MÉMOIRES D E LÆENSTIFUT. NAT IONAL DES SCIENCES ET ARTS. SCIENCES MATHÉMATIQUES ET PHYSIQUES, } 7 MÉMOIRES D E L'INSTITUT NATIONAL DES SCTENCES ET ARTS, POUR L’AN IV DE LA RÉPUBLIQUE. ,. SCIENCES MATHÉMATIQUES ET PHYSIQUES. TOME PREMIER. PAUL LAS BAUDOUIN, IMPRIMEUR DE L'INSTITUT NATIONAL. THERMIDOR AN VI. | DE é GAt ni: cite Bfe) H È He l'ANGSET fre 3 : L'ABL E ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME, S'usrrs des prix proposés dans l'an 4 par, La classe des sciences mathématiques et physiques, page j Liste des mémoires que la classe a jugés dignes d'étre imprimés dans le volume des savans étrangers, x Liste des machines , inventions et préparations approu- vées par la classe, xj Liste des ouvrages imprimés présentés à la classe, xij Notice sur la vie et des ouvrages de Vlandes monde F par LAcxeÈDE, sUIKRIX Notice sur la vie et les ouvrages de Pingré, par Prony, XXV}j Mémoire sur le prolongement morbifique de la langue hors de la bouche, par, Pierre Lassus, -1 Observations. sur la séparation spontanée de deux os, Le tibia et le péroné, dans leur partie moyenne, à la suite d'un sphacèle, par Drsessanrz, 20 Examen des faits que Girtanner rapporte en faveur de son opinion sur la nature du radical de l'acide . muriatique, par J. B. Van-Mons, associé, 36 Nouvelles expériences tendantes à vérifier si l’hydro- gène Hors le radical de l'acide muriatique 2 par le même, 44 T À BL EJ Ty Observations sur La structure des crystaux appelés zéolithes, et sur les propriétés électriques de quel- ques-uns, par Hauy, page 49 Procédé pour dissoudre la gomme élastique dans léther sulfurique, par Perrerrer, 56 Observations sur læ strontiane, par le même, 58 Mémoire sur le lieu du nœud de l'anneau de Saturne en 1790 ; par Honoré FrAUGERGUES, associé, 75 Observations sur les deux procédés employés pour la fabrication du verdet, verd-de-gris, ow acétite de cuivre, par J. A. Crarraz, associé, 89 Observations sur le savon de laine et sur ses usages dans les arts, par le même, 93 Observations astronomiques faites à Wiviers, départe- ment de l'Ardèche, par Honoré FLAUGERGUES, asso- cié , 102 Expériences faites par ordre du gouvernement , sur la navigation de la Seine, par ForFAïT;, asso- CE 120 Mémoire sur les effets du froid de ventose an 4 (JE- vrier et .nars 1796) sur divers végétaux, et parti- culièrement sur Le porrrEr, par Charles - Louis L'HÉRITIER, 169 Mémoire sur le serrement convulsif des mâchoires, à la suite des plaies, par SABATIER, r7d Observations sur une opération du trépan au fémur, par TENON, . | 208 Recherches sur le crâne humain, par le même, 221 Mémoire sur l'avantage et la nécessité de ne tirer que THASBHDBAES peu de sang à la fois aux enfans à:grosse téte, par DessssarTz, page 254 État de lagriculture des isles Canaries, Par H.-A. T'EssrER , | | 250 Mémoire sur l'abus des défrichemens , par le même, 280 Observations sur les sucs de quelques végétaux, et sur Les moyens dont le carbone circule dans Le végétal et s’y dépose pour servir à la nutrition, par J.-A. CHarraz, associé, 288 Mémoire sur ‘les mouvemens des corps célestes autour de leurs centres de gravité, par Lapracr, 301 Plan des expériences qui se font au jardin des Plantes sur les moutons et d’autres animaux domestiques, par DausEenTon, 377 Observations sur les caractères génériques en histoire naturelle, par le même, 387 Moyens d'augmenter la production du bled sur Le sol de la République française, par le parcage des mou- tons et par la suppression des jachères, par le même , 397 Mémoire et observations sur la petite vérole, et sur La complication de cette maladie avec La fièvre scarla- tine, le millet, et autres dépravations des humeurs, par DrsessarTz, 405 Mémoire sur l’organisation des monocotyledons , ou plantes àune feuille séminale, par Drsronraixes, 478 Dissertation sur le genre phallus, par Venrewar, 503 Nouvelle détermination de l'orbite de Mercure, par Jérôme LALANDE, 524 FA BÎL/E. Observation d'une atrophie idiopathique simple, c’est- à-dire qui n'a été précédée par aucune maladie primitive où antérieure ; et ra été accompagnée d'aucun accident et d'aucun symptôme étranger , par Harré, | page 536 Observations sur une pétrification du mont de Terre- Noire, département de la Loire, par DausEentow, 543 Mémoire sur la partie glutineuse du froment, par TEssiER ; 549 Sur une méthode particulière d'étudier l'anatomie, em- ployée, par forme d'essai, à des recherches sur Les dents et sur Les os des mdchoires, par TENoN, 558 Second essai d'étude, par époques , des dents molaires du cheval, par le même, 589 P Rrcl X. __ SUJET DU PRIX.DE MATHÉMATIQUES. LA construction d’une montre de poche propre à déter- miner Les longitudes en mer, en observant que les _ divisions indiquent les, parties décimales du jour; savoir, Les dixièmes ; millièmes et cent millièmes ; ou que le jour soit divisé en dix heures, l'heure en cent minutes , et la minute en cent secondes. L'Acanémre Des Scrences en 1793 (vieux style) avoit proposé ce sujet pour le prix de 1795; elle a été sup- primée avant qu'aucune pièce fût envoyée au concours : mais l’Institut national, considérant qu’il est possible que plusieurs artistes aient fait ou commencé ; pour ce concours , des montres conformes au programme , et que d’ailleurs le sujet du prix, très-important à l’époque à laquelle il avoit été proposé, ne l’est pas moins dans les circonstances actuelles, a pensé qu'il ne pouvoit mieux faire que de le proposer de nouveau. Néanmoins, pour diminuer autant qu’il est possible les difficultés qui pourroient écarter quelques concurrens ; l’Institut national a cru devoir changer en une simple invitation l'obligation de faire indiquer aux divisions les parties décimales du jour. | Toutes les montres envoyées au concours , celle mème de a ij PRIX qui aura remporté le prix , seront rendues à leurs auteurs après l’examen. Le prix est une médaille d’or de la valeur d’un kilo- gramme. Les artistes de toutes les nations sont invités à con- courir. Les ouvrages ne seront reçus que jusqu’au der- nier jour de fructidor de l’an 5 exclusivement. Ce terme est de rigueur. à L’Institut proclamera la pièce qui aura remporté le prix , À son assemblée publique du 15 messidor de Van 6. SUFET DU FRIX DE PHYSIQUE. La comparaison de la nature, de la forme et des usages du foie dans Les diverses classes d'animaux. Parmz les différens sujets de physique que l’Institut pouvoit choisir cette année pour un des prix qu’il doit distribuer , il ne s’en est pas présenté de plus remar- quable ni de plus important pour les progrès de cette science , que celui qui avoit été proposé par la ci-devant Académie des sciences en 1792. L’Institut a donc cru qu’il devoit conserver ce sujet relatif aux fonctions de l’économie animale, pour lequel d’ailleurs les savans ont pu s’engager dans des recherches plus ou moins considérables, depuis le temps où il a été proposé. Il adoptele programme publié par l'Académie, avec toutes P HN a. iij les vues qu’il contient , et le soumet de nouveau aux méditations des savans. Les végétaux puisent dans l’air qui les environne, dans l’eau , eten général dans le règne minéral, les ma- tériaux Lécess ae à leur organisation. Les animaux se nourrissent, ou de végétaux, ou d’autres animaux qui ont été eux-mêmes nourris de végétaux, en: sorte que les matériaux dont ils sont formés sont toujours , en dernier résultat, tirés de l’air ou du règne minéral. Enfin la fermentation, la putréfaction et la combus- tion, rendent continuellement à l’air de l'atmosphère et au règne minéral les principes que les végétaux et les animaux en ont empruntés. Par quels procédés la nature opère-t-elle cette circu- lation entre les trois règnes? Comment parvient-elle à former des substances fermentéscibles ; combustibles (1) et putrescibles , avec des matériaux qui n’avoient aucune de ces propriétés? tol( La cause et le mode dé ces phénomènes ont été ; usqu’à présent enveloppés d’un voile presque impénétrable. On entrevoit cependant que. puisque là putréfaction t'la combustion sont les moyens que la nature-emploie pour rendre au règne minéral les matériaux qu’elle en'a tirés ETTCCEOEOEOOOOUER—-—-—— QG) Il est très - remarquable que les substances minérales combustibles, se trouvent le plus souvent brûlées, ou au inoins engagées dans des combinai- sons où elles sont peu combustibles, et que les végétaux les séparent et se les approprient pour en former leur matière inflammable. . iv PUR AUX. pour former des végétaux et des animaux, la végéta- tion et l’animalisation doivent être des opérations in- verses de la combustion et de la putréfaction. L'Institut national a pensé qu’il étoit temps de fixer l’attention des savans sur la solution de ce grand pro- blème. C’est dans toute l’étendue du canal intestinal que s’opère le premier degré de l’animalisation , ou la con- version des matières végétales en matières animales. Les alimens reçoivent une première altération dans la bouche par leur mêlange avec la salive; ils en reçoivent une seconde dans l’estomac par leur mêlange avec le suc gastrique; ils en reçoivent une troisième par leur mélange avec la bile et le suc pancréatique. Convertis ensuite en chyle, une partie passe dans le sang, pour réparer les pertes qui s’opèrent continuellement par la respiration et la transpiration; enfin la nature rejette, sous la forme d’excrémens , tous les matériaux dont elle n’a pu faire emploi. Une circonstance remarquable, c’est que les änimaux qui sont dans l’état de santé, et qui ont pris toute leur croissance , reviennent constamment chaque jour, à la fin de la digestion, aù même poids qu’ils avoient la veille dans des circonstances semblables ; en. sortesqu'une, somme de matière égale à ce qui est reçu dans le canal intestinal , se consume et se dépense, soit par la transpiration , soit par la respiration, soit enfin par les différentes excrétions. L'Institut ne croit pas devoir présenter aux Cconcur- rens tout ce plan de.travail sur l’animalisation, pour le Fe P' PR. FTIEX vV sujet d’un seul prix ; il sait qu’il exige une suite immense derecherches qui ne sont peut-être pas susceptibles d’être faites par un seul homme , et sur-tout dans le temps qu’il fixe pour le concours : il a donc cru qu’il devoit choisir un des principaux traits de lPanimalisation ; et, dans l'intention de les parcourir les uns après les autres, il a d’abord fixé son attention sur l'influence du foie et de la bile. On sait que le foie occupe une grande place dans le corps des animaux ; qu’une partie du sytème vasculaire abdominal est destinée à ce viscère; que le sang y est disposé d’une manière particulière pour la secrétion de la bile; que l’écoulement de cette humeur doit se faire avec constance et régularité, pour l’intégrité de toutes les fonctions ; que le foie existe dans presque tous les animaux; qu’il est ou accompagné ou destitué de vé- sicule du fiel; qu’il y a des rapports essentiels entre la rate , le pancréas et le foie : voilà les premières données que l’anatomie offre depuis long-temps aux spéculations des physiologistes; mais elles ont été jusqu’à présent presque stériles en applications. On s’est presque uni- quement borné à considérer les usages de la bile dans la digestion : cependant des découvertes récentes sur la nature de cette humeur et de sa partie colorante , sur les concrétions biliaires , sur le parenchyme du foie, sur la composition huileuse de ce viscère , appellent toute l’attention des physiciens. Il est facile de prévoir qu’outre la secrétion de la bile, ou plutôt, qu’avec la secrétion de la bile, un appareil organique aussi impor- Y} P'RAT X: tant par sa masse, par ses connexions ,; par sa dispo- sition vasculaire , que l’est celui du foie, remplit un système de fonctions dont la science n’a point encore embrassé l’ensemble. L’Institut, en proposant ce sujet , en pressent toutes les difficultés : il sait qu’il demande des connoïssances anatomiques étendues , et sur-tout une comparaison soi- gnée de la structure du foie considéré dans les divers animaux : il sait qu’il exige des recherches chymiques puisées sur-tout dans les nouveaux moyens d’analyse que possède aujourd’hui la chymie : il sent et il espère que ce travail obligera ceux qui s’y livreront , à déterminer la nature du sang de la veine-porte , à la comparer à celle du sang artériel et veineux des autres régions; à suivre cette importante comparaison dans le fœtus qui n’a point ou qui n’a que peu respiré, et dans les ani- maux à sang froid, chez lesquels le foie, très-volumi- neux, paroît être d'autant plus huileux, qu’ils respirent moins ; à comparer le poids et la pesanteur spécifique de ce viscère dans les mêmes individus; à faire l’ana- lyse de son parenchyme, ainsi que celle de la bile dans quelques espèces principales de chaque ordre d’animaux : en un mot , il apprécie l’étendue de ce sujet : mais il connoît en même temps le succès des sciences modernes; il connoiît le zèle de ceux qui les cultivent et qui sont destinés à en agrandir le domaine ; il est persuadé qu’il est temps d'aborder les questions compliquées que présentent les phénomènes de l’économie animale, et que c’est de la réunion des efforts de la physique, de P KR I X. vi] Vanatomie et de la chymie, qu’on peut se promettre maintenant la solution de ces grandes questions. L'Institut attend donc des concurrens pour ce prix, 1°. un exposé comparé et succinct de la forme, du volume, du poids et des connexions du foie et de la vésicule du fiel dans les diverses classes d'animaux (1); F 20. L'analyse comparée de la bile dans ces différens animaux , en déterminant sur-tout la proportion et la nature des diverses substances qui la forment; 3°. Un examen également comparatif de la nature chymique du parenchyme du foie dans les mêmes espèces; ————————————————— (G:) On ne demande point une description détaillée, mais une simple com- paraison générale de la structure, de l'étendue, de la connexion du foie. Il ne sera pas non plus nécessaire de suivre ce travail anatomique, non plus que l’analyse chymique, dans un grand nombre d’espèces d'animaux. L'Institut, en suivant à cet égard le même plan que pour le programme de l'Académie sur le nerf intercostal, propose aux eoncurrens de choisir dans les diverses classes d'animaux quelques-unes des espèces suivantes, considé- rées par rapport à leurs différences anatomiques : L'homme, le fœtus, l’adulte, le vieillard ; Parmi les quadrupèdes, le singe , le chien, le rat, le lapin, le mouton, le cheval et le cochon; Parmi les oiseaux, l'aigle ou la buse, le corbeau, la cigogne ou le héron, l’oie ou le cygne, le cogq-d’inde ou le coq ; Parmi les quadrupèdes ovipares, les tortues d’eau douce et de terre , Les salamandres terrestres et aquatiques, la grenouille ; Parmi les serpens, la vipère, la couleuvre à collier, l’orvet ; Parmi les poissons, la raie, le squale ou chien de mer, languille, le flet, le brochet, la carpe, etc. Quant aux animaux à sang blanc, insectes et vers, il seroit à desirer qu’on recherchât dans quelles espèces il existe un foie ou un organe destiné aux mêmes usages, et sur-tout qu’on s’occupât des rapports qui se trouvent dans ces animaux entre cet organe et ceux de la respiration. wii} LD à M. 7 4. Ce travail anatomique et chymique suivi. dans quelques principales espèces d’animaux pris à différentes époques de leur vie, et sur-tout dans celles du fœtus et de l’adulte ; | 50. Le résultat de toutes ces recherches relativement aux fonctions du foie et aux usages de la bile , leurs rapports avec les autres fonctions de l’économie animale, unique but que se propose d’atteindre l’Institut. 6°. Sans rien exiger de positif et de suivi sur l’état pathologique du foie et de la bile, les auteurs pourront étayer leurs idées des principales altérations que les ma- ladies présentent dans le système hépatique et biliaire, dans l’homme , les quadrupèdes et les oiseaux. Quoique PInstitut ait cru devoir fixer particulière- ment l'attention des concurrens sur les fonctions du foie , il avertit les auteurs que, dans le cas où il n’auroit pas reçu de mémoire qui remplit le but qu’il se propose, il accordera le prix à celui des concurrens qui, sans embrasser le problème dans toute son étendue, lui offrira un travail intéressant , ou des découvertes importantes sur quelques - unes des humeurs principales qui con- courent à la digestion et à la nutrition , telles que la salive, le suc gastrique, ou le suc pancréatique , ou même sur une humeur animale dont la connoissance approfondie pourroit répandre un grand jour sur la phy- sique des animaux. Le prix sera d’un kilogramme d’or frappé en médaille. Les savans de toutes les nations sont invités à tra- yailler sur ce sujet : mais l’Institut s’est fait une loi À Hi HU x} ix d’exclure les aësociés républicoles de prétendre à ce prix. Ceux qui composeront sont invités à écrire en fran- çais ou en latin , mais sans aucune obligation : ils pour- ront écrire en telle langue qu’ils voudront. Les ouvrages ne seront reçus que jusqu’au premier ger- minal de l’an 6 exclusivement : ce terme est de rigueur. _ L’Institut, dans son assemblée publique de vendé- miaire de l’an 7, proclamera la pièce qui aura rem- porté le prix. | MÉMOIRES Que la classe a jugés dignes d’étre imprimés dans le volume des savans étrangers. Où sERVATIONS sur les naissances, les mariages et les morts qu’il y a eu parmi les habitans de Montpellier pendant vingt-un ans consécutifs, de 1772 à 1792 in- clusivement, et calculs qui en résultent sur les proba- bilités de la vie humaine, par le citoyen Mourceuss. Sur lopposition de Jupiter et sur celle de Mars, observées par le citoyen Bouvanp. MACHINES, INVENTIONS ET PRÉPARATIONS APPROUVÉES PAR LA CLASSE. 5, Ux thermomètre métallique du citoyen REGNrER. 20. Crayons du citoyen ConTÉ. La élasse a jugé que le travail de ce citoyen méritoit l'accueil et l’encouragement du gouvernement. 30. Préparations anatomiques en cire, présentées à la classe par le citoyen LaAumonter , associé. La classe les a jugées supérieures à tout ce qui a été fait dans ce genre jusqu’à ce jour. LOS TUE DES OUVRAGES IMPRIMÉS PRÉSENTES A LA CLASSE. Nlaivorne sur les mouvemens des corps célestes autour de leur centre de gravité, par le citoyen Laprace, membre de l’Institut. 4 Paris, de l'imprimerie du Cercle social. Exposition du système du monde ar le même. P , A Paris, de l'imprimerie du Cercle social. Troisième édition des Satyres de Juvénal, par le cit. Dusaurx, membre de l’Institut. De l’imprimerie de Didot jeune. Géographie enseignée par une méthode nouyelle , pour les écoles primaires, ornée de neuf cartes colo- riées. par le cit. MEnTEzLE, membre de l’Institut. » P , Paris, chez l’auteur. Traité sur le calcul différentiel et sur le calcul inté- gral, par le cit. Cousin, membre de l’Institut. 4 Paris, chez Régent et Bernard. 2 vol. De la médecine opératoire, ou des opérations de chirurgie qui se pratiquent le plus fréquemment, par le cit. SABATH1ER , membre de l’Institut. 4 Paris, chez Didot jeune. 3 vol. : Méthode directe et inverse des différences , avec des OUVRAGES IMPRIMÉS,, EC. xiij développemens sur quelques autres branches de l’ana- lyse , par le cit. Prony, membre de Mnstiute A Paris, de l'imprimerie de la us Nouvelle Architecture Huéliauc seconde partie, contenant la description des machines à feu, par le mème. À Paris, chez Firmin Didor. Manuel révolutionnaire. L’Arithmétique d'Émile, avec une exposition du nou- veau, système des poids et mesures, par Emmanuel Dr- VELAY, démonstrateur de physique expérimentale à Lausanne. Observations botanico-météorologiques, par le cit. Mavnrce, secrétaire de la société des arts de Genève. De la connexion de la vie avec la respiration, com- posé par Edme Goopw:1x , et, traduit de anglais par le cit. Harré, membre de (pe à A Paris, Gide ÎMé- guignon. Éloges de Bailly, de Lavoisier et de Condorcet, par le cit. Larawnr, membre de l’Institut. Avis aux cultivateurs sur la manière de remédier à la végétation surabondante dés bleds , et vingt-six dis- sertations ou instructions relatives à l’économie rurale ou à l’art vétérinaire, publiées par les membres de la ci-devant commission d’agriculture et des arts, ou du conseil d'agriculture. . Examen de quelques principes erronés en électricité , xiv OUVRAGES IMPRIMÉS par le cit. SréauD-LArons ; membre associé de l’Ins- titut. 4 Paris, chez Déroy. Plusieurs planches envoyées de Madrid par le cit. RoumE , membre associé , et représentant les différentes parties d’un squélette de très-grand quadrupède trouvé sous terre, à la profondeur de cent pieds, aux environs de Rio de la Plata, dans l’Amérique méridionale. ie vE ; : Mémoire sur les propriétés du platine , par François CHABANEAU, imprimé en espagnol , avec une traduction en français. Mémoire sur l'influence de la lumière du soleil, par Domingue-Garcie FERNANDEzZ , en espagnol, envoyé par le même. Notice sur la vie et les ouvrages de Condorcet, par le cit. DrannyÈREe, membre associé. Echelles graphiques des nouveaux poids, mesures et monnoies de la République française, et des villes et pays les plus commerçans de l’Europe, par le cit. Louis Poucxer de Rouen. Instruction sur la culture et les usages du maïs, pu- bliée par le conseil d'agriculture. Développemens du régime hypothécaire , et réponse aux objections présentées contre ce système. Arithmétique linéaire, ou nouvelle méthode abrégée de calculer, par le cit. Louis Poucner, membre du PRÉSENTÉS A; LA CLASSE. XV conseil des arts et manufactures établi près le ministre de l’intérieur. Sur les poids, mesures'et monnoïes du Japon, par le cit. Lancrës, membre de l’Institut. De l’imprimerie de la République. Annales de chymie, en espagnol, par Le cit. Prousr. .De la conservation des enfans pendant la grossesse, et de leur éducation physique depuis. la naissance jus- qu’à Pâge de six à huit ans, par le cit. Saucerorre, membre associé ; ouvrage auquel le jury pour l’examen - des livres élémentaires a décerné le premier prix. Bibliothèque britannique, publiée à Genève. Ouvrage en espagnol relatif à la F/ore du Pérou, pu- blié par don Hippolyte Ruiz, de lacadémie de médecine de Madrid. Fondemens de la chymie d’après les découvertes mo- dernes ; en allemand, par M. Grex. Description des travaux exécutés pour le déplace- ment, transport et élévation des grouppes de Coustou, par le cit. Groserr, chef de brigade. «Traité historique et dogmatique de l’opération de la taille, par le cit. Descmames, chirurgien en chef de l’hospice de l’Unité. Sur la phthisie pulmonaire, par le cit. FonEré, médecin de Varmée d'Italie. xv)j TIOUVRAGES IMPRIMÉES »: Sur une affection scorbutique ‘qui! a ‘été endémique dans l’armée d’Italie ; par le même. Sur les eaux, minérales du plan de Fusy, cv le même. : Ouvrage contenant les deux premières partiès de là description du muséum d'anatomie de M. de Walter père, par M. Frédéric- Auguste WALTER, professeur d’änatomie au collége de médecine et chirurgie à à Berlin, et membre de l'académie des sciences dé la 2 même ville.” » Détail de la ÉprRn des prix faite aux 2lèyes de l’école d’Alfort le jour de la fête de:la Jeunesse, envoyé par le conseil d’ creuse Considérations générales sur ia monnoies, par le cit. Moxez) membre de l'Institut. A Paris, .chez Agasse; Avis sur les moyens de conserver ou de rétablir la santé des troupes à l’armée d’ Itakie présenté par le cit. PARMENTIER ; au nom des inspecteurs généraux du,ser- vice de santé des armées de la République. Mémoire sur Le principe de la vitesse virtuelle, en italien, par FossomBRoNI de Florence: io ol 18 Traité de la fièvre :putride, précédé d’une disserta- tion sur les remèdes généraux ; et d’un ‘plan pour former un code complet de médecine et de chirurgie pratique; par le citoyen Vauus. Réflexions sur la fabrication en général des bouches PRÉ SE NITÉS, À LA CLASSE, :xvij à feu, ét observations sur les épreuves extraordinaires et comparatives de différentes espèces de bouches à feu qui ont eu lieu à Douay, en 1786, par ordre du ministre de la guerre, par le cit. LamanrTiruiËre, général de division. L ” Collection des ouvrages imprimés du cit. Aueryx sur le nouveau système de poids et mesures. Essai sur la cachexie en général, et sur la cachexie | nosocomiale en particulier, précédé d’une introduction contenant des observations pratiques sur la nature du corps vivant, en allemand, par le cit. Wepexin», médecin de l’hôpital militaire à Strasbourg. Remarques sur les maladies vénériennes, les virus vénérien, scorbutique et goutteux, et la manière d’agir du mercure, par le cit. Jacques MrenarD, du dépar- tement de l’Yonne.— Il a présenté aussi plusieurs autres ouvrages imprimés de politique , de morale, de finances et de médecine. Dissertation chymico-médicinale sur un opiat fébri- fuge, etc. par don Juan Sancuez y Sancnez , profes- seur de pharmacie, en espagnol. An inquiry into and observations upon the causes and effects of the epidemic diseases which reigned in Phi- ladelphia from the month of august till toward the middle of december 1793, par le cit. Jean DEveze, membre de la société philosophique de Philadelphie. Seconde continuation des expériences faites par le 1, c xviij OUVRAGES IMPRIMÉS, etc. moyen de la machine électrique teylérienne (imprimé én français et en hollandais), par le cit. Vawmarum. Instruction sur les effets des inondations et débor- demens des rivières, publiée par le conseil d’agricul- ture , et rédigée par les cit. Ces et Girserr, membres de l’Institut. NOTICE. SUR à LA VIELET. LES:OUVRAGES DE VANDERMONDE, Part LA ct P'È D E: Lu le 15 germinal an 4, dans la première séance publique de l’Institut. Vis DERMONDE, membre de l’Institut national des sciences et des arts, naquit à Paris en 1735. Il employa sa jeunesse à s’instruire ; mais vers l’âge de trente ans il étoit encore bien loin de se croire destiné à instruiré les autres à son tour. Le hasard le rapprocha du célèbre Fontaine. Ce géomètre sexagénaire devina aisément les progrès que les mathématiques pourroient devoir un jour à Vandermonde ; il crut, pour ainsi dire, voir en lui son successeur ; il l’encouragea , l’attira près de lui, l’admit dans le secret de ses recherches , de ses calculs, de ses inventions : il lui dévoila ces jouissances si vives que donnent les spéculations profondes à un esprit élevé ‘etattentif, et qui, se mêlant aux douceurs du calme, aux charmes de la retraite et au sentiment des succès, deviennent bientôt une sorte de passion aussi heureuse que constante. À cette époque , Fontaine , qui avoit cru devoir s’occu- MX 4 il S NOTICE per de nouveau des recherches qu’il avoit ajoutées à celles de Jean Bernoulli, sur la question , fameuse alors, des zautochrones ; eut la gloire de n'être vaincu que par d’Alembert et par Lagrange. Vandermonde , témoin de ce combat nécessairement célèbre , animé par l’hon- neur qu’il voyoit attaché à cette illustre défaite, en- chanté du spectacle de Fontaine que l’amour de la géométrie rendoit heureux malgré son âge, comme on peut l’être à vingt ans par un sentiment moins paisible, crut assurer à jamais son bonheur en se livrant à une affection que les glaces de l’âge ne pouvoient éteindre ; et pensant devoir préférer à tout une passion qui sur- vivoit à tout, il se consacra à la géométrie. Peu d'années après, il se présenta à l’Académie des sciences : il y fut admis en 1771; et il voulut justifier les suffrages de ses confrères par le travail qu’il pu- blia sur la résolution des équations. Dès le seizième siècle on connoissoit la méthode de résoudre les équations des quatre premiers degrés ; et depuis ce temps la théorie générale des équations avoit fait de grands progrès. Mais, malgré les efforts récens des plus grands géomètres , on avoit cherché en vain la solution des équations du cinquième degré. Vander- monde voulut réunir ses travaux à ceux d’illustres ana- lystes , et il proposa une théorie nouvelle des équations , dans laquelle il paroît s’être particulièrement attaché à simplifier les méthodes de calcul, et à diminuer la longueur des formules, qu’il regardoit comme l’une des plus grandes difficultés du sujet. SUR VANDERMONDE. XX} Cet ouvrage fut bientôt suivi d’un autre sur les pro- blèmes appelés, par les géomètres , problèmes de situa- tion. Il semble qu’il ait été dans la destinée de Van- dermonde , ainsi que dans celle de Fontaine, qui lui avoit révélé le premier les mystères des sciences ma- thématiques, de travailler souvent sur des sujets déja traités par les plus grands maîtres. Dans son premier mémoire , il avoit examiné le même objet que Lagrange -et Euler; dans le second , il s’occupe des mêmes pro- blèmes qu’Euler et Leibnitz. Ce dernier étoit persuadé que Panalyse employée de son temps par les géomètres né pouvoit pas convenir à toutes les questions des sciences naturelles, et que, pour calculer les rapports de position de différens corps dans l’espace, il falloit, pour ainsi dire, inventer une géométrie nouvelle, qu’il nomma géométrie de situation. Mais, excepté “une application de cette géométrie nouvelle, faite par Leibnitz lui-même au jeu du solitaire , et qui, sous lapparence d’un objet de curiosité peu digne de la sublimité et de lutilité de la géométrie , est un exemple de la manière de résoudre les questions les plus élevées et les plus importantes, Euler avoit em- ployé presque seul cette géométrie de situation. Il s’en étoit servi pour la solution d’un problème appelé pro- bléme du cavalier, également trop familier au premier coup-d’œil , mais aussi fécond en applications graves et utiles. Ce problème ne consistoit , pour le vulgaire, qu’à trouver la manière de faire parcourir au cavalier du jeu des échecs toutes les cases de l’échiquier sans - zxi NOTICE passer deux fois par la même : mais pour le profond géomètre , sa résolution devoit tracer la route que doit suivre tout corps dont la marche est soumise à une loi connue, pour passer, en se conformant à des conditions imposées, par tous les points disposés sur un espace dans un ordre déterminé. Vandermonde s’étoit parti- culièrement attaché à trouver, pour cette espèce d’ana- lyse, une notation simple et propre à rendre les calculs plus aisés à faire ; et il en donna un exemple dans une solution de ce même problème du cavalier, qu’Euler avoit rendu célèbre. Mais déja son goût pour les hautes conceptions des sciences spéculatives s’étoit lié avec celui qu’inspirent les objets immédiatement utiles à la société : aussi, de- sirant de donner un nouveau moyen de perfectionner les arts qui s'occupent de tissus, ou dont les productions présentent des formes régulières ; employa-t-ilune grande partie de ce second mémoire à indiquer une manière de noter les points par lesquels doivent passer les fils des- tinés à former ces tissus ou les lignes qui terminent les surfaces des divers corps réguliers. Voulant toujours être utile aux sciences mathéma- tiques , il fit imprimer, dès l’année suivante (1772); un troisième mémoire dans lequel il chercha à ouvrir une nouvelle route aux géomètres, en proposant des irra- tionnelles d’une nouvelle espèce, en montrant les suites dont ces irrationnelles sont les termes ou la somme, et en indiquant une méthode directe et générale d’y faire ioutes les réductions possibles. s WPEN/V AENND ER MO N DH ‘ XXII} Dans la même année parut son travail sur l’élimina- tion des inconnues dans les quantités algébriques. On sait que cette élimination est l’art de ramener les équa- tions qui renferment plusieurs inconnues, à des équa- tions qui n’en présentent qu’une. La perfection des re- cherches sur cet art consisteroit à obtenir une formule d'élimination générale et unique sous la forme la plus concise et la plus commode, et où le nombre des équa- tions et leurs degrés seroiïent désignés par des lettres géo- mètres comme très-éloignés de ce point , entrevit néan- moins quelque possibilité d’y parvenir, et proposa de nouveaux moyens d’en approcher. Cependant, malgré son zèle pour les mathématiques, Vandermonde ne s’étoit pas uniquement voué à cette science. Son ame, facile à émouvoir, devoit accorder bien des affections à l’un des beaux arts qui touchent indéterminées. Vandermonde , en regardant les avec le plus de force : aussi déroba-t-il plusieurs de ses momens à la géométrie pour les donner à la musique. Mais comme il ne pouvoit cesser d’être géomètre, il ne s’occupa pas long-temps de musique sans calculer les moyens qu’elle emploie , observer les usages autorisés par les grands succès , simplifier ces procédés par l’ana- lyse , comparer les résultats de ces réductions , tirer de ces résultats des formules générales, et présenter les règles de l’art. Dès 1778 il exposa, dans une des séances publiques de l’Académie, un nouveau système d’harmonie qu’il développa dans une autre séance publique de 1780. Dans XXIV NO Tr Cc'E ce système , Vandermonde rapporte les manières de procéder adoptées jusqu’à lui à deux règles principales, qui par-là lui paroissent établies sur des effets avoués par tous les musiciens. Ces deux règles générales, l’une sur la succession des accords, l’autre sur Parrangement des parties , dépendent elles-mêmes d’une loi plusélevée, qui , selon Vandermonde , doit régir toute l’harmonie. Au moment où il publia son ouvrage, il étoit diffi- cile de beaucoup mieux remplir le but qu’il s’étoit pro- posé. Aussi obtint-il l'approbation de trois hommes fa- meux , et, pour ainsi dire, des représentans des trois grandes écoles d'Allemagne, de France et d'Italie ; de Gluck , de Philidor et de Piccini (1). C’est de travaux analogues à ceux que nous venons d'exposer , d’études variées sur des objets d'économie publique , et de fréquentes recherches sur les arts mé- chaniques , pour les progrès desquels on avoit établi le dépôt national de machines dont il étoit devenu lun des conservateurs , que Vandermonde étoit occupé, lors- que , vers l’an 3 de la République , une maladie qui devoit le conduire au tombeau, attaqua sa poitrine , éteignit presque entièrement sa voix, et commença à se manifester par des symptômes alarmans. Bientôt les représentans du peuple cherchèrent, par (1) Il étoit réservé à l’un de nos confrères (le citoyen Gossec) de donner une base plus solide aux règles de l’harmonie, en découvrant une suite de sons que la nature fait entendre à ceux qui savent l’interroger, et dont l'exposition intéressera autant les amis des sciences physiques que ceux des beaux arts, S UrR VW A N° D E RIM O N'D'E. XXV un hommage éclatant , à consoler les lettres des pertes qu’elles avoient faites ; ils voulurent, par l’établissement d’une école normale, rouvrir les sources de l’instruc- tion sur toute l’étendue de la République. Vandermonde fut appelé pour y exposer les principes de l’économie politique. Son zèle eut à combattre et la briéveté du temps pendant lequel il put se préparer à un travail qu’il n’avoit pas prévu, et la grandeur du vaisseau dans lequel il dut se faire entendre , et la foiblesse de sa voix : et le dérangement toujours croissant de sa santé , et la courte durée de l’école dont il faisoit partie. Quelque temps après, vous l’admiîtes au milieu de vous. Malgré les progrès de sa maladie, devenus de jour en jour plus effrayans, il venoit de commencer à rem- plir, parmi ses anciens et ses nouveaux confrères, les devoirs que vous lui aviez imposés, lorsque la mort le frappa subitement presque dans cette enceinte, le 11 nivose de cette année ; et ses derniers momens , comme une grande partie de sa vie, furent consacrés au culte du génie des sciences et des arts bienfaiteurs, N'O"EMMOELUAE SUR ; LA VIE E% LES OUVRAGES D'ALEXANDRE-GUI PINGRÉ, Membre de l Institut national des sciences et arts, PATRONS Lu le 15 messidor an 4. À rexanpne-Gui Pincré naquit à Paris le 4 septembre 1711. Ses parens l’envoyèrent de très-bonne heure dans un collége établi à Senlis par les chanoines - réguliers connus sous le nom de gérovéfains. L’ardent amour pour l’étude, qui pendant soixante-huit ans de travaux a été sa seule passion , s’annonça dès ses premiers pas dans la carrière des sciences, et mérita la bien- veillance de ses instituteurs. Les progrès du jeune élève ne furent pas la seule récompense de leurs leçons : une tendre réciprocité de soins paternels d’un côté, de re- connoissance et d’attachement de l’autre, finit par enchaîner la destinée de Pingré à celle de ses maîtres; il entra dans leur congrégation à l’âge de seize ans, cédant uniquement à l'impulsion de la sensibilité et à la passion d'apprendre. Les corps religieux ont ainsi attiré dans leur sein quelques hommes recommandables NOTICE SUR PINGRÉ. XxVi) par de riches tributs payés aux sciences et aux lettres ; il faut même avouer que le recueillement de leur soli- tude pouvoit seul préduire ces grands travaux littéraires, chefs-d’œuvre d’une’patience infatigable, qui arriveront à la postérité comme ces monumens antiques dont la masse étonne les regards, et dont la solidité brave les effets du temps. C’est un dédommagement d’une partie des maux que le monachisme a répandus sur la terre. La théologie , dont les hommes ont fait une science, tandis que la nature mwen faisoit qu’un sentiment, s’em- para des premières pensées de Pingré ; il s’y livra sans réserve , et avec un tel succès, qu’à vingt-quatre ans il fut jugé digne d’en être professeur. Il doit vraisembla- blement à ce premier essor le goût de Pérudition qu’on remarque dans plusieurs de ses ouvrages astronomiques : mais il faut regretter pour les sciences utiles qu’il ait acheté cet avantage par le sacrifice de quatorze années de sa vie; peut-être même la gloire théologique eût été le tombeau de son nom; si une de ces crises violentes dont le spectacle est quelquefois donné aux hommes pour les dégoûter de l'ivresse du fanatisme, ne l’eût enfin arraché à sa laborieuse inutilité. On devine aisément que je veux parler de ces scan- daleuses et ridicules querelles dont une bulle trop fa- meuse vint ‘déshonorer le milieu de ce siècle ; lutte déplorable de l’erreur contre l’erreur, où toutes les folies amenèrent tous les excès, et où le gouvernement, pre- nant parti, mêla quelques mesures de ‘police raison- näblés à une foulé d’actes d’un despotisme absurde et Xxvii} NOTICE cruel. Pingré se trouva enveloppé dans le parti qu’on persécutoit; et comme si la tyrannie avoit un instinct particulier pour découvrir et frapper les talens, il reçut en quatre ans cinq lettres de cachet... Destitué de sa chaire, il étoit réduit à des travaux obscurs dans des colléges éloignés de Paris, lorsqu'un hasard heureux lui fit rencontrer un homme ami de la philosophie et des arts, qui, au bienfait de le soustraire à l’acharnement de ses persécuteurs, joignit le service non moins précieux de diriger son ardeur, pour l’étude vers des objets plus favorables à son repos et plus utiles à la société. Cet homme est le célèbre chirurgien Lecat, auteur de plusieurs ouvrages estimés, et dou- blement recommandable pour avoir arraché une victime au fanatisme et pour avoir donné aux sciences un de leurs plus zélés prosélytes. IL avoit fondé une académie à Rouen; et croyant appercevoir dans Pingré une grande aptitude à devenir astronome, il le fit recevoir en cette qualité dans son établissement naissant. Le nouvel académicien, sérieusement dégoûté de la car- rière théologique, se livra tout entier à l’astronomie, où il dut trouver la vraie théologie des sages et les plus belles méditations des hommes religieux. IL avoit alors trente-huit/ans ; et c’est à cette époque, d’où datent ses premiers titres! à, la mémoire et à la re- connoissance des hommes, que doit commencer l’his- toire de ses travaux. Avant d’en présenter l’ensemble, et pour assigner le rang qu’ils occupent parmi ceux qui ont concouru aux progrès de l’astronomie, replions S DR N BEN & R É. XXIX un moment notre attention sur les progrès de lPesprit humain dans les sciences astronomiques. Les phénomènes célestes n’offroient encore, il y a moins de trois siècles, qu’un assemblage de faits liés entre eux par des hypothèses absolument empiriques, qui, multipliées à mesure que de nouvelles difficultés exigeoient de nouvelles explications, avoient fait de l'astronomie un véritable chaos. Deux cent cinquante- trois ans seulement se sont écoulés depuis que Copernic leva une partie du voile qui couvroit les secrets de la nature ; mais Kepler, le premier, fit de astronomie une science vraiment géométrique. Cependant les vérités qu’il avoit enseignées n’étoient qu’expérimentales, et il pressentit lui-même qu’on pouvoit les lier à un principe général, une espèce de puissance de la nature, dont elles ne devoient être que le résultat, et où on trouveroit sur- tout le dénouement des difficultés qui embarrassoient leur application. Newton parut, et révéla aux hommes ce mystère su- blime : une simple propriété de la matière fut dans sa bouche la proclamation des lois du système du monde. Le flambeau de la vérité étoit placé au milieu du vaste édifice des sciences ; il restoit à faire pénétrer la lu- mière dans ses parties les plus secrètes. Les lois de Kepler, qui ne supposent que l’action d’une force -ceu- trale unique, furent les premières conséquences déduites du principe de la gravitation universelle, et elles ne laisseroient rien à desirér, dans une hypothèse de cor- respondances isolées , entre un centre d’action immobile XXX INPTOMENTNCIE et les corps qui circulent autour de lui; mais dès que la puissance attractive est commune à toutes les parties de la matière, les différentes masses sollicitées par lat- traction du Soleil le sont aussi par leurs attractions réciproques, et une liaison dépendante de la même cause doit être conçue dans laggrégation des molécules qui composent chacune de ces masses en particulier. Ces dernières considérations renferment tout ce que la découverte de Newton a ajouté à celles de Kepler, pour application du calcul aux phénomènes qu'offre le sys- tême du monde; elles sont la base de l’explication et de la mesure des inégalités et des variations périodiques, qui changent sans cesse l’état de ce système, et l’écar- tent ou le rapprochent successivement d’un état moyen renfermé entre des limites peu étendues : cependant l'application géométrique du principe de lPattraction à ces grands problèmes offroit des difficultés qui n’atten- doient rien moins que les efforts des plus puissans gé- nies; et l'attraction newtonienne auroit été à peu près inutile aux progrès des sciences physiques, si, d’une part , les nouvelles branches de calcul dont on a enrichi Panalyse, et, de l’autre, des méthodes d’observation et des instrumens extrêmement perfectionnés n’eussent fourni des secours proportionnés à la grandeur de l’en- treprise. La réunion de ces diverses sources de lumière étoit indispensable : car les combinaisons abstraites de la géométrie et de l’analyse, qui embrassent toutes les hypothèses, n’auroient présenté , séparées des données physiques qui devoient les ramener aux cas de la nature, SUR PING RÉ. XXX} que des conceptions stériles, de purs exercices de l’es- prit; et pour rendre ces données dignes d’être employées dans des calculs rigoureux ; il a fallu observer les phé- nomènes avec une précision inconnue jusqu'alors. Ainsi le système de attraction, préparé par les dé- couvertes de Kepler, Galilée, Descartes et Huygens, a été l’occasion ou l’objet de nouvelles découvertes aux- quelles il doit son développement; et s’il est né du progrès des lumières , il leur a payé avec usure le bien- fait de sa naissance par l’essor rapide et brillant qu’il leur a fait prendre. Mais dès-lors l’immense étendue de la science astro- nomique a nécessité la division des travaux qui devoient concourir à son avancement, et qui se sont répartis entre les géomètres particulièrement occupés de la per- fection du calcul intégral, de celle des méthodes ana- lytiques en général, et de leur application aux grands problèmes du système du monde, et les observateurs voués à la contemplation du ciel, qui les a conduits à la mesure de la terre. Newton a ouvert la route aux premiers; et, malgré ses nombreuses et sublimes découvertes, il a laissé à ses successeurs une riche moisson à cueillir. Clairaut, d’Alembert et Euler ont rectifié quelques-unes de ses explications, et donné celles de plusieurs phénomènes qu’il n’avoit point expliqués. Après eux d’autres géo- mètres que l’Europe et l’Institut ont l’avantage de pos- séder, ont achevé de soumettre l’univers à l’empire de Pattraction. XXxi) NOTICE Il est cependant de toute justice de, faire partager aux observateurs la gloire de cette conquête; il faut même convenir que nous leur en devons la partie la plus pénible. Enchaînés jour et nuit aux objets de leurs recherches , isolés, pour ainsi dire, du commerce des hommes, ils connoissent à peine les douceurs et les dé- lassemens de la société, et ils doivent joindre à la force et au courage qui leur font supporter tant de fatigues et de sacrifices, une foule de qualités et de talens dont la réunion est aussi difficile que rare. La longue habitude du maniement des instrumens , qu’il faut soigneusement entretenir par des exercices journaliers ; une habileté particulière à les disposer aux observations et à se ga- rantir des erreurs que leur défaut de division ou de construction pourroit occasionner ; un tactet une sagacité qui ne peuvent s’acquérir que par une expérience et une application soutenues, pour diriger ou combiner les observations. de la manière la plus favorable au résultat qu’on veut obtenir; l’étude de toutes les parties de la géométrie et de l’analyse, indispensable pour lintelli- gence et l’usage des recherches et des découvertes des ma- thématiciens du premier ordre ; leur application spéciale aux problèmes trigonométriques , à laquelle il faut réu- nir une aptitude rare à la pratique des grands calculs, et une constance plus rare encore qui fasse surmonter leur sécheresse et leur ennui ; enfin la connoissance de plusieurs arts et de plusieurs branches des sciences phy- sico-mathématiques : tels sont les principaux élémens dont se compose la science et l’art de l’observation en SD NE LOPNTENOGUR LE, XxxiiJ astronomie , et il ne faut pas s’étonner si peu d’hommes ont pu y aspirer et y parvenir à la supériorité. Aussi le dénombrement des observateurs qui se sont illustrés et que la mort nous a enlevés depuis Newton, est-il à peu près complet quand on a nommé Flamsteed , Halley, les Cassini, Bradley, Mayer et Lacaille, auxquels je réunirai Pingré, que le jugement des savans a depuis long-temps placé à côté d’eux. Je reprends le fil de sa vie et de ses travaux. Son coup d'essai fut le calcul de Péclipse de lune du 23 décembre 1749. Lacaille avoit fait le même calcul et obtenu un résultat différent : l'erreur étoit de son côté; il le reconnut, et une amitié réciproque termina la dispute. L'observation du passage de Mercure sur le disque du Soleil, faite le 6 mai 1753, valut à Pingré le titre de correspondant de l’Académie des sciences. Vers cette époque, sa réputation, qui s’augmentoit chaque jour, décida sa congrégation à l'appeler à Paris, et à finir Pespèce d’exil auquel il étoit condamné. Il s'établit à l’abbaye de Sainte-Geneviève. On lui fit, peu de temps après, construire un observatoire dans la même maison, où, pendant plus de quarante ans, ses travaux n’ont été interrompus que par des voyages entrepris pour le progrès des sciences. Dès son arrivée à Paris il avoit fait la connoissance de notre respectable confrère Lemonnier, qui, non con- tent des services qu’il rendoit à l’astronomie par ses propres ouvrages , recherchoit et encourageoit, avec un 1. € XXXIV NOTICE zèle digne des plus grands éloges, tous ceux qu’il croyoit capables de se distinguer dans cette carrière. Il en avoit récemment ouvert l’entrée à notre confrère Lalande ; et dès qu’il vit Pingré fixé dans la capitale, il s’empressa de lui fournir l’occasion de se faire connoître par un travail utile. 11 avoit conçu l’idée d’une espèce de calendrier astronomique , dont l’objet principal étoit de faciliter aux navigateurs la détermination des longitudes par les obser- vations de la Lune. Les calculs immenses qu’exigeoit l’exécution d’un pareil projet, auroient effrayé tout autre que Pingré : il s’en chargea, publia en 1753 le volume de 1754, sous le titre d'État du ciel à l'usage de la marine, et s’acquit en Europe la réputation d’un cal- culateur aussi exact qu’infatigable. Il a continué les années suivantes avec le même succès jusqu’en 1757, époque à laquelle on n’imprima plus que la Coznois- sance des temps, dont le calcul et la rédaction furent confiés, en 1760 , à Lalande , qui le rendit propre à être employé comme almanach nautique. L’Académie des sciences reçut, en 1756, Pingré dans son sein. Cet honneur étoit le terme de son ambition, mais ne fut pas celui de ses travaux. Il n’est presque pas un volume de lPAcadémie, depuis 1753 jusqu’en 1770, qui ne renferme un ou plusieurs de ses mémoires, avec les détails d’une immense quantité d’observations où les astronomes trouveront une collection utile de matériaux , et dont il seroit trop long de faire ici même la simple énumération. Aucun phénomène céleste n’é- chappoit à sa vigilance. S Ur RO PEAU GR É. XXXV Un calculateur aussi étonnant devoit trouver dans la chronologie des sujets dignes de l’occuper. Cette science a ses fondemens naturels dans la connoissance des mou- vemens célestes, dont la régularité, indépendante des vicissitudes des événemens humains, offre des phéno- mènes périodiques auxquels on peut attacher les épo- ques contemporaines de l’histoire. Lacaille avoit calculé, pour le fameux ouvrage de l’_ Art de vérifier les dates , les éclipses de dix-neuf siècles, à compter de l’an 1, vieux style. Pingré, dans une seconde édition, recommença tous ces calculs, et y ajouta encore dix siècles avant Vère chrétienne. La table qu’il a publiée , et dont la pre- mière partie se trouve dans les Mémoires de l’Aca- démie des inscriptions et belles-lettres , contient, en y joignant un petit supplément de Duvaucel, toutes les éclipses qui ont eu lieu depuis les premiers temps de la république d'Athènes jusqu’à nos jours, et celles qu’on pourra observer jusqu’à l’an 208 de la république française. Il sembleroit, d’après l'exposé précédent , que l’ob- servatoire de Pingré devoit être le seul théâtre de ses travaux; mais de nouvelles découvertes en astro- nomie , les progrès de la géographie, ceux de la navi- gation, l’appelèrent à des fatigues d’une autre espèce, et Pingré n’hésita point à s’y livrer. Plusieurs voyages de long cours qu’il a faits par ordre du gouvernement pour ces divers objets, attestent que ni l’amour de la tranquillité, l’un des premiers besoins de l’homme très- occupé, ni la crainte même des dangers, ne pouvoient XXXV) NOTICE balancer chez lui l’intérêt des sciences. Il est à remar- quer que parmi les savans et les hommes de lettres ce genre de force et de courage a spécialement distingué les astronomes, qui comptent parmi eux des victimes de leur zèle pour l’avancement de lPastronomie. Ce fut un beau spectacle que ce concours des savans euro- péens pour assiéger les derniers retranchemens de la nature. Ils allèrent consulter le ciel d'Asie, comme autrefois les sages de la Grèce cherchèrent la philoso- phic chez les peuples de l'Orient ; et les mers des Indes, qui jusqu'alors n’avoient reçu de l’Europe que d’avides oppresseurs ou de sanguinaires aventuriers, portèrent sans effroi les paisibles conquérans des sciences. Trois voyages de Pingré ont eu pour principal objet l'essai des montres marines de notre confrère Berthoud et de celles de Leroy. Le premier fut fait en 1767, sur la corvette ? Aurore, commandée par Courtanvaux , qui Vavoit fait construire (1) , et armée àses frais. Pingré en a rédigé et publié l’année suivante toute la relation. Le second eut lieu en 1768 et 1769, sur la frégate l’Isis , commandée par notre confrère Fleurieu. Pingré en a donné les résultats dans le volume de l’Académie de 1770 ; l’ouvrage intéressant qui contient le journal des Lorloges marines , et celui de la zavigation de l'Isis, a été publié par Fleurieu en 1773 (2). G) Sur les plans et sous la direction du citoyen Ozanne le jeune , aujour- d’hui ingénieur constructeur de la marine, (2) Deux volumes #7-4°, avec des cartes, s v & JPIIINOGAR É. XXXVIj Enfinil fit le troisième voyage sur la frégate Za Flore: cette expédition importante , particulièrement destinée aux épreuves comparatives des montres de Berthoud et de Leroy, et de plusieurs autres moyens de déterminer les longitudes en mer , étoit confiée à troiscommissaires ; Verdun, qui commandoit la frégate, notre confrère Borda et Pingré : ce dernier eut une très - grande part à la rédaction de Phistorique du voyage et des expériences , qui parut en 1770. 5 On remarque dans toutes ces productions une variété d'observations et de recherches qui, indépendamment de l’objet principal, excitent l’intérêt et l'attention par les détails piquans et instructifs qu’elles renferment. On peut ajouter que ce mérite leur est commun avec tous les ouvrages des académiciens français qui ont été chargés d’opérations lointaines. Le voyage de Pingré sur Z’Zsis, et celui qu’il avoit fait avant sur la corvette / Aurore , coïncident avec une des plus brillantes époques’ de l’astronomie mo- derne : je veux parler du passage de Vénus sur le disque du Soleil. Il ne sera pas hors de propos, avant d'en rendre compte, de donner une idée précise de l’objet d'utilité de cette célèbre observation. . La théorie newtonienne, d'accord avec tous les phé- nomènes, suflisoit pour connoître exactement et :les vitesses angulaires des corps qui :circulent autour du Soleil ; et les rapports entre leurs distances respec- tives pour des époques quelconques. Ainsi ,; en prenant la distance de la Terre au Soleil pour unité ou! terme xXxxVII} Y ÆNDOKTLIAC E de comparaison, toutes les proportions de la machine planétaire pouvoient s’exprimer en parties de cette unité. Mais quelle étoit sa grandeur absolue? C’est ce qu’au- cune considération déduite de la gravitation universelle ne pouvoit apprendre; et en concevant une infinité de systèmes d’une forme semblable au nôtre, on ne pou- voit savoir quel étoit celui qui avoit précisément les mêmes dimensions. Il est vrai que cette ignorance ne faisoit rien perdre ni de l'utilité de l’astronomie , ni de la certitude de ses calculs, qui dans le fait n’exigent que des connoïissances de rapports : mais la curiosité active et inquiète de l’homme ne se contentoit pas de ces idées de relation; il vouloit assigner, dans une portion déterminée de l’espace, les limites de la marche des corps célestes. La nature avoit mis sous notre main une grandeur que nous pouvions immédiatement mesurer, c’est celle du globe terrestre; la difficulté consistoit à trouver combien de fois un de ses diamètres étoit contenu dans la distance entre deux points donnés du système pla- nétaire, tels, par exemple, que les centres de la Terre et du Soleil. Parmi les moyens qu’on avoit imaginés pour résoudre cette question, le meilleur consistoit à profiter de la circonstance où l’on rencontreroit un objet intermé- diaire entre la Terre et le Soleil, dont la position fût telle, que deux rayons visuels partant de deux points différens de la Terre, et passant par cet objet, pus- sent aboutir à deux points différens du disque du Soleil. S U R PI N/GHR É. XXXIX Avec cette condition et les diverses données qu’on avoit d’ailleurs, on pouvoit, par la géométrie et le calcul, trouver le rapport entre la longueur d’un diamètre ter- restre et la distance de la Terre au Soleil, ou, ce qui revient au mème, déterminer la parallaxe du Soleil, qui est l’angle dont le sommet est au centre de cet astre, et dont les côtés passent par les extrémités d’un même rayon terrestre. i Deux corps du système planétaire étoient propres à faire la fonction de l’objet intermédiaire dont je viens de parler; c’étoient Mercure et Vénus : mais Mercure étant trop près du Soleil, l’arc sous-tendu sur le disque de cet astre auroit été trop petit pour fournir des me- sures exactes; Vénus, au contraire, à peu près deux fois aussi distante du Soleil que de la Terre, lors de son passage sur le disque, remplissoit avantageusement les conditions demandées, et les astronomes avoient fixé leur choix sur cette planète pour l’importante déter- mination de la parallaxe du Soleil. ‘Son passage, calculé et prédit d’avance , étoit attendu ‘avec l’impatience la plus vive. Par une singularité re- marquable , ce phénomène , qui , à de certaines époques, se renouvelle deux fois dans l’espace de huit ans, ne re- paroît ensuite qu'après plus d’un siècle. Nos enfans, et peut-être quelques personnes de cette assemblée, le reverront les années 82 et 90 de la république fran- çaise, à cent cinq ans de distance des deux derniers passages observés en 1761 et 1769, vieux style. Tous les gouvernemens de l'Europe se sont empressés xh 24 HnŸoWr/ ri € de concourir à cette grande opération : la mesure du monde planétaire sembloit en être la conquête. Un grand nombre de savans se disposèrent à faire en divers lieux de la terre des observations correspondantes. Pin: gré partit en 1760 pour lisle Rodrigue, dans la mer des Indes, où il se proposoit d’observer le passage du 6 juin 1761. Il n’avoit rien négligé pour assurer le succès dû à de si grandes fatigues; mais cette première fois son attente et celle de ses coopérateurs furent trompées, et le rapprochement des observations laissa de grandes incertitudes sur le résultat qu’on cherchoit. Heureuse- ment la nature leur avoit réservé un moyen de vérifi- cation ; et lors du second passage , arrivé le 3 juin 1769, les astronomes, éclairés par l’expérience du premier, prirent si bien leurs mesures, qu’on put établir une con- cordance satisfaisante entre leurs observations, d’où on a déduit 8".5, à très-peu près, pour la parallaxe du Soleil; ce qui donne pour sa distance à la Terre 34 751 680 lieues, ou 14 590 250 myriamètres. À cette seconde époque Pingré étoit avec Fleurieu au cap Français, où ils observèrent le passage; il a ensuite fait un rapprochement de toutes les observa- tions, d’où il a conclu la parallaxe de 8’.75. Il est sans contredit un de ceux qui ont le plus écrit et travaillé pour éclaircir une aussi grande question, et la décou- verte de cette seule vérité physique attacheroit à son nom le sceau de l’immortalité. Les travaux dont je viens de rendre compte semblent devoir suffire pour remplir la carrière la plus longue ! S U K PUr'NCGMR É. xTÿ: et la plus laborieuse. Mais que ne peuvent l’enthou- siasme de la vérité et la passion d’être utile! ces sentimens sublimes doublent l’existence et les forces de lhomme qui ne vit que par eux. Je n’ai rien dit éncore des recherches de Pingré sur les comètes, et ces recherches pourroient seules occuper la vie et faire la gloire d’un astronome. On sait qu’elles offrent une des parties les plus épineuses de la théorie astronomique , qui a été l’objet des méditations profondes de plusieurs géomètres du premier ordre, et que l’application des formules aux observations entraîne dans des calculs dont la longueur et la complication ont de quoi effrayer les plus intrépides calculateurs. Une tâche hérissée de pareilles difficultés promettoit à Pingré les jouissances dont. il étoit le plus avide; il voulut l’embrasser dans toute son étendue. Il avoit commencé dès 1757, et il continua depuis à s’en occuper avec’ toute l’ardeur et le succès possibles. Lalande, à qui on peut s’en rapporter sur cette matière, pense que Pingré a calculé à lui seul plus d’orbites de comètes que tous les autres astronomes ensemble pendant le même temps. Des recherches et des calculs aussi vastes auroient beaucoup perdu à être disséminés dans les collections académiques : Pingré les a rassemblés en un seul corps méthodique, dans un ouvrage très-considérable qu’il a publié en 1783, sous le titre de Cométographie. Il y expose avec le plus grand détail tout ce qui a été su et pensé des comètes depuis l’antiquité jusqu’à l’époque où on a reconnu qu’elles étoient des planètes soumises ke Dr xli} NOTICE à la gravitation universelle ; il y donne ensuite l’his- toire et l’énumération de toutes celles dont il est fait quelque mention dans les écrits des historiens ou des philosophes, traite des diverses questions qui leur sont relatives, telles que leurs retours, les effets qu’elles peuvent produire sur les planètes, leurs destinations, les phénomènes et la nature de leur queue et de leur chevelure ; enfin il donne la théorie mathématique de leurs mouvemens, et fait connoître les solutions trou- vées par Newton, Lagrange, Laplace, et quelques au- tres, des divers problèmes que cette théorie comporte. La publication de la Cométographie devoit être suivie d’une Histoire de l'astronomie pendant Le dix-septième siècle, à laquelle Pingré avoit travaillé dès 1756, à la sollicitation de Lemonnier , qui lui avoit communiqué les manuscrits de Boulliaud. Après de longues inter- ruptions, l’auteur y mit la dernière main à l’âge de quatre-vingts ans. Lalande en rendit compte à lAca- démie des sciences en 1791, et l’on doit à son zèle les fonds que le gouvernement accorda pour limpression de cet ouvrage, qui en ce moment est très-avancée. On y trouvera rassemblées et calculées un nombre prodi- gieux d'observations éparses dans les écrits des astro- nomes du dernier siècle. 11 me reste à parler de deux productions littéraires qui pourroient donner la réputation de savant à celui que d’autres ouvrages n’auroient pas fait connoître , mais qui n’ont dù être pour Pingré que des objets de délasse- ment. La première est une traduction française du poème SUR PINGR É. xlii} latin de Manilius sur l'astronomie, dont il se chargea à l'invitation de l’Académie des sciences. Manilius, poète contemporain de Virgile, a mis en vers, quelquefois dignes du poète de Mantoue, ce qu’il a recueilli de Pastronomie ancienne. Il traite de origine, de l’ame et de l’étendue de lunivers, des étoiles fixes et des constellations, de l’influence des astres sur la destinée des hommes, et donne une description de la sphère moderne des Égyptiens. L’auteur ajoutoit une grande foi à l’astrologie. La seconde est encore une traduction d’un poème latin, fruit des loisirs de la jeunesse de Cicéron, et qui est une imitation du poème grec d’Aratus , intitulé /es Phénomènes, L'ouvrage de l’orateur romain ne nous est pas parvenu entier; mais Hugues Grotius en a rempli les lacunes en vers que Cicéron lui-même (suivant l’opi- nion de Pingré) n’auroit pas désavoués. Aratus, qui vivoit il y a environ deux mille ans, mit en vers, par ordre d’Antigone, surnommé Jonathas, roi de Macé- doine, les ouvrages astronomiques d’Eudoxe. Il traite des constellations célestes, de leurs positions respec- tives, de leur éclat plus ou moins grand; donne quel- ques notions générales sur les cercles de la sphère, parle des levers et des couchers des étoiles correspondans aux instans où chacun des douze signes paroît sur Phorizon, et entre dans plusieurs détails sur l’art des prédictions. Pingré na publié que le texte latin des Phéno- mères, pour s’accommoder à la portée du plus grand nombre des lecteurs : il étoit cependant très-versé dans xliv N'OTIICE la connoissance de la langue grecque et de plusieurs autres langues anciennes et modernes. On a de lui les traductions de quelques voyages espagnols. Sa récréa- tion habituelle étoit la lecture des écrivains du siècle d’Auguste, et sur-tout celle d’'Horace : il y consacroit une heure chaque jour. Il avoit aussi donné quelques instans à la musique; mais le délassement où il trou- voit le plus de charmes dans les dernières années de sa vie, étoit l’étude de la botanique. Il semble que le destin de cette agréable science soit de s’emparer tôt ou tard des ames honnêtes et tendres, et de leur offrir ou un aliment à leur douce sensibilité, ou un refuge et des consolations dans le malheur. Cette variété de connoissances, une égalité et une aménité de caractère qui ne se sont jamais démenties, une picté éclairée et sur-tout tolérante, rendoient le commerce de Pingré précieux et cher à tous ceux qui l’approchoient. Ils aimoiïent à retrouver en lui cette ignorance des petites passions de la terre, cette simpli- cité noble et touchante , qui semblent en quelque sorte appartenir à ce que j’oserai appeler les mœurs astrono- miques. Jamais savant n’a joui d’une estime et d’une considération plus soutenue et plus universelle : on ne lui a connu d’autres ennemis que ceux que le fanatisme lui avoit jadis suscités; il a eu l’estime et l’attache- ment de tous les hommes raisonnables qui ont pu le voir et l’apprécier. Il fut profondément affligé du coup fatal qui, en dé- truisant les sociétés savantes, sembloit être le présage | x SU Ri PAIUN G RÉ. xlv. de l’anéantissement total des. lumières et de la socia- bilité : il a! pu être témoin de leur renaissance, et se retrouver au. milieu de ses compagnons et de ses disci- ples. Nous l'avons vu, à quatre-vingt-quatre ans, assidu aux séances de l’Institut, malgré la rigueur des saisons : _ses cheveux d’une extrême blancheur, le caractère de candeur et de modestie répandu dans, tous ses traits, inspiroient un respect mêlé d’attendrissement. Ce véné- rable vieillard, ce patriarche de l’astronomie, entouré des savans et. des hommes de lettres qu’il avoit presque tous vu, naître, offroit l’image touchante, d’un père chéri rendu à une famille qui se réunit après avoir été dispersée par de longues calamités. Mais, au milieu de ce spectacle si propre à l’émou- voir, ses yeux inquiets ont vainement cherché ce/savant distingué , cet émule , cet ami , dont la plume non moins profonde et plus éloquente encore que la sienne traça l’histoire de l’astronomie de tous les âges. O illustre et mille fois infortuné Bailly, tes vertus et ton courage ouvrirent les grandes destinées de la France, et, pour prix de ce bienfait, un fer homicide, dirigé par des mains atrocement cruelles, a tranché le fil de tes jours. Reçois l’hommage de nos douleurs et de nos regrets éternels ! Puissent les douces images des lois qui ont repris leur empire, des sciences et des lettres qui ont recouvré leur splendeur, appaiser ton ombre sanglante ! puisse leur influence protectrice préserver à jamais notre patrie de voir encore son sein déchiré par des monstres pareils à ceux qui furent tes assassins ! xlvj NOTICE SUR PINGR É. Pingré assista’À la séance de l’Institut du 6 florial dernier ; le lendemain il éprouva une grande foiblesse, cinq jours ajrès il avoit cessé de vivre : il étoit âgé de quatre-vinpt-quatre anis sept mois ét vingt-six jours. Sa douceur, sà tranquillité, ét sa présence d'esprit. l’ont suivi jusques dans ses’ derniers instans. Il répondit à un de ses amis qui s’informoit de sa souffrance : « Je » ne souffre point, mais je sens que je me meurs ». Son philosophe favori, Horace, étoit encore présent à sa mémoire; il en cita des passages. Sa longue car- rière, après lui avoir permis de faire aux hommes tout le bien qu'ils pouvoient attendre de lui, l’a conduit près des dernières limites que la nature assigne à notre existence; mais l’amitié, qui ne calcule de temps que celui de l’absence, n’en ira pas moins sur sa tombe payer un tribut de larmes à son souvenir. HIER CE he sn LÉ Nu +10 “qui Pros 4 Li ue à Mn PE Lime. 14h il f | | War Pere mu à a ge rs x? ro er à Li PE. - : 1 al ENFANT jette! fi AIDE nie fa. \iaïs- Lux dene “ à pis 10 in LOT “2h : j' fe À tie sa M | at LU LA mise lis | HP He | er Pin ; Fun airs PAPE MÉMOIRES DE LA CLASSE D: E'.65::Gh: IENLG:E,S MATHÉMATIQUES ET PHYSIQUES. M É M O IR E Sur le prolongement morbifique de la langue hors de la bouche , Par Presne Lassus. Lu, et déposé au secrétariat de la classe, le 6 ventôse an 4. Les quelques enfans dont la pointe de la langue se tuméfie et se prolonge peu à peu hors de la bouche , en s’étendant jusque sur le menton. Cette affection vicieuse, qui est heureusement rare , et dont la cause n’est pas la même dans tous les indivi- dus , se manifeste tantôt immédiatement après la nais- sance , et quelquefois dans les premières années de l’en- fance. Dans l’un et dans l’autre cas, cette difformité à soit de naissance , soit accidentelle , à laquelle on pour- roit donner le nom de prolapsus lingua, dégénère peu à peu, lorsqu'on n’y remédie pas dans son principe, en Lo 1 2 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES une maladie habituelle qui s’accroît avec l’âge, et que quelques-uns de ceux qui en ont été incommodés ont conservée pendant toute leur vie. Les personnes de l’art ne paroissant point avoir observé cette maladie avec toute l’attention qu’elle mérite , j’ai pensé qu’il seroit utile de recueillir le peu d’observations qu’on a faites à cet égard , de les joindre à celles que j’ai eu occasion de faire moi-même , de discuter les unes et les autres, afin de trouver les moyens de remédier à cette affection contre nature (1). Un auteur du seizième siècle , Gaspar Peucer, est , à ce que je crois, le premier qui aït dit avoir vu des enfans venir au monde avec la langue hors de la bouche, et pendante sur le menton, comme celle d’un veau récem- ment égorgé. C’est l'expression de Peucer, qui regarde ce vice de conformation comme un phénomène en quel- que sorte étranger à l’art, comme une monstruosité in- curable (2). Le mème cas a été observé avec un peu plus d’exac- titude par Zacchias (3). Ce médecin dit avoir vu en 1628, à Rome, un enfant nouveau né, très-fort et bien constitué , qui avoit la langue hors de la bouche, de la _— G) Sauvages a fait mention , dans sa Nôso/ogie méthodique , de la sortie involontaire de la langue hors de la bouche , sous le nom de paraglosse exertoria , linguae extrusio : mais ni lui, ni Gorter, ni Gaubius, qu'il cite, mont parlé de la maladie qui fait l’objet de ce mémoire. (2) Commentarius de praecipuis generibus divinationum, Wittebergæ ;, 1580. in-8°. p. 442. Teratoscopia. (G) Quaestion. medic. legal. Lib, 7, tit, 1, quæst. 9. ET DEP H Y S IQ U:E. 3 ‘longueur au moins de trois travers de doigt : elle étoit un peu plus large et un peu plus épaisse qu’elle n’a cou- tume de l’être à cet âge ; c’étoit sur-tout quand cet en- fant la faisoit mouvoir et quand il la redressoit, qu’on pouvoit juger de combien elle dépassoit l’ouverture de la bouche. Cependant il tettoit assez bien, pourvu que le mamelon de la nourrice ft un peu gros et alongé ; car il ne pouvoit plus exécuter la même fonction avec une autre nourrice dont le mamelon étoit un peu court et grêle. Parvenu à l’âge d’environ quatorze mois, il man- geoit et buvoit assez librement, quoiqu'il eût jour et nuit une portion de la langue hors de la bouche : il commençoit même à prononcer quelques paroles lorsqu'il mourut, sans que Zacchias ait su quelle fut la cause de sa mort. 1 L’observation suivante semble prouver que cette con- formation vicieuse peut exister lors même que le fœtus st encore contenu dans l’uterus. Une femme âgée de vingt-quatre ans accoucha, le 11 avril 1771, pour la première fois , et n’étant encore que dans le huitième mois de sa grossesse, d’un fœtus mort qui étoit acéphale, et dont la langue un peu épaisse faisoit une saillie d’en- viron trois lignes hors de la bouche (1). Les cas les plus ordinaires sont ceux dans lesquels le prolongement de cet organe se manifeste aussitôt après la naïssance ou quelques années après : il est dans quel- ques enfans très-considérable dès l'instant même de son (1) Journal de médecine, juin 1772 p. 498. 4 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES apparition, tandis que dans d’autres les progrès du mal sont un peu moins rapides, et ne se font qu’insensible- ment. C’est ce que prouve une observation communiquée à Bartholin par Bogdan son disciple, qui dit avoir vu à Driesen, dans la Marche de Brandebourg , un enfant qui vint au monde ayant l’extrémité de la langue hors de la bouche, de la grosseur d’une aveline. Cet enfant n’ayant reçu aucun secours, sa maladie augmenta tellement, qu’elle effraya bientôt tous ceux qui en étoient specta- teurs. Peu à peu la langue se tuméfia, et se prolongea jusqu’au point d’égaler en volume le cœur d’un veau de six semaines ; ce qui n’empêcha pas, dans la suite, cet enfant d’avaler des alimens solides, et même de parler distinctement, quoiqu'il eût le son de la voix un peu rauque (r). Il est certain que le mal augmente en laissant tetter l'enfant, qui ne peut exercer cette action qu’avec peine. Ce qui le prouve, c’est qu’on est obligé quelquefois , pour le nourrir, de lui introduire des alimens liquides fort avant dans la bouche pour les lui faire avaler. A mesure que la langue se prolonge et se tuméfie, elle en- traîne avec elle , par son poids , l’os hyoïde et la partie supérieure du larynx , ce qui contribue à rendre la dé- glutition encore plus difficile ; l’effusion continuelle et irès-abondante de la salive , qui n’est plus retenue dans la bouche , procure la soif et l’aridité du gosier; les dents incisives et canines de la mâchoire inférieure se OR AUS ON : SONT (à) istor. centur. 3; listor. 43, p. 84. \ PTS HD EN PIE Yi S T2Q UE 5 ‘déjettent en devant, et sortent en partie de leurs alvéoles; la langue, qui frotte contre ces dents déplacées et usées, s’excorie et verse du sang ; la mâchoire inférieure, tou- jours abaissée, se porte un peu en avant ; la lèvre infé- rieure se renverse et s’alonge ; le bord supérieur de la mâchoire inférieure est creusé peu à peu dans son milieu dépourvu consécutivement de dents par la présence et les mouvemens de la langue, qui y forme une espèce déchancrure pour s’y: loger ; enfin cet organe, tantôt plus’, tantôt moins tuméfié, reste constamment hors de la bouche. Tels sont les symptômes qui caractérisent cette maladie lorsqw’elle est invétérée : elle n’empêche pourtant pas absolument de parler et d’avaler ; mais le son de voix est rauque, et la déglutition est toujours plus ou moins gènée (1). L'observation suivante confirmera tout ce qui vient d’être dit sur les progrès que cette maladie est suscep- tible de faire. Une fille de la ville de Leyde eut , dans s6n enfance, une fièvre continue qui subsista pendant quelques se- maines. Au moment de la guérison , la langue se tuméfia et se prolongea peu à peu hors de la bouche, jusqu’au point de pendre sur le menton de la longueur d’environ quatre pouces : sa largeur remplissoit tout l'intervalle qui s'étend de l’un à l'autre anglé des lèvres. Le desir de cacher sa difformité , ou de la rendre un peu moins apparente, suggéra à cette fille, lorsqu'elle eut atteint se + reg LR < r R AU, à a eue sen (1) Journal de médecine ; août 1761 , p. 156, 6 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES V’âge de quinze ans, l’idée d’enfermer sa langue dans une petite boîte d'argent ; ce qui ne lempêcha pas de parler, de former des sons , et d’exécuter la plupart des fonctions qu’on attribué à cet organe. Parvenue à l’âge de cin- quante-quatre ans, elle à été examinée depuis peu par le célèbre Sandifort , professeur d’anatomie à Leyde, qui donne sur les progrès de cette maladie les détails sui- vans : L’ouverture transversale de la bouche est de trois pouces, et est remplie par la langue, qui pend de Ia lon- gueur d'environ quatre pouces et demi sur le menton; sa surface est inégale, tuberculeuse , et toujours couverte dune salive épaisse ; la lèvre inférieure est renversée en devant, et alongée de trois pouces ; son bord vermeil west pas égal, mais recouvert de deux éminences arron- dies de l’épaisseur à peu près de la lèvre elle-même ; la mâchoire inférieure est mobile, et constamment abaissée par le poids de la langne. Il ne reste plus à cette fille qu’une seule dent, qui est cariée ; c’est une des molaires. On voit à la voûte du palais deux tumeurs arrondies , séparées l’une de l’autre par une fissure. Cette maladie subsiste depuis plus de quarante ans, et cause une dou- leur presque habituelle et gênante dans le fond du gosier, près de los hyoïde. Pendant ce long espace de temps, la malade a été souvent attaquée d’esquinancie et de diffi- culté d’avaler. Quand elle n’éprouve point cette incom- modité, elle avale toute espèce d’alimens , et parle même assez distinctement (1). @) Trioen, Observat. medicinal. , p. 142.=— Sandifort ; Observat. anatom. patholog. Lib. 4, cap. 9. x HUE D BRU VS E © WE: 7 Dans des cas absolument semblables à celui - ci ES résection de l’extrémité protubérante de la langue a été conseillée et même exécutée, contre le vœu de l’art : la crainte seule d’une hémorrhagie qu’on a crue difficile à réprimer, a retenu la main de quelques praticiens qui étoient tourmentés du desir de faire cette opération inu- tile. M. Sandifort pense pourtant qu’elle seroit avanta- geuse aux malades et honorable pour l’art, Nous prou- yerons dans un instant le contraire : mais examinons auparavant le fait sur lequel ce savant professeur établit son sentiment. On lit, dans les Actes littéraires de Suède (1), que la société de médecine de Stockholm s’assembla en 1695 pour examiner la maladie d’une fille de dix ans qui, depuis sa naissance, étoit défigurée par la protrusion de l'extrémité de la langue hors de la bouche. Cet organe avoit deux pouces d'épaisseur, et pendoit sur le menton de la longueur de quatre pouces : la mâchoire inférieure étoit déprimée par le poids de cette tumeur : les dents incisives , les canines et les petites molaires, étoient ren- versées en devant. Cette fille ne pouvoit ni fermer la bouche , ni parler distinctement, ni retenir sa salive , qui s’écouloit au dehors continuellement et en très - grande quantité ; la déglutition étoit gênée. Cet examen fait, les consultans décidèrent qu’il falloit retrancher l’extrémité protubérante de la langue ; et Hoffmann, chirurgien de Stockholm , se chargea de cette opération : elle fut faite RE NM ue AL Le, ei NU SEUL . G) Acta lifieraria et scéentiarum Sueciae, anno 1732, tom. IUT, p. 1. 8 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de manière à ne pas donner une idée bien avantageuse de la chirurgie des Suédois dans le siècle dernier (1). La portion excédente de la langue étant retranchée, on la pesa, et l’on trouva qu’elle étoit du poids de trois onces. L’hémorrhagie, quoique peu considérable , fut arrêtée par l’application du cautère actuel. Il est dit que cette fille fut parfaitement guérie dans l’espace d’environ trois semaines ; elle put ensuite parler librement et avaler avec facilité ; la lèvre inférieure, qui, depuis la naissance, étoit renversée par la langue sur le menton, reprit som état naturel : enfin le rédacteur de cette observation termine son récit en s’adressant aux maîtres de l’art, et en les invitant à faire tourner au profit de la science cette opération , ou de la corriger, s’il est possible (2). On verra dans un instant qu’en effet il y a beaucoup à cor- riger dans cette manière de procéder à la curation de la maladie dont il s’agit. C’est encore sans nécessité que Claudini , médecin de Bologne, en parlant d’une fille qui, depuis sa naissance , avoit la langue hors de la bouche, a conseillé, pour opérer une guérison radicale, de faire la résection de cet organe (3). (Gi) La langue étant fixée sur une espèce de spatule large et échancrée, Vextrémité protubérante de cet organe fut coupée avec un ciseau à peu près semblable à celui dont se servent les sculpteurs et les taïlleurs de pierre. Ferrum idipsum ad instar ferri quo utuntur sculptores et lapicidae. (P. 3.) (2) Vestrum est, artis salutaris chérurgiae magistri, nobile hoc inventum én vestros usus vertere, vel, si poreritis , illud emendare. (Ibid. , p. 3.) (3) Quôd si spectemus auctam linguae magnitudinem plus justo, vel malum hoc est nativum quale ego vidi in puella quae dinguam exertamn BAL EE VE D Q Ù 9 Tous les auteurs dont on vient de parler n’ont connu ni la nature ni le caractère de cette maladie, qui est gué- rissable par les procédés les plus simples, lors même qu’elle est invétérée. IL est de fait que la tumeur n’a pas toujours le même volume ni le même prolongement. Ceux dans lesquels cette maladie a subsisté pendant plu- sieurs années, en ont fait la remarque eux-mêmes : elle n’a point échappé à la plupart des observateurs ; mais ils n’ont pas su tirer parti de ce fait, ni saisir l'indication que présentoit cet état variable de la partie affectée. On n’a jamais vu cette maladie se guérir spontanément ; mais on a vu la langue, après s’être excessivement prolongée hors de la bouche, y rentrer partiellement, au moins pendant quelque temps, se détuméfier, et rendre, par cette rétrocession plus ou moins durable, le mal un peu plus facile à supporter. Ce seroit se faire illusion que de prendre la tuméfaction de la langue pour la maladie elle- mème : elle en est l'effet, mais elle n’en ést point la cause. Elle peut, jusqu’à un certain point, mettre ob- stacle à la réduction de la partie ; mais il est si facile de diminuer son volume pour opérer ensuite cette réduction, qu'il est étonnant que les personnes de l’art les plus instruites se soient trompées sur ce point. L’inspection du mal indique suffisamment que, pour le guérir, il ne faut pas couper l'extrémité de la langue tuméfiée et prolongée a ———_—_—_ —_—"——.—.——————_—_—_—— gestabat, cui ea sexzsim etliam a primordio sui ortfs fuit adancta, linoua Plus justo aucta incidatur. (Julii Cæsaris Claudini Empirica rationalis. Bo< noniae ; 1653 , in-fol. lib. 3, cap. 6, p. 603.) 1, , k 2 10 MÉMOIRES DÉ MATHÉMATIQUES hors de la bouche , mais en opérer la détumescence et ensuite la réduction. C’est ce que prouvent les observa- tions suivantes. Û Il y a quelques années que je fus consulté pour un enfant qui étoit né depuis sept à huit jours, et qui tenoit constamment la pointe de sa langue hors de la bouche, de la longueur d'environ un travers de doigt. La crainte que cette affection vicieuse, qui s’étoit manifestée aussitôt après la naissance, et qui prenoit des accroissemens insensibles , ne devint encore plus considérable , avoit déterminé les parens à prendre mon avis. Cet enfant se portoit d’ailleurs très-bien, mais il ne saisissoit qu'avec difficulté le sein de sa nourrice. J’examinai la langue avec attention : elle n’étoit guère ni plus épaisse ni plus large que dans Pétat naturel ; elle n’avoit aucun vice de première conformation, et il me fut facile de la remettre dans sa place naturelle, d’où elle sortit aussitôt que j’eus cessé de l’y maintenir. Instruit par cet examen, je conçus la possibilité de s’opposer tout à la fois aux progrès du mal, et même de le guérir radicalement en maintenant la langue réduite, et en s’opposant à sa sortie : C’est pour- quoi je la replaçai une seconde fois, après en avoir sti- mulé la pointe avec un peu d’alun crud en poudre, et j'appliquai sous le menton une compresse étroite et lon- gitudinale en forme de fronde, dont je fixai les bouts sur le sommet de la tête, afin de tenir les mâchoires exacte- ment rapprochées. Je recommandai de ne plus laisser ictter l'enfant, mais dele nourrir avec un mêlange de lait de vache et d’eau d’orge pris à la cuiller, pour que la ET, DE PHYSIQUE. 11 * langue, par cet artifice , püt exciter, au moins pendant la déglutition, une action inverse à celle qu’elle faisoit dans la succion, lorsque l’enfant tettoit sa nourrice. Les parens eurent l'attention de ne lever lappareil que j’avois ap- pliqué, que toutes les fois qu’il falloit faire boire l’en- fant, et de le réappliquer immédiatement après. Ce procédé, si simple et si naturel, a suffi pour opérer dans l’espace de quinze jours une cure radicale, et per- mettre ensuite à l’enfant de reprendre sans inconvénient le sein de sa nourrice. Curieux de savoir quelle pouvoit être la cause de cette disposition morbifique de la langue, j'appris de la sage-femme que l’enfant étoit venu au monde en présentant la face, ayant le visage très-rouge, la bouche ouverte et pleine de bave ; qu’une salivation abondante avoit paru dès les premiers jours, et que lPac- couchement avoit été long et difficile. D’après tous ces détails, il me parut évident que la protrusion de la langue, qui s’étoit manifestée immédiatement après la naissance avoit été le produit d’un état convulsif, ou, si l’on veut, d’une sorte de suffocation à peu près semblable à celle qu’éprouvent quelques épileptiques qui, pendant l’accès, ont la langue excessivement prolongée hors de la bouche. Peu de temps après je fus consulié pour un petit garçon âgé de six ans, qui avoit la langue volumineuse et hors de la bouche de la longueur d’environ trois travers de doigt. Cette difformité subsistoit depuis plus de trois ans. Les parens , ne sachant quelle en étoit la cause, Vattribuoient à une mauvaise habitude que cet enfant avoit coniractée. Quoi qu’il en soit, la langue étoit trop 12 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES tuméfiée pour pouvoir être réduite et maintenue dans sa place naturelle. L’indication à suivre me parut être celle d'opérer d’abord la détumescence de cet organe par Pap- plication de quelques sangsues. En effet, cette saignée locale en diminua le volume et facilita consécutivement sa rentrée dans la bouche. Pour l’y maintenir, je fis rapprocher les mâchoires Pune contre l’autre par lappli- cation d’une bande appliquée sous le menton, qui s’at- tachoit au bonnet de lenfant sur le sommet de la tête : je recommandai de garder ce bandage jour et nuit, et de ne l’ôter qu’au moment des repas. En tenant constam- ment les mâchoires rapprochées, afin de s’opposer à la sortie de la langue, elle reprit peu à peu son volume naturel, et dans l’espace d’un mois cet enfant fut parfai- tement guéri de sa difformité. Les dents incisives et ca- nines de la mâchoire inférieure étoient déjetées en devant, comme on l’a vu dans les observations précédentes ; la partie inférieure de la langue étoit légèrement ulcérée par son frottement contre ces dents, tandis que sa partie supérieure étoit absolument desséchée par son exposition continuelle à lair. L’effusion de la salive au dehors étoit peu considérable, la déglutition assez facile, mais la parole sourde et le son de voix rauque. Pendant les huit premiers jours du traitement, je m’apperçus que Venfant pouvoit bien tenir sa langue dans sa bouche, mais elle en sortoit aussitôt qu’il l’ouvroit et qu’il par- loit. Je lui recommandai le silence, et je vis bien que C’étoit au rapprochement constant des deux mâchoires qu’il falloit attribuer la guérison de cette maladie. ET" DE (PH YS 1 QU Er. 13 On lit, dans un traité de chir urgie publié en 1782 par le Blanc, une observation isolée DR plus utile à potes, qu’en l’envisageant sous son véritable point de vue, elle servira à prôuver la solidité des principes que nous exposons dans ce mémoire. : La fille d’un vannier d'Orléans fut attaquée, à l’âge de trois ans, de convulsions qui firent sortir la langue hors de la bouche, sans que la malade pt l’ÿ faire ren: trer. Elle porta cette hideuse incommodité pendant qua- torze ans. Au mois d'avril 1772 on pria le Blanc de la voir ; elle avoit alors dix-sept ans : la langue étoit hors de la bouche de la longueur de trois travers de doist, et avoit plus d’un pouce d'épaisseur ; elle étoit couverte de sept à huit petits ulcères; on voyoit en dessous trois à quatre protubérances ulcérées. Cette fille faisoit horreur à tous ceux qui la regardoient. Les dents incisives de la mâchoire inférieure étoient renversées en dehors et cou- vertes de tartre. L’auteur de cette observation pensa qu’en renfermant la langue dans un petit sac de toile fine , la faisant rentrer dans la bouche, et l’y maintenant pendant quelque temps avec un bridon, elle diminueroit de volume ; que les muscles qui servent à la tirer vers le fond de la bouche, ayant été depuis quatorze ans trop alongés , reprendroient successivement leur ressort, et que la salive qui lrumectoit continuellement ces lee suffiroit seulé pour les déterger ‘et les guérir. D’après cette idée, il énferma la langue dans un petit sac de. toile, aux angles duquel étoit attaché un bridon fait de fil d’archal, qui devoit être appliqué sous le menton, 14 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pour y trouver un point d'appui solide. Des rubans atta- chés à ce même bridon furent conduits de devant en ar rière pour être croisés sur la nuque et revenir ensuite en devant pour être noués sur le#front. Cet appareil fut dté soir et matin pour laver. le sacet faire rincer la bouche de la malade avec du vin. Dans l’espace de quatre jours la langue diminua considérablement de volume , reprit sa place, et les ulcères se détergèrent. Dès-lors il fut inutile de se servir dubridon , et la langue ne sortit plus de la bouche. Mais comme les dents incisives de la mâ< choire inférieure, qui étoient déjetées de leurs alvéoles, entroient dans la lèvre inférieure et l’empèchoient de s'appliquer contre la supérieure , sur-tout lorsque cette fille vouloit fermer la bouche , il fallut en faire l’extrac- tion. Dès-lors la malade fut délivrée pour toujours d’une incommodité qui avoit rendue méconnoissable (1). Le conseil d’enfermer la langue dans une espèce de bourse de linge fin, attachée à un fil d’archal qui se replie en forme de bridon sous le menton , a été donné comme un moyen propre à favoriser la cure des plaies transversales de cet organe (2). Le Blanc a pensé que ce même procédé pourroit servir utilement à la guérison de la fille du vannier d'Orléans. C’est en effet à la rétropul- sion opérée par laction de ce bandage sur l'extrémité de la langue, que cette fille a dù sa guérison; elle fait honneur à l'intelligence et à la sagacité de l’homme de —— “ () Précis d'opérations de chirurgie, par le Blanc, p. 17. (2) Mémoires de l'académie de chirurgie, tome III, p. 418. , ET, DM PHYSIQUE. AS Part qui la dirigée. Mais , dans un enfant , le même moyen ne seroit point aussi efficace qu’il l’aété, la langue n'ayant ni le même volume ni le même prolongement, et ne pouvant pas fournir par son extrémité un point d'appui suffisamment solide : li-commissure des lèvres mettroit obstacle à laction de ce bandage, qui, en agissant trop foiblement de devant en arrière, ne pourroit repousser la langue et la maintenir dans la bouche. D'ailleurs, si Von fait attention à l’indocilité d’un enfant que ce bridon gène, et qui tient nécessairement la bouche entr’ouverte : on verra qu’il ne peut pas toujours remplir un objet au- quel il wa pas été primitivement destiné par son auteur. Il résulte des notions anatomiques les plus élémen- taires que la déglutition ne peut se faire, ou que du moins elle se fait très-mal, lorsque la bouche est ouverte. Il faut, pour que cette action naturelle s’exécute, que les mâchoires soient rapprochées l’une contre l’autre : alors Vos hyoïde, qui sert d’appui à la langue, s’élève avec la partie supérieure du larynx, tandis que la base de la langue, portée en arrière, agit contre la portion d’ali- ment qui est dirigée vers le pharynx. C’est ainsi que les muscles releveurs de la mâchoire contribuent essentiel- lement à la déglutition. Il est donc vrai que pour guérir, dans les enfans nouveaux nés, la maladie dont il s’agit, il faut non seulement empècher l'enfant de tetter, mais tenir encore les mâchoires rapprochées, afin de diriger, autant qu’il est possible, les mouyemens de la langue, pendant la déglutition ,.dans un sens contraire à,celui qu’elle à pris jusqu'alors , et qu’elle continueroiÿ de preñdre par la succion du sein d’une nourrice. 160 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Je terminerai ce mémoire par le récit d’un fait d’au- tant plus important à connoître , qu’il prouvera avec quelle facilité l’on peut guérir cette maladie, lors même ‘qu’elle a fait les progrès les plus considérables, Il existe à Paris, dans la maïson des femmes dite la Salpètrière, une fille âgée de quarante ans qui est née avec la langue prolongée hors de la bouche. Elle a con- servé cette incommodité pendant trente ans, ne parlant qu'avec difficulté, et ne pouvant même prononcer plu- sieurs Syllabes. Les dents de la mâchoire inférieure se déjetèrent peu à peu en dehors, la lèvre se renversa, et la salive, qui n’étoit plus retenue dans la bouche, tom- boit continuellement sur le menton et sur la poitrine. L’impression du chaud et du froid sur la langue étoit très-douloureuse, et cet organe étoit ordinairement plus rouge et plus tuméfié pendant l'hiver que pendant été. Lorsque cette fille eut atteint l’âge de trente ans, elle consulta feu Louis, secrétaire de l’académie de chirur- gie, qui lui déclara d’abord qu’il n’y avoit aucun espoir de guérison ; mais, quelques jours après, il revit la ma- lade, et lui conseilla, d’après la lecture qu’il avoit faite d’une observation qu’on trouve dans Galien, d’envelop- per sa langue dans des linges imbibés de suc de laïtue. On lit en effet, dans les ouvrages du médecin de Per- game (1), qu'un vieillard qui avoit la langue tuméfiée par une affection catarrale ou pituiteuse, fut guéri en 1 (1) Methodus medendi, Üb. 14, cap. 8, — De differentiis morborurm ÿ cap. 9. PME DUT 0 DH Ÿ S TVQ UIE 17 prenant un purgatif et en tenant dans sa bouche le suc âcre et irritant de la laitue sauvage (#hridacine), plante que Galien, ainsi que Théophraste et Dioscoride , dis- tinguent soigneusement de la laitue cultivée, qu’ils ont nommée zkridax. La fille de la Salpêtrière suivit le conseil qui lui fut donné ; elle humecta continuellement, et pendant six mois entiers, sa langue avec le suc de la laitue cultivée. Galien auroit probablement conseillé celui de la laitue sauvage, comme remède répercussif par son âcreté. Quoi qu’il en soit, la langue, qui étoit desséchée, se ramollit et devint plus humide. L’usage continué de ce remède insipide, appliqué froid pendant un long espace de temps, et renouvelé sans cesse, opéra insensiblement la diminution du volume de cet organe. Cette fille est aujourd’hui parfaitement guérie ; mais elle éprouve encore de la difficulté à parler, quoique la langue soit bien contenue dans la bouche depuis sept à huit ans : la peau du menton, qui pendant trente années a été recouverte par la langue, est aussi un peu plus rouge et plus épaisse que dans l’état naturel. Il résulte de toutes les observations que j’ai rappor- tées dans ce mémoire, que le prolongement de la langue hors de la bouche est une maladie chronique qui dif- fère essentiellement de toutes les espèces de tumeurs inflammatoires, dont cet organe est susceptible par àes causes qui sont très-variées. J’ai déja dit qu’il n’est pas de l’essence de la maladie dont je parle que la langue soit très-tuméfiée : cet accident ne se manifeste que consécutivement ; et ce n’est pas parce que cet organe 1 3 18 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES est primitivement plus volumineux ou plus long qu’il ne doit l'être qu’il se déplace, maïs par une cause qui n’est pas toujours la même, comme on l’a vu dans les observations précédentes. Cependant, quand cet acci- dent se manifeste, quand la tuméfaction est telle qu’elle met obstacle à la réduction de la partie malade , elle n’en présente pas moins une indication curative qu’il est utile de ne pas perdre de vue. On conçoit que dans différentes circonstances, selon que la maladie sera ré- cente ou ancienne, la langue plus ou moins tuméfiée ou desséchée par sa longue exposition à l’air, des lotions ou des gargarismes simplement émolliens, ou un peu sti- mulans, selon l’état variable de la partie affectée, pour- ront être utilement employés. Par un procédé semblable, Scultet (1) a guéri, dans l’espace de quelques jours, un homme qui, à la suite de l'usage inconsidéré du mercure pris en friction, eut pendant quatre mois la langue très- volumineuse, et pendante, hors de la bouche, de la lon- sueur de quatre travers de doigt : en la stimulant avec une poudre irritante composée de poivre , de gingembre, de moutarde et de sel, elle devint d’abord plus mobile et moins dure. On pouvoit la replacer; mais elle sortoit aussitôt de son lieu naturel. En faisant sur sa partie inférieure des scarifications, elle se détuméfia jusqu’au point de pouvoir être contenue pour toujours dans la bouche. C’est ainsi que l’application des sang-sues , qui a produit tout à la fois une déplétion et une irritation sur EEE enr e nent (:) Obs. 17. Append. obs. EH) UD El H Y SI Q ULE 19 la langue tuméfiée , m’a paru convenir dans le cas où je l’ai employée ; mais lorsque, dans un enfant nouveau né, la pointe de la langue non tuméfiée ne sort que de quelques lignes hors de la bouche, lorsque la maladie ne se montre encore que sous l’apparence d’une affection légère qui fixe peu l'attention des parens, on remédiera efficacement à cette disposition vicieuse en excitant sur l’organe de la parole une légère irritation, comme on remédie au prolongement de la luette en la stimulant avec du poivre ou avec de l’alun en poudre. Ce premier secours, qu’il peut être utile de réitérer, ne doit pas faire négliger l'application d’une fronde qui tienne les mâchoires rapprochées, afin de s'opposer à la sortie de la langue, au renversement en devant de l’os hyoïde, et à l’alongement des muscles qui servent à maintenir ces parties dans leur situation naturelle. Enfin il est bien important de ne pas prendre pour un cancer la maladie dont il s’agit, lorsqu’elle est invétérée, et de ne pas, d’après une fausse vue, retrancher l'extrémité protubé- rante de l’organe de la parole. 20 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES OBSERVATION Svr la séparation spontanée de deux os, le tibia et Le péroné, dans leur partie moyenne , à la suite dun sphacèle, Par DEesEessarrTz. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 16 ventôse an 4. Per les observations que les maîtres en l’art de guérir nous ont transmises, il en est d’une utilité plus réelle et plus étendue : ce sont celles qui tracent le ta- bleau fidèle, non seulement des symptômes qui caracté- risent les maladies, mais encore des efforts que fait la nature, des moyens qu’elle met en œuvre , et des res- sources qu’elle développe pour s’en délivrer. Dans ce tableau, où tout est exactement signalé, ap- précié sans prévention et avec un juste discernement, le praticien puise les lumières nécessaires pour bien con- noître l’ennemi avec lequel la nature est aux prises, et les règles qui doivent déterminer sa conduite; supposé que la nature, ce médecin véritable et le plus sûr, prin- cipalement dans les maladies aiguës, ait besoin des se- cours de Part, Mais on ne doit attendre ces avantages inestimables que de tableaux formés de la réunion de plusieurs obser- vations faites dans les maladies de même espèce, exami- EL T DSE BH YIS ICQ UE 2 nées , vérifiées, et rapprochées par leur ressemblance, j'oserois presque dire par leuridentité. Je conviens que, si ces qualités étoient rigoureusement exigées pour toutes les observations, bien peu mériteroient de nous servir de guide; aussi ce n’est pas mon idée : je desire seule- ment que. nous n’admettions pour régulateur de notre jugement et de notre pratique auprès des malades, que celles qui auront réuni les conditions que j’ai posées, d’après mon expérience et mes réflexions. Celles qui sont isolées, dont l’objet est un fait extraor- dinaire , ne doivent pas moins fixer notre attention ; elles pourront nous aider à soupçonner et même à découvrir la vérité dans des cas difficiles et analogues. C’est pour- quoi je crois que l’on n’en doit négliger aucune, fût-elle unique : peut-être s’en présentera-t-il une seconde avec des circonstances pareilles, ou wen différant que peu; et ces deux, jointes à uné troisième, commenceront à former le noyau d’un corps de doctrine aussi certaine que les bornes de Pesprit humain , et les voiles dont l’éco- nomie animale est encore enveloppée, peuvent le per- mettre. C’est ainsi qu’on est parvenu à établir une curation à peu près infaillible de la maladie vénérienne, de la pe- tite-vérole,, lorsqu'elle est seule et débarrassée de toute complication d'humeur maligne, et arrêter les progrès de la gangrène , lorsqw’elle n’a pas étendu son virus destructeur sur les viscères essentiels à lavie. C’est aussi dans cette vue que je vais vous communi- quer un fait dont je crois que les exemples sont rares; 22 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES du moins je n’en ai trouvé qu’un, malgré le grand nombre d’auteurs que j'ai consultés. Il est consigné dans les Më- moires de l’Académie des Sciences pour l’année 1702. J’en rapporterai la substance à la fin de ce mémoire. De- puis la lecture de ce mémoire, mon collègue Lassus m’en a indiqué un autre. ‘ Les séparations spontanées des os dans leur articula- tion, à la suite du sphacèle, se présentent assez fréquem- ment : j'en ai vu plusieurs dans le cours de ma pratique. Je croirois abuser de vos momens si je vous en retraçois l’histoire et vous citois celles que chacun peut lire dans leurs auteurs: mais il est question aujourd’hui de la sec- tion spontanée complète d’un et mème de deux os, le tibia et le péroné, dans leur partie moyenne, à la suite d’une gangrène commencée à la malléole. Le nommé Poirier; âgé de soixante et onze ans, domi- cilié dans le fauxbourg Saint-Antoine, d’une haute sta- ture , vivant bien, sans aucun excès, n’avoit éprouvé d'autre incommodité que des douleurs de rhumatismes vagues autrefois, et, depuis quelques années, une efflores- cence ou dartre sèche au scrotum , qui s’étoit dissipée d’elle-même, sans l’application d’aucun topique, mais dont la disparution avoit été suivie, deux mois après, d’aphtes au palais et sur la surface de la langue. Ces aphtes peu profonds avoient cédé à de simples garga- rismes d’une décoction d’orge. Le 8 janvier 1781, en rentrant chez lui le soir par une allée sombre, il se heurta le pied, tomba, et se fit une plaie très-considérable au-dessus et dans toute la lon- ” Ut OMTA AMIE TA Y S 10Q 0: Er. 23 gueur du sourcil gauche. Cette plaie fut traitée métho- diquement par M. Bouville , chirurgien très-instruit et d’une grande prudence. Le malade fut saigné du bras, le lendemain de la chûte ; et comme il navoit point de fièvre, point de mal à la tête, la saignée ne fut point réitérée, Après seize jours révolus, la cicatrice fut consolidée : le régime avoit été sévère , et le malade avoit bu abon- damimnent d’une tisane amère et nitrée ; le traitement fut terminé par un minoratif dont l’effet fut doux, mais suf- fisant. Le lendemain 25 janvier, dix - septième jour après la chûte, le convalescent , qui ne s’étoit pas encore apperçu d’aucune incommodité au pied ni à la jambe, se plaignit d’une douleur très-aiguë qui s’étendoit depuis la partie moyenne et externe de la jambe droite jusqu’à la mal- léole externe du même côté. Il n’y avoit aucun signe ‘d’engorgement, ni changement de couleur à la peau : c’est pourquoi le chirurgien attribua cette douleur à une humeur de rhumatisme goutteux dont le malade avoit souffert anciennement ; il ordonna des fumigations avec le karabé et le genièvre. Le soulagement fut léger. Le surlendemaïn on appliqua de la graisse de blaireau, sans la participation du chirurgien, qui dès-lors se retira. Ce topique ne diminua point les douleurs. M. Bouville fut rappelé : il trouva un gonflement très-sensible qui s’éten- doit depuis la malléole externe sur presque toute la sur- face du pied. Croyant que c’étoit l’effet de la goutte, il prescrivit des cataplasmes avec la mie de pain et le lait, 24 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES renouvelés toutes les quatre heures , un régime humec- tant, et; pour boisson, du petit lait clarifié et légèrement nitré. L’usage de ces moyens, continué pendant neuf jours, ne proûuisit aucun bien : l’engorgement étoit le même. Le malade wavoit point de fièvre. Mais il se manifesta alors sur le pied quelques taches et des lignes d’un rouge brun. M. Bouville examina, avec une attention scrupuleuse, la peau sur toute l’habitude du corps, et la bouche du malade : il n’y remarqua que de la pâleur. {1 substitua au petit lait une tisane anti-scorbutique, et trois verres, par jour, de la décoction d’une once de quinquina dans une pinte d’eau. Au lieu de cataplasme de mie de païn et de lait , il mit sur le pied des compresses trempées dans de l’eau-de-vie bien camphrée et aiguisée de sel ammo- niac. Ce traitement a été commencé le 10 février. Je fus appelé quelques jours après, et je vis que la gangrène occupoit non -seulement le pied, mais une partie de la jambe ; la peau du pied commençoit à être noire et sèche, et celle de la jambe au-dessus de la mal- léole étoit d’un rouge livide. Je crus devoir tenter de ramollir la peau du pied, et d’y déterminer une suppu- ration : je conseillai des cataplasmes émelliens sur cette partie, en continuant les compresses imbibées d’eau-de- vie campbhrée sur la jambe. Je nrétois trompé en adop- tant, dans ce cas, les conseils donnés par Boerhaave et quelques praticiens célèbres. L’effet ne répondant point à monvattente, les cataplasmes émolliens furent aban- donnés, après deux jours d’essai, J’ajoutai au traitement mi /. D'EÙ PH VS KO WE 25 adopté par M. Bouville, 1°.-une bonne poignée de cresson de fontaine dans un bouillon gras , tous les matins; 2°, des compresses chargées d’une forte décoction de quinquina, mises par-dessus d’autres trempées dans lesprit-de-vin saturé de camphreiet animé de sel ammoniac. Les se- condes compresses ne couvroient que la moitié inférieure de la jambe ; mais les premières s’étendoiént depuis le pied, le long de la jambe, jusqu’au genou. Le 5 mars, la gangrène paroissant faire de nouveaux progrès, je conseillai d'ajouter à l’esprit-de-vin camphré de la teinture de myrrhe; ce qui fut continué huit jours de suite. Enfin , la gangrène:s’étant visiblement bornée à: la partie moyenne de la jambe; nous avons persévéré dans le même pansement avec les compresses trempées dans l’esprit-de-vin camphré, animé de sel ammoniac , et celles chargées d’une forte décoction de quinquina, depuis le 13 mars jusqu’au commencement d’août. Le malade prenoit tous les matins quatre onces de suc non épuré de cresson de fontaine > et buvoit, en plusieurs fois, douze onces d’une décoction de deux gros de quin- quina dans une chopine d’eau ; sa nourriture étoit comi- posée de bouillon de viande dans lequel on mettoit des raçines et.des herbes potagères, deux potages au pain, de temps en temps des pruneaux cuits, pour entretenir la liberté du ventre, le malade étant souvent constipé , et éprouvant alors des mal-être, des foiblesses qui alloient jusqu’à la lipothymie, ; Pendant cet intervalle de près de trois mois, là ligne de démarcation entre le vif et le mort s’est décidément, LD 1, 4 56 MÉMOIRES. DE MATHÉMATIQUES quoique lentement, prononcée à la partie moyenne et an- térieure de la jambe. Cette ligne n’étoit point exactement circulaire : elle-présentoit les trois quarts d’un cercle postérieurement dans toute la partie charnue ; mais , ar4 _rivée au péroné et au tibia, partie antérieure; elle s’éle- voit et formoit un angle obtus dont la pointe étoit sur la crête du tibia, et les côtés se portoient en descen- dant vers la partie postérieure de la jambe, ayant environ deux pouces de long, et étant à peu près égaux. Dans les premiers jours d’août, l’épiderme s’est fendu suivant la direction de la ligne que nous avons décrite, et nous avons vu dessous une ligne d’un beau rouge, et au-dessous de cette ligne la peau étoit noire et sèche. Cette ligne, qui ne nous paroïissoit que superficielle, s’est enfoncée dans la peau , et enfin dans la substance des muscles ; mais elle n’opéroit encore aucun changement dans la substance du tibia, qui fut bientôt abandonné à nud : le péroné étant encore recouvert, nous ne pûmes voir ce qui s’y passoit. Quand la ligne de section a été portée jusqu’à la sub- stance des muscles , il s’est établi une suppuration très- abondante et presque toujours de bonne qualité, tant que le malade étoit fidèle à prendre son suc de cresson et sa décoction de quinquiua; qui PRES le lassoient et lui répugnoient. À mesure que la suppuration établie dans les bords des parties saines diminuoit , les extrémités des fibres musculaires des vaisseaux , des nerfs , etc., se rappro- choient les unes des autres pour former un moïgnon qui HT BE: 1D,E « P H Y S LQ UE. 27 étoit distant d’au moins un. pouce. des parties mortes. Dans cet intervalle les deux os restèrent à nud; et en les plaçant entre notre œil et une lumière, nous y avons apperçu une couleur noïre dans la, partie qui répondoit à la ligne de démarcation des partiesmolles. La portion supérieure à cette ligne étoit à peu près de la couleur des os,sains ; on n’y remarquoit qu’un peu de pâleur. Espérant que la nature , qui avoit marqué la sépara- tion dela portion morte de ces os, dé leur portion:restée vivante, comme ‘elle avoïit-fait pour les parties molles, opéreroit dans les uns la même section qu’elleavoit opérée dans les autres, nous résolümes de lui abandonner ce complément de son travail. Nousne nous sommes point dissimulé que ce travail seroit fort long : mais le malade n’avoit point de fièvre; il faisoit bien ses fonctions : d’ailleurs sa constitution avoit une tendance très-prochaine au scorbut ; et lorsque la suppuration commençoit à se ralentir par l’omission des remèdes que nous avions prescrits, nous avions eu la douleur de voir le pied et:la partie inférieure de la jambe gauche devenir livides, et vingt-quatre heures après menacés d’une gangrène aussi prompte que celle ‘que nous avions eu tant de peine à combattre à la jambe droite. Cet accident , attribué généralement à une ré- sorption et à une métastase de l’humeur de la suppura- tion, ou peut-être simplement l'effet de la sympathie qui existe entre les parties correspondantes et d’une struc- ture semblable, à été promptement dissipé en augmen- tant la dose des anti-scorbutiques et des anti-Septiques, 28 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES tañt à l’intérieur qu’à l'extérieur. Le malade en à été quitte pour l’exfoliation de l’épiderme et du tissu cellu- laire qui Punit à la peau. Ces deux membranes se sont promptément reproduites ; artist le malade étoit âgé de soixante et onze ans. Toutes ces considérations nous portèrent à redouter une opération qui, faite dans une direction qui n’auroit pas été et ne pouvoit pas être celle de la nature, auroit retranché des parties que celle-ci vouloit conserver, où en auroit conservé qu’elle vouloit retrancher. Dans l’un et l’autre cas nous avions une grande suppuration à es- suyer, et la nature avoit fait les frais de celle qui étoit nécessaire. Il'est vrai qu’en attendant la chûte de la’ partie morte des os, nous avions à craindre l’impression de lair sur la substance médullaire de la portion vivante, dont à la rigueur nous ignorions l’état, quoique la couleur de la substance osseuse au-dessus de la ligne de démarcation mousautorisât à la juger saine. Toujours confians dans le travail de la nature , nous espérâmes qu’elle pareroïit elle- “même à cet inconvénient trop réel, nous réservant de la ‘seconder par des défensifs doux. L'événement a justifié nos espérances, et le 30 sep- -tembre les portions inférieures du tibia et du péroné se sont séparées en même temps de leur portion supérieure: Il paroît qu'un éffort fait par le malade , dans un moment d’impatience pour élever sa jambe, a Due cette sé- -paration. à L’extrémité saine du tibia formoit un bec de flûte FE C0 ER IEDUE PHYSIQUH. 59 alongé d'environ un pouce dans sa partie postérieure, au lieu que la section du péroné avoit une forme ronde. Jai dans le temps déposé la portion de la jambe et le pied sur le bureau de la faculté de médecine, à qui je rendis compte du fait pur et simple dans une de ses assemblées dites prima mensis. Le chirurgien a couvert Vune et l’autre extrémité avec de la charpie sèche très- mollette et légèrement maintenue sans compression, pour servir seulement de défensif contre l’impression de Pair. On'a continué les compresses de quinquina sur ce qui restoit de la jambe. On ne pansoït qu'avec des plumas- seaux très-doux le moisnon, qui ne fournissoit presque plus qu’un léger suintement lymphatique. La nature semble s’ètre hâtée de consommer son ou- yrage : la partie des deux os demeurée à nud a été re- couverte en très-peu de temps de mamelons charnus qui se sont desséchés petit-à-petit, et ont formé un cuir dur et insensible. À mesure que ce cuir s’étendoit, il potts-- soit et séparoit de petites esquilles des inégalités q it laissées la section ; le chirurgien en enlevoit d’autres facilement avec ses deux doigts. Enfin les deux os ont été entièrement recouverts, et le malade s’est parfaite-. ment rétabli. La durée de sa maladie a été de huit mois. Il a vécu encore quatre ans, marchant avec une jambe de bois. Il a succombé en peu de temps à une vraie pé- ripneumonie, dont il se seroit peut-être garanti s’il eût suivi le conseil que nous lui avions donné de se faire saigner de temps en temps : il étoit devenu très-plétho- rique à/raison du peu d’exercice qu’il prenoit depuis sa 30 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES maladie , étant accoutumé à en faire beaucoup avant. J’ai eu plusieurs fois occasion de reconnoître la néces- sité de ces saignées pour les personnes qui avoient souf- fert la perte de ‘quelque membre considérable, par exemple l’amputation d’un bras, d’une cuisse ou d’une jambe. Si cette guérison naturelle doit être rangée dans la classe des faits extraordinaires et surprenans, je vous avoue que celle dont j’ai promis le précis, extrait des Mémoires de l Académie des Sciences pour l’année 1702, est plus merveilleuse et plus propre à:exciter la confiance dans les opérations de la nature. Un homme âgé d’environ quarante ans, d’un bon tem- pérament , reçut un coup d’épée à la partie moyenne, interne et inférieure du bras droit: cette blessure fut suivie des accidens les plus graves, insomnie, fièvre, putridité dans les humeurs : car en peu de jours tout parut, spacelé jusqu’au coude ; la partie interne du bras étoit cormgnpue jusqu’à Vaisselle, et l’os même. du bras étoit à L. à la distance de quatre travers de doigt de lais- selle, la pourriture ayant fait tomber toutes Les parties qui la recouvroient. L’amputation paroissoit le seul re- mède pour empècher les progrès de la communication et la mort ; mais l’état déplorable où se trouvoit le malade, présentoit une contr'indication trop puissante pour ne pas arrèter la main des chirurgiens qui furent consultés. Une femme promit de guérir avec un onguent dont, suivant l’usage de cette espèce d’empiriques, elle faisoit un mystère, et que l’on reconnut être le baume de Leu- % OPA DS É° Lib Ÿ'S M'ONT Æ. 34 catel. Elle en frotta toute la partie malade, la recouvrit ensuite de linges ; elle donna en même temps du bon vin. et des alimens fort nourrissans. Vingt -quatre heures après, la gangrène étoit bornée : les parties corrompues se séparèrent d’elles-mêmes. Six semaines étoient à peine écoulées depuis Papplication de l’onguent, que tout Vavant-bras se détacha de l’humérus, sans qu’on y tou- chât; et au bout d’un mois, à dater de cette première séparation, la partie de l’humérus qui avoit été nue se sépara dé l'os sain, et ce terrible mal fut terminé par une cicatrice dans l’espace de quatre mois. On ne peut se dissimuler que ce dernier malade, chez lequel la corruption tant externe qu’interne étoit poussée au plus haut degré , ne présentoit et ne pouvoit présenter aucun espoir aux gens de l’art, et, au tribunal de la fison et de l’humanité, proscrivoit toute opération. Ce- pendant la nature, cet ensemble des forces organiques qui prépare, mêle, sépare et distribue les principes de la vie par un mécanisme que nous ne connoissons pas, et par conséquent au-dessus de toutes nos théories, pose une barrière insurmontable au milieu d’un membre dont toutes les parties sont animées par les mêmes nerfs, nourries par les mêmes vaisseaux, et défendues par les mèmes enveloppes. Cette barrière interrompt toute com- munication entre les parties qui lui sont inférieures et celles qui lui sont supérieures : les unes continuent à vivre , et les autres sont livrées au poison destructeur qui les à attaquées ; devenues étrangères à l’organisation du corps, elles en doivent être rejetées, elles tombent d’elles- 32 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES mêmes. Que l’art seroit heureux, s’il pouvoit imiter Ja nature dans toutes ses opérations , arrêter la marche de la corruption, et ne séparer que les parties qui en sont atteintes, et dont la perte ne peut opérer aucun change- ment, aucun trouble, dans les parties conservées saines! Quant au premier vœu, l’heureuse découverte de la vertu éminemment anti-septique du quinquina, du cam- phre dissous dans une liqueur spiritueuse, tant de fois confirmée par d’heureux succès, et d’autres remèdes mis en œuvre par de grands praticiens, ne nous laissent presque rien à desirer dans les cas possibles. Quant au second, on sent,-1°. qu’il n’est praticable que lorsque le sphacèle est fixé ; 2°. que, la ligne de dé- marcation n'étant pas toujours circulaire, il est difficile, pour ne pas dire impossible, de la suivre dans l’ampu- tation, et par conséquent de ne séparer que les parties mortes. ; C’est pourquoi Part, en suivant le précepte de la na- ture , que les parties mortes doivent être séparées des vivantes, a admis pour règle d'opérer cette séparation dans les parties vivantes, et par préférence dans les arti- culations où elle est en quelque sorte indiquée ; mais cette pratique, couronnée par un grand nombre de gué- risons, n’esi pas toujours admissible : les deux exemples que j’ai rapportés semblent le prouver. Que reste-t-il alors à espérer ? Rien, que de la nature? Je ne le pense pas : l’art peut encore beaucoup en secondant et facili- tant son travail. Ce sont les conséquences que je me crois autorisé à tirer de ces deux observations, Si ces consé- fr DIE (P # Y 6 10 DE. 33 quences ne paroissent aux maîtres de l’art qu’une confir- mation de leur doctrine et de leur conduite, sous ce rapport même elles ne seront pas inutiles. Poirier ayant négligé pendant quelques jours l’usage interne du quinquina, la suppuration, qui jusqu'alors avoit été abondante et de bonne qualité, diminua sensi- blement et devint ichoreuse ; la jambe gauche fut atta- quée des mèmes douleurs qui avoient commencé la maladie de la droite, et bientôt les taches, d’un rouge livide , annoncèrent la gangrène. La reprise et même l'augmentation de la dose du cresson et du quinquina en boisson , ainsi qu’en décoction pour recouvrir les jambes, arrêtèrent la dépravation des humeurs , et firent évanouir les craintes que nous avions conçues d’un nouveau sphacèle chez un malade de cet âge. Il est donc démontré, 1°. que l’usage interne du quin- quina en boisson n’est pas moins nécessaire en cet état que son usage externe. Je dis en boisson : car j’ai eu lieu de reconnoître la vérité de l’observation faite par d’au- tres, que son usage en substance ne produit pas de si bons effets ; 2°. que cet usage doit être persévéramment continué jusqu’à la guérison totale. La persévérance à tenir les parties malades, et même celles qui, placées au-dessus, sont encore saines, exac- tement couvertes de défensifs efficaces qui les garantis- sent du contact de l’air extérieur, m’a paru non moins importante; parce que nous avons observé que le moi- gnon, dont la couleur étoit habituellement vermeille, en prenoit une plus foncée dès qu’il restoit quelque temps me 5 34 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES exposé à l’air, et qu'au pansement suivant la suppuration toit de moins bonne qualité. Le malade n’ayant point de fièvre , nous lui avons accordé de la nourriture choisie pour la qualité, et dosée en quantité relativement à ses forces et à la manière dont se faisoient ses digestions, . La conduite tenue par la femme dont il est question dans l’observation que j’ai empruntée des Mémoires de l Académie des Sciences, en donnant au malade du vin et de bonnes nourritures, a été également justifiée par le succès. Je pense donc qu’une diète trop sévère ne peut être que dangereuse dans un travail aussi long, même mal- gré un léger mouvement de fièvre. Ce travail devant” être celui de la nature, il faut soutenir ses forces ; il faut craindre l’affoiblissement du principe de la vie, qui seul peut opérer la séparation des parties mortes d’avec les vivantes, conformément à ces aphorismes d'Hippocrate (1) : « Peu de nourriture , et plus encore son retranche- » ment total , est toujours dangereux dans les maladies » longues : il l’est aussi dans les aiguës , auxquelles » il ne convient pas. » La diète affoiblit les malades ; et dès-lors aug- QG) Tenuis et exquisitus victus, ef in longis morbis semper, et in acutis , ubi non convenit, periculosus. ( Aphoris. IV, sect. I.) Ta tenui victu delinquuntaegri, ob id magis laeduntur : omneenim delictum guod committitur multo magis fit ën tenui quam in paulo pleniore victr. (Aph. V sect. ejusdem,) BE LD EH LEE Y S LLOU EH 35 » mente la lésion des fonctions : car les inconvéniens » du régime sont plus considérables quand la privation » des nourritures est absolue , que quand on en prend » même un peu trop. ». Aphorismes qui, soit dit en passant, sont peut-être trop négligés aujourd’hui, sur-tout dans les villes peuplées, où, exagérant les maux qui résultent de l’oisiveté dans laquelle la plupart des habitans passent leur vie, et des mets succulens dont ils font leur principale nourriture s on a prononcé cette hyperbolique sentence, que presque tous mouroient d’indigestion ; qu’il falloit par consé- quent, aussitôt qu’ils tomboient malades , les condamner à une diète très-sévère; tandis que je suis en droit d’as- surer que j’en ai vu périr, ou sur le point de périr, d’inanition (1). ————_———————ZZt QG) L'exemple qui m'a été communiqué par mon confrère Lassus , est celui d’une fille qui, dans l’espace de deux ans et plus, perdit les deux jambes à deux travers de doigt au dessus de la malléole. Ce fait se trouve dans une note de l’ouvrage de Sandifort , intitulé, Exer- cétationes anafomico - pathologicae ; imprimé là Leyde en 1783, in-4°, livre IV, chap. IX. 36 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES E X AM EN Drs rarrs que Girtanner rapporte en faveur de son opinion sur la nature du radical de l'acide muria- 1ique » Par J. B. Vax-Morxs. Lu, et déposé au secrétariat, le 6 germinal an 4. Ok sait que Girtanner a annoncé il y a quatre ans, dans une lettre adressée au citoyen la Métherie, et insérée dans le Journal de physique, que ses expériences l’avoient conduit à découvrir que l’hydrogène formoit le radical de l’acide muriatique : ce chymiste vient de faire con- noître au public, dans les Annonces scientifiques de Got- zingue (1) , et dans la seconde édition de ses Principes de chymie anti-phlogistique(2), les faitssur lesquels il fonde cette opinion. Comme ces faits ne m’ont pas toujours paru permettre les conclusions que Girtanner en a tirées, j'ai cru la matière assez importante pour'en présenter au public un examen particulier. Premier fait.