F0 2 F8, \ LU: 4 . | “ 4e F L | pe _ L 1e MOI R.} # Ur | Ré EM; À Ti i O F + 2 ri DE PHY SIQU) D':E MATHÉMATIQUE DE PHYSIQUE. MÉMOIRES Tome IX | | MÉMOIRES MATHÉMATIQUE E T DE PHYSIQUE, Préfentés à l’Académie Royale des Sciences, par divers Savans, & lIüûs dans fes Affemblées. Tome IX. A PAR IS; MouTArD, Imprimeur-Libraire de la REINE, & des Mémoires de | l'Académie Royale des Sciences, rue des Mathurins, Hôtel de Cluni, Chez je à É: à Pancroucxe, Libraire de l'Académie Royale des Sciences, Hôtel de Thou, rue des Poitevins. M DCC. LXXX. Ps à M PER EE AC EE Ce vOLUME renferme trois pièces fur le prix de l'indigo , la pièce de M. Coulomb fur l'aimant qui a été annoncée dans le volume précédent , & 29 Mémoires. Deux de Chirurgie , fix d'Hifloire natu- relle des animaux, un de Minéralogie , onze de Chy- mie, cinq relatifs aux Arts , un d'Analyfe & trois de Géométrie. Ù PER LxX, Uk: Socrété de Négocians zélés pour le progrès des Arts, a remis à | Académie une fomme de 1200 iv. deftinée à former un prix fur l'Art de la Teinture. L'Académie a choifi pour fujet de ce prix , l’Ana- lyfe de l’indigo & l’Examen chymique des opérations employees dans les teuntures dont cette [ubffance ef? la bafe. Le prix a été partagé entre deux pièces , l'une de M. Quatremere , l'autre de MM: Hecquet d'Orval & de Ribaucour. … Deux autres pièces ont mérité les éloges de l’Aca- démie, qui a cru devoir inviter les Auteurs à fe faire connoître & à publier leurs pièces. L’Auteur de l’une des deux, qui avoit pour devife : Nifi urile ef? quod Jacimus flulta eft gloria, eft M. Bergman , Corref- pondant de l'Académie, Sa pièce eft imprimée dans ce volume. | Tome IX, | 6 ÿ PAR. EF A C His M. Quatremere a cru devoir confidérer d’abord les détails de la culture de l'indigo. Les terres de l'Amé- rique ont déjà perdu de leur fertilité première, & cet appauvriffement eft un mal prefque incurable , dans des pays où l'homme a été changé en bête de fomme A & où la crainte des fupplices eft le feul encouragement à la culture. Tant il eft vrai que, fi l'injuftice & le crime font pour quelques hommes un bien paffager , ce bien eft toujours un mal durable pour les fociéres qui l'autorifent ou le tolèrent. C'eit à cette diminution de fertilité dans les terres que M. Quatremere attribue la détérioration de l'indigo , & il propofe pour remède de labourer profondément avec des charrues les terres qui le produilent. La fabrication de l'indigo eft une autre caufe de {es défauts. M. Quatremere a obfervé que la partie colorante étoit plus où moins mêlée d'une partie xtractive , que la proportion plus ou moins grande de celle-ci donnoit les indigos de différentes qualités , & qu'en féparant cette partie extractive avec plus de foin, ou même en l’extrayant par de nouveaux lavages , on changeyoit en indigo de la premiere qualité tous ceux qui fe trouvent dans le commerce. Enfin l'indigo fe détériore encore par le tranfport , cette perte tient à la maniere de l'emballer, & M. Quatre- mere propofe une autre méthode plus propre à con- ferver cette denrée. Dans la feconde partie, l'Auteur donne en détail la maniere de teindre avec l'indigo les foies, les fils ou cotons & les laines, d’après l'ufage établi dans les BOR EMEA CC zif ateliers les plus confidérables. C'eft toujours la même opération re dirigée par les mêmes principes, mais les procédés font différens. Les cuves d'indigo (on donne ce nom au bain qui {ert à la teinture) , font fujettes à deux accidens, elles deviennent roides ou rebutées; dans le premier étac, elles ont une odeur Âcre; dans le fecond , l'odeur eft très-fétide. M. Quatremere a recherché la caufe de ces accidens regardés comme incurables, non-feule- ment par les plus habiles teinturiers, mais par M. Hellot lui-même; ce n'étoit pas qu'on manquât de recettes , on en ayoit même un grand nombre toutes réputées infaillibles, & toutes plus nuifibles qu'utiles. Il n'y à jamais cant de fpécifiques que pour les maladies in- curables, comme il n'y a jamais tant d’apologies que pour les caufes défefpérées. M. Quatremere avoit une grande difficulté à lever: des expériences fur les cuves en grand étoient très- coûteufes; & la cuve d'indigo ne parvenant à fon état de perfection que par la fermentation, il falloit trouver des moyens de produire, dans un cffai en petit, ce qui avoit lieu dans les cuves engrand. L'auteur y a réufli en foutenant la chaleur dans les petites cuves , il eft même parvenu à crouver des moyens de faire roidir ou rebuter {es cuves à volonté. Dès-lors il a pu répéter fes expc- riences , & il a trouvé que le remède à une cuve roide étoit le temps, & une de foutenue plus ou moins long-temps, & que la chaux étoit le fpécifique des cuves rebutées. Il a effayé fon procédé fur des cuves en grand reburées par accident, & Le fuccès a été le même, ai] Page 81, Page 121- iv PIRE FAU'E L'examen chymique de l'indigo & des phénomènes que produifent les cuves de cetre teinture , Ont été l'objet principal de MM. d'Orval & de Ribaucour. Ils ont conclu , de leurs expériences , que l'alkali vo- latil étoit , de tous les diffolvans de la partie colorante de l'indigo, celui qu'on pouvoit en feparer plus aifé- ment, & qui laifloit une couleur plus folide : que le moyen de produire cette diflolution , étoit d'offrir à l'alkali volatil, à mefure qu'il fe formoit dans la cuve, foit par la décompofition des fels ammoniacaux qui entrent dans l'indivo , {oit par la fermentation de fubftances ajoutées dans la cuve, d'offtir, dis-je, à cet alkali volatil les molécules de lindigo réduites dans une grande ténuité par les mouvemens d'efler- vefcence & de fermentation excités dans les cuves. C'eft d'après ces vues qu'ils expliquent les accidens qui nuifent aux cuves, & qu'ils préfentent des moyens d'y remédier. Le Mémoire de M. Bergman contient une favante Analyfe de l'indigo , des Réflexions fur PArt de l'em- ployer à la teinture & un nouveau procédé pour tein- dre les foies & les laines. M. Bergman regarde la partie bleue de l'indigo, qui ne forme réellement que la moitié de l'indigo ordinaire, comme une fubftance analogue à l'encre & au bleu de Prufle , dont le fer fait également la bafe , mais dans un état différent. Cen eft point aux alkalis volatils unis à la fecule bleue & diffipés enfuite , qu'il attribue la couleur verte qu'ont en fortant du bain les étoffes teintes par l'indigo, Eur BR PEU NA. TIC VE y mais à une furabondance de phlogiftique dont le plus ou moins de denfité peut ,sindépendamment de toute autre circonftance , faire parcourir à un même corps les différentes couleurs prifmatiques , & il croit que c'eft en furchargeant de phlogiftique les particules bleues de l'indigo, qu'on parvient à les atténuer au point de pouvoir les employer à la teinture. La méchode de teindre que M. Bergman propole ; & qui eft bonne pour la foie & fur-tout pour la laine, confifte à mêler dans l'eau une certaine proportion d’une diflolution de l'indigo par l'acide vitriolique très-concentré. L'indigo fe fépare de l'acide & s'unit avec l'étoffe , une feule partie d’indigo fuffit dans cette méthode pour teindre 260 parties d'etoffe du bleu le plus fonce. M. Bergman fe propofe de continuer & d'etendre des effais de ce genre, par lefquels on parviendroit à débar- raffer l'Art de la teinture d'une foule de procédés inutiles dont cet Art eft fi furchargé, qu'on ofe à peinepropoler de detruire, & qui multiplient les accidens & les dépenfes. CH 1 R:Ü.R:G I E Sur les Bandages élaffiques , par M. Geoffroi. Lss BANDAGES ÉLASTIQUES font, dans une maladie très-commune & très-dangereufe , un moyen d'éviter les dangers , de rendre l'état des malades très-fuppor- table , de mettre en état de travailler ceux à qui le travail eft néceflaire , ils font enfin dans plufieurs cir- conftances un moyen même curatif. Ceux qui ont été propofés jufqu'ici, avoient en général un inconvénient Deux Mémoires, Pages265j & 285, Page 730, ‘ dé conduire à des ré vj PARME NF AUC dE: très-ficheux , celui d’avoir une action inégale dans les différentes pofitions du corps, & même de deve- nir, dans plufeurs attitudes , abfolument incapables de contenir la hernie. C'eft à ces inconveniens que M. Geoffroi fe propole de remédier, une longue ex- périence , les confeils d'un Anatomifte célèbre qui l'a guidé dans la pratique, le mettoient à portée de bien connoître les maux auxquels il falloit remédier. Il ne fe flatte pas d'avoir évite tous les inconvéniens ; mais il fe borne à regarder fes nouveaux Bandages comme utiles dans un grand nombre de cas, & la méthode qu'il a fuivie pour les ne comme fufceptible ultats encore plus avantageux. HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX: Sur une Mouche du genre des Coups ; par M. de la Tourette. | Moucue décrite dans ce Mémoire préfente ; dans {à conftruction, quelques fingularités remarqua- bles. Un long aiguillon roulé en fpirale à fa bale dont la partie extérieure fe replie fur le dos , & qui cft fufceprible de s'alonger & de fe raccourcir, fert à l'animal pour creufer, dans les plantes, un logement deftiné à fes œufs ; ce mème aiguillon va enfuite chercher fur le dos de la mouche l'œuf qui, couvert d'une fubftance gluante , sv attache , l’aiguillon le porte enfin dans le lieu qui lui eft préparé. L'efpèce d'in- fecte, à laquelle cette Mouche reffemble le plus, cft celle des cinips. La différence la plus fenfible eft dans la grandeur ; elle eft de fix à fept lignes de longueur, PREFACE viÿ les cinips au contraire {ont très petits. Plufeurs le {ont aflez pour aller placer leurs œufs dans ceux des papillons dont l'œuf eft la nourriture du ver du ci- nips, Jufquà ce qu'il fe transforme en Mouche. On voit même de petits ichneumons percer les corps des pucerons , y placer leurs œufs , & enfuite un cinips dépofer le fien qui {e nourrit alors de l'œuf de l'ichneu- mon. Le corps d'un puceron eft un empire que deux conquérans fe difputent. Sur les Tubulaires de POcéan > par M. Mazéas. Un TROIS Mémoires renferment la defcription de plufieurs cfpèces de Tubulaires de l'Océan , & la comparaifon d'une de ces efpèces avec les Tubulaires obfervées par M. Ellis dans la Méditerranée. Toutes ces Tubulaires ont également un tube cartilagineux , & font attachées fur des rochers. Il étoit naturel de les regarder comme une même efpèce ,» & les diffé rences obfervées entr’elles comme des différences pu- rement accidentelles.. C’eft auf l'objection qu'on a faite à M. Mazéas, il y a répondu en multipliant {es obfervations , & il en réfulre que les différences qu'il a remarquées {ont réellement Communes à tous les individus des Tubulaires de l'Océan , pris dans tous les états de grofleur où il les à obfervés; & qu'ainfi elles fuifent pour établir une divifion d'efpèces. Trois Mémoires, Pagcs 299 , 309, 317e Page 329. Page 331. vii FRE LE, A MÈUE Sur une nouvelle efpèce d'Infe&e , par M. Quéronit. Es RAMASSANT les 'l'ubulaires de l'Océan , M. Mazéas remarqua , dans les fucus qu'on avoit tirés de la mer, un Infecte nouveau, mais il ne voulut pas in- terrompre fes obfervations; & M. de Quéronic, qui l'accompagnoit , fe chargea de décrire cet infecte. Il reflemble à la chenille arpenteufe, par la maniere dont il marche; d’ailleurs il fe rapproche beaucoup d’un Infeéte obfervé par M. Godcheu auprès de Céy- lan, & dont il eft fait mention dans le troifième volume des Mémoires des Savans Etrangers. Sur les Macreufes, par M. de la Fuille, Li ANCIENS ont cru que les Macreufes & d’autres oifeaux aquatiques étoient produits par des coquilla- ges auxquels on à même donné en conféquence le nom de conques anatifères. Obligés de fe borner aux relations , ou verbales, ou dépolées dans les manuf- crits obfcurs de Voyageurs peu inftruits & en très- petit nombre , les anciens Naturaliftes ne pouvoient connoître la critique , les faits les plus étranges paf- foient de bouche en bouche fans être contredits; d'ail- leurs , crop peu éclairés fur les loix de la Nature, ils ne pouvoient en ce genre oppoler la probabilité à un tmoignage poftif. Aufli les voit-on prefque tous rapporter du même ton les faits les plus fimples & les fables les plus étranges, Ferunr, on rapporte , ef la ; formule PR E F' A CT 1x formule qu'ils emploient également, & pour un évè- nement naturel , & pour un prodige. Mais, s'il ne doit pas être fingulier que la méta- morphofe des coquilles en oïleaux ait été rapportée comme tant d'autres, on doit être étonné que des Modernes même dans notre fiècle aient, finon adopté cette fable, du moins y aient fubftitué une opinion femblable & de la même nature. Selon eux, les co- quilles ne deviennent pas des Macreufes , mais les Macreufes dépolent leurs œufs dans les coquillages ; on avoit même été jufqua voir dans des coquillages non des oifeaux tout ins à la vérité, mais des commencemens d’oifeaux. Telle eft la fable que M. de la Faille entreprend de détruire, &, ce qui eft plus utile, il y joint une defcription détaillée des conques ‘anatifères. Ontrouve, dans cette Defcription , une des caufes de l'opinion que l'Auteur a combattue. L'animal que renferment ces coquillages , a une frange qui ne ref- femble pas mal à l'aile d'un oifeau qui na encore que du duvet; d'ailleurs les nids des Macreufes & des autres oifeaux de cette efpèce, font remplis de ces conques. Ces raïfons n'étoient pas fans doute fufñ- fantes pour faire croire qu'une huître devenoit un canard ; mais qui fait fi nos neveux ne nous repro- cheront pas d'avoir eu fur de moindres fondemens des opinions encore plus abfurdes ? LT Tome IX. | b Page 757: : RRÉFAEE MINÉRALOG LE, Sur des Os foffiles, par M. de la Tourette. Ces Os rossires paroiflent des dents molaires d'éle- phans. L'Auteur , après Jes avoir décrits, rapproche ce fait des faits femblables obferves par les Naturalifes. Il en réfulte que ces animaux actuellement répan: dus uniquement dans les pays chauds de l'Afie & de l'Afrique, ont cependant autrefois. dépofé leurs dé- pouilles dans le Nord de l'Europe , de l'Afñe.,. de l'Amérique. La même obfervation.a été faite fur les plantes dont on trouve les empreintes, fur les coquil- lages dont les débris ont formé d’immenfes carrieres;. ‘mais nous ne connoiflons point de faits dont on puifle conclure que les carrières des Pays de la Zonc- Torride nous offrent les dépouilles ou l'empreinte des animaux .ou des plantes du Nord. À la vérité l'Hif toire naturelle ne connoît prefque que le Nord. Quel ques nombreux que foient ces Os fofliles d'élephans trouves, en Europe, ils font en. petit. nombre, ils ne forment point de grandes mafless mais, en Sibérie, ils font très- communs, & c'eft là vraifemblablemenc que l'on trouvera: le moyen de: découvrir le myftere de leur origine. Tout annonce que la terre a. efluyé de grandes révolutions. lentes & aflujetties aux. loix générales qui gouvernent le monde; mais quelles ont, été ces révolutions, quelles font ces loix? C'eft ce qu'une nuit profonde cache encore, & vraifemblable- ment ce quelle cachera toujours , tant qu'un petit PREFACE. x] nombre de Philofophes obfervateurs, cachés dans un coin de la terre ; feront réduits à deviner l'hiftoire d'un globe dont ils n'ont encore à peine entreva que - la centième partie à une profondeur prefque infini- ment petite, Il viendra fans doute un temps oùla terre ne fera plus habitée que par des peuples libres, éclairés, liés entr'eux par l'intérêt comme par la Nature, & oùl'activite des hommes, fi long-temps &fi triftement employée à détruire ou à tourmenter leurs femblables , ne s'exercera plus que pour vaincre les obftacles que la Nature oppole à leurs progrès & à leur bonheur. GER TRNME MCE Sur l'Air fixe, par M. le Duc de Chaulnes: | nes ces deux Mémoires furent préfentés à l'Académie, ces différentes efpèces de fubitances ex- panfbles, qu'on nomme Airs ou gaz , étoient encore bien moins connues quelles ne le font aujourd’hui. L'acidité même de ce quon nomme Air fixe ; n'étoit pas généralement reconnue. La plupart des Chymiftes n avoient employé que l'Air fixe quile dégage des diflolutions des fubftances calcaires par les acides ; ce qui rendoit cet air plus difficile à fe procurer. Comme on favoit_ que celui qui fe dégage des fubftances qui fubiffent la fermentation fpiritueule , étoit de la même nature , M. le Duc de Chaulnes imagina qu il feroivplüs commode d'aller le chercher dans les cuves des braf- feries ; il obferva que cet Air occupoit toujours les cuves jufqu'à leur partie fupérieure, quelque füt la J Pages f21 & jÿre x1] PUR EE RANCE hauteur de la partie vuide , que plus pefant que l'Air ath- mofphérique & peu mifcible avec lui, il fe comportoit avec cet Air, comme une liqueur plus pefante que l'eau & peu mifcible avec elle fe comporteroit , fi on plaçoit dans l'eau des vales pleins de cette liqueur, qu'on les vuidèt, qu'on fit pañler la liqueur de l'un à l'autre. Mais l'Air fixe eft abfolument invifible; ainfi, prenant un bocal de verre où il n'y a rien, on peut y verfer l'Air fixe contenu dans un autre bocal où il nya rien, & , en verfant lentement & avec attention fans que l'œil puifle appercevoir aucun changement dans l'état des vaifleaux, on verra un oïifeau y mourir fubite- ment & la lumiere s'y éteindre. M. de Chaulnes dé- termine le rapport de la pefanteur de l'Air fixe à celle de l'Air commun, conftate par de nouvelles expéren- ces l'acidité de l'Air fixe, fa propriété de faire cryftal- lifer les alkalis; cherche la quantité d’Air fixe qu'ab- {orbe une quantité donnée d'alkali; il foumet enfuite à un examen fuivi les fels qui réfulrent de la combi- naifon de l'Air fixe avec les alkalis ; il obferve enfin qué l'Air, qui fe forme par la combultion du charbon, a, comme l'Air fixe, la propriété de faire cryftallifer ces mêmes fels. Un Chymifte avoit regarde l'Air fixe comme iden- tique, ou du moins comme très- analogue à l'acide marin volatil, c'efl-à-dire, aux vapeurs d'acide marin qu'on obtient en mêlant cet acide avec de l'huile & du fablon. M. de Chaulnes a fait, fur ces deux efpèces de fluides , une fuite d'expériences , qui conftatent que l'Air fixe diffère effenticllement de ces vapeurs d'acide marin. PR LEE TA € wii] Sur P Air fixe, par M. Bucquet. Dares ce Mémoire , antérieur de beaucoup aux dernieres recherches fur les gaz ou Airs, l'Auteur difcute plufeurs opinions de favans Chymiftes, & fait voir qu'il cft difhcile de les concilier avec des expé- riences nouvelles qu'il a faites; il montre, par exem- le, que l'abfence ou la préfence de l’Air fixe n’eft pas la fcule difference de la craie avec la chaux. Sur la Mine de fer fpathique, par M. Bayen: | Mine de fer fpathique ; examinée dans ce Mémoire , renferme du fer dans l'état métallique combiné avec-un tiers de fon poids de la fubftance acide qu'on nomme air fixe. Le fer y eft en général uni en une petite quantité de zinc que l'Auteur en fépare , en mettant la Mine dans une diflolution de vitriol de Mars & faifant évaporer lentement, on ob- tient alors une cryftallifation de vitriol de zinc. M. Bayen avoit obfervé , dansle: cours de fes ex= ériences, que l'air fixe a la propriété de faire cryftal- lifer les alkalis. . , Mo Ett Sur la Mine de plomb blanche; par M. Laborie. 1 PARTIES Nat er que M. ADO nn cd 4 eft blanche & cryftallifée, , ce qui lui donne quelque reflemblance avec le fpath. On ‘avoit cru que; dans Page 5630 Page 629, Page 441. Page 717° iv PUR EE MP AAC UE. ette Mine, le plomb étoir minéralifé par l'arfenic. Quelques. Chymiltes avoient avancé que l'acide marin y étoit le minéralitateur. M. Laborie réfute ces deux opinions ,,& prouve que, dans la Mine de plomb blanche de Poullawen, le plomb eft dans l’état mé- tallique ; mais combiné avec cette efpece de oaz connue fous le nom d'air fixe , combinaifon qui rentre dans l'ordre ordinaire des combinaifons chy= miques , fi l'air fixe eft réellement un acide. Cette opinion très-conteftée dans le temps où M. Laborie a écrit fon Mémoire, eft aujourd'hui prefque géne- ralement adoptée. Sur une Terretrouvée à Sarnte-Marie-aux- Mines } > par M. Monnier. O, rrouvA dans la Mine de Sainte-Marie-aux-Mines une Terre blanche, Iécere, affez femblable à une ar- gille peu compacte, & on la rejetta abfolument; la plus grande partie avoit été emportée par les eaux, lorfqu'un vieux Mineur, abfent depuis quelque temps, en ayant apperçu les reftes , témoiona fon regret, examina ces reltes & avertit le Directeur des Mines que cette Terre, inutile en apparence , étoit une Mine très-riche; il n'écoit plus temps, la veine qui contenoit cette Terre étoit cpuifce. Le Directeur en envoya quelques mor- ceaux à M. Monnet, qui en à fair une analyfe exaéte. Cette Mine eft de l'argent combiné avec l'acide ma- nu ; elle a toutes les propriétés de la Lune-cornée. On ÿ trouve un peu de fer diflous par le même acide, PREFTACE xy & même un peu de fer ou de chaux de fer non-com- binée. La Lune-cornée pure contiendroit 6o: livres d'argent par quintal, celle-ci: en donne conftaniment un peu plus de 0. On peut doné la regarder comme la vraie Mine d'argent cornée. Mine célebre dans les Ecrits dés Minéralogiftes Allemands, mais dont l'exif tance ctoit encore douteule. Sur la Zéolite, par M. Buücquer, Ï L RÉSULTE des expériences de M. Bucquet {ur 12 Zéolite ; que cette fubftance eft une terre paiticulière , fufceptible de fe cryftalli{er ; diffoluble dans les acides minéraux , formant avec eux des {els avec excès d'acide; Mais que, par des procédés chymiques, on rend parfaites Ment neutres; qu'elle diffère eflenticllement des terres calcaires, argilleufes , vitritiables , de la bafe de l'alun & des: chaux métalliques; qu'enfin clle paroît devoir fa folidité à la combinaifon de l'eau avec cette terre , combinaifon qu'un feu peu violent peut détruire; ce ui paroît prouver que la Zéolite n'eft pas un produit de volcan, & doit à l'eau {à formation, Sur la Cryflallifarion du an par M, de Morveau. Did Es toutes Îcs fubffances. minérales formes d'élémens femblables affectent des figures conftanres plus. ou, moins. régulières, lorfque: leurs élémens {e rapprochent avec. lenteur : & tranquillité, Cette pro Priété qu'ona; reconnue. de tout temps. fur les {els & f Page 570, Page fr3, xv) PNROE CF ACTE dans un grand nombre de pierres, eft moins fenfible dans les autres corps. Le régule étoilé d’antimoine a été long-remps la {eule Cryftallifation métallique qu'on connûr. Depuis quelque temps on a fait fur cer objet des découvertes importantes. M. de Morveau donne ici les obfervations qu'il a faites fur des Cryftallifations de fer. Ces Cryftallifations font les mêmes, & quelques fondans qu'on emploie pour la fufion , & quelque efpèce de fer qu'on choififle : obfervation qui confirme l'identité de ce metal. Les différentes formes fous lef- quelles il fe préfente fans qu'on puifle quelquefois le ramener de l’une à l'autre, avoient jeté quelques doutes fur cet objet, fur-tout dans les elprits qui favent que les regles auxquelles nous donnons le nom impofant de Loix de la Nature font notre ouvrage, & qu'elle ofe quelquefois {e difpenfer de les fuivre. Sur les combinaifons falines de l Arfenic ; par M. Bucquer. Deux Mémoires, ue de M. Bucquet, dans ces deux Mémoires ; PSS 65 0% Croit d'examiner Îes phénomènes que préfenteroient les combinaifons de l'Arfenic avec les acides. Les trois acides minéraux & les deux acides végétaux tirés du raifin ont été ceux qu'il a choifis. L'acide nitreux , l'acide marin & la crême de tartre {ont les feuls qui contractent , foit avec l’Arfe- nic , foit avec fon régule, une véritable combinaifon;: dans l'ordre où nous venons de les nommer. M. Bucquer avoit préfenté ces Mémoires long-temps avant PORAENErLA CE xVij avant d'être admis à l'Académie , & à peine avoit-elle couronne fes travaux qu'une mort prématurée l’a en- leves à fes Confreres qui l’aimoient , aux Sciences dent il eût hâté les progrès , à l'humanité qu'il eût fervie. Sur les Eaux fulfureufes de Montmorena. | pti de foie de foufre que répandent ces Eaux, la couleur de la pellicule qui les couvre , annonçoïient des Eaux fulfureufes. M. Veillard en donne ici une analyle exacte. Il y a trouvé des fels vitrioliques en petite dofe, mais ilna pu d'abord en retirer du foufre. Si on puile l'Eau à la fin de l'été , on y trouve une petite quan- tite de fel ammoniac fourni par la décompofition des feuilles & des plantes qui ont féjourne dans l'Eau. Un fel grimpant qui s'attache à des bois que baigne l'Eau de la fource , s’eft trouvé être de l'alun mafque par des matières extractives. Le dépôt de ces Eaux contient du foufre. M. Veillard a fait nettoyer la fontaine, &, en prenant l'Eau plus haut, il a trouvé que le dépôt qu'elle formoit dans les vafes non-bouchés contenoit du foufre précifément comme celui que plus loin elle avoit formé dans le canal. Cette Eau contient donc réellement du foufre en diflolution, mais la préfence de l'air & la chaleur de l'athmofphere {uffifent pour l'en féparer. 1 AR UTESS: Sur les Mines de Norwège, par M. Jars. 1 OR EUR donne, dans ce Mémoire, la defcription . , \ des Mines d'argent de Konsberg en Norwege. Ces Tome IX. C Page 673. Page 551, Page 495. XVI] PRE EL AC Mines ne renferment que de l'argent natif prefque pur, puifqu'il eft au vitre de 11 deniers 10 grains au moins. Cet argent eft tantôt en grande mafle, tantôt en filets , tantôt en fils raflemblés comme par paquets , tantôt en lames , tantôt enfin diffléminc dans les fubftances qui l'entourent en parcelles prefque in- fenfibles. Un feul morceau a rendu près de 400 marcs, & of en trouve un fecond dans le Cabinet du Roi de Danen:arck dont on cftime 15000 liv. la valeur en efpeces. Aux détails fur les Mines de Norwège, M. Jars en a joint fur l'adminiftration politique des Mines de Norwève. Elles ont été ouvertes il y a plufieurs fiècles , & la légiflation fe {ent un peu du temps où elle a été établie; par exemple, les Habitans compris dans l'ar- rondiflement de ces Mines, font obliges de vendre le bois néceflaire à leur exploitation à un prix fixe par le Confeil des Mines, & ne peuvent en vendre que la Mine n'ait la quantité néceflaire. Le Confeil des Mines taxe les denrées deftinées à la confommation des Mineurs. On fait aujourd'hui que de pareils régle- mens font contraires à la Juftice , parce qu'ils atta- de la propriete, & que, fans même examiner une oule d'autres raifons , celle-ci fufhroit feule pour les faire profcrire. Sur des Forces de Fer fituées en Bretagne ; par M. Duhamel. HE Fer le plus commun , & jufqu'ici le plus utile des métaux , offre des fingularités particulieres. Depuis l'état de chaux jufqu'a celui où il atteint la perfe&ion PRE AA NC Fe xix métallique, il fe préfente dans une foule d'états difé- rens, comme nous l'avons dejà obfervé. Le pañage de l'un à l'autre, eft fouvent difficile par les moyens connus, & ni la même Mine différemment traitée, ni les Mines différentes traitées de la même maniere, ne donnent la même efpèce de Fer. Les détails des différens procédés ufités dans les Forges font donc très-importans. M. Duhamel décrit ici celles de la Nouée & des Salles en Bretagne, il montre quels font les procédés les plus défectueux , il indique les moyens de les corriger. Ces détails devien- nent d'autant plus importans , que tant que les Arts ne peuvent être dirigés par une théorie certaine , c'eft une longue fuite d'obfervations ifolées qui forme l'Art, & que la comparaifon des différentes méthodes qui fervent au même Art, font le feul moyen d'en éclairer la pratique. On a effayé de faire des canons avec le Fer des Mines de la Salle, cet effai n'a pas réufh. M. Duha- mel en donne les raifons, & indique les moyens qu'on pourroit prendre pour y réufhr & pour perfectionner en général l'Art de faire les canons de fer; il obferve EXP la caufe d'une défeuofité fréquente dans les boulets, & offre un moyen fimple & ingénieux d'y remédier. Sur la Mine de Plomb d'Helgoat, par le méme. 1 EN Mine de Plomb d'Helgoat eft placec dans une montagne graniteufc, & elle renferme des flons de Mine dont jufqu'à quatre cens cinquante picds de 7. Pagé 711, Page 481, xx PARENT NC EE; rofondeur , dernier terme où l'on ait fouille , le toit & le mur d'un côté font des galets femblables aux galets roulés que la mer laifle {ur fes bords. Le toit de ces galets cit incliné quelquefois de 70 degrés à l'horizon, & on n'en trouve aucun dans le filon même. L'Auteur n'entreprend point d'expliquer ce phénomène. M. Duhamel remarqua, dans le filon , une terre noi- râtre & une terre ocreufe qu'on négligcoit dans l'ex- ploitation. Il les examina , il trouva que toutes deux contenoient du Plomb & de l'argent; depuis ce temps, les propriétaires des Mines ont cefle de les négliger. Sur les différentes graiffes du Verre, par M. d'Antick. O: ENTEND paf graifle du Verre différens défauts qui en altèrent la tranfparence & la couleur, & qui fe trouvent fouvent dans les Verres blancs & dans les glaces foufflées, les Verres verts & les glaces coulées en font exempts. M. d'Antick trouve fa caufe de ce défaut dans les fels neutres ; tels que le tartre vitriolé, le {el marin, qui fe trouvent mélés aux alkalis employés dans la fabrication du Verre. Ces {els en cflet fe trouvent exilter encore en nature dans les Verres fort gras, & on les fépare en partie par les lotions. Le Verre où l'on a fait entrer des alkalis mélés de ces fels, ne font exempts de graifle que lorfque , foit par la force du feu, foit par la proportion d'alkali & de fable, foir par l'addition des matières qui contiennent du phlo- giftique , ces acides ont été chaflés en entier. PR PEN GA :C "E) xx] La caufc du mal étant connue, les remèdes {ont indiqués; mais il falloit en trouver qui ne fuflent pas difpendicux & ne produififfent pas de nouveaux in- convéniens. Le charbon, par exemple, détruit les graifles, en facilitant l'expulfion des acides, mais il produit fouvent des bulles, M. d’Antick propofe deux moyens , l'un eft une méthode fimple de purifier les alkalis d'une maniere fufifante, l’autre eft l'addition d’une certaine quan- tité de chaux. Sur la purification du Camphre, par M. de Bomare. UOIQU on trouvât dans les livres de Chymie dif- férens procédés pour raffiner le Camphre par fublima- tion , on doutoit encore fi cette opération ne fe faifoit point par voie de fufion. M. de Bomare , dans fon voyage de Hollande , entra dans une raffinerie, &, du premier coup-d'œil, il vit qu'il ne pouvoit y avoir de doute, A fon retour cependant il crut devoir répéter le procédé qu'il avoit deviné, & le fuccès de fes ex- périences a été complet. AONIRA LV CISUNE, Sur les fonéhons arbitraires, par M. Monge. ‘oser de M. Monge, dans ce Mémoire, eft la détermination des fonctions arbitraires qui entrent dans les intégrales des équations aux différences finies. La forme de ces arbitraires étoit connue pour le cas où l’une des différences étoit conftante. M. Monge la donne ici pour différentes autres hypothèles; mais Page 470, Page 3454 taxi) PUR MEME ACTE) l'intégrale une fois trouvée , ainfi que la forme de la fonction arbitraire qui y rentre , il relte à déterminer cette fonction d’après les conditions par- ticulieres de chaque problème, M. Monge démontre d'abord que, fi ces conditions fe bornent à fatisfaire à un nombre fini de valeurs, ou en regardant une courbe comme le lieu de l'équation, fi elle eft feu- lement aflujétie à pañler par un nombre de points fini, l'intégrale n'eft pas déterminée; il prouve enfuits que ce doit être ou à un nombre infini de valeurs particulieres prifes entre certaines limites, ou à une portion de courbe que l'équation doit fatisfaire. Il montre comment, d'après ces conditions , on peut conf- truire l'intégrale cherchée, & il en tire cette confe- quence génerale, que comme une équation aux dif- férences partielles repréfente toutes les furfaces cour- bes qui ont une même formation, une équation aux différences finies reprefente toutes les courbes planes qui ont aufli la même formation. Comme les fonctions arbitraires qui entrent dans les intégrales des équationsaux différences finies, ne font pas rigoureufementarbitraires, maisaflujeties à certainescon- ditions, il paroït paradoxal de dire qu'elles peuvent, pour un Le fini de valeurs prifes à des points quelconques , fatisfaire à telle équation qu'on voudra. Cependant, en réfléchiflant fur la nature de ces conditions, on verra qu'elles ne font abfolues que dans le cas où l'on voudroit conferver la loi de continuité dans toute la fuite des valeurs d'une indéterminée , ou dans toute la courbe qui en eft {e lieu. Dans le cas où l'on renon- ceroit à la loi de continuité, ces conditions ceflent PAR) ER A CA EME, xt d'être néceffaires ; ainfi, l'on peut déterminer à vo- Jonte , ou une fuite de vdleurs pour un cfpace fini, ow une partie finie de la courbe. G'ÉIO M É TR TE Sur les furfaces développables, par le méme: . MoxGE donne ici la condition générale à laquelle doit être aflujétie l'équation d'une furface courbe, pour que cette furface foit développable fur un plan. Ce Problème avoit déjà été réfolu par M. Euler , mais M. Monge le réfout ici d'une ma- nière plus complète. Ses confidérations fur ce genre de furfaces le conduifent enfuite à l'intégration , à la conftruétion & à la determination des arbitraires dans dés équations aux differences partielles, dont, fans ces confidérations géométriques, il eût été difficile de donner une analyfe aufli complète. Une furface développable eft déterminée par la condition qu'elle doit pafler par deux courbes à double courbure, ou que toutes les lignes droites qui la forment , doivent être tangentes à deux furfaces données; & M. Monge montre que le problème le plus général qu'on puiile propoler fur la détermination des ombres & des pénombres, dépend de la folution de ce problème : deux furfaces courbes étant données , trouver la fur- face développable qui touche les deux furfaces dans tous les points communs qu'ils ont avec elles. On nomme furfaces gauches, les furfaces engendrées par le mouvement d'une ligne droite. Toutes les furfaces 1 (o) . développables font donc des furfaces sauches , mais tous Page 382, XIV P3R$ E Fr ANCNE, les corps gauches n'ont pas des furfaces développables. M. Monge montre quelles font les conditions ana- lytiques communes aux furfaces développables & à celles des corps gauches, & quelle eft celle qui fait en- fuite que la furface d’un corps gauche eft developpable. Sur les furfaces courbes, par M. de Tinfeau. Deux Mémoires, ke premIER Mémoire de M. de Tinfeau eft deftiné pags 593» 625: 7 chercher les formules analytiques, qui donnent les équations de dificrens problèmes fur les furfaces cour- bes, ou fur les courbes à doubles courbures, telle eft la détermination de leurs tangentes , de leurs points finguliers, l'expreflion des élémens de la furface, de la folidité, de l'efpace enfermé par les lignes à double courbure , &c. | On. y remarque fur les plans un Théorème fyn- thétique analogue à celui du quarré de l'hypothénule oO D 7 $ pour les lignes, & qui donne l'élément des furfaces | courbes , comme celui de Pythagore donne l'élément | des courbes; un autre Theorème très-fimple enfeione ÿ à trouver fur un cône des furfaces quarrables, | Dans le fecond Mémoire, M. de Tinfeau examine d'autres problêmes relatifs aux furfaces gauches; il y développe quelques proprietes fingulières d’un corps qu'il nomme paralléloïde, & qui eft engendré par le mouvement parallele d'une ligne droite qui fuit deux courbes données. toc dé ANALYSE ANALYSE EXAMEN CHIMIQUE DE L’'IN DIGO, TEL QU'IL EST DANS LE COMMERCE POUR L'USAGE DE LA TEINTURE. Par M QUATREMERE DIJONVAL, Ecuyer, Entrepreneur de lancienne Manufatture Royale & privilégie des Draps de Paignon, à Sedan. dr te à TE PR: TUE AMEL à ns 1 - « É » : Fu Le PA) à à CROP RES TS y a) Le tISERAIL TS \£ 444 dra AM ne: Ï FR SUR 5 LUE ROLE AE 4 du % / te À il ANALYSE EXAMEN CHIMIQUE DE LIN DIGO, TEL QU'IL EST DANS LE COMMERCE POUR L'USAGE DE LA TEINTURE. Di St Vincant, queis Neptune dedifii , Quanquam 68 . . . . . . + + . . DD D:rvr s qu'on a tenté d'appliquer les Sciences aux diffé- rens Ârts qui pouvoient leur correfpondre, il n’en eft prefque point auquel cette époque n'ait valu les progrès les plus ra- pides. Réforme d'abus dangereux, procédés plus sûrs, ma- nœuvres moins pénibles , économie immenfe fur les frais; tels font les fuccès prefque magiques que les Arts doivent aux Sciences; tels font les fervices fignalés qu'ils doivent à tant A i FM.Macquer. 4 ANALYSE d'hommes de génie, qui sy font dévoués fur-tout depuis un fiécle. La teinture fi digne, par fon utilité, de participer à cette noble émulation qui enflammoit les Savans en faveur des Arts : la teinture liée d’ailleurs d’une maniere fi intime, avec cette partie dela Phyfique( 1), quia peut-être le mieux mérité des hommes, eft cependant celui de tous qui a fait le moins de progrès, & à peine fort-il de l'enfance. Les Savans auroient-ils donc méconnu fon utilité, ou ne lui auroient-ils réfervé qu'une attention médiocre & de foibles efforts? Non fans doute ; des hommes.pleins de lumiere, & fur-tout verfés dans toutes les connoiflances analogues à cet Art, ont tenté plufieurs fois d'en éclairer la marche ; ils fe fonc tranfportés dans les atreliers, ils ont abordé les Artiftes; mais tel a été, & tel fera toujours le fort des Savans les plus zélés en pénétrant dans les arreliers de teinture : ils feront prefque toujours reçus par la duplicité ou le myftere. La plupart des Teinturiers de- vant où croyant devoir leur fortune à des recettes particulie- res, il n’eft peut-être point de profeflion plus dévouée à la manie des fecrets, aux bafles impreflions de l'intéréc per- fonnel. Je ne mets pas cependant au rang de ces efforts infruétueux, l'art de la teinture en laine par le célèbre M. Hellot, ainf que celui qui a été fait depuis fur la teincure en foie, ou- vrage également digne de fon illuftre Auteur *, & bien fait pour étre comparé à tous ceux dont il a enrichi la Chimie françoife. Mais, comme le dit cet Auteur lui-même dans la préface de fon ouvrage fur les foies, pour que la teinture püc recevoir des Sciences & du Génie, tous les fecours qu'elle à droit d’en attendre, il faudroit que les barrieres qui feparent les Teinturiers d’éroffes ou d'objets difiérens, puflenc être. détruites pour un moment; que ces Artiftes puflent s'entendre, our donner un réfulrat comparé de leurs travaux; ou au moins, il faudroit qu'un Savanc füt aflez heureux pour pé- nétrer non pas un feul atrelier, ou des atteliers d'un même (1) La Chimie. DA LAN ID G O. $ genre, mais tous les atteliers de teinture poflibles, & qu'il pûr y obferver comparément tous les différens moyens d’em- ployer une même drogue felon la différence des fubftances & des étoffes. Ce feroic fans doute le vrai moyen d’applanir toutes les difficultés dont eft femé l’art de teindre, de réfou- dre cette multitude de problèmes qui défolent les Artiftes au milieu de tous leurs fecrets, & qui les font bien fouvent re- pentir de ce filence qu'une folle crainte leur impofe. S'il eft une partie dans la teinture encore plus femée d’épines que toutes les autres, & à laquelle un pareil Obfervateur auroit pu rendre les plus grands fervices, c'eft fans contredit la tein- ture du bleu, ou l'emploi de l'indigo. C'eft fans doute aufli ce qui a fixé les regards de ces hommes vraiment citoyens, qui propofent aujourd'hui la récompenfe la plus flatteufe, à celui qui aura donné les meilleures obfervations fur lindigo & fon emploi. Placé depuis mon plus bas âge dans l'atelier de la France où lon confomme peut-être une plus grande quantité d'indigo, j'oferai difputer la Couronne, ou plutôt je rendrai compte de ce que j'ai vu,à,ces citoyens zelés qui mele de- mandent par l'organe le plus refpeétable. Des mains exer- cées depuis un plus grand nombre d'années dans les manipula- tions délicates de la’ chimie, auront peut - être travaillé avec plus d’arc.& plus de fuccès, mais sûrement aucun de mes ri- vaux ne fera entré dans la carriere, avec un cœur plus de- fintérefle , plus zélé pour le progrès des Arts, plus dévoué au bien de fon pays. - D'ailleurs jofe dire que je n'ai épargné aucun des moyens qui pouvoient étendre mes conhoiflances fur l'objer & la ma- ere du prix. Deéfirant connoitre plus à fond l’indigo en lui- même, & confidéré avant tous les procédés de la teinture, j'ai parcouru toutes les Villes maritimes, & toës ceux de nos Ports qui fervent comme d’entrepôt à cette marchandile pré- cicufe. J'ai eu le bonheur d'y trouver plufieurs anciens habitäns des Colonies, & qui avoient même gouverné des Indigoteries en perfonne, J'ai donc été à portée de conférer avec eux de 6 A NCAYL Y S'E mes conjeétures, de mes projets, & j'y ai puifé prefqu'autant de connoïflances, que fi javois pafle les mers, pour aller ob- ferver les Indigoteries elles-mêmes. Également jaloux de comparer tous les procédés de teinture ufités dans les autres Villes, à ceux dont j'étois témoins dès mon enfance, j'ofe dire qu'il n’eft aucune Ville de manufac- ture, ni aucun attelier un peu intéreflant dans ces mêmes Villes, où je n'aie été puifer de nouvelles lumieres, & ob- ferver les différents procédés. J'efpere donc ne pouvoir être démenti par perfonne , lorfque j'avancerai que tel inconvé- nient eft général, que tel préjugé eft univerfel , & je puis aflu- rer qu'avant de propofer des changemens ou des remedes, j'ai été à portée d’obferver tous les abus. Cet Ouvrage excédera peut-être les bornes ordinaires des Mémoires qu'on préfente à l'Académie; mais la nouveauté de la matiere, ma pofition , & fur-tout mes voyages, mont obligé d’embraffer un plan plus étendu que je n’aurois d’abord cru moi-même, D'ailleurs mes Juges aufli animés qu'ils le font de l'amour des Arts & du bien public, me pardonne- ront fans doute aïfément, de n'avoir pu facrifier aucune des réflexions que j'ai cru pouvoir étre utiles. Je donnerai dans ma premiere partie un précis des opé- rations fondamentales de l'Indigoterie, qui offrent elles-mêmes de fi beaux phénomenes au Phyficien, & qui d’ailleurs font fi étroitement liées avec les changemens que je propoferai peu après. Je donnerai dans cette même partie, l'Analyfe chimique de lindigo , auquel j'ai tâché d'appliquer tous les moyens analytiques, & tous les menftrues , qui font comme les agens de la Chimie; je la terminerai par des obfervations qui concernent&encore l'Indigo en lui-même, & abftraction faice de tous les procédés de la teinture. Tous ceux qui exercent l’art de teindre, étant, fi jofe dire, des Chimiftes formés par la nature, & tous leurs procédés leur ayant été diétés par une efpece d’Analyfe naturelle, j'ai cru DE 2LYIMNIDI SG O. > devoir donner dans ma feconde partie un tableau comparé de toutes les combinaïfons par lefquelles of applique lIndigo à la teinture des foies, de la plus grande partie des cottons & des laines. J’aurois cru n'offtir qu'un tableau incomplet, fi je m'etois borné dans cet ouvrage à parler uniquement des pro- cédés de la teinture en laine; & fi je n'avois donné , avant tout, un court expolé de ceux-ci, j'aurois été inintelligible , lorfque Jaurois parlé des accidens qu'on y éprouve. C'eft le détail de ces accidens, & toutes les expériences que j'ai faices pour y remédier, qui rempliront la troifieme & derniere partie. Quelques perfonnes trouveront peut-être que jy parle d’une maniere bien aflurée, fur des faits aufli finguliers & auf problématiques : mais j'ofe aflurer que je n’avancerai tien qui ne m'ait été confirmé pat une multitude d'expériences, & je crois pouvoir offrir de les renouveller fous les Yeux de cels Commiflaires qu'il plairoit à l'Académie de nommer, £ ANALYSE | À Na Euudoas dau Et Ed EXAMEN CHIMIQUE DE L’'INDIG O0. Exoico FERE, Anil, & Indigo, font trois noms communs au végétal, dont on extrait cette fubftance colorante & folide, connue dans le commerce fous le nom d’/xd;90. On en dif- tingue de deux fortes à Saint-Domingue, & dans les Colo- nies voifines, qui font celles d’où nous vient la plus grande artie de nos Indigos. L'Indigo franc eft une efpèce d'arbufte aflez femblable à celui qu'on connoît en France fous le nom de Genet; il eft aflez touffu, séleve environ à trois pieds & demi, porte un feuillage crès-verd, & qui dégage une odeur aflez pénétrante, lorfqu'il touche à fa maturité. L'Indigo bâtard ne differe du premier que par fa hauteur qui eft beaucoup lus confidérable, & qui s'élève jufqu’à fix pieds, par une feuille moins large; mais plus longue, & par une fouche beaucoup plus forte. Ces deux efpeces fe plantent également à l'entrée de la belle faifon, & lorfqu'on à lieu d'attendre des pluies douces, qui favorifenc beaucoup la levée de la plantule. L'Indigo bâtard, & fur-tout l'Indigo franc , font au plus trois mois à prendre l’accroiflement qui leur eft néceflaire, & à donner tous les fignes de la maturité, On profite alors des premiers jours favorables pour commencer la premiere coupe ; mais on a l'attention de n'attaquer la tige qu'à un pouce D'Æ LAN DIE Oo. ; pouce & demi ou deux pouces de terre, attendu qu’on def- tine cette petite fouche à produire des rejettons qui doivent faire eux-mêmes la matiere d’une nouvelle coupe, au bout de fix femaines. L’Indico , dans le moment même où il vient d'être coupe, & où il n'eft encore qu'une herbe, eft déjà fi difpofé à la fermentation, qu'il s’échauffe & prendroit feu, fi on le laïfloit quelque temps en bottes ou en monceau. On n'épargne donc aucun des moyens qui peuvent accélérer le tranfport de cette herbe dans la cuve, & on prévient au- tant quil eft poflible les commencemens même de cette fermentation fpontanée, attendu qu'elle fait le plus grand tort au refte des opérations. C’eft fans doute cette difpoñition fi marquée à la fermen- tation fpiricueufe, qui a engagé les premiers Oblervateurs à la favorifer par des vaiffleaux convenables, & par l'addition d'une certaine quantité d'eau. On a remarqué pour lors que cette fermentation, en tout femblable à la fermentation vi- neufe , développoit comme celle-ci les parties généreufes de lIndigo, chafloit les atomes colorans hors de leur enveloppe, & en chargeoïit l’eau ajoutée pour la macération ; mais l'expé- rience a démontré en même temps que ce produit coloré ; cet extrait précieux , après un certain degré de fermentation , dé- veloppoit avec la plus grande promptitude tous les fymp- tômes alkalefcens, & qu'une fois réduit à l'état putride, on ne pouvoit plus en tirer aucun parti. On a donc cherché les moyens de prolonger la fermentation fpiritueufe tout le temps néceffaire , fans amener cependant la fermentation pu- tride. Un mouvement rapide & continu a paru le plus pro- pre de rous à remplir cet objer délicat ; 1l écoit de plus le feul qui püt donner la confiftance néceflaire à l'extrait : c'eft ce qui a engagé à faire fuivre le procédé de la fermentation fpiri- tneufe par celui du battage. La décantation & le repos étant les feuls moyens de faire pafler un extrait de cette nature à une confiftance folide ; c’eft ce dont on a cru devoir s’occuper dans les dernieres manipulations, & c’eft ce qui termine le travail. Tome IX. B 10 ANALYSE Telle eft Ja théorie, qui fert de fondement à tout ce quife pratique dans la fabrication de lIndigo, & telles fonc les loix de ce beau travail qui s'exécute par l'appareil fuivant. Dans un attelier couvert, ou au moins abrité des princi- palesinjures du temps, on difpofe crois cuves compofées d’une maçonnerie folide en amphithéâtre, & de maniere qu'elles puillent étre vuidées les unes dans les autres. La première qui fe nomme /a trempoire, & dont la forme eft ordinairement quarrce , eft celle dans laquelle on jette l'herbe , aufli - tôt qu'elle vient d’être coupée. Lorfque la cuve eft chargée , on y introduit une quantité d’eau fuffifante pour la remplit à fix pouces des bords, & on étend fur le tout des paliflades de bois, furmontées de deux autres pieces de bois tranfver- fales, qui fervent à les affermir, Celles-ci font arrêtées à quatre poteaux perpendiculaires au fol, fcellés en terre contre les parois de la cuve, & qui portent le nom de clefs. Ces préparatifs ne font pas plutôt achevés, que la fer- mentation sannonce par une prodigieufe quantité d'air qui fe dégage avec bruit , & par une multitude de grofles bulles qui {e fuccédent. Toute l’eau qui furnage à la fuperficie de la cuve, prend en même temps une teinture verte très-caraété: rifée. Lorfque la couleur verte eft au plus haut point d'in tenfité, on doit juger que la fermentation eft également dans fon plus foit, & d'ailleurs tout le manifefte. Les bulles d’air qui fc dégagoient d’abord font remplacées par des flots d’écume, qui sélevent & retombent précipitamment dans la cuve. Le bouillonnement eft même fouvent d'une telle violence, qu'il brife is palliffades , & arrache ces poteaux fcellés en terre , auxquels nous avons donné le nom de clefs. Une chofe bien digne de remarque, c'eft que toute cetre écume eft inflammable, & que l'inflammation sy communique d'une LE tout aufli rapide que dans l'efprit - de- vin, où éther. Il ny a point de régle fixe pour la durée de cette fer: Mentation, Une infinité de circonftances peuvent forcer à la D'EPLMANED LG O: a prolonger ou à la fufpendre, mais elle ne doit jamais durer moins de dix à douze heures. Lorfque l'Indigotier reconnoîc par tous les fignes accoutumés, que la fermentation eft aflez avancée, & que les atômes colorans commencent à fe réunir, il faifit ce moment pour couler tout l'extrait dans la feconde cuve, quon nomme la barterie , & qui cft à-peu-près fem- blable à la premiere dans toutes fes dimenfions. On com- mence aufli-côc l'opération du battage, qui fe fait par le moyen d'inftrumens nommés /uquets. Ceux-ci font des ef peces d’écoppes fans fond, emmanchés à des bâtons de moyenne grofleur , mais longs de dix à douze pieds, & qu’on appuie fur les bords de la batterie, de maniere qu'ils puiflenc être agités fans cefle de haut en bas. Quatre nègres qui frap- pent fans cefle la fuperficie de la liqueur avec ces inftru- mens, excitent de nouveau une écume confidérable, & qui va quelquefois jufqu’à géner le coup des buquets; mais il y a plufieurs moyens très-fimples de diffiper, ou au moins de modérer cette écumexOn fent, comme je l'ai dit plus haut, qu'un mouvement auf rapide prolonge tous les avantages de la fermentation, fans permettre à l'extrait de tourner à l’état purride; il eft clair de plus qu'une agitation pareille favo- rife l’aggrégation des parties, qu’elle raflemble les molécules colorantes fi divifées dans l’eau de la premiere cuve, & qu’elle forme peu-à-peu ce petit grain regardé par les Indigotiers comme l'élément de la fécule. » Il n'y a point encore d'époque fixe pour arrêter le bat- tage, & ceft uniquement lorfque la fermentation du grain eft bien décidée, qu'on doit le fufpendre. On le recon- noît encore lorfque la couleur de l'extrait, fi verte avant le battage, devient d'un bleu aflez carattérifé. On fe garde bien de le couler alors précipitamment dans la troïfieme cuve: on laifle, au contraire, le tout en repos au moins l'efpace de deux heures. Pendant cet intervalle, la partie jaunâtre qui Ctoit un des principes de la couleur verte, & qui ternit gncore la vivacitt du bleu, fe fépare de la fécule, la laifle Bi 12 PUINATEV STE précipiter au fond de la batterie, & furnage à la partie fu- périeure de l'extrait, auquel elle donne une teinte dorée. C'eft lorfque cette précipitation paroît bien accomplie, qu'on com- mence à décanter dans la troifieme cuve. Celle-ci fe nomme baffinot où diablotin , & au lieu de trois ouvertures ou robi- ners que porte la batterie, elle en a une feule à fon extrémité, qui doit aboutir à quelque ruifleau ou à quelque fofle perdue. On commence par ouvrir le robinet fupérieur de la batterie, & on laifle cette eau, après qu'elle eft tombée dans le dia- blotin, fe perdre & s’écouler dans la campagne. On en fait autant de l'eau qui s'échappe enfuite par le robinet placé un peu au-deflous. La fécule, après ces deux décantacions, fe trouve prefqu'à fec: on étanche encore autant qu'il eft pof- fible, le peu d’eau fuperflue qui peut y refter; après quoi, on lâche le dernier des trois robinets, & on y recueille précieu- fement la fecule qui eft d’une confiftance à demi-fluide. Comme un plus long féjour dans cette cuve n’ajouteroit rien à la perfeétion de l'Indigo , on ne tarde guere à le re- tirer du diablotin. On introduit alors cette efpece de vafe dans des chaufles de toile, qu'on fufpend les unes à côté des autres. L'Indigo sy defleche de plus en plus. Lorfqu'il eft prefqu'à l'état de pâte, on le coule fur des caïfles quarrées, dont le rebord à environ deux pouces & demi, & on laifle d’abord ces caifles à l'ombre fous des hangards, qu'on nomme fecheries, ou bien on les expofe à l'air libre, mais avanc la grande ardeur du foleil. Peu-à-peu on les expofe à une chaleur plus vive, & à un foleil plus ardent. Lorfqu'enfin on sapper- çoit que cette pâte eft parvenue au point de deffication defiré, on la divife en parties, de la grofleur & de la forme connues dans le commerce. Tout le monde fait que cette forme appro- che afiez d'un cube exaét, portant deux pouces ou un peu plus fur fes faces. Après avoir laïfle ces cubes, qu'on nomme alors pierres d’Indivo , {e refluyer encore quelque tems à l'ombre des hangards, elles n’ont plus aucune façon à recevoir, & on peut de ce moment les mettre en futaille. DE LINDIGO. xs Pour pérerminer la nature des parties intégrantes de l’'In- digo, & connoïître d’abord la quantité de matiere huileufe qu'il contenoit, j'ai diftille dans une cornue de verre luttée, quatre onces du plus bel Indigo connu; il a pañfé de l’eau odo- rante, de lefprit alkali volatil, de l'huile verdâtre empyreuma- tique, dont une partie étoit pefante, & l’autre légere : le réfidu de la diftiilation étoit noir & fpongieux, & pefoit deux onces quatre gros & demi. Produits de la difillation de quatre onces d’Indipo. onces. gros. EPA tAIRAN VOIE ER NUM AUEL US Le 2 ÉMAMÉCCTe ee eue MES" AS Hiulé pente, ue té. MATE NRC EU le 2 I 3 RD MR EUR 0e ee elmpie sale à 4 LA NON CROSS TA TE PR PTT OR . Il s'eft perdu durant cette opération fix gros de matiere, dont la plus grande partie m'a paru étre de l'air ; ce que jai re- connu par l'appareil chimicopneumatique de Hales. Le réfidu de la diftillation de l'Indigo ayant été expofé au feu pour être convetti en cendres, ne seft incinéré que très- difficilement, & ces deux onces quatre gros de charbon n'ont fourni après cette opération que trois gros de cendres grisâtres, qui ne failoient pas effervefcence avec les acides ; l'efprit de nitre ver{e fur ces cendres leur a fait prendre une couleur brune. Les cendres de l'Indigo contiennent du fer attirable par laimant. 14 ANALYSE J'ai diftillé une partie de ces cendres d’Indigo avec fix par: ties de fel ammoniac; il ne s'eft dégagé que quelques gouttes d'alkali volatil ; le fel ammoniac, qui s’eft fublime dans le col de la cornue , avoit une couleur jaune; le rélidu étoit d’un gris blanchitre. J'ai difous le fel ammoniac coloré dans de l'eau diftillée ; Jen ai féparé le fer en verfant dans cette diflolution de l'al- kali fixe du tartre. La couleur bleue de lIndiso n’eft pas altérable par l'acide vitriolique, ni par l'acide marin. Lorfqu'on verfe l'un ou l’autre de ces acides fur lIndigo en poudre , ils font une lé- gere effervefcence ; il n’en eft pas de même de l'efprit de nitre qui décompofe la couleur bleue avec la plus forte ef- fervefcence. J'ai verfé une once d'acide nitreux précipité fur, deux gros d'Indigo en poudre; le mélange s’eft prodigieufement bour- foufflé, & a pris une couleur d’un rouge framboife : la pâte qui a réfulté de ce mélange étoit gluante, tenace , & tachoit la peau d'un jaune de fafran. L'eau régale décompofe avec effervefcence l’Indigo, & le LA e \ \ A ‘ , ° 2 réduit à-peu-près dans le même état que l'acide nitreux. L'acide du citron, la crème de tartre, & le vinaigre ; ne mont pas paru altérer la couleur bleue de lIndigo, quoique j'aie tenu ces menftrues en digeftion avec cette fécule. Les aikalis n’ont pas une aëtion fenfible ; ou au moins apparente fur l'Indigo. L’alkali fixe du tartre en a dégagé une odeur lixiviclle, que jai cherché à coërcer, en mettane ce mélange d'alkali & d’'Indigo avec quatre parties d’eau diftillée, dans un alembic de verre , que je plaçai fur un bain de fable; l'eau qui diftilla durant cette opération n'avoir au= cune propricce alkaline, DEN LAN DT G ©. 5$ L'alkali volatil , mis en digeftion avec l'Indigo, n’a pas non plus alréré fa couleur, & m'a paru n'attaquer aucune de fes parties d’une maniere fenfible. Mais il faut bien fe garder d'en conclure que les alkalis en général foient fans effet à l'égard de certe fécule; il n'eft peutétre point, au contraire, d’agens chimiques qui aïent autant d’analogie avec elle, qui favorifent autant le développement de fes parties; & il paroît même que cette vérité a été connue une des premieres aux Artiftes, Les Teinturiers en laine ont coutume de laifler Indigo en macéra- tion dans l'urine un tems confidérable ,avant de l'employer. Un des procédés les plus intéreflans de la teinture en coton eft de préparer une leflive de foude & de chaux, dans laquelle on fait de même macérer l’Indigo un certain réms, avant de le moudre: mais ce qui m'a convaincu de plus en plus de la grande aétion des alkalis fur l'Indigo, ce font les expériences que j'ai faites en cherchant à perfeétionner le bleu de Saxe. On fait aflez généralement que le bleu de Saxe s'obtient par un mélange de l'huile de vitriol, avec un Indigo de la qualité la plus fine, & divifé en parties le plus menues qu'il eft poñfible. Ce mélange, qui porte dans la teinture le nom de compo/i- zzon , Eft aflurément une découverte précieufe, puifque c’eft à elle feule qu’on doit le bleu & le verd de Saxe, deux couleurs aufh riches que brillantes; mais il sen faut bien qu'elles foient: portées l’une & l'autre à leur perfection. De tous les acreliers de teinture que j'ai parcourus, J'en ai trouvé au plus un ou deux où on eût le fecret de faire pénétrer la compofition dans l'intérieur des étoffes; ce qu’on appelle en terme d'art, percer ou srancher , & ce qui eft le feul moyen de rendre èn méme- tems une couleur durable & folide. Prefque tous les Teinru- riers avec lefquels je me fuis entretenu de cette matiere, m'ont dit avoir fait toutes rentatives inutiles, & même y avoir renoncé, Après avoir fait aufli beaucoup d'expériences fans fuccès; j'ai tenté de neutralifer l'acide vitriolique par le mélange d'un alkali. J'ai introduit en conféquence, à différentes reprifes, une once d’alkali fixe dans un vaifleau qui conccnoit déjà fix 16 AINTARL YASIE onces d'huile de vitriol, & une once d'Indigo bien diffous. Dès que la plus petite partie d’alkali fixe fut en contaét avec le mélange, j'ai remarqué une chaleur & une effervefcence plus confidérables, que lors même qu’on mélange l'acide vi- triolique & cet alkali, pour obtenir du tartre vicriolé. J'ai été auf plus fuffoqué par les vapeurs que dans cette derniere opération. À yant ajouté peu-à-peu le refte de mon alkali, le mélange s'eft clevé beaucoup au-defflus des parois du vafe; mais avant ceflé après quelques minutes de l'agicer, le bour- fouflement s'eft entiérement difipé, & le mélange cft revenu à l'état fluide. Je l'ai jetté alors dans une quantité proportionnée d’eau bouillante, & j'y ai plongé un morceau d’étofte. En moins de fept à Pa minutes, j'ai réufli non-feulement à teindre l’étoffe dans le bleu le plus vif & le plus foncé, mais encore à en péné- trer la corde, & à rendre ce que les Teinturiers appellent la cranche , d'une nuance aufli foncée que la fuperficie de l’éroffe. Ayant réitéré nombre de fois l'expérience en grand, & tou- jours avec les mêmes effets, je crois pouvoir la propofer aux Artiftes comme Îa folution de toutes les difhicultés qu'ils éprouvent à l'égard de cette couleur: elle offre de plus, comme je l'ai dejà dit, la preuve la plus complete de l'influence qu'ont les alkalis fur lndigo, & elle démontre bien que loin d'en altérer les parties colorantes , comme quelques perfonnes le prétendent, ils les avivent au contraire, les rendent plus péné- trantes, & leur communiquent de la Été Voulant connoître fi lIndigo ne contenoit point de partie extraétive, j'ai cente de le difloudre par les menftrues vineux. J'en ai He dans cette vue quantité égale dans un flacon rempli d’efprit-de-vin, & dans un autre rempli d’éther. Ayant bien bouché le tout, & l'ayant abandonné jufqu’au lende- main, j'ai remarque , après cet efpace, que la couleur claire & limpide de ces deux liqueurs s’étoient changées en une couleur jaune, Ayant continué à laifler lIndigo en digeftion, la cou- leur s'eft foncée de plus en plus, & ef devenue d'un rouge fauve D'E LIN DU G O: 17 fauve très-cataétérifé. Lorfque j'ai cru appercevoir que la couleur ne fe fonçoit plus davantage , J'ai décanté les deux liqueurs qui étoient également chargées, & J'ai confidéré, avec la plus grande attention, mon Indigo que javois divifé avant en parties crès-menues. J'ai reconnu alors, par toutes les expé- riences qui pouvoient m'éclairer, que la couleur bleue, loin d’avoir été altérée, étoit au plus haut point d'intenfité & de richeffe ; que les principes colorans en bleu, loin d’avoir rien perdu d’effentiel dans cette digeftion, y étoient devenus plus libres, plus actifs, & ne sy étoient que débarraflés d’une ma- tierce fuperflue, & même très-nuifible à la ceinture. Enfin les extraits réfineux étant les feuls colorans & folubles dans les liqueurs fpiritueufes, j'ai reconnu que la matiere colorante rou- geatre, obtenue par cette digeftion, étoir exaétement d’une nature extraéto-rcfineufe. Ce fuccès, qui n’en feroit pas un pout l'art de la teinture, vu la cherte des menftrues fpiritueux, n'a engagé à tenter d'ob- tenir les mêmes effets d’une maniere moins coûteufe. Tous les extraits réfineux étant également folubles dans l'eau com- mune, j'ai mis de l'Indigo divifé de même en parties très me- nues dans un bocal rempli d’eau non diftillée, & j'ai amené le tout à une légère ébullition, par le moyen du bain de fable. L'eau n’a pas tardé à prendre exaétement les mêmes caraéteres que les deux liqueurs fpiritueufes. Devenue d’abord roufle, elle a pris une couleur de plus en plus fauve, à mefure que la digef- tion a été concinuée. Voulant, dans cette expérience, dépouiller la fécule autant qu'il me feroic poflible de la partie extraétive, j'ai renouvellé l’eau, & j'en ai rendu jufqu’à ce que l'Indigo ne lui communiquât plus la ceinture la plus légère de fauve ou de rouge. L’Indigo que j'ai retiré, après avoir décanté certe derniere eau, loin d’être plus altéré qüe le premier, par une fi longue ébullition, & par cette fuite de leflives, n'a paru, au contraire, d'un bleu encore plus éclatant; & quoique ce füt du Saint-Domingue que j'avois employé dans cette expérience, Jai reconnu qu’elle lui avoit donné toutes les qualités & trous Tome IX, C 18 A'INFANLEYIS E les caracteres qui diftinguent les fuperbes Indigos connus fous le nom de Guatimalo. J'ai appliqué enfuite ce procédé au Guatimalo lui-même. L'eau en eft pareillement fortie très-colorée ; mais la matière extraétive y étoit évidemment dans une quantité beaucoup moindre, & la couleur de l'eau étoit beaucoup moins foncée. Ayant continué l'expérience fur des Indigos d'une qualité moyenne, la gradation que j'ai obtenue dans la nuance des diflolutions, & dans la quantité de la matiere extraétive, m'a démontré de plus en plus que l'une & l’autre étoient toujours en raifon de la qualité elle-même de l'Indigo, & que ce rapport écoit un des plus exaéts qu'on puille defirer. On aura peut-être quelque peine à concevoir qu’une opéra: tion fi fimple métamorphofe des Indigos communs en Indigos d'une qualité & d’un prix infiniment fupérieurs ; que ces der- niers même, après lavoir fubi, foient portés à un degré de per- fection & de pureté, qui ne trouve plus de terme de compa- raïfon ; mais qu'on fe rappelle ce que nous avons dit dans notre Théorie abrégée des travaux de l’Indigoterie. Nous y avons fait remarquer que la couleur verte qu'offroit d’abord l'extrait étoit düe à une partie jaunâtre, mélée dans ce premier développement avec les parties bleues de la plante; qu'un des principaux objets du battage étoit de dégager ces deux par- uies l’une de l’autre, & de précipiter les parties bleues, qui, comme plus pefantes, ne manquent jamais de laïfler furnager toutes les autres: c’efl même un principe connu de tous les Indigotiers, qu'un Indigo eft d'autant mieux réufhi, qu'il a été plus repolé après le battage, & par conféquent mieux dégagé de fon jaune. N'eft-il pas clair, d’après cela, que ces parties qui colorent les diflolutions de lindigo, dans un jaune fi foncé , ne font autre chofe qu'un réfidu de ces parties jaunes qu'on cherche à difliper par le battage, & qui font recon- nues des Indigotiers eux-mêmes comme nuifbles; que toute opération propre à renouveller ou à perfectionner l'extraction du battage, doit perfectionner infiniment la qualité de l’Indigo D'ERELL ND TG. 19 méme ? & fi ces parties nuifibles engagées en plus où moindre quantité dans tous les Indigos quelconques , n’ont pas encoré été reconnues, c’eft qu’on n’a peut-être jamais cherché à raff- ner, fi Jofe dire, les Indigos, une fois qu'ils ont été exportés hors des Colonies. Le premier parti que les Artiftes pourront tirer de cette découverte, eft un moyen infaillible de reconnoïtre au jufte la qualité des différens Indigos, & de les comparer avec la plus grande exactitude. La légèreté , la fineffe de la pâte, le cuivré intérieur, le poli de la caflure, ne font bien fouvent que des fignes équivoques, & ne font que trop fréquemment dé- mentis par l'emploi. Si on fe rappelle, au contraire, le rapport conftant que je viens de démontrer entre la quantité de la ma- tiere excrative, & la qualité fpécifique de l’Indigo, on con- viendra que le procédé que jindique offre le moyen le plus fimple, le plus précis, & en même tems le plus fenfble de réuflir à cet examen, fur lequel il y a eu jufqu'à préfenc fi peu de principes sûrs. Mais l'avantage, fans contredit, encore plus précieux que me femble offrir cette expérience, eft d'épurer tous les Indi- gos quelconques d'une quantité plus ou moins grande de par: ties coujours nuifbles, & d’aviver non-feulement ceux de baffe qualité, mais même les plus fins & les plus accomplis. Les Tein- turiers trouveront, fans doute, plus d’un moyen d'exécuter en grand un procédé fi fimple; mais celui que je crois devoir leur prefcrire de préférence, eft d'introduire l'Indigo le plus divifé qu'il fera poflible, dans des facs d'une toile aflez fer- rée pour ne point laïffer pafler le menu ou la pouilicre; d'emplit une petite chaudiere d’eau commune, d'y faire bouillir lindigo contenu dans ces facs à un bouillon léger, & de renouveller l'eau jufqu'à ce que l'Indigo ne lui com- munique plus la moindre couleur roufle. Si on fe conten- toit d'étendre l'Indigo fur une toile, & d’y jetcer plufieurs leffives d'eau bouillante, ou de jetter cette même eau dans un cuyier qui contiendtoit de lIndigo , chaque partie auroit C ÿ 20 AIN AUL IV ISVE bien plus de peine à être attaquée per l’eau bouillante, & il en réfulteroit d’ailleurs une multitude d’autres inconvéniens. Ms Jucrs approuveront fans doute que j'aie pouflé mes recherches encore plus loin, & qu'après avoir trouvé ces moyens de perfeétionner un Indigo quelconque, immédiate- ment avant fon emploi, je me fois occupé de l’'altération géné- rale qui regne depuis plufieurs années dans toures les clafles d'Indigo. Je vais donc expofer mes vues fur un probléme dont la folution eft fi intéreflante, & propofer en méme-temps des moyens de retédier à plufeurs autres abus. Les produits de l'Art font ordinairement d'autant plus parfaits, qu'ils s’éloignent davantage de l’inftant de leur dé- couverte. Ce n’eft même que le temps, & les manipulations réitérées, qui les conduifent ordinairement à leur perfeétion ; mais il n'en a pas été de même de lIndigo. Voilà bientôt cent ans que l'Indigo & fes préparations font connues. Le dé- bit rapide qu'ont eu les premiers eflais, a fait naître des In- digoteries dans toutes les parties du nouveau monde. Le prix de cette fécule eft aujourd'hui le double de ce quil étoit même il y a dix ans; & nous fommes cependant forcés de regretter le temps où les Indigoreries étoient au ber- ceau. Si on compare les qualités aétuelles à d'anciens échan- tillons des mêmes qualités, on apperçoit la différence la plus frappante dans tous les caracteres qui confticuent le bon In- digo. Ce que les ouvriers appellent rendement, ou rapport dans les cuves, eft abfolument change depuis quelques an- nées : enfin (ce qui n'eft qu'une démonftration trop com- plette), il faut aujourd’hui prefque le double des anciennes dofes, pour obtenir les mêmes eflets. L'économie bien mal entendue de quelques propriétaires d’Indigoteries fur les pre- parations & les travaux contribue fans doute beaucoup à cette altération marquée, & qui fait prefque chaque année de nouveaux progrès; mais les chefs d'Indigoteries les plus \ défintéreflés, commencent à fe plaindre eux-mêmes, que DPÉXSL IN ADITG. OO; ar leurs travaux deviennent plus ingrats & plus pénibles que jamais; que les Indigos bruts femblent plus appauvtis de patties colorantes, moins pourvus de ces parties fermen- tefcibles qui favorifenc l'extraétion de la plante; & il arrive fréquemment que des parties entières refufent de, sextraire dans la trempoire. Ces derniers accidens proviennent fans doute de caufes antérieures à toutes manipulations, Quelles peuvent étre ces caufes> le végétal lui-même feroit-il al- térc? peut-on fe flatter de remédier à cette alrération » fup- pofé qu’elle fût démontrée? Je vais hafarder à ce fujet quel- ques réflexions que j'ai puifées dans des informations exactes fur l'état de nos Colonies. L'Indigo, ainfi que les autres productions végétales dm nouveau monde, y exiftoit probablement lors de la décou- verte, en petite quantité, & difperfe çà & là, comme le font toujours les productions fpontanées d’un fol quelconque; le parti précieux qu'on n'a pas tardé à en tirer pour la teinture, l'a bientôt rendu un des objets les plus intéreflans de la cul. ture & des défrichemens. Ces terres nouvellement défrichées, & qui peu de temps avant étoient même couvertes de bois, ont donné d’abord les produétions les plus vigoureufes. La cul. ture étoit prefque fuperflue. Les proprictaires d'Indigoteries recueilloient alors des fruits immenfes de leurs habitations, & les Indigos femés dans le commerce étoient de la qualité la plus accomplie. Peu-à-peu, ces tertès couvertes auparavant de forêts, & qui ne fe trouvoient plus defendues des ardeurs du foleil pat leurs nouvelles produétions, ont dû par cela feul perdre beaucoup de leur fuc & de leur vigneur, Tourmentées fans relâche pour donner de nouvelles récoltes, & brülées en même-temps par le foleil le plus ardent à leur furface, elles n'ont pu que beaucoup dégenérer. Une culture approfondie auroit remédié de bonne heure à tous ces inconyéniens; mais la feule culture qu'on ait donnée Jufqu'à préfent aux champs d'indigo, conlifte à retourner légérement la terre avec des houes ; & qui ne fait encore que ce travail, comme tous 22 AMINPMARNYE STE ceux des Colonies, eft confie au bras languiffant & énervé des Noirs? Ces premiers terreins, toujours façonnés à demi par des bras fans vigueur, ont donc dû dégénérer de plus en plus, ainfi que leurs produétions; les nouveaux défri- chemens qui fe font faits, encore aux dépens des forêts, & qui ont formé de nouvelles Indigoteries, ont perpétué pendant quelque temps les Indigos de premiere perfection , & fi jofe dire, de premier aloi ; mais il ne faut plus compter à l’avenir fur cette reflource. Loin de voir jour à ce que les Colonies s’erendent davantage, on remarque qu’elles fonc déjà trop ctendues, en raifon des Nègres qu'on peut employer à leur culture. Ces malheureufes viétimes deviennent tous lès “jours de plus en plus rares. On diroit que la fource commence auffi à s'en tarir, Le feul moyen qui felon moi remédieroit à un mal fi alarmant, & qui peut-être changeroit la face de toutes nos Colonies, feroit de renoncer entièrement à la maniere ac- cuelle de façonner les champs à Indigo, d'abandonner les houes qui entrent à peine de quelques pouces dans la terre, qui demandent les plus grands efforts pour ne produire pref- qu'aucun effet, & qui ont le vice plus grand encore de retenir à-la-fois un nombre confidérable de Nègres. Je voudrois qu'à un inftrument fi mal combiné on fubftituât une de nos char- rues, & même une de nos plus lourdes charrues. Mon projet révoltera fans doute au premier afpeét tous nos Colons. On m'objeétera que tous les terrains de l'Amérique font fort difie- rens des terreins de l'Europe ; qu'ils font beaucoup plus meu- bles ; que des inftrumens légers y font par conféquent plus d'effet : enfin que fi l'appauvrifflement des terrains pouvoit être réparé par quelque voie, il le feroït depuis long-temps par les excellens fumiers de Mill & d’Indigo pourris qu'on répand à leur furface. Du moins telles font les différentes objeétions ui m'ont été faites dans les différens ports de mer où j'ai ha- fardé mon fyftême; mais J'ai trouvé dans les mêmes ports des perfonnes encore plus verfées dans la connoiflance des Colo- D EUÉIIN D'I/G O. 23 nies, qui avoient méme dirigé autrefois en perfonne des Indi- goteries, & qui ont adopté prefque fans exception toutes mes vues. On ne peut difconvenir, en effet, qu'un terrain quel- conque , meuble ou non, ne gagne beaucoup à étre retourné à fond. Le terrain des Indigoteries y gagneroit d'autant plus qu'on ne feme point la graine d’Indigo en l'éparpillanc fur la furface du champ, comme nous femons le bled, mais en fai- fant des trous aflez profonds dans la terre, & y jetrant un cer. tain nombre de grains. Si les excellens fumiers qu'on emploie pout tanimer la vigueur des cerres ont peu d’eflet, c’eft pré- cifément parce qu’elles font à peine retournées. Qu'on intro- duife le coutre dela charrue dans ces terres fi bien fumées, alors les fucs précieux du fumier, au lieu d’être pompés fans cefle par l’ardeur du foleil, & de s'exhaler en vapeurs, pénétre- ront à la profondeur où le travail de la végétation s'ébauche & fe développe ; ils y formeront infenfiblement un nouveau terrain bien plus généreux & plus alimentaire que le pre- mier, & les cerrains même défefpérés redeviendront infaillible- ment fertiles (1). La feule objeétion que je trouverois invin- cible feroit fi le fol de l'Amérique ne permettoit d'élever ni bœufs, ni chevaux ou mulets; mais il n’en eft point à cet égard de me comme des Indes Orientales. Tous les beftiaux s’y élevent fans difficulté : on y éleve même des chevaux fpécia- lement pour les Indigoteries, attendu que, dans un très-grand nombre, les buquets des batteries ne font mis en mouvement que par des chevaux ou des mulets. Tous les propriétaires d’ha- bitation qui ne feront point dominés par la routine & les pré- jugés, conyiendront donc que l'introduction des charrues dans (1) Je tiens de M. Tillet, un de nos plus grands Obfervateurs dans le règne végétal, que toures les plantes frugiferes perdent au lieu de gagner ; par une culture approfondie, & des fumiers très- gras; mais que tous les végétaux dont la partie précieufe, comme celle de lIndigo , réfide dans l'écorce ou dans les feuilles, déclinent au. contraire fenfiblement, & fini fent par s’altérer totalement , fi on ne façonne à fond la terre qui les en- toure, & fi on ne la renouvelle par des fucs étrangers , tels que ceux des meilleurs fumiers. 24 ANALYSE les chanps d’Indigo n'offre que des avantages fous tous les points de vue; que cet inftrument ne peut être fujec à aucun inconvénient dans les pays de plaine, & qu'avec de légères modifications on le rendroit également propre à la culture des Mornes. Au refte, je ne tarderai point à avoir la démonf tration la plus complète fur cette matiere. Avant de quitter Nantes & Bordeaux, j'ai décide quelques amis à faire charger des charrues fur des navires prêts à partir pour Léogade & les Cayes Saint-Louis. Quels que foient les effers de ces inftrumens, que je crois inconnus, ou au moins fans ulage dans toutes nos Colonies, je faifirai la premiere occalon de les rendre publics. Il eft une autre réforme qui paroitra peut être avoir un ob- jet moins effentiel, mais qui, introduite une fois dans toutes les Indigoteries, procurera encore des avantages inappréciables à tous ceux qui ont rapport, foit à la vente, foit à l'emploi de lIndigo. J'ai dit dans le récit abrégé des opérations de l'Indi- goterie, que ceux qui conduifent ces travaux, après avoir re- tire la fécule du Diablotin, lintroduifent dans des chaufies de voile, où ils la laïffent s’égoutter un certain temps; que lorf- qu'elle n'eft plus qu'à demi-fluide, on la verfe fur des caifles quarrées, dont les rebords ont environ deux pouces; enfin J'ai ajouté que lorfque l'Indigo étoit parvenu à l'état une pâte un peu folide, on partageoïit cette furface unie par le moyen de couteaux faits exprès, en petits cubes d'environ deux pouces fur toutes les faces, & que ces cubes ou petites pierres étant bien refluyés, on les mettoit en futailles, en ayant attention de les ferrer & de les comprimer le plus qu'il étoit poflible ; mais il réfulre toujours les plus grands inconvé- niens de ces dernieres manipulations, quelques foins qu'on y apporte. Toutes ces pierres ou cubes étant d’un trop petit volume pour être arrangés avec ordre dans les futailles, & leur petitefle obligeant, au contraire, de les jetter au hafard, cette quan- üte innombrable d’angles & de furfaces forme prefqu’autant de vuides, qui font encore augmentés par le retrait .que fubiffent Jes D'E 2LYIGNiDALAG O. 2$ les pierres en fe féchant de plus en plus. De-là une vacillation qui occafionne la fraéture d'une quantité confidérable de ierres, dans tous les mouvemens qu'on donne à l'Indigo en futaille. L'Indigo ne pouvant étre employé dans la teinture fans étre moulu, toutes ces pierres brifées, tout le menu ou grabot, en terme de commerce, qui en réfulte, n’occafon- neroïient fans contredit aucune perte, & feroienc fans incon- vénient, file vaifleau qui contient lIndigo renfermoit her- métiquement les parties contenues. Mais quels font les vaif- feaux dans lefquels la plupart des Nations exportent cette marchandife fi précieufe hors de leurs Colonies? Des barriques femblables à celles de nos vins, mais qui font encore l’ou- vrage brut & informe des Nègres, dont les douves mal aflemblées par ces ouvriers peu induftrieux, donnent mille iflues à la poufliere qui fe forme, & fe renouvelle fans cefle dans l'intérieur de la barrique; dont le parfait aflemblage ne pourroit d’ailleurs fubfifter long-temps, quand elles feroient le mieux fabriquées, puifque les fluides feuls ont la propriété de * faire joindre hermétiquement les parties d’une barrique. Lepeu de cohérence de ces parties entre elles, occafionne donc une perte immenfe des objets contenus; mais il me fera facile de démontrer que la forme feule de ce vaifleau eft encore fujette à deux grands inconvéniens. 1. La forme ronde des barriques ne manque jamais de dé- cider, tant aux Colonies que dans nos ports, les porte-faix ou manœuvres à rouler les futailles d'Indigo dans tous les trajets qu’ils ont à leur faire faire. On ne fauroit croire combien ce mouvement de rotation, acheve d'arténuer les pierres déjà brifées, combien ces fecoufles en brifent même de nou- velles, & fur-cout combien elles font tranfpirer de poufliere à travers les parois de la futaille. Or c’eft ce qui n’arriveroit pas fi lIndigo étoit contenu dans des vaifleaux d'une autre forme. 2.° Je me fuis convaincu, en parcourant tous nos ports, & en defcendant dans des navires de toutes les grandeurs , que la Tome 1X. D 16 AINVANEI VIS E forme des barriques eft la plus ingrate de toutes pour larri- mage ; que les futailles ne manquent jamais de confumer en pure perte un tiers du local qu’elles occupent, & qu'une même quantité de marchandife qui feroit contenue, par exemple dans des caifles quarrées, occuperoit un tiers moins d’efpace dans les écoutilles. Si on fait attention que le premier bénéfice des Armateurs dépend du fret plus ou moins confidérable de leurs navires, & qu'ils ne peuvent jamais aflez contenir, fur- tout dans les retours, on conviendra fans doute que tout ce qui nuit à l’arrimage, tire aux plus grandes conféquences. Or, je le répete , toutes les perfonnes que j'ai confultées à ce fujet, Capitaines, Matelots, Arrimeurs, tous font convenus, avec moi, d'un commun accord , que de tous les objets qui entroient en cargaïfon, les futailles quelconques font ceux qui confu- ment le plus de place, quelques précautions qu'on prenne en les arrimant ; &les raifons en font trop fenfibles pour que nous cherchions plus long-temps à le prouver. Si Je propofois, pour remédier à tous ces inconvéniens pat un feul & unique procédé, d'imiter dans toutes les Colonies Jes habitans de Guatimala, qui n’envoient leurs indigos que dans des peaux de boucs, on ne manqueroit pas de m'ob- jeéter que toutes les parties du nouveau continent ne fe pré- teroient peut - être pas également à clever ces animaux; que d'ailleurs il en faudroit une quantité immenfe, pour qu'elle ft proportionnée à celle des Indigos de toutes les Colonies; enfin que les Indigos de Guatimala, étant les plus précieux & les plus chers qui exiftent, des qualités fort inférieures ne mériteroient pas cette dépenfe. Mais ne feroit-il pas poflible de crouver quelqu’autre moyen auñi fimple, moins difpen- dieux, & qui ne coûteroit aux Indigotiers d'autre facrifice que celui de leurs préjugés & de leur habitude? C’eft ce que nous allons tâcher maintenant de démontrer, On a vu par ce que nous avons dit au commencement de ce Mémoire, & que nous venons de rappcller, 1l y a quelques momens, fur les dernieres manipulations de l’Indigoterie, que DE LIN DIG OO. 27 la fécule, après avoir été retirée du Diablotin, & avoir palfé par les facs, eft une pâte docile , à laquelle on peut imprimer, fans aucune peine, telle forme qu’on defire. La méthode re- çue dans toutes les Colonies, d'étendre alors la fécule fur des caifles plates, pour la faire fécher, & de la partager avec un couteau en pierres de la grandeur connue, lorfqu'elle eft à Fétat d’une demi-confiftence; cette méthode, dis-je, rend encore plus facile de donner à ces mêmes pierres telles nou- velle forme ou telle étendue qu’on fouhaiteroit. Je voudrois donc, qu'au lieu de couper l'Indigo encore humide, en cubes d’un pouce où un pouce & demi, on le coupât en quarrés de la même épaifleur , mais de fix pouces de furface, ou en paral- llipipèdes de fix pouces de long, fur quatre de large. J'ofe prefque défier qu'on objeéte rien de folidé contre cette inno- vation, puifque je ne change rien à l’épaifleur de lIndigo ;, la feule chofe qui pourroit nuire à fon parfait defléchement. On ne pourroit pas m'objeéter avecplus de raifon , que ce chan- gement alongeroit le travail des Nègres. On fent ,. au. con- traire, combien le partage de tout l’Indigo contenu dans une caïfle , feroit plus prompt & plus facile, puifqu'une de ces nouvelles pierres en comprendroit cinq ou fix des anciennes : mais l'avantage ineftimable qui réfulteroit de cette réforme, feroic que l’Indigo réduit fous des mafles beaucoup plus fortes & plus maniables, pourroit s'arranger fans peine avec toute la précaution poflible , dans les vaiffeaux qu'on deftineroit à fon tranfport. Il réfulteroit fur- tour de cette innovation, qu'on pourroit abandonner pour jamais les futailles qui font fujettes à une fi grande foule d'inconvéniens, & qu'on pout- roit y fubftituer des vaifleaux d'une forme toute différente. Celle que je croirois devoir adopter, d’après toutes les in- formations & voutes les expériences que j'ai faites à ce fujec, feroit des caifles quarrées de telle grandeur qu'on fouhaieroit , qu'on pourroit encore fabriquer avec le bois le plus léger & le moins cher, qui croitroit dans chaque Colonie, mais qui {e- roient cflenticllement affemblées en languettes & mortaifes, D ji 23 A'INXAYE:YS E Je voudrois , de plus ; qu'avant d’y dépofer lIndiso, elles fuffenc garnies d’un fort papier, ou ce qui feroit peut-être moins difpendieux dans certaines Colonies, d’une natte quel- conque. On voit que par toutes ces attentions, Je préviens chacune des circonftaänces qui ont contribué jufqu'à ce jour à fracafler les pierres d'Indigo; qu’en cas de fraëture de quel- ques-unes, je ne laïfle plus la moindre iflue aux parties fi évaporables de certe fécule ; que ces mêmes procedes offrent un moyen d'exporter l'Indigo fous le volume le plus favora- ble à la navigation : enfin, que tant d'avantages réunis, exigent au plus les mêmes peines & la même dépenfe que les furailles dont on s’eft toujours fervi. S'il eft quelques petfonnes auxquelles ces détails aient paru longs ou peu relevés, je les fupplie d'obferver que de tout tems lIndigo a perdu environ douze pour cent fur fon poids, pen- dant. le trajet des ifles dans nos ports; que dans le trajet de nos villes maritimes à celle où il doit être employé, il perd encore cinq à fix pour cent; ce qui a donné naïflance à la tare & au don qui s'accordent toujours par les vendeurs. Si, comme il eft vifible , cette perte énorme n’a d'autre caufe que la conformation vicieufe des pierres d’Indigo, & encore plus celle des barriques, on conviendra, fans doute, que cette matière méricoit quelqu'examen, & qu'elle étoit bien digne d'être foumife aux yeux d'une Compagnie egalement zelée pour le progrès des Arts & le bien du Commerce. La derniere obfervation que j'adrefferai à nos Colons, & que je leur adreflerai encore au nom du Commerce & de rous les Confommateurs, a pour objet la précipitation avec laquelle la plupart mettent l'Indigo en futaille, lorfqu'il ne fait que d'être fabriqué. C’eft une des loix de lIndigoterie de laifler encore lIndigo refluyer quelque temps, lors même qu'il eft partage en pierres, que ces pierres font devenues bien folidés , & qu'il donne à l'extérieur cous les indices d’un parfait defléchemenr. Il sen faut bien , en effet , que l'Indigo foit alors privé de:toute humidice fuperflue. On ne l'a pas DE LINDIGO. . plutôt mis à l'ombre & à l'écart, pour ce qu'on appelle le laiffer refluyer , qu'il entre, pour ainfi dire, dans une nouvelle fermentation des plus furprenantes. Si on l'a déjà mis dans une barrique, l'intérieur de la barrique contraéte le plus haut degré de chaleur. Chaque pierre paroî: bouillir en particulier, diftille de groffes gouttes d’eau , & finit par fe couvrir d'une efpece de fleur blanche ( 1); mais on doit bien fe garder de croire que cette fermentation intérieure cefle exaétement avec les fymptômes apparens. Ceux-ci fe diflipent en entier au bout de quelques jours; mais le mouvement intérieur des par- ties continue fouvent pendant deux mois, Si limpatience ou le befoin de vendre détermine le propriétaire, comme il n'arrive que trop fouvent, à fermer les furaifles avant cet intervalle, la fuppreflion de l'air extérieur n’arrête point cette fermentation ; il femble même qu'elle n’en acquiert que plus de force. Ces Indigos continuant donc à fermenter pendant tout le temps de la traverfée, arrivent dans les ports ou dans nos ateliers avec vous les dehors de moifi, & aufli mouillés que s'ils euffenc fait avarie. On fent, d’après cela, qu'il eft d’abord impoflible d'en conftater le poids réel; mais la qualité ellemème en eft cotalement changée. Il femble dans cet accident, que la fécule ait tourné toute fon énergie contre elle-même, & qu'elle foit entièrement décompolée; & il eft au moins certain qu'elle a perdu la plus grande partie de fes principes colo- rans. Ayant reçu une fois de l'Indigo de cette nature, & vou- lant d'abord obferver combien il ÿ auroit de perte fur fon poids, jen ai expofé cent livres non pas au foleil, ou même nn —————————."———————————— mm {x) Ce font des reftes de cette fleur blanche qu'on trouve fouvent au- «dedans de l’Indigo, en caffant les pierres, & qu’on nomme évent en terme de commerce. Je viens d'apprendre que M. Sage, de l’Académie des Sciences, avoit examiné cetre efpèce de moifflure , qu'il lattribuoit uniquement à la matiere extraétive, dont une partie fe décompofe en attirant l'humidité; & que felon lui l’Indigo ne feroit point fufceptible de ce défaut , fi on avoit foin de le bien luver dans les ateliers où on le prépare. 30 ANALYSE à l'air extérieur, mais feulement dans un endroit fermé & bien fec. Au bout de vingt-quatre heures les cents livres étoient réduites à moins de quatre-vingt-dix, & elles font encore tombées enfuite de beaucoup. Quant à fa qualité, les obfervations que j'ai faites lors de l'emploi m'ont dé- montré qu'elle ne valoit pas moitié du Saint - Domingue ordinaire, Ces accidens fi préjudiciables, fur-tout au Confommateur ; devenant plus fréquens que jamais, ce feroic fans doute le mo- ment de faire revivre les anciennes Ordonnances qui ont été portées fur cet objet; mais elles ne tarderont sûrement pas à être remifes en vigueur , ainfi que toutes les autres Loix fages, par le Miniftre éclairé qui préfide à nos Colonies, & qui n'a jamais été plus occupé de leurs véritables intérêts. J’ofe même me flater que toutes les innovations dont je crois avoir démon- tré plus haut les avantages, feront elles-mêmes appuyées par des Ordonnances nouvelles , fi leur utilité eft reconnue de PAcadémie; & ce fera, fans doute, le fruit de fon fuffrage, fi je fuis aflez heureux pour le remporter. D'E MEULINID:L:G O. 31 RE —_—_—__—_— PROCÉDES Par lefquels on applique lIndigo à la teinture des principales fub/fances. Les varsssaux dans lefquels on teint en bleu la foie écrue & non fabriquée, font de cuivre, & difpofés de maniere à foutenir continuellement l'aétion d'un feu modéré. Ces vaif. feaux auxquels la plupart des Teinturiers donnent le nom de cuves (1), ont ordinairement quatre pieds de profondeur ;, fur deux de largeur à leur partie fupérieure; & un pied ou Quinze pouces dans leur partie inférieure. Celle-ci, comme on voit, offre un diamètre moindre que la premiere, elle eft de plus arrondie, & elle defcend environ un pied & demi au- deflous du fol de l'atrelier. Ces cuves font ordinairement adof- fées à quelque mur, & toujours entourées d’une maçonnerie de fept à huit pouces. Au niveau du fol de l’attelier, & à la partie qui fait face, on pratique une ouverture d'environ fix pouces de large, fur huit à neuf de haut. Cette ouverture ferc à introduire de la braife dans le vuide que l’on a mé- nagé encre les parois de la cuve & la maçonnerie ; elle forme de plus un courant d'air avec une autre ouverture pratiquée en face, encore au niveau du fol, & furmontée d’une efpece de tuyau, dont l'ouverture fort quelques pouces au - deflus de la cuve. Onaffied ces cuves en Les rempliffant d'eau commune, dans laquelle on jette d’abord trois ou quatre poignées de fon bien mm eu (1) J'ai étudié les procédés de la teinture en foie dans les villes de Tours , Nimes & Lyon ; mais j'ai cru devoir m’en tenir aux termes d’artufités dans cette derniere ville, 32 ANNPARENVAS"E lavé, & battu dans les mains jufqu'à ce que l’eau en forte claire. On fait bouillir ce fon pendant un demi-quart-d’heure; après quoi, on met une livre de cendre gravelcte , & une once de garence, fur une livre d'Indigo : on fait bouillir en- femble les deux premieres, lefpace d’un demi quart-d’heure, & lorfqu’elles ont jetté un gros bouillon, on retire le feu de deflous la cuve, pour les laïfler repofer au moins une demi- heure. Pendant ce temps, on pile l'Indigo le plus menu qu'il eft poflible dans un mortier. Lorfque le fon, la cendre gravelée , & la garence font bien repofes, on commence à puifer à la fuperficie du bain, autant qu'il eft néceflaire, pour délayer lndigo , & on furvuide fans cefle la partie la plus claire, juf- qu'à ce que l'Indigo foit entièrement divifé. On a foin, à chacune de ces opérations, d’agicer le plus complétement poflble tout le mélange, par le moyen d’une palette de bois adaptée à un manche, dont la longueur fe régle fur la profondeur de la cuve, & qu'on nomme able. Dans la plupart des teintures, on defigne l’ufage du rable par les mots de pallier & de palliemens ; maïs dans la teinture en foie, & fur-tout à Lyon, on exprime cette opération pat les mots de éraffer & de Braffées. I eft de la plus grande im- portance de bien brafler la cuve , chaque fois qu’on y intro- duit quelque nouvelle fubftance, ou même une nouvelle dofe des mêmes fubftances. C’eft prefque cette opération feule qui décide le développement & la fermentation des fubftances combinées enfemble; & quoiqu'elle foit fi fimple en apparence, nous lui verrons jouer le plus grand rôle dans toutes les opé- rations que nous allons continuer à décrire. Une cuve conftruite & établie felon tout ce qui a été dit ci-deflus, contient ordinairement douze à quinze livres d’In- digo , & par conféquent de la cendre gravelée ainfi que de la garence en proportion. Lorfqu'elle eft parfaitement venue, ce que l'on reconnoit à une pellicule rougeûtre & cuivrée qui fe forme D'EN LI INDE 0: 33 forme deflus, on lui donne ce qu'on appelle un érever, avec Environ deux livres de cendre gravelée & trois onces de 92- rence : on lui en donne encore autant le lendemain, s’il eft néceflaire, quoique la cuve n'ait point travaillé. C'eft ce qui fe nomme accompliffage , & qui achevé de faire poufler l'Indigo. Lorfque la cuve eft à ce point, & que la chaleur eft telle- ment rallentie, qu'on y peut tenir la main fans douleur , il ne lui manque rien pour teindre, On y plonge donc alors la foie qui doit avoir été cuite à raifon de trente livres de favon pour cent, & enfuite bien dégorgée de fon favon par deux bat- turcs, ou même plus dans une eau courante, Avant même de faire fubir à la foie l'opération de la cuite , on doit avoir formé différens aflemblages d’un même nombre d’écheveaux qu'on nomme wateaux. Lorfqu'on en vient à teindre la foie , on pañle un de ces mateaux dans un petit cylindre de bois long d'environ un pied, dont l’ouvrier tient chaque extrémité, & fur le milieu duquel porte le mateau. Lorfqu’on à fair pañler fucceflivement chaque partie du mateau, une ou plufieurs fois fur le bain, on fe tord à la main au-deflus du même bain , & autant que les forces le permettent : on l’évente enfuite dans les mains pour le déverdir. Lorfqu'il paroît bien déverdi, on le jette dans de l’eau parfaitement nette, qu'on tient à portée ; après quoi, on le tord jufqu'à dix & douze fois fur une efpece de cheville arréréé dans le mur, ou dans un po- au, qu'on nomme efpart. On peut teindre de cette forte trente livres de foie fur une Cuve, fans y rien ajouter. Lorfqu'on à teint à-peu-près cette quantité, on compofe un brevet d’une livre de cendre grave- lée, une once de garence & une poignée de fon bien lavé. Cetre addition eft indifpenfable pour confolider l’aétion de la cuve. Les parties colorantes de lIndigo fe trouvant auffi épuilées, lorfqu'on à teint une certaine quantité de foie, il devient éga- lement néceffaire de rendre de lTadigo à la cuve, & on lui en rend ordinairement à la quantité de cinq ou fix livres ; mais il Tome IX. E 34 ANA AL V'SUE faut toujours obferver en même temps d'ajouter quantité pro- portionnée de cendre gravelée de garence & de fon ; c’eft ce qu'on appelle enter la cuve. Je répéte qu’on doit faire cette opération aufli-tôt qu'on a teint vingt-cinq ou trente livres de foie dans un bleu plein, quoique plufieurs Teinturiers profitent de ce moment pour teindre les foies qu'ils veulent laïfler d’un bleu clair ; mais cette manœuvre économique, à la vérité, eft fujette à de grands in- convéniens ; elle amnene d'abord tres-fouvent la défaillance des cuves, dont nous parlerons plus bas; d’ailleurs les foies qui ont été paflees fur ces cuves ne font jamais d’un bleu niaufñli brillant, ni aufli {olide. Il vaut beaucoup mieux établir des cuves avec une moindre quantité d’Indigo pour cette efpèce de nuance; &; sil en réfulre un peu plus de dépenfe par la multiplicité des cuves que cette pratique exige, l’Artifte eft bien dédommagé par la beaute & la folidité de fon bleu. La foie qu’on plonge fans cefle dans la cuve lorfqu’on la fait travailler un certain temps y dépofe infenfiblement une graifle qui arréteroic entièrement les opérations, fi on n’avoit foin de l'en purger. Pour y parvenir, on remplit de fon non lavé un petit fac de toile: on ferme le fac par une ficelle qu’on arrête au bord de la cuve, mais qu’on tient en même temps aflez longue pour qu'il puifle defcendre au fond ; enfin on obferv: de ne mettre le fac qu'un demi-quart-d’heure après avoir braflé la cuve. Il eft remarquable qu'en moins de vingt-quatre heures le fac dégraifle la cuve, & ne manque jamais alors de remonter à la fuperficie. Lorfqu'on veut purger la cuve autant qu'il eft poilible, on a foin, après lui avoir donné un brevet & l'avoir braflé, de faire griller au feu trois ou quatre tranches de pain: on les met toutes chaudes dans la cuve, & on réitère le pro- cédé jufqu’à ce qu’elle foit parfaitement en état ; ce quon re- connoît lorfqu’en foufHant un peu fur fa fuperficie elle verdie, ou lorfqu'elle eft couverte de cette pellicule cuivrée ou rou- geatre dont j'ai parlé plus haut. Di VPLIL'N'D'I G O. 35 Les Indigos d'un prix moyen, comme le Saint - Domingue cuivré, fufhifent pour obtenir toutes les nuances de bleu qu'on defire en teignant les foies, Les fuperbes Indigos, comme le Guatimalo Flore, ou le Sobre faliente, peuvent aufli s'employer pour le même objet; mais ils ne font pas un aflez grand effet, & ils n’ajoutent pas aflez à la beauté de la foie pour qu'on y ap- plique des matieres auñli chères ; c’eft ce qui fait qu’on s'en fert peu dans toutes les ceintures en foie. Lss FILS & le coton filé fe teignent en bleu par des procé- dés communs & exaétement fur le même bain. On teignoit au- trefois les uns & les autres à chaud ; mais la teinture à froid ayant offert des avantages confidérables, elle eft aujourd’hui prefque la feule en ufage. La difpofition des cuves d’Indigo pour le fl ou le coton filé n’a en conféquence aucun rapport à celles que nous ve- nons de décrire, ni aux cuves des Teinturiers en laines, dont nous donnerons plus bas la defcription. On ne pratique de fourneaux ni fous les cuves, ni dans leur voifinage. Les cuves font compofces de bizer, efpece de pierre à fufil qu’on tire des ravines ou des rivieres, & dont on compofe les murailles ou parois de la cuve : celles - ci doivent avoir au moins fix pouces d’épaifleur , & tant en-dedans qu’en dehors un enduit fait avec le ciment le plus fin. La forme de ces cuves doit être un quarré de vingt pouces en tout fens, ou un quarré long de vingt pouces fur vingt-quatre. Leur profondeur eft ordinai- tement de cinq pieds ; elles ne doivent faillir hors de terre qu'à hauteur d'appui ; & comme il eft abfolument néceflaire d'en avoir un certain nombre dans le même attelier, la com- modité exige qu'on les range fur une ou plufieurs files pa- ralleles. Une cuve conftruite comme celle que je viens-de décrire; peut contenir quatre muids d'eau, & on peut y établir dix- huit à vingc livres d'Indigo ; mais le premier procédé qu'on E ÿ 36 ANALYSE doit obferver avant d'établir la cuve, eft de faire macérer lIndigo pendant huit jours dans une eau forte qu'on com- pole exprès. Pour faire sette eau, on met dans un cuvier percé, cinq à fix livres de foude d’Alicante bien battue & broyée à-peu-près comme du ciment: on y ajoute environ trois livres de chaux vive, fur lefquelles on verfe fepc à huit pots (r) d’eau com- mune :on laifle couler le tout dans un récipient, comme toutes les leflives ordinaires: on reverfe jufqu'à trois ou quatre fois la leflive qu'on a obtenue, fur la cuve, pour lui donner plus de force, & on reconnoît qu'elle eft au degré de force con- venable, lorfqu’elle eft grafle au toucher, ou ce qui eft en- core un figne plus certain, lorfqu'elle porte un œuf. On fe fert ordinairement du moulin même à Indigo, pour opérer cette maceération; lorfqu’elle a eu lieu pendant l'efpace de temps que j'ai marqué plus haut, on commence à moudre lIndigo dans la même eau; on en introduit de nouvelle sil eft néceflaire pour le délayer avec plus d’aifance ; &, après avoir continue la mouture pendant environ deux heures, on foutire le tout par un robinet placé au niveau de la premiere meule. Il eft temps de remplir alors la cuve d'environ trois muids & demi d'eau. Celle de riviere eft préférable. On y introduit enfuite vingt livres de chaux vive. Lorfque la premiere efter- vcflence de la chaux eft pañlée, & qu'elle eft bien éteinte, on pallie la cuve : on y ajoute alors trente-fix livres de cou- perofe d'Angleterre, lefquelles étant bien délayéés & bien fondues, on verfe l’Indigo moulu, ayant en même temps le foin de le pañler à travers un tamis. On pallie la cuve fept ou huit fois cette même journée. Apres un repos de ctrente- fix heures, on peut teindre deflus. (1) Terme de mefure ufité à Rouen, où j'ai particulièrement fuivis les procédés de Ja teinture en coton. DE LINDIGO. 37 Une cuve qu'on vient d'établir n'eft jamais celle qu'on em- ploie pour commencer du coton ou du fil entièrément écru. Le Teinturiet doit eflentiellement avoir un certain nombre de cuves établies chacune à des époques différentes, & par con- féquent qui fe trouvent en tout temps à différens degrés. Cette accention indifpenfable pour le fuccès de la ceinture, met de plus le propriétaire à portée de tirer beaucoup mieux tout l'In- digo de fes cuves; & il en faut au moins dix pour former un atelier complet. On commence donc par paffer le coton ou le fil écru fur la cuve la plus baffe ou la plus épuifée, & on continue enfuite, en allant de cuve en cuve jufqu’à la plus forte, à moins qu'on ait obtenu avant cette cuve la nuance à laquelle on veut teindre, Ce font ces premieres cuves qui donnent ce qu'on appelle /e pied, & ce font les dernières qui finiflent. Lorfqu’on a teint fix fois fur une cuve neuve, cette cuve ne faic plus le bleu affez foncé, & pour lors, de cuve neuve qu'elle s'appelloit, elle pafle dans la feconde clafle qu'on nomme cuve à corcer. Lorfqu'elle a fervi encore fix fois dans cette feconde claife, on la nomme rroifième cuve, puis quatrième , CIRQUIÈME ; jufqu'a ce que le laps de temps & la réitération des travaux en fañle la dixième. Il réfulte delà qu’une cuve fert environ foi- xante fois, fix fois en qualité de neuve, fix fois en qualité de cuve à corcer, fix fois en qualité de troifième, & ainfi de fuite jufqu’à la dixième. La quantité qu'on peut teindre avec le plus de fuccès fur une cuve établie de la manière ci-deflus, eft de trente livres de coton, & chaque pente ou poignée doit être au plus de vingt onces, fans quoi on auroit de la peine à la tordre en une fois. Il faut que le fil ou le coton foit mouillé, avant d’entrer dans la premiere cuve où on commence à lui donner fon pied ; mais on ne doit pas le laïfler dans le bain plus de cinq à fix minutes, attendu que le cocon fur-touc prend dans cet efpace tout le bleu dont il peut fe charger, & ne gagneroic prefque rien à 38 ANALYSE refter plongé plus long-temps. Lorfque la teinture paroît bien prife, il fauc cordre chaque pente. L'économie exige que, pour ne point perdre de bain, on torde au-deflus de la cuve, foic que cette opéragon fe fafle à la main, foit qu'elle fe faffe par le moyen d'une cheville qu’on place alors à vingt ou vingt-deux pouces au-deflus de la cuve. Comme on commence toujours le coton ou le fil écru par une cuve baffle, & prefqu'épuifée, on peut y defcendre en mé- me temps, & fans inconvénient toute la quantité de coton, & toutes les pentes qu'on veut teindre en une fois. Il n’en eft pas de même lorfqu’on en vient à des cuves plus garnies ; il fauc diminuer le nombre des pentes en raifon de leur force; & lorf- qu'on en vient enfin à la cuve neuve ou à la cuve à corcer, il ne faut plus y defcendre qu'une pente à-la-fois. Cette pratique eft fondce fur ce que le fil ou le coton paffant d’abord fur une cuve prefqu'épuilce, ces fubftances y prennent leur premiere nuance d'une maniere bien moins prompte & bien moins ra- pide; mais lorfqu’on vient à travailler fur des cuves plus gar- nies, & enfin fur des cuves tout-à-fait neuves, le coton fe chargeant des parties colorantes de la maniere la plus fubtile, il y auroit une inégalité confidérable entre la pente qui auroit été tordue la premuere, & celle qui feroit fortie, par exemple, la dixième ou la derniere de la cuve. Or cet inftant eft précife- ment celui où on doit vifer à réparer tous les défauts , loin de s’expofer à en faire de nouveaux: c'eft en même temps celui où il devient fur-tout impoillble de réparer l'inégalité , & on fent que le temps néceflaire pour cordre une vingtaine de pentes lune après l’autre, eft beaucoup plus que fufhfant pour rendre prefque chaque pente de nuance inégale. Lorfqu'on vient de teindre fur une cuve, il faut la pallier & ne plus travailler deflus qu'on ne lait laiflé repofer au moins vingt-quatre heures. Il faut cependant un peu moins de repos à une cuve qui commence à devenir baffe. L'Indigo y étant alors en bien moindre quantité, il foutient beaucoup moins les autres drogues, & on peut ceindre fur une bafle cuve, même au bout DE LIN DIGO. 39 de dix-huit heures, On reconnoît d’ailleurs aifément fi une cuve p’eft point affez repofce, parce que le coton ne manque point dans ce cas d'amener de la boue jaune, lorfqu'on le tourne. Lorfqu'une cuve a teint trois ou quatre fois, elle com- mence à s'altérer. On reconnoît cette altération, en ce que lorfqu’on la pallie, on n'apperçoit plus de veines à {a fuper- ficie ou qu’elle noircit. Ces fignes ont conftamment lieu, fur: tout lorfque la cuve eft neuve, & il feroit alors impoñlible d'en tirer aucun parti, fi on ne procédoit promptement à ce qu’on appelle réchauffer ou renourrir. Cette réparation confifte dans quatre livres de couperofe verte & deux livres de chaux vive, qu’on rend à la cuve en la palliant deux fois. Lorfque la même cuve a travaillé encore trois ou quatre fois, on la renourrit de nouveau avec moitié de drogues ci-deflus : enfin on peut ré- chauffer ou renourrir une cuve jufqu'à quatre fois, en dimi- nuant la dofe à proportion qu’elle déchcoit en force & en qualité. Dans le cas où on viendroit à la nourrir trop fort, on s’en apperçoit aifément, parce qu'alors la cuve jaunit à l'excès, & qu'en méme-temps les mains des Teinturiers fe rempliffent de crevafles. C'eft encore l'Indigo cuivré de Saint-Domingue, mais choiïfi dans les qualités les plus fines, qu'on emploie pour teindre le fil & le coton. La pâte de cet Indigo étant un peu plus pefante & un peu plus foncée, elle fait beaucoup plus d'effec fur ces fubftances. Pour les Indigos Efpagnols, & fur- tout lIndiso Flore, ils font trop légers, ils font prefque tou- jours des bleux clairs, & ils ne donnent jamais de bleux fon- cés qu'en prodiguant la matière; confidération qui, jointe à celle de leur prix exceflif, doit déterminer les Teinturiers de fil & de coton à les employer le moins qui leur eft poflible. nee Les varsseaux dans lefquels on teint à l’Indigo les laines & toutes les croffes en laine, portent aufñli le nom de cuves. Mais, ayant de détailler la maniere dont elles fe compofent, 40 AINTA'LYISE il eft effentiel de remarquer la différence que les Teïnturiers en laine mettent entre une chaudiere & une cuve. La première, deftince à recevoir l'action du feu le plus vio- lent, eft un vaifleau de‘cuivre portant ordinairement fix à huit pieds de diamètre, fur huic ou dix de profondeur, entouré d'une maçonnerie folide & appuyé fur un fourneau capable de contenir une quantité de bois confidérable. Les cuves de teinture , ne devant point être foumife à l'ac- tion du feu, font compofée de douves, entourées de grands cercles de fer, ont environ fept pieds de profondeur, fur cinq de diametre, & ne fortent de terre qu’à hauteur d'appui. Pour toutes les couleurs, excepté celle où l'Indigo domine, c’eft dans la chaudière que fe font toutes les préparations de la ceinture : on y plonge enfuite les laines ou les draps; & fi ces deux objets fubiflent différens procédes, c’eft coujours en repaflant par la chaudière. Il n'en eft pas de même de la teinture de l'Indigo. La chaudiere ne fert qu'à échauffer cette drogue, ainfi que toutes les autres avec lefquelles on la mêle : on les tranfvafe enfuite dans la cuve, & c’eft dans celle-ci que fe fait le mélange de toutes les drogues, ainf que le refte des opérations. Pour établir une cuve de fept pieds de profondeur fur cinq de diamètre, on jette dans le fond , à fec, deux balles de paftel pefant enfemble quatre cens livres, qu'on à foin de divifer avant. On fait bouillir dans une chaudière, pendant trois heures, une quantité d’eau fuffifante pour remplir cette cuve, avec trente livres de vaude. Cette infufon faite, on y ajoute vingt livres de garence, & une corbeillée de fon : on laiïfle encore bouillir pendant une demi-heure : on raffraîichit enfuite avec vingt fceaux d’eau fraîche, on laïfle rafleoir le bain, on retire la vaude, on tranfvafe D EME TN D TG oO, 4t tranfvafe ce bain dans la cuve; enfin on fait pallier, c’eft-à- dire remuer le paftel avec des rables , par deux ou trois hommes, pendant tout le temps de la tranfvafion, & même Encore un quart-d'heure de plus. Toutes ces opérations faites, on couvre bien chaudement la cuve: on la laifle fix heures dans cet état, après quoi on la découvre & on la pallic; c'eftà-dire qu’on fait mouvoir le paftel dans toute l'étendue du bain, pendant une demi-heure, & on en fait autant de trois heures en trois heures. Tant que le paftel n’eft ni humedté ni divifé, & qu'il refte fous une forme folide, le bain auquel toutes les autres matieres n'ont donné qu'une couleur d’un gris fale & peu caradtérifé x conferve toujours cette même couleur, & ne préfente aucfine apparence de bleu. Bientôt cependant les palliemens réitérés commençant à divifer exactement le paftel, & À le pénétrer d’eau, la cuve commence à entrer en travail Le premier ef- fet qu’elle produit eft de dégager des vapeurs âcres & légé- rement itritantes. À mefure que le pañtel fe met en bouillie , fon action augmente, & la cuve dégage: des vapeurs plus fortes : elle perd fa couleur terne , devient verte, & finit par fe couvrir de veines bleues. C’eft à l'enfemble de tous ces carac- teres, & fur-tout au dernier, qu'on reconnoît que la cuve eft venuc. Pour s’en aflurer davantage, on agite avec le rable, par plufieurs fois, le paftel qui eft au fond, de la cuve, & on finit par le plonger brufquement dans le bain. La cuve porte alors-une fleurée, c'eft-è-dire, une écume bleue ; au lieu d’une blanche, & elle feroit en état de teindre d’un bleu-clair. Le procédé qui fuit immédiatement la venue de la cuve , eft de lui donner ce qu'on appelle Jon pied, c'eftà-diretnviron huit à neuf livres de chaux vive. Dès que cette nouvelle fubf tance cft introduite, on apperçeit à l'inftant des caracteres nouveaux & frappans. La couleur de la cuve devient d’un bleu plus noir & plus foncé, fes exhalaifons deviennent beaucou plus âcres; &, lorfqu’on veut approcher le nez de la partie du Tome IX, F . 42 ANTMANES VASE rable qui a manœuvré au fond de la cuve, on fent l'odeur la lus irricante. La chaux agit avec tant de promptitude fur le paftel ou la totalité du bain , que j'ai vu conftamment la cou- leur changer & devenir beaucoup plus foncée aux endroits même où on venoit de la jetter. C’eft immédiatement après avoir mis la quantité fufñfante de chaux, où même en même-temps qu’on introduit l’Indigo dans la cuve. Pour le rendre propre à garnir les cuves, on commence par le broyer dans le moulin, mais avec la moindre quantité d’eau poflible ; lorfqu'il eft délayé en forme d'une bouillie épaifle ; on le foutire par le moyen du robinet placé à la partie inferieure du moulin, & on le jette fans autre pré- paration dans la cuve. La quantité d'Indigo qu’il faut mettre dans une cuve, n’eft déterminée que par la nuance à laquelle on veut amener le drap ou la laine; & fur une cuve compofée dans les proportions que nous avons énoncées ci-deflus, on peut employer, fans inconvéniens, depuis dix jufqu'à trente livres d'Indigo. Lorfqu'on a mis lIndigo dans la cuve, on ne reconnoït aucun changement pour lodeur ou la fermentation; mais fa couleur devient toute différente. Le paftel , lorfqu'il etoit feul , offroit une couleur grisâtre, avec quelques veines d’un bleu léger. Lorfque l’Indigo eft introduit dans la cuve, la couleur devient d’un beau verd olive, femé de veinesbleues, qui ont le caractere le plus décidé : enfin, lorfqu'on agite le fond de la cuve avec le rable, & qu'enfuite on le précipite brufque- ment au fond de la cuve, comme on a vu plus haut, on ob- tiencune fleurée du bleu le plus vif & le plus riche. Ceft-là ce qui acheve de prouver que la cuve eft en évat; il ne s'agit plus pour teindre que de la pallier deux fois dans l'efpace de fix heures, afin de mélanger parfaitement les matieres; il eft quel- quefois néceflaire de rendre aufli un peu de chaux, pour con- lohider la fermentation. . Lorfqu'une cuve d'Indigo eft une fois établie, on traite cette DE L'INDIGO. 43 préparation bien différemment de toutes celles qui fervent aux autres couleurs. Nous avons déjà dit plus haut , que prefque toutes fe faïfoient dans la chaudiere , & le bain étant poulie à grand feu, par le fourneau fur lequel pofe la chaudiere. Ces différens bains qui fe compofent chaque fois qu’on veut cein- dre, fe jettent aufli hors de la chaudiere, aufli-tôt qu'on a fini les opérations de la teinture; ou s'il y en a quelques-uns dont on conferve le réfidu, c’eft toujours en vuidant la chau- diere, & en les laiflant refroidir dans d’autres vafes qui ne font employés qu'à cet ufage. Il n'en eft pas de même des cuves d’Indigo. Comme le bain qu'on a commencé par jetter fur le paftel, avoit été échauffe À un très-grand feu dans la chaudicre, & étoit à l’état d’eau bouillante, on a foin de ne laifler la cuve expofée à l'air libre, que le temps néceflaire pour la pallier. Auffi-tôt que cette opé- ration eft finie, on ferme fon ouverture le -plus exactement poflible » avec un grand couvercle de bois, fur lequel on étend encore d’épaifles couvertures, & on réunit tous les moyens connus pour maintenir la chaleur des fluides fans l'in- termède du feu. Mais en obfervant même toutes ces précautions , & d’autres femblables, on feroit bien éloigné de conferver aux cuves leur chaleur pendant huic, dix jours, & quelquefois plus, fi on les établifloit dans le même emplacement que les chau- dieres, c’eft-à-dire dans le grand attelier de la teinture. Les chaudieres étant toujours placées fur des fourneaux qu'on poufle à grand feu, la chaleur violente qui s’excite & les va- peurs prodigieufes qui s'élevent des chaudieres mêmes, obli- gent à ne faire toutes ces manipulations que dans des atreliers très-vaftes, qui font des efpèces de hangards, & dont le toir eft pratiqué de maniere que air fe renouvelle fans cefle par de grandes ouvertures qui ne ferment jamais. Si les cuves étoient expolées dans de pareils emplacemens, il feroit impoflible pen- dant les rigucurs de l'hiver, & même dans toute autre faifon, de leur conferver auf long-témps la chaleur qu’elles ont une Fi 4 ANALYSE fois reçue dans la chaudiere; l’efpèce de couvercle & les cou- vertures avec lefquelles on a foin de les couvrir, ne les défen- droient que bien foiblement de limpreflion de l'air extérieur qui les frapperoit fans cefle, & il faudroit probablement ou réchauffer tous les jours, ou renoncer à la chaleur qui eft in- difpenfable pour les opérations. Pour éviter tous ces incon- véniens, on établit les cuves dans un emplacement très-peu fpacieux, élevé au plus de huit à neuf pieds, plafonné , n’ayant, sil eft poflible, qu'une ou deux fenêtres, encore de la plus petite proportion; enfin on obferve toutes les loix de la conf. truction qui peuvent diminuer la circulation de l'air, & con- ferver la chaleur. Les emplacemens ainfi conftruits, fe nom- ment Guefdres. Comme cependant on a befoin de faire communiquer fans cefle les cuves & les chaudieres , on a foin d'établir le Guefdre immédiatement à côte du grand attelier de la ceinture. On pra- tique dans le mur de féparation une ouverture fuffifante pour donner paflage à une longue rigolle de bois, dont l’une des extrémieés porte fur le bord de la chaudiere, & l’autre fur celui de la cuve. Les bords de la cuve étant toujours établis au même niveau que ceux de la chaudiere, lorfqu’on veut tranf- vafer le bain de l'une dans l’autre il ne s'agit plus que de pro- curer de la pente en mettant un taffleau de bois, ou un tam- pon d'écoffe fous l'une des deux extrémités, & de puifer en- fuite, foit dans la cuve, foit dans la chaudiere, avec une efpèce d'écoppe qu'on nomme jet, & dont le manche eft aflez long pour que deux ouvriers puiflent le faire manœuvrer en- femble. Quoique la difpoftion du Guefdre favorife, autant qu'il eff potüble ,le maintien de la chaleur , cette précaution & toutes les autres ne peuvent la conferver qu'un certain efpace de temps; au bout de huit ou dix jours , elle diminue fenfible- ment, & elle fe difliperoit bien-tôt en entier, fi onne procé- doit à l'opération qu'on appelle réchauffer. Elle confifte à tranfvaler la plus grande partie du bain, de DVEË L'IIN D KG 0. 45 la cuve dans la chaudiere , fous laquelle ou allume un très- grand feu. Lorfque le bain a été pénétré d’une chaleur fufi- fante, on le fait repañler dans la cuve de la même maniere, & lorfque la cuve eft ce qu’on appelle réchauffée , on la couvre avec foin de la maniere indiquée ci-deflus. Pendant un an , & quelquefois dix-huit mois qu’on renou- velle fans cefle ce procéde, les deux feuls ingrédiens qu'on remet fans cefle dans la cuve, font la chaux & l'Indigo. On rend de la chaux tous les deux ou trois jours. On remet auf chaque fois qu'on veut teindre, une certaine quantité d'In- digo, pour réparer celui qui a été abforbé par les étoffes pré- cédentes ; mais l'addition de ces fubftances n'empêche pas que la plupart des parties conftituantes de la cuve ne fubfiftent & ne confervent leur aétion pendant plus d'un an fans être renouvellées. J'ai décrit l'opération du réchaux immédiatement après avoir détaillé là maniere dont on établit les cuves, parce qu'elles font également en étar de teindre, foit après le réchaux, foit Jorfqu'elles viennent d’être établies, & qu'elles font dans leur plus grande nouveauté, Il faut toujours pallier la cuve environ deux heures avant de teindre, & râcher par-là d'y répartir le plus qu'il eft poflible toutes les parties colorantes; mais les palliemens, quelques fréquens qu'on les fafle, ne fauroient tenir les drogues dans un ctat de divifion aflez parfait, pour qu'il n’en refte pas une bonne partie au fond de la cuve, fous la forme de bouillie épaifle, & même de pâte. Le contaét de ces parties feroic le plus grand tort aux laines oufaux étoffes, fi elles yenoïient à y être engagées. Pour éviter donc qu'elles n'aient conta& avec le fond de là cuve, qu'on appelle /a pâtée, avant de les y plon- ger, on introduit ce qu'on appelle une champagne. Elle con- lifte dans une efpèce de treilli formé avec des groffes cordes, & arrété à un cercle de bois, quelquefois de fer, portant la même diamètre que la cuve. On defcend la champagne de trois > 46 ANALYSE à quatre pieds dans la cuve, par le moyen de quatre cordes; &, quand elle eft defcendue à certe profondeur , on l'arrête aux bords de la cuve par quatre crochets. Par ce moyen, les laines ou les draps qu'on plonge enfuite, & qu’on abandonne dans la cuve , ne fauroient defcendre jufqu’au fond , & fe trouvent fufpendus à une hauteur où rien ne fauroit leur nuire. Lorfque la cuve eft en état fur tous les points, & que la champagne eft bien établie, on peut commencer à teindre les laines qu’on doit avoir foin de mouiller auparavant dans une eau de fon ; mais la ceinture des laines exige de plus une pré- caution particuliere. Si on les abandonnoit dans la cuve, en même-temps qu'on les y plonge, bientôt pénétrées par l'humi- dité , elles tomberoient au fond , ou elles fe confondroient avec la pâtée, malgré la champagne même, & il feroit impof: fible de les manœuvrer. Pour pouvoir les tenir raflemblées, & à la portée des ouvriers, onne fe contente donc point de placer la champagne à l'ordinaire : on établit au - deflus un filet à mailles crès-ferrées, ayanc par le haut une évafion de la même grandeur que celle de la cuve, & appuyé de toutes parts fur les bords : on jette alors , fans autre précaution, la laine dans le filec: on la remue en tous fens avec de longs bâtons, pour lui faire prendre la teinture le plus également poflble, Lorf- qu'elle eft à la nuance qu'on defire, on leve le filet. Lorfque ce font des draps ou autres étoffes qui fonc l'objet du travail , on établit feulement la champagne: on plonge en- fuire les draps dans la cuve, après quoi on les fait tourner fans cefle fur eux-mêmes, par le moyen de deux petits crochets que l'ouvrier tient dans fes deux mains, & avec lefquels cantôc il ” retire l’étoffe à lui, tantôt il lenfonce; ou, felon le terme de l'art, il fonce les plis qui fe trouvent à flots; c'eft ce qui s ap- pelle mener en cuve. On conduit ainfi l'étoffe cinq ou fix fois far elle-même , & fouvent plus, felon la nuance plus ou moins foncée qu'on veut obtenir; ce qui s'appelle donner un, deux, trois bouts, &c. etes? toi D & AY NIDA G O. 47 Toutes les fubftances qu'on pañle fur les différentes cuves dont nous avons déjà parlé, fortent vertes du bain, & ne pa- roiflent bleues qu'après quelques momens; mais c’eft fur-tout à l'égard des laines & des draps, que ce phénomene 2 lieu de la maniere la plus remarquable. Les laines & routes les étoffes en laine, ne préfentent abfolument aucune apparence de bleu, lorfqu’on les retire de la cuve, & font du verd le mieux carac- cérifé. Ce n'eft qu'au bout de plufieurs minutes , & par le contaét de l'air libre, que tous ces objets commencent à fe dc- verdir , & c’eft pour accélérer ce changement, qu’on évente fortement; c’eft-à-dire , qu'on agite pendant près d’un quart- d'heure les laines & les draps fur le pavé de la ceinture. Quoqu'en retirant les draps & les laines de la cuve, on exprime, en les tordant avec un moulinet au-deflus du bain, tout le fluide fuperflu dontils fonc chargés, il sen faut bien qu'un feul lavage en eau courante fuffife pour qu'on puifle en continuer les apprêts, comme dans les autres couleurs. Si on fe contentoit de ce procédé, l'étoffe une fois fabriquée & ré- pandue dans le commerce , déchargeroit fans cefle les parties colorantes qui font reftées en trop grande abondance à fa fuper- ficie : elle coloreroit jufqu’à ce qu'elle für ufée, tous les meu- bles & toutes les autres éroffes avec lefquelles elle feroic en conta“ ; en un mot, elle feroit fujette à tant d’inconvéniens; que perfonne n’en pourroit foutenir l'ufage. On obferve donc toujours, avant de filer les laines qui ont étéceintes à l'Indigo, de les battre avec de grands rateaux dans des paniers fufpendus au milieu d'une eau courante, & la plus fraîche poffible. L'eau qui a filré à travers ces paniers, & qui! continue enjuire fon cours, eft fi chargée d'Indigo, qu’elle change en entier la couleur de la riviere ou du ruifléau fur le- quel on fait cette opération, qui fe nomme repaumape. On obferve de même, après avoir teint les draps en bleu, de les faire battre en terre peñdant trente & quelquefois qua- rante heures dans les foulcries. L'eau, qui fort des renflures 48 ANALYSE pendant les quinze ou vingt premières heures, eft cout auffi chargée de particules bleues , que celle qui fort au repau- magc des laines, & elle préfente exaétement la même appa- rence que les cuves. Les draps noirs recevant un pied de bleu crès-foncé , avant de pañler à l’engallage, on les envoie aufli en foulerie, lorfqu'ils font achevés , pour y battre en terre le même efpace de temps que les draps bleus. L'eau qui fort des renflures eft d’un noir bien caraëétérifé ; mais je me fuis convaincu, par plufieurs expériences, que c’étoit l'Indigo qui dépoloit encore dans cette occafion , bien plus que lengallage. L'operation, que je viens de détailler à l'égard des draps noirs, cft ce qu'on appelle le lavage en terre. On emploie dans la teinture en laine toutes les différentes qualités d’Indigo fans exception, & même toutes peuvent étre employées fans grand inconvénient aux mêmes nuances ou aux mêmes objets. L'économie prefcric cependant de n’employer que des Indigos de Saint-Domingue, dans la teinture de routes les étoffes deftinces à être enfuite teintes en noir, & auxquelles le bleu fert uniquement de pied. J'ai obfervé que ces Indigos étoient encore non-feulement plus économiques , mais même beaucoup plus propres à la teinture des bleus foncés, foit en laine, foit en drap, & qui doivent refter dans cette couleur. Quant aux beaux Indigos qui nous viennent de l'Efpagne , & qui font connus fous le nom général d’/ndigo Guatimalo , ils font fans contredit les feuls qui aient pu procurer jufqu'à pré- fent ces bleus fi vifs, & qui excitent l'admiration. Ils font les feuls qu'on ait coutume d'employer lorfqu'on veut faire des bleus en même-temps vifs & clairs; & fi leur prix eft prefque le double de celui des Indigos de Saint-Domingue, il eft re- marquable que ce bel Indigo , mis à partie égale dans la cuve, rapporte beaucoup plus. ACCIDENS DE LUN DA GO: #5 Re ——————paZpEZEZEZE—_—_——, MOCCTD ENS Qu'éprouvent les Cuves ; & Expériences faites pour y remédier. Sr ON EXAMINE comparément la maniere de préparer l'In- digo pour la teinture des foies, des cotons & des laines, on remarque également dans ces trois différentes opérations, qu'on ne jette point leréfidu des cuves aufli-tôt qu'on vient de tein- dre , comme cela fe pratique dans prefque toutes les autres couleurs; qu'on conferve , au contraire avec foin, le fond de la cuve, & qu’on ne fait, pendant un certain efpace de temps, que réparer le vuide produit par l’Introduétion des fois , des cotons’, &c. Cette particularité eft fondée fur un caraétère qui diftingue l’Indigo lui-même de toutes les autres fubftances em- ployées dans la teinture; c'eft-à-dire, fur ce que lui feul ft fufceptible de fermentation, & même de fe développer d’au- tant mieux, que cette fermentation eft plus foutenue. C’eft fans doute cette propriété qui a obligé, dans chaque genre de teinture, à traiter cette drogue par des vaifleaux & des procédés particuliers; c’eft probablement aufli à ces mêmes caraéteres qu'on doit attribuer les différens accidens qu'on éprouve dans fon emploi, & (ont le détail fera le fujet de cette troilieme Partie, Les cuves des Teinturiers en foie tombent quelquefois , comme nous l'avons dit plus haut, dans une efpèce de dé- faillance; mais il n’eft pas difficile de réparer ce vice qui ne provient ordinairement que de ce que la cuve a été ou né- gligée ou trop fatiguée. Pour la faire revivre, on compofe un brevet bouilli avec du fon lavé: on y ajoute une demi once Tome IX, k G so ANALYSE de fublimé corrofif, une once de fucre candi , quatre onces de cendre gravelée, & une once de garence. On emploie, de plus, tous les procédés énoncés à l’article de la teinture en foie, pour dégraifler, & on brafle avec foin la cuve lorfque le mélange eft fair. Au bout de quelques heures, on voit la cuve donner tous les fymptômes d'un état parfait, tels que la fleurée, les veines bleues & un beau verd, lorfque l'on fouffle fur la fuperficie du bain, Les cuves des Teinturiers en fil & coton manquent quelque- fois de produire leurs effets ordinaires, & paroiflent cournées ; mais c'eft plutôt parce qu'elles n’ont pas été bien établies d'abord , que par ce qu'on peut appeller accident. L'ignorance faifoic autrefois attribuer leur mauvais fuccès à d’autres caufes, comme à l'odeur qu'exhalent certaines perfonnes , à la mau- vaife haleine , & autres chofes femblables ; mais l'expérience a démontré l’abfurdité de ces conjectures, & on n’attribue plus leur mauvais fuccès qu'aux mauvaifes manœuvres qui ont dû précéder. . Les accidens qu’on éprouve dans la teinture en laine , fonc bien plus graves , bien plus fréquens , & tiennent à des caufes infiniment plus compliquées; aufli ce feront les expériences que J'ai faices à ce fujet, qui occuperont le refte de cet Ou- vrage. J'efpère qu'on me pardonnera les longs détails qu'elles pourront entraîner fi elles indiquent les caufes & le remède d'accidens qui défefperent depuis tant d'années les Artiftes, Quoiqu’une cuve ait été établie avec toute la précaution pof fible, qu'elle foit parfaitement venue, & qu'elle ait déjà donné les plus belles nuances de bleu, il arrive fouvent que le Guef- dron, en découvrant cette même cuve, la trouve noire, fans aucune apparence de veines bleues , fans fleurée. S'il la pallie pour en découvrir le pied, au lieu de voir le bain prendre la couleur d'un jaune doré, & les veines ferpenter à la fuperfi- cie , il n’apperçoit toujours qu'une couleur d’un noir de plus en plus fonce ; il ne peut obtenir de fleurée , quoiqu'il heurte PE EULND:lG O: , 5! à coup redoublés, & l'odeur du bain, au lieu de tirer fur le doux comme lorfque la cuve eft en bon état, affecte au con- traire l’odorat de la maniere la plus piquante & la plus âcre. Si on effaie de teindre fur une cuve qui offre tous ces carac- tères, l’écoffe ou refte entièrement blanche, & ne prend au- cune couleur , ou fort d’un gris fale, terreux & mal uni. Les Teinturiets donnent à ces fortes de cuves le nom de cuves roides ou rebutées. Mais l'accident qui les alarme encore plus , & qui jufqu'à ce ce Jour a fait le défefpoir dès meilleurs Artiftes, eft celui dans lequel la cuve la plus vigoureufe change tout-à-coup de face, & pour ainf dire de nature, pañle du bleu le plus vif à la cou- leur de lefive , exhale l'odeur la plus fœtide, & ne fair que devenir de plus en plus infeéte à mefure qu’on la pallie. Si on rifque de plonger quelqu'érefte dans une cuve exaétement ré- uice à cet état, elle ne prend aucune efpèce de nuance, & elle fort exaétement telle que fi on l’eût plongée dans de l'eau pure, Il ne faut pas. s'étonner fi d’après des fymptômes auffi effrayans, & fur-tout d’après l'odeur terrible que ces fortes de cuves exhalent , les Teinturiers fe font defefpérés toutes les fois qu'ils ont éprouvé cet accident, & s'il ont regardé comme impoflible d’en tirer aucun parti. M. Hellot lui-même, dans fon Art de:la teinture , paroît avoir regardé ces cuves comme perdues fans reflources, & il dit que, vu leurs exalaifons fœti- diflimes, on doit fe hâter de les jetter à la riviere. Quoique la décifion d'un Savant aufi refpeétable , & le cri commun de tous les Artiftes, m'ôtaffent prefque toute efpérance de remédier à ces cruels accidéns, j'ai cru devoir au moins tenter d'en découvrir les caufes; mais la difficulté de faire les expériences elles-mêmes, étoit prefque égale. Les expériences en grand qui applaniflent tous les autres travaux , & qu’on fe trouve heureux d’avoir à fa portée, ne faifoient ici que rendre tout plus épineux, & étoient même impraticables. Le volume prodigieux des grandes cuves , laquantité de drogues de même genre qu'il faudroit y introduire , pour y produire révolution , Gi 2 AINLAIE Y SE enfin la perte énorme qui réfulteroic en facrifiant de propos délibéré de grandes cuves garnies d'Indigo, toutes ces diffé- rentes confidérations rendent comme impoflible de faire des expériences fur de grandes cuves, & M. Hellot paroïc aufli lavoir reconnu, puifqu'il s'eft donné les plus grandes peines pour faire venir une cuve en diminucif ; mais fes travaux à cet égard, n’étoient encore rien moins qu'encourageans. Ce Sa- vant , après une multitude de tentatives inutiles , n’a pu reuflir à faire venir une cuve de la grandeur d’un tonneau, qu’en l'in- troduifant elle même dans une grande chaudiere de cuivre rem- plie d'eau, qu'il entretcnoit toujours à demi- bouillante. On fe doute bien que l'inégalité de la chaleur, la dépenfe, & les autres inconvéniens fans nombre de cet appareil, n’ont pas tardé a y faire renoncer M. Hellot, qui a eflectivement jetté cette cuve au bout de trois ou quatre jours. uoique tous les Teinturiers me confirmafflent comme im- poflible de faire venir une cuve d’un fi petit volume, fans s’é- carter des procédés ordinaires, & m'en portaflent prefque le défi, je crus appercevoir que M. Hellot, au milieu de routes fes tentatives, avoit manqué le point eflentiel à obferver, favoir le nombre d'heures & le degré précis de chaleur auquel les grandes cuves ne manquent prelque jamais de porter bleu. Ayant reconnu par des obfervations fuivies dans différentes faifons, & par les chermomètres les plus exaëts , qu'une grande cuve portoit toujours bleu, fur-tout l'été, au bout de feize heures, & la chaleur du bain étant au cinquante-cinquieme degré du thermomètre de Réaumur, je me flattai d'obtenir les memes eflets fur une petite cuve, dès le moment où je pour- rois réuflir à conferver ce degré de chaleur pendant le même efpace de temps, ou même plus long-temps. Les fluides, comme tout le monde fait, confervant leur cha- leur infiniment plus long-temps, fous un grand que fous un petit volume, le feul moyen de réuflir, étoit d'excéder de beaucoup les précautions qu’on prend pour entretenir la cha- leur dans les grandes cuves. J'ai donc fait conftruire une cuve DE LINDIGO. 53 de la même grandeur que celle de M. Hellot, mais avec des douves de bois de chêne, portant dans toutes leurs parties deux pouces d’épaifleur. J'y ai fait adapter un couvercle de planches encore plus épaifles, & j'ai fait pratiquer dans toute fa circonférence , une rainure d'environ un pouce de profon- deur, pour qu'il fermât hermétiquement la cuve. Celle - ci, outre tous fes autres défavantages , ayant encore celui de ne point être enterrée, j'ai râché de compenfer cet inconvénient , en aflujétiflant tout au tour d’épaifles couvertures de laïnes repliées en fix; j'en ai difpofé de la même nature & de même épaifleur , pour être adaptées fur le couvercle lui- même, lorfque le premier bain feroit ravalé. Ayant enfuité reconnu par plufieurs HR à que les quantités qui pourroient répondre à celles du travail en grand, & me donner les mêmes effets, feroient. ! Trente livres.....»..,.,.....de Paftel, Deux livres ....:».....,..de Gérifle. Deuxilivses - 1: :2.:...1:.de Garence. 2.10. In Quare/ontesibede Son. J'ai fait broyer beaucoup plus menu que de coutume, fes trente livres de Paftel. J'ai rempli d’eau commune deux gran- des baflines, dont les capacités réunies formoient à - peu - près celle de ma cuve, jai partagé ma Gériffe en deux parties égales, que j'ai bortelées, & j'ai mis une moitié dans chaque bafline. Une heure après que cette irifufion étoit fur le feu, & lorf- qu'elle a commencé à jetter de gros bouillons, j'ai partagé entre mes deux baflines deux livres de Garence commune, & environ quatre onces de Son. Jai laiflé bouillir le tout une demi-heure. Lorfque la Garence m'a paru bien difloute, & que les bouillons ont commencé à fortir des baflines, j'ai raf- fraichi chacune avec un fceau d’eau ;alors j'ai jetté mon Paftef le plus divifé qu'il m'a été pofñfible au fond de la cuve ; enfuire s4 RAIN IAMNEUT SE j'ai ravalé ; c'eft-à-dire, fait pañler dans la cuve le bain con tenu dans les baflines, & jai pallié pendant tout le temps de la tranfvafon : il étoit alors quatre heures après midi : la tem- pérature extérieure, & qui différoit très-peu de celle de mon laboratoire , étoit à douze degrés; & la chaleur du bain dans lequel j'ai plongé un thermomètre de mercure, éroit environ à foixante-dix. J'ai recouvert alors ma cuve avec le couvercle & les couvertures dont j'ai parle plus haut, & je ne l'ai vifitée qu'au bout de quatreheures. Après cet intervalle, je l'ai palliée, {lon les régles de la teinture en grand, & j'ai continué en- fuite à pallier de quatre heures en quatre heures, jufqu’au lendemain midi. Elle n’écoit pas encore venue à ce palliement; mais l'ayant vifitce de nouveaux deux heures après, & ayant heurté LE Jai vu qu'elle portoit le plus beau bleu. Pour m'en aflurer de plus en plus, jy ai plongé un petit échan- tillon; il eft forti du bleu le plus caraétérife que puifle donner le Paftel. Ayant plongé au même moment dans la cuve, un thermomètre de mercure, j'ai eu cinquante-trois degrés, c'eft- a-dire , le degré de chaleur que donnent très-fouvent les gran- des cuves elles-mêmes, à pareille époque, & feulement deux degrés de moins que je n’ai énoncé plus haut. Si on calcule de même le temps de fa venue, on verra quelle na guere cxcédé que de deux heures le terme que j'ai donné pour le plus commun dans la venue des grandes cuves , & on con- viendra qu'il eft difficile d’obtenit un rapport plus exaét fur des points qui d’ailleurs ne font jamais conftans ni rigoureux de part & d'autre. : Reconnoiflant de plus en plus, pendant le palliement, que ma petite cuve étoit parfaitement venue , je lui ai donné deux livres de chaux vive tamifée, felon le procéde ordinaire & felon la proportion qui m'a paru la plus convenable. Je l'ai laiflé enfuice repofer fix heures. Après cet intervalle, j'ai com- letté l'établiflement de ma cuve en y mettant deux livres d'Indigo, felon la proportion qui me paroïfloit encore la plus exacte, vu la différence de volume, & Je lui ai rendu en DER LUNDI IIG ©. 5 même-remps une livre de chaux. Cette cuve fur laquelle j'ai teint le lendemain un morceau d'étoffe dans le bleu le plus foncé & le plus nourri, ne me permettant plus de douter de fa parfaite réuflite, je me fuis mis en devoir d'en établir deux autres pendant la même femaine, & elles ont eu toutes le même fuccès. Je devois fans doute, avant de rendre compte d'aucune expérience, expoer celle qui m'a fervi de bafe pour toutes les autres. J'ai cru même devoir entrer dans un détail d'autant plus exa&, qu’elle n’avoit pu reuflir à un homme de la plus jufte célébrité dans les Sciences ; qu'elle n’auroit pas été tentée davantage par les Artiftes qui la regardoïent comme impofli- ble, & que fon fuccès étant au contraire bien conftatée, elle mectra tous les Savans à portée d’obferver de nouveau , dans leurs laboratoires, les phénomènes de cette partie de la tein- ture. Après avoir gouverné ma premiere cuve pendant environ huit jours fans accident, l'avoir réchauffée , & avoir teint def fus plufieurs fois, comme je ne pouvois plus douter qu’elle ne füt dans le rapport le plus exaét fur tous les points avec mes grandes cuves, j'ai tenté d'en déranger l'équilibre en y jettant d’abord un excès de chaux. Quoique je lui en eufle donné une livre en la palliant la veille au foir, je lui en ai encore rendu une livre & demi le lendemain matin, & je ne l'ai plus palliée de la journée. Lorfque je l'ai découverte le leffdemam, j'ai trouvé la belle couleur du bain changée en un noir foncé : fon odeur étoit abfolument celle de ia chaux, & quoiqu'elle portât encore une fleurée bleue, elle ne teignoir nullement les mains; y ayant plongé un morceau d’écoffe, qui la veille auroit été teint du plus beau bleu au bout de fept ou huit minutes, je ne Pai retiré que d’un bleu pâle, terne, & mal égal, après l'y avoir laïflé féjourner pendant quatre heures : tous ces fymptômes, comme je l'ai dit plus haut, font ceux qui prouvent infailliblement qu'une cuve eft roïde ou rebutée. J'ai pris alors le parti de la réchauffer; mais elle 56 ANALYSE eft reftce dans le même état pendant quatre jouts confécutifs. Je l'ai réchauffée de nouveau après cet intervalle. La cuve qui donnoit encore une fleurée légere avant ce fecond réchaux, & porroit encore bleu, a cefle d'en donner alors le moindre veftige ; fon odeur eft devenue plus mordante que jamais , fa couleur plus noire, & elle paroifloit ne devoir plus jamais rendre aucun effet. Je l'ai laiflée deux jours dans cette état & fans lui donner aucun mouvement; lorfque je l'ai décou- verte, le troifieme jour, & que J'ai commence à heurter def- fus, j'ai vu aufli- tôt une fleurée bien cara“térifée , paroitre à la fuperficie du bain ; la fleurée s’eft foutenue fans interruption, & avec les mêmes caracteres pendant trois Jours, que je l'ai liflée encore fans la réchauffer. Je l'ai enfin mife fur le feu le quatrieme jour, bien perfuadé qu'elle reprendroit alors tout fon éclat, & & feroit reparoître fon Indigo. J'ai effectivement apperçu un changement rapide , même en ravalant, & encore plus lorfque j'ai eu cranfvafé cout le bain. La fleurée ne dif- féroit en aucune façon de celle d'une cuve dans fa plus grande force; les veines d’Indigo commençoient à couvrir la fuper- ficie de la cuve, dès le temps même du palliement; & lui ayant laifle quelques heures de repos , j'ai teint deflus un mor- ceau d’étoffe, dans une nuance tout aufli foncée qu'aupara- vant, fans y avoir cependant remis la moindre particule d'Indigo. Ce changement fi complet & fi flatteur , je ne l'ai obtenu, comme on voit, par aucune recette particuliere, ni par aucün brevet compliqué, mais uniquement en redoublant les ré- chaux, & remettant plufieurs fois de fuite le bain fur le feu , en tout ou en païtie. On fera peut-être bien furpris mainte- nant d'apprendre que les Teinturiers regardent cependant le réchaux , en pareil cas, comme la perte totale des cuves, & comme le procédé qu’on doit fuir avec le plus de foin. Tou- jours troublés lorfqu'ils éprouvent quelqu'accident de cette pature, la plupart, ou n'ont jamais tente de réchauffer alors la cuye , & encore moins de redoubler les réchaux , ou frappés de DE LS INNEIX IG20. $7 de ce que le défaftre patoiïfloit redoubler à mefuré qu'ils ré- chauffoient; de ce que la fleurée , les veines bleues , la bonne odeur de la cuve, paroiïfloient fe difiper de plus en plus, à mefure qu'ils réitéroient les réchaux, comme je l'ai éprouvé moi-même; frappés, dis-je, de toutes ces apparences, ils ont cru, & toujours publié depuis, que le réchaux étoit, pour ainfi dire, l’extinétion-totale des cuves une fois rebutées. Pour moi, Jai penfé, dès le commencement de cette expérience, que fi le réchaux rendoit la couleur de la cuve plus noire, fes vapeurs plus âcres & plus mordantes, c’eft qu'il augmen- toit confidérablement la fermentation des parties; c'eft à ce redoublement de fermentation que j'ai cru devoir attribuer la perte de la fleurée, des veines ; & toute défordre appa- rent; mais J'ai conjeturé en même -temps, que rien n’écoit plus propre qu'une telle fermentation, pour ronger l'excès de la chaux, qui étoit vifiblement la caufe du mal , & j'en ai eu la démonftration la plus complète, puifque, dans l'expé- rience précédente, les réchaux réitérés ont rétabli, pour ainfi dire, la faturation exate qui doit toujours exifter entre la chaux & les autres parties de la cuve. Voulant pouffer cette expérience encore plus loin, & re- connoître de plus en plus la vérité de ces conjectures , jai choïfi une feconde cuve établie avec le même fuccès que la précédente, & dans fa pleine force. Quoiqu'elle füc par con- féquent bien pourvue de chaux , Je lui en ai encore donné la valeur de huit livres. On fe doute bien de la prodigieufe révolution qu'une parcille dofe à produite dans la cuve ; en moins de quelques heures, elle ne portoit plus ni fleurée, ni apparence de bleu. L'extérieur du bain étoir même bien autrement dénaturé que dans la derniere expérience; au- lieu d'une couleur noire , 1] n’avoit que celle d’une eau limoneufe 3 & d'une efpece de boue. L’odeur qui, dans l'autre cuve re- butée, étoit âcre & irritante » étoit ici d’une fœtidiré inexpri- mable , & plutôt fade que mordante. Tant de caracteres re- butans ne me firent point défefpérer. Je commençai, felon Tome IX. H æ# 58 ANALYSE mon principe, par réchauffer. Je ne fis, par ce premier ré- chaux, qu'augmenter le cendré de la couleur & la puanteur du bain. Je réchauffai encore fix jours après; j'eus toujours les mêmes fymptômes, & je remarquai fur-tout qu'il m’etoit impoflble, en heurtant, d'obtenir une fleurée, même ana- logue à la couleur du bain. Je ne la réchauffai plus que douze jours après, & je ne reconnus encore aucune différence lors du ravalement ( inftant d’ailleurs où le bain eft toujours le plus trouble ); mais quelques heures après, & lorfque la cuve com- mença à fe refroidir , j'apperçus un commencement de fleurée en heurtant deflus. Cette fleurée, ou plutôt cette écume, étoit grife , & avoit encore très- peu de tenue. Je la laïflai encore quinze jours en repos; mais je la vifitai fréquemment pendant cer intervalle; &, à mefure que le temps avançoit , je m'apperçus que la fleurée commençoit peu-à-peu à bleuir, L'ayant enfin réchauffé pour la quatrieme fois, j'ai vu une fleurée du plus beau bleu fe manifefter dès l'inftant même du ravallement , les veines & la couleur jaune que doit avoir une cuve en bon état, n’ont pas tardé à reparoître; &,au bout de quelques heures, il ne lui manquoit plus aucun des carac- teres quoffrent les cuves qui n'ont jamais rien efluyé. On fe doute bien que je ne donne point cette derniere expérience comme une chofe qui doive être répétée par les Artiftes , mais uniquement comme une preuve encore plus complette de la théorie que j'ai donnée plus haut. J'efpere donc qu'ils reconnoïtront avec moi les véritables effets du ré- chaux en pareil cas, & qu'ils renonceront fur-tout à tant de procédés & de brevets, ou qui n'operent rien, ou qui peu- vent produire un défordre beaucoup plus réel dans les cuves. Mox rriNcrPAL sur dans l’établiffement de ces petites cuves, étant d’obferver , avec la plus grande précifion, ce phénomène encore bien plus frappant, que les Teinturiers appellent pu- zréfaétion où perte totale des cuves , j'en ai confacre plufieurs à cet important objet. Le premier pas dans de pareilles recher- DY'E: #L°E ND GO, 59 ches, étant de connoître les caufes du mal, & de les con- noître au point de favoir le produire , j'ai cherché à faire tourner une de mes petites cuves, en y jéttant d'abord fcpa- rément tous les agens chimiques. Les alkalis, loin de l’alté- rer & d'y produire aucun effet fâcheux , m'ont paru en rani- mer toutes les parties, & cela en raifon de l’analogie dont j'ai parlé en rendant compte de mon analyfe. Tous les acides m'ont paru y faire peu d'effet, fi on excepte cependant l'acide vitriolique. Celui-ci n’y fait pas plus d'effet que les autres à l'extérieur , & quant à la putréfaction de la cuve ; mais il arrête fingulièrement les opérations de lateinture; il empêche l'écoffe de verdir, & par conféquent de prendre enfuite une nuance de bleu égale & décidée. Ne trouvant d’abord aucune recette ni aucun brevet avec lequel je puñle réuflir à faire tourner mes cuves, & ayant d'ailleurs l'expérience journaliere que les grandes cuves tour- nent fans aucune addition , j'ai tâché d’obtenir auffi cet effet par le jeu des fubftances feules qui les compofent. J’avois reconnu par les expériences précédentes, que l'aétion fi fim- ple en elle-même, de réchauffer, avoit une influence éton- nante fur les cuves, & qu’elle étoit leur falut lorfqu’elles étoient rebutées. Ce procédé, comme je l'ai démontré, n'ayant d’effec que par l'efpèce d'épuifement qu'il procure, je foupçonnai que, pouflé encore plus loin, il contribueroit peut-être Ééga- lement à leur perte. Je laïffai donc d'abord une de mes petites cuves que je venois de réchauffer, fans lui rendre ni chaux ni Indigo; je m’apperçus qu’elle devenoit extrêmement jaune, & de plus en plus à doux. Sans attendre qu'elle füt refroidie, je la remis fur le feu, & je la réchauffai à fond. Je m'apperçus d'abord, & comme je m'y attendois, que le réchaux avoit ranimé toutes fes parties. Sa couleur étoit devenue plus brune , fon odeur plus montante : la fleurée & les veines éroient au plus haut degré de beauté. Il étoit environ huit heures du foir lorfque je ravalai; je crus devoir pallier un peu plus long- temps que de coutume; mais je recouvris encore la cuve fans Hij 60 ANALYSE lui rendre ni chaux ni Indigo, & je l’'abandonnai à elle-même toute la nuit. Comme j'avois pallié cette cuve, & heurté deflus fort long-temps , je l'avois laiflé couverte de la plus épaifle fleurée. Lorfque je revins la voir le lendemain matin, je trou- yai encore coure la fleurée de la veille à la fuperficie du bain, mais lorfque je heurtai deflus , la cuve ne me donna plus qu'une legere écume grisatre ; ce que les Teinturiers appellent crémer. Je me mis à pallier, mais le bain ne n'offroit plus de veines; fa couleur étroit d’un jaune blanchâtre; fon odeur de- venoit fœride, & je remarquai {ur-tout avec le plus grand éton- nement, que la belle fleurée obtenue la veille, fembloic fe ronger , & difparoifloit à mefure que je continuois à pallier. Obiervant toujours conftamment cette méme cuve, fai vu difparoiître jufqu'à la moindre particule de bleu; & en moins d'une demi-heure, la fœrtidité qui ne fe manifeftoit pas avant, s'eft accrue à un degré inexprimable. Tant de caraéteres & aufli conformes à ceux que j'ai dé- taillés plus haut, me prouvoient bien clairement que javois réufli à tourner complétement ma cuve, & que fi le réchaux avoit paru la ranimer d'abord, ce n'avoit été que pour le plus court intervalle, J'ai tenté alors différentes expériences qui m'en ont convaincu de plus en plus. Fy ai plongé un morceau d’étoffe que j'avois mouillé auparavant dans de l’eau chaude pour le rendre plus facile à teindre, & je l'ai mené en cuve un temps confidérable. Je l'ai retiré après ce temps fans aucun veftise de bleu , mais feulement un peu roufli. Soupçonnant que la cuve étoit alors dans une efpèce d'état dévorant, jy ai plongé un morceau d’étoffe déjà teint dans un bleu foncé; en moins de deux heures, l'échantillon étoit tombé de dix nuances. Un morceau de toile bleue y ayant féjourné lefpace de douze heures, il en eft forti entièremene déteinc; & cette cuve, qui auroit produit quelques heures plucôt le bleu le plus riche , étoit alors l'intermede le plus propre à corroder cette couleur. D EU E NW DE GO. 1 61 J'ai fait une dernière expérience qui prouve encore mieux Ra rapidité avec laqueile la cuve abforbe & décompofe tout ce qu'on lui offre, lorfqu’elle eft dans cet état. J'avois obfervé plus d'une fois quele bain d’une cuve non altérée pénétroit le tiflu animal à un point fingulier , que fi on plongeoit la main dans cette cuve, non-feulement la peau ; mais même les ongles étoient auifi-tôt imprégnés de teinture, au point que le favon, le fon, les cendres mêmes, ne pouvoient leur faire perdre fur-le champ la couleur; & ce n’eft, en'effet, que pat des lotions réitérées qu’on y parvient. Ayant fous les yeux deux cuves, dont l'une étoit dans fa plus grande vigueur, & l’autre dans cet état de putréfaétion complète, j'ai plongé les mains. dans la premiere , & les y ai laifle tout le temps nécef. faire pour qu'elles priffent le plus grand degré de bléu poili- ble. Je les ai plongé enfuite dans la cuve putréfiée ; en moins de quelques fecondes toute la couleur de mes mains a difparu. Quelques Guefdrons fe font imaginés , de loin en loin, de rendre alors de l'Indigo à la cuve, & fe fonc flattés, par- à, de lui reftituer fa couleur bleue; mais on fe doute bien que la cuve n’en à fair que ronger davantage. L'inutilité de ce procédé a donc achevé d’iccréditer de plus en plus l'idée où l'on a été, de tous les temps & dans tous les atteliers, qu'une cuve réduite à cet état étoit putréfice; c’eft-à-dire, felon les Artiftes, perdue fans reflources ; &, comme on vOyoit tou- jours la fœtidité de ces cuves s'accroitre de plus en plus, on a cru ne pouvoir crop fe hâter de les jeter à la riviere. J'ai ouï dire maintes fois, que des Teinturies gagés, craignant de perdre leurs places, lorfqu'ils avoient eu le malheur de laifler tomber une cuve dans cet état, avoient emprunté, ou pris fur leur propre fortune , de quoi rétablir ces cuves qu'ils Jet- toient en fecrec. J'ai vu moi - même des propriétaires de teinture, perdre jufqu'à dix mille livres dans une {eule année, Par une fuite de cuves qui leur avoient préfente ces caractères, & qu'ils s’éroient cru, en conféquence, obligés de jeter à la 62 AN UE TS E riviere : enfin j'ai connu un Aïtifte infortuné, qui a été rc- duit à faillir, & même à la mendicité, par la perte de quatre cuves confécutives. Il eft fans doute bien intéreflant de pouvoir annoncer que c'eft le prejugé, & le préjugé feul, qui cft encore la caufe de ces malheurs, que les Artiftes fe font encore laïfle abufer par les apparences, & que ces cuves qu'ils ont toujours cru abfo- lument perdues, contiennent encore fans aucune altération toutes les parties colorantes , & font routes prêtes à les refti- tuer. Cette aflertion paroîtra fans doute bien hardie au premier afpect ; je fais même que les Artiftes ont une autorité refpec- table pour fe couvrir, & qu'un grand homme a partagé leur opinion; mais je crois avoir à leur oppofer tout ce que l'ex- périence a de plus fort, & jefpere qu'il en fera de ce pré- jugé comme de tant d’autres de la plus grande importance , qui ne font que d’être dévoilés. D'après les moyens que javois employés pour faire tourner ma petite cuve, tous les états par lefquels elle a paflé enfuite, loin de me paroître un défordre, m'ont paru une fuite des loix de la Nature même , & ils ont cefle de me caufer aucun étonnement. J’avois excité par des réchaux réitérés une fer- mentation & un travail exceflif entre toutes fes parties. J'a- vois en même temps retiré la feule fubftance qui foutenoit laëtivité & l'union entre elles; le paftel, & fur-tout l’Indigo étant deux fubftances qui ont déjà pañlé par la fermentation fpiritueufe & la fermentation acide, il étoit néceflaire qu’el- les fubiflent alors l'une & l’autre la fermentation putride, & on ne peut difconvenir que tous les fymprômes d’une cuve perdue, ne fe rapportent exaétement avec ceux de cette der- nicre fermentation. Celle-ci eft encore, à la vérite, celle de toutes qu'il eft plus difficile d'arrêter dans fes effets; elle eft ordinairement l’an- nonce sûre, & Île moyen de deftruétion de tous les corps; mais connoiffant aufli-bien les caufes qui l’avoient amence, D'EVE TIN DIL G O. 6; & en ayant fuivi tous les progrès, je me flattai d'y remédier, fi je ne pouvois trouver un anti-putride aflez puiffant. Après les avoir épuifé tous, j'ai reconnu que la fubftance la plus com- mune de toutes, la plus connue des Teinturiers, & la plus connue des Guefdrons même, étoit la feule qui if faire effet en changeant, à la vérité, de beaucoup les dofes ordinaires. C'eft la chaux dont jai déjà parlé tant de fois, qui n'a rendu ces effets fi précieux dont je vais donner le détail; &, après avoir une fois furmonté tous les caraéteres rebutans de ma petite cuve, je n'ai fait autre chofe qu’excéder de beaucoup les proportions qui fervent ordinairement de régle. J'ai donc jetté dans la petite cuve dont j'ai toujours parlé jufqu'à préfent , environ huit livres de chaux, & jai pallié aufhi long-temps que fon odeur fuffoquante me l’a permis. J'ai quitté aufli-tôt mon laboratoire, où il m’étoit impoflible de tenir, & je n'y fuis rentré que quatre heures après. Je trouvai cn rentrant l'odeur diflipée, non-feulement de mon labora- toire, mais de ma cuve même. Quoique je l'aie pallié pour lors crès-long-temps, je ne lui ai plus trouvé que Fodeur d'une cuve à doux, mais elle ne donnoit toujours aucune fleurée. L’ayant vifitée de nouveau deux heures après, la fleurée bleue à commencé à fe manifefter, & le lendemain matin la cuve s'en eft couvert, lorfque j'ai pallié. Elle avoit donc tous les dehors d’une cuve parfaitement rétablie; mais avoue qu'elle n’a pas tardé à noircir & à me donner tous les caraéteres de la roideur, fans même la réchauffer. Cette pro- digicufe quantité de chaux bien propre à la vérité à produire, & même d’une maniere fubite, le premier effet que je defi- rois, a jetté la cuve dans un autre inconvénient; j'ai donc tenté d'obtenir un rapport plus exact dans une nouvelle expérience. Ayant encore une cuve entièrement tournée, fans fleurée, fans aucune veine, ne faifant que crêmer lorfque je la heur- tois, & ne donnant plus aucuneapparence de bleu, je lui aï donnc d’abord deux livres de chaux. Je l'ai découverte au bout 64 OMAN AE YA SE de deux heures. Je n’avois aucun changement. Étant revenu deux heures après, je n’apperçus encore aucune différence. La cuve étoit toujours fœtide, fans fleurée, & crémoit même encore; je pris alors le parti de jeter une livre de chaux. Au bout'de quelques minutes, l'écume prit un peu de confiftence, la fleurce reparut de plus en plus :enfin, ayant donné encore huit onces de chaux, la fleurée eut une confiftance décidée, & le goût de la cuve, qui étoit auparavant de la plus grande fœtidité , prit beaucoup de montant. Je la laiflai dans cet état toute la nuit, & je ne la vins vificer que le lendemain matin; mais je m’apperçus qu’elle étoit encere devenue un peu roide, & que J'avois encore un peu excédé la quantité de chaux qui étoit néceflaire à la cuve. L’ayant abandonné pendant quatre jours , je m'apperçus qu'elle commençoit à revenir à doux, & à porter un peu de fleurée, quoiqu'extrémement froide. Je jugeai qu'il étoit temps alors de la remettre fur le feu. Pen- dant qu'elle fe réchauffoit, & beaucoup plus encore lorfqu’elle fut ravalée , la fleurée reparut avec le meilleur caractere ;- l'odeur n’étoit que celle d'une cuve en bon état; &, quoique fa couleur füt encore très-brune, je jugeai qu’elle feroit bien- rôt en état de travailler. En effet, après lui avoir encore donné deux palliemens, & laiflé rafleoir la pâtée, j'y ai plongé une aune d'étoffe, & l'ai mené en cuve l’efpace de dix minutes: elle eft fortie du plus beau verd, & après avoir été éventée , jai eu un bleu vif & bien tranché. Je lui ai donné un fecond bout, pendant environ le même efpace de temps, J'ai eu en- core le plus beau verd en levant létoffe hors de la cuve, & aprés l'évent, un bleu également vif & fonce , qui s'eft très- bien foutenu au lavage, Six heures après avoir fait ainfi tra- vailler cette cuve, je lui ai donné une demiHlivre de chaux : elle à toujours continué à donner les meilleurs caraétères , & même elle à quitté, petit-à-petit, fa couleur noire qu’elle af- fectoit encore immédiatement après ce dernier réchaux. Trois jours après, quoique fa couleur für prefqu’entièrement tom- bée , elle étroit plus belle quejamais , d’un beau jeaune, & cou- verre de veines bleues. J'ai dir, D'EÉYLY N D'E G O. 65 J'ai dit, dans le commencement de cet article , que je,n’a- vois pu réuflir à faire tourner aucune de mes petites cuves, en y jetant les différens acides ,ou les différens alkalis féparé- ment; maisayant compolé quelque temps après un breveravec fix onces d'huile de vitriol,une once de potafle , une demi- once.de borax , & une once d’Indigo, j'ai reconnu que cebre- vet avoit la vertu de faire tourner mes cuves prefqu'a l'inftanc. Jai profité aufli-tôc de l’aétion rapide de ce mélange , pour cflayer de faire tourner & de reproduireun plus grand nom- bre de cuves en peu de temps. La premiere cuve fur laquelle j'ai fait cet eflai, écoit plutôc un peu roide que, difpofée à s'affoiblir. Aufli-tôt que j'ai eu jetté le mélange, il s'eft excité dans la cuve une violente effervefcenfe. Une fleurée grisäcre s'eft formée à la fuperfcie , & eft devenue à l'inftant fi abondante, qu'elle débordoit pref- que la cuve. Lorfque cette grande efferyefcence a été calmée, jai pallié fortement ma cuve, & j'en ai confidéré attentive- ment le fond. La couleur qui, avantle nouveau mélange, étoit d'un noir brun, comme l’eft toujours celle d’une cuve roïde, avoit pris, en moins de quatre ou cinq minutes, une nuance jaune femblable à celle des cuves qui font le plus en état. L'odeur roide & âcre de la chaux s’eft diflipée avec la même promptitude, & a fait place à celle des cuves que l'on nomme a doux. il étoit alors fix heures du foir ; Jai recouvert ma cuve. jufqu'à huit. Lorfque je fuis venu la revoir , j'ai trouvé que dans, cet efpace de temps fi court, elle s’'étoit prefqu'en- tiérement tournée; elle jettoit déjà l'odeur la plus fœride;; elle crémoit fortement, ne donnoit plus aucune fleurée , & ne donnoit qu'un gris-fale à létofe : je lui ai donné deux livres de chaux pour l'arrêter, & le lendemain matin encore une livre. Cette quantité de chaux a effeétivement diflipé en partie la putréfaétion qui commgençoit à fe maniféfter fi fortement. La fieurée bleue a connhencé aufli à reparoitre ; mais, pour m'aflurer de plus en plus des effets que j'avois déja obtenus, jai jetté à fept heures du foir quantité égale de ce brevet, & Tome IX, I 66 ANALYSE compofée exaétement de même, excepté qu'à la potaffe j'avois fubftitué de l'alkali fxe concret. J'ai eu un peu moins d’effer- velcence en jettant le mélange, foit que ma cuve fût plus roide, foit à caufe de l'alkali fixe; mais les mêmes effets ont répatü dans la cuve , & même plus fubitement. En huit ou dix minutes ; l'odeur de la cuve eft devenue infupportable. Suffoqué par la fœtidité qui sen dégageoit, & reconnoiflanc d'ailleurs tous les fymptômes de la cuve la plus complète- ment tournée , Jai ceflé de pallier; mais, avant de recouvrir, Jai jetté dans la cuve environ crois livres de chaux. À dix heures du foir, je n’avois aucun changement. Le lendemain, Podeur étroit éncore fi forte , que je fus obligé d'abandonner la cuve, & qu’elle me caufa des naufées violentes. Le furlende- main, je mapperçus bien que la puanteur étoit un peu dimi- nuée, mais le bain étoit toujouts exactement de couleur de terre, & fans aucune refflemblance à celle des cuves en étar. Je l'äbandonnai alors pendant quatre jours fans la découvrir. Lorfque je l'ai vifité, après cet intervalle , toute l'odeur fœtide ctoit diffipée; on ne fentoit plus que celle du pañtel; & la cuve , quoiqu'entièrement froide , donnoït une petite fleurce bleué, Je me füis alors empreflé de la réchauffer. Aufi-tôc qu'elle a été fur le feu, & encore bien plus lorfqw'elle a été ravalée, elle à porté la fléurée la plus riche. J'ai plongé de- dans, au bout de quatre heures, un morceau d’étoffe; il à pris, dès le premier bout, un bleu très- vif; mais ce qui prouve fur-tout combien cette cuve étoit réparée, c'eft que Jai cu le verd le plus marqué que jaie jamais vu en retirant l'étoffe du bain. J'ai tourné & reproduit de la forte, au moins dix petites cuves, & jairépére certe finguliere expérience jufqu'à quatre fois fur une feule. Après des fuccès aufli foutenus, & fur-tout aufi convaincu que je l’étois du rapport exaët de mes petites cuves ayec les grandes, fur rous les pots, j'aurois pu ter- mincr-là mes travaux À cet égard, & mes Juges trouveront fans doute le problème déjà complétement réfolu; mais jaloux DÉ L'IN DIG O. 67 de diffiper jufqu'au moindre nuage, & fur-fout ne voulant pas laiffer le moindre retranchement au préjugé , je vais rendre compte de l'expérience au moins aufli triomphante que j'ai faite fur une grande cuve. Je me trouvai avoir, au 15 de Mai 1776, une grande cuve dont le paftel étoit extrémement fatiguée, & dont lIndigo étoit prefqu'entièrement tiré par vous les objets que javois paffé deflus: Je formai auffi- tôt le projet d'employer tous les moyens que javois reconnu contribuer à la perte des cuves. Je défendis expreflément de lui rendre de la chaux. Je neus d'abord aucun effet ; je foupçonnai que cette inattion ve- noit de ce que ma cuve étoit refroidie; & ayant éprouvé, comme je l'ai dic plus hauc, que le pañtel ne travailloit plus, ou très-peu, lorfque la cuve étoit froide, je la fs réchauffer : elle fut encore un ou deux jours fans donner aucun ffmptôme extraordinaire. Le 22, elle commença à crémer, & fa fleurce à diminuer fenfiblement ; le lendemain, elle étoit entièrement tournée, n'avoit plus de fleurée, & commençoit à exhaler une odeur très-fœtide. Pendant les trois jours confécutifs , l'odeur devint de plus en plus fœtide ; au quatrieme, elle infeétoit non-feulement le bâtimenc où la Teinture eft fituée, mais en- core tous les bâtimens voifins , & même plufeurs jardins fitués à l’entour. L’odeur devint alors fi terrible, que les ou- vriers me conjurerent de faire vuider la cuve; mais je demeu- rai inflexible, réfolu de fuivre fon état beaucoup au-delà de toutes les expériences, qui pouvoient avoir été faites jufqu’à moi. Comme je commençois cependant à craindre des acci- dens de cette terrible odeur, & à croiré qu'il étoit cemps de tenter quelques épreuves, je fis jetter environ vingt livres de chaux en grumelot ; jétois alors au vingt-cinq: Je ne décou- vris ma cuye que trois jours après, réfolu cependant de la jetter à la riviere, fi je ne trouvois aucun changement ; mais je vis, au contraire , avec une bien grande furprife , qu'elle avoit une odeur infiniment moins fœtide : en heurtanc, deflus, j'ap- perçus une fleurce caractérifée ; & plus je continuai à heurter, plus Ia fleuréce devint marquée. J'avois efayé , lorfque la cuve li 68 AUNAANLY:S E étoit entièrement tournée, de teindre deflus; &, ayant retiré mon étoffe exactement celle que je l'avois plongé, je m'étois convaincu de plus-en plus, qu'une cuve en cet état ne donne plus le moindre veftige de couleur. Il étoit de toute impor- tance, pour avérer l'efpèce de renouvellement de ma cuve, d'effayer fi elle recommençoit à teindre; mais elle étoic alors fi froide ( c’étoit le vingt - huit ), qu ‘elle mauroit pas méme faifi létoffe, fi elle avoit été dans le meilleur état. Je la fs donc & qu ‘elles fonc t toujours prêtes à reparoître auñfi femblables à elles - mé- mes, & aufl peu alcérées que la matiere des précipités quel- conques. Qu'eft- ce qui peut produire des fymptômes aufli extraoïdinaires, & fur- tout auffi rebutans ? Je le répète, ce font les commencemens de la fermentation 1HrcE ceft elle qui produir lhorrible fécidite des cuves, puifqu'el Je feule eft en pofleflion de ‘répandre une odeur hépatique fur toutes | les cf LA 1 D'EÉMLUIN'D'T G O. _ 69 fubftances , & d'y produire même un vrai foie de foufre: c'eft elle encore qui fait difparoître toutes les parties colo- rantes , puifqu'elle ne manque jamais de porter également fes ravages fur le principe colorant de toutes les fubftances qu'elle attaque, & que la deftruétion des couléurs eft même un des premiers fignes de fon aétion. Queft-ce qui peut pro- duire la fermentation putride elle-même, & la produire dans certains m@mens plutôt que dans d’autres? C'eft l'épuilement de la chaux; c’ettà-dire, l’épuifement des parties falines qui font feules capables de prévenir ou de fufpendre ce genre de fermentarion. Toutes les matieres végétales, comme le rappelle le programme même de l’Académie, étant fufcepribles des trois fermentations, fpiritueule , acide, putride, & les pincipes vé- gétaux des cuves n'ayant pañlé, lors de leur fabrication, que par les deux premiers degrés, il eft néceflaire qu'ils fe préci- pitent vers le troifieme, dès qu'il ceffe d’être contenu par un anti-putride aflez puiflanc, & il eft dans les loix de la Nature même, qu'ils offrent alors tous Îes fymptrômes de la deftruc- tion. Comment enfin la chaux adminiftrée feulement à des dofes beaucoup plus fortes & plus fréquemnrent que de cou- tume, peut-elle reftituer la plus belle fleurce & les veines bleues les plus vives à des cuves qui n'offrent qu'une bourbe fœride ? C'eft par la faculté qu’elle a non feulement de pré- venir, mais encofe d'arrêter dans cette circonftance- ci la fer- mentation putride, Cette fubftance arrêtant le mouvement inteftin & rapide qui troubloit l'harmonie de tous les prin- cipes, qui commençoit à divifer & à denaturer toutes es parties , il eft naturel qu’elles fe rapprochent, qu'elles fe re- forment fur les mêmes principes, qu'elles recommencent à former un même tout, & par conféquent qu'elles recouvrent teur odeur, leur couleur, leues effets. : Jenecrois pas qu'il foit poflible de démontrer, d'unemaniere plus-évidente; la caufe d'un accident, ni d'offtir un remède plus prompt, plus sûr &-plus fimple; mais come lAca- démie demande non-feulemenc les caules & les remèdes des 70 ANALYSE accidens qu'éprouvent les cuves, mais encore les moyens de les empêcher & de les prévenir, je crois devoir avertir les Arciftes que jamais leurs cuves ne courent un plus grand rifque que lorfqu’elles viennent d’être érablies. Le paftel & les autres ingrédiens de la cuve étant alors dans leur plus grand degré d'adtivité, c’eft alors aufli qu'ils rongent davantage & avec plus de promptitude. Lors donc qu’on a une cuve neuve dans un gucfdre, il faut toujours excéder un peu la proportion dans laquelle on rend dela chaux aux autres cuves plus an- ciennement établies; fi on ne lui en rend qu’au méme degré, ou même tant foit peu peu moins, on court le plus grand rique de la perdre. Siune cuve ancienne ou neuve ef très-jaune & très-à- doux, lorfqu'on la réchaufle, il eft de toute néceflité & de toute importance de lui rendre de la chaux aufli-tôc qu'elle eft ra- valée, ou peu de temps après. Le réchaux ranimant toutes les parties de la cuve, la rendant plus brune, & lui donnant une odeur plus ferme, les Teinturiers la regardent fouvent alors comme bien en état & pleine de force ; mais ce renouvellement n'étant , comme Je l'ai dic plus haut, que de très-courte durée, elle acheve, au contraire, d'épuifer fa chaux, & elle courne infailliblement avant d’être refroidie. J'ai obfervé qu'une cuve foic petite, foit grande, ne tour- noit jamais lorfqu'on venoit de la ravaler , ni même plufieurs heures après; mais le plus fouvent deux ou trois jours après avoir été réchauffée, & lorfqu'elle commençoic à être confi- dérablement refroidie. C’eft donc lorfque la chaleur d’une: cuve commence à tomber, qu'un Guefdron doit tout craindre, vifiter plus fouvent fes cuves , & fur - tout rendre de la chaux. Je me fuis convaincu par une expérience bien frappante, que c'eft uniquement le degré de chaleur, & non pas le laps du temps, que les Teinturiers doivent obferver dans cette même circonftance. Ayant établi la plupart de mes petites cuves dans l'été, & lorfque le thermomètre étoit à douze desrés, j'en at établi deux lorfqu'il étoit à fix. La température de l'air con- D E £"1 N'!DA G O. 71 fervant la chaleur des premieres beaucoup plus long-temps, je n’ai pu les faire tourner que trois jours & trois nuits, quel- quefois même plus long-temps encore après le réchaux. Les dernieres s'érant refroidies, avec la plus grande célérité, jai réuffi à les fairetourner au bout de vingt heures. C’eft donc toujours au même degré de chaleur, & non pas après le même efpace de temps que les cuves tournent: ce n'eft jamais de quaränte -cinq à foixante-dix degrès, mais toujours de trente à quarante-cinq ; & fi les Teinturiers ont foin de bien obferver ce degré, ils ne feront jamais furpris. . La différence prodigieufe qui n’exifte que trop fouvent dans la vigueur & la qualité des paftels,eft encore une des chofes qui contribue le plus à furprendre les Artiftes & à perdre leurs cuves, quoiqu'ils les aient d’ailleurs très-bien conduites. Ayant établi deux petites cuves avec l'égalité la plus rigoureufe dans les dofes de chaque ingrédient , mais feulement avec deux diffe- rentes fortes de paftel,, j'ai d'abord obfervé une différence mar- quee dans le moment de la venue. Celle dont javois reconnu le paftel pour mauvais, n’eft venu qu’au bout u vingt-quatre heures. Celle dont je foupçonnois le paftel beaucoup meilleur a porté bleu au bout de feize. Ayant enfuite employé tous les moyens que je connoiflois pour les faire tourner; le paftel , qui avoit été fi long-temps à porter bleu, s’'eft putréfic en moins de douze heures. Pour la cuve dont je favois le paftel beau- coup plus vigoureux, j'ai été près de trois jours & deini à l'amener aux moindres apparences d’affoibliflement. Ces dife- rences qui fe manifeftent encore d’une maniere bien plus frap- pante dans les cuves en grand, furprennent tous les jours les Artiftes de lammaniere la plus cruelle, & fans qu'ils puiflent en deviner la caufe. Pour les mettre encore en garde contre cette fource d’accidens , je les invite donc à confidérer toujours , avec la plus grande attention, la nature de leur paftel, lorf- qu'ils établiflenr une cuve. Si ce pañtel eft difficile à broyet , verdâtre dans l'intérieur lorfqu’on le brife; & fi, dans les pre- miers momens, il ne donne au bain qu'une couleur brune gl 7È ANALYSE eft de la meilleure qualité, & il fouriendra long-temps fon action. S'il fe réduit facilement en poufliere, lorfqu'on veut le broyer dans la main; s'il eft d’une couleur terreufe dans lin- térieur, & sil donne dès les premiers jours une couleur très- jaune au bain de la cuve, il eft infailible qu'il aura très-peu d'énergie, & qu'il fera tourner la cuve aufli-tôt qu’on retat- dera, où qu'on diminuera tant foit peu la dofe de chaux qui lui convient. Je ne me fuis apperçu qu’en dernier lieu, que la qualité de la chaux elle même avoit la plus grande influence fur les cuves, & contribuoit très-fouvent à leurs accidens. C’eft toujours de Ja chaux vive qu’on emploie à cet ufage ; mais cette chaux, lorfqu’elle a été, par exemple, retirée de pierres tendres, po- reufes, &, prefque friables, a infiniment moins d'action fur les cuves ; & quoiqu'on leur donne une très grande quantité de chaux de cette efpece, on n’y produit prefqu'aucun efler., Si la chaux eft, au contraire, retirée de pierres denfes, & dela plus grande dureté, celles que le marbre ou autres pierres auf dures, la moindre quantité produit la fermentation la plus vio- ‘lente dans la cuve, & fuffit pour la rebuter. C’eft donc encore ici une des choles qui font fouvent la plus funefte illufion aux Aïtiftes, & qui rebutent ou font tourner leurs cuves au mo- ment même où ils obférvent le plus exaétement les dofes re- çues. Ils previendront cependant tous les accidens qui pour- roient en refulter ,en s'informant exaétement de quelles pierres a été retirée la chaux qu'ils emploient, de quelles carrieres ont été tirées ces pierres elles-mêmes, & fur-cout en faifant de pe- tics eflais fur leurs cuves, avant d’y jetter avec confiance la chaux dont ils viennent de faire emplette. Je ne crois pas devoir terminer cet article fans expofer le rapport bien facis- faifant que j'ai trouvé entre cette remarque & les obferva- tions fiingenieufes que MM. Duhamel & Macquer ont publiées fur la chaux. Ces deux Chimiftes ont reconnu, par une fuite d'expériences convaincantes, par les différens degrés d’efter- #éfcence des acides, & par la différente influence des alkalis, que DEMI ND4EG O7 A 734 que la chaux différoit beaucoup dans fes propriétés, felon la nature de la pierre qu'on avoit calcinée. L'obfervation dont je viens de donner le détail , quoique fi éloignée des appareils & des expériences ordinaires , appuie fans doute cette belle théorie d'une maniere bien frappante, & doit la faire rcgar- der comme une des véricés les plus inconteftables qui exiftenc dans li Chimie. Je ne croirois pas avoir épuife toutes les précautions , qui pèuvent prévenir la putréfaétion des cuves, fi je n’indiquois la quantité de chaux qu'on doit ordinairement leur donner en les établiflanc, & qu'on doit leur rendre enfuite lorfqu'el- les font une fois établies. La quantité de paftel qu’on met pour établir une cuve, n’eft jamais réglée; elle dépend toujours, . ou de fa grandeur , ou même fouvent de la volonté de l'Ar- tifte; mais quelle que foit cette quantité, j'ai reconnu, par une multitude d'expériences, tant en petit qu’en grand, que la chaux devoit toujours être avec le paftel, dans le rapporc d'un trentieme lorfqu'on établifloit la cuve, & qu'enfuite on ne devoit jamais en rendre plus du foixantième, à moins d’accidens. Si on met donc de trois à quatre cens livres de pañtel pour établir la cuve, on ne doit pas mettre plus de dix à douze livres de chaux, lorfqu'elle commence à porter bleu ; lorfqu’on lui en rend enfuite, pour confolider & entre- tenir fon action, on doit lui en rendre au plus cinq à fix livres. Si tous les Artiftes adoptoient cette proportion, & fi, pour y réuflir plus sûrement, ils ne mettoient jamais la chaux dans leurs cuves, qu'après lavoir exaétement pefée , au - lieu de la jetter au hafard avec une febille de bois, ou avec l'inf- trument qu'ils appellent sranchorr ils s'évireroient pour jamais, & les accidens de la roideur ou du rebut, dont nous avons parlé plus haut, & celui de la putréfation qui eft toujours ficheux, & qui appotte toujours du retard aux opérations, même lorfqu'il eft le mieux réparé. Tels font les derniers détails dans lefquels j'ai cru devoir en- trer pour remonter aux dernieres fources des accidens des Tome IX, K var A N 4 L'YSSES DIE ML: IN ED. É,G:0; cuves. L'Académie defiroit que les Auteurs offriflent non -feu- lement une Analyfe chimique de l’Indigo, mais encore des. expériences qui découvriflent les caufes , les remèdes, & les moyens même de prévenir ces accidens. Eft-ce donc trop me fatter , que de croire que jai rempli ce triple objet aufli com- plétement qu'il étoit poflible? Ma feconde Partie contient de plus les loix les plus précifes. & les plus exactes pour appliquer l'Indigo avec fuccès à la tein- ture des foies, des cotons, & des laines : cette partie peut même être regardée comme un Art complet de la Teinture en bleu. Sià ces travaux, qui ont fi direétement la ceinture pour objet, on joint les découvertes que j'ai données dans mon Analy{e même de l'Indigo, le fecret de faire percer infaillible- ment la teinture du bleu & du verd de Saxe, & de rendre ces deux couleurs de toute folidité, le moyen plus précieux encore de changer prefque la nature de l'Indigo , & de l'augmenter réellement de qualité & de prix, en le dépouillant de fa ma- ticre extrattive, j'efpère qu'on m'accordera au moins l'avantage d'avoir offert des expériences auf applicables qu'elles puilent l'être au fuccès & à l'avancement de l'Art de la teinture. On aura lu, fans doute, avec au moins autant d'intérêt tous les changemens que j'ai propofes , pour reculer , s'il eft poflible, lf ruine dont font menacées nos Indigoteries ; les nouveaux procédés que jindique pour la culture de ces ter- reins, pour la conformation des pierres à Indigo, pour l’ex- portation de cette marchandife, Des objets d'une pareille im- portance, quand même ils ne feroient qu'ébauchés dans cet Ouvrage, font bien faits pour captiver route l'attention de Juges rels que ceux qui décideront ici de la Couronne; & fi Jolois former quelqu'efpérance, ce feroit fur- tout d’après l'im- portance & la fingularité des fujets qui fe font préfentés fuc- ceflivement fous ma plume. Es: "IN EXPLICATION DES PLANCHES, PUTAIN C 4 Et PUR VEMNUR'E. Fire. I." R PRÉSENTATION de la Sécherie. Fic. I. Repréfente des Nègres occupés aux dernières mani- pulaions de l’Indigoterte. L'un coupe l’Indigo dans [a caiffe à la grandeur de fix pouces en quarré, & l’autre l’arrange dans une caille confiruite felon le nouveau projet. Derrière eux , eft un rateau auquel font attachés Les facs dans lefquels on laiffe PIndigo s’égouteer. Frc. III. Plan géomèrral & grandeur des différentes caiffes. A. Caiffe où on coupe l’Indigo d'environ deux pouces quarrés. B. Caiffe de même ARE Te où Lee eft coupé de fix pouces en quarré. C. Caiffe dans laquelle on propofe d'exporter l’Indigo. Prancumez Il Fre. I. Repréfente l’arrelier de la teinture en foce. ë A. L'Ouvrier qui plonge les mateaux dans la teinture. B. Ouvrier qui évante les [oies & les agite au fortir de la cuve. C. Ouvrier qui tord un mateau fur l’efpart. Fic. IL. Repréfente une cuve & fa coupe. A. Le fourneau avec la cuve & le suyaux , pour l'évapora- tion du charbon : le fond de la cuve eft ponctué. B. La coupe du fourneau. C. La cuve. D. La bouche du fourneau. K ij 76 ERP NC PA NTEI ON E. Tuyau pour l’évaporation du charbon. F. Le rable. G. Le couvercle de la cuve. PAT AN ICAHRRE act LE Fic. I Reprefente l’artelier de la teinture en coton. À. L'Ouvrier qui teint & retourne [ucceffivement chaque pente de coton. B. Ouvrier qui tord le coton au-defflus des cuves au nom- bre de cing : au- deffus de chacune eft une canelle , & au- deffus de chaque canelle eft un crochet pour Joutenir la pente qu’on tord. Fic. IL. Coupe de l’élévation des cuves au nombre de cinq. Fic. IIL Plan géoméètral des cinq cuves. Pr AÏNAe er IVe Plan géomètral de l’attelier de la Teinture en larne: N.