SELS os Hi ï | TES = De 30222035 (ie PET LC D ë MÉMOIRES D E MATHÉMATIQUE EXT DE; DELYSIOU.E. Tome XI. | AUQIT AMIHTA M. £. ages DH 6 (uit 4 SEE etes % ä Vortex Ha. aa . ü f £ Eu MÉMOIRES DE MATHÉMATIQUE DE PHYSIQUE, PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, PAR DIVERS SAVANS, ET LUS DANS SES ASSEMBLÉES. Contenant le Recueil des Mémoires Jar la Formation G& la Fabrication du Salpétre. A) SPAS CES" De lImprimerie de MouTarp, Imprimeur-Libraire de la Re:Ne, de MApaME, de Madame Comtelle p’'Arrois, & de L'ACADÉMIE Royae Des Sciences, rue des Mathurins, Hôtel de Cluni. F'roiesen PHCUETTE AA Ro ex mime En a CR EE Es AVERTISSEMENT. L'ADMINISTRATION ayant jugé qu'il feroit utile de faire connoître au Public ce que con- tiennent d'infiruhf les Memoires qui ont été admis au Concours pour le Prix du Salpétre, propole en 17770 l'ACADÉMIE a chargé Jes Commiffaires ( MM. Tizer, CADET, Laroi- SIER G SAGE, ) d'en faire des Extraits , G de les inferer dans la Partie Hiflorique de ce Vo- lume; M. LAVoOISIER faifant les fonélions de Secrétaire de la Commiffion. MM. DE MonTiGny , D'ArcY @ MACQUER, qui ont concouru à ce même travail, font morts avant qu'il füt achevé. 1 ARE ON à Pa > POUR L' HIS TIOTIR E. E ; TRAIT des Regiffres de la Commiffion nommée par l'Académie des Sciences pour le Prix propofe fur la Jormation du Salpétre... "0% Li Ne Pau. PROGRAMME du Prix propofé pour l’annee 1778. ÿ EXTRAIT détaillé du Rapport fair à M. le Contrôleur General des Finances , Jur les Pièces qui ont concouru en 1776, pour le Prix propofé par l’Académie de Befançon. . .,....... 13 ExTRAIT du Recueil de Mémoires & d’Obj?:r- vations fur la formation & la fabrication du Sal- pétre, publié en 1776, par MM. Macquer, Darcy, Lavorster, Sace & BauMé.. . . . .. 21 EXTRAIT de lInftruélion , publiee en 1777, par MI. les Récisseurs Des Poupres. . . . . . .. 3€ PARC OO PACE AREA 37 NÉ Le ODA OO SL ERINE 33 FTP Etes gran MENU CIER NUE 40 EVORRA NME a in AI Namad ete supra RE ins 2 43 Vs tsnantse 2 sine ti 4 AE RE tn da ds Mémore Ne NE eee tem du lo Ibid Monet ets NON ON ARE TEE EE 48 ES OO PE CRT NO EE ELA EURE 49 el Me ne et ns AA IR Ibid. NET Cassie RE QU nt 2 RMS a Le Mantes Lee eee ST XVI OO II OODDDOIDOE CIO 61 \ NN D es et ste ee de dei ce 62 a ij TAB L'EXPIOURVL'HES TOTRE. EXTRAIT du Mémoire N°. CCC CCC CCC CC ExTRAIT des vingthuit Mémoires admis au fécond Concours. . . . ESCTREATT du Mémoire N°. / CE CCE EVE GC OC MON OLIS OM ME CESSE CCC CC CC CT EC nn mme chole sets le reletele ele eine olele/alatene ste le les e CHOICE CCIONOIOIQFOINIONCI ON OICIQIC ICOOIDIONCIC ED none CROP AO CTOIIOIOIOIC RICO TABLE POUR: L'EIS T OFRIE: SA Pr Re ER P. 146 MON Le ne see Dh e bein ste io.o cs Ibid. MOULE DÉS dE I EE 147 Exrnarz À Xe 152 HMetioe NS MOVE D PET TE 556 NN DR rl ect rie tree 163 DO, QU RDS 00 D'OR ee 165$ KVM COMTE MU tte 176 NOXNIILEEES A RS RTE nee sen +77 JucEMENT de l’Académie des Sciences fur les Mémoires admis tant au premier qu’au fécond Concours PR ENT UE De RE el dur 184 EXTRAIT de quelques Ouvrages & Mémoires rela- tifs à la fabrication du Salpétre, qui ont été rédi- gés pendant le Concours ou depuis la proclamation IDNT ONN Rettese 7e N RE MERE ERA 188 ART de fabriquer le falin & la potaffé. . . . ... Ibid. OBSERVATIONS fur des terres & pierres falpé- trees, par MM. le Duc DE La RocHEroucauLp, CrOUER EL AVOISIER LM 1e ie ne see Ve US 192 DÉTAIzs de quelques experiences faites en Angle- terre & en France, fur la compofition & la decom- BooR dla detre CE TE 197 FIN de la Table pour l'Hiftoire, a i A PR LURE POUR LES MÉMOIRES. MÉMOIRE fr la formation du Salpétre , & fur les moyens d'augmenter en France la production de ce eleipan MNCORNENDEN NE Mie sie NL AVERTISSEMENT DE L'AUTEUR. . « . . 4 MÉTRODUCTRIONS D ALAN. Le MEME MATE NET c PREMIERE PARTIE. Sur l'acide nitreux. . . . . SECONDE PARTIE. De la formation du Salpétre, & des moyens que l’on doit employer pour en obtenir. TroisiëMEe PaRT:E. Sur les moyens d'augmenter en France l1 produttion du Salpétre, fans avoir recours au creufement des caves, & en delivrant les Particuliers de la gêne & de l'affijettiffement auxquels ils font expofes par les fouilles que les Salpétriers ont droir de Jaure \eber Rex MANN Pag. : Ibid. MÉMOIRE Chimique & Économique für les prin- cipes G la generation du Salpétre. Ouvrage qui a remporté le Prix Royal, au jugement de l’ Aca- demie des Sciences ; par MM. THOUVENEL. . PRÉÊLIMINAIRES. DIU OUEST): PREMIÈRE SECTION. Théorie generale de la nitri- MICALION: NME oi a eee Ne LU SE DEuxiÈME SECTION. Pratique generale de la nitri- VÉCORIOME re USERS ©: NAPPES Es LEP D PREMIER SUPPLÉMENT. Recapitulation du Me- MO EDreCE Cent I EE RE Red Meet à DiuxiÈèME SUPPLÉMENT. Relarif à la féconde Partie du Mémoire. . TABLE POUR LES MÉMOIRES. v RÉSUMÉ GÉNÉRAL du Memoire & des Sup- DIÉMERS eee eNe tee che ue + OA RECHERCEHES fur la formation & la mulripli- cation des nitres, par M. ve Lorcena, Colonel des Ingénieurs au Service de la Republique de Venife. P. 167 CHAPITRE PREMIER. Des acides. . . . . . .l. : Ibid. Caar. Il. Des nitres en general & des alkalis fixes. 186 Car. IIL De la formation du nitre & de l’acide PLEINS EN NET Ile Lie Lol O7 NU EURE PEPIQR EE 201 Car. IV. De la multiplication du nitre. . .... 225 Car. V. Plan d’adminiftration pour fervir à la multiplication CSTILre, UN nr 254 MÉMOIRE qui a partagé le fecond Prix fur la formation & fur la fabrication du Salpétre, par M. Gaviner, Commiffaire des Poudres à Befan- con ; & par M. CnevrAND, Infpecleur des Poudres danse smenelvilles trltatste der le en NUNIP 268 Aa ÈS ALLE TEidé CHapiTRE PREMIER. De l’exiflence du nitre dans (LITE PR PRE PARA PA EEE T OU PRET TE (PAT re 287 CHar III Sentiment de PAuteur fur la décompo- Jition de lacide nitreux, par M. Lavoisier. . .. 280 CHar. IV. Rejlexions de l° Auteur fur la queftion propojée.: AA ES ANS, MOSS - 1e ie PAUT 282 Cuar. V. Plans de hangars pour les villes qui pour- ront fournir les matières neceffaires à cet établi JÉMERESE CARE ENT Le ES ee Vie (et 284 Cuar. VL Enumeration des matières que l’ Auteur v] TABLE POUR LES MÉMOIRES. emploie dans la nitrière ; des moyens de fe les procure de leursjemploi. re TE ACT P. 289 CHar. VIL Manière d’arrofer les couches. . ... 295 * Car. VIIL Comparaifon de l’établiffement, pro- pofé par l’Auteur, avec celui de MM. les Ri- GISSEURSS D. 1. 4 OU NP EE ENTER 303 Car. IX. Projets de hangars pour les villages. . 305$ Car. X, Du leffivage des terres. . . . . !. !. 315 Car. XI. Des fubflances alkalines qu’on doir em- ployer pour donner une bafe au Salpétre. . . ... 317 CHar. XII Du traitement des Salpétriers, & du benefice que les Communautés ou Particuliers peu- vent retirer des hangars-écuries. . . :...... 319 OBSERVATIONS Jur les moyens d'augmenter la récolte du Salpétre en France, par M. Cur- VRAND, Înfpecteur des Poudres & Salpétres , à Befançonpien PEN RNA ENST AHACEL 2 ARTICLE PREMIER. Des demolitions. . . . .. Ibid. Arr ALI, Des -tuffeauxe/ es ns DER RNB 330 Aus TI D esroraies ns tes hier 0e CITANT 331 ART. IV. Du leffivage particulier des craies. . . . 340 ARTE ES TALONS NA ART En NE Snill LES 345 ART VIP De icon ruCRon NE RE EAN Er 352 ART. VII. Du deffivage des terres... ... ... .: 360 ArRTUV PTE Jararatape ee, 363 Ant. IX. De la formation de l’acide nitreux. . . . 365 DISSERTATION ür le Salpétre, avec quel- ques idees fur la nitrification, ainft que fur la manière d'augmenter confiderablement la recolie du Salpétre. Ouvrage qui a remporte le premier Ac- - ceflic, par M. J.B. pe Beunie, Médecin à An- vers , de l’Académie Impériale des Arts 6 Belles- Errires de Dress NE ANNEE EE, P. 37» TARLE POUR LES MÉMOIRES vij DTSCOURS PRÉLEMINATRE.: eee. . 571 CHaA?1ITRE PREMIER. Des principes 6 des qua- PILES MERE RE IN Là SCO TAN. ue? 3 Car. IL De la nirification. .. .... .... En Car. IIL Maniere d'augmenter la nitrification. 3 Car. IV. De la manière de tirer le nitre de la LETTE NELFEL( EN. phds-meneee à nel etienne acts RS ee P. 391 ESS AT fur les moyens de faire genérer le Salpétre en abondance & avec la plus grande economie. Ouvrage qui a remporté le fecond Acceflit; par M. le Comte MHOMASSINVDE. SAINT-OMER, . : : . & . à... P. 399 MÉMOIRE fur la formation & la fabrication du Salpétre , préfenté pour concourir au Prix propofé par lAcadeïnie Royale des Sciences de Paris; par M. Rome, Profeffeur Royal de Mathématiques, & Correfpondant de la méme Académie. . . . .. P.42x ADDITION au Memoire précédent. . ....... 478 MÉMOIRE fur des terres naturellement falpétrees , exiftantes en France, lu à l’Académie, le $ Juillet 1777, par MM. Crouer © Lavoisier, Reoif- eurs des \Poudres\@"Salpétres),;11P2 MERE P'503 PREMIÈRE Parrir. Détail des expériences. . . 506 SECONDE PARTIE. Des conféquences qui réfiltent des experiences précedentes , foit pour la theorie, NO pOunle pratiques OT AT RNETTE 56: MÉMOIRE fur des terres & pierres naturellement falpétrées dans la Touraine & dans la Saintonge , par MM. Court & LAVoISIER. . . . .. . .. Psy TABLE POUR LES MÉMOIRES. vi MÉMOIRE fñr la génération du Salpétre dans la craie, par M. le Duc pe La Rocarroucauzn. . P. 610 EXPÉRIENCES Jur la décompofition du nitre par le charbon, par M. Lavoisier. . .. .. .. P.625 MÉMOIRE Jùr la fabrication artificielle du Sal- DéPre Reis 3 SMIC SN se in Ut à P.633 Fin de la Table pour les Mémoires. HISTOIRE EU Î NT juil HISTOIRE DiELCE QUAI S EST: PASSE RELATIVEMENT AU PRIX PROPOSÉ SUR LA FORMATION BU ONEPETRE, EXTRAIT des Regiftres de la Commiffion nommée par l'Académie des Sciences pour le Prix propofë fur la formation du Salpétre. Lz 23 Août 1775, M. de Fouchy, Secrétaire perpétuel, fit, à l'Académie Royale des Sciences , leéture de la lettre fuivante , qui lui avoit été adreflée par M. Turgot, Contrôleur Général des Finances. Verfailles , ce 17 Août 1775. Sur le compte, Monfeur , que j'ai rendu au Roi, de l'état actuel de A ce . E : Ja récolte du Salpêtre en France, des diminutions fucceflives qu’elle « 2 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ éprouvées depuis quelques années , des moyens propres à la rétablir, enfin des différens inotifs qui doivent fixer fon attention fur cette branche importante d’adminiftration , Sa Majelté a penfé que le plan qui avoir éte fuivi jufqu'’à ce jour, relativement à la fabrication du Salpétre dans fon Royaume , avoit dû retarder les progrès de cer Art, & que c’étoit ans doute par cette raifon qu’il fembloir être , däns ce moment, au deffous . du niveau des autres connoïffances phyfiques & chimiques; Dans ces circonftances , Elle a jugé néceflaire de réveiller l'attention des Savans , de diriger leurs recherches fur cet objet, & de chercherà acquérir, par leurs concours, des connoiffanceSäfixes & certaines qui pullent fervir de bafe aux diffcrens établiflemiens qu'Elle fe propole d’ordonner. Aucun moyen ne lui a paru plus propre à remplir fes vües à cet égard, . que la propofition d’un Prix en faveur de celui qui, au jugement de l'Académie , auroit vu de plus près le fecret de la Nature, dans la formation & la génération du Salpêtre , & qui auroit enfeigné les moyens les plus prompts & les plus économiques pour le fabriquer en grand & en abondance. L’intention de Sa Majefté étant de foulager le plus tôt poffible fes fujets de la gêne qu’entraînent la recherche, la fouille & l'extraction du Salpètre chez les particuliers, Elle défire que l’Académie fe meite en érar d'annoncer ce Prix dès la féance publique de la Saint-Martin prochaine. Ii fera néceflaire , en conféquence , qu’au recu de la préfente, ou dans le plus court délai poñfible , elle procède, dans la forme accoutumée., à la nomination des Commiflaires qui feront chargés de la rédaction du Programme , & qu'ils en rendent compte à l’Académie avant les vacances. Le Programme devra contenir fuffifamment de détails, 1°. pour donner une idée très-fuccinéte de l’état actuel des connoiïffances fur la formation du Salpètre; 2°. pour indiquer les Ouvrages dans lefquels les Concurrens pourront trouver des notions plus étendues; 3°. enfin, pour les mettre fur la voie de ce qu'ils ont à faire, & des expériences qu'ils ont tenter. ‘L'intention du Roi étant que le Prix ne foit diftribué qu’autant que l'expérience aura été jointe à la théorie , Sa Majefté fe propole de procurer aux Commiffaires de l’Académie, foit à l'Arfenal, foit ailleurs, un: emplacement commode & fuffifamment vafte pour répéter les expériences ropofées dans les Mémoires admis au Concours ; Elle défire même que Fe Commiffaires de l’Académie y joignent toutes celles, qui quoique non-indiquées par les Concurrens , leur paroïtront propres à éclaircir la matière, Elle attend de leur part des preuves du zèle conftant de ? Académie pour tout ce qui STE le bien public & le fervice de l’État. Sa Majefe défiré auf, qu'ils dreflent du tout, jour par jour , un procès-verbal exa, auquel pourront aflifter les Régifleurs des Poudres & Salpêtre, & qui fera figné de tous les Affiftans. Le Prix propofé fera de quatre mille livres, &, vu les dépenfes SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ; extraordinaires qu'il exigera de la part des Concurrens, il y fera joint deux Accellit, de mille livres chacun , en faveur de ceux qui fe feront le plus diftingué. Ces fonds feront aflignés fur ceux de la Régie des Poudres & Salpérre; & j'écris aux Régifleurs, pour qu'aufli-tôt que.le temps de la proclamation fera fixé, ils remettent entre les mains du Tréforier de l'Académie , un ordre payable à la même époque. Le Prix diftribué, je vous prierai de m'adrefler toutes les Pièces qui auront été admifes au Concours, pour en faire des Extraits, afin que les idées utiles qui pourront s’y trouver ne foient pas perdues pour le Public. Je vous prie de me marquer ce que l’Académie aura fait pour l'exécution du contenu de la préfente; de m'envoyer le nom des Commiflaires qu’elle aura choifis , & de me donner communication du Programme aufli-tôc qu'il fera rédigc. Je fuis, Monfeur, &c. Signé TurGor. Quoique l’ufage de l’Académie des Sciences foit de remettre à huitaine toute délibération d’une certaine importance; cependant, comme on étoit très-près des vacances, & qu'il ne reftoit de temps que ce qu'il en falloit pour rédiger le Programme & le foumettre au jugement de l'Académie avant fa féparation ; enfin, comme il étoit queftion d’un objet d'utilité publique, fur lequel le Gouvernement réclamoit le Concours de l'Académie des Sciences , on penfa qu'elle pou- voit, fans tirer à conféquence, sécarter pour cette fois de fes ufages, & délibérer dès le jour même. M. de Fouchy fit en conféquence la leéture des Réglemens relatifs à la propofition des Prix, & on procéda, en exécution, à la nomination de cinq Commiflaires, par voie de fcrutin, dans la forme ordinaire. Quelques Académiciens mirent en queftion , à cette occa- fion, fi M. Lavoifier , en même temps Membre de l'Académie des Sciences & Résiffeur des Poudres, n'étoit pas, en cette dernière qualité, dans le cas de l'exclufion, & sil pouvoit être du nombre des Commiflaires qu'on alloit élire ; mais fur ce qu'il fut repréfenté que l'Adminiftration des Poudres & Salpêtre n'étoit plus en entreprile ; que par la forme qui avoit A i) 4 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ été donnée à la Régie, ceux qui en étoient chargés ne pouvoient avoir d'autre intérêt ni d’autre but que le plus grand avantage de l'État & du fervice du Roi, il fut convenu qu'il n'y avoit aucun motif qui püt exclure M. Lavoifier du nombre des Commiflaires. En conféquence, le choix des Commiflaires fut fait dans l'ordre qui fuir : M. Macquer , M. Lavoifier, M. le Chevalier d'Arcy, M. Sage , M. Baumé ; depuis, M. Baumé ayant demandé à fe retirer de la Commifion , il a été remplacé par M. Cadet; M. le Chevalier d’Arcy étant venu à mourir, M. de Montigny a été nommé à fa place; enfin, à la mort de M. de Mon- tigny , il a été remplacé par M. Tillec : en forte qu'au moment où cet Ouvrage eft public, les Commiflaires font, MM. Mac- quer , Lavoiñer, Sage, Cadet & Tillet. On les range ici dans ordre dé leur nomination. La plus grande célérité fat recommandée aux Commiflaires our la rédaction du Programme ; & pour mieux remplir les vûes de l'Académie, ils s’aflemblèrent dès le jour même à la fuite de la Séance de l'Académie. Le réfultat de cette première conférence fut de convenir que chacun d'eux mettroit par écrit fes idées fur la forme à donner au Programme, & raflembleroit tous les matériaux qu'il pouvoit fe procurer pour le rendre plus inftructif; qu'enfuire le cout feroit remis à M. Macquer, qui voulut bien, à la prière de fes Confreres , fe charger de la rédaction. Le travail des Commifaires ne tarda pas long-temps à tre en état d'être préfenté à l'Académie , &, dès le 2 Septembre, le Programme fut lu, difcuté & arrêté dans fon Aflemblée, Régulièrement , & fuivant les ufages de l'Académie, il n’auroit dû être publié qu’à la Séance publique d'après la Saint-Martir, c'eft-à-dire , le 15 Novembre fuivant; cependant, pour donner plus de temps aux Concurrens , FAcademie chargea les Com- miflaires de le faire imprimer pendant les vacances, de le diftribuer , & de l'envoyer aux Papiers publics , aux Correfpon- dans de l’Académie, &.aux Académies étrangères & regnicoles. SUR LA FORMATION DU SALPETRE. M. le Contrôleur Général, auquel le Programme fut com- 3 Us . à . \ muniqué, ordonna quil en fût viré trois mille exemplaires à l'Imprimerie Royale, aux frais du Roi : on en joint ici la copie. PRIX (EX TR A'ORDINAPRIE, Propofe par l’Academie Royale des Sciences, pour l'année 1776. S ur le compte qui a été rendu au Roi, par M. le Controleur Général des Finances, de l’état actuel de la fabrication du Salpétre en France, & de la diminution fenfible qu’elle à éprouvée , Sa Majefté , après avoir reconnu que cet inconvénient provenoit des défauts du fyftème ci-devant adopté fur cette branche d’adminiftration, & y avoir fait les réformes & les changemens qui lui ont paru néceilaires, a jugé qu'il feroit encore avantageux à fes fujets de faire rechercher tous les moyens d'augmenter le produit du Salpêtre dans fon Royaume, fur-tout pour les délivrer, le plus tôt qu'il fera poflible , de la gène & des torts que leur occafionnent les perquifitions , les fouilles & les démolitions que les Salpêtriers ont le droit de faire dans les habitations des particuliers, & des abus qui peuvent en réfulter. Aucun moyen n’a paru plus propre à Sa Majeflé, pour remplir fes vies , que de propofer fur cet objet un Prix au jugement de l'Académie, & Elle la chargée d'en publier un Programme aflez détaillé & aflez inftruétif pour faciliter, le plus quil fera poñlible , les recherches de ceux qui voudront concourir. L'Académie , pour fe conformer aux intentions du Roi, croit donc devoir faire les obfervations fuivantes , en indiquant le fujer & les conditions de ce Prix. Nos connoiffances actuelles , fur l’origine & la génération du Salpètre, fe réduifent à plufeurs faits certains, fur lefquels on a établi quelques théories affez incertaines. Il eft conftant , par l’obfervation journalière des Chimiftes, & de tous ceux qui travaillent à l'extraction & à la fabrication du Salpêtre , que ce fel ne fe forme ou ne fe dépofe habituellement que dans des murs, des terres & des pierres tendres & poreufes, qui peuvent être imprégnés des fucs des fubftances végétales & animales, & fufcepribles de putréfaction; que le Salpêtre ne commence à devenir fenfible, dans ces terres & pierres , qu'au bout d’un certain temps tout-à-fait indéterminée, & qu'il 6 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ .eft pourtant très-eflentiel de connoître & d’abréger, s'il eft poffible ; ce temps varie fans doute fuivant les circonftances, & c’eft probablement celui où la décompofition des végétaux & des animaux a été portée à fon plus haut point. On fait encore que les endroits les plus favorables à la production du nitre , font les lieux bas qui ne font pas trop expofés à l’aétion du grand air, dans lefquels cependant l'air a un affez libre accès, qui font à ombre , à l'abri du foleil & de la pluie, & où il règne habituellement un peu d'humidité , tels que font les caves, les cuitines , les latrines, les celliers, les granges , écuries, étables; en un mor, tous les endroits, toutes les pièces habitées par les hommes & les animaux. On s’eft afluré par l'expérience , qu’en mélant les fumiers , les lirières des animaux, les plantes, même toutes feules, de quelque efpèce qu’elles foient, avec des terres , fur-tout calcaires , marneufes & limoneufes , on peut conftruire des murs ou des monceaux de fept à huir pieds d’élévation,, qui, lorfqu'ils font placés dans les lieux tels que ceux qu’on vient d'indiquer , & arrofés de temps en temps avec de l'urine, commencent à fournir une quantité fenfible de Salpêtre , quelque temps après leur conftruction ; que ce Salpêtre qui eft à bafe d’alkali fixe , quand il vient des plantes, fe criftallife à la furface ; qu’on peut l'enlever par le houffage; que fa quantité augmente jufqu’à un certain terme; qu’on peut en retirer de cette manière & fans lefliver les mélanges , pendant fept ou huit ans; & qu'enfin on les leflive pour achever de retirer tout le Salpêtre qui s'y eft formé ou raflemblé. C’eft de cette manière que fe conftruifent & s’exploitent, à ce qu'on aflure, les couches ou nitrières artificielles en Suède, dans plufieurs autres pays , & peut-être même aux Indes, dont on apporte en Europe une énorme quantité de Salpêtre; lequel, malgré les frais du tranfport & le bénéfice du commerce , n’eft point ici d'un plus haut prix que celui du pays. Au fapport des Salpétriers , les terres qu'ils ont épuifées de nitre par les leffives, en refourniflent une nouvelle quantité, après qu’elles ont féjourné fous les hangars , où ils les confervent pour cet ufage; il eft vrai qu'ils répandent fur ces mêmes terres , les eaux mères qu'ils obtiennent de leurs cuites , & que, ces eaux contenant ordinairement encore une portion de Salpêtre, & toujours du nitre à bafe terreufe, cette circonftance répand de l'incertitude fur la reproduétion du Salpêtre dans ces terres, quoiqu’elle foit bien d'accord d’ailleurs avec la génération de ce fel dans les couches Suédoifes (*). : (@) Nota. Le peu de temps que l'Académie a eu pour rédiger & publier ce Programme , ne lui à pas permis de fe procurer, par le moyen de fes Correfpondans L tous les éclairciflemens qu'elle auroit défiré d'inférer ici, fur ce qui fe pratique dans les pays étrangers, au fujet des couches à Salpêtre ou nitrières artificielles ; mais voici ce qu'un Citoyen ( M. de Chaumont}, qui s'occupe avec zèle depuis un certain temps de cet objet, a bien voulu lui communiquer. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 7 Enfin, les analyfes des Chimiftes ont prouvé que beaucoup de plantes, telles que la bourache, la pariétaire, & fur-tout le grand foléil, contiennent, fans aucune putréfaétion préalable , une quantité , fouvent confidérable, de Salpétre à bafe d’alkali fixe. On a obfervé que celles qui croiffene aux pieds des murs, ou dans des terreins remplis de fumier, en contiennent beaucoup plus que leurs analogues, qui ont végété dans des terres moins nitreufes, ou contenant beaucoup moins de matériaux du Salpêtre; ce qui peut faire préfumer , avec beaucoup de vraifemblance, qu'il fe forme habituellement une grande quantité de Salpétre für toute la furface de la terre, par la putréfaétion des herbes, feuilles & racines qui y reftent enfevelies chaque année ; mais que ce Salpêtre étant emporté & difperfé par l’eau des pluies , ne fe trouve nulle part en quantité fenfible dans les endroits découverts , à moins qu’il ne foit recueilli & raffemblé par des plantes qui ont en quelque forte la vertu de les pomper. On reconnoït que les terres & pierres font bien falpétrées, à leur faveur , qui a quelque chofe de falin & de piquant; de plus, ces matières, quand le Salpêtre y eft abondant , n’ont plus leur confiftance naturelle: elles font plus friablés. Ordinairement leur furface fe couvre d’une cfflorefcence qui fe réduit en pouflière dès qu'on y touche, & dans certaines circonftances , on y obferve méme un vrai Salpêtre de houflage. » Les couches à Salpêtre, établies près de Stockholm , font faites en pyramides » triangulaires, avec du chaume, de la chaux , des cendres & des terres de pré; » leur bafe cft conftruite en briques pofées de champ; fur cette bafe eft un lit > de mortier , fait avec de la terre de pré, de la cendre, de la chaux, & fufñfante 5 quantité d'eau mère de Salpêtre, ou d'urine : les lits de chaume & de mortier » fe fuccèdent aufli alternativement jufqu'au fommet de la couche. » Pour couvrir ces monceaux & les garancir de la pluie, on pique en terre » autour d'eux, des perches, qu'on lie par leur extrémité fupérieure, & le tout » eft couvert avec de la bruyére ; on obferve qu'il y ait, entre le monceau & » fa couverture, un efpace aflez grand pour qu'on puifle les arrofer quand ik # convient, & recueillir le Salpêtre qui fe criftallife à leur furface; l’arrofement fe » fait avec des urines & des matières fécales, que des femmes de mauvaife vie #> font forcées d'y tranfporter. » Ces couches font en rapport au bout d'un an, & durent dix ans. On en » détache lé nitre avec des balais, tous les huit jours, & on les arrofe , dès æ qu’elles font balayées, avec des eaux mères étendues d'eau pure, quand ot. n’a » pas affez d'eau mère pour arrofer complètement la couche. » Le réfidu de ces couches, au bout de dix ans, eft un excellent engrais >> & très-recherché pour Ha culture du chanvre & du lin. » On conftruit aufli en Prufle des murs de terre, mélée avec la vidange des latrines, & quand ils font falpétrés , on en retire le nitre par les lixiviations » & les cuites ordinaires. » Le Citoyen qui a bien voulu communiquer ces détails à FAcadémie, dit qu'il les tient du fieur Berthelin, François, qui a conduit en Suède une Manufacture de porcelaine, & qui eft aétuellement à fa terre pour y diriger une nitrière , a peu près fur les mêmes principes, mais avec quelques changemens dont > il efpère de l'avantage «. 8 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Les faits qui viennent d’être expofés, réunis avec les procédés connus ou faciles à connoïtre , de l'extraction & de la purification du Salpétre, compofent toutes nos connoïflances certaines fur la production & l'extraction de ce fel; car, comme on l’a déjà fair obferver , les Chimuftes n’ont encore établi aucune théorie entièrement fatisfaifante fur les principes de l'acide nitreux, fur fa véritable origine , & fur la manière dont il fe forme. Tout ce qui a été dit fur cet objet, peur fe réduire à trois fentimens principauxk Le premier cft celui des anciens Chimiftes; ils penfoient que l'air de latmofphère étoit le lieu natal & le grand magafñn de l'acide nitreux : fuivant cette opinion, qui a même encore des partifans, cet acide nitreux de l’air {e dépofe dans les terres calcaires & autres matières alkalines qu’il trouve à fa portée, & forme avec elles les différentes efpèces de nitre qui fe manifeftent dans ces matières, après qu’elles ont été expofées à l'air pendant un temps convenable. Ceux qui adoptent ce {entimenr, fe fondent principalement fur ce qu'en ne trouve point de Salpêtre dans les terres & pierres, à moins qu’elles n’aient éprouvé -pendant long-temps l’action & le contat d’un air tranquille; mais outre que ce fait n'eft pas bien avéré , & qu'il eft un de ceux qui demandent à être vérifiés , il eft combattu par un autre fait indubitable ; favoir , que les mêmes terres & pierres qui fe falpêtrent abondamment dans les habitations des hommes & des animaux, ne produifent point du tout de Salpétre dans leurs carrières, lors même qu’elles s’y trouvent placées de manière qu'elles foient acceñibies à l'air, précifément comme dans les maifons & autres lieux habités. Le fecond fentiment eft celui de Stahl, qui, n’admettant avec Becher qu'un feul acide primitif, principe & origine de tous les autres, favoir, l'acide vitriolique, croit que l'acide nitreux n’eft que cet acide univerfel, tranfmué par fon union intime avec un principe inflammable , qui fe fépare des fubftances végétales & animales, & même de l’alkali volatil, dans la décompoñtion que la putréfaétion fait éprouver à routes ces matières. Il y a beaucoup de faits chimiques qui dépofent en faveur de cette opinion , comme on peut le voir dans les Ouvrages de Stahl , & particulièrement dans les Fundamenta Chimie Dogmatico-rationalis ; dans le Specimen Becherianum ; & dans le Confpeëtus Chimie de Juncker, Tab. de Nitro, & Acido nicri. Cependant on ne peut pas regarder cette théorie comme faffifamment prouvée, parce qu’elle exigeroit un travail expérimental, fuivi d’après ces vües, & plus complet que tout ce qu'on a entrepris jufqu'à préfent. On n’a fur cet objet que la differtation du Docteur Pietch, imprimé à Berlin en 1750, & qui a remporté le Prix que l’Académie de Prufle avoit propofé fur l'origine & la formation du nitre. Les expériences de ce Chimifte , qui font toutes en faveur du fentiment de Stahl , demandent néanmoins à être vérifiées, & fur-tout varices & multiplices. On SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. » ‘On croit devoir ajouter ici, que Stahl avance encore dans plufeurs «ændroits de fes Ouvrages, que l'acide du fel commun peut aufi fe tran£ muer en acide nitreux dans certaines circonftances ; & il eft certain qu'en différens temps pluleurs gens à fecrets ont prétendu pofléder celui de cette tranfmuration, & ont offert de la réalifer; mais, foit qu’on n'ait pas accepté leurs offres , foit que leurs expériences n'aient point réufi, leurs propoftions ne paroiflent avoir eu aucune fuite. Le troifième fentiment fur l’origine du nitre eft celui de M. Lemery de fils; il l'a expofé dans deux Mémoires imprimés dans le Recueil de ceux de l’Académie, pour l’année 1717. Ce Chimifte entreprend de prouver dans ces Mémoires , que le nitre eft un produit de la végétation; qu'il fe forme habituellement dans les plantes vivantes , d’où il pafle dans les animaux, & que fi ce nitre ne fe manifefte point , finon en très-petite quantité, dans les analy£es ordinaires des fubitances végétales & animales , -c'eft parce qu'il eft emibarraflé & mafqué par les autres principes de ces mixtes, ou détruit par l’action du feu, mais que la jueméen eft le moyen que la nature emploie pour le développer & e féparer. On peut voir les preuves que M. Lemery apporte de fon opinion dans ces Mémoires, qui méritent d’être lus à caufe des réflexions qu'ils contiennent , & des vües qu'ils peuvent fournir : au furplus , il en eft de cette théorie comme de celle de Stahl; elle demande à étre confirmée par des expériences beaucoup plus variées & plus mulripliées que celles de l’Auteur. Les trois fentimens qui viennent d’être expofés en abrégé , renferment ; comme on l'a dit, routes les idées théoriques que les Chimiftes ont eues jufqu’à préfent {ur l'origine & la production du Salpétre. Quoiqu’aucune d'elles ne foit aflez bien établie pour n'être pas fujette à de grandes difficultés, elles peuvent fervir néanmoins à fuggérer des plans d’expé- riences, & à empêcher qu'on ne travaille en quelque forte au hafard. D'ailleurs, il eft très-probable que les fuites d'expériences , dirigées d’après chacune de ces théories , & tendantes à découvrir fi elles font bien ou mal fondées , répandront beaucoup de lumières fur le point de phyfique qu'il s’agit d'approfondir , quand même il en réfulteroit que ces théories font faufles routes où incomplettes. Il eft facile de reconnoitre fi l'acide vitriolique, ou l'acide marin, fe tranfmue en acide nitreux , par le concours des matières en putréfaction. Suivant l'opinion de Stahl, il ne s’agit pour cela que de mêler avec des matières végétales & animales, fufceptibles de putréfaétion , l’un & l'autre de ces acides féparément, foit libres, foit engagés dans différentes bafes , en obfervant néanmoins de les proportionner ou de les combiner de manière qu'ils ne puiflent retarder fenfiblement la fermentation putride. Il fera à propos de laïffer ces mélanges en expérience dans un lieu tel que ceux que l'obfervation a fait reconnoître comme les plus favorables À la génération du Salpêtre , & de mettre de plus, dans Je même lieu, d’autres mélanges qui ne différeront des premiers qu’en B 10 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ ce qu'on n’y auta ajouté ni acide vitriolique ni acide marin; ces derniers devant fervir de comparaifon. Si l'on a fait entrer en même temps, dans plufieurs de ces mélanges, une aflez grande quantité de terres calcaires ou marneufes, bien exemptes de Salpêtre , comme cela paroït aflez convenable, en ce que ces terres accélèrent la putréfaction, il eft bien certain qu'avec le temps il fe fera formé du Salpêtre dans tous ces mélanges ; mais s’il y a eu en effet tranfmutation des acides vitriolique ou marin , en acide nitreux , ccla fera démontré par la quantité de Salpêtre qu’on obtiendra de cha- cune des matières mifes en expérience, & qui, dans ce cas , doit être plus grande dans celle où ces acides auront été ajoutés, & ne doit pas être plus confiderable dans les autres. Des expériences de ce genre, faites comme ilconvient, feront d’autant plus avantageufes, qu’elles pourront fervir en même temps à fe décider {ur le fentiment de Lemery, qui admet la préexiftence du Salpêtre dans les végétaux & les animaux, & fon dégagement par la putréfaction. Mais comme il.eft de la plus grande importance de prévoir tout ce qui pour- roit induire en erreur fur le réfultar des expériences , c’eft-à-dire , fur les quantutés de Salpètre qu’on pourra obtenir dans ces procédés, il {era abfolument néceflaire de garantir les mélanges , ou du moins une portion notable de chacun d'eux, du contact immédiat des murs, & même du fol du lieu où ils feront placés , fans quoi le Salpètre, qui doit naturellement fe former dans ces mêmes endroits, indépendam- ment de toute addition, répandroïit immanquablement beaucoup d’in- certitude {ur le produit réel de celui qui pourroit s'être formé dans les mélanges mis en expériences. A l'égard de l'influence de l'air dans la production du Salpêtre, c’eft encore un objet effentiel, & auquel on ne peut fe difpenfer de donner la plus grande attention. I] paroïît démontré , à la vérité, contre le fentiment des anciens, que l'air n’eft point le réceptacle, ni le véhicule de l’acide nitreux tout formé ; mais il eft vraifemblable qu'il contribue direétement ou indirectement à la production de cet acide, On fair que le concours de l'air favorile & accélère la putréfaction; & quand il. n’y auroit que cette circonftance , il en réfulteroit que fon influence n'eft point indifférente pour la production de l'acide nitreux; mais indé- pendamment de cette circonftance, il eft très-poflible que Fair entre lui- même , comme partie conftituante , dans la compofition de cet acide, où qu'il RuniBe quelque fubftance gazeufe, ou autre qui , fans être de l'acide nitreux , fe trouveroit cependant un des ingrédiens néceflaires à fa formation. Ces confidérations fuffifent pour faire fentir combien il importe de déterminer fi l'air contribue ou ne. contribue point à la génération du Salpètre ; & en cas qu'il y influe, en quoi, & jufqu'à quel point fon concours eft néceflaire à cette opération. Cette circonftance indique dans les recherches qu'il convient de faire , une nouvelle fuite d'expe- SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. #r fiences toutes dirigées vers l’action de l'air; on n'en parle ici qu’en : général, parce qu'elles font faciles à imaginer , & qu'elles ne peuvent manquer de fe préfenter d'elles-mêmes à ceux qui voudront s'occuper de ces travaux. Après cet expofé des connoiïffances actuelles fur l’origine & la pro- duétion du Salpêtre , l'Académie annonce que le fujet du Prix qu'elle propofe eft de srouver les moyens les plus prompts & Les plus économiques de procurer en France une produëlion & une récolte de Salpêtre plus abon- dantes que celles qu’on obtient préfentement , & fur-tout qui puiffent dif penfer des recherches que les Salpétriers ont le droit de faire dans les maifons des particuliers. Élle exige que ceux qui enverront des Mémoires , expofent leurs procédés avec toute la clarté & tous les détails néceflaires | pour qu'on puille les vérifier fans aucune incertitude | comme l’Académie fe pro- pofe de le faire. Elle déclare que le Prix fera adjugé à celui qui aura indiqué le procédé le plus avantageux pour la prompritude , l’économie ‘& l’abondance du produit, indépendamment de toute autre confidéra- tion, & que quand même ce procédé réfulteroit uniquement d’une application heureufe des obfervations & des pratiques déjà connues , fera préféré aux plus belles découvertes dont on ne pourroit pas tirer aufli promptement la même utilité. dé Ce Prix fera de 4000 livres , & fera proclamé à l’Affemblée publique de Paques 1778. Les Mémoires ne feront admis pour le Concours que jufqu’au premier Avril 1777 inclufivement; mais l’Académie recevra jufqu’au dernier Décembre de la même année les Supplémens & les éclairciffemens que voudront envoyer les Auteurs des Mémoires qui lui feront parvenus dans le temps prefcrit. Outre le Prix des 4000 livres, il y aura aufli deux Acceffie ; le premier de 1200 livres, & le fecond de 800 liv. Les Savans & les Artiftes de toutes les Nations font invités à concourir au Prix, & même les Aflociés étrangers de l’Académie : les feuls Aca- .démiciens regnicoles en font exclus. Les Mémoires feront lifiblement écrits en françois ou en latin. Les Auteurs ne mettront point leur nom à leurs Ouvrages, mais feulement une fentence ou devife; ils pourront , s'ils le veulent, atta- cher à leur Mémoire un billet féparé & cacheté par eux, qui contiendra, avec la même fentence ou devife, leurs noms, leurs qualités & leur adrefle : ce billet ne fera ouvert , fans le confentement de lAuteur , qu'au cas que la Pièce ait remporté le Prix, ou un des deux Acceffir. Les Ouvrages deftinés pour le Concours , feront adreflés à Paris au Secrétaire Perpétuel de l’Académie; & fi c’eft par la Pofte, avec une double enveloppe , à l’adrefle de M. de Malesherbes , Secrétaire d’Etar. Dans le cas où les Auteurs préféreroient de faire remettre directement leur Ouvrage entre les mains du Secrétaire Perpétuel de l Académie, ce dernier en donnera fon récépiflé , où feront marqués la fentence de Bij 22 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ FOuvrage & fon numéro, felon l’ordre ou le temps dans lequel il aur& été reçu. S'il y a un récépiflé du Secrétaire pour la Pièce qui aura remporté le Prix, ïe Tréforier de l’Académie délivrera la fomme du Prix à celui qui lui rapportera ce récépiile ; il n’y aura à cela nulle autre formalité. S'il n'y à pas de récépiflé du Sécréraire , le Tréforier ne délivrera le Prix qu’à l’Auteur même, qui {e fera connoitre, ou au porteur d’une pro- curation de fa part. L'inrenrTioN du Roi, fuivant [a lettre de M. Turgot, du 17 Août, étant de procurer aux Commiflaires de l'Académie un emplacement commode , foit pour y répéter les expériences annoncées par les Concurrens, foit pour y ajouter toutes celles qui paroïîtroient propres à procurer des lumières fur l’origine & fur la compoftion du Salpêtre. Les. Commiflaires louèrent , au mois d'Oétobie fuivant, une maïfon, un jardin & un grand hangar dans le fauxbourg S. Denis ; & non feulement M. le Contrôleur-Général voulut bien approuver la location de 200 livres, mais il y joignit encore une fomme de 12100 I, pour fubvenir aux frais des expériences. Dans cet intervalle, M. Turgot fut inftruit que l'Académie des Sciences & Arts de Befançon avoit propoié , pour la Séance publique d'Août 1766 , un Prix fur la manière la moins onéreufe de fabriquer le Salpétre en Franche-Comté ; que, quoique le Prix eût été proclamé à l’époque fixée par l'Aca- démie , les Mémoires qui avoient été couronnés n’avoient point été publiés. Il crut devoir en écrire à M. Droz, Secrétaire de Académie, & il le pria , fi l'Académie n’y trouvoit point d'inconvéniens, de lui confier le Recueil des Mémoires manuf- crits qui avoient concouru, afin qu'il püt faire extraire ce que ces Mémoires contenoient d’utile, & qu'ils ne fuñlent pas perdus pour la Société. Ce Recueil parvint à M. Turgot vers la fin de Septembre, & il le fit pañler aux Commiflaires de l’Académie. Il y joignit quelques détails inftruétifs qu'il s’étoit procurés fur la fabrication du Salpétre en Franche-Comté, & défira qu'il lui fûc fai un rappoït du tout. Les Commiflaires s’occupèrent de ce travail, & le rapport SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. ?; fat lu dans l'Aflemblée de tous les Commiflaires réunis dans la maïifon du fauxbourg S. Denis, le 18 Novembre 1775. Comme cette Pièce contient des dérails intéreflans, on croit devoir la donner ici avec quelques legers changemens. EXTRAIT détaillé du Rapport fait à M. le Contréleur- Général des Finances par les CommifJaires de l’Académie des Sciences, en Novembre 1775, en lui remettant les Pièces qui avoient concouru en 1766 pour le Prix de Befançon. L'Acanémir des Sciences , Belles-Lettres & Arts de Befançon avoir propofé , pour fujet du Prix de 1766 , de déterminer la manière la moins onéreufe de fabriquer du Sualpêtre en Franche Cemté. … L'Académie ayant été farisfaite de plufeurs des Pièces qui lui avoient été adreflées, elle à couronné d’abord le Mémoire N°. 8 , ayant pour devife : Arte perficitur quod Natura dedir, dont l'Auteur eft M. de Vannes , Apothicaire à Befançon. Elle a en même temps témoigné fa fatisfaction aux Auteurs de deux autres Pièces , en leur accordant à cha- cun un Acceffir. Ces deux Pièces font celles N°. 1°, ayant pour devife: Il y a peu de chofes impoffibles d'elles mêmes , & l’application pour les faire réuffir nous manque plus que les moyens. Réflexions morales de M. de la Rochefoucaulr, nombre 298, dont l’Auteur eft M. Puricelly, Négociant , ancien Juge-Conful à Befançon; & celle N°. 3 , ayant pour devife : Bonum publicum reperiendo opificis commodis confulere jucundum , dont l’Auteur eft M. Janfon , Apothicaire à Befancçon. De l'examen détaillé qui a été fair par les Commiffaires de l'Aca- démie , non feulement de ces trois Mémoires , mais de tous ceux qui ont été admis au Concours , il réfulte une vérité très-importante , & qui doit fixer d’une façon bien particulière l'attention du Gouvernement; c'eft que , quoique le Salpêtre brut en Franche-Comté n'ait éré payé jufqu’ici par les Fermiers des Poudres aux Salpétriers que 7 à 8 fols la livre, il en coute beaucoup davantage , foit au Roi, foit aux habitans de la Province, & que cer excédent forme une impofition très-réelle, beaucoup plus onéreufe que ne le feroit une impofition directe. Cette vérité eft démontrée dans le Mémoire N°. 1° de M. Puricelly : fi l'on s’en rapportoit même à fes calculs, il en réfulteroit que le Salvétre: de Franche-Comté coute, tant au Roi qu’au peuple, plus de 40 fols la livre; mais fans admettre ces réfulrars qui paroiïffent exagérés, on peut au moins regarder comme à peu près certains les faits qui fuivent.. Premièrement , les Salpéuiers de Franche-Comté confomment au: ‘14 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ moins, l’un dans l’autre, cinquante ‘cordes de bois par année : les Communautés font obligées de les leur fournir façonnées & rendues dans leurs ateliers fur le pied de 30 fols la corde pour le chêne, le hêtre & le foyard, & fur le pied de 24 fols pour le fapin & le bois blanc : cette fixation fuffit à peine aujourd’hui pour la fiçon du bois; de forte que la valeur intrinfeque & le charroi tombent entiè- rement à la charge des Communautés. Quand on ne fuppoferoit au bois qu'une valeur de 5 livres par corde, ce qui certainement eft au deflous de la valeur actuelle , il en réfulteroit encore que chaque Sal- pêtrier coute à la Province 250 livres paran, ce qui fait pour la totalité des Salpétriers , qui font au nombre de cent trente, un premier objet de -dépente de RE SL LM 22 ele Secondement , le nombre des Communautés de Franche- Comté eft de deux mille à peu près, dont les deux tiers, c'eft-à-dire, treize cent trente-deux environ fourniffent du Salpétre; mais comme le Salpêtrier ne revient qu’une fois tous les trois ans dans la même paroife , il en réfulte que le nombre des paroifles , exploitées chaque année, n'eft que de quatre cent quarante-quatre. Il en coute par an à chacune de ces Communautés, en - mettant tout au plus bas : 1°. Pour le logement du Salpétrier , 24 liv. ci. . . . 241. 2°. Pour le tranfport de fes uftenfiles. . . . .... 10 3°. Pour le charroi du Salpêtre à la raffinerie. . .. 6 Toraz pour chaque Communauté, . ..... 401. Et pour les quatre cent quarante-quatre exploitées chaque année par la totalité des Salpêtriers... ... . . , . . . .. . ‘17,760 La fabrication du Salpêtre coute donc évidemment à la Promesse eee eee tiens lis oi2. CON. La Franche-Comté rapporte environ trois cent cinquante mille livres de Salpêtre brut, qui, l’une dans l’autre , font payées aux Salpêtriers 7 f. 6 den., & qui forment une dépenfe totale pour l'Adminiftration des Poudres ou pour le Roi, de 131,250 Trois cent cinquante milliers de Salpètre brut coutent - donc en Franche-Comté, tant au Roi qu'aux Communautés, 181,510 L TR C'eft-à-dire, 10 fols 4 den. = la livre. On n'a point fait entrer dans ce calcul les monopoles que n’exercent que trop fréquemment les Salpêtriers : les plus adroits d’entre eux ne manquent pas de placer leurs cuveaux dans la partie de la maifon où ils jugent qu'ils feront les plus incommodes à ceux qui l'habitent , ‘fouvent même dans leur chambre d'habitation; ils effraient, ils menacent SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 1:15 de refter long-temps , de fouiller par-tout, & le plus fouvent ils finiflent par traiter pour une fomme plus ou moins forte que le particulier croit devoir facrifier à {a tranquillité; quelquefois ils compofent avec la Com- munauté toute entière, fous prétexte de non-fourniture de bois ou autre- ment : la Communauté fupporte les charges fans procurer de Salpérre à l'Etat, & l’objet du Gouvernement n’eft point rempli. IL éft impoñible d'évaluer le produit de ces manœuvres; elles font fûrement très-profirables aux Salpétriers & très à charge aux particuliers; & on ne doute pas qu'en les eftimant au plus bas, elles ne portent au moins à 13 fols par livre le prix du Salpêtre brut en Franche-Comté, & à 18 fols celui du Salpétre raffiné , fans compter la gène qui refte encore pour le compte de ceux qui ne font point en état de compofer avec le Salpêtrier. Il n’en eft pas de même, il eft vrai, de la fabrication du Salpêtre dans les grandes Villes, & dans les Provinces où la fouille n’eft point en ufage, comme dans la Touraine; mais il n’en eft pas moins vrai que, même dans les cas les plus favorables , le Salpêtre coute plus au Roi qu'il n’eft réellement payé par l'Adminiftration des Poudres. Pour connoitre, par exemple , le prix que coute au Roi le Salpêtre à Paris, il faudroit cumuler enfemble , 1°. le prix de 7 fols par livre que la Régie paye aux Salpétriers ; 2°. la gratification de 2 fols par livre qui leur eft accordée par le Roi; 3°. le prix du fel marin qui leur eft payé, par la Ferme Générale , à raifon de 7 fols par livre ; 4°. enfin, le tort qu'ils font à la Gabelle, foit par la confommartion que font leurs ouvriers de fel de Salpètre, foit par les abus qu'ils commettent même à leur infçu fur cet objet. En fuppofant que la production du Saipétre. dans cette Ville foit de 600,000 livres , année commune, on pourra établir le calcul fuivant. Prix de fix cent milliers de Salpêtre, payés par l’'Adminiftration des Pondres,.alraifonide 7folsuarhivre dir... 42 lu, aro,000:14. Gratification de 2 fols par livre accordée par le Roi. . . 60,000 Prix des quatorze livres par cent, ou des quatre-vingt- quatre mille livres de fel marin , payées par la Ferme Générale , à raifon de 7 fols par livres, ci. . . . ..... 29,400 Evaluation de la valeur à laquelle peuvent fe monter les fraudes de toute efpèce qui fe commettent par les agens fubalternes attachés à la fabrication du Salpètre , ci... .. 15,600 TOTAL AM S ENhesnes LR I 0GO je ED A Dé D'où il fuit que, quoique le Salpêtre à Paris ne paroiffe couter à VAdminiftration des Poudres, favoir, le Salpêtre brut que 9 fols, & le Sälpètre raffiné que 12 fols, il coute réellement au Roi & à l'Etat, le premier ro fols 6 den. &: le fecond environ 14 fols; les prix de Tou- raine font un peu moindres. Ces vérités, qui ne font peut-être pas fuffifamment développées dans: 16 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ %es Mémoires communiqués par l'Académie de Befançcon , mais qu'on a cherché à préfenter ici dans tout leur jour, conduifent à un grand nombre de conféquences & de réflexions auxquelles les Commiflaires de l’Académie croient devoir s'arrêter. La première, c’eft que quand le Salpêtre brut, qu’on recueilleroit em France par de nouveaux moyens, reviendroit au Roi à 10 & 12 els l livre, il en réfulteroit encore une économie réelle pour la Nation , puifqu’il eft démontré qu’elle le paye beaucoup davantage , fur-tout dans quelques Provinces , telles que la Franche-Comté , la Bourgogne & plufieurs autres. La feconde, c’eft que, dans les objets de fabrication & d’induf- trie , le régime réglementaire ne conduit pas toujours au but défiré. Avec des réglemens très-avantageux aux Salpétriers, avec des exemp- tions , des priviléges , des faveurs de toute efpèce , la récolte du Sal- pêtre s’eft anéantie infenfiblement en France, & de 3,500,000 livres qu’elle étoit dans le dernier fiecle , lorfque la France ne poffédoit encore ni la Franche-Comté, ni | Alface , ni la Lorraine, elle étroit rombée au com- mencement de la préfente année 1775 , au deflous de 1,800,000 livres: il eft donc évident qu'il exifte un vice dans le régime qui a été fuivi jufqu'ici pour la fabrication du Salpêtre en France ; que ce n’eft point avec des réglemens feuls qu'on peut efpérer de rétablir une récolte nationale fufhfante pour les befoins; que c’eft en multipliant les con- noiffances relatives à la fabrication du Salpêtre , en éclairant ceux qui s'en occupent, fur-tout en les payant mieux, & en remplaçant les priviléges, dont on abufe par une augmentation de payement en argent, qu'on peut parvenir à ce but. Une troifième réflexion , c’eft que le rétabliflement de la récolte du Salpêtre en France ne peut pas être opéré par une Compagnie d’Entrepre- neurs ; quelque inftruétion , quelque zèle pour le bien public, quelque honnéteté qu’on leur fuppofe , on ne peut pas exiger qu'ils le portent jufqu’au point de faire le ef de leur propre intérêt. Ils font entrainés par une pente naturelle & néceffaire à fe procurer du Salpètre, au meilleur marché poflible : on ne peut donc pas efpérer qu'ils faflent des éta- bliffemens difpendieux & difficiles , dont le réfultat feroit de leur pro- curer du Salpêtre à 12 £. la livre , tandis qu'en ufant de leurs privilèges ; ils ne le payent que 7 à 8. & que celui de l'Inde, en raïfon de fa qualité, ne leur revient pas beaucoup plus cher. Les Commiflaires de l Académie n’ont entretenu jufqu'’ici le Miniftre que de ce qui concerne en quelque façon la partie économique & olitique des Mémoires communiqués par l’Académie de Befançon; il eur refte à lui rendre compte de la partie phyfique. Les moyens propofés dans les Mémoires pour établir une récolte de Salpêtre, indépendante de la fouille , fe réduifent à quatre ; des voûtes, des murailles , des fofles, des couches ou tas. L'idée de former des voûtes avec des matières propres à produire du Salpétre , SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 1» Salpètre, pour les lefliver enfuite au bout d’un certain temps, paroït remonter jufqu’à Glauber. L’Auteur du N°. 5, donne pour les confuire la méthode fuivante : On prend douze parties de terre à Potier. Quatre de chaux vive. Deux de fel marin. On y ajoure de la fiente de pigeon & de volaille, où du crotin de brebis délayé; on pétrit le tout avec de la paille coupée très-menue, & au lieu d’eau on emploie de l'urine ou de la lefive de fumier. On fait fécher ces briques, & on leur fait même éprouver un léger degré de euiflon , après quoi on en conftruit des voûtes felon l’art. Le mortier qu'on emploie pour les maftiquer , fe compofe anf qu'il {uit : Atgile, huit parties. Chaux, huit parties. Fiente de pigeon, ou crotin de mouton, deux parties. On établit au deflus de la voûte une terrafle formée également d’un mélange de terre & de matières propres à la production du Salpétre; enfin, on recouvre le tout avec de la paille, laquelle fert par la fuite à compofer un nouveau mélange. Ces briques , fuivant l’Auteur , fe falpétrent en peu de temps; les voûtes fe dégradent, & quand on s’appercoit qu’elles font prêtes à tomber en ruine, on les détruit; on concafle les briques, & on les lefive. Ces voûtes ont l'inconvénient d’occafionner une main-d'œuvre qui renchérit néceflairement le Salpètre ; mais elles ont en même temps l'avantage d’économifer le terrein , attendu que le deffous de ces voñtes forme une efpèce de hangar dans lequel on peut fuüre des établiffemens de murailles ou de couches. On ne voit pas qu'aucun Auteur ait parlé, avant M. Pietfch, de V'établifflement d’une fabrique de Salpétreen murailles; il paroït cependant, d’après les Ouvrages de Stalh , & le Cours de Chimic de Junker, que cette méthode étoit très-anciennement ufitée en Saxe & en Brandebourg. Dans ces pays & dans plufeurs autres de l'Allemagne , on n’eft pas dans l’ufage de clore les héritages par le moyen de haies ; on y fupplée par de petits murs de terre franche, de glaife ou de toute autre terre, qu'on mêle avec de la paille hachée; en très-peu de temps ces murs fe falpétrent, au point de pouvoir être leflivés avec avantage par les Salpétriers (*). Le parti qu'on tire de ces murs, en plufieurs endroits de l'Allemagne ; pour la fabrication du Salpêtre , a fans doute donné l’idée d’en conftruire d'artificiels, & c’eft un des objets de la differtation de M. Pietfch. Ces murs fe forment de terre & de paille hachée : on les humedte & on CF) Ce fait eit-contredit par le Docteur Pietfch , dans fa Differtation fur le Nitre. 18 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ les pétrit avec de l'urine ou de la leflive de fumier ; & pour empêcher- que l'eau de pluie , en leflivant ces murs, n’emporte le Salpêtre , on les recouvre d'un petit toit de paille. Ce moyen de fabriquer du Salpêtre a, comme les voûtes, l'inconvénient d'exiger une main-d'œuvre, d'occuper beaucoup de place , & d’ailleurs le petit toit de paille, dont on recouvre les murailles , ne fuffit pas pour empêcher la pluie de frapper fur leurs parois dans les temps de vent; de forte qu'une partie du Salpètre eft entrainée aufli-tôt qu’elle eft formée. Les foiles ont un autre inconvénient; comme le Salpêtre ne peut fe former fans le contaét & le renouvellement de l'air, la nitrification ne’ s’y fait qu'à quelques pouces de profondeur , & il eft aifé de concevoir que ce moyen doit étre par conféquent celui de rous qui exige le plus de terrein, & qui, par conféquent, eft le moins économique. Il paroït , tout examen fait, en difcutant, les uns par les autres, les Mémoires préfentés à l’Académie de Befançon , & en les rapprochant des connoiffances de Chimie les plus certaines, que le moyen le plus économique & le plus avantageux de produire du Salpétre , eft de faire, fous de grands hangars, des amas de terre quelconque, pourvu qu'elle ne foit ni trop fabieufe ni trop argileufe , d'y mélanger des matières animales difpofées à la putréfaction , telles que des fumiers, du crotin de mouton, de la fente de pigeon , des vidanges, &c. d'y introduire même des végétaux , en choififfant de préférence les efpèces qui contiennent une plus grande quantité de nitre ; de les arrofer d’urine, de leflive de fumier, &c. enfin, de remuer fréquemment ces terres à la pelle; premièrement, pourles entretenir toujours meubles; fecondemenit, pour renouveler les furfaces , & pour expoler fucceflivement toutes les parties de la mafle à l'action de Pair. Parmi les Auteurs qui ont concouru , il en eft plufeurs.qui regardent comme fufffant d'élever de! grands hangars , d'y amafler des terres quelconques qui ne foient pas trop compactes; ils à perfuadent qu'elles fe falpétreront d’elles-mêmes fans addition, & qu’au bout de trois ans on pourra les lefliver avec profit. Cette opinion non feulement n'eft as prouvée , mais elle eft contraire même aux expériences de M. Mariotte, i celles de Lémery , & à l'opinion du plus grand nombre des Chimiftes. I eft très-probable que s’il {e forme du Salpètre dans une terre expofée à l'air, fans aucune addition , ce n’eft qu’en raifon des matières végétales qu'elle contenoit, telles que des racines de plantes , &c. ou des matières animales qui y ont été accidentellement mélées. Tel eft à peu près le réfulrat de ce que les Mémoires, qui ont concouru pour le Prix de l'Académie de Befançon , contiennent d’utile quant à la partie phyfique. On y trouve en général beaucoup d’affertions, mais peu de preuves : les Auteurs affirment bien qu’on peut, par telle méthode, parvenir à produire du Salpêtre; mais aucun ne dit précifément ni qu'il en a fait, ni combien il en à fait, &, à proprement parler, il ny a pas dans tous ces Mémoires une feule expérience. SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 19 A ce reproche on pourroit ajouter celui de ne contenir rien d’abfolument neuf; prefque tout ce qu’on y trouve de bon, avoit été publié auparavant par Stahl, par le Docteur Pietfch, par M. Bertrand, & par M. Grunner. Quoique le Mémoire de M. de Vannes, qui a été couronné, ne Loit pas à l'abri de ces reproches, on ne peut s'empêcher d'y reconnoitre beaucoup de connoiffances d'Hiftoire naturelle & de Chimie : l'Auteur paroîr les avoir principalement puifées dans les Cours de M. de Juflieu & de M. Rouelle. Ses obfervations fur les défauts de la manière d'opérer des Salpérriers de Paris, & de ceux de Franche-Comté, font conformes aux vrais principes ; & les corrections qu'il propofe font prefque toutes praticables & utiles. Les Régiffeurs des Poudres & Salpètre , fans connoitre les Mémoires adreflés à l'Académie de Befançon, avoient déjà fenti la néceflité des mêmes réformes, & il y a plus de deux mois qu'ils ont commencé à établir , chez les Salpétriers de Paris , une fuite d'expériences tendante à changer toute la forme de leur travail , à les débarrafler entièrement des eaux mères, & à les convertir toutes en Salpêtre par l'addition d’un alkali. Les avantages de cette nouvelle manière d’opérer leur ont déjà été démontrés par expériences, & il ne leur refte plus, pour en étendre la pratique , qu'à vaincre la réfiftance qu’apportent à ce nouveau travail les préjugés , & peut-être l'intérét même des Salpètriers. Si le Mémoire couronné eft celui de tous qui annonce le plus de connoiffances de Phyfique & de Chimie, s’il eft le mieux fait & le plus favant, ce n’eft pas le plus inftruétif quant au point principal, c’eft-à-dire, quant aux moyens de produire ae du Salpêtre. Le Mémoire N°. ç traite de cet objet plus à fond; & quoiqu'il ne donne rien de précis fur le produit des foffes, des couches, &c. il n’eft pas difficile de voir que ce Mémoire eft fait par quelqu'un qui a vu opérer & qui a opéré fans doute par lui-même. Il mérite d'autant plus d'attention , qu'il eft d’un habitant de Berne, Membre de la Société Économique, & qu'il paroït que le Salpétre ne fe fabrique aujourd’hui dans cette ville que par les moyens indiqués par l'Auteur. Ce Mémoire , au furplus, n’a point été perdu pour le Public; il a été publié, fans nom d’Auteur, dans le Recueil de la Société Économique de Berne, pour l’année 1766. CE rapport, en faifant connoîre à M. le Contrôleur Général combien la Nation étoit en retard fur les connoif- fances relatives à la fabrication du Salpêtre, lui fit en même temps fentir la néceflité d'enrichir la France d'un grand nombre de diflertations qui n'étoient ni traduites, ni même connues des Savans François. Il pria en conféquence les Commiflaires de l'Académie de s'occuper le plus tôt pofhible C i zo HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ de faire traduire tout ce qu'ils pourroient rafflembler d'inté- reflant fur cette matière dans les pays étrangers, & d'en pablier un Recueil. Les perfonnes les plus diftinguées par leur: rang & par leurs connoïflances voulurent bien les feconder. M. le Duc de là Rochefoucault avoit déjà reçu de Suède: quelques éclairciflemens fur la manière dont on fabriquoit le Salpétre dans ce Royaume ; il avoit découvert qu'il exiftoir plufieurs inftruétions qui avoient été publiées par le Confeil de Guerre, & il écrivit pour fe les procurer. D'un autre coté, M. Baër, Secretaire d'Ambañlide, voulut bien prendre la peine de les traduire : enfin, les Commiflaires de l’Académie raflemblerent tout ce que les Auteurs anciens & modernes purent leur procurer de connoïflances relatives à leur objet, & dès le mois de Janvier 1776 , ils fe virent en état de commencer limpreflion. Les Régifleurs des Poudres ne voulurent point le céder pour le zèle aux Commiflaires de l'Académie, & pour rendre ce travail encore plus utile à la pratique , ils en formèrent une efpèce de réfumé en forme d'inftruétion. Telles font les cir- conftances qui ont donné lieu à deux Ouvrages; le premier; intitulé : Recueil de Mémoires & d'Obfervations fur la formation & fur la fabricacion du Salpêrre, par MM. Mac- quer, d’Arcy, Lavoifier, Sage, & Baumé, Paris, 1776, un volume in-8°. de 622 pages, chez Panckouke, Libraire, rue des Poitevins, hôtel de Thou. Le fecond , Inftruction fur la fabrication du Salpétre, de l’Imprimerie Royale, Paris, 1777 ; in-4®. de 85 pages, avec figures, par les Régiffeurs des Poudres & Salpétres. L'objer du Précis hiftorique que publient aujourd’hui les Commiflaires de l Académie , étant de réunir dans un même volume & fous un même point de vue tout ce qui a été fat de plus important fur la formation & la fabrication du Salpétre, il entre dans leur plan de donner un extrait abrégé: des deux Ouvrages qu'ils viennent de citer. SUR ELA FORMATION DU SALPÊTRE. 20 CERERPERETERE TNT EEE RENE SCERIERNEENLTE DIE PENEIEE EEE STEP VV ET PTS PERRET ARTE ITEM ELEPRT EXTRAIT du Recueil de Mémoires & d’Obfervations. fur la formation & la fabrication du Salpétre, publié en 1776, par MM. Macquer , Lavoifier , d’Arcy, Sage, & Baume, L:s Commiffaires de l'Académie n’ont pas cru devoir s'occuper dans ce Recueil , des fubftances que les Anciens ont décrites fous le nom de Nicrum. Pline , il eft vrai, dans plufeurs endroits de fes Ouvrages, parle d’une fubftance faline , d’une efpèce de nitre qu’on retire des lacs de la Perfe, & des plantes par la combuftion ; mais comme il eft évident, d’après les paroles mêmes de l’Auteur , que ce qu'il décrit fous ce nom n'eft point le nitre , le Salpêtre des Modernes, mais un alkali minéra ou végétal, & principalement celui qui eft connu fous le nom de Natrum; ils ont regardé comme inutile d’inférer dans ce Recueil un extrait de fes Ouvrages. On en peut dire autant de plufieurs Auteurs, qui ont écrit depuis Pline fur le Nitre , & qui n’ont fait , en quelque façon ,. que le copier :tels font Difoftorides, Agricola, Ferrante Imperato , &c. En rejetant tout ce qui ne s'applique pas évidemment au nirre des Modernes, les Commiflaires de l'Académie ont été ramenés jufqu'aw temps de Glauber, & c’eft par l'extrait de fes Ouvrages, que commence le Recueil qu'ils ont donné au Public. Comme les recherches de cet Auteur font le germe de tout ce que nous avons encore aujourd’hui de'mieux fait fur cette matière, ils ont cru defoir expofer, dans quelque détail, fes expériences & fes idées® mais ils ont cru devoir prévenir en même temps, qu'on ne doit pas les adopter fans réferve : il règne dans les écrits de ce Chimifte , un ton de jaétance , un myftère affecté qui tient au langage de l’Alchimie, & ils préviennent qu’on ne peut fe défendre , en les lifant , de quelque défiance fur la certitude des réfulats, En analyfant les Ouvrages de Glauber , on: voit qu'il attribuoit au Salpêtre trois origines différentes ; il penfoit, 1°. que ce fel étroit tour formé dans les végétaux , & qu'il pañloit de là dans les animaux, qui s’en nourriflent par les voies de Ja digeftion ;.2°. qu'il fe produifoir une quantité confidérable de ce fel, par la puiréfaction des matières végétales & animales ; 3°. enfin, qu'indépendamment de ce Salpêtre, en quelque façon factice , il s'en rencontroit de naturel dans le règne minéral; & il cite des carrières, des montagnes entières , qui.en contiennent en grahde abondance. On voit donc que, fuivant cet Auteur ; lorfqu’on méle enfemble des terres, des matières animales & végétales, on obtient avec le temps, & à mefure que les matières animales & végétales fe font détruites par la putréfaction , 1°. le Salpêtre qui exiftoit tout formé dans la terres 2°, celui qui étoit tout formé dans les matières végétales 22 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ ou animales qu'on a employées; 3°. enfin, celui qui eft en quelque façon l'ouvrage de la putréfaétion. Glauber donne, d’après ces principes différentes méthodes pour obtenir du Salpêtre. Quelques-unes de ces méthodes ont été vérifiées depuis avec fuccès , & elles ont fervi de bafe aux établiflemens qui ont été faits en Suède, en Prufle, & dans plufieurs autres endroits; quelques autres , ou n’ont point été éprouvées depuis lui, ou l'ont été fans fuccès. Ce Chimifte croyoit à la converfon du {el marin en Salpêtre , & il donne plufieurs moyens pour l’opérer ; mais comme il eft démontré qu'on obtient du Salpétre par la plupart des méthodes qu'il donne , fans qu’on foit obligé d'ajouter du fi marin au mélange, il y a toute apparence que le Salpêtre, que Glauber regardoit comme un.réfulrat de la converfon , étoit réellement de formation nouvelle: au refte, les expériences multipliées qui ont été faites fur cet objet, depuis la propofition du Prix, ont prouvé, d’une manière démonitrative, que cette convetfon -eft abfolument imaginaire. Le célèbre Stahl, qui a beaucoup écrit fur le Nitre , en différens temps; eft d'une opinion entièrement différente de celle de Glauber. L’acide conftitutif du Salpêtre n’eft autre chofe , fuivant cet Auteur, qu’une modification de l’acide univerfel, une combinaifon de l'acide vitriolique, avec le principe inflammable , avec le phlogiftique qui s’émane des matières en putréfaction : il donne même différens procédés chimiques pour obtenir de l'acide nitreux, ou plutôt pour convertir l'acide vitriolique en acide nitreux; mais les expériences modernes , dont on rendra compte dans la fuite, ont renverfé entièrement toute cette théorie , & il n’eft pas plus permis de croir& à la converfion de l'acide vitriolique , qu’à celle de l'acide marin en acide nitreux. On vient de voir que Glauber attribuoit au nitre trois origines différentes. M. Lémery le fils, dans deux Mémoires qu'il donna à l'Académie en 1717, n’en admet qu'une feule ; il s'efforce de prouver que le nitre eft l'ouvrage de la végétation ; qu’il exifte tout formé dans les végétaux; qu'il paille de ces derniers dans les animaux par la nutrition; enfin , que le nitre qu’on retire par lixiviation , des terres dans lefquelles on a imélé des fubftances végétales ou animales , n’eft autre chofe que celui qui exiftoit rout formé, & qui a été féparé par la fermentation des parties huileufes & mucilagineufes qui le mafquoient. Plufeurs Auteurs anciens avoient avancé , fans expériences & fans preuves , que le nitre tiroit fon origine de l'air; que l’atmofphère étoit le magañn univerfel du nitre, & ils admettoient des efpèces d’aimant propre à l'attirer & à le fixer. Quoique Glauber, & fur-rout Stahl, euflent écarté cette opinion , c’eft principalement à M. Lémery, & avant ui à M. Mariotte , qu'on a l'obligation d’avoir prouvé par des faits, que Faction de l’air feul ne fuffifoit pas pour produire du nitre; que des terres, de quelque nature qu'elles fuffent, ne fe falpéroient pas d’elles-mêmes SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 23 à l'air, lorfqu’elles étoient ifolées, & qu'elles ne contenoient aucune fubftance ni animale ni végétale. Quoique M. Pourfour du Petit, Membre de l'Académie , ne fe foit point occupé fpécialement de l’origine & de la formation du Salpètre, les Commiflaires ont cru devoir, pour rendre ce Recueil plus complet, y inférer un très-bon Mémoire qu'il a donné en 1729, fur la précipitation du fel marin dans la fabrique du Salpètre. Pendant que les Chimiftes & les Phyficiens de différentes Nations s’occupoient de recherches fur le Salpêtre, les Souverains de plufeurs États de l'Europe cherchoient à tirer parti de leurs connoïffances , & à affurer à leurs États une récolte de Salpêtre fuffifante pour leurs befoins. Dès 1745, le Confeil de Guerre en Suède avoit reconnu la néceflité de changer la forme de l’adminiftration des Poudres & Salpètre, de foulager le peuple de la gêne de la fouille, & de le décharger des impofitions indirectes qui en étoient une fuite. Les perfonnes les plus inftruites fur la formation du Salpêtre ayant été confultées , le Confeil de Guerre publia, dès 1747, une inftruction fur la manière de produire ce fel par des méthodes artificielles. Cet Ouvrage , très- intéreffant , fur-tout relativement à l’époque à laquelle il a été publié, traite fucceflivement, dans ditférens chapitres & dans différens paragraphes, 1°. du choix de l'emplacement d'une nitrière; 2°. de la conftruétion du bâtiment; 3°. de la manière d’en éloigner les eaux; 4°. des matières tirées des trois règnes qui peuvent concourir à la formation du Salpêtre; s°. des règles fondamentales qui doivent guider ceux qui défirent former des établiflemens de nitrières; 6°. du mélange des terres; 7°. de la formation des couches; 8°. des matières propres aux arrofages, & des moyens de les employer; 9°. du leflivage , de l'évaporation , & de la criftallifation du Salpètre; 10°. du produit des nitrières , fuivant lés- dimenfions du hangar. Cet Ouvrage eft accompagné de planches très- détaillées , & de tout ce qui peut contribuer à en rendre l'intelligence facile ; c’eft une efpèce de Traité élémentaire , qui laïfle peu de chofe à défirer fur la formation du Salpêtre par le moyen des couches. Le Confeil de Guerre, en publiant cette inftruction, invitoit les particuliers à fe livrer à ce genre d’entreprife , & promettoit des encouragemens & des gratifications à ceux qui établiroient des ateliers de fabrication. Tandis qu'on élevoit en Suède des hangars , des pyramides, &c. le Roi de Prufle multiplioit dans fes États la production du Salpétre par une méthode différente. Il prefcrivit, par une Ordonnance du 18 Janvier 1748 , à chaque Communauté , Bourg & Village , de conftruire une certaine quantité de murailles épaifles , compofées de terre , de paille & autres végétaux, & de les défendre des injures de l'air par un petit toit de paille. Dans la même année, un Prix fut propofé par Académie de Berlin, fur la fabrication du Salpêtre, & le Prix fuc remporté en 1749, par le Docteur Pietfch. Ce Chimifte, dans fa 24 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Differtation , qui fut imprimée en François l'année fuivente , prétend ; comme Stabl, que l’acide du nitre eft compofé d’un acide vitriolique, en quelque façon affoibli par le phlogiftique qui s'échappe des matières végétales & animales en putréfaétion; mais loin que les expériences qu'il rapporte en faveur de fon opinion, foient décifives , elles ont au contraire été détruites , & toute cette théorie renverfée par les expériences de plufeurs des Concurrens au Prix. M. Pietfch, après avoir établi , dans le commencement de fa Difler- tation, fon opinion fur les parties conititutives du nitre, pafle à la formation de ce fel. Les circonftances qui lui paroiïffenc les plus propres à la favorifer , font, 1°. la préfence d’une terre calcaire , qui fixe l’acide du nitre, & qui lui fournifle une bafe; 2°. la grande porofité de la terre, qui laifle un libre paflage à l'air; 3°.da putréfaétion des matières végétales ou animales , & l’émanation de Falkali volatil qui s’en dégage; 4°. une certaine proportion de chaleur & d'humidité. Cette Differtation de M. Pierfch, fur le Salpètre , eft fuivie d’un Appendice du même Auteur, intitulé : Penfées fur la multiplication du Nitre. | y prouve d’abord, que les végétaux qui croiffent dans un. terrein quelconque, ont la propriété d’attirer & de fe rendre propre une grande partie du nitre qu'il contient. Il entre enfuite dans quelques détails fur la compofition des murs ordonnés par Sa Majefté le Roi de Prufle. 11 établit, 1°. que la terre qui fert de bafe à ces murailles, doit contenir de la terre calcaire; fi même on vouloit obtenir tout d’un coup du nitre parfait, il faudroit employer un alkali fixe quelconque, & le méler avec la terre : il confeille à cet égard de faire ramafler avec foin les cendres pour les faire entrer dans la compofition des murs; 2°. que la terre noire qui fe trouve à quelques pouces fous le gazon, éft une des plus difpofées à fe falpétrer; 3°. que de tous les excrémens des animaux , la fente de pigeon eft celle qui réuflit le mieux pour la fabrication du Salpêtre. Peu de temps après la publication de la Differtation de M. Pietfch } Ja fabrication du Salpétre devint l'objet des travaux de plufieurs Membres d’une Société Economique naïflante ; M. Elie Bertrand , M. Grunner , & un Auteur anonyme, publièrent, dans le Recueil de la Société Economique de Berne, chacun un Mémoire fur cet objet. Le Mémoire de M. Bertrand roule principalement fur la conftruétion des murailles à Salpêtre de Prufle; fur les matières qui entrent dans leur compoñition ; enfin , fur la manière de lefliver les terres, & de faire évaporer la lefiive. M. Grunner, dont l'Ouvrage parut quelque temps après celui de M. Bertrand , inftruit par fa propre expérience, crut devoir condamner l'ufage des murailles, des voûres & des foffes ; il prérendit que les murailles étant faites d’une terre pétrie, d’une efpèce d'argile, l'air ne pénétroit pas aflez facilement dans l'intérieur de là male, & que le fuccès des murailles en Prufle ne tenoit qu'à ce qu'elles étoient faires aux SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 24 aux dépens des Communautés, & que le temps & la main d'œuvre conféquemment n'éroient comptés pour rien. Quant aux voûtes , la main d'œuvre en eft, fuivant lui, trop chère; enfin les foffes , à caufe du défaut de circulation d’air , ne produifent du Salpètre qu'à la longue, & on eft jufqu'à dix & vingt ans pour en obtenir une très-petite quantité. M. Grunner fe trouve ramené, par ces réflexions, à la méthode de Suède, c’eft-à-dire , à la conftruction de hangars fous lefquels on amafle des terres qu'on difpofe par couches, ou par pyramides. Il confeille de les faire aux moindres frais qu'il fera poflible , de les couvrir en chaume , d'y amonceler des débris de murailles calcaires, des terres déjà falpétrées , d’y méler beaucoup de cendres, enfin de les arrofer avec de l'urine putréfiée , de la leflive de fumier, de l’eau des égouts des villes. 11 eft néceflaire , fuivant lui, de remuer fouvent les terres , afin qu’elles préfentent fucceflivement à l'air des furfaces multipliées. Par cette méthode on peut obtenir en peu de temps, fans dépenfe & fans grande difhculté , une récolte de Salpêtre fort abondante. L'Ouvrage de l’Auteur anonyme traite , comme celui de M. Grunner , de tous les moyens connus de fabriquer du Salpêtre ; des voûtes, des tuyaux , des mutailles , des fofles , des couches , &c. Il ne penfe pas auñfi défavorablement des voûtes, que M. Grunner; il donne le moyen de les compofer, de les élever, & il affure qu’on peut en tirer un très-grand parti. Les tuyaux font, fuivant lui, plus chers que les voûtes. Quant aux murailles , il les rejette entièrement. Enfin, il fe décide pour les fofles & pour les couches, & principalement pour ces dernières. Il prefcrit , comme M. Grunner , de placer les couches fous des hangars couverts en paille. On peut donner, fuivant lui , aux couches jufqu’à huit à dix pieds de largeur, fur la longueur qu’on juge à propos; on en forme un aufli grand nombre que le hangar peut en contenir, en Jaiffant entre elles des fentiers pour la manœuvre des Ouvriers. L'Auteur prefcrit de méler avec les terres , de la chaux, de la cendre, du mâche-fer., un peu de vitriol, & un peu d'alun ; mais il eft prouvé aujourd’hui que les trois dernières matières ne fervent à rien, & que les deux premières mêmes pourroient être nuifbles, fi on les introduifoit dans les couches en trop grande quantité. On donne aux couches ou tasune figure triangu- haire, c'eft-à-dire, qu’on les termine en efpèce de toit. On difpofe au fond de ces tas deux claies qui s’arc-boutent l’une contre l’autre , & qui ménagenc en deffous un courant libre à l'air; enfin on faupoudre ces couches pyramidales avec du fel marin , & on les arrofe tous les quinze jours avec de l’urine. Quand la furface de la couche fe durcit , on la ratifle à la furface avec un rateau de fer, qui rend la terre plus meuble & perméable à l'air. Ces couches, fuivant l’Auteur, peuvent être leffivées au bout d’un an. Il penfe que les falpêtrières doivent être placées de préférence dans D 26 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ les environs des grandes villes, à caufe des fumiers, des urines & des matières animales qu’on y trouve en abondance. Les balayures mêmes des maifons & des rues font très-propres à la production du Salpétre. Il en eft de même des débris des boucheries , des offemens des animaux , &c.. En général, il n’eft point de matières fufceptibles de putréfaction qu'on doive rejeter. On trouve , à la fuite de cette Differtation , un extrait de deux lettres adreflées à la Société Economique de Berne, par M. Neuhaus, fur la formation du Salpêtre. Il paroït qu'il a éprouvé avec quelque fuccès une des méthodes de Glauber ; elle confifte à amaffer dans un même endroit de la maïfon, toutes les matières fufceptibles de fe putréfier, & de les y laiffer pourrir. Il a tiré d’un tas qui s’éroit aini amoncelé pendant l’efpace de fept ans, douze quintaux de Salpêtre; la furface de terrein occupée par le tas, étoit environ de vingt-cinq pieds en carré. Quoique les trois Mémoires dont on vient de donner l'extrait ne con- tiennent rien d'abfolument neuf, & qui ne fe trouve, à proprement parler , dans Glauber , dans la Differtation de M. Pierfch & dans linf- truction Suédoife , les Commillaires de l'Académie ont cru qu’on les verroit avec plaifir dans le Recueil qu’ils ont publié, parce que les Auteurs annoncent avoir fait des expériences par eux-mêmes, & parce que les méthodes qu'ils propofent diffèrent, en plufieurs points importans, de celles de Prufle & de Suède. Tandis que la production artificielle du Salpêtre faifoit des progrès rapides en Allemagne , la France étoit dans une inaétion abfolue fur cet objet; la fouille dans les maifons des particuliers continuoit à fatiguer les habitans de la campagne , & quelques provinces reflentoient plus vive- ment que les autres les inconvéniens de cette méthode. Ce fut dans ces circonftances que l’Académie de Befançon, dont les travaux ont toujours été dirigés au plus grand avantage de la Société, crur qu'il étoit important d'appeler l'inftruction & les lumières au fecours du Peuple; elle propofa en conféquence, en 176$, pour fujer de fon Prix annuel, de déterminer la manière la plus économique & en même temps la moins onéreufe pour la Franche-Comté , de fabriquer le Salpêtre en grand. On a déjà donné plus haut une idée des principaux abus développés dans les Mémoires admis au concours. Les Auteurs propo- fenr, pour y remédier, l'établiflement de nitrières artificielles , la conftruétion de hangars ; & ils ne font que répéter à cer égard ce qui a été dit par Glauber, par Stahl, parle Doéteur Pierfch, & que ce qui a été publié dans les inflructions Suédoifes & dans les Mémoires de la Société Économique de Berne. Quelques-uns propofent de faire faire les établiffemens aux frais du Roi ; d’autres de les faire faire aux dépens des Communautés, Cependant on continuoit toujours en Suède de multiplier les établiffe- mens des nitrières aruificielles , & les connoiffances ne cefloient de faire SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 27 de nouveaux progrès dans ce Royaume. La difhculté qu’avoit l'air de pénétrer jufque dans l'intérieur des terres amoncelées dans les foffes, étoit le feul défaut qu'on püt leur reprocher; M. Gadd entreprit de le corriger. Il préfenta, en 1757, au Collége de la Guerre, un nouveau projet de foffes dans lefquelles il introdufoit de l'air par des efpèces de tuyaux d’airage, à l'inftar de ceux qu'on emploie dans les mines. Ce projet fur accueilli par le Gouvernement, & il fut même accordé à M. Gadd des fonds pour accélérer fon exécution. M. Berger , Confeiller de la Guerre, perfeétionna même encore l’idée de M. Gadd , & propofa, dans un Mémoire qu'il donna fur le même fujer, de placer la terre deftinée à la formation du Salpêtre fur un faux fond de planches diftant de deux pieds environ du fol, d’y percer un grand nombre de trous, afin que l'air pür avoir un accès prefque auf libre par-deffc Tous la malle que par-deflus. Enfin ,en 1771 , M. Abraham Granit publia, en Suédois, une nouvelle Dillertation {ur les moyens d'augmenter la fabrication du Salpètre en Suède. Il y fait voir que la circulation de l'air eft le moyen Je plus efficace pour accélérer la formation de ce fel, & il va jufqu'à prétendre qu'on peut parvenir à falpêtrer aflez promptement des terres , pour quon puile les lefliver deux fois dans un été. Il regarde, avec raifon, comme inutile, le mélange de fel marin, de fels vitrioliques & de chaux avec les terres propres à fe falpétrer; & il fe perfuade même que ces matières, lorfqu’on les emploie au delà de certaines proportions, peuvent nuire à la formation du Salpêtre, en ce qu’elles retardent les progrès de la putréfaétion. M. Granit n’eft pas non plus dans l'opinion ue l'acide nitreux foit une modification de l'acide vitriolique; il prétend également que l’alkali volatil n'entre point dans fa compolition; qu'il ne peut contribuer à {a formation que comme lui fourniffant le prin- cipe inflammable, Enfin , il réfute l'opinion du nitre aérien. Toures ces idées font très-conformes aux découvertes qui ont été faites depuis. M. Granit termine fon Mémoire par des détails très-intére{fans fur la manière d'extraire le Salpètre des terres dans lefquelles il s’eft formé. La méthode qu’on emploie en Suède diffère peu de celle qu’on emploie en France. Un Mémoire publié la même année en Pologne, par M. Jean-Chré- tien Simon, annonce que les connoiffances relatives à la fabrication artificielle du Salpêtre , avoient également pénétré dans ce Royaume. Ce Mémoire contient des détails très-étendus {ur l’établiffement des nitrières artificielles , fur les dépenfes qu’elles exigent, fur le produit qu’on peut en efpérer : on y traite de la nature des terres qu’il convient d'employer , de Ja préparation qu'il convient de leur donner, de la proportion des mélanges , des arrofages, &c. Il eft aifé de voir que ce Traité a été calqué fur celui qui avoit été publié en Suède en 1747; mais l’Auteur y a ajouté le réfultat de fa propre expérience; & , à cet égard , fon Ou- vrage et précieux; il blâme l’ufage des murs & des fofles, & s’en tient eux couches ou pyramides élevées & conftruites fous des hangars. Di L LI 28 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Tel étoit à peu près en Europe l’état des connoiffances {ur la fabrication: du Salpéètre, à l'époque du Prix propofé par l'Académie des Sciences. Mais tandis qu’un grand nombre de Savans travailloient en filence dans la vüe d'obtenir la Palme Académique qui leur étoit offerte, d'autres , fans attendre cette époque, fe font empreffés d'offrir au Public le tribut de leurs connoiffances ; & les Commiflaires de l’Académie ont penfé qu'ils devoient faire jouir la Société , le plus promptement qu'il feroit poflible , de leurs Mémoires , en les imprimant dans leur Recueil. Le premier de ces Mémoires eft de M. le Comte de Milly, que l’Aca- démie a compté depuis parmi fes Membres. Il y donne une defcription détaillée d’une nitrière artificielle , qu'il a eu occafion de voir en Allemagne. Sans s'arrêter à des differtations vagues fur la nature du Salpêtre, fur fa compofition , il pafle rapidement aux faits ; il décrit avec précifion le bâtiment qui forme Ja nitrière , la nature des terres qu'on y emploie, les matières qu'on y mélange , leur proportion, la difpofition des tas, leur arrofage ; enfin 1l conduit le Salpétre depuis l'inftant où il fe forme jufqu'à fa dernière criftallifation & à fon raffinage. Ce Mémoire eit accompagné de figures , & les defcriprions y font faites avec tant de clarté, qu'il eft aifé à quiconque voudroit formerun établiffement de ce genre, de trouver dans l'Ouvrage de M. de Mülly, tous les détails dont on a befoin pour opérer avec certitude, Peu de temps après, M. Tronfon du Coudray, Officier d'artillerie , & Coriefpondant de l’Académie, communiqua à cette Compagnie un Mé- moire fur les méthodes employées en Pruffe & à Malthe pour la génération artificielle du Salpétre. Ce Mémoire fut bientôt fuivi d’un autre de M. le Chevalier Defimazis , qui fut adreffé au Miniftre. Quoique ces deux Mé- moires aient plufieurs chofes qui leur font communes, les Commiflaires de l'Académie ont penfé qu'il pourroit être utile de les publier lun & l'autre. La fabrication du Salpétre dans la nitrière de Malthe , fe fait à peu près de la même manière qu'en Suède, c’eft-à-dire, fous des hangars; on on y emploie de la terre calcaire la plus légère, la plus poreufe & la plus meuble; on en forme des pyramides ou couches triangulaires alongées, en y mélant alternativement de fix pouces en fix pouces un lit de fumier. On arrofe ces pyramides avec de l'urine putréfiée , qu'on amalle , pour cet objet, dans des citernes. M. Clouet, Régifleur des poudres, ayant eu occafion de raffembler des obfervations très-intéreffantes fur la manière dont fe fabrique le Salpêtre dans Inde , en a:communiqué le réfulrat à l’Académie. Toutes les terres végétales , d’après fon Mémoire, du moins dans certaines parties de J’Inde , font de véritables nitrières naturelles. Le Salpêtre s'y forme en abondance pendant la faifon fèche; il y végète, pour ainfi dire , & paroît à la furface en petites aiguilles de deux ou trois lignes. Lorfque la faifon des pluies eft arrivée, l'eau du Ciel diffour le Salpérre , SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 29 & l'entraîne à une profondeur plus ou moins grande ; mais fi-tôt que la terre a repris un certain degré de fécheretfe il remonte à la furface. Il paroït qu'il eR des cantons où l’on peut ainfi recucillir du Salpétre chaque année en abondance , & fans que la quantité en paroïfle dimi- nuer l'année fuivante. Ce Salpétre eft naturellement à bafe d’alkali fixe, & on na pas befoin de cendres pour l'amener à l'état de Salpèire parfait. qEneur | ‘e il Un fait très-fingulier , rapporté par M. Clouet , d’après l'autorité de M. Perot , c’eft qu'il exifte dans le Royaume de Cachemire, des mines d’où l’on tire du Salpêtre en mafle, à peu près de la même manière qu'on tire de la pierre à plâtre aux environs de Paris. Le Salpètre fe trouve dans ces mines, en bancs d’une certaine épaifleur , & 1l prétend qu'on en tire de même dans les Royaumes de Siam & de Pégu. Une autre remarque importante, c'eft que, malgré la grande abon- dance de Salpétre qui £e trouve tout formé dans l'Inde, on ne néglige pas d’appeler l'Art au fecours de la Nature, pour favorifer fa produétion. On y élève des hangars, on y arrofe les terres avec de l'urine, & cette même méthode fe fuit à Manille & à Kanton. Une réflexion que les Comimillaires de l’Académie croient devoir faire fur le Mémoire de M. Clouet, c’eft qu'il ne feroit pas impoñlible qu'on eût confondu dans les éclairciffemens qui lui ont été fournis, le nitre & le natrum. Il paroït en effet que ce dernier fel eft une fubftance minérale foflille, qui fe trouve quelquefois en mafle dans l’intérieur de la terre; mais on n'a pas jufqu'ici de preuves fuffifantes qu'il exifte du Salpètre dans de femblables circonftances. Il paroït, d’après un Mémoire du Père d’Incarville, que le Salpétre n'eft pas moins abondant en Chine que dans les Indes; on l'y recueille de même en plein air, dans les temps de fécherefle. Ce Mémoire fe trouve dans le quatrième volume des Mémoires préfentés à l'Académie des Sciences. Les Commiffaires de l’Académie ont cru devoir rapprocher FExtrait de ce Mémoire de celui de M. Clouet. Tandis qu’on cherchoit de toutes parts à raflembler des connoiffances fur le Salpêtre naturel de l’inde & de la Chine, M. Bowles , dans fon Hüiftoire Naturelle d'Efpagne , apprenoït aux Savans que ce {el n’éroic peut-être pas moins abondant dans ce Royaume que dans l'Inde même; que près d'un tiers des terres incultes des Provinces Orientales & Méri- dionales d'Efpagne contenoient du Salpêtre naturel; que pour obtenir - ce fel, il fufkloit de labourer, deux ou trois fois en hiver & au printemps, les champs qui font près des villages; qu'en ramaflant enfuite, au mois d'Août, la couche fuperficielle de la terre, on en pouvoit tirer, par lixiviation , une grande quantité de Salpétre. Ce fel, comme celui de l'Inde , eft naturellement à bafe d’alkali fixe : il contient de vingt à quarante livres pour cent de fel marin. Les mêmes terres , qui ont été Jeflivées une année , étendues l'année fuivante, & expofées de nouveau : à l'air , rendent communément une égale quantité de Salpétre. 40 HISTOIRE DU PRIX PROTOSÉ Ce n'eft, à ce qu'il paroït, que depuis peu d'années qu'on a effayé de fabriquer du Salpétre dans l'Amérique. Les Papiers Anglois de 1775, nous apprennent que les magafins à tabac font de vraies nitrieres ; qu’en mélant la terre, qui forme le fol de ces magafins , avec des rebuts de feuilles de tabac, & en l'humeétant avec la leflive de ces mêmes feuilles, 1l s'y forme, en peu de temps, de beau Salpêtre, qui fe montre en efflorefcence à la furface. On a foin de balayer de temps en temps ce Salpêtre , & de le mettre à part pour le purifier fuivant les méthodes ordinaires, Quoique le Mémoire lu en 1776 à l'Académie, par M. de Lavoiïfier , fur un moyen de décompofer & de recompofer l'acide nitreux , foit plus théorique que pratique, & qu'il n'ait qu'un rapport éloigné avec les méthodes connues de fabriquer du Salpêtre , les Commiflaires n’ont pas cru qu'il fûrinutile de le faire inferer dans leur Recueil, & il eft pofhble, en effet, qu'il ait ouvert les yeux des Concurrens fur les opérations de a Nature dans la formation de l'acide nitreux, puifqu'il paroït aujourd’hui prouvé que les matériaux qu'elle y employe font dans l'état gazeux ou aériforme, Quoiqu'il en foit, M. de Lavoiler prouve dans ce Mémoire , que Yacide nitreux peut fe réfoudre , fe partager en deux fubftances aéri- formes , l'air nitreux & l'air vital ou déphlogiftiqué , & qu’en réuniffant ces deux principes, on réforme de l'acide nitreux. La quantité d'air vital qui entre dans la compofition de cer acide, eft, d’après des expériences ubliées depuis par M. de Lavoifier , environ du quart de fon poids; Pair pitreux y entre à peu près pour un autre quart; le refte eft du phlègme, ou de l’eau, Le Recueil eft terminé par l'Extrait d’un Mémoire publié par le Père d'Incarville , fur la manière de recueillir le Salpêtre en Chine, 11 paroït qu'on le tire par lexiviation des terres végétales. Ter eft le tableau raccourci des connoïiffances que les Commiflaires avoient raffemblées dans le Recueil qu'ils ont ublié en 1776. On va rendre également un compte abrégé de l'inftrudion des Régiffeurs. SUR LA FORMATION DU SALPETRE 31, EXTRAIT de l’Infruclion publiée en 1777, par MM. les Régiffeurs des Poudres. Carre Inftrudion eft divifée en dix-fept articles : on y traite d’abord, d'une manière élémentaire & fuccinéte, de la nature de l'acide nitreux, & des principes qui entrent dans fa compofition; on y annonce que, conformément aux expériences modernes, cet acide eft, en grande partie, compofé d'air très-pur , lequel eft fixé & combiné avec une fubftance encore inconnue ; que cer acide , une fois formé , eft fufcep- tible de fe combiner avec un grand nombre de fubftances ;. qu'il peut, par exemple, s'unir avec les terres calcaires, les alkalis fixes, les fubftances métalliques, &c. & qu'il réfulre de ces différentes combi- naifons un grand nombre de fels neutres , connus fous le nom g£nérique de nitre; mais que celui qu'on a qualifié particulièrement du nom de Salpètre, eft le réfulrat de l'union de l'acide nitreux avec l’alkali fixe végétal. De ces connoiffances élémentaires fur la nature de l'acide nitreux, les Régilleurs des poudres paflent aux moyens que la Nature paroït employer pour le former. Sans remonter aux caufes premières , ils font obferver que le Salpètre fe forme pendant la putréfaétion & la décompofition des fubftances végétales & animales; d’où ils concluent que tout ce qui tend à entretenir & à accélérer la putréfaétion , tend en même temps à favorifer la formation & la multiplication du Salpétre. Ces vües générales les conduifent à l'examen des différentes méthodes qui ont été publiées principalement en Allemagne, pour produire arti- ficiellement du Salpêtre. Ils difcutent les avantages & les inconvéniens des fofles, des murailles, des pyramides, des voûtes, des couches ou tas, & ils croient devoir donner la préférence à ces dernières. Les articles IV, V, VI, VII, VII font en conféquence employés aux détails de la conftruétion des hangars, du choix des terres, de la manière de former les couches, de les trairer, de les arrofer : ils infiftent fur la néceflité de former le premier fond des nitrières avec des terres déjà falpétrées; on obtient, par ce moyen , une jouiffance plus prompte & une régénération plus facile & plus füre. L'article VIN à principalement pour objet, d'indiquer aux habitans de la campagne des moyens faciles & peu difpendieux de fabriquer du Salpétre. Ce n'eft point aflez d’avoir produit du Salpètre, il faut enfuite l'extraire & le féparer des terres dans lefquelles il s’eft formé. Or, ce fel érane foluble dans l'eau, tandis que la terre eft infoluble, il en réfulre un moyen fimple de faire le départ de ces deux fubftances, & d’obrenir le 32 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Salpêtre feul en diffolution dans l'eau : c’eft ce qu'on nomme /effive, lexiviation, leffivage. Les Régifleurs développent les principes d’après lefquels cette opération doit être conduite; ils indiquent la conftruétion d’un pèfe-liqueur qui exprime la quantité de Salpétre que contient chaque quintal d’eau; enfin ils expofent les moyens de laïffer le moins de Salpétre qu'il eft poñlible dans les terres, & d'en concentrer au contraire le plus qu'il eft pofhble , dans une médiocre quantité d’eau, pour diminuer les frais d’évaporation. L'eau une fois chargée du Salpêtre qui étoit contenu dans la terre , il refte à féparer le Salpétre d'avec l’eau, & c’eft ce qui s’opère par l’éva- poration & la criftallifarion. Ces deux objets font traités dans l'article X. 11 s’en faut beaucoup que tout le Salpétre qui exifte dans les matériaux f-lpétrés, foit à bafe d’alkali fixe végétal. Une portion très-confidérable eft à bafe terreufe : il en réfulre un fel déliquefcent qui n’eft prefque pas fufcepuble de criftallifer | & qui, loin d’être propre à la fabrication de la poudre , la gâre & laltère, pour peu qu'il y foi introduit en quantité fenfible. L'art de fe débarrafler de ce fel confifte à le décompofer par V'alkali fixe végétal. Ce dernier ayant plus d’affinité avec l'acide nitreux, que n'en a laterre, la précipite & prend fa place, & il réfulte de cette nouvelle combinaifon de vrai Salpérre. Jufqu'à l'époque de la publication de l'inftruétion des Régifleurs, les Salpétriers ne s'étoient jamais fervisque de cendres pour opérer la décompoftion du nitre à bafe terreufe ; mais .comme les cendres font plus où moins chargées d’alkali , que quelques- unes n'en contiennent point du tout, ils opéroient fans certitude comme fans principe: ils manquoient fouvent leur objet, & ils introduifoient quelquefois même dans le Salpêtre des fels qui nuifoient à fa qualité, & dont on avoit enfuite bien de la peine à le dépouiller. La cendre d’ail- leurs eft une matière chère & précieufe , que plufeurs autres Arts partagent avec les Salpêtriers , & il arrivait fouvent que leurs travaux fe trouvoient fufpendus ou au moins ralentis par la rareté de cette matière. Les Régifleurs , après avoir prouvé que la cendre n’agit qu’en raifon de lalkali fixe qu’elle contient , font voir qu’on peut y fubftituer la potaffe, qui n’eft autre chofe que ce même alkali, qu'on extrait des cendres dans les pays où le bois eft abondant. En employant cet alkali dort-a qualité eft uniforme ou au moins facile à déterminer, le travail des Salpêtriers prend une marche mérhodique & affurée; ils ne fonc plus dans la dépendance, ni des cendres, ni de ceux qui les amaffent, & les Rcgifleurs prouvent qu'il en réfulte fouvent de l'économie. Quelque détaillé que füt cet article du traitement des eaux mères, comme il eft le plus important par l'influence qu'il peut avoir fur le travail des Salpêtriers , les Régifleurs ont cru devoir publier depuis un fupplément, dont on va donner égalementune idée, Ils obfervent d’abord, que les eaux qui ont paflé fur des matériaux falpétrés , contiennent com- munément quatre efpèces de fel. Le SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. 33 - Le Salpètre à bafe d’alkali végétal. Le Salpétre à bafe rerreufe. Le fel marin à bafe d’alkali minéral. Le fel marin à bafe terreufe. L'addition d’un alkali en quantité fuffifante, fait difparoître les deux fels à bafe terreufe, mais elle en introduit un nouveau; c’eft le fel marin à bafe d’alkali végétal; ainfi il ne refte plus dans des eaux bien faturées d’alkali, que trois efpèces de fels. Du Salpêtre à bafe d’alkali végétal. Du fel marin à bafe d’alkali minéral. Du fel marin à bafe d’alkali végétal. Rien n'eft enfuite plus aifé que de féparer , au moins groflièrement, le Salpêtre des deux autres fels, attendu que les deux fels marins n'étant pas beaucoup plus folubles dans l'eau chaude que dans l'eau froide, ils criftallifent dans la chaudière très-long-temps avant le Salpêtre, & on les retire avec des écumoires; c’eit ce que les Salpêtriers nomment le grain. Toute la difficulté de ce genre de travail confifte à faturer convena- lement les eaux. Les Régifleurs croyoient avoir donné un principe certain à cet égard, en prefcrivant de pouffer l'addition d’alkali jufqu’à ce qu'il ne fe précipitàt plus de terre; mais ils ne favoient pas, à cetre époque, & tous les Savans ignoroient comme eux, que l’eau mère de nitre décompofoit le fel marin à bafe d’alkali végétal. Cette découverte, qui n'a été faite que très-récemment , exige une modification dans le traitement des eaux mères, ainfi qu'on l’expofera dans la fuite; mais il n’en réfulte pas moins, que les inftructions des Régiffeurs étoient conformes aux connoiffances exiftantes en Chimie, au moment où ils les ont publiées. Après que les terres ont été leffivées , elles doivent être remifes en couches , & traitées de manière à ce que le Salpètre s’y régénère prompte- ment : c’eft encore ici le cas de l'addition des matières végétales & animales fufceptibles de fe putréfier. Mais il paroït que la quantité néceffaire pour le traitement des terres leffivées , doit être infiniment moindre que quand il s’agit de nitrifier des terres neuves; du refte, la difpofition des couches, leur traitement, les arrofages , &c. font abfolument les mêmes. Dans l'article XVI, les Régiffeurs donnent des calculs fur le produit qu'on peut attendre de nitrières bien conduites , & du bénéfice qui doit en réfulter. Enfin , cet Ouvrage eft terminé par un article fur la manière d’effayer les terres & de déterminer la quantité de Salpêtre qu’elles contiennent. # a 8 . . , que Quoique les Commiffaires de l’Académie aient été occupés; pendant une partie de l'année 1776, de la publication du 34 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Recueil dont on a donné plus haut l'analyfe, ils ne fe font pas livrés avec moins d’a&ivité à ce qui formoit l'objet prin- cipal de leur Commiflion. Dès le mois de Décembre 1775, ils avoient adopté un plan d'expériences, dont l’objet étoit de reconnoïître fi les terres fimples & non mélangées de matières végétales & anima es étoient fufcepribles de fe nitrifier; fi les acides pouvoient fe convertir les uns dans les autres, comme quelques Auteurs lavoient avancé; fi certains fels favoriloient plus que d’autres la formation du nitre; fi toutes les matières, fufceptib'es de fermentation putride, produifoient un effect égal, & quelles étoient celles qu'on devoit choifir de préférence ; quelle étoit l'influence de chaque nature de terre ; s'il pouvoit fe former du Salpètre dans de l'argile pur, ou dans du fable, &c. D’après ces vües & beaucoup d’autres, il fut fait deux cent vingt-cinq mélanges & expériences, qui ont été fuivis, avec beaucoup d'attention, depuis l'hiver de 1776 jufqu'à celui de 1783, c'eft-à-dire, pendant fept années, Il fuit d'annoncer ici ces expériences; parce qu'on en rendra. compte dans un volume à part, que les Commiflaires de PAcadémie publieront aufli-tôt qu'ils le pourront. Infenfiblement le délai fixé pour l'envoi des Pièces au Concours approchoit, & un nouveau genre de travail attendoit les Commiflaires ; l’examen des Mémoires , & la répé- tion des expériences qui devoient y être indiqués. Il eft vrai que fur ce dernier article ils s'étoient procuré une avance. bien confiderable : en effet, comme ils avoient embraflé dans leurs expériences prefque toutes les combinaifons qu'on pou- voit tenter, il étoit impoñlible qu'ils n’euflent pas, pour ainfi dire, répéré d'avance une partie des expériences des concur- rens, & C'eft réellement ce qui eft arrivé. Quoique l'Académie foit dans lufage de tenir fecret tout ce qui eft relatif au jugement des Prix; quelle ne publie que les Mémoires couronnés; qu'elle garde le filence fur les autres, & qu'elle n’expofe pas même les motifs de fon juge- ment, elle a penfe qu'elle fe trouvoit, à l'égard du Prix du Salpètre, dans une circonftance particulière & qui exigeoit une SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 3 exception. Le Gouvernement, en autorifant, tant pour le Prix du Salpètre que pour les frais d'expériences , une dépenfe de près de 30,000 livres, s’eft propofe un objet d'utilité publique ; & c'eft pour le remplir d'autant plus, que le Mi- niftre, dans fa Lettre du 1$ Août, a exige, conformément aux intentions du Roi, qu'après la proclamation du Prix, les Mémoires lui fuflent adreflés, pour qu'il en fit faire des extraits, & qu'il püc faire jouir le Public de tout ce qu'ils pourroient contenir d'utile. Cette Lertre du Miniftre ayant été imprimée à la tête du Programme, les Concurrens n'ont pu ignorer les conditions qu'elle contenoit; & en envoyant leurs Mémoires au Concours, ils fe font dépouillés de leur propriété, & fe font foumis à ce qu'il en für fait tel ufage quil plairoit au Miniftre d’ordonner. D'après ces détails, les Concurrens ne peuvent trouver mauvais que les Commiflaires de l'Académie faflent imprimer, foit par extrait, foit en entier , fuivant qu'ils le jugeront utile, chacun des Mémoires qui ont concouru. Ils vont en confé- quence joindre à ce Précis hiftorique, un extrait détaillé de chacun des Mémoires admis au premier Concours. Ils fuivronc la même marche à l'égard de ceux admis au fecond ; ils joindront à la fuie les Mémoires qu'ils ont jugés dignes d'être imprimés en entier ; ils termineront ce premier volume par quelques Mémoires, intéreflans pour leur objet, qu'ils fe font procurés depuis limpreffion du Recueil publié en 1776. Enfin, dans un fecond volume, ils rendront compte de leurs propres expériences, & des conféquences auxquelles ils auront été conduits. Comme le plus grand nombre des Concurrens n’ont pas jugé à propos de fe faire connoître depuis la proclamation du Prix, les Commiffaires s’expliqueront avec franchife & fimplicité fur le mérite de chacun des Mémoires admis au Concours : ils n'ont eu deflein d’humilier perfonne; maïs ils r’ont pu fe difpenfer d’être vrais, & ils efpèrent qu’on ne les foupçonnera pas de préventions vis-à-vis d’Auteurs anonymes. Au refte, ils n’ont point la prétention d'être infailhbles , ils E ij 36 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ favent que leur jugement à eux-mêmes eft foumis à celui du Public. Ils ne trouveront donc pas mauvais que les Auteurs qui fe croiront trop févèrement jugés, faflent leurs récla- mations, même par la voie de l'impreflion , & ils feront toujours très-empreflés de revenir fur les erreurs involontaires qu'ils pourroient avoir commifes, SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 37 ER A Ldde ——_—_—___— EXTRAIT des trente-huit Mémoires adreffés pour le premier Concours. NÉ MR OT. RER NC" T. Audaces Fortuna Juvat. D ce Mémoire, qui eft fort court, l’Auteur propofe des moyens pour faire du Salpètre , par la voie humide & par la voie fèche. Par la voie humide, il confeille d’arrofer une terre légère quelconque avec de l'urine d'hommes , avec celle des animaux, ou avec des égouts de fumier. L’urine d'hommes vaut mieux , fuivant lui, que celle des ani- maux ; mais en faifant fermenter cette dernière , elle produit également de bon Salpètre. Il faut au plus un an. L'eau de mer, verfée fur du fumier bien gras dans des foffes revêtues de maçonnerie , forme une matière qui, mélée avec de la terre Iégère & mife en murs, donne du Salpêtre en deux ou trois ans; mais l'Auteur avoue qu'il n'a pas été à portée de répéter cette expérience , faute d’eau de mer. La méthode que l’Auteur décrit fous le nom de voie fèche , confifte à prendre les démolitions des vieilles maifons , fur-tout de celles qui ont été incendies ; de les humecter, & d’en faire des murailles de huit pieds de haut fur quatre de large. Lorfque ces murailles donnent des efflorefcences , on enlève un pouce ou un pouce & demi de terre à leur furface , & on laiffe cette terre expofée un mois fous un hangar , avant de la lefliver. Un fecond moyen eft d’entafler des feuilles d’arbres dans de grandes foffes, de les humecter, & de les laiffer fermenter & fe putréfier , jufau’à ce qu'elles foient converties en terre noire; alors on mêle cette terre avec moitié glaife , & on en fait des murailles; ce travail exige plufeurs années. L’Auteur prétend qu'on peut, en trois ou quatre ans , convertir le {el marin en Salpêtre : il ne donne point le détail de fes procédés, mais il annonce qu'ils font difpendieux. Les Commilfaires de l'Académie obferveront , à cette occafion, que toutes les expériences que les Con- currens ont tentées , & qu'ils ont tentées eux-mêmes pour la converfon de l'acide vitriolique , de l'acide marin & de l'acide tartareux en acide nitreux , ont été infructueufes ; & ils regardent comme une vérité à peu près démontrée , que l'acide nitreux eft un acide particulier, & non point 38 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ une modification d'aucun autre. Ils développeront dans le fecond volume les preuves de cette aflertion. L’Auteur aflure que, d’après fes expériences, un homme fournit affez d'urine fie rocurer , chaque année, cent livres de Salpétres ainfi, en ne fuppofant que fix cent mille perfonnes à Paris, on pourroit y faire foixante millions pefant de Salpêtre par an. Quand l’Auteur fe tromperoit des neuf dixièmes, il en refteroit beau- coup plus qu’il n’en faut pour fubvenir à tous les befoins du Royaume. Comme ce Mémoire ne contient que des opinions & des idets déjà connues ; qu'il ne renferme point d'expériences proprement dites, ou au moins que celles qui y font annoncées ne préfentent aucun détail, les Commiflaires de l’Académie ont jugé qu'il ne remplifloit pas l’objet du Programme. MÉMOIRE N° IL In rebus arduis fatis ef! monftrare viam. L'Aureur de ce Mémoire admet un acide univerfel, qui , fuivant la nature des bafes auxquelles il s’unit, forme les différens fels que nous connoiflons. L’acide nitreux n’eft, fuivant lui , que cet acide univerfel modifié par l'addition de matières putréfiées. S'il s’en fût tenu uniquement à ce fyftème , il auroit approché bien près de la vérité; mais il ajoute, d’après Stalh, qu’on peut obtenir du nitre en modifiant l'acide vitrio- fique, & en le combinant avec le phlogiftique par la fermentation putride; & cette partie de fa théorie fe trouve démentie par des expé- riences qui paroïflent décifives. Voici au furplus quelles font les expériences qu’on peut regarder comme propres à l’Auteur. Il prend des tuyaux de terre cuite non ver- nillée ; il les emplit de fel commun, les fufpend à l'ombre, & les arrofe de deux jours l’un avec de l'urine pourrie ; au bout de quelque temps, il obtient une riche efflorefcence de Salpétre. De la cendre de bouleau , de hêtre ou de chêne expofé à l'air, défendue de la pluie , s'humeéte d’abord , enfuire elle fe fèche, & en la leflivant on en tire du Salpêtre. Si on expofe de l’alkali fixe végéral à Pair, il tombe en deliquium, & au bout d’un certain temps on en obtient du tartre vitriolé. S'il a été expofé à des vapeurs urineufes, on en obtient du Salpètre. La première de cesaffertions, celle de la converfion de l’alkali fixe végétal en tartre vitriélé, fe trouve démentie par des expériences bien faites, dont on rendra compte SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 39 dans la fuite de ces extraits; &c à l'égard de la converfon de l’alkali en: Salpêtre par fon expofition à des vapeurs urineufes, elle eft contraire aux expériences de M. Thouvenel & à celles des Commiflaires de l’Académie. Après quelques détails fur l’opinion de Mariotte & de Lémery , que l'Auteur réfute, & quelques préceptes fur le-choix des terres les plus propres à fe falpérrer, il pafle aux établiffemens en grand : il rappelle , à cet égard , les folles & les voûtes de Glauber. Les foffes ont, fuivant lui, quelque avantage, pour préparer les matières & y commencer ja putréfaétion. Quant aux voûtes, 1l affure que le produit en Salpêtre ne fufñit pas pour payer la main d'œuvre de la conftruétion, Il fait, contre l’ufage des murs, toutes les objections connues; la difficulté des arrofages , la liaifon, ou plutôt la compaciré des parties qui s’oppofe au paffage de l'air, &c. Les couches font, fuivant lui, la meilleure de toutes les méthodes : on fait un mélange quelconque fermentefcible; on en forme des tas coniques, qu'on met à couvert; on fait un trou au milieu avec une perche, & c’eft dans ce trou qu’on verfe les arrofages. Ce procédé réufir, fuivant lAuteur , avec bénéfice & profit. Il croit aufi à la poffibilité de la converfion du fel marin en Salpétre, qu'il affure avoir opérée lui-même il y a vingt ans, & qu'il dit avoir vu pratiquer avec avantage à Naumbourg en Saxe. Il a pris deux livres de fel commun bien broyé; il les a mifes dans un plat de terre vernifé; il a verfé par-deflus une leflive de fumier de brebis & de poules, à la hauteur de quatre travers de doigts ; il a laïflé cette eau furnageante s’évaporer dans un lieu couvert &c à l'abri du foleil, en remuant fouvent les matières. L'évaporation à peu près achevée , il a ajouté au fel marin une livre de colcothar, une demi-livre de chaux ; il y a joint de Ja terre de foflés & de jardin, & en a fait une muraille qu'il a percée de wous avec une pipe à tabac, & qu'il arrofoit d'urine lorfqu’elle étoit fèche. Au bout de trois mois, la muraille étoit couverte d’efflorefcences de Salpêtre , & l'ayant leflivée , il en a retiré dix-fept onces de ce fel.. On opère, fuivant lui, la méme converfion de la manière fuivante. 3 de livre de fe] marin. Prenez< * 3 Rotr 1 de livre de vitriol: broyez bien le tout, verfez deflus deux travers de doigts de leflive de fumier de brebis ou de pigeons, ou autres, & laiflez évaporer à ficcité; ajoutez + de livre de chaux & autant de cendres, & continuez d’humecter le mélange à mefure qu'il fe deffèche. Au bout de huit à dix femaines , vous aurez du Salpêtre abondamment, & environ moitié du poids du fel que vous aurez employé. Les Commiffaires de l'Académie, d’après les expériences de même genre dont ils fe font occupés, & d'après les lumières qu'ils ont été à portée de puifer dans les Mémoires des autres Concurrens, ont reconnu que ces expériences ne prouvoient rien en faveur de la poflibilité de la converfion du fel marin en Salpêtre : en effet, ils ont éprouvé qu'on obtenoit autant & fouvent plus de: 40 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Salpêtre des mêmes mélanges , lorfqu’on.n’y faifoit point entrer de {el marin. Quoi qu'il en foit, l'Auteur convient lui-même que ces méthodes de convertir le fel marin en Salpêtre, ne font pas profitables , & il en revient à la conftruction des hangars. Il propofe d'établir des nitrières dans différentes provinces, d’obliger,, une fois pour toutes, les Communautés à y porter les terres falpêtrées de leurs écuries, granges , &c. & de délivrer pour toujours de la fouille les habitans de le campagne , moyennant la redevance annuelle d’une mefure de cendre par ménage. Par cette méthode , on pourroit com- mencer à lefliver prefque fur le champ; on auroit un travail prompt, facile & peu couteux, & on auroit les deux matières néceffaires à la formation du Salpêtre , la terre falpêtrée & la cendre. Ces difpofitions ne s’écartent pas beaucoup du plan que lAdminiftration à adopté par l'Arrét du Confeil du $ Septembre 1770. Quant à la difpofition des terres fous les hangars, il les met en tas ou couches de quatre pieds de hauteur , qu’on remue & qu’on arrofe fouvent: Pour remplir commodément ce dernier objet, il propofe de faire dans les couches des trous à un ou deux pieds de diftance les uns des autres , par le-moyen d’un pieu de trois ou quatre pouces de diamètre, de remplir ces trous d’urine , & d’arrofer la furface avec des arrofoirs. Il. faut que ces terres foient remuées le plus fouvent qu'il eft poffible, & l’augmentation de produit dédommage amplement des frais. L’urine ne doit être employée que bien putréfiée : on peut y fup- pléer par de l’eau de fumier qu’on a laiflé fermenter. Par une-fuite de l'opinion où il eft que l'acide nitreux eft une modi- fication de l'acide vitriolique & de l'acide marin , il confeille d'employer dans les nitrières le colcothar, l’alun , les pyrites, l’eau mère des falines , d'ajouter de la chaux lors du leflivage. Les Commiflaires de l’Académie fe font affurés de l’inutilité de routes ces matières dans la fabrication du Salpètre. Il n’en eft pas de même des balayures des maifons , qui font d’une utilité réelle, ne füt-ce que par la quantité de Salpètre tout formé qu’elles contiennent fouvent. Quoique ce Mémoire contienne quelques obfervations ‘intéreffantes, comme il ne contient rien d’abfolument neuf, qu'il ne préfente qu'unpetit nombre d'expériences, qui ne font pas même très-concluantes; enfin que l'Auteur eft dans l'erreur fur plufeurs points de théorie, les Commiffaires de l Académie n’ont pas jugé qu'il eût rempli les conditions du Programme. M Ë MO: RE N° I LE Cr Mémoire contient un procédé pour produire du Salpétte en troisjouts. 11 confifte à élever un mur en moellons de craie, à faire au bas une tranchée d’un pied de large & d’un pied de profondeur, à y dépofer des SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 4x des herbages fraîchement cueillis, & par-deflus du fumier de vache. Ces matières fermentent en peu de temps; & pour que les vapeurs qui s'en élèvent, lèchent la furface de la craie avant de fe difiper dans l'air , il appuie contre le mur des planches ou des paillaflons inclinés, auxquels il donne un empiètement convenable. Il aflure qu'au bout de trois jours on peut retirer par chaque taife carrée d'un mur ainfi préparé, neuf onces de Salpêtre de houflage , & qu'on peut ainfi con- tinuer à en recueillir de trois jours en trois jours. Lorfque le tas de matières putrefcibles, placé au pied du mur , eft épuifé , on le renouvelle. Il n'y a pas de doure qu'avec ce procédé on ne fafle du Salpètre, & même en aflez grande quantité. Cette manière d'opérer a beaucoup d’analogie avec ce qui s’obferve le long des côteaux de craie naturelle- ment {alpêtrés, ainfi qu'on le verra dans la fuite, & elle s'explique très-bien d’après la théorie de M. Thouvenel. Mais en même temps, comme le Salpêtre ne fe forme qu'à mefure que les plantes & les fumiers entrent en putréfaction , la formation eft beaucoup plus lente que ne l'annonce l’Auteur, & lon obtiendra à peine , au bout de trois mois , la quantité de Salpètre qu'il promet en trois jouts. Il y x appa- rence qu'il a employé dans l'épreuve qu'il rapporte, des craies déjà falpêtrées , & que ce qu'il a regardé comme une formation de Salpètre , n'etoit qu'une criftallifation opérée par le temps fec & froid. MIRE MO) TRUE N° TV Plus étre que paroitre. L'Avrrur regarde la poflibilité de la tranfmutation des feis comme une vérité reconnue & hors de doute , & il a particulièrement dirigé fes recherches vers la ranfmutation du fel marin & du vitriol de Mars en nitre. Pour parvenir à fon but, il prefcrit d'opérer ainfi qu'il fuit. On raflemble , an commencement d'Avril, les cornes, les ongles des animaux ; on met ces matières dans une grande chaudière avec le triple de leur volume d’eau ; on ferme, le mieux qu’il eft poflible, la chau- dière; on fait chauffer & on tient en digeftion. Quand la cuiffon eft faite, on ouvre la chaudière, & on trouve à la furface une écume graffe que l’on rejette, au deflous , une gelée qu'on conferve foigneufement , & au fond, un marc qu’on garde pour le méler dans des couches nitreufes. On opère ainfi jufqu'’à ce qu'on ait raflemblé fufffamment de liqueur gélatineufe. On diffout enfuite dans une première portion de cette gelée entretenue F 4 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ chaude & fluide, feize livres de fel marin qui a fervi à faler les viandes; dans une feconde portion , neuf livres de vitriol; enfin dans une troifième , deux livres de rartre : on mêle toutes ces folutions; on ajoute de l'urine d'animaux, du fang de bœuf, de l’eau mère de nitre, de la levure de bière , du marc de diftillation de vin, du frai de grenouille. On couvre les vafes, on échauffe par le moyen de fourneaux ou de tuyaux de poéle, & on remplit avec de l'urine ou du fang, ce qui fe perd par évaporation. Cn continue cette digeftion pendant cinq mois , à la fin defquels on jette une certaine quantité de chaux vive dans les tonneaux. Quelques jours après , on tire la liqueur , on la mêle avec des terres propres à la formation du nitre. Cn ajoute de la chaux, des cendres, de la fuie, de la fiente de poules , de pigeons, &c. On doit employer aflez de ces matières pour boire toute l'humidité. Ce mélange eft enfuite mis en couche fous un hangar , de la manière qui fuit : On forme d'abord un premier lit de fougère & autres plantes fèches. 2°. Une couche de fumier de cochon. 3%. Une couche de végéraux. 4°. Une couche de fumier de brebis. 5. Une couche de raclure de corne afpergée de chaux. 6. Une couche du réfidu demeuré au fond des tonneaux. 7. Une couche de raclure de corne & de chaux. $°. Une couche de fumier de brebis, & de fiente de pigeons ou de poules. 9°. Une couche de la terre demie putréfiée, ci-deflus préparée. On commence cette opération à la fin de Septembre. Dès le fixième jour, la couche s’échauffe ; & pour l’entretenir chaude pendant l'hiver , on la couvre de fumier de cheval. Au mois d'Août fuivant, on défait la couche & on remue chaque Lt, en obfervant de mettre deflus ce qui éroit deflous. On la retourne de même la feconde & la troifième année : enfin, la quatrième année, on retire cent dix livres de nitre par le leflivage. Quand la couche fe fèche, on larrofe avec du fang & de l'urine. L’Auteur ne doute pas qu'on ne puiffe fuppléer aux mélanges qu'il indique , par d’autres matières de même genre. Il eft facile de voir que l’Auteur prend une marche beaucoup trop lente, beaucoup trop difpendieufe, & que comme, pour arriver au but , il fuffit d'établir une putréfaétion complette de matières végétales & animales , il eft poñible de remplir cet objet d’une manière plus fimple & beaucoup moins couteufe. Tout ce qu’on peut tirer d’utile de ce Mémoire , c’eft qu'il eft poffible d’exciter une chaleur confidérable dans les couches, & de l’y conferver long-temps. Cette circonftance contribueroit-elle à accélérer ou à retarder SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 4; la formation du Salpétre ? c’eft fur quoi il n’y a que l'expérience qui puifle prononcer. Si on s'en rapporte aux obfervations rapportées dans le Mémoire N°. 21, fecond Concours, qui eft de M. Rome, la chaleur des couches feroit plus nuifible qu'utiles Cette chaleur nuiroit également à la formation du Salpètre , d’après la doctrine de M. Thouvenel. En effer, Pair armofphérique & le gaz putride devenant plus légérs lorfqu’ils font échauftés, 115 tendent à s'élever & à s'échapper dans l'air environnant. Ainfi plus lacouche eftchaude , moins l'acide nitreux doit tendre à s’y fixer. D'après ces réflexions , & conune d’ailleurs les expériences rapportées par l’Auteur ne prouvent pas la poflibilité de la converfion du fel marin en Salpêtre qu'il a eue en vue, les Commiflaires de l’Académie ont jugé qu'il n’avoit aucun droit au Prix ni aux Acceflit. MÉMOIRE N° V. Qu'il eft doux de fervir fon Roi & fa Patrie! L'A UTEUR annonce n’avoir aucunes connoiffances de Chimie, & en effet on voit, par Îa lecture de fon Mémoire, qu’il ignore même les moyens de reconnoitre le Salpêtre. Cette circonftance jette une telle incertitude fur fes réfultats, qu'il n’eft pas même démontré fi les fels qu'il a obtenus dans fes expériences font du Salpétre ou non. Les moyens qu'il propofe fe réduifent à deux, PREMIER ESSAI fait avec de l’eau de morue. Le 9 Mars 1776 , l’Auteur plaça fous un hangar deux cent foixante livres de terreau aflez fec, qui s’étoit formé dans un bofquet pendant l'hiver , par l'affemblage d'herbes de toute efpèce. Le terreau fut pris de préférence au centre du tas, pour qu'il fût moins dépouillé de fes {els par la pluie. 1] fut enfuite arrofé une fois par femaine avec de l’eau de morue, & remué également une fois chaque femaine avant l’arrofement. Le 9 Septembre , l’Auteur procéda au leflivage dans deux cuveaux avec de la cendre & un peu de chaux éteinte à l'air. Ayant fait évaporer la lefiive , il eut d'abord beaucoup d’écumes , & enfin ayant mis à criftal- lifer , il obtint une livre de fel en beaux criftaux longs de deux pouces. L’Auteur conclut que ce fel eft du Salpêtre ; mais il ne s’en eft afluré par aucun moyen, & il ny a d'autre préfomption en fa faveur, que la figure des criftaux, & la difficulté d'imaginer quel autre fel de cette figure Fi 44 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ. il auroit pu obtenir dans cette expérience. Il obferve qu’il n’a pas appetewr dans cette opérarion , un feul atome de fel marin; mais:il eft poffible que ce fel foit refté dans les eaux mères, d'autant plus qu'il paroït n'avoir pas pouffé fort loin l’évaporation. L'eau de morue , que l'Auteur a employée, étoit très-peu chargée de fel, SECOND ESSAI fait avec la vinaffe. L'Aureur entend par de la vinafle , le réfidu des diftillations des lies ‘de vin, pour en faire de l’eau-de-vie. Il a pris trois cents livres du même gerreau que dans l’expérience précédente. Il Pa mis le o Mars 1776 ;- fous un hangar, & l'a remué &- arrofé , chaque femaine , avec de la vinafle. Dans les premiers mois , ce terreau formoit, avec la vinafle, un corps dur & tenace; mais au bout de quatre mois, il éroit devenu très-friable. Ce terreau fut leflivé, au bout de fix mois, avec de la cendre; la liqueur qui pafla éroit grafle. L’Auteur l'ayant fair évaporer & mis à criftallifer à plufeurs fois , n'a pu en obtenir que de petits criftaux qui avoient , fuivant lui, la fraîcheur & le piquant du Salpêtre , mais qui étoient fans doute d’une nature fort différente; cat ce fel, poullé au feu dans une chaudière, ne laifloit qu’un réfidu jaunâtre , & {e diflipoit prefque en entier; la quantité étroit de neuf livres onze onces. L'Auteur a retiré en outre dix livres de fel marin de cer effai. Pour préparer les terres & les rendre propres à la formation du Sal: pêtre, l’Auteur a formé , dans un terrein argileux, une fofle; dans laquelle il amis des herbages de différentes efpèces. Il a laïffé fermenter le tout pendant quinze jours, après quoi il a arrofé avec de la vinafle & de l’eau de morue; il y a ajouté aufli des lies de vin avec des eaux bourbeufes: Au bout de quatre mois & dix jours, les plantes furent parfai- tem nt confommées & converties en terreau. Ayant expolé ce dernier à Y'air fous un hangar , pendant un mois, il s’eft trouvé , fuivant l’Auteur , chargé d’une grande quantité de Salpétre; mais if convient qu'il na conitaté ce fait par aucun autre moyen que par la vue & par l’examen à la loupe. On voit que les expériences contenues dans ce Mémoire, font err général peu concluantes. Rien ne prouve que le Salpêtre obtenu dans le premier eflai , ait été produit par l’eau de morue , & il eft très-poffible, au contraire, qu'il exiftat dans le terreau ou plutôt dans les plantes qui avoient fervi à le former. A l'égard de la vinafle ow réfidu de la diftillation du vin , il paroït quelle n'a donné qu'un fel rarrareux, commé il étoit facile de lé prévoir, mais point de Salpêtre. . Ce Mémoire n'a donc rempli que très-imparfaitement l’objet du Programme, SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 45 SPP SEE CPP SAEENENNERERE es M'ÉMONRE, Ne: VTL L'expérience favorife l'Art. CE Mémoire eft plutôt économique & politique, que phyfique & chimique; l’Auteur n’y donne aucun autre moyen pour produire arüif- ciellement du Salpêtre, que ceux connus. Il confeille d'élever dans les diverfes Communautés , des hangars , dans lefquels on amaflera des terres pour la fabrication du Salpétre. 11 ne parle pas de la difpofition de ces terres ; mais il prefcric de les arrofer avec de l’eau de fumier : elles ne doivent être leflivées, fuivant lui, qu’au bout de trois ou quatre ans. Il penfe que ces établiffemens doivent être faits aux frais des Com- munautés; qu'il convient de former des diftriéts pour les Salpétriers ; enfin il affure qu'un grand nombre des Salpêtriers des environs du pays qu'il habite (la Souabe), pratiquent avec fuccès cette méthode de produire artificiellement du Salpètre. Comme ce Mémoire ne contient rien de nouveau , & qu'il ne remplit que très-imparfairement les vües du Programme ; les Commiflaires n'ont pas jugé qu'il eut aucun droit au Prix. MAR IMeOLIORMEL CNET VUE La fille du Feu, animée de colère, déchire fans nulle horreur le fein de fa mère. {L paroït par le préambule de ce Mémoire, que les Salpétriers Alle- mands ne font pas moins à charge aux habitans de la campagne, que. ceux de France, par la pérmiflion qu’ils ont d’exercer la fouille dans les maifons des particuliers. L'Auteur , pour délivrer les habitans de la campagne de cette gêne, propofe de raxer chaque maifon , chaque Communauté , chaque pro- vince à une certaine quantité de Salpêtre. Tout particulier , par ce. moyen , loin de chercher à nuire à la production du Salpétre , comme on le fait actuellement , travailleroit, au contraire , à la favorifer, Ce Salpétre feroit livré à des Prépofés dans chaque province. 46 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ L'Auteur examine enfuite la manière dont le Salpétre fe produit dans les bergeries , les écuries, &c. Il confeille aux particuliers qui vou- dront y augmenter la production du Salpêtre, de commencér par creufer le fol de l'écurie de deux pieds & demi, de mettre-au fond de cette éxcavation une couche de terre limoneufe , de la bien battre, & de remplir le furplus avec de la terre ordinaire, qui s’imprégnera de l'urine des chevaux, de celle des vaches & des ivurons. Au Bout de trois a quatre ans, on fera des monceaux ou pyramides alongées de cette terre, & en peu de remps le Salpêtre fe montrera de lui-même à la furface. _ Le limon qui forme le fond du fol, doit refter toujours le même, & la terre feulement être renouvelée. Tout particulier peut, par ce moyen , fe procurer, de trois en trois années , une grande quantité deterres falpêtrées. Les Prépofés à la fabrication des Poudres & Salpêtres recevroient of la terre même en nature, qu'ils effayeroient avant de la payer ; ou bien le Payfan en extrairoit lui-même le Salpétre & le porteroit enfuite aux Prépofés. Si le Payfan lefivoit lui-même, fon opération faire , il remettroit la terre à fa place, pour qu’elle fe falpétrat de nouveau , & au bout de deux à trois ans il fe trouveroit en état d'opérer de la même manière. Si, au contraire, les Prépofés à la fabrication recevoient la terre , ils pourroient , après qu'elle auroit été leflivée, en former des couches fous des hangars, les couvrir avec du fumier de brebis & autres animaux , l’arrofer avec de l’eau de fumier; & au bout de deux ans ils en retireroient , fuivant l’Auteur , par lexiviation , un tiers du poids de la terre en Salpêtre. Il annonce avoir formé en Pologne des établiffemens de cette efpèce, dont on a été fatisfait; mais fûrement il fe trompe de beaucoup fur la quantité des réfultats; & les terres mifes en couches , loin de produire, comme il l'annonce, trente-trois pour cent de Salpètre , en rendent rarement plus d’une ou deux livres. L'Auteur prétend qu'il eft des pays où le Salpêtre fe montre le long des chemins, de grand matin, comme une neige blanche; il en a obfervé ainfi en Pologne, & principalement en Ukraine. Dans cette province , on racle avec une pelle les rerres qui montrent ainfi des efflo- refcences; on amafle cetre terre en tas le long du chemin, puis on la tranfporte fous des hangars à Salpêtre, où l’on en forme des couches qu'on couvre de fumier pendant l'été & pendant l'automne. Au bout de deux ans, cette terre eft bonne à être leflivée, & on en tire une on à ie grande quantité de Salpétre. Les détails, au furplus , dans lefquels entre YAuteur, ne prouvent pas que le Salpêtre fût tout formé dans ces terres lorfqu'on les a raclées à la pelle; il eft poñlible qu'il s’y forme pendant le féjour de ces terres en couches. Ce Mémoire contient, comme l’on voit, des détails intéreffans ; les moyens qu’on y propofe pour augmenter la production naturelle du Sal- pére, ne font pas impraticables ; ils fe rapprochent même de ce qui fe prati- quoiranciennement dans quelques provinces de France: les Communautés étoient obligées de fournir à l’Etat une certaine quantité de Salpétre à SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 4 laquelle elles étoient taxées. Il exifte encore en Prufle de ces fortes de taxes; mais elles ont plus d'inconvéniens, & il en réfulte plus de gêne, plus de vexations, plus de charges réelles, que de la fouille même qu’on veut fupprimer. L'Auteur nenfeigne d’ailleurs rien de nouveau fur la formation & la fabrication du Salpêtre. Les Commiflaires de l’Académie ont jugé en conféquence, qu'il n’avoit rempli qu'imparfaitement les conditions du Programme, & qu'il n’avoit droit ni au Prix ni aux Accefit. Le dd mimi) MuÉMoO: TR EN VI ET Felix qui potuit rerum cognoftere caufas. Fortunatus & ille Deos qui novit agrefles. LE Mémoire que l’Académie a reçu fous ce numéro & fous certe devife , ne contient qu'une théorie très-obfcure fur la formation du Salpétre , & rien qui puifle être utile dans la pratique. NÉE UNE ONE RES ENT LLOX Rien ne s’anéantit, non rien; & la matière, comme un fleuve, roule. toujours entière. CE Mémoire eft rédigé d’après les principes de FOuvrage de Chrétien: Simon, dont l'Extrait eft imprimé dans le Recueil publié en 1776 par les Comnillrires de l'Académie; & les recettes qu'il donne n'en font que la copie. L’Auteur y a ajouté le réfulrat d'épreuves qu'il a faites lui-même; & certe partie eft ce qu'il y a de plus intéreffant dans fon Mémoire. Il a fait conftruire un hangar de foixante pieds de long fur trente de large; il y a fait mettre deux cents tonneaux de terre commune, cent cinquante tonneaux de terre de Savonnier, cinquante tonneaux de fumier de cheval, & quarante tonneaux de rognures de Corroyeurs. Il n'a mélé avec la terre que la moitié du fumier & la moitié des rognures de Corroyeur ; il a mis l'autre moitié dans de grandes pipes à l'huile, & a verfé par-deflus trois cents fepriers de leffive des Savonniers, & fix cents fepriers d’eau de fumier. Lorfque les matières ont été bien pourries , il s'eft fervi de cette eau pour arrofer , & il a mélé À 48 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ le marc avec fa terre. A la fin de l'été, il a tiré de dix tonneaux de ces mélanges quinze livres de nitre; il penfe qu'avec plus de temps on en obtiendroit davantage. L'Auteur voudroit qu'on établit à la fois une fabrique de favon, une fabrique de Salpêtre, & une de colle forte. Ces établiflemens s’aideroient réciproquement par les matières qu'ils fe fourniroient, & il n’y auroit rien de perdu. On pourroit en outre raflembler pour faire le nitre , du marc de raifin, de la pouflière de tartre , des rinçures d’écuelles , les ordures des boucheries , les boues des rues, la fuie des cheminées, l'urine des hommes, la faumure , &c. On obfervera que la principale expérience que rapporte l’Auteur , s’eft pas fuffifamment concluante ; il annonce en effet qu'il a employé dans fes mélanges, des décombres de maifons qui pouvoient contenir du Saipêtre : il n’eft donc pas prouvé que le Salpétre qu'il a obtenu, ait été réellement produit pendant le cours d’un été. Cuoique ce Mémoire ait été fait par un homme qui a opéré par lui-même, & que fous ce point de vue il mérite attention, les Commiflaires de l’Académie n’ont pas jugé qu'il contint rien d’aflez précis, d’aflez détaillé, ni d'aflez nouveau pour donner à l’Auteur un droit au Prix. l M'É MOIRE N°, X Heureux qui peut fonder les Loix de l'Univers. CE Mémoire a éré rédigé par un habirant de Saint-Quentin, qui a peu de connoiffances relatives à la produétion & à la fabrication du Salpétre. Il propofe de prendre les démolitions des maifons , de les faire concaller avec des mailloches par des déferteurs, & d'en former des aires dans le fond des étables-& écuries ; il fe perfuade que la produétion du Salpêtre D feroit très-rapide. Il propofe encore de faire des mélanges propres à la fabrication du Salpètre , dans des fouterrains ou caffemates qui font fous les remparts de la ville de Saint-Quentin, & qui ne fervent à rien : enfin il confeille d’effayer dans les mélanges propres à la fibrication du Salpêtre, la terre vitriolique qui fe trouve prefque par-tout entre Saint-Quentin & Chaulny. Cetre terre eft déjà connue de l'Académie; mais loin de pouvoir être d'aucun ufage pour la fabrication du Salpêtre , elle feroit plus nuifble qu'utile à fa formation. Les Commiffaires de l’Académie n’ont pas jugé que ce Mémoire eût aucun droit au Prix, MÉMOIRE SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 49 MÉPN O TR EN UX I Ex nihilo nihil fir. CE Mémoire ne contient rien de neuf, rien par conféquent qui puiffe donner à l’Auteur des droits au Prix. Il propofe de conftruire des hangars, d'y amafler des terres, de les arrofer d'urine, &c. tous moyens connus , & dont il fe promet le plus grand fuccès ; mais il n’a fait aucune épreuve pour conftater la réalité de ce qu'il avance. MÉMOIRE N°: XIL Sigillum veri fimplex. CE Mémoire, qui eft fait par un homme très-inftruit , eft écrit en latin. Il remarque d’abord , que la fabrication du Salpêtre , malgré fon impor- gance , eft confiée à une claffe d'Ouvriers en général peu inftruits , & qui n’ont ni connoiffances , ni principes. il divife ce qu'il dit fur les défauts de la manutention aétuelle , en quatre chapitres , dont on va donner fucceflivement un Extrait. Dans le premier , il traite du choix & de la préparation des matériaux dont on tire le nitre. Tout le monde cenvient que le nitre fe forme par la réfolution des principes des végétaux & des animaux, réfolution qui s'opère par la putréfaction. C'eft encore un fait à peu près démontré, fur-tout depuis ces derniers temps , que l'air , foit en tout, foit en partie, fe combine avec les terres nitreufes pour y former l'acide nitreux. L'Auteur cependant n’eft pas de ce dernier fentiment ,-& il penfe que ce font les corpufcules des corps dégagés par la putréfaétion, qui, combinés avec l’alkali fixe, forment le nitre. Il convient bien que le concours de l'air eft néceflaire à cette formation , mais comme un agent mécanique , & uniquement parce que la puréfaction ne peut avoir lieu fans air. La preuve , fuivantlui, que l'air feul ne fe combine pas avec les terres pour former le nitre, c'eft que les terres qui ne contiennent point de matières fufcepribles de putréfaction, ne donnent point de nitre, quelque long temps qu’elles demeurent expofées à l'air. La préfence des matières G so HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ putrefcibles , ou plutôt la putréfaction elle-même, eft donc une condition néceflaire. L’Auteur , au furplus, n’ofe pas précifément affurer que le Salpêtre ne foit pas tour formé dans les plantes, ou dans les animaux; mais il prétend qu'on ne peut l'y découvrir, & qu'il n’exifte aucun moyen pour l'obtenir avant la putréfaction complette des parties qui en font Deonbles Quant aux plantes qui contiennent du nitre tout formé , l’Auteur penfe, avec grande raifon , qu'il ne vient que des terreaux ou fumiers dans lefquels elles ont été nourries, mais qu’on ne peut l'en tirer avec profit. Beaucoup de Chimiftes ont.penfé qu’on pouvoit changer le fel marin en Salpètre, ou transformer l'acide vitriolique en acide nitreux. M. Woulfe, Chimifte Anglois, a même prétendu avoir un moyen de changer l'acide marin en acide, nitreux, & réciproquement. L'Auteur de ce Mémoire annonce qu'il n’a retiré aucune lumière des expériences qu'il a tentées dans cet objet, & qu’elles n’ont eu aucun fuccès. D'après cela, il n'attend de Salpêtre que de la décompoñfition complette des matières végétales & animales , opérée par la putréfaction, & il a obfervé , que plus la fermentation putride étroit rapide , plus il £e formoit de Salpêtre. De là la nécellité d’une chaleur douce, d’une quantité d'humidité convenable | &c. toutes circonftances propres à favorifer & à accélérer la putréfaétion. Tous les corps ne font pas également propres à la fermentation vineufe; ilen eft de même de la putride; & cette réflexion le conduit aquelques détails fur le choix des matières putrefcibles qu’on doit employer de préférence dans l’établiffément des nitrières. La terre des écuries, des étables , qu’on emploie pour faire du Salpêtre, contient fouvent des matières qui n’ont encore fubi qu'un commencement de putréfaétion, & il ne s’y eft formé qu'une petite quantité de Salpêtre : il y auroitun grandavantage à attendre queles principes purrefcibles qu’elle contient fuflent parvenus au degré de réfolution néceffaire ; & l’Auteur penfe , avecrrès-grande raifon , que l'ufage où l’oneft de lefiver les terres de fouille aufi-toraprès qu’ellesfont extraites, eft un des vices des plus effentiels de lamanière actuelle d'opérer. Il feroit crès-avantageux que les terres fuffent raffemblées fous des hangars, au moins pendantun an, & la quantité du Salpêtre s’y accroïîtroit dans une très-grande proportion: L’ufage des murailles formées de fumier, de chaux, de terre, &c. & arrofées d'urine , a quelque avantage {ur la méthode aétuelle; mais Y'Auteur ne la regarde pas encore comme la meilleure. L'air n’agit qu’à la furface des murs, & la putréfaétion ne {e fait pas dans l'intérieur. Ces murailles ne feroient donc avanrageufes qu’autant qu’elles feroient très-minces$ & alors elles s’écrouleroient trop aïfément. Ces murs d’ailleurs tantôt font trop pénétrés d'humidité par la pluie, dont ils ne font pasaflez défendus par le toit de paille dont on les couvre; tantôt ils font defféchés à l'excès dans les faifons chaudes; de forte qu'ils ne rendent de Salpêtre qu'au bout d'un très-long efpace de temps, & en très-perite quantité. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 5: Les foffes ont l'inconvénient de ne pas préfenter afez de contact à l'air, & la putréfaction en eft retardée. L’Auteur eft, en conféquence , ramené aux tas ou couches difpofés fous des hangars , & il prétend que , d’après fa propre expérience, on en peut attendre une récolte abondante en Salpêtre. Il faut, dans le choix des terres , éviter d'employer celles qui font trop compactes , trop argileufes, trop légères ; les matières putrefcibles que l’Auteur indique , font toutes celles connues, la terre végétale, Les balayures des places, des rues, &c. la terre de marres, les curures d'étangs, &c. le fumier, l'urine , toutes les matières animales ou végétales, quelles qu’elles foient , les rebuts des Ouvriers qui emploient des matières animales, les rognures de peaux, de peignes de corne, lefang, laterre des cimetières , &c. Les cendres, lorfqu’elles font neuves, ont l'avantage de contenir un alkali qui donne une bafe fixe au Salpêtre ; mais celles mêmes qui ont été leffivées, ne font pas à rejeter , à caufe de leur qualité poreufe & des matières fufcepribles de putréfaétion qu’elles contiennent encore. La chaux peut également produire un effet avantageux , pourvu qu’elle foit employée en petite quantité. Les tas ou couches à Salpêtre doivent être formés fur un fol argileux , dans la crainte que la terre ne dérobe le Salpêtre à mefure qu'il fe forme. Il faut enfuite qu'ils foient abrités de la pluie & du foleil, par le moyen de hangars. Ces hangars doivent être fermés d’une manière quelconque, foit avec des murs ou autrement. On doit y ménager des fenêtres, qu’on puifle ouvrir ou fermer à volonté. Les tas ou couches ne doivent point avoir plus de trois à quatre pieds d'élévarion , & cinq de large , afin que la putréfaction puifle {e faire dans toute la mafle, Il faut les remuer au moins tous les deux mois, 1°, pour renouveler les furfaces & mettre les parties intérieures en contact avec l'air ; 2°. pour que la terre ne fe pelotte pas & ne fafle pas mafle. Les arrofages doivent fe faire avec de l’eau de fumier & de l'urine pourrie, dans laquelle on ajoute un peu de chaux vive. Le grand art eft d'entretenir dans les terres le degré d’humectation convenable : il ne faut pas qu'elles foient trop fèches; mais il eft plus important encore qu'elles ne foient as trop humides, parce que l’eau bouche les pores de la terre & Ote tout accès à l’air. Si on a trop mouillé par la négligence des Ouvriers , il faut, dès qu'on s’en apperçoit, remuer les tas, y introduire de la chaux vive, de la cendre , &c. pour détruire l'excès d'humidité. L’Aureur défire que l'Académie puifle faire l'épreuve de comparaifon des murs & des tas ou couches, pour fe convaincre par elle-même de la préférence due à ces derniers. Il annonce aufli avoir tenté différens mélanges de fubftances falines avec des terres propres à fe nitrifier, pour connoître quel avantage on pouvoit en attendre. Il a pris une même terre bien mélée de cendres, & il en à fait fix tas , en ajoutant au premier de la chaux vive , au fecond Gi s2 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ de l'acide vitriolique faturé de terre calcaire, au troifième dirtartre cru, au quatrième du fel commun mélé de vitriol, au cinquième. du fel commun feul. Le fixième eft demeuré fans aucune addition. Tous ces tas ont été arrofés avec une cgale quantité d'urine, remués aux mêmes époques, &rraités uniformément. Au bout de foixante jours, l'Auteur a fait un premier leflivage d’une portion de ces terres; mais il n’y avoit point encore de Salpêtre. Il fe propofoit de rendre compte du réfulrar ultérieur. dans un fupplément; mais-il n’eft pas parvenu À l’Académie. Dans le fecond chapitre, l'Auteur traite de la lixiviation des terres. Toute terre nitreufe contient communément beaucoup de nitre à bafe terreule, un peu de vrai nitre, un peu de nitre cubique, un peu de nitre ammoniacal , enfin du fel marin à bafe faline & rerreufe. Pour con- vertir en nitre parfait les différentes efpèces de nitre qui en font fufcep- tibles , & l'obtenir dans fon état de pureté , il faut, 1°. donner une bafe d’alkali fixe à l'acide ; 2°. fe débarrafler des {els étrangers. Les terres ne doivent commencer à étre leffivées qu'au bout de deux ans. Le nitre eft formé avant cette époque, mais en petite quantité ; & c’eft vers les derniers mois principalement qu'il fe forme en abondance, Il eft bien important de ne pas employer des tonneaux: trop élevés pour lefliver : la terre s’y raffe & devient impénétrable à l’eau; la pro- portion de deux pieds + À trois pieds, eft la meilleure; quant au diamètre, il eft indifférent. Les cuveaux doivent être garnis d’un faux fond fupporté par une croix de bois, & l'intervalle doit être rempli de paille. On place fur le faux fond : de la capacité du cuveau de cendre de bois dur mélé de deux tiers de chaux vive; on mer par-deflus la terre nitreufe , &, on leflive avec de l’eau de rivière. Il faut retenir au moins douze heures l'eau dans les cuveaux, avant de la laifler écouler. Les Salpêtriers emploient tous une trop petite quantité de cendre. On peut leur fubftituer des cendres gravelées dans les Provinces où elles font à bon marché , ou bien de la potafle , & le Salpêtre en eft beaucoup plus beau. L’Auteur recommande fur-tout d'employer de la chaux vive, lors du leflivage des terres, & même de ne la pas épargner. M. du Coudrai s’eft trompé , en annonçant qu’elle produifoit du Salpêtre moins ferme. Son aflertion n’eft vraie, fuivant l'Auteur de ce Mémoire, que lorfqu’on n’a pas employé aflez de cendres , & qu’on a laiffé beaucoup de fels à bafe terreufe non décompofés : alors la chaux les fait criftallifer , & on les obtient fous forme concrète; mais ces fels n’en font pas moins déliquefcens. Cet inconvénient n’a pas lieu quand on a faruré l'acide nitreux d’alkali; la chaux ne fert alors qu’à blanchir le Salpêtre, à le are & à le purifier. ette méthode de mettre la chaux & la cendre dans le cuveau , eft , fuivant l’Auteur , bien préférable à celle de lefliver d’abord les terres feules , & d'y ajouter eltie Falkali, SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 53 Lorfque la terre aura été détrempée par l’eau dans les cuveaux pendant une nuit, on ouvrira les robinets. L'eau qui a paflé fur ces premiers cuveaux doit repailer fur d’autres difpofés de la même manière , jufqu’à ce qu’elle n’augmente plus de force. Il prétend qu’elle n’eft bonne à évaporer , que quand fa pefanteur eft à celle de l’eau pure, dans le rapport de dix à neuf; elle contient alors vingt à vingt-cinq pour cent de Salpêtre ; mais cette propofition n’eft vraie que pour l'été : en hiver au contraire , lorfque l’eau eft très-refroidie, elle ne peut diffoudre que quinze à vingt livres de Salpêtre au plus par cent, & il n’eft pas poflible de la charger au delà. L’Auteur prétend encore, qu'avant de faire évaporer la leffive , il faut avoir foin d’eflayer fi elle ne précipite plus par une addition d’alkali. On prend à cet effet une livre de la leflive, on y ajoute peu à peu de l'alkali, & la proportion donnée par cet effai, détermine la quihtité qu'on doit employer pour le tour. Les Commiflaires de l’Académie feront connoître dans la fuite de ce Recueil, les inconvéniens de porter l’addi- tion d'alkali jufqu’au point de décompofer La totalité des fels à bafe terreufe , & combien il eft important au contraire de fe tenir beaucoup en decà de la précipitation complette de la terre. Il feroit trop long d’en expofer ici la raifon. Dans le chapitre troifième , l’Auteur traite de la coction & dé fa criftal- lifation. Il eftime que les chaudières d'Allemagne font trop creufes, & que celles que Stalh a décrites dans les endroits de fes Ouvrages où il traite du Salpêtre, ont ce même défaut. On penfe en général, que le {el fe raflemble mieux dans une pareille chaudière ; mais l’Auteur eft. d’une opinion différente, & il demande une chaudière de cinq à fix pieds fur trois au plus de profondeur. L’évaporation ne doit pas être poufée trop rapidement, parce que le nitre à bafe terreufe, ou le nitre ammoniacal, pourroit lâcher une partie de fon acide. L’Auteur confeille , pour remplir la chaudière, de fe fervir d’un cuveau qui laïfle couler la liqueur lentement, comme il eft indiqué dans l'Inftruction in-4°. publiée en 1777; mais les Régiffeurs des Poudres ont imaginé depuis un procédé plus avantageux encore , dont il fera rendu compte dans ce Recueil. Il eft des Salpètriers qui pouflent l’évaporation jufqu’à ce que la liqueur contienne foixante & foixante-quinze p. 2 de matière faline; mais cette méthode ne tend , fuivant l’Auteur, qu’à obtenir du Salpêtre très-mélé de fel marin & de nitre à bafe terreufe , tandis que, criftallifé à grande eau, il eft prefque aufli pur à la première cuite qu’à la troifième. Il confeille en conféquence de ne pouffer l'évaporation que jufqu’à quarante ou quarante- cing-pour cent de Salpêtre. Il défireroit encore qu’on filrât la leffive dans une chauffe de laine , avant de la mettre à criftallifer pour obtenir du Salpêtre plus pur. A l'égard de la criftallifation , les vafes les plus grands lui paroiïflent les meilleurs, parce que le refroidiffement s’y fait . 