- « Lorsqu'on fait bouillir de l’acide » muriatique pur et libre d’eau (wasserfrei) sur de =. QG) Cotting : anzeigen von gelehtithe sacher fur 1795, n° 52, pag. 526, €) Anfangsgrunde der antiphlogistischen chemie von Girtanner. Berlin, 1799. Pag. 154. ET DE PHYSIQUE. 37 » l’étain, du cuivre, du bismuth, etc. dans une cornue » en communication avec l’appareil pneumatique, ces » métaux s’oxident aux dépens de l'acide, et il se dégage » de l'hydrogène. » Le dégagement d'hydrogène pendant la dissolution de ces métaux dans l’acide muriatique a été attribué jus- qu'ici à la décomposition de l’eau, sans laquelle on sait que cet acide ne peut subsister sous la forme liquide. Les expériences que je vais rapporter prouveront que Girtanner a eu tort d’en rechercher une autre expli- cation. J’ai séparément saturé d’oxide d’étain, et d’étain mé- tallique, deux demi-onces d’acide muriatique : de la pre- mière dissolution il ne s’est point dégagé d'hydrogène. J’ai fait crystalliser ces deux dissolutions, et j’ai obtenu de l’une et de l’autre, à peu de chose près, le même poids de sel. J’ai répété la mème expérience ; mais au lieu de crys- talliser le muriate d’étain, je l’ai précipité par de la potasse caustique : les deux précipités n’ont pas différé en poids ; les deux dissolutions ont aussi pris la même quantité d’alkali pour leur décomposition. J’ai répété ces mêmes expériences avec le zinc, et j’ai obtenu les mêmes résultats. Si dans l’une ou l’autre de ces dissolutions l’acide avoit été décomposé, cette disso- lution auroit été moins chargée de métal ; ce qui n’est pas arrivé. Second fait. « En faisant passer de l’acide muria- » tique ez vapeur ( pourquoi pas du gaz muriatique ? ) 38 MÉMOLRES : DE. MATHÉMATIQUES » sur de l’oxide de manganèse dans un canon de fusil » rougi, on obtient du gaz hydrogène et du gaz acide » carbonique. La décomposition de lacide fournit le » premier de ces gaz; et la combinaison de son oxygène » ‘avec le carbone de loxide, le second, » Cette expérience appartient à Milner. L'opération est trop compliquée pour en tirer des conséquences. Troisième fait. « I arrive souvent, lorsqu'on distille ». de l’acide muriatique avec de l’oxide de manganèse » pour-obtenir de Pacide muriatique oxygéné , qu’il se » produit de l’huile , comme Giobert et Westrumb Pont » observé. Cette huile est formée par l’hydrogène de » l'acide et le carbone de Poxide. » On sait avec quelle facilité l’oxide de manganèse en partie. désoxidé, comme il l’est ici par Vacide muria- tique, décompose l’eau, et sur-tout à une température chaude. Quatrième fait. « L’acide muriatique donne du gaz » hydrogène avec le sulfure sec dé potasse. » J'ai pris deux demi-onces de sulfure de potasse, dont j’ai décomposé l’une à sec, et l’autre dissoute dans de Veau avec de lPacide muriatique. La proportion de cet acide que l’une et l’autre ont prise, n’a pas sensiblement différé. C’est donc l’eau, et non l’acide, qui est dé- composée. Cinquième fait. « Lorsqu'on distille des substances » animales , telles que la laine, etc., avec de Pacide » muriatique, ces substances sont oxidées et noircies, » etil se dégage de l'hydrogène, » Lu 2S APT ei Em UT € S'I1O U- É: 39 Sixième fait. « Dans le gaz muriatique le fer s’oxide, » et l’oxide de ce métal complète son oxidation, et il » se met de l’hydrogène en expansion. » Septième fair. « De l’huile d'olives et de térébenthine » s’oxident et se noircissent dans le gaz muriatique, et » il se rend libre du gaz hydrogène. » Huitième fait. « La cire et l’alcool transforment le » gaz muriatique en gaz hydrogène. » Je n’ai pas pu remarquer ce fait avec l’alcool. Neuvième fait. « Du charbon, du soufre et du phos- » phore, s’oxygènent dans le gaz muriatique, et en dé- » gagent de l’hydrogène. » J’ai obtenu les mêmes résultats, mais seulement à cette température à laquelle ces substances décomposent l’eau. Dixième fait, « Lorsqu'on fait brûler de l’alcool sur » du muriate oxygéné de mercure, ce sel se décompose, » le métal se réduit, et l’on obtient du gaz carbonique, » de hydrogène et de l’eau. » J’ai annoncé ce fait dans les Annales de chymie. Avant de connoître les faits sur lesquels Girtanner fondoit son opinion , j’avois fait quelques expériences propres à éclaircir cette importante matière. Je ne rapporterai que les résultats des principales d’entre elles. Première expérience. J'ai tiré plusieurs décharges électriques au travers d’un mêlange de parties égales de gaz muriatique et d'hydrogène. Mon but étoit de rame- ner , Par une répartition de loxygène sur toute la masse 4o MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d'hydrogène, le gaz muriatique à l’état d’oxide d’hydro- gène ou d’eau. Il ne s’est opéré aucune réduction du vo- lume des gaz, ni aucune altération dans leur nature. Seconde et troisième expériences. J'ai tenté le même essai avec l'addition d’un peu d’oxygène, et avec du gaz muriatique oxygéné, mais sans plus de succès. Quatrième expérience. J'ai fait brûler du gaz oxygène et hydrogène, avec excès du premier, à la proportion qui forme l’eau. J’espéroïs obtenir de lacide muriatique, mais je n’ai obtenu que de Peau. Cinquième expérience. J'ai introduit dans un tube de verre fermé à une de ses extrémités, un mêlange de mu- riate de chaux très-sec et de phosphore ; j’ai recouvert ce mêlange du même muriate à la hauteur de cinq pou- ces, afin d’intercepter l’accès de l'air; j’ai ensuite échauffé la portion inférieure du tube : le phosphore ma paru s’oxider, mais il ne s’est point dégagé de gaz. J'ai lessivé la masse, qui s’est entièrement dissoute, excepté le phosphore. J'ai agité la solution dans une atmosphère d’acide carbonique : il ne s’est point préci- pité de carbonate de chaux. L’acide muriatique n’avoit donc point été décomposé. Sixième expérience. J'ai fait brûler un mêlange de 0,95 alcool, et de 0,05 acide muriatique. Le résidu et le produit de cette combustion, réunis et saturés de po- tasse caustique en liqueur, ont pris la même proportion d’alkali qu'une quantité comparative d’acide. Septième, huitième , neuvième et dixième expériences. J’ai fait passer du gaz muriatique sur de la limaille de ÿ ; jyestee de l'acide. muriatique, HAUTE LOLEI T PIE TS 120 UE 41 fer, d’étain ; de cuivre et de zinc, dans des tubes, de verre rougis : j’ai D best chaque fois un peu de gaz hydrogène et muriatique, point d’eau , et toujours plus ou moins de muriate des métaux employés. . Onzièmeet douzième expériences. J'ai fait passer de Veau à différens degrés de chaleur, et à différentes re- prises, sur des oxides de mercure, et de manganèse, sans obtenir de Pacide muriatique. | Treizièmeetquatorzième expériences. J'ai versé quel- ques gouites d’acide,muriatique sur plusieurs gros de limaille d’étain et de zinc; je m’attendois que ce peu d'acide se seroit déchnposé pour oxider ces métaux : cette décomposition n’a pas eu lieu. Quinzième expérience. J'ai fait brûler de léools sur du muriate de Hhéguésié : ce ,sel a été décomposé, et Vacide muriatique n’a été retrouvé qu’en partie dans l'eau qui s’étoit formée de l’hydrogène de Palcool. LÉ Seizième expérience..J'ai traité un: mélange de. mu- riate de magnésie et de, charbon en poudre, et. lavé comme dans la cinquième expérience : le muriate a été décomposé , et il s’est formé du carbonate de ma- gnésie. Dix » + septième expérience. Un mélange de muriate oxygéné de mercure; et de,graisse colorée par du carbone libre, s’est d’abord blésiebi ensuite il-s’est jauni, et,a fini parse noircir par la rédibti de du mercure. On au- roit dit de l’onguent mercuriel. Il ne s’est trouvé aucun - Le citoyen Van-Lavwrenburg ; membre de la société ., 6 42 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES des chymistes d'Amsterdam , m'a communiqué le fait suivant : « Nous avons tiré plus de vingt mille étincelles élec- » triques à travers un tube rempli de gaz muriatique. » Ce gaz diminua un peu au commencement. Après que » cette réduction se fut arrêtée, on le porta sur de l’eau, » où il fut presque entièrement absorbé. Ce restant, il » est vrai, étoit du gaz hydrogène ; mais on a attribué » son origine à la décomposition de l’eau, dont il west » pas possible d'obtenir le gaz muriatique entièrement > dépouillé. D’un autre côté, si la décomposition detce » gaz avoit eu lieu, elle auroit dû être complète, après » que le gaz avoit été exposé à un si grand nombre de » décharges. » | Après avoir repassé ces différens faits, on est encore ëmbarrassé pour prononcer en faveur ou contre l’opinion de Girtanner. L’incertitude qui naît de ces expériences dépend de la difficulté de savoir si c’est l’eau ou l’acide qui se décompose et qui fournit le gaz hydrogène. Il paroît certain que Girtanner a plus conclu de l’ana- logie que du résultat de ses expériences. La facilité avec ‘laquelle on expliqueroit, dans son opinion, la formation de la grande quantité d'acide muriatique qui sature la soude dans le sel de la mer, a dû en partie le séduire. Mais cette composition de l’acide muriatique ne rend pas encore raison de la production de la soude, et ne lève pas encore la difficulté aussi grande de concevoir le procédé dont la nature se serviroit pour oxygéner Veau, etc, ET DE PH YS IQ U.E 43 Je dois encore relever une erreur de raisonnement de notre auteur. Girtanner dit que l’eau est à l’acide mu- riatique ce que l’air de l'atmosphère est à l’acide nitri- que. Comment a-t-il pu comparer l’état de combinaison à celui de simple mêlange ? Il devoit dire : L’eau est à l’acide muriatique ce que l’oxide d’azote est à l’acide nitrique. On doit encore observer que les acides favorisent fortement la décomposition de l’eau, comme dans les sulfures alkalins , et par le mêlange des métaux, du soufre, etc. {4 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES a : NOUVELLES EXPÉRIENCES Trnxpanxres à vérifier si l'hydrogène forme Le radical de l'acide muriatique, Par J. B'Van-Moxs. Lurjet déposé au secrétariat, le 16 vendémiaire an 5, Ayanr répété et varié quelques unes des expériences sur le radical de l'acide muriatique , que j’ai communi- quées à l’Institut national, j’avois obtenu dans une opé- ration un déchet de 0,12 d’acide. Ce résultat, qui, comme on le verra, tenoit à une faute dans le choix du réactif, me donna occasion de faire les expériences sui- vantes, que je ne crois mériter d’être présentées à l’Ins- titut que comme une suite à mon Examen des faits que Girtanner rapporte en faveur de son opinion sur la na- ture du radical de l'acide muriatique. Première expérience. On a lavé à longue eau du char- bon pulvérisé; et, après l’avoir fait sécher, on l’a arrosé d’une portion déterminée d’acide muriatique. On a intro- duit aussitôt ce mêlange dans un tube de verre, par les deux extrémités duquel passoient des fils d’or, à Peffet de pouvoir se transmettre le fluide électrique. A côté d’un de ces fils étoit pratiquée une ouverture par laquelle passoit un tube de communication, qu’on fit plonger sous ET DE PHYSIQUE 43 un récipient sur le mercure. Cet appareil ainsi disposé fut porté et tenu en présence du soleil pendant six jours, afin de faire sécher convenablement le charbon. On tira ensuite à travers le charbon un grand nombre d’étin- celles électriques. Il parut d’abord résister à toute ten- tative de l’enflammer ; mais ayant chauffé la portion du tube sur lequel il reposoit, il se consuma à la longue jusqu’à un résidu d’à peu près 0,80 : le reste s’opposa à toute combustion ultérieure , malgré le plus fort échauf- fement du tube. Sans doute que la combustion s’arrêta à cause que le gaz oxygène étoit consumé. Après que l'appareil fut refroidi , on le fit soigneusement laver avec de l’eau distillée, ainsi que le restant du charbon et le gaz, et on réunit les eaux de lavage. Le gaz, dégagé et lavé , fut encore éprouvé par de l’eau de chaux : il pré- cipita de cette eau quelques flocons de carbonate. On essaya ensuite d’enflammer ce gaz : mais on n’y parvint que par l’addition de quelques bulles de gaz oxygène; encore ne brüla-t-il que légèrement. Le résidu , après cette combustion , étoit du gaz oxygène et azote : on le laissa échäâpper. On satura ensuite de carbonate de baryte l’eau de lavage, et d’un autre côté une quantité d’acide muriatique correspondante à celle employée en expérience, qu'on avoit étendue de la même quantité d’eau : il se trouva que la portion d’acide sur laqueile on avoit opéré , satura à peu près 0,12 moins de cette terre que la portion comparative. Deuxième expérience. On a répété l’expérience pré- cédente ; mais au lieu de charbon on a pris du phosphore 46 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pour corps combustible. Le même dégagement d’hydro- gène a eu lieu. On a lavé, comme la première fois , la gaz dégagé et l’appareil, et on a précipité l’eau acide avec de l’acétite de plomb, dans la vue d’en- chaîner l’acide phosphorique qui s’étoit formé ; après on a séparé le phosphate de plomb, et on a précipité lacide matière , le muriatique, au moyen de l’acétite d'argent. Le précipité étoit dans un rapport assez exact de poids avec la préci- pitation de comparaison. 1 Troisième expérience. On a arrosé d’acide muriatique un morceau de bois de tilleul ; on a porté ce bois sous une cloche remplie de gaz oxygène, et on l’a fait brûler. Le gaz qui s’en est dégagé a été lavé d’abord avec de l’eau distillée, et ensuite avec de l’eau de chaux : il s’est trouvé, en grande partie, composé de gaz acide carbonique et hydrogène. Ayant réuni les eaux du premier lavage, on les a précipitées par du nitrate d’argent. La différence de ce précipité avec un précipité comparatif étoit à peine sensible. Quatrième expérience. Ayant constamment remarqué, pendant mes expériences sur la décomposition de l’am- moniaque par les oxides de mercure , qu’il ne se déga- geoit que peu ou presque point de gaz hydrogène, et ayant obtenu de ces oxides un résidu qui m’étoit point dissoluble dans Pacide nitrique , je soupçonnois que de l'hydrogène de l’ammoniaque avec l'oxygène de l’oxide, il pouvoit s’être formé de l’acide muriatique; ce qui me rendit probable que ce résidu étoit du muriate de mer- cure. Pour m'en assurer, j’ai versé sur deux gros d’oxide 18 k n HUE UD MT PIE Y S wQ UE. 47 de mercure par le feu, fait suivant mon procédé,un gros d’ammoniaque caustique liquide très-saturée. Après six jours j'ai lessivé le mêlange avec de Peau distillée, et jy ai versé quelques gouttes d’une solution de nitrate d'argent, avec excès d’acide : il ne s’est formé aucun précipité. On a fait dissoudre l’oxide restant dans l’acide nitrique , et on a obtenu un résidu qui ne s’est point su- blimé dans une fiole, mais qui s’est décomposé par le feu en mercure métallique, en produisant une légère dé- tonnation. Je suppose que ce fût une combinaison très- intime d’oxide de mercure , d’ammoniaque et d’acide ni- trique , ou du nitrate d’ammoniaque et de mercure. Cinquième expérience. On a fait passer de lammo- niaque gazeuse sur de l’oxide de mercure, dans un tube de verre échauffé jusqu’à réduction de l’oxide. Le gaz qui se dégageoit étoit reçu dans de l’eau : on a éprouvé cette eau avec de l’acétite d’argent, qui n’y a démontré aucune trace d’acide muriatique. Sixième expérience. On a chassé pendant plus de huit - heures de l’eau en vapeur sur de l’oxide de mercure à un degré d’échauffement très-voisin de sa réduction. Pour ceteffet on a introduit dans un tube de verre très- long de l’oxide de mercure imprégné d’eau ; aux deux extrémités du tube étoient attachées des vessies vuides d’air : à mesure que l’eau mise en expansion remplissoit les vessies, on les comprimoit alternativement , pour faire passer continuellement la vapeur aqueuse sur l’oxide. Après cette opération, l’eau se trouvoit aussi pure qu'auparavant, 48 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Septième expérience. Les résultats des expériences précédentes me firent soupçonner que j’avois commis quelque erreur dans la première ; je craignis sur-tout que la combustion du charbon ayant.donné naissance à de la potasse, celle - ci avoit pu se combiner avec une portion de l’acide muriatique, et Pempêcher ainsi dagir sur le carbonate de baryte. Cette réflexion s’est trouvée vérifiée par le fait : on a répété l’expérience première; mais, au lieu d’éprouver la quantité de l’acide muria- tique par du muriate de baryte, on a employé à cet effet du nitrate d’argent. Les deux précipités se sont trouvés à peu près égaux en poids. Je dois avouer que ces expériences sont très-délicates , et qu’elles ont besoin d’être faites en grand pour donner des résultats et des différences sensibles et concluans. Celles-ci ont eu ces conditions en leur faveur : elles con- firment que Girtanner a eu tort de conclure des siennes, ou plutôt de faits déja connus, que « l’hydrogène for- moit le radical de Pacide muriatique. » Bruxelles, le 8 vendémiaire an 5, RE HO MT PIE M 4 12Q UE 49 OBSERVATIONS Sur la structure des crystaux appelés zéolithes , et sur les propriétés électriques de quelques-uns ; m . Par ‘°H Wu y: Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut , le 21 germinal an 4. I: y a peu de dénominations en minéralogie qui aient un sens plus vague que celle de zéolithe, et que l’on ait appliquées à un plus grand nombre de substances mal assorties et comme étrangères les unes à l'égard des autres. On ne sera point étonné de ce rapprochement vicieux, si l’on considère qu’il étoit fondé, tantôt sur des propriétés qui pouvoient être communes à plusieurs substances, comme celles de se résoudre en gelée dans les acides, ou de se fondre en bouillonnant par lPaction du feu ; tantôt sur des: caractères extérieurs propres à faire naître un faux air de ressemblance , comme la disposition des prismes en faisceaux de rayons diver- gens, qui n’est autre chose que l'effet d’une crystalli- sation confuse dont tous les minéraux sont susceptibles: c’étoit vouloir que le caractère devint saillant et décisif par le côté où il se dégrade et cesse d’être prononcé. La division méchanique des différens crystaux qui ont été réunis jusqu’ici sous le nom de zéolirhe, et le calcul 1 7 50 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES des lois auxquelles leur structure est soumise ,-m’ont fait reconnoître que ces crystaux formoient plusieurs espèces sensiblement distinguées les unes des autres. J'en ai déja trouvé quatre dont la séparation me paroît indiquée sans équivoque. La première est celle dont nous devons la connois- sance à Cronstedt :,elle crystallise ordinairement en longs prismes terminés par des sommets dont la forme, si elle étoit complète , paroïtroit devoir être celle d’une pyramide surbaissée à quatre faces ; mais le plus sou- vent le sommet n’a qu’une ou deux faces. Ces crystaux se divisent nettement dans des directions parallèles aux pans du prisme, qui font entre eux des angles droits. La division dans le sens des bases est seulement indi- quée par une multitude de fissures transversales qui existent quelquefois naturellement dans les prismes. La difficulté d’obtenir des coupes nettes suivant cette même direction peut faire présumer que les bases du prisme qui représente la molécule, ont une étendue différente de celle des pans. La petitesse des crystaux ne m’a per- mis de mesurer que d’une manière approchée lincli- naison des faces de la pyramide sur les pans adjacens; elle m’a paru être d’environ 114 d. Si on la suppose de 114 6 , et que l’on admette la loi la plus simple de décroissement, celle qui se fait par une seule ran- gée, la molécule sera un prisme droit à bases carrées, dont la hauteur est à la moitié du côté dans le rapport de Punité à ÿ5. La seconde espèce, dont la surface a un certain lui- EL : D) ES D H) W Si 1/Q UE É à sant qui tire sur celui de la nacre , crystallise tantôt en dodécahèdres à quatre pans hexagones , avec des som- mets à quatre parallélogrammes obliquangles ; tantôt en prismes droits hexahèdres, qui sont simplement sym- métriques, et dont les quatre angles solides les plus obtus sont remplacés chacun par une facette triangu- laire. Quoique l’on soit encore conduit à admettre ici pour forme primitive un prisme droit quadrangulaire dont les pans sont perpendiculaires entre eux, les di- mensions de ce prisme, telles que les donne l’applica- tion de la théorie, ne s’accordent point avec celles qui ont lieu dans l’espèce précédente. La base est un rec- tangle, et le rapport entre l’un ou l’autre des côtés de cette base et la hauteur du prisme est tout différent. Aussi les divisions ne sont-elles très-nettes et faciles à obtenir que dans un sens parallèle à deux pans opposés du prisme; au lieu que les crystaux de la première espèce se divisent dans les deux sens avec la même netteté et avec la même facilité. Je n’entrerai point dans de plus grands détails sur la structure des crys- taux dont il s’agit, qui exigeroit seule un mémoire particulier. Les crystaux de la troisième espèce sont très-souvent des cubes dent les huit angles solides se trouvent rem- placés chacun par trois facettes triangulaires. Les re- flets que l’on apperçoit dans les fractures, en les faisant mouvoir à la lumière, indiquent que le noyau est lui- même un cube. La forme dont je viens de parler est un passage à une autre forme que présente la même 52 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES substance, et qui ne diffère en rien à Pextérieur de celle du grenat à vingt-quatre trapézoïdes tous égaux et semblables. On trouve au mont Caltoun-Hill, près d'Édimboursg, de ces crystaux qui sont opaques et d’une couleur de chair, dont le plus grand axe a environ quatre centimètres , ou dix-huit lignes, de longueur : ily en a dans certaines laves qui sont brillans et demi- transparens, et d’autres d’un blanc mat. Dans le cas présent, le cube subit un décroissement par deux rangées sur tous ses angles, d’où résulte cette même forme secondaire qui, dans le grenat, est produite en vertu d’un décroissement par une rangée de petits rhomboïdes composés chacun de six tétrahèdres, sur tous les bords du dodécahèdre primitif, ainsi que je l’ai exposé ailleurs (1). Ce dodécahèdre, à son tour, devient forme secondaire dans une variété de minéral qui paroît appartenir à la pierre improprement nommée Ayacinthe brune des volcans , et où il est produit par des soustractions d’une simple rangée sur tous les bords du cube. J’ai retrouvé de nouveau ce même dodéca- hèdre , comme forme secondaire , dans espèce du fluate calcaire (vulgairement spath fluor), où il provient d’un décroissement qui a lieu aussi par une rangée sur tous les bords de loctahèdre primitif. Je donne ici ces ob- servations en passant, pour faire voir avec quelle faci- lité les lois de la crystallisation se prêtent à des modi- QG) Essai d’une théorie sur la structure des crystaux, p. 172. ( Journal de physique, août 1793.) CA LOU EN CE EH % S AY w'Eù 53 » fications que l’aspect de la forme extérieure semble lier étroitement entre elles, maïs qui offrent des points nèts de séparation lorsqu'on pénètre dans le méchanisme intime de la structure, caché, sous ces dehors trom- peurs. La dernière espèce est la substance que l’on a nom- mée zéolithe cubique, parce que l’on a pris pour cube un rhomboïde un peu obtus, dans lequel le rapport des deux diagonales du rhombe est celui de V9 à 8; ce qui donne pour l’angle plan au sommet 934 36’ : elle a pour forme primitive ce même rhomboïde que l’on en retire par des divisions très-nettes. Les crystaux qui ont été présentés il y a quelques années à la société d’histoire naturelle, sous le nom de ckabasie, n’en sont que des variétés. Dans ces crystaux, la forme primitive est modifiée par six facettes qui remplacent les arêtes contiguëés au sommet, et qui résultent d’un décroisse- ment par une rangée sur les mêmes arêtes. Si ces fa- cettes se prolongeoïent jusqu’à s’entre - couper, elles produiroient un nouveau rhomboïde plus obtus, analogue à celui du carbonate calcaire. Souvent les six angles solides latéraux sont aussi remplacés par six facettes, en vertu d’un décroissement par une rangée de part et d'autre des mêmes angles ; et ces facettes, prolongées pareillement jusqu’à s’entre-couper, produiroient un rhomboïde aigu qui, à son tour, seroit en rapport avec celui du carbonate calcaire ; en sorte que l’on a dans le même crystal la réunion de trois rhomboïdes, dont l’un est la forme primitive, et les deux autres les formes 54 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES secondaires les plus simples qui puissent naître des lois de décroissement. Tandis que je soumettois les minéraux qui viennent d’être décrits à diverses épreuves, dans la vue de faire ressortir davantage les différences qui devoient empê- cher de les confondre , j’ai reconnu que la première zéolithe, ou celle de Cronstedt, possédoit exclusivement une propriété physique remarquable, soit en elle-même, soit par la rareté des substances qui en sont pourvues. Cette propriété consiste à acquérir la vertu électrique au moyen de la simple chaleur, sans le secours du frottement. Les crystaux conservent encore quelque temps cette vertu après qu’ils sont refroidis : jen ai vérifié Pexistence sur des échantillons venus de diffé- rens pays. Comme tous les crystaux que j’avois entre les mains étoient engagés dans la masse commune par leur extré- mité inférieure, je nai pu vérifier sur eux une obser- vation que j’avois faite sur des crystaux d’espèces dif- férentes qui jouissent de la même propriété , et que l’on trouve quelquefois complets. Ceux-ci dérogent à la sym- métrie des crystaux ordinaires par la diversité de forme des parties dans lesquelles résident les deux électricités, c’est-à-dire que l’une de ces parties a des facettes ad- ditionnelles qui manquent sur l’autre, en sorte que l’on peut indiquer d'avance la partie qui donnera des signes d'électricité vitrée, ou de celle que Franklin appeloit positive, et la partie qui manifestera l'électricité rési- neuse, ou la négative. ET DE PHYSIQUE. 55 Au défaut de crystaux complets, j’ar desiré du moins de m’assurer si les deux électricités existoient dans la zéolithe dont ïl s’agit; et ayant détaché un crystal d'environ douze millimètres et demi , ou cinq lignes et demie, de longueur, puis ayant fait chauffer convena- blement, je l’ai présenté à un fil de soie qui avoit l’élec- tricité résineuse : ce fil étoit attiré par le sommet py- ramidal du crystal, et repoussé par la partie fracturée ; d’où il suit que le sommet avoit l’électricité résineuse. On savoit, il y a long-temps, que la tourmaline et la topaze jouissoient d’une semblable propriété : je l’a- vois trouvée depuis dans l’oxide de zinc, connu sous le nom de calamine, et dans le borate calcaire, où, parmi les huit angles du cube qui est la forme primi- tive, quatre sont sollicités par une espèce d’électricité, et les quatre autres par l’espèce contraire. La zéolithe offre une cinquième substance à placer sur cette liste peu nombreuse, et que j’ai essayé inutilement de grossir par des expériences faites sur tous les minéraux que j’ai pu avoir jusqu’ici en ma disposition. ..* te 56. MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES PROCEDE POUR DISSOUDRE LA GOMME ÉLASTIQUE DANS L'ÉTHER SULFURIQUE, Par Prier L'Etriee &. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 26 germinal an 4. LA dissolution de la gomme élastique dans l’éthér sulfurique avoit été annoncée par Macquer ; mais, comme on ne réussissoit pas constamment à la dissou- dre, le citoyen Berniard et d’autres chymistes ont jeté des doutes sur l’énoncé de Macquer. Les moyens pro- posés en dernier lieu pour obtenir cette dissolution con- sistent à employer de l’éther lavé à l’eau. Étant par- venu, par un moyen plus simple, à dissoudre la gomme élastique dans l’éther sulfurique, j’ai cru que ce procédé méritoit d’être connu. Procédé. Je commence par faire bouillir pendant une heure la gomme élastique dans de l’eau ordinaire. Par cette chullition elle acquiert assez de souplesse pour pouvoir être coupée en brins très-ténus. Je remets de nouveau la gomme élastique ainsi divisée dans de l’eau bouillante, et je tiens le vase sur le feu pendant encore environ une heure. Cette seconde ébullition pénètre m'a (DU PH Y & 1, Q UE. 57 sensiblement la gomme élastique, de manière à lui ôter la dureté qu’elle a dans l’état où on la trouve dans le commerce. La gomme élastique étant ainsi divisée et ramollie, je la retire de l’eau, et je l’introduis aussitôt dans un matras, ou tout autre vase bouché, contenant de l’éther sulfurique rectifé : quelques heures suffisent pour que léther pénètre la gomme élastique, laquelle se gonfle considérablement ; et au bout de quelques jours la dissolution s’en fait en totalité et à froid, si l’on a employé assez d’éther. J’ai essayé par ce procédé divers échantillons de gomme élastique, et j’ai constamment obtenu des dis- solutions très-saturées qui étoient blanches et transpa- rentes ; j’ai même remarqué que les parties hétérogènes et fuligineuses dont la gomme élastique est ordinaire- ment souillée, se précipitoient au fond des vases sous une forme noire, de manière qu’en décantant la disso- lution, on l’obtenoit très-limpide. Je présente à la classe deux flacons : l’un d’eux con- tient une dissolution complète de gomme élastique ; dans Vautre la gomme élastique est simplement renflée et pénétrée par l’éther. Une quantité d’éther plus consi- dérable en déterminera la solution totale. De pareilles dissolutions peuvent être très-utiles pour défendre du contact de l’air, soit des insectes, ou des minéraux qui s’effleurissent avec facilité : j’invite les naturalistes à en faire. l’essai. 58 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES OBSERVATIONS SUR LA STRONTIANE, Par PELLETIER. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut , le 11 floréal an 4. JL, strontiane est aujourd’hui regardée par plusieurs chymistes étrangers comme une terre particulière. Sa découverte me paroît due à M. Hope, professeur de chymie à Glascow ; c’est lui qui le premier en a décrit les caractères et propriétés chymiques dans une disser- tation qu’il publia le 4 novembre 1795, et qui depuis a été imprimée dans les Transactions de la société royale d'Édimbourg. | Klaproth a aussi examiné la strontiane ; maïs il paroît que c’est postérieurement à M. Hope. Klaproth, à la vérité, n’en parle point dans son ou- vrage : sans doute que les travaux de M. Hope ne lui étoient point connus. è La strontiane se trouve encore indiquée dans l’ou- vrage minéralogique de M. Schmeisser, comme diffé- rente des autres terres connues. * C’est à l’état de carbonate terreux qu’elle se trouve à Strontian , dans PArgyleshire, ou comté d’Argyle, dans ET DE PHYSIQUE. 59 la partie occidentale du nord de l'Écosse , accompagnant un filon de mine de plomb. Klaproth, Blumenbach, et ulzer de Ronebourg, l’ont appelée strontianite ; Hope la nomme stronite. Je pense que le nom de strontiane, pris du lieu où elle a été rencontrée, pourroit lui être assigné, d’autant que ce nom ne signifie rien par lui-même, et ne peut par con- séquent la faire confondre avec d’autres substances. Le carbonate de. strontiane a été regardé pendant long-temps comme une variété de carbonate de baryte natif; je lai moi-même regardé comme tel en 1791, d’après quelques essais auxquels j’en avois soumis un petit échantillon que M. Greville de Londres eut la bonté de me procurer. L’ayant essayé comparativement avec le carbonate de baryte d’Anglezark , que l’on nom- moit alors witherite, je ne crus pas appercevoir de différence bien remarquable entre ces deux substances. L’une et l’autre, essayées au chalumeau, fournirent des globules vitreux, blancs et opaques, qui, exposés quelque temps à Pair, se réduisirent en poussière. Traités à la distillation , le carbonate de strontiane, comme celui d’Anglezark, ne donnèrent point de gaz acide carbo- nique, tandis qu’ils furent dissous par les acides nitrique et muriatique, avec effervescence et dégagement de gaz acide carbonique, et les sels qui résultèrent de ces com- binaisons n’étoient nullement déliquescens. Je les pris donc pour des nitrate et muriate de baryte, d’autant mieux que leurs dissolutions étoient décompostes par les sulfates de potasse , de chaux, et autres, comme cela a lieu avec les nitrate et muriate de baryte. 60 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Il y a quelques mois que nous connoissons en France les travaux de Klaproth sur le carbonate de strontiane ; mais ceux de M. Hope, quoiqu’antérieurs, nous étoient inconnus, et ce n’est que de ces jours derniers que j’en ai eu connoissance par M. Schmeisser. Dans une lettre que M. Hermestadt m’écrivit il y a six mois, ce chymiste m’annonçoit que Klaproth ve- noit de confirmer les propriétés de la strontiane , comme terre nouvelle dont la découverte avoit été faite depuis plusieurs années par M. Sulzer, et avoit été publiée par M. Blumenbach dans son 7raité d'histoire natu- relle. Les caractères distinctifs que Klaproth avoit reconnus au carbonate de strontiane, étoient : 1°. D’être spécifiquement plus léger que le carbonate natif de baryte (witherite ) ; | 2°. De produire, avec les acides nitrique, muria- tique, etc., des sels plus solubles que ne sont ceux de la baryte avec les mêmes acides ; 3°. De donner, avec l’acide muriatique, un sel qui, dissous dans l’alcool, lui donne la propriété de brûler d’une flamme rouge ; 4. Enfin, de pouvoir être privé de gaz acide carbo- nique par la calcination, et d’être ensuite soluble dans l’eau, mais en plus grande quantité dans l’eau bouil- lante ; de sorte que, par le refroidissement , une partie s’en sépare sous forme crystalline. L’échantillon de carbonate de strontiane que j’avois dans ma collection, n’étoit pas assez considérable pour Em L D EN PH Y-ST QU: Eo :; ! 6, fournir à un grand nombre d’expériences; il l’étoit ce- pendant assez pour répéter, une partie de celles énon- cées par MM. Hope et Klaproth : mais ce qui m’a sur-tout décidé à le consacrer, c’est que le citoyen Co- quebert a imprimé, dans le n° 5 du Journal des Mines , que , d’après quelques essais que nous avions faits sur le carbonate de strontiane, je doutois qu’il con- tintune terre nouvelle. Voici sur quoi mes doutes étoient fondés : 3 1°. Sur ce que, il y a plusieurs années, j’étois par- venu à dégager par la calcination le, gaz acide car- bonique du carbonate de baryte, et qu'ayant ensuite fait dissoudre la baryte calcinée dans l’eau chaude, j'en avois obtenu ‘üne crystallisation : je ne pouvois donc regarder ce caractère comme appartenant seulemént à la strontiane. ° 2°. Je savois aussi que le muriate calcaire, dissous dans l’alcool, lui donnoit la propriété de brüler avec une flamme rouge. Ces considérations me portoient donc à soupçonner dans le carbonate de strontiane un mé- lange de carbonate calcaire. L’échantillon d’ailleurs que j'en avois se trouvoit accompagné de cette dernière substance. J’aurai soin d’indiquer les expériences que j'ai faites pour tâcher de l’y reconnoître ; et comme “elles l’ont été comparativement avec le carbonate de ba- ryte natif, j’ai cru devoir les présenter ensemble, afin que l’on juge en quoi le carbonate de strontiane’se rap- proche du carbonate de baryte d’Anglezark (witherite) et en quoi il en diffère particulièrement. 62 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Comparaison de la strontiane et de la baryte. 1°. Le carbonate de baryte se rencontre dans une mine de plomb, avec le sulfate de baryte, à Anglezark, dans le Lancashire. Le carbonate de strontiane se rencontre à Strontian, dans VArgyleshire, accompagnant également une mine: de plomb avec un sulfate de baryte. 2°, Le carbonate de baryte d’Anglezark, pris inté- rieurement, est mortel ; aussi dans le pays est-il connw sous lé noni de pierre contre Les rats. Un petit chien à qui j'en ai fait avaler quinze grains, a éu des vomis- semens, etest mort huit heures après. Ayant encore fait pretidre à un chien à peu près de la même force quinze grains de carbonate de baryte obtenu de la décompo-! sition d’un sulfate de ‘baryte, le chien a eu également des vomissemens, et est mort quinze heures après. Ce dernier a été ouvert par le citoyen Chaussié. Un autre chien à qui j'ai donné une égale quantité de carbonate de baryte venant de la ci-devant Auvergne, a éprouvé des vomissemens : il n’en est cependant-pas mort, quoi- qu’il en aït pris trois jours de suite ; mais il a vomi à chaque fois. Je me propose de suivre ces expériences avec des carbonates de baryte que je me procurerai de divers sulfates de baryte, sur - tout de ceux qui n’ac- compagnent point les mines métalliques. Le carbonate de strontiane, au contraire, peut ètre pris intérieure- ment sans danger : j’en ai donné à un petit chien vingt ET / D EU PH 81 °@ 0 we 63 grains; il n’a éprouvé aucun vomissement, et vingt heures après je ne me suis point apperçu qu’il en eût éprouvé le moindre effet. Je me propose de faire quel- ques expériences à des doses plus fortes. Blumenbach s’est aussi assuré que le carbonate de strontiane , pris intérieurement, ne dérange point l’éco- nomie animale. Ces observations indiquent donc une différence entre la strontiane et la baryte. 3°. La couleur du-carbonate de baryte d’Anglezark est d’un gris blanc; on le rencontre quelquefois crys- tallisé, mais communément en masse striée. Sa pesan- teur spécifique est de 42,919 à 43,310. La couleur du carbonate de strontiane est d’un verd clair ; il s’en trouve aussi de transparent et sans cou- leur. Il eststrié, et quelquefois de forme crystalline régulière. Sa pesanteur spécifique est de 36,583 à 36,750. Ce carbonate est conséquemment plus léger que le carbonate de baryte. 4. Le carbonate de baryte natif, exposé à un feu qui ne soit pas trop violent, ne perd Presque rien de son poids ; exposé à un feu plus fort, ll attaque le creuset et entre en fusion. ft ii moftezi Le carbonate de strontiane retient aussi assez forte- ment le gaz acide Carbonique : mais avec des précau- tions , et en continuant le feu , on peut en séparer jus- qu'à cinq ou six parties de gaz acide carbonique sur cent de carbonate strontiane, sans que le creuset soit attaqué. Il faut cependant avoir l’attention de ne pas donner un feu trop fort ; car alors cette terre attaqueroit 6 MÉMOIRESIDE MATHÉMATIQUES le creuset, et fourniroit un verre couleur de chryso- lithe. Le gaz acide carbonique tient donc moins forte- ment à la strontiane qu’il ne tient à la baryte. Hope et Klaproth avoient observé que la strontiane calcinée étoit soluble dans l’eau, et que, lorsque celle-ci étoit bouillante, elle pouvoit en dissoudre suffisamment pour donner des crystaux par refroidissement : de manière que ces deux chymistes ont regardé cette propriété dans la strontiane comme un caractère distinctif. Klaproth sur-tout n’est jamais parvenu à calciner suffisamment le carbonate de baryte natif pour essayer ensuite sa solu- bilité. Quand il le chauffoit peu , il n’étoit point privé de gaz acide carbonique ; lorsqu'il le chauffoit plus fort , il entroit en vitrification : au lieutque M. Hope a annoncé, dans un supplément à son mémoire , qu'il étoit parvenu à calciner du carbonate de baryte natif dans un creuset de plombagine, et qu’il avoit reconnu que cette terre ainsi calcinée étoit soluble dans Veau bouillante ,;,et que, comme la strontiane, elle étoit susceptible de crystallisation. M. Hope n’a plus dès- lors regardé la propriété de la solubilité et de la crys- tallisation comme un caractère particulier à la stron- tiane. J'ai aussi réussi à séparer avec facilité le gaz acide carbonique des carbonates de baryte natif ou ar- tificiel, ainsi que du carbonate de strontiane, sans em- ployer des creusets de plombagine. Je vais indiquer le moyen qui m'a constamment réussi, et décrire les ex- périences comparatives que jai faites à ce sujet. Premièrement, à cent grains de carbonate de baryte HP, DE .P H ES IQ U E 65 natif réduit en poudre j’ai ajouté dix grains de charbon en poudre , le tout bien mêlangé ; j’en ai fait, avec un peu de colle d’amidon, une pâte solide dont j’ai formé une boule : alors j’ai mis dans un creuset un peu de charbon en poudre nouvellement calciné; et après avoir placé sur le charbon la boule, j’ai recouvert le tout de poudre de charbon. J’ai adapté aussi au creuset un couvercle, et je l’ai luté avec un peu de terre glaise. Le creuset ainsi disposé, je l’ai exposé à un feu très- fort pendant une bonne heure : ce temps suffit pour dégager le gaz acide carbonique. Le creuset étant re- froidi, je l’ai ouvert, et j'y ai trouvé la petite boule parfaitement conservée ; mais elle ne pesoit plus que soixante-dix grains. Je l’ai alors triturée dans un mor- tier de verre, avec environ six onces d’eau bouillante : j'ai filtré la liqueur;-et, pour la disposer encore mieux à la crystallisation, je l’ai mise dans une cornue de verre, afin d’en séparer par la distillation une portion de l’eau employée à la dissolution de la terre. Par le refroidissement il s’est formé dans la cornue des crys- taux de plusieurs lignes de longueur. Deuxièmement, cent grains de carbonate de baryte; préparés par les procédés ordinaires avec le sulfate de baryte, ont été traités avec dix grains de poudre de charbon, comme il a été dit ci-dessus : le creuset n’a été également chauffé que pendant une heure. Ayant ensuite traité le résidu avec de l’eau bouillante, et rap- proché la liqueur dans une cornue, j’en ai obtenu, par D 9 66 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES refroidissement , des crystaux pareïls à ceux dont je viens de parler. Troisièmement, cent grains de carbonate de stron- tiane ont été traités de la même manière ; ce qui restoit après la calcination ne pesoit que soixante-douze grains : sa dissolution dans l’eau chaude m’a paru plus saturée que celle de la baryte; et, sans avoir recours à la con- centration , j'en ai obtenu , par refroidissement, des crystaux, quoique j’eusse employé environ la même quantité d’eau que dans les expériences précédentes. Cependant je ne crois point que la strontiane soit plus soluble que la baryte ; car, dans plusieurs autres expé- riences , J'ai eu des dissolutions de baryte tellement saturées, que par le refroidissement elles crystallisoient en masse et confusément. Ainsi il est très-constant que Vaction du feu sépare de la baryte et de la strontiane le gaz acide carbonique, et qu’ensuite ces terres de- viennent solubles dans l’eau, mais en plus grande quan- tité dans l’eau bouillante, de manière à pouvoir donner des crystaux par refroidissement. Ce caractère n’appar- tient donc pas exclusivement à la strontiane , comme Klaproth l’a annoncé. J’ai aussi remarqué que la dis- solution dans l’eau , soit de la baryte, soit de la stron- tiane, pures ou calcinées, avoit une odeur analogue à celle de la soude ou potasse caustique : telle est celle désignée sous ke nom vulgaire d’odeur de lessive. ET DE PHYSIQUE. 67 Carbonates de baryte et de strontiane avec l'acide nitrique. *! Le carbonate de baryte natif à été dissous en totalité par l'acide nitrique affoibli. La dissolution a été ac- compagnée de dégagement de gaz acide carbonique dans les proportions de vingt-deux centièmes : la liqueur évaporée a fourni des crystaux dont la figure la plus ordinaire ést l’octahèdre. Cent grains de carbonate de strontiane ont été éga- lement dissous par l’acide nitrique : mais le dégagement de gaz acide carbonique a été plus considérable que _ dans expérience précédente ; les proportions en sont de trente centièmes. Le sel qui résulte de cette combinai- son crystallise également en octahèdre. Avec l'acide muriatique. J’ai dissous cent grains de carbonate de baryte natif avec l’acide muriatique , et j'ai obtenu vingt - deux grains de gaz acide carbonique La dissolution , ayant été évaporée, donne des crystaux qui sont de“courts prismes applatis, ou des lames hexagones, dont le poids étoit de cent trente-huit grains. J’ai aussi fait dissoudre dans l'acide muriatique cent grains de carbonate de barÿte obtenu par la décomposition du sulfate de ba- _ ryte : le dégagement de gaz acide carbonique a été aussi de vingt-deux grains; et le muriate a crystallisé comme 68 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES le précédent, de manière à n’y trouver à l’aspect au- cune différence. Il n’en est pas de même du carbonate de strontiane : celui-ci a été totalement dissous par l’acide muriatique ; mais le dégagement de gaz acide carbonique a été de trente centièmes , et Le sel que j’ai obtenu de cette com- binaison étoit de longues aiguilles ou prismes rhomboï- daux très-déliés, terminés par une pyramide à deux faces : les prismes sont quelquefois hexahèdres. Ce sel m'a paru aussi plus soluble que le muriate de baryte. J’ai obtenu cent soixante-seize grains de muriate, de cent grains de carbonate. Le docteur Croword a été un des premiers à observer la grande différence qu’il y avoit dans la forme des crystaux de muriate de baryte, et de ceux de muriate de strontiane , ainsi que leur différent degré de solubilité dans l’eau, et de là il soupçonna que ces deux sub- stances pouvoient ne pas être de la même nature. Avec l'acide sulfurique. Le carbonate de baryte natif, réduit en poudre, est décomposé par Pacide sulfurique : il y a dégagement de gaz acide carbonique. Le résultat de cette combi- naison est du sulfate de baryte insoluble dans l’eau. Le carbonate de strontiane est aussi décomposé par l'acide sulfurique, avec dégagement d’acide carbo- nique, et le sulfate que l’on obtient est de même peu soluble dans l’eau. M. Hope a observé que quatre onces U MENU L D (EU PAHMYASIT QU Es mi 69 d’eau distillée n’en dissolvoient que demi-grain, et que, si à cette dissolution de sulfate de strontiane l’on. ajoutoit du muriate de baryte, il se formoit un préci- pité de sulfate de baryte. Le sulfate dé strontiane est donc plus soluble que le sulfate de baryte. Avec l'acide. acéteuzx. L’acide acéteux dégage du carbonate de baryte le gaz acide carbonique. Le même acide décompose aussi le carbonate de strontiane. Les sels qui résultent de cette combinaison, savoir, les acétites de baryte et de strontiane, s’obtien- nent sous forme gribtaline, et ne sont pas déliques- cens. Dans le nombre des Pt que MM. Hope, Kla- proth et autres , ont employés pour distinguer la stron- tiane de la baryte, il en est un sur-tout qu’ils s’accor- dent à regarder comme démonstratif. Les chymistes ont observé que Palcool: dans lequel on,a fait dissoudre soit du nitrate ou du muriate de baryte, brûloit: avec une flamme d’un jaune blanc; tandis que l’alcool , te- nant en dissolution du nitrate ou muriate de pi tanes brûloit avec une flamme d’un rouge de carmin. M. Hope rapporte dans son mémoire. que c’est M. Ash qui, dès 1787, avoit observé la couleur particulière que le mu- riate de strontiane donne à la flamme de l’alcool. Les expériences, répétées sous les HenE des élèves de l’école polytechnique, ont offert les: mêmes résultats. Mais. 70 MÉMOIRES (DE MATHÉMATIQUES cominé le nitrate et le muriate de chaux communiquent aussi à l’alcool la propriété de brûler avec une flamme rouge, j’ai cru devoir nvassurer si le nitrate et le mu- riäté de strontiane ne contiendroient paside chaux. A cet effet J’ai tenté les moyens suivans : 1°. À une dissolution de nitrate de baryte j’ai ajouté de l'acide fluorique très-pur et exempt d’acide sulfu- rique : le mêlange a eu lieu sans précipitation. 20.1: À uné ‘dissolution de nitrate dé strontiane j'ai aussi ajouté du même acide ART : le na À a eu lieu sans précipitation. 30. À des dissolutions de nitrate de baryte et: vdi strontiane, mises dans des vases Iséparés, j'ai ajouté detix ou trois gouttes de nitrate de chaux , et ‘ensuite j'y ai versé de Pacide fluorique. Cet acide a aussitôt produit un précipité blanc qui étoit du fluate de chaux. I résulte donc de ces expériences comparatives, que le nitrate de strontiane ne! contenoit point de chaux ; car pour peu qu'il y en éût eu, l’acide fluorique y au- roit: déterminé un précipité. Cet acide a une telle affinité avec la chaux, qu’il l’énlève à l’äcide sulfurique lorsque lé sulfate de chaux est tenu en’ dissolution dans Veau. Aussi, quand on ajotite à une eau sélénitense quelques gouttes d'acide fluoriqué, il se fait un précipité aussi promptement que lorsqu'on emploie ‘Pacide oxalique* L’acide fluorique offre donc un excellent moyen de re- connoître la présence de la chaux. Le fluate d’ammo- niaque bien pur peut aussi être employé pour recon: noître Ja chaux ; car ‘si on le mélange aux nitrate, ARR M EN TER NE SN ON PMU M muriate ou sulfate de chaux, il y a aussitôt décompo- sition par affinités doubles, et le précipité qui a Heu est du fluate de chaux. L’on a dû voir que les caractères de la strontiaäne qui sembloient la rapprocher le plus de la baryte, offroient néanmoins des différences marquées lorsqu'on en faisoit une comparaison rigoureuse. L’eéxpérience suivante, due aux observations de M. Hope, offre un caractère dis- tinct plus Saillant entre ces deux terres. On savoit que le nitrate de baryte étoit totalement précipité par lés prussiates de potasse ou de chaux : M. Hope, ayant ajouté du prussiate de potasse à une dissolution de ni- trate de strontiane ;, n’a eu qu’un léger précipité, en raison du fer qui accompagne le carbonate de strontiane. J’ai voulu m'en assurer par moi-même ; j’ai donc pré- paré trois dissolutions; savoir, 10. Une dissolution de carbonate de baryte natif dans l’acide nitrique ;: 2. Une dissolution de carbonate de baryte ; obtenu par la décomposition du sulfate de baryte, dans le même acide ; | 3°. Une dissolution de carbonate de strontiane dans Vacide nitrique. : Ces trois dissolutions mises dans des vases séparés, j’y ai ajouté une assez grande quantité de prussiate de potasse, pour BÉEUAlbOSer complètement ces nitrates. Il y a eu en effet un précipité abondant dans les ni- trates de baryte; et les liqueurs surnageantes , ayant été ensuite éprouvées avec. le carbonate de’ potasse , n’ont 72 MÉMOIRES, DE MATHÉMATIQUES donné aucun signe de précipitation. Le nitrate de stron- tiane, au contraire, n’a donné qu’un foible précipité bleu, en raison du fer qu’il contenoit; et un excès de prussiate de: potasse n’en a pu rien précipiter. La li- quéur surnageante ,; essayée. avec le carbonate de po- tasse, a donné un précipité blanc très - abondant, qui étoit du carbonate de strontiane. Ainsi il paroît constant que le prussiate de potasse ne décompose point le nitrate de strontiane , tandis qu’il décompose totalement le nitrate de baryte. Ce moyen indique donc un caractère distinctif entre ces deux terres. Je n’examine point ici de quelle nature est le précipité qu’on obtient en décomposant le nitrate de baryte par le prussiate de potasse , et si la décompo- sition n’a lieu qu’en raison d’un trisule qui se forme, ou en raison de l’acide sulfurique que le prussiate de potasse peut contenir quelquefois. Les expériences com- paratives dont je viens de rendre compte ayant été faites avec le même prussiate de potasse, le nitrate de strontiane auroit dû être décomposé comme le nitrate de baryte, si ces terres eussent été de même nature. Il seroit trop long de détailler les diverses expé- riences que j’ai faites pour connoître les parties cons- tituantes des carbonates natifs de strontiane et de ba- ryte; je dirai seulement que c’est par la dissolution dans l’acide muriatique que j’ai déterminé la quantité de gaz acide carbonique, et par la calcination celle de la terre. Le résultat moyen que j'ai obtenu est, pour çent grains de carbonate de baryte natif, ou wicherite , À + ir EU LD Er PL VE S:I QU Eë 73 soixante-deux grains de baryte, vingt-deux grains de gaz acide carbonique, et seize grains d’eau ; pour cent grains de carbonate de strontiane , soixante-deux grains de strontiane, trente grains de gaz acide carbonique, et huit grains d’eaux. Conclusion. Je n’ai pu porter plus loin mes recherches sur la strontiane, n’en ayant plus pour en soumettre à de nouvelles expériences : aussitôt que je pourrai m’en procurer, je les continuerai, d'autant que je vois qu’il convient d'établir la différence entre la baryte et la strontiane par des caractères plus saillans et plus mul- tipliés. Néanmoins, si l’on considère, d’après mes re- cherches et celles de Hope et de Klaproth, 10. Que le carbonate de strontiane n’est point mortel comme le carbonate de baryte natif, et qu’il n’est point vomitif comme le carbonate de baryte artificiel ; 2°. Que le carbonate de strontiane est spécifiquement plus léger que celui de baryÿte ; 3. Qu’il abandonne plus facilement par la chaleur le gaz acide carbonique, et qu’il en contient également plus que le carbonate de baryte ; 4e. Que la strontiane calcinée est soluble dans l’eau froide et dans l’eau chaude , mais en plus grande quan- A tité dans cette dernière, de manière à fournir des crys- taux par le refroidissement, propriété à La vérité com- mune à la baryte; 5. Que les nitrate et muriate de strontiane parois: 1e 19 É.. F4 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES . sent plus solubles, etc. que les mêmes sels barytiques, ét qu’ils communiquent à lPalcool la propriété de brûler avec une flamme rouge, tandis que les mêmes sels barytiques donnent à la flamme de l'alcool une - couleur d’un blanc jaunûtre; 6o. Que la strontiane ne contient point de chaux; 7°. Et enfin que le nitrate de strontiane n’est pas décomposé par le prussiate de potasse, qui décompose le nitrate de baryte : Tous ces caractères établiront déja une différence assez marquée entre la strontiane et la baryte, et encore plus entre les autres terres connues, et on pourra la regarder comme une terre particulière. ET DE PHYS1IQU Er. 75 EE MÉMOIRE Svr Le lieu du nœud de l'anneau de Saëurne erz £ 1790 ; Par Honoré FravwcrrçeuEs, membre associé. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut , le 16 floréal an 4. Davis que le célèbre Huygens a fait connoître la véritable forme de l’anneau de Saturne, les astronomes ont été très-attentifs à observer les temps où, la Terré passant par le plan de cet anneau, il disparoît , à cause que son épaisseur est trop petite pour qu’on puisse l’ap- percevoir avec des télescopes ordinaires, dans le grand éloignement où Saturne se trouve de la Terre; et les temps où, le plan de cet anneau passant par le centre du Soleil, il n’est plus éclairé que sur son épaisseur, et disparoît encore par la même raison, parce qu’il est aisé, au moyen de ces observations, de déterminer la longitude des nœuds de cet anneau : mais , malgré tous les soins des astronomes, on m’avoit point encore d’ob- servation complète des disparitions et des réapparitions de Panneau dans son nœud descendant. C’est ce qui rend très-précieuses les observations de ces phases qui ont eu lieu pendant l’année 1789 et au commencement de l’année 1790. J’ai eu le rare bonheur de les observer 76 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES toutes complètement. Voici le détail de ces observa- tions. J’y joindrai celles qui ont été faites en différens lieux par divers astronomes, et je tâcherai ensuite de déterminer, d’après ces observations, la longitude du nœud descendant de Panneau tant sur lécliptique que sur l’orbite de Saturne. Première disparition. Le premier mai 1789, j'ob- servai Saturne depuis 3h © du matin jusques à 4h +; les deux anses de l’anneau paroïissoient réduites à deux petits triangles isoscèles alongés, dont les bases, conti- guës au disque de Saturne, étoient un peu plus lumi- neuses que le reste. Les 2, 3 et 4 du même mois, je ne pus voir Saturne à cause des nuages. Le 8, j’observai Saturne depuis 3h + du matin jus- ques à 4h +; les anses ne paroissoient plus que comme deux petites lignes droites, blanchâtres et fort fines. Ces vestiges de l’anneau étoient si foibles, qu’ils dispa- roissoient souvent par le seul effet de l’agitation de Vair et des vapeurs. Le 6, je ne pus voir Saturne à cause des nuages. Enfin, le 7, j’observai Saturne depuis 3h + du matin jusques à 4h, avec la plus grande attention ; mais je ne pus découvrir absolument aucun vestige de l’anneau (1). QG) Je remarquai ce même jour que la figure de Saturne étoit sensiblement elliptique ; le plus grand diamètre étoit celui qui correspondoit au plan de Panneau. Cette observation a été confirmée ensuite par celles du docteur Herschel, ET/DE PHYSIQUE. 77 Première réapparition. Depuis le 17 août jusqu’au 28, j'ai observé tous les jours Saturne avec la plus grande attention. Cette planète m’a paru, dans toutes ces observations, parfaitement ronde, et sans aucun vestige de l’anneau. Le 28, à 10h + du soir, le ciel étant parfaitement serein, je crus entrevoir une légère apparence de l’an- neau dans une petite pointe située dans la partie occi- dentale de Saturne. Il ne me fut pas cependant possible de bien m’assurer de la réalité de cette apparence. Le 29, à 11h du soir, j’observai de nouveau Saturne, le ciel étant parfaitement serein. Je revis la petite pointe que j’avois cru voir la veille dans la partie occidentale de cette planète ; j’apperçus même une autre pointe semblable et opposée dans la partie orientale. Ces pre- mières apparences de l’anneau étoient extrêmement foibles , et elles disparoissoient souvent par le seul effet du vacillement léger que causoient quelques vapeurs répandues dans l’atmosphère. Le 30 au soir le ciel fut couvert, et il plut pendant toute la nuit. Le premier septembre , à 1h = du matin, le ciel étant parfaitement serein, et la Lune ayant passé sous l’ho- rizon, j’observai Saturne pendant plus d’une heure, et je vis parfaitement l’anneau sous la forme de deux petits triangles fort alongés , dont la lumière étoit beau- coup plus foible que celle du disque de Saturne. Seconde disparition. Le 2 octobre, à 11h du soir, j’observai Saturne , et je m’apperçus qu’on voyoit encore 78 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES quelques légères traces de l’anneau ‘dans une nébulosité blanchâtre dirigée dans le sens de cet anneau, et con- tiguë au disque de Saturne. Le 3 et le 4 le ciel fut couvert, et je ne pus voir Saturne. Le 5, à 10h + du soir, j'observai Saturne dans un éclairci. Je crus entrevoir encore quelque apparence de la nébulosité ; mais cette apparence étoit si vague et si incertaine, que je ne crus pas pouvoir établir la-dessus quelque chose de positif. Enfin, le 6, j'observai Saturne depuis 10h:du soir jusqu’à 11h. Cette planète me parut parfaitement ronde, et sans aucun vestige de l’anneau. Je la vis de même les jours suivans. Seconde réapparition. Depuis le 20 janvier 1790 jus- qu’au 29, j'ai observé tous les soirs Saturne avec la plus grande attention. Cette planète m’a paru, dans toutes ces observations, parfaitement ronde, et sans aucun vestige de l’anneau. Le 29 janvier, à 6h} du soir, je vis pendant une minute Saturne dans un éclairci qui se fit entre les nuages dont le ciel étoit couvert. Je crus appercevoir un léger filet de lumière dans le sens de l’anneau ; mais il ne me fut pas cependant possible de bien m’assurer de la réalité de cette apparence. Le 30, j’observai Saturne dans un éclairci qui dura un demi-quart d’heure, vers 6h 20’ du soir. Je vis bien distinctement l’anneau sous la forme d’un filet de lu- mière dirigé dans le sens de cet anneau. Mim. de l'Institut, 1" CI, Tom. T, Pag: 79: E T D E PH Y S 200 VE. 79 T1 plut le 31, et les jours suivans l’air fut Chargé de vapeurs qui produisoient des ondulations si considéra- bles dans les bords de Saturne , qu’il n’étoit pas possible de pouvoir y rien distinguer. Ce ne fut que le 4 février que, les vapeurs ayant un peu diminué, je revis l’an- neau avec assez de netteté pour être assuré que je ne métois pas trompé dans l’observation faite un peu à la hôte le 30 janvier. | Toutes ces observations ont été faites dans mon ob- servatoire , à Viviers en Vivarais , avec un bon télescope grégorien de quinze pouces de longueur, qui amplifioit environ quarante fois le diamètre apparent des objets. J’ai tâché d’y apporter tous les soins et toutes les atten- tions qu’elles méritoient. Pour déterminer, d’après ces observations, la longi- tude du nœud descendant de Panneau, ou le point dans lequel l’écliptique est coupée par le plan de cet anneau . soient S , le Soleil ; ABCD, l'orbite de la Terre; EFGH, V’orbite de Saturne; VXYZ, Pécliptique projetée à une distance infinie dans la sphère étoilée; IK , la section du plan de l’écliptique par le plan de l’anneau de Sa- turne. Il est évident qu’au moment de la disparition de Panneau , causée par le passage de la Terre par le plan de cet anneau, la Terre doit se trouver au point L de son orbite dans la ligne (1) IK. Supposons donc la Terre au point L de son orbite, et Saturne au point M de la sienne, et imaginons trois arcs de grands cercles décrits 1 5 9 407, PNA Gfocat QG) Voyez la figure ci-contre. 80 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES du point L comme centre : le premier, MN , sur le plan de l’anneau; le second, NO, sur le plan de Péclip- tique ; et le troisième, MO, sur un plan perpendicu- laire à ce dernier plan. Ces trois arcs formeront un triangle sphérique rectangle en O, dans lequel le côté MO est égal à la latitude géocentrique de Saturne, et l'angle MNO est égal à l’inclinaison du plan de lan- neau sur celui de lécliptique : on aura donc, NO) == tang. MO x cotang. MNO sin, total - Pareillement, soit K'ST la section du plan de léclip- tique par le plan de l’anneau lors de la disparition de cet anneau, occasionnée par le passage de son plan par le centre du Soleil, et M' le lieu de Saturne sur son or- bite à cette époque; ayant décrit du centre 8 les trois arcs de cercle M'N', N'O', M'O’, analogues aux arcs MN, NO, MO, on aura de même, ENT O' = er M'O' x cotang. MNO sin. total ? dans laquelle formule M'O' est égal à la latitude hélio- centrique de Saturne lors de la disparition de l’anneau. Il est évident que l’arc N'O', étant la mesure de l’angle O'SN', est égal à la différence en longitude entre le lieu O'’ de Saturne sur l’écliptique lors de la disparition occasionnée par le passage du plan de l’anneau par le centre du Soleil, et le lieu N’ du nœud de l'anneau ; il est pareillement évident que l’arc NO, étant la mesure de Vangle OLN , est égal à la différence entre la longitude géocentrique de Saturne lors de la disparition et de la ET DE PHYSIQUE 82: réapparition de l’anneau, occasionnées par le passage dela Terre par son plan , etla longitude du nœud de cetanneau, puisque , le cercle VXYZ étant infini, le point L peut être censé confondu avec le centre S de ce cercle. De plus, la latitude de Saturne étant australe lors des phases de l’anneau qui arrivent près du nœud descendant de cet anneau, et boréale lors des phases qui arrivent près de son nœud ascendant , il s’ensuit que la longitude de Saturne, lors de ces phases, est toujours plus grande que la longitude du nœud de l'anneau , et par consé- quent que, pour avoir cette dernière longitude , il faut retrancher de la longitude de Saturne , lors de ces pha- ses, l'angle OLN ou l’angle O'SN'; c’est-à-dire qu’on a en général, longitude du nœud de l’anneau sur Péclip- tique — géocentrique Longitude bp — angle. sin. (tangente héliocentrique géocentrique Latitude . { b X cotang. inclinaison), £ héliocentrique suivant que les phases de l’anneau sont occasionnées par le passage de la Terre par le plan de cet anneau > OÙ par le passage de ce plan par le centre du Soleil. Connoïssant la longitude du nœud de l’anneau sur l’écliptique , ilest aisé de trouver la longitude du nœud de cet anneau sur l’orbite de Saturne : car soient VY et T'K' les sections du plan de Pécliptique par le plan de l'orbite de Saturne et par le plan de l’anneau ; du centre S du Soleil soient décrits, avec un rayon arbitraire SP , 1, 11 82 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES trois arcs de cercle ; le premier ; PQ, sur l’écliptique ; le second; PR , sur Porbite de Saturne; et le troisième, QR , sur le plan de Panneau. Ces trois arcs de cercle formeront un triangle sphérique dans lequel on connoît le côté PQ, qui est égal à la différence en longitude entre le nœud de Panneau et le nœud de Porbite de Saturne ; Pangle QPR , qui est égal à l’inclinaison de Vorbite de Saturne; et l’angle RQP, supplément de Vangle d’inclinaison du plan de l’anneau sur le plan de l’écliptique. On pourra donc trouver le côté PR, qui est égal à la différence en longitude comptée sur lorbite de Saturne, entre le lieu du nœud de cette orbite et le lieu du nœud de l’anneau. Pour appliquer la formule précédente aux observa- tions des phases de l’anneau de Saturne pendant les années 1789 et 1790, que j'ai pu recueillir, j’ai sup- posé , d’après M. Maraldi , que l’inclinaison du plan de cet anneau sur le plan de l’écliptique étoit de 31° 20’. J’ai calculé ensuite, sur les tables de Saturne dressées par Delambre, d’après les observations les plus exactés et la théorie du citoyen de la Place, la longitude et la latitude de cette planète lors de chaque observation, pour une plus grande exactitude ; j’ai retranché 13" de la longitude héliocentrique de Saturne , calculée d’après ces tables. En effet l’opposition de Saturne, d’après les observations faites à l’Observatoire na- tional, est arrivée le 11 septembre 1789, à 18h 13’ 24", temps moyen ; la longitude de Saturne, comptée de léquinoxe moyen ; étant de XIS 19° 50’ 21°, et sa ET DH, PH Y 6 E QUU Ee. | | 83 latitude géocentrique,, de 2° 21! 51" aust. ; et, suivant les observations du citoyen Delambre , lle est arrivée le 11 septembre, à 18h 9' 40"5, en XIs 19° 50’ 16", ce quidonne treize secondes pour l'erreur des tables du citoyen De- lambre, en longitude, À l'égard, de. la latitude hélio- centrique donnée par ces mêmes tables, elle ne m’a paru avoir besoin d’aucune correction. La table sui- Yante contient toutes les observations des phases de Panneau aue j'ai pu recueillir, et les résultats des .cal- culs de ces observations. J’aurois bien desiré pouvoir y insérer celles du savant Herschel ; mais elles ne sont pas encore publiées. Nous savons seulement qu’au moyen du fameux télescope de quarante pieds de longueur, l'anneau de Saturne a toujours été visible pour ce cé- lèbre astronome; (7: oyez la table ci-contre.) . On peut, au moyen de la table précédente, déter- -miner quelle est la longitude la plus probable du nœud descendant de l’anneau ; car, les résultats des observa- tions différant entre eux de plus, d’un demi-degré, on ne peut guère espérer de la déterminer avec une entière précision. Pour cela on, choisira dans la table les ob- servations que l’on jugera les plus exactes, et, en, les comparant entre elles, on aura des limites entre les- quelles sera renfermée la vraie longitude du nœud; de sorte que si ces limites sont fort rapprochées, la moyenne entire elles ne différera pas sensiblement de cette vraie longitude du nœud descendant. de l’anneau.. Je vais , pour donner un exemple de cette méthode, l'appliquer à mes propres observations : non pasique, j'aie la pré- 84 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES somption de croire qu’elles soient plus exactes que les autres, mais parce qu’elles ont l’avantage d’être com- plètes. Puisque lépaisseur de Panneau est trop petite pour pouvoir être apperçue avec des lunettes et des télescopes ordinaires, il faut, pour qu’on puisse appercevoir cet anneau avec ces instrumens , que le Soleil, ou la Terre, soit un peu élevé au-dessus de son plan ; d’où il s’en- suit que cet anneau doit disparoître un peu avant le passage de son plan par le centre du Soleil ou de la Terre, et qu’il doit reparoître un peu après le passage de ce plan par le centre du Soleil ou de la Terre. D’après cela il est clair que le passage de la Terre par le plan de l’anneau ayant précédé la première réappa- rition de cet anneau, que j’ai observée le 28 août, et le mouvement de Saturne étant alors rétrograde , la lon- gitude du nœud descendant de l’anneau doït être plus grande que celle de XTs 17° 4’0", qui résulte de mon ob- servation. Pareillement la longitude du nœud descendant de l’anneau doit surpasser la longitude de XIS 17° 8' 5", qui résulte de mon observation de la seconde dispari- tion, le 6 octobre, avant le passage du plan de l’anneau par le centre du Soleil. Elle doit de même surpasser la longitude de XTs 17° 20’ 17", qui résulte de mon obser- vation de la première disparition, le 5 mai; mais la longitude du nœud descendant de lanneau doit être moindre que celle de XIs 17° 20’ 22", qui résulte de mon observation de la seconde réapparition , le 30 janvier 1790. Par conséquent la vraie longitude du nœud DES OBSER DE SATURNE ÉT DE LICET ANNEAU, LIEUX NO DES DIFFÉRENCE LONGITUDE D 1 |en longitude entre FE du nœud descendant == NNONNDET AMINATO NnéTDA Ma Somme 3 Li 5 MEME CNET Greenwich . .:. + + | MasKELYNE sta de 17 33 25 Paris. ee CassiNI . « | EE ———————————— LeX B LE DES OBSERVATIONS DES PHASES DE L'ANNEAU DE SATURNE PENDANT LES ANNÉES :1789 z#r 1790; ET DE LA LONGITUDE DU NŒUD DESCENDANT DE CET ANNEAU, DÉDUITE DE CES OBSERVATIONS. | LIEUX NOMS INSTRUMENS JOURS ET HEURES | LONGITUDE DE LATITUDE DE h | DIFFÉRENCE LONGITUDI Es Des az Es lors lors h | du d descendant OBSERVATIONS. | OBSFRVATEURS LEUR ETFET. [rHAsrsonsEnvers.|re enaque Observation chaque observatlor , d ad | | | 15 : 20 28 10. 1 54 à 3 53 : o | \ 1 | 2 11 À à 50 34 Tél. gr | à 2 5 ALTO Tél 155p r. 4 | 28 a à 3 | Lur 5 pieds 2 à 2 43 ) Luo. acr, 9:pied e ; | : 3 Aie te tenieteat es > août | | 29 août, [FE 20 LT Tél. 61} fois | | 20 3 51 40 | 3 20 57 3 51 4 | août, à 10 2 37 3 51 49. S EC ON D E DLFP AN RATER ON héliocentrique héliocentrique. | | Lun, ner, 5 pieds . 3 octobre, à 12° 7°. XI 2 26 2 7 58 À XI 17 3 : Tél. 6 p. gr. Boo fois. . F) 4 octobre, à 11° 2 5 16 2 8 1 Ÿ |. | 17 ñ 6 Tél. 19 p. gr. 40 fois 6 octobre, à 10°. . |. . 20 39 5.. Tree 17 8 5 st tobre, à 10° 20 47 4 ANNEE Oo | 17 16 € 10 octobre, à 10 j7 4. 8 18 . +0 17 16 6 10 octobre, à 10 20 47 5. 8 18 11902 17 16 7 10 octobre) À 12 10 47 13 2 Te oi « 17 16 15 11 octobre, à 10°. . |. . 20 52 8 19 | CAT: è 17 17 52 15 octabre, à 10. . |. . 20 1 2 8 3 LE j1 20. 17 25 41 Master . + + « «| Lune acre 8 pt. . . . . | agijanvier, à 6 XI 20 37 13... |. a 3 14. XI 17 13 59 SLoP + « + + + » Tél, gr. 200 fois .« . . 1. . . | 30 janvier, à 6* 20 43 23.. > LA 52 fe 17 20 18 FLavGxnovEs . | Tél. 15 p. gr. do fois. . . . . | 30 janvier, à 6 2 20 43 27.. 2 3 23 5. 17 20 32 D Et ent a eo Se anne à le noms. leCamse l 25e |EPSRSCTESS Vo Tnurts. . «+ « | Passy Canocné. . . . « «| Tél. aa pieds . . . . - . « . 30 janvier, à 6 :.. ao 4340... a 033: 3 23 17 20 35 Lilienthal + . . « .« | Scmnouren . . . . | Tél. y pieds. . . . . . . , . 31 janvier, À 6*.. . 20 4941-12 08 26e Aa 57 | 712044 Greenwich : ... . « Masrecyxe , . : + | Lun. acr. 5 31 janvier) à 6*.. ,. |. . 20 49 51... |.. 2 3 26 3 22 57 17 26 54 NON CI CAD CC février; à 6 2. . |. . 2056 12. . |. « à 3 20° « . |. . 322 47... 17 33 25 | Paris. .e se « LOPECTET EE es ntore Nota. L'anneau n'a été vu que le 2 février par le C. Bernard, et le 4 février par M. Bode; mais c'est à cause que le mauvais temps n’avoit pas permis À ces deux astronomes d'observer Saturne plutôt. 1. page B3. MA PDIE Mb EH %S 16 v’# 85 descendant de l’anneau de Saturne est renfermée entre XIs 17° 20 17" et XIS 170 20’ 22". Or, comme ces limites sont fort rapprochées, et que les circonstances qui in- fluent sur la visibilité de l’anneau étoient à peu près les mêmes dans les observations de la première disparition et de la seconde réapparition , qui les ont fournies, on peut, sans crainte d’erreur sensible, prendre le milieu entre ces limites pour la vraie longitude du nœud des- cendant de l’anneau de Saturne , laquelle est par consé- quent de XIS 17° 20° 19. L’exactitude de cette détermination de la longitude du nœud descendant de l’anneau de Saturne sur Péclip- tique est assez bien confirmée par les résultats géné- raux des observations de chaque phase. Après en avoir supprimé pour chacune de ces phases, excepté pour celles de la première disparition , les deux observations extrêmes , à cause qu’il est aisé de prouver que la plu- part de ces observations extrêmes sont contraires aux autres ; et qu’on raisonne sur ces longitudes moyennes comme nous venons de le faire dans lexemple précé- dent, on trouvera que, puisque la moyenne entre les longitudes du nœud descendant de l'anneau , résultantes des observations de la première disparition, est XIs 1 7° 17° 50", la moyenne entre-les longitudes du nœud des- cendant de l’anneau , résultantes des observations de la première réapparition , après en avoir supprimé les deux observations extrêmes , est XIs 170 2’ 57"; que la moyenne entre les longitudes du nœud descendant de Panneau, résultantes des observations de la seconde disparition, 86 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES après avoir supprimé la première et la dernière de ces observations, est XIS 17° 13° 15"; et qu’enfin la : moyenne entre les longitudes du nœud descendant de l’anneau , résultantes des observations de la seconde réap- parition , prise avec la même condition, est XIs 17° 22’ 33". La véritable longitude du nœud descendant de l'anneau sur l’écliptique est plus grande que XIs 17° 17 50", est plus petite que XIS 170 22’ 23": donc, en pre- nant un milieu entre ces limites , la vraie longitude du nœud descendant de l’anneau sur l’écliptique est de XISs 190 20’ 111; ce qui ne diffère que de 7" + de celle que nous avons trouvée précédemment. D’après les disparitions et les réapparitions de l’an- neau de Saturne, observées par M. Maraldi en 1714 et 5715, ce savant astronome détermina la longitude de son nœud descendant sur lécliptique , de XI 16° 20’. La différence de cette longitude avec la longitude du même nœud , déterminée d’après mes observations en 1790, est de 1° o'19",et, d’après les longitudes moyennes déduites des observations rapportées dans la table pré- cédente , de 1° o’ 11"+; tandis que par leffet de la pré- cession des équinoxes , supposée de 1° 23 45° dans ce siècle, cette différence auroit dû être de 1° 2° 49". IL s’ensuit de là que le nœud de l’anneau a eu un mou- vement rétrograde sur l’écliptique, qui, dans l’espace de cent soixante-quinze ans , intervalle entre les observa- tions, a été de 2’ 30” d’après la première hypothèse, et de 2' 37" + d’après la seconde ; ou bien de 2° 36" suivant la première hypothèse, et de 2’ 44" suivant la seconde, HT DE PHYSIQUE. 87 si on le rapporte à l'orbite de Saturne. Ce mouvement rétrograde des nœuds de l’anneau sur lorbite de Sa- turne, parfaitement analogue à celui des points équi- noxiaux sur l’orbite de la Terre, est produit, suivant toutes les apparences, par les attractions que les satel- lites de Saturne, et particulièrement le cinquième , exer- cent sur cet anneau; flais les quantités que nous avons trouvées pour ce mouvement sont trop petites , et les ob- servations qui servent à le déterminer, trop susceptibles d’erreur, pour qu’on puisse regarder ces quantités comme nent constatées. En supposant la longitude du nœud Monceau de l'anneau de Saturne sur l’écliptique de XI° 17° 20’ 19'; la longitude du nœud descendant de l’orbite de Sa- turne au commencement de 1790, d’après les tables de M. de la Lande, de IXS 21° 44 37"; l’inclinaison de cette _ orbite, ou l’angle QPR , de 2° 29° 45", ainsi que M. de la Lande l’a déterminée , d’après les observations de M. Maskelyne (Mémoires de | Académie , année 1787); le côté PQ , ou la différence en longitude entre le nœud de l’anneau et le nœud de l'orbite de Saturne, sera de 55° 35'42"; et l’angle PQR étant de 1480 40’, on trouvera, en résolvant le triangle PQR , le côté PR de 59° 8’ 30’, qui, ajoutés à la longitude du nœud descendant de l’or- bite de Saturne au commencement de l’année 1790 , donneront XIS 20° 53 7' pour la longitude du nœud descendant de l’anneau de Saturne à cette époque. Si l’on suppose que la longitude du nœud descendant de l’anneau sur l’écliptique n’est que de XIS 17° 20’ 1 21e 88 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ainsi qu’elle résulte de l’ensemble des observations, on trouvera le côté PR de 59° 8" 22", et par conséquent la longitude du nœud descendant de l’anneau sur l’orbite de Saturne, de XIS 20° 52° 59”. ADD A TIIIO: NS: Dans les Mémoires de l’Académie des sciences pour 1790, qui ont paru depuis la lecture de celui qu’on vient de lire, on en trouve un de Jérôme Lalande et un de Charles Messier sur le même sujet, qui contiennent un grand nombre d’ob- servations sur les disparitions de l’anneau de Saturne en 1789 et 1790. Le premier a donné la longitude du nœud de l'anneau sur l'orbite de Saturne , XI° 200 26°, plus petite seulement de 27° que celle du citoyen Flaugergues; les différentes obser- vations donnent des écarts de près d’un degré : ainsi l’on ne doit pas être surpris de la différence qui sé trouve entre ces deux résultats. Le mémoire de Charles Messier contient une carte de la route apparente de Saturne pendant tout le temps des obser- vations faites sur l’anneau, et les oppositions de Saturne pendant trois ans, pour servir aux calculs de ces phénomènes. On y trouve aussi les observations de plusieurs points lu- mineux observés sur les anses de l’anneau lorsqu'elles étoient très-minces, et sur l’ombre de l’anneau projetée sur le disque de Saturne. Enfin il a paru dans les Transactions philosophiques de la société royale de Londres pour 1794, un mémoire de M. Herschel, qui a observé cinq bandes sur Saturne, et qui a déterminé sa rotation de 10° 16° 0°44. LALANDE, \ ET DE PHYSIQUE 89 OBSERVATIONS Sur les deux procédés employés pour la fabrication du verdet, verd-de-sris, ou acétite de cuivre, Par J. A. CnarraAr, membre associé. Lu , et déposé au secrétariat de l’Institut , le 26 floréal an 4. D:vx procédés nous sont connus LHpuE la fabrication de l’acétite de cuivre. L'un, usité à Montpellier depuis un temps immémo- rial, consiste à faire fermenter le marc des raisins, et à le stratifier avec les lames de cuivre, pour oxider le métal. L’autre, suivi à Grenoble et dans les environs depuis quelques années, se borne à asperger de vinaigre dis- tillé les lames de cuivre disposées dans des cuviers, et à développer et favoriser par ce moyen l’oxidation. Le verd-de-gris de Montpellier est gras, pâteux, perd moitié de son poids en séchant ; il présente dans sa cas- sure des points soyeux comme certains morceaux de _malachite ; il est peu soluble dans l’eau. Le verd-de-gris de Grenoble est plus sec, d’un bleu verdâtre plus prononcé ; il a une cassure de crystal, et est plus soluble dans l’eau. Le premier est un peu moins cher dans le commerce ; Le 12 90 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES il est employé avec succès dans les travaux de pein- ture. Le second est-préféré pour les opérations de la tein- ture : il donne plus de vivacité aux couleurs, et il en faut une moindre quantité pour composer les mordans, À quoi tiennent ces différences? c’est la solution de ce problème que je me suis proposée. Première expérience. Cent parties de verdet de Gre- noble, distillées dans une cornue à appareil pneumato- chymique , ont fourni ce qui suit : 10, De l’eau foiblement acide, et d’un goût et odeur métallique ; 2°. Des vapeurs blanches qui se condensoient dans le récipient ; 3°. De l’acide carbonique ; 4°. De l'acide acéteux très-fort, très-transparent , co- loré en verd, et d’une odeur très-pénétrante. 5°. Le résidu de la cornue épuisé n’a fourni que du cuivre et du charbon par son analyse et sa réduction. Résultat de l'analyse de 100 parties de verdet de Grenoble. Acide carbonique ,: ie es 1 2009230 Eau foiblement acidulée, . . . 13.05 Acide fort et coloré, , . . . . 53.95 »-100. Cuivre. ee Des PA 0 20-00 Carbone. 2 le 0400 Seconde expérience. Cent parties de verdet de Mont- ET DE PHYSIQUE. o1 pellier, distillées dans une cornue à l’appareil pneu- mato-chymique, ont fourni ce qui suit: 10. De l’eau foiblement acide , d’une odeur empyreu- ris ; . De l'acide carbonique mêlé d’une petite quantité de gaz hydrogène ; 30. De lacide acéteux jaunâtre, sentant fortement l’empyreume , très-foible , et peu concentré ; 4. Le résidu de la cornue a fourni du cuivre et du charbon. Résultat de l'analyse de 100 parties de verdet de Montpellier. Acide carbonique, . . . . 8.00 Acide acéteux très-foible et AN empyreutratiques "it : flo: 4 UMA 6SLES : » 100% COMENT DE RE ON LL ET 50 MAR DODE SUITE TC EUR IT MS I1 résulte des expériences ci-dessus , qui représentent le résultat moyen de mes opérations sur diverses sortes de verdets, 1°. que le verdet de Montpellier est moins soluble dans l’eau que celui de Grenoble; 2°. que celui de Montpellier contient beaucoup moins d’acide acé- teux pur que celui de, Grenoble; 3°. que celui de Mont- pellier est mêlé d’une portion d’extractif que le verdet de Grenoble ne contient pas ; 4°. que le premier fournit un peu plus de cuivre et de carbone que le second. 92 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES En rapprochant et comparant les procédés de la fa- brication, on sentira aisément la cause de ces diffé- rences. 10. Le marc de raisin, dont on se sert à Montpellier, est foiblement acide ; son séjour sur le cuivre oxide le métal, et dépose sur les lames une couche de principe extractif. 29, L’acide acéteux, employé à Grenoble, oxide d’abord le métal, et le nouvel acide qu’on ajoute dissout l’oxide. Le verdet de Montpellier est donc un mêlange d’oxide de cuivre, d’extractif, et d’acétite de cuivre. Celui de Grenoble ne contient presque que de l’acé- tite de cuivre. Nous pouvons déduire de ce qui précède , la cause de la différence que les arts ont assignée à ces deux sortes de verdets. Celui de Montpellier, très -agréablement coloré, gluant et pâteux par son extractif, est employé avec avantage dans la peinture. Celui de Grenoble, plus soluble, plus pur, tenant le milieu entre le verdet et les crystaux de Vénus, est préféré dans les opérations de teinture. EÔT DE PHYSIQU Fr. 93 OBSERVATIONS Sar le savon de laine et sur ses usages dans les Qrës , Par J. À. CHApTar, membre associé. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le premier prairial an 4. Jar fait connoître le moyen de fabriquer en tout temps, par-tout, et à peu de frais, une liqueur savonneuse propre à remplacer le savon dans les usages domestiques (1); je vais présenter un supplément à ce premier travail, en apprenant à substituer au savon mou, employé au fou- Zage de presque toutes les étoffes en laine, un savon peu coûteux , et qu’on peut aisément fabriquer dans chaque attelier. Dans toutes les fabriques de draps, couvertures, molletons , calmouks, et autres ouvrages en laine, on est dans l’usage de fouler l’étoffe dès qu’elle est tissue. Cette opération a pour but, non seulement de la dé- graisser, mais de la feutrer. On emploie à cet effet environ trente livres de savon mou par quatre-vingts livres d’étoffe. Ce savon coûtoit dans le midi, avant la (1) Voyez le rapport des citoyens Pelletier, Darcet et Lelièvre, sur la fabrication des savons. 94 MÉMOIRES DEF MATHÉMATIQUES révolution, 20 liv. le cent. Il consomme une grande quantité de nos huiles et de celles d'Italie, et emploie toutes les cendres des foyers domestiques , dans les pays où s’en fait la fabrication. On voit d’après cela combien il seroit avantageux pour le fabricant, et pour le commerce lui-même, de pouvoir remplacer commodément le savon mou par des matières dont la fabrication fût facile et peu coûteuse: outre l’économie dans la confection de l’étoffe, il en résulteroit le grand avantage de laisser la cendre de nos foyers aux usages domestiques , aux atteliers desalin, et aux verreries en verre noir, en même temps que l'huile resteroit en entier pour les travaux où on ne peut pas la suppléer. De tout temps le fabricant et le gouvernement ont cherché la solution de ce problème. On a successive- ment employé la terre à foulon, les alkalis purs, etc. : mais le premier moyen blanchit et feutre mal, le second dissout létoffe; et les fabricans de Lodève se rappel- lent avec effroi un charlatan envoyé par le gouverne- ment, il y a quelques années , qui prétendoit remplacer le savon parle moyen de la soude. Aux inconvéniens dont nous venons de parler il faut ajouter celui de ne pas assouplir Pétoffe , et de lui laisser cette rudesse que le seul savon fait disparoître. Il faut donc que la substance qu’on peut proposer pour rem- placer le savon mou dans toutes ses qualités, ait la propriété de dégraisser, de feutrer et d’assouplir l’étoffe. La composition que je vais faire connoître ici réunit FES ver tm Etats To u +» 95 tous ces avantages : l’expérience en a été faite à Lodève, sur mon invitation , par le citoyen Michel Fabréguettes, aussi versé dans les connoissances physiques qu’habile fabricant de draps. Toute l’opération se réduit à faire une lessive alkaline de cendres ou de potasse, à la porter à l’ébullition, et à y dissoudre de vieux morceaux de laine, ou rerailles de drap, jusqu’à saturation. Il en résulte un savon mou, très-soluble dans l’eau, de couleur d’un verd grisâtre, bien lié, ayant une odeur animale que les draps perdent au lavage et à Pair. Les diverses expériences que j'ai faites à ce sujet m'ont présenté les résultats suivans : 1°, Dès qu’on plonge la laine dans la liqueur bouil- lante , les filamens s’agglutinent, et il suffit d’une légère agitation pour en opérer une dissolution complète. 20. La lessive se colore et s’épaissit peu à peu, à mesure qu’on ajoute de nouvelle laine. 3°. Le savon est plus ou moins coloré, selon que la laine est’ plus ou moins propre, plus ou moins blanche. 4°. Les poils ou crins qui se trouvent mêlés avec la laine qui a servi, se dissolvent plus difficilement. 50. La quantité de laine que l’alkali peut dissoudre dépend de la force de la lessive, de sa causticité, de son degré de chaleur. 1093 grammes (2 liv. 3 onces 6 gros, anc. mes. ) d’al- kali caustique , à douze degrés de concentration, et à la chaleur de l’ébullition, ont dissous 321 grammes (10 onces 4 gros) de laine; le savon refroidi a pesé 611.43 grammes (1 liv. 4 onces). 96 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Quantité égale d’alkali, au même degré de causticité, de chaleur et de concentration , dans lequel j’ai fait dis- soudre 122.28 grammes (4 onces) de laine, n’a pas pris une consistance suffisante pour pouvoir servir aux divers usages. Une égale quantité d’alkali, marquant quatre degrés, n’a pu dissoudre que 87.89 grammes (2 onces 7 gros) de laine : le savon refroïdi a pesé 428 grammes (14 onces); il avoit une bonne consistance. 6°. À proportion qu’on dissout la laine dans la lessive, la vertu dissolvante de l’alkali diminue, et il finit à la fin par ne plus en dissoudre. C’est dans le moment qu’on voit que la laine, agitée dans la liqueur, ne se dissout plus, qu’il faut arrêter l’opération. Il me reste à faire connoître les moyens qu’on peut employer dans chaque attelier pour y fabriquer le savon dont on a besoin. 10. Choix et préparation des matières. Les matières nécessaires pour composer ce savon se réduisent à deux : substances alkalines, et laines. Les substances alkalines doivent être prises dans les cendres des foyers : la lessive doit en être faite par les procédés connus. On éteint la chaux avec un peu d’eau; on en mêle la pâte avec les cendres passées au crible, dans la proportion d’environ un dixième de chaux vive sur le poids des cendres employées ; on porte le mêlange dans un petit cuvier de pierre (les cuviers de bois colo- Æ PT D\ Ej/0P, H JS: IL (QU Ex 07 rent la lessive et se détériorent trop aisément); on y verse de l’eau jusqu’à ce qu’elle recouvre de quelques pouces ; on laisse séjourner pendant quelque temps, et on retire la lessive par une ouverture pratiquée à des- sein au bas du cuvier. On ne doit extraire cette lessive qu’au moment de employer ; elle doitmarquer de quatre à quinze degrés. Au reste, peu importe le degré de con- centration, puisque toute la différence qui résulte de l'usage d’une lessive foible ou d’une lessive forte, con- siste dans Pemploi d’une quantité de laine plus ou moins considérable. On peut encore employer la potasse du commerce; on la iraite comme les cendres, en mêlant la chaux dans la proportion d’un tiers. - Quant au choix des laines, tout le monde sait que dans les fabriques de draps, de couvertures, de cal- moucks, et autres étoffes en laine il s’exécute une suite d'opérations depuis le lavage des laines jusqu’à la sortie de l’étoffe de la fabrique, qui entraînent la déperdition d’une portion plus ou moins considérable de cette ma- tière première. L’eau dans laquelle on foule la laine pour la laver, le sol sur lequel on l’étend, le magasin -où on la dépose; les opérations qui consistent à battre la laine, à la carder, à la filer, à la tisser; celles qui ont pour but de tondre les draps, de les peigner, de les fouler : dans toutes ces diverses manipulations, on voit par-tout un résidu de laines qu’on ramasse, à la vérité, avec quelque soin ; mais plusieurs de ces opérations sont ‘de telle nature , que les débris de laines qui en résultent 1. 6 13 98 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES sont sales et mêlés de matières étrangères dans quelques unes, et que les fils en sont coupés , et conséquemment trop courts, dans quelques autres; de manière que le fabricant jette ces résidus au fumier. La fabrication du savon lui fournit le moyen de les utiliser tous ; il n’est question que de les réunir tous dans les paniers où se lavent les laines, et de les y fouler avec précau- tion, tant pour les laver que pour en séparer tout ce qui leur est mêlé de corps étrangers : on les conservera ensuite pour l’usage. On peut encore se servir avec avantage des retailles de toutes les étoffes qu’on trouve chez les fabricans , les tailleurs, les marchands de draps. On profitera avec le même succès de tous ces objets, après que l’usage les a mis hors de service. 20, Fabrication du savon. Dès qu’on s’est procuré la lessive et la laine , il n’est plus question que de porter la lessive à lébullition dans un chaudron ordinaire. Lorsqu'elle est parvenue à ce degré de chaleur, on y jette la laine peu à peu, et on agite avec une spatule pour en opérer une disso- lution plus prompte; on a l’attention de n’ajouter de - nouvelle laine que lorsque la précédente est dissoutes on arrête l’opération, du moment qu’on s’apperçoit que la liqueur refuse de dissoudre. D’après les expériences faites en grand par Michel Fabréguettes, avec des savons qu’il a faits lui-même ENT DEIPHYSIQU 09 d’après la méthode que je lui fis connoître, il est constant que ce savon dégraisse , feutre et assouplit parfaitement des draps ; mais son emploi exige quelques observations qu’il est important de connoître. “10, Lorsqu'il nest pas fait avec toutes les précautions convenables, ou lorsqu'on a employé à sa fabrication des laines sales et colorées, le savon donne à l’étoffe une teinte grise qu’il est bien difficile de luï enlever. Cette teinte est indifférente s’il est question d’employer l’étoffe à la teinture ; mais elle nuiroit à la beauté du blanc que l’on se propose de donner et de conserver dans certains cas. On remédie à cet inconvénient en n’employant que des matières choisies pour former le savon qu’on destine à ces usages délicats. 2°. Les étoffes foulées avec ce savon contractent une odeur animale qui, sans être très-forte, est néanmoins désagréable ; mais l’eau et Pair la font complètement disparoître. Après avoir obtenu des succès de l’emploi de ce savon dans le foulage des étoffes en laine, j’ai tenté de sub- *stituer la soude à la potasse, et de former, en suivant le procédé que j’ai décrit ci-dessus , un savon solide, propre aux opérations de la teinture en coton : mes essais ont réussi au-delà de mes espérances. 22500 grammes (46 Liv.) de soude à huit degrés ont dissous , au degré de l’ébullition, 2445.73 grammes (5 Liv.) de soude, etont fourni , par le refroidissement, 10 8254.38 grammes (16 liv. 14 onces) de savon assez na «solide pour ne pas couler. 100 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES La première laine qu’on jette dans la soude bouil- lante, se dissout aisément ; mais on s’apperçoit que la liqueur s’épaissit peu à peu, et que la dissolution de- vient plus difficile et plus longue. Les premières dissolutions rendent la liqueur verte; elle noircit ensuite, et le savon refroidi conserve une couleur d’un verd noirûtre. Ce savon a été employé de toutes les manières et sous toutes les formes dans ma fabrique de teinture en coton ; et je suis à présent convaincu qu’il peut remplacer la liqueur savonneuse que nous formons par le moyen de l'huile et de la lessive de soude, pour appréter les co- tons. J’ai constamment observé qu’en dissolvant une quantité suffisante de ce savon dans l’eau froide, de manière à rendre le liquide laiteux, et en y foulant les cotons d’après le méchanisme qui est connu, il suffit d’y passer le coton à trois reprises, et de le sécher chaque fois, pour qu’il soit aussi disposé à recevoir la teinture que celui qu’on a passé à sept reprises dans les liqueurs savonneuses ordinaires. Cela paroîtra peu étonnant, lors- qu’on fera attention que les matières animales sont très- propres à disposer le fil et le coton à recevoir la tein- ture, et que quelques-unes de nos opérations, dans nos fabriques , ne tendent qu’à les imprégner de ces sub- stances. Il est à observer que le coton qui a passé dans ce savon prend une teinte grise, à peu près semblable à celle qu’il prend par lalunage, tandis que les liqueurs savonneuses ordinaires lui donnent le plus beau blanc; EUT, DE: LP H Y SI QU EF. 101 mais cette couieur grise ne préjudicie en rien à la tein- ture, comme nous l’avons déja observé pour les étoffes en laine. Je dirai, à l'appui du dernier usage que je viens d'attribuer à ce savon, qu’après en avoir imprégné du coton par le procédé connu, je l’ai fait passer par toutes les opérations que lon fait subir à la laine pour la teindre en écarlate, et ce coton a pris une teinte cou- leur de chair foncée très-agréable, tandis que le coton qui mavoit pas reçu cette préparation est sorti du bain presque avec sa couleur naturelle. Ce premier essai pro- met des résultats avantageux que je me propose de poursuivre. Il n’est pas inutile d’observer que ce savon de laine peut remplacer avec avantage le savon ordinaire dans les usages domestiques : je l’ai fait servir avec avantage pour blanchir et dégraisser le linge, et suritout les étoffes en laine, etc, Je ne doute pas que la facilité et l’économie que présente sa fabrication n’en multiplient encore les usages ; mais, en attendant, j’ai cru devoir présenter les diverses applications que j’en ‘ai faites. 102 MÉMOIRES DE FUN. AS OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES FAITES À VIVTERS, DÉPARTEMENT DE L'ARDÈCHE, Par Honoré FLAUGERGUES, membre associé. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 16 prairial an 4. Observations faites depuis le mois ventôse jusqu'au mois germinal de l'an 4. 10, Os de l’occultation de d\'' du Taureau, le 24 ventôse (14 mars 1796). Temps apparent. M Try 30169 Immersion à « . « + + + + + + + + + + Énerdion ae eee Dee ETS O3 Conjonction vraie à 6h 56° 6'8, temps apparent, ou 7h 5 13"1, temps moyen, en Is 4° 0" 48"2 de longitude, comptée de l’équinoxe apparent. Différence des lati- tudes , 30° 20'3; latitude vraie de la Lune, 3° 29° 2"7 australe. Erreur des tables de M. Charles Mason : en longitude + 92, en latitude + 43. Le lieu apparent de l’étoile a été calculé d’après la position moyenne de cette étoile, tirée du catalogue inséré dans la Connois- “codant ET) DE PHYSIQUE: 103 Sance des temps pour l’an 4. Et pour calculer ceite conjonction , ainsi que les suivantes, j’ai retranché 12 du temps des observations, afin de tenir compte du re- tard occasionné par le temps que la lumière emploie pour parvenir de la Lune à la Terre, ainsi que j’ai remarqué qu’il étoit essentiel de le faire, dans un mé- moire que j’ai eu l’honneur d’adresser à l’Institut na- tional des sciences et des arts, et au Bureau des lon- gitudes. D’après l’observation faite à Paris par les citoyens Bouvard et Messier, jai trouvé la conjonction vraie À 6h 46° 413, temps apparent, ou à 6h 55° 47'6, temps moyen ; erreur des tables, + 91. L'observation de Pime mersion ayant été faite à l'Observatoire national , et celle de l’émersion au ci-devant hôtel de Cluny, j’ai calculé séparément les deux phases, en supposant exacte la lati- tude de la > tirée des tables, et j’ai conclu lé temps de la conjonction vraie, en-prenant le milieu entre leurs résultats, qui étoient très-peu différens, et tenant compte, comme de raison, de la différence en longitude des deux observatoires. J’ai calculé de la même manière les deux phases de mon observation, et le temps apparent de la conjonction vraie qui a résulté de ces calculs à été 6h 56! 64, ce qui donne 9° 251 pour la différence des méridiens entre mon observatoire et celui de Paris; ce qui ne diffère que de o'3 de la différence 9° 248 que j'avois conclue de cinq observations choisies et calculées avec soin. En joignant cette observation aux cinq autres, la différence moyenne des méridiens qui en résulte, est 104 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES encore 9 24'8. Les triangles de la méridienne donnent 9 229, dans l'hypothèse de l’applatissement—1-, qui est celle que j’ai suivie dans mes calculs. D’après l’observation faite à Toulouse par le citoyen Darquier, qui a observé l’immersion à 7h 15’ 455, et l’émersion à 8h 15° 32'6, j'ai trouvé l’erreur des tables en longitude + 13", en latitude + 207, et la conjonc- tion vraie à 6h 43° 13'6, temps apparent; ce qui ne donneroïit que 3° 277 de différence en longitude avec l'Observatoire national de Paris, au lieu de 3 35” qu’il y aréellement. Je soupçonne qu’il s’est glissé quelque erreur de chiffre dans la note que cet habile astronome a bien voulu me communiquer. J’ai reçu des observations complètes de cette occulta- tion , faites à Montauban par le citoyen Duc-la-Chapelle; à Gotha, par M. de Zach; à Genève , par M. Pictet, etc, Je travaille actuellement à leur réduction. | 2°, Observation du contact de d° du Taureau, et d’une petite éminence proche de l’extrémité de la corne australe de la Lune, le 24 ventôse (14 mars 1796). Temps apparent. Confactix 1. ut ET I ME UE ANSE La méthode que j’ai suivie pour déduire de cette ob- servation la conjonction vraie, m’ayant paru pouvoir être utile , je me propose d’en faire l’objet d’un mémoire particulier; de sorte que je n’en dirai rien ici. 3°. Observation de l’occultation de dŸ du Taureau, le 24 ventôse (14 mars 1796). Émersion à 04 Mi Ne MUST ot 146 a? ce. cé teté ET DE PHYSIQUE. 108 * Conjonction vraie à 8h 4’ o"4, temps apparent, ou à 8h 13'5"9, temps moyen, en IIs 4° 40’ 364 de longitude, comptée de l’équinoxe apparent. Erreur des tables en longitude, + 14'3. La position apparente de l'étoile a été calculée d’après la position moyenne de cette étoile, tirée du catalogue inséré dans la Connoissance des temps pour 1795. 4°. Observation de l’occultation de la 194° étoile du catalogue de T. Mayer, dans la corne australe du Tau- reau, le 25 ventôse (15 mars 1796). T'emps apparent, Immersion à... 1.1. + A et 1 2 LUE Er LE al? D 8* 58° 253 5°, Observation de l’occultation de la 14° étoile des Gémeaux, dans le catalogue britannique, le 26 ventôse (16 mars 1796). AUnimemon dl aie is lis: Dre lriadstihnerrates re 8° 32° 2” 6°. Observation de l’occultation de deux petites étoiles proche et un peu au nord de ; du Taureau, le 22 ger- minal (11 avril 1796). Immersion de la première à , , , , «2. 7 7. . 7" 43 38°5 . Tumersionçde la seconde à .,4 , , some %), ,:e + 9 | 7 28.1 7°. Observation de l’occultation d’une étoile de sep- tième grandeur, proche et au sud de # des Gémeaux, le 23 germinal (12 avril 1796). MTRINEISION de 21e ar. 2 AUS eee (0 Brel 75 7107 20 00 7# f 8°, Observation de l’occultation de la 83° étoile du 1. 14 106 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Cancer, dans le catalogue britannique, le 26 germinal (15 avril 1796). Temps apparent. MIMETSIOIL AT eee a eo de an ea l 101 sMet elle ro Ne TT 9" 39’ 53°8 9°. Observation du contact de la sortie de à du Sa- gittaire de derrière le disque de Mars, le 29 germinal (17 avril 1796). Contact du disque et de l'étoile. , . . { Le2ggerm., à 3° 58° 25" mat. Le 17 avril, à 15 58 25 L'étoile paroïssoit extrèmement pâle; on ne voyoïit d'intervalle entre Mars et Pétoile qu’un petit filet cor- respondant, pour sa largeur , à la partie obscure visible du disque de Mars. Le point du contact étoit au-dessus du diamètre horizontal, 20° à l’occident du vertical. D’après un premier calcul, je trouve que l'étoile a dù être occultée pendant environ 10' +; et qu’elle a dû passer à une seconde environ en dedans du disque de Mars. Je me propose de calculer avec soin cette obser- vation, qui peut servir à déterminer avec précision le lieu du nœud de Mars, la latitude de l'étoile étant fort petite. 10°. J’ai observé, avec ma lunette de dix-huit pieds, qu’il y a au sud de la nébuleuse d’Orion une seconde nébuleuse fort pâle, d’une figure ovale alongée , et d’une teinte parfaitement uniforme dans toute son étendue. 11°, Dans les nouvelles Lunes de ces deux, mois, j’ai observé qu’il y avoit deux éminences au bord austral de la Lune, fort élevées, et qui étoient éclairées , quoi- ET DE PHYSIQUE. 107 qu’elles fussent assez éloignées de l'extrémité de la corne australe de la Lune. Observations du mois floréal de Pan 4. 1°, Observation sur Vénus. Depuis le 14 floréal, j’ai vu Vénus en plein jour, à la vue simple, toutes les fois que le ciel a été serein. 2°. Observation d’un halo double autour du Soleil, le 20 floréal (9 mai 1796). À onze heures du matin il a paru un halo double au- tour du Soleil ; savoir, 1°. un halo ordinaire concen- trique au Soleil, de la forme et de la grandeur ordinaire, coloré des couleurs prismatiques, le rouge en dedans et le bleu en dehors ; en second lieu, il y avoit un grand cercle blanc, d’un diamètre à peu près égal à celui du précédent, qui passoit par le Soleil dans sa partie infé- rieure, et coupoit le précédent en deux points opposés. Les parties communes étoient blanches , et un peu plus éclatantes que le reste du cercle; le bord extérieur de ce cercle étoit mal terminé en certains endroits, et comme frangé. Le ciel étoit en partie couvert de nuages rares poussés par le vent du sud. Ce phénomène a duré en- viron une heure, et s’est évanoui ensuite peu à peu, 30, Observation de éclipse du quatrième satellite de Jupiter, le 28 floréal (17 mai 1796). T'emps apparent, Immersion à . éco r es es ose so ee 0 15° 42° 357 108 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Le ciel étoit serein ; le crépuscule commençoit à être un peu fort, et il y avoit quelques vapeurs. Cette ob servation a été faite avec ma lunette de dix-huit pieds. D’après cette observation , l'immersion a dà avoir lieu pour Paris à 15h 33° 10"; ce qui feroit une anticipation de 5’ 15” sur le calcul de la Connoissance des temps. Je crois bien que le crépuscule et les vapeurs ont pu produire une anticipation de 15 à 20”; mais le surplus me paroît devoir être attribué très-certainement à ler- reur des tables. P 4°. Observation sur Mars, le 29 floréal (18 mai 1796). J’ai observé Mars avec ma lunette de dix-huit pieds. - Vers 3» du matin j'ai vu dans la partie australe de cette planète une grosse tache formée en espèce de fer à cheval. Observations faites pendant les mois prairial et messidor de l'an 4. 1°. Observations sur les taches du Soleil. Depuis le 15 prairial (3 juin 1796) jusqu’au 30 (18 juin) à 6h du soir, il n’a paru aucune tache sur le Soleil; ce dernier jour il en parut deux petites, qui dis- parurent le 3 messidor (21 juin). Le Soleil resta sans taches jusqu’au 9 (27 juin) qu’il en parut quatre, dont une assez grosse, entourée de nébulosité. Cette tache avoit une partie plus claire dans le milieu, et elle se partagea en deux le 17 messidor (5 juillet). Le même ET DE PH vYS 1Q UE : 1oÿ jour il en parut une nouvelle. Le 23 (11 juillet) il en parut deux autres, qui disparurent le 25 (13 juillet). Ce même jour il en reparut une autre, qui disparut dans la nuit du 25 au 26. Le 26 (14 juillet) il parut un grouppe de petites taches , qui dura jusqu’au 28. Les 29 et 30 (17 et 18 juillet) 1 Soleil fut sans tache. J’ai- observé toutes ces taches, pendant toute la durée de leur apparition, à la manière ordinaire, par les passages au fil vertical et au fil horizontal de ma lunette. Je me suis fait une loi d’observer ainsi toutes les taches qui paroïtront sur le Soleil. Lorsque j'aurai fini les calculs nécessaires pour déterminer leur position , j'aurai l’hon- neur d’en présenter le résultat à l’Institut, comme mes autres observations: 2% an de Péclipse du premier satellite de Jupiter, le 30 prairial (18 juin 1796). Temps apparent . . . . . . . . . 14*32'26"7 Temps MOYEN « + + + + + + + « 14 32 34.5 Immersion . . . . . { Réduit au méridien de Paris. . . . 14 23 9.7 Suivant les tables du cit. Delambre. 14 24 Différence cite 1.2 DR PAR AUE CPE AO PE 51.5 30. Observation de l’éclipse du troisième satellite de Jupiter, le 6 messidor (24 juin 1796). Temps apparent à . . . . . . , . 14° 2156” Temps moyen à . . .… . . . + 14 4 7.6 Réduit au méridien de Paris . . . . 13 54 42.8 Suivant les tables du cit. Delambre . 13 50 48.3 Différence "MMM AUS QE — 13 54.5 Emersion , . +. 110 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 4°. Observation de l’éclipse du troisième satellite de Jupiter, le 13 messidor (premier juillet 1796). Temps apparent à . . . . . . . . 14" 36°25"6 Temps moyen à , . . SNS a 4 40 1.7 Immersion . «+ + .:( Réduit au méridien de Paris. +. . 14 30 36.9 Suivant les tables du cit. Delambre . 14 29 16.1 Ditférencelcueleiiese euclleletelle le == 12024 $o. Observation de l’occultation d’une étoile de sep- tième grandeur au-dessous de w du Taureau , le 13 mes- sidor (premier juillet 1796). Temps apparent à. . . ... . + . . 153 53 EEE L SELS 2 « NF AE MONO RENPE ND Etes MON MONTRES J'ai apperçu l’étoile un peu éloignée du disque obscur de la Lune, éclairé par la lumière cendrée. lé. Observation de l’éclipse du premier satellite de Jupiter, du 16 messidor (4 juillet 1796). Temps apparent à . . . . . . . . 12" 44358 Temps moyen à . . . . + . + + + 12 48 43.6 Immersion . « « . . ( Réduit au méridien de Paris, . . . 12 39 16.8 D’après les tables du cit. Delambre . 12 39 44 Difierence Me Ne leu Tee SE MET: 25.2 7°. Observation de léclipse du premier satellite de Jupiter, le 23 messidor (11 juillet 1796). Temps apparent à . 1. . . . . . . 14" 36'54” Temps moyen à . . « «+ « . + . . 14 42 5.5 Immersion . . , . . € Réduit au méridien de Paris. . : . 14 32 40.7 D’après les tables du cit. Delambre . 14 33 42.9 Différence. VIN MM EMTENN". 1 2.2 0 U ŒUT 0 DE (PH Y SI QU €. T1Yx Cette observation a été faite avec une lunette acroma- tique de vingt-sept pouces, des circonstances m’ayant empèché de me servir de ma lunette ordinaire de dix- huit pieds. Cela peut avoir anticipé l’immersion de 15 à 18° 8°. Observation de Péclipse du second satellite de Jupiter, du 25 messidor (13 juillet). Temps apparent à ... . . . . . . 15*19 19 Temps moyen à . . . . . . . . . 15 24 27.5 Immersion . . . . .4 Réduit au méridien de Paris. . . . 15 15 2.7 Suivant les tables du cit. Delambre . 15:16 20:3 a Différence . à .{. lie), cie ff 1176 Observations faites pendant les mois thermidor et ol fructidor. 1°. Observations sur les taches du Soleil. Le premier thermidor (19 juillet 1796), à 7h : du matin , il parut une tache ronde, assez grosse, vers le milieu du disque, suivie d’une autre tache fort foible. Cette dernière disparut le lendemain, et la première étoit fort affoiblie. Le 3 thermidor (21 juillet}),.à 7h + du matin, cette tache ne paroissoit plus. Le 3 etle 4 (21 et 22 juillet), le Soleil fut immaculé. Le 5 (23 juillet) ; à 8h du matin, on commençoit à voir une tache assez longue ; qui passoit de l'hémisphère supérieur à l’inférieur. Le 11 (29 juillet) il en parut une autre. Ces deux taches disparurent dans la nuit du 13 au 14 112 MÉMOIRES: DE MATHÉMATIQUES (31 juillet au premier août}, et le Soleil resta absolu- ment immaculé jusqu’au premier fructidor (18 août), où un amas de taches légères parut dans la matinée ; mais cet amas ne dura que quelques heures : le Soleil fut de nouveau immaculé jusqu’au 14 fructidor (31 août), vers 11h £, jour auquel deux nouvelles taches commen- cèrent à paroître , passant de l’hémisphère supérieur dans l'hémisphère inférieur. Ces taches parurent le lende- main divisées en un grand nombre d’autres taches, parmi lesquelles on distinguoit plusieurs espaces arron- dis, beaucoup plus clairs et plus lumineux que le reste du disque. Une de ces taches disparut le 23 (9 sep- tembre}), et la seconde le 27 (13 septembre). Depuis cette époque le Soleil m’a toujours paru immaculé. 29. Observation de l’éclipse du premier satellite de Jupiter, le 2 thermidor (20 juillet 1796). Temps apparent à . , . . . . . . 1058513 Temps moyen à +. . . . . . . rit 46;:2 Ymmersion . .« .« .« . { Réduit au méridien de Paris. . . , 10 55 23.4 Suivant les tables du cit. Delambre , 10 56 3.4 Différence rte ee le + le 101409 30. Observation de l’éclipse du premier satellite de Jupiter, le 9 thermidor (27 juillet). 1} 7 : Temps-moyen à . . . e:. + + + + 12,66 16.1 Ymmersion . . . . . Réduit au méridien de Paris. . . . 12 48 51.3 Suivant les tables du cit. Delambre. 12 5e 3.2 Différence. fs nent CNED, STE ES Temps apparent à + 6 . . . . . + 12"52' 13" LU ŒTp à 5 1 pif v sir Q ÙU Ed: 113 40. Obsérvation de l’éclipse du premier satellite de Jupiter, du 16 thermidor (3 août). Temps apparent à... .!. . . , 214*46' v’9 Temps moyen à. ,.11 .}. . . . 14 51 46.6 Immersion douteuse . { Réduit au méridien de Paris . . . . 14 42 22.0 Suivant les tables du cit: Delambré . ‘14 44.16.8 Différence . . . .f sl... Li: Vs 24e 50: Observation de l’éclipse du troisième satellite de Jupiter, du 19 thermidor (6 août). Temps apparent à, . + «+ . + . . 1036233 ; . | Temps moyen à .,. . «1. . . « . 10 41 44.4 Immersion . + .: « . { Réduit au méridien de Paris. . . . 10 32 19.6 ( Suivant les tables du cit. Delambre. 10 31 22.6 Différence. . . . . . . . + . . .« — O0 57.0 J J’ai attendu vainement, sur l’annonce des Ephémé- rides.et.de la Connoissance des temps j Vémersion ; elle s’est faite derrière le disque de, Jupiter. 6°.. Obseryation de l’éclipse du second satellite de Jupiter, le 20 thermidor (7 août 1796). Temps apparent à . « . . . . . . 12*26/ 494 Temps moyen à +: NE Q6 ), 2901412032 2.4 Immersion , . . . . Réduit au méridien de Paris. . . . 12 22 37.6 Suivant les tables du cit. Délambre .. 12 24 51,8 Différence 51% 0 M. Le joe 22 7°. Observation de l’éclipse du quatrième satellite, le 22 thermidor (9 août). Temps apparent à 1,04 1.1. 10" 30") 2/8 4 Temps moyen à... . . . se «7e, 10,43. 59.7 Immersion , + 1° + Réduit au méridien de Paris. . . . 10 34 34.9 + Suivant les tables du cit. Delanibre. 10 39 42.3 d Différence 41,700 MOMIE. 2100 064 7149 16 19 14 MÉMOIRES DE MATHÉMATDIQUES Temps apparent à . .:. . …. . . Temps moyen A PEUT ONE LAS EN Émersion « + . «+ « L Réduit au méridien de Paris. , . . Suivant les tables du cit. Delambre . Différence £' 455 d4l 205 MAR OUEN 15 11° 54"4 15 16 49.6 15 7 24.8 15 7 44.3 + 19.5 8°. Observation de l’éclipse du troisième satellite, le 26 thermidor (13 août). Temps apparent à . . . . . . . . Tempsimayen ht teNslstenals 011 Immersion . . . . .