% 1. L’arrelier des deux chaudières , l’une pour le no:r & l’autre pour le bleu. . Entrée de l’artelier. . Grande chaudière pour le norr. . Chaudière pour le bleu. . Moulin pour moudre l’Indigo. . Pompe pour donner de l’eau aux chaudières: 7. 7. Efcalier pour defcendre aux fourneaux. . 8. Bouche des fourneaux. . Paffage des deux marches pour aller au Magafir du bois ou bächer. © ON ah > b 10. Porte chartière pour l’approvifionnement du boës dans le bücher. it, Entrée de l’attelier aux cuves. DES PLANCHES: ‘27 N.® 12. Ouverture ou demi-fenêtre au £roS mur, pour pafler 13. la chaînée des chaudières aux cuves. 14. 15. & 16. Les quatre cuves. PLUAIN IE Em Et Ÿ Fic, IL Coupe prife Jur la ligne ponctuée au plan géomètral Planche IV®, & indiquée J. K. N.° Frc. os DN Oo R ww pb nm L'atelier des deux chaudières. . La bouche du fourneau. . La grande chaudière pour le noir. . Zntérieur du fourneau. + La pompe. + Les Pompiers. . Efcalier qui defcend à la bouche des fourneaux. . La Cheminée du fourneau de la chaudière pour Le noir, de la chaudière pour le bleu. . Fenêtre. . Porte de dégagement. . Porte pour entrer dans l’attelier aux quatre cuves. . Ouverture ou demi - fenêtre pour paller la chaînée de la chaudière aux cuves. } IL. Coupe prife fur la ligne L.M trdiquée au plan géomètral. MR & D 6. 7: . L'atelier des deux chaudières. + La bouche du fourneau. . L'intérieur du fourneau. . La chaudiere pour. Le bleu: - Le paffage qui [pare l'atelier d'avec Le Magafir au bois , qui ya au fourneau. La pompe. Le Puit de la pompe, 78 EXID'LUINC' AT TI ON N.* 8. La cheminée de la chaudière pour le bleu. 9. Fenêtre. 10. Porte de dégagement. 11. Porte d'entrée de l’artelier des quatre cuves. 12. Ouverture ou demi fenêtre pour palfer la chaînée de la chaudière aux cuves. PULTAMNIC UE ETUI E Coupe prife fur la ligne ABCD EFGH indiquée au plan géomètral. N° r. L’arelier des deux chaudières. . L'intérieur du fourneau. . La chaudière pour le noir. . La chaudière pour Le bleu. . L'intérieur du fourneau. . Ouverture ou demi-fenêtre pour palfer la chaînée des chaudières aux cuves. 7. Fenêtre de latrelier aux cuves. 8. 8. Intérieur des fenêtres. 9.9. Extérieur des cheminées de la chaudière pour le noir, & de celle pour le bleu. ro. Porte qui va à l'eftalier qui conduit aux fourneaux , & au magafin au bois. 11, Arrelier des cuves. 12 G 13. Cuves. P'HrAUN'CraMEt AVI Fi. 1% Le moulin où deux Ouvriers font à moudre l’Indigo. Fic. IL. Les décails du moulin. À. Coupe du moulin. B. La meule mobile du moulin de pierre meulière, C. Le fond du moulin de même pierre. Dans le milieu ef? NN hn RO & Bb DES PLANCHES. 79 Parbre perpendiculaire qui fert à faire mouvoir la meule , lequel arbre eft quarré par le bas. D. La meule vue en-deffus avec fes deux anfes. E. Plan du moulin. F. L'arbre de la meule avec fon tenon qui fe [celle dans la muraille. P'Er A'NîC 4 El VOIE Repréfentant trous les outils propres aux manipulations des Teinturiers en laine. Fic. L‘* Le jer vu de face vers Le milieu de fon manche ; il eff entouré de cordes, afin de ne point ufèr La chau- dière fur laquelle il frorte journellement; au bout oppofe à la cuiller , eft une malfe de plomb pour faciliser Ouvrier. Fic. II. Le même jet vu de profil. Fic. TI. La chaînée avec fa planche pour contenir l’eau du bain pendunt le ravalement. Fic. IV. Le Rable. Fic. V. La planche de la chaînée feule. Fic. VI. Plan géométral du pied droit. Fic. VIL Pied droit vu de face avec fon crochet & fon tenor de fer. Fic. VIII. Le Bois feul du pied droit fans fon crochet. Fic. IX. Le crochet de fer du pied droit feul pour faire voir {a conftrudlion. Fic. X. Pied droit dans [a fituation , relativement à la Fic. XX. Fic. XI. Le Tour dans [a fituarion , relativement au pied droit , Fic. X, j Fic. XII. Le Tour vu de face , avec [es bâtons palfés dans les anieiux pour faire tourner le crocher. Ces bâtons fons 80 Frc. Fire. Frc. Fic. Erc. Fic. Frc, fic. ] E: XP IC AT TI ON, É« ponélués en leur place à la Fic. XI. Les pieds de ces outils doivent entrer en terre de quatre pouces par le bas, comme on le voit a La ligne de terre AB. XIII. Le manche du crochet. XIV. Le crochet complet. XV. Le crochet vu de face. XVI. Le crochet vu poftérieurement. XVII. Ze rranchoir avec lequel on donne la chaux. PLAIN CHEN RIRE Le Repréfente la cuve; d’un de fes côtés À, eft Le pied droit qui defcend en terre de quatre pouces , comme je l'ai dit, ci-deffus, à la ligne de terre dans une pierre quarrée où l’on a creufe un quarré long. Woy. ie SNES IR B efl le. ‘plan géomètral de cette pierre : N° C endique la coupe perpendiculaire. À la Fic. IL, , N°, B, ef l’Ouvrier qui tourne le moulinet, nommé Tour, pour tordre le drap; il faut: obfèrver que le piëdK, de cet outil, entre en terre de. quatre pouces auffi, dans une pierre pareille à celle dont je viens de parler. Il* Eft la coupe de la cuve pour faire voir la cham- pagne; qui eft un cèrcle dé fer, dont le fond eft un filet de cordes pour fupporter le drap, & pour qu’il ne touche point au fond de la cuve ; cette champagne eft fufpen- due par des cordes autour de l’extérieur de la cuve. Foy. Pic: RES. @ Fire. UT: $ III. Eft ouvrier qui retourne l’étoffé dans la cuve , avec fes deux petits crochets; dont le détail eft en grand PI VIII, Fic. XIV. MÉMOIRE = = k ne 721170 Jeavans Elranger Tom. ne Pag. Bo. | | | rom UML ir on il | Fe ji ÿ ut LLULAUR ls AUTRE lu | es > hr J a ait | HA < | OR C'* Haussard Jeun | pie pi PET LS meet her ; + RAS Ah. PE eat, ah Di ch Jcavans Etranger 1èm.IX, Pag. 8. »” Jon ad * HE Ël TN CE ee abouig berne Vds 04 22 2 LL | e A Le * n'Hlru Rnb n he med Bree = v *£ Jeavans Elranger Tom XP Zag. 80. Pl B Ge i 1 | Il Lil i | | | | L Fosswr Del, LL Hrussard Seup . st) DES A HAS EPL CATMRENRE TNT A UNE DAT TUE i sr TE a UE UE ETAT TUE A ee [I A ua A A A — — AT a GA LUE= EE a EMEA AA A AE [ON D UNE ï il NON ll CUT LiULH TI Coupe prise sur la Lgne JK pu Etrans. Tom. IX. Page. 80. A EU CT tnt D TNT Ti UE EN 1 | LL TN CT [EE CN TT A OT ZE re CET I HU cd a nt TNT ca — UN M A NU nr — [I EE [TT UE AN A WU LA fl il 1 il A (I a —— a al UE Sd 5 AU AN A _ A NE NE TE LE LA A A LL A I I [TTL _ TT a a LL [ ru A [A TE A D nn A EE a AE UE A A Ur UE Er A NU EN EEE E ll Fr AU Tr EH (TLLIEUT = ul _ [Il A LL D A LE CT TI [IT (Im MIN nn er NE ce TL Lpetais —— RAT RAR NET he PTE ! Î k a AU 1: \ 2 REG — Jravant Etranger Tom. IX. lag. Bo, | KO | Ne 345622 122 IE nn, 402700 Ron = are er Wu "+, Ê LEE Jeavans Etranger Tim. IX, Pay. Bo. CCD CH BEN EL Haussard Se cup à » ae Le Jeavens Etranger Trm.IX. Pag. Bo. ABCDEFGH - PI a 4 £ Jeavans Etranger Tom. IX, Pay. Bo, + Een ÉRÉT) pe s nc o AN cures TE TEE L'ARER CEE MAN RL ST NU CU LS | Pl. FIL Jeavant Etranger Tim. IX. Pay. Bo. TT I TNT Il TT TT I IT TT ll mi | | ë ; ON SÉ tous Poe pie en 2 | RS Y a ET. 2 2 40 1 UK M) és dima - 2 à tp tr ais ur: RCE KA rs à } É * 'éay EME pe re ‘ LH . Fe % Jeavant. Etranger Tom. IX. Lag 80, nl di A 1 = Ti SSSSSSSSSS == FE BLÉ aanrerd Jeu MÉMOIRE SUR LIN D I GO, TEL QU'IL EST DANS LE COMMERCE, POUR L'USAGE DE LA TEINTURE. Par MM. HECQuET d'ORvAL, Ertrepreneur d'une Manufacture de Moquette, à Abbevillede , & Risaucour ; Apothicaire de la même Ville. Tome IX: ; K rte mere 2 ur à rl ? ST oden sl ob risitrègi ) = ÿ de x ®) À ji \ ; k SUR 6 ra agn AE g SR D Felix qui potuit rerum cognofcere caufas. V'IRG. Georg: Pan eft une fécule qu’on extrait de Anil dans les'Indes ‘ È 5 4 2 Occidentales par un procédé que nous décrirons plus loin. On en diftingue plufeurs efpèces dans le Commerce, qui diffèrent eflentiellement entrelles,en raifon du plus ou moins de parties colorantes qu’elles rafflemblent fous le même volume donné : favoir , l'Indigo Guatimalo , dont le plus beau eit connu fous le nom de Flore; lIndigo de Saint-Domingue, dont on diftingue particulièrement deux fortes, le Bleu, & le Cuivré; enfin la troifième efpèce, eft celui de la Caroline. Le flore eft de tous les Indigos le plus beau; il porte un bleu vif; fa pierre n’a point d'écorce, elle eft de même cou- leur à fa furface que dans fon intérieur, petite, d'une tex- ture rare, & fpécifiquement plus légère que l’eau. L'Indigo bleu eft celui-qui,a le plus de rapport avec le flore; il en:diffère en:ce que fon bleu eft moins franc, tirant K i ñ MÉMOIRE plus fur le marron; fa pierre eft plus grofle, recouverté d'une écorce d'un bleu plus ardoifé que l’intérieur, & fa texture eft un peu plus compaéte. Il n’en eft cependant pas moins en- core fpécifiquement plus léger que l’eau. L'Indigo cuivré, prend fon nom de la couleur du cuivre rouge , quil préfente dans fa caflure. Il porte une écorce comme le dernier, d'un bleu cependant encore plus ardoifé; il eft plus compat, & fpécifiquement plus pefant que l'eau. L'Indigo de la Caroline eft d’un bleu plus ardoifé tant exté- rieurement qu'intérieurement. Les fignes extérieurs auxquels on reconnoit les différentes qualités d'Indigo, font donc, la couleur , la cexture, & la pefanteur fpécifique ; mais le figne commun à tous, & qui diftingue cette matière de toute autre fubftance bleue qu’on o . 5 3. . 7 . , voudra lui fubftituer, eft limpreflion cuivrée que laiffe l’on- gle en frottant fa furface. Nousne nous étendrons pas fur l'hiftoire naturelle de l'Anil, elle eft trop connue : Nous jeterons feulement un coup -d'œil rapide fur la manière dont on en extrait l’Indigo. Les Réfic- xions que nous ferons fur les différentes circonftances de ce procédé, jeteront déjà quelques lumières fur la nature de certe fécule, &, après avoir ouvert la voie à nos expérien- ces, apuyeront les Conclufions que nous en aurons déduites. Elles nous indiqueront en même temps les moyens dont on pourroit fe fervir pour parvenir à extraire des végétaux de notre Climat de quoi fuppléer à l'Indigo. Préparation de l’Indipo. ‘« Pour faire certe fécule, dit M. Hellot, on à trois cu- ves l’une au-deflus de l’autre en manière de cafcade; dans la première qu'on appelle sremporre , où pourriture ; & qu'on remplit d'eau, on met la plante chargée de fes feuil- les, de fon écorce & de fes fleurs; au bout de quelque temps le tout fermente, l'eau s'echaufe & bouillonne , S 5 :4 Var SUR L'INDIGO. 8s s'épaïñit, & devient d’une couleur bleue tirant fut le vio- let; pour lors on ouvre lés robinets de la trempoire, & l’on en fait fortir l’eau chargée de route la fubftance colo- rante de la plante: dans la feconde cuve appelée /a Barte- rie, parce qu'on y bat cette eau avec un Moulin à palettes, pour condenfer la fubftance de l'Indigo, & la précipiter au fond; on ouvre les robinets de cette Cuve, pour en faire écouler l’eau jufqu’à la fuperficie de la fécule bleue; après quoi, on ouvre d’autres robinets qui fonc au plus bas, afin que toute la fécule tombe au fond de la troifième cuve , appelée repofoir, parce que c’eft là où lIndigo fe repofe & fe defléche, » 8 y L Y L s$ 8 s = Es 59 Dans cette opération, la plante mile dans la trempoïre; y éprouve un mouvement de fermentation fi confidérable, que l’eau s’'échauffe & bouillonne; les parties muqueufes font détruites; il fe développe un acide, qui, devenant le conduc- teur & l’accélerateur de la fermentation , la mène jufqu’à la putréfattion; à ce moment fe forment les alkalis volatils , “qui, s'uniflant à l'acide, produifent des fels ammoniacaux; les réfines fe décompofent en partie; leurs débris chargés de la partie colorante, qu’elles ont jufqu’alors défendue de la pu- tréfaction , fe dépofent avec un peu de la terre du végétal : quant à la partie colorante jaune dont la réunion avec le bleu formoit le verd dans la plante, elle eft détruire, parce qu’elle étoit unie à la partie muqueufe. Le point effenriel eft d'arrêter à propos certe fermentation; fi l’on ne la'laifle pas al- ler aflez loin, la réfine n’eft pas aflez décompofée; laggréga- tion des autres fubftances à la terre n'étant pas TOMpuE , eM- pêche cette dernière de fe précipiter; fi on la laifle aller trop loin, alors la putréfaction étant complète la partie colorante, la réfine feront détruites. C'eft ce qui fera évidemment dé- montré dans la fuite de ce Mémoirc. Des réflexions que nous venons de faire fur le procédé de la préparation de l’Indigo, nous concluons que c’eft une 4 / » IP. + , fécule compofce d'une fubftance réfineufe, en partie décom- 86 MÉMOIRE polée, que nous nommerons oléo-réfineufe, fervant de véhi- cule à la partie colorante, d’une terre, de fels amoniacaux , & de quelques parties extractives qui ont echappé à la putré- fattion, ce que les expériences fuivantes vont prouver. Première Expérience. OK SASSURERA facilement de l’exiftence des fels ammonia- caux ; il fuffic de broyer l’Indigo avec la chaux pour en dé- gager abondamment l’alkali volatil. Deuxième E xpérience. L'Inprco mis fur les charbons ardens, brüle avec une flamme très-vive, accompagnée de fumée & de fuie, & laifle un réfidu charbonneux fort confidérable. Quatre onces ainfi brü- lées, ont laiflé deux onces trois gros & demi de charbon, qui a fourni cinq gros & demi dix grains de cendres, d’où nous avons extrait vingt-huit grains de vartre vicriolc , & pas un atome d'alkali fixe. Trofième Expérience. Quarre onces d'Indigo diftillées dans une cornue, ont donné, une once trente-neuf grains d’alkali volatil en liqueur , un gros quatorze grains d'huile Enepyreumatique, & la même uantité de charbon, de cendre, & de tartre vitriole que ci- deflus. Nous obferverons que l'incinération parfaite de ce charbon eft très-longue, 1 pi! Quatrième Expérience. UATORZE ONCES TROIS GROS Indigo flore, bouilli dans une fort grande quantité d’eau, ont fourni, par le fie , une li- queur. de couleur fauve foncée, qui évaporée en confiftance requife , a donné un gros foixante grains d'exrrait. L'Indigo SUR L'INIDI & 0. 87 s'eft trouvé pefer, après fon exficcation parfaite, treize onces fix gros. Loin que fa couleur ait fouffert de cette opération, fon bleu étoit au contraire infiniment plus beau, & prefque noir, tant il avoit d'intenfité. La même quantité d'Indigo bleu à fourni fix gros d’ex- trait, & lIndigo féché pefoit treize onces un gros. L'Indigo cuivré a fourni la même quantité d'extrait & s’eft trouvé, après fon exficcation, du même poids que le précé- dent. | " Quoïque ce lavage ait ajouté à la beauté de ces trois ef- pèces d’Indigo, il eft cependant facile de les diftinguer , ils confervent le même ordre; le flore eft d'un bleu plus franc, plus vif ; le bleu: eft plus brun ; le cuivré beaucoup plus encore. En réfiéchiffant: fur cette Expérience, on obferve que , foit que la fermentation que l'on emploie à Saint-Domin: gue pour préparer l'Indigo , ne foit pas pouflée aufi Loin qu'on le fait à Guatimalo; foit que la partie extradtive fe trouve plus abondante dans l’Anil de Saint-Domingue , à raifon peut - étre du fol ou du choix des parties de la plan- te , & du temps de la récolte ; foit enfin que, pour toutes ces raïifons, la partie réfineufe fe trouve ou plus abondante, ou moins atténuée , il n'en paroîtra pas moins vrai de dire que c’eft à ces différences qu'eft dûe celle qui diftingue ces trois efpèces d'Indigo. L'expérience, que nous venons de rapporter, éprouve de grandes difficultés dans fa manipulation, à caufe de {a pr'omp- titude avec laquelle la matiere.extractive entre en fermenta- tion, & putréfie les filtres pour peu quelle y féjourne ; La rande divifion qu’acquiert une partie de l’Indigo pendant l'é- Buliion le mettant d’ailleurs en état de pénétrer dans les por res du filtre, & par -là s'oppofer au pañlage de la liqueur, rend cette opération très - longue, Son Importance nous à fait 88 MÉMOIRE chercher, & nous avons trouvé une méthode plus facile & plus prompte dont nous allons rendre compte. Après avoir réduit en poudre & pañlé au tamis de foie; lIndigo, nous l'avons fait bouillir pendant un quart d'heure dans quinze fois fon poids d’eau, remuant continuellement avec une fpatule, afin qu'il ne fe brûlât pas au fond de la baf fine ; nous avons enfuite verfe le cout dans une terrine, &; après l'avoir laïffé refroidir, nous avons verfé la liqueur qui farnageoit l'Indigo, fur une toile ferrée; fitôt qu'elle fut paf fée, ce qui ne fut l'ouvrage que d'un inftant, nous fimes tom- ber fur La toile l'Indigo, & l’y laiflmes s'égoücer & fécher. Cinquième Expérience. L'EsPRIT-DE-VIN mis en digeftion à chaud fur l’Indigo ; en extrait une ceinture pourpre très-foncée, qui laifle par l’éva- poration fpontanée, une fubftance de couleur marron, grafle au toucher, dont une partie fe délaye plutôt qu’elle ne fe diflout , dans l'eau, qu'elle rend laiteufe ; l’autre partie refte au fond du vafe, fous la forme d’une fubftance huileufe bru- ne; cette teinture, qui eft très-tranfparente, fe trouble à me- fure qu’elle s'évapore. La fubftance huileufe eft en très-petite quantité, huit onces d’efprit-de-vin digérées à chaud & à plu- fieurs reprifes fur une demi-once d’'Indigo lavé, l'ont épuifé de maniere qu'il n'en coloroit plus de nouveau & cependant lIndigo féché pefoit encore trois gros foixante -huit grains; cette grande quantité d’efprit-de-vin, ne lui avoit donc en- levé que quatre grains de fubftance. L'Indigo eft encore forti de cette expérience plus beau qu'il n’étoit auparavant, Sixième Expérience, L'ÉTHER VITRIOLIQUE, digéré à une très-douce chaleur fur l'Indigo, fe colore de même en pourpre, il faut une prodi- gicufe quantité d’échèr, encore n'ayons-nous pu parvenir à n'avoir SUR L'INDIGO: 89 n'avoir plus de teinture. L’évaporation fpontanée, laifle une fubftance oléo-réfineufe brune, foluble en entier dans l'efprit- de-vin. L'Indigo n’eft nullement décoloré; &, après fa deffica- tion, on trouve une quantité aflez confidérable de fel ammo- niacal qui s'eft cryftallifé péle-méle avec lui en aiguilles auffi blanches que brillantes & déliées. Septième Expérience: L'AUILE D'oLive fe colore en rouge fur l’Indigo , on la croi: . . ’ . 0 js , 14 £oIt TEINte par une médiocre quantité d’orcanette. Notre fe- . . EC cule ne reçoit encore aucune altération par cette Expérience, Huiuème Expérience, L’ACIDE VITRIOLIQUE diflout complétement l’Indigo, avec effervefcence & chaleur, il sen dégage une odeur d'acide fulphureux - volatil. Pour bien faire cette diffolution, il faut mettre l’Indigo réduic en poudre, dans un vafle de verre ou de terre cuite, verfer deflus une partie de l’acide, agitant continuellement le mélange, continuer ainfi à verfer peu-à-peu le refte de l'acide & laifler enfin repofer, pendant vingt-quatre heures, cette diflolution; nous verrons ailleurs la néceflité d’attendre ainfi, avant d'employer cette diflolution , & l'inconvénient qu'il y a aufli à Îa garder plus long-tems; nous n'ôterons ici qu'un moyen de l'opérer plus promptement & plus fü- rement , c'eft de mettre avec l'Indigo quelques gouttes d'une diflolution déjà faite. L'huile de vitriol qu'on emploie, doit pefer le double du même volume d’eau, & la propor- tion de l’Indigo, avec elle, doit être d'un à huit, & ce doit être l'Indigo flore. Neuvième Expérience. Si l'on verfe de l'huile de tartre par défaillance, fur trois Tome IX, L 90 MÉMOIRE onces de la diflolution ci-deflus, étendue de deux livres d'eau, jufqu'à parfaite faturation de l'acide, il fe fera un pré- cipité, qui, recueilli fur un filtre, paroïtra aflez abondant, gras au toucher, d'un bleu très-foncé. La liqueur pañlera roufle. Si on verfe de l’eau fur ce précipité pour le deffaler, cle en entraînera une partie qui lui communiquera une couleur bleue très-brillante, mais qui, n’étant point véritablement dif- foute, fe précipitera fous fa première forme. Ce précipité bien féché, fe réduit à un très-petit volume; fa furface eft cuivrée. Si, dans cet état, on le délaie dans l’eau, elle paroïîtra en difloudre une partie, & laifler l'autre fous fa première forme. L’efprit-de-vin le diflout en entier, & sy colore du bleu le plus brillant. L’écher vitriolique y prend une légère teinte bleue, qui prouve que sil ne le diflout pas complétement, il en attaque au moins une partie. L’évaporation de la li- queur fournit du tartre vitriole, & une fort grande quantité de fel ammoniacal en aiguilles foyeufes; enfin une eau mere- roufle. Si l'on verfe plus d’alkali fixe qu'il n’en faut pour fatu- rer l'acide , alors on obtient d'autant moins de précipité qu'on a plus mis d'alkali; on n’en obtient enfin qu'une très- petite quantité , d'un roux fale, fi on a outre -paflé de beau. coup le point de faturation, ce qui rend cette Expérience très - difficile à faire en petit, il faut alors cefler de verfer de lalkali fixe auflitot qu'on approche du point de faturation, la liqueur fera encore bleue & tranfparente; mais, en peu de tems, on verra fe former le précipité, & la liqueur fera de- venue roufle. Si lon faturoit parfairement lacide , le préci- ité pourroit être décoloreé, mais ne verfa-t-on qu'une feule goutte d'alkali fixe de trop, il le feroit certainement. Si au lieu de l’alkali végétal, on emploie celui de la fou- de, le précipité fera beaucoup plus abondant, d'un bleu lus foncé & plus brillant , plus onétueux , très-dificile à fécher, & très-cuivré. La liqueur fera bleue. Si l’on verfe de l'eau fur ce précipite, elle en fortira bleue, comme dans lEx- périence ci-deflus, & dépofcra de méme en partie fa cou. SUR AT INDE TG CO. 91 leur. L'efprit-de-vin, l'éthèr même qui avoit à peine effleuté le premier, diflolveront celui-ci en entier, & sy coloreront en bleu le plus brillant. Toutes ces propriétés caractétifent une fubftance de nature réfineufe, & confirment ce que nous avons avancé de l'union de la partie colorante à une fubf: tance de cette nature, l'acide qui les avoir difloutes à la fa: veur de leur adhérence à la terre, les abandonne pour su- nit à l'alkali fixe qu'on lui préfente. L’évaporarion de la li- queur donnera du fel de glauber & le même fel ammonia- cal que ci-deflus; il fe dépofera, pendant toute fa durée dans lune & l'autre opération, une fubftance terreufe ; d'un pris fale dans la première, d’un bleu pâle dans celle-ci, & à raïon de la couleur bleue que conferve la liqueur, il reftera une eau-mere bleue. L’exiftence de la terre, & celle des fels ammoniacaux, eft inconteftablement prouvée par cette Expérience. Nous y voyons aufli que l’alkali de la foude, jouic, avec l'acide vitriolique, du privilège important de ne point alté- rer la couleur de lindigo. Il faut bien noter cette propriété de l'alkali minéral, elle nous conduira. à une découverte in- téreflante. On ne rifque jamais ici de décolorer , comme ci - deflus, le précipicé par l'excès d’alkali, on peut, à cet égard, en mettre tant qu'on veut; mais on tombe dans un autre inconvénient, celui de réduire cette fubftance réfineufe dans l’état favonneux, & d’en diminuer d'autant la précipita- tion; le peu qu'on en obtient, devient d'ailleurs foluble dans l'eau, à raïfon d’un peu d’alkali qu'il aretenu, car comme on le fair, les précipités retiennent toujours une partie des fubf tances précipitantes , & participent par conféquent à leurs propriétés. 7 Fa Nous avons dit que la furface de nos précipités évoir cui- vrée, comme nous avons obfervé qu'ils’ n'ont cette :couleut qu'à mefure qu'il fe font raprochiés en: fechanr, noûs l'actrte buons à l'intenfité de la particicolorante, qui m'eft ici étendue Li 91 MÉMOIRE que par la fubftance réfineufe, on croiroit être en droit de conclure de-là, que la couleur cuivrée doit diftinguer le plus bel Indigo, comme le penfent plufieurs Artiftes; mais nous croyons au contraire, que cette couleur n’eft düe qu'au ra- prochement des parties, puifque l’Indigo bleu cuivre lorf- qu'on le frotte avec l'ongle, & que le plus cuivré, eft auf le plus compaét. Dixième Expérience. L’ACIDE NITREUX diflout l’Indigo avec une effervefcence des plus vives; il le décolore dès qu'il le touche; la diffolution eft pourpre. L’alkali fixe en précipite une fubftance terreufe de couleur de rouille de fer, foluble avec effervefcence, méme par l'acide du vinaigre. Onzième Expérience. L’ACIDE MARIN, agit avec moins d'activité que le précédent; fa diflolution eft pourpre; le précipité de même couleur que le précédent, eft, comme lui, foluble par tous les acides. Douxième E xpérience. L’ACIDE DU viNAIGRE, tenue en digeftion à chaud, pen: dant douze heures, fur lIndigo, ne l'a point attaqué. Trerzième Expérience. L’ALKALI FIXE VÉGÉTAL ver{é fur l'Indigo , en dégage à l'inf tant de l’alkali volatil, il fe fait une effervefcence confidera- ble, qui, fi on le tient en digeftion à chaud, pendant trois heures, continue avec la même force; l’alkali fixe acquiert uné couleur brune. Si l’on verfe fur lIndigo de nouvelle li- queur alkaline, elle sy colore encore ; mais à la troifième fois elle m'en extrait plus rien. Ce menftrue n’agit donc point SUERR E D'N D.1/G O. 93 fur cette fécule, il ne fait que sy phlosiftiquer, comme le prouve la diffolution du vitriol de mars, avec laquelle il fait du bleu de Prufle, & décompole une partie des fels ammo- niacaux. On feroit tenté de croire, qu'en le laïflant digérer plus long - temps, il pourroit attaquer lIndigo; mais nous l'avons traité ainfi vainement pendant cinq jours. : ne. Quatorzième Expérience. Les ALKALIS cauftique, marin & volatil, agiflent de même ; & l'Indigo eft forti très-beau de toutes ces Expériences. Quinzième Expérience. Les SELS NEUTRES n'ont aucune action, & leurs folutions nagiflent que comme l'eau. Serzième Experience. Sr lon met de l'eau fur l’Indigo , & qu’on les laifle miacé: rer à froid , elle fe charge en peu de temps de fes parties extractives & falines, acquiert une couleur roufle, une odeur fétide, & dans ce moment une couleur légèrement verditre, Après un temps très-confidérable, (Æuir mors) l'odeur fe dif: fipe, & la liqueur redevient claire & fans couleur, l’Indigo paroît noiratre au premier afpe& & préfente quelques petits oïints blancs, qui annoncent que fa partie colorante à fouf- fert quelque altération; mais, en l'écrafant entre les doigts , le beau bleu dont il les colore, prouve que, sil a fouffert, ce n'eft qu'à la furface qui couchoit immédiatement le liquide. Dix-féprième Expérience. _ Sr on procède de même avec l'urine, alors, à mefure que & putréfattion produit de l'alkali volatil, la liqueur fe colore en un verd que la chaux rend bleu, É LL 94 MÉMOIRE Dix-huitième Expérience: LA FERMENTATION SPIRITUEUSE na ni diflout, ni altéré lIndigo. La matière de cette fermentation fut la melafle. Dix-neuvième Expérience. CETTE MÊME FERMENTATION pouflée jufqu’à l'acide, n'a cu aucune action fur lui. î uant à la fermentation putride, nous verrons à l'article des cuves, quelle détruit abfolument fa couleur, mais il faut 2 pire : = que la purréfaétion foit complète. Il réfulte des Expériences ci-deflus, que l’Indigo eft com- pofé d'une terre calcaire, à laquelle eft unie une partie oléo- réfineufe colorée en bleu, d'un peu de matière extraétive, & de beaucoup de fel ammoniacal , dont au moins partie a pour bafe l'acide vitriolique. Enfin, d’après les propriétés de cette fécule, il paroît qu'on peut parvenir à limiter. Il s'agit de trouver des végétaux dans leiquels la partie bleue foit abondante, unie à une partie réfineufe, & la partie jaune au contraire aux parties muqueufes; de détruire ces dernières, & décompofer en partie la réfine colorée de bleu par un mouvement de fermentation putride arrêté à propos. Conduit par ces idées, nous avons jeté les yeux fur la clafe des plantes crucifères, parmi lefquelles nous avons choili le raifort fauvage, pour examiner qu'elle feroit fa fécule. Nous avons empli de ces feuilles une petite cuve de bois, nous leur avons applique, dans les plus grandes chaleurs de cet Eté, le procédé décrit pour l'extraétion de l'Indigo, & nous avons obtenu une fécule verte, qui, étant féche, avoit, à la couleur près, beaucoup de reffemblance avec l'Indigo, cui- vroit comme lui fous l'ongle, fe diflolvoit avec effervefcence dans les acides vitrioliques & nitreux, mais ne différoit ef “ntiellement en ce qu’elle fe diflolvoic pour la plus grande S DR EL ENIDITIE O. o$ partie dans l'efprit-de-vin qu'elle coloroit d'ailleurs en verd. En répétant le même procédé, & laïffanc aller la fermenta- tion plus loin, nous avons eu une fécule plus terreufe quoi- que toujours verte, & encore foluble dans l’efprit- de-vin : ce qui nous a fait penfer que les deux parties colorantes étoient également unies à la réfine. Les différentes Expériences faites fur lIndigo, dont nous venons de rendre compte, en développant fa nature, font aufi connoître combien il eft difficile de difloudre cette fé- cule en entier, & de conferver en même tems fa couleur; l'eau (Expérience XV 11), n'en diflout que la partie extrac- tive qui a échapé à la fermentation lors de la préparation; l'efprit-de-vin ( Expérience r ), l'éthèr (Expérience V1), & les huiles (Expérience V11), n'en extraient qu'un peu de partie réfineufe; l'acide nitreux (Æxpérience X), diflouc lndigo en entier, mais il en détruit toute la couleur; l'acide marin (ÆExpérince X1), a la même action; l'acide végétal (Expérience XI1), n’en a aucune; l'acide vitriolique eft donc le feul qui le diflolve parfaitement & fans l'alrérer ( Expé- rience VIII). Cette diflolution étendue dans l'eau, donne une teinture diaphane, d'un bleu élégant, & les matières qu'on y veut teindre n'exigent aucune préparation antécé- dente, il fuffit de les avoir fait bouillir dans l’eau pour en dilater les pores; après cette préparation commune à toute les teintures, on les plonge dans le bain que l’on a chargé d'une quantité de diflojution d’Indigo proportionnelle à la nuance de bleu qu'on veut obtenir; elles sy teignent d'un bleu très-agréable, mais aufi, peu folide, connu fous le nom de bleu de Saxe. L’érat falin, fous lequel eft lIndigo dans cette teinture, la rend d’autant plus fufceptible de l'impreflion de l'air, que cette efpèce de fel eft avec excès d'acide : aufli obferve- ton dans la pratique, que fi l'on emploie cette diflolution immédiatement apres qu'elle eft faite, le bleu qui en réfulre eft plus vif, mais en même - tems moins folide; l'union que l'a- cide vitriolique vient de former avec Findigo étant encore a MÉMOIRE toute récente, cet acide n'eft point autant engagé dans cètte fécule, que lorfque la diflolution a repofé quelque tems; il en conferve d'autant plus fon affinité avec l'eau, & il n'eft pas rare de voir des matières teintes avec une diflolution trop récemment faite, perdre, en féchant, une partie de leur couleur. C’eft à l'occafion de cette teinture qu'il eft particu- lièrement vrai de dire avec M. Hellor, que lation du froid fur les matières qui viennent d'être teintes, eft une des cau- fes qui contribuent à fixer la coleur; la particule faline colo- rante cft ici à un tel point de ténuité qu'elle eft, pour ainfi dire, vacillante dans le pore qu'elle occupe tant que les ma- tières teintes font encore chaudes; fi l'on n’a pas l'attention de les jeter dans l’eau froide, ou de les éventer rapidement immédiatement au fortir du bain teignant, la couleur s’élave, & létoffe fera ondée, Il eft aife d'après ces obfervations d'apprécier le peu de folidité de cette teinture, & l’on ne doit point fe flatter de la fixer & lui conferver en même-tems fon éclat; pour y réuflir, il faudroit, après la teinture faite, neutralifer l'acide ui cft uni à Indigo; ce feroit faire à grands frais le bleu Dlide connu dans le Commerce fous le nom de bleu de cuve, & il auroit encore moins d'éclat que ce dernier. Nous avons cependant fait cette Expérience, nous avons trempé dans une légère leflive d’alkali fixe végétal , des laines teintes en bleu de Saxe, la couleur en perdant fon éclat, eft deve- nue plus folide, le bleu a pris un ton ardoifé qui le rappro- choit du bleu de cuve. S'il eft important de ne point employer la diffolution d’In- digo immédiatement après qu'elle eft faite, il ne left pas moins de ne point trop la laïfler vieillir, avec le tems, l'acide vitriolique, par fon aétion continuée fur la partie colorante , en détruit une partie, & fait verdoyer l’autre en fe phlogif- tiquant qux dépens de la première. Nous pouvons aflurer}, avec véritc, que fi l’on ne fe fert de cette diflolution que quinze jours après qu'elle eft faic , il en faudra un quart de plus SUOVR MEMNONNDET IG O: 97 plus pour produire le même ton de couleur ; encore fera- t-elle moins vive que fi la diflolution n’avoit que deux jours. Ce n'eft point feulement dans la diflolution que l'acide agit fur la partie colorante, dans le bain même où l'on teint, fi lon fait bouillir trop, ou trop long-tems, le bleu au lieu d'augmenter, baiflera de nuance & verdoyera. 11 ny a point à regretter que les autres acides n'aient point fur l’Indigo la même action que l'acide vitriolique ; car quand plus heureux, ou plus induftrieux que nous, quel- qu'un parviendroit à le difloudre dans l'acide du vinaigre , cette diflolution eût-elle le même éclat que celle faite par l'acide vitriolique, la teinture qui en réfulteroit, n'en feroit pas plus folide. L’alkali volatil fournit un diflolvant bien plus parfait; comme l'acide vitriolique, il diffout complétement l’Indigo; comme lui, il porte la molécule colorante qu'il tient en diflolu- tion, dans le pore de la matière que l’on teint : mais il ne con- ferve d'union avec elle, que le temps néceflaire pour l’affer: mir dans le pore où il vient de l'introduire, il la quitte bien- tôt après, & la rend à fon premier état d’indiflolubilité ; c'eft-à-dire, que l’eau, les acides, les huiles, n’ont plus d’ac- tion fur elle. Mais le moyen d'opérer cette diflolution, n'eft point un moyen fimple; car, comme nous l'avons vu, (Ex- périences XIII, XIV, XV ,) les alkalis fixes & volatils, ap- pliqués fur l’Indigo par la voie des digeftions, n’ont eu aucune aétion fur lui; c'eft du fein même de cette fécule, qu'il faut dégager l'alkali volatil qui doit la difloudre, & par les mêmes moyens qui mettront en jeu la chaux, ou lalkali fixe, qui ferviront à décompofer les fels ammonia- caux dont nous avons prouvé l’exiftence dans l'Indigo, l'at- ténuer au point qu'il n’oppofe aucune réfiftance à l'alkali volatil qui doit le difloudre. Les moyens, qui rempliflent ces deux indications, font un mouvement d'effervelcence qu'on fufcite dansile vaifleau, où lindigo attend fa diflolution ; ou un mouvement de fermen- tation combiné avec le premier, en mettant avec lIndigo des matières qui peuvent le produire, | Tome IX, N 98 MÉMOIRE Le bleu qu'on obtient, par ces différens procédés, eft connu dans le commerce fous le nom de bleu de cuve, & cette dénomination emporte avec elle l'idée d’un bleu folide; ce qui a déterminé cette défisnation, eft que cette couleur fe prépare dans de grands vaifleaux de bois, ou de cuivre, qu'on appelle cuves; &, fuivant la méthode dont on fe fert pour y difloudre l’Indigo, ces cuves prennent chez les tein- turiers différens noms : celles où les effervefcences font les feuls moyens employés pour déterminer la diflblution de l'Indigo, s'appellent cuves à froid ; ce feront les premières dont nous traiterons, parce que leur procédé eft le plus fimple , & qu'il jette beaucoup de jour fur ceux où l’on saide d'un mouvement de fermentation pour parvenir à la même diffolution. Nous avons, comme M. Hellotr, monté cette cuve en petit, dans les proportions fuivantes. Cuves à froid. Nous AVONS FAIT FONDRE, dans deux livres d’eau, une once & demie de couperofe verte, nous avions fait digérer pendant trois heures à chaud, une once & demie d'Indigo, dans une autre livre d’eau chargée d'une once & demie de potañle ; nous avons verfé ce dernier mélange dans le vafe où ctoit la couperofe fondue, & fitôt après nous y avons jeté une once & demie de chaux éteinte à l'air; après avoir brouillé le tout avec une fpatule, nous l'avons laiflé repofer; deux heures après, nous avons encore rebrouillé le tout pendant quelques momens. Dès le moment où ces divers mélanges ont été faits, il seft excité un mouvement d’effervefcence très-fenfible, qui fe ralentiflanc peu-à-peu, a permis aux précipités, qui [fe font dans cette opération, de saflaifler. Cet affaiflement, n'eft rotal, & bien égal, que quand l'effervefcence eft entiè- rement difipé ; telle attention que nous ayions apportée SUR A ENADIIG O. 99 toutes les fois que nous avons fait cette opération, il ne nous à pas été poflible d'obferver , comme A. Hellor, l'ordre qu'il afligne aux différens précipités qui fe font ici; les parties calcaires, & les parties métalliques, fe fone tou- Jours, dans Les divers effais que nous avons faits, précipitées pêle-mêle; &, jufqu'au moment de leur précipitation, ils ref- toient fufpendus dans la liqueur avec l’Indigo, & nous n'avons vu ni le bourfoufflement de cette fubftance, ni le précipité d’une de fes parties annoncées par M. Hellor. Nous avons au contraire conftamment obfervé que la diflolution étoit toujours faite quand les précipités avoient fait toute la retraite qu'ils pou- Voient faire; & quand alors la diflolution n’eft point faite, l’opé- tion cft manquée, & nous n'avons jamais pu la faire réuflir. Le bain, qui furnage les précipités, eft jaune verditre; fi lon en prend dans une cuiller, ou dans un verre, il verdit parfaitement & prend enfin la couleur bleue; fa furface eft cuivrée, couverte d’écume bleue. Cette cuve eft à-peu-près, en tems chaud, quatre heures à venir, au moins en majeure patie, car il en faut, près de vingt-quatre pour que les préci- pités foient totalement affaiflés, & que par conféquent l'ef- fervefcence & la diflolution, qui en eft le réfulrat, foient abfolument finies. Le fimple expofé du procédé, femble en développer tout le méchanifme. Du mélange fait en même tems de la chaux, de alkali fixe, & du vitriol martial , il réfulte néceflairement qu'une partie de l'acide vitriolique sunira à l’alkali fixe, qu'une autre fe joindra à des molecules calcaires, qui fe trou- veront dans fon voifinage : par le mouvement qui réfulte de ces différentes unions, des molécules alkalines encore libres, venantes à rencontrer ces fels à bafe terreufe les décompofe- ront; & pendant que tout ceci fe pañle d’un côté, des molé- cules tant calcaires terreufes, que calcaires métalliques, & & alkalines attaqueront les fels ammoniacaux de l'Indigo, & formeront encore de nouvelles combinaifons dont il n’y aura de durables, que celles faites par les alkalis fixes; toutes Ni oo MÉMOIRE les autres feront encore décompofées, & l’alkali volatil rendu libre, difloudra l’Indigo, qui, atténué tant par la cuite, que par les effervefcences extrances, & par celles qui Le font opcrées méme dans fon fein, n'oppofera aucune réliftance au diflolvant qui l'attaque, & qui lui imprime le figne de diffolution dont l'alkali volatil marque toutes les teintures bleues auxquelles il sunit; comme elles, la diffolution de FIndigo fera verte, fi l’alkali volatil ne furabonde point, & s'il furabonde, ou fi l'atténuation de lIndigo a été portée au dernier degré, cette diflolution fera jaune; c’eft fous la première couleur, & dans cet état de diflolution, que cette matière pañlera dans les pores des laines ou ctofes que l’on tiendra dans ces cuves; mais aufli-tôt qu'elles for- üront du bain, l'alkali volatil sévapore, & les molécules d'Indigo feront rendues à leur première couleur, & à leur état d'indiflolubilité. Il fembloit naturel de penfer que l'effervefcence étant ici l'unique moyen qui détermine la diflolution, on pouvoit Tappliquer d’une manière plus fimple, qu'un acide à nud devoit produire le même effet qu'engagé dans une bafe. Nous avons vérifié cette conjeéture par l'expérience; fans rien changer d’ailleurs au procédé que nous venons de décrire, nous avons au-lieu de vitriol, employé lacide vitrio- hque à nud, l’effervefcence fut très-violente, mais de courte durée, & il ne fe fit aucune diflolution. Nous avons fait le même eflai, mais fans plus de fuccès, avec l'acide du vinaigre. Sans doute que le trouble qu'occafionnent des effervef- cences aufli violentes, soppofe à l'union de lalkali volatil avec lIndigo, ou la détruit dans le même moment où elle vient de fe former; peut-être aufli la violence de l'effervef- cence ne fupplée-t-elle pas à fon peu de durée. Il eft donc néceflaire que l'acide qu'on emploie, foit engagé dans une bafe, que cette bafe foit calcaire ou métal- lique, comme nous l'allons voir dans les Expériences fuivantes. SUR LIN DIG OC. TOI : Nous avons effayé fans fuccès, à differentes reprifes, de fubftituer l'alun au vitriol martial, la bafe de ce fel étant argilleufe, elle eft fans action fur les fels ammoniacaux con- tenus dans l'Indigo , & sinterpofant d'ailleurs entreux, & les molécules calcaires ou alkalines , elle les défend de laétion de ces derniers. Cuves à froid, avec l'acide végétal. Cowvaincus par l'expérience de la nécefité d’une bafe calcaire, nous avons tenté ce même procédé en fubftituanc au vitriol martial douze onces de vinaigre faturé de craie; il fe fit une effervefcence , & bientôt après un précipité; nous attendimes inutilement la diflolution de l'Indigo; nous goûütames la liqueur qui toit tranfparente; &, remarquant que la totalité du fel aceteux n’étoit point décompolée , n'ayant point pour le moment d’alkali fixe végétal, nous nous fervimes d'une leflive de foude pour décompofer le refte de la diflolution de craie; il fe fit une nouvelle effer- vefcence , & bientôt le précipité perdit l'œil bleu ardoifé qu'il portoit, il devint blanc jaunâtre, le liquide refta tranf- parent , & d’une couleur citrine. Si lon prenoit de cette liqueur dans un verre, elle verdifit à la longue, & pafloit enfuite au bleu ; en la reverfanc dans le bain, la couleur bleue difparoifloit à l’'inftant. Flattés du fuccès de cette Expérience, nous voulümes la recommencer le lendemain; mais, faifant la décompofition entière du fel aceteux par l’alkali fixe végétal, la diflolution de l'Indigo n'eut point lieu, le liquide devint d’un brun rou- geatre. Nous téncâmes cette Expérience à différentes reprifes & toujours fans fuccès : nous fimes donc obligés de recon- noîtreé que,.nous devions la réufite de cette première, à l'al- kali minéral dont nous nous étions fervis pour achever la décompofition du fel aceteux. Nous l'avons recommencé 102 M É MOIRE plufieuts fois; & avec un fuccès conftant en employant coujours l’alkali minéral. Si l'on nous demande pourquoi l’alkali fixe végétal ne réuflit point dans ce procédé, comme dans celui où l'on emploie la diflolution du fer par l'acide vitriolique, nous répondrons, qu'il eft moins abondant dans celui-ci; il a donc moins d’aétion fur la partie colorante , & nous avons vu, (Expér. IX), combien cette aétion la détruit : peut-être aufli que phlogiftiqué par le fer, & rapproché par-là de l'al- kali minéral, il n'eft plus aufli deftruéteur. Cuves à froid, avec l’alkali minéral. D'’arres cette obfervation fur la différence des deux alkalis fixes, nous avons tenté de monter la cuve à froid, fuivant le procédé ordinaire, en nous fervant de lalkali minéral, au lieu du végéral; l'effervefcence fut plus vive, la diflolution de lindigo plus prompte, & fi parfaite, qu'on n’eût point fouppçonné cette fécule dans le liquide qui la tenoit en diflolution. L’alkali, que nous avons employé, n’étoit point fous forme concrète; nous nous fervimes de fix onces d’une première leflive de foude. Nous croyons d’après cette Expérience, (que nous fouhai- tons qu'on répète, tant elle nous a paru curieufe,) que la fubftitution de l’alkali minéral au végétal dans cette cuve, en perfettionneroit le procédé, & le rendroit plus sûr en ce qu'on pourroit y introduire une plus grande quantité d’alkali fans endommager la couleur, & procurer par-là une décom- ofition plus complète du vitriol, une effervefcence par con- féquent plus foutenue & qui rendroit la diflolution plus parfaite. Le procédé ordinaire des cuves à froid n'eft point infail- lible; comme il eft fondé fur des effervefcences, fon fuccès cft fubordonné à la température de l'air; fi, à caufe d’un trop SUR L’'INDIGO. 103 grand froid, elles languiflenr, lIndigo n'étant pas fuffifam- ment atténué, l'alkali volatil fe dégagera en pure perte, & cette fécule qu'il n'a pu difloudre n’en contenant prefque plus, ce fera envain qu'on tentera à fufciter de nouveaux mouvemens d’effervefcence, Nous avons manqué plufeurs de ces cuves fans pouvoir, par aucun moyen, opérer la dif. folution. D'après la caufe que nous aflignons de limpof- bilité de faire réuflir ce procédé par de nouvelles effervef. cences, quand une fois il a été manqué, l'on apperçoit combien eft abufive la pratique de faire digérer lIndigo dans l'alkali fixe : la quantité d’alkali volatil qu'il perd dans cette opération préparatoire, le privant d’une partie de fon diflol- vant, nuit à fa diflolution. Nous avons conftaté, par des Expériences réitérées, que cette fécule bouillie feulement dans l'eau, & broyée enfuite avec la méme eau, fe diflout plus promptement que lorfqu'on la fait digérer dans l’alkali fixe; l'effervefcence eft plus vive & plus foutenue. Les cuves à froid ne s'emploient guères dans les teintu: reries que pour les fils & cotons; ces matières étant d’une texture plus ferrée que les matières animales, elles prennent le bleu difficilement, il faut le leur donner, pour ainfi dire, par couches, les éventer par conféquent fans cefle afin de faciliter l'évaporation de l'alkali volatil qui eft uni à l'Indigo : cette manœuvre eft incommode fur des cuves chaudes, en ce qu'elle les refroidir, le bain d'ailleurs étant fans cefle ouvert & agité par cette manipulation, il s'évapore une prodigieufe quantité d’alkali volatil parce qu'à raifon de la chaleur, il y eft plus mobile que dans les cuves à froid. Cuves avec fermentation. Nous avons vu, dans la cuve à froid, que l’effervefcence étoit le feul moyen employé pour atténuer lndigo & déter- miner fa diflolution , dans celles que nous allons décrire, RoUS retrouverons la même caufe, mais fecondéc d'un mou- 104 MÉMOIRE vement de fermentation, qui concourt avec elle au méme effet. Ces cuves diffèrent entrelles en raïfon de l’efpèce de fermentation qu'on y introduit : dans l’une, c’eft la fermen- tation acide; dans l'autre, c’eft la fermentation acide putride ; enfin l'on y a même admis la fermentation putride, Celles où l'on emploie la fermentation acide, s'appelle cuve d’inde; la feconde fe défigne par la matière fermentef- cible qu'on y introduic, elle éft connue fous le nom de cuve au vouède où au paftel, Comme la matière fermentefcible de la troifième eft l'urine, on l'appelle cuve à lurine. Nous traiterons d’abord de la première, parce qu'elle eft la moins compofce, & que la théorie de fon procédé tient de très-près à celle de la cuve à froid. Cuves d'inde. LE vaisseau où s'exécute le procédé que nous allons dé- crire, eft une chaudière, qui, par fa forme conique, laïfle entrelle & la maçonnerie qui l'entoure & fur laquelle fes bords s'appuient, aflez de vide pour y faire du feu; on verfe dans cette chaudière quarante fceaux d’eau, plus ou moins fuivant fa continence, chargée de fix livres de cendres gravelées , douze onces de garence, & fix livres de fon qu'on a fait bouillir dans cette eau; on fait entrer dans la cuve les marcs même de ces matières; on y verfe enfuice fix livres d'Indigo cuit & broyé à l'eau; on brouille, on pallie (pour nous fervir du mor ufité) ce mélange, avec une efpece de rateau en bois qu'on nomme rable, on ferme enfuite la chaudiere, on entretient un peu de feu autour; on la pallie une feconde fois douze heures après qu'on l'a montée, & ainfi de fuite de douze en douze heures, jufqu'à ce qu’elle foir venue à bleu, ce qui arrivera au bout de quarante- huit heures fi on l'a bien gouvernée, & montée dans les dofes prefcrites : le bain fera dun beau verd , couvert de plaques cuivrées, & d'écume ou fleurce bleue, I La théorie S U R 1 END IG 0. ïo$ La théorie de ce procédé fe rapproche, comme. nous l'avons dit, de celle de la cuve à froid. Dans celle-ci, on introduit un acide tout formé; dans celle-là, on le forme. Le mouvement de fermentation qui le produit; & la chaleur. d'ailleurs qui eft ici néceflaire, fuppléenc à11a foibleffe de l'effervefcence légère qui doit réfulter de l'union de cc acide avec l’alkali fixe à côté duquel il s’'engendre: L'Indigo dans ce procédé, prend lui-même part au mouvément de fermentation par fa partie extraétive; nous avons vu (Expé. rence 1Y ), combien cette partie fermentoit aifément. Nous ne concluons pas feulement la fermentation que nous admettons dans ce procédé de la nature des matières qu'on y fait entrer, mais de l'afpeët du bain qui long-tems après que le feu eft éteint, eft dans un mouvement continuel. On peut donner dans deux extrêmes oppolés dans l’exé- cution de ce procédé, fi l'on excède la quantité de cendres gravelées que nous avons prefcrite, ou fi-reftant la même, l'on diminue trop celle du fon & de la garence , alors l’al- kali fixe dans l'un & l'autre cas, devenant furabondant, atta- que & détruit même une partie de lIndigo; cette furabon- dance de l'alkali fixe fe reconnoiît à ce que le bain de la cuve eft d’un verd jaune, &' que les bleus qu'on y ‘a teinr tirent plus où moins für le verd; on ramène une cuve en cet état au point où elle doit être, en y faïfant entrer une nou- velie quantité de fon ou de garence qui, en fermentant, pro- duifent l'acide néceflaire pout falurer l’alkali fixe füurabondant; l'extrême contraire eft celui où l’on diminueroit la quantité de cendres gravelées que nous avons prefcrite ; ou fi cette quan- tité reftant la même, l’on augmentoit confidérablément celle du fon & dela garence ; alors l’aigre produit par ces matières; n'étant poinc faifi pat les alkalis fixes, une partie s'unit à l'al- kali volatil, qui doit difloudre lIndivo, l'autre’ faifanc office de ferment, détermine la fermentation jufques dans l'Indigo même : cette fermentation d’abord ‘acide, devient -bientôt Tome IX. O 106 : MÉMOIRE putride & deftruétive; on reconnoït aifément le cas que nous venons de décrire, d’abord la cuve exhale une odeur douce, le bain eft d'un verd louche plutôt même d'un bleu ver- dâtre; à cet état fuccède une odeur d'aigre décidé, & bien- côt après la putréfaction complète qui eft irremédiable; on corrige aifément une cuve dans les deux premiers degrés, une nouvelle mife d’alkali fixe en falurant l'acide furabondant prévient la putréfaction, dégage l’'alkali volatil & détermine la diflolution de l’Indigo. Cuves au vouëde ou au paftel. LE PAsSTEL & le vouëde font les matières fermentefcibles qu'on emploie dans ces cuves; ces plantes font de la famille des. crucifères : le rapport de cette famille végétale avec le règne animal connus par les produits qu'on en retire par la diftillation, s'établit: encore. par la fermentation des fucs extraits de ces plantes; elle préfente les mêmes phénomènes que celle des matières animales; on y obferve de même trois degrés: dans le premier, ces fucs font dans un état parfait d'atténuation & de neutralité, ils exhalent alors une odeur douce, qui a tant de rapport avec celle des fucs extraits de viandes fraîches, qu'on ne peut mieux la-défigner ue par le nom d'odeur animale; dans le fecond: degré, la neutralité obfervée dans le premier eft rompue, il fe déve loppe un acide que nous nomimerons acide, puiride ; {on exiftence eft annoncée par l'odeur d'aigre que répandent alors les fucs en fermentation, odeur femblable à celle des fucs de viandes qui, commencent à fermenter; de ces états peut-être pourroient fe comparer le premier, à celui des liqueurs d'un animal vivant & bien portant; le fecond à celui où fonc ces mêmes liqueurs dans l'animal lor{qu'il a la fièvre; le troi. fième degré de la fermentation de ces fucs, eft la putréfattion ou létat.cadavereux de. l'animal ; il en eft fans doute encore un quatrième. qui fera, fi l'on peur fe fexvir de ce terme, la fer- mentationannihilatoire; il eft aife de s'appercevoir que le nom SUR LINDIGO: 107 de putride donné à cette fermentation, n’eft point aflez géné- rique, puifqu'il ne préfente que l'idée du troifième degré; celui de fermentation animale nous fembleroit plus convenable. On n’emploie dans la cuve, que nous allons décrire , que les deux premiers degrés de cette fermentation ; & , comme elle rend fans ceffe au troifième , il faut perpétuellement la rappeler du fecond au premier. Nous verrons ; dans l'expofi- tion du procédé , les moyens dont on fe fert pour l’yramencr, les fignes auxquels on reconnoiït la néceflité d’y recourir, & le danger qu'il y a à en abufer. Nous ne traiterons ici que de la cuve au vouëde ; parce que nous n'avons pas eu occafion de traiter en grand celle au pañtel, qui d’ailleurs ne diffère eflentiellement de la première ; que parce que le paftel entre plus vite en fermentation. Ces deux plantes font de la même famille &: de la même efpèce ; (felon M. Valmont de Bomare ) leur culture & leur préparation établiflent feules leur différence. : Procédé de la cuve an vouëde. On Mer dans le fond de la cuve , qui contient environ deux cçns feaux d’eau , cent cinquante livres de vouëde en pelottes; on y jette douze livres de fon, & on y fait couler cent {eaux d'eau bouillante ; quand le vouëde a ainfi trempé environ trois heures, on remplit ia cuve en entier d’eau bouil- lante, & l'on y verfe en même-tems l'eau dans laquelle l’In- digo a éte cuit & broyé. (Nous ne déterminons pas la quan- tité d'Indigo, ) deux garçons avec leurs rables , foulèvenc le vouëde & le promènent dans le bain ; (cette opération s'ap- pelle pallier; ) fi quatre heures après l’afliette de cette cuve, on en obferve le bain, on lui trouvera une odeur forte , fem- blable à celle du vouëde en pelotres ; fa couleur fera d’un jaune de feuilles mortes peu foncée ; fi l'on heurte le, bain avec le plat du rable, il s'élèvera une moufle fans confiftance , dont les bulles difparoïtront avec bruit fitôt qu’elles feront formées: O ÿ 108 MÉMOIRE huit ou dix-heures après l’afliette , l'odeur de là cuve cont- mence à devenir fucrée, herbacée ; du refte tour eft encore au même état. Enfin douze ou quinze heures après, cette odeur fucrée fe convertit en une odeur douce , fade , nauféabonde, fouvent légèrement acelcente; en un mot, celle des fucs ré- cemment extraics des animaux. Mais il faut oblerver , avec attention , pour déméler cette acefcence , qui fe feroït bien- tôt fentir diftinétement, fi l’on laifloit aller la fermentation plus loin. Si lon heurte fur le bain en ce moment, la moule qui s'élève ne décrépite plus, fes bulles fe foutiennent comme celles formées par une eau favoneufe , & elles font teintes d’un bleu plus ou moins fonce; le bain n’eft plus fec au toucher, il devient légèrement onétueux , parfaitement homogène, & d'un verd plus ou moins jaune. Si l'on defcend le rable dans l'intérieur du bain, & qu'on le remonte doucement, on voit s'élever de findigo qui y fufe, & avec lui un marc plus jau- nacre que.le refte du bain; fi l'on enlève quelques gouttes de ce dernier, elles feront d'abord vertes & tranfparentes ; bientôt ce verd tirera fur le bleu , & les gouttes perdront leur tranfparence : fi lon fait tirer du vouëde, & qu'on en prefle une pelotte dans les mains, elle yerdira à l'air. Dès que ces différens fignes paroïflent, maïs particulièrement dès que l'o- deur que nous venons d'exprimer , fe fait fencir , il efk tems, non feulement de faire pallier la cuve ( ces fignes ne fuffent-ils point venus, il faudroit toujours la pallier), mais encore de mo- dérer la fermentation , en y jetant, pendant que les deux gar- çons pallient , un peu de chaux avecune petite palette de bois, nommée sranchorr; un des garçons heurte auflitôc le liquide avec fon rable , afin de faciliter le mélange de la chaux. Un moment après on fentira le bain, ce qui fe fait d’une manière plus commode & plus füre , en en prenant dans une cuiller- à-pot: plate ; qu'en y trempant les mains, fuivanc la méthode fale &'dégoûtante des Teinturiers, & on ceflera d'y mettre de KR chaux, fi, dès la première mile, on fent l'odeur de l'alkalr volatil, C'eft cetce odeur feule'qu'il faut confulter, & le grand )i SUR E HNÉDE G O. nr talent eft de favoir la démêler parmi celles avec lefquelles elle peut être compliquée. Nous ofons mettre en fait, que ceux à qui elle eft familière, pourroïent , après la leéture de cet ex- pofé , conduire une cuve , fans y rencontrer de grandes diffi- cultés; pourquoi nous recommandons à tous ceux qui fe defti- gent à l'arc de la teinture, de difloudre du fel ammoniacal dans différentes infufions végétales, & de s'exercer, en décompo- fant ce fel avec un peu de chaux qu'ils jeteront dans cette même infufon, à diftinguer l'odeur de l’alkali volatil, de toute autre odeur étrangère dont il pourroit être chargé. On ne met donc cette fois qu’une légère quantité de chaux ( mettre de la chaux dans une cuve , s'appelle garrir , ) puifqu'on cefle dès que l'alkali volatil commence à fe faire fencir. Cinq heures après ce palliage, on découvrira la cuve ; on trouve , en la fentant, ce qui s'appelle goûrer , qu'elle a perdu la légère odeur d'alkali volatil qu'on y avoit développée le ma- tin ; le bain a repris de nouveau l'odeur douce, fade & acef- cente; la moufle ou fleurée, qui sélève en heurtant, eft d’un bleu plus vif qu’elle ne l'étoit au premier palliage après la mife de chaux; fes bulles font plus rondes , plus petites , & ont moins de tenue ; non-feulement l'indigo fufe dans le bain quand on remonte doucement le rable qu’on y a plongé, mais on le voir rouler à la furface de la cuve, où:il forme des veines qui fe meuvent en fpirale. Il faut pallier de nouveau, & fi l'odeur de l’alkali volatil ne remonte pas par cette manipulation, on garnira petit-à - petit, en conftatant , après chaque mife de chaux qui doit être fuivie d’un coup de rable, fi l’alkali volatil ne fe fait point fentir , afin de cefler de garnir dès qu’on en recon- noîtra l'odeur. Six ou fept heures après, on découvrira la cuve pour la troi- fième fois , on lui trouvera plus de fleurée bleue & d'une cou- leur plus nourrie qu’au fecond palliage; le bain fera couvert de plaques cuivrées d'un verd plus jaune ; mais il aura encore tro MÉMOIRE perdu l'odeur d’alkali volatil qu’on lui avoit laïffée au fecond palliage ; les bulles qui s'élèveront en fe heurtant, feront d’un bleu vif, mais rondes, de peu de volume; il faut pallier de nouveau , & il eft cems de garnir avec plus de hardieffe ; il ne faudra cefler de le faire, que quand l’alkali volatil domi- nera univerfellement , & qu'il viendra heurter vivement l’o2 dorat , pourquoi il faudra , après chaque mife de chaux, con- ftater l'état du bain, dans la crainte d’outre-pañler le point que nous venons d’afligner. Outre l'odeur dominante de l'al- cali volatil, d’autres fignes annoncent encore que la cuve eft fuffifamment garnie : la fleurée a plus de tenue , fes bulles plus de volume, leur bleu eft plus verd , elles font d’ailleurs du bruit en fe formant. La fermentation eft ramenée, & arrêtée en ce moment au premier degré pour vingt-quatre heures. Nous parlons géné- ralement, parce que, par des caufes particulières , il pourra fe faire que , dans cet intervalle , elle ait befoin d’être arrêtée de nouveau. Dès le lendemain matin, après ce troifième palliage, on peut teindre deflus la cuve. On teint trois fois dans la même journée, le matin à fix heures , vers les onze heures, & à cin heures du foir.( L'aétion par laquelle on teint , s'appelle zr1/e em cuve, ou paliment. ) Sitôt que les matières qu'on y teint en font forties, on pallie, & il eft toujours prudent de vérifier en ce moment l’état de la cuve. Tant que l'alkali volauil s’y fera fentir, il ne faudra point la garnir; mais fi l’on obferve que fon odeur foic éceinte , il faudra la faire reparoîïtre. Si, im- médiatement après la troifième mife en cuve, elle n’eft point trop douce , il fera bien de la pallier fans la garnir, & de re- mectre à le faire trois heures après, ou on la palliera de nou- veau. Il fera tems alors d’y faire encore dominer l'odeur de lalkali volatil ; mais il faut obferver qu'il ne heurtera plus l'odorat avec la même vivacite , à raïfon de ce que la chaleur commence à baïfler. On procède ainfi pendant quatre jours, SUR LIN DIG OO. Il à compter de celui où l’on a commencé à teindre; on garnit à la fin de chaque journée jufqu’au point , & avec les précau- tions ci-deflus indiquées : mais, comme la chaux va toujours en décroiflant, & que le mouvement de fermentation dimi- nue avec elle, il faut bien moins de chaleur à la fin des troi- fième & quatrième jours; fouvent même il exifte encore aflez d’alkali volatil ce dernier jour , pour être difpenfé de regarnir. Généralement le cinquième jour , on ne garnit point du-tout, parce que communément iln’y appoint de néceflicé de le faire. Si l'on à à travailler fur la cuve le fixième jour, il faut alors la réchauffer , parce qu'elle a perdu coute fa chaleur. Réchaud de la cuve au vouëde. LE PROCÉDÉ par lequel on réchauffe , eft fimple. On fait couler par une gouttière tout le bain dans une chaudière, on ly fait chauffer jufqu'à ce qu'il foit prêt à bouillir ; dès qu'il eft à ce point , on le renvoie par la même gouttière dans la chaudière d’où on l'a tiré. On reconnoït dans la chaudière que le bain eft à fon point de chaleur, lorfqu'en ouvrant fa furface avec un bâton , le creux que l'on a formé fe remplit rapidement par le repouflement qui fe fait de bas en haut. Il eft crès-intéreffant de ne point laifler bouillir le bain, parce qu'aloïs une partie de l'acide putride fe diffi- peroit par l'évaporation, & qu’on perdroir une portion du fer- ment de la cuve. L’exiftence de cet acide & lafacilité avec la- quelle le feu le dégage, feront démontrées par les expériences qui.termineront ce Mémoire. ( Exper. v.) Les Phénomènes qu'offre la cuve après ce réchaud , font les mêmes que ceux que nous venons de décrire, & on la gou- verne de la même manière. La feule différence importante qu'on obferve dans une cuve réchauffée, c’eft que, lorfque la diflo- lutien de l'Indigo y eft bien faite, le bain n’eft point verd comme dans la cuve neuve dont.nous venons de détailler le procédé ; il.eft au contraire; d’un jaune de-coing. Cetre diffe- 112 MÉMOIRE rence vient de ce qu'il refte encore dans le vouëde un peu de la partie colorante jaune de la plante qui, s’alliant au bleu, donne au bain la couleur verte, & la communique même aux matières qu'on y teint auxquelles il donne un œil verditre : aufli tire-t-on peu de parti du premier réchaud dans les Tein- tureries, on ne s'en fert que pour donner le pied du bleu aux étoffes qu'on deftine pour noir ; au fecond réchaud , cette partie colorante jaune ne fe fait plus appercevoir , elle a été détruite en partie par la fermentation de la première afliette de la cuve, & en partie enlevée par les matières qu'on y a teintes. D'un autre côte , la texture du vouëde ayant été bri- fée par le mouvement de la même fermentation, il lâche fes fucs en plus grande abondance, ce qui fournit plus de matières fermentefcibles; il sen extrait plus de fels ammoniacaux, par conféquent plus d'alkali volatil; la diffolution de lIndigo fera donc plus parfaite, & nétant plus altérée par le mélange de la partie colorante jaune du vouëde, elle aura la couleur de coing, comme toutes les teintures bleues végérales où l’alkali volaul furabonde. Comme la fermentation eft quelquefois retenue dans une cuve réchauffée par les parties calcaires, qui n’éroient point en- core neutralifées lors du réchaud, il fera bien de joindre une ou deux livres de tartre en poudre au fon que l'on emploie ici, comme quand on monte une cuve à neuf. On ne renouvelle jamais le bain, mais tous les trois mois on en jette le pied , & on le remplace par une nouvelle mife de vouéde. (Ce terme que nous fixons, fuppofe qu’on a réchauffé routes les femaines.) Dans cet intervalle, on fortifie ce pied de rems-en-tems de vingr à trente pelottes de vouëde; (la pelotte pèfe environ douze onces.) Explication des Phénomenes qu’offrent les cuves. AvanT de parler des deux extrêmes dans lefquels on peut donner en conduifant la fermentation dont nous traitons, nous croyons SPUMRULE AND: EG O. 113 croyons devdir expliquer les différens états où nous venons de la décrire; cette théorie fera préjuger les fignes auxquels on reconnoît qu'on a laiflé aller trop loin la fermentation, ou qu'on l'a trop réprimée; elle préparera à leurexplication & à l'in- telligence des moyens dont on ufe pour la ramener des extré- mes où on l’a fait ou laiflé pañler. . Toute fermentation exigeant un certain tems pour fe for- mer & acténuer les corps qui en font la matière, il n’eft pas étonnant que quatre heures après l’affiette on n’y trouve d’au- tre odeur que celle du vouëde en infufon, que le bain foit fec au toucher & prefque fans couleur , que les bulles qui s’en élèvent n'aient point de tenue; l’eau bouillante verfée fur le vouëde & l'Indigo, n’en à pu extraire encore qu’une petite quantité de parties extraétives infufñifante pour donner quel- que confiftance au bain & aux bulles qui s'en élèvent ; il ne commencera à {e charger des fucs du vouëde, que quand la fer- mentation, qu'on renouvelle ici dans cette plante, en aura brifé la texture; & les bulles n'auront de tenue que quand les par- ties oléo-réfineufes mifes en état favoneux, auront été rendues mifcibles à l’eau : c'eft à l'atténuarion de ces parties & à leur état favonneux qu'eft dû l'odeur douce, fade & acefcente du bain : une partie du bleu de l’Indigo & du vouëde déja difloute par l’alkali volatil qui s'eft dégagé , lui donnent alors la teinte verte, & l'évaporation de ce diflolvant , donne aux bulles la couleur bleue: le mouvement inteftin de fermentation, les par- ties cerreufes qu'elle a dégagé & mis en jeu, ont fufñi pour dé- compofer une petite partie des fels ammoniacaux contenus tant dans le vouëde que dans lIndigo, - Il eft tems de pallier alors la cuve: par cette manœuvre, on charge le bain , tant des parties colorantes déja difloutes dans le pied , que de celles qui fonc aflez atténuées, pour pouvoir létre bientôt ; d’ailleurs , en l'imprégnant de fucs qui fermen- tent, 1l en prend lui-même d’autanc plus de part à la fermen- tation, Tome IX, P 114 MÉMOIRE Il eft tems auffi de commencer à garnir , parce que l'acide putride déjà préfent , quoique peu fenfible , précipiteroic le cours de la fermentation & la conduiroit rapidement à la pu: tréfaction : on en fature donc une partie , & tandis qu'une partie de la chaux s’y unit, une autre mife en mouvement par l'effervefcence que cette union opère, heurte & dépofe les fels ammoniacaux, tant de l'Indigo que du vouëde; l’alkali vo- latil devient alors fenfible , mais il s’en développe peu cette fois où l’on ceffe de garnir, dès que l’on reconnoît fon odeur: ce feroit en pure perte que l’on en feroit développer davan- tage , parce que les parties colorantes ne font pas encore affez atténuces pour qu'il puifle les difloudre: d’ailleurs, en faturant tout l'acide , on fupprimeroit ou l’on ralentiroit tellement la fermentation , que fon mouvement deviendroit infuffifant pour atténuer l'Indigo & déterminer fa diflolution. À la feconde ouverture , on retrouve la fermentation au méme degré qu’à la première, parce qu’elle n’a été que mo- dérée & non arrêtée ; par fon mouvement continué , il y a plus d’Indigo atténué & diflout, aufli la feurce eft plus fournie en bleu ; à raïfon de cette plus grande atténuation , les bulles qui s'élèvent, ont moins de volume & de tenue, leur bleu eft plus vif & moins verd qu'après la garniture du premier pal- liage , parce que l'alkali volatil, qu'on avoit fait développer, fufñt à peine à la quantité d'Indigo donc il seft chargé, aufli fon odeur eft infenfble , le bain eft encore doux & fade comme à la première ouverture. Ces fignes réunis, établiffent de nou- veau la néceffité de garnir ; mais encore , avec la même précau- tion, il faudra ralentir la fermentation fans l'arrêter; on n’effa- cera donc point encote en entier l'odeur douce du bain. À la troifième ouverture , nous avons trouvé la cuve préci- fément au même état qu’à la feconde, fi ce n’eft qu'à raifon d'une diflolution plus parfaite de lIndigo , fon bain, fi c'eft une cuve neuve, eft d’un verd plus jaune , & d’un jaune plus franc, fi c'eft une cuve réchauflée. Il eft tems alors de faturer l'acide S'URAE DNHEG O: 115 qui a mené la fermentation jufqu’à ce moment, d'effacer l’o- deur douce en entier par celle de l'alkali volatil, parce que les matières colorantes font atténuées au point , qu'il les puifle patfaitement difloudre; on le fait donc dominer, fa furabon- dance pourvoira à ce qui s'en perd par l’'évaporation; c'eft à cette évaporation qu'eft dûe la fleurée, qui n'eft qu'un amas de bulles du bain où lIndiso , d’une ténuité merveilleufe , eft rendue à fa première couleur ; c’eft encore elle qui produit les plaques cuivreufes & les veines noires qu'on obferve dans le bain; ces veines font formées par des traînées d'Indigo aban- données par l’alkali volatil, elles tournoient & difparoiïffent , quand le nouvel alkali à faifi lndigo qui les forme ; enfin, c'eft elle qui produit l'efpèce d'étoiles noires qui {e formenc fur le bain quand on fouffle deflous au point où a donné le foufle ; ce figne annonce l’atténuation parfaite de lIndigo, & beaucoup d’alkali volatil dans le bain, s'il eft d'un jaune bien franc dans le contour de l'étoile. Cuve mal £ouvernée. Nous ALLONS TRAITER maintenant des deux extrêmes dans lefquels on peut donfer en gouvernant une cuve , des fignes qui l'indiquent, & des moyens d'y remédier. Si, fe méprenant fur l'odeur » On garnit lorfqu'elle n’eft encore qu'herbacée , fucrée , ou fi lorfque l'odeur de la cuve eft vraiment douce, fade, acefcente , on l'efface en entier par une trop forte mile de chaux; dans le premier cas, l'acide à naître, danslefecond, celui qui eft né fe trouvant faturé, la fer- mentation s'arrêtera , envain il fe décompofera des fels ammo- niacaux, l'alkali volatil ne diflolvra qu'ncomplérement l'Indigo encote en ctat d’aggrégation ; le bain fera donc d’un verd fale, la fleurée d'un bleu groflier , terne & verdâtre ; elle saffai£ fera à raifon du peu d'atténuation des parties colorantes dont elle eft chargée. Le bain, dans cer état de diffolution impar- faite ; ne prcfente point d'homogénéité , fa furface eft parta- Pi 116 MÉMOIRE gée par des lignes en quadrille, à-peu-près comme une terre qui,enfe defléchant, à fait retraite, & il n’eft pas rare de la voit couverte d’une légère pellicule femblable à la crême de chaux : l'odeur de la cuve eft alors toute-à-la-fois celle de l’eau de chaux, & de l’alkali volatil; mais l'odeur de ce dernier eft féche & dure, elle n'eft plus aromatifée par l'Indigo. La cuve, en cet état, s'appelle cuve rebutée, L'intenfité des fignes, que nous venous de décrire, eft en raifon de la caule qui les produit; il en eft de même des moyens qu'on emploie pour les faire difparoître; fi la cuve n’eft que légèrement rebutée, il fuffira de ne la point pallier, le repos favorifant la fermentation, il sengendrera bientôt affez d’acide pour faturer la chaux qui furabonde ; fi tous les fignes que nous avons décrits fe trouvent réunis, il faudra recourir à des acides tout formés, ou à des matières qui, en fermentant dans la cuve , puiflent en produire abondamment ; tels font le fon & la garence en fubftance ou en décoétion. Les moyens que nous préférons, font ceux-ci; il faut enfermer dans un fac dix livres de fon , on le met dans la cuve, & l'on répand en même- tems dans le bain trois ou quatre livres de tartre en poudre & tamifé. Au bout de fix heures, le fon a fermenté & produit fon acide, il fe bourfoufle & le fac remonte, on le tire alors & l'on pallie; fi l'odeur dure d’eau de chaux & d’alkali vo- latil eft effacée, fi la cuve ne refpire plus que laigre des ma- tières qu'on y a introduit, n’y a plus rien à faire; dans le cas contraire, on répète les moyens que nous venons d'indiquer. Nous préférons la méthode d’enfermer le fon dans un fac, en ce que le marc ne reftant point dans la cuve, n’y répand point d'odeur étrangère, 11 faut veiller avec attention une cuve ainf traitée; cat une fois que la fermentation interrompue renaîtra, l’acide qui s’en- gendrera , ne rencontrant plus d’entraves , précipitera fon cours de manière à ce qu'on pourroit étre furpris; 1l n’eft pas rare de voir la fermentation reprendre avec tant de vivacité S'URAL DINIDi GO. 117 ue le bain fe couvre d’une mouffe blanche & que le pied fe élève Cet état de la cuve s'appelle érozage. E Les fignes qui établiffent la nécefité de garnir, font les avant-coureurs de ceux qui annoncent la fermentation putride inftante ou commencée : ceux-ci font la direction longitudi- nale que prennent les veines de la cuve; la fleurée d'un bleu pâle ou fans couleur, fans confiftance ; la rupture prompte & bruyante des bulles qui s'élèvent quand on heurte le bain; le bruit que font ces mêmes bulles en montant du fond de la cuve à fa furface; l’afcefcence du liquide; enfin l'odeur fœtide du bain, fon bouillonnement » fa couleur roufle, fon afpect pulvérulant, la difparition totale de lndigo , le foulèvement du pied , feront les fignes de la putréfaétion adtuelle du bain, & , fi elle a gagné jufqu'au pied, la mafle cotale du vouëde mon- cera au-deflus de la cuve. Il fut semprefler de prévenir la putréfa&ion dès l'appari- tion des premiers fignes ; comme c’eft l'acide putride qui pré- Cipite la fermentation vers le troifième degré, c’eft lui qu'il faut attaquer ; on pallie donc & l’on garnit en conftatant cepen- dant l’état du bain après chaque mife de chaux point le faire repafler d’un extrême À l'autre, on arrête dès que l'alkali volatil commence à dominer. On eft d’ailleurs averti que la chaux a produit fon cffet > parce que les diffé- rens fignes de la putréfa&tion inftante ou commencée , per- écrépitent plus d'une manière aufhi prompte & aufli bruyante, elles font d’un bleu - Au bout deux heures on fit encore pallier la cuve, & fi les fignes de putréfation réapparoiflent , On garnit de nouveau, & l’on procède ainfi jufqu'à ce que le calme foit parfaitement rétabli. … Il eft difficile de ramener une cuve où la fermentation ca: davereufe à paflé jufqu'au pied; nous pouvons cependant aflu- 118 MÉMOIRE rer en avoir rappelé deux en cer état , où le vouëde en tota- Jité furnageoit le bain, perfuadés , malgré l'alkali volatil huileux qui s'en exhaloit, que la putréfaétion n’étoit complète encore que dans le bain ; ileft bon de noter que l'acide n’exifte pas en- core dansle vouëde quand ileft déjà développé dans lebain, & que la fermentation n y eft encore qu’acide , lorfqu’elle eft déja putride dans le bain. Nous chargeimes de chaux la mafle de vouëde qui furnageoit , il s’en exhala de fuite beaucoup d’alkali volatil cauftique ; on parvint à enfoncer cette mafle , qui gagna infenfiblement le fond de la cuve. Les chofes remifes dans cet état, nous continuâmes à faire pallier de deux en deux heures; au bout de fix heures la fleurce prit une petite teinte de gris. Nous effayâmes inutilement, en palliant En à faire repa- roître l’Indigo ; il avoit été dévoré par la fermentation pu- tride. Perfuadés que le vouëde étroit épuifé pour la plus grande partie , nous en introduisimes de nouveau dans la cuve, après l'avoir fait réchauffer, &, chargée de nouvel Indigo, ellerevint à bleu fans difficulté. Sans doute que fi, dans le cas que nous venons de décrire, la putréfattion eût été complète jufques dans le vouëde , nous n'euflions pas également reufli, les vrais anti-fepriques euflent été alors les acides. Cette diftinétion pourroit peut-être jeter quelque jour fur les remèdes anti-putrides ; la différence de la fermentation des premières voies à celle des fecondes, done la première eft peut-être le foyer, juftifie, ce nous femble, loppo- fition de ces remèdes. De tout tems on a joint en médecine, dans les fièvres putrides & peftilentielles , à l'ufage des acides celui des remèdes terreux , calcaires & alkalins, ces derniers, il eft vrai , ils ne font recommandés que comme alexipharma- ques ; mais il eft vraïfemblable , comme le prouvent les Expé- riences de M. Pringle, qu'ils agiflent réellement comme anti feptiques dans les fecondes voies, où il n’eft guère poflible que chez l'animal vivant, la fermentation pañe le fecond degré : en fuppofant que ce foic là l'état des liqueurs de l'animal dans les différentes maladies putrides , la quantité de terre que con- S'UR YU N D I:G OC. 119 tient le quinquina, & qu'on précipite de fon infufon par un alkali fixe, explique fa vertu anti-feptique : on conçoit aufli pourquoi, en lui alliant des remèdes terreux ou alkalins , on augmente fa vertu fébrifuge. ( Voyez, Ouxhame & Haën.) Nous terminerons là cette digreflion , bien étrangère à la ma- tière dont il s’agit, pour expofer quelques Expériences fur le bain de la cuve au vouëde , & qui ajoutent encore aux preuves de fa théorie. Première Expérience. Si l'on fait évaporer promptement du bain de la cuve, & qu'après l'avoir concentré , on le laïfle repofer , lIndigo qui étoit diflout fe précipitera, & la liqueur de verte qu’elle étoit deviendra roufle comme une forte décoétion de plante; fi on la laïfle quelques jours fur le précipité, elle en rediflolvera une païtie. Deuxième E xpérience. L’affufion d'un acide , change le bain de verd - jaune en bleu. Trorfième Expérience. L’alkali fixe précipite une terre blanche foluble dans les acides végétaux , mais qui fe colore bientôt en bleu pâle. a "rt Quatrième E xpérience. La diflolution mercurielle précipite à l'inftant toute la par- tie colorante, l'acide nitreux s’'unit aux terres abforbantes & à Jalkali volatil ; le mercure , dans fa chüte, entraîne avec lui lIndigo; ce précipité blanchit le cuivre: en filtrant, on obtient une liqueur décolorée, qui contient un fel à bafe terreufe , dont la terre précipitée par l’alkali fixe eft foluble avec effervefcence par tous les acides. Cinquième Expérience. Quatre livres d’un bain de cuve non garnie & à donc (terme de teinturerie ), ont fourni au degré moyen de l’eau bouillante quatre onces de liqueur acide. L'on emploie encore dans les cuves à l'urine, les deux mou- 120 MÉMOIRE, &c. vemens remarqués dans les autres , celui de fermentation , & l'autre d’effervefcence; l'urine fournit le premier , & les acides qu'on y introduit fous forme concrète ou liquide, procure le fecond par l'union avec l'alkali volatil , qui eft ici le feul pro- duic de la fermentation qu'on emploie; ces deux mouvemens réunis, en mettant en jeu les parties terreufes de l'urine, décom- pofent les fels ammoniacaux. Nous ne détaillerons point les procédés de la cuve à l'urine à froid ou à chaud décrite par M. Hellot. Nous les avons exc- cutés d’après lui ; la diffolution de l'Indigo s’eft faite dans l’une & l’autre; mais nous n'avons pas pu teindre dans celle à froid. Nous n'ofons point prononcer qu'il eft impoflible de le faire ; mais nous ferions bien tentés de le croire , parce que la diflo- lution n’eft pas, ce nous femble, à un point de ténuité telle qu'elle puifle pénétrer à froid les matières qu'on en veut tein- dre, foit parce que l’alkali volatil n'eft point ici rendu caufti- que , foit parce que les deux mouvemens qui s’opèrent ici comme dans la cuve d'Inde, ne lui livrent pas l'Indigo fuffifam- ment atténué. Nous avons vu, dansces divers procédés, que l’alkali volatil eft le vrai difflolvant de l'Indigo , qu'il n’a de prife fur lui, que lorfque fon aggrégation eft rompue ; dès-lors le procédé où lIndigo eft le plus atténué & où l'alkali abonde le plus étant le plus complet, nous aflignerons la première place à celui de la cuve au vouëde ; la feconde, à celle à l'urine , parce que fi lIndigo n'y eft pas autant atténué que dans la première, elle a quelque rapport avec elle, par la quantité de l'alkali volatil u’elle contient ; la cuve à froid , quoique très-commode fur- tout avec l’alkali minéral , doit être la dernière , parce que fila diflolution de l'Indigo y eft plus parfaire que dans la cuve d'In- de , elle y eft aufli moins durable, parce que l'aikali volatil, dé- gagé par la chaux, eft plus mobile. Sans doute qu'il eft dans les crucifères des efpèces qui peu- vent remplacer le paftel & le vouëde, cette recherche & celle d'une fécule qui imite l'Indigo , pourront donner matière à de nouveaux Mémoires, ANALYSE ANALYSE PAT EXAMEN CHIMIQUE DE L’INDIGO, TEL QU'IL EST DANS LE COMMERCE, POUR L'USAGE DE LA TEINTURE. PIECE qui a concouru pour le Prix fur la nature L: & l’ufage de lIndigo. Par M. BErGman, Correfpondant de l'Académie: Tome IX: | Q È po - = “End _— Le 2) ge, de sr 4 à a ar 4:77 x } (Nr: 1] Le. 7 " or L E ’ L \ EL cp M 7'ME fn Es : etT 15) x an rh € 8 " : 4 FER Li > s Hs 5, : t et AHitue HAMUES RE ET SON Fr r - NT ER dé ee nes & ro EAN, A! 2 OR + : e ch, Qird à % Ky Lei : 17 ‘ PRE 2 ; “PER CP Le “sabot 9h '1uRbtibe CS Las à EN sRoL m7 Le À NS > D ANALYSE PL. EXAMEN CHIMIQUE DE L'INDIGO. Nifi.utile eft quod facimus, ftulta eft gloria. PrÆDRUS. & tr. Os PEUT RÉDUIRE les Arts mécaniques en deux claffes générales : l'une dépendante uniquement, ou au moins pour la plus grande partie, d'une adrefle mécanique ; & l'autre, qui a encore befoin de certaines opérations vérita- blement chimiques, quoique fouvent très-mal entendues. Il faut pourtant avouer, qu'il n’en eft prefque aucun de la pre- mière même, qui n'ait pas quelque cas où il eft néceflaire de recourir aux opérations plus ou moins chimiques. L'in- fluence de cette fcience, pour perfeétionner les Arts, eft donc très-évidente, & fi les Arts ont encore beaucoup d’embarras Q ÿ 24: À N'ANEMNS"ETEHI MI QUE & de défauts, cela vient en partie du filence myftérieux dont on a toujours enveloppé coute la Pratique, fuggcrée, ou par un hafard heureux, ou par un tâtonnement opiniâtre; én partie aufh, parce que des hommes fuffifamment inftruits n'ont pas eu le loïfir de s'y appliquer avec fuccès. Mais, depuis l'époque la plus mémorable dans l'Hiftoire des Arts; je veux dite, depuis que l’Académie des Sciences à commencé de publier leurs Defcriptions, la feène a changé. Dans ces Ouvrages, le favant Chimifte ou Phyficien apprend beaucoup . de faits très-remarquables, il entrevoit ce qui manque, & la connoïffance d’autres faits ignorés des Artiftes, lui fournit des moyens pour y remédier, ou au moins lui montre le chemin le plus court & le plus sûr pour y arriver. uant à l'Art de la Teinture, il n’eft tout entier qu'une fuite de plufieurs opérations chimiques, foit pour préparer les matières à ceindre, foit pour extraire & attirer les par- celles colorantes , foit enfin pour les appliquer folidement. Le premier pas eft de bien connoiître la nature des drogues dont on fe fert, & ceft ce probléme, que l'Académie des Sciences a propofé de réfoudre touchant fIndigo. Je vais donc décrire mes Expériences, fouhairant que leurs réfultats puillent en quelque façon fatisfaire les demandes d’une Com- pagnie fi illuftre. Je me fuis fervi du bon Indigo, dont les Teinturiers font ordinairement ufage : le plus fin eft crop cher pour étre fouvent employé. # L'Indigo avec de l’eau. $:2. J'AI FAIT BouILEIR 100 parties d'Indigo en poudre avec de l’eau diftillée pendant un quart d'heure, dans une cucur- bite de vérre : je laiffois aflez de reims aux poudres pour cou- ler à fond, & je décantois après doucement la liqueur fur un filtre de papier, évitant, autant qu'il étoic poflible, qu'aucune partie de la poudre fûtemportée: j'ajoutois enfin la même quan- tité d'eau, Je faifois bouillir & décanter comme la première D'E LIN D'I G O. 126 fois, -répétant la même opération jufqu'à ce que l'eau ne fe colorât plus. Enfin jai foigneufement affemblé la poudre, qui féchée, fut expofée à la chaleur du bain-marie pendant quinze minutes, comme elle avoit été avant la décottion, & jai trouvé, en pefant, une perte de onze parties; il refte environ une partie de la même nature, mais qui neft pas encore féparable moyennant de l’eau, étant défendue par les autres matières. 6.3. La liqueur filtrée étoic claire, brune jauniâtré, fans odeur fenfible, mais d’une adftriétion très-légère fur la langue. En concentrant, par l'évaporation, elle devient brune, rou- geâtre prefque opaque : elle ne rougit point le tournefol, & ne verdit point le fyrop de violette. L’alkali ni fixe ni volatil n’en fépare rien, mais les acides précipitent promptement des molécules brunâtres pour la plus grande partie diflolubles par l'alkali fixe & volatil, qui en prénnent la couleur. Après la précipitation, la couleur de la liqueur refte, mais affoiblie & jaunûâtre. La diflolution d’alun caufe une précipitation jaunâtre. Celle de vitriol de cuivre fait rombet des parcelles grifes, qui affemblées & lavées fe diffolvent par l'alkali volatil, ne laif- fant qu'une petite portion blanche de refte : la diflolution devient grife, bleuâtre. Le vitriol verd donne un fédiment femblable qui fe comporte avec de l’alkali volatil comme le précédent, mais la liqueur n’acquiert qu'une couleur de paille très-foible, La matière aftringente eft précipitée non- feulement par l'alun, mais aufi par tous les fels métalliques. La teinture des galles ne fait aucun changement vifble ;, non plus que l'efprit-de-vin. & 4. L'eau feule n’eft donc point capable de difloudte les mo- lécules bleues, n'atraquant qu'environ £ du poids; c'eft-à-dire, les parties mucilagineufes, les aftringentes , & les favonneufes. La potdré d'Indigo épuifée par des décoëtions dans de l'eau, €ft aufli bonne pour teindre, finon meilleure qu'auparavant. 126 À N À LYS,E ,C HI M I QUE La matière diffoute par l'eau n'eft donc pas toute entière A . . / de la même nature, puifque les parties réfineufes de la fubf- tance favonneule, fe laiflent précipiter par tous les acides. L’Indiso avec des diffolvans phlogiftiques. 6. 5. La roupre D'Inpico digérée fortement dans ’efprit- de-vin bien rettifié, donne une teinture d’abord jaune, puis rouge & enfin brune. Cette opération répétée plufieurs fois avec de l’efprit-de-vin nouveau l’épuife enfin, & ce menf- true ne fe colore plus De cette manière, l'Indigo perd environ -- de fon poids, comme on peut s'en convaincre en aflemblant, défléchant & pañlant la poudre reftante. La couleur de la teinture varie felon l'épaifleur de la mafle mife entre l'œil & la lumiere; par l'atténuation, elle devient jaunâtre, & de plus en plus foible. De l’eau ajoutée la rend louche, une matière réfineufe brunâtre eft féparée; mais va très-lentement au fond. L’acide marin ne fait aucun changement, la couleur en devient feulement plus foncée ,- mais fans fe grumeler; au contraire, l’alkali volatil cauftique la rend plus claire & précipite un peu de matière; il en arrive de même avec l’eau vitriolique concentrée : la leffive d’al- kali fixe fait un mélange un peu louche & favonneux, préci- pitant en même tems un peu d'alkali, & par-là la liqueur s'éclaircit; elle contient pourtant encore, & une portion d’al- kali, & la matière réfineule, comme on peut s’en convaincre, en ajoutant quelques gouttes d’un acide, qui non-feulemenc excitent une cffervefcence, mais féparent aufli des floccons rougeatres, 6. 6. L'éthèr vitriolique agit fur l’Indigo à-peu-près comme l'efprit-de-vin, la couleur me femble pourtant être un peu plus gaie. L'eau ajoutée précipite des foccons jaunes brunâtres. $. 7. Les huiles, tant exprimées que diftillées, ont peu de prife fur l'Indigo, quoique aidées par la digeftion. Elles MENETDNIDI CG Oo: 123 jauniflent pourtant , & cette circonftance jointe à ce que la poudre bleue une fois bien remuée à befoin de plufieurs jours pour gagner le fond, fait paroïtre l'huile verte; mais, cette apparence eft fauffe , elle s'affoiblit infenfiblement & eft enfin entièrement éteinte; mais elle peut être renouvel- lée à fouhait , en fecouant le vaifleau & le laiflant enfuite en repos. j L’Indigo avec des acides. $. 8. JAI MËLÉ une partie d'Indigo bien pulvérifé avec huit, d'acde virriolique clair, fans couleur & tellement concentré, que fa pefanteur fpécifique étoit à celle de l'eau diftillée comme 1,900 à 1,000. Le mélange fait dans un fla- con de verre; je l'ai bouché légèrement. L’acide attaquoit ptomptement l'Indigo, excitant une grande chaleur. Après une digeftion de,24 heures, l’Indigo étoit diflout; mais le mélange étoit tout-à-fait opaque & noir. En ajoutant de l'eau, il s'éclaircit donnant fucceflivement toutes les nuances de bleu felon la quantité, & il faut au moins vingt livres d’eau dans un vaifleau cylindrique de verre de fept pouces de diamètre, pour éteindre la moindre gouttelette de la dif folution décrite. Voilà une grande richefle de couleur. J'entends par teinture d'Indigo, la diflolution mélée avec de l'eau jufqu'à devenir tranfparente, plus où moins bleue felon qu’elle a plus ou moins d’épaiffeur, ce dont ilifaut fe fouvenir pour la fuite. En laïffant tomber une très-petite portion d'Indigo fur Facide vitriolique concentré fans faire aucun mélange, on en voit bientôt fortit des nuages verds, fi on ajoute une gout- relette d’eau, il s'exeite de la chaleur, les nuages deviennent bleus à linftant; cela arrive aufli de foi-même, mais plus lentement. :! Lacide vitriolique phlogiftiqué n'attaque point l'Indigo ; -moms cela ne fe fait pas de la manière que je viens de décrire, 128 ANALYSE CHIMIQUE comme nous le verrons bientôt. Je phlogiftique mon acide concentré en y mélant de la poudre de charbons & le retirant enfuite moyennant la diftillation ; car, fans érre aidé par la cha- leur, il ne fe charge pas du principe inflammable des charbons. - Si l'acide vitriolique eft delayé par de l’eau, il n'attaque que le principe terreux ($. 27), il devient pourtant jaynâtre par la diflolution de quelques parties mucilagineufes, ce qui arrive de même à tous les autres acides. 6.9. Pour connoître de plus près les propriétés de cette diflolution relativement aux autres matières, jai verfé plu- fieurs mélanges dans divers bocaux de verre marqués de cer- taines lettres d’alphabet : j'ai mis enfuite, dans chacun, une goutte de la diflolution d'Indigo; j'ai bien mêlé & laifle les bocaux en repos lun auprès de l’autre dans une température de 15 à 10 degrés, felon l'Échelle de M. de Réaumur, obfervant journellement les changemens. (a) Le premier bocal contenoït, outre la goutte de la diffolution d'Indigo, 215$ grains d’eau difüllée, devant fervir à comparer & mieux Cvaluer les autres réfultats. Pen- dant plufieurs femaines que durerent ces obfervations on ne voyoit d'autres changemens, que la diminution caufée par l'évaporation, (6) 325 grains d’acide vitriolique phlogiftiqué avec une goutte de la diflolution légèrement fecoués dans un flacon bien bouché, donnoiïent une jolie teinture bleue, mais qui, après quelques heures, tiroit fenfiblement fur le verd. Ce chan- gement s'augmentoit, & en même-tems la couleur s’affoiblif- foit de plus en plus, de manière qu'après trente heures il n'en reftoit qu'une teinte jaunâtre à peine vifible. Le bleu écoit donc entièrement mangé, & ne pouvoir revenir, ni par Pair libre, ni par les alkalis, ni par aucun autre moyen. (c) 325 grains d'eau diflillée mélés aveç une goutte de la diffolution & quatre d'un bon acrde: nitreux, devenoient bleus ; DE ! PIN D 1 G ©. 129 # bleus ; mais cette couleur fur entièrement détruite dans un quart d'heure, fans pafler auparavant par le verd & fans pouvoir reparoître. d) 325 grains d’acide de fel marin avec une goutte de la diffolution d'Indigo, devenoient bleus:comme tous les au- tres mélanges, mais ils ne changecient plus. L sie) 7grains d'acide de tartre:cryftallife, diffouts dans 21$;grains d'eau diftillée & mêlés avec une goutte de diflolu- tion changeoïent comme 4, mais plus lentement. Après 72 heures, la couleur étoit verte, & après 144 d’un jaune peu fen- fible : ni les alkalis, ni d'autres moyens ne la reftiruoienc. Il faut obferver, que je n’entends pas-ici la crème de tartre, mais fon acide délivré de tout alkali & cryftallifé. -: (f) 280 grains de bon wagre devenoient bientôt verds avec la goutte de la diflolurion, -puifque l'acide même tiroir un peu fur le jaune, En quatre femaines, la teinte verte fut irréparablement perdue. , (g) 280 grains d’acide des fourmis diftillé avec une goutte ‘de la diffolution, agit comme le vinaigre, mais plus lentement. de n’ai pas encore fait d’eflais avec cet acide non diftillé, -qui Eft plus huileux & opère alors, felon toutes les apparen- ces, comme le vinaigre. (%) 6 grains d’alkali fixe cauftique , diffouts dans deux -cens quinze grains d’eau diftillée, deétruifent bientôt la cou- leur bleue d’une goutte de la diflolution, fans que les acides puiflent la rappeler. La décoloration pañle par une teinte verte. (2) 6 grains de potaffe blanche , dans deux cens quinze grains d’eau diftillée, ne caufent aucun changement pendant .plufieurs femaines; mais une plus grande quantité de cet alkali attaque pourtant les molécules bleues, quoique lentement. (k) 6 grains de /e/ de foude avec autant d’eau fe compor- tent de même. Tome IX, R 130 À NL AB SE MCE I ME QNUGE (1) 6 grains d’alkali volatil cauflique changent le bleu d'une goutte de la difflolution en verd, & détruifent aufli cette dernière couleur en quelques heures. (m) 6 grains d’alkali volaril cry ftalife, produit le même changement, mais il faut beaucoup plus de tems. 11 faut obferver que les alkalis fixes bien mitigés, féparent dela teinture d’Indigo une poudre bleue très-fine, qui tombe très-lentement. Je diftingue cette matière fous le nom d’/#- digo préapité. On le recouvre aufli, en faifant dégoutter la teinture dans de l’alcohol de vin, dans des diflolutions fatu- rées d’alun, de fel de glauber ou de quelqu’autre, qui con- tient de l'acide vitriolique; mais la teinture refte toujours un peu colorée. (7) 16 grains de fel de glauber avec deux cens quinze grains d'eau diftillée, & une goutte de la diflolution, tiroient un peu fur le verd, après fix femaines. (0)-16 grains de zirre purifié ne changent pas. (p) 16 grains de /è/ marin purifié avec une goutte de la diflolution, ne font aucun changement. 8 (q) 16 grains de /e/ ammoniac purifié non plus. Il faut pourtant obferver que ces fels neutres féparent un peu d'In- digo précipite. (r) 16 grains de sartre tartarifé verdifloient diftinétemenc après trois Jours : depuis la liqueur fe moififloit & la couleur fuc enfin effacée. (f) 16 grains de /e/ microftomique verdifloient un peu après fix femaines. Ce fel contient effentiellement une por- tion d’alkali de foude, outre l’alkali volatil & acide de l'urine. (1) 16 grains du /ucre blanc verdifloient diftinétement après douze heures : après quatre jours, il ne reftoic qu'une teinte Jaunâtre très- foible. DE'L'INDIGO. L3t - (a) 16 grains d’alun de Rome purifié, ne caufent aucun changement. (x) 16grainsde vzrrio/ bleu, ne faifoïent aucun changement. (y) 16 grains de virriol verd avec la quantité ufitée d’eau & une goutte de la diflolution, verdiffoient dans trois jouts; &, après trois femaines, la couleur étoit entièrement mangée. (x) 16 grains de foie de foufre, détruifoient la couleur en deux ou trois heures. (za) 16 grains de réalgar ou arfenic rouge, n'excitoient aucune teinte verte, & la couleur ne fut aucunement altérée en fix femaines. (bb) 16 grains d’arfenic blanc ne faifoit aucun changement. (cc) 16 grains d’orpiment, de même. (dd) Un grain de magnéfie noire détruifoit la couleur bleue en quelques heures non-feulement d’une goutte de la diflo- lution, mais aufli de plufñeurs autres. (ee) 17 grains de garence avec les deux cens quinze grains d’eau, tournoient bientôt la couleur bleue d'une goutte de la diflolution en verd; en effec, cette drogue donne d'elle-même une teinte jaunâtre, qui reftoit feule après vingt jours; la bleue étant tout-à-fait mangce. Cf) 16 grains de paftel fe comportent de même ) Mais plus vice. : 6. to. Les réfultats des Expériences précédentes {ont dif- ferentes, fuivant les qualités des matières. Quelques-unes ne font aucun changement , comme l'acide de fel, le nitre, le £l marin, le {el ammoniac, l’alun, le vitriol bleu, l’arfenic blanc, lorpiment & le rcaloar; ou au moins très-lentement, comme le fel de Glauber & le fel microfcomique. Toutes lës autres détruifent entièrement la couleur bleue; nous ver- ons pourtant qu'il y a une grande différence entrelles, R ij 13: ANAŒYSE CHIMIQUE parce que les unes mangent en fouftrayant une portion de phlogiftique , & les autres en fourniflant une furabondance de la même matière. On reconnoïit prefque généralement que le phlogiftique, comme principe des corps, eft la caufe principale de leur couleur, en modifiant le paffage & la réflexion dela lumière; la diminution & l'augmentation de cette fubf- tance colorante n'eft donc pas indifférente. Examinons premiè- rement les matières qui dévorent le phlogiftique, dont nous n'avons employé icique deux, l’acidenitreux & la magnéfie noire. L'acide nitreux concentré, eft un des plus puiffans aimans de phlogiftique, s'en charge aifément, devient alors jaunâtre jufqu’au rouge foncé, pouflant des fumées rougetres. Prenons l'acide nitreux nouvellement tiré du nitre purifié moyennant Facide vitriolique concentré; diftillons dans une retorte un peu haute, très-lentement, nous verrons l'acide fe décolorer peu- à-peu, & enfin devenir comme de l’eau, mais beaucoup plus âpre qu'il n'étoit auparavant. Cet acide, ainfi purifie, redevient coloré par là moindre portion de phlogiftique, & recouvre les proprietés mentionnées. En aflemblant les vapeurs chaf- fées pendant la diftillation dans une bouteille renverfee & pleine d’eau, on aura un fluide élaftique , tranfparent, & fans couleur, connu aujourd'hui fous le nom d'a nitreux , ui neft autre chofe qu'une portion d’acide nitreux unie-au phlogiftique, & par-là devenue élaftique. Cette aflertion eft appuyée fur des faits conftans : l'acide nitreux décoloré de la manière décrite, gagne de rechef de la couleur par l'attouche- ment des matières qui contiennent du phlogiftique, & qui le retiennent plus foiblement ; que: ne fair l'acide nitreux ; mais cette fubftance colorante. chaflée, lavée & aflemblée, fait l'air nitreux. Voilà la fynthèfe. De l’autre côté, l'air nitreux eut ‘facilement être décompofé par l'introduétion d’une quantité fuffifante d'air athmofphérique, dont la partie pure a plus d'afinité avec le phlogiftique, que ne l'a l'acide nitreux qu, en perdant le phlogiftique, perd aufli fon clafticité & peut être recueilli dans l'eau difüulies ,:qui énvirone le mélange î DE LINDIGO. 133 dans des vaiffeaux clos. Ce pañage du phlogiftique de l'acide dans l'air, fe fait avec un petit fremiflement & une coloration rougeatre paflagère. Voilà l’analyfe. En confidérant tout cela, on peut facilement concevoir pourquoi l'acide nitreux mange prefque toutes les couleurs, & entrautres celle de lIndigo ($. 9, c,) comme nous le verrons bientôt plus en détail ($$. 13, 14.) La magnéfie noire (Minéral. de M. Cronfledt, $. 116,) qui eft employée dans nos vérreries, n’eft que la chaux d'un mé- tal, différent, felon toutes les apparences, des autres connus, Celle-ci attire le phlogiftique encore plus fortement que ne fait l'acide nitreux pur ; car fi on en met une dofe proportion- née dans l'acide nitreux non coloré, elle refte fans être pref- qu'aucunement entamée, au-lieu qu'une égale portion d'acide nitreux phlogiftiqué diflout la poudre de la magnéfie parfai- tement, perdant en même tems fa couleur, puifque le phlo- giftique s'attache à cette chaux & la fait difloluble. L’acide nitreux pur fait de même, en y ajoutant un peu de fucre, d'huile ou d'autre matiere qui peut fournir une quantité fufñ. fante de phlosiftique. On voit donc évidemment pourquoi la couleur eft mangée dans notre Expérience, & pourquoi la quantité de magnéfic employée peut encore détruire le bleu d’un grand nombre de nouvelles gouttes de la diflelution; mais la li- queur devient de plus en plus brunâtre, & enfin prefque opaque. $. r. Les autres matières, qui détruifenc Ja couleur bleue, le font en fourniflant plus de phlogiftique qu'il ne faut pour le bleu, & je vais tâcher de prouver cette affettion, D'abord il eft bien hors de doute que les matieres en queftion contiennent beaucoup de phlogiftique. L’acide du tartre donne, par la dif- tillation, une vraie huile. Le vinaigre & l'acide des fourmis fonc auf huileux, principalement le premier non diftillé, & c’eft fans doute la raifon pourquoi le vinaigre fait plucôt le chan- gement décrit que l'acide des fourmis qui étoit diftillé. Le iucre eft aflez huileux pour pouvoir brûler avec de la fainme, 134 ANAËZYSE CHIMIQUE Le fel végétal ou tartre tartarifé, contient l’alkali végétal faturé avec du tartre, & le tartre même le plus pur, eft toujours con- taminé d'huile. L’acide vitriolique phlosiftiqué, connu ordi- nairement {ous le nom d’efprit volatil de foufre, le foie de foufre & le vitriol verd, prouvent bien clairement qu'il n’eft pas néceflaire que le phlogiftique foit dans une combinaifon huileufe, étant ici très-pur, & faifant néanmoins le même effer. Le vicriol de fer a beaucoup de phlogiftique tandis qu'il eft verd & cryftallifable ; mais le vitriol bleu n’eft que la chaux de cuivre unie à l'acide vitriolique, comme on peut facilement s'en convaincre; car la chaux de cuivre fe diflout aifément dans l'acide vitriolique, donnant le véritable vitriol de Chy- pre, au-lieu que le cuivre en état métallique n’eft attaqué qu'en employant une grande chaleur, moyennant laquelle une partie de l'acide vitriolique peut fe charger du phlogiftique & l'emporter. Enfin la garance & le paftel, comme drogues colorantes, abondent néceflaitement en phlogiftique. * Mais comment une furcharge de phlogiftique peut elle d’abord changer le bleu en verd, & enfuite effacer même certe dernière couleur? Prenons une quantité determinée d'acide nitreux, préparé à la manière de Glauber; ajoutons-y dans un flacon environ = en mefure d’eau diftillée plus ou moins felon la concentration de l'acide, & nous verrons la liqueur devenir verte; ajoutons plus d’eau , la couleur s’éclaircira & devient enfin bleue quand le volume d’eau égale ou furpafle un peu celui de l'acide ; en augmentant enfuite l'eau, le bleu fe dé- laie & s'efface enfin tellement que le mélange paroïît être d’eau {eule. En ajoutant l’eau ici on ne fait, je crois, que répandre l'air nitreux dans un plus grand volume. Donc cette combi- naifon élaftique d’une portion d'acide avec le phlogiftique pro- duit dans une certaine denfité dû brun rougeitre qui, conve- nablement dilatée, devient fucceflivement jaune, verd & bleu, DE LIN DIGO. 135 exattement felon l’ordre des couleurs prifmatiques. Il ne faut pourtant pas conclure delà que toute variation des couleurs dépend de la différente denfité du phlosiftique. Il eft vrai que le mélange des molécules bleues & jaunes, produifant du verd, paroîr s'y accorder, puifque la denfité des parties bleues avec celle des parties jaunes, qui eft plus grande, font naturelle- ment enfemble une denfité mitoyenne ou celle de la verdure; mais la Nature fait fouvent naître le même effet par des voies crès-différentes; il peut donc arriver qu'outre la denfité il y a quelque diverfité dans la qualité ou dans l'ébranlement de la matière phlogiftique qui produifent aufli la différence des couleurs. Ce que j'efpère avoir prouvé, c’eft que la denfité feule peut quelquefois y fuffire. Donc, puifque le verd peut vifñblement changer en bleu par la raréfaétion de la matière phlogiftique, il faut récipro- quement que le verd puifle naître par la condenfation, ou, ce qui revient au même, par l'augmentation de phlogiftique dans un volume bleu. Nous avons déjà démontré que, dans tous nos cas, des changemens du bleu en verd il y a une fura- bondance de phlogiftique ; jefpère donc qu'on ne doutera pas de cette partie de l’affertion. Mais comment la couleur verte eft-elle détruite? Il eft bien vrai que la liqueur devient jaunâtre, après l'abolition de la ver- dure ; on pourroit donc croire que la quantité de phlogiftique étant fucceflivement développée, devient plus que fuffifante pour la verdure, & par-là caufe enfin le jaune felon l’ordre des couleurs; mais, quoique cette explication foit très-plaufible , jai pourtant peur qu'elle n'ait pas ici la véritable. Il faudroit alors que cette couleur jaune püt revenir en verte & même en bleue par la diminution proportionnée du phlogiftique, & c'eft en cela que jufqu'ici je n’ai pas réuffi, ni par l'acide ni- treux, ni par la magnéfie noire. Il me femble donc qu'il y a ici une diflipation de la matière inflammable. La portion, qui eft développée des matières ajoutées étant attirée par les molé- 155 ANALYSE CHIMIQUE cules bleues, fait une accumulation de phlogiftique, mais dont les parties ont une cohérence beaucoup plus lâche qu’aupara- vant, & C’eit pourquoi ces atomes volatils font facilement dif- fipés étant expofes à l'air libre, qui les attire aflez puiflammenc pour les arracher à l'acide nitreux même. L'autorité de M. Æellor eft d'un grand poids en matière de teinture ; mais je n'ai pu, il faut l'avouer , me perfuader que fon explication de la fixité des couleurs foi généralement la véri- table, On fait fort bien que ni le tartre vitriolé, niletartrene font capables d'empêcher les changemens en beaucoup de cas. Il eft vrai que les couleurs doivent néceflairement varier fi les par- celles colorantes fe détachent fucceflivement ; mais je fuis aufli afluré que ces parcelles peuvent refter & leurs couleurs pourtant s’aftoiblir. N’eft-il pas très-probable que leur phlogif- tique, qui eft la caufe principale de la couleur, foit quelquetois affez lâchement combiné avec les autres principes pour étre plus ou moins diflipé par les rayons du foleil? On connoît le pouvoir des corps à reflort. Une corde vibrante en excite d’au- tres dans les environs, qui font d’une tenfion & d’une longueur convenable. Il eft donc vraïfemblable que les rayons direëts, & quelqueiois la lumière feule, ébranlent tellement le phlogif- tique engagé, étant eflentiellement très-élaftique, qu'il brife en peu de temps fes entraves, L'air pur attire encore avec une force crès-grande le phlogiftique; il peut donc, foit feul, foit aidé par la chaleur qui augmente la volatilité, ou par les rayons dardes du foleil qui excitent des vibrations trop fréquentes, enfin rompre fes liens, F $. 12. L’acide nitreux un peu concentré, attaque l'Indigo violemment, excitant beaucoup de chaleur & de moule. Trop ferréidans un flacon bien bouché, il le fair éclater favec explofion, Si l'acide eft très-fort, l'Indigo s'embrâfe. L’acide convenablement afoibli, par de l’eau, prend d’abord une teinte Runâtre, qui depuis brunit de plus en plus ; les morceaux un peu grands deviennent légers & fpongieux ; leur couleur naturelle DE L’INDIGC. 137 naturelle change peu-à-peu en ferrugineufe, fans pouvoir don- ner du bleu davantage. Le réfidu , après cette opération, étant bien féché, a l'appa- rence de terre d'ombre, & ne fait que le tiers de l'Indigo. De l'eau en diflout quelque portion; mais il faut beaucoup d’eau pour l'épuifer, & elle fe colore en jaune brunatre. Quand leau ne l'atraque plus, l’efprit-de-vin en eft coloré en rouge, & la leflive d’alkali fixe en jaune brunatre. 6. 13. L’acide nitreux, après avoir agi fur l'Indigo, fe trouve beaucoup affoibli par le phlogiftique & les matières difloutes. L’alkali fixe en précipite un peu de fer calciné, mêlé avec de terre pefante & calcaire ($. 27); mais, en ajoutant trop d’alkali une portion du précipité fe rediflout faifant la cou- leur plus fpncée qu’elle n’étoit auparavant. L’alkali phlogif tique produit du bleu de Prufle. La teinture du réfidu faite par de l'eau, donne avec tous les acides un précipité fpongieux, qui ne fe diffouc totalement ni par les alkalis, ni par lefpritde-vin, ni même par l'eau, quoique la teinture évaporée jufqu'à ficcité foit aïfément re- diffoute. On fait que la matière cafeufe du lait une fois fépa: rée moyennant quelque acide, refte de même indifloluble. L'alkali, foit ordinaire, foit phlogiftiqué, ne précipite rien. Cette teinture aqueufe ne diffère donc de la decoétion d'Ins digo ($$. 2,3), que par une couleur plus gaic. La teinture rouge fpiritueufe fe décompofe avec l'eau; mais la ceinture akaline jaune brunäâtre s'y mêle fans aucune précipitation, & la tranfparence même n’eft pas endomma- gée, quoique la couleur change un peu. On voit donc que l'acide nitreux un peu fort, agit tout au- grement que ne fait l'acide vitriolique: au-lieu de difoudre les molécules bleues, il les détruit parfaitement; mais, étant trop délayé par de l’eau, l'avidité pour le phlogiftique eft celle- ment appaifce, qu'il ne peut attaquer que le cerreux (S$. 27; 3 1} Tome IX, S 138 À Nu ÆMEUS ET € HA M HIQUEÆ & la matiere mucilagineufe, qui le colore en brun jaunâtre, & qui eft également diffoute par vous les acides plus ou moins forts. On peut fe fervir d'acide nicreux, qui a volé le phlogiftique d'Indigo , & qui seft en même tems chargé d'une portion du mucilagineux pour teindre de la laine & de la foie très- folidement en jaune de nuances très-différentes. $. 14. L’acide marin en digeftion & même en bouillane avec de l’Indigo le mieux porphyrife, ne fait autre effet que de fe charger du terreux, du fer ($. 31), & d’un peu de matière gommeufe, qui le colorent en brun jaunatre, mais fans atta- -quer en aucune manière la couleur bleue. Si l'Indigo eft pré- cipité de l'acide vitriolique ($. 9, #7), alors l'acide marin er diffout une certaine quantité très-facilement donnant une liqueur bleue foncée. La magnéfie noire, dont nous avons déja parlé plus d’une fois à l'égard de la grande force avec laquelle elle attire le phlogiftique, nous fervira encore ici. Cette matière montre bien clairement que le phlosiftique entre comme principe confticuant dans l'acide marin. En digérant de l'acide marin le plus pur d’une pefanteur fpécifique environ comme 1, 110 avec la moitié en poids de magnéfie noire dans une retorte, on en verra bientôt fortir une vapeur élaftique rougeâtre, qui a l'odeur d'eau régale un peu chaude, mais qui examinée ne donne pas la moindre parcelle d'acide nitreux, comme on peut facilement sen convaincre en la combinant avec des alkalis. Cette vapeur attaque prefque toutes les matières qui ont du phlogiftique, fe raflafñie de ce principe, & redevient l'acide mar ordinaire. Ce n'eft pas ici qu'il faut détailler ces expé- riences ; il fuffit à cette heure de dire que la vapeur row geâtre, qui eft l'autre principe de l'acide marin, & qu'on peut appeler l’acide marin déphlogiftiqué, étant engagée avec de l’Indigo détruit en peu de temps fa couleur bleue, le fair DE LINDIGO. 139 btun jaunâtre, & en même tems fe fature fuflifamment du phlogiftique, & reparoit fous la forme d'acide marin ordinaire. $. rs. Les autres acides, comme le vinaigre , ceux de tar- tre , des fourmis & de phofphore {e comportent avec de l'In- digo comme l'acide marin ordinaire; ils deviennent brunîtres, mais fans fe charger des molécules bleues: au contraire, ils dif- folvent fort bien l'Indigo précipité, & nous avons déja remar- qué que les acides huileux détruifent peu-à-peu la couleur bleue ($.9,e, f, g:) L'Indigo avec des alkalis. $&. 16. L’ALKALI DE TARTRE cauftique ou bien privé d'air fixe ,ne donne avec de l’ean & de l'Indigo en poudre qu'une lie noirâtre & opaque, même en bouillant. Si l'alkali eft moins âcre, comme la potafle ordinaire, la liqueur devient brune, opaque. Si on verfe quelque acide après avoir filtré, une matière fpongicufe & brunâtre fe détache. Ce précipité fe diffout dans l'efprit-de-vin. En digérant ou faifant bouillir la même poudre plufieurs fois dans des lefives alkalines nouvelles, elle donne fucceflivement des diffolutions verdâtres de plus en plus pauvres, qui pourtant fe laiffent précipiter par des’alkalis, comme la première. Enfin la poudre d'Indigo s'épuife, & la matière bleue refte peu diminuée, étant encore chargée de fer & des terres qui en- trent dans la compofition d'Indigo , comme nous le verrons ‘bientôt. L’Indigo précipite eft diflout promptement & à froid dans une leffive alkaline; mais fi l'alkali fixe eft cauftique, la couleur bleue change peu-à-peu en verte, qui s'affoiblit aufli fuccefli- vement jufqu’à s'évanouir entièrement, fans pouvoir revenir ni par les acides, ni par aucun autre moyen, J'ajoute .de l'Indigo précipité peu-à-peu jufqu'à obtenir une teinture foncée, mais “pourtant tranfparente pour mieux obferver les changemens. S ÿ 140 À N JA MISMENNCIENUT INT TIQUE L'alkali végétal cryftallifc ou pleinement mitigé, ne gâte pas la couleur bleue, au moins il agit très-lentement. $. 17. L’alkali fixe minéral fe comporte avec de l’Indigo de même que l'alkali fixe végétal, étant feulement un peu moins fort. Ë 6. 18. L’alkali volaul n’attaque non plus l'Indigo por- phyrifé à l'égard des molécules bleues; il extrait feulement les parties qui donnent la teinture brunâtre; mais l’Indigo pré- cipité eft crès-bien diflout, & enfin toute la couleur bleue eft mangée en paflant par le verd. L’alkali volatil cryftallifable, c’eft- à-dire faturé d'air fixe, produit le même changement, mais avec plus de lenteur. En faïfant l'expérience dans des vaif feaux remplis & bien bouchés, la couleur bleue eft également détruite; mais il arrive quelquefois que la liqueur recouvre dans l'air libre un peu de verdure, mais c’eft feulement pour peu de tems; elle sévanouit de nouveau fans fe laifler reproduire ni par les acides, ni par aucun autre moyen: $. 19. l’eau de chaux agit comme l'alkali volatil. Il eft vrai qu’elle paroît entamer un peu la poudre d'Indigo ; mais fon action ne s'étend que lentement fur une portion très-petite, & n’eft encore que peu vilble. L'Indigo précipité eft facile- ment diflout, produit bientôt de la verdure, & change enfin en brun jaunâtre. Puifque l'eau de chaux fe détruit à Fair libre, il fauc faire ces eflais dans des vaifleaux clos. Si Pair eft bien exclu, la diflolution jaunâtre recouvre un peu de verdure dans l'air libre pour le perdre de rechef, comme il a déja été remarqué à l'égard de l'alkali volatil. $. 20. Il n’eft pas difficile d'expliquer ces phénomènes. Les alkalis feuls n’ont point de prife fur les molécules bleues, au moins ils agiflent infenfiblement ; mais une divilion plus par- faite, que n’en peut produire la porphyrifation les rend propres à étre entamées. L’alkali volatil eft eflentiellement doué d'aflez de phlogiftique pour produire la verdure & même fa déper- DE LIN DIGO. 4 “dicion; mais comment les alkalis fixes & la chaux opèrenc:ils également ? Il faut premièrement oblerver que les alkalis fixes cryftallifés ne peuvent provoquer ces changemens. Pour les alkalis cauftiques, ils contiennent réellement du phlogif- tique. En les faturant avec quelque acide une chaleur très-{en- fible eft excitée, ce qu’on n’obferve jamais avec les alkalis fixes parfaitement mitigés. Il en eft de même avec la chaux; elle perd dans le feu fon air fixe; mais elle attire en même cemps de la matière qui caufe une véritable chaleur lorfqwon jette de la chaux fraîche dans de l’eau ou dans de l'acide. Cette matière de chaleur contient toujours du phlogiftique , mais ne change qu'en délogeant ou regagnant fa liberté : tandis qu'elle refte attachée à la chaux moyennant une certaine affi- nité, elle eft comme cachée, de même qu'une matière fau: rée d’une autre; mais l'eau & les acides ont plus d’affinité avec la chaux; elle eft donc chaflée, mife en liberté, ou au moins entrée dans une nouvelle combinaifon avec de l'air pur. Les alkalis fixes deviennent cauftiques moyennant la chaux, & cela fe fait par un double échange; la chaux arrache l'air fixe & laifle la matière de la chaleur aux alkalis. On voit donc que la verdure & fon abolition font encore ici caufées par le phlogiftique; car, quoique la matière de la chaleur ne foit pas le phlogiftique feul , il en contient pourtant effentiellement, A la vérité les alkalis fixes donnent, avec l'acide de fel dé- phlogiftiqué, les mêmes fels que l'acide de fel ordinaire; & puifque l'acide déphlogiftiqué ne peut étre reftitué que par le phlogiftique, ces phenomènes montrent évidemment que les alkalis fixes ont par eux-mêmes un peu de. phlogiftique, mais qui eft infuffifant pour les changemens mentionnés, étant ou trop lié ou en quantité trop petite. … I refte encore à faire voir, comment la reprodu&tion de la verdure dans l'air libre s'accorde avec notre explication générale, Je conçois la raifon du phénomène de la manière fuivante. L'alkali volatil & la chaux ont aflez de phlogiftique, 142 A NASPANS'E CHIMIQUE non-feulement pour faire naître la verdure, mais aufli pout former du blanc diaphane dans un vaifleau rempli & bien bouché, de même que le font les couleurs prifmatiques réunies. En expofant enfuite la diflolution à l'air libre, celui-ci arrache par le premier contaét tant de phlogiftique, que le refte ne fuffit que pour une foible verdure, qui s'efface aufli en tres- peu de tems, toute cette agorégation du phlogiftique étant ici propre à fe difliper entièrement. Cette explication s'e- claircit par beaucoup d’autres faits. L’acide vitriolique donne, avec de la magnéfie noire moyennant de la chaleur, une diflo- lution imparfaite, rougeâtre; mais, en ajoutant du fucre ou quelqu’autre matière , qui peut fournir la dofe néceflaire de phlogiftique, la liqueur devient bientôt dépourvue de toute couleur, comme de l’eau claire. On fe fert de magnéfie noire pour decolorer le verre, une dofe proportionnée trouve du phlogiftique pour fe faturer, & c’eft par-là que la mafle fondue eft décolorée. Cela faute aux yeux en fondant au chalumeau fur un charbon, un peu de fel microcofmi- que avec une mie de magnéfie noire : on obtient une pe- tite boule tranfparente, mais de couleur cramoifie. En tenant cette boulette fondue plufieurs minutes de fuite, on peut enfin la décolorer complétement par le phloaiftique, qui eft attiré du charbon pendant l'opération, mais tou- chant la mañle encore fluide par un peu de nitre, la cou- leur rouge revient au moment; c'eft parce qu'une portion de phlogiftique fe brüle. Si on tient la boule colorée fondue fur une plaque d'argent, la couleur perfifte, ne pouvant gagner ce qui manque pour difparoître. Tout cela confirme bien vifiblement mon fentiment. À l'égard de la couleur brunâtre, qui refte après l'abolition de la couleur bleue & verte, il faut obferver qu'elle dépend de la matière extraétive qui eft colorée d’une manière à ne point changer ici. Cette teinte, jaunâtre ou brunâtre felon la quantité de la matière extrattive, cft comme étouffée par le bleu & le verd, ne patoiflant qu'après leur évanouiflement. DAB EN DIN DA GO: 143 L'Indigo examiné par la vote de fermentation. 8. 21. Pour procéder avec ordre, je commençois par le cas le plus fimple. Je mélois une once d’Indigo en poudre avec huit onces d’eau diftillée dans une cucurbite ouverte, la laiffant légèrement couverte d’une feuille de papier pour empécher les parcelles voltigeantes dans l'air d'y tomber. C'étoit dans le mois de Juillet, que je faifois cette Expérience & les fuivantes : la liqueur du thermomètre de M. de Réau- mur, montoit le plus fouvent jufqu'à 26 degrés. Le vaiffeau étoit placé dans un coin de mon cabinet, où il n'étoit pas expofé aux rayons du foleil. Je l’examinoiïs foigneufement pendant quatre femaines, mais fans remarquer autre chan- gement que celui de l'eau, qui devenoit brunâtre : point de mouvemens tumultuaires inteftins, point de gonflement, point d'odeur piquante qui indiquaflent quelque fermentation. Enfin, après plufeurs jours, une mauvaife odeur commençoit à fe faire fencir. L'eau brunâtre faifoic bleuir un papier teint d'abord bleu avec du tournefol & depuis rougi par quelque acidité affoi- blie, & qui alors eft prefque auf fenfible pour le plus foible alkali, comme fa couleur bleue left pour l'acidité. D'ailleurs cetce eau fe comportoir comme la décoétion d’Indigo ($$. 2, 3.) Je recommençois la même opération avec cette feule dif- w2 LE] = it G) A férence , que l’eau fut tiède; mais le réfultat fut le même. 6.22. Puifque l'Indigo refufoit de fermenter feul, je fs un autre effai avec des portions femblables, ajoutant feule- ment une demi-once de ferment dont on fe fert pour la biere. Le jour fuivant, quelques nuages de moififlure fe mon- troient à la furface, qui s’augmentoient jufqu'à faire une cou- verture toute entière. La liqueur paroïfloit un peu louche & verdâtre, mais ne donnoit aucun figne de fermentation. Le cinquième jour, il en fortoit une puanteur très-mauvaife. + 6.23. Je répétai encore, pour la quatrième, fois l'Expé- 144 A NAME "'E "CHA MAI'QU'E rience avec les mêmes dofes; mais, au-lieu du ferment, je me fervis de la matière glutineufe , tirée de la farine de fro- ment; je ne remarquai pourtant point de différence notable, finon que la liqueur devenoit moins verdätre, & la couver- ture moins velue, que dans l'Expérience précédente. $&.24. Enfin je pris trois pinces de difolution de malt fait avec de l’eau chaude, & propre à faire de la bicre; jy mélois une demi-once d’Indigo en poudre & deux onces de ferment ordinaire. Cette liqueur, qui avoit 28 degrés de cha- leur, fut mile en repos & fermentoit comme à l'ordinaire, fans que je pufñle y remarquer aucune différence, finon que la biere moilifloit après quelques jours, à-peu-près comme dans les Expériences décrites. 6.25. Nous voyons donc que lIndigo n'eft pas propre à donner des fpiritueux par la fermentation : les parties extrac- tives fubiffent plutôt une forte de putréfaétion, mais qui n'eft pas complète, parce que la liqueur fe comporte depuis comme la décoétion ($$. 2, 3). Néanmoins, les molécules bleues font plus ou moins gâtées, même un peu par l'eau feule ($. 21) : il eft vrai que la couleur bleue n'eft pas abfo- lument détruire, mais en diflolvant des portions égales des réfidus, qui ont fubi les opérations décrites, par des quan- tités égales d'acide vitriolique, on trouve les diflolutions de lIndigo, qui refte après la fermentation ($$. 22, 24), beau coup plus foibles que les autres, qui femblent avoir très- peu fouffert, quoique l’une ait été mélé avec de la matière glutineufe de froment ($. 23). L'Indigo foumis à l’action du feu. 6.26. EN ExrOsANT un petit morceau d'Indigo à l'attion du feu dans un creufct ouvert, ou dans un têt à rôtir, fous ja moule, on voit qu'il commence à fumer, à fe gonfler, à rougir, & même quelquefois à senflamimer , donnant une flamme blanche. Pour brüler tout ce qu'il contient de come buftible, DE ERN DI6 Ox y A L145 buftible , il faut le pulverifer , &, encore remuer la poudre bien rougie. Je n’ai trouve aucun Indigo qui fe diflipât en- tièrement; il refte roujours de la cendre, foit grife de l’Indiso qui eft d'une bonté médiocre , foit ferrugincufe de l'Indigo le plus choili. 100 parties d'Indigo donnent 33 à 34 de cendre, ou 196 grains par once. La fumée qui en fort, pendant la combuftion ; eft rou- getre, tirant un peu fur le bleu. Si le feu eft augmenté très-len- tement, l'Indigo en poudre ne s'allume pas diftinétement; mais, après que toute fumée a ceflc, on voit une petite flamme très-légere & blanchâtre voltiger à la furface. $. 27. Ces cendres ne donnent point d’alkali fixe végé- tal étant leflivées avec l’eau diftillée ; mais l'eau devient pourtant alkaline par la diflolution d’un peu des terres brûlées. En les noyant dans l'acide marin, on voit dif- tinétement une petite effervefcence; la plus grande partie fe diffout , mais environ — refte, qui n'eft atteinc par aucun des acides ayant toutes les qualités d'une terre quartfeufe , parce qu'une partie eft rendue difloluble dans l'eau bouillante par 6 d’alkali de tartre, & avec la moitié d'alkali fixe, elle donne moyennant le feu , du verre ordinaire. . Ladiffolution faite avec l'acide marin, produit du bleu de Pruffe en y mélant de l'alkali flogiftiqué:on en obtient 30à3 2 grains par once d'Indigo ; mais puifque le bleu de Prufle fans alun étant Jealciné à devenir rougeitre, pefd 2#, cela ne fait en chaux de fer, que 18 à 20 grains. Pour féparer les quatre terres diflo- lubles que nous connoiffons aujourd’hui, en cas que deux ou plufieurs foient méêlées enfemble , je me fers de la méthode fuivante : je précipite premièrement avec de l'alkali volatil cauf tique, qui fair tomber l'argile & la magnéfie blanche, fi l'une ou toutes deux font préfentes: la terre calcaire & celle du fpath pefant reftenc , s'il en eft quelque portion dans la diflolution ; mais il faut un alkali volatil abfolument cauftiqüe ou délivré de tout air fixe; car autrement ces dernières terres font auffi Tome IX. T 146 A N'NEMSE"CHIMÉQUE précipitées , moyennant une affinité double : je diffous le précipité par quelque acide, & fais bouillir un peu la diflo- lution avec de la craie, qui décompofe pleinement le fel ag- gilleux, fans entamer celui qui a la magnéfie pour bafe : il faut foigneufement éviter la chaux qui précipite lun & l'autre; mais la craie étant raflafiée d'air ke , n'a de prife que fur la combinaïfon argilleufe. uand l'alkali volatil cauftique ne précipite plus rien, j'ajoute du fel de foude en cryftaux, qui dégage, par une double dé- compolfition & la terre calcaire, & celle du fpalth pefant. Pour les avoir à part, en cas qu’elles foient mélées , je diflous le précipité par l'acide marin, & laifle évaporer à ficcité ; je pulvérife la mañle defléchée , & l’expofe à l'air humide , alors le fel calcaire fe fépare par déliquefcence , l’autre n'étant que très-peu difloluble. En traitant les cendres de cette façon, j'ai trouvé qu'elles contiennent par once d'Indigo , $o grains de terre pefante, 58 de terre calcaire, 11 de poudre quartfeufe, & environ 59 de fer calciné: ÿentends par terre pefante , celle qui faic la bafe du fpalth pefant, & qui diffère eflentiellement de la terre calcaire , puifqu'elle donne avec de l'acide vitriolique, le fpalth pefant , avec de l'acide nitreux & marin des fels cryf- tallifables , & avec le vinaigre, un fel déliquefcent. Pour fe- parer le plus commodément les matières mêlées dans les cendres d’Indigo , il faut les diffoudre par du vinaigre diftillé, qui n'attaque ni le quarts ni la chaux martiale : la diflolu- tion doit être évaporéc jufqu'à ficcité , & cette mañle expofée convenablement à l'air humide, donne, par déliquefcence, la partie du vinaigre qui eft faturée avec de la terre pefante: le quarts & le fer calciné , font facilement féparés par l'a- cide marin. $. 28. En jetant de l’Indigo en poudre fur le nitre fondu ; ou en femant de lIndigo méle avec du nitre dans un creufet bien rougi , on obferve une détonation très-violente , qui D E L'INDIG O. : 47 prouve clairement l'abondance de phlogiftique dont Ja pré- fence eft bien hors de doute par beaucoup d’autres indices non équivoques. $. 25. Après avoir foumis fIndigo à lation du feu dans fair libre, il faut encore l'examiner dans des vafleaux clos. Pour avoir toutés les diverfes matières à parc, qui fe féparene de notre drogue en le diftillanc, j'ai fait cette operation moyennant une cornue de verre à long bec, à l'extrémité de laquelle j'ai adapté un petit récipient , dont le fond étoit ercc & pourvu d'un tuyau tecourbé en haut : cet appareil fut tellement placé, que l'ouverture du tuyau recourbé , étoic un pouce deflous la fuface de l'eau , dans un vaifleau de figure convenable : fur louverture du tuyau , fut placé le goulot d'une bouteille renverfce & pleine d’eau , afin de re- cevoir le fluide élaftique qui fortoit de la matière brûlée. Quand tout cela étroit préparé, comme il falloit, je faifois allumer du feu ; l'augmentant par degrés , d'abord quelques grandes bulles d'air montoient dans la bouteille renverfée , _Qui n'étoient autre chofe que l'air des vaifleaux dilaté par la chaleur; mais bientôt des bulles très-perices fortoient rapide- ment par l’ouverture du tuyau , & continuoïent jufqu’à la fin de l'opération, Au commencement un peu de flegme s’affem- bloit dans le récipient : quand le feu fut augmenté jufqu’à furpafler la chaleur de l'eau bouillante, on voyoic s'élever une fumée rougeâtre tirant fur le bleu, qui téignoit la voûte de la cornue, mais qui, à caufe de la longueur du col , n'atteignoit pas le récipient; enfin je pouflois le feu jufqu’à faire fondre le fond de la cornue. 6.30. Examinons maintenant les matières détachées. Le T ji 148 ANALYSE CHIMIQUE c'éroit donc de l'air fixe, & l’Indigo en avoit donné environ une pinte, ou dix-neuf grains en poids par once. La liqueur affemblée dans le récipient, étoit jaunâtre ; pefant environ 173 grains pour chaque once d'Indigo:elle faifoit bleuir & rougir enfuite le papier teint par le tournefol, contenant environ trois à quatre grains d’alkali volatil huileux. L'huile étoir tenace , prefque noire , & ne montroit au- cune rougeur, qu'étant étendue très-mince fur du verre:elle avoit tout-à-fait l'odeur d'huile empyreumatique de tabac, fe diffolvoit fort bien dans l'efprit-de vin, lui donnant une rougeur un peu fombre & prefque noire opaque, par la faturation. La poudre d’Indigo au fond de la cornue, éroit charbon- neufe, pefante pour chaque once d'Indigo , environ 331 grains qui, par une calcination complète dans l'air libre, fe réduifent à 158 grains. Puifque le réfidu charbonneux avec le flegme alkalin & l'air fixe fait $23 grains, il faut que l'huile empyreumatique pefe 53 grains:je nai pu eftimer au- trement fa quantité , car elle s'applique fortement aux vaifleaux. La compofuion de lIndigo. $. 31. EN comraranr les réfulcats de nos recherches précé- dentes, on peut aifément déterminer les parties conftituantes de l'Indigo :il y a quelque différence dans les proportions L mais qu'on peut négliger ici dans l'examen du bon Indigo ;, dont on fe fert ordinairement : voici une analyle fuivie de 10® parties. Partie mucilagineufe féparable meyennant de l'eau,. 12 ($.2.) L'efprit-de-vin bien reëtifié détache des parties réfineufes. ........ LA, FR REA}, AU LU EA(GT 5.) Du vinaigre diftillé diffout la partie terreufe, mais n’attaque pas le fer, quieftici en formede chaux,. 22 ($.15.) L'acide marin emporte le fer calciné,......... 1 3. 53 DIE UILAUN D. 1 GC O: 149 ! Les 47 parties reftantes , après ces opérations, ne font que des molécules bleues prefque pures: Je les ai diftillées à la manière décrite ($.29.) Elles mont donne d'air fixe 2 , de liqueur alkaline 8 , de l'huile empyreumatique 9 , & de charbon 23. Le charbon brûlé en air libre, préfente quatre parties de terre de couleur de brique, dont environ la moitié eft de fer calciné , & le refte une poudre quartfeufe infiniment fubtile : je trouve un peu plus de fer par cette méthode , qu'en brûlant l’Indigo d’abord dans un vaifleau ouvert ($. 27); mais cette différence dérive probablement de JIndigo même. $. 32. La preuve la plus complète d'une analyfe, ef la re- compofition, mais il faut avouer que Part n'y peut atteindre à l'égard des matières végétales & animales; la raïfon en eft que l'art ne peut imiter la ftruéture organique , qui le plus fouvent produit des combinaifons, qui ne fe peuvent faire autrement : nonobitant cet obftacle, j'ai été aflez téméraire pour tenter la recompofition de lIndigo, & fi je nai pas encore réufli patfaitement , jai au-moins aflez vu pour croire ce problème foluble , & nous aurons certainement tôt o@ tard des Fabriques d'Indigo en Europe , fans avoir befoin d'acheter chèrement cette drogue dans les Indes: les molécules bleues font les parties eflentielles, les autres étant ou étrangè- res, ou tout au plus la matrice qui les a réunies : l'art nous préfente journellement deux matières qui ont la convenance la plus marquée avec les molécules bleues d'Indigo, & il n’eft pas hors de propos de les comparer ici; ces deux matières {ont l'encre & le bleu de Prufic. Ces trois drogues conviennent en couleur : l’Indigo, l'encre bien lavée & le bleu de Prufe fans alun, font d’un bleu noir; l'acide vitriolique n’attaque pas le bleu de Prufle, diffout l'In- digo en confervant la couleur bleue, & encore mieux l'encre, puifque la diflolution perd toute couleur, & que la noirceur re- paroït en faturant l'acide avec un alkali; l'acide nitreux bien 5 so ANALËXSE CHIMEQUE concentré & délivré du flogiftique ($. ro), bouillant avec du bleu de Prufle, détruit enfin la couleur bleue , & il l'emporte beaucoup plus facilement que les deux autres, fans qu'elle puifle reparoitre enfuite, fi l'acide a eu affez de tems pour dé- voret le fogiftique ; le vinaigre détruit le bleu d’Indigo fuffi- fammenc fubulifé ($. 9 f.); mais le bleu de Prufle & l’encre réfiftenc mieux ; il eft pourtant digne d’être remarqué que l'al. kali flogiftiqué , mélangé avec un peu de vinaigre , foit pour précipirer un peu du bleu de Prufle diflous, en cas qu'on fe foit fervi de cette matière , foit pour faturer l'alkali, dont ordi- nairement une portion eff libre & caufe de la confufion , quand on fait ufage de cette liqueur; il eft digne d’attention, dis-je, qu'un tel mélange perde dans quelques femaines , fa faculté de donner du bleu de Prufle avec des diflolutions martiales; l'alkali cauftique mange la couleur du bleu de Pruffe, maisla redonne au fer diflous par quelque acide, comme l’a expliqué le célèbre M. Macquer; cela n'arrive pourtant pas aux autres; car la couleur bleue une fois perdue, ne peut reparoître en aucune manière connue jufqu'ici; enfin le bleu de Prufle, les molécules bleues d'encre & d’Indigo, font toutes trois des combinaifons de fer avec une matière phlogiftique , mais qui pourtant eft différemment modifie , & de cette variation dé- rive fans doute que l'union eft plus étroite dans le bleu de Prufle , que dans les autres ; il faut néanmoins avouer que cette couleur même n’eft pas toujours également ftable. En analyfant l’Indigo, j'ai trouvé du fer nonefeulement dans. les molecules bleues, mais aufli dans les autres parties moins eflentielles. On peut avoir chaque portion à part: fi on met de lIndigo pulvérifé en digeftion avec de l'acide marin, le menftrue fe colore en jaune, & donne avec l'alkali phlogiftique, le bleu de Prufle : les autres acides, comme le vitriolique, le nitreux & le vinaigre , qui n’attaquent que peu ou point le fer dépourvu de phlogiftique, ne peuvent pas fervir ici ; le fer des molécules bleues ne peut être fépare par aucun acide, & je ne çonnois d'autre moyen pour l'avoir à part, que la difi- D'EULUIIN DE GO: 1! 151 pation ou deftruétion des parties phlogiftiques; car, après la combuftion en air libre, l'acide marin s’en charge facilement. Quoique je me fois principalement fervi d’Indigo ordinaire dans mes recherches décrites, je n’ai pourtant pas négligé de le comparer avec le plus choïfi qui ne me femble différer de . l'autre, que par une plus grande quantité des molécules bleues; Jai pourtant quelquefois trouvé un peu d'argile dans l'Indiso de Guatimala; mais la partie terreufe n’eft pas ici un principe cflentiel. Application des Recherches précédentes. $.-33: APRÈS avoir analyfé l’Indigo , & confidéré fes diverfes relations avec d’autres matières , il faut maintenant voir comment la pratique ordinaire s'accorde avec les con- noiflances acquifes. Les Arts, & principalement les Arts Chimiques, n'ont fait de progrès que crès-lentement, & de notre tems; & comment en feroit-il arrivé autremenr? Car, fans connoïtre les vrais principes de la faine Phyfique, un Artifte reflemble à un aveugle qui ne peut faire quelques pas qu'en tâtonnant. Je ne fuis donc point étonné de l’innombrable multitude des efais, des vaines tentatives, des hafards heu- - reux & inefpcrés, des pertes par lefquelles on a paffé avant de trouver les procédés dont on fe fert aujourd'hui pour teindre en bleu, fans parler d’autres opérations encore plus difficiles. 5. 34. Les proccdés pour teindre en bleu avec lndigo , diffèrent beaucoup entreux, mais nous n'envifagerons que les principaux phénomènes. On fe fert ordinairement des matières alkalines pour dé- velopper la faculté colorante de l'Indigo; nous avons pourtant prouvé par des expériences, que ces fubitances n'attaquent pas les molécules bleues , avant d’être fubtilifées auparavant par l'acide vitriolique ; quelles font donc les raifons de cette pratique > 11 faut, 1.° remarquer que Les alkalis diflolvent le ï52 ANALYSE CHIMIQUE reliñeux qui enveloppe les particules bleues, qui par-là font mifes plus à nud, & comme préparées pour Ctre entamces par quelque autre fubftance convenable, 1.° Les alkalis, par- uculièrement la chaux, attaquent‘la compofition des végé- taux , & decruifenc la ftructure organique , foit en fe char- geant de l'air fixe, qui eft comme le ciment de ces particules, foic en diflolvant les acides , les parties huileufes & réfineufes qui sy peuvent rencontrer. Pendant cette décompofition , une grande quantité de phlogiftiqne fe développe , qui ren- contrant les molécules bleues dénuces, sy attache légère- ment , fafant l'accumulation néceflaire pour les tourner en verd, fi la chaleur & les autres circonftances y font propres, comme jai tâche de le prouver auparavanre, ($$. 11, 20), & lexpliquerai encore davantage toute-à-l’heure. Donc, quoique ics alkalis feuls ne puiflent entamer les molecules bleues , ils les délivrent, d’un côte , d'un obftacle, & de l’autre, en décompofant les matières végétales ajoutées, fourniflenc du phlogiftique. $. 35 Que la verdure du bain d'une cuve eft produite par l'abondance du phlogiftique, c'eft une vérité fondamentale, & pour l'aflurer davantage, confidérons la cuve d'Inde à froid pour le fil &le coton, qui de toutes eft la plus fimple, parce qu'on peut omettre & l'alkali & la garance ; la chaux & le vitriol verd font fuffifans pour la faire travailler : avec trois gros de vitriol verd , autant d'Indigo choifi , le double de chaux & une pinte d’eau, je prépare à coup für, une . cuve, qui ordinairement travaille après fix heures : enfuite en gardant les mêmes proportions & le même traitement, jai feulement déphlogiitiqué auparavant le vitriol , en le faifanc bouillir dans beaucoup d’eau pendant plufeurs heures , rédui- fant enfin la diflolution à une pinte par l’évaporation; & alors je n'ai jamais réufli à la faire travailler. Toutes les circonftances font ici les mêmes, excepté la préfence du phlogiftique; il eft donc bien évident que la différence des rélulcats n'eft çaufée DEC HMIIN D TG O. 4 V3 153 caufée que par-:nous en verrons encore une nouvelle preuve dans le paragraphe fuivant : l'opération eft prefque auffi fimple que celle dont nous venons d’expliquer la vraie caufe ; les cas plus compliqués , dépendent abfolument du même reflort; mais celui-ci eft plus caché par plufieurs matières , qui em- pêchent de le déméler & le voir diftinétement, $. 36. En contemplant les autres manières de teindre en bleu avec l'indigo, moyennant des alkalis, fixes ou volatils, on trouvera facilement la préfence des matières, qui con- tiennent plus ou moins d'huileux, de réfineux, & même de phlogiftique prefque libre, je n'ai donc pas peur que ma conclufon fouffre quelque exception; il faut pourtantencore m'arrêter un peu, en examinant un procédé qui eft crès-bon pour le fil & le coton. L'opération eft achevée, dans un quart-d'hegre, de la manière fuivante. On prend de la lefive des favonniers très-forte dans un chaudron, on y ajoute trois gros d’Indigo bien pulvérifé pour chaque pinte de liqueur. Après quelques minutes, quand les fécules colorantes font bien pénétrées, on met dans la liqueur fix gros d’orpiment en poudre : on doit bien pallier, après quoi dans peu de minutes le bain devient verd, fait de la fleurée bleue & montre une pellicule. C’eft alors qu'il faut appaifer le feu & plonger la matière à teindre. L'explication eft très-facile. L’orpiment contient du foufre & pat jconféquent du phlogiftique. Par la diflolution dans la leflive, il fe forme un foye de foufre & d’arfenic, qui laifle facilement échapper le phlogiftique, comme on peut le conclure de l'odeur & de la a ri qui fe fait en peu de temps en air libre. Si on met d'abord autant d’arfenic dans la leflive, qu'il en entre dans la dofe ufitée d'orpiment, on a beau faire bouillir le bain, il ne fera jamais propre à teindre; mais, en ajoutant la qualité manquante de foufre, on verra naître, après quelques momens, la pellicule cuivreufe, la fleurée bleue & la verdure du bain. 1 Tome IX. | V fé A NADMSE CHIMIQUE Avec de lindigo précipité , lorpiment ne caufe aucun changement, ($. 9, cc.) & la raïfon en ef, que l'union du phlogiftique eft trop forte : il faut de la chaleur & de al kali pour le relächer. : 6. 37. Il refte à expliquer pourquoi les cuves d'Indigo manquent quelquefois & fe gatenc totalement. Nous en avons. déjà entrevu la raifon ($$. 11,20.) Le phlogiftique étant, ou aflez abondant, ou moyennant la chaleur, aflez atif pour ébranler tellement les molécules bleues, qu'elles hiffent échapper une grande partie de leur phlogiftique, ik cft bien néceflaire que leur couleur bleue s'efface, Cela arrive principalemenrs en fe fervant d’Indigo & de paftel enfermble. Le patel eft une matière végétale pourrie à demi, qui mife dans l'eau achève fa deftruction, moyennant de la chaleur & de l'alkali, fourniffant, comme il fe fait ordinairement en cel cas, beaucoup de phlogiftique. L'Expérience décrite ci-deflus, montre aufli que le paftel faic plutôt évanouir la couleur bleue, que ne le fait une égale portion de garance. Ea difficulté de modérer la dofe de phlogiftique, dérive fur-tout de la qua- lité du paftel, dont les parties font inégalement avancées dans la pourriture, & agiflent différemment felon ces divers: dégrés. Ce n’eft donc ni l'identité des dofes, ni des circonf tances, ni le même traitement qui peuvent toujours aflurer la cuve; le plus habile guefderon n’eft que très-fouvent trahi, fans en pouvoir rendre raïfon. La perte une fois faite, ïl n'eft pas moyen d'y remédier, puifque les molécules qui devoient téindre, font détruites, & pour gouverner à coup sûr cette cuve, il faudroic avoir des fignes infaillibles pour connoître l'état actuel du paftel, ce qui, le plus fouvent, n'eft point du tout ail; puifque non-feulement les différentes portions d’une balle, mais aufli le plus grand nombre des feuilles fonc iné- galement avancées dans la pourriture. Le premier pas à faire regarde donc la préparation du paftel, qui doit toujours & tout entier être de la même qualité, au moins eftil neécef faire de découvrir des indices convenables, qui annoncent DIET Et DNDeIYG Où 4 A | juss sûrement les différens degrés de putréfation ; à l'égard des cuves compofces avec de l'Indigo feul, elles manquent tres- rarement, & cela n'arrive encorc que par ignorance ou par négligence. $..38. La verdure du bain d'une cuve d'Indigo, ne peut naître de la petite quantité d’alkali volatil qui fe développe, ni l'étoffe teinte déverdir par fa diffipation: la caufe n’eft pas proportionnée à l'effet ; c’'eft plurôt le phlogiftique;:qui, dans de bain, refte légèrement attaché aux molécules bleues, maïs qui étant expofe à l’action de l'air libre, qui attire cette fubftance puiflamment, eft enlevé en peu de momens : voilà:la raifon de la fleurée bleue , & de l’éroffe déverdie. Il eft vrai que l’al- kali volatil tourne le bleu d'Indigo précipité, en verd (5.18), mais cela fe fait moyennant le phlogiftique qui lui eft eflentiel: Falkali fixe fait de même, fur-toutc aidé d'un phlogiftique étranger ($.26.). La verdure du bain d'une cuve d'Indigo n'eft pas produite, fi je ne me trompe, par la faculté connue des alkalis de verdir les fucs bleus des végétaux, car plufieurs matières, qui ne font pas alkalines, & même les acides phlo- giftiques & huileux, peuvent tourner Le bleu d'Indigo en verd, ($9,8,e,f,g,) L'Indigo fai aufli exceprion à l'égard des acides, parce qu'il ne rougit par aucun, pas même par l'acide vitriolique le plus concentré. à $.39. La cuve d'Indigo confume, felon toutes les appa- rences, une bonne quantité des particules colorantes à pure perte; puifqu'il faut beaucoup de phlogiftique pour les mettre en aétion, & qu'un peutrop gâte plus ou moins felon les cir- conftances : il eft crès-probable qu'un grand nombre des mo- lécules font détruites, avant que la pluralité ait atteint le degré qu'il faut pour travailler. Je m'imaginé que cette ppération fe pañle à-peu-près comme la fermentation. Toutes les parcelles ne font pas dela même qualicé; les plus difpoiées à fermenter commencent les premières, & ont déjà! avancé jufqu’au fecond degré; c'eft-à-dire , jufqu'à la fermentation acide, quand V ï 156 ANALYSE CHIMIQUE pluralité eft au milieu de la fpiritueufe; on voit par-là pourquoi une biere toute fraîche & prête à être entonnée, fait déjà rou- gir un papier teint en bleu avec du tournefol, & pourquoi le vinaigre contient tréès-fouvent de l’alkali volatil. De même quand le plus grand nombre des molécules bleues d’une euve font dans l'état propre à teindre, celles qui sy apprétoient les premieres l’ont déjà pañfé. D'un autre côté, en développant fucceflivement les par- ticules colorantes les plus tardives, le marc saugmente jufqu'à ternir l'ouvrage, & il faut enfin jeter le bain, avant qu'il ait perdu coute fa qualité colorante. Enfin, quoique la cuve de paftel, qui contient en même tems de lIndigo, puifle être regardée comme la plus difficile à pofer & à manier, on.s'en fert pourtant ordinairement dans les grands atteliers, parce qu'on expédie beaucoup plus d'ou- le] vrage quand elle réuflic. Tous ces défavantages font bien defirer quelqu'autre pro- céde plus sûr & moins embarraffant. Je vais donc en propoferun qui réuflic toujours & très-facilement, qui peut être effectué fans perte, & au moins dans quelques cas donne du bleu par- faitement fixe. $. 40. Nous avons déjà remarqué que l'acide vitriolique diflout l'Indigo, ($. 8.) On a aufli commence, il y a plufeurs ‘années, de fe fervir de cette diflolution pour teindre; mais on a obfervé avec étonnement, que le bleu d'Indigo, ailleurs fi fixe, n’étoit en cetre façon qu'une couleur faufle ou de petit teint. Cette obfervation n’eft pas généralement vraie, on opère comme il faut. L’acide vitriolique délayé d’eau, n’attaque aucunement les molécules bleues; ce qu'on appelle ordinairement huile de vitriol, donne avec l'Indiso une couleur brillante, mais faufle, & ce n’eft que l'acide le plus concentré qui réuflit bien. L'Indigo précipité fe diflout fact- lemént dans tous lés acides , & on peut sen fervir pour DENT Et PINADT Go 157 teindre ; mais cette méthode eft plus embarraffante & plus chère que d'employer la première diflolution , moyennant l'acide vitriolique. $. 4r. Je préparela teinture d'Indigo de Ja maniere fuivante, Une partie d'Indigo en poudre très-fubtile, eft mife dans un flacon de verre, je verfe deflus l'acide vitriolique clair, & très-bien concentré, je bouche légèrement le flacon, & le laifle expofé à une chaleur de 30 à 40 degrés, pendant 24 heures. Enfin jy ajoute peu-à-peu 91 parties d'eau pure, broyant bien tous les grains, qui peuvent encore refter dans un mortier de terre. Voilà une teinture qui eft bleue, mais qui doit être délayée par une bonne quantité d’eau, avant de de- venir tranfparante , quoiquelle ne contienne qu'une partie d'Indigo pour cent. $. 42. Avec la teinture décrite, j'ai teint de l’étoffe de laine, dont le poids a toujours été fuppofé r, pour propor- tionner les dofes des autres matières aufli en poids. L’étoffe étoit auparavant plongée dans de l'eau botillante, & y reftoit pendant 24 heures, d'où elle étoit tirée, exprimée, & mife dans un bain colorant. (a) Le bain fut compofé d'une partie de teinture, & de 76 d'eau bouillante. Après 36 heures, le baïn étroit fans cou- leur comme de l'eau. L'étoffe qui coloroit leau de lavage étant defléchée, avoit gagné ‘un bleu célefte, plein & très- joli. (73-) Deux parties de la ceinturel, & 76 de l’eau bouillante, fe décolorent parfaitement en 8o heures. L'éroffe ne coloroit pas l'eau de lavage, & avoit un bleu de reine. (c) 2 + parties de teinture, & 76 de l’eau bouillante fe décoloroient en 96 heures. L'étoffe ne coloroit pas plus l’eau de lavage que les précédentes & les deux fuivantes : elle étoir bleu turquin, 158 ANALYSE CHIMIQUE (4) 4 parties deteinture, & 76 d’eau bouillante fe déco- loroient en 112 heures. L'écoffe croit bleu pers. (e) 7 : parties de teinture, & 76 d’eau bouillante avoient une couleur bleue, verdâtre, à peine vifible après 136 heures. L'épfle avoirun bleu d'enfer. | (f) 7: parties de teinture, & 76 d'eau froide fe com- portoient parfaitement, comme dans l'Exp. e. L'étoffe avoit aufli la couleur bleue noire, comme e. L'étoffe étant 1 & trempéc dans de l'eau pendant 24 LC comme dans les Expériences précédentes, j'ai mêlé : parties de teinture, avec 76 d'eau bouillante & faturé par en fels, pour voir clairement leurs influences, (g) Les parties d’eau faturées avec le fel de foude. L’étoffe fut tirée après 96 heures, comme dans les Expériences fui- vantes de ce $, elle coloroit plufieurs eaux de lavage, & avoir un bleu très- “pâle. (4) L'eau faturée avec le fel de Glauber. L’écoffe bien ex- primée coloroit l’eau de lavage, mais la couleur avoit un bleu pers très-joli. (2) L'eau faturée avec du nitre putrifié. L’étoffe ne coloroit pas l'eau de lavage, mais la couleur étoit d’un bleu mignon. (k) L'eau faturée avec du fel marin, L’étoffe coloroit l’eau de lavage, & avoit un bleu de roi. (!) L'eau faturée avec du fel ammoniac. L’étoffe coloroit . l'eau de lavage, & avoit un bleu célefte tres-plein. (7) L'eau faturée avec de l’alun romain. L’étoffe coloroit l'eau de lavage & avoit un bleu pers. (n) L'eau faturée avec de la crême du tartre. L'étoffe co- loroit l'eau de lavage & avoit la même couleur de bleu pers. L'effet a été prefque le même, quand l'étoffe avoit trempé DAME DM G ©. 159 24 heures dans des diflolutions faturées des fels mentionnés, avant d’être plongée dans fon bain. 6. 43. Nous avons déjà obfervé que l'eau peut extraire de lIndigo une teinture jaunâtré, & qu'une, leflive alkaline pro. duit une teinture plus forte brunätre ($$. 3, 16). J'ai trempé de lécoffe dans chacune féparément, pendant 24 heures : j'ai enfuite mis les pièces préparéesdans dés bains, qui contenoient 2 + parties de la teinture d’Indigo, & 76 d’eau bouillante ; &, pour voir la différence, j'ai ajouté dans les mêmes bains des échantillons, préparés feulement dans de l’eau, comme auparavant. (0) L'étoffe préparée dans la teinture aqueufe, ($. 3,) avec un morceau égal, préparé feulement dans dé l’eau, furent mis enfemble dans le bain, & y refterent 40 heures; c’eft-à- dire, jufqu’à ce que toute la couleur de la liqueur füt abforbée. Les échantillons avoient la même nuance du bleu, au moins il n'y avoit aucune différence notable , quoique lun fût auparavant d’une couleur pâle, ventré de biche pâle. (p) L'étoffe préparée dans la teinture alkaline, ($. 16,) & un morceau trempé feulement dans de l’eau, furent traités de la même façon. À l'égard de la nuance, je n'ai pu non plus obferver ici aucune différence, quoique l'un des échan- tillons eut pris un peu de couleur jaune alkaline. $. 44. On peut conclure des Expériences décrites, r.° Que notre teinture d'indigo eft très-commode pour teindre l’écoffe de laine. 2. Que l'opération n'ufe que très-peu d'Indigo, puif qu'il ne faut qu'une partie d'Indigo pour produire un bleu noir fur 260 d’étoffe (5. 42, e), qui alors paroît être facurée, & ne pourroit recevoir folidement plus d’Indigo. 3.° Que le bain froid agit aufli-bien que le chaud. ($. 42, :) 4.° Que l'opération peut fe faire fans perte, puifque le bain fe décolore enfin parfaitement (a-;, o p.), & que sil a été trop chargé, on peut ajouter de l'étoffe qui ne foit pas faturée, qui abforbe 16 ANALYSE CHIMIQUE route la couleur reftante, On peut encore éviter de perdre quelques molécules bleues dans le lavage (a-f, h,2,m,n.) ul yaune plus grande affinité entre le bleu d’Indigo & letoffe bien trempée , dans de l’eau qu'entre ce même bleu & l'eau acidule; le bleu eft donc précipité par l'étoffe. 6. Que tous les fels dont nous avons fait ufage ($. 42, gn), diminuent l’affinité mentionnée , mais plus ou moins, felon les nuances décrites. 7.° Que la préparation d’étoffe dans de la teinture jaune d'Indigo ($. 43), ne fait aucune différence à l'égard de la quantité des molécules bleues attirées, puifque la nuance eft la même, quand l’étoffe à feulement trempé dans de l'eau pure. $. 45. J'ai femblablement eflayé de produire du bleu fur la foie. Je la faifois tremper dans de l'eau comme ci-deflus Le poids de la matière à teindre eft encore ici 1, comme dans coutes les autres expériences : l'échantillon fut tité du bain après 144 heures. À (9) Le bain toit un mélange de 18 parties de teinture, & de 76 d'eau froide. La foie prenoit une couleur bleue foncée, mais le bain étoit encore fortement coloré. (r) Comme le bain de l'Expérience g avoit beaucoup de couleur, quand l'etoffe de laine fut tirée, j'y ai mis de la foie, qui neft devenue que grife bleuâtre. Le bain reftant avoit encore de la couleur. (f°) Le bain reftant dans l'Expérience À donnoit à la foie un bleu célefle. (1) Le bain reftant dans l'Expérience / ne produifoit qu'un bleu pâle. . (u) Le bain reftant dans l'Expérience £ donnoit du bleu encorc plus pale. : (x) Lebain reftant dans l’'Expérience /, donnoitune nuance plus D'EBSL'IN D I G O. 161 plus foncée que celle del'Expérience f, mais plus pâle que celle de l'Expérience /. (y) Le bain reftant dans l'Expérience #, produifoit là même nuance que l'Expérience x. (x) Le bain reftant dans l'Expérience », donnoit un bleu pâle verdâtre. Le bain étoit à la fin de cette Expérience prefque décoloré ; tirant feulement un peu fur un bleu verdâtre; mais, dans les Expériences précédentes, les bains contenoient encore beaucoup de couleur. (a) Dans un bain de 76 parties d'eau bouillante, avec 5 de teinture, la foie préparée comme l'étoffe de l'Expé- rience o, devenoit bleue célefte très-jolie, & celle qui avoit feulement trempée dans de l'eau, gagnoit la même nuance. (Bb) Le bain étoit comme le précédent, mais la foie pré- parée comme l'étoffe de l'Expérience p, donnoït la même nuance aux deux échantillons, dont l'un n’avoit trempé que dans l'eau pure. $. 46. Lateinture d'Indigo fait donc du bleu fur la foie comme fur l'écoffe; mais l’affinité qui doitprécipicer les molécules bleues, eft plus foible. Je regarde cette opération comme une véri- | table précipitation, & on peut aïfément sen convaincre pat l'examen d’un bain entièrement décoloré; car l'acide vi- triolique , qui tenoït auparavant le bleu en diflolution, y refte dépouillé. Quoique les échantillons teints réfiftenr fort bien à l'eau feule;,-ilsIne:-peuvent pourtant fupporter l'aétion du favon , qui,emporte facilément toute la couleur, parée que la foie aune plus grande affinité avec le favon qu'avec les molé: cules bleues, : 8 ocisl &l Tome 1X, X + 162 À N ASIE CHIMIQUE 5. 47. Les matières végétales font la plus grande difficulté dans l’art de la teinture. Pour voir l'effet de la teinture d’In- digo fur du fil, j'ai fait les mêmes eflais qu'avec la foie; met: tant les échantillons enfemble, dans les mêmes bains déjà décrits, & c’eft pourquoi je les indique par les mêmes lettres. (4) L'échantillon avoit un bleu très-pâle. (7) L'échantillon étoit encore plus pale que le précédent. Le bain étoit faturé de fel de foude. (f) L'échantillon n’avoit que la couleur pâle de 9. Le bain faturé de fel de Glauber. (2) L'échantillon étoit comme le précédent. Le bain faturé de nitre. (y ) L'échantillon étoit comme le précédent. Le bain faturé de fel marin. (x) L’échantillon avoit un bleu faiflant, plus foncé que tous les autres. Le bain faturé de fel ammoniac. (y) L'échantillon étoit comme g. Le bain faturé d'alun. (x) L'échantillon étoit le plus pâle de tous. Le bain faturé de crême de tartre. ; … (a) Les deux échantillons gagnoient la même nuance que. de 9. (6) Ces deux échantillons reflembloïent parfaitement aux deux précédens. 5.48. On peut conclure des Expériences dont.nous venons de rapporter les réfulcats, que la teinture d’Indigo eft très- propre & très-commode, pour faire toutes fortes deïbelles nuances çn bleu fur de la laine & de la foie, mais fur du fl DE L'INDIG ©. ’ 163 & du coton, elle ne produit que des couleurs très-pâles. On croit ordinairement que l’Indigo diflout par l'acide vitriolique, ne donne que des couleurs de petit teint, & il faut avouer que, quoique très-jolies, elles font le plus fouvent très-fujettes à fe ternir ou à saffoiblir étant expofées aux rayons du foleil, Mais, en fe fervant d’un acide vitriolique aflez concentré, elles deviennent beaucoup plus fixes, & les nuances les plus foncées ne s’altèrent aucunement. J'ai expofé tous les échan- tillons au foleil pendant deux mois: ceux qui étoient d'un bleu d’enfer ne changeoïient point ; les bleus pers & Turquin s'affoiblifloient à peine fenfiblement, mais les nuances plus claires fouffrent bien davantage : à la vérité elles ne s’effacent pas entièrément, mais elles deviennent ternes & verdiflent. Cetté façon de teindre n'eft donc point dañs tous les cas préférable à l'ancienne; mais cela n'empêche pas qu'elle ne puifle devenir très-utile, érant déjà trèsbonne pour les nuan- ces foncées, & recommandable à d’autres égards. J'efpère aufli que ces Expériences, qui font très-amufantes, & fe peuvent faire très-commodément, feront dans peu de tems aflez mul- tipliées & aflez variées pour obtenir quelque moyen propre à fixer les nuances les plus claires : fi cela arrive, comme il y a tout lieu de le croire, on oubliera bientôt l’ancienne méthode, plus chère & plus embarraffante. Pour le fil & le coton, on a une maniere de teindre décrite ($. 36), qui ne manque jamais, & dont la couleur réfifte fort bien au favon, au cas qu'on ne trouve pas quelque expédient, d'augmenter à fouhait l'attraétion entre ces matieres & les molécules bleues difloutes par l'acide vitriolique. X ij #64 À N À LI SENC'HIMIQUE,; éc 6. 49. Avant de finir, je dois avertir que l’Indigo précipité (S.9,m), préfente pour la miniature une couleur excellente, à l'égard foit de la beauté, foit de la fixité; il eft pourtant fâcheux qu'il ne fe fépare de la teinture qu'imparfaitement, & de plus très-lentement, RECHERCHES SUR LA MEILLEURE MANIERE DE FABRIQUER LES AIGUILLES AIMANTÉES, De les fufpendre, de s’af[urer quelles font dans le véritable Méridien magnétique ; enfin de rendre raifon de leurs Variations diurnes régulières : PIÈCE QUI A PARTAGE LE PRIX PROPOSÉ POUR L’ANNÉE 1777. Faciliis quid non fir quam quid fit de hujufmodi rebus poffe confirmari. Crc. Par M COULOMB, Capitaine en premier au Corps-Royal du Génie, Correfpondant de l’Académie des Sciences. 12% PTCPE à L £ ” j «° 1 ” PA n : A ; | nv 4 ‘ F7 4.1 LOC RUES #. Ne Je 8 < [ IR, CR RER SE LT ÿ bat Pr. : KA" LS Le n! "1 i À rrt | RUE ON Obs A BD MOT Bs4 G! U RANE PARALTAÆN l'E ER Y15 EN à ARE HI UD IVYN n » « NT. RME) CAT 71 ET Le Tan 0. lc OUEE cu Pr PA T7 ! * } » ARE FE RTS PRE SE: ve ee x He TO AT EE } ce NN L PLU &i SAIT ENS J te _— —_ ntm nm mme — 2 . | + A E ss 34 “DEN 3 ira de “k:pA ù < ; L, 1 ps > LE - — ch made dt © E « cr + + * LD EF à Si + LA { | + l : «! ARS ) LS 14 DUO" 115 TOR net Ces noi or 13 S1LSRSRE RECHERCHES SUR | | LA MEILLEURE MANIÈRE DE FABRIQUER Ji LES AIGUILLES AIMANTÉES. a É NDIS que toutes les parties de la terre font unies par leurs befoins refpedtifs & par l'échange de leur fuperfu ; tandis que .des armées & des nations entières couvrent & habitent les mers : des Savans aufñ refpectables par leur amour pour le bien public, que par leur génie, propofent aux recher: ches des Phyficiens & des Géomètres, la perfettion de l'inf. trument qui dirige la marche des vaifleaux ; qui, placé au centre d'un horizon vafte & uniforme, trace une lighe dont La direction eft connue: c’eft fervir l'Humanité & fa Patrie, que de répondre à leurs vues ; & d'effayer fes forcés: fur un objet auf vil; 0: nus t ob cast 168 DIR À CH ÉK-CEE S DÉFINITIONS ET PRINCIPES. 1 Sr L'ON SUSPEND une Aiguille aimantée par fon centre de gravité, autour duquel on fuppofe qu'elle peut tourner librement dans tous les fens, elle prendra une direétion fixe, en forte que , fi on l'éloignoit de cette direction , elle y feroit tou- jours ramenée en ofcillant. Si, par la direétion de cette Aiguille , on fait pañler un plan vertical, ce plan fera le méridien de la Bouflole , ou autrement le méridien magnétique. L’angle formé par ce plan avec le véritable méridien du monde, fera la déclinaifon de la Bouflole. Si par le point de fufpenfion de lAiguille , lon fait pañler un plan horizontal , l'angle formé par la direétion de l'Aiguille avec ce plan, fera l'inclinaifon de la Bouflole. L'on diftingue dans les Aiguilles Aimantées, leurs extrémités fous le nom de poles. L’extrémitc qui fe dirige à-peu-près vers le Nord , s'appelle pole boréal. L’extrémité qui fe dirige à-peu- près vers le Sud , s'appelle pole auftral. Les poles du même nom de différens aimans ou Aiguilles, paroiflent exercer les uns fur les autres une force répulfive. Les poles de différens noms paroiflent avoir une force attractive. Les lames d'acier ne font fufcepribles que d'un certain degré de magnétifme qu'elles ne peuvent outfe - pañler. Parvenues à ce point , on dit qu'elles font Aimantées à faturice. PREMIER PRINCIPE FONDAMENTAL. 2. Si, après avoir fufpendu une Aiguille par fon centre de gravité, on l'éloigne de la direction qu'elle affeéte naturelle- ment, elle y eft toujours ramence par des forces qui agiflent parallélement SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. ré9 parallélement à cette direétion, qui font différentes pour les différens points de l’Aiguille; mais qui font les mêmes pour chacun de ces points en particulier , dans quelque pofition que cette Aiguille foit placée , par rapport à fa direction naturelle. En forte qu'une Aiguille, Aimantée éprouve toujours la même action , dans quelque polition qu'on la fuppofe, de la part des forces magnétiques de la terre. Développement de ce Prinape. Le ciose de la terre eft un aimant naturel qui , par fon aétion , produit la direétion de la Bouflole. Si l'on fuppofe que les forces aimantaires font des forces attraétives ou répulfives ; les centres de ces forces, placés dans le globe de la terre feront, par rapport à la longueur de la Bouflole, à une diftance que l'on peut regarder comme infinie. Mais, comme l'aétion des forces attraétives ou répulfives , dépend de la nature & de l'intenfité des mafles , & d’une fonétion de la diftance, la diftance pouvant être fuppofée la même, dans quelque poli- tion que l’on place la Bouflole , & chaque point de cette Bouflole pris en particulier , n’éprouvant dans les changemens de pofition ancune variation par rapportà la conftitution de fes parties, il s'enfuit que chacun des points de l’Aïguille fera folli- citée par une force dont la direétion fera toujours la même, & dont l'intenfité fera indépendante de la pofition de l'Aiguille. Les Expériences de M. Muffchenbroek, & celles de Wifton, citées par le même Auteur, viennent à l'appui de la théorie. M. Muffchenbroek ( Differtatio de magnere, Exp. CIIL), a trouvé , que lorfque lon faifoit ofciller une Aiguille d'incli- naïfon dans un autre plan vertical, que le méridien magnétique, les forces, qui produifoient les ofcillations dans les differens plans étoient entrelles comme les cofinus d’inclinaifon , formée par la direction naturelle de lAïguille avec ces plans. Or fi lon fuppofe que la force particuliere qui follicite chaque point de la Bouflole , a toujours la même direction, & que fon aétion Tome IX, X 170 RABIGNET ERIC HPE"S eft indépendante de la pofition de l’Aiguille, il réfultera de cette fuppofition & du principe de la décompofition des forces, que les forces qui feront ofciller Aiguille Aimantée dans des plans inclinés à la direction naturelle, feront comme les cofinus des angles que forment ces plans avec cette direction. Ce qui étant confirmé par l'expérience , il en réfulce que le principe établi eft légitime. Un autre fait que nous avons tous les jours fous les yeux ; prouve encore , ce me femble, ce principe d’une manière in- conteftable. Lorfque l’on fufpend fur la pointe d'un pivot une Aiguille ordinaire de déclinaïfon, fi elle étoit en équilibre, avant d'être aimautée, elle ceffera de l'être lorfqu'elle aura été aimantée, la partie boréale fe trouvera plus pefante que la partie auftrale, & l’on fera obligé , pour rétablir l'équilibre , ow d'ajouter un petit contrepoids à la partie auftrale, ou de di- minuer la pefanteur de la partie boréale. Ce font donc des forces dépendantes de la vertu aimantaire qui augmente la pefanteur de la partié boréale , ou qui diminue celle de la partie auftrale. Mais lorfqu'on a rétabli l'équilibre par un petit contrepoids , fi la Bouflole fe trouve dans une fituation hori- zontale dirigée naturellement dans fon méridien magnétique , & {1 l’on fai tourner cette Bouflole horizontalement, elle continuera , abandonnée à elle-même, à refter horizontale dans toutes les pofitions où elle fe trouvera amenée par fon mou: ‘vement ofcillatoire. Par conféquent la force aimantaire aug- mente la pefanteur de la partie boréale, ou diminue la pefanteur de la partie auftrale d'une même quantité, dans quelque pofi- tion que cette Bouflole fe trouve , par rapport à fon méridien magnétique ; donc la pofition de la Bouflole n'inAue point fur l'action des différentes forces aimantaires, SECOND PRINCIPE FONDAMENTAL. 3. LES FORCES MAGNÉTIQUES du globe cerreftrequi follicitent les différens points d'une Bouflole , agiflenc dans deux fens SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 171 oppofés. La partie boréale de la Bouflole eft attirée vers le pole boréal du méridien magnétique. La partie auftrale de lAiguille eft follicitée dans la direétion oppofée. Quelque foit la loi, fuivant laquelle ces forces agiflent , la fomme des forces qui follicitent l’Aiguille vers le pole boréal, eft exaétement égale à la fomme des forces qui follicitent le pole auftral de VAïguille dans la dire&ion oppoiée. Développement de ce Principe. M. Muffchenbroek ( Differtario de magnete, Exp. XXVI), a trouvé qu'une lame d'acier pefée avant d'être Aimantée, & après l'avoir été , ne changcoït nullement de poids. Quelque précifion qu'il ait pu mettre dans fes Expériences , elles lui ont toujours donné le même réfultat. Ainf, toutes les forces qui {ollicitent une Aiguille Aimantée, étant décompolées , fuivant une direction horizontale & une diretion verticale : il fuit des principes de ftarique , & de cette Expérience, que la fomme des forces verticales doit être nulle. D'un autre côté, l'on fait que lorfqu'on fait flotter une Aiguille Aimantée fur un petit morceau de liége, elle fe dirige fuivant le méridien magnétique , mais que le centre de gravité de tout le fyftème parvient bientôt à un état de repos; or fi la fomme des forces horizontales n'é- toit pas nulle; fi, par exemple, la fomme des forces qui tirent vers le pole boréal éroit plus grande que la fomme des forces qui agiflent dans le fens oppofe , le centre de gravité du fyftême devroit fe mouvoir vers le Nord d'un mouvement , Continu. L'on peut donc conclure de ces deux Expériences , que puifque la fomme des forces décompofées dans le plan hori- zontal fuivant le méridien magnétique eft nulle, de même que la fommedes forces verticales, il fuit que la fomme des forces qui agiflent fuivanc la direction naturelle de la Bouflole , eft aufti nulle. Y i Ficure 1, 172 RAERGMENE R'CMANE:S Comme l'on pourroit oppofer à cette dernière Expérience que la cohéfion de l'eau peut détruire l'effet des forces hori- zontales : voici un fait qui me paroït fans réplique. Une régle de bois AB très-léoère, percée à fon milieu C & garnie à ce point d’une chappe de Bouflole , a étc fufpendue, par le moyen de cette chappe, fur un pivot de la même ma- nière que l’on fufpend une Aïguille de déclinaïfon ; une Aiguille Sn, a été attachce à l'extrémité de cette régle, & formoit avec elle un angle droit; l'on a placé un petit contrepoids en À, pour que cout le fyftéme für équilibré horizontalement, & püt fe mouvoir librement {ur la pointe d’un pivot, autour du centre de fufpenfion C. Apres que les ofcillations ont été étein- tes, l’Aiguille Sz seft trouvée dirigée fuivant le Méridien ma- gnctique , C'eftà-dire, fuivant la même ligne , que fi elle avoit été foutenue fur la pointe d’un pivot par fon centre E: voici l'explication & le réfultat de cette Expérience. Les forces qui agiflent fur cette Aiguille, lorfqw’elle eft dans fon Meridien magnétique , font dirigées fuivant fa longueur : or, puifque l'expérience nous montre que la Bouflole parvient à fon état de repos, lorfqu'elle eft dirigée fuivanc le Meridien magne- tique , il s'enfuit que les forces boréales & les forces auftrales ont pour lors le même bras de levier; ainfi, elles ne peuvent pas être en équilibre à moins d’être égales. J'ai répété cette Expérience fur un très-grand nombre d’Ai- guilles aimantées à faturité ou non, ayant feulement un cen- tre aimanraire, ou en ayant un plus grand nombre. J'ai conf- tament trouvé le même réfulrat. Cette Expérience fera encore plus exacte, en fufpendant la petite régle de bois avec des fils de loie , comme je l’expliquerai dans la fuite de ce Mémoire. COROLLAIRE GÉNÉRAL. 4. DE ces deux principes, l'on peut , ce me femble, con- clure que la direction d'une Aguille aimantée ne peut pas dé- pendre d’un torrent de fluide , qui, mû avec rapidité fuivanc r SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 173 le Méridien magnétique, force l’Aiguille par fon impulfion, de fe diriger fuivant ce Méridien. Car , par le premier principe établi , l'Aiguille éprouve toujours la même aétion de la part du fluide magnétique , quelque angle qu'elle forme avec fa direction nacurelle , qui devroir étre la direétion du torrent de fluide aimantaire. Cependant , fuivant tout ce que nous pou- vons connoître des loix des impulfons des fluides , ils agiflent différemment, fuivant que les corps qu'ils frappent font pofés différemment , & préfente une moindre ou plus grande furface à la direction de leur courant. Ainfi, puifque Expérience nous apprend , que les forces aimantaires du Globe terreftre agiflent également fur l Aiguille dans toutes les pofitions, cette action ne peut pas provenir d'un torrent de fluide. En fecond lieu , puifqu'il fuit du fecond principe , que la fomme des forces qui agiflent fur l’Aiguille , eft égale dans les deux fens oppofés ; il faut , fi lon veut faire dépendre la direc- tion de l’Aïguille de limpulfion d’un fluide, imaginer des torrens oppofés qui agiront également dans les fens contraires fans fe détruire mutuellement. De pareilles hypothèfes paroiflent de- voir être rejettées de la Phyfique, comme trop contraires aux principes de la mécanique. Il femble donc qu'il réfulte de Expérience, que ce ne font point des tourbillons qui produifent les différens phénomènes aimantaires; & que, pour les expliquer, il faut nécefläirement recourir à des forces artraétives & répulfives de la nature de celles dont on eft obligé de fe fervir pour expliquer la pefanteur des corps & la phyfque célefte. RAENCHEMPE R CAE ?S GREPA PIERRE PREMIER Formules qui dérivent de toutes les forces, Joir aëlives, foit coercitives, qui peuvent influer fur la pofiion d'une Aiguille en équilibre dans un plan horizontal. 5. Lorsqu'uxe ArcuILLE de déclinaifon équilibrée dans un plan horizontal , peut tourner librement autour de fon point de fufpenfon; fi elle eft éloignée de fon Méridien magnétique, elle y fera ramenée par la force aimantaire, qui agit fur chaque point de cette Aiguille; & fon mouvement fera retardé par toutes les forces coercitives, provenant , foit du frottement de la chappe fur fon pivot, foit de Ia torfion des foies, auxquelles on peut fuppofer les Boufloles fufpendues, foit enfin de la réfiftance de Fair, dans lequel la Bouflole fait fes ofcillations. Nous ne confidérons point ici les erreurs qui peuvent naître de la poii- tion du point de fufpenfon, & de l'imperfeétion des pivots & des chappes. Nous y reviendrons dans la fuite. De ces différentes forces coercitives, qui toutes tendent à détruire le mouvement des Aiouilles qui ofcillent : les unes font conftantes & dépendent, foit du frottement, foit de la cohéfion de l'air : les autres dépendent également du frotte- ment & de la cohéfion de l'air ; mais augmentent avec la vitefle ; en forte que le momentum de toutes les forces coercitives fera repréfente par une quantité { À + F4) ou A étant une quantité conftante, F4 fera une fonétion de la vitefle angulaire, 6. Soit AB ( Fig.r1.) le véritable méridien d'une Aiguille de déclinaifon, dont on la fuppoñe éloignée, au commencement SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 175 de fon mouvement, de l'angle BCN—B, le point C étant le point de fufpenfion , qui s'éloigne très -peu du centre de gravité & du centre aimantaire, dans les lames homogènes aimantées à faturité. Lorfque l’Aiguille fera arrivée en 7, foit l'angle NCr=S, l'angle CB — B—S, la vitefle angulaire =u—*, la force aimantaire me, qui agit fur un point quelconque (décompofée fuivant le plan horizontal), parallèle au méri- dien magnétique =, Cu=r, CN—/, le momentum ce la force aimantaire du point u, fera repréfenté par ou Cu A: Si R—(A+Fu) repréfente le momentum de toutes les forces coercitives, l'on aura, pour le momentum total, autour du point C, la quantité (/ouCu TE —R); mais, lorfque l’Aïguille eft parvenue à fon état de repos, les forces-aétives & cocrcitives doivent être en équilibre; ainfi l'on aura, pour l'erreur de l’Aiguille, EF —R:/ouCr; &, lorfque l'angle d'erreur eft peu confidérab e, lon aura (B—S)=R : /ouCu; ainfi, pour avoir les dimenfions les plus avantageufes d’une Aiguille , il faut, lorfque l'on connoïtra la quantité R & la quantité /ouCu, intégrée pour toute la longueur de PAi- guille, faire en forte que l'angle (B—S) foit un #rmum. 7. Paflons aétuellement au mouvement ofcillatoiré : nous en aurons befoin dans la fuite, foit pour comparer la force aimantaire de différentes Aiguilles, foit pour comparer la force aimantaire avec la force coercitive. Le momentum de toutes les forces qui produifent l’accéléra: tion de l'Aiguille lorfqu’elle eft arrivée au point z, eft, comme nous venons de le voir dans l'article précédent, exprimé par ( J(euCu) Er — R }); mais l'accélération du point #, ou le petit arc parcoüru par ce point, eft exprimé par Cu-du=r.du; ainfi lon aura;"en nommant dr l'élément du témips 2.01 (four) ES — R)d=f{urt)du; d'où, en intégrant cette, quantité, après avoir fubftitué, à la place de &, fa valeur &S : 4, & remarquant que x s'évanouit, lorfque Sd) lon'aura f (pr) Sen 2 fRaS=* fr a, 176 AARDEÉICHACE IR CNÉAE'S 8. Si l'angle B eft très-petit, c’eft le feul cas dont nous aurons befoin dans la fuite, l’on aura F-52225 — 2S$; ainf l'équation fe réduit à few r (2BS—SS)— Ras app u. 9. Si lon fait 4=0, l'on trouve (2B—S )=2/RdS: S.fourz & fi R étoit une quantité conftante, D auroit 2B—S — 2À : Sour : ainfi lorfque V Aiguille , après avoir parcouru l'arc NB, remonte jufqu'en N’, fi l'arc remonté BN’, eft fappofé — B', l'on aura BAUBIEUHA : fur; ce qui ds toujours ; dans la fuppofition des forces coercitives conftantes, la même quantité pour la différence des ares defcendus & remontés. 10. Si l'on fuppofe R—A+Fz, l'on aura pour lors quel- que petite que foit la vitefle 4, B— B' plus grand que 2 A : four. Cette confidération nous fuffira dans la fuite, pour prou- ver que la réfiftance de l'air ne peut pas produire une erreur fenfible dans la pofition de l’Aiguille. 11. Lorfque, dans l'équation précédente, lon fuppofe R=—o, l'on a l'équation approchée uu = (2 2 BS— —SS); d'où Ce Fde= dS : (2BS—SS)"; or fdS:(2BS—SS) eft Ju l'angle dont le rayon eft B, & S le finus-verfe; quantité égale à 90°, lorfque S—B; ainfi, en nommant T le temps d'une ofcillation totale, l'on aura T ( ) (180) 12. Si l'on veut comparer la force magnétique avec la gra: vité , lon remarquera que g exprimant cette force , l'on à 14 (£ — (180) pour les ofcillations d'un pendule, dont la longueur eft À; ainfi, fi l'on veur que le temps T” foit ifo- crone avec les ofcillations de l’Aiguille aimantée, l'on fera es Re, d'où A = g ge sen DÉPORREe la BOÉOR foit une lame d'une largeur & d'une épaifleur uniforme, nommant . SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 177 nommant | la feétion tranfverfale de cette lame, & / la moitié de fa longueur, lon trouvera *fur®=— 2 Â/.