54 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ plus lentement. D’après le même principe , il prefcrit de tenir couverts ces vaifleaux. On peut aufli les traverfer de bätons fur lefquels fe fixent les criftaux. Enfin il prefcrit, lorfque le Salpêtre à été retiré du vafe à criftallifer, de laver & le faire fécher enfuite; on emporte ainf le peu d’eau mère qui pourroit refter. La liqueur furnageant à la criftalli{a- tion, doit étre évaporée de nouveau & traitée par l’alkali cauftique, fielle en a befoin. Le chapitre quatrième traite du raffinage du Salpêtre. Comme il ne contient que des vérités & des réfultats connus, on fe difpenfera d’en donner l'Extrait. Il n’eft pas difficile de voir que ce Mémoire eft fait par un Chimifte très-inftruit; il a de plus le mérite d’être parfaitement rédigé ; mais en mére temps , comme il ne contient point, à proprement parler, d’expé- riences nouvelles , les Commiffaires de l’Académie n’ont pas jugé qu'il eût rempli les conditions du Programme , & ils fe font contentés d'en faire une mention honorable , lors de la proclamation du Prix. MÉB M OMTORER ANS UGHIRRE Notatio Naturæ & animadverfio peperit artem. Cic. L'Aurrur de ce Mémoire regarde l'acide nitreux comme une modif- cation de l'acide vitriolique. Il cite l'expérience de M. Pietsch, celle de Stalh (FundamentaChimiæ), lequel a obtenu de beaux criftaux de nitre , en combinant enfemble de l'efprit de vitriol volatil, de l'efprit de thériaque, & de l’efprit urineux de tartre. Mais toutes ces expériences ne font point fuffifamment pro- bantes , ainfi qu'il réfulre d'expériences décifives faites par M. Lorgna, par quelques autres Concurrens , & par les Commiflaires de l’Académie. Il prétend que la cendre feule , expofée long-temps dans une cave, donne du Salpêtre; mais que la nitrification eft beaucoup plus abon- dante & beaucoup plus rapide quand on l’humeéte avec des matières putrefcibles. Depuis quinze ou vingt ans on a commencé à établir dans quelques æzrties de l'Allemagne des plantages de nitre, notamment dans le Palatinat, dans le Margraviat de Bade-Dourlach, & dans le Landgraviat de Hefle- Darmftadr. Il y en a quatre dans le Palatinat ; mais ils ne fuffifent pas pour la confommation du pays, & pour le furplus, on continue de fabriquer fuivant les méthodes anciennes. Les établiflemens des nitrières ont été faits jufqu'ici aux frais des Souverains , & en général il paroït que le Salpétre qui en provient , eft cher. 4 SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 5 Toutes les nitrières qu'on vient de citer, font établies à peu près fur les mêmes principes ; & l’Auteur entre dans le détail de la manière dont font conftruits les hangars. On leur donne quatre-vingr-quatre pieds fur un fens, & quarante- trois {ur l’autre en dehors ; un mur fert de fondation; tout le refte cft en bois & en terre. Toutes matières qui contiennent de l’alkali fixe , du fel urineux, ou qui font propres à en produire , font par cela même propres à la fabri- cation du Salpêtre ; on méle ces matières avec de la terre légère & poreufe. Les terres déjà falpétrées , fonc préférables à toutes. Par ce moyen , le tranfport des terres ne fe fait qu'une feule fois pour toutes, & les mêmes rerres font remifes en couche après le leflivage. Lorfque les mélanges ont été faits, & que les terres ont été convenable- ment difpofées fous les hangars, on les remue au moins deux fois par an, au printemps & en automne, & on les arrofe quand elles fe deffèchent. Un plantage conftruit fur ces principes , peut donner du nitre dès h deuxième année; mais il vaut mieux attendre la fin de la troifième : le produit alors peut être de neuf à douze quintaux; ce qui revient à trois ou quatre cents livres par an. Ce produit eft bien médiocre , & il paroît que les effais de ce genre qui ont été faits en France, promettent plus de fuccès. L’Auteur eft d'avis qu’on établiffe en Alface un certain nombre de ces plantages; que les Communautés contribuent aux premiers frais , & qu'enfuite on les laifle exploiter par les Salpétriers. Le bois ne coutera rien dans cette Province, où la plupart des Communautés en poflèdent, & on n'aura tout au plus à payer que le chariage. Il penfe même qu'on pourroit faire également contribuer toutes les Communautés du Royaume; & l’établiffement une fois fait, l'entretien couteroit peu de chofe. En Pruffe , les établiffemens ont été faits, partie aux frais du Roi ; partie aux frais des Communautés. L’Electeur de Bavière fit publier, en 1766 , un Réglement qui portoit, que dans tout village un peu confidérable , il feroit conftruit une efpèce de pyramide, couverte de planches & de chaume, pour la formation du Salpêtre ; ce même Réglement accorde une gratification par chaque nl de Salpêtre qui fera formé au moÿen de la pyramide , indé- pendamment du prix du Salpêtre, payé aux Salpêtriers. Ce Mémoire eft bien fait; & il eft certain qu’en fuivant la marche indiquée par l’Auteur , en faifant conftruire des hangars par toutes les Communautés du Royaume, on auroit une récolte de Salpêtre füre & abondante. Cependant , comme les moyens qu’il propofe ne font point nouveaux, que fon Mémoire ne contient aucune expérience qui lui foit propre, aucun fait qui puiffe contribuer à augmenter les connoiflances relatives à la formation du Salpétre , les Cominiffaires ont penfé qu'il ne pourroit avoir aucun droit, ni au Prix, maux Acceflis, 6 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ MPÉ M O:I:R EE > NEMX DAME Non tam turpe fuit vinci, qudm contendere decorum. Ovi1D. L'Acanémre a reçu, fous ce numéro & fous cette devife , une lettre du 21 Février 1777, fignée J. B. C. L’Auteur annonce qu’on a fait à Londres un atelier à Salpêtre, compofé de deux à trois mille rcombereaux de terre. Une partie des terres étoit en plein air, d’autres fous des appentis, d’autres enfin étoient recouvertes avec du fumier. On avoit arrofé routes ces terres avec de l'urine &-des matières fécales ; mais après beaucoup de dépenfe , l’établiffement n’a eu aucun fuccès , & il a été abandonné. Il à vu à Bruxelles un autre atelier, où l’on avoit opéré à peu près comme à celui de Londres; cette entreprife n’a pas eu plus de fuccès. Enfin, à Saint-Germain-en-Laye, M. le Baron d’Efpuller a eflayé de nitrifier des terres grafles; mais l’Auteur doute encore qu'il y ait réuñli, & les Commiflaires de l’Académie favent que ces craintes de l’Auteur n’étoient pas fans fondement. L’Auteur en conféquence confeille de ne prendre que des matériaux déjà falpétrés, de les lefliver & de les traiter enfuite avec des eaux mères, de petites eaux, & un peu d'urine; de les placer dans des granges, des écuries, des hangars , &c. : en traitant chaque année des terres ainfi apportées du dehors, & en les travaillant enfuite pour les nitrifier de nouveau , la provifion de terres falpétrées iroit toujours en augmentant , jufqu’à ce qu’on en eût raffemblé une quantité fufffante. Si on a de grands tetreins à fa difpofition, on peut former des lits de cette terre, les couvrir de paillotis pour les garantir de la pluie, les arrofer & les retourner pour les travailler au bout de quatre ans. Des terres bien traitées doivent rendre , fuivant l’Auteur , une livre ‘& demie de Salpêtre par pied cube. Les Commiflaires de l’Académie ont Jieu de regarder ce produit comme exagéré, & ils ne penfent pas au’on puifle compter fur plus d’une livre dans les circonftances les plus favorables. L'Auteur annonce avoir travaillé de cetre manière quand il > C ! . quil fe remontre, Il n’eft queition dans cout le refte du Mémoire, 62 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ que du leflivage, de la crifallifation du Salpètre ; &c. Toute cette partie ne contient rien que de connu, & l’Aurteur n’eft pas même au courant des connoïffances acquifes {ur ces différens objets. Les Commiflaires n'ont pas jugé qu’une fimple obfervation fur la manière dont le Salpêtre fe recueille en Efpagne , püt donner à l’Auteur des droits au Prix, ni aux Accefli. NT ÉUNNONE R FRANCE VAT Quo Natura ducet eo eundum. L'Avrrur propofe d’abord d'extraire le Salpêtre des terres par filera- tion , au lieu de l’extraire par lixiviation. Il met du plâtre ou de la terre bien falpêtrée dans des vafes d’une terre poreufe ; le Salpêtre pafle à travers le vale , & s’effleurit à fa [furface extérieure. On parvient ainfi à extraire la majeure partie du Salpétre contenue dans la terre. On fent aflez combien cette méthode feroit longue & embarraflante , avec combien de facilité les vafes fe détruiroient. Les Commiflaires penfent en conféquence qu’elle ne peut être d'aucune application à des travaux en grand. Il confeille de former dans les villages des caveaux dans lefquels on taffemblera des terres deftinées à fe falpêtrer , & il prefcrit d'y introduire l'air, ou plutôt la vapeur des écuries, des bergeries , &c. fans quoi il annonce qu'on n'obtiendra pas de Salpêtre. Les leffivages ne doivent être faits que de loin en loin; fi on leflive chaque année , on aura un produit très-foible. Les hangars établis en France ne fe foutiendront pas , fuivant l’Auteur , fi on continue de laïffer les terres expofées à un air peu propre à les enrichir de Salpêtre; 1l prétend d’ailleurs qu’on leflive top fouvent les terres. A défaut de cette méthode, il confeille au Gouvernement d’obliger tout particulier à avoir chez lui une certaine quantité de terre difpofée pour la formation du Salpétre; mais cet expédient a plus d’inconvéniens que la fouille même que le Gouver- nement fe propofe d’abolir. On voit aflez par cet Extrait , que ce Mé- moire ne contient rien de neuf, & en conféquence les Commiffaires de l’Académie ont jugé qu'il n’avoit aucun droit au Prix, ni aux Acceflit. Ce: à 2 SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 63; NE ROSE EE CAN ONE LI L Vive le Roi........ Domine, falvum fac Regem. L'Avrsvur obferve que le Salpêtre fe forme dans les plâtras, les pierres calcaires , les mortiers, les terres & autres matières imbibées d’urine & de matières difpofées à la putréfaction. En imitant le procédé que la Nature emploie journellement fous nos yeux, il eft indubitable qu’on formera du Salpétre. Il prefcrit en conféquence, de réduire d’abord en poudre groffière les matériaux qu'on juge à propos d'employer , de les méler avec des végé- taux, des fumiers , de la chaux, de la cendre, de la fuie, de la fente de pigeons, &c. de réitérer ces mélanges, & au bout d’une année, la fermentation fera, fuivant lui , achevée, & le Salpêtre formé. Les pierres tendres imbibées d'urine font encore très-propres à donner une grande quantité de Salpètre, D’après ces principes , qui font ceux connus & confignés dans nombre de Mémoires imprimés, l’Auteur propofe de faire les établiflemens relatifs à la fabrication du Salpêtre en plein air, & de choifir un champ dans lequel il y ait peu de terre végétale, & deflous de la glaife ou de la marne. Il n’annonce pas qu'il ait fait aucune expérience pour s'affurer du fuccès de cette nouvelle efpèce de nitrière; mais peut-être fon idée pourroit-elle mériter quelque attention ; car le feul inconvénient des nitrières en plein air, eft la crainte que la pluie ne diflolve le {el & ne l'entraîine à mefure qu'il fe forme ; mais fi le fond du fol eft glaifeux & ne permet pas à l'eau de s'imbiber; fi, comme il le propofe, on établit des rigoles, des foflés. bien glaifés, où l’eau fe raffemblera , pour être enfuite employée en arrofages ; l'inconvénient ne fubfifte plus. Le Salpêtre, il eft vrai, fe trouvera dans l'état de diffolution pendant l'hiver; mais il reprendra fa forme concrète pendant l'été. L’Aureur entre aufli dans quelques détails fur la manière de labourer la terre mélangée , deftinée à la fabrication du Salpêtre. Ce Mémoire contient la première idée des nitrières en plein air , qui depuis ont été propofées par d’autres Concurrens; mais cette idée n’eft point ici fufffamment développée, & l’Auteur ne s’eft occupé d'aucune des expériences qui auroient pu faire connoître fi ce projet eft praticable, sl eft avantageux ou non. Les Commiflaires n’ont pas jugé en confé=- quence qu'il eût rempli les vûes du Programme. 64 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ rm cedd MÉ MOTÏTRE [N° XIX CE Mémoire ne contient rien d'utile ; & a paru ne mériter aucune attention. MÉMOIRE INC 0e Sans devife. L'Acanémir a recu fous ce numéro & fans devife, une fimple lettre de quatre pages , dans laquelle l’Aureur fuppofe que le Salpétre fe tire principalement des démolitions. Il a pris fans doute cette idée à Paris, où en effet on ne leflive que rarement des terres de fouille. Il propofe dans une démolition, de diftinguer les gros & les petits matériaux; les gros feroient leflivés par le Salpétrier fur les lieux même, fans les réduire en poudre , après quoi ils feroient rendus au Proprié- taire , qui feroit tenu de faire charger & décharger les cuveaux. Quant aux menus matériaux , il feroit libre au Salpêtrier de les lefliver, ou chez lui, ou fur place, & la dépenfe du tranfport feroit à fa charge. Il propofe d’accorder une augmentation de fix deniers par livre à ceux qui fabriqueront fuivant cette méthode. Il attache aufli une grande importance à la nature des eaux dont on fe fert pour lefiver, & il prétend qu'il ne faut employer que celles qui prennent leur fource dans du gravier, & qu icoulent fur du gravier. L’Auteur termine fa lettre en repréfentant qu’il feroit beaucoup plus x avantageux de percevoir les droits le les boiffons à l'encavement , qu'à la confommation. Cet objet n’eft pas du reflort de l'Académie. Tout ce que propofe l’Auteur fur la fabrication du Salpètre, eft abfo- lument impraticable, Si on lefivoir les gros matériaux fans les concaffer, on ne retireroit pas le quart & fouvent même la dixième partie du Salpétre qu'ils contiennent, Si les matériaux étoient enfuire rendus aux Proprié- taires , ils ne pourroient les employer dans de nouveaux bâtimens , fans y porter un principe de nitrification qui les altéreroit & les détruiroit en peu de temps. Cette lettre a paru aux Commifaires ne mériter aucune attention. MÉMOIRE. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 64 M ÉUNMOÏT REINE XXL Dis Solis ef} Scientia veri, nobis contra « SUNSET a illa, L'Avrsur propofe, pour épargner le pri des hangars & des bâtimens, de former ex plein air, dans les environs de chaque village, des mon- ceaux de terre difpofés de manière que le ‘talus foit fuffifant pour éviter les éboulemens ; de les garantir feulement du vent du fud & de l’oneft , par le moyen d'arbres ou de haies : ces tas feroient placés de préférence fur un fol argileux. Les pluies entraineroient, il eft vrai, une partie du Salpètre ; mais l’Auteur prétend que le déchet ne fera pas proportionné à ce qu'il en coûteroit pour conftruire des hangars. I! propofe au furplus, de faire un foflé autour de ces amas de terre , pout y raflembler les eaux pluviales & éviter la perte du Salpétre. Les méthodes que l’Auteur propofe pour favorifer la formation de ce fel dans les amas de terre, font les mélanges fufceptibles de fermenter , & à cet égard, fon Mémoire ne contient rien de neuf. Comme l’Auteur de ce Mémoire n’a prouvé par aucune expérience la pofhibilité de fabriquer du Salpétre ayec avantage , par le moyen d’établiffemens en plein air; que leur fuccès eft au moins douteux dans des climats pluvieux comme celui que nous habitons , les Commiffaires de l'Académie n'ont pas jugé qu’il eût rempli l’objet du Programme, & qu'il eût aucun droit au Prix, ni aux Acceflit. MRROMNO IR EN" XUOXITIL À grande peine pouvons-nous comprendre ce qui eft dans la terre, &c. CE Mémoire eft écrit en Langue Alchimique, & d’une obfcurité difhi- cile à pénétrer. Le réfultat eft de conclure que la meilleure méthode de produire artificiellement du Salpétre , eft de raffembler fous des hangars des terres ou des platras lefivés, d'environner les hangars de 66 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ paillaffons ou de nattes, qu’on puifle lever dans les temps de lune, & abaifer dans les temps de pluie; d’arrofer ces terres avec de l’eau dans laquelle on aura laïflé putréfier gros comme une noïx par tonneau de chairs d'animaux. Quand, au bout d’un mois , l'eau fera bien corrompue & dans un état vifqueux, on y ajoutera la dixième partie de fon poids de faumure, ou bien de fel marin appelé grain par les Salpêtriers, ou encore de fel de mer ou de fontaines falantes , calciné à la manière de Glauber, &c. Les arrofages ne doivent commencer qu’au bout de quelques mois. Ces eaux , ainf préparées & putréfiées, valent mieux, fuivant l’Auteur, que les urines , & elles procurent un Salpêtre meilleur & plus fort. Pour raffembler aflez de faumure , Auteur propofe de reprendre celles des Chaircuitiers , en les remplaçant par du fel neuf; d’ordonner à tous les vaiffeaux qui portent des viandes falées à la mer, de rapporter les faumures ; enfin d’obliger les écorcheurs à apporter les bêtes qu'ils tuent, à un dépôr de fel où elles feroient falées pour faire de la faumure, Tout ce que ce Mémoire préfente de praticable , eft l'idée de former des eaux putrides par une addition de chairs animales; ce moyen mul- tiplieroit d’une manière facile & peu difpendieufe les arrofages. Quant à l’eau de mer, à celle des fontaines falées & aux faumures , elles feroient plus nuifibles qu'utiles, & on verra dans la fuite, que l'addition d’une grande quantité de fel marin & même de route matière faline , fufpend entièrement la putréfaction & conféquemment la formation du Salpêtre: Ce Mémoire a paru n'avoir aucun droit au Prix, ni aux Acceilit. pme Mr EM OM EC EL IN EN RUE Si parva licet componere magnis. CE Mémoire ne contient que des recettes pour convertir le fel marin en Salpètre; ce font à peu près les mêmes procédés qu’a donnés Glauber ; mais la converfion du fel marin en Salpêtre , étant reconnue impoñlble , d’après les expériences de plufeurs Concurrens, & d’après celles des Commiflaires de l'Académie, ce Mémoire n'a paru mériter aucune attention. L'Auteur d’ailleurs ne paroïît pas avoir répété par lui-même aucune des expériences qu'il rapporte; en forte qu'il n'a pas rempli les conditions. du: Programme. N SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 67 MPRENMOMtRERAELN NE NU XIV. Nunquam aliud Natura aliud fapientia dicit. JUVENAL. L'Aureur ne voit que trois moyens pour fuppléer à la fouille. Le premier , de trouver du Salpétre hors des habitations des par- ticuliers. Le fecond , d'établir des nitrières en grand. Enfin le troifième , d'accorder à tous les particuliers la liberté de fabriquer du Salpétre chez eux. Le premier de ces moyens n'appartient , fuivant l’Auteur, qu’à l'Inde , à l'Efpagne , &c. & il paroit ignorer qu'on trouve en France du Salpêtre naturel en plufieurs endroits. Le fecond et difpendieux ; il exige des conftruétions chères , l’am2s de matières difficiles à raffembler en grand; enfin il faut beaucoup de temps pour que le Salpètre fe forme. . D'ailleurs, aux dépens de qui fe feront ces établiffemens ? Si c’eft aux dépens des Communautés, c’eft fubftituer une charge à une autre. Si on abandonne ces entreprifes à des particuliers, elles n’auront de fuccès qu'autant qu'on payera le Salpétre beaucoup plus cher qu’on ne l’a payé jufqu’ici. L’Auteur penfe d’ailleurs, que les nitrières en grand ne peuvent réuflir que dans les environs des villes; que ce n’eft que par des écono- mies particulières qu'on pourra y fabriquer du Salpêtre à un prix raifon- nable; en fe fervant , par exemple, de bâtimens conftruits & abandonnés, en y faifant travailler des mendians , des déferteurs , &c.; en faifant ces établiflemens dans des maifons publiques , dans des maifons de force, parce qu'on auroit alors fous la main les deux grands moyens nécef- faires pour la fabrication du Salpêtre, les matières putrefcibles, & la main d'œuvre à bon marché. Ces moyens au furplus, reftreints aux grandes villes, ne peuvent, fuivant l'Auteur , produire qu’une quantité médiocre de Salpêtre , & il revient en conféquence au troifième moyen propofé, celui de laïffer à chacun la liberté de fabriquer du Salpêrre. Il ne s’agit à cet égard, que d'intérefler les particuliers , & de leur apprendre à le fabriquer à peu de frais; c’eft l’objet de fon Mémoire. Un coin de hangar, d’écurie, d’étable, de grange, peut fervir à la fabrication du Salpétre. A défaut de local, une cahute, le bâtiment le plus léger peut remplir l'objet, pourvu que la pluie n’y pénètre pas. Tout Journalier peut faire par lui-même de femblables conftruétions. L’Auteur prefcrit de difpofer les terres, couches par couches, avec de Ti 63 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ la cendre & de la mouffe. Il confeille fur-tout le muftus arboreftens , & il le préfère même au fumier , à caufe de fa partie rélimeufe , qu'il croit devoir être utile pour la formation du Salpêtre; mais il n’en rapporte aucune preuve; & qn croit étre fondé à croire que cette plante étant fort sèche & peu difpofée à la putréfaétion , elle ne fervira qu’à procurer des conduits à l'air, comme le pourroit faire de la paille. 11 propofe d’y joindre les balayures de toute efpèce, kes plumes de volailies, de pigeons, &c. A l'égard des arrofages , il confeille , pour ne pas écraler la couche, & pour ne pas tafler la terrre en marchant deflus, de la couvrir de deux planches qui fe couperont à angle droir, & qui formeront un chemin ; il donne le moyen de foutenir convenablement ces planches. Il prefcrit pour arrofage, l'urine & l’eau de leflive; il exige qu’on arrofe tous les deux jours alternativement avec ces deux liqueurs , & que les arrofages fœient continués pendant quatre mois. Les couches, pen- dant ce temps, doivent être remuées plufieurs fois à la pelle ; au bout de quatre mois on cefle d’arrofer, & au bout de fix on lefive. Les Commiflaites de l’Académie croient déjà pouvoir affurer , d’après routes les expériences faites, foit par eux-mêmes, foit par les Concurrens, que le terme de fix mois, qu'afligne l’Auteur , eft beaucoup trop court. Il préfère de lefiver féparément les terres & la cendre, & de précipiter enfuite jufqu’à faturation; cette méthode eft bonne , mais embarraffante : on verra d’ailleurs dans la fuite, les raifons pour lefquelles on doit éviter de précipiter toute la terre, & de décompofer completrement l’eau mère. Une partie confidérable d’aikali eft employée à décompofer le {el marin à bafe terreufe, & on augmente aindi la dépenfe fans augmenter le produit. Il annonce qu'il a fait quelques expériences qui ont eu beaucoup de faccès ; il fe propofoit de les répéter & de faire part à Académie de leur réfultat ; mais il n’a point tenu ce qu’il avoit annonce. Ce Mémoire eft bien fair, & le fyftême de liberté que lAuteur propofe, eft très-conforme aux principes que l’Adminiftration a adoptés. Non feulement il eft permis, par les derniers Arrêts du Confeil, à tout particulier , de fabriquer du Salpètre , en prenant une fimple autorifation gratuite de la Régie , mais encore les Régifeurs regardent comme une de leurs obligations effentielles , d'inftruire & d'encourager ceux qui fe livrent à ce travail. Indépendamment de ce que le Prix du Salpètre à été beaucoup augmenté, il leur eft encore accordé des récom- penfes proportionnées à fa qualité. Le vœu de l’Auteur eft donc rempli jufqu'à un certain point à cet égard, & autant que le permet l’exiftence du privilège exclufif de la vente de la poudre & du Salpêtre que le Roi s'eft réfervé. : Ce Mémoire au furplus ne contenant qu’un petit nombre de réflexions nouvelles fur la théorie & fur la pratique de l’art de fabriquer le Salpêtre, & peu d'expériences, il n’a pas paru avoir rempli les conditions du Programme. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 69 PSN den ue SG Us if SU US NS Sd Cr | MN ÉMMRONLO RE Nr XX NV. CE Mémoire, écrit en latin, propofe , pour premier moyen, à tous les habitans de la -campagne , de faire près de leur habitation, une folle à Salpêtre, couverte en chaume ou en paille , &c. d’y jeter toutes les matières fufceptibles de. putréfaétion, d'y verfer les urines, &c. ils vendront enfuite au Salpétrier les matières qu'ils auront ainf préparées. F re Il propofe enfuite pour feconde méthode, des hangars conftruits à très-bon compte, fous lefquels on traitera des terres; il prétend qu’elles ne doivent être remuées que dans certains temps de la lune. Ce Mémoire eft, en grande partie, puifé dans Glauber, que l’Auteur cependant ne cite pas. Son Ouvrage ne contenant que des faits & des réflexions déjà connus , & rien qui puille éclairer la théorie ni la pratique de la fabrication du Salpêtre , les Commiflaires ont jugé qu'il n'avoit aucun droit au Prix, ni aux Acceflit. Mi MO LR N'uX Xe VOT. Multa latent arcana Nature. L'Aureur eft dans la fauffe opinion auil n'entre point d’alkali fixe dans la compoftion du Salpêtre , & l’on s’apperçoit qu'il manque des connoiffances les plus élémentaires fur cet objet. Il prétend qu’en laiffant les terres falpétrées dépofées fous des hangats, jufqu’à ce que les matières putrefcibles foient entièrement détruites par la fermentation , on n’auroit plus befoin d'ajouter de cendres lors du leflivage. Quand ce fait feroit vrai , 1l ne prouveroit pas que l’alkah fixe n'entre pas dans la compofition du Salpètre ; il en réfulteroit feulement de deux chofes l’une, ou qu'il exifte de l’alkali fixe rout formé dans les végétaux , & que cet alkali devenu libre par la décompofition totale , peut s'unir à l'acide nitreux ; ou bien qu'il fe forme de l’alkali fixe dans les derniers remps de la putré- faction , comme les expériences de M. Thouvenel femblent le faire foupconner. L’Auteur eft dans une autre erreur capitale fur la nature du fel marin; il croit qu'il peut remplacer les cendres & Palkali dans la fabrication + 70 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ du Salpêtre, ce qui eft de toute fauffeté, au moins pour le {el marin à bafe d’allcali minéral. Il prétend même , que dans des expériences qu'il a faites, il eft parvenu à changer le fel marin en alkali fixe végétal. Les Commiflaires de l’Académie peuvent aflurer affirmativement à lAu- teur , que s’il veut prendre le peine de vérifier fes expériences avec attention , il reconnoitra qu'il s’eft trompé, Il admet , comme tous les Chimiftes, la putréfaétion comme la caufe de la formation du Salpêtre , & il ne fait que répéter ce qui a été dit fur amas des terres fous les hangars, fur la néceflité de les remuer, fur les arrofages , &c. . I! confeille d’employer dans les couches de la paille, d’en former de longs bouchons , tels que ceux qu’on emploie pour laver les jambes des chevaux , d'en placer un certain nombre perpendiculairement dans les lits de terre , pour faire pénétrer l'air & les arrofages, & de répandre de la paille fraîche dans toute Ja mañle. Cette idée eft bonne, & elle feroit certainement d’une application utile dans la pratique. Quant aux arrofages , c'eft toujours l'urine, l’eau de fumier & l’eau de leflive des blanchifleufes : enfin il prétend que l'urine & les excrémens d'un homme peuvent rendre par an quatorze livres de Salpétre. Indépendamment des établiffemens en grand , Auteur défireroit qu'on encouraget les établiflemens particuliers, en accordant, par exemple, l'exemprtion de tirer à la milice pour un fils, ou un valer, à tout habitant de la campagne qui auroit difpofé deux toifes cubes de terres pour la fabri- cation du Salpétre. Il calcule, qu'avec feulement deux établiffemens de certe efpèce dans chaque paroïfle , on fabriqueroit en France trente- trois millions de Salpètre. L'Auteur ne s’'apperçoit pas, qu'en propofant d'accorder des privilèges particuliers à ceux qui fabriqueront du Salpêtre dans les campagnes , c'eft aller contre le but même que fe propofe l'Adminiftration. On ne peut exempter un particulier de la milice, fans reporter fur le refte de la Communauté une charge qui devroit étre commune: ce feroit donc fubftituer une charge à une autre , celle de Ja milice à celle de la fouille, Le plan que l'Adminiftration s'eit formé , tend plus au foulagement du peuple; elle défire de fubitituer, autant qu'il fera poñlible , de l'argent dont la valeur eft bien connue, à des privilèges dont les effers {ont compliqués & indérerminés , LÉ dégénèrent le plus fouvent en abus, -& qui communément ve remp iffent pas leur objet. F SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 1 DA ES MO NRA MENT ENT TT _— Credidimus fpiritus acidos nitri nufquam in rerum natur extitiffe ante inventum modum nitri parendi. BOERHAAVE. CE Mémoire eft de M. de Beunie, Médecin à Anvers, de l’Académie Impériale des Arts & Belles-Lettres de Bruxelles. L'Académie a cru devoir lui accorder un Acceflit ; mais, quoiqu'il foit deftiné à être imprimé en entier dans ce Recueil, on n’a pas cru devoir fe difpenfer d'en donner un Extrait. Le nitre eft un fel neutre compofé d’un acide uni, foit à un alkali, foit à une terre. Par nitre brut, l’Auteur entend , dans tout le cours de fon Mémoire , un mélange d’acide nitreux, de terre calcaire, d’alkali fixe, d'alkali volatil, d’une matière grafle, de fel marin & de fel d'Epfum. Le nitre rafhiné eft le Salpêtre pur à bafe d’alkali fixe. Quant aux nitres métalliques , ils n’ont aucun rapport à l’objet du Prix. Il n’admet point avec Stalh , que l'acide nitreux foit une modification de l'acide virriolique , & il difcute à cette occafion les preuves rap- portées par M. Pietfch. Première preuve de M. Pietfch. Avec quatre parties d’acide nitreux,. & une d'huile de térébenthine, on forme, fuivant cet Auteur, du baume de foufre. M. de Beunie , qui a répété cette expérience, fait voir qu’elle n’eft point concluante ; que le baume qu’on obtient, eft un baume nitreux fort différent du baume de foufre vitriolique. Seconde preuve. Si on mêle enfemble deux parties de nitre & une: d'huile de vitriol, on à des vapeurs gristres d’acide fulfureux. On pourroit d’abord élever un doute très-légitime fur la nature de ces vapeurs; mais en fuppofant même que ce fût véritablement de l'acide fulfureux , M. de Beunie obferve que l'acide nitreux contenant beaucoup de phlo- gifhque, il n'eft pas étonnant qu'il en communique à l'huile de vitriol , & qu'il la convertifle en acide fulfureux. La preuve que l’efprit de foufre eft produit aux dépens de l'huile de vitriol , c’eft que fi on poule le feu dans un appareil diftillatoiré, on retiré une quantité d’acide nitreux égale à celle qu'on avoit employée. La troifième! & la principale preuve de M. Pietfch eft, que fi on humecte une terre calcaire avec de l'acide vitriolique &'1de l'urine , on obtient, au bout d’un certain temps, du nitte où du Salpêtre. M. de Beunie a répété plufeurs fois cette expérienceavec fuccès; mais 72 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ premièrement il a obtenu de ce mélange , de la félénite & du fel ammo- niacal vitriolique; donc l'acide vitriolique n’avoit pas été changé en acide nitreux: fecondement, ayant fait la même expérience avec de l'urine & de la chaux, 1l à obtenu la même quantité de Salpêtre , fans le concours d'acide vitriolique. M. Pietfcha cflayé de phlogiftiquer l'acide vitriolique avec du camphre, avec de la teinture d’antimoine tartarifée, avec diflérens efprits inflam- mables , tant fimples que redtifiés , & avec une multitude d’effences de végcraux; il a varié les dofes de cent manières ; mais fes expériences ont étc fans fuccès. M, de Beunie a répété quelques-unes de ces expériences; il a infufé dans de l'acide vitriolique de la poudre de charbon, de la rapure de cornes , de la laine, de la fuie, des plumes, & plufeurs autres matières abondantes en phlogiftique ; il a éteint plufieurs fois des char- bons allumés dans le même acide; il y a mêlé des eflences inflammables , de l’efprit de vin, des réfines, des huiles , des fels volacils ; il a faturé ces acides ainf préparés , avec de l’alkali fixe ; il a toujours obtenu du tartre vitriolé , du fel ammoniacal, ou enfin différens els fulfureux de Stalh, mais pas un atome de Salpêtre. Il à de même eflayé fans fuccès de phlogiftiquer l'acide marin. M. de Beunie ob{erve à cetre occalion , qu’onne peut parvenir à changer par la putréfaction , le fel marin en nitre; car ce nitre feroit cubique : à moins qu'on ne prétende que la putréfaétion change l’alkali marin en terre calcaire, ou en alkali végétal, ce qui n'eft ni prouvé, ni probable, ; Il a eu occafion, relativement à des opérations de commerce & de manufacture, de faire un grand ufage d'urine humaine vieille & putréfiée; l'ayant fait évaporer, il en a tiré beaucoup de fel marin, mais pas un atome de nitre, Il n’y avoit donc point eu de changement du fef marin en Salpétre. Après avoir prouvé que l'acide nitreux ne réfulte pas de la combinaifon de l'acide vitriolique, ni de l’acide marin avec le phlogiftique, comme plufeurs Auteurs l’avoient avancé, M, de Beunie cherche à établir qu'il ne vient pas de l'air ; il apporte en preuve l'expérience du linge imbibé d'alkali fixe végéral, qui, expofé long-temps à Fair, donne du tartre vitriolé. Mais cette expérience n'eft pas exacte; & M, Cornette a fait voir qu'on obtenoit, par ce procédé, de l’alkali faruré d'air fixe & crif- zallifable , mais non du tartre vitriolé, 11 réfulte toujours de ce fait, que l’alkali expofé à l'air ne donne point de Salpétre; & M. de Beunie établit même, qu’on n'en retire des terres calcaires ; qu’autant qu'on y ajoute des matières en putréfaction, On a prétendu que la fertilité des terres venoit du nitre; l’Auteur a examiné par d'analyfe, plufeurs claffes de terre végérale, fans y avoir trouvé un feul atome de Salpêtre. Il cite à l'appui les expériences de M. André, qui a analyfé au delà de cent efpèces de terres fertiles , & qui n'a trouvé que dans une feule un grain de fel par livre, M. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 7 M. Lémery a avancé que le Salpêtre étoit l'ouvrage de la végétation. M. de Beunie n’admet pas encore cette opimion. Les animaux frugivores & leurs urines devroient, dans ce fyftéme , donner plus de nitre que les autres; cependant l'urine humaine eft, fuivant M. de Beunie, la meilleure de toutes. D'ailleurs on ne trouve de Salpêtre dans l'urine des animaux , que quand elle eft putréfice. Les terres bourbeufes, qui ne font que des plantes pourries , ne donnent pas de nitre; & M de Beunie en tire un nouveau motif de croire que le Salpêtre n'eft pas tout formé dans les plantes : mais on pourroit lui objecter que leur nitre a été diffous & emporté par les eaux. Ce n'eft pas non plus l’alkali volatil qui fert à la formation du nitre: l’Auteur a mélé enfemble de lalkali volatil & de la chaux, fans addition de matières putrefcibles, & il n’a pas obtenu un feul atome de Salpêtre. Après avoir écarté par la voie des expériences , les différens fyftêmes imaginés pour expliquer la formation du nitre, M. de Beunie développe le fien. 11 obferve que la même matière muqueufe ou fucrée qui a fubi la fermentation fpiritueufe, pafle enfuite à la fermentation acide, & forme le vinaigre ; il penfe que la fermentation putride à également la propriété de former un acide , & que cet acide eft le nitreux ; qu'il fe forme dans un air méphitique, qui s’exhale pendant la fermentation putride ; enfin il penfe , avec beaucoup de raïfon , qu’en raflemblant toutes les circonftances propres à cette fermentation , on‘ parviendra à augmenter la nitrification. Cette Diflertarion théorique, très-intéreffante , eft fuivie de détails applicables à Ja pratique. M. de Beunie ne prefcrit rien de nouveau fur le choix des terres , ni fur les mélanges ; il engage à préférer les terres déjà falpétrées , & à les mélanger de matières putrefcibles. Quant à la difpoftion des couches, il confeille d'élever en plein air des pyramides. carrées par leur bafe, & de Ja hauteur de douze ou quinze pieds. Ces pyramides doivent être percées de trous de cinq à fix pouces de diamètre , placés à un pied de diftance les uns des autres; & Je tout doit être recouvert d’un toit de paille foutenu par quatre piliers. On doit injecter, chaque mois , de l'urine dans les ouvertures avec une pompe ou feringue. Si les trous venoient à fe boucher, il faudroit les repercer avec une fonde. On pourroit aufli y introduire, en conf- truifant la pyramide , des poteries percées de trous, ou enfin faire un bâti de mauvaifes briques pour foutenir les terres. L’Auteur a été conduit à donner la préférence à cette méthode. Par expérience fuivante, il a conftruit avec des terres levées, deux couches égales de’ quatre pieds carrés de bafe fur trois d’élévation. L'une étoit pleine, l'autre percée de trous; elles éroient placées à une toife l’une de l'autre : celle percée de tous a donné trois bis plus de Salpètre que Y'autre. Il obferve d'ailleurs, que cette méthode à l'avantage d'éviter tour remucment & déplacement de terres, K 74 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ M. de Beunie , pour éviter une partie de la dépenfe en alkali fixe : confeille d'employer, lors du leflivage, les eaux de favon noir, ainfi que celles des ateliers de Chamoifeurs, qui contiennent de la porafle, & d’y ajouter un peu de chaux. Il prétend que pour clarifier la cuite, il vaut mieux employer le fang de bœuf que la colle; qu'il réuflit mieux, & qu’il eft à meilleur marché. M. de Beunie fait voir , à loccafion de la criftallifarion | qu'il eft très- important de mettre, pendant l'été , à criftallifer dans un endroit frais , & que fans certe précaution on n'obtient pas de Salpètre. On voit, par l’expofé que nous venons de faire , qu'on doir à M. de Beunie , d’avoir prouvé, par des expériences bien concluantes, que l'acide nitreux n’eft une modification ni de l'acide vitriolique, ni de l'acide marin; & c’eft principalement fous ce point de vue que l'Académie l’a jugé digne d’un Acceflit. Son Mémoire eft bien fait, fa théorie {ur la formation du Salpêtre claire & fimple. L'Académie a feulement regretté que fes expériences ne l’aient pas conduit à des vérités plus directement applicables à la pratique. CEDRRET SEL EN ERNEST TN EPS EE PRET EURE LÉ PMERE LES EE POESIE RTE TEE MISE SES MÉMOIRE NX VITL Non fingendum aut excogitandum, [éd inveniendum quid Natura faciat aut ferat. BACON. CE Mémoire contient une fuite tres-intéreffante d'expériences entre- prifes, à ce qu'il paroït, à Paris, dans une grange de huit pieds fur fept. L’Auteur , preffé fins doute par le temps, n’a envoyé à l’Académie que le détail des procédés. Il avoit promis de lui faire parvenir bientôt après les réfultats qu'il auroit obtenus; mais elle ne les a point recus. Les Commilflaires ont regretté de voir un travail fi bien commencé demeurer fans fuite, & de ce que l’Aunteur n’a pas recueilli le fruit de {on travail & de fes dépenfes, he jee SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 75 CRIER ESP LEA SEE LT LIT TRS EL VTT RCE PS REDDIT ÉD CA AETRNNATE T TE SCT) MÉMOIRE N°. XXI%X Sic materits arte difpofiris, Natura duce, abondanter gefferabitur nitrum. CE Mémoire , dont l’Auteur ne s’eft point fait connoître, a été jugé digne d'obtenir un Accellit de la valeut de huit cents livres ; il contient une fuite d'expériences bien faites ‘& concluantes , dont on va rendre compte dans quelque détail. ; Première Experience. L’Auteur 2 mis dans un vafe un boifleau ou quatre cent quatre- vingt pouces cubiques de marne, & feize pintes d'urine d'homme; il a laïflé ce mélange pendant fept mois expofé à l'air, à l'abri de la pluie & du foleil, ayant foin de lagiter de temps en temps, & d'y ajouter {ufhfante quantité d'urine pour le réhumecter à mefure qu'il étoit fec. Ce mélange, leflivé au bout de fept mois & évaporé, a donné fept gros de nitre à bafe de terre calcaire. Deuxième . Expérience. Quatre cent quatre-vingts pouces cubiques de marne écrafée, deux cent quarante pouces de bonnes cendres de bois, & vingt pintes d'urine mélangées & travaillées comme ci-deflus , ont donné en fept mois une once & demie de Salpètre à bafe d’alkali fixe. Troifiéme Experience. Quatre cent quatre-vingts pouces de marne, fix livres de vitriol verd, S à SE ! . / G & feize pintes d'urine expofées, agitées & arrofées comme çi-deflus, ont donné trois gros de nitre à bafe terreufe. Quatrième Experience. Quatre cent quatre-vingts pouces de marne, deux cent quarante pouces de cendre, fix livres de vitriol verd, & vingt pintes d'urine, ont donné cinq gros de nitre à bafe de terre calcaire. Nota. Les Commiflaires de l'Académie ne peuvent concevoir comment le Salpêtre, obtenu dans cette expérience , s'eft trouvé à bafe de terre calcaire , 2 moins que l'Auteur n'ait employé des cendres leffivées. Ils ne peuvent difimuler que cette circonftance jette quelque incertitude fur les expériences de l'Auteur. Ki vé HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Cinquième Expérience, Quatre cent quatre-vingts pouces de marne, trois livres de potalfe ; feize pintes d'urine ont donné une once fix gros de nitre à bafe d’alkali e: Sixième Expérience. Marne) RO ENT UE 0 PS ON otiCes: PTE NE Cle, SAUT à Le CMP MEME ce 2 D EE 3 livres. NAtTOAVELd EAP EEE EN SRE IN 6 UNS NT el RC MON 2 OR DITITES. ont donné une once deux gros de nitre à bafe d’alkali fixe. Septième Experience. Gendie PRE RE RE EE OT A PAS ONnOnCes. Urine se AN PCR ER PR SE CRE PE ET OLDTTITESs ont donné Salpétre à bafe d’alkali fixe, deux gros. Huitième Expérience. Vote: 1,2 TRE PUISE tre EURE SAME CRUE 1 livre. (OMTASS EE UF Threbil Lo MONA NC) ot CRE PA TERRE æont pas donné de Salpêtre. 1 1 Neuvième Experience. Vitriol yerd et Re TN RSA A SR 2 livres. UrINC RSR PES LE NOR EE ORPSe EEECS 4. pintes. s'ont point donné de Salpètre. abs qe Dixième Expérience. Mithiol' st MARNE ENS EE TEARE 6 livres. Gendre.. PAR SN RER MEME TEE EE 7 OR DoUceS: Unie et. ro nm rl: MRC n'ont point donné de Salpètre. De la marne, mélée avec du fel marin & de l'urine , a donné moins de Salpètre que la marne & l'urine feule, fans addition de fel marin ; mais elle en a donne plus cependant que lorfqu'on a ajouté du vitriol au lieu de fel marin: SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 77 La chaux éteinte à l'air, & les décombres de bätimens pris dans des lieux élevés où il n’y avoit pas de Salpêtre, ont donné les mêmes réfultats que la marne. se RE : É La marne, la cendre & l'urine mélangées comme ci-deflus, & mifes dans un vailleau fermé , n'ont pas donné un atome de nitre. C0 NI SNE QU: FE: NNCIENS: Le vitriol nuit plus qu'il ne fert à la production du Salpétre. Le fel marin y nuit aufli, mais moins que le vitriol. Le concours de l'air eft indifpenfablement néceffaire pour la formation du Salpètre. D'après ces obfervations préliminaires, l'Auteur remarque que la plupart des mélanges indiqués pour former du Salpêtre, fuppofent lemploi de matières chères & précieufes ; telles font la terre végétale des prairies, les fentes de pigeons, les plantes nitreufes, &c. 11 feroit difficile, même à prix d'argent, de fe procurer la plupart de ces ma- tières en aflez grande quantité, Il penfe qu’on trouveroit des reffources plus füres & moins chères dans les matériaux de démolitions des grañdes villes. Il s’exporte , par exemple, chaque année, de la ville de Paris , au moins huit à dix mille tombereaux de décombres , dont les Propriétaires font embarraffés. Cetre quantité, mul- tipliée par quatorze pieds cubes que contiennent chaque tombereau , donneroit cent vingt-fix mille pieds cubes de matières qu'on pourroit obtenir fans frais : il feroit important que ces matières fuflent tranf- portées fur le champ dans les nitrières, afin qu’elles ne fuflent point expofées à perdre le peu de nitre qu’elles peuvent contenir. Secondement, les boues, les immondices & les balayures: des rues forment un objet de fept mille tombereaux par an, lefquels doivent être réduits à moitié , à caufe de l’affaiflement des matières qui doit réfulter de la putréfaétion, C’eft encore cinquante mille pieds’ cubes effectifs de matières propres à la fabrication du Salpêtre. Quant aux pailles & aux fumiers , l'Auteur penfe qu'ils font trop chers pour qu'on puille les appliquer à cet objet. Troifièmement, les vuidanges des latrines, qui fe vendent communé- ment quatre fous la tonne, ne couteroient pas plus de trois fous, fi on s’engageoit à les prendre toutes. La ville de Paris en fournit fix à fept mille de trois pieds cubes; c’eft environ vingt mille pieds cubes dont on pourroit difpofer. Quatrièmement, le fang , les tripailles & autres abattis des tueries, que les Bouchers font obligés de tranfporter hors de la ville, à leurs frais , forment un cbjer de deux cents rombereaux par an, ou de deux mille huit cents pieds cubes. L’Auteur propofe d'empécher les Bouchers de laifer couler le fang dans 78 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ les rues, & de les obliger à le retenir & à le raffembler.dans des cuvettes ou des tonnes. Quant aux moyens d'employer ces matières pour en faire du Salpêtre, l’Auteur fe décide pour les hangars. Il propofe de les conftruire folide- ment, & de leur donner cent quatre-vingt-dix pieds de long fur trente- quatre de large. N Il entre dansle détail de routes les parties de la nitrière, qui deviendroit ; dans ce plan , un établiffement très -confidérable , mais en même temps très-cher. Il propofe de lxifler les hangars ouverts de toutes parts ; & pour fe garantir de la pluie , il fait déborder le toit de quatre pieds tout autour. Cette méthode, ainfi qu'on en pourra juger d’après le Mémoire de M. Thouvenel, n’eft pas fans inconvénient, & l’on verra qu'un air ftagnant eft préférable à un air trop renouvelé. L'Auteur divife chaque hangar en deux couches de foixante - onze pieds de longueur fur quatorze de large ; au fommet , elles auront fept pieds de hauteur: ainfi chaque hangar contiendra feize mille cent quatre- vingt-quatre pieds cubes de matières propres à fe falpêtrer; fur quoi déduifant huit cent dix-huit pieds pour les ventoufes. pratiquées dans l'intérieur des couches , ‘il reftera par hangar quinze mille deux cent foixante-fix pieds cubes. ” Les ventoufes qu’il propofe pour multiplier les furfaces & pour donner accès à l'air, font des efpèces de doubles rateliers de bois , qui auront à peu près la figure des Le de l’Inftruétion publiée par les Régifleurs des Poudres, mais qui auront beaucoup plus de folidité. : L'urine fera la bafe des arrofages & on les diftribuera avec une pompe. L'Auteur donne tous les procédés relatifs à la lixiviation , à Pévapora- tion, &c. Mais comme ces détails ne rentrent pas directement dans l’objet du Prix, on fe difpenfera d’en donner ici l'extrait , & on renverra au Mémoire même, qui eft imprimé en entier. Ce Mémoire à paru aux Commiffaires avoir été fait par un homme très-inftruit; les moyens propofés pour raffembler des matériaux, font très-économiques pour la ville de Paris ; & très-praticables : mais il eft à craindre qu'on ne manque, dans le projet de l'Auteur, de liqueurs pour les arrofages ; & à cet égard on pourroit RS l'idée de l’Auteur du Mémoire N°. 22, qui confifte à faire putréfer de la chair dans de l'eau; les rebuts des boucheries & des écorcheries rempliroient très-bicm get objet. Ce Mémoire a obtenu un Accefit. LE RERETENEETALEEET L DO | MAÉ -M-OI PRE: NP XX X. Ars longa, vita brevis. L'Aureur de ce Mémoire n’entre dans aucun détail relativement À la partie phyfique de la fabrication du Salpêtre ; il fuppofe qu’en amaf- fant des terres fous des hangars , & en les mélangeant de matières ani- males & végétales , il s’y formera du Salpétre; du refte il ne s'occupe que des moyens d’exécution, Son Mémoire préfente deux plans. P'RE) Mir EUR PRIG PT. IL propofe d’abord de former des arrondiflemens mieux diftribués aux Salpétriers , & de les faire fuffifamment étendus pour que les rerres aient le repos néceflaire pour la régénération du Salpèrre ; il défireroit qu'on fixàt le nombre de cuveaux de terre que chaque Communauté feroit obligée de fournir, & qu'on réglät leur mefure. La quantité de terre que chaque Communauté devroit fournir étant ainfi réglée, on l’obligeroit à faire elle - meme la recherche des terres falpérrées, & à les: dépofer dans des caves, granges, écuries. Ces granges ou écuries n'en feroient pas moins utiles comme toutes les autres , parce que les terres y feroient dépofées fous un plancher en bois, fait aux frais des Communautés, lequel feroit diftant au moins d’un pouce des terres. Ce plancher fe leveroit lorfqu'il feroit queftion de travailler les tétres. Il aflure que celles des écuries & granges ainfi couvertes, font beaucoup préférables à celles qui font expofées à un air libre; mais it men rapporte aucune preuve. Les terres de caves font, fuivant lui, auf bonnes que celles des granges & écuries qui ont été couvertes d’un plancher. Trois caves, trois granges & trois écuries fuffiroient pour la plupart des Communautés , & ce feroient ces mêmes Communautés qui en payeroient le loyer aux particuliers. Quant au logement des Salpétriers , l’Auteur propofe d’en conftruire un dans chaque Paroifle aux dépens de la Province. On fent affez combien cet article feroit cher. Les. Communautés loueroient le logement à des paticuhers , dans l'intervalle des retours des Salpêtriers. Plufieurs Communautés très-voifines pourroient fe réunir pour la dépenfe du logement du Salpétrier. À l'égard des cendres, il voudroit qu’on obligeäs: tout particulier à en fournir une certaine quantité, 80 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ SEE GO LN DU PR ONE TES 1°. Conftruire des hangars dans les Communautés les plus proches des forêts. 2°. Les conftruire à trois étages voñtés, pour mettre trois étages de terre. Le Salpétrier logeroit fur la troifième voûte du hangar. On conçoit l'énorme dépenfe d’une telle conftruction, & cette circonftance fufit feule pour rendre ce projet inexécurable. Pour éviter les frais de tran{port, il propofe de prendre la terre même du dieu ; & pour l’amender, chaque Salpétrier auroit vingt-cinq à trente chevres où moutons qui paferoient la nuit dans le hangar. L’Auteur prétend que les terres falpétrées ne lâchent leur Salpêtre qu'autant qu'on méle avec ces terres de la terre de bergerie; ce qui eft contraire à tout ce qui eft connu, ou plutôt ce qui eft évidemment faux. Il regarde les marcs de raifin comme-ttès - propres à favorifer la pro- duétion du Salpétre. On voit que le réfultar de ce Mémoire feroit de fubftituer à la gêne de la fouille, une gêne beaucoup plus grande encore, & des charges plus réelles & plus abufives. Ce plan d'ailleurs eft directement oppofé à l'état de liberté auquel l’Adminiftration pa défirer de ramener, autant qu'il fera poffble , la fabrication du Salpêtre. Ce Mémoire n’a paru en conféquence mériter aucune attention, M Er MIOT-R ET ENS UDC RL CE Mémoire , qui eft de M. Cornctte, a éré retiré du Concours avance la diftribution du Prix; l’Auteur ayant été appelé dans l'intervalle à l’Aca- démie des Sciences , dans la claffe de Chimie, il étoit, aux termes du Pro- gramme , exclus du Concours ; mais le Public n’a pas été privé du fruit de fes travaux, & fon Mémoire a été imprimé féparément en 1779. Comme cet Ouvrage et devenu rare , les Commiflaires de l’Académie ont jugé qu'il feroit utile de le faire réimprimer en entier dans ce Recueil , re cependant prérendre lui afligner de rang. On va en confé- quence en préfenter ici un Extrait détaillé, comme on l’a fait pour les autres Mémoires. L'’Auteur divife fon Mémoire en trois parties. Première partie, de l'acide nitreux, Seconde partie , de la formation du Salpètre. Troifième patie, des procédés propres à augmenter la récolte du Salpérre. Il SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 8gr Ïl commence par expofer dans la première partie, les fyftêmes des différens Chimilftes {ur la compofition de l'acide nitreux. Les Anciens fuppofoient que ce fel exiftoit tout formé dans l'air; qu'il fe dépofoit dans les terres; quelles formoient pour lui une efpèce de magnes. Ce fentiment n’eft pas, fuivant l’Auteur , abfolument déraifonnable ; & il fe propole de faire voir qu'il y a du vrai dans cette opinion. Lemery fe perfuadoit au contraire, que le nitre étoit l’ouvrage de 4 végétation. Glauber l’avoit dit avant lui; mais ni l’un ni l’autre n’onr donné des preuves fufifantes pour fatisfaire les Phyficiens & les Chimiftes. Stahl & la plupart des Chimiftes modernes ont regardé l'acide nitreux comme une modification de l'acide vitriolique. Enfin quelques Auteurs, d’après Glauber , ont cru à la converfon du fel marin en Salpêtre. Le fentiment de Stahl à été adopté par M. Pietfch dans la Differ- tation qui a remporté le Prix qu’a propofé l’Académie de Berlin; & il l’a appuyé d’une expérience aflez directe ; elle confifte à faire du Salpêtre par une combinaïfon d’acide vitriolique , de terre calcaire, & d'urine. M. Cornette a répété cette expérience, & en a fait d’autres de même genre. Pour reconnoitre fi l'acide vitriolique fe convertifloit réellement en acide nitreux , il a faturé de la craie avec de l'acide vitriolique , il a humeété le mélange d'urine, & il a continué d’en faire des arrofagez ménagés , à mefure que la matière fe defféchoit. Au bout de fix mois ,ila leffivé, & il a obtenu une très-petite quantité de nitre. La félénite n’étoit point altérée, & il en a retiré à peu près une quantité proportionnée à acide vitriolique qu'il avoit employé. Les expériences fuivantes , entreprifes dans le même objet, lui ont donné des réfultats analogues. livres. Ont donné, au bout de fix femaines, Craie SAR RAT RE Le 12 un peu de nitre, du fel marin, & de la Sel de Glauber, humecté d'urine. 2 félénite; ce dernier fel venoit de la décom- pofition de l'eau mère par le fel de Glauber, Au bout de fix mois la putréfaétion n'étoit livres. CAC Eire cesse. 12 pas encore complette, & TodeLE pAErAe fe TATÉTCVIETOIE ee ec ee 2 failoit fentir ; aufli l'Auteur n'a-t-il pas retiré Mind RSR re 1 nv de Salpètre ; mais au bout d'un an, ayant Le tout humeëté d'urine. leffivé de nouveau, il a obtenu du Salpêtre. Craie. Crottin de cheval. Humedé d'urine, plus de Salpérre qu'aucun des mélanges précédens, L'Auteur penfe qu’une addition de chaux éteinte pourroir être avanrageufe, qe de cheval bien pourri. Ont donné un peu de nitre au bout de fix Farine. mo livres Vicriolide Mars. er Ont donné dans le mème intervalle de Crottin de cheval........... 4 temps un peu plus de nitre que dans l'expé- Chaux éteinte......,.... … 8 rience précédente. Le vitriol a été décompolé, Ce mélange, au bout de fix mois, a douné Humecté d'eau feulement. L 82 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Les conféquences que M. Cornette tire de cette première claffe d’expé- riences, font: 1°. que l'acide vitriolique ne concourt en rien à la formation de l'acide nitreux. 2°. Que l'acide nitreux ne fe forme que quand la putréfaétion eft à fon dernier période , & que les terres n’ont plus-du tout d’odeur. Il conclut encore d’une expérience faite avec des matières purréfiées, qui étoient reftées dans un pot fix à huit ans, fans le contaét de l'air, & qui n'avoient point donné d'indice de Salpêtre , que le concours libre de lair eft néceflaire à la formation de ce fel. M. Cornette a effayé de combiner le gaz putride de la viande avec des diffolutions de fel de Glauber, de tartre vitriolé, d’alkali volatil, de fel ammoniacal vitriolique. Il opéroit dans des bouteilles renverfces , pleines de diffolutions falines, & plongées dans un vafe également rempli de diffolutions falines , & il y introduifoit le gaz putride de la viande, à mefure qu'il fe dégageoit. L'opération a duré quatre mois ; mais les fels ont été peu altérés. Le tartre vitriolé avoit été feulement un peu rapproché de la nature du fel fulfureux de Stahl. À Après avoir expofe les expériences faites dans la vue de convertir l'acide vitriolique en acide nitreux, M. Cornette pafle aux expériences auxquelles il a foumis le fel marin. Il a fait les mélanges qui fuivent: livres. Selma rene 2 Ce mélange a donné un peu de Salpètre; le Craiesnte iles elle cet tel, fel marin s’eft trouvé fans altération. Crottin decheval........... 6 Sel marin à bafe terreufe. Craie Ce mélange a donné un peu de Salpètre ; le Fate fel marin s’eft trouvé fans altération. Ce mélange a donné un peu de Salpètre ; le fel marin s'eft trouvé dans le même état où on l'avoit employé. Gipfe & urine. Sel marin. Sel marin. à : : Viande Ce mélange n’a point donné de Salpètre, . 5 , , 1 Craic. S la fermentation n'ayant pas été complete. Les conféquences que l’Auteur tire de cette feconde fuite d'expériences , font : 1°. que l’acide marin n'entre point dans la compofition de l'acide nitreux ; 2°. que le fel marin ne fe convertit point en Salpétre. Après avoir ainfi exclu les différentes opinions reçues, il établit la fienne , & conclut que l’acide nitseux réfulre de la combinaifon de Lair fixe avec le phlogiftique. De ces connoiffances préliminaires, M. Cornette paffe à la feconde partie de fon Mémoire, c’eft-à-dire, aux expériences applicables à la pratique , {ur la formation du Salpétre. 1] a conftruit une nitrière artifi- SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 8; cielle , dont un côté donnoit un libre accès à l'air, tandis que l’autre ne contenoit qu'un air ftagnant : la partie expofce à l’air a fourni beau- coup plus de Salpêtre que l'autre. On verra dans la fuite , que les expé- riences de MM. Thouvenel conduifent à un réfultat contraire, & que l'air ftagnant convient mieux en général qu’un air trop renouvelé. Une obfer- vation que M. Cornette donne à l'appui de fon opinion; c’eft que les terres de caves donnent beaucoup plus de Salpêtre, quand elles ont été expofées à l'air, que quand on les leflive immédiatement au fortir des caves. 1i prétend encore que l’expofition du nord eft plus favorable que celle du midi à la formation du Salpêtre. Il penfe que la chaux vive peut avoir quelques inconvéniens dans les mélanges ; & il préféreroit la craie iégèrement ouverte par le feu, mais non dépouillée de fon air fixe. Enfin ces deux parties font fuivies d’une troïfième ; dans laquelle l'Auteur traite des moyens d'augmenter en France la récolte du Salpétre. Il prépofe de former ce fel dans les travaux en grand , par des mélanges de terres & de matières putrefcibles, & il préfère les matières végétales aux animales , à caufe de l’alkali fixe qu’elles contiennent naturellement, & qui donne une bafe à l’acide nitreux. Il paroït , d’après quelques expériences de l’Auteur , qu'on trouve du Salpêtre à bafe d’alkali fixe dans des matières où on n’avoit introduit aucune portion de ce dernier fel; ce qui le porte à croire que l’alkali fixe fe forme aufli bien que l'acide nitreux, & que cette fubftance réfulte , conformément à l’opinion de M. Baumé, de la combinaifon de la terre calcaire avec le phlogiftique. Quant aux choix des terres, M. Cornette indique les terres calcaires calcinées ou non calcinées , le terreau des jardins, la terre de prés, celle du fond des marais, les décombres de vieux édifices, la brique pilée. L'argile n’y convient pas. Il confeille d'y méler des plantes de toute efpèce, & principalement les plantes aqueufes, & celles qui viennent le long des murailles ; il propofe d’humecter le tout avec l'eau noire qui découle des fumiers. Toutes les matières animales , & fur-tout les excrémens ; peuvent étre employés avec avantage pour les mélanges ; mais il faut avoir attention de débarraffer les matières animales de leur graifle qui nuit à la putré- faction , & qui en retarde les progrès. Lorfqu’on a fait choix des matières , il faut les battre , les mettre en poudre groflière , & les pañfer à la claie. Les matières animales doivent être divifées également en morceaux, ou même avoir été préalablement macérées & ramollies dans de la leflive ou dans de l’eau; mais l’Auteur confeille de n'employer ces matières, fur-tout les chairs & les parties folides des animaux , qu’à la dernière extrémité. 11 faut que les matières deftinées à la formation du Salpêtre foiententre- tenues très-meubles , & qu’elles foient humeétées convenablement, pour favorifer la putréfaétion. On peut employer en arrofages , l'urine , les égouts de tannerie, & l’eau pure , à défaut d’eau de fumier. L i 84 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Les proportions que lAuteur a employées dans les expériences de pratique, font: PÉHESOMEENEM TU CRE NIUE SE EN METO oMpartiest GENE NES DERREUM OIMETEMS rt o (CERTES dE ONE ot ne NOEL GES RTE $ Matibrestipurrelcibles Se ISSN AT NT Il a arrofé avec de lurine & de l’eau de fumier, & il. a eu du Salpêtre abondamment. Il n’ofe cependant déterminer les quantités qu'il a obtenues , à caufe des incertitudes que laïffent les expériences:en petit, & dans la crainte de donner quelque chofe de hafardé. L’Auteur n’eft pas d'avis qu'on fafle des érabliffemens de nitrières très en grand , fur-tout dans le voifinage dés grandes villes, à caufe de l'infection qui pourroit étre dangereufe ; mais il propofe de rendre une loi qui oblige les habitans de la campagne d’avoir chez eux des amas de terres difpofées pour la formation du Salpêtre, Les méthodes au furplus à prefcrire, ne doivent point être les mêmes pour toutes les Provinces. Dans la Normandie , l'Auvergne , le Poitou , la Touraine, la Picardie , FAlface, la Bourgogne., la Flandre, la Lorraine, où les beftiaux font nombreux , les terres humectées par les excrémens des animaux, pourroïent fournir beaucoup de Salpètre ; dans les pays fablonneux, on feroit des murailles comme en Prufle: Ce feroit en hiver que les habitans des campagnes travailléroient les terres. M. Cornette ne demande qu'une fofle carrée de fix pieds fur chaque face, garnie de glaife & couverte d’un toit de paille; & voici comme il confeille de compofer les amas de terre qu’on y dépoferoit. On prendra du terreau de jardin, ou mieux encore-de là terre de cave ; d'étable ou de grange, déjà falpêtrée; on mélera cent parties de certe terre avec cent parties de plâtras ou décombres, & à défaut avec de la craie, de la chaux, de la terre coquillière , &c. On ajoutera à ce mélange trois ou quatre hottées d’herbes de route efpèce; on les brifera ; on y mélera cinq parties de fumier de cheval, de vache , de mouton, &c, quatre parties de cendres ; on remplira la fofle de ce mélange, & on l'élèvera en pyramides au deflus de fon-niveau ; on: mettra par-deflus, filon veut, un peu dé fiente de pigeon, & chaque jour on videra fur ce tas les urines de la nuit, & on y jettera les balayures de la maifon, Tous les deux mois on remuera cette terre, pour renouveller les furfaces; & quatre mois avant la lixiviation , on ceflera d'employer aucune humi- dité, L'appentis doit être garni de paillaflons, pour défendre la terre de la pluie & de l'ardeur du foleil. M. Cornette propole d’avoir dans chaque Communauté, un homme aui feroit chargé de lefliver les terres; la Communauté fourniroit la chau+ dière &z le bois nécellaire pour évaporer. Les terres lefivées pourroient reflervir avec avantage. I] faut , fuivant l’Anteur , y méler quatre parties de chaux éteinte ou de cendres, un peu de crottin de cheval , remettre jé tout dans la fofle, & continuer d’arrofer avec de l'urine, comme avant la SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 8 lixiviation. M. Cornette aflure que ce procédé a été pratiqué avec fuccès. I n'appartient point aux Commiflaires de l’Académie d'apprécier le mérite de ce Mémoire, & d’afligner la place qu'il auroir obrenue dans le Concours , fi les circonftances n’euflent pas obligé M. Cornette de le retirer. Leur témoignage , fur le compte d’un Confrère & d’un ami. Re être fufpect, & ils ne peuvent que s’en rapporter au jugement du Public. MAMA OR AE NET XX IUT Sine ratione , fine fine. Ox propofe de faire pafler , au moyen d’un appareil particulier qu'on a bien de la peine à entendre , même avec le fecours de la figure jointe au Mémoire , la fumée du bois & la vapeur de l'urine en diftil- lation dans des terres difpofées en couche pour former du Salpétre: L’Auteur prétend qu'en trois mois là terre eft imprégnée de Salpètre ; qu'il faut enfuite en former des couches, qu’on laifle repofer encore quelques mois, & qu'on leflive. Il ne dit pas qu'il ait eflayé ce pro- cédé; & le deflin qu'il donne pourroit faire croire qu'il eft inexécutable, au moins de la manière dont il le propofe. D'ailleurs l'idée d'employer l'acide du bois à la fabrication du Salpétre, n’eft pas neuve : elle eft de Glauber. Les Commiflaires ont. donc jugé, qu’à toutes fortes d’égards, ce Mémoire n'avoit aucun dfoit, ni au Prix, ni aux Acceflit, MENT OL IARS ES NT PR TÉL T Nec fpecies fia cuique manet, rerumque novatrix Ex aliis alias reparat Natura figuras. Ovip. Liv. XV. Mét. CEMémoire eft de M. Chevrand , Infpeéteur des Poudres & Saïlpêtres & de M. Gavinet, Commiflaire dans la même partie, demeurans l’un se l'autre à Befançon. Quoiqu'il contienne des détails intéreflans & des expériences bien faites , les Commiflaires de l’Académie n'ont pas jugé , lors du premier Concours, qu'il eût rempli affez completement 86 HISTOIRE DU FRIX PROPOSÉ les vües du Programme , pour avoir des droits au Prix, Depuis , M. Gavinet paroït avoir perdu cet objer de vue, & il n’a rien été adreflé de fa part à l'Académie pour le fecond Concours. M. Chevrand au contraire 2 profité du délai accordé, pour parcourir prefque routes les Provinces de France, dans lefquelles on fabrique du Salpètre ; il a raffemblé un grand nombre d’obfervations & de faits, & il a adreffé au fecond Concours, fous la même devife ,.& fous le N°. 33, un Mémoire qui, rapproché de celui dont on parle ici , a paru digne de partager le fecond Prix. Ces deux Mémoires font imprimés en entier dans la feconde partie de ce Re- cueil. On va effayer de donner une idée du premier; l'Extrait du fecond fe trouvera dans fon ordre, parmi ceux adreflés au fecond Concours. Ce Mémoire eft divifé en treize chapitres. Le premier eft intitulé: Sur.les Principes, & fur ce qu'on doit regarder comme tel; maïs il ne répond point à l'importance de fon titre, & la nature dés principes n’y eft pas fufifamment difcutée. Dans le chapitre fecond, MM. Chevrand & Gavinet expofent leur fentiment fur l'exiftence du nitre dans l'air, & fur la tranfmutation des acides. Pour fixer leur opinion à cet égard , ils ont pris deux paniers contenant chacun un pied cube; ils les ont remplis de terre précé- demment falpétrée, mais qui avoit été bien épuilée par des lavages multipliés ; ils ont mêlé à l’une huit onces d’alun; ils ont laïffé la feconde fans addition , & ils les ont arrofées toutes deux avec un mélange de fang & d’urine. Ces arrofages ont été continués pendant huit mois, après quoi ils les ont ceflés pendant quelque temps; puis ils ont leflivé en jetant les terres dans de l’eau bouillante; ils ont filtré & précipité par une addition de lefive alkaline , & ils ont obtenu par évaporation du mélange fans alun , deux onces fept gros de Salpètre, & de celuiavecalun, deux onces fix gros de Salpêtre , quatre onces de tärtre vitriolé, & du fel marin. De ce que dans cette expérience le mélange dans lequel ils avoient introduit l’alun, n’a pas produit plus de Salpêtre que l’autre, ils concluent que l'acide vitriolique ne fe change pas en acide nitreux. Ils examinent enfuite fi l'acide vitriolique répandu dans l'air, fe méta- morphofe en acide nitreux, Pour cela, ils ont fait conftruire une caifle de bois de la capacité d’un pied cube; ils l'ont remplie de terre falpêtrée épuifée par des lavages, &z ils l'ont recouverte avec une pyramide de canevas , garnie intérieurement d'étoupes imbibées d’alkali fixe : au moyen de cet appareil, l'air ne pouvoit arriver à la terre, qu'après s'être filtré à travers de l’alkali, & s'être dépouillé par conféquent , non feulement d'acide vitriolique , mais encore d'air fixe, d’acide nitreux , & en général de tous les acides qu’il pouvoit contenir. Ils opt arrofé cette terre avec un mélange de fang & d'urine, au moyen d’un entonnoir pratiqué au haut de la pyramide. Les arrofages ont été continués pendant huit mois; ayant enfuite icfivé au bout de quatorze, ils ont obtenu deux onces & un gros de Salpêtre. MM. Chevrand & Gavinet ont effayé de mettre des terres propres à SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 87 fe falpétrer avec des matières animales , dans un matras bien fermé ;. au bout d’un an, ils ont lellivé, & n’ont point obtenu de Salpètre. Ils concluent de cette ingénieufe expérience , que ce n’eft point à Pacide vitriolique de l'air qu'eft due la nitrification des terres. Les Commiflaires ajouteront qu’elle prouve également que l'acide nitreux n'exifte pas tout formé dans l'air; autrement il auroit été arrêté par le filtre alkalifé; & d’une part , les étoupes leflivées auroient donné du Salpètre, tandis que de l’autre le mélange mis en expérience n’en auroit point fourni. MM. Chevrand & Gavinet prétendent avoir remarqué, que dans les grandes chaleurs de l'été, les matières en putréfaction ont une odeur d'acide nitreux; ce qui les porte à croire qu'il fe forme fouvent de l'acide nitreux, qui fe diffipe faute d’avoir rien qui l’arrête & qui le fixe. Après avoir exclu par voie d'expériences l’opinion du nitre aérien, & celle de la transformation de l'acide vitriolique en acide nitreux, MM. Chevrand & Gavinet cherchent à établir , par voie de raifon- nement, que le nitre n’eft pas l'ouvrage de la végétation; & que l'air n'entre pas matériellement dans fa formation , ou au moins qu'il n’y entre que comme l’eau de criftallifation dans les fels. Enfn , dans un troifième chapitre, ils établiffent leur propre fentiment {ur la formation de l'acide nitreux. Les élémens, fuivant eux, s’uniffent difficilement enfemble , & on ne peut parvenir à les combiner que par des moyens particuliers ; fans cela, toute la nature fe coaguleroit , & il n’exifteroit bientôt plus de mouve- ment. Ils préfument qu'il y a dans la formation de l’acide nitreux, une décompofition, une défunion de principes , & une recompofition comme dans la fermentation fpiritueufe , & que c’eft par la fermentation putride que fe fait certe opération ; enfin ils définiffent l'acide nitreux , un com- biné d’air , de feu, & d’une terre fubtile. D’après cette expoñition de leurs principes, MM. Chevrand & Gavinet entrent en matière fur ce qui fait principalement l’objet du Programme; ils déclarent qu'ils n’ont point cherché à découvrir de nouveaux moyens de produire l'acide nitreux : ils font connus , fuivant eux, & on eft für du fuccès en élevant des hangars & en y formant des nitrières; mais ces hangars forment un capital trop confidérable , pour que le Gouvernement puiffe fe charger de leur conftruction : le nombre de particuliers qui feront des éra- blifemens, ne fera jamais très-grand ; la plupart ne feront pas affez inftruits , d’autres n'auront pas des moyens fufhifans; enfin la crainte de fe livrer à une entreprife hafardeufe , arrérera le plus grand nombre. C’eft au furplus dans les environs des villes où abondent les matières propres à la production du Salpétre, que ces établiffémens peuvent avoir le plus de fuccès, & ils donnent en conféquence le plan d’un hangar dirigé vers cet objet. Ce hangar conftruir , ils prefcrivent d’en défoncer le fol de deux pieds, d’y battre de l'argile, & d'y apporter les terres falpêtrées des villes, des granges & des habitations à portée ; de préférer 88 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ fur-tout les moins fableufes , les moins argileufes, & les plus calcaires; de méler avec ces terres toutes les matières fufceptibles de putréfaction, & de former ainf le fol de la nitrière. MM. Chevrand & Gavinet élèvent enfuite fur ce fol de petites couches de fix pieds de large fur toute la longueur du hangar. Pour ménager la circulation de l'air, ils propofent de faire faire dans les tuileries, des faitières routes percées de trous, & d'en ranger une ou plufeurs lignes bout à bout, en fuivant la longueur de la couche. Ces faitières ne coutent que 15 liv. le 5; mais il eft à craindre que les trous qui y feront pratiqués, ne s'obftruent, & qu'on n'obtienne pas par ce moyen une circulation fufhfante d’air. Ils ne donnent que quatre pieds de hauteur aux terres, & ils font terminer la couche en pyramide. Les hangars feront fermés de volets, & on ouvrira le côté du midi pendant le temps froid , &-le côté du nord pendant le temps chaud, A l'égard du choix des matières dont feront compofées les couches, MM. Chevrand & Gavinet ne prefcrivent rien que de connu. Ce font toujours les urines, le fang des boucheries , les boues de rues, la chaux qui fort des ateliers de Tanneurs & de Mégifliers ; la matière folide qui fe trouve au fond des fofles d’aifance, & qui fe coupe à la pelle, & en général les matières fécales très-confommées; du grand fumier de cheval, de mouton & de chèvres; les terres falpétrées des habitations , & à leur défaut , celles qui feront défignées ci-après. Toutes ces matières font à vil prix dans les grandes villes; les urines peuvent fe raffembler aifément dans les cafernes, dans les hôpitaux , dans les maïfons de force , dans les corps de garde , les auberges , &cc. La chaux vive feroit trop chère, &fon effet même eft, jufqu’à un certain point , équivoque ; mais les Tanneurs & les Mégifliers en emploient une grande quantité dans leurs foffes , & ils la rejettent quand elle eft épuifée. Alors elle eft plus propre qu'aucune autre matière à la formation du Salpêtre, à caufe des parties animales qu’elle contient. Ils confeillent , avant d'employer les matières propres à la formation du Salpêtre, de les mettre à putréfier dans des foffes ou baflins deftinés à cet objet; & voici la proportion des mélanges qu'il prefcrivent. ROUES dERTUES RP EN RCE cc ie LA PATES Matières folides des foffes d’aifance . . . . : . . . 2 Chaux des Tanneurs ou Mégifliers. . . . , . . . . 1 Plantes récentes , débris de jardins , autant qu’on pourra s’en procurer. Urine & fang déjà putréfiés & concentrés par l’évaporation à l'air libre , autant qu'il fera néceflaire pour humecter les matières. MM. Chevrand & Gavinet adoptent, pour les arrofages , les pots placés fur la couche, à la manière de M. le Ray de Chaumont; mais au lieu de les faire poreux , ils préfèrent qu'ils foient percés de petits trous ; autrement les pores de la terre fe bouchent en peu de temps, la partie la plus précieufe pour la formation du Salpêtre refte dans le por, & l'eau même ne pénètre plus dans la couche. Ils SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 89 Ils confeillent aufli de faire pénétrer les arrofages dans l’intérieur des couches fous les faîtières. Ils propofent à cet effet d'introduire avec de Longs bâtons qui fe démonteront comme une toife d’Arpenteur , des tuyaux de cuir , femblables à ceux en ufage dans les incendies, lefquels répondront d’une part à une pompe, & de l’autre à une boîte de fer- blanc garnie de trous. Mais MM. Chevrand & Gavinet ne font pas attention que la bourbe & les corps étrangers qui fe dépoferont dans la pompe , empêcheront bientôt le jeu des foupapes, & obftrueront tous les paflages. Au bout de deux années , on coupera les eaux d’arrofages avec moitié d'eau pure, & on ceflera abfolument d’arrofer cinq mois avant de lefliver. MM. Chevrand & Gavinet paflent enfuite aux détails de la conf- truction des hangars , & des dépenfes de route efpèce néceffaires pour l'éta- bliffement d’une nitrière. Ces détaïls ne peuvent être fuivis que dans le Mémoire même. On fe contentera de dire qu'ils font monter le bénéfice à plus de 20 p ?; mais on craint que cette évaluation ne foit trop à l’avan- tage des nitrières. Les Régiffeurs des Poudres, dans l'inftrubtion qu'ils ont publiée, ne la portent pas, à beaucoup près, aufli haut, & il ne feroit pas impoffible que leur évaluation fütmême déjà forcée. Quoiqu'il en foit, MM. Chevrand & Gavinet rapportent un grand nombre d'expériences pour prouver la juftefle de leurs calculs. On va en citer les principales. Pour s'aflurer d’abord du produit des terres falpétrées qui doivent 5 fuivant eux, former le fond de la nitière, ils ont fait un grand nombre d’effais fur des terres prifes dans différens endroits de la Province ; dans chaque expérience ils ont leflivé quatre pieds cubes de terres falpétrées prifes depuis la furface jufqu'à deux pieds de profondeur , lorfque la nature du fol l’a permis. Première Experience. Quatre pieds cubes de terre prife dans une bergerie, ayant trois ans de repos , ont été leflivées fans addition : on a décompofé les fels à bafe terreufe, par de l’alkali; avant de procéder à la criftallifation , on a purgé de fel marin , & on a obtenu deux livres neuf onces de très- bon falpêtre brut. Deuxième Expérience. Quatre pieds cubes de terre d’une autre bergerie , ont donné deux livres quatre onces. Troifième Experience. Quatre pieds cubes de terre de bergeries, qui n’avoient jamais été lefivées , ont rendu trois livres fept onces. M 90 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Quatrième Expérience. Terre de cuverie , même quantité, une livre douze onces.. Cinquième Expérience. Terre de grange, une livre fept onces. Sixième Expérience. Terre d’écuries à bœufs, une partie prife fous la crêche, & l’autre au centre de cette écurie, une livre huit onces. S eptième Experience. Terre prife dans une écurie à chevaux.& bœufs, après deux ans de: repos , ONZE Onces. Huitième. Experience. Terre de bergeries, après quatre ans de repos , trois livres quatre onces. Neuvième Experience. Terre prife dans un cimetière fous des voûtes aérées par des abats-jour trois ‘livres une once. DEN » Dixième Experience. Huit pieds cubes de terre prife dans une voirie abandonnée depuis quatre ans, n'ont rendu qu'un dépôt terreux , dans lequel il n’a pas été pofñlible de diftinguer de fubftance faline. "1 HS Ongiéme Expérience. Quatre pi cubes de terre de hangar , travaillée depuis trois ans, ont rendu dix livres. s Fe Douzième Expérience. La même terre qui, dans l'expérience feptième , avoit été lefivée au bout de deux ans, l'ayant été de nouveau au bout de trois ans, a readu une livre fix onces. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. or T5 reizième Expérience. Terre de bergerie, prife dans une maifon bâtie depuis trois ans, quatorze onces. FE A Quatorzième Expérience. Terre de bergerie, prife dans une maifon bâtie depuis cinq ans , une äivre fix onces. On voit que les terres des expériences 1°, 2°, 3°, 4°, 5° & 6°, formant vingt-quatre pieds cubes de terre , ont rendu douze livres quinze onces ; ce qui donne , pour produit commun , neuf onces deux gros par chaque pied cube ; & MM. Chevrand & Gavinet en concluent que des terres imieux foignées , plus divifées & arrofées à propos , donneront au moins douze onces par pied cube; c’eft d’après cette bafe qu'ils ont établi leurs calculs. Ils concluent encore de ces expériences, qu'il eft avan- tageux de ne lefliver les terres des hangars qu'après trois ans de repos, & ils prouvent que le bénéfice croît dans une proportion beaucoup plus grande que les dépenfes. MM. Chevrand & Gavinet comparent enfuite Le plan d’établiffement qu'ils propofent, avec celui contenu dans l'Inftruétion des Régifleurs, & ils le trouvent beaucoup plus économique & beaucoup plus produétif ; mais on craint qu'ils n'aient forcé le produit, & peut-être diminué‘la dépenfe: ils ne font pas attention d’ailleurs qu'ils ont calculé les frais de conftruétion fur les prix de Franche-Comté, Province où le bois eft commun , tandis que les Régifleurs ont cherché à prendre un prix moyenentre celui des différentes Provinces de France. : Les établiflemens de hangars que propofent MM. Chevrand & Ga- vinet, & dont on vient de rendre compte, ne doivent être établis, fuivant eux, que dans les environs des grandes villes. Quant à la fabri- cation du Salpêtre dans la campagne , ils obfervent que les étables des moutons ou des chevres font les lieux où ce fel fe forme en plus grande abondance. Ils propofent en conféquence, de conftruire dans chaque Communauté un hangar propottionné à la quantité de chevres & de moutons qui appartiennent aux différens particuliers ; ils donnent à ces hangars foixante pieds de long fur vingt-cinq de large; ils les ferment de manière à former des écuries; ils les creufent de deux pieds, & rem- pliffent l'excavation de terres falpétrées des habitations , & paflées à la claie; enfin ïüis prefcrivent de répandre deffus de la paille pour la litière des moutons. Tout particulier feroit obligé de conduire fes troupeaux dans ce hangar, & on formeroit des féparations à claire-voie, pour diftinguer les animaux appartenans à chaque particulier. Quand on voudroit lefMiver les terres, on feroit une féparation au hangar, on placeroit les moutons dans une partie, & les cuveaux dans l'autre. Mi 92 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ MM. Chevrand & Gavinet penfent que les frais de conftruétion des hangars devroient être à la charge du Roi, & le tranfport des matériaux ou des terres à la charge des Communautés. Dans le cas où elles refu-. feroient de faire cet érabliflement pour leur compte, on pourroit auto- rifer tout particulier à le faire en leur lieu & place, & il s'en préfentera d'autant plus aifément, fuivant MM. Chevrand. & Gaviner, qu'ils portent à fix ou fept cents livres le bénéfice que produira chaque éta-- bliflement par année. La Franche-Comté a fourni depuis 1772 jufqu'en 1776, les quantités. de Salpètre ci-après. livres, 1772 Ne MU Ter dioleuele RE 369,046 1773 0e lee letters. (set pes à 366,384 DINIUINENES See 7742 Ne us toie free 359,855 YEAR ÉOE: ciBiRRor bhapan 331,382 1770 es ele ee déeleis ice le 322,376 ESS EELEEEENERES 1,749,043 ANNÉE COMMUNE....... RATE E SHHES RE 3493808 LE Cette Province eft compofée de quatorze villes & de deux mille dix- huit villages; on pourroit donc lefliver cinq cent quatre hangars par année , lefquels , à raïfon de 2250 livres , rendroient 1,134,000 livres de Salpètre , fans compter le produit des quatorze nitrières qu’ils propofent d'établir dans les quatorze villes, qui pourroient rendre dix ou douze milliers chacune. Ce produit feroit proportionnellement beaucoup plus confidérable dans les Provinces où il y a plus de beftiaux. Les derniers chapitres traitent du leffivage , & des fubftances aïkalines qu’on peut employer pour donner une bafe au Salpêtre; MM. Chevrand & Gaviner confeillent le falin.: cette fubftance n’eft autre chofe , du moins d’après l’acceprion qu’on donne au mot falin en Franche- Comté, que le fel de la cendre, qui n’a point été converti en potafle par la calcination. Ils prétendent qu’une mefure de trente livres de cendre , qui coute fix à huit fous en Franche-Comté, peut fournir deux à trois livres d’alkali. Les Commiflaires de l'Académie ont reconnu aifément par l'examen de ce Mémoire , qu'il étoit fait par dés perfonnes inftruites, &. qui réuniflent à des connoiffances de Chimie , celles des détails relatifs à la fabrication du Salpêtre. L'expérience dans laquelle ils ont fileré l'air à travers une diffolution alkaline , pour le dépouiller d'acide vitriolique, eft extrêmement ingénieufe. Quant aux moyens d'exécution que propofent MM. Chevrand & Gavinet , pour les environs des villes , ils ne font point impraticables ; SUR LA FORMATION DU SALPETRE, 3 mais les Commilfaires de l'Académie penfent que la difpoftion des couches, à laquelle ils donnent la préférence , n’eft pas la plus écono- mique, & qu'elle a l'inconvénient de perdre beaucoup de terrein. Quant au projet des hangars, bergeries ou écuries , les Commiffaires: de l'Académie le regardent comme le moins praticable de tous ceux qui ont été propofés. En effet, l'obligation impofée aux particuliers, de conduire tous les jours leurs beftiaux dans une écurie commune , fouvent éloignée de leur habitation , leur feroit bien plus à charge que l'inconvénient de la fouille, qui ne revient que tous les trois ou quatre ans. Enfin les Commiflaires penfent que les produits attribués aux nitrières & aux hangars , écuries & bergeries , font exagérés. Voyez l’Extrait de la feconde paitie de ce Mémoire , fecond Con- cours ,. n°. 33- MSMCONTARE IN XX OX 17 ms Defrudio unius, produffio alterius. CE Mémoire propofe avec beaucoup de raifon, de fubftituer aux voiries des grandes villes, des nitrières dans lefquelles on tranfporteroit les débris de matières végétales & animales qu’on eft obligé de porter au dehors, les vidanges des latrines , les balayures , les boues , &c. Si on joint à ces matières les décombres des bâtimens, qu'on eft également obligé de porter au loin , on verra que les grandes villes peuvent fournir des matériaux riches pour des établiffemens très en grand. C’eft égale- ment l'opinion de l’Auteur du Mémoire n°. 29 , qui a obtenu un Acceflit, mais qui ne s’eft point fait connoitre. Ces réflexions font très-judicieufes fans doute; mais l’Auteur n’en a pas fait une application heureufe à la pratique ; ce qu'il: dit {ur la conftruction des nitrières , fur la forme des bâtimens , fur celle des couches , eft inférieur à prefque tout ce qui a été publié fur cer objet. I} propofe des hangars circulaires, fans faire attention-que cette forme eft la plus chère pour la batifle; il adopte une forme de couche qui tient beaucoup de place : enfin les Commiflaires de l'Académie ont: jugé que ce Mémoire ne remplifloit point les vûes du Programme. EU. NS ir 434 À à _ HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ MR MT OT Rue DC OCIDCIVE Cum Sacerdos viderit in parietibus domus quafi valliculas pallore five rubore deformas & humiliores furperficie reliqua ; egredietur cflium domus , & flatim claudet illam feprem diebus. Lévit. Chap. XIV, ÿ. 37 & 38. L'Aureunr ne regarde pas comme impoflible que le Salpêtre foit une efpèce de moiliffure , de biffus ou de moule, qui croit & qui végète. La graine de cette végétation feroit, dans ce fyftème, répandue dans Var, & préte à fe dépofer dans les couches de terre difpofées favora- blement pour la végétation. L'Expofé de ce fyftême fuffit pour faire fentir combien il eft oppofé à toutes les connoiflances acquifes; & les Commiflaires de l’Académie ne s’arréteront pas à en démontrer la faufleté. L'Auteur obferve que le Salpêtre paroît fe former de préférence dans les fentes des murailles où il y a un courant d’air qui traverfe. Il défireroit qu'il s'établit dans les campagnes des Salpêtrilloniers , comme il exifte des Chiffonniers ; qu'ils couruflent le pays pour raffembler rout ce qu'il feroit poflible de Salpêtre de houflage , & il penfe que les habitans dela campagne s’accoutumeroient à leur en mettre à part, comme on raffemble des chiffons. J Ce Mémoire paroït avoir été fait dans la Touraine , Province où le Salpêtre fe montre de toute part. I] ne contient point d'expériences ,.& Y Auteur n’y préfente que des vûes vagues, & qui ne font point fufhfam- ment arrêtées. Il avoit laiflé à fon Mémoire beaucoup de lacunes , qu'il fe propofoit de remplir, & il a en effet fourni un fupplément pour le fecond Concours , fous le n°. 19; mais les Commiflaires de l’Académie n’ont pas jugé qu'il donnàt à l'Auteur plus de droits au Prix, ni aux Acceflir. ; NUE MO TOR EN ME ET OIL CE Mémoire eft écrit en latin; lAuteur propofe , pour fabriquer du Salpêtre, de prendre des terres grafles, marécageufes , argileufes, &c. «de les placer à l'abri de la pluie, d'y mêler des matières putrefcibles, Il SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. o$ vante beaucoup l'emploi de la terre des taupières, & celle des places où l’on a fait du charbon. Il regarde l'acide nitreux comme une modi- fication de l'acide vitriolique, & il penfe que l'accès d’un air libre eft néceffaire pour opérer cette transformation. Il propofe , d’après ces idées, d'élever des hangars, d'y amafler des terres, de les remuer, &c. Il confeille fur-tout de commencer à opérer au printemps. $ Depuis la publication du Programme, il a formé, par curiofité, un établiffement de ce genre; & en une année, 1l a obtenu cinq quintaux. de très-bon Salpètre. L'Auteur fait enfuite les queftions fuivantes : 1°. La fouille eft un droit du Roi; en. la fupprimant, le Roi foulage fes fujets d’un grand fardeau. Ne feroit-il pas jufte qu'ils contribuaffent aux dépenfes des conftruétions , pour que les vües du Gouvernement fuffent plus tôt remplies ? 2°. Se trouvera-t-il en France des particuliers qui entreprendront à leurs rifques ces établiffemens ? 3°. Ne pourroit-on pas exiger dans chaque Communauté, qu'un certain. nombte de particuliers euflent dans leur grange une certaine quantité de terre propre à fe falpétrer ? Ce Mémoire eft fait par un homme fage & inftruit, mais il ne con- tient rien que de connu; l’Auteur d’ailleurs n’y entre pas dans des détails aflez étendus ; & les Commiflaires ont penfé en conféquence , qu'il ne. pouvoit avoir aucun droit, ni au Prix, ni aux Acceñlir. MÉMOIRE. NX KXXVILT Ex libris colligere quæ prodiderunt auïhores, longè eff periculofum ; rerum ipfarum cognitio vera è rebus ipfis eff. Juctus SCALIGER: L'Aureur annonce avoir répété l'expérience dé M. Pietsch, qui confifte à arrofer une pierre calcaire d'acide vitriolique & d'urine; il a obtenu de la félénite | mais point de falpétre. Il a fait enlever dans des écuries remplies de terres falpètrées , un panier de terre dans la partie la plus haute & la plus sèche , un dans le milieu ,. & un dans la partie bafle & la plus humide. Ces terres ayant été leffivées ; les produits ont été dans les proportions qui fuivent. Terre d'en-haut, 3 parties de Salpétre très-beau. Terre d'en-bas, 1 partie de Salpêtre de mauvaife qualité. 96 HISTOIRE-DU PRIX PROPOSÉ Cependant la partie balle avoit été imbibée d'urine, & la partie haute étoit demeurée sèche. Il a répété cette expérience plufieurs fois, & on peut la regarder , fuivant lui, comme conftanre. De certe expérience & de quelques raifonnemens à l'appui , l’Auteur conclut que le nitre eft tout formé dans la nature; mais fes preuves font des plus foibles; & Glauber, ainfi que Lémery , ont dit à cet égard, avant lui, des chofes beaucoup plus farisfaifanres. k Il prétend enfuite, qu'après avoir jeté fur de l'eau mère de nitre une diflolution de criftaux de foude , & avoir précipité la terre, on obtient par évaporation , non du nitre quadrangulaire , mais de vrai nitre en aiguilles exagones , & que ce Salpêtre eft le même, foit qu'on emploie le fel de foude ou la poraffe. Il en conclut très-fauffement , que le Salpètre eft cout formé à bafe d’alkali fixe dans les eaux mères; qu'il a feulement un excès de terre, dont il faut le débarrafer. Ce qui paroît avoir trompé l’Auteur , c’eft qu'il refte communément dans les eaux mères des Salpêtiiers une quantité confidérable de Salpètre à bafe d’alkali fixe. Quand on décompofe Les eaux mères, & qu’on met à criftallifer , le nitre en aiguilles, comme moins foluble à froid, crif- tallife ie premier; le nitre quadrangulaire au contraire refte dans les eaux, & on ne peut l'obtenir que par une évaporation fubféquente. M. Meyer a annoncé qu’on obtenoit beaucoup de Salpêtre de houf- {age , en enduifant de chaux nouvelle les murs d’une cave humide. L'Auteur a répété fans fuccès cette expérience. Ces différentes réflexions, & d’autres qu’on croit devoir fupprimer ; le ramènent à la formation des nitrières & des hangars pour fabriquer du Salpètre ; mais il ne penfe pas que ce moyen puifle de long-temps fuppléer à la fouille, & il ne croit pas qu’on doive renoncer à ce dernier à À Le D ÉTDÉE moyen de fabriquer du Salpêtre. Son idée au furplus fur létabliffement des nitrières , diffère de tout ce qui a été donné jufqu'ici. Il fuppofe que le terrein fur lequel fe fera l’établiffement, fera en pente douce; il propofe d'y conftruire des hangars de cent vingt pieds de long {ur foixante de large; il y difpofe des claies folides placées les unes au deffus des autres, & les charge chacune d’un pied de terre très- poreufe , telle, par exemple, qu'un mélange de cendres & de briques concafltes. Au lieu de méler du fumier avec ces terres , il les amoncèle hors du hangar fur une efpèce de foffe garnie de glaife, couverte de fagors; & c’eft par-deflus ces fagots que s’entafle le fumier : il prefcrit enfuite d’arrofer abondamment ces fumiers. L'eau , en paffant à trâvers , fe chargera des parties extractives & falines qu'ils contiennent; elle rombeïa dans la foffe , d’où elle fera enfuite reprife avec une pompe pour fervir aux arrofages. EL cft d'avis qu'on charge les villes des érablifflemens des nitrières , parce que la fouille étant une charge publique, le Public doit fupporter Ja charge qui la remplace. 1 prétend que Ja chaux a plufieurs inconvéniens dans la fabrication du F SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 07 du Salpêtre ; qu’elle le blanchit, mais qu’elle lui ôte de la confiftance & du-corps. Il paroît en effet que la chaux a la propriété de blanchir l’eau mère, & de lui faciliter Les moyens de paroïtre fous forme concrète; mais cet inconvémient, qui eft très-grand, en ce qu'il fournit aux Sal- pêtriers un moyen de livrer du Salpêtre à bafe terreufe pour du Salpêtre à bafe d’alkali fixe, n’en feroit peut-être pas un pour un établiffement en grand qui feroit bien foigné. L’Auteur rappelle enfuire un projet qu'il-avoit propofé , pour tirer en grand du Salpêtre des végétaux : ce projet confilte à femer en plein champ des plantes nitreufes, principalement le tournefol ; & il pré- tend qu'un arpent de terre traité de cette façon , peut donner une grande quantité de Salpêtre. Les Commiffaires de l’Académie ont été informés des épreuves que la Régie des Poudres à fait faire dans différentes Provinces de France, pour conftater ce qu'on doit attendre de la culture des plantes nitreufes. I en eft réfulté, que le tournefol ne donne de Salpètre en abondance, qu'autant qu'il a été élevé dans un champ qui avoit été bien fumé; en forte que la végétation eft plutôt un moyen d'extraire le Salpêtre des terres , que de le former. U autre moyen de faire du Salpètre, que l’Auteur affure avoir em- ployé avec fuccès, confifte à délayer du fumier dans de l’eau de mare ou autre , à y ajouter un mélange d’une partie de cendre , d’une partie de chaux vive, & d’une partie de chaux éteinte, à gâcher le tout, & à en faire une efpèce de mur , que l’on élève par le moyen d’une claie qui le foutient. On arrofe ce mur en mettant deffus des pots de jardin, qu’on remplit d’eau de fumier; cette eau fe filtre & pénètre dans toute la mañle. 2 Ce Mémoire eft bien fait; mais les Commiffaires de l’Académie n’ont pas jugé qu'il contint affez de chofes neuves pour avoir rempli le vœu du Programme. NAN O I BAPE NE XX X'VPEE Dimidium fzëti, qui bene cæpit, habet. CE Mémoire eft fort court ; mais comme il n’eft écrit ni en françois ni en latin, il eft hors des termes du Programme , & n’a pu concourir pour le Pux. N 98 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ CEPPERE FPE THE EE PURSEZ SIP VE CPPRENEPES PET PRIS EEE EPA R IEEE VEREREEEP TEE NUE RENTE JUGEMENT de l’Académie Royale des Sciences, fur les trente-huit Mémoires admis au premier Concours. Lzs Commiffaires nommés par l’Académie Royale des Sciences, confor- mémentaux ordres du Roi , pour le jugement du Prix relatif à la fabrication du Salpêtre, & pour les épreuves ordonnées par Sa Majefté , après avoir fait un examen approfondi des trente-huit Mémoires admis au Concours, ont reconnu que, quoique plufeurs de ces Mémoires foient propres à répandre des lumières fur la théorie de la fabrication du Salpêtre, & puiflent même, à quelques égards, donner lieu à des applications utiles dans la pratique , il n’en eft aucun cependant qui contienne rien d’aflez neuf, ni qui remplifle aflez complettement les vües du Programme, pour avoir droit au Prix. On ne peut douter que la briéveté du temps accordé aux Concurrens , & l'obligation qui leur a été impofée de remettre leurs Mémoires avant l’époque du premier Avril 1777 , ne foit une des princi- pales caufes des imperfections qu’on-y remarque : plufeurs des Concurrens s’en fontexpliqués; & les Commiflaires de l’Académie ont la certitude que nombre de perfonnes très-inftruites , & capables d’infpirer de la confiance, auroient concouru , file délai eût été moins court. Dans ces circonftances, l'Académie regarde comme indifpenfable, 1°. de différer la proclamation du Prix; 2°. d'annoncer ce nouveau délai dès la rentrée publique de la Saint-Martin prochaine. Enfin elle eft perfuadée qu'il eft impollible d’efpérer un travail un peu complet fur la formation du Salpêtre, fi l'on ne fe dérermine à accorder au moins trois années aux Concurrens; ce qui remettroit la proclamation du Prix à la Saint-Martin de 1780 au plus tôt. Cependant, avant de faire aucune annonce au Public , l'Académie a défiré de connoître les intentions du Miniftre , & elle a arrêté de lui repré- fenter que ce nouveau délai, en procurant aux Concurrens les moyens de multiplier les expériences, donnera lieu à de nouvelles dépenfes. Qu'il feroit en conféquence infiniment intéreflant, qu’en différant la pro- clamation du Prix,*on l’augmentàt, qu'il füt porté à dix ou douze mille francs au lieu de fix, & qu’il y fût joint une fomme de quatre mille livres à diftribuer en Accefñlit. Le délai que l’Académie juge néceffaire, apportera fans doute quelque retard à l'exécution des vües bienfaifantes du Roi, & au défir qu'il a témoigné de foulager fes fujets de la gêne de la fouille , & des recherches qui fe font chez les Particuliers; mais la marche de l’Adminiftration en devenant plus lente, en fera plus aflurée, & elle ne parviendra que plus certainement à fon but. CE Réfulrat ayant été unanimement arrêté , les Com- miflures furent chargés, par délibération du 12 Juin 1777, SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 09 de faire, auprès du Miniftre , toutes les démarches nécefaires pour obtenir que la fomme deftinée au Prix fût doublée, & que l'époque de la proclamation fût différée. M. d'Ormeflon, Confeiller d'État & Intendant des Fi- nances, avec lequel ils en conférèrent, voulut bien fe charger de preflentir le Miniftre, & peu de jours après les Com- miflaires furent convoqués chez M. le Contrôleur Général. Ils lui rendirent un compte fommaire des travaux des Concur- rens ; de ceux dont ils s’étoient occupés eux-mêmes ; de la néceflité d’un délai plus long ; de celle d'une augmentation dans la fomme deftinée au Prix. Ils trouvèrent le Miniftre dans la difpofition de propofer au Roi tout ce qu'ils juge- roient de plus utile au bien de fon fervice; il leur fut donné connoïflance des intentions du Roi quelques jours après, &, pour sy conformer, ils rédigèrent le Programme qui fuit. I fut imprimé & publié à la rentrée de l'Académie, dans fa féance de la Saint-Martin de l'année 1777. SECOND PROGRAMME, Publié par l’Académie Royale des Sciences , pour la remife de la proclamation du Prix fur la formation & la fabrication du Salpétre. L'Acantmir,en annonçant, pour la Séance publique de Pâques 1778, la proclamation d’un Prix extraordinaire fur le Salpêtre, & en exigeant que les Mémoires lui fuflent adreffés avant le premier Avril 1777, n’avoit confulté que fon-empreflement à répondre aux vües bienfaifantes du Roi, & au défir qu'il a de délivrer , le plus tôt poflible, fes fujets, de la gêne de la fouille que les Salpétriers font autorifés à faire chez les Par- ticuliers , & des abus auxquels elle peut donner lieu. L'examen des Mémoires qui ont été adreflés à l’Académie , n’a pas tardé à lui faire appercevoir que le délai accordé aux Concurrens étoit beaucoup trop court, relativement à l'importance de l’objet, & à la nature des expériences qu'il exige : il eft arrivé de là , que dans le grand nombre de Mémoires qui ont été admis au Concours, quoiqu'il s'en foit trouvé plufeurs qui paroiïlent avoir été rédigés par de wès- N ï 100 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ habiles Ckimiftes , il n’y en a aucun cependant qui contienne rien d’affez. neuf , qui préfente des expériences aflez décifives & aflez completres ,, enfin qui renferme des applications aflez heureufes à la pratique, pous: avoir des droits au Prix. Dans ces circonftances', l'Acadéimie fe voit forcée de différer la pro- clamation du Prix, & elle croit devoir en reculer l’époque aflez loin, pour n’êrre plus dans le cas. d'accorder de nouveaux délais, Il auroit été à défirer fans doute, qu’en faifant cette annonce au Public, il lui eut été poñlible d'aider les Concurrens dës conmoiffances acquifes’ depuis la publication de fon Programme, en 1775; mais comme la: plus grande partie des notions qu’elle pourroit donner à cer égard, ne. pourroient qu'être puifées dans les Mémoires mêmes admis au Concours, ou au moins qu'elles ne pourroient manquer d’avoir des relations très- prochaines avec les expériences contenues dans ces Mémoires , elle a- refpeété le droit de propriété des Auteurs, & elle s'impofe en confé- quence le filence le plus abfolu {ur cet objet, jufqu'à la proclamation. du Prix. L'Académie fe borne donc à annoncer pour le préfent, que le Prix qui devoit être proclamé à la Séance publique de Pâques 1778, fera différé jufqu’à celle de la Saint-Martin 1782; & elle propofe de nouveau pour cette époque , de » trouver les moyens les plus prompts & les. » plus économiques de procurer en France une production & une récolte » de Salpétre plus abondantes que celles qu’on obrient préfentement ; &. fur-tout qui puiflent difpenfer des recherches que les Salpêrriers font autorifés à faire dans les maifons des Particuliers «. L'Académie prévient de nouveau, qu’elle fe propofe , conformément- aux.intentions du Roi, de répéter généralement routes les expériences qui feront indiquées par les Concurrens : elle exige donc de ceux qui lui enverront des Mémoires , de décrire leurs: procédés avec aflez de clarté & de précifion, pour qu’elle puiffe les vérifier fans aucune incer- titude; elle déclare aufli, que le Prix fera adjugé à celui qui aura indiqué - le. procédé le plus avantageux pour la promptitude, l'économie & l'abondance du produit, indépendamment de toute autre confidération; & que, quand même ce procédé ne réfulreroit que d’une application heureufe des obfervations & des pratiques déjà connues, il {era préféré: aux plus belles découvertes , dont on ne pourroit tirer la même utilité. Le Roi, fur les-repréfentations qui lui ont été faites par l’Académie, a bien vouiu doubler le Prix; ainfi, il fera de Huir Mixte LIVRES, au lieu dequarTre; & ia fomme à répartir en Acceflit, fera de quaTRe; MILLE LIVRES, au lieu de peux. Cette dernière fomme fera diftribuée en un ou plufieurs Acceflit, fuivant le nombre des: Mémoires qui: paroïcront avoir droir à des récompenfes , &.fuivant l’objet des dépenfes utiles qui auront été faites par les Concurrens relativement auPrix. Commel vérification que PAcadémie: doit faire de toutes les expé- riences indiquées par les Concurrens , exigera néceflairement un temps affez confidérable, les Mémoires ne feront admis pour le Con- m È Æ SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 1o1 cours, que jufqu'au premier Janvier 17813 mais l’Académie recevra jufqu'au premier Avril 1782, les fupplémens & éclairciflemens que voudront envoyer les Auteurs des Mémoires qui lui feront parvenus dans le temps prefcrit; avec cette condition cependant, que toutes les expériences comprifes dans ces fupplémens , feront regardées comme non avenues, fi elles font de nature à ne pouvois être répétées avant l’époque fixée pour la proclamation du Prix, c’eft-à-dire, avant ia Séance publique de la Saint-Martin 1782. Les Savans & les Artiftes de toutes les Narions, & même les Affociés étrangers de l’Académie , font invités à concourir; les feuls Académiciens régnicoles en font exclus. Les Mémoires feront écrits lifiblement, en françois ou en latin. Les Auteurs. ne mettront point leur nom à leurs Ouvrages, mais feulement une Sentence ou Devife; ils pourront, s'ils le veulent, attacher à leur Mémoire un billet féparé & cacheté par eux, qui con- tiendra , avec la même Sentence ou Devife, leurs noms, leurs qualités & leur adrefle : ce billet ne fera ouvert, fans le confentement de l'Auteur , qu'au cas que la Pièce ait remporté le Prix, ou un des Acceïlit. Les Ouvrages deftinés pour le Concours, feront adreflés à Paris au Sécrétaire perpétuel de l’Académie; & fi c'eft par la Pofte, avec une double enveloppe, à l'adrefle de M. Amelor, Secrétaire d'Etat, ayant le département de l'Académie. Dans le cas où les Auteurs pré- féreroient de faire remettre directement leur Ouvrage entre les mains du Secrétaire perpétuel de l'Académie, il en donnera fon récépiflé,. où feront marqués la Sentence de lOuvrage & fon numéro, felon l'ordre ou le temps dans lequel il aura été recu. S'il y a.un récépiffé du Secrétaire , pour la Pièce qui aura remporté le Prix, le Trélorier de l'Académie délivrera la fomme du Prix à celui. qui lui rapportera ce récépiflé , fans aucune formalité. S'il n’y a pas de récépiflé du Secrétaire , le Tréforier ne délivrera le Prix qu'à l’Auteur même, qui fe fera connoître , ou au Porteur d’une procuration de fa part. L'AcADËMIE, en terminant ce Programme, croit devoir indiquer au Public quelques obfervarions nouvelles & peu connues fur l'exiftence : du Salpètre naturel en France. M. Peronnet, Ingénieur des Ponts & Chauflées , préfenta, en 1767 , dans une de fes Séances , deux échan- tillons d’une pierre calcaire poreufe, provenant de la carrière d’Augne. en Touraine; ces pierres, confervées dans un tiroir , s’éroient naturel lement couvertes de Salpêtre en efflorefcence ; & M. Cadet ,. qui en: a fait l'examen par ordre de l'Académie, a reconnu qu’indépendam- ment de la-perite portion de Salpêrre à bafe d’alkali fixe végéral qu’elles contenoient , on y trouvoit encore , par la lixiviation & par l'évaporz- on ,. du nitre à bafe de terre calcaire, & du nitre à bafe de terre du: fel de Sedlitz ou d'Ep{om. Depuis cette époque , M. le Duc de là Roche. Foucault à fait une autre découverte importante, plus décifive que celle: 102 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ de M. Peronñer, fur l’exiftence du Salpêtre naturel, & qui a été annoncée, depuis plus d’un an, par M. Bucquet, dans fes Leçons de Chimie publiques & particulières : il réfulre des obfervations de M. le Duc de la Roche- foucault, & de celles qui ont été faites, d'après fes indications, par MM. Clouer & Lavoifier, Régifleurs des Poudres & Salpêrres, 1°. que les montagnes de craie des environs de la Roche-Guyon , Moufleau , &c. contiennent fouvent une quantité notable de Salpêtre | dans le voifinage des furfaces expofées à l'air : 2°. qu'il ne paroït pas en exifter , du moins en quantité fenfble , dans les parties de la montagne, qui font abfo- lument intérieures, & qui n’ont point de communication avec l'air: 3°. que ce Salpêtre eft à bafe calcaire, dans tous les lieux éloignés des habitations , tandis qu'il eft à bafe d'alkah végétal , & fe montre fous forme de petits criftaux à la furface de la craie , dans le voifinage des lieux habités. MM. Clouer & Lavoiler ont conftaté l’exiftence de femblables mon- tagnes, dans différentes parties de la France, notamment aux environs de Dreux en Normandie, à Saint-Avertin près Tours, & dans plufieurs endroits d’un côteau fort étendu quirègne depuis Toursjufqu’àa Saumur, &c. Une pierre tendre & poreufe , une expoftion favorable , des rochers difpofés en faillie, qui forment un abri contre les injures de l'air, font les circonftances les plus avantageufes à la formation de ce Salpétre ; & il n’eft pas rare, lorfqu'’on réunit toutes ces circonftances , & fur-tout dans le voifinage des habitations creufées dans la craie, ou dans le roc, de trouver des terres qui , traitées avec de l’alkali fixe en quantité {ufh- fante, donnent jufqu'à trois livres de Salpêtre par quintal. Ces nitrières naturelles ont échappé, jufqu'à ce jour , aux recherches des Salpêtriers , par la raifon que le Salpètre y eft prefque toujours à bafe terreufe , qu'il faut le traiter avec de l’alkali pour le transformer en vrai Salpêtre, queles Salpêrriers en ignorent la méthode, & qu'ils croient mieux trouver leur compte à traiter celui qui fe forme dans les endroits ha- birés, & qui y eft naturellement , au moins pour une portion aflez confidérable , à bafe d’alkali fixe. On fent aflez de quelle importance cer objer peut être pour les Concurrens : en effet il eft probable , d’après les relations des Voyageurs, que le Salpêtre, qui vient en fi grande abondance de l'Inde , fe forme naturellement dans les terres ; il feroit donc pollible que la France renfermät les mêmes richefles dans fon fein. M. le Duc de la Rochefoucault a encore conftaté, que les craies des environs de la Roche-Guyon , à quelque pointqu’elles aient étédépouillées, par le lavage, du Salpêtre qu’elles contenoient , étoient fufceptibles de fe falpétrer de nouveau d’elles-mêmes , fans addition , & par la fimple expolition à l'air dans un lieu abrité. L'Académie, en annonçant ces découvertes aux Concurrens , invite M. le Duc de la Rochefoucaulr, MM. Clouet & Lavoifier, à publier inceflamment le travail qu'ils ont annoncé fur cet objet; elle renvoie pour le furplus à fon Programme de 1775 , & aux différens Ouvrages qui ont été publiés depuis fur cet objet. 4 SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 103 EXTRAIT des vingt-huit Mémorres admis au fecond Concours. ME M O L R'BraNuE Experimentis & arte cognitio certior. L'Avrrur divife fon Ouvrage en huit Chapitres. Il compare , dans le premier, l’analyfe des fubftances végétales & animales faite par le feu , avec celle qui s'opère par la putréfaétion , & qu'il nomme fermentation alkalefcente. Ce plan étoit bon, mais il ne l’a qu’ébauché. Il rappelle à peu près- les connoiffances générales qu'on a fur l’analyfe des végéraux & des animaux, par la diftillation à la cornue , & il fe borne à rapporter l'expérience fuivante. Il a mis dans une cornue de verre , à laquelle étoit adapté un récipient luté avec du lut gras, quatre livres de viande hachée , qui commençoit à répandre de l'odeur. En quatre mois il a paflé peu à peu trois gros d’alkali volatil, qui ne faifoit point d’effervefcence avec les acides. L'huile qu’on retire des végétaux ou des animaux par la diftillation ; fe détruit par la putréfaétion ; en général tous les principes des corps fe défuniflent dans cette opération, & c’eft le-moyen que la Nature em- ploie pour retirer les principes des végétaux & des animaux, pour les faire rentrer dans le réfervoir général, & pour les faire pafler enfuite dans d’autres combinaifons. L'Auteur traite dans le Chapitre fecond , des fubftances dont le mé- lange eft propre à accélérer la putréfaction ; & il indique d’abord les serres calcaires , 1°. parce qu’elles contiennent beaucoup d’eau dans leur compofition , & que cette eau peut favorifer la putréfaétion; 2°. parce qu'elles peuvent attirer des miafmes putrides. Pour fe convaincre de cetre vérité , il a répété une expérience de’ M. Macbride; il a mis une égale quantité de chair de bœuf dans deux vafes , avec égale quantité d’eau, & il a ajouté de la craie à l’un de ces deux mélanges : ce dernier amanifefté l'odeur putride , quatre heures avan Pautre, Une circonftance remarquable, ceft que la chaux produir un cfec: 104 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ contraire; elle fufpend les progrès de la putréfaétion: Ayant fair lemême mélange que ci-deflus, & ayant ajouté de la chaux au lieu de craie, la chair de bœuf s’eft difloute complettement dans l’efpace de huit jours; mais pendant un mois l'odeur putride ne s’eft point manifeftée, L’Auteur n’en conclut pas que la chaux doive être bannie des nitrières, mais qu'elle doit étre employée en petites dofes. Il confeille d’en intro- duire dans les mélanges, dès qu'on commence la couche, & d’en ajouter un fixième de la quantité primitivement employée , lorfque la putréfaction eft à fon plus haut degré. Dans le Chapitre troifième , l’Auteur rapporte les expériences qu’il a faires {ur la formation du nitre. NO 11 à fait un mélange des matières fuivantes. Marne grife faifant effervefcence avec les acides. . . 18 pieds cubes. Tuf calcaire faifant effervefcence avec les acides. CRU AVE IVENLEE MN PARIS AIENENITS Suietderchémmeetdercuiine MeV MENCRNT Bourache & viperine, crues fur des murs, berle & becabungas piléestauttmortes, 1e MAN e CRREN Fienterdetpigeons eee. DO Re SRE Fientedefpometdi#fiqu au os or Fumer deP mouton. MMM MEME Menuespailest Uno DE bte Me men Li Lea OR æ æ C0 Mort di. HelEsetess cle ei be ismpieds qubes Vitriol de mars employé en diffolution avec de Vurine , comme il va être expofé 14 . . . . . . 3 livres. RE ce Le tout a été mis dans une grande caïfle de bois, abritée de la pluie; elle étoit percée de trous d’un pouce de diamètre , efpacés à huit pouces les uns des autres. L'intérieur éroit garni de menues baguettes & de paille , pour empêcher la terre de s’écouler par les trous. Ces différens matériaux ont été mélés enfemble, à l'exception des plantes & de la moitié de la chaux qui a été réfervée. On a formé au fond de la caïffe , un lit du quart de ce mélange; on l’a arrofé d’urine putréfiée , dans laquelle on avoit fait difloudre du vitriol. On à mis deffus le quart des plantes pilées, qu’on a faupoudré de chaux; on a ajouté un fecond quart de terre mélangée, qu'on à également arrofé avec de l'urine , dans laquelle on avoit fait difloudre du vitriol; puis on a ajouté par-deffus une couche de plantes pilées, & ainfi de fuite : on a terminé par une couche de plantes pilées, faupoudrée de chaux ; on a arrofé le tout pendant fix mois, de temps en temps, avec de urine purréfiée. Au bout de quinze jours, le mélange avoit une odeur de fumier ; il sen exhaloir de lalkali volatil, & ce dégage- ent a augmenté pendant trois femaines, L'opération a été commencée le 15 Septembre ; ce n’eft qu'au 15 Mars qu'on a remué pour la première w” SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ro; première fois le mélange. A cette époque on a vidé la caifle & on a mélé la terre à la bèche. Les plantes éroient déjà détruites par la putré- faction ; on en appercevoit à peine quelques veftiges. On a ajouté À la totalité du mélange fix pieds cubes de cendre , & une demi- livre de potafé ; on a remis le tout dans la caifle jufqu'au 1$ Mai, c’eft-à-dire , pendant deux mois, en arrôfant d'urine putréfiée de quinze jours en quinze jours. Le 15 Mai, on a remué de nouveau à la bèche; on a faupoudré ce mélange avec un pied cube de chaux en poudre; on la remis dans la caiffe jufqu’à la fin de Juin, arrofant plus fouvent, à caufe de la chaleur qui accéléroit l’évaporation ; on a leflivé au bout de dix-neuf mois. On a formé une femblable couche le 29 Octobre 1775, & on Fa lefivée le premier Décembre 1776, c’eft-à-dire, au bout de treize mois : les circonftances éroient les mêmes , à l’exception qu’on n’a point ajouté de vitriol. On a retiré de la couche entretenue pendant dix-neuf mois avec addition de viriol: . livres. onces. Salpètre très-pur & très-blanc. . . . . . : 6 4 SAIDELe MODS PUE Len Le elle lette 10 HOTAL -Vehare > ei tlellet ee iG 14 On a retiré de la couche entretenue pendant treize mois , fans vitriol: : : eh À livres, onces. gros. Salpêtre bien criftallifé , très-pur . . . . . 7 4 4 SIDE ITOINS put ee Lee lire ele 2 4 MIOTALE MNT U CERN en eue 7 Ainfi le vitriol nuit plus qu'il ne fert dans la formation du Salpétre. Les cinquante-cinq pieds cubes de mélange s'étant affaiflés , on ne peut guère compter que fur quarante environ , lors du leflivage; ainfi c'eft à peu près trois onces de Salpêtre par pied cube , ce qui eft beaucoup pour un fi court intervalle de temps. L’Auteur fe perfuade qu'il auroit obtenu plus de Salpêtre, s'il avoit donné un accès plus libre à l'air ; il préfume également qu'on accéléreroit beaucoup la nitrification , en employaht des matières dont la putréfaétion auroit été commencée dans des foffes. On peut objeéter ici, que l’Auteur ayant employé dans fon mélange des plantes nitreufes , il refte de l'incertitude fur l'origine du Salpêrre qu'il a obtenu , & on ne voit pas clairement s’il éroit tout formé dans les matériaux qu'il a employés, ou s'il eft le produit de la putréfaction, O 106 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Les chapitres 4 & $ contiennent des differtations théoriques fur la: nature de l’acide nitreux , dont les Commiflaires fe difpenferont de donner le détail. Dans le chapitre 6, l’Auteur rapporte quelques expériences, dont l'objet eft de prouver que la formation de lacide nitreux n’eft aucune- ment due à la transformation de l'acide vitriolique, ni à celle d'aucun autre acide. Il s’eft confirmé dans fon opinion par l’expérience fuivante. Il à pris trois tonneaux fraîchement vides d'huile de navette; il a mis dans chacun trente-deux pintes d'urine, huit livres de chaux vive, & quinze livres de bourrache bien écrafée. Il à ajouté dans l’un de ces tonneaux deux livres de fel de Glauber , & dans le fecond deux livres de fel marin; il n'a rien ajouté dans le troifième. Ces mélanges font reftés pendant quinze mois expofës à l'air, à l'abri de la pluie. La putréfaction set établie; il y a eu dégagement d’alkali volatil: mais il n'y a eu aucune différence apparente dans la marche de l'opération , fi ce n’eft que l'évaporation a été un peu plus forte dans le tonneau où il n’y avoit point eu de fel ajouté. Au bout de quinze mois, voulant examiner les fels par évaporation , il commença par ajouter à la liqueur huit onces d’alkali fixe, qui dégagèrent de l’alkali volatil ; il paffa le tout à travers un filtre de cendres , & fit évaporer; & il obtint: Du mélange fans addition de fels. s è livre. onces, gros. INitre pH Meet Mc -iieile de ce Re 18 2 Sellmanns Da PE) RTE 3 4 TartreNittiOlE ST EIRE 2 > £ 6 Du mélange avec addition de fel de Glauber. INR IR ono CNT MAR CE rL ER Li AIME 16 7 SOLAR NE MERE LS EE PNPNT TP EIRE 4 5 SOCCER RER EU oo NUE 19 4. MaRtTenVItrIOlE, 2e ONE EEE ï $ Du mélange avec addition de fel marin. INITEC RUES OR EE PR RENTE, 1$ 6 SEL Man MR AURA PANENTR PSE RE RARES 1$ sPattree VATICAN SRE NOTERN SERRES, » 4 On voit que la quantité de nitre a été plus grande dans l'expérience: où l’on n’a employé aucuns fels , que dans les deux autres. Mais une circonftance que les Commiflaires de l’Académie ne peuvent expliquer, & qui leur fait craindre qu'il ne fe foir glifié quelque erreur. dans cette expérience, c’eft que l’Auteur annonce avoir obtenu plus d’eau mère dans l'expérience où il a employé le fel de Glauber, que dans celles de comparaifon, Gerréfultat feroit inexplicable ; car l’eau SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 107 inère & le fel de Glauber fe décompofent mutuellement; donc il ne peut y avoir d’eau mère dans un mélange où il y a du fel de Glauber non décompofé. D'ailleurs on ne voit pas ce que font devenus, dans cette expérience , les fels que contient naturellement Purine. L’Auteur rapporte dans ce même chapitre l’expérience fuivante, dont on peut tirer des conféquences intéreffantes. Il a femé de la graine de tournefol , 1°. dans {on jardin, 2°. dans fix pots remplis de terre. Les tournefols femés en pleine terre, ont été abandonnés à eux-mêmes ; de ceux femés dans les fix pots, moitié a été arrofée avec de l’eau légèrement nitreufe ; ceux des trois autres pots ont été arrofés avec de l’eau de fontaine. Les tournefols arrofés avec du nitre, fe {ont trouvés en contenir dans les feuilles & dans les tiges; il y a trouvé en outre un peu de fel effentiel, & de l’eau mère. Ceux arrofés avec de l’eau pure, ne contenoient que du {el effentiel , & un peu d’eau mère; enfin ceux crus en pleine terre ont donné du nitre, mais moins que ceux arrofés avec de l’eau nitreufe. Ces réfultars font affez conformes à ceux qu'ont obtenus les Régiffeurs des Poudres : ils ont fait femer & cultiver dans une bonne terre bien fumée , mais en plein champ, des tournefols, puis les ayant fait couper à maturité , il ne leur a pas été pollible d'en retirer un feul atome de Salpêtre. Cette expérience a été faite à Glatigny ; elle a été répétée avec D en Alface par M. Nadal & par M. Comard; & il en eft réfulré que les tournefols ne contenoient de nitre, qu’autant qu’ils avoient pris croiffance dans une terre nitreufe. Le chapitre 8 a pour objet l'application de la théorie à la pratique. L'Auteur confeille d'établir des hangars dans les villes , de leur donner quatre-vingt pieds de long & trente de large, & d'y établir cinquante couches de Fa pieds de long fur quatre de largeur, avec le plus de hauteur qu'il fera poflible. Les fenêtres doivent être garnies de volets percés pour donner de l'air, ou en ôter à volonté. Il admet des folles à putréfaétion | & des réfervoits d’eau putride. Il propofe de voûter le deffous du hangar , d'y conftruire une cave pour avoir une feconde nitrière ; mais il ne fait pas attention que de pareilles conftruc- tions feroient extrémement chères, & que de bénéfice ne pourroit jamais indemnifer des dépenfes. Il forme également dans cette partie fouterraine , des couches qui feront, à ce qu'il prétend , plus produc- rives que les premières, à caufe de l'égalité d'humidité & de tempéra- ture : elles demanderont d’ailleurs moins de foin & d’arrofage. Il penfe qu'on pourra leffiver ces terres tous les deux ans. A l'égard des Communautés de campagne , il propofe d’y conftruire de petits hangars , de publier des Inftructions fimples par demandes & par réponfes , pour apprendre à les gouverner, & d’en charger principalement les Maîtres d'école , à moins qu'on ne préfère d’autorifer is Communautés à vendre aux Salpétriers ordinaires le droit de lefliver es terres. O i 08 HISTOIRE DU PRIX PROPOSE L'Auteur traite dans le même chapitre , de l'emplacement des han= gars, du choix des matériaux propres à la formation du Salpétre, de la formation des couches, de leur conduite, & des arrofemens. Sur tous ces objets, il n’a fait qu’extraire ce qui fe trouve dans le Recueil. publié par l'Académie , & dans l'Inftruétion des Régiffeurs des Poudres. Quoique ce Mémoire contienne quelques expériences intéreffantes , comme leur réfultat ajoute peu aux connoiffances: acquifes , les Com- millaires de l'Académie ont jugé qu’il ne pouvoit avoir aucun droit, ni au. Prix, ni même à un Accellit. DRE PR ALAN ELA APR DES RO QUE LE PRES PRNEMESRRERC CEE EEE NEIL EE DREEREN TON SRE EN LME D MÉMOIRES N ILE Félix qui, populi folamen, votaque Regis , Artis fubfidio , conciliare valer! L'Acan£mre avoir annoncé dans fon Progtamme, qu’elle envifageroir moins les découvertes importantes, les fpeculations ingénieufes , que le procédé le plus fimple pour fabriquer du Salpêtre, pourvu qu'il fät conflaté par des expériences , & quand même il réfulteroit uniquement. de l’application heureufe de pratiques & d’obfervarions déjà connues. L’Auteur part de cer énoncé, &-au lieu de s'occuper de recherches phyfiques fur la produétion du Salpêtre , il n'envifage au-contraire la; queftion que du côté feulement qui intéreffe l'Adminiftration. Il annonce. dans fon introduction, que par la méthode qu’il.va propofer , on pourra. obtenir en France une récolte de Salpêtre de plus de dix-huit millions: de livres, & un bénéfice pécuniaire de vingt-deux millions. Il entre enfuite en matière, & donne des idées fort juftes fur la nature du nitre ou Salpêtre. H établit la diftinction des quatre efpèces- de nitre; le nitre fexangulaire ou à bafe d’alkah végétal; le nitre qua- drangulaire ou à bafe d’alkali minéral; le nitre ammoniacal ou à bafe. d’alkali volatil; le nitre à bafe rerreufe ou l’eau mère. Quelques Chimiftes ont regardé l’acide vitriolique comme l'acide univerfel, & ils fe font perfuadés que tous les autres n’en étoient que. des modifications..Ils fe font appuyés fur un fait, dont on a depuis reconnu la fauffeté. On a imbibé des linges d’alkali fixe, on les à. expofés à l'air : on a prétendu que l’alkali avoit été neutralifé, & qu’en les lefivant on avoit obtenu du tartre vitriolé. L’Auteur du Mémoire. annonce que l'expérience a été répétée au dôme des Invalides ; que le: fel qu'on à obtenu n’étoit point vitriolique, & qu'il ne donnoit point de foufre par {a combinaifon avec le phlogiftique : il ne-regarde point en conféquence l'acide vitriolique, ni comme l'acide primitif, ni comme l'acide univerfel : il fait voir qu'il n’eft pas même le plus abondamment Lx, SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 109 répandu dans la Nature; & que l'acide marin , par exemple, s’y trouve en beaucoup plus grande abondance. Il regarde comme äll@oire l'expérience de M. Pietfch, par laquelle il prétend prouver la converfion de lacide vitrioliqne en acide nitreux. 11 l’a répétée fur de la terre de cave qu'il avoit imbibée d'acide vitriolique, & avec laquelle il avoit fait un mélange de bourre & de paille. Cette terre lefivée au bout de deux mois , n’a donné que de la félénite , du fel am- moniacal vitriolique , & du tartre vitriolé , tandis que la terre de la cave, lefivée fans aucune autre préparation , donnoit une quantité affez con- fidérable de Salpétre. Quoique les conféquences de l’Auteur paroiflent en général très-vraies dans l’état actuel des connoïflances fur cet objet, fon expérience n’en eft pas plus concluante, parce qu'il eft tout fimple que l'addition d’acide vitriolique ait détruit le Salpêtre qui pouvoit être tout formé dans la terre de fa cave , & qu’un intervalle de deux mois n'ait pas été fuffifant pour opérer une formation nouvelle. L'expérience n'auroit été probante , qu’autant qu'on auroit employé de la terre neuve de part & d'autre, & fait en forte que toutes les circonftances fuffent égales , à la différence feulement que dans l’un des deux mélanges on eût ajouté de l'acide vitriolique, & qu’on s’en feroit abftenu dans l’autre, C'eft ce qu'ont fait les Commiflaires de l’Académie, fous différentes formes, au fauxbourg St. Denis, & ce qu'ont fait aufli plufieurs des Concurrens. L’Auteur eft également perfuadé que le fel marin ne contribue pas À la formation du Salpétre ; il a fait des mélanges de terre, de matières’ putrefcibles & de fel marin : ce dernier fel a fufpendu les progrès de la fermentation, & il n’a point obtenu de Salpétre. Il nadopte pas non plus le fentiment de Lémery, qui regarde le Salpêtre comme un produit de la végétation , & il prétend au con- traire, mais fans expériences nouvelles, que les plantes ne donnent de Salpêtre par leur analyfe, qu’autant qu’elles ont cru dans un terrein qui en contenoit lui-même. Au refte, cette opinion eft conforme À l'expérience faite par les Régifleurs des Poudres , & rapportée au fujer du Mémoire précédent. Après avoir réfuté ces différens fyftêmes , il donne celui qui lui eft propre. Il prétend que le Salpétre eft le produit de la fermentation putride; qu'il eft un compofé d'air, de phlogifique , d’eau, & d’une: légère portion de terre. Cetre théorie eft celle. qui paroït avoir été la plus généralement adoptée dans ces derniers temps; mais l’Auteur du” Mémoire rapporte lui-méme des faits qui femblent la contredire. Il a mis de la terre, qu'il avoit probablement bien leffivée, dans un vale expolé à l'air, en un lieu abrité & frais, à une certaine: 11/ . die "\ . élévation du fol, & fans aucune addition de matière fermenrefcible. 11 à. répété plufieurs fois cette expérience , & au bout d’un an il a toujours retiré de vrai Salpètre, Pour être für qu'il n’y avoit dans fa terre aucun principe fufceptible de fermentation putride, il a pris de la chaux , Fa hiflé éteindre à l'air; & l'ayant mife de même dans ur vale ouvert, K10) HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ il en a retiré du nitre. Les expériences faites par les Commiffaires de l'Académie , leur permettent difficilement de croire à ce réfultat : la chaux éteinte eft pas , comme le penfe l’Auteur , une terre calcaire ordinaire ; il lui manque un principe pour la conflituer telle; c’eft l'air fixe ; & en fuppofant que la chaux éteinte püût produire -du nitre , ce qui eft douteux , ce ne pourroit être que par quelque mélange , & fur-tout en l’arrofant ; car, dans l’état de fécherefle & d’aridité où elle tombe promptement quand elle eft expofée à l'air, elle n’eft nulle: ment difpofée à la produétion du Salpêtre. Cependant l’Auteur ne fait pas mention qu’il l'ait humeétée même avec de l’eau. Quoi qu'il en foit, il a répété les mêmes épreuves dans des circonftances femblables , dans des vaifleaux de même nature , & en les couvrant de cloches de verre, & il n'a point eu de Salpêtre. Il conclut de ces expériences , non pas que l'air contient de l'acide nitreux tout formé, mais des cfluves putrides propres à le former. Cette dernière conféquence paroït fe rapprocher beaucoup de la vérité. : Il prétend à cer égard avoir fair des expériences en grand, pendant l'efpace de douze années. 11 a dépofé de la terre dans des endroits abrités, & non expofés au Soleil, & l'a leflivée tous les deux ans, {ans aucune addition, & il a toujours trouvé la même quantité de Salpètre à chaque opération ; il prétend même qu'on pourroit lefliver plus fouvent qu'il ne l’a fait. Cette méthode eft celle qu'on emploie dans la plupart des hangars conftruits dans le Royaume pour la fabrication du Salpétre; on y remet les terres après qu’elles ont été lefivées , & elles reproduifent également du nitre au bout d’un certain intervalle. Il femble même que les rerres fe bonifient avec le temps; mais cette circonftance ne fuffit pas pour prouver que le nitre puifle {e former fans le concours de matières fermentefcibles. Les terres qu'on amoncèle fous les hangars , ont con- tenu originairement des matières végétales & animales; on y en remet encore involontairement par l'opération du leflivage ; & tout ce qu'on pourroit conclure , c'eft qu’il faut peu de matières végétales & animales pour communiquer aux terres la propriété de fe falpêtrer. C'eit au furplus de ce point que part PAuteur , pour propofer un moyen qui lui paroît afluré, afin d'obtenir en France une récolte abon- dante de Salpêtre à bon marché. Au lieu de Salpêtriers ambulans , il voudroit qu'on leur fit, dans les différentes Provinces du Royaume , des établiflemens fixes; ils perdroient moins de temps & auroient un travai! continu. Ces établiffemens confifteroient dans de grands hangars avec un logement & un atelier d’évaporation : on placeroiït ces han- gars dans les lieux où les matières falpêtrées font abondantes, ainfi que le bois à brüler, & dans le voifinage d’un ruifleau , s’il étoit poflble. Il propofe de bâtir les hangars en carré autour d’une grande cour, & de placer le logement du Salpêtrier au milieu. Il donne les devis eftimatifs des frais de conftruction , & il les porte en total à 35,714 liv. Si ce plan étoit adopté, il feroit néceffaire , fuivant l'Auteur , que w SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. #1r quelqu'un füt chargé par le Gouvernement de fixer dans tout le Royaume l'emplacement deftiné pour chaque établiffement ; enfuite l’adjudication des conftructions feroit faite au rabais. Les hangars pourroient être conftruits en trois mois, & aufli-tôt on y tranfporteroit toutes les terres {alpétrées du voifinage , même les terres fur lefquelles on auroit dépofé du fumier. Ces terres feroient arrangées par couches ou monceaux ; mais fans addition de chaux, parce qu'il la regarde en même temps comme chère & comme inutile. On placeroit dans chacun des établiffemens huit mille cent voitures de terre, de trente-fix pieds cubes chacune; chaque pied cube de terre pèfe quatre-vingt-cinq livres : la voiture pèferoit donc environ zrois mille livres, & le total des terres entaflées , vingt-quatre millions fept cent quatre-vingr-fix mille livres. L’Auteur eftime à quatre livres par quintal la quantité de Salpêtre que donneront ces terres; & c’eft ici que fes calculs commencent à être forcés : en effet, il eft douteux qu’on puifle porter les évaluations à plus d’une livre par cent , & il y a même lieu de croire que pour ne pas fe tromper , il faut à peine compter fur douze onces. Il prétend de même, & à ce qu'il aflure d’après fes propres expériences , que des terres leflivées donnent au bout de deux ans de féjour fous les hangars , également quatre livres par cent ; mais les Commiffaires de l’Académie font encore fondés à regarder ce produis comme impoflible, & ils ne croient pas qu’en leflivant périodiquement les mêmes terres tous les deux ans, on puifle efpérer plus de huit onces de Salpètre par quintal de terre ; encore penfent-ils comme l’Auteur, qu'il feroit préférable de ne lefliver que tous les trois ans. L’Auteur fuppofe que l’on conftruiroit deux cents hangars dé cetre efpèce dans le Royaume. Il penfe qu’on pourroit obliger les Communautés à y faire le tranfport des terres, & que comme elles fe rédimeroient par-là à jamais de la fouille, elles s’y préteroient volontiers , fur-rout dans certaines Provinces. L’Auteur prétend que ce projet de former dés nitrières en grand, auxquelles on affeéteroit un arrondiflement de quatre à cinq lieues, cit beaucoup préférable à celui d'établir un hangar dans chaque Commu- nauté. Il propofe de confier chaque hangar ou établiflement à un certain nombre d'Ouvriers , qui feront appointés par l'Adminiftration : le prin- cipal Ouvrier auroit 540 liv. le fecond 48o liv. & les autres 432 liv.. ces Ouvriers exploiteroient le Salpêtre pour le compte du Roi. Cette partie du projet de l’Auteur eft fufceptible de beaucoup d’objections, x il eft certain que des Ouvriers ainfi appointés , & qui feroient aflurés.. de toucher leurs gages à la fin de l’année , deviendroient à la longue dés Penfonnaires de l’État, que la dépenfe refteroit, & que la fabri- cation du Salpètre s’anéantiroit. Au lieu de cuviers de bois, qui perdent prefque toujours, & qui fe: pourriflent , il propofe de conftruire dans chaque établiflement deux grands baflins en pierre pour le leflivage des terres, & ‘deux autres plus petits pour le leffivage des cendres. Les deux grands fercient de capacité” 112 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ fuffifante pour contenir trois cent quatre-vingts livres de terre; ils feroient contenus par des cercles de fer; on y pratiqueroit un faux fond en bois , garni de trous pour l'écoulement des eaux, & on feroit une ouverture dans le bas, à la hauteur du faux fond, avec un emplacement pour évacuer facilement les terres. Ces baflins auroient douze pieds en carré, fur quatre pieds fix pouces de hauteur, non compris le faux fond. Il eftime qu'ils ne couteroient pas plus de 480 liv.; mais cette évaluation eft évidemment trop foible , au moins pour un grand nombre de Provinces. L’Aureur fuppofe qu’on lefivera par jour vingt- fept mille cinq cent quarante livres , lefquelles, {ur le pied d'une livre douze onces par quintal, rendront quatre cent quatre-vingr-fix livres de Salpêtre , ce qui donnera, à raifon de trois cents jours de travail par an, cent quarante cinq mille huit cents livres de Salpêtre pour chaque hangar, & pour les deux cents, vingt neuf millions cent foixante mille livres dans l’année; fur quoi rabattant le décher de 25 pour ?, refte vingt-un millions huit cent foixante-dix mille livres de Salpêtre rafhiné. Ces réfultars font tellement merveilleux, qu’on ne peut fe difpenfer de les difcuter & de les apprécier. Il y aura , fuivant l Auteur , dans chacun des deux cents ateliers qu’il propofe de conftruire, vingt-quatre millions fept cent quatre-vingr-fix mille livres de terre; mais pour y placer une quantité aufli confidérable , il faudroit y amonceler la terre jufqu’à la hauteur de cinq à fix pieds. Il paroît conftant au contraire, que des couches bafles, peu épaifles , féparées les unes des autres, qu’on peut remuer aifément, font beaucoup préférables, & alors le hangar propofé ne contiendra pas plus de douze millions de livres pefant. On ne pourra lefliver les terres que tous les trois ans; c’eft donc quatre millions de livres par an, ce qui, à raifon de huit onces par quintal, donneroit vingt-huit mille livres de Salpêtre, & pour les deux cents hangars, quatre millions de livres par an : cette quantité eft bien inférieure à ce que promet l’Auteur ; mais elle feroit néanmoins plus que fufhifante pour la confommarion du Royaume. Ces calculs , fur lefquels on peut compter , renverfent , comme l’on voir, toute Ja théorie de l’Aureur ; & on eft bien éloigné , en parlant de ces nouvelles bafes , de trouver chaque année un bénéfice de 22,250,000 liv. en argent, comme il le promet. Voici , relativement à la dépenfe & au bénéfice , la réalité des faits, d’après les notions à peu près certaines, que la Régie des Poudres a acquifes par plufeurs années d’expériences , & qu’elle a bien voulu communiquer aux Commiflaires de l’Académie. D'abord chaque établiffement ne coutera guère moins de 100,000 liv. ce qui fait, pour les deux cents hangars, une avance de 20,000,000 de liv.; encore faut-il fuppofer que le tranfport des terres fera fait par les Communautés, {ans quoi il faudroit porter l'avance beaucoup plus baut. L’Auteur ba que ces mêmes premiers frais ne monteront qu'à 66,676 liv. par hangar, y compris 24,300 liv. pour le prix de huit SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 113 huit mille cent voitures de terres. Son évaluation eft donc d’un tiers au deffous de l'effectif. Quant aux dépenfes annuelles, voici à peu près à quoi elles doivent 4 être évaluées. DÉPENSES ANNUELLES. lie, Gages de fix Ouvriers, à 400 liv. l’un dans l’autre, ci. 2,400 Bois , à raifon de trois cordes par millier de Salpêtre, ce qui revient, pour vingt milliers, à foixante cordes, & en argent, à raifon de 15 liv. la corde, à ...... 900 Achat de fix mille livres de porafle environ , à raifon de trente livres par quintal de Salpêtre, la potaffe évaluée Mons AN ivre NC ET EME 1,800 Quand on voudroit fubftituer la cendre à la potañle, il n'y auroit point d'économie fur cet objet, du moins dans le plus grand nombre des Provinces du Royaume. Achat d’uftenfiles , de fumier, d'urine, de matières fetmentelciblessnczcles- eine ein Mie ele. et 1,200 ToraLz de la dépenfe annuelle. .......... 6,300 Ce qui fait pour les deux cents hangars . . . . . . . 1,260,000 Intérêt à cinq pour cent des avances premières. . . . 1,000,000 MON AD MR relie cite lee ec 23260:000 pe © 7 Cette fomme répartie fur les quatre millions de Salpêtre que pro- duiront les établiffemens , donne 10 f. 2 den. pour le prix de la livre de Salpétre. C’eft à peu près le prix que la Régie des Poudres donne aux Entrepreneurs de nitrières ; d'où l'on voit que le plan adopté par lAdminiftration, eft précifément d'engager les particuliers , par l’appât d’un bénéfice honnête , à faire ce que l’Auteur propofe de faire pour le compte du Roi. Quôique d’après ces calculs le bénéfice de 22,000,000 de liv. promis par l'Auteur, difparoifle en entier , fon Mémoire n’en mérite pas moins d’être diftingué de la foule. Les Commiflaires de l’Académie ont cru lui devoir des éloges; mais ils n’ont pas penfé qu'il eût affez complète- ment rempli les vües du Programme, pour avoir droit ni au Prix, ni à un Acceflit. fr4 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ NP M°O-L'R-E "NS IE Privatis neceffitudinibus habere potiora Reïpublicæ commoda. CE Mémoire préfente un extrait clairement fait des connoiffances acquifes {ur la formation & la fabrication du Salpêtre. Il établit que l'air eft le principal agent de la formation de ce fel, & il rapporte en preuve l'expérience fuivante : Il à fait remuer fréquemment à la pelle , des terres propres à fe falpêtrer ; mais dans lefquelles cependant il n’avoit introduit aucun mélange de matières fermentefcibles ; au bout de deux mois, ces matières commencèrent à donner des indices de Salpétre, & en continuant de même , elles font devenues de plus en plus riches. Ila amené par cette feule méthode des terres jufqu'à donner trente-fix grains de Salpêtre par livre de terre, c’eftà-dire , fix onces deux gros par quintal, tandis qu’ordinairement les bonnes terres à Salpêtre ne donnent pas plus de vingt-quatre grains par livre de terre, c’eftà-dire , quatre onces un gros vingt-quatre grains par quintal. En traitant des terres de la même manière, & en y faifant des additions convenables , on obtient une production de Salpêtre plus confidérable , & il le prouve par les expé- riences fuivantes : à Il a pris de la terre de champ, qu'il a divifée en fix portions ou tas, & qu'il a placée dans un lieu à couvert. Le premier tas, avant d'être mis en expériences , a été exactement leflivé à froid, pour le dépouiller de tout fel, & on s’eft contenté, pour toute préparation, de l'arrofer d’eau pure, quand la terre étoit trop defféchée, Ce mélange , ainf que les fix autres , a été remué à la pelle deux fois par mois, & a été leflivé au bout de fix mois : il a donné une partie de Salpêtre. à La feconde portion de terre a été emplacée telle qu’elle étoir en fortant du champ, & n’a point été lavée au commencement de l’expé- rience; on l’a arrofée de temps en temps comme la première; au bout de fix mois elle à donné deux parties de Salpêtre. La troifième portion a été arrofce plufieurs fois avec de l'urine humaine, & au bout du même temps elle a donné trois parties de Salpètre. La quatrième a été arrofée à peu près aufli fouvent que la précédente, avec de l'égout de fumier, & elle à donné une égale quantité de Salpétre. La cinquième a éré également arrofée avec de l’eau d’égout de fumier, mélée de partie égale d’eau d’une fontaine falée; & ayant été leflivée SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. rr$ au bout de fix mois comme les précédentes , elle à donné fix parties de Salpêtre. Enfin la fixième a été détrempée avec de l’eau de la même fontaine faice, fans mélange d'aucune autre matière, & elle a donné quatre parties de Salpètre. De la fixième , & fur-tout de la cinquième expérience, l’Auteur conclut que le fel marin fe convertit en Salpêtre ; mais il eft aifé de voir que cette conféquence eft précipitée. Ce n'eft pas fur une feule épreuve , faite avec aufli peu de précaution , dans laquelle on ne fpécifie ni la quantité de terre employée , ni celle du Salpétre obtenu, dans laquelle on n’a point diftingué fi ce Salpêtre étoit à bafe d’alkali fixe, ou à bafe terreufe, s'il écoit plus ou moins mêlé de {el marin, qu’on peut établir une vérité de cette importance, fur-tout lorfqw'elle eft contredite par un grand nombre d'expériences authentiques , & faites par d’habiles Chimuites. L’Auteur , d’après l'opinion où il eft de la tranfmutation du fel marin en Salpètre , penfe qu’on devroit établir des nitrières dans les environs des fontaines falées , y former des hangars qu’on traiteroit à peu près comme il l'indique dans fa cinquième expérience ; il en a fait l'épreuve fous un hangar de douze pieds de long & de cinq pieds de large , & il a reconnu dans fes expériences, comme il avoit fait dans celles pré- cédemment rapportées, qu’on peut retirer de la fimple terre des champs, fans addition , pourvu qu’elle foit fouvent remuée à la pelle, plus de Salpètre que les Salpêtriers n’en retirent communément des terres qu'ils exploitent : il prétend que fi on ajoute des arrofages d’égout de fumier, on peur obtenir tous les ans, des terres qu’on aura traitées ainfi, quatre fois plus de Salpêtre que n’en donnent les terres ordinaires de fouille. Il propofe encore de faire , fous les hangars ou nitrières, des caveaux voûtés , où l'on amafferoit des terres. La nitrification s’y feroit mieux que dans le hangar même, à caufe de l'humidité & de l'égalité de température, & on pourroit balayer {ur la voûte du Salpêtre de houffaige. L’Auteur du Mémoire n°. 1, avoit pareillement eu cette idée ; mais ni l’un ni l’autre n’ont fait attention , qu'indépendamment de ce que cette voûte feroit chère à conftruire , elle fe détruiroit promptement par l'aétion même du Salpêtre, qui ramelliroit les pierres & les rédui- roit en efflorefcences. L’Auteur rapporte une méthode pour faire du Salpêtre , pratiquée en Pruffe, felon M. Brunner. On prend de la terre de deffous les gafons ou paturages, de la terre noire des environs des habitations , ou mieux encore , de celle qui fort des égouts & cloaques; on y joint un cin- quième de cendre de bois; on forme du tout une efpèce de mortier, avec de l’eau d’égout de fumier; on y incorpore de la paille, & on en fait des monceaux, qu'on couvre avec des toits légers , ou plutôt des paillaffons difpofés en forme de toits : on les arrofe avec des égouts de fumier, & on parvient ainfi fucceflivement à la putréfation & à la Pi 116 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ deftruction totale de la paille ; elle laiffe à fa place des pores qui donnent un libre accès à l’air, & qui favorifent la formation du Saï: pêtre : ces terres font leflivées chaque année, & on en forme de nouveaux monceaux. A ce Mémoire, l’Auteur à ajouté un fupplément, dans lequel il entré dans quelques détails fur la conftruétion des hangars. Cette feconde partie ne contient rien qui ne foit connu, fi ce n’eft qu’elle propofe de couvrir les hangars en tuiles, & de choifir l’efpèce la plus propre à fe falpétrer. Ce Mémoire n’eft pas le feul où l’on parle du Salpêtre qui fe forme fous les tuiles, & cet objet pourroit mériter quelque attention. L'Auteur prétend que les tuiles qui ont été cuites à grand feu, fe falpêtrent davantage que les autres ; ce devroit être cependant le contraire, parce qu'une vitrificarion complette doit boucher les pores de la tuile. Le Salpêtre s'attache à la partie fupérieure interne des tuiles, fous forme d’une matière blanche farineufe , quelquefois friable , quelquefois compacte, & qui ne peut fe détacher qu'avec le couteau. Cette formation du Salpètre fous les tuiles s’explique très-bien d’après les expériences de MM. Thouvenel , & elle en forme une efpèce de confirmation. ° Quant à la conftruétion des hangars, l’Auteur penfe qu’elle devroit être à la charge des Communautés, & qu’elles fe préreroient volontiers à cette dépenfe pour s'affranchir de la gêne de la fouille. Quoique ce Mémoire ne foit pas fans mérite, cependant, comme les expériences qu’on y rapporte ne font pas faites avec une certaine exactitude & une certaine rigueur , qu’elles ne font pas très-nombreufes, & que l'Aureur même en tire des conféquences qui paroiïflent fauffes, les Commiflaires de l’Académie ont jugé qu'il ne pouvoit avoir droit ni au Prix, ni à un Acceflit. MÉMOIRES NET PT. Labor omnia vincit improbus. LE Mémoire que Académie a reçu fous ce numéro & fous cette devife, quoique préfenté avec un appareil fcientifique , eft abfolument runtelligible, & n'eft pas même fufceprible d'extrait. ® SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 117 MMM OM TARU EN NE NT. Et fi de r'agréer je n’emporte le prix, J'aurai du moins Fhonneur de l'avoir entrepris. LA FONTAINE. CE Mémoire contient un expofé nés -incéree d'expériences entre- prifes à Chälons-fur-Marne, dans de très-bonnes vüûes & fur de très- bons principes ; l’Auteur en promet le réfultat, & ne l’a point fait parvenir à l’Académie; au moyen de quoi ce Mémoire doit être regardé comme nul pour le Concours. MAÉ MO NIR 8.2 Neil Que funt ir luce tuemur & tenebris. Il y a peu de chofes impofibles d’elles-mêmes, & l'application pour les faire réufhir nous manque plus que les moyens, Réflexions morales de la ROCHEFOUCAULT , N°. 208. es CE Mémoire avoit déjà concouru en 1766, pour le Prix propofé par l’Académie de Befançon, & il avoit obtenu l’Acceflit. L’Auteur , M. Puricelli, Négociant à Befançon, l’a adreffé à l’Académie des Sciences le 13 Juin 17773 mais comme le Concours étoit alors fermé, il n’a pu être adimis que pour le fecond Concours. Ce Mémoire fe fent du temps auquel il a été rédigé , & il n’eft point exaétement au courant des connoiffances actuelles ; il n'en contient pas moins de très-bonnes réflexions & de très-bonnes obfervations , qui ont dû faire une grande impreflion en 1766. Il auroit été à fouhaiter qu'il eût été publié à certe époque. L’Auteur regarde l'acide nitreux comme une combinaifon de l’acide vitriolique , avec le phlogiftique ; c’éroit l'opinion d'un grand nombre de Chimiftes, dans le temps où il écrivoit. Cette combinaifon s'opère, dit-il, par la putréfaction des fubftances animales & végétales. Dans tr8 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ fe produit qu'on tire des terres & des plâtras, il diftingue le nitre À re terreufe & le nitre à bafe alkaline, & fait voir comment l’alkali de la cendre précipite la terré & convertit le nitre à bafe rerreufe en Salpètre. IL convient que les moyens employés en Prufle, en Saxe, & en Suède, pour fabriquer artificiellement du Salpètre, peuvent remplir leur objet; mais il penfe en même temps que le Salpêtre , obtenu par ces méthodes, doit revenir fort cher. Il parle enfuire de quelques établiffemens faits en Suilfe , à Berne, & à Laufanne. Dès 1766, on y avoit établi des hangars, où l’on appor- toit des terres falpétrées de huit, dix & douze lieues; ce long trajet n’effrayoit point les MR , parce qu'ils favoient que cette dépenfe feroit faite une feule fois pour Pavenir, & que les hangars approvi- fionnés, ils jouiroient enfuite d’une récolte abondante de Salpêtre. L’Auteur entre dans quelques détails fur l'état où étoit l’art de fabri- quer du Salpêtre en Franche-Comté , lorfqu'il a rédigé fon Mémoire, c'eftàdire, en 1766. Cette Province éroit exploitée par environ cent cinquante Salpêtriers , difperfés dans les différens Bailliages ; ils avoient droit de fouiller , & ils jouifloient en outre des privilèges fuivans: 1°, Les Communautés de leur arrondiflement étoient obligées de leur fournir gratuitement un logement, & un emplacement fuffifamment grand pour contenir leurs chaudières & leurs cuviers. 