( Réduit au méridien de Paris. . . . Suivant les tables du cit. Delambre . DiÉrénce ri RENE ele te 1 à 14 39° 25 14 43 17.4 14 33 52.6 14 32 10.2 — 1 41.6 9°. Observation de l’éclipse du premier satellite de Jupiter, le 9 fructidor (26 aeût 1796). Temps apparent à . . . : - . . . Temps moyen à . . . . . . + . . Immersion douteuse : ( Réduit au méridien de Paris. . . . Suivant les tables du cit. Delambre . Difiérence 24 rer LS RNA NI 10°. Observation de l’occultation de 6 du le 9 fructidor (26 août). Faro on Les -{ Temps apparent à . . . . + - . Temps moyen à . . .,. le + + - bon! 5 tof Temps apparent à « . . . . . + « Temps moyen à «+ « . « + + « , : 21521,0 9 15 3 15.9 14 53 51.1 14 55 59.5 + 2 8.4 Taureau, 16 23 27"4 16 24 33.4 17 13 50.3 17 14 55.7 Conjonction. géocentrique vraie à 7h 28’ 28'5, temps apparent, ou 17h 29° 33'7, temps moyen; au méridien de mon observatoire, en IIS 21° 56° 41'8 de longitude, compiée de l’équinoxe moyen. Différence des latitudes, BRU OUT. IQDUE 2 NE US + 2070 115 40" 28'8. Latitude de ‘la Lune, 1° 32° 377 australe, Erreurdes tables (Astronomie de Lalande ; troisième édition), en long. — 377, en lat. + 1'0. Le temps de cette conjonction est diminué de 1” pour le temps que la lumière -emploie à -venir de la Lune à la Terre ; et jai employé le lieu vrai de l'étoile, mais ‘en y appliquant aberration on aura le lieu appa- rent , et l’on en déduira facilement la conjonction avec le lieu apparent de l'étoile. | “11°, Observation: de éclipse du premier satellite de Jupiter, le 12 fructidor (28 août). Temps apparent à . . . . . . . . o*32'340 Témps moyen à Kg pee URI 9 33.10.2 Îmmersion douteuse .{ Réduit au méridien de Paris . . . . 9 23 45.4 Suivant les tables du cit. Delambre, 9 24 41.5 Différencesc il" 91 ste rod 0 066.1 120, Observation de l'éclipse du ‘Secbnd satellite de Jupiter, le 15 fructidor (premier, septembre ). ‘{ Temps ‘apparent à . : . frarani te 14133 1379 [rem moyen à . « . DIRinNe Miel 28 34.4 Émersion . . . . .{ Réduit au méridien de Paris. . . . 12 23 9.6 111 FU ‘Suivant les tables du cit. Delambre . 12 22 22.9 DUR To 2 VA MN EMMA PNR PRE 46.7 13°. Observation de Péclipse du premier satellite de Jupiter, du 18 fructidor (4 septembre). Témps'apparent à . 5 . . « . : . 13°46 58/5 Témps moyen à . . . . +. . . . 13 45 20.8 Émersion . . , + + À Réduit au méridien de Paris. . . , 13 35 56.0 : Suivant les tables du cit. Delambre, 13 33 56.7 Différence, MMS HS. — 1 593 116 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 14°. Observation de léclipse du premier satellite , le 20 fructidor (6 septembre) :... . . 18h12’ 27"t. m. 150. PA du second satellite, le 22 :htev L sioloetetontsmit : 2e adire06 x Ftirrbse faites pendant les mois nivése, pluviôse et ventôse de l'an 5. 1°, Occultation de la trente-troisième des Poissons, suivant le catalogue britannique, le 4 janvier 1797. * Temps apparent à. 5 .,.N. . . . . 7"17 327 Temps moyen à NAS, CRETE TE = 26.0 Émersion très-exacte . 29, Observation de l’éclipse du quatrième satellite de Jupiter, du, 7 janvier 1797: Témps'apparent À 7 7 25 Te 4 12° 244 Immersion très -incer-} Temps moyen à . . .,. « . . 7 19 35.6 taine . . . . . .( Réduit au méridien de Paris . . . . 7 10 11.0 Suivant les tables du cit. Delambre . 7 17 26,6 Erreur des tables . . . . . . . . 12 7 15.6 30. Observation de l’occultation de : du Taureau, du 9 janvier 1797. A + k 0 7 sn tès-exactef Temps apparent à. , 7, . . . . 8 4 86 Temps moyen à , . .. . . + . + 8 55 11.1 Temps apparent AE in 9 51 11.8 Émersion fort exacte . { Temps moyen à, . »-.h + + + + «+ 9 59 15.4 BOTN DIE EH VIS 1,0 U EF. 117 4. Observation de l’occultation de Saturne, du 10 1 janvier 1797, ciel très-nuageux. Immersion du bord occidental du globe de Saturne, assez pré- ciseytemps apparent . 1.1 NIQUE Dore N12028 120.0 em ?itemps moyen ain one EU MEN LU 12 36 56.5 Immersion du centre, douteuse , temps apparentà. . + . ., 12 28 45.6 Idem, temps moyen à. . sonores ses es ee +, 12 37 16.5 Émersion du bord occidental du globe de Saturne, un peu dou- teuse, temps apparent à, . . . . . . . . . . . . . .. 13 36 31.7 Tdem, temps moyen à . . . . . . :,. . . . . . . . .. 13 44 32.8 Émersion du bord oriental de l'anse orientale, ou émersion totale de Saturne, assez précise, temps apparent à . : . . . . 13 36 25.7 PRÉ tempstmoyent eee let rit te is 44 56.8 Lors de limmersion, l’anse occidentale ma paru courbée contre le bord de la Lune , probablement par un effet de l’atmosphère de la Lune ou de la distrac- tion dont il est parlé dans plusieurs auteurs. Voyez VAstronomie , art. 2276, 2488. Cette apparence fut également remarquée dans l’occultation de Saturne , dont il y a une figure dans les anciens Mémoires de l’Académie, tome X. J'ai employé pour cette obser- Yation la lunette acromatique. 5o, Observation de l’éclipse du troisième satellite de Jupiter, du 18 janvier 1797. NET douteuse , a(- Temps apparent à. . .. . . ...,./7"16", 6/6 Hempslimayenti eus 0-- iles 7 27, 18.6 Réduit au méridien de Paris . . . . 7 17 53.8 . Suivant les, tables du cit, Delambre . 7 25 17.0 Différence ht NPA NEUTRE RTE 7 23.2 cause de la grande proximité du satellite ‘ de Jupiter + 4 , : 118 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 6°. Observation de Péclipse du premier satellite de Jupiter, du 31 janvier 1797. Temps apparent à. . . . . . , + . 5"59' 544 Immersion exacte, va-| Temps moyen à + . . . . « « + . 6 13 56.2 peurs légères . . . { Réduit au méridien de Paris . . : . 6 4 31.4 Suivant les tables du cit. Delambre . DifÉXENCENA FA RRIRS - celle cire 7°. Observation de l’occultation d’une petite étoile dans le lien des Poissons, le 2 février 1797. Temps apparent an ec eleue 0120 2pe Immersion très-exacte- Temps moyen à . . . . . . . . . 6 26 48.7 8. Observation de l’occultation d’une petite étoile dans Le cou du Taureau, le 5 février 1797. Temps apparent à . . . . . . . . .) 73263"3 Tempÿ moyen À « 4 5, . (5 .. 747 23,3 Immersion très-exacte { 9°. Observation de l’occultation d’une petite étoile des Poissons, le premier mars 1797. à Les’ on Trees Hall Rte -{ Temps apparent à. . . . . . « . . 7" 56579 Temps moyenà. . . « + . « . - . 8 9 25,6 10°, Observation de l’occultation d’une petite étoile du Belier, le 3 mars 1797. s v 0 Immersion très-exacte.f TemPS apparent à. . . . . . . . . 7 1719 3 Temps moyen à . . . . . . . . . . 7 13 34.8 119. Observation de Poccultation de » du Scorpion, le 17 mars 1797. Temps apparent à © . . . . . . . 13° 453% Émersion très-exacte . { " Fempsimoyen atteste 19 19 00:38 ET DE VMHYS1IQUE. 119 12°. Observations sur les taches du Soleil. Le Soleil a resté immaculé jusqu’au 5 janvier 1797 qu’il parut une petite tache au bord oriental de “cet astre, visible jusqu’au 11 que le Soleil parut de nou- veau immaculé jusqu’au 19. Ce dernier jour, une petite tache parut près du bord oriental; on la voyoit encore le 27. Le 29 il parut un gros amas de taches vers le bord occidental, avec une grande déclinaison australe. Le 31 janvier et le premier février il ne restoit plus de cet amas que deux taches prêtes à disparoître. Deux autres taches parurent le 6 février, assez loin du bord oriental. Je ne pus revoir le Soleil que le 15; il étoit immaculé, et il le fut jusqu’au premier mars, jour auquel il commença à paroître une grosse tache que les mauvais temps m’empêchèrent de suivre. Le 17, le Soleil étoit immaculé, et il le fut pendant tout le reste du mois. 120 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES EXPÉRIENCES FAITES PAR ORDRE DU GOUVERNEMENT, SUR LA NAVIGATION DE LA SEINE, Par ForFAIT, membre associé. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut , le 16 thermidor an 4. Lx gouvernement , éprouvant, pendant la disette de l’an 2, de grandes difficultés pour faire parvenir des subsistances à Paris, prit un arrêté, le 21 vendémiaire de lan 3, portant qu’il seroit construit des bateaux propres à monter et à descendre la Seine en tout temps, et à naviguer à la voile, et qu’un ingénieur construc- teur de la marine et un ingénieur des travaux publics monteroient ensemble sur un de ces bateaux, depuis Rouen jusqu’à Paris, afin de connoître les diverses positions de la rivière , pour le perfectionnement de cette navigation. Cette mission , qui éprouva depuis quelques obstacles, vient d’être remplie. Le lougre le Saumon, commandé par le citoyen Thibaut, lieutenant de vais- seau, est arrivé du Havre à Paris, avec un chargement de farine , en seize jours de navigation effective, maïs ralentie par mille circonstances. L’ingénieur Sganzin, pour les travaux publics, et l’ingénieur Forfait, pour. Mer L DE: PAR visir Q:u x: IT, mat la marine , y étojent embarqués, et ont fait les obser- vations ordonnées. Le lougre /e Saumon a été construit à Rouen pendant Vhiver de lan 3 ; il a soixante-quinze pieds de longueur, dix-huit de largeur, et huit et demi de creux. Ce problème de construction navale n’étoit pas sans difficultés. Pour naviguer à la voile dans une rivière où le courant est rapide, il falloit une forme propre à di- viser le fluide ; et cependant on ne pouvoit pas adopter les formes de carènes aiguës , parce qu’elles auroient demandé un trop grand tirant d’eau. À l’exemple des bateaux de rivière, on a donné à la proue une configuration telle, que ses coupes, faites suivant un plan vertical et parallèle à l’axe diamétral longitudinal , sont fort aiguës à Pavant; tandis qu’au contraire les coupes faites pa- rallèlement à la surface de l’eau sont fort obtuses. Cette forme paroît la meilleure pour naviguer sur une eau tranquille ; et la pratique des mariniers des fleuves con- firme à cet égard les spéculations des constructeurs. 11 a bien fallu donner au fond du navire une cour- bure très-médiocre, pour qu’il pût porter une charge raisonnable sans tirer trop d’eau. La même raison a forcé de donner à sa quille très-peu de saillie en dessous du bordage. C’est donc un bâtiment à fond plat : la navigation des rivières et des canaux n’en admet point d’autres ; et ces formes, consacrées dans la marine des peuples du nord, et particulièrement des Hollandais, se concilient parfaitement avec l’immense activité de leur navigation. 1, 16 122 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Le Saumon, arrivant à Paris, avoit de charge effec- tive soixante-dix tonneaux de farine et autres effets ; il tiroit quatre pieds quatre pouces. Lorsque les crues per- mettront de lui faire tirer six pieds six pouces , il pourra porter cent soixante tonneaux, ou trois cent vingt mil- liers ; et comme il est possible de faire des navires un peu plus grands que /e Saumon, et de supprimer quel- ques établissemens inutiles dans ee bâtiment , et quitien- nent à son armement comme vaisseau de lPétat, on peut entrevoir qu’il sera facile de faire des navires pro- pres à naviguer sur la Seine et à la mer, qui, ne tirant que six pieds et demi d’eau, porteront deux cents ton- neaux, et pourront remonter de la mer à Paris, au moins pendant huit mois, avec leur chargement complet. Le gouvernail, avec ses dimensions ordinaires, n’au- roit pu suffire pour diriger un bâtiment de cette espèce ; et cependant, si on lui en eût donné un plus grand , il wauroit pu manœuvrer dans la grosse mer. On a pris le parti de faire à la partie de l’arrière du gouvernail une rainure dans laquelle on engage-un petit gouvernail additionnel qui tient avec deux crochets au premier, et se manœuvre avec la même barre. Ce méchanisme simple a parfaitement réussi. Il falloit, pour passer sous les ponts, un système de mâture tel, que le poids des mâts et celui du grément qui leur seroit indispensablement fixé, fût le moindre possible. Cette considération importante a déterminé à mâter Z Saumon en lougre ; on y a trouvé en même temps l’avantage de présenter au vent, quand il seroit BATLDIE I MAT AUS iQ 0 E: 128 contraire, moins de surface qu'avec toute autre espèce de voilure. On ne s’est pas dissimulé que la manœuvre des voiles est laborieuse et demande beaucoup de bras ; mais c’étoit un objet de médiocre conséquence dans une campagne d’expérience, où le bâtiment , armé pour la République , auroït certainement un équipage nombreux. La voilure de lougre, appliquée sur le Saumon, à eu du succès. Ce bâtiment marche mieux que tous les na- vires du commerce avec lesquels il s’est essayé ; il pour- roit même lutter, vent arrière et largue, contre beau- coup de bâtimens de guerre : mais on ne pouvoit pas s’attendre qu’il tint le plus près ; c’est une qualité dont il faut nécessairement faire le sacrifice à celle de tirer peu d’eau; il dérive cependant moins que les bâtimens du nord. , La manœuvre d’abattre et de relever les mâts devoit se faire onze fois pour passer sous onze ponts : elle de- voit se faire avec promptitude, pour ne pas causer de retardement ; elle devoit être sûre, car un accident eñt été bien funeste, et la vie de plusieurs hommes seroit en danger si l’appareil qui sert à la manœuvre des mâts venoit à manquer. Cependant ces mâts sont énormément lourds : le plus grand a cinquante-huit pieds de longueur , quatorze pouces de diamètre au gros bout, neuf au petit; il pèse trois milliers, et porte à sa tête un appa- reil de cordages et de poulies qui pèse encore un mil- lier. Cette masse doit tourner autour d’une cheville ouvrière qui traverse le mât à six pieds du gros bout, et; sans aucun point qui soutienne son autre extrémité, ES 194 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES passer de la situation verticale à la situation horizon- tale. ' Une simple caliorne suffit pour faire cette opération. Le cordage de cette caliorne se garnit à un petit mou- linet que l’on fait tourner à l’aide d’une lanterne qui engrène avec une roue dentée montée sur son axe. Cet appareil, que l’on nomme improprement cric, mexige que six hommes sur deux manivelles, pour enlever ou pour abattre le plus grand mât en sept ou huit minutes, et les autres dans un temps moiïndre, à raison de leur pesanteur et de leur volée; mais, dans le temps de l’évolution, les mâts sont sans cesse contenus par des cor- dages qui maintiennent leur pied tellement, que, quand même l'appareil principal casseroit, ils resteroient au point d’inclinaison où cet accident seroit survenu. Les mâts du Saumon s’abattent et se relèvent en vingt minutes, au moyen de l’appareil qu’on vient de décrire, Le reste du grément, les vergues, les mâts de hune, tout se déplace et se replace dans le même temps, et rien n'empêche de faire toutes ces manœuvres pendant que les chevaux halent; de sorte qu’il n’y a point de temps à perdre. Maïs cette précaution est inutile ; les dispositions des maîtres de pont sont si longues, que l’on a toujours trois fois plus de temps qu’il n’en faut pour manœuvrer les mâts. Les différentes évolutions qu’on a fait faire aux mâts du Saumon ne laissent rien à desirer, ni sur la promp+ titude de la manœuvre, ni.sur la solidité des machines qui servent à son exécution. Il faut cependant observer EUT UDIE TP H YS QU E 126 que les mâts de ce bâtiment ont été faits avec des sapins excrus dans le département de la Seine-Inférieure ; que ces bois étant de qualité très-médiocre, on a donné aux mâts de plus forts diamètres ; qu’on a de même augmenté la grosseur des cordages et des poulies qui leur appar- tiennent; enfin, que la pesanteur spécifique des bois de France, qu’on ne peut employer qu’au sortir de la - souche , est d’un cinquième plus grande que celle des bois pins du nord. Il y a donc une certitude démontrée qu'avec des moyens semblables on maïñœuvreroit à vo- Jonté les mâts de tous les navires propres à remonter la Seine, qui seroient construits dans le même système que le Saumon, et ne s’éleveroïent pas au-dessus du port de deux cents tonneaux. Quoi qu’il en soit, il ne paroît pas impossible de rendre encore plus simple la ma- nœuvre d’abattre, et de relever les mâts : et c’est ce dont les artistes doivent s’occuper, en adoptant un système de voilure qui permette de diminuer le nombre des hommes d'équipage autant qu’on le pourra ; car il est évident que sous ce rapport la mâture en lougre ne peut être avantageuse quand les nawires excéderont cent ton- neaux.de port : maïs on verra, dans la suite de ce mé- moire , que l’art offre des moyens faciles et peu dispen- dieux, pour éviter le passage des ponts, et procurer en même temps de grands secours à la navigation de la Seine; de sorte que si les projets qui sont soumis au gouvernement avoient un jour leur entière exécution, les navires tout gréés remonteroient à Paris sans ob- stacle. 126 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Pour éviter la manœuvre des ancres, on avoit imaginé de fixer aux flancs du lougre Ze Saumon des perches très-fortes, longues de trente pieds, dont le gros bout, enchâssé dans une galoche contre le bord , tournoit autour d’une grosse cheville, et dont le petit bout, garni d’une pointe de fer, devoit s’engager dans le fond, et retenir ainsi le navire sur deux espèces d’arcs-boutans. Ces pièces ont été essayées plusieurs fois : tantôt elles ont réussi; tantôt elles ont glissé sur le fond sans s’y fixer ; tantôt le bâtiment a été porté plus fortement sur l’une d’elles, qui auroit rompu si Pon n’eût mouillé Vancre pour venir à son secours. Jailleurs il a été re- connu que par-tout on mouilloit et levoit l’ancre avec la plus grande facilité, que les arcs-boutans étoient plus embarrassans qu’utiles ; de sorte que , quoiqu’on entrevit des moyens d’en simplifier le jeu et d’en améliorer la construction, cependant on s’est déterminé à les aban- donner comme inutiles. | Les préparatifs dont on vient de donner une idée étant finis, le Saumon est parti du Havre. La traversée de ce port à Rouen n’a pu rien offrir de remarquable pour l’objet principal de la mission, puisqu'il y a toujours dans la Seine, au-dessous de Rouen, de l’eau pour les navires de deux à trois cents tonneaux. Les commis- saires ont observé cependant, et consigné dans leurs rapports, que de tous les projets qui ont été formés dans le dessein d'améliorer la navigation à Pembouchure de la Seine , qui est obstruée par des bancs de sable chan- geans, celui qui mérite la préférence est le plan de ET DE PHYSIQUE. 127 Yingénieur Lamblardie ; il consiste à ouvrir un canal qui prenne des environs de Villequiers, et passe par Harfleur, pour communiquer avec le canal de Vauban , qui débouche par le port du Havre, Si ce travail étoit exécuté, les navires entreroïent en Seine par tous les vents et dans tous les temps, au lieu qu’il leur faut le concours du vent et de la marée. Des bâtimens de quinze à seize pieds de tirant d’eau remonteroient à Rouen, au lieu que le plus grand tirant d’eau de ceux qui fré- quentent ce port est de neuf pieds. Enfin il n’ÿ auroit aucun danger dans ce trajet, au lieu que la passe de Quillebeuf est très-périlleuse. Quelques avantages que promette le beau projet de l’ingénieur Lamblardie , il faut absolument ajourner son exécution, parce qu’elle sera fort dispendieuse, Le halage sur la rivière commence à la Mailleraye. I1 n’est pas établi par-tout : les riverains , dans quelques parties, se sont soustraits à l’exécution des lois qui les obligent à laisser libre , sur les rives, une lisière pour le passage des-chevaux. Il seroit à propos de remettre ces lois en vigueur. Au surplus ; le halage se fait là par des particuliers avec qui les capitaines conviennent de prix spontanément pour une course déterminée. Si le vent ou la marée leur suffisent , ils passent outre sans recourir aux haleurs, qui ne se permettent à ce sujet aucune plainte. Tel est le type du système de halage qu’il faudroit établir par toute la rivière. , Le Saumon est arrivé à Rouen le 10 prairial. Il ya pris un pilote de la rivière et un aide, une flette pour 1589 WMÉMOTRES DE MATHÉMATIQUES passer ses chévaux de halage, et pour l’alléger dans le cas: où il manqueroit d’eau. L’ordonnatéur des guerres lui a donné seize chevaux des transports militaires, huit charretiers et un conducteur avec son cheval. Il est inutile d'observer qu’un train aussi considérable m’étoit pas indispensablement nécessaire : mais comme il s’agis- soit d’une expérience importante , on n’a rien épargné pour en assurer le succès, et l’on wa pas craint de prendre même des précautions superflues ; en même temps les commissaires desiroient de ne prendre de renfort en aucun endroit, et leurs vœux ont été rem- plis. Nous avions obtenu du dépôt des plans de la marine une carte superbe du cours de la Seine, en onze feuil- lets, par Buache, sur celles de Pabbé de la Grive. Ce travail, exécuté depuis 1763 jusqu’en 1767, a été porté à un tel degré de perfection, que nous avons trouvé presque dans tous les points les bassiers et atterrissemens, avec les repères sur les rives, tels que l’auteur les a tracés. Nous avons aussi reconnu , presque dans tout le cours de la Seine , que les angles saillans que l’on nomme des bosses , et dont le prolongement oblige d’alonger le trait, sont encore les mêmes que Buache a marqués sur sa carte; et cette observation, en prouvant le mérite de l'artiste, nous a fait en mème temps réfléchir que le régime de la rivière étoit bien établi, puisque, dans un espace de trente années, la situation de toutes les par- ties de son lit n’a point changé. Nous en avons conclu que tous les projets de redressement qu’on pourroit for- PE D € PB H-Y:S I Q U FE! 129 mer pour ce fleuve bienfaisant, devroient être conçus de manière à ne pas altérer son régime. Le 19 prairial. Le lougre est parti de Rouen avec huit chevaux. En six heures et demie, sans le secours du vent qui ne s’est fait nullement sentir, il s’est rendu à Elbeuf, après avoir parcouru au bhalage 11,700 toises. Le canal de la Seine est beau dans cette partie, et profond. La na- vigation y est facile; la marée s’y fait sentir, et per- mettroit de louvoyer. Les commissaires ont observé qu’il seroit utile de réunir au continent, par des ponts de bois peu dispendieux , les isles d’Oissel et de Bec-d’Ane, qui retardent la navigation au halage, parce qu’il faut faire changer les chevaux de rive. Le 20 prairial, Le lougre, parti à quatre heures et demie du matin, est arrivé, après six heures de navigation , au Pont-de- VArche. Le vent la un peu aidé pendant la dernière lieue; le passage de Martot l’a excessivement retardé ; celui, du Pont-de-l'Arche a pris le reste de la journée, qui a été employée en démarches et préparatifs. L’extrême largeur de la rivière , qui se divise en trois bras à Martot, ést cause que l’eau manque dans cette partie: le bras principal est coupé par des gords qui VPobstruent; il a point de profondeur, et rejette le courant dans les bras latéraux. Quoi qu’il en soit, la hauteur d’eau dans la rivière, indiquée par les échelles 1, 17 130 MÉMOIRES DE-:MATHÉMATIQUES de navigation , étant de, cinq pieds et demi, nous avons trouvé par-tout six pieds et demi d’eau au moins dans le pertuis de Martot; nous le franchîmes au mo- ment de la marée, qui avoit monté d’environ dix-huit pouces. Nous n’avons point jugé qu’il y eùt dans cette partie de la rivière aucun ouvrage essentiel à faïre pour amé- liorer la navigation. Les embarras qu’elle éprouve tien- nent moins aux difficultés locales qu’à la mauvaise com- binaison des appareils que les mariniers font pour les surmonter , et à la grandeur excessive des bateaux de la Seine. Les maîtres du pertuis veulent gouverner un corps flottant de cent quatre-vingts pieds de longueur , dans un courant rapide, au moyen de deux cordes tirées sur le rivage perpendiculairement à l’axe de ce corps flottant et à la direction mème du courant. La longueur de ces cordes excède cent cinquante brasses, ou sept cent cin- quante pieds ; elles sont elles-mêmes le jouet de l’eau , qui les entraîne en arrière du bâtiment. Il est bien évi= dent qu'avec de pareils procédés on doit éprouver les difficultés les plus grandes. En adoptant un autre sys- ième , d’abord des bâtimens beaucoup moins longs, en- suite des halages ou touages qui aient pour points d’appui des pieux plantés dans la rivière suivant une direction convenable , on n’éprouvera plus au pertuis de Martot le moindre embarras; il ne restera plus qu’à réparer les chemins dans les isles, réunir ces isles entre elles et avec le continent pour éviter des traverses ; il ne faudra que de petits ponts de bois de très-médiocre ET DE PHYSI Q U r 131 conséquence, et l’on franchira bientôt le redoutable pertuis de Martot avec la même facilité que tout le reste du cours de Îa rivière. Il n’en est pas de même du Pont-de-l’Arche : ce pont, très-ancien , a été construit sans égards pour la naviga- tion ; les arches sont étroites , les piles sont d’une épais- seur excessive ; l’eau de la Seine y éprouve un étran- glement si considérable, qu’il se forme sous lui un déversoir dont la chûte nous a paru être de dix-huit pouces au moins. Cette chûte augmente quand les eaux baïssent ; elle diminue quand les eaux croissent. On éprouve un effet contraire dans la plupart des ponts; mais celui-ci tient à ce que toutes les arches, ex- cepté les arches marinières, sont bouchées par des éta- blissemens de pèche qui forcent les eaux à se porter en plus grande abondance par les dernières, et même en totalité lors des grandes sécheresses. Il y a trois arches marinières à ce pont : l’une, au milieu, sert pour les plus grandes eaux ; une autre, du côté de la ville, pour les eaux moindres ; un troisième passage, pratiqué hors du pont, dans une espèce de canal de dérivation formé par les fossés de l’ancien châ- teau , sert dans les eaux moindres encore ; enfin la der- nière arche marinière, cellé par laquelle nous sommes passés, est contre la rive gauche du fleuve en le re- montant. On peut, en général, réduire la manœuvre du passage des ponts à quelques points essentiels et communs à tous. D’abord il faut conduire le bâtiment sous l’arche 132 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES et l’ÿ amarrer contre une des piles; cela s’appelle em- ponter : alors on passe une ou plusieurs amarres par- dessous l’arche du chemin de halage, soit sur une rive, soit sur deux rives en même temps; de sorte que des chevaux, en nombre proportionné à la masse du navire et à la vitesse du courant qu’il faut refouler , le tireront par un effort que l’adrésse des charretiers rendra plus ou moins simultané. Enfin, si des courans partiels tendant à éloigner le bâtiment de la route qu’il doit suivre, ou bien si cette route elle-même est tortueuse ou dans une direction qui ne s'accorde pas avec celle du chemin de halage, il faut y suppléer au moyen d’amarres attachées à bord par un bout, et, par Pautre, au pont ou aux rives. On file ou lâche des amarres à volonté, pour gouverner le bâtiment ou le maintenir dans sa route. Si les amarres sont attachées à l'avant du navire, on les appelle #12seaux ; si elles sont atta- chées à l’arrière, on les appelle coZliers de l'arrière. T1 est évident que, dans le courant le plus rapide, un corps flottant , tiré dans le sens de sa longueur par une force supérieure, et contenu par des cordes contre l’ac- tion qui tend à le faire dévoyer, ne peut manquer de suivre la route dans laquelle on veut le diriger. Voilà toute la théorie des passages des ponts et per- tuis, auxquels l’habitude, le préjugé, l’insatiable ava- rice de la féodalité, ont ajouté mille pratiques minu- tieuses. On a créé des fantômes pour les combattre; on a disposé des appareils à contre-sens, les uns dans les autres, pour accroître les résistances; on a établi des ET DE PHYSIQUE. 133 formes de service compliquées, pour en imposer aux navigateurs , et baser d’intolérables exactions. Le fana- tisme lui-mème a joint son charlatanisme à celui de la finance des péages ; et, dans des passages où depuis mille ans il ne s’est pas perdu seulement un navire, on a conservé l’habitude d’effrayer le vulgaire en criant aux navigateurs de recommander leur ame à Dieu, comme s’ils alloient franchir les cataractes du Nil. Nous avons soupçonné toutes ces rubriques combi- nées de d’ignorance et de l’imposture au Pont-de-l’Ar- che, et nos soupçons, à mesure que nous nous sommes approchés de Paris, se sont changés en certitude. Nous avions amarré notre navire à des pieux à l’aval du pont ; il a fallu le démarrer pour faire faire cette opération par un homme institué pour ce travail. Les museaux et colliers, que des hommes auroient portés avec la plus grande facilité, ont été traînés sur le pont, en pompe, par des chevaux. Au lieu de mettre une amarre unique , mais solide, pour faire le halage et franchir la petite cataracte, on a mis trois amarres, ti- rées , l’une par huit chevaux, les deux autres par quatre. Avec cette vicieuse disposition, les chevaux, embarras- sés par la multiplicité des traits, courcient le risque de s’estropier , et le plus souvent ne pouvoient agir. L’iné- galité du tirage auroit pu rompre une des amarres; le défaut c’ensemble dans l’action a fait culbuter deux des meilleurs chevaux, qui , n’étant pas secondés au moment où ils déployoient une grande énergie , ont été suffoqués et n’ont pu servir pendant le reste de l'opération. 134 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Malgré ces fautes, comme nous avions mis en jeu une puissance dix fois supérieure à la résistance , le pont a été franchi en quatorze minutes. Nous avons attendu le moment du flot ou de la marée, qui se fait encore sentir en ce point ; elle avoit grossi les eaux de neuf à dix pouces à l’aval du pont, et n’avoit produit aucun effet à l’amont. Il ne restoit donc plus que huit à neuf pouces de chüûte ; c’étoit un foible obstacle à surmonter pour un navire façonné comme /e Saumon, et traîné par quatorze bons chevaux. Il étoit possible de faciliter le passage du Pont-de- VArche, en disposant des appareils avec plus d’intelli- gence , en substituant à l’action inégale et par secousse des chevaux Paction plus lente, mais plus uniforme, d’un cabestan ou d’un manège. Il faudroit pour cela faire quelques établissemens, qui devroient être multipliés même à un certain point, à cause des quatre passes différentes que les bateaux suivent dans les diverses saisons. Nous avons proposé de ne faire là que des améliora- tions provisoires , et de remédier à toutes les difficultés en mème temps par une seule construction; il s’agit de profiter de la passe actuellement établie dans le fossé de l’ancien château, de l’approfondir, et de construire à sa tête une double écluse formant sas, pour racheter quinze à dix-huit pouces de chûte que peut avoir son développement. Le pont actuel qui recouvre ce canal tombe en ruine; on le remplacera par un pont-levis ou tournant, Moyennant ce travail, le halage ne sera point / EME DEN IPIE Y'S MOQUE. 135 interrompu, les navires n’auront aucun courant à re- fouler ; il ne faudra que quinze minutes pour passer le sas ; on épargnera la manœuvre d’abattre et relever les mâts. Enfin le canal de dérivation, ayant ses rives et ses écluses au-dessus de la hauteur des plus fortes crues, ne peut éprouver aucun dommage ni des grandes eaux ni de la débacle des glaces. Les mâts du Saumon ont été abanius le en soixante mi- nutes environ, et remontés en quarante-cinq. À force de s’habituer à ce travail, on est parvenu à le faire en trente-six ou quarante, compris le temps du grément et du dégrément. On peut faire route pendant la manœuvre. On a proposé de faire un canal de bon port à Porti- joie. Cette opération ne se peut exécuter à cause de la trop grande élévation de la montagne du Pont-de-l’Arche. Le 21 prairial. Nous avons couru depuis le Pont-de-l'Arche jusqu’à l’entrée du trou de Pose, à la voile sous la misaine, le tapecu, la grande voile et le petit hunier. Ce canal est fort beau. Le vent étoit au O. N. O petit frais. Nous avons dépassé un bateau traîné par six chevaux. Au mo- ment où nous commencions à faire un peu de sillage, nous avons échoué. Cet accident, très-grave pour un grand bateau de la Seine, a été réparé en huit minutes: une ancre mouillée dans lé chenal nous a remis en route à l’instant et sans peine. Nous avons trouvé au pertuis ou trou de Pose les mêmes préjugés , les mêmes prétentions qu’au Pont-de- 136 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES l'Arche; toujours les manœuvres mal combinées, une force énorme appliquée aux extrémités de cordes très- longues que le courant entraîne ; toujours des lenteurs interminables chez les agens ; toujours un surcroît de bras inutiles, et par conséquent de dépenses onéreuses à la navigation. Nous aurions franchi ce pertuis avec le seul secours du vent, si nos pilotes l’eussent osé; mais la crainte des voiles, avec lesquelles ils ne sont pas familiarisés , les retenoit d’un côté, tandis que de l’autre ils ne vouloient pas désobliger les gens du pays, dont ils dépendent souvent. Notre bâtiment fut chargé, suivant l’usage , d’un lourd appareil de cordages, soutenu par huit bachots : une brise légère survint; il entraîna hommes, cordes, - chevaux, bateaux, et passa ce pertuis célèbre sans la moindre difficulté. Nous observâmes cependant que les eaux, divisées en trois branches par les isles qui obstruent la rivière sous la côte des Deux-Amans, ayant établi leur cours le plus rapide sous le village de Pose, il faut en effet un grand effort pour vaincre le courant dans la partie la plus étroite de cette passe. Le halage, qui se fait tantôt dans l’isle, tantôt dans le continent, accroît la difficulté par ces changemens trop fréquens. Un atter- rissement qui se forme au bas du pertuis, vis-à-vis la pointe de l’isle de la Mouchoitte, oblige à passer à une très-grande distance de la rive, et d’alonger le trait excessivement. Tous ces obstacles réunis rendent eo AD EU PRET VS LLQNU .F: 137 le passage laborieux pour les grands bateaux de la Seine, sur-tout quand les eaux sont basses’; il le seroit moins, mais il le seroit encore pour les navires façonnés , ex- cepté dans le cas où ils seroient bien servis par le vent. La navigation est facile depuis le Ménil de Pose jus- qu’à Tournedos ou Pampoulle. Il paroît que dans cette partie la nature a établi une espèce de barrage sur le- quel il y a fort peu d’eau. Nous avons, dans un espace de trois cents toises , touché très-fréquemment. On son- doit toujours aux deux bords , et nous n’avions que trois pieds et demi d’éau dans bien des points sous les côtés du navire : ainsi le canal est extrêmement étroit. Le Port-Pinché, qui est dans le même cas, suivant le rapport des navigateurs, ne nous a fait éprouver au- cune difficulté. Passé ce bassier, nous avons trouvé bien de l’eau jusqu’à Portijoie, où nous nous sommes arrêtés. La seconde et la troisième journées sont cellés de toute notre navigation qui ont fourni matière aux observations les plus intéressantes, et les passages que nous avons franchis pendant ces deux jours sont en effet les plus difficiles de la rivière; ils sont aussi ceux où les rive- rains ont soumis les navigateurs aux exactions les plus criantes. 5 Dans tout ce qui concerne la navigation de la Seine, l’observateur désintéressé reconnoîtra bientôt que la cu- pidité a jouétle rôle principal. D’abord les maîtres de bateaux reconnurent que les frais de halage et ceux du service immédiat des bateaux croissoient dans une pro- portion moindre que leur grandeur ou la charge qu’ils 1, 18 138 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES peuvent porter; dès l’instant ils en augmentèrent les dimensions outre mésure, et la grande activité du com- merce et le défaut de concurrence leur procurèrent quelques bénéfices : maïs ces masses énormes éprou- vèrent dans les endroits difficiles divers accidens. Il fallut recourir aux secours des villes et des villages voi- sins. Les receveurs de péages organisèrent ces secours et les modifièrent toujours sur les données les plus fa- vorables aux riverains. Enfin le navigateur prit l’habi- tude de payer, sans se plaindre, un tribut qui retomboit, en dernière analyse, à la charge de la cargaison. Cepen- dant le mal parvint bientôt à son comble; et le gouver- nement , à qui l’on dénonça les excès des riverains, prit des mesures pour les réprimer et pour affranchir la navigation d’un joug odieux. La mission du Saumon est une conséquence des déterminations qu’il prit à cette époque. Ün représentant du peuple se transporta sur les lieux ; il établit un tarif qui n’eut lieu que pendant un court espace de temps. Un ingénieur des ponts et chaussées fut chargé de recueillir des renseignemens sur la navigation au Pont-de-l'Arche , à Pose et Tournedos, d’examiner les obstacles qu’elle éprouve, et de la part de la nature et de la part des hommes, et de proposer des moyens pour les lever. Cet ingénieur observa la marche du service dans l'administration des secours et renforts, et son rapport contient des choses qui paroîtroient incroyables si l’on navoit journellement des preuves de son exactitude. Un bateau prenant quatre pieds six pouces d’eau pour passer EUT. DE «Pi EH Y:S16Q DE, 139 au Pont-de-l'Arche en messidor de l’an 3, étoit halé par.cinquante chevaux; mais cette!force étant insuff- sante, il fallut y'suppléer par ‘celle des hommes. On se servit du moyen ordinaire pour les convoquer : un crieur public annonça l’arriyée du bateau ; trois ou quatre heures après , les habitans du Pont-de-l'Arche et d’Igouville se réunirent sur une place au-delà du vieux château: Le nombre étoit, conformément à l’usage, au moins de six cents personnes de tout âge et de tout sexe; on y voyoit des vieillards cacochymes, des enfans. de douze à treize ans, des personnes même assez bien yêtues pour faire juger qu’elles ne vivoient pas ordi- nairement du produit. de leur travail. Il fallut sept heures pour organiser cet immense appareil de forces et faire passer le bateau. Pose: a trois sections formant un corps de quatre cent cinquante hommes environ, qui font leur occupation unique de la navigation par toute la rivière, et sur-tout des secours et renforts à donner aux bateaux qui pas- sent le pertuis. Ces quatre cent cinquante hommes, dont les deux tiers au moins restent au village et ne font d’autre métier que celui de passer les bateaux (car ils ne pratiquent ni l’agriculture ni la pêche); ces hommes , qui , dans les ten:ps très-longs d’inaction, se livrent à tous les excès qu’entraîne l’oisiveté, subviennent cepen- dant aux besoins d’une population de quinze cents ha- bitans, et à satisfaire leurs appétits immodérés ; avec le seul produit des contributions qu’ils imposent arbitrai- rement aux navigateurs : de là viennent les retards qu’on 1/0 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES éprouve au passage de ce pertuis, la persévérance des maîtres marinicrs dans leurs absurdes méthodes, et la dépendance où restent les navigateurs de leur insatiable cupidité. A Tournedos, il faut que les bateaux prennent les mêmes secours , et'se les procurent en se soumettant aux mêmes servitudes. Les difficultés locales en cette partie sont plus grandes qu'ailleurs. Dans les eaux basses il n’y a point de passage pour deux bateaux. Un abor- dage , un échouage, sont des événemens ordinaires; et leur moindre inconvénient, c’est d’arrêter plusieurs jours ; de sorte qu’il n’est pas rare que des bateaux soient trois jours à se rendre du Pont-de-l'Arche à Portijoie. L’ingénieur que nous venons de citer propose de con- damner deux bras du canal de la Seine sous le village de Pose, pour ramener toutes les eaux dans le bras où se fait la navigation; et comme la section , trop étroite en cette partie, auroit donné trop de rapidité au cou- rant , il vouloit que l’on coupât les isles, pour donner à la passe nouvelle une largeur réglée de cent toises. Ce projet nous a paru d’une exécution difficile et dis- pendieuse, et son auteur lui-même ne se l’est pas dis- simulé. Il a en même temps exposé une autre opinion que nous jugeons plus admissible ; c’est d'ouvrir un canal de dérivation qui, partant des environs de Porti- joie et traversant la plaine du Vaudreuil, viendroit se rendre à la Seine près de l'embouchure de l'Eure. Ce redressement pourroit avoir {000 toises de longueur. Une double écluse formant sas, établie à son entrée d’amont, ET DE PHYSIQUE. 142 yacheteroit la pente du fleuve dans le développement auquel on substitue le nouveau canal; un grand en- caissement le garantiroit contre les crues et les glaces ; et les bateaux ou navires, parcourant avec facilité cette eau stagnante , franchiroïent en deux ou trois heures, sans aucune peine, un espace rempli de difficultés qui les ont mis jusqu’à présent dans la plus désolante dé- pendance , et les retiennent ordinairement plusieurs jours. L’idée du canal du Vaudreuil nous a paru bien con- çue, et nous pensons que son exécution est le premier travail dont le gouvernement se doive occuper aussitôt qu’il sera déterminé à faire des sacrifices pour améliorer la navigation de la Seine. Le 22 prairial. Le lougre n’a mis en route qu’à deux heures , la ma- tinée ayant été employée à faire des observations; il s’est rendu, sans qu’il y eût rien de bien remarquable, à Andely , à 9500 toises de distance, en sept heures de navigation. Le vent a été foible, et les voiles ont peu servi. C’est dans cette journée qu’on a fait, à plusieurs re- prises, l’épreuve des griffes ou béquilles, et qu’il a été reconnu que, quoiqu’en y faisant quelques modifica- tions elles pussent devenir utiles et atteindre le but proposé, la manœuvre des ancres est si facile, si sûre et si peu laborieuse, qu’il est inutile, pour remplir leur service, de recourir à un autre méchanisme. 142 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Nous avons observé sous les murs d’Andelys un cou- rant assez rapide. Le canal de la rivière est obstrué par les alluvions d’un ruisseau nommé le Gambon, qui se divise en deux bras au-dessus de la ville, et porte par le bras inférieur beaucoup de troubles dans la rivière, On pourroit réunir les eaux du Gambon dans l’autre bras. Son affluent nest point dans la partie du fleuve où se fait la navigation , et les atterrissemens seroient sans conséquence. Au surplus, cette amélioration doit être combinée avec d’autres considérations d’utilité publique dans lesquelles la rapidité de notre passage ne nous a pas permis d’entrer. Les quais de halage et les ponts sous Andely sont trop étroits et fort incommodes pour le service. Le 23 prairial. Nous avons couru dix heures et fait 11,500 toises de chemin pour aller d’Andely à Vernon. Le canal est beau et profond par-tout. La passe des grandes et petites gourdennes est laborieuse, parce que le courant est rapide ; on est obligé de mettre des renforts et de chevaux et d’hommes pour les faire fran- chir aux bateaux plats. La forme et les petites dimen- sions du Saumon sont la cause, sans doute, qu’il nous a fallu employer de bien moindres moyens : seize che- vaux ont halé le bâtiment sans difficulté ; il auroit passé de mème avec douze, et même moins. ET DE PHYSIQUE. 143 Le 24 prairial. La première opération de la journée fut de passer le pont de Vernon. Nous y trouvâmes les mêmes embarras qu'ailleurs et les mêmes préjugés. Le chemin de ha- lage sur lequel marchent les chevaux pour emponter le navire, est trop court : on les fait reprendre deux à deux, ce qui demande un temps infini, tandis qu’avec une poulie de retour cette opération se feroit tout d’un coup. Le courant est bien moins rapide qu’au Pont-de- V'Arche : nous n’avions pu refouler celui-ci avec une yole à quatre avirons; nous l’avons refoulé facilement à Vernon et à tous les autres ponts jusqu’à Paris, de sorte que la manœuvre du passage devient de plus en plus aisée. Le vent nous a peu servi pendant cette journée. Nous sommes parvenus en huit heures de navigation à Véteuil, à 10,500 toises de Vernon. Nous avions eu lieu de nous appercevoir depuis notre départ qu’un train de seize chevaux nous étoit inutile, et que des relais de six chevaux seroient plus que suf- fisans pour haler le bâtiment : nous en congédiâmes quatre à Vernon. Le canal entre cette ville et Véteuil est beau et pro- fond. | Le 25 prairial. Nous allâmes en neuf heures de navigation de Véteuil à Mantes, distance de 9,500 toises. Le canal continue 144 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d’être beau et profond. Le vent fut contraire et foible. La carte de Buache indique des bassiers devant Rosny: nous ne les ayons pas trouvés à la sonde ; elle a donné toujours plus de six pieds et demi. Le Saumon a passé le pont de Mantes sans aucun travail extraordinaire. La grande ouverture des arches et la délicatesse des piles font que le courant n’est pas sensiblement plus rapide sous le pont qu’ailleurs. Les peuples qui, comme nous, négligent assez leur naviga- tion intérieure pour barrer de beaux fleuves par des ponts, doivent les faire sur ce superbe modèle, ou en bois. On a proposé de creuser un canal de dérivation de Bonnières à Rolleboise. Ce plan est beau sur la carte; mais la grande élévation du plateau qui règne entre ces deux points s’oppose à son exécution. Elle ne seroit pas impossible en contournant la côte de la Roche-Guyon à Monceaux. Ce canal auroit 2,000 toises de longueur: on ne le propose que comme une perfection à exécuter par la suite. Le 26 prairial. Le Saumon est allé de Mantes à Triel en neuf heures quatre minutes de navigation : distance, 12,500 toises. Le vent souffloit rondement vis-à-vis Rangiport. On débilla les chevaux; et le lougre, par le seul effet de ses voiles, fit 4,155 toises en une heure. Le pont de Meulan eût été franchi sans la moindre peine, si les maîtres du pont ne disposoient pas leurs ET DE PHYSIQUE. 145 appareils de manière à retarder le navire. On doit aussi leur reprocher une lenteur extrême dans leurs prépara- tifs : la manœuvre de dégréer le navire et d’abattre les mâts étoit faite plus d’une heure et demie avant que les pontiers fussent prêts. Le lougre, remâté en cinquante-une minutes , malgré la foule immense des curieux qui encombroit le pont, se remit en route sans Voile, et arriva près de Triel. Il s’engrava vis-à-vis la pointe d’un islot : les chevaux tirèrent vers. laval , et le dégagèrent en quatre minutes. ‘ Le 27 prairial. De Triel, Z Saumon est parvenu au Pec; distance, 17,500 RE ; temps de la napisatinsy onze ut vingt-une minutes. { Le canal est superbe dans toute“cette partie; la na- vigation n’y éprouve d’autres obstacles: que le passage des ponts et les mauvaises méthodes de'ceux qui diri- gent cette opération. À Poissy on mouille à une distance énorme du pont, quoique rien n’empèche d'approcher presque à le tou- cher. Un seul trait fait passer le navire avec huit chevaux. Il à fallu deux heures un quart pour franchir une passe aussi facile. Û À Flafosse il y a deux mottes qu’il faudroit couper; parce qu’elles occasionnent un attérrissement. Nous n’a- vons cependant pas trouvé moins ide cinq pieds quatre pouces d’eau, comme l’indiquent les ‘échelles. l. 19 {146 MÉMOIRES DE, MATHÉMATIQUES La voile a bien servi jusques vis-à-vis l’église d’Her- bley : les chevaux débillés alloient au grand trot pour nous suivre. Le vent ayant tombé vis-à-vis Herbley, le navire à échoué sur un bassier, au moment:où l’on portoit le trait aux chevaux. Ils ont halé en travers dans la prairie, et le navire a été remis à linstant dans le chenal, qui est fort large et profond de sept pieds et demi. Il étoit tard quand nous'sommes arrivés au Pec; on a mal manœuvré. Le pilote s’est obstiné, suivant les usages de la rivière, à faire haler le navire avec les chevaux sur un trait de cent quatre-vingts brasses, et nous nous sommes encore une fois échoués. Une ancre portée dans le chenal nous a servi à nous remettre à flot en un quart d'heure. Ces accidens seroient très- graves avec des bateaux à fond plat; c’est un jeu d’y remédier avec des pavires façonnés. On poutroit.ouvrir un canal de Poissy à Maisons, en contournant un peu sur le penchant de la côte de Saint- Germain ; il abrégeroit la navigation : maïs ce n’est pas sous..ce rapport qu’il seroit le: plus avantageux ;:' c’est principalement en ce! qu’il n’y auroit.plus de courant dans le trajet qu’orr feroit par ce canal. Ausurplus, ceci ne doit être regardé que comme un apperçu qui sera rectifié par les recherches des genside l’art, et des ob- servations plus: précises. Dans le cas même où le, re- dressement-donÿ nous parlons seroit utile et praticable,; sa construction n’est, pas ungente; et doit: être ajournée à l’époque oùla navigation, devenue plus active, HAE ODNE CPE ES IQ À 147 dernanderoïit de nouveaux moyens de prospérité, et pourroitien payer les frais, : XL :oviré Le ,28 prairial, En neuf heures de navigation effective ; nous sommes parvenus du Pec à Saint-Denys, distance de 12,000 toises. La proximité du pont de Chatou, et le calme, nous déterminèrent à ne point relever nos mâts. Un mât de hune; planté contre lés bittes du cric, servit au halage. Nous ‘primes les douze chevaux pour refouler le cou- rant de la rivière neuve. Les isles qu’on laisse à droite en remontant sont réunies entre elles’ par des barrages, Pour conserver dans le bras où est établie la machine de Marly une hauteur d’eau qui excède au moins de quatre pieds celle de l'autre bras ou de la rivière neuve. Le vent d'ouest ayant un pèu fraîchi, nous mâtämes et appareillâmes la misaine, qui nous conduisit ; avec le halage, jusqu’au pont de Chatou.: Le passage de'ce pont est facile, et s’exécute avec plus d’intelligence, mais non pas avec moins de lenteur que les autres. Le lougre, totalement démâté et traîné toujours par douze chevaux , arrive bientôt au redoutable passage de la Morue. Ce pertuis est un des plus difficiles pour les grands bateaux. C’est un passe-lit entre bajoyers de charpente. Ilest formé par la tôte des isles, qui sont liées par des barrages pour retenir l’eau du canal de la machine de Marly dans un état d’horizontalité presque absolue, Le 148 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES trop plein de ce bassin passe par le pertuis, et coule dans la rivière neuve. Le canal, à l'entrée ou,au passe-lit, peut avoir quarante -pieds de largeur et trente de lon- gueur. Nous avons éstimé à l’œil que la pente, sur cette longueur, étoit au moins de vingt-quatre pouces. Elle est d’autant plus grande , et par conséquent le courant plus rapide, que les eaux rasent de plus près les cha- peaux des bajoyers. Aussitôt que les eaux s’élèvent par- dessus , il n’y a plus de courant, parce que le niveau se rétablissant dans toute la largeur du lit, il n’y a plus d’étranglement , et la section est assez ouverte pour que la vitesse soit uniforme avec celle du reste du fleuve. Quand , au contraire, les eaux sont au-dessous des cha; peaux des bajoyers, la quantité d’eau qui s’écoule dans un temps donné étant moindre, et la section constante, la vitesse doit être moindre. La hauteur qui répond au maximum de vitesse et de chüte est de sept pieds et demi. I1 y avoit à l’échelle, quand nous avons passé, cinq pieds et demi. On se rappelle que /e Saumon tiroit quatre pieds qua're pouces. Le maître du pertuis nous avoit fait préparer un ren- fort de neuf chevaux; il regrettoit de n’avoir pu s’en procurer davantage, et doutoit qu'avec vingt-un che- vaux et ce qu’il y avoit là d'hommes disponibles, nous pussions franchir le pertuis. Avant d’employer ces ressources extrêmes, nous crûmes devoir examiner le local.’ La vitesse. dans le courant principal étoit au plus de deux lieues à l’heure. Nous nous assurûmes, autant par les sondes que par ET. DE PHYSIQUE. 149 le rapport de nos pilotes et des gens du pertuis , qu’à son,aval il n’y avoit ni rocher ni mauvais échouage , le fond est par-tout de gravier et menues pierrailles; que par conséquent il n’y avoit nul danger pour le bâtiment quand il romproit ses amarres et seroïit emporté par le courant ; enfin, que ce courant lui-même se dirige sui- vant un chenal où il y a plus de six pieds d’eau. Nous observâmes ensuite la marche des eaux dans le pertuis. Le courant principal suit à peu près son mi- lieu , et se dirige le long de la rive de l’isle ; il se forme en même temps contre la rive du continent un remoux ou contre-courant doué d’une grande vitesse. Les na- vires , engagés dans ce contre-courant, sont entraînés fort rapidement vers l’amont du pertuis, jusqu’à toucher la ligne du courant principal : là ils s’arrêtent naturel- lement ; et si une force étrangère les engage dans le courant principal, ils sont renvoyés rapidement vers Pautre rive. Tout le danger pour les grands bateaux consiste donc en ce.que , leur avant,, frappé par le courant principal, tendant à descendre, pendant que leur arrière , engagé dans le contre-courant, est sollicité à remonter, ils pourroient venir en travers, et alors aucune force ne seroit capable de les contenir; ils se- roient jetés contre les rives, entraînés par le courant, et grièvement offensés par leur choc contre les bajoyers. Mais rien de tout cela ne pouvoit arriver au Saumon: ilest trop court pour qu’il ne soit pas facile de se rendre ioujours maître de ses mouvemens ; et quand même ik seroit entraîné par le courant, sa solidité est telle, qu’il 150 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ne pourroit lui arriver aucun mal. Forts de ces rensei- gnemens , nous ne balançämes pas à refuser toute espèce de secours : nous annonçâmes au maître du pertuis que nous le passerions, même sans nos chevaux; et cette détermination le fit rire de pitié, ainsi que nos pilotes et une assez nombreuse assistance. Les douze chevaux étoient toujours billés. Nous fimes mettre le navire dans le contre-courant : il fut emporté à l’instant le long du bajoyer de terre avec beaucoup de rapidité. Une forte amarre de retenue, fixée sur son épaule de bas-bord, servoit à contenir son avant contre le bajoyer, et l’empêchoïit de tomber dans le courant principal. Il fallut contraindre les gens du pertuis à donner plus de liberté au navire. Tls tournoient, à chaque pas, cette amarre autour de pieux fichés en terre très- près les uns des autres, et par son moyen ils ralentis- soient sa course. Nous les déterminâmes à l’abandonner au contre-courant, et à se tenir prêts seulement pour tourner l’amarre autour d’un pieu, dans le cas où, la proue s’engageant trop avant dans le courant principal, le bâtiment tendroit à faire une évolution. Nous par- vinmes de cette manière, en très-peu de temps, à la ligne qui sépare le contre-courant du courant principal à l’amont du pertuis. Notre intention étoit de nous arrêter là, et de faire un appareil de bonnes amarres pour haler le navire avec son cric et son virevau; mais les charretiers eontinuèrent, malgré nos ordres, à faire marcher les chevaux, et la cascade fut franchie à l’ins- tant avec la plus grande facilité. EE | DEN PE vNS I QU E- 151 Aussitôt que la moîtié de la longueur du navire a dépassé la chûte, il n’y a plus de raison pour qu’il tourne. L’action de l’eau sur la carène est diminuée presque de moitié. Il n’y a donc plus de danger pour lui, ni d'effort à exercer pour la puissance qui le tire. Avec un navire court comme /e Saumon, cet effet est obtenu dans l'instant. Il faut beaucoup plus de temps et des moyens plus grands pour y parvenir avec les bateaux normands, qui ont deux fois et demie la lon- gueur du Saumon. Cette manœuvre si simple déconcerta les gens du per- tuis, qui convinrent que la forme seule du navire étoit cause de son succès, mais qu’ils ne l’auroient pas cru - s'ils n’en eussent été les témoins. Elle nous déconcerta nous-mêmes, qui nous étions épuisés en réflexions pour surmonter des obstacles imaginaires. Le pertuis a été franchi en quatre minutes : nous en avions employé cinquante-cinq en réflexions et observa- tions. On le franchiroit aisément à la voile sans aucune amarre , parce que le contre-courant donne une vitesse assez grande pour qu'avec celle acquise par l’action du vent le navire domte! aisément le courant principal. Nous n’avions qu’un trait de quatre pouces, au tiers usé: les grands bateaux mettent deux traits de huit pouces et cinquante chevaux. On pourroit faire un petit canal de dérivation pour éviter ce passage ; mais nous donnerons l’idée d’un grand redressement qui lé supprime , et fait éviter le pont du Pec. En attendant que ces travaux soient exécutés, il ny ‘1#2 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES a rien à faire que l’entretien du pertuis dont les bajoyers se dégradent. Un appareil de cabestan ou manège , établi sur la rive gauche , et qui tirera le navire par l’avant, pendant qu’un autre appareil semblable, établi sur l’isle, tirera le navire par l'arrière, suffira pour passer les plus grands bâtimens avec leur seul équipage d’hommes et de chevaux. De la Morue à Saint-Denys le canal est beau et pro- fond. Le 29 prairial. Le Saumon est arrivé de Saint-Denys à Paris en dix heures trente minutes de navigation : distance , 13,000 toises. La voile n’a été. d'aucun service. Le canal continue d’être beau et profond depuis Saint- Denys jusqu’à Paris, où nous avons trouvé cinq pieds: quatre pouces à l’échelle du pont de la Révolution. Nous aurions donc passé par-tout, excepté à Pampoulle ou Tournedos (voyez la journée du 21 prairial), quand nous aurions tiré douze pouces de plus, ou porté une charge additionnelle de quarante tonneaux. Le passage du pont de Neuilly se fait sans sh et sans difficulté. Celui du pont de Saint-Cloud est un peu plus compliqué. Enfin on passe le pont de Sèvres sans peine ; mais on n’y est pas moins retenu par l’inertie des maîtres de pont. Nous relevâmes nos mâts , après avoir Dee le pont de Sèvres, en quarante-cinq minutes. Nousétionsappareillés sur toutes les voiles ; mais il ne ventoit presque pas, Il ET DE PHYSIQU F 153 ÿ a un banc très-long sous Passy, qui oblige de pas- ser contre la rive opposée, et d’alonger excessivement le trait. Il faudroit établir un halage sur les deux rives. 1 On ne peut s’empècher, quand on arrive sur la Seine aux environs d'Argenteuil , lorsqu'on découvre le dôme des Invalides et la butte Montmartre, de faire avec chagrin cette réflexion, que chaque pas qu’on fait vous éloigne de votre but, et qu’il faut encore un jour et demi ou deux jours de navigation pour parvenir au port, que l’on atteindroit en deux ou trois heures, s’il y avoit un chemin droit pour y conduire; et l’on se sent invin- ciblement entraîné par le desir de tracer cette route di- recte, et de soustraire le navigateur aux interminables lenteurs du passage des ponts. T1 nous a paru facile de faire deux canaux. L’un, prenant des environs de Maisons pour déboucher au- près d'Argenteuil, produiroit un raccourcissement mé- diocre; mais il supprimeroit le courant, il feroit éviter le passage de la Morue et du pont du Pec. L'autre canal prendroit des environs de Saïint-Denys, et, passant par le penchant de la colline de Montmartre , soit au S.E., soit au N. O., il se rendroit dans la Seine à l’un des bouts de Paris. Nous préférerions la direction par le S. E., qui aboutiroit au fauxbourg Antoine par des ma- rais et des fossés déja presque nivelés à la hauteur des grandes eaux du fleuve. Ceci n’est qu’une indication : il faut un travail précis des gens de l’art pour déterminer la direction la plus avantageuse à donner à ces deux le 29 154 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES canaux : nous n'avons pu, d’après une inspection rapide du local, conclure que leur possibilité. Il auroit été bien nécessaire de confirmer les obser- vations faites pendant ce voyage, par celles auxquelles le retour donne lieu ; on sent même que le bâtiment qui descend la rivière est exposé à plus d’accidens , et à des accidens plus graves , que celui qui remonte contre son cours. En effet, en remontant, l’action du courant, qui s’exerce dans une direction contraire à celle du vent ou des chevaux , frappe le gouvernail avec une énergie composée de ces deux élémens , tandis qu’en descendant le gouvernail n’est frappé qu’avec l’excès de vitesse que le vent ou les chevaux impriment au navire sur la vi- tesse du courant, et souvent cet excès est nul ou même négatif. La direction du navire qui remonte est donc très-sûre , et celle du navire qui descend , très-incertaine. D'un autre côté, si le bâtiment touche en remontant, on s’en apperçoit d’abord ; on fait arrêter les chevaux, et l’on cargue les voiles : ensuite l’action de l’eau s’exerce de manière à favoriser toutes les manœuvres qu’on peut faire pour se remettre à flot; au lieu qu’en descendant on ne s’apperçoit que le bâtiment touche qu’au moment où il est déja fort engravé. Le courant le fait tourner jusqu’à ce que le sable, qui s’accumule par cette évo- lution contre son fond, forme une résistance égale à son action : alors , pour diriger le navire , il faut refouler la colonne d’eau qui charge son côté, et vaincre en même temps la tenacité du fond, et la force de pression qui résulte de Pexcès de pesanteur du navire sur la DT D-E PHYSI Q U «x. #4 poussée verticale de l’eau, dans toute la partie de sa longueur qui a gravi sur le banc où il est échoué. Il est facile de sentir encore que les avantages des bâtimens de mer sur les frêles bateaux des rivières sont immenses sous ce nouveau rapport. Leur solidité permet d’y ap- pliquer des appareils très-forts sans les rompre ; la cour- bure de leurs flancs fait perdre au courant la plus grande partie de sa force ; la saillie de la quille empêche qu’ils ne s'engagent aussi profondément ; la courbure du fond réduit le contact avec le gravier à une surface moins étendue. Les ingénieurs, ayant été retenus à Paris par le mi- nistre, n’ont pu recueillir de nouvelles lumières lors du retour du Saumon ; cependant l’ingénieur Forfait l’a suivi jusqu’à Poissy. Tous les ponts ont été passés sans le secours des maï- tres de pont, et sans les avis du pilote, qui, pour ne pas se faire des ennemis, a refusé de présider à cette manœuvre. Le capitaine a dirigé seul le navire, avec deux amarres fixées aux deux rives ou à des ancres; et, én laissant dériver le bâtiment la pouppe à l'aval, il l’a conduit parfaitement sous les arches. Cette opération est facile; elle est la contrépreuve de celle de remon- ter. Toutes deux s’exécuteront certainement avec célé- rité et sûreté, dès que le gouvernement favorisera le commerce, et lui donnera protection contre les préten- tions du charlatanisme. Une des ancres ayant chassé au pont de Sèvres, Ze Saumon fut porté par le courant en travers contre les 156 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pales. Il ne s’y fit aucun mal : on le redressa en une demi-heure , et il passa le pont par une arche autre que l'arche marinière. Celle-ci étoit occupée par un bateau chargé de pierres, qui s’y étoit amarré pendant que ses chevaux rafraïchissoient , et qui retint quatre autres ba- teaux pendant plus de trois heures. Environ à mille toises à l’aval du pont de Neuilly; le pilote nous prévint que nous allions passer un endroit fort difficile, parce que nous n’avions pas de chevaux. Deux saillies ou bosses s’avancent dans la rivière , assez près l’une de l’autre, et un gord se prolonge dans l’angle rentrant qu’elles forment. Il falloit donc contourner ces trois pointes avec la seule impulsion du courant. Il au- roit été prudent de mouiller, pour se conduire avec des amarres. On voulut éviter ce travail, qui n’est cepen- dant pas bien pénible. Au moment où nous allions doubler la première pointe, une bourrasque violente prend le navire par la hanche, et nous nous engravons dans le sable au moins à moitié de la longueur du bâ- timent. On essaya divers procédés pour nous remettre à flot ; il fallut en venir aux grands moyens. Un fort grelin porté dans l’isle, un autre sur la rive, et des moufles ou caliornes attachées sur ces grelins , le tout amarré au virevau et au cric, nous firent reculer contre le courant par le même chemin par où nous nous étions engagés dans le sable, et nous flottämes, mais après un travail pénible de cinq heures, dont la moitié avoit été em- ployée à des tentatives infructueuses. Avec les mêmes amarres, le navire fut dirigé entre les trois écueils, et les doubla sans autre accident. - ÆTi D EE, PH Y,S.1 Q-U-E: 15% Le passage de la Morue étoit presque au moment de sa plus grande rapidité. Nous avons dit qu’il falloit pour cela que l’eau s’y élevât à sept pieds et demi de hau- teur : elle en avoit sept pieds deux pouces quand Z Saumon a repassé le pertuis. Cette opération est facile : deux chevaux tirent le navire vers le continent, pen- dant que le courant le porte vers Pisle ; la résultante le maintient au milieu du passe-lit. La vitesse du courant est telle, que les chevaux étant vis-à-vis le milieu du pertuis avant que le bâtiment y soit entré, ils ont beau prendre le galop, le navire est arrivé à l’autre bout avant eux. La longueur est, comme nous l’avons dit, de trente toises environ; la chûte n’est pas, sur cette longueur, de plus de vingt-quatre à trgnte pouces. Il ne paroît pas que l’on pût refouler ce courant et faire re- monter aucun bateau, si le contre-courant qui se forme particulièrement sur la rive du continent, ne faisoit plus _ des trois quarts de l’ouvrage. En jugeant de la rapidité des eaux par la course des chevaux, il paroît qu’elles font au moins cinq lieues à l’heure. Le trajet de Paris à Poissy n’a pas donné matière à d’autres observations importantes. Le canal de la Seine est superbe dans toute cette partie , qui cependant n’est pas la plus belle de la rivière. Nous avons fait, sans le vouloir, la sonde la plus exacte et la plus incontes- table, dans le cours de cette navigation. Le bâtiment étoit sans cesse porté de la rive droite , en descendant, vers la rive gauche, parce que l’action combinée du vent et du courant ne pouvoit être balancée par les avirons 158 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ni la remorque des bateaux ; il falloït souvent rapprocher le bâtiment de l’autre rive, d’où les mêmes causes ne tardèrent pas à lPéloigner encore. Il n’a fait ainsi que louvoyer sans cesse. Il tiroït cinq pieds deux pouces d’eau. Il n’y avoit, au moment du départ, que cinq pieds dix pouces à l’échelle du pont de la Révolution; et, lorsque Ze Saumon étoit à Poissy, la même échelle ne marquoit plus que cinq pieds six pouces. Dans un développement de 37,000 toises, le navire; courant à courtes bordées , et les prolongeant presque toujours jusqu'aux rives, n’a touché que deux fois, et sur des écueils connus. Cette observation doit donner la plus grande espérance pour la navigation, et ne per- met pas de dou&er que l’on n’y puisse employer des navires tirant sept à huit pieds, quand on aura fait quelques dépenses pour laméliorer. Conwcziusrons. Les détails qu’on vient de lire prouvent incontesta- blement qu’il est possible, avec très-peu de dépénse, d'ouvrir une navigation de Paris à la mer immédia- tement. Le lougre Ze Saumon est construit pour la mer, et faire même le grand cabotage. Il pourroït, en tirant six pieds et demi, porter cent quatre-vingts tonneaux de charge ; il n’en portoit que soixante-quinze lors de Pex- périence , et tiroit quatre pieds quatre pouces. On auroit pu, sans inconvénient, le charger de cent quatre ion- neaux. PÉTA A DIÉE PSE VSD QUE. 159 La navigation immédiate de Paris à la mer est donc praticable pour des navires de deux cents tonneaux au moins pendant l'hiver, qui porteroient moitié charge pendant une partie de la belle saison. À la moitié de messidor de lan 4 , l’eau s’étoit élevée, à l'échelle du pont de la Révolution, jusqu’à dix pieds trois pouces ; le 10 thermidor elle battoit encore à cinq pieds, et les crues reviennent ordinairement à la fin de fructidor : ainsi, cette année , la navigation ne sera presque pas interrompue : mais , en supposant qu’elle le fût pendant un ou deux mois , année commune , pour- roit-on faire à un canal creusé par la nature sur les plus belles proportions , reproche d’un chommage qui a nécessairement lieu dans tous les canaux mesquins creusés par la main des hommes? Si l’on pouvoit porter à sept pieds et demi ou huit pieds le tirant d’eau des navires qui feroient cette na- vigation , il seroit possible de faire monter à Paris des navires propres à la mer, et du port de trois cents ton- neaux. Ainsi cette ville jouiroit des mêmes avantages que le port de Rouen. Nous pensons qu’il y a lieu de espérer. Les travaux à faire pour obtenir ce résultat ne seront pas fort dispendieux. La Seine est sinueuse; mais son cours est assez bien établi pour qu’il n’y ait aucun changement à craindre dans son lit. Nous avons observé dans le journal que les belles cartes du citoyen Buache, qui nous ont servi de guide, avoient été dressées en 1767 : nous avôns retrouvé non seulement les mêmes 160 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES écueils et les mêmes bas-fonds-qu’elles indiquent , mais aussi les mêmes angles saillans et rentrans sur les rives. Nous en avons conclu que le régime de cette rivière étant parfaitement fixé , il-seroit imprudent de faire à son cours aucun changement qui le pût altérer. Nous n’avons donc proposé que des canaux de dérivation , avec des écluses à sas à l’amont , dont les bajoyers se- roient élevés au-dessus de la hauteur des plus grandes eaux. Ces constructions, ne pouvant , dans aucun cas, changer la direction du lit principal , ne produiront ja- mais de mauvais effets : elles serviront, tantôt à éviter des pertuis difficiles, tantôt à contourner des ponts, toujours à raccourcir le chemin et à faciliter le halage , puisque dans tout le cours de ces dérivations il n’y aura pas de courant. Ces canaux nous paroissent devoir être ouverts dans l’ordre suivant : 10. Un petit canal de dérivation faisant le tour de l’ancien château du Pont-de-l'Arche : il est déja ouvert dans le fossé de cette fortification , et sert, dans les eaux moyennes, au passage des bateaux. Sur lécluse à sas qui sera pratiquée à sa tête, an établira un pont mobile pour le-service de la route , et les vaisseaux seront dis- pensés de démâter. 20, Un canal de 4,250 toises environ , prenant vers l'embouchure de l'Eure , pour se rendre vers Portijoie ou Saint-Étienne du Vauvray. Sa construction paroît facile , d’après divers projets qui sont maintenant soumis à l’examen de l’assemblée des ponts et chaussées. Ce canal feroit éviter les passes difficiles de Pampoulle ou ET DE PHYSIQUE 16: de Tournçdos et de Port-Pinché ; il n’y auroit plus alors aucun obstacle à la navigation depuis Rouen jusqu’à Vernon. 30. Un redressement de 200 toises entre la Roches. Guyon et Monceaux. C’est une perfection dont l’exécu- tion est peu urgente. 4°. Un redressement de 5,000 toises entre Sartrou- ville et la Frette à l'aval, Argenteuil et Saint - Denys à l’amont. | 5°. Un redressement de 4 à 5,000 toises entre Saïnt+ Denys et le fauxbourg. Antoine, ou bien les Champs- Elysées. Ces deux canaux donneroient un raccourcisse- ment immense, et dispenseroient des passages de cinq ponts ; savoir, le Pec, Chatou, Neuilly, Saint-Cloud et Sèvres ; ils dispenseroient aussi du passage de la Morue, -: Au moyen de ces dérivations le cours de la Seine, depuis Rouen jusqu’à Paris, qui maintenant a 121,000 toises, seroit réduit à 98,000, et il y auroit encore 16,250 toises de canaux sans courant ; le reste du cours du fleuve seroit profond et sans aucun danger. Il n’y auroit plus que quatre ponts à franchir. Celui de Ver- non, partie en pierre et en bois, pourroit être coupé Pour y établir un pont-levis. Celui de Mantes n’est fait qu’à moitié ; on pourroit ouvrir l’autre partie pour passer sans abattre les mâts. Le pont de Meulan est en bois; rien n’empêchera d’y établir un pont-levis. Il n’y aura donc que le pont de Poissy où l’on doive faire une dé- rivation pour le contourner , et alors les navires vien- dront, sans abattre leurs mâts, de la mer à Paris; ils 2 21 162 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES trouveront par-tout assez d’eau, et, dans une grande partie du trajet, fort peu de courant. En attendant que ces grands projets soient réalisés, on peut faire à la navigation de la Seine, sans de trop grandes dépenses, des améliorations qui détermineront bientôt le commerce à renoncer aux méthodes barbares de la marine fluviale, pour y substituer les méthodes plus savantes de la marine proprement dite. Le gouvernement fera taire les viles passions des ri- verains, qui rançonnent sans pitié les bateaux aux pas- sages des ponts et pertuis. Aux endroits où le courant est rapide et la manœuvre assez laborieuse pour exiger des renforts, il fera placer des cabestans et des pieux pour l’amarrage et le touage ; il établira une bonne police, et fera, par des hommes instruits , améliorer les appareils et détruire les pitoya- bles routines que l’ignorance, la cupidité, et l’esprit d'imitation , ont consacrées. Les maîtres des ponts et pertuis auront des amarres et des bateaux pour leur service, qui devra toujours être fait avec célérité, parce que chaque bâtiment, au moment même de son arrivée, trouvera tout préparé pour son passage. Le gouvernement excitera par son exemple le com- merce à naviguer sur la Seine avec des navires propres à tenir la mer ; il favorisera de tous ses moyens l’établis- sement des relais pour le halage , qui déja s’étoient for- més sans qu’il s’en mèlât, et que la création d’une agence nationale de navigation a détruits ; il fera en sorte ET DE PHYSIQUE. 163 que ces relais prennent les navires aux traverses, pour éviter la perte de temps que cause le passage des che- vaux. Tout cela tend à se former soi-même ; et, pour obtenir les derniers succès, il faut les secours , les en- couragemens, et non le poids de l’autorité suprême. Enfin, en réunissant quelques isles entre elles, et quelques isles au continent, on évitera de passer trop souvent les chevaux d’une rive à l’autre; ce qui fait perdre un temps infini. Les chemins de halage étant améliorés par ces travaux et un meilleur entretien, la navigation se fera bientôt avec plus d'économie et de célérité. Les avantages qui résulteront de ces travaux seront-ils en équilibre avec les dépenses qu’ils entraineront ? Cette question ne se peut résoudre que par apperçu, jusqu’à ce que les projets de construction soient arrètés définitive- ment. L’estimation des dépenses, faite avec toute lexac- titude possible , d’après de simples apperçus , les porte à 4,500,000 francs. Si le gouvernement exigeoit, pour les passages de canaux , ce que les bateaux payoïent pour les passages des ponts et pertuis, dont ils seront alors dis- pensés , la recette, en ne comptant que les communica- tions de Rouen avec Paris, telles qu’elles étoient en 1789, s’éleveroit à un million par an. Il y faut ajouter toutes les relations des places intermédiaires et des rivières affluentes , les accroissemens que doit prendre une navi- gation mieux établie. Ainsi , tandis que , d’une part, le gouvernement recueilleroit un produit annuel supérieur de beaucoup à l'intérêt légal de ses avances, le conmnerce 164 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES recueilleroit tout le bénéfice de la promptitude avec laquelle se feroient les transports , et de la conservation de ses cordages et de ses manœuvres. Considérons cette question sous un autre aspect. La nation gagneroit à l'introduction d’une navigation ma- ritime sur la Seine : 1°. un accroissement considérable dans le nombre des marins ; 2°. de grandes facilités pour exécuter tous les transports; 3°. la conservation des grandes routes, qui seroient moins broyées par le roulage ; 4°. la multiplication des atteliers et des ou- vriers de marine; 5°. une extension considérable du commerce et des manufactures intérieures; 6°. un élan des capitalistes éloignés de la mer, qui les porteroit peut-être à prendre plus d’intérèt aux expéditions ma- ritimes, et particulièrement aux grandes pèches. Le commerce gagneroit à l’introduction d’une navi- gation maritime sur la Seine : 1°. d’être dispensé de reverser ses marchandises au Havre dans une allège, et, à Rouen, de l’allège dans un bateau plat; 2°. de ne plus être astreint à mettre toutes les boissons en doubles fûts, parce qu’elles seroient embarquées dans une cale fermée ; 3°. de ne plus éprouver de dilapidations, de coulages et d’avaries , à chaque reversement ; 4°. de ne plus payer une ou deux commissions au Havre et à Rouen; 5°. d’être servi beaucoup plutôt ; 6°. de courir beaucoup moins de risques : car il est presque impossible qu’un navire fait pour la mer éprouve, dans le trajet de Rouen à Paris, aucun événement qui puisse com- promettre sa cargaison ; au lieu que les: bateaux plats ÉT DE PHYSIQU Fr. 163 de la Seine sont sujets aux plus graves accidens , à cause de leur extrême foiblesse. Enfin les armateurs eux- mêmes, qui déja sont dégoûtés des immenses colosses portant douze à seize cents milliers , qui veulent faire des bateaux de deux à trois cents tonneaux; ces armateurs eux-mêmes finiront par adopter le mode de navigation proposé : car il est démontré que, dans l’état actuel de la rivière, avant qu’il y ait la moindre dépense faite pour améliorer la navigation , on pourroit iransporter du Havre à Paris deux cents tonneaux de marchandises, dont le quart en vin, pour 3,000 francs, avec des bä- timens marins; tandis que , si l’on compte tous les faux frais des méthodes actuelles, ce transport coûte 10,000 francs. Lorsque les redressemens seront exécutés, leur chüte, qui sera de six pieds au moins, permettra d’y établir des usines. On pourroit, sur les quatre grands canaux, monter au moins quarante-huit moulins à roue horizon- tale, comme celle de Moissac. Il est inutile de dire combien ces usines prospéreroient dans le pays où il y a le plus d'industrie de toutes les espèces , dans le pays où l’agriculture est le plus en honneur, dans le pays qui entretient les relations les plus actives avec nos co- lonies. Leur produit ajoutera encore aux recettes, qui déja, comme on l’a vu, excèdent dans un très-grand rapport l’intérêt de la mise dehors qu’exigera l’exécution de toutes les améliorations projetées. + Nous n’avons pas, dans ces apperçus indéterminés, fait entrer en ligne de compte l’accroissementgque la 166 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES navigation doit prendre par les nouvelles méthodes. Aussitôt que les marchandises ne seront plus sujettes à des frais énormes de reversement au Havre et À Rouen ; aussitôt qu’elles seront en sûreté dans les cales, aussi- tôt que le trajet de Rouen à Paris sera de trois à quatre jours en montant, et de deux à trois en descendant, alors les marchandises d’un grand poids et d’une valeur médiocre , comme les charbons de terre et les bois du nord , remonteront à Paris ; nos manufactures seront vivifiées par ce combustible supplémentaire ; notre marine doublera ses ressources par l’économie que Pim- portation des boïs du nord apportera nécessairement à la consommation des bois indigènes. Les soudes, les sels, les sumacs, les savons, les cotons, les huiles, les soufres, les marbres, les tabacs, la pierre-ponce, les bois de teinture et de marqueterie , les sucres, les cafés; les vins de Bourgogne, de Champagne, d’une part; de Bordeaux et de la Méditerranée , d’une autre part : toutes ces marchandises, dont la plus grande partie est expédiée souvent par terre, parce que le con sommateur est pressé de jouir, seront toutes transpor- tées par eau, et cette facilité en accroîtra la consomma- tion; par conséquent la perception des droits aux ponts et aux écluses deviendra plus considérable ; par consé- quent enfin, le gouvernement, rendant au commerce une partie de ce qu’il recevroit en sus de l’indemnité qui lui sera due, donneroit encore, par cet acte de sa munifcence , un nouvel essor aux opérations maritimes de la Seine, et à l’industrie des beaux pays qu’elle arrose, ET DE PHYSIQUEr. 167 Telles sont les belles destinées que la nature avoit préparées au commerce de Paris; il en jouiroit depuis long-temps , ou plutôt il n’auroit jamais cessé d’en jouir, si les hommes n’eussent pas employé tout leur savoir à la contrarier. Ces beaux ponts, ces chefs-d’œuvre de l’art, que nous admirons, sont le fléau le plus destructif de la navigation. Heureusement il ne faut pas, pour remédier aux désastres produits par diverses causes, et sur-tout par onze ponts, plus de dépense que n’exige- la construction d’un seul. Le gouvernement, frappé de ces vérités, met la plus grande importance à la suite des projets qu’on lui a soumis. Des ingénieurs des ponts et chaussées vont être chargés de prendre des nivelle- mens nécessaires pour fixer la direction et les points d’aboutissement des canaux de redressement. On relevera en même temps des sondes exactes dans le cours du fleuve , pour fixer la hauteur précise à laquelle on doit établir les radiers des écluses ; ce qui donnera la limite exacte du tirant d’eau des navires propres à la navi- gation maritime de Paris. En attendant que le gouvernement puisse affecter des fonds à l’exécution de cette utile entreprise , il va don- ner au commerce l’exemple d’armer immédiatement au Havre pour Paris. Vingt-deux navires de l’état sont dé- signés pour cette navigation. Il sera construit incessam- ment des bâtimens de deux cents tonneaux, sur une forme et un grément modifiés d’après les épreuves faites sur le lougre Ze Saumon : ils pourront naviguer avec six marins , sans compter le capitaine , et remonter 168 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES avec six chevaux. Ces navires , qui seront les plus grands que la Seine supérieure puisse porter jusqu’à ce qu’on ait fait les redressemens , deviendront les plus petits quand ces travaux seront achevés. Tel est maintenant l’état des choses relativement à la navigation de la Seine. Le ministre de l’intérieut vient de charger un ingénieur en chef de la rédaction définitive des projets tendant à son amélioration ; le ministre de la marine y concourt de tous ses moyens. Tout annonce que le commerce de Paris va prendre une nouvelle splendeur, et que la marine militaire trouvera de grandes ressources en hommes, en lumières et en atteliers, jusqu’au milieu du territoire de la République, IS ROUEN Journal de la À >ubh que le S qe Freneus } ] 2 Rolleborse CAMRIT E ROUEN, DU COURS DE LA SEINE, DHPUIS ROUEN JUSQU1 PARIS, Pour SCPVIP all Memoire et Journal de la Navivaüon du Louvre de la Republique le Saumon ignes Rouges oudiguent las Car de. lodressement proposés dans le Memotr ET DE PHYSIQU r. 169 —————_—_—_—_— MÉMOIRE Ste les effets du froid de ventose an 4 (février ef mars 1796) sur divers végétaux, et particulièrement sur le PorRIER, Par Charles-Louis L’H£rr TIER, Lu le premier germinal an 4 et déposé au secrétariat de l’Institut le 24 thermidor suivant, L observations météorologiques forment un point de contact entre les sciences mathématiques et les sciences physiques. L’astronome doit prendre l'initiative. À l’aide des instrumens les plus parfaits, il constate d’une ima- nière rigoureuse les divers phénomènes de Pair, les degrés du froid et du chaud, etc.; c’est ensuite aw zoologiste et au médecin à reconnoître jusqu’à quel point les vicissitudes de Paimosphère ‘et des saïsons ont Pu influer sur la vie animale. De leur côté , le botaniste et l’agronome ne doivent pas négliger davantage de re- cueillir tous les faits qui tiennent à l’organisation végé- tale. Après s’être assurés des effets, ils doivent faire leurs efforts pour s'élever jusqu'aux causes des: désor- dres divers que les végétaux auroient éprouvés dans leurs organes ; causes dont il west pas toujours permis de juger avec une entière certitude , d’après le concours 1, 22 170 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES et la combinaison des circonstances variées qui appar- tiennent à la végétation. C’est enfin de l’ensemble de ces observations météorologiques , appliquées ainsi aux fonctions organiques et vitales des animaux et des plantes, et continuées sur un même plan d’âge en âge, que se combinera et se complétera peut - être un jour l’histoire physique des êtres vivans. Le froid rigoureux que nous venons d’éprouver à la suite de l’hiver le plus doux, a dù être d’autant plus funeste aux plantes, que leur végétation étoit plus avan- cée. Pour intensité de la gelée, et pour les autres phéno- mènes qui l’ont accompagnée , je m'en réfère absolument au mémoire de notre collègue Messier , lu dans une des précédentes séances. On se rappellera seulement que ce froid dura environ treize jours; savoir ; depuis le 7 jus- qu’au 20 ventose (du 26 février au 10 mars). La conge- lation, d’après les observations faites par l’astronome Messier sur le thermomètre employé aux autres obser- vations publiées précédemment, a été de six degrés , six degrés et demi, six degrés un quart, les 10, 15 et 16 ventose (29 février, 5 et 6 mars); les 17 et 18 ven- tose (7 et 8 mars), le froid a encore continué de six degrés; le 12 ventose (2 mars), en vingt-quatre heures il étoit tombé dix à onze pouces de neige : enfin le dégel a été lent et successif, sans aucun accident particulier. On jugera facilement qu’un froid de six degrés et six degrés et demi pour l’intérieur de Paris (froid qu’on peut bien évaluer à sept et à sept degrés et demi pour por Det FREE vs 1 'Q7 D EF; 171 les campagnes des environs) n’a dù épargner aucuns des plantes dont la végétation étoit commencée : aussi les fleurs ouvertes ou prêtes à épanouir des amandiers, des abricotiers, et mème des pèchers, sont-elles entiè- rement détruites, Heureusement c’étoit le plus petit nombre. De tous les arbres en fleurs, le noisettier est le seul qui ait résisté Accoutumé à fleurir dès le solstice d’hi- ver, destiné d’aïlleurs par sa structure à braver nos frimas , le froid extraordinaire de l’année dernière ayant point nui à sa fécondité, un froid de six à sept degrés ne pouvoit l’atteindre. Sa fécondation étoit déja consommée , puisque ses fleurs mâles , plus précoces que les femelles , comme dans toutes les plantes amentacées, étoient passées et tombées. L'organisation des fleurs femelles répond à la saison qui les voit naître ; elles sont défendues par leurs enveloppes calicinales, qui, dans le premier âge, pressent tellement les organes fe- melles, qu’ils deviennent impénétrables à toutes les atteintes de l’air. Ce n’est qu’aux approches de la ma- turité du fruit, lorsqu'il n’a plus rien à craindre des injures de l’atmosphère , que cette enveloppe, s’entr’ou- vrant, laisse appercevoir la noisette , qu’elle avoit jus- qu’alors protégée en la dérobant à nos yeux. Le poirier, qui fait plus particulièrement l’objet de ce mémoire, offrira cette année, et offre mème en ce moment un phénomène doni les fastes de la physique végétale et de l’agriculture ne nous fournissent pas d'exemples. Ses boutons à fleurs , encore cuirassés de leurs 172 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nombreuses écailles, annonçoient déjaun commencement de végétation par leur accroissement et leur renflement considérables. Dans quelques variétés même, comme dans le saint-germain (mais seulement dans le plus petit nombre de fleurs), les écailles, commençant à s’entr’ou- vrir, découvroient les sommets de chaque bouton de fleurs. Les choses en cet état, quel a été Peffet de la gelée sur de semblables boutons? Ce n’est pas, comme dans les autres arbres, chaque fleur , chaque germe isolément qui se trouvent détruits dans le poirier; c’est le pédon- cule même du corymbe de fleurs qui a été morbifé, et Veffet du mal s’étend jusqu’au prolongement ligneux servant de base au corymbe. Il est assez singulier de voir que la plupart des fleurs de corymbes dont les pédoncules étoient viciés de la sorte, soient restées saines et intactes, si l’on en excepte un petit nombre plus avancé dont les germes seuls ont été gelés. Il est bien plus extraordinaire encore de voir ces mêmes fleurs, malgré l’état de mort auquel elles semblent vouées par la destruction des parties internes du support qui les unit à la plante, de les voir, dis-je, s’accroître, se dé- velopper , en un mot végéter de la manière la plus sensible, sans qu’on puisse déterminer quel sera le terme de la vie de chaque bouton, ou même de chaque fleur. À la suite de la gelée, je crus, je l'avoue, à la perte totale de nos poires pour cette année ; et c’est dans ce sens qu’un premier mémoire, qu’à défaut de temps la classe n’a pu entendre, avoit été rédigé. Pour comble ET DE PHYSIQUE. 179 dé malheur, nulle exposition , nul abri même, n’avoient été épargnés. Le pédoncule des corymbes paroissoit en effet vicié dans toutes ses parties, et ses vaisseaux in- térieurs noircissoient de plus en plus. Quel espoir d’ail- leurs concevoir , tandis qu’à l’égard des plantes gelées le mal est communément plus grand qu’il n’avoit été présumé d’abord, et s’accroît presque toujours , au lieu de diminuer ? Quoi qu’il en soit, la nature a voulu nous donner un grand exemple de ses ressources et de sa puissance, et le mal est déja en grande partie réparé. Ces corymbes du poirier sembloient, à la vérité, gelés jusqu’à Pépi- derme ; ou au moins, si l’écorce étoit saine, son ex- trème ténuité ne permettoit-elle pas de s’en douter? Il falloit bien cependant que la désorganisation ne fût pas aussi complète sur l’écorce et sur le /iber que sur la substance médullaire et sur la substance ligneuse, car depuis j’ai reconnu que la circulation de la sève s’est continuée dans les zones extérieures d’un grand nombre de ces corymbes. L’accroissement est même déja assez sensible pour appercevoir que ce Zliber commence à se convertir en substance ligneuse , et de nouvelles couches s’établissent sur la partie interne qui est morbifiée (1). CR CR A AR OS A QG) C’est ici le lieu de rapporter quel a été, en dernière analyse, le résultat de la gelée sur les boutons à fruit du poirier. Dans un nombre considérable de boutons; toute végétation à été détruite aussitôt; dans les boutons qui se sont développés, la végétation a été plus ou moins durable euivant qu’ils étoient plus ou moins viciés. Dans les uns, on n’a vu s’ouvrir qu’une partie des fleurs; dans les autres, où toutes les fleurs s’étoient épa- ‘ 174 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Il y avoit, à la vérité , une différence frappante entre la’ gelée de nos poiriers et celle à laquellé ne sont que trop sujets certains végétaux exotiques. Dans une plante sensible à son action, la gelée tend à désorganiser toutes les parties : aussi n'est-il que trop ordinaire de voir la contagion s'étendre des branches au tronc, de la tige aux rameaux, et quelquefois mème du tronc aux ra- cines; ici, au contraire, C’est une plaie accidentelle, intérieure à la vérité, mais locale, qui ne peut influer sur les autres parties de l'arbre. Le poirier, arbre in- digène , n’a rien perdu de sa vigueur; il réparera d’au- tant plus facilement les altérations qu’il vient de subir, que nous sommes au printemps. Cette saison, pour les végétaux , répond en quelque sorte à l’enfance pour les animaux. De même qu’il n’est pas d’âge où les frac- tures et autres blessures soient plutôt reprises et gué- ries que dans l’enfance, de même aussi il n’est pas de saison où l’abondance de la sève remédie avec plus de vitesse aux désordres particuliers des plantes, que le printemps. bi nouies ou avoient même-noué, le corymbe entier s’est bientôt desséché et a péri : il est même des corymbes qui se sont flétris subitement lorsque les jeunes fruits avoient déja atteint un pouce de diamètre ( près de trois centimètres ). Je me suis assuré que tous ces accidens provenoient du même vice, et, dans les divers co= rymbes; j'ai observé les nouvelles couches ligneuses plus ou moins sensibles, suivant le moindre ou plus grand développement du corymbe. Enfin les fruits ont prospéré dans un certain nombre de fleurs; ils continuent à grossir, et semblent n’avoir plus rien à redouter des suites de leur première altération. Quelques poires d'été, déja en maturité, m'ont offert dans leurs supports le phénomène qui a fait l’objet du mémoire, savoir des couches ligneuses bien formées recouvrant un centre noirâtre et détruit. ET DE PHYSIQUE. 175 Nous pouvons donc nous promettre une récolte quel- conque de poires. Elle sera plus ou moins abondante, suivant le nombre de corymbes de fleurs que la nature aura ainsi en quelque sorte rappelés à la vie. On doit s’at- tendre seulement que les corymbes, venant à être char- gés de fruits, seront peut-être, à raison de leur morbi- fication interne, un peu plus fragiles et plus exposés par conséquent à être cassés par les vents, Comment expliquera-t-on maintenant pourquoi les seuls pédoncules des corymbes , ou leurs bases, ont été frappés de la gelée, tandis que les fleurs des mêmes corymbes, si l’on en excepte un petit nombre, tandis que les pédicelles, ou queues de chaque fleur, ont été préservés? La solution sera peut-être satisfaisante, en examinant attentivement quelle étoit alors la situation du bouton à fleurs. D’un côté, l'accroissement qui s’étoit déja fait dans le bouton, avoit écarté les écailles qui le composent et le recouvrent, et cette dilatation se fait singulièrement par la base. Or c’est précisément à la base du bouton que correspond le pédoncule du corymbe, tandis que les fleurs situées au sommet continuoient à être défendues par les écailles à peine soulevées en cette partie, et qu’en outre les organes sexuels de chaque bouton particulier étoient enveloppés dans les corollés et dans les calices. D’un autre côté, ce pédoncule à peine naissant, charnu et tendre, étoit peut-être dans la seule circonstance où il pouvoit donner prise à la gelée. Dans un développement plus avancé, il eût par- ticipé davantage de la nature rustique du poirier, arbre 176 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES indigène de nos forêts, et qui résiste aux plus grands froids. L’exemple de cette gelée prouve sans réplique un point de physique végétale déja connu; savoir, que la sub- stance médullaire et la substance ligneuse ne sont pas indispensablement nécessaires à la vie des plantes. Se- condement , nulle expérience ne favorise davantage l'opinion des physiciens qui ont prétendu que la plus grande circulation de la sève se faisoit entre le bois et l'écorce, ou par l’écorce même. Il résulte enfin, tant de la gelée dernière que des précédentes, abstraction faite des pédoncules corymbi- fères viciés accidentellement cette année par un con- cours de circonstances dont la réunion doit être très- rare , que l’organe de la fleur le plus sensible à la gelée est le pistil, et que la gelée attaque d’abord le stigmate, puis le style, et enfin le germe. Il a été facile cette année de s’en assurer; car on trouve fréquemment , dans des fleurs non épanouies , l’organe femelle gelé, tandis que les étamines n’ont éprouvé aucune espèce d’alté- ration. Vous voyez ensuite ces mêmes fleurs s’ouvrir et présenter un aspect aussi riant que les fleurs fertiles ; mais elles ne répondront jamais aux espérances du cul- tivateur : privées de leur ovaire qui est brûlé et noirci, leur illusion sera mème de très-courte durée. Si, dans la fleur, l’organe le plus sensible à la gelée est le pistil, et ensuite l’étamine; si, dans les rudimens des bourgeons et du bois, la substance médullaire, et après elle la substance ligneuse, sont les premières ET DE PHYSIQUE. 177 désorganisées par l'effet du froid, on peut en induire qu’il y a une relation entre la moëlle et le pistil, entre le bois et les étamines. Linnæus avoit eu le premier la hardiesse de donner comme loi de la nature : Calyx fit ex cortice, corolla ex libro, stamina ex substan- zia lignea, pistillum ex propria medullari substantia. (Lixx. Gemm. arb.) (1). Cette vue grande , et vraiment digne de l’auteur du Philosophia botanica ; n’avoit été regardée dans son temps que comme un rappro- chement piquant, ou, si l’om veut même, comme un paradoxe ingénieux. Maïs qu'aux observations déja connues de Linnæus à l’appui de cette doctrine , qu'aux faits consignés dans ce mémoire, il se joigne quelques nouvelles expériences, cette maxime , qui sembloit plus philosophique que réelle, ne tardera pas à devenir une vérité rigoureusement démontrée. Pourquoi faut-il que la nature, en nous dépouillant d’une partie de nos richesses pour cette année, ne nous ait pas dédommagés par la destruction de quelques in- sectes, de ceux, par exemple, dont la proscription est de nouveau proclamée par la République? Il y avoit bien lieu d’espérer qu’une pareille gelée devoit nous délivrer , sinon de toutes, du moins des chenilles alors écloses : mais non; elles ont tellement résisté à (2) Et ailleurs : Fructus ex medullari substantia nequit novam vitam in= choare, nisi priès staminum essentia Vignea absorpta fuerit humore pistilli. (Laisx. Phil. bot.) Dans le même ouvrage le calyce et la corolle sont ainsi définis : Calyx : cortex plantae in fructificatione pracsens. Corolla : \iber planiae in flore praesens. 1. 23 1 178 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nos six à sept degrés de froid, que, peu après le dégel, on en voyoit déja d’un à deux pouces de longueur, c’est-à-dire d’environ trois à cinq centimètres (1). Diverses espèces de papillons voltigeoient aussi dans nos jardins. Si les entomologistes ne viennent pas à notre secours, s’ils ne puisent pas dans la physique même des armes pour combattre ce fléau de lagricul- ture sans cesse renaissant, il est à craindre que les chenilles ne survivent encore aux décrets républicains, de même qu’elles ont bravé précédemment les arrêts des parlemens et les foudres du Vatican. (1) Plusieurs chenilles cependant ont été détruites. J’en ai trouvé , trop peu à la vérité, éparses et collées sur les branches , dans la situation la plus naturelle, mais sans vie. Elles y avoient été surprises et frappées par la gelée, qui ne leur avoit fait éprouver aucune altération apparente; d’où l’on peut conjecturer que, pour survivre à un froid pareil à celui de cette année, il a été nécessaire aux chenilles de rejoindre leur nid, et de s’envelopper de l’espèce de coque commune qui semble assez particulièrement destinée à les mettre à l’abri de toutes les injures de l'atmosphère, E T D E PH TS IQ IUrE. 179 MÉMOIRE SUR LE SERREMENT CON VULSIF DES MACHOIRES, A LA SUITE DES PLAIES, Par SABATIER. Lu le 6 pluviose an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 16 fructidor de la même année, I y avoit déja long-temps que je pratiquois la chirur- gie, et je ne connoissois encore l’accident dont il est question dans ce mémoire que par le petit nombre de faits épars et présentés sans détails, qui se trouvent dans les auteurs, et par ceux que Philippe, chirurgien de réputation à Chartres, et l’un des correspondans de Vacadémie de chirurgie , lui avoit communiqués en 1762, lorsque j’eus occasion de observer au mois d’avril 1775. Un maçon , homme robuste et encore dans la force de l’âge, occupé à faire transporter les pierres d’un bâti- ment, se trouva derrière une voiture très-basse sur la- quelle on en avoit chargé quelques-unes, à l’instant où le cable qui les retenoit se rompit. Comme elles parois- soient disposées à tomber en arrière, un mouvement machinal Le porta à vouloir les retenir : mais il en fut 180 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES renversé; et l’une d’elles, lui tombant sur les deux cuisses, les lui écrasa à leur partie moyenne infé- rieure. Des blessures aussi énormes ne laissoient aucune espérance de guérison. Cependant je crus ne devoir point négliger les secours que l’art prescrit : je pratiquai plusieurs incisions sur les fractures, j’en tirai les esquilles sans nombre dont elles étoient compliquées, et je donnai issue au sang qui s’étoit épanché dans linterstice des muscles , après quoi je pansai d’une manière fort lâche avec des bandages à dix-huit chefs, et j’enfermai les extrémités dans des fanons. Le pouls étoit si foible et si lent, que je ne pus faire saigner le malade, comme son état l’auroit exigé ; je fus obligé, au contraire, de soutenir ses forces par quelques cuillerées de vin d’Es- pagne données comme cordial. Ce ne fut que le troi- sième jour qu’il parut se ranimer, et que les effets de la commotion commencèrent à se ralentir ; mais le blessé ne se réveilla de l’espèce d’engourdissement et de stu- peur dans lequel il étoit, que pour tomber dans un état pire. Il souffroit des douleurs horribles, et, malgré trois saignées qui lui furent faites, il passa la nuit dans la plus grande agitation. Le lendemain, quatrième jour de son accident, il se plaignit de serrement aux mâchoires et à la gorge, et de difficulté de respirer. Les muscles du cou et ceux du bas-ventre se tendirent dans la jour- née. On ne put lui rien faire avaler; il montroit même pour la boisson une répugnance que l’on auroit pu prendre pour une hydrophobie spontanée, et il périt dans l’espace de vingt-huit à trente heures. ED A DA THE MS 16 UM 181 - L'année d’après, je vis arriver le même accident dans un cas beaucoup moins grave, mais qui cependant étoit encore plein de dangers. On nous apporta de la Bastille un bas-officier à qui la chûte d’une des branches qui soutenoient le pont-levis de cette place, avoit cassé le bras droit à la partie moyenne et supérieure , et l’avant- bras du même côté, près le poignet. Ces deux mem- bres étoient excessivement pliés à l’endroit des frac- tures. La partie supérieure de l’humérus étoit prête à percer la peau : il y avoit une petite plaie au dedans du bras. La contusion étoit forte, et l’aspect de cette double maladie étoit effrayant. Les appareils étant préparés, je réduisis l’avant-bras sans trop de difficulté, après quoi je l’entourai d’un ban- dage à dix-huit chefs. Je procédai ensuite à la réduction du bras. Il me fut facile de lui rendre sa rectitude na- turelle. Lorsque j’eus agrandi la petite plaie, je portai le-doigt au dedans du membre, pour reconnoître l’état des choses, et voir s’il n’y auroit pas des fragmens d’os à Ôter : il ne s’en rencontra pas; mais je me trouvai dans un vuide fort grand, produit sans doute par la con: tusion que les parties molles avoient soufferte. Je fis ‘une seconde ouverture vis-à-vis de la première, à la partie externe et un peu postérieure du bras , et les deux bouts de l’os furent rapprochés, autant que cela fut possible. Ces blessures étoient très-graves, et je m’at- tendois à beaucoup d’accidens : il n’en survint pas. Le malade avoit perdu une si grande quantitéide sang, que je ne le fis pas saigner, La suppuration s’établit en huit 182 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES jours , et tout annonçoit les dispositions les plus heu- reuses, lorsque , le dixième de la blessure, le malade se plaignit que la situation où il étoit l’incommodoit beau- coup, et qu’il vouloit avoir la tête plus élevée. Cela n’étoit guère possible ; néanmoins on le contenta comme on put. Le lendemain les mêmes plaintes recommen- cèrent avec plus de vivacité, et le malade dit qu’il ne pouvoit dormir. Le jour d’ensuite, c’est-à-dire le dou- zième, il se trouva pris d’un serrement dans les mä- choires qui’ne lui permettoit pas d’ouvrir la bouche, Je lui prescrivis sur-le-champ une potion antispasmo- dique et calmante, et une tisane faite avec la racine de valériane sauvage. Ces remèdes n’empêchèrent pas la maladie de faire des progrès, quoique d’abord ils ‘ parussent la calmer, et que le malade füt plus tran- quille à tous égards ; il lui survint des sueurs excessives ; auxquelles il avoit déja quelques dispositions; la fièvre s’alluma ; le spasme s’étendit aux muscles du côté droit du cou et à ceux du bas-ventre. Je conseillai des la- vemens purgatifs, une saignée, des vésicatoires aux jambes. Néanmoins le malade périt en quatre jours: J’aurois desiré le faire baigner ; mais l’état de son bras, qu’il auroïit fallu remuer, ne me l’a pas permis. Je Pavouerai, ces deux observations firent sur moi une impression peu profonde : les blessures dont les personnes qui en font le sujet étoient atteintes , offroient si peu d'espérance de guérison, que, regardant leur perte comme inévitable, je ne fis pas à l’accident qui l’avoit déterminée toute l'attention qu’il méritoit, D’ailleurs, ET DE PHYS1IQU =. 183 comme il me paroissoit imtimement lié avec la nature du désordre qu’offroient les parties lésées, je me per- suadai qu’il étoit aussi impossible d’y remédier que de le prévenir ; mais bientôt je vis survenir le serrement convulsif des mâchoires à des personnes dont les bles- sures, bien moins considérables , ne paroissoient devoir pas avoir des suites aussi fâcheuses. Le jeudi 24 avril 1776, au soir, un bas-officier âgé de soixante-cinq ans, d’une constitution robuste, se laissa tomber de sa hauteur, dans l’obscurité ; il porta sur ses deux mains, mais plus sur la droite que sur la gauche, dé sorte que la première phalange du pouce fut luxée en dessus, et qu’il se fit une plaie transver- sale à la partie interne de ce doigt, un peu plus haut que la jointure malade. Le blessé éprouva beaucoup de douleurs pendant la nuit, et il se fit un peu de gon- flement à la main; ce qui ne l’empêcha pas de vivre à sa manière SR et de vaquer à une partie de ses occupations domestiques. Le mercredi suivant , qui étoit le sixième jour depuis sa chûte, il se réveilla avec un serrement dans les mâchoires qui ne lui permettoit pas de les écarter l’une de lautre. Peu d’heures après , il survint à la partie postérieure du cou une roideur qui le forçoit de se tenir renversé en arrière. Il comprit pour lors qu’il ne pouvoit se dispenser de se rendre aux infirmeries de la maison, où il fut transporté dans V’après-dînée. Le chirurgien de garde venoit de le sai- gner quand j’arrivai près de lui. Mon premier soin fut de réduire la luxation ; et, quelque grave que le cas me 184 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES parût, j'espérai qu'ayant remédié au déplacement de la phalange qui paroissoit être la cause de tout le désor- dre, le spasme céderoït plus aisément aux moyens que j’allois employer. Je prescrivis une seconde saigne, une embrocation avec l’huile de jusquiame sur l’avant- bras, le bras, le cou et le dos, un cataplasme de mie de pain et de lait sur la main, et une potion antispas- modique et calmante. Le lendemain matin le malade n’étoit pas mieux. Je m’informai encore des circon- stances de son accident; qu’il me raconta de la même manière que la veille. Son pouls étoit bon et bien réglé. ILessaya d’avaler devant moi un peu de potion anodyne, à travers les intervalles des dents qui lui manquoient. L'action de parler étoit un peu difficile, eu égard au serrement des mâchoires ; mais la respiration ne parois- soit pas fort embarrassée. Il alloit recevoir un lavement purgatif, et j’avois dit qu’on continuât les pansemens et les remèdes qui avoient déja été mis en usage, et qu’on le plongeât dans le bain, lorsqu’après avoir fait le tour de la salle, je trouvai qu’il venoit d’expirer, vingt-quatre heures après l’invasion du spasme ; et douze heures après qu’on eut commencé à lui donner du secours. Quelques jours après, il vint à nosinfirmeries un soldat âgé de quarante-cinq ans, qui avoit à la jambe une contusion fort considérable, à la suite d’un coup en cette partie. Lorsque les huit premiers jours de son ac- cident furent passés, je n’apperçus que l’échymose sur- venue à l’endroit blessé avoit pris la teinte de celles ET DE PHYSIQUE. 185 des scorbutiques. Je le fis passer à la salle destinée aux malades qui sont attaqués du scorbut. Il y fut pris, au bout de cinq à six jours, d’un serremment dans les mâ- choïres qui en gênoit les mouvemens; bientôt il lui fut impossible de les écarter l’une de l’autre. Les muscles de la partie postérieure du cou se roidirent. À peine : eus-je le temps de lui administrer quelques remèdes, car -il mourut en moins de trente-six heures. . Ces tristes événemens , que je voyois se succéder avec rapidité , réveillèrent toute mon attention. Je consultai quelques personnes de l’art, dont les unes n’avoient que des notions très-imparfaites du serrement convulsif des mâchoires, et telles qu’on les acquiert par la lecture, quand elles ne sont, pas fortifiées par l’expérience ; d’au- tres en avoient vu des exemples dont les suites avoient été aussi funestes qu'aux miens, et ne connoissoient pas plus que moi le moyen d’y remédier. M’étant souvenu qu’il étoit parlé de cette maladie dans un ouvrage pu- blié depuis quelques années à Londres, sous le nom d’Observations et de recherches de médecine, je le par- courus , et je trouvai qu’on étoit quelquefois parvenu à la guérir par l’usage des antispasmodiques,.et sur-tout par celui de l’opium donné à grande dose; mais que plusieurs en avoient été attaqués si vivement, et qu’ils étoient morts avec tant de promptitude; qu’on n’avoit pas eu le temps de le leur administrer. Ce remède, qui, dans d’autres occasions , produit de la stupeur et de l’engour- dissement, avoit réveillé les esprits abattus de ceux à qui on l’avoit fait prendre , et n’avoit eu d’autre effet 1, 24 186 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES sensible sur eux que d’exciter une abondante transpira- tion , présage du changement heureux qui devoit bientôt arriver dans leur état. Ma satisfaction fut d'autant plus grande, qu’elle ne fut pas troublée par le souvenir de la perte de mes malades, dont il me sembla et dont je ‘ crois encore que la rapidité n’auroit laissé aucun lieu à la guérison. J’espérois être assez heureux pour n’avoir pas sitôt l’occasion de recourir à la méthode employée en An- gleterre : elle ne tarda pas à se présenter. Un jeune homme de vingt-deux ans, grand, fort, et bien constitué, avoit eu en 1775 une gonorrhée qui avoit été guérie en deux mois et demi, à cela près d’un écoulement d’une goutte au plus deliqueur blancheen vingt-quatre heures. Vers la fin de 1776, cet écoulement se supprima tout-à- coup, et il vint une fluxion sur le testicule droit, avec douleur et fièvre. Les premiers soins qui furent donnés dissipèrent presque tout-à-fait cet accident; mais il re- vint peu après avec beaucoup dé force. Le testicule acquit le volume du poing, et devint fort douloureux. Il ÿ avoit long-temps que les choses étoient en cet état lorsque le malade me fut adressé. Je mis en usage les relâchans et les résolutifs connus , sans succès. Je fis aussi donner quelques frictions mercurielles qui n’en eurent pas davantage; car il fallut en venir à la castra- tion, qui fut pratiquée le jeudi 13 mai, après les pré- parations d’usage. Quoique j’eusse lié le cordon sper- matique , il yeut dans la journéeplusieurs hémorrhagies, que j’arrêtai par une seconde ligature faite avec un lien ET DE PHYSIQU Fr. 187 d'attente placé au moment même de l’opération , et par l’application d’un bouton de vitriol. Ces accidens jetè- rent de la consternation dans l’esprit du malade, déja affoibli par la perte d’une grande quantité de sang, et il y eut un gonflement d’estomac, accompagné de vents par haut et par bas. Néanmoins les choses se passèrent assez bien jusqu’au septième jour que je levai entière- ment l’appareil. Il se présenta alors à la partie supé- rieure de la plaie une tumeur grosse comme une petite noix, et de couleur livide, qui me donna de l’inquié- tude ; mais elle tomba en fonte les jours suivans, et disparut presque en entier. Le 28 mai, quatorzième jour de l’opération , le ma- lade étoit si bien, que je lui permis deux soupes. Il eut dans la journée une pesanteur sur l’estomac, et une sorte d’oppression , qui augmenta sur les onze heures du soir au point qu’il se crut au moment de mourir. Cependant le pouls étoit très-bon, et l’aspect naturel, de sorte que celui de mes élèves qui étoit resté auprès de lui n’en fut pas effrayé. Cet accident diminua peu à peu jus- qu’au lendemain matin. Ce fut alors seulement que j’en fus averti. La plaie étoit belle , et la suppuration de bonne qualité. Lié malade paroissoit assez tranquille, et il n’y avoit aucune altération dans le pouls. Comme la difficulté de respirer se faisoit un peu sentir, je con- seillai une potion antispasmodique à prendre par cuil- lerée, et une décoction de fleurs de sureau pour bois- son ; je fis aussi donner un lavement simple, et retran- cher toute espèce d’aliment, Le soir du mème jour, le 188 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES malade me dit qu’il avoit eu quelque peine à avaler. J’essayai de le faire boire devant moi; ce qu’il ne fit que par gorgées , et avec une répugnance approchant de celle des hydrophobes. Il ajouta qu’ayant eu la fantaisie de mâcher une bouchée de pain, il avoit senti de la roideur dans les mâchoïres. Je vis toute la gravité de son état; mais, comme il étoit tard , je ne changeai rien à ses remèdes pendant la nuit, de peur de lui causer de. inquiétude. - Le vendredi 30 au matin, le spasme étoit décidé ; il y avoit un peu de fréquence dans le pouls, qui néanmoins étoit fort bon. La plaie n’avoit pas souffert. Je fis faire des bols avec un scrupule de thériaque, dix grains de musc et un grain d’opium pour chacun. Je prescrivis la décoction de valériane sauvage pour boisson, et fis appliquer sur le creux de l’estomac un emplâtre avec parties égales de galbanum et d’opium. Deux de mes confrères, appelés en consultation dans l’après-dinée, desirèrent qu’on y substituât un large emplâtre de thé- riaque récente, et que le malade fût mis au bain pen- dant deux heures, s’il pouvoit le supporter; ce qui fut exécuté : du reste, ils ne changèrent rien aux autres moyens que j’avois conseillés, et on donna douze bols tant dans le jour que pendant la nuit. Le 31, le spasme de la mâchoire r’étoit pas augmenté ; mais il avoit fait des progrès sur les muscles du bas- ventre , qui étoient roides et tendus. Le pouls étoit plein et fréquent, la peau très-humectée, les yeux chargés et appesantis par l’opium. Il y avoit eu quelques heures ET DE PHYSIQU *. 189 de sommeil. Il fut convenu qu'on continueroit les re- mèdes de la veille, que le malade seroit baigné , qu’on lui feroit sur le cou un liniment avec le camphre dis- sous dans l’huile d’olive et avec le laudanum liquide, et qu’on lui appliqueroit des vésicatoires aux deux jambes. Le soir, la boisson fut changée en une émulsion dans laquelle on mit une once d’eau de fleurs d’oranges et un gros de liqueur minérale anodyne d’Hofman par pinte, et on donna un lavement qui procura des éva- cuations par bas très-abondantes. Quoiqu’on n’eût donné que deux bols dans la journée et dans la nuit, le lendemain, premier juin , le malade fut assez tranquille. Le pouls étoit bon, les spasmes des muscles du ventre beaucoup moindres : mais celui des mâchoires avoit augmenté ; les dents étoient fort serrées. Ce dernier accident devenoit plus marqué lorsque le malade étoit troublé par l’arrivée de quelque personne que ce fût. Comme la déglutition étoit plus difficile, on arrêta qu’au lieu des bols qui avoient été adminis- trés jusqu’alors , on donneroit des pilules d’un grain dopium seul, lesquelles, étant plus petites, devoient moins incommoder le malade, et qu’on lui feroit prendre par cuillerée une solution de deux grains de tartre stibié dans douze onces d’eau, afin d’entretenir la liberté du venire, qui avoit paru avoir un bon effet; du reste, on ne changea rien à ce qui avoit été mis en usage précé- demment. L’émétique , dont on ne donna qu’une cuillerée , Causa sur-le-champ une douleur vive à Pestomac, et des 190 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES secousses convulsives , qui, commençant à la partie su périeure et moyenne du ventre qui répond à ce vis- cère , se répandoient par tout Le corps, et avoient l’effet d’un hoquet très-violent. Ces secousses continuèrent le jour et pendant la nuit. Il s’y joignit une roideur à la partie postérieure et droite du cou et du tronc. Le ma- lade éprouva quelque soulagement dans le bain : mais il ne put prendre qu’une pilule d’opium, qu’il fallut même écraser ; et je fus obligé de substituer à ce médi- cament une potion antispasmodique , à laquelle j’ajoutai deux gros de liqueur minérale anodyne d’Hofman , et de laudanum liquide, qu’il consomma dans la journée. Le 2 juin, le pouls étoit tranquille , le malade#entiè- rement à lui, et même gai, le cou moins roide, les mâchoires moins serrées, les secousses convulsives du ventre moins fortes et moins fréquentes, l’aspect meiïl- leur, la suppuration des vésicatoires abondante, et la plaie de l’aîne en bon état. L’espoir auquel ces cir- constances sembloient permettre de se livrer ne ralentit pas l'emploi des moyens dont on s’étoit servi jusqu’a- lors. Malgré cela, quand le malade sortit du bain vers les deux heures après-midi, le serrement des mâchoires et de la gorge se trouva augmenté, la déglutition ne pouvoit plus se faire, et les spasmes du ventre avoient plus de fréquence et de force ; le pouls étoit très-animé, mais fort bon; les mouvemens convulsifs s’étendoient le long du bras et de la cuisse gauche. ._ Un lavement avec le miel de mercuriale n’avoit pro- duit aucun effet. Je proposai alors de substituer aux ET DE PHYSIQUE. 