=; mais 2 A / re- préfente la mafle de l’Aiguille, qui, multiplice par la force de fa gravité g, égale fon poids P; ainf fur* = & par con- .P féquent À = k q 3 Jour 13. Si l’on cherché un poids Q , qui, placé à l'extrémité du levier /, ait le même momentum que la force magnétique de l’Aiguille, lon aura Q./=/fomr; mais, en conféquence de l'article précédent, four— #5 ainfi Q—;; quantité qui eft la même que celle trouvée par M. Euler, dans la Pièce qui a concouru pour le Prix, en 1743, où ce Géomètre, divifant la force aimantaire en deux parties, qui agiflent en fens contraire, aux deux extrémités de l'Aïgullle, trouve pour chacune Q =P/: 62. ; Tome IX. Z 178 RENE TETE RACOETIENS CHA PMR EN IT Détermination théorique & expérimentale des Forces aimantaires. 3: M. MusscHENBROEK ( D:ffert. de Magnete, Exp.cvrr); dit que, dans les ofcillations de lames aimantées, le quarré du temps dans lequel fe fait un certain nombre de vibrations, eft en raïfon compofce de la longueur des lames & de leur poids; ce qui, exprimé algébriquement, donne TT—#/P, T exprimant le temps d'un certain nombre de vibrations, m €tant un coefficient conftant, 2 / la longueur, & P le poids de lAïguille; mais nous avons trouvé, dans les articles pré- 3 cédens, TT —(180°) 247 — (180°y PF Jeur 38-Jour parant cette valeur de TT avec l’Expérience, il en réfulte : l'équation #/P =(180°) . d'où four=(1 80°} = Q5 ainfi, en comparant les expériences de Muffchenbrock avec la théorie des ofcillations, l'on trouveroit que le momentum total des forces magnétiques d’une lame , quelque foit les di- menfions de cette lame, feroit toujours égal à un poids conftant, multiplié par la longueur de la lame. ; ainfi, en com- 14. Deà on concluroit qu'à longueurs égales, le frotte- ment des Aiguilles de déclinaïfon , qui tournent fur un pivot , augmentant fuivant une Loi du poids, & le momentum de T'ac- tion aimantaire étant toujours une quantité conftante, les Bouf- foles les plus légères feroient les meilleures. 15. Il enréfulteroit encore, que file momentum du frottement augmentoit en raifon direéte des poids, il augmenteroit, Out Étant d'ailleurs égal, comme les longueurs des Boufloles : or le m0- SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 179 mentum de la force aimantaire, augmente dans la même pro- portion. Ainfi , le rapport du momentum des forces magnéti- ques , au rapport du z7omentum des frottemens , étant conf- tant , il en réfulteroit toujours la même erreur dans la pofition des Aiguilles. 16. Si l’on vouloit chercher, d’après les mêmes formules, fondées fur les Expériences de Muffchenbroek, la loi des for- ces aimantaires de différens points des Aiguilles. Voici comme on pourroit s'y prendre. Que S N, repréfente une Aiguille , dont le centre aiman- taire eft en C, c'eftä-dire, dont le point C eft tel, que tous les points # de la partie C N, ont une force boréale, tandis que tous les points # de la partie C S’ ont une force auftrale : fi l'ordonnée mr repréfente la force du point #, & fi, par les extrémités de toutes les ordonnées , on fait pañler une ligne MCM’, certe ligne fera le lieu géométrique de toutes les forces magnétiques , & coupera lAiguille en un point C, qui fera le centre aimantaire Mais, par le fecond principe, la fomme des forces boréales eft égale à la fomme des forces auftrales, d’où lon conclura que Paire C M N — l'aire C MS. Mais l'Expérience nous montre, que dans les Aiguilles ho- mogènes , aimantées à faturite, le centre aimantaire fe trouve au milieu des Aiguilles : ainfi, fi nous fuppofons que la quantité ? force aimantaire du point #, eft exprimée par 2/*r*, n étant un coefficient conftant , / la moitié de la longueur de lAï- guille, & r la diftance du point # au point C, 9 & k les puif- fances de / & de r, nous tirerons de ce que JRumr=Q:.2, Q étant un poids conftant , our — fn Al! r"* "dr — LÉ RREE & 3 > ; andiitk4+s lorfque r—/, l'on aura TETE Q:/: or, comme cette équation doit être identique, & que Q eft une quantité conf. tante , il faut que (g+k+1)=o, ou (g+k)=— 1; ainfi, la force @, pour l'extrémité N, étant »/:#t, l'on a toujours Zn Frc. 111. 180 R'EC'HERCHES à l'extrémité des Aiguilles, ® — (+), quelle que foit d’ailleurs la valeur de g ou de k. È 17. Si l'on fuppofe avec la plupart des Auteurs qui fe font occupés de la matiere magnétique , que les forces boréales & auftrales des différens points # de lAiguille , font comme les diftances cu de ces points au centre aimantaire, pour lors @—nlr & qg—=—2; ainfi p—7, & le lieu géomcrique MCM’, fera une ligne droite. 18. Quoiqu'il y aït plufieurs Expériences qui femblent fe réu- nir à prouver , que les forces des différens points d’une lame, font comme les diftances de ces points au centre aimantaire. Il fe préfente une difficulté qui doit, ce me femble, rendre cir- confpeét fur cette hyporhèle : l'on conçoit, à la vérité aflez facilement , que lorfqu'une Aiguille eft aimantée à faturité , le centre aimantaire fe trouvant au milieu de la lame, le lieu géométrique des forces magnétiques ,. peut être repréfenté par deux triangles égaux, oppofés par la pointe & liés par la même équation : mais nous fommes les maitres de tranfporter ce cen- tre magnétique vers les extrémités de la lame , en nous fet- vant de la pratique prefcrite par M. le Monnier, ( Zoz du Ma- gnétifme, pag. 107.) Si nous fuppolons que ce centre fe trouve dans un autre point que le milieu de la lame, pour lors les forces boréales feront repréfentées { Fig.4), par un un triangle CMN, & les forces auftrales par un triangle M'CS : la Loi de continuité exige que les deux trian- gles foient femblables, ou que M CM foit une ligne droite: mais il réfulte du premier principe , que la fomme des forces auftrales doit être égale à la fomme des forces boréales : ainfr il faut, pour fatisfure à ce principe, que les deux triangles foient égaux , ce qui eft incompatible avec la fimilitude des deux oO . . triangles ; lerfque la ligne N C {era plus grande ou plus petite ue CS: ain, lhypothèfe des forces aimantaires des différens ointsde l’Aisuille, provortionnelles à la diftance de ces points, le) P L ne peut pas étre admile, SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 18 NouvEiLes EXPÉRIENCES pour déterminer La Force de direction des Lames aimantrées. 19. Siles Expériences de Muffchenbroek étoient plus nom. breufes ; fi la théorie du Magnétifme avoit été portée de fon temps au degré où elle eft parvenue ; l’autoriré de cet Auteur en fait de Phyfique, a un fi grand poids, que j'aurois adopté aveuglément les formules fimples qui en réfulcent ; mais il fera facile de s’appercevoir qu'elles font incompatibles avec la théo- tie du magnétifme, lorfqu’on aura expofe ce que des effais ré pétés ont faitentrevoir depuis quelques années , fur la manière dont la vertu aimantaire fe communique : j'en tirerai des con: féquences que je crois intéreflantes au lujet que je traite, 20. Lorfque le pole d'un'aimant eft pofé fur l'extrémité d'une lame d'acier en 7°, fi c'eft » par exemple , le pole auftral de l'aimant, qui touche le point x’, une partie »’ C de cette lame prend une force boréale, tandis que l'autre CS’, prend une force auftrale ; & le centre C, qui {parc la partie boréale de la partie auftrale, qui n’a aucune force magnétique , s'appelle le centre magnétique , ou centre d'indifférence. Si lon faic glifler le pole S de l’aimant le long de la lame, le centre d'in- différence C s'approche du point S’ la force auftrale de l'extré- mité Sa d’abord en augmentant, jufqu'a ce que le pole de l'ai- mant foit parvenu à un point E ; puis elle diminue jufqu'à ce que le pole foit arrivé à un point ©, où elle eft nulle. Elle de- vient enfuite boréale, & va toujoursen augmentant jufqu'à ce que le pole auftral S de l’aimant foit arrivé au point S’: ce que l'on di par rapport au point S’, aura également lieu pour le point 2, fa force d’abord boréale, augmentera , diminuera, devien- dra nulle, puis auftrale, pendant que le pole de l’aimant par- courera la longueur de la lame, Ce que l'on vient de trouver pour Îe pole auftral de l'aimant, aura également licu, vice verfa, en fe fervant du pole boréal N, Fic, », Fic, vi, 182 RAEME "EI EFRICGIH ES Ces Expériences ont ére faites par plufieurs Auteurs ; l'on en trouve le détail le plus circonftancié , dans un Ouvrage de Vanswiden, ( Tentamina treorie Mathematice de P henomenis magneticis,) lon conçoit que, dans l'opération que nous ve- nons de détailler, lorfque la force aimantaire des extrémités x! ou S' devient nulle ; pour lors le centre d’indifférence de cette lame, tombe aux extrémités de la lame. 21. En général , le pole d’un aimant étant appliqué à un point w ( F9. 6.) d’une lame , communique à ce point une force d’un nom contraire à celle du pole de aimant qui tou- che le point de la lame: en forte que fi c'eft, par exemple, le pole boréal de l’aimant qui touche le point «, ce point w pren- dra une force auftrale : il en fera de même de tous les points cir- convoifins, qui prendront tous une force auftrale, cette force ira toujours en diminuant jufqu’aux points C & C’, qui feront des centres aimantaires : les extrémités CM & C’ M’ auront des forces boréales. Il arrivera le plus fouvent, que l'extrémité la plus courte M, aura une force auftrale , & que la lame fe divifera feulement en deux parties par un centre C : il pourra arriver aufli qu'elle fe divife en crois & quatre partiés par plu- fieurs centres magnétiques, ce qui dépend de la nature de cette lame, de fes dimenfions, & de la force de l’aimant. Si l'on fait glifler le pole N de l’aimant le long de la lame, Jes centres aimantaires parcoureront cette lame ; mais le point fur lequel fe trouvera le pole N, recevra toujours une force d'un nom contraire à ce pole. 22. De ces Expériences il réfulte que puifque le pole d’un aimant produit toujours fur la partie de la lame où il eft appli- qué , une force d'un nom différent du pole qui touche; fi l'on joint enfemble deux lames aimantées à faturité , en réuniflant les poles du même nom ; quelle que foit la caufe de leur aétion, elles tendent à produire l'une fur l’autre une force d'un nom contraire à celle dont elles font douces : ainfi, l'effet de . — ——— SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 183 _cette aétion doit diminuer la force polaire de chacune de ces lames. Par conféquent , la force aimantaire de chaque élément Ions gitudinal d’un aimant artificiel , diminue néceffairement à me- fure que fa grofleur augmente : ainfi, la force totale de deux aimans artificiels de la même longueur, mais d'une grofleur inégale , aimanté l'un & l’autre à faturité, fera dans un moindre rapport que celui de leur maffe. 23. Si, au lieu de faire toucher le pole d’un aimant à une lame d'acier , on le préfente feulement à une ou deux lignes de diftance, l’on aura les mêmes phénomènes que dans arr. 21; mais le degré de magnétifme qu’acquèrera la lame , fera moindre que dansJe premier cas. Aïnfi,.chaque point d’un aimant ou d’une lame aimantée, peut être regarde comme le pole d'un petit aimant, qui tend à produire dans les autres points de cette lame une force d’un nom contraire à celui qu'il a lui-même; & l'effet de certe ation eft d'autant plus grand, que l'intenfité de la force du point qui agit, eft plus grande, & que fa diftance aux points fur lef quelsil agit, eft moindre; ainfi la force magnétique d’un aimant, dépend de lation réciproque que tous les points de cet aimant exerce l’un fur l’autre. 24. Si l'on développe les raifonnemens qui précèdent, l'on verra que puifque lation qu'éprouve un point magnétique ; augmente néceflairement , fuivant que l'intenficé de la force des autres points qui forment la lame augmente , fuivant que le nombre des points qui agiflent eft plus grand , & qu'ils exercent leur aétion à une moindre diftance : plus les points d'un aimant artificiel feront rapprochés par la figure-de cet aimant, plus l'action que les différentes parties exercent l'une fur l'autre , pour détruire leurs forces réciproques ; fera confi- dérable, & par conféquent plus la force de chaque point fera moindre. 184 RECHERCHES Ainfi, dans deux lames du même poids & de la même lon: gueur , le magnétifme fera plus grand, dans celle dont la lar- geur fera plus grande , parce que les fibres longitudinaux feront plus ifolés dans la lame la plus large. Aïnf, fi une lame eft feparée en deux parties, chacune d’elles aimantée à facurité, recevra en particulier un plus grand degré de magnétifme, que lorfqu'’elles étoient réunies. Ainfi de toutes les figures , la figure cylindrique étant pour les verges d'acier, celle où les parties à longueur égale, fonr pour le même poids rapprochées de plus près, {era aufli celle où lac- tion mutuelle des parties aimantaires fera la plus grande , & par conféquent celle dont le magnétifme fera le moindre, En continuant à fuivre les mêmes analogies, l'on trouvera que les points de la furface d’une lame, feront néceflairemenr doués d’une force aimantaire plus confidérable que les points de l'intérieur de certe lame , puifque les parties intérieures font touchées de tous côtés par des élémens qui tende à détruire leur force aimantaire ; au -lieu que, dans les furfaces, il n'y a qu'un côté qui foit en contaét, | L'on trouvera également que les angles des verges aiman- tées , font les parties qui prendront le plus grand degré de magnétifme , parce que ce font les parties qui font les plus ifolces. Enfin lon en conclura qu'à grofleur égale, les extrémités d’une longue lame aimantée à faturite , & dont le centre ma- gnétique {e trouve au milieu , auront moins de force que les extrémités d’une petite lame; puifque, dans la premiere , il y à plus de parties quiagiffent, que dans la feconde, &c, 25. De ces réflexions, l'on peut tirer une foule de confé- quences , fur le choix des lames aimantées dans la conftruction des Boufloles: mais , avant de nous livrer à cette difcuflion , nous allons rendre compte de plufieurs Expériences, qui nous | aideront | à SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 185 aideront à développer cette théorie d’une maniere plus füre 8 plus précife, 26. L'on s'eft fervi , dans les Expériences qui vont fuivre, pour aimanter les lames à faturité, de deux barres d'acier, dont la longueur étoit de 12 pouces, & la largeur d’un pouce, Pépaifleur de s lign. L'on a aimanté , par la méthode de la double touche , telle qu'elle eft prefcrite par MM. Antheaume & Œe- pinus: elle confifte (F19.7), à incliner les deux aimans aiti- ficiels fur la lame que l’on veut aimanter; en forte que ie pole auftral S de la barre NS, ne foit qu’à une ou deux lignes du pole boréal N' de la barre N’S’. Dans cetre fituation, l’on fait glifler les deux aïmans d’une extrémité de la lame à l’autre: lorfque la lame a peu d’épaifleur & qu'elle n’a que fept à huit pouces de longueur , il eft rare qu’elle ne foit pas aimantée à faturité, après fept à huit frottemens un peu lents fur chacune des faces : l’on s’aflure que la lame eft aimantée à faturité, lorf- que fufpendue horizontalement , elle continue à faire le même nombre d’ofcillations dans le même tems, quelque nombre de fois qu'elles foient de nouveau frottée , ou quoique vous em- ployez d'autres aimans que les premiers. L'on s'eft fervi, dans voutes les Expériences, d’un acier très- pur & du même grain : toutes les lames ont été tirées d’une {cie d'Allemagne, d’une épaifleur à-peu près uniforme: mais lon a eu foin de la planer long-tems à froid fous le marteau; l'Expérience a appris que c’eft le feul moyen d'avoir des réful- tars fuivis , & d’evirer des inçgalités qui tiennent à la diffimili- tude de la pofition des parties, & dont aucune hypothèfe ne peut rendre compte. Lorfqu'une lame étroit aimantée à faturité, on la fufpendoit de champ horizontalement, par une foie tres-flexible, à l’ex- trémité de laquelle éroit attaché un peu de cire que l’on col- loit à certé-lame : l'on s'étoit afluré pat des Expériences , que l’on expliquera plus bas, que la torfion de la foie ne pouvoit point influer fur le cemps dés ofcillaions : l’on comptoit avec Tome 1X, À a Frc. virz, 186 RE.C'H ER ÇGH ESS foin le cems que la lame employoit à faire 20 ofcillations ; chaque opération étoit répétée deux fois, l’on coupoit enfuite un pouce de chaque côté de la lame; le reftant étant aimanté à faturité , l'on faifoit les mêmes opérations que fur la pre- miere lame. La lame ofcilloit dans un boëte bien fermée, pour que les courans d'air qui régnoient dans la chambre, ne troublaffent oint les Expériences : cette précaution eft fur-rout indifpen- fable, lorfque l'on a du feu. Expériences pour déterminer la Force aimantaire des Lames, eu égard à leur longueur. Première Expérience. 27. La lame avoit trois lignes de large: une longueur d'un pied, pefoit 288 grains; elle faifoit fes ofcillations; SAVOIR, Pour une longueur de 16 pouces, 20 ofcillations en 231 ea Tapie Drame Al MR nee 180 MONTANT A PT Va 154 CARE AE CEE AAA edité 126 (SRE Le TATAT AA À DIS HRÈUNE 98 At edel- nia DSP TEE 80 Seconde Expérience. La lame avoit huit lignes de large : une longueur d’un pied peloit 976 grains, elle a fait fes ofaillations; SAVOIR, Une longueur de 16 pouces, 20 ofcillations en 254” Le sé bUo) este: eee ares ete (tie 202 PNR LEE TROP LYC en 154 SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. ‘187 Troifième Expérience. Cette lame avoit douze lignes de large; une longueur d'un pied pefoit 110$ grains; elle a fait fes ofcillations; SAVOIR, Une longueur de 16 pouces, 20 ofcillations eh SNO 12 ie ARR ICE PTE. 20 Sue UPS PRIE as DR TELS 3 Ab euh bits: MO Reéfulrat de ces trois Expériences. Dans la Premiere Expérience, l'on à pour une lamé de 12 pouces de longueur & de 3 lignes de large ; 20 ofcillations en 180”. Dans la même Expérience , l'on a, pour une lame de 4 pouces de longueur , & ayant d’ailleurs les mêmes dimenfions que la précédente , 20 ofcillations en 80”: ainfi, la diffé pi du temps pour 20 ofcillations dans ces deux lames, eft C 100 . : Dans la deuxieme Expérience , lon a, pour une lame de 8 lignes de large & de 12 pouces de longueur, 20 ofcillations en 202”: pour cette même lame réduire à 4 pouces, l'on trouve 20 ofcillations en 104//: ainfi, la différence du temps, Pour une diminution de longueur égale à 8 pouces , fe trouve pour 20 ofcillations 98”. ANNE … Dans la troïfieme Expérience , l’on trouve, pour une lime de 12 lignes de largeur & d’un pied de longueur , 20 ofcilla- tions en205$”: lona, par la même Expérience, pour une lame de 4 pouces, 20 ofcillations en 11 9”, ce qui donne, pour une diminution de 8 pouces; dans, le tems de 20;ofcillacions ; une diminution de 95”. : En comparant aétuellement ces trois réfultats , l'on voit qu'une diminution égale dans les lonoueurs, donne, à peu de Aa i 188 RIENGANE RCE ETS chofe près ; la même diminution dans le tems des ofcilla- tions : ainfi , la largeur des lames n'influe que très-peu fur cette diminytion. Si lon compare , dans chaque Expérience particuliere , Ha diminution du teins des ofaillations, avec le raccourciflement des lames, l'on verra que ce tems décroît , à peu de chofe près , par des quantités qui font proportionnelles aux diminu- tions des lames. L'on voit encore , par ces Expériences, que le tems total des ofcillations eft plus grand , à épaifleurs & longueurs éga- les pour les James larges que pour les lames étroites. C’eft ce qui réfulte évidemment de la premiere Expérience comparée avec la troifieme ; c'eft ce que la théorie avoit annoncé : la deuxieme Expérience comparée avec la troifieme , femble donner un réfultat contraire ; mais, fi l'on fait attention que la deuxieme lame, quoique plus étroite que la troifieme , eft proportionnellement plus pefante , & par conféquent plus épaifle, l’on verra qu’elles donnent un réfultat exaétement con- forme à la chcorie du Magnctifme, ji ai Quarrième Expérience. . 28. L'on a cherché à déterminer dans cette Expérience, fi en augmentant , l'épaifleur des lames , l'incrément du tems des ofcillations , continueroiït à être proportionel à l'accroifle- ment des longueurs de la lame , comme dans les articles pré- cédens. La lame dont on s’eft fervi dans cette Expérience ; étoit de la même nature que les précédentes : elle avoit trois lignes de large, comme celle de la premiere Expérience; mais fon Cpaifleur étoit un peu plus que triple, & les 12 pouces de lon- gueur pefoient 9 36 grains : elle a donné fes ofcillations; SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 18ÿ SAVOIR, Pour une longueur de 12 pouces, 20 ofcillations en 229" DOME RNA, 208 DONNE ee 2176 VERS RME LPO HET ON TEL AMEN CUP ON JE à den melon bo ciele ot 128 Réfuliat de cette Expérience. Si l'on retranche dans cette Expérience du temps qu'une lame de 12 pouces, emploie à faire 20 ofcillations ; le temps qu'une lame de 4 pouces de longueur , emploie à faire les mêmes 20 ofcillations; l’on trouve 101", quantité prefqueexac- tement la même que celle que nous avons trouvée par la pre- miere Expérience. Ainfi, il paroiît que l’épaifleur ne change rien à l’accroiflement du tems des ofcillations , qui eft toujours proportionnel à l’accroiflement des longueurs. 29. En taflemblant actuellement les réfultats de toutes les Expériences qui précèdent , on verra facilement que le tems : T, d'un certain nombre d’ofcillations , pourra toujours êtte repréfenté pour les lames d’une épaifleur & d’une largeur uni- forme, par une quantité ( À + #7/) ou À exprime une fonc- tion de l'épaifleur & de la largeur, & (7711) eft le produit d’un coefficient conftant ; par la longueur /, la quantité A aug- mentera à mefure que la largeur & l’épaifleur augmenteront : elle fera plus grande pour une verge cylindrique que pour une autre figure. Le coefficient conftant »#, dépendra de la nature de l'acier & du degré de magnétifme dont il fera fufceptible. Ce cocff- cient fera plus grand, à mefure que l'acier ou le fer fera moins fufceptible de magnétifme. Dans les fils-de-fer répandus dans le commerce , l'on trouve moyennement qu'une diminution de huit pouces dans la longueur , produit une diminution de Jo : RECHERCHES 120 pour 20 ofcillations: cherchons aétuellement à détermi: ner la quantité À. Expériences relatives à la largeur des Lames. LA Cinquième Expérience. L'on a cherché ; dans cette Expérience ; à trouver un rap- port entre le tems des ofcillations & la largeur des lames: Ton à pris en conféquence une lame de 4 pouces de longueur & d'un pouce de large , que l'on a divifé exaétement en # de ligne: cette lame , d'une épaifleur uniforme, pefoit 378 grains; après avoir été aimanté à faturité , elle a été fufpendue comme les lames des’ articles précédens , & l’on a déterminé le tems où elle faifoit 20 ofcillations. L'on a enfuite retranché une par- tie de fa largeur ; la païtie reftante a été aimantée de nou- veau à faturité , & lon à mefuré le tems qu'elle employoit pour faire 20 ofcillations , continuant cette opération en dirni- nuant peu-à-peu la largeur de la lame, l'on a eu; SAVOIR, A I. Effai, pour une Lame de ?= de ligne de large, 20 ofcill. en 114" .. 65° RIAD EE Se nalle ae do at l te Molelsielelnle eiete |oie RE ee Nes LOIR CRETE LT suceuse siens o do qe PR ME le Noa e es) street OA TE Net oo ss Delmas pos leN Re sleleisleeie ele cspies sceller AU) V nor drossesnes È LACS beton esse er 08 418 119 one Réfulat de cerre Expérience. L'expreflion générale du tems des ofcillations , ef repré- fentée par la quantité (A+ »/): or une diminution de 8 pouces dans li /lonpueéur des lames , produit (Æxp. 1 , 2, 3 ,) pour 0 ofcillarions , üne diminution de 98”; quantité àpeu-près môyenne entre (roo & 9$,) donnée par la premiere & la tioïifieme Exp. Ainfi, la lame ayant ici 4 pouces de longueur, ml fera égal à 49”, & l'expreflion générale deviendra T — (A+49/ ) : ainfi, en retranchant par-tout , dans cette Expé- es . SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. on rience, 49” du tems des 20 ofcillations, l'on aura la quantité A défignée à la fin de chaque eflai. Mais nous venons de voir, dans l'Article précédent , qua cette quantité eft égale à une fonction de la largeur & de l’é paifleur : ainfi, fi cette fonétion peut être repréfentée par un {eul terme , l'on aura A—»L-E", 7 étant un coefficient conf- tant, L# une puiflance y de le largeur, & E' une puiffance E de l'épaïfleur ; & puifque dans nos Effäis, l'épaifleur eft conf- tante , nous devons trouver les valeurs de À proportionnelles à L#: ainfi, en comparant deux lames d’une différente lar- geur L & L’avec les quantités qui leur correfpondent, À & log (* ‘A’, lon aura À : A’:: Lé!L'#, d'où £ (+): & u — 28 (x), : og (x) Il eft facile aétuellement, en fubftituant à la place de À, & à la place de L, leur valeur numérique donnée à chaque Efai, de découvrir la quantité w. l'LNUEE 6 - (Une lame de ?* de ligne de large, donne A — 65” I & V.Effai His lame de À de ligne de large, donne A— 19” og (£ Il réfulte de ces deux articles, p — re = 0+49$1: 3 Une lame de 7 de ligne de large, donne A—2 5" log (5) log (5) TL & IL. Effai; il réfulte de ces deux Eflais, u — 0. 6363. L& I. EM: ee lame de *° de ligne de large , donne A — 65” Il réfulte de ces deux Effais, y — = 0:5835. I. &c IT. Eflaï ; il réfulte de ces deux Eflais, # — 0. 5330. Quoique la valeur de w ne foit pas parfaitement égale dans toutes ces comparaifons ; cependant les différences font trop peu confidérables , pour qu’elles puiffent être attribuées à au- te chofe qu'à l'imperfection des opérations; & l’on peut ; fans erreur fenfible pour la pratique, fuppofer u ==, 192 ROPRETH'E R'C'H'E’S Des Expériences pareilles , faites avec des lames de fix & huit pouces de longueur, m'ont donné les mêmes réfulrats, & la quantité w n’a jamais différé de + de fa valeur :. Il ne faut pas, au furplus, efpérer dans ces Expériences une plus grande cxaétitude , quelques parties hétérogènes fuffifent pour produire ces différences. Expériences relatives à l’épaiffeur des Lames. Sixième Expérience. 31. Il n'etoit plus queftion, pour avoir une théorie com- plèce des lames aimantées, que de déterminer, combien leur épaifleur augmentoit le tems des ofcillations, Voici les différens cflais que l'on à fait pour s’en aflurer. 1. Eflai. Une lame de 4 pouces de longueur, de 3 lignes de large, pefant 310 grains, a été aimantée à faturité; elle a fait 20 ofcillations en 136” ,ce qui donne A. .......... JOre 2." Effai. L'on à fait limer la furface de [a lame de l'Eflai LA 14 - . . LA précédent , fans rien diminuer de fa largeur : cette lame ré- duite à 200 grains & aimantée à faturité, a fait 20 ofcillations Q [14 en 11275 CEUUdORNE A A RAM RE RAS ner 63" 3." Eflai. Réduite par la mème opération , à 104 grains ou . : 1 . 1 : : au tiers de fa premiere épaiffeur , elle a donné 20 ofcillations [14 En 79/7) D'OHSARPIN EAN ENT TERRES Me le 4% Eflai. Réduite fur la meule à 64 grains, elle a donné 10 élellations en 70 1d'où ALMA PALULILIR rie * 5." Eflai. Réduite à 35 grains, a fait 20 ofcillations en 60”, ° 7 {1 ilréfulce A..... EP PAT 2 2e CNE EP Lt Réfültat de cette Expérience. Les épaifleurs des lames font entrelles, dans ces cinq Efais ; à-peu-près conune les nombres 3,2,1,5,:;, la quantité À çorrefpondante; SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. “os correfpondante, eft exprimée par les nombres 87, 63, 30,21, 11, qui diffèrent crès-peu d'être dans le même rapport que les premiers : ainfi, l’on en peut déduire, que la quantité À croit proportionnellement à l'épaifleur ; & la formule générale T—A+m/, qui exprime le temps d'un certain nombre d’of: cillations, deviendra T —(7L'E +7). LAMES COMPOSÉES: 32. Pour pouvoir fe rendre compte. plus exaétement de lac- cord de la théorie du Magnétifme avec l'Expérience: pour pou- voir pénétrer dans l'intérieur des barres aimantées, l’on a joint plufieurs lames qui fe touchoïent exaétement par tous les points de leur furface. Elles étoient fixées enfemble à leurs extrémités & à leur centre, par crois petits liens de foie très - légers: les faïfceaux ainfi compolés, ont été aimantés à faturité:; on les a fufpendu & fait ofciller , pour avoir leur degré de magnétifme; en décompofant enfuite ces faifceaux , l’on a fait ofciller en par- ticulier chaque lame, pour pouvoir les comparer l’une à l'autre. Voici le réfultat de quelques-unes de ces Expériences. Septième E xpérience. 33. 1.* Effai. Une feule lame de quatre pouces de long ; trois lignes de large, pefant 108 grains, a donné 20 ofcilla- fans enSorsdeuA ie. sos malles ts - More se RL. 2.% Effai. Deux lames des mêmes dimenfions que la pre- micre, ont été réunies le plus exaétement'qu'il a été poflible, elles formoïent une feule lame qui avoit le double d’épaifleur de la premiere, & qui pefoit 218 grains; elle a donné fes 20 MEGiQUs, en 1 LOL nee à Mol ce eee léStS 3. Effai. Trois lames réunies de la même maniere que les $ eut L é . Le [74 deux précédentes , ont donné leurs 30 vibrations en 139} A ren En Ne en. PALIN Tome IX. Bb Du deoré de magnétifme de plufieurs Lam. jointes enfem- ble. 194 RÉCHERCHES 4° Effai. Cinq lames réunies, ont donné leurs 20 afcillations LA œh Do MON... :! cul urheut cpu lier LE 5." Eflai. Huit lames réunies, ont donné leurs 20 ofcillations CHR Où À. 0 RME ee ae De Met cie DPI Réfultar de cette Expérience. Il fuit de cette Expérience, comparéeavec la fixième, qu’un faif- ceau de lames prend à-peu-près le même degré de magnétifme, qu'une lame feule de la même figure, & du même poids, con- féquemment que la quantité À , eft proportionnelle aux épaif feurs. C'eft ce qui réfule encore ici des trois premiers Efais. Mais fi l'on compare le premier & le -cinquieme Eflai , l'on trouvera dans la quantité A=»L#E", que »—0:7783, quan- tité plus petite que l'unité : d'où il paroït qu'il faut conclure, que lorfque l'épaifleur eft très - confidérable , rout étant égal d’ailleurs, la quantité À .croït dans un moindre rapport que les épaiffeurs ; mais cette remarque, quifemble devoir introduire un fecond terme dans la fonétion des largeurs & épaifleurs qui repréfentent la quantité À , ne peut influer que fur les barres d’une très - grande épaifleur , & non fur les lames de Bouflole , que la théorie du Magnctifme nous a appris devoir être larges & légères. Huitième Expérience. 34. Pour avoir atuellement la force aimantaire des diffé rentes lames réunies dans l'Expérience qui précède, jai dé- compofe les faifceaux. -& jai fa .ofciller en particulier chaque Jame. 1. Eli. Un faïfceau de trois lames , qui «donnoit fes 20 ofcillations en 139/ , ‘ayant ‘été décompole , les deux lames des furf:ces ont donné leurs 20.ofcillations, l'une en 100! ; l’au- tre-en 1145 da lame du cengre n'a donné prefque aucun figne de magnétifme, SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 195 2. Eflai. Le faifceau de huit lames, qui donnoit {es 25 ofeil- lations dans 242” , étant décompofé, a donné pour chaqu lame particuliere , le même nombre d’ofc:lations dans l'ordre qui fuit : * I. Lame, de la furface, 20 ofcillations en 9r”! PTE CRE NOTE LA Jde das va BiDE NP M LE ee bétere lc ot TR ONE as EEE ES sblartletid: HI A CUT rie Het at Sa sa AREA RENE L DUC NE ia EC VAE 07 és polés renverfes a, Lure TP de" Er furace PMP UPS DO 3." Effai. Comme j'ai pu foupçonner que la matière magné- tique étoit dans les deux Effais qui précèdent, dans une fitua- tion forcée, parce que les faifceaux ont été décompolés quel- ques heures feulement après avoir été aimantés. Voici ce que l'on a fait pour connoître le magnétifme de chaque lame, lorf- qu'elle feroit parvenue à un état ftable. L'on à pris un faifceau formé de cinq lames, dont on avoit chaflé avec foin tout le magnétifme, avant de les réunir. L'on, a enfuite-aimanté ce faifceau à faturité ; il a donné 20: ofcil- latibns en 190"; l'on a laiflé ce faifceau pendare deux mois fans le défunir , pour que , fi la matiere magnétique {e- trou- voit dans un état forcé , elle eût le rems de fe diftribuer, fuivant une fituation naturelle : au bout de deux mois, l'on a cherché quelle étoit la force magnétique de chaque lame, & voici ce que l’on a trouvé. : Toutes les Lames étant réunies, 20 ofcillations en 196” i Le Faifceau de cinq Lames décompolfé. 1. Eame de la furface, 20 ofcillations en ....... 10$ ‘ d reel o : sn 340 RANRIG TRADE TONI LRO NACRE NEIL 320 AC 'deteféface snif, 019 LE HR HR, JL, 98 Sur Ja Force magnétiq. dans les parties inté- rieures des La- mes, 296. ROC AE RCITE.S Réfultat de cette Expérience. La force aimantaire de chacune des lames des Expériences précédentes , étant , en raïfon inverfe, du quarré des tems de leurs ofcillations , il en réfulté que la force magnétique des lames intérieures, eft beaucoup moindre que celle des furfa- ces; il arrive même quelquefois, en décompofant les faifceaux que les poles d’une ou de plufieurs lames font renverfés ; c’eft ce que J'ai remarqué dans le deuxieme Eflai pour la feptième lame. it -- Le dernier Eflai, qui a été fait avec beaucoup de foin, nous prouve que la force magnétique des parties intérieures des barres aimantées , eft prefque nulle par rapport à la force ma- gnctique des furfaces. L'on doit cependant obferver , que le momentum magnéti- que des lames intérieures , n’eft probablement pas le même, lorfque les lames font réunies; &, lorfqu’elles font divifees, Jai prefque toujours trouvé , en calculant le #70mentum ma- gnétique de chaque lame en particulier, que la fomme de ces momentum ; étoit plus grande que le #omentum du faifceau avant la défunion ; ce qui provient probablement de ce que l'état magnétique de chaque lame , dépendant de Paétion mu- tuelle de toutes les lames qui compofent le faifceau , cet état change lorfque les lames font défunies. Neuvième Expérience. 35. Entre deux lames de huit lignes de largeur & de quatre pouces de longeur pefant chacune 244 grains, l’on a inféré une troifieme lame des mêmes dimenfions , mais divifée fui- ‘ SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 197 réfultat , qui m'a paru intéreflant pour la théorie du magné- tifme. Le faifceau a donné 20 ofcillations en 172”. En décompofant le Faifceau. Les lames de huit lignes de chaque furface, ont donné leurs 20 ofcillations en 123”. Les lames de 2 lignes qui formoient les bords de la lame centrale, 20 ofcillations en 124”. La lame centrale de 4 lignes de large, a fait fes 20 vibrations en 128/; mais fes poles étoient dans une fituation contraire à ceux du faifceau : en forte que fon extrémité boréale étoit placée dans l'extrémité auftrale du faifceau. Réfultat de cette Expérience. Il fuit évidemment de cette Expérience, qu'il peut arr ver fouvent que les parties centrales des barres aimantées, aient une force d’un nom contraire à celle des parties qui les avoifinent. à 36. Nous avons fait un grand nombre d’Expériences du même genre, foit en joignant plufieurs lames pour augmenter les épaifleurs, foit en joignant les mêmes lames, fuivant leur largeur. Nous avons aufli compofé des faifceaux, avec des fils d'acier très-fin : mais toutes ces expériences, qui nous ont paru propres à éclairer la théorie du magnétifme, n'ont pas un rapport aflez dire& , avec le. fujet principal de ce Mémoire, pour trouver leur place ici. Il en eft de même de toutes les Expériences que nous avons pu faire avec des lames, que l’on aimantoit d’abord à faturité, chacune en particulier, & dont on formoit enfuite des faifceaux , lorfqu'on venoit à ies défunir, la force magné- tique des lames centrales avoit prefque difparu , ou au moins n'étoit guère plus confidérable que dans les Expériences de Art. XXXIV. 158 RECHERCHES Réflexions fur la Formule générale T — (mL'E+n). 37. L'on peut aflurer que la formule T—"L'E+ n/a été confirmée par un grand nombre d'Expériences, & qu’elle a toujours annoncé les réfultats d’une manière aufli exaéte, que l'on peut l'attendre dans la pratique. Nous allons aétuellement la comparer avec les formules du mouvement ofcillatoire, déterminée dans l'Art. vir, & nous en tirerons les conféquences qui peuvent avoir rapport à notre objet. : d'un fur TT autre côté, nous avons, pour les lames d’une largeur & d'une épaifleur uniforme, dont nous fuppofons la denfité égale à l'unité, fur =: fubftituant ces deux valeurs, & faifancr=2(180°), 7.LE./ FIOUS AUTONS, JO per = =— 0 S\ (mL'E+n1) Nous avons trouvé (Art. 11.) f@ur—(180°) Voici ce que cette équation préfente: 38. Le momentum de la force aïmantaire four, croîtra avec la longueur de la lame, & deviendra infini lorfque certe longueur fera infinie, 39. Ce même momentum croîtra à mefure que la largeur L augmentera; & lorfque cette largeur fera infinie, il fera égal à CT ME 40. Si nous différencions cette équation en faifant feulement E variable, nous trouverons, pour le maximum de four, Œ 2mL*dE nl E EE ml'E+nl mLr at. Si lon divife four par la feétion tranfverfle LE, à ét. d'in. SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 4099 Jon aura le momentum moyen de la force aimantaire de chaque fibre longitudinal, dont on peut fuppofer la lame formée ; ce À Jour TE Fe L { qui donnera = 5 > quantité qui augmentera à LE (mLiE+n1) mefure que la quantité / augmentera, qui deviendra infinie avec cette quantité, qui augmentera également, à mefure que L ou E diminueront, & qui fera égale à _ lorfque Lou E feront nulles; ce qui donne le momentum, dans ce dernier cas, proportionnel à la longueur de la lame. L'on retrouve ici la formule de M. Muffchenbroek , qui neft vraie que lorfque L ou E peuvent être fuppofés infiniment petits, ou que la quantité mL'E peut être néglioée; mais encore, dans ce cas, le poids n'entre pour rien dans certe expreflion ; ce qui ft encore contraire à la théorie de cet Auteur, AU 200 RAEICTA ME" R'CHMESS RE EH AP LERE JTE Expériences & Théorie [ur la Force de torfion des Cheveux & des Soies : comparaifon de ces Forces avec la Force magnétique : de la Réfiflance de l'Air dans les Mouvemens très-lents : Conftruc- aon d'une nouvelle Bouffole de Déclinaifon, propre à obferver les Variations diurnes. 42. Tous LES MOYENS que l’on peut employer pour fufpendre une Aiguille de déclinaïfon , entraînent néceflairement des inconvéniens. Si on la fufpend par un fil de foie, ou par un cheveu , il faudra toujours que la bouflole emploie une certaine force pour les tordre; & fi la foie eft fuppofce cordue, lorfque l'Aiguille fera fur fon véritable méridien, la foie fera un effort pour l’entraîner dans une autre direétion. Si Aiguille eft portée , par le moyen d’une chappe, fur la pointe d'un pivot, quelque parfaite que foit cetre chappe, quel- que dure que foit la pointe du pivot, la chappe preffera de route la pefanteur de l'Aiguille la pointe du pivot : or toute preflion engendre du frottement; ainfi, dès que le momentum, de la force magnétique, fera égal au momentum du frottement, lAi- guille fera fans action, pour fe rétablir dans fon méridien magnétique. Outre les difficultés, que les moyens de fufpenfion préfentent, il en eft une autre qui provient de la cohcfion de Fair. Tout fluide a une certaine tenacité entre ces parties ; ainfi, pour qu’un corps, qui y eft plongé, puifle changer de pofition , il faut né- ceffairement que la force qui le tire de fon état de repos, foit plus confidérable que la réfiftance que cette tenacité lui oppotfe. Mais SUR LES‘AIGUILLES AIMANTÉES. or Mais nous verrons tout-à-l'heure que la réfiftance dûe à la co- héfion eft peu confidérable par rapport à la force aimantaire ; & quelle peur être négligéc. De la Force de torfion des Cheveux & des Fils de foie: 43. Nous ne pouvons citer ici les Expériences d’aucun Au- teur : mais-celles que nous allons rapporter font fi fimples, fi faciles, à répéter, que Jelpère qu'elles mériteront quelque confiance. Première E xpérience. . Jai fufpendu (F1G. 1x, ) avec un cheveu de fx pouces de longueur, une pièce de cuivre ronde de huit lignes de dia- mètre, & pefant $o grains, de manière qu'elle étoit foutenue par fon centre C, & que fon plan fe trouvoit horizontal. J'ai fait tourner cette plaque autour de fon centre C, fans la dé- ranger de fa fituation horizontale ; le fl À C reftanr toujours vertical; abandonnée À elle-même, elle a pris, en ofcillant,, un Mouvement de rotation, autour de fon centre C. L'on à me- furé le temps de. chaque ofcillation, & l'on a trouvé que foit que cette plaque fit une, deux & jufqu'à fix ou fept révolutions par ofcillation , le temps de chaque ofcillation étoit conftant & ésal\aner 2 Réfulta: de cette Expérience. Lorfqu'un corps fufpendu à un fil ou à un cheveu, eft abandonné à lui-même, il parvient bientôt à un état de repos, dans lequel le fil, qui le foutient ,ne fait aucun effort pour le faire pirouetter dans aucun fens, Cet état eft ce qu'on peut appeler la fituation naturelle du cheveu. Mais fi le centre de gravité reftant immobile, l’on fait pirouetter le corps autour de ce centre; à mefure qu’en tournant il s'éloigner: de la fituation, où il Étoit dans fon état de fepos , le cheveu fe tordra, & en fe tordant il fera un effort pour fe rétablir dans fà fituation natu- relle : or nous trouvons, dans cette Expérience, que cet cffort Tome IX, Ce 202 RAEMONEE R IC'H'ESS produit des ofcillations dont le temps eft conftant , quelque foit l'angle primitif de révolution : ainfi, les forces de torfion, qui ramènent un corps à fa fituation naturelle, font néceflaire- ment proportionelles à l'angle de torfion. Seconde Experience. 44. L'on a cherché dans cetre Expérience fi le poids du corps foutenu par le cheveu , influoit fur la force de torfion. Voici ce que l'on trouve. I. Essar. Une feule plaque des mêmes dimenfions que dans lExpérience précédente, fufpendue à un cheveu de fix pouces, donne une ofcillation en -<” IL. Essai. Sous cette première plaque, l'on à collé avec un eu de cire une feconde plaque abfolument femblable à la première : les deux pièces réunies ont fait une ofcillation en =”, IIL. Essar. Une troifième plaque, réunie aux deux autres, a 274/ donné chaque ofcillation en =”. IV. Essar. Une quatrième plaque réunie de même que les récédentes, donne chaque ofcillation en =”. ; q 3 V. Essar. Une cinquième réunie donne chaque ofcillation 35// VI. Essar. Une fixième pièce en VIL Essai. Une feptième en &”. en 39/4 fan . Réfulrat de certé Expérience. La force de torfion, étant en conféquence de l'article qui précède, proportionelle à l'angle de torfion. Si la différence des oids- ne change rien à cette force, elle fera la méme dans chaque Eflai, & TT fera proportionnel à fu7°, T étant le temps d'une ofcillarion, & fr° la fomme des produits de tous les points de la plaque, par le quarre de leur diflance au SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 203 cehtre de rotation C, mais les plaques étant toutes égales, fur eft comme le nombre des plaques employées dans chaque effai; ainf, il ne s'agit plus que de favoir fi TT eft proportionnel au nombre des plaques. Le I. Eflai, comparé avec le fecond, donne, par la théorie, pour le temps des ofcill. de deux pièces , 22:6/; l'Exp. 22" Les I. & HT. Eflais, donnent, pour lathéoric,27:7 +... 27 RIVE BR er arte a dede de om à 32. ve... 30 MOV ES tn is ee d'étage ee Eee ere Le 35-8 CINE 35 L&VI................ EPRALEURE LISTNANPERCNE RS 39 EN ITS RE craie slale sante rate) à 42-33 ve... 42 L'on voit, par ce tableau, que lexpéricnce & la chéorie ont la 4 — DEEE plus grande conformité, & qu’ainfi la mañle des corps foutenus par les cheveux, ou, ce qui revient au même, la venfion de ces cheveux , n'nflue nullement {ur la force de torfion. 2 Il faut cependant remarquer. que lorfqu'on augmente beau- coup le poids des corps, & que les cheveux ou les fils de foie font prêts à fe. rompre , la même loi ne s'obferve pas exaéte- ment ; mais la force de torfion paroi beaucoup diminuée ; les ofcillations ne font plus ifochrones, le temps des grandes eft beaucoup plus confidérable que celui des petites ‘il arrive dans ce cas que le fil, par une trop grande tenfion, perd fon élafti- cité, à-peu-près comme une lame qui ne conferve fon:reflort, que lorfqu'elle eft feulement pliée à un certain point. ? Troifième E xpérience. 45. L'on à cherché à déterminer} dans cette Expérience, fuivant quelle loi augmentation de longueur, dans les cheveux, diminuoit la force de torfion. L Essar.! Un chevew de trois pouces de 1ongueut:, chargé d'une pièce de cuivre, femblable À celles des’articles précédens, à fai chaque ofcillation’en 2 Ceci 204 REICH EIR CH E 5 IL. Essar. Un cheveu de fix pouces de longueur, chargé de 16// la même pièce, a fait fes ofaillations en “”’. IT. Essar. Un cheveu de douze pouces de longueur, en y fufpendant la même pièce, a fait fes ofcillations en 2”. Réfultat de cette E xpéricnce. À mefure que l’on alonge le cheveu , la plaque de cuivre peut faire un plus grand nombre de révolutions, fans augmenter la torfion de cé cheveu. Si, par exemple, on compare la tor- fion de chaque partie du cheveu , lorfque la pièce de cuivre fait une révolution avec un cheveu de trois pouces de lon- gueur , avéc la torfion, lorfque la plaque fait une révolution avec un cheveu. de fix pouces ; la corfion de chaque partie du cheveu fe trouvera double dans le premier cas, de ce qu'elle fera dans le fecond. Il doit donc arriver, fuivant tout ce que nous connoiflons de l’aétion des reflorts, que la réaétion de la torfion doit auffi être double dans le premier cas; aïhfi, les forces de torfion doivent, à révolutions égales, être en raïfon inverfe des longueurs. Mais les formules du mouvement ofcil- latoires ifochrones, nous donne les forces en raifon inverfe du quarré des temps des ofcillations; ainfi, les quarrés des temps doivent fe trouver en raifon directe de la longueur des cheveux. Comparons cette théorie.avec l'expérience. Les I. & IT. Eflais, donnent, pour la théorie, =” +=TExp. xs F, & Miog-misns ru oi Aou), Reset Ex gl 2m mn L'expérience & la théorie s'accordent donc encore ici, pour . / prouver que les forces de corlion font à révolutions égales, en raïon inverfe .des longueurs. des cheveux: Quatrième Expérience. 46. L'on a enfin cherché à déterminer combien le diamètre des cheveux, où des foies homogènes, influoit fur la force dé torfion, Je ne rapporterai pas içi le détail des Expériences que: SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 205 jai pu faire à ce fujer ; parce que la difficulté de mefurer le diamètre d’un cheveu, ou d’un fil de foie crès-fin, & de Saflurer qu'il eft homogène dans toute fa longueur , a fait varier les réfultats; mais l’on a trouvé aflez généralément, en comparant un grand nombre d'Expériences , que pour des foies homogènes & de même longueur, les forces de torfion étoient à révolu- tions égales en raifon triplée des diamètres. L'on a répété ces mêmes Expériences avec des fils de foie, dont on s'eft fervi de préférence, pour fufpendre les Aiguilles de bouflole; parce que l’on a reconnu qu’à forces égales, ils font infiniment plus flexibles que les premiers , & lon a trouvé les mêmes loix que dans les Expériences qui précèdent, Comparaïfon du momentum des Forces magnétiques, avec le momentum de la Force de torfion des Soces. 47. Nous avons vu, dans les Articles vi & fuivans, que-lorf- qu'une bouflole de déclinaïfon eft éloignée -de fon véritable méridien d'un petit angle C, le momentum, de toutes les forces aimantaires, pour la rappeler à fon méridien, eft exprimé par la quantité C/{(pmr), & que le temps des ofcillations eft Jour (180) Je} (TT) Mais nous venons de voir, par les Expériences fur la torfion ; que fi un corps eft foutenu par une foie, dont l'angle de torfion foit C’, l'on aura aC' pour le momentum de la force de torfon; a étant une quantité conftante, & qu'ainfi l'on aura également a) (80)? | FF GED Ainfi, dans l'un & l’autre cas, le temps des ofcillations étant donné par l'Expérience , ainfi que les quantités (/#7°) & (fur), il fera toujours facile de déterminer, pour un angle donné C, le rapport entre le #omentum de la force de tor- fion a & de la force magnétique /(e4r), & de trouver par donné par l'équation pour le temps d’une ofcillation , 206 RAEMENELE RICHES conféquent combien un angle de torfion donné, peut éloigner une Aiguille de fon véritable méridien magnétique. Si nous fuppolons (FIG. ro), que l’Aiguille SCN fufpendue par un fil de foie, & équilibrée horizontalement, eft éloignée de fon véritable méridien B À de l'angle NCA..C, & que l'angle de corfion de la foie qui foutient cette Aiguille cft RACINE. C’; certe Aiguille, arrivée à fon état de repos, eft follicitée par deux forces; favoir la force aimantaire, dont le momentum pour lamener vers A—C/four, & la force de torfion , dont le #omemum eft a C’; & comme il y a équilibre, aC° SLT 3 ; d’où il fuit qur que l'erreur de lAïguille, exprimée par C, augmentera, comme le produit de la force de torfion, par l'angle de torfion , & diminuera à mefure que la force magnétique augmentera. lon trouve l'équation C/@ur = aC, ou C = F Il eft donc facile de fufpendre une Aiguille de manière que la torfion de la foie n'influe que très-peu fur fa pofition, & ne produife que des erreurs infenfibles. Voici comme on peut sy prendre : l'on fufpendra d'abord au fil de foie que l'on veut employer, une Aiguille d'argent ou de cuivre, & l’on fera en forte que, lorfque la foie fera arrivée à fon état naturel, la di- rection de l’Aïguille de cuivre coïncide avec le méridien ma- gnctique : l'on lubftituera enfuite une Aiguille aimantée, du même poids, à l’Aiguille de cuivre, & l’on fera für que la torfion de la foie n'influe que d’une manière infenfible fur la direétion de l'Aiguille; puifque l'angle de rorfion coïncide à-peu-près avec le méridien magnétique. 48. Mis, pour donner à ces principes toute l'étendue qu'ils paroïflent mériter, par l'utlice dont ils nous feront dans la fuite, & par les rapports qu'ils peuvent avoir avec les Arts, l'on va prouver qu'en lufpendant des Aiguilles aimantces à des fils de foie tres-fins non tordus, & fuffifans pour en foutenir le poids: fans fe rompre, quand même l'on fuppoleroit l'angle de torfion SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 207 de plus de 100 degrés avec le méridien magnétique ; la force de torfion feroit encore f peu confidérable , par rapport à la force aimantaire, qu'elle ne produiroit encore que des erreurs infenfibles. Cinquième Expérience. 49. Un fil de foie, tel qu'il fort du cocon, a fupporté, fans fe rompre, un poids de 200 grains. Pour déterminer le momen- um de fa force de torfon, l'on a fufpendu, horizontalement à ce fil, une petite Aiguille cylindrique de cuivre d'un pouce de longueur, & de fix grains de pefanteur. Le fil de foie, depuis fon attache jJufqu’au point de fufpenfion , n'avoit qu'un pouce de longueur; l’on à fait tourner horizontalement le fil de cuivre autour de fon centre de gravité : abandonné à lui-même > 1a fait fes ofdillations fenfiblement ifochrones en 40”. Réfultat de cette Expérience, Nous avons trouvé, Pour un corps que la torfon fait ofciller / . X ds l'équation at (180°); eh nommant P’ Ja pefanteur de l'Aiguille, & /’ la moitié de fa longueur, l'on aura f{u/7° = p'/? 3 13 o\2 p'£? ——; d'où 4 = 62) —— 35 3£ T Nous trouvons, pour le momentum de la force magnétique, f{eur) = M te en comparant ces deux éaüations. il ! FF TT ? P q ; Leur PPT 2 PUPT en réfulte Aïnfi, fi nous voulons comparer la force aimantaire d’une lame de 4 pouces de longueur, de 3 lignes de large & de 100 grains de pefanteur, avec la force de torfion, qui réfulte de cetre Expérience, nous trouverons que cette lame, aimantée à {aru- -tité, fait 20 ofcillations en 80”; ainfr, nous avons le temps d'une LAURE P TOO IPN SEEN. (40)° > à Glion, 4" 700 7 + ——= "© — {10}; d'où 2 4 2 P' 6 ] 77 I 2 TT 25 ( + 9! EXEMPLE, 208 RPENCYELTE R°CIHME:S l'on trouve /?#! _ © = #92} ainfi, un angle de torfion (Aït. 47) de 26670’, ou de 444°, ne produiroit, avec ce fil de foic; qu'une minute d'erreur, dans la pofition d’une Aïguille de quatre pouces de longueur , pefant 100 grains. Sixième Expérience. 50. L'on a pris un fil de foie de 20 pouces de longueur, & compofe de 12 brins, tels qu'ils fortent du cocon ou de la filière du vers à foie. Ces 12 fils étoient collés enfemble fans être cordus , & pouvoient fupporter , fans fe rompre, un poids de 1800 grains. L'on a fufpendu à ce fil horizontalement la même Aiguille de cuivre que dans l'Expérience précédente : elle a fait fes ofcillations fenfiblement ifochrones dans 29”. Réfultat de cette Expérience. LE 4e Eu La quantité fur? = ——, eft ici la même que dans l'Ex: 38 périence précédente, puifque c’eft le même fil de cuivre que la force de torfion fait ofciller: ainfi, en comparant cette Expérience avec la précédente, nous devons trouver les 720- mentum des forces de torfion, en raïfon inverfe du quarré des temps: ainfi, la force de torfion eftici—a(#)=1:9084 ou double, à-peu-près, de la force de torfion calculée dans la première Expérience : ainfi, un angle de vorfion, égal à 222°, ne produiroit qu'une minute d'erreur, dans la pofition de l’Ai- guille décrite à l’article précédent. Nous voilà donc fürs que la torfion des foies ne peut influer que d'une manière infenfble, fur la pofition des Aïguilles ma- gnétiques qui y feront fufpendues. Refte à déterminer fi la co- héfion de l'air peut produire des erreurs, De SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 209 De la Réfiflance de l'Air dans les Mouvemens très-lents. $ 1. Quelques Auteurs célèbres ont penfé que la partie de la réfiftance de l'air, qui eft conftante & indépendante de la vicefle, étoit une quantité aflez confidérable pour que l'on ne dûc pas la négligertlans les formules du mouvement des corps dans ce fluide. Je vais prouver, je crois, que le w70mentum de certe réfiftance conftante, n’eft qu'une très-petite partie du 710- mentum de la force magnétique d'une lame ; qu'elle ne peut produire que des erreurs infenfibles dans la pofition de la bouf- fole , & qu'il n'y a guère de recherches où lon ne puifle la négliger fans danger. C'eft ce que d’abord l'on peut, ce me femble, conclure de la Remarque qui va fuivre. Si l’on fufpend horizontalement au fil de foie de Expérience précédente, une lame de cuivre , elle s'arrêtera toujours, à quelques degrés près, dans la même direétion : or comme il n'y a ici que la force de torfion qui agifle, & que nous avons trouvé cette force très-petite pour un angle aflez confidérable ; il en réfulte que, puifque cette lame eft toujours ramenée à-peu- près à la même direction, la partie conftante de la réfiftance de l'air ne peut être qu’une quantité infenfible. Mais voici quelque chofe de plus précis. Septième Expérience. 52. Un fil de fer NS (F1G. 11,) de 9 pouces de longueur, êc pefant 24 grains, a été aimanté foiblement. On l’a fufpendu, par fon centre C, avec un fil de foie d’un feul brin de fix pouces de longueur, & dont l'angle de torfion étoit nul : fa force ai- mantaire lui faifoit faire 4 ofcillations en-62”. Comme il n’étoit queftion que de déterminer la partie conftante de la réfiftance de l'air, l’on a cherché à diminuer encore la vitefle des ofcil- lations : c'eft ce qui a été facile en attachant à chaque extrémité de certe Aiguille, un petit poids de $o grains : l’on a collé Tome IX, Dd 210 RUEIG'HMELRIGIENE"S enfuite au fl de fer un reétangle abcd de papier, d’un pouce de large, & de huit pouces de longueur. Dans le premier. Efai le plan du papier étroit horizontal; dans le fecond, il étroit vertical : tout le fyftéme faifoit 4 ofcilla- tions én 155”; ce qui donnoit un mouvement très-lent dans les petites ofcillations : l'on a déterminé, dans les deux Effais, en faifant ofciller cette Aiguille , de combien l'angle décrit diminuoic à chaque ofcillation , depuis le commencement du mouvement jufqu'à ce que les ofcillations fuffent infenfibles. 1. Essar. Le plan du papier étant horizontal , lAïguille éloi- gnée de 2.° de fon véritable méridien magnétique, ........ ER arrivée à 1° 45° en 2 ofcillat. 1230 -ME2 A LS 2 1 Ho ASULRUE 30 +. 4 1: 4 o .. 6 ou 8 ofcillat. IL. Essar. Le plan du papier vertical : pe 27250 lenevib. D 207002 so ee 20...4 10...4 O...4 ou 6 Vib. Réfulrar de cette Expérience. Le fil de fer, dont on s'eft fervi dans cette Expérience, ofcille en vertu de la force aimantaire. La torfion de la foie eft nulle; les arcs décrits à chaque ofcillation, décroiflent par la réfiftance que l'air oppole au mouvement : or nous avons trouvé (Art. 1x), que lorfqu'une Aiguille ofcilloit en vertu de la force aimantaire, SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 211 fi elle éprouvoit une réfiftance dont le momentum fût une quantité conftante À, l'on auroit à chaque vibration, pour la différence des angles décrits (B—B')— 2 À : /{ow r)s" ainits fi l'on fuppote que lorfque le fil de fer ne s'éloigne plus en of. cillant que de 30’ de fon méridien, il éprouve pour lots une réfiftance conftante. L'on verra que puifque , dans le premier Efläi, l'on diftingue encore 1$ ofcillations jufqu'au point de repos, nous avons 2 minut. de perte à chaque ofcillation : ainfi, À: four=—t'; quantité qui exprime (Art. 6) l'erreur que peut produire la quantité À. Si nous comparons actuellement le #0mentum magnétique de cette Aiguille , que nous avons aimantée très-foiblement, avec le momentum magnétique d’une lame de 4 pouces de lon- gueur , 3 lignes de large, 100 grains de pefanteur, nous trou- verons que la quantité A. pourroit à peine produire, dans la direction de cette Aiguille, une erreur de $ à 6”, quantité que lon peut négliger. Si l'on veut avoir la réfiftance qu'éprouve le plan du papier lorfqu'il eft vertical, l'on trouvera, par des raifonnemens fem- blables à ceux qui précèdent, que, puifqu'il fait r1 ou 12 ofcil- lations lorfqu'il a commencé à vibrer à 30’ de fon méridien, la réfiftance de l'air eft encore infenfible dans ce cas : il paroît même s'enfuivre que, de quelque manière que le plan foit placé, Par rapport à la direction de fon mouvement ; [a réfiftance conftante eft à-peu-près l même, & que la différence que l’on trouve entre le premier & le deuxième Eflai, eft dûe à la petite vitefle dans ces deux Effais. 53. En faïfant ofciller différentes Aiguilles avec des petits plans de papiers, comme dans l'Article précédent, & en éten- dant le mouvement ofcillatoire jufqu'à 10 où 12 degrés du méridien magnétique, l’on 2 eu des obfervations qui, comparées avec les formules du mouvement ofcillatoire, nous ont paru propres à développer la théorie de la réfiftance de l'air, lorfque Dd ji 212 REICH ER IC'HNE"S les corps s'y meuvent d’un mouvement très-lent; mais ce tra- vail n’a point de rapport avec ce Mémoire. Ces Expériences au furplus font très-délicates, & demandent la plus grande attention. L’Aiguille & le fl, qui la fufpend , doivent être renfermés dans une boîte où l'air ne puifle pas enétrer : l'on fait ofciller les Aiguilles, en leur préfentant en- dehors de la boîte le pole d'une autre Aiguille; l'on obferve les petites ofcillations avec une loupe. , Conftruction d’une Bouffole propre à obferver les Variations diurnes. 54. Inftruit que la cohéfion de l'air, & que la torfon des foies ne pouvoit influer que d’une manière infenfible, fur la ofition des Aivuilles aimantées, j'ai fait exécuter une bouflole, fans prefque le fecours d'aucun Attifte, avec laquelle j'obferve, depuis cinq mois, la variation diurne avec une précifion, que lon ne pourra jamais efpérer avec des Aiguilles à chappe fuf- pendues fur des pivots. La (F1G. 12. n.° 1,) repréfente en perfpeétive toutes les parties de la boite où l’Aiguille eft renfermée. La partie À B eft une tige creufe, qui s'élève de 20 pouces au-deflus de la boite HK LM, au milieu de laquelle elle eft fixée , par le moyen d'une traverfe & de deux petits efleliers qui la fou- tiennent. À l'extrémité de cette tige, l’on a mis, en C, une plaque de cuivre circulaire, mobile & percée à fon centre, pour. y recevoir l'extrémité d'un fil de foie qui foutient l’Aiguille. La artie ONQR eft une prolongation de la grande boite HK LM Êe une moindre hauteur. Ces boites font fermées par des chafis garnis de glaces, qui laiflent voir tout ce qui fe pafle dans l'intérieur. SVP eft un fupport de bois, fixé fur la table où la boîte de Bouflole eft pofée. Ce fupport porte à fon fommet V un petit cylindre creux, où une petite lunette d’un champ très-érendu, SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 213 pour que l'obfervateur place toujours fon œil au même point. La même (F1G. n.° 2, ) repréfente une fection verticale de la boîte , faite fuivant fa plus grande longueur, que l’on à foin de placer à-peu-près parallélement au méridien magnétique. abcd repréfente la lame d’acier, ou l’Aiguille aimantée fufpendue de champ *. Elle a dix pouces de longueur, trois lignes & demie de large , & pèfe 250 grains. À fon extrémité boréale 4 , eft foudée une petite lame de cuivre 4 de f très-légère, qui fe termine par une pointe extraordinairement finc. À l'extrémité auftrale eft un petit contre-poids qui embrafle la lame, & sy foutient par frottement ; il fert à établir l’Aiguille dans une po- fition horizontale, Le fil C B eft une foie de 12 brins, pareille à celle que nous avons calculée dans les Expériences qui pré- cèdent : elle a été détordue, ou ramenée à fa direction naturelle, par une Aiguille de cuivre que l’on y avoit d’abord fufpendu; & comme l'attache C eft fixée à un cercle mobile autour de fon centre, il a été facile de faire coïncider l’Aïguille de cuivre, lorfque la foie a été dans fon état naturel avec le méridien ma- gnétique, que l’on connoifloit à-peu-près. En K, ef le limbe d’un cercle qui a 1$ pouces de rayon, & dont le centre eft dans la verticale C G. Ce cercle eft divifé de 16 en 16”, ou plutôt de 4 en 4’, par le moyen des diagonales qui traverfent fon limbe, comme on le voit figuré, n.° 3. La diftance de l'extrémité e f de l'Aiguille au limbe du cercle, étoit fi peu confidérable qu'elle ne pouvoit produire , pour lObfervateur, dans une variation d’un ou deux degrés, que des erreurs infenfibles; mais qu'il eft facile de calculer, parce que cette diftance eft connue, & que l'œil eft toujours dans la même * L’ons’eft fervi, fans choix, de la première lame d’acier qui s’eft préfentée : Pon auroit pu déterminer les dimenfons de cette lame par les équations , Art. 37, & fuivans ; mais la tefiflance que doit occafionner le genre de fuf- penfion que nous employons ici, eft fi peu confdérable , que ce degré de perfection paroît inutile, 214 RÉCHERCHES ofition, L'on donnera, dansle dernier Chapitre de ce Mémoire, l’'Extrait des Obfervations faites avec cette Aiguille. ss. Cette efpèce de fufpenfion n’entraîne, ce me femble, aucun des défauts qu'il eft peut-être impofñhible de corriger dans les Aiguilles à chappe foutenues par les pivots : toutes les forces verticales fe contre-balancent ici néceflairement; & leur réful- tante pafle par la direétion verticale CG qui eft invariable : toutes les forces magnétiques, qui follicicent la Bouflole, étant décompolées fuivant une ligne horizontale, fe trouvent, à caufe du peu d’épaifleur de la lame que nous fufpendons de champ, dans le même plan vertical, & par conféquent ce plan fe diri- gera fuivant le méridien magnétique. Si l’on veut plus de préci- fion , il fera facile de fufpendre cette même lame par l'autre côté de fon champ, en forte que la furface foit toujours verticale. L'on obfervera fi la furface de la lame conferve la même direc- tion; & dans le cas où il y auroit de la différence, la moitié de l'angle obfervé donnera, comme nous le verrons dans le Cha- pitre fuivant, le véritable méridien magnétique. 56. La facilité de conftruire des Boufloles dans le genre de celle que nous venons de propofer, & de leur donner, fans in- convénient de plus grands rayons; l’exactitude qui en réfulrera pour les obfervations des variations de déclinaïfons, doivent, ce me femble, les faire préférer pour toutes les obfervations rela- tives à la Phyfique, à des Aiguilles fufpendues fur des pointes de pivots. Mais, d’un autre côté, comme il fera affez difficile d'adapter de pareilles Boufloles au fervice de la Marine, non-feulement à caufe du mouvement des vaifleaux, mais parce qu'en outre la flexibilité des fufpenfions les laïfle ofciller très-long-temps, pour peu qu'on les éloïgne de leur méridien; ce qui ne peut pas convenir aux opérations des Navigateurs, qui doivent prefque toujours fe faire avec célérité: nous fommes obli- gés, pour futilité de la Navigation, de tâcher de découvrir d'où peuvent provenir les inconvéniens des chappes & des À eo \ SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 215$ pivots, & quels font les moyens de connoitre les erreurs qui en réfultent. ADDITION. Quoique la Bouflole dont nous venons de parler, donne les Obfervations d'une manière plus exacte que toutes celles que l'on a eu jufqu'à préfent, elle fera cependant fufceptible d'un plus grand degré de perfection, lorfque l'on pourra fe procurer des Ouvriers plus adroits que ceux que j'avois à ma difpofition , dans le temps que je travaillois à mon Mémoire: jétois alors chargé de quelques réparations aux Fortifications de la Hougue, petit Fort en Bafle-Normandie, fur les Côtes de la Prefou'Ifle du Cotentin, & je n’y trouvai abfolument aucun fecours. La Bouflole, que je vais décrire dans cette Addition, don- nera les variations, à quelques fecondes près. La Figure première, Planche À, repréfente extérieure- ment, en perfpedive, toutes les parties de la nouvelle Bouf fole ; elle eft formée d'une boîte de deux ou trois pieds de longueur , fur laquelle s'élève une tige creufe verticale, def tince à renfermer le fl qui foutient Aiguille: cette boîte cft pofée fur deux traverfes de cuivre BB, zz; à l'extrémité de ces traverfes, & fans toucher à la boîte, sélèvent verticale- ment les piliers AB, A’B', & :P, z’P'; les deux premiers font kés, dans leur partie fupérieure, par une traverfe Nx, percée vers le milieu par un trou circulaire, qui enfile, fans la toucher, la tige creufe CF : fur cette même traverle, & correfpondamment au même trou, l'on fixe un anneau circu- laire, tel qu'on le voit repréfenté à la Figure troifième: cet anneau, qui à fon centre dans le fl vertical qui foutient l’Ai- guille, fert de cercle de rotation à une alidade horizontale a /; l'alidade porte, à fon extrémité /, une petite lunette microf: Cette Addi- tion n’a été faite qu'après le Jugement DE L?ACA- DÉMIE. 216 RRERGPÉ EE RICGHHIE(S copique, placée verticalement, pour obferver les mouvemens de l'extrémité de l'Aiguille aimantée. La Figure feconde, n.° 1, repréfente une fe&tion de cette même Bouflole, fuivant fa longueur: l’Aiguille ad, eft fou- tenue de champ, par le moyen d'un coulant 4, attaché par fa partie fupérieure au fil de foie vertical ch: à une des extré- mités a de la Bouflole, eft un fecond eoulant a, qui fert de contre-poids pour établir lAiguille dans une pofition hori- zontale : à l'autre extrémité d, l'on foude un petit cadre de cuivre, repréfenté au n.° 2, fur lequel l’on trace un trait très- délié, fuivant la longueur de l’Aiguille, qui exprime le méri- dien magnétique. Au foyer de la lunette eg, l'on a placé, en f, un petit fil de foie, dirigé fuivant le rayon de lalidade, ou dont le centre de rotation, dans les mouvemens de l’alidade, eft le même que celui de lAiguille : en Z, eft le limbe d’un cercle, que parcourt l’extrémité de l'alidade divifce fuivant la mé- thode de Vonius : lalidade exécute les petits mouvemens de rotation , au moyen d’une vis de rappel, comme on le pra- tique pour tous les Inftrumens deftinés à donner les angles avec précifion. il! eft inutile d'entrer dans un plus grand détail fur la conf- truction de cette Bouflole : la boîte Ê place de manière que fa longueur réponde au méridien magnétique, & les varia- tions de l’Aiguille, fe mefurent au moyen de lalidade, en faifant correfpondre le fil de la lunette, avec le trait qui divife le cadre de cuivre, foudé à l'extrémité de lAiguille : au lieu du trait que nous traçons fur ce cadre, il feroit peut- être plus commode de percer ce cadre, fuivant fa longueur , & de fubftituer au trait, un fil de foie, pour pouvoir vérifier la direction de lAïguille , par le renveriement. Si l'on vouloit fe fervir de cette Bouflole, pour déterminer la déclinaifon abfolue , il faudroit placer horizontalement fur l'alidade, SUR LES AIGUILLES-AIMANTÉES. 217 l'alidade, & parallélement à fon rayon , une lunette ordinaire, avec laquelle l'on obferveroit un point à l'horizon. La boîte’ ainfi que les traverfes, fe fixent à quelques corps folides, par plufieurs vis de cuivre, de manière que le tout {oit inébranlable : les piliers font féparés de la boîte; &, entre l'anneau qui fert de centre de rotation à l’alidade, & la-tige verticale, qui renferme le fil à plomb, il y a aflez de jeu, pour que les mouvemens de l'alidade ne puiflent occafionner aucun cbranlement, ni à la tige, ni à la boîte. Tome IX, Ece 218 REEIC"ACE RC E,S CHAUBET TN? Principes généraux fur Pétat d'équilibre des Corps; leur application aux Lames magnétiques | po- Jées fur des Plans équihbrés horizontalement ; ce qui en réfulte pour le Point de fufpenfion, & pour tracer fur les Lames le véritable Méri- dien magnétique: du Frottement des Pivots, & des Chappes: application de tous ces Principes à la Conftruélion des Bouffoles marines. S7: Lorsouux corps libre, follicité par des puiflances quel- conques, eft fuppofé parvenu à fon état de repos; fi routes les forces qui agiflent fur ce corps font décompofces fuivant deux directions , l’une perpendiculaire à un plan quelconque ;" & l'autre parallele à ce plan, la fomme des forces décompolees, fuivant la dire&ion perpendiculaire au plan, fera nulle. Si l’on décompofe enfuite toutes les forces parallèles au plan en deux autres encore parallèles à ce même plan, maïs perpendiculaires lune à l'autre, là fomme des forces décompofees, fuivant cha- cune de ces directions, fera encore nulle, 58. D’un autre côte, lorfqu'un corps libre æft parvenu à fon état de repos, fi l’on fuppofe une ligne quelconque qui traverfe ou non le corps, l'on pourra regarder cette ligne comme un axe fixe, autour duquel toutes les forces, qui follicitent le corps, agiflent pour le faire courner. Or le corps étant en repos, il faut néceflairement que les momentum de toutes les forces fe faffent équilibre autour de cet axe : ainfi, fi l’on fait pafler , dans le plan fuppofe à l'Article précédent, deux lignes perpendiculaires l'une SUR RES AIGUILLES AIMANTÉES. 249 à l'autre, & qu’à leur point de rencontre l’on élève une perpen- diculaire à ce plan, ces trois lignes pourtont être regardées comme trois axes fixes de rotation, & il faut, pour que léqui- Bbre fubfifte , que le momentum, de toutes les forces autour de ces trois axes, foit nul. Ces trois conditions d'équilibre , réunies avec les trois autres conditions expliquées dans l'Article précédent , forment fix conditions à remplir, pour qu'un corps follicité par des puif- fances quelconques, perfifte dans fon état de repos. Comme ces propofitions de Statique font développées dans tous les Livres de Mécanique, je ne m'y arréterai pas. 5 9. Si nous fuppofons aétuellement que ce corps, follicité par des puiflances quelconques, eft en outre preflé fur un des points de fa furface par la pointe d'un pivot; pour lors ayant fait paf fer un plan qui touche la furface du corps dans fon point de pieflion, & clevant au point de contaét une perpendiculaire à ce plan, nous aurons en conféquence des deux propofirions précédentes. L 1.” Que la fomme des forces décompofées , fuivant deux directions perpendiculaires l'une à l'autte, & parallèles au plan de contaét, fera nulle. | 2.° Que la fomme des forces décompofées, perpendiculaire- ment à ce plan, fera égale à la preflion qu'éprouve le point de contact. Si l'on avoit égard au frottement occafionné par la preflion du point de contact, l'équilibre pourroit fubfifter routes les fois que le frottement donneroit une réfiftance plus grande que la réfultante de toutes les forces , qui agiflent parallélement au plan de contaét. Les trois premières conditions d'équilibre remplies , l'on fa- tisfera facilement aux trois autres pour le momentum, en fafant pafler trois axes fixes par le point de conta&t, & le frottement Ee ij ÿ 220 ROME EURIGTAUE:S ne pourra influer fur les conditions d'équilibre des moxentum , de toutes les forces autour de ces trois axes, qu'autant que la pointe du pivot preflera une furface ou plufñeurs points à-la-fois. 60. Appliquons ces propofirions générales à l'état d'équilibre des Boufloles, foit (F1G. 13,) un plan ao be pefant, équilibré horizontalement par le moyen d’une chappe, dont l'axe eft vertical, en forte que le fond de la chappe , qui porte fur la pointe d’un pivot, peut être regardée comme un plan horizontal très-petit : foit pofé fur ce plan une Aiguille aimantée, confiderée comme une ligne, & balancée par le petit contre-poids P, en forte que le plan refte toujours horizontal ; le n.° 1 repréfence le plan, & le n.° 2 fa fe&tion, fuivant le méridien magnétique. Si nous appliquons ici les principes qui précèdent, nous trouverons que toutes les parties du plan font follicitées. par les forces de la gravité. Nous trouverons en fecond lieu que l'Aï- guille eft follicitée par fa gravité & par fa force aimantaire, qui agit fur chaque point, fuivant une direction conftante. Nous trouverons, en,décompofant la force magnétique, fuivant une direction horizontale, & fuivant une direétion verticale, que la force verticale augmente le poids de la partie boréale, & agit dans un fens contraire, ou diminue la pefanteur de la partie auftrale. Nous trouverons en outre, en conféquence du deuxième principe, que l'augmentation de pefanteur de la partie boréale, eft exaétement égale à la diminution de pefan- teur de la partie auftrale; & qu'ainf la preflion qu'eprouve la pointe du pivor, eft égale à la pefanteur de tout le fyftême. Nous remarquerons enfuire que l’aétion du globe terreftre fur Aiguille , ayant, pour tous les points de certe Aiguille, une direétion conftante; fi lon décompofe cette aétion, il en réfulte, pour chaque point, une force horizontale, fuivant le méridien magnétique, & qu'à caufe de l'égalité des fommes des forces, dans les deux fens oppoñes, J’'Aïguille, comme nous l'avons déja expliqué dans le deuxième principe, fe dirigera fuivant le méridien magnétique. SUR LES AIGUILLES. AIMANTÉES. 221 61. Il réfulte encore des principes qui précèdent, que dans * quelques pofitions, & à quelque diftance du centre de rota- tion, que cette Aiguille fe trouve fur le plan horizontal, la force qui la ramenera à fon véritable méridien, lorfqw'elle en fera éloignée d'un angle quelconque , aura toujours le même momentum. Ù Pour le démontrer foit (F1G. 14,) C, le centre de rotation d'une Aiguille SN, pofée comme dans l'Article précédent, fur un plan équilibré horizontalement ; que le centre magnétique de cette Aiguille foit fuppofé en # ; par ce centre foit tirée la ligne a kB, qui repréfente le méridien magnétique; & par le point de rotation C, foit tirée la ligne À B paralelle à ce mé- ridien ; que l'angle N # 4, entre la direétion de l’Aiguille & fon méridien, foit fuppoie 4. Chaque point # de cette Aiguille, eft follicité en vertu du premier principe par une force HE, parallèle au méridien ma- gnétique. Toutes les forces de la partie KN , étant dirigées vers le Nord; toutes les forces de la partie K S, étant dirigées vers le Sud, foit @ la force qui agit fur le point boréal, & 9’ la force qui agit fur le point auftral w’, de l’autre côté du centre aimantaire; l’on aura (en abaiflant des points u, K, #’des per- pendiculaires fur le méridien A B) pour le momentum de la force qui agit fur le point #, autour du centre de rotation C, (ou)-(DK—g9#); &, pour le momentim de la force qui agit fur le point auftral ww, o’u’(DK+9'#'): or les forces étant dirigées fuivant deux dircétions oppolées , il en réfulte, out le momentum total, autour du centre de fufpenfion C, la formule (fo w"— fon) DK+/eu qu +fom.qu; &, comme la fomme des forces auftrales , eft égale à la forme des forces boréales, il en réfulre que le premier terme sé: vanouit, & que la formule f réduic à four (£%), intégré pour la totalité de l’Aisuille, 7 repréfentant ici la diftance (Kz). Ainfi ; une Aiguille aimantée, pofte fur un plan équilibré 222 RYEVCNAIE RICYH: ES horizontalement, fe rérablira toujours dans la direction de fon méridien magnétique ; & lorfqu'elle fera éloignée de cette direétion d'un angle quelconque 6, {on momentum, autour du centre de rotation, fera toujours proportionel à /ën 4, & in- dépendant de la diftance de l'Aïguille, au centre de rotation. 62. REMARQUE. Si la fomme des forces auftrales n’étoit point égale à la fomme des forces boréales , pour lors l’on auroit la pofition de lAiguille, par rapport à fon méridien, dans l'état d'équilibre, en fuppofant la formule précédente, (fa u—fou) Dk+(fou-ku+fe u'-.ku') Dé = 0 ; mais, comme nous avons démontré que la fomme des forces auf- trales, eft Cgale à la fomme des forces boréales, nous ne nous arréterons pas à difcuter ces nouveaux réfulrats. 63. Nous venons de voir qu'il n’y avoit point de difficulté, pour déterminer le méridien magnétique, lorique l'Aiguille aimantée pouvoit être regardée comme une ligne; puifqu’elle prenoit néceflairement la direétion du méridien magnérique. Mais fuppofons aétuellement que cette Aiguille foit une lame aimantée . qui ait de la largeur; & voyons quel angle la direc- tion du méridien magnétique formera avec un des côtés de la lame, lorfque le plan , équilibré horizontalement , fera arrivé à fon état de repos. Sur un plan horizontal , femblable à celui de l'Article pré- cédent , foic pofé une lame aimantée (ABDE) (F1G. 15); que l'extrémité BE de cette lime aie une force boréale , & l'extrémité À D une force auftrale : fi l'on fuppole que la re- fultante de routes les forces boréales eft repréfentée parko, & la réfultante de routes les forces auftrales par g f, les forces de la partie boréale, comme de la partie auttrale, étant toute dirige en vertu du premier principe, fuivant le méridien ma- gnétique ; feront par conféquent toutes parallèles entrelles, & leurs réfulrantes feront paralèlles au méridien magné- tique: ainfi, fi lorfque la Bouflole fera parvenue à fon etat de repos, lon abaifle, du point de rotation C, une per- Es A mn mm ne ts EE SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 223 pendiculaire fur le méridien magnétique , elle fera en même temps perpendiculaire fur la réfultante des forces magnétiques, Or, comme la fomme des forces boréales égale la fomme des forces auftrales, il faut que le bras de levier foit le même pour les deux réfultantes, qui feront par conféquent en ligne droite. L’on voit facilement que dans quelqu'endroit du plan, équi- libré horizontalement , que la lame foit placée , elle prendra toujours la même direétion, pourvu qu'elle foit pofée fur la même face. Si l'on fuppofe aëtucllement que, dans la lame ABDE, la ligne f® des réfultantes reftant immobile, l’on fait tourner toute la lame aurour de cette ligne, jufqu'à ce qu'elle {oit placée fur fon autre face, il eft évident que lorfque certe lame aura fait une demi-révolution autour de l'axe f; fi la lame étroit en équilibre fur fa première face, quant aux forces fituées dans le plan horizontal , elle le fera encore lorfqu'elle aura fait une demi -révolution autour de l'axe fe, & qu'elle fera placée fur l'autre face, repréfentée ici par les lignes pon&tuées À’B'D'E'; ou D D’ repréfente le diamètre ou la projettion du demi-cercle, -parcouru par le point D, qui fe trouve coupé en deux parties égales par la réfultante fo; & AA repréfente le diamètre du cercle parcouru par le poirir A. : Si nous: prolongeons a@uellement les lignes correfpondantes AB, A°B', ainfi que la réfultante ç f, l'ôn verra que ces trois lignes doivent fe rencontrer au même point T, & que langle AT f, formé entre la direction du côté À B dé la Jame, & de la rclultante f8 , fera la moitié de l'angle ATA'..2 © T°nous fera aétuellement bien facile ‘de tracer, far une lame, une ét réponde au méridien magnétique : nous polerons cetté lame fur le plan équilibré horizontalement, & nous obferverons la direction de fon côté AB; nous rénverlerons cette lame fur fon autre face : nous équibbrerons ée nôuveau-le 5lan horizontalement, & nous obferverons Ha nouvelle direction dur côté A BU Lx moitié de l'angle , formé 22.4 RÉICHERCHES par ces deux directions, nous donnera le méridien magnétique: au-lieu d'obferver la direétion d’un des côtés de la lame, lon peut tracer une ligne fur le milieu de cette lame, & obferver fa direétion , ce qui reviendra au même. 64.REMARQUE. Lorfque lAiguille SN fera pofée fur un plan ABDE (F1C.16,) incliné à l'horizon, fufpendu & mobile autour du point de fufpenfon z, l’on déterminera encore faci- lement toutes les conditions d'équilibre. Par le point de fufpenfion ;, faifons pañler trois axes :zF, axe horizontal dans le plan du méridien magnétique; 20, axe horizontal perpendiculaire au méridien magnétique ; zif axe vertical : toutes les forces de la gravité & du magnctifme, doivent être en équilibre autour de ces trois axes. Si nous décompofons toutes les forces magnétiques #R , qui qui agiflent fur chaque point # de l’Aiguille, en une force hori- zontale uQ, & une force verticale QR, fituces l'une & l’autre dans le plan du méridien magnétique, nous verrons que toutes les forces verticales n’ont point de momentum autour de l'axe 1f, puifqu’elles lui font parallèles. Il ne refte donc que les forces horizontales: mais à caufe de l'égalité entre les forces auftrales & les forces boréales, & du parallélifme des forces horizontales avec le méridien magnétique, l’Aiguille prendra néceflairement une direction parallele au plan de ce méridien. D'un autre côté, l’axe horizontal z F, étant fuppofe dansle méridien magnétique, & l’Aiguille SN étant parallèle à ce mé- ridien, les forces horizontales n'auront aucun m0mentum au- tour de l'axe z F, puifqu'elles lui font parallèles ; & les forces verticales magnétiques, auront routes le même bras de levier autour de cet axe. Delà il réfulce, à caufe de l'égalicé entre les fommes des forces aimantaires, dans les direétions oppofées, que ces forces, décompolées verticalement, fe contre-balancent autour de l'axe :F; ainfi, les forces de la gravité de tout le fyftème doivent aufli fe contre-balancer ; & fi l'on fait pañler, par SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 225 par le centre de gravité p , une verticale P À, elle rencontrera # . . . 2 . 14 néceflairement l'axe z F dans un point quelconque Æ, éloigné du point z de la quantité 7, que nous allons déterminer. Il ne refte pour cela qu'à chercher le momentum de toutes ces forces, autour de l'axe horizontal 10, perpendiculaire au mé- ridien magnétique. Nous venons de voir que lAiguille fe diri- geoit toujours fuivant le plan du méridien magnétique : ainfi, les forces magnétiques 4 R de chaque point #, que nous avons trouvé ; par le premier principe, parallèles entr’elles, font dans un plan perpendiculaire à laxe o 7. Ainfi, fi ce plan rencontre cet axe au point O, & fi C eft le centre magnétique de l'Ai- guille SN, il fuit, de l'article 67, que le momentum, de toutes les forces magnétiques autour de cet axe zO, fera le même que le momentum , de toutes ces forces, autour du centre aimantaire C. Ainfi, en nommant H l'angle NuQ, in- clinaifon de l’Aïguille fur la ligne horizontale Q, & I l'angle QzR, formé par la direction magnétique u R, avec cette même horizontale; l’on aura, comme dans l’article 61 , en nommant encore HR=—®p, & cu=—r, l'équation four. — po. mentum magnétique autour de l'axe :0O. Si a eft la diftance du centre de gravité p, au point de fuf- penfonz; fi, de plus, lon fuppofe l'angle p :f=G, le poids cotal = P, l'on aura, pour le momentum de tout le poids du fyftême, autour de l'axe z0, la quantité aP.Æ%; &, à caufo de l'état d'équilibre, où l'on fuppofe le fyftême parvenu, l’on aura, en général, Pa. fin G—/f(ou.cu)./fin(H+1). 65. Voici plufeurs conclufons que l’on peut tirer de cette Remarque. Lorfqu'on a équilibré horizontalement, pour un lieu quelconque, une rofe de Bouflole, chargce de fes Aiguilles magnétiques, la force magnétique, ainfi que la diredion, venant à changer à mefure que l’on change de latitude & de longitude, il arrivera que le plan de la rofe tournera autour de fon centre de fufpenfion , en s’inclinant à l'horifon ; mais ce plan reftera Tome IX. Ff 2216 RABRENFIMENR CHEN ES toujours perpendiculaire au plan du méridien magnétique du lieu où l’on fera arrive. Il arrivera encore que le centre de gra- vité de tout le fyftême, tournera autour du point de fufpen- fion z, en sapprochant ou s’éloignant de la perpendiculaire z f, fans jamais fortir du plan du méridien magnétique ; & que Vangle , parcouru par ce centre de gravité, fera égal à f'incli- mr de la rofe fur le plan horizontal. C'eft ce que démontre la F1G. 17, où le centre de gravité, étant en P lorfque'la rofe eft horizontale, le point z étant le point de fufpenfon, &7e’ une perpendiculaire abaïflée du point de füfpenfion fur le plan de la rofe; lorfque le point P arrivera en P”, la ligne verticale e z arrivera en ze’, & la Bouflole N S en N'S’, l'angle NCN’— eie—P;P'; ainfi, dans Féquation de article précédent, a fin G-P=/(pucu). fin (H4H): fi fr G=AÀ, dorfque la rofe eft horizontale , lon aura A—G—H, & par conféquent @aP:. fin (A —H) = fonc /firH +1): fl force magnétique & fa direction étoient données, l'on auroit ‘facilement l'incli- naïfon -H de la Bouflole. 66. Il ne refte plus, pour compléter cette théorie, que de déterminer les forces coërcitives, qui.dépendent foit du frotte- ment du pivot, fur le fond de la chappe, foit de limperfection de ces chappes : mais lon ‘apperçoit d'avance que le frotte- ment , augnrentant néceffairement avec le poids, & la force magnétique tant, proportion gardée, moindre pour une lame pefante que pour une lameilégère, que d'ailleurs le omentum d'une: lime, pour fe rétablir fur fon méridien magnétique, étant indépendant de fa pofition dans le plan de la rofe; l'on-doit toujours preferer les Boufloles formées avec plufieurs lames le- gères, dont les lignes, du méridien magnétique, font parallèles entrelles à une-feule lame épaifle & pelante. Mais, pour nous mettre à même de dire quelque chole de plus précis , voyons ce que l'expérience -& la théorie nous. donneront furle frotte- ment des pivots. SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 227 Du Frottement des Pivors. 67. Tous les Auteurs qui ont écrit fur le frottement, toutes les Expériences que l’on a pu faire à ce fujet, fe fonc réunies à prouver que la furface entroit pour peu dans les frottemens des corps lévers, & qu'ils fuivoient à-peu-près le rapport des pref- fions. Nous avons cherché à déterminer fi cette même loi fub- - fiftoit , lorfqu’on faifoit glifler des furfaces crès-dures fur des pointes d’Aiguille. Expérience. ABCD(Fic.18,n.° 1 & 2,)eft une petite planche, fur laquelle on a planté trois Aiguilles la pointe en-haut. Cette planche eft mobile autour de l'axe B D, fixé à une table hori- zontale. L'on donnoit par ce moyen, à la planche AB, n°2, l'inclinaifon néceflaire , pour qu'une petite lame a 4, de verre ou de cuivre, pofee fur la pointe de trois Aiguilles, commença à y glifler. Voici les réfultats de quelques Expériences. En fe fervant d'une laie de verre pefant : once, l'on à trouvé que, pour qu’elle comimençât à glifler fur les pointes d'acier, il falloit que le finus d’inclinaifon für le feptième du rayon. L'on a charge fucceflivement cette plaque de 1,2, 3 & 4 onces, & l'on à toujours trouvé qu’elle commençoit à glifler fous la même inclinaifon, La lame de verre, réduite à 100 grains, a fenfiblement donné le même réfulcat. Pour une lame de cuivré jaune , planée au marteau, & très- bien polie, l’on a eu encore des réfultats analogues aux précé- dens : l’on a trouvé feulement que le frottement étoit plus confidérablé entre les pointes d'acier & le cuivre , qu'entre l'acier & le verre. La plaque de cuivre ne commence à glifler fur les pointes d'acier, que lorfque le finus d'inclinaifon eft au rayon ::1:5$- Il fuit de ces deux Expériences, que le frottement de pointes de pivot eft à-peu-près proportionnel aux preflions. Ff ij 228 RIEMGRELE RICIH'E:S 68. Si nous fuppofons à HE qu'un corps, ABDE (FIG. 19,n.° 1,) porte fur la feétion horizontale d'une colonne, dont le plan circulaire eft repréfenté au n.° 2. Si nous fuppofons de plus que le centre de gravité de ce corps répond au point C, & que des forces horizontales agiffent pour le faire tourner au- tour de ce centre, il eft évident que ce corps fera retenu par le frottement de fon plan AE fur le cercle CMH, frottement qui dépendra de la preflion qu'éprouvent tous les points du cercle. Mais la preflion de tous les points de ce cercle, doit être ici une quantité conftante; c'eft ce qui paroît au moins très-probable, en fuppofant toute la furface de ce cercle couverte d’une infinité de petits reflorts égaux, qui, à caufe du centre de gravité placé en C, fe comprimeront également entre les deux plans de conta&. Ainfi, puifque nous avons trouvé le frottement proportionnel à la prefion, le momentum, dû à la réfiftance de chaque point du cercle, fera proportionnel à la diftance de ce point au centre C. Que * exprime le frottement d’un point du cercle, 4 étant la preflion de ce point, le momentum total du frottement autour du point C, fera coal à T2. 360°; &, comme le poids du corps égale ‘a preflion totale du cercle de conta&, lon aura, en nommant P le poids du corps, P—2<%2.360°; ainfi, le momentum total du frottement autour du centre C, fera # CM, où + exprime le rapport de la prefion au frottement: ainfi, lef romentum du frottement d'un corps, qui pirouette fur un cercle, eft en raïfon compofte de fon poids, & du diamètre du cercle de contaét. 69. REMARQUE. Si la verticale , paffant par le centre de gra- vité du corps, rencontroit (F1G. 20, ) le cercle de contrat ABDE dans un point P , autre que fon centre de figure C, l'on trouveroit ainfi les conditions d'équilibre. 1.° La fomme des preflions de tous les points du cercle, e- A LA \ ri » e doit être égale à la pefanteur du corps : 2.° fi l'on fait pañler SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 229 deux axes BD , AC perpendiculaires lun à l’autre , par le point P, dans le plan du cercle de conta&, l'on verra que, puifque le point P eft fuppofé dans la verticale qui répond au centre de gravité, les momentum de la pefanteur de toutes les parties du corps, font en équilibre autour de ces deux axes ; & que par conféquent il faut que les momentum de la réaétion de la preflion qu'éprouve tous les points w, foient en équilibre au- tour des deux mêmes axes. Ainfi , fi l’on abaifle de tous les points du cercle, deux perpendiculaires 49 & w7, à ces deux axes ; fi A repréfente la preflion du point #, & P le poids du corps, les trois équations qui expriment l’état d'équilibre, don- neront, 1. fAm—P; 2° fd.up=0; fAur—0o. Si lon vouloit aétuellement déterminer la réfiftince que le frottement oppoferoit à une force horizontale KR (*), fuppofons pour un inftant que le corps ne peut tourner qu’autour d’un axe vertical fixe, paflant par le point N ; du point N foit abaïflé la perpendiculaire NK fur la direction de la force KR, la réfif tance que le frottement oppofera à un mouvement de rotation horizontal , autour de l'axe vertical N, fera f{.Nx, & le momentum total, autour de ce même axe, fera, en nommant k la force RK, (&-NK— /?:Nx);.il eft clair que, dès que cette quantité fera pofitive, le corps tournera autour de {on axe N; ainfi, fi le corps eft libre, & qu'il n’y ait aucun axe fixe, pour avoir le véritable axe, autour duquel le corps commencera à tourner, il faut, en faifant varier le point N, déterminer fa pofition, en fuppofanc que la quantité (k-NK— JE Nr), eft un maximum; car, par cette opéra- tion , l’on verra facilement que, pour ce point N, ainfi trouvé, la quantité £-NK— f'Nu, commencera à avoir une valeur pofitive , dans le temps qu’elle fera encore nulle, ou négative pour tous les autres points; ainfi, dès que la valeur de A (*) Cerrelforce KR eft une-réfultante, qui n’eft confidérée ici que relative- ment à fon momentum ; il faut la fuppofer formée, de différentes forces égales & oppofées , qui, abitraétion faite du frottement, feroient tourner le corps horizontalement autour de fon centre de gravité ; qui répond au point P. 1) 230 RECHERCHES fera fuppofe donnée, le refte ne fera plus qu'un probléme de Gcometrie aflez fimple, Nous ne nous arréterons pas plus long-temps à cette re- marque ; parce que, dans les cas dont nous avons befoin, ou la pointé d'un pivor eft renfermée dans le fond conique d'une chapbe, où pénètre naturellement en s'enfonçant un peu dans l'intérieur d'un plan horizontal , l'axe du pivot devient nécef fairement l'axe de rotation; d'autant plus que le plan de contat éft toujours plus petit que toutes les mefures fenfibles, comme nous le verrons, Art. Sr. 70. Si la Nature nous fournifloit des corps qui fuflenc par- faitement durs, ou dont les parties fuflent réunies par une co- héfion infinie , ce feroit , fans contredit , ceux qu'il faudroit choifir pour fabriquer les chappes & les pivots ; puifque de pareils pivots auroient Îes diamètres de leur pointe infiniment petits fans fe rompre , & fans pénétrer dans l'intérieur des chappes. Mais tous les moyens que nous pouvons emplover, Pacier le plus ferme, & le mieux trempé, toutes les vitrifica- tions, le diamant même, n’ont qu'un certain degré de cohéfion, qui cède pour une fufface donnée à un poids donné. Ainfi, lorfqu’une furface pefante eft équilibrée fut la pointe d’un pivot, ïl faut que la furface de cont4® foit aflez confiderable pour que la cohéfion de toutes les parties dé cette furface puifle réfifter fans rupture au poids qui la prefle. Il faut par conféquent, pour une pefanteur finie , que cette furface foic finie. Pour mieux fairé entendre d’où péut provenir le frottement d'un pivot ; fuppofons que les corps folides font formés d'une infinité de pétics globules creux, remplis d'une matière fluide élaftique; que tous ces globulès font joints entr'eux, aïnfi que les parties folides qui forment la furface de ces lobules, par une adhérencé - dont la caufe nous éft inconnue; l’on verra que chacun de ces petits globules ne pourra fupporter qu'un certain petit poids fans fe rompre. Ainfi, dès que la pointe d’un pivot fera chargée par un plan pefant, il faut, (F1G. 21,) que la furface du cercle de contat, dont le diamètre eft a 4, foir aflez grande pour que SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 231 de nombre des globules , qui forment cetre furface, puifle fup- porter un poids donné; d’où il réfulte que lorfqu’on charge la pointe d'un pivot de différens poids, la furface de contaét fera proportionnelle au poids. 6 Si, au-lieu de fuppofer les corps formés d'une infinité de -petits globules; on les fuppofoit formés d'une infiniré de petits reflorts , l'on trouveroit de même que chacun de ces perits reflorts ne pourroir, fans fe rompre, fupporter.qu'un petitipoids, &Tonen concluroitencore la furface de contaét- proportionnelle a la preffon. Il paroït donc probable que lorfqu’une furface très-dure eft portée fur la pointe d’un pivot, la furface de contact eft pro- portionnelle à la prefion votale : ainfi, cette-preflion eft comme le quarré du diamètre. Mais nousavonsitrouvé, Art. 68 , que le momentum du frot- #+ement.d'un plan,pefant, fur une furface circulaire, eft,en raïfon compofée du diamètre & de la preflion. Ainfi ,.comme.çe .dia- mèrre eft ici comme la racine du poids, nous trouyerons le 3 -momentum du frottement des :pivots proportionel à P'. 71. Si nous voulons avoir une formule du momentum des frottemens, fondée fur. des hypothèfes encore plus générales, fuppofons que la pointe du pivot en C, fur laquelle porte la Æurface À B, que nous confidérons comme inflexible ;oit un Æolide-de révolution , (F1G.22,n.°1,) fi la pointecde ce pivot IMcm.cft comprimée jufqu'en M , quieft Je diamètre du cercle de contaét, chaque point de ia furface du pivot artivera en, & la preflion qu'éprouvera le point «, fera comme une fonétion de l’ordonnée gu, diftante du point & däns fà fituatiôn naturelle à fa fituation forcée dans l’état de compreflion. ‘Le n° 2 repréfente le cercle de contat, dont le diamètre My. ve : "Soit n° 2 l'angle MCM'=5,.cu=x, l'on aura, pour la preffion ‘de la petite furface. élémentaire, mulu, foncé (@e) -dxbx ù (Le 232 RAEIC'ETIE RC AVES font(CP-q0) bxdx; mais, comme CM n’eft qu'une petite portion de la furface (*), l’on aura, fans erreur fenfible, @g proportionnel à (Cg}, & CP proportionnel à (CB) =(CM} ; ainfi, l’on aura, pour la preflion élémentaire, fonc? ( n'((CMŸ— x)) bxdx, où 7 eft une quantité conftante, dépendante de la courbure du point C: fi, pour fimplifier, nous fappofons que la pref- fion du point # peut être repréfentée par une puiflance m, de (®4), nous aurons, pour la preflion élémentaire, n"(cM—x) bxdx; cette quantité, intégrée de manière qu'elle s'évanouifle , lorfque x—o, donnera, pour la totalité n 360° du cercle, CM°'"*"”; quantité qui doit être égale à 2z(m+1) la preflion totale P. L'on aura de même, pour le momentum de la prefion élé- mentaite, 2”"(CM°—x")"#xdx; quantité qui sintégrera, ou exattement, ou par les quadratures, fuivant la valeur de m; mais, fans entrer dans le détail de cette intégration, il fuic, de la marche du calcul intégral, & de la loi d'homo- généité, qui doit être obfervée entre les quantités intégrales & leurs différentielles, que lon aura toujours le #0men- sum de la preflion du cercle entier, proportionnel à (**) (CM}"#"*:, & P proportionnel à (CM}‘"*"”; ainfi, le momentum du frottement fera proportionnel à PP F0; fi m—o, pour lors la preflion fera conftante pour tous les points w, & le #0omentum du frottement fera proportionnel à P:. (*) Voyez Art. 81. (**) La remarque que nous faifons ici fur l'homogénéité des quantités intégrales , & de leurs différentielles, évite fouvent beaucoup de calcul dans les Problèmes qui ont rapport à la Phyfique; ainfi, l'intégrale de... adr (a+ nat x +n'at2x +zh), prife lorfque x=2, nous donne .. Garti+#1, où G eft une quantité conftante, indépendante de la valeur de &, & où r & n' font des coefficiens conftans de dimenfon nulle, Si SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 233 Si m—1, l'on aura le momentum de la preflion propor- tionnel à P*. 72. Enfin cette théorie aura toute l'étendue dont elle paroït fufceptible, & elle deviendra applicable dans toutes les parties des Arts. Si nous continuons à fuppofer que la pointe du pivot eft formée par un folide de révolution , & que ce pivot porte une chappe, dont la furface intérieure eft auffi une furface de révolution; fi nous fuppofons en outre que le fond de la chappe eft comprefible, de même que l'extrémité du pivot, & que le poids dont la chappe eft chargée, eft équilibré de manière que l'axe du pivot & l'axe de la chappe font dans la ligne verticale, qui pañle par le centre de gravité du poids. Dans la F1G. 23, MCM repréfente la tête du pivot avant fa compreflion. MC’ M repréfente la tête de ce même pivot après la compreflion ; #7 cm’ repréfente le fond de la chappe avant la compreflion; 77 c’ m'repréfente le fond de cette même chappe après la compreffion : il faut que la pointe du pivot, ainfi que le fond de la chappe, foient d'une matière très- dure, pour qu'on puifle fimplifier le problème, & fuppofer que les parties comprimées CCM & cc'm font terminées par de petites lignes courbes, qui peuvent, fans erreur fenfble, être prifes pour des arcs de cercle. Si l'on tire les tangentes CB & C'B', cb & c' b' au fommet de toutes les furfaces courbes, & fi l'on prend la ligne L 9° parallèle à l'axe P c’, qui coupe les tangentes aux points Q,Q”, 9, g', & les courbes aux points correfpondans D, D’, à, d’. Il eft clair que CM, C'M', ainf que cm & cm, étant fuppofés, à caufe de la dureté du pivot & de la chappe, de très- «peures portions de courbe. CC’ & D D’, cc’ & dd’ repréfente- ront les compreffions des points correfpondans € & D, c & d, Actuellement faifons PM—4,PL=—x, le rayon de cour- bure en C, du pivot, avant fa compreflion, —?; le rayon de Tome IX. Gg "4 Formule gé- nérale du frot- tement des Pi- vots, & des Chappes flexi- bles. 234 RENC'EATIE R'ICIRES courbure en C’, du pivot, après fa comprefion, = 2; le rayon de courbure du fond de la chappe, en €, avant fa compreflion, —*;le rayon de courbure de la même chappe, après fa compreflion, = <. L'on voit d'abord qu'après la compreffion , le fond de la chappe devant toucher l'extrémité du pivot a tous les points d'une partie de fa furface, la courbe M’ C’ M eft exactement la même que la courbe mcm, & qu'ainfi D'—d#/’. L'on voit encore que, comme les petites portions de courbes, qui fe couchent après la compreflion, peuvent , à caufe de la dureté du pivot & de la chappe, être prifes poRE une naiflance de courbe, lon aura, fans erreur fenfble (*), BM=%#, BM=*# PRE (PRE » QD =>, QD Sig dt gd ="; mais la comprefon di point DR ee... DD'=BM—QD—DL=(5—%) (a4—xx). La compreflion du point correfpondant d, du fond de la chappe, eft dd'=b'm—gd'—dLl'= fetes (aa— xx). A&ucllement la prefion qu'éprouve un point quelconque D’, dépend de l'état de compreflion, & par conféquent peut sexprimer par une fonétion de la compreflion : pour fimpli- fier cette hypothèfe, fuppofons la preflion du pivot comme une puiflance »2 de la compreflion, & la preflion d’un point de la chappe, comme une puiflance m de la comprefli on; lon aura, pour la preflion du point D’, la quantité SES . (53) (aa—xx))"s &, pour la preffion du point corref- pondant 4” de la chappe, l'on aura 9” ((5—2) (aa—xx)}", s(*) Dans la Figure xxi1, lon a repréfenté la chappe détachée verticale-" ment au-deflus de la tête du pivot, de manière que la ligne mm', extrémité du contatt, qui doit fe confondre avec la ligne MM, lorfque la chappe porte fur la tête du pivot, fe trouve ici faire une même ligne avec la rangente CB du pivot, avant fa comprefhou. SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 335 ou g eft une quantité; qui dépend du rapport de la flexi- bilité de la chappe à celle du pivot. Or, à caufe que la preflion eft commune aux points corref- pondans D’ & d”, ces deux quantités doivent être égales, & donneront l'équation. .......... ER ne à] ((B—2 (aa xx) 2 8" ((R9) (aa xx). Cette première égalité nous apprend une vérité intéreffante, c'eft que pour qu'elle fubfifte, 1l faut que »w—m" ; puifgw'elle doit avoir lieu pour tous les points de contaét; ainfi, lorfque la preflion ne fera pas exprimée, pour la chappe & pour le pivot, par la même puiflance », la éhappe ne tou- chera le pivot que par parties, & le contaét ne feta pas continu. Mais, dès que l’on fe fera fervi de deux matières homo- gènés, pour lors m—m', & l'on a tout de fuite ee JUURES FR Halls L—%)=g(5—;i), d'où lon tire 5 — (+5) ; d'où il fuit rt que la courbure, produite par là compreflion, eft indépen- dante de la puiflance ». Si nous fubftituons cette valeur 3, dans la formule. . .. (G—5) (aa—xx))", qui exprime la preffion du point D’, on aura HT#) aa — xx q ; (EH) s+T Nous voici aétuellement à même de déterminer la prefion totale, & le #0omenrum des frottemens, qui eft la partie in- téreflante de notre recherche. Comme nous avons fuppofé ici que Ja partie M'C'M com- primée, n’eft qu'une petite portion de courbe, nous pouvons, fans erreur fenfble , fuppofer que la furface engendrée par la révolutioy de CDM, autour de l'axe CP, ou, ce qui revient aûimême , que la furfàce du ‘pivot; ft égale à la furface du cercle. dont MM eff, le diamètre: d'après cette fuppofitions Gsi 236 REMCHEROCHES nous aurons, pour la preflion d’une zone, dont x = CQ cft le rayon, & dx la largeur, la quantité ............. ur ob m 3 Le : 360° (E 9 (aa—xx)) xdx; en intégrant, l'on aura, gti pour la furface entière du cercle, dont PM— eft le rayon, L'ANPE ANUS an ; K 360° [ 7 4/ ÿ quantité qui doit étre égale à la g+1: 2(m+1) preffion entière, ou au poids P, dont on fuppofe la chappe chargce: pour avoir le momentum de la preflion, il faudra multiplier la preflion élémentaire par x; ce qui donnera ss" , 5 ds “4 (360)° ( :) (aa— xx) x'dx: cette équation eft intc- s+1 grable exaétement toutes les fois que » eft un nombre en- tier ; ainfi, dans le cas de la parfaite élafticité, où l’on fup- poferoit la preflion proportionnelle à la compreflion, l'on auroit »—1; ce qui donneroit, pour le momentum de la prefion totale, 5 (360) (5) (5—7) 45; mais, dans cette fuppoñition, P=—: (360) (5—-+) at, d'où l'on tire le 0- L mentum de la preflion = À Dés (y) &, fi +ex Gen G= prime le rapport du frottement x'la la preffion, il fuffra de divifer cette quantité par f, pour avoir le momentum du frot- tement. En fuivant la marche de l'article précédent, nous trouverons, fans entrer dans le détail de l'intégration, en nommant N— 360° (#.)"(5— 2), que puifque la prefion de la zone eft N(aa— xx)"xdx, & le momentum élémen- taire de la preflion de cette même zone, eft N(4a—xx)"x°dx, lon aura, pour l'intégrale de la preflion, lorfque x=—a, la quantité GN a"; &, pour l'intégrale du momentum, GINaeT" loùG°& G! font des fonétions de », indé- pÉRAARES de a & N; ainfi, puifque GNa"rZP, nous aurons $ Pa pour le momentum total de la preflion, ou SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 237 I EP) +; ainfi, en fubfituant la valeur de N, lon aura le zomentum de la preflion, & par conféquent le . \ momentum du frottement, proportionnel à! .,.),..7° PE7+3) (am+2) (CHE Si z—0, l’on retrouve cette quantité — P°, comme dans l'article 70. Lorfqu'on fe fert des mêmes chappes & des mêmes pivots, lon doit trouver le momentum du frottement augmentant avec le poids, & proportionnel à Po Cette quantité diminuera, tout étant d'ailleurs égal, à mefure que (5—+) augmentera; c'eft-à-dire, à mefure que lon augmentera la courbure de l'extrémité du pivot, & qu’on applatira, ou qu'on diminuera la courbure du fond de la chappe; d'où réfulte cette pratique ufitée , lorfque lon 2 beloin de faire tourner de très-grofles mafles autour d'un axe vertical, c'eft de préfenter une furfice convexe à l'ex- trémité convexe du pivot, parce qu'alors (5—1) devient Épre NR Enfin le momentum du frottement diminuerà à mefure que la quantité z augmentera ; C'eft-à-dire, à mefure que la dureté du fond de la chappe augmentera, celle du pivor étant donnée : fi, au-lieu de fuppofer la preffion d'un point D, du pivot, —(DD'}’, l'on avoit fuppofé cette preflion = (A-DD')" A augmentant avec la dureté du pivot, nous aurions , dans la formule qui exprime le momentum du frot- tement , E): à la place de g: (g+1):0r, comme le Momentum du frottement diminue àmefure que certe quantité 238 RECHERCHES augmente, & que cette quantité augmente à mefure que 2 & d font plus grands, il s'enfuit que plus la dureté, ou linflexibilité du pivot & de la chappe, feront grandes, plus le #romentum du frottement diminuera ; il deviendra nul, lorfque g & À {feront infinis. 73. REMARQUE. Lorfque la chappe eft pottée par une Aiguille très-fine, fi la pointe de cette Aiguille eft fortement trempée, & qu'elle foit beaucoup plus dure que le fond de la chappe, pour lors il pourra arriver qu’elle pénétrera dans l'intérieur de la chappe, dont.elle divifera les parties; la thcorie précédente ne peut pas s'appliquer à ce cas. Dans la Figure xx1v, MC": reprefente la pointe du pivot qui a divifé les parties de la chappe; foit le petit angle mCM=2A ; foit PM= a l'éloignement du point M, de fa fitua- tion naturelle, lorfqu'il eft en P, à fa fituation comprimée, lorfqu'il eft parvenu en- »; foit PD—x, qui exprime la compreflion du point D, La prefion fur la partie CM, dépendra des compreffions PM & pD, des points D & M; fuppofons que cette preflion foit comme une puiflance z de la compreflion, l’on aura, pour la prefion DQ, qu'éprouve le point D perpendiculai- rement à CM, fa valeur (gP'D)", ou (gx): décompofons cette force en deux autres, l'une verticale DO, & l’autre horizontale OQ, la fimilitude des triangles nous donnera la force verticde DO—(sx)" #À; fi la pointe du pivot pouvoit pénétrer dans l'intérieur de la chappe, fans éprouver de frottement, il faudroit, en conféquence des principes de Statique, que nous avons rapportés au commencement de ce Chapitre, que la fomme des forces verticales (gx)"$E fût égale à la pefanteur de la chappe, & du poids dont elle feroït chargée. Mais la preffion DQ engendré un frottement, & le pivot ne peur pas percer le folide de la chappe, fans vaincre cç SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 239 frottement, qui fera proportionnel à DQ, & empêchera le pivot de pglifler le long de CM. Si (+) exprime le rapport de la preflion au frottement, 7 fera le frottement qui agit, en D, le long de CM, Al empêcher la pointe du pivot de pénétrer dans la folidiré de la chappe ; décompofons cette nouvelle force en une force verticale & une force horizontale, nous aurons, pour la force verticale , _ : a): ainf , la réaction du frottement & rayon de la preflion, pour foutenir le poids de la chappe, fera, en D, (gx) (RE +, ): certe réaction ; étant multiplie par la petite rayon frayon zonc circulaire de la furface du pivot, dont pD ou x ef le rayon, & dx #% la largeur, donne, pour la preflion verticale de cette petite zone, 9” 360 (RE MR) x" 7x, & cette quantité, intégrée pour toute la furface du pivot, Fine en o rayon f fin A cof A \ am? ant = aéléses ARS) faifan AT 406 "(360 2 fin À ne m +2 D'un autre côté, fi la preffion du point D, que nous avons és éx Yay on trouvé (gx), eft multipliée par “er, rgeur de la zone, & par {à circonférence 360° x, l’on aura <- + 360 ne Ce LIL our le momentum du frottement de el ZONC ; intégrant ; 8 us quantité, en fuppofant x—a , l'on aura encore . : rayon a"+3 7 E 360 ls Dent A puifque nous venons de voir que a A A m +2 P— 2" 60° Te F cof. ) 2 am yon frayon) m+2 7nomenturm total du frottement , DR A a LE M il SRE , il réfulte, pour le 3 1 fin A {(m+2)Prayon ais. : E orfc ivot fera f(m+3) 360° £” EE) Cars TA 51 que le piv très - -aigu, pour lors l'angle À étanc très- - petit, ki on aura, pour m+3 Sin A f mhz, le momenrum du frottement, y — (EC ENV CDIINE eo RECHERCHES cette quantité diminuant à mefure que /7 À diminue, il s'enfuit que les pivots les plus aigus feroient les mailleurs ; ce qui feroit effe&tivement vrai, fi l'on pouvoit leur donner une force fuffifante pour fupporter le poids de la chappe, fans fe plier. Il eft facile de prévoir tous les inconvéniens qui réfultent, dans la pratique , d’un pivot très-fin, qui perce la partie folide de la chappe : car, quoiqu'on fuppofe d’abord cette chappe fou- tenue par la preflion latérale de fes parties divifées, le moindre mouvement ofcillatoire aura bientôt ue , par le frottement, les parties latérales comprimées, & pour lors il faut que la tête du pivot, ou sarrondifle ou fe plie, pour fupporter feule tout le poids: le cas où la tête du pivot vient à s'arron- dir, rentre dans le cas de l'Article qui précède : celui où les extrémités du pivot fe plie, donne un frottement très-con- fidérable , parce que la chappe porte alors, non pas fur un point , mais fur une petite ligne, & le frottement augmentera par conféquent à proportion que la longueur de cette ligne augmentera. S'il y a quelques mcgalités dans le fond de la chappe, l'extrémité courbée du pivot y pénétrera, ou oblique- ment, ou horizontalement , & l’on ne poura plus abfolument compter fur la direction de la Boutlole, Mais , avant d'entrer dans des difcuffions relatives à la prati- que , fur la force & fur la figure des pivots, nous allons rap- porter quelques Expériences , que nous comparerons avec la thcorie, Expérience fur le frottement des pivors. 74. L'onapris, F9.2$ ,n.°1 &2, une Aiguille de Bouflole, percée à fon centre de gravité, d’un trou C, n.° 2; l’on a eollé (n° 1,) à 3 ou 41. au-deflüs de ce trou, une petite lame de verre très-polie; certe lame fc trouvoit féparée de l’Aïguille, par le moyen de deux petits poteaux de bois z & /, collés à la Boufs fole & à la lame. Cette Bouflole pefoit, tout compris, 150 gr. Ja lame de verre & les petits morceaux de bois pefoient enfemble C 9 grains; SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 24r 9 gains; Aiguille avoit dix pouces de longueur & faifoit 10 ofcillations en 60’. L'on pofnit cette Aiguille horizontalement fur la pointe d'un pivot d'acier crès-dur, (n.° 1, ) il falloit tâtonner pour trouver le point d'équilibre ; mais, comme le centre de gravité eft beau coup plus bas que Îe point de fufpenfion , l'on en venoit faci- lement à bout : lorfque l’Aiguille fe trouvoit un peu inclinée, avec du fable que lon répandoit fur l'extrémité la plus légère, on la rétablifloit bientôt dans la pofition horizontale. Cette Aiguille étant exaétement fermée dans une boîte ; l'on cherchoit , en lui préfentant de loin le pole d'une autre Aiguille , les limites de fon champ d’indifférence , ou l'angle formé entre toutes les diretions cä, qu'elle pouvoit prendre, fans que fa force aimantaire & directrice la ramena à fon vérita- ble Méridien: il eft évident que l'angle d'indifférence a c 4 étoit proportionel au frottement. 1.% Eflai. La Bouflole fufpendue librement fur fon pivot, a donné l'angle a cb de 8 ou 10’. 2.m€ Effai. La Bouflole chargée de deux petites plaques de cuivre , pefant enfemble 300 grains, a donné l'angle 4c4 de 30”. 3-"€ Effai. La Bouflole chargée de 600 grains, a donné l'an- gle acb de 60°. 4.n€ Effai. La Bouflole chargée de 1200 grains , a donné l'an- gle acb de 3° 15° s.me Effai. La Bouffole chargée de 1800 grains , a donné l'an- gle acb de 5°. Réfultat de cette Expérience. Dans tous ces Eflais , l’Aiguille eft toujours fufpendue hori- zontalement placée fur la pointe du même pivot , foutenue Par un plan trèspoli , & que l'on peut regarder, à caufe de Tome 1X, Hh 242 RÉCHERCHES fa grande dureté , comme impénétrable à l'acier. Le fond d’une chappe, fes inégalités & fes courbures , ne pouvoient point influer ici fur l'augmentation du frottement : ainfi, les erreurs de la Bouflole mefurées par le champ d'indifférence , ne pou- voient être occafonnées que par le frottement horizontal de la plaque de verre fur la pointe d'un pivot : fi nous fuppofons adtuellement , que le romentum du frottement foit comme une puiflance # de la pefanteur, ou plutôt de la compreflion , nous trouverons ,. en négligeant le premier Eflai, donc il eft “difficile, à caufe de la petiteffe de l'angle a cb, d'avoir une mefure jufte , & en comparant enfuite le deuxieme Eflai avec tous les autres, qu'il réfulte du deuxieme & troifieme Efläis , (450) :(750) 1: 30:60", d'où = 1, 357. Le 2.me & 4.me Fflai donnent 2= 1,703. Le 2.me & le $.me Effai donnent 7= 1,571: En prenant une valeur moyenne, l'on trouvera 2=1,544; d’où il paroït réfulter , que le momentum du frottement eft à- peu-près proportionnel à P*, comme la théorie (de l'Article 70) fembloit nous l'indiquer ; d’où il réfulte par conféquent, que lorfque la pointe d’un pivot eft comprimée par un plan impéné- trable, tous les points du cercle de contact éprouvent à-peu- près une preflion égale. Nous avons fait un très- grand nombre d'Expériences , en fufpendant , comme dans les Eflais qui précèdent, les Aiguil- les aimantées par le moyen de plaques de verre, d'agate, de cuivre jaune, & de différentes compolitions , & nous avons tou- jours trouvé des réfultats analogues à ceux que nous venons de détailler. Lorfque les pivots fervoient depuis long-temps, & que leur pointe étoit ufée, lon trouvoit aflez exaëtement, que le momentum des frottemens , étoit proportionnel aux preffions. 5 SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 243 Les meilleures chappes que nous ayons pu nous procurer, 3 nous ont donné les frottemens proportionels à P'; mais la moindre inclinaifon dans la pofition de la Bouflolc, & les pe- tites courbures, qui fe trouvent dans le fond de ces chappes, -produit le plus fouvent , dans le réfultat des Expériences, des incgalités dont aucune hypothèfe ne peut rendte raifon. Comparaifon du momentum des forces magnétiques , avec le momentum du frottement des pivots. 75. Nous avons jufqu'ici tâché de développer tous les élé- mens qui produifent la direétion des Aiguilles; nous nous fommes aufli attaché à déterminer les forces: coërcitives, qui peuvent produire des erreurs dans cette direétion. En compa- rant actuellement les forces coërcitives avec la force magnc- tique , il fera facile dé nous déterminer für le choix des lames que nous devons employer pour: former des Boufloles , fui- vant les différens ufages auxquels nous pouvons les deftiner. On trouve ( Art. 6,) que ( B—S ) ou l'angle d'erreur d’une ‘ . . . - W. LA R Aiguille magnétique, pouvoit être repréfenté par CRETE LC par conféquent ; pour diminuer cette erreur autant qu'il eft -poffible , il falloit que cette quantité fût un #272mum. k TLEI.l (m1°E+n1) 6 nous trouvons, par les Articles précédens, que le momentum du frottement d'un pivot, doit être proportionnel à une puif- fance de la prefion, & f nous nommons cette puiflance à , l'Experience nous a appris qu'elle étoit à-peu-près égale à À. Maïs nous avons trouvé, Art. 37, f@:mcu— Ainfi, fi nous fuppofons , en confervant les mêmes lettres ; qu'une rofc de Bouflole marine, dont la pefanteur eft(2gA) foit équilibrée horizontalement fur la pointe d'un pivot, & dirigée par une lame aimantée d’une épaifleur & d’une largeur uniforme dans coute fa longueur , nous trouverons , en nom- Hh ÿ 2A4 A CR RS mant LE/=M, > que = B er CAL'EFn) à B étant un coefficient conftant , en fubftituant, à la place de 1 L' E, fa valeur M : L' 7, l'on aura, pour le MLNLINUIM , . (A+M} /aM 2 g d af +7 —0; ce qui donne, en faifant va- M L°/? 2m adM dM Ë P d ÿ HÉEVL n me —o; équation du fecond 7e ñ L'£ ü degré, d'où il eft facile de tirer la valeur de M. Il'eft inutile de faire varier L & Z , parce qu'on voit tout de fuite , que M reftant conftant , il faut augmenter ces quanti- tés à l'infini , ou au moins autant que la nature & la folidite de l'acier peuvent le permettre. Les quantités L & / étant données, l'équation précédente donnera l’épaifleur de la lame. 76. L'on déterminera facilement , par le même procédé, la longueur d’une lame dont les autres dimenfions {eroient don- nées, dans l'équation tas (a +); fubftituant , à la place de M, fa valeur A7, ou PTE quantité ici conf- tante, par hypothèfe, & nous aurons ......... TR ) 2n (A+d4) [md Fr ad FT AN 00 US d— NE VAE tr —O, OU 7 7 ESS L: équation du fecond degré, d’où l'on tirera la valeur de 7. 77. Si l'on fuppofe, dans la formule de l'Article précédent, que l'Aiguille n'eft chargée d'aucun poids ; pour lors l'on aura SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 245 2nl A=o, & l'équation fe réduit à (A—3)+m4 An d'où L° 7 (3—2) ÿ MEL Exemple. Nous avons trouvé, premiere Expérience, Art. 26, qu'une lame de 12 pouces de longueur & pefanc (288) grains , fai- foit , lorfqu’elle étoit réduite à 4 pouces de longucur , 20 ofcil- lations en 80”. Nous avons vu qu'une diminution de 4 pou- ces dans la longueur de cette lame }! produifoit une dimi. nution de 49°” dans le temps des ofcillations: or, comme = mEL'+ nl ), lon aura, pour une Aiguille de 4 pouces de longueur , 2/— 49"; &, comme T—80”, l'on aura encore mEL'— 31”; fubftituant ces valeurs dans la formule .. 1= (G2)2EL", nous trouverons /=(2=2). 1-4 pouc. &, finous » RE e . fuppofons A—1, comme l'Expérience nous l'a appris, nous aurons /= EX 3 + 4 pouc. — 7-2 pouc. REMARQUE. De la formule /—G=2 ."EL>, l'on en con- clut que / diminuera à mefure que EL: diminuera ; ceft-à- dire , que la longueur des Aiguilles doit être diminuée à mefure qu'elles feront plus légères; c’eft ce que la pratique avoit déjà indiqué. 77. Les queftions dont on pourroit avoir befoin , dans le genre des deux Articles précédens, font trop faciles à réfoudre, pour qu'il paroïfle néceflaire de s’y arrécer plus long-rems. Nous allons terminer cette théorie par deux petits problèmes , qui feront fouvent d'ufage dans la compofition des Boufloles for- mées avec plufieurs Aiguilles aimantées. Nous avons vu , dans la théorie du magnétifme , que les lames les plus légeres, éroient celles qui , proportion gardée, à : Saimantoient le plus fortement. Nous avons vu ( Art, 61 & 246 RECHERCHES 62,) qu'ane Aiguille équilibrée fur un plan horizontal, avoit toujours le même #omentum, pour fe rétablir dans la direction de fon Méridien magnétique : d’où il eft facile de voir qu'une Bouflole, formée de plufieurs lames parallèles & féparées, a plus de force pour fe diriger fuivant fon Méridien, qu'une feule lame qui auroit le même poids que toutes les lames réunies: ces con- fidérations nous prélente ces deux Problèmes. 8. Problème. La pefanteur de la rofe d’une Bouffole marine, étant donnée, ainfi que toutes les dimenfions des lames magné- tiques que l’on veut employer, de combien de lames la Bouflole doit-elle être compolce , pour qu'elle s'approche le plus qu'il eft poñlible de fon Méridien magnétique. _ Que 2gA foi, comme plus haut, le poids de la role, & 29M, le poids d’une des Aiguilles données, foit 4, le nombre des Aiguilles, le zomencum de la preflion, & conféquemment du frottement, fera comme ( A+kM}) : mais le momentum de la force aimantaire exprimé pour chaque lame par /@ur, donnera, à caufe de l'égalité des lames, pour le momenrum de la force ai- mantaire, kf@ur: ain, l'angle d'erreur fera (A+ KM) : kf@ur; quantité qu'il faut différencier, en faifant feulement 4 variable; ce qui donne, pour la condition du Probléme, k= 5 &, fi A—È, comme l’Expérience nous la appris, k=%: aïnfi, il faudroit, par exemple, 4 lames de 100 grains, pour une rofe qui peferoit 200 grains. 78. Problème. Le nombre & des lames étant donné, ainfi que leur longueur & leur largeur, déterminer l'épaifleur ou le le poids de ces lames. L'on à encore ici l'équation générale (A+4M) : &-fouc, kMŸ m 2 ë den er ou (A+ AM) = M+n) ; cette équation différenciée, en kM \Le je : Ë xk ue Lil faifant feulement M variable, donne PR OS - A+KM M m s —- M+r SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 247 ’ * à É 2 M équation du fecond deoré, d’où il réfulte, en faifant —— 7’ : À SOU D ormule CAUSE MR en MN. 02 , M=— (a=t)zk+m'A + (a—1)n2k+ mA res n À > RE. 2(a+i)mk 2(a+1)mk (a=1)mk]" Nous croyons avoir raflemblé , dans ce Chapitre , la plus grande partie des principes qui peuvent nous diriger dans la conftruétion des Boufloles propres au fervice de la Marine. Nous allons le terminer par quelques Remarques relatives, foit à la théorie, foit à la pratique, qui n'ont pu trouver encore leur place. .. 78. 1. Remarque. Si l’on coupe en deux parties, au point B, unelame NS ( F19. 26,n° 1 ,) aimantée à faturité, dont N eft l'extrémité boréale , & S l'extrémité auftrale, & dont le centre aimantaire cft placé ä-peu-près au milieu de la lame; après la féparation, l'extrémité B de la partie NB fera le pole auftral , & l'extrémité N confervera fa force boréale : l’extré- mité B de la partie SB aura une force boréale , l'extrémité S confervera fa force auftrale ; chacune de ces parties prendra un centre aimantaire en C & C’. Si, au lieu d’être divifée en deux parties, cette même lame eft feulement percée d'un trou B_( Fig. 26 ,n°2, ) pour lors les deux extrémités font en parties féparées, & cetre lame doit avoir deux centres aimantaires, comme la précédente. Cette multiplication de poles, à fait croire qu’une lame ainfi percée, devoit perdre en partie fa force directrice , & qu'elle écoic peu propre à indiquer les déclinaïfons. Voici ce que l'Ex- périence donne à ce fujet. Lorfqu'une lame à été percée à fon centre, d’un trou dont le diamètre n’excédoit pas la moitié de la largeur de la lame, elle a eu fenfiblement la même force de direction qu'avant d’être percée; c’eft ce dont il eft facile de fe convaincre , en faifant ofciller cette lame aimantée à faturité , & fufpendue 248 RECHERCUHES horizontalement. L'on trouvera que, dans les deux cas ; elle donne fenfiblement le même nombre d’ofcillations pour le méme tems. Lorfque le trou de la lame cft prefque égal à fa largeur, on trouve pour lors que le momentmm magnétique de cette lame , cft égal à la fomme des momentum magnétiques de deux autres lames qui n’auroient que la moitié de la longueur de la premiere: c'eft ce qui cft aufli conforme à la théorie que nous avons expliqué ( Art. 61 & 62; ) ainfi, lorfque la lame efttrès- légère , comme pour lors fon #0mentum magnétique eft à-peu- près égal à une quantité conftante , multipliée par fa lon- gueur ; que la lame, dans ce cas, foit percée , ou qu'elle ne le foit pas , l'on aura toujours à- peu - près le même "omen- T7. 79. 2. Remarque. Après tout ce que nous avons dit fur la communication du magnétifme , nous n'avons pas cru qu'il füt néceflaire de faire des recherches {ur les différentes tor- mes , foic rectilignes, foit courbes , que l’on peut donner aux James aimantees, il eft facile de prévoir tout ce qu'on peut efpé- rer de ces variations. Les Aiguilles en flèches, de la forme tracée à la Fig. 25, donnent , à pefanteur & épaifleur égales , le même rapport en- tre le momentum magnétique & le momentum du frottement, & produifent par conféquent à-peu-près les mêmes erreurs que les lames d’une largeur uniforme ; l’on obferve cependant , que les lames légères, d’une largeur uniforme, ont de l'avantage fur les lames taillées en flèche , & que lorfque les lames font pefantes , celles-ci ont de l'avantage fur les premieres: la théorie =. 1 . [2 » pe) o nn fait prévoir ce réfultat, l'expérience le confirme. Les Aiguilles, telle que la Fig. 25, dont on eft aflez dans lufage de fe fervir pour les obfervations que l'ont fait fur terre, font le plus fouvent plus épaifles vers leurs extrémités, que dans les autres parties: certe pratique paroit défavantageufe; Yon 4 SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 249 Ton concevra facilement qu'il vaut mieux, en confervant le même poids, élargir l'extrémité, & en diminuer l'épaifleur à pour que les parties exercent , les unes fur les autres, leur action magnétique à une plus grande diftance, & confervent par con- féquent un plus grand degré de magnétifme. 80. 3.me Remarque. Nous avons dit plus haut, quil y avoit toujours de l'avantage à compofer les Boufoles de plufieurs lames légères : la théorie du magnétifme ne laifle aucun doute fur cet article. Plus on multipliera les lames, en les rendant légères à proportion , plus la force de dire&ion de la Bouflole aura d'avantage fur le frottement. Dans la conftruction des compas de navigation , où l’on ne peut guères donner plus de fix pouces de longueur aux Aiguilles magnétiques, des lames de $o à 60 grains rempliflent aflez bien tous les ufages auxe uels ces Boufloles font deftinées: l'on détermine le nombre de lames par la formule ( Art. 78.) Ces lames calibrées exac- tement fuivant les mêmes dimenfions, fe pofent de champ , à égales diftances du point de fufpenfion , efpacées à quatre ou cinq lignes de diftance l’une de l'autre » Pour que leur action réciproque ne détruife pas le magnétifme (*). Elles doivent être bien droites & fixées invariablement à la rofe qu'elles diri- gent: la rofe & la chappe feront auf légères qu'il fera poflible. Les chappes bien centrées & tournées avec foin , doi- vent former dans leur concavité un cone plutôt obtus qu'aigu: la plupart des chappes, quoiqu'elles paroiïflent à l'œil aflez bien centrées & exaétement polies, ont, dans leur concayité, DA MR à NE re des forces magnétiques de chaque lame; mais il fera toujours facile de trouver la réfultante commune de toutes les Aiguilles fixées à la rofe, en renverfant cette rofe, &. pratiquant les mêmes opérations que nous avons indiquées (art.63,) pour une feule lame. Tome IX, 65 250 REICH TE RICHHNE S des inégalités &des petits enfoncemens qui s'engrainent avec la pointe du pivot ; de forte qu'il y a des pofirions où le cen- tre de gravité de la charge fe trouve plus bas que dans les au- tres : arrivée à cette fituation , la chappe ne peut pas tourner horizontalement , fon axe reftant vertical, fans que ces inéga- lités venant à fe dégager , le centre de gravité de cette chappe & de la mañle qui y eft fixée, ne fe foulève. Ainf ,une Bouflole portée par une pareille chappe & équi- librée horizontalement fur la pointe d'un pivot, te trouve en même-tems follicitée par la force aimantaire, & par fa pefan- teur , qui engrainant les inégalités du fond de la chappe avec celles de la pointe du pivot, rend à lui füre prendre la pofi- tion où le centre de gravité eft le plus bas: la patience & l'ha- bileté de lArtifte , peut feule nous fournir des chappes exac- tes; mais l'Obfervateur peut aufñi, par différens eflais, en reconnoitre les défauts. Voici un moyen qui m'a aflez bien reufli. L'on fufpend de champ avec des foies une lame aïmantée ; comme nous l'avons indiqué plus haut; par-là, on décermine facilement le Méridien magnétique. On trace également ce Méridien fur la largeur de la lame , en la fufpendant de maniere que fa largeur foit dans un plan horizontal, & en la renver- fant enfuite fur l’autre face |, comme nous l'avons expliqué , (Art. 63.) Nous prenons actuellement (F:g.27,) une petite régle de bois AB fort légère, garnie en C de Îa chappe que nous voulons éprouver. Nous pofons à un point quelconque g , une lame SN aimantée à faturité , dont nous connoiflons le Méridien magnétique : nous équilibrons le tout bien horizon- talement, par le moyen d'un contrepoids P , qui peut glifler le long de CB, & avec un peu de fable que l'on répand légè- rement {ur les parties qui paroïffent fe foulever. Si‘ la chappe eft parfaitement centrée, fi fon axe fe trouve vertical , le petit plan de contaét du pivot & du fond dela SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 25r chappe , fera un petit cercle horizontal, & la direction de l'Ai- guille fera uniquement dérerminée par la force aimantaire : l’on fera difparoitre l'erreur que peut occafionner le frottement , en frappant légèrement & rapidement fur la table où eft fixé le pivot ; ce qui produit, dans les parties élaftiques de certe table , un mouvement d’ofcillation rapide , qui fait monter & defcendre le pivot. Pendant le tems que le pivot defcend, l'on conçoit qu'il fe détache en partie du fond de la chappe, & que pendant ce tems, la preflion & conféquemment le frot- tement eft peu confidérable. Il fuit actuellement de tout ce que nous avons dit plus haut, que dans quelque pofirion que lAiguille magnétique foit placée par rapport à fon cen- tre de rotation, elle doit prendre la diréétion de fon Méridien magnétique : or , comme cette direétion nous eft connue, l’'an- gle qu'elle formera avec certe direction , fera l'erreur dûe aux défauts de la chappe & du pivot. En pofant, fucceflivement cette lame, de maniere que fon Méridien magnétique SN, faflent différens angles avec la ligne ponétuce AB de la balance ; l'on reconnoîtra toutes les imperfections de la chappe , dont les différens points vicieux fe trouveront à chaque Effai , pofés différemment par rapport à ladire&ion magnétique, & donneront des erreurs différentes. L'on peut fe fervir de plufieurs autres moyens. Si, par exemple, l'on fufpend, avec cette chappe, une Aiguille per- cée à fon centre, & que, par le point de fufpenfion, lon fafle pañler le Méridien magnétique; cette Aiguille doit non- feulement fe placer fur fon Méridien magnétique ; mais lorf- qu'elle fera mife en ofcillation, elle doit faire des excurfions Éga- les à droite & à gauche de ce Méridien, ou au moins qui dimi- nueront également à chaque excurfion. Si l'on n’a pas le fecours d’un bon Artifte, & que lon puifle fe procurer un poinçon obtus, bien poli & un peu arrondi à fa pointe, l’on formera une aflez bonne chappe, en enfonçant ce poinçon perpendiculairement d'un quart de ligne, à petit coup li ÿ 252 RIFICMERCHES de marteau, dans le centre d’une petite plaque de cuivre. Les pivots doivent être plus ou moins aigus , fuivant les charges qu'ils font deftinés à foutenir : dans les Bouffoles, pour le fervice des vaifleaux, les pivots fatiguent beaucoup , non-feule- ment à caufe du poids de la rofe de carton dont les Aiguilles font chargées, mais encore à caufe du mouvement continuel où font les Boufloles. L'on eft dans l'ufage & avec raïfon , de faire ces pivots plus renforcés, moins aigus que ceux qui doi- vent foutenir des Aiguilles deftinées à faire des opérations dans un lieu fixe. La dureté des chappes & des pivots eft la condition la plus effentielle pour la perfection de ces inftrumens; jamais le pivot ne doit être aflez aigu pour pénétrer dans le folide de la chappe, ni pour pouvoir plier fous fon poids. 8r. 4.me Remarque. Le point de fufpenfon ou le contatt de l'extrémité du pivot & du fond de la chappe, eft une petite fur- face circulaire , comme nous l’avons vu ( Art. 70 :) il patoïe intéreflant pour la matiere que nous traitons, & pour les Arts en général, de chercher à déterminer le diamètre de ce cercle. Voici, d'après la théorie & les expériences qui précèdent, comme on pourra en venir à bout, Nous avons vu ( Art. 74,) qu'il réfultoit de l'Expérience ; que le petit cercle de contaët , formé par la compreflion de l'extrémité du pivot , étoit également preflé dans tous fes points : nous avons trouvé ( Art. 68,) que le momentum du frottement fur le petit cercle de contatt, croit exprimé par la quantité =. CM, où CM eft le rayon du cercle de contaé, & À le frottement du poids P, qui glifleroit le long d'une fur- face ; quantité que nous trouvons pour le verre & l'acier, égale à (Æ) (Art. 67). Nous avons vu, Article 6, que l'angle d'erreur d'une SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 253 ,; & nous avons trouvé Aiguille aimantée étoit (B—S) = F Jouck (Art. 12), que foucu = JE , où À cft la longueur d'un pendule qui battroit des ofcillations ifochrones à celles de l’Ai- £ , D 1 guille: ainf, l'on a (B—S) — Ra CM; & B—S étant donné par l'Expérience, de même que à, l'on trouvera facile- ment, pour une Aiguille donnée, la valeur de CM. E xemple. Nous avons trouvé ( Art. 74, Expérience, premier Effxi,) qu'une Aïguille en flèche, de 10 pouces de longueur & de 1$o grains de pefanteur , a fait 10 ofcillations en 60”, & que fon angle d’erreur dû au frottement , étroit de 5”: or nous avons pour une Aïguille de cette forme, fur? =, où / égale ici $ pouces: ainfi, CM—®%; &, fubftituant les valeurs numériques, 2=7, A=1321 pouces, (B—S)= 5", /=5 pouc. lon aura le diamètre du cercle de conta&, 2CM=— 5: de ligne. L'on peut conclure, ce me femble, de la petitefle du dia- mètre du cercle de contaét , trouvé dans cet exemple, que le plan de contaét peut être regardé comme un point fixe. 82. ÿ.me Remarque. Les Aïcuilles d'inclinaïfon ont toujours préfenté de très-grandes difficultés dans leur exécution , foi parce qu'il eft difhcile de faire tomber le centre de gravité dans laxe des tourillons, foit parce que la courbure de ces Aiguil- les, changeant fuivant leur inclinaïfon , rend la pofition de ce centre de gravité variable , par rapport à laxe de fufpenfion : fon ne peut rien ajouter aux favantes recherches que M. Da- niel Bernoulli a donné à ce fujet: mais lorfqu'on ne pourra pas difpofer d’un Artifte aufli habile & aufli exact , que ceux qui paroiflent néceflaires ; pour remplir les vues de cet Au- teur, voici comme il m'a paru que l'on pourroit y fuppléer. Bouffoles d’Inclinaifon, 254 RECHERCHES: L’Aiïguille SN (Fip.28,) eft équilibrée fur festourillons C; qui portent fur deux lames de verre; un fil de cuivre 7 pefant un ou deux grains , mais dont le poids eft exaétement déter- miné , peut glifler le mr de la partie auftrale , depuis € juf qu'en S, fon momentum le mefure par la diftance (C 7). Avant d’aimanter cette lame, elle fera équilibrée bien exac- tement fur ces tourillons, dans une pofition horizontale, le petit poids 7 répondant pour lors en C à l'axe des tourillons, ou n'ayant aucun »70/1emtum ; lon aïmantera enfuite la lame à farurite : fi elle eft d'un acier bien pur, le centre aimantaire tombera à-peu-près en C, les forces zQ qui agiront fur cha- que point # de la partie boréale CN, feront parallèles entre elles & à la direétion magnétique: les forces #° Q” qui agiront fur la partie auftrale , auront la même direétion dans un fens oppofe ; il faudra donc, pour retenir l’Aïguille dans la pofition horizontale , porter le petit poids 7 à la diftance C7 du point C. Si lon décompofe aétuellement toutes les forces magnéti: quos # Q en deux autres forces, l’une horizontale RQ, & l'au- tre verticale Ru, & que l'on nomme © la force fuivant uQ , & B l'angle wQR , inclinaïfon de la direétion magnétique avec l'horizon, l’onaura, pour le momentum magnétique de toutes les forces verticales, /oucu +, qui doit être égal à 7-7C. Si lon fufpend enfuite cette Aiguille horizontalement, par le moyen d'une foie, comme nous l'avons fait plus haut , & qu'on la fafle ofciller, le tems des ofcillations nous donnera, conformément à l'Article 13, un poids ©, qui, multiplié par la moitié de la longueur de lAïguille, auroit un zor1entum égal à toutes les forces magnétiques RQ , qui agiflent fuivane une direction horizontale; d’où l'on tirera Q-CN=/tucu Se, Divifons actuellement le #10mentum des forces verticales, par Je #0mentum des forces horizontales, & nous aurons l'équation a cu=ys =cang B; ce qui donnera l'angle B que l'on cherche, SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 25 En fubftituant la valeur de B, ainfi déterminée dans l’'équa- tion — feucu, l'on tirera le momentum des forces magné- tiques, fi intéreffant à connoître dans les différens points de Ja Terre. Nous remarquerons que, pour que cette méthode foit pta- ticable , il faut avoir foin de rapprocher beaucoup l'axe des tourillons , du centre de gravité de la lame , parce que pour lors la moindre variation dans la pofition du poids 7 , don- nera un angle d’inclinaïfon fenfible, 256 RECHERCHES oo GE AP BeR ENV. Des Variations diurnes répulières de la Déclinaifon des Aiguilles. 83. J USQU'ICI nous avons toujours fait précéder la théorie par les Expériences , & nous ne nous fommes abfolument livré à aucune hypothèfe fur la nature du fluide magnétique : maïs comme il eft queftion , dans ce Chapitre, de fixer une caufe, & qu'il nous manque des obfervations faites pendant une fuite d'années, & fur l’exactirude defquelles nous puiflions compter; nous ne pourrons pas fuivre une route aufli füre. Le fyftême général des Phyficiens, a été pendant long- tems, que la caufe du magnétifme étoit dûe à un tourbillon de matiere fluide, qui faifoit fa révolution autour des aimans, {oit artificiels, foit naturels, en entrant par un Pole, & en fortant par l'autre. Ce fluide agifloit , difoit-on , fur le fer, à caufe de la configuration de fes pores, mais il n’exerçoitpoint d'ac- tion fur aucune autre cfpèce de corps: à mefure , dans cette hypothèfe , qu'il f rencontroit des difficultés pour expliquer de nouveaux phénomènes magnétiques , ou les variations de la déclinaifon des Aiguilles , lon faifoit quelques nouvelles fup- pofitions , foit en imaginant plufieurs tourbillons ou plufieurs Poles magnétiques , foit en imaginant un aimant au centre de la terre, auquel on donnoït un mouvement particulier. C'eft fur ces principes , que font établis les trois Mémoires fur la caufe du Magnétifme, qui furent couronnés en 1746. Cependant +28 SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 257 Cependant la difficulté d'expliquer tous les phénomènes ma- gnétiques avec des tourbillons » à fait foupçonner , depuis quel- ques années, à plufieurs Phyficiens, que la caufe du magné- tifme pouvoit provenir de l'attra&tion. Je crois avoir prouvé , dans le commencement de ce Mé- moire , que les caufes de la direction de l’Aïguille magnéti- que, ne pouvoient point être expliquées par limpulfion. J'a- jouterai ici, que lorfqu’on aimante une barre d'acier avec un aimant artificiel, il ne paroît pas que la barre, qui fert à aiman- ter , ait perdu de fon magnétifme après l'opération : cepen- dant, dans l'hypothèfe de l'impulfon, le tourbillon de la barre qui aimante , a produit un mouvement dans toute la mañfle du fluide magnétique de la barre aimantée ; ce mouyement n’a pu être produit fans une impulfion, qui, par fa réaction, a dû détruire une partie du mouvement , ou changer la dire&ion du fluide .— magnétique de la barre dont on s’eft fervi pour aimanter; & conféquemment, fi le magnctifme étoit dû à limpulfon, un aimant devroit perdre fa force en aimantanc, ce qui eft contraire à l'Expérience, 84. Parmi les différens Auteurs, qui ont eu recours à l’attrac- tion pour expliquer les phénomènes magnétiques , la plupart , comme MM. Brugman & Wilke, fe font fervis de deux fui- des élaftiques ; ils ont fuppofé que, lorfqu'une lame d'acier étoit dans fon état naturel » Ces deux fluides étoient réunis, & répandus uniformément dans toute la lame ; mais que, lorf- qu'elle étoit aimantée, les deux fluides étoient divifés: d’après ces Auteurs, les deux fluides exercent L'un fur l'autre une ation Attrattive; mais ils exercent fur leurs propres parties une force Tome IX, KKk 258 RAC ESRIC'ANES répulfive, comme l'air & vous les fluides élaftiques : ils ont nommé un de ces fluides, pofitif, & l'autre, négatif. M. Œpinus a adapté au magnétifme, le fyftéme de M. Frank- lin fur l'électricité : il penfe que, pour caufe du magnétifme, il n'y a qu'un feul fluide élaftique , qui agit fur fes propres par- ties par une force répulfive, & fur les parties de l'acier, par une force attractive. Ce fluide , une fois engage dans les pores de l'acier, ne s'en dégage qu'avec difficulté. Ce fyftêéme con- duit à une conclufon fingulière ; c’'eft qu'il réfulte des phéno- mènes magnétiques , que les parties folides de l'acier exercent les unes fur les autres une force répulfive. M. Œpinus appelle Pole pofirif , la partie de la lame d'acier où le fluide abonde, & Pole négatif, la partie qui a été vidée, ou qui ne conferve pas fa portion naturelle de fluide magnétique. Ces deux hypothefes expliquent également bien , & de la même maniere, tous les phénomènes magnétiques: il refte ce- pendant quelques difficultés à réfoudre; en voici une des prin- cipales. Je fuppofe qu'une lame d'acier foit aimantée à fatu- rite ; fi nous prenons l'hypothèfe des deux fluides magnétiques, ces deux fluides feront féparés ,le fluide boréal fera porté dans la partie boréale ;le fluide auftral fera porté dans la partie auftrale de la lame ; le centre aimantaire , fi la lame eft homogène , fe trouvera à-peu-près au milieu ; que lon coupe cette lame en deux parties égales , fi les deux fluides font féparés , chaque partie de la lame n’aura qu'une efpèce de fluide, & par con- féquent ne fera pas fufceptible du même degré de magnétifme, qu'une lame de la même grandeur, qui feroît dans fon état naturel : cependant l'Expérience prouve le contraire. Cette même difficulté a lieu contre le fyftême de M. Œpinus. Com- SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 255 ment ; par exemple, la partie de la lame, vide de fluide . magnétique , peut-elle être fufceptible du même degré de ma- gnétifme, qu'une pareille lame dans fon état naturel ? Il femble, d’après cette Expérience, qu'il faille admettre , que la quantité de fluide, tranfportée, par le magnétifme, d'une extrémité d’une lame d’acier à l'autre, eftbeaucoup moins confidérable que la quantité totale de fluide que chaque par- tie de cette lame contient : peut-être , au furplus, la plus grande partie du fluide élaftique magnétique, fe trouve- t-il dans les lames dans un état de fixité , & fans aucune efpèce d'action ; comme Expérience nous a appris, que l'air fixe étoit répandu dans tous les corps en beaucoup plus grande quantité , que l'air élaftique que ces corps peuvent contenir ? Il paroit , en effet, probable qu'il exifte, dans tous les corps & dans leurs athmofphères , des parties qui exercent des forces attraétives , & d'autres qui exercent des forces répulfives, dont différentes combinaifons avec d’autres corps , changent & développent l'attion : l'évaporation des fluides, l'élafticité & la cohéfion des folides, l'éle&ricité, enfin toutes les analyfes chymiques , ne font peut-être que le réfultat de différentes propriétés analogues au magnétifme: mais nous fommes encore bien loin d’avoir foulevé le voile qui nous dérobe cette partie de la Phyfique. 85. Après avoir expliqué ces différentes hypothèles , nous allons préfenter quelques probabilités fur la caufe des variations diurnes : raffemblons quelques faits. Nous avons vu, dans la théorie du magnétifme , que Faétion de chaque point d'une lame aimantée, tend à détruire le ma- gnétifme des parties qui avoifinent: de-là il paroît que l'état magnétique cft un état forcé , & quele fluide magnétique fait KKkÿ 260 ROEMCUH IE RICHE Si effort pour fe répandre uniformément ; c'eft ce que l'Expérience prouve , puifque l’on eft obligé de renouveller de tems-en-tems le magnétifme des Aiguilles. Le Globe de la terre eft un aimant naturel, qui, livré à lui- même , paroît conferver fa force magnétique : cependant la variation de la déclinaifon, nous annonce que la matiere ma- gnétique y eftdans un mouvement continuel : ainfi, en raïfon- nant par analogie, la matière magnétique auroit dû fe répan- dre uniformément , & le magnétifine de la terre devroit être anéanti depuis long-tems. Il y a donc quelque caufe qui conferve, ou renouvelle le ma- gnétifme de la terre. Il eft probable que la même caufe, qui entretient le magné- tifme de la terre, produit les mouvemens de la matière aiman- taire , produit dans les déclinaïfons, les variations annuelles & les variations diurnes. La variation diurne eft à - peu - près régulière ; l'Aiguille eft attuellement dans nos climats dans fa plus grande déclinaifon à une heure après midi: cette déclinaifon diminue jufqu'à fept ou huit heures du foir; elle eft prefque ftationnaire jufqu'à huit heures du matin ; elle croît avec plus de rapidité , lorfque le Soleil s'approche de fon méridien. . . . .Ces variations ne font pas toujours égales. J'ai trouvé, en 1776 , depuis le mois de Mars jufqu'à la fin de Juillet, qu'elles étoient quelquefois de 18 ou 20 minutes, mais le plus fouvent entre 8 & 12°. Je n'ai pas trouvé les excurfions journalieres régulièrement plus grandes pendant un mois, que pendant l’autre: les plus grandes variations ont été obfervées pendant l’Equinoxe, & pendant les chaleurs du mois de Juillet : il y a eu pendant ces cinq mois, trois variations SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 261 irrégulières fenfibles; la premiere , le 28 Mars, ellea commencé à être apperçue vers les fix heures du foir ; à dix heures l'Aï- guille étoit dans fa plus grande excurfion, & fa déclinaifon de 61° moindre qu'à une heure après midi. La feconde à été fen- fible le $ Avril ; lon a commencé à obferver la direétion de lAiguille à fept heures du matin; la déclinaïfon étoit de 41’ plus grande qu'à l'ordinaire; à r heure, elle avoit diminué de 30’, & l'Aiguille fe trouvoit à-peu-près dans la même direétion où on l’obferve ordinairement à la même heure. La troifieme variation a été fenfible le 8 Avril, elle a commencé à être obfervée à $ heures du foir , elle a marqué fa plus grande excur- fion à 9h. & pour lors la déclinaïfon étoit moindre de 44/ qu'à 1 heure après midi; à minuit, l’Aiguille paroïfloit dans fa direc- tion ordinaire ; l'on diftinguoit ce même jour une aurore bo- réale dans la partie du Nord-oueft. Pendant les deux premières obfervations, le tems a été couvert & orageux. Daus les varia- tions irrégulières, l Aiguille eft continuellement en mouvement, _fes ofcillations font quelquefois d'une demi-heure, & d’un quart de degré. À Il y a déjà long-tems que l’on a obfervé l'influence des aurotes boréales fur la dire&tion de l’Aiguille ; il éft même très-probable que le fluide, qui forme ce météore, eft le même que le fluide aimantaire: l’on trouve, à ce fujet, les idées les plus ingénieufes dans les Loix du magnétifme de M. le Monnier; il fera facile d'y pie la théorie qui va fuivre. + 86. Si l'on examiné les variations régulières dutioe de lAï- aille , l'on verra qu’elles ont une révolution réglée comme celle du Soleil. C’eft donc une a&ion dûe à cet Aftre qui pro- duit ces variations périodiques, Quelques Auteurs ont prétendu 262 REGGAE RICH E S que ces variations étoient l'effet de la chaleur folaire, qui détrui- foit le magnétifme de la partie de la terre qui lui étoit oppo- fée. Ils fe font fondés fur ce qu'une lame aimantée perd dans le feu fa vertu magnétique : mais, quand même cette opinion expliqueroit la variation diurne, elle ne feroit pas recevable ; parce qu'une caufe, qui tendroit continuellement à détruire le magnétifme de la terre, ne lui auroit laiflé depuis long-tems aucune qualité magnétique. Si ce n'eft pas la chaleur du Soleil qui produit les variations diurnes : fi cependant cet effec eft dû à cer Aftre, il faut que le Soleil agiffe fur le Globe terreftre, comme un aimant agit fux un autfe aimant. Voici, d’après cette idée, comme il femble que l’on peut expliquer tous les phénomènes magnétiques: l’athmofphère fo- laire , connue fous le nom de lumiere zodiacale, ne fera autre chofe qu'un fluide magnétique ; ce fluide, en admettant le fyf- tème de M. Œpinus, & il fera facile d’adapter les mêmes rai- fonnemens à tout autre fyftême, agira fur les parties de la terre pour en chafler le fluide magnétique qui y eft contenu , comme le Pole pofitif d’un aimant, tend à chaffer le fluide magnétique, du point d'une lame d’acier où il eft appliqué. Mais laétion de ce fluide fera d’autant plus grande , que fa denfité fera plus grande & fon éloignement moindre; or cette denfité diminuant à mefure que l’on s'éloigne du Soleil, il en réfulte que ce fluide agira plus fortement fur la partie de lhé- mifphère éclairée par le Soleil, que fur lhémifphère oppofée; que fon aétion fera plus grande dans le périgée que dans l’a- pogée ; ainfi, pendant l'hiver, la partie auftrale de la terre doit fe vider de matiere magnétique: pendant l'été, l'athmof. SUR LES AIGUILLES AIMANTÉES. 263 phère folaire produira un effet contraire; mais le Soleil étant pour lors dans fon apogée , cette aétion fera moins grande que pendanc l'hiver: d'où il doit en réfulter que la terre fera aiman- tée pofrivement dans la partie boréale , & négativement dans la partie auftrale : à mefure que l'apogée changera , il fe fera une révolution dans la poftion du fluide magnétique ; mais ce mouvement eft trop lent, pour que l'effet en foit bien fenfible, depuis que l’on obferve avec exaétitude la déclinaifon de FAï- guille aimantce. Il eft facile à préfent d'expliquer les variations diurnes : le fluide magnétique , répandu fur la furface de la terre , agit par fa force attraëtive fur les points de l’Aiguille aimantée négati- vement , & par une force répulfive fur les parties de l’Aiguille aimantée pofitivement. Ainfi, la direétion de l’Aiguille fera dé- terminée par toutes ces forces, & cette aétion fuivra une Loi de la denfité du fluide dans chaque point de la terre, & de fon éloignement à lAiguille , fur les différens points de laquelle il agit, Dans la Fig. 29, le cercle ESO N repréfente le globe de la terre EO l'Équateur, & SN le Méridien du lieu, où fe fait l'obfervation en g: la direction de l’Aiguille À B, placée ici fur lhémifphère boréal , fera déterminée par l'aétion magnétique de toutes les parties de la terre : ainfi, fi l'action réunie de tou- tes ces forces , détermine la Bouflole à former un angle B 9 x avec le Méridien, ce fera parce que le fluide magnétique fera plus denfe dans la partie OCN, que dans le quart d’hémifphère ECN: on peut faire vice versé un raifonnement femblable par rapport à la partie auftrale ES O de la terre. Si E repréfente l'Eft, & © l'Oueft, à mefure que le Soleil 264 RÉCHERCHES, &c s’'approchera du Méridien du lieu où la Bouflole eft placée, il chafléra le fluide magnétique de la partie ECN , dans la partie OCN: ainfi, la denfité du fluide augmentera dans la partie de lOueft, & diminuera dans la partie de l’'Eft: ainfi, fi © écoit le centre de toutes les forces qui follicitoient l'Aiguille lorfque le Soleil étoit en E , ce centre + fe portera vers l'Oueft en #’, & la déclinaifon augmentera, jufqu'à ce que le Soleil fe trouve placé dans le même Méridien que ce centre 9’; & comme la déclinai- fon porte à préfent dans nos climats l' Aiguille vers lOuet, il doit arriver que la déclinaifon augmentera encore quelque tems après le paflage du Soleil dans le Méridien du lieu où fe fait lobfervation. Lorfque le Soleil fe trouvera à l'Oueft du Méri- dien où cft placé le centre ®, il eft clair que pour lors la décli- naifon doit diminuer; d’où il doit fuivre le mouvement périodi- que des variations diurnes. Si le fluide magnétique étoit répandu fimmétriquement autour du Pole du monde: fi le Soleil parcouroït toujours le même cercle, & à une même diftance de la terte, le mouvement diurne de la déclinaifon de l'aiguille’ pourroit être parfaitement régulier , & le centre 9 parcoureroït un ovale exaétement fer- mé. Mais la différente denfité de ce fluide dans les parties de l'Eft & de lOueft; le changement de pofition du Soleil doit faire, ou que ce centre ne viendra pas au point @ après une révolution diurne , ou qu'il pourra être porté plus loin; en forte que ce centre parcourera tous les jours, non pas un ovale exa- €tement fermé, mais une ligne fpirale ; ce qui produira le mou- vement annuel , obferve dans la déclinaifon depuis plus d’un fiécle, FIN DES PIÈCES DES PRIX MÉMOIRES Jar. Etrang. Tom.LX. Par. 264, î 3 fear. Etrang: Tom . IX, Pay. 26! | fs f uv, Lino Tom Jçar. Elrano . Im. IX, Pz7. 26 4 r nr. WE j HAN EnIET Ju LR À CRT PT node dre € pe Nb eee À ‘ Pl ie ‘ $ 4 è DA SAUCE 1 Je SEA 7 ge û LINE Te SORA LARQUS male Er EE une. } he po een Ab! dt 46 CE hat TA l PI. À. Aime à Jar. Etrang. Tom. IX : Prg. 264. LL a I L \ ( K [e S 5 / ( 7 F 3 “ . LA SE 1 ‘ À LA T4 Fe L MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUE Ve à DE PHYSIQUE, Préfentés à l'ACADÉMIE DES SIENCES par divers S'AVANS, & lus dans fes ASSEMBLÉES. Tome IX. L1 —_ PREMIER MEMOIRE SUR LES BANDAGES, PROPRES A RETENIR LES HERNIES; dans lequel on examine en détail les défauts qui les empêchent de remplir leur objet. Par M GEOFFROL “tn Exvzre les Auteurs qui ont travaillé à la éorre&tion des | Prémté AM Are, st à l’Académie Bandages, les uns fe font bornés à établir des principes des sciences, , LA . - énéraux fur la manière de prendre les mefures, fur da 1e 27 Novem- " É : bre 1776. conftruction des Bandages, & fur leur manutention. 1 Les autres ont propofé différens moyens de remédier à quelques inconvéniens dépendans de la nature &: du volume des Hernies. Le plus grand nombre attribuant l'inefficacité du Bandage dans plufieurs circonftances , au défaut d'une compreflion fufifante, ont cru trouver le poinc de perfection defiré, dans des machines compliquées propres à oppofer une réfif tance proportionnée à l'impulfion des parties, fans avoir égard aux inconyéniens qui peuvent fouvent en réfulcer. LI ij 268 MÉMOIRE Très-peu fe font occupés effentiellement du mécanifme des Bandages ; cependant, en examinant attentivement leur aétion fur les parties qu'ils touchent, il eft facile de recon- noître que leur ineffcacité & plufieurs mauvais effets, que lon attribue fouvent à des caufes éloignées, ne dépendent le plus ordinairement que des Bandages mêmes & des divers déplacemens qu'ils éprouvent. Le petit Traite de M. Dejean, intitulé : Ouvrage touchant Les Hernies ou Deftentes, & celui de M. Blegny, Edition de 1676, font prefque les feuls où la matière Be envifagce fous fon vrai point de vue. M. Camper à aufli donne dans le dernier volume des Mémoires de l’Académie de Chirurgie des Remarques, très-judicieufes fur la conftruc- tion [des Bandages & fur leur aétion mécanique; il eft fâcheux que ces Auteurs n'aient pas donné à leur ouvrage toute l'étendue qu'exige l'importance du fujet, & dont ils étoient capables. En réfléchiffant fur les moyens les plus propres à perfec- tionner ces machines, j'ai cru que le plus sûr étoit de com- mencer par bien connoître les défauts de celles qui font le plus en ufïge. Mais, pour fe flatter d'y parvenir, il eft indifpenfable de bien connoître la nature de la maladie, la ftruéture naturelle des parties fur lefquelles le Bandage doit agir, les vices de conformation , les degrés d’embonpoint, de maigreur & de fenfibiliré des malades, l’'aétion mécanique des Bandages dans l'état de repos ou de mouvement, la nature des matières qu'on emploie pour leur conftruétion, enfin les caufes accef- foires qui peuvent changer leur effect & les rendre inutiles ou dangereux. À cet effec, après avoir pris, autant qu'il m'a été poflible toutes les inftruétions relatives, je ne me fuis pas contente d'obferver l'action mécanique des Bandages fur un nombre SU RUETES BAM ND À G ES 880 fuffifant de malades; mais, pour en juger avec plus de préci- fon, je me fuis aflujéti pendant long-tems à les porter moi- même, & craignant encore de me tromper , J'en ai imaginé un qui neft propre qu'à faire des eflais & rendre fenfible ce qui fe pañle fous les pelotes dans les divers mouvemens du corps. Pour qu'un Bandage foit bon, il faut que, dans quelque attitude que prenne le corps, il porte par-tout, qu'il oppofe une réfiftance conftante & toujours égale aux parties qui fe préfentent pour s'échapper. Malheureufement il n’eft pas toujours facile de lui donner ce degré de perfeétion; les changemens variés dépendans du malade ou du Bandage même, occafionnent des déplace- mens contradiétoires à l'effet que l'on defire, Ces déplacemens, qui jufqu’à ce jour me paroiflent n'avoir été obfervés qu'en partie, & très-fuperficiellement, influent trop fur le mécanifme des Bandages, pout ne pas mériter une attention particulière, J'établirai donc trois efpèces de déplacemens que je défigne par déplacement de corps du malade; déplacement de pelote & déplacement de cercle, qui les uns & les autres ont dif. férens degrés, & peuvent avoir lieu féparément ou quelquefois agir de concert pour nuire à l'effet du Bandage : quoique le fer d'un brayer ne décrive pas direétement un cercle, je me fervirai ‘toujours de ce terme parce qu'il ne fait rien à la chofe & qu'il -eft confacré par l’ufage; j'entends par pelote du Bandage, cette païtie de la garniture qui bouche l'ouverture par-où fortent -les defcentes ; j'appelle plaque de Bandage, cette partie du -fer fur laquelle eft coufue la pelote; ainfi, quand je parle d'un Bandage nud, je ne peux me fervir que du terme de plaque, & fi le Bandage eft garni, Jemploie l'une & l'autre dénomi: nation , fuivant le befoin. Je diftingue deux déplacémens de corps ; le premier à 270 MÉMOIRE lieu toutes les fois que le malade affis ou debout, s'incline En avant pour agir dans cette attitude, Ce déplacement fouffre autant de variations quil y a de degrés d'embonpoint & de maigreur dans le malade, que la flexion du corps eft plus où moins grande, & que les fié- ges fur lefquels il s’afied font plus ou moins bas. J'appelle deuxième déplacement de corps, celui qui arrive fur nombre de fujets dans la fituation horizontale ; alors le même Bandage, qui, le malade debout, s'appliquoit exacte- ment, laifle un vide à la partie fupérieure de la pelote, quelquefois aufli à fa partie moyenne, où au moins une dimi- nution de compreflion; il n’y a alors que la partie inférieure qui paroïfle n'éprouver aucun changement, principalement fi elle s'étend jufqu'au pubis & que le Bandage ait la réaction néceflaire. Ce dernier déplacement eft fenfble, il eft même vifible; puifqu'à certains fujets il laïffe un pouce de vide à la partie lupérieure de la pelote; il n'en eft pas ainfi du premier dé- placement, qui, quelquefois eft fi peu fenfible qu’on pourroit le révoquer en doute; ce n’eft que pour m'aflurer parfaite- ment de fon exiftence que j'ai imaginé le Bandage annoncé précédemment & dont il neft pas inutile de faire ici la defcription. Planc. 1. À la face antérieure d’une plaque de Bandage, j'ai fait #78" siver trois morceaux de cuivre de forme cylindrique, l’un à la partie fupérieure , l’aurre À la partie moyenne & le troi- fième à la partie inférieure. Ces trois cylindres creufés dans toute leur longueur & ayant trois quarts de pouces de cir- conférence, débordent la face poftérieure de la plaque, de manière à fe trouver de niveau & à fleurer la pelote du Ban- dage qui eft en liège de forme ordinaire & percée de trois crous pour les recevoir. Aux deux parties latérales de la plaque, font aufli rivées —=\ TANT ion FL, 12644: be w F 5 r y ee “ap . Ÿ ‘ x | äeux ptites pointes, qui débordent la face poftéricure de deux à trois lignes, & fervent conjointement avec les cylin- dres à maintenir en place la pelote de liège & l'empêcher de vaciller. 2 Dans le milieu & fur là longueur de Ia face antérieure de la plaque qui eft de cuivre, eft rivée une autre lame de cuivre de trois lignes d'épaifleur ; cette lame de cuivre eft percée & taraudce vis-à-vis les trous qui répondent aux cylindres, & dans chacun de ces trous ainfi taraudés, fe place une vis qui pañle à travers : ces vis font un peu affilées par le bout & débordent les cylindres, la pelote de liège & fa garniture, autant & fi peu que lon veut, & ref- tent fixées à Ja diftance que l’on juge néceflaire. La plaque neft point revêtue de toile comme il eft d'ufage , il y a feulement à fa partie latérale, qui regarde Fos pubis, une courroie très-courte & de largeur à pouvoir coudre à fon extrémité une boucle pour fuppléer au crochet & fixer le Bandage en y attachant la courroie qui fait le circulaire. , La pelote n’eft garnie qu'à la face poftérieure, c’eft-à-dire à celle qui touche le ventre; cette garniture n'eft compofée que de deux morceaux de peau de mouton , entre lefquels on met un ou deux morceaux de molton ou d'autre éroffe hineufe, & lorfque cette garniture eft fixée fur la face pof- térieure de la pelote, on la perce avec un emporte-pièce par les trous deftinés à recevoir les cylindres, enfuite on attache cette pelote comme il a été explique précédem- ment. La defcription de cette machine, paroît aflez indiquer Pufage que lon en peut faire, & la plus fimple démonftration fuffira pour inftruire ceux qui voudroient faire de femblables eflais. Suppofons que, dans un fujec quelconque, on veuille déter- 9 >» ; , = miInEf sil y à un vide ou un défaut de compreilion fous 272 MÉMOIRE la partié moyenne de la pelote; à cet effet, le malade écant debout & le Bandage fixé comme à l'ordinaire, on tourne la vis qui répond à cette partie moyenne jufqu'à ce que, débordant un peu la pelote, fa pointe fafle une légère fen- fation fur la peau & cependant aflez marquée pour que l'on s'apperçoive de fa diminution quand elle à lieu ; enfuice on fait changer d’attitude au malade, & on le met dans un plan plus ou moins incliné; fi, dans cette fituation, il fent moins la pointe de la vis; fi, le picotement n'eft pas fi con- fidérable, c'eit une preuve qu'il y aura feulement diminution de compreflion; s’il ne fent plus rien du tout, ce fera une preuve qu'il y aura un vide; enfin, fi le fujec aflis, courbé, ou droit fur fes jambes, fent également le contat de la vis, il fera démontré qu'il n’y a ni vide ni diminution de compreflion. J'obferve qu'il eft néceffaire que la partie foit rafce, fans quoi le fimple tiraillement d'un poil cauferoit une douleur qui feroit croire que la vis auroit atteint la peau, lorfqu'elle en feroit encore éloignée, & cette fenfation ne diminuant; ni n'augmentant, on en pourroit conclure à tort quil n'y auroit Jamais pi vide, ni défaut de compreflion. Après l'épreuve indiquée, pour fe confirmer entièrement dans le jugement que l'on a porté, on réicérera l'Expérience, mais en fens contraire : la vis étant remife au niveau de la pelote, on fera afleoir & courber le fujec jufqu'au degré où la diminution de compreflion avoit parn le plus fenfible ; alors on refferrera la vis jufqu'à ce que la pointe fe fafle fentir très-légèrement; enfuite on fera relever le malade, & fi le défaut de preflion eft réel, le picotement augmentera, cau- fera une fenfation plus ou moins douloureufe & toujours pro- portionnée au degré du vice dont il eft la preuve; au refte; il eft facile de voir qu'en fuivanc la même méthode, on peut également saflurer de cé qui 4e pañle aux parties fupérieures & inférieures. , SUR LES IBANDAGES. 273 Le réfultat des obfervations que J'ai faites fur une quantité fuffifante de malades ; m’4 convaincu que chez prefque tous ceux qui fonc maigres & mal conftitués, il y à diminution de compreflion, quelquefois même un déplacement fenfble, c'eft-à-dirc, un vide. À l'égard des malades gras & mufcu- leux, il n'y a jamais de vide; mais, dans certaines attitudes, on peut quelquefois, à l’aide du Bandage indiqué, obferver un défaut de compreflion. Dans les différens fujets, ces dé- fauts feront plus ou moins grands, à raifon de la flexion du corps & de la forme que l'on aura donnée aux pelotes des Bandages ; par exemple, dans un füujet très-maigre dont le pubis eft faillant, fi on fait une pelote plate, il pourra y avoir un vide même aflez grand; dans l'excès d'embonpoint au contraire, la même pelote ne pourra occafonner qu'une diminution de compreflion fouvent aflez fenfible. Je me fuis attaché d'autant plus à prouver ce déplacement, qu'il eft d'une conféquence infinie, qu'aucun Auteur n’a paru y faire une attention férieufe, & que M. Arnaud même, fans lui donner aucune dénomination, n’en parle que fuccinte- ment, comme d’un vice qui ne tire pas à conféquence, & dont il n’admet l’exiftence qu'en fuppofant les malades afis fur des fiéges très-bas & le Bandage mal conftruit : moi, je penfe au contraire, que celui qui eft le mieux fait, ne peut le plus fouvent que diminuer ce défaut. Cependant sil reftoit encore quelques doutes, fi les preu- ves que jai données paroifloient équivoques, il en eftune irré- vocable tirée de la nature des faits dont je crois pouvoir étayer mon opinion. Si les Bandages bien conftruits appliqués fur des Hernies naïflantes, qui ne font compliquées d’aucunes maladies & fur des malades encore jeunes, bien conftitués & fur lefquels il n'y à aucun déplacement apparent ; fi ces Bandages, dis-je, retiennent conftamment les Defcentes, en empêchent les progrès, & mettent les malades à couvert de tour accident, Tome IX. Mm 274 MÉMOIRE le défaut de compreflion eft idéal, ou de nulle importance; mais fi le contraire arrive, fi, comme il eft prouvé, plufeurs de ces malades voient leur état sempirer , fi leurs Def- centes augmentent de volume & par fuccefion de tems deviennent complètes, on ne peut douter que ce déplace- ment n'en foit la caufe, fur-tout fi l'on n'en peut découvrir d’autres. J'aurois voulu refferrer dans un efpace plus étroit ce que javois à dire fur cet objet ; mais l'importance de la matière m'a entrainé : je pourrois même ajouter bien des chofes, fi les bor- nes que je dois me prefcrire ne m'en empêchoient. Je pañle à la deuxième efpèce de déplacement. J'appelle déplacement de pelote , celui dans lequel cette partie du Bandage cefle de porter direétement fur l'anneau : jen diftingue de trois fortes; dans le premier déplacement, qui eft le plus fréquent, la pelote remonte plus ou moins , & laifle quelquefois l'anneau à découvert, il fe fait fur des fujets peu mufculeux & chez ceux qui, fans être abfolument maigres, ont le ventre plat & l'os pubis faillant; il y a pourtant certains cas où les perfonnes les mieux conftituées fouffrent aufli ce déplacement ; alors fi l'anneau eft bas & dilate, fi l'on n’a point remédié au défaut du fous-cuifle, qui fe relâche dans nombre de pofitions; enfin fi la tumeur eft ou d'un gros volume ou même d'un petit volume , mais caufée par la préfence de lépiploon, il eft prefque certain que les parties ne feront point maintenues conftamment en leur place. Le fecond déplacement de pelote fe fait en fens contraire au premier, & arrive à des malades extrêmementreplers, chez lef- quels la partie inférieure du ventre eft prefque portée par la pelote, & la difpofe, par fon poids, à defcendre plus bas qu'il ne faut; beaucoup d’enfans font fujets à ces déplace- mens. L'invention des fous-cuifles & des fcapulaires n’a pu remédier SURMBES)BANDAGES 275 que très-imparfaitement à ces déplacemens ; en effet, ces ban- des n’ont de valeur que dans une feule fituation , c’eft-à-dire, dans le plan droit; &, dès que le malade s'aflied ou fléchit le corps, elles ferelâchent & permettent aux pelotes de remonter ou de defcendre. Les refforts que l’on a imaginé de river fur la plaque ou entre deux plaques, ne produifent pas l'effet que l’on en at- tendoit , la ceinture de culotte empêche totalement Jeur ac- tion ; &, en fuppofant que leur jeu füc libre, une pelote ainfi armée ayant trois À quatre pouces d’épaifleur , entraîne des em- barras & des inconvéniens capables de rebuter les malades. J'appelle troifième déplacement de pelote, celui qui a lieu lorfque le malade eft couché fur la portion du cercle qui em- braffe la hanche , sil eft replet, fi le bandage eft neuf & épais en garniture, fi le malade n’en a Jamais porté , cette garniture s'affaifle par le poids du corps, le fer fe moule fur la hanche, s'enfonce dans les graifles & par conféquent la pelote avance du côté du pubis plus qu'elle ne doit, ce qui peut d'autant plus faciliter la fortie des parties, que la mañle des inteftins eft rapprochée de l'anneau; mais, quand le malade éviteroit cette fituation, le déplacement n’en auroit pas moins lieu, il eft vrai qu'il feroit plus. long-tems à fe faire; car on fait qu'il fe pañle quelquefois quinze jours , ayant qu'un Bandage ait fait fon effet : pendant cet intervalle, on le reflere de rems à autre à mefure que la garniture s'affaifle & s'imprime dans les graifles ; or elle s'affaifle & simprime plus fur les hanches que fur les au- tres parties; il eft donc vrai que la fituation ne fit qu'accélérer ce déplacement, Refte à traiter des déplacemens de cercles; j'en établis de deux fortes, ils font fouvent produits par un vice du Bandage, qui fait que fon cercle defcend plus ou moins bas, foit fur lépine, ce qui caraétérife le premier déplacement, foit fur la han- che, ce qui produit le fecond; l'un & l'autre ont été obfervés par Plufieurs Auteurs > Mais fuperficiellement, fans aucune diftinc- Mn i] 276 MÉMOIRE tion; le premier cependant en mérite beaucoup, c’eft pour- quoi je le divife en complet & incomplet. Le pu Pr complet eft celui dans lequel la queue du cercle defcend d’un pouce ou deux , fouvent plus, quelquefois moins , mais tou- jours aflez pour que le malade s'en apperçoive par la gêne & la fenfation douloureufe qui en réfulte. Le mal-aife vient de ce que la queue defcendant crès-bas & en travers fur les fefles, gêne la marche & femble faire craindre que le Bandage ne tombe tout-à fait dans la culotte; la douleur eft l’effer de limpreflion de la lèvre inférieure du cercle, qui fouvent, dans ce déplacement, poite feul fur la peau; ce déplacement ne peut avoir lieu que fur des fujets mal conformés & entièrement dépourvus de graifles. J'appelle ce déplacement incomplet, lorfque la queue du cercle ne baïfle que de quelques lignes, ou au plus d'un demi- pouce; alors il eft fi peu fenfible , que les malades ne s'en apperçoivent pas, & c'eft en cela même qu'il eft dangereux , parce que fouveut il induit en erreur & fait chercher bien loin la caufe des difficultés que l’on trouve à retenir une defcente, tandis qu'un peu plus en garde , on la trouveroït dans ce vice du Bandage. Le deuxième déplacement fe faic à la portion du cercle qui embrafle la hanche, &-arrive lorfque cette partie étant dé- pourvue de graiïfle , le cercle difpofe à gliffer par un vice dont Je vais parler, eft encore entrainé par le poids des culottes ; ce déplacement eft le plus douloureux & le plus infupportable aux malades, parce que quand il a lieu, le cercle, en baïflant, ne porte que fur fa lèvre inférieure & fur l'os des hanches qui cft très-fenfible & où il excite une douleur proportionnée au degré du vice , aux mouvemens que l’on fait & même au poids des vêtemens. Dans les Bandages fimples , ce déplacement change bien quelque chofe à la fituation de la pelote qui remonte un peu, mais fans découvrir l'anneau : dans les Bandages doubles, 1l S U RAM ES, {B AN D À CG ES. 277 eft d'une toute autre conféquence , car fi la pelote qui tient au collet, fe dérange , & remonte feulement d’un quart de pouce , la feconde pelote , à raifon de fon plus grand éloi- gnement du coller, pourra remonter d’un pouce, & laifler l'anneau prefqu’à découvert. k Le déplacement incomplet, & celui dont je viens de par- ler, peuvent avoir lieu fur les malades les mieux conftitués ; alors leur principale caufe eft la cournure vicieufe des Ban- dages qui ne portent point exaétement à plat, & dans tous les fens, fur toutes les parties qu’ils touchent. Ce défaut vient, ou de l'ouvrier qui les forge , ou du Ban- dagifte qui, ayant été obligé de les manuter, aura fuivi les régles que plufieurs Praticiens nous ont prefcrites, & qui, pour être confacrées par lufage > n'en font pas moins con- craires au but que l’on fe propole ; c’eft ce que je vais râcher de prouver. Lorfque le Forgeur n'ayant pas bien difpofé fon cercle, lui donne trop de coude , le commence GE près de la plaque, & le continue fur un trop long efpace de fer, il en réfulte que la portion qui embrafle la hanche, eft plus baffe que cette plaque, & ne porte que fur fa lèvre inférieure ; cette mauvaifé difpofition fe continue jufqu'au bout, c’eftà-dire ; juiqu'à la queue, qui n'eft plus parallèle à la plaque; le cercle aïnfi vicié, porte de plus én lus fur fa lèvre inférieure : »P P 3 la fupérieure fait une faillie plus ou moins forte , fuivant Je degté du vice, & l'épaifleur de Ja garniture ; alors fi la cein- ture d’une culotte étroite porte direétement fur ce cercle , OÙ immédiatement au-deflus ,il eft prefque impofhble que, dans les différens mouvemens du corps , il ne baifle de quelque chofe , foit fur les hanches » CE qui donne lieu au deuxième déplacement , foit fur les vertèbres > C6 qui conftitue le pre= mier; or, dans ce premier déplacement , on peut fe convain- cre par le témoignage des yeux, que deux ou trois lignes de dérangement fur cette portion de cercle, produifent au-mains 278 MÉMOIRE autant de diminution de compreflion à la partie inférieure de la pelote, & il n'en faut pas davantage pour faciliter la fortie des defcentes , même de celles qui ne font que médiocrement difficiles à contenir. Une caufe qui aide encore à ce premier déplacement , c’eft l'habitude vicieufe que l’on a de fixer le fous-cuifle à la partie moyenne du cercle; car, pour le peu qu'on le ferre, il détermine le cercle à defcendre. Voilà un défaut contre lequel on n’a jamais été prémuni, & dont les auteurs n’admettent l’exiftence , que dans fon plus grand degré , fans diftinétion ni dénomination , & feulement fur des fujets appauvris , & abfolument dénués de graïfles : ce que je viens de dire, montre la néceffité qu'il y avoit d’afligner plufeurs degrés à ces déplacemens; jai tâché de prouver qu'ils pouvoient avoir lieu quelquefois fur les fujets les mieux conftruits, par l'inattention ou l'ignorance de ouvrier. Voyons maintenant fi le Bandage le mieux forge, n'eft pas fufceptible d'acquérir ce vice, en paflant par les mains du Bandagifte. On fair que le Bandage le mieux forgé, ne s'applique pas indifféremment fur routes fortes de malades, que même, en le fuppofant fait exprès pour le fujet, il eft fouvent nécefaire que la manutention lui donne le dernier degré de perfeétion; cela poié , imaginons qu'un Bandage bien forge, bien tourné dans toutes fes parties, ait feulement le défaut de trop comprimer a la partie inférieure de la pelote : comme il en réfulceroit nom- bre d'inconvéniens , on fe hâte d'y remédier, & voici pour cela les préceptes que plufieurs Auteurs prefcrivent. «Dans » le cas où la pelote d'un Bandage à gauche comprimeroic » trop à fa partie inférieure , l'on doit empoigner cette pe- »lote de la main droite, & le cercle du Bandage de la + main gauche , & dans cette pofition , la main droite jetera S'U RIM SIBIAIN D'À G E S LlLa » cette pelote en-dehors.» Il eft bien vrai qu'en procédant ainf, l'on paroîtra jeter cette pelote en-dehors; mais com- ment ne seft-on point apperçu que cette façon de faire eft illufoire? que ce n'eft point cffeétivement la pelote qui change de poñition, mais feulement le cercle du Bandage dont la queue remonte plus haut qu’elle ne doit; ce qui eft indifpenfable , parce que cette dernière partie eft flexible , & que la pelote ne l'eft pas , encore moins le collet, auquel elle eft continue : ce n’eft donc ni lun ni l’autre qui obéit, & quoique la main droite agifle , & que la gauche paroifle ne faire qu’entretenir , il n’en eft pas moins vrai que la pre- mière, en voulant corriger le défaut de la pelote, en fait contracter au cercle un autre plus confidérable :il fe gauchit, & la queue qui remonte plus ou moins , n'eft plus parallèle à la pelote ; elle acquiert la difpofition vicieufe de porter fur fa lèvre inférieure , & par conféquent d’être fujet à glifler fur l'épine. Outre ce premier vice, qui dépend de la manutention , il en eft un autre qui, quoique peut-être moins confidérable, eft encore l'effet de la même caufe ; il à lieu lorfqu’on veut manuter en fens contraire; c'eft-à-dire, lorfque l’on veut augmenter la compreflion de la partie inférieure de la pelote; alors les mains changent de place, la gauche empoigne la pelote , la droite fe faifit du cercle, & en agiflant de la pre- mière , on fait rentrer cette pelore en-dedans , c’eft-à-dire , qu’au lieu de faire remonter le cercle comme dans l’autre cas, on le force à defcendre en proportion de ce que le défaut qu'on veut corriger , eft plus ou moins grand , ce qui au moins gêne le malade , & diminue la faculté comprefive du Bandage , en faifant perdre le parallèle à fon cercle. J'ai tâché de prouver que l'inftabilité du Bandage, eft la principale caufe des difficultés que l’on trouve à retenir les defcentes ; j'ai indiqué les déplacemens qui y donnent lieu, 280 MÉMOIRE & leurs différens degrés ; il me refte maintenant à propofer les corrections que je crois propres à prévenir ces divers in- convéniens, & à donner au Bandage une aétion ftable & per- manente dans toutes les fituations; ce travail fera la matière d'un fecond Mémoire. SECOND MÉMOIRE SU RIUIMENS MB ASNLD) A G ES: 281 SECOND MÉMOIRE SUR Les MoyENs de corriger les défauts des Bandages énoncés dans le Mémoire précédent. Pour expofer avec méthode les moyens de remédier aux défauts de la plupart des Bandages dont on à coutume de faire ufage , je fuivrai l’ordre des divers déplacemens que Jai établi dans le premier Mémoire, J'ai d'abord dit que je reconnoiflois deux déplacemens de corps, dont le premier, & encore plus le fecond , occa- fionnent un vide à la partie fupérieure de la pelote, quel- quefois aufli à la partie moyenne, ou au moins une dimi- nution de compreflion ; c’eft donc fur ces deux parties de la pelote , que les correétions doivent porter , car fi le Ban- dage eft bien appliqué , s'il a la réaction néceflaire , s'il eft ferré comme il convient, & file malade ne saflied pas fur des fiéges très-bas, il eft certain que la partie inférieure de la pelote, refte fixée fur le pubis, à moins que la maigreur du malade n'oblige le Bandage à remonter ; alors ce n’eft plus un déplacement de corps, mais de la pelote, qui glifle par le défaut du fous-cuifle , & c’eft pofitivement ce qui caraétérife le premier déplacement de pelote dont j'aurai oc- cafñion de parler dans la fuite, en indiquant le moyen d'y remédier. Si ceux qui ont cherché à perfetionner les Bandages ; avoient bien reconnu la véritable caufe des déplacemens dont il eft queftion, ilsfe feroient moins occupés de la partie inférieure de la pelore; cependant le Bandage à vis de M. Delaunay, Tome IX. No 282 MÉMOIRE celui à reflort, à roix (que plufieurs Auteurs ont ancienne- ment revendiqués), ne paroïflent avoir d'autre objet que d'augmenter la compreflion de cette partie inférieure, d'où néceflairement il réfulte un inconvénient qui n’a point échappé au génie obfervateur de M. Arnaud. « Quelques-uns (dit-il), + ont voulu augmenter le point de compreflion, en ajoutant » à la pelote un reflort à noix, avecun arc-boutant qui fixe » cette noix, & qui fait approcher davantage la pelote par » le bas, fans confidérer que fi l'on augmente la compreflion » dans la partie inférieure , on la diminue dans la partie fu- #périeure , & la hernie s'échappe par le haut.» Quoique l’Auteur, que je viens de citer, ne trouve aucun mérite à cette invention, je crois cependant qu'il eft des cit- conftances où elle peut être de quelque utilité; par exemple, lorfque les malades font fi fort chargés d'embonpoint , que le volume de la graifle empêche la compreflion immédiate de la pelote; mais alors le Bandage à vis me paroitroit mériter la préférence. Pour ne point tomber dans l'inconvénient oppofé à celui que M. Arnaud a relevé; c’eft-à-dire, pour augmenter la com- preflion des parties fupérieures & moyennes de ia pelote, fansdi- minuer celle de la partie inférieure , j'ai imaginé un Bandage qui me paroit propre à remplir cet objet; mais, pour me ren- dre plus intelligible dans la defcriprion que je vais en faire, je crois qu'ilne fera pas inutile d’écablir quelques généralités fur la divifion des Bandages. On divife ordinairement un Bandage nud en cercle & en plaque ou platine: dans le cercle, on diftingue deux faces ,- lune convexe, l'autre concave; deux bords ou lèvres, l’un - fupérieur , l'autre inférieur, & deux extrémités , dont lune, qui tient à la plaque, fe nomme le coller, & l’autre la queue : la plaque fe divife en faces & en bords; chaque face fe diftin- gue en antérieure & poftcrieure , & fe fubdivife en partie fu- périeure, moyenne & inférieure. SUR LÉSIBANDAGES 2183 Des bords , il y en à un fupérieur , un inférieur , & deux latéraux, dont l’un eft interne & l’autre externe; la longueur de la plaque fe prend de la partie fupérieure à l'inférieure , & fa largeur d’un bord latéral à l’autre; lorfque la plaque eft garnie , on lui donne le nom de pelote ou écuflon; le Ban- dage, qui n’a qu'une pelote, eft fimple; s'il en a deux , il eft double. Lorfqu'il entre deux plaques ou platines dans la compofi- tion d’un Bandage fimple ; fappelle antérieure celle qui eft la plus éloignée du corps, & poftérieure celle qui eft la plus proche ; ces divifions, que je pourrois étendre beaucoup plus loin, me paroiflent fufhfantes pour faciliter l'intelligence des corrections que je vais avoir l'honneur d’expofer à l'Académie. Pour remédier aux deux déplacemens de corps dont j'ai parlé , jemploie un Bandage compolé de deux platines, jointes par charnières à leur partie inférieure ; la plaque poftérieure cft mife en mouvement par l'attion de deux reflorts, quifonr rivés près du bord fupérieur de la plaque antérieure , & s'étendent latéralement jufqu’au bas de la poftérieure. Au moyen de cette fimple mécanique , la platine poñté- rieure mobile dans toute fa longueur , s'éloigne ou fe rap- proche de l’antérieure par degrés, fuivant le befoin, & en proportion du plus ou moins de réfiftance que lui offrent les parties. Le malade étant debout, les deux platines fe touchent pour l'ordinaire , ou laiffent très-peu de diftance entr'elles. Dans la flexion du corps, elles s’éloignent plus ou moins, fuivant les circonftances : dans la firuation horizontale; l'écar- tement eft encore plus confidérable , parce qu’alors l'affaife- ment des parties occafionne un plus grand vide. Enfin la pelote nagit pas feulement par fa partie fupé- ricure, pour produire l'effet qu’on en attend ; la moyenne, qui Naï PLANC. I, Fig. 17 & y. PLANC.II, Fig. F1, WII. 284 MÉMOIRE répond direétement à l'anneau , fe rapproche également du corps , en taïifon du vide qu’elle a à remplir. Pendant ces différens changemens, la partie inférieure de la pelote, difpofée pour faire une prefion fufifante , refte ordinairement fixée fur le pubis, & fi, par quelques circonf- tances, qui ne peuvent dépendre de la mécanique du Ban- dage , elle ne comprimoit pas aflez , on auroit toujours les reflources de la manutention , qui ne peut en rien diminuer le jeu des reflorts. J'ajoute encore que les vêtemens ne peuvent nuire à l'aétion de ce Bandage, & que la mécanique agiffant de bas en haut, n'en eft que mieux difpofce pour foutenir les parties. Je pañle aux correétions propres à remédier aux trois dé- placemens de pelote , & à l'empêcher de remonter, de def- cendre, ou de fe porter trop , ou trop peu en avant: comme la pelote remonte plus fouvent qu’elle ne defcend , & que ces deux déplacemens fe corrigent l'un comme l'autre, c'eft au premier que Jappliquerai mes moyens. J'ai dit que ce déplacement arrivoit plus fréquemment aux fujets maigres & mal conftitués; cependant il eft nombre de circonftances où les perfonnes replètes, attaquées de her- nies gliflantes & difficiles à contenir , font obligées d'avoir recours aux fous-cuifles , dans l’efpérance de pouvoir , par leur moyen , maintenir leur Bandage; il fuffit de connoître la dif- polition que ces fortes de Bandes ont à fe relâcher dans les différentes attitudes & l'effet qui en réfulce , pour fentir com- bien elles font peu propres à remplir l’objet qu'on fe propofe: Pour remédier à ce vice, je me fers d’un barillet avec fon reflort, tel que ceux que les Horlogers emploient , à l'exception du rocher, que l’on peut cependant ajouter, fi on a befoin d'augmenter ou diminuer la force du reflort ; ce! barillet, qui eft caché en partie dans l'épaifleur de la Javans Etrangers. Pay 284 , Tom, IX, PL. I. \ | 14 ÿ AN ( ! à TU km 4% CARPE RLEURE L77YE1 1 rs - = 4 me % ane … LE + . dant: ait ài | \ F pré | 1e À “ : | = ui? | JT IL OURS Lente aénntne op cote da Et de en 0 eue ee mie tenais + pe 2 ne mes à ee pain pod mme ed om à à 4 Ÿ wi ” : € SUR LES BANDAGES. 