2°. Chaque particulier étoit obligé de fouffrir la fouille des terres propres à la fabrication du Salpêtre , dans fes habitations , même dans fa chambre à coucher. Les terres éroient bien remplacées après avoir éré leflivées ; mais on conçoit combien le rapport d’une terre fraiche & humide devoit rendre les habitations mal-faines. 3°. Les habitans étoient tenus de fournir les bois néceffaires à la cuite du Salpêtre , tout façonnés & voiturés devant l'atelier, au prix de 1 liv. 10 f. la corde , mefure de Roi, la büche de quatre pieds de long , chaque quartier ou rondin de quinze à feize pouces de tour. 4°. Ils éroient également tenus de fournir les voitures néceffaires pour le tranfport du Salpêtre brut à la raffinerie , à raifon de 1 f. 6 den. par quintal & par lieue. Le tranfport du Salpêtre fe faifoit ordinairement par parties de trois quintaux; ainfi, en fuppofant la diftance de huir lieues , la Communauté recevoit 1 liv. 16 {. du Salpêtrier ; mais la dépenfe, à raifon de deux journées pour aller & venir, y compris les frais de route & la nourriture du Conducteur, montoit à 6 ou 8 liv. ainf il en réfulroir encore une charge de 6 liv. environ par voyage, à la charge de la Communauté, 5°. La Communauté étoit obligée de fournir graris an Salpêtrier deux voitures attelées chacune de trois chevaux ou de quatre bœufs , pour conduire gratis fes effets dans le lieu où il fe tranfporteroit; & dans le cas où deux voitures auroient été infuffifantes , il pouvoit en exiger * autant qu'il vouloit, moyennant le prix de 20 f. par lieue. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 119 6°. Il étoit permis aux Salpétriers de prendre les cendres des parti- culiers au deflous des prix courans. 7°. Ils avoient la liberté de prendre des Journaliers à difcrétion, & de ne leur payer que $ f. par jour , pendant les mois de Novembre, Décembre , Janvier & Février; 6 {. pendant les mois de Mars & d'Avril; 8 f. pendant les mois de Mai & de Septembre; & ro f. pendant les mois de Juin, Juillet & Août. Il eft aifé de juger combien ces privilèges étoient onéreux à la Province; il en réfultoit des impofitions indirectes, qui coutoient, fuivant l’Auteur, 4 à 500,000 liv. par an; mais fans adopter cesbafes, qui paroiffent forcées, on dira ici, d’après des connoiffances certaines , qu’il fe fabriquoit en Franche-Comté , avant 177$, environ trois cents milliers de Salpêtre; ue cette fabrication étoit entre les mains de cent trente Salpétriers , d forte que chacun fabriquoit deux milliers de Salpêtre l'un dans l'autre; que chaque Salpétrier confommoit environ foixante cordes de bois; que dans le nombre de deux mille Communautés qui compofent la Franche-Comté , les deux tiers environ éroient exploités par les Sal- pêtriers ; mais comme ils n’y revenoient que tous les trois ans, le nombre des paroïfles exploitées chaque année étoit de quatre cent quarante-quatre. D'après ces bafes on peut établir les calculs qui fuivent , fur ce que coutoient les Salpétriers à la Province de Franche-Comté. Perte fur le bois, à raifon de 6 liv. la corde, & de foixante cordes pour chaque Salpêtrier, ce qui revient pour les He BNC ON OT D RE A OR ACER AR NUE) Il en coutoit par an à chacune des quatre cent quarante- quatre Communautés exploitées : roMPourtlosement duiSalpetrier..220e rs 2 2°. Pour le tranfport de fes uftenfiles , à raifon dedeuxivoitures à) trois chevaux. M RES 3°. Pour chariage du Salpêtre à la raffinerie. . .. 11 liv. DLERILIE oo ns oo CTI e D 7 7] Ce qui revient, pour les quatre cent quarante-quatre Gommunaureslexploites ah MR Re RTC EST 7520 Ainfi la fabrication du Salpêtre , avant les difpofitions faites par M. Turgot, chargeoit la feule Province de Franche- = Gone d'un impor indiseæ de .. 4.6.0... 1.400 69,009 Pour opérer avec exactitude , il faudroit encore ajouter à cette fomme celles réfulrantes des exactions commifes par les Salpètriers; il eft de fait que la plupart s’étudioïent à étre le plus incommodes qu'il leur étoir poñible aux habitans de la campagne. Les plus adroits avoient grand foin de placer leurs cuveaux dans les caves , dans les lieux 120 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ DERNIER NE ENNEMI TJ000 lie même d'habitation. Ils fatiguoient ainfi les habitans , & les forçoient à fe rédimer du travail du Salpêtre , moyennant une modique fomme; ainfi la charge impofée fur les ha- bitans de la campagne ne remplifloit pas même fon objet! la Province produifoit de l'argent au Salpêtrier ; mais elle ne produifoit pas à l’État toute la quantité de Salpêrre qu’il en auroit dû tirer. En fuppofant que ces taxes volontaires, arrachées par la vexation & par l'importunité, ne montaflent qu'à so liv. paï chaque Communauté , il y auroit encore à ajouter aux fommes ci-deflus, celle de........,, 22,200 Toraz de l'impôt indirect dont étroit grevée la Franche- Comté par la fabrication du Salpêtre, ci. . ......... 91,200 Des es = 7 C’eft d'après ces confidérations que l’Auteur du Mémoire propofe de fubftituer à la manière de fabriquer le Salpêtre , telle qu’elle exiftoir en 1766, l'établiflement de hangars, fous lefquels on entrepoferoit les terres après qu’elles auroient été leflivées. Il propofe , pour accélérer la régénération du Salpêtre , d’y mêler des débris de végétaux, des fruits pourris, des plantes nitreufes , des topinambours, des grands foleils, de la paille, des féves, de la bardane, &c. Le Comté de Bourgogne renferme dans fon enceinte quantité de vieux châteaux inhabités & abandonnés, dont une grande partie appartient au Domaine du Roi, & d'autres à des Seigneurs particuliers; l’érar qu'en donne l’Auteur, monte à quatre-vingt-quatre : il penfe qu’on pourroit les affecter au logement des Salpêtriers , & y former des ateliers ou nitrières. En fuppofant que le nombre des Salpêtriers, devenus fédentaires, fût réduit à cent, & que chacun fabriquât douze milliers de Salpêtre, la récolte en Franche-Comté feroit portée à un million deux cent mille livres de Salpêtre par an. L'Auteur penfe qu’en remplaçant les terres leflivées fous des hangars, le Salpètre s’y régénérera de lui-même , fans addition; mais il ne rapporte aucune preuve de cette aflertion;s & il n’eft point encore décide fi les terres ne s’épuifent point à la longue, & s'il n’eft point néceflaire d’y introduire des matières fufceptibles de fe putréfier. Il entre dans des détails affez étendus fur la manière de lefliver les terres , de faire évaporer & criftallifer ; mais loin de rien ajouter aux connoiffances acquifes , il eft même en retard fur ce qu’on connoït, & on ne doit pas en être étonné , en remontant à la date où le Mémoire a été rédigé. Il auroit été à fouhaiter que l'Auteur , avant d’envoyer ce Mémoire à l’Académie, l’eût retravaillé, qu'il l’eût remis au niveau des connoiffances actuelles, & qu'il l’eût appuyé par des expériences. MÉMOIRE SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 21 MAÉ MO LRIE NA VI K Aurum non efl premium , fed benevolentia Regis Academiæ proteétoris. L'écrir envoyé à l’Académie , fous ce numéro & cette devife , n’eft qu'une fimple notice dans laquelle l’Auteur fait un grand éloge de la marne, relativement à la production du Salpêtre. I] paroît penfer que ce fel y eft tout formé, & que c’eft par cette raifon qu’elle fertilife les terres. IL part de ce principe, pour conclure que comme la marne fe trouve prefque par-tout, il eft poffible d'établir prefque par-tout une récolte abondante de Salpètre. Nous ne nous arréterons pas à réfuter cette opinion. Tout le monde fait aujourd'hui que le nitre n’eft point, à proprement parler, un fel minéral; qu'il ne fe rencontre nulle part dans l'intérieur de la terre, mais qu'il fe forme à fa furface , & que le contact de l'air eft nécelfaire à fa formation. La marne ne contient donc point de Salpêtre , elle eft feulement propre à s'imprégner d'acide nitreux quand on l’expofe à l'air, avec des conditions données. L'Auteur propofe , comme un fecond moyen , d'augmenter la récolte du Salpêtre, de multiplier les colombiers, & de permettre à tout le monde d’en conftruire, Ce moyen eft fufceprible de grandes difficultés que l’Auteur n'a pas prévues. De fages Loix défendent à ceux qui ne font point propriétaires d’une certaine étendue de terre en fuperficie, d’avoir des colombiers , parce qu'il eft jufte que celui-là feul ait le droit d’avoir des pigeons , qui eft en état de les nourrir. Enfin l’Auteur propofe , comme un moyen très-avantageux, de mêler de la marne avec de la fiente de pigeon; mais en cela il n'avance rien de nouveau & qui ne foit connu. M'É M'O I R'E: Ne VOB L Sans devife. CE Mémoire contient deux recettes pour convertir le fel marin et Salpêtre; elles diffèrent peu de celles propofées par Glauber. Mais cette prétendue converfion du fel marin en Salpètre a déjà été tentée fans 122 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ fuccès par d’habiles Chimiftes, & par des procédés fort analogues à ceux-ci. Les Commiffaires de l’Académie eux-mêmes ont fait un grand nombre de recherches fur cet objer, & il en a réfulté que le fel marin, loin de fe convertir en Salpètre , nuiloit au contraire à la formation de ce fel , lorfqw'il étoit employé en trop grande quantité dans les mélanges : ils ont penfé en conféquence , qu'on ne pouvoit prendre aucune confiance dans les réfulrats annoncés par l’Auteur. ren ME MNCOCISR ANS al ppere css Avec la devife © altitudo divitiarum ! CE Mémoire ne contient qu'un expofé des méthodes ordinaires pour faire du nitre; des couches formées alternativement de terre & de fumier, de feuilles d'arbres, de paille hachée, de feuillages de buis , de rejets de plantes, &c. L'Auteur prefcrit de faire d’abord fur le fol un lit de quatre pouces de fumier , de le couvrir d’un lit de terre de quatre pouces , puis d'y ajouter des lits alternatifs de terre & de fumier de deux pouces, & de continuer ainfi pour former une efpèce de pyramide. Si on a employé de la terre tirée d’écuries ou de bâtimens habités, & qui ait un commencement de nitrification , il penfe qu'on pourra remuer le mélange à la pelle, & le changer de place au bout de fix mois pour y introduire de l'air; qu’il faudra répéter la même opération tous les deux mois, & qu’on pourra leffiver au bout d'un an. Si c’eft de la terre de rue ou de chemins, il faudra plus de temps, & il confeille de ne leffiver qu’au bout de deux ans. Enfin les terres abfolument neuves, les terres de champ ne doivent être, fuivant lui, leffivées qu’au bout de trois ans. Ces intervalles de temps répondent aflez à ce que les Régiffeurs des poudres ont éprouvé dans les travaux en grand, & aux épreuves faites par les Commiflaires de l'Académie ; ils penfent feule. ment que le terme de trois ans eft trop court pour les terres qui n’ont aucun commencement de nitrification. Lorfque les terres auront été leflivées , l’Auteur prefcrit d'en reformer de nouvelles couches, en y mélant la cendre qui aura Cté leflivée avec elles, & de les lefliver de nouveau au bout de deux ans & demi ou de trois ans. H donne dans le même Mémoire un moyen de préferver de l'humidité la poudre mife dans des barriques; il confifie à revêtir la barrique d’une SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 125 chemife ou double enveloppe de liége. On conçoit qu’en {uppofant que ce moyen fût praticable dans les Provinces méridionales où le liége eft abondant , il n’en eft pas de même des autres où cette double chemife feroit d’un prix exceflif; d’ailleurs cette enveloppe n’écarteroit pas mieux l'humidité , & moins même encore que des chapes & barils bien reliés. L’Auteur donne dans un fupplément un moyen de préparer la terre, qu'il prétend également intéreflant, & pour l'Agriculture , & pour la formation du Salpétre : on prend du menu bois, des fagots, qu'on arrange en petits tas, & on en forme ainfi un grand nombre; en leur donne dix à douze pieds de diamètre, & quatre de hauteur : on arrange autour, des mottes de terre, difpofées à peu près de lamême manière que dans le fournceau du Charbonnier ; on laifle une ouverture dans le bas, & on met le feu : lorfque le bois eft confumé & que tout eft affaifé, on a une terre rouge ou noire très-propre à fertilifer les terres, & à devenirla bafe d'une nitrière. L'Auteur au Été ne parle des propri£tés de cette terre que théoriquement, il ne rapporte aucune expérience qui conftate {es bons effets; de forte qu'on ne peut pas prendre une confiance abfolue dans ce qu'il avance, fur-tout relativement à la fabrication du Salpêtre. I prétend au furplus , que cette méthode de fertilifer les terres fe pratique dans quelques Provinces où le fumier eft rare. Ii confcille encore , dans ce fupplément, de former les nitrières alter- nativement d’un lit de terre d’un pied, & d’un lit de moufle de deux pouces , & de placer dans la malle des tuyaux d’ofier, ronds, d'environ douze à quinze pouces de diamètre , travaillés à la manière des claies, & de les éloigner de deux pieds environ les uns des autres : à mefure qu'on formeroit la couche , on humecteroit la terre avec de l'urine & des eaux de buanderie. Il donne aufli une manière particulière d’arrofer , qui eft à la vérité un peu compliquée , mais qui rempliroit fon objet. Il n’eft pas poflible de la faire entendre fans le fecours des figures. L’Aureur voudroit qu’on établit les couches à Salpêtre fous de fimples cabanes couvertes de bois ou de paille. Il prétend en avoir vu de cette forte en Efpagne : les couches avoient la forme de pains de fucre. Il prétend encore avoir vu lefliver en Efpagne la terre des chemins, des rues, & même des campagnes, par lefquelles les beftiaux paflent habituellement; mais il convignt en même temps, que cette méthode de fabriquer du Salpètre ne peut avoir lieu que-dans les climats où les pluies font rares. On voit par cet expofé, que le Mémoire dont on vient de donner l'extrait, ne contient aucune expérience qui foit propre à Auteur; qu'on n’y trouve de neuf que l’idée d'employer la terre brûlée pour former des nitrières; mais cette idée même appartient originairement à Glauber; & il eft incertain fi elle eft aufli avantageufe que l’Auteut le promet. Les Commiflaires de l’Académie ont penfé en conféquence que l'Auteur n’avoit point rempli les conditions du Programme , & qu'il ne pouvoit avoir droit au Prix, ni aux Acceflit. oi 1j 124 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ ME M.O'r RE IN ER LAcaimr à reçu fous ce N°. une fimple note fans devife, dans hiquelle on expofe que la cherté du bois eft une des premières & des rincipales caufes qui détournent les particuliers de fe livrer aux éta- Érenens de nitrières. L'Auteur propofe en confequence de fubftituer la tourbe au bois, pour l’évaporation des eaux falpétrées ; il annonce qu'il y en a des quantités confidérables en Franche-Comté. Il prétend de plus, que les tourbes fe régénèrent dans les lieux où elles ont été exploitées. L’Auteur ne paroïît pas avoir des connoïffances fort exactes far cet objer. On fait que les tourbes ne font autre chofe qu’un affem- blage de racines, de végétaux & de plantes elles-mêmes, dans un état de demie décompofition ; c’eft le He d'une accumulation formée pendant plufieurs fiècles. Or , s'il en eft ainfi, il ne faut pas s'attendre que la tourbe puiffe renaître dans les lieux d’où elle a été tirée. Il faudroit un temps égal à celui pendant lequel elle s’eft précédemment formée, & des circonftances femblables ; concours qu'il eft difficile de rencontrer. Cette note ayant un objet particulier, & l’Auteur n’y ayant point traité. à proprement parler , le véritable fujet propofé par le Programme, les Commiflaires ont jugé qu’elle ne pouvoit lui donner aucun droit au Prix ; on ajoutera d’ailleurs, que la propofition d'employer de la tourbe pour la fabrication du Salpêtre n’eft pas nouvelle. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. #25 ERREUR SERIES PE PPET SE à SAS ENTERREMENT TARN ENT VA EE ET ET IP RENERSEN ENTER NÉ MO LR EN. x, QUI A REMPORTÉ LE PRIX PROPOSÉ SUR LA FORMATION DU SALPÈÉTRE. Par MM. THOUVENEL. Après avoir lu & médité tout ce qui a été écrit fur cet important fujet, nepourroit-on pas dire, avec le Vicillard de Térence : Incertior multd [um quam dudum ? LI On favoir depuis long-temps que le Salpètre ne pouvoir fe former fans le contact de l'air, & d’un autre côté, que la fermentation putride des matières végétales & animales favorifoit fa formation; mais à quoi. fervent ces deux agens, l'air & la putréfaction? C’eft ce qu’on ignoroit encore , & fur quoi le Mémoire de MM. Thouvenel à répandu de grandes lumières. Is ont d’abord recherché quelle pouvoit être l'influence des différens airs dans la formation de l'acide nitreux. On fait que les Chimiftes diffinguent aujourd’hui un grand nombre d’efpèces d’airs ou de gas. Les principales font : l'air armofphérique , l'air fixe, air inflammable, Pair déphlogiftiqué ou vital, l'air phlogiftiqué , l'air qui fe dégage des matières végérales où animales qui fe putréfient. Ils ont combiné enfemble , deux à deux, dans des appareils convenables, qu'il feroit trop long de décrire, toutes ces différentes efpèces d'air; ils avoient foin de placer dans les vaifleaux où fe faifoient ces mélanges d'air, des capfules dans lefquelles ils mettoient de la craie, de l'alkali, & différentes autres matières abforbantes , dans la vüe de fixer, par leur moyen , les particules d’acide nitreux qui pourroient fe former. La plupart de ces mélanges ont donné à MM. Thouvenel des réfulrats curieux fur la formation des acides en général; mais ils n’ont obtenu de Salpêtre que dans une feule efpèce de mélange d’airs, c'eft dans celui de l’atmofphère ou de Fair déphlogiftiqué, avec l'air qui s'émane des matières végérales & animales qui fe putréfent. Ces deux airs fe font combinés enfemble , & au bout de quelques mois, la craie: qui avoit été renfermce dans l'appareil, s'eft trouvée falpétrée... 126 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Une circonflance remarquable, c'eft que toutes les matières abfor- bantes ne réufliffent pas également dans cette expérience; la chaux vive, l'alkali fixe , la terre .de, l'alun, celle du fel de Sedlits, &c. donnent rarement du Salpêtre , au lieu que la craie en’donne conftamment toutes les fois qu’elle a été expofée dans un mélange d’air puxide & d'air atmofphérique ou déphlogiftiqué; d'où MM. Thouvenel fe font crus en droit de conclure que la craie, ou quelques-uns des principes contenus dans la craie, concouroient à la formation de l'acide nitreux. Le choix des matières animales & végétales , d’où l’on tire les éma- nations putrides , n’eit pas non plus indifférent. Le {ang eft de toutes les matières animales celle qui fournit le plus long-temps & le plus abondamment l'efpèce d'air propre à la formation du Salpêtre; les matières excrémenteufes, {ur-tout l'urine , ne font bonnes que dans les derniers temps. Cette théorie, ou plutôt ce réfultat des faits obfervés par MM. Thouvenel , a été confirmé par une expérience bien fimple des Com- miffaires de l’Académie : ils ont mis de la craie, préalablement bien lefivée à l’eau bouillante , dans des paniers àclaire-voie , qu’ils ont expofés à la vapeur du {ang de bœuf en putréfaétion ; il y avoit environ deux pieds de diftance entre la furface du fang de bœuf & celle de la craie , & cetre dernière étroit fufpendue de manière que le Salpêtre n’y pouvoir parvenir par voie de communication; au bout de quelques mois la craie s'eft trouvée contenir quatre ou cinq onces de Salpêtre par quintal. Dans les expériences de MM. Thouvenel , fur la formation du Salpêtre par les mélanges d'air, il s'eft rencontré fouvent du fel marin, quel- quefois du Salpêtre à bafe d’alkali fixe, & ils font obligés d’en conclure qu'il fe forme auili de l'alkali fixe par le mélange de l'air putride & de l'air atmofphérique; mais ils penfenr que l’alkali fixe fe forme le dernier , de forte qu’il fembleroit qu'il y a dans la fermentation putride une époque d’aceflence & une d’alkalefcence. C'eit une queftion importante de favoir jufqu’à quel point les terres font fufcepribles de fe nitrifier feules & fans addition, par leur fimple expofirion à l'air libre, & MM. Thouvenel ont cru devoir entreprendre une fuite d'expériences {ur cet objet : ils ont expofé des terres abfor- bantes bien lavées; 1°. à l’air des plaines; 2°. à celui de profondes exca- vations faites dans les mines; 3°. à celui de fofles fuperficielles faites dans les terres végétales; 4°, à celui des érables , des caves, des latrines des cachots , des hôpitaux; 5°. enfin, à l'air des cuves de bière en fermentation , & à celui des foyers fans ceffe allumés avec des charbons. Ces expériences ont duré fept à huit mois, & pendant ce remps les terres abforbantes ont été garanties du foleil & de la pluie, Ayant enfuite leflivé, il s’eft trouvé plus de nitre dans les terres abforbantes , expofées dans les plaines, que dans celles expofées {ur des montagnes; plus dans les foffes fuperficielles, pratiquées dans les terres yégétales, que dans les plaines ouvertes; mais nulle part la nitrification SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 127 n'a éré auf abondante que lorfque les terres abfotbantes ont été expofées dans des lieux où l'air peu renouvelé eft fans cefle imprégné d’exha- laifons de matières animales, notañimetit dans les étables, les latrines, les cachots, & il ne s’eft trouvé nulle apparence de nitrification dans les terres expofées dans les profondes excavations des mines , dans celles -expofées dans les fouterrains de fottification, où il n’y avoit point d’exhalaifons animales, ni dans l’atmofphère des cuves de bière én fermentation , ou des foyers de charbons allumés. Il n'eft donc plus queftion aujourd’hui de chercher la formation du nitre dans la converfion de l'acide vitriolique ou de l’acide marin en acide nitreux. Les expériences faites par plufeurs Concurrens , & no- tamment celles faites par les Commifläires de l'Académie , paroiffènt démontrer qué cette converfon eft impoflible; & il eft reconnu au contraire, par tous ceux qui fe font occupés de cer objet, que les fels vitrioliques & marins, employés en une certaine abondance , font plus nuifibles qu'utiles. Tout l'art de la nitrification confifte à combiner en- femble les émanations qui fe dégagent des corps en putréfaélion avec l'air commun, & à fixer dans des terres calcaires le réfultat de cetre combinaifon. Pat une conféquence naturelle de ces obfervations , on voit que pour former du Salpétre il faut entretenir un milieu ftagnant & tranquille , dans lequel l'air fe renouvelle , mais lentement & peu à peu. Un courant d'air rapide ne rempliroit pas l’objet : peut-être le Salpêrre s’y formeroit-il & même en plus grande abondance; mais au licu de fe fixer avec la terre calcaire , il feroit emporté par le courant d'air, & fe diffiperoit. On vient de dire que l'air de l’atmofphère entroit matériellement dans la compofition du Salpêtre; il ne fera pas inutile de rappeler à cetre occafion les connoiffances acquifes depuis quelques années , fur la nature de Pair & fur la décompofition du Salpêtre ; elles s'accordent très-bien avec le réfultar des expériences de MM. Thouvenel. Il paroït prouvé, par des expériences que M. Lavoifier a confignées dans fe Mémoires de l'Académie des Sciences , que l'air de l'atmofphère eft compofé de deux fluides élaftiques très-différens | qui font mélés enfemble ; l'un de ces deux fluides eft celui que M. Prieftley à nommé air déphlogifliqueé , & que le plus grand nombre des Savans nomment aujourd'hui air viral ; il n'entre que pour un quart où un tiers dans la compofition de Pair de larmofphère, & c’eft ce quart qui contribue à la formation du nitre. D’après les expériences de MM. Thouvenel, on voit qu'il eft indifpenfablement néceflaire que l'air fe renouvelle dans les nitrières , à mefure qu'il a été dépouillé de fa portion propre à la formation du Salpêtre, autrement la nitrification feroit abfoluiment fufperdué; mais, comme on l'a dit, ce renouvellement doit être extré- mement lent, parce que la formation du nitre eft elle-même très-lente; & quelque bien ferinée que foi une nitrière , iks'y fera toujours un: 128 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ renouvellement fufhifant , pour fournir à ce qui e confomme d'air par Ja formation du Salpêtre. Ce que MM. Thouvenel ont fait connoître par voie de compofition, qu'une portion de l'air entre marériellement dans la formation du Salpêtre, on peut Je prouver également par voie de décompofition : c’eft à M. Prieftley qu'on doit principalement cetre découverte ; elle a depuis été confirmée par M. Scheele, par M. Bertholet , & par plufieurs Membres de l'Académie des Sciences. On prend une très-petite cornue de verre, ou mieux encore de grès ou de porcelaine, qui ait le col fort long; on y introduit une ou deux onces de Salpêtre très-pur ; il faut que la capacité de la cornue foit telle, qu'elle foit à peu près remplie par la quantité de Salpétre qu'on y introduit : on place cette petite cornue au bain de fable dans un peut creufet, & on recouvre toute la partie du col qui doit être expofée au feu, d’une couche épaifle de terre à Potier. On poule cet appareil à grand feu dans un fourneau de réverbère , en rece- vant l'air qui s'échappe par le col de la cornue, dans des cloches de verre ou des bouteilles à large gouleau , pleines d’eau, & renverfées dans un baflin ou dans une cuvette pleine d’eau. La quantité d’air qui fe dégage dans cette opération , eft extrêmement confidérable; il pafle aufi un peu d'acide nitreux, qui fe combine avec l’eau du baflin; cet air eft celui. que M. Prieftley à nommé air déphlogifliqué. C’eft celui qui entre pour un quart dans la compofition de f. air de l’atimofphère , & qui feul le rend propre à entretenir la vie des animaux & la combuftion. Cette expérience vient parfaitement à l'appui de la théorie de MM. Thouvenel , & elle prouve encore que l'air déphlogiftiqué ou air vital entre, dans une très-grande proportion, dans la compofition de l'acide nitreux. M. Lavoifier avoit prouvé la même chofe d’une autre manière; voyez les Mémoires de l’Académie, année 1776, page 672, Il refte maintenant, pour obtenir des idées plus exactes encore fur la compofition du Salpêtre, à déterminer la nature de l'air putride qui fe combine avec l'air viral pour le former. MM. Thouvenel ont déjà prouvé qu'une portion d'air fixe éroit néceflaire pour cette opération. Il réfulte en effet de fes expériences , que l'air putride n’eft plus propre à la nitrification , quand il a pañfé à travers de l’eau de chaux; mais il refte encore des recherches à faire fur cet objet, & les Commiflaires de l’Académie en font occupés. A cette partie théorique, MM. Thouvenel ont joint des détails relatifs À la pratique de la nitrification ; ils font développés principalement dans un fecond fupplément, remis à l’Académie en Décembre 1781. Ils y rapportent quelques effais très-heureux , de couches qui leur ont donné , dans l’efpace de dix-huit mois où de deux ans, jufqu'à une livre de Salpètre par quintal. Ces couches étoient compofées de terreau & de plâtras de démolitions, mélés avec du fang de bœuf defféché & en poudre ; elles éroient difpofées en pyramides, & ils avoient ménagé dans SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 128 dans l’intérieur, des canaux de circulation pour l'air, par le moyen de fagots placés tranfverfalement & debout. Enfin ils avoient pratiqué au centre de la couche une partie vide voûtée , fous laquelle on mettoit un mélange de fumier , de crottin frais de pigeon , & de chaux , qu'on renouveloit tous les mois : ils ont entretenu ainfi dans leur couche une chaleur douce & des exhalaifons excrémentielles putrides, deux cir- conftances très-propres à favorifer la nitrification. MM. Thouvenel s'étendent aufli dans ce fecond fupplément, fur ce qu'ils appellent nitrières-bergeries & nitrières-cavaleries ; ils en ont exécuté une très en grand de la première de ces deux efpèces, à leur frais & pour leur compte. Ils ont commencé par y faire habiter trois à quatre cents moutons pendant un an environ; enfuite ils ont fait relever les terres, & en ont fait former des couches qu'ils ont traitées avec différens arrofages pendant une autre année : au bout de ce temps, elles fe font trouvées contenir huit à neuf onces de Salpêtre par quintal; ainfi elles étoient déjà plus riches que ne le font communément les terres de fouille au bout de trois à quatre ans. Nous ne fuivrons pas MM. Thouvenel dans tous les détails que contient leur Mémoire fur l'entretien des couches à Salpêtre, & fur la conduite des nitrières : on peut confulter l'Ouvrage lui-même , qui eft imprimé en entier, page 55 de ce Recueil. Les Commiflaires de l’Académie ne diflimuleront pas que le projet de nitrières-bergeries , qui a été propofé fous une autre forme par M. Chevrand, leur paroît d’une exécution difficile dans le plus grand nombre des Provinces de France. Les engrais font trop rares, trop précieux, trop néceflaires à l'Agriculture, pour qu’on puifle les lui enlever pour les appliquer à la fabrication du Salpêtre. Ce court extrait fuffira pour faire fentir combien les expériences de MM. Thouvenel ont avancé l'Art de fabriquer le Salpêtre; c’eft d’après cette confidération que les Commiflaires de l’Académie ont cru devoir leur décerner la couronne. Ils ont été fur-tout frappés de la multitude, de la variété, de la difficulté des expériences, & des reffources nul- tipliées que MM. Thouvenel ont été obligés de trouver pour arriver à des réfulrats facisfaifans. 130 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ MAÉ M O\PRPE SrANe MT Iz a été fourni fous ce N°. deux Écrits très-courts, dont voici la fubftance : L'Avrur propofe de faire tranfporter tous les gravois & les démolitions de Paris dans les platrières de Belleville, & d'y former des nitrières. Pour obtenir une quantité d'urine aflez confidérable , il propofe de rendre une Ordonnance de Police qui oblige les Marchands de vin & de bière de conferver les urines dans des tonneaux. Les Entre- preneurs des boues de Paris les feroient enlever fur des haquets, & les feroient conduire à la nitrière. Daxs un fecond Écrit, il propofe d'établir dans les environs de Belleville des écuries banales , où l’on obligeroit les Carrofliers de remifes & les Entrepreneurs de fiacres de loger leurs chevaux pendant la nuit. On conçoit qu’une fimple idée , aufli impraticable dans l’exé- cution fur-tour que l’eft la dernière, ne pouvoit remplir ni le vœu du Gouvernement , ni celui de l’Académie, NÉ M OL RUES NA XV TE Sat cud f*** CE Mémoire eft rédigé par un homme inftruit. L'Auteur y établit, par des expériences qui ne font pas il eft vrai Les ones que l'acide nitreux n’eft une modification ni de l'acide vitriolique, ni de l'acide marin, & il affure même avoir toujours éprouvé que l'addition des acides minéraux retardoit en général la formation du Salpêtre. Il à fait aflez en grand un premiér mélange, compofé de Vitriol de mars. s 5." 2e tee Chaux Vive. + eines 0 eee ce ee LZ Urine'humaine putréfiée: NP ee Et un fecond, compofé de Miciol'de mars, PA MERE PR RES EP PATENT TES ONE A CNE AN Rage Qu pp ea 2 le À Bummier/1de, chevaux 2e ae in NE ere SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 13r Ces mélanges ont été mis fous un hangar, où ils font reftés pendant deux ans & demi; on les humectoit d'urine dès .que leur furface fe defféchoit. Ayant enfuite leflivé, le premier lui a donné du gipfe, du fel de Glauber, & du fel commun; & le fecond du gipfe, du fel commun, & beaucoup de matières grafles; mais pas un atome de Salpêtre. Cependant l'urine & fur-tout le fumier de cheval, donnent conftamment du Salpêtre par la putréfaétion ; c’eft donc le vitriol qui dans cette expérience a mis obftacle à la formation du Salpétre. On pourroit objecter à l’Auteur, que la chaux employée dans une trop grande proportion, peut nuire également à la formation du Salpêtre; de forte qu’on ne peut pas abfolument aflurer que l'effet qu'il attribue à l'acide vitriolique n’appartienne pas à la chaux. Il a répété les mêmes expériences avec de l’urine humaine , comme contenant beaucoup de fel marin, & il a fait en conféquence le mélange ci-après : Chaux vivent Mile en Mitie s her: Tsparte Ur hUMAMEMEL I EE MIS I ie co oretere 2 Un fecond mélange de Cha iMive ee NO SEM NE Re dodo el Urmerhumanmeïpourrien LE. re mieu Fumiernedescheval. en-lefele die ciele ete ecole tree) 13 Enfin un troifième Défcendre debout RTS. es AL RTE Urinethumanemponttess siens. cs eh plie 2 Ayant leflivé au bout de deux ans & demi, le premier mélange à donné du fel commun, point de nitre. Le fecond , beaucoup de matière grafle, du fel commun, point de nitre. Enfin , le troifième a donné du fel commun, un peu de tartre vitriolé, & une petite quantité de Salpêtre. L’Auteur conclut de ces expériences, que l’acide marin ne fe convertit point en acide nitreux, & fes conféquences à cet égard, ainfi qu'à l'égard de l'acide vitriolique, font très-vraies; mais elles ne découlent pas immédiatement de fes expériences; & la preuve que la trop grande abondance de chaux a nui à la formation du Salpêtre dans les quatre premières épreuves , C’'eft que dans la cinquième, où il a fubftitué de la cendre à la chaux, il a obtenu un peu de Salpètre. Une expérience plus concluante, que l’Auteur rapporte pour prouver que l’acide marin ne fe transforme pas en Salpêtre, c’eft que fi on icfive une terre falpétrée , & qu’on la replace fous des hangars pour la leffiver de nouveau, la quantité de fel marin va toujours en aug- mentant à chaque leflivage , tandis que le contraire devroit arriver fi. le fel marin fe transformoit en Salpétre. Un homme à fecrets avoit prétendu qu'en mélant enfemble du witiol & du fel commun, en faifant difloudre ces deux fels dans de R ij 132 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ l'eau, en y ajoutant du vinaigre, & en jetant le tout fur du fable ; dans des pots de grès, au bout de trois mois il fe trouveroit du Salpêtre tout forme à la furface du pot. L'Aureur ayant été à portée de répéter certe expérience , n’a obtenu que.du fel de Glauber, & point de nitre; il ajoute cependant qu'il a lieu de croire que l'acide du vinaigre n'eft pas inutile à la fabrication du Salpêtre. L'Aureur expofe enfuite fon-opinion fur l’origine du Salpêtre. Il le: regarde comme un fel minéral; mais communément fi difperfé & f enveloppé de matières hétérogènes , qu'il eft difficile de le reconnoïtre, La Nature emploie , fuivant lui, la végétation. pour le raflembler & pour le féparer des matières qui le mafquenr. C’eft dans les végétaux que le Salpêtre abonde, & l'Auteur penfe que les animaux n'en con- tennent- qu'autant qu'ils le tirent du règne végétal qui leur fert de nourriture ; aufhi prétend-il , fans. cependant citer les expériences par lefquelles il s’en eft afluré, que les animaux frugivores, dans leurs excrétions & dans leur urine , donnent beaucoup plus de Salpétre que les carnivores De ces principes , l'Auteur conclut que pour former du Salpêrre , il faut mêler avec les terres des fubftances végérales, des urines & des excrémens d'animaux frugivores ; .qu'il faut choifir les végétaux les plus siches en Salpêtre, comme les tiges de tabac; qu'il fauten bannir tout ce qui provient des animaux carnivores ; & l’Auteur va jufqu’à penfer que lurine humaine eft peu propre à la produétion du Salpêtre. D'après les mêmes principes , il préfère le fumier de chevaux & de brebis , à celui de vaches ou de taureaux , parce que les excrémens.des premiers font plus animalifés que ceux des feconds, & plus avancés vers. la décompofition: Enfin il prefcrit de faire un ufage modéré des matières abforbantes, telle que la chaux; d'employer pour mélange, fon- damental de la nitrière , de l'argile mêlée de fable, ou plutôt encore du terreau. La meilleure proportion , fuivant lui, eft de parties égales .de terreau & d'argile , ou de deux parties d’argile contre une de fable. Quant aux liqueurs qu’on doit employer pour arrofages, il préfère l'urine de chevaux, & il confeille d’enterrer, dans la partie bat des écuries, des tonneaux à fleur de terre, pour la recueillir. A défaut d'urine de chevaux, il propofe d'y fuppléer par des égouts de fumier , par des infufons de plantes fucculentes, enfin par de l’eau pure. A l'exception de la fiente & de l'urine des animaux frugivores ; l’Auteur penfe que toutes les matières animales ne conviennent pas à la formation du Salpêtre. It exclut & avec raifon le poil & les cornes, qui ne fonr fufceptibles que d’une décompofition extrêmement lente: mais c’eft à tort qu'il s'élève contre lufage du fang , dont l'efficacité à été reconnue par MM. Thouvenel & par plufieurs autres. Enfin les faumures dans lefquelles la viande ou le poiflon ont féjourné,, lui paroiffent également nuifbles , fur-tout à caufe de la grande quantité de fel marin qu’elles introduifent. À l'égard des végétaux , il excepte les bois & les écorces, SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 13; le tan , le charbon de bois, & généralement toutes les matières végétales d'une décompofirion difficile. Après ces préliminaires , l’'Auteur paffe à l’établiffement des nitrières. Entre les différens moyens qui ont été propofés pour les former, il donne la préférence aux hangars; quoiqu'il ajoute à cet égard peu de chofes aux connoiflances acquiles , on ne regarde pas cependant comme inutile de donner ici le détail de fa manipulation. Il met d’abord fur le fol du hangar un mélange de moitié argile & moitié terreau de jardin , ou de deux tiers d'argile & un tiers de fable ; il élève le tout à la hauteur d’une demi-aune (*). Il ajoute, 1°. tiges de tabac ou autres végétaux non décompofés , mais riches en Salpêtre. . . ? aune. NO RAM Se NA ARTE LE Pet ere onine ut E d'autne, 21Gendres(deibois#.ns smile fn asie ep ane col fete sidaune. 4%. Même mélange de terre que ci-deflus. . . ... .…. .…. ... !d’aune. 1] continue ainfi, fératum fuper ftratum jufqu'à la hauteur de fix ou fept aunes. À défaut de végétaux non décompofés , il confeille l’ufage du fumier, & ce dernier même lui paroït préférable à beaucoup d’égards. H faut éviter de mettre trop de chaux, parce qu’en trop grande dofe elle feroit plus nuifible qu'utile. En formant ces couches, on les arrofe d’eau de fumier ou d'urine de chevaux; enfin quand la couche eft fuffifamment élevée, on la couvre de paille, pour conferver la chaleur & exciter le mouvement de fermentation. De temps en temps on doit arrofer le mélange, pour y entretenir l'humidité; mais 1l faut bien fe garder de trop arrofer, dans la crainte de troubler la fermentation. A mefure que la décom- pofition s'opère , & que les matières fermentefcibles fe sèchent & fe rapprochent de l’état terreux, la couche s’affaifle , & le Salpêtre fe déve- loppe. On peut recharger la couche, fi on le juge à propos, pour l'entretenir à peu près à la même hauteur. C’eft ordinairement au bout de deux ans que la fermentation eft complette, & on s’en apperçoit parce que la mafle ne s’affaifle plus ; alors on ôte la paille, on retourne , on mêle bien les matières de chaque kit, on arrofe le tout, puis on reforme la couche, & on la recouvre avec la même paille ; fi on s’appercevoit que la matière fût trop grafle , . on ajouteroit de la chaux. Après que la mafle a été retournée, on doit y ajouter tous les deux mois une couche de fumier frais, d’un quart d’aune d’épaifleur , & on ne doit cefler que deux mois avant de leffiver : ce fumier n’eft pas perdu , il rentre dans la couche quand elle a été leffivée & qu’on la reforme. L’Auteur affure que fi la nitrière à été bien conduite, & qu’elle ait été arrofée & nourrie convenablement, on peut laleffiver au bout de trois ans; {*) Comme on ignore le pays dans lequel ce Mémoire a été rédigé, on ne peut avoir aucune idée de la valeur de l’aune qu'il a employée, 134 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ mais qu'il vaut mieux attendre jufqu’à quatre & même jufqu'à cinq; & qu'alors elle donne quatre livres par tonneau. Il annonce s’en être afluré par des opérations en grand , qu’il avoit commencées lang-temps avant qu'il füt queftion de la propofition d’un Prix {ur la fabrication du Salpètre. Il ne donne au furplus aucuns détails fur les dimenfions du tonneau; mais en fuppofant que ce foit des demi-queues , jauge de Bourgogne , ce feroit environ une livre par quintal, ce qui eft aflez confidérable , fur-rout fi l’on confidère que prefque tout ce Salpêtre eft à bafe d’alkali fixe. Si au lien d'attendre quatre à cinq ans, on leflive au bout de deux, on obtient une terre rougeatre qui fufe aflez bien fur les charbonss au bout de la troifième année, la leflive donne des criftaux, quoiqu’avec uelque difficulté, & ‘on ne peut en retirer. de Salpêtre qu'après plu- de criftallifations & purifications , à caufe de la matière grafle qui y adhère; encore le Salpétre qu'on obtient eft-il en petite quantité. Enfin ce n'eft, comme on l’a dit, qu'à la fin de la quatrième ou dans la cinquième année qu’on obtient les quatre livres par tonneau. D’après ces principes , l’Auteur conclut que pour délivrer les parti- culiers de la fouille, le Gouvernement n’a pas de meilleur parti à prendre que de conftruire pour fon compte des nitrières; qu'il peut obliger les Communautés à fournir chaque année une certaine quantité de fumier, pour prix de l’exemption de la fouille. Ces nitrières feroient abandonnées à des Salpêtriers qui en remettroient le Salpêtre à l’Adminiftration , à des conditions convenues. L'Auteur penfe qu'il feroit à propos de remplir, pour la première fois, les hangars ou nitrières du Gouvernement , de terres nitreufes provenant de la fouille des habitations ; par ce moyen on auroit, dès le premier inftant , une récolte de Salpètre, & en arrofant & traitant convenablement ces terres , ‘elles deviendroïient très-riches. L'Auteur penfe même qu'il feroit à propos de ne pas exempter à perpétuité les particuliers de la fouille. Il paroïît craindre que les terres des nitrières ne s’épuifent à la longue , & il voudroit qu’on les renouvelät au bout de quelque temps , de vingt ans, par exemple, avec des terres provenant de nouveau dé la fouille; il n’en réfulteroit pas une charge rrès-confi- dérable pour le Public, & le fervice feroit plus afluré. Telle eft la fubftance du Mémoire N°. XIII du fecond concours; il contient des expériences bien faites ; il eft rédigé par un homme d’un efprit droit & fage , & les moyens qu'il propofe ne peuvent manquer, d’après ce qu’on connoît déjà, d’avoir un fuccès réel : cependant l’Aca- démie n'a pas jugé qu'il contint rien d’aflez neuf pour avoir droit au Prix, ou à un Acceñlit, & elle s’eft contenté d’en faire une mention honorable lorfqu’elle à décerné le Prix. æ) , (Ne TA FVa SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 135 MobM One RE ON noi 1. Qu'il eft doux de fervir utilement fon Roi & fa Patrie! CE Mémoire cft un fupplément à celui N°. V du premier concours. L'Acreur pofe de nouveau pour principe , que fans putréfaétion , point de Sabre . & que fans air humide, point de putréfaétion. Il annonce que depuis le fecond Programme de l'Académie , il a leflivé beaucoup de pierres , de terres calcaifés & de marne, fans y trouver le moindre atome de Salpètre. Enfin il aflure que de tous les matériaux propres à Ja produétion de ce fel, les terres végétales font celles qu'il préfère à routes , même à celles de fouille : ces dernières contiennent, il eft vrai, du Salpètre tout formé; mais les premières ont une difpo- fition très-prochaine à en produire & en plus grande abondance. Les meilleures terres végétales font, fuivant l’Auteur, celles qui fe trouvent au pied des côteaux , fous des Che de vigne; c’eft le limon des terres cultivées. Les dépôts formés dans les bois & dans les taillis, où le Soleil ne pénètre pas, font aufli, felon lui, très avantageux, fur- tout quand les feuilles s’y font accumulées, & qu’il n’y a point eu de courant d’eau qui les ait lavées. Ces terres doivent être portées fous des hangars & remuées fréquemment; il perfifte à confeiller | comme dans fon premier Mémoire , de les arrofer avec de la vinafle ou réfidu de la diftillarion du vin, & avec de l’eau de morue. Les terres de cime- tière feroient préférables à routes les autres , fi un préjugé religieux ne s’oppofoit pas à ce qu’elles fuffent employées. L’Auteur obferve que dans les pays de plaine , on trouve rarement l’efpèce de terre ou de terreau propre à la formation du Salpétre; il propofe d'y fuppléer en accumulant des plantes , & en les laiffant pourrir, Il penfe que fi on inftruifoit le peuple des campagnes des procédés relatifs à la fabrication du Salpêtre , il s’en occuperoit avec plaifir, & que ce feroit une nouvelle branche de produit & d’induftrie, Ce Mémoire , quoiqu'annonçant de bonnes vües dans Auteur , ne contient rien d’aflez neuf, & fur-tout point aflez de faits pour lui donner droit, ni au Prix, ni à un Acceflit. x PE el 136 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ RRPRLA 7 PSE LT ce mao ER ES DER de GS CET EE DER RPG EE CUT DAS ART AR NPÉAM OT E "NOV L'Écrir reçu par l'Académie , fous ce numéro, eft très- cowt, & il cit deftiné à fervir de fupplément à un des Mémoires adreflés au premier concours, L'Avreur propofe d’obliger toutes les Communautés de quelque impor- tance à entretenir un Salpêtrier. A l'égard desParoifles qui feroient trop peu confidérables, elles fe réuniroient plufeurs entre elles ; la Communauté fourniroit au Salpêtrier des cuveaux & une chaudière. Chaque particulier feroit tenu d'entretenir chez lui, dans un coin de hangar ou autre lieu bas, de la terre propre à fe falpêtrer, & de la donner à lefliver au Salpétrier : la quantité en feroit fixée en raifon des befoins du Royaume. Le tranfport & le remplacement des terres feroit à la charge du Sal- pêtrier; il n’y auroit d'exception que pour les fermes éloignées, qui feroient obligées d'amener elles-mêmes leurs terres, & le Salpêtrier {eroit tenu de les reporter après les avoir leflivées. Dans le cas où les Communautés préféreroient de former un hangar, ce feroit à elles à s'entendre fur cet objet avec le Salpètrier. Ce fupplément ne contient, comme l’on voit, que des idées connues; il eft d’ailleurs certain que l'entretien d’un Salpètrier feroit plus à charge aux Communautés , que la fouille elle-même dont on veut les délivrer. Le remède propofé eft donc pire que le mal; ainfi ce fupplément ne remplit pas mieux que le Mémoire les vües du Programme, ERP RC EEE PE ERP PAC HE EN CEE ER ARE Pme Res DRE ME MOLRE NU V [L L'AcaDéMmie n'a reçu fous ce numéro qu'une fimple note; dont voici la fubftance, L'Aurrvr a fair enterrer dans le fumier de fa bafle-cour des briques neuves : après un mois il les a fait retirer, & en a fait conftruire un mur dans une cave, en employant pour mortier une argile jaune. Il a fait enfuite appliquer fur ce mur un enduit fort mince d’un moitier de chaux, de ierres bleues, & de fable jaune. Du mois de Septembre au mois de Déembre fuivant , le mur étoit sout couvert d’efflorefcences falpérrées. Il a fait conftruire un mur femblable , avec des briques neuves qut g'avoient pas féjourné dans le fumier, & le réfultat a été le même. Il y SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 137 ÿ à toute apparence que l'argile jaune qui a fervi à faire le mortier, contenoit du Salpêtre avant que d’être employée ; le peu de temps attribué à la formation de ce fel, en fournit une efpèce de preuve. Cette obfervation ifolée, dont le réfulrat même eft équivoque , a paru ne donner à l'Auteur aucun droit, ni à un Prix, ni à un Accellir. NUE MO LAURE ANR Ve FU Non omnis fert omnia tellus. « L'Avrrur annonce dans une note, que cetre differtation n’a point été compofée dans la vûe de concourir au Prix propofc par l'Académie, qu’elle faifoit partie d’un Ouvrage confidérable fur la culture des Ardennes, compofé avant l'époque de la publication du Programme, & qu'on a engage l’Auteur à envoyer ce Chapitre au concours, comme pouvant remplir l'objet de l'Académie ; c’eft en conféquence , particulièrement pour les Ardennes, qu'il a travaillé; mais il penfe que les mêmes principes peuvent s'appliquer à d’autres pays. Il établit dans un premier paragraphe, que la fabrication du Salpêtre peur s’allier avec les travaux de l'Agriculture; que cette fabrication pourroit être fuivie avec fuccès & avec avantage par les riches propriétaires de terre qui font valoir par eux-mêmes, & fur-rout par ceux qui ont de nom breux troupeaux, par les Abbayes , & par les Communautés religieufes qui cer les mêmes avantages & qui ont beaucoup de domeftiques; enfin par les Gentilshommes de campagne que la culture des terres n'occupe pas également toute l’année, Le fecond paragraphe traite de la combinaifon des élémens en général, les uns avec les autres, & de la formation du Salpêtre; mais l'Auteur n’eft point à cet égard au niveau des connoiffances acquifes: au refte 1 annonce lui-même que fa théorie eft indépendante de fes moyens de fabrication. Il penfe que les Ardennes font aufli propres qu'aucun autre pays à la fabrication du Salpètre , & il en cite une preuve de fait; c’eit qu'il exiftoit, il y a environ quatre-vingts ans , dans le bourg de Saint- Hubert , deux frères qui y avoient établi une fabrique de poudre, & qui trouvoient dans les environs tout le Salpêtre qui leur étoir néceffaire ; ils fe font enrichis dans cette fabrique , dont la poudre avoit acquis beaucoup de réputation. La porafle n’eft pas rare dans les Ardennes, & il y a des particuliers qui en fabriquent, On peut d’ailleurs fe procurer abondamment des S 138 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ cendres, en brülant des genêts; de forte que pour la fabrication du Salpêtre il ne manque que la pierre calcaire. On doit peu compter dans les Ardennes , fuivant l’Auteur, fur les. matériaux de démolitions , parce que la pierre calcaire & la chaux y étant rares, on en emploie peu dans les bâtimenss mais les terres de fouilles font riches , fur-tout celle des écuries , des granges, & des bergeries. Ces terres , quoique non calcaires , n’en font pas moins falpétrées , & les Ardennes ont à cet égard l'avantage de renfermer un grand nombre de beftiaux. Il défireroit que la fabrication du Salpêtre ne s’y fit point par des Compagnies ou des entreprifes; mais, comme on l’a déjà dit, par les Gentilshommes , les riches propriétaires & les. Abbayes. Il y a beaucoup de vieux châteaux, de portions de mo- naftères abandonnées, où l’on pourroit établir des dépôts de terre & des ateliers. ; L’Auteur propôle de mettre en pratique ce qui eft déjà ufité dans lufieurs des établiflemens de la Régie des poudres; c’eft de conftruire es fourneaux deftinés à échauffer les chaudières d’évaporation , de manière que la flamme & la fumée paflent, avant de fe dégorger dans la cheminée , fous une feconde chaudière pour l’échauffer : cette mé- thode eft très-économique ; mais les conftructions que la Régie des poudres a fait faire d’après ces principes, font préférables , & rempliffenc mieux leur objet que celles propofées par l’Auteur. Il confeille aux Cultivateurs de lefliver leurs terres en hiver , après les femailles, & de répandre les terres leffivées dans les champs, pour leur fervir d'engrais ; d’amafler enfuite de nouveau des terres de granges, d'écuries, & de bergeries, pour les lefliver & les répandre de nouveau, & de même chaque année. Il les engage aufi à faire ufage des murailles nitreufes, & il en refcrit ainfi qu'il fuit la compofition : Sur cent livres de terres de Ééones ou de décombres de plâtras paflés à la claie, on ajoute deux livres de fente de poules, quatre livres de crotin de chèvre ou de brebis , fix livres de petit fumier de brebis ou de chevaux, autant de paille ou de branchages de menus genêts féchés, cinq livres de cendres, & cinq livres de fel commun; on mêle toutes ces fubftances à la pelle, en les arrofant d'urine; en en fait enfuite des briques dans un moule de fer, & on les fait fécher à l'air dans un lieu couvert; on forme en même temps des murs avec le même mortier qui a fervi à faire les briques. Les murs doivent avoir plus d’épaifleur à la bafe qu’en haut; lorfqu'ils font achevés , on les revérit de deux côtés, en dehors, avec les briques dont on vient de parler; on peut en employer de plus fortes dans le bas, & de moindres dans le haut : on doit ménager des trous de diftance en diffance dans ces murailles ; on fe fert à cer effet de rondins de bois, qu’on retire quand le mur eft un peu confolidé : on peut donner , fuivant l’Auteur , à ces murailles quatre à cinq pieds de hauteur , deux pieds & demi d’épaiffeur à la bafe, & un pied & SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 139 demi feulement dans le haut. Il prefcrit de former , fur la partie fupé- rieure, une rigole deftinée à recevoir des arrofages d’urine & d’eau de fumier , qui s'imbiberont infenfiblement dans la terre. L'achar du {el fera fait une feule fois pour toutes, & on en obtiendra enfuite abondamment de chaque cuite. Quant aux engrais, il fe per- fuade qu'ils ne feront pas perdus, & qu'ils pourront rellervir lorfque les murs auront été lellivés; mais à cet égard il eft dans l'erreur , & ces matériaux ne pourroient fervir comme engrais, qu’autant qu'ils contiendroient encore ou du Salpêtre où des matières encore fufcepubles de putréfaction ; & dans les deux cas on ne pourroit les tranfporter dans les champs, fans que ce ne füt en diminution du produit de Ja nitrière. Il prefcrit de laiffer ces murs en place pendant une année, enfuite de les détruire , d’emplacer les matériaux dont ils étoient formés fur des planches, de les remuer à la pelle & avec des rateaux de fer, en les arrofant encore, fi l’on veut, avec des eaux de fumier’, de l'urine & des lavures de vaiflelle. Enfin 1l annonce qu’au bout d’une feconde année ces terres feront propres à être lelivées. Les mêmes terres peuvent fervir à reformer de nouveaux murs, & l’Aureur penfé avec raifon qu'on peur les lefliver deux ou trois fois avant que de les rendre aux engrais. Si les murailles fe falpétrent promptement , on peut en balayer la furface pour obtenir du Salpêtre de houffage. L'Auteur confeille , avant de remplacer les terres falpètrées dans les granges & écuries, de mettre par-deflous une couche plus ou moins épaille de fciures de bois ou d’écorces de Tanneurs; il prétend, & il y a quelque lieu de le croire, que la nitrification en {era plus abondante. Il pafle enfuite à la leflive des terres & à l’évaporation; mais loin que fon Ouvrage contienne rien de neuf fur cet objet, il n’elt pas même au courant des connoiffances acquifes. Il explique cependant fort bien le mécanifme de la féparation du fel marin & du Salpétre dans le raffinage; mais en cela il n’ajoute rien à ce que contient le Mémoire de M. Petit de l’Académie des Sciences. Il confeille , avant de mettre à criftallifer , de laifler repofer & d’épurer la liqueur, & cette méthode eft bonne. Enfin il entre dans quelques détails relatifs au raffinage du Salpétre , & il prefcrit d'y employer l’alun. Quoique ce Mémoire contienne des réflexions judicieufes, cependant, comme elles ne font point nouvelles, que la plupart des faits qu'il préfente font connus, les Commiffaires de l’Académie ont penfé que FAuteur n’avoit aucun droit, ni au Prix, ni aux Acceflit. LD 140 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ EEE TEE MR MENT ATEN PS RETRO EPP EEE EEE PRPEEENE AE PAR OT Ie MOI RE N'a MER QUI À PARTAGÉ LE SECOND PRIX. Par M. CHEVRAND, Infpeëteur des Poudres & Salpétres à Befançon. Nec fpecies fua cuique manet, rerumque novatrix Ex aliis alias reparat Natura figuras. Ovio. Liv. XV. Mét. CE Mémoire eft une fuite de celui que l'Académie a reçu lors du premier Concours, avec la même devife & fous le N°. XXXIIL. L'Avreur annonce que depuis la rédaétion de fon Mémoire, il a fenti combien il étoit important pour lui d'examiner fi les moyens connus dans certaines Provinces, pour fabriquer du Salpêtre , Fétoient égale- ment dans routes, & qu'il a cru devoir en conféquence profiter du délai accordé par l'Académie, pour parcourir la plus grande partie des Provinces de France. Le but qu'on doit fe propofer , dit l'Auteur, n’eft pas d'établir em France une récolte de Salpêtre fort fupérieure à fes befoins; il n’eft pas queftion de chercher à forcer nature, & de vouloir créer une fabrication de Salpêtre dans les Provinces qui, par leur fol & par les circonftances où elles fe trouvent , fe refufenr à cette production; telle eft par exemple la Bretagne..On ne doit pas s'attendre non plus que la fabrication du Salpêtre fera de grands progrès dans les Provinces où les bras font rares, & où les hommes peuvent s'occuper d'objets d’in- duftiie plus lucratifs ou moins pénibles; mais en abandonnant même la fabrication du Salpêtre dans tous les lieux qui ne paroiflent pas propres à cette production , il refte encore en France des reflources immenfes : le Mémoire dont on va préfenter l’extrait et un dévelop- pement de ces vérités. Avant de parler des moyens que l'Art peut fournir pour augmenter la récolte du Salpêtre en France, l’Auteur croit devoir commencer par expofer ceux que la Nature préfente , & il traite en conféquence, * p” SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 141 dans un premier article, du Salpêtre qu’on obtient des matériaux de démolitions. La ville de Paris offre à cet égard des richefles très-confidérables; mais il prétend que les Salpétriers font bien éloignés de favoir en profiter. Lorfqu'un bâtiment eft démoli, les vingt Salpetriers de Paris ont également droit aux matériaux falpétrés qui en proviennent. Pour éviter qu'on ne les trompe & qu'on ne fafle des démolitions à leur infçu , ils ont chacun un Commis , connu fous le nom d'Homme de ville, dont les fonctions confiftent à aller à la découverte & à veiller à l'enlèvement & au tranfport des matériaux falpétrés ; mais PAuteur obferve que ces furveillans , payés fort cher, mettent la plus grande négligence dans leurs recherches ; d’un autre côté, le Maitre Maçon , dont l'intérêt eft fouvent oppofé à celui des Salpêtriers, s'emprefle de confondre les matériaux falpétrés avec ceux qui ne le font pas, & il £e perd ainfi une grande quantité de Salpêtre. Pour remédier à cet incon- vénient, M. Chevrand voudroir qu'il füt établi dans chaque quartier un magafn où feroient entrepofés les matériaux falpétrés. Les enlèvemens poürroient fe faire beaucoup plus vite, & les Maïtres Maçons ne feroient pas dans le cas de fe plaindre de la lenteur qu’on apporte ordinairement dans ces fortes de travaux. Sans chercher à détruire les objeions de M. Chevrand , contre l’ufage établi depuis très-long-temps à Paris pour la collection des matériaux falpétrés , on obfervera qu'il eft plus aifé de voir les inconvéniens de ce qui exifte, que ceux d’un ordre de chofes qui n’exifte pas.. S'il étoit queftion de défendre les Réglemens actuellement exiftans, on feroit remarquer qu'il exifte à Paris vingt Salpêtriers qui tous ont droit aux démolitions de tous les bâtimens qui fe font dans la ville; que le plus diligent a la préférence fur ceux qui arrivent après lui, & ainf fucceflivement nn vingtième, Or, on le demande, y a-til un moyen plus propre à empêcher qu'il ne fe perde des matériaux fal- pètrés, que d'admettre la concurrence de vingt perfonnes, toutes inté- reflées à les éplucher & à ne rien laïfler perdre de ce que l'on peut travailler à profit? Il feroit fans doute poflible , & peut-être même avantageux, de modifier le fyftême actuel de la fabrication du Salpêtre à Paris; mais un changement de cette nature ne peut être entrepris u’après avoir été bien médité, & il entraïîneroit néceflairement une: Due d'opérations fubféquentes qui conduiroient vraifemblablement beaucoup plus loin que l’Auteur ne l’a prévu. Ce qu'il avance au furplus fur la dépendance où les Salpétriers font: de leurs Ouvriers, eft bien plus certain; il n'y a aucun doute qu'il ne fût très-avantageux pour eux de fubftituer une machine menée par un: cheval, où même par des hommes, aux bras qu'ils emploient pour broyet leurs matériaux falpétrés; c’eft ce que font une partie des Sale. pêtriers de Touraine; c’eit ce que fait depuis plufieurs années le Salpétrier de Saint-Denis. Vraifemblablement fon exemple entrainera vous les 142 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ autres. 11 n’eft pas moins vrai, comme l'avance l’Auteur , que l’art de fabriquer le Salpêtre eft peu avancé à Paris, que les Salpétriers leffivent mal , qu'ils n’introduifent jamais dans leurs eaux de cuite une fuififante quantité d’alkali, qu'ils n’opèrent jamais fur des eaux faturées ; & il en condlur avec beaucoup de raifon, qu’en rectifiant ces vices dans la fabrication , la ville de Paris & une grande partie des grandes villes du Royaume peuvent fournir une augmentation de récolte très-confidé- rable. La Régie des poudres, qui depuis long-temps eft frappée de ces confidérations , a fait en conféquence des établiflemens à Marfeille, à Bordeaux , à Lyon, à Rouen, à Lille, & elle en fera fucceflivement dans toutes les villes du Royaume où elle le pourra, & où la nature du foi & celle des matériaux qu’on emploie à bâtir, promettent quelque fuccès. Des matériaux de démolition, l'Auteur paille, dans un fecond article, aux tuffaux de Touraine & aux craies naturellement falpétrées qui fe trouvent dans plufeurs cantons de la France , principalement dans la Généralité de Paris & de Rouen. Ces deux matières peuvent encore fournir des reffources , pour ainfi dire , illimitées pour la produétion du Salpètre. La craie fur-tout à tant de difpofition à fe falpétrer , au moins celle de certains cantons, que par la fimple expoñion à l'air elle acquiert en peu de temps, fuivant l'Auteur , dans l'efpace d'une année, par exemple, jufqu'à deux livres de Salpétre par quintal. La craie falpétrée qui a été lefivée, n’a pas moins de difpofition à former de nouveau Salpètre; pour peu qu'on lui donne de légers arrofages de fucs de végétaux , elle peur être leflivée au bout d’un an, & l'Auteur cire en preuve les expériences dont il a été lui-même témoin dans les établiflemens de Montereau & de la Roche-Guyon. JL penfe au furplus qu'il vaut mieux ne lefliver qu'au bout de deux ans, & qu'on eft indemnifé avec avantage de ce retard par l’augmen- tation du produit. Il n’eft donc pas nécellaire, pour fabriquer du Sal- pêtre avec de la craie , de trouver des furfaces déjà falpérrées; il fufhie d’avoir de la craie, d'en former des couches, & de les arrofer avec de l’eau de fumier , de l’eau de buanderie & de l’eau falpêtrée à un demi degré de l’aréomètre; en fix mois de temps, on aura des progrès allez rapides, pour ne pas pouvoir douter du fuccès de l'entreprife. Il exhorte au furplus tous ceux qui voudroient fe livrer à ce genre de travail, à faire des effais fur un tombereau de craie, avant de former de grandes entreprifes. M. Chévrand obferve que dans les pays de craies, les terres des habitations font naturellement très-falpêtrées, & il confeille de les em- ployer de préférence dans les établiffemens de nitrières. Ces terres doivent être d’abord pañées à la claie pour en féparer les pierres; enfuite on les leflive, après quoi on les méle avec de la craie, on les arrofe d’eau de fumier ou d’eau de buanderie, & on en forme des couches de quatre pieds de haut fur toute la longueur & la largeur du hangar, Il prévient, dans un autre endroit de fon Mémoire , l'objection SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 143 qu’on pourroit faire contre la trop grande épaifleur des couches , & il prétend qu’elle n’empêche pas qu’elles ne fe falpêtrent jufqu’au centre; mais les Commiflaires de l’Académie ne font pas de fon avis , & ils fonc perfuadés qu’au delà d’un pied & demi ou de deux pieds d’épailleur, la nitrificarion eft nulle ou au moins très-lente. M. Chevrand penfe que les hangars doivent être fermés en dehors, & une longue expérience a confirmé les Régifleurs des poudres dans cette opinion. Il confeille d'employer à cer effet des murs faits avec de la craie moulée entre deux planches ; certe craie doit être délayée avec l’eau de fumier & de buanderie, & même avec de l’eau falpêtrée , pour accélérer la nitrification. En fuivant cette méthode & en conftruifant trois hangars, on pourra y emplacer trente-fix mille pieds cubes de craie falpétrée, qui, au bout de trois ans, donneront deux livres de Salpétre par pied cube. Quoique l'Auteur prétende avoir la preuve d'un produit aufli confidérable dans la nitrière de M. le Marquis de Chaumont à Mon- tereau , les Commiffaires de l’Académie font fondés à le croire forcé. Il fe peut bien que dans le voifinage des furfaces, la quantité de Sal- pêtre aille jufqu’à deux livres & plus par pied cube ; mais dès que les malles deviennent un peu épaifles , les quantités font fouvent beaucoup moindres , de forte que fur une épaifleur de deux à trois pieds, on ne peut compter que fur une livre par pied cube tout au plus. L'Auteur infifte pour qu’on ne leffive pas avant un délai de trois ans, non que la quantité de nitre augmente beaucoup pendant les derniers temps, mais parce qu'une partie du Salpètre qui étoit à bafe terreufe, fe convertit en Salpêtre à bafe alkaline , au moyen de l’alkali provenant de la décompofition des végétaux , & il en réfulte une économie d’une grande importance fur la quantité de cendre ou de potaile néceffaire à la faturation. L'article quatrième traite d’une difficulté très-grande , qui fe rencontre fouvent dans le lefivage des craies. Ces terres fe pelottent dans les cuveaux, & elles forment une mafle continue que l’eau ne peur pénétrer. M. Chevrand prefcrit, pour lever cette difficulté, de féparer , par le moyen d'un rateau , la craie en morceaux, de celle en poudre , de lefliver la première à l'ordinaire dans des cuveaux peu profonds. Quant à la feconde , il confeille de la traiter par le braffage, c’'eft-à-dire, de la délayer dans l’eau, & d'obtenir la liqueur falpétrée par dépôt & par décantation ; mais il ajoute que la méthode du braflage eft moins avantageufe que celle de la filtration , qu’on a moins de produit à dépenfe égale ; d’où 1l conclut qu'on ne doit avoir recours à la première que quand on y eft abfolument forcé par la nécelliré. Après avoir expofé les reflources que la France peur trouver pour: la fabrication du Salpêtre, dans: les démolitions des villes, dans les tuffeaux & les craies falpétrées, M. Chevrand pafle aux moyens d’ajouter au Salpêtre qui fe forme naturellement dans le Royaume , celui qu’on peur y produire artificiellement. Il avoit propofé dans le premier Mémoire, 144 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ qui avoit été admis au concours, fous le N°. 33, de conftruire des hangars-écuries; il prétend avoir vu la preuve des avantages de ces établiffe- mens dans le Berri, où des bergeries de cette efpèce rendent une quantité extrêmement confidérable de Salpêtre; mais on ne peut nier que l’érablif- fement de bergeries banales, où l’on forceroit les habirans de Îa cam- pagne de mener leurs moutons & leurs chèvres, n’ait de grands inconvéniens. Ce {eroit remplacer la gène de la fouille , qui ne revient que tous les trois ans, par une gêne habituelle & journalière , & contre laquelle on feroit d'autant plus en droit de réclamer, qu'en cas de maladies épizootiques , cette méthode tendroit à propager la contagion. L’Auteur au furplus, fans infifter fur ce projet, pale aux moyens qu'il regarde comme les meilleurs pour l'établiflement des nitrières. Il paroiït avoir vifité toutes celles du Royaume , & noramment la plus grande partie de celles établies en Franche-Comté à l’époque de la rédaction de fon Mémoire. Il obferve d'abord, que de tous les établiflemens faits avec de la terre neuve , aucun n'a encore réuili; il a fait lui-même des épreuves à ce fujer. La nitrière de Dijon en préfente une expérience très en grand, & il en réfulre que des terres neuves, quoique parfaitement bien traitées, ne donnent qu'un produit très-médiocre au bout de trois ans. La méthode la be füre eft donc de former le fond de la nitrière de terres de fouilles déjà falpêtrées; on eft für alors d’une première récolte très-abondante : quant à la régénération, comme il faut trois ans pour lopérer, il n’y avoit point encore , lors de la rédaction de fon Mémoire, de nitrière en Franche-Comté où l'on für au fecond leflivage; mais il annonce avoir effayé les terres de plufeurs nitrières qui avoient deux ans & demi de repos, & les avoir trouvées plus riches, même qu’elles ne l'étoient avant leur premier leflivage. Il cite la nitrière d’Arbois , celle de Beaume-les-Dames , & celle de Serre , fur lefquelles il a été à portée de faire ces obfervations. Enfin, pour êrre en état de juger par lui- méme de ce fait important , il a mis fous un hangar ifolé, un mélange de terres qu'il avoit précédemment leflivées jufqu’à zéro. Au bout de trois ans, traitées avec parties égales d’eau, elles ont donné trois degrés au pèfe-liqueur du Salpétre , ce qui indique trois livres de matière faline par quintal; ce produit eft fi confidérable, qu’on pourroit craindre que PAuteur ne s’en für impofé à lui-même. Il exifte déjà cinquante-quatre nitrières en Franche-Comté; leur arron- diflement eft formé d’un certain nombre de villages. La quantité de nitrières que cette Province pourra alimenter, quand tous les efpaces vides feront remplis , fera de quatre-vingts environ. De ces établiflemens il y en aura un tiers qui pourront fournir l’un dans l’autre chacun vingt milliers par an; & les deux autres tiers dix milliers; d’où l’on voit qu’il eft poflible que la récolte du Salpêtre en Franche-Comté foit portée un jour à plus d'un million. Il ne s'agit donc que d’érendre la même méthode aux diférentes Provinces de France qui en font fufcepubles, & on aura beaucoup SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. t45 beaucoup plus de Salpêtre que le Royaume n’en peut employer. Quand ces réfultats feroient forcés, méme de moitié, il en réfulrera toujours que la Franche-Comté produira par les nitrières au moins cinq cent milliers de Salpètre, tandis que par la fouille, la récolte n’a jamais été à quatre cent milliers. Il eft vrai que ces établiflemens ne pourront fe fourenir qu’autant que le Salpétre fera payé plus cher par le Roi , que celui provenant de la fouille. Deux obftacles principaux fe font oppofés jufqu'ici à ce que la fabri- cation du Salpétre s’introduisit dans un grand nombre de Provinces : la difetre du bois, & celle de cendres; mais on fait aujourd'hui remplacer le bois pour le travail du Salpêrre avec.le charbon de terre & la tourbe; on fait fubftituer la potafle à la cendre : ainfi il n’y a pas de Province, à l'exception peut-être de la plus grande partie de ia Bretagne , où l'on ne puifle fabriquer du Salpétre. Les Arrêts du Confeil, du 8 Août 1777 & 24 Janvier 1778, défendent aux Salpétriers & Entrepreneurs de nitritres, d'enlever les terres fai- pétrées des caves, celliers, & des lieux d'habitation perfonnelle. L’Auteur obferve que ces difpofitions ont retardé confidérablement la formation des nitrières, & qu’elles ont fufpendu les progrès de la récolte du Salpêtre. Il n’y a de terres falpétrées en Bourgogne que dans les caves & celliers; & comme aux termes des Réglemens qu'on vient de citer, il n'eft pas permis de les y prendre, il eft très-difficile d’y former un premier fond de nitrière. Il penfe qu'on auroit dû diftinguer les Entre- preneurs de nitrières, d’avec les fimples Salpêrriers, & permettre aux premiers , une feule fois pour toutes , l'enlèvement des terres, même dans les caves & celliers : enfin les foulagemens accordés aux Commu- naurés les ont refroidies {ur l’établiflement des nitrières qu’elles défiroient toutes en Franche-Comté, & auxquelles elles refufent aujourd'hui de contribuer. Dans les articles fuivans, M. Chevrand traite de la conftruétion des hangars, de l'emplacement & de l'entretien des terres, du leflivage, de la faturation du nitre à bafe terreufe , de l’évaporation. Les Commiflaires de l’Académie ne le fuivront pas dans ces détails, qu'il faut lire dans le Mémoire même; on y reconnoit par-tout un homme éclairé, qui a beaucoup obfervé & qui a bien obfervé. Ce Mémoire eft terminé par une diflertation très-courte {ur la for- mation de l'acide nitreux. M. Chevrand penfe d’abord que le Salpètre ne fe forme pas dans les plâtras, qu'il ne s’y introduit que par voie d’imbibition; mais il ne rapporte aucune preuve de cette aflertion, qui paroït au moins très-hafardée, d’après les expériences des Commillaires de l Académie, Il a analyfé avec grand foin les craies propres à fe falpétrer , efpé- rant y trouver quelques Principes particuliers qui expliqueroient cette propriété ; mais fes expériences ne lui ont démontré que de la terre calcaire. Il a obfervé feulement qu’elles noirciffoient un peu l'argent, & donnoient un phlegme légèrement acide par la diftillation. 1 146 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Il admet, d’après quelques Chimiftes avec lefquels ils annonce avoir eu des converfarions , que le gas putride eft néceflaire à la formation de l'acide nitreux, & il ajoute en même temps que le concours de l'air n’eft pas moins effentiel : en effet, ayant renfermé des matières putrides & de la terre dans un ballon de verre, il n'a obtenu aucun atome de Salpètre. L'Aureur ne poufle pas plus loin fes réflexions théoriques fur la formation de l'acide nirreux, & à cet égard fon Mémoire n'ajoute rien aux connoiflances acquifes ; mais quant à la pratique des nitrières, quant à l’expoñition des reflources qu'offre le Royaume pour la fabrication du Salpètre, quant aux détails de la fabrication, ce Mémoire eft plein d'excellentes réflexions , d’obfervarions juftes , de détails qui annoncent Fhomme inftruit , le Chimifte & le Phyficien éclairé. C’eft d’après ces confidérations que les Commiffaires de l’Académie ont jugé qu'il devoit partager le fecond Prix. M'ÉM-O 1 RE NY XI X SurrLÉMENT au N°. XXXV, premier concours. CE Supplément contient à peu près les mêmes idées que le premier Mémoire, & l’Auteur y propofe à peu près les mêmes moyens. Les Commiffaires de l'Académie n’ont pas jugé qu'il donnât à l’Auteur plus de droit au Prix, ou à un Acceflit. NT É MAO TIRE MINCE. À grande peine pouvons-nous comprendre ce qui eft en la terre, & ne pouvons trouver, fans difficulté & travail, ce que nous avons en main. Qui eft-ce qui a connu de point en point les chofes qui font aux Cieux? Sapience IX, 16. CE Mémoire eft très-long ; il contient quelques faits & quelques dbfervations dont il y auroit peut-être à profiter ; mais il eft écrit en ftyle alchimique, difücile à comprendre, & par cela même ï n’eft pas fufcepuble d'extrait. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 147 Il eft facile au furplus, au milieu de l’obfcurité dont l’Auteur s’eft enveloppé, de juger que fon Mémoire ne peut avoir droit ni à un Poix, ni à un Accellit. Il avoit déjà envoyé au premier concours un Mémoire de même genre, mais moins étendu. NÉE NE OL RE NAN XI, Par M ROME, Profeffeur. Utile aux Gouvernemens , funeft: à l'humanité. LE Salpêtre eft un compofé d'acide nitreux & d’alkali végétal; ainf, pour former ce fel il faut réunir enfemble ces deux fubftances. La France, fuivant M. Rome, offre de toutes parts l’alkali en abondance; on l’obtient par la combuftion des végétaux, & les lieux habités en préfentent naturellement des quantités confidérables ; mais il n’en ef pas de même, fuivant lui, de l'acide nitreux. Ces premières aflertions ne font pas parfaitement exactes ; il eft de fait au contraire que l'acide nirreux eft beaucoup plus aifé à obtenir que l’alkali fixe, & que la fabrication du Salpétre eft plutôt limitée en France par le manque d’alkali, que par celui d’acide nitreux. Pour parvenir à former un plan pour augmenter en France la récolte du Salpêrre , il faut d’abord obferver avec foin les lieux où fe forme ce fel, & les circonftances de fa formation. De l'aflemblage des faits, on 7 enfuite remonter à des principes généraux qui conduiront à la folution du problème. » On trouve (dit M. Rome) du nitre dans les lieux habités & dans ceux qui ne le furent jamais; il fe montre dans les terres expofces » au foleil, & dans celles qui font à l'abri de fes rayons; on en tire » des lieux frais & humides, ainfi que de ceux qui font frappés par » un courant d'air continuel; il naït au fein des terres imprégnées » de fucs végéraux & animaux, & cependant on le rencontre dans des » terres quine préfentent aucun veltige de végéraux & d'animaux. » Toutes ces variétés & tous ces contraftes fubfftent , font connus, & » fe découvrent à tous ceux qui veulent prendre la peine de les » obferver «, Il entre enfuite dans le détail des faits, & pafle en revue les nitrières naturelles du Bengale, des bords du Gange, des Royaumes de Siam & de Pégu, &c. où le Salpètre femble végérer fur la terre après les faifons des pluies; celles de l'Efpagne, où on obferve une partie des mêmes phénomènes, fur-tout dans les Provinces orientales & méridionales ; celles Ti L2 M 148 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ des autres parties de l'Europe où le nitre fe forme de lui-même, dans les vieux édifices & dans les lieux habités, dans des carrières aban- données. Il pale enfuite aux nitières artificielles de l'Allemagne & de la France, & ilexpofe le fentimenr de tous les Auteurs fur la formation du nitre. IL regarde comme conftant qu'on peut faire du Salpétre fans le concours de matières végétales & animales, & il blime méme l’ufage des matières animales dans les nitrières : mais les faits quil rapporte à cet égard ne font pas parfaitement concluans; & ce qu'ils prouvent tout au plus, c’eft qu'il ne faut qu'une petite quantité de maticres végétales & animales pour la produétion du Salpêtre. , M. Rome compare enfuite les circonftances où {e trouvent les différens pays où le Salpétre fe prodvit naturellement dans les terres végétales, & il trouve une analogie frappante entre le Bengale , l'Efpagne & le Bas-Languedoc; les feules différences que préfentent ces contrées, c'eft que les.vents & les pluies font conftans, & périodiques dansl'Inde, & variables en Europe. Un dernier trait de reflemblance qu'il trouve entre ces contrées, & qu'il tire d'un Mémoire de M. Moniet, c’eft que le Salpêtre eft également à bafe d’alkali fixe au Pengale, en Efpagne & en Languedoc. Il rapporte à cette occafion différentes obfervations fur du Salpétre naturel qu'on rencontre dans des rochers fur le chemin de Montbazon à Sainte-Maure, & fur les carrières de Vaife, de Saint-Mefme & de Saint-Savinien , aux environs de Saintes; dans toutes ces carrières, le Salpèrre fe forme principalement à l'expofition du midi; mais il ne s'y forme que jufqu'à une certaine profondeur, & cette profondeur eft à peu près celle où la température commence à étre invariable. M. Rome développe à. certe occafon , d’une manière très-phyfique, ce qui doit fe paffer dans les carrières, relativement à la circulation de l'air. Il fuppofe un lieu fouterrain quelconque , ouvert horizontale- ment dans le Hanc d’une montagne. Si l'air extérieur eft à vingt degrés, & celui intérieur à dix, c’eft-à-dire, à la température des caves , par une fuite néceffaire des principes les plus fimples de l'hydroftarique, Pair du fourerrain, comme plus lourd, fe coulera par en bas, & fera remplacé par de l'air chaud qui rentrera par le haut. Cet air chaud avancera infenfiblement dans la carrière ; mais à mefure qu'il rouchera les parois fupérieurs , ou même qu'il deviendra en contact avec de Pair plus froid , il fe refroïdira lui-même , il deviendra plus lourd, & S'abaiflera; & cer effet ne ceffera que quand cet air fera revenu à la température du fouterrain, c’eft-à-dire, à dix degrés. L'air extérieur, en raïfon de ceire caufe, ne s'avancera donc que jufqu'à un certain point dans la carrière; de forte qu’il fe formera une ligne qu’on peut nommer avec l’Auteur ligne d'égale température , au delà de laquelle if ne fe fera plus de circulation. Or M: Rome obferve que cette ligne eft précifément celle au delà de laquelle il ne fe forme pas du Salpétre; d’après quoi il fe trouve forcé de conclure que la circulation de Fair eft la caufe- de R formation du nitre dans les carrières. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 149 Il va plus loin; il obferve que par une fuite néceffaire de cette cir- culation, l'air doit dépofer, dans toute la partie de la carrière dont la température eft variable, une partie des fubftances qui lui étoient combinées. En, effer, il eft d'obfervation que l'air chaud tient plus de fubitances en diffelurion que Pair froid; donc , à mefure que l'air pénètre dans l'intérieur de la carrière, à mefure qu'il s'y refroidit , il doit fe faire une précipiration , & c’eft à cette caufe qu'il atrribue la forma- tion du nitre; c’eft donc en été, ou plutôt dans les temps où l'air extérieur eft plus chaud que celui de l'intérieur , que doit fe former le Salpétre dans les cavernes. M. Rome, d’après ces obfervarions, feroit aflez porté à croite que l'acide du nitre eff tout formé dans l'air, qu'il y eft tenu en diffolution, & que les cavernes ne font qu'un moyen de réfrigération pour le condenfer; mais il eft aifé de juger de l'infufhfance de cette explication, En effet, fi la formation du Salpêtre éroit l'effet d’une fimple réfrigération de l'air, d’une condenfation des matières qu'il tient en diflolution , ik devroit s’en dépofer fur les terres non calcaires, dures & compactes ; or il eft de fait qu'il ne fe forme de Salpêtre que fur les pierres & terres tendres & poreufes; dès-lors 1l devient néceflaire de fuppofer dans a craie & les pierres calcaires tendres , au moins une force d’affinité qui oblige le Salpêtre à s’y dépofer. M. Rome cherche à appliquer cette mine explication de la forma- ton du nitre, à celui qui fe rencontre dans les caves & même à la furface des murailles, qui ont une mafle affez confidérable pour conferver quelque temps une fraîcheur plus grande que celle de l'air ambiant, il a même tenté d'expliquer par la même théorie, la formation du nitre dans les écuries, les vacheries, les étables, & les latrines; mais il eft obligé de fuppofer que les mélanges fermentefcibles attirent l'humidité de Fair, & que le nitre qui y eft contenu s'y dépcfe avec elle : oŒ, indépendamment de ce que cette explication n'eft pas conforme aux faits, l’'Aureur avoit un moyen plus fimple de forrir d’embarras, c’éroir de dire que les exhalaifons putrides ayant plus d'affinité avec l'air que l'acide nirreux , elles opéroient la précipitation de ce dernier. Au reite, comme certe dernière partie du fyféme propofé n’eft pas appuyée par des faits, on ne peut la regarder que comme une théorie ingénieule, vraie à quelques égards , mais qui ne répond pas à tout, M. Rome penfe qu'on peut expliquer par le même principe Le nitre qui fe forme dans les terres végcrales du Bengale & de l'Efpagne. I prétend que l'acide nitreux s’y unit par l'aflinité qu'il a avec la terre calcaire que contiennent ces terres végétales ; mais if lui a échappé: que le même principe qu'il a employé pour les cavernes pouvoit encore: s'appliquer , même à ce cas. En effet, les terres refroïdies par la fraicheur des nuits, doivent encore faire le matin office de réfrigérent par apport: x Had » LA vus Li à lai, d'autant plus que la température moyenne du globe. tend: 150 HISTOIRE DU FRIX PROPOSÉ continuellement à les ramener À une température moindre que celle de l'air. Il examine pourquoi le Salpétre, qui fe trouve tout formé dans les terres végétales de l'Inde & de l'Efpagne, eft à bafe d’alkali fixe, tandis qu'il eft à bafe cerreufe dans ki plupart des cavernes , fur-tout à mefure qu'on s'éloigne davantage de leur embouchure. Il s'embarrafle à cet égard dans des explications qui ne font point du tout chimiques. H eft affez probable que l'alkali qui fert de bafe au Salpêtre qui fe forme dans les terres de l'Inde & de l'Efpagne, vient des végétaux crüs dans ces terres. On ne peut douter, d’après les expériences modernes , que l'alkali fixe ne foit Ê produit de la végétation, & qu'il ne foit tout formé dans les plantes : donc par-tout où il fe rencontre de l'acide nitreux & des végé- aux , il fe formera du nitre à bafe alkaline; mais cette explication ne fatisfait pas encore à la formation du nitre à bafe d’alkali qui fe trouve à l'entrée des carrières; & on ne peut difconvenir que ce fait ne foit très-embarraffant à expliquer. De ces réflexions théoriques M. Rome pafle aux moyens de pratique. IL penfe que c’eft dans les Provinces méridionales , telles que le Lan- guedoc & la Provence , qu’on doit chercher à pouffer la fabrication du Salpètre , fur-tout d'après la confidérarion que le Salpêtre y eft naturel- lement, pour la plus grande partie, à bafe d’alikali fixe; mais il ne fait pas attention que le bois eft rare dans la plupart de ces Provinces, & qu'il en réfulte un renchérifflement confidérable dans la fabrication du Salpétre. Les principes, expofés dans le corps de ce Mémoire , conduifenr VAuteur à des conféquences naturelles fur l’établiffement & fur la conduite des nitrières. 1] confeille d’en former le fond principalement de terres calcaires, d'y méler des marières végétales, & il en exclut les matières animales. Le point important eft, fuivant lui, d'entretenir la malle de ces terres à un degré le plus inférieur qu'il fera poffible à celui de Fair extérieur, afin d'y opérer une condenfarion de l'acide nitreux ou des matières deftinées à le former. Il confeille encore de donner aux terres le plus de furface qu'il fera poflible, toujours dans l'objet d'opérer la plus grande condenfation potlible. M. Rome penfe qu'autant il eft néceflaire de foulager les habitans de la campagne de la fouille, & de tout ce qu'il y a d’onéreux dans la fabrication du Salpêtre , autant il eft effentiel de maintenir dans toute leur vigueur les réglemens relarifs aux démolitions. Il importe en effet que les matériaux falpêtrés n’entrent point dans la conftruétion des édifices neufs , de forte qu’on remplit à la fois plufieurs objets d'utilité en les réfervant à la fabrication du Salpêtre. L’Aureur termine fon Mémoire par des Formules algcbriques , pour déterminer par le calcul , d’après un eflai, la quantité de Salpêtre contenu dans les terres & dans les cuites; ces Formules peuvent étre d’une grande grilité pour les Entrepreneurs des nitrières. É SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. :6r L’'AcaDémie a reçu le 6 Février 1782 , un fupplément à ce Mémoire; M. Rome n'y remonte point, comme dans le premier, à l’origine du nitre ; mais il prétend qu’en fuppofant qu'il en exifte de tout formé & de flottant dans l'air, il n’en faut pas davantage pour rendie raifon de tous les phénomènes qui s’obfervent. Quant à l'alicali végétal qui fe trouve fouvent combiné avec l'acide nitreux , il obferve que dans tous les lieux expofés à l'air, où il fe forme du Salpètre, il eft à bafe d’alkali végétal ; que dans tous les lieux où il fe forme dans l'ombre & dans l’obfcurité , 1l eft à bafe terreufe. C'eft ainfi que le Salpétre eft principalement à bafe d’alkali dans les matériaux de démolition, & qu'il eft à bafe terreufe dans la terre des caves; & cette obfervation eft aflez conforime à la vérité ; d’où il conclut que le foleil contribue à la formation de l’alkali; & c’eft pour cela, fuivant lui, que prefque tous les côreaux naturellement falpétrés fonc expofés au midi, & que les terres du Bengale & de l’inde ne donnent que du Salpêtre à bafe alkaline. Une partie de ce Supplément eft enfuite employée à expliquer com- ment les terres, foit pures, foit imprégnées de matières fermentefcibles1 doivent condenfer l'acide nitreux répandu dans l'air. Il fuppofe que ces terres font plus froides que l'air environnant; que cer excès de froid provient de l’évaporation de l'humidité qui les imbibe; mais, comme on l’a déjà expofé ci-deflus , il étoit bien plus fimple de dire que les terres touchant à la mafle du globe, dont la température moyenne et de ro degrés, elles tendent toujours à fe refroidir dans les pays chauds, & qu'elles doivent être par conféquent , dans un très-grand nombre de circonftances , plus froides que l'air ambiant. On voit que dans tout ceci M. Rome n'explique pas comunent fe forme le nitre ; & en cela MM. Thouvenel, & même quelques-uns des autres Concurrens ont été plus loin que lui; mais le nitre une fois fuppofé formé & flottant dans l'air, on ne peut nier qu'il n’explique d'une manière très-heureufe , comment il fe fixe dans les terres. M. Rome difcute toutes les manières de faire du Salpètre , recueillies par les Commiflaires de l’Académie dans ie volume 27-8°. qu'ils ont publié, & cherche à les expliquer toutes par l’acide nitreux répandu dans Vair, & d’une manière purement mécanique. Enfin il termine form Supplément par quelques faits. Il a obfervé que dans nn couvent de Capucins, 400 pieds cubes de terre s’étoient nitrifiés en grande partie, & au point de pouvoir être exploités avec profit, par la £eule expofitiom aux vapeurs méphitiques des fofles d’aifance , dans le voifinage defquelles elles éroient; ce qui cadre parfaitement avec la théorie de M. Thouvenel. Il prétend encore que le voifinage des grandes marres d’eau contribue à da nitrification par le refroidiflement qu’elles occafonnent : du refte M. Rome, pour la conduite des nitrières , renvoie à fon prenrer Mémoire. Il eft aifé de s’appercevoir que ce Mémoire -eft fait par:un homme 1$2 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ très-inftruit , & qui réunit à la fcience mathématique beaucoup de con- inces de Phyfique; il contient peu d'expériences; & les Commif- faires ont regrerté , fous ce point de vue, de ne pouvoir le couronner: snais la théorie qu'il expofe eft infiniment ingénieufe; elle eft appuyce de faits connus, & elle ne peut même manquer d'être vraie en plufeurs points, « MAB M OT. RMEMuEN Xe Par M. FORESTIER DE VEREUX, ancien Capitaine de Canonniers au Corps Royal de l’Artillerie, Chevalier de l'Ordre Royal & Militaire de Saint-Louis. 12 pace robur, €& in bello ros cæli & pinguedo terræ. M. Foreftier de Vereux, après avoir fait un expofé fommaire des connoiflances acquifes jufqu’à ce jour fur la formation du nitre, obferve qu’en réfléchiffant fur les circonftances de cette opération de la Nature , on ne peut douter qu’elle ne puifle fe faire aufli bien en plein air que fous des hangars , & voici les réflexions qui l'ont conduit à cette confe- quence. S'il fe forme du Salpètre dans les terres convenablement mé- langées fous des hangars, il doit également s'en former en plein air; mais avec cette différence , que l’eau des pluies , en détrempanr les terres, doir le difloudre & l’entrainer ; mais l’effer de l’eau des pluies fur les terres eft nécellairement borné, car elles retiennent communément les trois quarts ou les ? de leur volume d’eau; donc elles retiennent une quantité de Salpètre proportionnelle. Ce raïfonnement a conduit l'Auteur à croire qu'il devoit fe trouver du Salpétre dans toutes les terres végétales; & en effet, en ayant leflivé un grand nombre à l’eau bouillante, il a retiré de prefque toutes une quantité plus où moins grande de ce fel. Il en a conclu que la conf- truction des hangars indiqués jufqu’ici pour la formation des nitrières , étoit inutile; qu'on pouvoit faire avec le même fuccès des nitrières en plein air, & il s’'eft livré à cet égard à des calculs très-féduifans. Mais tous ces calculs avoient pour bafe un fait, ou plutôt une fuppofition; c'eft que les terres fe falpétrent d’elles-mêmes en plein air , & que celles prifes au hafard au milieu des campagnes en contiennent une quantité notable. Les Commiffaires de l'Académie ont fenti l'importance de vérifier ce fait; mais comme ils ignoroient le nom & le domicile de l'Auteur SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 163 PAuteur à l’époque où ils ont examiné fon Mémoire, & que ce neft que depuis la proclamation du Prix, qu'ils ont été inftruits qu'il habitoit la ville de Gray en Franche-Comté, ils fe font trouvés dans 1 impoñübilité d'opérér fur les mêmes terres que lui; mais ils ont confidéré en même temps que fes raifonnemens pouvoient s'appliquer aux terres végétales d'un pays comme à celles d’un autre; & que s'ils étoient juftes, il ne devoit point fe trouver de terre végétale dans des circonftances favorables, qui ne contint quelque peu de Salpétre. Ils ont fait en conféquence ramaller dans les environs de Paris, à la fuite de la grande fécherefle qu'on a éprouvée pendant l'été de 1781, un affez grand nombre d’échan- tillons de terres végétales de différentes efpèces, en obfervant d'en varier la qualité, & de choifir tantôt des terres légères, tantôt des terres fortes; de la terre qui avoit été cultivée en blé, en luzerne, de Ja terre des chemins, &c. Les quantités {ur lefquelles ils ont opéré étoient d'un quintal environ : il les ont leflivées à l’eau bouillante , & en obfervant toutes les précautions prefcrites par l’Auteur; mais au lieu d'une once & plus par pied cube, ils n’ont obtenu qu'un ou deux grains de Salpêtre d’un El des échantillons : les autres n’en ont pas fourni un feul atome. C’eft d’après ces expériences, que l'Académie , dans fon Programme , a annoncé qu’elle foupçonnoit que l’Auteur avoit employé , pour lefliver fes verres , de l'eau qui contenoit déjà du Salpétre. Cette conjecture a été vérifie depuis & convertie en certitude : M. Chevrand , Infpecteur des Poudres & Salpétres à Befançon , a bien voulu fe tranfporter à Gray , fur la demande qui lui en a été faite par les Commiffaires de l'Acaacmie; & d’après les épreuves qu'il a faites conjointement avec M. Foreftier {ur les mêmes terres végétales qui avoient fervi à fes premières expériences ; il a reconnu qu'aucune ne conte- noit de Salpétre en quantité fenfible, quand elles étoient leflivées avec de l'eau de rivière; en forte qu'il paroït conftant que le Salpêtre obtenu par M. Foreltier , n’eft autre chofe que celui qui exiftoit dans au de fon puits. Cette circonftance, qui failuit perdre a l’Auteur toute prétention au Prix, lui a laiflé néanmoins des droits à la reconnoiffance du Public. Son Mémoire contient une fuite très-nombreufe d'expériences qui lui ont couté beaucoup de temps , de peine & de dépenfes. Il eft à es qu'un défaut de précaution fur un feul point, les ait rendues ANUULES, 154 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ CREER PERRET TE REEPEEESE SRPEENS NUE PRE CET 9 DR LORIE RIT SEXE PERDRE TD MRÉAM OL REINE UUX XIE Omne tulit punéum qui mifeuit utile dulci. CE Mémoire , après des réflexions générales fur la nature & la forma- tion de l'acide nitreux, préfente une efpèce de critique de l'Inftruétion publiée en 1777 par les Régiffeurs des Poudres & Salperres. L'Auteur annonce que les établiffemens de nitrières faits, foit par des Entrepreneurs , foit par la Régie elle-même, fur les principes de l'Inftruction , n'ont point eu de fuccès , & il cherche à en découvrir ia caufe. Il prétend d’abord que l'évaluation donnée par les Régiffeurs pour les frais de conftruction des hangars , eft beaucoup trop foible. Chaque hangar de cent pieds de longueur fur trente de large, n'eft eftimé que deux mille liv., & il donne comme certain qu’il couteroit au moins le double dans la Province qu’il habite. I prétend de même que le prix du tranfport des terres a été évalué beaucoup trop bas , & qu'au lieu de 6,000 liv. pour dix hangars, cet objet doit être porté à 60,000 liv. environ. L’Inftruction ne porte qu'à 5,000 liv. les frais de conftruétion d’un atelier de leflivage & d'éva- poration , & cette évaluation lui paroï encore au deffous des juftes proportions. Enfin les Régiffeurs des Poudres iui paroiffent dans l'erreur fur lefti- mation du prix du terrein; ils ne l'ont évalué qu'à 1500 liv., & il penfe qu'il doit être porté b tiges & racines de nicotiane hachées. on » » 3. Dans un autre, quatre cent quatre-vingts pouces cubes du même » terreau , avec cinq livres deux onces de parictaire verte. » 4. Dansle quatrième , quatre cent quatre-vingts pouces cubes du » même terreau, avec cinq livres deux onces de fucus wareck, » ou gouefmon marin tout frais. » 5. Dansle cinquième , quatre cent quatre-vingts pouces cubes du » même terreau, avec cinq livres deux onces de plantes encore À TE » vertes de taplicon ou poivre de Guinée. » Le tout fut arrofé féparément d’eau de mare poiffonneufe , & où les beftiaux & volailles vont boire. On a remué, renverfe le deflous deffus, & arrofé de la même eau chacun de ces effais , de fix femaines en fix femaines , jufqu’au 29 Décembre 1779 que je les ai lefiivés, évaporés & criftallifés. » Len°. 4 ne doit point être compté , puifqu'il n’a produit qu'une efpèce de fel de Glauber amer & farineux , qui fe gonfloit fur le feu au lieu de détonner. Zi 189 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ u y è y è m1 È + È y è y Ÿ 3 : k gros. grain Le n°. ze, a donné du nitre affez blanc, ci. . . . .. 13 36 Le n°. 2 idem. en longues , fortes & blanches aiguilles. x$ tr Le n°. 3 a donné du nitre en longues, fortes & blan- »iCheS aieui les NN PE EE TAC) Le n°. ç. idem. jaune & fale, mais bien fulminant. 16 » Ce qui donneroit par pied cube fix onces cinq gros de nitre cru ; obtenu en une année fans frais d'achat d'urine, & fans émanations: fétides. » L'addition des plantes a donné l’une dans l’autre un furplus de nitre de cent vingt cinq grains , ou un gros cinquante-trois grains par chacun des trois numéros où elle à eu lieu. » Dans les premiers jours de Juin 1778, j'avois fait un mélange de moitié terre de jardin, un quart de colombine ou de fiente de pigeon fèche & réduite en poudre , un huitième de fuie & un huitième debois neuf. Le rour failoit trois cent quatre-vingr-quatre pouces cubes ou quatre pots. Je l’arrofai de jus de fumier & d'urine alkalifée en parties égales , pour l'amener en confiftance de mortier. Je le pofai fur un plateau de fapin dans un grenier bien aéré , où l’on oublia totalement de l'arrofer & remuer. Le 26 Décembre 1778, l'ayant retrouvé très fec, je le réduifis en poudre, je le leflivai à l’eau chaude fur un filtre de deux livres de cendres; évaporé & mis à la cave, il m'a fourni er trois criftallifations deux onces de bon nitre fulrninant , avec peu de grain apparent; car je ne lai pas purifié. » J'aurois dû prifer davantage un tel fuccès, puifqu’en fept mois de: temps , fans manipulation défagréablement renouvelée , fans arrofe- mens, cette compofition m'avoit rendu neuf onces par pied cube, tandis que la meilleure terre n’eft annoncée pour fournir que huit onces. Mais la féduifante chimère de l'extraétion du nitre exiftant dans les plantes, m'a fait abandonner le corps pour l'ombre. » Plufeurs bancs des collines créracées & marneufes du canton que-- j'habite, contiennent beaucoup de débris de coquillages marins , & fe décompofent à l'air en une efpèce de farine falée , dont les pigeons font très-frians. J'ai penfe qu’en les travaillant , & fuppléant la bafe d’alkali végéral, j'en pourrois extraire du ritre de même nature. » Le 8 Février 1779 , j'en ai ubmergé des fragmens gros comme des œufs, dans une eau compofte d’une partie d'huile de vitriol & de foixante parties d’eau. Deux jours après, je Les ai laiflé bien fécher, puis je les ai expofés fous un hangar en les arrofant d'urine alkalifée, de deux en deux mois, pendant près de deux ans. » J'en ai plongé dans l'urine récente jufque long-temps après qu’elle a été putréfiée; puis je les ai expofés, & je les ai arrofés de:la même manière, de. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 187 # Je viens de les travailler; mais je n'en ai retiré, malgré l’addirion » de cendres neuves & de diflclution de potalle, qu'un fel marin » cubique, âcre & un peu amer. » La marne tirée de quarante-cinq pieds en terre, au pied des mêmes # collines, traitée de même , m'a donné les mêmes produits , mais en » moindres quantités. » Revenant à la nitrification des terres par les végétaux , j'ai éoncaflé » douze livres de marne & écrafc douze livres de laïtues vertes, le tout » expofé & arrofé d'urine alkalifce pendant un an : le {el cubique âcre & » amer a encore été prefque le feul produit, puifque je n’ai eu que trois » gros de nitre en aiguilles procédant vraifemblablement des laitues. » J'ai liflé pourrir avec de l'urine alkalifée plein une feuillette de » laitues groffièrement hachées. Le réfulrat, d’une puanteur infuppor- » table, a été mélé, le 21 Juin 1779, avec quinze boiïfleaux ou cent # quatre-vingts pots de terre de jardin , bien mélangé, mis en tas, & » entretenu de mouvement & d'arrofement d'urine, jufqu'au 29 Sep- » tembre 1780. J'en ai pris alors fix pots, ou cinq cent foixante-feize » pouces cubes mélés avec quatre livres de cendres. J'ai leflivé par vingr >» pots d’eau bouillante , évaporé; puis en trois criflallifations aiguifées » chacune par un peu de diflolution de potafle, j'ai obtenu vingr-deux » gros de nitre en aiguilles blanches; ce produit excède un peu celui de » la meilleure terre, dont le pied cube eft annoncé donner huit onces , » puifqu'il donneroit huit onces deux gros. On doit réfléchir en outre » que le moindre déchet eft confidérable fur toutes ces opérations en » petit. » Le 24 Oétobre 1779, j'ai haché cent livres de feuilles , tiges & # racines vettes de nicotiane , bien mêlées avec deux cents livres de terre » de jardin & de boucs de rues , le tout arrofé d'urine, remué & entre- » tenu fous le hangar jufqu'au 27 Oétobre 1780. J'en ai pris alors fix » pots ou cinq cent foixante-feize pouces cubes , avec quatre livres de » cendres, qui, traitées comme ci deffus , m'ont donné vingt gros de » nitre en aiguilles crès-blanches , mais minces; ce qui rendroit fept » onces quatre gros par pied cube. ]l eft bon d'cbferver que ce tas a été » expofé trois mois de moins que le précédent, qui avoit couté encore » près de trois mois pour la pourriture des laitues , & que dans aucun » des remuages celui-ci n’a exhalé de mauvaife odeur, ce qui eft impor- » tant pour la fanté des Ouvriers. » En Novembre 1778, je fs defcendre du terreau de couches à melons, 2 pour en établir une de chicorée fauvage dans ma cave qui eft fort faine » & fèche. Les racines, après avoir fourni des falades pendant tour » l'hiver, y ont enfin pourri. Ce terreau eft ainfi refté en couche juf- » qu'au 21 Juin 1779 , que je l'ai retire, arrofe d'urine, & expofé fous » le hangar, où ila été entretenu de remuages & d’arrofemens jufqu’au 2 » Oétobie 1730. J'en ai pris alors fix pots, ou cinq cent foixante-feize 182 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ pouces cubes , & quatre livres de cendres, leflivé par vingt quatre pots d’eau chaude, évaporé , mis à la cave. m Ë » Ÿ » La première criftallifation m'a donné huit gros de beau gros. » nitre brut, en grofles & longues aiguilles. . . . . . . . .. » La feconde , aiguifée par un peu de diffolution de poraffe, » à donné quatorze gros en aiguilles brillantes | maïs moins étoffées: Vs 1 212 M LENS NENRNERER nT 2t % Ë » La troifième , aiguifée de même, a donné cinq gros auffi beautiquehla feconde.| RES EE REP RENNES , Ÿ La quatrième a donné trois gros , mais en aiguilles plus TT CN MMS EU D 1010 diotoio:p bo nate bio iG oo n n b'Aale LS 16 » La cinquième , encore aiguifée, a donné trois gros , mais » partie en aiguilles, &!partie en croûtes, . .. .. 4. 3 » La fixième , encore aiguifée de même, à donné trois gros de nitre impur & roux, mais fulminant en partie. . . .. L] HIÉLOT ATEN SR LT NU RE DRE 36 CERTES » Ces 36 gros donneroient pour un pied cube treize onces & demie » de nitre brut, au lieu de 8 onces, plus fort produit annoncé. » Cestrente-fix gros bien defléchés dans le papier brouillard & devant » le feu , fe font trouvés réduits à 35 gros, lefquels j'ai prié un Apothi- » caire célèbre , Chimifte adroit & arrentif, de purifier avec foin, Il en a obtenu les produits ci-après, & joints au préfent Mémoire. ’ “ “ Ÿ SYAMVTO IR I: gros. grains. mn 1 De première criftallifation........... 19 LE de beau nitre pur » De deuxième criftallifation........... 24 % de beau nitre pur, » De troifième criftallifation........:.. 2 60 avec un peu de grain. > DUO DAT roches che 4li27000 » De quatrième criftallifation........... 3 12 prefque tout grain, HOIOTAES eee. ere OL » D PERTE se lee 1e elec IP AI » > HOTAE Reese es »” » Voilà donc près de vingt-huit gros de nitre propre à entrer dans la » compofition de la poudre à canon, procédant de cinq cent foixante- SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 183 » feize pouces cubes de terreau , lequel avoit déjà fervi À produire des » melons, puis de la falade d'hiver , qui n’a exigé que feize mois d’arro- » fages & de mains pour les remuer, & qui n’a expofé les Ouvriers » qu'aux émanations d'un peu d'urine. » Le 18 Février 1779, je fis une compofition. ; k 4 pots, » Poudretre où excrémens humains. . ......:.,,, 12 » Mortier, débris de vieilles murailles d’étables à vache. . 36 lerreauiderconchedesjardin ae EN arrete 24 “HOharréeougcendrestléiyéest 1 EN lila » Terre prife dans l'égout d’une laverie de cuïfine, . .. 24 D MO AN TAN Melo en Adele elle ae le Deere to ol et: 12 0 » Le tout fut arrofé d’urine , mis en tas fous le hangar , arrofe & » remué jufqu'au 22 Décembre 1780 , que j'en travaille cinq cent » foixante-feize pouces cubes , ou fix pots avec quatre livres de cendres, » & vingt-quatre pots d’eau bouillante «, Le réfultat de cette opération n’a point été envoyé à l’Académie par l'Auteur. : En réfléchiffant fur la fuite d'expériences rapportées dans ce Mémoire , on s’appercevra que dans prefque toures , l’Aureur s’eft fervi de terreau, de terre de jardin, & que dans toutes fes expériences il a obtenu des quantités de Salpêtre prefque égales ; lorfqu’au contraire il a em- ployé de la marne , il n’a plus obtenu de produit en Salpêtre. Ces circonftances porteroient les Commiflaires à croire que la terre du jardin fur laquelle il à opéré , contenoit du Salpétre. Il eft ficheux qu'il wait pas commencé par en lefliver une portion avant d'y intro- duire aucun mélange, & il auroit levé cetre difficulté importante. Quoïque ce Mémoire contienne une fuite de faits intéreflans , les Commiflaires de l’Académie n’ont pas jugé que ce travail für aflez complet pour donner à l’Auteur des droits au Prix, ni même à un Acceflir, & ils fe font contentés d’en faire une mention honorable. 184 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ JUGEMENT de l Académie des Sciences fur les Mémoires admis tant au premier qu’au Jfécond Concours. LE ROI défirant d'augmenter par tous les moyens poflibles la récolte du Salpètre en France , & de délivrer fes Sujets de la gene de la fouille que les Salpêtriers font autorifés à faire chez les Particuliers , avoit chargé l'Académie des Sciences, en 177$, de propofer un Prix de 4,000 livres, fur le fujet qui fuit : Trouver les moyens les plus prompts & les plus économiques de procurer en France une produétion & une récolte de Sal- pêtre plus abondantes que celles que l’on obtient préfentement , & furtour qui puiffent difpenfer des recherches que les Salpétriers ont le droit de faire chez les Particuliers. Ce Prix devoit être proclamé à la Séance pu- blique de Piques 1778. Les Mémoires adreflés à ce premier Concours , & qui étoient en grand nombre , ont fait connoitre à l'Académie que le délai qui avoit été accordé étoit trop court, relativement à l'importance du fujer & à la nature des expériences qu'il exigeoit; & que , d’un autre côté , l'objer du Prix , quoiqu'aflez confidérable en lui-même , ne pouvoit pas encore indemnifer les Concurrens des dépenfes néceflaires pour remplir com- plettement les intentions du Gouvernement : l'Académie a été forcée en conféquence de différer la proclamation du Prix, & d’en fixer l'époque à la Saint-Martin 1782. En même temps, fur les repréfentations qu'elle a faites au Roi , Sa Majefté a bien voulu porter le Prix à 8,000 livres, & y joindre une fomme de 4,000 livres pour être diftribuée en un ou plufieurs Accefftes , fuivant le nombre des Mémoires qui pourroient avoir droit à des récompenfes, & fuivant l'étendue des dépenfes utiles qui paroîtroient avoir été faites par les Concurrens , relativement au Prix. Ces nouvelles difpofitions ont produit l’effec avantageux que l'Acadé- mie pouvoit en attendre , & elle a eu la farisfaétion de voir que dans les foixante-fix Mémoires qui ont formé tant le premier que le fecond Concours , il y en avoit un affez grand nombre qui méritoient fon attention; mais celui de tous qui lui a paru le plus digne de fes fuf- frages , eft le Mémoire N°. X, fecond Concours, qui a pour devife : Après avoir lu & médité tout ce qui a été écrit fur cet important Jujet, ne pourroit-on pas s'écrier avec le Vieillard de Térence, INCERTIOR MULTO SUM QUAM DUDUM , dont les Auteurs font M. Thouvenel , Docteur en Médecine, Affocié Regnicole de la Société Royale de Méde- cine , & M. Thouvenel , Commiflaire des Poudres à Nancy. Ce Mémoire contient une foule d'expériences d’un genre délicat & difhcile, entreprifes d’après des vües nouvelles & la plupart très-con- cluantes. MM. Thouvencl y donnent des moyens de former de l'acide nitreux, pour ainf dire , de toutes pièces, & en employant des maté- Faux SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 185 tiaux abfolument étrangers à cet acide ; ces matériaux font le gas de la putréfaction & l'air atmofphérique. Peut-être laiffent-ils quelque chofe à défirer relativement à l'application de la théorie à la pratique; mais il n'en eft pas moins conftant que, d’après les expériences théoriques con- tenues dans leur Mémoire, il fera facile de ramener à des principes certains la conduite des nitrières , qui jufqu'à préfent a été abandonnée, pour ainfi dire, à une routine aveugle : l’Académie a cru en conféquence devoir adjuger à ce Mémoire le Prix de Sooo liv. Après ce Mémoire , le fuffrage de l’Académie s’eft trouvé partagé entre deux autres qui lui ont paru avoir les inêmes droits à une récompenfe honorable ; elle a cru en conféquence devoir leur accorder , à rire de fecond Prix , à chacun une fomme de 1200 liv. Le premier de ces Mémoires eft celui N°. XXVI , fecond Concours, qui a pour devile : On ne doit ni s'afjurer aifément de voir ce que les plais grands Hommes n'ont pas vu , ni er deféfperer entièrement. L'Auteur c't M. Lorgna , Colonel des Ingénieurs au fervice de la République ce Venile , & Directeur de l'Ecole Militaire à Vérone, Membre des Aca- déimies des Sciences de Férersbourg, de Berlin , de Turin, de Bologne, Padoue , Mantoue , Sienne , &c. & Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences de Paris. On trouve dans ce Mémoire une fuire d'expériences bien concluantes, d’après lefquelles l'Auteur prouve que l’acide nitreux n’eft point une modification de lacide vitriolique , ni de l’acide marin , comme le pen- foient Stalh , M. Piersh & une partie des Chimiftes modernes; mais il n'eft pas auffi heureux dans les expériences qu’il a faites pour découvrir les principes du nitre & le myftère de fa formation ; en forte qu'il réuffit mieux à établir ce que n'eft pas l'acide nitreux, que ce qu'il eft en cffer. Son Mémoire contient d’ailleurs quelques expériences qui ne font pas exactes ; telle eft la décompofition du {el marin par le nitre à bafe ter- reufe : cetre décompoftion n’eft vraie qu'à l'égard du fel marin à bafe d'alkali végétal, & non pas à l'égard de celui à bafe d’alkali minéral, comme l'annonce l'Auteur. Le fecond Mémoire que l’Académie a jugé digne de partager le {e- cond Prix, a pour devife : Mec fpecies fua cuique manet ; rerumque no- vatrix ex aliis alias reparat Natura fisuras. La première partic de ce Mémoire avoit été admife au premier Con- cours , fous le IN. XXXUI; les Aureurs font M. Chevrand , Infpec- teur des Poudres & Salpétres dans les Provinces de Franche-Comté & de Brefle , & M. Gaviner, Commiflaire des Poudres & Salpétres à Be- fançon : la feconde a été admife au fecond. Concours fous le N°. XVIII & fous la même devife, & avec le nom feul de M. Chevrand. L’Au- teur de cette dernière partie, qui a déterminé principalement le juge- ment de l’Académie , a parcouru , dans l'intervalle du premier au fecond Concours , une grande partie de la France, pour y étudier les relfources relatives à la fabrication du Salgêtre, 1] difcure les avantages & les in- A a 186 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ convéniens que préfentent les différentes Provinces du Royaume, confidé- rées relativement à cet objer. Quoique fon Mémoire ne contienne pas de découverte proprement dire , il eft plein de réflexions juftes , d’obferva- tions ingénieufes , & de détails intéreffans; il complette en quelque façon ce qui manque aux deux précédens , & il ne peut être que très-utile pour guider les Entrepreneurs de nitrières dans la pratique de leur Art. Enfin , l'Académie a cru devoir, foit à titre d’Acceffie , foit à titre de dédommagement des dépenfes qui ont été faites, accorder une fomme de $S0o livres au Mémoire, N°.XXVH, premier Concours, ayant pour devife: Credidimus fpiricus acidos nitri nufquam in rerum naturd exti- ciffe ante inventum modum nitri parandi : Boërhaave; & dont l’Au- teur eft M. J. B. de Beunie , Médecin à Anvers, de l'Académie Impé- riale des Arts & Belles-Lettres de Bruxelles; & une pareille fomme de 800 livres au Mémoire, N°. XXIX, premier Concours , ayant pour de- vife : Sic materiis Arte difpofitis , Natur& duce , abundanter generabitur nitrum , dont l'Auteur eft M. le Comte Thomaflin de Saint-Omer. Il cft aifé de voir que ces deux Mémoires font l'ouvrage de Chimiftes inftruits : ils contiennent des expériences bien faites , & qui ne peuvent que contribuer à avancer & à perfectionner l'Art de fabriquer le Salpètre. Indépendamment de ces cinq Mémoires qui préfentent un grand en- femble de faits, & quis réunis , rempliflent aflez complettement les vües du Programme , l Académie croit devoir faire une mention honorable de celui N°. XXII, fecond Concours , ayant pour devife : Zn pace robur, & in Bello ros cœli & pinguedo terre. L’Auteur (M. Foreftier de Vereux, ancien Capitaine de Canonniers au Corps Royal d'artillerie, Chevalier de Saint-Louis , à Gray en Franche- Comté ) y donne une fuite d'expériences très-nombreufes fur le Salpêtre qui fe trouve, fuivant lui, dans les terres végétales des champs ; mais les Commiffaires de l’Académie, qui ont répété ces expériences avec beaucoup de foin fur un grand nombre de terres des environs de Paris, ramaflées à la fuite d’une grande fécherefle vers la fin de l'été 1781, n’ont trouvé que des particules prefque imperceptibles de Salpêtre , & qui ne répondent pas à ce que l’Auteur avance. Peut-être a-t-il employé, pou leliver fes terres , de l’eau qui contenoit déjà du Salpêtre : quoi qu'il en foir, l'Académie n’a pas jugé que les nitrières découvertes & en plein air que FAuteur propofe de fubftituer aux hangars ; puflent remplir {on objer. Les autres Mémoires qui méritent une mention honorable , font: Celui N°. XXI, fecond Concours, ayant pour devile : Utile au Gou- vernement ; funefle à l'humanité , dont Auteur eft M. Rome , Profeffeur Royal de Mathématique à Rochefort , Correfpondant de l’Académie. . Celui N°.KXIF, premier Concours , ayant pour devife: Sigillum veri Jfunplex. . Celui N°. XXIV, fecond Concours, ayant pour devife : Obfervatio & experientia dosent, SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 187 Celui N°. XXVIN, fecond Concours, ayant pour devife : Tandis que tous s’empreffent de concourir aux projets d’un Roi bienfaifant, je veux aufft rouler mon tonneau. Celui N°. XXVIII, premier Concours, ayant pour .devife : Non fin- gendum aut excogitandum , fed inveniendum quid Natura faciat aut ferat : Bacon. Il n’eft aucun de ces Mémoires qui ne contienne quelques faits nou- veaux , de bonnes obfervarions , & des détails utiles : l’Académie invite en conféquence leurs Auteurs à fe faire connoître , afin qu'ils obtiennent du Public la reconnoiflance due à leur zèle & à leurs travaux. L'Académiefe propole, conformément aux intentions de SA MAJESTÉ, de publier, le plus tôt qu’elle le pourra , la Collection de ces Mémoires, en obfervant cependant de retrancher ce qui pourroit fe trouver de com- mun entre eux, & de ne donner que par extrait ceux qui contiendroient des détails trop étendus & des faits déjà connus. Elle y joindra la fuite d'expériences dont elle s'occupe depuis plus de fix ans, & elle s’atra- chera fur-tout à fuppléer à ce qui eft échappé aux Concurrens, commune Fanalyfe du gas putride qui peut encore jetter de grands lumières fur la nature & la formation de l'acide nitreux ; enfin, elle terminera ce Re- cueil par des vües générales fur la formation du Salpêtre , & fur la con duite des mtrières, ù Aaï 188 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ a —_—_—_——— EXTRAIT de quelques Ouvrages & Memorres relatifs à la fabrication du Salpétre, qui ont cté rédiges pendant le Concours ou depuis la proclamation du Prix. rit assé mestaieitinmmmrminrioionénéinssmstéie] ART DE FABRIQUER LE SALIN ET LA POTASSE. IL n'y a pas dix ans qu'on connoît en France [a néceflité de 'alkali fixe végétal pour la fabrication du Salpêtre , & il n’y en a pas huit qu’on ÿ a introduit l'ufage de la potafle. On annonçoit encore dans des Ou- vrages imprimés vers cette époque , que les cendres ne fervoientr qu'à dégrailler les eaux mères, & en conféquence , route l’induftrie des Pré- pofés de l'Adminiftration des Poudres {e portoir à imaginer des dgraif- foirs, des filtres à travers lefquels on faifoit paller les eaux mères, & dont elles reflortoient à peu près dans le même état qu’elles y éroient entrées. C'éroit dans cette fuppofition que les cendres avoïent la propriété de dégraifler les eaux mères, qu'on avoit accumulé les réelemens & les privilèges , pour donner aux Salpétriers toute préférence pour leur recher- che & leur enlèvement. Mais les privilèges ne peuvent point créer des matières qui n'exiftent pas , & la fabrication/du Salpétre languifloit en France plurôt par le défaut d’alkali que par le défaut d'acide nitreux. Ces confidérations ont déterminé les Régiffeurs des Poudres, première- ment , à rédiger une inftruétion générale {ur la fabrication du Salpétre, dans laquelle ils ont infifté fur l’avantage qu'il y avoit, dans certains cas & dans certaines Provinces, à fuppléer à la difette des cendres par la potaffe. Secondement , à publier bientôt après une inftruétion fur le tra- Yail des eaux mères. Troïlièmement enfin , à publier en 1779 une inf- truction fur l’art de fabriquer le {lin & la poraffe. Ces différentesinftruétions , jointes à une augmenration de prix que les circonftances ont fait juger néceflaire , ont donné une telle activité à la fabrication du Salpêtre en France, qu’elle eft à peu près doublée dans un efpace de douze années. On en peut juger par l’état ci-après. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 189 ÉTAT de la récolte du Salpétre en France, depuis 1773 jufqu'en 1785. FOURNITURES FAITES par par DE LA RÉCOLTE. LES SALPÊTRIERS.| LES NITRIÈRES. liv. | 4 porc -.. 1,800,060 DE ... 1,843,794 64,457 ste eee tels +. 2,027,849 ee Is107 1,908,2$1 + 2,128,956 20 6 de 3650 RIZ OS NC 078,49!$ + 2:003,$70 sesssosss ee …….. 2,0$3:543 .. 216,727 ...12:5270,270 soso +. 2,191,136 oc... 349,596 1,540,732 etes. °:112;296,710 Désom ATEC + 1,769,496 Sin ipiete siojaisis +. 2457;128 0. $45:076 35002,204 ssssssssses .. 2:555:26$ ... $93:463 3:148,728 esse ee sie ... 2,621,990 ….….. 616,656 3:238,646 SOIOÉE .-o| par évaluation. |.:.-...2.144 3,500,000 Ce n’eft point en pefant fur le Public que ces fuccès ont été obtenus: en effet, c’eft dans le mois d’Août 1777 , que le Roi à jugé qu'il ctoit de fa juftice & de fa bienfaifance de foulager fes fujets de la gêne que leur occafonnoit la recherche des matériaux falpétrés dans les caves & dans les lieux d'habitation perfonnelle ; que les Communautés des Pro- vinces de Champagne , des Evéchés, d’Alface , de Lorraine, de Franche- Comté & de Bourgogne ont été exemprées de toutes fournitures de bois ou de voitures autrement qu'à prix défendu , & que les privilèges des ® Salpétriers ont été reftreints. On peut évaluer les avantages qu'ont pro- curés ces changemens aux fujets du Roi, par les détails rapportés pages 12 & 13 de ce Recueil: On ne peut donc douter que ce ne foit au nouveau plan que le Gou- vernement 4 cfu devoir adopter pour l’Adminiftration dés Poudres, à Yinftruion , au bon prix, à l'ufage de la potafle , que font dûs les fuccès rapides de là récolte nationale. On diftingue dans l'Art dont nous nous fommes propofés de rendre 10 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ eompte , l’alkali végétal qui fe trouve dans le commerce fous le nom de falin & fous celui de potalle : l’un & l’autre font le produit de la lixiviation des cendres de bois, & de l’évaporation de l’eau employée à cette opération; mais avec cette différence qu’on a coutume de donner en Lorraine, en Franche-Comté & en Alface , le nom de falin à la matière feulement defléchée, & celui de potaffe à la même matière qui a fubi un degré plus ou moins grand de calcination. I} n'eft point de plantes qui brülées ne donnent des cendres ; il n’eft point de cendres dont on n’obtienne par lixiviation & évaporation une matière faline; mais chaque efpèce de bois donne des réfultats différens pour la qualité & pour la quantité d’alkali. Pour apprécier ces différences, les Régifleurs des poudres ont incinéré des quantités aflez confidérables de différens bois , de différentes plantes; ils en ont leflivé les cendres , & en ont obtenu le falin ou la potalle; enfin ils ont déterminé par des ex- périences très-concluantes , la quantité d’alkali réel qu’elles contenoient, Le tableau fuivant préfente les réfulcars qu'ils ont obtenus. TABLE AU des quantités de cendres & d’alkali, fournis par la combuflon, lixiviation & eévaporation, de 4000 liv. de différens végétaux. #1 L ESPÈCES | POIDS: |pRODUIT| QUANTITÉ | des PEN BR © EE ES Bots ET PLANTES SA De Marréresanne] P'ALEALI RÉEL | Bois OU DE PLANTES. Eu Er CENDRES. PRES a | PER ESS HITS - LE ee SL | liv. liv. onc. gros. liv. onc.gros. liv. onc.gros.! Tices DE Maïs...... ee else 2045000 2SAMAIS ES 70h 86 LUS PLOSE NS || Tices DE TOURNESOL. |....... 4,000 228 14 » 80 on» » SEL RANES 7 | SARMENS DE VIGNE.., |....... 4,000 13 5 ZONE 2804 4 230 NS Bus. RCE Rie dénissee + 4,000 I1f >» ® D Lis Ph ETS SAULE. AE SNA MERCATO .. 4,000 LL 3 ET AUS LIH, 9Ne 6 BAT 5 ORMES ETS eee 43000 94 II 6 1$ 19 4 12 LUS: CHENE Lee ne CHR GO E 4,000 (HAE ES), CAMES SANS 1 Le AIREMB LE ete eisietseie cie lle etre tele 4,000 49 ON EUIZ | 377 mr 12088 CHARMEes see oosse Moss eee 43900 AS MRUZINEZ (PIMEONE 4. 2 6 HÈTRE HOopoe Sala cet 4,000 23 CL CHREUCAUET sbtæ «3 SAPIN eleleiesi te ciste ll eee et 4,000 13 10 € IV Z æ J2 3 —*<" Se À, On voit par ce tableau , que la quantité de cendres & d’alkali four- SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ror nie par les différens bois & les différentes plantes, n’eft pas relative à leur dureté ni à leur pefanteur fpécifique, puifque le buis & le faule donnent des produits peu différens les uns des autres , quoique la dureté & la denfité de ces bois {oit bien différente. Les Régilleurs des poudres traitent dans un chapitre particulier, des moyens que les Saliniers peuvent mettre en ufage pout fe procurer des cendres, & de la valeur qu’elles ont pour eux. Il eft évident que les cendres étant un compo d'une fubitance terreufe & d’alkali, elles n’ont de valeur réelle relativement à la fabrication du falin & de la potafle, qu’en raifon de la quantité d’alkali qu’elles contiennent, & c’eft cette quantité qu'on peut reconhoitre par une épreuve rrès-facile : elle confifte à prendre une portion de la cendre dont on veut déterminer la qualité, une demi-livre, par exemple, à la leffiver avec deux livres d’eau bouillante , &, quand la liqueur eft froide & claire, à y plonger le pèfe-liqueur gradué pour le Salpêtre. Les Régiffeurs des poudres fe font aflurés que fept degrés + à ce pèfe-liqueur indiquoient que la liqueur mife en eflai contenoit fix pour cent d’alkali concret effervefcent; que neuf degrés ? au même inftrument indiquoient huit pour cent d’alkali ; douze degrés +, dix pour cent, & quinze degrés 2, douze À pour cent. I] eft toujours aifé , d’après cela, de calculer, fur l’effai qui a été fait en petit, la quantité de falin ou de potafle contenue dans un quintal de cendres, & de proportionner la valeur qu'on y attache à la quantité de produit qu’on en peut tirer. Quoique l'alkali foit une des fubftances falines qui fe diffout le plus facilement dans l’eau , il eft cependant beaucoup plus difficile qu'on né le croit communément , d’épuifer entièrement les cendres de la quan- tité qu'elles en contiennent. Les Régiffeurs des poudres font voir qu’il faut une très-grande, quantité d’eau, & qu'il y a beaucoup à gagner à Femployer chaude. Ils donnent la manière qu'ils regardent comme la plus avantageufe pour faire le lefivage , la meilleure forme des chau- dières & des fourneaux, & tous ces détails font accompagnés de plan- ches qui en rendent l'intelligence plus facile, La matière faline que lon retire ainfi des cendres par lixiviation & évaporarion , & qui, comme on l’a déjà dit, eft connue dans une païtie des Provinces de France fous le nom de falin , eft exceflive- ment deliquefcente , & par cette raifon d’un tranfport difficile & em- barraffant. On préfère en conféquence , pour les ufages du commerce, de la transformer en potafle , & c’eft ce qu’on opère par la calcination dans un four deftiné à cer objer. Ce four eft divifé en trois chambres ; deux latérales , où fe place le feu; une au milieu , où £e place le falin. Ces trois chambres ne font féparées l’une de l’autre que par deux lan- guettes de brique ou de fonte de fer, qui ne montent pas jufqu’à la voûte, & qui permettent à La Aamme d'aller lécher la furface du falin & de le calciner. 192 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ Cet Ouvrage, qui a mérité les éloges & l'approbation de l'Académie ; a été imprimé fous fon privilège , & publié par ordre du Roi en 1779. OBSERVATIONS fur des terres G pierres falpêtrees , qui fe trouvent dans quelques Provinces de France, par MM. le Duc de la Rochefoucauld, Clouet & Lavoiffer. Lrs Commillaires de l'Académie ayant eu pour objet de rendre ce Recueil le plus complet qu'il leur a été poñible , & d'y raffembler tous les Mémoires intéreffans & inftruétifs qui ont été rédigés pendant ou depuis le Concours , ils fe feroïent reprochés de n'y point inférer un Mémoire de M. le Duc de la Rochefoucauld , fur la génération du Sal- pêtre dans la craie , & deux Mémoires de MM. Clouer & Lavoifier , fur des terres & pierres naturellement falpêtrées , qui fe trouvent à la Roche- Guyon, dans la Touraine & dans la Saintonge. Les Auteurs de ces Mémoires, qui n’avoient eu d'autre but que le bien public & l'avan- cement des connoïffances utiles, ont confenti volontiers à ce qu'ils fuffent imprimés à la fuite de ceux qui ont concouru. Le château & le village de la Roche-Guyon font bâtis fur la rive droite de la Seine , au pied d’un côteau ,efcarpé, compofé de craie dans toute fa hauteur. Cette craie , dans un efpace de près de deux lieues , eft fou- vent découverte & coupée à pic, & on y a creufé dans plufieurs endroits des habirations , des caves, des écuries. Ce côteau, ainfi que celui au pied duquel eft fitué le villège de Mouffeau , cit tapiflé, dans un grand nombre d’endroits, d’efflorefcences de véritable Salpêtre de houffage. Ce Salpètre pénètre même fouvent dans la craie à quelque profondeur; & indépendamment de celui à bafe d’al- kali végétal | on en trouve qui n’eft qu’à bafe terrenfe. M. le Duc de la Rochefoucauld a été le premier à obferver ces faits & à foumetire les craies des environs de la Roche-Guyon à des expé- riences. MM Clouer & Lavoifier ont vifité depuis ce canton dans un très-grand détail; ils ont pris des échantillons de craie dans différens endroits , à différentes élévations , à différentes profondeurs; ils les ont lefivées avec grand foin , pour connoître la qualité & la quantité de matières {alines qui y étoient contenues. Sans entrer dans des détails qui ne peuvent être lus que dans les Mémoires mêmes, les Commiflaires de l'Académie vont donner ici, en peu de mots, les réfulrats des expé- riences, & des obfervations principales qui y font rapportées. ” ]l fe trouve en général du Salpétre dans prefque toutes les craies des environs de Moufleau & de la Roche-Guyon , bit dans le voifinage des lieux habités, foit à de grandes diftances des habitations , pourvu que SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 193 que ces craies foient expofes à l’action de l'air & à l'abri de la pluie ; mais avec cette circonftance remarquable , que loin des habi- tations le’ Salpétre eft toujours à bafe terreufe , & qu'il eft au contraire en partie concret & à bafe d’alkali fixe végétal dans les environs des lieux habités. Ce nitre ne pénètre pas dans toute la montagne ; on n’en trouve qu'à une médiocre profondeur , & il paroït que les parties de craie abfolument intérieures , & qui ne peuvent avoir aucune commu- nication avec l'air , n’en contiennent aucune portion. Il ne fe forme pas feulement de l'acide nitreux dans les craies des environs de la Roche Guyon, il s’y forme aufli de l'acide marin; il eft prefque toujours uni à une bafe terreufe , rarement à l’alkali minéral, & jamais au végétal. Les craies des environs de la Roche-Guyon & de Moufleau ont une telle tendance à fe nitrifier, que lorfqu’on les a leflivées , elles fe nitrifient de nou‘eau en très-peu de remps. M. le Duc de la Rochefoucauld en a eu la preuve dans des expériences qu’il a faites en 1776 & 1777, done on rendra compte Re , & fes réfultats font aujourd’hui con- firmés par une expérience journalière. Pour opérer cette régénération du nitre, on mêle un peu de paille aux craies qui ont été leilivées, on en forme des murs à la furface defquels le Salpètre s’effleurit. Au bout de quelques mois , on les gratte dès que le Salpêtre paroïît en abondance, & on continue ainfi jufqu’à deftruction totale du mur, La craie qu’on peut regarder comme une terre calcaire à peu près pure, n’eft pas la {eule matière du règne minéral qui ait une grande difpoñition à fe {alpêtrer. Le tuffeau de Touraine, qui n’eft qu’une terre calcaire mêlée d’un cinquième de fable très-fin , paroït au moins auffi propre à la nitrification ; c’eft ce que MM. Clouet & Lavoifer ont conftaté dans un voyage qu'ils ont fait en Touraine en 1778. Ils ont parcouru les côreaux & les cavernes de prefque toute cette Province, & ils donnent très en détail dans leur Mémoire , la defcription des ter- reins & des montagnes , la proportion de fable & de pierre calcaire contenue dans le tuffeau qui les compofe, la quantité de Salpétre & de fel marin qu'ils en ont retirée. F Il réfulte de leurs obfervations & de leurs expériences , que le ruffeau de Touraine eft fouvent falpétré dès la carrière même , & qu'il n’eft pas étonnant par conféquent que cette pierre employée dans les bâ- timens foit en peu d’années entièrement pénétrée de Salpêtre. La Tou- raine préfente donc des reflources rente & prefque inépuifables pour la fabrication du Salpêtre. Ces reffources font , 1°. les matières qui fe trouvent naturellement falpêtrées , même dans les carrières. 2°. Les ma- tériaux de démolitions qui font plus riches en Salpêtre que dans aucune autre Province du Royaume. 3°. Larégénération du Salpètre par le moyen des murs. Les Régifleurs des poudres, en obtenant du Roi que le prix du Salpêtre fût augmenté dans cette Province, en y répandant les inf- tructions, en éclairant les Salpétriers fur leurs véritables intérêts , ont Bb +94 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ mis en aétivité tous ces moyens, & la récolte du Salpêtre dans cette Province , qui en 1776 n'étoit que de 250,152 livres, eft aujourd'hui plus que doublée : on en peut juger par l'état ci-après, ÉTAT des quantités de Salpétre recoltéés en Touraine depuis 1775 jufqu’en 1784. livres. 177$ corse sssssurse « 161,074 1776... 2$0,1$2 1777 5 oabéidnonc s'oecteinete 259,998 LAPS Seb ie ete ls . - 338,326 , 17/7 inlatoloreletele ele etes tete loterie 12,89 ANNÉE Seorsserersnss UE SESSE RO DORCHU SERGE AE LS eieieie eiiaeltelelele = cie telolale lee 346,740 TAB Dee eleele see iojefolelelelæs ie ciaisie 426,009 LE103/e etai a s1e ete taie sie ete) elait à letete 464,314 1784. DÉLHOUSE CCHRdoES $39,44T Indépendamment des obfervations particulières que M. le Duc de fa Rochefoucauld à communiquées aux Commiffaires de l’Académie fur les nitrières naturelles des environs de la Roche-Guyon, il a bien voulu ré- diger un Mémoire rempli d'expériences & d’obfervations curieufes fur la génération du Salpêtre dans la craie. Après des détails intéreffans fur lorigine du travail du Salpètre à ja Roche-Guyon , fur les inconvéniens de la forme anciennement adoptée en France pour la récolte du Salpêtre ; enfin furles avantages de la nou- velle forme que le Roi y a fubftituée , M. le Duc de la Rochefoucauld donne une idée de la compolfition des montagnes des environs de la Roche-Guyon; il prouve enfuite , par de nombreufes expériences , que les craies ne contiennent de Salpétre que dans le voifinage des furfaces : qu'à la profondeur de cinq à fix pieds on n’en retire par lixiviation qu’un peu de félénite, & quelquefois un peu de fel marin à bafe faline & à bafe terreufe. Des expériences faites fur de la craie, prife dans le haut des falaifes qui bordent la mer à Dieppe , à fept à huit pieds des furfaces, ont con- firmé ce réfultar; M. le Duc de la Rochefoucauld n’en a également re- üré qu'un peu de félénire & de {el marin. On trouve à peu de diftance de [a Roche-Guyon , à Rangiport , un côteau plus riche encore en Salpêtre que ceux de la Roche-Guyon, & M. le Duc de la Rochefoucauld attribue cetre grande tendance à la ni- trification , à ce que la craie y eft mélée d’une portion d'argile. Cette obfervation s'accorde avec celles adreffées à M. le Duc de la Rochefou- cauld par M. le Chevalier de Dolomieu fur la nitrière artificielle de Malte : on y préfère un mélange de terre calcaire & d’un peu d'argile, SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 195 à de la terre calcaire pure , & on prétend qu'il s’y forme plus de Sal- pêtre à bafe alkaline. Après avoir prouvé que la craie, qui n’a point été expofée à l'air & qui a été prife dans l'intérieur des montagnes, ne contient point de Salpêtre , M. le Duc de la Rochefoucauld s’eft occupé d'expériences fur les circonftances de la formation de ce fel. Il a fait concafler en mor- ceaux de la grofleur du poing, de la craie tirée de l'intérieur des mon- tagnes, & qui ne contenoit point de Salpêtre; il en a fait conftruire des murs, eny entre-mélant des lits de paille : il a fait de femblables ex- périences avec de la craie falpétrée, mais qui avoir été bien dépouillée de tous fes fels par Le lavage , & il a varié de différentes manières la difpofition des murs : ils ont tous été conftruits en Mars & leflivés en Novembre , & ils ont tous donné de la félénite, du fel marin, du Sal- pêtre à bafe terreufe , & une petite portion de Salpétre à bafe d’alkali végétal. On n’avoit ajouté à ces murs aucune matière fermenrefcible , d'où M. le Duc de la Rochefoucauld conclut que la feule action de l'air fufñt pour imprégner la craie d’acide nitreux, même d'acide marin, & peut-être d'acide vitriolique. A l'égard de l’alkali fixe qui fert de bafe au Salpêtre , M. le Duc de la Rochefoucauld l'attribue à la décompofition des matières végétales & animales. Les Commillaires de l’Académie termineront le compte abrégé du tra- vail de M. le Duc de la Rochefoucauld fur la génération du nitre, par l’ex- trait d’une lettre de M. le Commandeur de Dolomieu , du 6 Décembre 1784, que l’Académie a jugé devoir étre rendue publique, fans garantir cependant qu'il n’y a pas d'exagération dans les faits dont on a fait part à M. de Dolomieu. Là Malte, G Décembre 1784. »# Je ne fais fi j'ai déjà eu l'honneur de vous parler, Monfeur, d’une » découverte aufli extraordinaire qu’intéreffante , faire par l Abbé Fortis : » c'eftune mine de Salpêtre à bafe alkaline , dans la Province de Pouille » du Royaume de Naples. 11 a trouvé plufeurs trous en forme d’enton- » noirs ou de crateres de volcans , ouverts dans une pierre calcaire à » bancs horizontaux, femblables à ceux que l’on voit fréquemment dans #” les montagnes de la Carniole. L'intérieur de ces cavités eff tapifé d’une » croûte de nitre criftallifé , de plus d’un pouce d’épaifleur. Le fond de » J'entonnoir eft plein d’une terre produite par la dégradation du rocher, » & mélée avec ces croûres de nitre qui fe font détachés des parois. II » y a enfuite une infinité de petites grottes dont l'ouverture donne dans » l'intérieur de la grande excavation , & qui contiennent de ces croûres » de nitre beaucoup plus épaifles & plus blanches. La caffure de ce » nitre eft femblable à celle des ftalactiques calcaires , dites fos ferri. » Une feule lixiviation & évaporation le rend aufli beau & aufhi pur » que le meilleur nitre de troilième cuite. Les Commiflaires envoyés Bb ji 196 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ » ë nm $ »” par la Cour fur les lieux , ont calculé qu'une feule de ces foffes pou- voit contenir plus de cinquante mille quintaux de nitre le plus pur. L’Abbé Fortis, que j'ai vu à Naples, m'a montré & donné des échan- tillons de la pierre, des rerres.& des croûres nitreufes ; j'ai éré étonné de la quantité de ce fel qu’elles contiennent : il m'a convaincu de la réalité d’une découverte qui me paroifloit contraire à ce que nous favons fur la formation du nitre. Je m'étois refufé à croire à cette mine juf- qu’au moment où j'en ai vu les preuves. L’Abbé Fortis a obtenu une penfion de 2000 francs de la Cour de Naples. La principale foife eft dans un lieu nommé Latera, à peu de diftance de ja mer , ce qui donne encore des facilités pour l’exploitation de ce nitre. Si le Gouvernement de Naples fait tirer tout l'avantage poilible de cette découverte , elle fera pour lui une nouvelle fource de richefle , & elle difpenfera les Nations Européennes d'aller chercher dans les Indes ce fel devenu malheureufement trop néceflaire. La pierre qui fert de matrice au nitre eft blanche , dure; elle à un grain fin, elle fait vivement effervef- cence avec les acides , & s’y diflout prefque en entier. Elle a une telle aptitude à former du nitre, qu'un morceau que j'ai dans mon cabinet depuis deux mois, renfermé dans une armoire vitrée , a déjà une petite croûte de nitre fur fa furface & dans une fente qui s’y eft for- mée. Cette pierre paroît être pour le nitre ce qu'ett la pierre de la Telfa pour l'alun; c’eft-à-dire, contenir les principes prochains né- ceffaires à la formation de ce fel, & n'avoir befoin que d’une nou- velle circonftance pour les développer ; tel eft le feu pour la pierre elumineufe , & l'air pour la pierre nitreufe. Les verres nitreufes de Latera , c'eftà-dire , celles qui, effleuries fur la furface du rocher, tombent dans le fond de l’entonnoir, paroïlfent être inépuifables. Deux ou trois mois après leur lixiviation , elles contiennent encore la même quantité de nitre. Si je trouve une occalion prochaine , j'aurai l'hon- neur de vous envoyer des échantillons de la terre & du fel, en vous priant de les préfenter à l'Académie. Je ne fais fi cette découverte de FAbbé Fortis eft déjà publiée en France; fi elle n’y eft pas connue, j'ofe vous prier de la faire inférer dans les Journaux. L’Abbé Fortis eft déjà connu par de très-bons Ouvrages, & par des obfervations fort intéreffantes fur l'Hiftoire Naturelle du Véronois , du Vicentin & de la Dalmatie «. SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 197 DÉTAILS de quelques experiences faites en Angleterre € en France, fur la compofition & la decompofition de l’acide nitreux. Tous les Phyficiens s'accordent aujourd’hui à regarder l'air de l’atmof- phère comme un compolé de trois parties environ d’air méphitique, & d'une d’air vital ou déphlogiftique. M. Cavendish, dans un Mémoire qu'il a lu très-réc“mment à la Société Royale de Londres, à fait voir que fi on ajoute à de l'air de l’atmofphère affez d'air vital pour que fa propor- tion à la mofette foit dans le rapport de fept à trois, qu’on l’intro- duife dans un appareil convenable, & qu’on tire un grand nombre d’é- tincelles électriques dans ce mélange , à chaque étincelle on obferve une très-petite diminution dans le volume des deux airs; & en conti- nuant ainfi très-long te:sps à tirer des éteincelles électriques , on parvient à abforber entièrement les deux airs. Si la liqueur fur laquelle on opère & qui fert à renfermer les deux airs, eft de l’eau de chaux , elle contient, après l’abforbrion , du Salpêtre à bafe terreufe ; fi c’eft de l’alkali végé- tal cauftique en liqueur , on en retire par évaporation de vrai Salpêtre, en forte que l’on ne peut douter que les deux airs ne fe foient combinés & convertis en acide nitreux. Ces expériences fur la compofirion de l'acide nitreux s'accordent avec les réfulrats qu'on obtient par voie de décompofition. M. Bertholet a fait voir que quand on poufloit au feu du Salpétre fans addition , on convertiffoit tout l’acidé en un mélange d’air vital & de mofette. Cette même mophette fe retrouve dans la détonnation du nitre avec le char- bon, comme l'ont fair voir MM. Bertholet & Cavallo. Enfin M. Lavoiier, dans un Mémoire lu récemment à l'Académie & qui termine ce Recueil, a fuivi avec beaucoup d'attention le réfultat de cette détonnation, en tenant un compte exact des quantités tant en poids qu'en volume; il fait voir qu'on n'obtient dans cette opération que de J’air fixe , de la mo- fete atmofphérique, & de l'alkali. Mais l'air fixe , d’après des expé- riences publiées par le méme M. Lavoifier dans le volume de 1781 , page 448, eft un compofé de vingt-huit parties de charbon fur foixante-douze d'air vital; on peut donc en quelque façon fubftituer à l'air £xe obtenu dans la détonnation du nitre, fa valeur en air vital & en charbon. D'où il réfulte que le nitre eft compofé d’air vital ou plutôt de principe oxy- gine, de mofette atmofphérique, & d’alkali fixe. L'air nitreux n'étant autre chofe , dans la théorie de M. Lavoïfier, que de l'acide nitreux, auquel on a enlevé une proportion déterminée de principe oxygine , il en réfulte que l'air nitreux & l'acide nitreux font compofes des mêmes principes , mais dans des proportions différentes, 198 HISTOIRE DU PRIX PROPOSÉ, &e. Voici celles qui ont été déterminées par M. Lavoifier. ComPosiTioN d’un quintal d’acide nitreux fec. en poids, en volume. PASS ae 2e liv. onc. pouc. cubiq. Mofette atmofphérique....... 20 . 8 .... 10 ; Air nitreux. À Principe oxygine employé à for- mer de l'air nitreux......... ST DNS UATIURS Principe oxygine employé 2 faturer l'airritreux, & à le convertir en acide nitreux.......... 36 » .... 36 » TOTAL: von se oeleioloioie ss sois simon TO ND che 100 un CARE Ces proportions ne s'accordent pas rout-à-fait avec celles de M. Caven- dish; mais les différences ne font pas affez grandes pour qu’on ne puille pas les attribuer à l’erreur des expériences , ou peut-être aux différens états de l'acide nitreux : on fait en effect qu'en variant les proportions de principe oxygine & d'air nitreux, on peut former différens acides nitreux , depuis celui qui eft blanc & fans couleur , jufqu'à celui qui eft rutilant & fumant. à MM. Cavendish & Lavoifer ont aufli formé de l'acide nitreux en brûlant enfemble de l'air inflammable & de l'air vital mélé de moferte atmofphérique. La chaleur de la combuftion opère alors , comme l'a obfervé M. Cavendish , un effet analogue à ce qui a lieu par l’étin- celle electrique. . L’acide nitreux n’eft pas la feule fubftance dans la combinaifon de laquelle entre la mofetre atmofphérique. M. Bertholer vient d’annon- cer que l’alkali volaril étoit un compofé de cinq parties environ en poids de mofette armofphérique, contre une d'air inflammable , & 1l a reconnu Yexiftence de cette même mofette dans toutes les fubftances animales. RECUEIL REC UE L D E MÉMOIRES ET DE PIÈCES, SUR LA FORMATION ET LA FABRICATION DU! "SA L'P'ÉTR E, Savans É trangers. Tome XI. A rm, M EÉMOIRE STURR LA FORMATION DU SALPÈTRE, ET SUR LES MOYENS D'AUGMENTER EN FRANCE LA PRODUCTION DE CE SEL. Pair MC O RON EST STE, Docteur en Médecine, de l'Académie Royale des Sciences, & de la Société Royale de Médecine. Nafcitur Nicrum è rebus putrefcentibus oleaginofis, Acido terra infito concurrentibus. GEORG. ERNEST. STAHL. SPECIM. BECCHER, PAg- 139. PREMIER Concours, N° XXXI AVERTISSEMENT DE L'AUTEUR Locs RAGE que je préfente au Public, a concouru au Prix que l'Académie des Sciences avoit propofé pour l'année 1775, SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE (*). Le titre qu'elle a bien voulu me conférer, en m’admettant au nombre de fes Membres, ne me permettant pas de concourir une feconde (#) Quoique ce Mémoire ait déjà éré"imprimé en 1779 , les Commiflaires de l'Académie croient rendre fervice au Public en l'inférant dans ce Recueil. Comme il a été reuré du Concours, il ne leur appartient pas.de lui afigner aucun rang. Ai 4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fois , j'ai penfé qu'en faifant imprimer mon Mémoire, je pour- rois faire plaifir & me rendre utile à ceux qui fe propofent de courir la même carrière. Des circonftances particulières mayant mis à portée de faire plufeurs Obfervations, je les ai ajoutées en note, afin de ne point intervertir l'ordre de ce Mémoire, & de le faire paroïtre tel qu'il étoit lorfque je l'ai envoyé au Concours. Enfin, le jugement qu’en ont porté Mefieurs les Commiflaires de l'Académie, & l'approbation qu'elle a bien voulu y donner, me font efpérer que le Public le recevra favorablement. Ce Mémoire eft divifé en trois parties; dans la première , je confidère le Salpêtre comme un fel neutre, compofe d'un acide particulier, qu'on nomme acide nitreux , combiné avec l'alkali végétal : mais je fuis forc éloigné de penfer que cet acide foit dû à la transformation de l'acide vitriolique , & à fon pañlage à l’état d'acide nitreux ; le grand nombre d’ex- périences que J'ai faites fur ce fujet, m'autorife à penfer que cet acide eft particulier dans fon efpèce, & qu'aucun des acides connus ne contribue en rien à fa formation. Je me fuis étendu auf beaucoup fur l'état de la putréfadtion , & je crois être le premier qui aie avancé quil falloit qu'elle füc complette, que les terres falpétrées fuflent exemptes de toute odeur, & qu'elles fournifloient d'autant moins de Salpètre, que la putréfaction n’étoit pas à fon dernier période. Je n'ai point négligé de m'aflurer, fi le libre concours de Fair étoit d'une neceflite abfolue au développement du Salpétre; on fait combien les fentimens font encore partagés fur cette quef- ion; mais Je crois pouvoir avancer, d'après mes propres expériences , & celles de M. le: Duc de la Rochefoucaulr, que l'on retire d'autant moins de Salpêtre des terres, qu'elles ont été moins de temps expofces à l'air. Je me fuis attaché dans la feconde partie, à déterminer quelles étoient les terres qui pouvoient convenir le mieux à fixer le Salpêtre; j'ai fait voir que les terres calcaires éroïent les feules qui euflent cet avantage, & je crois avoir démontré que pour qu'elles puflent être propres à cer eflec, il falloit MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. $ qu'elles fuflent pourvues de leur air fixe; parce que la chaux vive a la propricté de décompofer tous les fels : c'eft ce qui m'a donné lieu de conjetturer que l'air fixe pouvoit bien être un des principes confticuans de l'acide nitreux. Je prie mes Lecteurs de ne point me condamner avant de m'avoir lu; car je préviens que je ne tiens point à certe théorie , & que je ne l'ai avancée qu'avec beaucoup de réferve , & parce qu'elle m'a paru fondée fur quelques probabilités. Dans la troifième partie , j'indique la préparation des terres ; & je donne divers procédés pour parvenir à former à pcu de frais du Salpétre. Je m'attends bien qu'ils ne feront point approuvés de tout le monde; mais je penfe que dans une ma- üère aufli importante, on ne fauroit trop indiquer de moyens; car il me paroïtroit fort difficile d’en fixer un qui füt praticable par-tout : il faudroit pour cela que toutes les Provinces du Royaume fe reflemblaflent par leur fol & leur fituation. Je n'ai aucune prétention en publiant ce Mémoire : mon feul but eft de tâcher de me rendre utile; & je me croirai trop heureux , fi mon travail peut être de quelque fecours. 