191 remèdes que le malade prenoïit par la bouche, des la- vemens rendus médicamenteux. On lui en donna un avec trente grains de musc et trois grains d’opium. À minuit, les contractions de l’estomac devinrent très- vives. Il y eut un étouffement permanent : les crachats ne purent plus être expulsés. Un second lavement avec le musc et l’opium n’arrèta pas les progrès de ces ac- cidens. La parole se perdit, et les contractions de l’es- tomac devinrent excessives. Vers les trois heures du matin, on donna un autre lavement dans lequel on avoit délayé soixante grains de musc et six grains d’opium. Depuis ce temps le malade parut plus tranquille, et il eut deux heures de bon sommeil. Le 3 au matin, la plaie étoit belle , les contractions du ventre assez fréquentes et assez fortes, le pouls bon, la connoissance nette ; mais nulle déglutition. La sa- live, qui étoit épaisse et visqueuse, ne pouvoit être expulsée , et menaçoit de suffoquer le malade ; les mâ- choires s’ouvroient au moins de deux lignes; l’action de parler étoit assez libre. On ne baigna pas ce jour-là $ mais on continua les lavemens avec le musc et l’opium ainsi que les embrocations et les linimens. Il parut y avoir un peu de mieux jusqu’à quatre heures et demie que les accidens se renouvelèrent avec plus de force que jamais. La langue se prit même entre les dents dans ‘un de ces accès; et ce ne fut qu'avec beaucoup de peine, et après avoir plié une feuille de myrte assez forte, dont on se servoit pour lui écarter les mâchoires, qu’on parvint à la dégager. On avoit donné trois lavemens 192 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dans la journée; vers le minuit on en donna un qua- trième , avec neuf grains d’opium et quatre-vingt-dix grains de musc. Les spasmes en parurent un peu ra- lentis: mais ils se réveillèrent sur le matin; et Je pouls acquit une vîtesse si grande, qu’il donnoit au moins cent trente pulsations par minute. Le 4, les choses demeurèrent dans le même état. Le malade étoit d’une foiblesse extrême, et paroissoit de- voir bientôt mourir. Nulle partie musculeuse de son corps n’étoit exempte de spasmes ; il avoit des grince- mens de dents fort fréquens , et se plaignoit de vives douleurs au creux de l’estomac. La vitesse du pouls étoit telle, qu’on ne pouvoit en compter les battemens. 11 n’étoit plus possible de lui rien administrer. Un mé- decin de réputation, que l’on avoit appelé la veille, avoit été d’avis d’une saignée du pied, qui ne put être pratiquée vu le mauvais état des choses. Ce jour-là il conseilla de mettre sur la région de l’estomac un large emplâtre de thériaque sur lequel on auroit versé quel- ques gouites d’huile de succin et de teinture de cas- toréum ; mais à peine ce topique fut-il appliqué , que le malade expira , le huitième jour depuis qu’il étoit tombé dans les convulsions, et le vingtième de son opération. Je crus dans le temps ne devoir pas moins attribuer la perte de ce jeune homme à la timidité que l’on avoit mise dans l’administration de l’opium , qu’à la gravité de l'accident dont il étoit attaqué. En effet, ce remède fut presque interrompu le second jour , et il ne fut donné, dans l’espace de vingt-quatre heures, que deux des HT DE PHYSIQUE 193 pilules dont il faisoit partie, quoique j’eusse recom- mandé, de les faire prendre toutes les deux heures, comme la veille. L’élève que j’avois laissé près de lui s’excusa sur l’état d’affaissement et de stupeur dans lequel le malade s’étoit trouvé pendant le jour, ét sur- tout pendant la nuit, etsur la plénitude et la fréquence de son pouls. Quoique très-instruit, il ignoroit que Vopium eût été donné, en pareille circonstance, à une dose beaucoup plus considérable que celle que j'avois prescrite, et qu’on eût continué pendant plu- sieurs jours sur le même pied. Cette faute une fois commise , il ne fut plus possible de revenir sur ses pas. Les mâchoires se serrèrent avec plus de force, et la déglutition devint si difficile, qu’il fallut renoncer à faire prendre l’opium en substance, et que je fus obligé d’y suppléèr par des potions dans lesquelles entroit le laudanum liquide, et par des lavemens où j’en. faisois délayer une assez grande quantité. Peut-être aussi Pémé- tique, que nous, crûümes devoir -donner au malade le troisième jour, porta-t-il sur l’estomac , déja agacé , une irritation qui s’étendit à tout le genre nerveux; c’est du moins.à cette époque ‘que les accidens les plus alarmans se déclarèrent ,;et que nous pümes voir qu’il n’y avoit rien: à espérer du, malade, 0) :: ï} Je n’eus pas le même reprôche à me faire dans le cas qui suit, et cependant le suceès ne fut pas plus heu- reux. Un soldaï, âgé desoïxante-cinq ans ; mais robuste et de bonne santé ,.eut une hernie inguinale compliquée d’étranglement , dont il fut opéré le 4 juin de l’année 1, 25 194 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 1780. Le 18 du même mois, qui étoit le 14 de son opération, il se plaignit, dans l’après-dinée , d’une gêne dans les mouvemens de la mâchoire. Le 19, cet acci- dent étoit un peu augmenté. Je lui fis donner huit bols avec le. musc, le cinabre ; et un grain d’opium pour chacun, incorporés avec le sirop de pivoine. Le 20 au matin, j’observai que la constriction de la mâchoire étoit un peu plus forte, et qu’il y avoit de la roideur dans les muscles du cou. Il prit un pareil nombre de bols que la veille, et fut mis au bain pendant une heure et demie. Le lendemain le spasme étoit devenu encore plus considérable. Je fis doubler la dose de l’opium, et porter celle du musc et du cinabre à douze grains par pilule. Comme il paroïssoit fatigué , je fis suspendre le bain. Le soir du même jour, l’état du malade étoit plus fâcheux à tous égards : les mâchoires étoient fort serrées, et la tête renversée en arrière. Il mourut la nuit. Je ne savois à quoi m’en tenir sur lefficacité de l’opium et de ses préparations contre le serrement con- vulsif des mâchoires, lorsque le citoyen Billard, chi- rurgien en chef du port et des hôpitaux de la marine à Brest, envoya à Pacadémie de chirurgie quatre obser- vations qui la constatent. Ce praticien éclairé , ayant été déposé à Lisbonne au mois d’août 1761 , après un com- bat sur mer qui fut fort sanglant, avec quatre-vingt-dix blessés, en eut plusieurs qui éprouvèrent cet accident, ét, malgré ses soins et ceux d’autres chirurgiens dont il avoit requis les avis, il ne put en sauver aucun. k ÉnCET DE PHYSIQUE 195 Depuis ce temps il en avoit vu périr d’autres qui avoient été si brusquement attaqués, qu’ils avoient succombé en moins de vingt-quatre à trente heures, et sans, pour ainsi dire, qu’on eût eu le temps de s’appercevoir de leur état, et de leur apporter aucun secours. A la fin cependant, faisant attention à la vertu qu’a l’opium de remédier aux spasmes et d’émousser la sensibilité ner- veuse, et sachant d’ailleurs qu’on étoit parvenu dans ces derniers temps à obtenir, au moyen de ce remède, la guérison de quelques personnes qui avoient le serre- ment convulsif des mâchoires, il résolut d’en faire usage à la première occasion. Elle ne tarda pas à se présenter. Un officier anglais, qui avoit eu le pied brisé par un coup de canon, s’étoit senti les mâchoires ser- rées le quatorzième jour de sa blessure: il lui fit donner la teinture anodyne de Sydenham , en commençant par vingt-cinq gouttes, dose qu’il augmenta graduellement jusqu’à soixante, et qu’il fit répéter trois ou quatre fois en vingt-quatre heures. Il s’éleva une abondante trans- piration , qui fut favorisée par l'esprit de Mindérérus dans une infusion de fleurs de sureau édulcorée avec le miel. Malgré cela , le malade avoit toujours le cou ren- versé en‘arrière , et les mâchoires serrées au point qu’on avoit de la ‘peine à le faire boire. Les selles et les urines se supprimèrent, et tout le corps devint roide comme une barre. Cependant il y avoit quelques mo- mens de sommeil, la suppuration étoit de bonne qua- lité , et la plaie, qui étoit belle, tendoit à se cicatriser. Le citoyen Billard substitua le petit lait à l’infusion de 196 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES fleurs de sureau miellée ; il donna de la poudre tem- pérante de six en six heures , fit faire des onctions d'huile camphrée sur le bas-ventre , et appliquer sur la région de la vessie des cataplasmes qui rétablirent assez promptement la sortie des, urines. Il remédia à la cons- tipation par des lavemens émolliens souvent répétés, par de la manne dans de l’eau de tamarin, et princi- palement par l’huile de palma-Christi, remède excel- lent dans les cas d’irritation, de chaleur et de séche- resse d’entrailles. Le ventre s’étant relâché, il com- mença à concevoir quelque espérance ; et insistant sur ces différens moyens, variés et combinés suivant les circonstances, il vit les mâchoires se desserrer au bout de dix à douze jours, et les autres mouvemens convulsifs se dissiper peu à peu. Des trois autres malades dont parle le citoyen Bil- lard, deux ont été traités de la même manière, et ont aussi heureusement guéri. L’un avoit eu la cuisse am- putée sur-le-champ à l’occasion d’un coup de canon qui avoit brisé la partie supérieure du péroné et celle du tibia jusques dans larticulation du genou, et l’on avoit fait lamputation du bras à l’autre pour une blessure de même espèce à l’avant-bras. Ils furent pris du serrement des mâchoires ; le premier, le quatorzième jour de son accident; et le second, le vingt-cinquième seulement. Le laudanum liquide dissipa ce symptôme en quatre et en cinq jours, après quoi ils ne tardèrent pas à se ré- tablir. Le quatrième malade ayant été blessé par une balle de mitraille qui lui avoit fracassé l’acromion et BEM IDIEN PARTY USNI QU Er: 197 sillonné l’épine de l’omoplate gauche , de manière qu’un grand nombre d’esquilles s’implantèrent dans les mus- cles sus et sous- épineux, eut les mâchoires serrées dès le sixième jour. En peu de temps tout son corps devint roide comme une barre. Ce fut en vain qu’on lui administra le laudanum liquide, à la dose de vingt-cinq gouttes, de six en six heures, et qu’on fit usage des autres moyens qui avoient si bien réussi dans les cas précédens ; il fallut, au bout de quelques jours, faire donner lopium dissous dans l’eau. La quantité en fut portée à six grains, de quatre en quatre heures, et fut continuée long-temps , puisque ce ne fut qu’après trois semaines que le spasme des mâchoires commença à diminuer. Depuis que j’ai eu connoissance de ces observations, : jai aussi eu la satisfaction de guérir un malade que le serrement des mächoires, si funeste à ceux que j'avois eus jusqu’alors entre les mains, menaçoit d’une mort prochaine. Je ne puis dire que ce soit à l’opium qu’il ait dû son rétablissement , puisqu'il en a pris fort peu ; mais le cas n’en est pas moins intéressant et moins propre à répandre du jour sur cette maladie. Un homme de trente ans, d’une constitution foible et délicate, portoit depuis dix mois au testicule droit un engorgement de nature squirreuse et compliquée de fis- tule , qui lui étoit survenu en conséquence d’un coup en cette partie, et qui, loin de céder aux remèdes les mieux indiqués, prenoit des accroissemens continuels. Les douleurs, tantôt plus et tantôt moins vives, rendoient 198 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Pétat du malade fort triste &et l’empêchoient de se livrer à aucune occupation. Je lui avois annoncé , dès les pre- miers temps de cette incommodité, qu’il étoit à craindre qu'il ne fallüt en venir à l’extirpation du testicule, à laquelle il se détermina enfin au commencement de l'automne 1780. J’employai la ligature du cordon des vaisseaux spermatiques , pour me rendre maître du sang, Les premiers jours se passèrent plus tranquillement que je ne l’avois espéré, et tout promettoit un succès com- plet, lorsque , le samedi 7 octobre, le quinzième de opération , le malade se plaignit d’un léger engourdis- sement à la mâchoire, qui se fit sentir lorsqu’il man- geoit les premières cuillerées de la soupe que je lui avois permise depuis quelques jours. Je fis peu d’at- tention à cet accident, qui n’avoit encore rien de carac- térisé, et qu’on pouvoit attribuer à beaucoup de causes différentes de celle dont il dépendoit ; néanmoins je prescrivis une potion antispasmodique. Les deux jours suivans se passèrent sans que le mal parût augmenter. J’observai seulement que le pouls avoit beaucoup de lenteur, et qu’à peine il donnoit trente-cinq pulsations par minute. Le 9, vers les sept heures du soir, les mâchoires s’ouvroient un peu plus difficilement, et le malade ne pouvoit essayer les mouvemens de la masti- cation sans éprouver de la difficulté à respirer, et de la fatigue dans les muscles de la poitrine. Malgré cela, la nuit fut aussi bonne que celles qui avoient précédé, et il y eut neuf heures d’un sommeil tranquille. Le 10 au matin , l’engourdissement de la mâchoire et le serrement ET DE PHYSIQUE. 199 de la poitrine étoient augmentés. Quoiqu'il n’y eût aucune tension dans les muscles du ventre, et que la plaie parût avoir fait des progrès rapides vers la cica- trice, je crus cependant devoir administrer les anti- spasmodiques et lopium, pour m’opposer aux effets de cette effrayante maladie. On donna le soir deux bols de camphre et de musc, avec un grain d’opium dans chacun. Ces remèdes procurèrent un peu de relâche et quelques heures de sommeil pendant la nuit qui en sui- vit l'administration. Le lendemain 11, les mouvemens de la mâchoire et de la respiration s’exécutèrént avec assez de facilité; il y eut de la moiteur et un peu d’as- soupissement. Le pouls étoit peu élevé; le ventre s’ou- vrit à l’aide d’un lavement purgatif. On donna deux bols composés comme ceux de la veille. Le 12, les choses étoient en fort bon état. J’observai cependant que le malade étoit plus inquiet que les jours précédens , et qu’il avoit besoin que l’on rassurât son imagination alarmée ; mais comme les spasmes étoient fort diminués, je supprimai les bols, et je leur substituai une potion calmante dont on donna quelques cuillerées dans le jour: Le 13, la mâchoire se remuoit plus difficilement, et il y avoit plus de gêne dans les mouvemens de la res- piration. La soupe et les autres alimens dont le malade usoit en petite quantité , tels que les biscuits à la cuil- ler trempés dans du vin d’Alicante, les œufs frais avec quelques mouillettes de pain fort minces, etc., eurent beaucoup de peine à passer. Je fus obligé de revenir aux bols, dont le malade prit un le matin et un autre 200 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES le soir, comme à l'ordinaire. La lenteur excessive du pouls me suggéra de lui faire appliquer un vésicatoire aux deux jambes, et je lui fis exposer en différens temps la tète à la vapeur de l’eau chaude, qu’il recevoit à l’aide d’une serviette. Ces secours n’empêchèrent pas que la nuit ne fût fort agitée. Il y eut beaucoup de tiraillemens à la poitrine, et un sentiment de chaleur vive dans le ventre. Le ma- lade se plaignoit d’une sorte d’ivresse, d’engourdisse- ment dans les membres, de douleur à la gorge, et de plus de serrement dans Îles mâchoires. Le lendemain il y eut de Passoupissement et de la moiteur qui rame- nèrent un peu de calme, Comme le ventre ne sétoit presque pas ouvert les jours précédens, je conseillai , le quatorzième , trois verres d’une tisane royale, qui eurent un grand effet, et qui procurèrent la sortie d’une quan- tité étonnante de matières très-fétides, après ‘quoi il.y eut beaucoup de mieux en tout genre: On ne fit point rendre de bol ce jour-là. Cependant la nuit fut bonne, et le malade dormit long-temps d’un sommeil tranquille. Un lavement qui fut donné le lendemain 15 au matin, attira encore une grande quantité de matières avec le même succès, car la journée se passa à merveille. Le pouls s’anima et prit un peu de vitesse. Le pansement des vésicatoires, que l’on sait être très-douloureux dans les commencemens , ne causa aucun spasme, aucune irritation. Le visage, qui avoit été très-gonflé les jours précédens , commença à se détuméfier. Les mouvemens des mâchoires étoient plus libres; la respiration s’exé- F-TAx DIE PPEN YVES QUI E; 201 cutoit assez aisément. Le malade put se lever et faire quelques pas dans sa chambre. Le 17, il alla jusqu’à la fenêtre , où il se sentit fort bien de respirer un air frais. Le 18 , l’excoriation produite par le vésicatoire étoit enflammée et douloureuse ; il en découloit un pus san- guinolent. Vers le soir , il y eut quelques vapeurs occa- sionnées par l’inaction dans laquelle l’état des jambes retenoit le malade; maïs les spasmes ne revinrent pas. Le 19 et le 20 se passèrent d’une manière aussi satis- faisante. Le 21 fut orageux : tout faisoit impression sur le malade ; la présence des personnes qu’il étoit le plus accoutumé à voir lui occasionnoit des spasmes si vio- lens, qu’il ne pouvoit écarter les mAchoires , et que sa tête se renversoit en arrière avec force. Lies muscles du bas-ventre étoient aussi dans une grande tension. Je fus averti que le malade, à qui j’avois laissé une trop grande liberté sur le régime, avoit beaucoup mangé pour son état; en conséquence j'exigeai qu’il observât une abstinence presque totale les jours suivans : alors les accidens se dissipèrent tout-à-fait. Il ne restoit plus qu’un peu de roideur dans les muscles du bas-ventre et de serrement aux mâchoires > qui n’empêchoient pas le malade de sortir en voiture, et d’aller chercher de la dissipation hors de chez lui. Au bout de quelques jours , il m’avertit qu’il avoit résolu de se rendre dans une terre éloignée de quinze à dix-huit lieues de Paris, où il faisoit sa résidence ordinaire, et où il espéroit qu’un régime sain, quelque exercice, le grand air, et sur-tout le contentement d’être rendu à sa famille et à Ze -26 202 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ses affaires, le rétabliroient peu à peu. Il partit le 28 octobre. Les spasmes dont il étoit encore attaqué se dissipèrent avec lenteur , et ce ne fut que plus de vingt jours après être arrivé chez lui qu’il se trouva totale- ment débarrassé. Il est revenu depuis ce temps à Paris, et jai eu le plaisir, non seulement de le voir rétabli de son accident, maïs jouissant du bien-être qu’il s’étoit proposé en se faisant extirper une partie incommode par son poids , et par les douleurs habituelles qu’elle lui occasionnoit. On peut, ce me semble, tirer les inductions sui- vantes, tant des observations qui font la base de ce mémoire , que de celles de Philippe, de Chartres, dont j'ai parlé en commençant, mais que je n'ai pas fait connoître d’une manière particulière, parce qu'aucun des malades qui en font le sujet n’ayant pu être sauvé, elles n’auroient rien appris de plus que celles que je viens de mettre sous les yeux de l’Institut. 1°. Le serrement convulsif des mâchoires ‘est fort analogue au tétanos des Grecs , et à celui qui règne dans les contrées méridionales de l'Amérique, et dont on trouve la description dans plusieurs ouvrages, et notamment dans un mémoire de Chalmers, médecin à la Caroline , inséré dans le premier volume des Obser- vations et recherches de médecine, et dans celles pour servir à l’histoire de la Guiane française, publiées en 1779 par Bajon, chirurgien. En effet, ces deux maladies offrent à peu près les mêmes symptômes, ont presque toujours une terminaison aussi funeste, et cèdent aux IT) DE PHYSIQ U'E. 203 mêmes moyens, dans le très-petit nombre de cas où elles sont susceptibles de guérison. Je crois pourtant apper- cevoir entre elles une différence assez remarquable : le tétanos est fréquemment accompagné d’un spasme aux masséters et aux temporaux, pareil à celui qui donne lieu au serrement convulsif des mâchoires; mais, pour le plus souvent, ce spasme n’arrive qu’après que tous les autres muscles sont déja entrés en contraction, et que le corps entier est devenu roide et inflexible , au lieu qu’il constitue essentiellement le serrement convulsif des mâ- choires, et que beaucoup périssent sans avoir éprouvé d'autre incommodité. D’ailleurs les maladies dont il s’agit étant le produit, l’une de causes intérieures et cachées, et l’autre de l’irritation excitée sur les nerfs par une blessure plus ou moins considérable, elles peu- vent être regardées comme différentes , quoique faisant partie d’un même genre, et très-proches l’une de l’autre. 2°. Le serrement convulsif des mâchoires se présente sous différens aspects. Ordinairement c’est une maladie des plus aiguës, et qui se termine par la mort, sans avoir occasionné, en apparence, de changement bien notable dans l’économie animale. À peine ceux qui en sont attaqués ont-ils quelque difficulté à respirer. Leur pouls s'éloigne peu de l’état naturel. Nul autre muscle du corps ne souffre de convulsions que ceux destinés à rapprocher les mâchoires, et les facultés intellectuelles ne sont presque pas lésées. Cependant ils ne vont guère au-delà de trente à trente-six heures, et plusieurs sont tués en vingt-quatre. En d’autres cas , la maladie, plus 204 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES effrayante en apparence par les mouvemens convulsifs de toute espèce qui Paccompagnent, dure plus long- temps , et, malgré son danger excessif, on peut es- pérer de la guérir. Enfin il y en a quelques uns, et sans doute en fort petit nombre , puisque je ne l’ai vu qu’une fois dans le malade qui fait le sujet de ma septième observation, en qui les progrès du mal sont fort lents; et peut-être seroit-il possible alors d’en obtenir la gué- rison sans avoir recours à aucun spécifique, et par le seul usage des remèdes généraux prudemment admi- nistrés. 3°. Le serrement convulsif des mâchoires survient à toutes sortes de plaies : à celles qui résultent de lampu- tation, de la castration, de la hernie ; à celles qui in- téressent les articulations, aux fractures, et enfin à de simples contusions , comme il est arrivé à celui qui fait le sujét de ma quatrième observation. Il se déclare plus tôt dans les uns, et plus tard dans les autres. Quelques uns en sont attaqués le quatrième et le sixième jour de leurs blessures ; d’autres, en plus grand nombre, le quatorzième ; d’autres le dix-huitième, le vingtième , le vingt-cinquième, et mème le trentième. On pourroit croire que la lenteur avec laquelle le mal se manifeste est d’un présage avantageux : cependant le citoyen Bil- lard a guéri un de ses malades qui l’a éprouvé le sixième jour de l’opération de la castration, au lieu que tous ont péri entre les mains ou sous les yeux de Philippe, quoique parmi les cinq personnes dont il a donné VPhistoire, trois w’aient senti les atteintes du spasme NT DS RE AE VESTE © À ni 205 que le vingt-cinquième, le vingt-septième et le tren- tième jour de l’accident , ou de l’opération qui y a donné lieu. 4°. Il paroît impossible de prévenir le serrement con- vulsif des mâchoires. Le citoyen Billard propose, pour parvenir à ce but, de faire une perquisition exacte des corps étrangers qui pourroient se rencontrer dans la plaie , et de les extraire ; de procéder à la section des ten- dons , des muscles et des nerfs piqués, ou en partie coupés ou rompus ; de n’employer que des pansemens doux ; de prescrire un régime tempérant et adoucissant, et pres- que entièrement tiré du règne végétal ; de faire prendre des bains, s’ils paroissent nécessaires ; et enfin d’admi- nistrer de bonne heure les préparations d’opium, pour calmer les douleurs et s’opposer aux effets de l’irritation. Dans quels cas ces moyens peuvent-ils, convenir? Sans doute dans des plaies d’armes à feu, dans des fractures compliquées, dans des contusions où les parties molles ont beaucoup souffert; mais ce ne sont pas les seuls où Vaccident dont il s’agit arrive. Quels corps étrangers y a-t-il à extraire à la suite de la castration, de la hernie, des amputations? de quels débridemens les plaies qui en résultent sont-elles susceptibles? quelles douleurs causent-elles qu’il faille calmer, quand les premiers jours sont passés ? Cependant on est bien loin alors d’être à l’abri du serrement convulsif des mâchoires : il survient inopinément , lorsque tout est en bon état, et que la guérison de la maladie principale semble pro- chaine; et, n'étant annoncé par rien, il paroît, vu son 206 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES peu de fréquence , que ce seroit bien souvent tourmenter les malades en vain, que de chercher à le prévenir. 50, Enfin, de tous les moyens employés pour le gué- rir, l’opium paroît être le seul qui ait eu du succès. Il ne réussit que lorsqu'il est donné à grande dose, A la vérité , les trois premiers malades du citoyen Billard ont été sauvés par le seul usage du laudanum liquide de Sydenham, dont il leur faisoit prendre jusqu’à cent gouttes par jour; mais il a fallu pour le quatrième , qui étoit attaqué avec beaucoup plus de violence que les autres, avoir recours à l’opium en substance, et en porter la quantité à trente-six grains en vingt-quatre heures. Ce procédé est celui des Anglais : ils n’ont pas été retenus par la timidité dans l’emploi d’un remède dont les effets, ainsi que ceux de tous les autres, n’ont rien d’absolu, et dépendent de la disposition des ma- lades auxquels on le donne. Au contraire, ils se sont apperçus que quand on faisoit prendre moins d’opium qu’à l’ordinaire, ou qu’on en suspendoit absolument l’usage, les convulsions revenoient avec plus de force qu'avant. Je ne crois cependant pas qu’ils aient été aussi loin que le citoyen Billard, et qu’ils aient passé vingt- six grains en vingt-quatre heures. Un médecin d’une réputation brillante et méritée pense que l’application du feu sur la partie blessée pourroit faire cesser le ser- rement convulsif des mâchoires. Mais il est facile de voir qu’il y a beaucoup de cas dans lesquels on ignore absolument où réside la cause du mal. On dit aussi que le célèbre Jean-Louis Petit regardoit l’ampu- ET DE PH Y SI QU x 207. tation du membre blessé, pratiquée aussitôt qu’il com- mence à se manifester, comme le moyen le plus sûr pour y remédier. Sans doute cet habile praticien n’avoit vu le serrement convulsif des mâchoïires qu’à Ja suite des fractures et des autres maladies des extrémités. D'ailleurs , quel moment à saisir pour amputer un membre, que celui où il se déclare un accident si sou- vent et si promptement mortel! et comment se persua- der que la douleur excessive et inévitable de l’amputa- tion puisse faire cesser le trouble et l'agitation aux- quels le système nerveux est déja en proie? 208 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES OBSERVATION SUR UNE OPÉRATION DU TRÉPAN AU FÉMUR, Par TENONX. Lu le 26 floréal an 4, etidéposé au secrétariat de l’Institut le 16 vendémiaire an 5. er contribuer sans doute aux progrès de l’art de guérir, que de faire de nouvelles applications de ses procédés salutaires. On n’avoit point encore, que je sache, trépané l’os de la cuisse : je lai trépané avec succès. La description du mal qui a nécessité cette opération, et le détail des moyens que j’ai employés pour le surmonter, font le sujet de cet écrit. Cause du mal. Un homme vigoureux, âgé de trente-trois ans, le citoyen Rolland, fermier à Saint-Marc sous Dammar- tin, traversoit une porte en courant; il se heurta le grand trochanter de la cuisse droite contre l’un des jambages de cette porte, et fut renversé du coup. La douleur fut très-vive, suivie d’inflammation et d’un FT ADOEU PIE Y S.1'Q U r° 209 empâtement considérable. L’inflammation se modéra au bout de quelque temps, mais l’empâtement subsista pendant cinq années consécutives ; il étoit accompagné de douleurs légères que la pression faite avec le doigt, le marcher et les premières gelées, augmentoient. À la fin de ces cinq premières années, il parut une tumeur du volume d’un œuf à la partie moyenne ex- terne de la cuisse. Par la suite elle s’ouvrit spontané- ment; il en sortit un pus séreux, avec une masse de chair fongueuse du volume du petit doigt. À partir de ce moment, les douleurs cessèrent, le foyer de l’abcès se resserra en prenant la forme d’une longue fistule dont le fond aboutissoit au grand trochanter, et, au bout de deux autres années , il ne s’écouloit plus guère de cette fistule que quelques gouttes de sérosité tous les quinze ou vingt jours. La septième année révolue de la durée de cette ma- ladie, il survint à son premier siège un gonflement in- flammatoire qui embrassoit le haut de la cuisse, une partie de la hanche et de laine; on y découvroit pro- fondément une légère fluctuation : la fièvre étoit grande, la douleur vive. Le malade vint à Paris ; il se confia à mes soins. Après lavoir préparé convenablement à l’opération, j'y procédai comme il suit. J’ouvris d’abord la fistule de la face externe de la cuisse, depuis son orifice jus- qu’à son fond, qui aboutissoit au nouveau dépôt dont on vient de parler, sans avoir de communication avec l'intérieur du foyer de celui-ci; j’ouvris ensuite ce ki; 27 210 MÉMOIRES, DE MATHÉMATIQUES nouveau dépôt, er prolongeant la première incision. IL en fallut faire deux autres en travers de la précédente, l’une tendante à l’aîne , l’autre dirigée vers la fesse. Il résultoit de ces dernières un lambeau triangulaire que j'ébarbai, pour mieux découvrir le fond du mal; j’en- levai des chairs fongueuses ; je fendis des brides, des cloisons membraneuses , afin de ne laisser que le moins de retraite qu’il se pourroit au pus, et de mettre los plus à découvert. Le sang qui couloit suspendit toutes perquisitions ultérieures ; d’ailleurs Popération avoit été si longue et si douloureuse, qu’il convenoit de donner du répit au malade. Je me bornai donc à laisser saigner librement la plaie, sans trop me presser d'appliquer le premier appareil , qui consistoit en charpie sèche , com- presses, bandage, affermi pendant trois ou quatre heures par la main d’un chirurgien. À la chûte de ce premier appareil, je remarquai une carie au grand trochanter, une autre à la partie supé- rieure du fémur, au dessous de son col, et dans celle-ci un trou d'environ deux lignes de diamètre. Ce trou communiquoit avec le canal médullaire. Il n’y avoit point à douter que la carie ne s’y étendit, et que, pour la détruire, il falloit se mettre en état d’y atteindre. Je commençai par attaquer la carie à l’extérieur de l'os ; j’employai successivement, à cet effet, la rugine, qui est un grattoir tranchant, le ciseau , la gouge, avec le maillet de plomb, le cauière actuel, ou fer rougi au feu. Quant à la fistule ou au trou qui communiquoit avec ET DE PHYSIQUE. 211 le canal de la moëlle, je tentai de l’élargir avec des lames ou mèches que je fis faire bien tranchantes sur leurs bords , d’une forme pyramidale, plus larges d’en- viron une ligne les unes que les autres, disposées de manière à s’adapter à l’arbre du trépan, et à se succéder dans leur application : mais je fus forcé de les réfor- mer ; il eût fallu peser trop rudement pour s’en servir: d’ailleurs elles occasionnoiïent des secousses , et je crai- gnois de rompre l'os; ce qui me fit recourir à des équar- rissoirs ou élargissoirs , mousses à leur extrémité, et à quatre tranchans, bien trempés, d’une forme pyrami- dale. Je les fis monter à la manière des vrilles. Je n’en procurai trois dont les diamètres se succédoient en gran- deur. Commençant par faire usage du plus étroit, j’ob- tins par leur moyen une ouverture suffisante de dix lignes de diamètre, plus facilement et avec moins d’ef- forts qu'avec les lames précédentes montées sur l’arbre du trépan. Cette ouverture mit à découvert, dans le canal du fémur, un champignon où une masse de sub- stance molle, comme charnue , d’un rouge foncé , facile à saigner, et en même temps d’une extrème sensibilité. Mes expériences sur les os longs des animaux vivans navoient appris que c’est ainsi que se transforme la membrane de la moëlle, lorsqu'elle a été trop abreuvée de fluides relàächans. Je ne fus donc point surpris de Vétat où je trouvois celle-ci, qui avoit communiqué avec les fluides de l’intérieur du foyer du dernier dépôt du haut de la cuisse. Il fallut consumer ces fonguosités, cautériser linté- 212 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES rieur du canal du fémur par-tout où elles avoient pul: Julé. Je ne connoissois point précisément la forme et l’étendue de ce canal à cet endroit; je fis, pour m’en assurer, plusieurs coupes de fémurs sur des pièces de mon cabinet anatomique, et sur elles je fis modeler des cautères actuels, proportionnés d’ailleurs à l’ouverture qui devoit leur donner passage. J’en fis une première application; car, par la suite, de nouvelles fonguosités reparurent , qu’il fallut consu- mer pareillement, Une portion du grand trochanter, toute cariée, étoit prête à tomber; j’achevai de la dé- tacher. Il poussoit des chairs mollasses sur toute la surface dénudée de l’os à l’extérieur; j’y portai le fer rouge. Pansement. Les pansemens à cette époque consistoient en ban- delettes de linge trempées dans la teinture de myrrhe et d’aloès, que j’introduisois dans le canal médullaire , mais dont je retenois un bout au dehors qui servoit à les en retirer; en charpie imbibée de la même teinture, que j’appliquois sur l’os à lextérieur; et en digestif composé de jaune d’œuf, de térébenthine, d'huile d’hy- péricum et d’eau-de-vie, destiné au pansement des chairs; et j’enveloppois toute la cuisse, à la région malade , de compresses trempées dans une décoction de plantes émollientes et résolutives , animée d’eau-de-vie. En peu de temps cette large plaie prit un caractère satisfaisant, et nous commencions à nous livrer à ET DE PHYSIQ Ur. 213 espérance que le terme des douleurs étoit passé, lors- qu’il parut à la partie moyenne externe de la cuisse, dans le lieu qu’avoit occupé le premier dépôt , des bour- geons de chaïirs fongueux qui déceloient un mauvais fond et masquoient une carie. Je la découvris, la ru- ginai, et je finis par la cautériser. Cette opération fut en quelque sorte la dernière; je dis en quelque sorte, parce que j’eus par la suite à me défendre presque con- tinuellement contre le progrès trop rapide de la cica- trice des chairs, comparativement aux progrès plus tar- difs de la réparation de l’os. Cette marche inégale dans le progrès de la répara- tion de ces deux substances ; l’une osseuse, l’autre charnue, sur-tout à la cuisse, où le volume des mus- cles surpasse plus qu’en aucune autre partie celui de Vos, nécessita beaucoup de soins pour tenir les chairs suffisamment écartées, afin de faciliter l’écoulement du pus au dehors, de procurer la liberté des pansemens de Vos, de ménager aux exfoliations le temps de se faire, et afin d’asseoir la cicatrice des chairs sur un fond sain et solide. Comme on n’a pas d'exemple du trépan à la cuisse, on ne sauroit par conséquent se figurer les difficultés que nous avons eues à réprimer les chairs : pansemens à sec, poudre de sabine , alun calciné, trochisques de minium, eau mercurielle ; pierre infernale, furent employés pour en retarder le progrès, les ronger, les détruire. Ce fut de la pierre infernale que je tirai le plus d'avantage. Malgré les secours dont elle fut, les chairs à la fin me 314 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES gagnèrent au point que je me vis obligé d’en supprimer avec le bistouri. Lorsqu’enfin je crus l’os près de sa guérison, je me contentai de les tenir écartées les unes des autres, au moyen d’une canule de plomb revêtue en dehors d’un sparadrap de diachilon gommé , et de lanières d’éponges préparées, et d’autres fois avec des chevilles de cordes à boyau, que j’introduisois entre cette canule et les lèvres de la plaie. La canule étoit destinée à donner issue aux humidités ; les éponges et les cordes à boyau, venant à se gonfler, servoient à repousser les chairs : deux effets qui, combinés , remplirent convenablement mon objet dans ces durée temps. Les soins que demanda cette maladie, à partir du moment où j'en fus chargé, ont duré un an. Les souf- frances du malade égalèrent son courage. Une remarque à faire à leur sujet, est qu’elles devinrent plus vives à mesure qu’il maïigrissoit davantage. La longue diète, la douleur , les abondantes suppurations ; l’avoient épuisé. On jugeoit de cet épuisement à ses forces qu’il avoit perdues, à ses bras, ses mains, ses jambes, ses pieds, qui devinrent grêles, secs et terreux ; à l’état de sa tête : il perdit le sommeil ; son estomac ne digéroit plus, Pour remédier à ce dépérissement , j’eus recours avec succès aux sucs épurés de chicorée frisée, de cerfeuil, de pissenlit, de cresson de fontaine , au quinquina, au vin, à de bons alimens. En peu de temps le malade reprit l’agilité de sa cuisse, qui d’ailleurs est devenue aussi forte et aussi ar L PDT PL WTST D rQù U F4 215 grosse que la saine. Pour ce qui est du fémur, il a aug- menté de volume aux endroits précédemment cariés et ruinés par les instrumens. À l’égard de la cicatrice dans les parties molles, elle représente un long enfoncement entouré de plis cutanés, relevés et mobiles. À son mi- lieu elle est formée d’une pellicule mince, adhérente; lisse, qui pendant long-temps a été d’un rouge très foncé. Remarques sur cette observation. Cette observation se joint à toutes celles que l’on à déja, pour rappeler le danger des coups ou des chûtes sur le grand trochanter. Souvent leur effet porte sur l’intérieur de Particulation de los de la cuisse : ici il s’est fait sentir sur la cuisse même, où il a occasionné deux abcès à des époques et dans des circonstances dif- férentes ; deux caries, chacune à une région particu- lière du corps du fémur. On ne sauroït se dissimuler le danger auquel fut ex- posé le malade, et le tort qu’on lui a fait d’avoir né- gligé sa maladie à son origine ; ensuite, de l’avoir comme pérdue de vue pendant cinq ans, de n’avoir point été attentif à la fusée de pus qui du haut se fit vers le milieu de la même cuisse, et de ne l'en avoir pas retiré avant qu’il eût altéré le fémur à sa partie moyenne; et c’est encore avoir commis une omission bien fâcheuse que d’être resté pendant deux autres années dans l’inac- tion vis-à-vis d’un mal cependant aussi grave et aussi évident, soit par la nature de la cause, soit par le dé- veloppement, l’ordre et l’espèce de ses symptômes. 216 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Si lon ne voit point pendant ces sept années consé- cutives l’art qui préside à la santé aller au devant de la nature, dans l'intention de la secourir, du moins y voit-on la nature, toujours agissante, faire des efforts remarquables pour se délivrer de ce qui l’incommodoit ; et pour préparer à l’officier de santé des renseisnemens sûrs qu’il navoit qu’à suivre pour achever de la sou- lager : car, dans la réalité, l’officier de santé n’est guère que l’élève de la nature. Que n’a-t-elle pas tenté en effet, dans tout le cours de cette maladie, pour se réparer, et mème pour nous guider! Du pus s’étoit formé, vers le grand trochanter, à l’endroit frappé et contus : on ne l’en tira point, il coula sur la partie moyenne de la cuisse; on ne lui donna point d’issue, elle lui en procura une; le foyer du premier abcès dé- généra en longue fistule , qu’elle indiquoit d'ouvrir pour mettre le fond du mal à découvert : excellent avis qu’elle suggéroit, mais qu’on n’entendit point. Quant au second abcès survenu au bout de la sep- tième année, à partir de la cause du mal, c’est une question de savoir si le pus dont il étoit formé, et qui communiquoit avec le canal médullaire du fémur, avoit d’abord existé hors du fémur, et percé du dehors en dedans ; ou bien s’il ne s’étoit pas formé, au contraire, dans le canal de la moëlle, et s’il n’avoit pas percé l'os de la cuisse de dedans en dehors, pour étendre son foyer sur le haut de la cuisse, une partie de la fesse et de l’aîne. Je pencheroïis pour cette dernière opinion, fondé sur l’apparition tardive de ce dépôt, sur lalté- e ET DE BLEN M & 1 QUI FE. 217 ration de la membrane de la moëlle, et de l’intérieur de la cavité médullaire ; ce qui décèle un vice déja ancien, fondé encore sur le peu de temps qw’il y avoit que ce dernier dépôt s’annonçoit à l’extérieur, et sur ce que la peau et le tissu cellulaire qui le couvroient en dehors étoient à peine altérés. Quoi qu’il en soit, toujours est-il vrai que la nature avoit déja fait un trou au fémur, par où elle essayoit de se délivrer du pus formé dans le canal de cet os, et que ce trou une fois connu indiquoit ce qu’il restoit à faire, tant pour découvrir le reste du désordre que pour diriger contre lui les moyens propres à le détruire. J’élargis ce trou avec mes élargissoirs, sans trop peser sur l’os, sans y causer de secousses. J’en ferai connoître ailleurs d’au- tres applications: Ona pu juger; par le récit de ce qui s’est passé dans le cours du traitement de cette maladie, à quel point les grandes incisions que J’avois faites lors de la pre- mière opération, avoient été commandées, puisqu’il s’agissoit de prendre soin d’un os malade , à une partie aussi recouverte de muscles que lest l'os de la cuisse. Cette considération en suggéroit une autre non moins essentielle , de ne point se presser, après l’opé- ration, d'arrêter le sang de la plaie. C’est un procédé recommandé avec raison par Hippocrate, et suivi par d’habiles chirurgiens, pour diminuer la douleur, l’in- flammation de la plaie, dans le cas présent, comme _ dans tous ceux de grandes opérations voisines du tronc et de la tête. On a de plus un autre objet très-essentiel 1, 28 518 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES en vue en laissant couler le sang par la plaie jusqu’à ce que le pouls mollisse un peu, de prévenir les effets du refoulement trop subit du sang sur l’un des trois ventres, Où il y a tant de vaisseaux sanguins. C’est une méthode dont je me suis bien trouvé après l’am- putation à lambeau au bras, lextirpation du sein lors- qu’il étoit volumineux, les amputations de la cuisse. Je dois dire qu’en général l’espèce de frayeur dont on ne se défend point assez à l’aspect du sang qui coule, fait que d’ordinaire on se hâte trop de Parrêter à la suite des grandes opérations. On peut se souvenir combien il a fallu se débattre, sur la fin du traitement de cette maladie, pour empê- cher les chairs de couvrir los avant qu’il fût guéri, et combien les caustiques agissoient sur elles différem- ment : la poudre de sabine, l’alun calciné, ne les consumoient point assez, en comparaison des disposi- tions qu’elles avoient à s’avancer. Les trochisques de minium, l’eau mercurielle, brûloient plus profondé- ment : mais ils causoient plus de douleur, plus d’in- flammation ; ils endurcissoient et leurs escarres et les chairs voisines ; enfin leurs escarres étoient plus tar- dives à se détacher. EH en résultoit qu’à leur chûte on n’avoit presque rien gagné du côté de l’espace à découvrir, parce qu’alors elles se trouvoient déja rem- placées. La pierre infernale réunissoit ces avantages, qu’elle excitoit moins de douleur, moins d’inflamma- tion ; qu’elle ne procuroit pas la même induration aux escarres et aux chairs voisines que l’eau mercurielle , 4 UE LADA ENUIP 4 HU YA SUI AQU U IE! 219 et sur-tout que les trochisques de minium. Ses escarres étoient, il est vrai, moins épaisses, mais aussi elles tomboiïent plus promptement; et je pouvois, sans in- convénient , employer cette pierre aussi souvent que les circonstances le demandoient. Toutefois il fallut re- courir au bistouri pour supprimer ce que les caustiques ne pouvoient point emporter assez promptement , lors- que les chairs gagnoient trop. Quand j'en fus venu à me servir simultanément de canules de plomb, de lanières d’éponges préparées, ou de cordes à boyau, j’usois de ces éponges lorsque la résistance pour les introduire entre la canule et les chairs n’étoit pas grande; j’avois recours à des cordes à boyau de différens diamètres , depuis demi-ligne jus- qu’à deux lignes, assez longues pour déborder un peu la plaie en dehors, et adoucies à l’une de leurs extré- mités avec la lime, pour rendre leur introduction moins douloureuse. Plus résistantes que les lanières d’éponges, je n’en servois lorsque , les espaces devenus trop étroits, les éponges ne pouvoient plus pénétrer dans la profon- deur de la plaie. En général , les cordes à boyau dila- tent plus lentement et moins douloureusement que les éponges. J’émployai avec plus d’avantage les dernières contre des chairs molles, et tant que l’ouverture fut un peu spacieuse : je me servis avec plus de succès des premières, c’est-à-dire des cordes à boyau, lorsque l'ouverture fut rétrécie, et contre des chairs fermes, qu’elles dilatoient moins douloureusement. Les grands maîtres n’auront pas besoin de ces détails ; 220 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES mais je ne les crois point inutiles aux personnes qui commencent à se livrer à la pratique de l’art. Il y a quelques années que je fus dans le voisinage du lieu qu’habite le malade : il Le sut, il vint m’inviter d’aller le voir; il assembla ses parens; il me fit con- noître les succès de sa culture; il me conduisit à ses meules, à ses granges, à ses greniers, qui étoient rem- plis de grains. Ses enfans nous accompagnoient : « Mes » enfans, leur dit-il, vous devez tous ces biens à cet » homme que vous voyez; c’est lui qui vous a conservé » votre père». Aussitôt l’un me presse les mains, l’autre me serre dans ses bras. Si l’art de la santé déchire trop souvent l’ame de celui qui l’exerce, il faut conve- nir aussi que ses ministres trouvent des jouissances bien douces à conserver des hommes utiles, sur-tout quand ils en rencontrent d’aussi estimables et d'aussi reconnoissans que l’a été celui qui fait le sujet de cette observation. 5 ET DE. PH Y:S I Q U EF. 222 RECHERCHES SUR LE (CRAN E HUMAIN, Par TENON. Lu le 16 messidor an 4 ; et déposé au secrétariat de l’Institut le 16 vendémiaire an 5. De l'accroissement et du décroissement du crâne Aumair. J’arrzrzr croissance l'addition delsubstance qui s’i- dentifie à un tout; décroissance, la déperdition d’une substance précédemment identifiée à ce tout. On juge de l’une et de l’autre, ou par la pesanteur, ou par l’étendue , augmentées ou diminuées , mais plus sûrement en ayant recours à.ces deux moyens ; parce qu’un corps peut augmenter en étendue sans augmenter en poids, et parce qu’il peut acquérir du poids sans croître en étendue. Dans le premier cas, ce n’est point précisément croissance, mais seulement alongement, ou bien élargissement, ou enfin rarescence et gonfle- ment ; dans le second, on ne sauroit affirmer que le 222 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES corps ne soit point accru, puisqu are est devenu plus pesant. Ces considérations nous ont déterminé à faire ici usage du poids et de la mesure de l’étendue. Le travail que nous présentons a exigé la comparaison de beaucoup de crânes : il eût demandé sans doute qu’elle eût porté sur un plus grand nombre. Nous le donnons néanmoins avec une sorte de confiance , parce qu’il est fondé sur des observations exactes, et parce qu’il offrira, nous l’espérons, matière à de nouvelles recherches qui toutes tendront au progrès de nos connoissances. Nos observations ont été faites sur des crânes choisis exprès à quatre prineipales-époques de la vie : à la naissance ; ensuite au terme qui précède la sortie de la dent de sept ans , époque remarquable, parce qu’à eet âge cette dent est en partie sortie, ou est sur le point de déboucher de son alvéole; à l’âge fait, ou plutôt après l’éruption de la dent de sagesse; enfin, à la dé- crépitude. Ce que nous dirons ne doit s’entendre que du crâne de l’homme en France; car je ne puis douter que ses dimensions, ainsi que son poids, ne varient non seu- lement. selon: son à autre (1). 0 , A ge, mais encore d’un pays à un (Gi) Le fait suivant en est une preuve. Une cargaison de chapeaux, que feu M. Chatelain, fameux manufacturier de Paris, envoya dans le nord, faits sur des formes de 1 décimètre 62 millimètres et 1 décimètre 89 mil- limètres de diamètre, comme ceux pour les habitans de Paris et ceux qu'il expédioit pour l'Amérique espagnole, n°y fut point vendue, ces chapeaux ET: DE) :P H Y S 1°Q U:E, r }923. Au surplus, les poids et les mesures dont il va être question sont des poids:et des mesures moyens déduits * pour chaque époque, d’un certain nombre d’observa- tions. Quant au poids du crâne, il est ptis, abstrac- tion faite de celui de la mâchoire inférieure. Poids dn crâne: Le poids du crâne à la naissance (2) graminés’ ceutigéammes: à terme, &st dell 20, 29v8 gong 1h 2e 39 78: : À six ans/(2}; dec5t, 20 51844 91 ‘A Vâge fait{ (33 ,°@er. sf 5 oc, idagend 8h: 7 A la décrépitude (4), de : 2 44. 374 2 Ainsi, depuis la naissance jusqu’à, six ans , le crâne a crû en poids de 205 grammes.11 centigrammes. Depuis six ans jusqu’à l’âge fait, il a cr de 379 grammes 31 .centigrammes, x hatoit oi , Enfin, de l’âge fait à la décrépitude, il a décrà de 250 grammes 18 centigrammes, s'étant trouvés trop petits ; il en eût fallu den décimètre 89 millimètrés à 2 décimètres 17 millimètres. On cite comme extraordinaires parmi nous, des têtes de cette mesure : leur terme moyen, avec le compas du chapelier , est de 1 décimètre 76 millimètres à l’âge fait, et de 1 décimètre 40 millimètres à un an. ; (1) Déduit de quatre observations. (2) Déduit de quatre observations. i , (3) Déduit de vingt-quatre observations: (4) Déduit d’une seule observation de lfermme! de cent un ans, ©: 224 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Mesures du crâne. Elles sont prises sur des têtes entières de squélettes ; et en dehors. Je distingue ces mesures en grande circonférence, petite circonférence, circonférence horizontale, grand diamètre, petit diamètre, épaisseur. … J’appelle grande circonférence celle, qui , partant de la jonction des os du nez avec l’os frontal ; se prolonge le long de la suture Spghtale, passe. sous l’occipital,, puis sous.la base, du .crâne et la voûte, du palais, révient entre les deux mâchoires, pour s'élever sur la face et se terminer à la dire des os du nez avec le coronal; où ellela commencé.) ni Je nomme petite cirébfiférente celle qüi traverse sous 1ä base du'crâne,, d’une ‘apophysewigomätique à à l’autre, vers leur extrémité postérieure ;"ét qui de chaque côté se prolonge sur la portion squameuse des temporaux et sur les Anar près de leur bord ou côté anté- rieur, jusqu’à la suture sagittale. - . «La circonférence, horizontale comprend le-tour du crâne , à la hauteur du front, dans le lieu le plus étendu. Le grand diamètre est la ligne la plus longue du crâne de devant en arrièrè. Le petit diamètre est la ligne la plus longue du crâne d’un côté à l’autre. La hauteur du crâne est Ja ligne, comprifé entre sa base et son sommet,.à J’endroit le plus renflé, ET DE PHYSIQUE. 10, Mesures de La grande circonférence. décimètres millimètres, Elle est, en naïssant, de. . . . . . . 3 8 Bysix ans def ne rt PAT 4 80 A Pâge fender LANTA TON TE 7 À. laide de IT ET DEEP EN RE TR 2°. Mesures de La petite circonférence. Alainaissamee; (62 Vit UE UE a 49 ASE AR te DA oi Ad ee Pt ÉT DE PHYSIQUE. 235 Que j'ai vu des enfans nouveaux nés avec cet excès de grosseur’ dans la tête, j’ai ‘averti qu’il ‘falloit ‘craindre les symptômes que je viens d'indiquer ; etna prédic- tion a presque toujours été vérifiée. Le premier avantage que ma procuré cé pronostic a été de rassurer les parens, les pérsonnes chargées du soin de ces enfans, et deles émpêcher derinettre ‘en usage des’ remèdes ‘trop ‘ordinairement pérnicieux ; le second, et sans contredit le plus important, a été de pavés souvent et de diminuer l'intensité de ces ac- cidens. La Saignée étant un des moyens préservatifs et cu- ratifs dont la nécessité se prononce souvent, ji me bor- nerai, dans ce mémoire, aux leçons que m’a fournies V’expérience sur son emploi , et spécialement sur la quan- tité de sang que l’on doit tirer à la fois: Sans doute, la célérité, la plénitude, la dureté du pouls, la sécheresse brûlante de la peau, le gonflement du visage et du cou, la-rougeur vive des yeux, la dif- ficulté de la respiration qui semble étouffée , sont des indications impérieuses de désernplir les vaisseaux san+ guins, si fortement distendus qu’ils sont prêts à se rompre. Les hémorrhagies parle nez, qui surviennent quelquefois et soulagent sérisiblement, sont un motif légitime de satisfaire promptement à l'indication. Mais fautil proportionner la quantité de sang que Von tirera , à la plénitude , à ‘la dureté du pouls, comme je lai vu pratiquer trop souvent? Le malade se trou- vera-t-il plus promptement et plus sûrement délivré du 236 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES danger qui le menace, si l’on verse beaucoup de sang à la fois? J’ose assurer que non. leffet de ces larges saignées, par exemple, d’une demi-poélette aux enfans depuis six mois jusqu’à un an, d’une poélette, d’une poélette et demie ou de deux poélettes depuis un an jus- qu’à six, et d’une plus grande quantité passé cet âge, est de jeter les malades dans un affaissement-effrayant, vu la petitesse et la roideur du pouls, la pâleur du.vi- sage et le froid, des extrémités, qui succèdent. Cet état fait bientôt place à une agitation qui croît rapidement, et à un délire frénétique accompagné de convulsions, Si, déterminé par la violence de ces symptômes, on réitère la saignée, les accidens deviennent de plus graves en plus graves, sont suivis d’inflammation dans les viscères de labdomen, ou d’une oppression suffocante de la poitrine ; les évacuations se suppriment ; le pouls, toujours petit et tendu, change de rhythme à chaque instant, jusqu’au moment où la gangrène termine les douleurs et la vie de l’enfant. J’ai cru reconnoître dans les suites funestes de ces saignées trop abondantes ; effet inévitable de l’épuise- ment des forces de la nature, qui dès lors ne pouvoit plus rien contre la cause morbifique. La répétition des malheurs et une conduite contraire n’ont confirmé dans mon jugement. C’est pourquoi, toutes les fois que J'ai été obligé de recourir à la saignée, j’ai recommandé de tirer peu de sang à la fois, sauf à réitérer cette éva- cuation. Ainsi, pour les enfans, depuis leur naissance jusqu’à un an, un an et demi, j'emploie rarement la ET. DE PHYSIQUE. 237 Jancette; mais je leur fais appliquer trois ou quatre sang-sues, ordinairement à la tête, soit derrière les oreilles, soit aux tempes, quelquefois aux pieds. La lenteur avec laquelle le sang coule par les plaies super- ficielles que font ces petits animaux, ne produit qu’une déplétion graduée, qui n’expose point les vaisseaux et les organes à un affaissement toujours dangereux chez les sujets mous et lâches comme sont les enfans, sur- tout à grosse tête, et voisins de leur naissance. Je dois avertir qu’il ne faut pas laisser couler le sang trop long- temps, malgré que le petit malade paroisse bien sou- tenir l’évacuation. Il est prudent de l’arrêter lorsqu’on en à tiré à peu près une demi-poélette. Si les accidens persistent ou ne sont pas suffisamment diminués, on pourra faire une nouvelle saignée par le même moyen, une, deux ou quatre heures après, suivant l’urgence ; on pourra même y revenir encore après, ayant toujours attention d’éviter les angoisses de la foiblesse. J’observe les mêmes gradations, les mêmes ménage- mens , pour les enfans qui sont plus avancés en âge, pro- portionnant la quantité de sang que l’on tire à chaque fois, à leurs forces combinées avec l’intensité des acci- dens, soit que l’on emploie les sang-sues , soit que l’on se serve de la lancette. En secondant l'effet de ces saignées par des boissons appropriées, des lavemens, et sur-tout par une ap- plication continuelle de fomentations émollientes sur le ventre, j'ai eu la satisfaction de voir les accidens di- minuer, les convulsions et le délire s’évanouir, et la 238 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES maladie qui en étoit la première cause, suivre sa mar- che régulièrement et paisiblement ; car j’ai remarqué depuis long-temps que c’étoit principalement dans les enfans qu’on retrouvoit avec admiration la justesse de la; doctrine d’'Hippocrate sur le pronostic et les crises, lorsqu'on avoit été assez heureux pour écarter dès le commencement les obstacles qui entravoient la nature, et pour lui rendre la facilité de terminer son travail. Les grands secours que j’ai retirés de l’application, continuée même pendant plusieurs jours , des fomen- tations émollientes, me font une loi d’insister sur ce moyen, sans lequel les saignées n’ont qu’un effet in: complet, comme j’en ai été convaincu nombre de fois, le pouls devenant plus dur, le visage plus enflammé, le ventre se météorisant, et les convulsions se réveil- lant , aussitôt qu’on les supprimoit. Ce précepte est fondé sur l’indispensable nécessité de conserver constamment le ventre libre et souple, d’entretenir la libre circula- tion dans les viscères, et de favoriser les sécrétions. Je pourrois rapporter l’histoire d’un grand nombre d’enfans à grosse tête que j’ai traités; mais je crois suffisant de citer celle de deux frères nés avec ce vice de conformation. Le 8 mai 1767, l'aîné, âgé de douze ans, d’une gran- deur moyenne, avec peu d’embonpoint et un visage souvent enflammé , sur-tout après les repas, se plaïgnit d’avoir mal à la tête. Il but quelques tasses de thé, ne soupa point, fut agité pendant la nuit, qu’il passa sans dormir. Le lendemain matin il prit un lavement; BIT à DE «RH WS ICQ ULE. +: ‘ 239 observa une diète rigoureuse , et se trouva un peu mieux pendant quelques heures ; car dans le milieu du jour son pouls devint vifet serré. Le soir > la fièvre fut forte, le mal de tête augmenta dans la même proportion, le visage et les yeux étoient rouges, la respiration gènée, et les urines furent supprimées : il eut un délire obscur toute la nuit, Ces symptômes, la célérité et la dureté de son pouls, formoient l'indication la plus urgente de tirer du sang. On en tira en effet deux poélettes du bras : il étoit d’un rouge vif; et, refroidi, il avoit de la con- sistance , sans être couenneux. C’Ctoit le second jour de la maladie. Cette saignée, dont j’attendois du calme, fut suivie d’un effet contraire ; la fièvre devint plus violente : c’est- à-dire que le pouls étoit plus précipité, plus dur , la cha- leur de la peau plus brûlante, la tête plus embarrassée, le visage et les yeux plus enflammés ; les muscles de la face étoient de temps en temps en convulsion, et le délire ne se relâchoit que pour laisser le malade dans un affaissement interrompu par des secousses convul- sives ; dans les extrémités inférieures sur-tout ; le ventre étoit souple, mais ne fournissoit aucune évacuation, Je jugeai que la tête étoit le siège principal de la maladie. La rougeur du visage et des yeux, le délire par moment frénétique, me firent craindre une inflam- mation; en Conséquence je prescrivis une saignée du pied : elle fut de trois poélettes. Le sang sortit avec une grande impétuosité. Les accidens ne diminuèrent point. On en fit une seconde un peu moins forte, qui ne réussit 240 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pas mieux que la première; au contraire, les symp- tômes s’aggravèrent. L’enfant vomit deux fois de la bile poracée, et eut une évacuation par bas de même na- ture. La fièvre avoit de fréquentes exacerbations ou de fréquens redoublemens, cinq, six dans les vingt-quatre heures. Alors le délire, qui étoit continuel, étoit porté au plus haut degré, et vraiment frénétique. Cet état a duré jusqu’au 11, malgré les délayans, les antiputrides acides , de toute espèce. Le seul bien que ces derniers ont produit a été de rétablir le cours des urines. Les fomentations émollientes ont arrêté et dis= sipé le météorisme du ventre , qui avoit suivi immédia- tement les saignées du pied. Cependant ni elles ni les lavemens n’ont pu procurer des évacuations par les garde-robes : le malade a plusieurs fois passé vingt-quatre heures sans rien rendre du tout, pas même des urines. Dès le 6 il avoit perdu la parole, et ne l’a pas re- couvrée depuis. On sait que ce symptôme a été annoncé . par Hippocrate comme un signe mortel. Le 7, on avoit commencé à appercevoir plusieurs ta- ches violettes, et même noires, sur le côté gauche du ventre. Non seulement elles ne se sont pas étendues, mais elles ont cédé en partie à une embrocation faite avec une décoction de quinquina, dont le malade pre- noit même quelques cuillerées dans ses boissons. Le 11 au soir, les urines se supprimèrent pour la troi- sième fois; le ventre se gonfla, sans cependant offrir une vraie résistance, et sans douleur; il cédoit aisé- ment à la pression de la main, et on entendoit rouler ET DE PHYSIQUE. 24% l'air qui distendoit les intestins, et sur-tout le colon, dont la direction étoit tracée par un bourlet très- saillant. Trois jours après, c’est-à-dire le 14, le ventre se re- lâcha, mais devint très-douloureux. Les agitations du malade annonçoient que les douleurs étoient vives et aiguës toutes les fois que les vents changeoïent de place, et principalement avant leur sortie , qui entrainoit quel- quefois une eau bourbeuse et jaune. Dans l’intention de calmer ces douleurs et de procurer quelques évacuations, je fis prendre une potion com- posée de deux onces de décoction un peu chargée de quinquina , et de deux onces d’huile d'amandes douces. J’obtins en effet une évacuation bilieuse très-abon- dante, et la sortie de beaucoup de vents, à plusieurs reprises. Cette double évacuation fut suivie d’un calme qui ne fut pas de longue durée : car, dès la nuit du 16, le ventre se météorisa de nouveau, les urines devin- rent plus rares, il n’y eut presque plus d'évacuation, et la difficulté que le malade avoit eue à se retour- ner, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, dès le 12, devint une impuissance générale. Le 18, pendant la nuit, tout le corps, excepté les extrémités inférieures , qui étoient froides , se couvrit de sueur, le regard devint fixe, la prunelle très-dilatée, le globe de l’œil saillant, et comme prêt à sortir de orbite. Il y restoit cependant encore un peu de sen- sibilité ; car une lumière très-vive faisoit fermer les pau- ke 31 949 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pières. Le malade expira le 19 au soir, sans aucune agitation, sans agonie. Pendant toute cette affreuse maladie, la fièvre s’est maintenue constamment à peu près au même degré. La langue et les lèvres ont toujours été sèches et noires , et les dents enduites d’un limon épais de même couleur. Depuis les saignées , le malade n’a eu ni envie de vomir ni hoquet. Tourmenté de l’état où j’avois vu cet infortuné pen- dant dix-neuf jours, et du peu de succès des moyens que j’avois employés, quoiqu’ils me parussent répondre à des indications évidentes, je desirai l’ouverture du cadavre. J’en fis demander la permission à ses parens: je ne sais par quel motif je fus refusé. Mais il restoit ‘un frère dont la conformation de la tête étoit la même, et qui, comme son aîné, tomboit dans le délire toutes les fois qu’il avoit de la fièvre. Je persistai donc dans ma résolution ; je n’associai le chirurgien de la maison, le citoyen Goulliard, homme instruit, qui navoit se- condé dans les soins que j’avois donnés au malade. A l'insu des parens, le 20 au soir, nous procédâmes à l'ouverture. Voici le tableau fidèle de ce qu’elle nous a offert. À l’intérieur, à deux travers de doigt de l’ombilic, partie latérale gauche, une tache d’un brun noirûtre, de la largeur d’une pièce de six sous, reste d’une tache beaucoup plus étendue qui avoit paru dès le 10, et dont j’ai rendu compte. Sur les fausses côtes gauches, des plaques sphace- lées, de la largeur de la main. ET DE PHYSIQUE. 243 Le ventre très-gonflé, très-rénitent et saillant, prin- cipalement dans les régions épigastrique et ombilicale. À l’ouverture des tégumens , la peau étoit fort mince et se déchiroit aisément. À la première incision des muscles abdominaux, les intestins se sont précipités avec violence hors de la ca- pacité ; ils n’avoient souffert aucun déplacement. Le colon étoit, dans toute son étendue, prodigieusement distendu par l'air dont il étoit rempli; tous les intestins grèles également distendus, à proportion de leur dia- mètre, et l'estomac comme soufflé avec effort, sans que la pression de la main eût pu faire sortir la moindre portion de l’air qui le distendoit. Il ne contenoit rien autre chose que de l’air. L’épiploon étoit presque entièrement dégarni de graisse, le foie sain et de bonne couleur, la vésicule du fiel très-grosse et longue de trois pouces, remplie d’une bile épaisse fort jaune. La rate un peu plus volumineuse que dans l’état naturel, mais saine; sa figure différoit de l’ordinaire en ce qu’elle étoit plus courte; sa tête grosse, épaisse ; sa pointe arrondie, ce qui la faisoit ressembler assez bien à un cœur. Le pancréas fort dur, sans obstruction marquée. L’estomac avoit une texture fort épaisse; la portion de la grande courbure voisine du pylore étoit enflammée dans une étendue de la paume de la main , et tachetée de points, les uns d’un rouge vif, les autres d’une cou- leur violette; la membrane interne étoit détruite dans toute cette partie, 244 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Le canal intestinal , légèrement phlogosé, et par pla- ces, contenoit environ une livre d’une liqueur bilieuse délayée par les boissons à mesure qu’elle sortoit du du0- denuns. Le mésentère maigre , sans obstruction vraie ; seule- ment les glandes avoient un peu plus de volume que dans l’état ordinaire : elles étoient d’un violet très-foncé. Les reins fort gros , sans calculs ni embarras; les ar- tères très-épaisses , ainsi que la vessie, qui étoit encore pleine d’urine. Les membranes avoient trois fois plus d'épaisseur qu’elles n’en ont ordinairement. La poitrine ouverte ne nous a rien offert de vicié; seulement il y avoit beaucoup d’eau dans le péricarde, ce qui n’est point une singularité. Les tégumens de la tête enlevés, nous n'avons trouvé aucune trace de sutures. Le péricrâne s’est séparé des os avec autant de facilité que si c’eût été une coëffe étrangère à la structure de la tête. La boîte osseuse n’étoit que d’une seule pièce; les faces , tant internes qu’externes , étoient lisses et polies comme un vélin. On ne voyoit à l’interne aucun ves- tige, ni de sutures, ni d’impressions digitales, ni de gouttières pour les sinus, ni des ramifications qui y for- ment ordinairement les artères de la dure-mère. Cette membrane étoit plus épaisse qu’on ne la trouve chez un vicillard de soixante-dix ans; elle étoit très- blanche , d’un tissu fort serré ; elle n’avoit pas plus d’ad- hérence avec la surface interne de la boîte osseuse , que le péricräne n’en avoit avec la surface externe. Il n’y ET DE PHYSIQUE. 245 avoit par conséquent aucune communication entre ces deux membranes , communication cependant très-sen- sible et très-multipliée dans les autres sujets de cet âge. Cette membrane comprimoit si fort le cerveau, que, quand la scie l’a attaquée, nous avons entendu une ex- plosion semblable à celle qui se fait lorsqu’on perce un ballon bien tendu, et le cerveau a écarté les lèvres de l’ouverture, de manière qu’une partie sailloit au dehors. La masse du cerveau, dont la substance étoit ferme et rénitente, étoit proportionnée à l’ample capacité du crâne, qui, au coup d'œil, nous a paru égaler celle d’un adulte de vingt ans. La pie-mère étoit flottante, et n’avoit aucun point d’adhérence avec la substance corticale. Ses vaisseaux, ramassés par paquets, étoient remplis en partie de bulles d'air très-apparentes, et de globules d’un sang très- vermeil, que ces bulles d'air entrecoupoient, comme on le remarque dans un baromètre dont le vif-argent est séparé par des cylindres d’air. Le diamètre de ces vaisseaux étoit beaucoup plus grand qu’il n’a coutume d’être; il égaloit celui d’une grosse plume d’aile de perdrix. Ils étoient dilatés en plusieurs endroits ; et ces dilatations représentant des varices, étoient sur-tout re- marquables dans le plexus choroïde. Les nerfs sortans du crâne étoient fort gros, et pré- sentoient une grande résistance sous le doigt. L’artère qui accompagne le nerf optique étoit d’un diamètre considérable , et ayant un anévrisme gros 246 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES comme une lentille, remplie d’un sang noir au com- mencement de son entrée dans le ‘trou optique. Il y avoit peu d’eau dans les ventricules, et presque point de sang dans les sinus, soit longitudinal, soit la- téraux. Le cervelet bien conformé, dense, et même fort dur, seulement plus gros que dans les enfans de cet âge, et en proportion avec le cerveau. T'els sont les phénomènes singuliers, et rares sans doute , que nous a présentés la structure de cette grosse tête. Je suis bien éloigné de penser qu’elle accompagne toujours le trop grand volume; je n’ai même aucune raison de croire que le frère du malade, dont il va être question , ait eu aussi la même imperméabilité du crâne, qui, supprimant toute communication de l’intérieur avec l'extérieur, n’a pu que donner une grande intensité aux accidens provenant du seul volume excessif. Je laisse aux physiologistes à discuter cette opinion, et me ren- ferme dans les faits de pratique. Je me hâte donc de passer à l’application que j’ai faite des conséquences du traitement infructueux, et des connoissances puisées dans l’état des parties, distinguant cependant ce qui pouvoit dépendre du trop grand volume du cerveau, et ce qui pouvoit être le résultat de la dépravation des humeurs pendant la maladie et depuis la mort. Le 20 novembre de la même année, le frère de ce malheureux malade , âgé de huit ans, ayant la tête fort grosse à proportion du reste du corps, sur-tout dans sa ET DE PHYSIQUE. 247 partie postérieure, le visage plein et haut en couleur, tandis que le reste du corps étoit maigre et pâle , éprouva un accès de fièvre, avec altération et agitation, qui ne tarda pas à être suivi du délire. Les convulsions s’an- noncèrent le lendemain. Le pouls étoit dur, précipité, la respiration très-gênée , les yeux enflammés , ainsi que les joues. Malgré la crainte que m’inspiroit et que devoit m’ins- pirer le peu de succès des saignées pratiquées sur son frère, l’indication me parut trop urgente. En cherchant à deviner pourquoi les saignées avoient été suivies d’une augmentation , d’une exacerbation des accidens auxquels j’espérois qu’elles apporteroient de l’adoucissement, je crus entrevoir que le trop grand vuide produit subitement dans les vaisseaux sanguins du cerveau, par une évacuation trop abondante à la fois, avoit occasionné une désunion des parties globu- leuses rouges, et le dégagement de l’air, principe cons- tituant du sang, ainsi que plusieurs anatomistes l’ont observé dans les mêmes vaisseaux, et que cette décom- position avoit été la source de tous les désordres dont j'avois été témoin, et la cause insurmontable de la mort. Je pensai donc qu’en tirant moins de sang je ne produirois qu’une diminution graduée de son volume, et un relâchement dans la tension des membranes, sans opérer un vuide dangereux dans les vaisseaux, et un affaissement. Mon raisonnement fut peut-être hypothé- tique ; quoi qu’il en soit, il me guida dans ma conduite. Je prescrivis donc une première saignée d’une demi- 248 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES poélette ; j’en fis tirer autant une heure après , et quatre heures après pareille quantité. J’eus soin de seconder l’effet de ces saignées par des fomentations émollientes que l’on entretint à une douce chaleur sur le ventre ,des demi-lavemens, une boisson délayante et légèrement acidulée, et j’enveloppai le front et les tempes d’une compresse imbibée de vinaigre rosat ; jy fis même appli- quer le marc de ce vinaigre. Les symptômes étoient si sensiblement calmés, que le troisième jour le malade fut en état d’être transporté, de la pension où il étoit, chez ses parens, où j'ai su que l’on avoit seulement pratiqué une quatrième saignée du bras, aussi ménagée que l’avoient été les trois pre- mières ; et qu’on avoit continué les fomentations émol- lientes et les boissons délayantes, jusqu’à ce que la dé- tente complète eût permis d'employer les minoratifs. Cet enfant a été guéri, et vit encore aujourd’hui. Si je ne me trompe, ces deux modes de traitement dans une maladie , la même au moins dans son début, dont l'issue contraste d’une manière si frappante, et plusieurs autres faits qui se sont multipliés dans ma pratique depuis trente ans, ne doivent laisser aucun doute sur la vérité et l’utilité de ce précepte, gwil ne faut tirer que peu de sang à la fois aux enfans à grosse tête, lorsque des symptômes impérieux obligent d’avoir recours à ce moyen curatif. è J’ajoute que ce précepte n’est pas seulement avanta- geux et salutaire pour les enfans à grosse tête, mais pour tous les enfans en général, et même pour les adultes, TUOR TL MIE TM YISIT QU Mwmku 249 lorsqu'il y a complication d’humeurs viciées dans le ventre, et que la violence de la fièvre, la crainte ou l'existence de l’inflammation, forcent de faire précéder les évacuans par la saignée. Je ne parle que d’après un grand nombre d’expériences. i 556 MÉMOIRES DE MATINÉMATIQUES f GzL € ) « Le neo dl GE de c DiÆ, L’AcGyR TGCU L T'UR E& DuËxS IS LES CA NARIES, Par mHaca\ ve TM etss rer. Lu le 16 thermidor an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 6 brumaire an 5. Lx ERSUADÉ depuis long-temps qu’il n’y avoit d’autre manière de procéder à l’améliordtion de l’agriculture qu’en s’assurant de l’état où elle étoit dans les différens pays cultivés, je fis imprimer en 1785 des questions qui furent répandues en France et dans presque toutes les parties du-monde. Ces questions ont été depuis copiées, et envoyées, sous différens noms, dans différentes con- trées. J’ignore si l’on a eu lieu d’être satisfait des ré- ponses qu’on y a faites. S’il s’est trouvé des correspon- dans qui en aient fait passer d’intéressantes, au lieu de les laisser éparses, il seroit à desirer qu’elles fus- sent dans la même main, et qu’on en fit usage pour Vutilité publique. Lors de l’existence de l’Académie des Sciences, je lui,communiquai le projet que j’avois de faire un jour le tableau raisonné de l’agriculture > " £ Lu » ET! DE P/H{Y SI Q UE. 251 française; je lui rendis compte des matériaux déja ras- semblés , des expériences nombreuses que j’avois faites. Jelui fis connoître les plantes économiques , espèces et Variétés que j’avois fait dessiner et colorier, et je nou- bliai pas de l’informer que des réponses venues de pres- que tous les points de la France à des questions que jy avois fait parvenir, étoient un des matériaux que je comptois mettre.en œuvre. Mes idées s'étant agrandies de, plus en plus; j’avois voulu profiter des circonstances favorables où je m’étois trouvé pour obtenirudes rensei- gnemens sur l’agriculture des pays étrangers. Sans doute une foule d’obstacles m'ont empêché d’arriver tout-à-fait au but; mais au moins j’ai réussi à connoître quelques portions du globe, et jen présente aujourd’hui un échan- tillon à l’Institut, en lui exposant l’état de l’agriculture des isles Canaries. Il y verra, et la nature des questions que j’y avois adressées, et celle des réponses du citoyen Desautoy, vice-consul de France dans ces isles. Ce citoyen n’a pu m’envoyer des détails particuliers que sur trois des isles comprises sous la dénomination générique de Canaries ; savoir, Ténériffe, la grande Ca- narie et Fortaventure. Il assure que ce qu’il a dit decette dernière peut s’appliquer en grande partie à Lancerote, et qu'à l'égard de Gomère et de Palme, dont il m’a rapporté une particularité intéressante , il lui a été im- possible de recueillir, avant le départ du vaisseau chargé des réponses ; ce qu’il auroit desiré me communiquer, uniquement: pour objet de comparaison; car les détails sur les trois premières lui ont paru suffsans. 252 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES La position de Ténériffe, suivant la Connoissance des temps de 1792, est de 28d de latitude 17 à 18’ 30"; celle de la grande Canarie, de 274 45 à 47! 20'; celle de Fortaventure, de 284 4'; celle de Lancerote , de 294 14'; celle de Gomère, de 284 5° 4"; et celle de Palme, de 284 38’. La plus considérable des isles est Ténériffe; après elle, la grande Canarie a le plus d’étendue. Cette der- nière est lamieux arrosée et la plus fertile ; mais elle n’est ni aussi peuplée ni aussi cultivée qu’elle pourroit l’être. Il commence à pleuvoir aux isles Canaries à la fin de noyembre (vieux style), c’est-à-dire aux premiers jours de frimaire ; mais ce n’est que par intervalles , et la saison des pluies ne va pas au-delà du mois de mars, c’est-à-dire qu’elle cesse au commencement de germinal. Cette saison s’appelle l’hiver, quoiqw’il n’y gèle presque jamais, et qu’on n’y voie tomber de la neige que sur les montagnes, particulièrement sur le pic de Téné- riffe. Là elle se conserve depuis novembre (frimaire) jusqu’en mai et juin (prairial et messidor}), et ce n’est guère qu’en juillet et août (messidor et thermidor) que l’on peut en faire le voyage. Depuis germinal jusqu’en frimaire, assez ordinairement il ne tombe pas d’eau, sur-tout dans les environs de Sainte-Croix , située à l’est de l’isle de Ténériffe, et sur le bord de la mer, où est la demeure des consuls de France. Le ciel y est tou- jours beau, et les chaleurs y sont très-fortes en messi dor, thermidor et fructidor; mais il pleut très-souvent à la Laguna, village ou bourg placé sur la montagne, et AT DE PHYSIQUE. 253 distant de Sainte-Croix d’environ une lieue. La tempé- rature en est si différente, que pendant que le ciel est ‘pur et l’air chaud, sec et calme à Sainte-Croix, on éprouve à la Laguna ce qu’on éprouve dans tous les pays de montagnes, du brouillard, du vent, et même de la pluie. Les nuages s’y fondent et disparoissent à mesure qu’ils s’avancent vers la mer. À Ténériffe il n’y a point de rivières , maïs seulement des torrens, appelés en espagnol barrancos, qui ne coulent que dans l’hiver, et emportent à la mer un limon qu’il seroit utile de pouvoir conserver. Par-tout on y voit les traces du feu : toutes les pierres y sont cal- cinées, et présentent les effets de la plus forte com- bustion. Les environs de Sainte-Croix ne sont que des montagnes pelées, où il ne croît que quelques herbes qui servent à peine à nourrir des chèvres, et beaucoup d’euphorbes , qu’on y appelle chardons à cause de leurs piquans. Dans les endroits les moins escarpés , on trouve un peu de terre mêlée à beaucoup de pierres, qu’on abandonne le plus souvent, et qui rapporte très-peu. Au haut de la montagne, et autour de la Laguna, il y a un sol meilleur, cultivé avec soin, et produisant assez. Ce sol, qui paroît argilleux, est assis sur des couches de pierres calcinées, qu’on retrouve par-tout à diverses profondeurs. En allant de la Laguna au port l’Orotave, qui en est à cinq ou six lieues , on découvre des terres de bonne qualité ; mais à mesure qu’on approche de la mer, ce ne sont plus que des pierres et des rochers. 254 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Lorsqu'on a passé le port l’Orotave, on arrive au pied du pic, qui peut avoir à sa base six ou sept lieues. Suivant l’auteur des réponses , cette montagne volca- nique, qui laisse appercevoir des bouches à plusieurs hauteurs, a lancé par les plus élevées une lave qui, dans quelques endroits, a coulé jusqu’à la mer, et, par les moins élevées, des pierres brûlées et calcinées qui s’é- tendent très-loin, et parmi lesquelles il n’y à point de terre. Les espaces non couverts de lave ou de pierres calcinées sont remplis d’une terre extrêmement pier- reuse et pourtant fertile, et qui l’étoit davantage autre- fois. Le citoyen Desautoy assure que si on y sème du grain très-clair, elle rapporte quatre-vingts et plus de cent pour un; on a vu mème un seul grain produire quarante épis qui ont rendu trois mille cinq cents grains. Il y a des exemples de grands produits de certaines veines de terre dans les environs du Vésuve; et on sait que des grains semés clair rapportent beaucoup, si on compare le produit à la semence. Mais cette manière de calculer n’est pas admissible en agriculture. Un champ qui, ensemencé avec un setier de bled, en pro- duiroit dix, feroit moins de profit au proprictaire que si, ensemencé avec deux setiers , ilen produisoit douze; quoique, dans le premier cas, il donnât dix pour un, et seulement six pour un dans le second. Au reste, cette grande fécondité est due aux cendres volcaniques, et la présence des pierres mêlées à de bonnes terres n’est pas toujours un obstacle à la fertilité. On remarque bien aussi des traces de volcan dans er D ÉE, MEN E) W'S 1: 0 ULE. 255 les autres isles ; mais on ne peut les comparer à celles de Ténériffe. La grande Canarie a beaucoup d’excel- lente terre qui a‘ du fond, et dans la composition de laquelle l’argille paroît entrer en plus grande propor- tion. Il en est de même de Fortaventure et de Lance- rote. Comme par-tout ailleurs , on fait rapporter tous les ans les meilleurs fonds, lorsqu'on a la facilité de les arroser ; ce qui a lieu communément aux environs des villes et des villages. Les autres se reposent de deux années l’une. , L'art de travailler le terrain avec des amendemens de la nature des marnes ou des plantes marines , n’est pas connu dans ces isles. Peut - être n’en a-t-on pas besoin ,. et doit-on s’y contenter d’engrais animaux. On ne voit pas cependant que les häâbitans s’en occupent beaucoup. À Ténériffe, le fumier, destiné principale- ment pour le maïs et les pommes-de-terre , n’est que pour les jardins et les enclos voisins des maisons : on ne l’amoncelle pas d'avance en tas pour le faire pourrir, on le répand sur les terres au sortir des étables , et sans précautions. À Canarie il est un peu plus recherché et amoncelé d’avance : mais à Fortaventure on laisse pres- que tout perdre; une petite quantité seulement y est employée dans les jardins. T'énériffe a peu de bestiaux; la grande Canarie en a davantage. À Fortaventure, qui n’en a pas autant, on compte mille à douze cents bêtes à cornes, sept à huit cents chameaux, trois à quatre cents ânes, cinq à six mille moutons, et huit à dix mille 256 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES chèvres. Ces isles auroient donc de grandes ressources pour se procurer des engrais. La mesure de terre se nomme fanegua > parce qu’il faut souvent une fanègue de bled pour l’ensemencer : quelquefois on en emploie davantage, quelquefois on en emploie moins. C’est ainsi que parmi nous une se- terée est l’étendue qu’on ensemence avec un setier de bled, quoiqu’on en varie la quantité suivant le terrain. Cette mesure est estimée quarante brasses carrées , cha- cune de deux vares et un sixième de vare. La vare équivaut à deux pieds et demi de France. On cultive, pour la nourriture des hommes, du fro- ment, très-peu de seigle, beaucoup d’orge et de maïs, des pommes-de-terre, des haricots, et des pois chiches, dits garbansos. La récolte la plus considérable est celle du maïs. On y sème au moins autant d'orge que de froment. ù Pour les animaux, quelques lupins, des pois, des lentilles, du sorgho, des fèves et des féveroles; et très- peu d’avoine. En général, ils vivent de paille de fro- ment bien conservée, de feuilles de maïs, et des herbes qu’ils trouvent dans la campagne ; on leur donne aussi de lorge en, grain. Pour les arts, il n’y a aucune autre culture que celle du lin, de l’anis, dé la coriandre et du safranum, et ces cultures sont très en petit. On recueille à Ténériffe de l’orseille et du sumac qui croît spontanément. L’or- seille en est plus estimée que celle des autres pays. Les paysans , qui là vont chercher sur les rochers escarpés ; ET* DE PH Y SI QU €. 257 l’apportent à un collecteur, qui la leur paie, au nom du roi d’Espagne, à raison de 7 à 8 piastres le quintal; des négocians l’achètent à la douane de 30 à 4o piastres le quintal, et ont la liberté de embarquer. Autrefois les Anglais en donnoient jusqu’à 150 piastres. En 1787 elle ne valoit plus que 50 à Go. Il croît, le long de la mer, du kali (en espagnol, vidriera) , dont on pourroit. faire d’aussi bonne soude qu’à Alicante. Les habitans des côtes ne font usage que de sa graine, qu’ils séparent en lavant la plante dans l’eau de mer. Cette graine, légèrement rôtie, et passée au moulin, pour être mangée à sec ou détrempée d’eau, sert à faire du gofio, espèce de préparation pareille à celle qu’on donne à des graines céréales, et dont il sera question plus loin: ; On voit dans ces isles de magnifiques cotonniers , que les habitans ne prennent pas la peine de soigner. Il y a donc possibilité d’y établir ce beau genre de culture. On en peut dire autant de la canne à sucre, qu’on y plante dans quelques parties. Le froment et l’orge se cultivent dans l’isle, de temps immémorial. On soupçonne qu’ils y étoient connus lors- que les Espagnols la conquirent il ÿ a environ trois cents ans. Quant au seigle, au maïs, aux pois chi- ches et aux pommes-de-terre, on les y a apportés plus récemment et successivement. On croit qu’il n’y a pas plus de trente à quarante ans que limportation des pommes-de-terre , aujourd’hui presque la principale nourriture des habitans, y a été faite. On se plaint que ne 33 258 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dans beaucoup d’endroits elles y dégénèrent. Est-ce parce qu’on ne les y cultive pas convenablement, ou parce qu’on s’attache aux espèces ou variétés que le ter- rain refuse , ou parce que quelques animaux leur nui- sent? Les mêmes plaintes me sont parvenues de la châtellenie d'Andenarde, où, par négligence sans doute, on avoit laissé multiplier une petite variété qui produit peu et ne donne que des racines très-menues. Excepté le froment, l’orge et le seigle , les plantes économiques ne sont élevées qu’aux environs des habi- tations ; on ne les étend guère à plus d’une lieue des villes. Ce n’est que dans les pays susceptibles d’une grande diversité de plantes cultivables, et où l’industrie et les combinaisons agricoles sont déja portées loin, qu’on établit un ordre de culture qui, sans fatiguer la terre, la met en état de produire successivement plusieurs sortes de végétaux. À Ténériffe, c’est presque le hasard seul qui décide. Après le froment cependant, le plus com- munément on sème l’orge , puis on plante des pommes- de-terre, puis on sème du maïs , et ensuite du seigle. Sur les hauteurs, à Ténériffe, on sème le rrigo barbilla; sur les côtes, e/ trigo morisco ; et à mi- côte , el trigo aris negro , el trigo santo. Le premier est le froment à épis blancs ou roux barbus, barbes divergentes ; le second est le froment à épis épais et plats, et à barbes noires divergentes. Celui-ci est le plus estimé, parce qu’il pèse davantage, donne plus de pain, et produit plus que les trois autres; c’est un 3 BATA DIR TEE EE E OU E: 259 froment qu’on cultive en Barbarie. Le troisième est le froment à balles et barbes violettes. Enfin le quatrième est le froment à barbes et bales velues, épis grouppés , grains ronds et courts, connu sous le nom de bled de miracles. il La grande Canarie ne connoît presque que le érigo mnorisco , et Fortaventure y ajoute l’aris negro. Trois espèces d’orges' distinctes , l’une qu’ils appel- lent cebada blanca , l’autre cebada romana;, et ne orge nue, à quatre ou six rangs de grains, indiquée sous le nom de srigo de las montanas, froment de montagne , sont les seules qu’on y sème. La cebada romana est la moins répandue. J’ai reçu des Canaries deux variétés de maïs ; l’une d’un rouge violet et rayonné, et l’autre jaune : deux espèces de pois chiches; l’une à fleurs et grains rouges , petits ; l’autre à fleurs et grains blancs et gros : deux sortes de lentilles; la large, blanche ouverte, et.la petite rouge : deux sortes de pois; le pois des champs, et le pois mauresque ; la fève et la féveroleé, L’avoine est une petite avoine grise à deux barbes, appelce pied de poule ou peluche en France, où on la cul- tive dans de mauvais. terrains; par exémple, dans les environsde Saint-Flour, Cette avoine est, en général ; très-rare. Dans ces isles, comme dansiles pays chauds! au lieu d'avoine on donne de l’orge aux chevaux et aux mules. Ho: SRE fs io L’échange des semences n’a pas lieu ‘d’isle à isle, ni des autres pays aux isles Canaries: Dans un moment 260 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de pénurie, les paysans aiment mieux garder pour cét objet une partie de leur récolte, et acheter du bled ail- leurs pour leur nourriture. Ils auroïent cependant un moyen de réparer leur négligence, s ils employoient de temps en temps pour semer, le bled importé de l’étran- ger, toujours plus pur et plus beau que le leur. On ne donne que deux façons de charrue aux terres destinées au froment; souvent elles n’en ont qu’une. Celles qui ont été un an en jachères, ayant reçu un labour dans la saison des pluies, en reçoivent un second au moment de l’ensemencement, pour enterrer le grain qu’on y a répandu. On ne leur donne pas d'autre culture. La charrue est l’araire ; la herse n’est pas plus connue , aux Canaries que le rouleau. On seroit d’abord tenté de croire qu'avec plus de labours les terres seroïent d’un meilleur produit ; maïs, s’ils doi- vent être multipliés dans les pays froids, où les terres trop compactes ont besoin d’être divisées, il faut les économiser dans les pays chauds, où le soleil pénétre- roit trop facilement jusqu'aux racines. Cette réflexion m’empèche de blâmer la manière de cultiver des isles Canaries. On laboure à la main dans les jardins et dans le voi- sinage des habitations, où la petite culture est plus or- dinaire. Pour ce travail, on se sert d’un instrument que les Espagnols appellent azada. C’est une espèce de pioche ou de marre, large de six ou sept pouces, sur huit ou neuf de hauteur, ayant un manche de deux pieds et demi à trois pieds. Avec cet instrument on peut TOME DE; BE MS-L QU E, - 261 Jabourer à la profondeur de dix pôuces, tandis que la charrue ne peut enfoncer qu’à huit. En général , on ne fait que gratter la terre, excepté pour le maïs, dont la culture est plus soignée. Les labours pour le froment et Porge se font à plat. Pour le maïs, on laboure à sillons élevés , en donnant un peu de pente. Les grains se placent au milieu du sillon, à deux ou trois pouces de profondeur. On en met deux ou trois dans chaque trou , avec une cheville, et un ou deux haricots blancs, auxquels le maïs sert de rames. Les trous sont éloignés d’un pied les uns des autres. L’eau des ruisseaux, sur-tout à la grande Ca- narie, y est bien ménagée. Les terres qui se trouvent à portée de leur cours sont disposées de manière qu’elle peut entrer et se répandre par-tout. Quand on en a donné assez à un sillon , on le ferme pour la faire couler le long d’un autre. On arrose au moment de la planta- tion , et ensuite de quinze jours en quinze jours , ou plus souvent s’il en est, besoin. Cette facilité d’arroser les terres à maïs permet d’en faire deux récoltes dans la même année, On laboure le maïs au pied, et on le butte, Quelquefois, dans la partie de l’est de Ténériffe, on sème du bled de Turquie dans des terres qu’on ne Peut arroser, Dans ce cas, on le sème avant les pluies, S'il pleut assez, il réussit; mais on n’en peut avoir qu’une récolte par an. L’époque des ensemencemens de froment et d’orge est celle du commencement des pluies, c’est-à-dire en novembre ét décembre, On les sème à la volée, et on 262 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES en varie tellement-la proportion, qw’il y a des terres où l’on emploie à peine une fanègue de grain pour une fanègue de terre, tandis que pour d’autres on emploie jusqu’à trois fanègues de grain. Les Canariens font en cela l’inverse de ce que la raison et l’expérience dic- tent, c’est-à-dire que plus la terre a de qualité, plus ils répandent de semence. Les grains étant semés, on leur donne peu de soin jusqu’à la récolte. Quelques laboureurs cependant en font ôter à la main les herbes inutiles et nuisibles, qu’ils donnent à leurs bestiaux. On en indique quatorze sortes en espagnol, parmi lesquelles se trouvent lalpiste, le behen blanc , et trois espèces de chardons. Il est d’usage à Fortaventure de faire garder les terres cultivées et ensemencées, par des hommes avec des chiens, pour empêcher les bestiaux d’en approcher. Ces hommes, qu’on appelle parmi nous "essiers ou gardes champétres, reçoivent pour paiement la cinquantième ou soixantième partie de la récolte qu’ils gardent. Le froment et l’orge ne parviennent pas au-delà de deux pieds et demi, encore n’est-ce que dans les années de pluies abondantes. Chaque épi de froment peut con- tenir de quarante à cinquante grains. Les seigles s’élè- vent jusqu’à trois pieds et demi, et le maïs jusqu’à cinq. 4 Si les pluies tombent convenablement, le froment est déja grand en janvier, les épis sortent en mars, et la maturité s'opère en mai. Il paroît qu’à Gomère les ré- coltes sont un peu plus tardives. L’orge mürit presque BUT D'EtPH YS IQ U 263 un mois plutôt. Le maïs, qu’on sème en tout temps, n’a pas, pour cette raison, de maturité fixe. À Téné- riffe on coupe le bled et l’orge à la faucille, et à For- taventure on les arrache. Les récoltes se transportent dans des draps, sans être liées , auprès des habitations , sur des ânes , ou des mu- lets, ou des chameaux. On ne prend presque aucune précaution pour les ranger; seulement, à Fortaventure, on les place sur trois lignes ou côtés d’un carré long. Les chameaux entrent tout chargés par le côté ouvert, On a l’attention de mettre les épis en dedans. Quelques laboureurs dont les récoltes sont grandes, forment des meules qui subsistent deux ou trois mois. En général, comme dans nos pays méridionaux , où il n’y a que de petites exploitations , on bat les grains peu de temps après leur maturité; les animaux les foulent, jusqu’à ce que la paille en soit broyée , dans un terrain uni qu’on se contente de balayer. Pour favoriser le nettoie- ment du grain, qu’on soulève à la pelle, on choisit les jours où il fait du vent. Cette opération est très- vicieuse. Dans quelques-uns de nos départemens, comme aux Canaries, on bat, à la vérité, le grain en dehors, mais sur des places bien affermies, et dont on forme des aires solides. Il vaudroit mieux encore le battre dans des granges, dont les aires, faites de terre franche délayée ; battue «et séchée peu à peu, à laquelle on ajoute du sang de bœuf, se dégradent moins. Il en ré- sulte aux Canaries le grand inconvénient de laisser dans les grains jusqu’à un douzième de terre et de pierres, 264 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES qu’on est obligé d’ôter chaque fois qu’on veut en faire moudre. Des femmes, dont le temps pourroit être mieux employé, sont occupées de ce triage une partie de l’année. Le maïs s’égrène à la main. En France |} dans le dé- partement du Lot, on l’égrène en passant l’épi sur un morceau de fer; ce qui est plus expéditif. La bonté des récoltes en froment et orge dépend de l'abondance des pluies et de leur distribution. Celles du maïs sont constamment les mêmes , pourvu qu’on procure une irrigation convenable aux bonnes terres qu'on y consacre, et qu’on y répande de l’engrais. S'il tombe beaucoup d’eau en novembre et décembre, et de quinze en quinze jours dans les mois de janvier et fé- vrier, on à beaucoup de froment et d’orge ; dans les années de sécheresse , on en récolte les cinq sixièmes de moins. Je ne peux compter sur les produits indiqués dans les réponses , parce que l’auteur n’a rapporté que les produits comparés à la semence, d’après lesquels on voit tantôt huit ou dix, tantôt vingt ou trente mesures pour une. | On a remarqué que, dans certaines années , un in- secte rouge suçoit et amaigrissoit le grain, et qu’un insecte verd, qu’on ne décrit point, nommé dans le pays pulgon , rongeoit la paille : de fortes pluies font périr les uns et les autres. On voit quelquefois , mais rarement , arriver de Bar- barie des essaims de grosses sauterelles, que les Espa- gnols appellent Zargosta, qui se jettent sur les mois- sons et les détruisent en un instant. Pour les chasser : PT Dr LP YS 1°Q 6: Mi 265 et les tuer, on s’arme de bâtons et de balais. Il en reste qui déposent leurs œufs dans le pays. l’année suivante; au moment où ces œufs éclosent, on envoie ramasser avec soin les jeunes sauterelles, avant qu’elles aient de la force , afin de les brûler. On parvient ainsi à ‘se dé- faire d’un ennemi dangereux. . Les lupins, qui se sèmenten novembre dans les terres médiocres, ne müûrissent qu’en juin. Quand on les des- tine à servir d'engrais aux terres, on les recouvre à/la charrue : si on se propose d’en récolter la graine, on peut y laisser paître les bestiaux ; il est bien rare qu’ils touchent aux lupins. Les labours qui ne se font point à la main, se font à l’aide de chevaux, mules ou mulets, bœufs ‘et va: . ches : on en attelle deux: à une charrue. Ces animaux, qui sont de taille et de force médiocres, en un jour de moyenne longueur, labourent une fanègue de terrain, quand il n’est pas pierreux; ce que ne feroit pas.en dix jours un homme avec l’azada. Si l’on pouvoit comparer Vactivité des cultivateurs des Canaries à celle des nô- tres, on croiroit que leurs chevaux ou mulets peuvent labourer dans une journée un arpent de terre de cent perches, à dix-huit pieds la perche, puisque, dans des jours d’été, nos forts chevaux labourent cent dix perches, et quatre-vingts, de vingt-deux pieds , dans des jours d’hiver. Dans ce cas ; la fanègue répondroit à un ar- pent de Paris. On peut encore le supposer d’après la quantité de grains qu’on emploie pour la semence. On en emploie tantôt une fanègue, tantôt trois: termé a 34 } 266 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES moyen, une et demié. Or la fanègue pèse de cent à cent dix livres : ainsi c’est cent cinquante-cinq livres, ou environ huit boisseaux de Paris, quantité suffisante pour un arpent de neuf cents toises carrées (), en sup- posant la livre de seize onces; car, si elle étoit de vingt-huit onces, il faudroit convenir que la fanègue auroit plus d’étendue, ou qu’on semeroit plus dru qu’en France. Un homme ensemenceroit beaucoup de terrain en un jour ; mais il n’a besoin d’ensemencer que ce que ses charrues peuvent recouvrir en labourant. 11 lui faut deux jours pour couper une fanègue de bled à la fau- cille. Les habitans de Fortaventure , riches en grains, oft une manière particulière de le conserver au dehors. Ils font un cercle plus ou moins grand avec de la longue paille d’orge entière ; le centre se remplit mo- mentanément avec de la paille hachée. On élève le cercle, en forme de pyramide, jusqu’à une certaine hauteur; alors on y place quatre planches ou quatre morceaux de bois qui se traversent : on presse le cercle, soit avec des pierres, soit en marchant dessus ; on en- lève de l’ouverture du centre une partie de la paille hachée, en en laissant assez pour former un lit près de la terre. C’est dans cette ouverture que l’on jette cin- quante ou cent fanègues de froment ou d'orge. On en QG) Cette conjecture est d’accord avec Paucton (Métrologie), qui estime que la fanègue d'Espagne est de quatre mille neuf cents vares — un arpent de Paris, de neuf cents toises carrées, plus trois toises et dix-huit pieds. ET DE PHYSIQUE. 26% garnit l'entrée avec quelques branches d’arbres. On continue d’élever la pyramide, et de remplir l’ouver- ture de paille hachée; on scelle le haût dela:pyramide avec des pierres ou du mortier. Les grains, de cette manière, se conservent en bon état pendant deux ou trois ans. On conçoit qu’ils sont à l’abri des injures de l’air et de la voracité des animaux. ; Le froment et l’orge qui se recueillent à Ténériffe sur les côtes, sont de meilleure qualité que ceux de l'intérieur, et se vendent ordinairement deux réaux de plata (°c? Std dire vingt sous) de plus par fanègue. Les grains de la grande Canarie sont toujours à plus bas prix qu'à Ténériffe. On yestime le maïs plus que le froment et l’orge. De toutes ces isles, celle de Forta- venture produit le meilleur froment. On le préféreroit et on l’acheteroit plus cher, s’il n’étoit pas aussi mé- langé de terre et de pierres; ce qu’il doit non seule- ment au peu de solidité des aires où on'le bat, mais encore à la pratique d’arracher les tiges,.au lieu de les couper. Une fanègue de froment de Ténériffe, qui se divise en douze almudes, rend à la mouture huit almudes de farine et trois de son, c’est-à-dire plus d’un quart : le déchet est d’un douzième; ce qui suppose une grande imperfection dans les moutures, ou beaucoup d’infidélité dans les meüniers. Les moulins sont des moulins à vent, où à eau sur de petits ruisseaux qui les font tourner dans certains temps de l’année, Dans les isles Canaries , bn loue les terres, non à prix d'argent, mais à moitié profit pour la récolte. Le 1 268 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES propriétaire fournit les semences et autres objets de première nécessité ; il fournit aussi les bestiaux , qui lui appartiennent : il peut les reprendre après le terme convenu , et il a la moitié du croît pendant la durée du bail, indépendamment d’une fanègue de froment par chaque tête de bétail. Cette manière de louer est un véritable cheptel. Des paysans louent quelquefois des bestiaux sans terres, uniquement pour partager la moitié de l’accroissement. En France, les baux à cheptel sont d'usage ; avec diverses nuances, dans tous les départe- mens situés au-delà de la Loire, et presque point en- deçà. : 1] n’y a que quelques gens aisés qui se nourrissent de grains sous forme de pain : la plupart des habitans, et sur-tout ceux de la campagne, vivent en très - grande partie de go/o. Pour préparer cet aliment , on fait griller légèrement, sur un plat de terre, ou du froment, ou de l'orge, ou du seigle, .ow du maïs ; ainsi il y a goféo de froment , gofio de! seigle, d’orge et de maïs. On les réduit en farine dans un petit moulin à bras. Chaque paysan a le sien, dont il se sert à mesure qu’il veut manger. Le Canarien, allant en campagne, porte son gofro dans un sac ou dans une peau de chèvre ou de chevreau, comme le Péruvien sa fécule de pomme-de- terre. À mesure qu’il a faim, il en mange dans l’état de farine, ou après en avoir fait des boulettes en l’hu- mectant d’eau. Les plus friands du pays le mangent avec du poisson salé et des pommes-de-terre. Le go/f’o d’orge, regardé comme le plus rafraîchissant, est préféré aux EE D ENT OUÉE MIS TRQ Mir, 269 autres à Fortaventure ; c’est aussi le moins cher. Sur quelques avis que dans les isles de Palme et de Gomère les habitans pauvres étoient quelquefois réduits à faire des galettes avec une racine prise dans les montagnes, je demandai tout à la fois la racine entière et en poudre, la plante, et de la galette faite dans le pays. Il me fut aisé de juger que c’étoit le pzeris aquilina Lin., ou la Jougère mdle, dont ces infortunés, dans les années de disette , sans doute , formoient un si déplorable aliment, en y joignant très-peu d’orge ou du seigle. Les échan- tillons reçus des isles Canaries, et mis sous les yeux de Vlnstitut, en offrent des preuves authentiques. La ga- lette , ainsi qu’on le voit, a la croûte brune et la mie noire, comme celle du froment de pain carié, et sem- ble, par son aspect brillant, un morceau de laitier de forge. On l’a fabriquée en biscuit de mer, afin qu’elle pût soutenir la traversée sans s’altérer. Trempée dans Veau pendant dix heures, elle mavoit ni saveur ni odeur. ; Pour réduire en poudre la racine de fougère, on la fait sécher, on en nettoie la superficie, et on la coupe en menus morceaux qu’on passe ensuite au moulin. Cet instrument, le mème qui sert pour le &ofio, est com- posé de deux pierres de douze à vingt pouces de dia- mètre , dont l’une est gisante et l’autre tournante, Celle-ci, qui recouvre la première, est armée d’une cheville de bois ou de fer que l’homme qui moud tient dans la main. À la vue de ce pain, il est impossible de ne pas 270 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES déplorer le sort des habitans qui le mangent , et de croire qu'avec cette seule ressource des hommes puissent pro- longer long-temps leur existence. La graine des lupins est une bonne nourriture pour les animaux, et sur-tout pour les bœufs; mais elle a besoin d’une préparation. On la fait tremper trois jours dans l’eau, qu’on fait bouillir ensuite , en y mettant du sel : quelques personnes , sans doute quand l’eau est sé- léniteuse, y ajoutent des cendres. Les grains étant de- venus jaunes, et l’enveloppe s’en séparant facilement, on jette l’eau dans laquelle on les a fait cuire ; on les passe dans de l’eau fraîche , qu’on renouvelle jusqu’à ce qu’ils aient perdu leur amertume. Les animaux les mangent volontiers en .cet état. En Espagne, les pau- vres gens s’en accommodent lorsqu'ils sont adoucis. Les sens riches font grand cas des pois chiches. Cette graine légumineuse, qui exige une terre substantielle, se sème en mars ou février, et se récolte quatre ou cinq mois après. On emploie la coriandre dans les ragoûts, et on dis- -tille avec de leau-de-vie anis, pour en faire de l’eau- de-vie anisée, et on se sert du safranum pour teindre: Indépendamment des plantes qu’on cultive en grand, ‘on cultive dans les jardins des choux pommés, des choux-fleurs, des oignons dont on embarque une partie pour l'Amérique, des patates {convolyulus batatas ), quatre espèces de calebasses , et des melons d’eau. Deux calebasses envoyées dans du son me sont parvenues \ très-fraîches. RU LP 5, PH ES LO 0. E 271 Une grande partie de Ténériffe étant pays de mon- tagnes ou sol de pierres , il y a bien du terrain qui ne produit rien. On croit que, compensation faite des bonnes et des mauvaises années, l’isle récolteroit de quoi se nourrir, et que les vivres y seroient à bon mar- ché, si les commandans généraux, pour gagner une piécette ou vingt sous par fanègue de froment, ne don- noient des permissions d’exporter. Loin que ces per- missions fussent nuisibles ,; si les Canariens étoient industrieux, ce seroit un moyen de tirer un meilleur parti de leurs terres. Déja on s’est apperçu que, dans les momens de gène, les Américains et des négocians de Mogador et de Cadix y apportoient des chargemens de farine et de froment : rien n’étoit plus propre à faire baisser le prix et À établir l'équilibre. La grande Canarie, plus abondante que les autres, éprouve moins de disettes , et est en état de leur fournir des grains, parce qu’elle _ mieux arrosée. Fortaventure, qui dans les bonnes années produit beaucoup de froment et d’orge , et peut aider les autres isles, a souvent de mauvaises récoltes. Une partie de ses habitans, mourant de faim, est obligée de s’expa- trier, et d’aller chercher de quoi vivre dans les autres isles. Celles de Palme et.de Gomère, dont les habitans sont quelquefois forcés de vivre de racines de fougère, ne sont pas dans une position plus favorable. On voit à Ténériffe quelques manufacturés de soie du pays; on en récolte aussi à Canarie, à Palme et à 272 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Gomère. On file seulement à Fortaventure un peu de lin que des négocians de T'énériffe font venir d’Ams- terdam et de Hambourg ; et du coton de V'isle , qui pour- roit s’y multiplier facilement. La laine des moutons du pays s’y emploie en couvertures et en étoffes grossières, dont les gens de la campagne s’habillent. Au nord de Ténériffe, il y a des montagnes où l’on va journellement faire du charbon et couper du bois pour le chauffage. Il paroît qu’il n’y a aucun ordre établi dans l'aménagement de ces forêts, et qu’elles se dépeuplent, tant parce qu’on détruit, comme parmi nous, sans replanter, que par les incendies fréquens dus aux charbonniers. On en a éprouvé un , il n’y a pas long-temps , qui a duré quinze jours et a causé un dégât irréparable. Du côté du pic, au sud de l’isle, les montagnes pro- duisent des pins très-résineux que les habitans nomment tea. On en fait des solives, des planches ; on s’en sert pour allumer le feu, pour les pêches de nuit, pour s’'éclairer dans lés maisons; on en tire du brai qu’on envoie à Cadix. Ces arbres s’épuisent aussi, et il est à craindre que dans trenté ans l’isle ne possède plus de bois. Canarie offre encore sur ses montagnes beaucoup de bois, particulièrement sur celle dite de Doramas ; on y trouve aussi des pins et des oliviers, qui ne deman- deroient qu’à être soignés pour rapporter abondamment: Les habitans de Fortaventure , faute de bois, brülent du tabaiba et des euphorbes. ET DE PHYSIQUE. 273 On est assuré qu’à Gomère et à Palme on peut mettre au feu beaucoup de fougères, qu’on ne trouve guère dans les autres isles. L’éducation des bestiaux se borne à en élever pour les besoins. C’est à la grande Canarie qu’il y en a le plus. Cette isle fournit à Ténériffe beaucoup de bœufs et de moutons, qu’on mange sans prendre la peine de les engraisser ; Fortaventure lui fait aussi passer des moutons. La plupart sont pèle-mêle, errans le long des côtes et dans les terres incultes. Chaque particu- Lier marque les siens aux oreilles ; on les rassemble une Lois l’année , en présence d’un ing tate nommé vedor, pour nb anholtré les marques. Les propriétaires pren- nent ce qu’ils en veulent pour tuer ou pour vendre, et les autres ont la permission de se promener jusqu’à Vannée suivante. Les bêtes qui travaillent sont nour- ries de paille hachée, en été, et d’herbe en hiver. À Ténériffe, les mulets sont passables , et les ânes petits, mais d’une grande résistance. Les bêtes à laine y ont toutes des cornes : les plus fortes pèsent cinquante li- vres; elles ont deux nie et demi de hauteur. La toi- son, qu’on ne tond qu’une fois par an, pèse de quatre livres à quatre Hvres et demie, sans être lavée ; elle se réduit à moitié quand elle est lavée et dégraissée : ce qui suppose que ce n’est pas de la laine courte, comme celle des moutons d’une partie de l'Espagne, qui au lavage perd les trois cinquièmes de son poids. Les mou- tons de Canarie sont plus forts et ont plus de laine que ceux de Ténériffe. 1. 35 274 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES On fait travailler à Ténériffe les bœufs et les vaches jusqu’à quinze et vingt ans, ce qui paroît un temps bien considérable. Le prix du bœuf et de la vache, à a boucherie , est depuis 16 jusqu’à 20 et 22 quartos la livre de ur huit onces, c’est-à-dire de 10 à 13 sous 9 deniers de notre monnoie, ou de 7 sous 4 deniers à 9 sous 3 de- niers la livre de seize onces. Un bœuf ou une vache étant estimés 45 piastres, dont chacune contient qua- torze fois 7 sous 4 deniers , il s’ensuit que ces animaux, aux Canaries, pèsent de six cents à six cent trente li- vres. Le prix moyen d’un mouton, dont la viande est toujours plus chère que celle du bœuf ou de la vache, est de 4 à 5 piastres; et celui de la chèvre, de 3 piastres. Le poisson salé, dont se nourrit, avec le gofo et les pommes-de-terre , une partie des habitans des Canaries, se pêche sur la côte d'Afrique, vingt-cinq à trente lieues des isles. Vingt-deux à vingt-trois brigantins, employés à cette pêche, font sept à huit voyages par an, et rap- portent chaque fois dix-huit à vingt milliers de poisson, qui, au prix de 6 quartos la livre de vingt-huit onces, ou 3 sous 4 deniers la livre de seize ONCE ; produit environ 1000 piastres courantes. L’isle de Ténériffe fait un commerce de vins assez considérable. La plus grande partie des vignes qui le donnent sont situées au sud-ouest, dans les environs du pic, le long des côtes, Dans beaucoup d’endroits, elles sont plantées sans ordre et mal entretenues ; - A UDN EPS PU PS 2 QU EF: ?.) 290 quelques-unes sont disposées sur des treillages de cinq à six pieds de hauteur, et en espaliers. On donne à la terre deux façons, avec une pioche, à la profondeur de sept à huit pouces ; l’une en janvier, et l’autre en mars. On n'apporte dans. les vignes ni terre ni fumier; on les taille en mars, on vendange en août et septembre, et on porte le raisin au pressoir à mesure qu’on le cueille. Il ÿ a aussi des vignes à Canarie et à Fortaventure, moins dans celle-ci que dans la précédente ; mais elles y sont plus mal soignées qu’à Ténériffe : on ne leur donne qu’une seule façon par an à Fortaventure. Le vin, qui n’a pas grande qualité, peut-être parce qu’on ne sait pas le faire, se consomme dans le pays, ou pour la boisson, ou pour en tirer de l’eau-de-vie. On recueille beaucoup plus de vin à Lancerote qu’à Fortaventure ; mais il n’y est bon qu’à convertir en eau- de-vie. Les volcans qui l’ont ravagée y ont répandu dans beaucoup d’endroits un sable mêlé de cendres, de l'épaisseur de quatre ou cinq pieds. Les habitans le percent jusqu’à ce qu’ils trouvent la terre, etils y plan- tent des ceps de vigne, qui croissent et s'étendent ad- mirablement. On a vu souvent un seul pied produire de quoi faire une demi-pipe de vin, c’est-à-dire deux cent quarante pintes de Paris. Les vignerons de Ténériffe ont chacun leur pressoir à côté de leur habitation; ils le couvrent de paille ou de planches, pour le défendre des: injures de l’air. Au moment de la vendange, ils le nettoient. Ce pressoir est fort simple; il consiste dans un fort caisson de 276 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES huit ou dix pieds en carré, porté sur quatre piliers en maçonnerie. À une certaine hauteur, une grosse poutre , que nous appelons arbre de pressoir, fixée par une extrémité à un montant, portant son autre extrémité à huit ou dix pieds au-delà du caisson, est percée à cette dernière par un écrou qui reçoit une vis à laquelle s’accroche une pierre très-pesante. Moyen- nant des leviers , des hommes tournent la vis, et arbre appuie fortement sur quelques petites pièces de boïs et de planches immédiatement posées sur les marcs de raisins. On foule d’abord le raisin sous les pieds, pour en tirer le plus liquide; et on place ensuite le marc sur le caisson , en entourant, pour l’affermir , d’une grosse corde de jonc. Il est à remarquer qu'à Ténériffe on sait très-bien éclaircir le vin et le fortifier avec de l’eau-de-vie. Il ne seroit pas difficile en France d’imiter cette pratique, connue sans doute dans plusieurs de nos pays de vi- gnoble. Autant qu’on en peut juger par les détails dont j'ai rendu compte, les isles Canaries ne sont pas sans inté- rêt, même pour l’agriculture. La position de ces isles, dont la chaleur n’est pas excessive dans tous les points; la nature de leur sol, fertile en beaucoup d’endroits ; la qualité des productions qu’on y récolte; tout doit les faire regarder comme une portion des possessions espagnoles plus précieuse que celles de l'Amérique qui font le chargement des galions: EN D E4 PH Y,S.1Q vw: 277 Indépendamment des pommes-de-terre et des princi- pales graines céréales que les Espagnols y ont portées et qui y prospèrent, on peut présumer qu’on y feroit avec avantage des cultures en grand de cannes à sucre, : de patates, de cotonniers , d’oliviers, de mûriers blancs, de tabac, de soude et de safranum, puisque ces végé- taux y croissent très-facilement. Plus multipliés, ils serviroient à alimenter quelques fabriques, ou à pro- curer des objets d’échange. Quel parti ne tireroit-on pas des terrains propres à la vigne, dont le vin est si estimé dans les deux mondes, si utile et si agréable aux navigateurs ! N’a-t-on pas lieu de penser qu’on pourroit y acclimater des productions , soit d'Europe, soit des contrées plus australes et plus septentrionales d’Amé- rique, d'Afrique et d'Asie? * Si les habitans soignoient mieux ce qu’ils cultivent actuellement , s’ils faisoient plus d’usage des engrais, s’ils étendoient leurs cultures bien au-delà des villes et des villages, s’ils alternoient pour ne point fatiguer la terre, s’ils nettoyoient convenablement leurs récoltes, si, au lieu d’arracher leurs bleds, ils. les coupoient tou- jours et les battoient dans des aires solides et non dé- gradées , leurs productions, essentiellement utiles, se- roient bien plus abondantes et de meilleure qualité , les disettes y seroient plus rares, et la misère seroit bannie de ces contrées. Les habitans de Gomère et de Palme, comme j’en ai donné les preuves, ont été sans doute forcés quel- quefois de se nourrir en partie de pain de fougère. Ce 278 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES fait ne démontre point la stérilité de ces isles, puisque, dans les pays les plus riches en moissons ; les hommes ont souvent vécu de racines ou de mauvaises graines. La France n’en a fourni que trop d'exemples. Aucune partie du monde n’a éprouvé autant de disettes que le grand duché de Toscane, avant qu’on y eût favorisé l’exportation des grains ; tant il est vrai que la pénurie des subsistances tient moins à l’infécondité des terres qu'aux fautes des gouvernemens. Quelques-unes des Canaries, et notamment Téné- riffe, manquent d’eau en été; ce qui nuit infiniment à la culture des grains et des plantes à fourrage : mais croit-on qu’on ne püt avec intelligence y ménager, pour les temps de la sécheresse , une partie de l’eau qui tombe abondamment dans la saison des pluies, comme on fait en Égypte, où l’on profite du débordement du Nil pour conserver de quoi faire des irrigations salutaires? Au reste, parmi les plantes profitables à cette colonie, il y en a plusieurs qui n’ont pas besoin d’eau pendant leur végétation, et on les préféreroit pour les isles pri- vées de ruisseaux. L’étonnante industrie des Maltais, qui obtiennent de belles récoltes sur des rochers qu’ils recouvrent d’un peu de terre après en avoir brisé la substance, prouve que l’homme, par-tout où il est laborieux et plein d’é- nergie, cultive avec succès ce que son sol peut pro- duire , et se forme des objets dont échange lui procure ce qui Ini manque. Un des grands obstacles à l’amélioration des Canaries ET DE PHYSIQUE. 279 est la nonchalance naturelle des colons, aussi sobres qu’imprévoyans ; ce qui y contribue davantage , suivant l’auteur des réponses, est le régime monastique et la forme du gouvernement, qui gène les propriétaires et le commerce. Il suit de ces réflexions, qu’habitées par un peuple actif et encouragé par un gouvernement qui sentiroit le prix de l’industrie, les Canaries seroient un pays très- fertile, en état de se suffire à lui-même le plus souvent, et d'offrir aux peuples des autres parties du monde des productions qu’ils vont chercher au-delà. 280 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES MÉMOIRE SUR LES ABUS DES DÉFRICHEMENS; Par H.