285 plaque , près de fon bord fupérieur , eft couronné par une longue poulie fixée fur fon arbre. A côté eft une bafcule prefque de la longueur de la plaque; certe bafcule, fixée à fa partie fupérieure, par une vis à têre perdue ou fraifée , eft revêtue à fa partie inférieure, d’une chappe qui loge une petite poulie pofée fur champ, & main- tenue par une goupille qui traverfe la chappe. Cette bafcule n'étant fixée à fa partie fupérieure , que par une vis qui ne gêne point fes mouvemens , elle a la Jiberté de parcourir prefque un demi-cercle fur la plaque , vers fa partie inférieure. Une corde à boyau, qui part de la grande poulie fur la- quelle elle fait un tour , vient gagner la bafcule , & après avoir parcouru fa longueur , vient pañler fur la deuxième poulie, pour fortir par un petit trou fait à la chappe, &en- fuite étre fixée par plufieurs points d’aiguille à l’un des bouts du fous-cuiffe. Pour empêcher le frottement des vétemens de nuire à l'ac- tion du reflort , toute cette mécanique eft recouverte par une lame d’acier très-mince , qui souvre à charnieres. Pour que cette machine remplifle fon objet, il faut quele malade ait l'attention d’attacher le fous-cuifle étant debout; qu'avant de le fixer parderrière au bouton deftiné à cet ufage, il le tire aflez pour l’éloigner de la pelote , au moins d'un pouce, alors à chaque mouvement du corps qui relà- chera le fous-cuifle , le reflort le fera remonter. Il obéira donc à tous les mouvemens, & tiendra toujours le fous-cuifle au degré de tenfon néceflaire, & par confé- quent empéchera la pelote de remonter. . Au refle, dans cetté correction, comme dans celle que Jai indiquée pour remédier aux déplacemens de corps ; l'on PLANC. Il, Fig: P1II, 1X & vx. 286 MÉMOIRE peut & l’on doit proportionner la force des teflorts à celle des malades , & au degré de la maladie, Si, dans le fecond déplacement où la pelote defcend trop bas, le fcapulaire dont on fait ordinairement ufage , croit infuffifant , parce qu'il eft également expofé à l'inconvénient du relâchement des Bandes , on pourroit fe fervir des mêmes moyens, en difpofant le reflort pour agir en fens contraire. À l'égard du troifième déplacement de pelote, dans lequel cettæ partie fe porte en avant, pour y remédier, je fais ufage d'une vis de rappel » qui, par la plus petite gradation, ramène la pelote vers l'os des îles au point defiré. Cette même vis agiflant dans un fens contraire , porte aufi la pelote en avant, c'eft-à-dire, vers le pubis, ce qui peut devenir très-utile dans plufieurs circonftances. Par exemple, fi un malade , dans un état de maigreur , porte un Bandage dont les rapports foient parfaits , & dont la jufte application produife l'effet qu'il en attend ; fi, dis-je, ce malade vient à prendre de l'embonpoint; alors le Ban- dage éprouvera néceflairement un déplacement , parce que le volume de la graifle, qui recouvre les hanches, éloignera en proportion la pelote du pubis; dans ce cas, la vis de rappel fervira à rapprocher la pelote, & à épargner les frais d'un nouveau Bandage, qui, fans ce moyen, deviendroit indifpenfable. Outre ces avantages qu'on ne peut révoquer en doute ; cette mécanique en préfente encore une autre , en pouvant remédier, jufqu’à un certain point, à l'inexaétitude des mefures que les malades de la Province envoient aux Bandagiftes qu'ils ne font point à portée de confulter. Pour bien fentir. l'effet de la vis de rappel dont il eft queftion , il eft bon d’obferver que le cercle du Bandage, au lieu d'être d’une feule pièce avec la plaque, comme il eft SUR LES BANDAGES 287 d'ufage , doit être forgé féparément , & qu'il faut avoir lat. tention de donner à fon collet autant de longueur que la \ plaque a de largeur à f1 partie fupérieure. Dans l’épaifleur de cette alonge du cercle , l’on pratique une coulifle pour donner paflage à deux conduits À chapeau , qui, d’une part, traverfent la plaque fur laquelle ils font rivés & fixés folidement, & dant les têtes de l'autre part, recouvrent les bords du cercle, fans y être attachés. La vis , ainfi que la partie du cercle à laquelle elle répond, eft placée le long du bord fupérieur de la plaque ; fa tête afeure le bord latéral interne de cette même plaque , qui, pour cet effet, eft échancrée. ‘10 Au bord de l'échancrure eft un petit coller, qui embrafle la vis immédiatement au-deflous de fa tête, & qui eft fixe & rivé fur la plaque, le bout du cercle eft taraudé pour re- cevoir la vis qui, chaque fois qu'on la ferre ou defferre , force la plaque à s'éloigner ou à fe rapprocher. Il me refte à parler des corrections propres à remédier aux deux déplacemens de cercle ; ils reconnoiflent approchane les mêmes caufes ; le premier dont Je parle d'abord, fe fait par la mauvaife conformation ou du Bandage ou du malade f par f négligence ou fon peu d'aptitude, enfin par le défaut de fes vétemens. Plufeurs Auteurs ont déjà indiqué les moyens de re- médier à la plupart de ces inconvéniens » & les malades , en fe rendant plus foigneux & plus attentifs , en portant des culottes hautes & larges, & en ÿ Joignant des bretelles , parviennent eux-mêmes à corriger ces défauts; il n’en eft pas de même des vices de conformation , qui préfentent plus de dificulrés, & exigent un artifte inftruit, pour déterminer , füivant les cir- conftances, les moyens convenables qu'il faut employer. Ces moyens jufqu’à ce jour , fe font bornés principalement PLANC. Ill, Fig. x1. 288 MÉMOIRE à la manutention du Bandage , ou à fe fervir de bandelettes pour fixer la queuc; mais l'expérience journalière démontre que le plus fouvent elles font infuffifances, & n’empêchent pas que le deplacement n'ait lieu. Comme ce vice eft effentiel, qu'il caufe de la douleur, donne prife aux ceintures de culottes, & difpofe le Bandage à fe déplacer, je crois pouvoir y remédier , en fendant le cercle en deux parties , fuivant fa longueur , jufqu’à la portion qui embrafle la hanche à laquelle , ainfi qu'au collec, je laïfle toute fa force. Ces deux lames, plus étroites & plus flexibles, acquièrent Ja facilité de mieux s'appliquer à la région lombaire, leur écartement leur permet de s'infinuer (fur-tout dans les per- fonnes maigres) entre Îles éminences faillantes des vertèbres , où elles trouvent un point de réfftance qui les empêche de glifler ; fur les nee replets , elles simpriment plus faci- lement dans les graifles , & y reftent fixées avantageufement. Enfin le Bandage conferve la même réaétion , &, ce qui n'eft pas indifférent, c’eft que chacune de ces lames armée d'une courroie, peut agir féparément ou enfemble , fuivant qu'il eft néceffaire : ces deux courroies arrêtées à deux cro- chets qui font rivés fur la plaque, aflujétiflent beaucoup mieux le Bandage; celle d’en-bas fur-tout paroît augmenter la preffion de la partie moyenne de la pelote (effet qu'une feule ceinture ne produit pas). J'ajoute encore que le Bandage ne perd rien de fa folidité, parce que j'ai la précaution de ne point diminuer la force de la partie qui embrafle la hanche, ni celle du coller où fe pañlent les plus grands efforts du Bandage, & où il cafle le plus ordinairement. Mais que deviendra la manutention prefcrite par différens Auteurs, & dont j'ai déjà fait voir les inconvéniens? L’in- fpection feule de ce Bandage fuffic pour démontrer qu’elle ne peut Re Je = ji “il pe nn Pi u | CE | TT il Li ia Dnbt 7 2 Jaédee AR 3 RES at - s F S'HRMEMES AB AIN D:A GES 289 peut plus avoir lieu; car, en prenant la queue du cercle pour faire lever ou baifler Ja pelote , comme il eft d'ufage , les lames fe faufleroient, ou fe croiferoient l’une fur l'autre ,. & le moyen de les rétablir, ne feroit pas facile; aufli ce n’eft pas de cette façon que je procède : le collet étant la partie la plus forte, & celle fur laquelle on veut directement ma- nuter , il me paroît plus naturel & plus méthodique de diriger fes efforts vers cette partie. Pour y réuflir, je me fers de deux pinces à vis, dont l’une embrafle le bord inférieur du cercle , & l'autre fon bord fu- périeur , de manière qu'il foit contenu dedans {ur fon plat. Je place la première de ces pinces la plus près qu'il m'eft polible de la plaque, & la feconde, à deux pouces ou en- viton de diftance ; c'eft dans cet intervalle que fe fait la ma- nutention , de forte que la pince la plus proche de la plaque la fait aifément baifler ou lever » pendant que la feconde ne fert qu’à contenir le cercle, & à former le point d'appui. Alors le cercle fe contournant un peu dans cet endroit ; difpofe la plaque à produire plus ou moins de compreffion, fans expofer la queue au moindre changement: fi le vice à corriger étoit confidérable , €n forçant la manutention , le fer Pourroit acquérir une difpofition à préfenter fa lèvre infé- rieure ; mais ce feroit direétement vers le pli de la cuifle, où l'enfoncement qui s’y trouve ordinairement, indique une gat- niture plus épaifle , qui fuffroit pour corriger ces petits dé- fauts; ces pinces dans le befoin , font également propres à redreffer le cercle dans tous les points de fa circonférence. Malgré l'avantage de ces correëtions, il eftdes circonftances où elles deviennent infuffifantes pour remédier au déplace- ment complet du cercle dont il eft principalement queftion; alors il faudroit employer un barillet placé derrière & au- deflus du cercle, & auquel viendroit s'attacher une bande de futaine paffée fur l'épaule. Tome IX. Oo PLANC. III, J'ig. x11. 290 MÉMOIRE Quant au deuxième déplacement, qui fe fait fur la partie du cercle qui embraffle la hanche, & y caufe une douleur crès-vive (comme M. Arnaud Va obfervé,) on y remédie quelquefois en fubftituant au Bandage coudé, un collec droit, dont la lèvre inférieure fe déjette en dehors, & qui, en partant de la plaque , ait une légère difpofition à remonter fur la hanche. Si ce moyen eft infufifant , jemploie un autre Bandage ; dont voici la defcription. La platine & le cercle de ce Bane dage font forgés féparément : la première eft fendue fur la hauteur; cette fente, d'environ un pouce & demi, eft den- telée au rebord qui regarde la cuïfle, le cercle du Bandage eft fixe à la plaque vers fon collet, avec un feul river aflez lâche pour lui permettre de fe mouvoir; ce cercle eft percé à fon extrémité antérieure, vis-à-vis l'ouverture de la plaque, un pignon qui traverfe le trou du cercle à l'ouverture de la plaque , engraine avec les dents de cette dernière, & donne la facilité de baïfler le cercle, en tournant un anneau qui ré- pond au pignon , & le cercle , en baïflant vers la partie infé- rieure de la plaque , haufle en proportion , fur la partie qui gmbraffe la hanche, & refte fixe à la diftance que l’on veut. À l'aide de cette mécanique, non-feulement le cercle re- monte, mais fa lèvre inférieure fe rejette d’aurant en dehors; & fi, malgré cette corretion, & la précaution de fixer la ceinture par deux courroies, il defcendoit encore un peu au-deflous de fa pofition naturelle , il ne cauferoit aucune douleur , parce qu'il porteroit à plat. Si, outre la mauvaife conformation du malade , ii fe trou- voit encore des obftacles produits par la nature de la ma- ladie, ceft-à-dire, fi la hernie étoit ancienne, d’un gros vo- lume, & caufée par la préfence de l'épiploon, comme ces fortes de defcentes offrent des difficultés prefque infurmon- tables , je crois qu'on pourroit joindre à cette mécanique la Méthode de M. Camper, & donner au cercle du Bandage Eu 3 { À: SUR MMES LB AIN DA G ES: 298 la longueur néceflaire pour ceindre un peu plus des trois quarts & demi du corps : malgré les embarras & les inconvé- niens qu'entraîne néceflairement l’ufage de ces fortes de cercles, & dont l’Auteur convient lui-même avec franchife, le défaut de moyens plus convenables, m'a quelquefois obligé de les employer , & je crois que l’on auroït une parfaite réuflite , fi leur forme & la manière dont il faut les mettre, ne les ren- doient pas incapables de conferver long-tems leur réaétion. Comme il pourroit fe trouver (quoique très-rarement) des circonftances où il feroit néceflaire de joindre plufeurs de ces corrections fur le même Bandage, pour faire voir que la choie eft facile, j'en ai fait fabriquer un, fur lequel je les ai réunies toutes les quatre , & dont la defcription feroit inu- tile, puifqu'il ne contient qu'une poulie de plus, & un chan- gement de place dans le barillet. Ce Bandage , quoique très-compofé , ne paroït cependant ni plus lourd , ni plus embarraflant que la plupart des brayes ordinaires, & beaucoup moins que certains Bandages de nou- velle invention , qui n’ont pas une utilité aufli étendue. D’après les corrections que je viens d'indiquer , & la di- vifion des caufes qui les rendent néceflaires , 1l eft facile de juger du degré de confiance que l’on peut donner à la plu- part des Bandages que l’on annonce chaque jour , & dont lon vante les effets merveilleux pour contenir toutes fortes de defcentes. _ Je conviens qu'il en eft dans le nombre qui peuvent réuffir dans plufieurs circonftances ; mais jofe dire avec la même franchife , que je n'en connois point qui puifle remplir toutes les indications qui fe préfentent : je dis plus ; le même Ban- dage qui auroit la propriété de remédier à un déplacement, peut être inutile , & même dangereux dans une difpofition contraire. Plus les caufes des déplacemens font multipliées, plus elles Oo ij PLANC. IV, Fig. x, XIV, XV, XVI PLANC. V, Tig. x v11 & x VIII, 292 MÉMOIRE exigent de moyens variés; c'eft une vérité dont conviennent (au moins intérieurement), tous ceux qui annoncent leurs Bandages comme propres à tout Âge , à tout fexe, & à toute maladie, Le zèle avec lequel l'Académie éclaire les Arts, & facilite leurs progrès, l'empreflement de chacun de fes Membres à mettre fous les yeux du Public les fruits de leurs travaux, m'ont facilité les moyens de perfcétionner un Bandage ima- giné depuis plus d'un fiècle, & que fes défauts ont depuis Jlong-tems fait abandonner. (Je veux parler du Bandage de fil de fer.) D'abord je m'étois imaginé que la mauvaife qualité de la matière, pouvoit contribuer aux inconvéniens qu'on lui reprochoit; mais, en lifant l'art du fil de fer par M. Duha- mel Dumonceau , Jai vu au contraire quels foins l'on apporte pour choïfir le meilleur fer; j'ai appris qu'il faut que les différentes efpèces que lon emploie, aient été forgées & tirées dans les allemanderies , que l'on avoit l'attention de n’y laifler ni pailles, ni criflures, ni grains ; enfin Jai appris que les marteaux de lallemanderie en alongeant les barres de fer, leur donnent du nerf, les rendent plus duc- tiles, ce qui joint aux opérations de la filière force les fibres à salonger & sétendre fur un même plan, & par conféquent à acquérir plus de folidicé. Tant de perfcétions réunies étoient fuffifantes pour me déterminer à en eflayer l'ufage ; je favois que M. Lequin employoit le fil de fer tel qu'il fort de la filière, j'ai fuivi d'abord le même procedc; &, après plufieurs effais dont je n'eus pas lieu d’être fatistait, je compris enfin que je n’ob- tiendrois aucune réaétion, tant que le fil de fer conferveroit fa rondeur & qu'il ne feroit pas écroui; à cet effet, en for- geant un peu le fil de fer, puis le battant à froid pour l'applatir en l'écrouiflant, je fuis parvenu à le rendre propre, à remplir fon objet; fa réaction eft parfaite; je crois même " Javans Era gers, Pag. 291. Tom IX, LIT BE E PU | dl | ii | D. W 4 Javans Etrangers, Pag, 292 , Tom, IX É ii | 1 | l à ù DTA || hi |A ie A AL # M Benand Julp. st SUR LES BANDAGES. 293 quil eft fufcéprible d’acquérir plus de reflort que le fer en kmes. Outre cet avantage, ce Bandage réunit plufieurs autres perfettions, il eft moins lourd que ceux dont on à coutume de fe fervir, il s'applique mieux dans tous les fens, & fe moule plus exaétement fur le corps, parce que fes branches euvent fe mouvoir féparément, pat conféquent il eft moins fujet à fe déplacer. Les’ perfonnes délicates, les femmes fur-tout dont l'ima- ination alarmée fe fait fouvent une idée défagréable de la gêne & de lincommodité des Bandages, n'en craindront plus tant l'ufage. Celui de fil de fer réuniffant aux qualités effentielles des autres Bandages beaucoup plus de légereté & de flexibilité, ne doit pas leur paroître plus redoutable ni plus incommode que les corcets baleinés qu’elles portent journellement. Il me refteroit encore beaucoup de chofes à dire fur les points de vue de cure radicale ou palliative que préfentenr, les corrections dont j'ai fait mention; mais les bornes d'un Mémoire, peut-être déja trop long, ne me permettent pas d'entrer dans tous ces détails, je les réferve pour un Traité de Bandages, dans lefquels rous ces objets feront difcutés plus au long. Avant de finir, je crois cependant ne pouvoir me difpen- fer d'obferver que fi les idées que je viens de foumettre au jugement de l'Académie, lui paroïflent de quelque utilité, fi ces idées retifiées par l'expérience & l’obfervation, pouvoient un jour contribuer à la perfection des Bandages; les bons effets qui en réfulteroient pourroient difpenfer les Malades attaqués d'Hernies d’avoir recours à ces opérations cruelles & dangereufes, qui femblent n'avoir été confeillées & prati- quées, jufqu'à cs jour, que pour mettre les Malades à l'abri 294 MÉMOIRE, &c des incommodités & des accidens auxquels les Baridages défectueux les expofent. | uoique les correétions que je viens de décrire, foient le fruit d'une longue Expérience, d'un travail réfléchi & des confeils d’un célèbre Chirurgien , fous les yeux duquel je travaille depuis vingt ans, cependant je conviens qu'il peut fe crouver des circonftances où elles paroîtront infufffances, Jai ciché de me rendre utile & de contribuer aux progrès de l'Art, mais je ne me flatte point d'être parvenu au but defiré : trop heureux, fi mes idées peuvent en fairé naître de plus avantageufes, & fi mes foibles eflais peuvent fervir d'échelon pour atteindre à la perfection. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE PREMIERE. CsTrEe PLANCHE contient deux Bandages. Les Figures, 1, 2, 3, repréfentent le Bandage d’épreuve. Les Figures 4, 5 , repréfentent le Bandage qui fert à remédier aux déplacemens de corps. Fic. L‘® Plaque du Bandage d’épreuve vue du côté anté- rieur. ABC. Les têtes des trois vis, qui traverfent les troës eylin- dres & la pelote du Bandage repréfentée par la fig. 3. D. Boucle où va fe fixer la courrote du Bandage. EF. Portion du cercle revêtue de [a garniture, Fic. IL. La même plaque vue du côté oppofe. ABC. Les pointes des trois vis qui traverfent les cylindres rivés a la platine, D. Portion de la boucle. E. Collet du cercle auquel la plaque eff fixée par deux rives. Fic. II. Za pelore du Bandage vue du côté qui touche à la plaque. ABC. Les trois trous qui reçoivent les trois cylindres repré- fentés dans la figure précédente, E. Entaille pour recevoir Le coller du cercle. Fic. IV. ABCD. Plarine antérieure & fixe. CD. Charnière qui joint les deux plaques. EF. Partie fupérieure de la platine poftérieure & mobile. B. Paffant fous lequel s’enguge la courroie du Bandage. H. Bouton pour accrocher la courroie. Fic. V..Profil du même Bandage. BD. Plaque fixe. ‘FD, Plaque mobile revêtue de fa pelote. «ED. Et auf un des deux refforts, qui font ouvrir .a vlaque. 296 FXWPAL UT C'AT ITONN PET TA NN CE VENIR: Cette Planche contient deux Bandages propres à remé- dier aux déplacemens de pelote. Fis. VI ABC. La plaune ou plaque du Bandage vue du côté antérieur. HI. Baftule qui fe termine à fa partie inférieure (1) par une chappe dans laquelle eft placée la petite poulie. L. La grande poulie d’où part la corde de boyau. LCD. Qui s’artache au fous-cuiffe DEFG. Fic. VIL. Profil de la plaque & de la garniture de la pelote. L. La grande poulie. ML. Barrillers qui renferme un reffort. C. Partie inferieure de la baftule, ou chappe qui contient la petite poulie. LCD. La corde de boyau. Entre ces deux figures on a repréfenté féparément la bafcule HI & au-deffous la petite poulie. Fic. VIIL BCD. Za plaque du Bandage monté [ur [on cercle. A. Tête de la vis de rappel, qui fait avancer ou reculer la plaque. Fic. IX. La même plaque féparée de fon cercle. D. ÆEntaille qui reçoit le coller de la vis. EF. Les deux tenons ou conduits à chapeaux, qui traverfent la portion du cercle qui eft fendue. Fic. X. Portion de cercle [éparé de la plaque. A. Trou taraudé qui reçoit la vis de rappel. AB. Les fentes ou couliffes, qui reçoivent les conduirs à cha- peaux de la figure précédente. BC. Portion de cercle du Bandage. PALUAUN CHE TL E Cette Planche contient deux Bandages propres à remé- dier aux déplacemens du cercle. Fic. XI. ABD. La platine rivée au cercle EFGH. GH. La queue du cercle, qui eft féparée en deux. C. Deux boutons rivés [fur la plaque & deflinés à fixer les courrotes, Fic. XII. D:É*S PB EL A N CH ES. 297 Fic. XII. ABC. Za plaque affemblée en C, avec le cercle CDE, par une rivure, qui lur permet de tourner en haut ou en bas, [elon que l’on tourne le pignon placé Jur l’extrémité du cercle. Fic. XII. N° 2. La plaque du Bandage précédent [éparée de fon cercle. ABC. La plaque. C. Trou de la rivure, qui fert de centre de mouvement & \ eft auffi le centre de la fente DE, dentée intérieurement pour engrainer avec un pignon de fix aîles qui eft au-deffous de l'extrémité du cercle. Fic. XII N' 3. Développement du pignon & des pièces qui en dépendent. ï F. Rondelle de cuivre, qui fe place fur la tige du pignon, & derriere la plaque, après que celui-ci eft placé dans la fente dentée ; cette rondelle eft fixée par une goupulle. G. Le pignon vu en plan. H. Le pignon vu en profil, on y diflingue les deux tiges & les zroux dont elles font percées pour recevorr les goupilles. J. Wirole de fer qui fe place fur la longue tige du pignon, après qu’elle .a traverfé de dedans en dehors le trou du cercle deftiné à la recevoir. K. Boucle ou belière qui embraffe la virole & eft traverfée arnfi que la tige du pignon par une goupille. Paz A NC HE E V. Cette Planche contient un Bandage auquelon a réuni les qua- tre principales correclions & les développemens néceJarres. Fic. XIII. Le Bandage vu par [a partie antérieure. ABC. La plaque du cercle recouverte en partie par une pièce qui RR la mécanique relative au fous -cuiffe. B. Corde de boyau qui s'attache au fous-cuifje. DE. Parue de la platine mobile à laquelle s’attache la pelote comme dans les figures 4 & $ de la Planche 1. EFGH. Le cercle à deux queues dont les courroies viennent s’attacher aux deux boutons que l’on voit fur la pièce qui couvre la mécanique, figure furvante. Tome IX. Pp 298 EXPLICATION, 6 Fic. XIV. La platine du cercle ou platine fixe vue à décou- vert, ainft que la mécanique du fous-cuiffe. ABC. La plaque. AB. La baftule dans la poulie de laquelle paffe la corde de boyau, comme dans le premier Bandage de la PL I. D. La grande poulie placée plus bas que dans la Planche 1}, figure 6, à caufe que la mécanique plus compliquée exige une poulie de plus. E. La moyenne poulie ou poulie de renvoie. FGH. Couverture de la mécanique. . I. Crochet qui arrête la rêre K de la vis de rappel, après qu’elle eft ployée comme dans la figure précédente. Fic. XV. La plaque fixe vue du côté oppofe, & féparée de la plaque mobile ou plaque de la pelote. B. Un des côtes de la charnière qui affemble les deux platines. A. Le bariller dont le reffort communique le mouvement à la grande poulie placée de l’autre côté de la plaque. K. Za tére de la vis de rappel flexible par fon collet pour être arrêtée par le crochets J. DE. Conduis a chapeaux fous lefquels coule la portion de cercle F. que ces conduus traverfent. Fic. XVI. La plaque mobile ou plaque de la pelote vue du côté auquel cette garniture doit être attachée. DE. Le haut de la platine. B. Charnon qui eft recu entre ceux de la figure précédente. PLANCHE V. . Cette Planche contient deux Bandages de fil de fer écrouis pour leur donner du reffort. Fic. XVII. Bandage fimple à deux branches non garni. Fic. XVIII Bandage fimple à rois branches revêtu de [a garniture. Toutes les figures de ces cinq Planches font gravées aux deux tiers des objets, en forte que huit lignes du pied de roi repréfentent un pouce; c'eft l'échelle commune à routes ces figures. OBSERVATIONS SUR DES TUBULAIRES A TUBE ÉLASTIQUE ET CARTILAGINEUX. Par M. l'Abbé MAZEAS, Correfpondant de l’Académie &æ Membre de la Société Royale de Londres. L'Hisrorrse NATURELLE des animaux fédentaires au fond de la mer, & qui fe conftruifent des demeures à l'abri des flots, eft fans contredit la moins connue, & la plus difficile à obferver : on peut mettre dans ce rang les vers marins dont je vais donner la defcription. Le preinier, qui fera l’objet de ce Mémoire, habite des endroits que la mer ne découvre jamais, & fe cole fous de grofles pierres par un maftic fi dur, & dans une telle fituation, qu'il peut fe fouftraire également aux inftrumens des Pêcheurs, & à la curiofité des Obfervateurs. La façon dont ces animaux faifif- fent leur proie, les organes dont la Nature les a pourvus, la conftruétion fingulière de leurs demeures, lanalogie qu'ils me paroiflent avoir avec les Polypes, m'ont paru des objets dignes de l'attention des Naturaliftes. En 1764, dans les marées de l’équinoxe d'Automne, j'eus les premièrés indices de ces animaux. Je chérchois alors dif- férentes efpèces de Fucus, pour en former une collection, & je fis arrêcer le bâteau qui nous portoit auprès d’une petite Jfle environnée de rochers, au milieu de la rade de Lomariaker , près de Morbihan. Le fond de la mer tapiflé de plantes marines, parfemé d'Ourfins de différentes couleurs, offroit aux yeux le fpectacle le plus agréable : l'attention Pp ï 300 OBSERVATIONS avec laquelle je le confidérois, me fit appercevoir de grofles tiges couronnées de filamens épanouis, qui préfentoient l'image d'une fleur au fond des eaux. Lorfque la mer eut perdu fuf- fifamment pour atteindre au fond , je fis arracher de ces tiges qui me parvinrent en aflez mauvais état, mais qui juf- tifièrent pleinement les foupçons que Javois eu, que ces amas de feuilles dont les tiges étoient chargées , cachoient le tube d'un animal qui me parut en grand ce que les coral- lines font en petit. Animé par ces premiers fuccès, j’entrepris un fecond voyage dans la même rade fur la fin de l’année dernière 1765, deux jours après la pleine Lune, qui fuivit l'Équinoxe d'Automne. La mer fut plus bafle qu'on ne l’avoit vue depuis longtems; & les animaux que je cherchoiïs n'étoient couverts que de 2 à 3 p'eds d’eau. Le mouvement des filamens, qui couron- noient la tige, me parut alors parfaitement femblable à celui des trompes de l’efpèce d'ortie de mer, appellée par Rondeler urtica cinerea. Ces filamens mouchetés de plufieurs taches, difparoifloient fubitement dès que je les touchois de lextré- mité d’une baguette. Pour prendre ces tubes fans les déchirer, je fis defcendre dans la mer, & enlever les pierres auxquels ils étoient adhé- rens. Ces tubes font collés au-deflous de la pierre par une bafe fort large comme les lirrophites ( P/anche 1, fig. 1, 2), & ont une confiftance tout aufli forte. Par le moyen d'une lame de couteau fort mince, je parvins à les détacher fans offenfer l'animal; j'en emportai de cette façon près d’une douzaine; jenveloppai le tout de Fucus pris fur les lieux, &, à la faveur de cette humidité, les animaux vécurent aflez pour me donner tout le cems de les obferver. Le tube qui eft flexible, élaftique, & qui a la confiftance d'un cartilage, eft un cylindre dont les plus longs avoienc un pied & demi, & $ à 6 lignes de diamètre. Ce cylindre coupé, fuivant fa longueur, préfentoit un gros vers (PZ. IT, SUR UDRE St ÉTAUNB'U L'ALER ES 301 fig. 1), long d'un pied, d'un brun foncé fur le dos, & plus clair fous le ventre, de la figure de la Scolopendre de mer, armé comme elle de pointes qui régnent des deux côtés dans toute la longucur de l'animal, mais qui diffère de la Scolopendre, en ce que notre Tubulaire eft charnu comme les vers ordinaires, & que fa cête eft ornée de trompes d’une conftruction fingulière dont nous parlerons bientôt. Pendant que cet animal vivoit dans l'amas de Fucus où Je le confervois, il poufloit de rems en tems la cête hors du tube pour rechercher l'humidité : alors fes trompes colées les unes aux autres, préfentoienr exactement la figure d’un pinceau, a, 6, c, (Planche IT, fig. 1); comme je me fou- vins d’un animal à-peu-près femblable, décrit pat Rondeler, Jeus recours à l'ouvrage qu'il avoit fait traduire fous fes Yeux, & que j'avois aétuellement fous la main, Voici ce qu'il en dit, Livre IT, pag. 77. De la fimilitude des pinceaux defquels ufènt les Peintres, ou defquels on blanchir les parois, j'ai appelé pinceau de mer ce qui ef? ci-deffus pourtrait, pour la grandiffime [em- blance. C’eff un tuyau fait comme de teft dur, attaché aux rochiers d’une atrache molle & lâche, de Jorte que Les vents & les ondes lagitent çà & là. Au-dedans eft une fubftance charnue, aucunes fois jaune, aucunes fois d'autre couleur. Quand elle fe jette dehors, elle s’épand comme vous voyez en la peinture, tellement qu'il n’y a rien de plus femblable & un pinceau. Il s’en trouve aux rochiers d'aleniour PIfle de S. Honorat de Lérins. Comme les Naturaliftes ne s'accordent pas fur la nature du Tubulaire auquel Rondelez a donné le nom de pinceau de mer, qu’on ignore d'ailleurs la ftruéture de ces efpèces d'animaux, je me contenterai de décrire celui qui fait l'objet de ce Mémoire. La bafe du cylindre eft un cartilage de la nature de la 302 OBSERVATIONS corne à lanternes, plus dur & plus épais que celui du refte du tube; c’eft le tube même prolongé & applati par la pierre qui le comprime en cet endroit, Cette bafe eft repréientée par la PL À, fig. r. Elle eft tellement adhérente au rocher, qu'on la déchire plutôt que de l’arracher. De cette bale naît un petit tube ou appendice a, b, percé par fon extrémité a, qui commence à fe confondre avec le grand tube en c, & qui communique avec lui par le canal c, d. (Voyez, Plan- che LIL, fig. s, qui repréfente le tube & fon appendice cou- pés dans une direétion parallele à l'axe.) Voici l'ufage auquel je crois que cet appendice eft deftiné. La Nature n'ayant donné à cet animal aucun organe, qui puifle nuire à fes ennemis, il eft réduit à fe tenir fur la dé- fenlive; fes trompes ou fuçoirs qui l'avertuiflent & de la nou- riture qui lui convient, & du danger qu'il court, font d’un fentiment fi délicat que, pour peu qu'on les touche, il fe pré- cipite fubitement au fond du tube; c'eft ce que j'ai fouvent éprouvé fur plufeurs de ces animaux. Alors le corps fe ré- trécit de façon à n’occuper qu'un quart de la longueur du tube, & l'extrémité de la queue fort de l'appendice d’environ la longueur d'un pouce ; l'animal fe trouve donc prefque entièrement fous la pierre, à l'abri par conféquent des ani- maux qui voudroient le dévorer, & de la drague des pêcheurs, qui ne pourroient emporter que la partie fupérieure de fon logement. En introduifant une éguille dans l'appendice , je forçai l'animal à fortir de fon tube. Il parut, comme il eft repré- fenté par la Planche IL, fig. 1, compofe d’anneaux charnus. Chaque anneau eft garni des deux côtés de mammelons qui fervent d’étuis à autant de pointes fort dures, qui fortent & rentrent continuellement. Ces mammelons & ces pointes font les mêmes que ceux de la Scolopendre de mer, & de la grande efpèce d'Étoile fort commune fur nos côtes. Le dos, qui eft d’un brun foncé, eft divifé dans fa longueur SUR DES TUBULAIRES. 303 par une ligne noire, qui commence au quatrième ou cin- quième anneau au-deflous du bourrelet, & qui vu à la coupe, n'eft autre chofe qu'un enfancement de la peau qui fépare à droite & à gauche les élévations ou rugofités de cette même peau. Ces rugofités ont la forme de petits quarrés , dont chacun eft terminé par un mammelon; elles ne fe trou- vent pas fous le ventre, qui eft d’un brun plus clair, & où l’on remarque plus aifément la divifion de chaque anneau, qui eft recouvert en partie par le prolongement de la peau du mammelon, comme on le voit dans la P/anche III, fig. 4. Les pointes auxquelles les mammelons de notre Tubulaire fervent d'étui, lui font néceflaires pour fe cramponner dans le tube, & s'y tenir dans une fituation verticale quand il veut faire fortir fes trompes. Mais hors du tube, ces pointes ne peuvent lui communiquer aucun mouvement de progreflion, comme je l'ai fouvent éprouvé. Ces pointes macérées dans l’eau, pendant 7 à 8 jours, fe décomposèrent en une multitude d’autres pointes très-fines, & prefque imperceptibles, dont la réunion compofoit aupa- ravant un faifceau folide & très-dur. La têre dégarnie de fes trompes ( Planche FI1, fig. 3), eft un bourrelet charnu a, #, dans le milieu duquel on voit une petite élévation percée d'un trou c, qui eft la bouche de l'animal; elle n’eft armée d’aucune fubftance offeufe éa- pable de trituration, comme dans les Ourfins & l'Éroile dé mer. è Cette bouche eft environnée d’un colet d, f, (Planche LIT, fig. 1), qui tient au bourrelet par deux oflelets >, #,/durs & arrondis par leur extrémité comme la tête d'une épingle. Ces offelets sinsèrenc dans le bourfeleér, mais ils y tiennent foiblement, puifqu'ils sen détachent pour'peu qu'on laifle macérer l'animal dans de l'eau douce.” de Le colet qui eft un cartilage mince, dur, & d'une couleur 304 OBSERVATIONS jaunitre, eft divifé en deux parties; il eft fimplement échancré en g, qui eft le côté qui répond au dos, & entièrement divilé en 4, côté qui répond au ventre. Ce qui donne à l'animal la faculté de dilater ou de reflerrer fon coller, en doublant plus où moins les deux parties l'une fur l'autre; pat ee mécani{me, il en proportione l'ouverture à la groffeur de la proie dont les trompes fe font emparées, il la reflerre, l'em- pêche de s'évader, la fuce ou la fait entrer dans lœfo- phage. Ce coller fe divife en une multitude de trompes ou fu- çoirs, qui prennent la figure d'un pinceau, lorfque l'animal refferre ce coller, & qui sépanouiflenc ou fe divifent en deux faifceaux cd, ef, lorfque le coller fe relâche. (Voyez la Planche LIT, fig. 1.) Les trompes font parfaitement femblables à celle de l'ortie de mer (urtica cinerea). Elles n'en diffèrent que par la groffeur, & qu'en ce que celles de l'ortie font fimples, au lieu que celles de notre animal font compofées d'une frange qui règne tout le long de chaque trompe principale. J'arra- chai quatre trompes, 46, cd, cg, fg, (PL III, fig. 2), our les mettre au microfcope, & je vis que cette frange n'eft elle-même qu'une multitude de petites trompes dont le nombre eft fi grand que j’aurois eu bien de la peine à les compter. On conçoit qu'un infeéte engagé dans une parcille chevelure auroit certainement bien de la peine à s'en débarraffer. De diftance en diftance, & par intervalles égaux, ces petites trompes font d'un beau pourpre , quelquefois de couleur violette, & fouvent d’une couleur uniforme. Quand elles fonc épanouies dans une mer calme, elles préfentent comme je l'ai dir, le fpeétacle agréable d’une fleur panachée, portée par une belle tige ornée de feuilles, & fi l'on n’em- ployoit que le fens de la vue pour conftater la réalité de l'image, on y feroit certainement trompé. Cependant il n’y a de SU R D'ESTTAWBAUL AIRES %or a de végctal ici que les feuilles de cette plante apparente, encore ne font-elles pas toutes dans ce cas, il faut en excep- ter le grand nombre de corallines qu'on trouve fur cette tige, & qui font des logemens d'animaux, comme M. Ellis la prouvé dans les Tranfaétions philofophiques de 1755. En ouvrant le ventre de l'animal, par une incifion longitu- dinale , on voit les inteftins contournés en fpirale, & qui occupent toute fa longueur. Comme les pas de cetre fpiraie font fort courts, les inteftins ont la forme d'un chapelet, dont chaque grain eft moitié noir & moitié blanc. Mais ces inceftins font-ils, comme dans la plupart des autres animaux, des organes eflentiels à la vie? Ceft ce dont il y a tout lieu de douter, après le fait dont j'ai été témoin: parmi les tubes que j'avois apportés, j'en trouvai un où il ny avoit que la moitié de l'animal; la moitié la plus effentielle manquoit, la rêce & les trompes. Cette moitié vécut parmi les Æucus humides autant que les autres Tubulaires , je l’avois remife. dans fon tube, & au moindre ta&, elle avoit le mouvement auffi prompt que fi l'animal eût été entier. Parmi ces mêmes Fucus deftinés à conferver mes animaux; je trouvai la moitié d'une Scolopendre de mer parfaitement femblable à celle qui eft deflinée dans l'ouvrage françois de Kondeler. Cet animal étoic plus applati que notre Tubulaire, il paroïfloit avoir été de la même longueur ; il étoit garni de mammelons dont chacun fournifloit deux pointes; mais je ne lui trouvai point d'inteftins. Son corps, dont il ne me reftoit que la partie inférieure, éroit compofé d’entroques, ou efpèces de verrèbres de la même forme que ceux de l'Étoile de mer, marquée dans Rumphius fous le nom d’4f° terias Scolopendroïdes fpinofa, & qui eft fort commune fur la côte occidentale de Bretagne. Cette Étoile à un mouve- ment crès-rapide, mais rien neft plus fragile, on ne peut préfque pas la toucher fans la rompre; la même chofe m'ar- fiva pour la Scolopendre, une moitié de celle que je poflé- dois, ce qui faifoir le quart de l'animal, me refta dans la Tome 1X, Q q 306 OBSERVATIONS main, tandis que l’autre fe fauvoit. Ces deux moïtiés vécu: rent près de huit jours parmi les Fucus; au bout de ce tems, je rompis encore ces deux moitiés, le mouvement fe ralentit alors, & ces huitièmes d'animaux moururent en peu de tems. Cette propriété, comme on le fait, caraëtérife fpéciale- ment les polypes; mais il m'a paru qu'elle eft plus ou moins étendue, fuivant que l'organifation de’ l'animal approche plus ou moins de celle du parfait polype; c'eft-à-dire, de celui qui, coupé par des feétions en cout fens, donne autant d’ani- maux que de parties. Je n’en connois encore que deux de cette cipèce, celui d'eau douce de M. de Trembley, & celui de mer gravé à la tête de l'excellente Differtation du Doc- teur Parfons fur cette matière. Mes Tubulaires qui, par leurs anneaux charnus, & la forme de leurs inteftins, approchent davantage de l’organifation des vers de terre, partagés en deux, vécurent parmi les Fucus autant que lanimal entier; mais leur mouvement & leur vie cefla lorfque je les eus partagés en quatre. La Sco- lopendre qui, par la forme de fes vertèbres, foiblement joints les uns aux autres, approche plus de l’organifation des toiles de mer, fouffre aufli un plus grand nombre de divi- fions, mais elle a fes bornes comme on vient de le voir. La fixième efpèce d’Ortie de mer, deflinée par Rondeler, pag. 384, & qui eft fort commune fur la côte méridionale de Bretagne, fouffre des divifions dont je ne pus connoître le terme. Une portion de cet animal que M. le Comte de la Bourdonnaye, Syndic des États de Bretagne , & moi, trouvâmes fur les bords de la mer en 1761, attira notre attention : ce frag- ment d'Ortie, qui étoit une gelée dure, blanche, & tranfpa- rente, nous parut évidemment par fes découpures, être une portion de lOrtie dont nous avions fouvent trouvé des morceaux plus confidérables fur le rivage. Notre fragment nageoit dans la mer, & fon mouvement étoit femblable à SUR DES TUBULAIRES 307 celui d’un poulmon qui fe dilate & fe contracte fucceñive- ment; je ne pus appercevoir à la loupe aucune organifation bien caraétérilée; c’étoit une mafle folide d’une égale tranfpa- rence ; je la divifai à plufieurs reprifes en tant de parties que chacune n’excédoit pas quatre lignes en tout fens, & toutes continuerent à nager, chacune ayant le même mou- vement qu'avoit auparavant le fragment principal dont je les avois détachées. Mais il s'agiroit de favoir fi chacune de ces parties, ainfi que celles de la Scolopendre & de notre Tubulaire, deviennent dans la fuite des animaux complets; c'eft ce que le tems ne m'a pas permis de conftacer. La conftruion du tube, qui fert de logement à notre animal , ne mérite pas moins d'attention. Il eft compofé de trois enveloppes qu'on fépare aïfément pendant que le tout cft humide : les deux premières enveloppes intérieures les plus voifines de l'animal, font une efpèce de cartilage très- mince, blanc, tranfparent, flexible, qui a la confiftance du cuir, & quon ne pourroit mieux comparer qu'à ces feuilles de corne très-minces qui fervent aux lanternes. La troifième enveloppe, qui eft de même nature que les précédentes, eft tapiflée à l'extérieur de cette moufle verdätre qui flotte fur les eaux. C'eft fur cette enveloppe que croiflent des Fucus, des Corallines, des Fougères de mer, différentes efpèces de moufles , & fouvent même des animaux tels que les Holo- churies, & les Ofcabriones. Ce tube qui, dans la mer, eft flexible & élaftique, devient très-caflant & très-fragile dès qu'il eft fec. Il reprend fa confiftance & fa flexibilité quand on le fait tremper quelque tems dans l’eau. La fubftance dont il eft compolé, eft indif- foluble dans les acides; ces menftrues ilot que fur les matières dont l’enveloppe extérieure eft tapiflée, qui, pour Ja plupart, font des matières calcaires. Il paroït, par tout ce que nous venons d’expofer, que cet animal a beaucoup de rapport avec ceux que M. Ellis à Qq ij 308 OBSERVATIONS, &c. découvert dans les Corallines, & que celui-ci eft en grand ce que les autres font en petits; maïs cette affinité me paroît encore plus marquée avec la grande Coralline de Maire que cet Auteur nomme Corallina Tubularia Melitenfis , cum Scolopendris fuis, rentaculis duobus duplicato-pinnatis, inftruëta. Comme cette Coralline, fuivant ce qu'en dit M. ET. lis, & fuivant la figure qu'il en donne, habite un tube dont le diamètre va toujours en augmentant, je ne la crois pas de même efpèce que celle dont je viens de donner la Def cription. Jeao . Elrang TomlX. 272 308. El Haussard 72 ÿ- \ PDT MA seu tee Mnonve à > | ASIE JScav .Etrang . Dm. IX lg. 308, PHPRRTN ET PETA } k ALT S R 1 LA Ætran Tom IX a . 808. Jrar ua y ie nn > = ue LD DE El Haussard Se cup. PVO TNA FPE D nn Me ue Lt ua OBSERVATIONS Sur les caracteres Jpécifiques qui difinguent le TuUBULAIRE DE L'OCÉAN à tube elaffique & cartilapineux , de fon analogue dans la Médi- terranée, décrit par M. Exrzrs. Par M. l'Abbé MAZEAS, Correfpondant de l’Académie, & Membre de la Société Royale de Londres. Lorsque Jeus l'honneur de communiquer à l’Académie Préfentéés le . . » / x 1 76 . mes obfervations fur le Tubulaire de l'Océan analogue à EL Er celui de la Méditerranée, je cirai les deux Auteurs qui ont parlé de ce dernier, Rondeler & M. Ellis : je citai la Def. cription entière de Rondeler, qui ne laifle à l'efprit aucun trait capable de caratérifer l'animal qu'il à voulu décrire, M. Ellis, dans les Tranfactions philofophiques, décrit plus exatement un Tubulaire analogue au mien; mais, comme je remarquai dans fa Defcription des caractères qui ne convenoient nullement au grand Tubulaire de l'Océan, je crus devoir le faire connoître plus particulièrement. Les obfervations faites fur mon Mémoire, pat de favans Naturaliftes, ont femblé confondre entièrement l'animal que je décrivois, avec celui de M. Ellis, & ne l'ont fait différer que par la grandeur & par l'âge. Comme ils ont Jugé par l'analogie, qui eft en effet-en leur faveur, jai répété mes obfervations, fuivant les defirs de l'Académie, & je n'ai rien négligé pour acquérir toute la certitude qu'on eft en droit d'exiger dans les faits, fur- tout lorfque lanalogie peut les faire envifager comme douteux. 1.6 Caradere, gro O:BISEURV ALT L'OINSS Depuis limpreflion du Mémoire de M. Æ/s, dans les Tranfaétions philofophiques, a paru de cer habile Obfer- vateur un ouvrage beaucoup plus étendu fur les Corallines, où la Defcriprion du Tubulaire de Malre eft aufli beaucoup plus détaillée; c’eft à certe Defcription que j'aurai recours dans l'examen, & la comparaifon des faits que je vais expoler. Mon intention n'eft pas de faire voir qu’on seft trompé dans les réflexions faites fur mon Mémoire, elles fe prefen- tent naturellement à lefprit, & quand on n'aime que la vérité, on ne doit que de la reconnoiflance à ceux qui veu- lent bien nous faire part de leurs lumières & de leurs doutes. Le Tubulaire de M. Ellis & le mien, paroiflent fe rappro- cher par des propriétés communes; mais ils s'éloignent aufli par des différences eflentieiles & bien marquées, Je vais expofer les unes & les autres. Tubulaire de Malte. Le PREMIER caraétère que M1. Ellis donne à ce Tubulaire, c'eft de vivre en famille: ils font grouppés les uns fur les autres : les extrémités de leurs tubes étant inférées dans une efpèce de fac ou de poche commune à ces Tubulaires. Zorf- que j'eus uré, dit M. Ellis, les tubes & les animaux de cette coralline hors de l’efprit-de-vin , dans lequel ils avotent été confervés, jy découvris un petit fac glaireux dans le- quel les bafes & Les racines de plufieurs de ces tubes érotent zrjérées, Tubulaire de l'Océan. CEux-cr ne vivenc jamais en famille, il eft même aflez rare d'en trouver deux fur la même pierre, & dans ce cas ils font éloignés Jun de lautre. Le tuyau eft applati dans l'endroit où il eft collé à la pierre, & je me fuis afluré que cet applatiflement ne vient pas de la pefanteur de la pierre qui Les comprime, car j'ai trouvé de ces Tubulaires collés S PR MDMENTAUBIUE A ER E las contre les furfaces latérales des pierres, & contre des fucus où rien ne les comprimoit, & l'applatiflement de bafe étoit la même. Tubulaire de Malte. LE sEcoND caraétère des Tubulaires de M. Ef/is, confifte dans la forme du tuyau. Il augmente en diamètre d'une manière fi fenfible qu'il préfente la figure d’un entonnoir fort alongé , comme on le voit par la figure qu'il en donne. Ces tubes, dit-il, gui font faits par les animaux qui y font renfermés , augmentent en diamètre par degrés à mefure qu’ils croiffent en hauteur. Tubulaire de l'Océan: Le Tuss eft exaétement cylindrique depuis l'endroit où il adhère à la pierre; c'eft-à-dire, depuis fa bafe jufqu’à l’extré- * mité fupérieure, Cette bafe eft applatie, comme je l'ai dit plus haut, & eft formée d'un cartilage plus dur & plus épais que le refte du tuyau. Ainfi, le Tubulaire de M. É/is, quoique cartilagineux comme celui de l'Océan, préfente une forme cffentiellement différente. Tubulaire de Malte. Par la figure que donne M. Ellis ( Planche 34, ) les bafes & les racines de ces Tubulaires fe terminent en pointes inférées dans un petit fac glaireux commun à plufieurs de ces Tubulaires; & ces pointes font fermées, fuivant les obfer- vations faites fur mon Mémoire. « La feule différence, difent ces obfervations indiquées pat M. Mazeas , confifte en ce que le tube du pinceau des côtes de Bretagne étroit replié fur le rocher qui le portoit de façon que fa pointe, qui étoit ouverte, remon- toit verticalement en haut comme le gros bout du tube 8 6 y: 8 2.4 Caraëère, 3.me Caradère, #12 OBSERVATIONS qui étoit au moins quatre fois plus long que cet appen: dice. Mais cette particularité, qui nous Paroit totalement accidentelle, ainfi que la compreflion du tube en cet en- droit de fa Er buLe. qui eft dûe à la fituation & au rétré- ciflement des fentes des rochers, qui ont force le tube à » Sapplatir, & aie replier, fuivant leur direction, & l’ouver- » ture inférieure, qui n'eft vifiblement due qu'à ce que le » tube a été coupé ou déchiré par accident à certe extré- » mité, n'établiflent pas une difference réelle entre ce pin- n ceau & celui de M. E/rs; d'autant plus que M. Maxeas » ne dit pas que tous les de tubes qu'il à pechés, aïenc » été dans ce cas; ce que l’analogie femble nous démon- » cer comme fortuit par la Nature | à façon de vivre, » & enfin par la REueRe & les proportions fi différentes » du corps de l'anim al. 8-8 (4 2»: 8 Tubularre de l'Océan. L'OBsERVATION précédente nous préfente trois objets éflen: tiels, qu'il eft important de vérifier: 1. la figure de l’appen- “| replié fur le EUVAUET, 2... l'applatiflement de la bafe : * l'ouverture de l’appendice; le tout comme fortuit & acci- un Tous les tubes, qui m'ont pafle par les mains, fe font trous vés dans le cas énoncé par mon Mémoire. Voici asintenantles pieuves que ces propriétés ne fonc pas accidentelles, 1.” Le repliement de l'appendice fur le gros tuyau: cette courbure eft faire de façon que le cartilage de la bafe & celui de l'a ppendice , font noyés & confondus l’un dans l'autre, dans lificervalle où ils fe touchent , qui eft d'environ 3 à 4 lignes plus où moins, fuivant la groffeur du tube , & cette propriété ayant lieu dans tous les Tubalases ; même ceux qui font collés contre les furfaces latérales des pierres où rien ne les compri- me, il eft évident que ce cas n’eft nullement accidentel; mais que c'eit la forme primitive & effentielle du Tubulaures, Le) 2. L'applatiflement RS est Ja. Elrang . Tom. IX. P19. 12. em 2 2 Ætrong . Tom. IX. Pig 12. 2 J F C'Haussard Jeu NE Jrav Etrans . Tom. IX . Page . 812 | 4 :. Ltrago Tom. IX. Page. B12. M SURME TUBULAIRE #53 ai L'applatiffement de la bafe eft dans le même cas; cette bafe efttoute auf applatie, lorfqu’elle eft adhérente à des fut- faces latérales , que dans le cas où ellefe trouve comprimée fous des pierres: il eft à remarquer que je n'ai jamais trouvé de ces Tubulaires dans les fentes des rochers > Mais toujours attachés à des pierres au fond de la Mer, d’une grofleur telle qu'un homme peut aifément les porter. 3° Il reftoit à m'aflurer fi l'ouverture de l'appendice , qui prend naiffance à la bafe du Tubulaire!, étoit dûe à un déchire: ment fortuit, ou à quelqu’autre accident, Dans les grandes marées, qui ont précédé & fuivi l’Equinoxe du printems de cette année 1767, lorfque la Mer étoit la plus bafle, & dans l'inftant que les Tubulaires n’étoient couverts que de deux ou trois pieds d’eau, des Pécheurs ont apporté : fur le rivage les grofles pierres auxquelles adhéroient les ani- maux que je leur avoisindiqués. Nous en avons eu par cemoyen de . âges & de différentes groffeurs. Je pris des témoins éclairés, & ayant pofé ces pierres dans une fituation telle, que le tube fe trouvoit renverf de haut en bas, l'animal en eft forti peu-à-peu, & enfin eft tombé fur le linge étendu pour le recevoir. Alors nous ayons examiné à la loupe l'extrémité fupérieure des petites appendices des jeunes tubulaires , & nous l'avons trouvée ouverte. Cette ouverture étoit fi {enfible dans les appendices des gros tubes , que nous n'eûmes pas befoin de loupes pour les appercevoir, & pour être Certain qu'il n’y avoit figne de déchirement. Enfuite nous nous fommes aflurés de la communication de lappendice avec le gros tube, en adaptant un entonnoir à lorifice fupérieur de ce gros tube : l'eau eft fortie fur-le-champ en forme de jer par l'ouverture de l'appendice. Ces expérien- ces répétées à différentes reprifes fur le grand nombre de Tu- bulaires qui nous ont Pailé fous les yeux, n’ont offert aucune exception. Tome IX, Rr 314 O1BASYEIROV/'AUT NO NS Après les obfervations que je viens d'expofer, j'aurois bien voulu pouvoir conftater, avec la même exactitude, les différen- ces des animaux qui habitent ces tubes; maïs M. Ellis n’eft en- tré dans aucun détail fur leurs organes, & il ne le pouvoit pas fans les dégrader & les rendre en fort mauvais état à ceux qui les lui avoient prêtes. Il eft feulement à remarquer, qu’en raifonnant d’après les figures de M. Ellis, les trompes de l'animal font attachéesle long de deux bras fort étendus, & que ces trompes vont en dimi- nuant à proportion qu’elles partent d'un endroit du bras plus éloigne de la tête. Dans le Tubulaire de l'Océan , au contraire, ces trompes partent d’un collier circulaire & membraneux, qui entoure la bouche de l'animal, & qui eft attache à la tête quil couronne, par deux offelets qu’on découvre en faifant macc- rer l'animal dans l’eau douce. Dans le Tubulaire de l'Océan ; toutes les crompes font d’une grandeur égale. Dans l'Occan & la Méditerranée, chaque trompe principale eft garnie dans fa longueur d’une frange de petites trompes qu’on n'apperçoit qu'à la loupe, & cette propriété a pareïllement lieu dans les Tubu- laires ceftacés qu'on trouve fur nos huîtres. Les trompes ont de longueur un fixième environ de la lon: gueur de l'animal; leur nombre ne peut fe compter avec exac- titude, parce qu'ils fe réfolvent en glaires, comme les trom- pes des orties marines. Les mammelons dont l'animal eft bordé de chaque côté , diminuent en groffeur vers la queue; & quoi- qu'il foic alors très-difficile de les diftinguer , jen ai toujours compté plus de 160 de chaque côté. Les rugofités qu'on remarque, à la loupe , fur le dos de l'animal, & les mammelons d'où partent les faifceaux des poin- tes, n'érant bien exprimés, ni dans la defcription, ni dans la la gravure de M. Ellis, je ne puis prononcer, ni fur la ref- femblance , ni fur la diflimilitude des deux animaux à cet égard. SUPREME NTAU BU LA TRE || ‘ir I! réfulte des faits que je viens d'expofer, que le Tubulaire de l'Océan & celui de la Méditerranée , Ont des caractères bien marqués, quiles feroient prendre pour les mêmes animaux, & d’autres caractères très oppolés qui fembleroient devoir en faire des efpèces différentes. Les animaux dont je viens de parler , ne font pas les feuls dans ce cas. Pendant que je les examinois , Je vis fur la méme pierre une efpèce de Fucus à feuilles , femblables à celles du petit Sedum ; ce Fucus étoit rempli d'un infeéte , qui mar- choit à la manière des chenilles arpenteufes. Pour ne pas in- terrompre mes obfervations, je priai M. de Queronic, ancien Confeiller au Parlement de Bretagne , & très-verfé dans l'Hif toire naturelle, de vouloir bien l'examiner & le defliner. J'ai l'honneur de communiquer à l’Académie les obfervations qu'il en à faites, que j'ai vérifices après lui , ainfi qu'il a bien voulu vérifier les miennes. On trouvera dans cetre Defcription , les traits de reflemblance les plus marqués, avec l’infecte que M. le Commandeur de Godeheu trouva à deux lieues au large de Ceylan, mais auf d'autres caraétères qui l'en font différer; & l'on verra, fans doute avec plaifir, un animal que l’on ne con- noifloit point encore dans nos climats. En général, la Nature eft fi variée dans les produétions d’une même clafle, que le plus difficile n’eft pas de les compter & de les obferver, mais de faifir les nuances caraétériftiques qui doi- vent réunir ou féparer les efpèces. Dans ces fortes de cas, j'avoue que l’analogie eft d’un grand fecours, & peut nous guider dans nos jugemens ; mais em- ployée avec trop de confiance, elle peur être une fource d'’er- teurs. Elle trompa le célèbre Swammerdam, lorfquil voulut prononcer fur l'ufage des pointes ou poils roides, qui fortent des mammelons du Phyfalus. Cet infecte lui avoit été donné par Oligerus Jacobeus , qui foutenoit que les organes en queltion faifoient la fonétion de Rr i] 316 O'B' SA RNVMANT T'ON SEE pieds. Swammerdam, qui n'avoit pas vu l'animal vivant, & uni- quement fondé fur l'analogie , nia le fait. M. Hüll, dans les notes qu'i la jointes à l'Edition Angloife de Swammerdam, fou- tint aufli le même fentiment * : cependant le fait eft direéte- ment contraire. Nous primes, l'an pañle , dans la rade du Croïfic , une très-grande quantité de Phyfalus ; au fortir des filets, nous les mîmes dans un grand baquet plein d’eau de Mer. M. le Comte de la Bourdonnaye, Procureur-Général , Syndic des Etats de ‘Bretagne, M. de Pontneuf, ancien Maire du Croific, & moi, les vimes marcher au fond du baquet avec beaucoup de rapidité , à l’aide de leurs pattes mifes en mouvement par les mammelons. La mécanique de ce mouve- ment progreflif étoit bien différente de l’action de nager, puif- que les pointes ou poils roides qui fortoient des mammelons, portoient toujouts fur le fond du baquet, & que nous ne vimes jamais l'animal fe fufpendre dans l’eau. Quant à l’efpèce de Scolopendre, dont jai dit un mot en paflant, & que les obfervations fur mon Mémoire regardent comme un rayon de l'étoile épineufe fcolopendroïde de C6- tes de Bretagne , figurée par Barrelier, jadopte très-volontiers ce fentiment. Je n'ai pu retrouver le même animal , quelque recherche que jaie fie , & quoique ce rayon für très-long, il eft néanmoins fi femblable à celui de Barrelier, qu'on doit le regarder comme identique, tant que les faits ne prouveront pas le contraire. Après avoir établi les différences qui caraëtérifent le Tubu- laire de l'Océan, & celui de lIfle de Malte, je laifle aux Natu- raliftes à prononcer fur l'identité ou la diverfité des efpèces; je n'adopte aucune opinion , aucun fyftêéme à ce fujet, je ne dois garantir que les faits. * Thefe are not legs, nor intended for its office : they approach more to the Nature of arms , nith hand or fingers, and are proberly tentacula of the creature. Their ufe is in finding or Jéruring the creature’s prey. Hills Obfervations on Swammerdam, | 317 OBSERVATIONS SUR la variété des Tubulaires de la claffe des pin: ceaux de Mer, & la mécanique que ces animaux emploient dans la conftruélion de leurs tubes. Par M. l'Abbé MAZEAS, De Ia Société Royale de Londres, & Correfpondant de l’Académies J AI FAIT VOIR, dans mon dernier Mémoire, les caraétères fpé- cifiques, qui diftinguent le Tubulaire de Malte décrit par M. Ellis, du grand Tubulaire que j'ai trouvé dans l'Océan; mais ces deux elpèces ne font pas les feules de la claffe des Pinceaux de mer, & il me refte à faire voir les dégra- dations de nuances que la Nature met dans fes ouvrages en ce genre, Pendant les grandes marées de l'Équinoxe d'Automne de cette année 1767, je parcourus la partie de la côte du Mor- bihan, qui eft expofée à l'Eft. Immédiatement au-deflous du Fort qui défend l'entrée du goulet de Lomariaker, deux cipèces de Tubulaire fixèrent mes regards; le premier, qui éroit élaftique & cartilagineux, me parut femblable à celui que j'ai décrit dans mon premier Mémoire ; le fecond étroit à fimple membrane très-mince & très-molle, revêtue de fable & de petits cailloux. Je paflai d’abord le premier fans l’examiner, lorfque trou- vant plufieurs autres de mêmes efpèces, les voyant pour la première fois dans le fable, & placés dans des endroits que la mer découvre à toutes les marées, je réfolus de les examiner: Jen enlevai un d'un coup de pelle, & je trouvai que la moitié Préféntées le 19 Mars 1768. Planche 1.® fg. 3. 318 OBSERVATIONS feulement du tube; la partie hors du fable, (ab) étoit d’une fubftance claftique & cartilagineufe, & que la feconde moi- tic (bc) enfoncce dans le fable, fans adhérence à aucune pierre, étoit une fimple membrane très- molle, fans con- fiftance, fans élafticité, garnie de fable & de derritus de coquillage. Je déchirai cette membrane, & je forçai l'animal à fortir par l’orifice fupérieur ; il avoir la même configuration que celui qui habite les grands tubes que jai eu l'honneur d’en- voyer à l'Académie : toute la différence, c'eft que l'animal actuel eft beaucoup plus petit, relativement à la longueur de fon tube, & que le nombie des trompes eft aufli moins confiderables; car, en les partageant par l'endroit où le col- lier eft échancré, on en compte vingt d'un côté, vingt-deux à vingt-trois de l'autre, ce qui ne va guères qu'à la moitié du nombre des trompes du grand Tubulaire ; du refte tout eft exaétemenc femblable. La différence la plus fenfible eft du côté des tubes. Les longueurs font égales dans les deux efpèces, mais les dia- mètres inégaux ; les uns & les autres font cylindriques, ou d'une largeur uniforme dans toute leur étendue; mais celui qui habite le fable eft compoft de deux moitiés, qui font l’une à l'égard de l'autre, ce qu'eft une légère membrane à un car- tilage : de plus, il n’a point d'appendice ou crochet, ni aucune ouverture à fon extrémité inférieure ; enfin il n’eft adhé- rent à aucune pierre ou rocher, mais fimplement enfoncé dans le rivage, revêtu de fable dans fa partie molle, de Fucus & de conferva dans fa partie cartilagineufe. Cette différence des tubes joints à celle que j'ai indiquée dans les animaux, fait voir que ce nouveau Tubulaire eft une efpèce feparée de cui qui a été l'objet de mon premier Mémoire, Il eft vrai que la reflémblance des deux vers, pourroit faire regarder celui dont je parle aujourd'hui comme une: Res RE AE SUR 1D@5 TTAUVBAU"LIMICR-E Seb produétion de l'autre; c'eft la première idée qui fe préfente, mais elle ne tarde pas à fe difliper en réfléchiffant fur les différences que j'ai détaillées, & en faifant attention qu’on trouve toujours dans le voifinage des grands Tubulaires ceux à qui ils ont, donné naiflance, adhérens comme eux à de groffes pierres , & dans des lieux couverts par la mer! dans les plus bafles marées. Il fuit delà que le genre des Tubulaires eft dans le cas de beaucoup d’autres produétions de la Nature; qu'il a dans fes efpèces des traits de reflemblance noyés, pour ainfi dire, dans ceux qui les diftinguent ; que, dans ces êtres qui peuplent la mer & nos rivages, une nuance impercepti- ble, fouvent difficile à faifir, forme tout le paflage d’une efpèce à l’autre. La fuite de mes obfervations, confirmera encore cette vérité. ; La longueur du plus grand, de ces animaux en vie étoit de trois pouces & demi, fans y comprendre les trompes ; la longueur des trompes d’un pouce; la longueur du tube hors du fable de fix pouces; la partie molle enfoncée.dans le fable de quatre pouces & demi à cinq pouces; elle fe raccourcit un peu en fe defféchant. Pour caraétérifer cet animal par fon tube, je lui donne le nom de Corallina Tubularia lertoralis tubo partim elaftico & cartilaginofo ; partim membranaceo molle: , arenofo. - Tubulaire moitié cartilagineux, moitié membranacée. \ eft du nombre de ceux que j'ai l'honneur d’envoyer à l’Acadé: mie confervés dans l’efprit-de-vin ; il eft repréfenté par la figure première, & contenu dans le flacon À ; la partie inférieure du tube a été offenfée. Je préfente encore un animal, qui ne diffère que très-peu de ceux que jai décrits jufqu'à prélent, mais dont le cube eft cflenticllement différent, 320 OBSÉRVATIONS Il eft, comme le dernier, du nombre de ceux qui habitent les côtes fablonneufes de la pleine mer, & qui reftent à décou- vert dans l'intervalle d’une marée à l’autre; fon tube ne s'élève hors du fable qu'à la hauteur d'un pouce, ou un pouce & demi au plus; le refte, qui fouvent eft de neuf à dix pouces, eft cache fous le rivage. Il y a peu de Tubulaires aufli-bien retranchés que celui-ci; il n'habice que les fables qui boivent l'eau de la mer à une grande profondeur, & l'extrémité inférieure de fon tube eft toujours adhérent à une grofle pierre enfoncée dans le rivage. Ce tube eft une fimple membrane très-mince & très- molle, à laquelle font collés des grains des fable, du caillou- tage, & du detritus de coquillages; en un mot, parfairement femblable à la moitié fablonneufe du Tubulaire décrit ci- deflus. L’extrémité fupérieure de fon tube, eft bordée de flamens BB, (fig. 3), qui, comme une efpèce de frange, en décore l’orifice. Dès que l'animal fent qu’on l'attaque, il fe retire au fond de fa demeure, & en contraétant fes anneaux, fe réduit au tiers environ de fa longueur ordinaire; il fe cache ainfi prefqu'en- tièrement fous le rocher. Quand on creufe le fable, il arrive prefque toujours que le fol venant à s'affaifler, le tube fe rompt & la tranchée fe rempliffanc d'eau, il n’eft plus pofible de re- trouver l'animal. Mes tentatives ayoient été fans fuccès jufqu’à l'Équinoxe de cet Automne, que je me fis accompagner de trois hommes robuftes & adroits. L'un faifoit la tranchée, l’autre formoit fur la pente du rivage des canaux propres à l'écoulement des eaux; &, pendant que je tenois le tube dans une fitua- tion verticale , un homme armé d’un lévier foulevoit le rocher. Nous eùmes le tube en entier; fon extrémité inférieure étoit fans aucune ouverture, & colée au rocher de la longueur d’un pouce, Je l'en détachai avec précaution ; je déchirai le ni bas SUR -DES LTAUVB'U"I> A ICR ES Sur bas du tube pour forcer l’animal par le moyen d’un fil d’archal à fortir par l’autre orifice, & il tomba dans un vafe plein d’eau de mer deftiné à le recevoir. Il a la configuration des Pinceaux de mer décrits jufqu'à préfenc. Après l'avoir examiné long-temps, & avec attention, voici ce que j'ai remarqué de différent. Les trompes comparées à la longueur du corps, font un peu plus petites que dans les Tubulaires que jai décrits jufqu'ici; ciles font brunes, mouchetées de blanc, au-lieu que, dans les autres Pinceaux de mer, elles font brunes, mouchetées de pourpre. Chaque trompe principale eft garnie dans toute fa longueur de trompes fecondaires comme dans les deux autres Tubulaires; mais ici les trompes fecondaires font plus longues & plus fortes; la vue fimple fuffit pour les apercevoir ; dans les autres, on ne les diftingue qu'a la loupe. Le nombre des trompes principales eft de quarante, vingt de chaque côté. Le collier ou efpèce de couronne cartilagineufe d'où naïf- fent les trompes, eft aufli proportionnellement plus petit que dans les pinceaux précédens, & il.adhère fi foiblement à la cêce, qu'il s'en fépara lorfque l'animal tomba dans le vale plein d’eau de mer. Le refte du corps, le bourrelet de la tête, la bouche, les anneaux, les mammelons, les pointes qui en fortent, la cou- leur , les rugofités de la peau, tout eft exaétement conforme au grand Tubulaire de l'Océan, & à celui par lequel j'ai com- mencé ce Mémoire. La longueur de l'animal, avant de mourir, étoit d'environ trois pouces; la longueur des trompes de cinq à fix lignes ; la longueur du tube de neuf pouces & quelques lignes; la longueur des filamens, qui couronnent orifice du tube, de D quatre à cinq lignes. Pour le carattérifer par fon tube, je lui donne le nom Tome IX, Sf # Table F.été fig. IL 322 OLBNSÆTRIVI AIT! I © NS de Corallina Tubularia lirtoralis , tubo membranaceo , mollr, areno/o , fimbriato , faxis [ub arend delileftentibus adhærente. Tubulaire à tube panaché d’une fimple frange. IL N'est pas du nombre de ceux que j'ai l'honneur d’en- voyer aduellement à l'Académie, parce qu'étanr le feul que jai pu faifr, il a été fort maltraité pendant lobfervation; je compte en envoyer de mieux confervés. Il eft repréfenté à : côté de fon tube dans la figure 2 , Table premiere. Nous venons de voir des animaux femblables habiter des tubes diférens, & nous allons voir les animazx différens-habi- ter des tubes prefque femblables. Le jour qui fuivit les obfervations que je viens de rappor- ter, je voulus aller à l'Ifle de Meaban, fituée en pleine mer, à une lieue & demie de la côte; cette Ifle trop expofée aux courans, & d'un rivage trop vafeux, ne nous préfenta de remarquable que des débris de Tubulaires tels que ceux qui ont fait l'objet de mon premier Mémoire, mais beaucoup plus gros; ce qui me fit conjeéturer que ces animaux vivent au fond de la pleine mer, comme dans les rades. Ne trouvant plus rien dans cette Ifle, nous remimes à la voile pour aller gagner la pointe de Port Navalo , expofée au Sud-Oueft, & nous mouillâmes dans une anfe fablonneufe au-delà du Fort fitué vis-à-vis celui de Zomariaker. L'endroit du côté le plus fablonneux nous offrit encore des Tubulaires dont les tubes au premier coup -d'œil paroif foient femblables au dernier que je viens de décrire. Chaque tube, comme le précédent, ne fort du fable que de la hauteur d’un pouce, ou un pouce & demi au plus, & com- munément il eft de la longueur de neuf à dix pouces; il eft compofe parcillement d'une membrane trèsmince & très- molle , revétue de fable & de derrirus de coquillages ; il eft couronne, comme le précédent, de plufeurs filamens recou- S'ÙÜ R? D ES YTAUYB-U:L: À: IR ES ges verts de fable, mais qui, au-lieu de fortir immédiatement de lorifice du tube, fortent d’une efpèce de calice formé de petites parcelles de coquilles de différentes couleurs, arrangces avec une adrefle & une régularité qui charme les yeux, Cette fleur artificielle eft compofée de deux grandes lames en forme de pétales, rapprochées l’une de l'autre, arrondies dans fes bords, & échancrée en AA ( figure 4 ; n° 1), ces deux lames s'ouvrent & fe ferment au gré de l’animal , comme une coquille bivalve. Les filamens font de même nature que le tube, ce font des filets membraneux tapiffés de fable. J'ai vu de ces tubes dans le Cabinet d'Hiftoire Naturelle de M. le Chevalier Turgot, & ils ne font pas rares dans ceux que nous avons ici; mais je n'ai vu nulle part l'animal qui les conftruit. L'opinion la plus commune eft qu'il s’enterre dans le fable, dès qu'il fent qu'on veut le furprendre, Cette opinion eft fondée, comme nous le verrons bientôt. Je fis creufer autour du tube, à la profondeur d’un pied; &; par le moyen de tranchées, je fis écouler l’eau qui selevoit au niveau du terrain. Alors, avec un pêle longue & forte, qui pénéttoit encore environ un pied dans le fable, je fis lever la motte fablonneufe qui renfermoit le tube. Pendant que cette mafle de fable étoit fur la pêle , je décou- vris l’extrémité inférieure du tube pour m'aflurer sil n'étoit point offenfc; mais, en cherchant cette extrémité, je trouvai une multitude de trompes de trois à quatre pouces de lon- gueur, qui rentroïent dans le tube lorfque je les touchois, ce qui me fit préfumer que l'animal y étoit dans une fituation renverfée, contraire aux autres Tubulaires. Comme l’extré- mité infcrieure du tube avoit une ouverture fenfibie, j'intro: duifis un fil d’archal par Yorifice fupérieur, & l'animal fortit par en bas, la crête la premiere; il comba dans un vate plein d’eau de mer, s'agita beaucoup, & je profitai de fes differens mouvemens pour en obferver la ftruéture. L. Sf y Table 1f, fig. IV. n° 1, ‘ 324 OBSERVATIONS Il a cinq à fix pouces dans fon plus grand alongement; fans y comprendre les trompes, & il peut fe contracter jufqu'à n'occuper que deux pouces, ce qui arrive lorfqu'on le plonge vivant dans de l’efprit-de-vin; il eft compofe d'anneaux, dont les feize premiers font garnis de mammelons, d’où fortent des pointes très-fines; depuis le feizième anneau jufqu’à l’extré- mité de la queue les mammelons deviennent imperceptibles , & n’ont pas de pointes. Le ventre, & j'appelle ainfi la partie fur laquelle l'animal fe roule & fe replie, fur laquelle il rampe pour travailler, ce ventre, dis-je, eft garni depuis la tête jufqu'au treizième an- ncau inclufivement d’une bande ou efpèce de fernum, CD, d'un rouge fort vif, plus foncé vers l'extrémité, & les feuls mammelons armés de pointes font bordés de la même couleur. La bande rouge, qui couvre le ventre, eft un peu plus foncée vers le bas, & rayée tranfverfalement de petites lignes noires qui ne m'ont pas paru correfpondre aux an- neaux. . Le dos a de fingulier, r.° une tranfparence fi grande qu’on voit les inteftins à travers la peau; 2.° la partie du dos la plus voifine de la tête, eft furmontée de fix petites houppes, CC, trois de chaque côté, compofées de filamens charnus, onduleux & ramifiés, d’un beau rouge de corail, & de deux lignes de hauteur. Une de ces houppes eft repréfentée groflie en E, fig. $, n.° 3. Les extrémités des branches font dicotomes ou fourchues. La tête eft garnie d’un petit bourrelet formé par les rides de la peau, comme dans les autres pinceaux de mer, avec certe différence; qu'au-lieu de collier ou de couronne carti- lagineufe, la têre eft ici furmontée d'une petite membrane en forme d’entonnoir Æ, de l'intérieur duquel fortent des trompes de trois à quatre pouces de long; ce petit entonnoir cft couert pardevant de deux petites membranes en forme \ | SU R°IDME)S FTDUNB UIL ATIQRE S 5 de languettes B B, écartées l’une de l’autre quand l'animal travaille , & qui fe referment quand l’entonnoir s’affaifle. Les trompes font fimples : vues au microfcope, elles paroif. . fent fous la forme de vers blancs, ronds, & compofés d'an- neaux; elles ont un mouvement vermiculaire continu. L'ani- mal peut les alonger jufqu’a quatre & cinq pouces, & les con- craéter jufqu'à les réduire à cinq ou fix lignes; elles font f molles, qu’on les rompt en les touchant fans précaution : quand l'animal travaille , elles font aflez fortes pour foutenir des fardeaux cinq à fix fois plus pefans que lui. J'avois mis plufieurs de ces Tubulaires dans un bocal, & les trompes qui fortoient par l’orifice inférieur, sétoient tellement cran ponnées contre le fond du vafe, qu'il fallut le rompre pour les en retirer , ce qui fait voir la néceflité de creufer profon- dément dans le fable pour faifir l'animal; autrement il laifle cnlever fon tube, & refte fous le rivage. Je coupai plufieurs trompes, que je mis à part dans un fla- con plein d’eau de mer; leur mouvement vermiculaire dura auffi long-tems que vécut l'animal, près de quarante huit heures; & j'aurois fans doute prolongé leur vie, fi j'avois été à portée de rafraîchir leur eau à chaque marée. Les trompes des autres pinceaux de mer décrits jufqu'à pré- fent, perdent la vie & le mouvement quand on les coupe; elles m'ont pas non plus la propriété de s'alonger & de fe rac- courcir, par la raifon fans doute qu'elles ne font point compo- fées d’anneaux, mais de filamens cartilagineux. De la manière dont ces animaux conftrurfent leur Tube. J’AvoIs Mis à part dans un bocal plein d’eau de mer le Le fort & le plus” vigoureux -de ces animaux dépouillé de on tube, après avoir rempli le fond du vafe de fable, de cailloutage & de desrius de coquillages. - ÿ pl 326 : OBSERVATIONS L'animal commença par fixer une partie . de fes: trompes far les cailloux les plus pefans, tandis qu'avec les’ autres il parcouroit différens endroits de fa nouvelle demeure. Après avoir tâté les objets qui l'environnoient, je le vis tirer à lui une trompe chargée de cinq à fix grains de fable affez gros; cette trompe, avec le fardeau dont elle étoit chargée, alla fe perdre dans l'entonnoir. Je le vis continuer cette manœuvre pendant quelque tems. Enfin l'animal léva la tête, s'agira beaucoup, & en appliquant lentonnoir contre les parois du bocal, y atracha des grains de fable en forme de voûte naiflante. Au bout d’une demi- heure la voûte fut complète; c'étoit un cercle, mais d'une rondeur aufli parfaite, que fi l'on eût faic ufage du compas. Ce cercle, au bout de deux heures, formoit un anneau de deux lignes de large; ainfi, l'animal auroit employé cinq jours environ à fe conftruire une demeure. Il y mettoit fouvent la tête, & sy agitoit beaucoup, fans doute pour arrondir le tube, & le tapifler intérieurement de cette matière vifqueufe; qui, dans le peu qu'il avoit fait d'ouvrage, formoit déjà une pellicule mince & tranfparente. Je ne pus découvrir dans ce travail quel étoit l'ufage des fix houppes en forme de coralline , qui font voifines de la tête ; elles étoient dans un mouvement continuel, mais je ne les vis faïfir aucun fardeau. Étant obligé de profiter de la marée pour partir, l’agita- tion du bocal dans le tranfport interrompit l'ouvrage, & le défaut d’eau prife au bord de la pleine mer fit languir l'ani- mal; il mourut au bout de deux jours. Il fuit de tout ce que je viens d’expofer que cet animal n'emploie, dans la conftruétion de fa demeure, d'autre inftru- SUR DES TUBULAIRES % ment que fes trompes; que la Nature l’a pourvu d'un réfer- Voir qui contient un gluten indifloluble à l'eau de Ja met; qu'il n'introduit les grains de fable dans l’entonnoir dont la tête cft furmontée , que pour les enduire de certe efpèce de glue deftinée à les coler enfemble. Ainfi, les Naturaliftes qui penfent que les animaux de cette cfpèce, en fe roulant dans le fable, font fortir de leur corps une humeur gluante capable de coler enfemble les ma- tières dont ils s'habillent, adoptent un fyfléme bien éloigné de celui de la Nature. J'ai dit plus haut que cet animal à dans fon tube une fitua: tion renverfée, & en effet de quatorze Tubulaires de cette efpèce, je n'en ai trouvé que deux. qui euflent la tête tournée vers l’orifice fupérieur. S'il arrive que le fable porté par les flots s'amoncèle fur le tube, l'animal Le continue Jufqu'à ce qu'il foit plus élevé que le fable. J'ai trouvé de ces tubes qui avoïent deux & trois panaches à quelques pouces de diftance, ce qui prouve qu'ils avoient été continués à deux & trois repriles différentes; il Shabille indifféremment de ce qu'il trouve à fa portée; mais les matériaux les plus pefans font toujours employés dans la païtie du tube la plus enfoncée dans le rivage, Pour caraë&térifer cet animal par la forme de fa demeure, je lui donne le nom de Corallina Tubularia Zttoralis, tubo . . sui 0 membranaceo, molli , arenofo, filamentis, ac detriru concha= rum florem demulantibus , coronato. 328 OBSERVATIONS, &c« Tubulaire à tube panaché de filamens , & de coquillages en forme de fleurs. Il eft du nombre de ceux que j'ai l'honneur d'envoyer à l'A: cadémie, & eft contenu dans le flacon B; mais, comme l’efprit- de-vin défigure l'animal, détruit fes couleurs, & ronge fes trompes, j'ai ajouté un deflein colorié d'après nature. DESCRIPTION Ê È È £ Ë Ê mrnrmr AN AN C2 Haussard Jeu. TT 29 ol % à. 0 ; PE Le té * à < À $ " a 1 CE Haussard Jeulp. Es ; . ; . à | | ke « x | 6 | | | = 1 .— FC LOUE £ | Eur EURE HUE, s LE SUR UT d À | 7 a — DESCRIPTION D'UN INSECTE SINGULIER TROUVÉ DANS LA RADE DE LOMARIAKER. Par M. DE QUÉRONIC, Ancien Confeiller au Parlement de Bretagne, Lnsecre dont on joint ici la figure, fe trouva, le 30 Mars 1767, parmi les branches d’un Fucus à feuilles femblables à celles du petit Sedum, garni de corallines & autres produc- tions de polypes. Ce Fucus fe trouvoit fur des piérres aux- quelles adhéroient les gros Tubulaires du Morbihan que M. l'Abbé Mazeas faifoit pêcher près du Bourg de Loma- riaker, jadis la Capitale des Venètes, afliégée & prife par Jules Céfar. Au moment qu'on Ôta ces petits animaux de leurs retrai- tes, les plus forts d’entr'eux cherchèrent à s'échapper, & fe mirent à marcher fur la table avec aflez de vitefle. Hs s'ap- puyoient fur les fix pattes de derrière, & fur les deux bras armés de gros crochets quon voit à leur anneau antérieur. Se plianc en,deux, ils rapprochoient & cloignoient fuccef- fivement la tête, ainfi que l'anneau antérieur, & le derrière du corps, marchant à la manière des Chenilles arpenteufes. La forme de ces animaux parut remarquable & d’auranc plus intéreflante qu'ils ont plufieurs traits de reflemblance avec un infcéte trouvé aufli en mer à deux lieues au large de Ceylan par M. le Commandeur Godeheu de Riville, & dont il a donné la defcription à la fin d'un Mémoire Tone IX, Te Préfenté le 4 Juillet 1767e 330 DE SRCIRMPPETT TE O NES fur la Mer lumineufe, imprimé dans le srotfième volume des Savans Etrangers. Notre infee eft couvert d’une écorce femblable à celle des Puces de mer, de même confiftance, & aufli d’un rouge lavé, fur-tout après la mort de l'animal, C’eft ce qui me porteroit à lui donner le nom de Puce de mer, auquel j'ajouteroïis celui d’arpenteufe pour caraétérifer fa marche. La figure À, repréfente l'animal de grandeur naturelle, & à-peu-près dans l'attitude où on l'a vu marcher. B, eft le même infe&e vu à la loupe, & deffiné avec coute l'exactitude poffible. L'œil qu’on lui voit à chaque côté de la tête, eft pendant fa vie, ainfi que lorfqu'il eft mort, du rouge le plus vif, femé de petits points jaunes. Sa gueule eft ouverte comme celle des poiflons, & non comme celle des crabes, écrevifles, &c. on l'a vu remuer les mâchoires qui ont plufeurs plis tels qu'ils font repréfen- tés; mais il n'a pas été poflible d'appercevoir fi l'intérieur eft garni de dents. comme l’infe&e de Ceylan. CC, facs membraneux, velus, & blancs, dont il y a deux de chaque côté, en-deflous l'un du fecond, l’autre du troifième anneau. Ces facs fervent probablement à l'infeéte, à fe foutenir dans l'eau & à nager. D, bras garnis chacun d'un gros crochet, parfaitement femblable à celui qui termine tous les pieds de l'infeéte de Ceylan. La comparaifon de notre figure avec celle de M. le Com- mandeur Godeheu, page 276 du troifième volume des Savans Etrangers , fera voir en quoi ces animaux fe reflem- blent, & en quoi ils diffèrent l'un de l'autre. 352 Le MEMOIRE Dans lequel on examune le fentiment des Anciens & des Modernes fur Porigine des MACREUSES. Par M. DE LA FAILLE, Secrétaire perpétuel de l’Académie de la Rochelle, Honoraire & Affocié de celle d'Aufbourg, de Lunebourg, de Berne; des Sociétés d'Agriculture de la Rochelle, Tours ; &c, D: roures Les rates qu'on à répandues jufqu’à ce jour fur les productions de la Nature, il n’en eft he ie ait eu plus de vuguc que la yéuvration fpontanée des creufes, des Bernacles, des Judelles, des Oïes d'Écofle. On s’eft par- tagé à leur égard en diverfes opinions, qui font les mêmes pour le fond. Les uns ont foutenu qu'il y avoit en Angle- terre des arbres qui au-lieu de fruits portoient des oifeaux. Les autres prétendent que ces oifeaux naïflent fur des plan- ches pourries auxquelles ils tiennent par le bec, qu'ils s’en dérachent lorfqu'ils fonc grands & dans toutes leurs forces. Quelques Auteurs avancent que ce ne font pas des oïfeaux qui pendent par le bec, mais de véritables coquilles dans lefquelles fe forment, felon eux, ces oïfeaux qui en fortent quand ils font en état de chercher leur vie. Ces générations monftrueufes ont été adoptées des pre- miers Naturaliftes. Nous en trouvons la preuve dans Pre, dans Æ/en, & dans tous les Anciens chez qui la corrup- tion étoit le principe de la plupart des fubftances animales. D'après eux cette erreur eft pañlée avec une foule d'autres abfurdités dans les écrits de tous ceux qui ont traité ce fujet, Toi} : Préfenté en 1769. cr EYE MÉMOIRE Des jours plus purs ont fuccédé à ces tems de ténèbres: L'amour du vrai, la phyfique & le flambeau de l'expérience ont difipé nos préjugés fur les productions de la Nature, Comment, malgré ces fecours, unc origine aufli fabuleufe que left celle qu'on attribue à la Macreufe & aux autres oifeaux de cette efpèce a-t-elle pu fe foutenir fur l'océan des fiècles, & pañler fans altération jufqu'à nous ? Comment les Savans, le Peuple & toutes les Nations ont- ils pu embarrafler & foutenir cette opinion. Copiftes les uns des autres nos Hiftoriens n’ont jamais écrit fur cet objet que d’après des oui-dires. La Nature, qu'il étoic difficile, mais non pas impoflible de confulter, a toujours été mife à l'écart. Le merveilleux a feduit l'imagination qui fe reépaic & s'en- thoufiafme fouvent des chofes extraordinaires; on a mieux aimé croire qu'approfondir. MM. Deflandes & Dargenville, n’ont fait que fuivre le torrent & accréditer l'erreur. Le Doéteur de Grain d'Urge eit le ieul, quis malgit la pitrention de fon fiécle, ait réclamé les loix de la Nature dans la repro- duétion de ces oïfeaux; mais il n’a fait que renvoyer aux effets ordinaires de la naïflance, à l’ovation, à l'incubation, fans fournir fes preuves; aufli fon Ouvrage pofthume, quoi- que commenté & mis au jour par une habile main, (le célèbre Malouin ,) n'a rien changé dans les efprits. Jofe, après ce grand Homme, entrer dans une carrière épineufe & traiter une matière enfévelie dans les plus épaifles ténèbres; pour y répandre plus de jour, il eft indifpenfable de connoître d’abord, & de fuivre, dans tous fes décails, le curieux Teftacée qui joue ici un grand rôle; delà nous , : e e . . Fe » . , paflons à la defcription du volatil, qui fait l'objet de ce Mc- moire. Ce premier appartient à la clafle des mulcivalves; je veux dire des coquillages compofés de plufieurs pièces. On le nomme en Bretagne Sapinette, à caufe qu'il s'attache au - . D \ LA . fapin, Clakis en Angleterre, à F Amérique Cravan, & en SUR DE SAMLA CRE US ES ss général Conque-anatifere; mot dont l'étimologie annonce aflez fon prétendu privilége. C'eft une des plus belles co- quilles qui parent les rivages du pays d’Aunis. Des trois fortes que fournit l'Océan, on ne trouve fur nos côtes que très-raremenc & dans des endroits écartés celle que les Na- turaliftes connoiflent fous le nom de Cozcha anauifera ad- herens. Ce coquillage, un des plus finguliers dans fhiftoire des Teftacées marins, n’eft jamais folitaire, il vit toujours en compagnie, groupé fur quantité de fes femblables. Il. fe trouve ordinairement attaché au bois ou aux pierres. Les débris flottans fur la mer, ainfi que la carenne des vieux vaifleaux, ou qui viennent de long cours, en font quelque- fois tout couverts : quelquefois aufi ce poiffon cache fous fa mafle de grofles coquilles, des Corallines, des Polypiers, des Madrépores. Les vents furieux & les tempêtes le déra- cinent fonuvent du fond dec eaux vu du creux des rochers, & le jettent fur nos rivages. La Conque-anatifère n'eft point comptée parmi les pro- duétions qui fervent aux agrémens de la vie; mais l'éclat & la variété de fes belles couleurs la font rechercher avec empreflement des Curieux, qui lui donnent une place diftin- guce dans tous les Cabinets d'Hiftoire Naturelle. Cette coquille eft pointue, trèsplatte & approche aflez de la forme d’une amande. Elle eft compofée de cinq pièces dont la couleur principale qui tire fur l’onix, eft coupée de ramifications d'une teinte plus forte. Le contour de ces pièces eft relevé d’un cordon faillanc & jaune, qui, outre l'agrément qu'il y répand par une nuance vive oppofée au fond, fert à les contenir dans leurs mouvemens ordinaires. Les deux grandes valves touchent à la tige, & les deux autres plus petites forment la pointe de la coquille. Le bord de ces quatre pièces va fe joindre au couvert d’une cinquième qui eft oblongue, courbée & creufée en goutriere. 334 MÉMOIRE Ces cinq pièces, qui difièrent entrelles affez confidérable: ment quant à la forme, font accouplées & tenues dans une mince pellicule, qui en tapifle la furface intérieure. Le jeu qu'elle donne aux valves dans la tenfion de l'animal, leur permet de s'étendre foiblement ou de fe gonfler plutôt que de s'écarter. Au premier coup-d’œil Fhabitant de cette maïfon ne paroït pas intérefler beaucoup : fa frange qui refflemble aflez à un plumaceau eft confufe. Mais, à l'examiner de près, ce petit corps fe développe & salonge; les filamens, qui le forment, fe divifent & fortent de la coquille. Ils font au nombre de vingt-fix. Le plus long, qui eft fitué vers fa pointe, cft aufli le plus mince : à melure que ces fortes de bras (car ils en font l'office) diminuent dans leur longueur, ils augmentent en volume. Leur arrangement eft cel, foic au dedans foit au-dehors de la couverture, qu'ils paroiflent ne s'en écarter jamais. Le premier ef celui qui déborde Je plus, le fecond rentre davantage, le troifième à moins de fortie, ainfi des autres jufqu'au dernier. Chaque filament eft un compolé continu de vertèbres qui s'engrainent réciproque- ment, & dont la furface inférieure eft armée de trois petits poils déliés & aflez longs. Tous ces poils, qui s'étendent dans l'eau de mer n’ont qu'un mouvement d’afcenfion, dont le jeu des vertèbres les rapproche plus ou moins, & lorfque le corps entier du plumaceau veut rentrer dans la coquille, les filamens fe rapprochent & fe réuniffent fous la forme d'un croiflant. Ceft dans le centre de cette partie qu'on découvre la bouche. C’eft un petit trou qui peut avoir environ deux lignes de diamètre, & qui a une forte de relicf. Sur le bord de ce trou font implantés les vingt-fix filamens que je viens de décrire. On peut dire qu'ils en font les gardiens, & qu'ils font autant faits pour lui fournir les alimens qui fe prennent dans leurs filets, que pour la mettre à couvert. SUR LES MACREUSES 335 C'eft ici que commence la partie charnue, celle qui conf titue vraiment l'animal. Elle eft grofle & ramafñlée, tant que le poiflon eft retiré fous fes valves; mais, lorfqu'il s'alonge & paroïic au-dehors, fon volume diminue & salonge aufli. Les alimens reçus par le petit trou qui forme la bouche, font enfuite portés par un long conduit placé inférieurement à une iflue qu'on croit être celle des excrémens. Cette coquille, ainfi que l'animal qui s’y trouve renferme, eft attachée par fon extrémité la plus large, à un boyau dont la groffeur & l'étendue varient fuivant l’âge du poiflon : dans les uns, il a jufqu’à neuf pouces de longueur fur huit lignes de diamètre; dans d’autres, il n’a que la moitié de ces deux pro- portions. Ce boyau eft tantôt d’un jaune clair , tantôt d'une couleur de fafran, & quelquefois d’un rouge peu fonce: telles font les différentes teintes des conques anatifères parvenues à leur entier accroifflement; mais les plus petites font prefque toujours d'un blanc fale. Ces nuances n'attaquent jamais que la partie inférieure du boyau, c'eft-à-dire , celle qui eft adhé- rente à un corps étranger, l'autre moitié qui fe réunit à la co- quille, tire, dans les uns & les autres , fur le noir foncé. Cette partie eft la feule qui fouffre quelque contraction ; elle eft à cet effet fillonnée, principalement à fon extrémité fupérieure, de grofles ftries tranfverfales, qui viennent finir vers le milieu du boyau : fans la couleur fombre, qui le cou- vre & l'enveloppe, il feroit tranfparent dans toute fa lon- gueur ; car il n’eft rempli que d’un mucilage glaireux, qui à l'air d'une vraie gelée : tant que l'animal eft fain , ce boyau eft ferme & réfifte à une aflez forte preflion ; mais aufli-tôc que le poiflon commence à manquer d’eau ou d’aliment , il fe flétric & fe ride; le mucilage, qui y eft contenu, fe fond peu-à-peu & fort par l'ouverture des valves. Tel eft le coquillage fur lequel l'antiquité à débité tant de fables & dont les Savans ont écrit rant de chofes incroya- bles, foit en le regardant comme l'origine & le principe d’une génération contraire à l’ordre naturel , foi en le méramor- 356 MÉMOIRE phofant lui-même en Macreufe. Nos modernes , fans admet: tre en entier ces rêveries, ont cru leur donner un air de vé- rité , ou plutôt éclaircir ce myftère, en foutenant que ces fortes d’oifeaux, pouvoient fort bien pondre leurs œufs dans ces coquillages , & les fubfticuer à la place du poiflon qu'ils béquetent à cet effet : le récit circonftancié de ce fait, qu'on lit dans un Recueil de différens Traités de Phyfique & : d'Hiftoire Naturelle, par M. Deflandes, imprimé à Paris en 1736, eft plus curieux que fonde en vérité. Nous allons le rap- porter dans fon entier. « D’autres oifeaux, dit M. Deflandes, s’établiffent dans les » endroits où il y a beaucoup de coquillages , fur-rout de ceux à deux pièces fortement atrachées contre des rochers ou contre des morceaux de bois; & là, quandils font à la veille de pondre, ils béquetent le poiffon renfermé dans ces di- VCIs coquillages & inerreut leure œnfe à B place : fans doute que ces œufs trop foibles pour fe foutenir d'eux-mêmes, y reftenc collés par quelque liqueur vifqueufe & gluante, juf- qu'à ce que l'oifeau rompe fes enveloppes, & prenanc plus » de nourriture, fe ferve enfin de fes propres aîles. Voila, à # mon avis, ce qui a donné lieu au peuple qui habite les côtes » de la Mer, de dire que les coquillages fe cransformeroient » eux-mêmes en oifeaux, HMH 181.67 SO BUS « On me demandera , fans doute , par quel art jai pu dé: » couvrir (ajoute M. Deflandes } une manœuvre fi fingu- » lière & fi peu remarquée jufqu'ici. Je repondrai fans peine, » & à l'exemple des Phyficiens les plus finceres, que c'eft » au hafard que je dois mes premières penfces fur cette ma- » tière. En 1729 , quelques Navires Anglois ayant fait nau- » frage envre le Conquer & $. Matthieu, la Mer en poufla les » débris & les membres épars fur la côte. Il y eut plufieurs » planches qu'on m'apporta par curiofiré, # qui étoient char- » gées de divers coquillages, principalement de moules & de » camimes. J'examinai ces coquillages avec loin, & Je remar- Fr] quai 1 SUR LES MACREUSES. 337 # quai que plufieuts d’entreux contenoient des embryons d’oi- » {eaux plus ou moins avancés, plus ou moins reconnoifl1- » bles : aux uns paroïfloient feulement les aîles À demi - ca- » chées; on voyoit aux autres le bec & le corps déjà tout for- 2 mé: jai cru qu'en faïfant remettre ces planches à fleur d'eau » & à l'abri du vent, je pourrois arriver à quelque chofe de » plus; mais les coquillages, qui avoient déja été fort agités, {e » déracherent tous, & la met les emporta. » Ma curiofité n'étant pas entièrement fatisfaite , je redou- » blai de foin en 1730, pour avoir de pareilles planches char- » gées de coquillages , en cas qu'il püt s'en trouver. Le nau- » frage d’un Vaifleau François; qui revenoit du Nord delEcofle, » & qui y avoit paflé l'hiver , m'en procura. Je revis avec plai- » fir des embryons d’oifeaux renfermés encore dans des moules » & des cammes, des œufs mêmes qui s'y trouvoient envei » loppés d’une matière vifqueufe & gluante. Tout cela me + confirma dans la penfce où J'étois, que, parmi les oifeaux de # mer, il y en avoit de plus habiles & de plus induftrieux les » uns que les autres , qui pondoïient leurs œufs dans des coquil- » lages où ils demeuroient en füreté jufqu'à ce qu'ils fuflent en- » tièrement éclos. » Un aveu auffi formel , garanti & foutenu par un Phyficien de réputation , qui dit avoir vu, feroit bien capable d’accré- diter l'erreur , fi l'on ne trouvoit dans le récit de M. Deflan- des des contradictions, & fi l’on n'y voyoit à découvert fon goût pour le merveilleux & pour les chofes extraordinaires. Il eft à croire que, dans fon récit, ce Naruralifte n’a pas cher- ché à altérer la vérité, il n’eft pas permis de foupconner fa bonne-foi; mais la prévention , ce tyran impérieux , qui a tant de force fur l'efprit de ceux qu'il foumer à {es loix, lui a, fans doute, fafciné les yeux. ; De tous les Auteurs, qui ont traité cette matière, il eft le feul qui fafle fortir des oifeaux des moules & des cammes; tous les Tome IX. Vy 338 MÉMOIRE autres Ecrivains n’ont jamais accordé ce privilége qu’à nos fapi- nettes. Pourquoi des milliarts de moules, qui couvrent nos côtes & nos bouchots , n’ont-elles jamais fourni un pareil exemple? Ce coquillage s'attache, il eft vrai, par un glutén , quelque- fois par fon 4/ffus , au bois , aux rochers & aux corps marins ; mais on ne peut pas dire quil en foi ainfi des cammes, qui ne vivent jamais que dans le fable, dans le limon ou dans la ierre. Cette coquille d’ailleurs , non plus que fon poiffon, n'a rien en elle-même qui puifle la coller à la carenne de nos Vaifleaux : aufli n’y trouve-t où le plus fouvent adhérent que des glands , des pouflepieds, des huîtres à bec & à rafteau ; des paquets de moules, & prefque toujours des conques ana- tifères. Voyons à préfent fi cette ponte, de la part de nos Ma: creules, dans un nid aufli extraordinaire, a quelque fondement, ou plurôc fi eile eft poflible. ‘ : M. Dargenville , qui a prévu Fobjection & fa difficulté, avance à la page 317 de fa Conchiliologie, feconde Editions imprimée à Paris en 1757, « Qu'il fe pourroic faire ques # comme la conque anatifère s'ouvre dans la mer , elle laïfsäe »# entrer l'œuf de la bernache qui eft très-petit, molafle & en- »vironné d'un mucilage , par lequel il fe colle aux différens » corps qu'il rencontre. Cet œuf ainfi attaché au poiflon de » la conque anatifère , en tire fa nourriture en vrai parafite, »# ainfi que de l'eau de la mer.» Cette folution hafardée , a tout l'air d'un paradoxe; l'Auteur qui ne cite pas fon garant, n'a fuivi que fes idées, ou plutor s’eft livré cout entier à l’eflor d’une imagination prévenue ou échauffée. Comment prouver que les œufs de la Macreule font , contre l'ordre’ naturel, petits, molafles & fans coque; & fi lun vivoir en vrai para- fice aux dépens de l'autre, on les trouveroït fouvent réunis ou confondus, ce qui n'arrive jamais : et il bien croyable en- core que la Macreufe abandonne fes œufs au hafard & au mouvement des eaux de la mer, dans l'idée qu'ils pourroien me SUR LES ;M A:GR/E US ES. 339 peut-être trouver un COUVErE fous cette coquille ? On connoît trop l'attachement des oïfeaux pour leurs petits. Nous def cendrons dans tous les détails de ces deux opinions , parce que le réfulcat nous en fera voir l'abus ou la fauffeté. La Macreufe eft un oifeau connu de tout le monde: il y en à de plufeurs elpèces ; qui font toutes à-peu-près de la grandeur du canard doineftique; on diftingue ; à la couleur des plumes; le mâle de la femelle : celle-ci eft toute grife; le mûle , au contraire, .eft d’un noir foncé, ce qui les fait nom- mer à Paris, Diable de Mer ; l'un & l’autre ont les aîles & les pattes aflez courtes & propres à nager, l'œil fombre , la paupière jaune ; fur l’origine de la partie fupérieure du bec, s'élève un tubercule charnu de la groffeur d’une noifette, d'un-beau rouge ; divifé en deux lobes par une ligne jaune, Les parties internes de cet oifeau ne s’écartent en rien de Tordre & de la configuration propre au genre volatile : tout y eft ‘conftitué de la:même manière que dans les autres fortes de canards; le mâle {e diftingue de la femelle , & l'ovaire n'a rien dans celle-ci qui foit digne de remarque: fes œufs , bien loin‘d’être mous & glutineux ; ont chacun une coque ferme, Hifle.&:très-féche. C’eft un fait précis & bien certain, que Jai eu occafon: de voir, de vérifier & d’examiner fur une Ma- créufe vivante, qui fut prife en 1756, au mois de Mai, fur le bord des côtes de la mer , par feû M. Defnain , & dont il me fit préfent pour augmenter l'Ornithologie de mon Cabi- net. Cette remarque s'étend à toute Ja clafle des) oifeaux, on n'en connoît point qui foient dans le cas fuppofé. Les tor- tues } les léfards , les couleuvres & quelques reptiles , fonc les. feuls qui pondent des;œufs fans coque; je veux dire que l'em- bryon & la liqueur où il nage, font enveloppés d'une mince pellicule qui Aéchie Tous les doists ; mais ceux de la Macreufe font fermes & capables de réfiftance ; ils égalént en groffeur Jes’œufs dela poule! Comment un volume de certe nature, & qui n'eft-pas flexible, pourroit-il être dépofé ou s’introduire Vvij 540 MÉMOIRE dans l'intérieur d’une coquille naturellement plate; qui n’a pas la moitié de cette grofleur , & dont l'ouverture ne fauroit s'é- tendre au-delà de cinq à fix lignes? ce feroit heurter le bon fens que de fourenir une chofe aufli abfurde. I n’eft pas moins révoltant de dire, que la Macreufe puifle béqueter le poiflon de la conque anatifère, pour y fubftituer fes œufs , parce que ce teftacée marin eft tellement renfermé fous le couvert de fes pièces , qu'il faut néceflairèmenc les | forcer & les rompre pour parvenir jufqu'à lui. Si les berna- ches ufoient de violence contre ces fortes de coquillages , ils en formeroient des débris, qui ne pourroient préfenter à leuts œufs aucune füreré, & s'il étoic poflible qu'ils puflent cachér leur ponte dans l'intérieur de ces multivalves morts, cer afyle ne feroit que momentané, vu que la corruption ; en détrui- fant ce berceau, expoferoit néceflairement l’un & l'autre à toute la violence des tempêtes & à périr contre les rochers. Il eft donc impoñlible qu'une manœuvre aufli bizarre puifle avoir lieu; tous les animaux foht guidés dans leurs mouve- mens, & principalement dans la reproduétion de leur efpè- ce, par un inftinét für, infaillible & raïfonné en apparence ; inftint qui ne leur permet jamais de heurter les loix de la Nature ou de s'en écaiter. La Macreufe ne paroît fur nos côtes que vers la fin de l'au- tomne & en hiver: au commencement du pfintems\;'ellé fe retire de nos-rivages, & va chercher un ciel moins doux & plus convenable à fa conftitution glaciale ; elle fe retire vers les plages feptentrionales ; y faic fon nid dans le creux des ro- chers, sy accouple, y pond fes œufs, & les-couve comme lés SUR LESIMACRÆUSES 341 ‘autres volatiles ; il eft vrai que ce nid eft groffièrement fait & prefque fans art, l’oifeau y fait entrer tout ce qu'il rencontre, le far, la moufle{de mer, & le plus fouvent des paquets en- tiers de conques anatifères , fonc les feuls matériaux qu'il en ploie à cet édifice , & au milieu defquels il dépofe fes œufs. Du fein de ces coquilles fort cette foule innombrable d’oi- feaux palmipèdes , qui habitent ordinairement les mers du Nord & de l'Ecofle ; mais cette naiflance n’a rien d’équivo- que ou d’extraordinaire : ce qui a paru merveilleux à tant d'Auteurs prévenus ou mal inftruits, eft ici réduit aux voies fimples & naturelles d’une reproduétion journaliere , conftante & quine varie jamais. Cette vérité eft garantie par le témoi- gnage non fufpet & fans intérêt de Girard de Werd, Hollan- dois, dans fa troifieme Navigation par le Nord. Voici fes pro- pies termes. « Ramants alors plus avant vers lle , nous y trouvimes © grand nombre d'oifons ou des canards, qu’ on nomme Rot- » Gauxen, nous en tuâmes un que nous avons fair cuire, avéc » enyiron {oixante œufs que nous avons apporté à bord, Ê 22 Juin 1596. Ces oifons ou canards étoient UE » » de la même efpèce que ceux qui nous vicnnent tous les ns D AS environs de Wiringen en Hollande’, & que l'on y prénd » > en très - grand nombre. On n’avoic pu favoir juqu'à préfent æ où ils pondent, & où ils couvent leurs œufs, ce qui avoit » porté plufieurs anciens Auteurs à aflurer qu'ils croifloient en » Ecofle à des branches d'arbre qui pendent au- deffüs d de l'eau, » dont les fruits qui y tombent, deviennent de petits oifons 5 nageañts © “&-ccux qui tombent en trre fé crèvent & fe y4ù 1 e U MÉMOIRE : » gâtent. L'on voit ici mdintenantle contraire. Ce n’eft donc pas * merveilles qu'on n'ait pas fu jufqu'à préfent où ces oifeaux » pondoïent leurs œufs, vu qu'il n'eft perfonne qu’on fache qui + ait encore pénétré fous la hauteur du 80° depré, que la terre » ait été connue en cet endroit, & encore moins que les Ros- » gans y couvent leurs petits.» Après des preuves aufli fortes , aufli précifes de la part d'un Voyageur, qui parle de ce qu'ila vu & examiné lui même avec la plus frieufe attention , il femble qu'on ne fauroit plus for- mer de foupçons fur la naïflance naturelle des Macteufes, dont la reproduétion ne peut fe faire que par l'accouplement du mâle & de la femelle, & par l'incubation des œufs. Les con- ques auatifères font un genre d'être trop éloigné des oifeaux, pour y trouver la moindre analogie. Un Curieux Militaire a fuivi pendant dix-huit mois , fur le côtes de Bretagne , la ma- nœuvre de quelques-uns de ces poiffons , qu'il obfervoit très- fouvent, fans y avoir jamais trouvé le moindre changement : j'ai fait de pareilles obfervations fur ce teftacée marin, dans l'Ance de Coreaille, près de la Rochelle; mais, ni la coquille, ni l'animal, ne m'ont jamais préfenté d'œufs ni d’oifeaux. Celui que nos Romanciers Naturaliftes ont cru y voir , n'eft autre chofe que le poiflon même, dont l'enveloppe , pour égaler un canard naïflant , devroit avoir dix fois plus de volume & vingt fois plus d’étendue , au moment que ce dernier eft aflez fort pour s'envoler. Cette migration occafionneroit, tous les ans, dans nos coquillages, des ee vides, au lieu qu'ils font tou- jours habités, & que l'animal n’en fort jamais. LA 11 n î 1 Que d’objettions à faire encore contre cette génération SUR LES MACREUSES. 34 monftrueufe : où trouver cette douce chaleur fi néceflaire à l'œuf pour éclorre ? où prendre la nourriture convenablé au peric canard dans les. premiers momens de fa vie? Dans ces inftans dela naïffance, où un état de langueur & de: débilité ne lui permetide/rien faire par lui-même, dira-t-on que les gaux de la mer fuppléent à cout ce qui paroît lui manquer® tous les reptiles, qui ne couvent point leurs œufs, les expofenr aux ardeurs du Soleil, & les tortues ne dépofent les leurs dans le fable des rivages de la mer, que pour augmenter par-là l'effet de fes rayons. Quelle peut donc être la fource d’une méprife aufli accrédi tée: je la trouve dans la figure du plumaceau de la conque ana- tifère, dont les filamens refflemblent affez à l'aile d’un jeune oi- feau couvert de fon premier duvet ; mais cette reflemblance ne fauroit féduire que ceux qui, fe contentant d'un examen fuperficiel, voient, par la prévention & par l’entêtement, ce qui n’exifte pas. Les glands de mer & les pouflepieds ren- ferment un pareil animal , que l'on n’a jamais foupçonné d’é- tre l'embryon de la bernache. Les conques anatifères fe perpé- tuent, à l'exemple des huîtres par une forte de frai & de ge- lée, qui s'attache à tout ce qu'il rencontre : ce fai donne naïflance à l'animal dont on reconnoît aifément la coquille jufques dans fa foible origine, J'ai vu des fapinettes de la grof. {eur d'un grain de mille. Ces coquillages n’ont d’autres rapports avec les Macreufes , que parce qu’elles en font le plus fouvent leur nourriture ; c'eft ce que l’on peut aifément vérifier, par l'ouverture & la diflection ; Peftomac de ces oifeaux eft ordi- nairement rempli de ces fortes de teftacées , qu'ils emploient 344 MÉMOIRE SUR LES MACREUSES: encore { comme je l'ai rapporté plus haut) à la conftruétion de leurs nids; mais les fecours qu'ils tirent des conques anati- fères font bornés à cet ufage feuf, & l'examen le plus attentif & le plus réfléchi, n'offre rien qui puifle fe concilier , ni avec le récit révoltant de M. Deflandes & de M. Dargenville, & éncore moins avec le Roman dans lequel on a travefti l'origine & l’hiftoire de ces oifeaux. MÉMOIRE 345 - ————— \o/ 2 MEMOIRE SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES CONTINUES OÙ DISCONTINUES, Qui entrent dans les Intéprales des Equations aux Différences finies. Pa M MONGE, Correfpondant , Profeffeur-Royal de Mathématiques , & de Phyfique Expérimentale, aux Écoles du Génie. Less DIFFICULTÉS de lIntégration ne font pas les feules que l’on rencontre en traitant les Équations aux Différences partielles ; pour peu que l'on foit au fait de cette matière, on fait que les intégrales complètes de ces équations, con- tiennent autant de fonétions arbitraires de variables, qu'il y a d'unités dans le degré de la différencielle, & que les formes, d'abord arbitraires, de ces fonctions, doivent étre déterminces & particularifées, de manière que l'équation fatif- fafle aux conditions particulières de la queftion, qui font, pour l'ordinaire, que la furface, qui eft le lieu de l'équation, pañle par autant de courbes, à double courbure , données, continues ou difcontinues, qu'il y a de fonctions arbitraires dans l'équation. Outre les difficultés de l'analyfe ordinaire, cette opération en éprouve encore de particulières dans cer- tains Cas; par exemple, fi l'équation ne renferme qu'une fonction, & qu'elle foit de cette forme, z—=M+N2vV, M, N & V ctanc des quantités quelconques données en x & y, ja fait voir qu'il étoit toujours poflible, en fuppo- fant la perfection de l'analyfe ordinaire, de trouver la forme Tome 1X, Xx Préfenté le 20 Août 1774. 346 MÉMOIRE de la fonction ®, pour qu'en faïfant y=F:x, l’on ait x=f.x, & qu'on pouvoit toujours la conftruire, quand même les quan- cités M,N, V,F,x & f:x, ne feroient pas foumifes à Ja loi de continuité, ni par conféquent expreflibles analytique- ment. Il en eft de même, fi l'équation renferme plufeurs fonc- tions arbitraires, pourvu toutefois que les fonétions foient com- poiées de l1 même quantité; par exemple, dans l'équation. . z—=M+NeV+PAiV RES &c. on peut toujours déterminer. les formes des fonctions D, VERRE &c. de manière qu'elles fatisfaflent à autant de’ de conditions quil y a de fonéions; ceft-à-dire, de ma- nière qu'en faifant ......... REV ©» Rte ce 1e ele CRE VE FER, OL AR EE Xe J'EN S AMONT AT ETES RE: soie aile cs 8EGi Et, fi ces formes ne peuvent pas être analytiques, ce qui arrive lorfque les quantités M, N, P...V, F-x,F'.x... fix, fx... &c. font difcontinues, ÿai fait voir qu'on pouvoir toujours au moins conftruire l'équation; ainfi, juf ques-là, lon neprouve d’autres difficultés que celles de Panalyfe ordinaire. Mais, fi les quantités dont font compoféés les différentes fonctions arbitraires, font différentes; fi, par exemple, l'e- quation éft de cette forme, ....... xz=M+NPV+PIW...... &c. il-ne m'eft plus poffible dé la confttuire par les méthodes que jai données, même en ne fuppofant aucune difcontinuité, ni dans les quantités M,N,P...V, W... &c. ni dans les conditions auxquelles il faut fatisfaire: la détermination ana- lytique de ces fonétions, dépend alors de l'intégration d’une équation aux différences finies, à deux variablés, d’un ordre moindre d'une unité qué le nombre des fonétions, & dans uses Jcavants Er. Tom. IX. lg. 845. SN \ NS NN SS El Hossard à fuÿp ? f ou SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c: 347 laquelle les différences finies de la variable principale, font variables elles-mêmes. On peut voir les Mémoires que jai donnés fur cette matière, & particulièrement un Mémoire de M. le Marquis de Condorcet , que cet illuftre Géomètre à eu la bonté de me communiquer, & qui doit être imprimé parmi ceux de l’Académie Royale des Sciences de Paris, Année 1771. Il fuit delà que la perfe@ion du calcul intégral des équa- tions aux différences partielles, dépend de celle du calcul in- tégral des équations aux différences finies: ce dernier genre de calcul a déjà été pouflé très-loin par MM. d° Alembert, Euler, Lagrange & de Condorcet ; M. Euler à remarqué que lorfque la différence finie de la variable principale x eft conftante , & exprimée par a, l'intégrale d’une équation aux différences finies, doit, pour être complète, contenir une fonction arbitraire des quantités fin 7° & cof"*, 7 étant le fapport de la circonférence au rayon; (*) mais je ne crois pas que perfonne ait encore donné la manière de trouver la quantité dont doit être compofée la fondtion, lorfque la dif férence finie de la variable principale , n’eft pas conftante : je me propofe, dans ce Mémoire, 1° De faire voir que, quelle que foit cette différence finie, l'intégrale complète d'une équa- tion aux différences finies d’un ordre quelconque , doit contenir un nombre de fonétions arbitraires Cgal au degré de la diffé- rentielle ; 2.° De démontrer que les fonétions peuvent être continues ou difcontinues, comme celles des intégrales des équations aux différences partielles ; 3.° De donner un pro- cédé pour trouver de quelles quantités doivent étre com- pofées ces fonctions; 4.° De faire voir de quelle nature doi- vent être les conditions qui peuvent fervir à les déterminer; (*) Voyez l'Ouvrage de M. le Marquis de Condorcet, intitulé: Lettre à M. d’Alembert, page 50, & fon Mémoire imprimé dans le Volume des Mémoires de l’Académie, pour l’Année 1770. M. de La Place avoit auffi donné ; avant moi, la manière de compléter les intégrales des équations aux diffé- rences finies , & me l’avoit même communiquée de vive voix ; mais je n’en avois plus 12 moindre idée , lorfque je travaillois à ce Mémoire. Xx ij 348 MÉMOIRE 5.” Enfin de donner la conftruétion de ces fonétions, lorfque les conditions ne font pas aflujéties à la loi de continuité, pour être clair, & fuivre un certain ordre dans cette matière: je vais commencer par les cas les plus fimples, quoiqu'ils foient déjà connus, & fuppofer d’abord que la différence finie de la variable principale , foit conftante. J'appelle variable principale d'une équation aux différences finies, celle à la différence finie de laquelle eft aflujérie la différence finie de l’autre variable: fi lon propofe, par exemple, Fic,:. de trouver la courbe AMN telle qu'ayant mené l'ordonnée quelconque MP, & porté de P en Q une droite quelconque PQ, qui foit toujours la même, quelque part que foit pris le point P, lon ait toujours l'ordonnée QN —QM: il eft évi- dent qu'en faïfant AP—x, MP—y & PQ— ax, l'on aura QN—7y+ay & QM— V Y°+( ax} ): la queftion exige donc que l'on ait ÿ + Ay — (+ ax) ); où (y + AY} —y* —(Ax); mais le premier membre eft la différence finie de y’, & d'ailleurs on a Ax=— conftante — a; on aura donc A-v GRR équation aux différences finies, dans laquelle x eft la variable principale, parce que c'eft d’après la difie- rence finie de x qu'a été prife la différence finie de y*; d’où lon voit que le caraétere À n'eft pas abfolu , mais que ceft un figne relatif, dont on ne peut donner l'idée, qu'en don- nant ja valeur de Ax. Ccla pofé , la différence finie de la variable principale étant conftante, ou Ax étant —a, foit propofé d'intégrer l'équa- tion AV — AAU, À étant une conftante, & les quantités V & U, des fonéions données en x & y, il eft évident que l'équation V—AU, fatisfait à la différencielle, & par con- féquent eft une intégrale de la propofée; mais cette intégrale n'eft pas complète, parce que, fi ® eft une quantité qui ne varie point, lorfque x devient x+ ax, l'équation V—AU+* fatisfera de même à la propolée » comme on peut s'en aflurer É SUR LES FONCTIONS ARBITRAIREÉS, &c. 349 par la différenciation: donc, après avoir intégré une équation aux différences finies , il faut , pour la compléter, ajouter une quantité w , telle que l'on ait Aw—o : ainfi, l'intégrale com- plète de A-y*—aAx, ou l'équation de la courbe demandée AMN, eft y°—ax+o. Adtuellement, pour trouver la quantité ©, foit AD la ligne des x, dont le point À foit l'origine , & concevons un cercle tangent à cette droite, dont la circonference foit — a, & dans lequel on ait mené le diamètre AF perpendiculaire à AD; concevons enfuite que ce cercle roule fur la droite AD, comme on le fuppole ordinairement pour la génération de la cycloïde, & que le diamètre AF foit mobile avec lui, il eft évident que le point A de la circonférence reviendra fuccef. fivement toucher la droite en des points B, C, D, ...&c. diftans entr'eux de la quantité a : il en eft de même de tous les points de la circonférence ; ainfi, le point M s'appliquant en 77, retouchera encore la droite AD, dans les points mm, m',... &c. diftans entreux de la quantité a ; de ma- nière que fi lon à Am—x, on aura Am — x + Ax; pareil- lement, fi lon à Am—x, on aura auf Am—x+4Ax: de plus, quelque part que foit le cercle, fi l'on abaifle du point de contaét une perpendiculaire fur le diamètre af, cette perpendiculaire variera de longueur, fuivant les diffé- rentes pofitions du cercle; mais, fi elle eft m2 lorfque le cercle eft en », m2 lorfqu'il eft en x’, mi lorfquil eft en m°...&c. onaura, #2 —m —m";— Ml: donc cette perpendiculaire ne variera pas, lorfque la quantité x deviendra x+Ax: donc fà différence finie fera — 0 : ainfi, la quan- tité MI pourroit être prife pour w, & l'équation V — AU+MI, feroit aufli une intégrale de l'équation A:V—AA.U; mais nous allons voir que cette intégrale n'eft pas encore com: plète. En effet, fi au-lieu de faire rouler un cercle fur la droite AD, l'on eût pris une toute autre figure, continue ou dif- Continue, rentrante en elle-même, comme dans la Eros Frc, 2. FIG 2555 5" 350 MÉMOIRE ou non rentrante, & terminée brufquement en a, comme . dans la Fig. 4, mais dont le contour auroit été égal à Ax—a, lon auroit eu le même réfultat; c'eft-à-dire, que lon auroit trouvé la perpendiculaire MI variable pour les différens x, mais toujours la même, lorfque x devient x+Ax : or, fui- vant que ces courbes mobiles AEFG feroient continues ou difcontinues , la perpendicnlaire MI feroit foumife ou non à une loi de continuité: donc la conftante © , que l’on doit ajourer à l’intégrale d’une équation aux différences finies, pour la rendre complète , doit être regardée comme pouvant être continue ou difcontinue. Pour donner l'expreflion générale de ces différentes valeurs de MI, ne confiderons plus que la Fz9.2, où nous fuppo- fons que ce foit un cercle, qui roule fur la droite AD, & foi, de plus (F2g.5), une courbe quelconque NOP, con- tinue ou difcontinue ; on peut même fuppoler qu'il y aït, comme dans la F:e.6, des folutions de contiguité, de ma- nière qu'elle foit compofée d’arcs NT’, TS’, SP, .... &c. non-feulement difcontinus, mais encore difcontious; foit OR la ligne de x, dont le point Q foit l'origine, & foit y—@.x le {ymbole de l'équation de cette courbe, en forte que l’on ait OR —@(QR); cela pofé, il eft clair que fi l'on prend la perpendiculaire M1 (F18.2), & qu'on la porte de QenR, l'ordonnée OR fera conftante , tant que QR —MI fera conf- tante : donc la quantité OR ne variera pas, lorfque x de- viendra x+Ax; donc on aura A-:(OR)=0; donc OR cft une quantité qu'on pourroit prendre à la place de w, pour compléter l'intégrale, qui feroit V=AU+9(QR)=AU+e(MI), la fonction @ étant quelconque, & pouvant être continue ou difcontinue. Il eft à remarquer, 1.” Que non-feulement la perpendicu- laire MI redevient égale à elle-même, lorfque x devient = x+Ax, mais encore lorfque x devient —£—x; 2. Que la droite HI redevient aufli égale à elle-même, lorfque x devient —x+Ax; mais non pas lorfque x devient =—x; _SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 351 donc une fonétion quelconque des deux droites MI & HI, fera conftante relativement à Ax; c’eft-à-dire, que l’on aura A-9 (MI & HI)= 0; donc l'intégrale complète de la fuppofée fera V= AU+ (MI & HI), la fonction @ étant quelconque: or MI ef le finus de l'arc AM, ou de x, en prenant HM pour rayon, & HI le cofinus du même arc; donc 7 étant le rapport de la circonférence au rayon, on aura ...... MI— fin (=) & HI a cof (=) 3 donc l'intégrale de- mandée fera V=AU.o ( fr ee & cof (=) : ainfi, l’e- quation de la courbe AMN (F9. 1), ou l'intégrale complète CR GEST Fer à CEE ge” de A.(y°)=aAx fera y? = ax +9 (re (£ ) car(æ)). (Voyez la conftruétion de cette équation, dans le Probléme IX). Jufqu'ici je mai rien dit qui ne fût connu des Géomètres, feulement je ne penfe pas que l'on ait remarqué que la fonc- tion arbitraire, qui complète cette intégrale, pouvoit être continue ou difcontinue, COROLLAIRE PREMIER. Il fuit delà que la détermination des fon&ions afbitraires, qui entrent dans les intégrales des équations aux différences païtielles, & qui peuvent être continues ou difcontinues, dépend d'un calcul qui introduit de nouvelles fonctions ar- bitraires, qui peuvent, comme les premières, être ou m'être pas foumifes à la loi de continuité; mais avec cette différence, que les quantités dont font compofées les premières, font à deux variables, & que celles qui entrent dans celles-ci n’en contiennent qu'unc. C'ONROL L'ANMRIET LE Püifque, pour trouver la quantité w , qui doit entrer dans la fonétion arbitraire qu'on ajoute pour compléter l'intégrale Fic, 7. 352 MÉMOIRE d’une équation aux différences finies , il fuffit de faire Aw— 0; Ax étant donné, fans avoir égard à l'équation que l'on a in- téorée, il fuit que cette quantité ne dépend nullement de l'équation intégrée, & qu'elle fera la même pour toutes les équations dans lefquelles la différence finie de x fera la même. C'OfRYO'L TC ANT R EMPIEIeT Le calcul intégral des équations aux différences finies, ren- ferme donc trois opérations principales ; 1.” L'intégration proprement dite; 2. La recherche de la fonétion arbitraire, qu'il faut ajouter pour compléter l'intégrale dans une certaine hypothèfe donnée de la différence finie de la variable prin- cipale; 3.° Enfin la détermination de certe fonétion, pour que l'équation fatisfafle aux conditions particulières de la queftion. Sur la première de ces opérations, on peut confulter les Mémoires de MM. de Lagrange & de Condorcet; on en verra d'ailleurs quelques exemples dans la fuite de ce Mémoire, dont les deux autres opérations font l’objet principal. PROBLÈME FONDAMENTAL. Étant donné le rapport de la variable principale x, à fa différence Ax, pour une équation aux différences finces à deux variables, trouver la fonélion arbitraire qu'il faut ajouter pour compléter fon intégrale. SN OPTAIUSTITIONNe Soit BCDE un cercle, dont le point À foit le centre, & au- quel on rapporte l'équation polare d'une courbe ASHEMLIRP, de manière que B étant l'origine, l'arc BN, & la droite AM correfpondante , foient les coordonnées de la courbe; cela pofé, il eft évident que fi la courbe fait plufieurs circonvo- lutions autour du pole À, pour le même point N, la droite AM coupera plufieurs fois la courbe , comme en, M, :P'éec: ceft-à-dire, SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c: 353 c'eft-à-dire, qu'à une même abifle BN, répondront plufieurs points S, M, P .. &c. de la courbe; d’où il fuit, que fi l'on abaïfle fur AB une perpendiculaire NO, les deux droites NQ & AQ, qui auront fucceflivement différentes valeurs pour les différens points de la courbe, reprendront les mêmes valeurs dans les points S, M, P...&c. ce que je viens de dire du point M, doit s'entendre de tous les points de la courbe qui répondent à la méme abcifle circulaire ; ainfi, par exemple, fi pour une autre abaifle Br, on abaifle la perpendiculaire #9, & qu'on mène l’ordonnée A» prolongée jufqu'à ce qu'elle coupe la courbe dans les points f', m, p... &c. pour tous | ces points , les droites zg & Àg auront les mêmes valeurs, quoique ces valeurs foient différentes de celles qui leur con- viennent pour les points S, M, P... &c. Si donc on conçoit que la courbe roule fur la droite AB, prolongée sil eft né- ceflaire, de manière que tous fes points s'appliquent fuccef- fivement fur ceux de la droite, & que les points M’, »7/, P’, P' foient ceux où les points correfpondans M, #, P, p touchent la droite dans ce mouvement, 1l eft clair que pour les points M' & P', une fonction quelconque des droites NQ & AQ, aura la même valeur, quoique cette valeur puifle être difié- rente pour tous les autres points. Semblablement une fonc- tion quelconque des droites ng & Ag aura la même valeur pour les points #/ & p': donc, fi la courbe eft telle, que AM étant la variable principale x, dans une équation aux différences finies propolée, MP’ foit la différence finie Ax ; une fonction quelconque continue ou difcontinue des droites -_NQ & AQ , aura la même valeur pour les deux hypothèfes de x=x & x —X+Ax; donc fa différence finie fera —0 ; donc on pourra l'ajouter à l'intégrale, pour la compléter. La queftion eft donc réduite À trouver l'équation de la courbe ASHEM , afin d’avoir l'expreflion de NQ & de AQ. Or AM’ ef le développement de la pattie ASHEM de la courbe, qui répond à l'abcifle BN » & M'P’ eft le dévelop- pement de la partie MLRP, qui répond à l’accroiflement de Tome IX. Yy. 354 MÉMOIRE Jabcifle — à la circonférence entière BCDEB; donc, pour fatisfaire à la queftion, la courbe ASHEM doit étre telle que la patie ASHEM étant — x, la partie MLRP foit — ax; c'eft-à-dire, qu'en nommant 4 le contour du cercle BCDE, & labcifle BN—w, cette courbe doit étre telle que fon contour pour une abciffe & étant — x, fon contour pour une abcifle — + a foit — x + Ax: mais on connoît le rap- port de x à Ax, par hypothèfe; donc, en intégrant léqua- tion aux différences finies, qui donne ce rapport, on aura Féquation de la courbe, qui fervira à connoître les valeurs des droites NQ & AQ, & par conféquent celle de la fonétion arbitraire , qui doit compléter l'intégrale de la propofée : ceci s'éclaircira par quelques applications. PROBLÈME II La différence finie de la variable principale étant Ax=x, trouver la fonction arbitraire qui doit compléter l'intégrale d'une équation aux differences finies propofee. ’ SOLUTION. Suivant ce qui vient d'être dit dans le Problème précédent} on intégrera l'équation Ax—x—o, en regardant comme conftante la différence finie de la variable principale w ; pour cela, on fera-x—e", d'où l'on tirera Ax=e"t#“— 6"; &, fubf- tituant cette valeur dans Ax—x—o, on aura e"*“— 26"=0, divifant par e”, & paflant aux nombres £!=— 1 ; mais, puifque lon à Aw=a, on aura = 1, & par conféquent #=°?, d'où Yon tirera, en intégrant, au—«L.2:3je néglige ici la conf tante arbitraire , parce qu'il n’eft pas néceflaire de connoître toutes les courbes poflibles, qui pourroient remplir le même objet que celle de la Figure 7; mais qu'il fuffit d'en avoir une: Péquation de cette courbe eft donc 4=*"=, ou, mettant pour D 7 z fa valeur, Lx=— “, ou enfin x—2e*, e étant le nombre SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 355 dont le logarithme eft—r. Aëtuellement x étant donné, pour trouver les valeurs des droites NQ & AQ, il faut remarquer qu’elles font les finus & cofinus de Farc BN, ou de l'arc ©, en prenant AN pour rayon; or l'équation x — 2e, donne L.x w— ar; donc, en exprimant par 7 le rapport de la circon- férence au rayon, on aura NQ —+ fin & AQ—+cof +; d’où il fuit que la fonétion arbitraire demandée fera ....... ] P(Jint: & cf). En effet, fi dans cette quantité on met par-tout x+x, ou 2x, à la place de x, elle deviendra o (fin 57 & cof +), où o(fin(r+%) & cof(r+%)), & par conféquent ne x changera pas de valeur: donc, &c. COROLLAIRE: Il fuit delà que la recherche de la fonétion arbitraire qu'il faut ajouter, pour compléter l'intégrale d'une équation aux différences finies | dans laquelle la différence finie de la variable principale eft variable, dépend de l'intégrale d’une équation aux différences finies, dans laquelle la différence finie de la variable principale , eft conftante. PROBLÈME IIL Le rapport de la variable principale à fa différence finie étant exprimé par l'équation Ax=a+bx, srouver la fonc: tion arbitraire qui doit compléter l'intégrale, ou, ce qui revient au même, intégrer Ay=0. SOLUTION. On cherchera l'équation de la courbe ASHEM, en intégrant l'équation Ax—a+bx, par rapport à une différence finie conftante ; pour cela, on fera a+4x-—e"; ce qui donnera Yy 356 MÉMOIRE u + Au €” ELU 9 ; . Ax=— —— ; ; d’où l’on tirera, en fubftituant cette valeur dans la propofée, e"*“=—(5+#+i)e": & enfin = 1: mais © ’ . # . étant la variable principale de cette équation, on aura w—4, ou $*—1; on aura donc #4; —°*, dont l'intégrale .... . os — EE fera l'équation de la courbe ASHEM & donnera, en x, la valeur de l'arc BN =; ainfi, en nom- mant # le rapport de la circonférence au rayon, on trouvera L.(a+bx) a rL.(a+bx) LA QN — “Hbne l'intégrale eft 20 09; &, mettant pour 4 & w' leurs valeurs, L.(Ay+B)—L:L.ax"-'X=C=9; ajoutant enfin la fonéticn arbitraire du Problème 1v, on aura, pour inté- HAICPCOMPIELE eh 1,4. CNE RERO EURE. L(Ay#B)=LeL- (ax JM EL-9 (re EEE 8 9 pire), Ê SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 359 En paflant aux-nombress Mie. : : | AS L. D:(1—A) mL.L.(axr—1 aL.L(ax"—1 Aÿ+B=(L-(ax"")) 27 X 0 (EE 8 A, PROBLÈME VI La différence finie de la variable principale étant .... Ax=—a+bx, zrtégrer complétement l'équation générale AŸy + AA" "y + BAT? y + CA“ y... ... +Ky=o, dans laquelle les coefficiens À, B, C..... K /ont conftans. SOLUTION: Soit fait (A) AT y + fl TOY HBAT y HAATT y. FEV, J; g, R...1 étant des cocfficiens indérerminés; & foit prife la différence finie de cette équation, en fuppofant que l'on At Ax—42+/x; ce qui donnera ......:: 000. Lh 5 (B) A + fa" y + GA" y + RATS y LA — AVS Soit enfuite multiplié (A) par le coefficient indéterminé M: & foit ajouté le produit à (B), l'on aura ............... A” PAT tAi) vi £ 7 5y...+/My=AV+MV: +} Y+1fM A y+{ Ms Y...+/My=AV+MY Cela fait, on déterminera les indéterminées Pres ReAlre M, de manière que les cocfficiens du premier membre de cette équation foient égaux aux coefficiens de la propolée ; c'eft-à-dire, de manière que l’on ait les équations fuivantes. f+M=A, g+fM=B, h+FgM=C...1/M=K, D'où l'on tire, PO MP Méoquatrons.M {RASE 2 :M°— AM"-: + BM":. CM... Ko, Ét l'on aura par conféquent, pour M, autant de valeurs [4 11 3 . Hum, um, 7, &c. qu'il y a d'unités dans »: quant aux autres indéterminées, f, Po ESS 7, il eft évident que leurs valeurs dépendent de celle de M; mais, pour mieux reconnoître leur formation, 4 eft bon de remarquer qu'elles 360 MÉMOIRE doivent étre telles que lon ait......... SENS 0 0110 (M°='— FM" + 9 M" — RM"... +/)x(M—w) = M°—AM"-'+BM"—CM"-:....+K; De manière que, fuivant que lon prendra, pour M, les valeurs m,m, p', &c. ou que le faéteur que l'on aura employé, dans cette dernière équation, fera M—yx, où M—«", ou M—;", &c. les valeurs des coefficiens f, g, k.... / feront différentes. Pour être plus clair encore, obfervons qu'ayant (M—2)X(M—p')X(M—p")x(M—u")... &c. —o: Si l'on prend, pour M, la valeur que donne un de ces fac- teurs quelconque, les cocfficiens f, g, k.... / doivent étre tels que le produit des autres faéteurs foit ............. = M"! — FM": + 8 M5 — Mt... + Cela pofé, la propofce fe transformera donc en l'équation AV+MV—o, dans laquelle on po mettre fucceflive- ment, pour M, fes valeurs u, w', u', &c. foit mife la pre- micre valeur #, & foit intégrce l'équation AV +uV—o, par le procédé du fecond cas du Problème précédent, & l'on aura V = (a+ 6x) 060 x @ (Jin St ge cof stat). Supprimant le coefficient & du premier membre, parce quil cft abforbé par la fonétion arbitraire, & repréfentant, pour abréger, par le caraétère unique P Rue la fonction elle- méme, l'intégrale fera V =(a+ BxYE FD “FFD x g: mettant enfin, pour V, fa valeur, on aura, pour intégrale première & complète, L.(1—#) A" y + FA" y + gA"T y + Ru ty. #2 + ly=(a+bx)r +0 x (GX Mais , au lieu de prendre, pour M, la valeur u, fi l'on prend fucceflivement les autres valeurs w/, w'', u'”, &c. on aura autant d’intégrales premières & complètes de la propofce, qu'il SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. F4 qu'il y à d'unités dans »7, & les intéprales feront ..... bo AGE FT A" y gt A y RE ANT ty + Lg =(a+ Ex) Een ten RE A y + PNG EG ERA Y A lY (at ba EU XF, Dans lefquelles les caractères Ÿ Fe: indiquent des fonc- tions différentes, mais de la même quantité que ?; de plus, dans les intégrales, le nombre des différences finies de y, eft m— 1; donc, en éliminant, à la manière de M. de Lagrange, toutes ces Tnt , il reftera une équation, qui contiendra la valeur de Y en fonétions ui Lu Fe CÉÉTC VALEUR RAA» « \ y=(a+Bx mer IX PACA EE TT EU XL (ab) ete 2e G+s KE, &e: Sera l'intégrale demandée, REMARQUE PREMIÈRE. Si le fecond membre de la propofée, au lieu d’être —0o; étoit —L, conftante quelconque, il eût été pareïllement facile de l'intégrer totalement, par la même méthode, avec certe différence feulement, que dans la première transformée, qui auroit été AV+MV=L, il eût fallu faire MV —L=e", pour avoir la feconde, comme dans le fecond cas du Pro- blême V, REMARQUE IL. La ÉTAE du Probléme précédent fuppofe que toutes Jesatacines de léquationtir., LCR néon ir... ] M°— AM"-'+BM"— CM" :...æK=0o, font inégales cntrelles; car, fi quelques-unes de ces racines, ou des quan- tités w,u', w', m, &c. quien font:les valeurs, étoient égales, quelques-uns des termes du fecond membre de l'in- tégrale , fe confondroient; par conféquent lé nombre des fonétions arbitraires ®, d, EF, &c. feroit moindre que le degré Tome 1X, 722 362 MÉMOIRE de la propofce, & l'intégrale ne feroit plus complète : pour remédier à cet inconvénient, je vais fuppofer que toutes les racines font égales entrelles, & exprimées par , & qu'après avoir intégré une fois, par la méthode précédente, l’on ait, pour intégrale première COMDIELE re ae JL: LCR L.(1—u ä) A y + FA" y ga" y... . +ly=(a+bx)r GE x 5 Équation qu'il faut intégrer de nouveau, & dans laquelle les quantités f, g, h.../, font les coeficiens des différentes puiflances de M, dans la quantité (M—)" ". Soit transformée cette équation, en faifant ............ 27 y + FA y + g'AT ty... + l'y =N', & elle deviendra : ; PEN de cette forme, AV'+uV'=— (a+ Bx YEN x ?; équation que l'on intégrera facilement , fi l'on rend le fecond membre de même forme que le premier: pour cela, foit reprefente ar R, ce fecond membre, de manière que l’équation à in- tégrer foit AV'+uV'=R [La quantité R eft telle, comme on peut le reconnoitre par différenciation, que l'on à .... AR——/“R]; foit enfuite ajoutée & retranchée la quantité rR; ce qui donnera AV'+pV'—(r+1)R—7rR; & foit déterminée r, de manière que le premier terme (r+1)R, foit la différence finie du fecond, — KR, divifé par w, ou que lon ait (r+1ŸR——2%%; on aura Ar—,"-, dont l'inté- grale r— ,%- = donne la valeur de 7, qu'il faut fubfti- tuer dans l'équation précedente, qui deviendra paralà. Par ! f :2.: R L (akbx) ÆR |, L.(atix) AV + E AG) ES 6 0 Prp Ou, parce que la quantité R contient une fonétion arbitraire, qui abforbe tous les cocfficiens conftans, .......... St AV'+pV'=A(RL.(atbx))+uRL-(a+bx), Ou enfin, A(V—RL-(a+4x))+u(V—RL-(a+46x))= 0. Or ceite cquation eft de mème forme que celle du Pro- blème V; donc fon intégrale complète fera ............. L ” SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c:, 363 L.O+x V'—RL:(a+8x) = (ax) TE x, la fonction 4 étant compofée de la même quantité que ®; rémettant enfin, à la place de R, fa valeur, on aura, pour intégrale feconde & complète de la propolée, AE TES PR Sr V'=(a+éx} GFOX d+L.(a+bx)X(a+bx)r GED X 9: En opérant fur cette équation, comme fur la première incé: grale, on trouvera, pour intégrale troifième, L.(1—4) L.(1—H4) L.(1—u) V'=(a+br)e FOX F+Li(e+br) x (a+br)e CFO x LA (L.(2+bx)) K(2+bx)L: (+) Xp: Donc fintégrale totale & complète de léquation générale dy + AA" y + BAT y + CAT y... +Ky=o, Lorfque les cocfficiens A,B,C....K font tels que les racines de l'équation eee sets sos ss seen. M°— AM" "+BM"—CM >... +K—o fonc toutes EE) 20e Al ASP AIR RSRE JR EPA ES AE APS , L.(1—/) y=(a+bx). +0 x (o+ L.(a+br)L+(L.(a+bx)) F+(L.(a+bx))f, &c.), Dans laquelle le nombre des fonétions arbitraires ?, d,F,f, &c. doit être égal au degré » de la différencielle. Si, dans la même hypothèfe, le fecond membre de la pro- pofée, au lieu d’être — o, étoit — conftante quelconque, on l'intégreroit de la même manière, en obfervant, de plus, ce qui a été dit dans la Remarque première. Si toutes les racines n’étoienc pas égales, mais qu'il n’y en eût qu'un certain nombre, on intégreroit, par le procédé du Problème, autant de fois qu'il y auroit de racines inégales, &, par celui de la Remarque II, autant de fois qu'il y auroit de racines égales, REMARQUE III. : Quelque rapport qu'aiententr'eux les coefficiens A, B,C...K, il fuit de cette Remarque, qu'il fera facile d'intégrer la propolée, Lai 364 MÉMOIRE. lorfque le fecond membre, au lieu d’être —o; ou — conf tante quelcongpeméra: 2. ape RE ten L.(1—N) L.(1— N') L.(1—N") =(2+bx)tr RU (a+bx) OF) XF +(a+bx) LOF) X 10 &c. L,(I1—N où (ab x (Se (Le (a+ be) + (Latex Ba) Re), ou égal à la fomme de ces deux quantités, dans lefquelles les fon&ions f, f”, f”, &c. peuvent être arbitraires ou dé- terminées : l'intégrale fera d’abord la même que celle que l’on a trouvée dans le Problème précédent, ou dans la Remarque1r; mais il faudra ajouter, dans le premier cas , le termé . 4. L.(1—N) L.(1—N:;) L.(1—N") L.(a+bx). (tartes FI) x f+(a+bx) LOTO x" +(a+bx)L: TENTE EE &c.); Darsile fcondieas}..... 0,40 4, 22090" QE, 200 Ne L.(1—Ni 5 a (a+bx)e- EF (f+( L.(a+bx))f' +(L. (a+bx))"F", &c..); PERLE le troifième cas, la fomime de ces deux termes. de. | REMARQUE IV. La: Salufiqn du Problème, & tout ce qui a été dir dans les Remarques , doit avoir lieu, quelques valeurs qu’aient les quan- tités a & b, dans l'expreffion de la différence finie de la va- riable principale Ax— a+ bx, excepté le cas où l’on a 0; ceft-à-dire, lorfque cette différence finie eft conftante; car alors où # L-(44 5) — 0, & l'intégrale générale devient inde- termince, & ne donfe! plus rien; mais, dans ce même cas, il cft facile d'intégrer la sat par le même procédé, ap- pliqué : au cas particulier dont il eft queftion: après avoir en eflet transforme là propofce, comme dans la Solution du Pro- blème, en AV+ MV=—o, ». où le coefficient. M peut avoir toutes les valeurs w, w/, m”, &c. des racines de l'équation M"— AM"-'+BM"—...+K—o, on intégrera cette équa- tion comme celle du premier cas du Problème V, & l’on aura ; Pour intégrale complète: PT PR RU Qi it MY (1 My: EX E(fin 8 fe) SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 365 Où, fupprimant le coefficient M, qui eft abforbé par la: fonc- tion arbitraire, & repréfentant , pour abréger, par le caraétère unique ©, toute la fonttion elle-même, on aura ..... Est V—(1=M)°xe: Mettant enfin, pour V, fa valeur, on aura, pour intégrale piemiére éccomplète, 214.5. 07/20 PNR AO | O1 | AT y + FA" y + gs y + RAT ty... + =( M) XP; Mais la quantité M pouvant avoir toutes es valeurs ..... m, w,m', &c. il s'enfuit que l'on peut avoir autant d'inté- grales premières & complètes, quil de d'unités dans #7, & Mit cit NME MERE NE ARE Se LES RES ES Any PAT y + SA y + RAT ty... + ly =(i—m)X9, moin) VAE TN RAY AE y rate") x N, An 2 Aer RE + ee H! 22 l'y=(1 —p')SXF, RP IEEE SN sue = RUES AMOR TE LE HE Dans cs les caraétères 9, ÿ, 18e Éaras des fonc. tions différentes de la même quantité (/£7 7 & cof =): donc, en éliminant les différences finies de Y,, dé reftera une équa- tion, qui contiendra la valeur de L'ASUS PURe cqRe équation y= (een) (ip), 8e Sera l'intégrale UNE Si fes racines de l'équation «2.4... LT M'— AN" +BM"r CM"... +K=o font égales entrelles, & que l'onait: par conféquent == y", &c. les termes de l'intégrale:{e confondent, & l'intégrale as incomplète: dans ce càs-là.,:il faut d’abord i intégrer une fois par le procédé précédent ,.ce qui donnera +... ° RAP RENTE HP an Ty = (0) 366 MÉMOIRE transformer cette équation en 2V'4+uV'=(r—x re; enfuite rendre le fecond membre de même forme que le premier: pour cela, on le repréfentera par R, & l'on ajoutera & retran- chera l'ndéténninée rR; par-là l'équation deviendra . .… AV'+pV'=(r+1)R—7rR, & l'on déterminera r de manière que l'on ait (r+1)R=2©%; d'où, parce que lon a .... AR=—4R, l'on tirera Ar= ,f=, & par conféquent r =; #<;: je néglige ici l'arbitraire, parce qu’elle eft inutile: ainfi, en mettant pour 7 cette valeur, on aura +-----...... EE AV'+uV'=A(ZSS) — ÈS, ou, parce que la quantité R contient une fonétion arbitraire, qui abforbe les coefficiens conftans, AV'+uV'—A(—Rx)—mwRx, & enfin----..- A(V'+Rx)+a#(V'+Rx)=o, dont l'intégrale complète eft V'+R x=—{1— FAN AJ; mettant, pour R, fa valeur à l'intégrale feconde fera «.-..,....:.. V'={(i1— LU A+ x( 1—uw)" pe GUERRE FN R ASAE NS SRE dr es &c. (ru) Ÿ4 xt Luÿe @: On opérera fur cetre intégrale comme fur la première, en la transformant d’abord en .:.:.-...:::..,.......,.4..04 AV + BV'=(1—u) d+x(i—u)"e, Et l’on donnera enfuite, au fecond membre, la même forme qu'au premier; ce qui fe fera pour le premier terme, que je repréfence par R, comme pour l'intégrale feconde, & il de- viendra A(H£5) — É£S : quant au fecond x ( 1m) ?, que je repréfente par R’x, on le mettra fous cette forme, R'x(r+1)—R'rx, r étant une indéterminée, qu'on déter- mingra de telle manière que l'on ait R'x(r+1)=—4%"; ce qui, parce que l'on a AR°=—wR", donnera x =" x Arx: or, puifque l'on 3 Ax=4, on aura x—A."7#, & par SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 367 M. A+7#—#tX Arx, dont l'intégrale donnera = x ; Bb il fie que le fecond terme R'x, ou x ( De u}s ?;, pourra revêtir cette forme TELE 1H? EURE — A((x—a)R'x)— m(x—a)R'x: Donc l'intégrale feconde deviendra :-.---- MANN. Vins AV'— VA (xR+( nn DT —m(xR+(x—a)R'x); Ou enfin, parce que les quantités R & R’ contiennent des fon&tions arbitraires, & que lon à xR+axR'=—xR, A(V'+XR +xR)+u(V"+x se Le Dont l'intégrale V”+ x°R'+ xR —( 1—p)E, donne, en Aubftituant à V'”’, R'& R, leurs valeurs ::............. 23 y FAT y Lg AS y, Bec. = (tp) Fat) + (1): o: Enfin, en continuant ainfi de fuite, on trouvera, pour inté- grale générale & complète didcois diam aie se) aie dés sine na els sie « = (rip) otx(r—n) N + (in) Se (OM Lie Il fuit de tout ce qu'on vient de dire, que la différence finie de la variable principale étant conftante, & exprimée par 4, il fera facile d'intégrer la: propofée -genérale, quand même le fecond terme feroit — conftante, ou d’une des ©” deux formes. IHIVANEESE rie eee cie Tete ï (ru) f+(i—u RFÈE —p#) F1, PES GMT + SAT . se Les quantités m,u, m', &c: épant des conftantes quelcon- ques, & les carattere£.f, f°, fl" &c: des JE | tions que des quanriés /ir * & 368 MÉMOIRE CNOUR OL LUAGTEREE Il fuit delà que dans une infinité de cas, il eft PP d'intégrer completement l'équation -.-................. se(eta(h4ky )) +80 (e+é(a+k)) +70 (r+c(4+k)), &c.=T, Rapportée par M. de Lagrange, dans le troifième Vol. des Mémoires de Turin, & particulièrement dans M cas où les (k+i}r— k coefficiens a, b,c, &c. font de la forme , M étant un nombre entier pofitif quelconque pour chaque coefficient. En effet l'on a généralement ......,..,.....,..... : p(i+At)—ArI+Er, | p(r+24r+A1)= Mpr+2Apr+pr, (et 3Ar+ 3Me+ At) = Mqr+ 3 Qt + 3 A+ Et; Et, en général, LÉO Too ME E io RAR HAS ALI »] (A) p{r+m. Ar +0 A + MORE Ag, Bec.) — »- +] A" QE + mA" QE +R AT que Die) AM IQ... + EE: Or fi, comme dans le cas préfent, ona Ar— A+ kr, ss... DS RCA EE) On aura auffi SAR QIAO EI PET QE EMA © Date NA RAR Et, en général, else pUnlaln le aieieln sista pete re Ainfi, le premier membre de l'équation (A), deviendra - ? (+440 Es 20 k + (2=0: 2e ke NEHCLSE -(m—1). (m2 2)-Cmæn fs &cC. )): Ou ? (=) tu). : donc on aura +---..... AT ol ueip etes oo)» Ir alola tele te pps ] APE + mA" qe + CD ANS GE + EE PV 7 so. + or: Ainfi, le terme général de la propofce ap(r+a(k+ki)), pourra toujours fe transformer en celui-ci---*+:::-°: SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &e. ; 69 Ado r+ BA" or 4 CAVTigr+ DA" pe... + Ge, Lorfque le coefficient a fera de la forme Er Donc, lorfque tous les coefficiens a, b,c, &c. feront de la forme oies la propofée pourra fe rapporter à l'équa- tion du Problème vr, & pourra par conféquent s'intégrer complétement, comme elle; 1.2 Dans le cas deaT —0o; 2. Dans les cas où T aura les formes indiquées dans les Remarques 111 & 1v: fur quoi il faut obferver, r.° Que lorfque la propofée na que deux termes, il eft toujours pofñlible de la ramener à cette condition; car il eft toujours poflible de la transformer en GS IE ECM E ORNE re CUS aV+BE(V+ (A IE V))+30 (V+a (+R V)), &c. =U, qui, lorfqu'elle n’a que deux termes. dans le premier membre, ou que l’on a y, &c. — 0, devient BAGV +(a+8)eV =U, & rentre par conféquenc dans les équations que nous ayons traitées précédemment. 2.” Que lorfque les cocficiens a, Bb, c, &c. font de la K+1)r 1: 5 AU : forme Et > l'intégrale complète de la propofée doit con- tenir des fon@ions arbitraires, dont le nombre ne dépend point du nombre des termes de la propofée, mais de la plus grande valeur qu'a l'expofant #, dans les différens cocfficiens a, b,c, &c. aïinfi, il peut fe faire que quand même la propoice n’auroit que trois termes, fon intégrale contint un très-grand nombre de fonctions arbitraires, PROBLÉME VII. La différence finie de la variable principale érant - .. AX—ax —X, 2mégrer complétement l’équation générale AYHAAT 'y+BATTEy+ CAT y... +Ky—o. Tome 1 X. Aaa 570 MÉMOIRE SO L'UNTITIONN: On transformeràa cette équation, comme celle du Problème précédent , en AV+MV=—o, M étant la valeur d’une des racines ES pe A EL ES à M°—AM"—'+BM"——CM"......+K—o; &, en procédant comme dans le troifième cas du Problème V, on trouverd', ROUE his première & complète, ------...) MV= (L( (ax"=?)) ie XO( fin Rue FLL(ar TT) à ee Supprimant le on M, qui ï a renfermé dans la fonétion arbitraire; remettant, pour V, fa valeur, & répré- fentant, pour abréger , toute la fonétion arbitraire, par le ca- raëtère ©, cette intégrale deviendra +.................. L.(1—M Any FAT y ga" + ER 4y (Las) ET x Or la quantité M peut avoir un nombre # de valeurs, re- préfentées par &, w', uw”, &c. donc on aura un pareil nombre d'intégrales premières & complètes, qui feronc différentes ; ces mtégrales LEONE Ne) eee ee D EN PAM ETS EU EST EE A" y + f AT y + I HE à +AA ty PAST —=(Le(ax71)) Er x, EE) a" y + f" A7? y + 9 2 Fay + h AT y Na One) LS a L.(1—4*) AT y HET L ARTE "+ RQ? SE (as NEC. . . . . . .…. s sa tie se piele e les eo 5e sHstione)ee vies else. Cie «© D'où lon conclura, comme dans le Problème pe que l'intégrale générale & re der de la propofée, eft- A g+(L: (are) Ver Len NE: Cu) AUS Le &C. REMARQUE PREMIÈRE. Si le fecond membre de la propofée, au lieu d'étre —o, croit — L, conftante quelconque, on l'intégreroit totalement SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c 3714 par le même procédé; car on auroit, pour première tranf formée, AV+MV=—L, qui cft également renfermce dans le troifième cas du Problème V. REMARQUE Il. Si toutes les racines de l'équation ........... M°— AM”-'+BM"-— CM 1... EK=o, RUE égales entrelles; c’eft-à-dire, que l’on ait u—u'—p", &c. la mé- thode précédente eft A ALU , & né donne plus l'intégrale complète : pour y remédier, on intégrera d’abord une PRIE fois, & l'on aura, comme nous avons vu, ............. L.(1—#) APE y+fA" y HeAT y. .L— = (L: (ax) Lim @: On transformer: de nouveau cette équation, en faifant ... APT y + f'A"Te + p'A7T POUPEE NÉE EL. _ Ce qui donnera AV'+uV = = (L( (ax) ET 6, & l'on in- tégrera de nouveau cette équation; ce qui fera facile, fi l'on donne au fecond membre une forme femblable à celle du premier. Pour cela, pour abréger, foit repréfenté le fecond membre par R, on aura AR——wR, comme on peut le reconnoïre par la différenciation, & l'équation deviendra, AV'+ uV'=R: foit enfuite ajoutée & retranchée la quantité rR, ce qui don- nera AV'+uV'—(r+1)R—7rR, & foit détermmnée r, de manière que l'on ait (r+1)R—2©%, on aura AT; m. L:L. (at). &, en intégrant Pi 0 y avr donc l'équation de- . ed .L. #1 HT. Mendes AV PUR RE EeL: (rer M) 4 ARS Er L.z Biréranpolant, |. UNE PRE cle à ; RELC ne: a (V4 Se D ra (+ RL. _ de LME en °7L Or, par le fe cas du Problème V, l'intégrale de cette Arai 372 MÉMOIRE équation te à à à MMA RS A LI DENS Dic' c to rGEITE (4) No () AT (ax) Er 4: L.n Donc, en ns pour V'& R, leurs A l'intégrale Éconde & complète de 4 propofée, fera... (1—2) L.{(1—4) A7? y + PA y+g'Am—4 y, ä «=(L. Ge) ne (2 ++ (LL (arr). (L. (at) Len Pour intégrer une troifième fois cette équation, on tranf- formera le premier membre en AV”+uV'', en fafanc--- ASE EE "el AtS Do Er l'on fra, )pour/abtérers intl RP se aies ei LG) (L:(ax*-")) L.n Lo, L.(1—H) (L-(ax"7")) ln ®—R,, SL (ain ter Ce qui donnera AR——wmR, AR——uR & Am—L:.#, comme on peut s’en aflurer en différenciant, & l'équation précédente deviendra AV”'+ &V"=R+4R'; équation qu'on intégrera facilement, fi l'on peut rendre le fecond membre de méme forme que le premier. ] D Or le premier terme R ne préfente aucune difficulté, puifque nous venons de voir qu'on peut le transformer en ...... —A(RL-L:. “(ax ))—(RL:L:(ax"7)). [Je néglige le divifeur L.», à caufe de la fonction mise comprife dans R]. uant au Fi l terme œR/, foic ajouté & retranché æR'r, il deviendra ©R'(r+1)—®R'r; & foir décerminé r, de ma- nière que l'on ait © R'(r+1)=1C2%; ce qui donnera É®=A.70, d'où l’on tirera facilement la Er de r, par l'intégration. Pour cela, il faut encore rendre le premier membre de même forme que le fecond; or on a A(4:)= 20Aœ +(Aw), où l : — A(w1) —(Aw)t __A(w?)— Lin. A0 ne d'où l’on tire © = (#1) au) — 0(e)T tr ne — À (ste); ainfi, SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 373 cette dernière équation devient = À (2%) = Aro, dont l'intégrale donne r =" (255): donc ls ‘fecond terme © R’ PERL étretmis fous'icettemfoimen, 1)... 4) db A (RE (EE) —ÉE (S UE), ou, à caufe que KR’ contient une fonction arbitraire, A(—aR'(o—L. n))—uoR'(—L. n): donc l'équation AV'+uV'—=R+R deviendra ........ ] AV"+pNV"=— que —uRo—A(oR(o—L.nr))—-uoR'(æ—L.z), Ou enfin, parce qu’à caufe des fonétions arbitraires, RS dans R & R', l'on eft en droit de faire …R—+wR'.L.n AV! + pi" = a ( &R'+aR)— u(oR'+0R): Donc, en tranfpofant, lon aura ............ FIST ar PORN n A ares aR'+ oR) Lu (V!+ a'R'+ R) Len dont l'intégrale, prife par le procédé du troifième cas du Problème V, fera V'+eR'+aR=(L.(ax")) Les FE: Donc, en remettant, pour V”, R, R' & ©, leurs valeurs, on aura, pour intégrale troifième de la Hrépolécs en fuppo- fant que Née racines uw, m', m', &c. pa égales entr ‘elles, ï. APTE HART BAM Le ee = L. (1=H) L.(i—4#4) É ee — (L. as) HT . E+(L.L.(ar—1)).(L. (ax) * J+(LL (ar 1)).(L.(axt—1)) qi En continuant ainfi de fuite, on trouvera, pour intégrale générale & complète de la propofte, .......... DL L.G— L.GA—1#) p=(Laar) LT (ox (LL (ar) 4 +(LL(en)E+ (LL (aa) Re). REMARQUE I11. Il fuit de cette Remarque, que, dans la même hyporhèfe de Ax—ax"—x, & quelque rapport qu'aient entreux les cocfficiens A, B, C, &c. de la propofée, il fera facile de l'intégrer totalement, non-feulemnent lorfque le fecond membre fera = 0 > Où = conffante quelconque, mais encore lorfqu'il fera 374 MÉMOIRE HAUT EC Lt N) L'tt1—N") | (L.(ax"=1)) | ss DU) PULL (cr RO “ (i—N) Où (L.(aar—t)) PT (F4 (Las )ff + (LL (aa) fr, Re), Ou égal à la fomme de ces deux quantités , dans lefquelles les quantités N, NON .p, p, &c. font des conftanres quelconques, & les CASE f, f, f”, &c. des fonions quelconques données, ou non, des quantités ...... , ASE mL.L. (ax) FL. E.(axr—1) TG ES 5 fr E.n f° L.n L'intégrale fera d'abord la même que celle qu'on a trouvée dans le Problème précédent, ou dans la RemarquelIl; mais il faudra ajouter, dans le premier cas, le terme ........ L.{1—N) L.(1—N') (L.L.(a ai) ).((L:( ax*—1)) Sn f+(L(ax—1)) pr f &c. ): Dans le fecond cas, SEM Li Ef LSPL TL SPP EUE SLR RTE L.(1—N) RAD ter" pat Mu (arr) + (LL (art )) PS &c.)s Et, dans le troifième cas, la fomme de ces deux termes. Ces exemples fufifent pour faire voir comment les fonc- tions arbitraires continues où difcontinues entrent dans les intégrales des équations aux différences finies, & la manière de les trouver, lorfque la nature du calcul ne sy refufe pas. il me refte aétuellement à parler de leurs lieux géométriques, & de la manière de les déterminer, pour qu'elles facisfaflenc aux conditions particulières de la queftion. THÉORËÈME PREMIER, La différence finie de la variable principale érant Ax—a, le lieu géometrique de l'équation Ay=0o, ou de fon intégrale, Frein, Y=@ (fn? cof *), eff une courbe quelcongne [comme dans 12813 Je Figures 11, 12 & 13] de la nature des cicloïdes, G en- gendrée comme elles par la révolution d'une courbe quel. SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 37$ conque continue ou diftontinue , rentranté ou non rentrante en elle-même, mais dont le contour eft —a. La démonftration de ce Théorême, fuit immédiatement de ce que nous avons dit, au commencement de ce Mémoire, fur les Figures 2, 3 & 4. PROBLÈME VIIL Étant donné Ax=a, conffruire Péquation Ay=b, ou fon intégrale complèse y=%+9 (fin & cofr). SOLUTION. Soit AB Ja ligne des x, A leur origine, & CDEF, &c. une courbe donnée ou prife à volonté, dont l'équation foit y =9 (fin & cof =); enfin foit conftruite la droite AM, dont l'équation eft y —# :, cela pofé, fi l'on mène à la ligne droite, une ordonnée quelconque PM, & qu’on prolonge cette hgne d'une quantité Md, égale à l'ordonnée PD, de la courbe CDEF, le point d fera dans la courbe demandée, & la courbe cdef; qui pafle par tous les points femblablement trouvés, fera le lieu de la propofée : en effet, fi l'on prend PQ=a, on aura, par la nature de la courbe CDEF, PDÈGE, & par conféquent M/— Nf: donc, fi l'on mène les deux droites 41 & MH parallèles à AB, on aura fI—NH: or on a f1—Ay & NH—6: donc on aura Ay—4. Cette Solution fuppofe que la forme de la fonction © eft donnée , & même qu'elle eft conftruite ; mais ce n'eft pas ce que comporte, pour l'ordinaire, Le genre de calcul dont il eft ici queftion, où il s'agit prefque toujours de déterminer au contraire la forme de Îa fonétion +, pour que le lieu de l'équation y—{+0, farisfafle à certaines condirions : voyons d'abord qu'elle eft la nature des conditions auxquelles peuvent fatisfaire des équations de ce genre, ‘ Fic, 14, 376 MÉMOIRE Ce ne peut pas être que la courbe demandée pafle par certains points donnés; car, quelque grand que füt le nombre de ces points, la quéftion! feroit toujours indéterminée : en effet, foient donnés tant de points qu'on voudra d, e, g, &c. & foit propofé de conftruire la fonétion ©, de telle manière que le lieu de l'équation y—#+0, pañle par tous ces Pons fi lon conftruit la droite AM, dont l'équarion eft LEA C de tous les points d, e, g, &e on abaïle des perpendicu- laires dP, eV, 8R, &c. fur la ligne des abcifles ; que Jon fafle PD — Ma ME=SATRGE Tr &c. ce qui donne les points D, E, G; qu après avoir divifé la ligne des abcifles en parties AP, PQ, QQ', &c. chacune égale à à a, &, à partir du point a l'on rapporte tous les points D, É G, &c. fur une même nl fur PQ, par exemple, ce qui fe fera pour le point G, en portant QR de Penr, & faifant rg —RG, on aura, pour une même divifion PQ, autant de points Dis 12 &c. qu'il y a de points donnes, & par lefquels on pourra Ge pafler une certaine courbe De EF: cela pofé, fi pour toutes les autres divifions AP, QQ', &c. l'on repère la même courbe D2'EF, 1. L'affemblage ; ou le fyftême de toutes les courbes, pa He par les points D, E, G, &c. comme il eft évident: 2° Le fymbole de l'équation de ce fyftême, qui peut être continu ou difcontinu, fera y =@(/in = & cof =), pH l'on a Ay=o: donc, en SE uuRRe le Probléme précédent d'après ce fyftême, la courbe que l'on trouvera, 4 pañlera par les points donnés 9, e, g, &c. 2. fera comprife dans l'é équation Y==+#+09:0r, quel que foit le nombre des points D, 2’, E, &c. par lefquels on propole de faire pañler une courbe D’ EF, cette courbe cft toujours indé- terminée, parce qu'il y a une infinité de courbes, qui peuvent remplir cette condition: donc aufli il y a une infinité de courbes c, d,e DE qui peuvent pañler par les points donnés ds es &c, & tre en même temps compriles fous certe équation y=—" +9: donc la nature des conditions auxquelles doivent fasfaire les intégrales des équations aux différences finies à SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 377 finies , pour que leurs fonctions arbitraires fe particularifenr, n'eft pas que Les courbes, qui en font les lieux, palfent par . des points donnés. Mais, fi la partie def, de la courbe, qui répond à une patie quelconque —a, de la ligne des abcifles, eft déjà conftruite , il fera facile de conftruire la partie D£Z'EF, cor- refpondante de la courbe formatrice, & de répéter cette partie pour toutes les autres divifions de la ligne des abcifles; par conféquent le refte de la courbe fera déterminé: donc, lorfque l’on,a Ax— a, la nature de la condition, à laquelle doit fatisfaire l'intégrale d’une équation aux différences finies, eft de continuer une courbe, continue ou difcontinue, déjà tracée, G qui ne réponde pas à une partie de la ligne des abciffes plus grande que à. Aïnfi, en confidérant l'équation y —#+ @ (fin & cof =); comme l'intégrale d’une équation aux différences finies, dans laquelle la fonction © eft jufqu'alors arbitraire, continue ou difcontinue, voici comment il falloit énoncer le Probléme précédent : Etant déjà conftruite une partie de courbe quel- conque , continue ou difcontinue , correfpondante a une partie — a de la ligne des aboiffes, continuer cette courbe, de manière que le fÿmbole de [on équation foit .. y= +0 (fn & cof); Ce qui ne peut fe faire, fans que la fonétion ® ne fe païrticu- larife, & cefle d’être arbitraire. D’après tout ce qu'on vient de dire, la Solution du Pro- À . / 2 A . . / blême, ainfi énoncé, ne peut être fujette à aucune difficulté. PROBLÈME IX. La différence finie de la variable principale érant Ax=2, conftrurre le lieu de l'équation A(y*)—aAx, ou de fon inté- grale ÿ =ax +o(finr & cof =). Tome IX. BbbE Fre, 8. 378 MÉMOIRE DOLUT I ON: On peut fuppofer que la fon&tion foit donnée de forme ; de manière qu'on puille conftruire l'équation y=®, où qu'au contraire 1l faille déterminer la fonétion 9, pour que l'équation J°=ax +, appartienne à une courbe déjà commencée, & que l’on fe propofe de continuer. Dans le premier cas, foit AEF, GHI, KNL, RS, &c. le le lieu de l'équation y—2£, nous avons déjà vu que la courbe, à laquelle elle appartient, doit être compofée de parties égales & femblables, correfpondantes à des parties de la ligne des abcifles , égales à la différence finie a : foit conftruite la para- bolce ABC, dont l'équation eft yÿ*—4ax; cela polé, fi pour une abcifle quelconque AQ, on veut trouver l'ordonnée QM, de la courbe demandée, on menera cette ordonnée indéfni- ment, que coupera quelque part, en N, le lieu de l'équation y=?; par le point N, on menera une droite Nr, qui fera, avec la ligne des abcifles, un angle de 45°, en obfervant de la mener du côté de l’origine, pour le figne —, & du côté oppofe, pour le figne +: par le point 7 , on menera l'ordonnée mn de la parabole; enfin on fera QM=mx, & le point M fera dans la courbe demandée. En effect, on a, pat la propriété de la parabole, (QM}, ou (mn) —=axX(Anr)=a(AQ+Q7): 0r on a Qr—=QN, on aura donc (Q M}, ou y*=a(x+t)=ax+. Il eft évident que, fuivant que la fonction + fera continue ou difcontinue, ou que le fyftème des courbes femblables AEF, GHI, &c. fera foumis ou non à la loi de continuité, la courbe demandée Acf, Bo, CM/, Df, &c. fera de même con- tinue ou difcontinuc; mais elle n'en fatisfera pas moins à la condition dont nous avons parlé au commencement du Mc- moire, & qui eft qu'ayant mené l’ordonnée quelconque Pz, SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 379 & porté de P en Q la quantité a, l'on ait QM—Qs; car, par la conftruétion , fi l’on porte de z en p la même quantité a, l'on aura ph=— Pg, & par conféquent Qg — Az: or, par la propriété de la parabole, on a ##—nh; donc on aura aufi QM=Qg. Dans le fecond cas, fi la partie CM de la courbe, eft déjà conftruite , & quil faille la continuer, de manière que fon équation foit y*—ax+®, par un point M quelconque, on abaïflera l’ordonnée MQ ,. & lon menera M2 parallélement à la ligne des abcifles, jufqu'à ce qu’elle coupe la parabole en un point 7, par lequel on abaïflera l'ordonnée #7; on menera z N, qui fafle un angle de 45° avec la ligne des x ; cette droite coupera MQ en un point N, qui appartiendra à la courbe KNL: on trouvera tant de points qu'on voudra de cette courbe, par le même procédé; &, en la répétant pour routes les parties AG, GR, &c. de la ligne des abcifles, on aura le lieu de l'équation ÿy—#++, qui fatisfera à la queftion; &, en achevant la conftruétion , comme dans le premier cas, on aura la courbe demandée. PROBLÈME X. La différence finie de la variable principale étant ...: Ax=—2a—2x, conftruire le lieu de l’équation Ay =o, ou de léquation .., ; | sn eee ee + + y=9(fin;L:(2a—2x) & cof L:(2a—2x)), qui Log. —1 Eft fon intégrale , comme on l’a démontré dans le Probléme y. SOLUTION. Soit À d la ligne des abcifles & A l'origine; foit portée de À en B une partie —a; & foit menée CB perpendiculaire à AB: cela pofé, fi l'on conftruit de part & d’autre deux courbes F1re, 9 quelconques, CMD & C4, continues ou difcontinues, mais Bbb ij Fire, 10, 380 MÉMOIRE fymmétriques , le fyftéme de ces deux courbes fatisfera à la queftion. En effet, foi prife l'abcifle quelconque AP — x , & menée lordonnée correfpondante PM—y, on aura PB—a—x; donc, fi l'on augmente l'abcifle de Ax—2a—2x,ou quon porte de P en p la quantité 2a— 2x, on aura Bp—PB, & par conféquent pm—PM: donc on aura y+Ay=—7y, ou Ay 0! PROBLÈME XI. Dans la même hypothèfe de la différence finie de la va- riable principale, conftruire le lieu de l'équation -..-... Ay+2y—2B—o, ou de fon intégrale -.............. y=B+(a—x)o(fin7L-(2a—2x) & cof—L-(2a—2x)). SOLUTION: Soit EFG la ligne des x, & E l’origine; foit fait EF— 4, & foit menée la perpendiculaire FB—B: cela pofé , fi par le point B, on mene AC parallélement aux x, & que de part & d'autre des droites FB & AC, on conftruife deux bran- ches de courbes continues ou difcontinues, mais fymmétriques, de manière que l'une DMB étant d’un côté de la droite AC, l'autre Bd foic de l’autre côté, le fyftême des deux courbes fera le lieu demandé. En effet Mot E PR PME= 5, on aura PP=2 Ex &, fi l'on augmente l'abcifle x, de la quantité Ax, en faifant Pp—2a—21x, on aura Ep—PF; foit menée l'ordonnée p», prolongée jufqu'a la rencontre de la droite MN, parallèle aux x: cela pofé, on aura Nr A\y= 2QM=—2(y—B), & par conféquent Ay + 2y — 2 B — 0. On pourroit demander aétuellement de déterminer les formes analytiques des fonétions ®, qui fatisfont aux problèmes SUR LES FONCTIONS ARBITRAIRES, &c. 38r précédens; mais le plus fouvent la queftion n’auroit point de folution; car les formes de ces fonctions feront difcontinues, & mauront par conféquent point d'expreflion analytique, non-feulement lorfque les différentes branches des courbes, qui en font les lieux , feront difcontinues, chacune en par- ticulier, mais encore lorfque leur fyftême ne fera pas con- tinu : ainfi, dans la Figure x, il faut , non-feulement que cha- cune des courbes DMB, Bd, foit continue, un arc de cercle, par exemple, mais encore que leur fyftêème DMC4, foit aufi continu; c’'eft-à-dire, fi ce font des arcs de cercles, de mêmes rayons, & fymmétriques, que ces arcs aient même centre, & par conféquent que la courbe entière foit un cercle, pour que la fonétion, qui entre dans fon équation +++... Y—=® (Jin & cof—L:(2a— 2x)), puifle obtenir une va- leur analytique. On peut conclure de ce Mémoire, que de même que les équations aux différences partielles appartiennent à toutes les furfaces courbes, qui s'engendrenc de la même manière, les équations aux différences finies appartiennent à toutes les courbes planes, continues ou difcontinues, qui ont même formation. 382 RE ——————, MÉMOIRE SUR LEs PROPRIÉTÉS DE PLUSIEURS GENRES DE SURFACES COURBES, particulièrement fur celles des Surfaces développables , avec une Application à la Théorie des Ombres & des Pénombres. Paz M MONGE,; Correfpondant , Profeffeur-Royal de Mathématiques, & de Phyfique Expérimentale , aux Écoles du Génie. Préfenté Dans un Mémoire que jeus l'honneur, en 1771, de pré- É Fe fenter à l’Académie , je fis voir qu'il n’y avoit aucune cour- "be, plane ou à double courbure, qui n’eût une infinité de déve- loppées : que toutes ces développées étoient à double courbure, à l'exception d’une feule pour chaque courbe plane : que l'af- femblage, ou plutôt le lieu géométrique de toutes les déve- loppées d’une même courbe , formoit une furface courbe douée de la propriété de pouvoir être étendue fur un plan, de ma- niere à le toucher dans tous ces points; par exemple, le lieu des développées d’une courbe fphérique quelconque , eft tou- jours la furface d’un cône, dont le fommet eft au centre de la fphère, & dont la bafe dépend de la nature de la courbe. Je démontrai qu'en fuppofant conftruit le lieu des développées d'une courbe , on obtenoiït une de fes développées quelcon- ques , en menant par un point de la courbe, & dans une direc- tion arbitraire, une droite tangente à la furface, & la pliant en- fuite librement fur cette furface ; que par conféquent chaque développée étoit entre fes extrémités la ligne la plus courte que l’on pût mener fur le lieu des développées. Je donnai des formules pour trouver l'équation du lieu des développées d'une Dern ner NS Eee 2 2 MÉMOIRE SUR LES SURFACES. 383 courbe quelconque , & celle d’une de fes développées quelcon- que ; enfin j'expofai plufeurs propriétés très-remarquables dont jouiflent les furfaces développables. Ayant repris cette matière , à l'occafion d'un Mémoire que M. Euler a donné dans le Volume de 1771, de l’Académie de Péterfbourg , fur les furfaces développables, & dans lequel cet illuftre Géomètre donne des formules pour reconnoître fi une furface courbe propofée , jouit ou non de la propriété de pouvoir être appliquée fur un plan, je fuis parvenu à des ré- fulcats qui me femblent beaucoup plus fimples , & d'un ufage bien plus facile pour le même objet; j'en aï déduit la détermi- nation de l'ombre & de la pénombre d'un corps de figure quel- conque, éclairé par un corps lumineux de figure quelconque. La même méthode peut conduire à trouver les caractères gé- néraux de tous les genres de furfaces courbes, & à les expri- mer analytiquement ; je donnerai pour exemple les équations & les propriétés générales de toutes les furfaces courbes, qui peuvent être engendrées d’une maniere quelconque par le mouvement d'une ligne droite. L’analyfe ne peut que retirer un très-grand avantage de fon application à ce genre de Géo- métrie; car je donne la folurion de plufieurs problèmes d’ana- lyfe , qu'on auroit peut-être beaucoup de peine à réfoudre, fans les confidérations géométriques. Une furface eft développable, lorfqu’en la fuppofant flexible & inextenfible, on peut la concevoir appliquée fur un plan, comme celles des cônes & des cylindres, de maniere qu’elle le couche fans duplicature ni folution de continuité , ou , ce qui revient au même, lorfque luiayant mené par un point quelcon- que un plan tangent & indéfini, & en fuppofant le plan flexi- ble & inextenfible , on peutle concevoir plié fur la furface, de maniere qu'il foit par-rout en contaét avec elle, fans que pour cela il faille le brifer ou replier en aucun point. Soient donc NPP'N/ élément d'une furface courbe & Fc. a) développable, ABCD , le plan tangent à cette furface en cet 384 MÉMOIRE élément, & foit d’abord plié ce plan, fuivant le côté N’P ; pour être appliqué fur l'élément fuivanc N'P'PN", & pren- dre lanouvelle pofition A’B'C'D”"; il eft évident, que dans cette opération, le plan n'aura pu fe plier que fuivant la droite AB déterminée de pofition par le prolongement du côté N’P' de l'élément : concevons enfuite que le plan A’B’C’D' tangent au fecond élément, foit plie fuivant le côte N°7 P” pour s’ap- pliquer fur le troifième élément N°P”P'N”, & prendre la troifième pofition A” BCD”, il eft clair quil n’aura pu pa- reillement fe plier que fur la droite A”’B"” , determince par le prolongement de la petite droite N''P” : imaginons enfin que cette opération foit continuée, & que le plan ait déja enve- loppé une partie finie de la furface. Cela pof£, on reconnoîtra facilement, 1.° que les droites AB, A’B', A”B", AB”, &c. doivent néceflairement fe trouver fur la furface courbe : 2.° que les parties de la furface renfermées entre deux de ces droi- tes confécutives, doivent être de nature à pouvoir étre regar- dées comme planes, ou, ce qui eft la même chofe, que deux de ces droites confécutives doivent être dans un même plan, c'eft-à-dire, être paralleles ou concourir en un point. Si les droites AB, AB’, AB”... &c. font parallèles, la furface fera cylindrique, à bafe quelconque ; fi elles concourent routes en un point, la furface fera conique ; mais il peut arri- ver, & c’eft le cas le plus général, que les droites fe rencon- trent {ucceflivement en ee points, par exemple , que la droite À B rencontre le fuivant en un point M, que celle-ci tencontre la troifième A’ B” en un autre point M’, que AB" coupe la quatrième A””B””" en un troifième point M'',& ainf de fuite. Dans ce cas, les points de rencontre M M'M”..... &c. forment une coube à double courbure EMF , dont toutes les droites AB, A’B’, A”B".... &c. font les tangentes ; alors la furface n’eft ni conique ni cylindrique ; mais elle eft formée par Faflemblage de toures les tangentes d'une certaine courbe à double courbure. J’ai fait voir , dans le Mémoire cité ci-devant, que de pareilles furfaces avoient toujours deux xappes , dont Ja courbe SURLES SURFACES. 385 la courbe EMF étoit l’arêre de rebrouflement , à moins que la courbe ne foit plane, auquel cas les deux nappes fe confon: droient, & fa furface deviendroit un plan. On peut conclure de-là , qu'il n'ya aucune furface développa- ble , qui ne puifle étre regardée comme formée par les prolon- gemens de toutes les tangentes d’une certaine courbe à double courbure; & que, réciproquement, toute furface formée par les tangentes d’une courbe quelconque, eft fufceptible d'être déve- loppée fur un plan, parce que tous fes élémens font des plans infiniment étroits, mais de longueur infinie, & qui peuvent être appliqués les uns à côté desautres fur un même plan , fans cefler d'être contigus. Un autre caraétère des furfaces développables, ef, 1. qu'elles n’ont aucun point par lequel on ne puifle mener une droite qui les touche dans toute fon étendue: 2.° que deux de ces droites confécutives doivent néceflairement étre paral- lèles, ou fe couper en un point; conditions qui font toutes deux néceflaires, car on verra, par la fuite de ce Mémoire, qu'une furface peut être compofée de lignes droites , comme les fur- faces gauches, fans être développable, & que l'équation des furfaces développables n’eft qu'un cas particulier de celle des farfaces compofées de lignes droites. C'eft pour n’avoir pas re- gardé ces deux conditions comme néceflaires , que l'unique Auteur de coupe des pierres , qui foit dans les mains des Artif- tes, seit trompé en employant les développemens de plufieurs furfaces, comme celles des conoïdes des voûtes d’arêtes en tour ronde, rampantes ou de niveau, qui ne font pas développables, mais fimplement des furfaces gauches, PROBLÈME PREMIER. Trouver équation générale des [urfaces développables, PREMIÈRE SOLUTION. Soient BAC & CAD, les deux plans perpendiculaires, l'un horizontal & l'autre vertical , auxquels doit étre rapportée Tome IX, À (CC 396 MÉMOIRE l'équation demandée , par des coordonnées rectangulaires x, y & 7, de manière que À C foit la ligne des x, A D celle des, & AB celle des 7; foit GNK une courbe quelconque à double courbure, continue ou difcontinue, dont les tangentes forment une furface quelconque développable , & dont les projetions fur les deux plans foient les deux courbes FMY & HTX: foicy—"} x, le fymbole de l'équation de la courbe FMY & z=® x celui de l'équation de la courbe HT X: enfin foient prifes à volonté deux abaiffes quelconques AP=x &PQ=—Y, ce qui détermine la pofition du point Q, pour lequel il s'agifle de trouver l'ordonnce correfpondante QL=7. Cela polé, fi lon conçoit que le point L foit dans la furface , & que par ce point on mène une droite LN tangente à la courbe GNK, cette droite fera toute entière fur la furface développable, & fa proje&tion horizontale fera la droite Q M tangente à la courbe FM Y; de plus, le point de contaët M fera la projcétion du point de contaët N; pareillement fi, par le point P , on élève une verticale PR—QL, que, par le point R,on mène à la courbe HT X une tangente RT, cette droite fera la projeétion verticale de la droite LN , & le point de conta& T fera celle du point N; enfin fi, des points M & T, on abaifle des per- pendiculaires M V & T V fur la droite AC, ces deux perpendi- culaires la rencontreront en un même point. Il fuit de-là, que la nature de la furface eft telle, que fi on la coupe par un plan vertical mené fuivant la tangente OM, on aura pour fe&ion une droite LN , dont la projettion verticale RT fera tangente à fa courbe HTX, le point de contatt T répondant à la méme abcifle AV que le point M. Or lequa- tion du plan vertical eft celle de la droite Q M ; donc, fi les équations des droites QM & RT font y=K & 7 Ke tcelle de la furface doit étre telle , qu'en fubftituant pour y fa valeur K, il vienne pour 7 la valeur K’; la queftion eft donc réduite à trouver les équations des droites QM & RT. Pour cela, foit pris infiniment près du point V un autre point, par lequel on mènera aux courbes de projeétion des ordonnées y» & vt; SUR LES SURFACES. 