6 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. NT RO D'UCTION. D: plufieurs années, la plupart des Académies de Europe, toujours accoutumées à diriger leurs travaux fur des objets utiles, fe font occupées des moyens d'étendre & de multiplier dans leur pays la produétion du Salpètre. Leur ‘principal but étoit non feulement d'augmenter les revenus du Souverain, mais même de délivrer les Particuliers de la gêne & de l'aflujettiflement qu'entraîne après elle la fouille des terres propres à produire ce fel. Les Savans de toutes les Nations ont été invités à porter leurs vûes fur cet objet important , & à contribuer, par leurs recherches , au bien de l'humanité. Déjà dans plufieurs Etats de l'Europe , des ni- trières artiñcielles ont été conftruites ; des réglemens fages ont été faits ; l'émulation & l'encouragement ont ete excités de toute part, & les peuples de ces contrées commencent enfin à reflentir les bons effets de ces établiflemens, & recueillent avec profit les fruirs de leurs peines. Puifle ma Patrie jouir bientôt d'un pareil avantage, & profiter des vües bienfaifantes & vraiment patriotiques d'un Miniftre fage & éclairé (*), qui, toujours occupé du bonheur public, a mis à même l'Académie Royale des Sciences de concourir à fes vües, en lui donnant une fomme pour pro- ofer des prix extraordinaires à ceux qui auront le mieux rem- pli la queftion fuivante : Déterminer les moyens les plus rompts & les plus économiques de procurer en France une produélion de Salpétre plus abondante que celle qu’on obtient préfentement, & fur-tout qui puiffé difpenfer des recherches que les Salpétriers ont le droit de faire dans les maifons des Particuliers. Cette queftion que propofe aujourd’hui l'Académie , fe trouve déjà en partie réfolue en plufieurs Royaumes. La Suède, €) M. Turgot, Contrôleur Général des Finances. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE 7 fa Prufle , une grande partie de l'Allemagne, lle de Malte; plufieurs Cantons de la Suifle, l'Amérique même, récoltent déjà, par cette voie, du Saipétre en aflez grande quantité pour fournir à leur confommation, & pour ccfler en quelque forte de devenir tributaires des Nations étrangères. En confi- dérant donc ces différens établiflemens , on peut en inférer que le Salpêtre fe trouve généralement répandu dans tous les pays5 que la France, aufli bien fituée que les autres Royaumes, peut fe flatter du même fuccès, & qu'enfin le moyen de fe procurer du Salpètre en plus grande quantité ne dépend que du choix des matériaux, de la difpofition, de larrangement & des mélanges convenables des terres propres à produire ce fel. Voilà à quoi fe borne tout ce travail. Mais cette queftion , très-intéreflante par elle-même, exige: pour la traiter, qu'on entre dans des détails très-ctendus : Jexpoferai le plus fuccinétement qu'il me fera poflible, mes idées & mes vües fur cette matière. Je ne tirerai de confé- quences que celles qui refloraront des expériences, & fi J'avance quelques théories, je préviens que je ne les donne que comme des conjettures, qui cependant auront, ce me femble, quel-- ques degrés de vraifemblance. Pour éviter la confufion, & mettre plus d'ordre à ce Mé- moire, je le diviferai en trois Parties : dans la première Partie, je traiterai de l'acide nitreux (*); jexpoferai les divers fen- ümens des Auteurs qui en ont parlé, & je difcuterai leurs- opinions : dans la feconde, je parlerai de la formation du Salpêtre, & des moyens que l'on doit employer pour en obtenir: dans la troilième, jerdonnerai des procédés fimples pour aug- menter en France la produétion de ce fel, fans avoir recours au creufement des caves, & en délivrant les Particuliers de la gêne & de l'aflujettiflement auxquels ils font expofes par les fouilles que les Salpécriers ont droit de faire chez eux. (#) Ou acide conflituant du Salpêtre. Le Salpêtre ou nitre eft un fel neutre compofé d'un acide particulier, nommé acide nitreux, combiné jufqu'au point* de faturation avec l'alkali fixe végétal. 3 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. PREMIÈRE PARTIE. Sur l'Acide nitreux. P our pouvoir donner de l'acide nitreux des idées juftes, une définition exaéte, & pour pouvoir établir quelque chofe de certain fur la nature de cet acide, il faudroit que l'on connût fes principes conftituans, & les moyens que la Nature emploie pour le former. Mais jufqu'ici on n’a encore rien obtenu de fatisfaifant fur cette matière, & routes les recherches des Chimiftes fe font bornées à faire connoître feulement fes propriétés. On ne peut donc le regarder que comme un corps fimple, un mixte vraifemblablement du fecond ordre, dont l'analyfe exaéte a échappé à la fagacité des Chimiftes les plus éclairés. Aufi ce défaut de connoiflance fur cet acide a-t-il fait naître beaucoup de fentimens divers fur fa nature & fa formation. La plupart des anciens Chimiftes penfoient que l'air de l'acmofphère étoit le principal magafin où fe formoit l'acide nitreux ; ils croyoient que cet acide, ainfi formé dans Fair, fe dépoloit dans les terres calcaires. Quoique cette opinion ne foit pas abfolument dénuée de vraifemblance , puifque l'air, comme j'aurai occafion de le faire voir par la fuite, eft un des principes eflentiels & conftituans de acide nitreux ; cependant ce fentiment a efluyé avec raïon des contradic- cons bien capables de le combartre. Léméry le fils, de l'Aca- démie Royale des Sciences, dans deux Mémoires qu'il a donnes fur cer objet, & qui fe trouvent inférés dans le volume de cette Académie pour l'année 1717, a prouvé d'une manière claire & fatisfaifante, que des terres, de quelque nature qu'elles fuflent, ne fe falpétroïient pas de même à l'air lorfqu'elles éroient ifolées , & qu'elles ne contenoïient aucune fubftance en putré- faétion, Cependant, fi l'on interprète avec un peu moins de sigueur Le fentiment des Anciens, on verra que ce nef a ans MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. o) fans fondement qu'ils avoient établi leur fyftême; on verra, dis-je, qu'ils n’attribuoient pas totalement à l'air la formation de l'acide nitreux, puifqu’ils employoiïent déjà pour en obtenir des matières en putréfaétion. Si d’une part ils ont voulu donner un peu trop d'extenfion à leurs fentimens, & trop le géné- ralfer ; d’un autre côté aufli, ils ont trouvé dans leurs contra- diéteurs un peu trop d’acharnement à les combattre; & on fera autorifé à leur rendre plus de juftice, fi l'on confidère que les matières en putréfattion, fans le concours de Fair, ne fourniflent pas de nitre. Je fais qu'on m'objeétera que la plupart des fubftances végétales fourniflent du nitre de cette manière; je répondrai à cela, que ce nitre étoit tout formé dans les plantes, & que celui que lon en retire n'eft point le produit d'une nouvelle combinaïifon , comme j'ai eu occa- fion de m'en aflurer plufieurs fois. Lémery , après avoir combattu le fentiment des anciens Chimiftes, a cru devoir adopter une autre opinion pour rendre raïfon de la formation du Salpètre; il prétend que ce fel eft un produit de la végération; qu'il fe forme habituelle- ment dans les plantes vivantes, d’où il pañle enfuite dans les animaux. Mais cette aflertion de Lémery entraîne après elle bien des objeions. Si le nitre eft un produit de la végé- tation , pourquoi toutes les plantes n'en contiennent-elles pas? Et pourquoi avance-t-il lui-même dans fon Mémoire, que la bourrache, le pourpier & plufieurs autres efpèces de plantes nitreufes, cultivées dans des terres exemptes du mélange de plantes pourries, ne lui ont donné par l'examen aucun indice de nitre, mais toujours de l'acide vitriolique? Ce fentiment, comme l'on voit, n'eft pas à l'abri des contradidions; car fi le nitre croit un produit de la végétation , il devroit fe trouver également dans toutes les plantes, ce qui n'arrive point ; & on peut avancer avec plus de raïfon fans doute que Lémery, que le mitre qu’on retire des plantes n’y eft qu’accidentelle- ment (*); que ce même nitre exiftoit tout forme dans la terre; (#) I y a déjà bien des années que j'ai pu me convaincre de la vérité que je viens d'avancer; mon objet, en faifant ces expériences, ne fe bornoit point 10 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. qu'étant diflous par Fhumidité ; il s’eft trouvé dans un crat de divifion aflez grand pour être entraîné par les fucs nourriciers de la plante. On pourroit encore avancer que la plupart des végétaux ne contiennent pas de nitre tout formé , & que celui qui réfulre de leurs mélanges avec la terre calcaire ou le gypfe, n'eft dû qu'à une nouvelle combinaifon & à un nouvel arran- gement des principes qui le conftituent. La terre animaïe, felon lui, peut encore ètre regardée comme une terre nitreufe; j'ai eu occafion de vérifier ce fait depuis plus de huit ans. On avoit mis dans un pot de terre verniflée des matières animales , on avoit enterré ce por afin d'ôter à cette matière route communication avec l'air extérieur : on avoit en vue d'autres recherches que celles qui intéreflent la matière que je craie; mais la circonftance m'a déterminé à employer cette terre pour cette expérience. J'ai délayé dans de l’eau froide certe terre, qui par ce laps de temps avoit perdu toute fa mauvaife odeur , figne certain que la putré- mm feulement au Salpètre, car mon but principal éroit d'examiner fi différens fels, mêlés avec de la terre , pafleroient dans le végétal fans altération : je ne rapporterai ici que celle qui a trait au Salpétre, me réfervant de reprendre ce travail, & de le donner dans fon temps à l'Académie. Voici donc comment je m'y pris : je mis dans deux caïfles de la terre de jardin, que j'avois bien lavée auparavant pour ôtef tout le fel qu'elle pouvoit contenir ; j'ajoutai dans une de ces caiffes deux onces de Salpèrre , que je mélai exaétement avec la terre, & dans l’autre je ne fis aucune addition, car elle devoir me fervir d'objet de comparaifon ; je femai dans ces deux caifles de la laitue ; celle où étoit le Sälpêtre me parut lever un peu plus promptement que l'autre. Je cultivai cette plante avec foin, & je l'arrofai auffi fouvent que la {écherefle de la terre l'exigeoir. Enfin, lorfqu'elle fut parvenue à fa parfaite maturité, je la cueillis & la fs deffécher promptement au foleil. La première, où étoit le Salpêtre, me laïffa entrevoir à la loupe quelques petits criftaux , au lieu que l’autre ne m'en donna aucun indice. Cette première plante brûlée fufa beaucoup fur Îes charbons ardens; l’autre au contraire brüla tranquillement, & ne laifla paroître aucun veftige du Salpètre. Je fens bien que pour donner plus de poids à cette expérience, il eut fallu la répéter plus en grand; mais il me femble cependant que quelque foible & légère qu'elle puifle être, on peur en inférer que le Salpêtre ne ch point formé dans la plante, & qu'il a paflé dans le végétal fans fouffrir d'altération. Ce qui fe pafle dans plufieurs pays , & notamment à l'Ifle de Ré, vient a l'appui de ce que j'ai avancé. Les Habirans de cetre Ifle manquant de fumier pour engraïffer Jeur terre, fe fervent à cer ufage de varech ou d'autres planes de cette nature LE trouvent fur les bords de la mer. Les plantes qu'ils cultivent ainf font alées, de forte que le pain , le vin & les légumes participent des différens feis contenus dans les plantes qui fervent d'engrais. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. II faction étoit achevée ; la liqueur eft pale claire, mais d'une couleur jaune ; foumife à l'évaporation, elle ne m'a donné aucun indice de l’exiftence du Salpêtre. Cette expérience eft concluante, puifqu'elle démontre que la terre végétale & animale ne fourniflent point de Salpètre fans le concours des fubftances qui lui font propres. Stahl, en fuivantc le fentiment de Becker fur l’exiftence d'un feul acide primitif, qu'il regardoit comme le principe & l'origine des autres acides (favoir, l'acide vitriolique ), a avancé que l'acide nitreux n'étoit autre chofe que ce même acide vitriolique , mais modifié par le mouvement de la fermenta- tion putride avec une certaine quantité de phlogiftique. Il fondoit fon opinion fur ce que l'acide nitreux fe forme par- ticulièrement & en plus grande quantité, dans des terres vitrioliques & abreuvces de phlogiftiques, que dans d’autres elpèces de terres; de là il conclut que l'acide viriolique fe convertit en acide nitreux. La plupart des Chimiftes modernes, foit par refpeé&t pour Stahl, foit qu'ils foient frappés de la folidité de fon raifonnement, ont fuivi fa doétrine; mais l’ex- périence ne doit pas plier fous le joug de l'autorité, & avec de pareilles armes je me propofe de la combattre. La préfence du fel marin, par-tout où fe trouve du nitre, fit penfer à Glauber que ce fel étoit fufceptible de fe convertir en Salpêtre. Cet Auteur étoit au moins aufli fonde à le croire que le font les Sectateurs de Stahl. De part & d'autre les raifonnemens qu'on peut faire fur cet objet paroïflent auffi {olides les uns que les autres; car on peut avancer que fi la félénite étoit aufli foluble dans l'eau que le fel marin, on en trouveroit autant de mêlé avec le Salpètre, que l’on trouve de ce dernier fel. Ce fentiment de Glauber n’a pas laïffe d'entraîner après lui beaucoup de pattifans : plufieurs demi-Savans, flatrés fans doute par l’efpoir du gain, ont entrepris, fur une fimple fpéculation, ce genre de travail; des Socictés fe font formées; des établiflemens confidérables ont été faits, & le fuccès n'ayant pas répondu à leur attente, ils ont été les viétimes de leur impéritie & de leur ignorance. Bi 12 MÉMOIRES SUR -LA FORMATION DU SALPÈTRE. Après ce court expofé de’ différens fentimens des Chimiftes fur lawmature de l'acide nitreux, j'ai cru qu'il éroic eflentiel de terminer , par des expériences varices & mulipliées ; auxquels de ces fentimens on devoit donner la préférence. Celui de Sthal , comme je l'ai déjà avancé , paroït avoir eu le plus de Se&areurs. Le Docteur Pietch, dans fa Difler- tation fur la nature & la formation du Salpêtre (Ouvrage qui a été couronné par l'Académie de Prufle) a principalement calque fes PREGPES far la do@rine de Stahl, en établiffant comme lui la tranfimuration de l'acide‘ vitriolique en acide nitreux : il apporte en preuve de fon fenüment, une expérience connue; il dit qu ’en faturant une terre calcaire avec l'acide vitriolique , & quen expofant ce mélange dans des endroïts où il y a des exhalaifons urineufes, ou mieux encore en l'humeétant d'urine & le laïffant évaporer à l'air, on obtient du nie de ce mélange ; traité par la lixiviation , pre Part ; d’où il conclut que dans cette circonftance l'acide vitriolique, par le concours de la matière phlogiftique de lurine, s'eft conveïti en Salpèrre. Je pourrois rapporter un plus grand nombre de faits à peu près analogues, contenus dans cette Diflertation ; mais comme ect Ouvrage eft imprimé , & qu'il {e trouve aujourd’hui entre les mains des Chimiftes, je crois’ devoir m'en tenir là , afin d'éviter des longueurs & des-redites inutiles. Cette expérience, qui étaie la Differtation du Do&eur Pieich, & qui lui fert de bafe, ctoit trop impottante pour que je ne la répétafle point; je faturai, ainfi que le demande l'Auteur, de la craie avec de l'acide vitriolique : faurois pu prendre ‘du gypfe ; qui auroit été la même chofe, mais je ne voulus avoir aucun reproche à me faire; jhumeétai ce mélange avec de lurine » & jeus foin d'en ajouter de temps en temps, lorfque j Je m appercevois qu'elle étoit évaporée, & que la mafle qui reftoir étoit très-sèehe: Après fix mois de digeftion , je leflivai ce mélange dans une fufñfante quantité d’eau ; j'obtins à la vérité par Pév aporation de la liqueur un peu de nitre, mais non point en aflez grande quantité pour MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 13 que je puñle conclure que celui que J'avois obtenu, étoit dû à la modification de l'acide vitriolique , & à fon pañlage à l’étar d'acide nitreux; d’ailleurs la felénite me parut n'avoir fouffert aucune altération ; je retirai, extraction faite des fels contenus dans l'urine, prefque poids pour poids la quantité de gypfe que javois employé, ce qui me prouva que la félénite, dans ce cas, n’avoit point contribué à la formation de l'acide nitreux. Mais pour mieux établir mon opinion, jé réfolus «de faire les expériences fuivantes ; je fis un mélange de douze livres de craie, de deux livres de fel de Glauber , que jhume&ai avec de l'urine ; Jeus foin d'en ajouter de temps en temps, afin de lentretenir toujours humide. Je ferai obferver que cette expérience a été commencée le 10 Juin 177$, & que je ne lai examinée que fix mois après. Pendant que d'un côté je procédois à cette expérience, d'un autre J'en pro- jetois plufieurs; je fis divers mélanges; le premier fut compofé de deux livres de tartre viiolé, de douze livres de craie, de quatre livres.de viande ; le fecond, de huit onces de fel ammorniacal viriolique, de fix livres de chaux éteinte , & de fix livres de crotin de cheval; le troifième étroit un mélange feul de crotin de cheval & de craie; & enfin le quatrième étoit fait avec de l'argile & du fumier de cheval bien pourri, & propre à faire le terreau des jardins. Tous ces mélanges ont été humcétés avec de l'eau , à l'exception du premier qui létoit avec de lurine : ils étoient tous numérotés felon l'ordre que je viens d'indiquer, & jy compris même le pre- mier mélange que je viens d'énoncer. Il eft inutile de dire que ces mélanges , pendant la chaleur de l'été, ont laifñié exbaler une odeur très-fetide & très-défagréable, & qu'après fix mois, toute cette odeur de certains mélanges n'étoit point encore entièrement pañlee. Tous ces vaifleaux évoient placés dans une efpèce de hangar, à quelque diftance les uns des autres, à l'abri de la pluie, mais où fair pouvoit circuler facilement; j'avois foin de remuer de temps en temps ces terres , afin de renouveler les furfaces & de hârer la putréfa@ion. Le temps étant expiré, Je les foumis à l'examen; le premier 14 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. numéro , qui étoit compofé de fel de Glauber & de craie, humeété avec de l'urine, lefivé & traité comme les terres à Salpétre, m’a fourni, par l'évaporation, une petite quantité de nitre; mais J'ai retiré une bonne partie du fel de Glauber, que j'avois employé, mêlé avec du fel marin; il s’écoit aufli formé de la félénite provenant de la décompofition du fel de Glauber , & de l’aétion de l'acide vitriolique de ce fel fur la terre calcaire. Je me propofe de démontrer dans une autre Diflertation (*), que l'acide vitriolique contracte avec les terres calcaires, une adhérence plus forte qu'avec les fubftances alka- lines, puifqu'il quitte, comme je viens de le faire voir #alkali avec lequel il eft uni, pour fe combiner avec une fubftance terreufe; & c'eft relativement à cette double décompoñirion, qu'on ne trouve Jamais ni fel de Glauber ni tartre vitriolé dans les travaux du Salpêtre (*). Le fecond mélange, traité comme le premier , me fournit une liqueur d'une couleur jaune & même d’une odeur encore très-défagréable : foumife à l'évaporation, je retirai une grande partie de mon tartre vitriolé , de la félénite, un peu de fel marin; mais il ny eut pas de nitre. Je préfumai que, fi dans cette circonftance Je n'avois pu obtenir du nitre de ce mélange, cela ne pouvoit dépendre que de ce que la putréfaétion n'étoit pas encore achevée entièrement ; & J'ai eu lieu de m'en con- vaincre , puifque fix mois après je retirai du nitre de ce même mélange, ce que Je n'avois pu faire auparavant, ce qui prouve que le terme complet de la putréfaétion eft très-eflentiel pour la produétion du Salpètre ; aufli l'ufage & l'habitude confir- (#) Volume de l'Académie des Sciences, année 1778. (K#) Comme dès l'année 1774, j'avois lu à l'Académie un Mémoire fur la décompofirion des fels’neutres alkalins par l'acide marin, auquel j'avois annoncé une fuite fur les fels à bafe verreufe , j'ai cru, dans. la crainte de me faire connoître, ne pas devoir entrer dans un plus grand détail fur la décompofition que les eaux mères du Salpêtre opèrent fur le fel de Glauber & le tartre vitriolé, Le peu que j'en ai dir a fufä pour mettre fur la voie d'autres Chimiftes , pour éclairer les Salpêtriers {ur la nature & l'emploi des cendres, & pour les mettre à portée de tirer parti des eaux mères, dont la plus grande partie étoit jetée & regardée comme inutile, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÊTRE. 1 ment cette opinion, puifque les terres des nitrières artificielles Jefivées , la première année , fourniflent moins de mire que les années fubféquentes. Le troifième mélange avec le fel ammoniacal vitriolique, laifla dégager beaucoup d’alkali volatil; je ne retirai plus de la Hixiviation de cette terre, que du gyple en très-grande quan- tie, du fel marin; mais il y avoit aufli un peu plus de nitre que dans les expériences précédentes, & prefque tout ce nitre étoit à bafe d’alkali fixe. Le quatrième mélange, leflivé de même, me fournit du nitre en plus grande quantité que les autres. Je ne doute point que ce mélange ne foit préférable aux précédens, fi au lieu de craie on y ajoutoit de la chaux éteinte, & qu'on laïflat cette matière expolce plus long-temps à l'air avant de la trañer; car, je le répète, la putréfaétion complète eft abfolument eflentielle à la formation du nitre, & c’eft une confidération qui doit entrer pour beaucoup dans les établiffe- mens des nitrières artificielles : je n'avois point employé, comme l'on voit, d'acide viriolique dans ce mélange, & je n'ai pas laïflé cependant d'en reürer plus de nitre que des autres. Le cinquième mélange m'a aufli fourni un peu de nitre comme les précédens ; maïs la lixiviation en eft ‘plus difficile, la compacité de l'argile n'etoit pas entièrement détruite; aufli la liqueur a-t-elle refte beaucoup de temps à filtrer, & même je n'ai pu éviter la perte d’une aflez bonne quantité qui a été retenue. J'aurois pu m'en tenir à ces premières expériences, & décider affirmativement que l'acide vitriolique n'entre pour rien dans la formation du Salpétre, fi je n’avois eu en vue d'établir, d'une manière encore plus exaéte , mon opinion fur cette matière, Aufli, à peine eus-Je fini ces expériences, que je m'occupai à en faire de nouvelles ; je jetai les yeux fur les combinaïfons de l'acide viriolique avec les fubftances métal- liques , perfuadé que cet acide fe trouvant ainfi combiné avec des fubftances aufli abondantes en phlogiftique , donneroit 16 MÉMOIRES SON LA FORMATION Du SALPÈTRE. encore plus de prile fur lui, & pourroit fournir, par fon union avec la matière phlogiftique qui sémane des corps putréfiés, quelques rélultats différens des expériences précédentes. Je fis deux mélanges ; le premier étoit compofé de deux livres de viriol de Mars, douze livres de craie; le fecond de deux livres du même vitriol, de huit livres de chaux éreinte, & quatre livres de crotin de cheval. Le défaut de temps m'empécha ‘de faire une nombreufe fuite d'expériences que J'avois projetces; mon intention étoit de répéter les mêmes opérations avec tous les vitriols métalliques, afin de naflurer fi je n'obtiendrois pas des réfultats diflerens. Le premier fut humedé avec de l'urine, & le fecond avec de l’eau feule- ment. J'oblervai toutes les particularités, comme je l'avois fait pour les expériences que je viens de décrire; ces deux mélanges , traités comme les précédens, me fournirent du nitre, mais le fecond un peu plus que le premier. Le vitriol de Mars, dans ces deux expériences, fut décompofe entiè- rement, & je trouvai aufli dans les différentes évaporations beaucoup de félénite., D'après cet expolé, on peut préfumer que l'acide vitrio- lique n'entre pour rien dans la formation de l'acide nitreux; puifque dans toutes les expériences que je viens de rapporter, la petite quantité de nitre que j'ai obtenue n'eft pas aflez confidérable pour me convaincre qu'il doive être attribué à la converfion de l'acide vitriolique en acide nitreux, & puif- qu'il eft pofible d’ailleurs de retirer du nitre de différens mélanges de terre qui ne contiennent point cet acide. Comme j'ai été à portée très-fouvent de fuivre les Salpétriers dans leurs opérations, j'ai eu occafion de voir qu'ils expofoient leurs terres à l'air, avant de les traiter, pour en retirer le Salpêtre ; que plus ils écendoient ces terres & renouveloient leurs furfaces , & plus aufli ils obtenoient de ce fel : j'ai cru auf m’appercevoir que leur principal but dans cette mani- pulation , tendoic principalement à faciliter le développement du gaz putide, qui, felon eux, eft très-eflentiel à la for- mation du Salpêtre, Cette idée , toute chimérique qu'elle foit, ne MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 17 ne ma pas paru dénuce de fondement, lorfque je confidérai que tous les jours cette manœuvre étoit mife en ufage avec fuccès dans toutes les nitrières artificielles; & il eft vifible qu'en pareil cas on ne peut aller contre l'expérience, puifqu' on fait que les terres de même nature, qui auront été remuées & agitées, fourniront plus de nitre que d’autres que l'on aura laiffées en repos. Sans cependant abfolument adopter ce fyftême, je réfolus de faire quelques expériences fur ce fujet , afin d'examiner l'aétion du gaz putride fur les fels à bafe vitriolique : je me {ervis pour cet effet d’un appareil crès-fimple, décrit par le célèbre Prieftley. Je pris quatre bouteilles cylindriques de verre blanc de dix pouces de hauteur fur deux#pouces & demi de diamètre ; je mis dans chacune de ces bouteilles deux livres de viande, dont j'avois fait Ôter toute la graïfle; j'avois ajufté à l’onifice de chacune de ces bouteilles, des bouchons de liége, que je lutai avec de la cire molle, & qui étoient percés au milieu. Fintroduifis dans chacun de ces bouchons un tuyau de verre de communication, qui étoit fait à peu près comme une S°. D'un autre côté, je fis diffoudre féparément dans de l’eau diftillée ; favoir, pour la première expérience, deux onces de {el de Glauber; pour la feconde, deux onces de tartre vitriolé; pour la troifième , une once d’alkali volatil concret; & pour la quatrième, une once de fel ammoniacal vitriolique. Toutes ces liqueurs furent mifes dans des vaifleaux de verres cylin- driques , abfolument femblables aux récipiens de la machine pneumatique. Chacun de ces vaifleaux étant rempli de la liqueur qui lui convenoit, entroit dans des fceaux de verre qui étoient également pleins de la même diffolution. Les chofes étant ainfi difpofces , je plaçai fous chacun de ces cylindres le tuyau de communication dont je viens de parler. Comme le temps où je fis ces expériences étoit fort chaud, la putréfa&tion ne tarda pas à fe faire ; il fe dégagea pour lors beaucoup d'air, qui, en paflant au ner de la liqueur, en déplaçoit une C 13 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. quantité proportionnelle à fon volume. Lorfque la liqueur conte- nue dans ces récipiens fut prefque toute déplacée, j'agitai ces cylindres dans leurs fceaux, afin de redifloudre cet air & de le mêler avec l'eau, ce qui fe fit aflez facilement ; je continuai cette expérience pendant quatre mois avec la même attention, ayant foin d'ajouter de l'eau dans les fceaux lorfqu'elle s€- vaporoit; Je n'apperçus pendant tout ce temps aucun chan- gement à toutes ces liqueurs ; elles étoient reftées claires & aufli limpides qu'auparavant; je les fis pour lors évaporer dans des caplules de verre au bain de fable; les fels que Jobtins me parurent n'avoir fouffert que quelques légères alté- rations. Le N.° 1%, où étoit le fel de Glauber, criftallifa plus difficilement: il étoit enveloppé d’une portion de matière grafle qui avoit un peu coloré fes criftaux; mais la calcina- tion la détruifit, & je parvins à avoir ce fel très-pur. Le N.° 2, où étoit le tartre vitriolé, ne criftallifa pas fi bien; les criftaux de ce fel étoient aufli un peu différens ; ils avoient plus de faveur , & approchoient aflez de la nature du fel fulfureux de Stahl. Une légère calcination détruifit également cette ma- tière grafle comme au fel de Glauber, & je parvins à avoir ce fel dans le même état où il étoit auparavant. Le N.° ;, où étoit l'alkali volatil, s’étoit diffipé prefque entièrement pendant le temps qu'avoit duré cette expérience. Il fe précipita pen- dant l'évaporation un peu de terre, & ilfe dégagea fur la fn une forte odeur d’alkali volatil. Le fel ammoniacal vitriolique dans l'expérience , N.° 4, parut n'avoir pas été altéré ; car je le retrouvai tout entier, tel que je l'avois employé. Il eft inutile de dire que dans toutes les évaporations il fe dégage des vapeurs putrides très-défagréables, & que l'on doit éviter ; auffi, pour obvier à tous ces inconvéniens, je les ai toujours fait évaporer en plein air. Jaurois pu fuivre plus loin ces ex- périences, &e les étendre fur un plus grand nombre de fels; mais je nai point voulu fortir des bornes que je me fuis prefcrites , en traitant de chofes étrangères à ce Mémoïre, me réfervant d’ailleurs de faire un travail particulier fur cet MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 19 objet, dans lequel j'examinerai l’aétion de ces gaz putrides fur cous les fels, foit cerreux, foit métalliques (*). Si ces gaz putrides, comme j'ai lieu de le penfer , & comme l'expérience le prouve, contribuent à la formation du Salpètre, on doit voir , par les expériences que je viens de mettre fous les yeux de cette illuftre Académie, que la route que j'ai fur- vie pouvoit me conduire à quelques nouvelles découvertes; que mon principal objet, en employant ces fels vitrioliques, étoit de m'aflurer , fi par ce moyen je pourrois former du nitre avec ces fels, afin de fixer mes doutes; mais mes efpérances fe font évanouies , lorfque J'ai vu que les petites altérations apparentes occafionnées à ces fels ne changeoïent point leur nature. Je prévois routes les objeétions que l'on peut me faire fur ce nouveau genre d'expériences; je fens bien qu'il auroit fallu, pour rendre cette démonftration plus complete , avoir pu parvenir à faire du nitre avec ce gaz putride & des ma— üères quelconques ; mais c’eft ce que je n'ai point eflayé , par le peu de temps qui m'étoit prefcrit. Au refte, on ne peut difconvenir que les matières en putréfaétion , foit tirées du règne végétal ou animal, ne foient très-eflentielles à la for- mation de l'acide nixeux, puifque fans elle on n’obtiene point de nitre; on ne peut pas en dire autant de l'acide vitriolique, fa préfence n'y ft pas aufli utile, puifqu'il fe forme égale- ment du nitre avec des terres calcaires pures & des matières putrides , fans le concours de cet acide. J'ai déjà avancé dans le commencement de cette Difler- tation , que Glauber étoit aufli fondé de fon côté que Stahl (&#) Depuis la publication de ce Mémoire, j'ai cru ne devoir point perdre cet objet de vue, & fuivre le plan SUR que j'avois projeté. Le J'ai pris de la craie bien pure, de la terre magnéfienne & de la pierre à plâtre calcinée & non calcinée. J'ai expofé ces terres chacune féparément & pendant pres de fix mois à la vapeur du gaz putride. Elles éroient placées dans une cloche de verre, de forte que le gaz les craverfoïent à mefure qu'il fe dégageoit des corps putréfiés. Lorfque j'ai cru qu’elles devoient en être fufifamment pénétrées, je les ai leffivées dans l’eau bouillante, & je puis aflurer que ces terres ne contenolent pas de nitre. Ce qui me fait préfumer que le gaz putride a befoin du concours de l'air extérieur , pour fervir à la nitrification de ces terres. C ï 20 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. & fes Sectateurs, de penfer que l'acide marin fût fufceptible de fe transformer en acide nitreux ; fa préfence dans le Sal. être prouve au moins qu'il y a entre ces deux fels une forte d'adhérence & d’analogie qui doit avoifiner de crès-près la décompofition. Cependant fi on examine avec attention, & fi l'on fe dirige par l'expérience avant de prononcer , on verra quil en eft de même de ce fel, comme de l'acide vitrio- lique ; on verra, dis-je, que, mêlé avec differentes ma- tières terreufes & putrides, il n'augmente point le produit du Salpètre , ainfi que je m'en fuis convaincu par plufieurs expé- riences. Comme ce fel ne fe décompfe point par fon mé- lange avec les terres, comme les fels à bafe d'acide vitrio- lique (*), on a l'avantage de le retirer plus facilement, & de s’af furer sil peut être employé comme un moyen propre à aug- menter la produétion du Salpétre. J'ai fait à peu près, fur le fel marin, autant d'expériences qu'avec les fels virioliques ; J'ai fait des mélanges de deux livres de fel marin, douze livres de craie, & de fix livres de crotin de cheval ; d’autres de fel marin à bafe terreufe, avec la craie & lefumier; d’autres de {el marin, avec le plâtre & l'urine, & d’autres enfin avec le fel marin & la viande : j'ai obfervé les mêmes précautions pour ces expériences, que pour celles que j'ai déjà décrites. Jai humeété ces mélanges, lorfqu'ils commençoient à fe deflécher , & je n'ai retiré, en lestraitant de même, aucun indice de l'altération de l'acide marin. Dela plupart de ces expé- riences, j'ai obtenu lefel marin tel que je l'avoisemployé, & dans d’autres un peu de fel qui avoit été décompofe. Tous ces mé- langes m'ont fourni un peu de nitre, à l'exception du der- nier qui ne m'en a point donné. J'ai expofe également au gaz putride, du fe! marin diffous dans de l'eau, du fel marin à bafe terreufe. Ces fels n'ont fouffert aucune alrération qui en dénaturât l'acide ; je me fuis convaincu que celles qu'ils avoient reçues n’entroient point dans mon but, qui étoit de former l'acide nitreux. (+) Vol. de l'Académie, année 1778, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 21 Je pourrois rapporter encore un très-grand nombre d’ex- périences que j'ai faites fur cet objet; mais comme elles ne m'ont rien fourni de particulier, Je crois devoir les fupprimer, dans la crainte que les détails n'en deviennent trop ennuyeux. Céiles que je viens de rapporter font, ce me femble, capa- bles d’éclaircir un peu cette matière , puifqu'’elles combattent l'opinion des Chimiftes, qui admettent la transformation des acides vitrioliques & marins en acides nitreux. Mais cette hy- pothèle de la part des Chiniftes, n'eft établie que fur de fimples conjeétures. Ils fe fondenr fur ce que l'acide nitreux fe forme plus particulièrement dans les endroits où il y a des terres vitrioliques, comme sil ne fe formoit pas également dans d’autres; ils donnent pour preuve, que l'acide vitrio- lique eft l'acide univerfel; qu'un linge imbibé d'alkali fixe, expole à l'air, fe fature d’acide vitriolique (*. Donc, difencils, l'acide vüriolique eft le feul acide ; donc il doit être la bafe formatrice des autres : comme fi je difois , le fer fe rencontre (#) L’acide vitriolique ne fe trouve pas plus répandu dans l'air que les autres acides: je crois étre en droit de prouver que l’on cft dans l'erreur, de penfer qu'un linge im- bibé d'alkali fixe, & expofé à l'air, fe fature de cet acide. Depuis les expériences du célèbre Pricftley , on fait que ces fels, par leur union avec l'air fixe, [e crif- tallifent, & il paroît, ainfi qu'on le verra par les expériences fuivantes, que c’eft à cette fubftance que l’on doit attribuer la caufe dont il s'agit. J'ai expofé dans un endroit fort élevé en pleine campagne , un linge imbibé d'al- kali fixe pur; ce fel avoit ét£ préparé par la déconation du nitre avec le charbon. Après huit jours d'expofition à l'air, je l'examinai ; je le trouvai entièrement re- couvert d’une infinité de petits criftaux lonouers ; ils étoient tous abfolument fem- blables à ceux qui réfultent de l'union de l'air fixe avec l'alkali. Je fus bientôt con- vaincu que je ne m'étois point trompé; car ayant leffivé ce linge dans une quan- tité convenable d’eau diftillée bouillante, & ayant fait évaporer la liqueur , je vis que le fel alkali n'avoit perdu aucune de fes propriétés ; il faifoit également effer- vefcence avec les acides, & ne contenoïit point de tartre vitriolé : je répétai certe expérience d'une autre manière. J'expofai à l'air une capfule de verre large & plate, fur la furface de laquelle j'avois étendu un peu du même alkali. Au bout de deux jours, je trouvai une partie de ce fel criftallifé autour des parcis de la capfu’e, & je reconnus que ces criftaux étoient les mêmes que ceux de l'expérience précé- dente. Je fuis fort éloigné de croire que cette expérience répétée indiftinétement dans tous les pays, aura toujours le même fuccès ; je conçois qu’elle peut varier beaucoup, felon le fol & la fituation du lieu eu elle fera faite; mais il eft aifé de fentir que cette différence ne fera qu'accidentelle, puifqu'érant répétée en pleine Fr ; éloignée du voifinage des volcans , elle donnera teujours les mêmes ré- Kats. 22 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ordinairement dans les pyrites cuivreufes ; donc il eft la bafe du cuivre. Que penferoit-on d’un pareil raifonnement , & quelle confiance pourroit-on y donner? Je ferois cependant tout aufli autorifé à l’avancer que ces Chimiftes , puilqu'il ne fe trouve jamais de pyrite cuivreufe, fans qu'il y ait du fer. Mais pourquoi refufer plus long-temps à l'acide nitreux ce que l'on accorde fi gratuitement à l'acide vitriolique? pour- quoi vouloir que l'acide nitreux foit un dérivé de cet acide, tandis que l'acide vitriolique auroit feul exclufivement le droit d'être univerfel > Eft-ce que la Nature manqueroiït de moyens pour foriner l'acide nitreux ? Peut-être en eft-elle plus avare; mais fi l'on ne trouve point des amas confidérables de nitre, comme l’on en trouve de fel gemme & de viriol, doit-on en conclure pour cela que cet acide foit le réfultat de la modi- fication de l'acide vitriolique? Ne fait-on pas que lorfque l'acide vitriolique touche au phlogiftique, il reçoit, à la vérité mo- mentanément, un caraëtère particulier, mais qui ne le dénature point, puifqu'il eft toujours de l'acide vitriolique? Si l’on con- fidère d’ailleurs les propriétés particulières des différens acides, leur manière d'être & d'agir fur les corps, n’eft-on pas auto- rife à penfer que ce font autant de compolés particuliers qui différent beaucoup par leurs principes conftituans les uns des autres? C’eft-là le fentiment que j'adopte, & c’eft celui qu'ont déjà adopté depuis long-temps avant moi plufeurs Chimiftes célèbres. Je penfe donc que les acides minéraux , quoiqu’ayant des propriétés qui les rapprochent les uns des autres, fonc très- differens entre eux, & qu'il eft aufli difficile de faire de l'acide nitreux avec de l'acide vitriolique, ou de l'acide marin, qu'il l'eft de faire de l'or ou de l'argent avec du cuivre ou du fer: cela pofé , l'acide nitreux ne doit-il pas étre regardé comme un produit particulier , mais compofe de principes très-fimples ? L'air fixe n'entreroit-il pas lui-même dans la compofition de cet acide? Ne feroit-ce point une modification de cet être avec la matière phlogiftique dans un état particulier, qui, comme l'on fait, eft un des principes conftituans des acides ? Il y auroïit encore un très-grand nombre d'expériences à faire MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 23 fur cette matière , que le défaut de temps & des occupations d'une nature ditéiente ne m'ont pas permis d'exécuter. Quoi qu'il en foit, je me propole de faire voir dans la feconde partie de ce Mémoire, que l'on ne retire du nitre en plus ou moins grande quantité que des fubftances qui contiennent plus ou moins d'air fixe; & fi les terres calcaires ont ce pri- vilèce fur toutes les autres, ce n'eft relativement qu'à cetre fubitance qu'elles contiennent très - abondamment. Le fenti- ment que j'adene pour établir une théorie fur l'acide nitreux, a déjà, en quel que forte , été avancé par un habile Chi- mifte, M. Lavoifier, de l'Académie Royale des Sciences. Quoique nos fentimens foient un peu difierens l'un de l'autre, on verra cependant qu'ils ont enfemble beaucoup de rappoit. Cet habile Chimifte, dans un Mémoire lu à l'Académie Royale des Sciences, & depuis imprimé dans un Recueil de Mémoires {ur la fabrication & la formation du Salpêtre, rap- porte que l’acide nitreux n’eft autre chofe que de l’air nitreux combiné avec les fix onzièmes de fon volume de la portion la plus pure de l’air, & avec une quantité affez confiderable d’eau. M. Prieftley penfe egalement que l'acide nitreux eff formé par une décompofition réelle de l’air même : on peut voir ce qu’il en dit dans fon fecond volume d’ Expériences , page 74. Mais pour que cetre affertion fur l'acide nitreux puiflé avoir le degré de précifion qu'exige une bonne définition , ül {eroit cfénriel que M. Lavoifi er nous dit ce que c’eft que l'air nitreux : il eft vrai qu'à la page 6 de cette même Dif- fercation, M. ZLavoifier ajoute, que l'air nitreux n'eft autre chofe que de l'acide nitreux dépouillé d'air & d'eau : mais comment concilier cette théorie fur la nature de l'acide nitreux avec les fentimens des plus célèbres Chimiftes, qui rous ad- mettent l'air, l'eau & le principe du feu, comme les princi- paux agens de la formation des fubftances falines? Quand bien même nous fuppoferions que l'acide nitreux puifle, par quelque moyen particulier » acquérir un affez grand degré de concentration pour être concret, s’enfuivroitil de là quil füt dépourvu d’air & d’eau? Stahl n’a-til pas démontré d’une 24 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. manière très-exacte , que l'acide vitriolique dans le foufre, con- tenoit encore de l'eau? Hales, dans fa Statique des végétaux , n'a-t-il pas fait voir également que l'air fait partie des fels, & quil y entre comme partie conftituante > Il eft donc probable que sil étoit poflible d'enlever , par quelque moyen que ce füc, à l'acide nitreux fon air ou fon eau prin- cipe , il cefleroit dès-lors d'être acide nitreux, & perdroir en- tièrement, par cette féparation , fon caraétère particulier. Quoi qu'il en foit , d’après l’expofé que je viens de faire, on eft au- torifé à penfer que M. Lavoïfer regarde l'acide nitreux comme un produit particulier, & qu'il entre dans la compofition de cet acide une quantité confidérable d'air très-pur. Mais cet air pur que contient l'acide nitreux, & que l’on retire par l’ana- lyfe d’un grand nombre de fubftances où il fe trouve , ne pout- roit-il pas être regarde comme de l'air fixe rendu plus léger par fon mélange avec le phlogiftique? M. Prieftley le penfe ainfi : il regarde l'air de l'atmofphère comme très-compole , & déjà chargé de beaucoup de phlogiftique : il dit, à la page 11è de fon fecond volume, qu'il faut laïfler féjourner long- temps l'air déphlogiftiqué dans l’eau, pour le purger d'air fixe ; ce qui paroït prouver que l'air déphlogiftiqué n'en eft jamais exempt. Plufieurs expériences m’autorifent encore à le penfer. Nous fommes parvenus , M. de Laflone & moi, à dénaturer de l'air fixe tiré des terres calcaires, en le combinant avec le hlogiftique , & à le rendre plus léger que l'air commun, Ce célèbre Chimifte a d’ailleurs démontré, dans une fuite d’ex- périences qu'il a faices fur l'air, que celui qui fe dégage de la calcination de l’étain, par l'acide nitreux, diffère beaucoup de celui que l’on retire de la diflolution de plufieurs autres métaux, par le même acide; puifqu’au lieu de former de l'air nitreux, il étoit au contraire plus léger que l'air ordinaire ; légèreté qui na pu provenir fans doute, que du phlogiftique que l'étain lui à fourni pendant fa calcination. M. Prieftley, à la page zot de fon fecond volume , remarque qu'il a retiré, d’un mélange de cailloux & d'acide nitreux, de l'air fixe; cet air sürement n'a pas été produit par le caillou , puifque cer Au- tçur MEMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 2$ teur lui-même fait obferver qu'ils n'en contiennent que très-peu ; ou même point. Il eft donc vraifemblable que l'air fixe ob= tenu de ce mélange a été fourni par l'acide nitreux. Je fens bien que pour donner plus de folidité à ce raïfonnement, il faudroit avoit formé de l'acide nitreux avec de l'air fixe & du phlogiftique ; mais la Nature, myfterieufe & cachée , ne dé- couvre que très-difhcilement les moyens qu'elle emploie pour là formation & la compofition des corps. Fin de la première Partie. v 26 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SÂLPÈTRE. SE CON: DiroiPrAs RyEITE De la formation du Salpétre, 6 des moyens que l’on doit employer pour en obtenir. LE Salpètre , comme je l'ai dit dans la première partie de ce Mémoire, ne fe produit pas en aufli grande quantité que les autres fels; la Nature, apparemment plus avare, n'en forme point de magafins, & il n'eft pas d'exemple que l'on en ait trouvé des mines, comme l’on en trouve de fel gemme. Mais fi la Nature forme ce fel en moindre quantité que les autres, 1] paroïc aufli qu'elle eft plus égale & plus uniforme dans fes productions : par-tout on peut faire du nitre, & par-tout on trouve les matériaux propres à le former; au lieu qu'on ne trouve pas généralement par-tout des mines de fel gemme ou de vitriol. Quoique la Chimie ne foit encore guère avancée pour rendre raïfon de la formation des fels, elle à cependant acquis plus de connoïfflance fur les circenf- tances qui favorifent la formation de l'acide du Salpètre, que fur celle des autres acides. On fait, par exemple, que les corps en putréfaétion, de quelque règne que ce foit, foit du règne végétal ou animal, font effentiels à la formation de l'acide nitreux : on fait encore que les picrres ou terres calcaires font exclufivement les feules qui, par leurs mélanges avec les matières putréfiées, fourniflent du nitre; au lieu quon ignore , ou du moins on ne fait que foupconner quelles font les fubftances qui concourent effentiellement à la forma- tion de l'acide vitiolique ou de l'acide marin. Cela poté, il eft donc important de déterminer quelles font les cir- conftances les plus propres & les plus convenables pour favorifer la production du Salpêtre: un libre concours de l'air & un peu d'humidité font, felon moi, les deux élémens qui contribuent le plus à fa formation; les autres fubftances qui entrent encore dans fa compoñtion, fe trouvent dans les MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: 17 mélanges, mais elles ne fe dégagent pas fans la rencontre des principes que je viens d'indiquer. On fait que fans humi- dité il ny a point de putréfaétion; que les fubftances végé- tales ou animales, sèches & folides, reftent toujours dans le même état, & que ce n'eft qu'en les humeétant qu'on peut les dénaturer, & les amener au terme convenable pour la formation du Salpètre : aufli c'eft pour cette raïfon que les Salpêtriers emploient toujours de préférence les terres des fouterrains qui font à la proximité des étables où des fofles d’aïfance, parce qu'elles font toujours abreuvées d’une humi- dité fuffifante pour compléter la putréfaétion , quoique l’on pût employer des terres d'endroits plus élevés, fi (toutes chofes égales d’ailleurs } on avoit fait des mélanges conve- nables , & fi on avoit eu foin d'humeëter ces terres; c'eft ce qui fe pratique journellement dans les nitrières artificielles, paticulièrement en Allemagne, ainfi que l’a annoncé M. le Comte de Milly, habile Chimifte, dans fa defcription d’une nitrière artificielle , lue à l'Académie Royale des Sciences de Paris, & imprimée dans le Recucil des obfervations fur le Salpêtre, déja cité. Plufieurs Chimiftes prétendent aufli que le libre accès de l'air n’eft pas abfolument eflentiel à la formation du Salpètre; ils donnent pour raïfon, que ce fel fe forme dans les caves où l'air eft ftagnant, & ils partent de [à pour fe déclarer fur le peu d'importance dont il eft dans cette occafon ; d’autres, au contraire, penfent que le libre acces de l'air eft abfolu- ment indifpenfable : ils diftinguent même l'efpèce d'air qui y contribue le plus, & ils avancent, non pas fans fondement, que toures les fois que le vent du Nord fouffle , ils retirent plus de nitre de leurs mélanges que par le vent du Sud, & qu'enfin il en réfulte une différence très-confidérable dans le produit des terres qui ont été expolées à l'air avec celles qui ne l'ont pas été. J'ai été à portée de vérifier ce fait, & de me convaincre de la bonté de cette opinion. Jai conftruit une ni- trière artificielle; une partie de cette nitrière étoit expofée à fair; mais une autre partie étoit placée de manière que l'air ÿ 28 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. n'y circuloit que très-difficilement, & quil y étoit prefque toujours ftagnant : en examinant féparément ces deux terres, & qui étoient de même nature, je me fuis apperçu d'une différence bien marquée dans leur produit. Celle expofée à Vair m'a fourni beaucoup plus de Salpétre que celle où l'air ne circuloit pas, & j'ai eu aufh occalion de me convaincre que toutes les fois que le vent du Nord foufloit, j'obtenois du Salpêtre de houffage à la furface de la terre qui lui étoit expofce; au lieu que l'autre, qui lui étoit contiguë, mais dont le communication étoit interrompue , ne m’en a jamais donné dans aucune circonftance (*). Mais comment expliquer cette dif- férence? Pourquoi n'obtienton pas également du Salpêtre par le vent du Midi, fi l'apparition du Salpètre par le vent du Nord n’eft occafionnée que par l'abforption de l'humidité ? Ii me femble que celui du Midi, qui eft aufli fec que celui du Nord , devroit produire le même effer. Je ne chercherai pas à rendre raïfon de tous ces phénomènes , ni à expliquer lequel de ces deux vents , ou de celui du Nord, ou de celui du Midi, contribue le-plus à la formation de l'acide nitreux ; lufage & l'habitude confirment d’ailleurs ce que je viens d'avancer. Les Chimiftes qui ont été à portée de diriger des nitrières artifi- cielles, ont depuis long-temps fenti cette vérité ; ils ontrou- jours réfervé des fenêtres au nord , afin de faciliter l'accès de: cet air, au lieu que celles pratiquées à l'eft & à l’oueft fonc toujours fermées, & paroiflent, felon eux, n’étre d'aucune utilité. Ils ont même foin , lorfque ce n'eft pas le vent du Nord qui fouffie, de fermer toutes les communications. (#) Une expérience d’un Amateur illuftre & diftingué (M. le Duc de la Roche-- foucault) vient à l'appui de ce que j'ai avancé, & fert à confirmer de plus en plus mon opinion. Ce Savant, dans un Mémoire qu'il a bien voulu communiquer , il ya AE temps, à l'Académie, a démontré que l'air contribuoiteflentiellement a la formation du Salpétre; il a prouvé par des expériences bien faites , que de la craie, qui, feule & fans addition, donnoit du Salpètre par la lixiviation lorfqu'elle étoit prife à la furface, n’en fournifloit plus lorfqu'on la prenoit à une certaine pro- fondeur, & ou l'air n'avoir pu circuler. Ces expériences réunies, prouvent donc d’une manière inconteftable , que le libre accès de l'air eft abfolument eflentiel a la for- mation de ce fel. F MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 29 Les Salpétriers , gens pour l'ordinaire peu inftruits , occu- pes feulement à fouiller les terres & à les lefliver machinalement, ont appris par leur propre expérience, que les terres des caves ou autres fouterrains qui étoient expofés au vent du Nord, fournifloient plus de nitre que les autres. On ne peut pas aller contre les faits, puifqu'ils paroïflent fi généralement établis. Je pourroisencore citer d’autres exemples, & fournir de nouvelles reuves fur la néceflité du libre concours de l'air pour la pro- duction du Salpêtre; mais comme les faits que je viens d'avancer fe répètent journellement, & qu'ils font confirmés par une fuite d’obfervations conftantes , Je n'entrerai pas dans de plus rands détails. Je ferai cependant obferver, que je fuis très - éloigné de croire que l'air dépofe l'acide nitreux fur ces terres; je penfe au contraire que sil en contient, ce n'eft que par accident , & que fi, par fon libre acces dans les terres , il en augmente la produétion, cela ne doit pro- venir que de ce qu'en accélérant la putréfaétion, il détermine le développement des miafmes putrides, qui font, ce me femble, ceux qui contribuent le plus à la produétion du Sal- être. Je fuis d’autant plus convaincu de ce que j'avance, qu'en Suède, en Allemagne & en différens autres endroits où lon à conftruit des nitrières artificielles , on seft apperçu que lon retiroit plus de nitre des terres qui avoient éte rermuées, & dont les furfaces avoient été renouvelées, que de celles qu'on avoit laifices en repos. Il me refte actuellement à pafler en revue les terres qui paroïflent les plus propres à la produétion de ce fel. Plufieurs Chimiftes ont décidé que le plâtre cuit, la chaux vive, le mor- tier de chaux, les terres calcaires de route efpèce cétoient les feuls qui contribuoient le plus à la formation du Salpêtre; ils ont même regarde le plâtre comme le compofé le plus propre à fa production. Mais de ce que le nitre fe forme plus abondamment dans le plâtre, doit-on en conclure que l'acide vitdiolique foit entré pour quelque chofe dans la formation de ce fel? Ne fait-on pas auffi qu'il fe forme abondamment dans les terres calcaires , & qu'on: en retire tous les jours en grande 30 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. quantité des décombres des vieux édifices , quoiqu'il n'y ait point eu de plâtre employé: Nous avons d’ailleurs en France des Provinces entières dans lefquelles on ne trouve pas de plâtre, & où cependant on ne laïfle pas de recueillir du Salpètre; il eft donc évident que le plâtre, comme plâtre, ne contribue point à la formation du nitre, & que c’eft plutôt à la terre cal- caire qu'il contient qu'on doit l'attribuer. On eft encore fort incer- tain de l'état le plus propre & le plus convenable auquel on doit employer cette terre; les uns prétendent que la chaux vive eft préférable à la chaux éteinte; je fuis porté à croire cependant que fi la chaux vive agifloit comme chaux vive, on n'ob- tiendroit point, par fon mélange avec l'urine , de nitre , ainfi, que beaucoup de Chimites l'ont prétendu. F ai répété cette expérience ; j'ai mis douze livres de chaux vive dans un vaifleau convenable que j'ai humeété avec de l'urine; jai continué à en ajouter de nouvelle, lorfque je me fuis _apperçu que cette mafle commençoit à fe defécher: ; Cette opération à té entre tenue pendant fix mois : il eft inutile de dire que, pendant cet efpace de temps, il s'eft dégagé de ce mélange une odeur très- forte d’alkali volatil; cependant, fur la fin du dernier mois, ayant laifle deféchee la matière, elle perdit entièrement fa mau- vaife odeur , & en contraéta une très-agréable qui approchoit beaucoup d'une plante qu'on nomme E iotrope. Je leflivai cette matière ; je fis évaporer la liqueur , & je ne vis pas fans fur- prife, que non feulement ce mélange ne me donna point de nitre ; mais j'obfervai aufli que tout le {el contenu dans l'urine, avoit été annihilé & détruit entièrement par la chaux; je crus devoir rechercher la caufe d’un pateil phénomène : je trouvai, dans M. Pott , une expérience qui me mit à portée de déci- der promprement cette queftion ; ; il rapporte, dans fa Difler- tation fur le fel marin, une expérience de Mazotta , extraite de fon Triplici Philofophia , où cet Auteur dit: qu’en calcinant le fe marin à différentes reprifes , avec une partie égale de chaux vive, ce [el eft détruit completement. On trouve égale- ment, dans une Dhiflertation de With, Médecin Anglois, fur l'eau de chaux, traduite en François par M. Roux, que la chaux MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 31 a la propriété de détruire plufieurs mucilages ; & nous avons fait, M. de Laflonne & moi, un travail fuivi fur cet objet, dans lequel nous nous propofons de démontrer que la chaux vive a non feulement la propriété de détruire le plus grand nombre des mucilages, mais aufli coutes les fubftances falines , de forte qu'iln'en refte plus le moindre veftige. D'après cet expole,, il eft viñble que fi, dans tous les mélanges où l'on fait entrer de la chaux vive, cette fubftance agifloit comme chaux, bien loin de favorifer la produétion du Salpètre, elle y feroit abfolument contraire ; mais il eft probable qu'en recevant des dificrentes matières en putréfaction avec lefquelles elle eft mélce, l'air qu'elle a perdu par la calcination , elle eft dans un état plus convenable à contribuer à la formation de ce fel; je conçois aufli cependant que fi , au lieu de craie, dans fon état naturel , on l'emploie légèrement ouverte par le feu, on pourra retirer de fon mélange avec les autres matières qui lui conviennent, plus de nire, parce qu'ayant reçu de la part du feu un com- mencement d’altération, mais telle que fon air fixe n'ait point été détruit, elle peut alors être dans un état plus favorable à devenir fubitance faline. Il réfulte néanmoins de tout ce que je viens de dire, qu'autant de temps que cette terre n'aura pas récupéré fon ai fixe, elle ne pourra être propre à la formation du Salpêtre : on pourra m'objeéter que l’on trouve dans les volumes de l'Académie Royale des Sciences , un Mémoire de Bolduc, dans lequel ce Chimifte annonce s'être fervi avec fuc- ces de chaux vive, pour extraire le nitre de plufieurs plantes qu'ilexaminoit; mais cette objeétion ne feroit pas fondée, fi l’on fait attention que Bolduc n’a employé la chaux vive, dans cette circonftance, que comme un intermède capable de détruire le mucilage qui mafquoit ce fel, & non point comme un moyen pour en faciliter la produétion. Son but étoit de prouver que les végétaux contenoient du nitre tout formé, & il na pas cher- che à calculer fi l'intermède qu'il avoit employé pour détruite le mucilage , n’avoit pas aufli emporté une portion de la fubf- tance faline. On voit donc que fi la terre calcaire eft eflentielle à la formation du Salpètre , il faut auf qu'elle foit pourvue de 32 MÉMoïREs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, fon air ; autrement , elle à la propriété de détruire tous les corps qu'elle touche. D'après cer expofe, j'ai lieu de croire que l'air fixe eft un des principes conftituans de l'acide nitreux (*) ; mais par quel Jacus fe combine-t-il ? quelle eft la matière avec laquelle il s'unir, & comment enfin fe forme cet acide ? ce font autant de quef tions qui font très-difficiles à refoudre. Les acides paroiflent être des fubftances très-fimples, des compofés du fecond ordre, dont la formation & l'origine ont échappé jufqu'ici à la perfpi- cacité des Chimiftes les plus exacts & les plus éclairés; il eft encore un très-grand nombre de mixtes de différente nature, fur l’origine defquels nous n'avons pas plus de connoïffance que fur la formation des acides : car qui pourroit nous dire de quoi font compofés les métaux, & qui pourroit nous donner les moyens de les réformer avec des fubftances différentes de celles dont ils font compolés , rendroïit un très-grand fervice à la Chimie, & avanceroic beaucoup les progrès de cette fcience. Le fentiment que j'adopte pour l'explication de l'acide (#) Plufieurs Chimiftes penfent aujourd'hui que l'air qui entre dans la compofition de l'acide nitreux, eff plutot de l'air déphlosiftiqué que de l'air fixe. Ils établiffent leurs opinions d’après une découverte de M. Prieftley, qui a effeétivement démontré que le nitre expofé au feu dans des vaifleaux de verreou de terre donnoit beaucoup d'air déplogiftiqué, toujours mêlé d'une petite quantité d'air fixe. De là ils concluent que cette efpèce d'air entre effentiellement dans la formation du nitre. Mais qui pourra nous affurer que cet air entre dans cet état dans la formation de ce fel? ne pourroit-il pas fe faire que l'air fixe mêlé & faturé de gaz putride , ayant dépofé dans une bafe quelconque le principe de la nitrification qu'il contenoir, cet air fur devenu plus pur & plus refpirable , femblable à celui qu'on retire des chaux métalliques, que l'on méphitife à volonté par l'addition d'un peu de phlo- giftique : car je ne ferois point furpris qu'on trouvât un jour le moyen de changer ‘air fixe en air déphlogiftiqué, comme on le fait de ce dernier en air fixe. Ainfi quelque probable que paroifle l'hypothèfe de ces Chimiftes, il faut avouer qu'elle n'eft érayée d'aucune preuve ; car jufqu'ici , il n'eft pas d'exemple qu'on ait pu faire du nitre par la combinaifon de l'air déphlogiftiqué avec une fubftance quelconque. Si les tentatives que j'ai faites pour combiner l'air fixe avec les terres, ont toutes été infructueufes, il me Re au moins le foible avantage d’avoir avancé le premier que cet air mélé de gaz putride , pouvoit bien être un des principes conftituans du Salpêtre; cette théorie que j'ai donnée avec beaucoup de réferve, vient d'être confirmée d'une manière bien fatisfaifante par M. Thouvenel. Ce Chi- mifte a démontré que l'air putride éroit abfolument effentiel à la nitrification ; mais il à fait voir en même temps que lorfque cet air étoit dépouillé de fon air fixe , il perdoit dès-lors cette propriété : ce qui me fait foupçonner avec aflez de yraifemblance, que ce dernier air eft un des principes conftituans du Salpètre. nitreux ;, MÉMoirEs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 33 nitreux, quelque conjectural qu'il puifle être , me paroît tout aufli admiflible que celui de plufcurs Auteurs , qui regardent avec Meyer, l’'Acidum pingue , comme principe conftituant de l'acide nitreux ; ils fe fondent fur ce que la chaux contribue à la formation du nitre : donc, difent:ls, lAcidum pinoue de la chaux fe combinant avec le phlogiftique ou matière huileufe des fubftances en putréfaction , forme l'acide nitreux ; mais fi la chaux contribue par fon Acidum pingue, à la formation du Salpètre , quelle raifon donneront-ils de celui que l’on forme avec la craie, qui, dans fon état naturel, ne contient point d’Aci. dum pingue, puifqu'elle n’a pas été expofce à l’action du feu? Il faudra de toute néceflité admettre une autre caufe ; car, avant d'établir cette affertion, il feroit à défirer que l'on connût ce que c'eft que cet ÆAcidum pingue, & quel effet il produit fur les corps. En confultant les ouvrages de Meyer , on voit que cet habile Chimifte n'avoit pas encore des idées bien nettes & bien precifes fur l’exiftence de ce nouvel être; il le regar- doit (*) comme la fubftance k plus prochaine de la plus pure matière du feu, comme une matière fubtile, mixte , analogue au foufre, & compofée d’une fubftance faline acide : il dit ailleurs, que fon genre eft inconnu , & il eft fort incertain de la dénomination qu'il doit lui donner, ou s'il doit l'appeler un efprit ou un fel volatil , ou une huile fubtile incombuftible. Je me difpenferai de fuivre plus loin Meyer dans fon hypothefe , puif que fon ouvrage fe trouve aujourd’hui entre les mains de tous les Chimiftes. Quoi qu'il en foit, fi, avant que de fe dé- cider , ôn veut concilier le fentiment de Meyer avec celui des Anciens, on pourra, ce me femble, y trouver beaucoup de rapport & d'analogie. L’Acidum pingue ne feroitil pas lui- même ce feu pur, ce feu principe qui eft fufceptible de fe combiner de diverfes manières avec les corps? Tout me porte à le croire , fi l'on en juge par les différens effets qu'il produir. La craie, comme l'on fait, eft fufceptible de fe calciner auffi bien dans les vaifleaux fermés qu'à l'air libre; dans ces (*) Meyer, fecond Volume, traduc. Franç. pag, 7. E 34 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. deux cas, elle fe convertit également en chaux : fi le prin- cipe qu'elle retient pendant fa calcination eft un mixte & un compofé ( comme l'avance Meyer), comment peut-il pañler à travers les pores du verre, puifque nous ne connoïflons que la mauère du feu pur qui lui foit perméable ? Nous voyons d’ailleurs que plufieurs eflets que l'on prétend étre occafionnés par lAcidum pingue, s'expliquent vout aufli bien, & méme d'une manière plus exacte par le feu pur. M, de Laflone, dans un Mémoire lu à l'Académie des Sciences, fur l'examen de la chaux fur différentes fubftances falines , a fait voir qu'en faifant bouillir de la chaux vive avec du fel de feignetre ou du fel végcral , on obtenoit par ce mélange une liqueur très-chaire , tès-limpide, mais devenue très-cauftique. Cette même liqueur, foumife à l'évaporation, sépaiflic fur le feu, & prend une confiftance à peu près femblable à celle de la colle d’amidon ; fi on laïfle refroidir ce mélange , cette liqueur reprend la lim- pidité qu'elle avoit auparavant. Eft-ce l'Æcidum pingue qui produir cet effet? Cela n’a pas paru tel aux yeux de M.de Eaf- fone , & ce célèbre Chimifte a cru devoir rendre raïfon de ce phénomène d'une manière plus fimple, en admettant comme caufe principale de cet eflét, non point l'acide du feu, mais le feu pur qui n'avoit pénétré cette fubftance que fuperficiellement , & qui y adhéroic fi peu, qu'il fe diflipoit par le refroidifiement. Pourquoi d’ailleurs le feu n'auroit -il pas le même avantage que l'air? On ne refufe pas à celui- ci la faculté de fe combiner de diverfes manières avec les corps, & d'y produire des changemens & des altérations, felon l’état & la quantité où il fe trouve; au lieu que l’on veut borner l'aétion du feu à une feule manière d’être, & prétendre qu'il agit uniformément fur les corps; pour moi, je fuis bien perluadé du contraire, & je penfe, d’après plufieurs célèbres Chimiftes , que la manière d'agir du feu fur les corps, eft bien aufli variée que celle de Fair, & que, felon le mode où il eft , il doit produire des changemens & des phénomènes capables en tout point d’exciter leur attention & leur curiofité. Je pourrois appuyer mon raïfonnement d'un plus grand MÉMOIRES SR LA FORMATION DU SALPÊTRE 35 nombre de citations & d'expériences, fi Je ne craignois de fortir des bornes que je me fuis prefcrites. Quoi qu'il en foic, l'air fixe eft un étre exiftant, un étre récl dont les pro- priétés font connues , & qui fe trouve répandu dans prefque cous les corps. Il eft probable que cet air fixe, dont l'iden- uité eft reconnue, retiré de toutes les fubftances quelconques, puifle, en fe combinant avec celles qui lui font propres, en- trer dans fa formation de l'acide nitreux. L’acidité de l'air fixe cft certaine ; toutes les expériences le prouvent : mais il n'en eft pas de même de lAcidum pingue , dont l'exiftence n'eft encore que précaire, & fur l'origine duquel on cft encore bien peu d'accord. Fin de la féconde Partie. m 1 ui 4 62 AIRE got 0 E j 36 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. RO MNS T'ÉMMAEMPEASRET TE. Sur les moyens d'augmenter en France la produélion du Sal- pétre, fans avoir recours au creufement des caves, & en délivrare les particuliers de la gêne 6 de lafijettife- ment auxquels ils font expofes par les fouilles que Les Salpétriers ont droit de faire chez eux. LET traite dans les deux premieres parties de ce Mémorïre, de l'acide nitreux & de fa formation, j'ai difcuté les fentimens de divers Auteurs qui en ont parlé jufqu'ici, & je fuis au moins porté à croire, que fi mes expériences ne détruifent pas entièrement leurs opinions, elles pourront fervir peut- être à ralentir leur Jugement , & les determineront à faire de. nouveaux efloits, qui tendront toujours à donner plus de connoiïflance fur la nature de cet acide. Il me refte aduel- lement à examiner quels font les moyens d'augmenter la produétion du Salpêtre, à déterminer les mélanges & les proportions les plus convenables des terres propres à _pro- duire ce fel, & enfin à propofer des méthodes qui me paroillent rl exécution plus fimple, plus facile, moins onéreule, & qui exigent moins de main-d'œuvre que celles qui font en ufage aujourd’ hui. Des moyens d'augmenter la produclion du Salpétre. On peut, de diverfes manières, parvenir au but que je me fuis _propofé. La nature, fi variée dans fes produétions, nous offre naturellement du Salpètre, & nous | préfente dif- férens moyens par lefquels on peut parvenir à fa compofi- tion; mais elle paroît afleétionner cependant de certaines terres, de certains mélanges de préférence à d'autres, pour la produétion de ce fel. Un moyen für pour acquérir quelque connoïflance fur cet objet, eft d'examiner les terres dans 4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 37 lefquelles il fe fixe plus tôt, & qui font eflenticlles à fa formation, confidérer également les matières en putréfaétion, qui y concourent le plus: en fuivant ces vües, on fera, ce mc femble, à portée de découviir quelques vérités qui pourront conduire à l'augmentation du produit de ce fcl. On fair, ainfi que je l'ai déjà dit dans lafeconde partie de ce Mémoire, que les terres calcaires entrent eflentiellement dans la compofition du Salpêtre; mais ces terres feules & fans aucuns mélanges, deviendroient totalement inutiles, fi l’on n'employoit quelques fubftances qui, pat leur union avec elles, contribuaflent à fa formation (*); ce fontlesmatières en putré- faction. Toutes ces matières ne pofsèdent pas cependant cette qualité aufli bien les unes que les autres : il sen trouve parmi elles qui ont cette propricté dans un degré plus émi- nent, qui contiennent du phlogiftique plus développe, & plus propre par conféquent à fe combiner avec la fubftance: qui fert à former l'acide nitreux. De toutes les matières enr: putréfaction retirées du règne végétal ou du règne arimal, celles qui me paroiflent les plus propres & les plus conve- nables, ce font celles du règne végétal; ces fubitances, en fe putréfiant, produifent un double avantage à la compolition de ce fel; elles fourniflent non feulement la matière phlo- giftique qui fert à le former, mais même encore l’alkal fixe qui le neutralife pour l'ordinaire , ainfi qu'on peut s'en con- vaincre par les expériences de M. Monter, habile Apothi- caire de Montpellier : cet alkali fixe qui fe combine ainfi avec l'acide nitreux, exiftoir tout forme dans les plantes, & ne doit fon dégagement qu'à la défunion des principes du corps qui tombe en putrefaétion, comme la avancé M. Baumé. (#) On a retiré depuis peu du nitre par la lixiviation d'une efpèce de craie 5 il eft aifé de fentir que la formation de ce nirre ne doir étre attribuée qu'a une portion de matière phlogiftique des corps organifés, qui fe fera combinée avec la terre calcaire , & aura formé du nitre. Cetre découverte vient à l'appui de ce que j'ai avancé dans la première partie de ce Mémoire, {ur la formation du nitre avec les terres calcaires, & les matièresen putréfaction. 38 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAZPÈTRE. Les fubftances animales, quoiqu’ayant les mêmes propriétés que les fubftances végétales pour la production du Salpètre , ne fourniflent pas par leur putréfaction l’alkali fixe (*); auffi le nitre qu'on retire du mélange de ces fubftances , eft ordi- naïrement du fel ammoniacal nitreux , qui eft pour l'ordi- naire décompofé par l'addition des cendres ou autres fubf tances alkalines, que l'on mêle avec les terres avant ou après leur lixiviation. Lorfque j'avance queles fubftances végétales en puxeéfaétion produifent de l'alkali fixe , & neutralifent l'acide pitreux , je ne prétends pas pour cela dire que tout l'alkali qui neutralife cet acide, foit formé par les plantes. Je fuis au contraire porté à croire que la plus grande partie de ce fel eft formée immédiatement & en même temps que l'acide, & que cette formation n’eft due qu'au développement du phlosiftique, qui s'émane de ces corps, & qui, en fe combinant avec la terre calcaire, forme l'alkali fixe, ainfi que l'a démontré M. Baumé : noûs en avons d’ailleurs plufieurs exemples dans le nitre à bafe d’alkali fixe, qu'on obtient de plufieurs mélanges, dans lefquels on n’a point fait entrer de fubftances végétales. Ainfi donc, le véritable moyen d'augmenter la produétion du Salpèze, eft de bien connoitre les fubftances qui concourent le plus à fa formation, lenr préparation & le terme conve- nable auquel on doit les employer pour en extraire ce fel. Car quelque bonnes que puiflent être ces préparations , fi la putréfattion n’eft pas finie entièrement, & fi ces mélanges confervent encore quelques mauvaifes odeurs, on n'obtiendra que peu ou point de Salpétre de ces terres, qui croient cependant fufceptibles d'en fournir beaucoup , fi elles euflenc été employées dans un temps convenable. Les trois règnes fourniflent chacun des matières propres à la produétion de (#) Les matières animales, feules , ne fourniffent que de l'alkali volatil ; il n'y auroit cependant rien de furprenant, que des mélanges de terre calcaire avec des matières animales en putréfaétion, 1l en réfulrät de l'alkali fixe ; mais il eft vifible auñi que cet alkali ne feroit point le produit de matière animale , mais feulement la combinaifon du phlogiftique échappé des corps putréfiés avec la serre calcaire. 1 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 39 ce fel; dans le règne minéral nous trouvons toutes les terres calcaires quelconques calcinées ou non calcinées , & routes les terres qui en contiennent ; celles que le terreau des jardins, la terre des prés, celle tirée du fond des marais (*), les platras , les décombres des vieux édifices, les briques piles ; toutes ces terres peuvent fervir, par leurs mélanges , à la pro- du&ion du Salpétre; l'argile n'y convient point : il faudroit , Four pouvoir l'employer, diminuer fa denfité & fa tenacité par l'addition des terres calcaires , autrement la perte feroic trop confidérable. | Toutes les fubftances végétales peuvent également conve- nir; mais les plantes tendres, aqueufes, & qui croiflent dans des terreins gras ou le long des murs , fonc préférables à celles qui font ligneufes : on peur fe fervir avec fuccès des feuilles , des fruits, dutan, & en un mot, de toutes les parties des végétaux ; les cendres, de quelque efpèce qu’elles foient , peu- venr être également employées. On peut fe fervir avec avan- age, pour humeéter ces mélanges, des eaux alkalines, ti- rées des blanchiferies, des tanneries, ou, de préférence , on peut employer cette eau noiîte qui découle des fumiers. Dans le règne animal, on peur employer tous les ani- maux quelconques, toures les parties qui les compofent , leurs excrémens, Mais parmi ceux-là, il en eft qui font plus pro- pres, tels que la fente de pigeon, la crote de mouton, de chèvre , le crotin de cheval & la fiente de poule : il faut avoir attention , dans le choix que l’on fait de ces matières, de n'employer de préférence que celles qui font compofces de parties tendres & molles, & dont la puréfaction puifle s'achever promptement, puilque c'eft une des caufes qui ac- célèrent le plus la produétion du Salpètre; il faut fur-toutavoir at- rention , fi l'on emploie des animaux, de les débarrafler de leur graïfle, qui en retardant la putréfication, s’'oppoferoit à la pro- () Celles de cette efpèce peuvent être employées avec beaucoup de fuccès , parce qu'elles renferment les fubftances convenables par la produ@tion du Sal- être, fans avoir, en quelque forte, befoin d'addition$ l'expofition de ces terres: a l'air fuffir. 40 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: duétion de ce fel. Il n’eft pas néceflaire que voutes les matières que je viens d'indiquer foient ajoutées dans les mélanges ; une partie feulemenc fuff: : maïs je préviendrai qu'il vaut beaucoup mieux employer des fubftances végétales que des fubftances ani- males, parce que ces matières, en fe putréhant, laïflent exhaler une odeur moins défagréable & moins nuifible aux ouvriers qui font occupés à ce genre de travail. Ayant donc expofe les diffe- rentes matières qui peuvent être mifes en ufage avec fuccès à la formation de ce fel, nous allons pañler aux mélanges, & donner les proportions les plus convenables auxquelles on doit sen fervir. Lorfque, felon fa fituation & le lieu qu'on habitera, on aura fait choix des matières que l'on veut employer, il fau- dra les battre & les mettre en poudre groflière, en les paflant à travers une claie, afin de les mêler plus exaéte- ment: fi l'on emploie des parties dures & folides d'animaux ou de végétaux, il faut avoir foin, avant de les mêler, de les couper & divifer en menues parties; il eft même très- eflentiel de les faire maccrer pendant quelque temps, ou dans une leflive de cendre, ou dans de l'eau de fumier, ou au défaut de cela, dans l'eau ordinaire, qu'on laïflera expofce au foleil, afin que par cette longue digeftion, ces matières puiflent fe ramollir & foient en état de fe purréfer plus promptement: mais ïl ne faut employer ces fubftances qu'à la dernière extrémité, & lorfquon ne peut pas sen procurer d'autres plus propres & plus convenables à cet ufage; ce qui ne peut pas arriver, attendu que par-tout on trouve des fubftances végétales, du fumier, de lurine ou d’autres excrémens d'animaux , qui toutes valent mieux que les autres parties folides , à la produétion du nitre, Il eft bien eflentiel dans la préparation de ces terres, qu'elles foient mélées du mieux qu'il fera poffible, avec les matières animales ou vépérales que l'on voudra employer ; il faut fur- tout avoir attention qu'elles foient aflez divifées pour que Pair puifle les pénétrer facilement; aufli, pour cet efler, faut-il ajouter des fubiftances qui les rendent & plus légères & MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 41 & plus friables. Quand on verra que la putréfattion fera bien avancée, & que cette matière n'aura prefque plus de mauvaife odeur, il faudra pour lors la remuer avec des inf trumens de fer, afin de renouveler les furfaces. Cette agi- cation cft d'autant plus eflentielle , que la putréfaétion étant plus long-temps à fe faire, retarderoit, ainfi que je l'ai déjà dit, la formation du nitre : il fauc que les mélanges foient toujours un peu chargés d'humidité; elle y eft indifpenfa- ble; la réation & la pénétration ne fe feroient point; la putréfaétion n’auroit pas lieu , ou du moins elle ne fe feroit que très - imparfaitement , fi l'on n'y ajoutoit pas d'autre humidité que celle contenue dans les fubftances que l'on emploieroit. Lorfque je dis que l'humidité y eft effentielle, je n'entends point que les mélanges foient humectés au point que la li- queut qu'on ajouteroit en trop grande quantité, vint à s’é- couler au travers des terres : on fent bien qu'une manipu- lation femblable feroit nuifible & défedtueufe , parce que cette eau, en fe filtrant, lefliveroit les terres, & emporte- roit beaucoup de fubftances falines, que l'on a grand inté- rêt de conferver : il faut, le moins qu'il fera pofble, les humeéter avec de l'eau pure; fi lon manquoit d’eau de fumier ou d'urine, on pourroit mettre en ufage les égouts des rues, des tanneries & autres, comme je l'ai déjà dir : au défaut de tout cela, on pourra préparer une liqueur dans laquelle on aura fait macérer diverfes plantes, nim- porte l'efpèce , qu'on laiflera expofée à l'air : cette eau, par le fejour de ces différentes matières, acquerra une mau- vaife odeur, & femblable à l'eau de fumier, pourra être employée avec fuccès pour humeéter de temps en temps ces terres. On ne peut point fixer de terme pour l'addition de cetre humidité , cela dépend du temps qu'il a fair & de la fituation du terrein; c’eft à l'Artifte à décider par lui-même de létat où il les trouve, de les humecter lorfquil prévoit qu'elles en ont befoin. Quant à la proportion des différentes fubftances que lon veut employer pour la compofition de ces mélanges, cela dépend d’abord des matières que l'on a fous la main. On fent F 42 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. qu'il eft difficile de donner des proportions juftes; mais heu- reufementune plus grande ou.une petite quantité ne change- roient poinit la production du Salpêtre , & il fauc roujours avoir attention que les matières putrides n'excèdent point les terres que l'on emploie. Suppofons donc un mélange , qui feroit compofé de terre végetale, de chaux, de cendres & de plà- tras; fi l’on ajoutoit encore à ce mélange une pareille quantité de matières en putréfa&ion, ou fumier, ou crotin de cheval, ou animaux , 1l eft évident que ce feroit trop , que la putréfac- tion auroit beaucoup de peine à fe faire, & que les terres con- tenues dans ce mélange feroient trop enveloppées de ma- tières grafles qui mafqueroient ce fel, & quil faudroit laifler écouler beaucoup d'années avant qu'elle füt propre à produire du Salpétre ; ce qui feroit un très-grand obftacle qui nerépon- droit point aux vûes que l'on seft propofées : il vaut mieux même , pour hâter la produétion de ce fel, pécher plutôt en moins qu'en plus : on pourra, ‘par ce moyen, fe procurer en très-peu de temps une terre bonne & fertile en Salpètre, au lieu qu'on eft oblige d'attendre très-long-temps, lorfque l'on em- ploie trop de matières putrides. Dans tous les mélanges que Jai ete à portée de faire plufieurs fois , j'ai toujours fuivi les proportions fuivantes : fur cent parties de plâtras & de terre végétale, j'y faïfois mêler douze parties de matières , ou pu- téfices , ou propres à fe putréfier (*); j'ajoutois à ce mélange dix parties de craie & cinq parties de cendre ; je l'humeëtois avec de l'urine ou de l’eau de fumier, & j'ai toujours obtenu par ce procédé une bonne quantité de Salpêtre : j'ai varié ces mélanges, J'ai employé au lieu de plâtras d’autres efpèces de terres, telles que la craie, & j'ai néanmoins obtenu des réluitats à peu près femblables : on fent bien qu'il eft impof- fible de déduire au jufte la quantité de Salpètre qu’on rexre de ces mélanges, cela ne peut fe faire fans s’expofer à com- (*) J'ai obfervé depuis, qu'on pouvoit diminuer au moins de moitié la quantité de matières purides, & que par l'agitation feule de ces mélanges, dans la vüe de les pénétrer plus tôt du gaz que ces fubftances fourniffent , on rendoit ces terres plus âpres à fe falpécrer. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. #3 mettre de grandes erreurs. On fait d'abord qu'il faut plufieurs années pour que ces terres foient en pleine vaieur, que la troifième & quatrième années fourniflent plus de Salpêtre que la première & la feconde; que la fituation du lieu & la faïfon plus où moins favorable qu'il a fait l'année courante, y contri- buent même beaucoup, & que les mêmes mélanges, employés en même quantité , produifent encore des variations très-gran- des, dont il eft très-difficile de rendre raïfon. Les expériences {e font d’ailleurs trop en petit, pour qu'on puifle prendre feu- lement aucun terme moyen. On voit donc que pour deter- miner des proportions juftes, il faudroit avoir une connoil- fance exacte de toutes les fubftances que l’on peut employer. Mais en fuivant les règles générales que je viens d'établir , j'ef- père que l’on pourra parvenir à augmenter la produétion du Salpêtre , & que l’on emploiera déformais des méthodes plus fimples que celles qu'on à pratiquées jufqu'ici. Je me difpenferai de rapporter celle que l'on pratique en France ; elle eft con- nue de tout le monde, & les pauvres habitans des villes & des campagnes n’ont appris que crop à leur dépens combien elle cft défetucufe ; & sils fe peuvent voir un jour délivrés des entraves & de la gêne qu'on exerce contre eux, ils béniront fans cefle l’augufte Monarque que le Ciel a placé fur le trône pour le bonheur de fes peuples, & le fage Miniftre, digne interprète de fa bienfaifance , à qui rien n’a échappé. On peut propofer divers moyens pour augmenter la pro- duétion du Salpêtre : nous avons fous les yeux les établiflemens qui ont été faits en Suède, en Prufle, & dans divers autres endroits ; peut-être pourrions-nous , par quelques moyens encore plus fimples , parvenir au même but. En Suède, on a établi des nitrières artificielles ; on a conftruit des hangars ou- verts de différens côtés, pour dérerminer le libre accès de l'air, fous lefquels on à fait des mélanges de terre propre à la pro= . duétion de ce fel. Il eft aifé de s'appercevoir que de pareils établiflemens exigent beaucoup de main-d'œuvre & de dépenfes; & quoique l’on fe ferve d’une voie peu couteufe , à la vérité, qui cft de fe fervir des filles de joie pour ramafler l'urine & la Fi 44 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. porter au lieu deftiné pour humeéter les terres, néanmoins elles ne peuvent pas feules remplir ce genre de travail, il faut dés hommes einployés continuellement à remuer les terres & à les lefliver ; ce qui doit certainement , en multipliant la dépenfe, augmenter le prix de ce fel. Je fais que jes hommes dont on fe fert pour fuivre ces travaux, font dans la mifère & fans aucune reflource; mais on conviendra fans peine, que fi lon vouloit employer une méthode plus fimple, on pourroit diriger ces bras d’une manière plus utile, en les employant au défrichement des terres & aux travaux de la campagne. Une autre confidération non moins importante à faire {ur ces établifiemens, c'eft leur proximité des villes. Comme il entre indifpenfablement dans ces mélanges beaucoup de matières en putréfation, on ne peut difconveuir que de ce foyer putride il s'émane continuellement beaucoup de miafmes capables d'infeéter l'air , & d'occafion- ner beaucoup de maladies dangereufes ; c'eft ce que nous ne voyons arriver que trop fouvent par les maladies auxquelles fone expofés ceux qui habitent près des cimetières , des marais, ou d’autres matières analogues en putréfaétion : fi l'on compenfe PFavantage qu'on en retire avec les dangers auxquels on eft expofé, on verra que quelque beaux & quelque avantageux que foient pour la nation Suédoife ces établiflemens , puifqu'ils ont pour objet l'utilité & la tranquillité publique , ils peuvent néan- moins devenir la fource d’une infinité d’accidens , & caufer la ruine de beaucoup de familles. De pareils établiffemens ne pour- roient avoir lieu aux environs de Paris, quoique, fans contre- dic, ils y feroient mieux placés qu'ailleurs , puifque l’on trou- veroit dans les balayures, les plätras & les égouts de cette grande ville , des matériaux tout préparés , très-riches en Salpêtre, & qui n’exigeroient d'autre dépenfe que celle d’agiter & remuer les terres de temps en temps. Mais il feroit à craindre qu'un amas auffi confidérable de matières putrides, ne répandit fur les habitans de cette ville des maladies contagieufes , & ne leur occafionnt des maux beaucoup plus grands que ceux auxquels ils font accoutumiés par la gêne qu'exercent fur eux les Salpé- tiers. Je fais quon m'objeétera que la plus grande quantité MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 4 des égouts de Paris font portés dans des combercaux aux envi- rons de cette ville, dans des endroits deftinés par la Police , & que cependant il n'eft pas d'exemple qu'ils aient occafonné jamais aucune maladie. Je ne chercherai point à réfoudre cette queftion , puifqu'elle eft toralement du refñort de la Médecine ; mais je répondrai feulement , que les égouts placésen différens endroits , font expolés en plein air ; que le dégagement de ces miafmes putrides n'eft retenu par rien; que la pluie délaye cette matière , & la fait pénétrer plus facilement dans les terres, & que néanmoins , malgré cela , à la proximité des lieux où fonc ces immondices , il eft des temps dont l'abord n’en eft pas fou- tenable. Que fcroit-ce donc, fi l'on vouloit mettre en ufage ces matières pour en retirer le Salpêtre? & qui feroient les ouvriers qui pourroient foutenir pendant long-temps un travail aufli pénible, fans courir eux-mêmes de très-grands rifques? On pourroit néanmoins employer ces terres, & ji indiquerai, dans un inftant, les petites préparations auxquelles il faudroit les foumettre. La Prufle, par la conftru&ion de fes murailles, paroît avoir prévu vous ces inconvéniens ; le moyen qu'elle emplois, fort fimple par lui même, cft d'autant plus avantageux, qu'il réu- nit à beaucoup d’égards tour ce que l’on peut défirer fur cet objet, puifquil procure le foulagement des peuples de ce Royaume, & les délivre de la fouille dans l'intérieur de leurs maifons. Les payfans eux-mêmes font chargés de la conftruétion de ces murailles ; le travail n'en eft point fatigant, & ils font bien récompenfés du prix de leurs Rose par la paix dont ils jouiflent. [ls font, felon M. Pietck (Ga ), un mélange de cendres non leflivées de bonne terre, c’eft-à-dire , de terre noire végétale , ou de la terre des caves ou d’autres fouterrains qu'ils PeUE avec de la paille pour donner à ce méiange plus de légèreté & le rendre plus poreux; ils humectent certe teire avec (#) Sthaal avoit déja remarqué , qte quand l'humidité avoit eu le temps de pé- nétrer aflez avant & aflez Ébathaimene dans certaines murailles, on voyoit enfuire paroître à fa furface, un véritable Salpêtre, fous la forme d'une efpèce d'efflorefcence. 46 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. l'eau fale des bourbiets ou celle qui fe trouve près des fumiers, & ils conftruifent, avec cettematière ainfi préparée, des murailles, qu'ils couvrent de paille pour les garantir de la pluie ; ils ont foin d'y verfer un peu de cette eau de temps en temps, & par ce moyen ils fe procurent du Salpètre en aflez grande quantité pour fournir à leur confommation : on pourroic cependant , ce me femble , augmenter le produit de ce fel ; fi au lieu de conf truire des murailles, on fe fervoit des mêmes mélanges de terre, & que l’on eût foin de les agicer & de les humeéter de temps en temps avec de l'eau ci-deflus indiquée, pour lors, en renou- velant davantage les furfaces, la putréfaétion fe feroit mieux, & on pourroit ainfi obtenir plus de Salpêtre. Il eft vrai qu'on ne rctireroit pas de ce mélange autant de Salpètre de houflage que des murailles ; mais à tout cela il n’y auroit rien de perdu, puif- que celui qui ne fe feroit pas montré au dehors fe trouveroit avec avantage lors de la lixiviation. M. Pietck emploie, dans la conf- truction de ces murailles, des cendres non lefivées , non feule- ment pour rendre les terres plus poreufes & plus pénétrables à l'air , mais méme dans la vüe d'obtenir davantage du nitre à bafe d’alkali fixe. Ces cendres, d’après le fentiment de M. Monter & du Chevalier du Coudray , n’y font pas d’une nécef- fité abfolue ; car ces deux habiles Chimiftes ont obférvé que l'on retiroit autant de nitre à bafe d’alkali fixe, du mélange des cendres du tamarifc qui n’en contiennent point , que du mélange d’autres cendres qui en contiennent (*). Ces dernières fubftances (#) Des obfervations que j'ai été à portée de faire pendant mon féjour à Mont- ellier , fur les cendres du tamarifc, me paroifflent un peu oppofées aux fentimens des deux habiles Chimiftes que je viens de citer : je ne difconviens point que la plus grande partie du nitre ne fe trouve naturellement formée à bafe alkaline; mais aufli je ne fuis pas de leur avis, lorfqu'ils avancent que les cendres du ta- marifc ne fervent qu'à dégraifler les eaux mères, & ne contribuent point à la ré- génération du Salpèrre. En effet, de ce que l'on ne retire point par la lixiviation de ces cendres, aucun indice d'alkalicité, doit-on en conclure qu'elles ne rem- lifent point l'indication qu'on avoit toujours crue jufqu'alors ? c'eit ce que lspénerse ne confirme point. J'ai démontré dans un Mémoire que j'ai lu à l'Académie des Sciences le 13 Décembre 1777, ayant pour titre : Mémoire fur l'ation comparée de l'acide nitreux , & de l'acide marin fur les [els vitrio- liques à bafe terreufe, que routes les fois que l'on unifloit le fel marin à bafe terteufe, ou le nitre à bafe terreufe avec le rartre vitriolé ou le fel de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 47 peuvent cependant être de quelque utilité aux mélanges de terres , foit dans la vüe de les rendre plus poreufes & plus péné- trables à l'air. En confidérant donc les deux établiflemens pra- tiqués en Suède ou en Prufle, on pourra , fans cependant les adopter ponétuellement, profiter des vües & des cclairciflemens qu'ils nous ont donnés pour chercher en France de nouveaux moyens d'augmenter la produétion du Salpétre , dont la récolte eft bien différente aujourd'hui de ce qu'elle étoit il y a plufñeurs années, puifqu'il y a près du double de diminution; ce qui fup- pole certainement un vice, foit dans la régie, foit par le défaut de capacité des perfonnes qu'on emploie à ce genre de travail: un moyen für de réparer cette perte, & de prevenir déformais route efpèce d'abus qui fe gliflent infenfiblement dans toutes les grandes entreprifes, ce feroit de fixer des loix fages & inva- riables. Il faudroit que , par une Déclaration du Roi, il fût en- joint à chaque particulier qui habite les boürgs & villages du Royaume, & qui font logés un peu convenablement (*}, de faire chez eux un mélange de terre propre à la produ&tion du Salpètre , que nous défignerons ci-après ; ordonner à Meflicurs Glauber, ces fels éroient toujours décompofés, & que , dans ces deux cas, les fels vitrioliques quittoient leur bafe alkaline, s'emparoient de la rerre des fels ter- reux , avec laquelle ils ont plus d'analogie. D'après cette théorie , fondée fur l'expérience, je crus que fi les céndres du ramarifc ne décompoloient point les eaux mères du Salpêrre par leurs propriétés alkalines, elles pouvoient le faire du moins par la nature des fels neutres qu'elles HAROIERe contenir. La réuflite de cette expérience confirma mon opinion, Je fis brüler féparément du tamarifc que j'avois fait cueillir en différens endroits, une partie aux environs de la mer, près de Maguelonne, & l'autre partie en éroit éloignée de trois lieues. Je mélai, fur fix onces de chacune de ces cendres, deux onces de nitre à bafe terreule, que j'avois fait avec de l'acide nitreux très-pur & de la terre calcaire ; j'ajourai fur chacuË de ces mélanges fix onces d'eau diftillée tiède, afin de les étendre davan- tage. Après vingt-quatre heures de digeftion, je filtrai les liqueurs ; je n'obtins point, par l'évaporation de la première, de nitte primaftique, mais la feconde m'en fournit uncaffez bonne quantité. Je m'aflurai par l'analyfe, que les premières cendres ne contenoient point de rartre vitriolé, au lieu que les fecondes m'en fournirent beaucoup. Ces expériences prouvent donc qu'il n’eft poinr inditiérene d'employer indiftiétement pour les lavages, des eaux mères de l’une ou de l’autre efpèce de cendre. J'entrerai dans de plus grands détails fur cet objet , dans un Mé- moire que je me propofe de lire inceflamment à l'Académie, fur certe matière, Vol. de l'Académie, .1779. (+) J'exclus de ce travail, tous les Payfans qui ne font pas logés chez eux, & qui n'ont pas une cour aflez grande pour ÿ faire l'écabliflement projeté, 48 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. les Intendans des Provinces, de tenir la main à l'exécution de certe préfente Déclaration ; fixer des termes pour le leflivage des terres ; défendre, fous peine de prifon ou autres châtimens, aux Salpétriers , d’inquicter en aucune manière le: particulier , fous quelque prétexte que ce foit, & récompenfer celui qui auroit le mieux travaillé fa terre , & de laquelle on auroit le plus retire de Salpètre. Pour lors, avec des règlemens aufli fages, il n'eft aucun fujer du Roi qui ne contribuât de toutes fes forces à la perfection de ces établiffemens , & qui ne fe trouvät bien dédommagé de fes peines, par l'efpoir de ne plus être troublé par les Salpétriers, Ce moyen que je propofe aujourd’hui , me paroît être un des plus fimples que l’on puifle mettre en exécu- tion, puifqu'il auroit l'avantage, fur les autres, d'exiger très-peu de main-d'œuvre , & réuniroit , ce me femble , les bonnes qua- lités des autres procédés. Pour parvenir à ce but, il faut déter- miner les mélanges qu'il convient de faire dans les différens droits. Toutes les provinces du Royaume ne fe reflemblent point , ni par leur fituation, ni par les terres qu’elles contiennent. Dans les unes, on trouve beaucoup de pierre à plâtre, par confequent, dans les décombres des bâtimens , on peut trouver des matériaux propres à remplir fon objet : dans d’autres, on ne trouve que de la terre calcaire; & dans d’autres enfin, ce font les corps marins qui y. font généralement le plus répandus. Mais toutes ces terres peuvent être employées également avec fuccès. Les provinces de Normandie, d'Auvergne , du Poirou, ia Touraine, la Picardie, l'Alface , la Franche-Comté, la Bour- gogne , la Flandre , la Lorraine, par leur fituation & par la bontc de leur terre humectée fans celle par les excrémens des animaux qui font en grand nombre dans ces provinces, peu- vent fournir beaucoup de Salpêtre; il en eft d’autres dont le trrein cft fablonneux, & où l'on pourroit conftruire des mu- railles , comme cela fe pratique en Prufle. Comme ces terres ne peuvent pas être exploitées tous les ans avec le même avan- rage, il faudroit que l’on divifat les provinces en deux parties, afin de laifler deux années d'intervalle entre chaque lixiviation : ce feroic l'hiver , temps où les habitans ne font pas preflés par les MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 49 les travaux champêtres, que l'on emploïeroit pour la lixiviation des terres : on pourroit même fe fervir du froid pour la con- centration des liqueurs ; ce qui feroit encore un avantage qui diminueroit beaucoup la confommation du bois. Si l'on vouloit éviter la main-d'œuvre, & rendre ces établiflemens plus profi- tables aux particuliers , il faudroit que l'on ftylät, dans chaque campagne , un homme qui füt en état de lefliver les terres, & qui l'apprît à chaque payfan; ce n'eft point une chofe diffi- cile, & je fuis perfuadé que le plus grand nombre s'en acquit- teroit déjà fort bien. D'ailleurs, s'ils avoient vu opérer une,fois, cela leur fufñroit pour toujours , & cette manipulation pafleroit de génération en génération. Si ce dernier plan propofé étoit accepté , il faudroit que la Régie des Poudres & Salpêtre éta- blit, dans la ville ou le bourg le plus prochain, un dépôt pour reccvoir le Salpêtre ; lorfque les particuliers l'apporteroient, que l’on fixât un prix pour chaque livre de fel. Cette dépenfe, au premier abord, paroîtra confidérable; mais fi l'on évalue l'ar- gent quil en coute à la Compagnie pour l'exploitation des rerres, & par le féjour des Salpétriers dans les villages, on trou- vera, dans cette fomme, de quoi payer les particuliers & les dédommager de leurs peines. Ce petitintérét produira un double avantage : non feulement le peuple, animé par l'efpoir du gain, augmentera fon établiflement, la récolte du Salpêtre deviendra plus abondante , &, par ce moyen, les revenus du Roi fe trou- veront tous les ans augmentés de plufieurs millions qui paflent chez l'Etranger. Aux environs des grandes villes, on pourroit, comme je l'ai déjà dit, mettre à profit les immondices qu'on en retire, après que ces matières auroient été expofces à l'air pen- dant quelque temps, pour les raifons que j'ai déjà indiquées; on pourroit, fans crainte , raflembler ces terres , les mêler avec les vieux plâtras que l’on retire de la démolition des maifons ; on conftruiroit ainfi des nitrières artificielles qui exigeroïent très- peu de main-d'œuvre, & dont on pourroit retirer un très-grand avantage , fi cestravaux étoient dirigés avec prudence & éco- nomie. Quant au procédc, pour préparer & difpofer les serres dans les villages, il faut qu'il foit aflez fimple pour qu'une G so MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. femme puille elle-même s'en charger; on pourra, felon la capa- cité du terrein que lon aura, préparer des niwières plus ou moins grandes : fi les habitations font petites, on fe contentera. de faire, dans une partie de la cour ou même à côté, des creux à fumier, pourvu que le terrein foit un peu plus élevé , ou dans un coin du jardin, une ouverture en terre de fix pieds carrés fur deux pieds de profondeur : ceux qui feront mieux logés, & qui auront un terrein plus confidérable, feront les maîtres de faire des augmentations; ils y trouveront un avantage réel, puifque leur profit fera établi fur leur produit. Il eft eflentiel que les ouvertures foient placées de manière que l'air puifle y avoir un libre acces. La dire&tion du Nord me paroïît être la meilleure & la plus convenable; on pourra adofler les fofles à un mur, afin d'y fixer un toit qui fera couvert de paille pour les garantir de la pluie; le fond de ces fofles fera garni de glaife que l'on aura battue de tout côte , ou, au défaut, on pourra les enduire avec du mortier de chaux & de fable, ou bien avec des dales de pierre. Les chofes étant ainfi difpofées, on procédera au mélange ; on prendra du terreau de jardin ; au lieu de cette terre, on pourra y fubitituer celle des caves, des étables, des granges, celle qui fe trouve autour des maïfons, dans les villages, ou mieux encore, celle fur laquelle ont féjourné les fumiers pendant long-temps, nimporte l’efpèce, pourvu que ce foit une terre qui foit abreuvée de fucs putrides; on en prendra, dis-je, cent parties; on y mélera autant de plâtras ou de décom- bres de vieilles maïfons ; on pourra, au défaut de ces plâtras, fe fervir de chaux éteinte, de craie, de terre coquillère de toute efpèce, pourvu cependant qu’elle foit entièrement dénaturée par le laps detemps; on ajoutera à ce mélange trois ou quatre hotées .d'herbes de toute efpèce; on préférera néanmoins celles qui croïflent dans les terreins gras, fur les fumiers, le long des murs, & toutes les herbes potagères;. on les brifera, afin de pouvoir les mêler plus exaétement ; on y mélera aufli un peu de fumier, foit de vache, cheval, mulet, mouton, cinq parties : fi l'on peut fe procurer de la fiente de pigeon, on en femera un peu fur ce mé- lange; mais on peut s'en pañler & y fubftiruer de la fente de poule: MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: 5: on y ajoutcra aufli des cendres, quatre parties, & on pourra les employer leflivées comme non leflivées , car elles conviennent également. Il faut qu'il y ait de ce mélange fuffifamment pour remplir toute l'ouverture, & pour qu'il déborde encore de deux ou trois pieds au deflus du niveau; on le terminera en efpèce de pyramide par le haut. Ce premier travail une fois fait, ce fera pour long-temps ; on n'aura d’autres chofes à faire que d’y porter tous les jours l'urine que l'on aura rendue de la nuit, & les balayures des chambres & de la cour. Si cependant il ne fe trouvoit pas d'urine en aflez grande quantité pour humeéter {uffifamment ces terres, il faudroit avoir recours à l'eau du fumier ou des bourbiers , ou la faufle que j'ai déjà indiquée ci-devant. Tous les deux mois on remuera cette terre à fond, afin de renou- veler les furfaces, & pour que la putréfa&ion fe fafle comple- tement; mais on pourra la remuer plus fouvent fur la fin, & quatre mois avant la lixiviation, on ceflera d'y ajouter aucune humidité, Ce procédé, que je foumets aujourd’hui au jugement de cette illuftre Académie, eft für ; il m'a été communiqué par un homme fort verfé dans ce genre de travail, qui m'a afluré l'avoir coujours employé avec un grand fuccès; & il a, ce me femble , fur les autres , l'avantage d’être plus fimple , & de pou- voir remplir les vües que le Gouvernement s’eft propofées, puif- quon peut le préparer par-tout, & que les matériaux qui le compofent font généralement répandus (*. Comme les ani- (#) On m'a objecté cependant , que les moyens que je viens de propofer n’étoient fimples qu'en apparence, & qu'ils ne pourroient pas étre mis en ufave, parce que l'exécution en eït, dit-on, plus rigoureufe & plus faiigante que la fouille même. Je crois que cette objection n'eft pas fondée ; car il me femble qu'il y 2 beaucoup de différence entre deux procédés , dont l’un ne fatigueroit point le Particulier, & lui rapporteroit du profit, & l'autre au contraire qui lui eft trés-onéreux , & dont les inconvéniens font RTE ; qu'il me paroît inutile de difcuter laquelle des deux méthodes, ou de celle que je propofe ici, ou de celle que l'on pratique, cit la meilleure. Quand le procédé que je propofe n'auroit d'autre avantage que cclui d'éviter la fouille , je crois qu'il pourroit mériter quelque confidération ; on n'ignors pas cependant les vexations qu'entraîne après elle la fouille ; on n'ignore pas que les Salpétriers, en creufant les caves des particuliers , dégradent leurs maifons & en hätent la ruine; on n'ignore pas que, fous le prétexte de chercher du Salpètre, les Salpétriers, à la campagne, troublent la tranquillité du payfan, e, rendent maîtres de leurs maifons, & occafionnent des maux plus grands que ceux même que procure la fouille. G ïj ç2 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: maux fonttrès=gourmands de nitre il eft très-eflentiel que cette fofe foit entource de paliflades, afin de leur en empécher lac- cès : on aura des paillaflons, dont on fe fervira pour garantir ces mélanges de la pluie & de la forte aétion du foleil (*). Le temps de la lixiviation de ces terres étant arrive , on fe difpofera à les lefiver & à filrer la liqueur. Il ne fera pas néceflaire d’avoir vingt-quatre cuviers, comme cela fe pratique dans les Raffineries en grand, deux ou trois feulement pourront fuffire. Au refte, on fe bornera à cet égard à la capacité des tonneaux & à la quantité de terre que l'on aura. Îl faut encore que ces cuviers foient percés par le bas , comme ceux qui fervent à couler la (@) On pourroit aufli mettre en ufage les moyens économiques que l'on emploie dans le Comrat d'Avignon. Ici le peuple n’eft point foulé, n’eft paint expofé à l'aflujertiffément qu’entraîne après elle la fouille; ce font des particuliers qui pré- parent le Salpêtre ; ily en a environ douze dans la feule ville d'Avignon, qui font chargés de cette opération, quoique d'autres perfonnes pourroient également entreprendre ce travail. Ils font logés prefque tous dans des rues affez retirées ,.& tout près des murs de la ville; ils ont le droit, dans la démolition des maifons ou des vieux édifices, de faire enlever les décombres , qu'ils mettent dans des han- gars attenans à leur maifon ; ils mêlent les décombres avec la terre des caves, ou avec celle des prés qu'ils humeétent enfuite ou avec de l'urine, ou avec l'eau des bourbiers, où bien avec une eau dans laquelle ils ont fait pourrir d2s plantes. Ils remuent les mélanges de temps en temps , & ne les leffivent que lorfqu'ils fonc bien fecs & qu'ils ont perdu toute mauvaifle odeur. Ils ont l'attention d’avoir une affez grande quantité de ces terres, qu'ils difpofent de manière à pouvoir occuper continuellement les ouvriers : lorfque la lixiviation eft faite , ils expofent ces terres dans de perites ouvertures qu'ils ont pratiquées autour des murs de la ville, non feulement pour les imprégner de nouveau de matières putrides, mais même pour les faire refluyer & les deflécher entièrement. Enfin, lorfque les terres ont refté- ainfi pendant un certain temps expofées à l'air, ils les rentrent de nouveau dans fe hangar, les remélent avec de nouvelles, & les laiflent en cet état, pour être enfuite releflivées à leur cour. Tels font les moyens que l'on emploie pour pré- parer le Salpétre dans le Comtat d'Avignon, moyens fimples & point du tout oné- reux au Public, puifqu'il n'eft affujetti à rien. Les différens ateliers que j'ai vus pendant mon féjour dans cette ville, m'ont paru très-bien dirigés, & conduits avec prudence; plufeurs Propriétaires m'ont avoué qu'ils faifoient environ deux cents quintaux de FA par an, qu'ils confomment prefque tous, foir à faire l’eau- forte, qu'ils diftillent dans de grandes cornues de’ verre, capables de contenir: foixante livres de mélange, foi à la poudre à canon, qu'ils préparent dans des. moulins hors de la ville, foit pour le commerce. à Cette manière de, falpêtrer les terres fe fait avec facilité ; le procédé en eft fi: fimple, que toute perfonne pourroit l'exécuter avec aifance. Au lieu qu'une ni- trière artificielle exige, pour fa conduite, beaucoup d'habitude & de foin ; & comme: elle ne hiffe pas d'entraîner après elle beaucoup de dépenfes, il atrive fouvent qu'elle occafionne la ruine de ceux qui l'entreprennent, MÉMOIRES S&R LA FORMATION DU SAIPÈTRE 5$ lefive; on ajuftera à cette ouverture, de la paille pour fervir de piflorte : il faut qu'ils foient pofés fur un bloc de bois aflez élevé, afin que l’on puifle facilement Y£ olifler un baquet pour recevoir la liqueur; au fond du cuvier , on NAT un lit de paille pour éviter l’'adhcience de la terre, & pour que la liqueur puifle filtrer P lus facilement. L'atelier étant ainfi difpofé , on remplira les cuviers aux trois quarts de terre, & on finira de les remplir avec de l'eau froide ; on agitera le tout avec un baton, & on la laiffera ainfi Ajourner pendant quelque temps, afin que la terre foit bien penétrée , & que l’eau puiïfle fe charger des fels les plus folubles : on pourra reverfer une feconde fois la liqueur filtrée fur la même terre, afin de la charger le plus qu il fera poflible de fel; cette liqueur fera mife à part. Si l'on prévoit qu'il refte Feu du fel dans la terre, on y ajoutera de nouvelle eau que l'on pourra reverfer fur de nouvelles terres, & on continuera ainfi de fuite, jufqu'à ce que les terres foient entièrement leffivées : on raflem- blera toutes ces liqueurs, & on les fera évaporer. Mais pour pro- céder à cette évaporation , il faut fe procurer les inftrumens convenables ; ce qui, je l'avoue, ne peut fe faire fans dépenie; mais s'il n y avoit que cette difficulté qui püt s’oppofer à la réuf- fice de cet crabliflement , on verra bientôt qu'il eft très facile de la réfoudre. Chaque particulier ne fera pas obligé Se fa chaudière, deux feulement fufiront pour une communauté elles pafleront fucceflivement de maïfon en maïfon pour “à évaporer leur liqueur, & elles feront enfuite dépofces chez le Curé du lieu ou chez le Principal de l'endroit. Une fomme de foixante livres fera fuffifante pour cette acquilition : cette fomme très-modique par elle-même, ne ruinera pas le payfan, puifqu'on peut calculer , en prenant un terme moyen, qu'il ne lui en coutera pas dix fous pour fa quote part, en comprenant encore la fpatule de fer & les autres inftrumens néceflaires. On pourroit encore oppofer à à la réuflite de cet établifflement, la quantité de bois qu'il faudroit pour lévaporation de ces liqueurs : = mais comment font les Salpétriers, lorfqu'ils fone la même opé- ration dans les villages? Les payfans feroient comme eux, fui- yroient leur Cet & parviendroient également à be fin. $ÿ MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Chaque communauté à fa portion de bois , & il feroit à défirer que les années où l’on procederoit à la leflive des terres, le Roi, par un nouveau trait de bienfaifance , permit aux habitans d'en abattre une plus grande quantité dans ces années-là que dans d’autres. Dans les endroits où il y a difette de bois, on pourroit fe fervir de tourbe, de charbon de terre ou d’autres matières combuftibles ; mais il faudroit, dans ce cas, que les fourneaux fuflenc conftruits différemment , afin de tirer de la chaleur le plus de parti poflible. Le Salpètre qui auroit été retiré de la hxiviation de ces terres, feroit remis en cet état aux Salpétriers qui le purifieroient, pour être enfuite employé aux diffcrens ufages auxquels convient le Salpètre purific. Les terres qui auront été leflivées, pourront fervir de nouveau au même ufage; il faudra , lorfquelles feront bien égouttées, y mêler quatre parties de cendre , ou mieux encore, de la chaux éteinte ; on y ajoutera un peu de crotin de cheval; on re- mettra le tout dans la faufle, & on continuera à y verfer l'urine & les balayures, comme cela fe pratiquoit auparavant : on retirera de cette terre , dans une feconde opération , une beaucoup plus grande quantité de Salpètre que dans la pre- < mière. Connoïflant les abus qui fe pratiquent dans ce genre de travail , & les vexations auxquelles font expofes les gens de la campagne , j'ai cru devoir propofer mes vües fur cet objet. Je me croirai trop heureux , fi les moyens fimples que j'an- nonce, peuvent être de quelque utilité, & fi je puis donner à ma Patrie, des preuves de mon zèle & de mon amour pour glle. EEE — —+, MEMOIRE CHIMIQUE ET ÉCONOMIQUE SUR LES PRINCIPES ET LA GÉNÉRATION DU SALPÉTRE. OuvrAGE qui a remporte le Prix Royal, au jugement de l'Académie des Sciences. M. TOUvENELzL, Doëleur en Médecine, Affocie Ft de la Societé Royale de Médecine. M. TOUvENEL, Commiffaire des Poudres & Salpëtre au département de Nanci, Par Après avoir lu & médité tout ce qu’on a écrit jufqu'a préfent fur cet important fujet, ne pourroit-on pas dire avec le Vicillard de TÉRENCE : Incertior mulro [um quam dudüm ?* DÉcEMBRE. 1780. een mme em mener PRÉLIMINAIRES. Le Salpêtre, par rapport à fes ufages importans dans la: fociété, & plus encore à caufe de fes “ingulicres propriétés, des HN rnb très-variables en apparence, & très-diverfes de fa formation , eft, de tous les fels, celui dont l’origine a été la plus ER Cette queftion, dans fa feule acception chimique, n’a jamais: éte réfolue, quoique propofée plufieurs fois par des Académies ,. &. fouvent agitée dans les Ecoles & dans les Ouvrages de Chimie; mais confidérée comme queftion économique & po- litique, 11 y a long-temps que la routine ou une pratique sroffière: 56 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. en ont donné la folution. Les Savans ont perfeétionné cette pratique dans certains pays ; mais eft-elle encore fufcepable de l'être, & la France peut-elle en retirer quelque avantage ? Tous les pays ne font pas également propres à la produc- tion du Salpètre. On connoît les méthodes par lefquelles on sen procure en Suède , en Prufle , en Suifle, à Make, en E'pagne, en Chine, dans l'Inde, en Amérique, &c. Il vient naturellement & très-vite dans plufieurs de ces cli- mats, notamment dans les plus chauds; tandis que dans les autres ce n'eft que par art, à force de travail, & lente- ment. Le royaume de France n'a pas, à cet égard , les avan- rages des premiers; mais il n'avoit pas eu non plus jufqu’à préfent befoin de recourir aux expédiens des feconds. Sa manière de récolter le Salpêtre, par le moyen des fouilles dans les ha- birations , eft, fans contredit, la plus onéreufe pour le peuple ; mais ne feroit-ce pas aufñli la plus sûre & la moins difpendieufe pour l'Etat? Ne faudroit-il pas encore , pour n'être point dans le cas, par la fuite, de remplacer peut-être une gêne par une impofñtion, lui donner la préférence, sil croit pofñfible d'en détruire les inconvéniens & les abus, d'en prévenir les vexations , d'en augmenter le produit , &c? Quoi qu'il en foit, le but de ce Concours, fuggéré par la bienfaifance du Souverain, & dirigé par la fageñle de fes Miniftres, eft d'abolir l'ancienne pratique des fouilles, & d'y fuppléer par les établiffemens qui feront jugés les plus fimples, les plus produétifs, les plus économiques. Exifte-t-il des con- noïflances fixes & certaines qui puiflent fervir de bafe à ces éta- bliffemens & en aflurer le fuccès? Quel étoit l'état de ces connoif- fances à l'époque de la proclamation du Concours, & quel eft-il aujourd hui? Jufqu’à quel point la Chimie pourra-t-elle donner la folution de ce grand problème, & que reftera-til à faire à la politique, à l'économie rurale, au commerce, à l’'adminiftration? Pour répondre à toutes ces queftions, l’ordre exige que nous commencions par donner une idée générale des connoif. fances de nos prédécefleurs ; que nous y ajoutions enfuite celles que des vües & des expériences nouvelles nous auront four- nies; MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. $7 nies ; enfin, que nous faflions de tout cela une utile applica- tion en grand au travail de la nitrificatian. PARRE MORE RE OS EC DE ON: Théorie generale de la Nitrification. D. les hypothèfes qui ont été produites fur ce point, peuvent bien contenir quelque chofe de vrai; mais toutes auffi font, à d’autres égards, ou manifeftement faufles, ou très-précaires. Leur difcuflion, que nous rendrons très-fuc- cinée , devient néceflaire pour conduire à l'expofirion des faits & des corollaires qui doivent fervir de bafe au fentiment que nous adopterons. Elle peut fe réduire à ce qui fuit: Suivant l'opinion la plus généralement adoptée, l'acide nitreux eft le réfulrar d’une converfion des autres acides, & notamment de l'acide vitriolique , regardé comme primitif & univerfellement répandu dans la nature, dans l'air, dans la terre, dans les plantes, libre ou combiné avec d’autres fubf- tances; converfion uniquement ou fpécialement attribuée au pouvoir divifant & atténuant de la putréfation , ou bien à la combinaïfon de l'acide préexiftant avec des fubftances phlo- giftiques, fulfureufes, grafles, &c. Les partifans de ce grand {yftême (de tranfmutation) qui a été long-temps le dominant, {e font enfuite divifés, faifant dériver l'acide nitreux , les uns de l'acide marin , les autres de l'acide phofphorique » ou plus généralement encore de l'acide microcofmique univerfel , tar- tareux , acéteux , ou autres, épars dans les animaux & les vé- gétaux. Une autre hypothèfe appuyée d'autorites , peut-être moins nombreufes, mais aufli graves que la précédente, eft celle qui attribue exclufivement à la végétation, la formation de l'acide nitreux, & la produétion des fels nitreux , au pur dé- veloppement qu'amène la décompofition putréfaétive des végc- taux & des animaux, Quelques partifans de cette hypothèfe H 58 MÉMOIRES SUR.LA FORMATION DU SALPÈTRE: (du végetalifme) fe font encore rapprochés de la première ; en admettant que dans cette opération, l'acide vitriolique contenu dans les terres, ou apporté de l'air, & fuivant une autre Seëte , l'acide microcofmique general, étoit tranfmué en acide nitreux. Le fyftéme le plus ancien, & qui, après avoir été dans tous les temps le plus combat , vient d'être depuis peu renouvelé: avec le plus d'éclat, eft celui dans lequel on regarde l'atmof- phère comme lunique réceptacle des matériaux de l'acide pitreux, ou qui fait dériver de à ce dernier tout formé , en confidérant ou l'air comme un élément eflentiel de l'acide, ou celui-ci comme un principe conftitutif de fair. Ce fyftéme (du Pneumatifme) a donc éprouvé , comme les autres, fes modifications , fes viciflitudes, de la part de fes divers par- tifans. - É Chacune de ces opinions a été appuyée par quelques faits vrais où fuppofes, & par beaucoup de raïfonnemens; & fur cette queftion très-importante de la Aalotechnie, comme fur beaucoup d’autres de cet ordre, la théorie eit allée bien ‘plus Join que ne pouvoit le comporter le réfumé des connoïflances. pratiques. j En effet, fi on examine les opérations connues , naturelles ou artificielles, tendant à la génération du Salpétre, on verra. que prefque toutes peuvent s'adapter indiftinétement à toutes les théories ; on verra qu'elles font les mêmes quant au fond, & ne diffèrent que par des circonftances accefloires de me- langes ou de manipulations, fuggérées par telle ou telle de: ces théories. D'un autre côté, fi on cherche à approfondir: ces dernières, en les comparant l'une à l'autre, on trouvera: qu'elles font eflentiellement moins diverfes qu’elles ne pourroïent le paroiître au premier afpett, fur-toue fi on admet , avec les partifans de ces différentes hypothèfes , l'exiftence d'un prin-- cipe falin, primitif, univerfel , dont les autres fels ne feroienit que des dérivés ou des modifications. Peu importe d’ailleurs, quant à préfent, pour la folution du problème , que l'on accorde le titre de cette primordialite’ MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 59 4 à tel ou tel acide , viriolique, phofphorique , ou autres; que ce foit plus généralement encore à l'acide fpécifique, aé- rien & gazeux, en feroit-on plus avancé pour entendre la genefe fucceflive des autres fels? Ce qui importe au contraire beaucoup, c’eft de connoître les grands foyers naturels de ces opérations, de favoir fi c'eft dans l'atmofphère , dans la terre, dans les êtres organiques, vivans ou pourriflans , qu’elles s’exé— curent; mais avant tout, de favoir fi réellement & jufqu'à quel point elles s’exécurent : fur cela nommément les Sectes chimiques ne s'accordent guère , lorfqu’il s’agit d’expliquér la formation du Salpêtre. D'après ce premier expofé, il paroît qu'on peut réduire à deux clafles routes les opinions des Chimiftes fur cet objet. La première comprend tous ceux qui croient à la converfion des divers ordres de fels en Salpêtre: la feconde, ceux qui admettent la formation immédiate & complète de ce fel, ou fa génération de toutes pièces, avec des corps reputés élémen- taires & non falins. Quant au premier point, on pourroit concevoir que la permutation des autres fels en Salpètre, confifte dans une totale décompolition de leur fubftance, & dans une nouvelle combinaifon de leurs matériaux défunis; mais alors cette hypo- thèfe rentreroit abfolument dans la feconde. Il refteroit à expliquer comment le mouvement putréfa&if où végétarif des lieux & des fujets où fe trouve le Salpêtre, feroic un moyen générateur de ce fel, & au contraire un moyen radi- calement deftruéteur de tous les autres. Des effets fi oppotés d'une même caufe, fur des fubftances dont la mixtion chi- mique femble fi peu différente, ne peuvent fe concilier d’après une chéorie aufli fpécieufe que celle de la permutation de ces fels, fuivant la doctrine de Beccher & de Sraahl , mo- difiée & interprétée par les connoiflances poftérieurement acquifes. Si au contraire, d’après ces autorités trés-impofantes , & par une fuppofcon tout aufli inexplicable que la précédente, on prétendoit que le changement des divers fels, ou en H 6o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. pur acide nitreux, ou en Salpétre complet, sopérât a moyen d'une fimple addition, ou d'une fouftration faite à leur efflence primitive; fi, comme on la dit plus vague- ment ençore, cela fe faïfoit par une forte d'aténuauon, d'épurement, de développement de leurs principes, il fau- droit en conclure que cette prétendue tranfmutation fuccefive des autres fels en vrai nitre, feroit, de quelque manière qu'on l'entendit, une chofe totalement diftinéte de la forma- tion nouvelle & élémentaire de ce fel. Cette feconde opinion, qui appartient prefque en tota- lité aux Chimiftes-Pneumatiques anciens, & à ceux qui fe font depuis rapprochés d'eux , mais avec quelques réformes dans leur doétrine , toujours vaguement & obfcurément an- moncée; cette opinion, dis-je, fi on veut l'interpréter, paroît bien mieux que celle des Sraahliens , fe concilier avec tous les phénomènes de la Chimie naturelle & artificielle. Elle cft plus conforme aux vrais dogmes de cette fcience qui n'admettent de tranfmutations poffibles, que celles qui sope- rent entre les fubftances fimples ou prefque élémentaires ; tranfmutations qui ne fontalors que de vraies régénérations réful- tant de décompolrtions radicales antérieures, d’après cet axiome généralement vrai en Phyfique : deffruélio unius, eff generario alterius. Au refte, s'il exifte en Chimie des exceptions à cette loi générale de l'immutabilité des corps compofés, par les feuls. procédés de l'Art, elles ne font pas fufifamment prouvées : elles ne dérogeroient d’ailleurs pas à ce que nous difons ici dés, corps falins , fur-rout fi on l'entend des corps falins du fecond ou du troifième ordre de compofition également compris dans le fyftème général de la tranfmutation. Si l'on devoit d’ailleurs admettre d’autres mutations réelles entre des corps déjà très-compofés, dans le fens que nous l'entendons , & fans décompofition préliminaire, ce feroit dans les corps organiques vivans, & non dans leur deftruc- tion fpontanée, ni dans les tortures que la Chimie leur fait éprouver. Encore ne conçoit-on la pofhbilité de tels évène- mens, qu'en fuppofint, avec beaucoup de vraïfemblance , MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. G# qu'ils font le produit de furcompofitions nouvelles qui maf- quent ou qui dénaturent les corps qui les fubiffent, & dont la mixtion les rend encore fufcepübles de contracter quelque union. Je citerois pour exemple, dans les végétaux , letartre très - abondant dans le verjus, lequel devient corps fucré dans le raïfin; le fucre des graminées qui pafle à l'état de farine par la maturation , &c. Dans les animaux, je citerois l'acide eflen- tiel & confticutif, originairement émané des plantes , le fucre animal engendré dans le lait, lefquels , après avoir fubi diverfes akérations, femblent parvenir à la condition de fel microcof- mique. 5 Or, la Chimie artificielle ne fait pas imiter de tels pro- duits; & sil exifte dans les êtres organiques, végétaux ou ani- maux, quelque fubftance faline qui, dans la décompofition fpontanée , putréfaétive, de ces corps très-compofés, puifle fournir immédiatement à la génération du nitre, c'eft fans doute ce fel eflentiel, microcofmique, général; c'eft ce com- pofé moitié falin, moitié muqueux, d’une mixtion très-tendre, très alcérable , très-abondamment pourvue d'air, & par-là fufceptible de fe prérer à d’autres formes. Il paroït n'être par- tout qu'une feule & même fubftance différemment modifiée, fuivant la nature de lorganifme animal ou végétal. Sa conf- titution faline-acide dans les matières de cesdeux règnes, eft bien prouvée par les refultats de leur décompofition analytique , où out contient de l'acide, ou bien eft le produit d’un acide décompofé. Quant aux autres fels plus parfaits & plus confiftans, les vitrioliques , les phofphoïiques , les marins, ils ne paroiflent fervir ni direétement ni fubftantiellement à la formation des {els nitreux. Une obfervation journalière très-importante , qui a dû fur ce point en impofer pour l’opinion contraire, déjà très-accréditée fans cela, & qui en effer eft une preuve très- fpécieufe , c’eft que dans l'exploitation des nitrières naturelles ou arüficielles, on nc trouve pas veftige de fels vitrioliques. & phofphoriques, quoique manifeftement contenus dans les fubftances végétales ou animales & quelquefois minérales, em- @2 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, ployces à leur confe&tion. On n’a pas manqué d’en condure; que ces divers fels étoient réellement changés en Salpètre ; mais cette erreur ne doit plus fubfifter, au moins pour les fels vitrioliques à bafes alkalines , depuis que l’on fait que par la loi des doubles affinités, ces fels ne font que changer de bafe avec les fels nitreux & marins terreux toujours contenus dans les terres falpétrées, foit que ces derniers fels aient une bafe calcaire , qui eft Ja plus commune , ou bien qu'elle foit de nature fedlitienne où alumineufe. Ce fait chimique, que je connoiflois depuis long-temps, m'avoit conduit à tenter la même décompolition avec les fels phofphoriques. J'ai vu en effet qu'ils décompoloient de la même manière , les fels nitreux & marins à routes bafes terreufes. Il en a réfulté d’une part une efpèce de felénite phofphorique ou microcofmique , à peine foluble , ainfi que la fclénite vitrio- lique; & d'autre part, du nitre & du fel marin, ayant pour bafes l’alkali fixe végétal ouminéral, & l’alkali volatil. Sans doute le fel phofphorique employé contenoit, comme il paroîc que cela lui arrive dans quelques fecrctions animales, l'un & l’autre de ces alkalis. La même chofe a lieu à l'égard de ces diflérens produits falins, lorfque l’on opère ces décompofitionsavecl'acide vitrioli. que pourvu de cestrois bafes alkalines. D'où l’on voit que dans les travaux des Salpétriers , il doit fe trouver trois efpèces de nitre & de fel marin , fans compter ceux à bafes terreufes ; mais il ne peut jamais y avoir de fels vitrioliques ni phofphoriques. Il eft facile de voir auffi pourquoi l’on n’y rencontre pas de fel de fedlitz, quoiqu'il foit wès-commun dans les eaux & les terres dont on fe fert. El eft toujours décompofé ou pendant le temps de la nitrification, ou bien dans le travail de l’ex- ploitation, par les alkalis ou fpontanés ou ajoutés, Puis il décom- pofe à fon tour les fels nitreux & marins à bafes terreufes. Pour ce qui concerne les fels marins à bafes alkalines , on fait qu'ils fe trouvent toujours plus ou moins abondamment & dans les terres falpétrées, & dans les cuites des Salpêtriers. Ilparoït qu'ils n’y éprouvent aucune altération, capable d’influer direementfur la produétion du Salpétre; fi ce n’eit par échange MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 63 de bafes de la part de ces fels marins avec lesnitreux terreux. Ce- . pendant c’ eft une opinion aflez généralement reçue parmi les Sal- pêtriers, même de beaucoup de Chimiites, que le felmarin con- court de fa propre fubftance ou par fes matériaux dcfunis, à la formation du nitre. Elle a été d'abord fuggérée ( cette opinion) par l’obfervation d’une abondante récolte de ce dernier {el , foit danslesterres naturellement imprégnées debeaucoup defel marin, foit dans les mélanges artificiels de matières animales & végétales furchargées de ce {el, foit enfin dans les nitrières nArUteIleS ou artificielles, qui, fans contenir d'avance du fel marin tout formé, en fourn niflent néanmoins d’aflez grandes proportions relative- ment à celles du Salpètre qui sy forme en même temps. D'un autre côte, cette opinion s’eft accréditée par cettethéorie, qui admet une très-grande analogie entre les acides nitreux & marin; théorie qui a été portée jufqu’à faire prétendre qu'en retranchant , par des procédés chimiques, quelque chofe au Premier, & en ajoutant quelque chofe au fecond , is pourroient réciproquement fe changer l'un dans l'autre. Enfin, pour der- nière preuve de la converfibiliré du fel marin en Salpêrre , On a cité, d’après des Chimiftes de nom, des expériences faites. déderent dans cette vüe , par voie de décompofition lente: & putréfactive des nicrières , & l’on n'a pas héfité d'en aflurer le fuccès. Cependant, maloré toutes ces obfervations, ces expériences, ces autorités, nous “penfons encore , avec la plupart des Chi-- miftes , que cette prétendue converfion eftillufoire , & que la. compofition des fels de cet ordre eft tout aufli able que celle des métaux. Les faits d'après lefquels il confte que: prefque par-tout où le Salpérre exifte , il s'y rencontre aufli du {el marin, ne peuvent prouver leur mutabilité réciproque. Tout: femble prouver au contraire, qu'indépendamment de la préexif tnce de ces deux fels, très-communs dans les matières qui fécondent les lieux à Salpétre , favoir, du nitre dans les végé-. taux & du fel marin dans les animaux (ot zs font en quelque forte effentiels), ils s'engendrent l'un & l’autre dans la décom- pofition de ces deux ordres de corps méêles à des matières 64 MAMOIREs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. terreufes. Cette double génération fimultanée n’arrive-t-elle pas fpontanément dans les terres, par leur fimple expofñition à l'air & aux brouillards, dans les pays où le fol & l'atmofphère font éminemment propres à la nitrification ? Cela indique tout au plus qu'il y a quelque analogie entre les matières & les circonftances favorables à la produétion de ces deux fels. Mais les expériences dont nous rendrons compte par la fuite, femblent prouver que la différence de leur formation tient plus à celle des matières terreufes, abforbantes, ou bien à celle de la conftitution de l’atmofphère, qu'à la diverfité cflentielle des émanations aérées & phlogiftiques qui conftituent, fuivant nous , les acides nitreux & matin; en forte que nous fommes très-portés à croire que dans les nitrières, foit natu- relles , foit artificielles, plus il fe forme du dernier de ces acides , moins il fe forme de l’autre, & vice verfa. Mais fi fous cet afpett la génération des fels marins eft contraire à celle des nitreux, il n’en eft pas de même de la préfence ou préexiftence de ceux-là relativement à la produétion de ceux-ci. N'eft-il pas plus vraifemblable que les fels marins , accélérant par leur qualité de ferment , la décompofition des matières purrefcibles , favorifent la nitrification ? peut-être aufli le font-ils en attirant , par leur diliquefcence , & entretenant dans les terres l'humidité de l’atmofphère , qui en outre porte avec elle les germes du falpérre. Si les fels marins rempliflent réelle- ment cette fonétion d'’intermèdes uules dans les nitrières , ne feroit-ce pas ce qui en auroït impofé pour faire croire à leur converfion en vrai nitre? Ce qu'il y a de certain, c’eft qu'aux expériences direétes qu'on a alléguées pour prouver cette converfion , je peux en oppofer de contradiétoires que j'ai faites avec toute l'exaéti- tude poffible, J'en ai difpofé , dans cette vüe , un très-grand nombre, foit en plaçant dans le fein même des matières putrefcibles, ou pures ou mêlées de terres, les fels marins, doit en les expofant feulement à leurs émanations. J'ai fait les mêmes épreuves avec toutes les autres fubftances falines connues. I! cft inutile d'en donner le détail, Mes réfultats généraux ont LE 4 etc MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 6$ été que la putréfa@tion peut décompofer les fels & en pro- duire de nouveaux, mais non les changer les uns dans les autres , fi ce n'eft par fimples précipitations ou échanges de bafes, fuivant les loix des pures affinités chimiques. Il paroït qu'il en eft de même pour la végétation. J'ai fait aufli far cela beaucoup d'expériences, en mêlant aux verres difié- rentes efpèces de fels & de graines. Mon but principal étoit de voir fi l'addition de ces {els rendoit les plantes plus riches en Salpêtre; mais je n’y ai point réuffi : d’ailleurs cela ne prou- veroit point encore une tranfmuration de fels. Jai vuiqu'une plante élevée dans un terrein imprégné de tél ou tel fel, n’en tournifloit point dans fon analyfe, tandis qu'une autre plante venue fur une terre exempte de fel , en donnoit de plufieurs efpèces. Cependant il y a.des plantes qui tirent évidemment & abondamment le fel du fol fur lequel on les voit croîtres mais tout cela tient beaucoup à l’organifme particulier de cha- que végétal. Le desré de maturation du même individu fait encore varier fes produits falins , aufli bien que fes autres fub£ tances. Enfin , on peut avancer comme une chofe incontef- table , que l'air & l'expofition concourent pour le moins autant que la hature de la terre , à l'œuvre de la végétation, & que cela eft également vrai pour la nitrification fpontanée ou fac- tice. Les fels des plantes introduits dans le fyftéme des animaux VIVANS , 7 éprouvent des altérations , des décompofitions ; maïs il s'y en engendre aufli de nouveaux. Tout le fel marin qu'on retire des “derniers ; ne leur eft pas fourni par les ali: mens , non plus que le fel microcofmique , ni le fel ammo- niacal. On fait qu'il s’y forme de l’alkali volatil, maïs peut-être beaucoup moins qu on ne le croit communément. On fait aufli que ce fel a été regardé, par quelques Sedaires Sraahliens, comme un des grands moteurs de la nitrification, en opé- tant, par fa décompolition & le nouvel emploi de fon prin- cipe inflammable ou'autre, la converfion des {els vitrioliques en fels nitreux, Mais cette opinion ne porte que fur des rai {onnemens très-vagues , ou des expériences très-fautives. Pai J ‘66 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. répété quelques -unes de ces dernières, en tenant pendant plufeurs années de fuite , dans des vaifleaux ouverts, ou dans des efpèces d'appareils circulatoires , de lalkali volatil pur avec p plâtre, ou naturel ou faétice, d’une part, & avec de la craie & de la chaux éteinte , de l’autre , tous bien édul- corés & mis en poudre. J'ai à la vérité obtenu quelque peu de nitre de toutes ces épreuves ; mais j'en ai aufh retiré d'au- tres épreuves de comparaifon faites avec les mémes fubftances, fimplement expofées à l'air atmofphorique, ou bien à l'air méphitique des matières en putréfaétion, & fans addition d’alkali volatil. D'où il réfulte que ni l'acide vitriolique comme tel, ni les fels urineux , par leur décompofition, ne concou- rent à la génération du Salpêtre. On prouvera peut-être un jour qu'ils y font, à quelques égards, contraires. Mais revenons aux fels des animaux. On ne retrouve pas dans leur fubftance le nitre que con- tiennent les plantes dont ils font ufage, ou celui qu’on leur donne exprès dans leurs boiflons , comme je m'en fuis afluré par quelques expériences. Il y a cependant cette exception très-remarquable , c'eft que dans les excrémens inteftinaux , à peine animalifés, des quadrupedes herbivores, dans la mafle parenchimateufe végétale qui réfulte , prefque inaltérée , de leur premiere digeftion , le Salpêtre y exifte encore tout forme & en aflez bonne quantité; mais je n'ai pu découvrir aucun in- dice de ce fel dans les matières totalement animalifées des di- geftions & des fecrétions ultérieures , le fang , l'urine, la bile, le lait, les fucs, &c.; j'ai trouvé conftamment du fel marin à bafe d’alkali fixe de tartre dans certaines de ces fubftances, & à bafe natreufe dans d’autres. J'ai trouvé aufi ces deux fortes d’alkalis non combinés , mais avec de grandes varia- tions » qui paroïflent tenx à la nourriture, plus qu'aux fonc- uons & aux organes. Quant aux fels vicrioliques qui fe rencontrent également dans les alimens & les boiflons des animaux , je crois qu'ils n'éprou- vent dans l'ouvrage de l'animalifation, d’autres changemens que ceux qui peuvent réfulcer des affinités purement chimiques, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 67 doubles ou fimples, telles qu'elles ont été déjà énoncées ci- deflus ; favoir, de celles qui s’exercent entre les fels vitrio- liques alkalins & les fels nicreux ou marins terreux; ou bien entre les fels vitrioliques à bafes terreufes & les alkalis libres ; peut-être aufh entre les fels vitrioliques & les phofphoriques: mais tous ces réfultats font plus importans à connoître pour quelques phénomènes fecondaires des fonétions animales, ou bien pour ceux de la végétation, que pour la nitrification fpontanée provenant de la décompolition des fubftances ani- males & végétales. Toujours eft-il certain, & ceci eft un corollaire général de ce qui précède , que la végétation & la putréfaétion , fou- vent l'une & l’autre réunies , font les deux grands moyens gé- nérateurs du Salpêtre, & quelles ont en outre le pouvoir de changer ou de créer d’autres fels; que l'animalifation au con- traire eft tout oppofée à l'œuvre de la nitrification , & même capable de détruire le nitre tout formé; tandis qu’elle forme des fels d’une autre nature : enfin que dans la fucceflion de ces trois états des êtres organiques , il fe fait de réels chan- gemens , des décompofitions & des récompofitions très-re- marquables dans la texture ou dans la mixtion des fels en général; mais fur-tout de nouvelles générations indépendantes de la falinité quelconque antérieure, Ces notions majeures , fpécialement relatives à la première clafle des fyftêèmes énoncés fur l’origine du Salpétre, à ceux que Staahl, fes Partifans divers, fes Commentateurs ont adoptés , faifant dériver, d’après des fpéculations très-vagues ; entortillées, embarrañées, la produétion de ce fel de la con- verfion des autres fels, au moyen de la putréfaétion & de fes débris; ces notions, dis-je, en détruifant les autorités très- graves & très-impofantes ; qui ont tant arrêté fur ce point les progrès de la vérité, & mafque méme celle que des Chi- miftes antérieurs & poftérieurs ont dévoilée fur les vraies fources du nitre, fur l'abord ou la formation de ce fel dans fes matrices ordinaires, &c. ; ces notions enfin, auxquelles nous ajouterons ci-après ce qu'il faut penfer de l'acide vitrio- I ï 63 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. lique répandu dans Pair, jettent déjà plus de jour fur les autres {yftémes qui nous reftenc à difcuter. Celui que l'on à attribue à Lemery , & qui appartient bièn plus à Glauber, eft manifeftement, par ce que nous venons de dire, démontré faux fur ces deux points ; que la végé- tation eft l'ouvriere exclufive des fels nitreux, & que ces fels, pourvus d'une bafe alkaline fixe ou volatile, pañlenc dans les animaux fans éprouver d’altération. Il eft bien prouve au con- traire, que, pufque ces derniers fourniflent du Salpêtre de toutes leurs païties après une putréfaétion complète ; & non fans cela, cette opération ne peut plus être regardée comme un moyen feulement propre à développer ce fel, mais bien comme capable de l'engendrer. Il eft prouvé que d’ailleurs il en eft de même à l'égard des plantes, puifque le nitre qu'elles donnent par une décompolition fpontanée & radicale , eft en bien plus grande quantité que celle qui y préexiftoir. Enfin , puifque le fel marim & le nitre, ranc à bafes alka- lines qu'à bales terreufes, dont l’aflociation eft conftante dans les nitrières , & qui réfulrent de la décompoñtion générale des végétaux & des animaux, furpañlent de beaucoup les proportions de ces mêmes fels & des autres matières falines quelconques que peuvent contenir ces deux ordres de corps dans leur état d'intégrité ; il s'enfuit évidemment que la pu- ucfaétion, confidéréc dans fon univerfalité, fait autre chofe que dégager & tranfmuer ces différentes fubftances falines ; il s'enfuit qu'elle en produit certainement de nouvelles, ou du moins qu'elle favorife leur produétion, mais avec de cer- taines conditions. Ces conféquences feront encore appuyées de ce que nous allons dire touchant la dernière clafle de fyftèmes, fur l’origine & la formation de l'acide nitreux ; fyf- têmes dans lefquels on fuppofe , ou que certe fubftance faline eft formée & généralement répandue dans Patmofphère, ou que celui-ci eft le réceptacle narurel de fes matériaux. H eft bien fingulier que chaque fete de CHimiftes air adopté un acide particulier: pour en fare Pacide primitif, uni- verlel, l'acide pretendu émané de Parmofphère, & de là ré- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SarrÜTRÉé Go part fur les trois règnes: de la Nature ,' mais avec des mo: difications différentes, I eft plus-finguliér encore que toutes ces .hypothèfes n'aient été fondées que fur de fimples données, fur des faies rrès-équivoques, fufceptibles de fe prêtét à toutes fortes d'explications , auffi gratuites les ‘unes que les ”autres. La première idée & laplus viafemblable que fuggère cette confufion de doctrines arbitraires fur-la génération des acides, ceft que leur germe commun, leur élément eflentiel exifte dans latmofphère , & que chacun d'eux, pour paroîtte fous fa forme propre & caraétériftique, n'a befoin que de trouver une matrice capable de l'abforber ‘ou de favoriter ‘fa "combi naïifon avec d'autres élémens. PE Ce ‘premier apperçu, déjà conforme aux découvertes mo- dernes fur les différentes modifications de l'air combiné avec d'autres principes ; notamment avec le principe du feu dans fes divers états, eft encore fuggéré par les réfulrats de quel- ques expériences fur la décompoñition des acides. FP éR d'ail leurs bien juftifié par la contemplation de ce qui fe pailé en grand dans le laboratoire de la Nature. En eflér, ne voit-on pas que chaque acide à fon domaine patticuliet, {6n rece L tacle propre? L'acide vimiolique fe forme ‘dans! les” entrailles de la terre; l'acide nitreux à fa furface; l'acide marin dans les grandes mafles d’eau ftagnante , remplie d'animaux & de plantes, dans le fein des mers & de certains lacs ; l'acide mi- crocofmique enfin, avec toutes fes variétés encore peu connues , sengendre dans les êtres organifés vivans, & fur-rout dans les animaux, où 1l prend plus manifeftement le caraétère d'acide phofphorique. EE Cependant il'ñe faut pas croire que ces limites refpeétives des doimaines ou des laboratoires naturels des divers acides, foient intranférefhbles ; ‘& que les loix qui régiflent ces coim- biñaïfons gencrales foient fans reftrition. On ne peut contefter la'génération des fels'vitrioliqués & des féls marins dans les plantes en général, aufli bién, mais beaucoup moindre , que celle di'Salpètie. On verra anfli par la fuite, qu'avec toutes les conditions en apparence favorables à la production: 70 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: de ce dernier fel , il ne s'engendre, dans certaines portions de terre, dans certaines conftitutions d'air ou d'humidité , que des fels vitrioliques ou des fels marins; mais ces produits, en quelque forte fecondaires , ne tiennent & ne dérogent point aux opérations majeures de la Nature , telles que nous venons de les indiquer. D'ailleurs il ne faut pas les confondre avec les effets, pour ainfi dire , accidentels de la confufion que pro- duic néceflairement la relation intime de tous les êtres, tant dans leur deftruétion que dans leur reproduétion. On fait que les évolutions communes & les bouleverfemens extraordinaires du globe, tranfportent conftamment dans un règne ce qui appartient à l’autre. C'eft par un évènement de cette forte uil peut fe rencontrer dans l'atmofphère quelques veftiges de acides ci-deflus mentionnés ; mais tout concoutt à prouver que ce n'eft pas là qu'ils fe forment, ou fi l'on peut fuppofer qu'il sy en forme réellement, ce ne fera que dans des air- conftances particulières , & par des caufes locales & fortuites ; ou bien il faudra convenir qu'ils fe décompofent à mefure. Aucun de ces acides ne mérite donc le titre d’acide atmof- phorique proprement dir. On a, dans ces derniers temps, regardé comme telles d’autres fubftances qui fonc bien d’un autre ordre de ténuitc. L'air fixe, ou acide de l'air, celui du feu (acidum pingue) , la matière éleétrique , celle de la lumière, celle de la foudre, &c. ont été, par différentes fetes de Chimiftes, adoptés pour l'acide aérien par excellence. Chacun à fa manière & pour l'honneur de fon opinion, leur a déjà fait jouer un grand rôle dans l'explication de beaucoup de phénomènes. Mais toute cette doctrine chimico-phyfique , vée ritablement tranfcendante & deftinée à devenir un jour la bafe d'un grand fyftème fur la Nature, peut à peine aujourd'hui fervir de flambeau pour chercher à en pénétrer les fecrets. On a bien le droit de préfumer que les fubftances peu définies, défignées par ces dénominations différentes, quoique peut- être analogues entre elles quant à leur mixtion , entrent pour quelque chofe & fous divers états, dans la combinaïfon des acides & de beaucoup d’autres corps naturels; mais on cft MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. 71. encore bien loin de pouvoir en fournir des preuves pofi… tives; & jufqu'à ce jour la Chimie, quoique riche en faits; n'a pu que conjeéturer fur la formation des fels en général, Ainfi, fans vouloir trop curieufément fcruter le mécanifme de ces combinaifons univerfelles, voyons ce que l'expérience. peut plus particulièrement nous apprendre fur là formation & les principes conftitutifs du nitre. PREMIER ARGUMENT. On fait que cette fubftance faline ne fe trouve nulle part auffi abondamment que. dans les lieux, où des matières vé- gétales & animales putréfaétives, & fur-tout les parties excré- menteufes de celles-ci, font convenablement mélangées avec des terres légères , maigres, poreufes, très-perméables, par- ticulièrement de nature calcaire ; que lorfqu'un tel mélange, abrité du folel & de la pluie , eff entretenu dans une certaine humidité & avec une chaleur médiocre; que ces matériaux , foit par leur difpofition , leur arrangement , foit par un fréquent remuage font, le plus quil eft poflible, mis en contaét avec un air renouvelé, mais retenu dans un cer- tain état de ftagnation ; enfin, que lorfque par une putré- faétion modérée , les matières qui en font fufceptibles, font parvenues à leur dernier terme de décompofition & que les matières terreufes reftent complètement imprégnées de leurs débris. Tel eft le fommaire des conditions: fondamentales les plus favorables à la produétion du nitre : mais que le pañfe-t-il dans cette opération ? D'abord il n'eft point de Chimifte qui ne fache apprécier influence de la chaleur & de l'humidité. Ce font les deux principaux inftrumens de la putréfaction & des combinaifons nouvelles qui doivent en réfulter. Quant à la préfence d’une maüère terreufe calcaire, elle concourt encore au méme but. Son interpofition fert non feulementc à retenir la putridité dans de certaines bornes, circonftance très-eflentielle; mais en outre elle fait fontion db bent à l'égard des acides qui fe for- ment ; ou des élémens de cette formation, D'ailleurs, d’après 72 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. une théorie aflez vraifemblable, déjà foutenue de quelques faits, cetre terre paroït devenir un des principes conftitutifs des’ älkalis qui fe produifent en même temps ou fucceflive- ment , & dont la génération ne diffère peut-être pas , au- nt qu'on pourrot le croire, de celle des acides, comme on le vétra craprès. Refte donc à examiner comment & en quoi les matières animales ou végétales, comment l'air atmofphorique coopè- rent à Ja génération de ces acides & de ces alkalis. Nous avons déjà dit ci-deffus ce qu'éprouvent les premières, en tant que fihncs, en‘avançant ; d’après des faits, qu'elles fubifent des décompofitions & quelques tranfmutations définies. Que léur arrive-til , confidérées feulement comme muqueules, extractives ; putrefcibles ? 