-A, Tessi:rezeRr. Lu le premier fructidor an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 6 brumaire an 5. L'sxacérarion dans tous les genres a fait des maux incalculables ; c’est sur-tout en agriculture que ses effets ont été le plus fâcheux. Il est du devoir des hommes qui en ont fait l’objet de leurs méditations, de les faire connoître et d’indiquer comment on pourroit y remédier. Le goût des défrichemens a paru en France il y à A environ quarante ans; du moins c’est à cette époque qu’on a commencé à s’en occuper d’une manière plus particulière. L’explosion qui s’est faite alors dans les esprits, soit qu’elle fût due à un accroissement de po- pulation qui nécessitoit plus de subsistances , soit qu’elle fût excitée par les idées de la vraie richesse de l’état, qui consiste dans les productions multipliées du sol, a donné lieu à des réflexions de la part du gouvernement. Il en est émané deux actes remarquables et capables ET DE PIH V2STI QU Æ. « 281. d’encourager : l’un est une déclaration du roi, qui exempte de dîmes et d'impôt pendant quinze ans les terres nouvellement défrichées ; l’autre est un arrêt du conseil d'état, en interprétation de la précédente décla- ration, qui étend les privilèges des défrichemens. Ces deux actes ont donné de grandes facilités pour convertir en terres labourées des landes, broussailles, vagues, etc. Le gouvernement d’alors, ayant cette in- tention , n’a pu rien faire de mieux en apparence : mais ce qui a contribué davantage aux défrichemens, c’est, d’une part, l’augmentation du prix des grains, qui en général s’est soutenu depuis ce temps-là; de l’autre, VPaccroissement de l’impôt, auquel on n’auroit pu satis- faire sans de nouveaux produits. D’ailleurs, les parti- culiers ayant vu qu’il y avoit du profit à vendre où à récolter beaucoup pour leur consommation, chacun a imaginé des ressources, et a cru en trouver dans les terres incultes. Mais il est un terme À tout : ce qui est un bien devient un mal quand on l’exagère , quand on va au-delà du but, quand on n’a pas une mesure dé- terminée. Les uns, pour gagner plus, ont défriché des bois ; les autres ont sacrifié à la culture du bled des prairies qui nourrissoient de nombreux troupeaux. IL eût fallu que le gouvernement, pour ne pas commettre de faute, füt plus instruit , et se procurât, avant d’ac- corder aucun privilège aux défrichemens , un état exact de la population du royaume et de ses accroisse- mens annuels ; que, sachant ce qu’il falloit à peu près de terres pour nourrir tous les habitans, de prairies 1, 36 282 MÉMOWTRES DE MATHÉMATIQUES pour les bestiaux, de bois pour le chauffage et pour la construction , il ne permît de défricher aucun bois en rapport, à moins d’en replanter la même quantité, ou aucune prairie, à moins d’en faire d’autres de même étendue, soit naturelles, soit artificielles. Cette con- duite eût paru, il est vrai, une atteinte à la liberté des propriétaires : mais le bien général le commandoit; la France commençoit déja à manquer de bois dans beau- coup de ses parties. Depuis cette époque , chaque année on en voit diminuer sensiblement la production, et la consommation augmenter d’une manière inquiétante. C’est aux défrichemens trop multipliés et mal entendus que nous devons en partie cette disette d’une denrée précieuse. Beaucoup de pays ont été privés de pâturage, tandis que rien n’est plus propre que la chair des bestiaux à remplacer et à compenser le manque de produits en grains. Il n’est donc pas toujours aussi intéressant qu’on le croit pour un gouvernement de favoriser les défri- chemens. En faisant voir que la France, état ancien et cultivé, n’a pas beaucoup d’intérêt à favoriser les défrichemens dans la plus grande partie de son sol, je ne prétends pas qu’il en doive être de même dans les pays neufs et dans ceux où les bois et les forêts sont trop étendus, eu égard à la culture, qui n’est pas en raison des be- Soins : on peut et on doit même permettre et ordonner d’abattre et de défricher les bois, pour semer des grains à leur place. Combien de honte ; maintenant habitées, ET DE PHYSIQUE. 83 ne doivent leur population qu’à l'accroissement des cultures aux dépens des forêts! _ Lorsqu'une colonie s'établit dans un pays où presque tout est bois, ce ne peut être qu’en en détruisant qu’elle se procure des terres cultivables. Les Européens ont été dans ce cas lorsqu'ils se sont emparés des isles et de quelques portions du continent de l'Amérique. Ils n’a- voient pas besoin de ménager le bois, puisqu’ils en re- gorgeoient. Pressés de jouir, et privés des bras néces- saires pour l’exploiter convenablement , ils n’ont eu de moyen plus prompt et plus expéditif que d’y mettre le feu. Parmi nous, il y a plus d'avantage à améliorer les terres actuellement culiivées, que de songer à porter la charrue dans celles où elle n’a pas encore passé: 19, parce qu’il y a moins de frais à faire, et plus de produits à attendre; 2°. parce que la plupart des terres incultes sont de peu de rapport, et répondroient mal aux vœux des laboureurs. Par exemple, je suppose qu’en France il y ait vingt millions d’arpens de terres cultivées , rapportant l’un dans l’autre quatre pour un, et dix millions de terres incultes, qui, moins bonnes. que les autres, rapporteroient deux pour un : il vau- droit mieux faire en sorte que les vingt millions pro- duisissent six pour un, parce que la dépense pour l’a- mélioration de celles-ci ne seroit pas aussi forte que celle qu’il faudroit pour défricher les autres. Les dix millions d’arpens en friche ne peuvent être regardés comme entièrement inutiles, puisqu’une partie sert à / 284 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES la pâture des bestiaux. Les encouragemens du gouver- nement, dans un pays cultivé, doivent principalement porter sur deux points , dont le premier est l’accroisse- ment du produit des terres actuellement en culture , et le second, de celles qui peuvent être desséchées sans aucun de ces inconvéniens dont on a éprouvé les tristes effets. L’enthousiasme des défrichemens, outre la diminu- tion du bois, a causé bien d’autres maux. On se plaint que tous les pays à côteaux sont ruinés : les sommets étoient garnis d’arbres ou de broussailles, dont les feuilles se pourrissoient et formoient un peu de terre végétale, que l’eau des pluies, retenue quelque temps par les ra- cines, entraînoit peu à peu vers le bas; ce qui fertili- soit les côteaux. Depuis que les sommets sont dégarnis, les roches sont à nu. La déclaration du roi n’ayant pas prévu cet inconvénient, une très-grande partie du ci- devant Languedoc, où on a mis en culture toute espèce de sol, n'offre plus qu’un roc vif et stérile. C’est à cette cause qu’on attribue la perte de beau- coup d’oliviers dans les hivers de 1766, 1776, 1781,et autres années rigoureuses. Les arbres avoient changé de climat par la dégradation des bois et des terres qui leur servoient d’abri contre le nord. On assure qu’à peine il existe aujourd’hui quelques oliviers à Montelimart. La même observation a lieu pour quelques pays de vignoble , qui n’ont perdu de leur ancienne réputation, sans doute , que parce que les vignes ne sont plus aussi abritées. ET DE PHYSI:IQU E…E 285 La loi sur le partage des communes a mis le.comble aux abus sur les défrichemens. Nulle mesure n’a été gardée ; un désordre affreux a porté la destruction dans les montagnes et dans les vallées : dans les montagnes, dont on a cultivé le sol, condamné par la nature à rester en pâture, et dont la terre, délayée par les pluies, les fontes de neige et les orages, est descendue jusqu’au bas; dans les vallées, par les atterrissemens qui ont obstrué les grands chemins et les rivières, et causé des débordemens funestes. Les gazons des montagnes, les racines des arbres et les broussailles, qui autrefois don- noient au sol de la fixité, et permettoient aux eaux de couler sans rien emporter avec elles, une fois enlevés par la charrue, la pioche ou la bêche, la dégradation des montagnes et les ravages des vallées ont dû s’en- suivre, sans que l’agriculture y ait gagné; car la plu- part de ces sortes de terres ne rapportent que peu d’an- nées, et ne donnent que des produits momentanés , qui ne sont rien si on les compare à ce qu’on en retiroit quand ils servoient à nourrir des bestiaux, et au tort qui en résulte pour les terrains des vallées, toujours excellens, et pour les habitations et les usines, qui en sont endommagées. Des hommes malveillans , égoïstes et avides, enhardis par l’impunité à entreprendre ce que la loi ne leur a pas accordé, ont impitoyablement con- verti en terres labourées des sols montueux, sans qu’on ait pu les en empêcher. Depuis que l’esprit de justice peut élever la voix, l’intérêt commun et l’intérêt parti- culier essaient de se faire entendre. Des plaintes amères 286 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES et pressantes sont arrivées des départemens des Pyré- nées-Orientales , de l’Isère, de la Meurte , et de la partie de celui des Landes qui est dans le voisinage des Py- rénées-Occidentales. Dans des pays de plaine même, sous le prétexte de communes, des habitans ont défriché les terrains qui sont auprès des fermes, et nécessaires pour la sortie des bestiaux. Ces faits, dont les preuves existent dans mes maïns, dénoncent à l'intérêt public des abus fâcheux, que le gou- vernement sans doute s’empressera de réprimer. On ose à peine le dire, tant l’idée en est affligeante, une partie du mal commis en peu d’années n’est peut-être entiè- rement réparable qu’en cent ans : tant il est vrai qu’a- vant de faire des lois pour l’agriculture, il faut en avoir connu et prévu les inconvéniens. I1 ne suffit pas plus à l’agriculteur qu’au médecin d’avoir exposé les maux dans toute leur étendue; ils n’ont rempli qu’une partie de leur tâche, s’ils ne pro- posent pas quelques moyens d’y remédier. Sans doute il en est un que le gouvernement ne peut manquer d'imaginer et d'adopter, aussitôt que les plaintes dont j’ai parlé lui seront parvenues : c’est de suspendre provisoirement tout défrichement dans les pays de mon- tagnes et de côteaux. Ce remède, dont l'effet est seulement d’arrèter l’es- pèce de contagion que l’amour d’une propriété nuisible à celle d’autrui a pu faire naître, n’est pas sans avan- tages, puisqu'il circonscrit et limite l’abus des défriche- mens. ET DE PHYSIQUE. 287 Mais, pour aller plus loin, il faudroit indiquer le degré d’inclinaison des côteaux, au-delà duquel il ést dangereux de défricher. On a cru qu’au-dessous de trente degrés il ÿ auroit peu d’inconvéniens de le permettre dans la suite : mais trente degrés de pente sont encore bien rapides ; il me semble qu’il suffiroit de fixer vingt degrés. : On pourroit exiger des propriétaires de nouveaux dé- frichemens qu’ils établissent des murs de terrasse, comme on en voit dans les vignobles placés sur des montagnes escarpées, et qu’ils formassent autour de leurs propriétés des fossés profonds, pour conduire l’excédent des eaux dans les vallées. Au moment où l’agriculture prit un nouvel essor dans le grand duché de Toscane ; on ne laissa défricher les côteaux que jusqu’à une certaine hauteur, et on ordonna, avant de commencer lopération, que le propriétaire plantât en bois la partie supérieure. Cette sage précau- tion pourroit être adoptée en France, et pour les ter- rains de montagnes ou côteaux destinés à être défrichés ; et pour ceux qui l’ont été si témérairement, 288 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES OBSERVATIONS Sur les sucs de quelques végétaux, et sur les moyens dont le carbone circule dans le végétal et s'y dépose pour servir à la nutrition, Par J.-A. CnAPTAr, membre associé. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 6 nivose an 5, L'inacrsr du suc très - connu de l’euphorbe na conduit naturellement, par les phénomènes qu’il m’a présentés, à l’examen comparé de quelques sucs extraits de diverses plantes. Je vais présenter les résultats quise sont offerts dans le cours de mes expériences , pour pou- voir en déduire quelques conséquences relatives à la nutrition et aux teintures. J’ai employé trois procédés pour extraire le suc d’euphorbe. 1°. J’ai coupé les tiges avec des ciseaux, et les ai de suite agitées dans l’eau froide. Le liquide s’est coloré en blanc, et a parfaitement délayé le suc qu’il tenoit en suspension. 20, J’ai profité de la saison où la sève est la plus fluide, la plus abondante dans les végétaux, et j’ai coupé avec soin les tiges d’euphorbe pour faire couler dans un flacon les gouttes blanches qui se forment aux ET DE PHYSIQUE. 289 extrémités coupées. Par ce procédé, quoique lent et pé- vible ;j’ai ramassé, à plusieurs reprises, de 9 à 12 déca- grammes (3 à 4 onces) de ce fluide pur. Pour lobtenir plus abondamment, il faut, 1°. couper latigeäà.la base de la pousse de l’année ; 2°: profiter delà chaléur du jour; 30. exprimer la tige entre les doigts , en'allant' vers l’ex- trémité lacérée. L’euphorbia cyparissias ést celui de tous qui n’en a fourni le plus. | 39. J’ai encore essayé d’extraire le suc d’euphorbe,, à l’aide de la presse; mais alors il est mêlé d’extractif; et la couleur en est verdâtre. Celui-ci présente deux phénomènes très-différens du premier. 1°. Abandonné dans une capsule à l'air libre, il se recouvre d’une membrane qu’on peut enlever à la main sans la rompre, qui présente beaucoup de consistance , jouit d’une cer- taine transparence, et ne se moisit pas. Si on enlève cette première couche, il s’en forme bientôt une se- conde qui jouit des mêmes propriétés. On peut , de cette manière , épaissir en pellicules ou membranes tout le suc de leuphorbe. 2°, Ces membranes se dessèchent à Vair, deviennent très-cassantes, s’enflamment par le contact des corps embrasés ; mais la flamme ne peut pas se nourrir long-temps elle seule, et il reste un charbon noir pour résidu de la combustion. 3°. La chaleur de l’ébullition y détermine un précipité qu’elle ne produit pas sur les sucs blancs extraits par les deux premiers procédés. II est à observer que ce précipité moisit à Pair, tandis que celui qui se forme dans le suc blanc n’é prouve aucune altération, à 37 290 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Fourcroy avoit déja observé que la membrane dont se recouvroient les sucs de quelques végétaux , étoit in- soluble dans Peau. Il attribue ce phénomène au con- _tact et à la combinaison de l’oxygène. J’expliquerai dans le moment à quoi sont dus ces phénomènes. Le suc blanc de l’euphorbe, obtenu par les deux pre- miers procédés, sur-tout par le second, est celui dont Vanalyse nous a essentiellement occupés. Ce suc est gluant à tel point, que lorsqu'on a manié pendant quelque temps des tithymales, les mains sont tellement poisseuses, qu’elles se prennent et se collent à tout. Ce suc pur, abandonné quelque temps à lui-même sous des vaisseaux, fermés ou ouverts, laisse précipiter une matière blanche qui ressemble parfaitement , par sa forme , sa couleur et sa consistance, à la partie ca- séeuse qu’on précipite du lait par les acides. L’acide sulfurique, versé sur le suc d’euphorbe, le colore en rouge orangé ; et, après vingt-quatre heures, y occasionne un précipité blanc. L’acide nitrique n’a pas précipité de suite, mais après vingt-quatre heures de repos. L’acide muriatique oxygéné, qu’on fait passer à tra- vers le suc blanc, y forme un précipité blanc très-abon- dant. Ce précipité se dépose quelque temps après, et la liqueur qui surnage devient limpide comme l’eau. Ce précipité, séparé par le filtre et desséché, est blanc comme la plus belle fécule, et se conserve sans alté- ration. EPP DE B BE" 8 IQ UE.” 292 Le même acide, qu’on fait passer à travers le suc ex- primé par la presse , y forme pareillement un précipité ; mais ce précipité est verdâtre. Il devient d’un beau rouge orangé par l’exsiccation. Les arts pourront s’en emparer comme d’une couleur fort agréable. L'eau qui surnage ce précipité reste jaune. La potasse et la soude , mêlées au suc blanc, forment un précipité qui ne paroît qu'après un repos de vingt- quatre heures. L’ammoniaque seule, mêlée à ce suc, n’en altère ni la couleur ni la transparence : le mêlange reste toujours laiteux. L’alcohol forme aussi un précipité dans ce suc. Lors- qu’on a séparé ce précipité, la liqueur qui reste, éva- porée, fournit une petite quantité d'extrait qui a la cou- leur et l’odeur de lPextrait d’opium. 1000 décigrammes de suc pur d’euphorbe donnent 343.75 de précipité, 20.83 d’extractif, et 635.42 d’eau pure. “ Le précipité qui se forme dans tous ces cas na paru mériter une attention particulière ; et comme je l’ai ob- tenu plus pur, plus abondant, etavec plus de facilité, par le moyen de l’acide muriatique oxygéné , c’est prin- cipalement sur celui-là que j’ai fait les expériences sui- vantes. Ce précipité n’est sensiblement attaqué ni par l’eau froide ni par l’eau chaude. Il se charbonne sur le feu en se gonflant. L’air n’altère ni sa consistance ni sa couleur. 292 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES J’ai disposé trois matras , dans chacun desquels j’ai mis 25 grammes de précipité d’euphorbe bien lavé. J’ai versé sur l’un 133 grammes d’alcohol pur, autant de potasse li- quide et concentrée sur le second, et pareille quantité d’ammoniaque sur le troisième. Après une digestion de quarante-huit heures, à une température de seize degrés, l’alcohol a paru opale; la potasse n’avoit pas changé de couleur, et l’ammoniaque avoit pris une couleur laiteuse. La consistance, le volume et la couleur des préci- pités ne paroïssoient pas sensiblement changés. J’ai exposé les trois bocaux à la chaleur du bain de sable : l’alcohol en a dissous la majeure partie ; l’ad- dition de l’eau rendoit la dissolution très-laiteuse. Le résidu insoluble a pesé 8:33 grammes ; le résidu, bouilli avec du nouvel alcohol, n’a pas éprouvé de diminution. Les alkalis ont paru n’y opérer aucun changement. Le résidu, insoluble dans lalcohol, avoit tous les caractères de la fibre. Le précipité du suc d’euphorbe est donc composé d’un tiers de fibre et de deux tiers de résine. Ces deux matières sont solubles dans l’eau, à l’aide de l’extractif. Le gaz oxygène, le calorique, les acides, les alkalis fixes, lalcohol, et. le seul repos, peuvent rompre cette combinaison et séparer ce précipité du principe extractif. Une des propriétés les plus remarquables du précipité du suc d’euphorbe, c’est de se combiner parfaitement avec les huiles, et de former avec elles une composition ET | DE PH Y!S 1 Q U E: 293 gluante et comme savonneuse, dont les propriétés mé- ritent toute notre attention. Pour former cette combinaison, on lave à l’eau bouil- lante le précipité d’euphorbe, et on le triture dans un mortier avec une huile fixe ; la combinaison se fait alors difficilement, et le composé s’épaissit avec peine : mais si on y ajoute de l’eau peu à peu, et qu’on soutienne toujours le broiement, le mêlange s’épaissit et devient pâteux en même temps qu’il devient très-blanc. L’eau : devient donc , dans ce cas, comme dans la fabrication du savon, un intermède d'union. La proportion d’eau n’est pas illimitée. La première qu’on emploie se mêle bien aisément; mais cette combinaison devient de plus en plus pénible, et il arrive un moment où le composé en est saturé , et refuse d’en admettre de nouvelle. Cette matière très-liée conserve toujours une consis- tance molle; elle se colore légèrement en jaune par le repos, et une portion de l’eau qui paroissoit parfaite- ment combinée, ressort en gouttelettes sur la surface. Ce précipité du suc d’euphorbe trouble et décompose, quoique lentement, une dissolution de savon. Le suc exprimé de l’euphorbe, contenant la fibre et Vextractif, ne forme point de combinaison pareille avec les huiles. L’infusion de noix de galle et la dissolution d’alun, employées à la place de l’eau pour faciliter la combi- naison du précipité de suc d’euphorbe avec Phuile, pro- duiseñt le même effet que ce liquide. J’appellerai dé- sormais cette combinaison de précipité et d’huile sayorz 294 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de fibre, quoique je sache qu’il est une grande diffé- rence entre les savons proprement dits et cette combi- naison. Cette combinaison, bouillie avec une décoction de garance, ne se dissout point, ne se sépare point, mais se colore en rouge orangé. Ce savon n’est soluble ni dans l’eau ni dans lal- cohol. Lorsqu'on l’agite dans la potasse, il s’y dissout en entier; et si, après quelque temps, la dissolution se trouble, on peut la rétablir par son mouvement. Tous les sucs analogues à celui de l’euphorbe, traités de la même manière, m’ont fourni, à peu de chose près , les mêmes résultats. Celui de chélidoine jaunit par le premier contact de Pair ; il s’épaissit bientôt , et devient orangé, puis brun. Ce suc se délaie bien difficilement dans l’eau, quand il a été frappé par l’air : alors ce liquide devient ver- dâtre et écumeux. L’acide muriatique oxygéné le rend d’un jaune citron ; le précipité qu’il y forme est couleur orangée : la liqueur qui surnage reste jaune. Après avoir éprouvé tous ces sucs, j'ai fait choix de quelques-uns qui provenoient de plantes de nature toute différente, pour les soumettre aux mêmes épreuves : le lait des semences dites émulsives, le suc des joubarbes et de quelques plantes herbacées, la décoction de quel- ques végétaux à tiges ligneuses, m'ont paru remplir mon objet, ; Le lait des graines émulsives, à travers lequel on fait ET DE PHYSIQUE. 295 passer l’acide muriatique oxygéné , laisse précipiter dans le moment une quantité considérable de grumeaux blancs qui se déposent au fond du vase. L’alcohol, les acides, forment un semblable précipité. Ce précipité, comme celui d’euphorbe, se dissout en partie dans l’alcohol, et le résidu insoluble a tous les caractères de la fibre. Ce précipité se combine plus facilement avec l’huile que celui d’euphorbe, et le composé qui en résulte se mêle plus difficilement avec l’eau. Le suc de joubarbe , extrait par l’eau, jaunit par Vac- tion de l’acide muriatique oxygéné , et il se sépare une substance légère qui monte à la surface de la liqueur, où elle forme une écume blanche , comme celle que pro- duit la silice lorsque l’acide fluorique l’abandonne en se dissolvant dans l’eau. Cette écume se comporte avec les huiles et les autres dissolvans, comme les précipités ci-dessus. Les sucs fermentés du sairfoin, du galéga, de la luzerne, devenus prodigieusemen®t visqueux et puans par la fermentation , jaunissent par l’acide muriatique oxygéné , et précipitent. Il n’est point de végétaux dont les sucs, soumis aux mêmes expériences, ne m’aient présenté des phéno- mènes analogues; la différence a toujours été dans la quantité plus ou moins considérable de précipité, et dans la promptitude plus ou moins grande avec laquelle on lobtient : mais ce qu’il importe bien d’observer, c’est que les sucs retirés par expression , et ceux extraits 296 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES par décoction, donnent des précipités qui n’ont plus les mêmes caractères, parce que le principe ligneux y reste noyé dans une quantité trop considérable d’extrait, dont il faut le débarrasser pour le rendre soluble dans l'huile. Une seconde observation dont les conséquences sont directement applicables aux phénomènes de la végéta- tion, c’est que les graines sont ceux des produits végé- taux qui donnent le plus de précipité. La nature paroît y avoir accumulé la fibre ou carbone , pour assurer une nourriture facile aux premiers développemens de l’em- bryon végétal. Si à présent nous rapprochons ces résultats des phé- nomènes que nous présentent les humeurs essentielle- ment nutritives du corps humain, nous serons frappés de leur identité. Le lait se décompose par les mêmes réactifs, et nous offre un précipité qui a la même tex- ture que celui des végétaux. Ce précipité est pareille- ment insoluble dans l’eau; il se dissout dans l’huile, et contient égalemeñt un principe fibreux. La liqueur qui surnage est claire, limpide, et foiblement chargée d’un principe salin et extractif. Toute la différence con- siste dans la nature très-différente des élémens de ces compositions , qui fait qu’après cette première analyse les recherches plus délicates présentent des phénomènes qui n’ont plus aucun rapport entre eux. . Le sang nous présente encore plus à découvert cette analogie entre la texture animale et végétale. Ici la fibre se précipite par le seul refroidissement ; et lorsqu’on ET / D EU PH Y S'I Q U FE. 297 s’oppose à cette séparation par l'agitation de cette li- queur encore chaude, et qu’on fait ensuite passer à travers le gaz acide muriatique oxygéné, chaque bulle concrète ou solidifie tout ce qu’elle touche ; et la masse entière du liquide n’est bientôt qu’un amas de. bulles grisâtres, sans résidu de liqueur, parce que la fibre et l’albumine ont passé en entier à l’état concret. En rapprochant les divers phénomènes que présen- tent les expériences que nous avons rapportées, nous pouvons en déduire quelques conséquences qui pour- ront éclairer la pratique de la teinture végétale , et nous donner quelques principes sur la nutrition dans les ani- maux et les végétaux. Nous àvons vu, par tout ce qui précède , que la fibre ; précipitée des sucs végétaux, fournit, avec les huiles, une combinaison solide, insoluble dans l’eau, l’alco- hol , etc. ; ne peut-on pas déduire de ce fait la théorie de l’usage où l’on est dans les atteliers de teinture en coton ou en fil, d’imprégner d’huile les fibres végétales, pour les disposer à prendre une teinture solide? Nous avons encore observé que lorsque le suc est extrait par expression, le précipité qu’on forme dans ce cas west plus susceptible de se combiner avec l’huile. Cette observation'nous explique pourquoi le décreusage est une opération préliminaire et essentielle aux opéra- tions de la teinture en filet coton : car, par ce moyen, on met la fibre à nud, et on la présente, sans mélange et sans altération, à l’action des huiles qui se combi- nent avec elle; et il est de fait que les couleurs sont 1. 38 298 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d'autant plus solides et d'autant plus brillantes, que la fibre a été plus complètement dépouillée de toute ma- tière étrangère. Si à présent nous passons aux phénomènes de la nu- trition , nous verrons que nous pouvons les déduire tous des principes que nous avons déja posés. L’analyse végétale ne nous présente essentiellement que trois élémens : carbone, hydrogène et oxygène. Le nombre et la proportion entre ces principes établissent toutes les variétés, toutes les nuances, toutes les mo- difications que nous offrent les divers produits de la végétation. L’observation nous démontre que l’eau et le carbone sont les deux principes essentiellement nutritifs du vé- gétal : ainsi l'hydrogène et l’oxygène sont essentielle- ment formés par la décomposition de l’eau, tandis que le carbone provient de la décomposition des matières animales et végétales. L’analyse nous a encore convaincus que la fibre , dé- pouillée de toute matière étrangère , n’est presque qu’un agrégé de carbone. Mais de quelle manière le carbone est-il porté dans le corps de la plante? par quels moyens y circule-t-il? comment et par quels agens se dépôse-t-il pour con- courir à la nutrition? Voilà des problèmes dont la so- lution découle naturellement des principes ci-dessus. Tout le monde sait que le carbone pur, ou tel qu’il est employé dans nos foyers, mêlé avec une terre pure et sèche, ne peut pas nourrir une plante, et l’on sait BEN VD: E PIE WG 190 C-É. 299 également que lorsque les plantes «mortes sont’ décom- posées ä tel point, que leur tissu et: leur consistance en soient relâchés et amollis , les végétaux vivans èn pom- peñt tous les principes. Cette différence me paroît pro- venir de ce que, dans le dernier cas, le carbone resté toujours dissous dans le principé huileux, extractif, résineux ou alkalin; et l’eau, qui a la faculté de dis- soudre ou de délayer cés combinaisons naturelles , leur sert de véhicule pour les porter dans tout le système du végétal, où se complète le travail de la digestion et de la nutrition. , Nous avons vu que l’air, la chaleur, les acides et le seul repos, suffisent pour précipiter le carbone , de ma- nière que les agens qui doivent faciliter la concrétion de la fibre, et assurer par là l’accroissement et la nu- trition, se trouvent par-tout. Le principe de vie qui régit et anime chaque organe, répartit d’une manière convenable cette matière nutritive ; il modifie l’action des agens externes, et préside à toutes les opérations du laboratoire, vivant, à peu près comme le chymiste dirige les opérations de son attelier, et en modifie les résultats, en variant la forme et le nombre de ses réactifs. Ces principes généraux sur la nutrition une fois éta- blis , il est aisé de concevoir que l’hydrogène, le carbone ou l’oxygène, prédominent dans le végétal selon la na- ture du sol, l’exposition de la plante, la température du climat, et la proportion dans laquelle ces trois prin- cipes nutritifs lui seront présentés. 300 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 11 me paroît que, dans l’animal, la nutrition obéit aux mêmes principes. Ici la fibre est dissoute dans l’albumine gelatinée ; et l’air, le repos, les acides , sont également capables de la précipiter : ici ’albumine elle- même , qui forme un second principe nutritif très-abon- dant, se concrète par l’action de l'air, d’après l’opinion ingénieuse de Fourcroy; et peut-être l’air, qui pénètre tout le corps humain par plusieurs voies, est-il essen- ticllement destiné à précipiter et à solidifier la fibre et l’albumine. ET DE PHYSIQUE. 301 ———————.——"—_————""——"——"—".—"—"—""—"—"—"—"—"—"—"—""—"—"—." MÉMOIRE Sur les mouvemens des corps célestes autour de leurs centres de gravité, Par LaAPLACcE. Lu le premier pluviose an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 16 nivose an 5. Jr me propose de donner dans ce mémoire , une théorie complète des mouvemens des corps célestes autour de leurs centres de gravité. Le plus remarquable de tous ces mouvemens est celui de la Terre, d’où résulte la précession des équinoxes. C’est par la durée de la ro- tation de cette planète , que les àstronomes mesurent le temps; c’est à ses poles et à son équateur qu’ils rappor- tent la position des astres : il importe donc de connoître exactement leurs variations périodiques et séculaires. J’ai pensé que, malgré les profondes recherches des géo- mètres sur cet objet, il pouvoit être utile encore de le considérer de nouveau, en discutant avec un soin par- ticulier toutes ces variations. Je ne m’occupe ici des mouvemens des centres de gravité , que pour donner _une équation de condition assez remarquable qui a lieu dans ces mouvemens, et qui est un développement de 302 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES l'équation aux différences partielles, sur laquelle j’ai fondé ailleurs la théorie de la figure des planètes. Je passe ensuite à la considération des mouvemens d’un corps autour de son centre de gravité, et, peur cela, je fais usage des équations différentielles données par Euler dans le troisième volume de sa Méchanique ; elles me paroïssent être les plus commodes et les plus simples que l’on puisse employer dans cette recherche, Pour les intégrer, il faut en développer les différens termes, en distinguant ceux qui peuvent devenir sen- sibles par les intégrations. Cette discussion est la partie la plus délicate de cette théorie. Il en résulte que parmi les changemens périodiques de l’axe de la Terre, le seul sensible est celui qui dépend de la longitude des nœuds de l’orbe lunaire, et que l’on nomme 7ufation. Il existe encore, dans l’expression de l’inclinaison de cet axe à l’écliptique, une petite inégalité d’une seconde, à peu près, dans son #7aximum , et dont l’argument est le double de la longitude du Soleil. Quelques astro- nomes ont introduit une nouvelle équation d’environm deux secondes, et qui dépend de la longitude de Vapo- gée de l’orbe lunaire ; mais on verra par lanalyse sui- vante, que cette équation doit être rejetée. Les varia- tions séculaires de l’orbe terrestre en produisent de cor- respondantes dans la position de l’axe de la Terre , rap- portée à un plan fixe ; elles sont analogues à la nuta- tion produite par le mouvement de l’orbe lunaire, avec cette différence, que la période des mouvemens de lorbe terrestre , étant incomparablement plus grande que celle ET DE PHYSIQUE. 303 du mouvement des nœuds de la Lune, la nutation qui en résulte est beaucoup plus étendue. Le principal effet de cette nutation est de resserrer les limites des variations séculaires qui auroient lieu dans l’obliquité de l’écliptique sur l’équateur, et dans la durée de Pannée tropique, si la Terre étoit exactement sphérique. Il en résulte encore une petite altération dans la longueur du jour moyen; mais elle sera toujours insensible aux ob- servateurs : en sorte que l’on peut, sans craindre au- cune erreur sensible, regarder la durée du jour comme étant toujours la même, et s’en servir pour la me- sure du temps; résultat que je développe avec le détail qu’exige son importance dans l’astronomie. Les phénomènes du mouvement de l’axe de la Terre doivent répandre quelques lumières sur la figure de cette planète , puisqu'ils en dépendent ; mais, pour cela, il est nécessaire de considérer cette figure de la manière la plus générale, et c’est ce que j’ai fait dans les Mé- moires de l Académie des sciences pour l’année 1782. En combinant la théorie que j’ai présentée dans ces Mémoires , avec les formules du mouvement de l’axe terrestre, je trouve que l’on ne peut pas supposer la Terre homogène, ni son applatissement au-dessus de Foi» et que l’applatissements—, qui résulte des mesures du pendule, satisfait aux phénomènes de la précession et de la nutation : d’où il suit que les termes de l’ex- pression du rayon du sphéroïde terrestre , qui paroissent écarter sensiblement les degrés mesurés du méridien , de la figure elliptique , ont une influence beaucoup moindre 304 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES sur la grandeur de ce rayon et sur la variation de la pesanteur; en sorte que, dans le calcul des parallaxes, de la longueur du pendule et des mouvemens de l’axe de la Terre, on peut supposer à cette planète , une figure elliptique applatie de =. Ces recherches supposent la Terre entièrement solide, etl’on peut croire que la flui- dité de l’océan doit en changer les résultats. En sou- mettant à l’analyse , les effets de sa pression et de son attraction sur le sphéroïde qu’il recouvre, la considé- ration des équations de ses mouvemens me conduit di- rectement à ce théorème auquel je suis déja parvenu d’une manière indirecte dans les Mémoires de l Aca- démnie des sciences pour l’année 1777 ; savoir, que /a précession et la nutation sont exactement les mémes que si la mer formoit une masse solide avec la Terre. J’ose me flatter que cette analyse pourra mériter l’at- iention des géomètres. La théorie précédente des mouvemens de l’axe de la Terre s’étend, au moyen de légères modifications, aux mouvemens de l’axe de la Lune. Les belles recherches de Lagrange sur la libration de ce satellite ne laissent à desirer sur cet objet, que ce qui concerne les variations séculaires de ce phénomène. Je présente ici la théorie de ces variations, ainsi que quelques remarques sur la figure de la Lune. Enfin, en étendant la même analyse aux anneaux de Saturne , je fais voir que , malgré la diffé- rence des attractions qu’ils éprouvent de la part du Soleil et du dernier satellite de cette planète, l’action de Sa- turne les retient toujours, à très-peu près ; dans le plan Ets ! D E, ‘P,H Y:SI12Q UE, 305. e son équateur , s’il est doué d’un: mouvement rapide q ? p de rotation; résultat d’où j’avois conclu l'existence de l ; J ce mouvement, ainsi que la rotation des anneaux, avant que les observations eussent fait connoître ces mouve- mens divers. Xe Le mouvement d’un corps libre consiste dans le mou- vement de translation de son centre de gravité , et dans le changement de sa position autour de ce point. La recherche du mouvement du centre de gravité se réduit à déterminer le mouvement d’un point sollicité par des forces données; et, relativement aux corps célestes, ces forces sont le résultat des attractions de sphéroïdes dont la figure est supposée connue. Soit Zm une molécule d’un sphéroïde; x’, y’, z', les trois coordonnées ortho- gonales de cette molécule ; d m sera de la forme €. dx' dy! dz', € étant fonction de z', #'; 34 Soient encore z, y, z, les coordonnées d’un point attiré par le Sphéroïde ; si lon nomme 77 la somme de toutes les molécules du sphéroïde, divisées respectivement par leurs distances au point attiré, on aura ri €. dz'. dy. dx VC —z) + (y +2)? cette intégrale étant prise relativement à toute l’étendue du sphéroïde. Sés limites étant indépendantes dex,y,2, ainsi que les variables z', V'; 3', il est clair qu’en diffé- rentiant l’expression de 7, par rapport àx,y,z,ilsuf- fira ; dans cette différentiation, d’avoir égard au radical 1. 39 a | 306 MÉMOIRESIDE MATHÉMATIQUES que renferme cette expression, et alors il est facile de voir que l’on a dadv ddr ddV Ka) up) Can) la fonction 7” a l’avantage de donner, par sa différen- tiation, l'attraction du sphéroïde, parallèlement aux axes des æ, des y et des z. Ces attractions dirigées L vers l’origine des coordonnées, sont (= =) — ( 73 —(T AE ; en nommant donc d£ l’élément du temps, sup- posé constant, le mouvement du point attiré par le sphéroïde sera déterminé par les trois équations diffé- FRS __ddy dVA\ -),:- ddz d ; pote (ponte ( Considérons présentementune molécule dm’ d’un corps attiré par le sphéroïde, et représentons par x, y, z, les coordonnées de cette molécule, Sil’onnomme X, Y,Z, les coordonnées du centre de gravité du corps, et si Von fait x=X+r; y=Y+y';z2—=ZL +3; en sorte que x’, y", z', soient les coordonnées de la mo- lécule dn', rapportées à son centre de gravité; en les considérant comme indépendantes de X, Yet Z, on aura ()= (2): = (LE) ainsi les forces dont la molécule d m' sera animée pa- ET DE PH:Y SI QU E 307 rallélement aux axes des X, des Yet des Z, seront (2) -()-(@) Si l’on fait dm'— €". dx". dy". dz', et PAF. dr' dy dr, l'équation (1) donnera adV' ddV' dd V'\. o=( )+ +() + (52): C2) les sommes des forces relatives à toutes les molécules du corps, et parallèles aux axes des X, des Yet des Z, dy" {/dav' d V' seront — e =) Hi NT à et — (5); or, par les pro priétés connues du centre de gravité, ce point est mu, comme si, la masse du corps y étant réunie, toutes les forces dont chaque molécule est animée, lui étoient immédiatement appliquées : en nommant donc £ la masse du corps, on aura _- p2T. (4 dd Mens (x ne er) Changeons les coordonnées X, Y, Z, en d’autres plus commodes pour les astronomes. Nommons r le rayon mené du point attiré, à l’origine des coordonnées ; soit v angle que la projection de ce rayon sur le plan 308 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES des X'et des Y, fait avec l’axe des X,, et æ l’inclinaison de r sur le mème plan, on aura X/= r.\cos./æ. cos. vu. NAT AICOS.) GA SLILi OS Z '=T. sin. æ. L’équation (2) rapportée à ces nouvelles coordonnées devient dd” AN 2 dd dd one (HE) ar (2) + (0) (HE dr° dr sir. x .fd V. cos, m° Us à ee 4 (3). En faisant ensuite ddr du? d &° M TE COS: tres d N = dl r2 cos æ*; d£ d£ ddz , dw 2rdr.d= Par ee mr. COS, DH —; les équations différentielles (b) donneront les suivantes, A PA NL APN (Le ï (5) —E£. M; (T7) —E£. N; (75) — E, P; (c) Les valeurs de r, v et &, renferment six arbitraires in- troduites par les intégrations. Considérons trois quel- conques de ces arbitraires, a, b et c; on aura les trois équations suivantes : (2) (a) (+) (eye (2 (2) (6-52 (0-2) (= CE (2) (+62) (0-62) Eat) ET DE PHYSIQUE. 309 day ui oi tirera de ces équations la valeur de (< De JE et si F ne Aie) DRE ST Se Cas TS R ù se a le ke as ù. Î © —— TRE US a Le 0 à] TR à 1 l’on ne Tny(e Mb 2 (5) (er) (ee 4 uns r=(5) ee Ce E (Hem (HE) (E MEL AT ODENES PRPENANRENE PE 2e) Cr C2) (re): } (ar): 7e) (re): ) (5); aline ire 310 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES on aura dP d 1 da” — 70" dP ne Q dP? (4 z (5=)= dec Fr) +7. ( 2j —_—_—_—_—__—_—_—_—__—_——— ç L’équation (3), combinée avec les équations (c), don- nera ainsi d M dM O0 = M. 1° COS. m°. (5) 727". COS. m*. (C7 b dM + pr”. cos. æ. ( 3 € , [aN ,[aN Dan + (TT) (5) NP & 5) dP ; A7: ) +. cos. æ*. (T ’ ide + p. COS. æ. (5): (4) +6. [2r AL. cos. æ°—P. sin. æ.cos. æ] Si l’origine des coordonnées X, Y, Z , au lieu d’être supposée fixe, est rapportée à un centre variable dont X', Y', Z, soient les coordonnées, celles-ci étant in- dépendantes de #, Y, Z, les équations (b) auront encore lieu, pourvu que l’on y change Ÿ”dans '— EX. ddX' daY' ddZ —E. Y;=2—2#, Z: Ë d# dr FE et (3) subsisteront toujours après ce changement : l’é- quation (4) aura donc toujours lieu. Ce cas est celui du mouvement de la Lune autour de la Terre; l’origine des coordonnées X, Y, Z , est alors au centre de gra- vité de la Terre; le point attiré est le centre de gravité de la Lune, et le sphéroïde attirant est l’ensemble des sphéroïdes du Soleil et de la Terre. En effet, la théorie de ce mouvement revient À supposer une masse infini- mm. COS. m”. ( Les équations (2) ET DE PHYSIQU x. 317 ment petite à la Lune , en donnant à la Terre une masse égale à la somme des masses de la Terre et de la Lune. Dans ce cas, les valeurs de X”, Y”,Z ',sontindépendantes de X, Y, Z, comme on l’a supposé. L’équation (4) fournit, entre les inégalités de la parallaxe de la Lune et celles de son mouvement, tant en longitude qu’en latitude, une relation très- propre à vérifier ces inéga- lités, et même la loi de la pesanteur universelle. Dans ce cas, on peut prendre pour les trois constantes a becs les longitudes moyennes de la Lune, de son périgée et de ses nœuds, à une époque donnée. L’équation (4) peut servir encore à vérifier le calcul des perturbations d’une planète par l’action d’une autre planète dont on néglige les perturbations, ce qui est le cas ordinaire; mais je me propose de développer, dans une autre occasion, ces diverses applications de l'équation (4). Je reviens à l'objet principal de ce mé- moire , au mouvement des corps célestes autour de leurs centres de gravité. II. Supposons, pour fixer les idées, que le corps soit la Terre; nommons 90° — 0 l’inclinaison de l’axe de l’é- duateur sur un plan fixe, par exemple, sur celui de lécliptique à une époque donnée. Soit Ÿ la longitude de l’extrémité d’une droite invariable prise sur ce plan, et passant par le centre de gravité de la Terre, cette longitude étant comptée de l’équinoxe mobile du prin- temps; soit encore @ la distance angulaire à cet équi- 312 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES noxe, d’un axe principal pris dans le plan de l’équateur : il est clair que d4 sera la différentielle du mouvement rétrograde de l’équinoxe, et que do sera la différen- tielle du mouvement de rotation de la Terre, par rap- port au même équinoxe. Des trois variations différen- tielles dÀ, do et d8, il se compose un mouvement de rotation du corps autour d’un axe fixe pendant un ins- tant; et si l’on suppose de — d\.cos. 8— pdt; (c) d'A sin. 0. sin. ® — dô. cos. e —qdt; d\ sin. 0. cos. g + dû. sin. e = rdr; dt étant l’élément du temps, W p° + qg° + r’, sera la vitesse angulaire de rotation du corps autour de son axe instantané de rotation, et les quantités P g et : TR — TRES Vp+g+r Vp+g+r V+g+r seront les cosinus des angles que l’axe instantané de rotation forme , 1°. avec l’axe de l’équateur, que nous nommerons premier axe principal; 2°. avec le second axe principal, que nous venons de considérer dans le plan de l’équateur ; 3°. avec un troisième axe principal perpendiculaire aux deux premiers, et formant, avec l’équinoxe de printemps , un angle égal à 90° + @. Ces résultats sont démontrés dans plusieurs ouvrages, et spé- cialement dans la Méchanique analytique de Lagrange. Supposons que les trois axes principaux dont nous venons de parler, soient les trois axes principaux de rotation du corps; soient 4, B, C, les momens d'inertie ET DE BH wY6 E'oQ ur 313 du corps relativement à ces axes. Nommons x’, y', z', les trois coordonnées d’une molécule dm du corps, rapportées à ces axes , et P, Q, R, les forces dont elle est animée parallèlement aux mêmes axes; si l’on fait S. dm.dt.[R y —Qz]—=anN; S.dm.di.[P 7 —Rz]=dN'; S. dm. dt. [Q z'—Py]=dN'; le signe intégral S se rapportant à la molécule dm", et devant s'étendre à la Terre entière; on aura TCB dN dp+(—>). rq En dg+(==) Roses (D) dr+().padi=T Ces trois équations , remarquables par leur simpli- cité, ont été données par Euler, dans le troisième vo- lume de sa Méchanique ; combinées avec les équations (c), elles me paroïssent offrir la détermination la plus générale et la plus simple que l’on puisse donner des mouvemens des corps célestes autour de leurs centres de gravité. ŒUTUE: Considérons d’abord les momens d’inertie 4, B, C; soit À le rayon mené du centre de gravité de la Terre à la 1, 40 | 314 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES molécule dm; soit » le cosinus de d’angle que R forme avec le premier axe principal ; soit encore & l’angle que forme le plan qui passe par le rayon R ét par le premier axe principal, avec le plan qui passe par le premier et par le second axe principal. A. MORTE 7e sera la distance de la molécule au premier axe princi- pal; R.V'1—(1 —#). cos. æ° sera sa distance au second axe principal, et R. W 1 —(1—""). sin. æ° sera sa distance au troisième axe principal. Ainsi le moment d'inertie d’un corps, relativement à un de ses axes, étant la somme des produits de chaque molécule du corps, par le carré de sa distance à cet axe, et A, B, C, étant les momens d'inertie de la Terre, par rapport au premier, au second et au troisième axe prin- cipal, on aura AS. R° dm.(1 —w); B=S.R? dm.[1—(1— x"). cos.æ°]; CS. R° dm. [1 —(1— 4°). sin. æ°]; les intégrales devant s’étendre à la masse entière de la Terre. Maintenant on a dm = kR° dR. du. dœ; si l’on observe ensuite que les intégrales doivent être prises depuis À —o, jusqu’à la valeur'de À à la sur- face de la Terre, valeur que nous désignerons par À; depuis # —— 1 jusqu’à & — 1, et depuis æ — 0 jus- De < ET DE PHYSIQU +. 315 qu'àæ=7, 7 étant le rapport de la demi-circonférence au rayon, On aura AE SR. du. dæ.(1—x); B—;.S R'. du. de. [1—(1—%"). cos. æ |; C=—;SR'*. du. daæ.[1i—(1—). sin. æ°]. Rappelons présentement un théorème remarquable sur les fonctions rationelles etentièresde «, Vin. sin. Ty etV1i—"".cos.æ. Y étant une pareille fonction de l’ordre i, assujettie à l’équation aux différences partielles d'yù ddy® PTE Cr), (+). Y?; et U( étant une pareille fonction de l’ordre Z’, assu- jettie à l’équation aux différences partielles fa Gun). En}. se) « 0—| Le +1". (+1). 0; 1 — pe on a généralement , lorsque les deux nombres z et £’sont différens, S. YÉ). U®). du. de — 0: ; (E) les intégrales étant prises dans les limites précédentes. Cela posé, concevons R° développé dans une série de fonctions semblables, en sorte que l’on ait R9 = UN LUN EU E VO E DA + etc. ; 316 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES . 2 . la fonction 1 — #° est égale à +5 —#; la partie £ de cette fonction, et généralement toutes les quantités indé- pendantes de wetdeæ, sont de la forme Y° ; la partie 5 —# est de la forme Y), puisqu’elle satisfait à l’équa- tion aux différences partielles fe CE) CE dt 1H on aura donc, en vertu de l’équation (E) AE S. du dæ. [5 Ut) + 2) ur | On a pareillement 1— (1— mu). cos. mi +|i—( —uh). cos. æ |; 2 3 cos. æ* est de la forme Y*; on aura donc Be S.du.dæ. LU +5 —G—um).cos.æ" | Dr}. la fonction -est de la forme Yet la fonction 3—G —uu). On trouvera de la mème manière CESSE: du.dæ. EU + —G—w).sin.m* | UE partant Ar. U9+E SU). du.de. —# |; EE F. UI+E.S. U”). du. da. Een (1— mu). cos.æ* |; CT. Do SU), du. de. [i—G—ue).sin. a | BT, DE, PH YAS,T (QU €. 317 Si la fonction U? disparoît de l’expression de A‘, on a 4—B — C; or on sait que les trois momens d'inertie 4, B, C, étant égaux par rapport aux trois axes principaux, ils le sont relativement à tous les axes du corps, qui deviennent alors des axes principaux : la sphère n’est donc pas le seul corps qui jouisse de cette propriété. L’analyse précédente donne l’équation géné- rale de tous les corps auxquels elle appartient. La Terre étant supposée formée d’une infinité de cou- ches variables du centre à la surface, le rayon À d’une quelconque de ces couches peut toujours être exprimé ainsi , R=a+aa.[Y® + Ye Eye, ER F# + , etc. ]; æ étant un très-petit coefficient constant, et Y\), Yw), Y, etc. , étant des fonctions de la nature de celles dont nous venons de parler, et qui peuvent de plus renfermer a d’une manière quelconque. En négligeant les quan- tités de l’ordre +°, on aura Ro + 5405. BASE R GO 6) +, etc. ]; partant, si l’on conçoit un solide homogène, d’une densité représentée par l’unité, et dont le rayon de la surface soit celui de la couche dont il s’agit; on aura, relativement À ce solide, ; 8 x. a° A _ a. S.a°, YE), du. de. Lie]: 8 7. a° REA 1 Pre or —+a. 8. a°. YÙ), du. de. 3 —(1——ww).cos. w |; ne C—= 8x. a? 10) : & te. Sa, PO), du, de. | (1 u).sin.æ | ' 2 318 MÉMOorRESs DE MATHÉMATIQUES En différenciant ces valeurs par rapport à a, eten les multipliant ensuite par la densité de la couche dont le rayon est À, densité que nous désignerons par p, p étant une fonction quelconque de a; on aura les mo- mens d'inertie de cette couche; et, pour avoir ceux de la Terre entière , il suffira d’intégrer les momens de la couche, par rapport à a, depuis a — 0, jusqu’à la va leur de à, relative à la surface de la Terre, valeur que nous désignerons par l’unité. On aura ainsi, Are 8: p. d. & + à. 8. p. d (a Y®). du. do. = Ne 5 x Facnel Dee S.p. dd + a.S.p.d(æ Y®). du: de, [i—G—#). cos. æ |; CE Ês Sp. d + a. Sp. d(à Y®). du. dæ: [i—G—%#). SEL. æ |; la différence d. (a° Y*) étant uniquement relative à la variable a. T1 résulte de ce que j’ai démontré dans les Mémoires cités de l'Académie des sciences pour l’année 1782 , que si l’on nomme « @ le rapport de la force centrifuge à la pesanteur à l’équateur; on a, par la condition de équilibre des fluides répandus sur la surface de la Terre, S. p. d (a PP) [uote (NT S.p. d. à la valeur de YŸ), dans le second membre de cette we ET DE PE Y S1Q U € | 319 équation, étant relative à la surface de la Terre, et les intégrales étant prises depuis a—o, jusqu’à a — 1 ;on aura par conséquent , Les S.p.d. à — T0. S.p. d. + es Y). du. d=., ( ;—x").S. A D D 8x 4ar 6 5 $ 2 pe S. p. d. gps: p.d.a MATE TS Y®). du. dæ. Liu Lu): cos. a | S. p. d. a; de / La à 5x 2 C=<. S.p.d. DH, 9. 8. pe d. + S.Y®. du. de. EXC — hu). Sin. a | S. p. d. aÿ. La fonction Y” est de cette forme HT, [5 —w#]+7 eV Re, sin + Hu. V — . COS. @ + H", (1 — pe). sin. 2@ + Hi —k). cos. 2@; et j'ai fait voir, dans les Mémoires de l Académie des sciences pour l’année 1783, que la considération des axes principaux de rotation rend nulles les constantes H', H', H"; en sorte que la fonction Y se réduit à H. (5 4) + Hi, (1m). cos. 2. Les variations dela pesanteur étant à très-peu près pro- portionnelles au carré du sinus de la latitude , la valeur # de H"' doit être très-petite; elle seroit nulle en effet, si 320 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES la Terre étoit un solide de révolution. Mais, pour plus de généralité , nous la conserverons dans ces recherches : nous aurons ainsi 87% 16 ! AE S. p. d. à SET a 7. [æ— 10] S. p. d. a LE 8x 5 8 À 1 B—= Sp. da — ar [H—]o)]S.p. de 8 Free RS. PL. 0° 8% 8 1 C=—S. pdd—;aer|H—'e) S. p. d. a 15 Bu (7 HT HS. p. d. à LAN: ; aN dN' Considérons présentement les valeurs de Sn mn dt. ==. qui entrent dans les équations différentielles (D) de l’article IT. Soit Z la masse d’un astre qui agit sur la Terre; x, y, z, les coordonnées de son centre, rap- portées au centre de gravité de la Terre et à ses trois axes principaux ; soit r'— V zx° +. y" + 2°, et nommons z', y’, z', les coordonnées d’une molécule dm du sphé- roïde terrestre; supposons enfin V—=—L.[rx+7yy +27] ca L a —Ù— —. A V'—x) + (y —7) +2 Les forces attractives de ZL sur la molécule 4», dé- composées parallèlement aux axes des x, des yet des z, en sens opposé à leur origine , et diminuées des ET DE PHYSI QU €. 30% mêmes forces attractives sur le centre de gravité de la Terre; que-nous considérons ici comme immobile, se- C44 dr C4 ront , 1 = (TE 5 ) Ces trois forces sont celles dx dy d 7 que nous avons désignées par P, Q, R, dans l’article II, On aura és | = S. dm. EZ me CAE ms dm. Ps" Œ F) ee Gr) = S. dm. [a (5) ar )] Si l’on observe ensuite que l’on a C4 z (7, 2) ()= 5. (2) - on aura ee S. dm. Cz. (TE) Er A dm. JE (E )—2 (27) 5 = am. [ (99) Les coordonnées x’, y', z', étant tr ès-petites relative- ment à la distance r’ de l’astre L, au centre de gravité de la Terre ; on peut dév:lopper 7 dans une suite fort convergente ee par rapport aux puissances réci- proques de 7’; on aura ainsi, à fort peu près, dN LM ME ! / AT rar = S dm. (xx +yy +zz). (zy —yz!); 3:Z > — 75. S. dm. (xx + yy +zz).(xz'— zx); aN° 3Z (4 (4 1 IN 4 st S. dm. (xx +yy +23) (yz —xy"), 1. ù A1 322 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Or on a, par la nature des axes principaux de rotation, S. dm.(x* +7") —=C; S.dm.(x®+ 2°) =8B; S. dm. (y° + 2°) =AÀ; Sx'y'.dm—=o; Sx'z'. dm—o; Sy'zm=6$ on aura ainsi - aN 3Z Fm LÀ (C—B). y z; aN' 3Z le 5 (A Cha 2; adN"” 3 L x = 5e (B—A).xy: les équations (D) deviendront conséquemment CE SAUCE Z ap+(=) rq. di. ( . )> 26 A— C 3L fA4—C da+( à Krp.drs 5 NÉ (F) à B— A 32 /B—A dr +( = pag dE. (=) zÿs Les équations (F) supposent que r’ est fort grand par rapport au rayon du sphéroïde terrestre, ce qui est vrai relativement au Soleil et à la Lune; mais il est remar- quable qu’elles seroient encore fort approchées, dans le cas où l’astre attirant étant fort près de la Terre, la figure de cette planète seroit elliptique. Pour le démon- trer, nous observerons que l’on a par Particle IT: REY EER: V'i—»°.cos. æ;z —R. Vin. sin.æ. Si l’on nomme y et À ce que deviennent, par rapport ET DE PHYSIQU +. 353 à l’astre Z, les quantités # et @, relatives À la molé. cule dm du sphéroïde terrestre ,-on aura Dr; JT. —#. cos. à; ar. W 1 Ye sir. 2, i l’on substitue ces valeurs dans la fonction 1, et qu’ensuite on la développe par rapport aux puissances R de —, on aura une série de cette forme T - L LR: 13 7 À DORE, US +, etc. ; T et il est facile de s'assurer que U®, U5), etc. , sont des lonctions telles , que l’on a Ené leu D (1— nn). DC JDA EE) (21). Vo, OST NOR NE 14H Reprenons maintenant l'équation as. de Les) (ls EMEA Am fra 2. (27) : dr 2% * dy ET (= us LEP Re Aer s.(7)] Les différences partielles du second membre de cette équation étant prises par rapport à des variables indé- dy CA IS — etc. / 324 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pendantes de x et de 3 si l’on désigne généralement | ; d U® d UO par U' la fonction z. (7) —Y. (57), on aura o=[d.(—u). (0) sen (° a+ + (5) +. G+a): D; en sorte que la fonction U'® est de la même nature que les fonctions Y et UŸ ; l’expression précédente aN . is . de — deviendra ainsi, en vertu de l’équation (E) de l’article précédent, en substituant pour dm, sa valeur R°.dR. du. d'æ, et pour À, sa valeur a+ & a. (Y + YŸ + etc.), adN a TS. p. d(a Ye). du. de. | k =) (5 FM +. S.p. .d( F5). du de. | (5) y (TS | + etc; LU les différentielles d. (a Y(), d. (@ Y®), etc., étant relatives à la variable a. Or j’ai démontré, dans les Mémoires de l Académie des sciences pour l’année 1782, que l’on a généralement , par la condition de lé- quilibre des fluides qui recouvrent la Terre, et lorsque À surpasse 2, Sp. d. (at, YO) = EYE, Sp. d. a3 EU Ê 2 les intégrales étant prises depuis a = 0, jusqu'à &—1, ds EAP: DE PHYSIQUE. 325 ét Y\) étant relatif à la surface de la Terre; on aura donc Sp. da Y®). du.de| z (° nn) (< —) } D 25.5 yo galet (nier Si la figure de la surface de la Terre est celle d’un 3 2 À dN ellipsoïde, Y%) est nul, et alors l’expression de Se réduit à son PL , non seulement à cause de la grandeur de 7’, mais parce que les valeurs de Y5), Y#, etc. sont nes. Or, quoique la figure clliptique ne A Un pas exactement aux degrés mesurés des méridiens, cependant l’accord des variations de la pe- santeur avec cette figure indique que Y®, Y®, etc. sont très-peu considérables par rapport à Y*. On peut donc calculer les mouvemens de l’axe de la Terre, en lui supposant une figure elliptique, sans craindre au- cune erreur. V. Rapportons maintenant les coordonnées de l’astre Z à un plan fixe que nous supposerons être celui de lé- cliptique à une époque donnée. Soient X, Y, Z, ces zouvelles coordonnées , l’axe des X étant la ligne menée du centre de la Terre à l’équinoxe du printemps , Vaxe des Y étant la ligne menée du même centre au premier point du Cancer, et la ligne des Z étant la 326 MÉMOIRES DÉ MATHÉMATIQUES ligne menée de ce même centre au pole boréal de l’écliptique. On aura ] x Y.sin. 64 Z.cos.8; y=X.cos.p#+ Ÿ.cos. 0. sin. — Z. sin. 0. sin.®; 2=Y.cos.l.cos.@— Z. sin. 8. cos. ® — X.sin.@. Les équations différentielles (F) de l’article précédent deviendront ainsi, SR aAt(C =) C—B dp+(—=). T'ON —E di à (Y®. cos. l + 2°. sin. P— XX? 2 YZ. sin. 8 cos. 8) + cos. 2 @. (X Y. cos. 6. — X 2; sin, 0)} ‘ A— C SEE: — dg + >) Tr p. PRE EE er À { cos. ®. [(3? —2Z*). sin. 8. cos. 0+ YZ. (cos. &. ; (G) —sin, 0 )]—sir.@. (XY. sin. O+XZ. cos. 0)} dr + er q: DRE (CE sin. 0 + XZ. cos. 0) + sin. @. [(X°?—Z*). sin. 0. cos. 8 + YZ. (cos. 8° — sir. 0°)] } î {sin.2®. . { cos. +. WE Intégrons . présentement ces équations. Si les deux momens d'inertie B et C étoient égaux, ce qui auroit lieu dans le cas où la Terre seroit un sphéroïde de révolution, la première des équations (G) donneroit d'p = o;, et par conséquent p = 7, # étant une HT D} Er CRM Y G I0@ Ur 327 constante. Lorsqu'il y a une petite différence entre ces momens d'inertie, la valeur de p renferme des inéga- lités périodiques ; mais elles sont insensibles. Enceffet, dJ’axe instantané de rotation s’éloignant toujours très- peu du premier axe principal, get r sont de très-pe- tites quantités , et l’on peut, sans erreur sensible, bb ne négliger le terme 3 équations (G). Le second membre de la même équation se développe en sinus et cosinus d’angles croissans avec =). rg dt de la première des rapidité , puisque ses termes sont multipliés par le sinus et le cosinus de 29; ces termes doivent donc être en- core insensibles après les intégrations. On peut ainsi supposer , dans les deux dernières des équations (G), p =, n étant la vitesse moyenne angulaire de la ro- tation de la Terre autour de son premier axe principal. Mais comme la discussion de la valeur de p est très- importante à cause de son influence sur la durée du jour, nous reviendrons sur cet objet , après avoir déter- miné les valeurs de g et de r. Faisons, pour abréger, —. L(X°—2Z?).sin.0.cos.04+YZ.(cos.8°.—sin.8")]—?; ee (XY. sin. 8+ XZ.cos.8)—= P'; les deux dernières des équations (G) deviendront D RAR ur. nu =( re =). de. (P.cos.®—P". sin.@); dr (= )ng: dr (TT). dr (P'.008.0-+P.sin.6). 328 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES P et P' peuvent être développés en sinus et cosinus d’angles croissans proportionnellement au temps ; soit Æ. cos. (it +e), un terme quelconque de P, et #’. sin (ir+e), le terme correspondant de P'; on aura, en m’ayant égard qu’à ces termes, dg+() nr, de=(S) dé, [(AH£").cos.(o+it+e) +(Æ—Æ). cos. (p—it—+)]; dr + =) rg. EN di. [(AHA") sir. (otre) + (£— A"). sin. (p—it—:)] Pour intégrer ces équations, supposons q= M. sin.(o+it+e)+N. sin. (p—it—+); r=MW.cos.(g+it+e)+N'.cos.(o—it—cé); nous aurons , en observant que dy est à très-peu près égal à z dt, M=(——). (4—C). [. (B+C—A)+ic] (AHD. CB REED) (C4) M=(——). (4—B).[r. (B+C—A)+iBT (Ga+i). CB—7. (B—AÀ). Heu 2) k—k' N =(— } LATE D CR) —C| =(T) (A8). Er. (B+C—A4)—iB] (AZ Cite, (BA) (CA) HT DE PH YSI QU 2. O9 D, Le) On a, par l’article IT, dÔ=7r dr. sin. ®— q dé. cos. y; on aura donc = N+N — # —). Sin. (29+it+ DH— —)Lsin.(2e 58) M— M } PRAUE SEE Nous pouvons négliger les deux premiers termes de : de . ; . « cette expression de 7, parce qu’ils sont insensibles en AA eux-mêmes à cause du facteur - qui les multi- plie, et que d’ailleurs ils n’augmentent point par Vintégra- tion. Il n’en est pas ainsi du troisième terme que l’inté- gration peut rendre sensible, si Z est fort petit; dans ce cas, on peut négliger À one ns à 2, et l’on a, à fort peu près, — =). K!. sin, (ie). D'ETEE R 27 À “ On a encore par l’article IT, d'Y. sin. 0 —=rdt. cos. @ + q dé. sin. ®; ce qui donne d ( NN —. SL 0 — dé } cos. (2 D+it+e) + M+MÆEN+EN' 2 M—IM COS. (2®—26— 6) +( ):cos. (te); et en supposant z très-petit, on aura; à, très-peu, près; d . A—B—0C ge She PT), & cos. (ie). 1, 42 330 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Si l’on désigne par £. Æ£. cos. (it e),la somme des termes dans lesquels Ppeut se développer ,etpar x. k' sir. (ir+e), la somme des termes dans lesquels P' peut se développer ; = étant la caractéristique des intégrales finies; on aura RE = (RS .3. À, sin. (it+e) (Arte ; (CH) dd . fre dé uns }=.Æ cos. (it 6e) En intégrant ces équations sans égard aux constantes arbitraires, on aura les parties de Ü et de Y qui dépen- dent de l’action de l’astre Z. Pour avoir les valeurs complètes de ces variables, il faut leur ajouter les quan- tités qui dépendent de Pétat initial du mouvement. En n'ayant égard qu’à cet état, les équations (F) de l’ar- ticle IV deviennent dg+( B )erdt= 0; dr+( — À = } RGAE=IOE d’où l’on tire en intégrant, g— G: Sin. (AËHE) F2 G. cos. (Aar+6); ‘G et 6 étant deux constantes arbitraires , et À étant égal à pe 4 (B— A). (C— 4) BC Si l’on substitue pour g et r ces valeurs dans l'équation de : Ze 7 SIT, ® — g. cos. Q; ET DE PHYSIQUE. 351 on aura, après avoir intégré, n. (C—A4)—2B Sn Gen Gui (6 HE MÉHE) 1= A+ AaB+n.(C— 4) an. Csin.(p—Ant—6€); h étant une nouvelle arbitraire. Si la valeur de G ctoit sensible, on le reconnoîtroit par les variations journa- lières de la hauteur du pole; et puisque les observa- tions les plus précises n’y font remarquer aucune va- riation de ce genre, il en résulte que Gest insensible, et qu’ainsi l’on peut négliger les parties de 8 et de +, qui dépendent de l’état initial du mouvement de la Terre. VUE. Reprenons maintenant les équations (H) de l’article précédent. La première donne en l’intégrant, et en ob- servant que =. Æ'. sin. (it) est le développement de la fonction P, ? B+C—2A = A+ TE ).JP'ar. Les seuls asires qui influent d’une manière sensible sur les mouvemens de l’axe de la Terre, sont le Soleil et la Lune. Considérons d’abord l’action du Soleil. Soit v la longitude de cet astre, comptée sur son or- bite, de l’équinoxe mobile du printemps ; soit encore > 332 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES l’inclinaison de l’orbite sur le plan fixe, et A la longi- tude de son nœud ascendant; on aura 2 À 2 Ve (cos. 2) -COSs.v +7", (sin. 2) . COS. (u— 22); 2 2 | Na Re ET y \? , ! . y\2 H Y=7r'.{cos.=).sin.u—r'.| sin. =). sin. (u—2A); 2 2 Z=rT. sin. y. sin. (v—A). D'où l’on tire TA 4 ? r°.sin.? : XY= LE ( cos. ? |. sin. 20 + DRE. sin. 2 À Tr? . y \4 ; Creer D SE . . U — : : ( Sin 1) sir. (2 AUANS 72 72 XZ = —sin.y. (cos. 2) Sin. (2 va) —T. Si71. 27. SL1. À 72 y À + = sin.7. (sin. ‘sin. (ou—3 A). On a, par la théorie du mouvement elliptique, r' du—2a mdr. Vue; mn £ étant le moyen mouvement du Soleil, & étant sa moyenne distance à la Terre, et e étant l’excentricité de son orbite ; on a de plus | 1+e. cos. (u—r) £ T Ë 1 —e? ? T étant la longitude de l’apogée solaire ; on aura donc relativement au Soleil, 3» P'at= Te (XY. sin.0+ XZ: cos.0) 2 mé É +e. Last se éd 0 } 5 T 91 : (ire) EÛT (DE PH VIS ro ur. 333 P 4 XY XZ Si l’on substitue pour CT EE leurs valeurs précé- dentes env, on verra d’abord, après avoir développé P'd£en sinus de l'angle v et de ses multiples, que les termes dépendans de la longitude T de l’apogée solaire, renferment l’angle v, et qu’ainsi ils ne peuvent devenir sensibles par l'intégration. Il n’en est pas ainsi des termes dépendans de la longitude du nœud ; la fonction dv Ze : 3 : ; LE introduit dans P'd#, le terme — = SEL. 27. SIL, À; T et vu la lenteur des variations de > et de A , Ce terme peut devenir par l’intégration , très-sensible dans la va- ‘leur de 4; on aura ainsi, à très-peu près, en observant que 7 ete sont fort petits, et en ne conservant parmi les termes multipliés par .ces quantités, que ceux qui peuvent croître considérablement par les intégrations : 3 m2 JPdt=—* sin. 0. cos. au. cos. 0. [y dt. sin. A. La quantité sir. À. est le produit de l’inclinaison de l’orbe solaire , par le sinus de la longitude de sonnœud ; oron sait, par la théorie des inégalités séculaires du mouvement des planètes, que ce produit est égal à un nombre fini de termes de la forme c. sin. (ft+€) , C étant un petit coefficient, et f étant pareillement très-petit, en sorte -que langle f £ croît avec une extrême lenteur. Nous désignerons par &. c. sin. ( f£+- 6), la somme de tons Ces termes ; nous aurons ainsi, pour la partie def P'dr dépendante de l’action du Soleil , JPdi— — sir. 0, cos, à +. cos. à, 2,2: cos. (fi+E), 74 334 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Considérons présentement l’action de la Lune. En désignant par L’ sa masse, et par a’ sa moyenne dis- tance à la Terre; en nommant de plus, relativement à cet astre, v', m',l',e', A'et y, ce que nous avons nommé v, 1, 1,e, À et y, relativement au Soleil, et faisant : on trouvera , par l’analyse précédente, 31m D ira 3a.m° : SP'dt=— <<. sin. 8. cos. 20— TT. cos. 8. [y'dt. sin. A". 4m 2 , XY. . , La fonction —- introduit encore dans l’intégrale f P'. de le terme SRE , Lx ER sin. 0. [y°. dt. sin. 2 À!. Ce terme croît considérablement par l’intégration ; mais il est aisé de voir que, malgré cet accroissement, il reste encore insensible, En effet, son maximum est à celui du terme 3 à m°. cos. 4 . LRO PPRMRNE JV dE. sin. À 2 comme : y. tang. 0 est à l’unité; or on verra bientôt que le second de ces maxima est d'environ 10’ relati- vement à l’orbe lunaire rapporté à l’écliptique ; de plus, ’ 1 . A 7 est au-dessous de— : le premier maximum est donc 1 insensible. Les seuls termes sensibles que l’action de la Lune produit dans l'intégrale WCP' d £, et par conséquent ET DE PHYSIQUE. 335 dans la valeur de 8, sont donc ceux auxquels nous avonseu égard. Quelques astronomes ont introduit dans cette valeur une petite inégalité dépendante de la lon- gitude de l'apogée de l’orbe lunaire; mais on voit, par l'analyse précédente , que cette inégalité n’existe point. Le moyen mouvement de l’apogée lunaire étant à peu près double du mouvement des nœuds de la Lune, un terme dépendant de l’angle 2 A — T' pourroit de- venir sensible par l'intégration , quoique multiplié par e"y°; mais l’analyse précédente nous montre encore qu’il n’existe point de terme semblable dans l’inté- grale f P'd £. Pour évaluer la fonction fy d£. sin. A’, nous obser- verons que, dans tous les changemens qu’éprouve la po- sition de l’orbe solaire , l’inclinaison moyenne de l’orbe lunäire sur son plan reste toujours la même, ainsi que je l’ai fait voir ailleurs. Or, en supposañt la Lune mue sur le plan même de Porbe solaire , on a y —7,et A'—A4; on a donc, eu égard aux variations de l’orbe solaire, [y dé. sin. À = — 2.2. cos. (ft+ 6). Soit de plus c’ l’inclinaison moyenne de l’orbe de la Lune sur celui du Soleil, et — f' :— 6’ la longitude de son nœud ascendant sur cet orbe , comptée de l’équi- noxe mobile du printemps ; on aura, en vertu de cette inclinaison , : Jr dr, sin. => . cos, (f +6); 336 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES en réunissant donc ces deux termes, on aura , relative- ment à la Lune, [y dé. sin. =. cos. (f" +46") — 2.3. cos, (fe 6); et l’on aura par les actions réunies du Soleil et de la Lune, 9 (2A4—B—0C) ce OL A7 ! Ph +— SZIZ, 37 - (cos. AU te cos. 2v'} 3 m° (24— B—0C) c 7 08. 8. TT qe de. (EE AC (JE+6) 3 à. c'. m° (24— B—0C) ; y | APR cos. b, MR ETES 2e cos, Cr, 446), VIII. Déterminons présentement la valeur de #, et, pour cela , reprenons la seconde des équations (H) de l’article VI. En lui donnant cette forme, . é 24—B—C dy.sin (= CAPE, p, dt. 27 A on a, par l’article précédent, relativement au Soleil, ‘es 4 Page este .(1—cos.2v) , 2 2 TA . y \? Cu (sin. 2) .[cos.2A—cos.(2u0—24)] "= sin. y”. [1—cos.(2v—2A)]; T2. Sin. 2 y VAE n b I rt DES © . COS. À — —. SET. y. (cos. 2) .cOs. (2u—A) VIR + 73 Sin, y. (sin. ) 005. (zu—34), ET DE PHYSIQUE. 337 On aura donc, par l’analyse du même article, en négli- geant les carrés de e et de y, et les quantités qui nç deviennent point sensibles par l’intégration, Fe, = s 3 à E Jr Ho) dé. sir. 0. cos. d——— sin. 0. cos. 0. d. sin.au + 2 7 dt. cos. À. (cos. 8° — sin. 8”). > cos. A est le produit de l’inclinaison de l’orbe solaire par le cosinus de la longitude de son nœud, et l’on sait, par la théorie des inégalités séculaires du mouve- ment des planètes, que ?. sir. À étant représenté par 5. c. sin. (ft + 6), la fonction }. cos. À sera exprimée par >. c. cos. (ft +6). Il faudra donc substituer cette valeur, au lieu de y. cos. A, dans l’expression de P. On trouvera par la même analyse, et par celle de Particle précédent, que, relativement à la Lune, on a * DA RE 3 pr : Pd=—.sin. 8. cos. 1 — . sin. 0.cos.0. d. sin.2v" RNÉLEC (cos. 8— sin. 8).3. c.cos.(ft+6) ze . ii (cos. Q sin. &), Es Gfl + €); on aura par conséquent dy _ 3m (24—B—C) .(i +2). cos. 8 FER NTT A gi}: EE Eee CMPAHT (d. sin. aUHTE. d, sin. 2v') nr 2e eee) Gi +). a c. cos. (ft+6) ee 2e eo — TO, cl, cos. (f'E+- €). o PL 43 338 MÉMOTRES DE MATHÉMATIQUES Pour intégrer cette équation , nous observerons que la valeur de 4 n’est pas constante, et que ses variations séculaires deviennent, par l'intégration , sensibles dans « . d'Y le premier terme de cette expression de ——; or la seule partie de la valeur de 8 trouvée dans l’article précédent, qui puisse acquérir une valeur un peu grande par la suite des siècles, est celle-ci : 3 m° (24—B— 0) cos. À. ———<: (1+42).5. Cc F c’est donc la seule à laquelle il soit nécessaire d’avoir égard : ainsi, en faisant, pour abréger, — .cos. (ft+6); 4n° 3m° @A—B—C) à an 05. À. a or CE) D . . dy . le premier terme de l’expression de — deviendra, en négligeant les quantités de l’ordre c?, La 12 T1 est inutile d’avoir égard à la variabilité de 8 dans les autres termes de cette expression , qui donne, après l’a- voir intégrée, + P, rang. h. 3. -. cos. (J Er+ 6). Y— lt | (5 1) tang.h-keot.} | _ sin. (ft+6) u : LE Re OU E D R 271. (1 +2) 2m. (12) Zx (cos. RH — sin.) | . ñ PA ER RD sin. h. cos. À -c". sir, (f t+6); . Si, 2 UV! £ étant une constante arbitraire. Mr DE Pin TS T6 0%. 339 L’expression de 0 de l’article précédent peut être mise sous cette forme, Ta G+a).f" . u Ph 5. e. cos. ( ft+6) + UT À lang. k 21m. (1 à) c'.cos.(f'#+6) . (cos. 2u+T. À. COS. 20"). En réunissant ces valeurs de 4 et de 0 avec celle-ci P—; on aura tout ce qui est nécessaire pour déter- miner, à chaque instant, les mouvemens de la Terre autour de son centre de gravité. x, Les valeurs de Y.et de 8 sont relatives À un plan fixe; pour avoir ces valeurs par rapport à l’écliptique vraie, considérons le triangle sphérique formé par l’é- cliptique fixe, par l’écliptique vraie et par l’équateur. T1 est aisé de voir que la différence des deux arcs in- terceptés entre l’équateur et le nœud ascendant de l’orbe solaire, dans ce triangle, est à très-peu près égale au produit de cor. 8, par linclinaison de l’orbe solaire à Vécliptique fixe, ét par le sinus de la longitude de son nœud ; cette différence est donc égale à cos. 0. 3. c. sir. (ft 6) ; or si l’on nomme Y’ la distance de lin- tersection de l’écliptique vraie et de léquateur, à la droite invariable prise sur le plan fixe, et d’où l’on compte l'angle 4, on aura à très-peu près # — 4’ pour cette même différente; on aura donc F—Y'—6cor. 0.5. c.sin, (ft+€); 3fjo MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d’où l’on tire 1 N/1 j peer (1+5ang.h Gi). cot.h.c.sin.( ft+€) LE (cos. H— sin. I) ,:. ’ J RE Ha). f" sin. À. cos. À -c'esin.(f'1+6€) 4 b Zà ; = ——— , SIN, DU 5 ——— SLIL, 20". 2 71. (1 + À) 2m.(1+2) Si l’on nomme ensuite 0’ l’inclinaison de lécliptique vraie sur l’équateur, on trouvera facilement, en consi- dérant le triangle sphérique précédent, et en observant que 0’ — 0 est fort petit, 8 —0—3%, 0. cos. (fi+6); on aura par conséquent 4 — A +x. (1—°) c. cos. (ft+6) À ’ 2 2 Eng d- cos. (f'i+6) ltang. k 2 m1 G+aà) f— 1 La partie =. (Er de c. cos. (f t+ 6) de cette expres- sion exprime la variation séculaire de lobliquité de l’écliptique vraie sur l’équateur. Si la Terre étoit sphé- rique, il n’y auroit point de précession en vertu de lPac- tion du Soleil et de la Lune; on auroit ainsi /—=0,et la variation séculaire de l’obliquité de l’écliptique vraie seroit >. c. cos. (ft+ 6). On voit donc que l’action du Soleil et de la Lune sur le sphéroïde terrestre change considérablement les lois de cette variation , qui devien- droit mème presque nulle, sile mouvement de précession 7 ’ COS, 2U + ee À, COS, 20 |. r ET: DE PHY6SI: Qi kw DA dù à cette action étoit très-rapide relativement. au mou- vement de l’orbe solaire; car ce dernier mouvement dépend des angles (f—/).#, dont les coefficiens f—/ seroient irès-petits par rapport.à / et à f;en .sortejque (f—21) # que insensible. Dans les suppositions les plus vraisem- blables sur les masses des planètes , l’étendue entière de la variation de l’obliquité de Pécliptique est réduite, par Vaction du Soleil et de la Lune sur le sphéroïde ter- restre, à peu près au quart de la valeur qu’elle auroit la fonction &. -c..c08. ( ft +6) deviendroit pres: sans cette action; mais cette différence ne se manifeste qu'après deux ou trois siècles. Pour le faire voir, déve- (f— 1) F port aux puissances du temps; on aura, en ne:consi- dérant que sa première puissance, (Ga) f Si la Terre étoit exactement sphérique , les coefficiens J— l'resteroient les mêmes; la variation séculaire de VPobliquité de l’écliptique seroit donc encore la même dans les temps voisins de l'instant pris pour époque. La fonction x. Ke +2 zang. à) (Z— f). cot. k. loppons la fonction 3. c, cos: (f t+ 6), par rap- =: -.C. COS, 6—r. EX. (f— l). c. sin. €. . dy : ; c. cos. ( ft—€ ) | de l’expression de——, donne la dimitiu- tion séculaire de l’année moyenne, en réduisant cette fonction en temps, à raison de 3600 pour une année. La diminution qui auroit lieu par le seul mouvement 342 mÉmorñfs DE MATHÉMATIQUES de l’écliptique, où sans l’action du Soleil ét de la Lune sur le sphéroïde terrestre, seroit =. [(/—f). cor. z. c. cos: (ft 6)7. Cette action changé donc encore l’é- tendüe de ‘cette variation dans la longueur de Pannée, et.elle la réduit à peu près au quart de là valeur qu’elle auroit sans cette action. C’est ici le lieu de discuter les variations du jour que les astronomes nomment jour moyen. Le moyen mou- vement de la Terre dans son orbite est uniforme : si l’on conçoit sur cette orbite un second Soleil dont le mou- vement et l’époque soient les mêmes que le moyen mouvement et l’époque du moyen mouvement du vrai Soleil ; si l’on conçoit de plus, dans le plan de l’équa- teur, un troisième Soleil mu de manière qu’il coïncide avec le second Soleil, toutes les fois que celui-ci passe par l’équinoxe moyen du printemps, et que sa distance à cet équinoxe soit toujours égale à la longitude moyenne du Soleil; l'intervalle de deux retours consé- cutifs de ce troisième Soleil au méridien sera ce que l’on appelle jour moyen. Si le mouvement de l’équi- noxe sur l’écliptique vraie étoit uniforme, et si lincli- naison de cette écliptique sur l’équateur étoit constante, le troisième Soleil se mouvroit toujours uniformément sur l'équateur ; mais les variations séculaires du mou- vement des équinoxés et de l’obliquité de l’écliptique introduisent dans le mouvement de ce troisième Soleil, de petites inégalités séculaires que nous allons déter- miner. | La vitesse de rotation de la Terre peut être supposée PL SES Tolé Aro pm 3}8 constante et égale à 7, De plus > Son axe instantané de rotation ne s’écarte jamais du premier axe principal , que d’une quantité insensible. Soit donc # la vitesse du troisième Soleil que, nous imaginons mu dans le plan de l'équateur, et v sa distance à l’équinoxé du prin- temps rapporté à l’écliptique fixe: z, —.k sera la vis tesse du second axe principal relativement à ce Soleil, et l’on aura , vi dodo (z—k)'ar. Mais on a, par l’article IT, de—=ndi+ dy, cos. 06; on aura donc du—=kdi+ d'y, cos. 4. Soit v’ la distance du troisième Soleil à l’équinoxe réel, c’est-à-dire à l’intersection de Péquateur avec Vécliptique vraie ; il est aisé de voir, par ce qui précède, Z. c. sin. (fÉ+C) que v — v' est égal à , ce qui donne SZ71, A 7 ZE. c. f. cos. (ft+6) s27: 10 Partant 4 des Sa du =Rkdi+ dy, cos. 0 — dr. Enr f on CHÉSESS S37, 8 Soit & : le mouvement sidéral du second Soleil sur 344 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES p: dx bu 9 LR Li . à BA x à ! + Vécliptique vraie; g'4 = sera sa vitesse angulaire re- lativement à l’équinoxe réel; mais on a Ldw'_ dy EL = =, — Co. 8 =. cf cos. (ft+E); cette vitesse est donc égale à g+S — co. 8. =. cf. cos. (ft+ €). . dv Elle doit être égale à <=; on pourra donc, au moyen de cette égalité, déterminer #, et l’on aura Vars dy G—cos. t) €) k=g+(1—cos.0). +. 3. cf. cos, (f1+6). En substituant, pour d'# et 0, leurs ere précé- dentes, on aura Ag d(ycos.h).sin.h. x: ee cos (ft+6) + (1—0cos. nsT(57) tang. h + L, cot. ñ] c. cos. (ft + 6) dE So PAR re cos. (ft+ 6). sin. k - La partie constante de Æ est g + Z (1 — cos. À); ainsi, dans la rigueur, le jour moyen est formé par un quatrième Soleil mu constamment dans l’équateur avec la vitesse g + / (1 — cos. h); mais ce Soleil ne passeroit pas par l’équinoxe réel, en même temps que le second Soleil. En intégrant je termes variables de Pt (Det PE 8 11Q Ù E: 345 Vexpression de Æ; on aura pour, l’équation des jours moyens , | —53. +. sin. h. sin. (ft46) | prie cl u + (1 — cos. 2). x. 1e _— à). tang. Lo COLA à | c. sin. (fé+ 6)} .Z. ©. cos. (ft 6). 1— cos. k sën. le Cette équation réduite en temps à raison de 3600 pour un jour, ne s’élevant qu’à un petit nombre de minutes dans une période de plusieurs milliers de siè- cles, sa considération est entièrement inutile aux astro- nomes. X. La constance dans la durée des jours moyens dépend de l’uniformité du mouvement de rotation de la Terre autour de son premier axe principal, et de ce que V’axe instantané de rotation ne s’écarte jamais de ce premier axe, que d’une quantité insensible. Le sinus Var, or il est visible, par ce qui précède, que g et r sont in- sensibles, et qu’ils n’ont d’influence sensible sur les valeurs de 8 et de #, que parles intégrations : on peut donc toujours 7 NRC Vaxe instantané de rotation, avec le premier axe principal , et les poles de rotation de la Terre répondent toujours, à ReCrEE CE aux mêmes points de sa surface, “ 44 de Pangle formé par ces deux axes est égal à 346 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Il est aisé de voir que p étant égal à +. cos. 8, il exprime le mouvement de rotation de la Terre autour de son premier axe principal : il importe donc de s’as- surer que les variations de la valeur de p sont insen- sibles. Pour cela, nous observerons que si B — C, ce qui a lieu lorsque la Terre est un sphéroïde de révo- lution, la première des équations (F) de Particle IV donne d p —0o,et par conséquent p égal à une cons- tante z; maïs ces équations n’étant qu’approchées rela- tivement à l’action de l’astre Z, nous allons faire voir que l’équation p — z, a encore lieu en ayant égard à tous les termes dus à cette action. La première des équations (D) de Particle IT donne dpE= T ; on a de plus par l’article IV, san [2 (9) (0) supposons L dm — . VC — x} + y" + —2)? a en(s) 4) Si la Terre est un solide de révolution, # est le nous aurons mème , lorsque x et W J°+ 2° sont les mêmes : il est donc fonction de ces deux quantités, d’où il suit que AN Où Mi DE ES r0Q v:6. 347 = o ét par conséquent p — 7. Voilà donc un cas fort étendu , dans lequel le mouvement de rotation de la Terre autour de son premier axe principal est rigou- reusement uniforme. Considérons maintenant le cas général dans lequel les trois momens d’inertie 4, B, C, sont inégaux entre eux. La force vive de la Terre est égale à 4. p° + B. 9° + C.r° : on a donc, par le principe de la conservation des forces vives, A.p°+B.g + C. r°— constante +2 S f° He A dr +(T).a7 + F\.d2 lan; la caractéristique intégrale S étant relative à toutes les molécules de la Terre, et la caractéristique intégrale f se rapportant au temps £. Soit d # la variation de Y, en ne faisant varier que les quantités relatives au mou- vement de la Terre autour de son centre de gravité ; on aura A.p°+B.g + Cr =const.+28.fSF.dm; on a, à très-peu près, S.Vdm= +8. (22° 9" 3°) dm LUN, (27° — x" 8), dm — S. (27 — 2°). 2r EE 7° E 115 (23 2x — y"). dm; = ++ (B+C—34).2 EF + (CHA 2B). TE +(B-44—2 OL 348 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Si l’on substitue pour æ, y, z, leurs valeurs don- nées dans l’ärticle V, on aura l’expression de S. JF. dm, en ne faisant varier, par rapport à d\, que les quantités ®,"F et 0. On peut ici négliger dans S F dm, les termes dépendans de langle @ , parce qu’ils sont encore insen- sibles après les intégrations ; on peut négliger pareïlle- ment les termes dépendans du moyen mouvement de l’astre ZL : car soit £. sin. (mt+ 6+Y) un de ces termes ; il produira dans S. d'F. dm le terme d'y, dE, « cos. (mt+6+Y);et 7, Stant beaucoup moindre que m1, ce terme sera insensible dans les intégrations. Il suffit donc de conserver dans S. F dm, les termes qui ne sont assujettis qu’à des variations séculaires. On aura ‘ainsi SVdm= (24—B— C), [2—3 sin. 8° — 6 sin. 0. cos. 0.2. c. cos. (ft+6)]. Pour avoir S JF d m, il faut différencier cette expres- sion par rapport à et à 4 : oron a, par l’article VIIT, en ne considérant que les variations séculaires de 0, d'O—=3x./lcdr. sin. (ft+ 6). On a de plus £.c.cos.(ft+É)—=3.c.cos.[(f—7)1+ 11467. En différenciant cette fonction par rapport à # ou /#, on aura — /d'4. Sc. sin. (ft+ €) pour Sa différence. Ces valeurs étant substituées dans 8. d 77 dm, on aura, én ÆEUT. VD E PH SI QU E. 349 en négligeant le carré dec, SA F:dm—o, et par conséquent Ap° + B q + Cr = constante. Ainsi B g° + Cr° étant toujours insensible, p est tou- jours, à très-peu. près, constant. On parviendroit au même résultat, en considérant les équations (G) de l’ar- ticle V : il suffiroit de multiplier la première par 4 d He la seconde par B dgq, et la troisième par Cdr. En les ajoutant ensuite , et substituant dans le second membre de leur somme , au lieu de p, q, r, leurs valeurs don- nées dans l’article IT, on arriveroit à l’équation Apdp+Bgdg+Crdr—=o, et lon verroit de plus que l’on a séparément Bqdq+Crdr—=o, en ne considérant que les inégalités séculaires. Le mouvement, de rotation de la Terre-autour de son axe instantané de rotation, étant égal à 4 ane do nb ou à 4 | VApP+Bg +Cr+(A—B)g +(A—0C)r PA ee RS A EU IT tr on voit que ce mouvement est uniforme;:et que les variations séculaires de 0 et de n’y produisent aucun changement sensible. La rotation de la Terre peut donc être supposée-uni- forme , soit autour de son PFSgier axe principal, soit, 350 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES autour de son axe instantané de rotation; et, de plus, ces deux axes ne font jamais entre eux qu’un angle insensible. AIT: L'analyse précédente suppose la Terre entièrement solide : mais elle est recouverte, en grande partie, d’un fluide dont les oscillations peuvent influer sur les mou- vemens de l’axe terrestre ; il importe donc d’examiner cette influence, et de voir si les résultats que nous ve- nons de trouver, n’en sont point altérés. Pour cela, il faut déterminer ce que l’action de l’Océan sur le sphé- roïde qu’il recouvre, ajoute aux valeurs de N, N', N° de l’article IE. On a par cet article, NE À ; ; —=S(Ry —Q7z) dm; an ; , 0 D Aix: = S: (Pz'—Rzx). dm; dN" ’ ’ + = S.(Q x —P y} dm. Voyons quelles sont les quantités que l’action de l'Océan produit dans ces expressions. Ce fluide agit sur le sphéroïde terrestre par sa pression et par son attrac- tion : considérons séparément ces deux effets. Dans lPétat d'équilibre, la pression et l'attraction de l'Océan ne produisent aucun mouvement dans l’axe de’ rotation de la Terre ; il ne faut donc avoir égard qu’à l’action de la couche d’eau qui, par les attractions du à L. AE, DE PAYS TIQUE, | : 35% Soleil etde la Lune, se dispose sur la surface d’équi- libre qui termineroit l'Océan, sans ces attractions. Re- présentons par + y l'épaisseur de cette couche, et pre- nons pour unité de densité, celle de la mer, et pour unité de distance, le rayon moyen du sphéroïde ter- restre. Nous aurons ainsi à considérer l’action d’une couche aqueuse dont le rayon intérieur est 1, et dont le rayon extérieur est 1 + z y. Si l’on nomme g la pesanteur, la pression d’une colonne de cette couche sur le sphéroide qu’elle recouvre, sera le produit de æ g.y par la base de cette colonne. Soit r le rayon mené du centre de gravité de la Terre , au point de la surface du sphéroïde que cette co- lonne presse ; soit z le cosinus de l’angle que le rayon r forme avec l’axe de rotation, et & l’angle que le plan mené par cet axe et par r forme avec l’axe des y’; soit enfin \— o l’équation de la surface du sphéroïde que recouvre la mer, À’ étant une fonction des coordonnées æ', J', z', qui déterminent la position d’un point de cette surface ; on aura Eh à 77 VETr V1. cos. æ'ÿ gr Vi sin. ©. La base de la petite colonne que nous venons de considé- rer, peut être supposée égale à r° du. d'æ : la pression de cette colonne est donc # 87-1° du. d'æ. Cette pression est perpendiculaire à la surface du sphéroïde ; en. la 352 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES décomposant en trois forces parallèles aux axes des x', des y’ et des z', et supposées tendre à augmenter ces coordonnées , on aura pour ces forces __c8Jy-'dmdz (2): # © \ dx! agy.r du. da [dx \. 5 LP ( dy ) 0 ___ 489: du dæ (&); ve HAUTE P/N2 étant égal à | HELENE CERTES ) + + ) + ra =): L’équation à la surface du sphéroïde est de cette forme, x +y®+z —=i+2g, q étant une fonction très-petite de z’,.y', z', dont nous négligerons le carré; on a donc A = x" + y? + 2° — 1 — 2q; ce qui change les expressions des trois forces précé: dentes, dans celles-ci, aug y des de C ; CÆY]: à RE te ARE | 2agy.r du da [. ’ (52) F F4 d'y « 2agy.r du.da n dq Pre uns en li 0 D Tan À regle f d:z On aura ainsi, en n’ayant égard qu’à ces forces, AN Ç°esy dm de CE) 21. (ET: de nf dz dN' 2&gy.r du.da 2 dq d q A de Hana ttee L(0)-(20)) ex OS VObÉ 2 RÉ VS Tor HE Rapportons les différences partielles: (2), (5 md (5 so aux variables r, 4 et æ. Pour cela nous ‘observerons que Von a , dq ! dq ! h dgq | ' (a de +(5s ) d'y + LE DE d d = (SH) art) du + (5). de Or on a 2 z", r=V' a+ y +z";e—= = ANG. PE 5 d’où l’on tire z'dr'+y dy +z dr Ag === RER T MONTE PET 1 : ; CAE TO) der LR ER dr — z dy dm Er, SU vo + En substituant ces valeurs dans l'équation différentielle précédente en g, et comparant séparément les coefficiens de dx’, d'y" et dz', on aura (En Len nrer E 2); : SEL D d Je Vi um. cos. æ. Ge (52) BV IR. cos. # dq\. dr | E TL) Vu sin. we. (22 2) + Fra e dr T. Vin dx 2 Va — 2. SO AE tj9 ‘ * L T de LE one — 354 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES On aura ainsi, en observant que, dans les valeurs pré- cédentes de ZN, d'N', d N', on peut supposer r = 1 et f — 2, en négligeant le carré de gq, GENRE dg\, Re S. AY « du. dæ.(51); re ag y. dude[Vri x. sin. @. (2) + COS, æ É 2) E à — —————. (=) Vies dz an. S.agy. QE da[— RE (Vi. dé Ve da Ce cos. æ. (2) |: aN daN’ Déterminons. présentement les valeurs de =, —, aN”’ PR tive à l’attraction de la couche aqueuse sur le sphéroïde terrestre. Il est clair que si ce sphéroïde et l'Océan qui le recouvre, formoient une masse solide, äl n’y auroit aucun mouvement dans cette masse, en vertu de attraction de toutes ses parties. L’effet de l'attraction de la couche aqueuse sur la mer est donc balancé par celui de l’attraction du sphéroïde terrestre et de la mer sur cette couche; d’où il suit que leffet de Pattraction de la couche aqueuse est égal à la somme des effets de l’attraction de la T'erre entière sur la cou- che , et de l'attraction de la couche sur l'Océan , et que cet effet peut être exprimé par cette somme prise avec un signe contraire. La résultante de l’action de la Terre entière sur la petite colonne « y, du. d'æ de la couche aqueuse, et EÔT 4 DEL RE NS r0Q mie rt 3655 de la force centrifuge , est perpendiculaire à la surface d'équilibre de la mer. On aura donc l’action de la Terre entière sur cette colonne, en la concevant animée de cette résultante et de la force centrifuge prise avec un signe contraire. La première de ces deux forces est la pesanteur g, qui doit être multipliée par la masse a y. du. d'æ de la molécule. En supposant donc que l'équation de la surface d’équilibre de la mer soit Lg + y® +z®=1tHg!, i pré 1 ies de 7, on aura, par ce qui précède, pour les parties de 3 aN .aN' NET ti à cette force a; © 77 relatives à ; ë. agy.du.de. (2) : S.agy.du.deæ. [Vi raisin.e. (EE (2) E Vie da ge sin. = f{dq' fe 0m dg' S.agy.du.de. pe 75) Vi. cos... 22) | T1 faut, comme on vient de le dire, prendre ces quan- tités ayec un signe contraire; en les réunissant ainsi AN. dN'. dN" ME 2 ar À 77 et observant que g'— q exprime la profondeur de la mer, profon- deur que nous supposons très-petite, et que nous repré- senterons par 7, on aura aux valeurs précédentes de DS. gy. du. de. (y 356 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nr dilau Fm dy er S.agy. du. dr. [V3 hu. Sin. ©. (22) 4: COS: = É 2)] Vrai d'a ? uN" == Jy210 0. dé. dæ. [Vi 2 cos. æ.() ir CU, Il faut maintenant considérer l’effet de la force centri: d# fuge prise avec un signe contraire, et le retrancher de dN ‘4N' dN° dt? dt? dé ces valeurs leffet de la force centrifuge. Si l’on désigne par z, la vitesse de rotation de la Terre, la force cen- ces valeurs de , Ce qui revient à ajouter à trifuge de la petite colonne 47 dudæ sera 7°. Va #7 : en la multipliant par la masse de la colonne, on aura any. dudaæ.V 1—° pour la force entière. Cette force est dirigée suivant le rayon du parallèle : en la décompo- sant en deux, l’une parallèle aux y’, et l’autre parallèle aux z',onauraz#°. y dudeæ.W 1. cos. æ, pour la première, ete z° y. du. d@œ Éd Te æ, pour . : dN 4aN la seconde. i 7 onde. On aura donc pour les parties de été aN” LEE Ù et, relatives à la force centrifuge, dN de aN' D Tr = Sen y.du.de.. Vie. sin. æ ; — 0 ; dN” LIRE T- UE == San y.du,de,n. Vin cos.æ. ET DE PHYS1re UE: 357 Il nous reste à déterminer l’effet de l’action de la couche aqueuse sur l'Océan. Pour cela , représentons par æ U la somme des molécules de cette couche, divisées par leurs distances respectives à une molécule de l'Océan, déterminée, soit par les quantités r, # et æ, Li [2 1 fx à dU dU soit par les coordonnées 2", y z'; à. ee se ( et d k æ. (EE); seront les actions de la couche sur cette mo- Z lécule, ces actions tendant à augmenter les coordon- nées x’, y',3'. La masse de la molécule est 7°. dr. du. aN. dN' aN” dt? dt? dr de la couche aqueuse , seront donc S.ar°.dr.du.dæ. [> É Dé za CE S.ar.dr.du.dæ. [= (2) — 2". () j; S.ar.dr.du.dæ.| à! E) ne (}] Pour intégrer ces fonctions relativement à r, nous observerons que la profondeur de la mer étant supposée très-petite , on peut supposer ici Sr° dr — 7. Si de plus on change les différences partielles ee ), Fe) et (5) en d’autres relatives aux variables r, æ et «, les fonc- tions précédentes deviendront, en les prenant avec un signe contraire, dæ. Les parties de , relatives à l’action —S.ay.du.de. (=) ; 358 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES —S.xy.du.dæ. [Vie SIL. a. (Te 2) ee ($ RE pe Say. du. de. [Vire PORTE (4 A (7) } Vip Si l’on réunit ces valeurs aux expressions partielles de 2 2 dan GTR Ar A TES expressions entières de ces quantités , relatives à l’at- traction et à la pression de l’Océan, ee — S.agy.dh. d æ. ()—s. mn ds 7 (2): 2 =— S.agy. NAN TTe S1IL. z.(7 2) 1 A) 0 —$S, 4 y, du, Ha SIL, @, T ps (0) Hire trouvées ci-dessus; on aura pour les —S.an y. du. dæ. ee Vs Sin. æ'; aN" RER dy ES ee à ag y. du. d®. Dre COS. æ. Ga dt ; 12 Si. æ y +. (2) |] ÉLUS da +S. «y. du. dæ. [V3 Rx r.(7) al/\ # Sir. igustrn ii 2) | Ve +S.an y. du. de. pu Vip. cos. æ. Les intégrales précédentes doivent être prises depuis ŒT DE PHYSIQUE. 359 M = 1 jusqu'à w — 1, et depuis æ — o jusqu’à a —560°. En intégrant par rapport à &, on a S.a2gy. de (57)= algyy—S.alo).de. 7) — const. IL est clair qu'aux deux limites de intégrale æ — o et æ — 360°, la fonction & Zgy7y est la même , puisque ces limites sont au même point de la surface du sphé- roïde : on a donc à / g y 7 + constante — 0, et par conséquent S.agy.du.dæ. =) —=—S.a4lg).du.de. (2 : En intégrant par rapport àk,ona S, agy.dh. 5) Vi sin. —agyy.V 1—u.sin, œ nd. sin. = +sS. ; 28V7 V 1—p° d ax rt —S.agy.du. (7. Vip. sin.æ. —- const. 72 L'intégrale doit être prise depuis u — — 1 jusqu’à H—1:0ryet}ne sont jamais infinis ; ainsi le radical Vi—x" étant nul à ces limites, on a à ces mêmes limites ag y 7. V'1—y2, sin. æ + constante — 0; \ et par conséquent de. da. sin. V 1 pe S.agy.du. dæV' 1. sin.æ (TT) =S.2gyy. —$. ag. du.dæ. (2) Vin. sin.. 360 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES On trouve encore, en intégrant par rapport à &, S, ay. du. dæ. tests À \E Lt ay rt dpe-da pe coS.z (ul d — 1— pe hi 4 1—4" d'a cs a LYY. du. de." 122 Sin. æ — ; Vie on aura donc S.agy.du.de. KA 1— H°. Sie. me Es : COS. 7 d Dre ER = —.S. «a g7y. du. d@. Reerz Si. @. (Z On trouvera pareillement S, CHR du. dæ. [w 1 — ?.: COS. æ. 6) = — S. « g7y. du.d@. Rare cos. se. (TZ dp sin. æ d & unes ( e )] (FES # I sions précédentes de LE RER t ea levien 165 expres L pr e FENTE e TS € 1 dront ainsi 2 2sugrande[(#)(2)} 1 RS 297. du.dæ. (ie SIL. Hé _(7] E esrq(e = En} San y. du. don: Wim: Sin. æ. EÛT' DE PlH Y SI Q U €. 361 Er 297.du.de. Vi, cos. æ. [ (2) IE TON +S.an y.dy. dæ.pn.Vi—p.005.; (O) 2 ee Déterminons maintenant l'influence de ces quantités sur les mouvemens du sphéroïde terrestre autour de son centre de gravité. Pour cela, reprenons les équations (D) de l’article IT. Si l’on néglige , dans la première, la très- petite quantité irzc P; On aura A dp= . On voit ainsi que les termes dépendans de très-petits angles, que contient d N, peuvent, par l’intégration, en produire de très-grands dans la valeur de p; il est donc nécessaire d’avoir égard à ces termes. Les deux dernières des équations (D) donnent, en . . - 1—C négligeant les quantités fort petites, en r'p; et (4 — B) on) an an" a) Er, (AD fs Les équations (C) du mème article donnent db : = + SUL, P — q. COS. ?; da, sin. 8 Ë k ge —/ COS, P + q. SI. D; 1, 46 362 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES en faisant donc dU un, dhssind 7. Tina) ART MEET et observant que d @ est à très-peu près égal à 2 dt, où aura dz'=dr.sin. p—dgqg.cos.e+ny' dt; dy"'=dr.cos.g+dg. sin. e—nx'dt. Si l’on substitue pour dg et d r leurs valeurs précé- dentes , dans lesquelles on ‘peut changer B et C en 4, on aura aN" aN da" —-. sin. p——— cos. p +727". dé; IE A aN . ; d y'—= y COS.PH+——. Sin. Q—n x. d £. Soit À d't cos. (1t++) un terme quelconque de 74 1 2: d N ; : y Sin.®———. cos. p, et H' dt. sin. (it+e) le terme dN aN . correspondant de —-.cos.p+ ——. sin. @; les termes correspondans de 2" et de y” seront IG HE mA) 3} Re PO D CT cos. (itHe); " H'—iH Q . D =. sin, (i£+e); les termes dépendans de très-petits angles, ou, ce qui revient au même, ceux dans lesquels à est fort petit, sont encore peu sensibles dans les valeurs de x” et de 7": mais l’intégration les rend très-sensibles dans les ET DE PHYSTIQ U «&. 363 valeurs de 8 et de Y; et l’on à vu que la précession et la nutation dépendent de termes semblables : il est donc essentiel d’y avoir égard. Ces termes sont produits par ceux de Z N'et de Z N', qui dépendent d’angles très- peu différens de 2#; car, en les multipliant par sir. @ . et par cos. ®, il en résulte des termes dépendans d’an- gles très-petits. Ainsi, dans le développement de 7 N’ et de Z N°, on doit faire beaucoup d’attention à ces termes. Les termes dans lesquels + est très-peu différent de 7 , deviennent fort grands dans les valeurs de x" et de 2 parce que le diviseur & — 7° est alors très-petit. Ces termes résultent de ceux de ZN' et de 4N ", qui ren- ferment de très-petits angles : il est donc essentiel d'y avoir égard. Les termes de N'et de d N", qui dé- pendent d’angles très-peu différens de » » t, en pro- duisent dans 2” et y’ qui dépendent d’angles très-peu différens de zz. Soit L dr. sin. (221+vt+e) un terme de Z_N” dans lequel v est très-petit ; il en résul- tera dans @ N', sin. @ — d N'. cos. ® ; le terme L Ÿ ù dE cos (nt+vr+ «), et dans 4 N". cos. o + d N!. ; ÿ, ; | £ sz71. ®, il en résultera le terme = d£,cos. (nt+vsr+ &); ce qui ne donne, dans x" et y’, que des quantités qui, n'ayant point y pour diviseur, sont encore insensibles. On verroit de même qu’un terme de 4 N' de la forme L dt. cos. (2nr1+vr+ :), ne produiroit, dans x" et Ÿ'} que des quantités insensibles. Il ne faut donc avoir égard , dans les valeurs de 2N'et 4N ’,; qu'aux termes 364 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dépendans de très-petits angles, ou d’angles très-peu différens de z £. Pour analyser ces différens termes , il est nécessaire de rappeler les équations différentielles du mouvement de l'Océan. Considérons une molécule de sa surface, déterminée dans l’état d’équilibre par les coordonnées et æ; concevons que, dans l’état de mouvement, elle soit élevée dé la quantité + y au-dessus de la surface d'équilibre ; que sa latitude soit diminuée de la quan- tité « w, et que l’angle & soit augmenté de æv. Nom- mons encore ÿ la déclinaison de Pastre L, 11 son ascen- sion droite, et r’ sa distance au centre de gravité de la Terre. Soit | 3 ; = [cos.8.cos.v+ sin. 0. sin.v.cos.(TI—9—®) |; on aura les trois équations suivantes ( Mémoires de 21 / DE 5 © LA # l'Académie des sciences , année 1776, page 178): y =fron vs) pit CC TC) ivre E ddv du 72 re d'y ad Gr) e= 60) 5 D ME KO 2 1—# Si l’on ne considère que les termes dépendans d’an- ET DE (PH YS IQ UE. 365 ges croissans avec une extrôme lenteur ; ou indépendans de oil est visible que la paitie de fftrelative à ces angles , est indépendante de æ; les parties de y et de ©, relatives aux mêmes angles, seront donc elles- mèmes indépendantes de @; en sorte qu’en ne considé- rant que ces termes, on aura | DEN A GN 4 ut faUT re (2) = oi (2) 0; (7) 0; et par conséquent aN d£ aN" aN' Var SAR PRE. COS.P——S.2 97. du. de. Vie, Sin. (PH). E (2) 4 te aN’ N° Ar CSP Sin. p——S, agy. du. d'auiVi y, cn (en Le (2) 2) (Voyez sur cela les Mémoires de l'Académie des sciences, année 1775.) — 0 ; Il résulte de te que j'ai fait voir dans les Mémoires cités, que, relativement aux termes croissans avec une extrême lenteur, on peut supposer ; à très-peu près, ea (2)—(2)—(42) Cette équation est d’autant plus exacte, que ces termes Varient avec plus de lenteur, et qu’ils ont, par consé- 366 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES quent , plus d'influence sur les mouvemens de l’axe de la Terre. On a donc, relativement à ces termes, 2 dN' . COS. P————. sin. Q—=—S$S.agy:du. de. [ir ; sin. (94). ( 2) À: CONTE dN' ———— “7 Sin. PH 7. COS. g—=—S.a2gy.du. de [ Vie cos.(?+®). (5) | Si nous concevons que la mer forme une masse solide avec la Terre, il est visible , par ce qui précède , que les deux dernières équations subsisteront encore ; ainsi , re- lativement aux termes de l’expression de y, qui crois- sent avec beaucoup de lenteur, les mouvemens de axe de la Terre, produits par l’action de l’Océan sur le sphéroïde qu’il recouvre , sont les mêmes que si ce fluide formoit une masse solide avec la Terre. _ Il nous reste à considérer les parties fee nt A de qui dépendent d’angles très-peu différens de nt;ona (1 ca . SÈTL, Ps cos.p—=S.an y.du.de.n. [Vie $ d£ SiL. (@+e) | SNS delle: (Vi. sin, (p+æ). E ee Du Eai; 72 LS D de — 1—p cos. (9+-&). Le: (Z — ( ) k ET/DE PH YyYS1IQUÙ +. 367 La première des équations (1) donne S. AR. du. dæ. pu. V 1 — h. sin. (9 de @œ) = S. ar. du do. lu. V1 y. sin. (D æ ). d. yaVi = dy } K de }—{ da VE en intégrant depuis # — — 1 jusqu’à # —1,ona —— jdyu Vie à Sadu Vie (ENS y du(i—2u); on à pareillement , en intégrant depuis æ — 0 jusqu’à æ — 360, S. de. sin. (p+æ). (£) —=—S$. 70. de. cos. (p+æ) ; partant, S. an y.du.deæ.p. Vie. sin. (P+a) —=—S$. #7 u. du. dœ. (1—2u°). sin. (+ @æ) HS. a 7 v. du. d@.h. Vie, cos. (pe). On peut supposer > x développé dans une suite de termes de la forme AZ. sin. (it+s æ + ec), MT étant fonction de « seul, et s étant un nombre entier positif ou négatif, les nombres fractionnaires étant exclus, parce que 7 x est le même lorsque æ — 0 , ét lorsque. æ — 3600. Pareillement > v peut être supposé déve- loppé dans une suite correspondante de termes de la forme ©. cos. (it+sæ + ), © étant fonction de w seul. Soient A7’ et O', les valeurs de M ét de O re- hatives au même arc £, et qui correspondent cg ei M 368 MÉMOIRES ;DE+ MATHÉMATIQUES on aura, en considérant l’ensemble dés termes dépen- dans de À Ge £ u S 2 y. ee de. ni. Vie, SIL. po an. S de. cos. Gite). [Q—2u°) M AN A on Si l'on multiplie la seconde des Pauvre (T1) par Fu © t K 2 DS AAA up et ‘qu’on Pajoute à la troisième multipliée par | CRETE dæ. ta Wir. cos, (e+æ); on aura S. Eat de. “(Ce ) ST. Secure (&) Fe a VE cos. (+=) | —27. Ne baser sin. (p+@) =Sey. Dre dæ: Vip, sin. (2+æ). Lg. (2) litieog roma uonf ap Yan f «eloxs se a Ga] ( dy cos: (Q+®). 2) A = k° [£: F= aU af JET (= ho \d Se} Si l’on, substitue pour y 4 ee des termes relatifs à l'angle it, et si l’on observe qu'ici nous ne considé- euSrey. du, da. = ET DE PHYSIQUE. 369 rons queule cas dans lequel ; diffère très-peu de z, le premier membre de cette équation deviendra —an"m. S. du. cos. (it+e—@p}).[(1—2w) M LL he. Vie OU on aura donc, en n’ayant égard qu’aux termes dans les- quels z est à très-peu près égal à 7, ._S.an y. du.de.nu.Vi—y.sin. (+) = S.ar. du. daœ: Vi—w. sir. (® pin Le. (E de) al —$.«7. du. de. —E—. cos. ue E +) | Re d'où l’on tire a N” dN' 7; Sn. P— 7 cos. po = Sa). du. dæ. : V3 — pe. A cos. (9 se se —S.27. du. de. [vi (5). sir. @+) | On trouvera de la même manière, aN” RQ D ÉRULS re OS. PH Sin. Q—=— S,ay. du. dæ. 7 (52). sin. (@+)] — Say. du. da. Pare (5) cos. (o +) | 1, 47 370 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Il est facile de s’assurer , par ce qui précède , que ces aN’ k dN aN’ valeurs de. sin. ®.— 7. cos. @, et de 7: COS. ® tre ee sin. @, sont les mêmes que si la mer formoit une masse solide avec la Terre; d’où résulte ce théorême remarquable , savoir, que /es phénomènes de la préces- sion des équinoxes , et de la nutation de l'axe de la Terre, sont exactement les mémes que si la mer for- moit une masse solide avec le sphéroïde quelle re+ couvre. RE TT. Comparons maintenant la théorie aux observations , et voyons les conséquences qui en résultent sur la constitution du globe terrestre. Si, dans l’expression de c£ 0 de l’article VIIT, on réduit &. 7 cos.(f t+ 6), dans une série ordonnée par rapport aux puissances de #; . on aura, en ne conservant que la première puissance, =: cos. (ft+6)—=SZ. 2. cos. 6—Z5#. >. c. Sin. 6. Prenons pour plan fixe celui de l’écliptique au commen- cement de 1750, où nous fixerons l’origine du temps 4. Le carré de l’inclinaison de l’écliptique vraie sur ce plan étant [= c. sin. (ft+6)V +[S.c.cos.(fr+6)T ; on à EC: sa eos cites 60; O9 MEN D) Re -PHUYS L. QUE, 2 ce qui donne Ze À: Ze 7. cos. (ft+6)=5 FF cos. 6. En retranchant ce terme de la valeur de 2, on aura l’inclinaison moyenne de l’équateur à l’écliptique au commencement de 1750; mais si l’on veut que 4 re- présente cette inclinaison moyenne, il faudra suppo- u £ ser. cos. 6— 0; et c’est ce que l’on peut toujours z , faire, car le terme x. 7 cos. (f £ + 6) résultant de l'intégrale f d £. x. lo. sin. (f £+ Ë), on peut, en ° A û "4 c ajoutant à cette intégrale la constante — >. 7: c05. 6, la rendre nulle lorsque £ — o, ce qui revient à supposer u 1e =- ni cos. 6— o. On aura donc ainsi, Z. tang.h 2m. (1+ 2) 7 + — A, cos. 2 ); 1/11 p— Apr eart e es (T'es 2 G+af" (cos. 2 VU la valeur de #’ de l’article IX deviéndra Zac’ Fa 2 £, D af: SLT. ÉD Sr COS. (f'e+eé) L. tang. h 2m. (+2) enfin les valeurs de # et de 4’ des articles VIII et IX deviennent rt (cos. 20. À. COS. 2 v'); SR ie sin. 20H TX, sin. 2 v) L/11 l4 rc | Zà. c’ .R— sin. À A A. c cos SÈrL =). FE (fée); G+).f" Sir. le COS. 372 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 1 2 m. (142) m à aire À SUIL. av) g'=lE— 1, cof. Ris cf: cos, 6 (sin. au Zxc (cos. }°.—sin.h° ne 1 / GHAa)S$" sin hcos.k "re (64 Ert6) Le terme 4 =. cf. sin. 6 de l’expression de 6’ exprime la diminution séculaire actuelle de l’obliquité de l’é- cliptique. Les observations laissent encore de l’incerti- tude sur cet objet; en prenant un milieu entre leurs résultats , on peut fixer cette diminution à 50” dans ce siècle : ainsi 7° représentant une année julienne, nous supposerons 1 2e AS RRbE 0.20: Cette équation donne par la théorie des planètes , TZ, c f, cos. 6— 0",080333 ; on aura donc la précession annuelle des équinoxes égale à TT — 0'",080333. cor. À. Delambre a trouvé, par une nouvelle discussion des observations, cette précession égale à 50',1; partant ZT — 0,080333. cor. k— 50',1. Substituons pour / sa valeur; mais, pour plus d’exac- titude , conservons les carrés de l’excentricité et de l’in- ET DE PHYSIQUE. 373 clinaison des orbes lunaire et solaire : on aura, par l'article VIIT, A—B—0C) 1 A ; FRA (1—e }= y \4 EE À. [ (cos. 1) — sin.» | RTC ENT 7 Ge) 2 RER _. T, cos. À. e étant l’excentricité de l’orbe solaire, et e’ étant l’ex- centricité de l’orbe lunaire. Pour réduire en nombres cette valeur de / T, nous observerons que l’on a par les observations e—0,016814; e'—0,0550368 ; H==100040)15.001 221280: 28/20"; la longueur de l’année sidérale est de 365;,256384, et celle du jour sidéral est de 0/,997269722; ce qui donne 71 ___ 0997269722 a 7 365,256384 360°. 365,25 Enfin on am T— = 2 365,256384 marées donnent À — 3; on aura ainsi, en supposant A3. (1+i), ; et les observations des 24—B—C n : 1T= 5 —) 9682',69. [1+ 2. 0,74849], ce qui donne 2A—B—C__ o0,00519329 - A TT 1+57.0,74849" 374 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES On à, à fort peu près, par l’article IIT, PRIT QE. (H— :e). S.p. a da ZT D ee Il est fort remarquable que la valeur de Z” du même ar- ticle n’entre point dans cette équation ; d’où il suit que les mouvemens de la Terre autour de son centre de gravité sont les mêmes que si elle étoitun ellipsoïde de révolution 1 ss Es 1 us, dont æ 7 est l’ellipticité. On a = « @ — 578 °n aura donc æ H —0,0017301 + 0,00259664. S. p at da (1+ 5. 0,74849). S. p a da Il est très-vraisemblable que la densité des couches du sphéroïde terrestre augmente de la surface au centre, td Seeds et pl tit que >; faisant e ans ce PRET est plus perl que >; er asan donc z— 0, conformément aux observations des marées, la valeur de « Æ7 sera moindre que 0,0032881, ou que Sr Si la Terre est elliptique, æ Æ exprime son fellip- ticité : on ne peut donc pas supposer cette ellipticité plus grande que y Dans l’hypothèse de l’homogénéité de la Terre, 5 \ : S : a 3 29e l’équation précédente donne à peu près A — 5; cette valeur est trop éloignée de satisfaire aux QI phénomènes des marées pour pouvoir être admise : ainsi l’on doit rejeter l'hypothèse de la Terre homogène. MIT | D El PR wS 10Q UE. 375 Les observations du pendule donnent 4 A=—- à peu près; elles s’accordent donc, aussi bien qu’on peut le desirer, avec le phénomène de la précession des équi- noxes et avec ceux des marées. Les variations observées dans les degrés des méridiens ne semblent pas pouvoir se concilier avec cette valeur de & Æ7, ni même avec l'hypothèse de Pellipticité de la Terre; mais j’ai re- marqué ailleurs que cela dépend de termes peu sensi- bles dans les expressions de la pesanteur et de la paral- laxe, et qui sont entièrement insensibles dans les phé- nomènes de la précession et de la nutation de l’axe terrestre. 2). c: } e . Le terme T7 008. (f'! #+6) des expressions de 0 et de (',en y faisant A — 3, devient 10",036. cos. ( f'£+€"), F'T étant égal à 69631", et / T'étant, par ce qui pré- cède, égal à 50,285. Ce terme représente la nutation observée par Bradley , et que ce grand astronome a fixée par ses observations à 9". Maskeline, par une discus- 4 sion nouvelle de ces mêmes observations, l’a portée à 1 . . \ 9" -; et il me paroît nécessaire , d’après les phénomènes 2 des marées, de l’augmenter encore d’une demi-seconde: L’étendue observée de la nutation peut servir à déter- miner la valeur de À ; mais une différence sensible dans cette valeur n’en produit qu’une presque insensible dans PAPE BE 5 la valeur de À : ainsi, dans les deux suppositions de ÀA—- et de À — 3, dont la différence est très-sensible sur les phénomènes des marées, comme je l’ai fait voir dans 376 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES les Mémoires de l'Académie des sciences pour l’année 1790, les coefficiens de la nutation ne diffèrent pas entre eux d’une demi-seconde ; d’où il suit que la valeur de À est beaucoup mieux déterminée par les phénomènes des marées que par celui de la nutation. Si la Terre est homogène, on a, par ce qui précède, ÂVE= É , et le coefficient de la nutation se réduit à 8’ à peu près; il est incontestablement plus grand par les observations : ainsi le phénomène de la nutation con- court avec ceux des marées , pour faire rejeter cette hypothèse. Le terme correspondant des valeurs de # et de 'est Due L/ 7 Gage 008 2 sin. (PIE) 28",754.sin. (JE); c’est l’équation de la précession. Les expressions de 8 et de 0’ renferment encore le terme Peel cos. 2 vu, qui est égal à o”,87. sin. 2 vu. 2 m, (AESAN £ ? q le] ? 7e ri Le terme correspondant des expressions de # et de est — 2",00. si. 2 u : vu la précision des observations modernes , il seroit utile d’avoir égard à ces termes. On voit, par l’analyse précédente, que ces termes ,et ceux dus à la nutation et à l’équation de la précession, sont les seuls dont on doive tenir compte, tous les autres étant insensibles, La longueur de ce mémoire m’oblige d'en renvoyer la suite au volume suivant. He DEAUENE #)S 16Q Ù E, 377 PT AC DES EXPÉRIENCES Qvrse font au jardin des Plantes sur Les moutons et d'autres animaux domestiques , Par DAUGBENTON. Lu le 21 floréal an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 26 nivose an 5. Sx toutes les expériences dont je présente le plan n’étoient qu’un projet , je me garderoïs bien d’en parler à l’Institut ; un simple projet ne mériteroit pas son at- tention : mais il y a long-temps que je m'occupe de ces expériences. J’en ai déja fait un grand nombre, et il y en a plusieurs qui m'ont donné des résultats assez intéréssans pour être publiés. Je me propose de les communiquer à l’Institut : c’est pourquoi j’ai pensé qu’il étoit nécessaire d’exposer la manière dont je fais ces expériences , afin que l’on juge de la confiance que l’on peut leur donner. Daxs l’assemblée du 24 thermidor, an 3 de la Répu- blique ffançaise, les professeurs-administrateurs du Muséum national d'histoire, naturelle ont laissé à ma 1, 48 378 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES disposition, pour faire des expériences sur les moutons, la partie du terrain et des bâtimens qui ont été acquis du citoyen Léger, et qui formoient une basse-cour. J'en ai fait une bergerie; jy ai mis des moutons et d’autres animaux domestiques, sur lesquels j’avois déja tenté des épreuves qui donnent des faits d'expérience toujours certains et souvent utiles pour avancement de nos connoissances. Mon âge et mes infirmités n’ayant empêché , depuis plusieurs années , d’aller à Montbard, j’avois interrompu ce travail; mais les facilités que mes confrères n’ont procurées au Muséum, m’engagent à le continuer. Depuis vingt-huit ans que je n’occupe de l’amélio- ration des troupeaux, j’ai toujours vu avec regret que Von n’employoit pas les remèdes qui ont été indiqués pour le traitement des moutons dans leurs maladies, parce qu’ils sont trop coûteux. En effet, on ne se ré- soudra pas à faire plus de dépense pour guérir un mou- ton malade qu’il ne vaudroit en santé : il faut donc que le traitement coûte beaucoup moins; car tous les ma- lades ne guérissent pas. J’ai trouvé des moyens de traiter à très-peu de frais les maladies les plus communes dans les troupeaux. J’avois été obligé de suspendre ces re- cherches ; mais les facilités que je viens de trouver dans le Muséum m’ont mis en état de reprendre ce travail, qui est près de sa fin. On dit que le bouc s’accouple volontiers avec la bre- bis , et le belier avec la chèvre : cependant une chèvre ‘a été dans ma bergerie près de Montbard, pendant BÉAP IDE: UP IS 18 QU - Er, 379 plusieurs années, dans un troupeau de beliers, sans quelle ait fait de chevreaux. Si le bouc et le belier étoient de même espèce, s’ils s’accouploient, si leur ac- couplement étoit fécond, on verroit de grandes variétés dans les produits de ceite espèce : il s’en trouveroit- quelques-uns dont les cornes auroient des rapports avec celles du belier et celles du bouc, ou qui seroient cou- verts de poil de chèvre et de laine. Cependant les ca- ractères distinctifs de ces deux animaux ne sont jamais équivoques sur aucun individu : mais tant de gens as- surent qu’ils produisent ensemble, cette opinion est si répandue , qu’il est intéressant pour l’histoire naturelle de constater le fait de cet accouplement, et de savoir, au cas qu’il ait lieu, quel est son produit. Pour cet effet je mettrai une chèvre avec un belier, et une brebis avec un bouc. Je rendis compte à l’Académie des sciences , en 1779, des expériences que j’avois déja faites pour connoître les alimens qui ne feroient point de mal aux moutons, et ceux qui leur seroient nuisibles. Je suis à portée au Muséum d'étendre ces épreuves sur un très-grand nombre de plantes que je n’aurois pu trouver dans le canton du département de la Côte-d'Or où j’ai travaillé, pendant une longue suite d’années, à l’amélioration des trou- peaux. On a de bonnes preuves que le parcage des moutons sur les terres à bled et sur les prairies augmente beaucoup leur rapport; cependant le parcage n’est pas encore en usage dans la plupart des départemens de la République 380 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES française. Si l’on parquoit toutes les terres, on parvien- droit peut-être à recueillir assez de bled pour la con- sommation de la République , ou au moins on ne seroit plus obligé d’en tirer une si grande quantité de l’étran- ger. J’ai pensé que lon répandroit l’usage du parcage des moutons, si l’on en faisoit parquer un petit trou- peau au jardin des Plantes : il y vient des gens de tous les départemens , qui verroient la manière dont on cons- truit un parc et dont on le change de place, la cabane où couche le berger qui le garde, la loge du chien, etc. Ils verroient aussi l’effet que produit le parcage sur des pièces de terre en rapport, dont une partie auroit été parquée et l’autre ne l’auroit pas été. Pour étendre l'usage d’une pratique aussi utile, aussi importante, aussi nécessaire , que le parcage des moutons sur les terres à bled et sur les prairies, il faut employer tous les moyens qui peuvent y contribuer. Je fais faire dans les enclos de ma bergerie, près de Montbard , au départe- ment de la Côte-d'Or, des expériences bien circonstan- ciées sur le produit du parcage; je compare les ré- coltes des champs et des prés qui ont été parqués, avec les récoltes des terres voisines qui ne l’ont pas été, avec celles des terres qui n’ont été ni parquées ni fumées, et des terres qui n’ont été que fumées sans parcage. Il faut nécessairement donner des preuves incontestables des avantages du parcage, pour le faire employer par les gens qui ne seroient pas convaincus du grand profit que l’on en peut tirer. Je ne puis trop répéter que si Von faisoit parquer tous les troupeaux qui sont sur le E Ti DE PH Y SI Q U €. 