387 par les points Q, M, R &T, on mènera parallèlement aux x les droites QU, Ms, RS, & TE, on fera AV =V, & l’on aura Vr=dV, VM=d:V, VT=av, ma=d de V=\ Va, tC= de. V=9 VAN; & les triangles femblables Mum, QUM, donneront »u : u M :: MU : UQ; d'où l'on tirera ........ mu-UQ=Mz:MU, ou 'VdN (V—x)=dV (V —y), où enfin Y=TV + (x—V)E TV; Équation de la droite QM. Pareillemenc les triangles femblables RST & T0, donne- xont 20: 0 T1::7 AS SR std'où lonttireratgia PRIE MTEMNNE j z=DV+(x—V)o.V; Équation de la droite RT : il faut donc que l'équation de la furface foic telle, qu'en y faïfant y—F-V+(x—V)#":V, Von ait 7—0V+(x—V)g.V; ou, ce qui revient au même, l'équation demandée eft 7—@V +(x—V)9'V, pourvu que V fatisfafle à l'équation y—#:V+(x—V)#".V: ainfi, en éli- minant V de ces deux équations, l'on aura une équation , fans condition, qui exprimera la nature des furfaces développables: fi les fonctions o & 4 {ont déterminées , l'équation fe particu- larife, & n’énonce plus que les propriétés d’une certaine fur- face dévelop able ; mais fi @ & N reftent arbitraires, l'équation appartient généralement à toutes les furfaces développables, la quantité V étant d’ailleurs quelconque, puifqu’elle dépend : de la forme des fonétions @ & À. Ces deux équations renferment tout ce qu'a dit M. Euler fur cet objet ; car cet illuftre Géomètre donne pour équation des jurfices dévéloppables 24" 2591, BND SERRE z=P+Qx, HYERESEXS les quantités P, Q, R & S devanr fatisfaire à l'équation & = 5 condition qui. eft exprimée dans les deux équations que l'on vient de trouver; mais on fent bien que ces formules font d’un ufage très-peu commode , & qu'il feroit rrès-difficile de recon- Ccci] 388 MÉMOIRE noître, par leur moyen, fi une furface propofée, dont l’équa- tion feroit différentielle, pourroit ou non fe développer fur un plan. On ne peut en retirer quelque avantage , que l’on n'ait éliminé la quantité V & les fonctions @ & Ÿ. Voici comme jy parviens. Soit différenciée l'équation y=#.V+(x—V)Y/V, d'abord en ne faïfant varier que x, puis en ne faifant varier que y, d\ étant le caractère de la première efpèce de différentiation, & 4 celui de la feconde , on aura les deux équations fuivantes. o—(x—V)#"VAV + Vax, dy=(x—V)+#"Vdv; Divifant la première par AV, la feconde par dV, & retran- chant l'unetdedlautretion nm) eee 7702 ue ARR ONS TE RESTE pV— HN. Mettant cette valeur, de F’V, dans l'équation ...... Lo YEN EE M) y VON HAUTA RS 2: M DSP TT EMIPES Y= TV (x V)2.8 Qui, différenciée encore par rapport à x, & par rapport ay, donner eme PR ES En OS EU Le ARR PRES oVVAV—(x—V)4 A (9) 2-4 (dx—diV), dy=#'NdV —(x—V)2 d (%)+%dv: Subftituant actuellement la valeur de #'V, que l’on vient de trouver, on aura les deux équations fuivantes, ......... We (A) (x—V)A (Gi) + dx. = 0, (B) (x—V)d(iv)+dx —o, ui expriment la nature de la quantité V, quelle que puifle x ue des fonétions + e NE f eee Soit différenciée de même l'équation 7—@V+(x—V)9V, en regardant d’abord x, puis y, comme conftans; ce qui donnéra les deux équations . .......4,41%,02,44,...0800. Ax=(x—V)P VAV+SV.dx, dz=(x—V)9" vd V: SUR LES SURFACES. 389 Divifant la première par d\V, la feconde par dV, & retran- chant, on aura .,........... leur... | eV En On mettra cette valeur dans ?—@V +(x—V)®'V, qui de- VIERALA MINE » > 222 gl Dé pra D at part CPR RS dE + (x —V) (EN): On différenciera encore cette équation, & par rapport à x, *& par rapport à y; ce qui donnera ......:......:--.. IP VAV + (x—V) A (ER) + (Er) (dx — AV), Ecdz=@ VdV+(x—V) d (5%) (5%) dV; Équations qui, par la fubftitution de la valeur de g'V, que l'on vient de trouver, deviendront ....................... Ax= (eV) AE En) + (5 — a) dx, dz=(x—V)d (5); Ç Ou bien, en développant ..................... MAPS (x—V)- (2x — Adi) = dx (x —V) A (4) + dei), (eV) (dx dd 747) — de {(x—V) d (13) + dx) Or les deux derniers membres de ces équations s'évanouiflent par les équations (A) & (B): donc on aura .............. CIE Er Adz F LE Et Ad; —ddz; 0; D'où, éliminant 4, l'on aura, pour équation générale des fur- res développables el RC RME, SAR, AAx-ddx= (Ad:}. COROLLAIRE. Pour reconnottre fi l'on peut développer une furface courbe dont on a l'équation en trois coordonnées reétangulaires x, y & 7, il fuffit donc, après avoir différencié deux fois cette équa- tion , afin d’avoir des valeurs de Adz, Adz & dd7; de voir fi ces 390 MÉMOIRE crois quantités font en proportion géométrique: ceci va s’éclair- cir par un exemple. EXEMPLE. Soit propofé de reconnoïtre fi toutes les furfaces coniques à bafes quelconques, font developpables ou non. J'ai démontre, dans un Mémoire fur la conftruétion des intégrales des équations aux différences partielles, que l'équation des furfaces coniques, quelque part que foit placé le fommet, eft ......... Ë zy—c—(x—a)?9(=), a, à & c étant les dobedene du a ee one do ONE DL ARR EEE di dxe (=) (2) dx8 Ch dx= dy (=), AdAx= de exe" (EE), Adz;=—dxdy 25e" (=), dpi) Or on a évidemment AdAzddz=— (Adz}: donc les furfaces coniques, à bafes quelconques, font développables; ce que lon favoit déjà par les définitions. Si, au lieu de prendre l'équation intégrale des furfaces coniques, l'on eût pris leur équation générale différentielle (x—a)#+(y—4)=(z—c), on auroit trouvé, en dif- férenciant, ‘par rapport à x, .-....... AA SA Er, À RUE IE (x—a) = (y) 5; ÉBAQAr rapporté Ayo, sus OR DAT br (xra)5a: Enfin, multipliant ces deux équations lune par l'autre, on auroit trouvé AdAzddz;=(Adz}, & l'on eût eu par confe- quent le même rélultar. SUR LES SURFACES. 391 Li REMARQUE PREMIÈRE. Si l'on avoit quelques doutes fur la généralité de la formule d'éyddz=(ddz;}, & qu'on la foupçonnât plus où moins étendue que les deux équations .................. FRS A YV Sr (x V) ŸV, Qui l'ont produite , il feroit très-facile de les lever, & de faire voir que l'intégrale de la formule Jd;dd7 =(/d7) dit précifement la même chofe que ces deux équations. Cette confidération ne fera d’ailleurs pas inutile , parce que la méthode que j'emploie fervira dans la fuite de ce Mémoire, & qu’elle eft applicable à beaucoup d'autres équations qu'il feroit très-difficile d'intégrer autrement. Soit donc propoié d'intégrer l'équation ddzddz—(dz);, qui, en faifant d7—pdx + gdy, devient .............. dpdg = de? = dp° = dadp, ou enfin # — #. On fera ?—w, variable quelconque, & l’on aura auffi sidon fontirera ce. RIRE SALUE CSS Et, par ce que l’on a généralement dp—p+dp, on trouvera En ajoutant, dp=wdg, équation qui ne peut avoir lieu entre des quantités réelles, à moins qu’elle ne foit différentielle complète, & pat conféquent que ® ne foit fonétion de 9 : on aura donc p=F:9 pour première intégrale complète, la fonion F étant arbitraire : mettant actuellement cette valeur de P dans Péqua- tion dy—pdx+qdy,on aura dy=dxFq+qdy, qu'on peut met- Héfous|certe forme A. EN PRE dx d(xFg+9y)—{(y+xFa)d; Mais cette équation ne peut être différentielle complète, à moins que le coëfhicient de 49 ne foit fonétion de 9; donc l'intégrale finie 0%.» 0 + 0 392 MÉMOIRE & complète de.la propofée eft ...... ch EE x = xE-9+aÿ #4, La fonétion f fatisfaifant à l'équation .................. y=—xF' fa, La quantité 9 étant d’ailleurs indéterminée, & pouvant être quel. conque en x & y. Maintenant , pour reconnoître ce qu'expriment ces deux équations , obfervons que la feconde eft la différentielle de la première , en ne faifant varier que g; donc elle énonce cette propricté, que, dans la premiere, les variables x, y & 7 font conftantes, lorfque y devient 9+ da; quant à la première , fi lon regarde g comme conftant, elle eft l'équation d'un plan; donc feule elle énonce que la furface qui en eft le lieu, eft compofée d'élémens plans de longueur au moins finie, puifque tous les points qui répondront à g — même conftante , feront dans un même plan : mais fi l’on y joint la condition exprimée par la feconde équation, qui eft que ces points ou leurs coor- données x ,y & 7 ne changent point, lorfque les plans chan- gent infiniment peu , il s'enfuivra que, dans toute l'étendue de la furface, fes points feront toujours dans l'interfeétion de deux plans infiniment peu différens ; donc les deux équations appar- tiennent à une furface qui eft compofée des continuelles inter- fcétions avec lui-même d’un plan qui change à chaque inftant de pofition ; donc elles appartiennent à une furface dévelop- pable, fur la nature de laquelle elles ne ftatuent rien d’ailleurs : donc la formule différentielle Jd;ddz — (dz7), dont elles font l'intégrale complète, exprime qu’une furface eft développable, I! faut conclure de-là, que les deux fyflèmes d'équation fimul- pances, où qui doivent avoir lieu en même-temps ..,...,. {= P-V+(x—V)9.V, DM CEE VIE — xF.9+a7y +f. st=xFatay fa, El y=alg la: Appa rtiennent SUR LES SURFACES. 393 Appartiennent tous deux au même genre de furfaces courbes, & {ont également fatisfaits par les équations de ces furfaces ; mais qu'ils énoneent chacun une propriété diftinéte & particu- lière de ces furfaces, quoique les propriétés foient inféparables : le premier dit, que les furfaces font les lieux géométriques des tangentes de courbes à double courbure : le fecond , qu’elles font les lieux des continuelles interfeétions avec eux-mêmes de plans mobiles. L'on auroit trouvé direétement ce fecond fyftêème comme le premier, fi l'on für parti de cette feconde propriété. REMARQUE Il. Il eft bon d’obferver ici, par rapport à l'équation . 7747 à Y= À V+(x—V) VV, pour laquelle on a trouvé les deux OR DES RS A Me DAT ae Jones à tee iles dl (A) (x—V)d.(K) +dxi=o, Et(B) (x=V) d(f)+dx —0, Que les deux équations doivent avoir lieu à-la-fois, pour fatif- faire à l'intégrale , par la même raifon que , fi l'on a d7—0o, lon doit avoir à-la-fois d7=0o & d7=0. Si l'équation eût été compofee de trois fonétions dépendantes les unes des autres ; COMIMENCONCE CUS SAMU RL LL, 27 RON, .) y= NV +M4{V +NV'V, Sa différentielle eût été le fyftême de quatre équations diffé: rentes, qui auroient dù avoir lieu en même-temps, &, en gé- néral , le nombre des différentielles de pareilles équations , eft toujours 2 (z—1), z étant le nombre des fonctions dépendan- tes les unes des autres :*quant à ces équations , on doit les re- garder comme les intégrales de plufieurs équations aux diffe- rences partielles , & de plus, comme des équatiôns aux différen- ces ordinaires. Dans la folution précédente, j'ai d’abord cherché l'équation intégrale de toutes les furfaces développables , puis je l'ai diffé- renciée pour faire difparoître les fonétions arbitraires, & obtenir Tome IX, Ddd Fire, 3. 394 MÉMOIRE la formule différentielle que j'ai trouvée; dans {a fofution fuivan: te, je chercherai direétement l'équation différentielle. SECONDE SOLUTION. Soient, comme dans la Fig. 2, BAC & CAD, le plan ver tical & horizontal auxquels eft rapportée l'équation demandée, demanière que AC foit la ligne des x, AD celle des y & AB celle des 7; foit de plus M, un point d’une furface dévelop- pable quelconque, correfpondant aux trois coordonnées AP = x, PQ—y & QM=—7. Par le point M, foienc faires deux fec- tions dans la furface, lune SME, par un plan perpendiculaire aux x, & l'autre GME, par un plan perpendiculaire aux y. Par le point M foit menée une tangente à chacune de ces fec- tions; l'une MT , qui rencontrera le plan horizontal quelque part en un point T pris fur le prolongement de la droite PQ; l'autre Me que le plan horizontal coupera quelque part en un point #, pris fur la droite Q43 mence par le point Q parallèle- ment aux x3 d'où il fuit que la droite T s fera l'incerfection du plan horizontal avec le plan tangent à la furface au point M: foit prife une abcifle quelconque À H=—7, foit menée à la droire Tr, l'ordonnée HK—%, & foit enfin cherchée en 7 & w l'équation de la droite Tz Pour cela, on remarquera que l'équation de la furface courbe étant dz;=pdx+ qdy, on aura les fous-tangentes QT ——<+, & Qz—2:, & par conféquent PT —y—<;or, fi l'origine des coordonnées 7 & étoir en t, l'équation à la droite T£ feroit o—=7%——7? ; il ne Sagit donc plus que de tranfporter l'origine en A; ce qu'on fera en ajoutant une conftante, telle, qu’en faïfant = AP=x, on ait w—PT—y—2£; ce qui donne, pour équation de la AÉORRRE. ne 27 ELA pe : (Or (etre x) Cela pofé, fi le plan tangent, au-lieu de toucher la furface au point M, la touchoit en un point » infiniment proche d, pris fur la feétion perpendiculaire aux x; la droite Tz chan- olalere » (ee en jeLe elle (ste eee ee site) SUR'LES SURFACES. #9$ geroit de pofition , elle deviendroit T'#’, & couperoit la pre- mière quelque part en un point Q auquel correfpondent les coordonnées At & IH, qui ne changent pas lorfque x étant conftant , y devient y+ dy: donc, fi l'on différencie l'équation (C), en regardant x, 7 & © comme conftans, l'équation (æ—y)dg= —(0— x) dp qui en réfultera, donnera conjoin- tement avec l'équation (C), les valeurs de 7 & « qui répondent au point 6, & fi l'on mène la droite M9, elle fera l'interfeétion des deux plans tangens confécutifs. Mais , par la propriété des furfaces développables , cette droite doit fe trouver toute entiere fur la furface, & doit étre la même, foit que le point M de contaët fe foit mû fur la fec- tion perpendiculaire aux y, foit que ce foit fur la feétion per- pendiculaire aux x; donc, fi l’on différencie encore l'équation (C) en regardant y, 7 & « comme conftans, l'équation (o—y)dg=— (7— x) d'p qu'on obtiendra, donnera de nouvelles valeurs pour les mêmes coordonnées 7 & w, qui répondent au point 9; on aura donc à-la-fois, pour le même point, les deux équations fuivantes. | (o—y)dq=—(r—x)dp, Et(o—y)dg=—(7—x)dp, Ou, multipliant en croix, dp dg—d'qdp; c'eft-à-dire, 57 ddyddz;=(dd7;}; Équation qui doit avoir lieu dans tous les points d’une furface courbe, pour qu’elle foit développable. REMARQUE. Pour bien entendre la folution précédente, il faut obferver que la première équation différentielle (w—y)dg=—(7— x) dp doit avoir lieu dans toutes les furfaces, développables ou non, 7 & « étant les coordonnées du point @, que de même, fi l'on fuppofe que le pian tangent en #7 rencontre le plan ho- rizontal dans Ja droite T'/#", & que cette droite coupe T'z en Ddd à F6. 6, 496 MÉMOIRE un point (’ pout lequel les coordonnées foient 7° & w’, l'on aura parcillement dans toutes les furfaces (æ'—y)dg=-{(7"—x)/p. Ainfi , jufques-là je ne dis rien qui ne puille convenir à tou- tes les furfaces poflibles. Mais lorfque je pofe que les points 0 & Q” font toujours confondus, propriété qui n'appartient qu'aux furfaces développables , & dont elles jouiflent toutes, c'eft-à- dire, lorfque dans les deux ÉQUAUONIE BE Ets ln les, CARE (o—y)dg=—(r—x)dp, Et(o—y)dq=—(7—x)d3, Je fais o—0" & 7—17", c'eft alors que j'exprime que la furface eft développable, & parce que je n'ai rien ftatué de particulier fur les courbures au point M des courbes SME & FMG, qui peuvent étre foumifes ou non à la loi de continuité fans ap- porter aucun changement au réfulcat ; il s'enfuit que l'équation ddydd;—(ddz;} , que jai trouvée, appartient à toutes les furfa- ces pollibles, continues ou difcontinues. TROISIÈME SOLUTION. Actuellement que des deux folutions précédentes, la pre: mière donne direétement l'équation intégrale des furfaces de- veloppables, & que la feconde donne direétement leur équa- tion aux fecondes différences , il fcroit aflez inutile d’en don- ner une troifième , fi celle-ci, outre qu’elle donne immédiate- ment l'équation demandée aux differences premières, n’étoit pas en même-temps & beaucoup plus courte & plus élégante que les deux autres ; je crois même qu’elle eft la feule qu'on puifle retenir , & qui puifle donner de mémoire l'équation gé- nérale. BAC & CAD étant, comme ci-devant, les deux plans de projeétions , l'un horizontal & l’autre vertical, de manière que AC foit l'axe des x, À D celui des y & AB celui des 7; foient de plus EFKT, KFGL, LGHO , trois élémens plans confécu- tifs d’une furface développable, & foit pris un point M quel- conque fur celui du milieu : foit M2 l'élément d'une fcétion SURYLES-SUREMNCES: 397 faite dans la furface perpendiculairement aux ÿ, MN, celui d'une fettion perpendiculaire aux x , & par les points M, », N foient abaïflées des ordonnées verticales MQ, #9 & Ng'; enfin dans le plan vertical mené par M, foit menée une pc- tite horizontale M jufqu'à la rencontre de la verticale mg, foit de même menée par le point N , & parallèlement aux y, une petite horizontale Nr, de manière que lon ait mu—dy, Mn =—d7. Cela pofé, il eft évident que quelque part que foit pris le point M fur le même élément plan KFGL, les petites droites M & MN conferveront toujours la même inclinai: fon au plan horizontal ; c'eft-à-dire, que les quantités # & 5: auront les mêmes valeurs, ou enfin que p & q feront conftan- tes; mais fi le point M change d’élément, pour pañler fur l'élé- ment voifin LGHO ou IEFK , alors ces deux lignes cefleront d’être chacune parallèle à elle-même , & les quantités Pp &gq va- rieront. Les furfaces développables font donc telles, 1.° que les “quantités p & g peuvent être conftantes pour différens x & ds 2.° qu'elles font toujours conftantes enfemble & varient conjoin- tement; donc, dans ces fortes de furfaces, on doit avoir Bi 94: Différenciant , par rapport à dx, on aura dp = gg dq; &, par rapport à dy, dp—#q.dg; multipliant en croix, on aura dpdqg—daqdp, ou ddz;ddz;—(Jd;}. REMARQUE. Cette folution fuppofe feulement , comme les précédentes ; que la furface foit compofée d’élémens plans infinis de lon- gueur , fans confidérer en aucune maniere la loi fuivant laquelle ils fe fuccèdent pour former la furface; elle eft donc indépen- dante de cette loi, qui peut être continue où difcontinue, fans que l'équation puifle cefler d'avoir lieu, 398 MÉMOIRE CHAR "O I. L A'I RE, L'équation générale des furfaces développables fd;dd7=(44;}", ne renfermant que des différences fecondes, il fuit que fi 7 =K eft l'équation d'une certaine furface développable , qui farisfafle par conféquent à l'équation générale, celle-ci 7=K+Ax+By+C, dans laquelle les coëfficiens A, B & C font conftans, ap- partiendra encore à une furface développable ; car, en difié- renciant deux fois, les termes À x, By & C difparoiflent avec leurs différentielles , & l'équation ne fatisfait pas moins à l’équa- tion générale : donc, fi l'on conçoit une furface développable & un plan quelconque rapportés aux mêmes axes , & qu'on augmente ou diminue pour chaque point lordonnée de la fur- face, de l'ordonnée correfpondante du plan, la noûvelle furface à laquelle appartiendront les coordonnées, ainfi augmentées ou diminuées, fera développable comme la premiere. Semblablement , fi une furface n’eft pas développable , & qu'on augmente ou diminue fes ordonnées de celles d'un plan quelconque, la nouvelle furface à laquelle appartiendront les ordonnées ainfi augmentées ; ne fera pas développable. Dans mon Mémoire fur les développées des courbes à dou: ble courbure , jai fait voit que toutes les furfaces développa- bles, formées par les tangentes d’une courbe dont tous les elé- mens font également inclinés à un plan quelconque , & for- ment avec lui un angle g, jouiflent de cette propriété , qu'une partie quelconque de leur furface eft à fa projection fur le plan dans un rapport conftant, c’eft-à-dire, comme 1 à cof. g. Par exemple , la furface du cône droit, & toutes les furfaces for- mées par les prolongemens des tangentes des hélices de vis à as conftans, font dans cé cas-là : ainfi, dans ces furfaces , l'aire d’une partie quelconque ne dépend que de la quadrature d'une aire plane; mais je n'ai pas démontré la propoftion inverfe, c'eft-à-dire, que toute furface dont l'aire d’une partie quelcon- que ef à fa projection fur un certain plan dans un rapport conf: SUR LES SURFACES. 399 tant, eft unefurface développable formée par les tangentes d'une courbe dont tous les élémens font également inclinés à ce plan, & c'eft ce que je vais faire voir. PROBLÈME Il. Trouver quel eff le genre de furfaces courbes , dont l'aire d’une partie quelconque eft à fa projection dans un rapport conftant. SOL TI ON: Cette propriété ne peut convenir à une furface, fans qu'elle ne foit commune à tous fes élémens; or l’équation d’une fur- face courbe étant dy? — pdz + qgdy , l'expreflion de l'aire d'un de fes élémens, eft 2xdyV(1+p°+9); & celle de fa projeétion horizontale, eft dxdy: donc il faut que l'on aït par-tout Adxdy = dxdyV(1+p+9), où 1+p°+9 = A; & par conféquent p = fonét. q: Donc, 1. Une furface ne peut jouir de la propriété énoncée dans le Problème, qu'elle ne foit développable: or il eft aife d’appercevoir, que de toutes les furfaces développables, il n'y a que celles qui font formées par les tangentes de courbes, dont tous les élémens font également inclinés à un plan, qui puiflent être telles, que tous leurs élémens foient en rapport conftant avec leurs pro- jections fur le plan: Donc, 2.” Ces furfaces font les feules qui fatisfaffent au Probléme. De ce que je n'ai pas confidéré la projeétion de l'élément de la furface fur un plan de pofition quelconque dans l'efpa- ce, ma folution n’en eft pas moins générale , parce que l'on peut toujours rapporter l'équation de la furface à trois axes, dont deux foient dans le plan , & alors on rentre dansle cas que Jai traié, 400 MÉMOIRE THÉORIE GÉNÉRALE DES OMBRES ET DES PÉNOMBRES. Ox APPELLE OMBRE, la partie de l’efpace qu’un corps opaque prive de lumiere par fon interpofition dans un milieu éclairé; d’où il fuit que fi le corps lumineux eft un point unique, & en fuppofant que les rayons de lumiere fe propagent en lignes droites, l'ombre ou l’efpace privé de lumière , fera toujours terminé ou enveloppé par une furface conique circonfcrite à la furface du corps opaque, & dont le fommet fera au point lumineux. Aïnf, dans ce cas fimple, & qui eft fuffifant pour la détermination géométrique des ombres dans les deffins, il fufit de trouver l'équation de cette furface conique, dont la forme dépend de la figure du corps opaque; & fi l'on veut avoir la projeétion de l'ombre du corps fur une furface quel- conque , donnée de forme & de pofition , il ne s'agit plus que de trouvér l'interfection de cette furface avec la furface co- nique, Maïs fi le corps lumineux, au-lieu d'être un point unique ; eft étendu fuivant les trois dimenfions , & terminé par une furface courbe quelconque, les chofes changent confidérable- ment, 1.° L'ombre pure, ou l'efpace totalement privé de lu- micre, n’eft plus terminé par une furface conique, mais par une furface développable , circonfcrite en même-temps aux furfa- ces du corps lumineux & du corps opaque, & qui les touche chacune dans une courbe à double courbure. 2.° Le pañlage de l'ombre à la clarté n’eft plus fubit , comme dans le premier cas; l'ombre pure eft enveloppée Gin efpace dont toutes les parties , toujours moins éclairées que fi le corps opaque étoit fupprimé, le font cependant plus ou moins, fuivant qu’elles {ont plus ou moins éloignées de l'ombre pure. Cet efpace, qu'on appelle SURAIÉÆE S CS URFACES: qot appelle Pénombre , eft terminé par une autre furface deve- loppable, pareillement circonfcrite aux furfaces des corps opa- que & lumineux, & qui les touche aufli chacune en une cout- be à deuble courbure; mais cette furface diflere de la première, en ce que fon arête de rebrouflement fe rrouve entre les deux corps, au-lieu que, pour la première, les deux corps fe trouvent du même côté par rapport à cette arête, Par exemple, fi les deux corps font fphériques , la furface qui enveloppe l'embre pure, eft celle d’un cône droit circonfcrit aux deux corps, & dont le fommer eft au-delà de lun des corps par rapport à l’autre & la pénombre eft termince par une autte furface conique, pareïllement circonfcrite aux deux corps, mais dont le fommer eft entre deux. Cette propolition fe déduit de la précédente , dont elle n'eft qu'un cas particulier , en obfer- vant que l'arête de rebrouflement d’une furface conique à bafe quelconque , confidérée comme développable, fe réduit toujours à un point unique qui eft le fommet, Pour démontrer la propofition générale , foit d’abord un plan tangent en même-temps & du même côté aux deux fur- faces du corps opaque & du corps lumineux , & concevons que ce plan tourne autour des deux corps , fans cefler de leur être tangent, il eft évident que fi l'on prend ce plan dans deux pofitions confécutives , on aura deux plans qui fe couperont en une droite tangente aux deux corps, & qui fera la direction d'un des rayons de lumière qui terminent l'ombre pure. Cette droite fera donc toute entière fur la furface de l'ombre; de plus, deux de ces droites fe trouveront toujours fur un même plan tangent: doncla furface, qui enveloppe l'ombre pure, a ces deux propriétés; r.° d'être compolée de lignes droites; 2.° que deux de ces droites confécutives font toujours dans un même plan; donc cette furface eft développable. Le même raifonne- ment démontrera que la furface, qui enveloppe la pénombre, eft auffi de nature à fe développer fur un plan. On pourroit objeéter que l'interfe&tion de deux plans confé- Tome IX, Ece 402 MÉMOIRE cutifs , tangéns en même-temps aux corps opaque & lumineux ; n'eft pas coujours fur la furface de l'ombre pure , fpécialement lorfque la figure du corps lumineux eft telle , qu'un plan qui le touche en un point, le coupe dans d’autres, parce qu'alors tout le corps lumineux n'étant pas du même côté par rapport au plan tangent, les parties de ce corps, qui font au-delà de ce plan par rapport au corps opaque, envoient des rayons de lu- mière qui rétréciflent l'ombre pure, & la terminent ailleurs que dans le lieu des continuelles interfections du plan tangent mobile. Je réponds que, dans ces cas-là, la furface qui enve- loppe l'ombre pure a plufieurs nappes qui fe replient les unes fur les autres; les unes féparent l'ombre pure de la pénombre,, les autres terminent des efpaces éclairés fuivant différentes loix dont les expreflions font les racines d’une même équation; mais il n'en eft pas moins vrai que l'ombre pure eft enveloppée d’une furface développable circonfcrite aux deux corps : c’eft à l'adrefle du calculateur à reconnoître fi cette furface n'a pas. des nappes qui traverfent la pénombre & qui foient placées ail- Zurs que fur les limites de ombre pure. Quant à la pofition de larêre de rebrouffement de chacune de ces furfaces, voici ce qu'il faut obferver. Les plans qui, par leur continuelle interfection , forment la furface de l'ombre pure font tous tangens aux deux corps du même côté ; donc, dans le paffage d’un des plans au fuivant , les mouvemens des deux points de contaét fe font dans le même fens; par con{é- quent deux droites confécutives menées par les points de con- tac correfpondans , ne peuvent fe rencontrer qu'au-delà d'un des corps par rapport à l’autre. Ce fera au-delà du corps opa- que par rapport au corps lumineux, fi, dans les points de con- ta , Lx courbure du corps lumineux prife dans la ligne de con: ta , eft d’un plus grand rayon que la courbure du corps opa- que prife dans fa ligne de contaét, eu égard aux pofitions ref pectives des élémens correfpondans de ces lignes de contaét ; & réciproquement : or la fuite des interfections de ces droites’, forme ce que j'appelle , arête de rebrouffement ; done cette SURELES SURRACES. 403 arêté pour la furfice de l'ombre pure , ‘eft toujonts au - delà de l'un des corps opaque ou lumineux par rapport à l'autre : mais les plans dont les continuelles interfeétions forment la fur- face de la pénombre étant tangens aux deux corps dans des côtés oppolés, les mouvemens des points de contaéts, dans le pañlage d'un plan à l'autre, font réciproques : fi l'un fe fait dans un certain fens, l’autre fe fair dans un fens contraire ; donc les droites mences par les points de contaét correfpondans, fe ren- contrent toujours entre les deux corps ; donc l'arête de rebrouf- fement , pour la furface de la pénombre, eft toujours entre le corps opaque & le corps lumineux. | Il füit de-là , que toute la chéorie des Ombres & des Pénom- bre, fe réduit à trouver les équations des deux furfaces déve- loppables qui peuvént être à-la-fois circonfcrites à deux corps donnés de formes & de pofitions, les deux corps étant pour lune du même côté relativement à fon arête de rebroufle- ment , & l’autre ayant cette arête entre les deux corps; la pre- mière fera la furface de l'ombre pure; la feconde terminera la pénombre. Enfin, fi l'on veut trouver fur une furface donnée, la projection de l'ombre & de la pénombre , il ne s'agira plus que de trouver l'incerfection de cette furface avec les deux furfa- ces développables, Pour réfoudre cette queftion avec une certaine clarté, je vais d'abord prendre le cas fimple, où le corps lumineux eft fuppoté n'être qu'un point unique, & où par conféquent les deux fur- faces développables de l'ombre & de la pénombre , fe rédui- fent à un feul cône circonfcrit au corps opaque, & qui a fon fommet au point lumineux. Je déterminerai premièrement la ligne de contaét du cône avec le corps opaque, c’eft-à dire, la ligne qui fépare la partie éclairée de la a du corps opa- que , de celle qui eft dans l'Ombre ; enfuite je chercherai V'é- quation de la furface conique qui, ayant fon fommet au point lumineux , pafleroit par cette ligne de contaét, & je donne- ai les équations de l'interfeétion de cette furface conique avec Eco 404 MÉMOIRE celle fur laquelle l'ombre eft projetée: enfin je pafferai delà aw Probléme général. PROBLÈME IIL Etant donnée l'équation d’une furface quelconque , trouver celle de la courbe , fuivant laquelle elle eft touchée par une 2 ee furface conique circonftrite, & dont le fommet [éroiten un point donné. SYTLIDT TON: J'ai démontré dans un Mémoire fur la conftruétion des équa- tions aux différences partielles que l'équation ge des furfa- ces coniques à bafe quelconque, eft . SUR. BAPE RE EUR x— C=(x—a)o (=, Ouz—C=(x—a)#+(y—0)5, a, b & c tant les coordonnées du fommet: foit done 7 —K ow dy — Pdx + Qdy , l'équation de la furface donnée , la quantité K & les coëfficiens P & Q quien dépendent, érant des fonctions. quelconques données en x & Y: Cela pole, la furface devant étre circonfcrire par la furface conique ; doit , dans toute l'étendue du contaét, participer à la PR du cône: on aura donc; dans toute cette ligne (x—a)#+(y— a 5 mais on a, pour toutc la furface, x=K EP & ; On auræ donc ; -pour-le contain 270. 7x HORS PO Re (x—a)P+(y—8)Q=K—C; Équation en x & y de la projection horizontale de la courbe: demandéee. L'équation que nous venons de trouver, eft auffi celle de la: projetion de la courbe , qui fépare la partie éclairée de la fur- face du corps opaque de celle qui eft dans l'ombre, & peur être d'une grande utilité dans le defin géométral, par la dif tibution correcte du clair & de l’obfeur. as a EE Vos SUR LES SURFACES. 40$ PROBLÈME IV. Trouver l'équation d’une furface conique ; étant données Les coordonnées a , b & o du fommet & les équations de projeétions z=K &(x—a) P+(y=b) Q=K—C d’une courbe a double cour- bure par laquelle doit palfer cette furface. SOLUTION. L'équation générale des furfaces coniques étant : z—c—(x—a)e(=), il ne sagi donc plus que ss ue miner la forme que il avoir la fonction ©, pour que les deux équations propofées foient fatisfaites en même- temps ; ou qu'en pofant (x—a)P+(y—#8) Q=K—c, l'on ait z=K. J'ai déjà réfolu cette queftion plus généralement qu'elle n'eft ici propofée, dans le Mémoire que je viens de citer; cependant je crois qu'il ne fera pas inutile de la rappeler. Etant donnée l'équation ?—M+NoV, dans laquelle les quantités M , N & V font des fonctions nées de x&Y, déterminer la Rein ?, pour qu'en faifanty—Fx, on ait 7=f: x. Soient M’, N" & V’ ce que deviennent les quantités M, N & V en mettant pour y fa valeur Fx, on aura, par les Coude du Problème , l’équation fuivante en x :-.-..........., LE fx=M'+N'eV’. Soit fait V'—u, &foit x— fx la valeur de x en z tirée de cette équation, enfin Roue M” & N'' ce que FShTQRESS M'&N'en fubfüituant à x fa valeur fu, on aura. .-......,..,,.... f'(fu)=M'4N" ou; Equation qui eft toute enz, & dans laquelle on reconnof- tra par conféquent la forme dd fonétion. ?. Remettant V pour 4, on aura la quantité gV, & l'équation 7=M+Ne V fera unie 406 MÉMOIRE Ayant obtenu , par un procédé pareil, l'équation de la fur- ace conique en x, y &7, & l'équation de là furface fur la- quelle l'ombre doit être projetée , étant aufli donnée en x, y & 7, fi l'on élimine 7 de ces deux équations , on aura celle de la projection horizontale de la courbe qui termine la projetion de l'ombre fur cette furface ; & en éliminant x ou Y), On aura celle des deux autres projeétions verticales qu'on voudra, REMARQUE, Outre la théorie générale des ombres, lorfque le corps lu: mineux eft réduit à un point, les deux Problèmes précédens renferment encore les principes généraux de la perfpetive di- rette, c'eft-a-dire, dans laquelle on fuppofe que le tableau eft vu direétement , fans que les rayons de lumière, pour arriver à l'œil , fubiflent de réflexions ni de réfraétions ; car, comme on fait, la perfpeétive d'un corps fur un tableau de figure quel- conque, n’eft autre chofe que l'interfeétion de ce tableau par un cône circonfcrit au corps & dont le fommet eft au centre de l'œil. Je ne connois aucun Traité de Perpective où cette queftion foit réfolue aufli généralement ; tous ceux qui ont écrit fur cette matière, ont toujours fuppofé que le corps à metre en perfpeétive, füt un point déterminé, ou bien ils fe font con- tentés de donner la maniere de mettre en perfpedtive certains points déterminés du corps ; mais ils n'ont rien dit de la ligne de contact du corps avec la furface conique circonfcrite, ligne qui eft la plus importante, puifqu'elle eft celle du contour ap- parent du corps. La méthode précédente eft purement analytique, & je n’en- tre dans aucun détail de conftruétion , mais elle eft comprife dans les conftruétions que j'ai déja données des fonétions arbi- traires. Reprenons aétuellement le Problème général des Ombres. SUR LES SURFACES. 407 PROBLÈME V. Trouver les équations des furfaces qui enveloppent l'Ombre & la Pénombre d’un corps opaque quelconque, éclairé par un . - 4 corps lumineux quelconque , les deux corps étant donnés de figures & de pofitions dans l’efpace. SOLUTION. D'après tout ce qui précède, il eft clair que les furfaces de- mandées, doivent être engendrées par la continuelle interfec- tion avec lui-même d’un plan qui tourne autour des deux corps fans cefler de leur être tangent , avec cette différence feule- ment, que le plan doit toucher les deux corps du même côté pour engendrer la furface de l'ombre pure, & qu'il les doit toucher dans des côtés oppofés, pour engendrer la furface de la pénombre. Cherchons donc d'abord l'équation d’un plan SRSRUANE tangent aux furfaces des deux corps, & pour cela, OCDE LR RE ee ete cie clothes ele le lenele ane le slots celle ele oi e | x, y & 7 les coordonnées du plan demandé, x", y’ & x’ les coordonnées du corps lumineux, Enfin x”, y” & 7”les coordonnées du corps opaque. Toutes rapportcés aux mêmes axes & à la méme origine. Les corps étant donnés de figures & de pofitions , on doit avoir en x ,y & 7 l'équation du corps lumineux, & en x”, y” &z7” celle du corps opaque; foient donc 7/—K' la premiere & z"—K"’ la feconde , de manière qu'en différenciant , lon ait -........ me dus Et d3"= p'dx"+9"dy", K’ étant donné en x’ & y’, K”en x” & y” &les quantités p’, 9’, P' & g”, qui peuvent s'obtenir par la différenciation, les deux premieres en x” & y, & les deux autres en x” & y”, devant par eonféquent être regardées comme données. Cela pofé, BAC & CAD étant les plans de projeétions , Fe, y, 498 MÉMOIRE AC la ligne des x’, AD celle des y” & AB celle des 7, foi M un point de la furface du corps lumineux, SME & FMG deux La faites par le point M dans la furface, l'une per- pendiculairement aux y”, & l’autre perpendiculairement aux x, & auxquelles on ait mené par le point M les tangentes MT, M; il eft évident que le plan mené par les deux tangentes, touchera la furface au point M; on fait de plus, que l'équation d'un plan cft généralement 7—A x+By+C, A étant la tan- gente de l'angle que fait, avec le plan horizontal , une fetion faite dans le plan perpendiculairement aux y, B étant la tan- gente de l’angle que fait, avec le plan horizontal , une feétion perpendiculaire aux x ; donc pour le plan tangent en M, on aura À = rang, MI1Q=%=p, & B—tang, MTQ=Ë=9'; enfin fi l'origine étoit en M, on auroit C—o, & l’équa- tion feroit ?—p'x+9"y; mais il faut tranfporter l’origine au point fixe À, c'eft-à-dire, fairex=x— x", y=y—y" &x=;—K", donc on aura pour équation d’un plan tangent au corps lumi- neux, en un certain point M,::-.....:.......,,..: (A) z=p'(x—x)+9 (y—Y)+K". Par la même raïfon, l'équation d'un plan tangent au corps opaque fera spioiere see on sons einiee ste ne ele see + de pe plolu le x =; (x— x") + g” (y — y") + K”, x’ & y’ étant les coordonnées du point de contact du premier, & x” & y’ celle du point de contact du fecond, Pour exprimer maintenant que ces deux plans fe confondent, ou que le même plan eft également tangent aux deux corps, il faut égaler entreux tous les coëfficiens correfpondans de x & de y , &les quantités qui ne multiplient ni x niy, on aura donc {es trois équations fuivantes, CREER PSE ET SU RY IHEISCOSU RFIACES. 409 Ou, à caufe de (B) & den(Cds denses see kde : (D) Ke KES pi (RER) SE 9 2 Sr, par le moyen dés trois équations (B), (C), (D), on éli- mine de (A) trois des quatre indérerminées x", y’, x" & y"; par exémple, y”, x” l'&y",il reftera en x, y,%x& x", l'équa- tion (E) d'un plan tangent en même-tems aux deux corps, & dont la polrion fera différente , fuivant les différentes va- lèuts que l'on donnera à x”, & cette équation fera de cette orme roses eos sr en sseseessesrse (E) 7z=Ax+By+C. A ,B &C étant des quantités connues enx’ & conftantes , &c trouvées par les opérations précédentes. Avance que d’aller plus loin, on doit remarquer que léqua- tion (E) eft également celle du plan tangent aux deux corps du même côte, & celle du plan qui touche les corps dans des côtés oppolés; ou , pour mieux dire, les opérations indiquées précédemment, donneront pour chacune des quantités À, B & C, plufieurs valeurs, dont les unes appartiendront au pre- mier plan , & les autres au fecond. Pour le démontrer; il faut obferver que les quantités K’ & K” que jai employées, & qui font les expreflions des coordonnées des furfaces du corps fu- mineux & du corps opaque, peuvent avoir plufieurs valeurs ; que même fi les furfaces de. ces corps font fermées à la manière des elliploïdes elles doivent néceffairementen avoir deux réelles. Suppofons donc, un inftant, que chacune de ces quan- tités ait deux valeurs, que G& g foient les deux valeurs de K’, G' & £’ celles de K”, enfin que l’on ait G >g & G' >g.lleft clair que fi lon veut avoir l'équation du plan tangent aux deux corps du même côte,, ‘il faudra employer , dans les équations précédentes ; les deux grandes valeurs G & G” conjointement, ou les deux petites g & g’, fuivant le côté où l’on veut avoir le plan tangent ; qu'au contraire, fi l'on veut avoir l'équation du plan tangent de deux :côtés différens, il faudra employer en même-téms pour,K' &:K'!,1la plus grande valeur G de l'une, Tome IX, Fff 41O M É MOI R E & la-plus petite 2” de l'autre , ou réciproquement # & G'; ce qui fai jufqu'ici pour le méme x” quatre plans , qui feront tou- jours différens & donneront toujours quatre furfaces différen- ces, fi les quantités G, g, G' & 2” font données chacune par une loi particulière , ou que les parties fupérieure & inférieure de la furface de chacun des corps ne faflent pas parties de la même furface courbe : mais ces quatre plans n’engendreront que deux furfaces courbes différentes , fi les quantités G & g, de même que G’ & 2’, font données par la même loi, qu'elles foient par conféquent de nature à fe changer l’une en l'autre dans certaines valeurs de x’; ce qui arrivera toutes les fois -qu'elles feront les racines d’une même équation, & que la fur- face de chaque corps fera foumife à la loi de continuité. Dans ce cas, les furfaces de l'ombre & de la pénombre feront cha- cune foumife à une même loi, & pourront chacune être déf- nie par une équation unique qui lui conviendra dans toute fon étendue. Dans le cas, au contraire, où les parties fupérieures & inférieures de chaque corps feroient aflujéties chacune à une loi particulière, les valeurs de G & g, de même que deG' &2”, “pourroient chacune s'exprimer analyriquement; mais elles ne feroient pas de nature à fe changer l’une en l'autre, & les fur- faces de l'ombre & de la pénombre, feroient chacune laflem- blage difcontinu de deux parties de furfaces continues ; enfin f les deux furfaces des corps étoient totalement difcontinues, les valeurs des quantités G,g, G’ & g'ne pourroïent plus s'exprimer analytiquement, & les furfacés de l'ombre & de la pénombre n'auroient plus d'équations analytiques , autres que celle qui convient généralement aux furfaces développables. I fuit delà, que l'équation (E) doit appartenir à tous Îles plans qui peuvent , de quelque manière que ce foit, toucher à- la-fois les furfaces des deux corps, le point de contaët avec le corps lumineux répondant à labaifle x ; que par conféquent ,en donnant fucceflivement aux coëfficiens, À , B & C, routes les valeurs dont ils font fufcepribles , on aura autant d'équations (E'), (E°),(E).. . &c. qu'il y a de manières poffibles de mener SUR:LES SURFACES. ALT un plan tangent à-la-fois aux deux corps, ainfi que, fuivant que celle de ces équations que lon aura employée, appartien- dra à un plan qui touchera les deux corps, ou du même côté ; ou dans des côtés oppofés, on aura dans la fuite l'équation d’une partie de la furface de ombre pure ou de la pénombre: le refte de la folution étant commun aux deux furfaces, doit s'entendre de l'ombre & de la pénombre. t Soient comme précédemment AC, la ligne des x, AD celle rc, 5 des y, AB celle des 7 & GHIK le plan tangent aux deux furfaces données & dont l'équation eft.::.............. sos, (E)z—Ax+Byÿ+cC, 2 À,B & C étant desfonctions de conftantes & de l'abcifle x’, qui conyient au point de contaét avec la furface lumineufe. Cela” pofé , fi l'on conçoit que x’ devienne x'+4x", & que à foit le caraëtère de cette efpèce de différentielle , l'équation (E) | deviendra . .... DUR CR QU cie à S'osite à Lie US PRIE ] (F) x=(A+DA)x+(B+0B)y+C+0C, Qui fera l'équation d’un autre plan G'H'T'K', infiniment peu différent du premier, tangent comme lui aux deux corps, & qui le -coupera en une droite EF , qui fe trouvera toute entière fur la furface demandée. La projetion horizontale de cette droite fera ef, dont on aura l'équation en égalant les deux va- leurs de 7 prifes dans les équations (E) & (F); ainfi ,cette équa- Hondcat ane sud oWarer ee Ja e Cd orroe se - cie dal (CHAMP TEeE0; e La furface demandée doit donc être telle, que les deux équa- tions (E) & (G) aient toujours lieu en même-tems, quelque valeur que puifle avoir indéterminée x”, puifque fi l'on veut avoir les points de cette furface qui fe trouvent dans le” plan GHIK dont l'équation eft (E) ; il faut prendre ceux qui répon- dent à la droite ef, dont l'équation eft (G); donc éliminant x’ de ces deux équations, on aura en x, y & 7 celle de la furface de Yombre pure & de la pénombre, . Me 4 Fff ij de MÉMOIRE : REMARQUES. je Pout trouver l'équation (G) aurois pu dire plus fimplement: « Différenciez l’equation (E) en regardant x, y & 7 comme conf > tans;» aufli, dans la fuite, je me fervirai de cette expreflion pour indiquer la même opération. ET Si, dans l'équation en +, & 7 de la furface de l'ombre ou de la. pénombre , on met pour 7 la valeur correfpondante de K'',on aura en x & y l'équation de la projection horizontale de la ligne de contaét de cette furface avec le corps opaque ; d’où il fuir qu'on connoîtra fur la furface du corps les deux limites de là partie totalement dans l'ombre , & de la partie éclairée paï tout lé corps lumineux ; & la zone renfermée entre ces deux limites, ne fera éclairée que par une partie du corps lu- imineux. Si l'on met de même pour 7 les valeurs de K’,, on aura de même les équations des proje&tions horizontales des: lignesde contaët des furfaces de l'ombre & dela pénombre avec celle du corps lumineux. | ch" ct PAIE - On peur trouver les équations de projeëtions des lignes de contact fans avoir réfolu le Problème ; car des trois équations (B),(C)&(D), on peut éliminer x”.& y” & l’on aura-en x’ & y’ l'équation du conta® du corps lumineux; réciproquement fi l'on élimine x’ & y’, on aura en x” & y” l'équation du contact du corps opaque. Eclairciflons tout cela par un exemple connu. His EXEMPLE. Soit propofc de trouver les équations des furfaces de l'ombre |! SUR&LES:SURE ACCES. 413 & de la pénombre d'une fphère apaque éclairée par une fphère Jumineule, les deux centres fe trouvant fur la ligne des x. Soit placée l’origine au centre de la fphère lumineufe, foit q fot rayon , 4 celui de la fphère opaque, & c la diftance des cen- res, l'équation de la première fphére EE ce ee ge QE mm x'z — ÿ"; nb (yiec)rY 2: Jr Es , a PTE Fi mi EEE Va -2 y)? FE —(27—c) x P VER y) à (ne ste Olate A D ei) g VE (ac) 5") Ét les équations (A), (B), (C) & (D), deviendront... 2x) (y à Fà 75 (A) LE + (at — x pal GO (B) a VC — (2 pp) 0) Ve x y), (C) y’ v(e —(x"—cY} y :) y" V(a— x y"), Chaflant y” des trois dernières, on trouvera , indépendamment CCC x'=2(276); x"= cc E (Ta); D'où l’on conclura d’abord que les lignes de contaë doivent être dans des plans perpendiculaires aux x, décerminés de poficion par les deux équations; enfuite réduifant (A ) & metçant pour x”. 4r4 MÉMOIRE re valeut, OMAN eee ten MR NE ETAT CAS: 7E Et PP MÉREN a'c—ax(a=b)—cyy" (E) À eee (ab) =cy)" On différenciera cette équation en ne faifant varier que y”, l’on fera fa différentielle — 0 , & l’on en tirera .............: (Gp + Le) : RTE Subitituant ‘cette valeur dans (E), on aura -:.......:..4 (£ +3): (&—(a+86}) = (ac—x (a+b));; Équation qui appartient aux deux furfaces de l'ombre & de Ia pénombre. Le figne fupérieur donne l'équation d’une furface conique tangente aux deux fphères, le fommet étant au-delà d'un des corps par rapport à l’autre, il appartient à l'ombre pure; le figne inférieur donne celle d'un cône circonfcrit aux deux fphè- res & dont le fommert eft entre deux , il appartient à la pénom: bre; ce que l'on favoit déja. PROBLÈME Vi. Etant donnes de figures & de pofiuions dans l’efpace deux corps , l’un opaque & l’autre lumineux ; trouver les équations des contours de l'Ombre & de la Pénombre du corps opaque , projetés fur une furface quelconque auffi donnée de figure & de pofition. S\0\L VIT TON: Ayant trouvé en x, y & x, par le Problème précédent, les équations des furfaces de l'ombre & de la pénombre , ayant aufi en x, y & 7, par les conditions du Problème, l'équation de la furface fur laquelle ombre & la pénombre font portées, fi l'on élimine 7 de ces équations, on aura en x & y les équa- tions des projeétions horizontales des courbes demandées, Les deux Problèmes précédens ne laïffent plus rien à defi- rer fur la détermination géométrique des Ombres, en fuppo- fant que les rayons de lumière fe propagent toujours en lignes SURATEIS!SU RFA CES. 41S droites , & n'éprouvent aucune inflexion aux approches du corps opaque; mais, fi l’on fuppofe que le corps opaque exerce fur les rayons de lumière une aétion qui les détourne de leur route , il eft évident qu'il doit en réfulter une altération dans , . 1 ; , ombre & la pénombre, qui feront terminées ou enveloppées par d’autres furfaces , fur la nature defquelles on ne peut pro- noncer, qu'on n'ait auparavant afligné la loi felon laquelle font brifés les rayons de lumière rangens au corps opaque. SCHOLIE. Pour déterminer la nature & la pofition d’une furface déve- loppable , il fuffit de donner la courbe à double courbure, qui en eft l’arête de rebrouflement , ou, ce qui revient au même, les équations de projeétion de cette courbe y— x & 7—0-x, étant données , il ne refte plus rien d'indéterminé dans l'équa- tion de la furface ; car cette équation eft, comme on l'a vu, Problème premier ----...... Sedan na nee eleletaiaie ele eee: z=@V+(x—V)eV, V fatisfaifant à l'équation CCC rss recsnsesse y = LV + (x—V) AE Donc , connoifflant les formes des fonétions 9 & 4, lélimina- tion de V donnera en x, y & 7, l'équation de la furface quifera déterminée. Maïs il faut bien remarquer que larêre de rebrouf- fement ne fuffit pour déterminer la furface développable , que parce qu'elle eft une courbe fingulière qui la caratérife toute autre courbe ne feroit pas fuffifante; car il ny a aucune courbe par laquelle on ne puifle faire pafler une infnité de furfaces développables , coniques , par exeniple ; ou cylindri- ques ... &c. . On a vu, dans la Théorie des Ombres , qu'une furface déve- loppabie eft donnée de pofition, lorfqu’on donne deux furfa- ces auxquelles elle doit être circonfcrite, elle Ie feroit pareille- “ment, fi, au-lieu des deux furfaces , on ne donnoit qe les lignes. de conta& par lefquelles elle doit paffer ; donc deux courbes.à Fre, e, avé MÉMOIRE double courbure fufifent pour déterminer la poftion-d’une fux- face développable, Voyons actuellement comment on peut trouver l'équation de la furface d’après ces données. | PROBLÈME VII Trouver l'équation d’une furface développable, connoiffant les équations de deux courbes à double courbure par lefquelles elle doit palfer. SOLUTION. Si l’on conçoit qu'un plan tangent aux deux courbes , tourne autour d'elles fans ceffer de les toucher , & qu’on confidère le plan dans deux pofitions confécutives , on aura deux plans dont l'interfetion pailera par les deux points de contaét, & par con- féquent par les deux courbes données: or deux pareilles inter- feétions confécutives font dans un même plan, puifqu’elles font les incerfeétions du même plan avec celui qui le fuir & celui qui le précède immédiatement : donc la fuite de ces interfeétions compofera une furface développable, qui paflera par les deux courbes données , & qui fera par conféquent la furface deman- dée. Ainfi , la queftion eft réduite à trouver l'équation de la continuelle interfeétion avec lui-même d’un plan toujours tan- gént aux deux courbes données. Cherchons d’abord l'équation -d'un plan tangent à-la-fois aux deux courbes, & pour cela foient x, y & 7 les coordonnées du plan, y=F:x & = fx les équa- sions de projeétions d’une des courbes données, y=F- x &z7=f:x -celles des projettions de Fautre courbe; & faifant, pour un inftant , abftraétion d’une de ces courbes , cherchons l'équa- tion du plan tangent à l’autre : cette équation contiendra deux “indérerminées , parce que la pofñition d'un plan n'eft pas fixée par la condition d’être tangent à une courbe donnée. Soient GNK la courbe à laquelle il eft queftion de mener “un plan tangent, EMY & HTX fes projeétions horizontale & SURLES SURFACES 417 & vetticale, dont les équations foient y—F: x pour la premiè- re, & 7—f.x pour lafeconde; foient de plus N le point de la courbe par lequel doit être mené le plan tangent, M & T fes projections, & x’ l’abcifle AV qui lui répond, on aura VM=F: x’. & MN—NT=—f.x"; enfin foient LN la tangente au point N, QM &RT fes deux projections. Cela pofé , le plan devant pañler par la droite LN , fon équation doit être telle, qu'en mettant pour y fa valeur prife dans l'équation de la droite QM , on obtienne pour x fa valeut prife dans l'équation de la droite RT : or l'équation générale du planeft............. sl Ë z=Ax+By+cC, Et celles des droites QM & RT font, comme nous avons vu Problème premier, MER (xx) Ex, Etz= fix +(x—x)flex: Donc il faut que les conftantes À, B & C {oient telles, que ‘ CR nm Ou bien, pañlant tout dans un membre, & ordonnant par NPD AU LCR etre me nie cute 0 SE. | À (F2 —A—BF,x)+fir-xf x B(F.rx —xrF.x)-C=o; D'où l’on tire , en égalant à zéro le coëfficient de x & le terme pre A HRMBE 7x7 Et Cf-x An 4 (A fox) Mettant ces valeurs dans l'équation 7=Ax+By+C, on aura, pour équation du plan tangent à la courbe GNK, ....... (A) z=Ax+y + fix +(A—f'x) EE — Ax, Dans laquelle la quantité À doit être déterminée par la condition que le plan foit tangent à l'autre courbe, En opérant de la même manière fur l'autre courbe, on Tome IX, Ggg 418 MÉMOIRE trouvera parcillement que x” étant l'abcife ; qui répond au point de contat, l'équation de fon plan tangent fera .... (B) x=A'x+y + fx + (A — lex) EE — A'x". Actuellement, fi l'on veut exprimer que ces deux plans fe con fondent en un feul plan tangent aux deux courbes, il faut rendre les deux équations (A) &(B) identiquement les mêmes, c'eft-à- dire, égaler les coëfficiens de x, de y & les termes fans x ni y, ce qui donnera les équations fuivantes: ..........,...... AA", Se ARR PRET RON 20 GO EPA Pen) ht (A pen Ent A (sl x mo: On'tire déffa”fconde Eee EE ant ne RS PROS MER ES 9 F'.x-F.x Subftituant cette valeur de À & de A’, dans les deux équa- üons (A) (OC) relrédulanr Montana PORN LL Re (D) (t= fr) (F2 Ferre) (Pod PP po) +(y—E.#) (2 fer), Ce) Ga=£2) (Prier) = (aa) (PE af er) + (Fed Per) (Pete). Cette dernière équation (e) étant en x’ & x’’ fimplement, in- dique que l'un des points de contaét étant donné, l’autre s'enfuit -néccflairement, Si l'on prend, dans cette équation, la valeur de x” en x” pour la fubftituer dans (D), on aura en x, y, x & x! l'équation du plan tangent aux deux courbes, & cette équation fera de cette HOTTE ACPAPARREEERES tete tte le LIRE (E) z=Ax+By+cC, À, B& C étant des fonétions de x’, & dépendans par confe- quent de la poñition d’un des points de contaë : traitant cette équation comme l'équation (E) du Problème $ , on aura pour les mêmes raifons l'équation de la furface demandée, c’eft-à-dire, SUR LES SURFACES. 419 qu'il faudra différencier (E) en regardant x, y & ?comme conf tans; ce qui donnera une nouveletéquation , .: 2.2/4 (EF) xii+y+%%=o; par le moyen de laquelle éliminant x’ de (E), on aura l'équation de la furface développable demandée, : REMARQUES. L On à vu dans la Remarque r. du Probl. I. que l'équation générale des furfaces développables, doit étre de cette forme z=xF.g9+gy+/fq, la fontion f fatisfaifant à l'équation y=-xF'gfg [Les caractères F & f n'ont ici aucun rapportavec ceux qu'on vient d'employer dans la folution précédente ]: donc l'équation en x, y & 7, que l'on vient de trouver, doit être de la même forme, & donner la quantité g & les fonétions F &f; mais fi, dans les opérations analytiques, on avoit altéré cette forme d’équation, & que lon eût quelque difficulté à l'y ramener, il faudroit fe rappeller que j'ai exprimé par g la quan- tit =, & À par F-9: donc, fi l'on différencie l'équation trou- vée & qu'on mette fa différentielle fous cette forme .... d;=Mdx+Ndy, M&N nerenfermant que x & y, on aurag=N &F-9—M; la première de ces équations donne la valeur de g, & par la nature de la furface courbe, il doit étre poffible d'éli- miner x & y de la feconde par la feule hypothète de 9=N, puifque, comme nous l'avons vu, l’on doit avoir M— fonél. de N=—fonét. de g: donc l'équation F:g fera toute en g, & la forme de la fonétion F fera connue. Quant à la fonétion f, il n'y a plus rien, qui puifle arrêter, puifque tout le refte de l'é- quation cft déterminé. LE Ce que l'on vient de dire de l'équation du Problème précé- dent, doit s'entendre auffi de celle de la furface de l'ombre ou de la pénombre trouvée dans le Probléme 5 , qu'il eft pareiïlle- Ggg 1j Fc, 5. 220 MÉMOIRE ment toujours poflible de ramener à la forme ::=,57,73 x=xE-9+9y+fr9. Eine Nous avons vu pareillement, Problème I, que l'équation d'une furface développable doit toujours étre fufceptible de la LOMME: 5. 0e SONORE ART PRE RL 2 z=@V+(x—V)oV, V étant tel que l'on ait........ RM MR M Te ce me Y=NV+(x—V)YV. Il s'agit aétuellement de faire voir comment les équations des Problèmes $ & 7 peuvent s'y ramener; mais auparavant il faut fe rappeller que les fonétions © & 4 font fuppolées de telles formes, que 7=px & y=1\x, foient les équations des pro- jettions horizontale & verticale de larête de rebrouflement, & que V eft l'abcifle qui convient au point où cette arète eff touchée par le plan tangent à la furface au point dont les coor- données font x, & x. Reprenons donc l'équation... .... (E) ;—=Ax+By+C, des Problèmes j & 7, qui, comme on l'a déja dit, pour une certaine valeur déterminée de x’, appartient à un plan CHIK tangent à la furfacc développable; or, de même qu’en différenciant cette équation, fans faire varier ni x, my, niz, l'équation (F) x5+yir+=—0o, Ou y——x #—%, qui en réfulte, appartient à la projeétion horizontale ef, de l'interfection EF de deux plans tangens confécutifs; parcillement fi l'on différencie l'équation (F), en regardant x & y comme conftans, lequation 9.7.4. 2008 (G) x0()+0(m)= 0, Qu'on obtiendra, donnera la valeur de x, ou de l'abcifle AV, qui répond au point M d'interfe&tion de deux droites confécutives ef, e’f'; mais c'eft cette abaifle AV, que jai exprimée par V dans les équations générales (#oyex Prob. I. ): LE el bare: rémttlE en SUR LES SURFACES. zut donc'hnaura d'abord mel, 0 4 ve. cé 1 (H) V— | 0%) ” De plus, en éliminant x’ des deux équations (F) & (G), on aura en x & y l'équation de la courbe NMP , formée par la fuite de toutes les interfe&tions M, & projeétion horizontale de l'a- réte de rebrouflement: donc la valeur de y prife dans cette équation, donnera la forme de y—4.x, & la fonétion F fera déterminée ; éliminant de même x’ des deux équations (F)&(H), on aura en x & y la valeur de V. Si on élimine y des deux équations (E) & (F), l'équation (1) x=Ax—B(x5ti)+C, Qu'on en tirera, fera celle de la projection verticale de la droite EF, donc en différenciant cette équation fans faire varier ni x ni x; Ééquation .. : .. .. Or E 1 sine 0 Jnbue sb niet (K)=(G) xñ+m—o, Que l’on aura, donnera la valeur de l'abciffe A V , qui répond à l'interfeétion de deux de ces projeétions verticales confécuti- ves, valeur qui eft la même que celle qui donne l'équation (G); donc éliminant x’ de (G) & de (1), on aura en x & 7 l'équation de la fuite de ces interfeétions ou de la projeétion verticale de l’arèe de rebrouffement : ainf la valeur de 7 en x tirée de cette équation, fera {—9 x, & donnera la forime de la fonétion €. Donc la quantité V & les formes des fon&ions 9 & 4 fcront déterminées, CO ROETUA FRE Si le point M étoit fixe, ou que toute la courbe N MP fe Fe. 5. réduisit à un point unique M, de manière que l’on eût l'ab- cifle À V—conftante , la furface développabie deviendroit us 425 MÉMOIRE cône dont la proje@ion du fommet feroit au point M, & l'on auto RER SA te et CREER à — à (55) 2) Ou, parce que les quantités À, B & C ne peuvent pas être dif. V, ou — conflante, férenciées autrement que par rapport à x’ dont elles font uniquement fonctions, il s'enfuit que ................. Ga) AN SZ d( Eft une équation de condition , qui doit être fatisfaite par celle de deux courbes à doublecourbure, pour que ces courbes puif. fent fe trouver fur une même furface conique, les quantités A, B & C étant prifes dans le Probléme 7; & fi ces quantités font celles que donnent le Problème $ , cette équation fera tou- jours fatisfaite par celles de deux furfaces courbes, lorfque ces furfaces feront de nature à étre circonfcrites par une même fur- face conique. On peut déduire, de tout ce qui précède, la démonftration des folutions des Problèmes fuivans, qu'il feroit très-difficile de réfoudre fans les confidérations géométriques par lefquelles on y cft parvenu; ce qui eft une nouvelle preuve que l'analyfe peut tirer de très-grands fecours de la connoïflance des propriétés de Pétendue, RS & md certe oimene tu) Ds ai) ea ; SUR LES SURFACES. 413 QUESTIONS ANALYTIQUES, Dont les Solutions font fondées fur les Recherches précédentes. PROBLÈME VIIL Etant donnée l'équation z—@V+(x—V)® V , dans La- quelle N eftune fonction inconnue de x & y, dont on fait [eu- lement qu’elle doit généralement faisfaire à léquasion y=dV +(x=V) d'V, Les formes des fonctions g & À étant indé- cerminées , trouver la valeur de NV , & les formes des fonctions g 6, pour que la propofée fatisfaffe aux deux conditions [ui- vantes , 1° qu’en faifant y—=Fx,on ait z=f.x, 2.° qu'en fai- fanty=F.x,onaiz=f.x. SOLUTION. Soient pofées les deux équations fuivantes, tirées du Pro- RE M ea en LONDON FOND Ge MoN (D) Ca Fe) (Per or)= (x 7) (PE AP CP x) + (y Ex) fo), (e) Cox fer) (Fo) = ("2") (€ LE x f rx) + (Fear) (for fr) 5 Soit prife, dans la feconde, la valeur de x” en x’, pour la fubftituer dans la première; ce qui donnera une équation (E) ;=Ax+By+c, Dans laquelle les quantités A, B & C feront données en x”: foit à le caractère d’une différentielle prife en ne faifant varier que x”, & foient pofées les quatre équations fuivantes, 424 MÉMOIRE ON Y=—x (G)-x0F+0X—0, Ds dc (H)-V= se, : Ô(à) (1):7x=Ax-B(xi+%)+C. Cela pofe, r.° Si l'on élimine x’ de (E) & de (F),'on aura la valeur de 7 qui fatisfait au Problême., 2. Si l’on élimine x’ de(F) & de (G), on aura une équation dont la valeur de y en x donnera la forme de la fonétion +. 3.° Si l’on élimine x’ de (G) &de(I), on aura une équation dont la valeur de 7 en x donnera la forme de la fonction 9. 4.° Enfin fi l'on élimine x’ de(H) & de(F), on aurauneéqua: con en V , x &y, qui donnera la valeur de V. PROBLÈME IX, Etant donnée l'équation z2—x@.q+yq+d.q, dans las quelle q eft une quantité inconnue dont on fair feulement qu’elle eft fonétion de x & de y, & Les fonctions ç & À devant f[eu- lement être elles, que la différentielle de la propofée prife en ne faifant varier que q, for =o, ou que l’on ar x? -q+y+"Ÿ-q=0o, déterminer la quantité q & les formes des fonétions @ & Y pour qu’elles farisfaffent aux deux con- ditions du Probléme précédent, c’eft-à-dire , qu'en faifant , 1. y—Ex, on ait z—fix, 2° Qu'en faifant y—=F:x, on HN ÈS SOLUTION. Tout étant comme dans le Problème précédent, fi l'on éli- mine x" de (E) & de (F), on aura une équation 7=Q qui fatisfera SU'RADIEISUS AU REACES. 425 Æatisfera à la queftion , comme la précédente. Soit de plus diffé- renciée cette équation, & foic d7 = Mdx + N d'y fa différen- telle, M & N ne contenant que x & y; on aura 1°g—=N, 2° @g—=M. Mais fi, de ces deux équations, on élimine x, y s’éliminer: néceffairement ; car M doit être néceflairement fonc- tion de N , & par conféquent fon&ion de 9; donc on aura 9 -q eng, & la quantité g, de même que la forme de la fonétion © feront déja connues. Quant à la fonction +, l'on doit avoir dg=7—x9.9—qy & par conféquent À :9—Q—xe :9—gy, d'où éliminant x par l'é- quation g=N, y s'éliminera aufli néceflairement, & l’on aura Ng en g. PROBLÈME X. Etant donnée l'équation z—@V+{(x—V)9 V, V devant généralement fatisfaire à l'équation y=\V+(x—V)Ÿ'V, dérer- miner la valeur qu’il faut donner à N, & les formes des fonc- tions @ & À, pour que da furface, qui fera le lieu de la propo- 2 « 5 . 4 , o fee foit circonfcrite à deux furfaces données , & telles 1.° que x’, y @ 7’, étant les coordonnées de la première rapportée aux mêmes axes, l’on ait, pour fon équation, z'=K' ou dz'=p'dx'+q'dy'; 2° Que x”, y" G 2” étant les coordon- nées de la feconde, fon équation foit z'=—K", ou dz”’ aus p'd x’! Ji g'd vi : SOLUTION. Soient.pofées les quatre équations fuivantes , tirées du Pro- blème s, seen ns etes ss seen see 0 ee + + 0! (A): x —K'= (x —x")p'+(y —y)g, (B ) À KEK = Bras x')p'+ (Y'y") g, CA BA ARE (Dre EE ee Er foient fubftituées, dans la première, les valeurs de x", y'8c Tome 1X. Hhh 416 MÉMOIRE ’prifes dans les trois autres, on obtiendra une équatiorr (E);=Ax+By+C, dans laquelle les coëfficiens À , B& C foient donnés en x", on traitera cette équation comme celle du Pro- blème 8, & l'on trouvera de même la quantité V & les formes des fonétions ® & 4. PROBLÈME XI Etant donnée l'équation z=x9.q+qy+4. q, dans laquelle q eft une irconnue , mais où la fonction À doit être telle, que la différentielle de la propofée prife ‘en ne faifant varier que q,/ort farisfarte jou que l'on aitx® :q+y+V'-q=0, déterminer qé les fonclions @ & À, de manière que le lieu de la propofee Jarisfalfe aux conditions du Problème précédent. SOLUTION. On prendra l'équation (E) du Problème précédent, on [a tratera comme l'équation (E)du Probléme 9, & on aura de méme la quantité g, & les formes des fonétions ® & 4 de- mandées. SCHOLIE. Dans tour ce qui précède, je n’ai détaillé des propriétés des furfaces développables, que celles dont elles jouiffent entant que développables: fi l'on y joint ce que j'ai dic ailleurs de ces fortes de furfaces confidérées comme lieux géométriques des dévelop- pées des courbes à double courbure, onen aura une théorie com- plète; mais fi l'on fe rappelle la définition que j'ai donnée au commencement de ce Mémoire, où j'ai dit, 1.” que les furfaces développables étoient compofces de lignes droites; 2.° que deux de ces droites confccutives étoient toujours dans un même lan , la premiere condition indiquoit le genre, la feconde ca- raétérifant l'efpèce , on reconnoîtra facilement que ces furfaces font partie d’une famille de furfaces courbes beaucoup plus gé- nérale, & remarquable en cela, que tout ce qui n'eft pas com- pris dans la clafle des furfaces developpables , eft déja connu SUR: LES SURFACES. 427 fous le nom générique de /urfaces gauches ; car c’eft ainfi qu’on a coutume d’appeller les furfaces compofces de lignes droites, dont deux confécutives ne font jamais dans un même plan; elles fe préfentent très-fréquemment dans les Arts, particulière- ment en Architecture. Les furfaces ide l'Arriere vouffure de Marfeille, des conoïdes des votes d’arêres en tour ronde, ram- pantes ou de niveau , des faces fupérieures & inférieures des /- mons des efcaliers tournans ... &c. font, pour l'ordinaire, des furfaces gauches. Il ne fera donc pas inutile d’entrer ici dans quel- ques détails fur leur nature & leur conftruétion. DES SURFACES GAUCHES, PROBLÈME XIL Trouver l'équation générale des furfaces engendrées par le mouvement d'une ligne droite. SOLUTION. De cela feul qu'une furface eft engendrée par le mouvement d'une droite, il senfuit qu'elle ne doit avoir aucun point par lequel on ne puifle mener une ligne droite qui fe trouve toute entière fur la furface ; car on peut toujours, par le point, mener une droite fuivant la dire&tion qu’avoit la droite génératrice, lorfque , dans fon mouvement , elle pañloit par ce point. Soient donc BAC, CAD les deux plans, l'un horizontal & Lautre vertical, auxquels doit être rapportée l'équation demandée; foit M un point de la furface pour lequel on ait les coordonnées AP=x, PQ=y & QM=7; foit NMI, la droite menée par le point M & qui fe trouve toute entière fur la furface ; enfin foient EF & »/ les projettions horizontale & verticale de cette droi- te;il eft évident que quelque part que foit pris le point Q, c'eft-à-dire, pour un x & un y pris à volonté, fi l’on mène un plan vertical par EF, il coupera la furface en une droite done Hhh ji F1c. 6. 4218 MÉMOIRE la projeétion verticale fera la droite 72: or l'équation du plans vertical ne peut étre que de cette forme y— Ax+4B, celle de la projection verticale 7/ ne peut être que de celle-ci 7=Cx+D; l'équation de la furface doit donc étretelle, qu’en faifant y=Ax+B; l'on ait 7=Cx+D. Voyons actuellement ce que doivent étre les quantités A, B, C & D. Suppofons, pour un inftant, que la loi du mouvement de la droite foit connue, & que les quantités A & B foient regardées comme données, il eft clair que non-feulement la pofition du plan vertical qui pañle par EF, fera déterminée; mais encore que là pofition de la droite génératrice dans ce plan, s'enfuivra néceflarement, & que par conféquent on fera en état d'en con- clure les valeurs de C & de C; or on n’emploie pour cela que les quantités À & B, qui font d’ailleurs néceflaxes; donc les quantités C & D doivent dépendre de À & deB, d'une manière indiquée par la loi du mouvement de la droite géné- ratrice ; donc que cette loi foit connue ou non, les quantités C & D doivent étrecer taines fonétionsde À & B. Quant aux quantités. À & B, ileft clair que, fi l’on fuppofe: connue la loi du mouvement de ia droite génératrice, pour un point Q donne à volonté, c’eft-à-dire, pour un x & un y quelconque, on doit connoitre la pofition de la droite EF, ou celle du plan vertical dans lequel fe trouve la droite génératrice; donc les quantités À & B doivent dépendre de x & y d'une manière indiquée par la loi du mouvement, & fi cetre loi n’eft pas énoncée, il s'enfuit au moins que les mêmes quan- tités font fonétions de x & y: mais il faut que ces fonétions {oient celles , que x & y puiflent varier dans un certain rapport, fans que les fonctions éprouvent aucun changement de valeur; car fi les coordonnees AP & PQ deviennent Ap & pq, de manière que le point Q fe meuve fur la droite EF, x & y va- rieront , & cependant la droite EF ne changera pas de pofi- tion, ni les quantités À & B, de valeurs. Dans tout autre rap- port , au contraire, que x & y puiflent varier, c'eft-à-dire, fi le point Q fe cranfporte en 9’, la droite EF changera de poñirion SUR LES SURFACES. 429 & fe traniportera en ef ; en forte que les quantités À & B au- ront toutes deux varié; il faut donc que À & B foient de telles fonétions de x & y qu'une même hypothèfe les rende toutes deux conftantes ou toutes deux variables, il faut donc qu'elles foient de cette formeF.V &f-V, la quantité V étant elle-même fonction de x &y, & pouvant devenir conftante fans que x & y le foient. Cette quantité V doit être déduite de la loi du mouvement, & fi cette loi eft inconnue, la valeur de la fonc- tion V le fera pareillement : or nous avons vu que les coëfi- ciens C & D font des fonctions de À &B; donc ils font aufli des fonctions de V ; donc l'équation d’une furface engendrée par Je mouvement d’une droite, doit être telle, qu'en faifant y=xEV+fV, on ait 7=xpV + VV. Cela pofé , on différenciera la première, en ne faifant varier que x, puis en ne faifant varier que y, & l’on aura ..... o—=xFVAV + dxEV+£".VAV, Ecdy=xF".Vdv....... +£".Vdv; è . .\ - + Mulripliant la première par dV, la feconde par AV, & retran- CHAN ON UE NS PM ARR RS du on y Mets Différenciant encore cette équation par rapport à x & par MBDOEC A VOPOMAUEA RE UC MMANNNE" : CRRS PER ER MONTE ANNE D NO VARIE RER TRS CREER cree PE (A) dV.A(4)= AVd(S), Où, CetquireviEnT au memes 6.200 MON RS DA dVAAV — 2AVdVAdV +AV'ddV—o; équation qui dit autant que la première y—xF.V+f.V, qui en cit l'inté- grale complète. On différencicra pareillement l'autre équation 7= xp: V+ VV; 430 MÉMOIRE cé-quidonneis te. NN NNREuRe 7 Îy= xp VAV + dxo.V + NV AV, Etdz=x?.Vdv........ + JV dv: Mülcipliant la première par dV, la feconde AV, & retran- chantourner 27e Az —dz5—dxo.V: Différenciant encore par rapport à x & par rapport à y, on MITA Ne so sole ciolale em iefelelelslaa se sue ls iellalelte ofete estelle eplole Pie ie Alx—Adz (5) —drA(Y)= dx g.VAV, A dx ddÿ()— dd (%)= dx 9 -VdV: Éliminant gl. Ve ON AUFA crosses ss esses CI (B) Jy-104 (is v)+ ddr (5) + (dvd. ()-dVd())= 0; Équation qui eft aufli générale que celle-ci: XX?" dre qui en eft l'intégrale finie & complète ; donc, à la place des deux équations 7=x?- V+4. V&y=xE. V+fv, on peut fubftituer (A) & (B), & l'équation à laquelle ces deux-ci fatisferont en même-tems, fera celle des furfaces engendrées par le mouvement d'une ligne droite. Or l'équation (À ) fait évanouir le dernier terme de(B), on aura dONC sessesssrossess esse ss. (CE) AA; — 241d4 (er +)+ Fe 9 Ou, parce que l’on a trouvé plus haut —$—#F.V, ...., (D) SE+2E- VS + (FV} “0; Équation qui fatisfait à la queftion , mais qui renferme encore F-V, qu'il faut éliminer, Poumeela , foit réfolue l'équation (D), qui donnera ...: Pdr ax)r __ david FEV — — IE + ea en) Ê Ou, en faifant ({dz)* — dd;dd7= 0, pour abréger ..,., ax ___—d'dit Vo, SEV= RS; SUR LES SURFACES. 431 Er foit différenciée cette équation par rapport à x, puis par Fapport à y; @æ qui donnera ....:.-.....,.... 5312800 SF. ViJV =; “sat, / ie ae Ec®F.V dV=—d.=#it%, Divifant l'une par so > AAÉOUPERA LR ET LT... .. Rat A (44%) RENE CE À 7° = — SF V = —(), d'(=S tv) 7 AV ( ddz ) D'où l'on tirera, pour équation demandée, des furfaces engen- drées par le mouvement d'une droite .....,,,.:....... A 2 2 (RE) + d (SE) = 0. REMARQUE PREMIÈRE. L'équatien différentielle que lon vient de trouver , n'eft pas plus générale que les deux équations ..,........ AAROUUS X=X9: V+ N °V, Ety—xF.V+ f.V, Defquelles on eft parti, & qui en font l'intégrale finie & com- plète. Pour le démontrer, faifons, pour abréger, ...... 3 — Jde + Vo dx : CE CEA = dy 3 Et l'équation différentielle deviendra ............... | ÿ AE dK dK ! , a+TRG— Soit attuellement %=1T, on aura dK=11 dy, &IK=-K7x; GAUTR ces deux équations , l’on aura dK—11(dy—Kdx), ou + d2K = dy —Kädx. Si lon retranche, de part & lé SE OA EM OUR RESTOS ARTE ee RAR AE LT ; PE jones dy —d(Kx), Dont FEES complète nant els sn... AE v=Kx+E.K. Réptenons actuellement l'équation =#%#*%=K#*, quidonne, 32 MÉMOIRE en mettant, pour ©, fa valeur, & faifant difparoïtre le ra- HICal ce RON LMBNT O0 2 0 Dan IQ er DE 2 0 AO K° + 2KIE+ = 0; dxdy Et foic fait, dans cette équation, ##4+K£%—R, onaura: PH KE—Rdx, Et Kd-#+ K°d——Rdy; Mulcipliant la première par K, & ajoutant la feconde, on aura d'E+Kd.E—<(dy—Kdx); Mais nous avons trouvé précédemment dy —Kdx=%: on AUTA TON c'e eme ie elle mice tele le re ioiele met cs atlas) d'E+Kd-E=—5; Enfin, ajoutant de part & d'autre € 4K, il viendra, «--++# d'E+KdE+EIK—= (ES) 2K; Équation dont le premier membre eft différentielle complète; & qui ne peut appartenir à quelque chofe de réel , à moins que le fecond ne le foit pareillement, & que l'on n'ait par confe- quent, pour fon intégrale complète + KÈ—9?K, qui fera auffi l'intégrale première & complète de la propofée. Pour intégrer de nouveau cette équation, foit fait 19 ce qui te & dy —0.Kdx—KSdx, _ aura, en ajoutant same 000 5 cn 200 CE conserver esst] dz =: ETC A KA Ou, parce que l'on à dy—Kdx =, -.....,..,..,..ù u pKdx+Ÿ; Qu enfin: - Ge iiy ot se afin Cned pu De ee ie KdK+(5—x9K)2K, Qui ne peut avoir lieu fans être différentielle complète, ou fans que le coëfhcient de ZK ne foit fonétion de K, on aura donc, pouÿ Le 27 nl SUR LES SURFACES. 433 pour intégrale feconde & complète de la propofée, ......- x=xPpK+4K, Pourvu que l'on ait, comme. nous l'avons füppofé. .. : 525 dy—Kdx—“#, ou fon intevrale-t (vi AE ARE À > - ae y=Kx+EF.K. Ces équations fonc celles d’où nous fommes partis; donc l'équation différentielle, quénous avons trouvée , exprime pré- cifément qu'une furface eft engendrée par le mouvement d'une ligne droite. REMARQUE IL. On pourroit objeéter, contre la généralité de notre équa- tion , que toutc furface compofée de lignes droites, peut auffi être regardée comme engendrée par les continuelles interfec- tions de deux plans mobiles, fuivant des loix indépendantes l’une de l'autre , que les équations de ces deux plans ne peuvent être que de IStfosmer se ANA, NE CO LORD (E) ;=xe-V+ydV+n.v, Et(F) z=xFV4yfV+f.v, Et que les fonctions ®, N, 11, F ; . & f ne pouvant dépendre que des loix que fuivent les plans dans leurs mouvemens , l’équa- tion aux différences partielles farisfaice par ces deux équations, doit être du fixième ordre. Je réponds à cela, que la propofi- tion, qui énonce que les deux équations ( E) & (F); doivent être fatisfaites par l'équation demandée, contient des rapports né- ceflaires entre les fon@ions &'la quantité V, & que ces rapports font en nombre fuffifant pour abaïfler l'équation à l'ordre que nous ayons trouvé. Soient , en effer, prifes les équations aux différences partielles du fecond ordre des deux équations (E) &(F), on trouvera, pour Tome IX. lii 434 MÉMOIRE la première «ste iblel otalololeione die » eee ne) or eicte eee se lee + à (G) ddx-24 dd +iVdd7 = (4. .Vdy-d) Gavd- (47) — on Et, pour la feconde, ---....... semer ssesse (H) déc 2ivdde#iv: ddr = (f V dy dx) (érd(a CU. Or ces deux équations ‘étant de la même M que M incégrales complèces, (E) & (F) doivent également avoir lieu en même-tems dans l'équation des furfaces engendrées par le mouvement d’une droite , il faut donc que les feconds membres foïent égaux entr'eux, ce qui donnera les deux équations : » » « +) av d: (av) = 2 (iv) Et LV = f VE La première eft la même que l'équation (A) du Problème précédent ; & fubftituée dans (G) & (H}, elle les réduit à dy — 15 dd; + dd;=0, qui eft l'équation (B) du même Pro- blême ; donc à) deux équations (E) & (F) ne peuvent être Évebite par une même équation , autre que celle que nous avons trouvée. Quant à l'équation V=fV, &aux autres eV=FV &II:V—f.V qu'on trouve pareillement, fuivant que l’on élimine les coëfficiens de x ou ceux de y, elles indiquent que la feconde condition eft trop générale, qu'elle peut même être fupprimée, parce qu’on lui fubftitue celle qui eft exprimée par l'équation (A); c'eft-à-dire, que les deux équations : - + -.. . x= x? V+ydV+n-V, M d(Y) = d(), Appartiennent à toutes les furfices engendrées par le mouve- ment d'une droite, ou par la continuelle interfeétion de deux plans mobiles. S'il reftoir encore quelques doutes fur cette matière , le Pro- blème fuivant , qui ne contient que des confidérations géométri- ques, les leveroit amplement. SUR LES SURFACES. 435 COROLLAIRE PREMIER. Les furfaces développables étant engendrées par te mouve- ment d'une droite , leur équation générale d/7;dd7—{(4d;}, doit fatisfaire à celle qu'on a trouvée dans le Problème précé- dent: c’eft aufli ce que l’on trouve; car alors on 2w=0, & l'équation fe réduit à 24.4 —d(i#), ou di—ird.ff, que l'équation æ—o rend identique, comme on peut s'en aflurer en effectuant la différenciation. COROLLAIRE Il. Il fuit de-là que le caraétère auquel on reconnoitra l'é- quation d’une furface gauche, eft qu'elle fatisfafle à -----: PEU Re) fi (= ad+ (ad c'e) 1e ddz EN GR PA 2 gs À dd Et qu'elle ne fatisfaffe pas à +... Adzddz=(Adz}. PROBLÈME XIII Conftruire les deux équations fimulranées z=x2-V+EN.V & y=xE-V+V, dans lefquelles on ne connoët nt la quantité V, ai les formes de fonctions ®, N&F,de manière que la furface qui er ftra le lieu géométrique , paf}è par trois courbes à dou- ble courbure , continues ou difcontinues , mais données dans lefpace. ” Ou, ce qui revient au même, trois courbes quelconques étant données , conftruire une furface courbe engendrée par le mouve- ment d’une lipne droite, & qui pale par ces srois courbes. SOLUTION. Soient BAC & CAD les deux plans, l'un horizontal & l’au- tre vertical, auxquels on rapporte tout ce qui cft dans l'efpace lii à Op Fc, 9 436 MÉMOIRE par des projettions orthogonales. Soient EFRS , GNH &ITKL les trois courbes à double courbure, continues ou difcontinues, de manière que E‘F'R'S' & Efrs foient les projeétions don- nées de la première, G'O'H"H" & GVX les projeétions don- nées de la feconde, l'T'K’L’& 174 /les projettions données de la troifième. Soit pris arbitrairement un point Q correfpondant aux coordonnées À P & PQ prifes à volonté, & foit menée par le point Q une verticale Q M; enfin foit M le point où cette droite coupe la furface demandée, il eft évident que la queftion eft réduite à conftruire la droite Q M. Pour le faire, foit menée fur le plan horizontal, & par le point Q ,unc droite quelconque F'Q L’, qui coupera les trois cour- bes de projeétions horizontales aux points FH’ L', par lefquels foient imaginées trois verticales FF, H'H, L'L, prolongées jufqu'à ce qu’elles coupent chacune la courbe à double cour- bure correfpondante quelque part en un point qui foit F pour la première, H pour la feconde & L pour la troifième ; foit menée la droite FL, qui coupera la verticale H'H quelque part en un point 2, Il eft évident que les crois verticales qu'on vient de mener, la verticale Q M, la droite FL & fa projec- tion horizontale FL’ font dans un même plan vertical ; que de plus, fi les points H & x ne faifoient qu'un feul & même point , la droite FL pañleroit à-la-fois par les crois courbes don- nées, & feroit par conféquent une des pofitions de la droite géné- ratrice de la furface demandée : le point M’ où cette droite coupe la verticale QM, feroit un point de la furfice; & QM' l'ordonnée demandée. Soit projeté fur le plan vertical tout ce qu'on vient d'imaginer , & pour cela foienc abaïflées {ur AC, & des points F'H’L/, les perpendiculaires F°f", H'P', L'/, & par les points de rencontre f” P’/',foient élevées des verti- cales prolongées jufqu'à ce qu’elles coupent chacune la projec- tion de la courbe correfpondante; ces verticales f'f, P°#, PT, feront les projections des ordonnées F'F, H'H, L’'L, & fi l'on men la droite f/, on aura la projection FL, & le point 4’ où elle coupera la verticale P'A fera celle du point &: ainf, SUR LES SURFACES. 437 d’après ce que je viens de dire, fi les points # & #” fe confon- doient, ou que le point 4’ combäâr fur la courbe GV X, la droite f / feroit la projetion de la droite génératrice, lorfqu’elle paffe par l'ordonnée demandée, dont Py feroit la projection ver- ticale. Mais il peut arriver, &.c'eft ce que l’on doit fuppofer, que les points + & H ou leurs projetions 4” & } ne fe confon- dent pas; dans cette hypothèle, foit remarqué le point 4’, & par le point Q , foit menée une nouvelle droite R’K’ pour laquelle on répérera les mêmes opérations qu'on a faites pour la droite F'L'; c’eft-à-dire, que par les points R’, H”’&K’, dans lef quels cette droite coupe les trois projetions horizontales des droites données , on abaïflera fur AC, des perpendiculaires R'r, HP”, K'K, qui détermineront les points #P”#!, par lefquels on élevera les verticales #7, P'v, #'K, qui cou- peront les trois projections verticales aux points r, v, & k: on menera la droite r£, qui rencontrera P’, quelque part, en un point #”, que je fuppole n'être pas encore fur la courbe GVX, ni fe confondre avec le point v : fi par la fuite de tous les points 4’, k”, &c. ainfi déterminés, on fait pañler une courbe Y Ah", &c. elle coupera GVX quelque part, en un point V, par lequel on abaiflera la verticale VP’”, qui déterminera fur AC un point P”, par lequel on lui menera, dans le plan horizontal, une perpendiculaire PO, qui cou- pera la courbe G'OH en un point O:-enfin, fi par le point O & le point Q, on mène une droite S’T’, on aura la projection horizontale de la droite génératrice, lorfqw’elle pañle par l’ordonnée QM. Par les points S’ & T', où cette droite coupe les courbes E'FS' &lTK'L', on abaïflera fur AC des perpendiculaires 5", T7, qui donneront les points 5" & 7, par lefquels on menera aux projections verticales correfpondantes les or- données ss, #1, & l'on menera la droite ss: je dis que cette droite coupera la verticale PV & la courbe GVX, dans le même point V, ce qui eft évident par la conftruétion, & que par conféquent elle fera la projeétion verticale de la 438 MÉMOIRE droite génératrice, lorfqu'elle pafle par l’ordonnée demandée; d'où il fuit que le point #7, où elle coupera la verticale Pr", fera la projection verticale du point demandé de la furface : Donc, fi lon fait QM=P#, le point M fera fur fa furface. REMARQUE. N Cette conftruétion n’eft pas fi compliquée qu’elle le paroïc au premier coup-d’œil ; car, quoiqu'il faille conftruire une courbe YA}! V pour déterminer le point M, il faut cependant obfer- ver que cette courbe, une fois conftruite , donne toutes les or- données correfpondantes à tous les points Q qui fe trouvent fur la droite ST ainfi , par exemple, le point q4 étant pris fur la droite ST’, & répondant aux coordonnées A7 & #9, fi l'on veut trouver l’ordonnée correfpandante 94, on n’a qu'à élever ar le point 7 une verticale z#", qu'on prolongera jufqu'à ce qu'elle coupe la droite Sr quelque part en un point #” & faire gu=7"",& le point w fera encore dans la furface. Si le point g évoit, à la vérité, pris aïlleurs que fur la droite S'T”, il faudroit conftruire une nouvelle courbe Y 4’ 4” V, qui ferviroit elle-même à une infnité d’autres points. COROLLAIRE. Dans la conftruétion précédente, on n’a pas fuppofé que la nature des courbes données , füt expreflible analytiquement: ainfi, quelques puiflent être les courbes , qu'elles foient conti- nues ou difcontinues, pourvu que leurs projeétions horizonta- les & verticales (tracées au hafard, ou foumifes à des loix) foient données , la conftruétion précédente aura toujours lieu ; donc il eft polible de conftruire le lieu géométrique des équations fmultanées «scores secs sseesesesssuse z = x-@V +, Ety=xFV+ V, SUR LES SURFACES. 439 Lors même les trois conditions auxquelles elles doivent farif faire, ne font pas foumifes à la loi de continuité; maïs on fent bien que, dans ce cas-à, l'équation de la furface conftruite n'eft plus analytique, ou que dans les équations propofées, les fonc- tions ©, À & F font difcontinues & ne peuvent plus s'exprimer analytiquement. Si toutes les conditions font foumifés à la loi de continuité, ileft poflible, en fuppofant la perfeétion de lanalyfe, de trouver l'équation de la furface conftruite: c'eft ce que je vais faire voir dans le Problème fuivant, où je n’apporterai point de démonftra: tion, parce que je ne ferai qu’y traduire en analyfe les opérations géométriques du Problème précédent. PROBLÈME XIV. Trouver dans les équations z=x9-V+4-V & y=xEV+V quelle valeur il faut donner a V, & quelles formes doivent avoir les fonctions ®,À & F, pour que les deux équations fatisfaffent aux trois conditions fuivantes :+essessssssssersereeee, 1.0 Qu'en fafanty=f -x, on aitz=f -x, 2.9 Qu'en faifanr y—/f"-x, on ait 2 Lee 3.° Qu'en faifanc y—=f".x, on ait x =f"-x, Les fon&ions f, f”, f”, f, f’ & f” étant indépendantes les unes des autres. SOLUTION. La quantité y étant une indéterminée, on pofera les trois équations fuivantes ...... TP RE lande ee o à ve à v à »(#—x)+y=f #, p(—x)+y=f +, vx =x)+y =f" x 5 440 MÉMOIRE SUR LES SURFACES. D'où l'on tirera, en v, x & y, les trois valeurs fuivantes détxfit e RRME .. La ele tous x! — Xe + x'—=X, x! = D'ŒUr On pofera enfuite l'équation ARC Er CINO OR ne ni CAO | fx _ X(EX—F"-X") + XX" —X'EX X—X" D'où l'on tirera la valeur de y en x & y, quon mettra dans l'équation DR I AT à sie de Se Ne PERTE ZX EX") + XLX = X'EX: DRE Liu : Et cette valeur de 7 fera celle qui fatisfera à la queftion: enfin, fi lon mét encore, pour y, fa valeur, dans les quatre 2 ÉQUATION ARE MR NES UNE PAR RARES FX —vX'=V, V—FYV, f.x—f".x? ee th X£X'— X'E.X Dar D La quantité V, ainf que les fonétions 9, 4 & F, n'auront plus rien d'indéterminé. ANALYSE | | | Jeav. Etranger Tom. LE Pas. 4. EE EE 7 me. LE eg go Jo. Etranger Ts CéLauroard Say 44 ag: Jeav. Etrang. Tim. IX. Pa er Ætrans. Tim. IX. Pro 449. LA Haurrard Seulp 440. Ja Elrang Tom. IX. Pay, ET SN € NRC IN RS 8, ETS — ‘ Jeav Etrg Tom. IX. Puy, 440 CE Hausvard Jap LA MINE DE PLOMB BLANCHE. Par M. LABORIE, Maitre en Pharmacie. Cx Mémoire tient à un travail que j'ai entrepris fur les Mines métalliques. Ce font des recherches fur leur analyfe, & fpécialement par la voie des menftrues, ou diflolvans hu- mides. Les avantages attachés à cette voie, me font efpérer de nouvelles lumières fur la nature générale & particulière des Mines. J’entre avec cette confiance dans une carrière où les Chymiftes ne fe font montrés, jufques à préfent, que par un petit nombre de tentatives ifolces. L'analyfe de la Mine de Plomb blanche commencera l'exé- cution de mon Plan. L'une des formes, fous lefquelles fe préfente le Plomb fofile, eft celle de concrétions fpathiques que l’on a divifées par les couleurs, en plufieurs efpèces. La Mine de Plomb blanche, eft une de ces efpèces comprifes fous le nom géné- rique de Mines de Plomb fpathiques, Henkel & M. Vallerius les regardent comme des Mines de Plomb arfenicales. M. Sage foutient que le Plomb y eft minéralifé paf l'acide marin. Cronfledt n'y admet que du Plomb dans l'écart de chaux. Telle eft une Queftion que nous nous propofons de déci- der par rapport à la Mine de Plomb blanche, Celle fur laquelle j'opère, me venoit des Mines de ‘Pou- Tome IX, Kkk Préfentée le 5 Décembre 1772. 442 ANA LISE laouen, en Bretagne, Elle eft en aflez gros cryftaux de forme prifmatique irrégulièrement ftries dans leur longueur, d’un blanc de nacre, demi-tranfparent, qui m'ont donné au quin- tal 80 livres de Plomb tenant un peu d'argent. M. Wallerius à avancé que la Mine de Plomb blanche ne fe diflout poinc par l’eau forte; il eft dit ailleurs, qu'elle n’eft foluble qu'en partie par l'efprit-de-nitre & l'acide marin. L'Ex- périence m'apprend le contraire; je la trouve parfaitement foluble par tous les acides; & voici le tableau de leur action obfervee fur cette mine réduite feulement en fragmens & non pas en poudre. L'huile de vitriol & la mine, à froid, font reftés fans au- cun mouvement fenfible, À l’aide d’un peu de chaleur l'effer- velcence furvient, & la diflolution s'opère. Dans le commen- cement fur tour elle répand une vapeur qui a l'odeur d’Aepar. L'acide nitreux & l’efprit de fel n’eurent pas firôt touché la Mine, que fa diflolution s’annonça par le figne ordinaire : ce qui a pu induire en erreur fur le compte de ces deux diflolvans, c'eft que ce premier mouvement de diflolution ralenti par degrés, s'arrête; &,à n'y pas regarder de plus près, la Mine: auroit aîlez l'apparence de ny ètre foluble qu'en partie. Mais un peu de chaleur communiquée aux di£ folvans, fufñt pour rétablir le cours d’une diflolution qui n'eft que fufpendue, à l'occafion de fon propre produit qui, for- mant croûte fur la Mine, interrompoit fa communication avec l'acide. L’acide nitreux par la vivacité avec laquelle il faifit la Mine; & par la quantité qu'il en peut abforber, fe montre le plus ap- proprié de {es diflolvans. Une once d'efprit de nitre fumant étendue de deux fois fon poids d'eau, a éré à peine faturce par 14 gros de Mine que je lui ai fournis fucceflivement & par petites parties. - de DE LA MINE DE.PLOMB 443 L’efprit de vinaigre montra peu d'énergie. Une aflez lon- guc digeftion de la Mine dans ce menftrue, n’a abouti qu'à la couvrir d’une petite couche de cérufe. J'ai eu cependant une difolurion par l'efprit de vinaigre : mais une petite quan- cité de Mine a demandé beaucoup d'acide; il m'a fallu pren- dre la Mine en poudre, & entretenir le diffolvant prefque bouillant. ; Le produit de chacune de ces diflolutions a été un el. Celui de la diflolution vitriolique seft montré fous la forme d'un magma falin fur lequel je verfai de l'eau froide, qui en ceft fortie fort acide. Dans cette eau, je jerai de l'al- kali fixe qui n’en précipita rien, & je reconnus que je n'en- levois qu'une portion d'acide furabondante; il me refta une matière blanche pulvérulente quand elle fut feche, prefque infoluble dans l'eau même bouillante. La diflolution, par l'acide nitreux, avoit cryftallifé en partie d'elle-même, & acheva de cryftallifer toute entière par l’éva- poration que j'en fis. Les mieux figurés de ces cryftaux font des hexagones un peu applatis. La diflolution, par l'acide marin, me préfenta un amas de “crès-fines aiguilles courtes & brillantes, flottantes dans de l'acide furabondant que j'eus la facilité d’enlever par le moyen de l'eau froide. Ces petics cryftaux n’éçant folubles qu'à l'eau bouillante, La difolution, par l'acide du vinaigre, ne me donna fon p'oduit que par une évaporation pouflée fort avant ; la li- queur réduite à une confiftance huileufe fe coagula en une mafle faline compofée de petites lames alongées quadrangu- laires, qui font comme les élémens d’une cryftallifation paral- lepipede. Ces différens fels fufffamment caraëtérifés par leur forme extérieure, ne peuvent être méconnus pour ce qu'ils fonc. If KkKk ij 444 ANA LAS 'E eft clair que jai pour tout produit les différentes combinai- fons du Plomb avec les acides; c’eft-à-dire, un vitriol de Plomb, un nitre faturnin , un Plomb corné, & le fel de Saturne des boutiques. Ainfi, le réfulrat de mes Diflolutions de Mine de Plomb blanche, ne fe trouve pas différent de celui que m'auroit donné du Plomb diffous dans ces mêmes acides. N'en éroit-ce pas affez pour fonder un doute très-légitime fur la minéralifation du Plomb dans cette Mine? Les Obfervations fuivantes ont achevé de m'éclairer. Si la Mine de Plomb blanche étoit arfenicale, il n’étoit pas néceflaire d'aller chercher bien loin les moyens d'y reconnoiître cette qualité. On fait qu'une odeur fpécifique décele l'arfenic toutes les fois qu'on lui procure le conta& du phlogiftique embrafe. On fait encore qu’une des proprié- tés de larfenic eft de décompofer le nitre, en dégageant fon acide de fa bafe; j'ai foumis la Mine à ces deux Expe- riences fans en tirer le moindre indice d’arfenic : répandue fur les charbons.ardens, elle n’a donné aucune odeur. Un mélange de trois parties de Mine, & d'une de nitre, mis en diftillation, a fubi l'incandefcence, & le nitre n’a point été décompolé. Je fuis fiché de ne pouvoir pourfuivre fans me trouver forcé de contredire un Chymifte diftingué, dont je n’attaque le fentiment qu’en rendant à fes talens le plus fincère hom- mage. Les Expériences que j'ai faites relativement à la partie vaporeufe de la Mine de Plomb blanche, ne m'ont point laiflé appercevoir l'acide marin que M. Sage y annonce. Dans une cornue de verre adaptée à un récipient mouillé intcrieurement d'huile de Tartre, j'ai chauffé graduellement de la Mine jufqu'à la mettre en fufñon à la fn. DE LA MINE DE PLOME. 445 Un fel cryftallifé a paru fur les parois du récipient : mais cette cryftailifation fort différente de celle qu'auroit affecté un fel marin régénéré, éroit en aiguilles & non en cubes. De plus, elle tombe en deliquium à Vair, & il n'en refta bientôt plus de veftiges, après que le récipient détaché de la cornue eut refté quelque temps ouvert. De l'acide vitrio- lique que j'y pañai, n’en dégagea aucune vapeur remarqua- ble. Si, comme il eft vrai, les vapeurs de la Mine ont eu Ja propriété de faire cryftallifer l'huile de tartre, ce n’eft point en qualité d'acide qu’elles opèrent; le phénomène à une toute autre caufe que nous allons faire connoître dans un moment. Pañlant à une autre Expérience, indiquée par M. Sage, jai mis en diftillation, dans une cornue, un mélange d'un gros de Mine en poudre, & de deux gros d'huile de vitriol que jeus foin de prendre bien blanche, & exempte de phlogiftique, Je devois trouver l'acide marin dans une vapeur que dégage de ce mélange la première impreffion du feu. Je le graduai en conféquence, & à peine eus”je une douzaine de gouttes dans le récipient que je me hâtai de le retirer. Je trouvai que la liqueur avoir l'odeur, non d’un acide marin, mais d'un acide volatil fulfureux. De deux parts que Jen fis, l'une fut employée à précipiter une diflolution de mercure dans l'acide nitreux, l’autre à faturer une quantité proportionnée d’alkali fixe, Le précipité-de mercure, en fuppofant que le précipitant eût été de l'acide marin, devoir étre fufcepuble de fe con- vertir en fublimé; je tentai l'opération & n'eus point le pro- duic. Mais le précipité prit au feu la couleur jaune qui carac- térifoit un curbith minéral. Du fel neutre provenant de la faturation, je fis avec la : 446 ANALYSE poudre de charbon un petit mélange, qui, mis en fufon, me donna de l’hepar fulfuris. | À ces traits, je reconnus qu'au-lieu de l'acide marin annon- cé, je n'avois recueilli qu'une portion de l'huile vitriol inver- tie en acide volacil fulfureux par du phlogiftique rencontré dans la Mine. ge L'opinion de M. Sage a, d'un autre côté, le défavantag d’étre combattue par les propriétés de la Mine de Plomb blanche, qui n’ont aucun rapport avec celles d’une combinai- fon de Plomb & d'acide marin, autrement dit Plomb corné. On en jugera par le parallèle des deux corps. Le Plomb corné eft foluble dans l'eau bouillante, & la Mine ne l'eft point dutout ; je m'en fuis afluré fur de la Mine réduite en poudre fine. Après une longue ébullition, je lai retrouvée fans diminution fenfible de poids. Dans l'eau où elle avoit bouilli, je verfai de la liqueur d’orpiment, qui n'en altéra, en aucune façon, la tranfparence; preuve qu'elle n'y rencontroit pas le moindre atome de Plomb en diffelu- tion. Six oncesgd'eau dans lefquelles javois fait diffoudre, pour objet de comparaïfon, un feul grain de Plomb corné, furent croublées tout de fuite par quelques gouttes de la méme liqueur d’orpiment. Le Plomb corné & les alkalis fixes ne fe touchent pas fans laïfler trace d’un réattion en vertu de laquelle le Plomb corné eft décompoft, & l’alkali neutralife; rien de femblable n'a lieu entre ces fels & la Mine, je l'ai fait bouillir long-tems avec de l'alkali fixe en liqueur, & je n’ai remarqué aucun changement dans l'état de l'une ni de l'autre. ‘Le Plomb corné n’eft point foluble dans les huiles graffes, & je trouve que la Mine de Plomb blanche left parfaite- ment par ces menftrues. De deux parties d'une de ces huiles bouillantes, & d'une partie de mine réduite en poudre, 1l ef réfulté une combinaïfon, ayant la confiftance & la Fr # Le pe Le DE LA MINE DE PLOMB 4 duétilité des mafles emplaftiques préparées avec les chaux de Plomb factices, À l'inftar de ces mêmes chaux , la Mine, prend par la calcination, diverfes nuances fucceflives de couleur; de blan- che, elle devient jaune, puis rouge, & finit par fe conver- tir en licharge à un feu plus fort. Pour le Plomb corné, il n'eft fufcepuible, par la même voie, que de fe fondre & de fe volatililer fans changer de nature. On a vu quel degré d’aétivité met l'acide nitreux dans la diflolution de la Mine; cet acide fe comporte au contraire avec le Plomb corné comme avec un corps dont il n’eft point le diflolvant : rémoin une feule goutte d'acide marin, qui tombe dans une diflolution de Plomb par l'acide nitreux. Le trouble & la précipitation qui furviennent fur-le-champ, n'annoncent-ils pas la formation d'un nouveau compofe que l'acide nitreux ne peut point tenir en diflolution, & ce nouveau compolfe n'eft autre que du Plomb corné. Des divers éclairciflemens que nous venons de prendre, relativement à l'arfenic & à l'acide marin, il réfulre évidem- ment que ces deux prétendues minéralifateurs font également étrangers à la Mine de Plomb blanche, dont il nous refte à déterminer le véritable caraétère. Il eft mention de quelques Mines de cette même efpèce, qui {ont fufceptibles de fe réduire d’elles-mêmes, & fans addi- üon par la fimple fufion. La nôtre à eu befoin d'un Aux réduc- cf; mais il n'en eft pas moins vrai que, fous une apparence purement terreufe, le plomb y conferve la meilleure partie de fon phlogiftique. La preuve en eft dans la manière donc Ja Mine cft difloute par l'acide nitreux ; car on fait par l'exemple du Minium & du Mafficor, que cet acide n’attaque que très-foiblement le Plomb lorfquil eft déphlogiftiqué à ce point qui conftitue les chaux de Plomb proprement dites. Le phlogiftique dont il eft queftion, a été manifefté encore par 448 24) ANALYSE l'acide vitriolique devenu fulfureux dans l'Expérience de fa diftillation avec la Mine; j'ai continué l'opération, & tour ce qui a pañlé d'acide évoit dans ce même état. La liqueur évoic un peu louche, &, fi je ne me trompe, j'ai quelques atomes de foufre dans un petit dépôt blanchâtre que je trouve au fond du vaifleau. Une autre Obiervation a pour objet la partie vaporeufe , qui unic à la fubftance métallique, caufe le déchet notable que l’on cprouve lors de la rédution de cetre Mine, done les plus riches échantillons ne rendent pas au-delà des 2. Je men prenois d'abord foit à des parties purement terreufes interpofCcs, foit au flux rédu@if lui-même qui, en qualité d’al- kali, pouvoit difloudre du plomb; mais je n'avois pas encore fair la remarque eflentielle, que la Mine diminuoit également de poids par la fimple calcination; 60 grains de Mine calcinés en maflicot furent réduits à 48. Je pris le parti de répéter l'Expérience dans une cornue adaptée & lutrée à un récipient proportionne ; je le vis fe remplir à différentes reprifes d’une vapeur humide très-expanfble, que je ne pus regarder qüe comme de l'air & de l’eau auxquels fe méloit le phlogiftique du Plomb. J'attribue à ce phlogiftique une odeur.affez indécife qui refte dans le récipient, & que j'ai trouvée, tantôt tirant fur J'empireume, tantôt lésèrement fafranée, C'eft ici le lieu de rappeler le fait de Fhuile de tartre, cryftallifant à la vapeur de la Mine, & de dire que ce phéno- menc cft dû à la portion d'air fixe qui fe dégage. Ce principe sunit volontiers aux alkalis, & les moins difpofés à cryftallifer en deviennent fufceptibles par cette combinaifon, Cet air fixe de la Mine de Plomb blanche n’auroit-il pas très- grande part à fa cryftallifation, en opérant fur la partie métallique ce que nous l'avons vu opérer fur les alkalis fixes ? Ce qui me paroît démontré, c'eft que, fous l'apparence d'une cryftallifation . DE LA MINE DE PLOMB. 449 cryftallifation fpathique, la mine que je viens d'analyfer n'eft autre chofe que le Plomb combiné à une portion d'ar & d’eau, laquelle fait à-peu-près un cinquième de la male. Telle eft notre Conclufion , & elle fe rapporte parfaite- ment à ce que l’on fait de l'origine des Mines de Plomb fpachiques. Rien de plus compliqué lorfqul a fallu l'accommo- der aux befoins de certaine hypothèfe : rien de plus fimple dans le procédé de la Nature. Les Minés de Plomb fpachiques, font des Mines de feconde formation, que l'on rencontre difperfées fans ordre, & fans fuite dans les environs, & toujours aflez près des galènes ou Mines de Plomb fulfureufes. La pofition des Mines fpathiques, leur eryftallifation plus ou moms diftincte, les font aifément reconnoïtre pour lou- vrage des eaux fouterraines chargées de la partie métallique des galènes décompofces, Les galènes fujettes à cette décompofition font celles à qui il arrive d'être mêlées de parties ferrugineufes. Tancôc c'eft * une galène qui contient du fer;-cantôc c'eft une Mine de fer qui renferme de la galène. Pour concevoir ce qui peut réful- ter d'un femblable alliage, il ne faut que fe rappeler l'extrême rapport en vertu duquel le foufre s'unit au fer par préférence à tout autre métal. Que l'eau vienne feconder cette tendance mutuelle, voilà le foufre de la galène dans le cas de former avec le fer une combinaïfon nouvelle, qui change le premier état du Plomb. Dégagé des liens de la minéralifation, réduit à n'être plus qu'interpofé en molécules infenfibles dans une mañle que le mouvement inteftin à ouverte de toutes parts, ce métal n’attend qu'un véhicule convenable pour aller fe dépofer ailleurs, & donner naiflance aux Mines fpathiques. Tome IX. LA 450 ANALYSE DE LA MINE DE PLOMB. Leur commune origine donne lieu de préfumer que les autres efpèces ne diffèrent de la blanche, que par le mélange accidentel d’une matière colorante probablement ferrugineufe. C'eft fur quoi des Expériences ultérieures nous procureront les éclairciffemens néceffaires. F Ÿ LES MINES DE LA NOR WËÈGE. Par M. JARS. Les Recuercues que j'ai l'honneur de vous préfenter au- jourd’hui, Meflieurs, ont pour objet les fameufes Mines d’ar- gent de Kongsberg, je les ai raffemblées de concert avec feù mon Frère , de l’Académie des Sciences , dans le cours du voyage que nous fimes en Norwège , en l'année 1767: pour rendre plus intelligible ce que Jai à dire, je crois devoir , au- paravan: , donner une idée genérale des autres Mines de ce Royaume, & de ce qui concerne leur adminiftration. Il paroît hors de doute que les Mines de la Norwège étoient découvertes dansle quatorzième fiècle , puifque , par une Lettre de la Reine Marguerite au Roi Eric de Poméranie, datée de l'an 1397, elle lui défend de permertre aux particuliers d'exploiter des Mines ; ce qui fuppofe des découvertes anté- rieures. En 151$, le Roi Chriftian II fit venir de Suède des Ou- vriers pour découvrir des Mines , ils en trouvèrent en effec, &,en 1539, Chriftian III en fit travailler. Depuis cette épo- que & par la fucceflion des tems, ces découvertes fe fonc mul- tipliées, les unes ont été fuivies, & d’autres abandonnées ; il enffefte néanmoins une grande quantité en exploitation, qui font non-feulement la richefle du Pays & le bien des Sujets , mais encore un avantage réel au Souverain, par le produit des matières que le Royaume fournit à l'Etranger. Lil ÿ Préfenté le 27 Mai 1772- 452 MÉMOIRE On exploite en Norwège principalement des Mines de fer & de cuivre; les plus confidérables de ces dernières font fituces dans le Gouvernement de Dromthein, & particulièrement la Mine de Reuras, à 150 lieues au Nord de Kongsberg, re- nommée par fa richefle & fon abondance; c’eft, dit-on, un Srockwerck (a), immenfe ou mafle minérale de pyrites cui- vreules , fi près de la furface de la terre, que l’on a pu facile- ment y pratiquer des ouvertures aflez grandes pour y faire entrer & foruir des voitures qui en tranfportent au-dehors les minerais; cette Mine , où plufieurs familles fe fonc enri- chies, produit annuellement douze mille quintaux & plus de cuivre. Toutes les Mines de métaux , à l'exception de celles d’or & d'argent, font exploitées par des Compagnies, compofces d'un nombre plus ou moins grand d'Intérefles , mais toujours divifes en 120 aétions; ces Compagnies reconnoiffent & dé- pendent de la Jurifdiétion du Confeil des Mines du départe- ment, dont on en diftingue deux, l’un à Dromchein, & l’autre à Kongsberg. La plupart des Mines étant fituées dans des endroits écar- tés, & fouvent fort éloignées de ceux où l’on tient des Mar- chés, les Intéreflés pourvoient eux-mêmes à la fubfftance des Ouvriers, afin qu'ils ne foient pas obligés de perdte leur tems en s'abfentant; ils achetent, pour leur propre compte, toutes les provifions qui leur font néceflaires, ce que l’on a foin de faire dans un temps d’abondance ; mais pour éviter le monopole, c’eft le Confeil des Mines , qui, deux fois l’an- née , taxe la valeur de toutes les denrées fuivant le prix cou- rant. Il eft libre à route Compagnie , & à tout particulier, & (a) Les Allemands donnent le nom Stockwerck, à de la Mine que l'on trouve en mafle de cinq à fept Toifes d’épaiffeur, dans fa largeur, & qui n’a ausune direétion déterminée dans fa longueur. ue y S U R1 É ES MMN ES. 453 toute-fois en avoir obtenu la conceflion du Confeil, qui ne peut la refufer , de travailler toutes fortes de Mines , à l'excep- tion de celles d'or & d'argent, dont le Roi s'eft réfervé à lui feul lexploiration, & fur les autres métaux , il lui eft dû un droit de dixième, Au premier qui demande une conceflion , on accorde d’a: bord l'arrondiffement qu'il defire pour faire des recherches, & lorfquil a découvert un filon qu'il a deffein d'exploiter , on lui détermine fa conceflion, comme cela fe pratique en Allema- gne, ou on lui donne un Fund-Grube ; c'eft une étendue de terrein de 42 toifes & dix mefures de 22 voifes, c’eft-à-dire, cinq de chaque côté. On lui affigne enfuite un circuit de plufieurs lieues , dans lequel tous les Payfans & Habitans font obligés de lui fournir le bois & le charbon néceflaires à fon exploitation , & ce à un prix fixé par le Confeil des Mines; de forte que ceux-ci ne peuvent-en vendre à qui que ce foit, qu'à fon refus ; cet arran- gement eft d'autant plus effentiel, que, fans lui, il y auroit une concurrence continuelle , qui feroit payer ces marchandifes à un trop haut prix , & conféquemment occafionneroit bientôt l'abandon de l’entreprife : pour prévenir encore plus cet in- convénient, il eft défendu d’avoir plus d’une Fonderie dans un arrondiflement afligné, de manière que s'il arrivoit qu'une Compagnie vint à exploiter une Mine dans celui d'une au- tre, ce qui eft permis, elle feroit , en ce cas, obligée de cher- cher un autre diftriét pour y bâtir une Fonderie, où elle feroit tranfporter fon minerai, & pour lequel on lui donneroit égale- ment une aflignation de bois. Lébci Une Mine qui refte fix femaines fans exploitation, & fans permiflion de la fufpendre, peut étre travaillée par le pre- mier qui la demande; mais, pour peu que celui qui cefle, ait des raifons valables ou légitimes , il lui eft aifé d'obtenir du Confeil une fufpenfion d’une année, ce qui faic un an & fix 454 MÉMOIRE femaines, il y a plufieurs Mines dans ce cas-là, fur-tout des Mines de fer. S'il furvient des difficultés entre les Intéreflés d’une Mine ; le Confeil du département nomme, à leur réquifition, des Députés qui fe tranfportent fur les lieux, aux frais de la Com- pagnie, pour les examiner; ils en font leur Rapport au Con- {eil qui les juge : les commiflions font ordinairement très-coû- teufes, attendu l'éloignement , par exemple, le Departement de Kongsberg s'étend à plus de cent lieues. Le droit du dixième, que nous avons dit que les Mines payoient à la Couronne, n'eft pas toujours perçu en entier, ou du moins très-rarement; il eft modifié, fuivant les circonf- tances , pour l’encouragement & le foutien des exploitations; les Entrepreneurs des Mines & Forges de fer de la Ville de Mofs, paient annuellement pour tout droit, cinq cens Rixda- lers (a); la Mine de cuivre de Numedal , à trente lieues de Kongsberg , a été affranchie pendant dix années, ainfi que celle de Foldal, éloignée de cent lieues ; d’autres n’ont ob- tenu que cinq années de franchife, ce que l’on prolonge ou diminue fuivant la valeur de la Mine ; après ce temps accordé par le Confeil , avec l'approbation de la Chambre de Copen- hague; on fait payer le quart, le tiers ou le votal du dixieme, fi l'on juge que la Mine puifle le fupporter ; telle eft la fa- meule Mine de Reuras , dont nous avons parlé ci-deflus, qui, dans l'efpace de trois ou quatre années, a payé en droits de di- xième, 30 mille Rixdalers. | (2) Le Rixdaler équivaut à quatre livres dix fols, argent de France. 2 Made ses | M. PS TE D et >; SUR LES MINES. 455 oo mme MINES D'ARGENT DE KONGSBERG. PREMIÈRE PARTIE. Leur origine, la manière dont elles ont été décou- vertes, comment elles ont été dirigées & exploi- tées, © fucceffivement; l’état de leur admniniftra- zon actuelle. A VINGT LIEUES de la Ville de Chriftiama, font fituces des Mines dont il s'agit, dans un pays montagneux , à trois quarts de lieues de la Ville de Kongsberg , qui leur doit fa population & fon accroiflement; cette dernière eft bâtie dans un vallon, arrofce par la Riviere de Zaupuen, dont le cours eft paral- lèle à la direction des montagnes, qui renferment les veines minérales. C’eft au lieu nommé Sardsverd , dans le canton de Num- médal , & dans l'endroit que l’on appelle aujourd’hui Monra- gne moyenne, qu'on fit la première découverte ; elle à été fui- vie de plufieurs autres , qui ont fondé la grande réputation de ces Mines ; on en fait remonter l’époque en l’année 1623 , & l'on eft d'accord qu'elle eft dûe à des Bergers, qui, en gardant leurs troupeaux, trouvèrent de l'argent natif qui fe manifeftoic au jour par filets fortans du rocher; ( ce fair eft aufli vraifem- blable qu'il eft hors de doute ; la plupart des Mines que l'on exploite aétuellement ont été découvertes de la même ma- tière;)il n'en fallut pas davantage; ces indices écoient fufi- 456 MÉMOIRE fans pout inviter à un examen, & pour décider bientôt l’ex- ploitation. Le premier foin fut de lui donner un nom; on adopta celui du Roi, & on la nomma Koënigs-Grube, ou Mine Royale; noin qu'elle conferve encore. On fongea aufli-tôt à mettre cette Mine en valeur; pour cer effet, l'on fic venir d'Allemagne des Mineurs , & autres Ouvriers entendus dans cette partie :on commença l'exploi- tation aux frais de plufieurs Particuliers , qui s'y intérefsèrent avec l'agrément de Sa Majeflé. L'année fuivante , en 1624, elle fe cranfporta en perfonne fur ces Mines: (ôn voit encore la pierre fur laquelle elle dina , elle eft près de l'ouverture; ) mais, fe réfervant l'adminiftration fuprème, elle en confia la direétion à un Surintendant & grand Capitaine des Mines, dont elle afligna les appointemens fur le dixième qui lui ap- partenoit, & ordonna que les autres Officiers, qui furent jugés néceffaires pour la régie des differens détails, feroient payés par la Caïfle des Interefés ; Elle afligna aufli une autre Mine ouverte, qui, pour lors, donnoit de belles efpérances , pour être exploitée au profit des pauvres; elle fubfifte encore, & eft appellée la Mine des Pauvres. Cette exploitation fe continua aïnfi pendant près de 40 années ; mais la méfintelligence s'étant mife parmi les Inté- refles & les Officiers des Mines, donna lieu à d’autres arran- emens. Frédéric IT, informé de cette défunion toujours pré- udiciable à ces fortes d’entreprifes , & du bon état de la Mine, réfolut, en 1661 , de rembourfer les Intérefles , ce qui fut exécutc. La défunion, qui ne cefloic pas parmi les Employés des Mi- nes , & le mauvais état où elles fe trouvèrent, déterminerent, en 1673, Sa Majefte à les aliéner pour la fomme de 8o mille Rixdalers, Les Mines firent de grands progrès pendant quelques années, | SUR LES MINES. 457 années, mais elles déchurent enfuite tellement que , faute des avances néceflaires, l'exploitation fut négligée au point, que les Ouvriers & les Officiers n'éroienc plus payés; leurs plain- tes parvinrent, en 1683, à Chriftian V , qui la reprit lui-même fous la direction d'un Officier de Mines, que l’on fit venir du Hartz. En 1686 , Sa Majefté fe tranfporta fur les lieux, &, entre autres changemens qu’elle fit, le département des Mines fut tranfmis de Chriftiania à Kongsberg ; en 1689, Elle divifa ce département en fupérieur & inférieur, en forme de Collège, compofe de différens Membres. De 1686 à 1689, les chofes allèrent de façon que, quoi- qu'en plufieurs endroits les Mines fuflent riches, la recette ne pouvoit pas fuffire pour en payer les frais, & que le Roi fe vit obligé, non - feulement d'accorder pour leur foutien , le dixième qui lui revenoic fur les Mines de fer, & une partie du droit d’accis fur le cuivre, mais encore d'avancer une fomme de 6600 rixdalers: malgré cet avantage, les dépenfes & la re- cette fe balançoient feulement. - De plufieurs arrangemens que l'on fit, il réfulta une réduc- tion des falaires, tant des Employés que des Ouvriers , dont ils ne furent indemnifés qu'en 1699, à l'avénement de Fré- déric IV. Depuis 1689 , les Mines furent dirigées de la même manière qu'on vient de le dire, De 1705 à 1710, plufieurs Bâtimens , les machines & les conduits d’eau furent mis en état, & l'on y conftruilit des étangs; depuis ce tems, l'exploitation des Mines seft faire fans interruption aux frais du Souverain, qui , comme nous l'avons dic ci-deflus, fe left réfervée à lui feul, pour toutes celles d’or & d'argent qui fe découvriroient dans fon Royaume. Leurs progrès ont toujours été en augmentant, quoiqu'il y ait Tome IX, Mmm 458 MÉMOIRE eu des tems où les bénéfices étoient bien médiocres; mais les découvertes qui fe fonc faites fucceflivement , & particulière- ment celles des Mines de Gorrés Hilf in der Noth. & de Jongs Knouren les ont rendu très-importantes. On évalue le produit annuel de routes les Mines de ce dépar- tement de 32 à 33 mille marcs d'argent. Ces Mines font adminiftrées aujourd’hui par deux Confeils, que l’on diftingue par Ober- Bersamt & Bergamt, qui tous deux fe tiennent le Samedi matin de chaque femaine. Dans le premier , on traite toutes les affaires majeures qui concernent l'exploitation, & aufli le réfultat de celles qui ont été auparavant examinées dans le fecond. Ses Cfciers font, le Capitaine des Mines, trois Confcillers & deux Aflefleurs. Le fecond Confeil examine toutes les affaires du détail, qui font enfuite approuvées & décidées dans le premier ; il eft compofé de deux Grands-Maïtres mineurs, de quatre Jurés, d'un Surveillant & de deux Géomètres; ceux-ci ne peuvent afifter au premier Confeil. SUR LES MINES. 459 SECONDE PARTIE. Des Montagnes qui renferment les veines minérales & de la nature des unes & des aurres. La rrurarT des Mines comprifes dans le diftri& de la Ville de Kongsberg, font placées au couchant de cette Ville fur le penchant d’une montagne , dont la direction eft du Sud au Nord, & l’expofition à l'Orient; elle eft encore dominée par d'autres élévations. Les veines minérales que l’on y a découvert en différens tems , depuis trois quarts de lieue jufqu’à une lieue & demie de diftance les unes des autres , ont donné lieu à en faire une diftinétion générale; on divife la Mortagne en trois parties ; favoir , Obergébrre , où Montagne haute, Mrrtelgéb re , ou Montagne moyenne, Unterpébirg ou Montagne bafle ; les Mines de cetre dernière ne font'éloignées de la Ville que d'une demi - lieue. À l'Oueft de la Montagne haute à ? de lieues de lamoyenne, on travaille une autre veine principale; de forte qu'il y en a quatre en exploitation. Il convient d'expliquer encore ce que l’on entendpar Fall- band ou Fall-art, qui eft le nom en ufage dans ces Mines, pour défigner la partie de rocher qui contient les veines d’ar- gent natif & les matières minérales qui l'accompagnent; ainfi, l'on dit Fall-band de la Montagne haute, de la moyenne, &c. & en parlant de plufieurs , on sexprime par Æull-bender, quant à nous, nous nommons ces parties filons principaux. Tous les rochers en général dont cette Montagne eft com- polée, de même que cous ceux de cette partie de la Nor- Mm m ij dé MÉMOIRE wège ; font très-compaë&s & fi durs, que l’on eft obligé d’avoir recours au feu pour les abattre plus facilement, & aveo plus d'avantage qu'avec la poudre ; ces rochers fone formés d'une infinité de lits ou de couches, dans une pofition qui appro- che beaucoup de la perpendiculaire ; ils confervent la même direétion qu'a la Montagne, du Nord au Sud, à peu-près pa- rallèle à celle de la Rivière; ils varient extrêmement dans leurs couleurs, & font un compofe de différentes matières inti- mément réunies ; les uns forment un mélange de pierre à corne tirant fur le blanc & le rouge, de quartz, fpath & mica; ce dernier y eft répandu en crès-srande quantité, d’autres fonc prefque tout pur mica. A-peu-près au tiers de la hauteur de la Montagne, elle pré- fente des lits de rocher d’une nature différente de celle des précédens, mais qui ne peut étre diftinguée que par une très- grande habitude, ils font auñli très-durs & de couleur grife; ils different en ce qu'ils renferment des matières ferrugineu- fes ; plufieurs font feu avec l'acier , fans doute par l’adhérence de quelques parties de quartz, peut-être aufli de fe/d fpar, Jpatum féinullans. Mais la plupart des autres rochers, fur- tout de ceux qui compofent les filons principaux de la Mon- tagne haute & de la moyenne , n’ont pas du tout cette pro- pricte , de forte qu'on peur les envifager comme un mélange de mica, de fpath calcaire & d'une matière ferrugineufe très- divilés. On ne remarque, dans ces lits de rochers ferrugineux , au- cune épaifleur détermince , elle varie même beaucoup , elle eft dans les uns feulemenc de deux toifes, & dans d’autres de vingt toifes; c’eft-à-dire, qu'il sen trouve plufieurs fur une celle largeur, mais qui font féparés par ceux de la nature des premiers; c'eft la réunion de ces lits de rocher que l'on nomme dans le pays un Fall band, & que nous défignons par un filon principal. Ce font ces flons principaux , qui renferment les veines SUR LES MINES. 461 minérales d'argent, & ce qu'il y a de particulier, c’eft que celles- ci les coupent en angle droit ou aigu, de manière qu'elles font dans une direétion totalement oppofée , c'eft-àdire, de PER à l'Ouett. Sur une étendue d’environ 600 à 800 toifes dans plufeurs endroits de leur direction; ( car d'une Mine à l'autre, il y a quelquefois $o, 100 , 200 , & même 300 toiles d'éloigne- ment où l’on ne trouve aucun indice, ) l'on compte une infi- nité de petites veines qui les craverfenc, mais dont les unes sinclinent du côté du Nord & les autres du côté du Midi ; fouvent aufi elles font fi rapprochées que, fur une diftance de 10 à 15 toifes, onen peut compter une douzaine & plus; la proximité de ces veines, la difference dans leur inclinaifon & quelquefois auffi dans leur direction , font qu'elles fe croi- fent en longueur & fouvent en profondeur ; ce qui lesrend alors plus äbondantes au point de réunion. Ces veines, quoique ayant leur continuité , ne produifent pas toujours du métal conftamment dans le même filon, &, ce qu'il y a de plus fingulier, c'eft qu’elles n’en produifent ja- mais au-delà , quoique leur direétion coupe. également les lits des rochers de la Montagne. On nous a dir être certain de quelques-unes qui fe prolongent à une aflez longue diftance, fans produire autre chofe que du minerai de fer & fur-tout de la pierre d’aimant. Dans l’épaifleur des filons principaux , les lits de rocher ne font pas tous propres à produire des veines riches ; ce quimet dans le cas de faire des travaux fort irréguliers, & de fe trom- per dans la pourluire des galeries, particulièrement de celles que l'on nomme Traverfes, & qui fonc faites en fuivant la direétion du filon principal, pour découvrir de nouvelles vei- nes : ce n’eft qu'une longue expérience qui peut apprendre ; lorfqu'on ne part pas d'un filon déjà riche, quel eft le lit que Ton doit préférer & que l’on penfe devoir produire des mine- rais l'un plutôt que l'autre , encore fe trompe--on chaque 462 MÉMOIRE jour: cela eft de la dernière difficulté , principalement lorf qu'il s’agit de nouvelles découvertes ; car quoiqu'il foit conf- tanc que les veines ne font riches & produétives que dans les lits de rochers ferrugineux dont font compolés les flons prin- cipaux, & que l’on ne doic les chercher que fur ceux de cette efpèce, il en eft pourtant qui ne produifent aucun métal, c’eft ce qui faic que les recherches aétuelles s'appliquent touces fur les principaux filons connus, & qu'on n'en entreprend d’au- tres qu'après que la découverte en a été bien conftatée. La connoiflance des véritables eft dû fouvent au hafard , mais bien plus à lencouragementque le Roi de Danemarck donne à toute perfonne qui découvre des veines minérales; on a des exemples récens, que des Payfans & Ouvriers ont reçu une ré- compenfe depuis 30, $o, 100, jufqu'à mille rixdalers, ce qui eft proportionné à la valeur dela découverte; il y aune Ordon- nance du Roï qui porte, que la récompenfe peut s'étendre jufqu'à cette fomme, fi l'objet le mérite; c'eft le Confeil des Mines qui la fixe après une exploitation de quelques années pour mieux l’apprécier. Pour prouver ce que nous venons de dire , on voit à la fur- face de la terre des filons principaux très-diftinés par le ro- cher ferrugineux qui les compole, fur lefquels on a fait des recherches en fuivant les veines qui les traverfent ; celles-ci ont bien produit un peu d'argent mélé de fpath, & autres ma- tières femblables aux autres; mais elles n’ont pas été trouvées aflez riches pour en continuer le travail. A TOccident & plus près de la Ville de Kongsberg, ily a une autre petire Montagne ifolée, voifine de la première, {e- parée feulement par un vallon. Quoique la difpofition de fes lits de rocher foit la même , & leur direétion également du Nord au Sud, on n'y a trouvé , jufqu’à préfent , aucun filon qui fût reconnu propre à produire des veines riches, Dans la Montagne , à l'Eft de ladite Ville & expofceàlOueft, on a bien découvert & mème exploité des filons principaux, SUR LES MINES. 463 parallèles aux premiets, qui contiennent des veines riches; mais celles même qui ont été très-abondantes, n’ont eu que très- peu de fuite, Sur l'étendue de chacun des deux filons principaux de la Montagne moyenne & de la Montagne bafle ou inférieure, que nous eftimons d'environ trois lieues, on a ouvert en diffé. rens tems plufieurs Mines; lors de notre féjour à Kongsberg, on en comptoit fur Je premier dix en exploitation , & quatorze fur le fecond , indépendamment de fept à huit recherches où lon travailloit du côté du Nord, qui produifoient toutes un peu d'argent. C’eft icide cas d’obferver que ces deux filons principaux; qui font les plus anciennement connus, ont une continuité du côté du Nord d'environ une lieue au-delà des Mines , qui n’eft pas par-tout la même en épaifleur, puifque celle-ci dimi- nue infenfiblement , au point qu'ils fe réuniflentc l’un à l’autre & qu'on ne les diftingue plus : on attribue la caufe de cette interruption à un vallon profond, qui fépare cette Montagne entièrement d'une autre, où l’on croit les avoir retrouvés dans les recherches dont nous avons fait mention ci-deflus. Elles done a-peu-près fur la même direttion, le minerai & les matières qui l’'accompagnent, font de la même efpèce; l'on compte environ deux lieues de diftance de cette Montagne à lautre. Du côté du Midi , au contraire, les lits de rochers ne pa- roiflent être que de la pierre à chaux, que l'on apperçoit peu- ä-peu les recouvrir, fur-tout dans le filon de la Montagne in- férieure; on ignore s'ils ont leur fuite intérieurement , ou s'ils font entièrement coupés par cette pierre-a-chaux, l’un d'eux produit au-delà des veines d’argenc, de la pyrite martiale & auffi de la cuivreufe. Dans le filon principal de la Montagne bafle, & fur fa di- rection , l'expérience a montré & prouve tous les jours, qu'a 464 MÉMOIRE deffous du niveau du lit de la Rivière & de 8o toifes depuis la furface de la terre, les veines minérales ne produifenc plus; nousenexcepterons néanmoins la Mine dénommée A/te feegen Gortes, qui, à la profondeur de près de 300 toifes, fournit encore des minerais de toute cfpèce , mais c’eft l'unique qui foit dans ce cas ; car toutes les autres fuivent la régle ci-deflus, & l'on ne continue l'exploitation que par pure curiofité, fon produit n'étant pas à-beaucoup-près fufffant pour payer les frais immenfes qu'on eft obligé de faire pour l'extraétion des matiè- res & pour fon foutien. Il réfulte de cette dernière obfervation , que les filons prin- cipaux , fupérieurs à celui-ci , comme étant beaucoup plus élevés , donnent de grandes efpérances pour l'avenir ; leur difference de hauteur ajoutée aux 80 toiles ci-deflus, amène déjà une très-grande profondeur , & fi l’on veut y comprendre celui de la Montagne haute , il y a tout lieu de fe flatter que ces Mines feront de plus en plus des progrès ; cependant il n'en faut pas conclure que ces filons produiront toujours en approfondiflant: car on a l'exemple de plufieurs Mines où les veines fe font appauvries au point de ne plus mériter l'exploi- tation. : Nous avons dit que les veines minérales renfermées dans les filons principaux, étoient fort étroites ; il eft rare qu’elles aient au-deflus d'un pied d’epaifleur , elle n'eft très -fouvent que dun pouce & même de quelques lignes; ces veines ne produifent généralement point d'argent minéralifé , fi l'on en excepte quelques morceaux de Mines d'argent vitreufe que le hafard fait rencontrer quelquefois, encore moins de la Mine d'argent rouge, mais toujours de l'argent vierge ou natif, extrêmement varié dans fes configurations; elles font remplies de différences matières pierreufes, qui fervent comme de ma- trice à ce métal, & forment un compofé de fpath calcaire, d’un autre fufible couleur d’améchifte, d'un fpath verdâtre, & d'un autre encore d'un blanc tranfparent reflemblanc aflez à une féle- nite, SURHLESTMUNES Lx, nite, & fouvent recouvert de cuir foflile ou de Montagne ; qui tous font.unis à de l'argent vierge & en contiennent eux- mêmes; ce métal fe trouve encore dans un rocher de couleur grife, qui pourroit être regardé comme le toit & le mur def- dits filons; on le rencontre auf > Mais plus rarement, avec du mica. ñ Dans tout ce mélange, on n'apperçoit aucune partic de quartz , mais bien dans les filons principaux , où l’on trouve même de la pyrite riche en argent, dans laquelle ce métal fe manifefte quelquefois, & où l'on voit des cryftallifations de {path & de quartz; ce dernier reflemblanc à du cryftal de roche, ces filons contiennent aufli de la blende. L'atgent eft toujours mafif dans le rocher & prefque pur, c'eft-à-dire , avec peu de mélange , il s’en extrait des mor- ceaux de différentes grofleurs & poids ; plufieurs fois on en a détaché qui pefoient depuis 20 jufqu'à 80 marcs. Dans la principale Mine de Gortés Alf in der Noth ; fituée fur le filon de la Montagne moyenne, que nous avons vifité jufqu’à fa profondeur de 140 toiles , & qui eft une des plus riches de ce département, on trouva, il y a près de fept années , à 135$ toifes au-deffous de la furface de la terre, un feul morceau d’argent vierge prefque pur, qui pefoit 419 marcs ; on en fit l'eflai fur quelques échantillons, qui étoient au titre de 15 loths, 14 grains; ré loths de fin fonten Noïivèce, comme 12 deniers en France, Dans le Cabinet de curiofités naturelles de Copenhague; appartenant à Sa Majefté, on en voit une pièce d'environ quatre pieds de longueur accompagnée des différens rôchers, que l'on eftime valoir 1 5,000 liv. ne. Cependant la forme la plus commune où l'on trouve ce 7 5 e métal, eft celle d’un fil plus où moins gros, prenant toutes forces de courbes & figures , quelques-uns ont un pied &, plus Tome IX, Nan Ce, 466 MÉMOIRE de longueur; d’autres ont la finefle des cheveux feuls ou réu: nis enfemble en grande quantité, par un feul point d’où ils partent , mais ordinairement mélés à du fpath ou du ro- cher ; d'autres encore forment différentes branches de ra: mifications de diverfes grofleuts, dont la blancheur & le brillant annonce toute la pureté du métal lorfqu'il eft affiné, On en trouve aufli en feuilles ou lames ; c’eft communé- ment à travers ou entre les lits d’un rocher gris fchifteux, de manière que, dans un de ces morceaux qui pourroit avoir trois à quatre pouces d'épaiffeur, on rencontre quelquefoisune , deux & même trois couches pénétrces de cet argent, qui, quand on les fépare, préfente à chaque furface des feuilles crès-blanches & très-minces. Il eft de ces veines enfin, où l'argent eft tellement divifé dans le fpath &le rocher, quoique vierge, qu'on à bien de la peine à le reconnoître ; dans d’autres ,on ne le diftingue point du tout. Tous ces minerais, en un mot , ont entr'eux {a plus grande variété , & l’on ne finiroic point, fi on vouloit entrer dans le détail qu'une defcription exacte de chaque efpèce exigeroit ; nous croyons en avoir aflez dit pour que l’on puifle s'en for- mer une idée, nous housen tiendrons, au refte, à la diftinc- tion connue & ufirée dans ces Minés, on les divife en quatre clafles; favoir : 1.” En argent vierge féparé'du rocher, dont la teneur eft d'environ deux tiers de métal par quintal. 2." Autre efpèce mêlée avec le rocher, de 25 à 26 marcs par quintal, 3." En minerai trié, c’eft le rocher dans lequel on apper- oit de l'argent vierge, & qui tient depuis ‘1 jufqu'à 1 marc : ç RE pe, & qt P par quintal. - hier api hGares "2 RESTE SUR LES MINES. 467 4° En minerai à bocard, rocher pyriteux, dans lequel l'ar- gent ne fe manifefte d'aucune manière; pilé & lavé, il pro- duit trois efpèces de /cklicks, dont le plus riche tient un marc par quintal, le moyen cinq à fix lochs, & le plus pauvre, de- puis un jufqu’à deux loths. ÿ Après avoir parlé des deux anciens filons principaux fur lef. quelles les premières découvertes de ces Mines ont été faites, il eft à- propos de dire un mot des deux autres plus mo- dernes, que nous ayons annoncé dans le commencement de ce Mémoire. " Ce fur au mois d’Août de l'année 1764, que fe fit la dé- couverte du troifième filon principal de la Montagne haute, dans l'endroit nommé Jora Knouten. À plus d’une lieue d’éloi- gnement de la Montagne moyenne , & à fon revers expofé au Sud-Oueft, eft fitué ce filon du côté du Nord; fur la dire&ion de ce filon principal, qui paroît avoir 30 ou 40 toifés d'é- païfleur , & fur une longueur de ro0 toifes au plus. Lors de notre vifite, on y avoit déjà fait treize ouvertures ou recher- ches, dont les plus profondes n’avoient que fept roifes; élles avoient toutes produit & produifoient encore de l'argencyierge; on en remarque plufieurs dans ce nombre, qui n'ont que quelques pieds d’approfondiflement ; d’autres qui font à peine commencées , dans lefquelles nous avons vu & détaché nous-mêmes ce métal, qui fortoic du rocher fous différentes formes. . Dans chacune de ces recherches , on reconnoît une infinité de petites veines tranfverfales plus ou moins riches & de diffé. rentes épaifleurs , il en eft qui s'étendent jufqu’à 8 & ro toi- fes en longueur fur leur direétion , qui eft toujours à angle droit ou approchant à celle du filon principal ; elles confif tent également en un fpath pénétré dans fon intérieur d'argent vierge; d'autres fois c’eft le rocher même qui l'accompagne, Nana ij 468 MÉMOIRE fes lits font remplis dans leurs féparations de feuilles d'argent crès-minces , il en eft enfin de celui-ci comme des deux premiers que nous avons décrit; ce qui peut l'en faire diftinguer, ce font les caractères fuivans. 1.” Les lits, qui le compofent, font moins marqués, & le rocher eft plus entier & plus compact. 2.° À la furface de la terre le rocher eft jaune, ferrugineux, paroiffant fe déliter comme un fchifte; il a exaétement toutes les apparences extérieures de certains filons de cuivre. 3." Il contient lui-même du cuivre & de la blende en plus grande quantité que les autres filons principaux, d’où il fuit » La LA 12 qu'on pourroit le confidérer comme un filon pauvre d’une pyrite cuivreufe dans un rocher martial très-dur, craverfé par de petites veines riches en argent; cela eft d'autant plus proba- É EN TES "ei ble, qu'il eft fur la direétion d’un femblable filon exploité il y a »{ Pre RE jie y quelques années à deux ou trois lieues d’éloignement, qui a produit de l'argent vierge. 4° Dans ces recherches, on trouveune pyrite blanche arfe- nicale très-pefante , compaéte, & de la plus grande dureté, que lon foupçonne renir un peu de cobalt , puifqu’on voit des ro- chers teints des fleurs de ce minerai, La veine d'argent la plus abondante , ‘forme, à quelques pouces de la furface de la terre ; une fente remplie d’une ef pèce d’ocre jaune, dans laquelle on a trouvé des morceaux pref- que‘détachés de ce métal. Ourre les differens fpaths qui accompagnent les veines mi= nérales, on en diftingue dans ce filon un tout particulier, qui n'eft point cryftallifé, mais qui a la propriété de refflembler à une pierre favonneufe, & fur-rout à un favon blanc dans fa caf fure; il en eft d’autres très veinés en noir & blanc: cette efpèce de fpath & celui de couleur d'améchifte, de même que la pyrite UDC SUR LES MINES. . 469 cuivreufe, qui eft divifée dans le rocher, font regardés & recon- nus, par expérience, comme les meilleurs indices; de forte que l'on efpéroit.que ces recherches, qui étoient déjà très-fruc- tucufes & donnoient du bénéfice, formeroient la plus belle dé- couverte que l’on ait eu jufqu’alors dans le pays. Ce que nous venons de dire du troifième filon principal , doit être entendu pour le quatrième, celui-ci étant de la même nature & compofe des mêmes matières, De tout ce que nous avons rapporé , nous croyons devoir conclure que les Mines d'argent de Kongsberg, foit par la fin- gularité de leur efpèce, foit par la nature des.rochers , leur pofition & celle des veines minérales , foit auffi par les varié- tés qui s’y trouvent, méritent de tenir un des prèmiers rangs dans l'Hiftoire naturelle, & peuvent fervir en même-tems d'inf tcuétion fur les divers filons de métaux que la Nature préfente, & fur ceux que l’on peut découvrir. à irphanks MEMOIRE SUR LE RAFFINAGE DU CAMPHRE. Pa M VALMONT pe BOMARE*. Saws Ewrrer 1er dans les détails qui concernent la récolte du Camiphre à Bornéo ; au Japon & autres lieux des Indes Orientales , la nature de ce produit végétal & la defcription, tant de l'arbre qui le‘donne plus communément & qui eft décrit dans Kémpfer ,' que des autres arbres, plantes ou ra- cines qui fourniflent une fubftance peut-être pareille, certai- nement analogue au Camphre brut : je me borne à examiner la manière de raffiner le Camphre. Le Camphre, cette fubftance végétale, fi connue & fi uti- le, eft peu abondante à Bornéo , & il nous en vient très-peu en Europe. Celui du Japon eft très-commun, mais il eft moins eftimé au Japon même, puifque les Commerçans de certe Contrée donnent jufqu’à fix cens livres du leur pour en avoir feulement une livre de celui de Bornéo. Les Hollandois n’ap- portent chéz eux que celui du Japon ; il eft en mafles cryf tallines , grisâtres , aflez femblable à cette efpèce de fucre im- pur, qu'on appelle Caffonnade brfe ; ils ont feuls l'art de le raffiner en grand , & c’eft la ieuie Nation qui envoie le Cam- phre raffiné dans toutes les parties de l'Europe: mais on eft (*) Ce Mémoire lu par M. de Bomare, le 18 Février 1761, auroit dû être imprimé , fuivant la deftination qui en avoit été faite, dans le IV"° Volume de ce Recueil publié en 1763. Mais la Copie lue étant égarée,ila fallu s'en procurer une feconde, & l’Académie 2 cru devoir à l'Auteur de publier la caufe de ce retardement. ve ee D Gr jé ée + - MÉMOIRE SUR LE RAFFINAGE. 471! encore fort indécis fur le procédé qu'ils emploient pour par- venir à ce raffinage, Eft-ce par la fublimation 2 eft-ce par la fufion ? Pomet, dans fon Hifloire des Drogues, Tome 2, Edi- tion de 1735, pag. 17, dit: «qu'on raffine ou purifie le » Camphre brut , en le mettant dans des matras ou autres » vaifleaux fublimatoires , après l'avoir concaflé & après avoir » rempli la moitié du vaiffeau de cette poudre , l'on bouchera » légèrement le vaifleau , on le mettra enfuite fur un petit » feu ; d’abord le plus fubtil du Camphre s’elèvera & s'atta- s cheraau haut du vaifleau, & lorfque toute la fublimation en » fera faite, on le trouvera beau, blanc, tranfparent & épais, » fuivant la quantité du Camphre brut que l’on aura employé. » Après la fublimation, on trouvera au fond du vaiffleau une ® tête morte & de nulle valeur. » M. Geoffroi, dans fa Matière médicale, expofe la manière de purifier le Camphre : ce procédé, qui indique que c’eft par la fublimation , eft extrait de la Diflertation de M. Jean- Frédéric Gronovius. | Lemery, dans fon Dictionnaire des Drogues , Edition de 1759, pag. 170, dit à-peu-près la même chofe, il ajoute feu- lement (ou peut-être fon Editeur, ) qu'il femble qu’on le met en pains ronds en le faifant fondre après l'avoir fublimé. Malgré l'autorité de Pomer, confirmée en partie par Ze- mery, &c. l'opinion la plus commune & la plus reçue, cft que l'état où nous recevons le Camphre purifié, foit un effet de la feule fufñon-; & cette opinion étoïit fondée; 4:° fur ce que les. huiles efenrielles-concrètes (comme eft:le Camphre) ne peuvent fe fondre qu'à un degré de,chaleur femblable à celui de l’eau bouillante , à un degré plus fort elles fe décom- pofenc, degré qui feroit néceflaire pour opérer la fublimation du Camphre; 2.° que le Camphre, en fe refroidiffant prenoit la forme du fond intérieur du vafe où il Sétoic liquéfic; & l’on - 472 MÉMOIRE difoit e Camphre purifié a dû conferver la figure du pontrs de la bouteille. Dans l’un de mes voyages en Hollande, j'ai eu la curiofité de voir un de ces Laboratoires où l’on raffine le Camphre: je n’efpérois pas comme découvrir le fecret, s'il en eft un ; mais je voulois du moins fatisfaire ma curiofité fur le local & fur les moyens généraux qu'ôn y employoit : je parvins non fans peine à encrer dans le Laboratoire & à y refter quelques minutes. Je vis une grande pièce, garnie dans fon pourtour d'un corps de fourneaux à hauteur d’appui , où font enfoncées dans un grand nombre de caplules garnies de fable, autant de bouteilles à cul plat, fous des couvercles de fer étamés; ces différens four- neaux font échauffés par un feul foyer , qui tranfmet l’activité du feu fous chaque capfule au moyen d’un tuyau. L’aliment de ce feu eft de la courbe , & la chaleur eft graduée par des ther- momètres placés en différens endroits de l’atcelier : il n y avoit qu'un feul Ouvrier. Je lui vis retirer divers couvercles, tourner les bouteilles dans leur bain de fable & les recouvrir aufhi-tôt; je ne lui fis point de queftions, il ne m'y auroit pas répon- du: je dois dire que dans ce moment plufieurs circonftances réunies me firent foupçonner que le raffinage de Camphre fe faifoic par fublimacion : la quantité de bouteilles, la figure qu'ont les pains de Camphre , convexes d’un côté, conca- ves de l'autre, & le trou qui s'y trouve, lequel répond à l'om- bilic qu'on obferve dans les pains de fel ammoniac fublimés : tout ceci ne favorifoit pas l'idée de la fufion du Camphre, qui pourroit fe faire plus naturellement dans un feul vaiffeau plus grand, De retour à Paris, j'ai voulu m’aflurer fi mon foupçon étroit fondé, j'ai fait, à ce fujet, plufeurs expériences dont je vais rendre compte à l'Académie. s Première Expérience. Une bouteille de verre verd, melure d’une pinte de Paris, & marquée SUR LE RAFFINAGE. 473 marquée N° 1 , contenoit huit onces de Camphre brut du Japon , te! qu'il nous vient daris le commerce par la voie des Hollandois: il étoic alors neuf heures du matin ; je mis cette bouteille dans une poële de fer garnie de fable, & fur un feu de chaïbon que Jaugmencai par degrés : la bouteille étoit pleine un peu plus qu'à moitié, bouchée avec du coton. & recouverte d'une autre poële, afin d'entretenir lachaleur égale à l'inflar des couvercles de fer-blanc qué javois vu en Hol: lande dans les Laboratoires à raffinage de Camphre; à dix heures & demie, je levai mon couvercle » la partie du bouchon de coton, qui étoic dans le col de la bouteille, me patut aufli- tôt{e charger de flocons cryftallins: J'apperçus en même-tems quelques gouttes d'une matière comme hüileufe, & fixées contre les parois intérieures de la bouteille; je remis le cou- vercle, jaugmentai le feu, & la bouteille fe féla hotizonta- lement au niveau du Camphre liquéfié ; c'étoit le même nix veau du bain de fable. Craignant ou l'explofion ou'linflam- mation d'une fubftance aufli combuftible ; jé diminuai le feu & même l'éteignis; tout étant refroidi , je voulus retirer’ {a bouteille , elle fe divifa en deux à l'endroit de la félure, &, malgré tous ces accidens,, je trouvai plus des deux ciets du Camphre qui étoic fublimé , très-beau , diiphane , non en une mafle folide, mais en flocons peloronnés comme de-la neige. Cer eflai m'encouragea & ime fit elpérer de réuflir fi je réite. rois cette opération avec une boutcille de verre blanc. En voici le détail. # q Deuxiême E xpérience. 11 Uxssoureizse de verre blanc & fort épais, plus large que haute ,à col fort court; de la mefure d’une demi-bouteïlle de Paris.& marquée N° 2, contenoit quatre onces-de Camphre brut du Japon, elle étoit à moitié pleine ouenviron, & bou- chée avec du coton. Je la mis à neuf heures du matin dans le bain de fable & échauffé comme dans la précédente opéra: tion: je n’y mis point de couvercle; à.nenf heures trois quarts; le bout du bouchon de coton. étoit déja chargé de flocons Tome IX, Oovo 474 MÉMOIRE cryftallins:à dix heures, les parois intérieures de la bouteille, étoient enduites jufqu'’au col de gouttes qui paroifloient comme huileufes; quelques minutes après, la bouteille parut nébu- leufc, elle étroit intérieurement tapiflée de flocons lamel: leux & brillans; à onze heures, j'augmentai le feu , & la partie fupérieure de la bouteille parut entièrement opaque jufqu'au niveau du bain de fable; néanmoins les gouttes huileufes fu rent toujours permanentes, le bout pyramidal du bouchon de coton étroit alors tout couvert de Camphre à demi- coagulé; ainfi que les parois, intérieures du col, de la bouteille; à onzé heures & demie, la partie fublimée fembloic fe fondre : le col de Ja bouteille s'éclaircit entièrement, il n’y reftoit plusde camphre; ar r heurestrois quarts, lesgoutteshuileufesparoifloient encore: le peu de vapeur fubtile , qui s'échappoit à travers le bouchon, de coton , étoit d’une odeur acide & légèrement empyreuma: gique. Tandis que j'obférvois les progrès de l'opération , j'ap- perçus une grande partie du peu de Camphre fublime fe fon+ dre de nouveau & en trois minutes de rems le cotal fe fondie entièrement &, parut bouillir; ce fut alors que toute la voûte de la bouteille jufqu’au niveau du bain de fable ( excepté le tiers de la circonférence , la partié qui n’étoit pas expolée au courant de l'air ,) fe trouva aufli-tôt recouverte de Camphre fublimé, & folide:les gouttes ou bulles comme huileufes avoient enfin difparu, & je foupçonne qu'elles fe raréfièrenc & pafsè: rent, à, travers le.bouchon de coton, fous la forme. de- vapeurs dont j'ai parlé ci-deflus; à midi & demi, je ne pus diftinguet l'effec des lames de Camphre qui fe fublimoient , parce que toute la partie de la bouteille au-deflus du bain de fable en étoie toute: tapiflée intériéurement & d’un'blanc opaque ; à midi trois quarts, je pus obferver que le Camphre brut ne fe fublimoit pas-fenfillement en flocons comme le Camphre purifié, nicomme celui qui eft à demi-raffiné : je remarquai encore; qu'à mefure qu'il écoit fublimé il fe fondoit aufli-tôt ; ce: qui n'arrivoit pas aux autres efpèces de Camphre qui fe coa- pe: danse même inftant & fans fe liquéfier de nouveau, couyris, pendant un moment, la bouteille avec un enton- SUR LE RAFFINAGE. 475 noir de fer-blanc dont j'avois bouché le tuyau , à deflein de reconnoître fi la fublimation & la liquéfaétion qui s’étoient faites alternativement, dépendoient ou des hétérogénités qui montoient avec le Camphre & Fempêchoient de fe fixer, ou du degré de chaleur qu'il falloit produire & entretenir pout permettre au Camphre fublimé de fe fixer d’une manière in- time contre les parois de la bouteille ;à une héure, je levai le couvercle , il ny avoir encore aucun changement ; à une heure & demie, je le levai pour la dernière fois, je n'appercevois encore aucun progrès dans l'opération ; mais, à l'inftant, je reconnus que le contat de fair extérieur fit auffi-tôt fixer les vapeurs intérieures contre les parois & feulement jufqu’au ni- veau dufable; la matière parut en forme de cire fort molle, ou d'huile congelée; les vapeurs fe coagulèrent peu-à-peu pen- dant une demi-heure, puis elles fe liquéfièrent par intervalles &:en partie; dans ce qui reftoit de fublimé ; ÿy diftinguai des vides qui fe remplirent :à moitié fur les deux heures & de- mie, nulautre progrès jufqu’à trois heures; mais bientôt job- {rvai la cryftallifation ‘du Camphre qui fe fublimoïir & fe #xoit; c’éroient autant de lames luifantes prefque tranfparen- tes qui s'entrelaçoient , réfléchifloient & réfraëtoient la lu- mière comme des particules de glace ; le fommet de 1à bou- teille étoit feulement tapifle d’une matière farineufe & opa- que ; fur les quatre heures; je diminuaï peu-à-péu l’aétivité du feu , parce que plus des deux tiers du Camphre éroïent fubli- més. Japprochai une bougie allumée céntte les parois exré- rieures de la bouteille ; à l'endroit le plus tranfparent; je me plaçai de l’autre côté; & je diftinguai très-bien le Camphre du fond en ébullition ; lançant ou formant des goutreleties en manière de-jets , femblables à ceux qué lon produit & que lon obferve quand on verfe du fuc de citron dans de l'eau; à fepcheures, je retirai la bouteille du bain de fable , elle étoit à demi-froide , & j'eus la fatisfaétion de voir une belle fubli- mation bien cryftallifée & plus tranfpatente que celle du Cam- phre raffiné en Hollande. Le fond de la bouteille éroit ta- piflé d’un: peu de terre brune ; noïrâtre : je pefai la bouteille, Ooo ij 476 MÉMOIRE pou reconnoître combien il sétoit diffipé de Camphre à travers le bouchon de coton, & je n’y trouvai pas de dimi- nution. Troifième Expérience, Uxe BouTeILL1E femblable à celle de l'Expérience précé- dente ; marquée N° 3, contenoït une once fix.gros de Cam- phre brut & autant de Camphre raffiné, l'un & l’autre du Japon. La bouteille étoit à moitié pleine & bouchée avec du coton; à neuf heures du matin, je la mis dans le bain de fable, fans la couvrir : je graduai le few; à dix heures, même phé- nomène que dans l’Expérience du N°2, excepté les bulles comme huileufes qui paroifloient en moindre quantité. La bouteille étoit alors un peu terne ou nébuleufe: à onze heu- res, elle étroit entièrement opaque; le bouchon de coton com- mençoit déja à être fixé par :le‘nombre de lames de Cam- phre, congelées, &c. qui.obftruoient l'orifice ou le col de la bouteille ; les bulles comme huileufés ne cefloient de: paroî: tre, mais toujours en moindre quantité que dns l'Expérien- ce du N° 2 ; à onze heures & demie, l'orifice de la bouteilie évoit encore obftrué d’un Camphte opaque; à midi, les bulles huileufes difparurent, & coute la capacité de la bouteille juf: qu'au niveau du bain de fable, fe trouva tapifée de Camphre; la couche ; qui touchoit immédiatement aux parois intérieures de la bouteille , écoit d’un gris fale. & confervai cette nuance juiqu'à la fin de l'opération; à midi & demi, le Camphre;; qui étoit au fond de la bouteille; fe liquéfia & fe mit en ébulli- tion : ce fut:alors que les degrés de la fublimation furent très- fenfibles & en même-tems très curieux ; qu'on fe figure un nombre de gouttes partir de la liqueut où Camphre enfufon ; paroïtre fous la forme de lames perlées & lucides au milieu de la bouteille, y voltigeant , comme la néige dans l'athmof: phère à l'inftant d'un yentimpétueux, & s'acerocher lesunesaux autres par différentes faces , monter, defcendre, puis fe fubli- mer de nouveau, &:fe fixer. peu-à-peu au dôme de la bou- taille, & ainfi de fuite jufqu'à la fin de l'opération ; alors on SUR JE PR'ALFGF EN AG'E. 477 ‘aura une pleine idée de cette fublimation ; à une heure, la fu- blimation fe faifoit par progrès très-fenfibles : mais elle pro- duifit encore les mêmes phénomènes que dans l’Expérience du N° 2; elle refta en cer état jufqu’à quatre heures , à cette différence , que la coagulation fe faifoit peu-à-peu plus fenfi- blement; l'opération fut achevée à fepc heures du foir, & à neuf heures je retirai la bouteille, je la pefai en cet état, elle avoit perdu trois gros de fon poids: le réfidu étoit une terre tenace d'un brun rougeâtre & foncé; la partie fublimée ne m'en parut pas fi belle que celle que j'avois obtenue avec du .Camphre tout brut & en couvrant la bouteille ; elle n'avdit pas même la tranfparence de celle que j'avois obtenue. du €amphre brut, & dont la bouteille sétoit caflée à moitié de l'opération , äinfi qu'il eft dic dans la première de ces Ex- Aix périences. Quatrième & ‘cinquième Expériences. Deux BouTEILLES femblables en tout aux précédentes. N.° 2 & N° 3, contenoient, l'une N.° 4, quatre onces de Camphre du Japon & raffiné, l’autre marquée N° $ , cinq on- ces de Camphre brut de Bornéo : ayant bouché légèremenc ces deux bouteilles avec du ceton, je les plaçai dans un même bain. de fable , il écoit alors neuf heures du matin; je pofai un couvercle fur celle qui renfermoit le Camphre de Bornéo; je pouffai le feu par degrés, d'abord aflez vifs ; à neuf heures & demie , l'extrémité pyramidale du bouchon de coton de la bouteille, V.° 4 , étoit déjà enduite de perits flocons de Cam- phre; à dix heures: & demie, les parois intérieures de la bou- teille fe trouvèrent, tapiflées de petites lames de Camphre à demi-concrètes & clair-femées ; à onze heures, la bouteille s'en trouva totalement enduite ; je n’obfervai, fur les paroïs , aucu- nes bulles comme huileufes, il y en avoit feulement à la bafe dé lotifice du col , lefquelles, enssy coagulant fous une cou- leur rouge, y rendirent le coton abfolument fxé; la partie de la boutalle-hots. du fable, avoit toujours une-force.de cranfpae | 478 MÉMOIRE rence, & le Camphre ne fe liquéfioit pas encore dans le fond de la bouteille ; à onze heures & demie, la bouteille parut en- uièrement opaque ; à midi, je levai le couvercle de deflüs la boutcille du N° $ , je diftinguai bien les mêmes phénomènes ( per defcenfum ) que j'avois obfervés dans la deuxième Expé- rience; mais les deux bouteilles N° 4 & N.° 5, placées dans le même bain , offtirent, dans la fuite de l'opération , les mé- mes progrés & la même alternative que dans le V.° 3; à midi & demi, chaque efpèce de Camphre étoic fondu & en ébulli- tion. Un Thermomètre de M. de Réaumur, un autre de Fa- fenheic étoient tous les deux plongés dans le même bain de fable , comme dans les trois précédentes opérations, & tou- jours fixés au degré de l’eau bouillante ou à-peu-près; à une heure, une partie du camphre fublimé parut fe liquéfier de nouveau & fe précipiter aufh-tôt ; dans le même inftant , il fe fit une nouvelle fublimation qui augmenta de denfité & en volume jufqu’à deux heures : la fuite de la fublimation fut fort lente , ce ne fut que fur les quatre heures & demie qu’en per- çant, au moyen d'une grofle & longue aiguille, le bouchon de cocon & la matière fublimée, j'apperçus très fenfiblement le fond des deux bouteilles , il y avoit encore quelques portions de Camphre fondu; alors je foufflai fur les parois extérieures des bouteilles : je crus qu’elles fe félerent à l’'inftant, en faifant une efpèce de cliquetis , que je reconnus enfuite être uniquement l'effet de la coagulation & de l’arrangement des parties du Camphre; coagulation accélérée par le froid d’un air faétice & extérieur : en effet, les deux bouteilles n'en furent point endommagées : je diminuai, par degrés , l'activité du feu , le refte du Camphre acheva de fe fublimer & de fe con- denfer fur les fix heures du foir, alors je laïflai les vaifleaux fe refroidir. A neuf heures, je retirai du fable les bouteilles, je pefai celle du N° 4, elle n’avoit aucunement perdu de fon poids: celle dy N° 5 en avoit perdu deux gros, La fublimation du Camphre, N° 4, quoique belle , me » ; SUR LE RAFFBNAGE. 479 parut inférieure à celle du M.° 3, qui étoit le produit d'un mélange & à parties égales de Camphres du Japon , l'un btut & l’autre raffiné; elle étoit encore moins tranfparente que celle du N.° 2, qui eft la plus diaphane, & qui éroit le pro- duit d’un Camphre brut du Japon. La bouteille du N° $ , qui contenoit du Camphre brut de Bornéo & qui avoit été couverte pendant la fublimation, a offert un Camphre qui, après celui du W.° 2, eft le plus beau. Il réfulte, detoutes ces Expériences que je foumets aux yeux de l’Académie ,, 1.9 Que laxiome adopté le plus généralement, qué le Cam- phre chauffé au degré de l’eau bouillante & même au-deflus, ne peut fe fublimer fans fe décompofer, doit fouffrir quélque exception. Le Camphre eft une fubftance toute particulière, qui à des caractères qui la diftinguent de tous les autres corps, ( foit huiles, foit rélines } du régne végétal. 2.9 Que {e raffinage du Camphre fe fait par fublimation , & que, pour parvenir à la fublimation de cette fubftance, le feu doit être gradué & aflez violent. ..3-° Que l'ufage d’un vafe de verre verd convient moins, pour cette opération , que le verre blanc, ou au moins blanchâtre ; & que ces vafes ou bouteilles de verre n’ont point leur fond intérieur convexe , ainfi qu'on le difoit; ileeft , au contraire, très-plat. | 4% Que l'ufage des couvercless, eft une manière de rever: bere qui, confervant & réfléchiffant la chaleur , accélère la liqué: fation (ceft-à-dire la fufion) du Camphre, état néceflaire à fa purification & à f4‘{ublimation. : 5” Que le contä& de l'äir ‘extérieur bien ménagé, contri- bue à faciliter l'opérarion. Letrtité où lé trezalé qu'on obferve fur les parties extérieures des. ins de Camphre, ne pro- vient que d’un refroidiflement fubit ou très-prompt à l'inftant où l’on retire les bouteilles du bain de fable, & qu'on les 7 (ar #39 MÉMOIRE SUR LE RAFFINAGE. LE CO Q . . . “ expofe à l'air libre; alors on entendun cliquetis qui produitdes lignes ou des raïes en tout fens, comme le feroit un coup de marteau fur un morceau de cryftal, ou d’eau convertie en glace. 6.° Que le Camphre brut du Japon, mis feul fur le feu, dans un yafe fublimatoire, ne perd point ou très-peu de fon poids , tandis qu'étanc mêlé avec le même qui eft purifié A il déchet d'un feprième. Le Camphre purifie, au contraire, étanc mis feul dans un vale fublimatoire, n'y diminue point , tandis que le Camphre brut de Bornéo y perd un vingtième de fon poids. 7° Que la partie du pain de Camphrg, qui touche immé- diarement à la pointe du bouchon (lequel eft fait de coton ,) & même lincrufte , eft communément poreufe , fans confif- tance & d'un gris roufsàtre. Pour obtenir ces pains , on cafle les bouteilles à l'aide d'un petit marteau : enfuite on prend un inftrument de fer dont la partie tranchante eft cambrée , on pare les fuperficies de chaque pain, notamment celles du côté du verre ; &, pour parvenir à retirer cout le coton, on en ar- rache une partie au moyen des doigts; pour en avoir le refte, l'on taille & perce la mafle de part en partavec le même inftru- ment de fer, de maniere à fure:un crou qui y refte & qu'on ob- ferve au centre des pains de Camphre. 8.” Enfin que la manière de raffiner lé Camphre telle que je l'ai décrite & exécurce , n'eft pas aufli compliquée que celle qu'on lit dans les Auteurs, & notamment dans la Difler- tation de M. Gronovius, & qu'il feroit peut-être difficile de répéter. MÉMOIRE 48r MEMOIRE SUR LA NATURE ET LA CAUSE DES DIFFÉRENTES GRAISSES DU VERRE; Par M. DANTICK. Dans mox Mémoire fur la caufe des bulles, qui fe trou- préfme vent dans le Verre , je me fuis engagé à traiter des autres effers le 7 Décembre du fel de Verre. Le defir de porter mes recherches à un plus » JA » . : A Voy. pag. haut degré d’évidence , ne m'a pas permis de remplir plutôt {77% 553 cet engagement. lume des f ; ù Mémoires pré- Il ne me fut pas poffible de développer, dans mon Mémoire ue pe fur la perfection de la Verrerie, les effets du fiel de Verre. Je 4 Sciences. me contentai de les indiquer. Voyez pag. 41 d à è K . de mon Mém. Ce qui me refte à faire , eft d'une trop grande érendue , fur la perfec- & à s) : ï d Ver: pour être traité convenablement dans un Mémoire. Je me POr- ie. ME nerai aujourd'hui aux graifles que le fuir produit dans le Verre. ” Mon travail ne fera pas chargé de citations. Je ne connois point d’Auteur, qui ait parlé de ce qui en fait le fujer. Mérz Poe dit, à la vérité, que le fel alkali, (le fiel de Verre, qu'il re- de fon Ant de gardoit comme un alkali fuperfu ) rend le cryftal obfcur & né- se buleux; mais cette idée eft fi peu développée, qu’elle ne paroït çoife, ér4.° pas mériter beaucoup d'attention. Les graiffes du Verre ne font guères connues que dans les Tome IX. P pp 482 MÉMOIRE Verreries où l’on travaille en cryftal ou en Verre-blanc. Il y a plufieurs raifons pour lefquelles on les remarque très - rare- ment dans les Verreries en commun; 1.° parce que celles-ci n’emploient jamais le fel alkali fixe pur ; 2.° qu’elles font en- trer, dans leur compofition, une bien moins grande quantité de fel alkali fixe, & conféquemment de fel de Verre, que les Verreries en fin; 3.° parce que la partie terreufe-calcaire de la foude ou des cendres ordinaires , donnant une grande flui- dité au Verre, favorife l’évaporation du fel de Verre; 4.° en- fin, parce que le principe colorant , les phlogiftiques, dont les cendres du ka/i & des autres végétaux font abondamment charges, volatilife , pendant la fufon, le fel de Verre. Des Verreries en fin, celles qui travaillent en affortiment;, font les plus expofées à voir leur Verre gras. Le bas prix que la concurrence a produit dans cette branche de Verrerie, les force à étre plus économes de fel alkali fixe, que les Verreries en glaces, en verres plats, façon de Bohème, &c. Dans un inf tant, nous aurons occafion de rendre ceci plus clair. Quelquefois, au moment qu'il faudroit travailler le Verre, on le trouve hors d'état d'être mis en pièces marchandes. Il eft demirtranfparent, de couleur de lait & peu folide ; au pre- mier coup-d'œil, on le prendroit pour de la porcelaine, ou pour du Verre de craie : c’eft le premier degré de graifle & le plus funefte. Cette efpèce de graifle , comme les autres, a, pour ainfi dire, des nuances ; la couleur de lair eft plus ou moins belle, tire plus ou moins fur le verd ou fur le bleu. On éprouve quelque chofe de très-approchant dans les Verreries communes, fur-tout dans les Verreries à bouteilles : leur verre devient plus où moins couleur de lait, foit dans le creufet, foit en chauffant la pièce. Il eft, je penfe, peu de perfonnes qui n'aient obfervé des boutcilles infectées de ce défaut, qui ont des parties ou des raies blanchâtres ou bleuâtres. En ter- mes de l'art , ce défaut sappelle chapeau. Quelque reflem- blance qu'il ait avec la grarfje , que nous venons de décrire, il SUR LES GRAISSES DU VERRE. 483 ne faut pas les confondre; ils ont des caufes très- différentes. Le Verre à bouteille ne devient chapeau , que parce qu'une cer- taine quantité de terre calcaire n’a pu être vitrifice. D'autres fois, au commencement ou pendant le travail, on voit, dans toute la fubftance du Verre refroidi, un nuage blan- châtre & une infinité de très - petits points blancs; ce Verre eft d’un blanc fade, peu brillant, moins tranfparent , que le beau Verre ne l’eft ordinairement , & plus caflant à la cuiflon & dans le magafin : c’eft le fecond degré de graifle. Il eft des verres à boire , & d’autres pièces , qui paroif- fent mal rincés ; on croit y remarquer l'empreinte de doigts gras , ou un nuage très-léger d'une couleur différente de celle du verre: fouvent les domeftiques font la viétime de l'impéri- tie ou de la négligence du Fabricateur. C’eft le croifième de- gré de graifle. Lorfqu’on examine de près les glaces foufflées, & dont le verre a été fait avec la foude , on y remarque comme une fumce plus ou moins étendue , un nuage violet ou tirant fur le violet: ce défaut n’occupe pas toute l'étendue de la glace ; mais une partie ou plufieurs féparément. C’eft le quatrième de- gré de graifle. | J'ai vu plus d’une fois des glaces foufflées , qui paroifloient parfemées, dans toute leur fubftance , d’une infinité de très- petits nœuds , & qui, quelques bien polies qu'elles fuflent , avoient toujours un air raboteux. C’eft notre cinquième & der- nier degré de graifle. C'eft improprement qu’on appelle ces défauts-là , graiffe : on leur a donné cette dénomination, parce quele Verre qui en eft infecté , pénétré par l'humidité , a réellement quelque chofe d'onétueux au toucher. Le Verre gras eft plus caflant , comme nous l'avons déjà fait obferver ; mais il eft aufli d'autant plus fufceptible d'humidité, Pppij 484 MÉMOIRE & il prend d'autant plus difficilement la couleur rouge de la manganèfe , qu'il eft plus gras. Ces deux derniers phénomè- nes auroient dû me conduire naturellement à la caufe de la graifle. Il eft certain que le fel de Verre defleché dans le creu- fet, & très-divifé dans le Verre, emporte avec lui, dans fon évaporation , le principe colorant de la manganèle , & attire l'humidité de l'air , apres le refroidiflement du Verre. Les rou- tes les plus fimples font rarement les premières qu’on fuit. Celle que je pris, loin de me faire atteindre le but que je me propolois , men éloigna. Je queftionnai les Direéteurs, les Maîtres Fondeurs & les principaux Ouvriers de diffcrentes Verreries : prefque tous s’accordèrent à attribuer le 1°, le 2." & le $."° degré de graifle , au froid qu'avoit fouffert le Verre dans le creufer, c’eft-à-dire, à une diminution de chaleur, & le 3.vc & 4€ degré, à la fumée du bois, qui, par l'imprudence du cfèur, faififloit la pièce , au moment qu'on la chauffoit à l'ouvreau. Ileft certain que, dansles Verreries en aflortiment , toutes les fois que le sfeur néglige fon fourneau , le Verre devient plus ou moins gras. Lorfqu'on met du Verre chaud fur du bois, la fumée fair unc tache au verre, qu'on ne peut détruire. Ces deux faits, quelques concluans qu'ils paruflent aux perionnes que j'avois confultées, laiffèrent des doutes dans mon efprir. J'avois vu du Verre, qui, à un feu très- foible, n’étoit point devenu gras. À un égal degré de chaleur, le verre gras m'avoit paru conftammenc plus pâteux, plus dur dans le creufet, que le verre qui nétoit point gras. Depuis long-tems je favois que le verre étoit d'autant plus difpofc à la graïfle, qu'on avoit moins fait entrer de fel alkali fixe dans fa compofition, & que ce fel avoit été mieux purifie du principe colorant. La tache que la fumée du bois avoit faite fur le verre , ne me parut pas de la même couleur, que la graifle du 3.v° & 4.° degré. On peut enlever certe tache, en ufant une crès-petite épaifleur du verre, SUR LES GRAISSES-DU VERRE. 485 au-lieu que la graifle du 3."° & 4.”° degré occupe toute l'épaif- feur du verre: d’ailleurs la graifle du 4.° degré n’affeéte qu'une ou plufeurs parties de la glace; fi elle éroit le produit de la fumée, elle en affeéteroit toute l'étendue. L'état d'incerticude fur un phénomène que javois fouvent occafion d’obferver, étoit pour moi trop défagréable, pour ne pas mettre en ufage tout ce qui me paroifloit propre à m'en tirer, J'envifageai donc la chofe fous un nouveau point-de-vue : mais, avant de rendre compte de mes expériences , & de donner la démonf- tration de la chofe que je cherchois, il eft néceffaire de remar- quer que la proportion de fel alkali fixe , qui entre dans la compolition du Verre-blanc, doit être relative au degré de chaleur du fourneau. Pour rendre ce principe plus fenfible , fuppofons que les fourneaux de Verrerie , donnent plulieurs degrés déterminés de chaleur ; s'il faut cinq degrés de chaleur pour mettre en fufon, & affiner convenablement une com- pofition de deux parties de fel alkali fixe , & de trois parties de fable ; avec la même compofition, on aura le 2.m° degré de graifle , fi le fourneau ne donne que quatre degrés de chaleur , & le premier degré de graifle, s'il ne donne que trois degrés de chaleur ; sil n’en donne que deux, la matière : n'entrera pas en fufion, &c. Si l'on fait la compofition d'une partie de fel alkali fixe fur deux parties de fable, à cinq degrés de chaleur , on aurale deuxième degré de graifle ; à quatre, le premier degré , & à trois, on n’obtiendra point de fufon.On fenc que la quantité de l’alkali fixe de la compofition , varie, à raïfon du plus ou moins de fel de verre dont il eft chargé. Une des grandes difficultés dans les Arts, c'eft d’avoir pref- prefque coujours à combiner un grand nombre de circonf- tances. L'examen que je fis du Verre , lorfqu'il commence à fe mettre en fufñon, fut pour moi le premier trait de lumière fur la caufe de la graifle. Dans cet état, le verre eft peu tranfpa- rant, plus ou moins laiteux,très-caffant, très-fufcepuible d'hu- midité, il ne prend point la couleur de la manganèle, il 486 MÉMOIRE eft gras. Si la chaleur eft fufffante, fi la compoñtion à été faire dans des proportions convenables , & fi le fel alkali fixe qu'on a employc , n’eft pas trop chargé de fiel de verre, la graifle difparoït par degrés. # Que perd le Verre dans fa cuite ou dans fon affinage? une infinité d'expériences nous afurent, que le Verre ne perd que le principe colorant & le fel de verre. Je ne pouvois donc attribuer la graïffe du Verre, pris au commencement de la fonte , qu'à l'une de ces deux caufes ou aux deux enfemble. Dans la vue de déterminer la vraie, je fis mêler de la pouf- fière de charbon de bois , du principe colorant au verre. Loin que cette matière inflammable augmentât la graifle , elle la diflipa. Quelque naturel qu'il me parüt de conclure , que le fiel de verre étoit la caufe que je cherchois; je voulus m'en aflurer par une nouvelle Expérience, je fis méler au verre du fürn wès-blanc : la graifle reparut , & je ne pus même la difiper, qu'au moyen des matières chargées de beaucoup de phlosiftique. Quoiqu'il ne me reftät aucun doute fur la caufe de la graifle, je crus devoir faire de nouvelles recherches pour porter ma découverte à un plus haut degré d’évidence ; le Verre gras, examiné à la loupe , eft pariemé d’une infinité de points blancs parfaitement femblables au fiel du Verre; vu de même à la loupe, Je fis éteindre dans l’eau du verre très-gras : cette eau éva- porce, j'eus pour réfidu du fel de verre; le verre étant remis en fufon , fut de beaucoup moins gras. Lorfqu'on dégraifle le Verre par la pouflière de charbon; ou par quelque autre moyen violent , 1l s'élève une vapeur blanchâtre & crès-abondante. Si l'on condenfe cette vapeur, on ne trouve autre chofe que du fiel de verre; fi lon mêle du /äin à du verre dégraiflé par le phlogiftique, il redevient ras. Je fis mêler à du verre très-gras du fel alkali fixe, puri- fic autant qu'il foic poñlible, la graifle difparut : j'eus beau mé- ‘ pe SUR LES GRAISSES DU VERRE. 487 ler du fan à ce verre dégraiflé ; la graifle ne reparut que pour très-peu de tems. Ce phénomène donne la raifon pour laquelle les Verreries en glace, &c. font moins expofées à voir leur verre gras, que les Verreries en aflortiment. Cette addition du fel alkali fixe, rend le verre moïns pâteux, &, par-là, facilite la diflipation du fel de verre en vapeur. Les Expériences dont nous venons de rendre compte , dé- montrent, je penfe, bien évidemment que le fiel de verre eft la caufe matérielle du 1. du 2."° & du 3." degré de graifie; mais prouvent-elles avec la même évidence qu'il eft la caufe du 4.me & du $."° degré? je conviens que non; & J'avoue que ces deux derniers degrés de graifle ont long-tems tenu mon efprit à la torture. Pourquoi le troifième degré eft-il particulier aux glaces foufflées , dont le verre a été fait avec de la foude ? Comment le fel de verre peut-il produire ces nœuds, qui caratérifent le 5.“ degré de graifle? Quelques difficiles que ces queftionsme paruflent, je ne négligeai rien de ce qui pouvoit me mettre en état de les réfoudre. Pour rendre plus fenfible ce que nous avons à dire fur le 4. & $."e degré de graifle, nous les envifa- gerons féparément. Si l'on examine à la loupe les parties de la glace affectées de la graifle du quatrième degré, on s'aflurera que le nuage eft un tiflu de très-petits points blancs , femblables au fel de verre; la couleur bleuâtre du verrede la glace & la couleur rouge de la manganèfe, donnent vraifemblablement à ce nuage un air violet. J'ai obfervé aflez conftamment que les parties de la glace affectées de la graifle, étoient plus fufceptibles d'humidité, & conféquemment plus fujets à fe rowiller, à fe plomber, &à avoir même des yeux de perdrix dans les magafins, que les autres. Nous avons vu plus haut qu'un des caraétères de la graille, c'écoic de rendre le verre plus fufceptible d'humidité, 3 488 MÉMOIRE Jamais je n'ai pu remarquer cette efpèce de graifle dans un verre fait avec la meilleure foude d’Alicante , dans des proportions convenables , & à un feu violent & long-tems continué. On fair, & j'en ai fouvent fait l'expérience, que la foude de Carthagène eft chargée de moitié plus de fiel de verre, que celle d'Alicante + aufli produit-elle affez ordinairement le 47° degré de graifle. Toutes ces obfervations paroiffent prouver affez clairement que le fel de verre n’eft pas moins la caufe du quatrième de- gré de graifle, que des trois premiers; mais elles ne nous ap- prennent pas pourquoi cette efpèce de graïfle eft particulière aux glaces foufflées , & qu’elle n’affecte qu’une ou plufieurs par- ties de leur étendue. Cette fingularité a été pour moi un objet de nouvelles recherches. On recuit les glaces foufflées de deux façons : dans des /frz- ques & dans des carquaifes : les ftriques font des fourneaux très-longs , & dont la voûte du côté oppofé à celui où lon chauffe , eft de beaucoup plus élevée. On étend les glaces dans le bout où la voûte eft furbaiflée, enfuite l’on conduit la glace développée fur l’âtre du fourneau , jufqu’à l'extrémité oppo- fée, où l’on la met de champ, & on Ja foutient dans cette fituation avec des barres de fer, qui traverfent hotizontalement le fourneau à différentes hauteurs : on juge que, pour mettre ces glaces de champ, il faut qu’elles foienc refroidies au point de ne pas plier. Les carquaifes font des fourneaux de 2$ à 30 pieds de lon- gueur, & de 8 à Lo pieds de largeur. On chauffe cette efpèce de fourneau par les deux bouts : il y a un fourneau particulier our érendre les glaces , duquel on les porte fur une grande pelle de fer , dans les carquaifes, où elles font placées à plat à côté l’une de l’autre. Avant de mettre des glaces dans les car- quaifes , il eft néceflaire de leschauffer jufqu'à ramollir le verre, & on continue SUR LES GRAISSES DU VERRE. 489 & on continue à les chauffer pendant douze heures; qu'on y place fucceflivement des glaces. On fentira, dans un inftant, la néceflité-de cette digreflion. Quelques foins que je me fois donnés ; je n’ai jamais pu dé-" couvrir aucun veftige de graifle du 4."° degré dans les glaces re- cuites dans les /riques : toutés celles que j'en trouvois infectées, avoient été recuices dans les carquaifes. Le fel de verre de la foude , c’eft-à-dire , le fel admirable de Glauber, & le fel marin, eft plus votatil que le fel de verre de la porafle, le tartre vitriolé : ce fel reçoit un nouveau de- gré de volatilité par le phlogiftique que lui fournit abondam- ment la partie terreufe calcaire de la foude. Il fufñir que le verre foit chaud à brûler le bois , pour que ce fel de verre s’é- vapore plus où moins, Nous pouvons envifager le fel de verre réduit en vapeur , comme un fluide, qui s'échappe par où il trouve le moins de réfiftance : or il eft certain que la partie la plus épaïfle de la glace conferve plus long-tems fa chaleur, que la partie plus mince, & que cette chaleur a plus d’inten- fité au milieu , qu'à la futface de cette partie plus épaifle. La vapeur du fel de verre doit donc y affluer de toutes les par- tics plus minces de la glace & y être condenfée, lorfqu'on ceffe le feu , ou par le refroidifflemenr, En effet, j'ai roujours obfervé que la graifle ne fe trouvoit que dans les parties les plus épaifles de la glace. . Quoique cette explication quadre affez bien avec les prin- cipes , elle ne me paroifloit qu'une conjecture. Je me hâtai de l'étayer dé l'expérience : je mélai une petite quantité de Juin à un refte de verte ; qui avoit été certainement dépouillé de tout principe de graiffe. Le plus mauvais Ouvrier fut choifi pour en faire deux glaces; il les fit comme je l’avois defiré & prévu d'une épaifleur très - inégale; elles furent recuites dans une Carquaife. Les parties les plus épaifles de ces deux glaces furent affcétées de graiffe. Tome IX. Qqq 490 L MÉMOIRE Le cinquième degré de graifle ne nous arrétera pas fi long- tems : on ne l'apperçoir Haine que vers la fin des mues, c'eft-à-dire, après qu'on a travaillé fur un creufet cinq ou fix heures de Nr alors le Verre eft trop bas dans le creu- fec , & la chaleur du fotreart trop foible pour que le /xin, qui monte continuellement à la furface du Verre , puifle fe difiper entièrement. Il fe forme donc au-deflus du Verre une légère couche de fel de Verre; l’ouvrier plonge fa grofle canne à trois ou quatre pouces date le Verre, il la tourne plufieurs fois {ur elle-même pour y attacher le Verre; à quelques mi- nutes d'intervalle, il fait trois fois cette opération pour cuerllir le Verre qui lui eft néceflaire. Quiconque concevra bien cette manœuvre, fentira comment le fel de Verre peut faire paroï- tre fa glace parfemée de petits nœuds: ces nœuds ne font que de très-petites parties de graifle, & , à la loupe, on voit diftinc- tement le {el de Verre qui les forme: Je m'en aflurai d’une ma- nière encore plus décifive.. Après avoir laiflé tomber Le feu du fourneau, je jettai fur du Verre, qui n’avoit aucune apparence de graïfle, du /zix en petire quantité, La graïfle du 5." degré fuc très-fenfible dans la glace que j'en avois faic faire. Nos recherches ne feroient propres, tout au plus, qu'à fatisfaire la curiofité, fi elles s'étoient bornées à la détonveite de la caufe de‘la graife. Nous n’en faifons cas , que parce qu'elles nous ont fait connoître des moyensaufli fimples qu'eff- caces, pour prévenir un des plus g grands ennemis qu'ait à EAP ter le Maître de Verrerie. Dans les Verreries, fans avoir aucune idée de la caufe du mal, on y avoit trouvé des remèdes : chacune a le fien dont elle a le plus grand fecrec. Parmi-ces remèdes ; le plus grand nombre font de palliatifs, & les autres des fpécifiques: JR un coup-d'œil rapide fur les uns & fur les autres. Lorfque les Maires, Fondeurs s'apperçoivent que leur Verre eft gras, ou qu'il tend à la graifle; les uns ÿ mélent à plulieurs reprifes de «4 SUR LES GRAISSES DU VERRE. 491 la manganèfe en poudre ou en pierre, de l'arfenic , de la pouf- fière de charbon , des écorces d'arbre , fur-tout de tremble, de faule, de bouleau , &c. les autres remuent fortement leur Verre avec un bâton de fept à huit pouces de circonférence de bois verd de tremble, de tilleul, de frène, de coudries , de faule, &c. Ces moyens ne détruifent qu'imparfaitement la graifle ; elle reparoit en partie peu de tems après l'opération ou pendant le travail , & il eft très-rare que le Verre ne conferve pas quel- que chofe de louche. La raïfon de l'infufifance de ces moyens eft fenfible ; avec quelque foin qu'on lesapplique, ils n’agiflent jamais également fur toutes les parties du verre contenu dans un creulfet : d’ailleurs ils ont trois inconvéniens qui devroienr les faire profcrire ; 1.° ils prennent un tems précieux ; 2.° ils fonc perdre beaucoup de Verre, parce qu'ils le bourfouent au point de lui faire pafler les bords du creufet ; 3.