1 ï SECOND ÀARGUMENT. On + rematqué qu'étant renférmées dans des vaifleaux par- faitement clos, leur putréfaétion ne marchoiït que très-lente- ment; & qui sen exhaloï, indépendamment de l'alkali volaril & ‘d'un principe fetide, une certaine quantité d’air fixe, d'at inflafimable, & d’air analogue à celui de l'atmofphère. Les deux premières fubftances font manifeftement engendrées dans cette opération'; les trois autres ne font vraifemblablement que dégagées, mais plus ou moins altérées par leur urion, fingu- lièrement avec le principe inflammable, La décompofition de ces mêmes fubftances opérée par le moyen du feu, fournit à peu près les mêmes produits. Dans l'un & dans l'autre cas, l'alkaf vôlatil paroiît être le réfulrat d’une métamorphofe qu’é- prouve le priñcipe falin-acide, élément eflentiel de toute mixtion huïleufe & muqueufe. Le phlosiftique & l'arr, fouvent combinés, & par conféquent déguifés , font les autres matériaux com- muns de ces fubftances. L'alkali volatil lumême , ultérieu- rement décompolé , fe réfout encore en ces' principes. les Chimiltes ne vont pas plus loin dans leurs procedes analy- tiques , & ils font réduites, pour éntendre la variété des corps qu'ils ont analyfes , à cette convention, de fuppofer dans leurs cprpufcules MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 73 corpufcules élémentaires, des différences de mixtion & de quantité. La vérité de cette fuppofition eft démontrée à p teriori par une infinité d'exemples, & normément dans le cas dont ileft iciqueftion, favoir, pour la formatiôn de l'acide nitreux, EL eft prouvé par les expériences dont ilnous refte à rendre compte, que ces principes dégagés des fubftances végétales & animales par la violence du feu , ne font pas aptes à former l'acide nitreux, & qu'il faut au contraire pour cela que le déga- gement foit opéré par la putréfaétion. En£n il doit être généralement reçu que la putréfaétion feule ne fuffic pas pour donner naiflance à l'acide nitreux , & que le concours de l'air atmofphérique eft encore néceflaire ; que celui-ci à fon tour ne peut rien fans être en contaét avec des matières putref- -cibles , ou avec quelque chofe qui en tienne lieu. La préfence de Vair artmofphérique & la putréfation font donc les deux grands agens de la génération de l'acide nitreux. Nous venons de voir ce que peut y fournir la dernière; fachons à préfent quel eft le contingent de l'air. TROISIÈME ARCGUMENT. On ne peut lui contefter d’être le plus puiflant moteur de la putréfaétion , & le plus puiflant menftrue des matières qui s'en exhalent. Ces matières font , comme nous l'avons dejà dic, de l'air méphitique fixe, de l'air inflammable , & de l'air refpirable , lorfqu'on a féparé ce dernier des autres par le lavage. Ajoutez à cela l’alkali volatil, qui cependant ne s'y trouve pas toujours, & qui, comme tel, ne contribue point à la génération de l'acide nitreux. D'un autre côté , les meï- leures analyfes de l'air atmofphérique nous apprennent qu'il cft lui-même compofé, indépendamment de la matière du feu & de la lumière dont il eft toujours pénétré, d'une certaine quantité d'air fixe, d'air phlogiftiqué & d'air refpirable où déphlogiftiqué (V. Mzm. Acan. de M. Lavoifer.). Le point capital du problème eft donc de déterminer parmi ces diflérentes mauères fubuiles, tant de l'air que des corps orga- K 74 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. niques , celles qui entrent dans la compofirion de l'acide nitreux. L'expérience étoit le feul moyen pour y parvenir, & il falloit néceflairement procéder par voie de co:parafon & d'exciufion. SOMMAIRE DES EXPÉRIENCES (*). Jai tenu féparément dans des appareils appropriés, avec des marieres abforbantes très-diverles, dont je fais ci-après lénumération, air atmofphérique & les difiérentes efpèces d'airs dégenérés, appelesfaétices. Jai, dans d’autres appareils, réuni enfuite en des proportions varices, les uns avec les au- es, ces difftrens fluides , pris dans latmofphère & dans les divers fujets des trois règnes. J'ai trouvé d’un côté, que l'air atmofphérique le plus pur ,bien lavé, & l'air déphlogiftique le plus parfait; que l'air fixe, l'air phlo- giftique & l'air inflammable retirés des fubftances minérales par difillation ou par efférvefcence ; que ces mêmes efpèces d'air extraites des matières végérales ou animales , foit par le moyen du feu, foit par la fermentation; que l'air éminemment inflammable des marais ou des eaux croupiflantes ; enfin que l'air atmofphéri- que, & l'air déphlogiftiqué réduits à l'état dégenéré d’air fixe, d'air phlogiftiqué ; ou d’air inflammable par quelque procédé pAlo- gifhcant; que tous ces airs, dis-je, ou feuls ou conibinés entre eux de diverfes manières, & gardés depuis un mois juf- qu'à un an, fur les fubftances abforbantes , n’ont donne au- cun réfultat d'acide nitreux ni d’alkali..…... Il y en a eu d'une autre nature, mais dont je ne dois pas m'occuper ici. Ce premier produit acide m'a été , au contraire , fourni par un grand nombre d'expériences, dans lefquelles j'ai rafflemblé les émanations putrefcentes, ou l'air méphitique compolé provenant des matières animales & végétales. Il a été plus fenfible encore , en faifant entrer dans ces procédés chimiques, certaines quan- tités d’air atmofphérique & d’air déphlogiftiqué, ou, ce qui (*) Les détails renvoyés aux Supplémens ci-après, pour être mieux comparés à d’autres expériences en grand, auxquelles celles-ci ont fervi de rype & de preuves, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 75 revient au même, en prenant ces airs refpirables après les avoir laiflc s'imprégner d’air putride. Enfin, de quelque ma- nière qu'on sy prenne pour concentrer dans des vaifleaux convenables , ou l'air feul qui fe dégage des corps en putré- faction , ou l'air atmofphérique chargé par degrés de ces émana- tions’, ou bien un mélange des deux fait après coup , onobtient, en les gardant quelque temps fur certaines matières capables de les abforber , & non fur toutes les matières abforbantes indiftinétement , du véritable acide nitreux , qu'il eft facile de dégager par les moyens connus. On obtient aufli de l'acide marin , également combiné avec les terres ; & quelquefois de lalkali fixe fervant de bafe à ces deux fels. La connoiflance de ces différentes matières abforbantes ; relativement à la découverte de ces produits nouveaux , étant très-importante, & leur préparation diverfe pouvant concourir à dévoiler le mécanifme de ces produétions , je vais en don- ner le détail. Celles que j'ai employées dans un grand nombre d'expériences, font : 1.9 La terre calcaire, la terre fédlitienne ( ou la vraie ma: gnéfie) & la terre alumineufe ; toutes crois bien pures & bien lavées. 2.9 Ces mêmes terres foumifes à un feu de calcination complette ; ce qui les change, comme on fait, beaucoup , notamment la première. 3.° Les deux alkalis fixes, végétal & minéral, cauftiques & non cauftiques ; les premiers rendus tels , foit avec la chaux vive, foit avec la magnéfe calcinée. 4.% Ces mêmes alkalis, chargés par les différens pro- cédés connus, du principe teignant , qui les à fait appeler alkalis phlogiftiqués. s.° Les divers foies de foufre, alkalins & terreux, ordi- naires. 6.9 La terre animale calculeufe & oflcufe; la première retirée par fimple lavage des pierres urinaires , la feconde pat la calcination. 7 Enfin différens fels neutres, vitrioliques, marins, acc- K ji 76 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: teux, tartareux & phofphoriques , à bafes alkalines , terreufes & métalliques. Les épreuves de ce dernier ordre , toutes relatives à la con- verfbilité des autres fels en Salpètre, ne m'ayant donné au- cun produit fatisfaifant , je les pañle fous filence; ayant au fur- plus précédemment conclu de R & d'autres épreuves bien lus décifives encore fur ce fait chimique, pour Fimmutabi- lité de toutes ces fubftances falines. Je ne dirai rien non plus ici des expériences, qui, ten- tées avec les autres matières vraiment abforbantes à l'égard des différens fluides aérés, & dans la vûe de connoître l'aptitude refpective de ceux-ci & de celles-là, pour fervir à la forma- tion nouvelle & immédiate de l’acide nitreux, ne m'ont fourni que des réfultats, autres que ce dernier fel. Je. me borne donc à indiquer à préfent dans le nombre des 20 ou 2$ cfpèces de matrices abforbantes, dont je me fuis fervi,, celles qu'il fe fonc véritablement montrées propres à la. nitrification; ayant d’ailleurs défigné ci-deflus les différentes, efpèces d'air convenables à cette opération. Toutes ces matières probatoires , bien pures, ont été dé- layées ou difloutes avec de l'eau diftillée , & foigneufement défendues dé cout mélange étranger , autre que celui des émanations gazeufes ou aérées. Elles ont été, chacune dans, leur vafe, quelquefois raflemblées dans les expériences en grand ; d'autres fois divifées 4 par 4 ou 6 par 6 dans les expériences en petir, pour recevoir la même ou les mêmes efpèces d'air. La véritable craie ou la terre calcaire pure eft celle qui m'a le plus conftamment réufli pour la formation de l'acide. nitreux. Elle m'en a donné dans plus de so épreuves dif- férentes, foit en fubitituant de la nouvelle terre à chaque fois, foit en faifant plufieurs fois fervir la même, après l'avoir, bien lavée. Cela fait voir pourquoi dans les fols crayeux purs où ceux mêlés de beaucoup de craie, le nitre s’y trouve bien. plus abondamment que dans les autres terreins. Il fe forme eh plein air, mais bien plus encore dans les lieux couverts & Mémoires sUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 77 habités ; cela fe fait avec des conditions que nous explique- rons ci-après. La chaux vive ne m'a fourni de l'acide nitreux que dans quelques expériences, quoiqu'elle ait été foumife à un auffi grand nombre que la verre calcaire; encore la première n'en a-t-elle donné que de très-foibles indices à chaque fois. N’au- roit-elle pas befoin , pour redevenir également apte à la nitri- fication , ou de récupérer ce qu'elle a perdu, ou, fuivant un autre fyftême, de perdre ce qu'elle a acquisdans la calcination ? Mais redevient - elle jamais parfaitement calcaire par fa fimple expoñition à l'air & fans repañler , ou dans un nouveau {y£ éme d'êtres organiques, ou dans de nouvelles combinaifons chimiques ? Enfin, la chaux repourvue , autant qu'il eft pof- fible , de l'air fixe ou des autres émanations aériformes reful- tant de la putréfation, eft-elle la même chofe que la craie, au moins quant à fon aptitude à la nitification; ou bien fe tient-elle toujours plus rapprochée de cet état de terre que quelques Chimiftes appellent terre abforbante proprement dite ? La terre fédlirienne & la terre alumineufe m'ont encore donné plus rarement que les précédentes de l'acide nitreux , par leur expofition aux ga7 méphitiques fimples ou compofés. Ce produit encore à été momdre avec ces deux terres cal- cinces , qu'avec les mêmes non calcinées, comme cela m'eft arrivé pour la chaux comparée à la craie. Les épreuves de ce genre dans lefquelles j'ai le plus recueilli de fel nitreux, ont cté celles où 11 seft établi, par l'effet du méphirifme, une forte de moififlure dans le fem des matrices abforbantes. au point de les rendre vertes. Cette efpèce de végétation, née de la putréfaétion , eft devenue alors , ainfi que cette dernière, une caufe génératrice de l'acide nitreux. Mais une chofe digne de remarque dans la comparaïfon des trois efpèces de nitre terreux provenant de nos expé- riences , C'eft que ceux qui ont pour bafe les trois terres non: calcinées ,. éprouvent fur les charbons ardens une! demi-défla- . gration, où plutôt une forte de fcintillarion plus ou moins. 78. MéMoïiRes SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. marquée ; laquelle n’a pas lieu avec ceux à bafes terreufes cal: cinées. Alors, pour reconnoître la préfence de l'acide nitreux , il. faut ou le dégager par l'acide vitriolique , ou précipiter la rerre par l'alkali AE Mais à quoi tient donc de la part de ces fels nireux, cette circonftance de fufer ou de ne pas fufer fur les charbons ? Nous avons remarqué fur cela bien des variations , qui paroiflent dépendre d'autre chofe que de la cal- cination ou de l'intégrité antérieures des tCrres. Seroïent-elles plus près de l'état alkalin, avant cette opération, qu'après l'avoir fubie? 11 y en a de la clañle, très-écendue , des calcaires, qui ne manquent jamais de préfener , avec l'acide nitreux, ce phénomène de légère dcflagration (indépendamment de route alkalicité que fan pourroit : foupçonner dans les charbons allumés), & d’autres qui ne le préfentent jamais. La terre dite abforbante des animaux, eft aufli dans ce dernier cas, lorf- qu'elle eft exempte de tout mélange d’alkalis. Cette terre animale extraite , foit du dépôt des urines ou des calculs urinaires, foit des os , & préparée comme il a été dit ci - deflus, n’a donné , après une longue expofition à l'air méphitique de la putréfaétion , aucun veftige d'acide nitreux. Cependant j'ai fait d’autres expériences, dans lefquelles, après avoir broyé & mis en poudre des os frais & des calculs, long-temps fourmis à Fébulition , pour en extraire toutes fubf- cances faline & muqueufe, j'ai obtenu du nitre terreux, & même du nitre alkalin , lorfqu'au bout de deux à trois ans, la putrcfaction à l'air libre & avec le fecours de l'eau, a eu totalement décompofe le refte de la matière animale, tou- jours adhérente à ces concrétions. Cela prouve donc que la terre des animaux eft , à la longue, propre à fervir à la géné- ration non feulement de l'acide , mais même de lalkali du Salpêtre. Îl paroïîc qu'il enceft de même, à ces deux égards, des autres efpèces de-terres abforbantes dont il vient d’être queftion. Jai trouvé , dans plufieurs de mes expériences, quelques portions de nitre à bale alkalinc, notamment dans celles à la serre calcaire pure, gardée tres-long-cemps dans le fein des émana- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 79 tions méphitiques fortes, avec quelque accès de l’air extérieur, fous de grandes cloches de verre. Je ne fuis pas auffi für des réful- tats alkalins des expériences faites avec les deux autres terres, la fédlitienne &Yalumineufe , attendu que ces dernières ayant été précipitées de leurs fels neutres refpedifs , au moyen de lalkah fixe , on pourroit les foupçonner encore d’être imprégnées de quelques reftes de ce fel, quoiqu'elles euffent été partaitement édulcorées auparavant par de grands lavages. Cependant ce qui devroit raflurer à cet égard , c'eft que d’autres portions de ces mêmes terres, après avoir été foumifes à de pareilles expériences, n'ont donné que du nitre à bafe terreufe , & point du tout à bafe d’alkaïi, fi ce n'eft quelquefois à bafe d’alkal volatil, provenant fans doute , tout forme , des matières en putréfaétion. Si l’alkalifarion de ces quatre efpèces de terres a réellement lieu dans nos procédés , & à plus forte raifon dans les grandes opérauons naturelles , avec de fimples différences du plus au moins à l'égard de cette propricté, ce feroit une preuve de plus en faveur de leur homogénité eflentielle & primordiale, déjà plus que preflentie par des Chimiftes du premier ordre. Leurs différences caraétcriftiques ne tiendroïienc plus alors qu’à des combinaïfons diverfes, faliniformes, qui, fans fortir de la clafle des terres, fuivant le langage chimique vulgaire, ni fans cefler d'être telles ou telles, en paflant dans de nouvelles com- binaifons vraimenvfalines , reprefenteroient la férie inmenfe des compolés terreux falins ou falins terreux. Dans cette férie, je placeroïs la terre animale la première , & là terre alumineufe la dernière , confiderant celle-là Comme la terre la plus faline, & celle-ci comme le fel le plus terreux. Les terres calcaire & fed- litienne, fous ces mémes rapports de falinité terreufe, OCCUpe- roient les places intermédiaires; en forte que, d’après cette manière de voir, & en fuppofant chacune de ces terres com- binées ( fans que toutefois la combinaïfon première & caracté- riftique de tel ou tel état terreux füt détruite ) avec chacun des acides connus ; depuis celui de air jufqu'à celui du phofphore ou du foufre , foit dans les opérations de la Nature, foit dans 8o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: les procédes de l'Art, on pourroit concevoir plus facilement innombrab'e varicté des corps de cet ordre. Ce qu'il y à decertain , c'eft que, quoique les quatre efpèces de terres delisnées femblent fufcepribles de fe prêter à la géne- ration des deux parties conftituantes du Salpètie, cependant la terre animale paroît plus propre à la formation de l'alkali, & la terre calcaire pure à celle de l'acide. Peut-être cela vient-il de ce que celle-là contient plus d’acide phofphorique, & celle-ci plus d'acide gazeux. Les deux autres qui en différent, fur-rour à ces deux égards , ont vraifemblablement befoin de fe rapprocher de la condition des deux premières , avanc de fervir aux mêmes ufages; & dès-lors qu’elles font une fois entrées dans l'une ou l'autre de ces combinaifons , il paroît qu'elles font identifiées : au moins ne retire-t-on du nitre décompofc fans intermède & par la feuie aétion du feu , qu'une terre homogène , sélatineufe dans la plupart de fes combinaifons, & qui n’a plus les caraëteres entiers propres à chacune des quatre autres. Une autre remarque à faire fur ce point, pour éclairer de plus en plus la théorie, véritablement tranfcendante, dela nitrifi- cation , c'eft que la calcination, loin de difpofer les différentes efpèces de terre à l'alkalifation , comme on pourroit le croire d'après une opinion aflez répandue, femble au contraire les éloigner de certe difpofition. Cela revient à ce que nous avons dic : qu’elle paroît les rendre aufli moins propres à la formation de l'acide nitreux. L’aétion du feu leur enleveroir elle , à ces deux égards, ce qu’elles doivent récupérer de la part des émanations putrides; ou bien fe formeroit-il, dans le prernier cas, quelque nouvelle combinaifon contraire à l'ouvrage de la nicrification ? Quoi qu'ilen foit, cet ouvrage fe commence & s'achève durant la décompofition fpontance, putréfaëtive, des fubftances animales & végétales, & fon double produit réfulte (comme dans la végétation) de tous les matériaux défunis de ces fubftances, lefquels fe recombinent de nouveau entre eux, & avec des matrices terreufes appropriées. On obferve de grandes diffé- rences dans la produétion du nitre, & quant à l'aptitude des matières végétales ou animales, & quant à la promptitude ou \ a MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 81 à la quantité des produits. Il paroît certain que toujours l'acide nitreux fe forme le premier, en fe combinant à mefure avec une bafe terreufe, & que ce n'eft qu'au dernier terme de la décompofition putréfiive que s’engendre l’alkali deftiné enfuite à précipiter le nitre terreux. De même quil y a dans toute putréfaétion une première époque d’acefcence & une autre d’alkalefcence ; de même auffi, dans la decompofition radicale des fubftances putrefcibles, il y a une époque pour la formation de l'acide nitreux, & une pour celle de fa bafe alkaline. D’après cela, sil m'étoit éncore per- mis de conjeéturer fur cette opération de Chimie occulte, je penferois, en fuppofant, felon cette acception très-chimique , qu'il entre efféntiellement un principe acide dans la confuru- tion des alkalis, & en partant des faits nombreux qui conf- ratent que, dans la décompofition analytique & totale des corps organiques, foit par l'action du feu, foit par celle du mouvement inteftin, ce font toujours les matières acrées qui dominent dans les premiers débris, & les matières ignées ou inflammables dans les derniers; je penferois, dis-je, que dans la nitrification réfultant de la putréfaétion , l'acide conftitutif du nitre eft forme d’une furabondance d'air, & l'acide confticutif de lalkali, d’une furabondance de feu ...... acide aere, acide igné , acide gazeux , acide pingue : efpèces d'acides fubuils, congénérés , dont l'exiftence eft indiquée par bien des phéno- mènes, confirmée par bien des fpéculations très-rationnelles, & dont la démonftration concilieroit nombre de fchifmes en Chimie. L’acide nitreux n’eft pas le feul acide qui réfulte de la décom- polition des corps organiques. fl s'y engendre aufli de l'acide marin. J'en ai crouve bien des fois dans mes expériences, mais cependant moins fouvent & moins abondamment que l'acide nicreux. Il feroit bien difficile de rendre raifon de cette diffé- rence, & de donner l'œthiologie de ces deux acides. Cela eft analogue à ce qui fe produit en grand dans les nitrières natu- relles & artificielles. Par-tout où il fe forme du Salpétre, on y uouye aufli du fel marin en des proportions bien différentes , L 82 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. felon les différens lieux; mais il n'eft pas vrai que par-tout où il fe forme du fel marin, il Sy engendre aufli du nitre. J'ai fou- vent recherché à quoi pouvoit tenir, dans mes expériences, l'origine de ces deux fels; favoir, fi c'étoit à la différence des matrices abforbantes terreufes , ou bien à celle des émanations aérées méphitiques. J'ai remarqué à l'égard de ces derniers, que , dans le cours d’une longue puréfaction des mêmes ma- üères ou de plufieurs mêlées dans les mêmes vafes, J'obtenois, en y expofant, pendant plus de trois ans, de cinq ou fix mois à autres, mes ablorbans, des produits à peu près femblables d'acide nitreux & d’acide marin. Cependant, quoique j'aye trouvé fouvent ces acides réunis dans chacune des matrices terreufes , & fur-tout dans la terre calcaire pure, j'ai vu plus particulièrement encore l'acide marin fe former dans la magnéfie fedlitienne & quelquefois dans la chaux calcaire. En- fin, dans chacune de ces trois cerres long-temps expofces à l'air putride , & notarhment fur la fin de la putréfaétion dans des vaif- {eaux où il n’entroit d’air atmofphérique que celui que j'y intro- duifois de temps en temps, j'ai aufi rencontré quelques veftiges d'acide vitriolique. Cela n'eft pas étonnant, puifque, dans cer- tains lieux où le mephitife eft très-abondant , foit qu'il réfulte de la corruption des matières animales, foit dé celle des vége- taux , il ne s’y forme prefque que des fels vitrioliques , cerreux, alkalins ou fulfureux. Voyez les latrines dans leur intérieur , les tourbières, les voieries , &c. Nous avons dit au furplus pour- quoi , dans les nitrières ordinaires , on ne rencontroit pas de fels vitioliques à bafe alkaline , quoique peut-être il sy en fafle aufli, outre celui qui y eft apporté tout fur. La circonftance de trouver prefque toujours, dans les épreuves dont je viens de rendre compte, de l'acide nitreux dans la terre calcaire, & aflez fouvent de l'acide marin dans la terre fedlitienne, m'avoit d’abord fait préfumer que dans les eaux mères des Salpêtriers il en étoit de même, c'eft -à dire, que des deux fels rerfeux qui s'y trouvent conftamment réu- nis, le nitreux étoit à bafe calcaire , & le marin à bafe de magnéfie {comme celui-ci eft prefque toujours dans les eaux MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 83 mères des falines) ; mais outre mes réfulrats ci-deflus, j'ai remar- qué, en travaillant en grand les eaux mères du Salpètre, que les proportions de l'acide marin , quoiqu’en général moindres que celles de l'acide nitreux, y étoient cependant beaucoup plus grandes que celles de la vraie magnéfie fedlitienne : d’où il réfulte qu'une grände partie de l'acide marin eft jointe à la bafe calcaire, & vraifemblablement une petite portion de l'a cide nitreux eft combinée avec la bafe fedlitienne , dont la quan- tité varie fouvent dans les eaux mères. Enfin, de ce que le partage ou l'emploi de ces deux bafes cerreufes dans la formation refpeétive des deux acides nitreux & marin, ne s'eft pas vérifié tout-à-fait d’après ma conjeéture ; & de ce que l'acide vitriolique lui-même { produit en appa- rence très-rare dans les procédés deftruéteurs des matières orga- niques tendant à la nitrification, mais très-commun au contraire dans les évènemens de la minéralifation } femble fe former & s'attacher indiftintement à toutes fortes de matrices terreufes : il s'enfuit que la génération diverfe des acides , tant à la fur- face qu'à l'intérieur du globe, tient bien moins à la nature de ces matrices, qu'a la diverfité de l'air & des airs méphitiques ; airs qui, combinés, mélangés, plus ou moins ignés, confti- tuent la partie eflencielle de toute falinité. Cela paroît fur-tout vrai pour les émanations méphitiques des corps pourriflans à la furface de la terie, puifqu'avec une feule matière abforbante, & dans le même foyer de putréfaétion , on peut, fuivant le temps & les circonftances, voir fe produire deux ou trois efpèces d'acides, & peut-être autant d’alkalis. Toutes les époques de la putréfaétion ne donnent pas éga- lement un air propre à la nitrification, & l'époque favorable n'eft pas la méme pour toutes les fubftances putrefcibles. I paroit que les matières animales, parenchimateufes valent mieux dans les commencemens , & les matières excrémenteufes, fur- cout l'urine , dans les derniers temps de la putréfaétion. Le fang eft de toutes celle qui fournit le plus abondamment & le plus long-temps. Ces différences ne tiennent-elles pas principale- ment à la quantité d'air inflammable ou d'air phlogiftiqué L ji) 84 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. que donnent ces matières , efpèces d'air qui, mifes en contaét. avec l'air atmofphérique, en précipitent une partie en air fixe? On fait qu'elles laïflent échapper en même temps de leur propre fubftance une plus ou moins grande quantité d'air fixe, à melure {quelles fe décompofent, & que dans ces emiflions il {e trouve aufli plus ou moins d'air, qui na befoin que d’étre un peu lavé pour devenir refpirable. JL paroic que le mouvement inteitin excité dans les matières animales & végétales, qui en font fufceptibles , fait dégager de leur texture plus d'air fixe que d'air inflammable ou phlo- giftiqué. Ceux-ci dominent au contraire dans la décompofi- tion de ces fubftances, opérée par le feu. En général, dans Jun & l'autre cas, les animaux fourniflent plus d'air inflam- mable que les végéraux, & ceux-ci plus d'air fixe que ceux- R. { paroît que le mélange des uns & des autres eft émi- nemment propre à une abondante produétion ou éruétation d'air. Au furplus , nous croyons que toutes ces fortes d'air ne différent entré elles ; que par la manière dont elles font affec- tées ou faturées par le principe inflammable qui s'échappe fans cefle avec l'air des corps pourriflans | & que toutes aufli, dans ce dernier cas (c'eft-à-dire, venant de putréfaétion & non de combuftion), font plus ou moins propres à concourir à la formation du nitre. Ce qui prouve qu’elles font eflentiellement les mêmes, ceft que par des procédés particuliers on peut les changer :les unes dans les autres , & les ramener toutes à la même efpèce d'air , en leur ajoutant ou enlevant du phlo- giftique. On fait faire la même chofe à l'égard de l'air atmof- phérique , & même de l'air déphlosiftique le plus pur. On les chañge à volonté ; en air fixe, phlogiftiqué , inflammable, au moyen de phlogiftications réitérées ; puis on les rappelle à Fétac d'air refpirable , en leur enlevant ce phlosiftique exce- dant, par des lavages fuffifans. Voilà du moins les affeétions apparentes &, très-vraifem- blablement réelles de l'air dans les pañläges alternatifs de fon état de-fixité où de combinaïifon ;: à ,célui de mañe agrce- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 8 gative , atmofphcrique. Ces changemens, ces modifications. diverfes ont conftamment lieu dans la Nature. C'eft à cela que tient la compenfation qui doit exifter entre l'air abforbé par les corps des trois règnes dans Jeur formation , & celui qui, dans leur deftruétion , eft\ reftitue à l atmofphère. D'ailleurs , les diflérentes caufes de la dégeneration de lai & celles de fon rétablifiement à la condition d’ar refpirable, réagiflent & fe contrebalancent fans cefle dans le vafte. tra- vail de la Nature, Enfin J'ai remarqué ailleurs, que. l'identité & la facilité des, altérations que fubiflent les différens, airs na- turels ou fa@tices, que leur permutabilitc FAPIOQUE prou- voient bien quil y a entre eux tous une anal ogie de com- poñition ou l'exiftence. d'un mixte commun. C'eft dans la recherche de ce mixte aérien primordial & fur fon efléence, que.les Chimiftes font tort embarrafles. Pref, que tous l'ont cru de nature acide, en.le fuppofant en outre faturé & rendu élaftique par. fa combinaifon.avec d’autres fub£ tances,. notamiment avec le principe inflammable. On a voulu aflimiler ce prétendu acide aérien à rous les. autres acides connus , & même à ceux que l'on ne connoïfloit pas. Sui- vant une des plus anciennes, & fuivant la plus récente de ces hyporhèles on a donnc la. préférence à l'acide nitreux, pour en faire élément de. l'air atmofphérique. Jai déjà dice que, je .penfois de ce fyfème ; & Je perfifte à croire que s'il exifte recllement dans l'atmofphère un acide primitif & uni: verfel , il,.n’eft encore reconnu-par aucune expérience InCOn- teftable, ou du moins que telle expérience n'a pas €c rendue pybli ique .jufqu'à jpréfent, Celles dont on.s'eft appuyé dans,.ces derniers temps ; pour prou ver que l'acide nitreux eft le principe conftitutif de l'air, prouvent bien plus que l'air eft au contraire un des maté riaux de l'acide nitreux. En effet, au lieu d’avoir changé celui- ci en air refpirable par fa combinaifon avec d’autres fubitances terreufes ou. inflammables ; il paroït qu'on l'a, radicalement décompofé & réduit à fes élémens, dont le plus abondanes et, apres fa défunion , de l'air femblable à celui de latmof- 86 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. phère. Cela eft d’ailleurs conforme aux réfulrats d'expériences dont j'ai rendu compte; car indépendamment de ce qu'on n'a pu encore, par aucun moyen direct, démontrer de l'acide nitreux ni dans l'air atmofphérique , ni dans l'air diverfement dégénéré que fourniflent les diflcrens corps dans leur décom- polition ; Comment concevoir que cet acide, sil préexiftoic réellement dans l’un & l’autre de ces airs, ne s’atracheroit pas également aux différentes matières abforbantes qui lui ont été préfentées dans mes expériences ? Pourquoi ne l’aurois-je ja- mais trouvé dans aucune de celles qui ont été difpofces avec les fubftances alkalines, pures , calcinées, rendues cauftiques , phlogiftiquées , ou autres que J'ai énoncées ci-deflus >? Pour- quoi n'ai-je apperçu dans tout cela que des indices d’une abondante abforption d’air diverfement méphitique, de la part des matrices alkalines, tandis que J'obtenois des indices d’a- cides différens dans les matrices terreufes placées tout à côté & dans les mêmes mafles d'air? Pourquoi faudroit-il enfin le concours de telle ou telle efpèce d'air, altéré par une fubftance inflammable particulière , pour qu'il en réfulrât une combinaifon nitreufe ? On eft donc en droit de conclure que les procédés dans lefquels on fait de l'air avec de l'acide nitreux font des press analytiques, & que ceux au contraire où l’on fait de l'acide nitreux avec de l'air, font des procédés fynthétiques. C'eft fur cette diftinétion que roule la principale difficulté dans la folution du problème académique, au moins quant à la parte théorique de ce problème. Car il eft bien cer- tain, d'après mes expériences & d'après l'obfervation de ce qui fe pañle en grand dans les nitrières naturelles & artif- cielles, que c'eft l'air comme tel, foit dégagc des corps putrefcibles , foit pris de la mañle atmofphérique ; mais tou- jours imprégné d’un principe ignc fpécifique, qui fert à la confettion de l'acide nitreux. Quoiqu'il ne puiñle refter aucun doute fur ce fait, ce- pendant, pour le mettre dans tout fon jour, pour en con- noître toutes les circonftances, enfin pour favoir plus par- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 87 A ticulièrement quelles font les efpèces d'air les plus propres à ha nitrification, j'ai cherché à confirmer les rélultats de mes expériences faites en petit, ou dans des appareils de vaifleaux fermés, par d’autres épreuves comparatives, difpofées dans des mafles d'air beaucoup plus confiderables & fenfiblement différentes les unes des autres. J'ai donc expofé mes fubftances abforbantes préparées : 1.9 À l'air acmofphérique des plaines cultivées, & à celui des lieux très-élevés, incultes & inhabités. 2.% A l'air des profondes excavations faites dans les mines ; à celui de fimples fofles fuperficielles pratiquées dans les terres végétales & recouvertes , ainfi que dans les terreins marécageux. 3.° À l'air des étables, des caves, des latrines, des ca- chots, des hôpitaux. 4.° Enfin à l'air des cuves en fermentation vineufe , & à celui des foyers fans cefle allumés avec du charbon. Dans toutes ces expériences, qui ont duré 7 à 8 mois (à chaque reprife), étant abritces du fo'eil, de la pluie & des filrations, j'ai obtenu des réfulrats fort différens. Je ne dois compte que de ceux qui font relatifs à la nitrification. Elle a été plus marquée dans l'air des plaines, à la furface de la terre, que fur les endroits élevés. Elie à fait encore plus de progrès dans les fofles de terres végétales ; mais elle -n'a été nulle part plus fenfible & plus abondante que dans les licux où l'air peu renouvelé, eft fans cefle imprégné d’exha- laïfons animales , & notamment dans les étables, les latrines, les cachots, &c. Par tout ailleurs je n’ai pas où prefque pas retire veftige de nitre, c'eft-à-dire, dans les excavations des mines, dans les fofles des marais, dans les caves très-pro- fondes, exemptes de toutes filtrations & émanations corrup- tives, dans les fouterrains des fortifications , & enfin dans l’at- mofphère des cuves à biere fermentante, & dans celui des foyers à charbon toujours brülans. J'ai répété plufieurs fois chacune de ces expériences dans 88 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. le cours des années 177$ (*}; 76, 77, 78 , en employant d'aflez' grandes quantités de tous mes abforbans pour chaque lieu indiqué & de confticurion d'air différente. Les produits relatifs en ont toujours été à peu près les mêmes , & d’ailleurs ‘aflez conformes aux produits correfpondans des expériences en petit précédemment rapportées » dans lefquelles chaque cfpèce d'air employé a été plus particulièrement fpécifiée. RÉFLEXIONS fur Les experiences précédentes, pour completer la théorie de la Nitrification. En comparant les qualités chimiques des différentes efpèces d’airs dégénérés ou méphitiques dont il a été queftion, ne pourroit-on pas les diftinguer en deux grandes clafles; rela- tivement à leur aptitude à former telles - ou telles combinai- fons falines , fuivant les différens règnes de la Nature & les départemens de latmofphère ? En exaininant ailleurs les qua- lités de ces airs, par rapport à leurs effets fur les êtres or- ganiques vivans , je les ai diffingués en airs méphitiques /iffo- cans, &En- airs méphitiques pourriffans. Ne pourroit-on pas admettre ici la même diftinétion ? On fait que les premiers éteignent très-rapidement le principe de la vie dans les ani- maux, & que les feconds en empoifonnent lentement les fources. 11 y en a de mixtes ou qui femblent pofléder ces deux fortes de qualités déléreres, fuivant leur intenfité ou degré de concentration, La différence de leur origine & l'analogie | appa- rente de leur compoftion chimique, étherée- -phlogifäique, cit une chofe très-remarquable. Mais ce qui left encore plus, pour la folution de notre problème, c’eft que parmi ces dife- rentes fortes d'airs méphitiques, il n’y en ait qu’une partie de propre à la géné ration du nitre. Javois déjà remarqué depuis long-temps, à l'égard des airs méphitiques pourriffans , qu'ils préfentoient quelques rap- ports de cocxiftance & vraïfemblablement de caufaïité com- (*) Première époque conftatée de'mes découvertes fur la compoñtion dés acides par les airs. (V. Gugetre de Sanré. & Mem. Acad, de Copenhague ). munc MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAaLPrÊTRE. 89 mune avec différens phénomènes appartenant à l’'animalité , À Ja végétation, & fur-tout relatifs à la produétion de certaines maladies des animaux & des végétaux. Je remarque aujour- d'hui plus particulièrement ces mêmes rapports avec la nitri- fication fpontance, puifqu'en effet le foyer principal & les grands agens de cette opération font les mêmes que ceux de la putrefcence; & que, d'un autre côté, fon produit ca- ractériftique (l'acide nitreux) eft, d’après les meilleures ana- lyfes, mamfeftement compofc d'aié & de phlogiftique , débris abondans de la deftruétion des fubftances végétales & animales, L'acmofphère étant lui-même le grand réceptacle de cous ces débris volatils des Corps organiques, ainfi que de toutes les émanations des fubftances minérales, peut être regardé (fous l'afpe&t de fournir les matériaux de laide uitreux & d’autres Corps falins) comme une forte de mofette, partie /uffocante 5; “partie pourriffante , indépendamment de fa portion d’air ref- pirable, vital & alimentaire. En eflet, on fait, d’après les épreu- ves les plus décives jufqu’à ce jour , que e atmofphérique, dans fon état le plus ordinaire, ne contient qu'environ un quart d'air déphlogiftique , propre à la refpiration & à la fub- fiftance des animaux. Le refte de cette mafle fluide, vapo- reufe, eft toujours plus ou moins, fuivant fes diffétentés ré- gions & révolutions, furchargé de matière infammable, & di- verfement altére par cet alliage inévitable. On , CONÇoit donc Aiféiuene , & il eft d’ailleurs bien dé- montré par nos expériences , que Pair atmofphérique a tout ce quil faut, aufli bien que l'air émané des corps putrefci- bles, pour fervir à la nitrification, pourvu qu il trouve dés matières capables d'en abforber les matériaux, & des cir- conftances propres à en favorifer la combinaifon. I eft également prouvé, ce me femble, par les mêmes expériences , que le concours de ces deux conditions eft ab- folument indifpenfable, & que l'acide nitreux, ainfi que l'acide marin , ne fe forment pas dans l’atmofphère , & par celle ou telle confitution d'air , indépendamment de la préfence de telles ou telles ie abforbantes. En effet, dans tous les M 90 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. cas cités de nos épreuves , les matrices alkalines n’ont jamais été faturées que d’acide gazeux ou aéré, plus ou moins chargé de principe inflammable ; au lieu que les vraies matrices terreufes l'ont été fouvent d'acides nitreux & marin, en plus ou moins grande quantité. Une autre preuve encore de cette aflertion, c'eft que ces deux acides volatils, lors même qu'ils font lancés dans l'atmofphère , n'y reftent pas en nature d'a- cides ; puifque dans un laboratoire où j'avois fouvent tenu en évaporation de l’un & l’autre acide, pendant trois ou quatre mois, ces abforbans alkalins & terreux , qui n’étoient places qua 12 ou 15 pieds du foyer de l'évaporation, tant fur le pavé qu'au plafond de cette pièce, ne s’en font pas trouvés fenfib'e- ment imprégnés. Il faut donc que ces acides difparoïflent dans l'air, foit en fe détruifant , comme tous les corps fubuils portés à une extrême divifion, foit en fe combinant de nouveau, ouavec la terre toujours exiftante & peut-être engendrée dans l’atmof= phère, ou bien avec la matière du feu, celle de la lumière, &c. &c. On ne peut cependant pas douter qu'il.ne fe forme de l'acide nitreux dans l'atmofphère, particulièrement dans les couches inférieures, qui font toujours plus chargées des éma- nations réfultant de la décompofition des corps de la furface de la terre, & dans lefquelles fe trouvent aufli plus abon- damment les matériaux inflammables & terreux, propres à la nitrification. Îl faut bien que l'atmofphère foit le réfervoir commun de tous ces débris aërés & phlogiftiques, pour qu'il lui foit reftitué fans cefle ce qu'il perd par toutes les combi- naïfons dans lefquelles entrent les élémens dont il eft formé. Ii faut bien aufhi qu'une de ces combinaïfons majeures foit celle de l'acide nitreux; puifqu'indépendamment de celui qui fe forme & fe fixe à toute la furface du globe, & dont les matériaux font apportés de l'air, il doit sen former une prodigieufe quantité dans le fein de Fair même. Tout prouve qu'il sy forme réellement, en s’attachant à mefure à la terre qui s'y trouve répandue, pour retomber enfuite avec la pluie, la neige & tous les météores aqueux, dans lefquels il fe rencontre aufli quelque peu de fel marin. Cela feul n'en faitil MÉMOIRES SUR LA FORMATION DÙ SALPÈTRE, 91 pas une quantité énorme & incalculable? Il faut en ajouter une autre, peut- être auf grande & aufli indéterminable: c'eft ce qui, de ces deux fels nitreux & marin terreux, en- gendrés dans l’atmofphère, fe décompofe à mefure, foit par les incendies fpontanés de cet océan vaporeux, foit par fes déluges , foit par fon agitation feule, ofcillatoire & ven- teufe ; car rien ne rélfte à cette incommenfurable force. À ces grandes caufes de deftruétion du nitre atmofphérique, ne pourrions-nous pas. ajouter ce qu'il en faut pour l'entretien des corps organiques vivans qui confomment une fi prodigieufe quantité d'air, les végétaux par leur inhalation, les animaux par ieur refpiration , &c. ? Nous avons dit que le nitre fe forme dans les premiers & fe détruit dans les autres. Nous ajoutons que ceux-ci, par leurs fimples émanations excré- menteules , leur tranfpiration , leur haleine , fourniflent des matériaux propres à la reproduction du nitre, tout comme par leur décompolition putréfaëive, après la mort. Peut-être en eft-il de même des végétaux, au premier comme au fecond égard. Je n'ai point fair d'expériences dans cette vûe. On connoïît celles, routes récentes & très-ingénieufes, qui conftatent que les végétaux vivans exhalent un air pur pendant le jour, & un air méphitique dans l'obfcurité. Quelques faits d'obfervations & quelques railon- nemens d’analogie fembleroient prouver que cette efpèce de mofette végétale, concentrée & retenue fur des matrices conve- nables , pourroit fervir à la nitrification. Peut-être, à cet égard de conftitution nitrifiante ou nitrifère , fert- elle conftamment d'engrais & d’alimenc à la végétation. Quoi qu'il en foic, il eft certain que le nitre fe forme pref que par-tout fur la terre, mais en quantites bien différentes. On connoît l'énorme produétion de ce fel, fans aucune pré- caution ni travail, dans l'inde , en Chine, & dans d'autres pays très-chauds. Ca ne vient certainement pas de la végéta- tion, ni de la décompofition des végétaux. Il faut en chercher la le dans la nature de l'air & du fol, dans la, grande quantité de matière inflammable dont lun & l'autre font im- prégnés; foit par la prompte & abondante deftruétion des êtres M ji 9z MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. organiques, foit encore par la formation habiuelle des mé- tores ignés, & peut-être aufli par le voifinage des volcans, ou d’autres feux fouterrains; en un mot ,; par tout ce qui peut entretenir dans les terres & dans l'air, un état de fermen- tation énergique & conftante. Ce n'eft donc point à raïfon du nitre préexiftant dans l'at- mofphère, quoiqu'il s'y en forme, comme on l'a dit, en très grande quantité , mais par la qualité fpécifique nitrifante de l'air que les terres s'imprègnent plus ou moins de ce fel. Dans nos climats tempéres , la nitrification fpontance des terreins. champétres eft en général très-peu confiderable , & cela varie encorc beaucoup fuivant l'efpèce de terre, d’expolrion & de conftitution d'air. J'ai examiné beaucoup de terres dans difié- rentes provinces de France; jai fait ces épreuves le plus com- munément dans les mois d'Avril & de Septembre, choïfiflant fur-tour les époques les plus éloignées des pluies un peu confi- dérables , & les terres cultivées qui étoient reftées le plus long- temps fans aucune plantation. Les terres très-fableufes ou très-argilleufes ne n'ont prefque: rien fourni. Les terres mélées de ces -deux-là & de terre cal caire, qui font les plus ordinaires , ne m'ont guère donné au delà d'une once ou une once & demie de réfidu falin par quintal. Les terres très-crayeufes, légères & fines, par exemple, celles de Champagne, fe font trouvées quelquefois un peu plus: riches. Celles des potagers bien foignés & de bon fol le font encore davantage. J'ai retiré jufqu'a quatre onces de matière faline par quintal de terre végétale prife dans le jardin: des Tuileries, au printemps ; après deux mois de chaleur & de {écherefle. C’eft à la vérité, de toutes les terres livrées à l'at- imofphère & fans abri, que j'ai examinées , celle qui s'eft mon- uce la plus chargée de ce fel naturel. Il y a peut-être la moitié des terres d'habitation que travaillent les Salpétriers du Royaume , & méme de celles cultivées dans des nitrières arti- ficielles , qui n’en fourniflent pas une plus grande proportion : mais il faut remarquer que la majeure partie de cette matière faline , dans tous les cas de terres abandonnées à l'air libre, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE 93 cft du nitre & du fel marin à bafes terreules , & qu'il s'y trouve très-peu de ces mêmes fels à bafes alkalines. Il en eft de même des cMorefcences falines que l'on voit fe former à la furface des bancs de craic ou de tufs calcaires qui font fimplement expofes à l'air atmofphérique. Pour peu qu'ils foient abrités du foleil & de la pluie, ils donnent encore, bien plus que toutes les terres champètres connues en France, des fels nicreux & marins, dont une partie eft toujours à bafe alkaline. Aufli ces mêmes fubftances calcaires, pures & tès-poreules, lerfqu'elles font en même temps abrirées & fécondées par des émanations, des filcrations ou des mélanges de matières putrefcibles , deviennent bien plus riches que toutes. les autres terres en fels nitreux ( ce qui eft en tout point con- forme à nos expériences). Elles méritent fans contredit la pré- férence , toutes les fois qu'on peut s'en procurer pour établir des nitrières artificielles ; mais on ne connoîït pas encore parmi nous de ces véritables matrices à Salpètre, qui , abandonnées. à elles-mêmes & fans culture, fourniflent aflez de ce fel pour dédommager amplement des frais d'exploitation , comme cela arrive dans les pays où cette récolte fe fair en plein air, & affez abondamment pour pouvoir en fournir au commerce exté- rieur , après avoir fourni à la confommation locale. Mais puilque cette reflource naturelle nous manque, ou du moins puifqu'elle eft crop bornée & top pauvre pour fournir aux befoins de l'Etat, comment l’art peutl y fuppléer? & puifque cet art, éclairé de toutes les lumières de la faine Chimie, ne peut pas, d'après nos principes & nos expériences , parvenir à ce but par des procédés extemporanés, ou très - courts & fimples , foit en convertiflant en Salpêtre d’autres fels plus communs, foit en compofant celui-là de toutes pièces & à volonté ; faut-il s'en tenir aux méthodes connues, longues & compliquées , dejà perfectionnées autrefois par une forte de rou- üne chimique; méthodes qui font depuis long-temps mifes en ufage ailleurs , &qui, de puis peu, font imitées & améliorées en France ? Enfin , fi lon adopte ces méthodes que nous croyons encore fufceptibles d'être perfectionnées , fimplifiées & com- 94 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. binces, doit-on les abandonner à l’économie rurale, à l'induftrie des particuliers, ou bien donner la préférence aux établiflemens minftériels? c'eft ce qui nous refte à examiner. D'EUX INE EME SEC SEIARIONN Pratique génerale de la Nitrification. Si on veut faire le tableau réfumé de tout ce que nous venons de dire, en rapprochant & comparant entre œux les réfultats de nos expériences & de nos obfervations accumulées, on verra, relativement aux matériaux & aux circonftances de la forma- tion du Salpêtre, que le principe conftitutif fondamental de ce fel eft l'air; foic celui qui émane des matières animales & végétales putrefcentes ; foit celui de latmofphère qui diffout & fe charge des miafmes engendrés dans la putréfaétion des matières organiques mortes, ou des exhalaïfons excrémen- teufes des animaux & peut-être des végétaux vivans. On verra que , dans l'un & l'autre cas, l'air eft imprégné d’une fubf- rance ignée particulière , ou d'un phlogiftique fpécifique , différent de celui qui réfulre de la combuftion des végé- taux & des animaux, de leur fermentation acide ou vineule , de l’altération ou de la décompofition des minéraux, &c. On verra enfin, que la génération de ce fel eft due à la réunion d'une certaine quantité de cet air & de ce feu particuliers, fixés & modifiés l'un par l'autre, & vraifemblablement aufli par l'intermède d'un peu d'eau, On remarquera fur-tout les faits qui autorifent à conclure que l'origine de ces matériaux aérés- phlogiftiques , doit être uniquement & exclufivement dcrivée des matières végétales & animales vivantes ou pour- riflantes, pour devenir propres à la combinaifon nitreufe ; foit que ces émanations mixtes sattachent & fe fixent à des ma- tières appropriées pour former les différentes efpèces de nitre; foit qu'elles rentrent & fe combinent de nouveau dans le fyf- tême végétal, trouvant d'ailleurs, dans lun & l'autre cas, de quoi à favorifer ou à compléter la mixtion faline en queftion. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 95 On verra, d'un autre côté, que les matières formatrices & les conditions eflentielles à la formation du nitre ne doivent fe rencontrer & ne fe rencontrent en eflet qu'à la fuperficie du globe ; qu'il ne peut pas exifter de mines ou d’amas fouterrains de ce fel, comme de plufieurs autres. On verra encore qu'à la furface même de la terre, & avec les conditions en apparence les plus propres à la nitrification , il fe forme quelquefois des fels d’une autre nature , analogues à ceux de nos expériences en petit: ce quitient, comme nous l'avons dit , ou à la nature fpéciale de l'air méphitique dégagé des corps, ou à la confti- tution particulière de l'atmofphère , notamment dans les lieux très-enfoncés ou très-couverts ; puifqu'en effet l’on voit des champs , des maifons ou des villages entiers, dans lefquels les terres & les murs ne donnent que des fels vitrioliques, & d’autres des fels marins. On verra enfin, qu'à part ces excep- tions, qui ne dérogent point à Ja loi générale, & dans tous les cas où, avec les circonftances indiquées , l'air extérieur & libre , ou bien l'air intérieur dégagé de certains corps défignés, trouvera à s'unir avec une matière inflammable, telle qu'elle eft fournie par la décompofition fpontanée des corps orga- niques , ou telle qu'elle exifte, notamment dans certains climats, fans être immédiatement extraite de ces corps regardés comme les magafins naturels de cette matière inflammable ; que , dans tous ces cas, dis-je , dont j'ai rapporte les plus notoires, la géné- ration du Salpètre aura néceflairement & inévitablement lieu. Cette conclufion, déduite auffi folidement qu'il eft poflible de le faire pour les objets de cet-ordre, de notre méthode fynthétique, eft encore confirmée par les produits de la décom- pofition analytique de la fubftance qui en fait le fujet. On eft parvenu, par des procédés très ingénieux, que leur publicité me difpenfe de rapporter, à réduire en air refpirable, en phlo- giftique & en eau, une quantité quelconque d’acide nicreux; fl refteroit encore à la vérité , pour avoir fur ce point théorique le dernier degré de conviction, à déterminer la nature fpeciale & le mode de la combinaifon de chacun de ces principes conf- titutifs ; mais le pouvoir de la Chimie ne s'étend pas jufque là : 96 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. & ce qui doit faire croire que ces principes font alcérés dans leur divulfion , c'eft qu'on ne peut refaire du nitre en les réu- niflant ; mais dans l’analyfe de quel corps peut-on fe flarcer d'obtenir ce complément de preuves ? C’eft bien aflez d’avoir, j'oferois prefque dire, démontré par des faits & par des raifons déduites de ces faits, tant à priorz qu'a poleriori , les matériaux eflentiels & les conditions majeures de la nitrification. Voyons maintenant par quelles méthodes économiques & promptes on peut régir cette opération en travaillant en grand. Je ne donnerai aujourd'hui que le fimple expofe de mes pro- cédés généraux , me réfervant de donner par la fuite , à titre de fupplément, à l'epoque accordce pour cela, les détails & les produits de ces procédes. Ce délai , en me permettant de orter à leur fin toutes mes épreuves , me mettra de plus en plus dans le cas de prononcer fur leur fuccès, Mon but principal à été de réunir, en faveur des méthodes auxquelles je donne la préférence, les avantages de routes les autres méthodes, & en général de mettre à profit ceux de l'ha- bitation & de la culture rendues fucceflives & alternatives. On connoît le produit moyen ou le plus genéral des terres fimple- ment & natuellement falpétrées dans les habitations domeftiques, & exploitées dans les différentes provinces du Royaume par les Salpêtriers. On fait aufli quels font les rapports de ces nitrières naturelles , comparées, quant à la récolte, avecles nitrières artifi- cielles, cultivées felon les différentes méthodes, & eftimces d’après leur produit commun ou le plus ordinaire, On fait enfin que l’art n'a prefque rien à faire dans le premier cas ; & qu'il fait prefque rout dans le fecond , avec plus ou moins de frais; & qu'ainff, pour qu'il y ait une compenfation dans le bénéfice provenant de ces deux manières de procurer du Salpêtre à l'Etat , il faut néceflairement, le prix de ce fel reftant le même dans l’un & l'autre cas, qu'il y ait une différence proportionnée ou dans leurs réfulrars refpcétifs ou dans les intervalles des récolres. Mais fi cette compenfation n’exifte pas ou n'exiffe que par des cir— conftances locales particulières, ou bien fi elle n’eft pas fufifance pour faire adopter univerfellement en France les nitrières artifi- cielles , MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 97 ciclles, telles qu'elles font pratiquées ailleurs, peut-on trouver des moyens plus économiques, plus faciles & plus à la portée de Finduftrie rurale ; moyens qui préfentant au peuple & aux particuliers l'appât d'un bénéfice certain , outre celui déjà très- puiflant de fe fouftraire à la gêne des fouilles, puiffent en même temps remplir les vües & les befoins du Gouvernement? Celui-ci, de {on côté , ne peur-il pas facilement & à peu de frais coopé- rer à l'emploi de ces moyens , en mettant à profit des reflources qu'il à fous la main, foit pour faire, foit pour aider à faire des établiflemens en ce genre ? Je me fuis appliqué à la recherche de ces moyens, & livré à l'exécution de ces établiffemens. J'ai eu pour objet de les com- parer à ceux qui font connus & déjà pratiqués en France, tant pour le compte du Roi, que pour celui de quelques Commu- nautés & des particuliers. Je renvoie au Supplément de ce Mc- moire, pour donner l'état comparatif des produits & des dépenfes des différens procédés que j'ai mis en ufage le premier , & de ceux que Je n'ai fait qu'imiter. Dans l’Inflruétion Françoife , publiée par ordre du Roi, en 1777, par MM. les Régifleurs Généraux des Poudres & Sal- pétres, pour établir dans le Royaume des nitrières artificielles, on a donné avec raïifon la préférence, fur toutes les autres méthodes, à celles des couches cultivées fous des hangars. Elle a cté adoptée prefque généralement dans tous les pays où l'on produit artificiellement le Salpétre. Chacun y faicà la vérité quel- ques changemens dans les mélanges , dans la difpofition, dans la manipulation , foit d’après des vües théoriques particulières , foit par économie & à caufe de la facilité de fe procurer les matériaux plusou moins propres à la confeétion de ces couches, ou de pratiquer telles ou telles conftru&tions pour les abriter. Mais cout cela revient à peu près au même quant au fond , & ne mérite pas d’étre ni difcuté ni apprécié d’une maniere bien rigoureufe, Il faut en cela fe diriger d’après fes moyens, d’après les circonftances locales, la différence de température ou de climats , &c. foit pour faire des établiflemens ee & en petit, foit pour des entreprifes en grand. N 98 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Le choix des matières les plus convenables dans les trois règnes n'étant pas toujours à beaucoup près praticable , on doit fe lervir de celles que lon peut fe procurer à moins de frais, & qui exigent le moins de préparations préliminaires ; ; Cat c'eft fur-tout dans ces deux points que confifle l'économie : épargner la main d'œuvre , & la’dépenfe de l’approvifionne- ment des matières. Cependant, comme c'eft principalement dans la bonne culture & les bons matériaux que confifte la bonté du produit, c’eft à la fagefle de l'Entrepreneur à éviter ces deux extrêmes de trop d’economie & de trop de recherche; il exifte des modèles d’établiffemens dans l'un & dans l'autre genre. La réferve dans la conftruétion des nitrières & dans lameublement des Laboratoires, eft aufli de la plus grande importance. Il faut, autant qu'il eft poflible , chercher à faire un double emploi des dépenfes que lon eft oblige de faire ; car toutes les fois que l’on fera de l’établiflement des nitrières un objet de fpéculation, conçues en grand & exccutées en urand ; dès qu'il faudra tout faire & tout avoir à prix d'argent, il eft à craindre que de pareils entreprifes n’échouent, faute d’une bonne adminiftration. En un mot, nousofons le dire d'après notre pro- pre pratique , l’état de Salpétrier , quelque extenfion & induftrie que lon veuille donner à cet Art, ne fera jamais qu'un métier de Gagne-petir, qui doit refter tel pour être profitable; metier dont le but invariable doit être de tirer parti de tout, de recueillir tout ce qui peut être perdu ou inutile pour l'engrais des terres, la nourriture du bétail & les autres befoins d'économie do- meftique. On doit enfin mettre la plus grande épargne jufque dans les plus petits détails. Les nitrières Suédoifes & toutes celles dont on a publié les détails, les dépenfes , les produits, peuvent bien fervir de modèle à tout ce qu'on voudra, je ne dis pas feule- ment pratiquer, mais même inventer en ce genre. Ces éta- bliflemens ont au furplus l'avantage d’être praticables prefque par-tout , vu la très-grande diverhité des matières, prifes des trois règnes, que l'on faic entrer dans leur compoñtion, & que l'on peut varier fuivant les cas. Ceux dont on a donné PF. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 99 le plan dans l’/nffruclion Françoife , étant encore fimplifiés & dirigés d’après de meilleures vües chimiques & économiques, fuffifent pour établir fur ce point une règle générale, dont les applications diverfes & appropriées aux circonftances , feront faciles à faire , toutes les fois que l’on aura des raifons de préférer cette forme de nitrières à celles que j'ai à propofer. Ainfi il feroit inutile de s’arrêcer plus long-temps fur ces objets, & ce na pas dû être non plus autant le but de ce concours de réformer les méthodes connues , que celui d'en découvrir de nouvelles qui foient préferables. Cela paroît d'autant plus vrai, que par tout où l’on a adopté comme meilleure la méthode des couches, on a été aflez généralement d'accord fur les points capitaux du gouverne- ment de ces nitrières, fur le choix des lieux & des ma- üères , fur leur difpofñition & leur préparation, fur les divers articles de leur culture ; enfin fur les termes de leur exploita- tion. Or, cette conformité prefque générale eft plus qu'une préfomption en faveur de la bonté de cette méthode, & des préceptes fur lefquels elle eft établie. Les fuccès en ont d'ail- leurs perpétué & étendu l'adoption dans les dificrens Etats politiques. Aidés de ces préceptes, encouragés par ces fuccès , nous avons cherché à conferver dans la pratique les avantages de cette méthode , en lui en fubftituant une autre, ou plu- tôt nous avons adopté une méthode mixte, qui confifte à falpêtrer les terres par l'habitation & la culture réunies. On verra par la fuite fi nous avons bien rempli notre plan & par de bons moyens. Simplicite & économie dans les pro- cédés; abondance & célérité dans les produits ; facilité & convenance dans l'application de ce genre d'induftrie à l'éco- nomie rurale, Telles ont été nos vües en propofant cette nou- velle pratique. Quoique toute efpèce de bétail puifle convenir à cette forme d’établiffement, nous donnons cependant la préférence aux moutons , par des raifons qu'il eft facile de preflentir. On peut employer à cela de deux manières les troupeaux. La N iï r00o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. première, en faifant habiter fous des hangars publics les trou- eaux publics ; foit pour le temps du pranfiage feulement, perdant la belle faïfon; foic pour certe partie du jour & pour la nuit, dans les provinces où les troupeaux reftent toujours aux champs pendant l'ére. La deuxième manière feroit pour les troupeaux particuliers, & conlifteroit à pratiquer des ber- geries domeftiques pour l'habitation annuelle & alternative, comme il fera expliqué ci-après. Nous pouvons d'avance aflu- rer que de ces deux manières les troupeaux feroient beau- coup mieux, & pour leur fanté & pour la profperité de leur laine; chofe fort importante dans l'économie rurale. Mais l'habitation deftinée à la fécondation des terres, & la culture de ces dernières pour l'œuvre de la nirification, ne pouvant fe faire en même temps & fur le même fol , 1l fau- droit pratiquer, tant pour les hangars publics, que pour les bergeries particulières, deux efpaces fous le même toit, & même mois, s'il étoit poflible. Nous réglerons par la fuite les époques &-les méthodes d'habitation & de culture fuccef fives, ainfi que les manipulations que les terres peuvent exiger dans l'un & l'autre cas. Cela doit être difpoft de manière à procurer des récoltes dans la révolution d’une, de deux ou de trois années , fuivant la diftribution & lufage des bà- timens, fuivant l'aptitude des terres à être fécondées & fal- pétrées ; car il peut y avoir fur cela des différences notables. Quoique la forme & l'étendue de ces conftruétions , tant publiques que particulières, puifle varier beaucoup, foit pour s'adapter à l'emplacement & fe conformer au befoin, foit pour profiter des conftruétions déjà faites, cependant, pour prc- fenter fur cela une règle générale, d’après laquelle on puifle fe diriger , nous avons adopté les dimenfions & les divifions fuivantes. Nous donnons aux bâtimens de bergeries doubles , fous le même toit, cent pieds de long & foïxante pieds de large; \ environ dix pieds d'élévation à l'égout du toit, & trente pieds au faîce ( dimenfions qui permettent d’accumuler dans ! le bas là quantité de terre fufñfante, & de loger dans le MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. IO1r baut des fourrages & des pailles pour les befoins , fur-tour dans les bergeries particulières & habituelles), Nous les divi- fons, fuivant leur longueur , en deux parties égales , par un mur enterre, à la Prufienne, d'environ trois pieds d’épaif feur & quatre à cinq pieds de hauteur. Il ne faut qu'une feule porte cochère qui communique aux deux côtés, & on doit être crès-réfervé fur les jours, dont le nombre cepen- dant doit varier fuivant les circonftances. Aux bâtimens de bergeries triples, fous le même toit, lef- quels feroient encore préférables aux précédentes , comme nous le ferons voir , nous confeillons de donner un tiers de plus en longueur, c'eft-à-dire, cent cinquante pieds; toutes les autres dimenfions reftant comme ci-deflus : mais il y auroit cette différence, que les divifions, pareillement faites par deux murs de terre, feroient dirigées fuivant la largeur & dans toute la profondeur , à la diftance de cinquante pieds lune de lautre. On pourroit encore ne faire qu'une feule porte cochère dans le milieu du flanc de ce bâtiment, en laiflanc fubfifter de là des pañlages de communication pour les deux parties latérales; mais il vaudroit mieux faire trois portes, afin de ne pas perdre de terrein dans l'intérieur. Une différence eflentielle qu'il y auroit à mettre entre les ber- geries publiques & les particulières , feroit , pour diminuer d’au- tant la dépenfe des premières, uniquement deftinées au pran- fiage des troupeaux , de ne pas les fermer de murs; mais de prolonger & d’abaifler fur tous les cotés la toiture , à peu près comme font les halles de certainestuileries. Alors il fuffiroit d'y pratiquer, dans le pourtour à l'intérieur , de petits murs en terre, qui ferviroient d'autant à la nitrification; ou bien des foflés en dehors, tant pour clore que pour l'écou- lement des eaux, & auffi pour fervir de fofles à putré- faétion en les abritant. Au refte, il y auroit encore fur tout cela beaucoup de détails de conftruétion , d’arrangement & d'économie, dans lefquels nous n'entrerons pas, attendu qu'ils font faciles à prévoir & à adapter aux poficions dific- rentes; par exemple , pour ce qui concerne la toiture , qui eft 102 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: un article confidérable de ces conftruétions, & qu'il faut, lorfqu'on en a des moyens, préférer de faire en chaume, comme je l'ai fait dans mes établiflemens. Outre qu'elle eft moins chère & plus durable, elle à encore l'avantage de maintenir dans l'intérieur des bâtimens une température plus égale, aufli favorable pour l'habitation que pour la nitrifica- non. D'après les dimenfions que nous avons indiquées, il y auroit dans chaque efpace feparé des bergeries doubles ou triples , trois mille pieds de furface. On pourroit y loger facilement quatre à cinq cents moutons ; mais deux ou trois cents fufhroient pour la fecondation des terres ; & c’eft-là le nombre le plus ordinaire des troupeaux publics ou particuliers dans la plupart des prov inces. On pourroit aufli placer dans chaque efpace, fept à huit mille pieds cubes de terre, non compris les murs de féparation, ni ceux de clôture. Cela feroit au moins deux pieds & demi d’épaifleur en terre dans toute la furface , laquelle feroit fucceflivement ajoutée & fc- condée pendant le temps de l'habitation. Cette terre enfuite müife en culture, feroit reprife à fond & divifée en couche de quatre à cinq pieds de large à la bafe , fur deux pieds & demi ou trois pieds d’elévation endos-d'âne Il: y auroit, d'après ce pat- tage, place pour cinq couches de cent pieds de long dans chaque moitié des bergeries doubles féparées longitudinale- ment, avec un petit fentier intermédiaire d’une lconchet à l'autre; & pour dix couches de so pieds chacune, dans les bergcries triples partagées , comme nous l'avons dit, fuivant leur largeur. I! refteroit en outre environ un pied de terre dans toute Hi furface fur laquelle feroient établies les couches. On laifleroit là ce lit inférieur , tant pour recevoir l'excédent des arrofages, que pour ne pas trop groffir les couches en y mettant la totalité de cette terre. Bien entendu que l'on au- toit préliminairement approprié le fond de la nirière , sil étoit néceflaire |, & enleve les mauvaifes terres, sil s'en trou- voit fur le fol. Bien entendu aufli que l'approvifionnement de ces berge- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 103 4 ries, en terre, fe feroit d’après un bon choix, lequel a été fufifamment indiqué dans les Ouvrages qui ont traité de cette matière. ( V. l’{nffruclion Françoife deja citée). On donne- roit la préférence encore aux terres dejà meubles & falpé. crées des habitations dans les villages où l'on feroit ces éta- bliffemens, comme on y eft autorifé par PAdminiftration. Au furplus, comme il n’en faudroit pas une très-grande quan- tité dans chaque bergerie , on pourroit facilement l'améliorer ar des mélanges de toutes les matières capables d'opérer dans les fols trop compaëts, trop glaifeux, l'ameubliflement, la perméabilité, la defficabilite, & les autres qualités favo- rables à la nitrification. Les craies feules tendroient lieu de toute autre matière, fi l'on étoit à portée de s'en procurer , & conviendroient également aux terres trop fableufes. Mais au défaut de craie ,on feferviroit des pierres à chaux , poreufes, tendres, friables, feule mentà demi-calcinces & broyées. On fubftitueroit encore à celles- ci des plätras & des mortiers de démolitions, des vicilles chaux, des fonds de fours à chaux, de la chaux des tan- neries ; de route efpèce de cendres, même de celles des tour- bes & des houilles; des os calcinés ou putréfiés , des dépôts d'urines , &c. Toutes ces fubftances terreufes, calcaires, ab- forbantes , feroient tenues quelque temps avec des matières pourriflantes dans des fofles ou fous des tas de fumiers, &c. Elles feroient enfuite expofces à l'air , avant d'être employées dans les couches. D'un autre côté , les rerreaux, les boues de rues, les fonds de marais, ou mieux encore, des marres d'eau croupiflante employées à rouir le chanvre; efpèce de "terreau nacurel, très-gras, & qui fouvent auroit befoin, pour devenir plus meuble & plus propre à la nitrification , d’être long-remps expofe à la gelée & au foleil, abrité de la pluie. Joïignez à cela la clafle très-écendue des marières végétales & antmales , dont les plus menues & les plus putrefcibles font toujours préférables ; le ran forti des ranneries , la fciure des bois , les copeaux même, la poudre des bois pourris, tous Jes marcs de fruits broyés, les menues pailles, les pailles ha- ro+4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, chées , ainfi que les tiges de navette, de féves, de fougères, &c. routes les plantes agreftes, inutiles, notamment les plus nitreufes & les plus molles; ayant l'attention de les faire fouler par le betail , & de les meure quelque temps en tas ou dans des fofles avec un peu de terre, avant de les mêler aux cou- ches : enfin, tous les excrémens d’animaux , long-temps di- gérés dans l'eau ( deftince aux arrofages), & leur marc féché à l'air; le fang à moitié pourri, mêlé avec de la chaux, en- fuice defléché & mis en poudre. Toutes ces matières, dis-je, moitié ameubliffantes , moitié fécondantes, rempliroient à merveille le but de la prépara- üon, de la fécondation des terres, & feroient employées ; les unes lors de l'habitation, les autres lors de la culture de ces mêmes terres, miles en couches. Ajoutez à cela, pour cette dernière époque , deux articles très-eflentiels; 1.2 des arrofages-fréquens & peu copieux à la fois, avec toute forte de liqueurs putrefcibles, &, ce qui vaut encore mieux, déjà en pleine putréfattion. Donnez la préférence fur — tout aux urines & aux infufions d'excrémens folides des animaux her- bivores , ainfi qu'à l'eau employée de temps en temps au lavage des pavés & des murs des étables , pour enlever le Salpètre qui sy forme : le cout reçu & confervé dans des marres ou des réfervoirs pratiqués exprès pour ces arrofages. 2.° Le remuage des verres en culture , aufli très-fréquemment répété, & plus ou moins à fond, avec des outils faits ex- près pour cela. Ayez l'attention d’ailleurs de placer dans le milieu des petites couches, fuivant toute leur longueur & profondeur , une cloifon d'environ un pouce d’épais de paille droite , pofée verticalement, pour favorifer encore la péné= tration des arrofages & de l'air. Quant à la première époque de la fécondation des terres par l'habitation des troupeaux, il y auroit, pour la rendre à peu près cgale dans la totalité de ces terres, différentes ma- nières de sy prendre; foit en rechargeant d'un lit de terre neuve, à mefure que la fecondation feroit jugée fuffifante dans le lit de deflous foit en faifant l'inverfe, c’eft-à-dire, en dl MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 10$ en enlevant chaque lit feconde de la mafñle de terre même, difpofée d'avance & tout à la fois fur le fol de la bergerie. Il feroit bon de féparer ces lits de terre , dans lune & l'autre méthode, par un peu de paille ou de fougère. On parta- geroit en deux ou trois époques le rechargement ou lenlève- ment de la totalité des terres indiquée ci- deflus, qui feroit d'environ deux pieds & demi. Chaque époque feroit de deux, trois ou quatre mois, fuivant l’épaifleur des couches & leur facilité à fe pénétrer des filtrations excrémenteufes. Les terres déjà fécondées que l'on enlèveroit, ou les terres neuves que l’on deftineroit à la fécondation, feroient dépolces, en atten- dant, le long des murs ou aux extrémités de la portion des bergeries habitées, sil y avoit aflez de place, ou bien on les mettroit dans la partie non habitée. Mais il faudroit , autant qu'il feroit poflible , pour épargner la main-d'œuvre, ne pas changer les terres de côté ; & dès-lors que l'habitation, la culture & la lixiviation de ces terres feroient une fois ré- glées pour fe fuccéder à des époques fixes, il ne pourroit plus y avoir d’embarras ni de confufion à ces égards. Il en feroit de même pour l'enlèvement du fumier de ces berge- ries , à chaque fois qu'on replaceroit ou qu'on Gteroit les lits de terre. On pourroït même fe règler pour cela fur les temps de l'année où l’on eft dans l’ufage de fumer les terres, afin d'éviter l'inconvénient très-commun dans les campagnes, de laifler long-temps les fumiers livrés aux intempéries avant de les employer ; ce qui les détériore confidérablement. Enfin fur toutes ces chojes de dérails concernant la fécondation des terres à Salpêtre, un peu d'induftrie & de routine rurales fuffroient. Il n’en faudroit pas plus pour le gouvernement de ces terres pendant leur culture, confiftant fpécialement en arrofages , remuages, & mélanges énoncés ci-deflus. CONCLUSION: Tel eft le précis des inftruétions les plus générales que nous avions à donner fur l’établiflement des nitrieres- bergeries , dont nous propofons d'adopter la méthode ; inf O 106 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. truéions que nous avons fuivies nous-néines, en tous points , dans des bergeries particulières que nous avons fait conftruire. Nous en donnerons les produits en Salpêtre d’après des cflais répétés, au bout de chaque année. Nous ne fommes encore qu'a la feconde de nos établiflemens, & ce ne fera qu'au fecond terme de ce concours que nous pourrons déterminer à peu près les époques fucceflives & alternatives d'habitation, de culture & d'exploitation; époques qui au furplus doivent néceflairement varier, comme nous l'avons déjà dit. Mais en attendant, on ne peut difconvenir que cette méthode ne réunifle tous les avantages les plus défirables, les plus claire ment déduits de nos connoïffances théoriques nouvelles fur la nitrification , & en même temps les plus fufcepables de s'adapter à la vie & à l'économie champêtres. Elle a fur- tout, fi on la compare avec la méthode uftée des grandes couches entaflées fous des hangars , les avantages fuivans : 1.° De n’exiger prefque ni main-d'œuvre ni matières pour la fécondation des terres pendant l'habitation, & par conféquent de ne rien enlever à l’agriculture. Il en réfulceroit au contraire, comme il eft facile de l’entendre, & pour les. particuliers & pour les Communautés , de feroient de ces éta- bliflémens, une plus grande quantité de fumier, nullement _ deftiné à la préparation des terres à Salpètre, mais totalement réfervé pour l'engrais des terres champètres. 2.9 De n’employer à la feconde époque de fécondation & de préparation, pendant la culture, que des matières en quelque foite perdues ou inutiles, & que l'on peut facile- ment fe procurer par-tout, En outre, le travail que deman- deroient la formation des couches , leur arrofage, leur re- muage , la préparation & le mélange des matières accefloires , ne feroit pas fort confiderable, puifqu'un feul homme fuffit pour gouverner un établiffement de bergerie double & même tiple, excepté le temps du leflivage des terres & de leur remplacement. 3.” Le plus grand de tous les avanrages de certe méthode, cft de pratiquer en même temps & fous le même toit , l'habi- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 107 tation & la culture. D'un côté, on imprègne les terres de toutes les filtrations & émanations excrémenteufes des trou- peaux; de l’autre , on établit fur des couches minces, ayant beaucoup de furface, & d’ailleurs fréquemment arrofées, re- tournées ou divifces, un atmofphère chaud, humide , capa- ble de favorifer par-là, & par fon état de demi-ftagnation indiquée ci-deflus , la putréfaétion infenfible & la décom- pofition radicale de toutes les matières organiques; un atmof- phère enfin portant par-tout le germe de la nitrification , paï fa condition habituelle d’air méphitique refpiré, exhalé, putréfié (car tel a ét l’objet principal de nos expériences & le point capital de notre chéorie ) : or, il eft bien certain que le concours de toutes ces caufes doit rendre la géné- ration du Salpèce & plus prompte & plus abondante , que fous les fimples hangars & dans les fimples étables. À tous ces avantages on pourroit encore en ajouter tm autre non moins évident, quant à l'épargne qui en rélulte- roit : ce feroit d'aflocier à l'état de Salpétrier celui de Sa- linier, pour chaque établiflement particulier ou communal. On fait que l'emploi du falin ou de la potañle, eft deve- nu, par les lumières de la Chimie, un objet très - eflentiel pour l'exploitation & l'augmentation. de la récolte du Sal- pêtre en France; mais il faut favoir aufi que le prix de ces denrées, depuis que lon en à fait l'application au tra- vail des eaux mères du nitre, tant à celui qui eft livré aux Salpétriers répandus dans le royaume, qu'à celui des eaux d’arelier , dans les raffineries, eft confidérablement augmenté ; que probablement il augmentera encore , indépendamment de ce que l'on eft obligé de tirer de l'Etranger pour fuffire aux befoins des autres Arts. Nous ferons voir par la fuite, & cela d'après notre propre experience, que fi chaque Entrepre- neur de nirière travailloit à fe procurer la quantité de falin néceflaire pour fa confommation , il ne lui reviendroit pas à moitié prix de ce qu'il coute dans le commerce; foit par le peu de peine & de dépenfe qu'il y auroit à recueillir toutes les: matières propres à fournir ce fel; foit par l’économie & le double em- O i 108 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ploi du feu & des uftenfiles de laboratoire , pour le préparer; foit enfin par la manière de l'employer fur place , dans l'exploitation des terres, & dans l'évaporation des eaux falpétrées. Il en réfulteroit encore le bénéfice d'améliorer les terres leflivées de la nitrière , par le mélange des cendres leflivées de la fali- nerie, pour les difpofer à une nouvelle régénération du Salpétre. Enfin, le dernier & le plus décifif des avantages de notre méthode mixte {ur toutes les autres, eft d’ofitir aux habitans des campagnes une branche d'induftrie à leur portée, ana- logue à leurs moyens , à leurs goûts , à leurs travaux , & qui d’ailleurs les délivre de leur aflerviflement aux fouilles. Cependant, malgrérout cela , onne doit pas s'attendre qu'elle foit facilement & promptement adoptée. En général , tout ce qui eft pour le peuple une pratique nouvelle, éprouve tou- jours des entraves & des lenteurs. Mais n'y auroit:il pas de 14 part de l'Adminiftration, des moyens à prendre pour en aflurer & en hâter le fuccès ? Il ne faudroit pas, à beaucoup près, employer pour cela les reflources de tout le royaume. Trois ou quatre provinces de l'intérieur , les plus riches en bois, en pâturages, en trou- peaux, fuffiroient pour fournir à l'Etat la quantité de Sal- pére dont il a befoin ; quantité de laquelle il faudroit d’abord déduire ce que lon récolte annuellement de ce fel fans le fecours des fouilles, tant dans les établiflemens miniftériels qui font déjà fort multipliés, que dans les ateliers privés ctablis dans le royaume , notamment dans les grandes villes: ce qui doit aller ou ira bientôt à plus d'un tiers de la con- fommation. Pour le furplus, trois ou quatre cents nitrières- bergeries , faites felon notre plan, feroient fuffifantes ; & je connois telle province, par exemple , la Lorraine , qui pour- roit fournir par an, près d’un million de Salpétre brut. On choifiroit , d’après le rapport des Commiflaires particuliers de la Régie generale , dans chaque département, les meilleurs villages , les plus à portée des raffineries & des moulins à poudres ; mais fur -tout ceux dont le fol & l’expofition font reconnus les plus favorables à la nitification, par MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 109 leur produit ordinaire , au moyen des fouilles. On adopte: roit pour chaque endroit défigné, l'établiffement d’une nitrière publique ou particulière , fuivant les circonftances & les facilités. On pourroit, finon obliger, du moins engager les Com- munautés , pour fe fouftraire aux fouilles, & pour leur béné- fice commun, à cette forte d'entreprife , que l’on mettroit en adjudication ou à l'enchère : entreprife dont les frais ne feroient prefque que ceux de la conftruétion , & dont le pro- duit feroit réverfble à chaque Communauté , fous la direc- tion des Officiers municipaux, ou appliquable à un fonds de charité , fous les aufpices des Curés. Pour diminuer encore la première dépenfe de ces établifliemens, tant publics que privés , on pourroit accorder les bois de conftruétion à pren- dre dans les bois communaux, ou, à défaut de ceux-ci, dans les bois domaniaux, pour les lieux où il s'en trouve. On pourroit aufli encourager les nitrières particulières par quelques exemptions ou gratifications. Enfin le Gouverne- ment, pour favorifer les entreprifes publiques , ne pourroit-il pas faire les premiers frais de conftruétion, fauf à les récu- pérer fur les premiers produits, pour en laifler enfuite l'ufu- fruit aux Communautés? La totalité de ces avances employées avec économie, & en profitant des parties de conftruétions déjà faites dans bien des endroits , ou les achetant à peu de frais, ne monteroit peut-être pas à plus de cent mille écus. Il me fuffic d’avoir indiqué des moyens très-praticables, dont l'application, en aflurant le fervice de l'État, & prévenant le befoin de recourir à l'Etranger , tourneroit rotalement à l’avan- tage & au profit du peuple , en le délivrant d’ailleurs d’une grande gêne. Tel a été le double but de l'Adminiftration, en propofant ce Concours : c’eft à elle encore à réalifer par les voies qui lui paroïtront les plus convenables, ce que nous lui propofons , après l'avoir exécuté nous-mêmes. PAST 110 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. PREMIER SUPPLÉMENT. Recapitulation du Mémoire précédent. Décembre 1781. On a, dans ce Mémoire, pañlé en revue , examine, dif- cuté les différens fyftêmes des Chimiftes , fur la nitrification. On a pus de chacun ce quil y a de vrai & d'utile, quant à l'objet propofé. On seft fpécialement attaché au fyftème des Chimiftes pneumatiques, anciens & modernes. On l'a pré- fenté fous un nouvel afpeét , plus vafte, plus lumineux , & fur-tout plus conforme aux faits d’obfervations générales, & aux réfulcats d'expériences particulières. Le but principal & véritablement chimique de ces dernières , a été de prouver: _ 1.9 Que tout air méphitique .émané de la putréfation des corps organiques, Morts Où ViVAns; que l'air atmofphérique méphiufe, plus ou moins alréré par le mélange ou la diflolu- tion de ces émanations putrides , font éminemment propres à la nitrification. 2,2 Que toute autre efpèce d'airs méphitiques, naturels où fadtices , phlogiftique , fixe, inflammable, pris dans l'atmof- hère ou dans les fujets des trois règnes, & rélultant de leur décompofition, par le feu, par l'aétion des diflolvans, où par une fermentation autre que la putréfaétive; que l'air atmof- phérique le, plus pur & l'air déphlogiftique le plus parfait , ne font, feuls, nullement propresà la-nitification; mais que les,aits méphitiques de cette feconde. clafle, dont on à indique les divers foyers, conviennent à la génération d’autres fels.étran- gers à l’objet de ce concours. D'un autre côté, on a défigné différentes matrices rerreufes abforbantes , fufceptbles de fe nitriñer par leur combinaïfon: avec les airs méphitiques de la première clafle, & on a in- dique les circonftances propres à favorifer ces combinaïfons. On a remarqué des différences confidérables dans les de- grés d'aptitude à la nitrification, & de la part des terres, & MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. TITI de la part des airs. On a fait voir qu'il n'y à aucune appa- rence de cette aptitude dans les fubftances alkalines quel= conques, calcinées , cauftiques , phlogiftiquées , fulfurées , ou autres, quoiqu'expoiées dans les mêmes foyers d’airs mé- phitiques. On a conclu de là & d’autres expériences , qu'il ne pouvoit y avoir aucun foupçon de préexiftence des maté- riaux immédiats du nitre, ni dans les airs, ni dans lés terres employés à fa confection fpontanée ; & qu'ainfi les pro- cédes dans lefquels on fait du nitre avec de l'air méphitique & de la terre , font réellement des procédés fynthétiques, {ui- vant le langage de l'Ecole ; tandis que ceux où on fait de Pair avec du nitre ou de l'acide nitreux , font des proccdés ana- lyriques. On à tire des réfultats de cette double voic d’analyfe, une preuve de plus en faveur de l'affertion principale » {ur laquelle porte tout le nouveau fyftème de la nitrification ; favoir, que l'air eft l'élément eflentiel & carattériftique de l'acide nitreux ; que par conféquent l'atmofphère eft, à cet égard , le récep- tacle naturel de la nitrification en grand ; mais que telle ou telle efpèce d'air méphitique , naturel ou faétice ; eft, exclu- fivement à toute autre, ou éminemment où médiocrement propre à la formation de ce fel; enfin, que le mécanifme de cette opération confifte en ce que l’aétion diflolvante & combinatoire de cet air fpécifique , conftitué tel par fa mix- tion avec le phlogiftique propre , réfultant de la putréfaétion ; foit dirigée , exercée fur telle ou celle efpèce de matrice ter- reufe AorbaHte Il paroît en outre, que ces dernières , dans les proccdés com- plets de la Hiiton > OU au moins que quelques-unes d’entre elles deviennent propres à l’aikalifation ; mais qu'il y a pour cela deux époques très-diftinétes, & que dans certe double gente, celle des alkalis par les émanations méphiti- ques , cft poftérieure à celle de l'acide ou des acides : ce qui porte à croire que tout nitre commence par être à bafe ter- reufe , & que la précipitation de celle-ci, pour qu'il en réfulre ou du vrai nitre, ou du nitre ammoniacal, ne fe fait que fuccef- 112 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fivement & à mefure que l'alkali fe forme ou fe développe de fon côté. On à comparé ces deux époques de la fermentation pu- tréfaétive & nitrifiante , quant à leurs produits refpedtifs, à celles d’autres fermentarions plus connues. On ajoute ici, pour exemple , que le tartre , dont une partie fe forme dans la vé- gctation, comme le nitre, eft aufli, comme ce dernier, à l'égard de la putréfattion , le produit de la fermentation vi- neufc. On a trouvé encore, entre ces deux fels, d’autres rap- ports , quant à leurs acides fpécifiques, l'un & l'autre éminem- ment aérés, & quant à leur bafe alkaline commune. Ainfi, pour indiquer les différentes fources de cette dernière dans les ni- trières, & faire entendre le complément de la nitrification à cet égard , on a conjeëturé qu'outre l'alkali fixe qui exifte tout forme, à nu ou prefque à nu dans les fubftances organi- ques des deux règnes; outre celui que l’on eft fonde à y ad- mettre aufli, mais très-enveloppe, déguife, faifanc principe conftiuant de tout corps huileux, muqueux , extractif, lequel ne fe développe que par la décompofition radicale de ces corps très-compolés ; on a conjeéturé , dis-je, que dans la utréfaction , ainfi que dans la combuftion de ces corps , il e forme encore de l’alkali fixe de toutes pièces , par un mé- canifme & des matériaux très -approchans de ceux qui con- courent à la formation des acides. Si, comme on le croit aflez généralement, la calcination rapprochoit les terres abforbantes de l'aptitude à salkalifer (ce qui n'eft pas du tout prouvé), il paroîtroit au contraire que cela les éloigneroit de la condition la plus favorable à la formation des acides, Cette alternative ne pourroit s'entendre que des deux manières énoncées dans le Mémoire, & d’après un point de théorie très- vraifemblable , qui, sil étoit mieux prouvé, concilicroit des fchifmes très-graves en Chimie , no- tamment les deux derniers fyftêmes concernant lation du feu & de l'air fur les terres calcinables, On a oppofe à ces deux fyftèmes, pour en tenter la conciliation la plus conforme aux faits, l'adoption de deux acides élémentaires, l'acide igne & MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 11 $ & lacide are; fubftances chimiques & naturelles du même ordre de ténuité & de diflolubilite. Ces deux acides fouvent combinés dans les mêmes corps, fouvent produits dans les mêmes opérations , paroïflent toujours auf diftinéts l'un de l'autre, par leurs propriétés , que le feu l'eft de l'air. En adop- tant cette même diftinétion , & pour mieux entendre le mécanifme ultérieur de la nitrification complette , on a auñli, d'après les meilleures induétions chimiques , admis entre les airs méphitiques d’une part , & les abforbans terreux de l'autre, une analogie de compolition , ou l'exiftence d’un mixte com- mun que chacun a voulu définir à fa manière; mixte dont le caraëtère principal, celui du moins qu'il importe le plus de fair ici, eft de fe prêter facilement & dans des circonftances peu différentes en apparence , à la formation diverfe des deux principes falins immédiats du Salpètre. Enfin on a conclu, relativement à la génération des fels acides & alkalis, dans la nicification, & même en général d’autres fels, que leur différence tient bien moins à la nature des matrices terreufes abforbantes , qu'à celle de l'air & des airs diflolvans ; qu'à l'ef- pèce des mofettes diverfes, animales & végétales; qu'à la difiérence des foyers, des récepracles de ces mofettes & des époques de la décompofition des corps defquels émanent ces airs méphitiques. Au furplus, on a dû remarquer dans tout le cours du Mé- moire , dont ceci eft le réfumé, que l'on à bien diftingué les fimples conjectures , les induétions purement rationnelles & inacceflibles à la methode expérimentale , d'avec les afler- tions les plus pofitives, toutes fubordonnées aux preuves de faits. On s'eft permis à la vérité d’entreméler cette dernière clafle de preuves avec celles qu'ont pu fournir le raifonne- ment, la comparaifon des moyens & des faits généraux ana- logues nbleira prochement des connoiflances homogènes asus On à cherché par cette reunion de preuves, par cette ex- tenfion de lumières, à rempli: le double but du Concours propofe ; celui d'établir une théorie folide de la génération du nitre , & celui de rendre cette théorie généralement & utilement 1% 114 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. appliquable aux méthodes pratiques de la nitrification. Les principes que lon a polés , les corollaires que l'on en a tirés, tendant à lun & l'autre but, ne font, en quelque forte, que l'expreflion des expériences & des obfervations accumulces. On avoit penfé quil fufroit de donner à l'Académie , à la première époque du Concours (Décembre 1780), le fom- maire de ces expériences fur la génération abfolue du Sal- pêtre, telle qu'elle a été annoncée dans le Mémoire ; enin- diquant d’une manière générale, mais précife, les vraies ma- tières formatrices, élémentaires , & les conditions eflentielles à la formation du nitre. On s’étoit réfervé de donner par la fuite, à titre de Supplément, à l’époque accordée pour cela, le complément des inftru&tions de détail, non feulement pour ce qui concerne la folution du point principal du problème chimique, d’après des expériences en petit ; mais encore pour ce qui regarde la partie économique , dans l'établiflement des nitières en grand, d'après les principes & les vües de la par- tie théorique. On avoit dès-lors en vüe, pour Ja feconde époque de ce travail, de mieux faire la comparaifon des procédés chimiques & économiques, & de leurs produits ref- pedtifs, pour éviter les erreurs de calcul qui fe commettent fouvent lorfqu'on veut conclure des uns aux autres. On efpé- roit que ce délai de plus d'une année, permettant de por- cer à leur fin toutes les épreuves, on feroit plus en état de prononcer fur leurs fuccès. On n'ignoroït pas à la vérité qu'une précifion extrême dans les expériences de ce genre, tant pour les circonftances de la manipulation , que pour les quantités des ingrédiens & des produits , étoit très-dificile à obtenir & même rigoureufement impraticable; mais un plus grand nom- bre de réfultats comparés devoit produire au moins des à- peu-près plus certains. Ce font ces nouveaux & plus nombreux réfultats , conformes aux dernières demandes de l'Académie (Journal de Paris, Avril 1781), & recueillis en Décembre de l même année, qui ont donné lieu à ce qui fui. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, f1$ NMOU ELLES. ELXBRERIE N CES relatives à la premiére partie du Mémaire. On a déjà avancé qu'on pouvoit réduire à trois claflestous les appafeils dont on seft fetvi pour les expériences fur la nitrification proprement dite. id 1.% Claffé. Appareils totalement découverts, & dans lef- quels les divers abforbans ont été expofés à l'abord libre‘de l'air atmofphérique , ou pur, ou altéré par des agens ratu- rels & habituels de corruption ; de manière à ce’que chaque cfpèce diftinéte d’air extérieur, pris dans différéntés par- ues de l'armofphère , fût féparément explorée par rapport à fon aptitude à fervir à la nitrification fpontanée. 2 Claffè. Appareils À demi - fermés | contenant! chaque cfpèce d'air intérieur , dégagé, tellement concentré dans le foyer même de fa génération, où de fon dégagement, que, malgré une certaine communication avec l'air atmofphérique, les matières abforbantes fufceptibles de fe nitrifier, ont été fans cefle environnées & imbibées de cet air factice. 3. Claffe. Vrais appareils pneumatiques totalement fer: més, dans lefquels les différentes fortes d’airs & dé matrices abforbantes ont été renfermcées & confervées fans aucuns mé- langes , ni fans aucune communication avec fair extérieur. Tous les procédés relatifs à la première claffe, n’ont befoin que d’être énoncés pour être entendus. Ils ont été fuffifam- ment expliqués dans le Mémoire, pour pouvoir être répétés & vérifiés. Ils fonc d’ailleurs, & quant à leur difpofition & quant aux produits, parfaitement conformes à ce qui fe pañle journellement & fpontanément fous les yeux de l'obfervater, par rapport à la génération du Salpètre & d'autres fels, dans les différens lieux, de conftitution d'air fenfiblement diffé- rente. Ces expériences, tentées fur-rout dans la vüe de con- noître plus particulièrement les efpèces d'air, faïfant parties diftinétes de l’atmofphère, les plus propres à la nitrification fpontance, ont aufli fervi à comparer , à confirmer d’autres expériences faites en petit & dans des appareils de vaiñeaux Pi 116 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fermés. Les réfulcats des premières ont été d’autant plus mar- qués, par rapport à ceux des autres, qu'elles ont éte dif. pofées dans des mafles plus confidérables d'air plus méphi- tique, & avec de plus grandes dofes de chacun des ab- forbans fufceptibles de fe nitrifier , dont j'ai donné J'énumc- ration & la préparation. Il fuffira d'en citer quelques exemples. Trois livres de craie bien pure & bien lave, mife en pou- dre grofhère , contenue dans des terrines de grès, ou de grandes cloches de verre, fimplement humeétce ou totale- ment recouverte d’eau pure, d'autrefois tenue à fec, roujours foigneufement abritée du foleil , de la pluie & des filtrations, ont été confervées pendant 7 à 8 mois, hors le temps des gelées, à l'air des différens lieux ci-après. 1. Les ctables, les latrines & les caves ont montré une nitrification plus prompte & plus abondante que par-tout ailleurs. En rapprochant tous les produits de ce genre que j'ai obtenus de 35 expériences exccutées dans la révolution de quatre années, le moindre a été de $o grains de réfidu lin, provenant de la lixiviation de cette terre, & le plus confidérable d’un gros & demi. Comme j'ai pris la précau- tion d'employer de l'eau diftillée pour les arrofages & les lefivages de ces eflais, on ne peut y foupçonner de fels étrangers. Dans celui que j'en ai retiré, il y a toujours eu quelques .veftiges de fel marin terreux; mais la plus grande partie toit du nitre aufi à bafe calcaire & quelquefois un peu à, bafe alkaline, comme je l'ai avancé & prouvé dans le Mémoire. 2.0 Les mêmes épreuves ont cté faites tant en plein air ; dans des expofitions très - différentes , que dans les habita- tions perfonnelles ; dans les hôpitaux ; dans des fofles fuper- ficielles pratiquées au milieu des couches de terre végétale & recouvertes ; dans les voiries; fous des tas de fumiers, &c. Par-rout il ya eu aufli des produits analogues aux précédens, plus ou moins abondans, fuivant le degré d’altération , fui- vant la ftagnation ou la circulation de Fair. Dans cette longue fuire d'expériences avec la terre cal- caire & dans d’autres du même genre, faites plus en grand, MÉMoIREs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 117 avec des terres mêlces, - & confervées en tas de 3 à 4 quintaux , dans les mêmes lieux , traitces de la même ma- nière, Jai fpécialement cherché à éclaircir un point trèsim- portant pour la théorie & pour la- pratique de la nitrifica- tion, Ce point relatif à l'influence & au gouvernement de l'air atmofphérique, ou tout-à-fait libre & ouvert, ou tout- à-faic ftagnant & concentré, n'a pas été jufqu'ici fuffifamment déterminé, ni par les Chimiftes, ni par les Salpêtriers. J'ai vu que ces deux conditions extrêmes de l'air ambiant étoient peu favorables à l'ouvrage de la nürification, & que l'état intermédiaire, çelui d’un renouvellement modéré, contri- buoit le plus au fuccès de cette opération; foit que l'air y agifle comme véhicule, comme intermède, ou comme agent de diflolution & de combinaifon; foit qu'il y fafle fonétion de principe conftituant & fubftantiel de falinité J'ai vu, par exemple, que trois livres de craie dans des terrines découvertes , ou trois quintaux de terre végctale étendue fur des aires garnis de planches ou de glaife, four- nifloient près de 3 à 4 fois plus de fel nitreux, que les mêmes quantités de terre gardées, ou dans des terrines couvertes de pareils vafes , de manière quil n'y reftät qu'une petite ou- verture pour le pañlage de l'air , ou dans des caifles de bois & des tonneaux qui génoient également l’abord de l'air, fans lin- cercepter totalement. Ces différens efais difpofes dans les mêmes lieux, dans des celliers , fous des hangars, dans des bergeries, éroient du refte , à l'article de l'air près , traités de la même manière. Ainfi on ne peut fufpeéter l'exactitude de leurs réfultats, quant à la nitrification. Ils ont été en général plus abondans , proportions gardées, dans les petits eflais avec la terre calcaire, que dans les mafñles plus confidérables avec les terres végétales ordinaires , quoique celles-ci aient été tou- jours choïfies dans la clafle des plus propres à fe falpêtrer. Mais pour que la comparaïfon de ces réfultats fût plus exaéte ; pour que la différence des quantités de terres employées, n’en ap- portât pas, comme telle, dans les produits, j'ai placé quel- ques petites couches, de 3 à 4 quintaux chacune, de craie 118 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. pure, mife en poudre groflière ou en petits morceaux , à côté de femblables couches de terre végétale mélangée. Toujours les premières fe font trouvées plus riches. Enfin, pour éviter une dernière fource d’erreur dans ces recherches, j'ai eu grand foin de lefliver à fondées différentes terres avant de les em- ployer; ou bien de tenir compte de leur état de falinité an- térieure , reconnue chaque fois par des eflais répétés. J'ai dit dans mon Mémoire, jufqu'à quel point elles étoient fufcep- tibles de fe nitrifier par la feule expofition à l'air libre. Il eft bien conftaté , d'après mes nouvelles épreuves, que la craie à, a cet égard, un grand avantage fur les autres terres, comme on la cru aflez généralement. - Je ne ferai que rappeler, en deux mots, ce que j'ai dit dans ce Mémoire, de la très-foible aptitude à la nitrification de la part des autres terres dires abforbantes & réputées pures. J'ai expofé aux mêmes foyers d'air atmofphérique, plus ou moins mephitifé, & j'ai traité de la même manière que dans les experiences ci-deflus, les terres fuivantes ; favoir , la chaux vive, éteinte à l'air & bien lavée; la cerre magnéfie & la terre alu- mineufe, précipitées de leurs fels neutres par la foude, & par- faitement édulcorées; enfin la terre animale provenant des os & des dépôts urinaires, l'une & l’autre dépouillées par une longue ébulition de toutes falinité & mucofité. Toutes ces terres, à la dofe de trois livres pour chaque épreuve, comme la terre calcaire , quoique toujours placces & traitées comme cette dernière , pendant le même efpace de temps, ne m'ont donné que de foibles indices de nitrification & dans quelques épreuves feulement. J'ai dit dans quelles circonf- tances ce fuccès avoit été plus marque. Je lai, depuis ce temps, obtenu dans prefque tous mes eflais nouveaux , avec la chaux éteinte, expofce dans les fofles végétales & dans les étables; avec la magnéfie cgalement placée dans ces dernières ; mais il m'a paru qu'il falloit à la terre alumineufe, pour fe nitifier d’une manière plus marquée, un air plus fortement méphitique , & plus de temps. J'ai conftamment reufli, en ex- polant cette terre dans des cloches de verre, au deflus de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 119 mes cuves d’arrofages putrides, deftinées à la culture des cou. ches fous des hangars & dans mes bergeries-nitrières. Cepen- dant je dois prévenir que, quoique toutes ces terres m'aient donné , dans quelques expériences , des produits de fels ni- creux , 1! n'en eft pas moins vrai, comme je l'ai dejà dir, qu'elles font bien moins propres que les terres calcaires à la ni- trification ; mais qu'enfin elles en font fufceptibles , & qu'il ya entre elles encore, à cet égard, des différences que j'ai indi- quées. Je n'ai jamais obtenu par livre de chacune de ces terres, au bout de 7 à 8 mois d'expérience , plus de 6 à 7 grains de fel nitreux prefque tout à bafe cerreufe, & quelquefois à bafe d’alkali volauil. Fy ai aufli toujours retrouvé , & notamment dans les épreuves avec la magnéfie, quelques veftiges de fel marin terreux, & jamais alkalin. Avant de terminer la relation des expériences de cette pre- mière clafle, il eft bon de rappeler deux points très-eflentiels & qui y font autant relatifs qu'a celles de la feconde & de la troifième clafle; favoir, 1.° que les abforbans alkalins quel- conques & tels qu'ils ont été défignés précédemment , ayant été expolés de la même manière & dans les mêmes lieux que les abforbans terreux ci- deflus , au contaët de l'air atmofphérique plus ou moins imprégné de méphitifme putride, n’ont donné aucun indice d’ablorption ou de génération d'acide nitreux, ni d'aucun autre acide. 2°. Qu'il ny a pas eu non plus le moindre veftige de nitrification dans ces deux ordres d’abfor- bans alkalins & terreux , expofeés autant de temps & avec les mêmes circonftances, à d'autres efpèces d’airs méphitiques , phlogiftique , fixe , inflammable, dont on à vu l'énumeéra- tion au commencement de ce Supplément, & indiqué les divers foyers dans le corps du Mémoire. Ainfi on fera difpenfe de donner les détails des expériences , difpofées à ces deux fins, dans le rapport qui va fuivre, des épreuves appar— tenant à la deuxième & à la troifième clafle. En me reftreignant donc à ne rapporter ici que les pro— cédés dans lefquels j'ai obtenu des fels nitreux, il fera facile de faire entendre en peu de mots la difpofition des appa- 120 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. reils de la feconde clafle, d'après ce que j'en ai déjà dir. Ils confiftent uniquement à retenir & à concentrer les émana- tions méphitiques putrefcentes » à mefure qu'elles fe forment ou fe dégagent, fur les matières abforbantes fufceptibles de nitrification ; mais fans intercepter totalement l’abord & le renouvellement de l'air atmofphérique ,; comme dans les pro- cédés de la troifième clafle , ni fans le laifler parfaitement libre, comme dans ceux de la première. Ainfi des cloches de verre ou des terrines de grès, réunies deux à deux & lutées, mais en laiffant toujours fubfifter une, deux ou trois petites ouvertures pour l'entrée & la fortie de l'air ; de grands ballons de verre, ou de grandes cucurbites éga- lement à demi-fermés, fervent de récipiens 2 aux matières en putrcfaction, & aux émanations compofces réfulrant de ces ma: tières, Dans l'atmofphere méphitique de ces vaifleaux, rem- plis au tiers ou à la moitié de fubftances putrefcibles , feules ou mélangées, font placés chacun dans des vafes à part, les divers abforbans terreux & alkalins, 4 par 4 ou 6 par 6 ; ceux- là à la dofe de deux onces, ceux-ci à la dofe ne once; les uns dans des flacons à large ouverture, fufpendus par des fils de fer , les autres dans des capfules de verre fupportées pat des châfis en bois; les fubftances cerreufes , tantôt à fec ou fimplement humcétées, tantôt délayées avec de l'eau dif- ullce; les alkalis parcillement en poudre ou diflous, & plus ou moins étendus d’eau pure. Dans vingt-deux appareils de cette forte, les unsrenouvelés plufieurs fois dans l'efpace de trois ou quatre ans, & quant aux cfpèces d’abforbans, réciproquement changés de foyers méphi- tiques, & quant aux matières putrefcibles végétales , animales ou mixtes ; fucceflivement appareillées avec de nouveaux abfor- bans; J'ai eu occafion d’obferver , tant pour les époques que pour les produits de la nitrification , bien des différences qu'il feroit trop long & très - inutile de rapporter ici. Les principales, celles qui peuvent avoir trait à l'objet dire& de ce Concours, ont cté indiquées dans le Mémoire. Il fuffira de rappeler ici : 1,9 Que la nitification eft d'autant plus prompte & plus abondante MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. 121 abondante dans les procédés de cette feconde clañle , que la putréfaction y eft plus aétive, plus récente, & qu'elle eft ac- compagnée d’une plus grande éruption d'air méphitique ; mais que néanmoins elle a encore lieu dans les degres ultérieurs & moindres de cette décompofition fpontance. 2.9 Que pour cela les fubftances animales très- putrefcibles & très-aérées, telles que le fang & les matières fécales , font plus propres que les autres, & plus encore dans la clafle des herbivores, que dans celle des carnivores ; mais que le mélange des animaux avec les végétaux vaut encore mieux; que parmi ces derniers, les feuls pourriflans peuvent fervir à la génération du nitre, & jamais ceux dont la fermenta- tion eft acide ou vineufe. 3.° Que dans le fein des émanations méphitiques putrides, alimentces d'air atmofphérique , les abforbans terreux, prefque toujours dans l’efpace d'un mois, ont donné un commen- cement de nitrification qui s'eft fucceflivement accrue ; mais que les produits au bout de l'année n’ont pas été en même proportion que dans les deux ou trois premiers mois; que ces produits nitreux , prefque toujours mélés d’un peu d'acide ma- tin, ont été conftamment plus marqués dans les épreuves avec la terre calcaire, que dans celles avec les autres terres, & plus encore avec chacune de ces terres non calcinées, qu'avec les Calcinées ; que dans un grand nombre d'eflais de ce genre, la différence pour la quanuté du réfultat falin a été depuis un jufqu'à fept grains par once de terre ; mais que dans la plu- pat de ceux avec les terres fédlitienne & alumineufe, ainfi qu'avec la chaux, ce réfulrat a manqué ; que, d’un autre côté, il n’a jamais eu lieu avec les abforbans alkalins, placés par-tout à côte des autres. 4.° Enfin, que parmi ces matières abforbantes, celles qui font fufcepübles de fe nitrifier, éprouvent cet évènement d'une manière plus marquée , lorfqu’elles font , comme dans les appareils à demi-fermés de cette feconde claffe, fans cefle environnées & pénétrées d'air très-méphitique, mêlé, étendu d’ait atmofphérique , que dans les procédés de la première 122 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. elafle, par leur fimple expofition à l'air libre atmofphérique plus ou moins méphitfé, & que dans ceux de la troifième clafle avec l'air méphitique feul, concentré & renferme, comme nous allons le faire voir. D'après la difpofition des expériences précédentes, l'air méphitique dégagé des fubftances putrides , étant toujours mêlé d’ax atmofphérique , il falloit bien rechercher les moyens de connoître féparément le degré de leur aptitude refpeëtive à la nirification : mais puifque d’après les meilleures analyfes, chacun de ces fluides eft encore lui-même compole de piu- fieurs fortes d’airs, comme on l'a indiqué dans le Mémorre, il évoit d'autant plus néceflaire, en fuivant la divifion ana- lyüque de ces fluides, de procéder par voie de comparaifon & d’exclufon. Ainfi, pour remplir ces différentes vües , on a eu recours à des appareils pneumatiques totalement fermés, dans kfquels chaque efpèce d'air a été éprouvé féparément & fans communication avec l'air extérieur. 1. Douze grands ballons de verre d'environ 2$ à 30 pintes ont été remplis, les uns d'air fixe des cuves à biere, les autres d’air mflammable des marais, par une expoñition fut fifante à ces deux efpèces de foyers mephitiques. On s'eft afluré par les moyens ordinaires, que ces vaifleaux étoient exaétement pleins de ces deux fortes d’airs. On avoit auparavant introduit dans chacun d'eux la même dofe d’abforbans terreux & al- kalins que dans les procédés de la feconde clafle, ceft-à- dire , deux onces de chaque terre féparément, & une once de chaque alkali, calciné ou non calcine , les uns & les autres étendus de quelques onces d’eau diftillée. On à parfaitement luté cous ces appareils, & on les à gardés fix mois fans y toucher, Dans d’autres épreuves , on a renouvelé chaque mois , dans les mêmes foyers méphitiques, les mêmes efpèces d’airs fur chaque abforbant terreux ou alkalin. Après ce terme de réaction, & ayant eu l'attention d’agiter de temps en temps les ballons, toutes les liqueurs ont été évaporées à une douce chaleur. Elles n'ont pas donné le moindre indice d'acide ni- œeux, non plus que les appareils correfpondans de la pre- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 123 mière & de la feconde clafle qui avoient été difpofés dans les mêmes lieux, comme on l'a dit ci-deflus. 2.° Deux autres ballons à peu près de la même capacité que les précédens , garnis de robinets en cuivre, ont été, par le moyen d’une pompe pneumatique, exadtement purgés d'air atmofphérique. On avoit mis dans l'un une once d'huile de tartre , & dans l’autre deux onces de craie pure, délayée avec quatre onces d’eau diftillce,. On a adapté à l'ouverture viflée de ces ballons, un tuyau de cuivre recoutbé & pareïlle- ment à vis. On les a fait par ce moyen communiquer avec un récipient ordinaire de machine pneumatique , aufli garni par le haut d’un robinet. Ce récipient, fermé de fon robinet & plein d'eau pure, a été placé fur l'appareil ordinairement employé pour les expériences fur les airs. La communication étant ctablie par le tuyau de cuivre recourbé & vifé, entre le récipient & le ballon, & les deux robinets reftant fermés, on a rempli d’air atmofphérique, pur & bien lave, le récipient. Enfuite, en tournant les deux robinets, on à fait pafler cet air dans le ballon pourvu de fon abforbant. On a referme les robinets pour empêcher l'eau de monter, & l'on a répété l'effufion du même air jufqu'à ce que le ballon en à été par- faitement rempli. On a employé les mêmes appareils & fuivi la même ma- nipulation , pour mettre en expérience avec les mêmes ab- forbans, l'air pur déphlogiitique , retiré , par diftillation, du mercure précipité per Jè, & lavé dans l'eau pure. La durée de ces expériences a €té la première fois de fix mois , la feconde fois d’un an, & la troifième fois d’un an & demi. On à eu foin toutes les femaines d’agiter les ballons. Il ne s'y eft crouvé, après ces termes, aucun indice de fels nicreux, & les airs qui y étoient contenus paroifloient n'avoir éprouvé aucune altéra- tion. De femblables expériences ont été faites, d’une part, avec l'air atmofphérique ordinaire , & de l’autre , avec l'air mephi- tique, pris dans nos cuves à putréfaétion pour les arrofages. Ces cuves, aux trois quarts vides & dans les momens de la Qi) FL 124 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. plus forte fermentation putride , exhaloïent un air capable d'étcindre la lumière. De grandes quines de grès pleines d'eau , étoient , en verfant cette dernière, remplies d’air'pu- wide, &, dans le même atmofphère , garnies des abforbans ci- deflus. Dans l’efpace de huit mois, ces vaifleaux, exaétement lutés , ont été agités & débouchés huit fois, pour les remplir de nouveau chacun de léur air. Celui à la craie pure & à l'air atmofphérique ordinaire, a donné fix grains de réfidu falin nicreux & en partie marin; celui à l'air méphitique putride en a donné quinze grains. Les deux vaifleaux garnis d’alkali fixe fe font comportés ici comme ailleurs, c’eft-à-dire, fans donner aucun produit falin nouveau. On seft encore fervi de ces grands récipiens, tant de verre que de grès, pour y faire pañler, après les avoir remplis d'eau , quelques autres efpèces d’airs dégénérés ou faices ; tels que l'air fixe, l'air phlogiftiqué , l'air inflammable, retires par diftillation de quelques fubftances des trois règnes; tel aufli que l'air atmofphérique réduit à l’état d’air méphitique par la combuftion du charbon, ou par l'éleâricité. On a introduit enfuite avec précaution & prompritude, dans ces vaifleaux pleins de ces airs, les deux abforbans, calcaire & alkalin. On a traité ces épreuves comme les précédentes ; mais aucune n'a donne le plus léger indice de nitrification. Pour qu'il ne reftât aucun doute fur les réfultats des opé- rations que l'on vient de voir; pour prouver de plus en plus que l'air méphitique, dégagé des corps par la putréfaétion , & l'air atmofphérique imprégné de ce gaz putride , ou altéré par fon union avec le principe inflammable réfultant des corps pourriflans , fonc, à l'exclufion de tout autre air méphitique ou dégénéré, propres à la génération des fels nitreux ; pour conftater que ceux-ci font réellement des produits nouveaux, qu'ils ne préexiftent pas, non plus que leurs matériaux immé- diats, dans les fubftances employées à leur confeétion, & que les abforbans terreux , chacun fuivant leur degré d'aptitude , fourniflent ; ainfi que les airs indiqués, leur contingent à cette confection; enfin, pour compléter le MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALFÉIRE, 125 plan des procédés relatifs à la troifième clafle, tendant à confirmer , à analyfer en quelque forte ceux des deux autres clafles, on a cru devoir ajouter encore les expériences fuivantes. 3.? Dans des appareils de ballons enfilés jufqu'au nombre 2h cinq à fix, on a introduit les divers abforbans terreux & alkalins ci- del. chacun dans un ballon fépare. On a adapte ces files de baïlons à de grandes cornues tubulées , contenant des matières, ou en putréfadtion, ou en diftillation , ou en effervefcence. On a eu foin de luter parfaitement ces appa- reils ; & pour que lai püc librement circuler fur toutes les matières abforbantes, on a adapte à une des tubulures du der- nier ballon, un tube de verre recourbé & plongé dans une jatte toujours pleine d’eau. On à d’autres fois employé des ballons à trois ou quatre tubulures & autant de cornues, afin d'in- pneu ou à la fois, ou fucceflivement, plufieurs efpeces d’airs pris de difiérens corps. On a mis en effervefcence avec l'acide vitriolique Ja craïe & la limaille de fer. On à diftillé pour fubftances minérales de la. mine de fer fpathique , du marbre, & de la houille déjà préparée ; pour fubftances animales, du fang & de la corne e cerf; pour fubftances végétales , du tartre, du blé & du charbon de bois. On a pris pour mélange de putréfaétion éminente & éminemment aérée , celui de fang , d'urine, de viande hachée & de farine; mais comme cette apération marche lentement dans les vaifleaux fermés, on a pris les matières déjà putrefcentes , & on n'a {cellé les ubulures des COrnuEs , ee lorfque la putréfattion a été bien établie. Quanc aux appareil s à diftilatons & eflerv ‘efcences , on aeula pré- caution d'interpoler un ou deux récip! ‘ens pleins d’eau entre les cornues, contenant les fubftances acrifères, & les ballons conte- nant les abforbans, afin de dépouiller les airs factices des pro- duits grofliers non aérés. On a £onfervé ces appareils ainfi difpolés autant de temps qu'on la juge néceflaire (depuis trois: juiqu'à fept mois), en ajoutant par intervalles aux mélanges effervefcens; en donnant aufli par intervalles des coups de feu 126 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. aux matières en diftillation ; enfin, en aidant par une chaleur douce habituelle, le dégagement d'air dans les mélanges em putréfaétion. Ces dernières feules , à l'examen, ont donné des produits nitreux , mais en moindres proportions que dans les procédés de la première & dela feconde claffe. La terre calcaire pure n’a jamais manqué d'en donner , depuis deux jufqu'à cinq grains par onze. La magnéfie ne s'eft nitrifice que quelquefois, & plus foiblement encore que la craie. Les autres terres, qui, dans plufeurs des épreuves précédentes, ont montré quelque apütude à la nitrification, y ont été réfraétaires dans celles-ci. Cette qualite réfractaire s’eft foutenue ici comme ailleurs, de la part des abforbans alkalins. Ils n’ont jamais éprouvé d’autre changement que celui d’une abforption plus ou moins abon- dante d'air méphitique, différent fuivant les différens corps dont il étoit extrait. Celui des corps putrides notamment , fuivant les époques de la putréfaétion, préfente , lorfqu’on le dégage de fa combinaïfon avec les alkalis par un acide ou par le feu, des variétés très - remarquables, tant par l'odeur plus ou moins piquante & vive, que par d’autres qualités. L'examen de tous ces airs & des compofés falins ou falini- formes auxquels ils donnent lieu , avec les différentes bafes , feroit un vafte champ de recherches, indépendant de ce qui cft relatif à la nitrification, qui feule doit nous occuper ici. Il nous refte à découvrir ce qui, dans la fubftance com- pofée de l'air méphitique putride, fournit à cette opération. Nous avons dit que cet air principe, s’exhalant des corps en putréfaétion , à mefure qu'ils fe décompofent , fe préfentoit fous les formes diverfes d'air fixe, d'air phlogiftiqué , d’air inflammable ; & d’une portion d'air peu difftrent de l'air at- mofphérique ; puifque par le plus fimple lavage il eft rendu refpirable comme ce dernjer. On a avancé, & tour femble prouver en effet, que le principe inflammable , ou le feu principe dégagé des corps organiques pourriflans , produit feul, par fes combinaifons diverfes avec le principe aéré, cette variété d’airs plus ou MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 127 moins dégénérés. On a d’autres exemples.que la phlogifüca- tion, comme telle, opère fur l'air pur de telles métamor- phofes; mais il paroît qu'il n'y a pas, outre la putréfaétion, un autre procéde phlogifticant qui difpofe l'air à fervir à la génération des fels nicreux. On a vu dans les expériences précédentes, que law atmofphérique, habituellement phlogifti- que par les exhalaïfons des corps organiques vivans & pour- flans , eft, jufqu'à un certain point, propre à cette généra- tion : il a été prouvé que c’eft en raïfon de fon alliage avec ces émanations, dans certaines conftitutions de l’atmofphère, ou dans des foyers particuliers de corruption. Îl à été con- fimé par d’autres expériences , que l'air atmofphérique très-pur , dans certaines expofitions , n’a aucune apütude à la nitrification , & quil en eft de même dans des appareils par- ticuliers, lorfqu'on purifie par des lavages fufhifans l'air at- mofphérique le moins pur , & même l'air méphitique le plus putride. Ainf, puifqu'il y a dans l'air refpirable de lamotfphère, une portion d'air méphitique, & dans l'air méphitique de la putré- faction, une partie d’air refpirable ; puifque, de part & d’autre, ces airs compofés paroiflent n'être fufcepübles de nitrification qu'à raïon de la fubftance méphitique, il falloit bien, pour éclairer de plus en plus, s'il étoit poflible , la théorie de cette opération, rechercher, finon le mode & l'aétion plus particu- lière de ce méphitifme, qu'il n’eft pas au pouvoir des Chimiftes de pénétrer, en ce qu'ils tiennent aux fecrets des affinités & des combinaïfons , du moins la partie eflentiellement nitrifianre de l'air méphitique putride. Les réfultars des expériences, 1 & 2 de la troifième clafle, jetrent déjà quelque jour dans cette recherche. On seft encore fervi des mêmes appareils de ballons , pour renfermer avec de la craie pure , l'air méphitique, après l'avoir fait pafler ou à travers l'eau de chaux, ou à travers une liqueur alkaline caufti- que, ou feulement à travers l’eau diftillée. Dans les deux pre- miers cas , iln y a pas eu veftige de fel nitreux, après un temps fufifant de réaétion. Dans le 3.° cas, il ÿ €n a eu un peu, mais 528 MÉMOIRES SUR LA‘FORMATION DU SALPÊTRE. moins que dans les épreuves avec l'air méphitique non filtré par le moyen de l'eau. On a vu plus haut, que cer air comple- tement lave , n’en fournit plus du tout, & qu'il reflemble à cet égard à l'air atmofphérique lave, ou fimplement filtré à travers l'eau de chaux ou la liqueur alkaline. On doit voir que dans ces lavages & ces filtrations, la partie nitrifante de l'air eft enlevce ou détruite ; mais avec cette différence que dans les premières , l'air méphitique eft ramené à l'état d'air analogue à celui de latmofphère; tandis qu'après fa filtration à travers l’eau de chaux & la liqueur alkaïine, il refte encore plus ou moins phlogiitique & inflammable. Il n’eft réellement dépouillé que de fa portion d’air fixe. Il paroît donc d’après cela, que ce dernier eft néceflaire à la énération du nitre; qu'elle a conftamment lieu, lorfque l’aétion diflolvante de cer air acide s'exerce fur certains abforbans terreux ; mais on ne peut encore en conclure que l'autre portion d’air altéré & rendu méphitique, inflammable ou phlogiftiqué, par fon union avec le principe igne réfultant de la decompo- fiion putrefative, ne contribue aufli pour quelque chofe à cette génération nitreufe, au moins indireétement ou média- tement. Ces affe&ions diverfes du même air principe, de la part du méme feu principe, au moment de leur éruption, de leur di- vulfion fimulrances des mêmes corps pourriffans, paroïflent fi voifines les unes des autres ; la formation telle ou telle, & la mutation réciproque de ce mixte échéré-phlogiftique femblent fi accidentelles & fi variables; enfin la compofñtion de ces airs méphitiques eft chimiquement & fubftanticllement fi analogue, & quant au principe, & quant au mécanifme qui les produit, quil eft bien difficile de pénétrer & d’ex- pliquer leur concours refpeëif, immédiat ou fecondaire, dans l'ouvrage de la nitrification. Voici encore quelques expériences tendant à éclaircir cette dernière partie du problème, qui cft du refte plus relative à l'objet chimique, qu’au but écono- mique. Des appareils analogues à ceux du n° 3 de la 3.‘ clafle, ont MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 129 ont été difpofés, les uns avec communication de l'air extérieur, les autres fans cette communication. Comme l'influence & le contingent de cet air dans la nitrification font connus; comme il eft bien prouvé, pat tout ce qui précède, que l'air atmof— phérique mis en contaét avec des matières en putréfaétion ; devient à cet égard, de mephitifine nitrifiant, comparable à l'air intérieur dégagé de ces matières putrides ; il nous eft permis de les confondre actuellement dans le rappoït des ex- périences fuivantes, faites depuis les nouveaux éclairciflemens demandés par l'Académie. On a rempli de mélanges très - putrefcibles & déjà en pleine putrefcence , de grandes cruches de grès, à larges ouvertures, & de grands bocaux de verre. On a adapté à ceux-ci des enton- noirs renverfés & bien lutés : on a fimplement recouvert celles- là de chapiteaux non lutés: on a fait communiquer ces vaif- feaux, par le moyen de tubes de verre recourbés & lutés, avec des flacons d'environ trois pintes, percés latéralement, & fe communiquant aufli entre eux par des tubes de verre exaétement lutés. On a réuni pour chaque appareil de flacons aïinfi enflés, trois vaifleaux à putréfaétion, afin d’avoir une plus grande quantité d’air méphitique, & on les a entretenus à une cha- leur habituelle de 18 à 20 degrés. Les flacons fervant de récipiens à l'air & aux abforbans, ont été, pour chaque appareil de trois vaïfleaux putrides , rangés dans l'ordre fuivant. 1 Appareil. Trois bocaux à putréfaétion, adaptés enfemble à trois flacons de file, fervant de récipiens : les deux premiers pleins au ; d’eau diftillce feule ; le troifième d’eau diftillée avec 4 onces de craie pure. 2° Appareil. Mème vafe à putréfaction, & mêmes récipiens; dans les deux premiers récipiens, de l'eau de chaux aux 24 dans le dernier, de l’eau diftillée & de la craie. 3° Appareil. Comme les précédens ; liqueur alkaline cauf- tique, au lieu d'eau de chaux : de la craie dans le troifième rccipient. 4 Appareil. Idem quant à la dipoñtion: quatre onces R 130 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de craie dans chacun des deux prentiers flacons ; & quatre onces de liqueur alkaline cauftique concentrée dans la troi- fième: On'a établi de la même manière, quatre autres appareils avec des cruches de grès, fervant de vafes à putréfattion, fimplement recouvertes de chapiteaux non lutés, & communi- quant trois à trois, comme ci-deflus, avec le premier des trois flacons de file. Ceux-ci ont été remplis de mêmes liqueurs abforbantes que dans les quatre appareils précédens. Enfin , il n'y a eu de différent, que l'accès de l'air extérieur , non eotalement intercepté dans les quatre derniers. Quant à la communication entre les trois récipiens de chaque appareil, par le moyen- des tubes de verre lutés, elle à été établie de façon que l'air méphitique, s'exhalant des vafes à purréfaétion, étoir porté jufqu'au fond des réci- piens.. Él étoit repris, après avoir traverfe les liqueurs ; dans lefpace vide, à la partie fupérieure de chaque récipient. Pour favorifer la circulation de ect air dans tous les flacons, il partoir du dernier de chaque appareil, un tube courbé & plongé dans une jatte d’eau. On a mis doubles par-tout les premiers récipiens , afin de mieux opérer la fikration ou l'abforprion de l'air dégagé , & de connoitre mieux ce quil étoit encore après ces deux opérations. Tous ces appareils ainfi difpofés , ont été confervés depuis le mois de Mäi jufqu'au mois de Novembre. Ils viemment d'être examinés, & les réfulcats en ont été à peu près tels qu'on les avoit attendus. Cependant, comme la capacité ou le nom- bre des récipiens n’étoient pas en proportion de l'air mephitique fourni par: les vales à putréfaétion, ces réfultats ont Cté , qüantau but analytique & fynthétique des expériences, un peu confondus & mal déterminés. Dans le premier appareil , les deux récipiens à l'eau diftillée ont enlevé à lair-putride la plus grande patrie de fa fub£- tance nitrifiante, dont l'eau eft reftée imprégnée, fans rien acquérir de falin, fice n'eft quelque pe d’alkali volatil. Ce- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 131 pendant il s’eft trouvé dans le troifième récipient une petite quantité de nitre calcaire (environ 4 grains), & point de fel marin. j Dans le deuxième appareil, l'eau de chaux des deux pre. imiers récipiens a abforbe la portion d'air fixe conténu dans Fair putride, & a dépofé peu à peu fa terre au fond & aux parois des vafes. La liqueur mife à évaporer, a répandu une odeur d’alkali volatil & d’ail-putride. La chaleur ayant été très- modérée , fur-tout à la fin, on a chtenu cinq à fix grains de nitre ammoniacal de toute l'eau réunie des deux premiers récipiens. Celle du troïfième a aufi donné quelque indice de nitre calcaire , mais à peine fenfible. Le troifième appareil n’a fourni aucune efpece de fel ni- treux, ni dans les deux premiers recipiens avec la liqueur alkaline cauftique , ni dans le troifième à la craie. L'alkali tora- lement neutralifé pat l'ablorption de l'air fixe, Croir devenu doux & criftalifable. Cet air dégagé par un acide, confervoit encore fon odeur d’ail-fetide tres-forte & très-piquante. J'ai cru y remarquer, ainfi que dans d'autres expéricnces ana- logues , la préfence de l’efprit de fel. Le quatrième appareil eft celui de rous qui ae plus donne de produit falin nitreux , tant ammoniacal que crayeux. Il y en a eu environ 25 à 26 grains dans les deux premiers réci- piens. Le troifième ne contenoit que fa liqueur alkaline, en- core faturée .d’air fixe , & en partie criftallifée aux parois du vale. L'air non abforbé ni diflous, contenu dans tous ces réci- piens , ainfi que celui qui s’eft ramafñlé dans des flacons pleins d'eau , renverfés -{ur la grande jatte d'eau, auxquels fläcons aboutifloient les tuyaux recourbés partant des derniers réci- piens; cet air, dis-je, fourni par les vafes à putréfattion & ajouté à l'air atmofphérique , également altéré, renfermé dans la partie vide des appareils, étoit par-tout un mélange d'air plus ou moins phlogiftiqué & inflammable. On a déjà avancé cideflus, que cette forte d’air méphitique n’étoit pas par elle- méme propre à la nitification ; mais on a préfume qu'elle pou- R ij 132 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, voit y fervir d’une autre manière. On s’eft fondé fur ce que de Pair furchargé de phlogiftique, étant mêlé à de l'air pur refpi- rable, il en réfulte roujours une certaine quantité d'air fixe ; tandis au contraire que fi à ce dernier on ajoute du nou- veau phlogiftique , on le convertit en air infoluble , phlogif- tiqué ou inflammable, qui , lavé fufhifamment , redevient ref- pirable. C’eft ce qui nous a déjà fait avancer ailleurs, » que # toutes ces cfpèces d’airs dégénérés ne diffèrent entre elles, » que felon la manière dont elles font affe&ces ou faturées » par le principe inflammable , qui s'échappe fans cefle avec l'air des coïps pourriflans , & que toutes aufli font plus ou » moins propres à concourir à la formation du nitre «. Pour prouver cette aflertion, quant à l'efpèce d’air méphi- tique infoluble & furchargé de ce principe inflammable , émané de la putréfaction, il éroit néceflaire , d’après ce qu’on vient de voir, de le foumettre à d’autres épreuves de nitrification. N'étant pas fufceprible feul de cette dernière, on l'a mélé en différentes proportions à de l'air atmofphérique lavé. On s'eft fervi pour cela des appareils N.° 2 de la troifième clafle , avec dela craie pure délayce , & il en eft réfulté, au bout de deux mois, du fel nitreux calcaire, à la vérité en moindre dofe que dans aucune des opérations précédentes , mais aflez pour conftater le but de ces nouvelles épreuves. Enfin, de tous ces réfultats accumulés, aufh bien conf- tatés que les objets de cet ordre peuvent l'être; réfulats fur lefquels la Chimie, plus curieufe & plus fcrutatrice, s'exercera fans doute encore quelque jour ; mais fur lefquels néanmoins il eft difficile que fon pouvoir s'étende plus loin, quant à - la théorie de leur produétion & nommément pour ce qui concerne la nature & les différences du méphitifme putride, nitrifant ; de ces réfultats, dis-je, liés & comparés les uns aux autres, on croit pouvoir conclure de nouveau , que toute la fubftance aérée-phlogiftique , qui sexhale des corps orga- niques en décompofition putride ; que toute la fubftance de l'air refpirable atmofphérique, lorfqw'elle eft imprégnée de ces exhalaïfons méphiriques pourriflantes , font l'une & MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 134 l'autre fufceptibles de fe prêter & de fournir à la nitrification; que ces matériaux organiques défunis , faifant corps enfuite avec l'atmofphère , doivent étre uniquement, mais non im- médiatement, produits par des fubftances animales & végétales, vivantes ou pourriflantes , pour communiquer à l'air atmof- phérique ce qui le fair devenir propre à la combinaïfon ni- treufe ; que cette combinaifon a réellement & également lieu, foit que les émanations méphitiques du fein de l'air s’atta- chent à des matrices appropriées, abforbantes , terreufes , déjà imprégnées, faturées d'air : ce qui forme alors les diffcrentes efpèces de nitres épars à la furface de la terre, & celui qui, formé & répandu dans l'atmofphère même , fe décompofe ou fe précipite à mefure; foit qu'elles rentrent & fe com- binent de nouveau dans le fyftème végétal, pour y fervir à des compofés analogues. Enfin, c'eft toujours & par-tout l'air qui, par fa condition d'air méphitique , refpiré , exhalé, pu- tréfié , porte le germe de la nitrification ; maïs le fiécè de cette opcration exécutée en grand , eft totalement fubordonné à des circonftances très- vahables , très-accidentelles , & de la part de la conftitution de l’atmofphère, qui fert de récepta- cle & de véhicule à ce germe nitrifiant, & par la difpofi- tion des matrices terreufes ablorbantes , qui {ont deftinces à le recevoir & à le féconder. 