381 sol de la République , ils augmenteroient considérable- ment la quantité de la première de nos subsistances. Cette considération mérite une attention particulière du gouvernement. On a écrit que la chair des cochons de Siam étoit plus blanche et plus délicate que celle des cochons:or- dinaires. On dit du bien et du mal du cochon de Siam. Il n’y en a plus dans des cantons de la République où il y en a eu : on en élève dans d’autres cantons ; mais ces animaux n’entrent pas dans le commerce des char- cutiers de Paris, qui ne savent pas pourquoi. Je mettrai le cochon de Siam à toute épreuve, pour savoir sil mérite d’être élevé pour faire une viande de boucherie. La plupart des lapins sauvages sont détruits : c’est un grand bien pour l’agriculture; mais il est difficile à présent de trouver des lapins dont la chair ait bon goût et un grand fumet. Cependant la chair du lapin est saine ; elle convient à tous les tempéramens ; elle est facile à digérer, et par conséquent bonne pour les con- valescens ; dont elle ranime l’appétit lorsqu'elle a du fumet. Je recherche, en faveur (des convalescens et des gens dont l’estomac est foible, les moyens de rendre la chair des lapins domestiques aussi agréable, s’il est possible, que celle des lapins sauvages , ou au moins d’ôter à peu de frais et en peu de temps, avant de tuer les lapins domestiques , les mauvaises qualités qui leur seroient venues de nourritures plus convenables pour les faire croître promptement que pour donner à leur chair un goût agréable. On sait que les moutons 382 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nourris de luzerne ont la graisse de couleur jaunâtre et d’un goût désagréable, et que ceux qui mangent du trèfle ont aussi la graisse jaunâtre, mais de bon goût. Il faut essayer d’autres plantes pour connoître leurs éffets sur les qualités de la chair et de la graisse des animaux. Je ferai grand nombre de ces essais sur des lapins : ils seront plus faciles et plus prompts que sur des moutons et des bœufs ; ils indiqueront au moins les fourrages qui pourroient donner les meilleures qualités à la chair et à la graisse du bétail. Les lapins multi- plient et croïssent en peu de temps, on les nourrit à peu de frais , ils n’ont pas besoin de beaucoup d’alimens : par toutes ces qualités ils sont préférables aux autres animaux pour des essais sur des plantes dont on n’a qu’une petite quantité. On expose les lapins sans re- gret à des expériences dangereuses, parce qu’ils ont peu de valeur. On ne craint pas de commencer sur ces animaux des essais de plantes vénéneuses , et de les répéter pour les modifier, afin que l’on ne soit pas obligé d’en faire plus d’un essai sur les animaux qui ont plus de valeur, tels que les moutons, les co- chons, etc. Columelle a fait mention de poules à cinq doigts. Cette race, de l’espèce du coq et de la poule, subsiste encore à présent. Il paroît que le cinquième doigt est une monstruosité ; mais on a lieu d’être surpris que cette monstruosité se soit perpétuée de génération en géné- ration pendant un si grand nombre de siècles , et qu’elle ait fait une race constante qui étoit déja connue du ŒiT DE. bP/H Y*S. I «Qi U “E 383 temps detColumelle pour être très-bonne : si elle n’a pas dégénéré , elle mérite d’être multipliée. Je me pro- pose de la mettre à différentes épreuves. On ne sait pas si la race des coqs et des poules sans croupion , et par conséquent sans queue, est aussi ancienne que celle des coqs et des poules à cinq doïgts ; mais elle est bien réelle- ment existante : c’est aussi une monstruosité. Il y a une race de cogs et de poules que l’on appelle nègres ; parce qu’ils ont la crête, les barbes , la peau et le périoste noirs, Y auroit-il moyen de faire disparoître cette couleur, ou au moins de l’affoiblir? Des épreuves faites sur ces poules peuvent être aussi intéressantes que celles des poules à cinq doigts pour lhistoire naturelle, Panatomie et la physiologie, sur-tout par le mêlange de ces trois races entre elles et.avec la race des poules communes. Ce mêlange fera-t-il varier le nombre des doigts ? Le crou- pion et la queue se formeront-ils en tout ou en partie? On m'a dit avoir vu des poules qui n’avoient qu’une moitié du croupion et de la queue. On pourra voir au jardin des Plantes un petit trou- peau en partie de race espagnole, à laine superfine, continuellement en plein air, sans aucun abri, qui y a toujours été depuis qu’il est né, et qui a été produit par des beliers et des brebis continuellement à l’air de génération en génération depuis vingt -sept ans. On pourra Voir des agneaux naître en plein air, et y mieux prospérer que dans des étables, quelle que soit la ri- gueur de la saison. Cet: exemple pourra déterminer les propriétaires de troupeaux à supprimer les étables. La 384 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dépense de l’entretien de ces bâtimens, au lieu d’être utile aux bêtes à laine, leur est nuisible. Lorsqu'il ny a point d’étable dans une ferme, et que l’on n’est pas disposé à en faire construire , on ne met point de mou- tons dans cette ferme : on ne sait pas qu’ils seroient mieux en plein air que dans des étables ; le petit trou- peau du jardin des Plantes peut le prouver évidemment. Ce sera un bien , non seulement pour des particuliers, mais pour la République entière, puisque les troupeaux sont une de ses principales richesses. Dans les expériences que j’ai faites , à ma bergerie près de Montbard, sur les moutons , pour connoître les herbes qui leur sont convenables et celles qui leur se- roient nuisibles , je mettois deux moutons dans un petit parc: ces animaux sont: si fort accoutumés à être plu- sieurs ensemble, qu’un mouton qui se trouve seul est toujours inquiet etioccupé à en chercher d’autres au lieu de manger. Je faisois donner aux deux moutons renfermés dans le petit parc une seule espèce de plante dans üñ ratelier, pour toute nourriture pendant huit jours. Je puis essayer au jardin des Plantes un nombre de végétaux beaucoup plus grand que dans le canton du département de la: Côte-d'Or où ma bergerie est située ; mais la plupart de ces plantes m’y sont pas assez abondantes pour les essayer: pendant plusieurs joursisur deux moutons. J'ai été obligé de diviser de ‘petits pares en deux, et de ne mettre qu’un seul mouton dans chacun : n’étant séparésique par une claie , ils se croient réunis , et ils mangent sans s'inquiéter pour avoir com- pagnie, MT DE PHYSIQUE. m 384 Il paroîtque Linné estle premier quiait conçu le projet de faire des essais pour connoître les plantes que les ani- maux mangent et celles dont ils s’abstiennent. Linné a fait de ces expériences par lui-même , et les a conseillées à ses disciples. Elles ont été publiées dans louvrage intitulé, Pan suecicus ; on y trouve aussi le-procédé que Von a suivi pour faire ces essais. Jai cru devoir m’en écarter, parce que j'y ai vu de grands inconvéniens, On a posé des herbes devant des animaux, et l’on a conclu trop tôt pour l’avenir qu’elles leur seroient tou- jours agréables, ou qu’ils les refuseroient toujours, parce qu’ils les avoient mangées ou qu’ils s’en étoient abstenus lorsqu’elles leur avoient été présentées. Je.crois que ces essais doivent être prolongés pendant plusieurs jours de suite, quand on a une assez grande quantité d’herbes de même espèce pour y suffire ; car j’ai vu des moutons refuser opiniâtrément de l’avoine les premières fois qu’on leur en présentoit, et la manger dans la suite avec avidité lorsqu’ils en avoient goûté. Linné ne veut pas que l’on fasse des essais d’herbes pour la nourriture des moutons, lorsqu'ils sont à jeun, au sortir de l’étable ; mais au retour du pâturage, lors- qu’ils sont presque rassasiés. Je crois que ce procédé seroit bon si l’on vouloit savoir quelles sont les herbes que les moutons aiment le mieux : mais ce n’est pas là ce que je cherche; je voudrois connoître les plantes dont les moutons peuvent se nourrir, quoiqw’ils ne les mangent qu’au défaut de celles auxquelles ils sont ac- coutumés. 3, 49 386 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES La manière dont je fais des essais de plantes sur les moutons, fera distinguer : 10. Les plantes dont ils mangent de bon appétit ; 20. Celles qu’ils ne mangent que malgré eux, pour appaiser la faim ; 30. Celles qu’ils refusent absolument de manger; 4°. Celles qui les font boire plus qu’à l’ordinaire , ce qui est un mauvais symptôme pour les moutons ; 50. Celles qui les font beaucoup uriner ; 6°. Celles qui leur donnent la colique de panse; 7°. Celles qui leur donnent le dévoiement ; 8°. Celles qui causent le pissement de sang; 9°. Celles qui leur sont mortelles. LEUT' “DE (PH YS IQ UE: | 387 OBSERVATIONS SUR LES CARACTÈRES GÉNÉRIQUES EN HISTOIRE NATURELLE, Par DAvzENTON. Lu le 1: thermidor an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 26 nivose an 5. Lorsqu'on a découvert un. individu. d’une espèce d'animal ou de végétal inconnue; j'entends dire son- vent, C’est un genre, nouveau; ou je. lis , Description d’un rouveau genre de quadrupède, d’insecte ou de plante, etc. Il me semble qu’en annonçant. une plante ou'un animal inconnu aux naturalistes, il seroit -plus convenable@le leur parler. de l’espèce de; cet individu que de son genre. On n’a qu'un ou quelques individus à citer, et l’on veut traiter du genre avant d’avoir ex- posé les caractères spécifiques. Quelle prééminence a donc le genre ‘sur l’espèce et sur la classe, . pour com- mencer par l’énoncer et le mettre en avant? Je prévois 388 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES que les méthodistes m’indiqueront l’école linnéenne (1) pour m'instruire de leurs raisons. Je les sais: j’ai vu naître cette école; j'ai vu paroître cet ensemble de principes}, de règles et de précéptes inventés pour éri- ger l’art des méthodes de Phistoire naturelle en philo- sophie (2). L'invention des distributions méthodiques des pro- ductions dela nature, est due aux naturalistes modernes : cet art manquoit ue anciens; de là vient la difficulté insurmontable de reconnoître la plupart des animaux, des plantes et des minéraux cités dans leurs ouvrages, Sans méthode on wa pas de caractères distinctifs pour chaque chose ; ‘sans caractères distinctifs aucun objet ne peut ètre désigné en particulier, à l'exclusion de tout autre, et de manière à être reconnu dans tous les temps. Cet exposé ne laisse aucun doute sur la nécessité d’avoir des méthodes de nomenclature en Histéire naturelle : mais ces méthodes sont fautives s parce que leurs divisions en classes et en genres, qui W’orit été déterminées que par des caractères arbitraires , ne peuvent pas s’accorder avec l’ordre de la nature. Ces contrariétés inévitables mettent les méthodes en défaut ; ét donnent lieu à des exceptions dans le nombre des’ ‘objets attribués aux classes et aux geñfes. Lie sys- tème de Tinné est erroné comme les autres ; il y en (1) Voyez les Aes. de la société d'histoire naturelle de Paris, Discours sur D'origine & (72 ve Pprogtes de lhishôtré naturelle enfFränce, p. 12 et 15. 6) Pilorephe Volanica Lifnucr, HT ND'E WP EH #S 1°Q Ù €. 389 a mème qui ont moins de défauts dans la théone, et qui sont plus simples et par conséquent plus commodes dans la pratique. Pourquoi donc a-t-on voulu l’ériger en école pour les naturalistes, sous la dénomination d'école linnéenne ? Mais que peut signifier ici le mot école? Seroit-ce une école comme celles des modernes pour la peinture, ou celles des anciens pour la philosophie ; les écoles de Rome ou de Florence , de Platon ou d’Aristote 2 L’assujettissement des disciples pour un maître est sujet à de grands inconvéniens dans l'exercice des beaux arts , et ne peut être que nuisible dans l’étude des sciences. L’état des sciences s’améliore à mesure qu’on les cultive ; leur avancement ne dépend pas des opinions des hommes , mais de la vérité des faits et de la justesse des conséquences que l’on en tire. La seule école pro- fitable pour les élèves en histoire naturelle, est celle d’un professeur qui leur apprend ce qui est connu, et qui leur donne ses vues sur les moyens de faire de nouvelles découvertes. IL doit corriger ses leçons et y ajouter à mesure que la science fait des progrès ; s’il se faisoit une philosophie , elle seroït fausse , puisqu’elle éprouveroit des variations continuelles. A vraie phi- losophie des naturalistes est de bien observer la nature. On connoît déja un très-grand nombre de produc- tions naturelles , et l’on ne peut pas douter qu’il n’y en ait encore Deal à découvrir. On a inventé l’art des, méthodes pour soulager la mémoire, ét-pour mettre un ordre fictif dans la confusion apparente de la nature. 3590 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Quel est le meilleur moyen d'employer cet art pour faire connoître un animal nouvellement découvert ? Cet animal est un individu de son espèce , dont on pourra reconnoître d’autres individus qui différeront peu du premier; ils se ressembleront par l’ensemble de leur structure, de leur organisation, qui constitue le carac- ière spécifique , lorsqu'on ne sait pas si les individus peuvent s’accoupler et engendrer un produit fécond. La description d’un individu qui a les deux sexes, ou de deux individus mâle et femelle , suffit pour donner une idée de la nouvelle espèce. En l’annonçant, on peut déja lui faire un nom , que l’on changeroit dans la suite si l'espèce mieux connue en indiquoit un meilleur : mais, dans tous les cas, il faut éviter soigneusement les dé- nominations qui pourroient donner une fausse idée de la chose dénommée; je n’en citerai qu’un exemple. On a donné aux singes le nom de qguadrumanes ; qui signifie que leurs pieds de derrière ressemblent plus à des mains qu’à des pieds. Je prétends au contraire que ce sont de vrais pieds, parce qu’ils sont composés d'un tarse, d’un métatarse et de doigts. Quoique les doigts soient fort longs, et que l'animal puisse empoi= gner avec le pied, on ne peut pas en conclure que son pied ne soit pas un vrai pied : mais puisqu'il fait quel- quefois la fonction d’une main, j’ai pensé que le nom de pédimane convenoit mieux à l’animal que celui de gradrumane. . L'espèce d’un individu nouvellement découvert étant décrite et nommée, il faut rechercher quelle doit être ET DE PHYSIQUE. 391 sa place dans la distribution méthodique que lon croit la meilleure. J’ai eu l’occasion de nommer une espèce de singe inconnue aux naturalistes; je lui ai donné le nom de zasique , parce que ce singe avoit la partie charnue du nez très-étendue. J’ai reconnu qu’il étoit de la classe des mammaires du Systéme de la nature de Linné , par ses mamelles; de l’ordre des primats, parce qu’il avoit des ongles et des dents; du genre des singes par ses quatre dents incisives et ses deux canines à chaque mâ- choire, et de la troisième section par sa longue queue: La grande saillie de son nez le distingue assez des au- tres espèces de sa section. Voilà donc une espèce du genre des singes nouvellement connue, dont le carac- tère spécifique est la longueur du nez. On ne peut trop s’empresser de la faire connoître au public, parce que ce nouvel animal peut être intéressant par ses bonnes ou ses mauvaises qualités. Supposons que le nasique n’eût pas eu les caractères nécessaires pour que son espèce entrât dans le genre des singes du système de Linné , quoiqw’il eût les caractères de la classe des primats ; dans ce cas, il eût fallu établir un autre genre dans cette classe pour le placer. Voilà ce que l’on appelle un genre nouveau. On n’en connoît qu’une espèce dont on n’a vu qu’un individu ; on pré- conise cette nouvelle espèce sous la dénomination de nouveau genre , que l’on croit plus imposante : cependant elle n’apprend rien de plus qu’un nouveau défaut dans la méthode que l’on croit la meilleure, puisque le nouvel animal n’a pu trêuver place dans aucun des genres de la classe dont il avoit les caractères. 392 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES J'ai déja dit qu’il n’y avoit de naturel dans les dis- tributions méthodiques des corps organisés, que les espèces des végétaux et des animaux, parce que les es- pèces sont composées d'individus formés para nature, Les méthodistes ont fait les genres en choisissant les espèces qui leur ont paru avoir le plus de rapports entre elles, et ils ont donné des noms particuliers à ces genres. En passant des espèces aux genres, on passe du do- maine de la nature aux fictions de l’art. Les métho- distes se sont trop livrés à leur imagination, et ont confondu la nature avec l’art. En observant et en combinant les caractères de di- verses espèces de plantes, les botanistes en ont trouvé plusieurs qui avoient tant de ressemblance entre elles, qu’ils les ont regardées comme appartenantes à une même famille. Magnol concçut, il y a plus d’un siècle, cette idée qui fut adoptée de tous les botanistes ; mais Linné , près de cinquante ans après Magnol , ne manqua pas de donner les familles des plantes comme naturelles. Depuis Linné, les méthodistes se sont familiarisés avec cette idée, et ont cru faire des méthodes en tout où en partie naturelles, tandis qu’elles sont entièrement artificielles, Il n’y a dans les méthodes que les espèces qui soient naturelles, parce qu’elles consistent chacune dans le rassemblement de leurs individus, tels qu’ils existent dans la nature. Il se trouve parmi ces individus des pères, des mères, des fils, des filles, des frères, des sœurs , des parens de toutes les sortessiet des alliés, qui HP DE PHYSIQUE. 393 composent une vraie famille naturelle : mais un certain nombre des espèces distinctes, réunies par les métho- distes pour faire des genres, ne peut pas composer une famille ; il n’y a entre elles ni affinité ni parenté, parce que la nature ne permet aucune alliance de l’une à l’autre de ces espèces. Loin d’être d’une même fa- mille, elles sont absolument étrangères les unes aux autres. Leur rassemblement en un même genre n’a été fait que sur des rapports de conformation et d’organi- sation : ce rassemblement ne peut donc pas faire une vraie famille, une famille naturelle. Tout ce que l’on peut se permettre , c’est de les regarder comme des fa- milles de convenance pour l’arrangement des distribu- tions méthodiques. Il est certain que les méthodistes les ont composées et en ont disposé à leur gré, puisque les espèces de ces famillés ne sont pas réunies sous un même genre dans toutes les méthodes. J’ai consulté beaucoup de méthodes, j’en ai fait quel- ques-unes ; je sais qu'avec toutes les licences que l’on peut se permettre dans le cas dont il s’agit, il est im- possible d’accorder Part avec la nature, et qu’il est très- difficile de les rapprocher sans les rendre très-discordans. NH wy a pas moins de difficulté pour la partition et pour la dénomination des classes que pour celles des genres : les classes trop multipliées surchargeroient la mémoire des étudians par le trop grand nombre de ca- ractères distinctifs qu’ils auroient à retenir. Linné a bien évité cet inconvénient , car il n’y a que six classes pour les mammaires dans son Systéme de La nature : mais il se 50 394 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES est tombé dans un autre inconvénient bien plus à crain- dre; il a rassemblé dans la même classe des espèces trop différentes les unes des autres pour que l’on puisse les réunir sans contredire les lois de la nature et les opinions des hommes. Dans la classe des mammaires, Linné a réuni dans l’ordre des bêtes féroces (belluae) quatre genres sous les dénominations de cheval (eguus), d’hippopotame, de sanglier (sus) et de rhinocéros. S’il n’étoit pas bien prouvé que le choix des caractères, des classes et des genres d’une méthode, dépend de la volonté du mé- thodiste, la réunion des individus solipèdes dans une même classe avec d’autres individus en seroit une bonne preuve qui ne laisseroit aucun doute à ce sujet. La distinction des classes consiste dans les grandes dif- férences qui se trouvent entre les productions de la na- ture ; de moindres différences distinguent les genres. Les solipèdes diffèrent des autres animaux par de si grands caractères , qu’ils doivent être mis, depuis Aristote , dans une classe particulière. En réunissant dans une même classe le cheval avec l’hippopotame, le sanglier et le rhi- nocéros , Linné a mêlé quatre classes ensemble, puisque ces quatre animaux diffèrent les uns des autres par des caractères majeurs. Des animaux quadrupèdes peuvent- ils être plus différens les uns des autres que le cheval et l’hippopotame, le cheval et le sanglier, le cheval et le rhinocéros ? En observant ces animaux seulement à lextérieur du corps, on verra que Linné, en en faisant des genres d’une même classe, a fait une classe bien mal MERE D EP) -Y:S12 QU Ec 395 * composée#Il n’y a point de systèmes ni de méthodes en histoire naturelle , qui n’aient des défauts plus ou moins grands ; mais on doit traiter avec indulgence ces sys- tèmes et ces méthodes, lorsqu'on les considère comme un art aussi ingénieux que commode, utile et même nécessaire. Les méthodes sont commodes, parce qu’elles facili- tent l’étude ; elles présentent les productions de la nature par divisions, par classes, etc. Tandis que l’on s’oc- cupe d’une classe, il semble que l’on ait mis les autres à l’écart, pour y revenir dans la suite : on voit un ordre tracé sur des tableaux, qui nous conduit, au milieu d’une multitude d'objets, à celui que nous voulons connoître. Les méthodes sont utiles, en ce qu’elles obligent à considérer des différences et des ressemblances qui se trouvent entre les productions de la nature, et qui ont servi à distinguer les divisions méthodiques. Enfin les méthodes sont nécessaires , en ce qu’elles soulagent, qu’elles exercent et qu’elles rappellent la mémoire. Ceux qui commencent à étudier retiennent plus facilement les noms et les caractères distinctifs des productions de la nature , lorsqu’ils voient ces noms et ces caractères rangés méthodiquement sous leurs yeux; Ceux qui sont instruits s’affermissent dans leurs connoissances ; ceux qui les ont oubliées se les rap- pellent. Il faut donc se servir des méthodes , quoiqu’elles ne soient pas toujours d’accord avec la nature : elles ont 396 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de grands avantages qui couvrent leurs grands défauts; ce sont des guides artificieux et rüsés dont il faut se défier toutes les fois qu’ils prétendent suivre exactement la marche de la nature. a € EE DES RU VS 100 0: £' 397 nd MOYENS D’augmenter la production du bled sur Le sol de La République française, par 1e Parcage des moutons et par la suppression des jachères, Par DAvwsexro«. Lu le 6 germinal an 4, et déposé au secrétariat de l'Institut le 26 nivosé | an 6. D: toutes les opérations de l’agriculture, une.des plus- importantes est le parcagé des troupeaux, parce qu’il augmente la fécondité de la terre pour produire en plus grande quantité la première de nos subsistances , et celle des animaux qui vivent d'herbes, et dont nous tirons une grande utilité. 4 La fiente et sur-tout l’urine des moutons sont un des engrais les plus actifs pour les champs et pour les prés. Lorsque les déjections restent mêlées avec la li- tière pour faire du fumier, elles perdent de leur force fécondante ; mais cette force a toute son activité lorsque Vanimal répand sa fiente et son urine immédiatement sur la terre qu’il doit fertiliser. C’est ce qui se fait par le moyen du parcage. Le troupeau est retenu pendant toute la nuit, ou partie de la nuit, sur un espace de terre proportionné au nombre des moutons qui le 398 MÉMOIRES DE MATMÉMATIQUES composent. On donne ordinairement dix pieds carrés pour chaque mouton. Afin que tout profite, on n’établit le parc qu'après un ou deux labours ; pour que l'urine, et même la transpiration du corps de l’animal couché sur la terre, et la vapeur de son suint , la pénètrent plus facilement. Après le parcage, on donne un dernier coup de labour, le plutôt. qu’il est possible, afin de prévenir le desséchement de la fiente. Quoiqu'il soit bien certain que le parcage est le meil- leur des engrais, on n’en fait point usage dans la plu- part des! départemens de la République française, et même on ne le connoît pas : il est donc nécessaire de le faire connoître. J’ai pensé que l’on répandroit l’usage du parcage dés moutons ; si Pon en faisoit parquer un petit troupeau au jardin des Plantes : il y vient des gens de tous les départemens , qui verroient la manière dont on construit un parc et dont on le change, la cabane où couche le berger qui le garde; la loge du chien , etc. Mais il ne suffit pas de dire que le parcage augmente de beaucoup la récolte des grains et des fourrages ; les promesses vagues ne portent pas la conviction, pas mème la persuasion : il faut des preuves circonstanciées de la quantité de cette augmentation, pour que les gens qui ne connoïssent pas tous les avantages du parcage, se déterminent à en faire usage. Je ne sache pas que l’on ait fait des expériences pour découvrir quelle est cette quantité ; c’est sans doute parce qu’elle doit être sujette à beaucoup de variétés qui dépendent des différentes sortes de grains que l’on ET : D EN PH YIiS I QU E“ : : 39g. a semés ,udes terrains qui les’ont produits, de la taille. des moutons, de la saison où ils ont parqué, et du temps que chaque parc a duré, parce que la quantité des éxcrémens des moutons; et par conséquent celle de l’engrais, varie par toutes ces circonstances. On pourroït se convaincre des bons effets du parcage en voyant, au jardin des Plantes, des pièces de terre en rapport, dont une partie auroit été parquée, et l’autre ne l’auroit pas été. Pour étendre l’usage d’une pratique aussi utile, aussi importante, aussi nécessaire que le parcage des moutons sur les terres à bled et sur les prairies , il faut employer tous les moyens qui peuvent y contribuer. Je fais parquer, depuis un grand nombre d’années, des prairies artificielles qui produisent d’abandantes ré: coltes sur des côteaux où il n’y auroïit que. très-peu d'herbe sans le parcage. Je ferai faire dans, les enclos de ma bergerie, prèside Montbard ; au département de la Côte-d'Or , des expériences bien circonstanciées ; dans un grand espace, sur le produit du parcage; je:com- parerai les récoltes des champs qui auront été parqués, avec les récoltes des terres voisines qui-ne l’auroient pas été ; avec celles des terres qui n’auront été ni par- quées ni fumées, et des terres qui n’auront.été que fu- mées sans parcage.. Les résultats de ces expériences prouveront évidemment à quel degré le. parcage est profitable. On verroit aisément Pavantage. qui résulte- roit, pour l’état, de ce grand produit du parcage :-mais encore il seroit suivi d’une réforme qui mauroit pas 400 MÉMOIRES :DE MATHÉMATIQUES moins d’importance; ce seroit la suppression des ja“ chères. De trois récoltes annuelles et consécutives, la jachère en fait perdre une. Au lieu de semer des plantes utiles, on laisse croître sur la terre des herbes de différentes espèces qui y viennent d’elles-mêmes et qui ne donnent ordinairement qu’une maigre pâture au bétail, tandis que si l’on avoit ensemencé la terre d’herbes utiles , elle auroit produit un pâturage abondant ou une ré- colte de bons grains ; etc. Le plus grand abus que Pon puisse faire d’une terre cultivée, bonne ou médiocre , est de la laïsser en jachère. L’on trouve beaucoup de résistance de la part des gens: de la campagne, quand on veut introduire une bonne pratique én agriculture, ou en supprimer une mauvaise ; ils suivent d’anciens usages avec une opinià- treté qui n’est pas sans fondement, quoiqu’on leur en propose de meilleurs. La plupart des cultivateurs ne sont pas assez instruits pour entendre les raisons que Von'pourroit leur donner d’une nouvelle pratique qui leur seroïit profitable : n'étant pas convaincus des avan- tages qu’ils pourroient en tirer , il ne faut pas les blâmer de s’en tenir à l’ancien usage. D'ailleurs il y a de mau- vais préceptes dans les instructions qu’on leur a don- nées : la plupart dé ées ouvrages mont pas été faits d’après l’expérience; on a copié d’anciens livres pour en faire de nouveaux ; on a répété des ouï-dire , au lieu de les vérifier ;et lon a fait des instructions fautives : les cultivateursiqui leur ont donné trop de confiance , ET DE PE YSIrQU Er: Âof ont été trompés , et les ont décriées ; à présent !ls veu lent voir pour croire. Il faut donc leur montrer ce que Von veut leur persuader ; il n’y a que l’évidence réelle qui puisse les convaincre du profit qu’ils feroient en changeant leur routine contre une bonne pratique. N’espérons donc pas de faire supprimer l’année de jachère par de bonnes raisons qui prouvent le tort qu’elle nous fait : il faut nécessairement des preuves palpables au doigt et à l'œil. Tous les cultivateurs assez instruits pour être convaincus des avantages de cette Suppression devroient en donner l’exemple; ces avan- tages Sont si grands, si profitables et si évidens, que les autres cultivateurs n’hésiteroient pas à suivre ce bon exemple. Fe : On met en jachère toutes sortes de terres , les bonnes, les médiocres et les mauvaises. Les bonnes terres peu- vent rapporter tous les ans, pour peu qu’on y mette d’engrais ; il faudroit être bien mal avisé pour les laisser en jachère. Il faut plus d’engrais pour les terres médiocres, et un Choix par rapport à la qualité des plantes que l’on y Sème successivement deux années de suite. Il y a une grande différence dans la direction des racines qui tra- cent et celle des racines qui pivotent : les racines qui tracent s’étendent à peu près horizontalement , et à peu : de profondeur dans la terre ; celles qui pivotent pénè- rent verticalement, et à une plus grande profondeur. Soit que les plantes ne tirent de la terre que de l’hu- midifé ; comme plusieurs expériences semblent le faire 1, À 21 402 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES soupçonner , soit qu’elles en reçoivent d’autres sub- stances , il est certain que les racines des plantes qui pivotent n’agissent pas sur la même portion de terre que les racines des plantes qui tracent. Si l’on sème alter- nativement ces deux sortes de plantes, on ne risquera pas de fatiguer ou d’épuiser la même portion de terre. Par exemple, en semant des pois, des haricots ou des lentilles, qui pivotent, dans l’année que l’on abandon- noit aux jachères, on ne peut nuire à la production du froment , qui trace, et que l’on semera l’année suivante dans le même champ. T1 faut encore plus d’engrais pour les mauvaises terres que pour les médiocres, et cet engrais doit être diffé- rent. Le parcage, ni mème le fumier de mouton, ne leur seroient pas les plus convenables, parce que la plupart de ces terres sont situées en montagne, ont peu de profondeur , ou sont légères. Le fumier de mouton, et encore plus le parcage, les dessécheroïent : au con- traire , le fumier de vache favorise les productions de ces mauvaises terres, en y entretenant de l’humidité plus long-temps. Quoique le parcage ne contribue pas immédiatement à l’engrais des mauvaises terres, il y influe beaucoup, en ce qu’il augmente la quantité des engrais tirés des animaux, et qu’il a le plus d'activité. Un mouton fer- ülise par le parcage une plus grande étendue de terre qu’il ne feroit par son fumier, et l’engrais du parcage est plus actif. Ces différences viennent de ce qu’il n’y a rien de perdu des excrémens d’un mouton qui parque; BAT DE AH YASTT QU E 403 ils sont immédiatement déposés sut la terre, et bientôt recouverts par la charrue, avant que le desséchement ait diminué leur activité. Au contraire, l’urine perd de sa force d’engrais en pénétrant la litière dans un fumier ; la fiente s’y échauffe et s’y brûle, ou se refroidit, et peu à peu , ensuite se pourrit et seconvertit en terre: dans ces deux cas, la vertu fécondante est presque nulle ; il n’y à plus d'engrais. Le parcage conserve donc une plus grande quantité de la substance de l’engrais , et le met à portée d’être employé dans sa plus grande activité ; par consé- quent, les mêmes moutons fertiliseroient une plus grande étendue de terre par le parcage que par leur fumier, Quant à l'emploi deslitières, des pailles, et des autres matières végétales et animales dont on fait des engrais , on les mettra dans les fosses à fumier. La quantité et l’activité des engrais destinés aux bonnes terres et aux médiocres étant augmentées par le moyen du parcage, il resteroit pour les mauvaises terres du fumier de vache, qui leur est le plus convenable. L’abondance des engrais produiroit celle des récoltes, tant en grains qu’en fourrages ; les cultivateurs et les propriétaires pourroient nourrir un plus grand nombre de moutons, et y seroïent engagés par l’espérance d’un gain assuré; la terre étant de plus en plus fécondée, on n’hésiteroit pas à l’ensemencer tous les ans; les ja- chères seroient supprimées, au moins dans les bonnes terres et dans les médiocres , par l'effet du parcage. Cette opération de l’agriculture est si profitable, qu’elle s’établiroit par-tout avec le temps; mais il nous importe of MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de jouir au plutôt de son riche produit. Cette affaire mérite bien la sollicitude du gouvernement ; il pourroit engager la section de l’économie rurale de l’Institut national à rechercher ce qui a été écrit de bon au sujet du parcage et des jachères, tant en France que dans les pays étrangers, et à en faire un recueil qui seroit imprimé et envoyé dans tous les départemens de la République française. 11 faudroit aussi inviter chacun des membres de la section de l’économie rurale à faire, lorsqu'ils en auroient l’occasion, des observations et des expériences sur le produit du parcage , sur la durée de cet engrais, et sur ses effets relativement aux diffé- rentes sortes de terres et aux plantes qui y ont été en- semencées. La même invitation devroit être faite aux cultivateurs qui sont en étatgde conduire une expérience et d’en rendre compte. Toutes ces observations ne pour- roient pas manquer de donner de la confiance aux bons effets du parcage dès le temps où on les feroit ; ensuite elles seroient envoyées de toutes parts à la section de l’économie rurale, qui les rédigeroit et en feroit une instruction que l’on distribueroit dans tous les dépar- temens. L’on ne trouvera rien de superflu dans toutes ces précautions, si l’on fait attention que le parcage doit augmenter nos récoltes et les multiplier par la suppres- sion de la jachère. CcÉT'DE PH YSIQU F1 405 Me MÉMOIRE b ET OBSERVATIONS. SUR LA PETITE: VÉROLE, *{ Er sur la complication de cette maladie avec La fièvre ‘scarlatine, le millet, et autres dépravations des humeurs , ï Par DESESSAR TZ, Lu le 21 floréal an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 26 nivose an 5. | A L>: grand nombre de-traités et d’observations publiés sur la petite vérole, sur ses différentes espèces et sur les traitemens qui leur conviennent, semble ne rien laisser à desirer, et avoir porté la doctrine sur cette maladie à son plus haut degré de perfection ; cependant des faits constans, reproduitgplusieurs fois, comparés entre eux et appréciés avec cette sévérité que commandent l’amour de la vérité et la crainte de l’erreur, m'ont conduit à des réflexions et à des conséquences qui, si je ne, m’a- buse, seront de quelque utilité pour fixer le jugement que l’on doit porter de la petite. vérole en elle-même, de ses symptômes propres , et de ceux des maladies qui 466 MÉMOIRES: DE MATHÉMATIQUES se joignent à elle, ou au milieu desquelles elle survient, et pour rendre leur curation simultanée plus méthodique et plus certaine. La majeure partie de ces faité m'a été fournie par une série non interrompue pendant quinze mois , dans deux maisons sur-tout, de petités véroles qui ont présenté successivement presque toutes les complications décrites par les meilleurs observateurs, et quelques autres qu’ils n’ont point eu lieu d’observer, ou qu’ils n’ont qu’indi- quées comme funestes; croyant, sans doute par cette raison ; qu’il suffisoit de les nommer, et qu’il étoit inu- tile d’en suivre la marche. J'y joindrai quelques autres faits d’une date antérieure et postérieure, comme explicatifs et confirmatifs des conséquences résultantes du tableau que je présenterai d’abord. Pour mettre plus de précision, et spécifier d’une ma- nière plus sensible les changemens opérés dans Ja marche de la petite vérole , et sa dégénérescence , suivant qu’elle étoit compliquée de telle ou telle dépravation des hu- meurs naturelles, de telle ou telle éruption, avant son invasion , pendant sa durée on après , j'ai suivi l’ordre dans lequel les complications se sont manifestées ; en conséquence, j'ai divisé cet espace de quinze mois en quatre époques. La première s’étend depuis le 4 octobre 1769 jusqu’au 26 juin 1770, la seconde depuis ce temps jusqu'aux premiers jours d'août, la troisième jusqu’au 7 septem- bre , et la quatrième enfin jusqu’au mois de février 17714 DAT 4 D'ENPAYIAIES NW rrr JON : Jai hésité quelques instans à communiquer l’histoire des deux premières époques, parce qu’elles ne contien, nent que peu d’observations qui, ne.se rencontrent pas dans les auteurs; mais cette omission auroit ronrpu .le fl des phénomènes dont l’ensemble m'est nécessaire pour l'établissement de la doctrine. J’énoncerai les prin: cipaux , et.je renverrai les détails au tableau de com- paraison qui fera suite à ces observations, dans le cours desquelles je ne me-permettrai que quelques réflexions que j'ai crues hein étana toutes relatives à la pratique, . 22792 97 JE Première É ro ç ü €. À Depuis Le à octobre 1769 Sous au 20. juin 1770. tan de mes mois qui be 0 cette Éadhul j'ai vu dans plusieurs maisons, tant de la ville que du fauxbourg Saint-Antoine, et principalement dans les pensions de MM.'Colin. et Goutier, une trentaine au plus d’enfans attaqués dela petite vérole. Quoique la marche et les symptômes de cette maladie éruptiye aient présenté des différences , à raison de l’âge et des tem- péramens, elle a cependant été AERFTÉe et n’a été traversée d’aucun accident grave. . - La seule chose qui nv'ait paru mériter s attention, €’ 'est qu’un seul malade a éprouvé le mal de cœur et Le vo: missemens , précurseurs assez ordinaires des petites vé- roles, sur-tout chez les enfans. Ne Les maux de tête étoient légers et rares; mais tous 408 MÉMOrIRESIDE MATHÉMATIQUES les malades se sont plaints de douleurs sourdes dans le ventre, sans envie d’évacuer , et sans évacuations même à l’aide des sie qui étoient suivis de peu d’ef- fet (1). fi | Quelques-uns oft eu des maux de reins violens, qui heureusement n’ont pas été /opiniâtres. Tous ces symptômes s’évanouissoient aussitôt que Véruption commençoit, ou ,‘tout au plus tard , le lende- main. J’ai remarqué peu de fièvres secondaires ; à moins que le nombre des boutons n’eût été très-considérable. Les purgations dissipoient cette fièvre, et les convales- cences ont été faciles ; car, quoique les douleurs sourdes du ventre, qui dans la suite ont été la source des symp- tômes les plus graves, se fussent déja fait sentir, elles n’ont cependant porté aucun trouble dans la marche et là términaison de la petite vérole. On conçoit que j’ai dü abandonner ces petites véroles au travail de la nature , après les préliminaires que com- mandoit l’usage, où plutôt la prudence, tels que la Ah T’émétique , les lavemens et la purgation, que jai cependant négligés très-souvent , aucuné indication réelle ne les exigeant. Une tisane simple et ordinaire, du bouillon, 'une nourriture douce et ménagée avec soin depuis lérup- tion jusqu’à la dessiccation , temps où il étoit nécessaire de la donner plus abondante; point de cordiaux dans G) Ces douleurs de ventre étoient alors très-communes ; pour ne pas dire épidémiques. ' \ m'rs 1D:8 YRLE MS TIQUE 409 ‘le commencement, maïs, dans les premiers jours de la suppuration, quelques cuillerées de, vin d’Alicante ou ‘d’une potion légèrement cordiale faitelavec l’eau de bour- rache, la confection d’hyacinthe oula, thériaque., et le sirop d’œillet ; sont le seul traitement que j’ai employé, et je me crois autorisé par l’expérience à assurer que c’est le seul qui convienne dans les petites véroles simples. S E CON DE ÉrPoQueEr. Depuis le 20 juin jusqu’au commencement d'août. Tous ceux qui dans cette époque etiles suivantes ont eu la petite vérole, avoient, dans le cours de la précé- dente, ressenti des douleurs de ventre, de reins.et de tête, et quelques accès de fièvre , légère à la vérité. Soupçonnant la maladie régnante , je les ai tenus huit jours au moins à linfirmerie ; j’ai fait saigner ceux que je jugeois en avoir besoin, et les ai préparés tous comme s’ils eussent été sur le-point d’avoir l’éruption. Depuis ces remèdes préparatoires je ne les ai point perdus de vue; mais les soins les plus assidus, une diète exacte, n’en ont pu préserver aucun, et n’ont pas paru avoir diminué la malignité de la maladie, au moins pour le plus grand nombre. Cette seconde époque , qui ne renferme que quarante- cinq jours environ, diffère de la première, 1°. en ce que la petite vérole s’est multipliée davantage, puisque dans la même maison où nous n'avions jamais eu à traiter qu’un malade ou deux tout au plus à la fois, A 52 410 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nous en avons eu vingt en même temps ; 2°. en ce que dès-lors elle a commencé à devenir plus difficile : les malades étoient plus accablés, avoient plus de fièvre; les maux de ventre et de reins étoient plus vifs et plus opiniâtres , l’éruption se faisoit moins régulièrement, les boutons s’élevoient presque tous à la fois ; ils étoient plus petits, et restoient vingt-quatre et même trente-six heures dans le même état; la peau et la langue étoient plus sèches. Pas un seul malade ne s’est plaint de mal de cœur , pas un seul n’a vomi. La maturation s’est faite lentement. Chez plusieurs les boutons se sont peu rem- plis; et comme la matière qu’ils contenoient ne se con- vertissoit pas en un pus épais, blanc et de bonne qua- lité, la fièvre secondaire a été plus commune et a duré plusieurs jours : elle s’annonçoit par de petits frissons suivis d’une chaleur médiocre. Le dévoiement survenoit le neuvième ou le dixième jour; il étoit précédé de borborygmes douloureux. Un ou deux lavemens simples le déterminoient. Si les éva- cuations se répétoient trop fréquemment, loin de sou- lager le malade elles abattoient ses forces. Il étoit alors nécessaire de donner un peu de thériaque ou de dia- scordium, un scrupule au plus à la fois, sauf à répéter la dose si les accidens persévéroient. L’exsiccation et la desquamation ont traîné en lon- gueur; les convalescences ont été difficiles et deman- doïent beaucoup de ménagemens, sur-tout pour la quan- tité des nourritures , quoique les malades se plaignissent d’une très-grande faim. Quelques cuillerées de bon vin HAT | HDYELVP EH Y S QU: E. {11 vieux dans le double d’eau relevoient les forces , et cal- moient la faim pendant quelques heures. J'ai déja remarqué que cette petite vérole, qui étoit discrète , ou tout au plus cohérente, et présentoit au premier coup d'œil les mêmes caractères que celle dé- crite dans la première époque , étoit cependant traversée par des accidens plus graves; aussi exigea-t-elle un traitement plus varié. En effet, chez quelques-uns, lors de l'invasion, le pouls étoit petit, serré, vif; l’artère très - tendue, la peau sèche et brûlante, les yeux brillans, les urines crues ou très-ronges, du jabotage (1); un délire obscur, et, chez ceux dont le caractère étoit plus bouillant, du transport , accompagnoient cet état, La saignée étoitalors très-avantageuse dès le premier jour. J’en ai fait faire peu du pied, parce que, suivant l’observation que j’ai faite plus haut, le mal de tête étoit très-léger, et les douleurs du ventre, au contraire, étoient continues et très-fatigantes. L’état du pouls, vif, serré, la chaleur âcre de la peau , la sécheresse de la langue , et la soif, indiquoient trop évidemment la nécessité de tirer du sang, pour que j'hésitasse à réitérer la saignée quand ces symptômes persévéroient après la première. Mais j’ai observé que, même dans cet état, il yaloit mieux tirer peu de sang () Par ce mot, peu usité, j'entends l’état d’un malade qui, laissé seul et tranquille, parle tout haut d’objets absens, mais connus, et répond juste quand on linterroge. 412 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES à la fois, et rouvrir la veine trois ou quatre heures après, aussi souvent que la pléthore, la roideur de l’ar- tère, l’exigeoient, et que les forces le permettoient. J’évitois, par cette précaution, l’affaissement, qui est toujours dangereux dans les maladies éruptives, à la suite de saignées trop copieuses. Chez d’autres , à la vérité, le pouls étoit très-fréquent et plein : mais l’artère étoit molle , sans ressort ; la peau, - quoique sèche, n’étoit ni âpre ni brûlante ; le malade restoit dans un accablement , un assoupissement presque léthargique ; les urines étoient naturelles, sans sédiment ; le ventre douloureux et élevé. Dans cet état, il étoit important de ménager les saignées; et quand j’ai été forcé de verser du sang, à cause du trop profond assou- pissement et du gonflement des vaisseaux, je ne l’ai fait qu'avec la précaution que je viens d’établir. Malgré ce ménagement, j’ai vu des malades tomber, après la sortie de trois ou quatre onces de sang, dans une foiblesse dont ils ne se relevoient que lentement, par le secours de quelques coräiaux. Le choix de ces cordiaux n’étoit pas indifférent, et ne devoit pas être réglé sur le degré de foiblesse. Ceux qui sont spiritueux ou âcres , tels que les teintures de myrrhe, d’aloès, l’eau thériacale, Péther vitriolique, les eaux composées de mélisse, de menthe , en un mot ceux qui, par leurs principes, réveillent plus prompte- ment l’oscillation des vaisseaux, excitent une grande raréfaction dans le sang , augmentoient l’assoupissement et causoient une fièvre très-ardente , avec transport. Une ET DE PHYSIQUE. 413 potion faite avec les eaux distillées de bourrache , de chardon bénit, de fleurs d’orange, de la confection d’hyacinthe , et du sirop d’œillet, donnée par cuillerées de temps en temps, avoit un succès plus assuré et plus durable. Lorsqu’à la mollesse du pouls plein et fréquent se joignoit une stupeur qui permettoit à peine au malade de lever la tête et d’ouvrir les yeux, et le retenoit dans son lit comme une masse, avec la langue molle et hu- mide, sans altération, les urines crues , les yeux humides et languissans ; jugeant le sang dans un état de dissolu- tion qui proscrit la saignée, je me suis bien gardé d’en ordonner : la crudité des boutons qui s’élevoient très- peu, la qualité ichoreuse du pus, m'ont confirmé dans ce jugement. | L’indication principale étoit de soutenir et d’animer l’éruption qui étoit trop lente : elle étoit plus pressante quand les boutons paroissoient s’affaisser , que leur base étoit pâle, et que les malades poussoient de profonds soupirs. J’ai retiré les plus grands avantages d’une po- tion composée d’une teinture de quinquina à la dose de deux gros dans huit onces d’eau, d’un gros de confec- tion hyacinthe, de huit gouttes d’élixir de vitriol de Mynsicht, et d’une once de sirop d’œillet ou d’écorce d'orange. On en donnoïit une cuillerée à bouche (en- viron six gros) toutes les deux heures. J’y ai joint, de six en six heures , une prise de la poudre composée de quatre grains de nitre, autant de sucre, et un grain de camphre, jusqu’à ce que l’éruption fût complète sur 414 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES toute l’habitude du corps, que les boutons fussent re- levés, et leur base ranimée : alors je ne faisois plus en- trer qu’un demi-grain de camphre dans chaque prise, et j'y ajoutois un grain de safran oriental. L'état des boutons m’a souvent décidé à commencer l’usage de cette poudre et de cette potion dès le second jour de l’éruption. à Les boissons étoient la décoction légère d’orge et de scorsonère, auxquelles j’ajoutois un peu de quinquigg pour les malades dont le pouls et l’affaissement annon- çoient le défaut d'énergie dans le principe de la vie, et un commencement de putridité. Cette boisson étoit édulcorée avec le sucre, et, pour ceux qui étoient al- térés, avec du sirop de limon. Je ne permettois que du bouillon léger, fait avec du veau, de la volaille et peu de bœuf; encore on n’en donnoit qu’une tasse de quatre en quatre heures. 4 Quoique les vésicatoires parussent très-indiqués, et qu’ils fussent d’une pratique presque générale dans la réunion des symptômes dont je viens de parler, le peu de secours que j’en avois retiré sur les deux premiers malades, et la mauvaise qualité de l’humeur que four- nissoient les plaies, me rendirent circonspect sur leur emploi. Je crus devoir éviter la douleur des pansemens à la plupart, et je ne les prescrivis plus que pour trois, à raison de maladies de peau antérieures, telles que dartres, furoncles, croûtes suppurantes à la tête, que la fièvre avoit fait disparoître. Lorsqué les malades se plaignoient que leur douleur ET! DE PHYSIQUE. 415 de ventre dégénéroit en colique, et qu’ils ne pouvoient évacuer, deux ou trois prises par jour de la poudre tempérante de Stahl, à la dose de quatre ou six grains chaque prise , suivant l’âge et la force, ou ont calmé les coliques sans procurer d’évacuations, ou en ont dé- terminé deux ou trois sans dévoiement subséquent. Une évacuation trop abondante ou trop répétée, qui suivoit l’usage des lavemens et jetoit les malades dans un véritable affaissement, comme je l’ai observé plus haut, n’a déterminé à-préférer ces poudres dont l’ac- tion, même laxative, fatiguoit moins. Si cette considération devoit éloigner les purgatifs, cependant le retour fréquent des coliques, l'oppression, passagère à la vérité, qui les accompägnoit, la qualité des matières qui, quittant leur fluidité, leur couleur verdâtre et leur odeur putride, piquante, devenoient plus épaisses, plus jaunes, et d’une odeur plus appro- chante de la naturelle, mont enhardi à purger aussitôt que j’ai vu les boutons se former en croûte et se sécher, et par conséquent plutôt que dans les petites véroles discrètes ou cohérentes simples , où j’attends ordinaire- ment que les croûtes soient tombées. Ayant reconnu que les purgatifs ordinaires des enfans, dans cette ville sur-tout , tels que la manne, les folli- cules, la casse, les sirops de pomme, de chicorée, com- posés , ne produisoient aucun effet ; que presque tous les rejetoient une heure ou une heure et demie après les avoir bus ; que le ventre restoit gonflé , tourmenté par des borborygmes ; je fus obligé d’y substituer la rhubarbe 416 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES en infusion, ou le catholicon double, le sirop magistral astringent, le sirop de fleurs de pêcher , et un sel neutre. Lorsque la répugnance des malades pour ces sirops me forçoit d’avoir recours à la manne, je la faisois fondre dans une sorte de décoction de quinquina. Plusieurs , quoique bien purgés , après douze ou quinze jours d’une convalescence, en apparence, solide , ont eu des ressentimens irréguliers et passagers de fièvre , une petite toux opiniâtre, et quelques-uns du dévoiement. Les purgatifs n’étoienf pas un remède assuré ; la saignée seule dissipoit ces reliquats, ayant soin de la faire suivre de bouillons apéritifs, plus ou moins actifs, suivant la force du sujet, continués pendant quinze ou vingt jours, et terminés par un purgatif un peu tonique. Ce traitement a répondu à mes desirs. Quoique dans ces deux époques j’aie vu plus de soïxante malades, j’ai eu la consolation de n’en pas perdre un. Il n’en est pas de même des deux époques suivantes, où j’ai eu la dou- leur d’en voir périr plusieurs, malgré tous mes soins et les conseils de quelques-uns de mes confrères , dont les lumières et l’expérience devoient assurer la conser- vation de ces infortunés. 2 Demtolbrls tr de me EP RoNQUuE, Depuis les premiers jours @août 1770 jusqu'au 7 septembre suivant, Non seulement les petites véroles ont été plus nom: AT |: DE NBA E VS T.Q UE. 417 breuses , mais les symptômes qui les accompagnoient avoient un caractère plus marqué de malignité. Jusqu'au mois d’août l’atmosphère avoit été fort hu- mide ; il y avoit eu vingt-sept jours de nuages, vingt de temps couvert, et dix-sépt de pluie. Dans le mois de juillet, la plus forte chaleur avoit été de 22 degrés un seul jour; la plus commune, dans le courant du mois, avoit été de 12 à 15. Dès le 2 août elle monta à 17 2, le 3 à 18 5, le 4 à 19 +, le 5 à 22, et tout-à-coup, le 6, à 24, et le 9 à 27; elle redescendit le 10 à 24 7, remonta le 11 à 25%, baissa subitement le 12 à 21 ©, etremonta le13à25, et le 14 à 26, pour retomber le 15 à 22 5. Depuis ce jour elle a toujours décliné, éprouvant cependant des variations très-promptes et très-marquées , puisque du 19 au 21 il y eut cinq degrés de différence. En général, le ciel fut très-beau et ne fut obscurci que par quelques légers nuages presque tous les jours; il n’a plu que neuf fois; peu abondamment, et plus particulièrement le matin que le soir. Les malades ressentirent les effets de ces variations, cependant avec des nuances très-marquées. Ceux dont la maladie étoit avancée et proche de sa fin, ne parurent souffrir aucune altération de ce chan- gement de température ; aussi leur traitement fut le même que dans l’époque précédente. Mais ceux qui n’avoient pas encore passé le temps de la maturation en furent vivement affectés, quelque pré- caution que lon prit pour rendre la chaleur moins 1, 53 418 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES incommode , comme de tenir les portes et les fenêtres ouvertes plusieurs fois dans la journée , de diminuer les vêtemens et les couvertures, d’humecter et de rafrai- chir l’air de la chambre par l’évaporation des plantes aqueuses. . Plus foibles et plus accablés, ils étoient en même temps plus inquiets et plus agités; la respiration étoit plus gènée, la suppuration ne s’établissoit qu'avec peine et lenteur, le pus étoit plus clair et plus âcre , la fièvre secondaire étoit plus générale et plus intense; le pouls étoit alors petit, serré, fréquent, et souvent il avoit cette espèce d’irrégularité qui annonce des évacuations du ventre, auxquelles il ne falloit avoir aucune con- fiance, ainsi que je l’ai déja observé, et que je serai forcé de le répéter avec des détails plus circonstanciés. La différence des tempéramens a nécessité quelques variétés dans le traitement , dont les boissons mucilagi- neuses , légèrement Robe et le quinquina, ont été les bases principales. Les poudres tempérantes de Stahl, auxquelles j’ai associé le camphre lorsque j’appercevois une disposition au spasme et aux convulsions, ont été d’un grand secours , et ont conduit les malades jusqu’au moment où il a été possible de les purger et d’établir leur convalescence. Les petites véroles qui ont commencé après les pre- mières chaleurs ont été tout-à-fait anomales , tant dans leur invasion que dans les autres périodes. Il ÿ en a eu de discrètes, mais crystallines et venant difficilement à maturité, les boutons restant jusqu’à la ENT! D 2, VUE YA QU €. 419 fin pleins d’une sérosité rousse qui, répandue sur la peau voisine, en ternissoit la couleur pendant vingt- quatre heures ; la peau se couvroit ensuite d’écailles ou farines qui étoient plus ou moins tenaces, et ne tom- boient qu’après plusieurs jours. Il y en a eu de confluentes sèches; les pustules ou plaques , ouvertes avec une lancette ou des ciseaux, ne fournissoient aucune liqueur, ou tout au plus un peu d’ichor roussâtre , le sixième ou septième jour après éruption. À Il y en a eu enfin de confluentes : en vessies formant des phlyctènes remplies d’une sérosité caustique. Elles ont été si bien décrites par Huxham, que je crois inu- tile d’en faire un tableau plus détaillé. Dans les unes et les autres, les symptômes les plus ficheux étoient, lors de Pinvasion, des douleurs de ventre et de reins opiniâtres ; une chaleur brûlante à la tête, sans néanmoins beaucoup de fièvre ; un battement extraordinaire des carotides ; des aphtes qui couvroient les gencives, les lèvres, les joues,, le palais, et jusqu’à la base de la langue; une sueur abondante sur-tout à la tête et sur la poitrine. Dans l’éruption, la sortie brusque et précipitée des boutons ou pustules sur toute. lhabitude du corps, pres- que en même temps, sembloit avoir épuisé les forces de la nature , qui restoit accablée trente-six ou quarante- huit heures. Pendant ce temps on n’appercevoit presque aucun progrès dans les boutons; les sécrétions parois- soient suspendues ; les urines étoient rares, rouges, Ct 420 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES se troubloient promptement; chez quelques-uns elles étoient crues, limpides , ou très-peu citronnées. Le troisième et le quatrième jour, de quelque nature que fussent les boutons , soit qu’ils fussent restés pleins et pâles, soit que leur pointe affaissée fût devenue brune , ils se relevoient un peu, et la peau se ranimoit dans les interstices. Le visage se gonfloit ; mais le gon- flement de la gorge, ou, pour mieux m’exprimer, de la partie antérieure du cou ; spécialement chez ceux qui y avoient beaucoup de boutons , étoit aussi effrayant qu’il étoit rapide. La difficulté d’avaler, qui Paccompagnoit, le rendoit très-dangereux en général, mais plus encore pour ceux qui avoient eu des aphtes dans l’invasion, ou dont la bouche étoit sèche et aride. Le moyen que j’employai pour remédier à cet acci- dent terrible, et qui avoit été funeste à un de mes ma lades , fut de tenir la bouche perpétuellement humectée, en laissant tomber dedans, à chaque minute, de la boisson goutte à goutte, soit avec une cuiller, soit avec un linge imbibé. Par cette espèce d’arrosement, la boisson couloit doucement , s’insinuoit dans l’œsophage ; ce qu’elle n’auroit pu faire, versée en plus grande quan- tité, parce qu’elle auroit exigé les mouvemens de la déglutition, que la sécheresse et l’aridité rendoient presque impossible (1). (Gi) Cette aridité, et l’étranglement qui enest une suite, doivent être dis- tingués du même état que produit la suppression subite du ptyalisme dans les adultes, dont je parlerai dans la suite. EE D HLIPHI si 210 où tr: 451 Ce gonflement duroït beaucoup plus long-temps que - dans les petites véroles même confluentes ordinaires ; la coction de l’humeur déposée dans les pustules ne se faisoit point, parce que cette humeur, à raison de sa causticité, n’en étoit pas susceptible. Il n’y avoit par conséquent point de vraie suppuration à attendre. Mais au moment où, suivant la marche bien connue et bien constante de la petite vérole , elle auroit dû avoir lieu , le ventre se météorisoit , devenoit très-douloureux , et cet état étoit quelquefois accompagné de la suppres- sion des urines ; la fièvre, qui étoit continue, redou- bloit ; l’altération devenoit plus fatigante; les pustules s’affaissoient, se séchoient, et prenoient une couleur brune ou celle d’un jaune livide; elles rendoient une sérosité âcre qui excitoit de violentes démangeaisons, et tenoit les malades dans une irritation continuelle, dont l'effet étoit de troubler toutes les fonctions, et sur-tout d’écarter le sommeil. à ' Les moyens curatifs que j’ai indiqués plus haut ayant répondu aux indications qui me les avoient fait adopter, “je les ai continués, en insistant un peu plus sur ceux qui avoient spécialement pour objet de relever et sou- tenir les forces opprimées de la nature, et de réprimer la disposition à la putridité, tels que la potion, avec une teinture aqueuse, mais forte, de quinquina, l’élixir de vitriol de Mynsicht, le sirop d’œillet. Mais les douleurs de ventre et le dévoiement ayant été le symptôme dominant chez tous , et le plus fâcheux, je crois devoir n’étendre davantage sur la conduite que 422 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES j'ai tenue pour le. combattre; et je me détermine d’au- tant plus volontiers à ne rien retrancher de mes obser- vations sur cet accident , que je ne connois aucun auteur qui ait vu ce que jai vu, ou qui l'ait décrit avec de pareilles nuances. J’ai déja dit qu'au moment où la suppuration devoit s'établir, si elle ne prenoit pas le caractère qu’elle a dans les petites véroles discrètes simples, ou même con- fluentes sans malignité, le ventre se météorisoit, étoit douloureux, et qu’à ce symptôme se joignoit quelque- fois la suppression des urines. Alors, si le dévoiement ne survenoit pas, ou s’il n’y avoit qu’une ou deux éva- cuations de matières dures ou molles, mais de bonne qualité, ou si un plus grand nombre d’évacuations étoit suivi de l’affaissement et de la mollesse du ventre, de la cessation des douleurs, de la liberté des urines , et de quelques heures d’un sommeil doux et tranquille , il y avoit beaucoup à espérer. Mais si le dévoiement se prolongeoit, si les matières étoient glaireuses ou séreuses , la langue, qui jusqu’a- lors n’avoit pas été très-sèche ou s’étoit humectée, de- venoit aride, noire ; les lèvres étoient comme brülées, les’ gencives et les dents couvertes d’un limon brun, épais, et qui exhaloïit une odeur de putridité. Les ma- tières des garde-robes changeoient fréquemment de cou- leur; elles étoient jaunes, vertes, brunes, et enfin noi- res; quelquefois même ce n’étoit qu’une eau teinte de brun, qui déposoit un sédiment semblable à du tabac rapé ou à de la suie très-fine, ET DE PHYSIQU r. 423 La persévérance du dévoiement entraînoit les accidens les plus graves , sur-tout dans les petites véroles crys- tallines vésiculaires : les pustules , qui avoient conservé la forme de boutons, s’affaissoient, faisoient l’enton- noir ; leur base disparoissoit; la peau devenoit terne, molle, et, quelques jours après , l’épiderme se séparoit, pour peu qu’on le pressât avec le doigt. La puanteur qui s’exhaloïit de ces corps en putridité étoit si infecte, qu’à peine pouvoit-on rester deux minutes auprès du lit du malade. Heureusement peu ont été réduits à cet en- semble de signes de corruption, qui étoit bientôt suivi de la mort. Ceux qui ont succombé sont restés pendant un et même deux jours dans un affaissement, une in- sensibilité universelle , et un délire semblable à celui des malades dont les douleurs se terminent par la gangrène. Après avoir vu périr ainsi un enfant de hüit ans, dès que le météorisme du ventre, les borborygmes, et une espèce d’intermittence dans le pouls, m’annoncèrent des évacuations, j’étudiai avec soin l'effet que la première et la seconde produisoient. Si je n’appercevois aucun signe d'amélioration dans le pouls qui restoit alors petit et serré, dans le ventre qui présentoit toujours le même boursouflement douloureux, je me hâtois de réprimer les évacuations en donnant la potion faite avec le quinquina, le sirop d’œillet, l’eau de cannelle orgée, et le diascordium; pour boisson, la décoction blanche de Sydenham , ou autres analogues. Quoique cette méthode ait rempli mes vues sur le plus grand nombre, elle a été infructueuse pour quelques-uns, 424 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES T’élixir de vitriol, essence de Rabel, les astringens les plus accrédités, n’ont pu sauver deux autres enfans qui ont péri avec les symptômes que jai décrits plus haut, l’un le quatorzième et l’autre le dix-septième jour de leur maladie , quoique les croûtes varioleuses du vi- sage fussent entièrement tombées. Désespéré de voir mes efforts inutiles, quoique je fusse fondé à regarder ce dévoiement plutôt comme symptomatique que comme critique , entrainé par le conseil de quelques-uns de mes confrères, j’essayai de favoriser les évacuations en émétisant les boissons, même en provoquant le vomissement, en donnant des purgatifs minoratifs, le tamarin, la rhubarbe. Les malades n’en ont pas été mieux; au contraire, leurs forces diminuoient dans la même proportion que les évacuations augmen- toient. Les émétiques, soit le tartrite de potasse antimonié, soit l’ipécacuanha , s’ils agissoient comme émétiques, ne faisoient rendre que de la bile verte, et en petite quan- tité ; les boissons émétisées augmentoient visiblement le météorisme et les douleurs; les minoratifs ne procuroïent que la sortie d’une eau jaune, rousse, et même noire. Ces mauvais effets me convainquirent de plus en plus qu’il falloit, dans cette complication, empècher la ré- pétition des évacuations du ventre, et éloigner tout ce qui pouvoit les exciter, jusqu’à la réunion des signes qui annoncent que le calme est rétabli dans les organes abdominaux (différence notable entre l’état des viscères et la qualité des humeurs dans cette petite vérole et dans celle de l’époque précédente , qui, ainsi que je l’ai ET DE PHYSIQuU r. 425 observé; avoit exigé l'emploi des purgatifs plutôt que dans le traitement des petites véroles ordinaires )E Je me bornai donc à la méthode curative que j'ai indiquée ci-dessus, y ajoutant l’usage des diurétiques, tels que la pariétaire, les queues de cerises sèches, la graine de lin, des doses légères de sel de nitre , pros- crivant tous ceux qui auroient pu solliciter le ventre, tels que les préparations de scille. Je fus déterminé à ajouter ce nouveau moyen curatif par l’observation que je. fis que tous les malades dont le ventre étoit météorisé, mais m’éprouvoit point de grandes évacuations , urinoient beaucoup , et même plus à proportion qu’ils ne buvoient. Je regardai cette abon- dance d'urine, que je n’avois point provoquée, comme l’œuvre de la nature, comme une crise favorable ; et en effet elle étoit le prélude d’une diminution sensible dans les accidens, et d’un acheminement à la guérison. Elle me servit de boussole Pour commencer l’usage des purgatifs : car je crus devoir ne pas l’interrompre, et attendre que le ventre fût revenu à cet état de souplesse et d’indolence qui caractérise le relâchement favorable à la purgation ; disposition que j’ai déja annoncée, et sur laquelle j’insiste , Parce que, au moins d’après mon expérience, elle doit servir de règle dans presque toutes les maladies. 1 En ne mécartant plus de cette marche, j’eus la sa- tisfaction de voir mes malades exercer distinctement les fonctions naturelles, et commencer leur convalescence. Elle fut longue et difficile, et demanda les plus grands 1, 54 426 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ménagemens , tant pour la qualité de la nourriture que pour la quantité que les organes de la digestion pou- voient supporter facilement. Je recommandai expressément que l’on veillât avec scrupule à ce que les convalescens ne fussent point ex- posés à un air froid et humide. Les raisons de ce pré- cepte, qui doit être observé dans toutes les maladies où la dépuration, la crise, se fait à la peau, seront déve- loppées et confirmées, dans l’histoire de la quatrième époque, par des faits sensibles. Je continuai chaque jour, jusqu’à parfaite guérison, c’est-à-dire jusqu’au retour complet des forces et de la gaieté , deux tasses d’une boisson diurétique et tonique. Malgré ces précautions quelques-uns restoient pâles, mous, sensibles au froid, indolens , ou se fatigant au plus petit mouvement. Informé qu’avant d’avoir été attaqués de la petite vérole, et dès leur plus tendre en- fance, ils avoient eu quelques symptômes de scorbut, je leur fis composer un vin entiscorbutique, cordial, avec la racine de raifort sauvage, celle d’aunée, les feuilles de cresson de fontaine, un citron, et la racine d’angélique (cette -dernière à quart de dose des deux autres). Ils en prenoient deux cuillerées à bouche par jour, une le matin et une à midi. (J’observerai, en pas- sant, que l’usage du vin antiscorbutiqye, même ordi- naire , le soir, provoque presque toujours de lagitation et des sueurs ensuite pendant la nuit.) Après avoir pris de ce vin douze à quinze jours, les symptômes qui m’avoient engagé à le prescrire disparurent, et rien ET | DE PH MS I1Q.U €. 427 narrêta plus le parfait rétablissement de ces malades, qui avoient été au nombre de vingt-un, et dont jai eu la douleur de perdre trois. Je finirai ces détails, qui paroîtront peut-être trop longs et superflus aux praticiens consommés , mais que les services qu’ils ont rendus aux tendres infortunés dont j'étois chargé, me rendent trop chers et trop précieux pour les omettre, dans l’espérance qu’ils pourront être utiles à d’autres ; je finirai, dis-je, ces détails par une observation sur les aphtes, qui étoient un des sÿymp- iômes de cette complication. Voyant avec chagrin que les aphtes résistoient aux gargarismes vantés comme les plus efficaces, et que la tête étoit plus brouillée , plus embarrassée chez ceux en qui ces petits ulcères étoient plus opiniâtres, je pris le parti de les détruire tout d’un coup avec le collyre de Lanfranc, dont on les touchoit deux ou trois fois en vingt-quatre heures. On Pemployoit tantôt pur, tantôt mitigé avec un quart d’eau d'orge, selon que la croûte aphteuse me paroissoit plus ou moins épaisse. Ce moyen a parfaitement réussi : les aphtes n’ont pas reparu. Seroit-ce une présomption hasardée que d’attribuer # leur prompte destruction la plus grande tranquillité dont ont joui les malades dans le cours suivant de leur ma- ladie, quand je trouve sur mon journal que ceux à qui les aphtes ont été ainsi enlevés dès lé commencement ;| ont été moins affaissés, moins en délire, et qu’ils se sont tous rétablis ? é 5! Sur la fin d'août, la chaleur diminua sensiblement : 428 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES sa plus grande intensité fut de 18 degrés ; mais ses ef- fets sur les corps subsistant toujours , la malignité et les accidens de la maladie persistèrent dans ceux qui étoient tombés malades avant cetadoucissement. Ceux qui ont été attaqués pendant le court espace de temps plus doux, qui ne fut que de dix jours, n’ont pas éprouvé des symptômes aussi violens. La maladie, à la vérité, n’é- toit pas moins irrégulière ; elle avoit le même caractère de complication : mais il étoit plus mitigé dans sa marche et dans ses effets, et exigea par conséquent des remèdes moins actifs, quant aux doses et à la fréquence de leur emploi; car leur choix fut toujours dirigé par les mêmes principes et les mêmes considérations. QUATRIÈME ÉPOew +. État de l'atmosphère dans le mois de septembre. Less alternatives brusques de la chaleur furent très- sensibles dès les premiers jours de septembre. Le pre- mier elle étoit à 15 degrés, le 2 elle monta tout-à-coup à 20 , le 3 elle fut à 18, le 4 à 21; le 7 elle descendit à 18 1, et le 8 à 14 +, ainsi que le 9; le 10 elle re- mionta à 19, le 11 à 18, et se maintint à peu près à ce degré jusqu’au 15 qu’elle fut portée à 20, le 16 et le 17 à 23 2, et le 18 à 24 +, pour retomber le lendemain 19 à 21, le 20 à 19 +. Ces variations se sont présentées avec la même promptitude et les mêmes sauts, si je puis parler ainsi; jusqu’à la fin du mois. è 7 U OSOTA DEN TPAHS VISTE 2Q U . 439 ‘Le ciel fut presque toujours nuageux; il ne s’éclair- cissoit que le soir , encore rarement: Il y eut, seize jours, de la pluie ; mais les deux!, trois et quatre premiers jours furent remarquables par des éclairs-et un tonnerre pres- que continuels , suivis seulement, d’un peu de pluie. Le vent a presque toujours soufflé du sud-ouest: Cet état de l'atmosphère, les variations brusques de la chaleur, m'ont paru avoir donné une nouvelle acti- vité aux causes de la complication. Les symptômes fà- cheux que nous’avions eu:à combattre devinrent. plus communs et plus graves, en sorte qu’il n’y eut aucun malade qui ne s’en ressentit plus ou moins. Instruit par le passé , je me croyois en état de les vaincre. Mais une nouvelle complication , se joignant à la pre- mière, me jeta dans de nouveaux embarras, et rendit ma conduite plus incertaine et malheureusement infruc- * tueuse, ou plutôt funeste, pour les trois premiers atta- qués de cette complication produite par la fièvre scar- latine et l’éruption miliaire. La fièvre scarlatine s’annonça dès les premiers jours du mois de septembre ; ellerse manifesta chez des enfans qui mavoient point encore eu la petite vérole, chez d’autres::qui. l’avoient: eue, et dont la desquamation étoit tout-à-fait finie; chez d’autres enfin elle se mêla : à la petite vérole. Cette fièvre , par elle-même , ne présenta aucun symp- tôme extraordinaire : seulement, dans, quelques, sujets, son explosion, au lieu dese faire. de suite. dans l’es- pace deitrente-six où quarante-huit heures, s’est faite à 430 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES plusieurs reprises; d’abord au cou, à la poitrine, où elle duroit vingt-quatre heures et disparoissoit; ensuite au ventre et aux extrémités. Dans cette irrégularité , les malades étoient plus accablés, avoient plus de fièvre, et plus long-temps; la desquamation étoit plus lente, Cependant, après neuf ou dix jours, ayant été purgés, ils paroissoient être bien rétablis et jouir d’une bonne santé. Mais presque tous (je veux dire ceux qui ont eu la fièvre scarlatine avant la petite vérole) ont essuyé lé- ruption miliaire en même temps que la varioleuse , mais non pas tous au même période de cette dernière : car, chez quelques-uns, elle ne s’est faite que le deuxième ou le troisième jour de l’éruption des boutons varioleux ; chez d’autres, à la fin de leur maturation, et chez d’au- tres enfin pendant la suppuration. En parlant de ma- turation et de suppuration, je veux seulement indiquer le temps où ces deux changemens de l’humeur vario- leuse- auroient dû s’opérer et se seroient opérés dans une petite vérole exempte de malignité. Deux seulement ont éprouvé l’éruption scarlatine en même temps que la varioleuse, et le millet s’est montré immédiatement après l’extinction de la rougeur de la peau. Quelques-uns n’ont eu que léruption miliaire en même temps que la petite vérole, sans fièvre scarlatine ni antérieure ni subséquente. Ces variations se sont préseritées dans un ‘espace ide temps si court, qu’on ne peut les attribuer avec fondement ET : D Es: PAM VS L QU: E. 43% à la différente qualité de Patmosphère, et il est plus raisonnable d’en chercher la cause dans-Vidiosyncrasie, ou la constitution particulière des sujets; car j’ai ob- servé que ceux qui avoient succombé ou avoient. été plus dangereusement malades ; étoient d’un tempéra- ment foible et délicat, ayant été traités avant de symp- tômes scorbutiques ou dartreux , ayant éprouvé la den- tition difficile, et ayant presque toujours eu les APRES tuméfiées, et souvent du dévoiement. Un fait qui m’a paru digne de l'attention des obser- vateurs physiciens, c’est que tous les malades qui ont eu la fièvre scarlatine seule, et avant la petite vérole, précisément quinze jours après cette première maladie, et sans aucun signe précurseur, ont été saisis d’une fièvre violente ; avec transport; sécheresse à la peau, grande altération! et aphtes dans la bouche. Huit heures après, tout au plus tard, les boutons de petite vérole sortoient précipitamment sur le visage, sur le cou et sur les bras. Le second jour de léruption ; le pouls, toujours accé- léré , devenoit plus petit, plus serré; la respiration plus laborieuse, entrecoupée de soupirs, accompagnée d’une anxiété continuelle et d’une douleur profonde dans les lombes ; le délire étoit presque insensible. Le soir même, ou le lendemain matin , dix-huitheuresenviron après l’é- ruption varioleuse, on appercevoitsur le ventre une quan- tité de petites éminences rondes, transparentes comme de petites perles fines ; qui se multiplioient rapidement et s’étendoient en très-grand nombre ; sur-tout sur le cou , 432 MÉMONRES DE MATHÉMATIQUES sur la'poitrine et sur les cuisses. Je men ai point vu sur le visage, et peu:sur les bras. On ne: pouvoit mécon- noître le miiliet: Le: quatrième jour ordinairement de cette seconde éruption, les grains de. millet devenoient plus gros et enmême temps ‘plus térnes; et semblablés à des ‘bou- ions de petite vérole en parfaite maturité, à l’exception de la base qu’ils:wavoïent point ; maïs ils restoient tou< jours durs et ne fournissoient aucune matière. Un seul malade-me présenta le phénomène suivant : l’enveloppe de la sérosité qui-formoit les grains de millet, étoit si mince ; qu’en promenant mes doigts dessus , elle se rom- pit, et il se répandit une liqueur limpide comme l’eau la plus pure ; mais si âcre-qw’elle excita au bout dermes doigts un prurit incommode pendant quelques minutes. La liqueur se reproduisit bientôt, et le lendemain, au lieu dé grains ou pustules, je trouvai des vessies qui étoient remplies d’une sérosité claire. Tant que les pustules miliairés restoient dans leur vigueur, ce qui duroit environ quatre jours, la nature sembloit oublier la petite vérole , dont les boutons sortis restoient petits, ternes, la pointe affaissée et la: base pâle : mais dès que le millet étoit terni ; séché et tombé: en farine, les premiers se relevoients et si leur éruption n’avoit pasoété complète, on-en voyoit sortir de nou- veaux ; principalement; sur la poitrine , sur le ventre et sur les extrémités. Le sixième et le.séptième jourseulement (notez que le temps de l'invasion étoit le mème que celui de léruption) ; ES DE PHYSIQUE 433: le visageet la gorge se gonfloient extraordinairement ; les boutons qui , après leur sortie , avoient été très-distincts, se confondoient, devenoient confluens , et ne formoient plus que des plaques âpres et peu élevées au-dessus de la peau. Deux ou trois jours après le gonflement du visage, les mains se tuméfoient : mais ni les boutons du visage ni ceux des extrémités ne se remplissoient de pus ; ils formoient des vessies qui, ouvertes après Le troisième jour de leur formation, rendirent une sérosité d’abord limpide, ensuite bourbeuse ; et même sanieuse. Le fond de la vessie étoit profond , d’une couleur terne et blas farde. Dans ce temps les douleurs de ventre, qui avoient été vives lors de l’invasion, et s’étoient ensuite un peu calmées , se réveillèrent avec fureur; le ventre se mé- téorisa tout-à-coup ; les urines, qui jusqu'alors avoient passablement bien coulé, et avoient été tantôt pâles, tantôt rouges, diminuèrent sensiblement, et, en moins de vingt-quatre heures, il.se forma une infiltration œdé- mateuse , plus ou moins considérable, dans le tissu cel- lulaire du scrotum , dont les tégumensétoient d’un violet bleuâtre. La respiration devenoit plus gènée, et la gène pas roissoit avoir son siége dans le diaphragme, dont les mouvemens étoient retenus, et n’avoient leur dévelop- pement que de temps en temps, par secousses. C’étoit alors que les malades poussoient de profonds soupirs. Quoique ces infortunés ne pussent goûter un instant Le 55 434 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de sommeil, perpétuellement tourmentés par des dé: mangéaisons telles, que , s’ils pouvoient se procurer la liberté des mains, ils se déchiroïent, s’arrachoient l’é- piderme par lambeaux ;'et offroient le spectacle le plus effrayant ; ils avoient néanmoins la tête saine et pré- sente ; ils ne se plaignoient point d’altération; leur lan- gue étoit humide ; les urines, coulant en pétite quantité, étoient , à cette époque, peu différentes des urinés natü- rélles ; le pouls continuoït à être précipité èt petit. De fréquens borborygmes se faisoient entendre dans le ventre, qui étoit bouffi et douloureux ; symptôme que j'ai regardé commé la cause des accidens qui avoient rendu les petites véroles de la troisième époque si dan- gereuses. Lia. dépravation des humeurs fut encore plus grande dans celle-ci ; les matières qui s’échappoient étoient plus ichoreuses et plus infectes. Heureusement les évacuations n’étoient ni abondantes ni trop fré- quentes ; ellés m’étoient point le fruit d’un relâchement du canal intestinal, mais plutôt l’effet de l’explosion de l’air qui, en sortant, les or avec lui. Du moins j’en portai ce jugement à à raison de la différence d'état dans lequel se trouvoient ces malades après les évacuations , et celui dans lequel s’étoient trouvés les malades de la seconde et de la troisième époque à la suite dés mêmes évacuations. Je rendraï compte ci-après des moyens que j'ai mis en usage contre cet état du «ventre. Jai déja dit que les vessies de la peau ne rendoient qu’un ichor sanieux, d’une âcreté corrosive, qué causoit ENT D EPE Sr Q Ù Er: 435 les démangeaisons les plus insupportables. Il s’en ex- haloïit une vapeur piquante , que je comparai à celle qui s’élève d’une fourmillière sur laquelle on à jeté de l’eau bouillante. Cette vapeur avoit une acrimonie si péné- trante , qu’il étoit impossible de rester cinq minutes au- près du malade sans ‘ressentir une vive démangeaison dans les yeux, et un mal de tête violent. Plusieurs des femmes qui étoient chargées de leur donner des soins, ont eu non seulement des pustules aux mains , aux bras, mais des inflammations très-opiniâtres aux paupières et à la conjonctive. La matière ichoreuse la plus ténue laissoit sur la peau, après son évaporation, une vase gluante qui s’épaississoit et devenoit brune, sans durcir. Chassée par une nouvelle source d’ichor, elle faisoit place à une croûte qui se durcissoit comme de la corne, s’attachoit fortement à la peau, et ne s’en séparoit qu’à la longue, par l’effet d’un nouveau suintement, dont la matière avoit un caractère moins rongeur et moins fétide. J’ai cru y reconnoître une odeur aigre. La dissolution me paroissant portée à son plus haut degré, deux malades sur-tout, qui avoient été attaqués les premiers de cette complication, et avoient eu des évacuations fréquentes et abondantes, ayant péri avec tous les symptômes de la gangrène, je crus devoir tenter de nouveau l’usage des acides, tant végétaux que mi- néraux, dans les boissons et les potions ; je les associai mème avec le quinquina. Mais je reconnus bientôt que ces remèdes étoient plus 436 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES nuisibles qu’utiles : ils entretenoient les. douleurs de ventre et le dévoiement , qu’il étoit au contraire impor- tant de réprimer. J’eus occasion d’entrevoir cette vérité auprès d’un de mes malades qui avoit en aversion les acides quelconques. Il avoit été pris en même temps de la fièvre scarla- tine et de la petite vérole. Ces deux éruptions avoient étéssuivies de celle du millet, le cinquième jour. Les seules boissons dont il fut possible de lui faire faire usage, furent une tisane légère de chiendent, de réglisse et de racine de scorsonère, du bouillon léger, et quel- ques cuillerées de la potion faite avec la teinture de quinquina , le diascordium et le sirop d’œillet. Quatre fois par jour il prenoit de la poudre avec le camphre, le nitre et le sucre. A la vérité, le ventre se météorisa comme chez les autres; mais le dévoiement dura peu, les matières étoient en petite quantité et de bonné.qua- lité. Les urines coulèrent abondamment, et même invo- lontairement, pendant deux jours. Le flux d’urine ne com- mença que le treizième jour de la maladie ; il dissipa l’hy- drocèle qui avoit commencé à se former dès le neuvième, et que l’on avoit toujours tenue couverte de compresses irempées dans du vin chaud. Quoique les boutons n’aient point fourni de pus, mais seulement une sérosité âcre, et qu’ils aient formé par leur réunion plusieurs phlyc- tènes bleuâtres , le malade a été parfaitement guéri. Cet exemple et celui de plusieurs autres qui furent traités de la même manière avec succès, ne me laissè- rent aucun doute que les acides avoient déterminé sur ET DE PHYSIQUE 437 les entrailles un reflux de la sérosité âcre déposée à la peau ;et avoient, en continuant les douleurs et entre- tenant le dévoiement, achevé d’épuiser les forces. Décidé d’ailleurs par la doctrine d’Hamilton , dont je venois de lire pour la première fois la dissertation sur la fièvre miliaire, je proscrivis absolument les acides, et renfermai mes moyens curatifs dans les diaphoré- tiques doux, les absorbans, les boissons mucilagineuses un peu diurétiques, et constamment la potion dont j'ai déja parlé, préparée avec une forte teinture aqueuse de quinquina , le sirop d’œillet, l’eau de fleurs d'orange où de cannelle orgée, dans laquelle on délayoit où du dia- scordium ou de la confection d’hyacinthe, suivant l’in- dication. Les poudres absorbantes étoient composées de parties égales d’antimoine diaphorétique, d’yeux d’écrevisses, et de moitié moins de safran oriental, Je les faisois étendre dans quatre onces d’eau dans lesquelles on avoit dissous vingt-quatre grains de gomme arabique et demi-once de sucre. On en administroit deux cuillerées de quatre en quatre heures: Quelquefois ; pour ne pas multiplier les boissons , je mêlois cinq grains de ces poudres dans deux cuillerées de la potion. Sur la fin de la maladie ; et dès que je m’appercevois que les urines couloient un peu plus librement, je joi= gnois la pariétaire ; les queues de cerises, aux mucila= gineux ; pour former la boisson habituelle. 1, Les vésicatoires ; quoiqu’appliqués dès. le: commen- cerñent de la maladie, ayant soulevé une. large vessie 438 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dont la plaie a constamment fourni, tantôt une sanie épaisse, tantôt une eau rousse, n’ont pas cependant, au moins sensiblement, procuré un avantage aussi réel que je l’espérois. Les plaies ayant toujours été pâles et souvent livides, l’onguent dont on se servoit fut tou- jours chargé de camphre. Comme les symptômes ont été, à quelques nuances près , les mêmes chez tous ceux qui ont eu la fièvre scar- latine avant la petite vérole, à laquelle le millet s’est mêlé, et chez ceux qui ont eu ces deux maladies et le millet en même temps, ou seulement avant la suppu- ration établie des boutons varioleux, je me bornerai à transcrire l’histoire d’un seul, qui présentera le vrai tableau de tous les accidens portés à leur plus haut degré, et l’influence qu'a pu avoir la maladie miliaire sur la complication déja existante, de l’humeur vario- leuse et de l’altération des humeurs naturelles. Première HrsTorers. Ux enfant de huit ans et demi, d’un tempérament délicat et foible (né d’un père dont la conduite n’avoit pas toujours été sans reproche, et qui avoit été, à la fleur de son âge, victime des excès auxquels il s’étoit livré), d’un teint habituellement pâle, sujet à une diar- rhée presque continuelle ; et ayant eu plusieurs fois des efflorescences dartreuses sur différentes parties du corps, fut attaqué d’une fièvre scarlatine très-abondante, etirré- gulière dans son explosion. La desquamation terminée, £ ET DT PH YS$S 1 QU #. 439 il fut purgé deux fois , et tenu à un régime exact, sans être trop sévère. ‘ .. Quinze jours précisément après l'invasion de la scar- latine, il fut saisi tout-à-coup d’un grand mal de tête. La fièvre s’alluma aussitôt ; elle fut vive, la respiration fort gènée ; les yeux étoient brillans. Le délire : com- mença avec la fièvre. “Premier Jour. On n’eut que le temps de lui faire prendre un bain de pieds et de lui administrèr un lavement d’eau simple; car, peu d’heures après l'invasion de la fièvre, l’érup- tion varioleuse se montra. | Second jour. Le second jour l’éruption étoit très-avancée sur le vi- Sage et sur les mains. Les boutons étoient fort petits, mais bien distincts. On remarquoit de plus sur le visage des plaques rouges Qui sembloient annoncer une con fluence. Les petites. pointes qui S’élevèrent au milieu de ces plaques étoient de la même couleur, et très-sé- parées les unes des autres. k Le pouls alors étoit petit et très-fréquent, la langue molle et vermeille , et les gencives blanches. L'enfant étoit affaissé , et poussoit de grands soupirs de temps en temps: V'S2 ef) e1rr0f xwSh téredtre 10H 80) Le soir on commença à appercevoir sür lé ventre des boutons blancs et très-brillans. Pendant la nuit ils aug- mentérent en nombre ‘et en grosseur, 44o MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Troisième jour. Le lendemain matin, en passant le doigt dessus, je fus étonné que tous ceux que j’avois pressés crevèrent : il en sortit une liqueur très-limpide et fort âcre. Point de changement dans le pouls , dans l’état de la tête et de la respiration. Les urines couloient bien , mais elles étoient crues ; le ventre étoit resserré, les lavemens w’entraînoient rien. Quatrième jour. Le jour suivant, à la place qu’avoient occupée les boutons blancs que j’avois écrasés, il s’étoit formé de petites vessies de forme irrégulière, pleines de la même liqueur qui étoit sortie des boutons. Les cuisses , le cou, la poitrine, furent bientôt garnis des mêmes boutons dont le ventre avoit été couvert le jour précédent, mais plus durs, et ne cédant point à la pression du doigt. Je PE que cette éruption étoit le millet. : On ne voyoit pas un seul bouton de petite vérole sur le ventre hi sur les cuisses; on n’en appercevoit que quelques-uns clair-semés sur Ë poitrine. Cinquième jour, Le millet subsista deux jours dans sa vigueur, sans changement apparent ni dans sa couleur ni dans sa grosseur. Le pouls étoit un peu moins vif et plus développé, ET DE PH YS IQ U €: 448 la tète plus libre , ainsi que la respiration plus régulière et plus large. Les urines coulèrent plus colorées ; mais point d'évacuation par les garde-robes. Sixième jour. Sur la fin du quatrième jour de l’éruption miliaire, et qui étoit le sixième jour de l’éruption varioleuse , les vessies et les boutons miliaires, de transparens qu’ils étoient restés, devinrent ternes, s’applatirent pendant la nuit; et le lendemain ils avoient presque tous dis- paru, laissant à leur place une petite pellicule farineuse. Le pouls s’éleva davantage, et il y eut plus de cha- leur à la peau. Cette chaleur n’étoit point âcre. En examinant le ventre Ie soir, jy apperçus de nou- Veaux boutons ; mais ils étoient rouges , ayant une base, une pointe, en un mot de vrais boutons de petite vé- role : ils furent peu nombreux. L’éruption, qui n’avoit ‘pas encore eu lieu sur les extrémités inférieures , s’y fit rapidement; et elle fut si abondante ,; que or tous les boutons étoient cohérens. Septième jour. Ceux qui étoient sortis le premier jour sur le visage ei sur les mains, et étoient restés tels qu’ils Etoigats à leur naissance, sans aucun progrès pendant toute la durée du millet , ayant seulement la pointe affaissée et la base pâle, se ratinièreste! se relevèrent et se rempli- rent en moins de lier heures. 1, 56 442 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Huitième Jour. Les plaques intermédiaires dont j’ai parlé se soule- vèrent aussi, mais moins. La mature sembla vouloir réparer le temps perdu. Neuvièrne jour. Le neuvième jour, le visage se gonfla tout d’un coup, et les boutons varioleux se confondirent avec les plaques intermédiaires, au point que sur le front, les joues , le menton et le cou, on ne voyoit que des vessies peu élevées, transparentes, et remplies d’une sérosité limpide qui, après douze heures, prit une teinte rous- sâtre. ; Dixième jour. Les interstices des vessies, ou plutôt les lignes in- termédiaires qui les séparoient, étoient d’un vermeil assez vif. Le soir, le ventre devint douloureux ,-et on y enten- doit des borborygmes continuels. Je fis administrer huit onces de décoction de son en lavement (1); je Le fis ré- péter le lendemain et les jours suivans, mais sans ob- tenir d'évacuation : elle n’eut lieu que le quatorzième (1) J’avois essayé sur d’autres les lavemens' de lait et de sucre , conseillés “par Huxham; muis ils avoient excité :des coliques et des évacuations trop abondantes. Ils conviennent mieux dans les petites véroles distinctes , après de longues constipations, EMT : D E:. P,H,YiS:I Q U €. 443 jour, et entraînd des matières moulées, très-fermes et de bonne couleur. Onzième jour. - Les boutons des mains se remplirent peu et lentement. Douzième jour. Mais le jour suivant, le gonflement du visage diminua sensiblement et plus promptement que dans les petites véroles ordinaires , même confluentes , et celui des mains s'établit. Le malade se plaignit de froid; le pouls redevint serré, précipité, et la respiration laborieuse. Treiziôme Jour. Le lendemain le visage se gonfla de nouveau, et plus qu’il n’avoit été la première fois. Ce gonflement gagna bientôt les bras, les mains, les cuisses, les jambes, les pieds, et toute l'habitude du corps. Tant à l’inspec- tion qu’au toucher, la peau étant pâle et livide, je re- connus que c’étoit plutôt un œdème que le gonflement ordinaire dans la petite vérole , et que l’on voit quel- quefois se reproduire, lorsqu'il a disparu trop tôt. Quzatorzième jour. Depuis cet instant la fièvre augmenta d'intensité ; le pouls étoit on ne peut plus irrégulier , tantôt vif et serré, tantôt mou et fuyant sous le doigt, tantôt intermittent. Le malade n’étoit point altéré ; il avoit la bouche fraîche A 444 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES la langue humide et vermeille ; ses yeux étoient ternes, les paupières très-æœdémateuses, la partie antérieure du cou tuméfite au point de se confondre avec le menton. Le soir de ce jour , il eut l'évacuation dont j’ai rendu compte par anticipation. Quinzième jour. Le jour suivant, qui étoit le second de cette tumé- faction, il se plaignit d’une douleur vive dans l’arrière- bouche, qui Pempêchoit d’avaler. La tisane, le bouil- lon, excitoient une toux convulsive. La potion seule, composée d’eau distillée de bourrache , de sirop d’œillet, d’eau de fleurs d'orange et de confection d’hyacinthe, passoit aisément. Je craignois le ptyalisme ; presque tou- jours dangereux à cet âge; mais il n’eut pas lieu. Je regardai cet accident comme dépendant d’un gonflement des glandes salivaires, plutôt que d’une inflammation, la langue , ainsi que je l’ai dit, étant restée molle, hu- mide et vermeille; c’est pourquoi je lui fis faire usage d’un gargarisme composé d’une décoction d’orge, de raifort sauvage et dé miel rosat, à l’imitation de celui que prescrivoit Sydenham lorsque la matière du ptya- lisme contractoit un épaississement qui empêchoit son ex- crétion. Mon malade rejeta en effet une salive très- gluante. Je le répète , ce n’étoit pas un ptyalisme comme chez les adultes. Après ce dégorgement des glandes, le palais et l’arrière-bouche étant devenus très-sensibles, on donna de temps en temps une cuillerée de lok fait “ BAT D EM PÜHEYISOE G'ut 21 445 avec le jaune d’œuf, le sirop de guimauve et l’infusion de bourrache. Seizième Jour. La première garde-robe depuis le commencement de la maladie n’avoit eu lieu que le quatorzième jour; le seizième il y eut des borborygmes qui me déterminèrent à mettre dans le lok une once de manne au lieu du sirop de guimauve, et d’y ajouter un grain de kermès. Nous eûmes une évacuation semblable à celle du qua- torzième jour, et trois autres bilieuses, sans que le ma- lade en parût affoibli. Cet effet m’induisit en erreur, et j'en tirai faussement la conséquence que je pouvois solliciter des garde-robes à des intervalles ménagés. Dix - septième Jour. Le soir même, le ventre devint si prodigieusement gonflé , que le lendemain on auroit jugé qu’il contenoit au moins sept à huit pintés d’eau. Un examen rigou- reux me fit reconnoître que ce gonflement étoit prin- cipalement dù à l’infiltration des tégumens. La percus- " sion, ilest vrai, n’indiquoit aucune collection de fluide dans l’intérieur ; mais elle ne laissoit aucun doute sur l’existence d’une vraie tympanite. Le scrotum avoit le sextuple au moins de son volume : la peau en étoit violette. Les urines, qui jusqu'alors avoient bien coulé et avoient été souvent de bonne couleur, se supprimèrent pendant quinze heures, et le malade tomba dans ua 446 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES assoupissement alarmant, ce symptôme autorisant le soupçon d’une infiltration dans le cerveau. Ce soupçon ne fut point confirmé. Les boutons, ou plutôt les pla- ques du visage, se séchèrent sans rendre de pus; seu- lement, quand on les perçoit, il en sortoit quelques gouttes d’une sérosité sanieuse. Elles formèrent un mas- que d’un brun noir effrayant , le visage restant toujours un peu gonflé, et exhalant une odeur putride aigre , qu’il étoit difficile de soutenir pendant quelques minutes. Sur le reste du corps les plaques se déchirèrent, sans doute par suite de la distention énorme de la peau, que l'air, qui se dégageoit des liqueurs en putréfaction , ren- doit emphysémateuse. A leur chûte succéda une déman- geaison si insupportable, que, malgré sa résolution et les précautions qu’on avoit prises, cet infortuné se dé- chira par-tout. La vue de ce corps ainsi écorché étoit affreuse. Les plaies étoient pâles et blafardes ; il en sortit une si grande quantité de liqueur rousse, que deux draps ployés en huit, dont l’enfant étoit enveloppé , en furent imbibés chaque jour pendant cinq. Les bases des boutons varioleux étoient comme autant de fontaines d’où cette humeur sourdoit à vue d’œil. Dix -/huitième jour. Pour seconder cet écoulement , le dix-huitième jour, je coupai sur les mains, les bras, les cuisses et les jambes, toutes les pustules qui n’étoient pas encore ouvertes, et principalement celles dont la couleur étoit d’un violet foncé ou d’un bleu noirâtre. UT ‘D EU PH Y(S QU E. 447 Dix-neuvième et vingtième jours. Le dix-neuvième jour ne présenta aucun changement sensible, à l’exception du cours des urines, qui s’étoit rétabli le dix-huitième au soir, et devint considérable le vingtième. Mais dès ce jour les douleurs de ventre et les borbo- rygmes se réveillèrent. Comme elles étoient accompa- gnées d’envies fréquentes et infructueuses d’évacuer que les demi-lavemens ne soulageoient pas, séduit par la facilité avec laquelle le malade avoit soutenu une éva- ‘cuation de matières dures et trois autres bilieuses, le sei- zième jour, après un lok dans lequel entroient la manne. et le kermès , je lui fis prendre en deux fois l’infusion d’un scrupule de rhubarbe dans huit onces d’eau de bourrache , et édulcorée avec quatre gros de sucre, dans l'intention de procurer une ou deux évacuations seule- ment. J’en obtins en effet trois, très-bilieuses , ou, pour mexprimer d’une manière plus juste, aqueuses, fort jaunes ; mais, dès le soir même, les douleurs de ventre furent plus vives, plus continues, et n’exprimoient qu’une eau rousse. Les yeux ternes, le pouls petit, vif, et la respiration gênée, étoient accompagnés d’une grande foiblesse. Je me hâtai de réparer ma faute en donnant des poudres absorbantes et de la potion avec la teinture de quinquina, la confection d’hyacinthe et le sirop d’œillet. L’évacuation cessa, et les symptômes qui m’a- voient effrayé se calmèrent ; maïs ils me tinrent toujours sur mes gardes, En conséquence , je ne me déterminai à 448 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES prescrire un véritable purgatif que le trentième jour de la maladie, ayant de plus l'attention de faire prendre, le soir de la purgation, une prise de la poudre absor- bante dans deux cuillerées de la potion. La cessation totale de l’écoulement et l’exsiccation de l’épiderme, la diminution des urines revenues à la quantité proportionnée à la boisson , la souplesse et l’in- dolence du ventre, le retour du sommeil et d’un appétit modéré, furent les motifs qui me décidèrent à une se- conde purgation : elle fut suivie de deux autres, mais à des distances très-éloignées. Que l’on se représente cet enfant échappé à une fonte aussi extraordinaire, et l’on concevra combien la con- valescence a dû être longue et difficile, combien il a fallu de ménagemens dans le choix et la quantité des nourritures (1) ; le moindre délit en ce genre auroit pu éteindre le peu de vie qui restoit. Heureux le médecin qui rencontre auprès de ses malades, et sur-tout de ses convalescens, des personnes aussi intelligentes, aussi éclairées, aussi actives et aussi véritablement tendres, que la maîtresse de pension à qui ces malheureux en- fans étoient confiés! Je lui dois la justice de publier que ses soins infatigables jour et nuit, son exactitude 0 (:) Nous avons un grand nombre de traités diététiques : il en est un qui nous manque ; c’est celui qui établiroit des règles, raisonnées en principes , pour la diète des convalescens, ouvrage non moins important que les traités de thérapeutique. Je communiquerai par la suite les principales réflexions que l'expérience m'a suggérées à ce sujet. MT ln 0 VBE À 911 F0 € 449 scrupuleuse à faire exécuter les conseils que je donnois , ont autant contribué à leur guérison que mes ordonnances. Dans le compte que j’ai rendu de la complication de la petite vérole avec le millet, j’ai tracé l’histoire des phénomènes qui ont eu lieu lorsque cette complication s’est établie au commencement de l’éruption varioleuse , ou dans le cours de cette éruption, ou enfin lorsqu’étant terminée , les boutons commençoient à se gonfler et à se remplir de la matière qui devoit se convertir en pus. Pour compléter le tableau de cette complication, je dois décrire les effets qu’elle a produits sur les malades en qui le millet ne s’est développé que pendant la suppu- ration des boutons du visage, ou quand ceux-ci com- mençant à brunir, ceux de la poitrine , du ventre ou des extrémités , parvenoient à leur degré de maturité. SE CO N DE VE IS. TO I RE. Trors enfans + le dixième jour de leur petite vérole, qui avoit été discrète ou cohérente , mais peu orageuse, les croûtes, suites de la suppuration, étant formées et sèches au visage, et plusieurs même déja tombées à la poitrine et au ventre, se plaignirent de petits froids de peu de durée, et de chaleur proportionnée qui leur suc- cédoit et se dissipoit promptement. Cet état dura vingt- quatre heures. Le pouls étoit fréquent, petit et serré; le sommeil s’enfuit, quoiqu'il y eût de l’accablement. _ Cet accablement étoit interrompu par de fréquentes agi- tations causées, suivant les réponses des malades, par 1, 57 450 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES un sentiment de chaleur incommode à l’intérieur. Les urines étoient crues , la respiration gênée et de loin en loin entrecoupée par des soupirs. Le lendemain l’éruption miliaire parut et se com- pléta le troisième jour sur la poitrine, le ventre, les cuisses et les jambes ; alors les symptômes précurseurs, que je viens de décrire, s’évanouirent. Le seul changement que j’apperçus sur le visage et sur les lèvres fut que les croûtes varioleuses , applaties ét brunes, laissoient suinter une sérosité roussâtre qui rendoit la peau voisine pâle et blafarde. La suppuration des boutons devint ichoreuse aux cuisses. Les pustules, qui étoient restées très-distinctes sur ces parties, et prin- cipalement aux jambes, se confondirent et formèrent de larges vessies , qui dégénérèrent en petits ulcères, et fu- rent très-long-temps à se sécher. Cinq jours après l’éruption, la démangeaison sur pres- que toute l’habitude du corps fut égale à celle qui avoit si cruellement tourmenté les malades précédens. Ce fut alors que les urines reprirent leur couleur; car, à dater du lendemain de l’éruption miliaire, elles avoient été fort abondantes et limpides. Comme ces malades n’avoient pas ressenti les dou- leurs du ventre, qui avoient été le prélude et la cause des plus grands accidens chez les autres, on put les purger plutôt. Deux ont conservé pendant long-temps les ulcères des jambes, malgré des purgations réitérées ; ils n’ont cédé qu’à l’usage du lait, coupé avec une décoction de squine. DR TA MD ET ex EI 0 'E. 451 M'iim co: ris IMAE 0 ESS rio rie UE. Au commencement de janvier 1771, j’ai été appelé auprès d’une jeune personne âgée de dix-huit ans; elle portoit encore les croûtes sèches d’une petite vérole con- fluente qui avoit été très-orageuse. Je la trouvai acca- blée, pouvant à peine répondre à mes questions , ne se plaignant d’aucune douleur, seulement de petits froids qui se répandoient le long du dos et aux extrémités. Le pouls étoit petit-et serré ; la respiration gêènée, en- trecoupée de soupirs ; la peau étoit sèche et brülante. Le soir, le visage se gonfla, et il s'établit une petite sueur à la tête et sur le trouc; le pouls devint alors plus développé, plus souple et moins accéléré. Lie lendemain le gonflement du visage s’étendoit sur tout le cou ; il ÿ eut mème sur le front quelques vessies peu élevées qui ne rendirent aucune humeur. ; Le même jour, dans! l'intervalle de dix heures du matin à huit heures du soir, la poitrine fut couverte de millet qui augmenta en grosseur , pendant deux jours ; et ne disparut qu’à la fin du cinquième jour, à dater de sonéruption. Il resta toujours sous la forme de millet, et ne se convertit point ci vessies, Les croûtes du visage ,.de la poitrine et des bras ; de- vinrent d’un brun plus foncé, et plus dures pendant les trois premiers jours de. l’éruption miliaire; elles s’humectèrent le quatrième , et laissérent suinter une li- queur limpide, mais en petite quantité; elles se déta- | 452 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES chèrent le sixième jour, et firent place à des écailles qui restèrent long-temps attachées à la peau. Pendant plusieurs jours la malade fut tourmentée , par une déman- geaison insupportable, sur presque toute l'habitude du corps. ñ Le traitement fut celui que je venois d'employer sur mes petits malades. Cette histoire terminera celle de la série des petites véroles annoncée au commencement de mon mémoire. Le recueil de mes observations ultérieures en contient un grand nombre , dont je rapporterai seulement les plus propres à faire réconnoître la marche de la nature dans ces complications. Les lumières qu’elles répandront sur cet objet important, seront d'autant plus certaines ; que la petite vérole s’y trouve compliquée seulement du millet. Qw'A TRE RME Mir STOrRE. À la fin de séprétbre 1793, ma fille âgée de neuf ans fut prise de la petite vérole. Elle étoit dans une campagne où l’on n’avoit pas entendu parler de cette maladie depuis plus de huit ans. A l’exception de légers engorgemens des sinus frontaux, que le public appelle rhumes de cerveau, sa santé avoit toujours été excel- lente. Délicate en apparence, elle étoit forte, vigou- reuse , et toujours de la plus grande gaieté. Sur la fin du troisième jour de la fièvre, je la ramenai à Paris dans un cabriolet découvert. L’éruption s’annonça pendant que nous étions en route ; elle fut complète le septième # mire (D etre vils rQ U:E. 453 jour. Les boutons étoient en assez grande quantité, mais très-séparés , élevés en pointe bien saillante, et ayant. chacun une base vermeille. Dès le quatrième jour la fièvre étoit tombée. Le huitième jour les boutons commencèrent à se gon- fler au visage ; le neuvième et le dixième, leur gonfle- ment étoit à son point , et déja leur sommité commençoit à se ternir; en un mot, tout promeitoit une marche et une terminaison paisibles. Les évacuations étoient telles qu’elles devoient être. Mais le dixième au soir ma malade fut très-agitée, ayant la peau aride et se plaignant d’une chaleur brûlante dans l’intérieur. La fièvre se ralluma ; la respiration étoit gènée, les urines couloient fréquemment ét en petite quantité ; elles étoient limpides. Il n’y avoit point d’al- tération, point de sommeil, maïs un peu de délire. Le lendemain matin, lui trouvant encore la peau très- aride et chaude, je lui donnai un lavement à l’eau. La peau devint plus humide, et deux heures après j’ap- perçus sur le cou , la poitrine et le ventre, une éruption miliaire fort abondante, sur-tout au-dessus des clavi- cules et à la région épigastrique. La fièvre , l'agitation et la chaleur, diminuèrent sensiblement (c’étoit le on- zième jour de la maladie). Les boutons miliaires con- servèrent leur brillant le douzième et le treizième; mais le quatorzième au matin ils étoient ternes, et le sei- zième on n’apperçut plus que des points farineux. Pendant tout le temps que les boutons miliaires ont Là été sensibles, c’est-à-dire depuis le onzième jour jusqu’au 454 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES quinzième , les boutons varioleux du visage , qui étoient gonflés et pleins , sont restés sans altération. Il y en avoit peu au tronc. Ceux qui étoient sortis aux extrémités étoient les moins avancés ; ils ne prirent aucun accrois- sement. Le quinzième jour au soir, les boutons du visage bru- nirent : plusieurs rendirent une liqueur épaisse , jaune; d’autres, mais en plus petit nombre , une matière plus claire et de la même couleur. Ceux du tronc et des ex- trémités se gonflèrent et se remplirent. L’humeur qu’ils contenoient est restée pâle et un peu claire pendant deux jours; mais enfin elle s’est épaissie. L’exsiccation com- plète n’a eu lieu que quatre jours après celle des pus- tules du visage; ce qui à prolongé la durée de cette petite vérole discrète jusqu’au dix-neuvième jour, en comptant du jour de linvasion. Ci xs woue à muet Hunts loir Gr. Millet survenu au commencement de la suppuration de la petite vérole. Ex 1774, madame David , demeurant rue de l’Arbre- Sec, âgée detrente ans , mariée depuis plusieurs années, etn’ayant point eu d’enfans , d’une bonne santé, a eu une petite vérole qui, quoiqu’abondante et même confluente au visage, avoit parcouru sans aucun accident grave les deux périodes de l’éruption et de la maturation. Le ptyalisme avoit commencé avec la maturation; il étoit abondant, et la matière peu épaisse, peu gluante, ET DE PHYSIQUE. 455 Le troisième jour de la maturation, le visage étant très-gonflé , la malade se plaignit de petits froids vagues suivis de chaleurs âcres qui se répétèrent plusieurs fois, de douleurs des lombes, de difficulté de respirer, d’un feu dévorant dans la gorge. Le ptyalisme fut suspendu, et le délire commença. Tous ces accidens s’établirent en moins de quatre heures. Je crus devoir m'occuper d’abord du ptyalisme. Je prescrivis un gargarisme avec six onces de vin rouge , deux gros d’esprit ardent de cochléaria et deux onces de miel blanc. La malade en gardoït une petite cuillerée dans sa bouche le plus long-temps qu’elle pouvoit, et, immédiatement après, une cuillerée d’eau d’orge légère- ment sucrée. Ces mêlanges procurèrent la sortie d’une humeur gluante , visqueuse, qu’on étoit obligé d’extraire de la bouche avec un linge. Cet orage s’étoit annoncé sur les deux heures de l’a- près-midi. Le soir, l'agitation, le délire, le transport même , étoient extrêmes ; le pouls étoit inégal, précipité ; la respiration entrecoupée de soupirs. La malade n’ayant point évacué depuis l’invasion de la petite vérole , je lui fis donner un lavement à l’eau: il entraîna des matières fort dures. Je recommandai de fréquentes boissons délayantes avec la bourrache, la pa- riétaire. J’examinai avec attention l’interstice des boutons ; OU plutôt des plaques au visage. Ils étoient tels qu’ils de- voient être à cette époque de la petite vérole ; maïs entre ceux du cou et de la poitrine la peau étoit fort rouge ; 456 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES et les boutons , au lieu de s’élever de plus en plus, çes- toient applatis et faisoient le godet. Je crus reconnoître les signes avant-coureurs du millet dans cet ensemble d’accidens et de phénomènes , dont la persévérance rendit la nuit très-orageuse. M. Borie fut appelé en consulta- tion, et nous décidàmes l’application de deux larges vésicatoires aux jambes’, la continuation des boissons délayanies, diurétiques ; des poudres avec les yeux d’é- crevisses, la poudre tempérante de Stahl et le sucre, que javais conseillés la veille. La malade les prenoit dans de la gelée de groseilles. La journée fut un peu moins agitée ; le ptyalisme se rétablit et continua pendant six jours de suite. Il y eut une garde-robe dans le jour, sans affaissement. Le soir j'apperçus le cou, la poitrine et les bras , couverts d’une grande quantité Ae boutons miliaires très-durs. Cette éruption augmenta beaucoup pendant la nuit, parut terminée le surlendemain, subsista encore un jour; et sur la fin du cinquième jour, à dater de celui de leur apparition, les boutons se ternirent, se séchèrent ensuite, et disparurent. Les boutons et les plaques du visage (car la con- fluence n’étoit pas générale) qui, dès l'invasion du mil- let, avoient pris une teinte brune, se séchèrent et ne fournirent aucune matière épaisse. De dessous la croûte noire et épaisse qu’ils formèrent, il sortit, quatre jours après le commencement de l’éruption miliaire, une eau xoussâtre, qui causoit les cuissons les plus incommodes. Je. crus devoir les calmer en les étuvant souvent avec ENT LD EN D'HMYAST QU: Er 457 une décoction d’orge dans laquelle on avoit fait infuser une pincée de mélilot. Le cinquième jour après l’éruption miliaire, les bou- tons du cou et de la poitrine, qui s’étoient d’abord un peu affaissés et étoient restés dans cet état pendant toute la durée du millet, se gonflèrent à la vérité, mais ne se remplirent que d’un ichor jaunâtre qui se sécha en vingt-quatre heures ; les croûtes qui en résultèrent pri- rent, ainsi que celles qui s’établirent de même sur le ventre, aux cuisses et aux jambes, un accroissement qui les faisoit ressembler à ces masses de croûtes laiteuses dont le visage des enfans est souvent couvert, mais plus brunes. Il sortit de dessous abondamment, pendant douze jours, un ichor semblable à celui qu’avoient rendu les croûtes du visage. Elles se séchèrent enfin tout-à-fait; mais la malade n’en fut totalement débar- rassée que plus de six semaines après l’invasion de la petite vérole. Elle avoit beaucoup souffert des déman- geaisons par tout le corps, cependant moins que les enfans que j’avois traités de la même complication en 1770. L Les boissons furent mucilagineuses , diurétiques, et de temps en temps elle prenoit une cuillerée de la po- tion cordiale que j’avois employée pour les enfans ; elle fit aussi usage chaque jour de trois paquets de la poudre absorbante cordiale , à laquelle j’ajoutois , de deux jours Vun, huit grains de la poudre tempérante de Stahl. Le ventre ne s’ouvrit que de distances en distances ; les urines furent toujours abondantes; et la malade , à 1, 53 458 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES qui j’avois expressémentrecommandé d'éviter l’air froid, s’est parfaitement rétablie. Elle avoit eu ses règles avant Vinvasion de la petite vérole; elles mont reparu que deux mois après , sans plus grande abondance qu’à Lor- dinaire. SUR UT REV ERM EL TRS MENO MIRE: ÎWillét survenu dans la maturation de la petite vérole, dont l'éruption avoit été accompagnée de celle des règles. Mapemoiserre ***, demeurant rue Mêlée, âgée de dix-neuf ans, d’une santé forte et robuste en apparence, mais éprouvant de fréquens maux d’estomac, ayant néanmoins de belles couleurs et de l’embonpoint, fut obligée de garder le lit, ayant une fièvre violente avec mal de reins , de tête, et assoupissement. Le troisièmer jour la. petite vérole parut; elle fut abondante, maïs: simplement cohérente. Les règles prirent en même temps; elles coulèrent fort, durèrent six jours, et furent accompagnées d’étouffemens. Leur effet sur la petite vérole fut d’en retarder l’éruption, qui ne fut terminée que le sixième jour. J’ajoutai quelques feuilles d'oranger à la scorsonère ;: au chiendent et à la réglisse, qui composoient la tisane, et des poudres avec des yeux d’écrevisses, le nitre et le: sucre. Deux jours après l’éruption finie, au moment où le gonflement du visage étoit très-avancé, la malade a ET DE PH YSI QU +. 459 ‘éprouvé Les Symptômes avant-coureurs du millet, des ressentimens de froid et de chaud successifs, des dou- leurs dans les lombes, de la gène dans la respiration, avec soupirs par intervalles , des sueurs, principalement au visage ét'shr la poitrine. Ces symptômes ont eu moins d'intensité que chez la dame de l'observation précé- dente ; ce que j'ai attribué à la grande évacuation pro- curée par les règles. Le gonflement du visage a été suspendu ; les boutons du reste: du corps, qui étoient distincts , sont restés pen- dant trois jours dans le même état où ils étoient au moment de l’éruption miliaire. Enfin le millet, s’étant amorti , à la fin du quatrième jour, au visage , s’est relevé et s’est étendu régulièrement sur le reste-du corps : mais les boutons de petite vérolesont restés clairs la suppura- tion a étéichoreuse ; et na duréque deux jours ; les croûtes qui se sont formées sont restées long-temps attachées à la peau , sur-tout celles des jambes, qui ont rendu abon- damment, et pendant huit jours, un ichor sanieux. Des lotions tièdes, avec la décoction d'orge et de mélilot,; répétées quatre à cinq fois par jour , ont modéré et calmé enfin les démangeaisons fatigantes qui accompagnoient ce suintement. Cette jeune personne a été beaucoup mar- quée et a perdu beaucoup de son ‘embonpoint ; cepen- dant, deux mois après, elle se portoit parfaitement bien. Je crois ces faits particuliers, auxquels j’en pourrois ajouter plusieurs autres, suffisans pour fixer notre ju- gement sur l'effet que l’éruption miliaire a produit dans la marche de la petite vérole. J'ai décrit avec la plus 460 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES grande exactitude les états par lesquels les malades ont passé ; j’ai spécifié les symptômes qui se sont présentés à chaque époque , ainsi que les précautions qu’ils m’ont paru exiger dans le traitement. Si j'ai été un peu prolixe, et même minutieux dans les détails, j'espère qu’on me le pardonnera en réflé- -chissant sur l’embarras que j’ai dû éprouver. Je suis tombé dans une route qui nr’étoit absolument inconnue : aux premiers pas, j'ai rencontré des précipices que la mort habitoit. J’ai cherché, pour me guider, des lu- mières dans les auteurs les plus justement célèbres qui ont écrit l’histoire de la petite vérole et celle de la fièvre miliaire. T'rès-peu ont parlé de la complication de ces deux maladies ; encore n’en ont-ils dit qu’un mot, et ce mot jetoit le désespoir dans mon ame , il n’annonçoit qu’une issue déplorable ; ou , si un malade avoit échappé à la mort, rien n’indiquoit ni les symptômes qui s’étoient succédé , ni le traitement qui l’avoit arraché à la com- mune destinée des autres. La dissertation seule d’Ha- milton releva mon courage ; j’y puisai des principes lumineux, üne application heureuse de ces principes dans la conduite qu’il tint avec la femme qui fait l’objet de son observation. Les circonstances , à la vérité, n’é- tant pas exactement les mêmes , les mêmes remèdes ne pouvoient pas convenir ; mais les règles fondamen- tales du traitement étoient posées, et la combinaison méditée de ces règles et des symptômes que j’avois à combattre, en détermina l’application et le succès. On ne regardera , si l’ou veut, mes observations que ET) DE PHYSIQUE. 