° il réfulte conf- tamment de cette agication violente qu'ils caufent dans le Verre, qu'il s'affine mal, qu'il refte infecté de bulles, & qu'il prend imparfaitement la couleur de la manganèfe. Il y a un petit nombre de Verreries, qui emploient des moyens bien plus efficaces, & qui peuvent même être regardés comme des fpécifiques ; les unes, au-lieu de potafle blanche, ne font entrer dans la compofition de leur Verre, que de la porafle rouge : le phlogiftique dont cette dernière abonde, fuffit pour volatilifer le fun & prévenir fürement la graifle; les autres mé- lent exaétement à leur compoftion faite avec la potaffe blan- che, un certaine quantité de pouflière de charbon de bois; le phlogiftique du charbon produit néceflairement le même effet que celui de la potafle rouge, Il n’y a que des hommes trèsintelligens & très-expérimen- tés, qui puiflent faire une application heureufe de ces deux moyens: pour peu que la potaile rouge loit margre, peu onc- tueufe, trop chargée de {el de verre, la compolñition fondra gras. Si la potafle rouge eft fraudée , ce qui eft commun, {i Qqqi 492 MÉMOIRE elle eft infectée de matières hétérogènes de fuie, de fuc , de fumier , de terre argilleufe , la compofition fondra difcile- ment, le verre fera d’un verd jaune défagréable, & il prendra mal la couleur de la manganèfe ; fi l'on ne méle pas à la com- pofition une fuffifante quantité de poufhère de charbon, elle fondra plus ou moins gras ; fi l'on y en mêle une trop grande quantite , le Verre fera d’un verd-jaune peu fatisfaifant, & il ne prendra qu'imparfairement la couleur de la manganèle. Il eft d'autant plus difficile de trouver la vraie proportion de la pouflère de charbon, qu'elle doit être relative à la pureté des matières de la compoltion & à la quantit de fel de Verre, dont la potafle eft chargée. Ajoutons qu'il eft très-rare que la poufhière de charbon ne fafle bourfouffler la fonte , de façon à en faire fortir une partie hors du creufer: l'expérience prouve que cene font pas des craintes mal-fondées que nous cherchons à infpirer. Les moyens que les Verreries mettoient en ufage, étant tous ou infuffifans ou d’un effet incertain, ou fujets à de grands inconvéniens, il étoit naturel que nous ne négligeaflions rien pour en découvrir de meilleurs, d’aufli propres à remplir les vues du Maître de Verrerie, qu'à contribuer au bien du Public. C'eft à quoi nous nous fommes appliqués avec une nouvelle ardeur; nous pouvons nous fatter que nos recherches n'onc pas été fans fuccès. Les proportions de la troifième compofition , que nous avons données dans notre Mémoire fur la perfeétion de la Verrerie, feroient un moyen infaillible de prévenir la graifle; mais il feroit trop difpendieux pour le Maïcre de Verrerie en aflor- timenc: sil faloit entrer plus du tiers de {el alkalt fixe dans fes compoltions , il ne pourroit foucenir avec avantage la con- cutrence. Certain que le fiel de Verre produifoit la graifle, Je cher- chai à rendre l'effet impoñlible, par la deftruétion même de la caufe. Les quantités différentes d'eau que le fel alkali fixe SUR LES GRAÏISSES DU VERRE. 493 & le fel de verre de potafle , le tartre vitriolé , demandent pour leur diflolution , m'en fournitent un moyen aufli für que fimple. Je plaçai fur un tonnçau une couverture de laine en quatre doubles , je mis fur cette efpèce de philtre deux cens livres de porafle bien calcinée & bien écrafce , & je verfai fur certe potafle autant d’eau chaude qu'il en falloit, ou à peu de chofe près , pour remplir le tonneau. Après l'opération , je trouvai fur le philtre une quantité aflez confidérable d’un {el blanc, en cryftaux parallélepipèdes , & qui ne faifoient aucune effer- vefcence avec les acides, en un mot, du vrai tartre vitriolé. A la troifième diflolution, philtration & évaporation, il ne refta point ou prefque point de fiel de verre mélé avec le fel alkali fixe. On peut faire la diffolution à l’eau froide, & dans ce cas deux philtrations fuffifent ; mais l'opération eft longue, & elle exige une pius grande quantité d’eau : une partie de {el alkali fixe ainfi purifié , combinée avec deux parties de fable , fe met prompte- ment en fufion , & le Verre qui en réfulte , ne donne aucun veftige de graifle. Nouvelle preuve démonftrative que le /zzr eft la caufe de la graifle. Cette découverte eft non-feulement utile à l’Art de la Verre- rie, mais elle offre aufli.une reflource importante à la teinture & même à la Médecine. Nous aurons peut-être un jour occafion de développer cesidées. Quelque fimple que foit le moyen que nous venons d'in- diquer , pour prévenir la graifle , il pourroit arriver qu'il ne fût pas du .goût de ous les Maîtres de Verrerie. Nous pouvons leur en fournir un autre aufli efficace, qui demande encore moins d'appareil, & qui n’eft pas moins applicable au fel de foude & au nicre alkalifé, qu'à la potafle. La chaux fufée à l'air ou éreinte à l'eau, à grand feu, aug- mente confidérablement la fluidité du Verre : cette chaux ef très-propre à volatilifer le fel de verre : on peut donc trou- 454 MÉMOIRE, 6e ver, dans la chaux, un moyen infaillible de prévenir la graifle: Un très-grand nombre d’expériences m'en ont convaincu : ces mêmes expériences m'ont appris , que la meilleure propor- tion dont on puifle faire He dans l'emploi de la chaux, étoit un douzième de la compoñition, c’eft-à-dire, que fur cent livres de bonne potañle blanche , & cent foixante & quinze livres de fable, on doit mettre vingt-cinq livres de chaux. Je n'ignore pas que l’ufage de la chaux eft connu dans les Verreries d'Allemagne & dans quelques-unes d’Alface ; mais je ne fache pas qu'aucune l’emploie dans la vue de prévenir la graifle, & qu’elle ait une régle certaine fur la quantité à faire entrer dans la compofition. : 14 495 MEMOIRE SUR LES FORGES DE LA BRETAGNE, Notamment fur celles des Salles & de la Noïüée ; avec quelques Obfervations fur la Méthode ordr- naïre de couler les Canons, & celle que l’on y pourroit fubfruer. Par. M. DUHAMEL, Correfpondant. Les Forces des Salles font fituées à quatre lieues de Pon- tivi, elles appartiennent à M. le Duc de Rohan; elles confif- tent en un grand fourneau à fondre les minerais, deux affine- ries & une chaufferie. é Le grand fourneau à vingt-deux pieds de haut, à compter de la pierre de fond jufqu'’au gueulard, la mañle en eft conf truite depuis deux ans & avec beaucoup de folidité ; ce qui étoit facile avec les pierres que l’on y a employées, qui fe ti- rent à dix pas du fourneau, c’eft de l’ardoife groffière ou chifte qui fe lève par grandes tables très-unies , de 4, 5, 6, jufqu'à 10 pieds de long & de bonne épaifleur ; l'on n’a point em- ployé de chaux à cette bârifle, qui n’a encore éprouvé aucu- nes léfardes, quoique l’on y ait déjà fait plufeurs fondages : cependant les fences fe manifeftenc ordinairement dès le pre- mier. ‘Les parois intérieures de ce fourneau font en moëlons de grais, & l'ouvrage ou creufet avec de pareilles pierres, mais ) Préfenté en 17 76. Î 495 MÉMOIRE qui font tailles; celles-ci réfiftent à la violence du feu pendant tout un fondage qui eft de fix à huit mois, & elles ne fonc que légèrement endommagées; celles des parois ou chemifes, n’é- prouvant pas le même degré de feu, tiennent plufieurs fon- dages. La partie fupérieure du fourneau , depuis le gueulard juiqu’aux échelages, eft ronde comme dans les fourneaux de la Suède, Deux grands fouflets de bois à l'ordinaire, mis en mouve- ment par une roue, donnent le vent à ce fourneau, c'eft dom- mage qu'avec une aufli belle chüte d’eau , qui eft de dix- huit pieds , on ne fafle pas ufage des trompes, il en réfulteroit une grande économie & un vent plus égal. Un canal, qui paffe au-deflous de la digue de l’étang, four nic continuellement de l'eau dans une grande huche, où elle remonte au niveau de celle de l'étang ; & de la huche, qui eft en bois, elle eft conduite fur la roue qui fait mouvoir les foufflets. Les minerais , qui fe fondent dans ce fourneau , fe tirent de différens endroits à deux lieues à la ronde , les veines ou les couches qui les fourniflent , ont rarement de la fuite, & lorf- qu'il s'en trouve quelques-unes dans le cas de donner de très- bon minéral en profondeur , elles font abandonnées aufli-tôt que l’on a trouvé de l’eau , & cela faute d’avoir cherché les moyens d'en faire les épuifemens ; de cette manière on atta- que beaucoup d'endroits à-la-fois, afin de pouvoir tirer aflez de mine pour alimenter le fourneau , tandis qu'une , deux ou trois veines bien fuivies dans la profondeur , feroient préfomp- tivement plus que fuffifantes , & donneroient des minerais plus égaux en qualité & en richeffe, qui empêcheroient les incon- véniens dont j'aurai occafion de parler dans la fuite de ce Mé- moire. Les minerais de tous les environs, font, “se la majeure partie, des mines limonneufes ; c’eft ce qui fait que les veines qui par ES SUR LES FORGES. 497 qui les contiennent n’ont pas toujours une fuite bien conftan- te; il s’en trouve néanmoins de pefante_& aufñfi compaéte que la pierre hématite & riche en fer, routes les autres font légè- res & terreules ; cous ces minerais n'affectent aucune forme régulière , &, mêlés enfemble au fourneau , ils ne rendent que trente à crente-cing livres de fer de gueufe par cent, qui , per- dent un tiers aux affineries, en forte qu'il nerefte que vingt à vingt-deux livres de fer fabriqué, par cent de mine. Comme tous ces minerais ont pour bafe une terre argil- leufe , il leur faut pour fondant des matières calcaires ; la di- fecte de la pierre à chaux dans cette partie de la Bretagne, a fait recourir aux coquilles d’huître pour fervir de caftine; on les tire du Legué, petit Port de mer prèsdes. Brieuc, éloigné de dix lieues de cette Forge; elles coûtent trois livres la barique, rendue fur le lieu. La fonte que l’on retire de la fufion des mines , eft partie coulée en gueufes, dont on fabrique le fer marchand, ainfi qu'il fera dit plus loin , & l’autre partie eft tout de fuite mou- le en marmites & autres uftenfiles de cuifines, en manivelles pour les machines hydrauliques des mines de Poullaouën , pillons de bouard , &c. Le fourneau rend de cent dix à cent trente milliers de fonte par mois, tant en gucufes qu'en mouleries; la fonte eft d'une affez bonne qualité pour certains uftenfiles, mais je ne penf pas qu'elle füt propre à faire des canons ; elle n’eft pas aflez égale, il s'en trouve de blanche mêlée avec la grife; l'on fait que la première eft crop dure & trop caflante pour cet ufage ; cet inconvénient , dont j'aurai occafion de traiter plus amplement en parlant de la fonte des canons , ne fe fait que trop fréquemment appercevoir aux mines de Poullaouën, par la rupture des manivelles , qui font des pièces coûceufes & qui exigent du cems pour être mifes en place. La différence , qui fe trouve dans cette fonte , vient de la Tome IX, Rrr Caftine. Emploi de la Fonte: 498 MÉMOIRE variété des minerais , dont les proportions ne font pas tou- -Jours les mêmes dans Les charges du fourneau , & de ce que le charbon eft plus ou moins humide ou fec , vieux ou nou- veau , dur ou tendre,& en général de ce que lon charge trop de mine relativement à la quantité de charbon ; ce qui fait une économie pour le fermier , mais dont il ne réfulte que trop fouvent que de la fonte blanche, mal digérée & qui n’eft propre ni à faire de bonnes mouleries ni de bon fer. Il feroit à defirer que l’on fuivit la méthode de M. le Comte de Buffon, pour les charges des fourneaux, dont nous aurons encore occafion de parler, l'on auroit de bien meilleur fer dans le commerce : mais il faut convenir que plufieurs raifons fémblent sy oppofer ; la première, c’eft que, pour faire du fer doux & nerveux, il en coûte plus de charbon au fourneau de fonte, ou, ce qui eft la méme chofe, qu'avec la même quan- tité de charbon on fait moins de fonte ; la feconde , eft que la fabrication du fer doux eft plus lente que celle du fer caf fant, le premier étant plus dur au marteau , plus fujet à être pailleux, & plus difficile à pafler aux efpatards & taillans de la fenderie ; la troifième , que les Maïtres de Forge ne ven- dent le fer doux que très - peu de chofe de plus que le caf- fanc, & qu'il coûte communémennt un tiers en fus à fabri- quer. De la réduétion du Fer de Gueufe, en Fer Marchand. L'on surrT, aux Forges des Sallés, la méthode du Berry & de l'Angoumois, pour raffiner le fer, c’eft-à-dire , que la gueufe étant une fois pañlée aux affineries & convertie en loupes, & ces loupes en encrenées, on porte celles-ci dans un autre foyer que l’on nomme Chaïñfferre, où elles reçoivent toutes les chaudes néceflaires pour les étirer fous le gros mar- ceau, & leur faire prendre la forme & les dimenfions convena- bles. Je ne m’arréterai pas à agiter la queftion de favoir fr cette S'U-Ry DES FOUR GES: 499 méthode eft préférable à celle de la Bourgogne, où l'on tra- vaille en renardières , dans lefquelles on perfe&tionne le fer fans le fecours de la chaufferie; Je dirai feulement aujourd'hui que, pat ce travail en renardières, l’on économife un peu de charbon ; que l’on a voulu introduire cet ufage dans les For- ges du Berry, mais qu'il n'a pas été fuivi : le Maître de Forge qui en a fait l’eflai, prétendant qu'il ne faifoit pas autant de fer, qu’en fe fervant d'une chaufferie ; ceci eft une affaire de fpéculation de la part des Maîtres de Forge , qui font leurs calculs fuivant la cherté des bois; car , dans les endroits où il fera à bon marché, comme aux Forges d’Ardantes en Berty , on négligera toujours de chercher les moyens de les écono- mifér, pour ne s'attacher uniquement qu'à faire beaucoup de fer, fans même s’embarrafler de la qualité , ainfi que je l'ai dit ci-deflus. L'on {ent aflez les inconvéniens de cette pratique , fans que je m'arrête à les détailler , il me fufira de dire , que lon devroit être plus attentif à faire ufage des moyens les plus convenables pour l'économie des bois , Qui ne deviennent que trop rares ; je n’en connois pas de meilleurs, pour y parve- nir, que de fuivre la méthode des Forges Catalanes. L'on ne fe fert que de marteaux de fonte à la Forge des . Salles , ils caffent fréquemment ; c'eft pourquoi on a foin, à chaque fondage, d’en mouler une bonne provifion , afin de n'être pas dans le ças d'en manquer , ils péfenc huit cens livres. Outre les ufines dont il eft ci-devant queftion, cette Forge a £ncorc. une refenderie , où Ja plus grande partie du fer eft réduite en verges de différentes dimenfons, pour en faire des -clous. Cette fenderie reçoit l’eau du même étang qui fert au grand fourneau avec la même chûte de dix-huit pieds; elle eft, en général, mal conftruite, les lanternes dans lefquelles engraimnent les rouets , ont dix-huit pouces dans œuvre , ce qui €ft beaucoup trop , & ce qui occafionne la rupture des fu- H Rrrij Marteaux, Fenderie. 506 MÉMOIRE feaux; les roues qui devroient être à augets, la chüte de l’eau étant affez confidérable pour les faire aller en-deflus , font à aubes ou palettes, ce qui leur fait dépenfer le double d'eau, & Les Roues. TES x en général elles font mal conftruites. Le Four à reverbère, fervant à chauffer le fer, pour être pañlé à la fenderie, eft aflez bien entendu. Le Maître de cette Forge m'a dit, que ce déchet du fer , dans l'opération de la Le Four de Rétdc. eft de foixante livres par millier, ce qui fait fix pour Reverbère, Cent, que les écailles qui en réfultent, font rejetées comme de Déchetdu Fer. nulle valeur. Il y a quatre roues à la Forge; favoir, deux pour faire mou- voir les foufflers des deux affineries, la troifième pour la chauf- ferie , & la quatrième eft celle du marteau; toutes ces roues font à augets & paflablement conftruices , elles tournent en- deflus avec une chüte d’eau de quinze pieds; la même qui a fervi au grand fourneau & à la fenderie, fe rend dans un étang au-deflous & fert aux quatre tournans de la Forge, dont nous venons de parler... En outre les deux étangs du fourneau & de la Forge, il y en a un troifième au-deflus & à un quart de lieue , qui eft le plus confidérable, il a vingt à vingt-cinq arpens de furface, re un petit ruifleau fournit l'eau à ces étangs, qui fe rempliflent ‘en hiver; mais cette Forge manque d’eau pendant quatre à cinq mois de l'été; c’eft pourquoi elle ne peut fabriquer qu'environ quatre cens milliers de fer marchand par année. Comme tourle fer, qui fe fabrique dans certe Forge, eft très- caffant à froid, on en convertit la majeure partie en verges à la fenderie, qui, comme je l'ai déjà dit, eft deftiné à être QuitéduFer. mis en clous; il eft envoyé à Vannes & embarqué pour Bordeaux & autres Ports. M. le Duc de Rohan, propriétaire de’cette Forge, fournit, fuivant ce que m'en a dit le Directeur , deux cens arpens de Val 6 CA he. LE] F * SU RIDESIFOMRGES. sor bois taillis par année à fon Fermier, à raifon de foixante livres par arpent, ce qui fait douze mille livres; le, Fermier ne re- tire qu'environ cinq milles cordes de ces deux cens arpens, parce que les taillis ne font pas bien fournis, & qu'on les lui livre , canc plain que vide; ce qui fait revenir la corde à en- viron deux livres huit fols, les fagots payant à-peu-près la façon des cordes. Lorfque les bois provenans des deux cens arpens cédés par le bail, pour chaque année , ne font pas fufffans, le Fer- mier s’en procure des particuliers. Le Direéteur m'a afluré, w’alors la corde lui revient de cinquante fols à trois livres, elle eft de huit pieds de long & quatre de haut, la longueur des buches de deux pieds & demi. Le Seigneur fournit grars quatre-vingt hêtres par chaque année, pour les manches de marteau. Le Fermier eft refponfa- ble des incendies, tanc pour la Forge que pour les forêts où il faic cravailler. Si je ne fuis pas entré dans des détails plus étendus fur les fourneaux, les ufines & la fabrication du fer, c’eft quil n'y a rien qui mérite d’être décrit , la façon de travailler érant exac: tement la même que celle qui eft en ufage dans le Berry, le harnois du marteau y étant également à grand drome. Forges de la Noüée. Ces Forces font fituées à cinq lieues de Pontivy & à quatre de Lominé, elles fonc bâties fur les Domaines de M. le Duc de Rohan, qui a cédé l'emplacement à une Compagnie qui fait conftruire ces Forges il y a dix-neufans; cette Forge a coûté, fuivant le Directeur , homme fort inftruit , trois cens vingt-cinq milles livres, ce qui eft très-probable, non par la beauté ni la folidité des maïfons , machines, &c. mais r.° à »caufe des grands bârimens qui ont été conftruits pour fervir d'attclier à moulker, forer & tourner les canons que l'on comp- Manche de Marteau. Grands Four- neaux. se2 MÉMOIRE toic y faire , & qui, n'ayant pas réufli, ainfi qué nous le dirons plus bas, font devenus prefque inutiles; 2.° par rapport au canal qui amène l’eau fur les roues, il a 1800 toifes de lon- gueur & trente pieds de largeur réduite; il a été fait de ni- veau , afin de ne pas perdre de chüte, il reçoit l'eau de la rivière de Lié, qui, rendue fur les tournans, a dix-huit pieds de chüte; elle manque très-rarement. La conftruétion de ce canal , ainfi que de la chauflée qui force l’eau de la rivière à y entrer, ont été dirigés par M. Laurent, moyennant la fomme de 72,000 livres. La Compagnie a fait un traité avec M. le Duc de Rohan, qui porte qu'elle jouira de cette Forge pendant vingt-fix an- nées confécutives. Ce Seigneur s'eft obligé de fournir de fes forêts, qui font à portée Æ la Forge , huit milles cordes de bois par an, pour lefquelles la Compagnie donne une fomme convenue ; fi elle a befoin , dans certaines années , de 4,000 cordes de plus, le Seigneur s’eft engagé de les fournir à cin- quante fols la corde; mais ce n’eft que dans le cas où les Fer- miers ne trouvent pas à Sen procurer à meilleur marché dans les environs; car ils font les maîtres de ne prendre que les huit mille cordes qui font d'obligation , & ils acherent le furplus des particuliers. Je tiens tout ceci du Direéteur de la Forge. Cette Forge a, pour fondre les minerais, deux grands four: neaux qui, alternativement, font en feu, aufli-tôt que l'un. eft arrêté, l'autre, qui y eftattenant , eft mis en feu , au moyen de quoi il y a rarement de l'interruption. Ces fourneaux font conftruits comme celui des Salles, mais les pierres n'étant pas aufli belles à la Nouée , ils n’ont pas la même folidité; ils font léfardés en plufieurs endroits : il y a deux grands fouflets de bois à chacun de ces fourneaux qui font müs par deux roues de feize pieds de diamètre & trois de large, elles font à augets & reçoivent l'eau pardeflus, au moyen de la chûte dont ila déjà été queftion. S'U.R HEA4F1S) FO! KG ES: 593 Les minerais que l'on emploie dans cette Forge, fe tirent communément de deux à trois lieues des Forges, ils fe paient fept livres la pippe; favoir, trois livres dix fols pour l'extrac- tion & autant pour le cranfport. Il n'y à pas plus d'ordre ici pour l'extraction des minerais, qu'aux Forges des Salles, il ny paroît pas de filonsréglés. Lorfque les payfans, qui travaillent ou font les fouilles de ces minerais , n'en trouvent plus aflez abondamment dans un endroit , ou qu’ils ont réncontré de léau , ils abandonnent pour fouiller ailleuts ; quand ils font parvenus à une dixaine de pieds de profondeur, ils placent un treuil fort mal faic fur l'embouchure de leur trou, ils y mettent une corde & un panier au bout pour monter la mine; lorfqu'ils en. ont une certaine quantité de fortie , ils la lavenc eux-mêmes dans un petit courant d'eau le plus à portée, & elle eft enfuite conduite à la Forge : ce lavage eft pour lui enlever la partie terreufe & argilleufe dans laquelle elle fe trouve. - Toutes les efpèces de mines, qui emploient dans cette For- ge , font ainfi que celles des Salles , limonneufes, il s’en trouve aflez fréquemment en Géodes & quelquefois avec des em- preintes de coquillages de mer. Comimne ces minerais fe ti- rent dé différens endroits , que les uns font plus riches en fonte que les autres ; qu'ils font plus où moins réfraétaires, on les mêle en les jetant dans le fourneau. . Le Direéteur de cette Forge m'a dit avoir fait charger le fourneau avec lés minerais les plus riches, qui font en pierres affez compactes , {ans les mêler avec d’aucres plus pauvres & plus légères, que la fonte qui eft provenue de ces minés ri- ches s’eft trouvée de la plus mauvaïfe qualité, & qu'il n'étoir pas pofhble d’en faire du fer qui püt pafler dans le commerce, on a donc foin de faire fondre les mines riches en fer avec les » pluscerreufes. Sr l’on n'a pas réuñlt à obtenir dé bonne fonte des minerais Minerais. Cafine, 504 , MÉMOIRE riches fondus féparément , je fuis très-perfuadé que c’eft parce que l’on en a porté autant à chaque charge que des pauvres, & que l'on n’y a pas plus ajouté de caftine; alors il eft arrivé que ce minerai, ainfi que la caftine, n’ont pas aflez fourni de laitiers , que par-là le fer s’eft crouvé trop expof£ à l'aétion du vent & de la grande chaleur en pañlant vis-à-vis la tuyere & même érant rendu dans le creufet , c’eft ce qui a dû détruire une partie du métal, qui, à coup-fûr , seft converti en une efpèce de mâche-fer très-tenace & non coulant, & a embar- rafle le fourneau ; car on fait que le contaë& de l'air détruit ou plutôt enlève très - promptement le phlogiftique au fer ; dans cette circonftance, l'on ne peut obtenir que de la fonte blanche & fragile ou très-noire & à grandes écailles, le fer forgé qui réfulte de ces deux efpèces de fonte , ne peut pas manquer d'être d’une très-mauvaife qualité. Les inconvéniens ci-deflus ne feroient pas arrivés, fi on eût moins chargé le fourneau de la mine riche dont il eft queftion, êc que l’on y eüt ajouté plus de caftine fans diminuer la quantité de charbon, & je fuis perfuadé qu’alors on feroit parvenu à faire de bien meilleure fonte. Quoique l'on mêle les minerais pauvres avec les riches, le fer qui en provient n’eft pas nerveux, il n’eft néanmoins pas aufi caffant que celui de la Forge des Salles; fa défeétuotité lui vienc aufh de ce que la fonte n’eft pas bien digérée ni pu- tifiée au fourneau de fufñon, parce que l’on charge trop de mine relativement à la quantité de charbon, ainfi que je l'ai dit en traitant de la Forge des Salles; mais, je le répète, l'in- convénient eft, que l’on feroit moins de fer , qu'il coûteroit beaucoup plus au Fermier, qui ne le vendroit pas à proportion de cette augmentation de dépenfe. L'on emploie aufli, en cette Forge, des coquilles d'huîtres pour caftine , mais on y méle une terre calcaire, qui eft rem: plie SUR LES) FORGES, sos plie de petits coquillages & de fragmens de coquilles: de mer; certe terre fe tire de quelques lieues de la Forge. Les deux fourneaux mis alternativement en feu , produifent chaque année environ quinze cens milliers de fonte, defquels il s’en.moule trois cens milliers en bombes & boulets pour Breft, les douze cens milliers reftant de fonte en gueufes, font convertis en fer à deux affinceries & une chauficrie, & rendent environ huit cens milliers de fer fabriqué ; on compte ici un tiers de déchet fu la fonte , pouf fa converfion en fer marchand. Environ les deux tiers de ce fer eft pañlé aux cylindres & taillans de la fenderie , pour en faire de la verge de difé- rentes grofleurs, l’autre tiers eft mis en fer marchand, fuivant les échantillons demandés & vendu dans la Province, celui de fenderie eft prefque tout envoyé à Vannes où il eft em- barqué pour Bordeaux ; tous ces fers fe vendent aëtuelle- ment dix-fept à dix-huit livres le quintal , quoiqu'ils ne foient pas d’une bonne qualité, mais ils fervent aux Cloutiers, & à des ouvrages qui n’exigent pas un fer de la première qua- lité. La grande quantité du fer de fenderie, qui fe fait en cette Forge, permet d'y fabriquer jufqu'à un million de fer par an avec deux feules affineries & une chaufferie; car, pour la fen- derie , on fait de grofles loupes que l’on réduit chacune en une feule barre , dont les dimenfions font très-fortes; après quoi la fenderie les réduit aux grofleurs requifes, ce qui ac- célère beaucoup le travail de la Forge , maïs ce qui, en même- tems , contribue à la défettuofité du fer , quoiqu'il s’adou- cifle un peu au fourneau de Reverbère, & que fes parties foienc de nouveau rapprochées & alongées par les cylin- dres. Outre les douze cens milliers de fonte ci-deflus , que l'on convertit en fer dans cette Forge, on y réduit aufli une aflez Tome IX, S{f Quantité de Fonte par an. 506 MÉMOIRE grande quantité de vieux canons de fer , que la Compagnie achete de la Marine, & qui, fans les couler en gueufes, font mis en loupes dès la première opération : ce fer marchand qui en provient, eft tres-bon & nerveux, fans doute que ces canons viennent des Forges de lAngoumois & du Péri- gord où lon en coule depuis long-tems d’une fonte d'excel- lente qualité. Les deux affineries & la chaufferie font conftruites comme celles de la Forge des Salles, c’eft-à-dire , à la manière du Berry ; comme ces fourneaux n’ont rien de particulier, je n’en ferai pas la defcription. Un feul gros marteau de fonte , pe- fant environ un millier & à grand drome, forge tout le fer que ces fourneaux peuvent préparer ; il y a aufli une refen- derie. Toutes les Forges de la Bretagne fe copient, pour la mé- thode de travailler le fer, ainfi que celles du Perche & de la Normandie. L'air des Forges de la Nouce eft pernicieux, tous les Ou- vriers y font attaqués de fièvres, fur-tout au printems & en automne. ÆEfjais fais pour parvenir à faire des Canons. M. TARITZ avoit été envoyé à la Nouée, lors dela -conf- tructiôn de la Forge , pour, voit sil ne feroit pas poflible d'y faire des canons pour la Marine du Roi; après avoir examiné les différens minerais, il décida qu’ils étoienc très-bons à cet ufage ; en confquence , on fit conftruire des bâtimens aflez conlidérables, une forerie , & tout ce qui eft néceflaire à ce genre de travail , l’on fit venir des mouleurs & autres ouvriers. à grands frais. On coula d’abord quelques petits canons , qui ne réuflirent pas bien, on en fit d'autres plus gros qui ne fe trouvèrent pas meilleurs, parce que la fonte étoit toujours trop dure pour pouvoir la tourner & la forer. Le Direéteur de la Forge fit charger le fourneau avec d’autres minerais moins riches en fer que les premiers que l’on avoit employés; JS'U RIRES) FÔRGES. $o7 alors on obtint des canons d'une fonte beaucoup plus douce, ce qui devoit naturellementarriver, par les raifons ci-devant déduites; il fe moula alors plufieurs canons, qui, ayant été mis à leur perfection , furent envoyés! à Breft , où l'épreuve s'en fit, les crois quarts éclarèrent, ayant quelques parties de fonte blanche: Les Entrepreneurs fe trouvèrent rebutés , ils abandonnèrent l’entreprife des canons avec toutes les avances qu'ils avoient faites pour cet objet; depuis ce tems, ils fe font bornés à faire des bombes, des boulets & autres petites moule- ries, & à la fabrication du fer marchand. En examinant les boulets que l’on ‘coule a cette Forge, . : [re E / je m'apperçus qu'il y en avoit beaucoup de manques par le jet, c'eft à-dire, qu'il fe trouve fréquemment un trou à l'en- - droit de la coulée , j'imaginai que cela ne pouvoit provenir que de ce que le jec étant beaucoup plus petit que le boulet, & recevant le contaét de l'air, étoit refroidi, tandis que la fonte contenue dans la coquille étoit encore en fufion & dans fon plus grand degré de raréfaëtion , qu’en refroidiflant la fonte perd un peu de fon volume, diminution qui ne peut avoir lieu , fans laifler un vide vers la partie fupérieure qui éft con- tiguë au jet , lequel étant déjà coagulé, ne peut plus fournir de matières pour remplir le vide que la fonte laifle en fe con- denfant , d’où nécefltirement il arrive qu’en caflant le jee, il refte un trou dans cette partie du boulet : pour éviter cet in- convénienr qui les fait rebuter, j'ai confeillé de renverfer les coquilles aufli-tôt que le jet eft coagulé ; alors s'il y avoit déjà un défaut de matières près le jet, cet efpace fe trouve rempli par celle qui eft contenue dans la coquille & qui eft encore en fufion , s'il refte alors un vide dans le boulet, il doit fe trouver vers fon centre, ce qui ne peut pas lui être préjudiciable. Il feroit difficile de faire conftamment de bons canons à la Forge de la Nouée , par rappoît à la variation des minerais, qui changent fréquemment de richefle & de qualité ; l'on a eflayé toutes les mines féparément & même mélées dans dif- Sff ij Manière d’és viterles défauts dans les Bou- lets. Dificu'té pour faire des bons Canons, Fonte Blan- che pernicieufe dans un Ca- non, Caufes de Ja rupture des Canons. 508 MÉMOIRE férentes proportions, pour voir s'il en fortiroit de meilleurs canons; mais il ne s'en eft pas trouvé de parfaitement bons, ainfi que je l'ai déjà dit; car, dans le même canon, il y avoit des parties de fonte blanche, quoique tout le refte für de fonte grife & douce: peut-être feroit-on parvenu à leur don- ner un certain degré de rénacité & de perfeétion, fi celui qui éroic envoyé par M. Mary, pour fuivre ces opérations , n’a- voit pas autant fait charger de mine dans le fourneau , relati- vement à la quantité de charbons de chaque charge, & que ces charges euilent été plus petites & plus fouvent répétées; mais, fuivant notre théorie , à chaque changement de minerai, il auroit fallu faire de nouvelles expériences , qui font toujours fort coùteufes en ce genre de travail. Il ne faut que très-peu de fonte blanche dans un canon, pour le rendre defeétueux ; c'eft pourquoi il eft de la plus grande conféquence que la fonte {oit , non-feulement grife , mais d'un grain égal & ferré ; cout canon qui n'a pas ces qua- lites , n’eft pas bon, s'il a des parties de fonte blanche, le foret n'y pénètre qu'avec peine, ces parties, au-lieu de fe couper avec la langue de carpe, s'égrainent & laiflent des chambres, les forets fe trouvent aufli-tôt gâtés & hors d’étar d'aller en avant, il les faut remplacer par d’autres, ce qui occafonne une perte de tems, & eft ruineux pour l'Entrepreneur , qui fouvent méme fe trouve obligé d'abandonner un canon aux crois quarts de fa perfection , ne pouvant plus le forer ni le tourner pour en polir l'extérieur ; premier inconvénient. Si, indépendamment de quelques parties de fonte blanche, l'on eft parvenu à finir le canon , il eft foumis à l'épreuve dans les Ports du Roi; sil n’eclate pas à la première charge, il fautera néceflairement dans la fuite; car il n’eft pas poflible que la fonte blanche réfifte long-tems aux battemens du boulet , qui en détache toujours de petires parties & qui difpofe les autres à séclater ; d'un autre côté, l'effort de la poudre & particu- licrement la chaleur qu'elle communique au canon, lor{qu'il a tiré plulieurs coups de fuice, en dilate la matière jufqu'à un S.U R'-HEÆE1S. FOR. G ES. 509 certain point; &, comme la dilatation de la fonte blanche ne fe fait pas en même proportion que celle de la grife, il en ré- fulte une contraction plus forte dans des parties que dans les autres, ce qui a bientôt opéré la rupture entière du canon ; au- tre inconvémient. Ce petit expofe fait fuffifamment voir que , pour faire de bons canons, il eft néeeflaire que la fonte foit grife, tenace & égale dans toutes fes parties , ce qui eft d’autanc plus diffi- cile, qu'il faut, comme on l'a déjà dit , que les minerais foient conftimment de la même qualité & richefle ou teneur en fer, à quoi j'ajouterai qu'il eft auffi indifpenfable que les charbons dont on fe fert dans l'opération de la fonte, foient non -feule- ment de la même qualité de bois, mais qu'ils foient également bien faits, c’eft-à-dire, qu'ils n'aient pas été trop preflés par les Charbonniers ; tous les Maîtres de Forge favent que le même bois donne des charbons de différentes qualités, fui- vant le plus ou le moins d'attention des Charbonniers , foit dans le dreffage de leurs fourneaux , foit dans la conduire du feu, &c. la nature du terrain y met aufli de la différence: une chofe encore à confidérer , c’eft le tems qu'il y a que les char- bons font faits , fi, ‘au commencement d’un fondage , l'on à employé de vieux charbons & qu’enfuite on en prenne de nouveaux faits , il en réfulcera un changement dans la qualité de la fonte , qui deviendra blanche & caflante , fi l'on ne di- minue pas la quantité de mine. Les différentes groffeurs des charbons contribuent aufli à faire changer la fonte ; car quoi- que ordinairement on réferve les plus gros pour fondre, ils ne font pasconftamment dela même grofleur , fi Fon fait plu- fieurs charges avec des charbons crès-gros , & les fuivances avec de plus petites ; il arrive que le minerai tamife ou pañle en grande partie entre les grands charbons & fe rend plus vite qu'il ne faut à la hauteur des écalages du fourneau & même Jufques vis-à-vis la tuyere , où il forme un trop gros volume à-la-fois, relativement à la quantité de charbons qui l’envi- ronne dans cette partie, d'où néceflairement il arrive de l’emk sro MÉMOIRE batras dans l'ouvrage , & la fonte, qui n'eft ni bien digéréc ni aflez chargée de phlogiftique, fe trouve être blanche. Pour éviter cet inconvénient , il faudroit, à limitation de M. le Comte de Buffon, que ces gueulards ou beugnes des fourneaux , fuflent conftruits en rond & de manière que les chargeurs puflent en faire le tour & charger également, & qu'avant de porter la mine & la caftine fur les charbons que les chargeurs les arrangeaflent bien en les battant avec une pelle, en caflant ceux qui feroient tropgros, enfin que l’on rendit la furface de la charge des charbons bien unie; de cette manière les minerais , même en petits grains , comme ceux de la Bourgogne, ne coulcroient pas trop vite entre les char- bons. Chaïbons Si, après avoir employé des charbons fecs & qui n'ont pas mouillé, Houillé, on en porte au fourneau qui ont été expolés à la pluie , il en pourra aufi arriver un changement dans la fonte; il eft beaucoup d’autres inconvéniens provenant de la négli- gence des fondeurs &-des chargeurs , de la conftruétion des fourneaux , de la pofition de la tuyere, de la direction du vent, & autres qu'il feroit trop long de détailler ici , cette matière ayant d’ailleurs été craitée dans l'Art, des Forges,donné par l'Académie. L'on voit, par ce détail, qu'il faut un homme éclairé dans cette partie , & beaucoup d'attention de fa part, pour éviter tous les inconvéniens ci-deflus, qui peuvent caufer un grand préjudice, foit à l'Entrepreneur , {oit dansle fervice de la Mari- ne par la rupture des canons, Corpsétran- J'ai toujours penfé que les canons de fer éclatent, pour la See oux majeure partie, à caule de l'inégalité de la fonte, & parce ‘qu'en les coulant dans les moules, il paile avec le fer en fu- fion des cotps étrangers , tels quelques parties de laitier, de charbons & même de mine qui neft pas parfaitement fon- due, ni par conféquent aflez purifice , pour faire un corps S U RÔLE S'1 FORGE S- ste homogène avec la fonte qui a cout le phlogiftique qui lui con- vient. Ces corps étrangers , entrant dans le moule, occupent un volume égal à la fonte qui en auroit pris la place, fi ces par- ties fe trouvoient vers le centre du canon, le mal ne feroit pas grand, puifque le forer les enlèveroic ; mais, comme leur poids fpécifique eft moindre que celui de la fonte , elles fe rangent dans les bords, c’eft-à dire, que le plus fouvent elles fe trouvent dans l'épaifleur du canon, après qu'il a été foré ; il y a donc une interruption des bonnes parties de la fonte, par l'interpoñtion des mauvaifes , qui néceflairement lui ôtenc beaucoup de fa folidité, foit qu'elles fe trouvent dans les pa- rois intérieures du canon , auquel cas elles y occafionnent cer- tainement des chambres pat les battemens du boulet & par la chaleur quela poudre produit, foit qu’elles fe trouvent plusavant dans l’épaiffeur du canon; car, dans ce cas, il y a pareillement difcontinuité du bon fer tenace, &c. J'ai imaginé un moyen, qui, à la vérité , n'eft pas fans diff cultés, mais qui, étant bien exécuté ; pourroit reuflir. Je le foumets au jugement de l'Académie; les inconvéniens qui réful- tent de la méthode ordinaire, m'ont infpiré le defir d'en trou- ver une qui puifle les parer : la voici, Premièrement, faire de la fonte de gueufe aufli pure qu'il eft poflible de l'obtenir par le procédé ordinaire, de la cou- ler en petits lingots ou plaques, que l’on cafleroit en mor- ceaux. Secondement , de ‘fondre’le fer ci-deflus dans de grands fourneaux de Reverbère * en quantité fuffifante pour le canon qu'on voudroit mouler. ; En procédant ainfi , Ja-fonte deviendroit non-feulement égale dans toutes fes parties, mais Les laitiers & matières hété- k A * Les Anglois coulent communément de cette manière les Cylindres des Machines à feu, qui font d’un très-bon fer. Voyez; Mémoires de M. Jars, Projet pour couler les Canons, çr2 MÉMOIRE, &e rogènes, comme plus lépères , prendroïent le deflus du bain & on les enlèveroit, ainfi que cela fe fait en raffinant le cuivre dans les grands fourneaux de Reverbère, & lorfque la fonte feroit en parfaite fufion & bien écumée, on la feroit couler dans les moules préparés à cet effet. Je crois que, par ce procédé, on parviendroit à obtenir de la fonte de fer parfaitement pure & égale ; mais refte à favoir fi elle ne feroit pas trop dure pour pouvoir aïfément fe forer & être paflée au tour; car je fuis moralement afluré qu'elle feroit plus dure que delafonte grife de la première opération; mais tout me porte à croire qu'elle auroit beaucoup plus de folidire :en cas qu'il ne fût pas poflible de la forer , il faudroit faire des moules à noyau, dont les canons fortiroient, pour ainfi dire, parfaits, &, fuivant M. de Buffon , ils n’en feroient que meilleurs ; je penfe comme ce célèbre Académicien , qu’en tournant les canons , on leur enlève une croûte qui eft la partie la plus tenace. Un noyau aflez parfaitement fait pour n'être pas oblige de paffer le foret dans le canon, mettroit aufli dans le cas de laïfler fubffter la croûte intérieure, qui feroit beaucoup moins fujette à fe chambrer ,& je crois même à fe rouiller , que dans les canons forés ; fi, d'un côté, en fuivant ce que je propofe ici, il en coûtoit plus à caufe de la double opération de la fonte, de l’autre, on pourroit épargner celle du forage & du tour, &, à ce que je penfe, ces dépenfes peuvent fe balancer. OBSERVATION )13 OBSERVATION D E LA CRYSTALLISATION DU FER. Par M. pe MORVEAU. La rusron des métaux eft une véritable diffolution par le Préfentée cu feu le plus puiflant des menftrues, la folidité qu'ils acquièrent 1715- par le refroidiffement , eft une vraie cryftallifation qui s'opère par l'évaporation de la partie furabondante du diflolvant, & en s'appropriant , par la puiflance de l'affinité ME partie de ce t même fluide néceflaire à l’état de concrétion: ces vérités, donc j'ai eflayé de montrer, en peu de mots, tous les rapports, en difant que le feu eft exaétement aux métaux, ce que l’eau eft aux fels (1), n'ont échappe fi long-tems à nos recherches, que d parce que le travail de la fufion étoit abandonné à des gens que le befoin de jouir animoit plus que Le befoin de favoir, le hafard leur en auroit offert les preuves, qu'ils auroient né- gligé de les reconnoître, faute d'en prévoir l'importance: l'ob- {ervation eft la fource de la bonne phyfique ; mais c’'aft l'ana- logie qui forme l'Obfervateur & qui le tient attentif aux phé- nomènes qui échapent au vulgaire ; d'ailleurs les produits de la fufñion fubordonnés à miile accidens indifférens à l’objet de ceux qui en étoient occupés, ne préfentoient pas certe conf- tance de forme, cette régularité qui fuppofe une mécanique fecrète , qui indique une forte de progrès géométrique dans la compolition de ces folides , qui nous fervira peut-être un jour de microfcope pour appercevoir les figures de leurs élé- LS (1) Digreflions Académiques ; pages 170 & 374. Tome 1X. F'tx $r4 O'B"S ER VPAMEAMNIOMS mens, & qui déjà ne permettent plus de douter que c’eft réelle: ment à cette figure qu'ils doivent ce que nous appellons leurs propriétés. ; . On connoît depuis long-tems le culot étoilé d’antimoine ; dont l’apparition ne fervit d’abord qu’à bercer les efpérances des adeptes; MM. Macquer & Baume ont obfervé la cryftalli- fation de l'argent & du cuivre; mais, lorfque jai entrepris le travail dont je vais rendre compte , je ne connoiflois aucun Auteur qui eüt parlé de celle du fer, jai, depuis, retrouvé deux pañlages où il en eft fait mention; le premier , qui fait partie des obfervarions recueillies par Suedembourg (1) , an- nonce fimplement, fur le témoignage de Zanichellus , quele fer fondu & refroidi, montre de petites particules pyramida- bes à quatre côtés : l’autre eft de M. l'Abbé Monner, qui, dans une Differtation fur les Volcans d'Auvergne, place le fer au nombre des métaux , qui,comme l'argent & l’antimoine, pren- nent, en fe refroidiflant, une forme particulière (1). On me par- donnera, fans doute, d’avoir penfe qu'ils ne remplifloient pas, à beaucoup près, cout ce que la curiofité de notre fiècle a droit d'attendre de l’examen d’un pareil fujet. Voulant eflayer , au mois d'Avril dernier, la converfon du fer en acier, par le cement de pouflière de charbon , dans le fourneau de M. Macquer, les fupports du creufet coulèrent en moins de trois heures, le creulet fur renverfe fur la grille prefque entièrement vide je cherchai envain le lingot de fer, je ne trouvai que des fcories; il étoit naturel de penfer quil s'éroit plutôt calciné que fondu ; cependant la penfan- teur de l'une de ces fcories me fit foupçonner qu’eile pouvoit contenir quelques parties métalliques, je la fs chaufier pour l'effayer enfuite fous le marteau ; les premiers coups eh déta- (x) Suedembourg, Obfervations fur le Fer, page 182° (2) Journal de Phyfique , mois de Juillet 1774 DE LA CRYSTALLISATION DU FER. sij chèrent bientôt route l'enveloppe vitreule, & je vis déjà avec €ronnemeut fe fogmer un petit barreau de la longueur d’en- viron trois pouces fur la largeur de fix à fept lignes de cha- que face ; je compris alors que le fer s’étoit réellement fondu dans cetre opération, mais j'érois bien éloigné d'imaginer qu'il, y eût eu tout-àla-fois fufion & converfion » fur-tout dans auf peu de tems, & le fer ayant ainfi été expolé au feu nud : cependant , ayant fait tremper ce barreau, il préfenta, dans fa caflure, le plus beau grain d’acier que J'eufle jamais apperçu. Cette Expérience avoit été faite à Montbard, chez M. le Corte de Buffon ; &, fur ce que je lui témoignai que javois le deffein de la répéter, & de rameñer À un procédé für ce que le hafard feul avoit produit certe fois, il me remit plu- fieurs morceaux d'acier bourfoufflé, comme étant plus dif pot à fe pénétrer de feu & à entrer en fufion; on appelle acier bourfouflé , les barres de fer qui fortent du fourneau de cementation , parce qu'en effet leur furface éft remplie de foufflures plus ou moins confidérables ; On fait encore que, dans cet état, les bartes ne peuvent plus fe forger à froid, qu'elles fe caflent aifément, & que le grain de leur caflure ne reflemble ni à celui du fer, ni à celui de l'acier, ni même a celui de la fonte ordinaire; &, aprés avoir bien examiné toutes ces circonftances, je crois pouvoir dire qu'# n’y a rien de moins fondé que l'opinion où lon a été long-tems que l'acier de fonte étoit néceflairemene plus parfait que l'acier de . CéMentarion , parce que le dernier ne Pouvoit tre purgé des parties hétérogènes qu'il contenoit : Je fuis très-perfuadé que dans cette opération , le fer eft amené à un point de fufion fufffant , pour que l'attraction qu'éprouvent les parties fimi- laires poufle au-dehors tout ce qui leur eft étranger ; il n’eft pas même befoin de fuppofer que le cement ferr de moule Pour conferver aux barres cementées leur première forme, 1l fuffit de fe rappeller ce qui fe pañle dans la liquation, pour être convaincu qu’un métal ramolli par le feu peut laifier échap- Ttcij s16 OBSERVATION per fon alliage fans arriver à l'état de fluidité. Cette théorié ; que je ne fais qu'indiquer ici en pañlant, mériteroit , fans doute, d'être développée; mais elle m’écarteroit trop de mon fujet. Le 23 Avril, je mis dans un creufet de plombnoir un mor- ceau de cet acier bourfoufflé , du poids exaét de 9 gros 64 grains; jimaginai d'en tenter la fufion fans autre fondant que cette efpèce de laitier de fourneau qui eft blanc , très-léger , comme écumeux, & qui, après avoir reçu l'humidité de l’ha- leine, fait entendre un craquement dans toutes les parties de fa furface; il y eut fufion parfaite en deux heures & demie de tems, au fourneau de M. Macquer , le culot bien arrondi pefoit 10 gros, 2 grains, ce qui faifoit une augmentation de 10 grains, que j'attribuai fans héfiter aux parties de fer que contenoir le laitier & qui s'étoient réunis au culot toute la fur- furface de ce culot étoic couverte de lignes entrecoupées régulièrement comme une hachure, &, formant un relief très-fenfible , à la réferve d'un feul endroit de la furface fu- périeure que l'air avoit frappé , parce que le flux n'étoit pa: aflez abondant & qui avoit un coup-d’œil de fer brûlé. Je compris bien dès-lors, que ces protubérances n’étoient pas un pur effec du hafard ; mais j'étois bien éloigné de penfer que je parviendrois à les produire à volonté avec routes fortes de terres ferrugineufes dans tous les états, en employant des flux très- différens, & qu'elles ferviroient ainfi à prouver contre Vopinion prefque générale d'identité du fer que contiennent les mines de ce métal. Ce fut en travaillant à la recherche du procédé de M. Bou- chu , pour l'eflai de ces fortes de mines, que jeus occafion de revoir le phénomène de cette cryftallifation, &il fe mon- tra fi fouvent , fi conftamment le même, que bientôt je ne Voyez N.° 208. DE LA CRYSTALLISATION DU FER. 517 fus plus furpris que de ce que M. Bozchu n'en avoit pas fair mention une feule fois dans fes manufcrits, où il avoit rendu compte de plus de 4000 eflais de mines de fer, & où il avoit décrit avec exactitude jufqu’aux nuances des produits 4 cetre circonftance, qui n'auroit pu lui échapper, me parut établir la fupériorité de mon procédé fur le fien , parce que s'il n’a poinc obfervé ce phénomène, c'eft que fa fonte n'étoit pas fi parfaite, ou qu'il étoit peut-être obligé de frapper fon creu- fec pour favorifer la réunion des parties de métal fondu: or, A u 4 sen tenir même à cette dernière fuppofition, fon flux n'a. voit pas toutes les qualités convenables, puifque le régule ne le traverfoit àu’2 l’aide d’une percuflion; il ne pouvoit rien conclure de fes effais, dès qu'il n’écoit pas parvenu à donner toujours à fes fondans un égal degré de fluidité & d'équipon- dérance , par la connoiffance même de ja nature des corps unis à la terre métallique; c’eft ce que je crois avoir prou- vé dans le Mémoire deftiné à publier la méthode de ces eflais, Pour tenir lieu du fecret que la veuve de M, Bouchu a refufe de donner pour le prix qui lui en étroit offert par les Etats de Bourgogne. . : Cependant je crus devoir fufpendre mes Expériences fur les mines de fer, pour les diriger plus particulièrement fur la cryftallifation de ce métal, & Jen fis des deux fortes: Zes unes, pour m'aflurer fi la nature du Aux environnant, n'avoit pas quelque part à ces produits : /es autres, pour vérifier fi je les obriendrois toujours femblables en employant le fer & la terre ferrugineufe dans tous les différens états poflibles; & les réfultats ont été très-fatisfaifans. 1. J'ai eu des culots cryftallifés dela même manière, en em- ployant fucceflivement pour fondant le fel de tartre, le {el ma- rin , le {el de Glauber, le borax, le fel neutre arfenical, tous ces {els mélés d'un peu de verre & de pouflière de charbon; enfin le pur laitier blanc fpongieux de fourneau de fer, quieft,comme 518 OBSERVATION l'on fai, la partie la plus légère du verre, qui fe forme avec l’ar: gille & la verre calcaire. ‘ 2.° Jai obtenu les mêmes culots avec la même cryftallifation, en traitant fucceflivement les mines de Pefme & de Jufley, données comme les exrrèmes des bonnes & mauvaifes qualités, la pierre d’aimant, l'hématice, les grès ferrugineux , la chaux, les précipités de fer, le fer lui-même, enfin l'acier d'Allemagne & d'Angleterre, Ainfi , cette opération devient, par-là, intéreflante pour les Sciences & pour les Arts : pour les Sciences, pat les rapports qu'elle préfente dela formation des réoules métalliques avec les concrétions régulières des corps falins, & en ajoutañt un fait à ceux qui nous ont déjà conduirs fur la route de la vraie théorie de leur compofñition: pour les Arts, en achevant de détruire le préjuge de la diverfcé eflentielle des efpèces de fer contenues dans les différentes mines. BOSS TIM R I'P TOU. M L'Auteur a cru devoir joindre ici le deflein de cette cryftal- lifation. La Fig, I. la repréfente dans ie culot d'acier fondu, petant ro gros, 2 grains; la partie fupérieure où l'on n'apperçoic au- cunes lignes, eft celui qui a été frappé par l'air, n'étant pas re- couverte par le flux. La Fig. IT. repréfente la cryftallifarion du même culot vue à la loupe. S Tous les autres régules obtenus par la fonte du métal ou de fes mines, ne préfentant aucune différence dans leurs cryftalli- fations, on a pen qu'il fufifoit d'en deffiner une. Tom. IX. Pay, 518 Dr Er LA bat ds Li fl LUIUR + DE LA CRYSTALLISATION EU FER. st9 La Fig. III. reprélente une hématite d’un genre particu- lier ; elle fait partie de la belle colleétion de Minéraux appar- tenans à M. Beffor, qui a bien voulu la confier à l'Auteur pour la faire deffiner. C’eft une cryftallifation minérale ferrugineufe , qui paroît avoir autant de rapports avec la cryftallifation de la Fig. I. qu'une métal minéralifé peut en avoir avec fon régule parfaitement pur. Cette hématite dont la furface inférieure eft polie, de cou- leur brune tirant au verdâtre, eftcompofée de plufieurs couches, celle du defous, de quatre à cinq lignes d’épaiffeur, eft faite en forme de rayons à-peu-près comme les pyrites. On diftingue, en quelques endroits, fur les côtés, une feconde couche de lépaifleur d’une ligne, tantôt en cryftaux brillans, tantôt unie & terne. Sur cette feconde couche on en apperçoit une troifième, qui règne aflez uniformément, & qui étant découverte dans une partie , préfente des efpèces d’alvéoles : ces alvéoles fonc deflinés en grand, Fe. W7. pour faire voir qu'ils paroiffent eux-mêmes formés de plus petites figures femblables, qui fe font remarquer dans les cavités régulières , terminées par les lignes faillantes. La troifième , couche qui forme la croûte'de ce minéral, & qui n'en recouvre plus qu'environ une moitié , paroît formée de petits primes réouliers qui fe couchent par des faces polies, & font implantés dans des alvéoles femblables à ceux que lon apperçoic dans la partie découverte : le deflus de cette croûte conferve lui-même quelque apparence de la régularité $20 OBS ER V ALTIFONNES.: des alvéoles; mais les prifmes fonc terminés par une efpèce de petit mamelon, & la piupic de ces mamelons font renfoncés à leursextrémités, comme une foufflure métallique dont on au- roic enlevé la partie fupérieure. | Enfin la F;g. IV. repréfente la même hématite vue de côté, pour indiquer l'ordre des couches. MÉMOIRE MEMOIRE IDE EXPÉRIENCES Sur L'AIR FIXE qui fe dégage de la BIÈRE en fermentation. Par M. le Duc DE CHAULNES. Lez vorsrwace du quattier où les Brafferies font fréquen- 1, à P'acadés tes, m'ayant fait naître , depuis quelques femaines, le defir mie le 13 > Décembre d’aller voir les travaux des Braffeurs , l'infpeétion des phéno- :;,4.e mènes de l'air fixe, m'a engagé à faire, fur ce mixte, plu- fieurs Expériences, dont jai cru devoir rendre compte à l'Académie. Je m'étois fi peu occupé de cette inc jufqu'à ce jour, que j'aurois peut - être dù commencer par lire les Ouvrages qui en ont traité ; mais J'avoue que l’exceflive prolixité de quelques-uns , m'a fait craindre d’embarrafler > malgré moi, mes idées, plutôt que je ne les étendrois; j'ai donc préféré de fuivre uniquement, en faifanc mes recherches , la marche qui fe préfenteroit à à moi comme la plus ES ; téfolu, comme je l'étois, de minftruire après- coup des faits connus, pour éviter de donner aujourd'hui, comme fait nouveau, ce qui ne left pas. J'ai fuivi ce projet , & non - feulement jai * Les Expériences ont été faites au mois de Septembre 1775, Tome IX, Vvy $22 MÉMOIRE parcouru, depuis mes obfervations, les livres publiés fur cette matière; mais jai confulté plufieurs Membres de cette Acadé- mie. Ils ont penfé comme moi, fur la nouveauté de la plupart de mes Expériences, & ils ont même cru que je ferois bien d'en donner quelques-unes, qui ne font que concourir à l'é- tabliflement de plufieurs vérités déjà connues , mais qui les établiflent mieux, & les préfentent peut-être avec plus d'ordre & de méchode, qu'elles ne l’ont encore été. Je vais donc rapporter, avec le plus de précifion quil me fera pofñlible , les Expériences que jai faires, & leur objet : je puis aflurer qu’elles ont été avec exaétitude; j'aurai foin de citer celles qui y ont rapport, & que d’autres ont faites avant moi; & d’ailleurs je me permettrai à peine quelques conjeétures fur les conféquences, loin de me livrer à l’efprit de fyftème & aux hypothèfes. Le lieu où j'ai fait toutes mes Obfervations, eft la Brafferie de M. de Zongchamps, où la plus grande intelligence des moyens mécaniques de tout genre, eft développée. C'eft lui qui a donné, dans l'Encyclopédie, la defcription de l'Art des Brafleurs. Le père & le fils ont mis trop de bonne volonté à m'aider dans mes Expériences, pour que je "rs pas loccafion de leur en témoigner ma reconnoiflanée. Les ayant prié de me faire avertir, quand ils auroïent une cuve de Bière en fermentation; ils l'ont fait. Je m'y fuis rendu. J'ai trouvé, en arrivant, une cuve de fept pieds de long, fur cinq de large, & fix de profondeur, au fond de laquelle la Bière fermentoir. Il y en avoit 2 pieds de hauteur , & par conféquent 4 pieds d'efpace vide au- deflus. M. Prieflley, ayant avancé qu'il ne règne fur la Bière fer- mentante, qu'une Cpaileur de 9, ou 12 pouces d'air fixe, J'ai cru pouvoir enfoncer une lumière aflez profondément dans la cuve; mais l'ayant effayé , j'ai reconnu, avec furprife, qu'elle ne pouvoit pas, fans s'éteindre, defcendreau-deflous de fes bords, #6 S'U:R' ALU AUT ROUEN NE. 523 Les Expériences que j'ai faites depuis, m'ont appris que l'é- paifleur de certe couche d'air fixe, ne dépend que du point auquel la fermentation eft avancée , de la quantité de matière qui fermente, & de la profondeur de la cuve. À mefure que la fermentation augmente, l'air fixe s'élève jufqu'à ce qu'il foit de niveau avec les bords du vaifleau. L'air ambiant diflipe alors la portion qui les dépañleroit : car le fimple conta& de l'ait feroit trop long à le difloudre. Toutes ces obfervations me font préfumer que M. Prieflley a fait fes Expériences dans une cuve, dont les bords n'étoient qu'à 9 ou 12 pouces de la furface de la liqueur , auquel cas on fent que la propofition ne peut être que relative au vaifleau. Si la cuve avoit $o pieds de profondeur, l'air fixe s’'élèveroit librement jufqu’à fes bords. Quand la fermentation à duré aflez long-tems, on foutire la Bière, par un gros robinet, qui eft au fond de la cuve; toute la couche d’air fixe commence, dans ce moment, à defcendre, & S'abaifle à mefure que la liqueur s'écoule ; de forte que quand elle eft toutefoutirée, il refte au fond de la cuve quatre pieds d’épaifleur de cet air, & pardeflus, deux pieds d'air ordi- naire. Le courant d'air ambiant n’agiflant plus alors fur l'air fixe, puifque fa furface eft inférieure de deux pieds au bord du vaifleau , le fimple contaét des deux airs, quoique par une furface auffi large, que fept pieds fur cinq , agit fi lentement fur l'air fixe, qu’au bout de fept heures, il n’y en a qu'environ les deux tiers de diflipés , & qu'une lumière ne peut encore ap- procher du fond de la cuve, à plus de 15 pouces, fans s'éteindre. Ces phénomènes de l'air fixe m’ont paru prouver fi formel lement fon excès de pefanteur fur l'air commun, que jai cru pouvoir tenter avec fuccès l’Expérience fuivante, qui m'a effec- tivement réufli. Ayant defcendu un bocal dans l'air fixe , je l'en ai trouvé rempli, quand je l'ai remonté, au point qu'une lumière s’étei- Vvy ij Tranfvafon de lair fixe. 524 MÉMOIRE gnoiït au niveau de fes bords, j'ai verfe doucement alors cet air fixe dans un autre bocal d’égale capacité , rempli d’air commun, & jufqu'au fond duquel la lumière brüloit : Vair fixe eft cellement defcendu, par ce procédé fimple , dans ce fecond bocal ; qu’en effavant d’y plonger la lumière, elle s'eft éteinte dès l'entrée, & qu'elle brüloitalors librement jufqu’au fond du premier. J'ai répété deux ou trois fois cette tranfva- fion d'un bocal dans l'autre , avant d'avoir pu diffiper entiè- rement l'air fixe, nonobftant fon trajet néceflaire au travers de l'air commun. On fent aifement que, pour réuflir à con- ferver feparées deux fubftances aufli équipondérables, il faut verfer doucement, & éviter foigneufement toute agitation de l'air. Une température modérée eft néceflaire, pour pouvoir ob- tenir crois tranfvafions; car, par un tems de gelée, on ne peut guères en faire reuflir qu'une ou deux. Cetre Expérience préfente le fpectacle affez extraordinaire ; de voir verfer rien, (quant à l'apparence optique), avec un bocal où il n’y a rien, dans un bocalouiln’y arien, en prenant méme beaucoup de précautions pour ne pas répandre, & de voir cependant, en peu de fecondes, un animal périr dans ce dernier bocal, une lumière sy éteindre, & un fel s’y cryf- tallifer , comme on le verra bientôt, Lorfque la Bière eft foutirée , par le gros robinet du fond de la cuve, l'air fixe, en raifon du même excès de pefanteur, s'échappe par ce robinet; un bocal, qu'on tient au-deflous, en eft rempli dans un moment, & la lumière s'éteint en y entrant; l'air fixe s'échappe même avec une telle impétuo- fité, que, débordant de toutes parts pardeflus le bocal, j'ai vu la lumière s'éteindre à cinq ou fix pouces en-dehors de fon orifice : en verfant fimplement l'air fixe contenu dans un bocal, cinq, ou fix pouces, au-deflus d’une lumière, cette lumière s'éteint, | Re ed rm S U K L'EAUIIR JEMX E. 525 - Non-feulement ces Expériences fur l'air fixe; ont. l'avan- tage d'établir, plus pofitivement qu'on ne l'avoit fait encore, fon excès de pefanteur fur l'air ordinaire , mais elles fournif fent, comme on voit , un excellent moyen de fe procurer, fans embarras & fans frais, une provifion d'air fixe ; avec la- quelle on peut faire chez foi les Expériences qu'on delire. Il fufic , pour cet effet , de defcendre des cruches dans la cou- che d'air fixe, ou de les préfenter au robinet de la cuve , & de les fermer enfuite exaétement avec un bouchon de liège, qu'on. recouvre avec de la cire molle : non-feulemenc on peut tranfporter ainfi l'air fixe, mais même le garder très- long-tems, une grande jatre peut en fournir une ample pro- -vifon, fi l’on a beaucoup d’Expériences à faire dans le même moment: car lorfqu'on en a enlevé une partie, fi on laifle le vaifleau tranquille pendant 24heures, quoique bien fermé ; l'air commun, qui à pris la place de l'air fixe qu'on à ôté, fe méle au reftant de cet air, de forte que fa denfité eft dimi- nuée au total, en raifon de la quantité d'air commun qui yleft entré. Une lumière s'éteint fubitement. dès l'ouverture, fi l'air fixe à toute fa denfité, au-lieu que, s'il eft plus rare, fuivanc fon degré d’affoiblifflement, elle y file & y languit plus ou moins long-tems. La dernière Expérience que j'ai faite, relativement à l'excès de pefanteur de l'air fixe fur l'air ordinaire, a eu pour objet de déterminer la gravité du premier , d’une manière aufli pré- cife qu'il eft pofhble d'y parvenir. J'ai pris, pour cet effet, un balon garni d’un robinet, & qui eft deftiné à pefer l'air ; après y avoir fait le vide, il s’eft crouvé pefer 7 livres, 1 once, 7 gros. Lorfqu'on y a laïflé reñtrer l'air, fon poids a augmenté de 3 gros 66 grains, & après y avoir fait le vide de nouveau, & y avoir laïflé rentrer l'air fixe, il a pefé 3 gros 42 grains de plus, que plein d'air ordinaire ; ce qui établit, dans cette Expérience, la proportion de l'air fixe à l'air com- mun, à-peu-près comme 2 eft à r. Le balon contient 737 pouces cubes : | | 2° Provifion d’air fixe ; le garder, le tranfporter, Pefanteur de l'air fxe com- parée à celle e Vair ordr naire, 526 MÉMOIRE Comme j'ai fait réflexion qu'il étoic impofhble de connof- tre la pefanteur abfolue de cet air, fi l'on n'avoit pas égard aux degrés du Baromètre, & du Thermomètre, à l'air libre, & fur-tout à celui du Thermometre, plongé dans la Bière qui fermente, j'ai cru devoir recommencer l'Expérience avec ces précautions. J'ai employé, pour cet effet, un balon def tiné à peler Fair, beaucoup plus léger, que celui, que j'avois été obligé d'emprunter, le mien n'étant pas alors en état; comme il furcharge moins le fléau de la balance, il conftate avec plus d'exaétitude les différences légères. Mon Balon pèfe, Vide d'ais Macs ob eee 2 MIDI AS Plein d'air commun, il a pefé....... 2 L4pt 6 Et plein d'air fixer. VAL 4002 [S 3 Die Wim Le Baromètre étant à 28 pouces moins 2 lignes, & le Ther- momètre de Mercure, divifé fuivant la méthode de M. de Réaumur, fe venant à 8 degrés au-deflus du terme de la glace, dans le lieu où étoit la cuve , ce même Thermomètre plon- gé dans la Bière fermentante , s'eft élevé jufqu'à 24 degrés; (la fermentation étant à fa fin.) Cette dernière circonftance eft encore très-néceflaire à obferver , les divers momens de la fermentation donnant differens degrés de chaleur. On voit déjà des différences fenfibles en prenant ces précautions, puifque, dans la première Expérience, le cems étant beau- coup plus froid , l'air fixe ne pefoit pas tout-à-fait le dou- ble de l'air commun, au-lieu qu'il eft ici beaucoup plus pe- fant. Lorfque le Thermomètre a indiqué, cette année, plus de 10 degrés au-deflus du terme de la glace, ainfi qu'en 1740, j'ai cru devoir ajouter une troifième Expérience à celles qui préc: dent. Le Thermomètre plongé dans la Bière au dernier moment De SUR L'AIR Fixer, 527 de fa fermentation , a donné 21 degrés, & le balon ; rempli d'air fixe, n’a pefé qu'un gros & demi de plus, que plein d'air ordinaire. Lorfque j'ai voulu effayer la tranfvañon de cet air, jai remarqué, en faifant l'Expérience, où il peloit fpécifiquement plus du double de l'air commun, qu'on l'appercevoir fous La forme d'une très-légère vapeur ; aufli, en laïffant féjourner, pendant quelques jours, dans un lieu froid, le balon de verre où il étoit renferme, il s’eft dépofé contre fes parois, d’un des côtés du globe, aflez d'humidité pour en altérer un peu la tranfparence , mais pas, aflez, pour qu'on püt, même à la loupe, diftinguer la moindre goutte de liqueur condenfée. J'ai cru néceffaire de conftater à quel point l'air fixe pouvoit exifter , dans toute fa force, fans être vilñble. Voici la manière dont je m'y fuis pris pour y parvenir. Au moment où la cuve venoit d'être évacuée en foutirant la Bière, j'ai laiflé remplir d’air fixe, par le robinet , un bocal que je tenois entre une lumière & mon œil; comme cet air occupoit l'efpace que remplifloit la liqueur chaude un mo- ment auparavant, il eft forti fous la forme d’une vapeur lé- gere ; mais un quart d'heure après, les parois de la cuve vi- dée ayant eu le tems de fe refroidir; en faifant la même Ex- périence, on ne voyoit pas la plus légère apparence de va- peur; l'air fixe paroïfloit avoir la même force , fa denfité pou- voit cependant être un peu diminuée, mais on reconnoifloit, par l'épreuve de la lumière, que fa hauteur étoit la même dans la cuve. Après avoir fait ces recherches préliminaires fur le poids EL, SSL es PACE D de l'air fixe , j'ai pañlé à celles qui étoient plus veritable- ment mon objet, & qui avoient pour but-de connoïtre fa nature. J'étois perfuadé qu'un acide y jouoit le principal rôle, & L'air fixe eft entièrement invifble, 528 MÉMOIRE je n'étois pas le premier de cette opinion , puifque M. Prieft- ley lui-même, à dir que cet air n’éroir peut-être, qu’un acide foible, & d'une nature particulière. Il rapporte enfuite que M. Beroman d’ Upfal, ne l'appelle, que l'acide aérien, qu'il a rougi la teinture de Tournefol avec ; & il ajoute enfin, que M. Hey avoit trouvé que cette teinture ainfi rougie , reprenoït à l'air fa couleur ordinaire. | D'après cette Expérience de M. Hey, citée par M. Prieft- ley ,; on ne conçoit pas trop pourquoi le même M. Prieftley rapporte un Chapitre entier d'Expériences faites, par le même M. Hey , pour prouver qu'il nya point d’acide dans l'air fixe. Ce Chapitre eft intitulé , à la vérité , qu'il n’y a point d'acide vitriolique; mais l'air fixe de M. Preflley , étantle produit d’un cffervefcence caufée par l'acide vitriolique, l'acide qui fe trou- veroit dans cet air fixe, ne pourroit être que l'acide vitrioli- que, ou l'acide particulier de l'air fixe. Or le Chapitre eft d’au- tant moins exaétement intitulé, que les Expériences qui y font rapportées, ont bien pour objet d'examiner en général, silya, où non, un acide dans l'air fixe, mais non pas déclaircir la nature de cer acide. Ces Expériences, au refte, ne font point concluantes. M. Æey s'eft fervi , pour l'éprouver, de fyrop de violettes, qui ne rougit qu'avec une quantité confidérable d'acide. Pour peu que le fyrop ait fermenté, il y devient de plus en plus infenfble, parce que la matière colorante fe dé- truit. Ce n’eft, en général, qu’en étendant le fyrop dans beau- coup d'eau , que les changemens de fa couleur fonc aifés à remarquer , & M. ey n'a mêle qu'une once d’eau imprégnée d'air fixe, avec une cuillerée à thé de fyrop de violette en nature. Enfin, puifque le même M. Hey a rougi, dans l'air fixe feulement , la teinture de Tournefol, ce qui eft une ex- cellente preuve de fon acidité , on eft très-étonné de lui en- tendre avancer , comme une démonftration du contraire , qu'il n'a pas rougi le fyrop de violette , qui eft un mauvais moyen d'épreuve pour les acides, & qui r’eft bon que pour les alkalis :la ceinture du Tournefoi qui cit, au contraire, très-peu {enfble SU Ri LIAXR “FIÈX E 529 fenfible aux alkalis, left fort aux acides , & auroit dû être choifie par préférence : enfin on n'entend pas pourquoi M. Hey dit que l'eau farurée d’air fixe , n’a point fait d’effer- vefcence , & ne s'eft pas troublée avec les alkalis fixes ou vola- tils. Les acides, même concentrés, ne troublent jamais ces alka- lis, à moins qu'il ne réfulte de leur combinaifon , un fel très- peu foluble, & qu'ils ne foient fi rapprochés, qu'il ne fe trouve pas aflez d’eau pour le tenir en diffolution. Quant à l'effer- vefcence, il faut auffi que les acides & les alkalis foient rap- prochés à un point aflez confidérable , pour en caufer par leur mélange. J'ai donc été fort étonné de ces obfervations fur l'acide de l'air fixe, & elles n’ont influé en rien fur les effais que je m’étois propofé de faire : mais j'ai cru devoir en parler, parce que c’eft chofe qui mérite difcuflion , qu'un Chapitre tout entier d’un homme favant, deftiné à établir ce qu'il croit une vérité, Au refte, en faifant des recherches fur l'acide de l'air fixe, qui fe dégage de la Bière en fermentation , J'ai eu moins d'avantage pour le démontrer, comme on le fentira . facilement, que ceux qui ont fait leurs Expériences fur l'air fixe qui a été produit par l'effervefcence de la craie & de l'a: cide vicriolique, qui eft Le plus fort de tous. Pour commencer donc l'examen de cet acide , j'ai rem- pli plufeurs verres à liqueur , de teinture de Tournefol , étendue dans de l’eau diftillée ; j'ai verfé dans l'un de l’eau faturée d'air fixe, & la teinture a pris la plus vive rougeur, J'ai defcendu le fecond de ces verres dans la couche d'air fixe, où la teinture eft devenue fenfiblement rouge en peu de momens, On a verfe , dans le troifième, quelques gouttes de la Bière elle-même, qui fermentoit, & qui ont de même rougi la teinture. Enfin pour m'aflurer, pat un à-peu-près, affez exaét, de Tome IX, Xxx Acide de l'a fixe. Acide de Pair fixe, comparé à l’acide vitrio lique, 530 MÉMOIRE la quantité d'acide, contenu dans l'air fixe, & en même tems de la vérité de laffertion de M.-Hey , que la couleur rouge, qu'il communique à la teinture de Tournefol difparoit à l'air, J'ai fait l'Expérience fuivante. Après avoir coloré deux livres d’eau diftillée , avec affez de teinture de Tournefol, pour que fa couleur paiñt toujours bleue , même quand elle éroit en oppofition avec la lumière; J'ai partagé cette liqueur en deux parties, que j'ai mifes dans deux grands verres, en obfervant de ne mettre que 1$ on- ces =: a liqueur dans l'un , & une livre dans l’autre. J'ai verfé dans le premier une demi once d’eau faturée d’air fixe, qui ne communique à la teinture, qu'un degré de rougeur fufh- fant, pour quelle puifle encore en manifefter aifement une augmentation. J'ai pris alors de l'acide vitriolique , fair avecune once d'huile de vitriol blanche, & bien concentrée, mélceavec 32 onces d’eau diftillée, & j'en ai laiflé comber, goutte à goutte, dans l'autre verre, avec un chalumeau renflé , jufqu'à ce que la rougeur de la teinte me parût bien exactement la même; il m'a fallu, pour égaler cette teinte, cinq gouttes de l'efprit de vitriol que je viens de décrire. Ce qui prouve qu'il y a envi ron l'équivalent de cinq gouttes d'huile de vitriol concen- trée, affoiblie par trente-deux parties d’eau, (1) dans une (1) IL fe trouve, dans une livre d’eau faturée d’air fixe, trente-deux fois autanc de fubftance aërante , ou d’acide aërien, que dans une demi-once de cette eau, de même qu’il fe trouve trente-deux fois plus d'acide vitrio- lique dans cinq gouttes d'huile de vitriol concentrée, que dans cinq gouttes de la même huile affoiblie par trente-deux parties d'eau. On .fent donc qu'il ne pêut y avoir d’obfcurité dans cette Expérience, que fi l'on sem- barrafle l’efprit par l’eau faturée d'air fixe qu'on ajoute à la livre d’eau diftillée. Comme l'eau diftillée ne compte pas, on doit la retrancher en raïifon de 11 quantité d’eau faturée qu'on veut ajouter. Par ce moyen, on agit toujours également des deux côtés fur la même quantité d'eau éga- lement chargée de matière coloranté. Si l’on vouloit faire lExpérience de cette dernière façon, il fufiroit d'ajouter direétement à la livre d'eau faturée, la quantité de gouttes de teinture de Tournefol , qi aurotent fait prendre aux quinze onces d’eau contenues dans l’autre verre, la couleur demandée; mais lExpérience fe fait trente-deux fois plus exac- tement en n'employant que des 5, comme je J'ai fait, SUR L'AIR FIXE. 531 livre d’eau, faturée d'air fixe. Le terme de cette faturation eft aflez conftant »lorfqu'un bocal, qui contientune livre ou deux d'eau, a paflé pluñeurs heures dans la cuve, & y a fouvent été agiré. Celui de l'huile de vitriol left à-peu - près autant, lorfqu'on la prend blanche , bien concentrée , & qu'elle à été contenue dans des flacons exaétement bouché. Cette Expérience m'a-encore fait voir, qu’en colorant avec très-peu d’eau farurée d'air fixe , la teinture de Tournefol, très-bleue, & très-affoiblie » elle perdoit une grande partie de $ fa couleur à l'air ordinaire , Comme l’avoit annoncé M. Hey. La pareille teinture colorée par l’acide vitriolique , en perd auffi un peu, mais beaucoup moins. Si, au-lieu d'acide vitrio- lique, on emploie le vinaigre radical, qui eft naturellement plus analogue à l'air fixe de la Bière » ON aura une dimi- nution de couleur auff forte qu'avec l’eau faturée d'air fixe. L'acide de cet air me devenant de plus en plus démontré ; par ces épreuves, j'ai penfé à lui préfenter une fubftance qui pût s'unir facilement avec lui, & me procurer un fel neutre, dont il feroit peut-être pofble, après, d’examiner la nature, J'ai employé, pour cer effet, l’alkali végétal leplus pur, préparé avec là crême de tartre, brûlée à l'air libre, difloute en- fuite dans l’eau diftillée. Cerre diflolution 4 été évaporée dans des bañines d'argent ; on a rediflous le fel reftant dans l'eau diftillée , & cette nouvelle diflolution, filtrée, a été de nouveau évaporée doucement , de manière que la liqueur, quoique tiède, laifsät dépofer une partie de fon {el. Cet alkali, filtré encoreune fois, pèfe une once 4 gros $ grains, dansun fla- Con, qui tient une once d’eau. C’eft celui dont je parlerai tou- _ jours dans ce Mémoire » lorfqueje n’en fpécifierai pas un autre, J'ai enduit, avec cette liqueur alkaline, l’intérieur d’un bo- cal tenant environ 8 pintes, & je l'ai defcendu dans l'air fixe; bientôt je l'ai retiré entièrement tapiflé de fel cryftalifé. Les Expériences, que j'ai faites depuis, m'ont appris qu'un inftanc fuffoit pour opérer cette cryftallifation, & qu'elle n'exigcoic Xxx ij Volatilité es acides, fur-tout de celui de l'air xe. Cryftallifation de l’alkali vé- gétal par lair fixe en peu de fecondes. Cryftallifer une fivre d’al- kali végétal en deux heures par l'air fixe. 33% MÉMOIRE que le tems néceffaire pour verfer, hors de la cuve, dans un bocal enduit de cette manière, l'air fixe contenu dans un au- tre bocal ; fi lon tient , pendant cette tranfvafion de l'air , le bocal enduit entre fon œil & la lumière, on voit la cryftallifa- tion végéter en peu de fecondes fur fes parois, & les obfcurcir de la façon la plüs fingulière (1). Comme le fel produit par ce procédé, devenait fort inté- téflant à connoïtre, fai cherché à m'en procurer une quan- tité : j'ai fufpendu, pour cet effet, autour de la cuve, & dans fon intérieur, 12 bocaux pareils à celui que j'avois employé, au fond de chacun defquels, j'ai mis deux onces d’alkali. Comme il ne falloit qu’un inftanc pour cryftallifer la diflolution , qui en- duifoit l'intérieur du bocal, un homme alloit continuellement d'un bocal à l'autre, & failoit pañler la liqueur, du fond , fur les parois, afin de préfenter toujours à l'air fixe une nou- velle furface d’alkali, non cryftallife ; je fuis parvenu, par ce moyen, à me procurer, en deux heures , une livre de ce {el, cout égouté, fur le papier gris. (1) La même liqueur alkaline fimplement expofée à l'air commun, y fournit aflez promptement, par une évaporation infenfible des cryftaux ana- logues à ceux, que l'addition de l'air fixe y produit plus rapidement, & qui Ont toutes les mêmes propriétés, qui feront fpécifiées plus bas. On ne fera point étonné de ce phénomène, fi l’on réfléchit que le fimple contaét de l'air fixe fufit à l'air commun, pour en faire une diffolution par- faite. Dès-lors il eft évident qu'il y en a toujours dans l'air de l’athmof- phère , une plus on moins grande quantité, puifqu’il s’en dégage continuel- lement de l’immenfe quantité de végétaux, qui fermentent & fe décompoñent fans cefle à la furface de la terre. Cette diflolution continuelle de Fair fixe, eft même de la plus grande importance dans le mécanifme de l’Uni- vers, pour reftituer fans cefle à l'air commun fa falubrité, toujours alterée pas les efluves putrides, qui s'élèvent auf de la furface de la terre, dans tous les tems. L’aétion de l'air fixe fur ces émanations dangereufes, a été prouvée de la manière la plus complète, par les belles Expériences de MM. Black & Macbride, & par la fuperbe Expérience de M. Préefiley, qui rétablit auffi les fubftances putrides, en les expofant fimplement aux éma- nations, qui fe dégagent des végétaux, dont la féve eft dans toute fa vigueur: SUR ÆUAIROEIXE 533 Je rendrai compte à l’Académie, de l'examen que j'en ai commencé ; mais je crois qu'il faut le faire précéder par quel- ques Expériences , qui trouveront plus naturellement leur place ici. Il éroit moins important d’avoir démontré la préfence d’un acide dans l'air fixe, que de favoir à quel point cet acide en étoit partie conftituante & néceflaire; s'il y étoit entièrement lié, fi l'on pouvoit l'en féparer , &, dans ce cas , quelle feroit la nature de l'air fixe après cette féparation. Afluré , comme je l'étois , de l’effer de l’alkali fur cette fubftance, je m'en fuis fervi pour réfoudre ces queftions par l'Expérience fuivante. J'ai pris deux de ees bocaux, dont on fe fert communé- ment pour les batteries électriques, ayant 1 4 pouces de hauteur, fur quatre de diamètre , dont les fonds font plats , la forme cylindrique & le diamètre égal dans toute leur longueur. J'ai garni le bord de ces vafes avec un cercle de cire molle, & j'ai faic couper des plaques rondes de glace, pour leur fervir de couvercle; J'ai defcendu enfuite ces vafes perpendiculaire- ment, & débouchés, dans l'air fixe, après avoir mis dans l’un la hauteur d'un demi- pouce de mon alkali en liqueur , & dans l'autre un volume égal d’eau, afin qu'à l’alkali près, les cir- conftances fuflent pareilles. À l’'inftant où j'ai retiré mes vaif- {eaux , une lumière s’'éteignoit également au niveau des bords de tous deux. J'ai fait appliquer alors les plaques de glaces fur le cercle de cire, pour fceller mes bocaux, enfin, en les tour- nant horizontalement, j'ai enduit leurs parois, avec la liqueur, qui d'abord n’occupoit que le fond. Pendant l'efpace de 24 heures qu'ils ont refté fans étre débouchés, on a répété plu- fieurs fois cette manipulation, afin de préfenter fouvent une grande furface d’alkali à l'air qu'ils renfermoient. Rien n’a changé dans lebocal, qui ne contenoit que l’eau; mais bientôt les parois de celui où étoit l'alkali, ont com- mencé à fe couvrir de goutres de fel congelé , fans forme cryftallifée , & ces gouttes de fel font devenues en peu de tems Vide produit par la combi- naïfon de Pair fixe & de l’al- kali végétal. 34 MÉMOIRE aflez épaifles, pour qu'il füt impoflible de rien diftinguer dans fon interieur. Au bout de 24 heures, j'ai fait ouvrir mes vafes, en com- mençant par celui où il n'y avoit que de l’eau ; fon couvercle s’eft {éparé facilement, l'air fixe n'étoit point diminue , la lu- mière s'éteignoit au niveau de fes bords, comme quand on lavoit rempli , un verre de montre plein de teinture de Tour- nefol affoiblie, qu'on y introduifit, rougit bientôt dans fon intérieur ; enfin la petite quantité d’eau qu'il contenait, étoit devenue fort acidule , & puiflamment imprégnée d’air fixe. Le bocal où étoit l'alkali en liqueur , étoit dans un état bien différent ; le couvercle de glace étoit fi adhérent, qu'il y avoit à craindre de brifer le vafe, en voulant le débou- cher. Comme je fentis que l’abforption de l'air fixe pouvoit avoir occafionné le vide , Jinférai la pointe d’un couteau entre le bord du bocal & fon couvercle, il fe fit alors un etit filement qui dura fort long -tems; quand il fut fini, on déboucha le bocal avec la plus grande facilité; une lumière introduite jufqu’au fond , continua d'y brûler de même, & un verre de montre, plein de teinture de Tournefol , ya con- fervé entièrement fa couleur. Il reftoit au fond du bocal une portion de liqueur, qui n’étoit pas cryftallifce ; enfin le fel qui l'éroit contre fes parois, s’'eft trouvé; après avoir été foigneufe- ment recueilli & feché, peer $ gros 21 grains. . J'ai répété deux autres fois cette Expérience, & j'ai trouvé la première, $ gros 37 grains de fel, & la feconde $ gros 52 rains. On voit que ces légères differences ont été vraifem- bliblement occafonnées par celles, qui fe font trouvées dans la capacité des vaifleaux , & plus vraifemblablement encore par les différences que les caules dont j'ai déjà parlé , peuvent occafonner dans la denfite de l'air fixe. D'après l'Expérience que je viens de rapporter, il ne pou- voit plus me refter aucun doute fur la manière dont l'acide SUR L'AIR FIXE. 535 étoit ani à l'air, dansle mixte, qu'on nomme, ass fixe. Il falloit que cette union füc intime, pour que l'air füt plutôt abforbé, que d'abandonner l'acide, lorfqu'on lui préfentoit un corps, auquel il écoit forcé de s'unir. J'apprenoïs en même-teins qu'il failoit à-peu-près 17$ pouces cubes d'air, pour cryftallifer $ ros 21 grains d'alkali ; enfin la liqueur reftée dans le bocal, étant abfolument limpide comme l'eau , au-lieu que celle des bocaux mis dans la cuve, avoit une teinte jaune aflez forte, il en réfultoitune manière d'obtenir le felneutre d'air fixe, & d’al- kali végétal, dans un état de pureté beaucoup plus grande, que par l'Expérience précédente. ’eft dans cette vue, & pour m'en procurer une quantité, que jai d'abord répété l'Expérience. J'ai fait couper des pla- ques de glace pour fervir de couvercles , avec de la cire molle à à crois grands bocaux , dans chacun defquels j'ai mis trois onces d’alkali. J'efpérois que ces plaques n'ayant que fix pouces de diamètre, & ayant été choïfies aflez épaifles , réfifteroient au poids de l'air : cependant la raréfaétion de l'air intérieur en à biencôc fait cafler, & enfoncer deux avec bruit, &, ce qui eft pourtant bien extraordinaire, l'air fixe étoit encore fi peu al- teré dans ce moment, qu'une lumière s’eft éteinte au niveau des plaques , quand on a voulu l'introduire dans le bocal : la troifième plaque a réfifté, le vide ne s'étant pas fait dans le vale , apparemment par le défaut d'application aflez exa@te du couvercle à fes bords : en débouchant le vaifleau, on à trou. ve fix gros d’alkali en liqueur. Le fel recueilli avec foin, pefoit tout humide , 2 onces 3 gros , & feché , 1 once 5 gros. Ce poids eft dans le même rapport avec la capacité de ce bocal, que celle du bocal de l'Expérience précédente avec le poids du fel qui y a été trouvé. J'avois rempli d'air fixe, un bocal cylindrique , en même- tems que les trois grands bocaux, dont je viens de parler, & Jy avois affujéti un Baromètre tronque , afin de conftater le degré de raréfadtion de l'air ; mais le vide ne sétant point Volume d’air réduit à 1 par a combi- naifon de Pair fixe & de lal- kali végétal, 536 MÉMOIRE fait dans ce bocal , non plus que dans l’autre, j'ai été obligé de réformer depuis quelque chofe à mon appareil. J'ai pris le parti de faire ufer fur du grais , les bords de tous les bo- Thermomètre avec Pair fixe & l’alkali végé- tal, caux dont je me fuis fervi, pour que la juxt -appoñrion für parfaite , avec les couvercles, que j'ai fait faire avec des glaces aflez épaifles pour réfifter au poids de l'air, & que j'ai lutté avec deux parties de cire, & une de térébenthine ( 1 ). J'ai ré- pété de cette manière l'épreuve du Baromètre tronqué, qui a parfaitement réuffi, & où le mercure eft defcendu jufqu'à 22 lignes de fon niveau. J'ai mis aufli un Thermomètre dans un vafe cylindrique; rempli d'air fixe , & où il y avoit deux onces d’alkali, pour connoître le degré de chaleur caufé par la combinaïfon de (x) J'ai manqué plufeurs fois cette Expérience, malgré toutes ces pré- caution. Il eft aifé de fentir les dificultés dont elle eft fufceptible. Le vide ne fe fait point aufhi promptement ici, que dans la Machine Pneumatique, où l'équilibre eft fufffamment rompu, dès le premier coup ée pifton, pour que la prefion de l'air extérieur attache le récipient, au lieu que, dans l'Expé- rience dont il s’agit, s’il y a le plus léger défaut d'adhérence entre le bord du vafe ou le couvercle, & la cire, l'air rentre par cette ouverture, avant d’avoir formé fur le couvercle, une preflion fufifante, pour caufer, en écra- fant la cire, une clôture abfolue. Pour fe procurer cette cloture, il faut com- mencer par bien chauffer le couvercle, & le bord du vafe, puis frotter ces deux parties avec le lut de cire, en obfervant de ne pas frotrer feulement les bords du vaiffeau, mais même quatre ou cinq lignes plus bas en-dehors & en-dedans ; il faut enfuite pofer le cordon de cire fur le bord du vale, en l’appuyant bien, de manière que le bord y foic exaétement renfermé , juf- ques à trois ou quatre lignes au-deflous. Le vaifleau ne doit fur-tout refter plongé dans l’air fixe qu'un inftant, de peur qu’une légère humidité n’em- pêche l’exaéte adhérence du couvercle, & il faut cependant defcendre per- pendiculairement, fur le vaiffeau, pendant qu'il eft dans l’air fixe, le cou-« vercle auquel le petit Baromètre doit être attaché par un fil. On prefle alors avec les pouces, des deux côtés, fur ce couvercle, & on achève en- fuite de l’appuyer fur la cire, quand il eft hors de la cuve. Enfin, & pour dernière précaution, il faut bien obferver, en faifant promener fur les parois du bocal, la liqueur qui eft dans le fond, qu’elle ne touche pas la cire, fur-tout dans les premières heures. 11 m'eft fouvent arrivé de ne pouvoir obtenir le vide, pour avoir manqué cette feule précaution. Quelque court que foit le moment où le vafe eit refté dans l'air fixe, fi le couvercle n’étoit pas chaud, la vapeur fixe qui s’y attache, permet enfuite à l’eau d'y péné- trer avec la plus grande facilité. ces deux SUR L'ATRYEIXE G37 ces deux fubftances, & il y a eu deux degrés & demi de cha- leur dans le vafe où elles étoient, de plus, que dans un vafe pareil, où j'avois placé un Thermomètre de comparaifon avec de l'air ordinaire :les deux vaifleaux étoient fermés par leurs couvercles & de la cire, Un des points les plus importans, qu'il reftoit à déterminer, étoit de favoir, fi le poids du fel fe trouvoit augmenté par l'acide de l'air fixe, qui s'unifloit à lui; mais cette Expérience fingulièrement délicate, préfentoit bien des difficultés , bien peu d’efpérance de fuccès, & exigeoic une grande précifion ; J'ai cependant cru devoir la tenter , & j'ai d'autant mieux fait, que j'ai réufli au-delà de mes efpérances. Voici la manière dont jai procédé, Jai fait faire, avec une lame de cuivre à caraëtère, un fup- port d’une dixaine de pouces de longueur, qui pouvoit fou- tenir par les deux extrémités, à environ deux pouces & demi d'un plan horizontal , une broche un peu plus longue de fil de laiton , terminé d’un côté par une pointe, & de l'autre par un anneau , auquel j'ai fait attacher , pour la fufpendre, un fil double de fix pouces de longueur. Tout cet appareil s’eft trou- vé pefer dans une balance-très-exaéte , de Galonde, ÿ gros 43 grains moins un quart, Jai coupé alors dix-huit ronds de linge fin , qui pefoient exattement enfemble 4 gros, dans la même balance: les ayant humeëtés, avec de l’alkali, médiocrement, pour qu'ils ne puf- fenc pas laïfler tomber des gouttes, je les ai enfilés fur la bro- che, & j'ai de nouveau remis dans la balance, le tout enfemble, qui s'eft trouvé pefer 4 once, 7 gros, 61 grains. À l'inftant même où je venois de le pefer, j'ai pris, par le fil de fufpegfion , la broche & les linges, & je les ai fufpen- dus, perpendiculairement, dans une cruche remplie d'air fixé, depuis quatre jours; j'ai bouché enfuite exaétement la cruche avec un bouchon de liège, qu’on a recouvert après & entouré Tome IX, Yyy Combien l’a- cide de l'air fixe augmente un poids donné d’alkali végé- tal. 538 : MÉMOIRE de cire molle, j'ai fait fixer pardeflus un parchemin huilé; je ne l'ai ouvert qu'au bout de deux fois 24 heures, & comme le vaifleau étoic gros, la diminution de l'air n’a pas empêche la lumière de s’éteindre fubitement dès l'ouverture, quandona voulu l'y plonger , comme au moment où onl'avoit rempli : tous les linges etoient parfaitement roides & fecs; enfin la broche, fon fil de fufpenfion, & les linges enduits, étant repelés de nou- veau avec le fupport de cuivre à caraétère, le tout enfemble s'eft trouvé du poids de $ onces 6$ grains, ce qui fait une augmentation de 7$ grains d'air fixe, pour 6 gros 18 grains & demi d'alkali, c’eft-à-dire, à-peu-près un feptième , dont cette Expérience importante nous apprend que l’ablorption de Fair fixe, augmente un poids donné d’alkali. Cette Expérience doit naturellement occafionner deux Ob- fervations, l’une fur l'humidité qui a pu être renfermée dans la cruche, l’autre fur le poids dont l’eau de cryftallifation feule peut avoir augmente celui du fel, fans que l'air fixe y ait eu au- cune part. Je répondrai à la première , que la cruche étoit neuve ; - [2 ’ e) LA Le qu'elle avoit été fechce, & bouchée, pendant quatre jours avant de l'employer, qu’on l'avoic remplie d'air fixe par un tems de gelée, & qu'elle a toujours féjourné depuis dans un lieu où ë de EURE le Thermomètre s’eft conftimment tenu à trois degrés au-deflus -. LA LA ? A de la glace; enfin qu’on a foigneufement fcellé & même recou- vert le bouchon avec de la cire. - Quant à la feconde objettion , qui porte fur l’eau de cryftal- lfation, non-feulement il faudroit, pour qu'elle füt fondée , que le fel, bien fec, eût exigé autant d’eau, pour fa cryftallifa- tion, que pour fa diflolution, puifqu'il avoit été introduit dans le vale en état de liqueur limpide, mais même qu'il eü e n- core attiré de l'humidité , au-délà de l'eau de diflolution, jufqu'à la concurrence d'° du poids total. Cette réponfe me paroifloit fatisfaifante , mais ne me fem- S'U À Œ''AUR FU X E. 539 bloit pas encore afez décifive, lorfqu’en cherchant des moyens de la réfoudre d’une manière plus complète, j'en imaginai un, auquel je ne crois pas qu'il refte d'objection à faire. Javois de l'air fixe en Expérience avec de l'alkali, dans un de mes vafes cylindriques , où leur combinaïfon avoit fait def- cendre le mercures dans le Baromètre tronqué jufqu’à 22 lignes de fon niveau. Je fongeai que, d’après l'Expérience qui m'avoit appris que l'air fixe étoit à l'air commun , lorfque j'avois rem- pli le vafe, comme deux eft à un, il n’y avoit qu’à pefer exac- tement ce vaifleau, tel qu'il étoic, y laïfler rentrer l'air enfuite & le repefer, pour voir ce dont l'air rentré auroit augmenté fon poids; ilen réfulroir, en doublant ce poids, celui de l'air fixe qui y avoit été contenu, & que le fel avoit abforbé. J'ai fac cette opération, & j'ai eu, d'augmentation, un grosd'air commun. Le vafe contenoit par conféquent deux gros d'air fixe, qui ont été abforbés par 9 gros & 12 grains de {el , qu'on a trouvé en le recucillant avec exactitude, & le faifant fecher, d’abord fur du papier gris, & enfuite fur une lame de verre, à la chaleur douce du fable d’un poële. Je ne vois pas quelle objeétion on pourroit faire contre cette feconde Expérience, puifqu'on a em- ployé plus d'alkali qu'il n’en falloit, pour abforber l'air fixe contenu, que le fel nageoit encore dans la liqueur quand on l'en areriré, & que le vafe a été aflez bien fermé, pour que l'aïrs’yfoit raréfié au point que le mercure n’étoit plus, qu’à 22 lignes au- deffus de {on niveau; il ne peut par conféquent y être entré rien d'étranger, & cette Expérience démontre d’une manière inconteftable, qu'il faut deux grosd’air fixe ou 200 pouces cubes ‘aà-peu-près, pour cryftallifer fix à fept gros d’alkali, tel que celui qui a été décrit ( 1 ) : lorfque cet air eft une fois plus pefant So . (x) Les divers degrés de denfité de l'air fixe, qui dépendent, comme on Fa déjà dit, du degré de chaleur de la bière qui fermente ; de l’époque de ja fermentation, & des degrés du Baromètre, & du Thermomètre à l'air libre, font les caufes, certaines, des différens poids du fel qui a cryfallié dans diverfes Expériences. Yyy.i Sofution du fel d'air fixe refroidit l’eau. Développe- ment de l'air. La terre de VPalkali fe pré- cipite beau- coup plus qu’à Vordinaire. 540 MÉMOIRE que l'air commun, ce qui eft le réfultat d’une température modérée, & par conféquent fon état le plus ordinaire. On peut fe reffouvenir que j'ai annoncé, vers le commence- ment de ce Mémoire, que je rapporterois les Expériences que J'ai faites pour découvrir la nature du fel d'air fixe à bafe d’al- kali végétal :il me femble que c’eft naturellement ici qu'elles doi- vent trouver leur place: ces Expériences, au refte, concourent toutes à me perfuader, qu’il n’y a prefque rien de changé à la na- ture de l’alkali. J'aicependant reconnu, & fufffamment conftaré quelques difiérences, pour ne pas craindre de les annoncer. La difolution du fel d'air fixe, qui avoit été fimplement refluyé, fur du papier gris, au fortir de la cuve, a offert plu- fieurs phénomènes intéreflans. Elle à fait baifler de fept degrés; au moment du mélange avec l’eau , ie Thermomètre de M.de Réaumur, auquel on avoit laiflé prendre féparément, dans le fel, & dans l'eau, la température de l'air, qui étoit à neuf degrés au-deflus de la congelation. Deux onces fix gros de ce fel, ayant été diffoutes dans un Bacon , par l’eau diftillée froide , le bouchon a fautillé plufeurs fois, parce qu'il s'élevoit beaucoup de bulles d'air très-fines de la furface du {el à celle de la liqueur. À mefure que cet air fe dégageoit, il fe féparoit aufli des flocons blancs & iégers, qui fe précipitoient beaucoup moins vite que le fel. Lorfqu'on à filtré la liqueur , on a trouvé fur le papier gris 33 grains d'une terre blanche, pareille à celle qui fe fépare ordinairement des alkalis, quand on les diflout, mais qui a paru être ici, proportionnellement, en beaucoup plus grande quantité. (1) (x) Lorfqu'on rediflout celui qui a été recryftallifé, les mêmes phénomè- nes ne paroiflent prelque plus. Ce qui doit arriver puifque l’alkali ne retient que la portion d'air fixe, qui eft néceflaire pour le faturer, & que le frefte étant volatil, & n'étant retenu par aucune bale, doit s’évaporer comme dans l'eau imprégnée, & les liqueurs fermentées qui perdent bientôt leur mon- sant à l'air, c'eft-a-dire, leur air fixe, SUR L'AIR FIXE s4t Enfin la diffolution m’a fourni, par refroïdiffement , à la fuite d’une évaporation très-lente , des cryftaux à-peü-près pa- reils à ceux de l’alkali minéral, dont les lames appofées les unes fur les autres, font toutefois un peu plus conftimment rectangles. M. Suge, qui a diffous, & cryftallifé 2 onces de ce fel que je lui avois donné, a obtenu des ctyftaux fort fingu- liers de plufieurs formes différentes, mais dont les élémens de la cryftallifation font toujours cubiques : la plupart de ces cryftaux refflemblenc à ceux qu'il a obtenus du fel fébrifuge de Silvius. Lorlque le fel aërien a été fait à l'air libre de la cuve par le premier procédé que j'ai donné, lescryftaux font embarraflés dès la feconde cryftallifation , par une eau-mère, jaune, grafle & très-huileufe; au lieu que celui qui eft fait dans des vaiïfleaux fermés, fe cryftallife beaucoup davantage, & ne laifle prefque point d'eau-mère. Ce n'eft que fur le fel, qui eft réfulté dela première cryftal- lifation, après l'avoir rediflous, que j'ai fait les Expériences fui- vantes. (1) Il décrépite conftamment, ce que ne fait ni l'alkali végé- tal, ni l’alkali minéral; il feroit cependant difficile d’en con- clure la préfence de l'acide marin, puifque le tartre vitriolé & plufieurs autres fels décrépirent de même. .* Il n’eft point deéliquefcent comme l’'alkali végétal, le plus pur , qui left toujours ; même quand il eft cryftallifé. J'ai laiflé exprès à l'humidité pendant plus de deux ans, depuis la le&ture du Mémoire, quelques cryftaux de fel d'air fixe, fort petits, qui fonc reftés fecs. … Il n'eft point pulvérulent & cforefcent, comme lalkali mi- néral ; fa faveur eft alkaline , mais infiniment plus douce que celle de l'alkali pur , même que celui de la foude. ) (1}iLe fel que le contatt: feul de l'air libre: fait cryftallifer lentement dans .la même liqueur, a tous les mêmes caractères. Forme des Cryftaux. Ils décrépitent. Ils ne font point déliquef- cens. Ils ne font point pulvéru- lents. II fe dégage beaucoup plus d’air de l’alkali végétal, quand il eft combiné avec l'air fixe, que quand ü ne l'eft pas. 542 MÉMOIRE Il verdit le fyrop de violette, mais moins que les alkalis: J'ai eflayé d'en Lite quelques cryftaux en poudre , & de les laifler trois jours dans une cruche d'air fixe, pour voir fi, en fe faturant davantage, ils perdroient, en tout, ou en par- tie, cette propriété ; mais je n'ai pu y remarquer aucune difié- rence. Il précipite les folutions métalliques de la même manière que les alkalis, excepté celle du vicriol de Mars, qu'il préci- pite fous une couleur de café au lait(1) ; au-lieu qu'une goutte D végétal ou minéral le plus pur, la précipite en verd oncé. Il fait une vive effervefcence avec lefprit de vitriol le plus foible, avec les acides nitreux, marin , même avec le vinaigre radical, & il fe cryftallife comme à l'ordinaire, dans ces diflolutions, du tartre vitriolé, du nitre, du fel fébrifuge, & de là verre folie, J'ai voulu favoir fi l'effervefcence de ce fel avec les acides; avoit pour caufe , l'excès d’alkali, ou une décompofition de la partie, qu'on pouvoit fuppofer neutralifée, & f1 l'acide de l'air fixe évoit le plus foible de tous. Pour m'en inftruire, j'ai choifi l'acide le moins fort, des acides connus; ç'eft-à-dire, l'acide végétal, qui eft d’ailleurs celui auquel on doit, par préférence, fuppofer le plus d’analogie avec l'air fixe, produit par la Bicre en fermentation. J'ai donc prisune partie de vinaigre radical, étendu dans huit parties d'eau, & j'en ai verfe gros, à gros dans deux verres, après avoir mis dans l'un deux gtos (1) Cette couleur de café au lait étant précifément celle de la mine de fer fpathique, qui, fuivant les Expériences de toute la claffe de Chymie de FAcadémie des Sciencesi, ne differe de la mine ordinaire que par l'air fixe qu’elle contient, a fair faire à M. Lavoifier, l'un des Commiflaires nommés Pour examiner ce Mémoire , la conjeéture fingulière & fort vraifemblable , que çe précipité n'étoit que du fer fpathique artificiellement produit. 2: SUR L'AIR :FAXE. 543 d'alkali végétal bien pur, & dans l’autre deux gros du même fel, faturé d'air fixe , qui avoient tous deux été fechés fur le même bain de fable. L'expofé de cette Expérience pourra ne pas fembler fort intéreflant au premier coup-d'œ1l; mais fon refulcac le paroïtra fürement davantage. Au fcptième gros d'acide, l’alkali végétal, pur, ne donnoit plus d’effervefcence , & au huitième les bulles d’air ont entiè- rement ceflé de s’en dégager; tout le fel étoit diffous : cepen. dant une eau très - légèrement chargée de fyrop de violette, qu'on y a verfé, a pris aflez promptement la couleur verte, & ne l’a entièrement perdue qu’au 12." gros d'acide. Au huitième gros, le fel d’air fixe faifoit encore une vive effervefcence ; il reftoit beaucoup de fel qui n'étoit pas dif- fous; & cependant du fyrop de violecte étendu dans l'eau, qu'on a mêlé dans la diflolution, eft entièrement refté bleu. Le fel n’a été totalement diflous, & l’effervefcence finie, qu’au 18.% gros, des bulles d’air ont encore continué pendant près d'un quart d'heure à s’en dégager, & la liqueur rougifloit alors la ceinture-de Tournefol, __ J'ai encore tenté de chauffer au bain de fable, 4 gros de fel d'air fixe, fec, dans une cornue tubulée Angloife, à bou- chon de cryftal , dont le col eft ufe à l’Emeri, dans le goulot d'un récipient, où javois placé une demi-once d’eau diftillée , colorée en bleu par la teinture de Tournefol; l’eau à été très- peu aërée , la couleur à peine changée, &le fel fournifloit à-peu- près autant d’air dans fa diflolurion. Ce n’eit qu'après avoir fait cette fuite d'Expériences , que Jai cherché, comme je l'ai dit au commencement du Mé- moire , à connoître les travaux qu’on avoit déjà fait fur l'air fixe, & entr'autres ceux de MM. Prieftley, Black, Macbride, & Jacquin. J'ai lu ce que j'ai pu me procurer de leurs Ouvra- Air fixe inti- mement com- biné avec Pal- kali végétal. 544 MÉMOIRE ges, dans les originaux, & le refte dans l'excellent Abrégé, qu'a fait M. Zavoifier, de tout ce qui a été publié fur l'air fixe. J'ai trouvé que ces Phyficiens avoient employé celui qu'on développe de la craie, par l'acide vitriolique, pour cryftallifer l'alkali fixe végéral, & qu'ils avoient rappellé , par le même moyen, l'alkali fixe, & l'alkali volatil cauftique, à l’écat d’alkalis cryftallifables. Après certe le&ture, j'ai cru devoir commencer par faire moi-méme des obfervations, fur les principales de ces Éxpérien- ces importantes, Aïkaïi volait J'ai mis, en conféquence, l’alkali volatil, obtenu par l'inter- cute , & mède du Mrnium , qui eft le plus fort de tous, le plus cauf- ne JE tique, & celui qui cryftallife le moins, dans un de mes cylindres de verre, avec de l'air fixe ; les feules vapeurs de lalkali vo- Jacil m'ont fourni à linftanc même la plus belle cryftallifation, & lorfque j'ai ouvert le vafe, j'ai reconnu qu'il y avoit eu abforption d'air, Cette Expérience m’ayant paru mériter d’être répétée, j'ai defcendu dans l’athmofphère d’air fixe, un de mes vafes cylin- driques, après y avoir verfé deux onces du même alkali volatil; à l'inftanc où fes vapeurs ont touché l'air fixe , renfermé par le couvercle, qu'on avoit placé fur le vafe, il s'eft produit une très-forte chaleur. Je n’ai point encore fait d'Expérience pour déterminer les quantités relatives, Je n’étois pas moins curieux d’obferver les effets de Pair fixe fur les alkalis fixes-cauftiques , que fur l’alkali volatil. J'ai préparé en conféquence, avec environ quatre ou cinq pintes d'eau diftillée, la leflive d’une livre d’alkali minéral très-pur, dans laquelle jai fait éteindre affez de chaux pour la bien fatu- rer, de ce que M. Meyer appelle le cauftrcum. J'ai enfuite fait bouillir quelques inftans cette leflive, & je l'ai flerée.. J'ai prépare S U-R AL Ar IR T'EM X E 545 J'ai préparé de lamême manière, faleffive d’une livre d’alkali fixe-vegéral. Ces deux leflives ne faifoient pas le moindre mouvement avec les acides; mais lorfqu’elles ont été réduites à une pinte à-peu-près par l'ébullition, dans des vaifleaux de fer , elles font devenues effervefcentes, & ayant achevée l'évaporation d'une partie de ces leflives, dans des capfules de verre, celle d’alkali minéral seft entièrement cryftallifce , avant d'être cout à-fait defléchée , & celle d’alkali végétal eft devenue ä-peu-près auff cffervefcente, qu'une leffive d’alkali ordinaire; j'ai été furpris du peu d’adhérence, du foit-difanc caufticum , à V'aikali. Une portion des deux lefives ,que j'avois réduites, chacune, au volume d'une pinte, ayant été placée dans'des petits bo- caux fufpendus par des fils , au milieu d’une cruche d'air fixe, y a efluyé les mêmes changemens en quatre jours. Telles font les Expériences que j'ai faites jufqu'à ce mo- ment , fur l'air fixe, de la Bière , en fermentation. On voit qu'elles ne preéfentent rien, qui doive porter à tirer des con- féquences différentes de celles, qui dérivent naturellement de la théorie des hommes célèbres que j'ai cités, quoiqu’elles y ajoutent quelques faits nouveaux, dont je crois devoir, en peu de mots, recapituler les principaux. La pefanteur de l'air fixe, eft à-peu-près à celle de l'air com- -mun, lorfque le Thermomètre eft à fix degrés au-deflus de la glace , comme deux eft à un; lorfqu'il eft à ro degrés au-def- fus, comme 10 eftà 7, &lorfqu'il eftà ro degrés au-deflous de la congelation , comme 10 ef à 4. Tout démontre qu'il exifte un acide dans cet air , & qu'il n'y en a qu'une très-petite quantité , puifque celui que peut abforber une livre d’eau, qui en eft farurée , ne paroïc équiva- loir, qu’à cinq gouttes d'huile de vitriol concentrée , affoiblie par 32 parties d’eau, ou ä-peu-près. = Tome IX, Z zz 546 MÉMOIRE Cet acide eft volatil, comme l'a bien remarqué M. Hey. Je me fuis apperçu, que l'acide vitriolique l’écoic auffi un peu; mais l'acide de l'air fixe left beaucoup davantage, & paroic l’étre au même degré que l'acide végétal , qui doit être, de tous les acides le plus reflemblant à celui du mixte fourni par la Bière en fermentation. ï L'union eft fi intime entre l'air fixe & fon acide, que ce dernier l'oblige , plutôt que de sen féparer, à s'unir aux al- kalis, & qu'il en rélulte, lorfqu’on les combine dans des vaif- feaux fermés, une raréfaétion que le Baromètre démontre 13 de me Si cette raréfaétion ne fuffifoit pas pour prouver l’abforp- tion complète, & fans décompofition de l'air fixe par l’'alkali, le poids dont cet alkali augmente, qui eft précifement celui de cet air abforbé , fourniroit le complément de la preu- ve, & fi elle ne fembloïc pas fuffifante , on en auroit encore une nouvelledémonftration, par Ja quantité d'air confidérable, qui fe dégage du fel d'air fixe, lorfqu'on le combine avec le vinaigre radical. D'après ce. petit nombre de points capitaux , n'eft-il pas permis de foupçonner, qu'on a fait trop peu d'attention juf- qu'ici à l'acide, qui exifte dans l'air fixe? Cet acide dont cet air füic le fort, lorfqu'il sunic aux corps qui enfont-avides , ne -paroît:il pas devoir être le moyen d'appropriation, que la Na- ture emploie, pour mettre l'air commun en état de fe com- biner intimement avec les corps ? Ceux dontelle fefert pour opérer en grand, cette combinaifon première de fair avec une petite portion d'acide , font les fermentations, les effer- vefcences, &c. il en réfulte un compofe neuf, & entière- ment différent de l'air fimplement chargéde vapeurs acides. Ce dernier eft très-coërcible, & lair-fixe éft prefque incoër- cible, quand il eft feul : il étemc la flamme dans limftant, & tue les animaux en peu. de fecondes ; l'air chargé de { P SU RAI ADR ONERR X'E: 547 vapeurs acides , n’a point ces caraétères (1); enfin l'air fixe eft bien certainement un être diftin@ ; mais à quel point pou- vons-nous efpérer de connoître fon acide principe , puifqul enchaîne plutôt l'air dans les corps, que de s’en fparer, & qu'il s'eft dérobé jufqu'ici à cous les efforts que nous avons faits pour y parvenir. Je fuis cependant loin d'être abfolument fans efpérance fur ce fujet ; il y a des Expériences difficiles & longues, qui pourront vraïfemblablemenc y faire parvenir. J'ai remarqué que le fel d'air fixe cryfallifé, bien feché, de première cryftallifation, & par conféquent exempt de tout ex- cès d'alkali , n’eft pas déliquefcent, & n'a éprouvé au bout d’un mois aucune diminution fenfible , mais il s'y attache ce- pendant, dès les premiers jours , une légère humidité fuperf- cielle qui ne fait point de progrès : or, la très-perite portion d'acide de l'air fixe, provenant de la bière, doit être naturel- lement analogue à l'acide végétal ; feroit-ce donc que cet acide auroit formé, avec l’alkali végétal , quelques atomes de terre foliée, qui eft, comme on fait, un fel déliquefcent & qui doit étre le réfulrac naturel de cette combinaifon ? Doit-on regarder encore comme impoflble d'unit direéte- ment quelques grains d’une bafe quelconque, avec la petite portion d'acide de l'air fixe , qui exifte en nÂture dans l’eau qui en eft faturée, & de retrouver enfuice , par l'évaporation, le fel neutre, qui auroit été produit par fon union avec cette bafe ? Cette idée eft d’autant moins deftituée de fondement, qu'un petit nombre de gouttes d’alkali enlèvent dans l'inftant toute faveur quelconque à l’eau aërée la plus piquante. Er mp M GA (x) L’air chargé de vapeurs de l’efprit dé nitre éteinc cependant la flamme; maïs il ft coëércible. ’ Zzzi] L'air fiixe ne change rien à une folution d’alkali miné- ral. La vapeur du charbon al- Jumé, n’eft que de l'air fixe. 548 MÉMOIRE Enfin l'alkali minéral, pourvu de tout l'air fixe qu'il lui faut pour cryftallifer , eft-il coralement hors d’état de porter fur l’a cide feul fon ation alkaline ? J'ai déjà expofé dans une cuve de bière , fix bocaux de huit ou dix pintes, dans chacun defquels il y avoit quelques onces d’une folution, fa- turce d’alkali minéral; leurs parois fe font garnis de très-petits points blancs, quelques légères croûtes falines fe font formées à la furface de la liqueur ; mais le tout m'a fourni fi peu de fel , que j'ai eu grande peine à retirer quatre gros du total, qui ne m'ont donné, en les cryftallifant, que des cryftaux d’al- kali mineral. En terminant ce Mémoire , je crois devoir rapporter une dernière Expérience, qui n'a point de traic à l'air fixe de la Bière , mais qui eft bien eflentielle à l'hiftoire de l'air fixe en général, & qui pourroit faire demander, s'il feroit fi abfurde d'imaginer , comme l'ont fait plufieurs Chymiftes célèbres , que l'acide du feu, ou de la lumière joue un rôleimportant dans cer air. Voici certe Expérience. J'ai placé un moyen fourneau, plein de charbon, à lune des extrémités d’un cabinet, de fix pieds de longueur , fur trois de largeur , & j'ai mis à l’autre, fur le plancher , un bocal enduit d'alkali, que j'ai garanti de la chaleur du fourneau, par une caif fe, qui forme un cube d'environ 18 pouces. Des tablettes gar- niflent toute 1. EE du cabinet, Deux bougies, dans leurs flambeaux , ont été pofees , l’une fur la plus haute, l'autre fur la plus bafle. J'ai bien calfeutte la porte qui eft vitrée, & je fuis refté auprès pour oblerver. La lumière la plus élevée s’eft éreinte la premiere, la plus bafle dix minutes après; Je fuis entré dans le cabinet alors , & j'ai trouvé l’alkali entièrement cryftallifé fur routes les parois du bocal. Je rapporte fimplement le fut. J'ai dit que je ne me permettrois n1 conjeétures ni hy- pothèfes, M. Sage, devant qui j'ai répété cette Expérience au Jardin SUR EMACT RM FAIRX E: 549 du Roi, en a varié la première partie d’une façon intéreffante. Il a artaché, fur un fromage deftiné à élever les creufets, deux bougies, l'une de trois pouces de hauteur, l’autre de deux. Après F2 avoir allumées:, & avoir pofé le tout fur la platine d'une machine pneumatique garnie de fes cuirs, il l'a recou- vertsavec un récipient, fur. lequel il a appuyé quelques inf- tans. La plus élevée des lumières s’eft éteinte la première , la fcconde quelques momens après. Le récipient s’eft attaché aux cuirs, & lorfqu’on à ouvert la communication avec l'air extérieur, ileneftrentré beaucoup. La chaleur , au refte, contribue fi-bien à faire cryftallifer Falkali , que de deux bocaux qui en font enduits, & qu’on laifle pañler la nuit, l'un dans une chambre chaude, oùil n'y a cependant point de feu; l’autre dans une chambre froide , le premier feulementeft fenfiblemient cryftallifé le lendemain , & l'autre ne left pas; il nef pourtant pas vraïfemblable que l'évaporation feule en foit la caufe, puifqu'en laiflant le fe- cond des bocaux pafler au-froid plufieurs fours , il fe feche abfolument , fans prendre prefque de forme cryftillifée. Jai remarqué , à la vérité , que s'il étoit dans un lieu aflez froid, pour que l'évaporation demandât beaucoup de tems, il cryf- tallifoit beaucoup davantage. J'ai cru remarquer encore que l'alkali de ces bocaux fe cryftallifoit moins , quand ils féjour- noiïent dans une chambre obfcure, que quand ils étoient ex- pofés une vive lumière; mais, pour établir des points certains, fur des Expériences aufli délicates, il faudroit en faire aupa- ravant fur la pureté de l’alkali du tartre , de beaucoup plus exactes, que l'on n'en a faites jufqu'à préfent. On a donné des Mémoires fur la manière de le faire cryftallifer ; Je crois que des obfervations fur la façon de l'en empêcher , feroient beaucoup plus juftes & plus intéreflances ; les nuances les plus légères y font de grandes différences, &, pour en donner une idée, il fuffit de faire connoître qu'il y en a une fort grande entre Effets de Ja fimple chaleur fur une folu- tion d’alkali végétal. s5° MÉMOIRE l'alkali le plus pur, préparé par déliquefcence, & celui qui l'eft par diflolution; le premier précipite en blanc la folution de cryftaux de Lune, & le fecond la précipite en brun pref- que noir. Certe couleur eft plus ou moins obfcure ; fuivant ue l’on a employé le fel de tartre plus ou moins defféché; s'il l’éft beaucoup, il s’échauffe beaucoup avec l’eau dans la- quelle on en fait la diflolution, qui, dans ce cas, n'eft jamais bien blanche. SUR L'AIRÆIXE ss! D LD IT TT O.N AU MÉMOIRE PRÉCÉDENT. EXPÉRIENCES qui paroiffent démontrer que l'air fixe, & Pacide marin volanil, n’ont aucunes qua- lités communes, & que cet acide marin volaril a toutes cellés de l’acide marin ordinaire , ex- cepté qu’il ef? moins volaril. Pzo de jours après que j'eus fait la leéture d’un Mémoire fur l'air fixe, à l’Académie, M. Sage fit paroître une brochu- re, qui porte le titre d'Aralyfe des Bleds. On y lit, p. 89, le paffage fuivant au Chapitre intitulé: De /’ Acide volant, qui fe dégage de la fermentation de la Bière. «Rougir en un inflant la teinture de Tournefol , faire cryf- » tallifer l'huile, de tartre par défaillance , en y introduifane » un acide, qui lui donne les propriétés du fel fpathique, fonc » les Expériences, qui ont fervi à faire voir à M. le Duc de » Chaulnes, que le prétendu Air fixe n’étoit autre chofe qu'un » Acide furchargé de matières inflammables. » On lit encore, page 90; « J'ai examiné le {el neutre formé » par l'alkali fixe, & l’Acide volatil de la bière ; j'ai trouvé qu'il » croit femblable au fel formé par l'alkali, & l'Acide marin mo- » difié par une matière grafle , c’eft l'Acide que j'ai défigné fous » le nom d’Acide marin volatil.» M. Sage n'a pu exprimer plus clairement, ce me femble ; 552 MÉMOIRE qu'il regarde l'Air fixe, & l’Acide marin volatil, comme une feule & même fubftance. On trouve enfuite, à la page 72, un Chapitre entier , dont le titre eft: De l’Acide marin volaul, & qui indique, pour s’en procurer, le procédé fuivant. Triturer d’abord deux gros d'huile , avec 16 parties de fablon lavé, pour augmenter les furfaces, & y ajouter enfuite, en broyant toujours, quatre gros d’Acide marin, 07 fumant : on doit enfuite introduire ce mé- ‘ange dans une cornue, & y joindre un récipient , dont il faut que les parois foient enduites d’alkali en liqueur ; feul moyen, dit M. Sage, de raflembler ces vapeurs prefque in- coërcibles. Six femaines après , on trouve dans lalkali , des cryftaux cubiques , qui précipitent la diflolution d'argent en jaune citron. Ce même procédé fe rencontre déjà , mais avec quelque différence à la page 99 des Mémoires de Chymie de M, Sage. Il vouloit alors qu'on employât l’Acide marin, fumant, au- lieu de celui qui ne left pas, & qu'on entretint fous la cor- nue un feu, qui répondit au 48.° degré du Thermomètre de Réaurmur. Après avoir donné, dans fa nouvelle Brochure, & dans un Chapitre féparé, le moyende préparer direétement l'Acide ma- rin volatil, fuivent fept autres Chapitres, intitulés: Acide marin volatil, 1.” De la diffolution des Métaux fpathiques, . 2.7 De la matière lumineufe du Phofphore. 3. De l'Électricité. 4° De la diftillation du Charbon en poudre. 5 De la faturation des Alkalis, ou Terres calcaires par les acides. 6° De la diftillation S U Rè L'IACIR ‘FH X E: 553 6.° De la diftillation de la Craie. 7° Du Mercure précipité , per fe. La preuve unique, & générale que donne M. Sage, qu'il exifte de l'Acide marin, dans toutes ces fubftances, eft que leurs émanarions forment, en fe combinant avec l'alkali vé- gétal, des cryftaux pareils à ceux que produifent avec ce fel, les vapeurs d’Acide marin volatil, & qui ont le même carac- tère de précipiter en jaune cicria la diflolution d’argent. Les faits que j'avois préfentés , comme conftans, à l’Aca- démie , la première fois que j'ai eu l'honneur d'y faire une leéture , fe trouvoient trop formellement contredits par tou- tes ces aflertions, pour que je pufle me difpenfer d'y répon- dre. J’avois eu foin de dire, à la vérité, même en lifant le titre de mon Mémoire, que je ne m’étois fervi du mot d’zr fixe , pour défigner le mixte qui fe dégage des végétaux en fermentation , que parce que c'étoit celui que lon avoit le plus ordinairement employé jufqu'ici ; en obfervant coute- fois, qu’un nom abfolument neuf, me paroifloit néceflaire pour caraë@érifer une fubftance , entièrement différente de toutes les fubftances connues; mais j'ejoutois enfuite que fi j'écois peu attaché à lui donner un nom quelconque, je l’étois infinimenc davantage à la définition, que j'eftimois devoir en faire; qu'il me fembloit donc qu'on devoit regarder l'air fixe, comme une combinaifon fi intime, d'un peu d'acide avec l'air com- mun, quil en réfultoit un compofé nouveau, doué de qua- lités nouvelles, & qui ne participoit prefque plus de celles qu'avoient l'Air & l’Acide avant leur réunion, On imagine bien, avec quelle réferve & quelle timidité Jai dû avancer cette conjeture, quoiqu’ellem’eût paru démon- # 30 £ trée par mes Expériences, Lorfque j'ai vu M. Sage affirmer d'une manière aufli pofi- tive , que l'Air fixe n’étoit que de l’'Acide marin volatil, on fent combien jai dû me repentir de m'être autant avancé; ne Tome 1X, Aaaa 554 MÉMOIRE pouvant douter, qu'avec infiniment plus de connoïiflances chymiques que je n'en puis avoir, M. Sage ne dût foutenir un avis aufli nouveau, par une multitude d'Expériences foi- gneufement répétées. Je ne pouvois cependant me défendre de quelque furprife, en me rappellant quil m'avoit fait dire à moi-même, page 89 de l'Analyfe des Bleds, précifement le contraire de ce que j'avois dit ; mais je me perfuadois , par réflexion, que M. Sage prévoyant bien que fon fentiment de- voit prévaloir, avoit fimplement voulu me rendre le fervice de m'y faire publiquement adhérer d'avance. L'intérét de défendre mes idées, n'a pas été le feul motif qui m'ait dérerminé à entreprendre des recherches fur l’'Aci- cide marin volatil. Le fyftème de M. Sage, en Chymie, étant tout-à-fait différent des autres, & prefque entièrement fondé fur cette fubftance , j'ai cru qu'il importoit au progrès de la fcience de s’aflurer fi cette bafe étoit vraie, ou faufle , par des Expériences foignées & répétées, que je ne voyois pas qu'on cüt encore faites, Je vais donc examiner d’abord , en peu de mots, quel de- ré de confiance on peut donner aux conféquences qu'on déduit de la cryftallifation des alkalis; & je chercherai enfuite, par des épreuves comparées, à mettre en état de prononcer {ur la reflemblance , ou la difflemblance de l'Air fixe, avec l'Acide marin volatil. Je me bornerai , dans ce Mémoire , à traiter feulement ces deux objets, d'autant qu'ils me paroiffent devoir entraîner, par leur éclairciflement, une décifion abfo+ Jue fur ce qu’on doit penfer des fept autres Chapitres. Tout le monde fait combien on obferve de variétés dans les cryftallifations, à quel point elles font peu conftantes, & combien celles dépendent des circonftances qui paroïflent les plus indifférentes, au premier coup-d'œil, telles que la forme des vafes, le degré d'agitation qu'ils éprouvent ; l'épaifleur de l’eau de diflolurion, & une multitude-d’autres , dont on re connoit que la moindre partie, & qui concourent à rendre SU RI L'IAUR FUXE 555 les formes cryftallifées fi incertainés, qu'elles n’ont jamais été regardées en Chymie, comme fourniflant des preuves {uffi: fantes, quand elles font feules , Pour prononcer fur un fair, quel qu'il foit, à plus forte raifon pour être le ul fondemént d'un nouveau fyftéme. Fai fair cryftallifer, par une évapora- tion très-lente, l’alun faturé de fà terre ; fous une forine cubi- que, compofce d'élémens cubiques : M. Baÿen a obtenu, par le même procédé, l’alun de roche ordinaire >. Cryftallifé fous cette même forme. M. Cades m'a donné du fel marin cryftal- lé en aiguilles. J'ai eu dans les mêmes terrines des cryftaux d'alkali minéral très-différens les uns des autres, & j'ai tou- Jours remarqué que les cryftallifations de l'alkali végétal étoient les plus fujettes de toutes à varier ; fans qu'on püt fouvent en déterminer les caufes. J'ai fair des recherches fur ces incer: titudes , qui m'ont , à la vérité » donné de fortes préfomp- tions ; mais je me crois encore fi fort éloigné de pouvoir adopter , fur cet objet, des idées exclufives, que j'ai cru de- voir infifter à l’avant-dernière page de mon Mémoire , fur là réferve avec laquelle il falloit employer ces cryftallifations, comme le moyen d'établir un fentiment quelconque. Je crois cependant pouvoir citer, comme une exception, la méthode neuve dont je me fuis fervi, pour parvenir en peu de fecondes, & par la fimple tranfvafion de l'Air fixe, à faire cryftallifer beaucoup d’alkali : je n’en tire d'ailleurs aucune induétion for- cée, & ce n’eft pas un de ces procédés incertains, plus que problématiques , & à-peu-près invifibles, qui ne font qu'em- brouiller la fcience, & dont on fe {ert fouvent pour pronon- cer affirmativement fur un nombre de faits nouveaux, aux- quels, pour être fort importans, il ne manque que la vériré, Maïs n’en voilà que trop fur l'incertitude des cryftallifations; examinons, par des Expériences & des procédés plus fürs, f Pon doit croire à l'exiftence de l'Acide marin volatil. J'aitrituré enfemble, commele prefcrit l'Analyft des Bleds, une demi - partie d'huile, une partie dÂcide marin, on fu- man, & fcize parties de fable lavé: Jai mis enfuite le cout Àaaa ij La Jumiere s'éteint dars l'air fixe, & ne s’éternt point dans l'acide vo- latil marin. 556 MÉMOIRE dans un flacon de cryftal, à large ouverture, contenant envi- ron deux pintes. J'ai introduit dans un pareil flacon , feize parties du même fable , fimplement trituré, avec une partie du même Acide marin , & J'ai obfervé, par comparaifon, les effets qui ont ré- fulte de ces deux mélanges. N'ayant pu y remarquer aucune différence, en employant, comme je le faifois, l'Âcide marin, n0n fumant, prefcrit par VAnalyfe des Bleds, jai cru devoir recommencer l'Expérien- ce, en y fubftituant l’Acide marin, fumanr, demandé par les Mémoires de Chymie , Jai effeétivement reconnu qu'il fe dégagcoit alors des vapeurs un peu plus piquantes, du mé- lange ou il entroit de l'huile, que de celui où il n’en entroit pas. Ce fait ne préfente pourtant rien d’extraordinaire ; car il ef fort fimple que l’'Acide marin, qui n’a prefque point d’ac- tion fur les corps gras, en ait un peu davantage lorfqu’on muluplie leurs furfaces, & qu'il s’en exhale en conféquence, fur-cour dans les premiers momens, des vapeurs plus pi- quantes, qui feroient totalement infoutenables , fi lon em- ployoit , au-lieu d’Acide marin, feulement quelques gouttes d'Acide nicreux. Il doit fe faire en même-tems une combi- naïlon d'huile & d’Acide , qui, en neutralifant une portion du mélange, lui donne une forte de qualité réfino-favonneule, & lui enlève une partie de fon activité. Je m'attendois encore que, dans le premier moment, l’effervefcence infenfible pour- roit dégager un peu d’Air fixe, comme toutes les efferveicen- ces en dégagent, & jai été fort furpris de n'en pas trouver , même l'apparence , dans aucun inftant. Ce qui me fait dire , dans aucun inftant, c'eft qu'ayant fucceflivement defcendu dans les deux flacons, & à différentes époques, une bougie allumée, elie a tranquillement conti- nue d'y brûler , tout le tems qu'on l'a laiflee dans l'intérieur des vaifleaux qui croient remplis de vapeurs. On fai que la S U RV/DIAUTIR IPMUX E 557 flamme, de quelque nature qu’elle foit, s'éceint fubitement dès qu’elle entre dans un athmofphère d'Air fixe. Après cette Expérience, qui m'a déjà paru prouver , que PAcide marin volaurl, n'évoit pas de l'Air fixe, j'en ai répété une autre, qui avoit été imagince par M. Sage lui-même, un jour que je l'avois invité à être témoin de quelques-unes des miennes. Dans la perfuañon où il étoit, que l'Air fixe étoit autre chofe que de l’Acide marin volatil, il n’héfita pas à faire defcendre dans la cave de bière en fermentation , deux bo- caux , dans l’un defquels il avoit mis de la diflolution d’ar- gent, par l’Acide nitreux; & dans l'autre, de la diflolution de mercure, par le même Acide, Tout le monde fait, qu'un arome d’Acide marin trouble fur-le-champ ces diflolutions; mais un fejour de cinq heures dans l'Air fixe, ne put altérer en aucune manière leur limpidité. Comme cette Expérience, deftinée par M. Sage, à appuyer fon opinion, me fembloit prouver, au contraire , entièrement contre la fienne, en faveur de la mienne, jai cherché depuis à la rendre plus frappante, & jai verfé, pour cet effet, de la diflolution d'argent dans l'eau diftillée, bien faturée d’Air fixe, qui en contient, par ce moyen, plus de deux fois fon volume, & qui, dans cet état, rougit très-promptement la teinture de Tournefol; mais, après cette addition, l’eau fatu- rée eft reftée coute aufli limpide qu'auparavant. L’Air fixe ne précipitant point l'argent, diffous dans l’efprit de nitre, les vapeurs de l’Acide marin volatil ne devoient pas, fuivant l’Auteur de l’Analyfe des Bleds, le précipicer da- yantage. Pour men inftruire, j'ai mis de cette diffolution dans deux phioles, que j'ai fufpendues, débouchées, au deflus des mélanges, & dans la partie vide, des gros ficons où ils étoienc contenus : un peu. de ruban actachoit à leurs bou- chons, ces deux phioles, Leurs ouvertures étant fort étroites, L’air fixe ne précipite point les folutions d’argent ou de mercure , par l'acide nitreux. L’acide ma- rin volatil jes précipite. L’air fixe pré: cipite l’eau de chaux. L’acide ma- rin yolatil, au contraire, dif- fout le préci- pité. 558 MÉMOIRE ce n'eft qu'au bout de ro où 12 minutes, que les émanations de lefprit de fel ont pu s’y introduire, & occafionner ja préci- pitation , qui avoit également rendu blanches comme du lait, au bout d'une demi-heure, les liqueurs d’epreuves contenues dans les phioles (1 ). Dès cet inftanc , j'avoue qu'il m'a paru que fi les vapeurs de l’Acide marin volaril ,ne reflembloient point à celles de l'Air fixe, elles avoient en récompenfe beaucoup de qualités communes avec celles de l’Acide matin ordinaire. I! me reftoit encore à connoître les effets de lAcide marin volatil fur l’alkali du tartre. Pour y parvenir, j'ai couché ho- rizontalement, & débouche les deux flacons qui contenoient les mélanges à la dofe de quatre onces , & j'ai lutté con- tre leur ouverture, avec la cire molle, deux bocaux, auf couchés horizontalement, & qu'on avoit intérieurement en- duits d’alkah. Bientôt les parois de ces bocaux fe font couvertes d’une eroûce faline, qui n'avoit point de forme cryftallifée, & la li- queur raflemblée dans la partie inférieure de ces vafes n'ayant fair que s’'épaiflir, n'a formé qu'une gelée épaifle & prefque tranfparente. Comme j'avois vu, chez M. Sage , des cryftaux fous l'alkali, (1) Depuis que ce Mémoire a été u à l’Académie, M. Lavoifier, l'un des Commiffaires nommés pour fon examen, a fait une Expérience , qui prouve au moins autant que les précédentes contre l'identité ue l'Air fixe & de l’a- cide marin volaul : on fait qu’à l'inflant où l’eau de chaux touche la pre- mière de ces fubitances , il s’y forme un précipité blanchätre qui t.ouble Ja liqueur; mais euvan l’a t-on renfermé avec de fortes vapeurs d'acide marin volaul, elle n'a rien perdu de fa limpidité. J'ai cru pouvoir rendre cette Expérience encore plus démonftrative en ex- ofant aux mêmes vapeurs d'acide marin volauil, l'eau ae chaux déjà trou- ble pir le précipité qu'occafionne l'Air fixe, il eft arrivé ce que j'avois prévu. L'addition de l'acide 2 rediflous la portion de terre calcaire, précipitée, dont l’interpo tion avoit fait celier la tranfpaience de la liqueur, qui eft rede- veque diaphane. SUR L'AIR FIXE. 559 contenu dans un récipient, qu'il avoit joint à une cornue, où l’on avoit mis le mélange propre à produire 1’ Acide marin volatil, jai cru devoir répéter l'Expérience, & , après avoir. fait les mélanges de nouveau; à la dofe d'une livre de fible chacun, & du refte à proportion , pour opérer d’une manière plus fenfible , je les aï introduits dans deux cornues, que j'ai chauffées fur le même bain de fable. J'ai employé le feu peu confidérable, que prefcrit M. Sage dans fes Mémoires de Chy- mie, & il m'a encore procuré les mêmes réfultats : l’'alkali ma donné , comme auparavant, qu'une gelée, qui étoit feulement un peu plus opaque. Ces obfervations m'ayant fait foupçonner, que la clôture exaéte des vaifleaux, dans lefquels on traitoit ces fubftances , pouvoir influer fur les altérations qu'efluyoit l’alkali ; jai pris de nouveaux balons, enduits de nouvelle liqueur , & j'ai fim- ement introduit les becs des cornues dans leurs ouvertures, fans les y lutter; les fels qui fe formbient, ont commencé pour lors à prendre une forme cryftallifée, mais très-confufe. Après les avoir retirés des récipients, je les ai féparés de l'al- kali, & les ayant diflous dans l'eau diftillée, je les ai faic cryf tallifer ; celui qui avoit été formé par les vapeurs de l’'Acide marin feul a pris la forme parallélipipède, que prend commu- - nément le fel fébrifuge, & celui qui avoit été produit par les vapeurs du mêlange d'huile & à’Acide marin, n’a donné qu'une cryftallifation un peu plus informe. C'eft à cette dernière différence prefqu'infenfible , que s’eft réduit tout ce que j'ai pu obferver de diffemblable entre les réfulrats des produits de l’'Acide marin pur, & de celui où Fon a mêlé un peu d'huile, qui d'ailleurs ont toujours été conf- tamment, & abfolument femblables. J'avois eu foin, pendant ces dernières épreuves, de tenir les récipiens plus élevés que les cornues, afin qu'il ne püc CP P qu 2 SO pañler que des vapeurs; mais comme je remarquai, qu'il fe con- denfoit beaucoup de gouttes fur les parois des vaifleaux, il me 5 Clôture des vaifleaux em- pèche fa cryf- tallifation. Acide ma- rin volatil plus coërcible que Pacide marin ordinaire. séo MÉMOIRE parut qu'il n'étoit pasimpoflible, comme l’'avoit affuré M. Sage, de les raflembler fans le fecours de l’alkali. Je joignis au col des cornues , pour m'en éclaircir, de nou- veaux récipiens, propres, fans les lutrer ; les vapeurs de l’A- cide marin pur pafsèrent, avec tous les fignes d'expanfbilité qu'elles ont coutuine de donner; & celles de l’Acide marin volatil, au contraire , fe condensèrenc beaucoup plus tran- quillement : elles avoient perdu le montant de l'Acide ma- rin, mais elles exhaloient une forte d'odeur aromatique & réfineufe, qui tient beaucoup aufli de celle de la cire; les gout- tes tomboïient toutes les vingt fecondes , & j'ai trouvé, dans le balon , près de deux onces de liqueur, que j'ai apporté dans le facon, que J'ai l'honneur de mettre fous les yeux de l’Aca- démie. En augmentant le feu, la partie du mélange qui rouchoit le fond de la cornue , a indiqué par une couleur noire, que l'huile commençoit à fe convertir en charbon. Ces Expériences ne fuffiroïent pas, fans doute, fi javois en- trepris d’analyfer exaétement la nouvelle fubftance, qui réfulte de l'union de l'huile avec lelprit de fel; mais je ne crois pas qu'il foit néceñlaire d’en ajouter de nouvelles, pour établir les points dont jai entrepris l'examen , fut-tuut fi on veut bien fe rappeller quelques-uns des eflais qui font contenus dans le Mc- moire que jai dejà donné, Quoique l'Air fixe opere fi promptement & fi facilement la cryftallifation de l’alkali vegetal, on peut je reflouvenir , que j'ai faic, fur l’alkali minéral, des épreuves dont le fuccès a été bien différent : il eft refté pendant fix heures dans la cuve, fans y efluyer la moindre alrération :or je demande, (car ce n'eft plus d’Acide marin dont il eft ici queftion ) quelle eft la fingulière efpèce d’Acide, (s'il n’eft pas différent des Aci- des connus) qui n’exerce aucune aétion fur la folution d’a!kali minéral, pendant qu'il en exerce une fi vive, fur celle d’alkali végétal? Cet alkali SUR L'AIR FIXE sé Cet alkali végétal même , lorfqu'il eft une fois cryftallifé par l'Air fixe, n'eft plus fufceptible d'y efluyer , par fon fcjour, aucun autre changement : vainement le laïfle-t-on très- long- tems expofé dans une cuve, même à très-petire dofe, telle que deux gros, par exemple, & réduit en poudre impalpa- ble, pour qu'il donne plus de prife au fluide environnant; on ne lui fait acquérir aucun nouveau caraëtère. ï Si cet alkali étoit un fel neutre, d’une nature ordinaire; comme le prétend M. Sage, il faudroit aufli foutenir la même chofe de l’alkali minéral. On m'objectera , fans doute, que l'alkali cryftallifé par l'Air fixe, a les caraétères particuliers, de n'être ni déliquefcent, ni eflorefcent, comme je crois l'avoir obfervé le premier, & de décrépiter , comme M. Sage l’a remarqué, page 248 de fes Mémoires de Chymie , en parlant du fel formé par la combi- naïfon de l’alkali végétal, & de ce qu'il appelloit alors ur mixte Jalin volaril. On fait d'abord, que la décrépitation ne dépend que de la grande quantité d'air, & de la petite quantité d’eau qui eft contenue dans un fel, & celui dontil s’agit, eft bien certaine- ment dans ce cas. Quant à la déliquefcence & à l'eflorefcence, il me fem- ble qu'on n’a pas encore des idées bien nettes fur leurs caufes; mais l’abfence feule de ces qualités n’eft certainement pas une preuve de neutralifation , & cependant l’alkali aëré a préci- fément d’ailleurs toutes celles de l’alkali commun. On ne rap- pellera pas, qu'il verdit le fyrop de violette, & qu'il a précifé- ment la même faveur que l’alkali minéral , parce qu’on ne man- queroit pas de répondre, qu'il y a des fels neutres qui confer- | vent ces caractères. Mais il me femble , qu'on peut employer , comme une preuve plus forte de fa neutralifation , & qui auroit même été reconnue jufqu'ici comme abfolue, la très-grande effer- Tome IX, Bbbb s62 MÉMOIRE SUR L'AIR FIXE. vefcence qu'il fair avec tous les Acides ; il fe dégage plus de deux fois autant d'air, par ce moyen, de l'alkali aëré, que de l'alkali ordinaire. Quoique cette grande quantité d'air foit encore de l'Air fixe, pareil à celui qui avoit été abforbé, devons-nous nous défier aflez du rapport de nos fens, pour croire que ce qui a fi fort l'apparence de l Air commun , en foit abfolument deftitué. Il me paroït d’ailleurs, parfaitement prouvé , que l’Acide ; dont nous avons démontré l'exiftence dans l'Air fixe, eft le plus foible de tous, & qu'il a des caraétères abfolument par- ticuliers; celui de n’exercer aucune aétion fur l’alkali minéral, fuffroit feul, à ce qu'il me femble , pour décider la queftion. Il en à encore une autre, qui eft de ne pouvoir fe combiner qu'en très-petite quantité avec l'eau, qui s’en trouve cepen- dant faturée. J'ai démontré, en enlevant à cette eau toute fa faveur, par quelques gouttes d’alkali, & en employant cette méme eau faturée, à coloter la teinture de Tournefol, par com- parailon avec des Acides connus, qu'il ne pouvoit exifter dans l'Air fixe, qu'une infiniment petite quantité de molécules acides. La manière dont il me paroît donc qu’on peut définir l'Air fixe en peu de mots, eft de dire, que c’éft un Acide d’un gente certainement particulier , qui exifte dans l'air commun en état de diflolution, au contraire des autres Âcides, qui e peuvent y être qu’en état de fufpenfion , ou d’interpo- itlon. Mais je m'écarte infenfiblèment des queftions que je me fuis propofé d'examiner dans ce Mémoire: je crois, non-feule- méñt qu'il eft tems de le terminer, mais pouvoir finir par con- clure , qu'il ny à nulle identité éntre l’Air fixe , & l’Acide marin volatil, &, qu'excepté d’être moins volatil , cet Acide marin volatil a toutes les propriétés de l'Acide marin ordi- naire. MEMOIRE s ST Quelques circonflances qui accompagnent la décom- pofinon du SEz AmmonrAcC par la Chaux vive, par les matières métalliques & par leur Chaux, relativement aux propriétés attribuées à l'Air fixe. Par M BUCQUET. LA ruéoris qui pofe les principes fondamentaux d'une fcience , qui rapproche les faits épars pour les préfenter à l'ef prit avec plus d'ordre &-de précifion, eft certainement la partie la plus brillante & la plus digne d’occuper les perfon- nes que leur génie élève au-deflus des artifans vulgaires: mais cette partie ne peut étre utile qu'autant qu'elle fe trouve cir- con{crite dans de juftes bornes, qu'elle fe plie aux faits, & n'oppofe point à des expériences avouées , les écarts d’une imagination quelquefois brillante & fouvent déréglée. C'eft dans ce dernier cas, à ce qu'il me femble, que tombent beau- coup de Chymiftes, qui embraflent une opinion nouvelle , & la Chymie riche, en ce moment, d'un grand nombre de faits, paroit être à la veille de fubir le fort qu'éprouva‘la Médecine d'Hyppocrate, au tems de Paracelfe. Depuis Stahl, on à tout attribué au phlogiftique. M. Meyer a imaginé l’exiftence d'une efpèce d'acide qui pañle à tra- vers les vaifleaux les plus compaéts ; & cette opinion, quoi- que peu d'accord avec les faits, & enveloppée d'une obfcu- rité rebutante , n’a pas laiffé de trouver quelques défenfeurs : Bbbbij Préfenté le 7 Août 1773. 564 MÉMOIRE à peine s’eft-on occupé de recherches fur Pair fixé, que les fentimens des Chymiftes fe font partagés ; les uns trouvant plus court &: plus facile de plier les faits à leur imagination , que de foumettre leur imagination aux faits, fe contentent de nier l’exiftence de cet air : d’autres, partifans zélés des nou- velles découvertes, ont tentc d’ expliquer les phénomènes les plus brillans & les plus finguliers, à l'aide de l'air fixé. Ces der- niers méritent mieux d’être AS x & font d’autant plus dangereux, que leurs fentimens portent fur des faits dont plufeurs font inconteftibles. Il eft démontré, d’une manière évidente , qu'on retire de l’analyfe des divers corps , des pro- duits ous fort difierens les uns des autres, & qui paroif- fent avoir beaucoup d'analogie avec Pair. Quoique je fois loin dimaginer qu'il y ait autant d’airs particuliers qu'il exifte de corps Fee Nature, je ne m'aviferai cependant pas de regar- der comme identiques tous ceux dont on a parlé jufqu'i IG, -à moins qu'on ne foit parvenu à les mettre dans le même état; au contraire, je les diftinguerai foigneufement, parce qu'ils ont , dans É moment où on les a obfervés, des propriétés particulières qui méritent de fixer l'attention des Chymiftes : ce n'eft donc que contre ceux qui abufent des meilleures cho- fes, au détriment de la fcience , que je m'élève aujourd'hui. Je ne fuis ni pour ni contre l’exiftence de l'air fixé , & comme Jai dit ce que Javois vu de particulier dans les recherches que Jai faices fur cette fubftance, je préfente, avec la même fidé- lite, quelques Expériences, fruit de mes réflexions fur le {y£ tême du Docteur FR & de fes partifans. Elles auront pour objet de faire voir, 1. que leur opinion fur la nature de la chaux n’eft point à Tab des contradiétions ; 2.° de démon- trer qu'en genéralrien n’eft plus difficile en Chymie , que d'é- tablir une AE qui généralife & raflemble tous les faits; 3.” enfin que lempreflement de rendre raïfon de tous les phénomènes eit plus nuifible qu'utile aux progrès de certe fcience. Le Doëteur Black & les fauteurs de fa do&rine , difent que SUR LE SEL AMMONIAC. : $6s la pierre calcaire n’eft autre chofe que de la chaux faturée d'air fixé ; que la calcination , en lui enlevant ce principe, lui fait perdre la propriété de faire effervefcence avec les acides, & lui donne celle de fe difloudre en totalité dans l'eau; qua- lités que la chaux communique à fon tour aux fels alkalis ; qu'on traite avec elle; qu'enfin,en rendant à ces fubftances l'air fixé qu'elles ont perdu , elles retournent à leur premier état , foic qu'elles reprennent ce principe qui leur manque, des différens corps qui le perdent dans leur analyfe , foit qu'elles le tirent de l’eau ou même de lathmofphère ; d’où il fuic , felon eux, que l'air fixé eft le principe de la folidité des corps & la caufe de l’effervefcence qui fe produit dans la plu- part des combinaifons falines. … Parmi les Expériences qui établiflent ce fyftème, il y en a un aflez grand'nombre d’exaétes pour juftifier l'Auteur; mais il y cena crop de douteüfes , pour que fa doctrine puifle efpérer de réunir tous les fuffrages. La première à laquelle je m'arrête, c'eft à la manière de démontrer la quantité d'air fixé que contient la pierre cal- caire. Cette fubftance perd , par la calcination , la moitié de fon poids : M. Marsraff, qui a opéré cette calcination dans les vaifleaux fermés , a vu que cette matière qui fe perd, étoit incoërcible , & M. Jacquin , qui a répété l'Expérience, aflure que c'eft de l'air fixé qui fort du ballon avec fiflement , & il en évalue la quantité aux ou à-peu-près de la matière éva- porée : cependant, comme il n’a pas raflemblé cette vapeur ;, ce quil TUE à cet Cgard, w'eft qu'une pure conjcéture. Il penfe que le produit qui s'eft échappé, ne contenoit que + d'eau; cependant il n'eft pas impoñlible qu'il en contint beau- coup davantage, car il n’eft pas äifé de diftinguer l’eau d'avec l'air , lorfqu'’elle eft réduite en vapeurs & dans un étar de raré- faction Extrême, & il eft prefque auffi difficile de recenir l’un de ces corps que l’autre. La feconde Expérience que rapporte M. Jacquin , pour 566 MÉMOIRE prouver que la pierre calcaire ne contient que + d'eau de plus qu'il n'en a reçu dans fon ballon en la calcinant, me paroït au moins aufhi\ défectueufe que la première. Ce Chy- mifte n'ayant point donné aflez de feu pour calciner la pierre calcaire , a cependant trouvé la même quantité de produits humides qu'avoit fourni la pierre calcaire bien calcince. Il me paroîc très-poflibie que cette humidité foit furabondante à la compofition de la pierre calcaire , qui peut en être pri- vée fans foufirir aucune décompofition , comme cela arrive à un grand nombre de fels, qui, quoique fort difficiles à dé- compolfer , fe laiflent néanmoins enlever très-facilement l’eau de leur cryftallifation. Jene vois , dans cette Expérience, rien qui prouve inconteftablement que la partie qui reftoit dans la pierre calcaire & qui auroic dû fe difliper, par la calcination, en vapeurs incoërcibles, fût de l'air fixe pur ou prefque pur ; Jai même tout lieu de préfumer le contraire. Defirant calciner la pierre calcaire dans les vaiffeaux fer: més , & mefurer avec exaéticude l'air qui en fortiroit , j'ai pris une once & demie d’un fpath blanc très-pur , de ceux qui fe diflolvent en cotalité dans les acides avec effervefcence, je l'ai mis dans une cornue de grès que j'ai placée dans un fourneau au feu de reverbère; j'ai ajufté au col de ma cornue un tuyau de verre qui plongeoit dans l'appareil de hales, corrigé par feù M. Rouelle. Jai eu foin d'élever entre le fourneau & le récipient, un petit mur de briques que j'arrofois fréquemment avec de l’eau bien froide, pour empêcher que mon appareil ne vint à séchauffer & pour hâter la condenfation de l'air fixe. J'ai poufle le feu par degrés &, au bout de huit heures, je commençai à voir l'eau baïfler fous la cloche & l'air fe de- gager ; J'efpérois pouvoir le mefurer, mais mes efpérances fu- rent trompces, l'eau baifla fi rapidement , que je ne pus jamais parvenir à la faire remonter, Malgre cette apparente abon- dance d'air fixe , je ne fus pas plus perfuadé que la pierre cal- caire fournit une quantité d'air telle que celle qu’on imagine; en voici la raïfon. Lorfque l'eau , qui étoir fous ma cloche, SUR LE SEL AMMONIAC. 567 baïffa avec tant de rapidité , les parois de cette cloche étoient chaudes à tel point, qu’on ne pouvoit y porter la main, ce qui fuffic pour que l'air très-raréfié remplifle un efpace fort confidérable. Cette chaleur, en décompofant le'lut gras dont je m’écois fervi pour fermer les jointures de mes vaifleaux , én faïfoit fortir une grande quantité d’air fixé, qui RE à l'odeur gazeufe qui lui eft particulière, celle de lhuïle de lin qui faic la bafe du lur; je vis même des ftries de cette huile décompofée , couler le long du col demon récipient : Javois cependant pris foin, pour prévenir ces accidens, de couvrir mes luts d’une couche épaifle de terre à four & de les renfermer dans l'épaifleur du petit mur de briques que j'arrofois d’eau froide à toute minute; mais mes précautions furent inutiles. Cette Expérience, quoique moins heureufe que je ne l’avois efpéré , prouve néanmoins que la matière, qui s'élève de la pierre calcaire pendant fa cal- cination , pouvoit bien contenir de l'eau réduite en vapeurs -tès-expanlibles , dont la quantité feroit beaucoup plus que + de la mafle évaporée, & que les lutsemployés par MM. Mar- graff & Jacquin , de quelque nature qu'ils fuflent, pourroient bien avoir fourni la plus grande partie de l'air qu'ils enten- doient fortir avec fiflement par la tubulure de leur ballon, \ MM. Macbride & Jacquin prétendent pra que la pierre calcaire ne perd que de l'air fixé dans fa calcination, parce que, difenc:ils, il fuffic de reftituer à la chaux vive l'air fixé qu'elle a perdu , pour la remettre dans l'état où elle éroic avant fa calcmation: à cer effet, ils font pañler dans de l'eau de chaux d'air dégagé de quelque corps, l'eau de chaux fe trouble & il fe fair un précipité, qui n’eft que de la'crare. Cetre Expérience, quia paru trés-concluanre à ces Meflieurs, me femble fort dé- feëétueufe : pour qu'elle prouvât en leur faveur , il faudroit qu'ils n’euflenc point employé d'eau ; mais feulement de la chaux vive & de l'air fixé; car la feconde diftillation de M. Jac- quin tend à prouver que l'eau n'eft pas abfolument néceflaire 568 - MÉMOIRE à l'exiftence de la pierre calcaire, puifqu'elle peut en être pri- vée fans fe réduire en chaux: or c’eft précifément ce troïfième corps, l'eau que ces Meflieurs ont regardé comme indifférente, qui joue le plus grand rôle dans Ieur procédé, comme je m'en fuis affuré par l'Expérience fuivante. J'ai pris deux onces de chaux bien vive, &, après les avoir réduites en poudre, je les ai placé dans appareil de M. Mac- bride, que j'ai eu l'honneur de préfenter à l'Académie, lors de la lecture de mon dernier Mémoire. Après avoir fait le vide dans mon appareil, je l'ai rempli d'air fixé dégagé d'un mélange d'acide vitriolique & de fel alkali de tartre. J'ai laiflé ma chaux plongée dans cet air pendant trois jours , & j'ai re- nouvellé trois fois l’air{fixé; au bout de ce tems, J'ai retiré ma chaux qui n'étoit point augmentée de poids; au moins de fix Expériences que j'ai répétée de cette forte, je n'ai trouvé de l'erreur qu'une feule fois, qui étoit la troifième; la chaux, après l'Expérience, s'eft trouvé pefer un demi-gros de plus; mais ai tout lieu de préfumer qu'elle n’avoit pas été d’abord pefee avec aflez de foin. J'ai examine les propriétés de cette chaux, qui avoit été ainfi furchargce d'air fixé comparativement à de fem- blable chaux qui n’avoit point été foumife aux mêmes épreuves; je n'ai trouvé aucune différence dans la manière dont ces deux chaux fe font comportées avec l’eau & les fels acides; toutes deux ont également décompofé le fel ammoniac fans le fecours du feu, & jai tiré, en diftillant féparément chacun des mé- langes , une quantité égale d’alkali volatil, qui ne faifoit point du tout d’effervefcence avec les acides : d’où je conclus qu'il ne fuffit pas de rendre à la chaux de l'air fixe pour la convertir en craie, qu'il faut un intermède pour que cette union fe fafle, & que cet incermède ef l'eau, J’ajouterai encore que l'eau, aidée même du fecours de l'air athmofphérique , ne fuffit pas pour opérer ce changement, qu'il faut encore y joindre l'air fixé, dégagé de quelque corps dans l'inftant de fa décompofition , & que M. B/ack fe trompe lorfqu'il aflure que la crême faline de la chaux ne perd fa diflolubilité & ne devient concrète, que SUR LE SEL AMMONIAC. 569 que parce qu'elle reprend l'air fixé, qui étoic contenu dans 4 . . . > \ l'eau, ou même celui qui étoit répandu dans 1 athmofphère. J'ai pris de la crême faline , enlevée avec précaution , de deflus l'eau de chaux, & que j'avois gardé pendant fix années, dans un bocal découvert. Cetre crème de chaux faufoit une vive effervefcence avec les acides, & ce neft qu'en ce point qu'elle m'a paru différer de la chaux vive; j'en ai mêlé trois parties avec une partie de fel ammoniac, il s'eft dégagc, pen- dant le mélange, un efprit alkali volatil très - pénétrant , & , par la diftillation, j'ai obtenu de l’alkali volatil fluide , qui ne faifoit aucune effervefcence avec les acides. J'ai pris trois parties de chaux éteinte à l'air, & que je con- fervois depuis fix années dans un vaifleaux découvert & dans un lieu bas fort humide, je les ai mélées avec une partie de fel ammoniac; il s’eft dégagé, dans l’'inftant du mélange , beau- coup d’alcali volatil fort pénétrant , & je n'ai obtenu , par la diftllation , que de l’efprit alkali volatil, qui ne faifoit pas la plus légère effervefcence avec.les acides. La chaux lavée, em- ployée de la même manière , m'a donné les mêmes réfultats. Je conclus de Lee , 1.° que la crême faline, la chaux étein- te, & la chaux lavée employée, quoique faturces d’eau, & ayant eu le tems de reprendre de cette eau &de l'ahmofphère tout l'air fixé qu’elles pouvoient y trouver , étoient encore fort éloignées de l'état de craie & avoient beaucoup plus des propriétés de la chaux vive; 2.° que les propriétés attribuées à l'air fixé ne font pas conftantes, & que même elles font in- dépendantes les unes des autres, puifque la crême faline de la chaux ; la chaux éteinte & la chaux lavée qui ont perdu leur diflolubilité & qui font effervefcence avec les acides , ont néanmoins la propriété de décompofer le fel ammoniac, de la méme manière que le fait la chaux vive; 3.° que fi ces fubftances reprennent de l'air fixé, foit-de l'eau , foit de l'ath- mofphère , cela n’a lieu qu'après un tems bien long & rentre dans l'ordre de ces altérations que la Nature produit d'une Tome IX, Ccce s70 MÉMOIRE manière lente & que nous ne pouvons pas fuivre; 4.° Enfin que ce n'eft qu'à la faveur de l’eau, que l'air fixé fe combine à la chaux pour la convertir en terre calcaire ; en forte que , loin de penfer, avec le Doéteur B/ack & les partifans de fa doc- trine, que cette terre n'eft que de la chaux rendue douce par l'air fixé, je ferois tenté de préfumer que c’eft une combinai- fon deterre, d'eau & d'air fixé dans une proportion qui ne nous eft pas connue. Je fais que quelques Chymiftes y admettent du phlogiftique, plufieurs même atteftent qu'elle en contient affez pour réduire les chaux métalliques. Voici une Expérience, qui n'eft pas favorable au fentiment de ces derniers. J'ai pris une once d'un fpath blanc difloluble en entier dans les acides avec effervefcence, je l'ai mife dans une cornue de grès que Jai placée dans un fourneau de reverbère, j'ai ajufté au col de la cornue un ballon, que j'avois mouillé en-dedans pour y faire tenir une légère couche de Minium; j'ai pouflé le feu par degrés jufqu'a ce qu'il fe dégageät de l'air fixé: à peine cet air commençoit à fortir , que le z7z7ium devint jaune &-paflalà l'état de maflicot. Ayant alors effayé d’afpirer l'air qui fe dé- gagcoit , je fus frappé d’une odeur forte d'huile de lin, & je m'apperçus que le lur gras dont je m’étoisfervi pour joindre mon ballon à la cornue , fe décompofoic par la chaleur, & fournifloit une grande quantité d'air fixé & de matière grafle à laquelle pouvoit être attribué le commencement de réduc- tion que Javois apperçu par laltérarion de la couleur du MENU. Je recommençai mon opérarion, en ne me fervant pour hit que de terre à four détrempée avec de l'eau ; je parvins à calciner la pierre calcaire fans que le mznium éprouvât au- cune altération dans fa couleur; ce quime fait croire que la réduétiondes chaux métalliques attribuée à la pierre calcaire, peut dépendre de quelques circonftances auxquelles on ne faic as une aflez férieufe atention dans l'opération. J'ajouterai ici une téfleétion au fujet de la décompofition du fel ammo- niac par la chaux. M. Duhamel, dans l'excellent Mémoire SUR LE SEL AMMONIAC. $7r inféré parmi ceux de l’Académie pour l’année 173$ , paroît difpofé à croire que la chaux agit fur lalkali volatil en lui enlevant une matière grafle : fon opinion eft établie fur des faits fans nombre & bien avérés. M. Baumé ; en répondant à uñ problème inféré dans le Journal de Médecine du mois d'O&tobre 1762, par lequel on propofoit de tirer du fel al- kali volatil concret en décompofant le fel ammontac par la chaux , a indiqué un procédé qui revient à ceux qu'avoit em- ployés M. Duhamel ; il confifte à charger la chaux d’une fuffi- fante quantité de matière grafle, en la calcinant avec le fan de bœuf, à-peu-près comme on prépare l'alkali phlogiftiqué, dort on fe fert pour précipiter le fer dans l’état de bleu de Prufle. J'ai obfervé auili plufieurs fois, que les matières grafles donnoient au produit du fel ammoniac diftillé avec la chaux, la propriété de faire effervefcence avec les acides , & quel- quefois même en mettoient une partie dans l'état de fel con- cret. Il fuffit, pour que ces phénomènes arrivent, qu'un de- gré de chaleur un peu fort décompofe les luts ou qu'on ait employé du fel ammoniäc trop chargé de fuliginofités & de matières grafles : c’eft pourquoi, lorfqu'on veut réuflir à avoir un alkali bien cauftique & bien pur, il faut n'employer que du fel ammoniac purifié par la cryftallifation, faire en forte que rien ne pañle des luts dans le ballon, & même, pour plus de füreté, ne lutter qu'avec plufieurs bandes de papier enduit de colle. Quoique les matières grafles dénaturent le produit qu'on à coutume de retirer en décompofant le fel ammoniac par la chaux, il ne me paroît pas entièrement prouvé que ce foit en qualité de corps gras, mais plutôt parce que ces matières produifent de l'air fixé qui fe recombine avec l'alkali volatil. J'ai pris du favon blanc fait avec foin, & un favon que j'avois préparé avec l'alkali volatil cauftique, je les ai diffous féparé- ment dans une quantité fufffante d’eau diftillée, je les a dé- compofés par tous les acides, fans qu'il fe foit produit la moin- dre effervefcence : j'ai diftillé f£parément ces mêmes favons, Ccecc'ij 572 MÉMOIRE & j'en ai retiré des efprits alkalis volatils très-effervefcens & point du tout cauftiques. Le charbon du favon blanc ordinaire contenoit une grande quantité d’alkak fixe, qui failoic effer- vefcence avec les acides: l'huile fe trouvoit-elle en trop gran- de quantité dans les favons pour empécher la jonétion immé- diate de l'acide & de l'alkali, & conféquemment l'efferve£ cence, tandis qu’elle s'eft trouvée dans les produirs diftillés en aflez jufte proportion, pour les mettre dans l’état où on trouve ordinairement les fels alkalis , ou bien l'air fixé dégage de l'huile dans la diftillation du favon ? a-t-il rendu aux alkalis h propricté de faire effervefcence? c’eft ce que je n’oferois décider. Comme, dans le fyftème du Docteur BZack, on attribue à la privation de l'air fixé, les altérations qu'éprouve l'alkali volatil dans la décompofition du fel ammoniac par la chaux, je voulus voir fi les matières métalliques dont on ne tire point d'air fxé proprement dit , mais une efpèce de gas inflamma- ble , qui ne produit aucun changement fur l’'alkali volatil cau- ftique , ainfi que je l'ai fait remarquer dans mon dernier Mé- moire , fépareroient l’alkali volatil du fel ammoniac fans le dénaturer ; je répétai, avec la plus fcrupuleufe attention , les procédés par lefquels on fait les fubftances connues fous les noms d'ens maris & d'ens veneris , en employant chacune des fubftances métalliques à la même dofe à laquelle on a coutume d'employer la chaux: j'ai donc pris trois parties de limaille d'acier & une partie de fel ammoniac en cryftaux bien purs & bien fecs; j'ai mêlé exaftement ces deux fubftances , il s'eft produit un peu de chaleur dans l'inftant du mélange; mais il ne seit point dégagé d'alkali volatil; j'ai diftiilé dans une cornue de verre bien nette à laquelle j'avois adapté un récipienr de verre également bien net lutté d'un fimple pa- pier enduit de colle: j'ai retiré un alkali volatil Auide, mais qui failoit avec les acides une très-vive effervecence. Pendant le progrès de la diftillation , il seit dégagé une celle quan- tite de vapeurs élaftiques , que mon recipient s'eft brife avec SUR LE SEL AMMONIAC. 573 éclat : jai recommencé la même opération en conduifant le feu bien lentement, & ayant foin de donner à tout moment iflue à ces vapeurs, qui auroient infailliblement fait éclater mon ballon ; car j'ai vu peu de diftillation où il s'en produisit autant & d'aufli expanfibles. J'ai obtenu , cette feconde fois, une très - grande quantité d’alkali volatil d’une couleur am- brée , d’une odeur tres fétide, & qui faifoit une effervefcence très vive avec tous les acides; il ne seft prefque point fubli- mé de fel ammoniac au col de la cornue, parce que j'avoiscon- duit le feu avec beaucoup de ménagement. J'ai pris, pour faire lens veneris , trois parties de la matière qui refte dans la cornue, après la diftillation des cryftaux de Werder & qu’on fair étre un cuivre très divifé, mais qui n'eft pas dans l'état de chaux ; je les ai mêlées avec une partie de fei ammoniac : ce mélange à été accompagné d’une chaleur beaucoup plus forte que celle qui fe produit dans le mélange du fel ammoniac avec le fer; mais il ne s’eft dégagé aucune vapeur d'alkali volatil. J'attribue l'augmentation de chaleur à l'état de divifion extrême dans lequel étoit le cuivre que j'ai employé , ce qui donne de la prife au fel fur le métal : jai diftillé avec les précautions que j'avois prifes dans l'opération précédente, j'ai obtenu un alkali volatil fluide teint en bleu par une portion de cuivre; cer alkali faifoit effervefcence avec tous les acides. Je ne crois pas, que dans ces Expériences, on puiffe dire que les matières métalliques aient enlevé à l’alkali volatil fon air fixé, & lui aient fair perdre, par ce moyen , fon état de con- crétion , puifque l’effervefcence que cet alkali produit avec les acides , prouve qu'il a retenu ce principe, qui, dans le fyf- téme du Docteur B/ack, eftaufli-bien la caufe du mouvement d'effervefcence que de la folidité. Si on objeéte que l’alkali volatil n'a perdu qu'une partie de cet air, je répondrai que cette partie perdue s’eft diflipée ou qu'elle s’eft reportée fur le réfidu: or l'air fixé n’eft pas plus difpofé à fe perdre dans cetre diftillation que dans celle du fel ammoniac avec la craie , & 574 MÉMOIRE les matières métalliques ne fe combinent point dans leur érat naturel avec l'air fixé qui fe dégage des fubftanses falines ; il faut néceflairement , pour sunir à ce principe, qui leur eft étranger , qu'elles changent de forme & deviennent chaux. Le Doëteur Black à déjà prétendu que l'augmentation de poids des chaux métalliques précipités des acides par les fels alkalis, n’étoit düe qu’à l'air fixé de ces alkalis qu'elles auroient ab- forbé. C’eft à de femblable air fixé qu'il attribue la propriété de l'or fulminant: s'il eft vrai que les chaux métalliques foient furchargées d'un air fixé femblable à celui qui fe dégage des fubftances falines , elles doivent agir fur le fel ammoniac bien différemment des chaux pierreules & des fubftances métalli- ques , & d’une manière tout-à-fait analogue à celle des pierres calcaires : or l'Expérience m'a montré le contraire , les chaux métalliques agiflent d’une façon qui leur eft propre, & qui tient de l'aétion des chaux pierreufes & de l’aétion des fubftan- ces métalliques, J'ai précipité une diflolution nitreufe mercurielle par le moyen du fel alkali de tartre ; j'ai fait bouillir le précipité dans une grande quantité d’eau diftllée, &, après l'avoir bien fait fécher, j'en ai mêlé trois parties avec une partie de fel ammo- niac en cryftaux bien purs & bien fecs: il s’eft dégagé à l'inf tant du mélange, une quantité confidérable de vapeurs d'al- kali volacil ; j'ai diftillé le mélange dans des vaifleaux de verre bien nets & luttés d’un fimple papier enduic de colle, j'ai ob- tenu une bonne quantité d’alkali volatil Auide & faifanc effer- vefcence avec tous les acides. Je m’attends bien que ceux des Chymiftes, qui penfent que les précipités participent aux pro- prictés des fubftances, qui ont opére leur précipitation , ne manqueront pas de me dire que le mercure, dans cette opé- ration, n'a pas agi d'une manière différente des fubftances métalliques, que les vapeurs d'alkali volatil qui ont été dépa- gées dans le tems du mélange, annoncent que le précipité contenoit un refte d’alkali fixe dont la décoétion ne lavoït pas entièrement privé, SUR LE SEL AMMONIAC. 575 Pour répondre à cette difficulté, je pris du z72nium, qui eft une chaux faite par la feule aétion du feu ; jen méêlai trois parties avec. une partie de fel ammoniac en cryftaux bien purs & bien fecs, dans l'inftant du mélange, il s’eft exhalé une grande quantité de vapeurs d’alkali volatil très-pénétrant; j'ai diftillé avec les précautions indiquées plus haut, j'ai obtenu pa- reillement de l’alkali volatil fluide & qui faifoic effervefcence avec tous les acides. Enfin je me fuis fervi d’une chaux métallique calcinée par le nitre , j'ai pris trois parties d’antimoine diaphorétique bien lavé & bien blanc, je les ai mêélées avec une partie de fel am- moniac ; il s’'eft dégagé beaucoup d’alkali volatil dans l'inftant du mélange, &, par la diftillation, j'ai obtenu de l'alkali vo- lail fuide qui faifoit effervefcence avec tous les acides. Ces Expériences me femblent établir que les chaux métalli- ues , loin de contenir plus d’air fixé que les métaux, paroif. q » P roiflent en contenir moins, sil eft poflible de le dire, puif- qu'elles agiffent, à certains égards , à la manière des chaux pier- reufes. ï Au refte, je conclus, d'après ces faits que j'ai vérifiés plu- fieurs fois, qu'on ne fauroit affez prendre garde aux circonf rances des opérations , que l’empreflement de donner des cho- fes neuves empêche de voir ce qui fe pañle, qu'on ne choifie que ce qui s'accorde avec le fyftêéme qu'on s’eft formé, qu'en particulier un grand nombre de faits que le Doéteur Black a avancés fur l'air fixé, ne font rien moins que prouvés. Si on me reproche que, dans ce Mémoire, je fie fais que détruire au-lieu d’édifier, je trouverai ma défenfe dans le goût de l'Académie, qui n’admet de découvertes que celles qui font bien avérées, de phénomènes, que ceux dont touces les circonftances ont été foigneufement examinées, & qui préfère la vérité des faics aux hyporthèfes les plus brillantes. 576 EE —_—_— —— — ANALYSE D E lé À : ZE O: CURIÈLES Pa M. BUCQUET. Quorqu E fouvent les foins que fe donnent les Naturaliftes , pour découvrir les richefles que la terre renferme dans fon fein, n'aient d'autre but que de fatisfaire la curiofité; ce n'eft pas cependant le feui fruit qu'ils tirent de leurs che tee Elles ont un avantage plus précieux, celui de fournir aux hom- mes la pluparc des biens donc ils jouiflent ; on pourroit peut- être même fe flatter , que de routes les fubftances que décou- vice l'Hiftoire Naturelle, il ne s’en trouveroit pas une qui ne püût être employée utilement, fi les Chymiftes euffent travaillé à nous faire connoiître , par des analyfes exactes, la nature & les pro- priétes de tous les corps: mais , fans GIE prétendre à de fi grands avantages , il paroit au moins certain, que fi l'Hiftoire Naturelle offre aux Chymiftes beaucoup de fajets de recherche, la Chyinie peut, à fon tour, jeter un grand jour fur Hiftoire Na: turelle & fur-tout fur celle dés fubftances minérales. C'eft un fait connu de tous les Savans, que quelques légè- res différences dans les formes , ont fouvent engagé les Mé- thodiftes À féparer des objets de même nature, & à rappro- cher dans une même clafle , des individus qui n'ont entreux qu'une reflemblance extérieure , quelquefois même aflez peu marquée. Dans le deflein de concourir, autant qu'il eft en mon pou- voir, à éclaircir l'hiftoire du règne minéral, au moins celle qui s'apprend ANALYSE DELA /ZÉOLITE. $77 s'apprénd dans les cabinets ; & que je ne confonds pas avec les connoiflances qu'on acquiert en étudiant la Nature dans les lieux mêmes où elle travaille , je me fuis propofé d’exami- ñer avec foin lés fubftances minérales dont les propriétés ne ñous font point connues, ou du moins ne le font que fort peu. Si mon travail peut être de quelque utilité, j'en ferai re- devable au zèle d’un Savant illuftre, M. le Duc de /a Roche- foucauld, qui ‘applique avec une ardeur égale à l'étude de l'Hiftoire Naturelle & à celle de la Chymie , & qui a bien voulu me fecourir en m’aidant dans mes recherches, & en facrifiant à des Expériences chymiques, les échantillons les plus beaux & les mieux caraétérifés de fon Cabinet. Je commencerai par rendre compte de l'examen chymique de la Zéolite. Si les faits que je préfente font peu abondans, & sils ne font pas parfaitement liés avec les chéories générales de la Chymie, jefpère que l’Académie voudra bien m’exculer, elle fait trop combien la marche eft lente dans des recherches de cette nature, fur-tout lorfqu’on veut qu'elle foit aflurée, & qu'on ne s'emprefle pas de conclure fur des apparences légè- res & fouvent trompeufes ; elle fait également combien les. théories chymiques ont de peine à çadrer avec les faits nou: veaux. M. Croufledt eft le prémier, qui nous aît fait connoïître la Zéolite , dans les Aétes de l’Académie de Suède, pour l'année 1756. Il la compare au fpath pour la dureté , parce qu'elle ne donne pas d’étincelles lorfqu'on la frappe avec l'acier! Il ob- ferve néanmoins que cette fubftance ne fait pas-effervefcence avec les acides, comme les fpaths calcaires, & qu'elle fe dur- cit aycc les acides lorfqu'ils font trop concentrés. Selon M. Croufledt, la Zéolite chauffée à la lampe d’émailleur, bouil- lone comme le borax , fes parties fe féparent , elle paroît blan- che & comme fpongieufe, elle donne une lumière phofpho- rique, enfin elle fe fond en un verre qui eft d’abord blanc & qui, à un plus grand coup de feu , devient tranfparent, » TomelIX, D ddd 578 R A'N AIL'AIS E M. Croufledt a examiné deux efpèces de Zéolites, une parfai- tement blanche, venant d'Iflande, qui eft plus difficile à fon- dre, quoiqu'elle fe vitrifie parfaitement avec le fel de foude & le fel fufible d'urine ; l'autre, tirant fur le jaune , venant de Laponie. Cette dernière a paru à notre Auteur tenir un peu de cuivre : elle fe fondoit fans addition en la foufflant fur ua charbon avec un chalumeau. M. Crouftedt ne diftingue la Zéolite du fpath , que parce qu’elle fe fond & fe vitrifie avec le fel de foude. Mais M. le Baron d'Æo/bach obferve très-judi- cieufement que ce caraétère ne diftingue pas fuffhifamment les deux fubftances, puifque l'expérience fait voir que vous les fpaths calcaires fe fondent & fé vicrifient avec routes les fub: ftances falines employées par M. Crouftedr. I préfume que la Zéolite pourroit bien n'être qu'un mélange de fpath fufible & d'un peu d'alun: il attribue à la première de ces deux fubftan- ccs, la fufibilité & la propriété phofphorique, & à la feconde, le bourfouflement qu'éprouve la Zcolite, lorfqu'on eflaie de la fondre. Les Expériences que je vais rapporter, me font croire que la Zéolice eft une fubftance d’une nature toute particuliere, & qui ne peut être aflimilée à aucune fubftance connue, pas méme à l'argile avec laquelle plufieurs Minéralogiftes ont voulu la ranger, ni au fpath, au nombre defquels M. le Che- valier Ÿ’ou-linné Va mife fous le nom de Sraladites fpathofus rufefceus , donnant comme caraétère particulier à cette fub- ftance la propriété qu'elle a de faire une gelée lorfqu’on la dif- fout dans les acides ; caractère qui fe retrouve dans le lapis- lazuh, que le même Auteur regarde comme une forte de Zéolite. M. Croufledr, dans fa nouvelle Minéralogie , ne compte que trois efpèces de ce genre; favoir, la Zéolice blanche, la Zéo- lite verte & la Zéolite rouge. L'efpèce fur laquelle jai opéré ; eft parfaitement blanche, elle eft cryfallifée en longs filets foycux, qui fe réuniflent en un DE LAVAÉQIRITE. 579 centre commun: elle vient de l'Ile de Feroë , & fe trouve fou- vent mêlée d’un peu de terre ochracée tougeatre; on en ten- contre aufli fur la Chalcédoine. 1.° J'ai placé un morceau de Zéolite pefant une once, dans un creufet d'Allemagne fermé de fon couvercle & lutté avec la rerre à four ; j'ai mis le creufet entre les charbons , dans un fourneau d’un pied de large fur un pied de hauteur ; j'ai porté le feu au plus haut degré de violence, à l’aide d’un fort fouf- flet de quatre pieds de long fur deux pieds & demi de large; je l'ai entretenu pendant une heure & demie : au bout de ce tems, j'ailaifle tomber le feu, & ayant retiré le creufet , je l'ai trouvé bien entier , mais foudé avec fon couvercle & fon fup- port : la Zéolite étoit fondue en un verre peu compact, lai- teux dans fa plus grande partie & tranfparant dans quelques endroits. Le verre, quoique fpongieux , a fait feu lorfqu'on l'a frappé avec l'acier, & je n'ai pu y découvrir aucune qualité phofphorique. 2.° J'ai pris une demi-once de Zéolite, que j'ai mife dans un creufet d'Allemagne; jai placé le creufet fous une moufle que j'avois établie au milieu d'un fourneau à vent femblable à celui dont s'eft fervi M. Por, pour fes Expériences de Litho: géognofic , avec les additions & corrections indiquées par M. Macquer. Le feu a été pouflé par degrés & foutenu dans a plus grande violence pendant près de trois heures ; au bout de ce tems, je l'ai laiflé tomber : cout étant refroidi, j'aitrouvé la moufle affaiflée & fondue en pluficurs endroits, principale- ment dans fon adhérence avec les briques qui lui fervoient de fupport. La terre que j'avois employée pour fixer les briques au fourneau & à la moufle , étoit parfaitement fondue; le creu- {et n'avoit fouffert aucune altération , maisla Zéolite fe trouva fondue en un verre blanc opaque & fort dur : ce verre étoit couvert en quelques endroits d’un enduit de verre noir, dont Jactribue la formation à la terre ochracée, qui recouvroit la Zéolite en quelques parties, Le verre de Zéolite a donné des Dddd ij 580 ANALYSE étincelles avec l'acier , mais il n'eft nullement phofphorique : quelque violent que foit le feu qu’on donne à laide du four- neau de M. Macquer, il ne m'a pas paru excéder celui du fourneau à foufflet dont je me fuis fervi pour ma première Ex- périence. J'efpère avoir inceflamment l'honneur de préfenter à Académie plufieurs fubftances qui ont été parfaitement fon- dues dans mon fourneau à foufflet, & qui n’ont point été al- térées dans celui de M. Macquer. À l'égard de la Zéolite, elle a éprouvé à-peu-près la même altération dans l’un & dans l'autre. 1 M. d’Arcer, en publiant , dans le Journal de Médecine du mois de Janvier 1773 , le réfultac de fes nouvelles tentatives fur le diamant , rapporte avoir fondu la Zéolite en un verre d'émail. Cette Expérience , qui saccorde parfaitement avec celles que j'ai rapportées plus haut, démontre que cette fub- ftance cf fort différente des pierres quartzeufes & autres, que les Naturaliftes nomment vicrifiables, puifque M. d’Arcer a fait voir que ces pierres étoient les feules qui ne pouvoient fe fondre fans addition. La Zéolite, foit en mafle, foir réduite en poudre, ne fait point d'effervefcence avec les acides : aïnfi, il eft aifé de foup- çonner qu'elle n'eft point de nature calcaire , cependant dans l'intention de m'en aflurer davantage. À 3. J'ai pris une once de Zéolite groffièrement concafiée ; je l'ai introduite dans une cornue de verre , que j'ai placée dans un fourneau de reverbère; j'ai ajufté un récipient, que Jai lucté avec du papier enduit de colle; j'ai chauffé par de- grés : au bout d’une demi-heure, j'ai apperçu les vaifleaux légè- rement obicurcis par des vapeurs aqueufes ; à ces vapeurs Ont fuccéde des gouttes qui fe fuivoient à-peu-près de minute en minute; lorfqu'elles ont ceflé, j'ai élevé le feu jufqu'à bien rougir la cornue qui seft fenfiblement déformée , mais fans fe fondre. L'opération a duré quatre heures, & le feu a été crès- fort pendant près de deux heures: il ne s’eft pas dégagé d'air DE LAY2ÉOMITE. s8r ni de vapeurs élaftiques fenfibles ; le produit que j'ai retiré du ballon étoic limpide, il avoit une faveur très-lécèrement ftip- tique, qui seft perdue en le laiflant expofe à l'air, & une odeur fenfiblement empyreumatique , que je crois devoir attribuer au lut dont je m'étois fervi: le produit pefoit un gros & demi & quelques grains; il n’altéroit pas la couleur du papier bleu ni celle du fyrop de violette ; les acides & les alkalis n’y ont roduit aucun changement, &, étant cxpofe à l'air , il s'eft évapore fans laifler de réfidu : la matière, qui étoit reftée dans la cornue , avoit confervé toute {à fotme , elle avoit feulement perdu de fon brillant & étoit fi friable, que les morceaux fe réduifoient facilement en poudre en les frottant entre les doigts. Cette matière pefoit fix gros & demi & quelques grains : or ce poids ajouté à celui du produit , prouve qu'il ne s’étoit rien ou prefque rien perdu pendant lopération , que la Zéolite contient un peu plus des £ de fon poids d’eau, qu'elle perd pat une chaleur aflez douce, & que cette eau contribué à lui donner la folidité & le brillanc cryftallin. La Zéolite qui a été privée d’eau par la diftillation, étant expofé à l'air, n'y éprouve aucun changement; elle n’eft donc pas dans l'étac de chaux. Comme on paroît objecter que le degré de feu que j'ai employé n'eft pas aflez fort pour décom- poler cette matière, & quil ne fait que lui enlever fon eau furabondante , comme cela arrive à la pierre à chaux, qui n'a pas été fuffifamment calcinée : je répondrai, 1.” qu'aucune pierre calcaire ne donne autant d’eau par la diftillation ; 2.” qu'au- cune n'acquiert la friabilité que jai trouvé dans la Zéolire ; 3.° qu'ayant expofé la Zéolite à un feu plus fort dans un creu- fet fous la moufle d'un fourneau de coupellé, pendant deux heures, cette fubftance n’a pas plus pris les caraétères de la chaux, qu'elle s’eft feulemenc agolutinée & un peu durcie : dans cer étar, elle n’eft nullement phofphorique ; elle ne s'é- chauffe point avec l'eau , ne produit pas d’effervefcence avec les acides, & lorfqu'on la tricure avec le fel ammoniac, elle ne 582 AN ABEYBSE dégage point d’alkali volatil. Cela fuffit, je penfe, pour prouver que la Zéolire n'eft point une fubftance calcaire. La Zéolite eft-elle une matière argilleufe? Plufieurs Miné- ralogiftes l'ont penfe, je l'ai cru moi- même, d’après la ref- femblance de fon tiflu avec celui de lasbefte & de l'amiante, qu'on regarde comme des pierres argilleufes ; mais je crois cette opinion mal-fondée ; 1.” les verres qu’on obtient en fon- dant la Zéolite ne font pas colorés comme ceux qu'on fait avec l’asbefte & l'amiante ; 2.° les pierres argilleufes fe durcif fent en féchant, & les morceaux LE rerre-olaife defléchés ne peuvent être mis en poudre que difficilement; la Zéolite eft, au contraire , fort difpofée à fe bourfoufler ; 3.° l’argille acquiert un très-grand degré de dureté, la Zéolite devient très-friable; 4° enfin les argilles ont un plus ou moins grand degré de liant ; la Zéolite, foit en fubftance , foit apres avoir éte deffé- Là D chée, n’en a aucun. Au refte, fi ces faits ne paroïflent pas concluans , je vais ajouter quelques Expériences , qui acheveront d'éclaircir la queftion. 