134 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, DÆUXIEME SUPPLÉMENT, Relatif à la feconde partie du Mémoire. Ox a fait connoître dans ce Mémoire, les circonftances, les matériaux & les foyers les plus favorables à la génération naturelle & fpontanée du nitre. On s'eft aïdc de ces cor- noïflancés pour trouver des méthodes artificielles , tendant à régir & à favorifer cette génération dans des ctabliflemens en grand. On croit avoir approche du but propofé dans ce Con- cours par le Gouvernement, & foumis au jugement de l'Aca- démie. Avant l'époque de ce jugement, il importe de faire connoitre , par deux eflais qui ont été faits , l’état de la nitrifi- cation dans les terres des établiflemens dont nous avons terminé Ja formation ati mois de Novembre 1779 , & donné Ja defcrip- tion générale dans notre Memoire à la fin de Décembre 1780. Ces deux eflais ont été faits dans le courant de l’année 1781; le premier au mois de Mai, le feconden Novembre. Nous allons en produire les réfultats, après avoir rappelé fuccin&te- ment la manière dont ces établiflemens ont été exécutés. Nous avons fait conftruire, exprès pour nos premières épreuves, une nitriere bergerie double fous le même toit, fuivant les dimenfions énoncées dans le Mémoire; favoir, de 100 pieds de long fur 60 de large, partagée fuivant fa longueur, par un mur en terre, à la Pruflienne; entourée d’un mur à l'ordinaire, de 10 pieds de haut, & recouverte d’un bon toit en chaume. Le fol de ce bâtiment , quoique trop glaifeux & trop compaét pour la nitrification , a été garde , faute de meilleur. Il y avoit environ un pied & demi de terre vegctale pañlable , & par- deffous une couche argileufe très-dure, que nous avons aufli laflé fubffter, comme capable de réfifter aux filtrations. Après avoir fait bécher à un pied le bon fond, & mis par- deflous une mince couche de paille, nous avons fait habiter dans un des côtés de la bergerie, 3 à 4 cents moutons, depuis MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 35 le mois de Décembre 1779, jufqu'en Mars 1789 , en fournif- fant une abondante litière. À cette époque , on a enlevé tout le fumier. On a retourné la terre à fond, & après trois fe- maines d'habitation continue , on l’a rechargée d'environ neuf pouces de nouvelle terre femblable à la première. On à fait habiter jufqu'à la fin de Juillet fuivant. On a enleve de nou- veau le fumier , & après avoir retourné la terre, on la en- core rechargée comme la première fois. L'habitation a été con- tinuée jufqu'au mois d'Oétobre fuivant, temps auquel on a enlevé le fumier pour la dernière fois. Voulant alors com- mencer la culture des terres fécondées , nous avons fait pañler les moutons de l’autre côtc. Ce dernier, pendant l'année d’ha- bitation de fon voifin, dans le courant de 1780, a été pré- paré & cultivé, pour qu'il ny eüc point de temps perdu. On la chargé d'autant & de pareille terre que l'autre, à plufieurs repriles. On y a répandu beaucoup d’arrofages & d’autres matières fécondantes où ameubliflantes. On ne l'a pas mis en couches ; mais on en a bêche & retourné la terre quatre à cinq fois, dans le cours de lannce , jufqu'au temps où il a commence à être habite. Cette habieatiori a duré de- us Novembre 1780, jufqu'à pareille date 178 r ; alors a com- mencé fa culture en couches. L'on à fait pafler les moutons dans une troïfième bergerie fimple & ancienne, deftinée à com- pléter la révolution ertols & alternative d'habitarion & de cultures que nous préfumons être la plus convenable à cette forte d’érabliflemens. C'’eft au temps à prouver fi nous fommes fondés, & à chaque Entrepreneur à vérifier fi une autre divi- fion ne vaudroit pas mieux , dans une awtre pofition , quant au fol & au local. Nous ne dirons plus rien à préfent des terres habitées en 1781, & dont la culture ne fait que com- mencer. Celles de la troifième bergerie auront à leur tour une culture encore différente des deux autres, lorfaw'eiles auront été fuffifamment fécondées par l'habitation de 1782. Reve- nons à celles de 1780. Ces terres fécondées pendant environ une année d’habita- tion continue, ont été encorc gardées deux mois fur place, 136 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fans y toucher. On les a arrofées de quinze jours à autres , pour mieux répandre dans toute la mafle d'environ trente pouces d'épaifleur, les filtrations excrémenteufes & putrefcentes. Le premier arrofage a été fait avant l'enlèvement du dernier fu- mier , que l’on a enfuite laïflé égoutter pendant quinze jours. Je crois qu’il feroit avantageux de laïfler un pluslong intervalle, que je ne l'ai fait ici, entre la fin de l'habitation & la mife- en-couche, afin d’eviter par ce remuage la diflipation des vapeurs animales putrefcibles , toujours très - abondantes à ce premier terme. À la vérité, ce travail des terres fécondées accélère la utréfaction & donne plus d'accès à l'air atmofphérique , qui eft, felon la doëtrine précédemment établie, un-puiflant coo- pérateur, & comme inftrument & comme élément, de la ni- trification. Ainfi il faut calculer les avantages & les inconvé- niens qui peuvent réfulter d’une culture à contre-temps, d’un -remuage trop fréquent ou trop tardif. En général, les terres fortes , très-riches en engrais, doivent être plus retournées que d'autres, pour hâter la putréfaétion, au rifque de difliper : beaucoup d'air méphitique; mais fur cela encore, ainfi que pour la fréquence & l'abondance des arrofages, la nature des terres apporte de grandes differences, & la manipulation à ces divers égards , ne peut comporter de règles précifes. Quant à nous, prefles de voir les premiers produits de nos eflais , nous avons hâté la culture des terres. Nous avons rendu plus fréquens les arrofages & les remuages des couches. Celles-ci, au nombre de cinq, formées dans un des côiés de notre bergerie , ont chacune cent pieds de long, cinq de large à la bafe, & environ trois de hauteur en dos-d’âne. Cela fait un total de près de quatre mille pieds cubes de terre; non compris le lit de fept à huit pouces de bonne terre réfervée fous les couches , dans toute la furface de cent pieds de long , fur trente de large qu'occupent les cinq couches avec les fentiers intermédiaires. Chaque couche eft par- tagce jufqu'à fa bafe, fur toute fa longueur , par un cor- don de paille droite, de trois à quatre pouces d’épaifleur , pour mieux faire pénétrer les arrofages. OA font com- pofés MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 137 pofés d'eau de fumier, ramaflce dans une marre que lon a pratiquée exprès pour cela, & confervée enfuite dans de grandes cuves , que l'on remplit au tiers de crotin de moutons & de pigeons. Ce mélange fermente pendant quinze ou vingt jours avant d'être employé aux arrofages , & eft renouvelé chaque fois. sn toute la liqueur fermentante eft répartie fur les cinq couches , le marc des cuves eft enlevé pour fervir à l’ufage que nous allons indiquer. Lors de la formation des couches, à la fin de Décembre 1780 , on a cherché à corriger, par différens mélanges de matières ameubliflantes , l'état trop compa& & trop glaïfeux des terres de la nitrière. On a laiflé une de ces couches fans y rien ajouter. On a intimement mêlé à la feconde (contenant, comme toutes les autres, environ fept à huit cents pieds cubes) quatre-vingt-dix quintaux de cendres lefivées : à la troifième, cent & quelques quintaux de poudre de tan, gardée (après fon fervice à la tanncrie) dans une fofle pen- dant quatre mois, & arrofée de temps en temps d'urine en putréfaction. La quatrième couche à été ameublie par foi- xante quintaux de vicille chaux éteinte à l'air , arrofce en tas; pendant quatre mois, avec de l'eau de fumier. La cinquième a reçu, tant à l'époque de fa formation, qu'à celle de fon premier remuage, deux mois après, environ trente quintaux du marc épuifé des crotins d'arrofages , mêlé avec le double de vieux plâtras battus & leflives. Toutes ces couches ainfi difpofces & préparées, ont été; chaque quinze ou vingt jours, arrofces avec la liqueur indi- quée ci-deflus, à la of de vingt, vingt-cinq à trente fceaux pour chaque couche, fuivant le degre d'ablorption , d'évaporation & de defliccation des terres mélangées. On a retourné ces couches à fond tous les deux mois ; on les a remuces tous les mois à la furface, avec des crochets de fer à trois pointes de quinze pouces. de longueur. Cette culture n'a pas été interrompue, malgré le froid de lhiver, à caufe de l'habitation de l’autre partie de la bergerie, fous le même toit & dans le méme atmofphère, Il y règne toujours S 133 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE! 3 à peu près la même température ; & c’eft encore à un des avantages de cette forte d’établiflement , de fauver le retard qu'apportent toujours à Ja marche de la nicrification, les temps froids de près de la moitié de l'année, dans la plupart des proviices du royaume. Ajoutez à cela le but très-utile d’éta- lir autour des terres à falpétrer, une conftitution d'air en quelque forte artificielle , toujours à peu près égale , ou du moins qui ne participe guère à certaines conftitutions pañla- gères ou durables de latmofphère; conftitutions peu propres , & d'autres fois même contraires , à la génération du Salpétre. Quoique cette génération ait dû à peine être commencée dans nos terres, feulement cultivées depuis fix mois, à raifon du peu de progrès de la putréfaétion des matières fécon- dantes, cependant nous en avons fait une première épreuve au mois de Mai 1781. Nous avons leflive fix pieds cubes de terre de chaque couche, dans des cuviers, à la manière des Salpétriers , avec deux cents livres d’eau. Cette terre érant , comme nous l'avons déjà dit, très-compaéte & grafle, une efpèce de terre à four, elle a retenu à peu près la moitié de l’eau employée, & chaque cuvier n’en a fourni qu'environ cent livres. Nous avons fait repafler cent autres livres de nou: velle eau qui seft écoulce toute entière, la terre étant faturée.. Cette feconde eau a été réunie à la première pour l'évapora- tion (*). Toutes ces eaux réduites au point de la criftalifation, n’ont donné que très-peu de vrai Salpétre en aiguilles, & il n’y a eu à cet gard que de petites différences entre chaque couche. C*) Les Salpétriers, dans la plupart des provinces, font dans l'ufage de fe fervir de cette feconde eau ( qu'ils appellent un raîlis) , pour la repafler fur de la nouvelle terre. Mais il paroît que pour les terres fortes & très-abforbantes , qui vont quel- quefois jufqu'a retenir près des 5 de l'eau employée pour lefliver, cette pratique eft mauvaile, fur-tout lorfque ces terres font un peu riches en Salpètre. Il vaudroit mieux faire cuire les raffis, malgré la plus grande confommation de bois. Un calcul facile à faire, montre qu'en n'employant que deux cents ou deux cent-cinquante livres d'eau pour une cuve de fix à fept pieds cubes de terre, & qu'en faifant repafler ducceflivement les raffs de cent livres d’eau fur de nouvelles cuves ,. il doit refter la moitié & même quelquefois les À du Salpêtre dans les terres. MÉMoIREs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 439 Les eaux mères, très-épaifles & crès-noires, à caufe de là dé- compofition encore incomplette des matières putrefcibles, ont éte précipitées avec une fufhfante quantité de potañle, Le Salpêtre, produit de cette opération, a éré par-tout plus du double de celui des premières ctiftallifations. À la vérité, on ne doit pas croire que celles-ci, vu la vifcofité des liqueurs concentrées, aient donné tout le Salpétre à bafe alkaline préexiftant dans les leflives ; mais il paroït qu'en cela tout a été égal de part & d'autre. L'eflai de la première couche , celle de terre végétale pure; a fourni $ onces : de Salpètre, dont plus des : provenant de la précipitation de l’eau mère. La deuxième couche à donné fix gros de plus que la pre- mire, & ce furplus a été prefque tout de la première criftal- lifation , avant l'emploi de la potafle. Les troifième & cinquième couches ont été à peu près égales en produits de première & feconde criftallifations; & le produit total de chacune a-été de fept onces trois à quatre gros. Il n'y a pas eu tout-à-fait trois onces dans cha- cun de ces eflais, avant la précipitation de l'eau mere. La quatrième couche s'eft trouvée encore un peu plus riche que les précédentes. Elle a donné trois onces à la pre- mière cuite, & cinq onces fept gros à la feconde. On a tou- jours eu foin de mettre la potafle en excès ; pour ne pas laïfler dans les eaux mères de nitre à bafe terreufe. Tous les eflais ont donné du fel marin, tant dans la première que dans la feconde opération. Les proportions de ce dernier fel ont été par-tout de plus d'un tiers, par rapport au Salpètre. Je rappellerai à cette occafon ce que j'ai déjà dit dans mon Mé- moire, qu'il importeroit beaucoup dans les travaux en grand, dé ne pas employer en pure perte une partie de la potafle pour précipiter le fel marin cerreux. Jai déjà fait fur cela diverfes épreuves qui n’ont pas eu encore tout le fucces défi- rable. POIL, Le * Le fecond examen de ‘nos couches a été fait à la fin de Novembre 1781. Leur culture a cté, depuis le mois de Mai, S ij #11 140 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ratiquée comme auparavant. La fermentation dans les cuves d’arrofages & dans l'intérieur des couches ; à été un peu plus aétive duranr cette feconde époque. Îl à paru des efiloref- cences nitreufes à la furface des terres. On a pris la même quantité de fix pieds cubes, de chaque couche , pour en faire la leflive , avec la même quantité d’eau, en deux fois, comme cideflus. Les eaux évaporées ont donné pour pre- mière ctiftallifation les produits fuivans : Première couche, fept onces deux gros. Seconde & troifième couches, fept onces fept gros. Quatrième couche , neuf onces. Cinquième couche, huit onces fix gros. Toutes les eaux mères ont été étendues d’eau, & travaillées féparément avec cinq à fix onces de potañle. Elles ont roues donné, à peu de chofe près, une quantité de Salpètre égale À celle de leurs premiers produits. Ïl n'y a pas eu de la pre- mière à la deuxième cuite, une différence de plus de deux à trois gtos, entre les produits correfpondans de chaque couche. H eft probable que lorfque la nitrification fera achevée dans toutes les couches, on y appercevra des differences plus con- fidérables, faivant leurs divers apprèts , non feulement quant au produit falin total de chaque couche ; mais aufli quant aux proportions du fel-alkali& du {el cerreux. En attendant, on voit que dans lefpace ‘de fix mois, elles ont plus que doublé leur produit en Salpêtre, & notamment que cette améliora- ton a été plus confidérable par rapport à la bafe alkaline ; ce qui eft très-digne de remarque. Si lon peut préfumer avec quelque fondement, que l’aug- mentation progreflive fera la même dans le cours de l'année qui commence, & qui doit compléter la révolution triennale d'habitation & de culture; on trouvera que pour une première époque de fécondation, encore très -incomplette, de terres toutes neuves, la nitrification aura été aflez prompte & aflez abondante ; fur-tout fi l’on confidère que certe efpèce de terre. forte , compaäe & froide, eft par elle-même peu propre à cette opération, & que l'on n'a pas encore employé pour MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE T4! l'approprier, ni les moyens les plus efficaces indiqués dans le Mémoire, ni un efpace de temps fuffifant pour cela. Aiïnfi on a tout lieu de croire qu'en fuivant la mème pratique, fur un meilleur fond de terre, avec de meilleures & de plus abondantes matières préparatoires , telles qu'on les a fait con- noître pour la culture, on obtiendra, en y mettant un temps convenable , des récoltes bien plus abondantes. Toujours eft-il vrai que, fans avoir été à portée jufqu'à prélenc de remplir ces conditions dans nos etablifiemens , comme nous le ferons par la fuite , nous avons obtenu de nos terres, après une feule année de culture, un produit à peu près égal à celui que fourniflenc pour l'ordinaire, dans des révolutions de fix, fept & huit ans, les terres d’ha- bitations domeftiques , exploitées par les Salpétriers dans la plupart des provinces du royaume. Si lon ajoute à ce pro- duit aétuel, l’accroiffement très-préfumable de nos nitriéres- Bergeries dans le cours de la feconde, & même, sille faur, d'une troifième année de culture, on verra qu'elles furpaf feront en richefle les nitrières ordinaires, celles des grandes couches élevées fous des hangars; en exceptant peut-être celles qui font formées avec de bonnes terres de craie pure , ou avec des terres d'ateliers & de démolitions, déjà fécondées & falpétrées de longue main. Nous avons été à portée de voir la plupart des nitrières Françoïles, établies à la manière Sué- doïfe corrigée. Nous les avons trouvées jufqu'à préfent peu profitables , vu la grande dépenfe qu'elles exigent. Nous en avons établi nous-mêmes , & il cft certain que, depuis trois ou quatre ans de culture, les terres ne font pas encore par- venues à plus de trois à quatre onces de Salpétre par pied cube, encore faut-il le tirer prefque tout du travail des eaux mères par la potafle. Nous avons trouvé en général les petites couches plus baätives & plus produétives que les grandes , quoique com- pofces de même & placées fous les mêmes hangars. Nous avons employé , pour les former, différentes forces de fumier 142 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. avec des boues de rues, & pour les cultiver, des arrofages préparés de diverfes manières; mais nous n'avons pas obfervé dans les réfulrats, des différences bien fenfibles. La plus remar- quable a été en faveur d’un effai que nous avons fait dans la vüe de propofer, comme un accefloire à notre travail fur les rivrieres-bergeries , le projet d'établir des nitrières à la fuite de la Cavalerie. Une feule petite couche de cinq cents quintaux de terre de prés , aflez bonne, placée fous un appentis adofé à une écurie de douze chevaux, a été fécondée avec cinquante quintaux de crotin, & arrofee avec l'urine de ces animaux. Pour entretenir un certain échauffement dans les terres, avec un degré de fermentation fufffante , on a ajouté, par parties de dix quintaux, chaque deux mois, & bien mêlé avec Ja terre meuble , le crotin confervé pendant ces intervalles , dans de grandes cuves, entaflé lits par lits avec des cendres non leflivées , ou bien de la chaux éteinte. Les urines ont été recueillies & gardées en putréfaétion pour. les arrofages , dans un réfervoir pratiqué exprès à l'extrémité de l'écurie en dehors & fous l’appentis de la couche. On a étendu cette urine avec l'eau employée, de temps en temps, comme je l'ai indiqué ailleurs , pour le lavage du pavé de l'écurie, après le houf Ce) , … fage des murs, afin d'enlever les parties excrémentitielles & le Salpétre qui sy trouvent. Après dix mois de fécondation de cette couche, par le mélange fucceflif de cinquante quintaux de crotin préparé, & après une année de culture & d’arrofages au delà de ce premier terme, on a leflivé , tout récemment, trois cuves de terre prife aux deux extrémités & au milieu de cette couche. Le produit de la première cuite, à part le fel marin qui s'eft trouvé plus abondant que dans les nitrières précédentes , a été, par quintal de terre, de près de fix onces, dont un tiers au plus provenant du travail des eaux mères. Remarquez au furpius, que cette épreuve des terres, faite après 22 mois de couches feulement, donne lieu d’efpérer que, lorfque la MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 143 maturation en fera complète, dans la révolution de trois à quatre ans, la nitrification pourra bien être portée à dix ou douze onces. Je n'ai fait qu'une feule expérience qui ait été plus riche que celle-à; c'eft celle d’une couche en pyramide , ah neuf pieds de haut fur lept de ee à la bafe : elle a cte formée au : d'un très-be terreau, & pour le furplus, d'un mélange, à parties à peu près égales, de vieux mortier & plâtras de démolitions; de fang de boucheries defléché ; de crotins de moutons & de pigeons, épuifés par l'eau des arrofages ; enfin de cendres de bois neuf non leflivées. Le tout à été pulvérife , pañlé à la claie, & intimement mêle au terreau. On a gardé ce mélange en un feul tas, pendant trois mois, en l'arrofant fortement avec une liqueur compofée d'eau de fumier & d'urine , dans laquelle on faioit pourrir différentes herbes champêtres & potagères hachées. Lorique la fermentation a été bien établie, & la terre bien pénétrée de matières putrefcentes, on a ee la pyramide dans un coin de nitrière-berserie y on a partagé & foutenu la terre de deux en deux pieds, par un lit de fagots placés hori- zontalement. Un autre rang de fagots, difpoles verticalement bout à bout, occupoit le milieu de la pyramide, & abou- üfloit à une efpèce de voûte en cléonage au centre & à la bafe de cette pyramide. La voûte étoit deftinée à recevoir un mélange de fumier de cheval & de crotin frais de pigeons , avec de la chaux vive : ce mélange ctoit renouvelé trous les mois, pour entretenir fous la couche une chaleur & des exhalaïfons excrémentitielles putrides. Les fagots , tra- verfant la pyramide dans toute fon épaiffeur , remplifloient le but d'établir une libre communication à l'air, & une facile diftribution pour les arrofages. Ces derniers ont été continués comme ci- deflus, pendant 18 mois, tous les 1 $ jours. On y a ajouté enfuite un quart d’eau de leflive domeftique pendant fix mois. Enfin on a terminé la culture par huit autres mois d'arrofages avec de l'eau fimplement rendue gazeufe- putride au moyen quelques pièces de charogne jetée dans une 144 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. grande cuve pleine d'eau & recouverte, Les quatre derniers mois, On n'y a pas touché. Quoique dans cet efpace de trois ans la décompofition des matieres putrefcibles, & notamment celle du fang en pou- dre, ne für pas encore parvenue à fon dernier terme , cepen- dant on 2 leflivé la couche tout efleurie à fa furface & dans les tuyaux d’airage pratiqués par les fagots. Chaque cuve de fix quintaux de terre, leflivée avec fix cents livres d’eau , à trois reprifes, a donné, fept livres de Salpètre brut, outre l'eau mere qui étoit , à la vérité, en petite quantité , à raifon de l'eau de leflive employée pourles arrofages à la fin. D'ailleurs , comme cette eau mère contenoit encore quelques portions de matières extraétives non totalement putrcfiées , on a préféré de ne pas la travailler , & on l'a mife de côté, pour fervir aux arrofages de la couche pyramidale qui a été reconftruite felon les mêmes principes que la première fois. J'ai fait d’autres pyramides pareillement difpofées avec des terres végétales, ou feules ou mélées avec des cendres, de la chaux, des plâtras, &c. fans aucune addition de fumier ni d’autres matières putrefcibles. Elles n'ont été arrofées qu'avec sde l'eau putride-gazeufe fimple , préparée comme ci-deflus. Elles ont fourni, au bout de l'année, depuis une jufqu’à trois onces de Salpètre par quintal de terre, mais prefque tout à bafe ter- reufe. Quoique la couche pyramidale précédente , fortement fecondée , fe foit trouvée, au bout de trois ans, beaucoup plus falpétrée que celles ci, fans fécondation préliminaire; quoique lon puifle préfumer avec raifon qu’elle feroît encore fufceprible d’une augmentation confidérable par une fuite deculrure, cepen- dant , vu les frais de préparation & l'emploi des matières qu'elle exige , je ne confeille d’en adopter l'entreprife que comme un accefloire dans l'établifement des nitrières - bergeries ou autres. Certe culture recherchée ne peut devenir profitable que lorf- qu'on peut fe procurer à crès-peu de frais les matieres nécef- faires, & en remettant leur préparation & smife en œuvre au temps de l'année où les ouvriers des nitrières n'auroient rien de mieux à faire. Cela ferviroit aufli à améliorer peu à peu les Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 145, les terres du fonds des nitrières en grand, lorfqw’elles eh ont befoin. Enfin, ces couches pyramidales, riches & fécondes.; feroient aufli la forme de petites nirières domeftiques la plus convenable & la plus à portée des géns de la campagne; attendu qu'elle exige peu de place & de couvert, & que d'ail- leurs on a prefque par-tout , fous la main , les chofes qui peuvent fervir à leur confeétion , tant por féconder, que pour arrofer & faliner. Lorfque les terres font de bonne qualité, il ne leur faut ni fécondations, ni arrofages. L'air feul fuffic pour les falpètrer par l'abondante abforption dont elles font fufcepübles. En Cham- pagne, par exemple, la craie pure, ou mieux encore , toutes les terres de démolitions, miles en efpèce de couches ou de murs , & fimplement abritées de la pluie par de petits toits de paille, fe falpétrent très-vite à leur furface. On peut enlever, pour le leflivage, une petite couche d'un ou deux pouces, tous les dix, quinze, vingt jours, fuivant les faifons de l'annce. I] paroïît que pour cette forte de nitrification fpontanée, fans addi- tion & fans culture, lexpofition à l'air vaut mieux que fous des hangars fermés. La rofce, les brouillards, de petites pluies fines & chaudes, femblent donner à l'air plus de force & de prife. Cependant, comme ces petits toits en chaume pour chaque cou- che , quoique très-économiques , ne laiflent pas que de devenir difpendieux par la main-d'œuvre, en ce qu'ils ne durent au plus uc deux ans, & que d’ailleurs, fous ces toits, les couches font expofces à foufirir des grandes pluies , ou des neiges ; qu'elles font fujertes à fe fendre & à s’ébouler au dégel : il feroit peut-être mieux, pour des établiflemens en grand ; de faire des hangars ouverts de toutes parts & fimplement foutenus fur des piliers, comme des halles. Je crois aufli que, foiten plein air, foit fous des hangars , on devroit, au lieu de difpofer tous les murs à Sal- pêtre fuivant une même direction, les faire s'entre-couper ou fe réunir, à peu près comme les murs des jardins fruitiers , à la manière dite de Montreuil. Ils s’abriteroient réciproquement : contre le foleil & les vents ; ils conferveroient la chaleur, & ren- dioient l'air un peu plus ftagnant, fans l'intercepter. E 146 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. On conçoit que l'on peut multiplier à l'infini ces vrais maga- fins prefque naturels de Salpètre. En ufant de cette reflource dans une Province, telle que la Champagne , par exemple, & fur-tout dans les villes où l’on peut fe procurer beaucoup de démolitions, il feroit peut-être poffible d'y récolter le quart ou le üers du Salpêtre néceflaire à la confommation de l'Etat. Dans les Provinces au contraire, où, par la nature du fol, le Salpêtre ne vient qu'à force d'art, comme dans les nitrières que j'ai fuivies, ou, à force de temps, comme dans les habi- tations domeftiques , je crois que la meilleure methode eft celle que j'ai propolée, des nitrières-bergeries. Voyez celle des étables du canton d’Appenzell, en Suifle. Quoique très-diffcrente de la mienne par la difpofition des terres, par l'habitation du bétail, & par la culture , elle revient à peu près au même, quant aux principes fur lefquels elle eft fondce , & quant aux produits des établifiemens. Il s’agit de féconder abondamment des terres avec des exhalaïfons & des filtrations excrémentitielles. Tout l'art doit tendre à bonifierles terres, lorfqu’elles font mauvaifes ou médiocres. En un mot, il faut qu'à l'égard de celles-ci, l'air très-méphitique des animaux vivans & pourriflans remplifle ce que l'air feul de l'atmofphère, qui n'eft que peu méphirique , opère fur les très-bonnes terres abforbantes calcaires. Si l'on met en comparaifon les nitrières établies dans l'Æppenzell, & prati- quées dans des fofles ou égouts fous les étables , avec les nitrières des pays crayeux, en forme de couches ou de murs expofes à l'air libre , on verra que les nitrières-bergeries , celles qu'elles ont été décrites , réuniflent les avantages a unes & des autres, & quant à la fécondation des terres par l'habitation, & quant au gouvernement de l'air par leurs expofition & mife en couches. Leur culture fuivie, confiftant en mélanges , arrofages , re- muages , &C. ajoute encore à ces avantages. Engagés par toutes ces confidérations & plus encore par nos premiers fuccès , nous avons, depuis l’année dernière, fort aug- menté nos établiffiemens dans le même lieu. Cette augmenta- tion n'en eft prefque pas une pour les frais d'ouvriers & ceux de laboratoire. C MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 147 Les frais de première mife n'ent pas été non plus très-confi- dérables. Nous avons profité d'anciennes conftiuctions, de vieux bâtimens de fermes, pour y pratiquer , moyennant quelques réparations & additions, des nitrières-bergeries ; doubles ou triples fous le mème toit. Nons les avons meublées de meil- leures terres que nos conftruétions neuves des années précé- dentes. Nous avons recueilli pour cela, comuine on y eft auto- rifé par le Gouvernement , toutes les couches de bonnes terres dans les maïfons des particuliers fournis à la fouille des Salpé- tiers. Nous y avons ajouté toutes les cerres de démolitions que nous avons pu nous procurer , ainfi que les fonds de fours à chaux, des cendres leflivées, des fonds de marais ou de matres à rouir le chanvre, de la poudre de tan & de chaux éteinte, retirés des tanneries, &c. Toutes ces matières bien mêlces & encore améliorées par l'habitation & par la culture, dans nos der- niers établifemens, feront fans doute d’un produit plus abondant & plus prompt que les terres neuves, froides & compaétes des premiers établifiemens dont nous avons rendu compte. Nous avons élevé, par-tout où nous avons pu le faire , atte- nant nos bâtimens, des appentis en bois, recouverts en tuile : efpèce de conftruétions très-fimples, très-économiques, & fur-tout très-commodes dans ces fortes d’entreprifes. Elles fervent à mettre en dépôt, en fermentation toutes les matières ou fécondantes où ameubliffantes , dont on a befoin pour la for- mation des couches, pour leur culture, pour leurs arrofages : on y place les laboratoires , les cuves à lefiver , les fourneaux à évaporer , les vaïfleaux pour la criftallifation, les uftenfiles & les matières pour le travail des eaux mères : on y place aufli ce qui eft relatit à l'Art du Salinier, que nous avons tant recom- mandé , pour plus grande économie, de joindre toujours à l'Art du Salpêtrier. Le furplus du cerrein couvert par ces appen- us, peut être employé à des couches, à des murs , à des prya- mides & à des fofles d’eflai, comme nous le pratiquons; voulant enfuite nous fervir de ces pctires épreuves recherchées & des teires qui en proviennent , pour améliorer Le fonds des grandes nitriéres-berveries, Ti 148 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: Enfin, nous avons par-tout & toujours cherché à joindre l'exemple au précepte, pour remplir les demandes de l'Aca- démie & les vûes du Gouvernement. Nous défirons, pour le foulagement des Peuples opprimés & vexés par les fouilles , que nos établiffemens , sil ne fe trouve pas de meilleure mc- thode, foient bientôt imités & multipliés. Nous avons fait voir que ce genre d'entreprife, rout-à-fait analogue à l'économie & à l'induftrie rurale, très facilement praticable par les Commu- nautés & par les particuliers , pouvoit être , jufqu'à un certain point, fecondé par des fecours que l'Etat a fous la main. On doit croire que, fous le règne de la Bienfaifance éclairée par les Savans, ces fecours peu difpendieux feront mis en ufage. (X 3ÿ x ARS 1/ = MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 149 RÉSUMÉ GÉNÉRAL Du Mémoire & des Supplemens. DÉCEMBRE 1782. ] PEAR SE de l'atmofphère, ébauchée dans un autre Mc- moire (*), ctoit le premier pas à faire pour parvenir à des connoïflances précifes fur la formation du Salpêtre. L'armof- phère porte par-tout le germe & les élémens de ce fel, mais en des degrés ou rapports de concentration bien différens , fuivant les divers quartiers, ou les différentes révolutions de cet océan vaporeux. Cerre vapeur atmofphérique, outre les hété- rogénéités de tout genre qu'elle tient difloutes ou fufpendues dans fon fein, eft eflentiellement compofée de deux fluides très-diftinéts , ou plutôt d’un feul fluide dans deux états bien différens. La partie refpirable de ce fluide, faifant à peu près les de la mafle totale atmofphérique, ne concourt point direétement & immédiatement à la nitrification. [l entreroit peut-être dans la folution ultérieure de notre problème, de favoir fi cette partie doit être, fuivant l'échelle ordinaire des êtres chimiques, regar- dée comme élémentaire ; ou bien fi des faits chuniques aflez probables, récemment obfervés, autorifent à croire que.4ans l'ouvrage de la Narure, elle eft un mixte du premier Jrdre » réfultant d’une combinaïfon de l'eau & du feu prinrpes "07 qu'il en foit, cette portion d’air atmofphérique cefpirabie , que Jon appelle auffi air du feu, air déphlogiftique ; 2* vital , sn n’eft récilement propre à la combinaifon nitretié que)parson aptitude éminente à faifir, par voie de diflolution la fubftance inflammable qui fe dégage des corps en purs tanrn ù ue faturer jufqu'à un certain point. CGfteu dans des dcr ne Fair déphlogiftiqué, avec le = > —— 1ouloufe en 1778. (A Paris, chez Didot), r$o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. eft au furplus une fource féconde de produits différens , foi dans les procédés de l'Art, foit dans ceux de la Nature. L'autre partie de l'air atmofphérique , dont l'air refpirable a été, ou fouftrait, ou corrompu par quelque procédé phlogifticant, eft ce qu'on peut appeler du nom générique d’arr phlogiflique’, d'air mephiife, de diverfes manières. Dans cette efpèce de mofette atmofphérique habituelle, fe trouvent pêle - mêle les matériaux propres à la nitrification , fournis par les débris vola- tils des corps organiques pourriflans, & les débris d’autres décoin- pofitions fervant à la génération d’autres fels. Plus ces fortes d’airs méphitiques dégagés font près de leurs foyers, plus elles font caraëtérifces , concentrées, & géncratrices de tels ou cels corps falins. Plus elles s’en éloignent & fe répandent dans les torrens de l’atmofphère , plus elles s’afloibliflent , fe dcna- turent & sidentifient. L'examen de ces différentes mofettes, dans leur état d’in- tégrité, de concentration; celui de leur mélange , de leur dilution, de leurs mutations, dans le fein de l'air atmofphé- rique ; celui enfin des compofés falins ou faliniformes qui peu- vent en réfulter dans l’un & l’autre état, deviendra fans doute un vafte fujet de recherches pour les Chimiftes, jaloux de con- noître les grands procédés de la Nature, Le réfultat fom- maire de ces recherches , fera que l'air, dans tous fes étars dégénérés, combinés, modifiés, fe fixant à des matrices ter- reufes sropres, cft le vrai principe général conftitutif de la falinité ÿ -smme le Auide éleétrique, qu'il ne faut pas non plus regarde romme fimple & homogène, paroît être, dans fes combinaifons avec des bafes particulières , le principe eflen- uel, caraététftique de la métallicité; comme l'alliage de ces deux clémens , Gns cefle abforbés par l'organifme vivant, fournit, dans cette texture a , la véritable fubftance fon- damenrale des 1, Ar ï F5 IX : : * crétions ee &e & " végétaux ; celle de leurs fe- Il peut donc Îe former dans . 4 divers genres, celui du foufre, celui du phohgre des acides de avons dit quil sy forme de l'acide nitreux & de l'acräe”"nHs MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. IST rin; mais il paroït que ces générations, dans le fein de l'at- mofphère, ne font en quelque forte que locales, acciden- celles & _pañagères ; que leurs produits deviennent l'aliment des météores ignés, ou font entraînés par les métcores aqueux & décompofes en partie ; comme les fels engendrés dans les entrailles de la terre & portés à fa furface par les fources , font détruits par le mouvement des eaux extérieures & par le contat de l'air; comme aufli, dans d’autres circonftances, une partie de ces fubftances enfouies devient la proie des feux fouterrains. Au furplus, d'après ce que nous avons prouvé à l'égard du Salpètre , il paroït que la diverfité dans la génération des autres fels , foit dans l'atmofphère, foit dans la terre, foit dans les êtres organiques , tient bien plus à la dfféence des mo- fetres aériennes , d'origine végétale, animale , minérale ou mixte, qu'à celle des bafes ou matrices dans lefquelles s'achè- vent ces générations. Mais outre ces matrices, toujours nécef- faires à la confection des acides, & à leur abforption » pour former des fels neutres, dont l'origine paroît toujours être à bafes terreufes, comme nous l'avons dit pour le Salpêtre , il faut bien admettre d’autres générations fpontanées de ces mêmes acides, dans les combinaïfons de matières combuf- ribles , tels que les foufres , les phofphores , les bitumes , les réfines, &c. ; combinaifons dans iefquelles on retrouve mani- feftement un principe acide, que neutralife toujours une fubf- tance ignefcible plus ou moins compofce. Le premier élément , l'élément eflentiel de toute falinité , eft donc l'a, qui » altéré par le feu & plus ou moins fur chargé de ce principe, donne naïflance à la plus fimple des combinaïfons; falines. C’eft cette combinaifon première, dans . lordre Hatuiele que nous avons, d'après des données très- probables de l'Arc, difingue en acide aéré & en acide igné , fuivant la prédominance des deux principes qui conftituent cette mxtion umverfelle. Avoir fait connoître l'influence de l'air & du feu principes, dégagés des corps en putréfaétion, & le concours de l'air atmofphérique , pour la génération du 152 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, Salpêtre, c'eft avoir fait un grand pas pour connoître l’ori- gine de vous les autres fels. Connoïlez d’abord les grands foyers, les domaines naturels des uns & des autres ; les baf- fins des lacs & des mers, les couches fuperficielles & inte- rieures des continens, celles de l'atmofphère , les êtres Orga- niques, & la correfpondance intime de tout cela ; voyez auili, d'un autre côté, à raïfon de cette correfpondance générale, la génération confufe , le tranfport continuel, dans ces diférens départemens du globe, des matières falines de tout genre; étudiez les circonftances de leur formation habituelle & conf tante, ou accidentelle & pañlagère ; diftinguez les bafes ou les matrices terreufes auxquelles s'attache & où fe développe, pour former-les acides & les alkalis, le germe falin élémentaire, tel que je l'ai défini: vous aurez, par cette fuite d'obferva- tions & d'expériences, conformes à celles que j'ai faites fur le Salpêtre , le complément des mêmes connoïflances fur les autres fels; & ces connoïflances réunies mèneront au delà du terme auquel je me fuis arrété. De cette étude fur les fels , toute fondée fur le pneumatifme chimique , & totalement étrangère à celui des Phyficiens , fi on pañle à l'étude des phénomènes éleétriques & des phéno- mènes phofphoriques , tels que la Nature les produits, & tels que l'Art cherche à les imiter ; fi on parvient à faifir les points de rapprochement, de fimilitude , des uns & des autres, on nc fera peut-être pas loin d'obtenir fur les métaux , en con- fiderant leurs matrices & leurs foyers, les memes notions que j'ai données fur les fels : peut-être auffi , d’après ces apperçus, ne fera-ce pas une entreprife téméraire que de chercher à imiter les procédés de la Nature dans la formation de ceux-là, comme je l'ai tenté avec fuccès pour ceux-ci. Le fer n'eft:l pe aux autres métaux, ce que le Salpètre eft aux autres fels 2 | paroïît que c’eft la première, la plus fimple, comme la plus commune des combinaifons métalliques. Jai dit, non fans quelques preuves , qu'elle fe forme dans les êtres organiques, animaux & végétaux. J'ai préfumé qu'elle n’eft pas indifférente à leur organifation , à leur vie, Sa fingulière propriété magné- tique MÉMOIRES SUK LA FORMATION DU SALPÉTRE. 153 tique & fon extrême turgefcence de principe inflammable , ferviront à expliquer fon origine , & donneront des idées fur les autres métaux : à peu près comme l'inflammabilité explo- five du Salpètie, & la prodigieule cruption d'air déphlogit- tiqué qui réfulte de fon analyle, ont éclairé fur la commpo- fiion de cette fubftance faline , & jeté du jour fur celle des autres corps du même ordre. Si, comme je l'ai conjeéturé , tout le Salpêtre qui fe forme naturellement ou artificiellement , commence par étre à bafe terreufe ; fi, d’un autre côté , une partie de l'alkah deftiné à compléter ce fel, s'engendre aufli dans les mêmes foyers & avec les mêmes matériaux, débris de la putréfaétion , cout l'arc des nitrières doit tendre à hâter la défunion de ces matériaux ; à opérer leur concentration; à empécher leur deftruétion ou leur diflipation; à favorifer leur combinaïfon nouvelle , en leur préfentant des bafes convenables , très-acceffibles , ayant beau- coup de furface, &c. : la nitrification, après cela, cft l'ou- vrage de la Nature , & le temps qu’elle emploie à le com- pléter, eft plus ou moins confidérable. C’eft une règle génc- rale, que les combinaifons chimiques s’opèrent à raïfon des fu- faces de leurs ingrédiens ; qu'elles font facilitées, accélérées par l'état de tenuité extrême, de fluidité, de vapeurs, par un certain degré de mouvement, d'échauflement, &c. Aünfi la nitrification en grand iroit bien plus vite, fi, comme dans les expériences en petit, on pouvoit remplir ces différentes conditions; fi on pouvoit tenir, dans le fein de l'air méphitique nittifiant, les matrices terreufes abforbantes en état de volati- lifation, de trufion, ou de folution conftantes. La formation du nitre terreux dans latmofphère où fe trouvent, comme nous l'avons dit, les matériaux néceflaires, eft fans doute bien plus prompte qu'à la furface de la terre. On fait combien la calci- nation fpontance ou la rouille de certains métaux à l'air libre, peut être accélérée par des moyens analogues à ceux qui hâtent la nitrification. On fait aufli que la chaux ordinaire, dont le retour à l'état approchant de celui de terre calcaire, eft EXtrÈ— mement lent par la fimple expoftion à l'ait atmofphérique , ÿ 154 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. éprouve au contraire très-promprement cette converfion, fi la chaux , fous forme pulvérulente , & rendue volatile par l’agita- tion, eft expofce dans un armofphère d'air fixe, & plus encore fi, à labord & au contaét de cer air fixe, la chaux eft préfentée difloute. C’eft à peu près l'image de ce qui fe pañle dans l'œu- vre de la nitrification, ou à l'air atmofpherique feul, ou à Pair atmofphérique chargé du méphitifme putride. Mais la réinté- gration de la chaux en terre caicaire , par le feul accès long- temps continue de l'air atmofphérique, eft-elle due à l'abforp- tion de l'air fixe préexiftanc dans le fein de ce fluide ; ou bien, vient-elle de ce que le principe igné contenu dans la chaux vive, convertit , à la longue, en air fixe, comme toute autre matière ignefcible , l'air refpirable ou dephlogiftique de l'atmofphère ? Il eft bien remarquabie que la chaux calcaire cefle d’être chaux par fon expoñition à l'air, & que, par le même moyen, quelques fubftances métalliques foient au contraire réduites en une efpèce de chaux. Dans un temps où la Chimie s’eft tant exercée fur les chaux calcaires & métalliques , on n’a pas aflez éclairci la com- paraïfon des propriétés chimiques de ces deux efpèces de chaux , & en général des chaux faites par le feu, par l'air & par les fels. Une recherche plus fuivie auroit jeté plus de jour fur l'origine des alkalis. La formation inconteftable des alkalis par le feu, n’eft-elle pas, à certains égards, comparable à la calcination des métaux par ce même agent? & la calcination fpontance de ceux-ci à l'air armofphérique , n'a-t-elle pas aufi quelques rapports avec la formation de ceux-là dans le fein de l'air méphitique ? Si la combuftion alkalife l'acide conftituant des matières organiques, végétales & animales, pourquoi la putréfaction ne le feroit- elle pas? Celle-ci, dans fa marche, préfente deux époques ou deux manières d’être, l'acefcence & lalkalefcence, quelquefois très-diftinctes l’une de l’autre , d'autrefois mélées & confondues. Son produit volatil, fpontané , aériforme, doit être également, avons-nous dit, confidére fous deux afpeéts différens, celui de méphitifme aéré, & celui de méphitifme igné, réfultanc de la combinaifon diverfe des mêmes principes. À cés différences d'e- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 195 poques , de produits, de combinaifons , dans le fein de Ja putré- faction & de l'air atmofphérique qui en reçoit les débris , tient la génération double & non fimultanée des acides & des “res Il paroit au moins que dans la géncration du Salpèrre , celle de l'acide précède coujours celle de l'alkali. Il paroît aufli qu'au terme même de la putréfaétion radicale , la formation de l'alkali n'eit jamais dans une proportion égale à celle de l'acide. Mais l'Art ne pourroit-il pas établir cette proportion dans les nitrières, en dirigeant, d’après ces vües particulières, la nitification ; ou bien, fera-t-on toujours obligé , dans les travaux des ne de fuppléer à a .ce qui manque à la proportion d’alk ah, foit engendré , foit développé durant la à purréraéti on des animaux, par celui qu'on retire de l'incinération des végétaux? Ne pour- roit-on pas aufli, en empêchant ou Rte la formation conftante & très- remarquable des fels marins, par-rout où fe forment les fels nitreux, augmenter , par des man ipulations ou des additions, la quantité FA ces derniers ? Les fels nitreux & marins, que nous croyons toujours terreux à leur naïflance , devenane alkalins par une forte de maturation des nirières ( puifqu' en efler les anciennes font pius riches que les récentes en fels neutres à baies alkalines), feroitil poflible d'accélérer cet évènement, & ne trouveroit-on pas que la fubftance méme des {els cerreux eft fufceprible de lalkalifer ? Quoique ces queftions appartiennent dircétement au pro- blême de la formation du Salpétre , cependant on ne s’eft pas OCCUpE fpécialement à à en donner la folution; mais des vüûes & des réfulrars contenus dans ce Mémoire doivent y conduire. La connoiflance des mofettes putrides & des matrices tét- reufes, propres à la génération des deux principes du Salpètre ; celle du concours de l'air atmofphérique , fervant d'intermède & d'ingrédient dans cette génération ; celle des foyers & des LUE qui y font an les ; ces connoïflances, dis- je, étant une fois bien acquifes, le refte n'eft qu'accefloire & en quelque forte un corollaire. Parmi ces connoïfflances, il en eft une qui n'a point encote été fuffifamment établie : c'eft celle qui eft relative à l'expo- Va 156 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. fiion des nitrières, la plus avantageufe à leur fécondation. L'ufage le plus généralement obfervé pour lexpofition au nord , eft dans les nitrières domeftiques du canton d’Appenyell en Suifle. Ce font des efpèces de caves ou de fofles prati- quées fous les étables , & dont la partie la plus ouverte re- garde le nord. La crainte de diffiper , par un courant d'air chaud , les exhalaïfons nitrifiantes, fait éviter l'expofition au midi. Cet ufage, que l'on à aufli quelquefois adopté ailleurs, fembleroit juftifier avis, peut-être plus théorique que pra- tique , de quelques Connoifleurs, qui en effer eft en faveur de lexpofition au nord. Mais cet avis n’a jamais été motivé de manière à faire une règle générale : ce n’a été jufqu'à préfent qu'un point de routine aveugle, dont on s'eft fouvent écarté dans la conftruétion des nitrières. Cependant, d'après notre théorie, on conçoit au moins que lexpofñtion n’eft pas indifférente : car fi, d'un côte, l'air moite & tiède du midi peut aider la putréfation, & par conféquent la génération de l'air méphitique; l'air fec & froid du nord doit favorifer l'évaporation, toujours très- utile, de l'humidité fuperflue, & rendre par-là plus fréquent le befoin des arrofages fécondans. Mais d'un autre côté, ces deux conftitutions d’air oppofées, qui font, à quelques égards, contraires à la nirification, foit en arrêtant, par l'excès du froid , la marche de la putréfaétion, foit en difi- pant fes produits par lexcès de la chaleur, ne peuvent- elles pas devenir profitables à cette opération, en portant dans les nicrières, par léurs qualités dominantes les plus habituelles, une certaine quantité ou d’air méphitique, ou d'air déphlogiftiqué, deux principes élémentaires de l'acide pitreux? Suivant ces vües, toutes fondées fur l’obfervation de quelques faits chimiques, n'eft-il pas pofible dans le gouvernement des nitrières artificielles, de tourner à leur profit & le dégagement de l'air méphitique intérieur , & l'accès de l'air atmofphérique extérieur, celui du nord, ou celui du midi, en variant toutefois , felon l'efpèce & la forme des nitrières , cette partie de leur pratique? / MÉMoïREs SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 157 Mais pour connoïtre mieux les influences de lair atmof- phcrique dans la formation du Salpétre , il faudroit une lons gue fuite d'expériences , qui, à €e que Le crois, n'ont pas encore été tentées. On à dit que la RIRE plus prompte & plus abondante durant les équinoxes , que dan- les autres temps de l'année ; mais cette aflertion ne porte- celle pas ‘uniquement fur ce que l’on a cru que l'expofition au nord étoit la plus favorable à cette opération , & fur ce que , pour l'ordinaire , dans les faifons dese équinoxes, les vents de nord font les Te ? Quoi qu'il en foit , pour éclaircir ce point de doctrine relatif aux faifons & aux expofitions 5 il faudroit non feulement connoître les proportions de fels nitreux ou marins qui fe trouvent naturellement dans la pluie & les autres météores aqueux, pendant le cours de plufieurs années; mais encore favoir quelles feroient les proportions de ces deux fels, fuivanties différentesexpofitions des mêmes abforbans terreux, livrés aux courans de l'atmofphère , pendant les diffc- rentes fufons de l’année. De telies expériences comparées vau- droient bien en Chimie, ce que valent en Phyfique les obler- vations météorologiques, Il eft certain que le méphitifme ou le dépurement de lair atmofphérique, relativement à la nitrification , varient beau- coup, comme ils le font par rapport à la produétion des ma- ladies qui tiennent à cet élément. La nitrification fpontance qui fe fait à la furface de la terre & dans l'atmofphere, n’eft-elle pas un moyen naturel de dépuration pour ce dernier, par l'abforption de Fair méphitique , comme la décompofition fpontanée du nitre atmofphérique en eft un de réintégration par le dégagement de fair déphlogiftiqué ? De même auffi la végération | , en employant, à à titre d'engrais, certaines Emana- tions mcphitiques , purifie law, comme les exhalaïfons des plantes pendant le jour le font en reftituant de Fair déphi o- giftiqué; tandis que pendant la nuit les exhalaïfons excrémen- teufes des végétaux paroïflent redevenir, par leur combi- naifon avec de l'air pur, une forte d'engrais nitrifiant: mais il ne faut pas croire que cette mofette vegétale nocturne 158 Mémoires sUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. en foit une pour les hommes, comme on a voulu le dire. Enfin, plus on confidérera que les grandes nitrières de la Na- ture, à la futace du globe, bien plus riches dans certains pays & dans certains ternps que dans d’autres, le font en raifon du méphiiline que la terre fournit à l'aumolphere ; plus on ctudiera la caufe des grandes différences qui s’oblervent à cer égard dans certains climats , par exemple , dans l'Inde, fur les côres de la mer Pacifique, près de Lima, &c.; & ce qui le pale fous nos yeux dans notre continent, à la furface des terres qui fervent depârurages , ou quicprouvent d’autres cul- cures , &c.; plus on fe perluadera que dans les nitrières artificiel les, la nature &le gouvernement de l'air font un article important. Mais il en eft un autre qui n’exige pas moins d'attention dans les établiflemens à Salpètre ; c'eit ce qui concerne lapprovifionnement, l'appropriation, la difpofition des matières terreufes, abforbantes, plus ou moins fufceptibles de fe nicifñicr. On a vu qu'à cet égard la terre calcaire ent le premier rang ; elle eft plus avide de combinaifons nouvelles, & con- tient, dans fon état naturel, plus d'air & de feu déjà com- binés. C’eft dans cette matrice même que saccomplit Îa ‘combinaïfon nitreufe, par labord de la mofete puide, mêlée à l'air atmofphérique. La terre calcaire eft ces-abon- dante à la furface & dans l'intérieur du globe; mais elle n'eft pas toujours, à beaucoup près, dans un état favorable À la nitrification. Celui de craie ou de tuf calcaire y eft éminemment propre à tous égards. Celui de fpah ou de pierres calcaires, dont les varictés font innombrables, exige des préparations qui ont été indiquées. La calcination par le feu éloigne à la vérité ces fubftances de leur aptitude à fe nicrifier; mais leur expofition à l'air atmofphérique & plus en- core à l'air méphitique , les rapproche de l'état de craie. C’eft pour cela que les vieux mortiers , les vieux cimens , fonc plus nitrifiables que les nouveaux; c’eft aufli à la réabforption d'un nouvel air fixe qu'ils doivent leur folidite (7. d'Arcet), & leur décompofñtion , infiniment lente, à l'air libre , méphitifé , vient en partie de leur nitrification fpontance. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 159 L’acide de l'air porte donc dans les terres, en s’y combi- nant, un premier germe favorable à cette opération, & l'acide du feu paroïit y être contraire. Les autres acides, celui du foufre, celui du phofphore, celui des fpaths, com- binés avec la terre calcaire, la terre animale, la terre fedli- tienne, la terre alumimneufe , &e. ; toutes ces combinaïfons, dis-je , qui forment la clafle immenfe des corps falins-terreux ou terreux-falins , gypfeux, fpathiques , argileux , &c. loin de fervir, comme on l'a dit, par la prétendue tranfmutation de leurs acides, au proccde de la nitrification , y font abfo- lument réfraétaires. Si elles peuvent y fournir quelque chofe , ce n'eft qua raïfon de l'excédent de leurs bafes cerreufes par rap- port à ces acides différens ; alors cela revient à ce Je nous avons prouve : favoir, que ces terres dégagées & miles à nu , font fufceptibles de fe nitrifier. C’eft ainfi que les platres , les argiles , les fpaths même vitrioliques & phofphoriques , ex- pofés à un a nitrifiant, peuvent fe decompofer en païtie ; par la méme raifon que la terre , prefque toute faline, des concrétions ofleufes & calculeufes des animaux, fe prête à la nitrification : mais il faut rappeler ici que ces décompofitions partielles peuvent être aufli produites par le moyen des doubles affinités qui sexercent entre les fels vitrioliques & phofpho- riques lorfqu'ils trouvent à s’alkalifer , & les fels nirreux ou marins terreux qui fe forment d'un autre côté. Au furplus, vout cela ne concourt que très-fecondairement à lœuvre de la nitrification. Après en avoir fait connoïître les grands foyers, les grands agens & les matériaux véritables, pour réfoudre le problème chimique, nous avons indiqué lufage que l'on pouvoit faire de ces connoïflances, pour remplir le but de lAdminiftration dans l'établifiement des nitrières. C'eft fur- tout dans lexpoñtion & la difpofition de ces matériaux, que confifte l'art du Salpètrier, & on peut pratiquer pour cela bien des méthodes diflérentes. Nous avons préferé celle des étables, comme étant les meilleurs laboratoires à Salpétre, & en méme temps les plus économiques & les plus analc- 160 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. gues à l'induftrie rurale. Nous avons donné les raifons de cette préférence, & le fuccès répond à notre attente. uoique nous ayons, par une fuite de ces mêmes raifons , adopté & confeille les aitriéres-bergeries, domeftiques ou com- munales, cependant on pourroit également faire fervir aux mêmes ufages les érables de tout autre bctail, en y appot- tant les différences de manipulation que les circonftances exi- geroient, Mais fi ces méthodes préfentoient des difiicultés que nous n'ayons pas prévues; fi l'on n’en trouvoit pas de meilleures qu'on pûr leur fubfticuer fans inconvénient, & livrer aux fpécu- lations du peuple ; enfin, fi le Gouvernement François ne pouvoit accomplir à cet égard fes vües bienfaifantes & poli- tiques, fans fe mettre encore à la tête des établiffemens à Salpètre | comme il a déjà commencé à le faire, & comme cela fe pratique dans d’autres Etats : on pourroit propofer un autre moyen moins couteux , de rendre aufli produétifs qu'ils peuvent l'être, fuivant la méthode Sucdoife ou autre analogue, les hangars adoptés jufqu'à préfent. On établiroit ces derniers pour étre fecondés & cultivés par la Cavalerie de France, dans fes garnifons ou dans fes quartiers habituels & réglés. On pratiqueroit pour cela des conftruétions fuffifantes en bois & en terre, attenant les écuries & même communiquant avec elles, sil éroic poflible ; clevant d'ailleurs par-tout où cela feroït praticable, des fimples halliers, efpèce de conftruétion très- économique. On meubleroit tous ces bâtimens de verres choi- lies & préparées, comme nous l'avons dit ci-deflus ; préférant toujours, pour les mettre en culture , les petites couches , les petices pyramides, aux mafles énormes des nicrières ordinaires & les murs en terre à Salpètre, à toute autre clôture. D'après les proportions que nous avons adopiées & mifes en pratique , chaque cent chevaux fufliroient pour féconder , tous les ans, de trente à quarante mille pieds cubes de terre , fars aucun emploi de fumier, & avec les feuls excrémens tant folides uc fluides de ces animaux. Ces excrémens très-faciles à recueil- Ur & à mettre en œuvre, font de leur nature /ém-animale , & perf MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. t6r par leur atténuation naturelle, éminemment difpofés à une fer- mentation active & à la nitrification , indépendamment du nitre tout formé qu'ils contiennent. On ajouteroit facilement à cela, pour les arrofages , les eaux de fumier , contenant auf du SAlpétrer & toujours abondantes en pareilles pofitions, avec les eaux de lavage des écuries. On y méleroit encore, pour les rendre plus fortes, certaines quantités de crotin frais, & quel- que peu de chaux éteinte. Enfin, fur-tout cela, on fe compor- teroic d’ après les principes établis ci-deflus. Quant à la main-d'œuvre, quoique très-peu couteufe, de cette culture , elle pourroit, vu fa fimplicite & fa facilité, être comprife dans le fervice militaire, pour en diminuer encore les frais ; on mettroit feulement à la tête de chaque érabliflement un Maître Salpêtrier , ou même un Invalide dreflc à cela, fur- cout pour l'exploitation des terres falpétrées, & pour les travaux ultérieurs du laboratoire. En calculant ce que l'on pourroït faire d’écabliffemens de ce genre dans quinze ou vingt poftes fixes de Cavalerie, & en portant à une livre de Salpétre feulement eftimation du pied cube, ou même du quintal de terres cultivées, exploitables tous les deux ou trois ans, on verra que ces ritrières-cava- lerie remplaceroient à à peu près, pour le produit cotal & an- nuel , les wicrières-bergeries, dont il a ét queftion dans ce Métone Il n'eft pas douteux que l'on ne puifle, par des mélanges & des manipulations plus recherchées , porter aun plus haut degré la nirification dans des établiflemens particuliers. Ce f{eroit encore une autre manière , plus chinique , de réfoudre le probléme en queftion , fans recourir aux expédiens écono- miques précédens; mais il faut peu compter fur cette manière, au moins pour en faire l'application dans les travaux en grand, & pour perpétuer le fervice de l'Etat. Cependant il eft des pofitions, favorables pour le choix & l'approvifionnement des matériaux , dans lefquelles les en- treprifes de nitrières , fans le fecours des étables , & fans aucun emploi de matières deftinces à l'engrais des terres, pour- X 162 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. roient devenir très-profitables. Elles feroient telles , fous quelque forme qu'on les établie, dans les pays abondans en craie ou en tuf calcaire ; l'Ile de France, la Champagne, la Tou- raine , les Falaifes de Normandie, &c… Pour rendre ces matières premières plus fécondes, ou pour féconder dans d’autres pays celles qui font moins propres, mélez-y des terres d'atelie:s ou d'habitation, non leflivées; ajoutez-y des gravois & des plâtras, fi vous en avez; des coquillages de toute cfpèce, concaflés , comme étant à la fois fubftances cal caires & putrefcibles ; ajoutez-y encore, à ce dernier égard , du fang & des crotins, qui font matières fécondantes préfe- rables à toutes celles dont on a vu précédemment le détail. Difpofez ces mélanges, faits avec foin, de manière à éten- dre leur furface, & pour que l'air atmofphérique les mouille, de toute part. Mettez-les en petites couches, en petits tas, & mieux encore en murs à torchis, à pifay , de 18 à 20 pouces d'épaifleur & de diftance. Jetez dans les intervalles & de rous côtes des matières pourriflantes , mais fur-tout du fang , qui, pat fon extrême turgefcence d'air & de feu, par fa décompoli- tion facile , aGtive & durable , eft éminemment propre à cela. Faites, au furplus, fi vous le pouvez , fi le local le permet, des nitrières à plufeurs étages, des efpèces de bâtimens de graduation, des murailles en moëllons de tufou de craie ; efpacés & difpofés de façon à fe prêter facilement à la diftribution, à la difperfion & à l'imbibition des eaux & des vapeurs putrides. En un mot, raflemblez dans ces vrais laboraroires à Salpétre, recou- verts le plus économiquement qu'il fera poflible , des matrices terreufes bien appropriées , fans cefle environnées , pénétrées d'air méphitique putride & d'air atmofphérique , avec une humeétation & une température convenables. Du refte, la nitrification s'opérera dans ces terres, ainfi aérées, humectées, échauffées, comme la vitriolifaion sopère dans les pyrites traitées de la même manière. Quant à l'exploitation des terres, fuffifamment falpétrées , par le laps de temps, elle devra varier fuivant les circonf- tances : l'induftrie de chaque Entrepreneur, aidée d’ailleurs MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 163 des notions pratiques que l’on à données fur cela, fuffira bien pour diriger cette partie du travail. Il y a cependant, pour améliorer cette récolte, un fait-pratique majeur, fur lequel les Chimiftes ont déja éclairé la routine des Salpêtriers; mais fur lequel aufli ceux-là ont peut-être pouflé trop loin la réforme dans les ateliers à Salpêtre : c'eft pour ce qui concerne l'emploi du falin ou de la potafle dans le travail des eaux mères. On fait en général ce qui doit réfulrer de ce mélange, & on ne peut douter que fon adoption ne foit propre à augmenter la récolte du Salpêtre. Mais de nouvelles expériences ont donné fur cela de nouvelles lumières. Voici quels ont été les rélultats des miennes. Elles ont eu pour but, annoncé dans mon Mémoire , en 1780, de diminuer la con- fommation de la potafle , & de connoitre plus particulièrement l'office de cette fubftance faline dans la précipitation des eaux « mères. Quoique ces dernières varient beaucoup en quantité & en qualité dans les terres des différentes nitrières, cependant elles contiennent toujours un mélange de fels nitreux & marins tet- reux , dont la plus grande partie eft à bafe calcaire, le-refte à bafe de magnéfie. Peut-être y retrouveroit-on , en y regardant de plus près, quelque peu de terre alumineufe , au moins dans certaines poñtions. Il s'y trouve enfin quelques reftes de vrai pire & de fel marin, qui fe font refufés aux premières criftalli- fations, mais qui font étrangers à la compolition des eaux mères, comme telles. Tout cela eft enveloppé d'une matière grafle indcfinic. Le but du Salpêtrier , en traitant ces eaux meres avec un fel alkali, étant uniquement de précipiter les nitres terreux pour en former du Salpêtre véritable, le furplus de cer alkali, em- ployé pour décompofer les fels marins cerreux , eft en pure perte pour lopération du Salpétrier. Peut-on éviter cette pérte ou la rendre moindre? N'en exifte-til pas encore une autre, dans la confommation du fel alkali, au delà même de ce qu'il en faut pour précipiter les deux efpèces de fels nitreux & X ij 164 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE: matins, fans que le précipitant furabonde ? Enfin, dans cette précipitation, ne fe pafle-t-il pas , foit en évaporation , foit en décompofition , des chofes qui nuifent d'autant à la quantité du produit en Salpètre que l’on a en vue? À ces deux dernières queftions , on ne peut encore répondre que par des conjectures & quelques faits très-probables : leur folution ultérieure tient à une analyfe complète des eaux mères, laquelle eft peut-être lopération de Chimie la plus compliquée & la plus difficile. Quant à la première queftion, relative à l'emploi d'une moindre quantité de potafle , elle me paroït décidée, pour le bénéfice des Salpètriers , d’après des réfultats d'expériences déjà entrevus par quelques Chimiftes, & qui font totalement con- formes aux miens. Ces nouveaux réfulrats prouvent que, jufqu'à ce jour, nos connoïfances fur l’aétion des doubles affinités entre les fels , étoient reftées très-imparfaites. Non feulement les fels vitrioliques & phofphoriques à bafes alkalines, précipitent les fels nitreux & marins à bafes terreufes, en changeant récipro- quement de bafes, comme nous l'avons rapporté ci-deflüs ; mais en outre, les fels nitreux à bafes terreufes décompofent les fe's marins à bafes alkalines. 11 y à bien quelques diflérences à vous ces égards, de précipiations réciproques , entre les fels vitrioliques , phofphoriques, nitreux & marins, fuivant qu'ils font pourvus de telles ou telles bafes d’alkalis, végétal, miné- ral ou volaul, ou bien de telles ou telles bafes de terres, cal- caire , fedlitienne ou autre ; mais de ces différences, toutes intereflantes pour la Chimie, la feule dont la connoiflance foit réellement utile aux Salpétriers, eft celle-ci. Dans la précipitation des eaux mères, par le moyen de la potaile, fi ce fel alkali végétal ne porte pas de préférence fon ation fur le fel nitreux à bafe terreufe , & fielle s'exerce indiftinétement & inftantanément fur le fel marin terreux (ce qui eft très-difficile à decider) ; il eft bien certain que le fel fébrifuge réfulrant de la précipitation de ce dernier {el, fait à fon tour fonétion de précipitant à l'égard du nitre ter- reux fubfiftant dans la liqueur. Ain on ne doit employer dans. MémMorREs SÛR LA FORMATION DU SAtPËTRE. 16$ ce travail que la quantité de potafle néceflaire à la faturation du nitre à bafe terreufe, pour le convertir en vrai Salpètre ; & cette quantité ne doit pas être toujours la même. Dans des expériences en petit , faites avec des eaux mères artificielles , on peut obtenir féparément ; par deux ou trois précipitations & criftallifations fucceflives, là totalire du Sal pêtre & du fel fébrifuge. Maïs en travaillant à la fois fur trois ou quatre cents pintes d'eau mère naturelle, je n'ai pas auffi bien réufli; puifque dans chacune des trois opérations, par précipitation & criftallifation , j'ai retiré péle-méle du Sal- pêtre & du fel fébrifuge : cependant le premier de ces fels étoit dominant dans les deux premières cuites, & l’autre dans la troïfième. Cela tient probablement à ce que la matière grafle des eaux mères diminue lation de FPacide nitreux, encore engagé dans fa bafe terreufe, fur l’alkali végétal du fel marin fébrifuge : mais ce dernier fel, lorfqu'il réfulte de l'emploi d'une trop grande quantité de potafle, pour précipiter le nitre terreux, contenu dans l’eau mère, ou d’une precipi- tation défectueufe, quant au but d'en obtenir feulement le Salpêtre, peut fervir néanmoins à précipiter d'autres eaux mères , au lieu de potaffe. Je fuis venu à bout de retirer, fous forme de vrai nitre, tout le fel nitreux à bafe terreufe, contenu dans des eaux mères factices, en les faïfanr, à plufieurs reprifes, cuire avec du fel fébrifuge. J'ai obfervé que, dans ces opérations, le nitre fédlitien fe décompofe plus promp- tement & plus abondamment que le nitre calcaire. J'ai vu, au contraire , qu'en traitant ces mêmes eaux mères avec du fel marin à bafe d’alkali minéral, le nitre calcaire le décompofoit en patie, en lui enlevant fa bafe , pour former du nitre cubique, & que le nitre fédlitien reftoit inta& dans ce mélange. Ces expériences, en faifant voir que laétion de l'acide nitreux fur l'alkali végétal eft bien fupérieure à celle de l'acide marin; prouventen même temps que certe aétion eft aufl plus forte fur cet alkali que fur le minéral. Ce dernier fait eft encore’mieux démontré par la précipitation que le fel de tartre opère fur 166 MÉMOIRES. SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. le nitre cubique, pour le changer en nitre prifmatique. On doit entendre par-à, comment 1l peut fe trouver, ou ne pas fe trouver , fuivant les circonftances, de nitre à bafe natreufe, dans les cuices des Salpètriers. Il sy trouve coujours au furplus , non du fel fcbiituge L mais du fel marin véricable, quil eft peut-être impoflible d'en féparer totalement. Enfin, d'apres le réfulcat pofitit & véritablement écono- mique de ces dernières expériences , on doit régler, dans l'exploitation des nitrières , l'emploi de la potafle fur le feul befoin de précipiter le nitre à bafe terreufe. N'y auroitil pas encore plus d'épargne, dans les grands établiflemens, bien uftenfiles, de ne pas faire de la précipitation des eaux mères un travail à part, lequel travail augmente la confommation du bois & la main-d'œuvre? En ajoutant la quantité d’alkali, jugée néceflaire , d'après un premier eflai en petit , aux eaux des leflives, & laïflant dépofer ces eaux dans de grandes cuves, avant de les cuire, n'eviteroit-on pas la décompofi- tion que produit cette cuite fur une partie du nitre terreux ; décompolition en tout comparable à celle qu'éprouvent tou- jours à une chaleur forte & durable tous les fels peu confif- tans, & quieft bien indiquée , tant par l'odeur lixivielle des eaux mères, que par leur continuel dépôt? Ne feroic-il pas également avantageux , comme nous l'avons déjà propolé, de fournir à fur & à mefure une partie de la bafe alkaline ; foit par l'addition de cendres non leflivées dans les couches ; foit par leur arrofage avec des leflives domeftiques , fur-rout aux dernières époques de la nitrification , pour prévenir l’al- tération que paroïfient fubir les {els nitreux qui ne font encore, pour ainf dire, qu'embrionnes dans leurs matrices terreufes? Muis quelque méthode que l'on fuive pour remplir certe partie du travail des Salpétriers , nous répétons qu'il ne peut être que très-utile de réunir aux établiflémens des nivrieres , celui des fulineries , fuivant le plan économique que nous ayons indiqué & pratique. EU UNI 167 QE —————_— RECHERCHES SUR LA FORMATION ET LA MULTIPLICATION DES INT" RVESS. Par M. LorGNA, Colonel des Ingénieurs au fervice de la République de Venife, & Direéleur de l'Ecole Militaire a Werone, Membre des Académies des Sciences de Pérershourg , de Berlin, de Turin, de Bologne, Padoue, Mantoue, Sienne, &c. &c. Correfpondant de l'Académie des Sciences de Paris. On ne doit ni s'aflurer aifément de voir ce que les plus Grands Hommes n’ont pas vu , nien défefpérer entièrement. FoNTENFILE. N.° XXVI:Seconp Concours. | CUS A PAT PERTE ET Des Acides. $. I. Les dégagé de toute enveloppe aqueufe, & féparé de tout mélange étranger à fa nature, étant ce qui fai récllement leflence de tout fel connu, c’eft une de ces fubftances , les plus pures d'entre les fubftances falines , qu'on Nota. On S'appercevra aïfément que ce Mémoire a été rédigé par un Etranger g n'a pas l'habitude d'écrire eni François: cependant les Comimiflaires de l'Aca- émie n’ont pas cru qu'il leur fat permis d'y faire aucun changement, & ils ont mieux aimé laïfler quelques inçorretions de ftyle, que de rifquer d'altérer le fens de l'Auteur, 168 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. eft contraint de ranger entre les matières principes. Elle ne fair à la vérite que % dérober à nos examens dans toutes les occafons faites pour nous en déceler la nature, comme tout ce qui a le caraétère de principe femble le faire foigneu- femenrt. Aisfi nous fommes fi éloignées de connoître inumé- ment fes qualités eflentielles & propres, qu'à l'exception de quelques fels acides concrets que nous avons faïfi, on n’eft pas encore parvenu à retirer des matières minérales , végé- tales & animales, les acides tous purs & traitables en Etre sèche, & à en déméler les parties intégrantes & conftitutives par une convenable décompofition. Ce n’eft que depuis la découverte fingulière du gaz nitreux, & de fes propriétés , qu on a commence à entrevoir que c'étoic l'acide nitreux lui- même qui entroit dans la produétion de ce gaz, & fubifloit par conféquent quelque décompolition, parce qu on ne l'obtient jamais fans le concours de cet acide , & qu'on en peut re- compoler l'acide nitreux lui-même fort facilement. Cependant il s’en falloic bien qu'on püt envifager ce fait, tout feduilant qu'il eft, comme une décompofition complette de l'acide ni- treux, & comme un Er ouvert à l'analyfe des acides en général. I! falloit conftater, r.° qu iln'y avoit pas dans cette opé- ration une décompofition réciproque , une féparation des principes tant du métal que du diflolvant, pour qu'on püt s'aflurer de tenir tout le fluide émané de la feule décompo- fition de l'acide; 2.9 que le gaz nitreux n'étoit pas l'acide nicreux lui-même altéré, modifié dans fa conftitution intégrale, ainfi que la transformation de l'acide nitreux en gaz nitreux, par la féparation de Pair:& la recompolition du gaz nitreux en acide nitreux ; par la réunion de cer air, le fait foupçonner. Ce ce que M. Lafoïbcratout récemment tenté de faire par des expériences exactes & lumineufes, lues à l'Acadcmie Royale l'année 1776. On ne fauroit douter que le mercure, forti de l'opération , ayant été trouvé précifément tel quil y étoit entré , l'émanation retirée de la diflolution ne füt exempte de toute participation des parties conftitutives du mercure , & toute due au diflolyant, On convient encore d'après fes ex- périences , MÉMOIRES SUR LA FORMATION. DU SALPÉTRE. 169 périences, que c’eft maintenant un fait démontré en rigueut , que l'air eft une des parties intécrantes de l'acide nitreux. Mais le gaz, qui joue le rôle principal dans cette émanation, n'y paroiïflant être que comme un compofant completif, ne feroit-il pas la fubftance vraiment eflentielle , qu'il s'agiroit de décompofer? Ce pourroit être l'acide lui-même incomplet, à caufe de l'air qui s'en eft féparé, en fuppofant qu'il n’y eûc rien d’échappé dans cette belle opération, & c'eft ce qui refte à favoir, pour qu'elle puifle étre regardée comme une décompoftion complete de l'acide. Perfonne, à la vérité, n'a plus de droit à ces découvertes ultérieures , que cer ex- cellent Chimifte. Il y a tout lieu d’efpérer que cela nous mettra fur une voie toute nouvelle d’analyfer les acides. $. IL En attendant que cet Arc naiflant fe débrouille, fe per- fectionne , nous fommes encore fort éloignés d’avoir, au fujer des acides quon trouve dans la Nature , des notions” aflez claires & certaines pour y fonder des fyftèmes. Ne crain- droit-on pas de fe laïfler trop légèrement féduire par des appa* rences, par des tranfmutations équivoques , par des obfer vations qui mériteroient bien d'être répetces & muliplices, en voulant les dériver tous d’un feul acide univerfel? Eft-on forcé par des faits décififs, & avoués de tous les Chimiftes, à établir que c’eft l'acide vitriolique , acide principe, épars par toute la Nature, quife modifie, fe mafque, fe moule, pour ainfi dire, dans les différens corps , fous la forme de tous les acides connus ? Que par conféquent les fels acides des plantes &desanimaux , les acides minéraux font tous d’une même na- ture, ne diffcrant peut-être entre eux, qu'en ce que les parties des uns font plus fubdivifées que ne font les parties des autres , ou en ce que les uns contiennent une plus grande quantité de parties inflammables , que n’en contiennent les autres? N'eft-ce pas moins un fyftème de fait au deflus de toute exception, de toute difficulté , qu'une hypothèfe phyfique , qui n’a peut-être pour tout fondement , fi c'en eft un, qu'une très-grande fimpli: 170 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. cité ? Mais il n'’eft pas facile qu'on s'en laïfle impofer aujour- d'hui, La Chimie qu'on cultive à préfent , par-tout où il y a des hommes vrainent fenfés , eft une Chimie folidement éclairée , tout expérimentale, lente, timide, & par-à même éminemment propre à fonder les fecrets de la Nature. Ce- pendant ceft la condition des Sciences humaines ; avant que de fubir une grande révolution, on y doit furmonter bien des obftacles ,: & s'occuper long-temps du foin pénible de defliller les yeux à quelque refte d'hommes prévenus, & dé- molir ehfin avant que de bâur. Et c’eft fouvent une affaire de longue haleine, que de déméler dans une foule de quef tions, de raifonnemens & d'expériences , quelquefois fines & délicates , ce qui peut avoir feduit des hommes illuftres, de profonds Savans , & de reconnoïtre au jufte ce qu'on étoit uniquement & légitimement en droit d’en conclure. 6. IIL. . Mais tout éloigné qu'on pourroit être de s'engager dans de pareilles difcuflions extrêmement épineufes , on ne fauroit mieux feconder les vües de la Société Royale, pour répandre le plus de jour qu'il eft poffble fur le point de la mtrifica- ton, quil s'agit d'approfondir , & pour empêcher qu'on ny travaille déformais au hafard , qu'en fe propofant de recon- noître préalablement fi l'acide vitriolique ou l'acide marin peur fe tranfmuer éfleivement en acide nitreux. Cer acide étant ce qui fait l'eflence de toute nitification , il n'eft pas indifie- rent , avant que de faire des recherches directes fur la genc- ration des nitres, d’être aflez fondé pour ne les pas dériver d'où l'expérience pourroit les excluré inconteftablement. Il eft même poflible que les réfultats des expériences qu'on feroit à ce fujet, loin d’être bornés à éclaircir les points en quef- tion, étendiffent en quelque forte nos lumières dans l'Ha- lotechnie , où il s'en faut de beaucoup que l'art de féparer & caratérifer les fels, foit porté à fon plus haut point. C’eft d'abord le raïfonnement tout fimple que je fs. Si cette wanfmutation a lieu par le concours des matières végétales MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 71 & animales, en putrcfaétion, il en doit réfulrer , au bout du compte, une plus grande quantité de nitre, quil n’en réfulteroic , fi la même quantitc de matières fermentefcibles fe putréfioit féparément. Mais il peut arriver que la matière paroiflant nireufe , fe foit augmentée, fans que la pans de nitre effe&if en foit devenue plus grande, & que l'acide vitriolique ou marin y foit aucunement dénaturé. Pour s'en aflurer donc d’une manière décifive, il ne faut pas s'arrêter au nie brut. C’eft lui qui peut en impofer, tant par Ja quantité qu'on en peut retirer , que par fes qualités appa- rentes. En effet, comme les corps compofes participent toujours des propriétés des parties compofantes, & que, quand une partie prédomine fur l'autre, ce font auffi fes propriétés qui prédominent dans le compolé ; saul cft naturel que le nitre devant être le fel prédominant dans le melange il y doit aufli ; jouer le rôle principal : de forte que les fels “ol liques ou marins, qui ÿ peuvent être unis, ny font pas fi aifc- ment appercevables, à moins que la purification du nitre ne les décèle. Par conféquent ce n'eft qu'au moyen d'une ara- lyfe exacte & fort délicarc de toute la mafle nitreufe retirée, quon peut efpérer de réfoudre une quefton fi importante, en démélant les fels € étrangers d'avec le nitre pur & bien ca- raéterife , auxquels ils pourroient adhérer très-étroirement. D'après cette idée , je me propofai d’ abord de commencer par des mélanges artificiels , fans aucun mélange de fubftances fermentefcibles , ne füt-ce que pour . obtenir des lumières fur ce que je devois attendre des expcriences plus compofces. PREMIERE EXPÉRIENCE. Je fis premièrement difiérens mélanges d'acide nitreux & d'acide vi itriolique & après une longue digeftion, j'en com- pofai moi-même avec de la terre oies de l'alkah fixe végétal , & de l'alkali de la foude, un grand nombre de fels, dont l'eflence étoic toujours une eau-forte différemment doféc. La combinaifon étoit exacte ? & au point précis de faturation , & je les dépouillois après de l'eau fort foigneu- Yi 172 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fement par la defication. Sans que jentre dans de longs détails fur toutes les obfervations que j'ai eu occafon de faire fur ces fels mixtes , je me bornerai à dire : 1.° Que pendant le rapprocheïment des parties dans la criftallifation , à mefure que le liquide interpofe diminuoi:, j'obfervois quelquefois des feparations marquées , entre les fels nitreux & les vitrio- liques, qu'on ne pouvoit pas méconnoître. .2.° Qu'en appliquant le feu à ceux de ces fels qui étoient à bafe d’alkali fixe, tant vegetal que minéral ; il n'y en eut pas un qui ne sallumär plus ou moins lentement, fuivant que l'acide vitriolique prédominoit plus ou moins fur l'acide nicreux dans le compofé. Les plus difficiles à s’enflammer ont été les fels à bafe cerreufe, & il y en eut même qui ne firent que fe bourfoufler, quoique l'acide nitreux y prédominar. 3.° Qu'enfin, par de convenables diflolutions , évapora- tions & criftallifations , je parvins à féparer les concretions vraiment & purement nitreufes ; d'avec les parties vicrioliques dontchacuns de ces fels étoient compofes, ayant tiré le plus grand fecours de la folubilité des nitres, & de lindiflolubilité des fels vitrioliques dans l'efprir de vin bien rettific. C’eft à l'illuftre “M. Macquer que nous devons cette précieufe découverte. (Mi. fel. Taurm. t. IT). SECONDE EXPÉRIENCE. Ayant de même compofé un grand nombre de fels avec des eaux régales différemment dofées, je parvins toujours à féparer les fels marins d'avec les fels nitreux par des fem- blables procédes. Je remarquai feulement qu'en y appliquant le feu, il y avoit fouvent dans l'embrafement, de ces fels mixtes qui deécrépitoient & détonnoient au même temps , d'une manière aflez marquée. 6. IV. Ces premières expériences m'ont d’abord convaincu, qu'en fe rapportant uniquement à la couleur , à la faveur, & même « 1 0 . . à la détonnation, il y avoit un grand nombre de ces {els MÉMoIREs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 173 compolés, qu'on auroit pris pour de véritables nitres ; mais en les décompofant avec un peu d'attention , il étoit facile de déméler ceux qui provenoient des acides virioliques & marins, d'avec les fels vraiment fufcepubl es d'inflammation, dont l'ef- fence étroit l'acide nitreux, chacun d’eux fubfiftant en entier fous une forme neutre, féparables & bien caraérifés. Ce- pendant , comme je n'avois allié que des acides libres, dans es expériences ; je voulus voir ce qu'une lente digef- tion à froid pourroit opérer, en y introduifant des acides en- gages dans quelques bafes. C'eft pourquoi , TROISIÈME EXPÉRIENCE. 1. Je titurai du fel marin fuffifamment dépuré, & je le misen digeftion dans deFacidenitreux. Je ne faifois que remuer le mélange fréquemment, ce qui caufoit quelquefois une éma- nation vaporeufe bien vifible. Après quelques jours de repos, de verfe la diflolution dans un vaifleau évafe, je la mis à évaporer à l'air, à l'abri du foleil. La votale defliccation ne fe fit qu'au bout de plufieurs jours. Ayant verfe de l'elprit de vin reétifié fur cette matière sèche, je filrai & fis bouillir l'efprit jufqu’à un certain point. Le refroidiflement me donna d'abord dans le fond du matras une grande quantité de nitre cubique en de très-beaux criftaux. Aÿant décanté & répété l'opération , je ne fis qu'en retirer du nitre. Je m'eus de la part du fel marin décompofé , qu'un peu de terre infipide à reftée fur les filtres, qui me parut bolare , tout l'acide marin s'étant entièrement dégagé , au point que je n’en trouvai pas le moindre veftige. 2.° Il en fut de même peu après , lorfque je mélai du nitre à bafe calcaire avec du fel marin purifié, Il sy fc à la vérité une double décompofition fans aucun fecours du feu , - l'acide du nitre s'étant réellement porté fur l'alkali fixe quitté par l'acide marin, & étant devenu par- -à un nitre cubique auf parfait, que fi lon avoit mêlé à la leflive nitreufe la quantité d’alkal marin libre néceflaire à la décompofñtion à du nitre à bafe terreufe, qu'elle contenoit ; mais je n'eus aucune 174 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. trace de l'acide marin lui-même , ayant retiré la bafe qui s’étoit féparée du nitre, en état de terre purement calcaire. 3° L’acide viriolique, tant libre qu'engagé dans une bafe métallique , en fit autant du Salpêtre, que je mis à digérer à froid Pun avec l’autre. Je n'obtins dans le premier cas que du tartre vitriole très-pur, qui refta au fond du matras, indiflous dans l'efprit de vin, avec lequel j'avois traité la matière sèche. Ayant fair brûler l'efprit filtré , je n'ai retiré qu’une quantité de Salpétre trop petite pour pouvoir être pefce& appréciée. Dans le fecond cas, c'efta-dire, avec une diflolution de vitriol de mars, le vitriol & le Salpêtre s'étant mutuellement décompofés dans la digeftion , par des actions réciproques, J'ai eu du tartre vi- triolé , bien décide, quife précipita dans l'efprit de vin , de la terre martiale , & une très-petite quantitt de nitre très- déliquefcent , tirée de l'efprit que je fis évaporer. s. V. Ceci , réuni aux obfervations précédentes, me confirma de plus en plus dans l'idée que javois conçue, que pour re- connoître au jufte fi l'acide vitriolique ou marin fe tranf- muoit efleétivement en acide nitreux par le concours des ma- tières putrefcibles , le point capital & décifif étoit d’analyfer très-foigneufement les réfultats finaux, tant pour ne pas fe laifler féduire par la quantité apparente de la matière nitreufe, que pour déméler tout cequl pouvoit y avoir d'impofant , en ce qui concerne les changemens de bafes , qui pouvoient s'être faits dans des digeftions fi longues par l'effet des affi- nités, très-propres à jouer un grand rôle dans ces tranfmu- tations. D'ailleurs , les expériences qu'on vient d'expofer nous apprennent encore, que l'acide nitreux, foic libre, foit en- gagé dans une bafe terreufe, enlève l’alkali fixe au fel marin, & en dégage l'acide , fans aucun fecours du feu; ce qu’on ne fauroit aflez apprécier dans notre fujet , ainfi qu'on le verra dans la fuite. Cependant voici mes procédes, & les réfulcats des ex- périences que j'ai faites au fujet de ces tranfmutations. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 175 SANT: L'année 1778, je fis faire exprès fept grandes terrines vernifiées. J'y diftribuai en parties égales foixante livres d’une même terre de jardin. Dans fix de ces terrmes, j'ajoutai à la terre égales quantités de plantes amères , fraiches, di- vifées en petites parties, & concaflées. Les ayant numérotées toutes, Je les mis fur des planches à labii du foleil & de la pluie, dans un endroit pourtant où l'air avoit un*accès libre , Ccartées les unes des autres, & toutes éloignées des murailles latérales. Dans la terrine, n.° I, je mélai cinq onces de vitriol de mars bien triturc. Dans la terrine, n.° IL, une demi-livre de fel marin dé- puré & trituré, comme le vitriol, Dans le n° III, quatre onces d’äcide vitriolique libre. Dans le n.° IV, quatie. onces d'acide marin libre. Dansles n° V & Vi, je n'ai ajouté aucun acide; mais la terrine, n.° VI, étoit couverte par une autre terrine femblable, la jointure étant fermée exaétement, avec du papier enduit de colle de farine , pour que l'air libre n’y eût pas d'accès; jy avois feulement pratiqué ‘un petit tou au fominet, pour l'arrofement. : & Dans la dernière, n.2 VIT, il n’y avoit que la terre fim- plement, fans aucune fubftance végétale mêlée. Toutes les fois que les mélanges étoient defléchés, on les humeëtoit avec de l'urine humaine, y comprife la terrine, n.° VI; la terre de la VII° terrine n'étoit arrofée que d'eau commune, On remuoit ces terres de temps en temps, pour prefenter toutes les parties fucceflivement au conta& de l'air, à l'ex- ception du n.° VI, qu'on ne faifoit que fecouer & tourner de haut en bas. Au bout de 13 mois, j'ai ceflé de faire ufage . d'urine pour larrofement, ayant jugé que c'étoi en pure perte, & même au préjudice de la nitrification; ce n'étant pas la favorifer , que d'ajouter des matières fufceptibles d’une fermentation toute nouvelle, à des matières dont la putré- 176 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE!: faction éroit déjà prefque portée à fon plus haut point. Depuis cette cpoque , Je ne fis qu'arrofer mes petites nitrières avec de l’eau fimple , en remuant pourtant les terres plus fréquem- ment qu'à l'ordinaire. Enfin dix-fept mois s'étant écoulés Je les leffivai coures l’une après l’autre fort foigneufement. Sans entrer dans lexpofñtion de toutes les plus petites opérations faites fur chacune de ces leflives, je me bornerai à toucher les points capitaux de mes analyfes, & à en foumertre les réfultats à l'extmen de mes Juges. J'ai fondé mes procédés de pra- tique, pour la féparation des fels en diflolutions dans les lef- fives. 1.° Sur la différente quantité d’eau, tant chaude que froide, que les fels demandent pour leur diflolution. 2. Sur leur différente diflolubilité dans des menftrues différens. 3.° Sur la criftallifation bien ménagée, fi propre à féparer les fels confondus dans une même dWiolution. 4.° Et enfin fur l'aétion des intermèdes convenables, tant pour tirer les nitres des eaux mères, que pour reconnoître les permutations arrivées dans unc fi longue digeftion par l'effec des affinités. Je ferai l'expofition fommaire de cesrélultats, fuivant l'ordre gardé ci-devant dans l'arrangement des vaifleaux mis en expe- rience. MUETR RM IN En 2 Après avoir filré la leflive dela terre contenue dans cette terrine, je la foumis à l'évaporation dans un bain de fable d’une chaleur très-douce & uniforme. À mefure que lévapo- ration enlevoit aux matières mélangées dans la diflolution une portion de l'eau qui les tenoit difloues , je laiflois refroidir la leflive, & je recueillois fur un filre toute la matière précipitée. Après je traitois ces fédimens partiaux avec l'eau , avec lefpric devin,& par des criftallifations opérées de différentes manières, pour féparer les fels les uns d'avec les autres. Toutes ces analyfes particulières étant pouflées au fcrupule, & dirigées lune après MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 177 après l'autre avec toute l'attention poflible , le produit final en nitre abfolument pur qui en réfulta en totalité, fe trouva de trois onces deux gros & quarante-deux grains. Il fe fépara dans les différentes diflolutions & criftallifations, du tartre vi- tiolé , du fel de Glauber, du fel marin, & quelque peu de félénite. Je me fuis borné à diftinguer feulement le caractère de ces fels, fans m’engager à en apprécier la quantité; ce qui auroit Cté très-fatigant & même inutile, ne s’agiflant que d'évaluer au jufte la quantité du nitre pur qui y étoit con- tenu, LME TR AR EMNDER NP n., ° SIST: La leffive de ce fecond mélange étant traitée d’abord par de lentes évaporations & filtrations trèsfréquentes, comme dans l'opération précédente , & après par le lavage des ma- tières sèches partielles , fait avec de l'efprit de vin & enfuite par la criftallifation , me donna pour produit final trois onces cinq gros & trente-deux grains de nitre , dont la plus grande partie étoit un véritable Salpétre, & l'autre un nitre à bafe d’alkali marin diftinétementr reconnoiflable. Tous les deux évoient crès-purs, & dépouillés de tout alliage de fels étran-. gers. Il y eut de bien cara&erifé , dans les autres fépara- tions,,du fel marin ordinaire , du fel marin à bafe d’alkali végétal, & un peu de fel de Glauber. DREUROR IEN EF Pr ICT Ce mélange traité de la même manière, n’a donné pour tout produit que deux onces fept gros & trois grains de Salpêtre entièrement dépuré. Je n’ai pas eu beaucoup de peine À reconnoître dans les féparations, par l'efprit de vin reétific, le tartre vitriolé & la félenite que la leflive de ce mélange con- tenoit abondamment. LEPRUR NE net Le produit de cette terre, où l’on avoit ajouté l'acide, Z 178 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. marin libre, toutes féparations & réduétions faites, a été de trois onces trois gros & fept grains de Salpêtre purifie. Il y avoir du fel marin à bafe d’alkali végétal un peu plus qu'à l'ordinaire. TERRE NNE 0 Ce mélange devant fervir de comparaïfon, je l'ai traité avec toute l'attention dont je fuis capable. Son produit total a été de trois onces fix gros & trente grains de crès- bon Salpètre. TER RS IIN ES: n° AVE Comme c'étoit le mélange qui avoit été couvert & où air w’avoit pas eu un accès libre, je n'ai pas manqué d'y faire des obfervations exaétes. Jai trouvé d’abord la terre cou- verte d'une croûte, & toute en grumeaux : l'ayant tirée de la terrine, l'odeur urineufe, forte, fuffoquante, infup- portable, qu'elle répandoit, faifoit connoître, que lurine dont elle avoit été arrofée, n'y éroit pas abfolument décom- pofée. Les plantes mêmes n'y étoient point entièrement cor- rompues. Je la fis fécher, n'étant pas exempte de ‘toute humidité, & lefliver comme les autres : ayant foumis eette lefive à lévaporation, j'ai eu bien de la peine à écarter la grande quantité d'écume qui s'engendroit à la furface. C'éroit une liqueur prefque incoagulable : à force de blancs d'œufs, de chaux vive par laquelle je la faifois pañler, & d'efprit de vin, je parvins a en dégager un peu de matière nitreufe & encore bien impure. Elle tenoit certainement au nitre préexiftant dans la terre, ainfi qu'on va le voir. TLBTR RENE MER Sr DE Il ny avoit ici que la terre toute fimple qu'on avoit tirée du jardin, à laquelle on n’avoit ajouté ni acide étranger, ni aucune matière végétale & animale fermentefcible. Cependant elle ne fe montra pas entièrement dépourvue de principes nireux. Je parvins en effet, par l'addition dun peu d’alkali tartareux libre , à en retirer un gros & onze grains de Salpêtre ordinaire. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 179 VAT, Qu'on rapproche maintenant tous ces faits, & qu'on les foumerre au plus fevère examen , en Le rapportant du réfultat de la terrine de comparaifon » n.® V, on ne fauroit fe refufer d'en conclure qu'il ny a pas dans toutes ces expériences le moindre indice de wanfmutation de l'acide vitriolique ou marin, tant libre, qu: engage dans des bafes, en acide nitreux, par lé concours des matières animales & vé- Es en putréfaction. On y apprend, .? Que le concours de l'acide vitriolique , foit libre , foit SEE , loin d’avoir été avantageux à la bee ATEN enlevé dans les fermentations & dans la digeftion fucceflive, une da d’alkali , avec laquelle il a formé des fels neutres vitrioliques | aux dépens du produit. .® Que l'acide marin libre n’a pas laïffé de s'emparer de Nr portion des matériaux alkalins développés dans la putréfaétion ; mais qu'il n'a pas* été fi nuifible que l'autre à ka nitrification. Qu'au contraire , une grande partie du fel rnatin ; à été ajoutée en petite dofe, de façon à ne pas retarder la fermentation par fa qualité antiputride , a été dé- compofée dans la digeftion, l'acide nitreux s'étant emparé de fa bafe; de forte que la quantité de fel vraiment nitreux, tire à putréfaétion confommée , eft prefque revenue à celle qu'on a is de la terrine de comparaifon, n° 9 Que fi l'on avoit d’abord évaporé ces lefives fans fe lee à aucune féparation, on auroit efle@ivement retiré des terres imprégnées de ces acides minéraux, plus de nitre brut que de la terrine de comparaifon , où ces acides n’entroient pas; mais ce n'auroit été . du nice grofli par l'adhéfion des fels étrangers, & par conféquent l'angmentation n'auroit été qu'apparente. Ce n’étoit donc qu'à l'aide d’une analyfe exacte de toures ces matières , & par la féparation des dif- férens fels all liés , qu'il pouvoit Ctre permis de juger de la quantité de nitre vraiment & effe&tivement tel qu'il y étoit contenu, Zi 180 Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: 4. Qu'enfin, fi l'on ne peut pas dire, d’après ces expé- riences, en quoi & jufqu'à quel point le concours de l'air eft néceflaire à la nitrification, on eft du moins afluré d’une ma- nière inconteftable , que laccès libre de ce fluide eft eflen- tiellement néceflaire à la génération du Salpètre : Ce qui s'ac- corde non feulement avec les connoiflances qu'on avoir de fon inAuence dans cette opération, & avec les expériences de ces derniers temps qui le conftituent tout pur, comme une des parties intégrantes de l'acide nitreux, & fi abondamment, que la quantité qu'on en retire d'une once de nitre par le moyen d'un feu violent , va prefque à fept ou huit cents pouces cubiques ; mais encore avec ce que mes obfervations m'ont porté à connoître fur la nitrification , ainfi qu'on aura occafion d'en parler dans le quatrième chapitre de ce Mémoire. VIII. On ne fauroit donc difconvenir que les faits font bien éloi- gnés de venir à l'appui de la tranfmutation des acides vitrio- lique & marin en acide nitreux , par le concours dés fubf- tances putrefcibles. C’eft une conclufon légitime , une con- clufion qui fuit immédiatement d’une fuite d'expériences faites avec le plus grand fcrupule & toutes les précautions poffbles. Il en eft de même des procédés dont on fait mention dans le favant Recueil de MM. les Commiflaires (page 17 & fuiv.), & de quelques obfervations qu’on y rapporte , qui paroiflent dé- pofer en faveur de la converfion du fel marin en Salpètre; tout fe réduit à de fimples effets d’affinité. Le fel marin mis à féjourner dans des leflives de nitre, dans des eaux mères, ou de femblables diflo!'utions contenant de l'acide nitreux foiblement uni à des terres ou enveloppé dans des matières huileufes, y fournit effeétivement une bafe fixe faline, que l'acide marin lâche facilement dans la digeftion à l'acide nitreux, ainfi que mes expériences le prouvent inconteftablement. Il y a même beaucoup d'acide nitreux difperfé dans les cuites, qui, moyennant ce fecours, n'eft pas entièrement MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 184 perdu : le réfultar qu’on obtient , eft le même que fi on eût em- ployé un alkali fixe libre, foit végétal, foit minéral. Ce n’eft donc pas une converfion de fel marin en nitre, c'eft une con- verfion de la bafe du fel marin en bafe de nitte, & c’eft cffec- tivement ce qui afrive tout naturellement dans les leffivages des terres à Salpêtre contenant du fel marin à bafe d'alkah minéral ; il y a une grande partie de l'acide nitreux foible- ment uni à quelque terre, qui fe porte pendant la digeftion fur lalkah fixe, qui fert de bafe au fel marin, & y dégage Jacide. Les circonftances font trop favorables, pour qu'un tel effet d’affinité ne puifle avoir lieu toutes les fois qu'il n’y a pas dans la leflive une dofe fuffifante d’alkali fixe végétal. Une preuve de ceci , au deflus de toute objeétion, c'eft que dans ces cas, on ne manque pas d’appercevoir dans les crif- tallifations, du nitre cubique bien décidé , adhérent ordinai- rement en petits criftaux aux aiguilles du Salpètre; & que la plus grande partie du fel marin contenu dans l'eau mère, n'eft que du fel main à bafe terreufe. Je m’en fuis afluré par mes propres expériences; de forte que fi l'on ménageoit les leffives, d’après ces vües, par des plus longues digeftions & par des dégraiflemens convenables, très-propres à favorifer le conta& des fels, & par des additions de fel commun bien purifié, ces converfions feroient plus abondantes & plus complettes. Mais ce n'eft pas le lieu d'entrer dans de pareils détails; nous aurons occafion d’y revenir dans la fuite. $. IX. Mais sil ne faut pas fe lafler de répéter les expériences en Chimie, & les expériences particulièrement auxquelles ent quelque fyftème qui paroït douteux , ce ne fera point un hors-d'œuvre que d’expofer en ce lieu les réfulrats des obfervations que j'ai faices fur les expériences capitales de M. Piersch; notre fujer paroît le demander: l'objet de cet habile Chimifte étoit de prouver la tranfmutation de l'acide vitriolique ; dont on vient de parler , en acide nitreux, par {on union in time avec le principe inflammable des matières en. 182z MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, putréfaétion. C’eft principalement fur quatre expériences que ce Chiuite Allemand appuie le fentiment du grand Stahl, fur l'origine de l'acide nitreux. Les ayant exaétement répé- tes pour en faifir & déméler routes les circonftances, je vais foumettre mes procédes aux lumières de la Socicté Royale. PREMIÈRE ExPÉRIENCE de M. Pietfth, S. XX, age 188 du Recueil cite ci-deflus. pag , Ayant pris quatre parties d'efprit pur & fort de nitre, & une partie d'huile de térébenthine, je les mêlai l'une avec l’autre, & au bain de fable; je réduilis le mélange à confftance d'un baume, qui prit une couleur rougeâtre. C’eft le baume que M. Pietfch dit être un véritable baume de foufre. Je fis en même temps ce baume à part, avec une diflolution d'huile eflentielle de térébenthine & de foufre. Je ne m'arrête pas fur des dific- rences quon y remarque aux yeux : c'eft la condition in- time & actuelle des acides nitreux & vitriolique combinés dans ces deux baumes , qu'il s'agit de démêler. Je mis d’abord dans de l'efprit de vin reétifié quatre gros du baume fait avec l'acide nitreux, en y mélant un peu d’alkali tartareux très-pur & très-fec. Je tins ce mélange en agitation pendant quelque temps. Ayant après laïfle repoler à froid cette dif folution, il fe fit au fond du matras une précipitation très- blanche , & l'efprit furnageant étoit tout chargé d'huile. Je décantai, & pat de convenables évaporations, filtrations & criftalifations , j'obtins du précipité un excellent Salpêtre. Pour que cette expérience füt favorable à l'opinion de M. Pierfch, il faudroit’ que l'acide vitriolique combiné dans le baume de foufre für dénaturé , & nous donnût , par un fem blable procédé, du veritable Salpétre. Les expériences de M. Homberg faites fur ce baume qui, par la ditillaion, n'a fourni que les produits qu'on retire de la combinailon de l'acide vitriolique avec une huile, prouvent que le foufre n’y eft plus dans fa conftitution naturelle. Il paroït que l'acide vitriolique fe trouvant partagé entre le phlogiftique avec lequel il étoit MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 183 combiné dans le foufre, & celui de l'huile où le foufre eft diflous , l'eau de l'huile eft fuffante pour achever la fépara- don & s'unir à l'acide. Par conféquent un alkali quelconque pouroit s'en emparer, en le débarraflant de l'eau & le cor- porifiant. Le fair vient à lappui de cette conjecture ; car ayant trait le baume de foufre que j'avois compolc , avec une bonne quantité d'efprit de vin & enfuite avec de l'al- kali tartareux en liqueur, je parvins, après les évaporations, filtrations & criftallifations convenables, à en retirer du tartre vitriolé très-bien caraétérifé ; ce qui, joint à l'expérience de M. Homberg, prouve d'une manière inconteftable qu'il n'y a plus de foufre dans le baume , n'y ayant eu aucun indice de foie de foufre dans mon expérience, Il n’y a rien ici qui puifle étayer le fentiment de M. Pietfch. S£conDE Expérience ,$. XXI. page 182. Ayant mis dans deux parties de nitre à bafe calcaire, diflous dans l'eau, une partie d'huile de vitriol, je foumis le tout enfemble à la diftillarion dans une cornue, en aug- mentant lé fèu par degrés. J'eus le foin d'interrompre la diftillation à différentes reprifes, pour reconnoïtre ce qui pañoit fucceflivement dans le récipient. Je m'aftrai donc que l'eau étoit pañlée la première : il y eut après de l'eau acidulée ; enfuite un peu d’efprit de nitre folitaire & bien carattcrife ; enfin le feu étant confidérablement augmenté, J'obtins de l’eau-forte, où l'acide virnolique dominoit beau- eoup fur l'efprit de nice qui y étoit mêle, M. Pierfch, n'ayant pas eu cette précaution, a jugé qu'après l'eau, tout ce qui avoit paflé dans le récipient n'étoic que de lefprit de foufre. S'il en avoit compofé tant foit peu de fel avec quelque fubftance alkaline , il auroit reconnu par le nitre allié & adhérent au fel vitiolique quil auroit retiré, que c'étoit un cfprit mêlé d'acide viriolique & d’acide nitreux, une eau-forte; au lieu de conclure, comme il a fair, que cétoit un véritable efprit de foufre, femblable à celui qu'on 184 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. obtient par la cloche, c'eft-à-dire,, un fimple acide vitriolique: Et quand méme ceût été un acide vicriolique tout pur, chafle par la violence du feu, il falloit conftater que l'eau féparée précédemment, ne contenoiït point l'acide nitreux que l'acide vitriolique devoit avoir dégagé de fa matrice terreule. TroISIÈME EXPÉRIENCE, S. XXII, page 290. Cer Auteur avant obfervé dans l'expérience précédente, que la mañle sèche blanchâtre qui reftoit dans la cornue s'é- chaufloit, en y verfant de l'eau froide, il ne craint pas d'en inférer, que l'acide du nitre doit être de la même nature que l'acide du vitiol; fans cela, ditil, l'huile de vitriol, comme le plus fort acide que nous connoiflions , s'em- pareroit néceflairement de la terre du nitre, & en détache- roit & chafleroit fon acide naturel. Mais, ajoute t-il , l'échauf- fement de cette matière faline par l’eau fraîche verfée par- deflus, prouve clairement que cela n'arrive point; car f l'huile de vitriol s'éroit emparée de la terre alkaline du nitre, FE échaufflement n’auroit pas lieu. | Tout Chimifte voit, fans que je le remarque , qu'il y au- foi ici bien des chofes à relever. C’eft , comme je viens de le dire , que M. Pietfch n’a pas eu la précaution de bien exa- miner & reconnoître les liqueurs qui pañloient fucceflivement dans le récipient. L’acide vitriolique s'eft effeétivement em- aré de la terre du nitre : c'eft lui qui seft fubftitué à la place de l'acide nitreux , & ce dernier eft paflé dans le récipient après l’eau. Mais le grand feu ayant dégagé à fon tour de la terre une grande partie de l'acide viriolique, la felénire reftée dans la cornue n'étoit prefque que de la terre calcaire calcinée , qui ne peut manquer de produire une effervefcence dès qu'elle eft en contaft avec l’eau. Sans doute M. Pietfch n'a pas pu concevoir que le feu für capable de chafñler l'acide vitriolique ? Cependant le contaét de la matière du feu, dont lafinité avec cer acide ne fauroir être contrebalancée par celle de la terre, n'eft-il fuffifant pour lui donner un caraétère fulfureux ? MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 185$ fulfureux ? On diftlle l'acide de lalun fans aucune addition, fans intermède; on le dégage de fa terre, & on obtient de l'acide vitriolique à toutes épreuves. C’eft d'un alkali fixe que le feu ne fauroit enlever cet acide minéral fans intermède. Je ne m'arrêce pas à la IV° Experience de ce Chimifte ; parce quelle ne préfente rien moins qu'une preuve favorable à fon opinion. SEX Il fuit de tout ce que nous venons de voir, que les faits font bien éloignés de dépofer en faveur du fentiment de ceux qui penfent que l'acide nitreux n'eft que l'acide vitriolique, métamorphofé par l'union qu'il contraéte avec le principe in- flammable des matières en putréfaétion ; qu'il s'en faut de beaucoup que les preuves dont il a été dernièrement étayé par M. Pierfch , foient concluantes , & qu'il en eft de même de l'opinion de ceux qui prétendent que ceft l'acide marin qui fe tranfmue en acide nitreux. On fait par conféquent le cas qu'on doit faire des prétendues tranfmutations du fel marin en nitre , dès qu'on eft convaincu à préfent que la dé- compofition du fel , qui arrive dans ces tranfmutations, n’eft qu'un effet de fimple affinité, par laquelle l'acide nitreux, tant libre qu'uni à une terre quelconque, dégage l'acide ma- nn, & fe fubfticue à fa place dans l’alkali fixe du fel, même par une fimple digeftion à froid, & une douce évaporation excitée par la chaleur naturelle de l'atmofphère. 186 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. CHAMP MPUME ROE ET Des Nitres en general, & des Alkalis fixes. s XI. a DS uT fel neutre, dont l'acide nitreux fait l'eflence , eft un véritable nitre. Ce n’eft que la matrice qui s'en eft abreu- vée, de quelque forte qu'elle foit, qui fait la différence des nitres qu'on trouve dans la Nature. Tous les nitres donc fe reflemblent par leur acide qui en eft le principe générique, & dif: fèrent les uns des autres par la bafe dans la quelle ils font engagés, en prenant même différentes configurations, qui ne dépendent, à ce quil paroît, que dela figure paticulière des alkalis falins , terreux ou métalliques que l'acide à diflous. Par conféquent les nitres qu'on retire des vieilles murailles, des cimetières, des terres tirées des étables, des vacheries, des écuries ; les nitres qu'on recueille en eforefcence fur des fumiers , fous des voûtes fouterraines, fur de certaines pierres de tuf ; les nitres enfin qu'on obtient de toutes fortes de nitrières artifi- cielles , ne font véritablement des nitres que par l'acide, & c'eft la fubftance particulière unie à l'acide qui en doit établir les différentes efpèces. $ XIL Les efpèces qui fe trouvent réellement dans la Nature, fe divifent naturellemement en deux clafles générales , favoir : 1.® Les nitres ayant pour bafe un alkali fixe végétal ou minéral. 2.® Et en nitres ayant pour bafe une fimple terre alka- line de quelque nature que ce foit. Les fels nitreux à bafe métallique font, ou des nitres ac- cidentels, ou des ouvrages de nos laboratoires; c'eft une MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 187 claffe à part, quil faut foigneufement diftinguer des autres » à caufe des phénomènes que les nitres à bafe métallique pré- fentent dans les cflais qu'on en fait; phénomènes , à bien des égards, diflérens de ceux qui rétultenc de l'union de l'acide nitreux avec les cerres, & les alkalis tant fixes que vo- latils. C’eft näturellement le phlogiftique des fubftances mé- talliques , qui joue un rôle tout particulier dans ces com- binaïfons. Mais cette clafle de nitres n'ayant aucun rapport avec l’objet dont il eft ici queftion, nous ne traiterons que de ceux des deux premières clafles , tous les nitres qu'on tire communément par leflivage ou par houflage , s'y réduifant in- conteftablement. Il n’y a que le nitre cru , celui qui fe tire des murailles & des plätras, fur lequel ilne paroit pas qu'onait acquis des connoiflances bien fixes. C’eft pourquoi Je vais rapporter ci les expériences que j'ai faires pour définir la nature de fa bafe. I eft bon qu'on ne laïfle pas cette lacune dans les premières no: tions d’un fujet qu'il s'agit d'approfondir en tous fens. PREMIERE EXPÉRIENCE. J'ai pris de la leflive concentrée de nitre cru, & j'y ai verfé de l’alkali tartareux bien fec & pur. Je vis d’abord s’y faire une précipitationg d'une matière blanchätre. Une heure après, ce précipité étoit devenu une elpèce de coagulum flottant en forme de blanc d'œuf. Il me vint dans la penfée de ne pas toucher à ce caille, ni à la diflolurion , & de laifler tout paifñiblement en digeftion. Tous les jours je vificois la diflolution, & jy voyois diminuer le coagulum de jour en jour. Enfin japperçus un matin que le précipité étoit entière- ment difparu , le fond de la bouteille s'étant couvert de très- beaux cuiftaux prifmatiques tranfparens , comme la plus belle glace. La couleur de la diflolution éroit devenue orangce. Voyant que les criftaux adhéroient au fond , je décantai la liqueur & je me mis à les confidérer. Voici les proprictés que j'y trouvai. 1. C'étoic un fel tout-à-fait infipide fur la langue, cro- A ai 188 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: quant fous les dents, fans fraicheur, fans amertume & fans aucun retour lixiviel. 2.° Il ne fe bourfoufloit point fur la pelle ; & fur les char- bons ardens, il ne donnoit aucune marque de fufon. 3.2 À lair,, par la diflipation de fon eau de criftallifation, il fe réduifoit en une pouflière d’un blanc mat. 4.° Il étoit très-peu foluble dans l'eau, & l'efprit de vin rectifié ne lattaquoit pas. 5-° Il faifoit une vive effervefcence avec tous les acides, & même avec le vinaigre diftillé , en sy diflolvant, Il ver- difloit la teinture de violettes, & précipitoit en jaune orange la folution du fublimé corrofif. SECONDE EXPÉRIENCE. Ayant balayé moi-même de ce nitre grimpé fur une vieille muraille , & l'ayant diflous dans de l'eau, filtré & concentré, je le foumis à un pareil traitement , avec l'alkali du tartre dans un vaifleau de verre à fond plat, où je pouvois hbre- ment introduire la main. J'eus le plailir cette fois, a après une digeftion de peu de jours, de voir d'abord adhérer de très- petites boules qui s'endurcifloient & groflifloient tous les jours de plus en plus, & de fuivre le progrès de la criftallifation. Le fel que Jen retirai avoit toutes les propriétés de l'autre, dont je viens de faire mention, à cela près, que celui-ci tenoit beaucoup plus foiblement à fon eau de criftallifation. TROISIÈME EXPÉRIENCE. Une autre fois le précipité ayant été en grumeaux, j'aieu de la peine à y démêéler la bafe du nitre cru, enveloppée dans la terre du nitre à bafe calcaire diflous év ideminent dans la même leflive, & en grande abondance. Après une plus longue digeftion, ayant dé leau, & defleché le préci- pite calcaire à l'ombre , en l'éclairant par un rayon du foleil, je parvins enfin à y difcerner de petits criftaux luifans en- cremélés. En en ayant retiré un très-grand nombre , Je les D trouvai par toutes épreuves de la même nature que ceux des MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 189 autres expériences. Il eft bon d'avertir que je nai jamais manqué d'évaporer l'eau qui furnageoit aux précipités, pour im'aflurer fi l’alkali rartareux s’y étoit réellement fubftitué dans la diflolution. Je l'ai toujours trouvé neutralifé avec l'acide nitreux, mayant reuré de ces diflolutions que d'excellent Salpêtre très-bien caraëtérife. En réuniffant ces réfulrats, & rap- prochant toutes les obfervations que je viens d'expofer , on eft fondé à conclure que la bafe de ce nitre eft un véritable alkali fixe minéral. Il reflemble, à quelques égards, à la bafe du fel marin; mais il en diffère, tant par le goût de fes criftaux , que par d’autres propriétés. On de- figne, à la vérité, cout alkali minéral libre, qu’on trouve fur la terre & dans des eaux minérales, du nom générique de zatrum; mais ce n’eft qu'après que ces objets feront éclai-- cis par de nouvelles recherches, avec le temps , qu'on faura au jufte fi cous ces alkalis font un même & unique narrum. Feu M. Rouelle avoit raïfon de dire, qu'on à pris fouvent pour précipités des fels neutres très-peu folubles, ou même infolubles , à raïfon de la fort petite quantité d'acide qu'ils contiennent. ( Voyez le Mémoire de M. Pietfch, dans le Recueil de Mémoires fur la formation du Salpétre , page 176). $. XIII. Mais cet alkali criftallifable , qui fait la bafe du nitre cru, d'où tire-t-il fon origine ? Grimpe-t-il de la terre en fe criftallifant, ainfi que le fait le natrum d'Egypte, fuivant l’obfervarion de M. du Hamel? ou appartiendroit-il à la chaux même, où l'acide nitreux paroît fe loger & fe corporifier? Les lumières que l'on acquiert dans un fujet obfcur , ne fervent fouvent qu'a faire naïtre de nouvelles difficultés. En réfiéchiflant que la chaux à toutes les propriérés des alkalis fixes, à cela près, que quelques- unes font dans ceux-ci un peu plus marquécs que dans la chaux, je penfai d’abord que cet effet pouvoir bien tenir à une certaine condition de la chaux dans le ciment , n'ayant plus ni le carac- tère très-cauftique de la chaux vive , ni celui qu'avoit la pierre galcaire avant que d'etre calcinée, En effet, les murailles ré- 190 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. cemment bâties, loin de fournir du nitre cru, même dans des circonftances très-favorables à fa produétion, ne font aucu- nement propres à fe falpétrer. Il en eft de même de cer- taines autres , & fur-tout des murailles d’une grande antiquité, expofces à l'air, lefquelles étant efleétivement imprégnées de matières nitreufes, ne fourniflent pourtant que du nitre, dont la bafe, précipitée par de l’alkali végetal, n'eft qu'imparfai- temenc criftalifable, ou bien fouvent une chaux raflaliée d’eau & de gaz, & par-là redevenue fimple terre calcaire, indif- foluble dans l'eau. C'eft ce qui fait croire que la génération du nie mural à bale d’alkai criftalifable , ne fauroit avoir lieu, que dans une chaux d’un degré particulier de caufticité ni wop grande, ni nulle. Et réellement les nitres qu'on fait avec de l'acide nitreux & de la chaux vive, font précifé- ment déliquefcens & femblables en tout à ceux qui fe fonc avec la terre calcaire non calcinée , ou avec la chaux rede- venue terre calcaire. IT paroïît donc que c'eft à un certain degré de faturation relative d'eau & de gaz dans la chaux des cimens, que nous devons les criftaux en queition : car il eft de fait, que les alkalis fixes & volauls, quand ils font unis avec l'eau & le gaz au degré de parfaite faturation rela- tive, deviennent doux & fufceptibles de criftallifacion. Pour- quoi n'en feroit-il pas de la chaux comme des alkalis rant fixes que volatils? Mais voici quelques expériences qui viennent à l'appui de ce fentiment. Ayant fait balayer l'enduit de la mu- raille de ce même magafin, où j'avois trouvé le nitre de mes premières expériences, Jen fis lefliver une bonne quantité, our en retirer toute la matière nitreufe qu'ellecontenoit, À près avoir bien defféché la fubftance calcaire reftée fur le file , je verfai fur une portion de l'acide nitreux concentré. J'ebfervai que l’effervefcence qui s’y faifoit , n’égaloit aucunement celle que le même acide excitoit dans une terre calcaire non cak cinée. Il s'en fépara du fable , quife précipita au fond du vaif- feau. Ayant décanrée & defléchée la liqueur furnageante, je mis la matière sèche en diflolution dans de l'eau, & jy ajoutai de l’alkali tartareux bien fec. Ayant laïflé repofer plu- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE,. 191 fieurs jours la diflolution avec fon précipité, comme dans les expériences précédentes , Jeus à la fin le plaïfir d'y apper- cevoir de petits criftaux entremêles de terre purement cal caire , ainfi qu il m'étoit arrivé dans la troifième expérience. Jai répété cette expérience plufieurs autres fois avec des ratiflures de différentes murailles falpérrées. À la vérité, ce n'a pas toujours étc avec le même fuccès; il n’y eut, dans quelques-uns des précipités , que des commencemens de cuiftallfation : ce qui paroît confirmer ma conjeéture, que la faturation relative d'eau & de gaz contraëtée par la chaux, doit être portée à un certain point, pour qu elle foit fufcep- üble d’une criftallifation parfaite & d'une figure de criftaux femblable à celle des autres alkalis fixes minéraux. C'eft tout ce que j'ai trouvé de plus probable fur l'origine de lalkali fixe minéral, qui fert de bafe au nitre cru. $. XIV. Mais en regardant l'acide nitreux & la bafe comme les puncipes prochains de tout nitre de quelque clafle que ce foit, on ne fauroit approfondir le fujec de la nitrification , fans entrer préliminairement dans des détails direéts fur ces principes , & fans les reconnoîtte du plus près qu'il eft pof- fible. Nous commencerons ici par quelques difcuflions fur les bafes, & c’eft dans le chapitre fuivant que nous parlerons de l'acide. Les qualités du nire à bafe d’alkal fixe végétal, & fes ufages précieux ; ont toujours faitregarder ce fel, qu'on nomme communément Salpètre, comme le nitre parfait , le nitre par excellence. Je ne fais pourtant fi l'on à jamais fair de la poudre à canon avec du nitre à bafe d’alkali marin tout pur, en vûe de fe procurer une plus grande abondance d’alkalis, & fion a cherché à conftater fi celui-ci pouvoit fournir à l'acide ni- treux une bafe aufli propre à cer effer, que l'eft Palkali végéta’. Je trouve , par toutes mes expériences, cette poudre éminemment bonne, en ayant fait des é cpreuves en petit & en grand avec diffe- rentes pièces d'artillerie, dont j'avoislaliberté de difpofer. Je com- 192 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. meuçois d’abord par dépouiller le fel commun de tout fel marin à bafe terreufe, & de route terre adhérente, par des diflolurions & des filrrations convenables. J'en tirois après mon nitre en de trèsbeaux criftaux, tant avec de l'acide nireux libre mis en digeftion avec le fel, qu'avec l'acide nitreux engagé dans des bales terreufes, par une double décompofition. Les foudes ne me parurent pas fi immédiatement propres à cet échange, à moins qu'on ne les foumit à bien des purifications, l'al- kali marin libre n’y étant point en fi grande quantité que les fubftances terreufes & falines, que la combuftion n'a pas attaques , & que les foudes contiennent abondamment. Il eft sûr que c'eft de la pureté du nitre que dépend principale- ment l'activite de la poudre de guerre, qui eft d'autant meilleure que le nitre eft plus dépouillé de fels étrangers. La bafe marine toute pure., & non dénaturce par la violence dufeu , unie à fatu- ration complette avec l'acide nitreux, nous en fournit certai- nement d'aufli excellent pour la compofition de cette poudre, que le meilleur Salpètre de houflage. C’eft de quoi mes illuf- tres Juges peuvent s’aflurer très - facilement. Il a encore, comme on É. l'avantage de ne pas attirer’aflez l'humidité de fair, pour sy réfoudre en liqueur. Il ne fait que perdre fon eau de cuiftallifation , & fe réduire en pouflière. On ne fauroit nier, qu'en donnant l'accès à cet alkali dans la com- pofition des nitres à l'ufage de la guerre , on ne s'ouvre plus de reflources qu'on n’en avoit, en n’y admettant que l’alkali vé- gétal. Il eft vrai qu'à bien d’autres égards, & pour les ufages de plufieurs arts, le Salpètre fera toujours préférable au nitre à bafe d’alkali marin : mais il n'eft pas indifférent dans notre objet , de s'être afluré par des expériences en grand, qu'on peut admetrre le nitre de la derniere clafle dans la fabrication de la poudre. J'en ai fait même grainer & lier pour les fufils , avec un égal fuccès; & j'efpère que MM. les Régifleurs la trouveront bonne à routes les autres manipulations , & à tous les ufages de la Pyrotechnie militaire. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE, 193 $. X V. Quant aux nitres de la feconde claffe , ils n’ont, à [a vérité, aucune des qualités requifes pour entrer , tels qu'ils font, dans une pareille compoftion. Cependant ce feroit faire beau- coup de tort à la nitrification , que d'en négliger le moindre atome, y ayant bien des occafions où la Nature les prodigue de préférence. Heureufement l'adhérence & l'union de l'acide nitreux avec la terre qui fert de bafe à ces nitres, y eft fi foible, & fa tendance au contraire à fe combiner avec l’alkali fixe eft fi forte, que cet intermède fufht pour les décompofer. Tout alkali en effet, tant végétal que minéral, les fépare, s’unit à leur acide , & par une décompofition & une nouvelle com- binaifon, forme avec lui des fels neutres criftallifables ; Il en eft de même des nitres à bafe métallique & d’alkali volatil. Il fufit donc d’avoir de l’alkali & de l'acide nitreux engage dans quelque bafe que ce foit, pour convertir tout en nitre de la première clafle, $. XVI. C'eft par conféquent fur les alkalis qu'il faut particulière: ment infifter. Quoique ce ne foit pas le lieu de faire un traité fuivi fur ces fubftances falines, très-connues de tous les Chi- miftes, & fur leurs propricrés cara@ériftiques , on ne fauroit fe difpenfer d'entrer dans quelques détails à ce fujer. On ef convenu d’affeéter le nom d'alkali fixe végéral aux fubflances falino-alkahnes, qu'on retire par l'incinération des végétaux ; & celui d’alkali fixe minéral à la bafe falino - alkaline du fel marin. La Nature ne nous office nulle part de ces fubftances libres , formées de tous temps en grands amas, ainfi que cela a lieu pour tant d’autres répandues fur la furface & dans les entrailles de la terre; fi ce n’eft quelques por- tions éparfes çà & là d’alkali minéral en particulier, à qui lon crouve les mêmes propriétés qu'a celui qui fert de bafe au fel marin , & qu'on défigne fous le nom générique de zatrum ; encore S'en faut-il de beaucoup qu'il foit dans un état de pureté Bb 194 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. convenable ; la plus grande quantité eft fous la forme de fel neutre, qu'on eft obligé de décompofer pour en retirer l’alkali libre , & fingulièrement l’alkal végétal Avant que lil- luftre M. Baumé en eüctiré de bien cara&térifé , du grand foleil fans combuftion, on n'en avoit point encore dégagé un feul atome de libre, autrement que par l'incinération. CR ce qui a donné lieu à la queftion de favoir sil en exifte ou non de formé, par la Nature , dans les végétaux antérieurement à la combuf- tion. D'abord qu'on retire des plantes, fans ce fecours, des fels neutres à bafe d’alkali fixe; tels que le tartre vitriolé & le Salpétre , il eft für que l’alkali y eft, de la même manière qu'y eft l'acide produit par la Nature, fans que la combuf- tion l'ait préalablement préparé : ce qu'on prouve encore mieux par l'expérience mémorable de MM. Margraf & Rouelie, fur la crème de tartre, de laquelle on tre de ces fels, fans combuftion, en la combinant feulement avec des acides miné- raux. Î eft donc moins queftion de favoir fi l’alkali végétal ft une produétion naturelle, que de favoir fi la Nature ne fauroit produire ces fels neutres, fans avoir premièrement produit l'alkali fixe libre; queftion que je ne fais fi les ob- fervations faites jufqu'à préfent font fuffifantes pour éclaircir d'une manière fatisfaifante & inconteftable. En attendant, ce qu'on peut dire de plus fenfé à l'égard de l'origine de ces alkalis ; d'après tous les fais, c'eft qu'ils exiftent en état neutre dans Ja plupart des plantes, fans que la combuftion foit entrée dans leur formation ; qu'il y en à de tout formés, libres & bien caraëtérifes, dans quelques plantes fingulières, in- dépendamment encore du concours du feu; & qu'enfin ce n'eft, du moins pour le préfent, que par la combüftion qu'on peut en faire, dans cer état, des provifions en grand. 5 XVIE. Quant à lalkal minéral, il n'eft pas queftion de favoir fi la Naure en produit de libre, parce qu'on en wrouve effec- tivement , même dans le kali, fans le fecours d'aucune com- buüftion , & dans les animaux; mais pour en avoir en abondance, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 195$ relativement à nos vües, ce n'eft de même qu'à l'aide de la décompoftion des fubftances, où ileft combiné, qu’on peut le retirer en état libre. Nous avons au fujec de cet alkali deux reflources; la première, c'eft lincincration des kalis; & la feconde , l'enlèvement dire de la bafe au fel marin, que l'acide nitreux , tant libre qu'engagé, peut opérer fans qu'il foit néceflaire d’alkalifer le fel préalablement. Il eft dé- cidé que l'alkali criftallifable, qu'on retire par la combuftion des plantes maritimes du genre des kalis, eft abfolument d'une méme nature que la bafe naturelle du fel commun ; quoique les foudes qu'on en tire foient fort éloignées de ne contenir que de cet alkali. Il en eft précifément comme de nos po- tafles & des produits falino-alkalins des cendres de nos foyers, qui font furchargées de phlogiftique, de fels neutres, de terre, & même mélés de quelques parties métalliques, & qu'on doit réduire à l'état de pureté convenable, avant que de les mettre en confommation dans les Arts, & principalement dans les Salpétreries Ce font en général les fources les plus abondantes & les feuls moyens de pratique fur lefquels il eft permis de faire fond , en grand , pour procurer à nos nitrières de l’alkali vé- gétal & minéral, en furcroit de l’alkali naturel de la nitri- fication, tant pour concourir d’abord à la formation des nitres parfaits dans late même de la produ&tion, que pour con- vertir les nitres à bafe terreufe en nitre de la première clafle. s. XVIII. Ayant eu occafon de faire moi-méme du nitre cubique en quantité , à bafe immédiate de fel marin , pour la compofi- tion de la poudre à canon, dont j'ai parlé ci-deflus, & de faire provifion de beaucoup d’alkali végétal tiré de linciné- ration de différentes plantes , on s'imaginera aïfement que j'en ai profité en bien des manières. Mais les obfervations que jai faites n'ayant pas toutes un rapport immédiat à notre fujec, je me bornerai à expofer ici celles qui y ont le plus de connexion, & donton peut retirer quelque avantage, Bbij 196 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. PREMIERE EXPÉRIENCE. Quoiqu'on fache que l’alkah fixe minéral à eflentiellement , & pour le fond , toutes les propriétés & les affinités de l'alkali fixe végétal, j'en voulus faire quelques épreuves en ce qui con- cerne leur force d’alkali comparative. Il fallut donc alkalifer du nitre cubique, que j'avois, pour en retirer la bafe toute pure dufel marin : c'eft ce que je fis de cette manière. Je répandis d’abord de petits monceaux de ce nitre bien fec çà & la, fur un marbre poli; je l'embrafai enfuire en y foufflant par-deflus la flamme d’une bougie au moyen d'un tuyau, jufqu'a ce que tout le nitre fut entièrement fondu, & plaqué fur le marbre. Ayant broyé ces petites mafles pierreufes , je les mis dans un creufer rougi au feu, pour leur donner une dernière calcination. La ma- tière étant refroidie , je la leflivai ; l'ayant après filtrée & deflé- chée, je me perfuadai que j'avois la bafe route feule du fel marin. Ïl me parut que la calcination ordinaire par le mélange de la poudre de charbon avec le nitre , n’auroït pas été fi exacte : elle fournit plus d’alkali, quil ny en a naturellement dans le nitre quon a employé, & c'eft l'alkali fixe des cendres du charbon qui fe confume, & qui, enfe mélant avec l'alkali mi- néral, caufe cette augmentation. C’eft ainf qu'ayant obtenu de l'alkali marin tout pur, j'en mis une demi-once dans de bon efprit de nitre , & une demi-once dans de l'acide marin; & dans un autre vaifleau, je verfai du même acide nitreux fur une demi -once d'alkali tartareux bien pur & fec. Après que tous ces alkalis furent foulés parfaitement d'acide , je les dépouillai de tout flegme , parun paifair defléchement. C’étoit donc l'augmentation du poids qui devoit marquer la vraie quandité d'acide que chacun avoit ablorbé. L’alkali marin, foulé d'acide nitreux, s'eft trouvé augmenté de cent onze grains. Ce même alkali, foule d'acide marin , avoir augmenté de cent fept grains. L’alkali végétal ; foule d'acide: nitreux , fe trouva augmenté d'un peu plus de cent douze grains. Y ayant verfé un peu d’eau commune , je foumis ces fels à la criftallifation , & les ayant pelés après l'enlèvement de toute MÉMorrEs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 197 eau furabondante , les criftaux de Salpètre pefoient quatre cent feize grains, poids compofé de deux cent quatre-vingt- huit grains d'alkali, de cent-douze grains d'acide nitreux , & de feize grains d’eau de criftallifation retenue. Le fel marin très-bien coformé peloit quatre cent feize grains, dont deux D cent quatre-vingr-huit écoient d'alkali marin , cent-fept d'efprit de fel, & vingt-un d’eau de criftallifation. Le nitre enfin à bafe d’alkali marin peloit quatre cent dix-fept grains; fon poids ctoic compofe de deux cent quatre-vingt-huit grains d'alkali, de cent onze grains d'acide nitreux , & de dix-huit grains d’eau de criftallifarion. Le réfultat de certe expérience eft que lal- kali tartareux & lalkali marin abforbent prefque la même. quantité d'acide nitreux bien concentré , & que la quantité d’alkali fixe tout pur, qui entre dans la compoñition du fel marin nature!, eft un peu plus que : du poids total du fel. Je ne fuis jamais parvenu à tirer l'alkali marin libre, contenu dans la foude d'Efpagne, telle qu'elle eft dans le commerce, en une telle proportion avec le poids rotal de la mafle que je traitois. Il paroît que la quantité de fels neutres non décom- polés, de la terre & des fubftances entrées en une demi-fufion dans la calcinarion qui compofent ces foudes , y ef plus grande qu'on ne simagine , ce qui en diminue l’uti- lité pourbeaucoup d'Arts; & encore s'en faut-il bien que l'alkali libre qu'on en retire, foit féparé de toute aglutina- tion & liaifon intime contraétée avec quelques-unes de ces ma- uères pendant la combuftion ; féparation , À ce qu'il me parut, très-dificile à obtenir d’une manière fatisfaifante & complette. SECONDE EXPÉRIENCE. Il peut être utile en bien des occafions, de connoître au jufte la quantité d’alkah fixe contenue dans les cendres de quelques plantes les plus en ufage dans la confommation jour- nalière. C'eft par certe raïfon que je vais rapporter les réiul- tats de l'incinération de douze de ces plantes des plus ufitées. J'en ai fai brûler les branches fraîches à l'air libre, ayant (4 193 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. toujours eu le foin de faire bien calciner les cendres. On en failoit le lavage avec de l’eau froide, ce qu'on répctoit jufqu'à ce que l'eau en fortit tout-à-fait claire. Après la filra- tion, j'évaporois la leffive à ficcité. La matière sèche qu'on en retiroic, eft ce que j'appelle alkali brut dans la table fuivante. Je purifiois chacun de ces alkals par des calcinations , diffolurions , filrarions & defléchemens , jufquà ce que jobtinfle un alkali très-blanc & bien cauftique , feparé des terres & des fels aglutinés, aufli exaétement qu'il m’étoit poflible : ce qui, pour dire la vérité, a été une opération très-fatigante. Voici les réfultats comparatifs de ces alkalis tant bruts que purifiés, que j'ai obrenus par tous ces procédés , le poids de la cendre leffivée étant coujours défigné par le nombre 1000. A —— NOMS DES PLANTES AUL KAASTELSS BURIFIÉS. brülées. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 199 :! TROISIÈME EXPÉRIENCE. Je prenois une demi-once de chacun de ces alkalis purs & bien fecs, & je la foulois d'acide nitreux au point précis de faturation. Après l'avoir dépouillée de toute eau par l'évapo- ration , je pelois le nitte réfultant, pour reconnoitre l'augmen- tation de poids qui sy étoit faite; il n’y en eut pas un dont l'augmentation ne fût au delà de cent grains; mais aucun n'atteignit précifément la force ablorbante de l’alkali tartareux (1. Exp. de ce 6.); ce qui doit plus étre attribué à un refte d'impureté échappée vraifemblablement à tous mes traitemens , qu'à une différence eflenticlle des alkalis, en tant que tirés de lincinération de différens arbres. Ces expériences mêmes & l'excellence des Salpétres que j'en retirai, ne faïfant qu'un même & feul Salpétre, prouvent évidemment que tous ces alkalis ne font qu'une même fubftance faline. $. XIX. Il eft donc de faic que les cendres de nos foyers ne font pas fi riches en alkalis qu'on pourroit le penfer. Par conféquent en réfléchiflant fur le produit de mille livres de fel marin, qui fourniflent, fuivant nos expériences (1. Exp. du $. précédent), prefque fept cents livres d’alkali fixe, ce qu'on auroit de la peine à retirer de dix mille livres de nos cendres, on fent bien que le fel marin, dont on peut abonder fans bornes & à très-peu de frais, fi la Couronne le veut , peut étre d’une très-grande reflource économique , étant employé à propos, pour que ce qu'il y a d'acide nitreux engagé dans des bafes terreules , s'empare de l’alkali qui fert de bafe au {el. Du moins peut-il fuppléer, dans le nitre à l'ufage de la guerre, à Valkali fixe végétal, dont on ne fauroit trop poufler la cen- fommation à ce {eul égard, fans inconveniens. Si limportante découverte de M. le Duc de la Rochefoucault , fur les craies falpêtrées des environs de la Roche-Guyon, Moufleau , &c. conftace dans bien d’autres parties de la France , par MM. Clouet & Lavoifier, fe trouve aflez ctendue pour procurer 200 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. des provifons de nitre en grand, commeil eft prefque toujours à bafc terreufe ; on conviendra que pour le transformer en Salpêtre , il faut une quantité d'alkali végétal bien confidérable. Le fel commun purifié , & convena- b'ement adminiftré, en feroit tout autant par de fimples di- geftions & évaporations naturelles, fans aucun fecours de feu; & le nitre réfultant, ne fütil bon que pour la poudre de guerre & dans la feule Pyrotechnie militaire , ainfi qu'il l'eft cffedivement , on auroit gagné du côte de l'économie , & fait en même temps un grand avantage aux Âïts qui ne favent fe pañler d'alkali fixe végétal. = CHAPITRE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE,. 204, CEA PL AI EEE SLT TNT De la formation du Nitre & de l'Acide nitreux. $. XX. Ps nitres en général étant claflés fuivant la nature de fa bafe avec laquelle l'acide nitreux eft combiné, & ayant parlé des alkalis fixes & des reflources de pratique & d'économie pour en faire des provifions en grand , il eft temps d’exa- miner un peu plus foigneufement la formation même de ces nitres , afin de s'approcher, le plus près qu'il eft poffible, du développement de l'acide nitreux, autre _püncipe prochain du nitre; principe le plus éminent, & qui fe dérobe le plus à nos recherches. Si le vitriol , l'alun , le foufre , & tant d’autres fels neutres fofliles, ne nous étoient préparés par la Nature en grand amas & en une très-grande abondance , & fi leur ufage dans les befoins de la vie étoit beaucoup plus précieux qu'il ne left ; les hommes n'auroient pas tardé à s'occuper de leur formation ; & l'on fenc bien que le laboratoire des fels fofliles n'étant pas ordinairement placé à la furface de la terre , ainfi qu'il paroît l'étre pour les nitres, l'objet en feroit même par-là incomparablement plus difficile à remplir. C'eft donc l'importance & la rareté du produit fpontané , relativement à notre befoin, ce grand moteur des hommes, qui nous porte à faire du nitre un fujet fi intéref fant de nos recherches. Gaue l'illuftre Société Royale ait bien voulu déclarer, pour les faciliter, que quand méme le procéde plus avantageux pour la promptitude , l'économie & l'abondance de ce produit, aboutiroit uniquement à une application heureufe des obfervations déjà connues , il fera prétéré aux plus belles découvertes , dont on ne pourroit pas tirer auffi promptement la même utilité, il faut convenir qu'on ne fauroit fatisfaire à fes vües , augmenter ce {el , G'e 203 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. rocurer à la Nature plus de matières & plus d'occañons pour le produire en une plus grande abondance , à moins qu'on n'entre heureufement dans les vües mêmes, &, pour ainfi dire , dans l'atelier de la Nature. Par conféquent en ne fe propofant même pour but que les objets énoncés, fans vifer à aucune théorie , il en faut toujours une , les points capitaux connus de la nitvification duflent-ils fubfifter en entier. $. XXI. Pour procéder donc avec ordre dans une telle recherche, nous allons commencer par une expofition fommaire de nos connoïflances inconteftables fur la genération du nie, afin aw’elles fe trouvent rapprochées & réunies fous un même point de vue. Il vaut mieux fe laïfler guider vers l'objet qu'on ne connoïit pas, par les connoiflances qu'on a, que de fe livrer d'abord à des principes de pure fpéculation. 1. Nous trouvons du nitre tout formé dans les décombres des vieilles murailles , dans les terres légères & friables , & dans les pierres tendres & poreufes , fur - tout lorfque ces matières ont été tirées de quelque endroit bas, à l'abri du foleil & de la pluie, où règne un peu d'hu- midité & de chaleur & où Fair a un libre accès, comme dans les caves , les étables, les bafles-cours, les celliers, les les granges, les écuries , les grottes, &c. 2.9 On en trouve quelquefois dans ces matières, même en plein air. Dans les Indes , dans la Barbarie , dans l'Efpagne, dans le Pérou, fur les côtes, aux environs de Lima, il y en a d'expofé à toutes les révolutions de Patmofphère. Il y a des cimetières qui en contiennent abondamment. On entrouve dans des fumiers confommés, & même en efflorefcence fur la furface, expofé au grand jour. Les montagnes de craie , ainfi que nous en avons fait mention, des environs de la Roche- Guyon, Moufleau , &c. & bien d’autres endroits de la France, fuivant les obfervations de MM. le Duc de la Rochefou- caut , Clouer & Lavoifier, contiennent du nitre à découvert. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 203 3° Si ces nitres ne font pas d'abord tout formés, un long fejour dans des lieux convenables, & quelques traitemens bien fimples , pour que fair entre en concaét avec eux, les per- fectionne , fans aucune addition étrangère. C’eft ainfi qu'on les obtient de toutes les matières tirées des latrines, des étables, dés vacheries, &c. 4.% Il y a une quantité de plantes dont on peut retirer du nitre bien caraëérifé, par la décodion & l'expreflion de leurs fucs convenablement rapprochés. 5° Toutes les matières animales & végétales fermentefcibles, tant féparées que mélées enfemble , mifes à fe putréfier, & traitées de maniere que le cours de la putréfaétion ne foit au- cunement troublé , au bout d’un certain temps, donnent du nitre à putréfaction complette. C’eft une vérité de fait, & l'expérience de tous les jours la confirme inconteftablement. Les doutes qu'ontrouve femés l-deflus dans le grand Ouvrage de l'Encyclopédie, au mot Mirre, ne m’empêchent pas de la mettre au rang de nos connoïflances certaines. Je le fais d'autant plus sûrement, que je m'en fuis afluré par des ex- periences faites en mon particulier, en employant féparé- ment des matières végétales toutes feules, ainfi que des ma- tières purement animales que J'ai laiflées en putréfa&tion pen- dant deux années dans une terre légère, que j'avois de- pouillée préalablement par des lavages de tout fel difloluble dans l’eau. Les faits font au deflus de tous doutes. 6.9 C’eft encore une vérité de fait, que le dernier terme de la putréfaétion, tout hors de la portée de nos yeux qu'il eff, cft l'acte, pour ainfi dire, l'accompliflement de la nitrifica- tion. Tout ce qui la retarde ou l'empêche , retarde & em- pêche en méme temps la produ&tion du nitre. En effet, tout le monde fait que les matières putrefcibles ne de- viennent propres à cette produétion, qu'autant qu’elles font mifes en état de fubir cette putréfaétion complete ; & il eft de fait, que bien fouvent d’un grand amas de ces matières, méme après un très-long féjour, il ne fe développe pas un atome de nitre, à moins qu’elles ne foient divifées & difperfées C cij 204 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. dans des matières poreufes, & diftribuées en petites quan- cités , en forte que la fermentation ne foit pas génce , & que la putrcfaction atteigne librement fon plus haut point. 7. Tout ceci ne fe faic qu'à la furface de la terre. Il eft conftaté par toutes les obfervations faites jufqu'à préfent , que l'intérieur de la terre n’a encore fourni aucune portion de nitre, ni d'acide nitreux engage dans une bafe quelconque, & moins encore en grand amas. C’eft donc une autre vérité de fait, que la produétion de ce fel fe fair habituel- lement fur la furface ou à des fort petites profondeurs, au bout d’un certain temps , moyennant le concours de certaines matières & de circonftances favorables & propres à fa for- mation. 8.° Une grande partie de ces nitres eft tout naturellement à bafe d'alkali fixe végétal, fans aucune addition étrangère ; le refte eft, pour la plupart, à bafe terreufe , n’y ayant que quelque portion à bafe d'alkali minéral (Chapitre précédent). On seft encore afluré que plus il eft entré de matières animales dans la putréfa&tion, moins on retire de nitre à bafe d’alkali fixe végétal, & plus de celui à bafe terreufe, & c'eft tout le contraire lorfque la matière végétale y domine; cir- conftance bien avérec, à laquelle on ne fauroit faire aflez d'attention. $. XXII. Ce font les points capitaux au fujet des nitres, auxquels toutes nos connoiflances fe réduifent dans ce moment. Maïs tout ceci fait plus connoître la pofñlibilité de trouver du nitre & d'en faire, que le procédé intime de la Nature, qu'il sagit de démêéler , sil eft poflible. En réféchiflant d'un côté fur les matières minérales, où le nitre fe loge habituellement & fe forme , & de l’autre fur les bafes rerreufes que l'acide nitreux affe&e le plus fouvent, on eft d'abord tenté de demander, qu'eft ce que fournit le règne minéral dans la nitrification ? Des que les décombres des vicilles mafures , les terres MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRÉ. 305$ qu'on tire des étables, des écuries, &c., les pierres & terres oreufes qui fourniflent ce fel, étant une fois parfaitement dépouillées de leur nitre, n’en reproduifent plus un atome, fi l'on fe contente fimplement de les expofer à l'air, fans les mettre en contaét avec de nouvelles matières falpétrées, fans les rendre acceflibles à des fucs végétaux ou animaux, fans y mêler des fubftances putrefcibles toutes fraîches, fans les hu- meéter d'eaux mères & de femblables liqueurs, c’eft d’abord une preuve fans réplique , que le Salpêtre n’eft pas un fel propre de ces matières , & qu'il leur vient d'ailleurs. Par conféquent on ne fauroit regarder tous ces minéraux imprégnés de fubftances nitreufes, que comme des laboratoires où les principes prochains du nitre fe divifent, s'atténuent , fe dépouillent des parties étrangères qui les enveloppent, où enfin fe fait & s'achève la préparation & la produétion du nitre , & tout au plus comme fourniflant quelquefois des matrices terreufes à l'acide nitreux, faute d’une bafe plus fixe, au moment de fon développement. Jai mis un jour, ainfi que Glauber le prefcrit, une once de pierre à chaux en poudre dans une once d'efprit de nitre { Recueil de Mémoires fur la formation du Nitre, pag. 12), & au lieu d'y verfer de la leflive de cendres, où la quantité d’al- kali végétal eft inconnue , j'y infufai une demi-once d’alkah tartareux bien fec. Je fis difloudre dans l’eau le fe! qui fe forma, je filtrai & évaporai, & j'obtins 495 grains de nitre. Le véri- table Salpêtre que je devois retirer d’une demi-once d’alkali, ne pouvoir être réellement que d'environ 400 grains (Chapitre précédent). Il eft donc vrai, comme l'avance cet Auteur, qu'on obtient dans cette expérience plus de nitre qu'on ne devroit en obtenir. Mais ce furplus n'eft pas un nitre provenant de la pierre, ni prééxiftant à l'opération , ainfi que je vais le démontrer. Pour fouler une demi-once de fel tartareux, il y faut 378 grains d’efprit de nitre. Ce qui refte d’une once d’efprit de nitre, favoir 198 grains, fufft pour fouler un peu plus de 72 grains de poudre calcaire ( voyez M. Homberg dans les Mémoires de FAcadémie pour l'année 1699). Par conféquent lonce d'’ef- 206 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. pric de nitre employé pouvoir réellement donner 400 grains de Salpètre, & un peu plus de 72 grains de nitre à bafe calcaire. En effer, nous avons obtenu de notre opération 495 grains de nitre. C’eft que tout ce nitre n’eft pas Salpêtre, ainfi que l'expérience me l'a appris ; car l'ayant.diflous dans une quan- tic fufhfante d'eau , & y ayant ajouté un gros du même alkali tartareux, la terre calcaire fe précipita tout de fuite, terre que j'ai reconnue à toutes épreuves pour la même que J'avois traitce pat l'acide nireux au commencement. Si donc l'intérieur de la terre ne contient aucune portion d'acide nitreux en- gagé en quelque bafe que ce foi; fi les fubftances minérales qui nous en fourniflent à la furface, ne fervent évidemment que de vaifleaux , de laboratoires pour la formation du nitre qui y eft apporté d’ailleurs, quelle eft la fource immédiate, cflentielle , matérielle & propre de ce fel? L'acide nitreux ne fauroit à la vérité être rangé parmi les acides minéraux, parce qu'il ne manqueroit pas de s'engager dans l'intérieur de la terre, sil y en avoit dans quelque baie, ainfi que le font trous les acides minéraux. Il en feroit de même , fi cetoit par quelque modification inconnue aux Chimiftes, que les acides minéraux fe tranfimuaflent en acide nitreux dans les entrailles de la terre. On n’en a jamais trouvé le moindre échantillon. D'un autre côté, fi c’étoit par le concours des matières végétales & animales en putréfaétion que cette modification s'opéroit fur la fuiface de la terre, nos expé- riences (Chap. r.), faites avec tous les foins poflibles , nous en auroient donné quelques indices. Maïs l'air ne pourroit-il pas être le lieu natal de l'acide nitreux? ne pouiroit-il pas fe dépofer fucceflivement dans les fubftances propres à sen charger ? C’eft ce que plufeurs anciens Chiniftes penfoient & foutenoient vivement. On ne fauroit difconvenir que l'accès libre de l'air ne foit indifpenfable dans toute nitrification , aufli bien qu'un certain degré de chaleur & d'humidité ; mais ce font auffi inconteftablement les conditions requifes pour l'ouvrage de la putréfa@tion de toute matière fer- mentefcible, C’eft donc trop légèrement qu’on fe croit autorife MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 207 d'en inférer, que l'air eft le magafn, le véhicule de l'acide nitreux qui sy produit au bout d’un certain temps. Il eft de fait, & toutes les expériences viennent à as , que les terres & pigrres , c'eftà-dire, les matières les plus propres à recevoir & à retenir l'acide nitreux, étant une fois exactement & entic- rement dépouillées du nitre qu'elles CONENOIENE, ne s'en Char- gent plus anfi qu'on l'a remarqué ci- deflus, de quelque manière qu'elles foient expolées à l'accès libre de l'air, à moins qu'elles ne fe falpétrent de nouveau par l'accès de fubftances contenant du nitre tout forme, ou parce que l’on y ajoute des matériaux prêts à le développer par une fermentation convenable. Par conféquent, la principale queftion à à difcucer aujourd'hui, eft de favoir en quoi & jufquà quel point le concours de l'air eft néceflaire à la formation des nitres, quef- ion quon tâchera d'éclaircir dans la fuite. 6. XXIII. En attendant, en réuniflant fous un même point de vue toutes ces recherches, on eft fondé à conclure, que la partie la plus eflentielle du nitre, l'acide nitreux , eft cout- à-fait étranger au règne minéral; que ce règne ne fournit à la nitrification qu'un laboratoire conv enable, & fouvent des bafes où l'acide nitreux s'engage & fe neutralife ; que l'air n'eft pas non plus le réceptacle ; le lieu natal, le véhicule ni du nitre ni de l'acide nitreux tout formé. Par confequent il eft prouvé par voie d’exclufion, que c’eft dans le regne vegetal & dans le regne animal qu'il faut puifer fon origine. Mais, d'un autre côté, il eft de fait (s. XXI de ce Chap.) que le nitre quon retire eft le produit de putréfaétion complette des matières animales & végétales tant mêlées que féparées; & que nu Ile fubftance minérale n’eft falpétrée, à moins que le Salpêtre n'y ait été apporté d’ailleurs, ou que des fucs végétaux & animaux n'y aient fubi une décompolfition achevce paï la fermentation. [ eft donc indirectement & direétement prouvé que l'acide nitreux tire fon origine immédiate , maté- rielle & propre, de deux règnes, vegetal & animal, quelle que 2083 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. foit la manière dont la Nature sy prenne pour le produire; & c'eft ce qu'il s'agit de déméler. On fent donc fur quoi orte l'objeétion qu'on fait à ceci, en difant qu'on a beau laifler putréfier des fubftances végétales & animales on n’en obtient point de nitre, fi l'on n'en expole toutes les parties fuccefli- vement à l'ai; qu'il y a méme de ces matières corrompues, ayant un fiècle d’antiquité , qui ne font pas nitrifiées lorfqu'on les retire de leur fofle, & cela uniquement par le défaut d'air. Encore une fois, il en eft de l'air comme de l'humidité & de la chaleur, dont la fermentation ne fauroit fe pafler , inde- pendamment de la confidération des nitres. Toute néceflaire qu'eft la cocpération de ces agens fubfidiaires, la nitrifica- üon n'en eft pas moins l'effet propre, le produit d’une putré- faétion achevée. Il ne faut pas confondre les caufes inftru- mentales, avec les efficientes & matérielles de cet ouvrage de la Nature. S'XXTV: C'eft par conféquent d’une connoïffance complette de ce qui sopère dans la putréfaétion des matières végétales & animales ; que dépend le développement du myftère de la ni- trification. C'’en eft la vraie clef, & ce qu'il y a de plus im- portant & fans doute de plus difficile à découvrir. C’eft dans cette opération que fe fait le nitre & la récombinaifon des principes en un être tout nouveau. Mais malheu- reufement cette théorie manque. On eft aufi éloigné de connoître au jufte tous les moyens, toutes les fubftances qui favorifenc le plus la putréfaétion , de même que ceux qui s'oppofent le plus à fon progrès , que les changemens qui arrivent aux corps organifes pendant cette grande opé- ration , & la manière dont la Nature sy prend pour fubri- lifer, élaborer & faire pañler les matériaux devenus libres, les débris des êtres décompofés, dans la formation de nouveaux êtres. Sera-ce un fecret pour toujours? Je ne le fais. En atten- dant, ileft à préfumer que d’après les recherches étendues & profondes qu'on fat à cette époque, bien des points capitaux MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 209 capitaux ne nous échapperont pas entièrement. Voici ce que je fuis parvenu à appercevoir relativement à l'objet de la nitrificaton, après un grand nombre de tentatives que, dès l'année 1777, je n'ai pas manque de faire à ce fujet. C’eft d'après ces obfervations qu'on pourra décider avec plus de fondement fi le nitre préexifte tout forme dans les végeraux & les animaux, & sil n'a beloin de la putréfaétion , que pour fe dégager, fuivant le fentiment de M. Lémery; ou fi c'eft un étre, un compofé de nouvelle formation, une combi- naifon toute nouvelle. 8 XX V. Je commençai d’abord par réfléchir que pour être d’ac- cord avec tous les faits, il falloit convenir qu'une des parties conftirutives , eflentielles du nitre, eft le phlosiftique, le prin- cipe inflammable , la matière du feu , de quelque façon qu'on veuille le nommer, & que c'eft ce principe quiicrend combuftible par l'attouchement du feu pur , mis en aétion juifqu'à un certain point. Sa décompofition, fon alkalifation par l'aétion du feu, par laquelle, de combuftible quil étoit, il rentre dans la chfle des:.corps incombuftibles, ne permet pas de douter. que la, matière du feu qui s'eft dégagée & diflipée dans certe opération, n'entre, comme principe, dans fa compofrion. C'eft une de ces vérités chimiques qu'on peut regarder, ce me femble, comme parfaitement démontrée. Et comme par cette opération tout l'acide nitreux, dont l’alkali étoit rafañé, eft entièrement enlevé, diflipé, détruit, on ne fauroït difconvenir que ce ne: {oit à l'acide que la matière du feu appartient principalement, & qu'elle n'entre dans fa compofñtion. En eflet, ayant décom- pofé le nitre par tout autre intermede que par le feu, en forte qu'on l'ait dégagé fans diffipation, ce n'eft que la fubftance qu'on. en a retirée fous une forme liquide, c'eft-à-dire, l'acide qui. conferve; l'inflammabilte , le refte eft devenu;un corps incombufüble, Il eft donc sûr que la matière du feu cft l'agent véritable, le principe de toutes ces combuftions , tant dans D d 210: MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. le nitre que dans l'acide nitreux. Une autre véritt également conftatce & certaine, c'eft que le nitre fe fait par le concours des matières végétales & animales en putréfaction ; qu'il eft le produit de cette opération, & que c’eft des débris feuls de la décompofition de ces matières, que le nitre réfulte : d’un autre côte il eft de fait que ces fubitances, tant folitaires que combi- nées, donnent du nitre à putrcfaétion confommée , fans aucune addition étrangère, & que les matières minérales, l'air, l'eau, n'y entrent les unes que comme des récepracles de la nitrification, & les autres comme des inftrumens néceflaires à l'ouvrage de la fermentation & décompoñition des corps organifés, & à la combinaïfon des nouveaux êtres qui s'y reproduifent. Qu'on confidère à prélent que toute plante, tout animal -eft originairement chargé de principes inflammables : les huiles, les réfines , les graïfles quelconques , dont ces çorps font compofés , en font le magafin. Ces principes inflamma- bles ne fe dégagent pas feulement de ces corps qui les con- tiennent par la combuftion, dans lequel cas ils fe remettent dans l'état de feu pur ; il eft une autre voie que la Nature afféte peut-être le plus, & qu'elle emploie fouvent pour les en retirer fans diflipation , la tranfmiflion , par laquelle un corps les enlève d’un autre fans combuftion, en s'y uniflant à mefure qu'ils fe dégagent. C’eft le cas où le principe inflam- mable ne quitte une combinaifon , que pour rentrer dans unc autre. Au moyen de cette tranflation , un corps , de non combuftible , peut devenir combuftible, pendant qu'un autre devient incombuftible, de combuftible quil évoit; & lon fait d’ailleurs que les alkalis fixes, les terres calcaires, toutes les matières enfin sèches & trerreufes, naturellement crès-fines & très-divifées, ont une très-grande difpofition à fe combiner avec les principes inflammables qui sy uniflenc & qui y adhèrent fortement. Tout ceci bien confidéré me fr d’abord entrévoit , en rapprochant ces faits de tout ce qui fe pañe dans la nitrification, que la produétion du nitre pourroit bien tenir de fort près au grand phénomène de la circulation , de la cranflation du phlogiftique d'une combi- - MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE 214 naïfon dans une autre , fans devenir feu libre, fans combuftion; travail des plus éminens de la Nature. Ne pourroit-il pas fe faire, me bis je, que les alkalis falins & rerreux qui fe dégagent pendant la fermentation, s'atténuaflent , fe fubtilifaflent, s’em- paraflent par leur difpofition à sunir au phlogiftique, des matières inflammables en décompofition , & que de non combuftibles qu'ils étoient avant cette tranfmiffon, ils devinflent des fubftances neutres combuftibles apres l'avoir reçue ? En quoi confiftent ces feux qui s'exhalent quelquefois des cimetières, des fumiers, des endroits où il y a des fubftances en putréfac- tion? Ce font des gaz inflammables qu' ‘on fait à prélent tirer de tant de corps, dégagés par une fermentation naturelle des matières putrefcibles qui y font enfouies. Mais ce font en même temps les endroits les plus cheris des Salpétriers pour en urer du nitre. Ÿ auroit-:il donc quelque connexion entre l'ouvrage de la nitrification & les gaz inflammables que M. Hales, & dernièrement tant d'autres Phyficiens célèbres, ont dégagés de la décompofition des matières végétales & animales par une analyfe à feu nu, & pouflée rapidement ? puifque c'eft de même de la décompofñtion completre de toutes ces matières que réfulte le nitre. Mais encore n'a-t-on pas vu dernièrement en Italie, & ne voit-on pas à préfent par-tout, que du fond vafeux des eaux dormantes , du terréin mou des marais, on tite facilement ce même gaz inflammable ? Ne pourroit-il pas fe faire que nous puñlions parvenir à tirer du nitre de ces mêmes endroits négligés de tout le monde, par ce feul indice du gaz inflammable qu'on en développe, & à acquérir quelque nouvelle connoïflance au fujet de cette connexion cachée , que nous entrevoyons dans ces hénomènes ? Ces conjectures fondées fur ce qu'on a bien reconnu ; qu'à moins que ces endroits ne foient compofés de débris de végétaux & animaux prefque décompoles , on ne rexire pas de gaz, me fienc penfer que tant le, déyagement de cette matière fluide inflammable, que la formation ;du nitre, étant évidemment le produit de la putréfaétion , il y avoit là D di 212 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. quelque chofe de lié qu'il falloit approfondir. En n'entrant pas dans le détail de toutes les tentatives que J'ai faites pour en venir à bout, je vais d'abord expofer mes dernières expériences, comme les plus décifives , les plus mémora- bles d’entre celles que j'ai faites, & en méme temps les plus faciles à répéter. Je fus donc reconnoître au commencement de l'année 1778 , dans un ancien marais, l'endroit le plus propre , où le terrein mou étoit en même temps le plus noir & le plus recouvert d'herbes corrompues. En le creufant avec une canne, ainf que le fit la première fois M. Volta en Jtalie, & la retirant précipitamment, je préfentois à l'inf- tant une bougie allumée , pour m'aflurer par la flamme bleu qui sy excitoit & s’enfonçoit rapidement dans le trou , que le lieu abondoit en gaz. je fis conduire chez moi une char- retce de cette terre tiréc d'un pied de profondeur. A linftant je la divifai en trois parties égales, que je fourmis aux expé- riences fuivantes. 1.° Je diftribuai d'abord une partie de cette terre dans de grands pots de terre verniflés , & je me hâtai d’en retirer le gaz prêt à fe développer, en y creufant avec précipitation des trous très-près les uns des autres, & en embrafant la ma- tière inflammable qui s'en dégageoit ; le fecond & le troi- fième jour il n'en émana que très-peu. C’éroit parce que la fermentation avoit été trouble par ces manœuvres, & quil falloit attendre qu'elle reprit fon cours, pour quil ütsen dégager de nouveau gaz. Mais je crus en même temps qu'il valoit mieux changer de procéde. Je commençai donc toutes les fois que j'en voulois dépouiller la terre, par échauf fer préalablement les pots, en les plaçant dans un bain de fable , où la terre prenoit à peine une chaleur de 40 degrés du thermomètre de M. de Réaumur ; je creufois enfuite dans la terre qui y étroit contenue, des trous; je la remuois en tous fens, afin de diffiper de toutes les manières le gaz à mefure qu'il fe développoit. J'avois le foin d’arrofer la terre de temps en temps avec de l'eau de rivière. Au bout de cinq mois, je voulus m'aflurer f je pouvois difcontinuer ce MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 213 travail. Je reçus pendant plufieurs jours de fuite dans des récipiens la vapeur qui fe dégageoit de cette terre traitée par la chaleur fimplement, fans aucun intermède. Au lieu d'un air inflammable , c’étoit toujours un peu de gaz méphitique que jobtenois. Dès-lors j'etendis cette terre fur des planches à l'abri du foleil & de la pluie, & je n’en eus d’autres foins que de l'humeéter avec de l’eau, & de la remuer tous les quinze jours. 2.° Le fecond monccau de la terre apportée du marais fut dès le premier jour étendu en tas fur un pavé de briques, de même à l'abri du foleil & de la pluie; je n'y ai pas touché pendant toute l'année 1779, fi ce n'eft que je la fis arrofer d'eau fimple de temps en temps, & remuer foigneufement. 3.