461 comme la confirmation d’une méthode , déja connue , de guérir dans des cas vraiment difficiles, qui ne se sont point présentés aux regards des observateurs modernes, ou qui leur ont échappé, ou qu’enfin ils ont rangés dans la classe de ces fléaux terribles qui donnent une mort si prompte qu’ils ne laissent pas même lieu à l’espoir de les adoucir. Cependant j’ose assurer que nulle part on ne trouvera une description aussi détaillée, aussi exacte, des différens phénomènes qui ont suivi cette complication , à quelque âge de la petite vérole qu’elle se soit présentée. C’est pourquoi je me suis fait un de- voir de ne rien négliger de ce qui peut augmenter l’in- struction , de ce qui peut rassurer le courage du praticien, éclairer sa marche, etenfin augmenter les services que la médecine observatrice rend à l'humanité. C’est le seul but de ce recueil de faits, dont je vais résumer les con- séquences. Dans l’espace de quatre mois, vingt-cinq enfans, du quatre seulement sont morts, ont. essuyé cette compli- cation de la petite vérole et. du millet ; depuis je lai vue et suivie plusieurs fois chez des enfans et des adultes, avec la plus sévère attention et la plus scrupuleuse exac- titude. J’ai tenu un, registre exact de leur situation jour par jour, et constamment j’ai observé que l’influence du Héle sur la petite vérole consistoit: - En ce que la préparation de l'éruption réa mn la sortie ou la maturation des boutons va- rioleux , lorsqu'elle survenoit pendant ou après leur sortie , et que les boutons sortis restoient au même point 462 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d’élévation et de grosseur où les prenoit le travail de la nature pour l’expulsion du millet; seulement, lorsqu’ils étoient un peu avancés, leur pointe s’affaissoit, et leur base perdoit la vivacité de sa couleur; mais aussitôt que de millet s’effaçoit , ils se relevoient : ceux qui mavoient pas encore paru sortoient, se remplissoient, et tous , s’il n’y avoit pas d’autre complication , si la petite vérole étoit simple, parvenoient à leur maturité et à une sup- puration (1) plus ou moins séreuse.- 2°. En ce que, si l’éruption miliaire ne se faisoit que pendant et même après la maturation des pustules varioleuses, l’humeur ‘varioleuse étoit dénaturée, elle ne prenoit point le caractère de ce qu’on appelle pus; mais, décomposée ; déliyée ; dissoute , si je peux parler ainsi, elle dégénéreit en un ichor qui produisoit sur la peau‘le même éffet ‘qu'un corrosif. Résorbée dans cet état, et par son action sur la lÿmphe, elle y-produisoit une décomposition effrayante, suivie d’un suintement excessif par les pores de Ja péau, sous les vessies où les croûtes varioleusés , et surstout d’une abondance ex- traordinaire d'urine.‘ 30. En ce que-cet effet a éè plus sensible, plus opi- niâtre et plus dangereux, chez les malades en qui la pe- tite vérolkrétoit déja compliquée avec les douleurs de ventre, qui se sont. faît sentir principalement dans la seconde ,:dans'la troisième et presque jusqwà la fin de {i) C’est le cas le plus SR dont ma fille et dix autres malades m'ont fourni l'observation. 7 ; Eur ! D EU PLHMYISOT OÙ Er: 463% la quatrième époque. Silesmêmes accidens ont été moins graves: à la fin de décembre 1770 et dans le cours de janvier 1771, je l’attribue à ce que les malades que j’ai traités alors ne se plaignoient point de ces douleurs qui avoient cruellement tourmenté les autres ; ce qui formoit alors double complication: J'ai: dit que l'humeur miliaire produisoit une décom- position énorme dans la lymphe. Ce fait me paroît in- contestable, car les années précédentes j’avois traité des petites véroles confluentes ; j’en avois traité, pendant la’ troisième époque, de très-malignes, ou putrides , comme on voudra les appeler, et jamais je n’avois remarqué ces phénomènes : je ne les ai pas remarqués davantage dans lés petites vérolés confluentes crystallirres que j'ai eues: à traiter depuis vingt-six ans, et auxquelles lé millet ne s’étoit pas joint. S Il'est vrai que, dans les petites véroles crystallines vésiculaires , on voitisortir pendant plusieurs jours, de dessous les vessies, une sanie rougeâtre et corrosive. Mais, 1°. cette sanie n’est point l’ichor que fournis- soit la peau sous les cioûtes varioleuses, et qui étoit si! abondant et'si fluide, quon étoit obligé de changer de- linge les maladés plusieurs fois par jour, et que, chez celui dont j’ai transerit l’histoire particulière, pendant cinq jours , elle a mouillé chaque jour deux draps pliés en quatre. Sa couleur, sa consistance, sa nature, son abondante, ne permettent pas de les confondre. 2°. Dans la petite vérole crystalline, l’humeur qui aborde à la peau est déja dégénérée , ou dégénère à l’instant même 464 MÉMOIRES D£ MATHÉMATIQUES qu’elle y'est déposée ; au lieu que , dans la complication du millet avec la petite vérole, sur-tout après l’éruption finie de cette dernière, et plus encore lorsque les bou- tons sont gonflés et remplis d’une humeur telle que Poffre la petite vérole simple , le millet survenant, cette hu- meur vraiment varioleuse est décomposée, délayée, et dégénère en ichor, ainsi que l’ont démontré les faits que j’ai rapportés , et ceux dont j’ai été témoin depuis. Je me crois donc autorisé à regarder cette espèce de dégénérescence de l’humeur varioleuse comme l'effet de l’humeur miliaire. La doctrine des auteurs qui ont écrit sur la fièvre miliaire simple ou seule , justifie plei-, nement mon assertion, puisque tous s'accordent à re. garder cette humeur comme Je dissolyant le plus puissant de la lymphe, à qui elle communique sa qualité irri-' tante et corrosive. Quelques personnes à qui j’ai communiqué ces obser- vations, ont, prétendu que l’éruption miliaire dont je parle n’étoit qu’une seconde pousse de petite vérole, et ont cité l’exemple d’éruptions successives de boutons varioleux, mème à des termes assez éloignés de la pre- mière invasion. La comparaison de la forme, de la couleur et de la terminaison des boutons miliaires et varioleux, suffira pour en faire reconnoître l’énorme différence , et me dispense d’une plus longue discussion, avec d'autant plus de raison que le millet est une ma- ladie connue, indépendamment de la petite vérole. Après avoir montré linfluence de l’humeur miliaire sur la marche et la terminaison de la varioleuse , il me œùT D 218% #6 à 6 v #i 465. rèste à indiquer l’influence qu’elle a eue et que je pense qu’elle doit avoir sur le traitement. En rassemblant les moyens pharmaceutiques et dié- - tétiques qui ont le mieux réussi, on verra qu’ils se ré- duisent à remplir les indications suivantes : modérer Vacrimonie de l’humeur miliaire; lier les principes de la lymphe pour les garantir d’une entière décomposition; soutenir les forces de la nature dans une lutte aussi longue et aussi périlleuse ; porter doucement à la peau la sérosité très-surabondante, effet de la décomposition ; en déterminer et seconder la sortie par les voies uri- naires ; à la fin de la maladie, et dans tout le cours, éviter avec soin tout ce qui étoit capable de solliciter et de forcer les évacuations du ventre, qui n’étoient salutaires que quand le calme étoit solidement établi. Pour y parvenir, j’ai constamment donné, 1°. des boissons adoucissantes , mucilagineuses, auxquelles j’as- sociois des diaphorétiques et absorbans, proscrivant ab- solument les acides ; 2°. une potion légèrement cordiale, dans laquelle j’évitois avec soin les spiritueux volatils ÿ 3°. des diurétiques doux que je mariois avec les muci- lagineux ; 4°. enfin les minoratifs un peu toniques. La nature mucilagineuse des boissons que j’ai continuées pendant tout le cours de la maladie, me dispensa d’a- voir recours aux bouillons de viande; aussi j’en permet- tois très-peu, et il étoit fort léger. À cet exposé succinct des moyens curatifs employés j’ajouterai des modifications que j’ai jugées très-impor- tantes. LE 59 466 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 1°. Quoique les vésicatoires ne m’aïent pas paru avoir procuré une vraie diminution dans les accidens , comme cependant ils ouvrent une large issue à la sérosité , je conseille d’y avoir recours, avec les précautions de ne charger l’emplâtre épispastique, qui en fait la base, que d’une médiocre quantité de poudre de cantharides, le quart, ou tout au plus le tiers, de ce qu’on a coutume d’y mêler ; d’y incorporer du camphre à assez forte doseg enfin de ne panser les plaies qu'avec du cérat de Galien, dans une once duquel on aura exactement étendu vingt- quatre grains de poudre de la seconde écorce de sain bois, et deux grains d’euphorbe : on-répétera le pan- sement trois fois dans les vingt-quatre heures. 20, J’ai observé qu'un gros, un gros et demi de quin- quina, ajouté dans une pinte des décoctions mucilagi- aeuses et diaphorétiques, qui formoient la boisson or- dinaire , produisoit des effets très-avantageux aux malades dont les fibres étoient molles et lâches, et à ceux dont les pustules dégénéroient en vessies violettes ou brunes. 3°. Dans cette complication de la miliaire et de la petite vérole, la boisson ne doit pas être aussi abon- dante que dans les petites véroles ordinaires : la grande quantité de sérosité dont la peau est abreuvée, et qui dénature la matière propre de la petite vérole, la contre- indique. 0 4°. Il est très-nécessaire de tenir les malades plus chaudement, c’est-à-dire plus à l’abri de l'air froid , que dans les petites véroles simples ; il faut également se ET DE PHYSIQUE. 467 garantir d’une trop grande chaleur, et renouveler Pair de la chambre de temps en temps, avec les précau- tions de ne point laisser le malade exposé à son im- pression subite. J’ai ouï dire à quelques personnes que, pour empècher ou au moins diminuer une éruption aussi dangereuse , il falloit tenir les malades levés, et même à l’air libre, J’avouerai que j'ai regardé ce conseil comme le fruit d’un système, plutôt que comme le résultat de l’expé- rience, et que je mai point eu cette hardiesse. Je crois d'autant moins avoir eu tort, que des malheurs, dont je rapporterai l’histoire ci-après, m’ont convaincu de la solidité du principe que j’établis. Bien plus, il est des sujets inoculés que les partisans les plus décidés du régime froid n’osent exposer à l’air, pour peu qu’il soit froid et humide; et même c’est sur la témérité de cer- tains inoculateurs qui, entêtés de leur routine, ne res- pectent ni la saison, ni le jour, ni la nuit, ni la déli- catesse des malades, que l’on a rejeté avec raison le funeste sort de quelques-uns d’entre eux. Enfin Hamil- ton; qui a traité de cette complication du millet avec la petite vérole , et les auteurs qui ont écrit sur la fièvre miliaire seule, avertissent tous qu’il faut éviter l’air froid avec grand soin; j'ajoute que l’on doit étendre cette précaution même bien avant dans la convalescence: 50. Il est aussi de la plus grande importance quil n’y ait pas plusieurs de ces malades rassemblés dans la même chambre. S’il n’est pas possible de les placer tous dans des pièces séparées, il faut au moins que leurs lits * 468 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES soient très-éloignés les uns des ‘autres; car j'ai eu la preuve que l’odeur putride qui s’exhaloit de ces malades et se répandoit dans une atmosphère assez étendue, étoit très-préjudiciable à ceux qui l’étoient moins , puis- que , transportés dans une autre chambre, la foiblesse, l’'anéantissement qu’ils éprouvoient avant , se dissipoient en peu de temps. 6°. Quand le suintement ou l’écoulement de la séro- sité est établi, il faut changer souvent les linges qui les enveloppent, tant pour favoriser cette évacuation par Vapplication d’un linge sec, sans être chaud , que pour diminuer le mal-être affreux dans lequel ces infortunés se trouvent, la sérosité, devenue corrosive par son sé- jour ét action de Pair, bràlant pour ainsi dire leur peau ; mais sur-tout pour les délivrer de l’odeur infecte que répand bientôt cette sérosité échauffée, odeur qui affecte visiblement le cerveau et la poitrine. 79. Il faut scrupuleusement veiller sur leur nourriture: Parvenus à la convalescence, ils sont tourmentés d’une faim dévorante, et, grands comme petits, également sourds à la raison, ils dévorent tout ce qui est à leur portée. Les indigestions ,; les dévoiemens , qui en résul- teroient , seroient très- dangereux. Les alimens qui les rétablissent le mieux sont ceux qu’ils digèrent aisément, qui fournissent un suc nourricier doux , qui n’exfge pas une grande quantité de sucs digestifs pour parvenir au degré d’animalisation nécessaire. La dose doit en être ménagée pour chaque repas, sauf à la réitérer à des distances conveuables : on doit leur permettre un peu LA ÊT DE PHYSIQUE. 469 de vin vieux. Autant il est prudent et utile de modérer la quantité des alimens, autant il est dangereux de prolonger trop long-temps la diète, sur-tout pour les enfans. L’expérience journalière confirme évidemment ce grand précepte d’Hippocrate : « Les vieillards sup- » portent très-facilement l’abstinence des nourritures ; » les hommes faits, moins : mais les jeunes gens, et » sur-tout les enfans, ne la supportent point, et spé- » cialement ceux de cet âge qui sont très-vifs. » J’ai dit, n°. 4, qu’il falloit étendre bien avant dans la convalescence la précaution de ne point laisser ex- posés à un froid subit, ou trop long-temps à un air humide , les malades qui avoient essuyé la complication du millet avec la petite vérole. Ce précepte est dicté par l’expérience. Il n’est pas à négliger même pour les enfans cacochymes qui ont eu la petite vérole toute simple ou confluente. En effet, j’ai vu plusieurs de mes malades , trente ou quarante jours, et même plus long- temps après cette maladie terminée, devenir tout-à-coup ‘bouffis, et avoir une infiltration œdémateuse ; non seu- lement au visage, mais aux extrémités, au ventre, et spécialement au scrotum. Chez ceux en qui cette bouf- fissure ne s’est formée que petit à petit, l’usage des poudres absorbantes diaphorétiques , des boissons légè- rement diurétiques , joint à la chaleur modérée du lit, a rétabli la transpiration ; et le cours des urines, devenu plus libre et plus abondant, après une moiteur de huit à dix heures, a consommé la guérison. Mais chez ceux en qui l’œdème s’est élevé brusquement ou en peu 470 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES d’heures, le traitement a été plus difficile, plus long; on a été obligé de marier les antiscorbutiques aux diu- rétiques , de recourir aux purgatifs, aux vésicatoires, aux mouchetures. Ces moyens n’ont pas toujours été assez puissans : j’en pourrois citer plusieurs exemples ; je me bornerai à quelques-uns. SEP DT D ENVIE EUTIS TO 1 EE, Bouffissure causée par le froid après une petite vérole compliquée de miller. Ex 1771, un enfant âgé de sept ans et demi, étant resté un peu trop long-temps à l’air par un temps froid et humide, devint tout d’un coup bouffi par tout le corps. C’étoit le quarante-cinquième jour après l’inva- sion de la petite vérole, qui, le troisième jour, avoit été compliquée avec l’éruption miliaire. Le lendemain, à l’aide de la chaleur modérée du lit, et d’une tisane avec la graine de lin, la pariétaire et l’oxymel sciili- tique , les urines coulèrent abondamment, et l’enflure toit beaucoup moindre, Le troisième jour, étant tour- menté de coliques et ayant eu deux évacuations bilieuses très-épaisses et spontanées, il fut purgé. L’enflure des mains, des cuisses, des pieds, étoit si fort diminuée, qu’il y avoit tout lieu d’espérer une prompte guérison. Ce- pendant son air triste et languissant, son œil morne, son visage froid, ne me permirent pas de rassurer sur son état. Je craignis un orage, et je le craignis dans le ventre. Je fus trompé, au moins quant au licu; car, ENT DER (PAM YiS IN Ù Éi 471 le cinquième jour au soir, il eut une attaque de con- vulsion universelle et violente. Malgré les potions les plus animées, les vésicatoires, il resta absorbé ; ses yeux étoient brillans et éteints. Le lendemain , un nou- veau paroxysme l’emporta. Comme on l’avoit transféré de la pension chez ses parens, je ne le vis point le der- nier jour : on ne m’avertit pas de sa mort, et je ne pus m’assurer du pronostic que j’avois annoncé d’un épan- chement aqueux dans la tête. La saillie des yeux hors de l'orbite, pendant et après les convulsions, m’avoit autorisé à porter ce jugement. En effet, je l’ai plusieurs fois observé comme un signe vraiment pathognomonique de l’hydropisie du cerveau. Hui:zTsrième HisToz:zes. Bouffissure causée par le froid après la petite vérole , et suivie d'une scarlatine. Un enfant âgé de dix ans (Courcilly l’aîné , pension- naire chez Colin), avoit eu une petite vérole très-dis- crète et sans orages, quoiqu'il eût essuyé, l’année pré- cédente, une rougeole suivie d’une éruption pourprée, dont il avoit été fort malade, et qui avoit développé en lui des symptômes évidens d’un scorbut peut-être hé- réditaire. Trente-sept jours après sa petite vérole, il eut une fièvre scarlatine irrégulière dans son éruption, mais qui cependant se termina sans accidens par la desquamation de la peau. Il avoit déja été purgé plu- sieurs fois après sa petite vérole, il le fut encore après 472 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES cette seconde maladie. Tout annonçoit qu’il étoit par- faitement rétabli , la couleur de son teint, sa gaieté, son appétit, la bonté et la régularité de ses digestions, enfin le retour de ses forces, lorsque sa mère l’envoya chercher de grand matin, et le mit dans la nécessité de faire un chemin fort long à pied, dans la boue, et par un temps froid et humide. 11 arriva fort las. Dès le lendemain son ventre fut tellement tuméfié , qu’il ne pouvoit boutonner sa veste. Le jour suivant il se forma une hydrocèle qui s’accrut prodigieusement en peu de temps. Les urines ne cou- lèrent qu’en très-petite quantité; néanmoins l'appétit persista. # : Appelé le cinquième jour, je trouvai le malade dans l’état que je viens de décrire. Le pouls n’étoit point fiévreux, quant à la célérité de ses mouvemens; mais il étoit gêné, ne se développant pas régulièrement à chaque pulsation, sans intermittence cependant. L’enflure gagna rapidement les cuisses, les jambes et les pieds. L’hydrocèle devint si monstrueuse et si douloureuse , que je demandai le conseil d’un des plus célèbres chirurgiens de cette ville, de M. Moreau (1). Il examina attentive- ment, et ne jugea pas devoir tenter aucune opération. Mais , le lendemain, déterminé par le volume immense du scrotum, le gonflement du ventre et des extrémités inférieures , par la difficulté de respirer, telle que lon craignoit à chaque instant que le malade ne fût suffoqué, (2) Chirurgien en chef de l’Hôtel-Dien, MAT MORT PE NÉS (0 @ Ù: E. 473 et par les douleurs aiguës qui lui arrachoient des cris déchirans , il fit deux mouchetures, une de chaque côté du raphé. Il en sortit d’abord beaucoup d’eau ; mais les plaies furent bientôt fermées par une humeur blanche : très-épaisse, qui en recouvrit les bords. Les cuisses s’en- gorgèrent de plus en plus, devinrent violettes et très- douloureuses ; la gangrène commença au scrotum, s’é- tendit sur Le cuisses , et jusqu’au-dessus des os pubis. La dissolution du sang étoit évidente; mais ni les antiscorbutiques par lesquels j’avois débuté, ni Les acides minéraux les plus fortement dosés, qui y furent ajoutés, ne purent en modérer les progrès. Dès le commencement de cette maladie, les urines furent en très-petite quantité, brunes , noires, et ensuite presque ‘tout-à-fait sanglantes. Après l’usage continué pendant plusieurs jours de l'esprit de vitriol dulcifié, elles furent un peu moins chargées en couleur, mais déposant toujours un sédiment noirâtre. Il se forma plusieurs phlyctènes gansréneuses Qu rendirent beaucoup d’eau rousse. Malgré cette évacua- tion, lenflure s’étendit jusqu’au visage, et l’enfant ne cessa de souffrir des douleurs inouies par tout le corps » que pour tomber dans l’assoupissement et le délire: or- dinaire dans cet état. Il ne se plaïignit point d’altération pendant tout le cours de sa maladie ; il avoit toujours conservé de l’appétit, et trouvoit bon tout ce qu’il pre- noit. Devenu violet, et même noir en plusieurs endroits, après sa mort, la putréfaction ne tarda pas à se faire sentir. 1, 69 474 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES N'e urv rime nrNels lion Er. Strabisme et hémiplégie à la suite d’une éruption miliaire précédée d'une fièvre scarlatine. Ex 1771, un enfant de quatre ans (Courcilly le ca- det} , d’une complexion foible et délicate , mais très-vif, sujet à de fréquens accès de fièvre, avec altération et -le visage emfflammé , que terminoit une diarrhée bi- lieuse dont la durée étoit de deux ou trois jours, fut attaqué vivement d’une fièvre très-ardente, avec un assoupissement presque continuel, et seulement inter- rompu par des momens de délire, Le premier jour, la langue et la peau étoient fort sèches; le lendemain , il survint une sueur très-abondante, principalement au visage et à la poitrine : la fièvre persistoit à être forte; la peau , très-brülante , étoit un peu soulevée, et se cou- vrit du rouge le plus éclatant. On ne put méconnoître la fièvre scarlatine. Cet état persévéra jusqu’au cinquième jour. Il y eut alôrs une diminution sensible dans l’intensité de la fièvre et la rougeur de la peau. En examinant l’enfant attentivement, ce que je fai- sois chaque jour, j’apperçus de petits boutons blancs très-transparens ; sans base rouge, au cou. Cette érup- tion s’étendit rapidement et abondamment sur tout le corps ; le visage seul en fut excepté. La fièvre diminua chaque jour; mais les sueurs continuèrent. Les urines BA. DE lrPUE VESTE QU: «. 175 furent abondantes , d’abord un peu claires , ensuite d’une couleur citrine légère, et par la suite-plus foncée : elles exhaloient , ainsi que les sueurs, une odeur aïigre. Le millet se ternit le quatrième jour, et disparut le cin- quième, en laissant sur la peau des écailles fort dures: Dès que l’éruption miliaire avoit commencé , on s’étoit apperçu que les yeüx étoient tantôt fixes, tantôt diver- gens, tantôt convergens. Enfin, quand le dixième jour on voulut lever l'enfant, on reconnut que non squlement il louchoïit beaucoup, mais qu’il ne pouvoit se servir ni du bras droit ni de la jambe du même côté : cette pa- ralysie néanmoins n’étoit pas complète , il restoit encore quelque mouvement dans ces parties. La surface du corps étoit sèche; les écailles qu’avoit laissées le millet étoient très-dures, et si cohérentes , qu’on ne pouvoit les détacher, même en frottant très- fort avec un linge. . Cette hémiplégie m’étonna ; et quelqu’abondante qu’ait été l’une et l’autre éruption (si toutefois on peut don- ner ce nom à la fièvre scarlatine), je présumai qu’elle étoit produite par une portion de l’humeur miliaire qui ne s’étoit point fait jour au dehors, ou qui avoit été répercutée en laissant imprudemment l’enfant exposé à V’air. En conséquence , je me disposai à employer les su- dorifiques un peu stimulans ; mais, craignant que la sé- cheresse et l’aridité de la peau ne s’opposassent à l’effet de ces remèdes, et que le tempérament bilieux du ma- lade ne fût une vraie contre-indication, au moins pour procéder tout de suite à l'exécution de mon projet, je 476 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES me déterminai à le purger. Le ventre étoit souple et mollet, et deux purgations furent administrées à un jour d'intervalle , avec succès. ; Dans l’intention de rouvrir les voies de la transpira- tion, j’ordonnai plusieurs bains tièdes, et, quelques heures après, des frictions sèches. Les écailles tombè- rent, la peau devint plus douce : oh fit alors des fric- tions ou embrocations avec de l’eau-de-vie dans laquelle on avoit, fait infuser de la lavande. Le mouvement des parties paralysées se ranima un peu : l'enfant ne traïnoit plus sa jambe comme les pre- miers jours, mais il la jetoit comme par secousse; il soulevoit son bras, mais avec peine. Je conseillai alors les bouillons de vipères. M. Belleteste, que j’appelai en consultation, préféra le sel volatil de ce reptile : il fut donné le matin, à la dose de six grains, dans un bouillon fait avec le bœuf, le veau, et la racine de sal- separeille. Le malade prenoit encore deux autres bouil- lons pareils, mais sans sel de vipère. On fit, quelque temps après, des frictions avec le baume nerval du codex, tout le long des vertèbres et du bras. La jambe s’est parfaitement raffermie ; son mouve- ment est devenu aussi libre et aussi assuré que celui de lPautre. Le rétablissement du bras fut un peu plus lent: il portoit bien des fardeaux très-lourds ,, exécutoit tous les mouvemens qui demandent de la force ; mais , quand il étoit question de saisir degsobjets délicats, ou de commencer à agir, les mouvemens n’étoient point sûrs ; on appercevoit une secousse, un sautillement dans la \ 4 ENT DE IPEUY SL Q@ U E. 477 contraction des muscles ; mais une fois en train d'agir, ces irrégularités n’avoient plus lieu. Il y a lieu de croire que s’il eût autant exercé son bras que sa jambe, le premier eût été rétabli aussi promptement que l’autre. Pendant l’automne suivant , je lui ai prescrit des bains _à une chaleur tempérée , ensuite des douches avec une décoction de racine de guimauve ou de l’eau de tripes, sur l’épaule et le bras, pendant douze jours. Son réta- blissement n’a plus rien laissé à desirer. Je ne crois pas inutile d'ajouter que l’augmentation de l’embarras et la difficulté des mouvemens, qui arri- voient quelquefois , étoient l’annonce certaine du besoin que l’enfant avoit d’être purgé. J’ai eu occasion de voir quelques autres enfans atta- qués d’hémiplégie semblable pour avoir été exposés au froid après la petite vérole : des bouillons apéritifs et des purgatifs réitérés ont facilement dissipé cet accident, en y joignant l’attention de garantir les malades du froid et de l’humidité. Je donnerai, par la suite, le tableau-des complica- tions de La petite vérole avec d’autres maladies, telles que je les ai vues. L] 4783 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES MÉMOIRE Sur l’organisation des monocotyledons, ou plantes à une feuille séminale, Par DESFONTAINES. Lu le 11 prairial an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le 26 nivose an 5. Lzs graines des plantes renferment, comme l’on sait, une ou deux feuilles séminales qui se développent aus- sitôt après la germination. On a donné aux premières le nom d’univalves , d’unilobées ou de monocotyledons, et aux secondes celui de bivalves, de bilobées ou de dicotyledons. Ces deux divisions générales , établies par Césalpin, ont été adoptées par des botanistes célèbres, tels que Ray, Boerhaave, Heiïster, Van-Royen, Jus- sieu, etc., et employées- avec avantage dans leurs mé- thodes. Quelques-uns en ont ajouté une troisième sous le nom d’acotyledons , laquelle comprend les fougères, les mousses, les algues et les champignons , soit parce qu'ils ont pensé que ces plantes n’avoient point de feuilles séminales, soit parce que, ne les connoissant pas, ils ont voulu en former un ordre séparé sous une dénomination particulière. Néanmoins des observations . VV LET DE PHYS1IQU =. 479 très-exactes concourent à prouver que les fougères et les mousses appartiennent à.la première des divisions pré- cédentes. Bernard de Jussieu a démontré l'existence des organes sexuels dans deux espèces de fougères, la piZu- laire et le marsilea ; il a fait germer les graines de la pilulaire , et il s’est assuré qu’elles n’avoient qu’un lobe ou cotyledon (1). L’analogie doit nous porter à croire que toutes les autres plantes de la même famille men ont pareïllement qu’un seul ; d’ailleurs leur organisation intérieure vient à l'appui de cette opinion, comme nous le verrons ci-après. Hedwig a découvert les étamines et les pistils des mousses. Cet auteur assure qu'ayant semé les petites graines renfermées dans les urnes , elles se sont gonflées au bout de quelques jours, et qu’il a vu ensuite, à l’aide du microscope , la radicule descendre, et le coty- ledon sortir latéralement sous la forme d’un petit corps charnu , oblong, et verdâtre à l'extrémité, qui se divise ensuite en plusieurs rameaux. Swartz à confirmé les observations d’'Hedwig. J'ai reconnu, avec une forte loupé, les étamines des mousses telles que cet auteur les a décrites, et je ne crois pas qu’on puisse révoquer en doute cette belle découverte. Enfin on verra bientôt que leurs tiges ont une structure analogue à celle de tous les monocotyledons. j Quart aux pins et aux Sapins, que quelques bota- uistes, du nombre desquels est Gærtner, ont regardés "Re S QG) Académie des sciences > années 1739 et 1740, 480 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES comme polycotyledons, et devant conséquemment for- mer une classe à part, je pense, avec Adänson et Jus- sieu, que ce sont des dicotyledons dont chaque lobe est découpé profondément en plusieurs parties : 1°. parce que le nombre des divisions n’est pas égal dans toutes les espèces; ainsi, par exemple, le pin sauvage en a cinq, le cèdre du Liban six, et j’en ai compté jusqu’à douze dans le pin cembro : 2°. parce que la séparation des deux principaux lobes est sensiblement indiquée par un léger sillon : 3°. parce qu’un grand nombre d’arbres de cette famille, tels que les thuya, les genevriers , les cyprès et les ifs, n’ont évidemment que deux feuilles séminales : 4°, enfin, parce que leur organisation inté- rieure moffre aucun caractère qui les distingue d’avec les autres dicotyledons : d’où il résulte que tous les végétaux, si l’on en excepte peut-être les algues et les champignons (dont la nature ne nous est pas encore bien connue), se rapportent à l’une ou à l’autre des deux divisions de Césalpin. Je vais maintenant essayer de faire connoître la struc- ture des monocotyledons. Je prendrai des exemples dans les tiges ligneuses, parce que la plupart des parties dont elles sont formées y sont plus apparentes que dans les tiges herbacées, et que l’on peut les observer en tout femps; mais, pour que l’on ait sous les yeux un terme de comparaison, je crois qu’il convient aupara- vant de présenter dans un tableau très-abrégé les prin- cipaux organes des dicotyledons, les seuls que les auteurs çe qui ont traité de l’anatomie des plantes, aient décrits ET DE PH YS Fr Ur. 481 convenablement. Ces organes sont l’épiderme, mem- brane ressemblante à une lame très-mince de vélin, criblée de pores imperceptibles. Sa structure est incon- nue ; elle entoure les autres parties, donne une issue à la transpiration insensible, et se régénère lorsqu’elle a été détruite. Sous cette enveloppe on en trouve une seconde connue sous le nom de issu cellulaire : c’est une substance succulente, ordinairement verte , formée de petits grains arrondis , vésiculeux, entremèlés de fila- mens très-déliés qui suivent toute sorte de directions; elle ne paroït guère différer de la moelle que par la couleur (1); elle tapisse la surface externe de l’écorce, et en remplit toutes les mailles. L’écorce, placée entre l'enveloppe cellulaire et le bois , est composée de feuil- lets emboîtés les uns dans les autres, que l’on peut sé- parer par la macération. Ces feuillets sont, comme l’on sait, des assemblages de vaisseaux séveux, de vaisseaux propres et de trachées (2), unis dans une direction ET PE PC ST PS PR ONE ETES (1) Il est facile de s’en assurer en observant ces deux substances sur la tranche d’une tige de raquette, ou de cierge, ou de toute autre plante dont les fibres soient d’un tissu très-lâche : on les voit communiquer ensemble; elles ent la même structure, et 6n n’y remarque d'autre différence sensible que celle de la couleur. 3 (2) Aucun des auteurs qui ont traité de l’anatomie des plantes, n’a vu les trachées dans l'écorce ; le citoyen Daubenton est le premier qui les y ait découvertes. « Ces parties brillantes, dit ce naturaliste célèbre , sont plus » rares et moins apparentes dans l’écorce ; mais leur disposition est la même: >» elles sont rangées par files longitudinales qui paroissent formées de glo- > bules brillans, et qui ressemblent aux trachées du bois ». L'auteur n’a pu cependant parvenir à dérouler la lame spirale qui les forme. ( Écoles nor< prales , tome IV, p. 387.) FE Î 61 482 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES parallèle et longitudinale. Il n’y en a qu’un seul sur les rameaux d’un an, et chaque année il en naît un nou- veau. Le bois renferme les mêmes organes que l’écorce ; il est pareillement formé de couches concentriques. On y distingue deux parties : l’une extérieure, que l’on appelle aubier; l’autre intérieure, plus dure et d’une couleur plus foncée, qui porte le nom de cœur. La moelle, renfermée dans un canal longitudinäl vers le centre de la tige, jette des ramifications transversales dont quelques-unes se prolongent jusquües sur l’écorce; elles font, avec les fibres ligneuses, un entrelacement semblable à celui de la trame d’une étoffe dans sa chaine. On les voit distinctement sur la coupe trans- versale d’un tronc scié perpendiculairement à l’axe; elles y sont disposées en rayons divergens , comme les lignes horaires d’un cadran. L’accroissement des tiges se fait en longueur et en grosseur. Tous les ans une nouvelle pousse sort de extrémité des rameaux, et deux nouvelles couches, l’une corticale et l’autre ligneuse, se forment entre le bois et l'écorce : ainsi le bois croît en grosseur de dedans en dehors, et l’écorce, au con- traire, de dehors en dedans. (Planche 1 , figure A.) Les tiges des monocotyledons renferment, à la vé- rité, la plupart des organes que je viens d’indiquer, mais avec des différences si marquées, que l’on est forcé de reconnoître dans les végétaux deux grandes classes naturelles, entièrement indépendantes de toutes les méthodes et de tous les systèmes. Cette vérité im- portante sera mise dans tout son jour par des observa- MAIS IDÉES PÈEE MES T10Q U -5 483 tions faites sur un très-grand nombre de plantes des diverses familles qui forment la série des monocotyle- dons , telles que les palmiers , les gramens, les asperges, les dragons, les liliacées, les narcisses, les fougères, et les mousses même. Au premier aspect d’un palmier on s’apperçoit que le tronc ne ressemble point à celui d’un hêtre, d’un sapin, d’un orme , ou de tout autre arbre à deux feuilles sémi- nales; c’est une colonne régulière , dont le sommet est -couronné de feuilles vivaces disposées circulairement les unes au-dessus des autres. Celles qui naissent au prin- . temps sortent toujours de. la cime; les plus anciennes, placées inférieurement , se dessèchent , et laissent, en se détachant , des impressions circulaires qui sil- lonnent la surface de la tige et en marquent les années jusqu’à ce qu’elle ait cessé de croître. Mais c’est par- ticulièrement dans les organes intérieurs que nous trouverons les différences les plus frappantes. Si l’on considère un tronc fendu suivant sa longueur, on y découvre un assemblage de grosses fibres ligneuses, so- lides , lisses, flexibles, légèrement comprimées, com; posées elles-mêmes d’autres petites fibres étroitement unies : la plupart suivent une direction parallèle à l’axe du tronc, et se prolongent sans interruption depuis sa base jusqu’à son sommet ; quelques-unes se portent obli- quement, et coupent les premières sous un angle plus ou moins aigu. On peut les séparer facilement dans les jeunes palmiers, ou dans ceux qui commencent à tomber en putréfaction, Si l’on examine ensuite la coupe 484 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES transversale d'un tronçon de tige, on ne remarque sur sa surface ni couches concentriques, ni canal, ni pro- ductions médullaires. Les fibres ligneuses , placées sans ordre les unes à côté des autres, sont enveloppées par la moelle, qui en remplit tous les intervalles ; elles se rapprochent sensiblement, se durcissent, et diminuent de diamètre en allant du centre à la circonférence , de sorte que la tige a beaucoup plus de force et de solidité auprès de sa surface que dans l’intérieur : organisatiom toute différente de celle des arbres à deux feuilles sé- minales. (PL. 2, fig. A.) Lorsqu'une graine de palmier a été semée, les feuilles se développent successivement et augmentent en nombre pendant quatre à cinq ans; le collet de la racine se dilate en même proportion ; la bulbe, formée par la réu- nion des pétioles des feuilles, grossit insensiblement ; sa solidité augmente peu à peu, et enfin la tige s’élève au-dessus de la surface de la terre avec toute la gros- seur qu’elle doit avoir dans la suite. Elle à exactement la figure d’un cylindre, depuis la base jusqu’à la cime ; et si l’on en mesure le diamètre à différentes époques, on sera convaincu qu’il n’a pris aucun accroissement. Cette observation n’avoit pas échappé à Kæmpfer. Cau- dex est rectissimus, dit cet auteur en parlant du dat- tier, figurae ad assem cylindracea ; nisi verticem versks paulisper gracilesceret; crassiorem häc parte referunt alii. (Kaæmpr. Amæn. exot. pag. 687.) Le citoyen Daubenton, daus un mémoire sur l’orga- nisation du bois, où l’on trouve une bonne description Réel. "Dia DE NE #10 Cru th 4383 des organes intérieurs du palmier - dattier, me paroît avoir donné la véritable raison pourquoi sa tige s'élève en colonne et n’augmente point tous les ans en gros- seur, comme celle de la plupart des autres arbres. Il 2 2 2 D 2 D] 2 2 » 2] 2 2 2 D 2 2 D] 2 2 D L2] Lo] » L] faut entendre l’auteur lui-même : « Chaque feuille (du dattier), en sortant du bourgeon, est formée par un prolongement de filets ligneux et de la substance cel- lulaire qui sont dans le tronc de l'arbre. On les voit dans le pétiole; ils sont très-apparens dans les restes de la feuille desséchée qui tiennent au ironc. L’ac- croissement de ce tronc est donc produit par les feuilles qui en sortent chaque année. Comme les filets ligneux et la substance cellulaire, dont les nouvelles feuilles sont un prolongement, partent toujours du centre, ils forcent toujours les feuilles précédentes de se re- jeter en dehors. Il s’ensuit que la partie qui fait tous les ans l’accroissement du tronc, se forme au centre. La partie déja formée dans les années précédentes doit nécessairement être déplacée et portée au dehors, comme lécorce des arbres qui en ont une est rejetée en dehors pour faire place aux nouvelles couches qui se forment entre l’écorce et l’aubier. Cette sorte de recul n’a point de limites dans ces arbres , parce qu’il se forme tous les ans de nouvelles couches corticales qui sont flexibles, et que les anciennes, qui ne le sont plus, se fondent et se détruisent : aussi la gros- seur de ces arbres n’est pas limitée comme celle du palnier-dattier, quine va guère au-delà de dix pouces. C’est parce que la substance du tronc à d'autant plus 436 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES » de compacité qu’elle se trouve plus près de la circon- » férence, et qu’à un certain point de densité elle ne » peut plus céder à l'effet des parties intérieures du » tronc et se porter en dehors ; aussi l'arbre, parvenu à » ce terme, ne grossit plus. C’est par la même raison » que le tronc du palmier a la même grosseur dans » toute sa longueur : à mesure que larbre s’élève, les » parties de la substance du tronc perdent successive- s ment leur flexibilité au même terme ; ainsi elles doi- » vent cesser de se porter en dehors lorsqu'elles sont » parvenues au même degré de densité dans tous les » points de la hauteur de Parbre; par conséquent , le » tronc a nécessairement la même grosseur dans toute » sa longueur. » On peut faire l’application des mêmes principes aux différentes espèces de palmiers et autres monocotyle- dons. Il est très-rare que la tige des palmiers se divise en plusieurs rameaux ; cela arrive cependant quelquefois, particulièrement lorsque le sommet a été coupé ou al- téré par quelque accident. Théophrasie a fait mention de ce phénomène : Est autem palma, ut simpliciter dicamus, caudice uno atque Simplici corpore. Quae- dam tamen vel bifida exeunt sicut in AEgypto, quasi bifurca ; in Creta quoque plures bifidas provenire af- firmant, quasdam trifidas. In lepaea vel quino cerebro genus quoddam enasci tradunt. (Vasorx. Hist. plant.) Rheede assare que le palmier connu au Japon sous Je nom de #odda panna pousse quelquefois quatre à ET DE PHYSIQUE. 487 cinq branches d’un même tronc. Contigit quoque non- AUTIQUAN ut ex uno trunco quatuor ad quirique Ver- tices enascantur. (Hort. Mal. t. III, p- 10; tab. 20, M2) Si la tige des palmiers n’a pas une égale grosseur dans tous les individus d’une même espèce, cette dif férence vient des sucs nourriciers qu’elle a reçus en plus ou moins grande abondance; mais elle s’élevera tou- jours en colonne , à moins que des circonstances parti- culières dont je vais faire mention, ne s’y opposent. En effet, il n’est pas très-rare de voir des tiges plus minces ou plus grosses vers la base que dans le reste de leur longueur ; quelquefois on y apperçoit aussi des gonflemens et des rétrécissemens alternatifs. Ces sortes d’irrégularités ne s’observent pas seulement dans les pal- miers ; les yuccas, les dragons, les aloès, etc., en offrent pareillement des exemples. Cela arrive toutes les fois que la plante reçoit, à différentes époques et pendant un certain temps, une inégale quantité de sucs nourri- ciers. Si, par exemple, on transplante un jeune palmier d’un sol aride dans un terrain fertile, les fibres de la nouvelle pousse acquerront un volume plus considérable que les anciennes, et le diamètre de la tige augmentera dans cette partie, tandis que linférieure conservera exactement la grosseur qu’elle avoit auparavant, parce qu’il ne se forme point de couches à sa surface, et que des fibres devenues Iligneuses ne peuvent prendre d’ac- croissement, comme Hales et Duhamel l'ont démontré. Si, par un PPEN contraire , la force de la végétation 488 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES se ralentit, les nouvelles pousses seront plus grèles que les anciennes. On voit, dans une des serres du jardin des Plantes, un cycas dont le tronc a un rétrécissement considérable vers le milieu. La cause en est bien connue. Cet arbre fut transplanté à Madagascar dans une petite caisse, et embarqué sur un vaisseau, au commencement de 1789, par le citoyen Joseph Martin ; il languit pendant la traversée, et même long-temps encore après son ar- rivée à Paris, Néanmoins la végétation n’ayant pas été entièrement arrêtée, la tige augmenta en longueur de quelques pouces ; mais le nouveau prolongement acquit beaucoup moins de grosseur que les anciens. Dans la suite, ce palmier, qu’on avoit placé dans une serre, et auquel on avoit donné tous les soins convenables, re- prit insensiblement de la vigueur. Depuis ce temps, les nouveaux jets de la tige ont augmenté de volume ; lé- tranglement formé lorsque la végétation étoit languis- sante, est resté dans le même état, et ne s’effacera ja- mais. La circonférence du tronc dans cet endroit est de treize pouces; il en a vingt-un un peu au-dessous, et dix-huit au-dessus. Il à crû d’environ un pied en sept ans et demi. Le prolongement est un cylindre régulier ; il a moins de grosseur que la partie qui s’étend depuis l’étranglement jusqu’à la racine, parce que la végétation a été moins forte dans un climat tempéré que sous la zone torride , où cette espèce croit spon- tanément. La même cause ne peut jamais produire le même effet ET DE PHYSIQUE. 489 dans un arbre à deux feuilles séminales , parce que son accroissement en grosseur ne se fait que par des cou- ches:concentriques et uniformes qui s'étendent depuis sa base jusqu’à son sommet. Ainsi; soit que la force de la végétation augmente, soit qu’elle diminue à diffé- rentes époques, le tronc conservera toujours sa forme primitive. J’ai dit précédemment que l’écorce des arbres à deux feuilles séminales étoit composée de lames emboîtées les unes dans les autres ; que tous les ans, dans le temps de la'séve, il en naissoit une nouvelle entre l’au- bier et celle de l’année précédente ; que le nombre des. couches diminuoïit successivement depuis la partie infé- rieure du tronc jusqu’à l'extrémité des branches; qu’en- fin il n’y en avoit qu’une seule sur les rameaux d’un an. On ne remarque rien de semblable dans l'enveloppe extérieure des palmiers ; elle n’est évidemment qu’une expansion des fibres de la base des pétioles, qui, se portant à droite et à gauche, forment autant de réseaux dont les mailles sont plus ou moins larges et diverse- ment configurées dans chaque espèce de palmier. Ces réseaux sont imbriqués, c’est-à-dire qu’ils se recouvrent à peu près comme les tuiles des toits-de nos maisons. Leur nombre est d’autant plus considérable que les feuilles sont plus rapprochées les unes des autres ; ils n’adhèrent point ensemble, et on peut les séparer avec la plus grande facilité. Chacun est composé de trois plans de fibres très-distincts : les deux plans extérieurs suivent une direction transversale et parallèle ; V’intermédiaire, 1, 62 49 MÉMOIRES DE*MATHÉMATIQUES que l’on peut comparer à Ja trame d’une étofïe , les coupe obliquement de haut en bas. Les fibres ne sont point entrelacées , mais seulement unies par des filamens ca- pillaires qui vont s’attacher de lune à l’autre. Enfin l'enveloppe des palmiers se détruit avec le temps, etil ne se forme jamais de couches à sa surface intérieure, de sorte qu’on ne doit pas la regarder comme une véri: table écorce. Kæmopfer l’avoit déja dit ; mais cet auteur n’avoit pas bien connu son organisation. Cortice dona- tus caudex non est; sed ab injuriis se junior tuetur par- tibus frondium ab amputatione residuis , quas pollices nuncupavimus. (Kxmpr. Amaæn. exot. pag. 687.) — (PL 3, fig. A,B, C, D.) Les palmiers portent deux sortes de feuilles : les unes ressemblent à des éventails; les autres sont composées de plusieurs folioles placées sur deux rangs opposés, comme les barbes d’une plume. Leur nombre demeure presque toujourslemême dans chaque individu (1), parce qu’il en renaît de nouvelles à mesure que les plus an- ciennes se dessèchent et tombent. Les folioles sont pliées en deux dans toute leur longueur, et appliquées latéra- lement les unes contre les autres, avant leur épanouis- sement; dans cét état elles ressemblent à un éventail fermé. Les nervures sont longitudimales et parallèles à la côte du milieu. Ce dernier caractère est commun à la plupart des monocotyledons ; je dis la plupart, parce que j (1) Suivant Kæmpfer, le dattier produit ordinairement sept feuilles nou- velles chaque année. © 3 e &1® 2 MPAMIVEBTE Q@e Ù ES # | 493 ‘ les nervures des arums, des balisiers, des bananiers et des fougères , ont une direction transversale. - Les rotangs approchent beaucoup des palmiérs par leur structure, et ne sauroïent en être séparés. On peut s’en convaincre facilenient, pour peu qu’on veuille ob- server la coupe transversale de lespèce qu’on emploie à faire les cannes connues sous le nom de joncs. Les fibres du centre y sont si écartées ; qu’on en distingue les intervalles à la simple vue , et qu’on peut faire passer de Pair dans des tronçons de plusieurs pieds de lon gueur, en soufflant par une des extrémités. Elles se resserrent très - sensiblement à mesuré qu’elles appro- chent de la circonférence , et lon n’y remarque ni cou ches ni productions médullaires. (P2. 2; fig: B, C:) Plusieurs autres espèces: de ce genre’, que j’ai examinées attentivement, m'ont offert la mème organisation. On trouve pareïllement dans tous les gramens dont les tiges sont vivaces , les caractères généraux que je viens de faire connoître dans les palmiers et les rotangs. Jai observé des chaumes de bambou (arundo bambos, Lin.); de canne à sûcre (saccharum officinarum, Lin.), de roseau à quenouilles !(arundo donax, Lin), de ca- lumet (panicum arboreum, Lin:), de panis à larges feuilles (paricum latifolium, Lin.) , et de plusiéurs autres espèceside cette-nombreuse famille. Les vaisseaux y sont placés parallèlement les uns à côté des autres ; sans former de couches; la moelle est disséminée dans les petits intervallés qui les séparent ; ils se rapprochent, diminuent de diamètre'en allant du centre à la surface ; 492 MÉMOTRES DE! MATHÉMATIQUES et je n’y ai jamais apperçu aucune trace de prolonge mens médullaires. (PL. 2, fig. D, E) Si les gramens se lient aux palmiers et aux rotangs par les grands caractères distinctifs des monocotyledons , ils en offrent aussi qui leur sont particuliers, et que je ne dois pas passer sous silence. Leur chaume est sou- vent creux et entrecoupé par des nœuds distribués de distance en distance. Ces nœuds forment des cloisons transversales dans l’intérieur des tiges, en augmentent la force , donnent naissance aux feuilles , produisent des racines , et contribuent à la multiplication des individus. Les feuilles sont toujours simples ; elles engaînent les chaumes ; et , au lieu d’être pliées en deux et appliquées, comme celles des palmiers avant leur développement, elles sont roulées intérieurement par les bords , et enve- loppées les unes dans les autres. Après avoir reconnu l'identité d'organisation dans les deux grandes familles précédentes, j’ai été curieux de savoir si les smilax , les fragons et les asperges, dont les tiges se ramifient, etont , au premier coup d’œil , une res- semblance si marquée avec les arbrisseaux à deux feuilles séminales , n’avoient pas aussi de l’affinité avec eux par leur structure intérieure: Je me suis procuré d’anciennes tiges d’asperge coudée (asparagus retrofractus, Lin.), d’asperge à feuilles aiguës ( asparagus acutifolius ; Lin.), de fragon à grappes (ruscus racemosus, Lin.);, de fragon androgyn (ruscus androgynus , Lin.), de smilax d'Orient (smilax excélsa, Lin.), de smilax épineux (srilax aspera, Lin.); je les ai examinées É T4 DE PE vS 1 6 Ù £. 493 intérieurement avec une forte loupe , et je puis assurer qu’elles n’ont ni couches ni prolongemens médullaires, et que leurs fibres sont plus serrées auprès de la cir- conférence que vers le centre. ( PL. 4, fig. 4, B, C, D.) Il faut encore ranger dans la même. division les dra- gons, les yuccas , les agavés, les aloës et les aletris. Ces plantes se développent à peu près comme les palmiers ; leurs tiges sont composées de fibres plus ou moins grè- les, plus où moins dures, qui se croisent obliquement. Les intérieures sont d’un tissu très-lâche; celleside la circonférence, au contraire, forment par leur réunion un cylindre continu depuis la base de la tige jusqu’au sommet. On n’y distingue point de couches, et la moelle, placée entre les fibres, ne jette point de rayons diver- gens. (PZ.3, fig. E, F'; et pl. 4, fig. E.) L’enveloppe extérieure, qui tient lieu d’écorce, est mince et d’un tissu très-serré, particulièrement dans les dragons, et elle n’est qu’une expansion des pétioles. La tige ne porte de feuilles qu’à l’extrémité supérieure : les nou- velles sortent toujours du centre en nombre déterminé ; elles s’enveloppent les unes dans les autres à peu près comme celles des gramens; elles sont simples, vivaces, et les impressions qu’elles laissent sur la surface de la tige en se desséchant, ne s’effacent qu’après un BR nombre d’années. Toutes les plantes ligneuses de la famille des liliacées; de celle des narcisses, ainsi que lananas et le vacoua (pandanus M. Sn > Lin.) , ont une organisation analogue à celle des monocotyledons dont j’ai parlé. Lé 494 MÉMOIRES DE, MATHÉMATIQUES tronc du vacoua est composé de fibres parallèles, et sa structure ressemble beaucoup à celle des palmiers et des. rotangs. (PL. 4, fig. F.) Les fougères en arbre; qui s'élèvent en colonne, et dont le sommet est toujours couronné de feuilles , comme celui des palmiers, appartiennent aussi à la même di- vision. Leur tronc est composé de grosses fibres et de plaques ligneuses courbées en différens sens ; elles sont plus compactes, plus larges, plus rapprochées auprès de la circonférence , que dans l’intérieur, et la moelle en rem- plit tous les vuides ; elles sont recouvertes d’uneenveloppe solide formée par les fibres des pétioles, qui , en se déta- chant , laissent , sur la surface de la tige, des impressions raboteuses et circulaires. Les feuilles sont roulées sur elles-mêmes en spirale, avant leur développement; leurs nervures se ramifient de mille manières, et suivent toute sorte de directions. Si les organes intérieurs des fougères offrent des caractères différens de ceux des autres monocotyledons, on y reconnoît du moins la même disposition et la même manière de croître. (Planche 5; Jig- A» B.) Enfin, après avoir observé avec le microscope les tiges vivaces de plusieurs lycopodes et autres espèces de mous- ses, je n’y ai remarqué ni couches ni appendices mé: dullaires et rayons divergens, et l’organisation»de ces petites plantes n’a paru conforme à celle: de tous! les monocotyledons, dont elles diffèrent beaucoup cepen- dant par le feuillage et par les organes de la fructifi- cation, - ET DE PHYSIQUE. 495 Ces observations ont été vérifiées sur un très -grand - nombre de plantes, soit sèches, soit vivantes, qui font partie de la riche collection du Muséum national d’his- toire naturelle , et je n’ai trouvé jusqu’à présent aucune exception. pa Je crois cependant devoir observer ici qu’il est pos- sible que les tiges de plusieurs monocotyledons, dont la texture est très-lâche, augmentent en grosseur jus- qu’à ce que les fibres aient perdu toute leur mollesse , et que celles de la circonférence soient tellement serrées les unes contre les autres , qu’elles ne puissent plus céder à l’effort de la végétation, qui tend sans cesse à les rapprocher en les portant du centre vers la surface; et je ne suis pas encore également bien convaincu que l'enveloppe extérieure des aloès et des dragons, par exemple, ne produise pas de nouvelles fibres à l’inté- rieur : mais quand même cela arriveroit, il n’en seroit pas moins vrai que dans tous les monocotyledons elles ne forment point de cercles réguliers et distincts, que celles du centre sont les plus écartées, que la moelle en occupe les intervalles, et que cette substance ne se prolonge point en rayons divergens. * Il paroît donc bien prouvé ; d’après tout ce qui a été dit précédemment , que les végétaux se divisent en deux grandes classes naturelles , dont les caractères distinctifs ont pour base la structure , la disposition et le dévelop- pement des organes intérieurs. Ces caractères peuvent être énoncés de la manière suivante : 496 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Pa em si & EL Dr y rSkio x. Vécéraux qui n’ont point de couches concentriques distinctes, dont la solidité décroît de la circonférence vers le centre ; moelle interposée entre les fibres ; point de prolongemens médullaires en rayons divergens. = Les monocotyledons. SE NCNO UND EMI) TA VETES TTONN: Vécéraux qui ont des couches concentriques dis- tinctes, dont la solidité décroît du centre vers la cir- conférence ; moelle renfermée dans un canal longitudi- nal; des prolongemens médullaires en rayons divergens. — Les dicotyledons. Je n’ai parlé jusqu’à présent que des plantes dont les tiges ne périssent pas tous les ans : je présenterai à l’Institut, dans un second mémoire , le résultat de mes recherches sur l’organisation des plantes herbacées. Je crois pouvoir annoncer d’avance que les racines vivaces renferment à peu près les mêmes caractères que les tiges ligneuses, et je ne désespère pas de parvenir à distin- guer également les plantes annuelles. Ces connoïssances ne seront point inutiles aux bota- nistes, particulièrement à ceux qui se livrent à l’étude des rapports naturels : ainsi on déterminera facilement à laquelle des deux divisions précédentes appartient une plante ligneuse, même inconnue, en jetant les yeux sur ET DE PHYSIQUE. 497 une coupe transversale de la tige, et lon pourra rap- porter à leur véritable classe plusieurs genres douteux dont la germination n’a pas été observée convenable- ment. Il est évident, par exemple, que les aristoloches sont de la division des dicotyledons , parce que les espèces de ce genre dont les tiges sont ligneuses , ont des cou- ches concentriques et des productions médullaires. Ber- nard de Jussieu et Gærtner les regardoient comme mo- nocotyledons. À la vérité, le citoyen Antoine- Laurent Jussieu les a placées dans la seconde division. Leur structure intérieure prouve combien il a eu raison de faire ce changement. ( PL. 1 , fig. B.) Il en est de même des cierges, que Linné et Gærtner ont rangés parmi les monocotyledons. Quoiqu’il soit très-difficile d’en apper- cevoir les couches , on ne peut cependant douter de leur existence, puisqu'on parvient à les séparer par la ma- cération, et que , dans les vieux troncs, la partie ligneuse, dont l’épaisseur est très-considérable, s’amincit par de- grés en ailant vers le sommet. J’ai vu plusieurs fois les fibres de l’espèce que l’on connoît sous le nom de ra- quette ou figuier d'Inde (cactus opuntia, Lin.), s’en- lever par plaques lorsqu’elles étoient desséchées , et que la substance cellulaire qui les unit avoit été détruite par le temps; et le citoyen Daubenton est parvenu à séparer un des feuillets du réseau ligneux du cierge du Pérou (cactus peruvianus, Lin.) : enfin les prolongemens mé- dullaires y sont très-apparens. Ce caractère peut même presque toujours servir à distinguer les monocotyledons, 1, - - 63 498 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES lorsque les couches sont si rapprochées, que l’œil de l’ob- servateur ne peut les appercevoir ; maïs ce cas est très- rare. Les autres plantes grasses à deux feuilles séminales, telles que les euphorbes, les joubarbes, les ficoïdes, ont des couches distinctes ; et la moelle, placée dans un con- duit longitudinal au centre de la tige, jette des rayons vers la surface. On pourra aussi décider, d’après les mêmes principes, si les prêles ont plus de rapport avec les fougères qwu’a- vec les ephedra , dont les fibres sont disposées par cou- ches concentriques. L’on sait que les botanistes ne sont pas d’accord à ce sujet. Le citoyen Jussieu a placé les prêles dans la famille des fougères , et le citoyen Adanson les a réunies avec les pins. I1 s’ensuit encore que les caractères tirés des couches et des productions médullaires, qui ont été indiqués par des physiciens pour reconnoître les bois pétrifiés, n’ont de valeur que dans le cas où ces fossiles auroient appartenu à des arbres ou arbrisseaux à deux feuilles séminales. Linné avoit pensé que les cycas devoient être réunis avec les fougères : 1°. parce que leurs feuilles sont rou- lées en spirale avant de se développer ; 2°. parce que les poussières fécondantes des chatons mâles des cycas sont à nud sur les écailles , qui ne sont que des feuilles avortées. Foliatione circinnali, filicibus proprid , à re- liquis plantis alien, nulli palmae communi , convenit cycas cum filicibus. Fructificatione dorsiferé, itidem filicibus proprid , et ET, D\E PHYSIQUE. 499 ab aliis plantis etiam palmis diversd, convenir cycas filicibus : notum enim est qudd amenta seu strobili, qua pari passu ambulant, formentur à natura à folio- rum rudimentis futuri anni, quodque optimèé illucescet é strobilo pini. Hisce datis qudd amenta sint folia parva, et ex his pulvis floridus inspersus absque ca- Lyce et corolla ut in filicibus, praesertim in achrosti- cis, maniféesto patebit quôd cycas sit à gente filicum. (Lin. Acad. des sciences , 1775, pag. 518.) Si ces caractères établissent une différence très-mar- quée entre les palmiers et les cycas, il en est d’autres qui les rapprochent et qui séparent en même temps les fougères d’avec les cycas. Les fleurs de ces derniers sont dioïques ; les ovaires, portés sur un spadix, deviennent autant de drupes monospermes analogues aux fruits des palmiers. Les nervures des feuilles sont pareillement longitudinales. Ces nervures sont très-fines ; il faut une bonne loupe et beaucoup d’attention pour les apperce- voir. Je ne les ai encore découvertes que dans le cycas Japonica ; il m'a été impossible jusqu’à présent de les observer dans le cycas circinnalis Lin. Ces deux es- pèces sont vivantes au Muséum d’histoire naturelle. La surface supérieure de leurs feuilles est très-lisse ; l’infé- rieure est parsemée d’une multitude de petites éminences qui ne sont. pas sensibles à l’œil. Enfin les fibres du tronc du cycas circinnalis Lin. sont en faisceaux, et non disposées en lames comme dans les fougères li- gneuses. Les poussières fécondantes des cycas ne sont point nues sur les écailles des chatons, comme le dit e— Soo MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Linné, mais renfermées dans de petites capsules arron- dies, uniloculaires, et dont la pellicule se partage en deux valves ; elles recouvrent la surface inférieure des écailles. L'auteur les aura sans doute observées lors- qu’elles étoient ouvertes : on ne distingue plus alors que des amas de pollen. Il est d’ailleurs très-douteux que sa comparaison soit bien exacte, puisque les organes sexuels des fougères ne sont pas encore connus. Les étamines des pins, des sapins, des genevriers, des thuya, des cyprès, sont aussi placées sous les écailles des chatons, sans qu’ils aient aucune analogie avec les cycas. Les zamia, dont les jeunes feuilles se roulent sur elles- mêmes, et dont les fleurs sont en chaton, ne sauroient être séparés des cycas ; leurs nervures sont toutes lon- gitudinales, comme celles des palmiers, et la graine du zamia villosa de Gærtner a l'embryon placé vers la base d’un périsperme charnu; caractère qu’on retrouve dans les fruits du cocotier, de l’elæis, de l’arec, du corypha et du lontarus (1). Il faut donc conclure que si les cycas et les zamia ont quelque affinité avec les fougères, leur organisation les rapproche aussi des palmiers, et qu’on doit regarder ces deux genres comme un ordre distinct et intermé- diaire entre les deux familles en question. Ces exemples, auxquels j’en pourrois ajouter beaucoup d’autres , suffisent pour donner une idée des applications qu’on peut faire des observations qui servent de base à ce mémoire. JR 7) ele ru pe Hu e re OR RSS QG) GænTn. de Frucr, t, I, p. 14, tab. 3 et suivantes. EPL EDR E SR PMEDINTS) IQ MU Fe Box Je crois qu’il n’est pas impossible de trouver dans les organes intérieurs des plantes qui composent les grandes familles naturelles des ombelles, des crucifères, des com- posées , des légumineuses , etc. , des caractères communs et particuliers à chacune d’elles; peut-être pourroit-on même parvenir à distinguer les genres et les espèces, si l’on en étudioit la structure avec toute l’attention que demande un objet aussi important, Les parties exté- rieures des plantes ne sont en quelque sorte qu’un dé- veloppement des organes intérieurs. Toutes les fois que les unes offrent des différences remarquables, il est à présumer qu’il en existe pareïllement dans les autres. EXPLICATION DES PLANCHES. PLancue 1. — Orsanisation des dicotyledons. A. Coupestransversale d’un tronc de chêne, sur la surface de laquelle on distingue le cœur, l’aubier, les couches concen- triques et les prolongemens médullaires , disposés comme les lignes horaires d’un cadran. B. Coupe transversale d’une portion de tige de l’aristolochia sypho. L'Héritier. C. Portion dela tige de la même plante, sur laquelle on voit, 4, une production médullaire partagée suivant son plan. PLAN CE Etor-— Organisation des monocotyledons. Æ. Coupe transversale d’une portion de tige de palmier. On n’y remarque ni couches concentriques ni prolongemens mé- dullaires. La moelle est placée entre les fibres ; celles-ci vont 502 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES toujours en se rapprochant, depuis le centre du tronc jusqu’à sa circonférence. B. Une tranche du rotang, dont on fait les cannes connues sous le nom, de joncs. C. Un tronçon de tige de la même plante, partagé suivant sa longueur. £ D. Coupe transversale d’une ancienne tige de canne à sucre. ÆE. La même, fendue en deux suivant sa longueur. _Prancme 3. — Orvanisation des monocotyledons. A. La base d’une feuille du palmier-latanier (chamaerops Lu- milis. Lin.). On voit latéralement le tissu des fibres qui tien- nent lieu d’écorce. B. Les mêmes fibres grossies à la loupe. a C. Fibres des feuilles d’un autre palmier. D. Les mêmes, vues à la loupe. E. Tronçon d’une ancienne tige d’aloës. F. Coupe horizontale de la même tige. Prancne 4. — Orsanisation des monocotyledons. A. Portion d’une ancienne tige de l’asparagus retrofractus. Lin. B. Coupe transversale de la même plante, vue à la loupe. C. Tronçon de tige du 7zscws androgynus. Lin. D. Une tranche de la tige du même arbrisseau, vue à la loupe. ÆE. Coupe longitudinale d’un tronçon de dracaena draco. Lin. F. Coupe transversale d’une tige de vacoua (pandanus odo- ratissimus. Lin.). Prancne 5. — Orvanisation des fougères en arbre, analogue à celle des monocotyledons. A. Coupe longitudinale d’une portion de tige de fougère en arbre. B. Coupe transversale du même tronc. 2./7.11. 1 Lg. 20 Of TMULA, em. de lInshlut 4 Plz. rÀ A 2 Os eue pet Buwry,J = 14 ua v" ET. ni re " 3 « x Mende Liishiiér "Cl Tom.L Pay. 502. PLAT. 2 Sa 7 € 7 Ep. et Buvry, à Mercchal, Del te TES 2 A SL mobi Mer. de l'Insktut,z CL. Tom.I Pay. So2. PL. 107 Z£p, et Buvrrr, Seufp.- ne PEN Vo SA VA DE HI AN nn sea B\ RS ru) RENTAL I h ) TES DOTE Memn.de l'Inshthut.1 CL T'om.I P29. 602. PL I lune, et Biwri. 072 Marchal, Del. . Llem. de llnshtut,1 CL Tom. L Leg. ÿv2. PL PT HT ë HE Marechal, D:/ 7 Æpeet Bury, Neuf ET DE PH 'Y S 11Q U €. 5o3 DiL.S.S RD: ON SUR LE GENRE PEPATELS: Par VENTENAT. Lu le 21 nivose an 5, et déposé au secrétariat de l’Institut le 29 du même mois: U»: espèce nouvelle d'un genre de champignon connu sous le au de phallus, apportée d'Amérique, m’a été communiquée , et je me suis proposé d’en donner con- noissance à la classe. La nécessité de fixer son carac- tère générique et ses rapports avec toutes les espèces congénères m'a engagé à revoir tout le genre avec quelque détail, à parcourir les différens auteurs qui V’ont traité dans son ensemble, ou qui ont décrit quel- ques espèces. Cet examen m’a montré que les botanistes n’ont pas été absolument d’accord , et que les plus mo- dernes ont négligé des observations intéressantes de leurs prédécesseurs. De là il est résulté que l’exposition du genre et de ses espèces a peut-être été faite d’une manière incomplète. J’ai essayé de rétablir les omis- sions, de rappeler les espèces oubliées , de fixer les rap- ports, et j’en ai profité pour ajouter à cette série l’espèce nouvelle, qui mérite’ d’être connue des botanistes. 504 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Les anciens, n’appréciant pas assez l'avantage qui résulte , pour l’avancement de la science, de létablis- sement des genres, c’est-à-dire de la réunion des espèces conformes par le plus grand nombre de caractères , et sur-tout par ceux que fournissent les organes de la fructification, donnoient indistinctement à tous les cham- pignons le nom de fungus, quelque différentes que fus- sent leur substance et leur forme. Comme il existe un grand nombre de productions fungoïdes, puisque Bul- lard, qui s’est borné aux champignons de la France, en à décrit près de six cents, on conçoit qu’il étoit presque impossible de déterminer une espèce parmi une foule d’autres qui porioient le même nom, et qui m’é- toient souvent distinguées par auvur varactèro iranché, Cet inconvénient , qui retardoit les progrès de la science ét qui en rendoit l’étude si pénible, détermina Tour- nefort à diviser les champignons en cinq genres. Cette nouvelle réforme fut utile à la science ; mais il s’en falloit bien qu’elle fût parfaite. En effet, dans le genre boletus, auquel se rapporte le nouveau champignon trouvé en Amérique, il existe des espèces qui ne sont point congénères , comme , par exemple , le clathrus, qui n’a d’autre affinité avec le bolezus que par le volva qui le recouvre avant sa naissance , mais qui en diffère par plusieurs caractères, et sur-tout par l'absence du pédicule et par la situation des semences renfermées dans son intérieur. Micheli, qui éclaira le premier du flambeau de Pob- servation l’obscurité des plantes cryptogames, ajouta me ET DE PHYSIQUE 505. aux travaux de l’immortel botaniste français. Il établit plusieurs genres nouveaux, et donna des figures qui, n représentant les individus , rendent sensibles les caractères du genre auquel {ils doivent être rapportés. Il divisa «le,-boletus T. en quatre genres; savoir, clathrus, phallus, phallo-boletus ; et boletus. Nous ne parlerons point ici du clathrus, puisqu'il est évidem- ment distinct des trois autres, qui ont été et qui sont encore souvent réunis en un seul genre par les auteurs, mais que Micheli avoit distingués par les caractères sui- vans. Phallus ; volva épais, formé de deux membranes entre lesquelles se trouve une liqueur mucilagineuse ; Pédicule spongieux, fistuleux , inséré dans un godet membrancux situé au Centre du volva ; chapean cellu- leux, recouvert d’une croûte calleuse qui se résout, dans la maturité du champignon, en une liqueur fé- tide , et surmonté d’un ombilic clos ou perforé. PAallo- boletus ; point de volva et de croûte calleuse ; chapeau libre: dans presque ioute son étendue, et n’adhérant au pédicule que par son sommet. Boletus ; point de volva et de croûte calleuse; chapeau adhérent, dans toute son étendue , au pédicuie. Le nom de boletus avoit été jusqu’alors employé pour désigner la morille et les autres espèces congénères. Gleditsch fut lé premier qui, sans égard pour l’accep- tion admise de ce nom, le. transporta aux espèces que Micheli avoit désignées par le nom de suillus, comme on le voit par les reproches que lui en fait Battara, à la fin de son 7raité sur Les champignons qui croissené Lo 64. 06 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES aux environs de Rimini. Gleditsch fut ‘imité par Lin- neus, qui adopta uniquement et exclusivement le nom de phallus pour désigner la plus grande partie des es- pèces réunies dans le genre boletus T. L’exemple du professeur d’Upsal fut suivi par un grand nombre de botanistes, qui auroient cru manquer au respect qu’ils devoient à la mémoire de ce célèbre naturaliste, s’ils avoient fait le moindre changement dans sa nomencla- ture. Nous devons cependant excepter de ce nombre Haller, qui ne voulut jamais reconnoître d’autre maître que la nature, d’autre guide que son génie, et qui rendit au genre boletus sa première signification. Nous devons également excepter l’auteur de la Méthode naturelle, qui, en rappelant dans son Gerera la botanique à ses vrais principes , a cru devoir rétablir plusieurs genres de Tournefort et conserver les noms qu’un long usage semble avoir consacrés. En donnant à la morille le nom sous lequel elle étoit connue des anciens , il a divisé en deux genres les espèces qui appartiennent réellement au bo- letus T., et il a également restreint au même nombre les trois genres de Micheli. Mais que celui dont je m’honore d’avoir été et d’être encore le disciple, me permette de lui observer que les caractères qu’il énonce pour distinguer le phallus et le boletus, ne sont pas assez tranchés, puisqu'il existe des espèces qui se rap- portent également à ces deux genres par quelques ca- ractères, et qui en sont exclus par d’autres, comme, par exemple, le phallus caninus d'Hudson, qui, étant muni d’un volva , appartient au genre phallus, et qui, E TD EP EH Y SI Q UE. 307 ayant un chapeau entièrement adhérent au pédicule, et clos à son sommet, paroît devoir se rapporter au genre boletus. La distinction des deux genres du citoyen Jus- sieu pourroit être admise en introduisant quelques lé- gers changemens dans les caractères génériques ; mais comme il existe plusieurs espèces réellement intermé- diaires, qui semblent lier le phallus et le boletus, et qui paroissent même devoir s’opposer à leur séparation, puisqu'elles appartiennent autant à l’un qu’à l’autre, nous croyons devoir les réunir en un seul genre que nous désignons par le nom de phallus. k CARACTÈRE GÉNÉRIQUE. PéprcuLe tantôt nu, tantôt muni à sa base d’un volva : chapeau celluleux , adhérent entièrement au pé- dicule, ou seulement par son sommet, terminé souvent par un ombilic clos ou perforé ; semences extrêmement minces, très-nombreuses , situées dans les cellules du chapeau. ‘ Linneus n’a fait mention dans ses ouvrages que de deux espèces de phallus; Murray, dans son Systema vegetabilium, en ajoute une troisième décrite dans L. S. ; Gmelin en indique dix dans Pédition qu’il a donnée du Systema raturae : mais comme dans ce nombre il s’en trouve qui ne sont que des variétés, ou même qui ne sont pas congénères, comme le phallus fungoides, qui est une véritable-espèce du genre Ae/vella, nous nous proposons de déterminer celles qui appartiennent réel. 508 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES lement au genre phallus, en distinguant avec soin les variétés. $ LJ Ier, PE IDTICT TE M CNUUS À. Chapeau adhérent, dans toute son étendue, au pédicule. P. Esculentus, L. — Stipite brevi; pileo celluloso, rugoso. De tous les champignons employés à la nourriture de l’homme, la morille est un de ceux qui sont le plus re- cherchés. Elle se distingue de toutes les espèces de ce genre par son odeur agréable. On la trouve abondam- ment dans les bois et les prairies , en germinal et floréal. De longues racines fibreuses tiennent ce champignon fortement attaché à la terre. Son pédicule cylindrique, communément renflé à sa base, continu, fistuleux dans toute son étendue, porte , sur les deux tiers ou environ de sa longueur, un chapeau plus ou moins conique, creusé de cellules très-profondes, et entièrement adhérent au pédicule. Il existe plusieurs variétés de cette espèce, distin- guées , soit par leur forme, soit par leur couleur. Tantôt le chapeau est orbiculaire : Boletus esculentus, rugosus, amplior et orbicularis. Tournef. I. R. H. 561 ; Micheli, Nov. pl. gen. t. 85, fig. 13 Sterbeeck, Theatr. fung. t. 10, B. ; Schæff. Fung. icon. t. 199, fig. 5; Bulliard, Champ. de la France, pl, 218, C, — Tantôt le chapeau H TAUPE M$ r:0 UE 509 est parfaitement ovoide, de couleur roussâtre ou blan- châtre : Boletus esculentus, rugosus, fulyus. T. ibid. Boletus esculentus, rugosus, albicans, quasi fuligine infestus. T. ibid. 1. 329, A.; Mich. t. 65, fig. 2; Sterb. t. 10, À.; Schæff. t. 199, fig. 2, 4,ett. 298, fig. 1, 2, 3; Bull. ibid. B, D, G, H. — Tantôt le chapeau est alongé en forme de borne : Boletus escu- lentus in metam fastigiatus.T', ibid. ; Sterb. t.10 , C.; Schæff. , t. 299, fig. 1. P. sremelloides. — Stipite brevi, crassissimo; pileo celluloso, lobato, undulato. Fig. 1; Juss. fo. rondum editae ; Bull. pl. 218. F. Cette espèce ne présente au premier aspect qu’une masse informe. Son pédicule, court et renflé, porte un chapeau d’un volume considérable , dilaté sur ses bords, lobé et ondulé, de couleur fauve, long d’un pouce et demi, large de près de quatre pouces. Antoine de Jussieu , appelé à Pontchartrain pour soigner le chancelier de ce nom qui y étoit tombé ma- lade, trouva cette espèce, ainsi que la suivante, dont il fit faire le dessin. C’est ainsi que ce savant natura- liste faisoit tourner au profit de la science les voyages que la réputation justement méritée d’un des plus grands médecins de son siècle l’obligeoit d’entreprendre. P. Crassipes. — Stipite infrà dilatato, supernè atte- nuato ; pileo brevi , celluloso, acuminato. Fig. 2 ; Juss. #g. nondum editaæ, 510 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Cette espèce, trouvée dans le mème lieu que la pré- cédente, est évidemment distincte de toutes les morilles connues par son pédicule renflé dans sa partie infé- rieure , rétréci dans la supérieure, et quatre fois plus long que le chapeau , qui est conique , acuminé, cellu- leux et de couleur brune. P. costatus. — Stipite compresso, densè foraminu- lato ; pileo conico, obtuso, grandi, costis longitudina- libus insignito. Boletus esculentus, compressus , densè foraminula- tus, per longitudinem costatus, à cinereo virescens, pediculo crassiore albo. Mich. Nov. gen. 203, t. 85, fig. 3. Phallus anastomosis, Gmel. Ce champignon , dont Micheli a donné une bonne figure, n’est mentionné dans aucun des ouvrages de Linneus; on ne peut cependant douter que ce ne soit une véritable espèce. Son pédicule, comprimé , légère- ment ondulé sur ses bords , parsemé de crevasses régu- lières très-petites, en forme de losange , est de couleur verte cendrée. Sa longueur est environ d’un décimètre (trois à quatre pouces), et son diamètre est environ d’un demi - décimètre (deux pouces). Le chapeau qui le surmonte est conique - obtus , presque campani- forme, parsemé de nervures qui tirent leur origine du sommet, et qui se prolongent jusqu’à sa base, en sui- vant des lignes presque droites. Les mailles, peu nom- breuses, oblongues , très-grandes, sont formées par de petites nervures qui se détachent des nervures princi- MT À DIRES MEOHUYS 1Q +. Bit pales , aboutissent à celles qui sont les plus voisines, ‘et se confondent souvent avec elles. La couleur de ce chapeau, et ses dimensions en longueur et largeur, sont les mêmes que celles du pédicule. B. Chapeau adhérent seulement au sommet du pé- dicule. P. squamosus. — Stipite clavato, squamoso ; pileo conico , ampliore , reticulato. ** Phallo-boletus esculentus pileolo conico, ampliore, subobscuro ; pediculo leucophaæo, fistuloso. Mich. t. 84, fig. 1. Phallus gigas, Gmel. a. Phallo-boletus'esculentus, pileolo parvo, conico, ex fulvo subobscuro ; pediculo leucopñaæo fistuloso, Mich. t. 84, fig. 3. Phallus rete, Gmel. Cette espèce s’élève à la hauteur d’un double déci- mètre (huit à neuf pouces ); elle est remarquable par les petites écailles éparses sur un pédicule renflé à sa base sen forme de massue renversée ,; long dé près d’un décimètre et demi (cinq pouces), et large de quatre centimètres (um pouce et demi). Le chapeau est grand , conique , ondulé Sur ses bords, parsemé de nervures flexueuses qui tirent leur origine du sommet et se prolongent jusqu’à sa base en suivant des lignes obliques. Ces nervures se croisent à certaines distances ; et forment un réseau dont les mailles sont très-srandes. Nous sommes portés à croire que le champignon figuré par Micheli, t. 84, fig. 3 ; n’est qu’une variété du 512 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES phallus squamosus. En effet, il lui est conforme dans toutes ses parties, et il en diffère seulement parce qu’il est plus petit, et parce que son pédicule est lisse ; diffé- rences qui peuvent être attribuées à la jeunesse de l’in- dividu. P. Crispus. — Stipite sulcato-tessellato; pileo am- pliore et crispo. Phallo-boletus esculentus, pileolo ampliore, rufes- cente et crispo; pediculo leucophaco, fistuloso, striis reticulatis insignito. Mich. t. 84, fig. 2. PAallus un- dosus, Gmel. Il suffit de jeter les yeux sur a figure de Micheli pour être convaincu qu’elle représente une espèce de phallus très-distincte de la précédente. Son pédicule, aminci et tronqué à sa base, de couleur gris-cendré , est creusé de sillons obliques qui, en se croisant, forment de grandes rides ou saillies taillées en losange. Son chapeau, presque conique, de couleur roussâtre, est très-évasé à sa base, dilaté sur ses bords, ondulé à son limbe , et marqué, sur sa surface extérieure, de nervures flexueuses qui, en cheminant sans ordre, se rencontrent, s’anastomosent , et forment des alvéoles longs et irré- guliers. Ce champignon s’élève à douze centimètres ( quatre à cinq pouces de hauteur. On trouve dans Sterbeeck, t. 10, quelques figures, telles que D, H, dont les individus représentés pa- EITA ŸD ET PH Y 6 1°0Q U:E. 513 roissent devoir se rapporter à cette section ; mais, comme Va déja observé Micheli, les descriptions de Sterbeeck sont si incomplètes , qu’on est obligé de passer sous silence les espèces qu’il a voulu faire connoître. SEE, PÉDIcULE VoLVACc É. A. Chapeau dépourvu d’ombilic, ou à ombilic clos. P. caninus, Huds. — Stipite celluloso; pileo trans- versim rugoso, impervio. Phallus exilis marattaæ. Batt. Fung. Arimir. p. 76, t. 40, F. Phallus caninus, volyatus, stipitatus ; pileo rubro, celluloso, acuto, apice clauso. Huds. F1. Angl, edit. sec, p: 630. Phallus caninus, volvatus, Slipilatus , stipite celluloso, capitulo impervio ; Tubro, rugoso, Curt. F/, Londin. fasc. 39, t. 235, Ce champignon , que l’ôn trouve en Italie et en An: gleterre , sort d’un volva coriace, blanchâtre , formé de deux lames entre lesquelles ‘est contenue une liqueur _mucilagineuse. Son pédicule, cylindrique , acuminé à sa base, celluleux, d’un jaune pâle, fistuleux, s'élève presque à la Eae de six centimètres ( deux pouces }; il soutient un chapeau oblong , presque acuminé , dé: pourvu d’ombilic, fermé à son sommet, et adhérent dans toute son étendue. Ce chapeau est. d’abord recous 1, 65 514 MÉMOIRES: DE MATHÉMATIQUES vert d’une croûte calleuse quiise résout insensiblemént en une liqueur verdatre, et c’est alors qu’il paroi ridé trañsversalement. P. mokusin. 4.8. Stipite Détäcté 3 ‘pileo ‘acuto ; impervio , quinque-partito , laciniis conniventibus. L. S. / Phallus mo-ku-sin, ActIPetrop. vol. 19, p. 373, t. 8. Ce champignon, d’une substance tendre et molle, sort d’un volva blañchâtre, de là grosseur d’une noi- sette, et fendu irrégulièrement à son limbe ; il s’élève environ à la hauteur de six centimètres (deux poucés ). Son.pédicule., creux dans l’intérieur revêtu d’une écorce épaisse et d’une belle couleur de chair ,: est remarquable par les cinq angles dont il est D Il soutient un chapeau oblong à cubnlé, presque anguleux, de couleur rouge ; dépourvu PÉRBLE : clos à son sommet ,:ét se divisant en cinq laciniures conniventes, e OX Ce champignon que l’on trouÿe dans différentes pro? vinces de la Chine, crottsur les racines: ét sur les feuilles presque pourries du müûrier.< Il parvient, ‘selon la 488 cription, qu’en a ,donnée, le, missionnaire Cibot; à son parfait développement dans l’espace de douze heures ; alors il s’affaisse et exhale une odeur désagréable. Les Chinois en font un grand usage en médecine pour guérir les ulcères cancéreux; ils le, servent aussi quelquefois sur la table, mais ils choisissent les individus qui x n’ont pas encore dé attaqués par les insectes. P. corrugatus: — Volva multipartita ; stipite tereti ; pileo corrugato ,'umbilicato ; umbilico impervio. BE 0 ENT A DEN PH Si 12Q U 5, 515 eo Phallus:qui fungus'phalloides major, germanicus , pileolo corrigato. Mich. p.202. Sterb., t.8o.K,L, M. Ge:champignon se distingue de toutes,les espèces de ce gehre par son yolva. fendu en,einq ou six découpures ovoïdes. presquer-égalés ,et fixées;à peu près dans la moitié de sa hauteur, qui est environ d’un décimètre et demi (six pouces). Son. pédicule est cylindrique, et d’une: grosseur -égale dans toute sa longueur. Son cha- peau, conique, ridé , celluleux , long environ de trois centimètres (un, pouce ), et. à peuprès de la même largeur , est surmonté d’un ombilic mamelonné , très- saillant et nonrperforé. P. cancellatus. — Stipite cylindraceo , lævi; pileo | cancoHatu > 1MPETVIO. Phallus volvatus ;pileo apice clauso. Linn. F1. Suec. edit. prima, n°. 11013 edit. sec. n°. 1261. Act. Stock. 1742,t. 2, fig.1, Phallus alpinus, volvd subrotundd, albä, FLE cancellato , umbilico pervio carente. Mich. Noy. CE Pr 200: à ils en Linneus cite, dans sa 7 al de Suède > comme Syÿyno- nyme du ol impudicus , le chamtisnén que nous décrivons. Cependant il en diffère par un si grand nom; bre de caractères ; qu’on mepeut-hésiter à le regarder comme une espèce très-distincte, Ce champignon , qui s'élève à la hauteur de-deux décimètres (huit pouces ), fut trouvé , en 1740, à Smao- land, dans un terrain maigre et couvert de mousses, par Jean Rothman, docteur:en médecine. Son volva, 516 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de forme orbiculaire , ridé , plissé, communément rongé par les insectes, est terminé par une petite touffe de racines. Sa longueur et sa largeur sont environ de sept centimètres (deux pouces et demi): Le pédicule est cylindrique, lisse, blanchâtre , fistuleux, de manière à contenir une forte plume à écrire , long d’un décimètre (quatre pouces), et environ de trois centimètres (un pouce) de largeur. Lie chapeau qui le surmonte est coni- que-oblong , creusé de plusieurs petites cavités disposées en lignes parallèles, de couleur brune , excepté au som- met qui est blanchâtre , ombiliqué , et parfaitement clos. Ce chapeau, adhérent dans toute son étendue au pédi- cule qui le:supporte,.a près de cinq à six centimètres (deux pouces) de longucui ; ot onviran trois centimè- tres (quatorze lignes) de largeur à sa base. Tout le champignon a une odeur agréable et vive comme un orchis, selon la remarque de Rothman, dont le citoyen Cuvier a eu la complaisance de nous traduire la des- cription. Micheli fait mention de quelques phallus qui paroïssent devoirse rapporter à cette section , et que nous croyons néanmoins devoir passer sous silence. Telles sontles deux espèces trouvées dans la Virginie par Banister. Ray, qui les cite dans son Hist. plant. t. 3; p. 25, dit expres- sément qu’il ignore si ce sont des espèces différentes de celles qui sont connues. Nous passerons aussi sous silence le phallus campa- aulatus de Withering, figuré dans les Act. Ang. vol. 74 t. 16. Il paroît, comme la observé Dickson, que ET: DE PH Y:S I Q UE. 517 cette espèce appartient au genre /ycoperdon. Ce célèbre botaniste lui a donné le nom de /ycoperdon phalloides , dans son premier fascicule des Plantes cryptogames ;, po: B. Chapeau ra cable perforé. P. Hadriani. Stipite tereti, maculis cineraceis dis- tincto; pileo brevi, non cellulato. Phallus Hadriani Julii, capitulo non cellulato, sed umbilico pervio donato. Mich. p. 202, Clus. His£. rar. plant. cexcv. J. B. vol. 3,.p. 845. Sterb. t. 30,E,F. - î Ce champignon, que les anciens botanistes regar- doient comme une des merveilles de la nature, croît en D Dadlineadash illisible lan trouvé près de Blois, sur les bords de la Loïre. IL est d’abord renfermé dans un volva turbiné ou pyriforme, de couleur blanchâtre, et muni à sa base d’une racine courte, fusiforme. Ce volva, qui contient une liqueur visqueuse , fétide , est formé de deux membranes. Lors- que le champignon s’est fait jour à travers , la membrane extérieure se renverse, et celle qui ést plus’ intérieure .engaîne la base d’un pédicule cylindrique , aminci à sa base, lisse, parsemé de petites taches cendrées , creux dans l’intérieur ; long d’un décimètre et demi (six pou- ces), et large environ de trois centimètres (un pouce). Le chapeau est. presque campaniforme ; marqué de quelques stries légères , un peu ridé, déchiré à son limbe, libre dans toute son étendue, couronné à son sommet d’un ombilic saillant, en forme de cupule, et perforé, 518 MÉMOIRES IDE MATHÉMATIQUES Il est d’abord d’une couleur laiteuse; mais , en vieillis- sant , il devient d’un brun roussâtre. Clusius nous apprend qu’on lui avoit présenté à Ams- terdam plusieurs individus de cette espèce , et que, toutes les fois qu’il les serroit dans sa main, il éprou- voit un. engourdissement. On croyoit, du temps de ce célèbre botaniste , que la liqueur contenue dans le volva de ce ent pouvoit être employée avec succès contre la goutte. Le genre auquel on doit rapporter ce champignon ne nous paroït pas encore suffisamment déterminé. À là 4 vérité, il se rapproche ; par une foule de caractères ; du plallus ; mais comme son chapeau n’est point celluleux;, il poutroit ce faire que - Isès suinoncode fuccont ranfermées dans {l’intérieur , ét ‘alors ce champignon seroit Me: ee du incoporaloh: où P, impudicus > rs fps tereti RG RAe pileo breyi celluloso, PURE : pes ANPAPE F pt a :wol, 3, 843: dut dé à be » penis imaginem referens. G. B. Pin. 374. Clus. Hist: rar. pl. coxxxxvr. Funous virilis penis arrecti facie. Lob.ïicon.:t. 309. Boletus phalloides ; Tournef. I..R. H. 562. Boletus phallum.referens, Rupp. F1. Jen. 203. Stexb. \t..30.,.A,.B,:C; D, Mich..t..33: Bait.. t. . Schæff. vol,,25 tr pe: 197%.198.:Oed.; F2. Dan. ts A Bull. pl. 182. On trouve ce champignon dans les bois en messidor et thétinidor , lorsque’la tèrre à été humectée par les B + 0 JET AUDE TR MH VS 12Q UE. rt G1ÿ pluies. Il est d’abord;renfermé dans un volva lisse ex- térieurement , et formé de deux membranes , entre les- quelles se trouvé une liqueur visqueusè, épaisse et irans- parente. Dans cette circoristance; ilressemble-à beaucoup d’autres champignonségalement contenus dans un volva’, comme ,lpar exemple , le c/athrus; mais on le distingue, comme l’observe Bulliard , à, samollesse , qui approche de celle d’un œuf dont on auroit enlevé la coquille: Onre: marqué: à la base. de ce volva quelques racines fibreuses, au-somrhét desquelles:se trouve communément un petit phallus: de la grosseur . d’une ‘lentille , ‘et qui est des- tiné à remplacer le premier. Le volva se déchire au bout. de quelques jours h+et l’on-voit alarsiparoître le champignon } qui-c’élèe iusensiblement, Parvenu' au terme de son développement;, il est droit; assez férime ; et répand une odeur infecte , qui attire une foule din: sectes, et qui ‘indique dedieuroù ‘ilestià éeux qui’sont curieux d'en! faïresla récolté. Le lpédiculé: est reçu à sa base dans une € espèce de ue pr situé dans le centre PATES CEE Îl'est ‘cylindrique, Un peu aminci à ses deux extrémités, charnu , ; fragile, percé à jour d’une infinité-de ‘pétits! trousr, seen dans sonvintérieur, long d’un décimètre. et ‘demi (cinqrà:six pouces ) ;: ét largé, de:trois centimètres (dix, Aiquatôrze dignes }. 1] supporte un chapeau cohique; obtus; eoncave } creusé de larges cellules, enduit. d’une croûte: verdâtre ; qui pe tarde pas à tomber-en, déliquescence:;>sé résout'en une liqueur peu différente de: cellé.qui estisituéel entre les inembranes du:volva:;-eténtraîne dans sa:chüte leg b20 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES semences. Ce chapeau est couronné à son sommet d’un ombilic arrondi et perforé. Micheli cite, dans la première section qu’il a faite du genre phallus, deux espèces qui nous paroissent Ôêtre deux variétés du phallus impudicus ; et qui en dif: fèrent, l’une, par son volva ovoïde et de couleur pur- purine en dehors ; l’autre, parce qu’elle est plus petite dans toutes ses parties. La conformité du phallus impudicus avec l’organe de la génération dans les animaux mâles a fait soup- conner qu’il pouvoit être utile, soit pour exciter, soit pour réveiller les feux de l’amour : aussi les habitans de plusieurs pays ont-ils grand soin de récolter les in- dividus decette espèce avant lenr maturité ; ils les font sécher en plein air ou à la fumée; ils les réduisent en poudre qu’ils mêlent avec quelque liqueur spiritueuse, et ils en font prendre une certaine dose aux animaux mâles et, femelles dontils desirent multiplier la race. P. indusiatus. Stipite tereti,, celluloso, indusiato ; pileo brevi, reticulato. Fig. 3. Ce champignon, originaire de la Guiane hollandaise, se rapproche beaucoup duù phallus impudicns ; maïs il en diffère essentiellement par la présenced’un organe d’une structure tout-à-fait remarquable, et dont aucun cham- pignon ne présente l'exemple. Il s’élève environ à la hau- teur d’un décimètre et demi ( six pouces) : son pédicule est cylindrique, droit, simplement contigu avec le cha- peau, d’une blancheur laiteuse, creux dans son inté- LQ MTA EN FTP VS ROULE: Bat rieur, large d’environ trois centimètres (un pouce) dans la partie inférieure , et d’un centimètre et demi ( demi- pouce ) dans la partie supérieure, On remarque sur toute sa superficie des bulles qui se crèvent à mesure qu’il avance en âge ; de sorte que , parvenu au période de son développement complet, il est parsemé de lacunes, parmi lesquelles on distingue encore quelques bulles. Le pédicule paroît , dans sa jeunesse, faire corps avec le chapeau. Ces deux organes sont réunis par le moyen d’un bourrelet frangé, qu’on prendroit d’abord pour un collet; mais, à mesure que ce bourrelet se développe, les fibres dont il est formé s’alongent, se croisent , et présentent un tissu qui se renverse, et qui, sem- blable à une chemise , recouvre en entier le pédicule du champignon. La couleur de ce tissu est d’abord la même que celle du pédicule; mais, en vieillissant, cette couleur s’altère, et tire sur le roussâtre. Les al- véoles ou ‘mailles fo par le croisement des fibres sont très-nombreuses : (elles ont des formes différentes ; cependant elles sont le plus généralement oblongues. Le chapeau , qui est en cône évasé à sa base, ou presque campaniforme , est libre dans toute son étendue, et il wadhère avec le pédicule que par le limbe de l’om- bilic perforé qui le couronne. Toute sa surface extérieure est remarquable par des alvéoles de grandeur et de forme différente, qui correspondent chacun à autant de cal- losités Eh culeuses , dont la surface intérieure est par- semée. Ces-alvéoles, dans lesquels doivent être con- 1e 66 522 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES tenues les semences, ont une couleur de bleu de tour- mesol, tandis que les nervures saillantes qui les forment sont d’une blancheur assez éclatante. Nous n’avons point parlé du volva de ce champignon, parce que les individus qui nous ont été communiqués en sont privés. Il est cependant probable que ce phallus en est pourvu de même que les autres espèces de cette section ; mais il paroît que cet organe , enfoncé dans la terre, y reste lorsqu'on arrache les individus. Cette belle espèce, qui présente un caractère assez tranché pour être suffisamment distincte de tous les champignons connus , croît en abondance dans la Guiane hollandaise ; à trois cents pas environ de la mer, et autant à peu près de la rive gauche du fleuve de Suri- nam. Elle ma été communiquée par le citoyen Vaillant père, qui Pavoit observée, en 1755, dans la saison des grandes pluies, sur de petits atterrissemens qui ne sont jamais inondés par les plus hautes marées, et qui sont formées d’un sable fin , très-blanc , recouvert d’une légère couche de terreau. La prodigieuse quantité des individus de cette espèce qui croïssent en même temps, leurs divers degrés de développement, léclat et les nuances variées de leurs couleurs, présentent à la vue un tableau vraiment pittoresque. On peut présumer que! ce champignon , qui n’est attaqué par aucune espèce d’in- secte, selon l’observation du citoyen Vaillant, ne ré- pand pas une odeur désagréable comme le phallus im pudicus. Test aussi probable, d’après le grand nombre Mein. de l'Inshtut CL Tom.L Pay. 922 ALT I: f Se À Us jo fe tte jh T'Egune et Buvry, feutre nya Loi a \ à gba He) ! qe à F + t À k 4 Fe * L [2 } $ à le ; "| d Nil RE A AT TT BU 5 D ET PE vSr © 0 © 553 d'individus de tout âge qui embellissent le terrain sur lequel ils croissent , que cette espèce ne se perpétue pas, comme la morille impudique, par un tubercule ou petit champignon , qu’on trouve assez communément dans la partie supérieure de sa racine. 524 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES NOUVELLE DÉTERMINATION DE L'ORBITE DE MERCURE, Par Jérôme LALzAnNDE (1). Lu le 11 nivose an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le premier pluviose an 5. ARE avoir entretenu pendant quarante ans l’Aca- démie des sciences de mes travaux sur l’astronomie pla- nétaire , je demande à l’Institut, qui la remplace, la permission de lui offrir le dernier succès que j’ai obtenu dans cette longue et pénible carrière. La difficulté de déterminer l'orbite de Mercure venoit sur-tout de la difficulté de le voir. Le grand Copernic mourut sans avoir jamais eu la satisfaction de Vobserver; et lorsque j’eus observé Mercure sur le So- leil en 1753, je trouvai que les tables de Cassini et celles de Halley différoient de cinq heures. Suivant celles z G) C’est ici le premier mémoire qui ait été lu à la première assemblée de la première classe de l’Institut national , le premier janvier 1796 ; mais les résultats ont été perfectionnés au mois de mars suivant, ET DE PH Y:S:1:Q U E: 525 de la Hire, l’erreur est encore plus grande ; il seroit entré sur le Soleil dès la veille. Il ne m'en fallut pas tant pour m’attacher à cette planète, et je n’épargnai pas le travail. Souvent je me lévai long-temps avant l'aurore, pour aller presque sous les toits attendre Mercure dans ses digressions du ma- tin, afin d’arracher à l’inconstance des saisons une dé- termination de l’aphélie de cette planète. Pour déter- miner le mouvement de l’aphélie , je fus obligé d'étudier le grec, afin de pouvoir faire usage des observations rapportées.dans | A/mageste de Ptolémée, dont les tra- ductions sont imparfaites; mais ces observations me trompèrent par leur inexactitude : elles me donnèrent le mouvement de Paphélie trop fort; et lorsque le pas- sage de Mercure sur le Soleil, le 4 mars 1706, devoit me faire jouir du succès de mes travaux , et sanctionner mes tables de Mercure, une erreur de plus de demi- heure vint me donner un démenti, suivant la prédic- tion de Mæstlinus, qui disoit, il y a deux cents ans, que cette planète servoit à décrier la réputation des as- tronomes, et. que s’il en connoïissoit un qui fût occupé trop sérieusement à en rechercher les inégalités, il lui conseilleroit de mieux employer son temps. Jecherchois une autre route pour parvenir à cette inex- tricable orbite, lorsque j’imaginai, en 1786, de prendre les passages sur Le Soleil deux à deux, c’est-à-dire un vers le nœud ascendant, l’autre vers le nœud descen- dant, pour en conclure le lieu de Paphélie dans le dernier siècle et dans celui-ci; ce qui devoit suffire, » 526 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES pourvu que l’excentricité fût bien connue d’ailleurs : mais j’avois observé plusieurs fois Mercure dans ses digres- sions aphélie et périhélie, et j’avois à peu près de quoi remplir mon objet; je trouvai l’équation de lorbite 230 40', et le mouvement de l’aphélie, 56" par an. Je dus à cette idée le succès si long-temps desiré. Cepen- dant M. Oriani paroît avoir cru (Éphém. de Milan , pour 1795, p. 70) que c’étoit la théorie du citoyen Lagrange qui m’avoit donné le mouvement de Va- phélie; mais il étoit impossible que j’en tirasse aucun secours, à cause de la grande incertitude qu’on avoit sur la masse de Vénus. Je trouvai le moyen de m'en passer, et les tables que je publiai en 1786, dans la Connoissance des temps de 1789, furent confirmées pleinement par le passage de Mercure, observé en 1789. (Mém. 1789, p. 178.) Malgré ce premier succès, je n’ai manqué aucune occasion de donner à cette recherche un nouveau degré d’exactitude ; j’ai mis à profit tous les astronomes de l’Europe , pour avoir des digressions de Mercure aphélie et périhélie : j’en ai observé moi-même plusieurs ; j’en ai eu de MM. Maskelyne, à Greenwich ; Saint-Jacques et Thulis, à Marseille; Darquier et Vidal, à Toulouse; de Zach, à Gotha; Oriani et Reggio , à Milan ; Piazzi, à Palerme; Duc-la-Chapelle, à Montauban (é”. 1789, p. 175; Connoissance des temps, 1797; p. 322, 337 et 342). L’Asie même m'en a fourni; et Beau- champ, assis sur les ruines de Babylone, a observé Mercure là où plus de deux mille ans auparavant les BE | DE PL [IS IINQ UE: 827 premières observations en avoient été faites : mais les siennes m'ont été plus utiles que celles des Chaldéens. Aidé de ces nouveaux secours, j’ai repris la théorie de Mercure avec une nouvelle ardeur : j’ai trouvé enfin qu’en ajoutant 45" à l’équation de Mercure, je repré- sentois encore un peu mieux toute cette masse d’obser- vations : ainsi l’équation est de 23° 40’ 45". Le dernier passage sur le Soleil, que j’ai observé le 5 novembre 1789, à 55 10° d’anomalie moyenne, devoit me servir pour constater le lieu de l’aphélie, en le com- parant avec celui du 3 mai 1786, quiétoit à 105 16° d’ano- malie. Les tables du Soleil du citoyen Delambre avoient aussi un degré d’exactitude qui nous manquoit lorsque je publiai mes tables de Mercure en 1783. J’ai donc repris ces deux conjonctions ; j’ai calculé les longitudes vraies, dégagées des deux aberrations de Mercure et du Soleil, pour les lieux des conjonctions héliocentriques vraies , et comptées de l’équinoxe moyen. 1786. 3 mai, 175 8047. +1. rs 130, 400407 27001 INOV-s DJ U TP eee lle et 13 M AONSZ Les longitudes de Mercure , calculées par mes tables pour ces deux instans, en RER de 45 Ja plus grande équation, se sont trouvées plus petites, la pre- mière de 1”, l’autre de 3”. Cés erreurs sont insensibles : ce qui m'a prouvé que tous les autres élémens étoient déja fort bien dans mes tables , et qu’il y avoit très-peu de chose à changer dans le TA de l’aphélie et dans Vépoque de la longitude moyenne. SaB MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES En effet, pour faire disparoître ces petites erreurs; il n’étoit question que d'augmenter de 2" la longitude, et d’ôter 3” de l’aphélie. Par là je rendois la longitude calculée plus petite de 1" en 1786, et plus grande en 1789. L’erreur étoit de 2" dans l’une et l’autre : le mou- vement étant d'accord avec l’observation, il falloit donc ajouter 2° aux époques de Mercure qui sont dans mes tables de 1786. Les observations du dernier siècle, telles que les passages de Mercure sur le Soleil en 1661 et 1677, devoient aussi se calculer avec ma nouvelle équations Mais ce n’est pas assez, toutes les parties de la science ont une connexion nécessaire : j’avois calculé la durée de l’année avec une précision qu’on n’y avoit pas en- core mise. (Mémoires de l Académie des ‘sciences ; 1782.) Le citoyen Delambre s’en est servi dans ses tables du Soleil. J’ai calculé par ces tables les lieux du Soleil dans ces deux passages anciens ; et j’ai trouvé des résultats différens de ceux que j’avois employés. Voici les temps moyens des conjonctions , observés avec les longitudes vraies dégagées des deux observations. 1O01-AD DAT A 10 AU ee 75 13° 34° 15° 1677. 7 NOV: 0: 27 207. 2 4 10 9 11 15) 45 55 En: calculant ces longitudes par mes tables avec l'équation augmentée de 45", j’ai trouvé pour la pre- mière 14° de. moins, et pour la seconde 10" de plus : il falloit diminuer de 24" le mouvement vraï de Mer- cure donné par mes tables dans cet intervalle, et il EUR, IDPEUIPAET YNSUTÉQ 07 E; 529 suffisoit- pour cela d'augmenter l’aphélie de 31”, et la longitude moyenne de G". Maïs, j’ai reçu ensuite les Éphémérides de Milan pour 1796, où M. Oriani a calculé les perturbations de Mercure par l'attraction de Vénus, en employant la troisième puissance de l’excentricité par la méthode du citoyen Laplace ; il a trouvé des équations que ne four- nissoient point les calculs que j’avois faits avec l’ex- centricité simple (Mémoires del Académie des sciences, 1771). Je les ai appliquées à mes recherches ; maïs j’ai diminué les équations d’un huitième, parce que je crois la masse de Vénus encore plus petite que M. Oriani ne Va faite. J’ai donc repris les.quatre longitudes calculées par les tables corrigées pour les temps des quatre cons jonctions vraies; en voici les résultats : Mai 1661, Nov. 1677. Nov. 1786. Mai 1789. Long. calculées . ..,7°13934 2”. 1515046" 5",7°139 49" 39°. 1513°40" 49% Perturbations . . . — 12. — 11, — 6. + 5 Long. parles tables. 7 13 33 49 . 1 15.45 54. 7 13 49 33 . 1 13 40 54 Par observation . . 7 13 34 15.1 15 45 55 : 7 13 49 40 . 1 13 40 52 Corrections à faire . + 26. +1. + 7. —* En ouvrant la table de l'équation de Mercure, on voit: facilement qu’une minute d'augmentation dans l’a- phélie produit des corrections + 16! au mois d2 mai, et—20"au mois de novembre, c’est-à-dire à 5 signes 11 degrés d’anomalie : ainsi elle diminue le mouvement calculé de 46". Pour produire les quatre corrections à faire, il faut diminuer le mouvement de 25" dans le premier intervalle, puisqu'il y a 26" d’un côté et 1" de 1, 67 530 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES l’autre; il faut aussi diminuer le mouvement de 9" dans le second intervalle, où il y a + 7" d’un côté , et — 2’ de l’autre. On trouve facilement qu’en ajoutant 32" à Vaphélie, on augmentera la longitude de 1661 de 9", et qu’on diminuera celle de 1677 de 16": le mouvement sera diminué de 25”, et l’erreur des tables se trouve la même, c’est-à-dire de 17’ dans les deux passages, comme cela doit être pour que les tables donnent le même mouvement que l’observation. De même , pour les deux derniers passages , en augmentant l’aphélie de 12", j’aug- mente la longitude de 3” dans l’un, je la diminue de 6" dans Pautre ; cela rend les deux erreurs de 4”, et elles se trouvent encore égales, comme on le voit dans te tableau suivant: | | 1661: 1677. 1786. 1789. Correction des tables : . . , . . . + 9 — 16” + 3° — 6” Elles étoient ci-dessus . . , + . « « + 26 + 1 +7 —2 Donc il faut encore ajouter . «+ . . +17 +17 +4 +4 Ainsi, vers 1669 , c’est-à-dire dans le milieu de l'intervalle entre les deux premiers passages, il y avoit A 17" à ajouter, et vers 1788, 4" seulement : donc il faut Ôter 13° pour cent dix-neuf ans , ou 10" par siècle, du mouvement de Mercure, employé dans mes tables de 1786. Pour produire ces changemens , il a fallu aug- menter l’aphélie de 32” vers 1669 , et de 12" vers 1788 : donc le mouvement de l’aphélie doit être diminué de 20" en cent dix-neuf ans, ou de 17" par siècle. Ainsi le résultat de ces nouvelles recherches se réduit à ôter 10" du mouvement séculaire de Mercure, qui devient “+ ET DE PHYS1:IQU SE. 531 25 14° 4! 10", et 17" de celui de Paphélie, qui devient 19 2328". En combinant de même les autres passages , on pourroit trouver quelques petites différences dans les résultats. Je n'ai pas été plus loin, en voyant que les corrections sont peu sensibles ; mais elles méritoient ce- pendant d’être employées dans de nouvelles tables que Jai déja insérées dans la Connoissance des temps de Pan 6; ou 1798. Ce mouvement de laphélie de Mercure est d’une exactitude à laquelle je n’avois pas osé aspirer avant d’avoir imaginé la méthode dont j’ai parlé, et il est d’une importance qui ne se borne pas à la théorie de Mercure, mais qui s'étend, pour ainsi dire, à tout le système du monde, par une suite de cette connexion dont j’ai parlé entre les différentes parties de l’astro- nomie : elle est bien remarquable ici sur-tout; car la masse de Vénus influant sur des effets importans, comme Pobliquité. de Pécliptique et les inégalités de la Terre, Vaphélie de Mercure > dont le mouvement vient en partie de l’action de Vénus, nous donne quelque lu- mière sur la masse de celle-ci ; il en résultera uné ;m- portance majeure pour les résultats qui font l’objet de ce mémoire. Or le mouvement annuel de l’aphélie de Mercure , 56'08 ; plus petit de 0')i que celui que le citoyen La- grangé déduisoit de ‘son hypothèse pour la masse de Vénus (Mémoires de Berlin > 1782), exige une dimi- “nution, comme je l’avois déja indiqué (Mémoires de l'Académie des sciences > 1788, p. 400); car le mou- 532 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES vement réel étant de 5"93, dont il y a 2'52 pour l’ac- tion des autres planètes, il reste 3"41 pour l’action de Vénus, au lieu de 414 : c’est presque un sixième à ôter de la masse de Vénus, que le citoyen Lagrange a sapposée 477 de celle du Soleil, et il y a des phé- nomènes qui paroissent exiger une diminution encore plus grande, même de deux cinquièmes (Mémoires de 1786, p. 399) ; aussi j’ai coutume de la supposer +55; ou 0,000002h11: mais cet élément se perfectionnera quand on connoîtra encore mieux par les observations les phénomènes qui dépendent de l’action de Vénus sur la Terre et sur Mercure. C’est d’après cette masse que j’ai diminué la somme des équations qu’il faut appliquer aux tables pour les passages de Mercure, que M. Oriani avoit mises dans les Éphémérides de Milan pour 1796, p. 59. Voici les nombres que je crois devoir employer, et qu’il faut appliquer aux tables avant de les comparer aux obser- vations : 1631. . 6 nov..# + 5°6 «1740 4. 2 mi. . — 72 1651. « 2 noy:. « + 2,3 1743. , 4inov.. . + 13,0 ‘1661. . 3 mai . + — 12,2 1753 . . D mai . . — 4,x 1677 « + 7 AOV.e + — 11,0 1756. + 6 nov.. . + 5,8 1690. .« g nov... e — 2,2 . 1769. + 9 nove: . — 10,2 1697 . + 2 nov., « + 4,8 1782 . . 12 nov. . . + 11,1 1723 . . 9 nov.. « — 8,5 1786 . . 3 mai . . — 5,7 3736. .10 nov.. . — 3,5 1789. . 5 nov.. . + 4,8 La masse de Vénus étoit, suivant M. Oriani, ——; c’est-à-dire trop grande d’un huitième. On demandera pourquoi je n’ai fait aucun usage de don, ÉGrA IbEu ‘PAs vis QHui El 533 V’observation du passage de Mercure sur le Soleil én:1631; la plus ancienne de toutes, qui avoit été employée par Hälléy, Cassini et-tous les autres, pour avoir le mou- vement de Mercureet celui du nœud ; mais j’ai reconnu qu’on n’en péüt tirer aucunsecours , et je vais en donner les raisons. ‘Cette observation sembleroit d’abord être utile, sur-tout pour le mouvément du nœud,1ien don- nant les latitudes de Mercure; imais en lisant le détail que donne Gassendi dans sa lettie à Schickardus ( Ope- rum t: IV, p. 501); on voit qu’il ne marqua pas exac- tement le point'du disque solaire où sortit Mevcüre. 1} se rappeloit bien que c’étoit à 2 où 3 degrés du 35e degré, en partant du diamètre* hôrizontal de l’image solaire ; mais il n’étoit pas sûr si é’étoit au-dessus ou au-dessous ‘du 35e degré : En 32 + : j'ai lieu de croire que c’étoit plutôt 37 +; car la latitude qui en résulte s’accorde mieux avec le ‘mouvement du nœud que j'ai tiré du passage de 1677, le plus ancien de ceux qui ont été observés exactement. Ainsi nous n’avons aucune certitude pour la latitude de Mercure dans le passage de 1631 : il ne peut donc servir à déterminer le mouvement du nœud. De là il suit que ce passage ne peut pas servir à déterminer la conjonction, et par conséquent la longitude et le mou- vément de Mercure ; car la sortie de Mercure ne peut donner le temips dé a conjonction sans le secours de la latitude, qui fait seule connoître la durée du passage. Mais, quand la sortie donneroïit la conjonction, il - “en résulteroit aucune lumièré sur le iioyen mouve: 534 MÉMOIRES :D:E MATHÉMATIQUES ment, .Gar.il dépend, trop de celui,de Paphélie pour qu’on puisse) déterminer l’un sans l’autre; il n'y avoit pour cela d'autre moyen que celui dont jai fait usagé (Mémoires de 1786),,.en combinant. deux jobservations qui donnent à. la fois la longitude de Mercure et célle de l’aphélie, Cela est si.évident, que je m'étonne de voit que les. plus: habiles astronomes , tous sans exception, aient entrepris de chercher le mouvement de Mercure par le passage de 163%. Au reste ,; le passagé de1677 est assez ancien et assez concluant pour que nous puissions nous passer de celui de 1631. J'ai calculé celui de 1677 avec une exactitude que Halley n’y avoit pas pu mettre, et j’y ai assujetti mes tablés.,..qui représentent parfaitement le lieu. du nœud déduit de Ce passage et de tous les passages in- termédiaites. € M Aïda Ainsi cette orbite. de Mercure, qui a si long -temps tourmenté les astronômes ,; et moi sur-tout, est donc enfin déterminée d’une -manière incontestable, Je puis dire decet objet de mes travaux ce. que Virgile disoit de la liberté : Respexit tarren et longo post tempore verni. (Eel, I, v. 30.) Mais j'aurai bientôt à entretenir l’Institut d’un objet. plus-importantet, plus vaste, qui n’a été interrompu ni par les troubles ni par les dangers, et que je n’aurois osé espérer lorsque je l’entrepris : c’est le dénombre- ment et la détermination. exacte des étoiles. jusqu’à, la, 2 « sms E dt. ds arr AD: Ex AH WRSTI eQ D 26 À 535. neuvième grandeur. Le nombre-est déja porté à trente- sept mille, etil y en aura probablement près de cinquante’ mille quand les zones seront finies jusqu’au tropique du Capricorne. Jai déja publié une! partie des résultats pour les principales étoiles, dans les volumes de la Connoissance des: temps. depuis 1794 :: dans celui de Van 7 (1799); on trouvera deux mille. étoiles, remar- quables, et qui, étoiént encore inconnues. C’est: an ci- toyen Michel Lé Français Lalande , mon parent.et lun de nos meilleurs astronomes , que l’on aura la principale obligation de cet immense travail. Les premières obser- vations se trouvent dans les Mémoires de l’Académie pour 1789-et vygpi La suite paroîtra dans. l'HrsrorrE cÉLESTE , dont j’espère bientôt commencer l’impression. 536 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES RE". ————— OBSERVATION D'UNE ATROPHIE TDIOPATHIQUE SIMPLES c’est-à-dire, qui ra été précédée par aucune maladie ‘primitive ou antérieure, et na élé accompagnée d'aucun accident et d'aucun symptôme étranger ; > Par Hi 4 dos Eu le 6 ventose an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut Le premier pluviose Ré 4 an CARTE ts L UELQU'AFFLIGEANT que soit pour nous le spectacle de la destruction des êtres qui vivent et qui sentent, cette destruction appartient, autant que leur existence même , au système des corps organisés ; car ce n’est qu’à cette condition qu’il leur est donné de se reproduire. Elle fait donc partie de l’œuvre de la nature, et doit également aïtacher les regards du philosophe. À ce titre je crois pouvoir appeler l'attention de l’Institut sur l’ob- servation dont je vais donner le détail : elle est, à ce que je pense, un trait de plus ajouté à l’histoire naturelle de Vhomme malade. Diverses maladies produisent l’atrophie, ou le défaut de nuirition ; 1nais je ne pense pas que l’on ait eu beau- coup d'exemples de l’atrophie existante par elle-même, Ep DEN HPIÉ IS IQ EH : Te 537 sans maladie antérieure , et sur-tout sansjautre altération visible , sans autre symptôme apparent, que Pamaigris- sement continué jusqu’à l’extinction de la vie. : C’est cependant ainsi que s’est éteinte sous mes yeux , sans-cause connue; une jeuñe personne de vingt-cinq ans. À cinq ou six ans elle avoit été languissante, comme le sont souvent les enfans dont la seconde dentition est difficile. | À sept ans elletéprouva:une menstruation précoce *. ne dura pas. À quatorze ans elle fut réglée sans äccident, et con- tinua de l’être bien, tant pour le période que pour la quantité , jusqu’à dix-sept ans: h +9 À dix-sept ans les règles diminuèrent sensiblement. La diminution alla toujours en croissant jusqu’à vingt-un ans, époque où les règles cessèrent absolument pour ne plus revenir. Depuis la diminution progressive des règles, cette malade a/maigri continuellement, perdant insensible- ment ses forces, sans aucune augmentation dans les évacuations , sans sueurs, sans transpiration sensible, sans toux, sans expectoration, sans œdème des extré- mités. ; La peau du cou et de la poitrine étoit marquée de taches fauves, communément nommées taches hépa- tiques. La malade d’ailleurs faisoit.ses. fonctions comme à VPordinaire , mangeoït beaucoup, digéroit bien en appa- 1, 68 538 mÉMmoOrTNÉS DE MATHÉMATIQUES rence, c’est-à-dire, n’éprouvoit aucun trouble dans le moment où la digestion se fait , et rendoït des excrémens de consistance et de couleur ordinaires ; elle dormoit peu, s’occupoit, et néanmoins maigrissoit à vue d'œil. La veille de sa!mort elle ne sortit point ; mais elle alla et vint dans la maison, et donna ses soins aux'afs faires domestiques comme à Pordinaire. Le soir elle se sentit lasse, ‘et se coucha de bonne heure. Le‘lendemain, jour de sa mort, elle resta couchée, étant extrêmement assoupie, la tête peu présente, les yeux ternes et languissans, les mouvemens lents, les sensations engourdies, le pouls singulièrement ralenti et foible, la RE très-courte, sans être Li Va ts ni tnée!? Elle ne se plaignoit de rien , et disoit seulement qu’elle sentoit un grande propension au sommeil. Elle expira sur les quatre heures après midi, Dans les huit jours’ qui ont précédé sa fini, elle avoit éprouvé quelques accès de toux sèche et quelques ins- tans d’oppression. ! Cette jeune personne étoit timide, peureuse'; on la sowpconñoit de jalousie. On croït qu’à l’époque de la diminution de ses règles, elle avoit éprouvé quelques frayeurs. ‘La masturbation ne: paroît avoir eu aucune part à sa maladie, autant qu'on put en juger par état des parties ee externes , ainsi qu on le verra dans les: détails de l’ouverturelio2ir! en | ‘tL'ouverture de’son corps a été faite par le citoyen Fragonard , à l’école de santé. Cr BED UD ENT DEC Er dQ 0 1 0 M | 539 La peau sembloit collée sur les os; le ventre étoit très-déprimé , et touchoit presque la colonné épinière. Le tissu celluleux sous: cutané contenoit seulement - quelques traces de graisse éparses re des foHicules isolés. Fe esmte it Nulle apparence de graisse ne se montroit dans l'épr ploon ni dans le mésentère. Les membranes de ées deux organes étoient tellement collées l’une! l’autre, satis autre intermédiaire visible que les’ vaisseaux sanguins et les nerfs, qu’elles étoient parfaitement transparentes. Les matières trouvées dans lès STros intéstins étoient de consistance et de couleur idées) La vésicule du fiel étoit presque vuide ; blanchâtre, €t'he présentoit aucune transsudation ETAT ‘Les glandes mésentériques: n’étoiént | nitigrossés: mi ie à ellésparoïissoient plus saillants: que Jde coût tume, à, cause de l’absence totale de 4x graisse qui les citonts ordinaïrenient. On ne voyoit péiit és traces des vaisseauxlaetés qui s’y rendent : il auroit faHt pou Voir poussér quelque injection dans Re eanal TA CEE F mais nous ‘h’éñ avions pas les moyens. ? Peu Aÿänt enlevé Ta’ peau dans le pli dés Ge > On âp- pérçut en cet endroit des filets $ecs d’un blanc mat et assez résistans ; ‘semblables'à des: nets. laveël des rén- flemens pareils à des ganglions nerveux. T4 même dis- position se présentoit de l’un et dé l’autre côté. En Fans ces parties avec soin , on's’est convainc qüe ’étoient les glandes: Ipinphätiqués: inguifiales et leurs vaisseaux lymphatiques qui étoient FÉdEAS à cet ‘état, 54o MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Nulle-autre part ces vaisseaux m’étoient apparens ,eten cet endroit leur cavité paroissoit oblitérée; il eût été impossible de les éprouver par linjection. Par-tout les artères étoient vuides et les veines fort pleines, particulièrement celles de la grande courbure de l'estomac. Tous, les viscères étoient peu volumineux, mais dans un état absolument conforme à l’état naturel, à Pex- ception de quelques hydatides attachées aux ovaires par de longs filets, et d’une légère induration dans le pou- mon droit; sans ulcération. La glande thyroïde étoit, comme toutes les autres, extrêmement petite. 