4° J'ai misune demi-once de Zéolite en poudre très-fine ; dans douze onces d’eau diftillée ; que j'ai fait bouillir pendant environ un quart d'heure : ayant filtré la décoétion , j'ai fait fécher la matière qui étoit reftée fur le filtre , elle s’eft trouvée abfolument de même poids qu'avant d'avoir été mife dans l'eau ; j'ai fait évaporer la liqueur filtrée dans un vaifleau bien net à une chaleur très-douce & comparativement à une égale quantité d’eau diftillée, elle n’a laïflé aucun réfidu. La décodion de Zéolite n'altère pas la couleur du fyrop de violettes & n'eft pas alrérée par les alkalis, On peut conclure de-là , que la Zéolite n’eft point un fel ; & que même elle ne contient rien de falin , fort différente en cela des argilles que M. Baumeé à (dit étre des fels diflolubles dans l'eau, différente aufli des fpachs féléniteux & des fpaths F DE LA ZIMO!LUT E. 583 fufñbles , les premiers diflolublés dans l'eau , comme la fait voir M. Mar graff, & formés par l'union de lcidé vitriolique à la terre calcaire; les feconds étant, au rapport de M. Boulanger, dans l'Analyfe des fpathis Auors qu'il vient de publier ; des {els à bafe cerreufe , dans la compolition défquels entre un acide particulier , qu ’l nomme acide fpathique, & qui paroîc avoir des propriétés communes avec r acide marin, A l'égard de l’alun, que M. le Baron d’'AHolbach préfume fe trouver dans la Zéolire , je n'ai rien vu qui puifle appuyer cette conjecture; je crois pouvoir aflurer que la Zéolire n’eft ni une terre vitrifiable, ni une terre calcaire; ni une terre argil- leufe, ni une matière faline, Il reftoit À examiner fi cette fubftance n’étoit pas une terre métallique dans l’état de’ “fpath, & telle à-peu-près, que fe trou- vent le plomb dans la mine de ion à blanche, & le fer dans les mines de. fer blanche. bg Pour: m'en aflürer , j'ai pris une once de Zéolite, & , après l'avoir mêle exactement avec le double de fon poids de flux noir, j'ai mis le tout dans un creufer d'Allemagne fermé de fon Convercle & lutté avec la terre à four: jai tenu ce creu- et pendant une heure dans le fourneau que j'avois employé pour ma première Expérience ; au bout de ce tems, j'ai laiflé tomber Je feu, & mon creufet étant refroidi, je l'ai caflé & j'ai trouvé un beau verre dur ; bien tranfparant & de couleur verte, mais fans aucun culot métallique; j je n’attribue pas même Hiédltériau verre à autreichofe qu'au flux dont je m’étois fervi, lequel conrenoit du phlogiftique en abondance’; principe . qui donne de lacouleur à tousles verres ; peut être même y en- troit-il une portion de terre martiale, qui fe trouve unie à pref que tous les échantillons de Zébhtel & dont le tartre qui en- tre dans le flux noir, n'eft jamais EXEMPt ; mais jé ne crois pas que la Zéolice foiel de nature métallique, puifque tous les verres qu'elle donne , lorfqu’on la’ fond fans addition, font ee comme de l'éinail; d’ailleurs, dans les Expériences que je ) 584 1 T JAINDAISY S É vais rappotter, cette fubftance n’a rien fourni qui puifle le faire CrOIrE: Les fels acides attaquent la Zéolite lorfqu'ils ne font pas trop concentrés ; car autrement ils la durciflenc ainfi que l'a dit M. Crouftedt. M. le Chevalier V’ou-linné dit, que la Zéolite forme, avec l'acide vitriolique afloibli, une efpèce de gelée ; mais il ne dit pas à quoi eft dûe la produétion de ce phénomène. C'eftce que je vais tâcher d'éclaircir. ? Ayant mis quatre onces de Zéolite en poudre dans huiton- ces d'huile de vitriol médiocrement concentrée , il. s’eft pro- duit un aflez grand degré de chaleur, & au bout de fix heu- res la mafle étoit en confiftance d’une gelée blanche de cou- leur d’opale & bien trémblante. Cette mafle , expoée à l'air, en a attiré l'humidité fenfiblement; l'ayant examiné au bout de deux années ,-j'ai trouvé des mafles aflez confidérables, de certe gelée nageantes dans une liqueur épaifle & acide ; j'ai féparé cette liqueur par le moyen du filtre & j'en ai retiré par l'évaporation , un fel vitriolique de Zéolite, femblable à celui que je ferai connoître dans l'inftant : ce fel étoit avec excès d'acide ; j'ai pris la .mafle gélatineufe, qui étoit reftée fur le fil- tre, je l'ai lavée dans plufeurs eaux diftillées jufqu'à celque ce fluide refusat d’en difloudre : il eft refté environ un quart, c'eft-à-dire, une once de Zéolite-.quin'étoic pas falin. Les lefli- ves de la matière mucilagineufe m'ont donné, par l'évapora- tion, le même fel que j'avois obrenu en évaporant la liqueur acide qui furnageoit le mucilage ; mais ce dernier ne conte- noit pas une aufli grande furabondance d’acide que le pre- mier. Ces tentatives me firent foupçonner que le produit gé- latineux qu’on obtenoit en difflolvant la Zeolite, n’étoit que l'état paflager d’une combinaïfon qui n’eft pas bien parfaite : on voit, en effet, que l'humidité de l'air fuffit pour détruire en partie la confiftance gélatineufe de cette combinaifon, & que 5 D'E HAWZIMOLM TE. 585 que l'eau achève de la détruire, en la mettant dans l’état or- dinaire d’une diflolution faline capable de cryftallifer lorfqu'on enlève au fel une portion de l'eau qui le tenoit diflous. Je penfai donc que la produétion du mucilage ne dépendoit que ‘de ce que l'acide vitriolique, appliqué à une mafñle de Zéolite un peu confidérable, s'échauffoit & l’attaquoit vivement, mais en partie feulement , & que le fel qui en réfulroit, cryftallifoit d’une manière prompte & péle-méle avec la portion de Zéo- lice & d'acide qui n’etoient pas combinés, puifqu'en délayant fuffifamment le mélange, je venois à bout de féparer la portion . . D 2 . faline d'avec celle quine l'étoic pas. 7+° Pour lever tous mes doutes, à cet égard, j'ai pris une demi-once de Zéolite réduite en poudre, j'ai verfé deflus une once d'huile de vitriol bien blanche & bien concentrée , il ne s'eft pas produit de chaleur fenfible , & l'huile de vitriol ne s'eft point colorée : la Zéolite s'eft aflez fenfiblement durcie ; au bout de quatre heures; j'ai ajouté une once d’eau diftillée, le mélange s'eft échauffé, il s’eft dégagé des vapeurs , mais elles n’avoient aucun caractère fulphureux , & étoient telles qu’elles réfultent ordinairement du mélange de l’huile de vi- triol concentrée avec l’eau; au bout de quatre heures, la liqueur avoit pris une confiftance plus folide, mais elle n’étoit pas élatineufe; je l'ai fait chauffer & évaporer à ficcité à l'aide d’une chaleur douce & incapable de difiper l'acide, qui pou- voit s'étre combiné à la Zéolite. J'ai leflivé la matière deflé- chée en y verfant à plufieurs reprifes de l'eau diftillée, jufqu’à ce qu'elle refusât d'en difloudre ; j'ai employé à ces lavages vingt-quatre onces, & il eft refté deux gros moins quelques grains, C'eftà-dire, près de la moitié de Zéolite, qui n’étoit pas dans l’état falin. On peut difloudre la plus grande partie de ce réfidu en le faifant bouillir dans de nouvel acide vitrio- lique ; maïs il faut s’y prendre à plufieurs fois, & il en refte toujours prefque un quart qui ne peut fe difloudre: j'ai raf femblé toutes les eaux qui avoient paflé fur la mafle faline de Zéolite; je les ai fait évaporer & j'en ai obtenu un fel qui Tome IX, Ecce 586 AMNUANENY SE cryftallifoit difficilement fur la fin; ce fel pefoit cinq gros & demi, il contenoit beaucoup d’acide furabondant & très- peu d’eau; aufli n’a-t4l pas pu perdre fon excès d'acide par limbi- bition fur le papier gris , fuivant la méthode de M. Baume : Jai ajouté un peu d'eau pour enlever l'excès d'acide ; on peut y parvenir de cette manière, mais on perd beaucoup: j'ai verfé une demi - once d’eau fur ce fel avec excès d'acide, il seft excité une chaleur vive & plus de la moitié de la mañle a été difloute, ce qui reftoit écoit beaucoup moins acide , j'ai verfé deflus une once d’eau qui en a diflous une quantité aflez con- fidérable ; une feconde once d'eau verfée fur le réfidu , en a encore diflous une partie, le refte' ne contenoit plus d’acide furabondant, & n'a pu étre diffous que par cinq onces & demie d'eau, ce qui fait huit onces de ce fluide pour difloudre une demi once de ce fel. On peut voir, d’après cela, que le fel vitriolique de Zéolite eft plus difloluble que la flénité & qu'il l'eft beaucoup moins que l’alun; on voit encore que plus ce {el contient d'acide furabondant , plüs il eft facile à difloudre. M. Baurmé a publié, dans fa Chymie, une obfervation fembla- ble fur le gyple. Comme javois pris foin de féparer les différentes eaux, qui avoient fervi à difloudre le fel vitriolique de Zéolite, je les ai fait évaporer féparément à une chaleur douce ; la première m'a donné un {el avec excès d'acide, qui a eu beaucoup de peine à fe deflecher , expolé à l'air, il en attiroit puiflamment l'humidité & fe noircifloit ; la feconde diflolution a donné un {el moins chargé d'acide & conféquemment moins déliquef- cent , mais toujours fufceptible de shumeéter & de noircir à Pair ; la troifième diflolution & les fuivantes, ont donné un fel parfaitement blanc & qui n’éprouvoit aucune altération de la part de l'air. Ce fel, que je nomme /£/ vériolique de Zéolrre, eft fous la forme de petites lames ou de flocons applatis, lies les uns aux autres & formant une pellicule terreufe un peu bril- lante, aflez femblable à l'efpèce d’argille faétice que M. Baumé forme en faturant l’alun de fa propre terre, & ilaconftamment DE L'AY 2 'É ONRI T E s 87 la mème forme, foit qu'il foit privé de tout acide furabondant, #oit qu'il en retienne une très-grande quantité. La faveur du fel vitriolique de Zéolite, privé de tout acide furabondant, eft amère & un peu AE lorfqu'on expofe ce fel au feu dans un creufer, il fe delléche , mais il ne fe bourfoufle pas comme lalun. 8. J'ai diftillé du fel vitriolique de Zéolite avec excès d’a- cide dans une cornue de verre que j'avois placée dans un four- neau de réverbère ; j'ai élevé le feu jufqu'à ce que la cornue füt bien rouge; jai trouvé , dans le récipient, de l’eau chargée d'acide vicriolique; la mafle, qui étoit dans la cornue, n'étoit plus avec excès d’acide, elle étoit néanmoins difloluble en tota- lité dans l'eau , & fa diflolation évaporée , a donné du fel vi- triolique de Zéolite parfaitement neutre: ce procédé m'a paru le plus propre à enlever à ce {el fon excès d'acide. Le fel vitriolique de Zéolite ; ainfi privé d'acide furabon- dant , demande, pour fe difloudre, vingt-quatre parties d’eau froidé, au-lieu de feize ; au refte, 11 n’en eft pas moins conf- tant que ce fel eft plus diffoluble que la félénite , & qu'il left moins que l'alun. 9.° L'eau bouillante diflout le fel vitriolique de Zéolite en plus grande quantité que l'eau froide, & les cryftaux que j'ai obtenus par le refroidifiement, ne diffèrent en rien de ceux de la même diflolution faite à froid. 10.” Pour voir jufqu'à quel point l'acide vitriolique adhéroït à la Zéolite, j'ai pris du fel vicriolique de Zéolire bien dépouillé de tout acide furabondant par deux lavages; je l'ai diftillé dans une cornue de verre au fourneau de réverbère; j'ai entretenu le feu dans fa plus grande violence pendant quatre heures, le felne s’eit pas décompolé; je n’ai trouvé dans le ballon que de l'eau pure. 11° Le vitriol de Zéolite peut être décompofé par les fels Ecéee 588 ANALYSE . alkalis boit fixes, foit volatils; j'ai verfé de l'huile de tattre dans une diflolution de fel vicriolique de Zéolite , la liqueur seft croublée & il s’eft fait un précipité blanc très-abondant ; j'ai dc- pouillé ce précipité de toute matière faline par des lavages muluipliés , je lai enfuite fait fécher doucement; il étoit d'un blanc fale & n’avoit aucune forte de liant; mêlé aux acides, il a fait une effervefcence aflez marquée & sy eft diflous en grande partie , mais non pas en totalité. Lorfque ce précipité eftæécent & humide, il fe diflout aifément & en totalité dans tous les acides; ces caractères lui font communs avec ceux que M. Baumé à aflignes à la terre precipitée de l'alun par l'al- kali fixe. Lorfque j'ai employé l'alkali volatil, pour décompofer le fel vitriolique de Zéolite , je n’ai apperçu aucune différence dans les réfulrats. La craie mife dans une diflolution de fel vitriolique de Zéo- lite n'y occafionne aucun précipité, il en eft de même de la terre d'alun. 12.° J'ai verfé, dans une diflolution de fel vitriolique de Zéolite , une leflive d’alkali phlogiftiqué préparé pour faire le bleu de Prufle; il s'eft dégagé à l'inftanc un précipité blanc fort abondant ; j'ai verfe un acide fur ce précipité , tour $’eft diflous , la liqueur eft devenue parfaitement tranfparente ; mais, au bout de deux jours, on y voyoit quelques parties de bleu de Prufle, mais en trop petite quantité pour pouvoir être raflemblé. J'attribue encore ce bleu à la terre ocracée, dont il eft difficile de dépouiller parfaitement la Zéolite, & cela ne m'empêche point de penfer que la Zéolite n'eft point une terre métallique ; 1.” parce que les acides ne fe combi- nent pas aufli facilement avec les terres métalliques parfaite- ment déphlogiftiqués: or la blancheur du verre de Zéolite, prouve que certe fubftance ne contient point de principe in- #ammable ; on le voit encore, parce qu'elle ne donne à l'huile DE LAYZÉOIMI T E. 589 de: vitriol ni couleur ni caraétère fulphureux; 2.” tous les fels métalliques décompofés par l'alkali phlogiftiqué , fourniffent des précipités indiflolubles dans les acides : or le précipité obtenu du fel vitriolique de Zeolite par cet alkali, eft, à crès- peu près, difloluble en entier dans les acides. Il n’eft donc dû qu'à la portion d’alkali qui n’eft pas faturé de’ la manière phlo- giftique, & qui agit à fa iranière fur les fels à bafe terreufe ; Ja portion d'alkali qui eft bien chargée de matière phlooifti- que , n'étant fufceptible d’être décompofée que par les fels mé- talliques , ainfi que l'a démontré M. Macquer , dans fes fivans Mémoires fur le bleu de Pruffe. 1 3.° L’acide nitreux-diffout la Zéolite avec autant defacilité que le fait l'acide vitriolique. J'ai pris une demi-once de Zéo- ‘lite, j'ai verfé deflus une once d'efprit.de nitre rouge & bien fumant, jai ajouté une once d'eau diftillée; il s’eft fait un petit mouvement, & l'acide en a diflous une aflez grande |quan- ticé ; Jai diftillé le cout dans une cornue de verre fur. un bain de faible ; jai leflivé la matière defléchée, avec une livre d’eau diftillée , en la verfanc à plufeurs fois, jufqu'à ce qu'elle refu- sat d'en difloudre. La matière, qui n’étoic pas dans l’écar falin , pefoit deux gros; j'ai verfé deflus une nouvelle once d’efpric de nitre & autant d’eau diftillée; j'ai diftillé comme la pre- mière fois , & j'ai diflous la matière deféchée dans douze onces d’eau diftillée; cout a été diflous à l'exception de douze grains. i 3 50 La diflolution de nitre de Zéolite évaporée à une chaleur douce , a fourni un‘{el refflemblant à une gomme. dans la quelle néanmoins on voyoit diftinétement des cryftaux blancs difpofés en barbe de plume. La mafle imiroir aflez bien les pains de régule d’antimoine du commerce, (fur lefquels on voir une ctyftallifation qu'on a comparée à des feuilles de fou- gère. Lorfque Ja diflolution de nitre de Zéolite à été rappro- chée par l’évaporation ,autantqu'il eft poffble , elle cryftalli- lifcialors fubitemenc par lerefroidiflement , & forme un-gros LE 1 L'AÏ N) À LE Y?S.E faifceau d’aiguilles , qui convergent toutes vers un centte commun. 3 Le nitre de Zéolite a une faveur violemment ftiptique, & femblable à celle du nitre qu'on forme avec la terre de l’alun, auquel il reflemble d'ailleurs beaucoup par la propriété d'attirer l'humidité de l'air & de fe réfoudre.en liqueur. … Le nitre de Zéolite eft décompofe très-facilement par l'acide vitriolique. À La diflolution de ce fel eft fufceprible d'être précipitée pat les fels alkalis, comme celle du fel viriolique de Zéolite. 14.°. L'acide marin verfé fur la Zéolice’, l'attaque méme froid, & en diffout une quantité aflez confidérable, J'ai opéré fur cette matière ‘avec l'acide marin ; comme j'avois opéré avec l'acide nitreux, & je! n'ai vu d'aûtrés différences; finon que l'acide marin diflout cette fubitance en moins grande quancité'que ne le fait l'acide nitreux & même l'acide vicrio- lique. Le‘fél marin de Zéolite eft jaunâtre ; fortement ftipti- que & moins deliquefcent que le nitre de Zéolite, 1l reflem- ble au fel marin , dont la bafe eft la terre de l’alun : ce fel eft décompofe par les acides vitrioliques & nitreux & par les alkalis. De tous les faits que je viens de rapporter , je crois être en droit de conclure, 1.® Que la Zéolite n’eft point une terre vicrifiable, au moins de l’efpèce de celles auxquelles on donne ce nom, puifqu'elle fe vicrifie fans addition; 2.° Qu'elle n’eft oïnt calcaire, puifque dans fon état d’aggrégation ,.elle ne fait poinc effervefcence avec les acides, qu'elle ne donne point d'air fixé, lorfqu'on la traite à feu nu ou dansles vaifleaux clos, qu'après la calcination, elle ne s’échauffe pointavec l'eau, & qu'elle ne dégage point l’alkali volatil lorfqu'on la triture avec le fel ammoniac; 3.° Es n’eft point de nature argil- leufe, puifque ; loin de fe durcir au feu en perdant fon humie DH) SA: Z É © HAT EMA. sor dité , elle devient , au contraire, très-friable; qu’elle n’a aucun liant, foit avant d'avoir été privée d’eau, foit après en avoir éré dépouillée; qu'elle ne fait pas d'alun lorfqu'on la combine avec l'acide vitriolique; que la craïe ne la dégage pas des acides auxquels on unit; & qu'enfin la terre précipitée de {es diflolutions falines , n’a pas plus de liant qu'elle n’en avoit avant fa diflolution; 4.° qu'elle n’eft point un fel, qu'elle ne contient rien de falin, puifque l'eau bouillante n'en peut rien extraire; 5.” Enfin qu'elle n’eft poinc une terre métallique, puifqu’elle ne fournit point de verres colorés lorfqu'on la fond fans addition, puifqu'on n’en peut rien tirer de métallique en la fondant avec des matières phlogiftiquées , puifque les acides la diffolvant prefque en totalité; l'afkali phlogiftiqué ne décompofe ces diflolutions que comme celles des fels à bafe terreufe. Je regarde donc la Zéolite comme une terre particulière; mais je ne me contente pas de lui afligner pour caraétère la propricté qu’elle a de fe fondre avec le fel de foude, ainf que l'a fait M. Croufledi, ni celle de former une gelée avec l'acide vicriolique , puifqu’elle a cela de commun avec plufieurs fubftances fort differentes les unés- des autres , comme le la- piflazuli , l'étain,, la pierre hématite, & la plupart des mines de fer, & que d’ailleurs cec état eft pañlager & non perma- nent. Je la diftinguerai par la propriété qu’elle a de fe fondre fans addition en un verre opaque Comine l'émail, & par celle de fe diffoudre prefqu'en totalité däns tous les acides , avec lef- quelselle fe comporte en quelque forte comme la terre de l'alun dont elle diffère d'ailleurs à beaucoup d’égards, principalement par fa fufbilité & fon défaut de liant. Peut-être , par la fuite, l'analyfe chymique nous fera-t-elle connoître quelques fubftances analogues à la Zéolite; il feroit auf fort pofivle qu'il y ait plufeurs efpèces de terres argil- leufes. M. Black à fait voir que la terre de la Magnéfie , qui çoz - ANAUYSE DE LAAZÉOLITE. fair effervefcence avec les acides, ne forme jamais de chaux vive par la calcination ; & plufieurs très-bons Chymiftes, pen- fenc que le fel d'Epfom, le gyps, la félénité, les fpaths vitreux & les fpaths fufblés, ne different qu'en raïfon de la cerre cal- caire qui leur fert de bafe , & qui pourroit bien ne pas être la même dans toutes les fubftances. Je finirai par faire obferver , que fi quelqu'un étoit difpofe à croire que. la Zéolite füt un produit de volcan , il devroit être derourné de cette idée , en refléchiflanc à la quantité d’eau que contient cette fubftance ; quantité qui va prefqué au quart de fon poids & qu'elle perd à l'aide d'une chaleur beaucoup plus foible: que celle que produit un volcan: on ne peut donc embrafler cette opinion, à moins de penfer que cette matière calcinée une première fois, a été de nou- veau difloute, charrice & cryftallifce par l'eau ; mais ce n'eft qu'une pure hypothèfe dénuce de preuves, & fur laquelle je n'infifterai pas davantage. SOLUTION 593 SOLUTION DE QUELQUES PROBLÈMES Relarifs à la Théorie des Surfaces courbes & des Courbes à double courbure. Par M TINSEAU, Correfpondant de l'Académie, Officier au Corps Royal du Génie. eZ PROBLÈME PREMIER, 1. T ROUYER léquation du plan tangent à une furface Préfeme courbe , en un point donné. SOLUTION. Soit À l'origine des trois plans coordonnés, PAE, PAR, RAE, auxquels eft rapportée la furface courbe ; foient AP (x), PQ (y), QM (x), les coordonnées du point M de la furface; ‘par M, imaginons deux plans, l’un perpendiculaire aux AP (x), l'autre perpendiculaire aux PQ QG; foient FMS, NMG, les fe&ions de la furface, par ces deux plans; M»T, NM, les tangentes au point M, de ces deux feétions; T &z, les points où ces tangentes remontrént le plan PAE; le plan T Mz , fera évidemment le plan tangent, en M, à la furface : il s'agit donc de trouver l'équation de ce plan, dont Tz eft l'interfe&tion avec le plan PAE. Pour cela, foit & un quelconque de fes points; de “; foit abaïflée, fur PAE , la perpendiculaire à; du point à, fur AP, la perpendiculaire A; appellons x, ©, », les coodonnées A7, 7A, Au, du point w; par #A, imaginons encore deux plans, Pun parallèle à MT Q , l'autre à M:Q; ils couperont le plan PAE, fuivant les droites A9, A7, parallèles Tome IX, F£f£ en1774: Fic. te 594 SLOHAUNT LION à PQ & AP, & le plan tangent, fuivant les droites 40, wy, parallèles aux tangentes MT, M: nommons f & /f” les foutangentes des courbes FMS, NMG:; par les points N &», que je fuppofe infiniment proches de M, abaïflons, fur le plan PAE, les perpendiculaires N 9, 3Q': enfin menons paralle- lement à TQ & à :Q, les petites droites M2, me: cela pofé, fi on repréfente la différentielle d’une fonétion A, de x, y, prife en ne faïfant varier que x, par (#)dx, il eft aïfe de Voir, que N:—(%).dx, & Me—(#).dy. Cela pofé, les triangles MOT, A0, donnent ...... à MO (x) : TOUQRALA (GTA IE ESS mais. CO A0—=70—mA.... mA=0, &/f :f::Br:7r0—BrXF, & Br—BP+Pr(+, fuivant que le point w eft plus près ou plus loin du plan RAE, que le point M): 0r....... JS SP TERMNABPEICYE D) K EE, 8. Pr=+tx+7: donc Br—(ÿ+/)X£ — x +7: donc A0, ou #, eft — CY+HNOXE-x+r)XS—9; équa- tion qui devient — ff" X (X—0)+fz;X(x— 7) — x f"X(ÿ—9)=0; fubftituant, dans cette équation, à f° 28 A (G):dy (Gi):dx toute réduction faite, l'éqüation A RME taf 88 GRR 1 (x—7)XdyX(E)- dx+(y-P)dxx(5)- dy (7-0) dxdy=o. (A). & f”', leurs valeurs, qui font , On aura, Je prends, pour f, _— , parce que PQ croiflant, MQ diminue, & qu’ainfi leurs différentielles, dy & (X) dy, doivent être prifes avec des fignes différens. COROLLAIRE. a. Faïfant o—0o, dans l'équation (A), on aura l'équation de la ligne T z , fuivant laquelle le plan tangent coupe le plan PAE; de même en faïfant 7 ou ®9 =0o, on trouveroit les inter- feétions du plan tangent avec les autres plans coordonnés. DE QUELQUES PROBLÊMES. 595 REMARQUE. 3. L’équation (A) ne contient évidemment que trois variables; puifque le point M étant donné, x, y & x font aufli donnés: de plus, elle eft algébrique, quoique fous une forme diffcren- tielle : car, pour avoir (2): dx, il faut prendre, dans l'équation de la furface, la valeur de x, en x & y, & différencier cette valeur, comme fi x feul varioit; ce qui donne une fonction algébrique, de x & y, dont tous les termes font affectés de dx: donc dyX(%)-dx eft une fonétion algébrique, dont tous les rermes font affectés de dx d'y: on prouvera de même que dxX(£)-dy eft une fonétion algébrique, multiplie par dx dy : donc toute l'équation (A) eft une fonction algébrique, multiplie, & partant divifible par dxdy: donc, &c. PROBLÈME IL. 4. Le Probléme premier nous donne une folurion bien fimple de celui-ci. Ayant mené, par un point donné, une infunite de lignes , tangentes à une furface donnée , déter- aminer la courbe à double courbure , qui eft le lieu de tous les points, dans lefquels ces lignes touchent la furface. SOLUTION. Soit M un des points de cette courbe; x, y, 7, {es coor- données AP, PQ, OM; w, le point fixe, duquel il faut mener ces tangentes à la furface ; a, b, c, les coordonnées conftantes, & connues, Â7, 7A, Au, de ce point w: fi, par le pont M, on imagine le plan tangent à la furface, il pañlera par le point w : l'équation (A), qui convient à tous les points d'un plan tangent, conviendra donc au point w, en y fubftituant les coordonnées particulières 4, 4, c, de ce point #, à la place des coordonnées indérerminées 7, @, w: on aura donc l'équation fuivante ..:....::...,.,,..4u } (G-a)dyx()-dxt+ (y) dx x(5)-dy=(x-0) dxdy = 0. (B} Ffffi SCA 596 SOLUTION Cette équation jointe à celle de la furface, donnera l’'équa- tion de projeétion de la courbe fur un quelconque des trois plans coordonnés. Remarquons que toutes ces tangentes forment la furface d'un cône tangent à la furface propofée , dont le fommet eft au point, & que la courbe que nous venons de détermi- ner , cft celle fuivant laquelle ce cône rafe & touche la fur- facc. SCHHO LAILE: 5. Ce que nous venons de voir, eft le fondement de la folu- tion du probléme général de la perfpettive & de celui des om- bres , qui, géométriquement, eft le même. Chaque point de la partie vifible d’un corps éclairé, envoie à l'œil un rayon de lumière : on peut donc regarder l'œil, comme le fommet d’un cône de lumière , qui a pour bafe la partie vifible de l’objet , & dont la furface eft tangente à celle de l’objet : or, fi on imagine ce cône coupé par une nouvelle furface quelconque, dont chaque point foit coloré de la cou- leur que porte le rayon de lumière par lequel il eft rencon- tré; il eft évident que cette furface fera fur l'œil la même im- preflion que l’objet : car elle y enverra le même nombre de rayons, fuivant la même direction & portant les mêmes cou- leurs. Cette furface fera donc la perfpe“tive de l'objet donné. La perfpcétive contient donc deux parties ; la première, qui confiftc à déterminer géométriquement les dimenfions de la erfpedive, fe nomme perfpettive géométrale ; la feconde, qui cf l'art d'y appliquer les coloris, fe nomme perfpective aërienne, & eft du reflort de la peinture. La perfpettive géométrale fe réduit donc à trouver l'inter- fettion du cône de lumière avec une furface donnée , c’eft-à- dire, dont on connoïît l'équation. Or , nous remarquerons que ce cône a pour bafe la courbe à double courbure, dont nous avons appris (N.° 4) à trouver les équations. Le Problème de la perfpective eft donc réduit à trouver l'équation d’un cône qui DE QUELQUES PROBLÈMES. 597 a pour fommet un point donné de pofition , & pour bafe une courbe à double courbure, dont on a les équations de projeétion: car ayant l'équation de ce cône, on trouvera aifément fon inter- fetion avec la furface donnée, qui doit fervir de tableau. Si, au-lieu d'un œil, onimaginoitun point lumineux , la par: tie éclairée de l’objet feroit la bafe d’un cône d'ombre , qui eft abfolument le même que le cône de lumière dont nous ve- nons de parler. Ainfi, le Problème de déterminer l'ombre por- tée par une furface donnée fur une autre aufli donnée , fe réduit comme celui de la perfpeétive , à trouver l'interfeétion du cône tangent à la première furface avec la feconde. Nous remarquerons encore que, fuivant que le point donné &, eft un œil ou un point lumineux, l'interfection ou plutôt la rencontre du cône de lumière avec la furface de l’objet, eft la courbe qui fépare la partie vifible de l'invifible, ou la partie éclairée de la partie obfcure de cette furface. PROBLÈME Ill. 6. Trouver l'équation d’un cône , étant donnees les coordon- LA d Ç, } 1 - d, . Ji d nées de fon fommet, & les équations de projections d’une courbe plane ou à double courbure par. laquelle & par le Jommet eft fuppofée paffer la furface de ce cône. SOLUTION. Soit Rz2 la projection fur le plan PAE de la courbe à dou- ble courbure , par laquelle pañle la furface conique, S’ & M, les projections fur ce plan du fommet S & d’un point N quel- conque de la furface ; par S & N, imaginons un apothême qui rencontre la courbe à double courbure en un point x, que je fuppolfe projetté en #2 fur le plan PAE; par S, M,&7, menons {us À P , les trois perpendiculaires,S’ S”’ , MP , 77 Je par M & », les droites ML, »1/ parallèles à À P; enfin par z, la droite z2K parallèle à #9’, & terminée à la perpendicu- laire SS”: foient 7, g.& « les coordonnées AP , PM, MN, de Frc, 2, $98 SOL DT OC! NY la furface conique ; a ,4 & c les coordonnés connues AS/’, S'S, S'S du fommet; x, y, 7, celles Ap,pm, mn de la courbe à ‘double courbure: on aura .............. 2 1:0H A YO NA(o—3):JK(c—2):: 24: nK:: mM : m ff: mi(r—x): ml(a—x) ::L(p—y) +19 (b=y). Le premier rapport, comparé avec le quatrième & le cin- quième , donnera les deux équations fuivantes ........4 (w—1)x(a-x)=(c—)x (rx) (C) (o—1)X(b—y)=(c-r)x(®-3)$ (D) Si on place l'origine des coordonnées au fommer S, les équations, que nous venons de trouver, deviennent ..... de) pr= 07 J° Les deux équations € & D, jointes aux deux équations de la courbe à double courbure, en font 4 par le moyen defquelles on pourra toujours éliminer x, y & 7, & partant avoir une cqua- tion En 7, ® & ©. REMARQUE: 7: Si la furface à mettre en perfpective n'étoit pas indefinie, mais terminée par une courbe tracée fur la partie vifible de cette furface , le Problème n’en feroit que plus aïfe, puifqu’on auroiït direétement la courbe qui fert de bafe au cône de lumière, fans étre oblige de la terminer par le N.° 4. Je n’ajouterai rien fur la manière de mettre un point en per- fpective fur une furface courbe quelconque pour tableau , puifque ce Problème eft renfermé dans ce que nous venons de dire, & en eft le cas le plus fimple, SCHOLIE PREMIERE, 8. Quoique la théorie que nous venons de donner, ne paroifle pas d'une grande utilité dans la pratique, elle peut néanmoins fervir à déterminer les points principaux d’une perfpcétivé, d'après lefquels lAttifte rifque moins de ségarer. Il faut aufli avoucr qu'on ne fe fert prefque jamais que de rableaux plans, DE QUELQUES PROBLÈMES. ‘ 599 par la grande difficulté qu'il y a à opérer fur un tableau cour- be, C’eft aufli par la même raïfon , que les Artiftes ne choïfiflent prefque jamais pour fujets de perfpective, que des corps termi- nés, au moins en grande partie, par des faces planes, comme des morceaux d’architeture, &c. Dans ce cas, & lorfque l'ob- jet à mettre en perfpedive contient beaucoup d’arrêtes paral- lèles, ils fe fervent , pour abréser , du principe fuivant: Les perfpectives de plufieurs droites parallèles fe rencontrent au point d’interfection du tableau avec la droite menée par l'œil parallèlement à ces droites. Voici une démonftration bien fim- ple de ce principe, dont les Auteurs de perfpcétive ont jufqu'ici cherchée la preuve ,les uns dans la métaphyfique, les autres dans des confidérations fur l'infini. Pat deux lignes parallèles & limitées, imaginons deux plans triangulaires , ayant leurs fommets à l'œil : foient coupés ces deux plans par un troifième quelconque, que je prends pour tableau; les perfpettives des deux parallèlas fonc (N.° s ) les interfeétions des plans trianoulaires par le tableau : or ces deux perfpedtives étant dans un même plan, qui eft celui du tableau , fe rencon- treront en quelque point : mais puifqu'elles font dans les deux lans triangulaires , elles fe rencontreront dans l'interfeétion de ces deux plans: or cette interfeétion pañle par Pœil, & de plus eft ad aux deux droites à mettre en perfpedtive; donc les perfpectives de deux droites parallèles concourent au point de rencontre du tableau avec la droite menée par l'œil paralléle- ment à ces deux droites. S-C H:0 LME I. 9. Si la diftance du point lumineux au corps qui porte or- bre eft incomparablement plus grande que la diftance de celui- ci au corps fur lequel il porte ombre, on pourra regarder les rayons de lumière qui vont rafer le premier corps comme pa- rallèles. Dans ce cas, le Problème des ombres fe réduit à trou- ver l'incerfettion d’une furface donnée avec une furface cylin- drique tangente à une autre furface donnée & dont les arrêtes 600 SUO"LAUE TL O' IN font parallèles à une ligne connue de pofition. Pour cela il faut avoir l'équation de cette furface cylindrique, ce qui fuppofe qu'on ait celle de fa bafe , c'eft-à-dire , de la courbe à dou- ble courbure , fuivant laquelle elle couche la furface pro- polée. PROBLÈME IV, 10. Trouver l'équation de la courbe à double courbure, fu:- vant laquelle une furface donnée eft touchée par une irfinité de . x \ ° e lignes parallèles à une direction connue. SOLUTION. Soit M un point quelconque de cette courbe; x, y & 7; fes coordonnées AP, PO, QM; on pourra, par le point M, mener une droite MB parallèle à la dire&tion connue: foit a l'angle qu'elle fait avec le plan PAE, ou avec fa projeétion BQ6 , l'angle :QB, que fait cette projetion avec :Q, ou l'axe AP qui lui eft parallèle, Par la condition du Probléme, cette droite fera tengente à la furface en M, elle ira donc ren- contrer le plan PAE en un point 8 de la droite T #. On aura MQ=8Q X rang a : donc BQ= 2%; mais le triangle :8Q, donne 8Q=1O x: or, 1 Qr= 2 Dans le triangle reétangle :QT, on a ....... e AR x dx XV. | me =: TO = ———— :: cof BrQ : fin BrQ ; d'où M are Gr : de is LE pi YX(R) dx je fre Jr RQ = TESTS dx) + de (0 d)) © dx X (à): dy É Of BEQ = —————’ © —©Î ——_——— 0 50 II su VC x dx) + de x (4) ? refte donc à trouver f?7 18Q: or l'angle Q , dans le triangle 1BQ et sie, fi on appelle :, l'angle B:Q, on aura tBQ=—180°—:— 0: donc... BRL, É DÉS CE: VURES DE QUELQUES PROBLÈMES. 6ot Jin t8Q = fin (180°—t) x cofb—finb cof(180°—+t)=ffnt x cofb + Jinb Xcofi; - Donc, remettant , pour /£r : & cof, leurs valeurs, que nous NÉRONS dÉÉFONVEr2LON AUTA LL LL 4.0 1 7 MU -] fin 28Q cof BX dy X(E)-dx + finb X dx X(E)-dy ae FR 2 d FENTE Var x (2 + dy x (5) dy) ) mettant, dans l'équation 8Q=:QXA#, pour ces grandeurs, les valeurs que nous venons de leur trouver, on auta l'équation AY atite ten |: LS (RDA CEA NRC DIE dxdy tang a = dy cof bX(E)dx + dx fin bX(S)-dy. (EX PROBLÈME V. : Sie 11. Trouver équation d’un cylindre formé en menant des parallèles à une ligne donnée , par tous les points d’une courbe # double courbure donnée. SOLUTION. Par l'origine À des coordonnées , imaginons une droite A9; donnée de pofition ; l'angle ® À À qu'elle fait avec fa projeétion & l'angle PAA, que fait fa projection avec l'axe ÀP feront connus: foient 77 & x ces deux angles; M un point quelconque de la courbe à double courbure, #2 fa projection fur le plan PAQ; Ap(x), pm(y), mM (x) fes coordonnées; MN une arête de la furface du cylindre ; N un point quelconque de cette arête; AP (7), Pz (©) & 2N (©) fes coor données ; MK une parallèle à #7 ; & enfin 72 / parallèle à AP; l'angle NMK fera m, & l'angle 2m/—n. On aura donc NK(w—7)=MK X rang m = mnXtans m3 mais le triangle #77, donne mn — #{—7*; il donne aufli nmn=%#—=$; ce qui donne les équations fuivantes: .... PRE "he ere ee RUE Y)S (G) Ces deux équations, jointes aux deux de la courbe à Tome IX, Gegg Fic, 3 Fic* 4, Fie, 4. 602 SOLUTION double courbure propofée, fuffiront pour éliminer +, y &x: Remarquons qu'on pourroit déduire la folution de ces deux derniers Problèmes de celles du fecond & du troifième. COROLLAIRE. 12. Si on fuppofe l'angle 2—o , ou que les arêtes du cylindre foient parallèles au plan des x & x, les équations F & G deviennent td À De fi on fup- pole l'angle 72—90°, auquel cas ang mc, les équations F & G deviennent, dans ce cas , qui eft celui où les arêtes du cylindre fonc perpendiculaires au plan des x & y, its c'eft-à-dire, que, dans ce cas, le cylindre a même équation que la projeétion de la courbe à double courbure; fur le plan des x & y; ce qu'on favoit déjà. LEMME. 13. La valeur de la foutangente, pour un point quelconque N, d’une courbe à double courbure, BND, portée fur la tangente de fa projeétion, eft "#42 [> étant l'ordonnée perpendiculaire au plan de la proje&tion, x & y les coor- données dans ce plan de projection ]. p pri Si, par le point N, on imagine une perpendiculaire, Nr, à la courbe BND, dirigée dans le plan AN M, la valeur de cette founormale, Me, fera Hi. PrRroBLÉMn VI. 14. Trouver l'équation de la furface formée par toutes les tangentes d’une courbe à double courbure propofée. DE QUELQUES PROBLÈMES. 603 SOLUTION. la première valeur de 4 2, comparéeavec les deux dernières, donne les équations fuivantes: .................4.. fes te Ti à) I x—o=(x—y)5K COROLLAIRE PREMIER. 15. Faïfons, dans les deux équations I & K, w—0o, nous aurons, pour déterminer la courbe Ak'#", fuivant laquelle les tangentes de la courbe à double courbure rencontrent le plan PAQ des x & y, lesideux équations ...... re) en Een (y 0e) SSL) REMARQUE. 16. On voit aïfément que les quatre équations que nous ve- nons de trouver, font algébriques, quoique fous une forme diffé- rentielle , & que les deux équations de la courbe à double cour- bure combinées avec les deux1&K, ou avec les deux H & L, fuffifent pour éliminer x, y & x. Geggi Fic, 4. 6o4 SOLUTION COROLLAIRE II. a 17. Sion fuppofe le point N donné & partant x , y & 7 con: nus, les équations H &L donnentla pofition du point fur le plan PAQ,& tourniflent par conféquent un moyen de menerune tangente d’une courbe à double courbure fans avoir recours aux cangentes de fes projections. COROLLAIRE IT. 18. Dans bien des cas, la courbe à double courbure formée par l'interfeétion de de furfaces , devient une courbe plane : : or, dans ce cas, la furface des rangentes devient le plan même 3 la courbe ; les équations I & K nous fourniflent donc un moyen non- HAE de reconnoître dans quels cas une courbe rapp DOrTÉE À CroIs plans eft plane, mais encore l'équation du plan Anis lequel elle fe trouve; Probléme aflez important dans la chéo- rie des courbes à double courbure. SÉCHNONENT LE 19. Une courbe plane w'eft fufceptible que d'une efpèce d'in- flexion , qui a lieu quand deux ou plufieurs élémens de cette courbe fe trouvent en ligne droite; m mais, outre cette efpèce d'inflexion , les courbes à double Libre en admettent une autre qui à lieu, quand trois on en général un plus grand nombre d'élémens confécutifs de la courbe à double cobrbte fe trouvent dans un même plan. J'appellerai znflexion plane, cette feconde elpèce d'inflexion , pour la diftinguer de la pre- mière, que je nommerai inflexion linéaire. PrRoBLÉËÉME VIL Déterminer Les points d’inflexion plane d’une courbe & double courbure. DE QUELQUES PROBLÉMES: 60$ SOLUTION. Soient DN, Nd, dJ, trois élémens confécutifs de la cour: be à double courbure BN D prolongés jufqu'à ce qu'ils ren- contrent en 2, #',k' le plan PAQ :4 k' fera la rencontre du plan PAQ avec le plan mené par les deux élémens DN, N4, & k’h"' fa rencontre avec le plan mené par les deux élemens N9, NX : donc fi lestrois élémens confecurifs DN, N7, di de la cour be BND font dans un même plan , les deux élémens 4 Z, #° #"' de la courbe k # ” feront en ligne droite. Si l'inflexion plane, au lieu d’être himple , étoit multiple du degré m, c'eft: a-dire, fi un nombre m+2 d'elémens confécutifs de la cour be BND, fe trouvoient dans un même plan, à commencer du point N, la courbe 4 4"! auroit un nombre #1 v-d’élé. lémens en ligne droite , à compter du point correfpon- dant au point N, c'eft-à-dire, auroit en 4 une inflexion du degré m. Il fuit delà, que pour trouver le point ou les points d’in< flexion plane de là courbe BND, on cherchera ceux de la courbe 4 2’ #" dont on trouvera l'équation (N° 15.): foit un de ces points d'inflexion , a & b, fes coordonnées AH, H?; on fubftituera à & leurs valeurs a & 4 dans les cqua- tions H & L, qui ne contiendront plus que x, y &7%:ainfr, ces deux équations jointes à celles de la projection de la courbe BND fur le plan PAQ , donneront les valeurs de KE VIE T > & fixeront par conféquent la pofition du point d'inflexion plane N, PROBLÈME VIII 21. Déterminer Les points d’inflexion linéaire d’une courbe A] a double courbure. SOLUTION. Soit N un point d'inflexion de la courbe BND, les deux élémens DN, NA font en ligne droite, & partant leurs pro- Fire, 4. 606 SOLUTION jections fur tous les plans poflibles , c’eft-à-dire, que les pro: jeétions du point N fur les trois plans coordonnés , font des points d’imflexion dans les trois courbes de projection. Soit a la valeur de x correfpondanteau point d'inflexion N ; il faudra qu'ayant cherché fucceflivement les points d'inflexion de la projection fur le plan des x & y, de celle fur le plan des x & 7, & de celle fur le plan des y & 7, on trouve dans la première & dans la feconde, un point d'inflexion correfpon- dant à la valeur de x—a, & dans la troifième , un point d'in- flexion correfpondant à une valeur de y, telle que le point correfpondant de la courbe à double courbure réponde à un X—=. Il faut donc faire dans l'équation en x & y, ddx & ddy =0 , & dans l'équation en x &7, ddx & ddz=o, rejetter les valeurs de x , que ces deux fuppofitions ne donnent pas égales dans les deux courbes. Il faut enfuite , dans l'équation en y & 7, faire ddy & ddz—o, ce qui donnera une ou plu- fieurs valeurs de 4 Si une de ces valeurs de y eft telle, quele point correfpondant de la courbe à double courbure réponde à un x qui ait pour valeur une de celles qu'on n'a pas rejetées, ce point de la courbe à double courbure fera un point d'infle- xion linéaire fimple; on trouveroit, par une méthode abfolu- ment femblable, les points d'inflexion mulciple. REMARQUE PREMIÈRE. 22, J'appelle plan ofculant , le plan qui pañle par deux élé- mens confécutifs de la courbe à double courbure. Il eft aifé de voir que les valeurs de x, déduites de la fup- pofition dd x & dd;—o, dans l'équation en x & y , & celles déduites de la fuppofñtion ddx & ddy=0o dans l'équationen x &7 qui ont été rejerces, parce qu'elles n’étoient pas égales de part & d'autre, indiquent les premières , que les points correfpon- dans de la courbe à double courbure ont leurs plans ofculans perpendiculaires fur le plan des x & y; les fecondes , que les points corrcfpondans de la courbe à double courbure , ont DE QUELQUES PROBLÈMES. 607 leurs plans ofculansperpendiculaires au plan des x & 7: enfin les valeurs de x & 7 qu'on rejette en fecond lieu , quoiqu'elles foient égales entrelles, parce qu'elles correfpondent à des va- leurs de y, qui ne font point données par la fuppoñition dzy & ddy—o dans l'équation en y & 7, correfpondent à des points de la courbe où le plan ofculant devient tout-à-la-fois perpendiculaire au plan des x & y, & à celui des x & z. En général, il eft fort utile , pour la connoiffance d’une courbe à double courbure , de connoître la pofition du plan ofculant en un quelconque de fes points. Propofons - nous donc ce Problème. PROBLÈME IX. 23. Trouver l’inclinaifon, [ur un des plans coordonnés, du plan ofculant , en un point quelconque d'une courbe à double courbure. SOLUTION. Soient M1, mu , deux élémens confécutifs d’une eourbe à double courbure, dont AP (x), PN (y), MN (x), font les coordonnées ; Nz, #v les projections de ces élémens, que je fuppofe égales [ c’eft-à-dire, je fais V(4x°+4y°) conf- tant &— dr]. Soient menées les coordonnées des deux points 2, 3 Cnfuite par M, menons Me parallèle à Nr; par 1 &e, mc & er parallèles à zv ; le plan Mez eft évidemment pa- rallèle au plan PAQ; ainf, la queftion fe réduit à trouver l'angle que fait ce plan Mez avec le plan ofculant Mu. Pour cela, prolongeons les droires mu, er, jufqu'à ce qu'elles fe rencontrent en © ; Ja ligne M w fera l'incerfec- tion des deux plans. Il faut donc calculer l'angle formé par les deux plans Mo; , Mo: pour en venir à bout, je re- marque que dans la pyramide Mu: , confidérée comme ayant fon fommet en w, l’on connoît, sus sun se se 1 L'angle droit , formé par les deux faces Mo, moi. Frc. 8. Fc. 4: 608 SOLUTION 2. La face ww; car rang por Fit, drdz 3. La face Mo; car uc:cmi:meï we—;%; mais; fi on prolonge Nz en 4, l'angle Mew=bnv=d(g9Nn): or, dr étant conftant, d(gN n)—‘# : donc # eft le finus de l'angle Mew: de plus, Mo faifant partie du triangle Mwe, on a, par la nature de tout triangle, ........... Sade) Mo—V{(Me) +(e0ÿ —2Mexco X cofMee) — Histo VO rec - 5), à caufe de cofMeow=1, & enfin Mo — #5; mais Mo : Me :: fin Meo : fin Mwe : donc fêr Moe = 22H22 : or, fi dans un triang. fph. ABC, on connoît fin A à AB, AC&A,ona(Trig.Sphér.), tan C= er qui, fi A—90", devient = = ; &, fi on fuppofe AB—=ypowi, AC=— Moi, C fera l'angle cherché : donc, appellant z l'inclinaifon du plan ofculant fur le plan coordonné, on aura canp =", ouenfin, en fubftituant, rang i =. REMARQUE SECONDE. 24. On voit de quelle utilité font les furfaces des tangen: tes, dans la théorie des courbes à double courbure; elles font d'ailleurs avec les furfaces coniques & cylindriques , les feules furfaces développables ou compofées d’élémens plans d'une dimenfon finie : elles ont aufli cette propriété commune avec les furfaces cylindriques & coniques, que leur quadrature dé- pend de lintégration d’une quantité différentielle du premier ordre à une feule variable, comme nous allons voir, PROBLÈME X. 25. Quarrer la furface des rangentes. SOLUTION. Soit NJk'k un de fes élémens, 4c une perpendiculaire ; abaiflée du point # fur le côté Nd#'; le triangle N d4'h eft =N# DE QUELQUES PROBLÈMES. 609 æN%'X!Ac: foit T la tangente N4 [T eft une fonction algébrique de x]; on aura ch —dT, & partant ........ ch=V(dr°4+ de — dT:). La furface eft donc ..-...... SE TV(dr + de — d'T°): or, par le moyen des équations H € L, on aura 7 & @ En MNOCISITEC par les deux équations de la courbe à double courbure, on aura y & z en x: donc, &c. 26. La folidité de lefpace renfermé entre cette furface, Fc. 4 le plan PAQ & le cylindre de projeétion dépend aufli de l'in- tégration d'une fonétion différentielle du premier ordre à une * {eule variable. En effet, ce folide eft compofé d’élémens pyramidaux ; tels que NM4/'9N : or la pyramide NMA%'9N ct — MNX:MA#", Soi 4K une perpendiculaire, abaiffée du point # fur le côté M’; nommons MA(S), [S fera une fonc- tion algébrique de x]: on aura M4# —Mh# X:AK, & partant la valeur du folide fera f 7 XSXV(dn°+de— ds). Je n'infifterai pas fur lutilité du Problème IX : il fuffit de dire qu'il peut fervir à trouver les mêmes affections des courbes à double courbure, pour lefquelles jai employé les furfaces des tangentes. \ ProBsLËÈME XI 27. Trouver la plus grande ou la moindre ordonnée d'une courbe à double courbure. SOLUTION. Suppoions qu'on demande le plus grand ou le plus petit 7 ; dans une des deux équations de projection où entre 7, cherchez le plus grand ou le plus petit z. PROBLÈME XIL 4 28. Trouver la plus grande ou la plus perte ordonnée d’une furface courbe. Tome IX, Hhhh Fire. 6, 610. 1 ONE Ù MT ON SOLUTION. Faites x conftant , vous aurez une équation en y &7, dans: laquelle on trouvera, par la théorie des courbes planes, le plus grand ou le plus petit 7,.& la valeur de y RS ae à à ce maximum OÙ minimum; Cette valeur de y fera exprimée en conftantes & en x. Faites aétuellement varier x; l’équa- tion qui donne la valeur de y correfpondante au plus grand ou plus petit 7, dans chaque fe&ion perpendiculaire aux x, deviendra une équation à deux variables x & y, qui fera celle: de la proje&tion de tous les points de la furface courbe , qui jouiflent du #raximum où minimum dans chaque fcétion per- pendiculaire aux x; & ces points parmi lefquels eft celui qui jouit du #7aximum où minimum cherché , forment fur la fur- face courbe, une courbe à double courbure , dont on à une projection fur le plan des x & y, & dont on trouvera aifément la projeétion fur le plan des x & 7. Or tous les 7 de la courbe à double courbure étant égaux à ceux de fes projeétions , la queftion fe réduit à trouver la plus grande ordonnce d’une- courbe planc. NS PROBLÈME XIII 29. Trouver la plus grande ordonnée plane d’un folide® J'appelle ordonnée plane d’un folide , une des fetions faites perpendiculairement à un defes trois axes. SŸ0' LU TT ON: Soit PFM'S une de cés ordonnées, perpendiculaire à l'axe des x; foit AP—x, PQO—7y, QM'—3: fi je répréfente par: [ Yintégrale, prife en regardant comme conftante la variable x, cette furface fera évidemment — /”y(#)-dy: donc la différentielle de f'yX(5)-dy, prife en faifant varier x, & égalée à zéro, donnera la folution du Problème: la queftion eft donc réduite à ce Probléme purement analytique: trouver df'yX(É)-dy.. DE QUELQUES PROBLÈMES. érx Soit donc PFM'S une valeur de f”y X (::)-dy,correfpondan- te à un x quelconque; P { N'S' une autre valeur ,correfpondante à uneautre x infiniment peu différent du premier; il eft clair que l'efpace FM'SS'N'feft la valeur de d/"y X (%)-dy : or, fi par les points infiniment proches M’, mn, on mène les ordonnées N'MQ, 7m Q', on aura [PQ étant = y & QM'—>;], (nm M'= dy X(E)X dx, puifquil sen faut infiniment peu que N'7 foit parallèle à M'#': on aura donc FM'SS'N'f, ou bien df'yX(E)-dy =/fdy X(E)-dx. On a donc, pour le cas préfent, /dy X(5)-dx— 0. LEMME PREMIER. 30. Une furface plane quelconque , eft à fa projection fur un plan quelconque , comme le rayon eft au cofinus de l’an- gle que fait fon plan avec celui fur lequel elle eft projetée. Cette propofñtion eft démontrée dans plufieurs Auteurs. LEMME SECOND. 31. Connoiflant les angles qu'un plan rapporté à trois plans coordonnés, fair, avec deux de ces plans, trouver celui qu'il fait avec le troifième. SOLUTION. Suppofons qu'on connoifle les deux angles p & g formés par le plan IK L avec les plans PAQ, PAR , & qu'on veuille connoîrre le troilième angle r quil fait avec le plan RAQ; on cherchera dans la pyramide IL AK , dans laquelle on con- noît les deux angles p & q que fait la face LIK!, avec les fa- ces voifines, & l'angle droit que font ces deuxifaces , l'angle AIK'; ou, ce qui revient au même, dans le triangle fpéri- que ABC, où lon connoît l'angle A=—90, l'angle B—»p, l'angle C —9, on cherchera le côté AB, & on trouvera, par les Form. de Trig. Sphérique, cof AIK —f%: on connoîtra Hhhhij K16. $e 61z S'O'EUFTF' T'ON donc dans la pyramide KLAÏI, l'angle AKI compris en- tre deux angles plans, un de 90°, l’autre —p, & il faut trouver le troifième angle plan r; ou dans le triangle fphéri- que, ABC, connoifflant A—00, B—p & AB, complément de AIK , il faut trouver l'angle C—7r: or on trouvera, par la trigonométrie fphérique, cof r— cof AKIX fin p ; mais cof AKI— fin AIK = V(1 — #2) = Pr ; donc enfin Jine p AT Sup cofr=V(i—cof* p—cof*q). a Es THÉORÈME. 32. Le quarré d’une furface quelconque plane , rapportée à trois plans coordonnés , eff égale à la fomme des quarrés de Jés projeëtions für ces vrois plans. DÉMONSTRATION. Soit s la furface; 5’, 5”, 5° fes trois projedtions; p, q, r, les angles qu'elle fait avec les trois plans coordonnés: on aura fn" 30) sfr = cor as S cor = SES dane SH SELS = SX (cof* p + cof* g+ cof*r); maïs (n.°31} cof* p + cof” g +cof*r= 1: donc s— 52454511 REMARQUES. 33. Ce. Théorème, auquel on n'avoit point penfe juf- qu'ici , eft crès - remarquable par fon analogie avec celui du quarré de l'hypothénufe; car celui-ci peut sénoncer fous cette forme. Une droite étant rapportée à deux axes perpendicu- aires lun à l’autre, & fitués avec elle dans le même plan, le quarré de certe droite eft égal à la fomme des quarrés de fes projections fur ces. deux axes. Notre Théorême nous donnera auffi la quadrature des furfaces courbes, comme celui de Pycha- gore donne la reétification des lignes courbes. DE QUELQUES PROBLÉMES: 613 L PROBLÈME XIV. 34. Quarrer une furface courbe dont on a l’équation. Fic.r, SOLUTION. Soient PFMS, pfNs, deux fections de la furface, perpen- .diculaires aux x & infiniment proches: foient NMG, zzK, deux autres fe&tions perpendiculaires aux y, & infiniment pro- ches ; la portion Nz»M de furface renfermée entre ces qua- tre plans, peut être regardée comme plane, & il s’en faut in- finiment peu que les lignes MN & #7, Mm & Nrne foient parallèles : cela pofé , il eft aïfé de voir que la projection du quadrilaère M2 N fur le plan des y & 7, eft...... = meXNi= dy X()-dx; que fa projection, fur le plan des x & 7, ft —M:XxMe—dxX(%)-dy; enfin que fa projection , fur le plan des x & y, eft — dxdy : donc NzrM— V(dxdy +dx X((E)-dyY + dy x ((&)- dx} ): donc la valeur de la zone, comprife entre les deux plans, MASON SOL ERA aa mp me it à AID LSRURUS of” V(dx dy+ dx X((E)-dyY + dy X((4)-dxy ); & enfin LS'V(dr dy + dy X((E)-dxY +de x ((É). dyŸ); fera la valeur d’une portion finie de la furface. Cette double intégration introduit dans la valeur de la furfa- ce , deux conftantes dont la détermination dépend des limites: de la portion de furface qu'on veut avoir. EXEMPLE. 35. Soit xx+yy+77—4a l'équation d’une ‘Sphère; on aura (2). dy= pe & (5) dx = ; la formule de- vient donc ;5—#%#—, qu'il faut intégrer comme fi x étoit conf- tant: oit aa—xx—mm, il faut trouver # /-"#+ ; mais fr ft un arc de cercle, qui a 7 pour rayon, & Y Lubeer | 614 ; SO LU EL PIPONN pour finus, & qui devient par conféquent nul, quand y=0o; d'où il fuit qu'il n'y a pas de conftante à ajouter; &, fi on veut avoir la zone entière, jufqu'à 7—0; c’eft-a-dire, jufqu'au plan des x & y, l'arc de cercle deviendra un quart de circon- férence, ayant pour rayon »#, où W(aa—xx); ainfi, Jr» deviendra (en nommant c le rapport de la cironférence au diamètre) “X%—%#*, Il faut atuellement intégrer ; ce qui donne + une conftante, qui fera nulle, fi on calcule la furface depuis x—o : calculons-la jufqu'à x—4, il viendra %; &, comme chacun des huit angles folides , formés par les trois plans coordonnés autour d'un point À, contient une portion égale de la furface, on aura 4caa pour la furface de ia Sphère: or 4caa—4-2ac X£: donc la furface de la Sphère eft quadruple de celle de fon cercle générateur. acx 2 REMARQUE. 36. Non-feulement , par notre formule , nous trouvons les portions de furface renfermées entre des plans parallèles aux coordonnés, mais encore une portion de furface renfermée par une courbe à double courbure quelconque tracée fur cette furface; ce qui eft le Problème de la quadrature des furfaces courbes pris dans fa plus grande généralité. Soit, en effet, gQ' +, la projeétion d'une courbe à double courbure tracée fur la furface, & qu'on veuille avoir'la quadrature de la por- tion de furface renfermée par cette comtbe: au-lieu d'intégrer la formule jufqu’à la valeur de y donnée, par la fuppoftion x= 0 , on l'intégrera jufqu’à la valeur de y donnée , par la va- leur qu'a 4 au point M de la courbe à double courbure, qui fert de limite à la poition, de furface qu'on fe propofe de quarrer. î EXEMPLE. 37. Prenons ‘pour exemple une fphète, ayant aa— xx + y Y+HXX pour équation. Suppofons que fon centre foit celui DE QUELQUES PROBLÈMES. 61$ d'une ellipfe décrite avec 2 a & a pour axes; l'axe 24 étant couché fur celui des x, & l'axe a fur celui des y, le cylindre élevé fur certe ellipfe rencontrera la furface de la fphère fui- vant une courbe à double courbure, qui renfermera une portion de furface qu'il s'agit de quarrer. De 5 1 aixdy J'ai toujours f—*— ##—, pour la valeur EMA A AIME fj' Var dy + dx ((S)- dy} + dy X((E) -dxŸ); prenant l'in- réorale, depuis ÿ—o, cette intégrale s’évanouit, en faïfant Y=o, aufli-bien que la furface de la zone élémentaire: il n'y a donc point de conftante à ajouter. Aétuellement il faut, dans cette intégrale, mettre, pour y, la valeur que donne la fuppoñtion 7—=»Q'; c'eft-à-dire, qu'il faut, à y, fubftituer PQ": or, par la nature de la courbe 9Q'w,ona.:...... PO'(ÿ)=1V{(aa— xx) : il faut donc, dans /” 5%, ou dans fa valeur = multipliée par un arc de ceicle ayant y pour finus & W(aa—xx) pour rayon, fubftituer, à y, fa valeur !W{(aa—xx): l'intégrale eft donc 7, muliplice par un arc de cercle dont Le rayon eft V(aa— xx), &le finus :V(aa— xx). Soit m1: le rapport d'un arc de cercle,, qui a pour finus la moitié du rayon, à fon rayon; notre intc- grale deviendra = x # V(aa—xx)=#adx, dont lin- tégrale eft *. Je n'ajoute point de conftante, parce que je calcuje la furface depuis l'origine des x. Refte à favoir jufqu’où il faut prendre cette valeur “4x, pour avoir toute la portion fphérique contenue dans l'angle folide APER, & lumitée par la courbe à double courbure : or il faut, pour cela, donner à x la plus grande valeur qu'il puifle avoir dans l'équation y—=:V{aa—xx) de la courbe 4Q'+ de proje&tion; cette plus grande valeur eft a : donc aa, ou plutôt 8 % 44 [Si on veut avoir les huit portions égales de furface rentermées dans les huit angles folides] eft la valeur de la furface cherchee. L’expreffion différentielle de l'élément d’une furface courte. trouvée ( N.° 34), eft de la plus grande utilité dans la folution: Frc, 15 616 SOLUTION de plufeurs des Problèmes de mécanique fur les furfaces courbes. PROBLÈME XV. 8. Trouver le centre de gravité d’une furface courbe. 3 £ S'O'L UT IT ON, Les momens d'un élément quel conque MmnN, par rap- port aux trois plans coordonnés, fonc Mr NX7,Mmn NX, MmzN x x; les trois diftances du centre de gravité de la fur- face aux trois plans coordonnés font donc .............. Sa Ve dy + de x ((E)-2y} + dy x (H)-dx)) JP V (day +de x (5): dy) + dy X((G)- dx) pOur He PIE NE MS I NE ML RER à JS y Vds dy +de x (2): dy + dx (4) ) JP V (dr dy +de x((5)-dyY + dy x CG): dx) ) | pour le plan des x 8 75 ...................... es l'a Var dy +de x (5) dy) +dyx((3-dx)) IS V(d dy +de x (6) dy) dx (ad) ) * pour le plan des y & 7. » LEMME PREMIER. 39. z Ctant un angle, 2’ fa projetion, p & g les angles for- més par fes côtés avec le plan de projection, on a ..., cof i = cof i X cof p X cof q + fin p X fin q. LEMME SECOND. 40. Trouver l'angle que le plan tangent en un point d'une furface courbe fait avec un des trois plans coordonnés. SOLUTION, " CN Nt DE QUELQUES PROBLÈMES. I SOLUTION. Cherchons l'angle que le plan tangent en M fait avec le plan PAE des x & y. On peut regarder le point T comme le fommet d’une pyramide, dans sql e on connoiîc l'angle MTQ, l'angle QT, & l'angle plan compris entre ces deux faces, qui Cite 90°, & où fon cherche l'angle plan compris entre les faces OTz & MTz: of, dans un triangle fphérique ABC, connoiflant l'angle B—90°, & les côtés es OT: AB—QTM, par les formules de Trig. Sphér. on trouve d Zang C = oran! Of, TN CON QTM= cot emM = — (5) dy AT OT: roucofe:Q et; par le n:10 480. = cs donc ne ne X((& )dxY + dx° X (5 LE _War x (5) dy) + dy x (Gr) dx) PROBLÈME XVI. 41. Déterminer la réfiflance qu’une furface quelconque , mue dans un fluide, éprouve de la part QE SOLUTION. Par l'origine À des coordonnées de la furface, menons la droite A, qui foit la direétion du mouvement de la furface; foit AC fa projettion, je nomme 77 l'angle CAP, x l'angle CA, V la vicefle du COrps , D I: denfité du fluide, de l'inf- tant dans lequel je confidère le mouvement, On fait que SD V'dr fir° : , eft la réfiftance qu'éprouve dans l'inftant de, une furface S mue dans un fluide d’une denfité D avec une vi- refle V, eft fous un angle d'incidence—; : on fait aufli que S étant la projection de S fur un plan quelconque, S'D V* d: fire à Tome IX, Jiii Fic,r, 618 SOL D'ENROIN eft l'effort qui réfulce de certe réfiftance dans un fens perpen- diculaire au plan de projeétion. Cela pofé, faifant abftraction du faéteur conftant DV: 47, & appellant S l'élément M2N de la furface, l'impulfon far cet 'élémenciiera L'on. ob... Muret ue 326080 SX fr i= fin ix Var dy +de X((E)-dy) + dy X((55) 4x}, & les efforts qui en réfultent à la furface, perpendiculairement aux crois plans coordonnés, feront 2x dy fini, ...... dxX(E)-dyXfir 1, dyX(E)-dx X für 1 : 1 s'agit donc de déterminer /?r r; c'eft-à-dire, le finus d'incidence {ur le plan tangent en un point M quelconque de la furface, ou, ce qui revient au même, l'angle que fait la droite A? avec le plan MT, tangent en M à la furface. Pour cela, de À fur le plan tangent, foit abaiflee la per- pendiculaire AY, le plan © AY coupera le plan tangent fui- vant une droite 9 F , qui fera avec A? prolongée, un angle EgY, dont le fupplément ApY eft l'angle cherché z. Il s'agie donc dans le triangle o AY rectangle en # de trouver l'angle A9Y ou fon complément o A # : pour ecla, par A? & AY, imaginons deux plans perpendiculaires fur le plan PAE, & qui le coupent , lunen AC, l’autre en Aa : 1.” l'angle AC fera— n: 2.° Afeft perpendiculaire fur YA ; par conféquent AA eft complément de AAY; mais AAY eft l'angle formé par le plan tangent en M avec le plan PAE , & l'on a par le Écmme fecond., va) AA out 0 -TTR RER cot YAA— Var x(():dy) + dy x (EH) dx) . 2° on con- dxdy noît l'angle PAC=—», & l'angle PAA—90°+ ABA: on aura donc une expreflion de l'angle CAA = 90°+ ABi—mÿ mais, par le Lemme premier, on a cftA#, ou/ir AEY = fin i — fin b AC X fin FAA + cof(CAA X cofeAC X cof FAA: or cf CAA, où cf (90°+ABA—m)—.......... fin m X cof ABA — cof m X fin ABA = .........:. Ë fl DE QUELQUES PROBLÈMES. 619 dx dx in mX dx (5): dy — cofm x dy X (x) dx , parlen. ro. Vase (5-27) + dy X (9) 2x) Refte donc à trouver, dans la valeur de fr 2, une expreffion de cof YAA & fin YAA: or fin = rs & of = 7e: donc fin AA eft [en mettant, pour cor AA, fa valeur trouvée MN Ra =. NN a us RENE TNT dxdy V dxdyXW dxdy+ Vas x((E) dyÿ +dy° x ((&) dxY ESPN E) AR 28 D IRON RE PAPER ATEN ESS PCA CR CE OP ECR GE) à | D Vazyxaxdyà Va (D4)+ x (D) Subftituant ces valeurs dans celle de /22z:, on trouvera, en fe rappelant que l'angle eAC—n, fini—............ cofn X (dx X (4) dy X fin m = dy X (E) dx cof m)+ dxdy fin n Vaxdy x Vaxay + Va x (C5 dy +45 x (9 &Y L'impulfion du fluide fur la furface Nz#M, lui commu- nique donc une quantité de mouvement, qui {e décompole À > . . ô / … cn crois autres perpendiculaires aux crois plans coordonnés , Méireprélencees, pare meidennMuente eme ete - dpya x (XX (ED dy firm — dy x (E)dex efn}t did X fan) | dxdy+Vax X((E) dy} + dy X((E) dx) x) É 3 dxdy+ Var x()dyy +dy x (y Boys CD, (cofnx(dxx(5) dyxfinmdyX(E)dx x cofm)+dxdy x fin n j' k dx dxdy + Var x(()47) +47 x (dx) Intégrant ces trois quantités fans faire varier x, on aura les expreflions des crois efforts qui réfultent à la furface perpen- liii à ï LA ( a L pv: x (®) 4% (mx (ax (2) dyxfinm—dyx()dexcofm)+dxdyx fan ÉrD SOLUTION diculairement aux trois plans coordonnés de limpulfion du fluide fur une zone de cetre furface comprife entre deux plans infiniment proches & perpendiculaires à l'axe AP des x; in- tégrant une feconde fois, en faifant varier x, on aura les ex- preflions des efforts que le fluide exerce fur une portion finie de Ja furface perpendiculairement aux trois plans coordonnés: CCS CXAÉBMIONS fcronc 1e ER UNNNEeS TT Re (cofn X (dx (5) dy fin m— dy(&) dx cofm) + fin n X dxdy} RS Nr a , dxdy + Va x) dy + dy x (ax) pv ES, Cfa x (dx (25) dy fie m— dy (6) dx cofm) + dxdy fan} | Gi dxdy+ Vie xd) + x (a) \ DVdex (à) dy 2 (cofn X (dx (5) dy fin m — dy (#5) dx cof m)+ dxdy fin n }* dx dxdy + Vas X((2) dy} + dy x (9) &Y 42. Imaginons un cylindre tangent à la furface & dont les arêtes foient parallèles à la direction Ac du mouvement , il rouchera la furface , fuivant une courbe à double courbure, qu'on déterminera, comme il a été dit (N° 10.), & cette courbe fera la limite dans laquelle il faudra renfermer l'inté-" grale ,.puifqu'il n'y a évidemment que la portion de furface renfermée par cette courbe, qui foit expofée au choc du fluide. C'ef par cette condition qu'on déterminera les deux conftan- tes que la double intégration introduit dans la valeur de la ré- fiftance. DV x ff’ On voit encore aïfément, que le N.° 41 donne la réfiftance qu'éprouve une furface dans un fluide, foit que cette furface {oit unique & indéfinie, foit qu’elle foit compofée d'un nom- bre fini de furfaces gcométriques adaptées les unes aux autres; feulement dans ce dernier cas , ‘il faut traiter chaque furface particulière en particulier , & prendre pour limite des intégra- les, la courbe qui termine chaque furface particulière , au cas toutefois que certe furface foit route entière expofée au choc du fluide, DE QUELQUES PROBLÉMES. G2t 43. Il ne fuffit pas d’avoir les intenfités des efforts dont {ce trouve animée la furface perpendiculairement aux trois plans coordonnés; il faut encore avoir les dire@ions réelles de ces efforts, pour pouvoir calculer le mouvement de rotation quien rélulte À la furface. . LI Soit P, l'effort perpendiculaire au plan des x & y, on aura fa direétion, fi on connoit fes diftances aux deux autres plans: Or, par la théorie des forces parallèles, on aura la diftance à un des deux plans, en divifant la fomme des momens de chaque effort partiel pris par rapport à un de ces deux plans par la fomme des efforts partiels : ces deux diftances feront donc [EX (cofn x (dx (5) dy fin m — dy (2) dx cofm)+ dxdy fin n} j dxdy + Va: Gay + dy° ((&) dx} ff (cfnx dx ((S) dy fin m — dy (%) dx cof m) + dxdy fin n dxdy + Va (G 25) +4 (() dx} r?* (cofn x (x (15) dy fin m— dy (2) cof m) + dxdy fin n} dxdy+VIsx(( dYY+dp x (dx 1 Ce n x (dx (dy Jon me — dy Ccofm) + dy far 1e drdy + VX) rx (Ga ve trouveroit de même les dircdtions des deux autres efforts. 4 REMARQUE, 44., Le Lemme que nous avons fuppofé, N.9 30, donne le tapport d’une feétion de priffne droit à fa bafe ; maïs il n°eft qu'un cas particulier d'une propofñition beaucoup plus générale , que voici avec {a démonftration. THÉORÈME. 45. Les deux Bafes d’un prifme oblique quelconque , font Fue. 7, réciproquement proportionnelles au Jinus des angles qu’elles font avec les arêtes du prifine. Fri, 622 S'OL'UAMTIONN DÉMONSTRATION. Soit ABCDKG, un prifme triangulaire quelconque, on fait qu'il eft égal au produit d'une de fes bafes par le tiers de la fomme des perpgndiculaires abaiflées des angles de l'autre bafe. Soit CP , une de ces perpendiculaires, l'angle CK P fera celui que chaque arète fait avec la bafe DKG ; foit » cet angle, a la fomme des arêtes, p la fomme des perpendicu- laires abaifices fur DKG:; le triangle CPK, donne ....... CP:KC::/f7rm:1, & comme chaque arête eft à fa per- pendiculaire dans le même rapport, on a p'a::finm:1, & partant p—a fin m, on aura aufli p—a fin n, (p' étant la fomme des perpendiculaires abaiflces fur ACB, & 7 l'angle que font les arêtes avec ce plan ABC); mais le tronc eft —=K D GX :p, il eft aufli — MBCX:p'; HORDE HAT EEE DKGX=p=ABCX:p'; donc DKGX a fin m= ABCXafinn, donc DGK : ABC :: fin n : fin m: d’où on conclura aife- ment, pour un prifme à bafes quelconques , que fes deux bales font réciproquement comme les finus des angles qu'elles font avec les arêtes. COR OL EAN E. 46. Cette même propofition donne le moyen de détermi- ner fur un cone droit tous les efpaces qui font quarrables gcométriquement. En effet, on en déduira aifément , qu'une portion quel- conque de furface de cone droit eft à fa projection fur la bafe, comme l'apothéme eft au rayon ; d’où il fuit, qu'ayant décrit fur la bafe d'un cone droit une courbe quelconque quarrable, le cylindre élevé deflus cette courbe, renfermera une portion de furface conique aufli quarrable. PROBLÈME XVII. 47. Cuber un folide dont on a l'équation, PRET T. DE QUELQUES PROBLÈMES. 623 SOLUTION. Soit PFMS, pf NS! deux fections infiniment proches, faites perpendiculairement à axe AP des x, une de ces feétions (n°29) 'eft f'y (5) dy; la valeur de la tranche comprife entre ces deux fcétions eft donc dxf'y(%)dy; & partant la valeur du folide eft fdxf"y (5) dy : quant aux deux conf- / tantes qu'introduit cette double intégration dans la valeur du folide, on les déterminera, comme nous allons voir, par les limites de la partie du folide qu'on fe propofe d'avoir. EXEMPLE. 48. Cherchons le folide qui a pour équation ...... ) x*+y +77 —0bb; cette équation eft celle d’un ellipfoïde alongé ou applati, ayant 24 pour axe de révolution: on a (ES) dy = EX 75: donc, faïfant #6—xx—mm, on aura SYE) dy = ES: or ES eft l'élément d'un demi- fegment de cercle, ayant » pour rayon, y pour finus: donc J'Y E) dy = + X ce demi -fegment + une conftante C: pour déterminer €, fuppofons qu'on veuille avoir tout le folide renfermé entre les deux plans PAE, PAR, & partant toute la furface PFMS; alors, faifant y —o, je remarque que la furface que je veux avoir, ou f'y(%) dy —0: donc +X le demi-fegment +C—o: donc C—o, puifque le demi-{eg- ment devient nul, en faifant y—o; &, puifque je veux avoir toute la furface PFMS, il faut faire ?— 0; ce qui donne y—=V(#b— xx): je dois donc, dans la valeur de f”y (4) dy, mettre, pour y, cette valeur ; alors f”y (5) dy devient = X - du cercle, qui a W(4b—xx) pour rayon: donc, fi c'1 exprime le rapport de la circonférence au diamètre, f”y (5) dy devient = X£X(#6—xx): il s’agit donc aétuellement d'inté- grer &X = X(#6—xx) dx ; ce qui donne XX (466x—*) + C': 624 SOLUTION DE QUELQUES PROBLÈMES. fi on calcule le folide depuis l'origine des x, il eft évident que, faifant x=o, le folide devient —0: donc C'—o. Sup- pofons qu'on veuille avoir la partie du folide comprife entre l'origine des x & un plan mené perpendiculairement aux x, à une diftance 4 de l'origine, la formule devient £X24=%5 &, comme chacun des huit angles folides, formés par les lans coordonnés, contient une partie égale de ce folide, l'ellipfoïde entier ft —=%"-— 268 X+X 2a X=2: donc un ellip- foïde alongé ou applati, eft égal aux deux tiers du cylindre. circonfcrit, REMARQUE. 49. Dans ce cas-ci, nous favions que le folide ne s'érendoit pas, dans le fens des x, au-delà de la quantité 2 : fi nous Vavions ignoré , nous aurions pu chercher une partie du folide correfpondante à une x=0+e ; le refultat que nous aurions trouvé, X == étant moindre que “=, trouvé en faifant x—b, indique une contradiétion, puifque, fi le folide s'étend jufqu'à x—4+e, la partie de ce folide, correfpondante à x—b+e doit être plus grande que la partie du même folide correfpondante à x — 4. C'eft cette contradiction même qui nous apprend que le folide ne s'étend pas jufqu'à une valeur de x—b+e. Il fut donc toujours chercher les limites du folide dans le fens des trois axes, pour n'être pas expolé à fe tromper fur fa yraie valeur. Jar. Elrancer Tom. IX. lag. 024. 1 > AP FE _ RER RQ PEL ee rom ee 2 Jravav .Elrang .Thbm. IX, l7. Ê2#, 62$ SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS DES SOLIDES RENFERMÉS PAR DES SURFACES COMPOSÉES DE LIGNES DROITES Pan UT FINIS IE ATEN Correfpondant de l’Académie, Officier au Corps Royal du Génie. Paix linfinité de clafles de furfaces que peut confidérer la Géométrie, il en eft une qui mérite une attention particulière : ce font celles qui font compofées de lignes droites, ou, pour parler plus rigoureufement , dans lefquelles on peut mener des droites, fuivant certaines direétions. Un grand Géomètre, que fes Ouvrages louent bien mieux que je ne pourrois faire, M. Monge a donné, fur cette matière, des Mémoires adop- tés avec empreflement par l'Académie; mais, ne s'étant point occupé de la cubature des folides qu’elles renferment, ni de plufieurs propriétés que ÿy ai remarquées , je me propofe * ici de donner quelques propofitions nouvelles fur ce fujet. 1.° En général, fi l'on aflujétit une droite mobile à tou- cher , ou plutôt enfiler toujours trois courbes exiftantes dans différens plans, on aura une furface compolée de droites, & en faifanc varier , comme il convient , ces trois courbes , on aura toutes les furfaces poñlibles compofées de lignes droites. On peut nommer, en général /urfaces gauches, ces furfaces, qui , dans différens cas particuliers , deviennent des furfaces connues, coniques, cylindriques, furfaces de tangentes ou à arêtes de rebrouflement, &c, Tome IX, KKkkKk Fic, 2, 626 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS 2. Si l'on ne prend que deux courbes, pour: les faire enf- ler fucceflivement dans tous leurs points par une même droite mobile, la furface n'eft plus déterminée, il faut encore une pe ou loi à laquelle foit aflujéti le mouvement de cette roite. 3. Imaginons donc un plan ACQ que, pour faciliter le difcours, je fuppofe horizontal , une droite AB, que je nomme l'axe , inclinée comme l’on voudra à ce plan, & une courbe quelconque DEQ, fituce hors du plan horizontal , que je nomme /a directrice ; concevons enfuite une droite mobile AQ, qui, demeurant toujours parallèle à l'horizon , pañle fucceflivement par les points correfpondans de l'axe & de la direétrice , on aura une clafle particulière de furfaces gauches, connues dans l’Architeéture fous le nom de conoïdes. Cette che fe fubdivifera en efpèces, fuivant que variera la courbe qui {ert de directrice dans fa formation. $i l'axe eft perpendi- culaire à l'horizon , on peut l’appeller conoïde droit & conoïde oblique dans les autres cas. Toute furface de cette efpèce eft évidemment infinie & partagée par fon axe en deux parties égales, comme un cone left par fon fommet. 4. Soit coupé un conoïde par un plan parallèle à fon axe, & fuppofons que DEQ, foit la feétion ; confiderons le folide compris entre le plan horizontal ACQ, le plan de la bafe CDEQ, la furface du conoïde & un plan quelconque ABDC mené par l'axe, & un point quelconque D de la bafe : il a des propriétés qui méritent d'être remarquées par leur analogie avec celles du prifme & de la pyramide. THÉORÈME PREMIER. Les aires des feétions CDEQ , PäNq, parallèles en- trelles & à l'axe , font proportionnelles à leurs diflances de cet axe. DÉMONSTRATION. Imaginons une infinité de plans horizontaux infiniment pro- D: ESS O-E HD ES: 627 ches , qui couperont le folide fuivant des triangles , & les deux {eétions CDEQ: P4N3 , fuivanc des parallèles : ces plans diviferont les deux fe&tions en un même nombre de petics parallélogrammes de même hauteur deux À deux, tels que EefF, NrcG, &c. donc EefF: NngG ::Ee: Nn:: BD:Bd, comme les diftances des deux fe&tions à l'axe : donc la fomme des aires EcfF & la fomme des aires N7gG,ceft-àdire, les aires des fections CD E Q &P4N g font proportionnelles à leur diftance à l'axe, THÉORÈME IL Le filide ABDCQCA eff éval au Produit de [a bafe CDEQ , par la moirré de Ja hauteur perpendiculaire, DÉMONSTRATION. On p eut le regarder comme compofé d’une infinité de tranches, comprifes entre des feétions parallèles à la bafe : foit PAN 3 une de ces fections > X fa diftance perpendiculaire à l'axe, B la bafe, À la hauteur du conoïde, Zx l'épaifleur de la tran- che qui a PZN g pour bafe, cette tranche fera (Théor. 1.) FX dx : le folide eft donc f' (%)= # (la conftante eft nulle “€n calculant le folide depuis l'axe) : faifant 2h, {era la valeur du folide entier. On tirera aifément de-là la folidité d'un tronc de conoïde CET 4 \ > J termine par des bafes parallèles entrelles & à laxe. Ce même Théoréme ches, en leur fuppofant ordonnées d’un triangle, auroit pu fe déduire de ce que les tran: même épaifleur, croiflent comme les THÉORÈME IIL Le centre de gravité d’un conoïde eff aux tiers, à compter depuis laxe, de La Ligne horizontale o © menée du centre de Sravité o de la bafe à l'axe. KEKKk ij 68 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS DÉMONSTRATION. Pour Je démontrer , je vais d’abord faire voir , que cette ; > J D 1 ligne o® pafle par les centres de gravité de toutes les feétions A “ . CE A parallèles à la bafe : en effet, la diftance du centre de gravité . . . 1 >" de la feétion P ZN g au plan horizontal ( prife parallelement à ' HELP PHep las NBAICIE. ARR EN EN En OS PT EE. CALE 1 NGerXxMN : Jr XEF/EXEH + JEFf-XEH: MINCE». LOENENE Rs NEr Ted la même que celle du centre de la bafe; donc le plan hori- zontal mené par le centre de gravité o de la bafe , contient les centres de toutes les feétions parallèles à cette bafe. c'eft-à-dire, La diftance du centre de gravité de la fe&tion PIN q au plan ABDC (prife parallélement à la droite CQ) eft— » NE TNGgn CNE EE CEE VUE die, qu'elle eft à la diftance du centre de gravité o de la bafe comme x : # : ce centre eft donc dans le plan mené par l'axe & le centre de gravité de la bafe: donc l'interfection de ces deux plans, c'eft-à-dire, la ligne horizontale o © menée du centre de gravité de la bafe à l'axe, contient les centres dé toutes les fections parallèles à la bafe, & par confequent de toutes les tranches que terminent les fetions & par conféquent enfin du conoïde. à _ Il ne refte donc plus qu'à trouver la pofition de ce centre fur la ligne 0. Or une tranche quelconque parallèle à la bafe eft (T'héor. 1.)—®#* & fon moment par rapport au point le SEX 0'& ; mais w0 :x°:©0 : À : ce moment eft donc JF x 00 Bxdx b a), Prix ;=Xwo, donc eft la diftance du centre de gra- vité du folide au point », ou ayant égard à ce que la conf RE ne at nt D ESS SOLE DES 629 tante eft nulle fi on calcule le folide depuis l'axe, 1... .. Bx5 xw0 Cr) =? woX+= 200. Cela peut d'ailleurs fe déduire de ÉD ce que les tranches ctoiflent comme les ordonnées d'un triangle, On tirera aifément de-là la poñtion du centre de gravité d'une tranche de conoïde terminée par des bafes parallèles en- trelles, & à l'axe fur la droite qui joint les centres de gravité de fes deux bafes. s. Une autre propriété remarquable des furfaces de conoï- des, c’eft la fimplicité de leur équation, en prenant pour axe des coordonnées, les droites AB, AC, CQ: en effer, foit N un point quelconque de la furface, NM — 7, MP — y, AP —x fes coordonnés; on a 7 —EH, mais EH—9 (CH), _ @ indiquant une fonction quelconque donnée par la nature de Ja bafe; donc 7—9 (CH). Or CH—*S donc 7— (À). 6. Je vais atuellement déduire des principes précédens, les principales propriétés d'une efpèce de furface connue pto- remenc fous le nom de furface sauche ou de quadrilarère P $ q gauche ; c'eft par ce dernier nom que je le défignerai. Soient AB, CD, deux droites indéfinies fituces dans diffg. tens plans & projetées au plan horizontal en A8 & Cd, Sion connoît les angles CA, BAB, ACd & DCW, la longueur de AC , ces deux droites font données de pofition dans l’ef- pace ; il y a encore plufeurs autres manières de fixer leurs po- fitions. 7° Parallélement au plan horizontal C A4, foient menées une infinité de droites, telles BD , Ff, &c. qui pañlent par les lignes AB, CD , on aura une furface du genre des co- noïdes , dont on pourra regarder AB comme l'axe, CD comme la directrice. Cette furface s'étend à l'infini dans tous les {ens ; puifqu'on peut par tous les points de AB & CD 6,39 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS prolongces à l'infini , mener des droites horizontales telles que BD , & prolonger encore celles-ci à l'infini. Il eft clair que , par tous les élémens AC, Ff, BD de cette furface , on peut mener des plans parallèles , & comme des plans parallèles coupent en parties proportionnelles des droites fituées ou non dans le même plan, les lignes indefinies AB , CD feront coupées par les élémens de la furface en parties proportionnelles entrelles & aux droites AB, CD; d’ou il fuit que la furface dont nous venons de donner la formation, eft la même que celle qu’on nomme /ürface gauche , plan gauche ou quadrilaière gauche, prife fuivant la définition commune, 8. L'équation de certe furface eft extrêmement fimple ; foit À l’origine des coordonnées, AC l'axe des x, menons DO parallèle & égale à AB, & partant terminée au plan CAB; menons aufli CO , foit N un point quelconque de la furface, BD l'élément fur lequel il eft fitué , menons N M parallèle à AB & MP à CO, enfin foient AP=x, PM=y, MN—z, AC=a, dDC=K, 0CD=L, ona C0 =? mas CO x DO =z :: fin K : fin L; donc? = FE ou y = afnL°? 9. Il fuit de cette équation, que toutes les feétions planes qu'on peut faire dans un quadrilatère gauche , font des droites ou des hyperboles. . Soic 1° 7? — 2, il vient y—#Ÿ% ce qui nous apprend ce que nous favons déjà par la formation ; favoir, que toutes les coupes horizontales , font des droites paflant par les points correfpondans des lignes AB , CD, jappellerai élémens directs de la furface, ces droites dont elle {eft compofce parallélement au plan horizontal, Soit 2° x= h, il vient y — *ÂE donc les coupes faites parallélement au plan CDO, ou aux deux direérices AB, CD, font encore des droites : donc la furface d’un quadrila- rère gauche eft compofée , non - feulement de droites parak 4 0 D'EG:S OL OUDES | 631 lèles au plan horizontal C À 4 , mais encore dans un autre fens de droites paralleles au plan CDO, mené parallèlement aux deux direétrices. J’appellerai é/émens tranfverfes de la fur- face , ces droites dont elle eft compofée parallélement au plan CD. 10. Tous les élémens tranfverfes étant fitués dans des plans parallèles , coupent les élémens direéts en parties proportion- nelles aux côtés AC, BD; par la même raifon, les lémens dires AC, Ff, BD, &c. coupent les élémens tranfverfes AB, NP, CD en parties proportionnelles aux deux côtés AC, BD: ainf, dans un quadrilatère gauche ABDC, ona la même furface en divifant les côtés oppofés AB, CD en parties ve nr à ces côtés, & joignant les points cor- refpondans par des droites , que fi on eût divifé les deux au- tres côtés AC, BD en parties proportionnelles à ces côtés, & mené des droites par les points de divifion. On peut donc regarder indifféremment comme direétrices , ou les deux côtés AB, CD, ou les deux autres AC, B D. On peut encore tirer de-là ce THÉORËÈME IV. Un élément quelconque direct de quadrilatère gauche & un élément cranfverfe fe coupent en parties proportionnelles aux parties correfpondantes de leurs directrices refpectives : ainfi , N9:@P::BF;AF:&Fop:fo::AP:PC. 11. On peut tirer de-là une démonftration bien fimple de cette propolition fi utile en Mécanique , que le centre de gra- vité du fyftême de tant de corps qu'on voudra, dont les centres fe meuvent uniformément en ligne droite, fe meut lui-même uniformément en ligne droite. - Soient À & B les centres de gravité de deux corps qui fe meuvent uniformément le long des lignes AC, BD, avec des vitefles repréfentées par AC & BD, F le centre de gravité de leur fyftme, Ff'un élément dire& du quadrilarère gauche, 632 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS f {era encore le centre du fyftême au moment où les deux corps arriveront , l’un en C, l’autre en D. Il faut donc prou- ver que ce centre a parcouru uniformément la droite Ef ; pour cela foit NP, un élément quelconque traniverte , les deux corps À & B arriveront en même tems aux points P & N, & partant le centre de leur fyftêème fera en un point ® de la droite NP tel qu'on ait Ne:eP :: BF:AF, c'eft- à-dire , au point d'interfcétion des deux élémens NP, Ff, (Th. 4. ) donc 1.” le centre du fyftêéme parcourt la droite F f: 2.” il la parcourt uniformément; car (Th. 4.) F@e:Ff:: AP : AC: donc, &c, 12. Nous avons vu, plus haut, que tous les élémens directs d'un quadrilatère gauche font parallèles à un même plan, & fes élémens font tranfverfes à un fecond plan. Ces deux plans ont entreux une certaine inclinaifon que je vais déterminer : pour cela nommons (AC =4a, AB=D0=/, BA/=DOd=p, DCa=9, CAb=m, ACd=n) on aura (B#=Dd- B fin p, Ab=dd=6cofp, CD =, Cd—/##) lepoint à «ft le fommet d’une pyramide triangulaire dont les faces fonc Dod=p, dC qu'il eft aifé de calculer & DOC qui fait avec d DC l'angle cherché : pour calculer 4 € je prolonge d0 en : & dans le triangle Czd j'ai l'angle :=m, l'angle C — 7 & le troifième par conféquent = 180°—»7—n# donc /în Cdd — fin (m+n) & cof Cdd —— cof (m+n) deplusCd=— Ft &0d=— 6 cof p. Mais dans fout'thansle #0 GVon'a7 7 CPS ER ENPPERURE | CaXfinCdd dd—CdxX cf Cdd es X Jin (m+n) b cof p+ x cf (m+ 7x) B [in p fin (m+n) fin (m+n2) bcof prang g+b finp cof (m+n) cotptang q+cof (m+n) On connoit donc dans la pyramide deux faces & l'angle droit qu'elles contiennent, ou dans le triangle fphérique ABC correfpondant, tango ddC — NT TRS sl rang doC = D'ÉISSS. O'LHIUDIE:S 633 correfpondant, les côtés AB—p, AC— ddc, & l'angle droit A; & il s'agit de trouver l'inclinaifon de la troilième face fur la feconde, ou l'angle C: or, dans un triangle fphé- rique ABC, rectangle en À, on a ... VAI Ps DA I tang AB tang p RO donc tranpeC — 2 +; gC fin AC X ct AB Jin AC o Jin dd C ? : tang En (m+n mais fn — ——: donc /fx doC = 27 Pi PAIE Vi +tang*) (cotp tangg+ cof(m+ n))x x V4 een Le sr asbl USE cotp tangg+cof(m+n)) 4 Jin (m+n) V/((cocp tang q + cof(m+n)) + fr (m+n)) : done PAU NUURRE LS del Lang GE tang p V/((cotp tang g+ cfa) + fin? (m+n)) Ge à Jin (m+n) caufe de sang X cot=1,ona2. ssteteieliaiate eue ste ed EAN, 9] (tang p + tang tä rang C = V'(tang° p + tang® q + 2tangptangqcof(m+n)) : Jin (m+n) 13. Pour trouver les cas où ces deux plans directeurs du quadrilatère gauche deviennent perpendiculaires lun à l'au- tre , il n'y a qu'à fuppofer rang C ou fa valeur infinie, ce qui donne fin. (#+#)=0, & partant m+n—180, ceft- à-dire , qu’alors les projeétions de deux côtés oppofés fur le plan parallèle aux deux autres , font parallèles. Les deux plans font encore perpendiculaires, quand un des angles p & q eft droit ou tous les deux, ce qui eft évident de foi-même, & par la valeur de sang C: quand les deux plans font perpen- diculaires l'un à l’autre, le quadrilatère gauche devient une por- tion de conoïde dioit , puifqu’alors il y a évidemment un des élémens tranfverfes de la furface perpendiculaire au plan hori- zontal, 1 4. Soit donc GR, cet élément vertical, c’eft-à-dire, l'axé perpendiculaire du conoïde droit, dont ABCD fait partie. Pour retrouver fa diftance AG du point À, prenons-le pour axe des 7, mettons au point G l’origine des x, & nommons g Tome IX, Li1ll Fic. 3. Fc. 4: 654 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS la diftance AG, nous aurons (n.° 8)................. GP X MN Jin ABb oi MP = AG Jin BAG ? La -48f die gtangp x= GC, ou g+a, & 7—=Dd=— 4 fin p, y fera=Cd= ; mais, fuppofant b fin b fin bfinp x (g+a a tan Fr. donc le LIRE donc g = "7; tang q tang q £gtang p tang p —tang q 1 . zT tang D — tan l'équation fera donc y — AUPEr ee) a targ p tang q 15. Reprenons l'équation y = =, dont les coordonnées font GP, PM, MN, & par G, menons GQ dans le plan Ponl perpendiculaire aux PM ou y, & prolongeons les droites A, Pr, Cd jufqu'à ce qu'elles rencontrent GQ en 4,7%, A; nommons G7 (x), 7M (y) & MN étant toujours 7, cherchons l'équation . : j j. & 7 nt rectangles , nous aurons Gz(x'): x):: firm: : donc x—;; de même Pr = : He AS Se dpi 2: =: donc 2% — —=— ; équation entre les coordonnées rec- co] m | £finmrengp rangles de la furface. dGQ étant toujours le plan horizontal, fi, par l'axe RGF prolongé & GQ, on fait pafler un plan, il coupera la furface, fuivant une arête Fax’, perpendiculaire à l'axe, & parallèle à GQ; par cette arête , menons un plan horizontal, qui ren- contre en #’, M', &c. les ordonnées B4, NM, &c. &, par ces points 4’, M', les droites #'a’, M'7', parallèles à M7; nommons x, y, x les coordonnées F7, 7'M', M'N;ela droite Fa’ —Ga Ç r’ eft le point où l'arête AB rencontre F7’), nous aurons (n.° 8), y—.., ; équation de furface entre des coordonnées rectangles, la plus fimple poflible après celle du plan. On connoîtra aifement la diftance FG (f), à laquelle pañle ce nouveau plan horizontal: caf, foit x—Fa'—Ga=e, y=a' À =aÂ=pgcofm, 7 fera de donc gofm= 2; donc f—g cof m tang p, ou f= LES, en remettant pour g fa valeur trouvée n° 14: DES AIS O LNCDSE 635 16. Il eft aifé de connoître la valeur de l'angle BAC, & de celui que fait le plan BAC avec le plan horizontal CA6: ainfi,on pourra, fi lon veut reconclure l'équation de la furface du quadrilatère gauche par rapport au plan mené par deux de fes côtés contigus. Il eft aufli aïfé de la trouver direéte- ment ; je ne m'y arréterai pas, parce qu’elle eft beaucoup plus compliquée que celle que nous avons trouvé (N.° 8 )& qu'elle ne fert pas plus pour les propriétés de la furface. 17. On peut demander le minimum de tous les élémens AB, NP, CD, du quadrilatère gauche : or, dans le triangle NMP, l'angle NMP eft conftant; nommons-le M:...... NIMECABEE ;MP'oulyEËRE; mais: 1 MUL.0.: NP =Y{((NM} + (MP } — 2NM x MP X co/M)=...... 46 en ne on , qui doit Ôtre un zzn1- a° fin L a Jin L um : donc 2x dx X finK — 2a fin LcofMdx = o : donc ES ei nais. Ch en une 8 DRE sféthnse cf M=— cof(K+L)=— fin L x fir K — cof L co[ K: donc .…. x—a fin LX(/finL—cof LcotK): voilà le lieu du ririmum : quant à fa valeur , la voici: On à, en fubftituant à x fa valeur DarttDNere, Sr al PEUT RSA AT tt GE on oteNbeel, | 2 Ji K X a° fin° L cof* M rs 2 fînK cof M X a fin L cof M NP—6 {+ a fin L x fin K a fin Lin K ) = bV(r+co9fM— 2c0f/°M)— 6 fin M; l'équation ...... NP — 5 fin M donne NP : NM : fin M: 15; c'eft-à-dire que le plus court des élémens reétilignes d’un quadrilatère gauche, eft celui qui fait avec fa projection oblique un angle droit. 18. On pourroit demander , non pas l'élément le plus court de la furface gauche terminé aux droites AC , BD; mais la droite la plus courte abfolument qu'on puifle mener de l’une à l’autre. Je vais donner la conftruction de ce Pro- blême par une méthode ufitée dans la coupe des pierres, & qui, par fon utilité, mériterait d’être plus connuc. Lil! ij Fic, 2, ts 6 sh EIRE A A. % 1 a » LA } | : , L 636 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS Imaginons que À & a foient les points où les deux lignes données de pofition rencontrent un plan connu , que je fup- poferai horizontal, que AC & aC foient les projeions de ces droites fur ce plan, ou, ce qui revient au même, que les angles formés par ces projettions AC, aC, avec la ligne fixe Aa, foïent connus , la droite qui pañle par À à un de fes points, qui correfpond verticalement au point C, nommons- le Z, & partant cetre ligne AZ, nommons a Z' l'autre ligne, (Z’ étant celui de fes points qui correfpond verticalement au point €, ) les angles que forment les droites AZ , aZ avec leurs proje&tions AC, aC, font cenfe connus, on connoïtra donc les haureurs CZ, CZ’des points Z , Z' au-deflus du plan horizontal : ainfi , fuppofant que 9x foit la bafe d'un profil perpendiculaire, fur À a , on y projetera aïfément les droites À Z & aZ' en wA &yuK (en faifanr LA & AK =CZ LCL ‘Imaginons aétuellement, par le point Z, une droite ZY. parallèle à aZ”, & par Z', une droite Z'Y’ parallèle à AZ, les plans AZY, aZ'Y' feront évidemment parallèles : main- tenant fi, de tous les points de AZ , onabaifle fur le plan a ZY” des perpendiculaires, une de ces perpendiculaires rencontrera la droite 42” & fera précifément la droite la plus courteentre les deux lignes AZ & a Z'; car elle eft la plus courte entre les deux plans parallèles, & partant moins longue que toute autre . droite menée entre les deux lignes ; puilque cette autre droite feroit auffi comprife entre les deux plans. Le riximum cher- ché, eft donc la diftance des deux plans parallèles que nous avons imagines par AZ & aZ'; pour la trouver, cher- chons d’abord l'interfeétion de ces deux plans avec le plan horizontal. Pour cela, remarquons que la droite ZY varen- contrer ce plan horizontal en quelque point e, par lequel & par À menant une droite Ae, elle fera une des interfeétions cherchées, trouvons donc le point e : or la droite Z Y e étant parallèle a aZ , fa projeétion A0 fera parallèle à #K; anfi, menant @e perpendiculaire à 62.& horizontale , elle con- tiendra le point e: ce point e eft aufli fur a C prolongée in- D'ÉS:SONTDES 637 définiment, il eft donc à l'interfe@ion des deux droites 4 C & 0e; Àe & fa parallèle am , font donc les interfedtions du plan horizontal avec les plans parallèles menés paï les deux droires AZ & aZ!. Imaginons à préfent un profil perpendiculaire à ces deux plans parallèles & dont M » perpendiculaire fur A e {oit la bafe; ces deux plans y feront projetés fur deux droites parallèles Mn , mt qu'on déterminera en menant fur My la perpendi- culaire CHzx, & faifanct Hr—CZ ou A. Concevons enfin qu'on projette les deux lignes AZ & a7’ fur le plan ZAe, par des perpendiculaires à ce plant le point À de la ligne AZ y fera projeté en À ; 2.° le point Z fera projeté en quelque point de Ja droite gCd perpendiculaire fur Ae, & fera éloigné du point g d'une quantité g d—Mn : donc À d eft la projection de AZ für le plan oblique; 3.° pour avoir la projection de aZ' fur ce plan', nous remarque- fons que Z’ étant projeté en C au plan horizontal, à pto- Je&ion fur le plan ZA e tombera aufi fur gd : refte à favoir à quelle diftance de g: or, fi de Z' on abaïfle fur le plan ZAe une perpendiculaire Z’L' pour avoir fa projeétion L’, & que par Z’L’ & ZC on mène un plan, il coupera le plan hori- zontal fuivant 9C, & le plan ZAe fuivant une droite £gL”, qui formera avec Cg, CZ'&Z'L' un quadrilatère CaLz femblable & égal à celui MHz (z4 étant perpendiculaire fur Mr): donc portant Mz de £ €n A, A fera la projection du point Z'; 4° refte à trouver la projcétion du point 4: or elle eft dans la perpendiculaire a 4 fur Àe; de plus, elle eft évidemment éloignée du point # d'une quantité BB—MP, (zxP étant perpendiculaire far M ): donc la droite BA eft la projection de aZ' fur le plan ZAe; partant le point o, où fe cou- pentles deux droites Ad, BA, fera la projection fur ZAe des deux _points où aboutit le minimum, & en même-tems de ce 7ALRETUINE donc fi du point o on abaïfle fur Ae la perpendiculaire o1f, elle contiendra indéfiniment les projections horizontales des deux points par lefquels paille le minimum, Ces projections 638 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS font donc les points f & :, où la droite oz f rencontre les pro: jetions horizontales AC, & aC & f: eft la projection horizon- tale du #:7imum : on retrouvera aïfement fes projections o\ & x y aux deux profils. Remarquons que x y eft aufli la vraie lon- gueur de ce minrmum. THÉORÈME V. Fic.x, 19. On a la cubature exaële du folide renfermé par la [ur- face d’un quadrilaière gauche ABDC , par des plans menés d’une manière quelconque par fes quatre côtés & par un cin- quième plan quelconque. DÉMONSTRATION. Car formant le conoïde ABD4CA, il eft par le Théo- rème 2, —=DdCX+; mais quelque inclinaifon qu'aienc les plans menés par les quatre côtés, ils ne font que retrancher du conoïde ou lui ajouter des folides terminés par des faces planes & reétilignes , & partant rigoureufement cubables : donc , &c. THÉORÈME VI. 20. On a géométriquement la pofition du centre de gravité d’un folide renfermé par la furface d'un quadrilatère gauche ABDC, par des pians menés d’une manière quelconque par Jes quatre côtés & par un cinquième plan quelconque. La démonftration en eft la même que celle du Théorème précédent, 21. Je me fuis un peu étendu fur cette dernière efpèce de furface gauche, parce qu’elle eft la plus fimple, & qu'elle en- tre d'une manière élémentaire dans la compofition de routes les furfaces gauches , qui ne font que des fyftêmes de furfaces de trapèzes gauches dont une dimenfion eft finie, l’autre infi- niment petite, 22. De la formation des conoïdes dont nous venons de DIE AS OL IDE S: 639 nous occuper, on peut s'élever à celle d’une claffe de furface gauche beaucoup plus étendue, & dont celle des conoïdes n'eft qu'une efpèce particulière. La voici. Imaginons un plan ACQR horizontal , deux courbes quel- conques DEQ , BeR , qui s'élèvent au-deflus de ce plan & que je nommerai directrices. Concevons enfuite une droite mo- bile RQ, qui, demeurant toujours parallèle à l'horizon, pale toujours par des points correfpondans des direétrices, elle engen- drera une furface gauche qui devient évidemment un conoïde quand une des deux directrices eit une droite; cette furface eft évidemmeurt infinie : je délignerai cette efpèce de furface par le nom de paralleloïde. 23. Soit coupée cette furface par deux plans parallèles entreux, & inclinés d'une manière quelconque à l'horizon: foient DEQ , BeR , ces deux fections que je nommerai Les bafès du folide gauche , & confidérons le folide renfermé en- tre ces deux bales , la furface , le plan horizontal & un plan ABDC, mené par une des arêtes ou élémens rectilignes de la furface, il a quelques propriétés remarquables. THÉORÈME VII. à 24. Le folide gauche ABeRQCDEQ, eff égal au produit de fa hauteur perpendiculaire par la moitié de la fomme de Jes deux bafës. DEMONSTRATION. Imaginons une infinité de plis horizontaux infiniment pro- ches, qui coupent le folide fuivant des trapèzes; foient El’e, FN »f, deux de ces trapèzes confecutifs ; la tranche du folide qu'ils renferment eft égal au produit d'un de ces trapèzes par l'épaifleur dx; mais ST étant la diftance perpendiculaire des droites AR, COQ, le trapèze FN zf eft = ST X ###* la tran- che élémentaire eft donc ST X 2x X “#7, Par ST imaginons un plan perpendiculaire aux deux bafes, qui les coupe fuivant Fic. 6. Fc. 6. di » 649 SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS Pis. 667. les parallèles SH, TA & les deux trapèzes fuivant les paral- lèles HA, L/; enfin menons HK perpendiculaire fur HA & HG fur SH, HK fera dx & HG la hauteur perpendiculaire (2) du folide. La tranche fera donc ST X HK X “#* mais HK : HL :: HG : Hz : donc HK X ST — HL x GH. La tranche eft donc — + x HL X HG = Eté X h:le folide eft doncÆxX /(FEIN + féën) = + x (CDEQ+ABeR) ainfi, nommant S le folide, B, 4 fes bafes, on a S— A x ir. 25. Soit 4’ une fection du paralléloïde faite parallélement à fes bafes & à la diftance x de B, on aura, en nommant S’, S’”, les portions de folide renfermées entre cette feétion & cha- cune des bafes B & 6, S' EX x, S"—"==X (h—x): donc (B+4)X2— BHUX x HtEX (Rx): doncisiciée, g — LITE; donc, &c. : THÉORÈME VIIl. Dans un paralléloïde comme dans les conoïdes , l'aire d’une feélion faite parallèlement à fès bafes, dépend uniquement de l'aire de ces bafes. 26. Paflons aétuellement à la recherche du centre de gra- vité du folide , & cherchons d’abord fa diftance au plan de la Bafe B Or la tranche qui a 4” pour bafe eft (7° 25)—......, BX fire +bx) CAL go _ +bx fon moment par rapport au plan B; donc la diftance du cen- tre de gravité du folide au plan de la bafe B eft.....,..., + /(Bhxdx—Bxdx+bx dx) ro 25e FÉF k x 25 EE, étant nulle fion calenle depuis la bafe B). Gr « cette expreflion faifant X xdx ceft 2 (la conftante DE... SOLIDES 64t faifant x =} & pareant 4 — 2 devient. ..,,..,.4,..., EEE Bh+ibk : k B+2 FX 4h 5 EE . CSPEN Quant aux diftances de ce centre de gravité à deux autres plans, elles dépendent des équations particulières des deux bafes, & l’on ne peut en trouver une expreflion générale. 27. Un conoïde étant évidemment une efpèce de parallé- loïde , on pourra trouver la gubature & la pofition du centre de gravité d'un fegment de conoïde à bafes parallèles entr'elles, lorfque ces bafes ne font pas parallèles à l'axe, par ce que nous venons de démontrer dans les Numéros précédens. 28. Avant de quitter cette matière, je ne crois pas inutile de donner l'équation générale des paralléloïdes. Pour cela foient x, y, 7 les coordonnées , x & y étant ho- rizontales , quelque foit l'équation qui exprime la dépendance mutuelle de ces coordonnées, elle eft de cette forme © (x,Y,4)—0,9 défignant une certaine fonétion : cela pofe, coupons la furface du paralléloïde par un plan quelconque horizontal , la feétion fera une droite ou un fyftéme de droi- tes ; mais on fait que, fi dans l'équation d’une furface , on fait z égal à une conftante donnée 4, l'équation entre x & y qui en réfulte , eft celle de la coupe horizontale faite dans cette furface à la diftance z : ainfi, puifque , dans le cas préfent, cette dernière équation eft celle d’une droite ,® (x,y,7)—0 devient l'équation d'une droite : or, l'équation d’une droite cft généralement À x + By + C—=0o; donc ici on a @ (x, y, »)—Ax+By+C, pour une autre coupe faite à la diftance 4’, on a ®(x, y,#')—A'x+By+C, d'où l'on voit que les coëfficiens À, B,C, varient lorfque la hauteur 4 Tome IX. Mm mm De CoSUR hi PROPRES DES SOLIDES. : _ varie; & puifque k eft généralement repréfenté par x, ileft vifible que les coëfficiens A, B, C fonc des fonéHiqué de 7; donco(x,y,x)=2x.9 3+y.0"7+0"x (0,0, expri- mant des fonctions quelconques) partant l'équation générale de tousles paralléloïdes rapportée au plan horizontal , eft x. (LEA Px+y.9 Er 40 = Jeavants Etranger ZomX. 2642. EP Haussard Sul. d'aseurte n : Jeavants Etranger Tom. IXEPL. 52. Réauerd Jap. “ 643 D ——_—— PREMIER MÉMOIRE SUR PLUSIEURS COMBINAISONS SALINES DE, a CA IC SCRANCA Ce Pa M. BUCQUET. Less sussrances MÉTALLIQUES ont été depuis long- tems l’objet du travail & des recherches des Chymiftes : ils les ont tourmentées de mille manières, & tous leurs efforts réunis n'ont pu découvrir autre chofe, finon qué ces. fubf- tances font compofces du principe inflammable & d'une terre dont la nature n’eft pas parfaitement connue, Eft-elle la même dans toutes les matières métalliques ? Ou chacune de ces fubftances a-t-elle une terre particulière qui lui foit pro- pre? C'eft ce qu'aucun Chymifte Phyfcien n'ofe encore af furer. La poflbilité de convertir en verre toutes les chaux métalliques, prouve en faveur de la première de ces opi- nions, & ceux qui la foutiennent prétendent que les diffe- rences qu'on obferve entre les matières métalliques, ne dé- pendent que de la proportion de leur phlogiftique & de leur terre , ou de l’union plus ou moins intime de ces deux principes : ils penfent aufli que les rerres ou chaux métal- liques n'ont des propriétés particulières que parce qu'elles retiennent toujours une aflez grande portion de phlogiftique dont il n’eft pas poflible de les dépouiller malgré les calci- nations les plus exaétes. Les défenfeurs du fentiment contraire s'appuient fur la variété des chaux métalliques, fur la facilité de fondre en verre quelques-unes d’entrelles , tandis que plufeurs autres réfiftent fortement à leur vitrification, fur Mmmm i]} Préfenté en 1772 644 MÉMOIRE la pefanteur, la couleur & la tranfparence qui varient dans chacun des verres métalliques, & plus encore fur la pro- priété qu'ont ces verres & les chaux qui les produifent, de fe convertir par l'addition du phlogiftique en un métal abfo- lument le même que celui dont ils faifoient partie. Avanc d'embrafler une de ces deux opinions, qui ont trouvé des partifans parmi les Chymiftes les plus célèbres, J'ai cru devoir raflembler un grand nombre de faics, afin que leur réunion püt fervir à établir uné théorie plus folide. Je me fuis propofe d'examiner, dans un grand détail, toutes les combinaifons falines métalliques; & quelque long que foit ce travail, quelque mulriphees que foient les expériences qu'il exige , je les fuivrai autant qu'il me fera pofible, per- fuadé que l’action des différens menftrues peut jeter un très- grand jour fur la nature des terres métalliques, & fur la ma- nière dont le phlogiftique eft combiné à chacune d'elles. On apperçoit d’ailleurs, en faifant les combinaïlons falines métal: liques, plufieuts phénomènes finguliers; tels font les pro- prictés qu'ont quelques acides de difloudre certains métaux plus facilement que ne peuvent le faire les autres acides, qui cependant ont plus d’aflinité avec ces mémes métaux & y adhèrent plus fortement après leur union, les diffé- rences fenfibles qu'on obferve entre les fels formes par le méme acide uni au mème métal, fuivant la manière dont on a opéré leur union, la déliquefcence de plufeurs fels métalliques, la caufticité de certains autres joint à un affez grand degré d’indiflolubilité. Toutes ces particularités n'ont point échappé aux Chymiftes, elles leur ont même paru mé- ricer toute leur attention. Cependant, comme les faits leur manquoient , ils ont été obligés de pafler légèrement fur ces objets que je tâcherai d'approfondir autant que je le pour- rai. Je m'abftiendrai néanmoins d'établir aucune aflerton, avant d'avoir raflemble une quantité fuffifante de preuves: c'eft pourquoi les premières parties de mon travail ne feront ex mit S'U Ré: ATRYS EN T C. 645 qu'une fuite d'Expériences, auxquelles j'ajouterai feulement, par forme de réflexion, les vues que chacune d'elles m’aura naturellement préfentées, Je fais que plufñeurs des combinaifons falines métalliques done j'aurai occafion de parier , font connues; maïs il en eft beaucoup qui ne le font pas, & parmi celles qui ont été tentées, il y en a peu qui aient été fuivies jufqu’au bout, C'eft ce qui m'a déterminé non-feulement à tenter de nou- velles Expériences, mais même à répéter foigneufement toutes celles qui ont été faites, pour les confirmer fi elles font exaétes, ou les contredire lorfque Je les aurai trouvées peu conformes à la vérité : j'aurai en conféquence l'attention de faire remarquer les Expériences qui m'appartiendront, afin qu'on puifle les comparer avec celles des autres Chymiftes, Je commence par publier quelques Expériences que jai faites fur l’arfenic, cette fubftance fingulière, qui paroît appartenir autant à la clafle des fels qu'à celle des demi- métaux , a préfenté à tous les Chymiftes qui l'ont exami- 4 . CA ni! LA \ née, & particulièrement à M. Macquer , des phénomènes crès-nouveaux & très-furprenants ; &, quoique ce Savant Académicien nous ait fait connoître un grand nombre des ” plus importantes propriétés de l’arfenic, comme il s'eft peu occupé des combinaifons de cette matière avec les acides, jajouterai ici ce qui manque à fon travail pour cette partie. Combinaïfons de l’ Acide vicriolique à l'Arfenic. te HN CHyMistes ont eflayé d’unir l'acide vi- triolique à l'arfenic. M. Macquer, dit qu'en diftillanr un mélange d'acide vitriolique & d’arfenic, on en retire un acide vitriolique qui a quelquefois une odeur tout-à-faic. impofante d'acide marin ; lorfqu'on à pouflé la diftillarion jufqu'à ce qu'il ne monte plus d'acide, la cornue érant pref 646 MÉMOIRE que rouge , il ne fe fublime pas d’arfenic; mais cette fubf- tance refte au fond du vaifleau dans une fonte tranquille, &, lorfqu’elle eft refroidie, elle forme une mafle tranfpa- rente, qui blanchic à l'air & attire l'humidité au point de { difloudre en partie. M. Brandr, dans les A&es de l’Aca= démie d'Upfal, dit que l'huile de vitriol diffout l'arfenic, & qu'à l'aide de cet acide très-concentré , l'arfenic devienc fufible & foutient un grand feu, avant de fe difliper en fumée; mais M. Brandt ne détermine pas la quantité d'acide vitriolique qu'il convient d'employer pour opérer la diflolution de l'arfenic. Voici ce que j'ai obfervé à cet égard: ayant pris une demi-once de chaux d’arfenic en poudre); je verlai deflus une once d'huile de vitriol, dont le poids étoit à celui de l’eau comme 57 à 3r; il ne seft pas fait de diflolution à froid, & l'arfenic s'eft durci en une mañe aflez difficile à rompre. J'ai fait bouillir le mélange; il s'eft difipe une grande quantité de vapeurs d’efprit fulphureux volaul ; cout l'arfenic s'eft diflous, la diflolution étoit claire, parfaitemnet tranfparente & peu fluide, en refroidiffant elle a dépofé des cryftaux blancs ; je les ai féparés de l’eau-mère qui les furnageoit ; ces cryftaux pefoient cinq gros, l'eau- mère pefoit quatre gros, cinquante-deux grains, il s’étoit diffipé deux gros vingt grains, ou un peu plus d'un fixième, pendant la diflolution. J'ai mis ces cryftaux fur des charbons ardens; ils ont com- mencé par répandre une odeur d'acide fulphureux aflez forie, ils fe font bourfouflés, & l'odeur fulphureufe étant difpce , il s'eft élevé des vapeurs purement arfenicales en tres-grande abondance; la matière seft fondue en une male tranfparente comme du verre, & eft reftée"fort long- temps, avant d'être volatilifée entièrement. Comme les cryftaux, tels que je les avois pris, éroient fort furcharges d'acide, je les lavai avec deux onces d’eau diftillée & les fis égoutter fur le papier gris; l’eau du lavage 7 ÿ ' @ SUR L'ARSENIC. 647 étoit fort acide, mais elle ne: contenoit rien d’arfenical; je m'en fuis afluré en la faturant avec du fel de tartre; je n’en ai retiré que du tartre vitriolé très-pur. La matière, qui avoit été lavée, n’avoit plus que la faveur fingulièrement ftiptique & rongeante de larfenic. J'en ai mis fur les charbons atdens; elle s’eft exhalce promptement en vapeurs arfenicales, & traitée dans des vaifleaux clos, elle s'eft entièrement fublimée, l’eau froide en à diflous un quarente-huitième de fon poids, & l’eau bouillante un vingt- quatrième. J'ai obtenu, par le refroidiflement de cette dif- folution, des cryftaux d'arfenic crès-purs, La liqueur que j'avois féparée du dépôt falin, étoit excef fivement acide; je l'ai étendue dans douze parties d’eau d'f- tillée, & après l'avoir faturée de fel de tartre, je n’en ai retiré que du tartre vitriolé très-pur, qui ne contenoit pas un atome d'arfenic. Pendant cette faturation, 1l s'étoit fait un petit précipité blanc que j'ai raflemblé avec foin. Ce préci- pité ne contenoic rien d’arfenical, & il ne dépendoit que de quelques flocons terreux qui s'étoient féparés de l'alkali pendant la faturation, comme cela fe voit fofivent. Ces Expériences, que j'ai répétées plufieurs fois & dans des dofes différentes, tant fur la chaux que fur le régule, m'ayant toujours donné les mêmes rélultats, je crois pou- voit aflurer, premièrement, que l'acide vitriolique ne con- tracte pas de véritable union faline avec l'arfenic, foit dans l'état sa chaux, foit dans l'écat de régule, puifque cet acide qui a diflous l’arfenic en bouillant, le laïfle précipiter en totalité par le refroidiflement : on en peut juger par l'état de l'eau-mère qui furnage le dépôt, laquelle ne contient rien d’arfenical, & en comparant avec le poids de la matière qui fe dépofe.au fond du vafe où s'eft faite la diflolucion, celui de l'arfenic qu'on avoit employé. L’excès de poids qu'on retrouve dans ce dépôt, appartient à une portion d'acide qui eft interpofée entre fes parties fans être com- 2 648 MÉMOIRE biné, puifqu'à la moindre chaleut cet acide fe diffipe en vapeurs {ulphureufes, & qu'un fimple lavage fait avec une petite quantité d’eau froide, fufñit pour l'enlever parfaitement. J'ajouterai en fecond lieu, que la portion d’acide qui fe précipite avec l’arfenic lui communique un très-grand degré de fixité, comme l'ont très-bien vu MM. Macquer & Brandt. Troiïfièmement enfin je remarquerai que laétion de l'huile de vicriol fur l'arfenic, eft la même que celle de cer acide fur le foufre; M. Baumé a fair voir que l'huile du vi triol bouillante diflolvoit le foufre, mais que cette matière fe cryftallifoit à mefure que l'acide refroidifloit, & que la liqueur , qui furnageoit le dépôt cryftallife, ne contenoit aucune partie de foufre en diflolution, tandis que le foufre retenoit entre fes parties une aflez grande quantité d'acide, pour que fa couleur en füt fenfblement alcérée. J'infifte d’au- tant plus fur cette analogie, qü'elle n’eft pas la feule qu'on ait trouvée entre le foufre & l'arfenic. Combigaifon de lAcide nureux à PArfenic. La pissoLuTIoN de larfenic dans l'acide nitreux, n'’eft pas une chofe nouvelle : M. Brandr dit, dans le Mémoire cité plus haut, que cinquante parties d'eau forte diffolvent une partie d'atfenic. M. Brandt ne dit pas comment il a opére, ni de quelle eau forte il s’eft fervi; mais, en compa- rant fon aflertion avec mes Expériences, il me femble qu'il Seft fervi d’une eau forte bien foible, ou il a opéré autre- ment que moi. Je me fuis fervi d'un efprit tiré du nitre à la manière de Glauber; cet efprit étoit crès-pur, & fon poids étroit à celui de l'eau comme 43 à 31. J'ai pris quatre onces de chaux d'arfenic en poudre, jai verfé deflus fix onces d’elprit de nitre; cet acide n’a point durci l'arfenic, comme l'a fait l'a- cide vitriolique, il ne l'a pas non plus diflous fenfiblement à froid; SUR Ê'ARSENIC. 649 à froid; cependant, au bout de vingt-quatre heures, l'acide avoit pris une couleur verte, & répandoit des vapeurs rouges aflez épaifles, ce qui prouve qu'il s'étoit déjà chargé d'une portion du phlogiftique de l’arfenic. J'ai fair bouillir douce- ment le mélange; à mefure que la diflolution fe faifoit, le récipient étoic rempli d'une vapeur rouge d'acide nitreux trés-Cpaïlle; après une heure d’ébullition, tout étoit diffous, la liqueur tranfparente & parfaitement limpide, mais elle répandoit encore quelques vapeurs d'acide nitreux; je l'ai Rïflé refroidir, elle n’a rien précipité. Comme je foupçon- nois qu'il y avoit une portion d'acide, qui n’étoit pas faturée, jai fait chauffer de nouveau la diflolution, & j'ai ajouté fuc- ceffivement & par parties trois gros de nouvelle chaux d'ar- fenic en poudre. Le troifième & dernier gros, ne s'étant dif fous qu'en partie, & la liqueur ceflant de répandre des vapeurs, je l'ai verfé dans une capfule de verre, &, par le refroïdiflement, j'en ai obtenu un felen petites écailles blan- ches & peu brillantes, que je ne peux mieux comparer qu'aux cryftaux de fel fédatif cryftallifé confufément dans une liqueur trop rapprochée. Ce fel, que jappellerai nitre d’arfénic à une faveur des plus cauftiques mêlée avec la faveur füptique & rougeante de l’arfenic, & il conferve cette faveur, même après les lavages les plus exaéts; il rougit le fyrop de violettes, il fe diflout dans environ quatre par- tics d’eau froide, & fa diflolution évaporée crès-lentement, fournit des cryftaux en petites écailles, tels que ceux qui ont été diflous. Le nitre d’arfenic, quoique des plus cauftiques, eft très- difloluble dans l’eau, il n'attire cependant pas très-fenfible- ment l'humidité de l'air. L'eau-mère qui furnage le nitre d’arfenic, après que le fel s'eft dépofé, étant évaporée, fournit une nouvelle portion de ce fel femblable à la première; ce qui prouve que certe Gau en tient en diflolution. Tome IX. Nnnn 650 MÉMOIRE Le nitre d’arfenic eft du nombre des fels qui fe diffolvent en plus grande quantité dans l’eau chaude que dans l'eau froide , puifque fa diflolution refte claire tant qu'elle eft chaude, & qu'elle ne laïffe précipiter des cryftaux qu’en re- froïdiflant, à moins qu'on ne l'ait fait trop rapprocher. Le nitre d’arfenic ne peut étre décompofe par le feu, ni à l'air libre, ni dans Îes vaifleaux clos. Lorfqu’on le met fur des charbons, il fe diflipe en entier fous la forme de vapeurs arfenicales, dont l'odeur n’eft cependant pas celle de l'arfe- nic pur. Il eft plus fixe que l’arfenic, mais moins que cette fubftance chargée d'acide vitriolique. J'ai eflayé de difiller le nitre d’arfenic dans une cornue de verre luttée. Il a paflée d'abord quelques vapeurs purement aqueufes; il s'eft enfuice fublimé une portion d’arfenic, partie fous la forme de cryftaux jaunâtres adhérens au col des vaif- feaux, partie fous celle d'une poudre fine & blanche qui tapifla l'incérieur du récipient. Je n'ai pas pu poufler l'Ex- périence jufqu'au bout, parce que, ne voyant plus pañler de vapeurs, Jeflayai de donner un peu plus de feu, mais ma cornue & le lut qui la couvroit, fe fondirent. Je ne pus oblerver autre chofe, finon que la matière, qui tomboit de la cornue fur les charbons, répandoit l'odeur du nitre d’ar- fenic, qui n’avoit pas fouffert de décompofition. Cette Expérience paroît prouver que le fel nitreux atfe- nical ne déconne pas fur les charbons, & que le phlogifti- que ne le décompofe pas. J'ai tenté de décompofer le nitre d’arfenic par l'intermède de l'alkali fixe, J'ai pris en conféquence deux onces de dif- folution nitreufe arfenicale rapprochée au point de la cryf- tallifation ; je l'ai étendue dans quatre onces d’eau diftillée, & jai ajouté peu-à-peu du fel de tartre très-pur, il s'eft fait une vive cflervefcence, mais je mai point apperçu de précipité, Lorfque l'effervefcence a ceflé d’avoir lieu, jai SU RL RON ENT C5 Uese ccflé d'ajouter de l'alkali fixe, & la quantité que j'avois em- ployé pour la faturation seft trouvée être d’une once & demie. J'ai filtré la liqueur, quoiqu'elle ne fût pas trouble, je l'ai fait évaporer le plus doucement qu'il m'a été poffible. J'ai obtenu d'abord des cryftaux d’un {el neutre arfenical très-pur, cel que M. Macquer Va fait en diftillant le nitre avec l’arfenic; la liqueur étant évaporée aux trois quarts, je je l'ai verfée dans un autre vaifleau, dans lequel elle à dé- polé des cryftaux de très-beau nitre mélés de quelques petits cryftaux de fel neutre arfenical. Cette Expérience me déter- mine à croire, avec M. Macquer, que l'alkali fixe a la plus grande affinité poflible avec l'arfenic, & que fi j'ai réufh à faire un fel neutre arfenical par la voie humide, ceft parce que l'alkali fixe sunit par partie à l'arfenic, à mefure qu'il le dégage de l'acide auquel ‘il étoit uni, comme cela à lieu dans la décompofition du nitre diftillé avec l'arfenic. Cette Expérience eft remarquable en ce que l'effervefcence dure jufqu'à ce qu'on ait mis aflez d'alkali fxe dans la liqueur nitreufe arfenicale, ce qui me fait croire que lalkali fixe s'unit avec ceffervefcence à l’arfenic comme aux acides, puif- que ce neft que pendant qu'on ajoute l'alkali -que fe forme le fel neutre arfenical. On peut d’ailleurs en juger par la quantité d’alkali, qui eft beaucoup plus confidérable qu'il nc faudroit pour faturer l'acide, J'ai eflfayé de décompofer la liqueur nitreufe par linter: mède du foie de foufre, penfant que, dans le tems que l'alkali de certe fubftance suniroit avec l'acide nitreux, l’ar- fenic pourroit fe combiner au foufre; mais j'ai été trompé dans mes efpérances : le foufre fe précipite cout feul, & la liqueur dans, laquelle il nage étant filtrée & éyaporée, ne donne que du fel neutre arfenical & du nitre, comme dans l’opération précédente où je n’avois employé que de l'alkali fixe {eul. J'ai pris deux onces de diflolution nitreufe arfenicale rapprochée au point de la cryftallifation ; &, après l'avoir ‘ Nana i] 652 MÉMOIRE érendue dans quatre oncés d’eau diftillée, jai faturé avec une once & demie d’alkali volatil concret tiré du fel am- moniac par lalkali fixe; il seft fait une effervefcence des plus vives, & je mai point apperçu de précipité; j'ai néan- moins filtré la liqueur pour plus de précaution, & je Vai laïflce évaporer à une chaleur très-douce : j'ai obtenu des cryftaux du fel neutre arfenico-ammoniacal décrit par M. Macquer, & les dernières portions de la liqueur mifes à évaporer féparément, m'ont donné du fel ammoniacal nitreux. Ce procédé offre un moyen facile de faire aflez abondamment le fel neutre arfenico-ammoniacal qu'on ne peut obtenir par le procédé qu'a indiqué M. Macquer que difficilement, & en courant quelques dangers. Comme l'acide vitriolique ne fe combine pas avec larfenic lorfqw'on le lui prefente direétement, je voulus voir sil sy uniroit mieux, après que cette fubftance auroit été combinée à l'a- cide nitreux. Je pris donc deux onces de la liqueur nitreufe arfenicale que je mélai avec deux onces d'huile de vitriol; il fe produifit une très-grande chaleur, & il séleva quelques vapeurs blanches, ayant une odeur forte d'acide marin, (je dirai à l'occafion de cette odeur, qu'elle fe manifefte toutes les fois que l'acide vitriolique eft réduir en vapeurs, qui ne contiennent pas aflez de phlogiftique pour être dans l’état d'acide fulphureux. Indépendamment de l'exemple préfent, M. Macquer l'a obfervé dans l'acide vitriolique diftillé fur larfenic; je l'ai auffi remarqué en faifant bouillir dans l'eau forte le tartre vitriolé pour le décompofer, fuivant le procédé de M. Baumé.) Le mélange d'huile de vitriol & de liqueur nitreule arfenicale en fe refroidiflant, laiffa dépofer un petit précipité blanc peu fenfible, Je mis le tout en diftillation au bain de fable dans une cornue de verre, à laquelle j'adaptai un récipient lutté avec le luc gras. A mefure que la liqueur de là cornue s'échauffoit, le précipité s'eft rediflous; j'ai retiré la moitié de la liqueur dans le récipient; cette liqueur étoit un acide vitriolique aflez peu concentré; je l'ai faturé avec S U R LI ARYS EN I C. 653 du fel de tartre & n'en ai retiré que du tartre vitriolé très- pur. La liqueur de la cornue éroit claire étant chaude; mais, en refroïdiflant, elle a laïflé dépofer un fel blanc péfant fix gros. Ce fel étoit furnagé par une liqueur acide parfaice- ment blanche & tranfparente; j'ai décanté cette liqueur, & quoiqu'elle ne pefat qu'une once un gros, elle abforba une très-grande quantité de fel de vartre, & ne fournit que du tartre vicriolé très-pur. Le fel, qui étoit refté au fond de la cornue, étant fort furchargé d'acide vitriolique, je l'ai lavé & l'ai mis à égout- rer; après quoi, l'ayant examiné, je n’ai trouvé que le nitre arfenical fans aucune altération ; fa faveur cauftique, fa dif- folubilité dans quatre parties d’eau froide, fa manière de fe volatilifer fur les charbons, l'odeur quil exhale en brü- lant & qui eft particulière à ce fel, aufli-bien que les autres caractères dont jai fait mention plus haut, ne m'ont laiflé aucune incertitude fur fa nature. C'eft je crois le premier exemple connu, qu’un fel nitreux ne foit pas décompofé par l'acide vitriolique, & fi on joint à cette exception celle de la décompofition du tartre vi- triolé par l'acide nitreux qu'a obfervé M. Baumé , on re- connoïîtra que plus les recherches des Chymiftes feront mulripliées > moins on trouvera en Chymie de régle gé- _ ncrale. Les Expériences me mettent à même d’aflurer, premic- rement, que l'acide vitriolique ne décompofe pas le nitre arfenical , puifqu'ayant retiré, par la diftllarion , tout l'acide viriolique que javois employé, j'ai retrouvé, dans la cornue, le nitre arfenical fans altération. J'ajouterai, en fecond lieu, que la chaleur qui réfulce des mélanges de l'huile de vitriol avec la diflolution nitreufe ar- fenicale, n’eft produite que par l'aétivité avec laquelle l'huile 654 MÉMOIRE de vitriol s'empare de l'humidité de la diflolution nitreufe, & que le dépôt qui fe manifefte après que le mélange eft refroidi , n'eft dù qu'à une portion de nitre arfenical qui a été privée de fon eau de diflolution. Troifièmement, j'obferverai que les premiers produits, qui pañlent dans la diftillation , étant plus chargés d'humidité, le nitre arfenical privé par-là de toute fon eau de diflo- lution , cryftallife en totalité & d’une manière confufe , au milieu de l'huile de vitriol la plus concentrée que la diftil- lation n'enlève pas. J'ai tenté inutilement de décompofer le nitre d’arfenic par l'acide vitriolique en employant le fecours des doubles affi- nités. Le tartre vitriolé, les vitriols de fer & de cuivre; n'y ont caufé aucune altération 3 d’où je crois qu'on peut hardiment conclure que l’acide nitreux sunit à larfenic & y adhère aufli fortement que l'acide vitriolique s'y com- bine peu. Combinaifons de lAcide. marin a lArfenrc. M. BRANDT a annoncé cette combinaifon , comme celles des acides vitrioliques & nitreux; mais il ne l'a pas plus circonftanciée; puifque, fans donner le degré de con- centration de l'acide & fans indiquer le procédé qu'il a fuivi, il fe contente de dire que vingt-quatre parties d’efprit de {el diflolvent une partie d’arfenic. L'acide dont je me fuis fervi avoit été retiré du fel marin pat l'intermède de l'huile de vicriol à la manière de G/au- ber; fon poids étoit à celui de l’eau comme 36 à 31. Ayant pris une once de chaux d’arfenic en poudre, je la mis dans un matras, & je verfai pardeflus deux onces d'acide marin qui ne l'attaquerent pas à froid; mais, en bouillane, la diflolution seit faite avec rapidité. La liqueur chaude étoit jaune & tranfparente; mais, en refroidiflanc, elle a laiflé SU RL IT ANRYSCEMNN TIC: 655 dépofer des cryftaux d’un blanc jaunâtre, furnagés d’une eau- mere d’une belle couleur jaune & femblable à une diflolu- tion d'or fort chargée. J'ai féparé l'eau-mère. de deflus le dépôt falin; &, ayant pefé féparément l'une & l'autre, jai trouvé fix gros de dépot falin, & dix gros d'eau- mère, une once sétoit diflipée pendant l'opération. Le dépôt falin a une faveur cauftique, mais qui n’appar- tient qu'à une portion d'acide qui refte mêlée entre fes par- ties, puifqu'il perd entièrement ce goût par-le lavage. Lorf. qu'on le diflout dans l’eau, une aflez grande quantité d’ar- fenic fe précipite, & fi, après avoir filtré la difiolution!, on veut la faire évaporer, il fe précipite encore une très-grande quantité d’arfenic & une portion fe diflipe en vapeurs. L’alkali fixe verfé dans la diffolution de fel marin arfe- nical, y occafionne de l’effervefcence; il fe fait un petie précipité arfenical , la liqueur: évaporée fournit du fel fébri- fuge de Sylvius, qui, étant mis fur les charbons, décrépite foiblement & répand une crès-légère odeur d’arfenic ; Peau- mère décantée de deffus le dépôt falin, n'eft prefque:que de l'acide marin pur. Je l'ai faturée avec le fel de tartre; il ne s'eft pas fait de précipité. J'ai filtré néanmoins la liqueur pour plus de précaution, j'ai fair évaporer, il s'eft faic un petit précipité, arfenical que j'ai féparé par une feconde filtration. En continuant d'évaporer je n'ai retiré que du {el fébrifuge de Sy/vius, qui répandoit également une foible odeur d'arfenic lorfqw'on le poloit fur les charbons. Ces Expériences rendent à prouver que l'acide marin sunit un peu mieux à l’arfenic que,ne le fait, l'acide vitriolique, puif- que le dépôt falin, qui fe précipite par le refroidiflement de la diflolution, d’arlenic dans. l'efpuit de fl, rérienc aflez d'acide pour être difoluble. dansl'eau en grande païtie, &yformer avec l'aikali du tartre un. felfebrifuge de Syiviust, qui,exhale, lorfquon le chaufe ,:des vapeurs d’arlenic.- 656 MÉMOIRE L'eau-mère, qui furnage le dépôt falin, contient également de lParfenic en diflolution , puilque le fébrifuge qu'on retire après avoir faturé cette liqueur avec du fel de vartre, donne fur les charbons des vapeurs arfenicales. Pour pouvoir dérerminer au jufte le rapport des diffe- rens acides avec l’arfenic, jai effayé de décompofer le fel marin arfenical par l'intermède des acides vitrioliques & ni- treux. J'ai mis en conféequence dans une petite cornue de verre une certaine quantité de fel marin arfenical; j'ai verfé pardeflus une égale quantité d'huile de vitriol ; jai diftillé au bain de fable, & j'ai retiré tout l'acide vicriolique fans autre altération qu'une odeur fulphureufe, qui ne fe mani- fefte pas lorfqu’on diftille l'acide vicriolique fur le nitre d’ar- fenic, parce que, dans ce fel , aucune portion d'arfenic ne fe trouvea nu, ce qui n'a pas lieu dans le fel marin arfenical ; enfin le fel marin arfenical s'eft trouvé au fond de la cor- nue avec la couleur jaunâtre qui lui eft naturelle; ce fel avoit feulement retenu aflez d'huile de vitriol pour refter en une fufion tranquille dans la cornue, au lieu de fe vola- cilifer, comme cela lui arrive lorfqu’on le diftille feul. J'ai répété une Expérience femblable fur le fel marin ar- fenical, en me fervant d’efprit de nitre. J'ai retiré, par la diftillation, lefpric de nitre chargé d'un peu d'efpric de fel & dans l'état d’eau régale. Ce qui reftoit dans la cornue, étoit un véritable nitre arfenical. J'ai tenté l'Expérience inverfe, c’eft-à-dire que j'ai eflayé de décompofer le nitre arfenical par l'intermède de l'acide matin, comme javois tenté de le faire avec l'acide vitrio- lique. Jai pris deux onces de la liqueur nitreufe arfenicale rapprochée au point de la cryftallifation; jai verfé deflus deux onces Pie de fel; le mélange n’a occafionné ni chaleur ni précipité ; feulement il a pris la teinte jaune de lefprit de fel; je lai mis en diftillation, & j'en ai re- tiré deux onces & demie d'un acide un peu jaunâtre ayant cout-à-fait SUR'L'ARSENIC 657 tout-à-fait l'odeur de lefprit de fel. J'ai faruré ce produit avec du fel de tartre, & j'en ai retiré un véricable fel fébrifuge de Sylvius qui, étant mis fur les charbons, exhaloit une foible odeur d’arfenic. La matière, qui reftoit dans la cornue, étoit blanche, claire tranfparente & de la confftance d'un mucilage de gomme arabique fort épais ; elle pefoit une once ; une demi- once sétoit perdue pendant l'opération. Ce réfidu évaporé ne fournit que du nitre d’arfenic tout pur. D'après ces Expériences, je crois pouvoir regarder comme une chofe démontrée que , de tous les acides, aucun n'a plus d'affinité avec l'arfenic que l'acide nitreux : après Vacide nitreux, c'eft l'acide marin, qui diflout l'arfenic & qui lui refte uni avec une aflez grande force; il faut obferver, a l'égard de cet acide, qu'il volatilife toujours une aflez grande portion d'arfenic, & qu'il n'attaque jamais cette fubftance que lorfqu'il. a un grand degré de concentration : enfin l'acide vitriolique ne peut contraéter de véritable union avec l'arfenic, foit qu'on lui fafle difloudre direétement cette fubftance, foit qu'elle ait été entamée par d'autres acides. Tous les phénomènes que préfentent les ‘acides unis à la chaux d’arfenic, ils les préfentent lorfqu'on les mêle au régule d'arfenic. Pour terminer tout ce qui regarde l'union de l'arfenic aux acides , je devrois examiner la préparation de l'huile gla- ciale d’arfenic, ou beurre d’arfenic, donc plufieurs bons Au- teurs de Chymie ont fait mention, & pour lequel Zemery indique un procédé. Comme les tentatives que jai faites pour obtenir le beurre d’arfenic, ont été prefque toutes inutiles , & que je n'ai pu rien obtenir en employant le fublimé corroff avec l'arfenic blanc, ces deux fubftances ayant l'inconvénient de fe volatilifer prefqu'en même tems) Tome IX, Oooo - 6583 MÉMOIRE SUR L'ARSENIC. jai tenté de fubftituer l'Orpiment & le Réalgar à larfenic ‘Jai obtenu alors un acide fluide très-pénétrant & qui pré- cipite avec l'eau; mais cet acide ctoit en très-petite quan- tité. Je me propofe d'examiner cette combinaifon plus am- plement, en traitant des combinaifons falines du mercure & de la décompofition du fublimé corrofif. ne 0 pe. VE + 659 SECOND MÉMOIRE S'U R LES COMBINAISONS SALINES DE LlARSENIC. Pa M BUCQUET. Daxs Mox PREMIER MÉMotireE, Jai examiné les com- binaïfons de larfenic avec les acides minéraux. Je m'occupe, dans celui-ci, à faire connoître l'union de cette fubftance avec les acides végétaux du tartre & du vinaigre. La combinaïfon de l'acide tartareux à l'arfenic n'a point encore été examince, au moins les Auteurs qui ont écrit fur larfenic, n’en ont rien dit; il n’en eft pas même quef- tion dans le Mémoire de M. Brandr, dans lequel cependant ce Chymifte parle des diflolutions de larfenic par les difie- rens acides. Le procédé que j'ai fuivi, eft le même que fuivent beau- coup de Chymiftes dans la préparation du vartre ftibié. J'ai pris une demi-livre de crême de tartre réduite en poudre groflière; je l'ai jetée dans cinq livres diftllce bouillante, au bout de fept à huit minutes, j'ai ajouté une demi-ivre d’ar- fenic groffièrement pulvérifé, il ne s'eft pas fait d'effervef- cence marquée, mais il s'eft élevé une aflez grande quantité de bulles qui paroifloient annoncer que la combinaifon fe faifoit ; jai laiflé la diflolution bouillir environ un quart d'heure, & tout étant prefque diflous, jai filtré, par le pa- pier gris, la liqueur a pale claire, mais un peu jaunâtre, il eft refte fur le filtre un gros & demi d’arfenic pur. La li- queur filtrée a laiffé dépofer une très-grande quantité de Oo0o ij FE MÉMOIRE petits cryftaux blancs en aiguilles fines & aflez peu régu- lières. La liqueur décantée de deflus ce fel, & évaporée, a fourni une nouvelle quantité de cryftaux femblables aux premiers, & la liqueur de cette féconde cryftallifation éva- porée & mile à cryftallifer pour la troifième fois, a donné encore de femblables cryftaux; enfin les dernières portions de liqueurs ont donné un fel, qui m'a paru un peu diffé- rent des autres, & que je crois être une portion de fel vé- gétal naturellement contenu dans la crême du tartre. Le fel tartareux arfenical a: une faveur acide-comme [a créme de tartre; cette faveur acide eft bientôt fuivie de la faveur flptique & rongeante de larfenic. Cc fel expofe à l'air, perd promptement fon éclat & devient jaune à fa fur- face. Il eft beaucoup plus difloluble dans l'eau bouillante que dans l’eau froide; cinq parties d’eau bouillante fuffifenc pour en difloudre une partie, Peau froide n’en diflolvant guère qu'un trentième de fon poids. Le fel tartareux arfenical eft facilement décompofé. par Faétion du feu, foit à l'air libre, foit dans les vaifleaux clos. Jai expofé fur les charbons ardents les premiers cryftaux de re ci; ils fe font bourfouflés confidérablement, & ont com- mencé par répandre quelques vapeurs purement arfenicales, qui ont été bientôt fuivies par des vapeurs parfaitement fem- blables à celles que fournit la crême de tartre pure lorfqu'on la fait brûler; il eft refté une matière charbonneulfe rare & fpongieufe, qui a fini par fe réduire en cendres fans donner de vapeurs. Le fel de la dernière cryftallifation expofé fur les charbons ardens, donne très-peu de vapeurs arfenicales, & laifle, après fa combuftion, un charbon confidérable. J'ai mis quatre onces de fel tartareux arfenical dans une cornue de verre luttée que jai placé dans un fourneau de reverbère; &, après avoir ajufté un récipient, jai diftillé cres- lentement. Ïl a paffé d’abord une eau roufleirre, ayant une odeur légère, & aflez agréable de fucre brülé; cette eau a SUR L'ARSENIC. 661 laiflé dépofer; dans le récipient, quelques cryftaux blancs affez irréguliers. Lorfque j'ai vu quil ne pañoit plus de va- peurs, j'ai retiré ce premier produit, & en pouflant le feu un peu.plus fortement , jai obtenu une nouvelle quantité de liqueur aqueufe ayant l'odeur forte, & empyreumatique, qui a coutume de fe faire fentir dans la difillarion de la crème de tartre. Je n'ai apperçu, dans toute cette diflillation, rien qui reflemblât a de l'huile. Après avoir retiré tous les pro- duits fluides , il seft fublimé, dans le col de la cornue, une matière, noire, dont une portion a pañlé jufques dans le récipient; jai entretenu la cornue bien rouge pendant deux heures, après lefquelles j'ai éteint le ‘feu. Les vaifleaux étant parfaitement refroidis, J'ai examiné les produits & le réfidu de mon opération. Le premier produit, dont l'odeur étoit celle du fucre brülé, avoit une faveur fenfiblement acide, il a rougi le fyrop de violettes & fait effervefcence avec les alkalis. Les cryftaux, qui s’étoient précipités au fond de ce premier produit, étoient également acides; jen ai mis fur les charbons ardents, ils ont donné d’abord une foible odeur arfenicale, ils ont répandu enfuire des vapeurs de pure crême de tartre, & fe font convertis en ‘un charbon compa&t. Le fecond produit, dont l'odeur étoit forte, & empyreumatique, étoit également très-acide. La matière. fublimée dans le col des vaifleaux, étoit un régule d'arfenic très-pur & en très-grande quantité. Il reftoic dans la cornue un charbon, qui n’étoit pas compaét comme celui de la crême de tartre pure, mais léger, fpongieux & très-volumineux, reflemblanc beaucoup au charbon qui refte après la diftillation, du, fucre. J'ai leflivé ce charbon avec une petite quantité d'eau diftillée froide ; la leflive filtrée & évaporée, m'a donné de l’alkali fixe déliquefcent. J'ai faic bouillir dans une beaucoup plus grande quantité d'eau dif tillée, le charbon qui avoit été leflivé à froid. La décottion filtrée & évaporéc m'a donné de véritable fel tartareux arfenical. 662 MÉMOIRE Cette décompoñtion, prefente plufieurs phénomènes qui méritent d'être confidérés avec attention. Premièrement , elle prouve qu'il y avoit véritablement union, entre la crême, de tartre & l’arfenic. Secondement, que cette union, n'eft pas fi intime, que le feu ne puifle la détruire. Troifième- ment, que l'arfenic paroïit donner un certain degré de volatilité à la crème de tartre, puifqu'une partie de ce fel pañle, avec les premières portions d'humidité. Quatrième- ment, que l'huile de la crème de tartre, qui ne seft pas volatilifée , a été, pour ainfi dire, décompofte, par la chaux d’arfenic, le principe inflammable de cette huile, en s'uniflanr à la chaux métallique la réduit en régule, & les autres principes ont fervi à former le charbon, qui fe trouve au fond de la cornue après l'opération. A l'égard de lalkali fixe qu'on retire en leflivant le charbon à froid, il paroit étre le même que celui qui refte après la diftilla- tion de la crème de tartre pure, & le fel cartareux arfenical, que jai retire par la décoétion de ce charbon, n'eft qu'une petite portion non décompofée du fel que javois mis en Expérience, J'ai effayc de décompofer le fel tartareux arfenical, par tous les moyens employés pour décompofer les fels carta- reux à bafe métallique, c’eft-à dire, à laide des acides plus forts que la crème de cartre, & à l'aide des alkalis qui ont plus d'affinité avec l'acide cartareux , que n'en ont les matières métalliques. J'ai pris quatre onces de diflolution tartareufe arfenicale; rapprochée au point de la cryftallifation ; jy ai verfé deux onces d'huile de vitriol bien concentrée, il seft produit une chaleur des plus confidérable, le mélange eft devenu trou- ble; &, en rétroidiflant, il a dépofé, une matière cryftalline blanche, qui, mife fur les charbons, a répandu des vapeurs arfenicales en très-orande quantité ; cette matière a été SUR 21 20 RYSEMNI 1 C. 663 aflez. long-tems à fe volatililer , parce qu'elle Ctoit furchargée d'une portion d'acide Yiphuliese qui lui avoit communiqué de la fixité ; mais, l'ayant leflivce ‘exattement , je l'ai vola- tilifée très- promptement à l'air hbre & dans les vaifleaux clos, & je puis aflurer que cécoic de larfenic très-pur. J'ai mis en diflillation , dans üne cornue de verre, Ja liqueur que favois décantée de deflus ce dépot arfenical, jen ai retiré environ Ja moitié, ce métoit qu'un phlegme dont lacidité n’étoit prefque pas fenfble, il rousifoit ce- pendant le firop de violettes ,. mais il ne faifoic pas effer- vefcence avec les ‘alkalis ; j'ai verfé dans une caplüle ce qui reftoit dans là cornue, & par le refroïdiflement, Jai obtenu une petite quantité de matière blanche, que jai dépouillée par le lavage de l'acide qui pouvoient y étre adhérent. Cette matière s'eft trouvée tre de l’arfenic très- pur. J'ai foumis de nouveau, à la difillation, la Dr acide qui avoit Jaiflé dépofer cette feconde quantité d'ar fénic, jen ai retiré à-peu-près la moitié; ce n’étoit encore qu'un phlegme afléz peu acide, quelques grains de fel de taitre ont fufi pour le Piel Ce qui reftoit ‘dans la cornue avoit une couleur noire, & un aflez grand degrc de fixité ; néanmoins, à l’aide d’un feu capable de ‘rouvir le fond dé la cornue, je fuis parvenu à faire pañer Hotte ce qu'il y avoit de fluide; ce produit étoir un acide vicrio- lique fulphureux, qui ne seft pas trouve dans un grand degré de concentration, puifqu’ il n’a abforbé que fon poids de {el de tartre pour étre parfaitement faturé. Jai fait évaporer le mélange de cet acide & d'alkali fixe, & jen aivrétité du 'rattre Witrilé pa“faicemenc pur. Ce qui reftoit dans là cornue, après la diftillätion, étoitune matière folide, ayant la tranfparence du verre, & Feffémblant allez parfaite ment à unc gomme bien FE M. Maroraff, dans les Mémoires de l’Académie de Ber En, en rendant compte des Expériences qu'il a faites pour retirer, à l'aide des aci- dés minéraux, re Rue conténu dans la crème de tartre, 664 MÉMOIRE dir que ce fel mêlé à l'acide vitriolique, forme une mafle mucilagineufe dont on a beaucoup de peine à retirer un fel bien figuré. Ce réfidu fec & ayant l'apparence d’une gomme, fe détache facilement de la cornue; il eft très-fra- gile, fa faveur cft fortement acide, expofé à l'air, il en attire très-promptement l'humidité & fe réfout en liqueur; mis_fur les charbons ardents, il devient liquide & fe diflipe en vapeurs, qui n'ont aucun caraétère arfenical. Les phénomènes, qui fe préfentent dans cette Expérience fonc très-finguliers. Premièrement , l'acide :vitriolique , qui, fuivant la loi générale des affinités, devroit en qualité d'acide plus. puiffant s'unir à larfenic & en. féparer la crème de tartre, {e joint au contraire à cette dernière fubftance, & donne ainfi lieu au dégagement de l'arfenic; ce qui prouve d'une manière bien évidente le peu de difpofition que l'a- cide vitriolique: & l’arfenic ont à s'unir enfemble. Propofi- tion que jai établie & prouvée dans mon premier Mémoire, Secondement, il paroît que la crême de tartre produit de grandes altérations fur l'acide. vitriolique, & qu'elle eft elle- même entièrement décompofée, puifque de deux onces d'huile de vitriol & à-peu-près pareille quantité de crême de tartre, qui devoit fe trouver dans le fel rartareux: arfe- - nical, je n'ai retiré qu'une once de liqueut d’un acidité aflez médiocre, & telle qu'un égal poids de feï:alkali fixe fufifoic pour une exafte faturation, À l'égard de la matière folide reftée dans la cornne, elle ne peloit qu'environ un demi-gros. La petite quantité que. j'en ai obtenu m'a em- péché de la foumetre à des examens plus détaillés. Le ca- raétère fulphureux .du produde la diftillation, paroît dé- pendre du phlogiftique de la crême de tartre qui seft uni à l'acide vitriolique; néanmoins le fel que jai obtenu, par la faturation de cette liqueur acide avec le fel de tartre, ne ma pas paru différer du tartre vitriole. M. Por avoit dit que, dun mélange d'huile de vitriol & de crême de gartre, on retiroit, par la diftillation, d'abord un acide du tartre SUR AIS AURESSEMN IC. 665 tattre très-aŒif, & enfuire de l'acide fulphureux. M. Véxe/ Là / . 27. L. LA a afluré que ce prétendu acide ‘du tartre, n'étoit qu'un vé- ritable acide nitreux ; je n’ai rien pu voir de femblable. L’acide nitreux ayant beaucoup plus d'analogie avec l’arfenic que Facide vitriolique , je penfai qu'il pourroic bien décompofer le fel tartareux arfenical. Je pris en con- féquence quatre onces d’efprit de nitre, que je mêélai avec une pareille quantité de diflolution cartareufe arfenicale rapprochée au point de la cryftallifacion, le mélange fe fit fans chaleur, &, au bout de douze heures, je trouvai la furface du vaifleau qui le contenoit, couverte de petits cryftaux, que je lavai avec un peu d’eau froide. Ces cry£ taux, après le lavage, avoient confervé une faveur ‘piquante mélée à la faveur d’arfenic, jen expofai fur les charbons ardens, ils fe difiperent en répandant des vapeurs blanches arfenicales , telles qu'a coutume d'en répandre le nitre d'arfenic, il ne seft point manifefté d’odeur de crême de tartre, & je nai point vu de réfidu charbonneux. La liqueur que jai décantée de déflus ce ‘nitre arfenical étroit fort roufle , je l'ai mife en diftillation dans une cornue de verre au bain de fable, jai retiré environ la moitié du produit; ce n'étoit qu'un phlegme lévèrement acide, puif- que quatre onces ont été faturées par deux gros de fel de tartre. Cette liqueur évaporée a fourni des cryftaux de nitre crès-pur. Ce qui reftoit dans 4 cornue étoit parfai- tement blanc, il s'en élevoit beaucoup de vapeurs! blanches ayant l'odeur de l'acide marin, & rien ne sen eft préci- pité par le refroidiflement. J'ai continué de diftiller jufqu'à ficcité. Sur la fin de lopération! il a paflé des vapéurs rou- ges mais qui fe condenfoient aïfément. J'ai troûvé dans le bal: lon, apres la diftillation, environ trois onces d’un acide ver- dâtre lépèrement fumanr. Cet acide faturé par du fel de tartre, ma donne des cryftaux de nitre très-purs. La matière refiée dans la cornue étoit blanche & compacte. Je l'ai la- vée avec une petite quantité d'eau diftilléé froide; elle à Tome IX. Pppp 666 MÉMOIRE conferve la faveur piquante & arfenicale du nitre d'arfenic. Je l'ai difloute dans quatre parties d’eau froide, & jen ai obtenu des cryftaux de nitre d'arfenic crès-purs. Cette ma- tière lavée & mile fur les charbons, seft difipée en répan- dant les vapeurs blanches arfenicales que répand le nitre d’atfenic en brûlant, & elle a été comme ce fel aflez long-temps, avant d'être entièrement diflipée. L'acide nitreux, que j'ai employé dans cette Expérience, ayant beaucoup d'affinité avec l'arfenic, sempare de cette fubftance, & la fépare d'avec la crême de tartre, une por- tion de nitre d’arfenic cryftallife d’abord, l'autre portion sefte en diffolution dans l'acide conjointement avec la crême de tartre, laquelle difparoït dans le progrès de la diftilla- tion, au point qu'on n'en retrouve aucun veftiwc ni dans le produit, ni dans le réfidu, qui neft qu'un vrai nitre arfenical, L'efprit de fel eft en état de décompofer le fel tartareux arfenical, comme le fait l’efprit de nitre, & il caufe aufli quelqu'altération à la crême de tartre. J'ai mélé quatre onces de diflolution tartareufe arfenicale rapprochée au point de la cryftallifation, avec quatre onces d’efprit de fel. Le mélange ne seit point échauffé, mais il eft devenu trouble, &, au bout de douze heures, j'ai trouvé l'intérieur du vaifleau, qui le contenoit, enduit d’une croûte faline, jau- natre & épaifle, que j'ai reconnu fans peine pour du fel marin arfenical; l'examen que j'en ai fait, ne m'a laiflé aucun doute fut cer objec. J'ai décanté la liqueur qui furnageoit ce fel, je lai mile en diftillation dans une cornue de vetre, & Jen ai reriré la moitié. Ce n’étoit qu'une liqueur blanche qui nétoit pas fortement acide, puifque deux gros d'alkali fixe du tartre ont fuffi pour la faturer complétement, jen ai obtenu du fel fbrifuge de Sy/vius. La liqueur qui ref- toit dans la cornue étroit d'un jaune foncé & légèrement fumante ; elle, n’a rien dépofé par le refroifflement, J'ai S'U RA EL ACRIS E NI C. 667 continué de diftiller jufqu'à ficcité.. Le produit de la diftil- lation étoit parfaitement blanc, & n’a abforbé que trois gros de fel de tartre. J'ai fait évaporer ce produit faturé, &:Jen ai obtenu du fel febrifuge de Sÿlvius. L'intérieur de la cornue, qui avoit fervi à cette opération, fe trouvoit enduit: d'une légère couche charbonneufe qui paroït dûe à une por- tion de crême de tartre. Mais cet enduit étant extrême- ment petit en comparaifon de la crême. de tartre, qui étoic entrée dans le mélange, on ne peut s'empêcher de croire que, dans cette opération, la crême de tartre a été détruite comme dans les autres, & seft aflimilée à. l'acide minéral qui a opéré fa décompofition, La propriété qu'ont les acides minéraux de décompofer 2 A A } L4 A ainfi la crème de tartre, fans en paroïtre altérés, me paroît bien mériter des recherches particulières auxquelles je compte me livrer inceflamment. Les fels alkalis déconipofent facilement le fel, tartareux atfenical, mais il n’eft pas indifférei.: de combiner, ces deux fels d’une manière ou d'une autre, J'ai verfé quatre onces d'huile de tartre par défaillance fur pareille quantité de dif- folution cartareufe arfenicale rapprochée au point de:la.cryf- tallifation, il ne s'eft fair ni effervefcence, ni. précipité. J'ai évaporé la liqueur, & n'en ai.obtenu qu'une mafle très- fenfiblement alkaline; on y diftinguoit cependant. la faveur de l'arfenic, & cette dernière fubftance Ê manifeftoit lorf. qu'on mettoit un peu de la maflé fur les charbons ardens. J'eflayai d'expofer à l'air une partie de la mafle d'alkali & de tartte arfenical , penfant qu'à l'aide de l'humidité que reprend l'alkali, je pourrois le féparer du fel arfenical; mais Jai fait d'inutiles tentatives; toute la mafle paroïc avoir le, . même degré de diflolubilité, &. elle s'eft réfoute entière- ment en liqueur dans un efpace de temps fort court. Jai LA » , . » , " eflayé de faturer: l'excès d’alkali par de l'acide nitreux, ob- fervant de ne pas mettre plus d'acide qu'il n'en falloit pour Pppp ÿ 668 MÉMOIRE faturer l'alkali furabondant; jefpérois qu'après avoir retiré le nitre que Je venois de former, je pourrois obtenir le fel atfenical pour l’examiner à mon aïfe; mais ce dernier moyen n'a pas mieux réufli que le premier. J'ai obrenu des cryf taux de nitre parfaitement bien figurés; ces cryftaux éroient feulement dun blanc plus mat que ceux de nitre pur, même ceux que j'avois retirés par la première cryftallifation; jen ai mis fur les charbons ardens, ils ont détonné avec beaucoup de rapidité en répandant une très-forre odeur d’arfenic. N'ayant pas pu réuflir à décompofer le fel tarta- reux arfenical à l'aide de l’alkali fixe, lorfque jai uni ces deux fels en liqueur, je pris quatre onces de {el tartareux arfenical & deux onces d’alkali du tartre bien fec, je les triturai enfemble dans un mortier de marbre, & je verfai eu-à-peu fur le mélange huit onces d’eau bouillante dif- tillée. À chaque fois que j'ajoutois de nouvelle eau, il fe failoit une vive effervefcence. Lorfque jai ceflé d’appercevoir ce mouvement, jai filtré la liqueur qui a pañlé claire, il eft refté fur le filtre un réfidu qui étoit compofc d'une très-grande quantitc d’arfenic pur, & d'un peu de fel tar- tarcux arfenical que l'éau n’avoit point diflous. Je m'en fuis afluré en expofanc ce réfidu fur les charbons ardens; il seft diflipé prefque entièrement en vapeurs blanches, & il n'eft refté qu'une fort petite quantité de matière char- bonneufe appartenante à la crème de tartre. La liqueur fil- trée n'a rien dépofé; je l'ai fait évaporer jufqu'à pellicule, & par le refroidiflement jai obtenu des cryftaux de fel ve- gétal, qui, quoique petits, étoient néanmoins très-réguliers. L’eau-mère qui les furnageoit, évaporée à pellicule, a éga- lement donné du fel végétal. Ce fel, mis fur les charbons, n'a doriné aucune odeur arfenicalc; ce qui prouve que l'al- kali fixe, en s'uniflant à la crème de cartre, en avoit bien exaétement féparé tout l’arfenic. Jai décompofe le fel tartareux arfenical auf aïfément par l'alkali volatil que par l'alkali fixe, en mélant & tritu- ns. S'UZRE LE'AUR S'EENAIICE. 669 rant enfemble deux onces de fel tartrareux arfenical, & une once de fel alkali volatil tiré du fel ammoniac par lalkali fixe. J'ai étendu le mélange dans huit onces d’eau diftillée bouillante , l'effervefcence seft produite & la plus grande partie de la mafle seft difloute. J'ai filtré pour féparer la liqueur claire de la portion de fel non difloute; cette por- tion reftée fur le filtre, contenoit beaucoup d’arfenic pur & une portion de fel tartareux arfenical. La liqueur claire éva- porée n'a fourni que du fel ammoniacal vartareux, qui, étant mis fur les charbons, ne répand point d'odeur arfc- nicale fenfible, J'ai cffayé de décompofer le fel arfenical par la voie des doubles affinités. Je n'ai pas employé le tartre vicriolé, bien convaincu par les Expériences rapportées dans mon premier Mémoire; & par celles que j'ai annoncées, dans celui-ci, que fon acide, n'ayant aucune difpoficion à sunir à larfenic, même à l'aide des affinités doubles, ce {el ne pourroit fouf- frir aucune altération. Mais, comme il n'en eff pas de même de l'acide nitreux, je crus pouvoir réuflir en mélant en égale proportion une diflolution de fel rartareux arfe- nical & une diflolution de nitre, toutes deux’au point de la cryftallifation. Il ne s'eft pas fair de précipité : dans ce mélange, & j'en ai obtenu des cryftaux qui, par leur forme & leur tranfparence , ne différoient en rien des cryftaux de nitre pur. Je les ai expofes fur les charbons ardens, ils ont vivement détonné & ont répandu beaucoup de vapeurs arfenicales, la liqueur décantée de deflus ces cryftaux,, en a fourni de nouveaux aufli réguliers que les premiers, mais d'un blanc plus mat; ils déconnoient également avec beaucoup de rapidité, en répandant des vapeurs arfenicales. Enfin la dernière eau-mère à encore fourni un fel en ai- guilles qui détonnoit fur les charbons, en répandant l'odeur de larfenic. Cette Expérience, & une autre que jai rap- portée plus haut, ‘en parlant des ventatives que Jai faites pour décompofer le:fel cartareux arfenical par l'alkali fixe 670 MÉMOIRE me font croire que le fel tartareux arfenical fe combine aflez bien avec le nitre, & qu'il n'eft pas poñlible de féparer ces deux fels, au moins en n'employant que la voie des diflolutions & cryftallifations. Au refte, il n’eft pas néceffaire de recourir aux doubles affinités pour décompofer le fel tartareux arfenical, puifque tous les acides minéraux & les fels alkalis foi fixes, foit volatils le décompofent, J'obferverai feulement qu'il y a entre le nitre &. l'arfenic un rapport fingulier, & que de tous les fels neutres, à bafe d’alkali, que j'ai préfenté à l’arfenic, il n’y a que Les fels nitreux dont la bafe puifle faire le fel neutre arfenical; ce qui fem- bleroit indiquer que l'acide nitreux agit fur lalkali fixe qui Jui fert de bafe, ou fur l'arfenic d'une manière toute parti- culière, & qui n'a point encore été déterminée. Combinaifon de l Acide du Vinaigre à lArfenic. M. BRANDT dit, dans les. Actes de l’Académie d'Upfal, que foixante-dix ou {oixante-quinze parties de vinaigre dif tillé diflolvent une partie d’arfenic. On feroit en droit de croire, d’après cet énonce, que l'acide du vinaigre eft en état de fe combiner à l'arfenic; ce qui cependant n’eft pas exact comme le démontrent les Expériences fuivantes. J'ai pris deux livres de bon vinaigre diftillé, que jai verfe dans une cornue de verre dans laquelle javois mis deux onces d'arfenic en poudre; j'ai ajouté un récipient au. bec de la cornue, & j'ai fait bouillir fur un bain de fable. J'ai retiré environ un quart du vinaigre que J'avois employé, & Jai filtré la liqueur de la cornue pour la féparer de la portion d'arfenic qui n’étoit pas difloute. Cette liqueur filrrée a laiflé dépofer par le refroidiflement une croûte faline mince , dans laquelle on découvre quelques petits cryftaux; ce dé- ôt qui eft d’un gris tirant fur le jaune, m'a. paru parfaite- ment femblable à la cryftallifation qu’on obtient lorfqu'on a faic difloudre l'arfenic dans l’eau bouillante. J'ai mélé la SUR L'ARSENIC 671 liqueur que jai retirée de deflus ce fel, avec la portion de vinaigre que j'avois raflemblée dans le récipient pendant la diflolution de l'arfenic; j'ai fait bouillir ce mélange fur ce qui reftoit d’arfenic à difloudre, J'y ai même ajouté une demi- once d'arfenic nouveau; le tout a été complétement diflous; le fel que j'ai obtenu par cette feconde opération étoit par- faicement femblable à celui que Javois eu d'abord. J'ai goûté ce prétendu fel acéteux arfenical ; il avoit une faveur de vinaigre aflez fenfible, mais cette faveur à difparu par le lavage; je conje&urai, dès-lors, que le fel que j'avois obtenu, Pouvoit bien n'être que de l’arfenic pur ; J'en fus convaincu par les épreuves auxquelles je le foumis. Jen ai expole fur les charbons, apres l'avoir bien lavé; il s'eft diffipé très-promp- tément en vapeurs blanches, purement arfenicales. Jai mis deux onces de ce fel non lavé, en diftillation dans une cor- nue de verre luttée; je n'ai retiré d’abord qu'un peu de phlegme ayant une légère odeur de vinaigre & prefque point de faveur; cette liqueur roupifloit lépèremenc le Sirop de Violettres, & elle na point fait effervefcence, avec le fl de tartre. Après avoir obtenu à-peu-près un gros de ce phlegme , le col de la cornue s'eft rempli d’une poudre blanche très-fine, quelques petits cryftaux fe fonc füblimés à fa partie füpérieure, & rien n'eft tefté dans le fond. La poudre & les petits cryftaux examinés avec foin, ne m'ont paru être que de l’arfenic pur. Je penfe que le peu de phlesine acidule que jai retiré, venoit d’une portion de vinaigre reftée à la furface des cryftaux. J'ai pris une demi-once du prétendu fel acéteux arfenical, Jai fait bouillir deflus une once d'huile de virriol ; le cour s'eft diflous; mais, en refroidiflant, la matière s'eft dépofée fous la forme de gros cryftaux, ainfi qu'il arrrive à larfenic pur diffous dans l'huile de vitriol 5 cés cryftaux lavés fe font trouvés effectivement n'être que de l’arfenic. Les acides nitreux & matin ont diflous le prétendu {el 672 MÉMOIRE SUR L'ARSENIC. actteux arfenical. Le premier de ces acides a formé avec lui du nitre d’arfenic, & le fecond un fel marin arfenical. On objectera, peut-être, que ces acides ont pu décompo- fer le fel acéteux arfenical, & qu'après avoir chaflé l'acide du vinaigre, ils fe font emparés de fa bafe. Cette objeétion, qui pourroit avoir lieu dans le cas où j'ai employc les acides nitreux & marin, ne peut être juftement appliquée lorfque je me fuis fervi d'huile de vitriol, puifque ce dernier acide n’a aucune affinité avec l’arfenic, & qu'il ne décompole pas les fels arfenicaux. L'alkali fixe, que j'ai fait bouillir fur le prétendu fel acé- teux arfenical, le diflout; mais il forme avec lui un foie d'arfenic que les acides précipitent facilement; ce qui con- tribuc encore à prouver que ce prétendu fel n'eft autre chofe que de l'arfenic. J'ai fait bouillir du fel tartareux arfenical dans de bon vinaigre diftillé, pour voir fi cet acide plus puiflant que la crème de tartre, pourroit la dégager & s'emparer de Par- fenic, lorfque cette fubftance auroit été déjà entamée par un acide végétal; mais l'union ne s’en eft pas mieux faite, le fel s'eft parfaitement diflous; mais, par le refroidiflement, il seft cryftallifé, & fes cryftaux ont répandu en brûlant l'odeur de l'arfenic fuivie de l'odeur de la crème de cartre brûlée. Ils ont laiflé un charbon confidérable. Ces Expériences fuffifent, je crois, pour démontrer que le vinaigre ne fe combine pas à l'arfenic, & s'il diflout certe fubftance, c’eft en raifon de l'humidité qu'il contient, & c'eft de la même manière qu'il diflout le fel vartareux arfenical. Je penfe d’après cela qu'on peut établir les affinités des aci- des avec l’arfenic, dans l’ordre fuivant : l'acide nitreux; l'a- cide marin; la crême de tartre. A l'égard de l'acide vitrioli- que & de vinaigre, je penfe d'après ce que jen ai vu juf- qu'à préfent, quils ne sy combinent en aucune manicre. ANALYSE 673 ANAEFSE D'ES EAUX HWDE LAUFONTAINE DE MONTMORENCI. Par M. le VEILLARD. M. Mac QUE Ra déjà fait un léger Examen de ces Eaux *; mais {es occupations importantes & mulripliées l'ayant empêché de lui donner l'étendue dont il le croyoit fufcepti- ble , il m'a lui-même engagé à l’entreprendre, & c’eft le réful- tat de ce travail dont je vais avoir l'honneur de vous rendre compte. La digue de l'étang de S. Gratien, près de Montmorenci, eft fort longue & percée de deux arches édifices fur des mañlifs de pierre-de-taille, qui fe terminent en glacis du côte oppofe à lérang ; l'objet de ces arches eft de permettre l'écoulement du trop plein. Plufieurs fources fulphureufes fe trouvent le long de H*di- gue; mais au bas des arches, à l'extrémité du mafñlif de pierre de taille fur lequel elles font fondées, de deflous fon glacis , & entre les pilotis fur lefquels il eft établi, fourcille la plus confidérable, celle dont je me propofe de donner ici l’ana- lyle; fon odênr de foie de foufre fe fait fentir de très-loïin ; la furface de l'Eau & les différentes matières {ur lefquelles elle coule font blanchies par le dépôt fulphureux qu'elle donne, dont une partie furnage & l'autre fe précipite ; en plufieurs endroits, ce dépôt prend diverfes couleurs , on voit des pietres Re ———_—_—_—_._—_ * Le P. Cotte de l'Oratoire, Correfpondant de l’Académie, eft celui qui Jes à fait connoitre le premier. Tome IX, Qgqq EN Préfentée le 7 Août 1771. 67 ANALYSE DES EAUX & des feuilles colorces du plus beau violet, de jaune & de verd ; mais ces couleurs ne font que la fuperficie du dépôt, le deflous eft d’un noir très-foncé. Cette fource eft abondante, elle coule dans un lit large d’en- viron deux pieds, & va fe jeter aflez près de fon origife dans le ruifleau qui fort de l'étang au-deflous d'un moulin; je nai trouvé d'autre plante dans tout fon cours que des joncs, & je n'y ai vu d'animal vivant que le ver à queue de fouris; cependant des grenouilles que j'y ai plongées & te- ne affez long-temps , n’ont donné aucun figne de fouf- _ france. À l'endroit où l'Eau fourcille , on apperçoit au côté des pilotis qu’elle baigne , une matière faline grimpante & comme eMorefcente, dont le goût eft fenfiblement acide & vitriolique. D'après cet expofe, trois chofes paroiflent importantes à examiner , l'Eau, le Sel grimpant & le Dépot. Analyfe de l'Eau. Le Baromètre étant à 28 pouces, une ligne , je plongeaï deux Thermomètres de Réaumur, l’un dans la Fontaine, l'autre dans l'Eau de l'étang , tous deux à 9 ? degrés au-deflus de ZCrO à l'air libre, celui de l'étang defcendit à 9 , & celui de la fontaine monta à 10 - degrés au-deflus du zéro* Le Baromètre étant à 28 pouces demi-ligne , le Thermo- mètre a 8 À degrés au-deflus de zéro, les Eaux à la même tem- pérature , le grand Aréomètre de M. de Parcieux eft defcendu dans l'Eau diftillée de fix pouces 9 : lignes, dans l'Eau de Seine claire de fix pouces & dans l'Eau de Montmorenci de quatre pouces deux lignes & demie, & une bouteille contenant, pleine, une livre, 14 onces, 7 gros, 18 grains d'Eau difillée, & une livre 14 onces, 7 gros, 33 grains d'Eau de Seine claire, DE MONTMORENCI. 675 contenoit de celle de Montmorenci une livre, 14 oncés, fept gros, 49 grains. Je remplis de cette Eau une bouteille contenant environ 14 pintes, jen vidai le goulot auquel jattachai une veflie vide & mouillée ; l'Eau agitée y produifit un gonflement très- fenfible. Quelques gouttes d’efprit de nitre verfées dans l'Eau, ontfen- fiblement augmenté fon odeur de foie de foufre; la teinture de noix de galle & le foie de foufre n'ont produit aucun effet; l'efprit-de-vin a diminué l'odeur de foie de foufre. La liqueur colorante du bleu de Prufle a d'abord jauni l'Eau, mais cette couleur s'eft diffipée. La teinture de tournefol a légèrement rougi. - L’alkali fixe a produit fur-le-champ une couleur brune, & la liqueur s’eft troublée. L’alkali volatil par l'alkali fixe, a faitun précipité blanc très- léger; mais celui par la chaux n'a produit aucun effet. La diffolution d'argent, celle de Mercure, le vinaigre de Saturne , une folution de vitriol vert, les nouvelles Eaux de Pafly , ont été fur-le-champ précipités en noir crès-foncé. Il eft bon de remarquer que la folution de vitriol martial, fi on en verfe une très-grande quantité, noircit bien d'abord, mais qu’elle jaunit enfuite, vraïfemblablement parcs que lacide furabondant du vitriol eft alors en aflez grande quantité pour difloudre la partie martiale colorée d’abord par la vapeur de foie de foufre ; & ce fentiment eft d'autant plus probable, que la liqueur redevient noire fi on la furcharge d’une dofe con- fidérable d'Eau de la fontaine. Tous ces différens mélanges ayant été faits à la fontaine, je voulus voir combien de tems l'Eau pouvoit conferver fa va- peur de foie de foufre; pour cer effet , j'en mis dans difiérentes Qaqga ii 658 AIN ALYSEN D ES) EMAWUX bouteilles bien bouchées, excepté une que je laiflai exprès fans bouchon : je les expofai à l'air libre & au Soleil, & j'en laïflai à la cave quinze bouchées de même, excepté une, dans le deffein d’effayer chaque jour l'Eau des bouteilles débouchces , & celle d'une des autres, jufqu'à ce que, tant à l’odorat qu'avec les diffe- rentes folutions métalliques, elle ne donnâc aucun indice de foie de foufre. Les obfervations fuivantes fur le Thermomètre &le Baromètre; ont été faites à deux heures après midi. La bouteille débouchée & laiffée à l'air libre , fe croubla dès le lendemain, & ne redevint limpide que le quatrième jour, après avoir laiflé tomber un dépôt légèrernent coloré en brun , que divers eflais me firent reconnoître pour une terre cal- caire entièrement foluble avec effervefcence dans les acides, trois pintes d'Eau m'ont donné par la fuite près d’un grain de dépôt femblable; en trois jours la même bouteille avoit perdu ar degré fon odeur & la faculté de teindre les folutions mé- talliques , celle d'argent fut la feule qu’elle colora légèrement en brun, & cette teinture même ne fe fit appercevoir que le lendemain de l'infufon ; le Baromètre varia, pendant ces quatre jours, de 27 pouces, fept À lignes à 128 pouces, & le Thermomètre de 20 À degrés à 17 au-deflus de zéro. Les bouteilles bouchées & laiflées à l'air, refterent limpides & confervèrent , tant à l'odorat, qu'avec les folutions métal- liques , les propriétés du foie de foufre jufqu'au huitième jour qu'elles fe croublèrent; elles déposèrent & Séclairci- rent le treizième , & ne teignirent plus dès le douzième; la hauteur du Baromètre ayant été pendant cet intervalle, en- tre 27 pouces 5 À lignes & 28 pouces r ligne, & celle du Ther- momètre entre 14 & 20 À degrés au-deflus de zéro. La bouteille débouchée & mife à la cave, fe troubla dès le premier jour & depofa le cinquième ; dès le, quatrième, elle navoit plus d'odeur & ne teignoit plus les folutions mé- DE MONTMORENCL 677 talliques ; le Thermomètre refta conftamment dans cette cave pendant cette obfervation & la fuivante à 11 degrés au-deflus de zero. Dés bouteilles bouchées & dépofces dans le même lieu; reftèrent les mêmes pendant quinze jours, & comme il ne m'en reftoit plus , il auroit fallu recommencer cette opéra- tion, fi le hafard ne m'avoic pas fourni le moyen de la poufler beaucoup plus loin que je n'en avois eu l'intention. Je rerrou- vai dans une cave adjacente, où le Thermomètre refte ordi- nairement l'été à 11 + degrés, une quantité aflez confidéra- ble de bouteilles de quatre peintes, puifées, fuivant leur éti- quette, neufmoisauparavant, & que j'avois oublices; j'en eflayai une, elle fentoit très-fenfiblement le foie de foufre, & teignic fortement les folutions mctalliques. Enfin jeflayai de rendre la vapeur de foie de foufre à celle qui en avoit été dépouillce ; je la fis bouillir long-tems avec fon dépôt, mais fans fuccès. por, L’Eau privée de fes qualités fulphureufes, donna avec l'huile de tartre par défaillance, un précipité blanc; avec l’alkali vola- til par la chaux , un précipité blanc très-léger; avec celui par lalkali fixe , un plus abondant , mais moins que celui par Fhuile de tartre par défaillance ; avec l'Eau mercurielle, un précipité jaune; avec la folution du vitriol de Mars, un préci- pité jaunâtre; avec le vinaigre de Saturne, un précipité blanc très-abondant; & enfin avec la diflolution d'argent, une cou- leur d'opale qui fe maintint très-long-tems, & laifla comber à la fin un dépôt ardoife. Je crus qu'il étoit auffi très-important d'examiner à quel point cette vapeur de foie de foufre étoit volatile, & fi l'Eau pour- roit la conferver après qu'on lui auroit fair éprouver un degré de chaleur confidérable, foit à l'air libre, foit dans les vaifleaux ermés. Quatre livres d'Eau ; après avoir bouilli un demi-quart: 63 ANALYSE DES EAUX d'heure, conferverent leur odeur de foie de foufre, & teigni- rent plus fortement les diflolutions métalliques, que l'Eau {or- tant de fontaine. Douze onces d'Eau retirées pat la diftillation de qfatre livres d'Eau , fentoient le foie de foufre, & teignoient foi- blement les difflolutions métalliques ; mais l'Eau reftée dans la cucurbite de l'alembic, a confervé l'odeur de foie de foufre, en a contracté une tres-forte d’empireume, & a teint en noir les folutions métalliques plus fortement que l'Eau fortant de la fontaine ; la diftillacion pouflée jufqu'à ce qu'il ne reftit dans l’alembic que le demi-quart de la liqueur , l'Eau diftil- lée n'a plus rien produit; mais celle reftée dans la cucurbite, a donné les mêmes effets que la précédente. Ii fembleroir, par cette expérience , que ces Eaux contiennent du foufre en nature, au moyen duquel & à l’aide de la chaleur, il fe forme un nouveau foie de foufre: mais on va voir que l'analyfe n’en donne aucune indice , & d’ailleurs les acides n'y occafionnent aucun précipité. Quoi qu'il en foit, fi la Médecine jugeoit que les bains de cette Eau puflent étre falutaires ; on #ent combien feroit avantageufe cette propriété de conferver , & même d’avoir plus fortement, étant échauffée, la vapeur de foie de foufre. 4 Mais toutes ces différentes Expériences, quoique proprés à donner des notions utiles fur ces Eaux, ne pouvant pas dérer- miner exactement, & leur nature & la quantité de leurs princi- pes, je fis évaporer à un feu doux, au bain de fable, dans plu- lieurs caplules de verre , $o livres d'Eau puifée dans le mois d'Aoùt, filtrée au papier Jofeph, & dépouillée de fon dépôt fpontané pefant 1 $ grains: j'obfervai de faire évaporer mes cap- fules fans les remplir. Quand la liqueur fut diminuée à-peu-près d’un quart, il fe forma une légère pellicule à fa furface , & elle sy main- tint jufqu'à la fin , fans aucune autre circonftance remar- quable, DE MONTMORENCI 679 Ayant rafflemblé mes réfidus , je trouvai qu'ils pefoient 4 gros ço grains, ils étoient d’une couleur brune , ne donnoïent aucune flamme fur les charbons ardens, & attiroient l'humi- dité de l'air: je les mis digérer à froid, pendant 24 heures, dans quatre onces d'Eau difüllée ; je filcrai la liqueur & je verfai fur ce qui avoit pas pañlé’ de nouvelle Eau diftillée; il refta fur le filtre trois gros » dix grains, d’une matière qui, mife à bouillir dans une livre d'Eau diftillée que je filcrai, e rédui- fit à deux gros, 46 grains: je verfai de l'efprit de nitre fur le réfidu ; il fe fit une forte effervefcence ; je continuai de verfer de lefprit de nitre à différens icervalles de temps, jufqu'à ce qu'il ne fe fit plus d’effervefcence ; je filcrai, j'e- dulcorai , & il ne refta fur le filtre que 29 grains d'une matière faline , foyeufe , d’un blanc fale & prefque fans fa- veur. Je fis évaporer mes différentes folutions à part ; la pre- mière me donna des cryftaux diftin@s , mais embarraflés dans une matière glaireufe , jaunâtre & déliquefcente; je parvins à les nettoyer avec l’efprit-de-vin redifié ; leur forme prifmati- que alongée en colonne & ftriée dans leur longueur , les fit reconnoître pour du fel de Glauber. En effet , ils tombèrent en cfforefcence à l'air ; ils avoient un goût amer fuivi de frai- cheur ; fondus dans l'Eau diftillée , ils ne donnèrent , avec l'huile de tartre par défaillance, qu'un précipité très-léger. J'en conclus que c'étoit un fel de Glauber à bafe alkaline, & jen obtins 36 grains. La partie glaireule n'avoit point été difloute par l'efprit-de- vin ; J'en verfai de nouveau à plufieurs reprifes, & je filcrai; je fis évaporer ce qui étoit pañlé , rien ne cryftallifa; le réfidu pefant treize grains, avoit un goût falé très-piquant ; quelques gouttes d'huile de vitriol verfées fur une partie , excitèrent des vapeurs blanches trèsfubriles, femblables à celles de l’'e£ ptit de fel fumant : comme le refte altéroit fortement l’hu- midicé , je le laïflai tomber en déliquium, & avec quelques 630 AN? AN LT YESCEUCDP ENS C'EMAMNE gouttes d'huile de tartre par défaillance , il fe fit un beau coa- gulum blanc. Toute la partie glaireufe étoit reftée fur le filtre , mais elle m'étoit pas encore pure ; je la fis difloudre dans l'Eau diftil- léc, je filcrai de nouveau, &, par ce moven, je l’obtins toute feule ; je la defféchai, elle pefoit huit grains, elle étoit jau- nâtre, crès-{oluble dans l'Eau |, en un mot,, de vérirable gomme. Nous verrons par la fuite, ce qui peut la former. Il refta fur le filcre 39 grains d'une matière femblable à celle qui n'avoit point été difloute par l'acide nitreux , & j'eus en- core 36 grains d'une parcille fubftance , en faifant évaporer ce qui avoit paflé au travers du filtre après la feconde infu- fon du réfidu faite à l'Eau bouillante. J'examinai au Microf cope ces trois portions, & je vis diftinétement dans chacune un grand nombre de cryftaux prifmatiques, coupés en bifeau à leurs extrémités, comme ceux d'une efpèce de fclénite; j'en puis un tiers que je craitai avec de la poudre de charbon & du fel de tartre dans un creufet bien clos, pouflc pendant quelques minutes à un feu de fufion: triturée fur-le-champ, lavée & filtrée, elle me donna, au moyen d'un acide , un lait de foufre & uñ précipité fulphureux. Je mis une autfe partie dans un creufet avec du fel de tartre , je luvai, j'ex- pofai le tout à un feu de fufion, &je me procurai, par les manipulations ordinaires, du tartre vitriolé : enfin l'alkali fixe verlé fur une troifième partie , occafionna un précipité très- abondant , & la liqueur filtrée & évaporce, laifla de beaux cryftaux de tartre vitriolé ; ayant bien lavé le précipité , je lelfayai avec l'acide vitriolique , qui ft d’abord une violente effervelcence ; mais une petite partie très - blanche refta au fond du vafe, & l'effervelcence cefla tout -à-fait , quoique la liqueur fût encore fortement acide ; je la décantai , je la- vai la poudre blanche, je verfai deflus de nouvel acide vi- triolique , & je fis chauffer ce mélange ; l'acide parvint à difloudre la terre en entier , fans faire d’effervefcence , & quelques gouttes d’alkali fixe, me donnèrent un précipité en flocons, ’ DE MONTMOREN GK 681 , , . A flocons, comme celui de l'alun ; il paroît donc que cette . md . . LA LA = matière faline eft en grande partie féléniteufe & un peu alu- mineufe. Enfin l’efprit de nitre verfé fur le réfidu , après la feconde lotion, laïfla précipiter, parle moyen d’un alkali fixe, 2 gros 8 grains d’une terre calcaire. On obfervera, en raffemblant le poids de toutes ces ma- tières, que leur fomme eft moindre de 25 grains que celle du réfidu du total ; mais il eft impoflble qu'il ne s'en perde pas une certaine quantité dans ces différentes manipulations , fur- tout dans les filtres, & d’ailleurs l'efprit de nitre employé pour difloudre la terre du réfidu , quoique verfé avec précaution, 2 dû emporter, par la folution, une partie féléniteufe dont nous avons bien retrouvé la bafe par la précipitation, mais dont J’a- cide a été perdu. L'acide du vinaigre , dont je me fuis fervi dans l'opération fuivante , a le même inconvénient , & celui que j'ai verfé fur le réfidu dont je vais parler tout-àl'heure, ainfi que l'efprit de nitre dont il vient d’être queftion, & qui avoit été pré- cipité , m'ont donné du turbite minéral avec l'Eau mercu- riclle , & un précipité ardoifé avec la diflolution d’argent ; il faut donc fe fervir de l’un & de l’autre avec précaution, & cefler de verfer dès que leffervefcence n’a plus lieu ; mais quelques ménagemens qu'on emploie, ils diffolvent toujours un peu des fels fléniteux & alumineux. Il réfulte des produits énoncés ci-deflus, que deux livres ou à-peu-près une pinte d’eau, contiennent , fans compter la perte , environ 1 © grain de fel de Glauber, + grain de fel marin à bafe terreufe, quatre gros de félénite, une très-petite 9 partie d'alun , & 6 2 gr. de terre, y compris le dépôt fpon- Le] fané, Tandis que je faifois l'évaporation précédente dans les vaif- feaux ouverts, j'en fis une autre dans des alembics de verre, Tome IX, Rrre 632 A N A L'Y6 El D E S)'EVANUUX pourvus de leur chapiteau, de 50 livres d'Eau puifée le même jour que la précédente, filtrée & dépouillée de fon dépôt fpontané , en obfervant de ne point remplir les cucurbites ; jobtins un réfidu très-blanc de $ gros 64 grains, plus fort par conféquent d’un gros 14 grains que le précédent. On fera peut-être furpris de cette augmentation , il femble même d'abord que la différence d'un réfidu à l'autre devroit être à l'avantage de celui qui s'eft fait dans les vaiffleaux ouverts, à caufe des différentes matières que l'air contient; une grande partie, malgré les plus grands foins , tombe dans les cap- fules , & donne même aux réfidus une couleur brune. MM. les Commiflaires de la Faculté de Médecine pour l'examen des Eaux de lIvette , avoient déjà remarqué ce phénomène, & d’ailleurs quelques réflexions pourront peut-être en faire foup- çonner les caules. Premièrement , l'agitation continuelle de l'air libre, qui fait office d'époñge à la furface de la liqueur, eft bien capable de favorifer l'évaporation des parties demi - volatiles. Secondement, il eft certain que, dans la diffillation , les fubitances volatiles en entraînent avec elles d’autres , qui fe- roient fixes & réfifteroient à une chaleur très-violente ; nous le voyons dans la redtification des huiles , & la Chymie en fournit beaucoup d'autres exemples : mais ces matières font d'autant plus difpofées à s'élever, que leur pefanteur fpécifique eft moindre relativement au fluide qu’elles ont à traverfer ; ce fluide eft l'air , & certainement celui que renferme les vaifleaux fermés eft infiniment plus raréfié, que l'air libre dont les capfu- les font environnées ; les molécules perdant donc d'autant moins de leur poids, que le volume d'air qu’elles déplacenr'eft moins pefant, trouvent beaucoup plus de facilité à s'élever dans l'air libre , que dans celui qu’elles rencontrententre les cu- curbites & le chapiteau de l’alembic. J'ai répété , fur le fecond réfidu , les mêmes Expériences que pour le premier, excepte qu'au lieu d'efprit de nitre , je DE MONTMORENCE 683 me fuis fervi de vinaigre diftillé, & j'ai trouvé les mêmes ré- fultats , mais avec les différences fuivantes pour les quan- ir cités. Sel de Glauber, 10 grains; fel marin déliquefcent, 9 gr.; gomme, 10 gr.; félénite mélée d’une petite partie alumineufe, 2 gros, 64 gr.3 terre, 2 gros 3 gr.; perte 30 gr. ce qui fait, fans y comprendre la perte, pour 2 livres ou environ une pinte d’eau, gr. de fel de Glauber; = gr. de fel marin à bafe terreufe; : gr. de gomme, 8 “or. de fel féléniceux & alumineux; & 6 1 gr. de terre ,en comptant le dépôt fpontané. Il eft difficile d'expliquer pourquoi ; malgré la quantité plus grande du fecond réfidu , le fel de Glauber, le {el ma- tin à bafe terreufe & la verre s’y trouvent cependant en moin- dre quantité , & pourquoi la felénite y eft plus abondante. Peut-être que lévaporation à l'air libre alrère & alkalife une partie de la terre , & la rendant propre à former du {el de Glauber, décompofe, par fon moyen , une partie de la félénite, & la chaleur plus forte dans les vaifleaux fermés, peut enlever au fel marin déliquefcent une partie de fon acide; à la vérité , l'Eau diftillée n'en donne aucune indice ; mais il fcroit difficile d'en obtenir de quelques grains noyés dans $o livres d’eau. Il eft bon de remarquer ici, qu'en analyfant une fubftance quelconque , & fur-tout des Eaux minérales , il eft nécef faire d'y procéder fans interruption , fans quoi les principes s'alrèrent, fe décompofent, fe recompofent & donnent des pro- duirs tous différens de ceux qui exiftoient primordialément dans les corps analyfés. Quelque tems après les opérations dont j'ai parlé , ayant deflein de faire encore quelques Expériences, je fis évapo- rér fix livres d’eau dans une capfule de verre au bain de fable. Quand l’évaporation fut aux deux ciers, je fus très - étonné de voir une cryftallifation rameufe grimper le long des parois Rrrri 634 AIN À EX SE D'ESNEAMULX de la capfule, & fe propager jufqu'à fa furface convexe : je la recueillis avec grand foin, elle pefoit environ deux grains; fa forme étoit en barbe de plume, comme celle du fel am- moniac. Ces cryftaux avoient la même flexibilité que celle qu'on obferve dans ceux de ce fel, & qui fait qu’en les pal- pant, on croit prendre de la cire ; je verfai fur une partie quelques gouttes d’alkali fixe, & j'eus des vapeurs crès-fenfi- bles d'efprit volatil. Je ne doutai plus que ce ne für du fel ammoniac : comme je n'en avois point trouvé par l'analyfe ci-deflus décrite , je crus que j'avois mal-fait mes opérations, & je réfolus de recommencer. Comme je n’avois plus d’eau , que Jétois fur le point de faire un voyage de quatre mois, Je re- mis ce travail à mon retour, &, dans le mois de Juillet, j'allai moi-même à la fontaine en puïfer de nouvelle ; mais quel- que moyen que jemployafle , malgré toute l'afliduité, l'exac- titude & la patience pofible, je n’obtins pas un atome de fel ammoniac : cependant un réfidu confidérable diftille dans une cornue avec de l'alkali fixe , produifit environ + gros de li- queur , fentant fortement l’empireume : jy mélai quelques gouttes d’efprit de fel, qui ne firent point d'effervefcence; Je fis évaporer, & le réfidu fur lequel je verfai un peu d’alkalt fixe , donna des vapeurs très-marquées d’efprit volatil de fel ammoniac. À la fin, je me reflouvins que l'Eau qui m’avoit donné ce fel , avoit été puifée le z Novembre , dans un tems où la fon- taine étoit remplie de feuilles , de dépouilles d'infeétes, & autres fubftances , tant végétales qu’animales : je foupçonnai que ces matières macérées avoient bien pu donner lieu à la fot- mation du fel ammoniac, & qu'elles étoient aufli en grande par- tie caufe de la partie gommeufe dont jai parlé. I fallut donc attendre automne ; je fis évaporer $o'livres d'eau puiféele 23 Novembre, je pris cinq grains du réfidu fur Jefquels je Jaiflai tomber deux gouttes d’alkali fixe, qui pro- duifirent une odeur d’alkali volatil très-marquée; je mis le refte DE MONTMORENCI. 