° Et quant au troifième monceau, je le fis premièrement fécher à l'ombre, pour le dépouiller de toute humidité. Je l'avois deftiné pour le lavage , en vüe de m'aflurer fi la terre du marais, pendant l'état d'abondance où elle fe trouvoit en gaz inflammable , ainfi que l'expérience fur le lieu le failoit voir, contenoit du nire. Je la fis féjourner fix jours dans l'eau. L'ayant après leflivée & filtrée, je foumis la leffive à une douce évaporation. Elle s’eft réduite en une eau roufle, vifqueufe , incoagulable, chargée de matières grafles & onc- tucufes. J'ai eu bien de la peine à la faire évaporer à ficcité; Jy fuis cependant parvenu. J'ai paflé enfuite fur le réfidu une bonne quantité d’efprit de vin froid , pour difloudre la partie huileufe : enfa j'ai faic plufieurs diflolutions de la matière sèche; je les faifois bouillir & refroidir par intervalies ; j'en foumet- tois des portions à la criftallifation : mais tous ces travaux ne mont fait appercevoir que de légers indices de matières nitreufes, & quelque peu de fubftance faline, qui fufoit comme de la mauvaife mèche d’arüfice, mais qui navoit pas le caractère de Salpêtre bien décidé. Voici à préfent les expériences que J'ai faites enfuice fur les deux premiers mon- ceaux. 4.° La terre que j'avois dépouillée (n.° E.), autantqu'il m'avoit ét poflible, de principes inflammables, à mefure qu'ils fe de- 214 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: veloppoient dans la putréfaétion des fubftances végétales & animales, après une année & demie de repos, ne m'a fourni qu'une quanturé de Salpétre très- petite , & prefque inap préciable. On simagine bien que cette expérience devant être décilive, j'ai eu recours à tous les moyens qui me font connus pour la bien faire. J'ai lefivé la terre trois fois de fuite; jai mis la lefive filtrée à toutes les épreuves de lévaporation, du refroidifflement , des criftallifations réité- rées, pour féparer les fels tant agglutinés que confus dans la diflolution. Mais comme il ne s’'agifloit enfin que dereconnoître sil y avoit du Salpêtre, on fent bien qu'il n’étoit pas fi facile de sy méprendre, fi la terre en avoit été effectivement & fenfi- lement imprégnée : mais je n’en retirai qu'une dofe bien foi- ble, & quon eut même de la peine à difcerner. 5. Un mois avant que de leffiver la terre du fecond mon- ceau (n.° IL), oùles matières végétales avoient été aban- données à la putréfaétion la plus complette fans y toucher , je la fourmis , vers la fin de l'année pañlée 1779, à plufieurs épreuves > pour voir fi, au moment où la nitrification devoit être achevce, elle fournifloit plus de ce gaz inflammable , dont elle étoit fi riche dans fon lieu el Je ne me fer- vois que de [a chaleur pour le dégager: mais il n'y eut jamais dans les récipiens que de fair refpirable , & dans quel- ques épreuves du gaz méphitique. 6.° Enfin, ayant leffivé cette terre & filtré la leffive, je fou- mis à l'évaporation la diflolution. Tant par les refroidifiemens & enfuite par les cüftallifations , que par le traitement conve- nable de l'eau mère, j'ai retiré fans trop de peine prefque une once & demie de Salpètre très-bien cara&érife. J'y ai crouvé du fel marin, comme on peut fe limaginer; mais c'étoit fingulièrement de nitre dont il falloic s'aflurer. $ XXVIH. Ce font celles d’entre mes expériences faites à ce fujet > fur lefquelles je compte le plus, & qu'on peut réperer le plus aifément fur toute forte de matières végétales & animales en MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 215$ putréfattion. Je fuis bien éloigné de les croire fuffifantes pour fonder un fyftéme complet : la marche en ces fortes de matières, neft jamais aflez lente ; mais il faut convenir qu'elles en peuvent étre la bafe. L'on voit premièrement, que pendant la fermentation des fubftances végétales & animales , les liens avec lefquels le principe inflammable des parties huileufes eft retenu , deviennent fi foibles, que toute légère fecoufle eft capable de le dégager. D'abord qu'on y touche, voilà le feu qui fe manifefte ; 1l jaillit , pour ainft dire , de toutes parts en gaz inflammable. Si l'on continue à l'enlever à mefure quil sen développe de nouveau dans le progrès de la fermentation , toutes les dépouilles de ces ma- tières ne forment, à putréfaétion achevée , qu'une mafle in- combuftible , faute des principes ignés, qui ont été diflipés : & fi l'opération de la Nature n'a pas été croublée , la matière du feu n'ayant point été détruite, & ayant eu toute la liberté de fe tranfmertre, & de fe fixer dans des matrices naturellement folides, elle ne fe dégage plusen gaz (n.° V.), ou en forme - aérienne, ainfi qu'elle pouvoit le faire dans le premier état. C'eft dans fa nouvelle combinaïifon, où elle a contratté des liens plus forts, qu'il faut la chercher, en un mot, dans le nitre qu'on retire à putréfaétion achevée. Il n'eft plus de matière combuftible dans toute la mafle qui réfulte, que celle précifément où le principe inflammable s'eft togé. C'ef ainfi que l'expérience nous met fur la voie de le fuivre de proche en proche , depuis fon état originaire, dans les ma- tières végétales & animales, jufqu'à fon nouvel alliage : sil n'eft pas diflipé en gaz par une permutation , par une tranf— lation , en filence , il pafle dans des nouvelles combinaifons ; les dépouilles originaires qu'il a abandonnées, deviennent in- combuftibles , & le corps de nouvelle efpèce dans lequel il Seft combiné, devient, par cette union, combuftible, d'in- combuftible qu'il étoit. SX XV ELE Ce premier pas fait, je me fis bien des queftions, dont voici les principales. 4 216 MéMornEs SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE: 1. Eft-ce le principe inflammable tout feul, en état de feu pur, qui s'allie avec les alkalis ; ou y pañle-cil combiné & en qualité de matière mflammable ? 2.9 Dans quel état eft-il lorfqu'il eft dégagé de nouveau de ces liens par un inrermède, & qu'il nous paroît fous une forme aqueufe , à qui nous donnons le nom d'acide nitreux ? 3.° Ces deux états feroient-ils’ différens ? 4°. Si la matière du feu toute pure eft fufceptible de fe combiner avec des compofes, dont l'eau & Pair font prin- cipes, tels que les matières falines, huileufes , terreufes, &c. peut-elle l'être avec un fimple compofe d’eau & d’air ? If paroît que non : il faut le fecours d’un intermède. Quand même le phlogiftique fe transféreroit cout pur dans la première combinaifon , c’eft à-dire, dans la formation du nitre, il ne fauroit paroïre fous une forme aqueufe, qu’en qualité de corps infaummab'e, ou engagé dans une matière qui le rende mifcible avec l'eau en qualité d’intermède. 5.” Eft-ce quelque partie terreufe & fixe des huiles qui sunit très-intimement avec le principe inflammable dans la putré- faétion , & qui forme le nitre, ainfi que fe forment les matières charbonneufes dans la décompofition des huiles par la diftil- lation, & même dans la combuftion des matières végcrales & animales ? Ou font-ce les fucs acides de ces matières, pré- parés , atténués, élaborés en un mot par la Nature pen- dant la fermentaion , qui fourniflent la matière alkaline très- fine, très-divifée , & crès-propre à s'unir au phlogiftique, qui, dans l'état huileux, fuligineux , & de vapeur où il eft, paroït: ke plus difpofc à sy combiner trèsintimement ? 6.° L'humidité fi néceflaire dans toutes les nitrifications, feroit-elle l'intermède propre à cette tranflation , & ne pour- roit-elle pas encore décompofer le gaz inflammable, abforber le gaz méphitique qui sy méleroit, & toute autre matière étrangère, & tranfmettre le principe igné dans toute fa pu- reté ? 7.° Ne doit-:l pas encote être permis, d’après ces expc- riences , de juger que l'air pourroit bien jouer dans la niui- fication MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 217 fication, par rapport au phlogiftique, qui pañle d'une combi- naïfon dans une autre, un rôle analogue à celui de toute com- buftion où le phlogiftique fe dégage fous forme de feu libre » S XXVEEIT Ce font des queftions dont il paroît que la décifion doit s'attendre du temps, de nouvelles expériences , & de l’avan- cement de nos connoiffances dans la Chimie. Cependant je vais faire part à la Société Royale de quelques expériences que J'avois faites précédemment, pendant les années 1776, 1777, après la publication de fon premier Programme. En les rapprochant des faits ci-devant rapportés, il ne peut qu'en réfulter de nouvelles lumières fur un fujet fi obfcur, & fingulièrement fur la nature des fubftances propres à fe ni- tifer, sil meft permis de dire ainfi, dans la putréfaétion. PREMIERE EXPÉRIENCE. Je pris une bonne quantité de plantes crues en pleine cam- pagne ; les ayant concaflées, je leur fis fubir une longue macération à froid dans un mélange d'eau & d'efprit de vin, au moyen de laquelle je leur enlevai la plus grande partie des fucs diflolubles dans l'eau & dans l'efprit de vin; enfuite je les retirai, en exprimant toute la liqueur dont elles étoient imbibées, & ayant préparé à part deux monceaux de terre légère, dépouille de fels par des lavages, fur l'un je verfai la matière liquide, & dans l'autre je diftribuai les débris des plantes dont on avoit fait l'extrait. Je faifois re- muer ces monceaux de temps en témps, & les arrofer avec de l'eau, d’abord que la terre étoit sèche. Vers la fin de l'année 1777, ayant leflivé les terres de ces expériences, & ayant foumis les leflives à l'évaporation & aux autres manœuvres chimiques éparément , la terre imprégnée de fucs extradtifs m'a d'abord fourni du Salpêtre bien décidé, ce que l’autre ne fit pas, & encore ai-je remarqué que la matière végétale n'y étoit pas putréfiée , à proprement parler. E € 218 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. SECONDE EXPÉRIENCE. En même temps que je faois l'extrait précédent par la macération , je foumis d'autres plantes à la décottion. L’ex- trait a été de méme répandu fur un monceau de terre traitce préalablement par le lavage, & dans un autre jai répandu & diftibué coute la mauere dont on avoit exprimé les fucs. Le rélulrat a été précifement le même que dans l'expérience précédente : la terre dans laquelle avoit féjourné, pendant weize mois, le réfidu végétal qui avoï: fubi la décottion, ne S'eft pas non plus falpêtrée , comme à fait l’autre, où l'on avoit répandu la matière extraétive. TROISIÈME EXPÉRIENCE. Enfin ayant dépouillé d'acides une autre portion de végé- taux, autant qu'il toit poñlible , par la diftillation , j'ai mêlé le réfidu dans de la verre, comme dans les expériences ci- deflus , en le diftribuant en petites parties. Au bout de qua- torze mois, ayant foumis la terre, en 1777, au leflivage , & la leflive aux évaporations & aux traitemens convenables, Je n'en ai retiré aucun indice de nitre, de quelque manière que je m'y fois pris. Je dois avertir que toutes les plantes employces dans ces expériences étoient inodores, & crues en pleine cunpagne. & XXIX. Qu'on fe rappelle à préfent les connoiïffances inconteftables qu'on à au Jujet des alkalis fixes végétaux. D'abord que les plantes ont été dépouillées de leurs acides concrets , foit par la macération ; foit par la décoëtion, ou par la diftillarion , lor{- qu'on les brûle à à l'air libre , elles ne laiflent que très- -peu où point d'alkali dans leurs ARS Maintenant ces expériences nous apprennent que ces mêmes rélidus, foumis à la putréfac- ton dans des matrices convenables, ne font plus propres à fournir du Salpérre » & que ce n'eft que de la matière des extraits , quon en peut retirer. Il eft donc vifible quil y MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 219 a dans tout ceci une liaifon frappante & marquée, qui mé- rite bien route l'attention des Chimiftes. On a tout lieu de croire que fi l'alkali fixe doit fon origine aux acides des végétaux , c'eft là que le nitre a également fa fource matc- riclle & propre , d’après l'atténuation, l'élaboration & la pre- paration de ces fubftances pendant la putréfation , & moyen- nant l'accès & l'union intime du principe inflammable qui fe développe, comme on vient de l'établir, des huiles décompofées dans la fermentation putride portée à fon plus haut point, foit qu'il s'y porte tout pur, foit qu'il foit combiné avec quel- que autre fubitance , ce qu'on ne fauroit encore decider. Rien, par exemple, de plus recherché dans les nitrières, que les fucs qui proviennent de la vigne, des fruits, pour une plus grande produétion de nitre. La lie, le marc, le tartre , tout y cft précieux. Et ce font précifément de toutes les matières végétales , celles qui fourniflent le plus d'alkali fixe par l'in- cinération (Chap. IF, $. XVIII). Il fe pourroit même faire que les fubftances acides qui fe changent prefque entièrement en alkali par la combuftion, tel que le tartre, fuflent en même temps les plus faciles & les plus promptes à fe nitri- fier, étant convenablement traitées & rapprochces. Ce ne fcroit pourtant que faire par des voies plus courtes, ce que la putrcfattion naturelle ne manqueroit pas d'opérer un peu plus à la longue , mais en récompenfe d’une manière plus fimple & à moindres frais. &. XXX. Cependant il s’en faut de beaucoup qu'on foit autorife d'en conclure que le nitre y eft complet & tout forme. Comme ce fentiment ne manque pas de célèbres partifans, 2 A A LA LA [A e " & que c'eft même le fyftème général de M. Lémery, il faut néceflairement entrer dans quelques difcuflions à ce fujet , ne füt-ce que pour l'éclaircir & pour fe décider avec quelque GC 4 fondement. Etant aflurés d'un côté qu'on ne trouve jamais de nitre que dans des endroits acceflibles à des fucs végétaux ou E € ij 220 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. animaux , dont ils peuvent simprégner, & voyant de l'autre qu'en faifant un grand nombre d’analyies de matières végé- rales & animales, & même de fimpl es extraits, on en retire de la matière nitreufe bien caraétcrifée, on seft cru fondé à en conclure que ce fel préexifte tout formé dans les indivi- dus de ces deux règnes, & qu'ils en font la fource. Mais il y a de fortes objeétions à faire à ce fentiment. Il falloit préalablement Saflurer que le nitre complet, qu'on trouve dans les végé- taux &-les animaux, ne leur eït pas étranger , parce qu'il eft poilib'e que les plantes & ies animaux l'aient tiré des fués NOurrICITS , fans qu'il foit entré dans leur économie, & qu'il y ait été décompolé. Il eft de fait que la quantité qu'on en obtient, en certe qualité , eft très-variable. Le grand foleil, par exemple , quia cru fur des couches ou dans du ter- eau, Contient une quantité prodigieufe de nitre, & lorf- quil a cru en pleine campagne, il n’en contient pas. Il en eft de même de la betrerave, en comparant les expériences de MM. Baume & de Vannes (voyez le Recueil cité, page 389). On à fingulièrement dans le kali un exemple frappant du changement qui arrive aux végétaux dans leurs produits, fui- vant les terreins où ils font es Le kah d'Elpagne , femé dans des terreins fort éloignés de la mer, dégénère à la lon- gue, & au lieu de cet alkali marin qui fait la bafe capi- tale de la foude d’Alicante , il donne, par lincinération, de l'alkah fixe purement végétal (Mém. de la Soc. Roy. pour année 1774, page 42). "Par confequent, dès que les expc- riences , tant anciennes que modernes (Mém. de l'Acad. Roy. 1748), font voir que les plantes peuvent fe pañler des ali- mens de la terre, & conferver leur nature en fe nourrif- fant fimplement d’eau, il ne faut pas établir , contre des faits journaliers , que les plantes ne tirent rien de la terre dans laquelle elles font cultivées. Pendant que les principes pro- pres fe développent dans une jeune plante, elle trouve fa nourri- ture & une sève convenable dans les lobes, comme le fœtus dans fon placenta : : mais lorfque le germe commence à groflir À les racines fuppléent aux lobes en pompant les fucs nourri- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 221 ciers & la fubfiftance de la terre. L'humidité ablorbée ne laifle pas d'entraîner avec elle des matières falines qui sy ouvent , lefquelles, filrrées & atténuces , reftent dans la plante, changeant tantôt de fioure & fe transformant fuivant les organes du végétal, & tantôt n'y fubiflant que de légères altérations. Ceci elt fi conforme à ce qui fe pañle tous les } Jours fous nos yeux, que je ne veux pas perdre mon temps à l'étayer de nouvelles preuves. Mais {pp pofons que ce nitre ne foit pas étranger aux individus du règne végétal & animal; d’a- bord que pour l'en retrer il faut que ces corps aïent fubi des altérations , des mouvemens de fermentation, des modifications, enfin, de leurs parties conftitutives , on n’a plus de droit de con- clure que le nire y précxifte tout forme , & que ce font ces mouvemens qui doivent le développer : que de raïfons pour en inférer que c'eft un être dont les matcriaux eflentiels préexiftent à la vérité dans ces individus , mais que c'eft par ces mouvemens qu'ils fortent d'une combinaifon pour ren- ter dans une autre ! En confidérant donc férieufement qu'on ne retire pas de nitre tout formé de routes les plantes, de tous les animaux ; que la quantité qu'on en obtient de quel- ques individus n'eft jamais conftañte , qu'ils en font quelque- fois entièrement dépourvus ; qu'au contraire, il n’eft pas de matières végétales & animales fermentefcibles , dont à la lon- gi il ne réfulte du nitre par une putrétaétion vraiment com- plette; qu'en dépouillant ces matières de tout principe in- fammable par diflipation, pendant la fermentation , il n'en réfuke plus un atome de nitre ; qu'enfin, en n'y détruifanc pas le phlogiftique, ce n'eft plus que re le nitre qu'on le trouve intimernent “engagé; tout le refte étant devenu in— combuftible, ce qui fait voir que les parties huileufes fe font décompofces dans la putréfaétion , & quele phlogiftique qu'elles contenoient , n'a fat que quitter fa matrice originaire hui- leufe, pour en imprégner une autre, fans devenir feu libre ; on ne fauroit difconvenir qu il ne foit permis de penfer : -° Que le nitre tout formé , dont quelques-uns de ces individus vivans font fouvent chargés, s'eft trouvé fortuice- 222 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ment méle avec les fubftances qui leur ont fervi de nour- riture , & qu'il ne doit pas être mis au nombre de leurs prin- cipes naturels. 2.9 Que comme dans bien des corps organifés les fels pom- pes peuvent av oir écc fort légèrement aleeres même par la fet- mentation quils peuvent y avoir fubie, il n'eft pas impoñlible que par des rapprochemens convenables ils reprennent & mani- feftent aifement leurs caraëtères particuliers, & en impofent par-à, comme fi c’etoient des principes qui entraffenc eflen- ticllement dans leur compofition. 3. Qu'il eft encore très- poffible qu'il y ait bien des fucs végétaux & animaux naturellement très-fermentefcibles, qu'une première fermentation réduife d’abord dans un état de demi- décompofition. C'eft par- là qu'ils reçoivent un commence- ment de nisification qui ne demande que d’être achevée. Dès-lors , il ne s’en faut pas beaucoup que par de nouveaux rapprochemens, par des traitemens convenables , la décom- polition fe complete, le travail de la Nature s'elabore, fe perfeionne , & il en réfulte un nitre bien décidé. N'eft-ce pas précifement le cas où fe trouvent quelques plantes nitreufes, les plantes les plus riches en alkali fixe, dont les fucs font les plus difpoies à fe nitrifier, ainfi que je l'ai fait obferver (s. XX[IX )? & je ne fuis pas éloigné de croire que ce ne foit fur-tout une prérogative particuliere aux dépôts tartareux qui fe féparent des vins & des fruits. Mais il ne faut pas cor- fondre des commencemens, des ébauches de nitre avec le nitre complet, décide , tout formé. Et peut-on refufer ici des éloges à la circonfpeétion de MM. Macquer & Spiel- man, qui n'ont jamais pu fe déterininer à y reconnoître un nitre tout achevé, ainfi que plufieurs Chimiftes fe croienr fondées à le faire? À la verité, leurs procédés mêmes, dans le traitement de ces dépôrs, fait pour y développer le nitre, donnent tout lieu de juger que ce qu'ils contiennent de matière nicreufe, n'eft rien moins qu'un nitre complet. Ne feroit - ce pas fuppoler tout connu, ce qu'il eft queftion de déméler? A-ton démontré que les moyens qu'on emploie MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 223 pour le démafquer, ne font pas fuffifans pour en rapprocher les principes & compléter la combinailon, fi ce n’étoit qu'une Dir un ébauchée ? 9 Qubftraétion faite de tout accident & des circonf- tances particulières , on a tout lieu de conclure que la géne- ration du nitre , naturelle, conftante & propre, n'eft due qu'à la décompofition totale des corps organifés. C'eft l'ouvrage décidé de leur putréfaétion portée à fon plus haut point ; & le nitre, loin d'y préexifter tout forme, n'eft qu'un être de nouvelle formation qui réfulre des principes féparés dans ce travail de la Nature, & quirentre par un nouveau travail dans une combinaifon toute nouvelle, ainfi que les faits rap- portes concourent à le démontrer. On y voir le principe igné contenu originairement dans les principes prochains hui- leux des végétaux & des animaux, fe dégager par la fermen- tation , rentrer dans une le ailee plus fixe, & réformer enfin ce nouveau corps inflammable fans devenir feu libre par une fimple tranflation. G'UXEXI. C'eft juiqu' où j'ai été conduit par l expcrience, & ce qu'ilm'a été permis de pénétrer, d'une marche fuivie & réglée, dans l'ouvrage de la nirification. Il feroit à fouhaiter qu'on püût fe décider fur les queftions que je me fuis faites à moi-même au fuet de l'acide mitreux (5. XX VIT). Mais il ne me refte plu de temps pour entreprendre de nouvelles expériences ; & en propofant des conjedtures, je rifque de répandre de l'incer- ütude fur un fujet dans lequel je ne me fuis laïflé guider juf- qu'ici que par les faits. D'ailleurs, comme c’eft un travail tendant plus à la perfe&ion de la théorie, qu'à l'avantage immédiat de la pratique, on ne furoit aflez attendre qu’on ait des idées nettes & décidées fur les acides animaux trop peu examinés , & même fur les acides VCgCtaux ; Où paroït étre non feulement la fource matérielle des alkalis fixes, comme on le favoit , mais le laboratoire encore immédiat & propre de nos nitres ; qu’on ait l'hiftoire & li connoiflance complete & détaillée de ce qui 224 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. fe pañle dans la putréfaion des matières animales & végé- tales fermentefcibles , depuis fon commencement jufqu'à fon dernier accompliflement, & qu'on foit enfin parvenu à bien connoître par l'analyfe ce qui eft intimement uni à la matière du feu dans l'acide nitreux libre, & ce qui le rend mifcible à l'eau. Il faut bien du temps & du travail, pour déchirer le voile qui dérobe ce myftere à nos yeux. Ti y a long-temps que tous les faits ont prouvé d’une manière incontef- table, que les métaux font compofés de fimple terre & de phlogiftique : mais c'eft encore une queftion que de favoir fi ces deux principes feuls & purs fufhfent pour conftituer les métaux, ou fi ce ne font que des principes prochains. En feratil de la nitrification des alkalis , comme de la métallifa- tion des terres? Peut-on efpérer de faire du Salpètre avec des alkalis & du phlogiftique » cn chant de les combiner par la voie humide > Er ne paroït- 1 pas plus convenable de le leur préfencer , par cette voie, fous la forme de gaz tiré de la fermentation de fubftances huileufes, ou de mélanges végc- taux & animaux purefcibles ? CHAPITRE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 225 a —————— CNE A 6P Je Le RME, LV: De la multiplication du Nitre. $ XXXII. NS fon fait attention à la fuite des faits très-fimples & tres- certains qu'on vient de rapporter, & aux conféquences légitimes qu'on s'eft permis d'en tirer, l’on voit manifeftement qu'on peut fe former, fur l'origine des nitres, des idées beaucoup plus juftes & plus précifes que celles qu'on avoit précédemment. Ce n’et plus l'ouvrage des acides minéraux modifiés , tranf- mués par le concours des matières putrefcibles, ni une fxa- tion & combinaifon de l'acide nitreux répandu par l'air dans les fubftances propres à le recevoir; ni un compofé tout formé, faifant une des parties conftitutives & prochaines des corps organifés, On fait à préfent avec toute la certitude dont un fujet de phyfique eft fufceprible , que c’eft uniquement le produit immédiat & propre de la putréfa&tion des parties vraiment fermentefcibles du règne végétal & animal, portée à fon plus haut point , un être qui en réfultede nouvelle for- mation. C’eft donc à ce dernier degré de la fermentation, où lorganifation des individus de ces deux règnes eft entièrement défunie , décompofée, dénaturée , que e fair ce travail. La matière du feu, contenue originairement dans ces individus, s'en fépare fans devenir feu libre , quitte fa combinaifon pour rentrer dans une autre, fe tranfmet, s’unic intimement avec celles des fubftances plus fines, plus divifées, qui font les plus difpofées à s’en imprégner. C’eft late où s'engendre, fe forme, fe combine évidemment cet être eflentiel de toute nitification, qu'on nomme acide nitreux. Les corps dans lefquels il s’'eft combiné, en perdant une partie de leur fixité naturelle, devien- nent en récompenfe combuftibles, de non combuftibles qu'ils étoient. On à des exemples frappans en Chimie de cette F £ 226 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAILPÈTRE. tranflation , en filence, & fans combuftion, du phlogiftique d'un corps combutthible en un autre qui ne l'étoir pas, & qui par-l le devient éminemment. Les foufres qu'on produit en combinant les graïfles, les réfines, les charbons, & toutes fortes de corps combuftibles avec l'acide vitriolique qui ne left pas, en font une preuve. On en trouve une autre dans la réduction de toutes chaux métalliques de quelque efpèce que ce foit, le corps inflammable leur tranfmertant le phlogif- tique. C'eft l'origine immédiate, matérielle & propre de tous les nitres qui fe forment dans la Nature : foit qu'ils sy trou- vent complets & tout formés, mafqués ou libres ; foit qu'ils y cxiftent incomplets & en ébauche; foit enfin que l'Art fe les procure de quelque manière que ce foit, on ne fauroit douter , d’après les faits, que ce ne foit toujours par une même opération , identique, invariable , qui s'eft faite ou fe fait, que les fubftances falino-alkalines ou terreufes fe nicrifient, moyennant le principe inflammable qui s'y tranfmet des fubf- tances huileufes qui le contiennent proprement & origi- naire ment, fans devenir feu libre. Quoiqu’on ne fache pas au jufte , à ne rien difflimuler, fi c’eft tout feul & pur ou combiné qu'il s’y unit en quittant fon état naturellement huileux , c'eft pourtant beaucoup pour notre objet, que de favoir que cette tranfmiflion a réellement lieu, ainfi qu'il eft conftaté par les faits. Car fi le principe igné eft diffipé pendant la fermentation des matières putrefcibles, il ne fe forme pas de nitre ablo- lument ; & lorfqu’au contraire ce principe n'eft pas détruit, on nen trouve de traces à putréfaétion achevée , que dans les matières nitreufes qui fe font formées effe“tivement, & quon peut récolter. C’eft un point capital qui ne nous échappe plus, & qui, joint aux connoiflances qu'on avoit, & qui viennent même de recevoir le dernier degré de certitude , fournit aflez de données, ainfi qu'on va le voir, pour remplir notre objet d'une manière fatisfaifante. C'XXXTIIE En réfléchiffant fur la putréfaétion & la combuftion des MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE, 227 corps organifés, on s’apperçoit facilement qu'il y a une analogie très-marquée entre ces deux grandes opérations de la Nature, Toutes les deux aboutiflent à cela, qu'il en rélulte la réfolution totale & la décompofition des individus qui les fubiflent. Mais fi ces procédés fe reflemblent à cer égard , ils different quant aux produits qui en proviennent à opérations achevées. En n’y confidérant que la différence des rôles que le principe inflammable doit y Jouer dans l'état huileux, on {ent d’abord qu'il n’eft pas poflible que les réfulcats finaux foient les mêmes. Il y à dégagement eflctif de la matière du feu dans toutes les deux ; mais dans la combuftion elle eft difipce, détruite pour la plus grande partie : ce qui n'arrive pas dans la putréfaétion, à moins que des circonftances particulières ne l'en {ouftraient, parce qu'ordinairement le phlogiftique rentre par tranfmifion dans des combinaïfons toutes nouvelles. Cependant il y a en tout ceci des lumières bien importantes à retirer au fujet de la nitrification , qui sy lie eflentiellement & né- ceflairement; car comme il n’y a de différence marquée qu'après latte du développement, il doit étre permis de penfer que c'eft par un même intermède , par un mécanifme tout fem- blable que fe fait cette féparation ; la rapidité plus ou moins grande de l'opération pouvant tenir à l'application plus ou moins continue de l'intermède, plutôt qu'à l'intermède même. Ainf, puifqu'il eft de fait & au deflus de toutes conteftations, que l’aétion de l'air libre eft indifpenfable dans la combuftion, on a tout lieu de préfumer que fi c'eft l'intermède qui fépare le phlogiftique , le dégage, fe fubftitue peut-être à fa place dans la combuftion, comme précipitant, ce doit être en cette qualité, & en jouant un rôle analogue, que l'air entre & agit dans les putréfations. En effect, aucune matière végétale & ani- male ne peut fe putréfier fans le concours immédiat de l'air : plus les parties de ces corps ont de contaës avec l'air, plus la putréfa@tion eft rapide & complette. Comme l'expérience vient à l'appui de cette importante vérité , il eft naturel de croire que le principe étant le même, F fi 228 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE: tout ce qui concouit à favorifer, accélérer & compléter le dégagement du principe inflammable dans la pau do Eee contribuer à l'en dégager dans la putré= fation. Et fi c’eft ce dégagement qu il Ets principal lement fa- vorifer pour la MÉCO ainfi qu'on le fait maintenant au jufte, ce feront des points fondamentaux de pratique, tout comme dans les combuftions. 1. De divifer, d'amincir, & de réduire toutes les ma tières animales & végétales qu'on veut foumettre à la fer- mentation en de fort petites parties, & de les difpofer de manière qu'elles foient touchées de toutes parts par la plus grande quantité d'air qu'il eft poflible 2.9 De retourner de temps en temps, & remuer ces paities, en forte que l'air ait par-tout l'accès libre , & qu elles s'y préfentent , & foient toutes fucceflivement furnifes à fon ation. 3. De renouveler même fouvent cet air qu’on veut in- troduire dans l'opération : & de même que l'air atmofphérique n'eft pas long-temps propie au dégagement du principe ion é dans les onbeltonss il ne doit pas Ene davantage pour ce même eflet dans les putréfadtions. Les ben acriformes qui y font mélées, n'étant pas faites pour entretenir ce dévelop- pement dans la combuftion , ne le favorifent pas non plus pour la nicrification. S'il eft de fait que l'air tout pur eft le feul qu'on trouve convenable aux combuftions, c'eft de même cet air qui le doit étre dans les nitrifications. $. XXXIV. Tout ceci tient également au dégagement du principe in- flammable dans. la combuftion & dans la putréfaétion. Mais de ce que dansla première opéraïion le phlogiftique doit fe diffiper a mefure qu'ilfe dégage , & ne doit dans l'autre que rentrer païfiblement dans une nouvelle combinaifon fans devenir feu hbre , il s'enfuit que l'application de l'air & du feu doit être foigneufement ménagce dans la putréfa&ion. Ce neft pas un Courant d'air, qu'il faut duiger fur les parties en pu- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 229 trétaétion : ce qui augmenteroit & accélèreroit efficacement la combuftion de’ ces fubftances & la difipation du principe igné , feroit nuifible dans une opération où ilne s'agit que de lui faire quitter doucement {on état huileux , fans vifce aucunement à fa deftruétion. Il en eft de même dé la cha- leur à y entretenir : lation de la chaleur unie à celle de l'air, contribue , à la vérité, éminemment au dégagement du phlogiftique ; ce qu ‘on ne fauroit nier : mais fi le degré en eft trop fort, l'opération devient un commencement de com- buftion, & le phlogiftique fe difperfe au grand dommage de la nitrificaion. Rien de plus important à ménager de les putréfaétions que lé phlogiftique, donc ia perte entraine celle du nitre. On verra bientôt que c'eft encore à d’autres égards, qu'une trop grande chaleur eft préjudiciable à à la nitrification ; ; mais fi lon fait à quoi s'en ten, fuivant ces principes, au fujet de l'air , le degré de chaleur convenable à ce travail eft un point fur lequel on ne peut pas fixer des hmites très-précifes. Nous y reviendrons dans la fuite. SX XV. Mais fi la coopération de l'air & de la chaleur eft tout ce qu'il faut pour féparer, en qualité d'intermède, & dégager la matière du feu de ces mixtes dans la combuftion comme dans la putréfation , il y a dans celle-ci une opération bien plus délicate à approfondir; c'eft la tranfmiflion tranquille de ce méme principe igné, & fon pañage d'une combinaïfon dans une autre. Il ne fuffic pas de recourir à la grande difpofition qu'ont les fubftances alkalines & terreufes à s'unir au phlogïftique; il faut encore l'interpofiion d'une fubftance qui occafionne cette union, & qui puifle fervir de véhicule, de conduéteur du phlosiftique, & qui par conféquent nait pas elle-même une trop grande affinité avec les principes inflammables. En con- fidéranc qu'un certain degré d'humidité eft toujours une des conditions requifes dans ces fortes de fermentations , & que ceft d'ailleurs par la voie humide que la Nature ordinaire- ment décompole , recompofe & fair une infinité d'opéra 230 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. tions, 1l me paroic que l'eau pourroit être l'inftrument, lin- termède convenable pour cette tranflacion. Il y a tout lieu de le prélumer ; ; car l’eau n'a effectivement que très-peu d'afñ- nice avec le principe inflammable , & paroic douée de toutes les conditions néceflaires pour préfenter les fubftances ter- reufes & la matière du feu, lune aux autres, de manière qu'elles puiflent fe combiner. On fait que fi le phiogiftique , dans late de fon dégagement , eft encore dans un état fuligineux , de vapeur actienne, de gaz inflammable , l'eau peut être fon décompofant. Er comme il eft impoible qu'il ne foit accompagné de gaz mcphitique dans le développe- ment , il neft rien qe pee propre que l'eau pour l'en dé purer , étant de fait qu'elle abforbe ce gaz très-puiflamment & le tient en diflolution. Quelques obfervations paroïflent venir à l'appui de cette conjeéture. Premièrement, il eft conf tant que bien des putréfaétions de matières végétales & ani- males, même les mieux ménagces, ne donnent que peu ou point de nire, malgre la Her convenable qu ‘on peut y avoir entretenue, & l'accès libre de l'air, à moins qu'on ny ait maintenu un certain degré d'humidité. On ne fauroit entière- ment l’attribuer à une fermentation impatfaite ; car à la longue tout caraétère végétal & animal eft détruit, tout eft porté à la dernière décompolition. Il paroît que dans cette circonftance le phlogiftique doit avoir fubi une difperfion , où quil n'eft pas entièrement dégagé & fort de fon état huileux : mais comme il ne refte après tout que peu ou point de matière combuftible , & qu'il ny a pas d'ailleurs de nitre où le phlogiftique fe foit logé ; le principe inflammable paroîc difipé. C'eft ce qui arrive aux bois pourris en plein air ou en grande eau , qui, faute du principe inflammable qui leur a été enlevé, ne font pas plus propres à la combuftion qu'à la nitrifcation. Il réfulte de là, qu'on ne fauroit aflez ménager l'humidité dans les putrétaëtions, ainfi qu on la dit de la chaleur & de l'air. L'eau ny doit jamais étre furabon- dante, autrement , quand même les matières putrefcibles ne eroïienc pas entraînces, & qu'il pourroit y avoir décompo- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 234 fiion complette des corps foumis à la putréfa&ion, ce feroit avec beaucoup plus de lenteur, & la plus grande partie du principe inflammable feroit plus difpofce à fe difperfer, qu’à fe rapprocher des fubftances trop disjointes dans l'eau & dans une trop g grande difgrégation , au préjudice de la for- mation du nitre. Si donc ce n’eft qu ‘une fimple humidite & méme très- légère > qui convient à ce travail fort délicat, c'eft une raifon de plus de ménager attentivement le degré de chaleur & l'accès païfible de l'air, ainfi qu'on l'a infinué ci- deflus ($. XXXIV}), dans la crainte d’occafionner un def- sèchement nuilible, & d'enlever par évaporation l'intermede aqueux fi néceflaire dans la nitrification. $ XXXVI. Rien de plus facile Fapse toutes ces connoiflances , que de former un plan de la plus grande étendue & sürcte , pour remplir le grand obiet de la multiplication matérielle du nitre , & pour rencherir fur tous les moyens connus d'y par- venir avec fuccès. On fait que c’eft feulement dans les règnes végétal & animal que ce fel a fa fource immédiate , He & propre, & que, de même que les charbons, il paroïc fe former uniquement par l'accès du phlogiftique des individus de ces deux règnes, où eft la fource originaire, conftante & propre de toutes les huiles. Par conféquent on peut être afluré que des qu'on ne trouve aucun veitige d'huile dans les fub{- tances purement minérales, même les plus inflammables, à moins que des circonftances particulières n'y en aient apporté & mêle quelque portion ; le nitre ne fauroit tirer fon ori- gine matérielle du règne purement fofile, que par accident; ce qui d'ailleurs ecole parfaitement avec les autres faits fondamentaux de la nitrification , expofes dans le Chapitre précédent. Tout le nitre qu'on y rencontre ordinairement, y cft étranger , ainfi qu'on l'a conftaté ci-devant; il provient des deux autres regnes , & n'a été élaboré & complété que par l'accès des fucs végétaux & animaux dont il tre fon origine, Si donc ce n’eft que du débris des êtres, où fe fair 232 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: une circulation perpétuelle de décompofition & de repro- duétion , que le nitre fe forme , êtres répandus fur toute la furface de laterre, en profitant, d’un côte, des putréfaétions toutes naturelles qui ne peuvent manquer d’avoir lieu dans bien des circonftances, & même dans des endroits tout-à-fait inhabités, & en en occañonnant, de l’autre, artificiellement par des moyens les plus convenables , on va s'ouvrir de routes parts bien des reflources pour fa multiplication. Ce font toujours les matières putrefcibles qui en forment le premier, & fans doute l'unique fondement. SEX XV IL Mais ce n'eft pas aflez, quant aux procédés artificiels, que de divifer ces matières en petites parties, de les accumuler en grands amas, & de les abandonner à elles-mêmes, pour don- ner lieu à la génération de ce fel. Ayant établi qu'un des principes les plus importans fur fa formation, c'eft de pro- curer le plus de conta&s qu'il eft poñlible avec l'air hbre & pur, d'entretenir par-tout une légère humidité , de ré- pandre par-tout l'action de la chaleur; la raifon nous apprend, & l'expérience y vient à l'appui, quil n'eft rien de plus avantageux que de diftribuer & difperfer ces corps fermen- tefcibles dans des pierres ou des terres poreules , friables , lé- geres, aérécs. Elles attirent l'humidité, s'en chargent & la retiennent; abforbent le gaz méphitique qui ne manque pas de fe développer dans la putréfaétion; facilitent l'accès & la circulation de l'air; favorifentles changemens alternatifs d’hu- midité & de chaleur. C'’eft enfin le laboratoire où la décom- potion des fubftances putrefcibles & la préparation de” ce {el fe fait plus promptement & plus complétement qu'en toute autre manière , & où par conféquent la nitrification a heu le plus abondamment. En effet, une petite quantité de mélanges putrefcibles diftribuée dans une grande quantité de ces fortes de terres | fe décompofe très-facilement , & fournit beaucoup plus de nitre & plus promptement qu'on n’en auroit retiré Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 233 retiré, fi elle avoir été mife en putrcfaétion toute feule & aban- donnée à elle-même, le concours des autres circonftances favorables étant également ménagé de part & d'autre, Au fur- plus, on a des preuves que les terres calcaires fingulière- ment, ont une grande difpofiion à attirer le phlogiftique, & même à l'arrêter & à sy unir. SX NLEL > Quoiqu’on fache donc qu'il n’eft pas effentiellement nécef- faire de mêler les fubftances végétales aux animales pour la pro- duétion du nitre, quelques confidérations qu'on va faire nous convaincront qu'il faut préferer le mélange de toutes les deux , à des nitrières purement végétales ou animales. Ileft vrai qu'on ne trouve dans le règne animal aucun principe qui ne fe ren- contre dans le végétal ; 1l y a cependant entre eux une difte- rénce fenfble , non pas du tout à rien, maïs du plus au moins, & pour la quantité & pour la qualité de ces principes. Les animaux paroïlent abonder en fubftances huileufes plus que les végétaux ; & les huiles dans ceux-ci font même en général moins atténuces que dans les autres. Les végétaux en général fe putréfienc plus difficilement que les animaux, ceux-ci étant beaucoup plus près de la décompofition que les fubftances végétales. L'expérience nous apprend encore que c'eft dans les fucs acides des végétaux qu’eft la fource Véritable des alkalis fixes, & qu'au contraire les acides ani- maux font plus difpofés à fe volatilifer & à devenir alkalis volatils. En effec, les nitres qu'on retire de la putréfation des matières purement animales, ne font que des nitres à bafe terreufe. Les fubftances animales paroiflent donc en gé- néral plus propres, à fournir une plus grande quantité de principes ignés que les végétales , & à produire par confé- quent plus d'acide nitreux ; elles le produiroient même plus p'omptément, fi cette même furabondance de graifles & de matières huileufes ne s'oppoloit d'abord à fon dégagement, Mais, cout confidéré de part & d'autre, il paroït plus avan- tageux de méler ces fubftances enfemble , que de les aban- Gg 234 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, donner à elles-mêmes féparément. S'il eft de fair que rien ne retarde plus , & n'arrête même la fermentation des ma- tières qui en font fufceptibles , que le melange de fubftances qui ne font pas elles-mêmes fermentefables, rien au con- traire ne paroït plus propre à la favorifer & à laccélcrer, que le mélange de celles qui font non feulement elles- mêmes Ie L Te fulceptibles de fermentation , mais incomparablement plus P ES ù proches de la putréfadtion, aïmfi que le font toutes les ma- tières animales. Et, après tout, ce qui fe développe d’alkali APE 7 . P A fixe des fubftances végétales, fournit autant de bon Salpètre, fans quil foit néceflaire d’en chercher d’ailleurs pour la tranf- formation des nitres à bafe terreufe. SR DEX- Mais il ne faut pas oublier qu'on accélère beaucoup la fer- mentation en divifant préalablement toutes les parties végétales & animales, qu'on veut foumettre à la putréfaétion ($. XXXTIT). Il feroit encore mieux de macérer un peu les matières végé- tales avant que de les mêler; ce qui pourroit fortement hâter la fermentation , ayant pourtant foin de répandre fur le mé- lange l'extrait qu'on en auroit tiré par cette infufion. En fe rappelant toutes les qualités connues de la chaux, ce neft pas fans fondement que les Artiftes en confeillent l'ufage dans les nitrifications : elle diffère à beaucoup d’égards des terres & des pierres calcaires non calcinées, ayant acquis par la calcination toutes les propriétés des alkalis fixes, quoique dans un degré inférieur. L'expérience nous a appris que la chaux a de lation fur les huiles & fur les graifles ; qu'elle aiguife & amène à une grande cauficité les alkalis; qu'elle abforbe l'humidité, l’air gazeux des fermentations putrides , & s'en empare; qu'elle décompole les fels ammoniacaux, & en dépage l'alkali volatil. On ne fauroit nier que ce ne foient- là bien des qualités dont on peut tirer des avantages dans la formation des nitres, ainf qu'on Le juge communément. Maïs ce n'eft pas une queftion indifférente que de favoir quelie on MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 235 eft la dofe convenable, & quel eft le temps précifément de l'employer. Je vais expoler quelques expériences que J'ai faites à ce fujet, pour répandre un peu de jour fur un article fi impor- tant. J'ai pris de la char de mouton , & l'ayant divifée en petits morceaux, je l'ai mélée avec des herbes hachées, j'ai diftribué le tout dans une plus grande quantité de chaux vive, & je l'ai laifle repofer pendant neuf mois. Au bout de ce temps, je voulus vifier le mélange. Les morceaux de chair s'etoient afluflés & comme defléchés. Ils avoient acquis une couleur livide > & la confiftance qu'ils avoient prife , ainfi que les plantes, étoit ligneufe. Tout y étoir en entier; point d'exhalaïfon fétide, point de véritable décompolition. Ce n'étoit qu'en caflant ces parties ligneufes, qu'il en émanoit une très - mauvaile odeur. Ceci fait voir que la pratique uftée d’enfouir les cadavres des animaux , pendant les épidémies, dans la chaux vive, eft A ondes Ce n'eft pas feule- ment la partie aqueufe que la chaux abloïbe; elle paroït en- lever tout le flegme des corps foumis à fon aétion , empêcher la fermentation puside dont ils feroient fufceptibles , & fuf- pendre par- à le développement des alkalis volatils , & la dé- compofition. Cet, je crois, ce qui doit arriver en infufant de la chaux vive en quantité dans tout mélange deftiné à Ja putréfaction. L'obfervation qu'on fait, que les murs où il eft entré beaucoup de chaux, font ceux qui amafñlent le plus de nitre, n'eft d'aucune foie contre une telle vérité de fait. C'eft que les circonftances font très-difiérentes. C'eft l’a- cide nitreux développé ailleurs, qui fe corporifie dans les murailles, où il s’en faut encore de beaucoup que la chaux ait confervé toute fa caufticité , comme on l’a obfervé dans le deuxième Chapitre : par conféquent dans les nitrifications où la fermentation doit avoir tout fon eflor, on rifque beau- coup d'y gêner par la chaux, la liberté des mouvemens natu- rels, fans en retirer peut-être rous les avantages qu'on lui e attribués. On ne fauroic difconvenir qu'une certaine quantité Ggi 236 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de chaux pourroït ne point faire de tort au travail de [a Nature ; mais en confidérant que la dofe proportonnée aux diffétens mélanges eft entièrement inconnue, on fe perfuadera facilement qu'il vaut mieux n'en faire aucun ufage dans les commencemens, & la réferver pour le progrès & la fin de la nirification, même avec ménagement, ainfi qu'on le verra en fon lieu. CAT Il n'en eft pas de même des plätras, gravois de chaux. & de tous les décombres,, en un mot, des vieilles murailles où il entre de la chaux. Bien des raïfons les rendent prefé- rables aux meilleures terres calcaires pour la nitrification. Ce neft plus une chaux cauftique , empêchant ou retardant au moins la corruption des matières fermentefcibles ; c’eft une chaux redevenue RE une fimple terre calcaire , mais in- comparablement plus poreufe » plus acrée, plus lépère: Puif- que. la formation des nitres eft en général l'ouvrage de la rare complette , & que la putréfaétion ne fauroit fe fe fans que les matières fermentelcibles éprouvent, comme on l'a dir, ce changement alternauf, d'air, d'humidité, de cha- leur, il n'eft rien de plus propre peurêtre à remplir toutes ces vües, que ces vieux cimens. On doit dire tout le con- traire des fables purs, des terres trop grafles & compactes 4 des argiles tenaces, qu’on doit éviter Le plus qu'on peut, à caufe ‘du peu d'accès qu'elles donnent à l'air, & du peu de liberté que les parties purréfices ont à sy loger & à {e préparer pour Pélaborauon du nitre. SRE. Il s'en faut bien, à la vérité, que nous ayons une hiftoire complette de la putréfaétion , & de rous les changemens fue- ceffits que la Nature fait éprouver aux mélanges fermentef- cibles, depuis fon commencement jufqu'à fon dernier terme , avant que de réformer de nouveaux êtres ; & ce qu'il ya MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 237 de plus, c’eft que nous ne connoïflons pas toutes les ma- tières qui peuvent la retarder. Cependant nous fommes à préfent beaucoup plus avancés que nous ne l'étions avant cetre époque, & nous le ferons davantage après qu'on aura publié toutes les recherches qu'on aura faites à ce fujet. À préfent que nous connoiflons un peu plus intimement l'influence de de l'air, de la chaleur, de l'humidité, & le rôle de chacun deces intermèdes , on voit de quelle confequence eft, tant leur ménagement & alcernation, que leur privation, pour favorifer ou fufpendre l'avancement de la putréfaétion. On fait encore à quoi s'en tenir par rapport à bien d’autres fubf- tances , qu'on avoit l'habitude de mélér dans les nitrières. Tout ce qui peut troubler la fermentation des parties putrefcibles, altérer l'arrangement de leurs principes, s'y unir même librement, & y entreméler des réations contraires à leurs mouvemens fermentatifs , doit étre regardé comme nuifible à ce travail, & comme rctardant & empêchant même fon progrès. T'elles font, par exemple, toutes les fubftances falines, & particulière- ment les fels à bafe métallique. Quand même ce feroit pour divifer & aérer les terres qu'on voudroit les y méler, il en réfulteroit inconteftablement plus de préjudice que d’avan- tage. On fait qu'il n'y a rien à efpérer de la prétendue tranf- mutation des acides minéraux, qui pourroient y être enga- gés , en acide nitreux. Mais il y a une autre précaution très-importante à garder, qui abrège beaucoup la putréfa&tion complette des matières fermentefcibles : c’eft à quoi on na pas encore fait aflez d'attention, Il eft certain qu'une quantité déterminée de terre ne peut convenablement fervir qu'à la divifion d'une quantité déterminée de matières fermentefcibles.. Si elle eft furchargée de mélanges putrefcibles, la putréfac- tion s’y fait plus lentement, & quelquefois ne s'y fait poinc du tout ou incomplétement. L'expérience nous lapprend tous les jours ; & celles particulièrement que j'ai faices pendant que je m'occupois de ce fujet, m'ont convaincu que cent livres de vieux gravois en chaux ne fauroient porter, avec ke plus grand profit, dix livres: de matières végctales & ant- 233 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. males mélangées. Ordinairement on ne garde pas de pro- proc , & l’on excède la portée des terres; ce qui nuit ingulièrement à la promptitude , & l'on n'’eft en état de les leffiver avec fuccès qu'au bout de quelques années. Les planta- tions de quelques pays, & bien des établiflemens de nitrières artificielles (voyez le Recueil de Mémoires fur la formation du nie, cité ci-devant), ne paroiflent point parür d'un point fixe & décidé pour ces fortes de proportions ; ce qui m'a obligé de faire un grand nombre d'expériences à AACCE égard , dou le relultat a été, comme je viens de le dre, que la dixième partie en matière purrefcible eft trop forte, quelle que foit la bonté de la terre qu'on employe. On ne pourra par conféquent difconvenir , qu'ayant même gardé de juftes bornes dans les mélanges, les urines, les écou- lemens des fumiers, & autres liqueurs putrefcibles dont on arrofe enfuite les nitrières , au bout d’un certain temps doivent être employées avec beaucoup de circonfpeëtion. On comprend aifément qu'elles peuvent être fort nuiñibles à la nitrification à putréfaction avancée, en ce qu'ellesen troublent le travail & le progrès, & qu’elles déconcertent & altèrent les mouvemens fermentaufs des matières portées prefque à à leur dernière réfo- lurion. On ne fauroit faire aflez d'attention au tort qu'on fait à la produétion du nitre par un pareil procédé, C'eft à contre- temps & mal à propos qu'on méle des fubftances fermen— tefcibles toutes récentes, à des matières fort avancées dans la putréfaction. $ XLITI. Mais doit-on mettre le fel commun, les faumures, toutes les eaux falées au rang des matières à écarter dans la planta- tion des nitrieres ? en on me permette d'entrer dans quelques difcuffions à ce fujer. La qualité antiputride de ce fel eft connue de tout le monde; mais il eft connu encore qu'en petite dofe, il favorife la putréfaétion & porte un peu d'hu- midité & une certaine fraîcheur qui peuvent être fort utiles à la plantation. L'expérience, à la véritc, nous a convaincus MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 239 que fon acide ne fe tranfmue pas en acide nitreux ; mais elle nous à app:is qu'il y a une converfion décidée de bafes pendant la mitrification, l'acide nitreux étant aflez puiflant pour enlever l’alkali minéral au fe: C’eft donc un intermède quon fe feroi du tort de négliger, lorfqu'on en a abon- damment. Il n’y a qu'à fe fixer fur la quantité & fur le temps de l'employer. Je ne faurois m'écarter, par rapport à la quantité de ce que j'ai dit fur la chaux vive. El n'eft pas pofhble de donner aucune règle pour fe contenir dans de juftes bornes, fuivant les différens mélanges dans lefquels on peut en ajouter. En difant qu'on ne peut D fe tromper en y En mêlant une fort petite dofe, ce n’eft rien dire, ou l'avantage cft fi mince, quil ne récompenfe point les frais ni la fujétion d'une manœuvre minutieufe de plus. Un peu plus au contraire touche de trop près à fon effet nuifible à la putréfaétion. Il paroît donc décidément plus sûr de ne pas l'emp! oycr pendant la fermentation, & de ne s'en fervir qu'a putréfaétion confom- mée, en qualité d'intermède, comme pouvant fournir uné bafe falino-alkaline à l'acide nitreux , tant libre qu'engagé dans des matrices cerreufes , au moyen d'une digeftion convenable. C'eft ainf qu on retire de ce fel des avantages certains > fans s'expofer à aucun inconvénient , en fuppléant même à lal- kali fixe végétal, qu'on ne fauroit aflez ménager pour lufage de tant d'Arts où il eft indifpenfable , ainfi qu'on fa dic ailleurs. (200. & LA à 1 2 Et pour revenir à l'humidité dont l'expérience & la raifon nous ont fait connoïtre la néceflite, foit dans la putrefac- tion , foit dans late méme de la nitrification , on ne fauroit donner aflez d'attention pour qu'elle ne foit ni trop abondante, ni trop légère. On fent bien que tout melange fourmis à la pu- een , ne peut manquer de fe déflécher out naturelle- ment, & qu'il faut par confcquent l'humeéter de temps en temps. Suivant les réflexions que j'ai faies ci-deflus, route liqueur putrefcible , telle que l'urine des animaux, le lavage, 240 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: ou Ja lefive des fumiers , la lie de vin, &c., doit être em: ployée tant dans le commencement que dans le progrès de la fermentation : mais qu'on doit cefler avant que les parties végétal les & animales foient paivenues à tel degre qu'on n'y reconnoiile prefque plus leur caraétère végétal ‘& animal. Alors, les matières étant trop approchées du dernier terme de Ja décompofion , l'arrofage convenable ne doit plus être demarières fufcepubles d'une ee toute nouvelle , mais d'eau toute fimple, ou de leflive de cendre trairée avec de la chaux vive. C’eft le moment de l'employer fans rifque , pour donner une plus grande caufticié aux alkalis lixiviels. La chaux, en leur communiquant fa caufticité , redevient une terre purement calcaire, qui neft pas elle même inutile en cette occafion. Mais ous ces arrofages ne fauroient fe faire convenablement, à moins qu'on ne reinve les mélanges, pour que l’humidite fe répande par-tout , & que la terre qui doit fe falpêtrer, puifle sen imbiber uniformément. C'eft déjà une.opération capitale, indifpenfable dans ce travail à bien d’autres égards : on ne fauroit fans cela préfenter toutes les parties fucceffivement au contaët de l'air qu'on à tant re- commandé. C'eft, à la vérité, la main d'œuvre la plus con: fidérab'e, mais en même temps la plus importante ; d’une telle nécefiré, que le plus grand produit des nitres, la plus grande prompritude en dépendent eflenuellement. C'’eft le der capital des murs à Salpètre, des voûtes, des foiles:, des monceaux pyranidaux , des fagots, &c., imprégnés de matières animales. Il n’eft pas pofñlible de retourner libre- ment ces amas, pour qu'ils foient partout perméables à l'air, à l'humidité , à la chaleur, & qu'il y ait par-tout ce chan- gement alternatif de ces intermèdes fi néceflaires à la purré- fation complette, & par conféquent à à la nitrification. Il n’eft pas poflible de remuer les matières en fermentation de toutes parts, fans démolir & renverfer les monceaux ; ce qui ne fauroit fe répéter fouvent, à caufe de la main-d'œuvre bien plus confidérable que ne left le remuement tout fimple des terres. Je parle d'après mes propres expériences ; de forte que MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 241, que je n'héfite pas de dire que deux cents livres d’une terre poreufe mélées de dix-huit ou vingt livres de matières végétales & animales, étant difpofces en couche horizontale d’un pied ou d'un pied &-demi de hauteur dans un lieu bas à l'abri du foleil & de la pluie, & traitées comme on vient de le dire, donneront plus de nitre & plus promptement que fi elles avoient été formées en murs ou en monceau immobile dans le même endroit, & traitées de la même manière par rap- port aux arrofemens. C’eft un fait dont on peut saflurer trés-facilement. Et après tout, les couches n'étant que de peu de hauteur , la main-d'œuvre pour le remuement, n’eft pas fi grande. J'ai fait faire pour les expériences qu'on va bientôt voir , une herfe dont les pointes avoient en quelque forte la forme d’un foc, qui fendoit crès-bien la terre, & qu'il n'étoit pas impoffible de faire conduire par un feul homme. Il eft sûr, & je veux bien en convenir, que ces fortes de nirières occupent une efpace trop confidérable : maïs il eft toujours bon de con- noître l'établiflemenc qui donne le plus grand rapport ; & en combinant ce que je vais dire, avec le plan qu'on propofera dans le Chapitre fuivant, cet objet pourroit devenir très-facile à remplir, en confidérant la néceffité qu'il y a de mettre toute nitrification , le plus qu'on peut, à l'abri du foleil, de la pluie & de toutes les eaux qui y pourroient aborder & nuire au travail de la Nature x on ne fauroit difconvenir qu'il faut des emplacemens clos , bien fitués, & couverts, pour en éloi- gner tous les eflets préjudiciables de la trop grande chaleur & de l'humidité furabondante : mais je ne vois pas en général que ce doivent toujours être des grands magafins , des halles fomptueufes. En choïfiflanc des lieux convenables pour l'empla- cement , on voit bien que c'eft aflez d'y conftruire des hangars ruftiques fur des poteaux avec des cloifons de toutes fortes de bois, & des toits en paille. Et quant à l'expofition, elle ne paroït pas tout-à-fait indifférente, fans cependant vouloir y mettre du myftère, comme fi c'étoic le vent qui dût imprégner les terres de nitre. L'expérience, à la vérite, nous a appris que les H h 242 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. lieux bas léoèrement humides, acceflibles de toutes parts à fair, moins expofés au midi qu'au nord, font les plus favo- rables à la nitrification : mais en faifant attention au rôle que doiventy jouer l'air, lachaleur , humidité , & à la néceflité d'y ménager fort foigneufement les changemens alternatifs de ces intermèdes , il n'eft pas difficile de fe convaincre que les em— placemens , les arrangemens , la conformation des hangars doivent fe diriger vers ce but, & vifer à l'entretien, dans les nitrières, d'une jufte chaleur , d’une humidité convenable, & d'y procurer fur-tout l'accès à l’a libre & tranquille; ce ui ne fauroit fe remplir, à moins que les endroits ne foient à l'abri des eaux, du foleil, & des vents fecs & impé- tueux. $. XLIV. Ces fortes de halles, de hangars ne font pas feulement néceflaires pour l’établiflement des nitrières artificielles , ainfi qu'on le pourroit juger : on ne fauroit s’en pafler même dans les pays où l'on auroit aflez de nitrières naturelles , pour n'avoir pas befoin de plantations artificielles. En France & en bien d’autres climats, on a des endroits qui réuniflent tout naturelle- ment les conditions demandées pour la génération du nitre, telles que les caves, les baflés-cours, les étables , les écuries, les vacheries , les bergeries, &c. & tant d’autres lieux de cette efpèce, imprégnés de matières végétales & animales en putréfaétion. Mais il faut réfléchir qu'en général la quantité de nitre tout forme qu'on en peut d’abord retirer, cft forc petite, & prefque toujours à bafe terreufe, que la plus grande partie des matières putrefcibles qui s'y trouvent enfouies, n'y eft pas entièrement décompofce, & quil y en a même qui ne fait que fubir les premiers degrés de la fer- mentation. Ces nitrières feroient d’un produit immenfe, fi l'on s'y prenoit de toute autre manière qu'on ne le fait. Les Salpétriers laïflent , à la vérité, repoler quelque temps les terres qu'on en retire fous des hangars; mais c’eft toujours en grands amas quil eft impoflble de remuer, d'échauffer, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 243 d’arrofer & d’aérer convenablement. S'il n’y a pas à la longue des pertes ablolues, quant à la matière fufcepible de nie tion , c'eft toujours un temps perdu très- confidérable , & on n'obtient pas l'abondance de produit quil s'agit de pro- curer. En multipliant le nombre des hangars ou des places couvertes pour érendre en couches les terres qu'on retire & qu'on pourroit retirer plus fouvent qu'on ne le fait, à mefure qu'elles fonc fuffifamment abreuvées de fucs végétaux ou ani- maux , on comprend aifément qu'on multiplicroit prodigieu- fement le produit du nitre. C'eft ainfi que les écuries, les étables, les vacheries , les bergeries, & toute forte d’endroits où les animaux dépofent habituellement leurs excrémens, fourniroient le plus grand rapport , ayant foin d'en retirer toutes les années la terre imprégnée à cinq ou fix pouces de rofondeur, de la répandre dans des femblables emplacemens, & de la remplacer par de nouvelle, ou par celle même qu’on auroit leflivée. $. XL V. Mais on ne fauroic fur-tout faire aflez de cas des fofles d’aifance, des latrines , & de toutes fortes d’égouts dans les villes. On n’en retire pas feulement des terres raflafiées de fucs végétaux & animaux, comme des étables, des écuries, &c. Ce font des amas immenfes de ces fucs eux-mêmes, dont la diftiibution dans des matières propres à les divifer, & à faciliter la putréfaétion complette ($. XLI), fous des han- gars, mukiplieroient la formation du nirre de tous côtés; formation qui ne peut cefler tant qu'il y a des animaux vivans & fe reproduifant fur la terre. Les ports de mer , les baies, les anfes bordces par des villes & habitations des hommes, offent dans leurs fonds vafeux de quoi multiplier cette pro- du&tion. Il n’y a peut-être pas de recoins fur la furface de la terre, où il ne fe dépofe habituellement des matériaux du nicre , tant de la part des animaux que des végétaux qui sy putréfient tous les ans. C’eft une richefle répandue dans tous les lieux habités & inhabités , qui ne demande que des Hhÿi 244 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: bras & de la liberté, pour être mife en toute fa valeur. Les découvertes faites & confirmées dernièrement aux environs de la Roche- Guyon, & en tant d’autres endroits n’en font- elles pas des exemples frappans ? Ce font des dépôts fucceflifs qui sy font faits d’un temps immémorial & peu à peu, de fucs fermentefcibles, dont la putréfaétion complette, à laide de circonftances tant foit peu favorables, ne peut manquer de fournir du nitre, même en plein air. Mais ce ne font pas abfolument les nitrières naturelles les plus riches, ce ne font point celles où la reproduction eft le plus facile , ni les feules dont la France pourra fe vanter un jour, en donnant à linduftrie des François tout l'eflor donc elle eft fufcepuble, ainfi qu'on le fera voir dans le Chapitre fuivant. $. XLVI. Qu'on fafle feulement attention au profit qu'on peut tirer des marais. Si les expériences faites en Italie & en France ne prouvoient pas que ce font de grands réceptacles de gaz inflam- mable en état huileux ; fi mes obfervations n'avoient fuivi de proche en proche les métamorphofes dont ce gaz y eft fufcep- tible, & n’avoient démontré que n'étant pas détruit, au lieu de fe difperfer, il entre par tranfæiflion dans une nouvelle com- binaïfon, & nous fournit du Salpètre ,, d'autant plus abon- damment qu'il y a plus de ce gaz dans le fond vafeux des ma- rais, on ne fauroit nier que ces fonds étant compofés de plantes paluftres, de feuilles, de racines enfevelies & corrompues, de débris d'infeétes, de poiflons, & autres animaux aquatiques, fi une longue macération en grande eau ne les à pas dénaturés, doivent être de véritables nitrières, On doit donc à prélent envifager fous un autre point de vue bien plus intéreffant, le gaz inflammable dont ils abondent , & la pro- vilion en grand qu'ils contiennent de tant de fubftances organifées en putréfaétion. En y établiffant des emplacemens convenables à l'abri du foleil & de la pluie , on n'a qu'à en retirer les vafes les plus riches en gaz (qui peut défor- mais fervir de nitrofcope , pour ainft dire, univerfel MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAILPÊTRE. 245 dans toute forte de mélanges putrefcibles), & les y étendre en les traitant comme on feroit de la terre tirée des écuries, pour que la putréfaétion fe porte à fon dernier terme. On fe perfüadera aifément que les expériences que Jai eme dans le Chapitre précédent à ce fujet, nont point été les feules que jaye fautes fur la vale des marais. Ce font celles qui mont reufli le plus complétement & plus fürement que toutes les autres. Mais ce feroit un récit cout-à-fait fuperfu ; je fupprime les détails du grand nombre que jen ai faites, pour ne pas trop groflir cet article. Je dirai feulement que les produits de dféren endroits ma- récageux m'ont appris que les fonds les plus aqueux étoient ordinairement les moins riches, étant en même temps ceux dont; je crois d'abord moins de gaz inflammable , & que ces rap- ports croient différens, fuivant la nature du terrein devenu marécageux , l'abondance plus ou moins grande d'herbes pa- lüftres qui y pourrifloient, la quantité del qui croupifloit deflus, & ru degrés de putréfattion où étoient alors ces ma- tières ; car quelquefois, lorfque la corruption y étoit portée natu- rellement à fon plus haut point, je n'ai pas retiré un atome de nitre: ce qui mérite bien quelque attention. Seroit-ce que le principe infammable en avoit été diflipé, les fels eflen- uels ayant été délayés & enlevés par une trop longue ma-- cération à grande eau ? Je ne faurois aflez répéter ce que lenfemble de toites les expériences que j'ai faites fur la ni- tification , m'a «ppris fur le rôle qu'y joue l'humidité. C’eft quil peut y avoir totze rélolution des matières vésétales & animales, fans quil en réfulte du nitre » tant par défaut d'humidité que par frabondance. On peut juger par-là avec beaucoup de fondement, qu'il n’y a qu'un certain degré , une certaine dofe, qui foit décidément propre à mer de LES cule, d'intermède pour la tranfmiflion du principe igné d’une combinaïfon dans une autre. Quoi qu'il en foit, les marais, & fur-tout les anciens, font des provifions naturelles en nel o des matériaux du Salpêtre ,; & ils ne demandent que d'être rapprochés, 246 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. s. -XLVIT. Je dirai encore, que je n'ai pas négligé de m'aflurer fi le fond vafeux qu'on trouve de toutes parts dans les fofles qui en- tourent les champs labourés, & qui en reçoivent les écoulemens, feroit également propre à nous fournir du nitre. Ce font en cflec des récepracles , des lavages que fait la pluie de ces terres, où il y a coujours des débris de végétaux putré- fics, qu'une telle leflive ne peut manquer d'entraîner ; il eft d'ailleurs rare qu'il n’y ait pas des plantes & des arbres au bord de ces foffes, dont les dépouilles vont pourrir dans le fond. Tour ceci me le faifoit préfumer. Ayant donc tiré de la vafe de plufieurs de ces fofles, & l'ayant traitée fous le hangar où repofoient les terres de marais, & de la même manière que celles-ci, j'en ai retiré effeétivement du Salpêtre, fur-tout lorfque le fond n’étoit pas fablonneux ou glaïfeux. C eft encore ici que je me fuis confirmé que plus je pouvois tirer de gaz inflammable des vafes , plus j'étois sûr d’en retirer du nitre. $ XLVIII. Comme c’étoit un hangar dont je pouvois difpofer, où Jai far routes les expériences dont je me fuis occupé ces années, je n'ai pas laiflé échapper l’occafon bien favorable d'y taie routes les obfervations qui m’étoient permifes, fur la chaleur dont l'entretien & le changeinent alternatif eft fi né- ceflaire à la nitrification. Mais je fuis forcé de dire, d’après un grand nombre d'expériences, qu'il n’eft rien peuc-être de plus indécis que ceci dans ce grand travail de la Nature. On fe perfuade facilement que toutes les matières végétales & animales expolées à une même chaleur , ne s’échauffent pas au même degré avec la même facilité & la même prompti- tude ; ce qui ne tient pas feulement aux matières fermen- tefcibles elles-mêmes & à leur mélange , mais encore à des circonftances particulières, telles que leur emplacement, le fol où elles repofent, la faifon, l'état de l'atmofphère, l'ex- pofition du lieu, le concours plus ou moins libre de l'air, MéMoIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 247 l'humidité plus ou moins grande, &c. tout-à-fait indétermi- nées. J'ai trouvé, par exemple, que des matières animales ; ou des mélanges plus abondans en matières animales que végétales , fermentent aflez bien, méme par un degré de chaleur continuel de 18 ou 20 degrés du thermomètre de M. de Reaumur, au deflus de la congélation naturelle ; que le degré néceflaire au commencement de la fermentation eft crop fort pour la continuer, & fur-tout vers le dernier terme de la putréfaétion ; & qu'en général la putréfaétion des matières végétales demande, pour être hârée, un degré plus confiderable de chaleur que celle des matières purement animales. Je n'ai cependant jamais eu beloïn, pour mettre en une convenable fermentation les matières végétales fraîches, hachées &concaflces, d’une chaleur au deflus de 35 degrés du même thermomètre; & il en falloit moins toutes les fois qu'on y méloit des matières animales. Pendant l'été, la chaleur naturelle de la plupait des jours me paroïfloit fufffante. Ce n’étoic qu'à l'approche de la nuit, que je fermois les ouvertures du hangar jufqu'au lever du foleil. Jai reconnu qu'on ne fauroit aflez fe garantir du grand froid & de la gelée. Au lieu du fecours des poêles, Javois le foin de couvrir la terre avec de la paille, des écorces d’aïbres, des brouflulles, & de fermer toutes les ouvertures. Tous les quinze jours, Je brülois cette couver- ture végétale peu à peu, pour y entretenir la chaleur plus à la longue, & je faifois fur le champ mêler les cendres toutes. tièdes avec la terre, en remuant les couches par le moyen d'une herfe ; ce qui introduifoit en même temps une quantité d’alkalis végétaux à l'avantage de la nitrificaton.. s. XLIX. Mais en réfléchiffant qu'il fe faic beaucoup de putréfaétions: de matières végétales & animales fur la furface de la terre en plein air, qui ne demandent qu'à être portées au plus haut degre pour la nitrification, comme on le voit dans les marais, les cimetières , & autres endroits dont on a fait mention, 248 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. & quil y à même quelquefois des nitres formés, fans qu'elles aiént été entièrement à l'abri du foleil & de la pluie, ainfi qu'on en trouve en bien des endroits , 6n ne fauroit réfifter à la centation de penfer que la Nature pourroit ne pas être fi fcrupuleufe qu'on le croit dans ce travail, & quelle n'exige pas exclufivement des hangars pour ateliers , fur-tout dans les premiers degrés de la fermentation. Je ne crois pas cependant qu'il y ait rien dans ces phénomènes qui déroge aux loix générales, Le climat, la pofition des lieux, la nature du fol, & autres circonftances bien obfervées & approfondies , ex- pliquent ces dérogations apparentes, & font rentrer les phé- nomènes dans la règle. C'eft toujours l'ouvrage, le produit d'une lente & fucceflive décompofition de fucs d'êtres organifés, qui s'amafñlent peu à peu dans ces lieux, & fouvent couches fur couches. Il y doit avoir, à la vérité, bien du nitre perdu dans ces occafons ; mais il eft poflible qu'il s'en dérobe une grande partie à la difperfion , toutes les fois que ces fucs peuvent fe loger dans des fituations accommodeées au der- nier travail de la Nature. C'eft en tout cas le dernier degré de la fermentation qui demande le plus d’être protégé. En effect, comme ceft du développement de la matière ignée , après la décompofition de l'enveloppe huileufe , que le nitre prend fa forme complette , conformément aux expériences rapportées ci-deflus , c’eft principalement cette dernière élaboration qui ne fauroir fe bien faire fans diflipation du principe le plus ’eflentiel , que par le concours & l'aétion tranquille des intermèdes dont on a parlé précédemment. Il eft donc à préfumer que des nitrières en plein air, fuffifamment protégées du dégât que pourroit faire la pluie & l’aétion directe du foleil, ne feroient pas inutiles, tout au moins pour procurer en abondance de la matière propre à fe nitrifier, ctant enfuite convenablement traitée pour un plus prompt & plus sûr accompliflement de la nitrifcation. C’eft d’après cette idée que j'ai imaginé une forte de nicrière cham- pêtre végétale, que je n'ai pu, à la vérité, exécuter en grand ; mais que quelques eflais faits dans une couche d’un Jardin, protégée MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 249 protégée pat un gros arbre, me donnent la confiance de propoler. La voici : Qu'on mette en rélerve un champ de la grandeur qu'on veut donner à la nitrière, dont la terre foic légère & friable ; il vaut mieux, s'il eft pofible, qu'il ne foit pas éloigné des habitations ; on l'entoure d'un fofflc & d’une haie vive, ainfi qu'on feroit d'un potager ou d'un légumier. Qu'on y fafle croître des arbres branchus à de conveuables diftances les uns des autres, pour que les branches couvrent le plus du fol qu'il eft poffible ; après l'avoir applani, qu'on l'engraifle & qu'on le seme de toutes fortes d'herbes acides, amères, &c. & fur-tout de toutes les plantes les plus nitreufes. Quand ces herbes abonderont le plus en fucs, qu'on les mette fous la pioche en les enfouiflant dans la terre, pour qu'elles y pourtiflent. On doit répéter cette manœuvre toutes les fois quil y aura dans la nitrière aflez de plantes reproduites ; & toujours après une pluie. Il ne feroit que mieux d'y répandre les liières des vers à foie, les grappes des raïfins, les lies de vin, & autres immon- dices, pour engrais. Les arbres défendent par leurs bran- ches la nitrière de lation trop forte du foleil & de la chute impétueufe des pluies, qui en font interceptées; ils augmentent, par les feuilles qui tombent tous les ans, la matière végétale putrefcible, & fervent de halle naturelle pour les premiers commencemens de la nitrification. Quand on reconnoît que le terrein eft fuffifamment imprégné de matières végétales en putréfattion, on n’a qu'à le tranfporter fous des hangars, pour que la putréfaétion s'achève & fe perfeétionne au plus vice, par le concours des circonftances les plus favorables, qu’on ne fauroit fi bien ménager en plein air. Les terres leflivées fe reportent & sétendent dans la nitrière champêtre, dans la- quelle tout fe reproduira bientôt. $. L. Je n’entrerai point dans de plus longs détails fur cette ma- 4 . / . . . tière. Je fuis tenté de croire que ce que J'ai dit, que toutes les vües, & routes les recherches qu'on vient d’expoler , fuf- Zi 250 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: front pour établir autant de points capitaux propres à rem- plir, dans toute fon étendue, le grand objet de la multiplica- tion matcrielle du nitre. Les indications particulières, les pra- tiques de detail fur chacun des moyens propofés, doivent moins être le fujet de ce Mémoire, que d’une inftruétion exae & circonftancice, qu'il faudra drefler fur toute forte de plan- tations tant artificielles que naturelles , & qu'on n’a fait ici que toucher en général. Le favant Recueil, tant de fois cité, de MM. les Commiflaires, contient un grand nombre de pra- tiques , dont on peut tirer parti, en feparant ce qui eft réel- lement utile, admiflible, & conforme aux lumières & con- noiflances décidées qu’on a préfentement fur la formation du nitre, d'avec ce qui eft fuperfu & nuifible même à la nitrification, que des principes plus sûrs & plus fondés nous ont main- tenant appris à déméler; mais comme cette inftruétion tient particulièrement au plan d’adminiftration, dont on s'eft pro- pofé de parler dans le Chapitre fuivant, ceft là que nous y reviendrons un peu plus en détail. SAT Je ne m’étendrai pas non plus au fujet des leflivages des terres falpécrées , des cuiflons, des leflives, des extraétions du Salpétre, de fes raffinages ; ce font de même des fujets à réferver pour une telle inftru&ion, aufli bien que les moyens de reconnoître les terres plus ou moins riches en nitre avant que de les lefliver, le degré des. différentes leflives à foumettre à l’évaporation , l'état de concentra- tion pour en tirer le Salpêtre par des refroidiflemens conve- nables, & mille autres articles de pratique. Ce ne fonr pas des objets quela Société Royale demande, étant connus de tout le monde. Cependant je vais expofer quelques obfervations que j'ai eu occafion de faire fur les leflivages des terres à Salpètre, & fur les eaux mères , avant que de pañler à d’autres confidé- rations. Nous avons fait remarquer que c'eft le nitre à bafe tricuic que la Nature prodigue le plus, à moins qu'une MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 251 grande abondance de matières végétales ne fe foit mêlée dans la putréfaction. Nous favons que dans les terres où dominent les fucs animaux, telles que celles des étables, des écuries, des vacheries, des colombiers, &c. dont on doit faire beau- coup de cas, & qu'on a infinué d'améliorer très-foigneufement, parce que ce font peut-être les meilleures nitrières de la France, prefque tout le nitre que l’on retire eft à bafe terreufe. Ce font les terres, ainff que je l'ai dit, qui demandent le moins d’être traicces fous les hangars avec de nouvelles liqueurs putrefcibles dans les arrofemens. On ne feroit que furcharger le travail aux dépens de la promptitude, fans fuppléer , par ce moyen, au dé- faut d’alkal, qui eft le point eflentiel. C’eft le cas où on ne fauroit faire aflez de provifion d’eau de leflives, pour humeéter les terres avec le plus grand profit ; comme auffi de faire des diflolurions de fes leflives , & de celles qu'on tireroit foi-même des cendres les plus riches en alkalis (Chap. IL.) avec de la chaux vive. Outre que cela don- neroir plus de caufticité aux alkalis, & plus d’aétion fur les matières onétueufes & vifqueufes, on décompoferoit les nitres ammoniacaux qui sv feroient formés , en dégageant les alkalis volatils, dont la putréfaétion des matières animales eft fi féconde (5. XXXIX.) ; & dans le cas où on manqueroit d'alkalis fixes. on pourroit y méler du fel commun diflous, pour préfenter toujours dans l'élaboration du nitre , des bafes falino-alkalines libres ou dégageables par l'acide nitreux. Mais ar un grand nombre d'expériences, Je me fuis convaincu que c'eft fur-tout dans les leflives des terres falpêtrées, qu'on peut urer le plus grand avantage de ces fortes de diffolutions. Avant que de foumettre la leflive, que je tirois de ces terres, à l'évaporation, je m'aflurois par une épreuve en petit, fi elle abondoit trop en nitre à bafe terreufe , je le préci- pitois par un alkali tartareux , & je pelois fort foigneufement la terre que je retirois par filtration. Ceci me fournifloit aflez d'indices , pour ne pas porter les alkalis que je devois ÿ ajouter, au delà des juftes bornes. Par corféquent, en fai- fant une diflolution d’alkalis végétaux , de fel marin & de li 252 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: chaux proportionnée à peu près au befoin , je la verfois dans la cuve : jy laiflois tout en digeftion à froid pendant quel- ques jours, & je foumertois après à la filtration certe leflive anfi digérée , en la faifant pafler dans une autre cuve. On comprend facilement deux choles : 1. Qu'on fépare par cette digeftion la plus grande partie, foit de la terre qui éroit neutralifée dans la première leffive, foit des matières imparfaitement putréfiées , & que ce neft pas même par une main-d'œuvre fort confidérable. 2.° Qu'en décompofant d'un côté le nitre à bafe rerreufe tout formé, tant libre qu'enveloppé dans des matières vif- queufes, on fournit de l'autre une bafe convenable & fixe à de l'acide nitreux combiné avec des alkalis volatils, & à celui qui, étant foiblement neutralife, {e feroit ablolument diflipé dans les cuiflons des leffives. Rien n'eft plus propre à opérer toutes ces métamorphofes , que l'effet des affinités ménagées par des digeftions convenables qu'on fe hâte trop quelquefois d’abréger & d'interrompre. On s'imaginera bien que je retirois par ce moyen de tès-beau nitre à bafe d’alkali fixe; que ce n'étoit que du fel marin à bafe terreufe qui reftoit confondu dans les diflolutions ; & quil ne me reftoit que très-peu de liqueur roufle incoagulable , refufant de fournir des criftaux par refroidifflement; en un mot, qu'il n'y avoit prefque point d'eau mère. Quelquefois, ne mtant pas d’abord écarté de la manière ordinaire de craiter les leflives, je foumettois enfuite à cette manœuvre l'eau mère à part; & je dois avouer que je l'ai toujours réduire par-là à fort peu de chofe , ayant fur-rour le foin de répéter plufeurs fois l'opé- ration. Mais tout comparé de part & d'autre, le traitement fax immédiatement fur les leflives, fimplifie toutes les opéra- tions , rend plus promptes les évaporations ; fournit d’abord des criftaux de Salpêtre incomparablement plus beaux & plus purs, comme sils éroient de la feconde cuite, & évite dans la cuiflon la perte d’une quantité d'acide nitreux, qui s'évapore & fe difperfe en l'air, & auquel on ne fait pas, je ne fais pour- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 253 quoi, l'attention qu'il mérite ; ce traitement doit donc être préféré à celui qu'on pourroit pratiquer fur les eaux mères. Les Salptriers feront peut-être bien éloignés de fentir limportance & l'utilité de ce procédé ; mais ce font des Chimiftes du premier ordre qui doivent en juger, & l’ap- précier au jufte. 254 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: CH API EAN Plan d’Adminiftration, pour fervir à la mulriplication du Nitre. $ LIL À Ba ceux qui voudront fe donner la peine de réfléchir fur toutes les parties de ce Mémoire, & principalement fur ce qui concerne la génération & la multiplication du nitre , conviendront certainement que c'eft moins de la poffbilité phyfique de porter ce produit au plus haut point d'augmen- tation, qu'il faut maintenant s'occuper , que de la manière de faire conftimment & habituellement concourir à ce but tous les moyens que la Nature prodigue de toutes parts. On fait à prélent d’une manière décidée, ce qu'il faut faire pour mettre en toute leur valeur les us matcrielles & propres de la nitrification Éépanètes) fur la terre, pour les muluplier & les féconder de plus en plus. On a de connoiïflances aflez éren- dues fur les matières, les intermèdes , les opérations qui peuvent empêcher ou retarder ce beau travail de la Nature, & l'on fait aflez les diftinguer d'avec celles qui le favorifent & laccélèrent, pour ne s'y pas méprendre aifément. Mais ce n'eft pas le cour. Les caufes phyfiques ne produifent point leurs effets fans le concours des cicorftances favorables au jeu libre de leurs actions, & à moins quon ne leve les obftacles qui fe jettent à la traverle. Ce n'eft pas aflez que la raïfon, d'accord avec l'expérience , nous apprenne à tirer du nitre de tous les recoins où il peut fe former; il fauc que les caufes morales ne sy oppofent pas, que les hommes puiflent difpofer librement des fources naturelles de ce produit, que lAdminiftration, en un mot, fe plie aux indications de la Nature. Heureufement le temps eit venu où il eft permis de penler à cet accommodement , à cet alliage. Le Gouvernement très-éclairé, fe propole aujourd'hui de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 2655 faire profpérer cette produétion en France, &, perfuadé des défauts du fyftême ci-devant adopté, il exige que les moyens qu'on pourroit trouver à cet eflet, difpenfent des recherches que les Salpètriers ont le droit de faire dans les maïfons des Particuliers ; ce qui fait bien connoître la difpofition où eft l'Adminiftration d'adopter les procédés qui fe trou- veront les plus propres à remplir fes vües bienfaifantes. Si les faits qui fe pafñlent tous les jours fous nos yeux , les obfer- vations qu'on vient de rapporter, & routes les expériences qu’on a faites jufqu'ici, nous apprennent que cette produétion fe fait fur toute la furface de la terre par le concours des fucs végétaux & animaux, portés au plus haut point de putré- faétion , & convenablement rapprochés & traités , pour que leurs principes inflammables ne fe diflipent pas ; fi la Nature a diftribué ces matières par-tout, fi elles croiflent, ceflent de vivre , fe reproduifent entre les mains & fous la difpofition de tous les hommes , rien de plus facile que de concilier, par une adminiftration convenable, la plus grande abondance, la promptitude , l'économie de ce produit avec les loix de la Nature, & la condition fagement impofce de ne rien prendre fur la propriété de la Nation. C’eft fur ce plan que je me permets de foumettre quelques idées à l'examen de mes Juges. Les plus belles découvertes fur la nirification ne fau- roient complètement fatisfaire aux intentions de l'Académie Royale, à moins qu'on n'indique un fyftême admiflible & praticable, auquel on puifle les aflujettir, pour les mettre en leur plus grande valeur, & pour remplir en grand les objets du Gouvernement, $. LIIL On doit étre fort furpris de voir qu'au milieu d'une quantité immenfe de corps organifés, qui périflent & fe renou- vellent continuellement fur la terre, on manque d'un pro- duit fi intimement lié avec le plus conftanc & le plus com- mun de tous les travaux de la Nature. Ces êtres qu'elle pa- roït détruire pour les reproduire bientôt, & ne les reproduire 256 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALrÊTRE, que pour une nouvelle deftruétion qui les touche de bien près, {ont ceux préciflément qui contiennent les matériaux du nitre, ui ne demandent que d’être convenablement rapprochés, pendant la décompofition, pour fe combiner, & pour ne pas fe difperfer où rentrer dans la réformation des corps orga- nifés renaïflans. N'eft-ce pas une mine inépuilable , pour TE dire, un préfent que la Nature eft toute prête à nous offrir de toutes parts, pour peu que notre induftrie sy méle & prof: e de ces momens précieux , où les principes 1g ignés , Ofi- ginaires des corps organifes, fe dégagent, fe développent, & quicrent une. combinaifon pour rentrer dans une autre ? Qui pourroit nier que le manque de ce _produic ne tienne à des caufes morales, à des entraves miles à l'induftrie des hommes, au fyitème enfin adopté fur cette branche d’adminiftration ? Des hommes privilégiés fe font charges de fournir le nitre à la Couronne, ayant le droit de fouiller librement pat- tout où il peuc s'en trouver de tout formé, ou proche à fe former dans les terres des Particuliers, de raper, garer, demolir les murailles qui en contiennent, de dcgoûter la Nation par toute forte de gêne & de torts, que leur indif= crétion ne peut manquer d'occafonner. Quand même tout cela fe pourroit faire fans aucun dommage confidérable , ce qui ne paroït pas poflible, les perquifitions feules que les Salpètriers font autorifés de faire par-tout où bon leur fem- ble, fuffiroient pour que tout Particulier fe crûc troublé dans la sûreté de fon habitation. Si on ajoute de plus l'enlèvement effeif de matières dont chacun eft fondé à fe croire le proprictaire , on prend en averfion un procédé qui blefle évidemment les droits de la propricté. Les plaintes, à la vérité , font éroufices par un fincère dévouement au bien de l'Etat; mais chacun paroît dire : La Couronne ne pour- roit-elle avoir mes nitres de bonne volonté ? Qu'il me foit permis de le tirer de mes caves, de mes écuries, de mes Ctables ; d'améliorer ce produit, de l'augmenter, & je le fournirai à l'Etat, plus promptement, plus abondamment & plus économiquement que tous ces Enrrepreneurs ne fonc dilpofés MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 257 difpofés à le.faire. C’eft ainfi que s'allieroit mon avantage avec celui de la Couronne, & que la main-d'œuvre étant moins couteufe chez moi, le prix du nitre pourroit fe rabaïfler. On na pas lieu d’efpérer tout cela, tant qu'on aura affaire à des Entrepreneurs. Premièrement, ajoute-t-il , les lieux vraiment libres aux perquiiions des Salpétriers fe réduifent à un fort petit nombre. Tout sy oppofe. Quelque part les Salpé- tiers n'ofent pas même paroïtre; fouvent ils fe laïflent ren- voyer de bon gré. Par conféquent la fouille ne s'exerce libre- ment, au bouc du compte, que dans ies endroits où les Particuliers ne favent oppofer qu'un frémiflement fecret & le filence. En fecond lieu, les meilleures fources font négligées ou dérobées aux pourfuites des Salpètriers. On détruit les nitrifications qui fe manifeftent ; l'on pave, le plus fouvent, tout fol où l’on craint la fouille; on difperfe une quantité p'odigieufe de matières fermentefcibles , dont une induftrie facile uireroit du nitre. $. LIV. La fagefle du Gouvernement à fi bien fenti tous ces in- convéniens , & en a cté fi vivement penétrce , qu'elle s’eft propofé de foulager le plus tôt pofñlible la Nation de la gêne que ce {yftéme entraine néceflairement. Ce feroit donc mal feconder des vûües fi bienfaifantes, fi l'on fe contentoit de n'entrer fur ce fujer dans d’autres difcuflions que celles qui font du reflort de la Chimie. La queftion propofée par la Société Royale, relativement aux ordres du Roi, doit né- ceflairement s’envifager fous deux points de vue. On ne fau- toit, à la vérité, trouver des moyens aflez sûrs de pro- curer en France l'abondance du Salpêtre, à moins qu'on n’en aic approfondi l'origine; ce qui eft légitimement du reflort de la Phyfique & de la Chimie. Mais il eft un autre objet à remplir, concernant la manière d’allier les moyens que la {cience pourroit découvrir , avec la propriété & la tranquillité des Particuliers, que la bienfaifance du Gouvernement fe pro- pole fu-touc de ne pas blefier, À préfent qu'on eft sûr que Kk 58 Mémotmes SUR LA FORMATION DU SarrèTRE. e nitre ne fe mouve nulle part tout naturellement en grande provifion , ainfi que cela à lieu pour tant d'autres fels qui affeétent les régions intérieures de la terre ; que c’eft en général une produétion qui s'élabore fur la furface, par une combinaifon toute particulière de certaines fubftances déga- gées dans la fermentation putride de toute forte de corps organilés ; que c'eft uniquement des fucs fermentelcibles de ces corps, & moyennant leur réfolution, que réfulte la partie éminente qui fait l'eflence des nitres; & qu'enfin on ne fau- roit rien efpérer de la tranfmutation des fels foffiles en nitre: il paroît d’abord qu'il n'y ait d’autres reflources pour remplir ce fecond objet, que d’avoir recours au fyftême des nitrières purement artificielles. Mais je vais faire voir, qu'à cela près, les Particuliers doivent étre par - là délivrés de toutes per- quifiions : il eft bien difficile, sil n'eft pas impoflible , qu'il en réfulte l'abondance de ce produit qu'on fe propofe de procurer à la France avec la promptitude & fur-tout l'économie qu'on doit défirer. Il faut donc , ou renoncer à toutes ces nitrières naturelles, fur lefquelles on à tant infifté dans le Chapitre précédent , gu'offrent de toutes parts les étables , les écuries, les granges, les colombiers, &c. en un mot, à toutes les nicrifications fur les fonds des Particuliers , ou mendier l'extraction des nitres , & les acheter à tel prix que le Particulier fe croira en droit d'exiger à proportion du dégôt qu'il en doit reflentir. L'un des deux eft incvitable. Toute obligation qu'on impofe- roic aux Communautés , aux Particuliers de fournir aux Entrepreneurs des nitrières artificielles, des matériaux quels qu'ils foient , & de quelque manière que ce foit , rentreroit par un cercle vicieux dans le fyftême qu’on veut abolir. Par conféquent tout le nitre qu'on doit fournir à la Couronne, doit être le produit de l'empleite & de l'Art. Il faut répandre par toutes les provinces du Royaume, des magafins fans nom- bre, pour autant de plantations que lexige la quantité des nitres quil faut procurer. Ce ne doivent plus être les habi- cations particulières où le nitre fe comunence aux frais de la MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 259 Nature , & qui ne demande que d'être achevé par l'Art. C’eft par une main-d'œuvre bien confidérable , & dans des licux préparés , qu'il faut, dans ce fyftême, amafler les fubf- tances dont le concours eft néceflaire à la nitrification, les traiter, & provoquer la Nature dès les premiers commen- cemens , les ébauches de la nitrification. Quand même, à force de multiplier ces emplacemens par le royaume , on pouroit faire des récoltes plus abondantes de ce fel, que celles qu'on obtient préfentement, je ne faurois me perfuader (bien entendu toujours qu'on ne touche point aux matériaux des Particuliers, que par des compenfations), qu'on puïfle rien gagner du côté de la promptitude & de léconomie. II n'y a pas une région que je fache en Europe, où tous les nitres néceflaires à l'Etat foient tirés des nitrières purement artificielles , fans qu'il sy méle quelque obligation de la part des Particuliers. Et après tout , il s’en faut bien que la plu- part des Etats foient , autant que la France, dans le cas d’avoir befoin d'une grande provifion de ce fel. On a préfentement, il eft vrai, fur la nitrifcation des connoiflances aflez nettes & décidées, pour fimplifier, favorifer, accélérer la formation des nitres. Le favant Recueil de MM. les Commiflaires con- tient d'excellentes inftructions fur toutes fortes de plantations ou de nitrières artificielles. Les marais, les nitrières végé- tales que je viens de propoler, les couches de nitres qu'on a découvertes & qu'on découvrira dans bien des endroits montueux , inhabités de la France , ne font pas des reflources à méprifer. Mais eft-il convenable que le Gouvernement attende du temps & des nouvelles recherches , les avan- tages qu'on peut fe promettre de ces fources, & qu'il eft du fervice & de l'intérèc de l'Etat de fe procurer fur le champ? En attendant, il fauc commencer par augmenter le nombre des halles, des hangars pour les nouvelles plantations : il faut que les Entrepreneurs faflent provifion de terres légères pour les couches, & de matières puwefcibles à y diftribuer pour la décompofition ; qu'ils préparent des urines, des eaux de fumier & femblables liqueurs fermentefcibles, pour les humeëres K kij 260 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, Il faut du temps, une pratique que les Salpêtriers n'ont pas encore en France, une depenfe vive à laquelle ils ne font pas accoutumés , nombre d'hommes gagés pour re- cueillir les rebuts des places, des boucheries, des cuifines &c., pour fe procurer des fumiers, des terreaux, des ex- crémens, &c. On connoît aflez les fantaifies des honunes, quelquefois chimériques , & toujours très- délicats en fait de propriété. Les matières les plus abjeétes & méprifables deviennent des objets précieux , toutes les fois qu'on y attache l'idée de propriéré. Il eft facile qu'on étende fur-tout la défenfe de la fouille des Salpétriers. Quelque excellentes, nombreules , réglées, & bien diftribuées que puiflenc être ces inftitutions , quelle que foi l'induftrie des Entrepreneurs, pour aller au plus vire, jai de la peine à croire que par ces moyens la France foit aflez promptement & abondamment pourvue de nitre, & je ne crois nullement qu’elle puille l'être avec toute l'économie dont ce produit eft fufcepuble,& qu'elle cft en droit d'exiger. $& LV. Mais en faifant attention que ce n’eft pas entre les mains d'un petit nombre d'hommes privilégiés, ni dans des endroits marqués, que la Nature élabore & forme le nitre, c'eft à fes indications , ainfi quil eft dit ci-devant, qu'il faut s'en tenir pour le puifer à routes les fources, telles qu'elles puiflent être, loit naturelles, foit artificielles, & profiter des matériaux qu'elle prodigue fur toute la furface de la terre. Cette pro- duétion, il faut le dire, ne pourra jamais fe relever de fa langueur , tant qu'on voudra avor befoin d’agens intermé- diaires. Ïl n'y a qu'une Nation en liberté & agiflant par elle- méme, qui puifle la faire profpérer de toutes parts : c'eft ce que je vais développer. On à fai voir que la génération du nitre peut avoir lieu par-tout, & entre les mains de tous les hommes en général, ce fel étant un compofe de parties dont la fource matérielle réfide en tout être organife de la terre, & dont la combinaïfon cft occafonnée par le développe- MÉMOIRES SUR LA FORMATION Du SALPÈTRE, 261 ment des principes convenablement rapprochés de ces êtres dans leur totale décompoñition. Et comme il n’y a que l'air ‘qui fe foit fouftrait par fon invifibilité aux partages moraux, on fent bien qu'il n'eft prefque point de provifion en grand de ces fubftances, qui n'appartienne à quelqu'un. Il en eft de même des intermèdes principaux, dont le concours n'eft pas moins néceflaire pour favorifer & compléter la forma- tion des nitres. De là vient qu'on ne peut difpofer en grand & à peu de frais, des matieres propres à certe fabrique, même des plus abjeétes , & moins encore des nitrif- cations , foit ébauchées , foit toutes formées, que la Nature prodigue de tout côté, fans toucher à la propriété des hommes que la fageñle du Gouvernement veut qu'on refpeéte. Il ne refte Re qua réuni & allier d’une manière convenable l'intéréc des Particuliers avec celui de la Couronne, ce qu’on pourroit faire en adoptant cette maxime capitale, » de faire entrer la produétion du nitre dans la mañle libre » des richefles vénales de la Nation x. Tout concourt à nous démontrer la nécefité d’un change- ment de fyftéme fur cette branche d'adminiftration, & tour ce qu'on vient de dire, nous met naturellement fous les yeux le fyftème le plus convenable qu'il faut embrafler. Les véri- tables moyens , les plus sûrs, les plus prompts & les plus économiques, de procurer en France une produétion & une récolte immenfe de Salpêtre, fans que la tranquillité , la sûreté & la propriété des Particuliers en foient bleflées, con fiftent à en mettre toutes les fources en valeur & profit ; par des arrangemens fages, & à faire en forte que déformais ce foit une produ&ion livrée à Finduftrie & aux foins réunis de coute la Nation. Que de changemens dans la récolte & dans le prix de ce fel, qui doit datée à pi ‘oportion de fon abondaïce, fi tout Paculier , toute Communauté , fi la Na- tion entière, en un mot, eft aurorifée à l’extraire foi-méme immédiatement de fes fonds , de fes nitrières naturelles, d'en occafionner la génération par toute forte de nitrières aruifi— ciclles , (bien entendu par-tout où la propriété des individus 2612 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, peur s'étendre): Tout Particulier en trouve de prêt à fe déve- lopper, par la plus légère préparation, dans fes caves, dans fes étables, dans fes bafles-cours, &c. de tout formé & en eforefcence fur fes murailles, fur fes fumiers aflaifonnés , & en bien d'autres endroits. [| à dans fes opérations & celles de toute forte d'animaux qui lui appartiennent, dans les amas faciles quil peut faire de matières végétales & animales, les matériaux eflentiels de la nitrification ; dans fes terres po- reufes, une matrice convenable à cette produétion, & un ate- lier à l'abri du foleil & de la pluie, dans toute forte de lieu clos & couvert, perméable à l'air, qu'il eft en liberté d'y deftiner ; dans fes cendres, une provifion non coureufe d’alkalis fixes, pour donner à fes nitres la bafe qui leur convient le plus. Tout lui fert, & à peu de frais, pour former fa nitrière. Rien ne lui échappe de ce qui peut con- tribuer à fa fertilifaton, & augmenter une profpérité que le Gouvernement offre à fon induftrie. Une Nation qui doit à fa fenfbilité vive & fouple un goût univerfel , une Nation pleine d'aptitude à tout, ne tardera pas à accélérer, à améliorer, à multiplier cette produétion. La confervation & la conduite des niuières arüficielles deviennent route autre chofe entre les mains des Particuliers qui trouvent bon de s'y adonner, qu'elles ne peuvent être étant livrées à des Entrepreneurs. Ni la main-d'œuvre, ni la provifion des matériaux, ni l'extraétion des nitres, qu'on peut faire chez foi , dans les cemps les moins occupés par les travaux de la campagne, ne font plus des objets fi couteux à remplir, qu'ils doivent l'être pour des Entre- preneurs. L'habitude du travail une fois contraétée, facilite tout, s'étend & fe perpétue très-aifement. Il faut fe perfuader qu’on peut tout vouloir , mais qu'on n'a rien de bon, de facile, que de la bonne volonté. Il eft de fait qu'une branche quel- conque d’adminiftration n’a de confiftance & de profpcrité, qu'autant que l'intérêt public eft lié à celui des Particuliers qui y ont rapport, la plupart des hommes ne bravant route forte de fatigues & de difficulrés qu’autant qu'ils en font récompenfés, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 263 $. LVI. Mais les Nations ne raïfonnent point; elles font conduites par les évènemens, & par la direétion de ceux qui les gou- vernent. En faifant entrer le nitre dans la mafñle des produc- tions libres & vénales de la Nation , en autorifant les Parti- culiers à cultiver ce produit, à le faire naître fur leurs fonds, & à l'améliorer le plus quil eft poffble, il faut bien les éclairer fur la conduite qu'ils doivent tenir, & fur les diffe- rentes manières de sy prendre fuivant les circonftances & la nature des nitrières tant naturelles qu'artificielles. Ce n’eft que par une inftru@ion générale, exaéte & détaillée à pu- blier & répandre par-tout, qu'ils peuvent en être informés, Toutes Jes indications, trous les moyens de pratique, tous les procédés qu'on pourra juger néceflares, y doivent être in- {érés, de forte que chacun foit mis à portée, avec connoiflance de caufe, d'augmenter fes revenus par cette nouvelle branche de produétion nationale. Et comme les nitrières naturelles. des habitations doivent être le but principal & la mine, pour ainfi dire, du nitre en France, qu'on doit exploiter le plus foigneufement, rien ne doit être négligé dans linftruétion pour qu'on en retire les plus grands avantages qu'il eft poñlible. On connoît maintenant , d'après tant de recherches & d’obfer- vations faites à ce fujet, les vrais principes auxquels il faut sen tenir pour la bonne conduite de ces fortes de nitrifi- cations. Ce qui les favorife le plus, c'eft la divifion, pout donner à la putréfaétion le plus d’eflor qu'il eft poflible, larrofement convenable , & le ménagement alternatif de l'hu- midité, de la chaleur & de l'air. Il en doit étre de même par rapport aux nitrières artificielles. L'inftruétion doit tomber fur le choix des terres, fur la proportion des mélanges putrefcibles, fur leur emplacement, leur diftribution & leur préparation; fur les matières des arrofages fuivant le degré où je trouve la putréfaétion, & fur tous les moyens donc on seft tant. occupé dans les Chapitres précédens, pour hâter ce 264 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. travail de la Nature. Mais on ne fauroit aflez défigner & nommer toutes les matières , tant liquides que folides, à éloi- gner attentivement des nitrières, comme faïfant plus de tort que d'avantage à la nitmfication, retardant & empêchant même quelquetois le progrès du travail; & il eft crès-eflentiel de faire diftinguer fur-tout les procédés de pratique les plusavantageux, d'avec ceux qui font nuifbles ou tout-à-fait fuperfus. Rien ne demande tant de détails exaëts & prefque minutieux, que cette inftruétion générale, tant fur ce qu'on doit faire que fur ce qu'on doit éviter dans les opérations, dès qu’on eft aflez éclairé à cetre heureufe époque, fur tout ce qu'il y a d'llufoire, d'inutile, & même de préjudiciable dans l’ancienne routine & dans bien des methodes inferées dans le Recueil cité ci-deflus fur la for- mation des nitres. Ces détails polés , foit pour toutes fortes de nitrières naturelles, foic pour les artificielles à établir, linftrudion doit à la fin traiter des moyens de reconnoître avec certitude les cerres plus ou moins nitreufes, de la meilleure manière de les lefiver, d'évaluer le plus ou moins d'abondance en nitre dans les leflives, de les digérer & dépurer, de les foumetrre à l'évaporation , & d'en extraire la plus grande quantité quil eft poñlible de Salpètre criftallifé. Si nos Salpètrier ss d'à préfent font bien éloignés d'être des Chimiftes éclairés, on n’a aucun lieu de “lt que tout ceci ne puifle étre fort bien exccuré, même par les hommes les plus grofliers. Ce font des habitudes qui fe contraétent en peu de temps. Il en doit étre comme du vert-de-oris, won fait préfentement à la campagne, aufli bien que ct jes villes du Languedoc. Il y a bien des produits d'induftrie incomparablement plus difficiles. La foie en peut être un exemple frappant. Il fufhit qu’on examine de proche en proche les foins pénibles & délicats que demande cerre produétion, du moment que les vers commencent à éclore, jufqu'à ce qu'on retire la foie du cocon, pour fe perluader que la culture & la récolte des nitres n'eit Pas» à beaucoup près, fi embarraflée, ni fi ennuycule, 6 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 265$ $. LVITI. On fent bien que ce feroit tout renverfer que de charger cette produétion de quelque impôt que ce foit. Toute vexa- tion en doit être éloignée. Il pourroit arriver que le prix modique du nitre, ainfi formé par tous les moyens à la fois, ne für pas quelquefois fufffant pour payer les frais préliminaires à la vente ; & un Laboureur, un Particulier quelconque ne facrifiera jamais une partie de fes loifirs & de fon bien à un travail, fi ce n'eft dans l'efpoir de quelque avantage. C'eft aflez que la produétion porte , dans les commencemens, l'obligation originaire d’être livrée à l'Etat pour un prix convenable. Les accroiflemens que cette culture recevra dans le Royaume avec le temps, (ce qu'on ne doit pourtant pas prétendre fi fubitement); & l'abondance des rapports qui en réfultera de plus en plus, nécefliteront à la vérité des changemens dans l’adminiftration : il fuflira peut-être alors d'enjoindre aux Particuliers de vendre à la Couronne le nitre qu'elle trouvera proportionné à fes befoins, en en prenant fur cent livres de récolte la partie qu'elle jugera à propos d'acheter. L'emplette publique accomplie , chacun doit être autorife à vendre le furplus dans le commerce. C’eft ainfi que tout Particulier deviendra le Salpêtrier de la Couronne. $. LVIII. Les foins de cette adminiftration doivent néceffairement être confiés à des Commis géneraux & particuliers, réfi- dant dans les provinces du Royaume , auxquels il faudra encore joindre des agens & connoifleurs experts pour la re- cette & appréciation des différentes qualités du nitre, qui étant attachés à la commiflion, feroient même des tournces par-tout où l’on croiroit leur préfence néceflaire pour la direétion & lamélioration de ce produit, & fut-tout pour l'inftruétion des gens de la campagne qui s'en oc- cuperont. Les Chefs des villages doivent être au fair de toutes les nitrières en œuvre, & des récoltes de leurs dif- L°1 266 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. tits. Et peut-être trouvera-t-on bon d'épargner aux Payfans & à vous Particuliers de la campagne, des voyages & des formalités, en chargeant les Receveurs de fe porter fur les lieux dans les temps marqués, pour y faire la provifion des nitres, & pour que le cultivateur en fafle le débit avec le moins Hneoamodirét qu'il eft poflible. SN D, Mais en voilà aflez de ma part: ce feroit trop m'carter de mon but, que d'entrer dans de plus longs détails à ce fujet; il me fufit d’avoir expofé là-deflus mes idées. C’eft à la Societé Royale , à des Savans du premier ordre , à un Miniftère très-éclairé que jai l'honneur de les préfenter. Si le nitre étoit un fel minéral affeétant la région intérieure de la terre en grand amas & provifion; fi c’étoit dans des mines qu'on le trouvât, comme les métaux, rien ne feroit plus facile que de foulager la Nation de toutes génes à cer égard. Mais c'eft précifément entre les mains de toute la Nana que fe trouvent les nitrières naturelles, que la Nature ébauche & travaille ce produit , qu'il y peut recevoir de linduftrie le plus grand accroiflement, la plus grande multiplication. Le rai- fonnement eft tout fimple : ou il faut renoncer au nitre na— tional , & le urer tout de l'Etranger ; ou il faut établir un fyfféme tout fonde fur les nitrières artificielles, en achetant & mendiant les matériaux des Particuliers , qu'il doit être défendu d'inquiéter ; ou enfin, en profitant de la diftribu- on que fait la Nature de cette produdion par-tout où il ya des corps organifés , il fauc donner la liberté à la Na- tion de la faire profpérer elle-même & de bonne volonté au grand profit commun de la Couronne & des Particuliers. En tous cas, le grand objet, l'objet capital à remplir , c'eft celui de l’abondance, de la promptitude & de l'économie du produit. Quand même lon prouveroit qu'il ne feroit pas impoffible de fatisfaire à quelques-unes de ces conditions dans les deux premiers fyftêmes, fur-tout en les combinant, je fuis perfuadé qu'on ne faura difconvenir qu'il n'y a que le MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 267 troifième dont on a parlé ci-devant, qui, porté à fon entie accompliflement, puifle promettre sûrement la plus grande abondance, la plus grande promptitude & la plus grande économie, Comme l'induftrie nationale y a & doit avoir tout fon eflor, elle n’eft pas bornée aux nitrières purement naturelles. Aucune plantation, aucun établiflement artificiel ne lui eft interdit fur fes fonds ; tout eft livré à fes recherches. Par-tout où la Nature amafñle quelque provifion de nitre fur la furface de la terre, ou eft difpofée à en engendrer à l’aide de quel- que arrangement qui la favorife , quel que foit l'endroit où fa propriété peut s'étendre , tout Particulier eft autorifé d'en pro- fier, & d'y améliorer & augmenter la produétion de toutes les manières : & encore eft-il bien à préfumer qu'on compte pour quelque chofe l'avantage que retireroit la Nation d'un revenu tout nouveau , d’une fource domeftique de richefle abandonnée autrefois au profit d'une branche d'hommes privilégiés, & étouffce pour la plus grande partie, ou dérobée du moins fort foigneufement à leurs perquifitions ; richefle qu'on peut re- lever de fa langueur , fans rien prendre fur les autres objets de culture, d'induftrie, de commerce. Que je ferois heu- reux , fi, d'un côté, les expériences & les obfervations que je viens d'expofer dans ce Mémoire, fe trouvoient propresà éclaircir la matière des nitres & leur origine, à déméler les voies les plus sûres d'en diriger , accélérer & perfectionner la pro- dudion, & à en poufler la multiplication au plus haut point ; & fi, de l'autre, les raïfonnemens qu'on vient de faire dans ce Chapitre, au fujet de l’'adminiftration, avoient le bonheur d’être regardes par mes illuftres Juges, comme affez folides pour mériter quelque attention de la part du Gouvernement ! Mais peut être que Je le ferois trop, sil étoit décidé par leurs fuf- ages qu'en prenant le fujet dans tous fes rapports, c’eft en fe tenant à ces principes & moyens de pratique, à la portée de tout le monde, qu'on peut remplir effeétivement & en grand également les objets propofés par la Société Royale dans fes Annonces publiques des années 1775, 1778, & les vües bienfaifantes du Gouvernement. Lili MÉMOIRE Qui à partagé le fecond Prix fur la formation & fur la fabrication du Salpêtre. Par M. GAaviNeT, Commiffaire des Poudres & Salpétres à Befançon ; & par M. CHëvrAND, Infpecleur des Poudres € Salpétres dans la méme ville. Nec fpecies fua cuique manet, rerumque novatrix Ex aliis alias reparat Natura figuras. Ovid. 1. 15. Met. PREMIER Concours, n.° 33. nr EN RIO DU Cr EO IN. J E ne me ferois jamais expofé à donner à l’Académie mes recherches fur la formation & la fabrication du Sal- pètre, fi je n'avois eu un fonds de connoiflances acquiles depuis bien des années fur cet objet. Je ne prévoyois pas alors qu'il deviendroit un jour le fujet des recherches de tous les Savans. Je m'appercevois bien que cette partie n'étoit pas au point de perfeétion où l'on pouvoit la porter ; Je failois mes efforts pour réprimer les abus que jy décou- vrois. Comme on n'éroit point dans lufage en France de fabri- quer arüficiellement du Salpètre , mes expériences & mes obfervarions n’ont point Cte dirigées de ce côûtc-là ; mes vües étoient bien d'en augmenter la récoke, & de A lin- commodite & les dépenles qu'occalionnent aux Particuliers les fréquentes vifiies des Salpêtriers. J'ai déjà écrit les de- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 269 fauts que j'ai remarqués dans leurs travaux ; je blâme l'ufage de lefliver les terres trop fréquemment; Je prouve par des expériences en grand, qu’elles rendent davantage de Sal pêtre en ne les leflivant que de quatre en quatre ans, au lieu de les lefliver de trois en trois ans. Je confeille une mixtion de matières propres à produire le Salpètre avec les terres des habitations ; je démontre l'ignorance des Salpé- tiers répandus dans les provinces , & la néceflité de les inf- tuire fur les points cflentiels de leur état : mais une bonne pare de ces obfervations devient inurile à la vue du Programme donné par l'Académie , puifque le point cflen- tic! eft de difpenfer des recherches que les Salpétriers ont le droit de faire dans les maïfons des Particuliers. Avant la diftribution de ce Programme , Meflieurs les Régifleurs des poudres avoient énvoyé aux Commiflaires des poudres dans les provinces, de la part du Miniftre, trente-trois quef- tions toutes relatives à la culture , à l'extraétion & à la pu- rification du Salpêtre. Je fus chargé par un de ces Meffieurs d'y répondre ; j'y ai joint ce que j'ai cru le plus propre à remplir leurs intentions. Comme aurai befoin dans cet Ou- vrage de ce que j'ai dit dans mes réponfes, je le rappeñerai comme mon propre bien. On ne trouvera ici aucune citation; j'avoue que je dois aux Savans qui m'ont inftruit ce qu'on y trouvera; mon hommage eft trop foible, pour les dédommager des obliga- tions rcelles que je leur ai : ainfi je laïffe chaque Aureur maitre d'y prendre ce quil croira lui appartenir; je me conten- terai du mérite de l'application. Je ne remonterai point aux premiers temps de l'Art que je décris ; je défire trop fa per- fe&ion, pour le ramener , pour ainfi dire, à fon enfance, & pour furcharger mon Ouvraze de fes anciens défauts. Je ne parlerai point non plus des principes des différentes Ecoles, dont beaucoup d'Ecrivains fe plaifent à faire éralage. Je fais que J'écris à mes Maîtres, & que fi je fuis ininteiligible , la faute fera de mon côté. En examinant le fujet à traiter , on apperçoit d'abord une Paris, #3 Juiller 377$: 270 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. carrière immenfe, une fuite d'expériences qui pourroient cffrayer celui qui n'auroit qu'une foible intention de travailler. Le peu de temps qu'on a, ne permet pas d’efpérer qu’on uifle parvenir à des réfultats ablolument farisfaifans : j'en ai conclu qu'il s'agifloit plutôt de faire une application heureufe des moyens déjà connus, en les perfectionnant par l'addition de quelques nouveautés, que de chercher à dérober à la Nature fon fecret; & j'ai pris le parti de ne faire que les expériences néceflaires, & qui pouvoient me fournir les preuves dont j'ai befoin pour étayer mon Ouvrage. Je n'ai pu m'em- pècher de parler de rour ce qui y a rapport. MÉMOIRES SUR LA FORMATION PU SALPÈTRE 271 PEL ANNE CENESE CP RPE NMFESR: De lexiflence du nitre dans Pair, les vepétaux 6 les animaux, 6 de la tranfmutation des acides. N: pères en nous tranfmettant leurs connoiflances., nous ont tranfmis leurs préjugés. Le fyftème de la tranfmutation des acides en eft encore un veftige. Pour m'aflurer fi l'acide vitriolique engagé dans une bale fe change en acide nitreux , Jai fait conftruire deux paniers , chacun d’un pied cube de capacité 5 Jai rempli ces paniers de terre à Salpétre que J'avois épuifée par des lotions fuffifantes, en ajoutant dans lun huit onces d’alun , & je les ai placés dans un rez-de- chauflée à couvert & à l'abri du foleil ; j'ai atrofé ces deux portions de terre benne huit mois avec une cgale quan- üté de parties égales de fang. & d'urine putré éfiés : ; après quoi je les ai laïflées en repos; Je les ai leffivées féparé- ment, en les jetant dans une chaudière d’eau chaude; je les ai épuifces par des lotions répétées ; Jai filué la liqueur , & avant de procéder à l'évaporation , J'ai précipité par une liqueur alkaline les bafes terreufes dés Palin & du nitre. J'ai obtenu du pied cube de terre fans alun deux onces fept gros de Salpêtre brut, plus blanc que le Salpètre brut ordinaire. J'ai obtenu du pied cube de terre dans laquelle J'avois mélé de lalun, deux onces fix gros de Salpètre bien féparé du tartre vitriolé & du fel marin, qui fe font dépoles au fond de la chaudiere , pendant l'évaporation que J'ai conduite avec une extrême lenteur pour éviter la confufion, La quantité de tartre vitriolé s'eft trouvée de quatre onces , qui font à peu près ce que huit onces d’alun décompofces peuvent rendre. Jai préféré pour mon fel vitriolique lalun*, parce que je voulois un fel que je pufle retirer par fa ie difolution ; j'ai précipité les fels à bale terreufe par un alkali fixe, pour en facide vitriolique qui n'avoit pas manqué d’aban- * Note des Commiffaires, Cette expérience éft fufceptible de quelques réflexiorrs qu'on trouvera dons l'extrait e ce Mémoire, Voyez là premiere Partie de ce Recueil, 272 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. donner la bafe alumineufe pour s'unir à une bafe calcaire pendant fon féjour dans les terres; j'ai retrouvé tout l'acide vitriolique de l'alun; & la terre dans laquelle j'avois introduit de l'alun, ne m'a pas fourni plus de Salpêtre que l'autre; d'où je conclus que l'acide vitriolique préfent n’eft entré pour rien dans la compofition de l'acide nitreux. L'acide vitriolique contenu dans l'air eft métamorphofé en acide nicreux , fuivant le fentiment de quelques Auteurs. Pour m'aflurer de cette métamorpholfe , j'ai fait conftruire une caïfle en chêne d’un pied cube dans œuvre; j'ai mis dans cette caille de la terre à Salpètre & épuifce ; j'ai ajoute fur cette caïfle une pyramide en liteaux de deux pieds de haut, qui, fe réuniflant à un fommet commun, laifloient entre un vide de quatre pouces en carré ; J'ai garni ces liteaux d'un canevas en dedans & en dehors, ce qui mettoit un pouce de diftance entre les deux toiles ; j'ai plongé dans une liqueur alkaline autant de filafle qu'il m'en à fallu pour garnir bien exactement le vide qui fe trouvoit entre les deux canevas ; j'ai cloué cette py- ramide fur la caiïfle remplie de terre à Salpêtre; j'ai ajouté au deflus de cette pyramide un entonnoir en fer-blanc, dont le goulottraverfoitla pyramide; je l'ai tenue fermée avecuntampon de bois garni de filafles ; j'ai arrofé la terre de cette caifle avec le mélange de fang & d'urine, autant de fois que je l'ai cru néceflaire, en obfervant de ne pas laïfler pénétrer l'air en introduifant la liqueur. Pour y réufhr, je mettois dans l'entonnoir la liqueur, je le débouchois pour en laïfler couler une portion ; & je le refermois avant que la liqueur fût en- tièrement écoulée. Jai continué ainfi les arrofages pendant huit mois, & pendant tout ce temps j'ai eu foin d'hu- mecter la filafle avec de la liqueur alkaline, à mefure que je remarquois qu'elle fe defléchoir. Au bout de quarorze mois, J'ai leffivé la terre de la caïfle, jen ai tiré deux onces & un gros de Salpètre. Dans cette expérience, j'avois deffein d’intercepter l'acide vitriolique de l'air, en le faïfanc pañler à travers de la filafle imprégnée d’alkalis, fubftance avec laquelle il a beaucoup d’afhnite. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 273 d'afinite. Cet appareil m'a paru fort propre à remplir mes vües. L'air en eflet ne pouvoir arriver à la terre fans avoir fair bien des détours à travers la filafle , & fans avoir eu un contaét bien immédiat avec une fubftance qui a grande dif- poftion à le fixer; cependant, malgre les obftacles que Jai apportés au travail de la Nature en lui i interceptant une partie de l'air & en détruifant l'acide vitiolique qu'il contenoit, la terre m'a encore produit du Salpètre. Je n'ai pas voulu priver totalement d'air la terre de la caïle ; la putréfation , certe opération de la Nature, n'auroit pu fe faire librement; Je n'aurois point obtenu de Salpétre ; j'en aurois attribué la caufe à l’abfence de l'acide vitriolique, tandis que celle de l'air auroit caufé cette différence, & mon expérience m'au- toit induit en erreur. La putréfaétion des matières animales , ainfi que je l'ai vu chez un Phylficien moderne, peut sopérer, Jufqu'à un certain point , dans les vaifleaux fermés, fans le contaét de Pair. Pour reconnoïtre fi dans ce cas il fe formoit du Salpètre, j'ai mis dansun matras d'une grande capacité, de laterre avec un mélange de matières animales; J'ai fermé exactement le ma- tras. Au bout d'une année, ayant eflayé une partie du mé- lange , il ne ma point rendu de Salpètre. Il réfulre de ces expériences que l'acide vitriolique , foit libre, foit engagé , n'eift point changé en acide nitreux ; que l'air eft aire pour favorifer la putrétaét: on; que Pcide vitriolique quil contient n'eft point ce qui le forme, mais lutôc les matières qui fe putrefient. C’eft inutilement qu'on a voulu. mettre à l'appui du fen- timent de la tranfmutation de l'acide vitriolique, quelques com- binaïfons fans exiftence permanente , telle que le fel ful- fureux de Sralh. La préfence du phlogiftique caufe une forte d’altération au tartre vitriolé, mais elle n'eft que moinenta- née ; le contrat de l'air feul détruit cette combinaifon ,» & Life l'acide vitriolique reprendre fes propriétés. L Le qe me dans lequel on prétend que le nitre fe pro- duit par la végétation, & quil le forme habituellement dans M m 274 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAILPÈTRE, les plantes vivantes , eft bien éloigné des vües de la Nature. Lorfqu'elle combine les élémens pour faire un compofe , elle va droit à fon but par le chemin le plus cour. Si les cir- conftances doivent produire une plante, ce ne fera point une fubftance faline. Une plante peut exifter fans contenir de fubflance faline étrangère à fon eflence ; mais comme il fe produit des fubftances falines dans les terres où elles croif- fent, ces fels paflent dans les plantes, par leur difolurion dans l'eau de végétation. Une fubftance faline , étrangère à une plante , peut fejourner dans {es vaïfleaux, fans nuire à fon économie; Ceft ce qu'on remarque dans celles de même efpèce qui contiennent des fels que d’autres ne contiennent pas; on ne doit attribuer cette différence qu'au terrein où elles croiflent. Ces Auteurs difent encore que les fubftances falines que les plantes contiennent , ne fe découvrent point dans les analyfes , parce qu'elles y font mafquées; fans doute ils n’en- sendent pas parler de celles qui fe préfentent à la vue: je dirai dans l'inftanc mon fentiment à cet égard. Ceux qui-prérendent que l'air contient le nitre & qu'il ne fait que le dépofer dans les terres , ont trouvé des par- tifans ; il eft indubitable que l'air peut contenir de l'acide nitreux , il peut fe rencontrer des circonftances où cet acide foit élevé ayant été formé avant que d'être fixé, ou les vapeurs néceflaires à fa compofition fe rencontrant Holées; c'eft ce dont je me fuis apperçu plus d’une fois fans le chercher. J'ai fenti autour des maiïlons de cam- pagne où il y avoit des matières en putréfaction , dans les chaleurs de l'été, une odeur qui avoit beaucoup de rapport à celle qui frappe lorfqu'on entre dans le laboratoire d’un Diftüillateur d’eauforte dont les galères travaillent; il faut être un peu accoutumé à cette odeur, pour la reconnoître fubitement. Ce que j'avance pourroit paroître ridicule , maïs peut-être ne fuis-je pas le feul à qui le hafard ait procuré cette obfervation. Si cet acide ifolé rencontre quelques matières avec lef- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 275$ quelles il puifle contrater union, il fe fixe, & bientôt l'air en eft dépourvu; sil continue à s'élever à des hauteurs im- menfes , il difparoït pour notre globe, & eft hors de portée pour nos obfervations. Il eft à prélumer qu'il fe raflemble à une certaine hauteur, ainfi que l'on voit la fumée d’une ville le foir d'un beau jour fe fixer à une hauteur proportionnée à fon poids & à celui de Pair; c’eft là que l'acide nitreux peut s'enflammer & fe détruire avec la matière du tonnerre , dans la compofition duquel il peut entrer: cette inflamma- tion cft une fage prévoyance de la Nature; car fi toutes les vapeurs qui s'émanent des corps en putréfaétion s'accu- muloient continuellement , bientôt l'air ne feroit plus aflez fain pour entretenir la vie des animaux qui le refpirent. On s'aflurera aifément de l'inflammation de l'acide nitreux en vapeur , en jetant dans une fofle d'aifance un peu vieille du papier enflammé ; j'ai vu cette expérience réuflir plu- fieurs fois, & je connois des perfonnes qui en ont fait d’aflez fâcheufes, fans le vouloir , en portant avec eux une lumière à l'ouverture de ces fofles (*). Des obfervations qui n’etoient point fuffifamment appro- fondies, ont induit nos Anciens en erreur. De ce qu'on voit les terres & les murailles qui contiennent du Salpêtre , le préfenter à leur furface, on a cru que c'étoit l'air qui ly dépofoit. Cette idce peut être vraie pour les murailles aux pieds defquelles il y a des matières en putréfaction; mais il nen eft pas de même à l'égard des terres. Le nitre fe forme dans leur intérieur ainfi qu'à leur furface; il eft caché à nos yeux, & sil nous paroît plus abondant à la furface , on doit en attribuer la caufe au conta& de l'air qui occafionne fa criftallifation par l'évaporation de l'eau qui le tient en diflolution; il fe montre à nous fous la forme d’un Ce) Note des Commiffaires de l'Académie. L'air qui fe dégage des marières fécales en fermentation , eft de l'air inflammable qui brûle païfiblement quand il eft feul, & qui détonne avec bruit & avec fracas quand il eft mélé avec l'air ordinaire 3 mais cette obfervation ne prouve pas , comme l’Auteur le pré- tend, que les vapeurs nüreufes foient inflammables, M mi 276 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. duvet très-fin qui eft une vraie criftallifation de ce fel, dont les criftaux font d'une grofleur proportionnée à la quantité fur laquelle la Nature a opéré. L'obfervadon fuivante vient à l'appui de mon fentiment. J'ai eu occafion de faire crépir un mur dans une conr à cou- vert, à l'abri du foleil & de la pluie. Dans la vüe de faire un ouvrage de durée; je me fuis fervi de ciment non Javé de Diftillateur d’eau -forte ; ce ciment contenoit beaucoup de Salpêètre non décompofé, ce dont je me fuis affuré par lexpcrience. Au bout de cinq à fix mois, le Salpêtre contenu dans le ciment s’eft préfenté à fa furface fous la forme d'un duvet d’une extrême finefle ; j'ai enlevé ce Salpêtre avec la barbe d'une plume ; il a toujours reparu & reparoît encore, quoiqu'il y ait trois ans que cet enduit ait été fait. On obfervera qu'à côté de ce ciment il y a du mor- tier ordinaire, qui ne prefente point le même phénomène. Je conclus donc que les Auteurs qui ont avancé que le nitre eft contenu dans l'air, que ceux qui prétendent qu'il fe forme par la végétation & l’animalifation, que ceux qui croient à la A ne de l'acide vitriolique en acide ni- treux, fe font trompés dans la recherche de la vérité. Ces re n'étoient pas pénétrés des principes que le fublime Newton donne à l'Obfervateur de la Narure ; 1l indique fous trois règles les moyens de la découvrir: on peut faire une jufte application de la première à la queftion préfente. » Elle » enfeigne quil ne faut pas admettre plus de caufes qu'il » n'eft néceflaire, pour expliquer les phénomènes de la Na- » ture «. Autrement on rendroit la Nature moins fage que l'homme dans fes procédés; | a plus grande économie du temps, des forces & de la matière, avec la plus ç grande énergie dans l'effer , eft le chef-d'œuvre de nos opérations. Ces furet ont écarté la Nature de la route droite qu'elle a coutume de tenir; le maximum eft fa mefwe pour la grandeur des effets, comme le minimum eft fa mefure pour l'emploi des matériaux, du temps & du mouvement. Pénérré de certe doétrine, Je l'oppole à tout ce qui m'arréte, & cherche la MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE 277 Nature fous la plus grande fimplicite : ces détours qu'on lui prête, cadrent mal avec fon nom ; elle eft plus fimple dans fes opérations : fi un moyen: eft fuflifant dans un cas, pourquoi ne J'eftil pas dans un auue? & sil y en avoit un qui fùt meilleur .& plus court, pas ne l'auroic elle. pas em- ployé? I ne lui eft pas plus difficile de former de l'acide nitreux , de de l'acide vitriolique ; îls font l’un & autre com- poles des él émens; leurs proportions, les circonftances font la caule de la variété des produits que nous avons fous les yeux. Jai expolé ce fentiment dans mes Réponles aux Queftions de MM. les Régiffeurs. 278 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. CPERSANPEL LE RME NIUE Théorie fur la formation de l Acide nitreux. | LRO nitreux eft une fubftance faline qui a les élé- mens pour principes conftituans. Si le contaë fimple de ces élémens formoit des. compoles , ils feroient bientôt tous liés, ils perdroient par cette union leur jeu, leur reflort & leur liberte; ce ne-feroit plus des corps libres qui entre- tiennent par leur mouvement l'ordre de la Nature, mais des mafles privées des propriétés des élémens. Pour former cette combinaïfon des clemens , la Nature emploie des moyens parüculiers; c’étoit une néceflité intéreflante que ces combi- naifons ne s’opéraflent que par des moyens compliqués & dans une proportion égale à la décompofition. La végétation & l'ani- malifation font {es moyens pour former les premières com- binaïfons. La végétation eft celle qui les fair le plus parfai- tement, puilquelle fourni des fubftances parfaitement ani- malifes. Les élémens combinés ne jouiflent plus de leurs propriétés primitives ; il leur eft plus difficile de retourner à leur pre- mier état, que de former autant de nouvelles compofitions, & de pañler d’une fituation à une autre. De la deftrution d'un compofe, il en réfulre de nouveaux moins compoles que le premier; la décompofition des végétaux & des ani- maux produit l'acide nitreux, & cetre opération eft un pas qui tend à ramener les principes primitifs à leur première fimplicité. Si on précipite cette décompofition des végétaux ou des animaux par l'aétion du feu, & que par un appareil convenable on recueille leurs principes, on trouvera qu'ils font moins compofés que ces fubftances. Je penfe donc que l'acide nitreux n'eft pas un compofe direct des clémens ; qu'il faut, pour le former, l'union de fes principes faite d'abord dans un végétal ou un animal ; qu'il n’eft formé qu'après que MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 279 les principes qui compofent ces fubftances fe réuniflent dans une différente proportion, & que ce dérangement fe fait par la putréfaion de l’un ou de l'autre: Tant que la combinaïfon qui opère la formation de ces êtres à lieu, ils croiflent & augmentent; mais aufli-tôt que ces moyens ceflent, le même produit ne peut fe former ; elle travaille fur le champ à en donner d'autres avec les mêmes matières, ne sétant pas bornée à former le pre- micr. C’eft dans ce nouveau travail que la Nature forme l'acide nitreux; on ne le trouve qu'après cette opération que nous appelons putréfaétion. Quoique cette opération fe fafle, fous nos yeux , nous ne pouvons fuivre la Nature pied à pied, par la raïfon que J'ai dejà donnée, ceft-à-dire, par l'igno- rance abfolue où nous fommes fur les materiaux qu'elle em- ploie. Nous pouvons dire feulement, que les produits de la feconde opération doivent leur exiftence à l'union des prin- cipes du premier ; que dans cette feconde , ils ont pris un nouvel arrangement, ils fe font combinés dans une propor= tion différente , relativement à ce qu'ils étoient dans le vé- gctal & l'animal. On voit par ce raïfonnement, que la for mation de l'acide nitreux eft une fuite naturelle des travaux de la Nature , & eft aufli infaillible que la première de ces combinaifons. 280 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, C'EAR PETROLE ICT Sentiment de l'Auteur fur la décompoficion de l Acide nitreux, par M: Lavoifier. vies les fois qu'on voudra procéder à la fabrication d'une fubftance , on fera d'autant plus afluré d’y parvenir , qu'on aüta une connoïflance plus parfaite des principes qui la compolent, de leur nombre & de leur proportion : ces lumières ne peuvent sacquérir qu'en défuniffanc les principes confticuans de la fubftance qu'on veut examiner, & en les re- combinant pour rétablir la fubftance décompolfée ; ce qui eft la preuve de la juftefle de lopération. Dans le travail du nitre, Je compofe le plus intéreflant eft fon acide; fi on connoïfloit bien exaéteiment fes principes conftituans , leurs pioportions & la manière de les unir, ce feroit une décou- verte qui nous donnetoit les moyens de le fabriquer. On eft encore bien éloigné de ce point; l'acide nitreux eft un prin- cipe du fecond ordre , & nous fommes bornés à ne décom- poler que ceux du troifième. M: Lavoifier donne. la decompofition & la recompofition de l'acide nicreux. Je fuis bien éloigné de regarder les dif férens états dans lefquels M. Lavoifier à obtenu l'acide nitreux , comme la féparation de fes principes conftituans ; je penfe que cet air nitreux, ce gaz claftique que M: Lavoïfier na pu altérer , eft l'acide nitreux luir-même.,: & qu'il a fait connoître aux Chimiftes cet état fous lequel l'aëide nitreux pouvoit exifter; ce qu'ils ne connoifloient pointencore |*); que Pair pur que M. Lavoifier a feparé de cé gaz élaftiqué, n'eft point puncipe conftituant du compofe, quil eft feulement une fubftance propre à le faire jouir des propriétés que nous lui (*) Note des Commifuires. C'eft M. Prieftley qui a fait connoitre le premier l'air nitreux aux Savans. conno.ffons ; MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALDÈTRE, 281 connoiflons; que cet air pur eft à l'acide nitreux, ce que l'eau de criftallifation eft aux fels; quil eft l'intermède né- ceflaire pour unir à l'acide nitreux le prinape aqueux, fans lequel il ne peut exercer fon aétion fur les corps qu'il a cou- tume de difloudre : c'eft, à bien confidérer, mettre l'acide nitreux fous l'état de ficcité. L'opération de M. Lavoifier m'autorife à penfer que l'acide nitreux eft très-peu compolfe; que l'air & le feu font les principes qui entrent en grande partie dans fa compofition ; que ces principes font unis au moyen d'une terre très fub- tile, ce qu'on ne peut révoquer en doute, & qu'on peut douter de la préfence de l'eau. L'air nitreux reprend fes propriétés avec l'air de l’atmof- phère, malgré limpureté de cet air; il eft en cela fem- blable aux fels qui criftallifent dans l’eau impure, & qui n'ad- mettent dans leurs criftaux que de l'eau pure. Quoique M. Lavoifier, fuivant mon fentiment, n'ait opéré aucune décom- pofition à la combinaïfon primitive de l'acide nitreux, on lui fera toujours redevable des connoiflances que cette opération nous donne fur cette matière: je défefpère cependant qu'elles puiflent nous conduire à enlever à la Nature le foin de fa fabrication , tant que nous n’aurons pas d’autres connoiflances des matières premières qu’elle emploie. N n 282 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. CET PAPIER TRUE AA Réflexions de l Auteur fur la Queflion propofte. Le moment qui doit bannir l'ignorance des ateliers à Sal- pète, & qui doit débarrafler les Particuliers des incom- modités que caufe la manière aétuelle de le récolter, eft enfinarrivé ; fans doute les Savans provoqués à en découvrir les moyens , feront des découvertes qui mettront la France en état de furpañler fes voifins dans cet Art. Il s'agit d’aug- menter la! récolte. des Salpétres, & de difpenfer de la fille les, habitations des Particuliers ; c'eft préfenter d’un mot toute la difficulté de la folution; les moyens font connus en partie, il ne refte qu'à en faire une jufte application. Les habitations font de vraies nitrières ; fi on les aban— donne , il faut en conftruire d’autres. La façon la plus éce- nomique. de faire ces établiflemens, eft mon point de vue, plurôt que l'efpérance de faire la découverte d’un procédé au moyen duquel on feroit l'acide nitreux à volonté. Je fuis plus sûr. d'arriver à mon but par la voie que je prends, que par toute autre. On connoït les circonftances qui peuvent nuire ou fayo- rifer la formation de ce fel; il faut les faire concourir le plus avantageufement. Les hangars ou nitrières font les feuls moyens qui peuvent remplacer ceux qu'on abandonne. Si on eft obligé de tirer de ces fabriques tout le Salpêtre néceflaire à la France, il faudra des fommes immenfes pour faire ces établiffemens, & l'Etat ne pourroit fournir des fonds afflez confidérables pour un travail aufli étendu. Je ne défefpère pas qu'il ne fe trouve des fujets zélés qui élève- ront pour leur compte quelques-unes de ces fabriques; mais je ne crois pas que le nombre puifle en être aflez grand, pour fournir une quantité de Salpêtre égale à celle qu'on recueille ; il y a trop peu de fujets aflez inftruits; ceux qui MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 283 en ont les moyens, n'auront point aflez de confiance pour une partie qu'ils ne connoïflent pas, dont le nom eflraye en ce qu'elle tient à la Chimie. ÉcR cependant en fuppofant la pofhibilité des établiffemens particuliers, que j'indique le parti qu'on doit prendre pour furmonter toutes difficultés; J'adopte les nitrières artificielles pour les grandes villes, & Jen conftruis d’autres dans les campagnes , qui feront infini- ment plus profitables, fans couter autant que ces premières. Je laifle fubfifter la lixiviation des plâtras de démolition, comme une fource avantageufe de Salpètre. Nni 284 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. CFA RETIRE EP Plan de hangars pour les villes qui pourront fournir les matières néceffaires à ces établiffemens. Pi. de la ville, d’une fontaine, d’un ruifleau ou d’une rivière , On fera choix d'un terrein qui foit à l'abri de toute inondation, foit.par la crue des eaux, foit par la chute de celles de quelques montagnes voifines, ou par quelques fources cachées. De quelque nature que foit le fol de ce terrem, il pourra convenir , pourvu quil ne foit pas un roc pur. On pourroit trouver dans les fofles des villes de guerre, de tres-beaux emplacemens qui ne couteroient rien au Roi, fi on failoit ces ctablifiemens à fon compte. On conftruira le hangar de telle grandeur & largeur qu'on voudra, fuivant la nature des bois qu'on aura à fa difpofition. Ceux qui n'ont pas de fapins , ne pourront pas donner autant de largeur que ceux qui en ont, par la difficulté de trouver des pièces de bois aflez longues pour les tirans; ils pourroient cependant les faire de deux pièces. Je vais donner pour exemple un hangar de cent cinq pieds de long, fur cinquante de large. On le tournera de manière qu’une de fes grandes faces foit expofce au nord ; on le fermera fur toutes fes faces avec de la paille ; on pofera la charpente fur des colonnes & des dés, on le couvrira en pailles; & du côté du nord, ainfi qu'au midi, on ménagera des ouvertures qui feront fermées par des vo- lets garnis de liteaux recouverts l'un fur l’autre , de manière à intercepter le paflage des rayons du foleil fans empêcher le paflage de l'air; ces volets, qu'on appelle perfiennes , fe- ront garnis d’un paillaflon qu'on pourra baifler & appliquer deflus au befoin ; ils feront diftribués de douze en douze pieds dans la longueur. Le hangar conftruit de la forte , on défoncera le terrein de deux pieds de profondeur ; fi la terre eft grafle & ar- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPETRE. 285$ gileufe, on la rendra folide avec la batte ; fi elle eft légère & fableufe, on en couvrira la furface de quatre à cinq pouces d'argile; on fera dans le centre du hangar une porte aflez large pour qu'un tombereau puifle y pafler & y dépofer les terres à couvert; on amènera les terres falpétrces des villes, granges & habitations à portée de ces hangars ; on fera choix des plus riches & des plus convenables, ce qui fera très- aile à reconnoître au caractère fuivant : les moins argileufes , les moins fableufes, les plus meubles & les plus noires, faïfant effervefcence avec les acides, & s’y diflolvant prefque compie- tement. On comblera avec cette terre l'excavation faite fous le hangar; on la mêlera en la mettanten place avec toutes fortes de matières fufceptibles de putréfaétion , comme pailles , grands fumiers, feuilles d'arbres, urines, fangs de boucherie, matières folides provenantes du fond des tofles d’aifance; on pourra ajouter à cesterres, de la chaux qu'on trouvera dans les endroits que j'indiquerai. Cette terreainf difpofe, fera le fol des couches. Il feroit très-avantageux , avant toute autre préparation , de conftruire à un bout du hangar un baflin de quatre pieds de profondeur, fur vingt-quatre pieds de long & douze de large; on divifera cet efpace en deux parties par une fcpa- ration que l'on fera en travers pat le milieu; on formera ce baflin avec des briques bien cimentées , en état de tenir l'eau ; on emplira d’abord un de ces baflinis des matieres que j'in- diquerai à fon article, après quoi on travaillera à remplir Pautre ; on mélera à la terre dont on veut former les cou- ches, une partie des matières du baflin fur trois de terres. On fera par petires parties le mélange le plus exaét ; on atrofera les terres jufqu'à ce qu'elles aient une humidité qui la rende fufceptible d'impreflion; deux Ouvriers feront ce mélange à la pelle, & le mettront dans la place où ils doi- vent former la couche; ils traceront fur le fol, & fuivanc la largeur du hangar, deux lignes droites diftantes de fix pieds, à l'exception de quatre pieds qu'ils ménageront à chaque bout, (C'eft une très-grande économie de n'employer dans ces travaux que des pelles de fer acérées & battues, minces & 286 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. égales). Ils placeront enfuite le long des deux lignes droites ci-deflus, deux rangs de pièces de terre cuite, femblables aux faîtières que l'on pofe fur le haut des toits en tuiles, avec cette différence qu'on les fera plus hautes & percces . d'un grand nombre de trous. L'on pourra faire fabriquer ces pièces dans les tuileries ; elles ont ordinairement un pied de long ; on les commandera de manière qu’elles laiflent huit pouces de vide en deflous; on placera deux rangs de ces pièces fur le fol de la couche dans le milieu, en laïflant entre les deux huit pouces de diftance ; on rangera ces pièces bout à bout fans les joindre bien exactement ; on élèvera la couche fur ces pièces, en y mélant de la paille ou grand fumier ; on lui donnera la hauteur de quatre pieds, en la terminant en pointe. On établira une feconde couche fem- blable à côté de cette première, en laïflant entre les deux un efpace d'un pied; on continuera à conftruire ces cou- ches jufqu'à ce que le hangar en foit entièrement rempli; il en pourra contenir environ quinze. On mettra dans le haut des cowchés, en les conftruifant , des pots de terre cuié de figure cylindrique , percés d’un grand nombre de trous, fur quatre pouces de diamètre & deux pieds de hauteur, à moins qu'on ne préfère de fubftituer à ces pots de petites caïfles en chène de quatre pouces en carre , percées par les «côtes de quanüté de trous, & qui feront fermées par le fond. On placera ces pots ou caifles de quatre en quatre pieds de diftance l’un de l'autre (*). Je fais garnir d'argile le fond du hangar, pour mé- nager dans les terres la fubftance qui doit produire l'acide nitreux par la putrétaétion, & qui pourroit s'échapper fi le fol en étoit trop fableux. Je forme un premier lit de deux pieds de terres à Salpètre, afin que, placées fous les cou- \ ches , elles foient abreuvées des matières propres à les fer- (+) MM. les Réoiffleurs des Poudres & Salpêtres viennent de donner des inf- eruétions fur l'établiflement des nitrières : on trouvera dans cet Ouvrage beau- coup de chofes qui font dans ces inftruétions ; il en eft auffi que je n'ai point admis , ce que j'obferverai MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 287 tilifer; jaugmente par ce moyen le produit du hangar, fans en multiplier la dépenfe ; je laïfle des ouvertures du côte du midi & du côté du nord, pour fervir au befoin. Lorfque la température fera depuis quatre ou cinq dégrés jufqu’a huit au deflus de laglace, on ouvrira les paillaflons appliquésfur les volets du côté du midi; & lorfque le thermomètre fera au deflus de cette température, on couvrira au contraire les volets du midi de leurs païllaflons, & on découvrira ceux du nord; lorfqu'on fera à une température à la glace ou au deflous , on fermera la nitrière de toutes parts. Je ne donne de l'air que d’un cott, pour éviter le trop grand defsèchement des couches qui s'oppoferoit à la purréfac- tion ; il fufht que l'air ne foit pas ftagnant, & qu'il puifle, en: fe renouvelant, emporter les vapeurs qui s’échappent des ma- ücres en putréfaction , que la Nature rejette comme inutiles. Je fais mettre des pieces en terre cuite percées de toutes paris, de préférence aux claies , par leurs plus longue durée & leur moindre valeur : ces pièces coutent à la tuilerie quinze: livres le cent. Les claies de MM. les Régifleurs ne pourront: réfifter deux années dans les terres, fans fe pourrir & fe rom- pre, ce qui caufera la deftruétion & le defordre de la cou-- che. Je fais mettre deux rangs de ces pièces, pour que l'air nait que deux pieds de terres à pénétrer de routes parts ; ceft à ce deflein que je ne donne que quatre pieds aux couches. Quoique la putréfaétion des matières animales puiffe- fe faire fans chaleur fenfible , les couches contenant beau- coup de matières végétales qui donnent de la chaleur dans: leur putréfaétion, j'adopte les pots pour les arrofemens inté-. rieurs de la couche, à la manière de M. le Ray de Chau-- mont; je leur Ôte feulement un défaut que je crois eflen- uel, c'eft de faire filtrer à travers la terre cuite l'urine ou l'égout de fumier dont on veut arrofer les couches. Il ef bien important d'introduire dans leur fein la matière fufcep- ble de putréfaétion que ces liqueurs contiennent, ce qui ne: peut arriver en les faïfant pañler à travers de la terre cuite; il ne filre qu'une eau claire chargée des fubftances falines. 