1: Les parties extérieures distinctives du sexe étoieni singulièrement émaociées , et n’avoient pas, à beaucoup près, l’apparence de .celles d’un enfant né à terme, quoique.le pubis fût couvert de beaucoup de poils. Les grandes lèvres étoient très:minces , les petites; presque aulesi; le clitoris nullement apparent, l’hymen entier, -.Les parties osseuses, du thorax. présentoient une sin- gularité qui n’a aucune liaison avec la maladie même, Les côtes. étoient, de l’un et de l’autre, côté, singuliè- rement écartées les. unes des autres, depuis les, supé- rieures jusqu'aux inférieures , l’intervalle. étant entre elles de prèside trois doigts, et les muscles intercostaux par conséquent très-longs ; en sorte que la caisse de la poitrine étoit à. la fois et très-étroite et très alongée, et queile bord inférieur des dernières côtes touchoit presque à l’os des hanches. | EVE A ND ti LE IYISIZ Q U Fe 541 On voit, par les détails de cette ouverture, que de toutes les dispositions qu’éffroit le corps de cette malade, les seules qui eussent trait à sa maladie, soit comme causes, soit comme effets , étoient, d’une part, l’état du système lymphatique presque oblitéré ; de Vautre, l’absence de la graisse, qui s’épuisoit sans se renouveler. Nous ne ferons à ce sujet qu’une réflexion. Cullen (1), en parlant du genre atrophie (asrophia), dans l’ordre marasme (marcores), classe cachexie (ca- chexia) , semble ne vouloir admettre l’atrophie que comme une affection symptomatique, et toujours dé- pendante d’une affection primitive. L’observation que nous venons de décrire nous présente l’atrophie comme maladie du système absorbant, existante bien réellement par elle-même, et RAD de toute autre af- fection. L’atrophia nervosa de Sauvages (2), phthisis nervosa de Morton , seule espèce connue qui ait quelque analogie avec celle dont il est ici question , en diffère essentiel- lement, en ce que parmi ses sympiômes caractéristiques les nosologistes comptent le dérangement de l'appétit et “des digestions, le dégoût, l’œdème, et un affoiblisse- - ment qui ne permet point au malade de quitter le lit. La personne dont nous avons donné l’histoire n’a éprouvé aucun de ces symptômes, et na gardé le lit que les quinze dernières heures de sa vie, y compris la nuit. oo ES QG) First lines of practice of physic, et in Me methodice. (2) Nosologia methodica. 5j2 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES J'ai pensé en conséquence que cette observation pouvoit être conservée comme un exemple rare d’une atrophie indépendante de toute affection étrangère , uniquement résultante , à ce qu’il paroît, de l’oblitération successive du système des vaisseaux absorbans; oblitération dont il est difficile d’assigner les causes, à moins qu’on ne l’attribue , d’après le caractère connu de la malade, à des affections de l’ame long-temps continuées et soi- gneusement dissimulées. Cette conjecture ne paroîtra pas dénuée de fondement à ceux qui savent de quelle irri- tabilité est doué le système lymphatique, et quelle influence exercent sur lui les affections de l’ame. BAT WDIE ve LE YYS 1 QU E: 543 OBS ER VAT TOLNES Sur une pétrification du mont de Terre- Noire ; département de la Loire, Pari DA vue 0E (NN T 10 :N. Lu le 26 pluviose an 4, et déposé au secrétariat de l’Institut le premier pluviose an 5. Grivz pétrification a été trouvée dans une carrière de grès micacé qui recouvre des mines de houille du créi de Terra-Ncire, où mont de Terre-N oire, près Saint-Étienne , au département de la Loire. On la pre- noit pour une portion d’un arbre pénétré par une infil- tration quartzeuse. Ce prétendu arbre avoit huit ou dix pieds de longueur ; il étoit placé parallèlement aux couches de grès, et engagé en grande partie dans le rocher : son écorce étoit, disoit-on, remplacée par une couche de houille. On prétendoit que la texture et les nœuds du bois y étoient très-distincts. J’ai vu tant d’incertitudes et de méprises au sujet des bois pétrifiés, que j’ai cru qu’il étoit nécessaire de re- chercher quelque caractère qui pût les faire reconnoître sans équivoque. J’en ai trouvé un, et je l’ai publié en 1787 (vieux style), dans un Mémoire sur le pechstein ; 544 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES c’est l'apparence des prolongemens médullaires sur la coupe transversale du bois pétrifié. N’ayant vu aucun vestige de ces prolongemens sur la pétrification de la montagne Noire, même après en: avoir fait scier! un morceau, etaprès que la coupe a été polie, on en peut conclure que ce n’est pas un bois pétrifié. La texture de cette pétrification ne ressemble nullement à celle du bois; les apparences de nœuds que l’on y voit sont très-différentes de la forme des yeux de l'écorce du bois, et des modifications que donnent à l’écorce laccroisse- ment des branches ou la présence des chicots : si l’on en doutoit, il suffiroit, pour s’en convaincre, de jeter les yeux sur des troncs d’arbres. Comment découvrir Vorigine de cette pétrification ? C’est un petit problème à résoudre ; c’est un plaisir pour les naturalistes : cet examen les fait jouir du fruit de leurs études. Toute pétrification a pour base des parties de végétaux ou d’animaux : ainsi plus on a de connois- sances de leur organisation, plus on a de facilité à reconnoître la base d’une pétrification. Après s'être assuré que celle dont il s’agit n’étoit pas un bois pétrifié, il falloit examiner sa texture, pour savoir à quels animaux elle auroit le plus de ressem- blance par leur organisation. 11] me parut que c’étoient les madrépores ; mais cette analogie, d’abord très-foible, ne se fortifia que par un grand nombre d’observations et de comparaisons d’un objet à un autre : il faut de la constance et mème de l’opiniâtreté dans ces recherches. Cet examen se fait non seulement sur les objets réels, On L'HD ES CDN MASIT QU .E. 545 mais aussi de mémoire, et les yeux fermés, en se repré- sentant les choses que l’on a vues, et en se rappelant les idées qui en sont restées. Le desir de trouver ce que l’on cherche en pareil cas, est très-vif; c’est une curiosité fort active qui vous suit par-tout. Je ne voyois d’abord dans la pétrification tirée de la montagne Noire que des lames longitudinales dont les bords étotent tuberculeux ; ces lames avoient beaucoup de rapport avec celles de plusieurs madrépores. Les tubercules pouvoient être l’effet de la pétrification ; mais cela n’étoit pas concluant : il falloit des preuves plus décisives. Je les cherchois en visitant la pétrification dans tous les sens, en revenant opiniätrément aux en- droits que j’avois déja vus maintes fois, quand j’apper- çus, sur un recoin de coupe transversale, une étoile de madrépore astroïte. Cette découverte étoit un grand pas vers le but que je me proposois; mais, pour ÿ arriver, il. falloit trouver d’autres étoiles sur la mème coupe transversale. Je la visitai avec empressement, et je fus surpris d’y voir plusieurs étoiles que je n’avois pas ap- perçues, quoique je l’eusse examinée plusieurs fois : il - est vrai que je n’avois observé qu’un morceau détaché du corps de la pétrification. J'ai souvent éprouvé qu’en examinant, même avec l’aide d’une loupe, la surface de certains corps, l’on n’y appercevoit pas des linéamens ou des empreintes qui ne devenoient sensibles aux yeux qu’après que l’on avoit vu distinctement les figures qu’ils représentoient. Sans doute, l'œil garde une impression de ces figures lo 69 546 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES qui semble rallier les traits épars et éclairer les em- preintes que l’on n’avoit pas remarquées d’abord , et qui dans la suite sont évidentes toutes les fois qu’on les regarde. Une astroïte est composée de tuyaux adhérens les uns aux autres, qui renferment des lames longitudinales de matière dure et calcaire : ces lames vont d’un bout à l'autre, et s'étendent du centre à la circonférence du tuyau; elles laissent au centre et entre elles des vuides occupés par l’animal qui les a produites. Les extrémités des tuyaux varoissent au dehors de l’astroïte : on y voit les bouts de lames qu’ils renferment ; elles forment des rayons qui ressemblent en quelque sorte à ceux d’une étoile, d’où est venu le nom d’astroïte. Un seul animal s'étend du centre à la circonférence de chaque tuyau ; lorsqu'il est mort et détruit, et qu’il arrive une eau chargée de molécules pierreuses, ces molécules remplissent tous les espaces que l’animal oc- cupoit, et l’astroïte devient un corps entièrement pier- reux. C’est ainsi, à ce qu’il me paroît, que la nature opère la pétrification. Puisque l’on voit, dans celle qui a été envoyée de la montagne Noire, des lames au dedans, et des étoiles semblables à celles des astroïtes au dehors, il paroît que c’est une astroïte pétrifiée. Il y a plusieurs espèces de madrépores astroïtes, que l’on a distinguées par les différences du diamètre de leurs étoiles. Je puis faire voir à l’Institut l'espèce qui est la base de la pétrification dont il s’agit : le diamètre de leurs étoiles en est la EUT D'E+ PH Y'S 1-0 U €. 547 preuve, puisqu'il a environ deux lignes dans l’un et dans l’autre. La pétrification a une couleur brune noirâtre, qui vient sans doute de la houille qui lavoisinoit ; elle perd cette couleur au feu , et prend une teinte rougeâtre : elle étincelle par le choc du briquet, elle résiste à la lime, et elle ne fait point d’effervescence dans l’eau forte ; ce qui prouve qu’elle a été formée par l’infiltration d’une eau chargée de molécules silicées : aussi y a-t-il de petits crystaux de quartz à deux pyramides sans prisme. Les madrépores sont très-disposés à la pétrification , lorsque les animaux qui les ont formés sont morts et détruits : alors , les espaces qu’ils occupoient étant restés - vuides , ils peuvent être remplis par les molécules pier- reuses apportées par une eau qui en seroit chargée. C’est ainsi, à ce que je crois, que tous les corps en partie pierreux peuvent être pétrifés ; tels sont les os de l’homme et des animaux quadrupèdes, les taies des crustacées , les arêtes et les écailles des poissons, les coquilles , etc. : mais la pétrification du bois ne peut pas se faire de la même manière, parce que la terre fixe y est en trop petite quantité pour se maintenir en place après la destruction des parties ligneuses, pour soutenir les molécules pierreuses chariées par le suc lapidifique, et pour représenter tous les traits d'organisation que l’on voit sur les bois pétrifiés. Leur pétrification peut s’opé- rer, à ce qu’il me paroît, par la destruction successive des parties ligneuses, à mesure qu’elles pourrissent les 548 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES unes après les autres, et par les molécules pierreuses qui les remplacent et prennent leurs formes, en rem- plissant exactement les espaces qui sont restés vuides par I destruction des parties ligneuses, comme je lai ex- pliqué à l’école normale, ET ‘DE PHYSIQUE. 549 MÉMOIRE LA PARTIE GLUTINEUSE DU FROMENT, ) Par TESSTER. Eu lé 11 brumaire an°5, et déposé au secrétariat de l’Institut le 6 pluviose suivant. C ELLE des parties constituantes du froment qui a paru lé plus intéresser les physiciens , est la partie glutineuse, connue encore sous lé nom de matière végéto-animale. Occupé de l’examen de toutes les espèces et variétés de cette plante, et desirant les connoître sous tous les rapports , il étoit difficile que je ne cherchasse pas à découvrir ce que chacune d’elles pouvoit fournir de; matière végéto-animale , et'si quelque chose contribuoit à en augmenter la proportion. Le J’aurois sur cet objet, comme sur, plusieurs autres, poussé mes recherches le plus loin possible, si les cir- constances' ne m’eussent arrêté dans ma course. Je n’ai donc à présenter quépeu de résultats. Tout foibles et tout imparfaits qu’ils sont, ils ne seront pas inutiles, s'ils peuvent engager quelqu'un à les vérifier et à rem- plir mieux que moi le but que! je m’étois proposé. 550 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Après la récolte de 1791, j’ai fait moudre vingt sortes, tant espèces que variétés de fromens , les uns durs, les autres tendres. Ils avoient été récoltés dans le même terrain, de qualité au-dessous du médiocre. On en a moulu de chaque sorte une assez grande quantité, et il a été pris assez de précautions pour que je fusse assuré que chaque produit appartenoit réellement à chaque froment. È Arte Je ne parlerai ici, ni des différens produits en farine de ces fromens, ni des différens pains que j’en ai obte- aus : ce sera l’objet d’un autre mémoire. Je me borneraï aujourd’hui à ce qui concerne la partie glutineuse. Une livre de chaque farine ayant été mise en pâte épaisse , soumise ensuite à un filet d’eau, ou plutôt à un écoulement d’eau goutte à goutte, et maniée pen- dant. long-temps, suivant le procédé connu, toute la partie amidonnée s’est séparée de la glutineuse , que j’ai pesée fraîche, et que j'ai fait sécher lentement sur le couvercle. d’une casserole remplie d’eau bouillante ,et placée:sur le feu. ‘Ilenestrésulté, 1°. que, sur le nombre indiqué , deux sortes de fromens ; savoir, le froment à épis roux, lisses ; harbus, barbes: divergentes, grains jaunes ou de: cou- leur ordinaire, très-hâtif, et le froment à épis blancs, lisses, sans barbes, grains blancs, originaire de:Phila- delphie , ont donné chacun cinq onces de partie gluti- neuse, tandis que le froment à épis roux, lisses, barbus, grouppés, variété du froment dit b/ed de miracles, jetile froment.à épis blancs, barbus,! bärbes droites, balles Et 2 on EN at SE DU 551 alongées , grains durs et longs, connu sous diverses dé- nominations , plus particulièrement sous celle de bled de Pologne (triticum polonicum, L.); tandis que ces fromens , dis-je, n’ont donné, l’un que deux onces, et Vautre que deux onces et demie de cette substance par livre de farine. Je n’en ai obtenu même que quatre gros du froment à épis violets, barbus et velus, grains durs et tachés sur le germe, originaire de Nice et des Cana- ries. Les autres en ont produit de quatre onces à quatre onces et cinq gros. 2°, Qu’en général les farines des bleds durs en avoient moins que celles des bleds tendres. °. Qu’après la dessiccation, la partie glutineuse de us étoit plus friable que ui des autres , et s c'étoit in. celle des bleds durs. °. Que, suivant une des remarques de notre collègue pe dans son ouvrage sur les végétaux nourris- sans, la partie glutineuse perd beaucoup de son poids quand on la dessèche (1). (1) Notre collègue Parmentier a exposé à une très-douce évaporation, de la matière glutineuse divisée par petits morceaux , jusqu’à ce qu’elle pût se réduire en poudre , et il a reconnu qu’elle perdoit les trois quarts de son poids, ét que le meilleur grain n’en contenoit pas plus d’un huitième. Cette assertion est d’autant moins exâgérée, qu'après avoir rassemblé la partie glu- tineuse de différens fromens , ea la dépouillant autant que possiblé et de son amidon et de l’eau qu’elle contenoit, et en la faisant bien sécher , j'ai trouvé au bout de quatre ans une diminution des deux tiers ; Ou des trois quarts , des quatre cinquièmes , et des sept huitièmes même ; selon les espèces où les variétés de froment ; il est rare que j'en aie eu d’un froment plus de deux onces dans l’état de sécheresse. A la vérité, il ne faut pas S'y tromper, 552 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 59, Enfin, que la diminution du poids est en raison inverse de la quantité qu’on en a obtenue, Au reste , il ne s’agit ici que de la comparaison des quantités de partie glutineuse fournies par les divers fromens , et par conséquent il est indifférent dans quel état on les estime, et dans quels rapports elles se trou- vent avec le poids de la farine. Il suffit d’avoir prouvé que les farines de vingt sortes de fromens ayant été traitées de la même manière, la matière végéto-animale qu’elles ont fournie, soit qu’on lait pesée immédiate- ment après son extraction, soit qu’on l’ait pesée après une dessiccation complète, étoit dans des proportions différentes. Instruit, par cette comparaison, d’une vérité que je desirois éclaircir, j’ai procédé à l’éclaircissement d’une autre. Avant tout, il m’importôit de savoir si les engrais, et quels engrais, contribuoient à la formation de la partie glutineuse, en supposant une disposition dans le végétal. En conséquence, au printemps de 1792, je fis pré- parer dans une pièce de terre où le sol me parut à peu oo le poids de la partie glutineuse sèche ne peut se, comparer avec celui de la farine dans l’état ordinaire où on la conserve ; car une livre de farine non humide , mise à sécher graduellement sur un poèle tiède, en vingt-quatre . heures s’est réduite à quatorze onces, c’est-à-dire a perdu un huitième, sans être grillée, sans altération de sa couleur : d’où il s’ensuit que pour savoir au juste la diminution de la partie glutineuse d’une livre de farine; il fau; droit l’extraire d’une livre de farine déja desséchée, ou ne compter que sur le produit en matière glutineuse de quatorze onces de farine. EN Di EU PO VNISE DE O U ‘EN 553 près de mème nature, neuf planches, chacune de deux perches, de vingt-deux pieds carrés, et parfaitement égales en tout, excepté sous le rapport de lengrais. J’en fis parquer une par un troupeau de cent qua- rante bêtes, tant moutons que chèvres, qui y séjour- nèrent environ deux heures. Le parcage me parut tel qu’il est d’usage de parquer en plein dans les dépar- temens de Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, du Loiret, et d’Eure-et-Loir. Une autre fut fumée par deux sachées de fumier de cheval assez consommé ; (2 Une autre , par deux sachées de fumier de vache dans le même état; Uneautre, parsoixante-quatre pintes d’urine d’homme ; La cinquième, par trente-six pintes de sang de bœuf; La sixième , par deux sachées de débris de plantes ré- duites en terreau. Je fumai la septième avec trois boisseaux de fienté de pigeon, et la huitième avec autant de la poudrette, ou matière fécale en poudre, préparée à Montfaucon, dans l’établissement du citoyen Bridet. Enfin la neuvième n’a reçu aucun engrais. Pour l’ensemencement de toutes ces planches, j’ai em- ployé une seule espèce de froment; c’est le froment à épis blancs, lisses, sans barbes, grain de couleur ordi- naire, tige ou paille creuse, accoutumé à être semé en mars. j = Quoique la comparaison des produits en grain ne fût pas l’objet principal que j’eusse en vue, cependant il 1: 70 554 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES est bon de remarquer que la planche fumée avec de la fiente de pigeon est celle qui a rendu le plus de grain. Après elle, j’en ai récolté davantage des deux que j’ai amendées avec la poudrette et l’urine d'homme , puis de celles qui ont reçu du sang de bœuf et du fumier de cheval. L’engrais formé des débris de végétaux , ou de fumier de vache, a eu moins d'effet. La planche ense- mencée sans engrais ma donné en froment qu’un peu plus du double de la semence, tandis que d’autres ont produit plus de six fois la semence. Quant au résultat relatif à la partie glutineuse qu’il importe de connoître , il consiste en ce que le froment de la planche arrosée avec de lurine a fourni six onces de partie glutineuse par livre de farine non séchée; celui des planches fumées par le parcage, par le fumier de cheval, de vache, de pigeon, par le sang de bœuf et les débris de végétaux, et celui de la planche sur laquelle je n’ai point fait répandre d’engrais, en ont donné cinq onces; et enfin celui de la planche à pou- drette n’en a produit que quatre. Sans doute on a peine à concevoir comment je mai pas obtenu du produit des huit planches une quantité égale de matière végéto-animale; car c’étoit la même semence jetée dans un terrain semblable en apparence, et fumé à peu près de la manière dont on fume : mais on voit clairement que l’engrais n’est entré pour rien dans cette différence, puisque j’en ai retiré cinq onces du froment récolté dans la planche non fumée, c’est-à-dire autant que de six autres planches amendées de diverses E T DE PH °YIS IQ U €. 555 manières ; ce qui suffit pour déterminer à chercher dans une autre circonstance la cause de la variation de La partie glutineuse. J’observerai que le froment employé pour l'expérience du printemps avoit son analogue en espèce et en variété dans ceux de l’expérience d’automne, et que dans les fromens d’automne il n’a fourni que trois onces de partie glutineuse , au lieu de cinq ou six dans l’état de fraîcheur ; ce qui feroit présumer que les bleds semés en mars en contiendroient plus que ceux qu’on sème en automne, ou au moins que ceux d’au- tomne, malgré leur végétation plus longue, n’en ont pas davantage. Pour rappeler en peu de mots les résultats qui pré- cèdent, on retire des diverses espèces et variétés de fromens diverses quantités de partie glutineuse plus ou moins friable, qui excède le tiers, si on la compare, dans Vétat de fraîcheur , à la farine, et ne va guère au-delà d’un huitième dans l’état de sécheresse. L’engrais ne contribue en rien à la formation de cette singulière substance. Il s’en faut de beaucoup que tout ce qu’il importe- roit de connoître sur ce sujet soit connu ; car on est en droit de demander, 1°. s’il est prouvé qu'aucune autre graminée n’en contient pas. On est assuré sans doute qu’on n’en obtient, ni du seigle, ni de lorge, ni de Vavoine ; mais a-t-on réuni assez de graines de quelques autres graminées pour en faire de la farine ? Par exemple, croit-on qu’on n’en trouve pas dans la graine appelée manne, et si fort en usage en Pologne? 556 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 20, L'économie rurale exigera de nous que nous cher- chions si les fromens d’un canton en contiennent tous les ans plus que ceux d’un autre, ce qui nécessite plu- sieurs années d'examen. 30. 11 faudra encore s'assurer si l’exposition des champs ou la nature du sol (1) doivent être admis ou non dans les causes de la partie glutineuse, et dans ce cas il sembleroit nécessaire de former un sol artificiel dont on connût les mélanges de terres, ouvrage difficile, et qu’un homme zélé et habitant la campagne peut seul entreprendre. 4°. Enfin, en supposant que ces recherches ne don- nent que des preuves négatives, ou qu’on ne trouve qu’une cause concurrente ou secondaire , il restera tou- jours à savoir pourquoi; des graminées qui nous nour- rissent, le froment est le seul qui paroisse avoir la pré- rogative de contenir de la matière végéto-animale, ou qui en contienne tant. On ne doit pas trop espérer de découvrir cette dernière vérité, parce que cela peut tenir à l’organisation particulière d’un végétal dont on ne G) Dans l'ouvrage cité, notre collègue Parmentier dit qu’il y a des bleds, tels que ceux qui croissent dans des lieux humides ou dans des terrains ingrats, dont le produit en matière glutineuse est à peine d’une once par livre, et qu'il y en a d’autres au contraire qui en contiennent près de deux onces. Je n’ai point à contredire cette assertion, puisque le fait est certain; j'ob- serverai seulement que si par sol ingrat notre collègue entend des terrains secs et pierreux, il me sembleroit plus naturel de penser que le froment qui en résulte, ayant beaucoup de qualité, il doit contenir plus de parties glutineuses. Ceci a besoin d’être examiné de près ; l'important est de bien constater l’état du sol, pour n’avoir rien que de bien positif, "HOUSE T À AD YES HUE MUST QD 455 + L 2 557 peut faire l’anatomie ; mais ce sera beaucoup que d’avoir reconnu en quoi consiste et d’où dépend, dans les di- verses espèces et dans les variétés de la même espèce de froment, le plus où moins de cette matière, qui a une si grande influence sur la panification, 558 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES DO UNE MÉTHODE PARTICULIÈRE D'ÉTUDIER L’ANATOMIE, EmP1royéEr, par forme d'essai, à des recherches sur les dents et sur les os des mächoires (1), Par T'ENON. Lu le 26 frimaire an 5 , et déposé au secrétariat de l’Institut le 11 pluviose suivant. L connoissance de Porganisation et du jeu des diffé- rentes parties qui composent le système animal, se dé- duit souvent, tant de leur structure que de leur position. Convaincus de cette vérité , les anatomistes ont toujours fait les plus grands efforts pour s'assurer de ces deux objets. Ce ne seroit point assez, sur-tout pour la pra- tique de la chirurgie , que de bien connoître ce que leur (1) Ce mémoire est un de ceux qui devoient entrer dans la collection que je me proposois de publier séparément. Il a été lu à la ci-devant Académie des sciences, dans la séance publique du 14 novembre 1767. J'ai rendu compte, dans l’un des mémoires précédens, des raisons qui ont empêché cette collection de paroïître. h Æ TD Ed PH Y(S 1 QU €. 559 organisation , leur position, je dirai même leur agen- cement, présentent de positif et d’intéressant ; c’est en- core de leur destination, mais de cette destination qui s’étend à tout le cours de la vice, qu’il est très-essen- tiel de s’occuper , et c’est à quoi il ne paroît pas que Von ait fait attention, ou que du moins on ait donné une attention suffisante. On ne doit donc pas être surpris qu’il subsiste tant de descriptions anatomiques ; nous ne devons l’être que des variations qu’elles nous offrent. Ce n’est pas toujours, comme on pourroit l’imaginer, - une suite de l’inexactitude de ceux qui observent et qui décrivent : les anatomistes à qui nous devons des obser- vations scrupuleuses (et ils sont en grand nombre), eussent mis moins de dissemblance dans leurs descrip- tions , s’ils eussent suivi les opérations de la nature dans les divers changemens que l’usage continuel de nos organes y introduit, et que la succession de l’âge y opère en chaque individu. S’il est également vrai, et que la nature agit uniformément, et qu’elle suit un cours réglé dans le développement et l’emploi de nos organes, l'observation qui tombe sur un terme unique de ce développement et de cet emploi, ne peut sac- corder avec les observations qui se rapportent à un développement et à une destination, soit antérieurs, soit postérieurs et plus reculés, de la vie. Telle est (si nous ne nous abusons point) la cause principale de cette variété que l’on trouve entre les productions de certains auteurs, et de ces omissions que nous cherchons à rec- tifier, s’il y a lieu. 560 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES En effet, nos différentés parties, ow-du moïns beau- coup d'elles, passent (on ne peut en douter) par des états sensiblement différens depuis la naissance jusqu’à une extrême vieillesse, et enfin jusqu’à l'instant de la mort à un âge décrépit, ‘Il est donc évident qu’une des- cription qui en seroit faite à une seule époque quel- conque de la vie, n’éclaireroit que pour cette époque, et laisseroit ignorer tout ce qui l’auroit précédée et suivie. Il résulte de cette réflexion que pour obtenir la - description exacte et complète de l’un de nos organes, l’histoire la moins incorrecte qu’il soit possible de l’ordre qu’il suit dans le couïs de son développement, des changemens qu’il subit, des expédiens auxquels la nature a recours pour lui faire exercer ses fonctions durant toute, la vie, il devenoit indispensable de létu- dier dans les divers états par lesquels la nature le fait passer depuis la naissance jusqu’à la décrépitude. .. Sous ce point de vue, l'anatomie, si peu cultivée parce qu’elle-est peu, encouragée, cependant si nécessaire à nos armées, à nos flottes, à nos hôpitaux, en un mot à l’homme blessé et souffrant; l’anatomie, si vaste, si rebutante par son objet, et si insalubre, présente un champ encore plus étendu et plus épineux à défricher : mais, dans l’ordre des choses utiles, il n’est pas permis de s’effrayer des difficultés, parce qu’il seroït immoral d'abandonner les moyens de les vaincre. Je pourrois faire l’application de la marche nouvelle que je propose, à différentes parties du corps des ani- maux; j'ai cru toutefois devoir d’abord y soumettre les He Ti (DÉE) BE YS/1,Q U EF; 561 dents. C’étoit sans doute l’exposer à une difficile épreuve, parce que les dents ont été beaucoup étudiées , soit par les chirurgiens , les médecins, les dentistes, les anatomistes ; soit par les maréchaux, les écuyers, les auteurs vétérinaires et les naturalistes. 11 y avoit donc lieu de croire que ce qui les concerne laissoit peu à desirer; de sorte que si la méthode dont il s’agit avoit à leur égard des succès un peu remarquables, je pou- vois espérer qu’à plus forte raison elle en auroit étant dirigée vers d’autres objets sur lesquels on se seroit moins exercé. ; Je me suis étayé, dans mes recherches, de l’ana- tomie comparée, persuadé que j’y puiserois des rensei- gnemens qui m’aideroient à approfondir la structure, l’ordre du développement et le méchanisme de l’instru- ment de la manducation de l’homme; car les dents, des- tinées essentiellement à la manducation, forment, pour ainsi dire, avec les os des mâchoires qui les reçoivent et (jusqu’à un certain point seulement) les affermis- sent, un seul et mème instrument à l’aide duquel s’exé- cute cette importante fonction. Cet instrument offre deux objets principaux à considérer, le méchanisme de la manducation , et l’industrie avec laquelle les dents ont été départies aux animaux pour satisfaire à certe fonction durant le cours de leur. vie. Je me bornerai dans ce mémoire à ce dernier objet, me réservant pour le reste à m'expliquer dans les mémoires suivans. Les dents sont si nécessaires dans les temps très-voi- sins de la naissance, que l’on ne doit point s'étonner le 71 562 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES - que la nature en général ait pris soin d’en procurer de bonne heure. Mais leur utilité ne se borne pas au temps de l’enfance, elle embrasse la durée de toute la vie; et les dents sont plus nécessaires encore dans la jeu- nesse, où l’on croît et où l’on consomme beaucoup d’alimens ; elles le sont aussi, mais moins , dans un âge avancé, où l’on ne fait guère que s’entretenir, et où l’on a moins de substances alimentaires à broyer. À quels expédiens la nature va-t-elle recourir pour que l’instrument de la manducation puisse satisfaire à des fonctions aussi étendues et cependant aussi variées ? Pour m’en assurer, je crus devoir étudier , dans ce pre- mier mémoire, les dents lorsqu'elles auroient percé les gencives, dans les animaux qui les auroient fort lon- gues, et dont la vie seroit fort courte, comparée à celle de l’homme. Je tournai à cet effet mes regards sur le cheval : il m’offroit les deux conditions que je deman- dois. Je considérai d’abord ses dents à ce terme où les sixièmes molaires , qui sont les postérieures , percent les gencives. Alors l’animal peut avoir cinq à six ans, et cet âge répond, tant pour la durée de sa vie que pour la poussée de ses dents, à environ la vingtième année de l’homme. Je trouvois un autre avantage à me servir du cheval : ses dents portent des caractères qui en indi- quent l’âge, ce dont j’avois besoin pour rapporter mes observations comparatives à des époques sûres de la durée de sa vie. Découvrons les dents molaires de cet animal à l’aide de quelques coupes de la mâchoire, et laissons-les en ET LOVE PMBVY IS I QU. E- 563 place : cette attention fera juger de leurs rapports, soit entre elles, soit avec l’intérieur des os des mächoires ; on ne tardera pas à s’appercevoir des avantages de cette précaution. La planche T, figure I, représente les six molaires, les trois incisives, le crochet et l’os maxillaire inférieur du côté gauche d’un cheval de cinq à six ans; la face externe de ces dents y est à découvert. Les molaires indiquées par les chiffres 1, 2 et 3, sont celles que j’appellerai rolaires de remplacement, et je nommerai arrière- molaires celles qui sont représentées sous les chiffres 4, 5 et 6. Celle surmontée du chiffre 4.est la première arrière-molaire du cheval ; ellerépond, tant pour ses effets singuliers et inconnus dans l’instru- ment de la manducation, que pour l'étendue de 'ses usages, à la première arrière-molaire, ou à la dent de sept ans de l’homme, dent la plus considérable, par son volume et ses usages, de la mâchoire humaine. Les molaires du cheval sont chacune dans un alvéole oblong aussi long qu’elles, tapissé intérieurement par une lame osseuse, et séparée de lalvéole suivant par un espace triangulaire rempli de cellules osseuses. La face mâchelière, formée par le rapprochement de ces six dents , est continueret moins longue que l’espace qui est entre la première et la sixième, à leur extrémité radiculaire. La première et la seconde sont situées per- pendiculairement à la base de la mâchoire: les suivantes sont inclinées, par leur face mâchelière, de derrière en devant; inclinaison qui augmente en chaque dent à 564 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES mesure qu’elles approchent de l’angle de la mâchoire D. De plus, en ce moment, les trois molaires de rempla- cement sont droites, les arrière- molaires sont courbées en arrière; celle n°. 6 l’est plus que les deux précé- dentes : d’ailleurs on ne voit d’ébauche de racine un peu marquée qu’à la dent 1, 4 et 5; toutes les autres dents sont moins avancées dans leur formation. Quant à la longueur de chacune de ces dents à Pépoque dont il est ici question, elle est telle que la première nb EL. ta dde don TL » décim, 4 centim, Aullins Eaisecondensts, triple etes 2 Datiroisiémentros els fais us TLakquatrième cu nat dinars Hancinquièmesaittioanrlie 72 NN ONU D OO nm À AN Et-lassixièmés, sagas ire Lrmiettne Toraz de la longueur actuelle cumulée de ces six dents molaires de la mâchoire d’en has, . . . .… 4 4 2 Pour ce qui est des six molaires correspondantes de la mâchoire supérieure du même cheval, elles ont * chacune de longueur ; SAVOIR), La première, ‘ bein fà M 2 5 décim. centim. Ne Taseconue. er ie TRE 7 9 a OISE, el die0 1 ee at 8 6 2 2 4 ET DE PHYSIQUE, 565 Report LP PARTNER PRE HIS pdécim. ,, céntim. Amie quatrième, |; sara esta nt 7 9 La cinquième, . {su «lee 10 8 8 Etila, sisièmes dust dela 7 7 Torar de la longueur cumulée des six dents molaires de la mäâ- choire d’en haut, à l’époque de Cie She AUS SEP dr de | 6 8 Ceci montre, 1°. qu’à l’âge du cheval dont j’examine les dents, c’est-à-dire vers cinq à six ans, la longueur totale , tant des trois molaires de remplacement, que celle des trois arrière - molaires de la mâchoire d’en haut, surpasse de 2 centimètres 8 millimètres la longueur totale des molaires qui leur correspondent à la mâchoire d’en bas; 2°. que la longueur particulière de chacune de ces dents, soit de la mâchoire d’en haut, soit de celle d’en bas, ne se suit pas d’une dent à l’autre, mais semble alterner , tellement qu’à la mâchoire d’en haut la première, la seconde; la quatrième et la sixième sont les plus courtes , la’ troisième et la cinquième les plus longues, et qu’à la mâchoire d’en bas pareillement ce sont la première , la seconde, la quatrième et la sixième, qui sont les plus courtes, comme ce sont la troisième et la cinquième qui se trouvent être les plus-longues : ce qui sembleroit annoncer une marche différente dans leur croissance, qui passeroit d’une dent par-dessus 566 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES celle qui la suit, pour hâter Paccroïssement de celle-ci et le suspendre dans celle-là ; au moins ce qu’il y a de certain, c’est que les racines sont plus avancées dans leur développement à la première, quatrième et cin- quième, qu’à la seconde, troisième et sixième dents, Ces faits étoient inconnus, et leur explication est à desi- rer : de nouveaux faits éclaireront à leur sujet. Les objets représentés dans cette même planche T, fig. T, donnent lieu à d’autres remarques encore essen- tielles à saisir. Les molaires que l’on y voit sont en général engagées dans leurs alvéoles depuis leur collet jusqu’au fond de ces mêmes alvéoles : la troisième dent, entre autres, y paroît située en ce moment d’une manière particulière , relativement aux cinq autres; elle porte inférieurement sur la base de la mâchoire ; elle s'engage dans cette base, la déprime , et lui fait prendre en des- sous une forme convexe, de manière que si, à cette époque et à d’autres dont nous rendrons compte, on pose cette mâchoire par sa base sur un plan, elle porte sur cet endroit déprimé, tandis qu’elle ne pose point à la pince À, ni du côté de l'angle D. Le contraire a lieu à d’autres termes plus reculés de la vie de cet animal. Nous avons dû en prévenir, pour iqu’onine soit point arrêté dans le cours des remarques qui survien- dront. La seconde molaire se prolonge aussi jusques sur la base de la mâchoire, mais moins que la:précé- dente ; les quatre autres répondent au bord supérieur du conduit maxillaire A7, F. out ceci changera par la suite, BE OUEN Vhhét (S zÉQ UiE: 567 Avec cette disposition de toutes ces molaires, les- quelles molaires remplissent autant qu’il est possible l’intérieur de la mâchoire à l’époque dont il s’agit en ce moment, il n’est cependant aucune d’elles qui ne soit privée de deux parties plus ou moïns considérables de son étendue en longueur , l’une du côté de leur face ou table mächelière, l’autre dans le sens de leurs racines: Elles ont toutes été usées et raccourcies à leur extrémité mâchelière ; aucune d’elles wa atteint à sa perfection du côté de leurs racines, qui ne sont point encore for- mées, mais qui se développeront avec le temps. J’ai à prouver, d’une part, que ces dents ont été usées et raccourcies du côté de leur face mâchelière ; d’autre part, qaw’elles n’ont point acquis leur croissance à leur extrémité radiculaire; de facon qu’elles sont certainement incomplètes et moins longues qu’elles ne devroient l’être de la quantité dont elles ont été usées, et de celle qui n’a point encore existé et qui se déve- loppera. Preuve que ces dents ont été raccourcies à leur face mdchelière. J’Ar avancé que ces dents ont été raccourcies à leur face mâchelière ; et pour le prouver je compare l’état de cette face dans le cheval de cinq à six ans, avec l’état où elle se trouve dans le cheval de deux ans et demi. Pour simplifier, je rapporte mes observations à la troisième molaire du cheval à ces deux âges. Celle 568 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES du cheval de cinq à six ans est large, applatie, repré- sente à sa face mâchelière la forme d’un carré long. On y distingue trois substances ( planche IT, fig. I) ; l’une que j'appellerai cortical osseux, ou simplement Ze cor- tical. C’est une enveloppe osseuse, moins dure que l’os propre de la dent, d’une couleur tirant sur le gris, qui encroûte l’émail en dehors, comme feroit une écorce, et qui le revêt par-tout où il se prolonge et se replie dans la dent, ce qui pourroit faire présumer qu’il en existe plusieurs ; mais il n’en est qu’un par dent. Ici il a été coupé en travers sur la hauteur, à mesure que la dent a été usée. Pour en abréger la description et le suivre plus aisément dans ses contours, j’observerai que le cortical, moins dur que l’os de la dent, est indiqué par un trait plus léger , los de la dent par un trait plus foncé , et Vémail sous la forme d’un cordon blanc qui serpente. Ainsi, dans cette dent, de même que dans toutes les autres de la même espèce et du même âge , l'émail n’est point à l’extérieur, comme dans l’homme, le singe, le porc d'Europe , les carnivores , certains poissons qui ont des dents ; mais ikest interpose entre le cortical et los de la dent. Il se produit à la face mâchelière sous la forme d’un cordon blanc, qui se replie diversement à la mûâ- choire d’en ‘bas qu’à celle d’en haut, mais pourtant d’une manière uniforme dans les dents propres à chaque mâchoire. Ce seroit trop nous détourner de l’objet principal qui nous occupe, que de rendre raison des motifs de cette distribution de l'émail , de addition du corticalet de ses révolutions, dans ces dents : j’y revien- ED RP Te pet Me LS 10 ve. 569 drai. J’ajouterai qu’ici l’os propre de la dent est à nu sur la face mâchelière à laquelle il aboutit. Tel est l’état de la face mâchelière à cinq à six ans. Mais ce qui est remarquable, c'est qu’à deux ans et demi ( planche IT, Jig. IT) cette dent n’a point la même configuration à son extrémité supérieure : au lieu de s’y terminer en face mâchelière applatie sur- baissée | et d’une forme carrée , elle y présente un sommet garni de pointes, et toutes les parties de ce sommet, ainsi que ses pointes , sont encroûtées du Cor- tical osseux, de manière qu'ici l’émail n’est point à découvert, n’est point détruit, non plus que l’os propre de la dent. T1 est donc prouvé que la même dent est différem- ment terminée et composée à son extrémité supérieure , à deux ans et demi qu’à cinq ans et demi; que, de la première de ces époques à la dernière, elle passe de cette fôrme étroite et pointue, qui lui est avantageuse dans le jeune animal pour se dégager de l’alvéole , à cette autre configuration approchante d’un carré long ; et que ce changement qui s’est opéré en élle provient de ce que, dans le cheval de cinq ans et demi, le cor- tical, l'émail, los propre de la dent, ont été usés par le frottement durant la manducation ; et la dent rac- courcie, et j'estime qu’elle l’a été d'environ 1 centi- mètre 3 millimètres; ce dont je juge par la distance du sommet à cette autre partie de la dent de deux ans et demi , qui doit avoir été détruite pour qu’elle soit réduite à la forme carrée de la face mächelière de la 1. 72 570 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dent de cinq à six ans. Je laisse cette quantité , nous en ferons usage dans un instant. Preuve que les molaires du cheval de cing à six ans ront point encore pris toute leur croissance. JE passe à la preuve que les molaires du cheval de cinq à six ans mont point encore pris à cet âge toute leur croissance. Voici sur quoi je me fonde pour établir cette vérité. On se rappelle que, dans le cheval de cinq à six ans, la molaire 3, pl. TI, fig. T, n’a point de racines : si maintenant nous la considérons dans son analogue à un terme plus avancé de la vie, dans un cheval, par exemple, d’une vingtaine d’années, pl. T, fig. IT (3), on lui trouvera deux racines. Les arrière- molaires 4, 5 et 6, ou qui n’en ont point ou qui en ont à peine, /g. T, en ont de complétement formées dans les dents 4, 5, 6, fig. II. Il est donc évident que ces dents ont des racines; je leur en trouve de 2 centimè- tres 7 millimètres, de 3 centimètres 4 millimètres, et même de 4 centimètres 1 millimètre, de longueur : elles en ont deux qui ne divergent point ou qui divergent peu, et c’est à quoi il faut faire attention ; souvent l’une et l’autre n’ont chacune que 2 centimètres 7 millimètres de longueur. Tels sont les élémens dont se compose la troisième dent de remplacement , pour atteindre à sa longueur totale et la compléter. Un sommet de 1 centimètre 3 millimètres, qui a été EDR LU Sr oi Eh M à A détruit avant l’âge de cinq ans et demi (voyez pl. IT, Fig. IT, ci SOI RAROD NO EH , . n‘décim., centim. 3 millim. Un corps ou fût qui, vers cinq à six ans, a 8 centimètres 6 milli- fi mètrés (bla Dacia, ds 8 6 Et deux racines qui , à vingtans, ont chacune 2 centimètres 7 milli- mètres! (pl. TZ, fe, 3,), ei suis 2 7 CR RARE D EE RQ EE .Ce qui donne une dent de .... 1 2 4 de longueur quand elle est complétement formée , et non pas une dent seulement de 8 centimètres 6 milli- mètres, comme dans le cheval de cinq à six ans. Autres preuves des mémes révolutions. Le corps de la dent pZ. TIT, fr. IT, qui est une troi: sième molaire inférieure du cheval de vingt ans ,; n’a plus 8 centimètres 6 millimètres, ou l’étendue de son analogue dans le cheval de cinq à six ans; mais a seule- ment 1 centimètre 3 millimètres de hauteur, ou l'étendue A; B;la face mâchelière n’est plus en CC, mais surbaïissée en 4 (pl. IIT, fig. T), et détruite d’une quantité Fee à 7 centimètres 2 millimètres, De mème le fût de cetteautre dent ( p£. III, LI, fig. TIT), qui représente une quatrième molairé d’un cheval d’en- viron vingt-quatre ans, n’à plus 8 centimètres 3 milli- mètres de longueur, où lPétendue EE, F; il est réduit à celle GF, onà 3 millimètres, du côté que je le . 575 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES présente ; de Pautre côté ses racines sont disjointes (fig. IV) : donc il a perdu 8 centimètres. Les lignes ponctuées représentent, dans ces trois figures, la por- tion de ces dents qui a été usée par la manducation. Il ést donc prouvé que la dent désignée sous le chiffre 3, pl. T, fig. I, n’est que le fàt de la dent du cheval, auquel, pour la compléter, manque le sommet et les racines. Que Les dents ne sont point immobiles dans leurs alvéoles. Tex se présente un autre fait non moins curieux et qui west pas moins nouveau; savoir , que les dents ne sont point articulées par gomphoses, c’est-à-dire , fixées d’une manière immobile dans leurs alvéoles, ou, suivant l’ex- pression de quelques anatomistes, comme un clou fiché dans un morceau de bois , mais qu’elles y changent de place jusqu’à ce qu’elles en soient entièrement expulsées. Je tire la preuve de ce fait, qui renverse à ce sujet les idées reçues depuis Galien jusqu’à ce jour, de la com- paraison de la situation et de l’état des dents du cheval à cinq ans et demi et à vingt ans. À cinq ans ou à cinq ans et demi, la troisième mo- laire (p1. T, fig. I) aboutit en o contre la base de la mächoire , que mème elle déprime; ses racines ne pa- roissent point, mais leur bifurcation commence à se montrer. À vingt ans (#9. 11) cette bifurcation des racines, de la dent 3 , au lieu de poser en o contre la ET DE PH YS IQ U €. 573 base de la mâchoire , est transportée vers le haut de l’alvéole, et le fût de la dent réduit à 1 centimètre 3 millimètres de hauteur , au lieu de 8 centimètres 6 milli- mètres qu’ilavoit( #9. 1) ; ce qui fait connoître en même temps et la quantité dont cette dent a été usée depuis cinq ans et demi jusqu’à vingt , et l’espace qu’elle a parcouru de bas en haut pour se tirer de son aivéole, lequel est de 7 centimètres 7 millimètres. Les preuves du déplacement des dents et de la consom- mation qui s’en fait sont encore indiquées par le bout de racine 1, fig. IT, de 2 centimètres delong , trans- porté sur le bord alvéolaire , et qui est le reste d’une dent son analogue fig. I (1), laquelle a 6 centimètres 8 millimètres. Il en est à peu près de mème de la molaire 2 et de la molaire 6 fig. IT. L’une ne conserve plus qu’une courte racine: les deux racines de l’autre sont disjointes ; elles sont les restes de leurs analogues 2 et 6, fée. I, et portées sur le bord de l’alvéole. Telles sont ies principales révolutions que subissent ces trois molaires de remplacement , et les trois arrière- molaires de la mâchoire d’en bas: j’ai trouvé les mêmes résultats dans leurs correspondantes de la mâchoire d’en haut; ce qui montre l’uniformité qui règne dans la pro- duction , l'emploi, le dépérissement et le déplacement de ces parties. Ce travail seroit demeuré en quelque sorte incom- plet, si je ne l’avois étendu à des recherches sur les incisives. Je fis donc l’essai de la même méthode sur 574 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES celles de remplacement. Voici à leur égard où m’a con- duit l’observation. Jncisives de remplacement du cheval ; changemens guelles subissent dans leur longueur et leur position. Les incisives se distinguent (p/. I, fig. T) en dents de la pince Æ, mitoyenne Z, du coin Æ ; on y voit aussi un crochet Z. Mes observations vont porter sur la dent de la pince inférieure. La dent d@ la pince, représentée pZ. LIT, fie. V, à 6 centimètres 1 millimètre de longueur ou environ, vers quatre à cinq ans : à cette époque son sommet est émoussé ; elle est creuse vers le centre à sa face mâche- lière ; elle l’est aussi du côté de sa racine, qui elle- même n’est point encore, à cet âge , complétement formée ; elle n’est pleine , cette racine , et n’est guère parvenue à toute sa croissance en longueur , que vers la vingtième année (méme pl. fig. VIII). Or il est à re- marquer que si on considère cette même dent vers la deuxième année de l’animal, elle est tranchante , en- duite d’émail, et, par-dessus , d’un cortical osseux à son bord mâchelier. Ce qui en est disparu et a été détruit de- puis l’âge de deux jusqu’à celui de quatre ans ou environ, peut s’évaluer à 4 millimètres de hauteur, et a converti son bord mâchelier , qui alors étoit double et tranchant, en une face ou table mâchelière bordée extérieurement de cortical osseux (p£. IT, fig. IIT, A, 4, A). Aboutit encore à cette même face une substance osseuse de TN ED DEN PE YASIT OU El 575 contexture semblable au cortical d’entourage dont on vient de parler. Celle-ci, située vers le centre de la face mâchelière , tapisse la cavité conique qui plonge dans la dent ; c’est ce que je nommerai corret osseux dentaire, B, B. Il est essentiel de remarquer que ce cornet n’est autre chose que la continuation du cor- tical, mais coupé en travers par l’abrasion de la dent à son sommet. On voit aussi à cette même face mâ- chelière l’une des extrémités de l’os propre de la dent. On y découvre de plus deux émails : lun, que je désigne sous le nom d’émail d'encadrement, est situé entre le cortical et l’os propre de la dent : l’autre, placé entre l’os de la dent et le cornet osseux , s’enfonce à une certaine profondeur , tapisse une espèce de gousset conique creusé dans l’os de la dent; ce sera l'émail central. Ces deux émails sont rendus en blanc. Il en est d’eux comme du cortical et du cornet osseux ; ils sont la continuation l’un de l’autre dans la dent dont le sommet n’a point té détruit. Je conserverai cependant la dénomination que je leur ai donnée; jÿ’en ai besoin pour me faire entendre dans ce qu il me reste à dire à leur sujet. Cecï convenu, poursuivons les émails par-tout où ils peuvent s'étendre. Je scie à cet effet la dent de la pince dass toute sa longueur, à quatre ans et demi, à sept, à dix et à vingt ans. L’émail central s'étend à 2 centi- mètres 9 TR. 2 de profondeur à quatre ans et demi (pL. LIT, fig. V); à 1 centimètre 3 millimètres vers sept ans, alors il se rétrécit beaucoup (fs. VI); seule: 576 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ment à 2 millimètres à dix ans ( fs. VIT); enfin la face mâchelière de cette même dent est encore surbaissée de x centimètre 3 millimètres, au-dessous de l’émail central, depuis l’époque de dix ans jusqu’à celle de vingt ans (fig. VTIT , A B ). Donc cette dent est usée et se rac- courcit graduellement comme on fait les molaires; elle est, comme elles, usée à l’une de ses extrémités, avant d’avoir acquis par l’autre bout toute sa croissance ; on ne la trouve point dans le même état aux différentes époques de la vie. Prouvons maintenant qu’elle n’est point fichée à demeure , et comme enclouée , dans son alvéole , mais qu’elle s’en écoule peu à peu, jusqu’à ce qu’elle en soit entièrement expulsée, La figure LIT, planche T, représente les incisives de - Ja mâchoire supérieure d’un cheval de sept ans. Le trou incisif £ Æ, interposé entre leurs racines , nous servira de réclame, À B sont les dents de la pince, € C les mitoyennes, D D celles du coin, Æ F les crochets. La fig. IV indique les mêmes dents d’un cheval d’en- _viron vingt ans. Les dents de la pince 4 B, fig. LIT, ont chacune 7 ,centimètres de longueur ; leurs racines dépassent un peu en arrière le trou incisif E ÆE'; les racines des mitoyennes le dépassent davantage, celles des dents du coin encore plus. Dans le cheval de vingt ans ( /?g. IV) , les dents de la pince À B ont seulement chacune 1 centimètre 6 millimètres ; et au lieu de s'étendre en Æ E, et même un peu au-delà, comme à sept ans, elles ont été portées en C D, beaucoup en avant du trou incisif, Il en est à peu près de même des CAT N ÈS ne nn À (D Ex PL SI IQ UE 377 quatre autres incisives, et je puis ajouter que j'ai vu de ces incisives réduites à n’avoir plus que le volume d’un pois , entièrement chassées des alvéoles. Ainsi, soit que l’on considère les molaires de rem- placement, les arrière-molaires, et même les incisives de remplacement , on ne peut en connoître l’étendue , la figure, les changemens qu’elles éprouvent, la con- sommation qui s’en fait par le broiement, à l’aide de la manducation ; juger de l’industrie avec laquelle elles sont employées à cette fonction pour y satisfaire du- rant toute la vie , déterminer ce qui se passe entre elles, ou bien entre elles et les os des mâchoires, qu’en les étudiant à différentes époques, et en place. L’applica- tion de cette méthode à l’objet qui nous occupe, nous a donc découvert que les dents du cheval n’existent jamais de toute leur étendue, dans la mâchoire, à une seule époque ; qu’elles sont trop longues quand elles ont pris toute leur croissance , et les mâchoires trop courtes en hauteur , pour qu’elles puissent y être renfermées en entier; mais que, comme l'animal en consomme beaucoup , il a fallu aviser au moyen de lux en procurer d’une longueur suffisante , et de concerter cette longueur nécessaire avee l’étendue disproportionnée du lieu qu’elles doivent occuper dans les mâchoires. L’expédient dont la nature s’est servie pour atteindre à ce but, a été de ne faire croître et loger de dents dans la mâchoire que ce qu’elle en peut contenir , et, comme les dents sont usées et raccourcies à leur extré- mité mâchelière , à mesure qu’elles broiïent les alimens, 1e 73 558 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de les en expulser en même temps qu’elle s’occupe de les prolonger à leur extrémité radiculaire , jusqu’à ce qu’elles aient complété leur croissance , époque où elle achève de les chasser hors des alvéoles : car nous avôns vu que les dents ne sont point stationnaires, comme on le pensoit; quoiqu’affermies dans les os maxillaires , elles glissent, pour ainsi dire, à travers les alvéoles comme à travers une filière , ou comme feroit une bougie allumée , chassée, à mesure qu’elle se consume , du chan- delier, par un ressort qui la souleveroït. Les moyens d’affermissement des dents, les espèces , les causes de leurs déplacemens, certains changemens qui se passent en elles, dont nous n'avons pas rendu compte, sont subordonnés à l’espèce particulière d’instrument de manducation , et un point d'anatomie ignoré sur lequel nous reviendrons. Non seulement les molaires du che- val sont chassées du fond vers l’entrée de leurs alvéoles , mais encore, durant cette expulsion , la plupart, comme les arrière - molaires, qui précédemment étoient incli- nées de devant en arrière, sont redressées à mesure qu’elles se produisent au dehors. Leurs alvéoles, la cloison triangulaire qui les sépare , disparoïssent; car il se fait comme un bouleversement général dans lin- térieur des mâchoires , à l’occasion de cette expulsion. Cette méthode nous a conduits aussi à quelques résultats relatifs à la connoissance de l’âge du cheval. L’utilité de cet objet nous détermine à nous y arrêter un instant. ŒT'DE PHYSIQUE. 579 Influence de ces recherches sur la connoissance de l'âge du'cheval. Ox juge ordinairement de l’âge du cheval à l’inspec- tion de ses salières, au nombre et à l’état plus ou moins effacé des plis du palais , à la considération de ses dents incisives tant de lait que de remplacement, et de ses crochets. Les principaux renseignemens pris de ses dents se tirent de la chûte, quatre à quatre, des douze incisives de lait, à trois époques indiquées par Aristote, à trente, quarante- deux ou cinquante-quatre mois, c’est-à-dire à deux ans et demi, trois ans et demi, et quatre ans et demi. L’existence de la fossette ou marque noire appelée par les gens de l’art germe de féves , que Von remarque sur la face mâchelière des incisives de remplacement vers quatre ans et demi, puis la dimi- nution successive de l’étendue en largeur de ce germe de féves, ensuite sa disparition complète vers la hui- tième année, est le signe auquel on s’attache le plus. On a recours encore à la saillie plus ou moins longue des dents hors des St à leur couleur, à ce qu’elles se mettent hors de file, à l’état où se trouvent les cro- chets, qui, d’abord bles es et ep finissent par s find en vieillissant. - Je n’examinerai de ces caractères que ceux qui ont rapport à la cause de la disparition du germe de féves, des incisives de remplacement, àla à la saillie, à la mise hors de rang de ces denis. Ù 580 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Quelle est donc la cause de la disparition de la fos- sette ou germe de féves des incisives de remplacement ? Rapporter ce qu’en dit Buffon, c’est s’autoriser de la réputation la plus accréditée , et dire ce que l’auteur du Parfait Cavalier (1), Baret (2), Laurent Ruüse (3), Saunier (4), avoient avancé sur le même sujet. Voici comment s'explique Buffon : « Ces dents, dit-il, » sont creuses, et ont une marque noire dans leur ca- » vité : à quatre ans et demi , le creux est fort sensible; » à six et demi il commence à se remplir, la marque » commence aussi à diminuer et à se rétrécir, el tou » jours de plus en plus, jusqu'à sept ans et demi o1 » huit ans, que le creux est tout-à-fait rempli et la » marque noire effacée (5) ». C’est donc, selon Buffon et selon ceux dont il a suivi l’opinion, parce que le creux de la dent se remplit peu à peu, qu’il se rétrécit, et parce qu’il se comble, qu’à la fin il disparoît. Il y a quelque chose de vrai dans cet énoncé. Il est sûr que le creux en général se rétrécit depuis quatre ans et demi jusques vers sept ans, et que vers la huitième année communément il disparoît. Mais ce n’est point parce qu’il se remplit qu’il se rétrécit, ni parce qu’il se. comble qu’il disparoît. Ceux qui ont eu recours à cette explication ignoroïent sans doute que ce creux est (1) Parfait Cavalier, ou la vraie connoissance du cheval, p+ 10. (2) Traité des chevaux, p. 7- (3) La Maréchallerie, p. 45. (4) Parfaité connoïissance des chevaux. (5) Æistorre naturelle, tome VI], seconde partie; édition 7-12, p. 291. BATU LD: EUX SPAHE YIST10Q D 581 tapissé d’un émail central, et que celui-ci est revêtu intérieurement d’un cornet osseux, lequel n’est autre chose qu’un prolongement du cortical , dont nous avons parlé ci-dessus ; ils ne savoient pas, ce qu’il est impor- tant d'observer, que ni émail ni le cortical ne peuvent se former ni se perfectionner qu’autant qu’ils sont ren- fermés dans l’alvéole et dans leur follicule, où est l’or- gane générateur de l’émail, celui du cortical, et celui de l’os propre de la dent. Que si les dents du cheval, comme fort longues, croissent à leur extrémité radicu- laire, tandis qu’elles s’usent du côté de leur sommet, c’est que les organes producteurs des trois principales substances qui les constituent, y subsistent encore en partie ; mais que quand ces organes générateurs ont une. fois été employés dans les alvéoles, les dents ne crois- sent plus et en sont chassées. Ainsi il ne se fait aucun accroissement , aucune réparation qui annonce un déve- loppement nouveau dans une portion d’une dent sortie de son follicule ; et qui excède les gencives. Mais quelle est done la cause de ce rétrécissement et de cette dis- parition du creux des incisives du cheval ? Elle consiste tout simplement en ce que la dent est usée horizonta- lement et par degrés du côté de sa face mâchelière , en même temps qu’elle est expulsée peu à peu de l’alvéole ; car, comme le creux dont il s’agit est conique, et plus évasé du côté de la face mâchclière de ces dents que du côté de leurs racines, il suit que plus elles sont usées , à partir de cette facemâchelière , en même temps qu’elles sont expulsées, et plus le creux doit diminuer 582 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES de largeur, et que dans le cas où il disparoît entièrement, c’est que la dent a été usée jusqu’au-delà du fond de sa cavité conique où l’émail central la termine ;/marche que l’observation que nous avons faite sur l’émailicen- tral nous a mis à même de représenter comme on le voit, fig. V, VI, VIT et VIII de la planche III. Ainsi deux conditions nécessaires pour que la fossette de ces incisives semble se rétrécir graduellement jusqu’à ce qu’elle dis- paroisse : l’une, l’usure graduelle de ces dents ; Pautre, leur sortie successive des alvéoles dans lesquels elles sont contenues. Le défaut de l’une ou de l’autre de ces conditions, ou de toutes les deux ensemble, fait le cheval bégu. La dent n’est-elle point usée, parce qu’elle ne frotte point contre sa correspondante, ou qu’elle ne s’y rapporte point convenablement ; la fossette demeure ; y répond-elle, maïs est-elle point portée hors de son alvéole par les causes qui ont coutume d’être employées à- cet effet, la fossette demeure encore ; ces deux causes concourent-elles, c’est un troisième cas qui rend le che- val bégu. Age du cheval, indiqué par le plus ou le moins de largeur de ses dents hors des gencives; causes de ce phénomène. Prusteurs auteurs jugent , en de certaines circons- tances , de l’âge du cheval, par la saillie plus ou moins longue de ses incisives hors des gencives. Solleysel, l’un de ceux qui se sont expliqués d’une manière plus exacte sur ce ŒT DE PHYSIQUE. 583 sujet, remarque que la dent du coin, à cinq ans , est, hors des gencives, de l’épaisseur d’un écu blanc ; à six ans, de l'épaisseur du petit doigt; à huit ans, de l’é- paisseur du troisième doigt ; et que lorsque les dents sont excessivement longues, cela dénote une grande vieillesse. Cet auteur (1), ainsi que Garsault (2) et La- fosse (3), avouent que les incisives s’usent : mais comme ils croient à l’enclavement de ces dents , ils n’ont point apperçu pourquoi elles paroissent plus prononcées hors des gencives dans la vieillesse que dans la jeunesse ; ils attribuent leur excès de longueur à la retraite des gen- cives. Mais ce n’est point parce que les gencives se rac- courcissent , que les incisives se produisent davantage à l’extérieur à un âge avancé ; c’est par un rassemble- ment de causes qui ont échappé à ceux qui ont traité de l'anatomie du cheval : c’est, dis-je, parce qu’elles sont expulsées des alvéoles; parce qu’à mesure qu’elles en sortent , elles sont raccourcies : c’est encore parce qu’aux époques où elles commencent à s’en écouler , elles sont arquées , tandis qu’aux époques plus reculées de la vie de l’animal , lorsqu’étant déja fort usées, le corps et l'extrémité radiculaire venant à sc produire à leur tour au dehors, elles sont moins arquées et presque droites. De ce concours de circonstances, il résulte que la dent dont la racine est conique trouve moins de résistance! à (1) Sorrevsez, le parfait Maréchal, p.23 et 26. (2) Nouveau parfait Maréchal. 4 (3) Cours d'hippiatrique , où Traité complet de la médecine des cheveux. 584 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES son expulsion, en passant d’une région (plus resserrée de sa racine dans un lieu plus évasé de son alvéole; ce qui, en rendant son issue plus facile et plus rapide à un âge avancé, la dispose à se prononcer davantage au dehors. J’ajouterai à cette première considération que la courbure rapide de la jeune incisive est plus propre à la soutenir dans l’alvéole ; que d’ailleurs, en mettant sa face mâchelière en opposition avec la face mâchelière de son antagoniste à la mâchoire opposée , elle contribue , il est vrai, à leur raccourcissement respectif ; maïs aussi ce contact mutuel qu’elles supposent empêche qu’elles ne se produisent trop rapidement hors des gencives. Qu’au contraire la mème dent soit raccourcie avec l’âge, que ce qui en reste soit devenu presque droit, alors sa face mâchelière n’a plus la même tendance vers la face mâchelière des incisives de la mâchoire opposée , ef vice versd. De là vient que , dans ces circonstances , la face mâchelière de ces dents des deux mâchoires, se diri- geant plus vers le devant de la bouche qu'aux époques précédentes , et ne se répondant plus entre elles, nest point autant usée , et paroît plus longue , en dehors , de la quantité dont elle auroïit dü être raccourcie, si elles s’étoient répondu comme auparavant. Ce n’est pas tout : de ces dispositions provient un autre phénomène auquel je ne sache point que l’on aït fait attention, non plus qu’à la cause qui le produit. Ces dents incisives du vieil animal ne se répondant point aussi exactement par leur face mâchelière que dans le jeune, il arrive (du moins quelquefois) que celles ET DE: PHYSIQUE 585 d’en haut, portant vers le bord postérieur de la face mâ- chelière de celles ;d’én bas, impriment à l’extrémité antérieure de cette mâchoire d’en bas une impulsion qui, à force de se répéter, de convexe qu’étoit cette mâchoire dans'le jeune animal (au temps dela plus grande expansion du fütmde la troisième molaire de remplacement et de celui de la première arrière - mo- laire) , la redresse dans le vieil animal quelquefois jusqu’à être renversée , tellement que, mise alors sur une surface plane, elle ne pose que sur la pince et sur l'angle, au lieu que, vers cinq à six ans, elle ne pose que par le milieu de sa base. Je sais que le progrès en dehors des molaires qui y répondent, donne en partie lieu à la rentrée de cette base; mais les faits que je soumets à lPassemblée prouvent que dans cer-. tains chevaux dont les incisives se produisoient en devant, l’exirémité extérieure de la mâchoire a été en même temps renversée. T'elles sont les causes qui, à un âge avancé, mettent hors des gencives plus de lon- gueur de dents, sans, pour cela, que les dents soient plus longues que dans le jeune cheval , comme on le pensoit ; et telles sont en même temps les causes de la convexité de la mâchoire inférieure à sa base dans le jeune , et de son redressement dans le vieux cheval. rA Que les dents se mettent quelquefois hors de file ; cause de ce déplacement. Nous avons dit que les dents incisives de remplace- 1. 74. 586 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES ment du cheval se mettoient quelquefois hors de file ; effectivement elles se renversent les unes dans un sens, les autres dans un autre : c’est encore un signe de vieillesse. Tant que l’on a été abusé par l’opinion que les dents étoient immobiles dans les mâchoires , ou arti- culées par gomphoses , on wa pu se rendre raison de la cause de ce déplacement ; mais présentement que nous savons qu’elles coulent dans les alvéoles , qu’elles y passent d’un lieu plus étroit dans un plus large où elles sont moins affermies, on comprend aisément pour- quoi , quand elles sont fort raccourcies , elles ne gardent plus entre elles le même ordre, et se mettent hors de Tang. Age du cheval, indiqué par la couleur de ses dents ; causes de la diversité de leurs couleurs. QuanrT à l’âge du cheval, indiqué par la couleur de ses incisives de remplacement , selon Solleysel , de blanches qu’elles étoient dans la jeunesse , elles de- viennent jaunes dans la vieillesse (1). Il est pourtant , ajoute-t-il , de vieux chevaux qui ont la dent courte et blanche. Ces observations sont exactes à quelques égards, maïs incomplètes et demeurées sans explica- tion , parce que le voile qui les enveloppoit m’étoit point rompu. Les dents sont blanches dans la jeunesse du cheval , après que le cortical osseux qui encroûte leur (1) Sorzeyser, ouvrage cité ci-dessus, p. 15. Een nr L Bt D EPS! If QUE. 537 émail d'encadrement a été usé ; et que cet émail lui- même a acquis du poli par le frottement : ce qui alors seulement leur donne un certain éclat; car, encore brut et avant de servir, l’émail à l’extérieur est grenu , moins blanc, et mème un peu terne : d’ailleurs, tant que le cortical subsiste sur cet émail, c’est-à-dire dans les pre- miers temps qui suivent l’éruption de leur sommet, elles sont d’un blanc grisâtre , qui est la couleur du cortical. Dans la vieillesse avancée , en'général elles sont jaunes, parce qu’alors l’os propre de la dent, qui est de couleur tirant sur le jaune, est dépourvu, en devant, du cortical et de l’émail d'encadrement, ou parce que la portion de racine privée naturellement et de cortical et d’émail s’est produite hors des gencives. Guidé par les observations dont je viens de rendre compte , et que la méthode que je venois d’expérimenter m'a mis en état de faire, je napperçus bientôt que la même composition de dents, et les mêmes phénomènes qui l’accompagnent dans le cheval, avoient aussi lieu dans l’âne, le mulet, les ruminans, dans les animaux rongeurs ; tels que le lièvre, le lapin, le castor, dans Je sanglier du Sénégal , le cabiai, l’éléphant : mais avec ces différences, que la nature fait un usage plus ou moins étendu de l’une de ces trois substances sur l’une de ces espèces d'animaux que sur l’autre ; qu’elle en varie la distribution, conformément aux vues particulières qu’elle a de les pourvoir d’un instrument de manducation con- venable, en proportionnant son étendue, sa forme, sa force, le nombre plus ou moins grand de ses pièces 588 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES dentaires, la manière de le faire mouvoir, à la durée plus ou moins longue de la vie de Panimal, à la puis- sance de ses muscles , à l’espèce plus ou moins dure des alimens dont il se nourrit , à la quantité qu’il en con- somme. Ces considérations ont donné lieu à d’autres recherches, tant sur les animaux à dents de troïs sub- stances, que sur ceux à dents de deux substances, et même sur ceux à dents d’une seule substance ( car il entest de ces trois sortes }; elles ont donné lieu, dis-je , À d’autres recherches ; toujours à l’aide de la même méthode. Mais, comme ce que je venois de voir dans le cheval m’avoit seulement fait recueillir le sommet de ses molaires de remplacement vers deux ans et demi, le fût de ces mêmes dents vers six ans , leurs racines vers a vingtième année, m’avoient conduit en mème temps à des observations sur les incisives de remplacement, sur les arrière -molaires, et sur les os des mâchoires , seulement depuis l’époque de deux ans et demi jus- qu’à celle de vingt ans et plus. Il me restoit à savoir ce qui se passoit, dans les mâchoires de cet animal de- puis l’âge de deux ans et demi, en remontant jusqu’à la naissance , afin de compléter, autant qu’il sera pos- sible, nos connoissances sur la forme, l’étendue , Pem- ploi de l'instrument de la manducation du cheval. Cet autre travail fera le sujet du mémoire qui suivra celui-ci. En (D € ‘Pl vs r Q u €: 589 SECOND ES SA DE TU DE, PAR ÉPOQUES, DES DENTS MOLAIRES DU CHEVAL, Pa °T = No N. Lu, et déposé au secrétariat de l’Institut, le 16 yentose an 5. J’ar démontré , dans le précédent mémoire (1), trois vérités essentielles, relatives à l’instrument de la man- ducation du cheval : l’une , que l’on ne connoissoit point l’étendue en longueur de ses dents de remplace- ment, non plus que celle de ses arrière - molaires , et j'ai rétabli cette omission ; l’autre, que ses dents, non plus que celles d'aucun autre animal qui en admet dans des alvéoles, n’y sont point fixées à demeure, mais qu’elles en sont expulsées de toutes leur étendue ; la troisième , qu’à mesure qu’elles en sortent, elles sont D ee à RO G) Voyez le mémoire intitulé, Sur une méthode particulière d'étudier l’anatomie, employée, par forme d’essai, à des recherches sur Les dents ct sur les os des mächoïres. 590 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES usées par l’effet du frottement que celles d’en bas exer- cent contre celles d’en haut durant la manducation: J’ai fait voir en outre que les incisives de remplacement subissent les mêmes révolutions que celles auxquelles nous venons de voir que ces molaires étoient sujettes; et que la fossette ou germe de féves, creusée en elles, disparoît à un certain âge ; que ce n’est point parce qu’elle se remplit comme on le croyoit ; mais c’est parce que ces incisives sont usées jusqu’au-delà du fond de cette fossette. Ces découvertes sont un des fruits de la méthode d’étudier un même objet à différentes époques, depuis la naissance jusqu’à la décrépitude. Je m’étois occupé, dans ce premier mémoire sur-tout , de ce qui regarde les molaires du cheval , à les consi- dérer depuis l’âge d’environ cinq ans et demi jusqu’à celui d'environ vingt-quatre, et lui en ai trouvé six de chaque côté à chaque mâchoire : c’est précisément le nombre dont on l’en croit pourvu. Il me restoit à me rendre compte de ce qui se passe dans l’instrument de la manducation de cet animal depuis l’âge de cinq ans et demi jusqu’à sa naissance , et c’est de ce que nous avons observé dans cet espace de temps, que nous allons rendre compte. J'ai lu ce second mémoire à l’Académie des sciences, dans sa séance publique du 25 avril 1770 : j’avois eu soin de lui faire voir les preuves matérielles des prin- cipales découvertes qu’il renferme, à ses séances du 28 juin et 2 juillet 1768 , tandis qu’elles étoient fraîches et à mesure que les circonstances me les offroient. Je ET DE PHYSIQUE. 591 dois prévenir encore que quand le poulain m’a manqué à Paris, où il s’en trouve peu , j’ai eu recours à des ânons, après m'être assuré que leur dentition étoit semblable à celle du poulain. J’en ai donc élevé autant et aussi long- temps qu’il a été nécessaire pour assurer mon travail et le joindre aux observations de mon premier mémoire... Mes observations nouvelles, tant sur le poulain que sur l’ânon , se rapportent à l’âge de la naissance, à deux, quatre, cinq, six, huit, treize, vingt-six, trente-six mois. Mais, pour éviter la multiplication des dessins et des gra- vures , je me bornerai à représenter celles de ces époques qui mont fourni le plus d'instruction : ce sont celles de la naissance , de treize, de vingt-six mois. Cela ne me dis- pensera point, dans le cours de la description, de m’ap- puyer des autres époques, quand elles pourront répandre quelque jour sur le sujet que je traite. Je procède ici en descendant de l’époque de trente-six mois à celle de la naissance , afin de joindre tout de suite les faits nou- veaux que je pouvois me procurer , à Ceux que je con- noissois déja , et dont j’ai rendu compte. Considérations sur Les molaires de lait du poulain à l’époque de trois ans. Vers la troisième année, je trouve dans la mâchoire du poulain , en outre des trois molaires de remplace- ment et des trois arrière-molaires , deux portions. de dents qui n’ont appartenu ni à des molaires de rempla- cement, ni à des arrière-molaires , mais qui s’annoncent 592 MÉMOIRES DK MATHÉMATIQUES pour être des débris de molaires de lait, dans l’état où elles se présentent à cette époque : ce sont , dis-je , plutôt des tronçons de dents , ou des plaques, que des dents entières : l’une de ces portions de dents est placée précisément sur le sommet de la deuxième molaire de remplacement ; Pautre, sur le sommet de la troisième molaire de remplacement. Par les inégalités de leurs faces d’en bas, les plaques des molaires de lait de la mâchoire inférieure s’adaptent avec les sommets des mo- laires de remplacement qu’elles recouvrent, et se masti- quent avec elles ; au moyen d’une espèce de mortier pro: duit des débris lymphatiques et terreux des racines de ces dents. Voilà donc deux plaques qui annoncent deux mo- laires de plus à l’un des côtés de la mâchoire d’en bas, que le cheval n’en avoit à cinq ans et demi. Je trouve aussi, à la même époque de trois ans, deux autres plaques : celles-ci sont à la mâchoire d’en haut , placées sur la deuxième et la troisième molaire de remplacement: Il n’y en a point à cette époque, tant au sommet de la vi P poque , première molaire de remplacement d’en haut, qu’à celui de celle d’en bas. Ed Considérations. sur les molaires de lait du poulain à me à 5 , l’époque de vingt-six mois. S1 de cette époque de trois ans nous descendons à celle de vingt-six mois (p/. T, fre. I) , alors, au lieu de deux plaques, nous en trouvons trois de chaque côté à chaque mâchoire (méme figure, 4 BC, GHI), sur EURE D EM AVE IS 100 (U1 F4 593 autant de dents de remplacement. Celle que je n’avois point vue à trente-six mois m’avoit échappé, parce qu’a- lors elle étoit tombée ; mais à vingt-six mois elle se rap- porte à la première molaire de remplacement : alors cette première plaque est moins épaisse que la deuxième, celle-ci que la troisième ; les deux premières sont dé-, truites et usées par les deux bouts et sans racine. La troisième , r1éme fig. C, présente quatre racines larges, minces , fort longues, deux labiales, ou tournées en de: hors , et deux palatines, ou dirigées vers le dedans de la bouche. Ces racines enveloppent le sommet et une grande étendue de la coque de la dent de remplacement , qui croît sous cette molaire : ce qui découvre d’une part que ces dents ont des racines tendantes à les prolonger et à les affermir ; de l’autre, que ces racines, en enve- loppant le sommet et une grande portion du corps de la coque qui croît dans leur intervalle, servent de plus à la maintenir et à la diriger plus sûrement dans le sens favorable à son éruption. Ces racines , que l’on découvre à cette époque aux molaires de lait, sont différentes de celles que nous leur découvrons à une époque moins avan- cée ; elles ont une autre origine et une autre destination bien importante, dont on ne se doute point, sur les- quelles nous nous expliquerons. Ajoutez que, dans l’état présent, ces trois portions de dents de lait, de hauteur différente , sont dans un tel rapport avec les trois mo- laires qui les remplaceront , que là où ces fragmens sont plus courts, les molaires de remplacement sont plus longues ; et qu’aux endroits où ces fragmens sont 1, 75 594 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES plus longs , les molaires qui poussent à leur extrémité radiculaire sont plus courtes : de sorte qu’il s'établit entre elles une compensation d’usure, de longueur , d'époque de leur éruption , et de durée, tendant à ce qu’elles puissent se succéder à propos, tant les unes que les autres, dans l’important office de la mandu- cation. Concluons donc qu’il se trouve à cette époque de vingt-six mois neuf portions de dents à l’un des côtés de la mâchoire d’en bas du poulain, trois appartenantes à des molaires de lait, trois à des molaires de rempla- cement, et trois à des arrière - molaires (planche TI, Sig: 2) E FX , au lieu de six seulement qu’elle offroit vers la sixième année. Le même nombre , les mêmes dispositions de dents se font remarquer à la mâchoire d’en haut (p£. T, fig. IT) ; elles y sont désignées par les mêmes lettres que leurs antagonistes , à la mâchoire d’en bas. On y voit de plus une dent conique Z sur laquelle nous reviendrons. Du Ruyni (1) découvrit dans le cheval, vers la fin du quinzième siècle ; quatre tronçons de dents semblables QG) Les planches anatomiques de cet auteur, qui parurent d’abord sous ce titre, Exquisita Anatomia del cavallo, in-fol. Venet. 1509, ont été insérées dans l'ouvrage intitulé , Ze parfait Cavalier, imprimé à Paris chez Robert Denain, 1655, et composé par Jean Jourdin ,; médecin. Voyez pl. XVT, fig. B, H, qui représentent deux plaques de molaires de lait de la mâchoire d’en haut, et X, Fr qui offrent deux autres plaques provenantes des molaires de lait de la mâchoire d’en bas. Les unes et les autres appartiennent , suivant l’ex- pression de l’auteur; à des molaires qui se changent aux chevaux à la troi- sième année. x DE PE TI QU E. 59% à ceux dont je viens de parler, et que je considère comme autant de débris de molaires de lait; deux ap: partenans à la mâchoire d’en haut, deux à celle d’en bas. Gaspar Saunier (1), écuyer de l’académie de Leyde, les a fait graver en 1734 , ainsi que la planche entière et plusieurs autres planches de du Ruyni , sans citer cet auteur. Il y a plus ; il ose avancer sans pu- deur, dans sa préface, gwil a fair dessiner ses planches daprès nature, avec soin, et avec de grandes dé- penses. Passons sur ce plagiat ; il suffit d’avoir remis du Ruyni en possession de ce qui lui appartient. Le voile com- mençoit donc de son temps à se soulever, relativement à l’objet qui nous occupe en ce moment. Cependant Vopinion dominante est encore que le cheval n’a point de molaires de lait, ou de molaires qui tombent dans sa jeunesse pour être remplacées. Aristote (2) avoit pro- noncé cette décision il y a plus de deux mille ans. Aris- tote avoit un si grand génie et de si vastes connois- sances , qu’il n’est pas étonnant que son autorité ait prévalu sur observation de du Ruyni, quoique celle: ci fût si bien fondée et si vraie. C’est cette même au- torité qui a entraîné Bourgelat (3), chef de l’école vé- térinaire , dont l'opinion doit être d’un grand poids sur nef (1) Parfaite connoissance du cheval; la Haye, 1734; pl. X , fig. 2,8, 193 22. : (2) Hist. animal. cap. 1 ; Hb. VI, cap: 22. (3) Élémens d’hippiatrique.; Lyon; 1950; t.1, p. 398. 596 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES le sujet que nous traitons ; Buffon (1), qui mérite, à tant de titres, la gloire qu’il s’est acquise dans les sciences et dans les lettres; Daubenton (2), dans son intéres- sante Description du cheval : tous trois ont cru que le cheval avoit en tout vingt-quatre molaires ; dont aucune n’étoit remplacée. Mais, en observant cet animal à dif= férens âges, la nature reprend ses droits que l’opinion lui avoit arrachés. Il est incontestable qu’il existe de chaque côté, dans chaque mâchoire du poulain, à l’époque de vingt-six mois, trois débris ou restes de molaires , sur autant d’autres dents qui leur succéderont. Or ces débris n’offrent point encore les dents de lait dans leur entier; ils en indiquent seulement lexistence ; sans en faire connoître ni la forme ni l’étendue , non plus que l'ordre qu’elles suivent dans leur croissance , leur éruption, leur destruction , et certaines mutations auxquelles elles sont sujettes. Deux principales époques entre celles que j'ai observées , vont nous éclairer sur ces objets. Considérations sur les molaires de lait de l’dnon , à Pépoque de treize mois. A treize mois, chacune de ces molaires de lait a seulement deux racines, et non pas quatre, comme à vingt-six mois ; elles sont entières : l’une en prolonge QG) Æistoire naturelle, édit. im12,t. VII, part, Il, p. 290. (2) Description du cheval; même vol, p.:482. BUT D EU MB WBILQ UE 597 le côté antérieur, ou qui regarde l’entrée de la bouche ; l’autre le côté postérieur, ou qui est dirigé vers le go- sier. Ces racines s'étendent parallèlement entre elles : elles sont cannelées dans leur longueur par leurs côtés qui sont en regard; disposition qui facilitera la sec- tion de chacune de ces racines en deux : telles sont les racines à la mâchoire d’en bas. À celle d’en haut, chaque molaire de lait, à cette mème époque de treize mois, a trois racines, et jusqu’à quatre et cinq, à celle de vingt-six mois. Ici se présentent plusieurs questions : pourquoi ces dents de lait de la mâchoire d’en bas n’ont -elles , à l’époque de treize mois chacune, que deux racines qui en prolongent les côtés, tandis que, dans le poulain d’un âge plus avancé , elles en ont quatre? pourquoi ces quatre racines ne répondent-elles plus aux côtés des dents , mais en prolongent-elles, les unes la face labiale, les autres la face palatine ? pourquoi enfin sont-elles plus larges, moins épaisses qu’elles n’étoient précédem- ment, sont - elles devenues divergentes, et n’ont - elles pas continué d’être parallèles l’une à l’autre comme auparavant ? La raison de ces phénomènes, dont je ne connois point d’exemple en anatomie, est que ces deux racines qui se manifestent au treizième mois, sont celles qui proviennent du développement naturel et pri- mitif de ces dents , tandis que les quatre racines qui se présentent plus tard , n’ont lieu que parce qu’une cause divulsive fend en deux , sur leur longueur, chacune des premières racines , les transpose, les élargit, les amincit, 598 MÉMOIRES DE MATIMÉMATIQUES les renverse en les éloignant les unes des autres, et finit par les détruire. Je donnerai aux deux racinés que je découvre à treize mois , le nom de racines pri- mitives ; et aux quatre racines qui proviennent de la section des deux précédentes vers le vingt-sixième mois, celui de racines secondaires. Il suffit, pour le présent, d’avoir établi que chacune de ces dents a certainement deux racines primitives fort différentes des secondaires , avec lesquelles il ne faut point les confondre. Voilà pour ce qui regarde les racines. Mais quelle est l’éten- due du corps de ces dents, et quelle est leur manière de croître ? Considérations sur les molaires de lait du poulain, à l’époque de sa naissance. Pour s’en assurer, il convient de porter ses regards sur les mâchoires du poulain naissant (p/. LIT, fie. Jet fig. IT, ABC): on y trouve de chaque côté, tant à celle d’en haut qu’à celle d’en bas , trois ébauches du corps d’autant de dents de lait ; lesquelles toutefois ne ressemblent point aux différens tronçons de ces dents, que les époques pré- cédentes nous avoient présentés : ce que nous en remar- quons ici est , à la vérité, encore sans raciné , et remplit la mâchoire (/£g. T) depuis le bord alvéolaire jusqu’au canal maxillaire qu’il comprime ; ce que nous en remar- quons , dis-je, s’étend en longueur depuis le sommet qui est entier, jusqu'à une lame osseuse transversale qui en termine l'extrémité opposée : cette lame est ce ET DE. PHYSIQUE. 599 que j’appellerai plancher. C’est des bords de ce plan- cher , comme des bords inférieurs du reste de chacune de ces pièces , que naissent les racines primitives. Dans Vétat où se trouvent à la naissance du poulain ces sortes de dents, on a déja toute la longueur de leur corps, et c’est une de leurs singularités : car aucune dent molaire du cheval ne parvient à la longueur totale de son corps, qu'après avoir débouché de son alvéole. La raison de cette différence est que le corps de celles-ci, moins long que celui de celles-là , trouve à se placer en entier dans la mâchoire, ce que ne peut faire le corps des autres molaires. Une autre singularité de ces dents, compara- tivement à celles de l’homme, est qu’à cette époque de la naissance, leur corps , qui a pris la longueur qu’il doit avoir, n’a point acquis ni toute son épaisseur , ni toute sa largeur. Alors l’émail est formé sur une coque déliée de los propre de la dent ; il en repré- sente assez bien les contours : cette coque est creuse en dedans , sillonnée profondément en dehors sur ses deux faces , dense et fragile comme du verre, terminée à son extrémité mâchelière par six ou sept pointes d’éruption, que je nomme ainsi pour les distinguer d’autres pointes dont nous parlerons par la suite, dont une, qui est en arrière de la troisième molaire (p£. III, Jig T, G), répond à une demi -dentule ; celle-ci est d’une grande utilité. Mais comment la nature va-t-elle s’y prendre , pour achever de donner à cette coque l’épais- seur et la largeur qu’elle doit avoir, et la convertir en fût? Car il faut bien distinguer l’une de l’autre : ce 6oo MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES sont deux états tout-à-fait différens. Elle a pourvu cette coque , en dehors , d’une espèce de membrane, qui non seulement l’enveloppe entièrement, maïs encore qui s’in- sinue dans la profondeur de ses sillons et de toutes ses anses : cette membrane est l’organe générateur du cortical, laquelle ne se convertit en une substance osseuse que quand l’émail est formé et enduit la coque de la dent. Cette membrane a de commun avec l’émail, que son induration gagne par degrés, en partant du sommet de la coque, et se prolongeant peu à peu jusqu’à l’extrémité opposée de son corps. Ainsi le corps ou le fût de ces dents croît en deux temps : dans l’un il se développe en longueur, et jusqu’à un certain point en largeur ét en épaisseur , pour former la coque ; dans l’autre , il parfait l’épais- seur et la largeur de cette coque pour former le fût, espèce de croissance dont je ne sache pas que lon ait fait mention : elle ne se borne point aux dents du cheval, elle appartient à la classe des animaux dont les dents sont composés de trois substances. Présentement, pour bien connoître étendue en lon- gueur de ces dents de lait, il faut ajouter à la longueur du corps de leur coque, qui est de 2 centimètres 9 mil- limètres pour la première de ces molaires, de 3 centi- mètres 4 millimètres pour la deuxième et la troisième à la mâchoire d’en bas, celle de leurs racines primitives, telles qu’elles se trouvent à l’époque de treize mois où elles sont entières. Par ce moyen on aura une première molaire de lait de 5 centimètres, une deuxième de 5 cen- timètres 4 millimètres , une troisième de 7 centimètres 8 millimètres, Pre er NnÈn te my S 1,0 D: 601 Considérations sur les dents complémentaires du pou-. lain et de l’änon. À ces douze molaires de lait j’ajouterai la description de quatre autres dents qui ne sont ni des molaires, ni des crochets , ni des incisives, et que je trouve dans le poulain et l’Anon , une de chaque côté à chaque mä- choire; ces dents, longues d’environ 2 centimètres 9 millimètres, épaisses, à l’endroit de leur plus grande épaisseur, d’environ 1 centimètre 1 millimètre, ont la forme de deux cônes réunis par leur base : l’un tient lieu de racines , l’autre de sommet; celui-ci , un peu incliné vers la fosse palatine , est tranchant dans le prin- cipe , mais s’émousse par. l’usure. Celles d’en haut n’ont point échappé au citoyen Dau- benton (1); il se contente de dire qu’elles n’ont que 7 millimètres de largeur. Je trouve que ces dents débou- chent de leurs alvéoles vers le cinquième mois qui suit la naissance, et non pas à toute sorte d’âges. Celles d’en haut sont accottées à la première molaire de lait et en devant ; elles prolongent la face mâchelière de ces dents, ce qui me les fait nommer complémentaires. Celles d’en bas sont à quelques millimètres en avant de ces molaires. Les dents complémentaires ne sont point remplacées par d’autres dents de leur espèce. Ordinai- G) DausEentoN, Description du cheyal, t, VII, part, I , édit. 27-12, p. 482. 1. FES 76 ‘ 602 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES rement elles le sont à la mâchoire d’en haut par la pre- mière molaire de remplacement , et tombent avec la plaque dela première molaire de lait. Leur remplacement par une dent d’une autre espèce fait, dans le système dentaire, une exception particulière , dont voici la cause. À la mâchoire d’en haut, cette dent sert, comme je viens de le dire , à augmenter l’étendue en largeur de la première molaire de lait, et à faire que leur largeur réunie surpasse de quelques millimètres celle de la pre- mière molaire de remplacement, ce qui facilite l’érup- tion de celle-ci. Or, cette dent tombe lors de l’éruption de la première molaire de remplacement, conjointement avec la plaque provenante de la première molaire de lait, si celle de remplacement, qui pousse dans leurs alvéoles pour se faire jour au dehors, les rencontre en dessus lune et l’autre ; mais elle reste plus long-temps en place, si la première molaire de remplacement , au lieu de ren- contrer la dent complémentaire, ne fait que glisser le long de son corps : voilà pourquoi on la trouve quelque- fois à un Âge avancé. Ceux qui croyoient qu’elle pousse dans différens temps de la vie de l’animal , sont dans l'erreur : le terme de leur éruption se rapporte à environ le cinquième ou le sixième mois ; Gelui le plus ordinaire de leur disparition , au trentième mois ; et si elles subsis- tent au-delà de ce terme , on vient d’en avoir la raison. Voilà donc une dent complémentaire , plus trois mo- laires de lait, à joindre de chaque côté à chaque mà- choire, avec les trois molaires de remplacement , et “avec les trois arrière-molaires du cheval, non pas telles ‘ET DE PHYSIQUE. 603 que les auteurs les ont décrites et représentées, mais avec la longueur totale et absolue que la nature leur accorde, et que nous avons découverte pour connoître létendue absolue de l'instrument de la manducation, résultant de nos recherches. Formation de l'instrument de la manducation du cheval, déduite des découvertes contenues tant dans ce mé- moire que dans le précédent. J’ar fait ce rapprochement pour l’un des côtés de la mâchoire d’en bas, dans l'intention de m’assurer de V’étendue des ressources que la nature s’est ménagées pour satisfaire , durant toute la vie de l’animal , à la man- ducation, avec un instrument qui ne cesse point de s’user. J’ai eu de plus pour objet de comparer cet instru- ment, qui résulte de mes recherches, avec celui connu des anatomistes , et de distinguer la portion qui s’en consomme par l’effet de la manducation ; de celle qui disparvoït par d’autres causes et pour d’autres motifs. Pour atteindre au but que je me proposois , j’ai dû avoir égard, 1°. au terme de l’éruption de chacune de ces dix pièces ; 2°. à la position qui leur est propre ; 3°. à Pétendue absolue de chacune d’elles , tirée de chacune des époques qui pouvoient me la procurer. Je ne rap- porterai que des résultats, ne voulant point fatiguer l’Institut par toutes les observations que j’ai été obligé de faire pour parvenir à l’éclaircissement de chacun des objets que je desirois d'approfondir. | 6of MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES Époques où le sommet de chacune de ces dix derits se Jait jour au dehors. Lr sommet d’une dent , ou d’une portion de dent contenue dans les mâchoires, se fait-il jour au dehors , c’est ce que l’on appelle éruption. L’éruption des dix pièces dentaires dont nous nous occupons en ce mo- ment , se fait à différentes époques plus ou moins éloi- gnées du terme de la naissance, Il-a donc fallu y avoir égard , parce que celle de ces pièces qui sort plutôt est employée et s’use plutôt. Voici les époques où se fait l’éruption de ces dix pièces : 19. De la première molaire de lait (pZ. IV, fig. T),1, environ huit jours après la naissance. 2°, De la deuxième molaire de lait, 2, également envi- ron huit jours après la naissance : c’est pourquoi je mets les sommets de ces deux dents de niveau, dans cette planche IF. 3°. De la troisième molaire de lait, 3 : elle débouche trois semaines après la naissance ; raison pour en tenir le sommet un peu plus bas que celui des deux dents précédentes. ÿ 4°. De la complémentaire , 4, vers le cinquième ou le sixième mois : je la pose en avant et vis-à-vis de la pre- mière molaire , comme elle se trouve à la mâchoire d'en bas. 5°. De la première arrière-molaire, 5, vers dix à onze mois ; ce qui fait que j’en tiens le sommet au-dessous de celui de la troisième molaire de lait. ‘ET DE PHYSIQUr 605 6°. De la deuxième arrière- molaire , 6 , vers le ving- tième mois : son sommet est au - dessous de celui de la première arrière-molaire. 7°. De la première molaire de remplacement, 7, vers le trentième mois. 8°. De la deuxième molaire de remplacement , 8, environ le trente-deuxième mois. 9°. De la troisième molaire de remplacement, 9, vers trois ans. 10°. Enfin de la troisième arrière-molaire , 10, vers cinq à six ans. Aïnsi ce travail de l’éruption des dents , qui s’accom- plit en vingt ou trente ans dans l’espèce humaine, se termine en six années dans le cheval. Voilà pour la position de ces dents à leur sommet, relativement aux époques de leur éruption, l’ordre dans lequel elles vont commencer à s’user. Pour ce qui est de leur posi- tion, elles en affectent deux fort différentes , et cha- cune d’une grande utilité. Les molaires de lait et les molaires de remplacement se prolongent les unes sur les autres du bord alvéolaire de la mâchoire à sa base, selon une direction perpendiculaire à cette base ; et les trois arrière- molaires , chacune selon une ligne incli- née de derrière en devant ; inclinaison qui a échappé à ceux qui ont représenté ces dents. La raison de cette différence de position , les causes qui l’opèrent , les effets qu’elle produit, les changemens qu’elle éprouve, sont très-curieux ; on en rendra compte dans le mémoire suivant, 606 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES - Nous avons énfin cherché quelle est l’étendue absolue de chacune de ces dents , tant en longueur qu’en largeur eten épaisseur; on les voit dans la planche IF, fig. I où elles sont représentées, au tiers de nature. Ce qui suit offre leurs dimensions précises en longueur, recueillies à différentes époques (1). Premièremolaire de lait, 7. "5 déce. freentint Qui Deuxième molaire de lait, . .. » 5 4 Troisième molaire de lait, . .. » 7 8 Dent complémentaire, .. . .. » 2 9 Première arrière-molaire Se LINE ST TEAE 5 » _ Deuxième arrière-molaire, . .. 1 3 » Première molaire de remplace- ment Ne FAURE AVC. AMENER o 4 Deuxième molaire, id. ,.. .. à 2 4 Troisième molaire, id. , 4 . .. 1 2 6 Troisième arrière-molaire, . .. 1 ar 3 9 6 a, ou NipiEnosg 5 8 Ainsi ces dix dents donnent ensemble une longueur de 9 décimètres 5 centimètres 8 millimètres. Celles de la mâchoire d’en haut sont en général plus longues que celles de la mâchoire d’en bas. Maïs en ne les suüppo- sant que de même longueur , et sommant celle des dents # (1) On. s'attend, bien que, suivant l’espèce et là taille du cheval, ces dimensions doivent changer. Celles - ci ont été prises sur des chevaux de charrois, à Paris. HT) DIE, PHYSIQUE. : 607 de chaque côté des deux mâchoires , on obtiendroit en longueur, pour les quarante pièces dentaires dont elles sont garnies seulement, je le répète, à leurs côtés, 3 mètres 8 décimètres 2 centimètres 6 millimètres, que le cheval auroit à consommer. Il suffit maïinténant de jeter un coup d’œil sur la planche XIV, figure VIIT, de l {rzatomie du cheval, par du Ruyni, pour juger combien l’instrument de la manducation étoit peu connu; je ne parle point de Saunier , non plus que de Garsault (1), qui ont copié cette figure. Du Ruyni ne désigne point l’âge du cheval d’après lequel elle a été gravée. Elle a tous les carac- tères des dents d’un cheval de douze à quatorze ans: même expulsion ; même raccourcissement par l’usure , mêmes racines. Or je trouve qu’à cet âge la longueur cumulée des six portions de molaires, alors subsistantes, des deux côtés à chaque mâchoire, est de 1 mètre 5 dé- cimètres 8 centimètres 7 millimètres, et non pas de 3 mètres 8 décimètres 2 centimètres 6 millimètres ; comme la donnent nos observations ; ou bien de ce qui se trouve au-dessus de la ligne en onde (p1. IV, fig. IIT, GH), qui est l’étendue que l’on ne connoïssoit point , tandis que celle que l’on connoiïssoit répond à ce qui se trouve au- dessous de la même ligne en onde. Mais comme toutes ces dents percent les gencives à différentes époques , il résulte qu’il en est qui , servant plutôt, sont plutôt usées ; d’autres qui , servant plus tard, QG) Anatomie du cheval, traduite de lanplais. 608 MÉMOIRES DE MATIFÉMATIQUES sont conservées pour un temps ‘plus reculé ; certaines qui, étant plus longues , perçant de bonne heure et,ser- Vant plus long-temps, s’usent davantage en satisfaisant à un service plus étendu. Tout cela montre que chaque dent , quoique distincte dans cet animal des autres dents, n’est point, quant aux fonctions qu’elle exerce dans l'instrument de la manducation , en tant qu’elle sert à moudre , une pièce que l’on puisse dire isolée, mais une pièce qui, se mettant en de certains rapports avec celles qui l’avoisinent , fait avec elles partie d’un tout dont on découvre ici les liaisons (p£'°1W, fie. IT) : on y voit que les molaires delait sont plutôt en fonction, servent et s’usent les premières ; que pour établir le passage du service de ces dents avec celui des molaires de remplacement , la nature a employé la première ar- rière-molaire , qui perce dix mois plus tard que celles de lait ; puis la seconde, qui perce dix mois plus tard que la première, et seize mois avant celles de rempla- cement : or cet ordre d’éruption, d’emploi et d’usure de ces dents, présente une vérité bien importante ; sa- voir, que chacune est réellement une partie intégrante d’un tout, comme si toutes ensemble ne formoient qu’une ou tout au plus deux dents. Ce que j’offre ici comme une conséquence , est toutefois une vérité de fait, dont j'adninistrerai la preuve dans l’un des mémoires suivans : car il est des animaux où toutes les molaires de lait, de remplacement, et les arrière-molaires d’un des côtés d’une mâchoire , sont réunies en deux seules dents. I] convient maintenant de remarquer que cette des- ET DE PHYSIQ U €. Gog truction naturelle de linstrument de la manducation du cheval ne s’exécute point de la même manière dans. toutes ses parties : car il est de fait que les molaires de remplacement et les arrière-molaïres sont usées depuis leur sommet jusques presque à l’extrémité de leurs ra- cines , par l’effet du frottement durant la manducation ; ce qui a été prouvé : tandis qu’il n’en est pas tout-à- fait de même des molaires de lait. Pour faire entendre comment s’opère leur destruction , j'aurai recours à une figure (pl: IV, fig. III), où je divise la première molaire de laït en trois portions; en sommet 4, en plaque B , et en deux racines primitives, tenant encore à une portion du füt. Or je dis 1°. que le sommet seul 4 de cette dent est usé comme le sont les molaires de remplacement et les arrière-molaires ; 2°. que la portion de dent que j'appelle plaque B tombera tout d’une pièce ; 3°. que les quatre racines secondaires provenantes des deux racines primi- tives , ainsi que la partie basse du fût qui joint ces racines € C, disparoîtront, non pas par l'effet de la manducation ,; mais par celui d’une pression ménagée avec art, provenante du follicule de la molaire de rem- placement que cette molaire de lait surmontoit. Une conséquence de cet ordre que suivent les molaires de lait dans le cours de leur destruction , est que la plaque et les racines sont des quantités seulement acces- soires de leur sommet, en tant qu’il entre dans lins- trument de la manducation pour y sérvir, et être détruit par cette fonction. Cela étant, jepose cè sommet ainsi 1. 77 610 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES réduit au-dessus de la première molaire de remplace- ment (pl. IV”, fig. IT, A). De semblables émonde- mens ont lieu relativement à la deuxième et à la troi- sième molaire de lait : j’en place les sommets (p£. 1W, fig. IT, B, C) au-dessus des molaires de remplace- ment qui leur succèdent ; disposition qui conduit à cette autre vérité, que l'instrument dentaire, détruit par la manducation, n’est point l’instrument complet et absolu représenté planche IV, figure T, mais celui de la méme planche, figure IT, par où l’on voit que le sommet des molaires de lait sert.en quelque sorte de complément à celles de remplacement , sans lequel sommet il eût fallu tenir les dents de remplacement plus longues, et les faire déboucher plutôt. Après que j’eus lu ce mémoire à lPAcadémie des sciences en 1770 , beaucoup de personnes ne voulurent point encore croire à l’existence des molaires de lait du cheval. Mon ami Étienne Turgot fut obligé, d’af- firmer à Bourgelat qu’il les avoit vues en assistant, à mes dissections. Courtanvaux, alors président de l’Aca- démie , porta aux écuyers et aux autres officiers des écuries de Versailles, des pièces que je lui remis pour les désabuser. Les principaux maréchaux de Paris, tels que Rondet, Lafosse et autres, vinrent s’assurer de l’existence de ces dents sur les pièces mêmes que je leur mis sous les yeux : tant étoitenracinée dans la tête des hommes les plus au fait de la connoissance du cheval, l'opinion d’Aristote touchant la.non-existence des, mo- laires de lait de cet animal; ce qui montre qu’un grand Bért ÊDÉE PAYS T QUE: 611 homme a plus à prendre garde de ne point se tromper, qu’un homme d’un talent médiocre , parce que , quand il commet une erreur , il faut quelquefois des siècles entiers et des circonstances particulières avant que l’on puisse se soustraire à la puissance d’une si grande ré- putation. J’ai fait voir dans ce mémoire, 1°. Qu’on trouve dans le cheval douze molaires de lait dont on nioit l’existence : 2°. Qu'il jouit de quatre autres dents, qui ne sont ni des molaires , ni des crochets , ni des incisives , les- quelles ont des propriétés des molaires de lait : 30. Que la coque des molaires de lait est formée de toute sa longueur dans les mächoires , avant qu’elle en débouche; ce qui n’arrive point aux autres molaires , dont la coque plus longue continue de croître en lon- gueur après leur éruption : 4°. Que la membrane qui enveloppe cette coque passe de cet état de membrane à celui de substance osseuse, pour former ce que j'appelle le cortical osseux : 5°. Que la formation de l’émail précède Possification de la membrane qui produit le cortical : 6°. Que le corps de la dent prend sa croissance en deux temps; dans le premier, en longueur au moyen de la coque; dans le deuxième , il achève d’acquérir son. épaisseur et sa largeur au moyen du cortical : 7°. Que chacune des molaires de lait de la mâchoire d’en bas a deux racines primitives qui en prolongeñt les côtés : 612 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES 8°. Que ces racines primitives se transforment cha- cune en deux racines secondaires , qui sont transposées , et répondent l’une à la face labiale, l’autre à la face palatine de ces dents : 9°. Que ces molaires sont employées seules à la man- ducation pendant près d’un an, et conjointement avec la première arrière - molaire pendant les deux années et demie suivantes, au bout duquel temps, et jusque vers l’époque de trois ans, elles tombent en plaques, por faire place à des molaires qui leur succèdent : 10°. Qu’environ la moitié de leur corpsest uséecom me le sont les autres molaires : k 110. Que la seule partie de ces dents égale à environ la hauteur de la moitié de leur corps entre dans l’ins- trument de la manducation pour servir au broiement des substances alimentaires ; le reste , qui comprend leurs plaques et leurs racines secondaires, a une autre des- tination : 12°. Quw’en rapprochant ces molaires de lait de celles de remplacement et des arrière-molaires, toutes sup- posées avec leur longueur absolue, on obtient pour la mâchoire d’en bas un instrument dentaire tout - à - fait différent, pour la forme et l’étendue, de celui que lon connoissoit : 130. Que cet instrument dentaire n’est point stricte- ment celui de la manducation ; qu’il n’entre des molaires de lait dans l'instrument de la manducation pour broyer les alimens , ét être usée par cette fonction , que la moitié environ de leur corps: MEL ID EIM EE MN EG Oo E 2 Le 613 14°. Que les neuf molaires d’un des côtés des m4- choires du cheval, quoique distinctes , font néanmoins ; par leur arrangement , leur service , partie d’un tout - comme si, entre elles , elles ne formoient qu’une ou deux seules dents. EXPLICATION DES PLANCHES DU PREMIER MÉMOIRE. PER NTICGT'EAN EE 138 représente, 9. I, l’un des côtés de l'os de la mAchoire inférieure d’un cheval de cinq à six ans, avec les dents qui s’y rencontrent à cet âge. . Condyle. . Apophyse coronoïde. Branche de la mâchoire. . Angle de la mâchoire. . Base de la mâchoire. Trou mentonnier. DrRESER . Barre. FH. Dent de la pince. I. Dent mitoyenne. K. Dent du coin. I. Crochet. 614 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES M, N. Coupe de l'os maxillaire. Elle met à découvert les six dents molaires du cheval fait, leurs cloisons interdentaires, le canal maxillaire et le tissu cellulaire de l’angle de la mâchoire. 1, 2, 3. Molaires de remplacement. 4, 5, 6. Arrière-molaires, M, F. Conduit maxillaire. La fig. IT représente une portion de la mâchoire d’en bas d’un cheval d'environ vingt ans. 1,2, 3. Restes des trois molaires de remplacement. 4, 5, 6. Restes des trois arrière-molaires. M, F. Conduit maxillaire transformé en gouttière. Fig. IT. Pince supérieure d’un cheval de sept ans. A, B. Les deux dents dites les pinces. C C. Les dents miteyennes. D D. Dents des coins. EE. Trou incisif. F F. Crochets. La fig. IV indique les mêmes objets, mais sur un cheval d'environ vingt ans. A, B. Dents de la pince. EE. Trou incisif. C, D. Lieux où ont été chassées les dents de la pince 4 B, et raccourcissement qu’elles ont éprouvé comparativement aux mêmes dents, #2. IIT, 4, B. ET DE PHYSIQUE., 615 PE A NACRE AE ES La f2. I représente la face mâchelière de la troisième mo- laire inférieure du cheval de cinq à six ans. Le cordon blanc qui serpente sur cette face, est l’émail. On y distingue deux enfoncemens ou baïes, 4, B ; deux petites anses, C, C. Ces baïes et ces anses sont remplies de cor- tical ; le reste du pourtour de l’émail en est revêtu. Tout ce qui est compris dans l’intérieur des plis de cet émail, est l’os dé la dent. La fo. IT représente le sommet de la troisième molaire infé- rieure de remplacement du cheval d’environ deux ans et demi, époque où cette dent n’a point encore été employée à la man- ducation , et où elle conserve ses pointes d’éruption, 1, 2, 3, 4, 5, 6,7, 8, qui ici sont un peu forcées. Fig. III. Dent de la pince d’un cheval de quatre à cinq ans, vue à sa face mâchelière. On distingue sur cette face, qui est usée, un émail d'encadrement , un émail central ; entre ces deux émails, l’os de la dent, un cortical d’entourage 4 4 qui enveloppe l’émail d'encadrement, et un cornet de cortical Z B qui plonge dans l’émail central. 616 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES PLAN IC HNES TT Elle représente, fs. T1, A, B, le fût de la troisième mo- laire de remplacement du cheval de cinq à six ans. A, C. Ce qui en a été usé à son sommet. B, D. Racines à former. \ Fig. II. Troisième molaire inférieure du cheval de vingt ans. A, Face mâchelière. A, B. Étendue de son fût. A, C, D. Portion détruite par l’usure. E, F, F. Étendue de ses racines. Fig. IIT. Quatrième molaire inférieure d’un cheval d'environ vingt-quatre ans. … La /ig. IV la représente du côté opposé; ce qui est ponctué dans l’une et dans l’autre a été détruit par l'usure. Fig. V. Dent de la pince d’un cheval de quatre à cinq ans. Fig. VI. La même dent, mais d’un cheval de sept ans. Fig. VII. La même dent, mais d’un cheval de dix ans. Fig. VIII. Encore la même dent, mais d’un cheval d'environ vingt ans. Toutes les quatre ont été sciées suivant leur longueur. ÉTÉ œ Hi l'Ru 1D Er PH Yi: S: TI Or U «4 ” 617 EXPLICATION DES PLANCHES DU DEUXIÈME MÉMOIRE. ar Ca A L A fig. I représente l’un des côtés de la mâchoire inférieure d’un poulain âgé de vingt-six mois; les dents sont découvertes à l’aide de coupes qui en montrent la face externe et leurs rap- ports avec différentes parties de l’os maxillaire. Les objets sont représentés tiers de nature. A,B, C. Restes des trois molaires de lait ; la troisième C, avec ses racines secondaires. E, F, K. Portions des trois arrière-molaires. G, H, I. Portions des trois molaires de remplacement, L. Orifice antérieur du conduit maxillaire. I. Extrémité postérieure du conduit maxillaire. 1. Dent de laït de la pince. 2. Dent mitoyenne de lait. 3. Dent du coin de lait. 4. Dent de la pince de remplacement. 5. Dent mitoyenne de remplacement. 6. Dent du coin de remplacement. Fig. II. L'un des côtés de la mâchoire supérieure du même poulain. À, B, C. Restes des trois molaires de lait supérieures. le 78 618 MÉMOIRES DE MÂTHÉMATIQUES E,F,K. Portions des trois arrière-molaires supérieures. G, H,1I. Portions des trois molaires supérieures de rempla- cement. L. Dent complémentaire supérieure. 1. Dent de lait de la pince. 2. Mitoyenne de lait. 3. Dent du coin de lait. 4. Mitoyenne de remplacement. ET DE PHYSIQUE, 619 PLANCHE TT. Elle représente les mâchoires d’un ânon d'environ dix mois. Les objets sont moitié de nature. Fig. I. Mâchoire inférieure. A, B, C. Portions des trois molaires de lait avec leurs racines primitives. D. Portion de première arrière-molaire. Æ. Portion de deuxième arrière - molaire. Ce n’est encore qu'un commencement de la coque. F, G, H. Germes sphériques des molaires de remplacement. I. Follicule ou bourse qui enveloppe la coque de la première arrière-molaire ; à cette époque il est membraneux , plus tard il sera osseux. Il a été fendu exprès sur sa longueur, pour découvrir le reste du germe qui termine l’extrémité radiculaire de cette coque. L. Le reste de ce germe. WT, N, K, Conduit maxillaire. O,P,Q,R. Cloisons interdentaires. Fig. II. Mâchoire supérieure. A, B, C. Restes des trois molaires de lait avec leurs racines primitives. D. Portion de la première arrière-molaire supérieure. Æ. Portion de la coque de la deuxième arrière-molaire su- périeure. F,G,H. Germes sphériques des trois molaires supérieures de remplacement. I. Extrémité supérieure de la première arrière-molaire, ter- minée par un reste de germe qui soulève le fond de l’alvéole, © et le porte dans le sinus maxillaire. 620 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES K. Lieu où se formera la troisième arrière-molaire. L. Dent complémentaire. : ! MW, N. Conduit maxillaire. ‘Fig. III. Ces cinq pointes: sont les sommets d’une même coque de molaire supérieure , qui ne sont point encore réunies entre elles à leurs bases. TU ee BAC DL EN Tel Hi) YA SE 1 [QI UE “…… 621 PLANCHE:III Les #2. I et fig. IT représententles mâchoires du poulain nais- sant, tiers de nature; la #g. JIT, la mâchoire inférieure du poulain avortif, grandeur de nature. Fis. I. Mâchoire inférieure du poulain naissant. À,B,C. Les trois coques des molaires de lait. D. Germe sphérique de la première arrière-molaire. OP. Plan de cette mâchoire. Il y pose de toute l’éten- due EF. G. Apophyse en oreille de la coque de la troisième molaire de lait. 1,1. Cloisons interdentaires. 1. Dent de la pince de lait. 2. Mitoyenne de lait. MN. Conduit maxillaire. Fig. II. Mâchoire supérieure du poulain naissant. A,B,C. Coques des molaires de lait. D. Germe sphérique de la première arrière - molaire su- périeure. MNE. Conduit maxillaire supérieur. F. Surbaïssement des os du nez. 1. Dent de lait de la pince, 2. Dent mitoyenne de lait. Fig. III. Mâchoire inférieure de poulain avortif. AB. Canal maxillaire. C, D,E. Alvéoles sphériques des trois molaires de lait. F. Alvéole sphérique de la première arrière-molaire. GH. Plan. La mâchoire n’y pose que par le milieu de sa base, 622 MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUES PLAN CH'E IV. Les objets y sont tiers de nature. Fig. I. Elle offre les dix dents de l’un des côtés de la mâ- choïire d’en bas, toutes censées avec leurs sommets, leurs fûts et leurs racines , telles en un mot qu’elles existent quand on en recueille toutes les parties aux différentes époques de la vie où elles subsistent. Elles sont, autant qu’on l’a pu, rangées les unes à côté des autres dans l’ordre qu'elles observent entre elles durant le cours de leur éruption. 1. Première molaire de lait. 2. Deuxième molaire de lait. 3. Troisième molaire de lait. 4. Dent complémentaire. cé 5. Première arrière-molaire. 6. Deuxième arrière-molaire. 7. Première molaire de remplacement. 8. Deuxième molaire de remplacement. 9. Troisième molaire de remplacement. 10. Troisième arrière-molaire. Fig. II. Elle représente la première molaire de lait de la Jig. JE coupée en quatre parties sur sa hauteur. A. Le sommet. Il a coutume d’être détruit par l’usure, à l’aide du frottement lors de la manducation. B. La plaque. Cette partie tombe en une seule pièce vers le trentième mois. C, D. Les racines primitives. Elles passent à l’état de racines secondaires , qui ensuite sont détruites dans les alvéoles avant la chûte de la plaque et pour la faciliter. Én . RMC DLEN PH Y ST QU E. 623 Fig. III. A, B, C. Les sommets seulement des trois molaires de lait, rapportés sur les molaires de remplacement D,ÆE,F ; les dix pièces de cette figure indiquent l’étendue de l’instrument de la manducation propre à moudre , et la quantité qui en est détruite par le frottement durant la manducation. Ce qui est au-dessous de cette ligne GA étoit l’étendue connue ; ce qui est situé au-dessus étoit demeuré inconnu. FINS DU MOMEt PREMIER. he x | te Gi «Wa : “ ENT . : E*4 Te RATS? . , pis ir 0e lat fi EVE MIRE 7 { NA ds Eequa A is ya AE a aù 4 ete s- PS Net ge - ati sl THRR L TS PA " TS + L # 7) NT LPS Libiée, + F CL ar à ue NES k “. \) a pu ten à h + £ vr ia | 27 4 Ê À A OT dt La EVE » FE 7 Pia d FE anges: V4 UPÈ EE À “ti Fr vu £ à jai die } CARRE M SET leg re viral $ s' Part L if 114 fs CO | ongt c's4f | F4 de tte NE An Ter End al £ RER TU % \ 401 A 88 à 2104 AU LA k « "4 IP 1 o À L + L Le HOT LL 4 NT TOUTE Et : hroëtèot RL ti ie LEA) ononbi dl fois Menu lie HA RATE AR es dois b oi Erazahs die : HT BD dpi Ex < hp ÿ Le! dé: - ion { "” artipe igi Ca où 4 L 4 VAPEUR RU RE Éprs dati | dt 4 PL 'he-di RAM AU AMT : JE ‘ % à\ ALT RENE Men. de Unshitutr! Cl Tom À Lag.622. FI AIT PLIT 2° Men. d ep Buwry, Jeu. PA < - - £ we. a Ve Mem. de l'Institut 1%*cl. Tome Z, p.622. 20. AU1. PLAT. 2 * Mem . ( CL EEE ET EEN \ ALLAN À D AN RER æ te PUS EL Mém. de l'Institut 17° cl. Tome L_p 622. PL. AIT el dern. PL. 2° Mem. 0 L re : L L ( : . CE + au ; RRRVES HAE Hiteie) :