685 dans une cornue de verre bien lutée, je la plaçai dans un four- neau de réverbère, & j'eus, par la fublimation, 3 à 4 grains de fel ammoniac. Ce produit eft de beaucoup moindre que celui que jai cité; mais on conçoit que mille circonftances, la tem- pérature de l'air, labondance des fubftances étrangères dans la fontaine, &c. doivent produire des variations qu'il eft impoñi- ble de calculer : de toutes les fublimations que J'ai tentces , au- cune n'a produit de foufre. w Examen du Sel grimpant. Ce fel eft acide au goût, mais les morceaux pourris des pilotis de chêne le long defquels il grimpe & qu'il eft aife de détacher, ont une faveur beaucoup plus acide & fenfiblement vitriolique; quelques gouttes d’alkali fixe verfées fur ce fel recueilli en Novembre, ont donné une très-légère odeur comme d'em- pireume ; celui ramañlé.en été n’a rien donné ; l'un & l'autre ont rougi fur-le-champ la teinture de tournefol; un gros de fel pris en Novembre , expofé dans une corriue à un degré de chaleur convenable , n’a rien donné par la fublimation. Comme le feu pouvoit avoir caufé quelque altération, je pris un gros & demi de nouveau fel, je le mis infufer à froid, pendant 24 heures; dans une once & demie d’eau diftillée, je filtrai, r2 grains s'étant diflous, quatre onces d'Eau bouillante fe char- gerent encore de fept gr.; je verfai fur un gros, 17 grains, qui me reftoient, deux onces de vinaigre diftillé ; &, après avoir filtré & édulcoré, je trouvai qu'il avoit diffous 4 gros, 6 grains ; je reconnus les 1 1 grains reftans pour de la félénite , au moyen des épreuves dont jai déjà parlé; je précipitai, par un alkali fixe, la partie difloute par l'acide , & c’étoit de la terre cal- caire ; les fept grains dont l'Eau bouillante s'étoit chargée, étoient encore de la félénite ; enfin , en faifant cryftallifer ce que l'infufion à l'eau froide avoit diflous, j'obtins quatre gr. de {el de Glauber, trois or. de félénice, & 21 gr. d’un feltres- acide en confiftance de gelée , ayant la faveur de l'alun. Comme il m'étoit difficile de faire cryftallifer une fi petite 666 ANA LN-SYENMD ES EAN quantité, vu la perte qu'occafionnent néceflairement les folu- tions , filtrations & méme additions qu'on eft obligé de faire ; je mis infufer & macérer une aflez grande quantité de mor- ceaux pourris des pilotis, qui, comme je l'ai déjà remarqué, ont une faveur vitriolique crès-fenfible ; je filrrai , je n'obtins point de fel de Glauber , mais une quantité confidérable de {el acide d'une confiftance gélatineufe. J'employai différens mélanges , comme l'alkali fixe , la chaux, l'urine, &c. pour le faire cryftallifer ; le feul alkali volatil par la chaux me procura quelques cryftaux peu réguliers, d’un goût abfolument fembla- ble à celui de l'alun, maïs qui ne fe font point bourfouflés, comme lui, par la calcination. Je fs calciner mon fel & l’effayai, mais fans fuccès., feul & avec les mêmes mélnges ; cependant ce que javois traité fans mélange, me donna des cryftaux très-diftinéts de tartre vitriolé, vraïfemblablement parce que là calcination avoit alkalif une partie de la matière extractive des pilotis. Je pris donc le parti de décompofer mon fel par l'alkali fixe ; il occafionna un précipité d’un blanc fale ; je filcrai & lavaiï cette fubftance dans l’eau diftillée |, & je verfai deflus quelques gouttes d'huile de vitriol , il fe fit une effervefcence qui cella bientôt, & qui rendit le précipité du plus beau blanc; je le lavai de nouveau, je verfai de nouvelle huile de vitriol , il ne fe fi aucune effervefcence ; mais la diflolution fe ft païfble- ment à l'acide de la chaleur d’un bain de fable; j'obtins, par l'é- vaporation, de véritable alun , qui, fondu dans l’eau , donna, avec l’alkali fixe, un précipité en flocons. , L . r . . LA D'un autre côté la liqueur filerée , après avoir fubi levapora- tion, laifla des cryftaux de tartre victriolé. Ce fel eft donc alumineux , & la première effervefcence du précipité avec l'huile de vitriol , n’eft dûe qu'à la terre calcaire d’une partie félénireufe, que l'alkali fixe avoit dé- compofée, DE MONTMORENCI «87 Dépôt de a Fontaine. Le dépôt defléché à une très-forte odeur de foutre; il prend feu fur les charbons ardens , donne une flamme bleue tirant fur le violet , accompagnée de vapeurs d’efprit volatil fulphureux : pris en été, quelques gouttes d'alkali fxe verfées deflus , n’y excitent aucune vapeur ; mais recueilli en hiver , il donne, avec le même alkali fixe, une légère odeur d’efprit vo- Jatil de fel ammoniac. Un gros & demi du dépôt d'été, m'a donné, par la fubli- mation , fix gr. de foufre ; de la même quantité du dépôt d'hiver, 6 : gr. fe font fublimés. Ces produits eflayés avec lalkali fixe, le premier n’a rien donné, des vapeurs cres- fenfibles d’efprit volatil de fel ammoniac , fe font élevées du fecond. J'ai deffivé ce dernier avec de l'eau diftillée; après avoir filtré & évaporé , il n’eft reftc dans la capfule qu'une tache faline dont je n'ai pu évaluer le poids ; maiselle m'a donné avec l’alkali fixe, les mêmes vapeurs que le produit dont je lavois tirée. Le dépôt d'été & celui d'hiver, après avoir fubi la fubli- mation, m'ont donné, par différentes lotions , tant à l'eau froide qu'à l’eau bouillante : le premier 12 gr. de felénice, le fecond 10; enfuite ayant verfé fur chaque réfidu de lefprit de nitre, jufqu'à ce quil ne fe fit plus d’effervefcence , ayant fileré & édulcoré , je précipitai du premier 54, & du fecond 63 grains de terre abforbante : il refta fur le filcre du premier 29 gr. & 24 fur celui du fecond. Ayant répété, fur.cette der- nière fubftance & fur celles que m’avoient produit les lotions précédentes, les procédés que j'ai déjà cités, je les reconnus pour de la félénite. La proportion des produits du dépôt & du fel grimpant, peut difficilement s'eftimer , à caufe des corps hétérogènes qui s'y trouvent néceflairement mêlés, quelque foin qu'on emploie \ . . : à les recueillir, 658 À NAME IYIS EL ADNE ISMEMAMUREE Cr. En faifant avec attention un travail de la nature de celui dont je viens d’avoir l'honneur de vous rendre compte, Meflieurs , on tente néceflairement quantité d'Expériences dont on ne retire aucun fruit. J'aureis peut-être dû les rap- porter pour épargner à d’autres le dégoût d’un procédé inu- tile ; mais ce Mémoire eft déjà trop confidérable, pour ne pas éviter tout ce qui peut faire longueur , & je n'ai prefque fait mention que des procédés qui m'ont réuffi. Il eft trés-pofli- ble qu'une main plus favante & plus adroite trouve par la fuite, dans ces Eaux, des fubftances que mes lumières, trop foibles peut-être pour venir à-bout d'un pareil ouvrage, n'ont pas fu y découvrir. Je ne dis rien de leur vertu; il ne m'appartient pas d’en décider, c’eft aux J uges en cette matière à prononcer à cet cgard. V. B. Environ un an après la le&ture de ce Mémoire , j'ai fait nettoyer la fontaine d'Anguien & prendre la fource de plus haut, l'eau puifée à l'endroit où elle fourcille & laiflée dans un vafe débouché, fe trouble quelque tems après, comme elle le faifoit ci-devant ; mais elle fe charge de plus d’une pellicule jaunâtre, prefque toute formée par du foufre, & qui brüle comme lui; le dépôt qui fe précipite, ne paroît pas en con- tenir d'une manière fenfible. MM. les Commiflaires de la Fa- culté de Médecine, chargés d'examiner cette fontaine, fonc les premiers à qui cette Expérience ait réufB. J'ai depuis obtenu le même produit , & M. d'Eyeux a eu le même fuccès ; enfin M. Roux'a trouvé le moyen, à l’aide du beurre d’arfenic, d’avoir pour précipité de véritable orpiment. s EXAMEN CHYMIQUE fi 1 “639 EXAMEN CHYMIQUE: D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE.* PREMIÈRE PARTIE- CONTENANT 1iESs EXPÉRIENCES FAITES PAR LA VOIE SECHE. Par M. BAYEN, Apothicaire-Major des Camps & Armées du Roi. La mine De Fer dont l'examen chymique fait le fujet de ce Mémoire , eft connue des Naturaliftes , fous le nom de Minera Ferri alba fpathiformis : eeft un amas de cryftaux en lames minces, brillantes , douces au toucher, à demi-tranf- parentes , de couleur grife & de forme romboïdale ; on ydiftin- gue des cryftaux de quartz & quelquefois des petites pyrites jaunes & gorge de pigeon ; elle n'eft pas très - dure , & la pointe d'un couteau peut facilement y imprimer des traïts ; le briquet n'en peut donc point tirer d’étincelles , à moins que par hafard , ou à defein , le coup ne Porte fur un grain de quartz ou fur une pyrite, had CRE * J'avois rapporté d'Allemagne, en 1764, divers Échantillons de Mines de Fér, parmi lefquels il s’en trouvoit un de Mine Spathique du poids de quatre livres & demie; on me lavoit donné fous la dénomination de mire d’où l’on retire le meilleur Acier. ! Tome IX, SL. Préfent € 17740 é EXAMEN C'HY MAI QUE Cette Mine n’eft point du tout attirable par l’aimant : f of en tient long-tems à l'air un morceau , elle jaunit à la fuper- ficie & perd fon brillant, ce qui annonce un commencement de décompofition. Lorfqu'on lexpofe au feu en morceaux d'une certaine grofleur , ou fimplement concafée , elle décré- pite fortement & fe fépare en petites parcelles, qui font je- tes hors du vafe où fe fait l'opération. Il n’eft donc pas poffi- ble de la calciner, à moins qu'on n’en ait préalablement dé- truit l'aggrégation cryftalline en la réduifant en poudre aflez fine pour pañler au tamis de foie. : Première E xpérience. Tai mis dans un petit creufet 4 gros ou 288 grains de mine pulvérifée & ramifce. L'ayant expofée, au feu , je ne tardai pas à appercevoir que fa couleur s’alréroit, elle devint brune & en moins de demi-heure elle éroit rout-à-fait noire; je pouflai le feu jufqu'à la faire rougir , & je la tins en cet état plus d'une heure & demie, fans qu'il s'en élevât rien de fenfible à lodorat ni à la vue; lorfqu'elle fut refroïdie , je la mis fur la balance: & j'en-trouvai le poids diminué de 93 grains, c'eft-à- dire, qu'elle avoit perdue lc tivrs de fon poids moins trois grains; c'étoir une poudre d'un noir foncé ; qui paroïfloit avoir aug- menté de volume; je lui préfentai alors un barreau d'acier aï- manté auquel elle s'attacha avec autant de virefle & en aufi grande quantité que l'auroit fait la limaille de Fer la plus récente & la plus pure. Deuxième Experience. Je crus devoir répéter cette Expérience dans des vaifleaux fermés ; je mis en confequence une once de la méme mine pulvérifée dans une petite retorte de verre lutée , à laquelle Jadaptai un balon percé ; je lui fis fubir le plus grand feu, ayant attention d'ouvrir de tems en tems le petit trou du ré- cipient d'où il fortoit à chaque fois une quantité d'air remar- D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 6or quable, il ne pafla rien de vifible dans le récipient, il ne s'at- tacha rien dans col de la retorte, fi ce n’eft que, dans le cours de l'opération, j'avois apperçu à deux pouces au-deflus du bec une petite rofée qui difparuc bientôt. Lacornue s'étoic affaiflée, mais fans fe rompre, la matière qu'elle contenoit avoit pris une couleur . noire foncée, fon poids éroit diminué de 2 gros 42 grains, ne pefant plus que $ gros 30 grains ; en forte qu'elle avoit per- du ,à peu de chofe près, le tiers de fon poids ; tout setoit donc paflé dans les vaifleaux fermés comme dans les vaifleaux OUVYEfrCs. s Trorfième Expérience. Je navois pas de vaifleau propre à faire des diftillations pneumatiques , & j'étois preflé de fatisfaire ma curiofité: je mis une once de mine pulvérifée dans une petite retorte de verre lutéc à laquelle j'adaprtai une veflie de bœuf mouillée & abfolument vide d'air, en moins de trois quarts d'heure de feu vif, la veflic fe gonfla fi fort, que craignant l’explofon , je fupprimäi le feu & laiflai tout refroidir, il rentra un peu d'air dans la retorte , ce qui me permit de pincer la veñie immédiatement au-deflous du bec & d'y faire.une forte liga- ture aflujétie par un nœud coulant : je détachai alors celle qui unifloit la veflie à la cornue, & fubftituant à cette dernière, un tube de verre long de quatre pouces, je devins le maitre de tranfporter le gaz dansun vaifleau plus commode: je choifis une bouteille cylindrique de quatre pintes environ , que je rem- plis d’eau pure, & l'ayant renveriée & aflujérie fur la furface d'une terrine également pleine d'eau , je fis entrer dans fon goulot le tube du verre qui étoit adapté à la veflie,, & déra- chant le nœud-coulant qui y fixoit le gaz, je parvins à faire fortir, par une preflion légère, environ crois pintes d'eau , dont le gaz occupoit la place. Je ne tardai pas à m'apperce- voir que l'eau remontoit dans la bouteille , &, par de légères fecoufles , Jen accélérai encore ‘l’afcenfion. Au moment où je Jugeaï qu'il en étoic rentré environ deux pintes , je fermai S ff ij 692 EX AMEN CHYMIQUE ja bouteille , & la retirant de la terrine où fon'orifice étoit plon- gée, je la mis fur fon afliette ; en la débouchantc , il fe fit un fiflement qui annonçoit que le gaz étoit encore comprimé , il s'en élevoit une odeur, que je ne peux mieux comparer qu'à celle de Phofphore: je goûtai l'eau & je la trouvai aigre- lecte , jen-mis quelques onces dans une petite bouteille où il y avoitenviron ; grain de limaille de Fer, & en peu de téms elle eut la propriété de prendre , avec la poudre de noix de galle, une teinture purpurine, La Mine employée dans cette Expérience, ayant été retirée de la retorte, n'avoir perdu de fon poids qu'un gros $7 grains, c’eft-à-dire, qu'il sen falloit 53 grains environ, qu'elle n'eûc donné tout le gaz que la première & feconde Expériences nous ont appris être contenu dans une once de cette même Mine, j'en achevai la calcination à feu ouvert, & je l'amenai au point de perdre à-peu-près le tiers de fon poids. L'Expérience que je venois de faire , commençoit à m'inf truire , mais elle ne remplifloit pas mes vues ; je difpofai fur- le-champ un de ces appareils chymico - pneumatiques , dont Hales pañlera toujours pour être l'inventeur , quelle que foic ha forme que nous puiflions leut donner ; jefpérois qu'ayant des inftrumiens plus commodes & plus exacts, je ferois en état , non-feulement de recevoir tout le: gaz que fourniroïit une quan: titc donnéé de notre Mine, mais encore d'en déterminer le volume, & peut-être même le poids fpécifique. Quatrième E xpérience. Je choïfis une rétorte de verre lutée , qui contenoit un vo- lume d'air égal à quatre onces, un gros d'eau , je la chargeaï d'une once de mine tamifée , fadaptai à fon bec un conduc- teur, ou tube de verre recourbé , dont la capacité contenoït un volume d'air égal à un once deux gros d’eau, je les afluje- tis l'un à l’autre avec du lut gras & des bandes de linge en- duites de chaux & de blanc d'œuf; lorfqw'elles furent féchées, D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 6»; je plaçai la rerorte dans le fourneau , & en l'y aflujétiffant , je lui donnai une fivuation propre à s'unir à l'autre partie de l'ap- pareil, qui confiftoit en une terrine pleine d’eau, furmontée d'une bouteille haute & cylindrique , contenant fept livres neuf onces d’eau , l'extrémité recourbée du conduéteur ayant été introduite dans le col du récipient, le feu fut allumé; Pair de la cornue fe raréfia , & il en pañla dans le récipient: une quantité fuffifante pour déplacer deux ou trois onces d'eau : le feu ayant été augmenté, les bulles fe fuccédèrent aflez vite, l'eau du récipient fe déprimoit fenfiblement , & lorfque la retorte fut échauffée au point d’êcre rouge , la dépreflion fe fit avec une prompritude étonnante, l'eau commença à {ortir de laterrine, & bientôt elle forma un filet de la grofieur de celui qu'on voit fortir du bec d’un alembic, lorfqu'une dif- dillation fe fait rapidement ; ce filet étoit l'image de celui que formoit le gaz en fortant du conduéteur ; l'opération n'é- toit pas finie & toute l’eau avoit été pouflée hors du réci- pient, le feu éroit toujours aufli vif, & le fluide ne trouvant plus d’eau à déplacer, fe fic jour à travers celle qui étoit dans la terrine , ce qui dura environ cinq ou fix minutes, après le- quel tems tout étant devenu tranquille , je jugeai l'opération finie; mais, ne voulant pas laifler reftoidit l'appareil dans l'é- tat où il étoit , de peur que l'eau montât dans la retorde, je levai légèrement le fupport & le récipient , fans cependant lui faire quitter la furface de l’eau, & je l’écartai du conduéteur d'environ un pouce, je fus alors le maître d'éloigner le Sur- neau & toute la partie de l'appareil qui en dépendoï ; Peau ne tarda pas à rentrer dans le récipient qui étoit refté en place, en moins dé deux heures, il y en étoit remonté plus de qua- tre onces , & en douze heures environ #1ze ; le lendemaim matin, jévaluai ce qui s'y trouva de 32 à 34 onces, je le fer- mai à cet inftant , & l'ôtant de deflüs fon fuppott, je remar- quai qu'en le débouchant, il fe #t un fifflement aflez fort, Veau qui étoit remontré avoir abforbé une grande quantité de gaz, elle étoit aigrelette, fon odeur étoit forte & reflembloit à celle du phofphore. é EXAMEN CHYMIQUE La Mine ayant été retirée de la recorte & mife fur la ba lance, fe trouva avoir perdu , à trois grains près, le tiers de fon poids, elle étoit, comme dans les opérations précédentes, d'un noir foncé & entièrement attirable par laimaat. Le volume du fluide élaftique ou gaz qui s'eft exhalé de l'once de mine employée dans cette opération , furpafloit donc celui de 121 onces, où , ce qui eft la méme chofe, de fepc livres 9 onces d’eau. Mon appareil commençoit à fe perfe&tionner , mais il n'étoic pas au point où je le defirois. Ma quatrième Expérience étoit imparfaite , je n’avois pu évaluer que par-à-peu-près , l'eau déplacée , & le récipient dont je m’étois fervis, étoit trop petit; il étoit facile de remédier au dernier inconvénient & poñlible de {e garantir du premier. Je choifis, en conféquence , une bouteille cylindrique plus grande que celle qui m'avoit fervi dans l'Expérience précé- dente , je colai deflus une bande de papier blanc , large de fix à fept lignes, & aflez longue pour s'étendre depuis fa bafe jufqu'à fon colet ; je fis, avec une petite bouteille à orifice étroit, une mefure qui contenoit jufte quatre onces d'eau s après quoi, ayant polé la bouteille fur une table bien nivellée » y verfai une mefure; &, dès que le mouvement communiqué à l'eau par la chûte fut pañlé, je fis fur la bande de papier une Marque à l'endroit où la fuperficie de l’eau étoit fixée: ce pres mier degré de l'échelle indiquoit quatre onces d’eau ; j'ajoutai une autre mefure d’eau , ce fut le fecond degré qui indiquoit huit onces, & continuant ainfi de quatre onces en quatre on: ces, Je parvins à semplir le récipient, dont le dernier degré ctoit le 39.° ce quifar, à quatre onces par degré, 156 onces, ou neuf livres d'eau. Comme je connoïflois la tare de ce vaifs feau , je pus vérifier ce poids, & je trouvai qu'à un gros près, il contenoit en effec neuf livres ? ou 156 onces, ce qui prou- voit que les degrés de l'échelle que je venois de faire, étoient aflez juftes, D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 695 Cinquième Expérience, Je procédai fur-le-champ à la cinquième Expérience, & ; comme jayois obfervé dans les diftillations précédentes, qu'il s'attachoit conftamment un peu d'eau , fous la forme d’une rofée, à la partie fupérieure du col de la retorte , je crus de- voir expofer celle dont jalloïis me fervir à un grand feu, & l'y tenir aflez long-tems pour en chafler toute l'humidité qu’on auroit pu y foupçonner; je tins aufli la mine plus de deux heures à un degré de chaleur , qui, fans l'altérer , pouvoit en enlever toùte l'humidité , dans le cas où elle en. auroit pris de l’athmofphère ; ce que je ne préfumois cependant pas, vu qu'elle étoit gardce dans une bouteille exaétement bouchée. La retorte éroit encore chaude, lorfque je la chargeai d'une once de mine: le volume d'air qu'elle contenoïit égaloit quatre onces deux gros 17 grains d’eau, & celui du conduéteur , un once deux gros ; jappareïllai comme dans la quatrième Expé- rience, & le feu fut allumé. Il étoit dix heures ? du matin, lorfque l'air des vaifleaux, tant au plus grand degré de raréfaétion, le gaz commença à paf fer & à déprimer l'eau du récipient : alors j'apperçus, comme dans les Expériences précédentes , une petite rofée où amas de goutelettes d'eau dans la partie fupérieure du col de la retorte, L'opération fut conduiteavec célérité , en forte qu’en moins d'une heure la Mine ayant donné tout le gaz qu'elle contenoit , l’eau du récipient fe trouvoit fixé au 35° de- gré de l'échelie , ce qui indiquoit un déplacement de 149 Onces. La cornue, le conducteur , le fourneau , furent enlevés avant le refroidiflement, l’eau remonta bientôt dans le réci- pient qui étoit refté fur fon fupport , en moins de deux heu- res elle avoit atteint le 34.° degré; le lendemain, le 29.°: le totfième, jour elle éroit au 24.°: le quatrième; au 19.°: le cin- quième , au 14.2: le fixième au 12° =: à cçtce époque , l'af 696 EXAMEN CHYMIQUE cenfion n’étoit prefque plus fenfible : le feptième jour ; elle s'éroit à peine exhauflée d’= de degré: le huitième jour, elle me parut fixée un peu au-deflus du 11°. Je fermai alors le técipient de fon bouchon, & l'ayant retiré, je le pofai fur fa bafe, il ne fe fit point ou peu de fiflement en le rebouchant: l’eau qu'il contenoir, n’étoit prefque pas aigrelette, quoiqu’elle eût pourtant une forte odeur de phofphore. Les 576 grains de Mine employée dans cette Expérience ; croient réduits à 394 grains , la perte étoit donc de 185 grains, que tout nous porte à regarder comme le véritable poids du gaz: mais 18$ grains de gaz n'ayant déplacé que 140 onces , Où 80,640 grains d'eau , pouvoit minduire à croire que la pefanteur fpécifique de ce fluide fingulier n’étoit à l'eau que comme un à 436 , & confequemment que fon poids éroit à-peu-près le double de celui de l'air de Pathmofphere, dont les Phyficiens ont ctabli le rapport à l'eau, comme r à 850 ou à 900. Sixième Expérience. Cette différence entre le poids de l'air & celui du gaz; me fic foupçonner qu'une portion de ce dernier avoit pu être abforbée par l'eau du récipient : pour m'en aflürer , je recom- mençai l'Expérience , & j'eus la précaution cette fois de mettre un travers de doigt d'huile d'olive fur l'eau qui devoit être déplacée ; jemployai un récipient beaucoup plus grand que le précédent, mais également gradué , tout fut appareillé à ordinaire; &, après l'opération , la fuperficie de la couche d'huile fe trouva fixée au degré de l'échelle , qui indiquoit 192 onces, & l'once de Mine employée, avoit perdu 193 grains de fon poids: or 193 grains de gaz ayant déplacé 192 onces ou 110,592 grains d'eau , il senfuit que fa pefanteur fe crou- voi déjà être en rapport avec l’eau , comme rt à 573. Le dernier procédé , en me faïfanc voir une diminution confidérable dans la pefanteur fpécifique, que jattribuoiïs au gaz; D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE ‘ 6°7 gaz ; d'après la cinquième Expérience , fit préfumer que je pourrois encore rapprocher fon poids de celui que les Phyfi- ciens ont tâché d’afligner à l'air de l’athmofphère. Mon appareil avoit un défaut effentiel qu'il falloit corri- ger , le bec recourbé du conduéteur m’entroit dans le col du récipient, que d’environ un pouce, & le gaz , en fe dé- gageant , avoit à traverfer un volume d’eau très - confidéra- ble ; je crus que cette eau pouvoit aufli en abforber une portion , & jen fus convaincu d’après l’Expérience fui- vante. Septième Expérience. Je rendis le récipient de mon appareil pneumatique, pro: pre à être rempli par fucceflion, je fis faire un conduéteur de verre, dont la branche recourbée pouvoit s'élever un peu au-deflus du premier degré de l'échelle ; je mis une once de Mine dans une retorte, & j'appareillai à l'ordinaire ; lorfque, par la fuccion , l’eau fut montée & arrêtée au deuxième de: gré environ , jintroduifis dans le récipient une quantité fuffifante d'huile , en faifant en forte d'en fixer la fuperficie vis-à-vis le deuxième degré de l'échelle , qui marquoit huit onces. Dans cette Expérience , l'once de Mine employée, fournit 189 grains de gaz qui déplacerent 216 onces ou 124,416 grains d'eau: cette quantité d’eau déplacée , bien fupérieure à tout ce que j'avois obtenu ci-devant , me mit en état de con- clure, fans prêtendre toutefois avoir atteint le véritable point, que la pefanteur fpécifique du gaz eft à l’eau comme r à 658, c’eft--dire, qu'un volume de gaz, qui feroit égal à celui d'une once ou 576 grains d'eau, peferoit à-peu-près un grain moins > de grain (a). (a) Je crois que le poids fpécifique du gaz feroit encore moindre fi en pouyoït trouver un interraède, qui empêchät abfolument fon abforption dans Tome IX, LÉLE 693 EXPAUMEE EN TG HE AEMOPONURE Dès que j'eusfixé, le plus exactement qu'il me fut poffible, le volume du gaz que fournifloit une quantité donnée de Mine de Fer fpatique, je voulus favoir fi ce fluide que les Anglois ont nommé ar fixe, pouvoit être refpiré impunémenc par les animaux. Pour cet effet , je chargeai une retorte d'une once de mine, jy adaptai un conduéteur, je fufpendis fur la fuperficie d'une terrine pleine d’eau , un de ces grands réci- piens de machine pneumatique dans lequel javois placé une alouette jeune & vigoureufe, je fs monter par la fuccion , l’eau dans le récipient jufqu'à une hauteur convenable, pour laifler à l'oifeau tout l'air néceflaire à fa refpiration ; le gaz fut intro- duit en un inftant dans cet appareil , & à peine l’eau fut-elle déprimée d’un demi-travers de doigt, que j'apperçus l’alouette s'inquiéter ; fes afpirations devinrent plus fréquentes , elle tomba & fit de foibles efforts pour fe relever ; elle tomba de nouveau & bientôt elle perdit tout mouvement, elle étoic morte ou du moins elle paroïfoit l'être, je la retirai promp- tement , & l’appliquant contre mon corps, en moins d'une minute elle revint à la vie. Cette Expérience prouve que le gaz qui s'élève de notre Mine, cft une moufette fuffocante, qui reflemble aflez , par fes effecs fur les animaux, à celle de la grotte du chien en Jcalie, & à plufieurs autres que j'ai eu occalion d’obferver dans le Royaume. Huitième Expérience. Quoique je me fois propofé, dans ce Mémoire, d'écarter tout ce qui pouvoit paroïtre étranger à l’analyfe de la Mine dont j'ai l'honneur de parler à l'Académie , je ne peux cepen- dant m'empécher de lui rendre compte d’une Expérience, qui l'eau, l'huile d'olive dont je me fuis fervi, l’a retardé fans-doute; outre qu'elle en abforbe elle-même, il me femble qu'elle n'empêche pas l’eau & le gaz de s'unir : j'ai vu plufieurs fois l’eau remonter en fept ou htit jours de quinze degrés & plus, malgré fhuile qui la recouvroit. ; D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. - 699 peut, ainfi que quelques autres qui ont déjà été publiées , com- mencer à nous donner des idées fur la nature de cet être fingu- lier, que nous nommons gaz ou e/prit. J'ai cherché à fixer le gaz d’une once de mine dans de lal- kali fixe, &, pour cet effet, Jai chargé une pctite retorte d’une once de notre mine pulvérifée; J'ai luté à fon bec un tube de verre de fix à fept lignes de diamètre , & de quinze à feize pouces de longueur , (mon deflein étoit d'éloigner, autant qu'il feroit poilible, du fourneau , le récipient dont Jallois me fervir, & cependant de porter dans fon fond le gaz qui s'échappoit de la Mine, lors de l'opération.) J'ai verlé environ un gros d’eau diftillée dans un petit balon , & en le tournant en tout fens , j'ai pu l'humeéter légèrement ; après quoi, j'y ai jeté 30 grains de fel de tartre en poudre fur la pu- reté duquel je n’avois aucun doute ; ce fel ablorba l'humi- dité du balon, tomba en deliquium & fe raflembla dans la partie la plus baffe. Je joignis ce balon au refte de l'appareil, je fermai exac- tement les jointures avec du lut gras recouvert de bandes de toiles trempées dans du blanc d'œuf & de la chaux: dans les premiers inftans où le feu fut allumé , j'ouvrois de rems en tems le petit trou du récipient pour donner iflue à l'air des vaifleaux ; mais, me difpofant à ne plus l'ouvrir aufli-tôt que la chaleur feroit aflez forte pour dégager le gaz, je le bou- chaï exaétement avec un peu de lut gras ; je pris en même- tems des précautions contre la fracture & lexplofion des vaïfleaux , j'enveloppai le balon dans des linges mouillés , & attachant autour de l'appareil des toiles fortes, je ne laïflai qu'une petite ouverture vis-à-vis la porte du fourneau pour y mettre le charbon lorfque le befoin le requerroit. Tout étant ainfi difpofé , je pouffai le feu aufli vivement & auf long-tems qu'il étoir nécellaire ; je m'attendois à cha- que inftant à voir fauter mon appareil, & ce n'étoit qu'en cremblant que jen approchois pour mettre du charbon fous ÆtEC- EN 700 ANALYSE CHYMIQUE. Ja cornuc; enfin, après une heure & demie d’un feu vif, jugeant l'opération finie, je fermai la porte du cendrier & laïflai tour refroidir. Je ne pouvois concevoir que trente grains d'alkali fixe cuflent été fuffifans pour abforber tout le gaz que je favois être contenu dans une once de Mine; je préfumois que mes vaifleaux avoienc pris air par quelque endroit; je foupçonnai fur-tout que le lut gras, qui fermoit le petit trou du récipient, avoit pu être foulevé : rien de cout cela n'étoit cependant arrivé ; je trouvai les jointures en bon état , & le petit trou me parut très-bien fermé : quoi qu'il en foit , le fel de tartre que l'humidité du récipient avoit réfou en liqueur, ainfi que je l'ai fait remarquer , sétoit coagulé , & comme il paroïfloit contenir un peu de liqueur, je.le fis égoutter en renverfant le récipient fur un verre, ce qui en tomba, avoit le goût pu- rement alkalin, & je le regardois comme de falkali furabon- dant, qui n'avoit fubi aucune altération; mais, l'ayant faturé avec un peu d’acide vitriolique , je vis avec furprife que le tartre vitriolique qui fe forma, prenoit , ainfi que la liqueur ; une couleur bleue : les vaifleaux dont je m'étois fervis étoienc neufs, l'eau que j'avois mife dans le balon avoit été diftillée dans le grès & le verre , je ne pouvois avoir de foupçon fur l'alkali que javois employé, c'étoit du pur fel de tartre; ce- pendant je crus devoir faire une contre-Expérience ; je fs dif foudre dix ou douze grains de ce même fel dans 24 ou 25 gouttes de la même eau diftillée, j'en fis la faruration avec un peu du même acide vitriolique, le fel qui fe forma étoit de la plus grande blancheur , ainfi que la liqueur qui le furna- geoit. Ne pouvant attribuer la caufe de cette couleur n1 aux vaifleaux, ni aux intermèdes dont je m'étois fervi, je jugeai que fans doute la Mine fur laquelle je travaillois conténoit du cuivre , & qu'il n'étoit peut-être pas impofñlible qu'une portion de ce métal eût été volatilifé; mais, ayant tenté de rendre la couleur bleue plus foncée, en verfant dans la liqueur quelques gouttes d’alkali volatil , jabandonnai ma éonjecture, D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 1: parce que cet alkali, bien loin d'augmenter la couleur :blene la détruifit entièrement : il étoit plus naturel d’en rapporter - la caufe au Fer, & ceft, en effet, à lui que je préfume qu'eft dûe cette couleur. Quant au fel qui ctoit refté attaché à l'endroit du balon où il s’étoit formé, ne voulant point le déranger ; je pris le parti de couper le récipient, ce qui me donna la facilité d’en retirer les cryftaux, qui étoient blancs & aflez réguliers ; ils pefoient 22 à 23 grains , la plupart étoient en colonne à quatre faces, leur goût eft celui de l’alkali crès-adouci, fi on en met un fur un charbon ardent, il décrépite ainfi que plu- fieurs autres {els , il perd alors fa tranfparence & fe charge en une poudre blanche ; enfin ce fel eft entièrement foluble dans les acides, celui de vitriol le diflout avec effervefcence , & la vapeur qui s'en élève me paroît ne point différer de celle qu'on obtient en faturant un alkaliavec le même acide ; l'acide du fel marin le diflout aufli entièrement avec effervefcence : on en peut dire autant de l'acide nitreux & du vinaigre diftillé; je dois même faire obferver qu'après l'acide marin, c’eft fur- tout dans le vinaigre diftillé qu’on doit faire l'Expérience de la diflolution , fi on veut en tirer quelques conféquences; car fi on jette dans ce dernier acide un cryftal de ce fel, comme leffervefcence eft peu tumultucufe , on peut, en fuivant de Fœil la difolution , remarquer que le mouvement excité par l'action du diffolvant, ne finit qu’au moment où le dernier atome a {el eft diflous, ce qui ne permet pas d'attribuer l’effervef- à l'alkali fixe, dont on pourroit peut-être foupçonner {el d’être mouillé, vu que la liqueur dans laquelle il 2 life étoic alkaline. cence notre Il eft hors de mon fujet de m'étendre davantage fur cette matière, qui eft trop intéreflante pour ne pas mériter un tra- vail fuivi, mais feparé de l’analyfe dont l'Académie me per- met de l’entretenir aujourd’hui. J'ai déjà une fuite d’Expérien- ces faites dans le deflein de découvür la nature du gaz qu'on J05 ANALYSE CHYMIQUE retire (de certains corps. Je me propofe d'y en ajouter encore d'autres & d'en former quelque jour un Mémoire que jaurai l'honneur de préfenter à l’Académie , fi elle veut bien me le permettre. SECONDE PARTIE, CONTENANT LES EXPÉRIENCES FAITES PAR LA VOIE HUMIDE. Lorsou’on expofe cette Mine à l'action des acides miné- raux foit crûe, foit calcinée, elle en eft facilement attaquée, &, à l'exception des parties de quartz qui y fonc plus ou moins abondantes, elle s'y diflout entièrement, elle ne réfifte même pas à l'acide végétal. Rapport de la Mine avec lAcide vuriolique. Première Expérience. Si on fait digérer à une chaleur douce une once de Mine crûe pulvérifée dans une fufifante quantité d’acide vitrioli- que, la diffolution s’en fait paifiblement, & fi, par des pré- cautions indiquées par l'art, on eft parvenu au point de fatu- rer l'acide en diflolvant tout ce qui eft foluble, il ne reftera dans la capfule que quelques grains de quartz fous la forme d'un fable menu & d'une blancheur parfaite ; qu'on mette la diflolution au point de donner des cryftaux , on obtiendra environ quatorze gros de vitriol martial & quelque peu d'eau merc. + Deuxième Expérience. Que l'on faffe calciner une once de la même Mine, pour lui DU ee, Ve D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 703 faire perdre le gaz qui la minéralife, on la réduira, à quelques grains près, aux deux tiers de fon poids, c’eft-à- dire, à environ cinq gros 24 grains (a). Que l'on traite ces cinq gros 24 grains de Mine calcinée avec de l'acide vitriolique , comme il à été dit dans la pre- mière Expérience , l'effervefcence fera prefqu'aufli forte que celle qui s'excite dans la diflolution de limaille de Fer avec le même acide ; que l’on mette la liqueur au point de cryftal- lifer , on obtiendra autant de vitriel martial qu'on en auroit ob- tenu d’une once de Mine non calcinée; ce qui prouve démonf- trativement, que tandis que le Fer de la Mine crûe fé combine avec l'acide, la fubftance volatile ou le gaz auquel le Fer devoit fa forme cryftalline s'évapore. Troifième Expérience. J'ai mis une once de Mine dans une petite retorte de verre, Jy ai auffi introduit à l’aide d’un tube deux onces d'acide vi- triolique concentré, j'ai adapté un petit balon mouillé avéc de falkali diffous ; le feu fut pouflé aflez légèrement, mais fuffi- famment pour faire pañler un peu de liqueur dans le réci- ient, l'alkali fixe s'érant coagulé , je retirai le balon , & à Ê aide d'un peu d’eau diftillée, j'en retirai le fel que je fis cry tallifer de nouveau , & que je reconnus pour être du tartre vitriolé. On peut déjà juger , d’après cette Expérience, que les inter- mèdes acides doivent être rejetés, fi on veuc fe procurer un gaz pur, M (a) En calcinant une once de Mine, on perd tantôt plus, tantôt moins, ce qui refte dans le teft, pèfe quelquefois plus de cinq gros vingt-quatre grains, & quelquefois moins, cet accident dépend du plus ou du moins de quartz qui s'y rencontres circonftance qui fait aufli varier le volume de gaz qu'on retire Ge cette même Mine. 1 704 EXAMEN CHŸMIQUE En faifant cryftallifer différentes diflolutions de notre Mine dans l'acide vitriolique, j'ai eu quelquefois un peu de félénire calcaire , & quelquefois je n’en ai pas obtenu un atome , ce qui me porte à conclure, qu'outre le quartz, cette Mine con:- tient aufli quelques petites ‘portions de terre calcaire : j'aurai dans un imftant une nouvelle occafion de faire obferver l’exif cence de cette terre dans notre Mine fpatique d’une manière plus marquée. on LE Quatrième Expérience. Dans la vue de découvrir fi la Mine contencit quelques portions de cuivre, j'ai fait difloudre dans de l'eau diftillée tout le vitriol que j'avois obtenu , en faifant cryftallifer diffé- rentes diflolutions de Mine crûe & de Mine calcinée ; mais ayant tenu, pendant plufieurs jours dans la liqueur, une lame de couteau bien avirée fans appercevoir la moindre trace de cuivre précipité , je crois être en droit de conclure que notre Mine ne contient point de cuivre. Rapport de la Mine avec P Acide nirreux. Première Expérience. j AYANT MIs, dans un petit matras, une once de Mine crûe pulvérifée , j'ai verfé deflus fix gros d'acide de nitre très-pur ; il ne fe fit dans les premiers inftans aucun mouvement ; mais, après quelques minutes, il s'établit une légère effervefcence, qui continua plufieurs jours (2); l'acide prit, en fe faturant, une couleur jaune foncée, je la décantai & lui en fubftituai d’autres, l'effervefcence fe rétablit & dura jufquà la diflolution totalequi {e fit fi lentement, qu’elle ne fut complète que vers le douzième (a) L'opération fe faifoit à froid, car fi on emploie Ie feu, la diffolution fe fait beaucoup plus vite. jour ; M. cond léenr “* D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 770$ jour; comme la Mine que j'avois employée étoit fort pure , il ne refta dans le matras que fix grains : de quartz. J'ai fait évaporer cette diflolution jufqu'à ficciré , & je l'ai tenue au feu de calcination le tems néceffaire pour lui faire perdre tout l'acide qu’elle contenoit, il refta dans la capfule cinq gros douze grains de fafran de Mars d’une couleur brune ou prefque noire, & qui n’étoit plus attirable par l'aimant. Cette Expérience prouve, de plus en plus, qu'une once de notre Mine la plus pure, contient réellement À de fer &: d'une fubftance volatile , qui s'évapore dans la diflolution par un acide en. que par la calcination dans les vaifleaux ouverts ou ermés, Deuxième Expérience. J'ai pris deux petites retortes de verre, je les chargeaï cha- cune d'une once de Mine concaflée , dans laquelle on ap- percevoit quelques grains de quartz; je les ai placées fur un bain de fable, & j'ai adapté à chacune un appareil chymico- pneumatique , dont l'un avoit un récipient où j'avois mis uno a d'huile , tandis que l’autre étoit fimplement rempli cau. En 24 heures, l'eau du récipient avec l'huile fut dépriméo jufqu’au degré qui indiquoit 60 onces, & dans le même efpace de tems, celle qui étoit dans le récipient fans huile , avoit à per atteint le degré qui en indique feize : cependant tout e pañloit également dans l'une & l'autre retorte ; l'effervef- cence étoit la même, & le procédé fe faifant à froid, le de- gré de température étoit aufli le même. Le quatrième jour, je chauffai légèrement le bain de fable, la dépreffion fuivit la même marche dans l'un & dans l’autre appareil; dans lun, elle étoit peu marquée; dans l'autre , elle étoit tres-fenfible, en forte que le feptième jour , depuis le commencement de l'opération , la fuperficie de l’eau du récipient avec l'huile, étoit vis-à-vis le degré qui indique 116 onces , & celle du Tome IX, VYvy 7066 EXAMEN CHYMIQUE récipient fans huile , un peu au-deflous du degré qui en indi- que 7 À cette époque, l’effervefcence me parut abfolument finie, & jen fus convaincu en voyant l’eau remonter dans les récipiens fort lentement, à la vérité, mais fuffifamment pour annoncer qu'il ne fe dégageoïit plus rien. Je défis les appareils , le récipient avec huile exhaloit une forte odeur d'acide nitreux, celui où il n’y avoit point d'huile , non-feulement répandoit la même odeur , mais l'eau dont il étoit encore prefque plein , avoit un goût très-acide , qui lui avoit été communique par lefprit de nitre , qui sé- tant élevé à l'aide du gaz, s’étoit, aufli-bien que ce dernier, abforbé dans l'eau , à mefure qu'ils fe dégageoient l'un & l'autre. Il refta, après la diffolution des deux onces de Mine em- ployées, 2$ grains de quartz de l'une, & 19 grains : de Jautra (a). On voit, par cette double Expérience, combien il eft né- ceffaire d'interpofer un travers de doigt d'huile entre l'eau & le gaz, quand on veut mefurer le volume de ce dernier; mais ce qui métite principalement d’être remarqué, c'eft, fans con- tredit, cette portion d’acide nitreux , qui, sélevant avec le gaz & fe mélant à l'eau, ne peut que jetrer dans l'erreur ceux des Chymniftes, qui, dans leurs recherches fur la nature de ce fluide, emploieroient des intermèdes acides pour le dégager. Troifième Expérience. Si notre Mine fe diffout dans l'acide nitreux, avant fa calci- nation , elle le fait encore plus facilement & avec plus d'effer- (a) Comme, dans cette Expérience, la Mine n’étoit pas en poudre, ce quartz étoig en morceaux affez gros pour fouffrir le coup d’un briquet. Le. Le: D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 707 vefcence , lorfqu'elle a fubi cette opération. J'en ai fait dif foudre cinq gros 21 grains, qui étoient le produit d'une once de Mine crûe , & ayant retiré par la diftiilation, tout l'acide nicreux , je lavai avec de l’eau diftillée, le fafran de Mars, qui croit refté dans la cornue, l'eau me parut avoir diflous quelque chofe de falin, elle fur filtrée, & lalkali fixe en précipita 22 grains d'une terre blanche , que des Expé- riences décifives me firent reconnoïtre pour être de nature calcaire. Si nous ajoutons cette nouvelle preuve à celle que nous a déjà donné la félénite retirée de la même Mine par le procédé avec l'acide vitriolique , nous reconnoîtrons dans cette Mine des portions de terre calcaire, qui, ainfi que le quartz, y fonc éparfes & ifolées. Son rapport avec l’acide de Sel marin: L'acide de fel marin diflout également la Mine de Fer fpa- tique , foit devant , foit après fa calcination, & cet agent eft aufli-bien que les autres acides , un excellent intermède pour féparer les portions de quartz d'avec celles qui font purement métalliques ; mais , comme il m'a été d’un très-grand fecours dans cette analyfe, & que c’eft lui qui m'a fait foupçonner que le zinc pourroit bien exifter dans la Mine, je dois dire un mot fur la manière dont il en fait la diflolution. Ayant mis dans un petit matras demi-once de Mine crûe pulvérilée, & une quantité proportionnée de très -bon acide de fel marin, il fe fit fur-le-champ une vive effervefcence ; lorfquelle fut ralentie , on appercevoic fur la partie de la Mine qui nétoit pas encore difloute , quelques corpufcules noirs qui en falifloient la blancheur; je navois rien oblervé de femblable dans les diflolutions par les acides de virriol & de nitre; je me rappellai fur-le champ l'effet de l'acide de fel marin fur le zinc: ( on fait que, dans la diflolution de ce demi-métal Vyvvi 73 EXAMEN CHYMIQUE par cet acide , il s'en fépare de petits flocons noirs, ) je crué que ceux que Je venois d’obferver, dénotoient que le fer étoit dans la Mine uni à une portion de zinc, je me déterminai auff- tÔt à m'en convaincre par quelques Expériences qui ne laïflent aucun doute. . Procédé par lequel il ef? démontré que la Mine contient du Zinc (a). Qu'on mette dans un petit matras une once de notre Mine calcinée , qu'on y ajoute 40 grains de vitriol martial ; qu'on verfe fur le tout fix onces d’eau diftillée , & qu'on laifle di- gérer à froid pendant 10 ou 12 jours avec la précaution d'a giter le matras toutes les fois que l’occafon s'en préfente, qu’on filtre la liqueur & qu’on la fafle évaporer à une chaleur douce, quand elle fera réduire à cinq ou fix gros au plus, on la reti- rera du bain de fable, & on l'abandonnera à l’'évaporation fpon- tanée, au moyen de laquelle on obtiendra une belle cryftal- lifation de vitriol blanc , dont le poids fera de 25 ou 26 grains, Cette Expérience que jai répétée fur différens échantil- Jons de Mine & toujours avec un pareil fuccès, démontre jufqu'à l'évidence que, dans notre Mine, le fer eft uni à une portion de zinc. T (a) Ce procédé, qui peur être de la plus grande utilité dans certaines oc- cafions, eft fondé fur les loix des affinités, je ne le donne pas comme nou- veau, il étoit connu des Chymiftes du fiécle pafñlé; mais, fi je ne me trompe; on ny a pas trop fait d’attention parmi nous. Les Allemands, au contraire, n'ont pas manqué de le célébrer dans leurs écrits, Pott entr'autres en fait mention dans fa Differtation fur le Zinc, en ces termes : Jem glauberus & be. cherus adverterunt, .quod Zineum ex vitriolo precipitet, exhabitans metallum & Jémetipfum acido vitriclico affociet, tanquam corpus iflis folubilius, & cum eo éitriolum Zincinum efformee, Ce LA D'UNE MINE DE FER SPATHIQUE. 709 Expériences qui prouvent que lé Fer ef? dans la Mine fpathique fous la forme métallique. Je pourrois rapporter un grand nombre d'Experiences, qui prouvent que le. Fer ef dans notre Mine fous fa forme vrai- ment métallique, qu'il y eft enfin avec tout fon phlogiftique ; mais je me contenterai d'en citer quatre, qui me parolflent ne rien laifler à defirer fur ce fujet. 1.0 La Mine calcinée eft totalement attirable par l'aimant. 2... Elle fe diflout entièrement avec facilité & avec une effer- vefcence très-vive dans l'acide nitreux. 3. Je m'en fuis fervi avec fuccès pour revivifier le mercure du cinnabre, 4° Ayant expofe dans les vaifleaux fermés un mélange de minium & de mine, le plomb seft réduit comme :il auroit fait avec de la limaille de fer. En démontrant que le Fer eft dans [a Mine calcinée, fous la forme vraiment métallique , je crois avoir levé tous les doutes qu'on pouvoit avoir fur l'état où il fe trouve dans la Mine crüûe. CONCLUSION. Il réfulte de l'examen chymique que j'ai l'honneur de fou: mettre au jugement de l'Académie. 1.° Que la Mine fpathique qui en fut le fujet , confidérée dans fon état de pureté , eft une combinaifon de fer & de gaz , être fingulier qui donne au fer la propriété de prendre, en cryftallifant , la forme que nous lui voyons dans cette Mine, $ 719 EXAMEN CHYMIQUE, &« 2. Que, dans cette combinaïfon, le gaz eft au fer à-peu-près comme un eff à crois. 3.° Que ce Fer eft uni à une petite portion de zinc. 4.° Que cette Mine, confiderée en mañle ,fe trouve dans quel- ques endroits mélangée de quartz & de fpach calcaire. | 14 711 ee OBSERVATIONS SUR LA MINE DE PLOMB DE HuEzGOoAT EN BASSE BRETAGNE. Pa M DU H A M E L,. La mixe De Husrcoar s'exploite dans une montagne d'environ cent cinquante pieds de hauteur perpendiculaire, à partir du niveau du ruifleau dont l’eau fait mouvoir les ma- chines hydrauliques & boccards à l’ufage de cette mine; fa pente eft d'environ quarante-cinq degrés, & fon expofition Nord-Oueft. C'eft dans cette montagne que la Duchefle Anne à fait autrefois travailler un filon de mine de plomb riche en argent; mais elle s'eft bornée à exploiter dans la partie fupc- rieure de la montagne jufqu'au niveau du ruifleau ; il paroîc que trois chofes ont empêché fes ouvriers d'aller en profon- deur, 1° L'abondance des eaux qui filtrent dans cette mine; 2.° le défaut de connoiffances dans l'hydraulique, foit pour la conftruétion des machines pour l’épuifement des ces eaux, foit pour en conduire fur ces machines par des canaux fort longs & très - coûteux ; 3.° enfin parce que ce filon s'étoit reflerré & appauvri, & qu'il ne paroïfloit pas mériter les frais confidérables & inévitables qu’il falloit faire pour parvenir à une plus grande profondeur. L'exploitation de cette mine a été reprife & fuivie avec fuc- cès par la Compagnie des mines de bafle Breragne, qui n'a rien Préfenté le 30 Août 1776 712 OBSERVATIONS épargné pour porter cet établiffement au degré de perfe&ion où il fe trouve aujourd'hui, & on peut dire , avec vérité, que le zèle de cette Compagnie mérite les plus grands éloges & l'attention du Gouvernement par le bien qu'elle faic dans la Province; on peut ajouter que fans elle cette mine feroit encore dans l'oubli, & peut-être à toujours perdue pour l'État. Je ne m'arrêterai pas à faire la defcription des travaux & machines de cette mine; je me bornerai à rapporter fuccinc- tement ce que Jy ai remarqué de particulier, & qui peut interefler les Naturaliftes. Il convient néanmoins de dire que le filon principal que l'on exploite dans les montagnes dont Jai déjà parlé, a fa direction du Midi au Nord, & que tous ces filons métalliques qui ont une dire&ion oppofce, c'eft-à- dire, de l'Eft à l'Oueft font regardés comme ftériles en Breta- gne, les meilleurs ont leur direction depuis neuf heures juf- qu'à midi, & de midi à trois heures; les autres direétions n’ont Jamais rien donné d’intéreflant dans cette Province. Si on les fuit par quelques galeries , c’eft moins pour y chercher des fubftances métalliques que pour reconnoiître la nature du ter- rain, & s'aflurer s'il n’y auroit pas de filons ou branches de filons parallèles au principal, ou pour procurer de l'air, écouler les eaux, &c. J'aurai occafion, dans la fuite, d'entrer dans un plus grand détail fur cette Obfervation que M. le Chevalier d’Arcy a faite avant moi. Ce qui m'a le plus frappé en vifitant la mine du Huel- goat, c'eft d'avoir trouvé le filon accompagné tant au toit qu'au mur, d'une écpaifleur de dix à douze pieds de pierres roulces ou galets de différentes groffeurs ; elles font ou parfai- tement fphériques ou oblongues; les intervalles ou interftices que laiflent entr'eux ces galets font remplis de terre blanche, & quelquefois ochracée, qui n’a que peu de folidité, fur-tour lorfqu'elle a été expofce pendant quelque temps à l'air; cette efpèce de glue ou moëlle de pierre permet de détacher facilement SUR LA MINE DE PLOMB 713 facilément les galets les uns des autres; elle ne m'a pas paru faire d'effervefcence fenfible avec les acides. Les travaux de cette mine font maintenant à plus de quatre cens cinquante pieds de profondeur, à compter du fommer de la montagne, & à plus de trois cens au-deflous du ruif feau, & on ne difcontinue pas de trouver les mêmes bancs de galets fervanc de toit & de mur au filon; fans doute qu’on les trouvera encore beaucoup plus bas : mais ils ne paroïffent pas s'étendre beaucoup en longueur. Le minéral de plomb eft communément très-beau & abon: dant entre ces deux bancs de galets, & le filon y eft auffi puiffanc & aufli riche que lorfqu'il a paflé dans fa matrice or- Es qui communément eft granite d'un côté & fchifte de autre. Les galets dont je parle, reffemblent parfaitement à ceux qui onc été pendant un très-long temps expolés au flux & reflux de la mer, & que lon voir fur fes rives. La montagne en queftion, ainfi que tous les environs, font compolés de granite & pierre fchifteufe ; les galets environ- nant le filon font au contraire quartzeux, & la majeure partie femble être une,glaife bleuâtre durcie ou pétrifiée fort dure qui ne fe délite pas; je n'ai apperçu aucuns coquillages dans l terre blanche qui remplit les intervalles de ces pierres. Ce qui paroït le plus extraordinaire dans ces bancs de pierres roulées, c’eft leur difpoftion; car, comme je l'ai déjà dit, l'un fert de mur au filon & l’autre eft fon toit : fi l'inclinai- fon du filon étoit dé 45 degrés, & quil ne fe trouvât des galets que dans le mur, c'eft-à-dire, dans la partie fur laquelle le filon feroit appuyé , on pourroit en ce cas expliquer com- ment elles auroient pu s'y dépofer; mais l'inclinaifon du filon eft d'environ 60 à 70 degrés, c'eft-à-dire, que l'angle que fa pente fair avec la ligne horizontale eft de 60 à 70 degrés, & que celui que cette même pente fait avec la verticale eft de Tome IX. Xxxx Jia OBSERVATIONS 20 à 30 degrés : comment donc pouvoir fe faire une idée de la maniere avec laquelle ces bancs de galets ont pu fe for- mer ? S'il n'y avoit que celui du mur, la queftion feroit plus aifée à réfoudre ; mais comment concevrat-on que celui du toit incliné fur le filon de 60 à 70 degrés, ait pu fe foutenit pour permettre à ce filon de fe former entre ces deux rem- parts inclinés; ce qui m'a paru d'autant plus étonnant, qu'il ne fe trouve pas de galets dans le corps du filon; fi jy en avois apperçu, J'aurois imagine que la montagne après s'être fendue, foit par le defléchement, foit par des tremblemens de terre ou autres caufes, J'aurois penfé, dis-je, que cette fente auroit pu fe remplir de galets qui y auroienct été chariés dans une rande inondation, & que, par fucceflion de tems, les inter- valles ou interftices de ces galets auroient pu fe remplir des fubftances métalliques qui compofent le filon, ainfi que du quartz, fpath & pirites qui accompagnent ; mais il n’eft rien de tout cela, car ce qui conftitue le filon, qui communément a plus de fix pieds de largeur, eft crès-diftiné&t des deux bancs de galets qui l’environnent, & fans aucun mélange, fi l'on en excepte la partie defdits bancs qui couche le filon, qui le plus fouvenc eft couverte de minéral de plomb, pyrite, quartz & fpath. L Fa difpofition du filon de la mine du Huelgoat ne permet pas de douter qu'il à été formé poftériéurement aux deux bancs de galets qui lui fervent de voütes où de parois. Comment donc expliquera-t-on la manière avec laquelle lefdits galets ont pu fe foutenir dans des plans prefque. verti- caux, & avoir confervé cette pofñirion afléz de rems pour avoir permis aux matières minérales & métalliques de rem- plir leur intervalle, & en former le filon que l’on exploite aujourd’hui ? Ne pourroir-on pas penfer que les deux bancs de galets n'en ont d'abord fait qu'un, qui, par la fuite, fe fera trouvé fendu où partagé en deux par de nouveaux tremblemens + 3 d — SUR LA MINE DE PLOMB 15 de terre ou autres caufes, qu'alofs ayant acquis un certain degré de folidité à caufe de la terre qui remplit les incer- valles defdites pierres, ces deux bancs auront pu fe foutenir dans leur pofition inclinée, & qu'enfuite le filon fe fera formé en rempliffant le vide? Ne pourroit-on pas aufli croire que cet amas de pierres roulées s'eft fait de manière que la partie aétuellement oc- cupée par la largeur du filon étoit, dans fon principe, plus terreufe que les autres, qui font de pierres dures? Que les eaux fouterraines auront peu-à-peu délayé & tranfporté cette terre dans d’autres fentes, & que les fubftances mctalli- qués en auront pris la place? Si lon admet que ces pierres rondes font le réfultat de la cryftallifation , ce phénomène fera plus aïfé à expliquer. J'ai feulement ofé hafarder ici mes idées fur cette matière, qui n'eft que conjeéturale, au-deflus de mes foibles connoif fances, & que je foumets au jugement de l’Académie, qui, mieux que moi, pourra l'expliquer d'une manière ‘fatif- faifante. Si le tems me l’eût permis, j'aurois levé les plans, coupe & profil de cette mine; j'y aurois exprimé les bancs de galets, & j'aurois été beaucoup plus à même d'entrer dans des détails plus circonftanciés & plus inftruétifs. J'ajouterai feulement ici, que faifant, l’été dernier, la vifite de cette mine avec Meflieurs les Députés de la Compagnie, M. le Chevalier d’Arcy étant fur les lieux, japperçus, dans plufieurs parties du filon, deux fubftances qui fe trouvent fréquemment dans des cavités qui en font remplies, lune d'une ochre martiale que les Alle- mands appellent gz/ben, & l'autre d’une terre noire & légère comme de la fuie, préfumant que ces deux matières (qui ci-devanc étoient rebutées ou pafñlées aux laveries avec les autres , & emportées par les courans), préfumant, dis je, qu'elles devoient contenir de l'argent, j'en pris que je mis feparement; jen fis faire les eflais; elles fe trouvèrent tenir plus d’un marc Xxxx i] 16 OBSERVATIONS, l&: d'argent par quintal; il ÿ a des parties beaucoup plus riches en ce métal que les autres. La matière noire, qui certainement eft en partie un plomb décompofe, donne, outre l'argent, quelques livres de plomb auffi par quintal. L'argent contenu dans la matière ochracée, provient fans doute aufli de la décompofition de quelques parties de mine de plomb riche en argent, & l’ochre qui len- veloppe eft le réfultat de la décompofition des pyrites: il eft à préfumer que l'argent y exifta fous fa forme métallique, c’eft- à-dire , comme natif; la mine de plomb avec laquelle il éroic minéralife par le foufre ne s'étant décompofee, il eft refté à nu, & s'eft trouvé enveloppé par lochre provenante de la décompofition des pyrites. M. le Chevalier d’Arcy ordonna de ramafler avec foin ces matières pour les fondre comme les terres de monnoie dans le fourneau à manche avec des matières tenant plomb, comme fonds de coupelles ou teft, crafles blanches, &c. Le plomb revivifié de ces matières fe charge de l'argent contenu dans celles ci-deflus, & il eft enfuite paffé à la coupelle, 717, aa MEMOIRE SUR UNE ESPÈCE DE MINE DÉCOUVERTE NOUVELLEMENT A S: MARIE- AUX-MINES. Pa M MONNET. Cr UN GRAND MALHEUR fouvent pour les exploitations des Mines lorfque la Nature y préfente quelques matières ex- traordinaires qu'on n'y a pas vues encore, &-dont l'apparence n'eft point métallique; car les Mineurs n’y foupçonnant pas de métal, la jetent ou [a mettent à l'écart indifféremment. C'eft ce qui cft arrivé depuis peu à Sainte - Marie - aux - Mines. M. Schreiber , Directeur, faïfant ouvrir une ancienne galerie, & ayant porté fes recherches au-délà de fon fonds, les Mi- neurs trouvèrent une matière molle, blanche ou grife, & très-légère, qu'ils ne foupçonnèrent nullement contenir rien de métallique. Une très-grande partie de cette matière fut perdue ou emportée par les grandes eaux, avant qu'on y foupçonnât rien d’extraordinaire, & plufieurs centaines de marcs d'argent ont été perdues, avant qu'il vint en penfée aux Mineurs qu'il pouvoit y avoir de ce métal précieux. Mais le coup-d'œil d'un vieux Maître-Mineur manquoit; une indif- poñtion avoit empêché d'aller à la mine depuis quelque £cms. M. Schreiber étoit abfent, & tout fembloit confpirer pour faire faire cette grande perte; mais enfin ce Maître- Mineur arrive, vifice les travaux, voit de notre matière À terre, en ramañle des échantillops; il les examine, il er mer Préfenté en Mars 1777- 718 : MÉMOIRE fur fa langue, il n’y fent aucun goût; il pafle la lame d’un couteau fur les parties folidifiées à l'air, elles deviennent lui- fantes comme le poli d’une glace; il comprime les molles; il voit que leur pefanteur devient plus fenfible à mefure que leur volume diminue; il voit encore que les parties expolces long-tems à l'air, deviennent d’un gris cirant fur le violet. Il ramafle enfuite tout ce qu'il peut de cette matière, il l'exa- mine encore & s'aflige: quelle eft la caufe de cette grande criftefle? Il répond qu'il y a de l'argent dans cette matière, & qu'on en a perdu beaucoup, -il court aufli-tôt à Sainre- Marie, frappe à la porte de M. Schreiber; eflayons, dit:l, cette matière fingulière, & il raconte à M. Schrerber tout ce qui s'eft pañlé. Ce Directeur voit cette matière, & y foup- çonne aufli-tôt de l'argent. Le fourneau de coupelle eft allu- mé; la fcorification s'en fait comme à l'ordinaire; aucune vapeur fulfureufe ne s’en élève, mais une matière blanche particulière. On coupelle, & on retire un grain d'argent qui annonce 5 5 livres d'argent au quintal. À cet afpe& M. Schreiber furpris, étonné, demeure plein de regrets par la perte qu'on a faite de cette matière. Il donne des ordres pour faire de nou- velles recherches à cet égard; mais la Nature refufe de faire de nouveau ce préfent. Plus il eft précieux, & plus il eft douteux qu’on le reçoive encore. Il faut s'en tenir au peu qu'on en a, & l'examiner de nouveau. Quelle eft cette ma- uère fingulière, m'écrit M. Schreiber> Examinez-la & mandez- moi ce que vous en penfez. Je reçus quatre morceaux de cette précieufe mine, chacun d'une once & demi à-peu-près. Je vis, comme le Mineur, que cette matière étoit fort friable, blanche en dedans, & en un mot reflemblante à une terre argilleufe non tenace. Je vis que l'endroit gratté paroïfloic bientôt de couleur brune tirant fur le violet; je me rappellai aufli-côt que l'argent préci- pité de la lune cornée, prend précifément la même couleur. Des foupçons me viennent aufli-tôt. Je cherche chez tous les Auteurs de Minéralogie les caraétères qu'ils ont aflignés SUR UNE ESPÈCE DE MINE 719 à cette précieufe & très-rare mine, quils ont nommé mine d'argent cornée. Cronftedt & Vallérius ne me difent rien qui {e rapporte à ma mine. Dans la leur, il y a du foufre, & dans celle-ci, il n’y en a pas; elle fe rapporteroitbien plus à celle que ce dernier Auteur expofe fous le titre de guhr d'argent ou de mine d'argent terreufe & friable. Je me rap- pelle que M. de Beden, Directeur-général des Mines aux Hartz, voyageant autrefois en France, montroit aux Ama- teurs de la Minéralogie un morceau de mine blanche à demi-tranfparente fur fes bords, & reflemblante aflez à de la corne, qu'il confervoit crès-foigneufement dans une boite d’or, comme autrefois les dévors leurs Reliques; il difoit que cette mine étoit la véritable mine cornée, c’eft-à-dire, une combinaifon réelle’ de l'argent avec l'acide marin; il difoit en avoir fait l’effai chymiquement; & tous ceux qui connoif- foient l'exactitude & les connoiflances de ce grand Mineur, Jen croyoient facilement; je me rappellai, dis-je, tout cela, & je ne trouvai encore aucune reflemblance entre cette mine & la mienne. Celle de M. de Beden ne changeoït pas de couleur à l'air; elle étoit folide, fe laïfloit couper comme Ja mine d'argent vitreufe, & la mienne n’a aucune de ces belles apparences. Je le répète, ce n’eft qu'une terre par l'ap- parence, & il faut apprendre, par cet exemple, à ne rien méprifer à caufe de l'apparence, mais à examiner particuliè- rement avant de juger. La première Expérience que je fis fur cette mine, fut de l'eflayer comme avoit fait M. Schretber. J'en pris crois quin- taux poids d'eflai; je les mis dans un fcorificatoire fous la moufle d’un de mes fourneaux de coupelle. Lorfque cette mine fut bien pénétrée de chaleur, elle fe grumela & s'af- fembla, en répandant une vapeur qui fencoit précifément comme celle qui s'élève de la fonte de la lune cornée. En fufion, elle ctoit blanche, & me piquoit les narines comme elle. Le feu augmenté, cette matière fe fondit en une matière noïrâtre bourbeufe, & les vapeurs blanchâtres furent plus W26 MÉMOIRE abondantes. Alors je portai dans le fcorificatoire fix quintaux de plomb d’effai (1). La fcorification fe fit très-facilement, & en moins d'un quart d'heure je trouvai l'eflai propre à être jeté fur plaque. Le bouton féparé des fcories, parfaitement vitrifiées & d’un beau noir, fut porté fur une coupelle propre à le recevoir. L'éclair paflé , il me refta un bouton du poids de r5o livres, ce qui fit so livres d'argent au quintal. La dif- férence du produit de mon effai d'avec celui de M. Schreiber eft de $ livres, quoique j'euffe pris de la mine la plus pure qu'il mavoit été poflible d’avoir. Cette différence ctoit peut- être dûe à ce que javois tenu plus long-tems ma matière dans le fcorificatoire pour avoir le tems d'examiner fuffilam- ment CCS vapeurs, qui avoienc vraifemblablement emporté une partie de l'argent. Je ne devois pis étre cronné de cette perte; Je vis au contraire par elle une nouvelle preuve de l'exiftence de l'acide marin dans cette Mine; car on doit favoir, & j'ai montré, dans mes Recherches fur la dif folution des métaux, que c’eft un effec ordinaire à cet acide d'emporter avec lui une portion de l'argent; mais il fe pou- voit aufli que je n'eufle pas effayé une partie de cette mine auili riche que celle qu'avoit employé M. Schrerber. 2. Je fis un nouvel eflai de cette mine avec un demi-. quintal feulement; je le fcorifiai le plus promprement qu'ik me fut poflible, pour ne pas donner le tems à l’acide d'em- porter l'argent, avant qu'il pât être imbibé dans le plomb. J'obtns cette fois-là sz livres d'argent au quintal; mais je n'oferois pas aflurer que ce foit là le véritable contenu en argent de cette mine; il fe peut encore qu'il y en ait eu une perte, 3. Après cela, je pris une demi-once de cette Mine ; je la mélai bien exaétement avec trois demi-onces d’alkali fixe Re Len T ie ty LE TISRREMRNES (1) On appelle Plomb d'effai ; un plomb qu’on a revivifié de la licharge la plus pauvre pofñlible, & provenant d’une Mine de Plomb très- pauvre elle- même en Argent, bica pur Ë SUR UNE ESPÈCE DE MINE 2r bien pur; je mis ce mélange dans un creufet bien graiflé in- térieurement. Je le couvris avec plufieurs plaques de fa- von gris; toutes précautions qu'il faut avoir pour réduire la lune cornée avec le moins de perte poñlible, Ce creufec, ayant été placé devant la tuyère de mon foufllet, je donnai le feu aflez vivement, comme il eft néceflaire dans cette circonftance. Tout fe pafla précifément comme dans la ré- duétion de la lune cornce. Comme d'elle les vapeurs s'en élevèrent, & le creufet fur fendu & crevé vers fon milieu; Jobtins un régule d'argent du poids jufte de deux gros, en y comprenant quelques grains, qui fe trouvèrent difperfés dans les fcories. Ce produit en argent répond parfaitement, comme on voit, à celui que j'avois obcenu par la fcorification; mais je n’en croyois pas moins avoir eu un déchet dans l'ar- gent, comme c’eft l'ordinaire dans cette opération, c’eft-à-dire, lorfqu'on réduit la lune cornée. Il y a, dans cette opération, une circonftance dont il ne faut pas négliger de profiter pour découvrir l'acide marin; c'eft que cet acide, felon que les Chymiftes le favent, doit pañler, lors de la réduétion de la lune cornée, dans lalkali fixe; mais ils ne favent pas tous que fi on mène cette opc- ration lentement, il n'y en pañle pas du tout, & que cet acide fe diflipe entièrement, en emportant avec lui une por- tion de l'argent. J'étois donc bien intéreflé à éviter certe faute, puifque je cherchois dans cette opération à découvrir l'acide marin, que je foupçonnois dans cette mine. Après donc avoir ramaflé foigneufement les fcories de cette fonte, je les pulvérifai; les ayant fait bouillir dans fuffifante quantité d’eau pure, j'en féparai par le filtre une lefive alkaline, dans laquelle je me propofois de chercher l'acide marin, qui de- voit y être combiné avec une portion de l'alkali fixe. Je partageai ma liqueur en deux parts; j'en fis évaporer une pour voir fi je n’appercevrois pas de fel marin fébrifuge; & fur l'autre, je fis les deux Expériences fuivantes. Après avoir faturé entièrement cette liqueur ayec du vinaigre diftillé, con: Tome IX, YYyY 722 MÉMOIRE centré & très-pur, je la partageai dans deux verres. Dans l'un; je verfai de la diflolution mercurielle; &, dans l’autre, de la dif- folution d'argent faite par l’efprit de nitre. Il fe fit dans tous les deux un précipité blanc, ce qui, comme le favent les Chymites, ne feroit pas arrivé dans cette circonftance, sil n'y avoit pas eu de l'acide marin. Alors je me crus fonde à admettre réellement l'acide marin comme partie conftituante de ma Mine, & voici comme Je my pris, pour mettre cette vérité en évidence, Si l'acide marin eft partie conftituante de ina Mine, me difai-je, c’eft-à-dire, fi l'acide marin y eft com- biné réellement avec l'argent, elle doit être la même chofe que la lune cornée & un étre falin comme elle, à quelque dif ference près, qui peuvent venir des matières étrangères qui sy trouvent confondues, comme la fcorification m'avoit donné lieu de le croire. La Nature me paroitroit bien bizarre fi elle nous donnoit des corps, qui n’auroient point les qualités pro- pies à leur efpèce. Nous n'avons pas à craindre en cette occa- fion de nous voir démentir. Comme il y a réellement de l'acide marin dans notre Mine, elle a auffi toutes les propriétés qui font eflentielles à la lune cornée; elle eft diffoluble comme elle dans l'eau, quoiqu'en ait dic plufieurs Chymiftes, & en dernier lieu M. Rouelle dans fes procédés chymiques. 4° Ayant pris un demi-gros de ma Mine, je la fis bouillir dans une chopine d’eau, & cette eau me fournit un enduic falin jaunâtre, qui pefoic quatre grains; ce qui répond, à quel- ques petites différences près, à la quantité que j'en avois diflous de la lune cornée ; ici il y en avoit un grain de plus: je dis en- duit falin, parce qu'il ne me fut pas poflble de faire cryftallifer cette liqueur, quoiqu'amence au point convenable pour celas clle parut toujours fort onétueufe , épaifle, & peu propre à per- mettre aux cryftaux de fe former. Cet état épais & onétueux n'étoit pas dû à la combinaifon propre de l'acide marin avec l'argent; on s'en doute bien, mais à quelques matières étran- gères à cette combinaifon : quelle eftelle cette matière ? Quef gion qui m'embarraffa d'abord; mais, ayant foupçonné , comme. ù SUR UNE ESPÈCE DE MINE 4 je l'ai dic, du fer dans cette Mine, je crus qué ce qui augmen- toit la quantité de la lune cornée difloute, la coloroit & en épaiflifloit la diflolution étoit une très-petite portion d'acide marin combiné avec une très-petite portion de fer, & que cette matière étoit intimement lice avec la lune cornce , fuivant une loi.que nous avons démontrée autrefois, par laquelle plufieurs fels métalliques fe confondent enfemble au point de ne former qu'une feule & même matière faline. Pour donc m'éclairer B-deflus, je fis diffoudre les quatre grains de ma ma- tière dans de l’eau diftillée, & je lavai bien dans la même eau la capfule qui avoit fervi à cette opération. Sur cette nou- velle diflolution, je verfai quelques gouttes de la liqueur fatu- rée du bleu de Prufle, felon la méthode de M. Macquer, & jeus dans l'inftant la fatisfaétion de voir qu'il sy formoit un bleu de Prufle. Mais pour profiter, autant qu'il me feroit pof- fible de cette Expérience, je verfai fur cette même liqueur quelques gouttes d’alkali fixe diffout & bien pur. Mon inten- tion étoit de décompofer par-là la véritable combinaifon de l'argent avec l'acide marin, & de tâcher de découvrir enfuite cet acide par une de ces petites Expériences qu'on a coutume de faire dans les Laboratoires quand on fait des recherches, & dont j'ai parlé plus haut. Après donc avoir faturé l'excédent de l’alkali qu'il pouvoit y avoir dans cette liqueur , jy verfai quelques gouttes de difolution mercurielle , & j'eus fur-le: champ un précipite blanc. Mais j'ai dit plus haut que j'avois expofé une portion de la leflive de mes fcories en évaporation; 1l eft cems de voir ce qui s'y montre. Tout ce que je viens de rapporter s'étoit paflé pendant que cette évaporation fe faifoit. Cette liqueur s'étoit évaporée prefqu'entièrement ; mais je ne pus y appercevoir de cryftaux de fel marin diftinéts & féparés de l’alkali fixe, & on fait qu’en pareïlle occafion rien n’eft plus difficile que de les avoir diftingués; tout ce que je pus faire, ce fut de goûter certe matière faline, en qui je crus déméler le goût du fel matin fébrifuge de Sylvius, Yyyy ÿ \ 724 MÉMOIRE 5.” Cette démonftration n'éranc pas fuffifante pour moi, je pris encore deux gros de ma Mine; je les fis bouillir dans trois intes d'eau, avec un gros de fel alkali fixe. Rien n’eft plus difficile que de décompofer de cette manière la lune cornée, & je m'atrendois bien d’éprouver en cette occafion la même difficulté ; mais cette difficulté même devoir m'éclairer fur Panalogie de ma Mine avec la lune cornée. Apres avoir donc fait bouillir long-tems cetce eau, je la filtrai; &, comme je la trouvai encore fort alkaline, je ne nvavifai pas d'y chercher des cryftaux de fel marin; j'aurois éprouvé la même difficulté ue j'avois eue précédemment, je faturai feulement l'excédent de l’alkali au moyen de l'acide du vinaigre concentré, diftillé, & je cherchai à y découvrir enfuite l'acide marin par les réa@ifs: en confequence jy verfai de la diflolution d'argent; j'eus dans Finftanc un précipité blanc, & tel qu'a coutume de le donner le fel marin diffout & étendu dans beaucoup d’eau. Toutes ces Expériences concourent, comme on voit, à faire connoître que l'acide marin exifte réellement dans notre Mine, & que cet acide y eft combiné avec l'argent; mais, comme la Chymie m'offroit d’autres reflources pour porter cette démonftration au plus grand degré d’évidence , il eùüt C9 0 . » . e Fe te imprudent à moi de m'en tenir à cet eflai feulement. 6. Je pris donc encore une demi-once de ma Mine; je la mélai avec deux gros de régule d’antimoine en poudre bien pur & bien ner. Ce mélange fut mis dans une petite cornue de verre, que je plaçai au bain de fable; &, lui ayant ajufté un récipient dune capacité convenable, je l'y laiflai éprouver Patton de la chaleur. À peine ce petit vaifleau fut-il chaud, que je vis s'élever de fon fond des vapeurs blanches , & telles qu'a coutume d'en donner le beurre d’antimoine ; je vis enfuite des ftries jaunâtres & ochracées s'attacher aux parois de ce vaif- feau : en un mor, je vis tous les fignes qui ont coutume d'ac- compagner la formation du beurre d’antimoine; mais je n'eus pas la fatisfaétion de voir pafñler dans le récipient de cette ma- SUR UNE ESPÈCE DE MINE 5 “üère faline ; le peu qui s’en -éleva s’attacha aux parois du col de la cornue, & sy deffécha ; C'étoic fans doute faute d'humi- dité, & ce qui prouveroit peut-être que l'acide marin eft en- core plus concentré dans la lune cornce qu'il n’eft dans le fa- blimé corrofif, marière avec laquelle on fait bien plus commu- nément le beurre d’antimoine qu'avec la lune cornée, qui _neft même connue de la plupart des Chymiftes pour être fuf ceptible de fe décompofer au moyen du régule d’antimoine que d'après la table-des affinités de M. Gcoftroy. Cependant On conçoit que, dans cette occafion, la partie de l'acide matin que je foupçonnois être unie à une portion de fer, me devoir pas la quitter pour s'attacher par préférence au régule d'an- timoinc ; car on fait que c’eft précifément le contraire, & que l'acide marin s'attache par préférence au fer; mais il y avoie lieu de croire que la décompofition qui s’étoit faite dans cette occafion de la vraie combinaifon de l'acide marin avée Par- gent, avoit rompu la liaifon qu'il y avoit entre ces deux ma. tières; que la première devenue libre par-à s'étoit aufli élevée comme nous venons de le remarquer, & que c'étoit elle qui coloroit en jaune les paroïs du vaifleau ; mais, pour rendre cette conjecture plus probable, je mis aufli-tôr deux gros de ma Mine dans un petit matras, à qui je fis éprouver le même degré de chaleur que la cornue, & pendant le même tems; rien nemonta, & il ne fe montra aucune tache ferrugineufe au parois de ce vaifleau ; la matière parut feulement rOugeitre & moins pulvérulente que lorfque je l'y avois mife, le fond même avoit acquis de la difpofition à fe fondre. Après avoir fait cet eflai de com araïfon , je.voulus voir décidément fi 'avois fait réellement du beurre d’antimoine. 1] eft des moyens de le reconnoître Plus particulièrement. Le beurre d’antimoine fe décompofe, comme on fait, dans l’eau ; fa partie métallique fe fépare de l'acide & fe précipite fous la forme d'une chaux très-divifée. Je pouvois voir tout-à-coup cet effet en verfanc de l’eau dans Ma cornuc; mais je voulus 716 MÉMOIRE me ménager le moyen de le voir plus à l'air, en n'y en verfant que quelques gouttes d'abord , & ce qu'il en falloit feulement pour délayer la matière fans la décompofer entièrement. Je tecirai de cette manière quelque peu d'une liqueur on&tucufe, qui imprimoit en effet un goût foible de beurre d’antimoine fur la langue. Cerre liqueur fe blanchit & fe troubla un peu plus lorfque j'y mêlai davantage d’eau. J'ai dit que j'avois cru reconnoître une portion ferrugineufe unie aufli à l’acide ma- rin dans cette matière; c'étoic ici une belle occafion de véri- fier cette conjecture, & rien n'étoit plus aifé; car on fait que cette combinaifon n'eft pas fufceptible de fe décompofer comme le beurre d’antimoine au moyen de l’eau; à cet effet, je mis une très-petite pincée de noix de galle dans ma liqueur, en peu de tems, elle devint très noire. Comme javois lieu de croire que ma Mine n’etoit pas par- faitement pure, je foupçonnai aufli qu'il pouvoit y avoir une partie de chaux de fer indépendante des combinaifons de Pacide marin, & rien n'étoit encore plus æifé que de vérifier certe exiftence. 7." À cet effet, je mélai un gros de ma Mine dans un ma- tras avec de l'acide vitriolique; j'en mêlai autant avec chacun des autres deux acides mineraux ; & ayant fait bouillir tous ces mélanges au bain de fable, je vis que chacun d'eux s'éroit charge d’une portion confidérable de fer; car non-feulement ils s'étoient tous colorés en jaune, mais encore la noix de galle les faifoient venir noirs comme de l'encre. Je dois remar- quer encore, en ceette occalion, que l'acide marin me parut chargé de quelque chofe de plus que du fer ; car, l'ayant faic évaporer après l'avoir filtré, je vis qu'elle étoit devenue épaiffe & cauftique; propriété qu'on ne rernarque pas dans la diflo- lution fimple du fer par l'acide marin ; mais, m’étant refou- venu que tous les fels métalliques font fufceptibles de fe diflou- dre dans le même acide dont ils font formés, je crus quen SUR UNE ESPÈCE DE MINE 727 cette occafion l'acide matin avoit diflous une partie même de ma Mine, & jen vis la preuve lorfqwayant précipité au moyen de l'alkali fixe tout ce qui put fe précipiter de cette , liqueur, je fs redifloudre ce précipité dans de l'acide nitreux, où ayant mis enfuite un peu d'une diflolution de fel marin, jeus un précipité blanc. Le même effet n’eut pas lieu avec les diflolutions faites par les autres acides. 8.° Cependant l’exiftence du fer dans ma Mine, me donnoit de la fufpicion fur la pureté de l'argent que jen avois obtenu par la fonte; car ; quoique je n’y eufle mis aucune matière qui pûc fournir du phlogiftique à ce fer en chaux, il fe pouvoir néanmoins que l'argent en eût retenu une partie avec Jui en s'aflemblant au fond du creufer, & que ce fer ne fût pas aflez déphlogiftiqué pour fe refufer à cette aflociation. Il étoit donc important de voir de combien l'argent en pouvoit étre rendu impur. En conféquence je mis un quart de quintal de cet argent fur une coupelle apparcillée ; & , lorfqu'il fut en l’étac convenable pour ‘être coupellé, jy portai un quintal de plomb d'eflai. Le bouton, qui me refta, m'annonça deux livres de perte au quintal, & cette perte ne pouvoit être dûe qu'au fer fcorifié dans cette opération. L'exiftence du fer eft donc démontrée dans cette Mine indépendamment de celui qui en fait partie véritablement, c’eft-à-dire, de celui qui éft combiné avec l'acide rmarin comme l'argent; mais cette exiftence ne peut que jetter dans l'embar- ras, quand on fait avec quelle facilité le fer décompofe la lune cornée. Il faut croire que, dans cette occafion-ci, il y a deux circonftances qui empéchent cette décompofition : la première, eft que ce fer y eft dans l’état de chaux, & la feconde, eft qu'il n’y eft pas mêlé bien exaétement; on voit en cffec des parties ochracées dans cette Mine : mais n'y a-t-il pas d’autres parties ferrugineufes étrangères à la compofition de cette Mine ? Voilà ce à quoi nous ne faurions répondre. 728 MÉMOIRE 9. Cependant cette facilité même qu'a la lune cornée de fe décompofer au moyen du fer, & remarquée de nouveau en cette occafion-ci, par des lames de couteaux que j'avois pañlé. fur ma Mine, qui fe font trouvées peu de tems après tachées très-fortement, me fournifloit une nouvelle idéc de rendre l'acide marin fenfible dans cette Mine. Je triturai de la limaille de fer neuve avec deux gros de ma Mine, après quoi j'humec- tai ce mélange avec de l'eau ; quelques heures de repos m'ap- prirent qu'il n'étoit pas même néceflaire, pour faciliter cette décompoftion , de lui faire éprouver l'aétion de la chaleur, le gonflement & le changement de couleur m’apprenoit aflez qu'elle éroit déjà faite; je le plaçai néanmoins fur le bain de fable pour en être plus afluré, La matière étendue dans de l'éau, je filcrai, & j'en eus une vraie diflolution de fer ; mais étoit-elle faite par l'acide marin? C’eft ce que nous allons voir. Je verfai deflus de l'alkali fixe ten liqueur, en prenant garde toutefois de n’en mettre que ce qu'il en falloit pour faire pré- cipiter le fer. La précipitation du fer étant faite, je filtrai la liqueur, & la fit évaporer dans une capfule de verre au bain de fable : alors je vis diftinétement & clairement des cryftaux de fel marin fébrifuge de Sy/vzus ; je vis, en un mot, la confir- mation de mes autres démonftrations; mais, comme fi j'en devois douter encore, je verfai de l'huile de vitriol deflus, & il en partit des vapeurs très-fortes d'acide marin. Voilà donc notre Mine reconnue pour être la véritable Mine d'argent cornée, tant célébrée par les Minéralogiftes Allemands, & fi vainement, puifque celle qu'ils nous prefen- toient pour exemple de cette efpèce n’en étoit réellemene pas.(a) à l'égard de la manière de la fondre en grand, & (a) On voit que M: Lehmann reconnoït de l’Arfenic dans la fiennes voyez la Page 115, Tome I. de fes Œuvres Phyfiques; M. Géllert, page 52 de la Chymie Métallurgie y admet du: Soufre & de l’Arfenic. d'en retirer SUR UNE ESPÈCE DE MINE 729 d’en retirer l'argent; il n’en eft point de plus expéditive , je crois, & de meilleure que de la jeter peu-à-peu dans un bain de coupellation. J'ai eu occafion de remarquer que cette Mine s'imbibe aflez facilement dans le plomb fondu, & qu’elle s'y fcorifioit très-facilement, & la raifon de cela, je crois, vient de ce que l'acide marin quitte l'argent pour s'attacher au plomb ; c’eft Kunckel qui a fait cette remarque le premier, comme on peut le voir dans fon Laboratoire chymique, page 311, & par-là on conçoit facilement que l'acide maria n'a pas le tems.de volatilifer l'argent. Comme lune cornée, notre Mine fourniroit 6o livres d'argent au quintal, fi elle n’étoit pas mélée avec quelques matières étrangères ; or ces parties étrangères, nous l'avons dit, font une portion remarquable de chaux de fer & d’autres parties terreufes; j'y ai même vu des parties quartzeufes qui y étoient intimement unies, & on fait d’ailleurs qu'il n'y a pas de Mine parfaitement pure, & qui ne contiennent plus ou moins de parties terreufes. Les plus pures font celles qui font cryftallifées ou en cryftaux réguliers diftinéts & féparés les uns des autres; mais notre Mine, comme nous l'avons dit, n’a que l'apparence d'une terre. Dans l'envoi Cependant que M. Schreiber m'a fait, il Seft trouvé un morceau quartzeux, auquel eft adhérent une portion très-petite de cette Mine {olide & compaéte, qui fe laïfle couper aifément au couteau, qui eft crès-flexible, qui fe ternit à l'air, & y devient d'un brun- violet comme celle qui eft terreufe ; mais je conferve cet échantillon très-précieufement pour me fervir de point de comparaifon dans d’autres occalions, Tome IX, Zzz2 Préfenté en Juillet 1770 MEMOIRE SUR . UNE NOUVELLE ESPÈCE D E,::MO'U-C:HES D.U:/G'ENREVD EST CINTIESS Trouvée dans l'enceinte de la Ville de Lyon. Par M. DE LA TOURETTE. L'ivsecre que je vais décrire, & fur lequel je hafarderai de courtes réflexions, m'a paru une efpèce nouvelle, ou, pour mieux m'énoncer , une cefpèce inconnue à M. de Réaumur , à M. Linneus , ainfi qu'à MM. Geoffroi, Scopoli , Scheffer & autres Savans Entomologiftes, dont jai parcouru les Ecrits (1). Quelques particularités extraordinaires, dans fa conformation, la rendent digne d'attention, aînfi que fa rareté: je ne l'ai vue que deux fois; je lai rencontrée, deux années de fuite, dans un jardin fitué au fud-eft, fur la montagne de Fourrières, au mois de Juillet, le foir après le x) Depuis que ceci eft écrit, au commencement d'Oétobre, j'ai en oc- cafion de voir M. Defauffure, Profefleur de Phyfique à Genève, de lui mon- trer cette Mouche, & de lui communiquer une partie de mes Obfervations. Il n'a dit que , fuivant un deffin qu'un de fes Amis lui a envoyé de Ja Suifle , le même Infecte y a été trouvé depuis peu, MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE. 730 coucher du Soleil, toujours fixée tranquillement contre la tige d'une plante. C’eft une mouche femelle à quatre ailes nues. Sa grandeur & fes couleurs pourroient la faire prendre, au premier coup- d'œil, pour une guêpe ; mais fon allure eft plus lente; elle en diffère d’ailleurs eflentiellement , comme on le verra. Je n'ai pas encore pu découvrir le mâle. Le fond de la mouche eft noir, avec des taches d’un beau jaune citron. Ces couleurs, examinées à la loupe, pré- fentent une furface chagrinée, brillante, femce de quelques poils gris & courts, qui font en plus grand nombre à l'extrémité de l'abdomen ; on ne les aperçoit pas avec les yeux. La longueur totale de la mouche cft de fept lignes: LA TÊTE, naturellement inclinée fous le corcelet, eft noire & triangulaire ( voy. fig. 1, lettre a); elle porte, fur les côtés, deux gros yeux convexes, d’un brun luifant, chagrinés très-finement; & en haut, fur le derrière, trois autres petits yeux noirs, brillans, difpofés en triangle. (Foy. fig. 3, etre a ). j Les antennes font cylindriques, mais un peu xenflées vers leur extrémité, & brifées en deux portions inégales (voy. fig. 3, lettre b). La première articulation trèscourte, d'une demi-ligne environ, fe relève entre la tête, & sem- boîte entre deux petites éminences jaunes, au milieu du front. Les grandes articulations, compofées de dix anneaux, font alors en avant, dans la pofition des antennes d'un fphinx (voy. fig. x & 2, Lettre b); elles ont deux lignes c long. Les petites articulations font noires parderriere, & jaunes pardevant; les grandes toutes noires. La bouche fimple, armée de mâchoires latérales, dures; Zz2z ij #22 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE courtes & noires, porte fur les côtés, quatre antenules filiformes ( voy. fig. 2, lettre a). LE CORCELET d'un noit chagriné, relevé en bofle, eft très-gros, proportionnellement au refte du corps (voyez fie. 1 & 2, leurre c) ; quoiqu'il paroïffe folide , il eft compofé de trois pièces raflemblées. Sur la première, qui touche à la tête, on voit deux lignes jaunes, parallèles, qui, par leur ñ : AE / réunion fur les côtés, forment une forte de parallélogramme. La pièce du milieu porte, fur fa convexité, deux points jaunes, & de chaque côte, au-deffus de linfertion des ailes, une parcille tache triangulaire, une autre tache jaune, en forme de cœur évale, occupe une petite éminence irrégu- lière, faifant partie de la troifième pièce qui appuie contre l'abdomen. Les quatre ailes partent du corcelet, elles font planes, nerveufes, brunes. Vues à la loupe, leur furface paroïît femce de petits points fymmétriquement rangés, les ailes fupérieures font plus longues que l'abdomen, les inférieures plus petites, & d'un brun moins foncé. Les fix pattes tiennent également au corcelet; les deux premières placées latéralement près de la tête, les deux fuivantes en-deflous. Ces quatre pattes fonc fimples ( voyez fig. x & 2, lertre d) ; leurs cuiffes portent une tache noire; cout le refte eft d’un jaune clair, ainfi que la jamoe. Les rarfes, d'un jaune fauve, font compofés de cinq articles. Les deux pattes poftérieures font remarquables par leur conformation ( voy. fig. 1 & 2, lettre e ); leurs cuifles ne font pas immédiatement adhérentes au corcelet; elles font précédées de deux articulations qui partent de l’infertion des ailes, & qui font très-fortes, noires, avec une tache jaune. Ces deux corps réguliers ont chacun une ligne & demiede lon- DU GENRE DES CINIPS 733 gueut. Le premier tient au corcelet, & embrafle le fecond qui fe termine par un filet, auquel la cuifle s'attache. Cette cuiffe très-courte, eft remarquable par fa forme ovale; convexe, en manière de bouclier, dout le bord inférieur eft armé de cinq dents, qui font noires, écailleufes & pointues. La cuifle eft jaune, avec une grande tache noire. La jambe, pour s'adapter à la forme de la cuife, eft elle-même cour- bée, de manière qu’elle l'embrafle circulairement lorfqu’elle s'y rejoint. L’ABDOMEN, qui comprend le dos, en-deflus, & le ventre en deflous, préfente d’autres fingularités. Sa longueur eft de quatre lignes & demie; fa hauteur de trois ; fa plus grande largeur de deux. Il eft, comme le corcelet, d’une fubftance corneufe, dont la confiftance peut étre comparée à celle des élitres des fcarabés. Sa furface eft chagrinée; fa couleur, d’un beau noir, coupée de chaque côté par quatre bandes jaunes, d'inégales longueurs, les plus courtes placées auprès du corcelet. La forme de l'abdomen peut être comparée à celle fous laquelle on peint une larme. C’eft un ovale, prefque aigu à une extrémité, & de l’autre très-obrus. Le côté pointu adhère au corcelet, par un pédieule court à peine: vifible. Si l'on confidère la partie poftérieure de l'abdomen, vue de face ( voy. fig. 3 ), l'ovale paroi applati des côtés, & refferré en-deflous. On n'apperçoit point d’anus à Ja place quil occupe dans là plupart des infectes. Un argur{lon noir, corneux,prefque cylindrique, marqué d'unelignelongitudinale, paroït à l'œil venir de deflous le ventte, Paccompagner . dans fa courbure par le milieu, & fe diriger fur l'abdomen | Comime une queue (voy: fig 1, lertre f, 6 fig. 3, lertre c), de la manière à-peu-près que certains quadrupèdes portent quelquefois la leur, ceft-adire, prefque parallèle à la partie fupérieure du dos, un peu relevée néanmoins, & formant, à 734 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE à fa naiflance, un angle aïgu. Cette portion extérieure de l'aiguillon a trois lignes de longueur; elle eft, à peu de chofe pres , aufli longue que l'abdomen. L'aiguillon eft doué de quelque mouvement; mais on ne fauroit, même dans l'animal vivant, le drefler à angle droit fur l'extrémité de l'abdomen, encore moins le ramener à la direction du corps. Voilà les objets tels qu'ils fe préfentent au premier coup- d'œil; avec le fecours de la loupe, on en découvre de nou- veaux. Si l’on obferve l'abdomen, vu par fà partie latérale, la courbure de fon extrémité poftérieure, n’eft pas aufli fimple qu'elle le paroït de face ( w0y. fig. 1, lettre g ). On apperçoit à l'extrémité du dos, au-deflus de la place que l'anus devroit occuper, une petite éminence terminée en forme de bec pointu, de la couleur & de la confiftance de la corne. L’ai- guillon femble fortir de ce point, qui cependant ne lui fert que d'appui; on verra que fon origine eft intérieure. En continuant d'examiner l'abdomen latéralement, on re- connoît qu'independamment des quatre bandes jaunes dont j'ai parlé, il eft divife tranfverfalement par des lignes noires, luifantes, mais peu fenfibles, & quatre anneaux de largeurs inégales, qui s'articulent les uns dans les autres. Lorfque la mouche eft morte, ces anneaux font immobiles; mais, dans l'infeéte vivant, une des articulations a la faculté de s'ouvrir; c'eft la première du côté du corceler ( voy. fig. 4, leure a ). À la volonte de l’infeéte, elle fe déboîte par le haut, & la partie inférieure fait la fonction de charnière, de cette manière la mouche plie l'abdomen en-deflous; elle le relève enfuite, ce qui communique à l’aiguillon un mouvement différent de celui qui lui eft propre, & dont je parlerai. Lorfque le ventre eft baiflé & l'articulation déboitée en- deflus, la partie entrouverte préfente une petite cavité, dans Les DU GENRE DES CINIPS 735 lintérieur de laquelle, & vers le centre, on apperçoit, avec la loupe, un petit bouton rougeûtre, charnu, doué d'un mou- vement de contraétion & de dilatation (voyez fig. 4, lettre b ). En procédant à cet examen, javois piqué la mouche au travers du corcelet, avec une épingle, afin de la tenir fixée. Elle agitoit de diverfes manières fa têre , fes antennes , fa bouche, fes pattes, faifant effort pour fe débarrafler. Lorfque je tournai en face de moi la partie poftérieure de l'abdomen qui, depuis l'articulation entrouverte, m'avoit paru un corps folide en tout fens, je fus furpris de reconnoïtre que cette portion étoit aufli en mouvement, mais dans une direction oppofée. Je vis (fig. 4, lettre c), que cette partie pofté- rieure de l'abdomen étoit fendue verticalement par le mi- lieu, fur fa courbure, même en-deflous, & comme divifée en deux lames ou corps convexes à l'extérieur, applatis en- dedans, qui s'entrouvroient de droite & de gauche, & fe refermoient continuellement par un mouvement latéral, tel que feroit celui d'un foufflet couché fur le côté, de manière - néanmoins que la fente réfultant de l'ouverture, étoic plus large en bas que vers Le dos, . En obfervant ce mécanifme avec une forte loupe, je re- connus aufli que l’aïguillon, qui m’avoit paru fimple, étoit triple, comme celui de quelques autres mouches à quatre ailes; qu'il étoit compofé d’un aiguillon véritable, & de deux demi-fourreaux plus longs que lui, fillonnés intérieurement pour lui fervir d'étui ( voyez fig. 2, leutre f). Ces fourreaux prennent naiffance fur le haut de la partie poftérieure de l'abdomen, qui eft fendue, ils font appuyés, à leur origine, fur le petit bec alongé que j'ai décrit; ils fonc écaïlleux, flexibles, mais immobiles par eux-mêmes, de forte qu'ils participent feulement du mouvement de l'abdomen lorfqu’il fe plie & fe redrefle, ou de celui de fes deux portions 736 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE latérales lorfqu'elles s'entr'ouvent. Dans le premier cas, ils ne fe féparent point de l’aiguillon vrai; dans le fecond, ils sen détachent , & s’y rejoignent alternativement, en s’ouvrant & fe refermant avec les lames de l'abdomen. L’aiguillon vrai contenu entre les fourreaux partage, comme eux, le mouvement de l’abdomen lorfqu'il fe haufle & fe baïfle; mais il en a d'autres qui lui font particuliers. L'un eft un mouve- ment fur lui-même, au moyen duquel il paroïît, à fa pointe, tantôt plus haut, tantôt plus bas que les demi-fourreaux, quittant, & reprenant leur direction. L'autre eft un mouve- ment en avant & en arrière, au moyen duquel il fort de fon étui & y rentre. Lorfque les portions latérales de l'abdomen s'entrouvent & fe referment, comme on l'a expliqué, lai- guillon salonge & fe raccourcit, c'eft-à-dire, que relative- ment à fa polition il s'approche ou séloigne du corcelet, ce qui ne peut fe faire qu'en fuppofant un reflort interne, qui n’eft autre chofe que la bafe de ce même aiguillon, prolongée dans l'intérieur, & roulce en fpirale élaftique. Cette efpèce de reflort eft connu dans l'hiftoire des mou- ches à quatre ailes; il forme le caraétère d’un des genres de M. Wen Linné; M. Geoffroi ladmet dans plufieurs efpèces; M. de Réaumur eft le premier qui l’a obfervé, décrit & fait defliner (r). « L’aiguillon de ces mouches, dit-il, après être » entré dans le corps, fe courbe pour fuivre la convexité du ventre, il va ainfi auprès du corcelet; là, en continuant de fe courber, ou même en fe courbant davantage, il retourne fur fes pas, il revient du côté du derrière, en fe tenant au- deflous de la ligne qui marque la longueur de la partie fupérieure du corps; il va ainfi jufqu'aupres de l'anus; c'eft » Jà qu'il fe termine & qu'eft fon attache. Ce bout de l'ai- 8 CSC (1) Mémoire pour fervir à l’Hiftoire des Infeétes, Tome IIT, pag. 485; PL, 46, Fig. IX, & PL. 33, Fig. VI & VII guillon, PART pot D'U' GENRE D ES ICI NE BIS: 737 # guillon, qui en doit étre regardé comme la bafe, eft donc » fixe dans le corps prefque vis-à-vis & au-deflus de l’en- 5 droit où eft l’autre bout du même aiguillon, où eft fa » pointe, &c, » ? Ce mécanifme a beaucoup de rapport à celui de la langue du PIC-vert ; quoiqu'aflez courte en apparence, elle s'alonge à la volonté de l’oifeau fort au-delà de fon bec, pour aller chercher {à proie, parce que la bafe, qui lui tient lieu d’os yoïde, eft une lame offeufe , roulée comme un reflort de montre, qui a la faculté de fe dérouler & de prolonger la lans gue hors du bec. Si javois pu me procurer plufieurs mouches femblables à celle que je décris, j'aurois ouvert l'abdomen pour m'aflurer; par moi-même, de cette organifation intérieure; mais, par analogie, on doit néceflairement la reconnoître pour conforme à la defcription de M. de Réaumur, fans quoi le jeu de l'aiguillon, dont jai parlé, ne pourroit avoir lieu. Étant d’une confiftance de corne, il eft évident qu'il ne peut s’alonger fur le dos que par un prolongement intérieur & le déroule- ment de fa bafe. Après la mort de la mouche, j'ai entrouvert les demi- fourreaux avec la pointe d’une épingle, l'aiguillon véritable sen eft dégagé & s'eft un peu relevé ( voy. fig. 2, lettre f) ; Je l'ai examiné alors plus exaétement avec Îa loupe; il m’a paru noir, à demi-cylindrique, un peu applati latéralement, fur- tout vers la pointe, qui eft aigue, recourbée en-deflous, & d'une couleur plus claire. La portion applatie repréfente un couteau, dont le tranchant eft dentelé, mais fi légèrement ge la plus forte lentille peut à peine faire découvrir fes ents. M. de Réaumur (1), en obfervant l’aiguillon d’une mouche analogue à la nôtre, quoiqu'infiniment plus petite, prétend RE (1) Ibid. pag. 489, Tome IX, Aaaaa 738 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE que cette extrémité dentelée que la loupe fait appercevoir; & quil nomme sarriere, eft elle-même l'étui d'un autre aiguillon extrêmement fin, & qu'il a vu cet aiguillon délié fortir de la tarriere, & y rentrer; ne feroit-ce point l’effec apperçu du vétitable aiguillon entre fes demifourreaux? Ce uil y a de certain, c'eft que je n'ai pu rien découvrir de femblable à l'aiguillon de notre mouche: fon extrémité paroît folide; mais on doit fe méfier de fes yeux, lorfqu'on voit différemment de ce prodigieux Obfervareur; d'ailleurs ce peut être une paiticularité de la mouche de l'églantier, dont il parle, malgré tous les rapports que je lui crois, en petit, avec celle qui fait l'objet de nos recherches. Pour terminer la defcription de fes parties intérieures, ÿa- jouterai qu’en la renverfant, il s'en préfente encore une fin- gulière. Nous avons vu que, dans l'état de tranquillité, le deflous du ventre ( voy. fig. 1, lettre k), païoît noir, Cot- neux, applati des côtés, aigu par le milieu, conformé de manière qu'on diroit que la partie inférieure de l'aiguillon vient, en fe repliant, fe prolonger fous le ventre, jufqu'au- près du corcelet; maïs une plus exaéte obfervation nous à fait voir que l’aiguillon fortoit de l'abdomen au-deflus de fa courbure poftéricure; elle découvre aufli que la portion aigue du ventre , eft un corps très-diftinét de laiguillon. Si l'on inquiète la mouche, elle fait mouvoir ce corps, qui eft une petite écaille en forme de carène, longue, étroite, atrachce auprès du corcelet, terminée en pointe à l'autre extrémité ( voy. fig. 2, lettre g). L'écaille fe foulève de ce côte, & fe replace en s'adaptant au ventre, & lembraflant en partie. Je l'ai fair agir plufieurs fois avec la pointe d’une épin- gle, mais on ne peut la foulever que d’une ligne environ; de forte qu'il n’eft pas poffible de bien voir les parties qu'elle recouvre. Quoi qu'il en foit, la mouche que je viens de décrire pré- fenté des particularités dans l’organifation des infeétes; elles DU GENRE DES CINIPS ‘39 peuvent donner lieu à pluficuts obfervations: je ne hafarderai que’ quelques conjectures, 1° fur l'ufage des parties extraot- dinaires qui la diftinguent; 2.° fur le genre qu'il convient de lui afligner. La tête, les antennes, la bouche, le corcelet, les ailes, les quatre pattes de devant n'ont rien de fingulier; mais les cuifles poftériéures en forme de bouclier dentelé, d'une grofleur démefurée, font crès-remarquables, ainfi que les deux corps, -au moyen defquels elles s'attachent au corcelet. Il neft pas aifé d'imaginer de quel ufage elles peuvent être; elles one l'air d'embarrafler l'infe&te; par leur pofirion , elles ne peuvent lui fournir une défenfe; placées aux pattes de derrière, il ne fauroit s'en fervir à fair fa proie; il ne s'en fert pas non plus pour fauter, quoique les cuifles renflées annoncent cette fa- culté dans plufieurs infectes. On peur préfumer quelles lui font utiles pour fe cramponner lors d’une opération dont nous parlerons bientôc. Au refte, cette conformation n’eft pas unique chez lesmou- ches à quatre ailes. M. Wen Linné décrit à-peu-près de même celle de lchneumon rufpaftor. ... fémoribus clavatis pofti- “cts dentatis (1); & , fuivanc la defcription que M. Geoffroz donne de fa guêpe déginguendée , {es cuiïfles poftérieures pa: roiflent abfolument femblables (2). A l'égard de l'abdomen, la première obfervation qui fe préfente eft que, vu fa conformation & la pofition de l'ai- guillon , l'anus & les parties de la génération n'occupent pas leur place ordinaire, & qu'il faut les chercher ailleurs. Je ne crois pas qu'ils foient ici rapprochés, commeils le font dans les autres infeétes. Suivant l’ordre commun, l'anus fe- roit à la naïflance de l'aïguillon fur le petit bec écailleux, qui EE nn (1) Syft. nat. Edition de 1767, pag. 937. (2) Hiftoire des Infeétes des environs de Paris, Tom. IT, pag. 380. Guépe, Ne 16, celle du N° 35 a le même caragtère. Aaaaa ji 740 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE lui fert d'appui; mais, ici, les excrémens tomberoïent fur le dos de la mouche, à moins qu'elle ne fe plaçât la têce en bas : aufli ne voit-on là aucune apparence de cet or- gane, & je foupçonne qu'il eft placé fous l’écaille navi- culaire, ce qui fuppofe à l'inceftin une difpofition par- ticulière. Je crois, avec encore plus de vraifemblance, que le fexe cft logé fous le premier anneau du dos. J'ai fait obferver que lorfque l'articulation sentrouvroit, on voyoit, dans l'intérieur, une petite cavité, & au centre un petit corps charnu, rougeâtre qui fe dilatoit & fe contraétoic : c’eft-là ce qui me paroît étre la partie du fexe, & le lieu de la fécon- dation. J'ai été conduit à cette conjetture en appercevant far les bords de la cavité un petit corps rond, brun, gluant, qui avoit toute l'apparence d'un œuf de mouche. Ce dépla- cement, dans les parties de la génération, n'a rien d'étonnant parmi les infectes; pour fe borner à un exemple, celui de la Demoifelle ( Libellula ) eft aufi extraordinaire (1). D'ailleurs, fi lon confidère l'ufage des aiguillons, triples dans les mouches à quatre ailes qui en font pourvues, & la pofition particulière de celui dont il eftici queftion, on recon- noîtra que la partie du fexe ne pourroit guères occuper une autre place. eo CL] Le triple aiguillon n’eft pas deftiné à fervir d'arme offen* five, c’eft une carrière propre à ouvrir une entaille dans une écorce ou une feuille pour y dépofer les œufs. Une canne- lure pratiquée fur fa longueur, fait l'office d’un canal, par le- quel l'œuf coule dans le trou où il eft introduit par la pointe de la tarrière; voilà le mécanifme ordinaire, lorfque l’aiguillon cft droit & fur la même ligne que le corps; mais cette opé- ration devient impoflible pour notre mouche, dont l’aiguillon replié, pour ainf dire, sétend fur le dos, de manière que fa (1) Voy. Inf. Réaumur, Tom. VI, pag. 421. DU GENRE DES CINIPS 741 pointe regarde la tête, & que, par le mouvement qui lui eft propre, il s'en rapproche & s’en éloigne. Pour fe repréfenter la mouche travaillant à pratiquer un logement à fes œufs, il faut la fuppofer placée à l'infertion d'une feuille, à la bifurcation d'une petite branche, cram- ponnée contre la plante, opétant derniète elle de bas en baut, & ouvrant dans l'écorce un trou à-peu-près visivis de fon corceler. Si la partie du fexe étoit à l'extrémité de l'abdomen ou fous le ventre, on conçoit que l'œuf à fa fortie tomberoir fans que l'aiguillon pût le diricer dans l'entaille, ou bien il faudroit encore fuppofer que linfecte, dans cette opération, fe tient renverf, la rêre regardant la terre; &, dans cette {up- pofition, je ne vois pas comment l'infete introduiroit fon œuf avec sûreté. La Nature à pourvu à tout, fi, comme Je le penfe, elle a placé le fexe précifément vers la pointe de l'aiguillon, & non à fon origine; elle a recouvert l'œuf d’une humeur gluante, afin qu'il püt s'attacher à certe pointe par un fimple contatt; de forte que, lorfque la mouche à fait fon entaille à l'écorce, elle entrouvre l'anneau de fon dos, foùs lequel eft la partie du fexe; elle dirige la pointe de l'aiguillon auprès de l'œuf qu'elle vienc de pondre; il sy attache, l'articulation fe referme, & pat le même mouvement, combiné avec le mouvement particulier par lequel l'aiguitlon s'alonge , l'œuf eft introduit & logé dans l'écorce ou dans la feuille deftinée à devenir le berceau & la nourrice du ver qui en éclofa. Dans toutes ces_opérations, il faut admettre le jeu de la fpirale élaftique , formée par le prolongement intérieur de l'aiguillon ; c'eft le mécanifme qui le fair avancer & reculer, en même temps les fourreaux l'embraflent, le dirigent. & aflurent la précifion de fes mouyemens, en s'ouvrant & fe refermant, par une fuite néceflaire du mouvement latéral des lames de l'abdomen, tandis que l'écaille naviculaire pla- 742 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE cée fous ic:ventre, foutient auili la bafe de l'aiguillon & le fortific. Si les chofes font ainf, comme il y a tout lieu de le croire, on ne peut fe refufer à admirer tant de merveilles dans l'organifation d’un petit individu : Quelles variétés dans la marche de la Nature? que de reflources dans fes moyens pour arriver au même but :par des :voix toujours nouvelles & toujours sûres? Il refte à examiner quel rang notre mouche doit occuper parmi les infeétes ; sil convient d'en former un nouveau gente, ou de la placer dans un genre connu. Cet examen n'exigcra pas une longue difcuffion. Le nombre & la nature de fes ailes la fixent dans la clafle des Lyménopteres de M. Linné , qui font les infeétes à quatre ailes nues de M. Geoffroi, & les cinq articles de fes tarces dans la troifième divifion. L’habitude générale la rapproche des genres du frélon , de lurocere, de la mouche à fcte, du cinips , du diplolepe, de l’ichneumon, de la guêpe & de l'abeille, Sans parcourir les différences fenfibles qui la diftin- guent de la plupart de ces genres, il fuffit de dire que fon triple aiguillon ne laïffe d'incertitude qu'entre les zchneumons & les cips, fi l'on ne fe détermine pas à conftituer un nou- veau genre. Or fes vrais caraétères génériques nous paroif- fent ellentiellement appartenir au œmps, foit que l'on s'arrête à celui que M. Zinné lui afligne, foit qu’on satrache à ceux que M. Geoffro: a développés. Les antennes, la brifure qui les diflingue, la forme entière de la rête s'accordent cel- lement, à la grandeur près, avec la defcription & la figure gravée de M. Geoffroz (1), que cette figure repréfentant un cinips connu, prodigieufement grofli au microfcope, paroît être celle de la tête, & des yeux & des antennes de notre mouche dans leur grofleur naturelle. (+) Infeétes, Paris, Tom, IT, PI, 15, Fig. b & c. DU GENRE DES CINIPS 743 Le ventre préfente à-peu-près la même conformité. Le 4 . # A LA même Auteur le décrit prefque ovale, applati des côtés, aigu en-deflous , attaché au corcelet, par un pédicule court, L'aiguillon, qui fournit un caraétère encore plus eflentiel; offre aurant de rapports. M. Zinné l'appelle aculeus. f[pr- ralis (1): M. Geoffroi veut qu'il foit conique, entre deux lames du ventre; il ajoute (2) que le ventre eft aigu en-deflous, & que c'eft dans cette efpèce de tranchant que laiguillon fe trouve caché entre les deux lames, dont la réunion forme la crête aigue du deflus du ventre. Dans notre infecte , le ventre ct aigu, mais les deux lames entre lefquelles fort laiguillon ne font pas fous le ventre; ceft l'abdomen lui-même divifé à fon extrémité en deux portions qui repréfente ces lames, entre lefquelles l'aiguillon fort fur le dos. Toute la différence eft donc dans la poftion des parties. L’organifation eft à. peu-près la même; car nous avons obfervé que le jeu de Pai- guillon jannonçoit nécefairement la fpirale, intérieure exi- gcc par M. Linné. - S'il y avoit quelque différence réelle, ce feroit, 1.° dans fa forme des fourreaux, qui eft moins conique qu'imitant un cylindre un peu applati; 2.° dans la pointe de laiguillon, qui m'a paru faite comme un couteau à pointe recourbée, donc le tranchant eft finement dentelé, ce qui ne accorde pas entièrement avec la defcription de l'aiguillon du crips, qui, felon M. Geoffror, eft creufé comme une tarrière, & garni de dents fur les côtés. Nous'devons ajouter que, dans la defcription du cxips , cet habile Obfervateur ne fait point mention de lécaille mobile que notre mouche porte fous le ventre. Ou la petitelle des efpèces qu'il a examinées lui a fait échapper ce corps, ou notre mouche en feroit feule pourvue comme d’un organe néceflairé (2) Syft. Nat. pag. 917. (3) Inf. Paris, Tome IT, pag. 290, 744 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE à la difpofition de fes autres parties; mais j'ai cru le reconz noître dans plufieurs cx/ps, du nombre de ceux dont l'ai- guillon ett extérieur. Il paroïît que, quoique fous une forme un peu différente, ce corps a beaucoup d’analogie avec celui que M. de Réaumur nomme chaperon écailleux, dont la mouche du #edeouar du roffier (1), & qu’on le retrouve auffi dans la mouche d’une galle, qui vient fur la racine du chêne (2); je fuis même très-porté à le regarder comme une pièce eflentielle à l'aétion des aïiguillons, dont la bafe eft roulée en fpirale dans l'intérieur du corps de la mouche. Quoi qu'il en foit, fi l'écaille naviculaire mobile étoit par- ticulière à notre mouche, peut-être feroic-on fondé à érablir un nouveau genre qu'on défigneroit par ce caraétère, aïinfi que par les fourreaux cylindriques, par l'aiguillon fimplement dentelé, & par leur pofition fur je dos (la cuifle en bouclier ne peut fournir qu'un caraétère fpécifique); mais en appré- ciant ces différences, elles nous paroïflent trop peu eflen- tielles. La vête, les antennes, l'aïiguillon même ont trop de rapports à ceux du cznsps pour ne pas placer notre mouche dans ce genre & dans la première famille de M. Geoffror. Elle y convient encore plus précifement, fi l'on sen tient au caractère afligné par M. Zrnné ; je remarque que la dernière cipèce décrite dans le Sy/ême de la Nature fous le nom de cinips inanita , porte un aïiguillon recourbé en-deflus, acu- leus exfertus , rigidus, recurvatus , &c. (3). Je n'héfite donc pas à regarder notre infeéte comme un cimps, Sa lenteur, fon peu de vivacité fourniflent encore un caraétère fecondaire, ainfi que le lieu où je l'ai trouvé. J'ai dit qu'il fe poloit le foir fur des plantes, contre lefquelles il paroît immobile. Plufieurs «zzzps font de même, dans lin- Re (t) Mém. Inf. Tom. III, PI. 46, fig. $ , lettre f. (2) Ibid. Planc, 44, Fig, 9, lettre €, (3) Syft. nat. 1767, pag. 920. tention DU GENRE DES CINIPS 745 tention de loger leurs œufs dans l'épaifleur d’une écorce ou d'une feuille. On fait que la piquure qu'ils font à la plante occafionne une extravañon de la féve qui enveloppe l'œuf, prend de la confiftance & forme bientôt ces galles, ces ex- croiflances, ces renflemens qu'on rencontre, fous diverfes formes, fur le rofier fauvage , le chardon hémorrhoïdal, le panicaud , les feuilles du faule , du peuplier, &c. L'œuf pro- duir un ver, qui fe nourrit du fuc de la galle, prend fon ac- croiflement, fe met en cryfalide, pour fortir enfuite fous la forme d’une mouche. Si la nôtre n'a pas les riches couleurs dont font parés la plupart des cxips, qui font brillans & dorés, elle en eft dé- dommagée par fa grofleur, qui paroïc prodigieufe lorfqu'on la compare à celle des efpèces connues, Pour juger de leur pcticefle, il fuffit de favoir que quelques-uns, au lieu de choïfir une plante pour pondre leurs œufs dans fon écorce, les dépofent dans des œufs même de papillons. Le ver, qui fort de l'œuf du crips, fe nourrit de la fubftance de l'œuf du papillon, fe met dans l'intérieur en cryfalide, & en fort en forme de mouche, fous fa grandeur naturelle. D’autres intro- duifent leurs œufs dans le corps d’un. puceron , infecte extré- mement petit; & ce qu'il y a de particulier, c'eft que fouvent le puceron eft déjà mort d'une autre piquure d'une très-petite mouche zchneumon , qui avoit précédemment introduit fon œuf dans fon corps. Le ver de l'zchneumon eft en cryfalide lorfque le cénips perce le cadavre du puceron. Celui du cps éclos fe nourrit de la cryfalide de lzchreumon, qui eft fans défenfe. Cette fcène tragique à lieu dans un bien petit efpace. Le corps d'un puceron, ainfi que le théâtre du monde, offre à l'Obfervateur le fpectacle cruel de la raïfon du plus fort. Pour terminer la comparaifon de notre mouche avec les cinips ordinaires, j'ajouterai que les plus grands qu'on ait obfervés jufqu'à ce jour n'ont guères plus d'une ligne & demie, & la plupart un tièrs ou une moitié de ligne au plus. Nous avons vu que notre mouche avoit fept lignes de long; Tome IX. Bbbbb 746 MÉMOIRE SUR UNE MOUCHE, &c. ce fera donc un géant dans une famille de nains. Je pré- fume, par analogie, qu’elle eft du nombre des cr1ps, qui occa- fionnent des galles fur les plantes; mais fi fa galle eft propor- tionnée à fa grandeur , il eft étonnant qu’elle foic reftée auñli long-tems inconnue, Ce nouveau œnips peut être appelé cINIPS A CUISSE POSTÉRIEURE TRÈS-GROSSE ET A QUEUE RECOURBÉE SUR LE pos. Cenips ( lugdunea ) nigra, maculis luteis norata , femo- ribus pofliers , globofis, margine inferiori dentatis, aculeo criplict fuper abdomen recurrato. Explication des Figures. Fig. I. La nouvelle efpèce de cinips , un peu plus grofle que nature, vue de côté, pour faire obferver principalement la forme du corceler, errre c. La cuifle & la jambe pofté- ricures, eztre e, l'aiguillon dans fon état ordinaire, /ezrre f, ke petit bec Ccailleux, esrre g. Fig. IT. Le même cnips, vu de côté, pour montrer le véritable aiguillon, féparé des deux demi-fourreaux qui lac- compagnent, lertre f. L'écaille naviculaire placée fous lab- domen lorfqu'elle s'entrouve, /esre g , les pattes de devant, leure d. Fig. III. Le même vu, du côté du dos, pour décou- vrir les trois petits yeux, /errre a. La brifure des antennes, lesre b, & la pohition de l’'aiguillon en ce fens, /esrre c. Fig. IV. Le même vu du côté du dos, mais plus ren- verfé en avant, pour faire appercevoir, 1° la première articu- lation de l'abdomen entrouverte tranfverfalement, /ertre aÿ 2. le petit corps charnu qui paroït dans le centre de la cavité, lettre b ; 3.° la fente verticale de l'abdomen, au moyen de laquelle il souvre latéralement À la volonté de l'infeéte, Lettre c. Fig. . Grandeur naturelle de l'infc@te mefuré depuis le front jufqu'à l'extrémité de l'abdomen, non comprife la lon- gueur des antennes. Jeav Etang Tom. IX Pay. 7 46. ’ _e ' , * 17 ARS < t, 1e a. D à É ne A | * N 7 1 « ÉENT : .» 1 74; RECHERCHES OBSERVATIONS SUR DES OS FOSSILES TROUVÉS EN D'AUPHINÉ dans une Terre de M. de VALERNOD, en 1762. Par M. DE LA TOURETTE. L'érue pes Fossites eft d'autant plus intéreffante, qu’elle préfenté le 18 feule peut manifefter la véritable théorie de la terre. Le Na- Pérembre turalifte, qui chercheroit à dévoiler ce myftère, fans avoir une 1e jufte idée de tous les corps qu’elle renferme , feroit dans le cas de celui qui voudroit compofer un Traité de Phyfiolo- gie, & qui ne connoîtroit que quelques parties du corps humain. Un feul fait imprévu ; une feule obfervation , fuffit pour détruire le fyftême le plus ingénieux, comme une feule pierre déplacée, fait écrouler la voûte la plus folide. Rien n'eft à dédaigner dans la Nature, lorfqu'on veut découvrir le fecret de fes opérations. Elle a imprimé à chaque être un caractère particulier qui le fpécifie, & des caraétères généraux qui l'affi- milent & l'enchaînent à d’autres êtres, qui font eux-mêmes liés entreux par des rapports multipliés. On voit par-là com: bien il importe, avant de la confidérer en grand, de l’étudier dans limmenfité de fes détails. L'examen d’une pierre, qui paroït peut-être une occupa- Bbbbb ij 748 RECHERCHES tion minutieufe , a donc lui-même un grand objet. La forme de cette pierre, fon organifation , les fubftances qui la com- pofent , le lieu où elle à été trouvée , celui où elle a pris naïflance , fon origine, fon développement : toutes ces chofes doivent être connues , parce qu'ayant chacune une relation particuliere & des rapports généraux à la théorie univerfelle de la terre ; on ne peut en déterminer le fyftême, qu'après les avoir trouvés unanimement d'accord avec la théorie qu’on veut adopter. Sous ce point-de-vue , fommes-nous arrivés au temps de bâtir des hypothefes? qu'on en juge par le nombre des décou- vertes que la fcience ou le hafard produifent, chaque jour ,en ce genre: cherchons donc, fans prétentions, à groflir le tréfor des obfervations. Les Antiquaires conftatent les faits hiftoriques par des fragmens de bronzes rouillés; les fofliles font les médailles de la Nature, ils développeront peu-à-peu fon hiftoire; ce font des témoins anciens & irréprochables qu'il faut entendre pour s’aflurer de la vérité. Avant de chercher à déterminer la nature de ceux que M. de Valernod a trouvés dans une de fes Terres , je dois analyfer les judicieufes obfervations qu'il m'a fait Fhonneur de m'adrefler; elles ont fervi de réponfes aux queftions que j'avois propofées fur le lieu & fur les circonftances de cette décou- verte. Les Foffiles dont il s'agit , ont été trouvés, en 1762, daris la Paroifle de Saine- Valier en Dauphiné, à 31 voifes au Midi du Château des Rioux, à un demi - quartde lieue du Rhône, dans un fol qui peut avoir environ 80 pieds d’élé- vation au-deflus du lit de ce Fleuve , & 36 au-deflus du fol du Château. Une roche grife, vitrifiable , & en grandes mafles, fe rencontre à 15 ou 16 pieds de la furface, elle eft recou- verte de deux couches bien diftinétes ; la fupérieure a près de fix pieds d'épaifleur , & n’eft autre chofe qu'un terreau S'URAMES ON FHOISSRPES 749 fablenneux & léger ; la couche inférieure, dont la profondeur eft de ro à 11 pieds, eft une terre feche, graveleufe, mélée de cailloux & de morceaux détachés du même rocher fur lequel elle repofe. Ceft dans l’épaifleur de cette couche, à 9 piéds environ de la furface , que les foffiles ont été trouvés. En fouillant la terre, à la diftance de cinq toifes du même lieu, on voir des indices de quelque ancien fourneau de Fonderie ou de Ver- rerie ; on en juge par la couleur des pierres & par la nature de quelques matieres, parmi lefquelles on ne trouve cepen- dant ni briques , ni vertes, ni fcories ; cette derniere ob- fervation ne paroît avoir aucun rapport avec les corps décou- verts. Ils font au nombre de fix ou fept, quelques-uns paroi fent être des fragmens d'os cariés & cerreux ; les autres fonc tous d’une même fubftance & d’une organifation femblable, la feule infpection fait reconnoître des corps ofleux , peu dé- naturés , & foupçonner que ces corps font des dents; les moins confidérables ont , fans doute, été détachés des plus gros , ou faifoient partie de morceaux femblables. Le plus gros eft une mañle longue & haute de fix pouces dans fes plus grandes dimenfions; elle eft compote de lames un peu courbées, appliquées les unes fur les autres , creufes dans leur intérieur ; elles ont près de trois pouces de largeur, elles fe divifent par le haut en deux parties diftinétes & vont en fe rétreciflant circulairement, fe terminer en cinq ou fix efpèces de racines pointues & fiftuleufes, ce qui paroït dans celles dont la pointe eft brifée. Les lames ne fe touchent pas immédiatement, fi ce n'eft par les bords externes de leur partie fupérieure ; une matiere différente de celle des lames, occupe les interftices qu'elles laiflent entr'elles & remplit leurs cavités incernes, Il eft inutile d'entreprendre une defcription plus détaillée ; 750 RECHERCHES ces obfervations générales, & encore mieux la vue de l’objet, font reconnoitre une dent molaire , altérée par divers acci- dens : on y retrouve fa forme, fa couronne & fes racines. L'examen des fubftances qui la compofent , confirme cette conjecture. La partie extérieure , cette efpèce de croûte qui forme les lames , n’eft prefque pas dénaturée , elle eft de nature offeufe; expofée au feu , elle fe noircit, elle exhale une odeur forte, où l’on diftingue la préfence des fels volatils qui caraétérifent toute fubftance animale , en un mor, l'odeur des os, de la corne & des dents brülés. Il fuit de-là que ce corps n'eft pas pétrifié quoiqu'il ait reçu quelques portions de fucs lapidifiques, qui ont augmenté fon poids fans le décompofer. La matiere blanchâtre, qui rem- pli les cavités des lames & les interftices intermédiaires , eft beaucoup plus dénaturée , aufli a-t-elle confervée moins de fubftance animale ; expoféc au feu , elle ne donne que peu ou point d’odeur, fa texture, fa couleur, fon poids, tout an- nonce qu'elle eft abfolument femblable à la fubftance que les Minéralogiftes ont appellée Zvozre foffile. L'ivoire foffile a moins de confiftance que l'ivoire ordi- naire : mais fa confiftance varie, il en eft de très-dur, il y en a de friable: on le trouve dans le fein de la terre; lorfqu'l cft parfaitement blanc & dur, il fe travaille comme lautre, fouvent il eft piqué de points gris ou noirs, qui lui donnent quelques refflemblances avec ces arborifations qu'on nomme dentrises : Ceft l'effet des fubftances minérales ou bitumineu- fes, qui ont pénétré fes pores. Si l’on trempe l'ivoire fofile dans l’eau, il la remplit de bulles d'air; il s'attache fortement à la langue comme les bols; il a le goût de la craie , fa nature eft à-peu-près femblable à celle des coquillages fofliles, qu'on nomme crétacés, parce qu'ils ont perdu leurs couleurs , & qu'ils ont pris une confiftance qui les rapproche de la craie ou de la marne, avec cette différence, que les coquilles fofliles 0 SUR DES OS FOSSILES. 7$1 font une vive effervefcence dans l'efprit de nitre, qui n’en occafionne qu'une très-foible fur l'ivoire foflile , il en enlève des pellicules , le jaunit , & agit fur lui comme fur les fub- ftances animales & principalement fur les corps offeux. Les os font calcaires , mais l'efprit de nitre ne les diffout pas , comme il diflout le marbre & les autres pierres-à-chaux; 1l les attaque avec moins d’effervefcence & plus de lenteur. M. de Fougeroux , dans fon Mémoire fur les os ( 1 ), en déter- mine la raifon; il les regarde comme des tiflus originairement cartilagineux , qui nacquierent de la dureté qu'autant qu'il Siero ait dans les mailles dont ils font compofés , une fub- fance cretacée , qu'il appelle sartre offeux. Si l'on plonge un os dans l'eau feconde , la fubftance crétacée fe diflout, la car- tilagineufe réfifte, & l'os n'eft plus qu'un cartilage flexible, divifé en pluñeurs lames. Cette belle expérience , bien obfer- vée, répand beaucoup de lumiere fur la nature & fur la forma- tion des os. Revenons à l'ivoire foflile; fon origine eft bien connue : lébur foffile , Yunicornu foffile , eft une partie de la dent canine de l'éléphant , improprement appellée fa corne ; c'eft quelquefois une dent entière , qui a plufieurs aunes de lon- gueur. Sa forme extérieure , fon organifation interne , démon- trent que c’eft un véritable ivoire , alcéré dans les entrailles de la terre, où il a perdu quelques-unes de fes propriétés & où il En a acquis de nouvelles. Mais la dent canine de DÉÉRRSS , vulgairement appellée corne , neft pas la feule dent de cet animal que l'on trouve (1) Voyez les Mémoires fur les Os de M. Heriffant, Volumes de l’Aca- démie, 17 : Memoire fur les Os pour fervir de réponfe aux Objeétions propo- fées contre Le Sentiment de M. Duhamel, avec Les Mémoires de M. Dehalles, Éc: Paris, 1760. Voyez l’Extrait de ces Ouvrages, dans les Confiderations fur les Corps orga- nifes, par M. Bonnet, Tome I, pag. 241 & fuiv. 752 RECHERCHES fofile. Les Auteurs parlent aufli de fes dents molaires. Morton; dans l'Hiftoire naturelle du Comté de Northampton, en a décrit une, quoique aflez mal (1). Wallerius fe contente de lannoncer dans fa Minéralogie ( 2), fous le nom d’ébur foffile zolare, en ajoutant quil en eft qui ont jufqu'à neuf pouces d'épaifleur, quelquefois moins , & qu’elles reflemblent parfaite- ment aux dents molaires. Il eft évident que les fofiles de M. de Y’alernod font de ce nombre ; leur odeur, en les expofant au feu, leur forme , l’ac- tion de l'efprit-de-nitre fur eux , la parfaite reflemblance de la matière blanche qui remplit les cavités des lames , avec livoire foflile dont on connoît l’origine , tout cela m'a fait penfer , à la premiere infpe&ion , que c’étoit des fragmens de dents molaires d’éléphant. J'en ai été convaincu par la def- cription de la mâchoire & des dents d'éléphans , qu'on lit dans les anciens Mémoires de l’Académie des Sciences, ( Zom. 3» PAS. 3» P+ 149.) M. Perrault, le Rédaéteur de ce Volume, après avoir dé- crit la dent canine , qu'il nomme la défenfe de l'animal, exa- mine les autres parties de la mâchoire , & compte quatre dents molaires dans la mâchoire fupérieure , & autant dans l'inférieure. Il diftingue expreflément les lames qui les divi- fent intérieurement, de la manière dont je l'ai fait obferver dans le corps fofile; il diftingue auñli les deux fubftances qui les compofent. « La bafe de ces dents, dit-il, c’eft-à-dire, » l'endroit par où elles fe touchent en mâchant, eft fort plate, » fort égale & lice, comme étant ufée par le frottement mu- » tuel; cela fait paroître ces dents compofées de deux fubftan- » ces différentes qui diftinguent chaque dent, comme plufieurs » dents de fubftance blanche, collées & jointes enfemble par » une fubftance grifatre. » (1) Voyez les Mémoires de l’Académie, année 1724, troifième Partie, page 305. Mémoire deM. Hans Sloanne. (2) Tom. II, pag. 54. Il patoit SUR DES OS FOSSILES. 753 Il paroît évidemment que la fubftance grisâtre dont parle M. Perrault , n'eft autre chofe que cette écorce ofleufe, cette partie dure qui a réfiftc dans le foflile, & la blanche, l'zvoire devenu fofile , lequel a été plus altéré , parce qu'il étoit d'une confiftance moins compaéte. L'Académicien na pas re- marqué , dans la dent molaire de l'éléphant qu'il a décrit, la prolongation des lames dans l'intérieur de la dent, il eût fallu la brifer pour faire cette obfervation ; l& fubftance blanche, c'eft-à-dire , la matière d'ivoire qui remplfloit le vide & les interftices que laïfloit la partie grisatres “avoit point été alté- rée dans la bouche de l'animal vivant , les deux fubftances formoient enfemble un corps mafhif, que le frottement de la maftication avoit feulement poli à fa furface; dans la dent foffile, l'action du temps, de l'eau, des acides , & de toute efpèce de vapeurs fouterraines , a découvert la partie grisà- tre qui confticue les lames , en détachant une partie de la fubftance qui les remplifloit ou les entouroit (1). L'analyfe du corps fofile eft donc évidente, la courbure de la dent dans le fens de fa longueur & de l'arrangement des lames , eft la même, fans doute , que la courbure de la mà- choire à laquelle elle adhéroit dans fon état primitif. M. Per- rault décrit la courbure de la mâchoire , & non celle des dents; mais l'une fuppofe l’autre , puifque la dent doit ac: compagner la mâchoire. Il attribue à une partie de l'os ma- xillaire une rondeur & une forme, qui donne lieu de croire que les fragmens d'os cariés découverts avec les dents fofliles auprès du Château des Rioux, ont appartenu à la mâchoire du même animal. Dalles gaie ref epues 16 Dan PRG LAS HA LeR 5 PRÈS IT DÉS TR RE ere (x) Lorfque j'ai écrit ce Mémoire, je m’avois pas été dans le cas de con- fulter les belles Defcriptions de MM. de Buffon & Daubenton, Vai reçu auf depuis une dent d’Eléphant venue des Indes ; ceft l'analogue précis des fofiles dont il eft ici queftion. Je lai fait fcier en coupant les lames tranf- verfalement, j'aireconnu , dans l’organifation intérieure» une parfaite confor- mité, Tome IX. Ù Ccccc 754 RE CNET FN CÈME S I ne faut pas s'étonner du nombre de fragmens trouvés; ce font les débris de plufeurs dents, dont les lames ont été to- talement divifées, parce que la fubftance intermédiaire a été atténuce dans toute fon étendue; dans le plus gros morceau, on compte neuf lames adhérentes, & vraïfemblablement il s'en eft détaché plufeurs ; la plus grande dent de l'éléphant de M. Perraulr, métoit compofée qne de fept, peut-être le nombre en augmente-til avec l’âge, peut-être varie-t-il felon le fexe de l'animal, ou felon la différence des efpèces. Le Dictionnaire des Animaux (1) diftingue plufieurs efpèces d'éléphans, quoique M. Linné n'en admette qu'une (2); il cft vrai qu'on en connoît plufieurs variétés , & lon fait quelle différence il y a entre les dents canines ou dents di- voire des éléphans des Indes, & celle des éléphans d'Afrique; les premières n’ont guères que trois ou-quatre pieds de lon- gucur , les dernieres en ont plus de dix. Il n’eft pas étonnant que la même différence fe trouve dans les dents molaires, & l'on à obfervé que les dents fofliles , foit canines , foit mo- laires , font toujours des plus grofles efpèces. Il en eft de même de prefque tous les corps fofiles ou pétrifiés , dents, os, coquillages , &c. leur volume furpañle le plus fouvent celui de leurs analogues connus ; la pétrification augmente-t-elle le volume du corps primitif? les anciennes efpèces furpafloient- elles celles de nos jours? ou bien les grofles efpèces font- elles celles qui réfiftent le plus aïfément à ous les accidens qui doivent précéder la pétrification ? C’eft le fujet d’une differta- tion aflez difficile; mais je me garderois, je crois , d'embrafler les deux premieres opinions. Examinons d’autres queftions plus relatives à notre fujet; les corps foffiles découverts aux Rioux , {ont certainement des dents d'éléphans ; mais en a-t-on vu fouvent de parcilles en Europe , & comment fe peut-il faire qu’on les ait trouvé dans (x) Tom. 11, pag. 86. (2) Elephas maximus, Syft. Nat. pag. 33. SUR DESYGSI HOSSMEES. 755 le fein de la terre fous des couches régulières & dans des con- crées aufli éloignées de la patrie des éléphans qui n’habitentque l'Afie & l'Afrique? Ce phénomène eft connu depuis long-temps des Naturalif- tes, 1l a été fouvent l'objet de leurs recherches, Tous les Mi- néralogiites en ont fait mention dans leurs énumérations ; ils ont parlé de ce fofile fous le nom d’ivorre foffile , ebur folle ; unicornu foffile , Petrificata antmalia dentium elephan: torum (1). Quelques Auteurs ont écrit fpécialement fur ce fujet; on peut confulter Thomas Bartholin , de dente & ebeno fofjili tflandico (2); Everard, dans la Relation de fon Voyage à la Chine(3); Joc. Luc. Rhiem. de Ebore foffili ; Laurence Zang , dans le Journal de fon Voyage ; M. de Marfigli, dans fon Ouvrage fur le cours du Danube ; M. Elie Bertrand, dans fon Dictionnaire ory@holo ique ; les Mémoires pour fer- vit à l'Hiftoire naturelle des Pétrifications des quatre parties du Monde (4); une Lettre d'Erneft Tentzelius, Hiftorio- graphe de l'Electeur de Saxe; les Voyages, en Tofcane, du Docteur Zaroiani T ozxetr | &c. &c. Le Chevalier Hans Sloanne, qui forma lui feul une collection plus riche que celles des Souverains, & dont les connoifflances furpaloient de beaucoup fa colleétion , a donné, dans le Re- cueil de l'Académie des Sciences , un Mémoire ( $ ) fur les dents & autres oflemens d’éléphans crouvés dans la terre, qui a répandu une grande lumière fur cette matière. Sur fon rapport & fur celui des Auteurs que j'ai cités, il pa roit qu'on a trouvé des dents & d’autres offemens d’éléphans PE EDEN ELEC BOL DENTA SUOMI CREME. COTOTOR (1) Wall. mir. Tom. TT, pag. 51. (2) A. med. Voz. IV, Obfervation 78. (3) Voyages au Nord Tom. VIII. (4) A la Haye, 1742, pag. 133 & fuiv. (5) Année 1727, troifième partie, pag. 305. È Ccccci 756 RECHERCHES fofiles , non-feulement en Afrique & en Afie; mais dans les quatre parties du Monde, & dans les lieux les plus éloignés de leur origine. Les Mémoires pour fervir à l'Hiftoire naturelle des pétrifica- tions , parlent de ceux qu'on a vus en Amérique (1). L’Angleterre en à fourni plufieurs fois. M. S/oanne fait men- tion d'une dent d’éléphant foflile découverte près de Lon- dres (2). Morton, dans fon Hiftoire naturelle du Comté de Nortampton, en décrit une molaire ( 3 ) trouvée dans cette Province, & abfolument femblable à la nôtre. J'en ai vu une plus grofle dans le Cabinet de M. de Luc à Genève, elle vient du Comté de Norfolck ; elle a environ onze pouces de long ; elle eft compofce de quinze lames d'un pouce & demi .de longueur , qui adhèrent les unes aux autres & font difpo- fées précifément comme celles que j'ai décrites. M. de Luc à eu occafñion de comparer à Londres ce corps avec une vraic dent d'eléphant; il y a reconnu la plus parfaite analo- gie. La pétrification en eft infiniment plus avancée que celle des fofliles dont il eft queftion dans ce Mémoire ; fa pefanteur fpécifique eft beaucoup plus confidérable. L'Académie Impériale des Sciences (4) rapporte qu'on a trouvé de pareilles offemens en Italie, dans le Diocèfe de Viterbe & ailleurs. Le Doéteur Targioni Tozzeri décrit, dans fes Voyages & dans une Lettre particulière , plufieurs oflemens fofliles d’éléphans & d’autres animaux, déterrés dans la vallée fupérieure & inférieure d’Arno en Tofcane. Ils y font difperfes cà & là dans des couches horizontales de fable & de craie, dont les montagnes voifines de cette Province font formées. M. Tozxeri ajoute, que ce ne font pas les feuls fofliles (1) Pag. 148. (Bourquet.) (2) Mémoire de Hans Sloanne, ci-deflus, Académie» pag. 306. (3) Tbid. pag. 316. | (4) Décur. 2 ann. 7. S, 1688, Oblerv. 234. SUR D, ES: OS FOSSHLES: 757 étrangers à la terre, renfermés dans ces couches , où l'on voit auf un grand nombre de coquillages originairement marins. Erneft Tentzelius écrivit, en 1696 (1), l'Hiftoire de la découverte d’un fquelette entier d’éléphant , trouvé dans l'in- térieur de la colline de Tonnen , village fitué dans le Land- graviat de T'huringe, Eleétorat de la Haute -Saxe. Plufieurs couches très-diftinctes de diverfes natures recouvroient cet énorme fofile. Il étoit étendu dans un lit de fable extrême- ment pur & blanc, qui fe tranfporte au loin pour fervir à différens ufages. Les os du fquelette furent déterrés fuccefi- vement , le æbra pefoit lui feul dix-neuf livres, lhomoplare éroit long de quatre pieds & large de deux palmes & demie. La tête prodigieufement grofle garnie de quatre dents molai- res, & de deux défenfes de la longueur de huit pieds, difipa tous les doutes qui s'étoient élevés fur l'efpèce d'animal à qui ce fquelette avoit appartenu; mais , à l'exception de quel- ques parties de la tête & principalement des dents, prefque tous ces os croient cariés & crès-friables ; J'ai fait remarquer le même fair dans ceux qu'on a trouvé aux Rioux. Il seft fait , en différens remps, de femblables découvertes en plufeurs parties de l'Allemagne. Rerft! (2), Médecin du Duc de Virtemberg, raconte qu'en 1701, en creufant une colline à une lieue de Stoutgard , on trouva plus de foixante dents canines d’éléphans , un grand nombre de molaires, des mâchoires & plufeurs offemens d’autres animaux , parmi lef- (1) Willelmi Erneffi Teutgelii Hifloriographi Ducatts Saxonici, epiftola de Seleto Elephantino, tonnæ effofo. Cette lettre eft rapportée par extrait dans fes Mémoires pour fervir à l'Hiftoire Naturelle des Pétrifications , pag. 133: par M. Bourguet. Voyez la Defcription entière du fquelete dans les Actes des Sayans de Leipfic, À 1684 Janvier 16973 & dans le Theatrum Zootomicum de Valentini, 1720, (2) Salomon Reïfel. Voyez la Relation de cette Découverte dans les Mé- moires fur les Pétrifications, ci-deflus cités, pag. 142. 758 RECHERCHES quels il y en avoit de la peritefle de ceux d’une fouriss mais on n'en reconnut aucun qui pût être comparé à des ofle- mens humains; obfervation fingulière que le Doéteur Zargzon: Tozzeri a renouvelé de nos jours, dans cette efpèce de cime- tierce foflile que la vallée d’Arno lui a montré. M. Sloanne parle des dents d'Eléphans, trouvées dans la Province de Zurinpe (1 ),'& près de Vienne en Autriche (2), felon M. de Marfioli (3) ; il y en a eu en Hongrie, en Tran- fylvanie , près de Strasbourg , à Bruges en Flandres; felon M. Rafpe (4), daus lEleétorat d'Hanovre; felon M. Efre Bertrand (s), dans le Marograviat de Bareïch & dans le canton de Bâle ; j'ai un fragment de dent molaire foflile , venu de ce canton. Il ne paroït pas qu'on en ait aufli fréquemment découvert en France; cependant le célèbre Peyrefc en a vu en Pro- vence. M. de Réaumur (6)a démontré que les turquaifes qui fe trouvent dans la Généralité de Montauban, près de la Ville de Simorre, près d’Auch & de Caftres, &c. ainfi que toute efpèce de turquoïfe, font des fragmens de véritables dents d'Elé- phans enterrés, une forte d'ivoire foflile que l’on peut colo- rer en bleu par le moyen du feu , lorfqu’elle ne l’a pas été naturellement dans la terre, comme la Z'urquorfe d'Orient, ou de Vreille-roche } de ce nombre eft une dent canine à qui lon donne le nom de Zicorne minérale ; c'eft la Licorne foffile des Pharmaciens. La France en a encore fourni en différens lieux ; mais il eft intéreffant d’obferver ici que la plupart de celles dont les Au- (1) Mém. Acad. de S/oanne, pag. 227. (2) Voyez aufli d'Argenville, Lithologie, pag. 160, (3) Danube , Tom, 11. (4) Specimen Globi Terraque. &c. Autore Rodolpho Erico Rafpe Amfielodzmi, 763, (5) Diétionnaire Oryétol. (6) Mém. Acad. 1715, pag. 230 & fuiv. S'U'R'DESTOSTEOUSSILES 759 teurs aient confervé la mémoire , ont été découvertes dans le même pays & à peu de diftance du lieu, où M. de V’a- lernod à trouvé celles qui ont occafonné ces recherches: ._ , . LE CT e LI voici un pañlage du Mémoire de S/oanne, déja cité , qui l'é- tablit, «On trouva, dit-il(r), en France plufieurs os foffiles, l'an 1456, fous le règne de Charles VIT, près d’une Riviere dans la Baronnie de Cruffo! , qui fut enfuite érigée en Comté ; ce » Comté n’eft pas loin de Valence. Jean Marius (in Libris » de Galliarur illuftrationibus) Calamaus (in fuis de Bi- » turgibus Commentartis), Fulgofius & Jean Caffanio de »> Montreuil, (dans fon Traité des Géans) parlent de ces os » qui étoient fi grands , que l'on conjeétura que le Géant à » qui l'on crut qu'ils avoient appartenu, & quelques-uns pri- » rent pour le Géant Briatus , ne pouvoit pas avoir moins de » quinze coudées. ... Caffanio donne une defcription circonf » tanciée d'une dent, qu'on ne peut prefque pas douter être » une grande dent molaire, & conféquemment les autres os, » les os d’un Eléphant ; il dit qu'on montroit , de fon temps , » une dent pareille dans le Château de Charmes, dans le voi- » finage de cet endroit......» M. Sloanne ajoute, qu'un Mar- chand François lui apporta du même pays de femblabies os qu'il reconnut pour être ceux d'un Eléphant. On voit par-là , que les Provinces qui bordent le Rhône auprès de Valence, ont produit plufieurs fois des offlemens fofliles d’Eléphans; mais le Nord de l'Europe eft, fans doute, la partie qui en fournit le plus. Sans parler de ceux qu'on à trouvé en Iflande (2), la Mof£ covie & fur-tout la Sybérie en abondent à un tel point, qu'il sy fait un commerce confidérable de cet ivoire, qui , quoi- on (1) Mém. de Sloanne pag. 322. (2) Bartolin, de dente & ebeno foffili Iflandico, AG. med. Vol. IV. Ob, 78, cité dans le Mémoire de Sloanne , pag. 325. 760 RLE C'EX EPR' C'HTE'S que foilile, conferve fouvent affez de blancheur & de confif tance pour tre travaillé au tour, & pour faire des tabatières, des peignes & autres ouvrages de clincaillerie, que les Ruffes vont vendre à la Chine. Cette propriété diftingue ces dents de celles qu'on découvre en Europe ; celles-ci font conftamment trop caffantes & crop friables , pour être employées à aucun ufage. Celies de la Sybérie font quelquefois d’une énorme gran- deur ; les tranfactions philofophiques (1) font mention de dents incilives de trois & de quatre aunes de long , de dents molaires de neuf pouces d’épaifleur & du poids de 300 livres, ce quil eff, je crois, permis de révoquer en'doute. Elles font fouvent mélées dans la terre avec d’autres offemens d’une éten- due proportionnée. ; On voit un de ces os dans le Cabinet du Roi, c'eft un Jfemur d'une grofleur & d'une longueur qui furprend. Il eft conftant que les Voyageurs n’ont jamais décrit d’'Eléphans d’une taille pareille , & ceux qu’on amène quelquefois en Europe, étant de la plus petite race, peuvent encore moins entrer Ici en comparaïfon ; l’analogie démontre cependant que ces os ont appartenu à des animaux de cette efpèce; j'ai remarqué que la difproportion qui fe rencontre également dans plu-. fieurs autres fofliles comparés à leurs analogues , eft un des embarras qu'on éprouve dans l'explication de leur origine; mais leur tranfport hors de leur lieu natal , préfente encore unc difficulté plus importante. Quand & comment les ofle- mens & les dents d’Eléphans nés en Afie & en Afrique, ont- ils été tranfportés & enterrés en Europe , dans fes parties fep- tentrionales, en Mofcovie & jufqu'auprès de la Mer glaciale, dans les contrées où le froid eft le plus rigoureux, & le climat par conféquent plus oppofé à la nature de l'Eléphant. Ce feroic fe jouer dans une matière férieufe , que de vou- (1) 1730. Voyez le Ditt. Oryétonol. loir , SUR DES OS FOSSILES. 761 loir ; avec un Auteur moderne , confidérer les corps étrangers à la terre, toutes les pétrifications animales & végétales, ma- rines & terreftres, comme des êtres fofliles créés avec elle & deftinés par le Créateur à fervir de chaînons intermédiaires entre le régne minéral & les régnes animaux & VÉgétAUx : nous rejetterons également lopinion de Camerarius, qui pen- choit à croire que ces corps ne font autre chofe que des eflais, des efpèces d’ébauche de lorganifation de la nature animale & végétale. Lorfqu'un homme ofe ainfi quitter la route des faits qui lui eft permife, & prétend s'élever fans appui jufqu'à l'Etre fuprême, pour lui furprendre desfecrets qui lui cache, bien loin de fe rapprocher de la Divinité , il la rabaiïfle juf- qu'à lui. On feroit un gros volume de tous les fyftémes imaginés, pour expliquer les énigmes de la Nature en ce genre , & ce volume occuperoit un rang diftingué dans l’hiftoire des erreurs humaines. On à prétendu que les dents fofiles d'Eléphans étoient des cornes minérales qui croifloient dans la terre: tel étoit le fentiment de Théophrafte , au rapport de Pline, Theophraf- ts autor eft , offa à terr nafci , envenirique lapides offeos (1). on regardoit aufli, dans ce temps, les bélemnites comme des végétaux ; & cela n'étoit pas plus difficile à comprendre que la végétation des madrepores, des coraux, des lythophites & des flaladtites , que de grands Naturaliftes admirent gratuitement dans le fiécle dernier. L'obfervation à fait trop de progrès de nos jours, pour lesen croire fur leur parole & contre le témoignage des faits avé- rés ; il feroit aufli raifonnable d’embrafler le parti des anciens Phyficiens qui attribuoient la formation des offemens fofliles à quelque vertu plaftique, ou encore le fentiment des anciens Ruffes fur l'zvorre foffile (2). (1) Plin. Hift. Nat. L. 36, C. 18. (2) Voyage au Nord, Zom. VIII, pag. 48. Tome IX, Ddddd 762 RECHERCHES Avant que le Cyar eût éclairé le Nord de la lumière de fon génie, ces Peuples, qui n’avoient aucune idée de YElé- phant, & qui ne connoïfloient aucun animal dont les os fuf {ent d'une grandeur comparable à ceux qu'ils trouvoient fré- quemment dans la terre , s'étoient imaginé, &, felon, l’ufage, avoit fini par croire fermement qu'ils venoient d'un gros ani- mal , qui ne vivoit que dans les ténèbres , fous la terre & dans fes entrailles. Ils avoient donné un nom à l'animal qu'ils avoient imaginé , ils lappelloient Mamourh ; Vos que jai dit étre dans le Cabinet du Roi, y a été envoyé fous le nom de Fémur dun Mamouth. On révéroit les Mamouths, on les regardoit comme les habitans d’immenfes & profondes caver- nes. Le jour étoit leur ennemi le plus redoutable. Ils expi- roient dès que la lumière perçoit jufqu'à eux ; on expliquoit par-à pourquoi l'animal vivant étoit inconnu , & pourquoi fon ne retrouvoit que fes offemens. Quelques Philofophes, livrés à leur imagination , au-lieu de fuivre les traces de l'analogie , n’ont guères été plus raïfonna- bles que les anciens Mofcovites. Ne pouvant préfumer qu'une celle quantité d'Eléphans eût été tranfportée en Europe, ils ont regarde leurs dents & leurs os fofliles comme des dents de Géans ; le merveilleux plait à l'imagination , & il eft plus aifé de fuppofer que de bien voir : de-là font nées mille con- je@ures fur les Géans. Le Pere Xircher les a raflemblées , il a donne un Catalogue chronologique de ces prétendus monftres humains ( 1); vaifemblablement tous les Géans du P. Xircher ne font que de vrais Mamouths. Le Docteur Targioni Tozetri, venu dans un fiécle où les Naturaliftes croient à leurs yeux & f méfient de leur imagi- nation , ma pas héfité de reconnoître la nature des fofliles de la vallée d’ Arno ; mais il croit que les Eléphans étoient an- ciennement des animaux indigènes de l'Europe & fur-tout de EE ne (1) Mundum fubterran. L. 8, Seét, 2. . SU K D'ESYTOISSHOSSÈLES 763 la Tofcanc; les coquillages marins avec lefquels on les trouve, & les couches régulières qui les recouvrent , lui perfuadent néanmoins que les cadavres d'Eléphans y ont été laiflés par la mer; mais il fuppofe que fes eaux ne recouvroient le globe qu'en partie, & que le haut des montagnes étant feul à dé- couvert & dès-lors le climat infiniment plus chaud, elles étoient habitées par les Eléphans. Ces fuppolitions échafaudées les unes fur les autres , portent fur une bafe trop fragile , elles font dénuées de preuves, & contraires à toutes les obfer- vations. Pourquoi la préfence de la Mer fur le Continent, eût-elle, d'un climat tempéré , faic un climat femblable à celui de l'Afi- que? L'Iflande, pour être entourée de l'Océan, eft-elle moins froide que la Sibérie » - S'il eft des animaux & des plantes, qui ne peuvent fubfifter que dans les pays brülans, il en eft également qui ne fau- roient vivre qu'au milieu de la neige & des frimats. Leur del- tination eft déterminée par leur organifation même. Le géne- pit & le café , la marmote & l'Eléphant n’ont jamais: habité naturellement le même lieu. Dans la fuppofition de Don 70- et, fi, au temps dont il parle, les Eléphans fe trouvoient fur les Alpes, la marmote & le génepit qui y font aujourd’hui fpontanés , n’y pouvoient pas exifter. D'où y feroientils venus dans la fuite > C’eft ainf que, pour élever un fyftème, on ren- verfe l’ordre même de la Nature. Le célèbre Marfigli, dont le génie avoit devancé le fiécle de l'obfervarion, avoit déja vu le rapport de l'analogue des os dont il s'agit ; mais, pour expliquer leur tranfport dans le Nord de l'Europe, il prétendit que c’éroir les reftes des fque- lettes des Eléphans que les Romains y amenerent fous les Empereurs Galien ou Pofthume. M. Sloanne à réfuté cette opi- nion ; il a fait voir que lenombre n’en feroit pas aufli grand; que les couches dans Jefquelles les os font enterrés, n'auroïent point, Ddddd ij 764 RIE C'HNMEORTCAQME S dans cette hypothefe , la difpofition régulière qu'on y remarque ordinairement & que jai dit être dans celles du Dauphiné , où nos fofliles ont été pris; en un mot, que ces couches {croient confondues & non diftinétes comme on les voit, fi les os y euflent été enfouis par les hommes ou par les accidens ordi- naires. La fituation d’ailleurs de ces os dans les couches, la profondeur où ils fe rencontrent , leur groffeur qui n'a aucun rapport avec les os des Eléphans des Romains, dont on con- noît la taille; toutes ces raifons auxquelles je pourrois ajouter une préfomption particulière aflez forte ; c’eft qu'il n'eft pas probable que les Romains , en enterrant les cadavres de leurs Eléphans , leur euilent laïflé leurs dents d'ivoire , matière dont ils failoient un grand ufage, & qui, dans ce tems, avoit encore plus de prix qu'aujourd'hui : toutes ces raifons, dis-je, ont autorife M. S/oanne à rejetter l'hypothèfe de Marfigli, & à fe ranger du parti des Phyficiens, qui croient que nos offe- mens foffiles fent d’une bien plus grande antiquité, & qu'ils n’ont pu être amenés dans les lieux où on les trouve, que par les eaux d'un déluge univerfel. Cette opinion la plus raïfonnable de toutes celles que j'ai rapportées , n'eft pas encore exempte de difficultés , elle eft cxpolée à routes les objeétions de Te/liamed & de M. de Buffon. Des eaux de pluie, qui couvrent infenfiblement la terre, peuvent-elles amener en Sibérie les fquelettes des Eléphans d'Afrique > Comment des eaux tranquilles qui samoncelent , s'écoulent & fe retirent avec lenteur, auroïent-celles eu un aufli court efpace de temps , applani plufieurs élévations du globe , élevé de nouvelles collines, & enterrés ces os dans le {ein des montagnes ou dans la profondeur des plaines > Tout cela sexplique plus facilement par la théorie ingé- nieufe & vraifemblable du déplacement fucceflif de la Mer, & de fon ancien féjour fur le Continent. Mais, fans embrafler précifément l’'hypothèle des Auteurs qui ont cherché à expli- quer comment la chofe eft arrivée , fans répéter les preuves a PE SUR DES OS FOSSILES es fur lefquelles ils fe font appuyés, on peut croire que le dépla- cement des os d'Eléphans a eu la même caufe que celui de tous les corps marins devenus foffiles , la même origine qu'un grand nombre de produétions terreftres mêlées avec les corps marins foffiles , cels que des arbres entiers pécrifiés dans le fein de la terre fous des couches multipliées & régulicres , qui ne peuvent avoir été formées par un déluge momentané , & par les accidens ordinaires auxquels nous favons que la furface de la terre eft expofée ; mille témoins atteftent l’ancien & long féjour de la Mer fur le Continent que nous habitons ; une païtie de ce qui eft aujourd’hui fous les eaux étoit alors con- tinent , les correns, les inondations , les naufrages , plufieurs caufes ont dû , de tout temps entraîner dans la Mer, ainfi que des arbres entiers, des fquelettes de toute efpèce d'animaux & fur-rout d'Eléphans qui habitent toujours les bords des grands Fleuves ( 1 ). Ces os les plus folides , les plus durs , les plus inacceffibles à l'air, les plus fufceptibles d'admettre les fucs lapidifiques, ont dù réfifter plus long-temps à l'action des élémens , & fe conferver jufqu'à nos jours dans leur forme naturelle ; dès- lors on ne doit pas plus s'étonner de trouver des dents d'Elé- phans en Sibérie, que de rencontrer les fougeres d’Améri- que décrites & gravées par Plumier , empreintes fur les ar- doïfes de Saint - Chaumont , les cornes d’Ammon & autres coquillages qui ne fe trouvent que dans les Mers des Indes, remplir les carrieres du Mont-d’or en Lyonnois, & prefque toutes les montagnes calcaires de l'Europe ; des os d'Hippopo- tame, animal amphibie, qui ne vit que fur les bords des Ri- vières d'Afrique, à côté d’un fquelette de rennes quadrupède qu'on ne voit qu'en Laponie, enfévelis fous trois couches ré- gulières de fable, de terre & de terreau , à Etampes auprès de Paris. Les uns & les autres , dans quelque temps & de (1) Lynn. Syftem. Nat. 1758. pag. 33. Habiat in paludofis ad amnes. 766 RE OPEN EXRICUAME?S quelque manière que ce foit , ont été déplacés, apportés , en- fouis & recouverts par la même révolution, par le bouleverfe- ment quelconque , qui eft inconteftablement arrivé à la terre, & qui, pour me fervir de l'expreflion d’Henkel (1) ,a changé le globe en un cimetière commun aux productions du régne animal & du végétal. Il me refte à rapporter, fur les dents foffiles , deux courtes obfervations par lefquelles Je finis. Les os des poiffons marins, leurs vertèbres, ainfi que tous les corps & coquillages pétri- fiés , à quelques exceptions près , telles que les empreintes fur les ardoifes, fe rencontrent dans des verres ou des pierres qui font calcaires, & dont l’origine eft peut-être totalement animale & marine ; les os d’Eléphans , au contraire, ont pref- que toujours été découverts dans des fables, des graviers, des argilles dont la nature eft vitrifiable : pour conftater ce fait, Jai décrit, en commençant, la nature des couches qui recou- vroient les foffiles du Dauphiné ; j'ai remarqué que Morton , dans fa Defcription citée par S/oanne , annonce que la dent molaire du Comté de Nortampton , fut trouvée fous cinq ou fix couches d'argile, de fable & de gravier; il en eft de méme du fquelette entier découvert & décrit par T'emrzelius. La feconde obfervation qui, peut-être, a quelques rapports avec la précédente, eft que l'ivoire foflile, les os & les dents d'Eléphans, ont prefque toujours été trouvés dans les Lacs, dans les Fleuves , fur leurs bords, ou à peu de diftance de leur courant. Les fragmens que j'ai décrits, ont été pris à un derni- quart de lieue du Rhône. Junker ; dans fa Chymie (2), dit qu'on en rencontre fouvent le long de la Viftule; les dents dont parle M. de Marfigli , ont été découvertes dans plu- fieurs Rivieres , Lacs ou Étangs de la Hongrie & de la Tran- (2) Pyrithologie, pag. 131. (1) Tom. I, pag. jo9=10, x SUR DES OS FOSSILES 767 fylvanie , & dans le Rhin auprès de Strasbourg. Suivant les re- Jations des Voyageurs, l'ivoire foflile de la Sybérie fe ramaffe fur les bords de la Rivière de la Kéca, des Fleuves J'enifca, de Trugau, de Mangafca & de Lena , lorfqu'après les grands dégels , ces Rivières , par l’impétuofité de leurs courfes, fapenc les montagnes voifines, & découvrent les os & quelquefois les fquelettes entiers qu'elles renferment. Je ne tirerai aucune conféquence de ces deux obfervations; mais elles pourrontfervir de matériaux aux faifeurs de fyftêémes à venir. Préfenté le 15 Janvier 1777. MÉMOIRE SUR la ftructure fingulière du Tibia & du Cubitus des Grenouilles & des Crapauds , avec quelques Expériences fur la reproduc- tion des os dans les mêmes animaux. Par M. Micxez TROJA, Docteur en Médecine de la Faculté de Naples, Chirurgien Afiftant de l’'H6- pital de Saint-Jacques, & Médecin ordinaire de Son Excellence M. le Marquis de Caracciolo, Ambafladeur de Naples , à Paris. LA srrucruRrE du tibia & du cubitus des grenouilles & des crapauds, eft différente de celle qu'on remarque dans tous les autres animaux ; elle a de très-grands ufages pour l'aétion des pattes, & je ne connois aucun Auteur qui l'ait décrite ; elle a échappé aux recherches de tous les Natura- liftes, & même à celles de Swamerdam, Obfervateur exaét, & d’Auguftus Ræfel von Rofenhof, qui nous a donne l'Hif- toire des grenouilles & des crapauds de fon pays, dans un excellent Ouvrage, z7-folo. Le tibia de ces amphibies eft dans le milieu de fon corps d'une figure cylindrique un peu applatie; mais les deux extrémités, qui grofliflent confidérablement, font bien plus évafces: cependant l’inférieure, qui eft articulée avec les deux os du tarde, eft beaucoup plus large que ne l'eft la fupérieure. Du côté extérieur ef (fig. 1), où devroic étre la place du péroné, cet os eft fingulièrement courbé, & le péroné manque entièrement, de manière que le tibia eft cout feul dans the SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. 769 dans cette partie de la patte, comme le femur eft tout feul dans la cuifle. On obferve fur la face AB , qui eft antérieure ou inférieure par rapport à la fituation de lanimal, & qui regarde le dos du pied, deux fillons aflez profonds 4e, fB, & deux autres Cg, k D (fig. IT), fur la face pof- térieure ou fupérieure CD , qui regarde la plante: tous les quatre s’'avancent fuivant la longueur de l'os vers la moitié du tibia. Si on coupe les deux extrémités tranfverfalement tout à côté des épiphyfes À & B (fig. 111 6 I1W),on voit, dars la fedtion de chacune d'elles, deux tuyaux € & d, e & f bien diftinéts, féparés par une cloïfon mitoyenne & communc; de façon que fi on regarde feulement leurs ouvertures & les fillons extérieurs fans faire attention au corps de los, on feroit tenté de penfer qu'ils font deux tuyaux diftingués, & l'un joint étroitement à l'autre. Si on introduit une feconde très-mince dans un de ces quatre tuyaux, on croiroit qu'elle devroic fortir par le tuyau oppofé; mais, parvenue vers la moitié du tibia, elle y eft arrêtée par une autre cloifon offeufe. Celle-ci eft très-épaifle & fituée cranfverfalement, de forte qu’elle empêche toute communication de la moitié fu- périeure de l'os avec l'inférieure; on apperçoit afément à la lumière cette cloifon que j'appelle sranfverfale, extérieure- ment & fans brifer l'os ; elle eft marquée par un cercle, qui pa- roic plus blanc que le refte de l'os même quand il eft féché, &c qui entoure toute fa circonférence comme on voit en 2, k, Î,m(fig.I, II, III SI ).Sonfiésc eft défigné plus exac- tement par un trou qui craverfe le tibia d’un côté à l’autre. Ce trou par lequel pañlent des vaifleaux & des nerfs com- mence à la partie poftérieure précifément fur la cloifon tranf- verfle en o (fig. 11); il perce enfuite le corps de la cloifon même, & il fort à la partie antérieure fous la cloifon en x dans la figure première & en p & q dans la figure troifième & quatrième. Dans la figure cinquième los a été coupé Jjufte- ment au niveau de la cloifon tranfverfale, & on voit la moitié Tome IX. Eceee 770 MÉMOIRE Abc creufe en cb, tandis que l'autre moitié D e f eft toute pleine en ef. On a introduit une foie de cochon g% par l'ou- verture poftérieure du trou en f, & on la fait fortir par l’ou- verture antérieure en e prefque fur le bord du plan de la cloi- fon tranfverfale. Cependant les deux cloifons, qui féparent les deux tuyaux de chaque extrémité, & que jappelle lorgrtudinales, quoi- u’elles s'avancent d’un côté jufques dans le corps des épi- phyfes, ne defcendent pas jufqw’à la cloïfon tranfverfale; elles finiffent à une certaine diftance avant d’y arriver, & leurs ex- tenfions font prefque défignées extérieurement par les fillons. Il eft donc évident, par ce que les cloifons longitudinales ne defcendent pas jufqu'à la tranfverfale , que les deux tuyaux fupéricurs, ainfi que les inférieurs, aboutiflent à un efpace cylindrique commun entre la cloïfon tranfverfale & l’extrc- mité inférieure de chaque cloifon longitudinale. Dans la figure fixième, on voit la cloifon longitudinale fupérieure, qui finit en ab, & l’efpace commun de cette moitié añcd. À cet effet, fi on introduit une petite fonde dans un des tuyaux fupé- rieurs, par exemple, & quil {oit e £ pendant qu'on ne l'a pas coupé latéralement, la moëlle fera pouffée dans l'efpace com- mun abcd, & de-là on la verra refluer par l'ouverture A2 de l'autre tuyau qui eft à côté. Dans les tétards ou dans les grenouilles à queue, quand les os ne font pas encore oflifiés, ou quand ils ne le font pas affez bien, les fillons que je viens de décrire font très - fuperficiels. Dans la coupe tranfverfale des extrémités on voit aïfément la féparation des tuyaux ; mais leurs cavités font remplies de manière qu'on ne peut pas introduire une foie ; cependant fi on force davantage on l’enfonce, & on voit fortir par l'ou- verture de l’autre tuyau latéral une matière gélatineufe ou à demi- cartilagineufe blanche. J'ai obfervé cette même matière dans le tibia du poulet pendant l'incubation. Dès le dixième jour, fi on frotte cet os entre les doigts , il fort une matière gélatineufe par les extrémités, & il refte une efpèce de tunique SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. #3: dans laquelle elle étoit contenue ; je l'ai examiné jufqu'au quin- zième jour, & j'en ai donné la defcription dans mon Our- vrage fur la régénération des nouveaux os aux pages 215, 216 & 217. Le cubitus, qui eft dépourvu de radius comme le tibia left de péroné, eft extrémement large dans fon extrémité inférieure, où il eft articulé avec le carpe; maïs, à mefure qu'il s’avance vers fon extrémité fupérieure, où il eft articulé avec lhumérus, il fe rétrecit tellement qu'on pourroit confidérer los tout entier comme un triangle. Il eft fitué de manière que le côté antérieur Ad ( fig. VIT), avec l'apophyfe coro- noïde d regarde le dos de la main; le côté poftérieur CB avec lolecrâne C, la plante; la face interne CAB , le cetps de l'animal & la face externe EFG (fig. WIIT), le dehors. Dans le milieu de fa partie inférieure, qui eft aufli élargie, on remarque deux fillons bien profonds, qui fuivent la longueur de l'os; le premier, qui fe trouve fur la face intérieure, eft eh (fig. VIT), & le fecond, qui eft placé fur l’extérieure, ft kz (fig. VIII). Us parcourent prefque les deux tiers de toute fa longueur, & ils deviennent fuperficiels à melure qu'ils approchent de l'extrémité fupérieure. Cependant on ne doit pas confidérer cet élargiffement de la partie inférieure comme un applatiflement de l'os, parce que les deux fillons correfpondant l'un contre l'autre, divifent cette extrémité en deux cylindres, de manière que la cloïfon, qui fe trouve dans l'entre-deux, eft très-mince & fuffifamment large. Si on coupe tranfverfalement l’épiphyfe inférieure, on découvre les ouver- tures &£ & Z (fig. 1 X°), de deux tuyaux cylindriques. Leurs cavités, qui contiennent la moëlle, savancent jufqu'à l'en- droit à-peu-près où finiflent extérieurement les fillons, c'eft-à- dire, où finit la cloifon commune. Là ces deux cavités, que j'ai trouvé quelquefois prefque remplies vers l'épiphyfe infé- tieure d’une fubftance cellulaire offeufe , sembouchent dans unefpace cylindrique commun qui termine l'extrémité fupé: ticure du cubitus. | Eceec ï 772 MÉMOIRE J'ai dit qu'extérieurement la cloifon étoit aflez large: en effet, fi on emploie l'adrefle néceffaire, on peut la couper tellement avec un fcalpel bien fin qu’on peut féparer entière- ment les deux tuyaux fans entamer la cavité ni de l'un ni de l'autre jufqu'à l'efpace commun. On voit, dans la figure dixième, les deux cylindres 4 B, CD féparés dans la cloifon, ayant confervédeur intégrité depuis B jufquà e, & depuis D jufquà f: on voit l’efpace commun ouvert dans l'un & q ; dans l'autre depuis e jufqux-A, & depuis f jufqu'à C. IL ef donc évident que, dans le tibia, il y a deux cavités cylindri- ques fupérieures avec un efpace commun, & deux inférieures avec un autre efpace commun pour la moëlle, au lieu que, dans le cubitus, il ny en a que deux avec un feul efpace commun. Telle eft la ftruéture des deux os que je m'étois propoft de décrire; elle eft fans doute admirable aux yeux des Philofophes. Pourquoi la Nature at-elle été obligée d'employer tant de cloifons & tant de tuyaux dans leur formation ? & pourquoi le fémur, qui eft de la même grandeur que le tibia, n’en a-t-:1l pas auf? Quand on veut remonter jufqu’aux caufes premiè- res, on tombe dans les abymes de l'ignorance, & tout eft caché aux regards des hommes ; mais quand nous cherchons les ufages des parties, nous nous élevons à l'Étre Suprème, & bien fouvent nous pénétrons dans fes fins. Je tâcherai donc, sil meft poflible , d'expliquer les fonétions de ces parties. J'ai vu d'abord que cétte variété de conftruétion devoit être néceflaire ou pour quelque chofe qui fe trouve hors de los & qui l'entoure, ou pour quelque chofe qui fe trouve dans los même. Une fcrupuleufe anatomie des tendons & des ligamens me fit renoncer au-dehors. On devoit donc trouver dans l'os même les raifons de cette conftru&tion. Je favois que la Naiure avoit employé des cloifons multipliées afin de fourenir les lobes du cerveau. Ce vifcère aflez mou par fa conftitution , avoit befoin d’être foutenu dans fon milieu par la faux, afin que de 2 | “ SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. ITA quand la tête fe trouve appuyée fur les côtés, un des lobes n'écrafat point fon compagnon par fa pefanteur : on obferve de femblables foutiens pour le cerveler. Or , comme la grenouille fait des mouvemens violens dans l’action de fauter, il étoit néceflaire que la Nature eût employé aufli des cloifons ofleufes dans les os de fes pattes pour foutenir la moëlle, qui, fans ces foutiens , auroit été fondue par la violence des fauts. Ce n'étoit pas aflez, il falloit aufli fortifier davantage les os mêmes, afin qu'ils puflent foutenir l'impétofité de ces mouvemens fans fe cafler. On fait qu'un cylindre creux eft plus folide qu'un autre tout plein, quand ils ont une égale quantité de matière: Ainfi, les os des grenouilles & des crapauds ; doivent être plus minces dans leur fubftance que les os des quadru- pèdes; ils font formés de même dans les volatils, de manière que leurs cavités de la moëlle font refpectivement plus amples. Cette conftruétion étoit avantageufe, afin que les premières euflent moins de gravité à la nage, & les feconds au vol. On pourroit objefter que, quoique les extrémités du tibia & l'extrémité inférieure du cubitus foient fortifiées par un double cylindre creux, cependant dans l'extrémité fupc- rieure de celui-ci, & dans le milieu de lautre, il n'y en a qu'un tout fimple: mais il fauc obferver que leur fubftance dans ces endroits eft bien plus épaifle. J'aurois donné à cette ftructure tubuleufe le feul ufage de fortifier les os, fi la cloïfon tranfverfale ne m’eût afluré qu'elle étoit faite principalement pour fourenir la moëlle, { Mais qu'elle difparoifle cette apparence de vérité toute fpécicufe qu’elle eft, difoisje en confidérant le fémur & l'humeérus. Celui-là n'eft pas moins gros que le tibia, & il n’a point de cloifon, & fa cavité pour la moëlle s'étend d’un bout de l'os à l'autre; celui-ci eft bien plus confidérable que le cubitus, & fa cavité eft toute fimple. Cependant, en réfléchiffant à la fituation de la grenouille quand elle eft prête à fauter, & à l'aétion du faut même, ce doute fut diffipe, & Je me confirmai, de plus en plus, dans on MÉMOIRE cette opinion. Quand elle eft en repos ou dans l'attitude de vouloir fauter, la cuifle touche le ventre, & le fémur forme un angle aigu avec les longs os du baflin : la partie de la patte qui renferme le tibia, ployée dans un fens contraire, touche tout le long de la cuïfle, & le tibia forme un angle très-aigu avec le fémur; mais l'extrémité inférieure du premier qui couche l'extrémité fupérieure du fecond, avance un peu fur celle-ci en longueur, & fe trouve un peu plus relevée fur la cuifle du côté du dos; de forte que le fémur eft tout-à-fait parallèle au plan horizontal fur lequel pofe l'animal, & l’ex- trémité inférieure du tibia combe obliquement jufqu'à ce qu'il ait couche le fémur avec fon extrémité fupérieure. La der- nière partie de la patte qui eft plus longue que les deux pré: cédents & que l’on appelle pied dans les hommes, ployée aufli dans un fens contraire, touche tout le trajet de la fe- conde, & les deux os du tarfe forment également un angle très-aigu avec le tibia. On peut voir toutes ces différentes fitua- tion dans la figure onzième. Il eft facile de comprendte, par cet expofé, que le fémur AB (fig. X11,le tibia BC & le pied C D forment la figure d'un Z, comme on voit en efghk (fig. X111); fi on fuppofe donc le femur & le pied. d’égale longueur, & une ligne ürée d’e à g, & une autre d'f à 2, nous aurons une figure a/erd parte longior e g hf, dont le bord e f fera le fémur, gA le pied, & la diagonale gA le tibia Or fi nous avons un corps fitué à l'angle f, par exemple, & fi deux puiflances le pouflent en même tems, une vers la direétion fe, & une autre vers la direction f 2, on fait qu'il n'obéira ni à l'une ni à l’autre, qu'il gagnera le chemin du milieu, & quil parcourra la diagonale fs; cependant le moment de la vélocité fera bien moindre que le total des deux forces qui l'ont pouflé : mais fi nous avons un corps long, tel que f 2, & qu'une puiflance, foic qu'elle le poufle d'e vers f, foic qu'elle le tire d'f vers e, & une autre foit également qu'elle le poufle d’4 vers g, foit qu'elle le tire a SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. 775 de g vers A, alors toute l’action tombera fur le même corps f£, & fon moment fera égal à lenfemble des forces qui l'ont poufié. IL eft donc évident que le tibia, aura à foutenir non-{eulement la force de fes mufcles propres, mais celle aufli des mufcles du fémur & du pied qui le tirent en fens contraire par les deux extrémités. Cela doit arriver toujours ainfi dans les petits & dans les grands fauts pendant que les os confervent encore leurs angles entreux; mais quand la patte eft tout-à-fait déployée, & que les os fe trouvent dans la dire&ion d'une ligne droite, le pied participera aufli à une grande partie de la force. Dans ce cas, le centre du mouvement eft à l'extrémiré du fémur dans la cavité cotiloïde, & le moment des corps centrifuges eft à la circonférence, c'eft-à-dire, à l'extrémité du pied. Mais, dans cette dernière circonftance, outre que le pied appuyant à terre ne parcourt pas une grande circonférence, fes os étant auffi petits & aufli nombreux n’avoient pas befoin d’une ftruéture particulière pour foutenir leur moëlle & leurs corps, le fémur étant trop près du centre du mouvement, ne par- couit pas non plus un long cfpace, & il n’en avoit pas befoin par la même raïon; ce n’étoit donc que le tibia qui étoit obligé de parcourir avec fes deux extrémités de très- grandes portions d’ovales, qui avoit befoin d'une conftruction différente pour qu'il püt mettre fa moëlle & foi-même à Fabri de la violence. On doit en dire autant du cubitus, de l'humérus & de la dernière extrémité de la patte antérieure , nonobftant que celle-ci foit infiniment plus courte que la poftérieure. J'ai trouvé dans une grenouille aflez grofle le cubitus de cinq lignes, tandis que le tibia l’étoit de quinze & demie ; l'humérus de huit lignes & le fémur de quatorze ; la main jufqu'à l'ex- | trémité du troifième doigt, qui eft le plus long, de huic lignes & demie, & les pieds avec les os du tarfe de vingt- quatre & demie. On voit donc que l'humérys furpañle le 776 MÉMOIRE cubitus de trois lignes, que le tibia furpañe le fémur d'une ligne & demie, que le pied a feize lignes de plus que la main, & que toute la patte poftérieure furpaile l’antérieure de trente- deux lignes & demie, Malgré cet excès de grandeur de lhu- mérus fur le cubitus, il faut ajouter que le premier garde toujours, même dans les fauts violents, un angle aigu avec le cubitus, & fe trouve dans une direction parallèle à l'horizon. Ces remarques faites, je voulois obferver auf fi la repro- du“ion des os, moyennant la deftruction de la moëlle, avoit lieu dans les animaux à fang froid. Je fs part au Public; l'année dernière, que jétois parvenu à faire régénérer entièrement les os longs dans les volatils & dans les quadrupèdes, fans faire autre chofe que détruire la moëlle. Ainfi, pour me con- vaincre fi les grenouilles étoient fufceptibles de cette repro- duction , je coupai la patte poftérieure à plufieurs de ces ani- maux de différent âge, & en même tems à un certain nombre d'eux. Je la coupai rout à côté de l'épiphyfe inférieure du tibia, & je décruilis la moëlle des deux tuyaux infériéurs jufqu'à la cloifon tranfverfale; à d’autres, je la coupai au-deflus de cette cloifon, & je détruifis la moëlle dans les deux tuyaux fupérieurs jufqu'à l’épiphyfe fupérieure, & à d’autres je la coupai à l'extrémité inférieure du fémur, & la moëlle fut détruite dans toute fa cavité; pour être für de lavoir bien détruite, je laïflai une ou deux foies dans chaque cavité. Je les tuai enfin en différens tems: après trois jours , après huit, après dix, après quinze, & je nai jamais trouvé la moin- dre difpofition à une nouvelle oflification, ni même le périofte altéré. J'avois obfervé dans les pigeons qu'un nouveau tibia parfaitement oflfié sétoit forme après le feptième jour de la deftruétion de la moëlle, & après le dixième, le douzième ou le quinzième dans les chiens. Je conclus delà que cette reproduction n’avoit pas lieu dans les grenouilles, ou que fi elle l'avoit, cela devoir être en un trés-long tems. Je n'ai pas pu m'aflurer de cette durée, parce que je ne pouvois pas porter SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. 777 porter ces animaux au-delà de quinze à dix-huit jours, attendu qu'ils périfloient tous; mais il faut remarquer que je faifois ces Expériences dans le mois de Septembre & après, paræ que la reproduétion des parties perdues dans les vermifleaux & autres zoophytes, eft plus prompte dans le printemps & dans l'été jufqu’à la fin du mois de Septembre. L { C'eft dans ces faifons, comme je viens de dire, & précifé- ment dans le premier âge de l’animal, que la force repro- duétrice eft plus active dans les polipes d’eau, dans les verres de terre, dans les tétards, dans les limaçons, dans les limaces cerreftres, dans les falamandres, dans la queue des tortues, dans les pattes des écrevifles, &c. Mais il ne s'agit pas de la reproduction d’une feule partie, comme d’un os, dans ces êtres vivants, qui femblent les plus vils de la terre; il s’agit de la tête, ou d’une patte entiere ou de toutes les quatre, ou de la queue, &c. M. l'Abbé Spalanzan! avoit atraché les quatre pattes à une falamandre tout près du tronc fix fois confécutives, & fix fois elles fe régénérèrent dans leur intégrité primitive de façon qu'il fit reproduire plus de fix cens oflelets, & il cçal- cule que fi on avoit fait la même opération douze -fois, on auroit fait régénérer plus de treize cens petits os. Il avoit avancé pareillement , d’après l'Expérience, que la méme reproduction. avoit lieu dans les pattes des grenouilles & des crapauds; mais ce fait à été nié formellement par plufieurs Savans, & ils l'ont nié aufli d’après l'Expérience. J'étois prefque déterminé pour ce dernier parti, après avoir vu que ‘la deftruétion de la moëlle, capable de faire régénérer les os dans les autres animaux , l'avoit empêché dans les grenouilles; mais quand on avoit oppofé l’Expérience à l'Expérience, c'étoit à elle-même qu'il falloit recourir de nouveau, fi on vouloit éviter toutes les vaines difputes & l’exagération fi facile à fe glifler dans l'efprit des hommes. Cependant je défef- pérois d'y parvenir, parce que jétois à la moitié d'Oétobre, Tome IX, F ££CE£ 778 MÉMOIRE rems dans lequel la force reproduétrice n’eft plus en vigueur ; mais, comme je me trouvois avoir vingt grenouilles, qui ne me fervoient plus à aucun ufage, je leur coupai la patte fous l'extrémité fupérieure du tibia, & je les laiflai fans détruire la moëlle. Je pris la précaution de les laifler dans ma chambre, où il y avoit toujours du feu, & dans la terre humide, parce que j'avois éprouvé que leau maceroit les mufcles coupés; mais, quand l'extrémité du moignon sétoit couverte d'une efpèce de gelée, je les mettois dans l'eau pendant une partie de la journée. Vingt jours après, toutes éroient péries, à lexception pourtant d'une feule bien grofle & par conféquent bien âgée. D'abord la gelée, qui couvroit cette extrémité du moignon étoit d'une couleur blanchâtre bien foncée; mais, fuivant qu'elle durcifloic, elle devenoit plus obfcure: après elle s'a- longeoit fucceflivement, & on voyoit fa furface exterieure acquérir la reflemblance de peau. Au bout d'un mois envi- ron elle étoit bien alongée depuis À (fig. X IF), jufquà B, de manière qu'on pouvoit dire que c'étoit de los cou vert de fa peau; mais cette pofition régénérée étroit alors bien mince comme l’eft à préfenc le tarle BC; & on ne pouvoit pas appercevoir les mufcles extérieurement. Ils commencerent enfuite à être apparens, & ils fe développèrent infenfiblement. Au commencement du mois de Décembre, le tarfe B C s'étoit formé aufli avec fon articulation fupé- rieure B, & on n'y voyoit point de mufcles non plus. A lextrémité inférieure C, il y avoit deux bourgeons gélati- neux d &e, qui reflembloient aflez bien à deux cornes de limaçon qui ne font pas alongces, & qui commencent à fe déployer; mais alors ils étoient bien plus petits qu'on ne les voyoit dans la figure qui a été deflinée quinze jours après quand la grenouille mourut; ils étoient fans doute le com- mencement de la dernière extrémité de la patte dont l'ani- a. fe fervoic delà crès-bien , tant pour nager que pour auter. SUR LE TIBIA DES CRAPAUDS. 779 Au même tems, à l'endroit fg, la circonférence étoit de neuf lignes, tandis que dans l'autre patte Æ/7 au même en- droit À, où les mufcles font plus gros dans l’état naturel, étoit de quatorze; la_circonférence du tarfe BC de quatre lignes, & celle du tarfe entier Z M d'onze; la longueur du tibia P B d’onze lignes, & celle du tibia NZ de feïze; la longueur du tarfe B C de cinq lignes & demie, & celle du tarfe Z M de neuf; les deux bourgeons d'une ligne, & le refte de l'extrémité M7 TZ dix-huic. La cuifle A N enfin étoit de quatorze lignes, & le corps de l'animal de trois pouces. La coupe dans la patte O C avoit été faite quatre lignes au- deffous de l'articulation en À ; elle avoit donc été coupée de la longueur de trente-neuf lignes. Le moignon À O n'en ayant que dix-huir. Ce fut dans cet état que je la préfentai à l'Académie le 7 du même mois de Décembre; & elle me fit l'honneur de m'afligner pour Commiflaire M. Portal & M. de Vicq d’Azir qui l'examinerent plus particulièrement & ils en firent leurs Rapports. Le dix-huit du même mois, la grenouille mourut d’elle- même. Extérieurement fur la patte, la feule diflérence qu'on voyoit, c'eft qu'elle étoit plus groflie en g f, & les bourgeons d & e alongés de deux lignes & durcis de manière qu'on les diftinguoit par deux oflelets avec une articulation commune & bien formée en C. Ayant ôté la peau, on voyoit auffi des mufcles a itour de la partie B C. Dans la figure quinzième, font repréfentés les os de la patte coupée & reproduire de la manière qu'on a vu. À B eft le fémur; C D Ie tibia qui avoit été coupé en e & qui s’étoit alongé jufquà D, mais d'une figure difforme; il navoit point de cloifon cranfverfale, ni de cloifon longitudinale inférieure; la cloifon longitudinale fupérieu:e n'exiftoit que depuis C jufqu'à e, c'eftà-dire, feu- lement dans la portion qui n’avoit pas été coupée; les fillons h'exiftoient que dans cette petite partie, & ils manquoient tout-à-fait Fa l'extrémité inférieure. Je fus étonné de ne trouyer à la place du tarfe qu'un feul os Æ F, qui reffem- 730 MÉMO IR E;, &c bloit effectivement à un des os du tarfe; mais ne feroït-il pas une portion du tibia avec une nouvelle articulation? c’eft ce que Jignorc; cependant fa cavité pour la moëlle éroit toute fimple, & à l'extrémité inférieure F, fe trouvoient arti- culés les deux offelets # & À. Je me propofe de fuivre, au Printems prochain, d’autres Expériences que j'ai commencées fur les Sauterelles, fur les Grenouilles & fur d’autres Infectes : j'examinerai fur-tout l'anatomie des mufcles, des nerfs, des ligamens & des os dans les parties régénérées, & j'en ferai parc à l'Académie dans un autre Mémoire, j FIN DU TOME NEUVIÈME. “ UE De l'imprimerie de la V° HÉRISSANT, Imprimeur du Cabinet du ROÏI; Mailon & Bâtimens#de SA MAJESTÉ. Mars 1780. La