288 MÉMOIRES SUR LA FORMATION Du SALPÊTRE. qui font en diflolution , & il refte dans les pots la fubftance favonneufe extrattive , fi néceflaire à porter le principe de putréfattion dans le centre des terres. C’eft d’après ces ré- flexions que je donne la préférence aux pots percés d'une grande quantité de trous : je les fais crès-ctroits pour qu'ils puiflenc porter l'humidité de toute leur hauteur dans la couche, fans l'inonder. l Je rejette l’arrofoir de MM. les Régifleurs ; les avantages qu'il peur procurer pour les arrofemens , ne dédommagent pas de fes frais de conftruétion, & de l’efpace qu'on eft obigé de perdre dans la nitrière pour le manier commodément. On trouvera à l'article des arrofages une manière plus avan- tageufe & moins incormode. Je fais conftruire des bafins, pour les remplir à l'avance des matières qui doivent fertilifer les terres. Lorfque je con- fidère le mécanifme de la putréfaétion , je trouve que c'eft une forte de fublimation des principes qui incommodent la Na- ture dans fon travail. S'il en eft de cette fublimation comme de quelques autres que je connois , qui s’opèrent d’autant plus promptement que le col du vaifleau dans lequel elles fe font, eft plus court, on doit s'attacher à expofer au con- taét de l'air, autant qu'on le pourra, la matière qu'on veut faire putréfier : ce font ces réflexions qui me font regarder comme mauvailes les citernes que confeillent les Auteurs dont on trouve les Ouvrages dans la Collcétion Académique. Mes deux baflins font des carrés de quatre pieds de pro- fondeur , fur douze de toutes autres faces : en les conftrui- fant , on élèvera les deux bouts, pour donner une pente qui fafle réunir les eaux de ces baflins dans un peut que l'on pratiquera à côté & au centre des deux grands; on ména- gera une ouverture dans l'angle de chacun des grands bañlins , afin que les liqueurs puiflent pañler dans le petit. VAR EAST CHAPITRE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 289 CTEAIPASPOMET RUE" VTT. Ænumération des matières que l’ Auteur emploie dans la nitricres ; des moyens de fe les procurer, & de leur em- ploi. Ox trouve dans les Ouvrages des Auteurs que l'Acae démie a recueillis, lénumération de toutes les matières pro pres à produire du Salpètre ; ils fe font tellement étendus fur ce fujec, qu'il eft difficile de rien dire de neuf. Malgré cette ample Collection , ils n'ont pas défigné le choix qu'on doit en faire. Je rejette le mélange de toutes fubftances fa- lines, comme inutiles. La plupart propolent des matières, bonnes à la vérité, mais leur valeur eft un obftacle à leur emploi; telle eft la terre de couche qui vaut ici fix fous le pied cube : on en peut dire autant d'autres matières égale- ment bonnes, mais quon ne peut fe procurer aflez abon- damment par leur trop grande raretc; telle eft la fente de pigeons. Peut-on, en établiflant des travaux aufli en grands que ceux dont il s’agit, compter fur des matières aufli peu abondantes ? Ces Auteurs n’ont point en vue l'économie & l'abondance, qui font les deux points eflentiels. Les matières qui fervent d'engrais à l'agriculture , ne peuvent pas non plus être em ployées dans les nitrières avec profit, par rapport à leur valeur. Le nombre de celles dont j'ai fait choix eft très- petit, & l'on peut sen procurer facilement & à wès-bas prix ; en voici l'énumération : j SAV. OBEIRS 1.° Les urines. 2.9 Le fang des boucheries, 3° Les boues des rues, 4° La chaux des Taneurs & Mégifiers: d © Del Urine, 290 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 5. La matière folide qui fe trouve au fond des fofles d’aifances, & qui fe coupe à la pelle. 6.% Du grand fumier de cheval, de moutons & de chèvres. 7.9 Les terres falpêtrées des habitations , & à leur défaut, celles qu'on doit choifir; elles feront défignées ci-après. Je comprends dans les frais annuels de la nitrière, unhomme & un cheval. L'occupation de ce Domeftique fera d'aller chercher les matières ; il aura fur un petit chariot, un tonneau de la contenance d’environ un muid , pour aller chercher les urines. Il fera très-facile dans une ville de guerre de fe les procurer ; fi la garnifon eft logée dans des cafernes, il y a déjà derrière ces bâtimens des cuviers places de diftance en diftance pour les recevoir. Je vois avec regret verfer & perdre cette matière ; c'eft une corvée pour le Soldat que cette opération , dont il feroit difpenfé. On pourroit en procurer une grande abondance, en obligeantle Soldat de les porter foigneufement dans ces cuviers. Dans les villes où l'on na pas cette reflource , on pourra les tirer des hôpitaux , maïfons de force, collèges, com- munautés, corps- de-gardes, auberges , enfin de cous les lieux où il s'aflemble beaucoup de monde. La facilité de fe procurer cette matière fans dépenfe , eft le moindre de fes avantages; elle contient beaucoup de ma- üères favonneufes extraétives de nature animale, & fufcep- tibles de putréfaétion. La propriété qu'elle a de fe difloudre & de s'étendre dans l'éau, facilite les moyens de la diftribuer uniformément dans les terres; elle peur accélérer par fa pu- tréfation celle desmatières qu'elle arrofe : on peut dire qu'elle met l'ouvrage en train; fi les fels qu'elle contient pouvoient être décompofés par l'acide nitreux il y trouveroit fa bale ; tel eft le fel phofphorique à bafe d’alkali végétal. Ses autres proprictés dédommagent bien de cette petite perte. Je ne reproche à l'urine qu'un feul. défaut ; c’eft de contenir: trop de fel marin ; il eft en fi grande quantité dans les verres arrofées d’urines. humaines ; qu'il embarrafle dans l'extraction MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 291 du Salpètre ; c’eft pourquoi je préfère d'employer moitié urine & moitié fang. De tous les débris des boucheries, il n'eneft pas qui ne puifle être d’une grande utilité dans une nitrière; mais je préfère le fang, parce que cette matière n'a aucune valeurt il eft vrai qu'elle en acquerroit bientôt une, fi elle ctoit re- cherchée. Mais une Ordonnance de Police qui obligeroit les Bouchers à le mettre à part, en leur payant quelque chofe pour les dédommager de leurs peines, préviendroit cet abus. Le caillé du fang qui fe fépare de la partie fereufe après fa decompofition , rend beaucoup d'huile animale & d’alkali volatil dans fon analyle ; ce qui prouve que c'eft une fubi- tance animalifée , & crès-propre à la nitrification des terres. J'avois quelque répugnance à employer la boue des rues; je confidérois que ce n'étoit qu'un réfidu échappé à l'adion diflolvante des pluies & de l'air; que cétoit une terre pro- venant du pavé des rues, réduit en une poudre impalpable; que dans les pays où l'on emploie des pierres vitrifiables pour paver , cette efpèce de terre conviendroit peu; que dans les pays où les pierres des pavés font de nature calcaire, leur divifion eft plutôt une divifion mécanique que chimique, qui convient moins que cette dernière. C’eft en confidérant que c’eft un amas de toutes fortes d'ordures, foit par les débris de cuiïfines, de marchés, de jardinages, que je me fuis décidé à en faire ufage. Les boues des rues appartiennent aux Magiftrats des villes ; 1l y a des En- trepreneurs qui font chargés de les enlever ; on peut les obli- ger à les conduire au hangar, en leur payant une fomme, qui, jointe à ce que leur donne le Magiftrat pour les en- lever, feroient enfemble la valeur de certe matière. L'élément terreux eft le principe conftituant des fubftances falines ; mais il faut qu'il foic combiné avec les autres prin- cipes : cette combinaïfon fe trouve faite dans la pierre cal- caire ; l'a&ion du feu la réduit en chaux; cette opération forme en elle une combinaifon dont il réfulte une forte de fubftance faline. C’eft en combinant, le plus pofible, le principe inflammable dans la chaux, qu'on rend cetre © oi Du Sang. Des Boues des rues. Dela Chaux. De la nra- tière folide des folles d'arfance. 292 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, fubftance faline plus parfaite, & qu'on la convertit en alkali. Je ne crois pas quil puifle réfulter un acide de cette combinaifon; mais je penfe que la chaux peut rrouver dans le fein des mauères en putréfattion, le phlosiftique nécef- faire pour arriver en partie à l'érar de parfait alkali. Quand même ce phénomène n'arriveroit point, fa divifion extrême, lafinié que l'acide nitreux a avec elle, doi engager à l'em- loyer dans les nitrières, ne für-ce que d’après la propriété qu’elle a d’accélérer la putréfaétion des matières. Sa valeur met un obftacle à fon emploi ; elle vaut à Be- fançon douze livres la voiture; mais voici le moyen de s’en procurer à peu de frais. Les Tanneurs & les Mégifiers onc des fofles pleines de chaux, dont ils fe fervent pour leurs tra- vaux ; auflitôt qu'une partie de fon aétion eft épuifce, ils la jettent à la rivière ; elle n’a pas toute l'aétivite de la chaux vive, mais elle eft aufli bonne qu'elle peut l'être pour la fabrication du Salpètre; elle a féjourné avec des matières animales, comme elle auroit fait dans le baflin. Quoique les Tanneurs & les Mégifliers de certe ville ne foient pas en grand nombre , ils en confomment environ cent voitures par an. J'ai parlé à tous ces Artftes, ils m'ont dit qu'ils don- neroient cette matière avec plaifir, pourvu qu'on prit la peine de lenlever. À lacherer direétement, ces cent voitures cou- teroient douze cents livres à l'Entrepreneur, & elles ne lui coureront que ce qu'il voudra bien donner aux Ouvriers de da tannerie. C'eft en accumulant cette matière, qu’on pourra augmenter les terres du hangar, pour en former de nou- veaux ; cetre terre cft préférable à toute autre terre calcaire. La matière fécale humaine ef fort propre à la produ&tion du Salpétre ; elle rend de l'alkali volatil dans fon analyfe ; fa putrefaétion cft longue, ce qui doit rebuter de l'employer récente. Dans ke fond des fofles d’aifance qu'on ne vide que rarement, on trouve une matière dure & ferme, qui fe coupe à la pelle ; je la trouve dans cer état préfé- table à cie qui na point cette folidité; fa décompofi- tion faite en pattie, la met en état de donner plus promp- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 293 tement le produit qui doit en être le réfultat. L'action de Fair libre achève cette décompofition , ce qui ne pouvoit avoir lieu lorfqw'elle étoit couverte du liquide qui la furnage dans la fofle. J'en aï leflivé au fortir de la fofle, qui ne m'a poinr donné de Salpétre; j'en aï diftillé à la cornue, & j'en ai tiré de l'huile & de l’alkahi volatil. Comme ces idées ne me font venues que fucceflivement, je n'ai pu voir le réfultat de ces différens mélanges, n’y ayant point encore aflez de temps qu'ils font expofes. Les Labou- reurs viennent chercher cette matière pour engrais ; ils payent aux Vidangeurs vingc fous la voiture attelée de deux chevaux: on pourra sen procurer aux mêmes conditions. Le concours des matières végétales étant très-avanrageux dans la fabrication du Salpèrre, foit en le formant direétement, foïit en entretenant la putréfaétion dans les teries, foit en les rendant plus meubles, & en procurant à l'air plus d'acces, on fe procurera de la paille qui ait fervi de litière aux ani- maux; je la préfère à la paille neuve, en ce qu'elle eft moins chère, & qu'elle eft imprégnée de leurs urines. Si on ne peut s'en procurer en aflez grande quantité, on prendra de la paille neuve. Si dans les environs du hangar il y a des terreins incultes qui contiennent des plantes , comme bruyère & autres herbes inutiles, on pourra en faire une provifñon dans la faifon d'automne. C'eft fur-toutau choix des terres quedoivent préfider desgens inftruics, Les terres calcaires quelconques peuvent fervir dans les pitrières. Si on ne peut fe procurer affez de terres falpétrées , on fera forcé d'en prendre de neuves. Jai vu par expérience combien leur rapport eft tardif; ce qui me détermine à don- ner la préférence aux terres déjà falpêtrées. Sion eft forcé de prendre des terres neuves, on fera choix de celles qui fe trouvent fous le gazon des prés, des déferts, des endroits incultes. Cette terre eft de couleur brune ou noire; elle doit à la végétation & à la putréfaétions des ma- tières qui périflent à fa furface , la différence qui la diftingue d'avec celle qui eft plus bafle. De la paille ou grand fu- mier, Du chois des terres. 294 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. L'urine & le fang font des matières qui contiennent beau- coup d'eau ; je défirois qu'elles fuflent plus rapprochces lorf- qu'on les emploie. La première reflource que l'imagination me préfenta, fut l'évaporation fur le feu ; mais cet expédient eft difpendieux. Je me fuis décidé à la faire au moyen de l'air; ce qui sexécutera très-bien dans le baflin. Comme les matières que je viens d'indiquer y feront mélan- ges , je confeille de les mettre à peu prèsdans les proportions ci-deflus. Boues des rues; 2 parties. Mauières foïdes des fofles d’aifance ; 2 Chaux de Tanneurs ou Mégifliers ; I Plantes récentes, débris de jardins, autant que l’on pourra s'en procurer ; urines & fangs, partie égale , & autant quil en faudra pour arrofer le mélange & les terres. Si les circonftances locales ne permettent pas de fe pro- curer les matières ci-deflus énoncées, on pourra avoir recours aux fumiers de routes efpèces, aux animaux péris, & autres immondices. Ces matières dépofées dans les baflins, réuniront tous les avantages qu'on peut défirer ; la concentration des liquides qui ferviront pour les arrofemens , fuppléera aux égouts de fumier qu'on ne pourroit fe procurer aflez abondamment. La putréfaétion des autres matières , qui fe trouvera déjà avancée lorfqu'on les mélera aux terres, gagnera du temps : enfin, la divifion du baflin en deux parties, permettra d'avoir tou- jours, & fans perte de temps, des matières en pleine putréfac- tion. La paille & le grand fumier feront inis à part, pour n'être employés qu'à la conftrudion des couches. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPETRE. 295$ CERTA PUT ESRCE ENT: Manière d’arrofer les couches. Ox connoïîtra que les couches ont befoin d’être arrofées, lorfque la terre deviendra sèche & fe mettra en poudre; on pourra s'aflurer de leur état dans l'intérieur, au moyen d’une petite fonde -qui ira chercher la terre du centre fans déranger la couche. Deux Ouvriers rempliront une tine du liquide du petit réfervoir; ils la porteront à la tête des couches; ils la diviferont enfuite en deux baquets qu'ils porteront entre les couches ; pour remplir les pots, ils puiferont avec un baflin emmanché dans leurs baquets, & en verferont une aflez grande quantité pour remplir les pots d’une feule fois ; lorf- que tous les pots feront remplis, ils arroferont la furface de la couche avec un arrofoir de jardin. Ils auront attention de ne point trop arrofer. Je fais remplir fubitement les pots, pour que la liqueur puifle fe diftribuer généralement dans la couche par les trous qui y feront pratiqués. Comme les cou- ches ne manqueront point de fe ferrer à leur furface par les arrofages, on les labourera lécèrement avec un outil que les Jardiniers appellent traçoir. Quoique mes couches aient peu d’épaifleur, j'exige que le fond en foit arrofé par les ouvertures qui fe trouvent deflous, non feulement pour entretenir l'humidité dans la couche, mais encore pour remplir le même objet à l'égard des terres qui font deflous. MM. les Régifleurs des poudres donnent dans leur inftruétion la forme d'un inftrument pour les arrofages; J'ai déjà dit que je le rejetois, en ce qu'il falloit trop facri- fier de place dans la nitrière pour en fane ufage: d'ailleurs il narrofe les terres que par flots. Voici le moyen que j'em- ploic, & que je préfère au leur. On aura une petite pompe foulante, telle qu'on en voit qui font fabriquées en bois, & qui ne coutent que douze à 296 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. quinze livres. On ajuftera à la fortie de cette pompe un tuyau de cuir pañle au fuif, femblable à ceux dont on fe fert dans les incendies, & auquel on donnera vingt-cinq pieds de longueur ; on adaptera au bout de ce cuir une pièce ronde & creufe en fer-blanc, percée comme un goupillon; on arréréra cette pièce au bout d’un bâton de quatre pieds de long; on mettra à l'extrémité de ce bâton une roulette aflez large pour qu'elle puifle fe foutenir d'elle-même fans fe ren- verfer; on introduira ce corps & ce bâton dans la cavité de la couche ; on ajuftera au bout de ce premier bâton , au moyen d’une boîte en fer du même cahbre, un fecond bà- ton de méme longueur, & on en ajuftera ainfi jufqua ce qu'il y en ait vingt pieds d'inroduits fous la couche. Ce petit appareil ainfi difpofe, on fera mouvoir la pompe en retirant le corps infenfiblement, & démontant les bârons à mefure qu'ils fe préfenceront. Comme lexperience m'a démontré qu'il y avoit un très- grand avantage à mettre beaucoup d'intervalle entre les lefli- vages des terres, il n’y aura nul inconvénient à les arrofer de la forte deux années avec les matières les plus rappro- chées & les plus chargées ; la troifième année, on alongera ha liqueur prife au baflin avec un volume égal d’eau pure; enfin on difcontinuera les arrofages quatre à cinq mois avant la lixiviation; c'eft pendant ce repos que s’achèvera la putré- faction. Pour faire un établiflement (*) tel que je le propofe, on prendra les mefures que je vais indiquer. Sil fe préfente quelque Particulier zélé, on lui accordera le priviléce de faire enlever les terres falpétrées des habita- tions une fois feulement, & le droit de ramañler les urines & les autres matières, ainfi que je l'ai indiqué. Il commencera par conftruire {es baflins, qu'il couvrira ; il les remplira des A ———————————_]_—————. () L’Erat devroit faire un érabliffement dans une des villes principales de chaque provinces, pour expofer un modèle fous les yeux des Particuliers qui pourroient fpéculer {ur cer objer, matières ; MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 297 matières; il conftruira enfuite deux hangats comme je l'ai in- diqué, ou fur telle proportion qu'il jugera à propos; il amè- nera les terres falpétrées fous un de fes hangars, pour les garnir & y établir fes couches; ce qui pourra bien employer une campagne : il veillera au foin de fes terres, en conftruifant de même l’année d’enfuite le fecond hangar; il en établira encore deux en prenant les mêmes précautions, & lorfque le quatrième fera fini, il procédera à Ja lixiviation des terres du premier, qui fe trouveront avoir trois ans de repos. II cmploiera une campagne à lefliver les terres de ce hangar, & à les remettre en place. L'année d'enfuite, il leflivera celles du fecond, & ainfi de fuite pour le troifième & le qua- ième; par ce moyen, il aura chaque année un hangar à leffiver, donc les terres auront trois ans de repos. Comme les frais de conftruétion donnés par MM. les Rc- gifleurs ne fe rapportent point avec ceux que J'ai calculés, & que je ne voudrois pas induire en erreur , je vais entrer ici dans quelques détails ; ils font relatifs à la province que j'ha- bite, la Franche-Comté. Pour couvrir un hangar en paille, on peut placer les fer- mes à quinze pieds lune de lautre; huit fermes à cette diftance donneront cent cinq pieds ; les fermes, le chevron- nage & les autres pièces de charpente, grofleur réduite, don- neront onze cent quatre-vingt-fix pieds cubes de bois, qui couteront en fapins quinze fols le pied, & feront la fomme de, ci Re dense re 1 pe Mel e 889! Lof:»d- Cent une toifes de couverture en paille , en y comprenantles côtés, à raïfon de neuf livres (role Monts che RS rer 909 » #» Portest\& voletsétci ie eue L [100 » >» Pour dix-huit mille pieds de terres falpé- trécsMenn 2: ll L L ge: 800 » » Terres cuites en place de claies , à qua- tre-vingts par couche, avec les pots ou peutes caifles en bois, à raifon de quinze 298 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 26981 1of nf livres par couche, font pour les quinze couches que pourra contenir chaque han- gar, Gi . s 22S im Te Pour les Colbibes de hangar & Le dés fur lefquels elles poferont, ci. . - . 100 » » 3023 10 » DIRE CRT ESS Pour trois femblables , ci . . . . 9070 10 » Et pour les quatre, ci: . : .'. ‘12094 » = Une écurie & deux chambres qu'on pourra placer entre deux fermes en conf- TrUHANLS CIN 20e : , j 200 ? #» Un atelier pour fier : Serre fout neau, mays en bois, & autres uftenfiles : 500 » » Wnachéyal ce MA eut 150 » » Un tombereau & un petit chariot, ù 100 » » Les baflins & leurs couvertures, . . 500 » » 13544 ®? » PrRoDuIT ANNUEL. Treize mille cinq cents livres de Salpêtre à dix fols, retenue faite des quatre pour cent en le livrant, font la fomme de & IN CASIO) 7NMS DÉPENSE ANNUELLE. Intérêts des treize mille cinq cent qua- rante quatre livres à cinq pour cent, forment une lomMENGE NME AU 677 4 » Pour quarante cordes de bois à qua toize, livres, GA SEA A NE ie 560 » » MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 299 12374 4 »d Genarestec potaflésner 0e tn, 500 » » Grand fumier ou paille, quatre milliers Aidix livres cl AMEN, 40 » Hoycnidu-terrani ete tion TUE © 60 » » Nourriture/dus cheval 4 na 25oh œil Gages d'un Domeftique & deux Our vriers, à trente livres par mois chacun, &. POUCE LUN AE PRE Net NE [080 %» n Cinquante voitures de matières folides de fofles d’aifance , à vingt fols, ci . . SO On» » Pour la boue des rues, cent voitures aAdicelols1.cis : ROUE PRE ER, jo » » Chaux des Tanneurs & Mégifiers, fomme arbitraire; "onu MUR AO 24 in 9 Entretien des uftenfiles & du cheval, 100 » n» OrALIMEN her IT RE 3491 4 » RÉCAPITULATION. \ Produit ammuelmonte à 40e, ÆMT A Eégoo nm: 18 Etidépentt annuelles Re NS oO Partant, bénéfice, intérêts compris . . 2999 3 8 Pour m'aflurer du rapport des terres, j'en ai leffivé une grande quantité prife dans différens endroits de la province; dans chaque expérience j'ai leffivé quatre pieds cubes de terres falpétrées , prifes depuis leur furface juiqu'à deux pieds de profondeur , lorfque la nature du fol l'a permis. Ë ‘ PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Quatre pieds cubes de terre prife dans une écurie de moutons, ayant trois ans de repos , leflivés fans addition, P pi 300 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. décompofition faite des fels à bafe terreufe par un alkali avant de procéder à la criftallifation, & purgés de fel marin, m'ont rendu deux livres neuf onces de très-bon Salpêtre brut. Pour éviter les répétitions, j’obferve que les expériencés fuivantes font faites avec les mêmes attentions que cette pre mière. SECONDE EXPÉRIENCE. Terre d'écurie de moutons, deux livres quatre onces. TROISIÈME ExPÉRIENCE. Terre d’écurie de moutons qui n'avoit point été leffivée, n'étant point comprife dans l'arrondiflement des Salpêtriers, pour m'aflurer de fa richefle ; m'a rendu trois livres fept onces. Ces terres contenoient moins de fel à befe terreufe que les autres. QUATRIÈME EXPÉRIENCE. Terre de cuverie , une livre douze onces. CiNQUIÈME ExPrÉRIENCE Terre de grange, une livre fept onces. SIXIÈME EXPÉRIENCE. Terre d'écurie à bœufs, une partie prife fous la crèche, & autre au centre de cette écurie, une livre huit onces. SEPTIÈME EXPÉRIENCE. Terre qui avoit deux ans de repos, prife dans une écurie à chevaux & bœufs , onze onces. HuiITiIÈME EXPÉRIENCE. Terre d’écurie de moutons, qui avoit quatre ans de repos; trois livres quatre onces. NEUvVIÈME EXPÉRIENCE. Pour m'aflurer fi les matières animales putréfiées dans les terres , rendoient beaucoup de Salpètre, j'en ai pris dans un MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 307 cimenère, fous des voûtes aérées par des abat-jours ; elles m'ont rendu trois livres une once. J'avois imaginé de couvrir les voiries de chaque village, & d'obliger les Particuliers à y en- terrer les bêtes qui viendroïient à mourir, en les mettant par morceaux ; mais ce produit ne m'a pas paru aflez confidérable, pour qu'on püt tirer un grand paiti de ce moyen. DixiÈME ExPÉRIENCE. Huit pieds cubes de terre prife dans une voirie aban- donnée depuis quatre ans, ne m'ont rendu qu'un dépôt ter- reux, dans lequel je n’ai pu diftinguer de fubftance faline. ONZIÈME EXPÉRIENCE. Quatre pieds cubes de terre de hangar, travaillée depuis trois ans , mont rendu dix livres. * DOUZzIÈME “EXPÉRIENCE. La terre leflivée , après trois ans de repos, la même qui avoit été leflivée au bout de deux ans, Expérience 7 , m'a rendu une livre fix onces. TREIZIÈME EXPÉRIENCE. Terre d’écurie de moutons , prife dans une maïfon bâtie RAR P depuis trois ans, quatorze onces. QuATORZIÈEME EXPÉRIENCE. Terre d’écurie de moutons, prife dans une maïfon batie depuis cinq aus, une livre fix onces. Toutes ces terres ont été leflivées dans une chaudière à grande eau, jufqu'à ce qu'elles fuflent entièrement épuifces. On voit que les terres des Expériences 1, 2, 3, 4, $ & 6 , formant enfemble vingt-quatre pieds cubes, ont rendu douze livres quinze onces, ce qui donne pour le produit moyen neuf onces deux gros par chaque pied cube. * Note des Commiffaires. Un produit aufli riche annonce qu'on avoit répandu fur ces terres des eaux mères de nitre. On ne peut pas efpérer par aucune des méthodes connues, d'arriver à un réfultat auf avantageux. 302 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: Si le produit de ces terres, qui ne font ni amendées, ni foignces, ni fuffifamment divifées, & qui contiennent de grofles pierres, eft auñli confidérable ; que ne doit-on pas attendre de celles qui feroient amendées , arrofées À propos, criblées & choifies ? C’eft en conféquence de ces obfervations & de ces expériences, que J'établis avec confiance le produit des couches à douze onces par pied cube de terre. Les perfonnes qui ne font pas inftruites, pourront douter que les terres des nitrières puiflent donner un produit plus fort; mais celles qui ont des connoïffances fur cet objet, verront au contraire que le produit pourra excéder celui au- quel je les ai fixées : ces terres placées avantageufement pour faciliter la putréfaétion des matières qu’elles contiennent, pourront venir au point de rendre autant que celles défi gnées, Expérience troifième, qui ont rendu environ quatorze onces par pied cube. J'avois déjà l'expérience en grand, que les terres ren- doïent davantage, lorfqu'elles étoient plus anciennes : les Expériences feptième & douzième m'ont encore confirmé dans cette opinion, & ceft ce qui m'a déterminé à ne lefliver mes terres de hangar qu'au bout de trois années. Que m'en coute-t-il pour avoir un produit sûr? La conf cruction d'un hangar de plus. Les intérêts des fonds que fa conftruétion exige , ne font rien en comparaïfon de l'avan- tage qu'il procure. Le Salpètre qui eft dans les couches , au bout de deux années, ne peut échapper à l’Entrepreneur ; ces deux, années ne fuffifent pas pour achever complète ment la putrefaétion des matières qui doivent produire le Salpétre; & il en réfulte que la troifième année en produit davantage que les deux autres. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 303 CELA UP RASE LC Comparaifon de l’établiffement propofe par l’Auteur , avec celui de MM. les RegifJeurs. L A fomme confidérable de quarante mille livres au moins, que MM. les Régifleurs des poudres exigent pour former un établiflement d’après leurs inftructions , eflrayera sûrement ceux qui auroient quelque difpolition à l’entreprendre. Ils comptent pour rien l'intérêt de la fomme avancce; ils efti- ment un térrein qui pourroit contenir dix hangars de cent pieds fur trente de large, clos de murs, à la fomme de quinze cents livres ; cette modique fomme ne payeroit pas les murs, [ls ne font point entrer en ligne de compte les frais de voitures des matières conduites aux hangars par des voituriers étrangers, & ne font même mention d'aucun attelage pour le fervice de ces hangars. Ils fonc lefliver les terres au bout de deux années , ils n'ofent en afhirmer le pro- duit ; enfin, pour former un ctabliffement qui, fans payer d'in- térêt des fonds, produiroit cing mille livres par année, il faut dix hangars à quinze mille pieds de terres à Salpètre par chaque, ce qui-feroit, pour les dix, cent cinquante mille pieds cubes de terres. L'impoflbilité de trouver & de raf fembler une pareille quantité de terres à Salpètre, joint au peu de bénéfice qu'ils préfentent dans leurs imftruétions , dé- montre inconteftablement qu’on ne peut faire un pareil éta- bliffement avec avantage. + La fomme quil faut pour faire l'établiffement que l’Auteur indique , n'eft que de treize mille cinq cent quarante -une livres : dépenfe annuelle comprife & intéréc des fonds, cette fomme produira un profit net de deux mille neuf cent quatre- vingt-dix-neuf livres fix fols huit deniers. Sous chaque hangar, je place quinze couches , chacune 304 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de quarante-deux pieds de long, fur fix pieds de bale & quatre de hauteur ; chacune de ces couches contiendra cinq cent quatre pieds cubes de terres, ce qui donnera pour les quinze la quantité de fept mille cinq cent foixante pieds be. le fol du hangar de cent cinq pieds de long fur cinquante de large & deux de profondeur k contiendra dix mil Île cinq cents pieds, qui, joints à la quantité de fept mille cinq cent foixante, forment une totalitæ de dix - huit mille foixante pieds cubes. Les terres ont plus de furface dans fes hangars que je pro- pole, quelles n'en ont fous ceux de MM. les Régifleurs ; ce qui eft un avantage. Il faut pour conftruire mes quatre hangars , environ foixante-douze mille pieds cubes de terres à Salpêtre , qui feront plus faciles à fe procurer que les cent cinquante mille pieds quils propofent; & avec un de ces hangars, travaillé tous les ans , l'Entrepreneur a un bé- péfice plus confiderable qu'il ne peut lefpérer de l'établife- ment que ces Meflieurs propofent. On voit que ces établiflemens ont befoin d’être placés près des grandes villes; on ne pourroit les faire dans les cam pagnes avec autant d'avantages, par la raifon qu'on ne pour- roit s'y procurer les matières à aufli bas prix. Je réferve l'éta- bliflement de ces hangars, pour tous les endroits où la faga- cité de l'Entrepreneur lui démontrera la poflibilité d'en faire, Je vais indiquer pour la campagne un autre genre d'établif- femenr, dont les avantages réunis feront peut-être le feul mérite de mon ouvrage. CHAPITRE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 305$ REREEP RE PERREEE PETER PIN EE ET PEINE SEEN ISSN EPRPUE CREER PTS EU TRUE LEE PIE PRRNES SET PETER DEEE Cal A PET RE SEX Projet de hangars pour les villages. Si ne falloit qu'expofer des terres nitreufes à l’adtion de Var, & les garantir du foleil & de la pluie pour leur faire produire du Salpérre , la fabrication de cette matière devien- droit facile ; mais aufli-tôt qu'elles ne reçoivent plus les ma- uères propres à entretenir la putréfaétion , le Salpêtre fe ré- génère difficilement, & il faut un temps beaucoup plus con- fidérable. Il eft bien étonnant que MM. les Régifleurs des poudres, qui ont fi fort à cœur l'établiflement des nitrières artificielles, faflent conftruire dans cette ville (à Befançon) des hangars fous lefquels ils vont mettre les terres falpétrées de ladite ville pour les laifler en repos ; ils ôtent les moyens de conftruire des hangars, où elles feroient traitées plus avantageufement. Hs penfent les enrichir avec les eaux mères de la raffinerie qui en eft voifine, & dans laquelle on purifie tous les Sal- pétres de la province ; mais J'efpère que lorfque les Ou- vriers qui dirigent ces travaux feront inftruits , ils abandon- neront l'ufage préjudiciable & défectueux de traiter ainfi leurs caux mères. On croit pouvoir aflurer que le feul produit de ces terres vient des eaux mères que l’on verfe abondamment deflus ; fi on les en privoit, elles rendroient fi peu, qu'on abandon- neroir le projet de délivrer les fujets de la fouille. Pour par- venir à ce point & augmenter la récolte du Salpêtre en aban- donnant les lieux où il fe forme fans aucun frais que ceux de récolte, voici le parti que j'ai pris. De tous les lieux où l'on recueille le Salpêtre dans les ha- bitations, il n'en eft point qui fourniflent autant (au rap- port de tous les Salpétriers, & fuivant mes propres expé- ricnces), que les écuries de moutons & de chèvres. C'eft Q q 306 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. en fe rappelant les circonftances les plus favorables à la pro- dué&tion de ce fel, qu'on n'eft plus étonné du réfulrar. Ces animaux entietiennent dans leurs écuries une chaleur & une humidité moyerne qui convient davantage à la formation du Salpétre, que linondation que caufent les urines trop abondantes des autres animaux, L’arrofement fe fait infenfi- blement fur toute la furface de létable , au lieu que dans les autres il ne s’y fait que dans une partie. Ces animaux vivent d'herbes fortes , telles que le thym, le ferpolet , l’orignan, le calaman & les plantes de cette efpèce, qui contiennent beaucoup d'huiles, ce qui donne à leur fumier une qualité fupérieure à tous les autres. J'en ai vu qui rendoient en les levant une vapeur qui irricoit le nez & les yeux, comme de J'alkali volaul; le fumier couvre toute la furface de l'écurie, ce qui rend la putréfaétion générale. C’eft dans le fein de cette putréfaétion & de cette humidité moyenne, que fe forme abondamment la combinaifon qu’on recherche. Le porc qui réduit en pâte le fumier & la terre de fa loge, ne produit point de Salpètre; la putréfa@tion fe fait dans une trop grande quantité d'eau, ce qui soppofe à la combinaifon des prin- cipes qui doivent former l'acide nitreux , du moins je le pré= fume. On à des exemples en Chimie de combinaïfons de cette efpèce, qui ne peuvent s'opérer avec la préfence de l'eau. Enfin, quand mon opinion fur le mécanifme de l'opc- ration feroit faufle , il reftera toujours pour conftant, d'après les faits , que l'écurie des moutons & des chèvres eft la meil- leure nitrière ; c’eft fur certe certitude qu'eft fondé mon éta- bliflement. Dans chaque village on conftruira un hangar d’une cran- deur proportionnée au nombre des moutons & des chèvres qui sy trouveront; j'en donnerai ci-après les proportions. Je prends dans ce moment pour exemple un hangar de foixante pieds de lông , fur vingt-cinq de large. On aura les mêmes attentions tant pour le choix de l'emplacement & de fa po- fition , que pour les nirières. J'appellerai ces hangars, pour les difbinguer des autres, hangars-écuries. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 307 Dans les provinces où il fair froid, on ferimera ce hangar- écurie d’un mur de fix pieds hors de terre, & de trois de fondation, conftruit en mortier. On ménagera dans la ma- çonnerie du côté du nord, de petites fenêtres qui pourront fe tenir fermées avec des volets; on fera à chaque extrémité du hangar-écurie une porte; on pofera fur cette maçonnerie une charpente en fapin ou en chêne, fuivant le local, & on couvrira en paille. On pourra faire un grenier fur cette charpente, qui fera loué au plus offrant, au profit de la Communauté; il pourroit contribuer à rendre ce hangar-écurie plus chaud en hiver. Le hangar-écurie ainfi acheve, on en creufera le fol de deux pieds de profondeur; on aflurera bien le fond avec la batte; puis on le garnira d’une couche d’ar- gile, fi on le peut ; enfin on y dépofera les terres falpétrées deshabitations. Dansle choix des terres , 1l eft important de ne prendre que les plus convenables, de les pañler à la claie, & de les améliorer fi elles font trop fableufes, en les mélant avec des terres plus grafles ; on pourra y ajouter le fumier qui fe trouve dans les étables à moutons du village; les terres ainfi préparées, on remplira l’excavation de deux pieds faire dans le hangar, en l’égalifanc lé mieux poflible ; on mettra fur la furface de la terre autant de paille qu'il en faut pour faire litière aux moutons & aux chèvres; enfin on obligera chaque Particulier à placer dans ce bangar-écurie fes moutons & fes chèvres. Une grande partie de l'année , ces animaux n'ont d'autre nourriture que celle qu'ils prennent dans la campagne : il eft des temps au contraire où l’on eft obligé de les nourrir à l'étable ; alors chaque Particuhér feroic bien aife de donner aux fiens la nourriture; à cet effet il fera fair une fépa- ration à claire-voie, où ils pourront mettre chacun les leurs: fi le croupeau cft aflez confidérable pour quil y ait un Pâtre, il veillera à entretenir l'ordre, & à ce que perfonne n'ôte aux moutons ou chèvres de fon voifin, pour donner aux fiens. Chaque Particulier fera à fes montons une mar- que diftinétive, pour éviter le défordre. Ce fcroit laïfler beaucoup à défirer, fi en indiquant cet Qq 5 308 MÉMOÏIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, établiffement, je ne donnois les moyens d’en aflurer le fuccès. C'eft tomber dans l'inconvénient que je trouve dans l'eta- bliffement des nitrières, que d'en charger l'état; fi on exige que les Communautés les faflent à leurs frais , c’eft leur rendre un fort mauvais fervice. Voici, je penfe, le parti qu'on peut prendre dans cette circonftance. Les Communautés feront chargées du tranfport des terres falpétrées , des pierres pour les murs, des bois pour la char- pente; ils fourniront la paille pour couverture, des Manœu- vres par corvée pour creufer les fondations, fervir les Ma- çons & les Charpentiers; l'Etat fournira les bois néceflaires qui feront pris dans les forêts du Roi; il payera l'Ouvrier de carrière , le Charpentier & le Maçon. Si on peut perfuader les Communautés du bénéfice qu'elles auroient de prendre ces hangars-ccuries à leur compte, alors clles les conftruiront à leurs frais, en prenant cependant les bois néceflaires à la conftruétion dans les forêts du Roi. Ils auront le privilége d'extraire le Salpètre, & de le vendre à J'Etac : fi quelques Communautés fe refufent à cette entre- prife, & qu'un Particulier veuille sen charger, elles feront obligées aux corvées ci-devant énoncées; & le Particulier fera chargé feulement de celles de l'Etat. Si le bénéfice ne de- terminoit aucune Communauté ni aucun Particulier à prendre ces ctabliflemens à leur compte, l'Etat pourroit s'en charger aux conditions ci-devant dites, & jindiquerai ci-après les moyens qu'il pourra employer pour s'indemnifer de fes frais. Dans les queftions envoyées par MM. les Régifleurs, ils demandent » quels feroient les fecours que lon pourroit » trouver au près des Communautés pour la formation des » hangars, &c. «. : J'ai répondu qu'on pourroit les charger de ce à quoi je les engage; ce qu'ils feront avec empreflement, dans l'ef- pcrance de fe débarrafler des incommodités de la fouille ; ce qui vient de fe rcalifer par des foumiflions que quelques- unes ont données. Les Communautés feront tenues à l'entretien, c'eft-à-dire , MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 309 aux réparations à faire à la couverture , aïnfi qu'aux portes & volets; cette charge ne fera pas onéreufe , en ce qu'une cou- verture en paille dure vingt-cinq à trente ans, & méme plus, fans qu'on ait befoin d'y toucher. Elles fourniront la paille nécef. faire à la litière de leurs moutons & chèvres; elles facrifieront cette petite quantité de fumier qui fera mêlée aux terres après les avoir leflivées. On pourroit peut-être même les obliger de labourer tous les ans la terre du hangar-écurie, & d’y mêler le fumier; on feroit faire cette corvée par la jeunefle du village les jours de pluie ou d'hiver, que les travaux cham- péties font interrompus. Dans le cas contraire , le fumier fe partagera entre chaque Particulier, ou fe vendra au profit de la Communauté, à l'exception de l'année qu'on leflivera les terres , parce qu'il eft néceflaire que le fumier y foi mêle. La grandeur du hangar-écurie fera déterminée à raifon de trois pieds de long fur deux de large, par chaque mouton ou chèvre. Suivant ce calcul , il ne faudroit pour un hangar- écurie de la dimenfion ci-deflus, qu'environ deux cent qua- rante moutons ou chèvres, non pas pour le remplir, mais pour le fertilifer. On pourroit placer davantage de ces animaux dans un hangar-écurie de certe étendue ; mais il eft néceflaire de n’y en pas mettre un plus grand nombre, pour les raïfons fui- vantes. Lorfqu'on leffivera les terres , on partagera le hangar-écurie en deux parties par le travers ; on fera une petire féparation; on mettra tous les moutons & chèvres dans une partie, tandis qu'on travaillera dans l’autre. Quand les terres feront remifes en place, on fera pafñler les animaux dans cette partie, pour travailler l’autre à fon tour; ce qui fera d’autant plus facile à exécuter , que j'ai ménagé une porte de chaque bout du hangar: les travaux finis, on rendra la liberté à ces mêmes animaux de l'occuper en entier. On penfera peut-être que la difficulté d'infpirer à chaque 310 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Particulier aflez de confiance pour réunir ainfi leurs moutons & leurs chèvres, mettra un obftacle à cet érabliflement; mais fi on confidère que ces animaux font toujours en troupe pour chercher leur nourriture, pourquoi ne pourroient:ils pas repofer enfemble: Les habitans des campagnes ont en commun des biens plus précieux. La dire&ion de ces hangars ne couteroit rien à l'Etat: que ce foic les Communautés ou un Particulier qui en foient chargés, ils feront intereflés à ce qu'on en ait le plus grand foin ; ce quifera d’autantmieux exécuté, qu'ils regarderonc cet étab'ifflement comme le leur, & comme le feul moyen qui puifle les délivrer des incommodités du Salpêtrier. Après avoir indiqué les moyens de faire l'etabliflement des hangars-écuries dans les Communautés , je vais mettre fous les yeux les avantages & le produit qu'on en pourroit tirer. Je donne pour exemple une province qui fournit une bonne quantité de Salpètre, & dans laquelle il y a moins de mou- tons & de chèvres que dans beaucoup d’autres. Cette pr'o- vince eft la Franche-Comté ; elle a fourni pendant les années ci-après, en Salpêuie bruc, SEA AV O EUR: Année 17/72 te der VU ISO OOAON DER ALE Et RE 366384 » n 1774 HN EEE SO OI NE TERRES Car AS Me ide di RE EU E pee bé AE 1727003223 710 » » ToraL +... 1749043 » D Année commmune : : : : 349808 9 4 _ On voit la diminution fenfible que la récolte a éprouvée dans l'efpace de cinq années; on voit aufli que le produit MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 31r annuel, année commune, eft de trois cent quarante-neuf mille huit cent huit livres neuf onces quatre gros. Pour éva- ‘luer le produit qu'on peut efpérer des hangars-écuries, on obfervera que cette province eft compolée de quatorze villes, & de deux mille dix-huit villages; les villes ; ainfi que les villages font fujets à la fouille des Salpètriers : je fuppole donc que l'on fafle un hangar-écurie dans chaque village. Il eft bien peu. de ces villages qui n'aient une quantité de moutons & de chèvres fuffifante pour un hangar de la dimenfion rapportée ci-devant; & il en eft beaucoup dans lefquels on feroit obligé d'en former un plus grand ; cependant je n'établirai mon Calcul que fut la fuppofñition la plus foible. Un hangar-écurie de foixante pieds de long fur vingr- cinq de large, contiendra trois mille pieds cubes de terre; on ne leffivera les terres de ce hangar qu'au bout de quatre ans de repos; ces trois mille pieds cubes de terre rendront douze ‘onces par pied ; ce qui fera la quantité de deux mille deux cent cinquante livres de Salpêtre. On en leffivera cinq cent quatre par année , qui, en partant du même produit, don- neront la quantité d'un million cent trente-quatre mille livres de Salpêtre. En fafanc la comparaïfon de ce produit annuel avec celui ” des années précédentes, on voir qu'il eft plus que triplé : fi on y joint enfuire celui des quatorze villes que je n'ai point compriles dans le nombre des hangars - écuries, & dans lefquelles on peut faire un établiflement de la nature de celui que fai indiqué à l'arücle des nitrières, en fup- polant que chacune ‘produife par année dix à: douze mille livres de Salpétre , on recueilléroit en Franche-Comté en- viron un million deux cent foixante-quatorze mille livres de Salpêtre. Si, par le moyen des hangars-écuries , la récolte fe trouve augmentée à ce point dans la province de Franche-Cointé qui a moins de moutons & de chèvres que celles de Chain- pigne, Languedoc, Provence & le Berry, que n'a-t-on pas 312 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE.! lieu d’efpérer de cet établiffement dans ces dernières pro- vinces ? à : , Je m'apperçois que le produit des hangars-écuries éton- nera , en le comparant avec celui des travaux aétuellement en ufage; & on concevra avec peine comment , avec une furface de foixante pieds de long fur vingt-cinq, je retirerai plus de Salpèrre qu'en leflivant toutes les terres du village: gen voici la raïfon. Une partie des Salpêtriers compofentavec les habitans de la plus grande partie des maïfons , & moyennant une rétribution quilsen tirent, ils ne leflivent point leurs terres. La plupart n'é- puifent point les terres de tourle Salpètre qu’elles contiennent;ils n'ajoutentpointaflez d’alkali pour décompoferles fels à bafe ter- reufe; ils n'obtiennent qu'une petite quantité de criftaux, & re- jettent une matière qui auroic éte d’un très-grand produit dans des mains. plus-inftruites. Les Particuliers d’ailleurs planchcïent & pavent pour la propreté de leurs habitations ; ceux qui n’en ont pas le moyen, mettent fur le fol de leurs habitations une couche d'argile qui fe durcit : tous ces moyens s’oppolent à la génération du Salpêtre. Le produit d'ailleurs des hangars-écuries n’eft point fondé fur des hypothèfes hafardées ; on voit par les expériences 1 & 2, que les terres d'écuries à moutons, prifes en difiérens endroits, ont rendu la quantité moyenne de neuf onces & demie & un gros par pied cube. Il. eft démontré par l'expérience 3, que ces terres peuvent rendre davantage, On obfervera que le produit de ces terres n’eft dû qu'à la Nature; que ces terres ne font point choifies , quelles contiennent de grofles pierres , qu'elles ne font amendées par aucune matière , qu'elles font leflivées de trois en trois ans; que les terres de hangar-écurie au contraire feront choi- fies & pañlées à la claie, pour en ôter les grofles pierres; quelles feront mêlces avec le fumier de moutons, & qu’elles ne feront leflivées que de quatre en:quatre ans ; que cetre année de plus eft un avantage réel : d'où je conclus que ces MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAÏPÊTRE. 313 ces terres ainli traitées, donneront un produit fupérieur à celui méme auquel je les porte. Je penfe que l'établiffement de ces hangars-écuries pourroit difpenfer de celui des nitrières : le Salpêtre deviendroit fi com- mun , quon ne pourroit lui donner aflez de valeur pour que l'Entrepreneur d’une nitrière pût trouver du profit à en fabriquer. Dans ces nitrières , il faut payer des Ouvriers, des matières & des terreins; dans les hangars-écuries , les mou- tons & les chèvres font les Ouvriers, ils arrofent, ils ap- portent les matières, ils procurent dans l'hiver une tempé- rature moyenne à leur écurie ; la putréfaétion par conféquent ne fera point interrompue comme dans les nitrières pendant la gelée. Je ne fais point d'ouverture aux murs du côté du midi, dans la crainte que les Particuliers n'en laiflenr les volets ouverts, ce qui expoferoit aux rayons du foleil les terres du hangar-écurie. J'en laifle du côté du nord, qu'on pourra ouvrir en cté & lorfquil ne fera point aflez froid, pour hifler circuler Pair. Les Particuliers refteront libres dans leurs habitations; les écuries des autres animaux, propres à leurs travaux, ne feront plus bouleverfées (*); ils feront maîtres de planchéïer ou de paver leur féjour , l'Ordonnance qui le leur défend n'ayant plus d'objet. Et fi cette propreté peut contribuer à la fanté, quelle eft la clafle des citoyens qui mérite plus d'attention que les habitans des campagnes Ce feroit en pure perte que la Nature & les foins formeroient une grande quantité de Salpétre, fi on n'inftrui- foit fuffifamment ceux qui feront chargés de le recueillir : pour y parvenir, voici le parti quil faut prendre. On commettra dans chaque province un homme inftruit dans ce genre de travail; il établira dans chaque Bailliage (#) Les bêtes de travail exigent trop de foins, pour pouvoir les faire vivre cæ commun; ce qui m'a déterminé à ne prendre que les moutons & les chèvres. R r 314 MÉMoïREs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, un Cours de démonftration & d'inftrution fur l'extraction du Salpétre, auquel pourront affifter les Particuliers des Com- munautés qui voudroient s'inftruire fur cet Art, & qui vou- droient entreprendre des établiflemens. S'il y a des Salpétriers en titre, ils feront obligés de s'y rencontrer, jufqu'à ce qu'ils foient fufiflamment inftruits ; ce qui ne peut être long. I! ct pofñlible de faire en quinze jours un parfait Salpé- trier, d'un homme d'une intelligence médiocre. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 31 CAE ARP LIRE -X. Du leffivage des terres. Ox divifera trente-deux cuveaux en quatre bandes : on garnira lefond de ces cuveaux (*) d’un faux fond , ainfi que le portent les inftruétions de MM. les Régifleurs; on mettra la terre falpétrée fur, ce faux fond, & on en remplira le cuveau; on verfera enfuite par- des de l'eau dans laquelle on aura diflous autant desfubftances alkalines iidiquées ci-après, qu'il en faudra pour pénétrer ies terres & jufqu'à ce qu'elles refufent d'en prendre ; on fermera exaétement la fortie des cuveaux pendant douze heures , après lequel temps on laif- fera filtrer l'eau dans la recette placée deflous ; onfera pañler l'eau de la première bande fur les cuveauxdelafeconde, & ainfi de fuice fur ceux de la troifième & quatrième bande. On examinera les eaux qui fortiront des cuveaux de la quatrième bande, pour saflurer fi elle eft autant chargée de Salpétre qu'elle peut l'être pour être foumife à l'évaporation ; ; on fe fervira du pèfe-liqueur donné dans les infiruétions de MM. les Régifleurs. Si les eaux ne fé trouvoient point aflez char- ge ‘es, on les fera Pi fur de nouvelles terres, jufqu'a ce qu'elles aient acquis le degré convenable. On verfera fur les terres de nouvelle eau, jufqu'à ce qu elle en forte pure, ce qu'on reconnoîtra encore par le pèle- liqueur. J'ai reconnu en vifitant les travaux des Salpétriers, qu'ils n'épuifoient point leurs terres de tout le Salpêtre qu'elles con- tenoient, quils ne chaïrgeoïient point aflez leurs eaux, qu'ils confommoient du bois à faire évaporer une eau qui ne leur rendoit que peu de Salpètre : c'eft pour éviter ces défauts, que J'ajoute une quatrième bande , & que j'emploie un grand (*) Si on veut faire la dépenfe d'une pompe pour diftribuer les eaux fur les cuveaux , au moyen des chaîneaux , ce fera une grande commodité. RD M à \ 316 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. nombre de cuveaux pour accélérer la lixiviation. Je laifle l'eau féjourner douze heures, pour qu'elle ait le remps de pénétrer complètement les terres. Le nitre à bafe terreufe étant d’une diflolution plus facile que le nitre à bafe alkaline, il {e diflour, le premier; ceft pourretirer ce dernier, que je recommande d'ajouter une grande quantité d'eau fur les terres. J'ai éprouvé qu'en tenant fous de l'eau pure du Salpètre concaflé pendant quinze jours, & à la température de dix degrés, il n'étoit pas diffous complète ment, Je ne fais aucune addition de cendres aux terres ni- treules, parce qu'on ne peut réduire fous un volume trop petit la terre à lefliver. L’alkali de la cendre eft d’une plus facile diflolution que le nitre; en mélant les cendres avec les terres , elles fe chargent d’eau falpétrée ; & il faut, pour les épuifer , une plus grande quantité d'eau, qu'il n’auroit fallu fila tetre eûc été feule, Il fera eflentiel de reconnoïre fi les fels à bafe rerreufe fonc décompofés; dans le ças contraire, on ajoutéra une quantité fuffifante d’eau alkaline très-concentrée, pour loperer complèrement; on laïflèra précipiter la terre, comme lindi- quent MM. les Régifleurs, & on portera l’eau de leflive à A chaudière. Si on reconnoïfloit un excès d’alkali, on pourroit fe dif- penfer d'ajouter de leau falpêtrée pour farurer cet alkah ; comme la quantité ne pourroit en être confidérable , il ache- veroit pendant l'ébulliion la décompofition des fels à bafe cerreufe, qui auroïient pu échapper à fon atien dans le mé- lange à froid. Sa préfence ne pourroit nuire au Salpètre, qui criftalliferoit, parce qu'il eft de la nature de ce fel de for- mer une criftalhfation parfaite , quoique dans une eau alkaline. Ce feroic pour l'Etat un bien grand avantage ; fi tous les Sal- pètres bruts qu'on lui délivre, criftallifoient dans une eau alka- line, DE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE 317 CRE TAPP I PORTE "XL Des fibflances alkalines qu’on doit employer pour donner une bafe au Salpétre. CD les fubftances végétales fourniflent, après leur decompofition , de lalkali fixes auffi et que celui qu'on auroit tiré de ces matières par l’analy{e, il ne fe trouve point en propoition fuffifante pour donner à l’acide nitreux là qualite qui lui eft neceflaire. J'ai remarqué que plus la putréfaétion ctoit parfaite, plus elles rendoïent d’alkali ; ce qui prouveroit qu il en eft de cette opération comme de la combuftion. J'ai mis dans une cornue du bois de Gayac ; J'ai procédé à la diftillation en l'interrompant à chaque pro- pr pour examiner le bois en partie décompofé; j'ai re- connu qu’il falloir que l'huile noire diftillat, ‘pour que lle rÉ— fidu rendit de l'alkali fixe ; ce qui vient à l'appui du fen- timent quil eft avantageux de donner le temps à la putré- faction de fe faire complètement dans les terres, avant de les lefliver. La potafle, le falin, la cendre font les matières qui peuvent fournir à l'acide nitreux la bafe qu'il n’a pas mouvée dans les terres. On ne peut indiquer la quantité de ces fubi- tances néceflaires pour le jufte point de la décompofition des fels à bafe terreufe , cela dépend de circonftances trop fujetes à variation. L’ufage indiquera la quantité qu’on doit en mettre par chaque cuveau, en obfervant ce qu'il en aura fallu pour la première leflive des terres qu'on commencera à lefiver. Si c'eft de la potafle ou du falin, on les fera préalablement difloudre dans l'eau qui doit pafler dans cha- que cuveau; fi on fait ufage de cendre, on la mettra dans un grand cuveau deftiné à cet ufage, & on fera pañler deflus Nu qui doit fervir à lefliver les terres. Je ne dirai rien de la potafle, puifque MM, les Régif- 318 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. feurs fe chargent d'en fournir de la meilleure qualité ;. je préviendrai feulement qu'on en fabrique dans les falines de Lorraine & de Franche - Comté , qu'on débite aux Ver- réries , qui n'eit que du fel marin prefque pur , qui ne peut être d'aucun ufage dans le travail des Salpétres; ce qui pour- roi induire en erreur les perfonnes qui pourroient s'en fervir fans la connoître. Le falin eft un. alkali retiré des. cendres de bois; il eft d'une qualité à peu près égale à la potaile ; il n'en diffère qu'en ce quil neft point calciné: mais fon bas prix devroit lc faire preferer; il vaut actuellement trois fols la livre. On en fabrique dans beaucoup d’endroits de cette province; on pourroit de même en fabriquer dans beaucoup d’autres endroits, les genevriers du Langundoc & de la Provence en ren- droient de qualité parfaite. Si on fe fert de cendres, il faut choifit celles qui pro- viennent de la combuftion du bois neuf; le bois flotté a perdu dans leawla fubftance faline qui devoir produire l'al- kali. On reconnoït aifément celles qui en contiennent beau- coup, en les appliquant fur la langue; elles piquent d'autant plus fortement, qu'elles en contiennent davantage. Une me- fure qui pèfe environ trente livres, coute fix à huit fols; j'en ai leflive plufieurs fois, j'en ai tiré trois livres d’alkali ; cette quantité d’alkali couteroit au moins vingt-un fols, tandis quelle ne revient pas à neuf en employant la cendre. L’o- pération pour l'en extraire coute trop peu, pour la compter pour quelque chofe. e ne penfe pas qu'on puifle tirer un grand parti des eaux” alkalines de leflives; on s’en fert dans chaque ménage à laver tous les autres effets, & on en fait grand cas. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 319 CHA BL TOR EX I IL Du traitement des Salpétriers, & du benefice que les Com- munautes ou les Particuliers peuvent retirer des hangars- ecuries. S'x ne fe trouve point aflez de Communautés ou de Par- ticuliers pour prendre à leur compte les hangars-ccuries , on pourra en charger des Salpétriers. Les Communautés ne leur fourniront rien; ils auront le feul avantage de prendre du bois dans les foréts au prix courant, fans qu'on puifle leur en retufer ; il leur fera ordonné de travailler avec trente-deux cuveaux Où vingt-quatre au Moins, pour ne pas laufler lan- guir louvrage, & de les traiter comme il convient. L'a- vantage qu'ils auront de trouver des terres très-riches raf femblées dans le même endroit, les difpenfera de la manœuvre fatigante de porter ces eaux de lefive des différentes maïfons dans la chaudière ; comme d’une autre part, ils Jouiront d’un établiffement pour lequel l'État aura fair des dépenfes; on leur retiendra dix livres de Salpétre par quintal, au lieu de quatre livres qu'on leur retient préfentement. Pour mettre fous les yeux des Communautés & des Par- ticuliers un tableau du bénéfice & du produit de ces han- gars-écuries , je vais encore entrer dans quelques détails. Un hangar-écurie de foixante pieds de long fur vingt-cinq; rendant tous les quatre ans deux mille deux cent cinquante livres de Salpêtre, retenue faise du dix pour cent , 1l reftera la quantité de deux mille vingt-cinq livres, qui, à huit fols, feront la fomme de huit cent dix livres. Pour faire criftallifer un millier de Salpêtre avec des eaux bien chargées, j'ai obfervé qu'il falloit trois cordes de bois; Je leur en pañle huit. Le bois coute dans les villages , rendu en place, depuis fix jufqu'à huit livres la corde; ce qui 20 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. \S2 feroic une fomme de foixante-quatre livres. Pour potaile, falin ou cendres, cinquante livres. RÉCAPITULA TION: LOUE Le 2e eme rbe de dei NON ne DÉPEME MS ele à Meier ue DITES Réfe, net}, 1548 MEN TN MARS EURE Un Salpètrier intelligent & a@if, avec un bon domef- tique , peut rendre par année dix milliers de Salpêtre. On voit par ce produit, qu'il lui refte un profit confidérable pour un Ârüfte de cette clafle ; il pourra aïfement payer les voi- tures pour tranfporter fon atchier, entretenir fes cuveaux & fa chaudière. Il y a beaucoup de maïfons dans les campagnes, qui font éloignées des villages; les habitans de ces maïfons pour- roient mettre leurs moutons dans les bangars- “écuries ; ils pour- ront en conftruire un proportionné à la quantité de mou- tons & de chèvres qu'ils auront. Jen ai vu qui avoient pour un feul plus de cent moutons. En inftrutfant ces Particuliers, ils pourroient eux-mêmes lefliver leursterres, & vendre le Sal- pêtre qui en proviendroit. Chacun regarderoit fon hangar- écurie comme un produit de plus à fes Her 5 & fi-tôt qu'il en fe- roit convaincu , il amenderoit fes terres avec le fumier de moutons & de chèvres, d'autant plus foigneufement qu'il feroit perfuadé que ce fumier lui feroic plus avantageux dans fon hangar-curie , qu'en l'employant dans fes terres. Les dépenfes pour l'achat des uftenfiles néceflaires pour l'exploitation d’un atelier powroient détourner les Particuliers de fare cet crabliflement ; mais l'Etat pourroit en avoir en réferve , & leur louer; ou bien ils pourroient s'adrefler aux Salpétriers du voifinage, pour faire lefliver leurs verres à un prix dont ils conviendroient. Si MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 321 Si la fragilité du pèfe-liqueur rebutoit ces nouveaux Sal- pêtriers , ou s'ils n’avoient point aflez d'intelligence pour en faire ufage , on pourroit leur donner un moyen aufli fimple de reconnoître le degré de l’eau de leflive, par fa pefanteur fpécifique comparée à celle de l'eau pure. our diminuer les frais qu'un nombre d'ateliers muluplié exigeroit , fur-tout pour la chaudière en cuivre qui coute qua- rante fols la livre, on pourroit en fabriquer de feuilles de fer forge, réunies enfemble comme le font celles de cuivre ; elles ne coutcroient que dix fols la livre, & ne dureroient guère moins , fi on en avoit foin. Le produit auquel je porte les hangars-écuries, ainfi que les terres des nicrières , pourra paroïtre extraordinaire pour les provinces dont les terres ne produifent que deux ou trois onces de Salpêtre par pied cube; cette différence provient de la qualité top fableufe de ia terre : l'Art peut venir au fecours de la Nature, en les amalgamant avec des terres plus grafles qu'on doit trouver dans ces lieux mêmes à une certaine profondeur. La putréfattion des matières végétales & animales fe fait par-tout; c’eft cette opération qui forme l'acide nitreux , & les terres ne fervent qu'a favoriler cette opéra- tion & à fixer l'acide nitreux. Je ne puis m'empêcher, en terminant ce Mémoire, d'indi- quer un moyen, peut être déjà connu , d'augmenter la quantité de Salpétre qu'on recueille en France. M. de Cofligny , qui a refté long-temps dans l'Ile de France, m'a dit bien des fois que le Salpêtre qu'il tiroit du Bengale y étoit à fi bon mar- ché, que, tout raffiné, il ne coutoit pas ce que le brut coute ici à l'Etat; 1] feroit donc intéreflant de voir fi ces Iles ne pourroient pas produire du Salpètre aufli facilement que l'Inde elle-même. On peut y poufler avec aétivité la fabrication de la poudre avec le Salpêtre de l'Inde. M. de Coffigny y a établi un moulin à poudre, qu'il m'a afluré être en Ctat d’en fabriquer une bonne quantité. Les bâtimens qui partent de France pour ces Iles, ne feroient plus obligés de sen charger pour aller & venir, & ils y touveroient Fi à 322 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. les mêmes reflources qu'en France. Je n'ai parlé de ces Iles que comme un moyen de fe procurer plus abondam- ment une matière qui, fans être rare en France, en life défrer une plus grande quantité. On en viendra aifément à bout, fi mes confails pouvoient avoir quel- que applicarion. Je ne doure pas que dans le nombre des Savans qui fe feront occupés de cet objet, d'autres n'aient trouvé peut-être des moyens meilleurs. Pour moi, je donne dans cet Ouvrage ce qui ma paru le plus propre à remplir les vûes du Monarque bienfaifant qui a daigné interroger tous les Arciftes, pour débarrafler fes fujets d'une charge fi onc- reufe. Si je nai pas eu le bonheur de réuflir, j'aurai au moins la fatisfiétion de me dire que J'ai fait ce qui a dépendu de moi pour fervir ma Patrie. 323 G—_— gg — 1") OBSERVATIONS Sur Îles moyens d'augmenter la récolte du Salpètre en France. Pour férvir de fuite au Memoire prefenté en 1777, fous le n°. 33, 6 fous la devife : Nec Jpecies Jua cuique manet , rerumgne novatris Ex aliis alias reparat Natura figuras. Ovid. L. 15. Met. Par M. CHE VRAND, Infpecleur des Poudres & Salpêtres a Befançon. SEconNp Concours. N°: r8. LE Mémoire que je mets aujourd'hui fous les yeux de cette illuftre Académie, eft une fuite de celui que Jj'eus l'hon- neur de lui: préfenter fous la même devife, dans le courant de Mars 1777. Le long délai accordé aux Concurrens m'a permis d'ajouter à mes premières expériences , & de vérifier en grand & dans les travaux mêmes de la Nature, le fyf- tême que je m'tois formé. J'ai fenti que pour répondre avec netteté & précifion à la queftion propofée , il étoit indifpenfable de faire un voyage d'obfervation dans les différentes provinces de ce royaume. Il m'a paru quil ne devoit pas fuffire de connoître certains moyens applicables à une ou même à plufieurs provinces, mais quil étoit néceflaire de les parcourir toutes d'un œil obfervateur , pour comparer les matières que chacune d'elles renferme , & juger, par cette comparaifon, du parti le plus Sf ï 324 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. avantageux qu'on en peut tirer. Les connoïffances que je crois avoir acquifes dans ces obfervations , me mettent en état de me préfenter fans crainte, & c'eft avec cette fecu- rité que je vais indiquer les procédés qui m'ont réufli. Je me verrai peut-être force de réfuter des procédés indi- qués dans quelques Ouvrages, qui peuvent induire en erreur les Entrepreneurs qui les ont entre les mains; mais je pré- viens Jes Auteurs que je les réfuterai fans caufticité, & que ma plume ne fera conduite que par le zele qui doit animer tous mes Concurrens emprefles de feconder les vûües bienfai- fantes d'un Monarque fi ferieufement occupé du bonheur de fes fujets. Je n'imagine pas que le projet du Miniftère de France foic de fabriquer du Salpêtre dans le Royaume , beaucoup au delà de fes befoins. On fait top combien il eft difficile de foutenir la concurrence de l'Inde, où la Nature donne cette matière en grande abondance & à bas prix. Cepen- dant, vu la grande. étendue & la nombreufe population du royaume de France, ïl doir être facile d’en tirer par annce fix millions à peu près de Salpétre brut, dont il peur avoir befoin ; quoique l’aéte de bonté que Sa Majefté a exerce envers fes fujets, en les difpenfant de la fouille dans leurs habitations , en ait prodigieufement reftreint les moyens. I cft, à mon avis, trés-inutile de prétendre préparer cette matière dans toutes les provinces de France indifféremment : on ne doit confeiller à fes Concitoyens que des entreprifes avantageufes. Les provinces, par exemple, où la Naure fe refufe abfolument cette fabrication par la mauvaife qualité des terres , doivent être exclues fans réferve ; telle eft la Bretagne prefque entière. On ne doit pas s'attendre non plus à voir les hommes d’une province, où les bras feront rares & em- ployés fur-tout à d’autres travaux d’une néceflité ablolue, fe tourner vers ceux-ci. Ce ne fera donc que dans les provinces feules où l'on trouvera & des! bras & de: matières affez abor- damment pour ajouter cette branche de commerce à l'in duftrie des habitans, que ces derniers sy livreront avec ein- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 325 preflement, & qu'on en pourra tirer un très-grand avantage. C’eft cè que je me propole de démontrer, d'après l'examen fcrupuleux que j'ai fait fur les lieux mêmes, & fur-tout d’ après nombre d’obfervations éclairées du flambeau de l'expérience. Je vais traiter d’abord des démolitions, des tutfaux, des craics, & de leur leflivage particulier. Je parlerai enfuie des nitrières, & dans cet arücle je dirai ce que doit obferver un Entrepreneur dans la conftruétion des hangars & dans le trai- tement des terres , dans les engrais, le mélange & les arro- fages. Je finirai par donner mon fyftème fur la formation de Dede nitreux. Pour fuivre un plan plus méthodique, J'aurois dû traiter cet article en premier lieu ; mais comme mon fyf- tème eft fonde fur les obfervations détaillées dans les articles précédens , il m'a paru qu'il étoit eflentiel de les faire con- “noître d’abord. ARTICLE CPARYEMIT ER: Des Démolitions. LEE) de parler des moyens que l'Art peut fournir pour augmenter la récolte du Salpêtre, commençons par CEUX que la Niere nous préfente. Les démolitions font les premiers. Le grand nombre de reconftruétions qui fe fonc chaque jour dans Paris, la quantité confidérable de plätre qu'on emploie dans les bâtimens, la vetufté des édifices que lon démolir, & leur expofition avantageufe aux matières en putré- fattion , font autant de moyens qui contribuent à donner une très- grande quantité de matériaux falpétrés. La pierre d’ailleurs dont onfait ufage, ayant elle-même la propriété de fe nitrifier augmente encore la quantité de ces matériaux. On doit j juger par ce feul article, combien cette immenfiré de déblaïs pourroit fournir de Salpétre. Cependant un ufage malheureufement établi fait que lon n'en tire qu'un parti ee : Voici cet ufage, É 326 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Tous les matériaux de démolitions font abandonnés aux Salptriers répandus dans les différens quartiers de Paris. Ces Ouvriers ont des voitures pour ramafler ces matériaux , & pour furveiller à cet amas , ils payent un homme, à qui ils donnent le nom d'Homme de ville. Ce furveillant, paye fort cher, eft fouvent de la plus grande négligence pour faire la recherche exacte de toutes les matières falpêtrées. Le Maître Maçon, d'un autre côté, confultant, comme de raïfon, fes intérêts plutôt que ceux du Salpètrier, confond à la hâte dans fa démolition les materiaux falpétrés avec ceux qui ne le font pas, dès que le Salpétrier n'eft pas extrémement prompt à faire enlever ces premiers. Pour obvier à ce double inconvénient, on pourroit établir dans chaque quartier un magafin, où feroient entrepofés les materiaux falpètrés. Le grand nombre de voitures qu’on mettroit en activité à l’inftant d’une démolition, enleveroit fur le champ ces matériaux; on nen perdroit aucun, &le Maître Maçon n'auroit jamais à fe plaindre de la gêne que la lenteur ordi- naire de ces fortes d’enlèvemens met à fes travaux. Mais quel feroit le meilleur moyen de procéder à cette entreprife ? Et la Régie des poudres pourroit-elle fe charger de cet enlèvement, & faire payer à chaque Salpètrier un prix convenable par voiture qu'il viendroit charger au dépôt? Faudroit-il plutôt en faire une entreprife & charger égale- ment le Salpétrier de payer l'Entrepreneur? On peut, fui- vant moi, prendre ou l’un ou l'autre de ces deux moyens. L'Entrepreneur de l'enlèvement des boues pourroit joindre cette entreprife à la fienne; ce qui le mettroit en état d’avoir un plus grand nombre de voitures, & de faire enlever avec la plus grande celerirc. Au refte, je fais que la néceñlité de ces précautions a déjà crée prévue par MM. les Régiffeurs généraux pour le Roï, des poudres & Salpètres de France, & qu'ils s'occupent des moyens de tirer le plus grand parti de cette immenfe reflource. Ceite efpèce d'abandon des matériaux falpêtrés , n’eft pas MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 327 le feul vice qui soppofe à la récolte du Salpètre. L’aveugle routine dans laquelle les Ouvriers ont vieilli, & dont on ne peut, pour ainfi dire , les détacher, y met encore un autre obftacle. Les Salpétriers de Paris dépendent en quelque façon de leurs. Ouvriers ; & fi on parvient à perfuader le Maître, les Ouvriers ne l’étant point, ils confervent obftinement leur pro- céde défeétueux. J'ai vu des Maîtres écouter avec plaifir les principes qu’on leur donnoit, mais qui n'ofoienc les pratiquer , dans la crainte d’être abandonnés de leurs Ouvriers. Quelles font les fources de cette crainte ? Le battage des plâtras à bras d'hommes, opération pe- nible qui s'exécute dans les ateliers. Oui, c'eft cette opc- ration qui aflervit le Maître à l'Ouvrier, parce que ce pre- mier ne peut que très-difficilement remplacer des Ouvriers accoutumés à ce dur exercice; & que tant que le Maïtre Salpétrier n'aura pas d'autres moyens pour faciliter ce travail, il fe verra continuellement dans cette dépendance. Les Salpètriers de Touraine font ufage de plufieurs ma- nières de moudre les pierres falpétrées. Les uns fe fervent d'un moulin en fer de fonte, femblable en grand au moulin à café. Ces moulins font mis en mouvement à l'aide d'un cheval. J'en ai vu à l'Arfenal de Paris quelques-uns, que MM. les Régifleurs ont fait conftruire pour eet ufage. D'autres Salpétriers fe fervent d’une meule tournante, pofce debout fur une autre meule giflante. Cette machine eft également mife: en mouvement par un cheval. Les Salpétriers de Paris pour- roient employer ou l’une ou l’autre de ces machines, pour fe: débarrafler des Batteurs de plâtras qui leur fonc la loi en faifant moins de befogne. Au défaut même de ces moulins qui pourroient paroître trop embarraflans, par la neceflité d’avoir un cheval dreflé à ce travail , il feroit aifé de faire mouvoir une meule par le moyen d’un tambour. Un homme feul, par fon propre poids, fufñiroit pour cet objer. Cette machine eft trop fimple, pour qu'il foit néceflaire d'entrer dans un plus 328 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. long détail : un arbre debout, un rouet, un arbre de couche; une lanterne & le tambour la compofent en entier. Au moyen d’une femblable machine, les Maîtres Salpé- tiers , avec de fimples Manœuvres fans connoiflance, feroient leur ouvrage, & ils pourroient recevoir les renfeignemens qu'il eft Pie de leur donner. Jai remarqué ; avec regret , que dans leur leflivage mal exécute, ils rejettent beaucoup e Salpêtre, & j'ai trouvé ces matières leflivces fouvent plus riches que des terres même qu'on lave chaque jour dans plufieurs nitrières. Il eft encore efentiel, outre la manière d'exécuter le leffivage fuivant les règles de l'Art, de leur apprendre à faturer ; ils le favent & l'exécutent fi peu, que jamais ils n’obtiennent autant de Salpêtre que leur cuire en donneroit à coup sûr , fi elle étoit traitée convenablement. C’eft en prêtant l'oreille à ces utiles leçons, que le Salpé- trier de S. Denis près de Paris, eft parvenu à doubler & au delà fa récolte en Salpêtre. Comme ce n'eft point ici le lieu de traiter de ces deux opérations , je renvoie à leur article. On doit voir par l'article feul des démolitions de la Capitale, quel parti immenfe on pourtoit tirer des démolitions de la plus grande partie des autres villes du Royaume. Dans toutes, ou peu s'en faut, on conftruit avec des fables, des plâtras , OU des pierres falpétrées. Il eft vrai que ces derniers matériaux ne le font pas par-touc aufli abondamment, & j'en dirai les raifons en parlant des craies& des tuffaux ; mais il eft des pro- vinces où ils font extraordinairement riches. MM. les Régifleurs généraux ont répandu trop de lumières dans leurs obferva- tions fur la province de Touraine, où ces matériaux falpétrés abondent, pour rien laifler à HéGéer fur cet objet. Ce que je pourrois dire de plus, ne feroit qu'une répétition fuperflue. L'Orléanois , le Berry , la Marche, le Poitou, la Beaufle, le Nivernois, l'Auvergne , notamment la partie de cette pro- vince qu'on appelle la Limagne » la Normandie, fourniflent ayec abontance les mêmes matériaux falpétrés. J'ai vu des fables MÉMOIRES SUR LA: FORMATION DU SAIPÊTRE, 329 fables de démolitions, dans la ville de Caen, fa'pétrés à 8 pour 100, &la quangité de ces matériaux eft fi grande, qu ‘elle eut fournir deux ateliers qui fabriqueroient par annéc 2$ milliers de Salpétie chacun. On doit trouver {les mêmes reflources dans les grandes villes, comme Lyon, Bordeaux, Marfeille, Rouen, Lille, &c. & généralement (dans toutes les villés (des provinces que je viens de nommer. Je ne faurois top le tépeter; il eft d'autant plus eflentiel de s'attacher aux démolitions ; qu'avec cette reflource prodigicufe pour la récolte du Salpétre, on ne nuira en aucune manière au repos & à la tranquillité des Particuliers; & qu'en leur tant même les moyens de rem- ployer dans les reconftruétions quantité de vieux matériaux falpèrrés , qui caufent la ruine des bâtimens, on pourvoit en partie à la sûreté de leur perlonne. Par-touc où les démolitions feront aflez abondantes pout entretenir un atelier, il fera aïfé d'en établir. Je prévois, à la vérité, qu'il y aura nombre de bourgs & de villages où ces matériaux ne feront jamais en aflez grande abondance pour procurer aux Salpétriers de quoi y trav TE avec avantage, & que, par une fuite néceflaire, les démolitions de ces bourgs & villages refteroient abandonnées, fi: on ne fait en forte de parer à cet obftacle. Sa Majefte pourroit engager chaque Communauté à . cette entreprile pour fon compte. Un Particulier autorilé , au befoin même encouragé à ce travail par quelques légères exemptions, pourroit renfermer fous un appentis les matières qu'il auroit ramaflées dans les reconftruétions, & les lefiver dans un temps où l'intempérie de la faifon interromproit fes travaux champêtres. Pour lui faciliter cette befogne, le Roi feroit les avances d’une très-petite chaudière que l'on confie- roit au Curé ou à l'Echevin du lieu, avec défenfe de la faire fervir à d’autres ufages. L'indemnité de cette avance mo- dique pourroit, au refte , être retenue proportionnellement à l'intérêt , fur la livraifon du Salpètre. L’Infpedteur de [a pro: vince feroit chargé en même temps, & de l'inftruétion de ce do 330 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Particulier, & du foin de veiller à ce que les matériaux de démolitions fuflent ramaflés avec exactitude. ARE GALSE AT: Des Tuffaux. Dr routes les matières de démolitions , la plus abondante eft le tuffau de Touraine. C’eft une pierre fort tendre, de couleur blanche. Les carrières de cette pierre fe trouvent à Montrichard & aux environs, fur la frontière du Berry. Elles fonc fouterraines ; mais l'entrée feule eft falpétrée; l'intérieur ne left point du tout, quoique depuis long-temps les furfaces en foient découvertes. Je dirai ailleurs ce que je penfe de cette différence. Cette pierre, aufli-tôr qu'elle a un contaét avec l'air, fe falpètre dans toute fa mañle de l'épaifleur d'un pied & demi. J'ai vu à Palluau, en Berry, des rochers fervanc de fondations à un château, falpêtrés comme les murs de l'édifice même. C’eft avec cette pierre que l'on bâut dans toute la Touraine ; & c’eft à elle que lon doit la grande quanté de Salpètre que fournit cette province. Elle fe nitiñe expolce a la pluie & au foleil, comme à couvert; & jai trouvé des murs de jardins fans couver- ture , falpêtrés comme ceux des habitations mêmes. Il exifte encore à St Genoux, près de Palluau, une églife aban- donnée , dont les murs très-cpais & découverts ou entiè= rement falpétrés. Enfin, tour ce qui eft bâti avec cette pierre eft chargé de Salpèrre ; ;)& ceft en parcourant cetté province, que Jai remarqué jufqu'où pourroit fe porter la récolte de cette ma- tière, fi on pouvoit déterminer les habitans à la recuaillir foigneufement. Ceux de Valencey, Ecueïlley, Châtillon, Cl lion, Loches ;, Mézieres & le Blanc, en perdent une quantitc prodigieule. & aufli riche que tous les matériaux de cetre efpèce que l'on trouve fur les frontières de la Touraine & du Berry. MÉMOIRES SUR ca FORMATION DU SALPÊTRE. 331 ANRT IACNESE LIT Des Craies. = D EPU1S long-temps on fabriquoit du Salpêtre avec les craïes naturellement falpétrées, & cependant la Compagnie des poudres avoit négligé de fixer fon attention fur cet objet. I] étoit réferve à MM. les Régifleurs généraux d'en faire une recherche exacte, & de mettre ces matières en œuvre avec avantage. Aux foibles ateliers qu'on voyoit aux environs de la Roche- Guyon en Normandie, il en a fuccédé tout à coup de bien fupérieurs, & dans ce canton, & dans la Bourgogne, la Brie, & la Bafñle-Normandie. J'ai vu & examiné les craies de Pont, Fontenelle, Chau- mont, de Montereaw-fur-Yonne, Rangiport, Evreux, Dreux, Louviers, Rouen & Dieppe; elles donnent toutes beau- coup de Salpérre. Quoique cette terre ait la propriété de fe nitrifier à l'air, elle n'eft point pour cela pénétrée de Salpétre dans coute fa mañle. Celle, par exemple, qui eft recouverte par le fol, n'eft point falpétrée, quoiqu'elle ait la faculté de le devenir: il faut de toute néceflité le contaét immédiat de l'air, comme on le remarque le long des côteaux & dans les coupures pratiquées pour les habitations. La craie expofée de la forte ne tarde pas à fe nitrifier; & ce qui doit détruire le faux fyftème de la néceflité d’une expolition au nord , c'eft que dans toutes les politions , la craic fe {alpètre également. Il femble même que sil étoic quef- tion d'adopter une expoftion particulière , l'expérience feroit choifir celle du midi. Toutes les craies ne font pas de qualité à fe falpétrer, témoin celles de Champagne & roues celles qui font fur le bord de la Seine depuis Rouen jufqu'au Havre. On Juge par les ;cailloux qu’elles renferment, que ces craies font fembla- bles à celles qui fe nitrifient; mais foit par leur dureté , foic Toi 332 MéMorres Sur 14 FOR Z2210N DU SALPÈTRE. par da perte-abfolue de la fabftance néceflaire à la nitrifica- rion. il eft certain que .ces. dernières n'ont pas la propriete de fe falpétrer. Généralement toutes les craies Icgères & douces au toucher, & qui donnent , en les mangeant, une faveur tirant à peu près für le fucré, fonc très-propres à fe nitrifier. J'en ai vu à Evreux acquérir cette faveur , & développer parfaitement l'acide nitreux après trois mois d'expolition à l'air. Jen ai vu de même en trés-grande quantité à Eflone, qui, mifes en couche, fc font falpêtiées , quoiqu'auparavant ce traitement elles ‘ne donnaflent aucun indice d'acide. À Montereau on fit fous mes yeux une couche de ces craies, qui, huit mois après, fut falpêtrée à deux livres par cent deterre. La régénération du nitre dans les craies n'eft pas moins prompte que la nirification : jai vu lefliver à la Roche- Guyon des craies pour la feconde fois, qui rendoient autant de Salpêtre qu'à la première; & cela, fans qu'on eût em- ployé d'autre fecours que la feule expofition à Pair. Après ce court expolé, on peut juger de l'avantage que les craies doivent avoir fur les autres terres, & de quelle uti- lité elles feront à lavenir pour la fabrication du Salpêtre. Mais malgré ces heureufes difpofitions , comme la manière de les travailler eft encoreinconnue, & que, jufqu'à prélent, on . n'a rien écrit fur cet objet, je vais faire connoître les moyens d'en tirer le plus grand parti. Il eft deux manières de former une nitrière avec les craies. La première, en grattant les rochers de craie, & en raflem- lant des furfaces qui font pénétrées d'acide nitreux. La feconde, en prenant la craie non falpêtrée pour la faire nitrifier. Un Entrepreneur qui aura dans fon voifinage une quan- tité fuffifante de furface de craies falpétrées , doit les regarder comme une fource inépuifablé pour l'entretien de fa fabrique, Jai dit plus haut, que la craie n’étoit pas falpétrée dans toute fa mafle ; on n'en trouve qu'une couche d'environ un pied de profondeur , plus au moins. Le Salpétre‘en ft pref- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DÙ SALPÈTRE. 333 que tout à bafe terreufe, excepté dans les furfaces voifines des habitations ou des matières en putréfaétion , comme des fumiers. Celles-ci donnent du Salpètre à bafe alkaline. Ces furfaces érant à découvert, & par confequent expolces à la pluie & au foleil, le moment d'en faire la récolte ne doit pas être indifférent. On fait que la craie eft une terre très-avide d’eau. Si le foleil l'a defléchée , l'eau qu'elle contenoit, à mefure qu'elle Seft évaporée, a charié à la furface de la terre le Salpêtre à bafg alkaline qu’elle tenoit en diflolution, & qui y cftrefté fixé fous forme criftalline, ne pouvant pas fe volatilifer comme fon eau de diflolution. C’eft alors que la furface des craies cft beaucoup plus falpétrée que l'intérieur; & ceft aufli dans ce temps fec que doic s'en faire la récoke, puif qu'on eft sûr d'obtenir , dans un moindre volume de terre, une plus grande quantite de Salpètre. Par le mécanifme contraire, äl eft fenfible que dans un temps humide & pluvieux , l’eau rentrant dans la craie, en- traine avec elle le nitre qui étoit à fa furface. On fe voit obligé pour lors d'enlever & de lefliver une plus grande quantité de terre, pour faire une récolte en Salpétre égale à celle que l'on auroit faite dans un temps fec. L'Entrepreneur intel- ligent , d’après cette obfervation , faura parer aux inconvéniens de la fafon, & choilir le temps le plus propre. Il fera aufli de la plus grande importance pour ce Parti- culier, de favoir fe ménager les furfaces, & de ne pointtrop enlever de terres à Ja fois. On doit toujours Jaïfler du Sals pètre aux fuperficies qu'on récolte ; il fe régénère plus promp- tement par ce moyen, & fournit d’ailleurs perpétuellement. Si l'avidité portoit l'Entrepreneur à dépouiller & à enlever toutes fes furfaces , il feroit forcé d'attendre bien des années da régénération du Salpêtre, qui même ne fe feroit d'abord qu'en couches trop minces pour être récoltées. C'eft ce que J'ai remarqué à Méntereau{ur-Yonne. L'Entrepreneur doit donc ménager habilement, fes furfaces, pour -pouvoit faire chaque année une récolte abondante de 334 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. énatières falpétrées. Il pourroic même , à la rigueur , en faire deux tous les ans; mais c’eft aflez, felon moi, de fe borner à une feule. On trouvera davantage de Salpétre à bafe alka- line, ee qui diminuera la dépenfe d’alkali dans l'atelier. Il n'en coureroit d'ailleurs pas plus à l'Entrepreneur en frais de tranfport, échelles, ponts, & autres uftenfiles, pour faire cette récolte double. Les craies mifes à couvert après leur leflivage, & amendées avec des arrofages très légers de fucs végéraux & d’eau de buanderie , donneront, après une année, aflez de Salpètre pour être travaillées de nouveau. Cependant, comme il feroit plus avantageux de laïfler ces verres s'enrichir par un plus long féjour , le Conftruéteur doit recourir à fes furfaces, sil ne les a pas toutes récoltées, pour fe donner , par ce moyen, le temps d’attendre la régénération des premières terres mifes fous les hangars. Si une heureufe polition lui fournifloit aflez de craies falpêtrées pour fournir à un travail de trois années confécutives, fans toucher aux premières craies, & qu'à cet avantage il pût ajouter celui de joindre à fon leflivage la même quantité de terres que doit lui donner fa récolte an- nuelle, alors fa fabrique fe trouveroit doublée pour le produit. C’eft ce qu'a très-bien reconnu l'Entrepreneur d'Evreux , qui travaille déjà de cette manière. À la vérité , on fe voit forcé tous les ans d'augmenter les hangars en proportion de cette augmentation des terres ; mais on doit d’autant moins regretter certe dépenfe, que cette plus grande quantité des matières fera our le Conftruéteur une moiflon perpétuelle & abondante, qui l'exemptera pour toujours de récolter, & fera la richeffe de fon atelier. On peut d'autant plus compter fur ce que javance , que le fieur Alexandre de la Roche-Guyon, monté préfentement pour fabriquer vingt milliers de Salpêtre par an, produit qu'il augmentera encore à l'avenir, en fournit un exemple fenfible & conftant. Quoique les craies foient en général très-communes, fur- tout dans la province de Normandie , elles ne donnent cepen- dant pas autant de Salpétre qu'elles font fufcepübies d'en MÉMOIRES SUR LA FORMATION PU SALPÊTRE. 335 donner, parce que les furfaces font rarement découvertes, & que les craies n’ont la faculté de fe nitrifier que dans cette circonftance. C’eft encore dommage que les furfaces qui bor- dent la Manche en Normandie, foient baignées par les caux de la mer. Les craies, dans cette partie du royaume , font de nature à fe falpétrer; mais le fel dont elles font imprégnées empêche la formation du falpêtre (*); & comme le fela la propriété de grimper, il arrive jufqu'à la patie la plus élevée des mafles de craies. J'en ai mâché , que je prenois à la hauteur d'environ deux cents pieds, & qui étoient falées comme celles baignées par le flux & le reflux au niveau de la mer. Le fel que ces craies contiennent , leur eft abfolument étranger ; elles font fi difpofces naturellement à donner du Salpètre de préférence à ce fel, qu'elles en produifent dès qu'elles font aflez éloignées de la mer pour n'être plus im- prégnées de fel. J'en ai trouvé à Dieppe, à droite & à gauche du port , qui font aflez falpéuces pour fournir un atelier; & qui, quoiqu’attenantes aux bancs de craies falées, ne le font Pas , parce que la mer n’en baïgne pas le pied. On en ren- contre encore d’autres aux environs de la ville & loin des ha- bitations, fur les chemins , qui ne doivent le Salpétre qu’elles contiennent, qu'à leur difpofition naturelle à le former. Ces obfervations prouvent, 1°. que ces craies font dif. pofées à donner du Salpêtre, & non pas du fel; 2°. que ce lel ne fe convertit point en Salpêtre dans les terres ; 3°. que lorfque ces craies font imprégnées de fel marin, elles ne donnent pas de Salpètre , fur-tout fi l'on fait, comme l'Au- teur du Mémoire Jur la formation du Salpétre, un mélange d'un fixieme de {el & de craie; mélange entièrement difpro- portionné à tout ce que l’on trouve dans la Nature & dans les matières falpétrées. (*) Note des Commiffaires. Les craies, quoïqu'expofces à l'air dans des cir- conftances favorables en apparence, ne fe falpêtrent qu'autant qu'elles reçoivent des émanations de matières végérales on animales en putréfaétion. C'eft parce que cette circonflance manque au bord de la mer , que les craies des falaifes de Normandie ne font point falpétrées. 336 MémMorrés suk LA FORMATION pu SALPÉTRE. Ces oblervations conduifent naturellement à ure autre; ceft qu'ayant fous la main une teire qui donne fi facile ment du Salpétre, on ne doit pas fe reftreindre à n'en tirer que de certe merne terre lortqu’elle eft en furface. Il ne s'agit donc, pour avoit du Salpétre des craies non falpérées , mais fuiceptibles de le devenir, comme de celles qui le font déjà, que de réunir les moyens les malleurs & les plus avanta- geux. En conféquence , cout Particulier qui pourra fe pro- curer des craies non falpétrées, par la raïton qu'elles ne font pas decouvertes, entreprendra, sil le veut, de faire avec lucces une nitrière arüficielle. Pour le tranquillifer fur les frais que cette nirière occafionnera ; & pour saflurer en même temps de la propricté des terres non falpétrces qu'il voudra employer sal pourra; avant tout , prendre une voiture en- viron de ces craies, qu'il renfermera fous un hangar ; ; il les concaflera, & les arrofera avec un mélange à parties égales d'eau de fumier, de buanderie & d'eau légèrement {alpé- trée à un demi-degré de l'aréometre, juiqu'à ce que fa terre foic bien Pme de Si ces craies font de qualité con venable, dans fix mois il y reconnoiïtra la préfence du Sal- pêtre, & il acquerra la certitude de la réuflite de fon en- treprife. Il ne fuffic pas de copier la Nature, pour fe donner des furfaces fal Ipétrées. Ja vu à Eflone, à Mo fereat & à Fonte- nelle, des murs formés avec des craies taillées , refter expofés de la forte, l'efpace d'une année & plus, fans indiquer de Salpètre. On a imaginé que cette ablence provenoit de ce que ces murs étoient ifolés & denues de communication avec la mafle de la terre qui devoit leur fournir une humi- dité néceffaire ; cependant ces mêmes murs, brifées & mis en couches , à la manière que je viens d'indiquer, & que je l'ai fait pratiquer à Montereau , ont donné très-prompte- ment du Salpètre. D'un autre côté, fi l'on confidère que les craies expo- fées fur des murs en pleine campagne , fe font falpétrées , on ne peut condamner les murs formés à couvert. La feule différence MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 337 différence de ces murs aux couches , eft, à mon avis» que le développement de l'acide nitreux devient beaucoup plus long dans les murs, & que le Fabricant, impatient de jouir, n'a pas donné à ceux que je viens de citer le temps de fe nitrifier. Au furplus, je ne confeillerai jamais cette voie, que je crois très-inférieure à celle des couches, & beaucoup moins certaine & moins prompte. Par-tout où j'ai trouvé des craies propres à fe nitrifiet ; J'ai remarqué que la terre du fol des habitations étoit aufli tres-falpétrée. Comme il eft fort avantageux d’avoir des terres falpétrées pour les premiers arrofages , on trouvera par con- féquent fur les lieux mêmes les matières néceflaires à l’entré* rile. Lorfqu'un Particulier fera déterminé à sy livrer, 1l fera choix ; en premier lieu, d'un emplacement aflez fpacieux pour y conftruire un hangar de quatre cents pieds de long , fur trente- cinq à tente-fix de large. Il faut qu'il foic à l'abri de toute inondation , & cependant que le Conftruéteur foit afluré de ne jamais manquer d’eau, foit par le moyen d’un puits, foit par quelques autres reflources. Cet emplacementtrouvé, il conftruira d’abord cent pieds de hangar; 1l fera enfuite l'amas des terres falpétrées qui fe trouveront dans les habitations , fuivant l'efprit de lArrêét du Confeil du ...... qui l'y au- corife. [l pañlera ces terres à la claic, pour en féparer les pierres ; il leflivera d'une part lefdires terres, & de l’autre les pierres, quil rejettera après leur leflivage. Après avoir mêlé ces terres falpêtrées avec les craies, il fera un amas d'eau de fumier & de buanderie, & les jettera fur un creux à fumier, conftruit de la manière que je l'indique dans mon premier Mémoire. Ces opérations finies , l'Entrepreneur prendra des craies, & les brifera par morceaux, dont les plus confide- rables n’excéderont pas la grofleur d'un œuf. Il en étendra, fur le fol & dans tout le travers de fon hangar , une couche de trois pieds de largeur fur quatre pouces d’épaifleur ; il arrofera cette terre ainfi préparée, avec fon eau falpètrée & celle de fumier, dans laquelle le fumier même doit être délayé, V v 333 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. On aura foin d'inonder fortement la craie, parce qu'étant sèche , elle peut abforber beaucoup d'eau. Des qu'elle fera humedtéeau point de devenir en mortier folide, on la relevera à la pelle, pour rendre le melange plus uniforme, & pour en former une couche de quatre pieds de hauceur fur coute la lon- gueur & largeur du hangar. On laiflera feulement tout au tout de cette couche, un petit paflage d'environ un pied. Le hangar fera fermé exaétement avec des craies délayées de même & avec la même eau. Pour rendre cette clôture folide, on jette cette matière entre des planches formant l'épaifleur du mur, & on ne lève ces planches qu'après que les craies ont pris aflez de confiftance pour fe foutenir. Cette méthode eft bien préférable à celle de faire un mur en ap- pareils de craies, ou de fe fervir pour mortiers de ces mêmes craies délayées. Jai vu des Maçons conftruire de ces fortes de murs, qui fe font bientôt écroulés, parce que la craie taillée perdoic fa folidité en shumeétanr. On ménagera de douze en douze pieds une ouverture d'un pied carre. Cetre ouverture fe fermera feulement avec un volet en planches. Ce n'eft pas ici le moment d'entrer dans les différens détails qui me décident à adopter les moyens que jindique; on les verra à l'article Mitricre. L'Entrepreneur meublera de la forte un hangar chaque année , ce qui lui donnera trente-fix mille pieds cubes de verres environ; en n'en leflivant que douze mille pieds tous les ans, le produit le plus bas que j'aye conftaré, fera de deux livres par chaque pied cube, & par conféquent de vingt - quatre milliers de Salpêtre. Ce n’eft poinc ici une aflertion hafardée , on peut en voir la preuve dans la nixière de M. le Mar- quis de Chaumont, où, après une année d'expofition de cette manière , les terres donnoient, en les prenant au deflus , au bas & au milieu de la couche, deux degrés au pèfe-liqueur; ce qui revient à deux livres pour cent (*). : (*) Note des Commiffaires. On a lieu de craindre que ces produits ne foient forcés, fur-tout pour un fecond ou troifième leflivage des mêmesrerres. Les Commillaires de l'Académie n'ont jamais obrenu de réfultats à beaucoup près aufh avantageux. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 339 Pendant les crois années ci-devant dires, on bouleverfera les terres, & on les arrofera fortement, fur-tout la première ainée, avec l'eau compofce dont j'ai parlé plus haut. Les deux dernières années, on fe contentera de les retourner de fix en fix mois, fans y rien ajouter; cependant fi elles paroifloient trop sèches, on les arroferoit feulement avec de l’eau ie le prefcris un intervalle de trois ans, parce que j'ai vu les Entrepreneurs, op empreflés de jouir, perdre le fruit de leurs opérations , pour avoir voulu lefliver leurs craies prépa- rces , après une feule année de repos. Pour qu'une opération de leflivage foit avantageufe, il ne fufht pas que les terres donnent du Salpètre , il faut encore qu'elles en donnent aflez pour indemnifer des frais du leflivage & de l'évaporation, & qu'au moyen de leurs richeñles elles puiflent monter les eaux après la quatrième bande entre fix & huit degrés. J'ai vu de ces terres trop peu riches, augmenter les eaux à la pre- mière & feconde bande, & perdre confidérablement à la quatrième ; c'eft ce qui décourage un Fabricant , & difcrédire une entreprile qui, fans cet inconvénient, auroit eu le plus heureux fucces. Gerneft pas encore le feul obftacle que caufe l'emprefle- ment de jouir. L’acide nitreux eft le premier produit des craies ; l’alkali végétal ne s'unit à cet acide qu'après fa for- mation : Jai beaucoup examiné de terres de toutes efpèces, je n'ai jamais trouvé d’alkali feul & libre dans ces terres : on trouve du Salpêtre à bafe alkaline dans les craies qui font à portée d'être abreuvées de fucs végétaux ; mais celles qui font éloignées de pareil fecours , n'en produifent qu'à bafe terreufe : en conféquence, la quantité d'alkali qu il faut em- ployer pour convertir en Salpéètre parfait le Salpétre à bafe terreufe , fait une dépenfe au Fabricant qui lui enlève une grande partie de fon bénéfice. J'ai vu des craies de cetre ef- pèce, quine rendoient qu'une livre de Salpètre pour une livre de potafle. Chacun fait que la potafle n'eft point un alkali Vvi 340 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. aflez pur, & quil n'y a qu'environ huit à dix onces d’al- kali par livre de cetre matière. On peut, en comparant le ix adtuel de la potalle à celui du Salpètre, juger du bé- néfice d’un Fabricant, fi la Régie n'avoit pas foin de l'ap- provifionner à meilleur compte. Le féjour des craies fous les hangars a donc pour objet d'augmenter la quantité d'acide nitreux & celle d’alkali, par la décompofition complette des matières végétales qui sy trouvént mélées, tant par le moyen des eaux de fumier , que par le fumier en fubftance délayé dans l'eau, comme je viens de le dire. Que tout Entrepreneur de nitrière fe pénètre donc forte- ment de cette maxime indubitable : op d'empreflement à récolter, & à jouir, fair perdre tour le fruit du travail le plus adif. Celui qui voudra jouir dès la première année, re- cueillera peu ; les annces fuivantes ne feront pas plus avanta- geufes, & d'année à autres il fe verra toujours dans la mal- heureufe pofñtion de travailler mal & de gagner peu; au lieu qu'en fe ménageant d'avance trois années de repos , il aura un fonds riche & qui fe perpétuera. Un Particulier qui plante une vigne ou qui conftruit une maifon, n'attend-t-il pas davantage avant de retirer fes revenus >? & pourquoi le Fabriquant de Salpètre n'attendroit-il pas de méme pour doubler les fiens ? ART To CREME UNMEVE Du leffivage particulier des craies. IL n'étoit pas naturel de s'attendre à trouver autant de difficultés qu'on en rencontre dans le lefivage des craies, ces terresétant de nature calcaire aflez pure. Il eftétonnant que l'Aureur du Mémoire fur la formation du Salpêtre ait paflé ces difhicultés fous filence ; elles méritent une attention par- üculière. | On pratique deux méthodes pour lefliver les craies, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 341 La première, que l’on appelle par filtration , confifte à mettre la craie dans un cuvier, & à verfer deflus l’eau qui doit sécouler par un trou percé dans le fond de ce cuvier. Si les craies font en poudre, elles s’oppolent abfolument au pañlage de l'eau; elles fe tapent même fi fort, qu'elles repouflent cette eau à leur furface. J'ai vu de ces craies en poudre fe deflécher entièrement dans la partie inferieure, tandis que la fupérieure étoit recouverte d'eau. J'ai rencontrai cette difficulté après avoir monté & garni un atelier de 80 euveaux, & c'eft à cette difficulté que l’on doit l'idée de retirer l'eau de deflus la craie après avoir braflé & laiflé dépofer : feconde méthode en ufage , qui s'ap- pelle Ze braffage. Pour préférer lun de ces deux moyens à l'autre, il eft eflentiel de calculer les avantages & les frais de chacun en particulier. Dans un atelier de foixante cuveaux divifes en quatre bandes égales, j'ai vu employer chaque jour huit cent trente- cinq livres de craies, & pour le leflivage de ces craies , deux mille cinq cent vingt livres d'eau. On obtenoit régulièrement dix-huit cents livres d’eau, donnant fix à huit degrés à l'arcomètre ; ce qui indique cént huit livres de Salpétre au produit le plus bas : mais lon étoit forcé d'occuper fix Ou- vriers tous les jours , foit au battage de ces craies, foit au rechange des bandes, au braflage & décharge des cuveaux. Dans un autre atelier , par filtration de quarante - huit cuveaux divifes également en quatre bandes, on employoit par jour douze cents hivres de ciaies avec douze cents livres d’eau, dont on retiroit huit cents livres d'eau de douze à quinze de- grés , qui donnoient au plus bas produit quatre-vingt-feize livres de Salpêtre. Deux Ouvriers fuffiloient à ce travail. Comme on le voit, la dépenfe de latelier par le braf= Jage eft de fix livres, en payant chaque Ouvrier à une livre par Jour ; tandis que celle de l'atelier par fltrarion n'eft que de deux livres. Ainfi le produit de l'atelier par le braflage , 342 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. compenfation faite de la dépenfe , eft bien inferieur à celui de iatelier par leflivage. Certe difference vient de ce que ce dernier emploie une plus grande quantité de terres. Une autre oblervation, c'eft ue les fix Ouvriers font occupés conftamment dans l'atelier du braflage, tandis que les deux Ouvriers peuvent, en fat- fant leur leflivage , vacquer encore à d’autres occupations nc- ceflaires dans leur atelier, comme le travail du hangar, &c. On ne doit pas oublier non plus, que par cette dernière méthode on a, fous un moindre volume d’eau, une quantité de Salpêtre Cgale à celle que l'on obtient par le braflage, ce qui diminue les frais d'évaporation. F L'expofñtion des deux moyens de lefliver les craïes que l'on vient de mettre fous les yeux, femble décider en faveur de celui par filtration, comme on le pratique à Fonrenelle , à la Roche-Guyon & à Evreux. Cependant, comme parmi les craies mifes dans les cuveaux, il sy en trouve beaucoup de réduites en poudre, qu'on pourroit fe trouver dans l'in- poflibilié de filtrer, & qu'il y auroit par conféquent une perte de produit, je me fuis déterminé à confeiller l'une & l'autre méthode. Si l'on avoit pour objet de tirer la plus grande quantité poñible de Salpêtre d’une quantité donnée de terre, j'accor- derois la préférence à l'opération par le braflage. Cette ma- nière dépouille mieux les craies que la filtration ; mais les terres leflivées étant remiles fous les hangars, 1l eft avantageux de ne les pas épuifer entièrement, & il ny a rien à perdre à laifler encore du Salpêtre dans les craies en mafle. J'en ai rompu des morceaux après le lefivage; ces morceaux con- fervoient dans le centre une faveur plus marquée qu'à l'ex- térieur; ce qui fait connoître la caufe du moindre produit par filtration, malgré l'emploi d'une plus grande quantité de terres. ” Toutefois, d’après mes expériences réitérées, J'ai reconnu qu'il étoic poflible de lefliver facilement les craies par filcra- uon, en sy prenant de la manière fuivante. On fe procurera MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 343 des cuveaux plus larges & plus plats que ceux qui font en ufage dans les ateliers ; ils auront trois pieds de diamètre fur huic pouces de profondeur, avec un trou dans le fond, qui fe fermera par un tampon de bois. Après avoir clos cetre fortic , onjettera doucement dans les cuveaux, qu'il eft inutile de garnir de faux fonds, des craies ramañlces au rateau, pour évier d'y mettre celles qui font en poudre : on y verfera de l'eau jufqu'à ce qu'elle furnage de trois doigts. Dès qu'on aura laiflé imbiber pendant douze heures , on ouvrira la cham- pleure pourfaire égoutter les craies; il doit en fortir les deux diers de l'eau employée à la filtration , & cette eau fera chargée à dix ou douze degrés, fi les craies font riches de trois à quatre pour cent. D'une autre part, on montera douze cu- veaux plus hauts & plus étroits que les premiers , & femblables à ceux que l'on emploie dans les ateliers de Montereau & d'Eflone. On les divifera en quatre bandes cœales. Ces cu- veaux feront deftinés à la leffive, par le braflage , des craies en poudre qui fe trouvent néceflairement dans tout ateiier. On évitera, par ce moyen, les frais de battage & la mani- pulation difpendieufe du braflige. Les eaux feront aufli plus riches pour la cuite, & les terres pourront être plus facilement mifes fous les hangars; elles feront plus folides que celles qui fortent du braflage, toujours aufli liquides que l'eau même, & on ne fera pas oblisé de les mettre defié- cher dans de vaftes endroits capables de les contenir & de les empêcher de couler hors du hangar. Je donne la préférence à des cuveaux plats, afin de ne pas mettre trop de craies les unes fur les autres ; elles écra- fent celles qui font deflous, & empéchent la filtration. Lorf- que la craie fe foutient en morceaux, cette terre avide d'eau abforbe incontinent celle qu'on lui préfente, & elle pénètre jufqu'au fond de la mafle ; la diflolution mettant en- fuite un partage Cgal entre l'eau contenue dans la craie & celle qui l'avoifine, on enlève par ce moyen le Salpêtre qui y eft renfermé, fans détruire la foible agrégation des mailes de cette terrc. 544 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Après l'extraction de la première eau qui eft la meilleure; celle que l'on ajoute, étant moins riche que celle que les” craies ont retenue , s’unit à cette dernière ; & par la loi de diflolution , elle parvient à ne laïfler dans ces craies que de l'eau pure, ou au moins qui ne contient plus qu'une très- pete quantité de Salpêtre, fi tourefois on lui a donné le temps de faire complètement cette opération. Mais, comme je l'ai dit, il ny a point d'inconvénient de laïfler du Sal- pètre dans les craïes après leur levage. Ce Salpêtre ne refte point renfermé dans le centre de la craie, il eft charié à la furface par l'évaporation de l'eau contenue dans cette terre. Jai tenté une infinité de moyens pour rendre la craie fil- trable ; aucuns ne m'ont réuñli. Je ne citerai que celui d’avoir réuni trois parties de fable avec une de craie; cette petite quantité feule de cette dernière a fufli pour opérer la diffi- culte de filtrer. J'ai vu une machine avec laquelle un homme brafloit for- tement l’eau & la craie, au moyen d’une manivelle qui fai- foit mouvoir dans un cuveau une croifee en fer. Comme les moyens les plus fimples méritent toujours la préférence quand ils arrivent au même but, je ne confeille pas de faire ufage de cette machine. On à imaginé que la caufe de la difficulté de la filrra- tion de l'eau à travers la craie, provenoit d'une matière gé- latineufe qui lui étoit unie. J'ai fait difloudre de la craie dans les acides nitreux & vicrioliques; il eft refté crès-peu de ma- tière indifloluble, & cette matière fautoit avec éclat au lieu de s'enflimmer; ce quiindique plutôt une terre argileufe qu'une gelce. J'ai fait aufi évaporer quatante muids d'eau provenant du leflivage des craies; il eft {enfible que ces qua- rante muids réduits à un feu, ce dernier n’auroit été qu'une gelée très-forte, fi la matière gélatineufe exiftoit dans les craies , comme on l'a penfc. Pour moi, je crois que la pro- pricté qu'à cette terre de retenir l'eau , provient de fon ex- trème divifion, & de fa tendance à fe réunir & à former des mafles. On ne voit jamais s'écouler une goutte d'eau dans les MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 345$ les ateliers & habitations creufés dans les craies; ce qui prouve que c'eft une propriété inhérente à cette terre, de soppofer au pañlage de l'eau. ARE LC T EMEVE Des Nirrières. Ja parlé des démolitions, des tuffaux & des craies, & JE crois avoir fait voir que ces trois parties pouvoient fournir une ample récolte de Salpêtre ; mais il eft une autre fource plus abondante & plus intéreflante enêore à faire valoir , parce qu'elle eft plus gencrale; c’eft celle des nitrières. À peine at-on pris le parti d'en établir en France, que de tout côté on a cherché des modeles; on a ajouté même à ceux que nous ont fournis la Prufle , la Suède, la Suifle, l'ile de Malte, &c. Peut-être auroit-on à s'applaudir de ces recherches & des moyens qu'on a trouvés jufqu'à ce jour, fi l'expérience , cette grande maïtrefle , feule capable de mettre un fceau certain à nos obfervations, ne venoit anéantir la: plupart de ces moyens, & nous indiquer une méthode d’ap- procher davantage de la perfection, foit pour le choix des matières & pour les conftruétions , foit dans le produit & les dépenfes journalières. L'Ouvrage que j'eus l'honneur de préfenter à cette illuftre Académie en 1777, fe reflentoit encore de la nouveauté de l'entreprife , quoiqu'il ne fut pas mon eflai fur cette matière. Je confcillois dans cet Ouvrage, de conftruire dans chaque hameau des hangars-écuries , d'y faire tranfporter, une fois feulement, les terres falpêtrées de chaque habitation, & d'y renfermer les mourons & les chèvres du village. Je me fuis aflez étendu fur le produit afluré & confiderable de ces fortes d’établiflemens , pour n'avoir plus rien à ajouter. Je répérerai feulement, que j'ai vu dans le Berry des bâtimens femblables, qu'on appelle bergeries , où l'acide nitreux fe trouvoit en fi X x 346 MÉMoIREs SUR EA FORMATION DU SALPÈTRE, grande quantité , que les Salpétriers n’ofoient en travailler les terres, parce quiis ne pouvoient en obtenir du Salpètre, faute de favoir farurer & précipicer les bafes verreufes. De- puis qu'ils connoiflenc cette opération, ils ont autant d’em- preflement à récolter les terres de ces bergeries, qu'ils en avoienc à les éviter. Je peux encore ajouter à cette remar- que, que Je connois plufieurs Entrepreneurs qui ont eu le plus grand fuccès en nitrifiant des terres par cette voie; ceux de Franche-Comté la pratiquent aufli dans beaucoup d’en- droïs, en fafant repofer les troupeaux du village, fur leurs terres, pendant la chaleur du jour. Cependant, comme on ne peut que préférer les moyens qui entraînent le mois de dépenfes & de gêne, il efteflen- ticl de les chercher dans les nitrières. Je ne m'atracherai pas à rapporter les différentes méthodes que l'on emploie dans les nitrièrés nouvellement conftruires. Je ne mettrai fous les yeux que celles qui reufliflent le mieux d’après l'expérience. Toutefois, comme on a mis en ufage plufieurs moyens qui n'ont pas réufli, je penfe quil eft à ve de les faire connoître, ne füt-ce que pour épargner es dépenfes que ces mêmes expériences pourroient occa- fionner à ceux qui les tenteroïient, Les provinces de ce Royaume, dans lefquelles il exifte pré- fencement beaucoup de nitrières, font la Bourgogne, la Brefle, & fur-rour la Franche-Comté; lon en. voit déjà dans cette dernière juiqu'à cinquante-quatre d'établies. Généralement on donne le nom de nitrières artificielles à toutes ces fortes d'établiflemens. fl me femble cependant que pour une plus grande intelligence , on doi en faire une dif- tinction. J’appelle fimplemenc nitrière, celle où fe fait un amas de terres falpérrees , provenant des habitations ; & je donne exclufivement le nom de nitrières artificielles à celles qui font formées fans ces fecours avec des terres neuves prifes dans la campagne, pour les amander & les travailler fous les hangars où elles fe chargent de Salpêtre. Je ne confcillerai pas d'entreprendre des nicrières de certe MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 347 dernière efpece. Le foible produit qu'on retire de celles qui font déjà élevées, le dBrawage qu'elles auront toujours relativement à celles qui travaillent avec des terres d’habita- tions, les mélanges que jai faits moi-même avec des terres neuves expofces depuis trois ans, le peu de fuccès que j'en ait tiré, me déterminent à les condamner. On doit d'au- tant mieux fc ranger à ce fentiment, qu'on en a une preuve convaincante dans la nitrière de cette façon établie aux en- vions de Paris, & dans les deux conftruites à Orléans : quoi- qu'il faille avouer que les Entrepreneurs de ces trois établif- femens n’avoient aucune idée du travail dont ils alloient soc- cuper, & ne vouloient écouter qui que ce für. Enfin, pour fortifier invinciblement ces différentes preuves, on voit une d: ces nitrières établie à Dijon , & dirigée par les perfonnes les plus inftruires dans ce genre de travail. Maloré leurs lumières, leuts foins affidus & leurs dépenfes, le rélulrat quils obtiennent eft fi peu avantageux , qu'il n'engage pas à les imiter. Peut-on compter fur le produit des nitrières de la pre- mière efpèce? On fait qu'elles ne donnent à préfent que du Salpètre de fouilles, & qu'on ne leflive point encore les ter- res de régénération dans les nitrières de Franche-Comté. C'eft l'incertitude de cette régénération, qui renoit les Entrepreneurs en fufpens. En effet, des terres amonceïées fous des hangars ayant moins de furfaces & de chaleurs, ctant moins expofées aux vapeurs des matières en putréfac- tion, devoient-elles ffi@iñier comme ‘dans les habitations > Le réfulrat pouvoit cffrayer les perfonnes les plus imftruites. À préfent que lon approche de ce termé , j'ai vilité tous ces établiflemens, & j'ai vu avec la plus grande farisfation que la Narure fecondoit merveilleufement ces fortes d’en- treprifes. Je n'apporterai pas pour preuve de ce que avance, le produit annuel de la nitrière établie pour le compte du Roi à la rafñnerie de Befançon ; on pourroit foupçonner que les travaux rapprochés de ces deux parties ajoutent au pro- X x i] 348 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. duit des certes, foit par les écumes, foit par les autres ma- tières falpérréés de ce genre. Je peux aflürer cependant que, Jai fuivi de très - = près. le travail de cette nitrière, & ue jai reconnu que la régénérati ion enrichifloit ces terres plus que les fecours qu'elle peut tirer des opérations de la raffine:ic. … J'ai vu la nitrière d'Aibois dans la même province de Franche-Comté : on y travaille depuis deux ans & demi les premic’es terres, & on les y leflive jufqu'à zéro, ou juf- qu'a un demi-degré de l'Arcomètre ; & ces rerres donnenc dejà deux degres & demi, terme fufñfant pour étre traitées avec. profit ; puifque la plus grande partie de celles quon lave dans les nitrières fivuées dans la partie de la Franche- Comté qu'on nomme le pays bas, n'outre-paflent point un degre. J'ai vu de même les terres fe régénérér aufli richement dans la nirière de Baume-les-Dames , où elles feront bien- tôt travaillées pour la feconde fois ; & dans celle de Serre, je puis certifier que des terres leflivées depuis neuf mois feulement ont acquis déjà un degré, quoiqu'elles aient été réduites à zéro par, un leflivage très-exact. Malgré les courfes que ces diverfes obfervations m'ont oc- cafonnécs » Jai fait l'expérience d’expoler dans un hangar ifole un mélange de terres falpétrées ÿ épuiféesapar un le£ fivage parfait, amendées &._ traitées comme je l'indiquerai ci-après. Jen avois confié le foin à une perfonne fur la- quelle Je pouvois compter. Apres trs ans, ces terres mont donné trois. degrés au pèle - liqueur , traitées avec leur poids égal d’eau : ce qui dénote trois livres de Salpètre par quintal de terre. C'eft donc après ces expériences certaines, que j'ofe comp- rer fur le fuccès de la régénération , & que jindiquerai la marche qu'il faut tenir pour avoir un fucces égal, & même fupérieur. Par. le tableau que je vais dornet des. nirrières de Franche-Comté, on jugera de ce qu'il eft poffible d’exc- euter dans le refte du Royaume. Mémotres SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 349 Il exifte préfentement cinquante-quatre nitrières en Fran- che-Comté. Une partie de ces nitrières fait amas de terres, l'autre eft en conftrution. Pour former ces ctabliflemens, on leur annèxe un certain nombre de villages. Les Entre preneurs en enlèvent les terres falpétrées, qu'ils lefivent à leur airivée à la nitrière. Ils choifflenc de préférence celles qui ont été travaillées par le Salpétrier depuis deux ou trois ans. Piufieurs de ces nitrières ont leflivé dans une année la quatiième partie des terres qui leur ont été accordées. Elles ont fourni jufqu'à vingt-deux milliers de Salpètre; de ce nombre eft celle de Mignovillars. D'autres, d'un moindre produit, ont donné cependant jufqu'à douze milliers, apres avoir leflivé également la quatrième partie de leurs terres. D'après la quantité des terres qui doivent former la con- fiftance de chacune de ces nitrières, il n’en eft aucune qui ne puifle fabriquer à l'avenir huit milliers de Salpètre au moins par chaque année. Or, après avoir tracé fur la carte les arrondiflemens de chaque nitrière en particulier, & calculé, à vue des places vuides, & fur les mèmes dimenfons, le nombre des nitrières que l'on peut encore établir, on voit qu'il fe portera facilement jufqu'à quatre-vingt. Ainfi en par- tant de ce calcul, & en ne comptant le produit de Salpé- tre de chaque nitrière qu'à dix milliers par an, on aura huit cents milliers. J'obferverai de plus, que le tiers de ces établiflemens fournira cependant annuellement vingt milliers de Salpétre. Par ce tableau réel, exiftant, & für, on peut fe former une idée de la quantité prodigieufe de Salpètre que donne- roit ke Royaume entier, sil étoit récolté de la même ma- nière. Je n'excepre de toutes nos provinces que celles de Bretagne, qui nofite qu'un fchifte plutôt qu'une terre propre à la végétation. Cette immenfe récolte, qui feroit peut-être trois fois plus forte que les befoins de la France ne l'exigent , augmenteroit encore dans les provinces où l'on n’a jamais 350 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. vu de Salpétriers; telles font la Flandre, la Picardie, la Normandie , la Brie, la Bafñle- - Bourgogne, &c. La cher du bois eft caufe que la Compagnie des poudres ne seft point occupée du foin d'établir des ate- liers dans ces Res , comme dans la Franche- Comte, la Lorraine, l'Alface, la Bourgogne, la Bref, le Bugey , le Dauphi ine, le Berry; l'Auvergne , &c. & je conçois quil croit difficile à des ouvriers peu inflruis de furmonter ces obftacles de la Nature. La rareté & la cherté du bois aug- mentoient le prix des cendres , & ces ouvriers, qui ne con- noifloient d’autres moyens pour faire du Salpétre que l'ufage des cendres, devoient infailiblement trouver de l'impofbi- lité à s'établir dans les pays où ces matières manquent. Aétuellement on nignore pas qu'à limitation des diffc- rentes fabriques établies dans les provinces où le bois eft très-cher, on peut chauffer une chaudière, foit avec de la tourbe, foit avec du charbon de terre défoufré ou non dé- foufré; on peut remplacer les cendres avec la porafle, & par conféquent conftruire des nitrières par-tout où l'on trou- vera des terres falpétrées. Où les terres font fertiles & propres à la végétation, elles font également propres à la produétion du Salpèrre : c'eft une obferv ation que J'ai faire dans toutes Îes provinces que J'ai citées & que j'ai parcourues. Il ne refte donc qu'à multiplier ces établiffemens dans tout le Royaume : & ne devroit-on pas s'attendre à voir les peu- ples concourir à la perfeétion des nitrières, pour répondre à la bienfaifance du Souverain qui les exempte de la fouille dans leurs caves, celliers & Eos perfonnelles ? Cepen- dant ce même acte de bonté eft, contre l’attente de rous les vrais citoyens, un des plus grands obftacles aux établiflemens des nitrières. En Franche-Comté, prefque tous les Entrepreneurs ont conftruit à leurs frais feuls ; nombre de Communautés , qui d'abord avoient fait foumiflion de conduire leurs terres, ont MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 3$t procedé pour fe rétraéter. Depuis l'Arrêc avantageux du Con- feil de Sa Majefté, aucune Communauté n’a vouiu s'enga- ger, par la raïon que les Salpétriers ne peuvent plus es troubler dans leurs habitations perfonnelles, ni exiger d'eux, comme auparavant cet ÂArrét, du bois & des voitures. Je fuis loin de ne pas applaudir aux vües louables & généreu- fes qui ont diétc cette loi; je fuis trop patriote , pour con- feiller aucun moyen d'autorité, & je juge par mon cœur que fi mes concitoyens connoïfloient la néceilité de fervir l'Etat par ces entreprifes uüles , ils sy porteroient avec zèle : mais comme ces nouveautés font étrangeres à leurs connoif- fances, & que leur intérêt & leur repos n'y eft pas atta- che, ils reftent vous dans un quiétifme abfolu, état plus attrayant pour eux que celui du travail. Ce ne fera donc que par l'efpoir du gain, qu'on décer- mincra quelques Particuliers à fe livrer à ce genre d’entre prife. Il faut fur-tout veiller à ce que des impofteurs ne fe fervent de ce prétexte pour faire des dupes, comme on ne la que trop vu dans quelques endroits, & que ce foit le Mi- niftère.feul qui commiflionne pour cet objet des perfonnes connues & inftruités. Puifque Sa Mijeite, en abandonnant les terres des caves & cellierss a renoncé au plus vafte magafin du produit des Salpètres , tachons d'y fuppléer par d'autres moyens qui fecondent les intérèts de l'Etat & les vües du Monarque, Aux termes des Arrêts des 8 Août 1777 & 24 Janvier 1778, on paroïit n’exclure de l'enlèvement des terres des caves & celliers', que les Salpêtriers & non pas les Entre- PRE des nicrières. Cependant dans plufieurs endroits de la province de Franche-Comté, nombre de Particuliers ont fait réfus de les donner. Cet obftacle met une impoflibi- Hte abfolue de conftruire des nitrières dans les pays de vi- gnoblés, où l'on ne rencontre des matièrés falpétrces que dans les caves. Aufñli a-t-on vu tous les Salpérriers de Bourgogne abandonner leur métier, d’après la publication des Mrrérs ci-deflus. 352 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. La fouille pour une conftruétion de nitrière diffère telle- ment de celle d'un Salpétrier ordinaire, qu'il ny auroit au- cun inconvénient à l’accorder dans ces endroits aux Entre- prencurs de ces établiflements. Une demi- journée, dans un temps où une cave neft pas garnie de vin, fuffit pour en enlever les terres ; le remplacement fe fair avec des terres sèches : le Salpétrier au contraire, qui remplace avec les ter- res de fes cuveaux, caufe toujours infailiblement beaucoup de défordres. Il eft donc plus avantageux pour l'Etat, que les nicrières fe faflent aux frais des Entrepreneurs. La fource des matières falpétrées devient inépuifable par ce moyen. On trouve dans lesmémes lieux, après dix ans, des matières aflez riches pour former un atclier pareil au premier; par conféquent méme avantage pour les temps à venir. J'ai vu des terres neuves bien choïfies, qui montroient du Salpêtre après deux années d’expofition dans les lieux où s'etoit fait l'enlèv ement, ce que J'atttibue aux murs & aux rerres falpétrées qui les touchent : car j'ai cherché combien il falloit de temps ‘aux terres d’une maïfon neuve pour fe fal- pêtrer , & J'ai reconnu qu après quatre années elles ne don- noient encore rien. Je n'ai trouve du Salpètre que dans les terres des maïfons conftruites depuis huit & dix ans. À préfent que Jai parlé des moyens d'établir les nitrières, je vais dire quelque chofe de leur conftruétion. ATRPT CL'ENVCE De la Confrruclion. LARGES Entrepreneur aura fair choix d’un terrein con- venable, à l'abri des inondations, quoiqu'à portée de ne manquer Jamais d'eau, il fera travailler à la conftruétion d'un hangar qui doit contenir en étendue la quatrième partie de fon ‘entreprife; c'eft-à- -dire, que fi le Conftruéteur fe propole de icfliver chaque année vingt mille pieds cubes de terres, fon MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 393 fon hangar doit avoir cent cinquante pieds de long fur trente de large, pour renfermer cette quantité de terres à quatre pieds de hauteur. On a beaucoup varié fur la forme, la clôture & la con- duite de ces nirrières. On les a d’abord fermées avec des claies & des paillaflons, pour avoir la liberté d’y introduire beaucoup d'air; & cela, parce qu'ayant trouvé des matières falpêtrées expofées à cet élément, on l'a cru néceflaire & cflentiel à la formation du Salpêtre. On a bientôt reconnu cependant que l’on s’etoit trompé; je dirai dans la fuite les rai- fons de cette méprife. Si la pierre ‘eft commune dans l'endroit choifi, on doit conftruire avec des murs à mortier, que l’on élevera à la hau- teur de fix pieds feulement, pour éviter la dépenfe : il fuf- fira que les Ouvriers puiflent pañler fous les tirans fans fe heur- ter la tête. Si au contraire la pierre eft rare, on conftruira le hangar fur des poteaux de bois, & on le fermera en terres battues de l’épaileur de huit pouces au moins; on lui donnera de la confiftance & de la liaïfon, au moyen de fafcines ou de paille. On ménagera au haut du mur, de douze en douze pieds, une ouverture d'un pied carré feulement , garnie de {on volet en planche. La couverture fe fera en tuiles, pierres, bardeaux ou pailles, de la manière enfin qui coutera le moins fur les lieux , quoique je donne la préférence à la couverture en pailles. Il y aura des portes placées relative- ment à la pofition du hangar, pour amener les terres & communiquer avec l'atclier. Le fol pourra refter tel qu'il fe crouvera; qu'il foit de roc, de terre ou d'argile, il fuffit de le niveller. Toutes chofes difpofces de la forte, l'Entrepreneur fera amas de fes terres falpétrces. Il en garnira, la première année, fon hangar, & soccupera en même temps de la conftruétion d'un fecond, & du foin de monter l'atelier du leflivage & celui d’évaporation, Il ne leflivera ces terres qu'après les avoir life repoler une année. J'ai vu enlever des terres encore impré- gnées de fucs végétaux, de fumiers, & d’autres matières non Yy 354 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. décompofces; dans le leflivage qu’on en faifoit tout de fuite, il en fortoit des écumes & des matières extractives, qui em- barrafloient extraordinairement le travail. Ces inconvéniens p'arrivetont jamais, quand l'Entrepreneur aura au moins une année d'avance fur fes terres. S'il en a aflez de quoi meub'er quatre hangars, qui, dans fix cents pieds de longueur, renfermeront quatre-vingt mille pieds cubes de terres , fon fuccès eft certain en les divifant en quatre parties pour les lefliver de quatre en quatre ans. Jai vu des terres dans la Normandie, la Touraine, le Berry, la Beauce, l'Orlcanois & les montagnes de Franche-Comté, donner quatre degrés au pèfe-liqueur : or, comme on peut aife- ment les entretenir à cette valeur fous les hangars, quel pro- duit afluré ne donneront pas vingt mille pieds cubes de terres de cette efpèce ? Les terres leflivées feront mifes en égout. Dès qu'elles au- ront perdu l'eau de leur leflivage, on les brifera pour en former une couche, en les mélant avec les eaux de fumiers délayés , ainfi que l'indique mon Mémoire. On peut fe dif- penfer d'y mêler des eaux de Salpèrre , elles le portent en elles- mêmes. Cette couche fera de toute la longueur & de toute la largeur du hangar, fur quatre pieds de hauteur. Comme on y aura mis dés l'origine toutes les matières à putréfier , on fe contentera de la bouleverfer une année après fa conf- tuétion ; & fi les terres étoient trop defléchces, on les arro- froit convenablement avec de l’eau de fumiers, & on les laifleroit ainfi, fans y coucher, pendant une autre année : même opération l'année fuivante. Si par hafard au bout de ce laps de temps, les terres étoient sèches & n’étoient pas encore completement putréfiées, ce qu'il eft aifc de recon- noître à l'odeur & aux débris des fubftances végétales, on les arrofera avec de l'eau pure, & on les laiflera attendre h quatrième année, terme fufifant pour leur leflivage. On avoit penfé mal-à- propos que l'air contribuoit beau- coup à la formation du Salpêtre, & c'eft ce qui avoit donné l'idée des claies, pour en introduire par ce moyen dans les MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÊTRE. 395$ terres, L'expérience a prouvé que , dans cette pofition, elles fe rapoient, & que le Salpétre s'y régénéroit mal; que d’ail- leurs la dépente de ces claies emportoit au delà de bencfce. J'ai vu à Roligni en Franche-Comté une couche montée de cette manière, expofce depuis deux ans, & qui jufqu'alors avoit fait crès-peu de progrès pour la régénération. Jai ob- fervé la même chofe à Befançon, & ee n'eft qu'après avoir démoli ces couches de douze pieds de hauteur pour les remettre en couche de quatre pieds, que le progrès de fa régénération a commencé à s'établir dans les terres. Dans mes différentes obfervations fur la formation du Sal- pêtre dans les terres d'habitations, j'ai fait une découverte, qui par fa nouveauté doit répandre le plus grand jour fur cette formation. Je vais en rendre compte. Dans la partie de la province de Franche-Comté limitrophe de la Suifle , que l'on appelle communément la Montagne , Jai wouvé des terres à Salpètre toutes particulières. Elles fe rencontrent fous les aires des granges où les laboureurs battent leurs bleds. Comme le.bois de fapin eft très commun dans ces cantons, les habitans conftruifent le plancher par terre avec des ma- driers ou plateaux de ce bois, qui repofent fur des traverfes de huit pouces d’épaileur, appelées femelles. Xl refte par conféquent entre le fol du terrein & ces plateaux un ef- pace vide de huit pouces : comme ces madriers font rangés fimplement les uns à côté des autres, & qu'ils ne fe joignent Pa exactement , les particules brifces de la paille & de l'en- vel oppe du grain s'infinuent à cravers les joints, & remplif- fenc à la longue l’efpace en queftion. Ils le rempli iflent même fi ex actement, « qu en levant le madrier, on voit fa forme imprimée fur ce refidu de Les brifces, que l'on nomme vulgairement la pouffe ; elle s'échauffe à tel point fous ce plancher, qu en y portant la main, on reflent une chaleur fupérieure à la température, Ce réfidu du végéral eft une fubftance terreufe, fort le- gère, de couleur de tabac d’Efpagne, faifant Hcrdience avec les acides, ce qui dénote quil eft de nature calcaire. Yyÿ 356 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. | JL donne quatre & cinq livres de Salpêtre par quintal de terres: mais une grande partie de ce Salpêtre eft à bafe ter- reufe. C'eft à ce réfidu qu'on doit la richefle des nitrières des montagnes de Franche-Comté, principalement de celles de Mignovillars, de Rufley, Vauclufotte, Damprichard, &c. & de toutes celles qui ont ce genre de conftruétion: dans les environs. Voilà donc de l’acide nitreux produit par le végétal feu, fans air, fans fecours des matières en putréfa&ion, fans hu- midite : car le fol de prefque toutes les granges en queftion, eft un roc vif & fec; c'eft ce qu'on pourroit appeler une analyfe de végétal par la voie sèche. Cette découverte a beaucoup accredite cette poufle, & tous les Entrepreneurs en mélent dans leurs terres, en aufli grande quantité qu'ils le peuvent. Cela eft d'autant moins difhcile, que cette ma- tière atrès-peu de valeur dans ces cantons. On apperçoit l'effet heureux de cette poufle dans les terres; elle les échauñfe confidérablement, & accélère la putréfaétion des matières qui y font mélangces. Comme cette matière eft généralement répandue en France, je confeille d'en faire ufage en lhu- meétantc avant de la mêler avec les terres. Je n'entreprendrai pas de décider comment un végétal ifolc peut donner de l'acide nitreux & de lalkali : les doit: on à la matière animalifée qui fe trouve dans le grain > y en a-til aufli dans l'enveloppe ? Ce font autant de fujets d'expé: riences à faire, & dont je me propole de rendre compte par la fuite, Je tirerai feulement de cette découverte une induc- tion, qui m'autorife à penfer que l'acide niveux eft produit plus abondamment par les végétaux que par les matières ani- males, Je me fuis engagé à rendre compte des motifs qui me décident à adopter la manière que j'indique pour la conftruc- tion des hangars, le traitement des terres fous ces hangars, & les matières les plus propres aux engrais. Pour ctablir ces motifs plus fürement, je demanderai d'a. bord ce que l'on cherche en formant des nitrières? C'eit, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 397 me dirat-on, à remplacer les lieux où la Nature fabrique l'a- cide nitreux. Examinons donc quels font les endroits où la Nature le produit plus abondamment, pour copier plus parfai- tement cette Nature. Les caves, les écuries & les autres lieux clos des habira- tions, ceux où il y a peu d'air & qui font à portée de re- cevoir des matières fufceptibles de putréfa&ion, font en gé- néral les endroits où la Nature établit fon travail pour cet objet. Que fe propole l'Arrifte qui amende des terres falpétrees avec des matières végérales & animales? D'obrenir par la dé- compolition complette de ces matières, l'acide nitreux , & de rendre continuellement aux terres les principes que cha- que travail doit leur ôter. En conféquence, pour faire promp- tement cette opération, on voir que les lieux les plus propres à la putréfaétion, font ceux qui font clos & où il circu'e peu d'air. Qu'on ne sy trompe pas, ce travail n'a aucun rapport avec les premiers produits des craies ou des tuflaux qui doivent être expofes au grand courant d'air. L'acide nitreux que ces matières contiennent, provient des matières végétales & animales, complètement décompofces, & qui ont été confon- dues avec ces craies dans le bouleverfement, Ainfi, quoique ces terres puiflent donner de l'acide nitreux fans addition de matières putrefcibles , il eft prudent cependant d'en augmenter la quantité par l'addition de ces matières ; & pour faire concourir en même temps les moyens les meilleurs pour harer cette putré- faction dans toutes les terres quelconques , on fe défendra éga- lement avec foin, & de la chaleur quiles defsèche trop prompte- ment & arrête cette putréfattion, & du froid qui en gelant les terres, s'oppofe au travail de la Nature. Si l'Entrepreneur des nitrières a eu attention de remplir continuellement le creux à fumier dont j'ai parlé dans mon Mémoire précédent, il ne manquera jamais d'engrais pour ferulifer fes terres. Je me borne fimplement à confeiller le fumier de cheval, de vaches, de moutons, & celui qu'on pourra tirer des colombiers. On arrofera ces matières avec des eaux de buanderie, & à leur défaut avec des eaux de mares, 358 MÉMOIRES sUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. d'ecouts de fumier, & généralement de toutes celles qui fe trouvent dans les rues des villages. Ce doit être avec ce De pourri & l'eau du puifard que l'Entrepreneur amendera fes terres : 1] mettra dès la pre- mière fois tout ce qu'il veut faire puréher, afin de conduire l'opération à fa fin dans le temps le plus court, & ne pas la retarder, comme il arriveroit par l'addition de nouvelles ma- tières. D'après mes expériences fur le produit de ces matières, je rejette pour engrais toutes fubitances autres que celles que je viens de nommer. En premier lieu, j'exclus les urines, que je n’avois confcillces d'abord qu'avec beaucoup de modération : j'ai reconnu qu'elles donnent trop de fel marin, & que même elles peuvent mettre les re au point de ne donner que de ce fel. CAPES cendres, la terre vitifiable & fablonneufe qui ne prod jamais de Salpêtre. Si les cendres en ont indiqué , on ne le doit qu'a l'alkal qu ‘elles contiennent, qui a formé ce Salpètre avec l'acide des terres qui les avoifinoient, & que les cendres n’ont point du tout produit. Ainfi, comme le lef- fivage exact doit laifler très-peu d’alkali dans les cendres, il eft inutile, pour ce même objer, de leur donner place fous les hangars. 3. La brique, indiquée par l'Auteur du Memoire fur la formation du Salpétre. C’eft une terre argileufe & cuice, peu propre au mélange des terres, & encore moins à donner de l'acide nitreux. Si on trouve de ces briques falpétrées dans les bâtimens, ce Salpétre leur eft étranger & n'eft dû qu'à leur pofon dans les lieux penétrés dejà de certe matière. Il eft un autre objet dont perfonne n'a parlé jufqu'à pré- fent, mais que quelques Entrepreneurs de nitrières en Fran- che-Comté emploient , féduits par la reflemblance du nom: cet objet eft la pierre appelée zuf, qu'ils confondent mal-à- propos avec le tuffau de Touraine, dont MM. les Régifleurs ont fait mention dans leur inftruétion. Ce tuf de Franche-Comté, employé dans la conftruétion des maïlons, devient fort dur & ne fe falpêtre poinc, quoi- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 359 que le fable qui le touche dans les murs foit fortement falpétré. J'ai examiné des couches de cent voitures de terres, à parties égales de tuf concaflé & de terre falpétrée; cette terre falpétrée” donnoïit au moment du mélange un degré au pèfe- liqueur. On a arrofé très-foiblement ces terres avec des eaux falpérices ; & après une annce d'expolition, la totalité don- noit un degré. J'ai vu une autre couche compofée d’une partie de terres falpétrées donnant quatre degrés & trois parties de cuf. Après une année d'expolition & de traitement femblable aux premières , la mafle donnoit un degré, comme au moment du mélange, pate qu'elle eft dans fa proportion ce qu'un eft à quatre ME où je conclus que le tuf n'a rien produit pat lui-méme. SR avant d'en blâmer lufage, j'ai réitéré mes ob- fervations, & vifité une quantité prodigieufe de ces tufs en conftruétions. Si cette pierre avoit les propriétés du tuffau de Touraine pour fe falpétrer, j'en aurois rencontré de falpétrée; & depuis le temps que ces conftiuétions exiftent, fe Sal pètre les auroit détruites, au lieu que ce tuf a acquis beaucoup de dureté; ce qui fe rapporte parfaitement aux craies top dures qui ne fe falpétrent pas. Il ne reflemble donc en rien au tuffau de Touraine : celmi-ci eft uni & lifle, & le tuf de Franche-Comté eft au contraire un nue formé chaque jour par les eaux que l'on voit rouler dans la carrière. Suivant mes principes, le tuf de Franche-Comté eft une pierre calcaire, pure, douée du principe qui produit l'acide nitreux. On ne réuflira à lui donner du Salpérre , qu'après lavoir furchargeé de matières putrefcibles; ce qui reviendroit à l'entreprife du travail des terres neuves. En conféquence , je confeille aux Entrepreneurs de n'employer cette pierre qu'avec beaucoup de modération : ils ne doivent s'attendre à obtenir du Salpètre de ces tufs, qu après les avoir amenés au point des terres qui font chargées du réfidu des matières putréfices. En reftreignant les matières pour les engrais au point que je viens de a dire, les Particuliers ne feront plus cffrayés 360 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: par la pucridité des matières animales que l’on a indiquée dans les Ouvrages qui ont paru jufqu'ici. On pourra trouver fans peine , au eu des campagnes, les fecours néceflaires pour opérer la putréfaétion dans les nitrières. On s'eft trompé encore en prétendant que les terres doi- vent être arrofces habituellement & entretenues fort humides, pour que la putréfaétion des engrais puifle fe faire complè- tement ; il faut au contraire que ces terres parviennent à un certain point de ficcité. On aura donc foin, après avoir mis les engrais dans les terres, de ne les arrofer qu'autant qu'elles pourront prendre d'eau, & de les abandonner enfuite. Lorfqu' une fois elles font difpofces à donner de l'acide ni- treux, il faut très-peu d’engrais pour en entretenir la fabrica- tion; fi cent livres de terres produifent une livre d'acide ni- treux, elles donneront au quintal environ deux livres de Sal- pêre, richefle fuffifante pour travailler à profit. APR ST AITO ENE VOTE Du leffivage É$ terres. On fait que ce n'eft point en PL plufieurs fois la même eau fur le même cuvier, comme le dit l Auteur du Mémoire fur a formation du Salpétre, que l'on fait l'opération du lef- fivage dans les règles de l'Art; ceft au contraire.en paflant la même eau fur trois ou quatre différentes terres. Jufqu'à préfent on ne s'eft fervi que de cuveaux pour ce travail : les Salpétriers en ont introduit l'ufage, parce que dans leurs ateliers ambulans , ils ne pouvoient tranfporter d'uften- files plus commodes. Dans les nitrières & autres ateliers où l’on eft fixé, je con- feille de faire conftruire des baflins en bois de huit à dix pieds carrés, fur dix-huit pouces de profondeur. La forme régulière de ces baïlins occupe peu de place dans les ateliers; Re largeur donne beaucoup d'aïfance dans les manœuvres de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 361 de la charge & de la décharge des terres; le leflivage eft très-uniforme & parfairement exécuté. Il fuffic de placer au bas de ces baflins un faux fond, pour faciliter l'écoulement des eaux. Avec trois bañlins feulement , on peut lefliver cent cinquante pieds cubes de terre par jour. On en établira une plus grande quantité , s'il le faut, proportionnément à la force de l'atelier. Jai vu plufeurs ateliers travailler avec ces baïlins, & avoir le plus grand fuccès ; dans le pays où la pierre eft commune , 1l feroit facile d’en faire de cette matière qui ferviroient à jamais. Toutes les différentes efpèces de terres de fol, fablonneufes , marneufes, argileufes , légères & noires comme le terreau, font filtrables, & peuvent être leflivées dans ces baflins; ainfi un établiflement qui travaille des de- molitions ou des terres de fol, peut, fans crainte , en faire ufage. C'eft en faifant des fautes, que l’on parvient à perfec- tionner les opérations. J'avois penfé que l'agitation accéle- rant la diflolution, ce feroit un moyen de prefiér la dif- folution dans les terres: j'ai éprouvé tout le contraire; l’'agi- tation broyoic la terre, empéchoit la filtration, & le travail étoit fans fuccès. La réflexion m'a démontré que l'opération dont il s’agit n’eft point une diflolution, mais une lixiviation, que les terres doivent refter fpongieufes pour permettre la filtration ; & qu'il faut par conféquent , au lieu de les broyer, les laifler en repos pendant le leflivage. Quand un Entrepreneur à difpofé fa fabrique, il doit fe conftruire un atelier de leflivage fépare de fes hangars; & comme on ne peut fe procurer par-tout les commodités de ceux qui font creufés fous la montagne même de craie, tel qu'on le voit à Fontenelle, Montereau, Chaumont & à la Roche-Guyon , où ils font fans cefle dans une température uniforme qui les défend de la gelée, il faut tâcher de les remplacer en conftruifant un bâtiment de foixante pieds de long fur vingt-deux pieds de large. On peut dans cette étendue placer la chaudière, l'atelier de leflivage, & les baflins de criftallifation, On conftruit ce bâtiment en murs, & la partie 2,12 362 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. qu'occupe l'atelier pour le leffivage , eft furmonté d’un loge- ment pour les Ouvriers; celle de la chaudière eft fous la couverture fans planchers, avec de grandes ouvertures pour faciliter lévaporation. Au moyen de ceite conftruétion, on peut fermer l'atelier du leflivage, & y monter, dans les grands froids , un fourneau pour défendre les cuveaux de la gelée. J'ai vu un Entrepreneur adapter un corps de fourneau à la cheminée de la chaudière ; il étoit prolongé dans l’ate- lier, & rendoit une chaleur fuffifante pour empêcher le lefli- vage de geler, & pour permettre de travailler durant toute l'année. Je n'entreprendrai pas de mettre fous les yeux un tableau de dépenfes nécellaires pour la conftruétion d’une nitrière ; elles varient trop dans chaque province , en raïfon de la cherté des matériaux à y employer; je dirai feulement que l'on peut conftruire pour vingt-quatre mille livres une nitrière à fabriquer vingt-cinq milliers de Salpétre par chaque année, & que le bénéfice fera d'un tiers du produit de la recette , dans un pays où la journée du Manœuvre coute une livre, & la corde de bois quinze livres. J'obferverai de plus, que beaucoup d'Entrepreneurs n’ont payé leurs conftruétions & l'enlèvement des terres, avec le produit du Salpètre que ces terres ont donné , qu'après quatre années de travaux. Le Propriétaire fera difpenfe d’avoir des voitures pour l'enlèvement des terres 3 il pourra fe renfermer dans fa nitrière avec crois Ouvriers feulement, qui lui fufñiront pour le remuage & le leflivage des terres, & pour fabriquer vingt-cinq milliers de Salpètre par chaque année (*). (#) Les Commilfaires croient ces calculs trop avantageux 1 la récolte du Salpètre. Ils craignent que l'Auteur n'ait forcé les produits, & qu'il n'ait pas évalué con- venablement toutes les dépenfes. LAS MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, 363 APR C INE VU ET EL De la Saturation. If ee qu'on a reconnu la néceflité abfolue de fubfticuer un alkali végétal à la bafe terreufe du Salpètre de cette der- nière efpèce, on a cherché les moyens de faire cette opé- ration avec le moins de dépenfes poflble : on connoïît deux manières de faturer, favoir, à froid ou à chaud. A froid, on fait fondre l'alkali dans une partie de l'eau à faturer, & lon méle enfuite le tout enfembie pour opérer la précipi- tation. À chaud, on fait évaporer la leflive de terres fal- pétrées , & lorfqu' on eft parvenu par cette éva poration, au point d’avoir l’eau de trente DÉRSs du pèfe-liqueur , on jette la potafle dans la chaudière pleine de la liqueur. Quoique l'une & l’autre de ces deux méthodes aient le même objet, il eft certain cependant que les produits ne fonc pas les mêmes. Je me fuis afluré par l'expérience, que Valkah fondu à part & mêlé enfuite à la liqueur falpétrée , rend moins de Salpètre que l'alkali fondu à chaud dans la cotalité de la liqueur. Cette vérité eft furprenante; car enfin l'alkali, dira-t-on; doit être mis en œuvre de telle ou telle manière qu'on en fañle ufage : il eft conftant cependant, après des expériences répétées fcrupuleufement en grand , que la faturation à chaud rend , avec les mêmes eaux & les inêmes alkalis, dix livres de Salpètre de plus par cent que la diflolution préliminaire de l'alkali & la faturation à froid, d'où jai penfé que l'alkali n'ayant pas, entre fes principes, d'union aflez par- faite, perd davantage dans les deux opérations de diflolu- tion & faturation faites féparément, que lorfqu'on les fait enfemble. Je me fuis afluré que l’alkali rendoit beaucoup d'air fixe dans fa diflolution , & que c'étoit toujours en pure perte pour Z 2 1 364 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Ja quantité de ce fel que cet air principe fe difipoit ; au lieu que cette perte étoir beaucoup moindre lorfque la fatura- tion opcroit Li diflolution:(*). Mais, d’un autre côté, la manière dont plufieurs Entre- preneurs traitent l'opération à chaud, eft crès - fautive. Ils font trop rapprocher la liqueur, qui eft, en grande païtie, à bafe terreule ; & je me fuis couvaincu, en plaçant à la fur- face de la liqueur bouillante un chapiteau de verre garni d’une fiole à fon bec, quil sélevoit de l'acide nitreux, que lation réunie de l'air libre & du feu forçoit à aban- donner fa bafe : l'odeur feule auroit fuff pour indiquer cette volatilifation de l'acide ; mais on en eft plus certain encore, pat la propriété que la liqueur reçue dans la fiole a de changer en rouge la couleur bleue des Végétaux. Comme cet acide eft en perte pour le produit, ainfi que je l'ai dit plus haut, je confeillerai, pour éviter cer incon- vénient , de faturer à chaud , en mettant rout à la fois dans la chaudière, & la quantité d’eau, & celle d’alkali nécef- faire. On les fera bouillir & réduire une heure ou deux, fuivanc la capacité de la chaudière. On tirera enfuite la “iqueur, & on la mettra dépofer dans la cuve à faturer. Le dépôt fe fait plus exaétement quand la terre a bouilli : celle- ci fe pelotonne , tombe en mafñle plus p'omptement, & oc— cupe moins d'efpace dans la liqueur ; ce qui la rend plus facile à décanter. Mais comme la chaudière ne peut & ne doit pas .Contenir toute l’eau de la cuite, il faut fe donner la peine de Fy faire pañler par partie, en ajoutant à chaque chau- ère la quantité d’alkah que lufage indique. On avoit cru qu'il étoit néceflaire , pour fabriquer du Sal- pêtre, d'opérer la précipitation complette de la terre, & de faturer entièrement l'acide d’alkali végétal. Cette précifon , 1J1 LES, Note des Commiflaires. Il ne fe dégage point d’air fixe dans la décompo- fition du nitre à-bale terreufe par l’alkali fixe , par la raifon qu'il fe combine avec la terre calcaire, qui fe précipite fous forme de terre calcaire & non fous forme de chaux. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 365 au contraire, eft d’autant plus inutile, que l'on doit toujours refter au deflous de la faturation parfaite, c'eft-à-dire, qu'il faut laifler fubfifter dans la cuite des Salpétres à bafe ter- reufe. On peut fe pañler de porafle ou de falin, pour faturer. Dans les fabriques à portée de fe procurer des cendres de bois ordinaires, on pourra monter un atelier de Salinier. Je renvoie pour cela à l'inftruétion donnée par MM. les Régif- feurs, fur les moyens de fabriquer cette matière. Au lieu de fre évaporer les eaux chargces d’alkali pour en tirer le falin, on peut faturer direétement avec ces eaux. J'ai vu plufieurs ateliers en Berry & en Franche-Comté, qui travaillent de cette manière. La réduétion des eaux eft plus facile à faire dans une grande chaudière que dans une petite ; mais comme on ne peut faire cette opération dans le cuivre, qui eft trop atta— quable par les alkalis, & quil eft impoñlible de s’en procurer en fer de fonte d’aufli grande que celle en cuivre de l'ate- lier, on peut, fans crainte, faire cette opération dans cetre dernière, parce qu'après la faturation, l'alkali n’eft plus libre, ASRORTINCEL ISERE TAXE De la formation de l’ Acide nitreux. Lzs Savans qui fe font occupés de trouver les moyens d’aug- menter la récolte en Salpêtre, ont tenté fans doute, par des expériences recherchées, d'enlever à la Nature le fecret particulier qu'elle a de préparer cet acide. Sans défefperer de cette découverte, j'ai tourné mes vûes d'un autre côté, & j'ai penfé que l'acide nitreux étoit un compofé de l'union direéte des élémens ; il n’y a pas moins de difficultés à trouver le procédé de le fabriquer, qu'à faire un efprit ou une fubftance métallique. Il n’eft pas à notre puiflance de former des combinaïfons avec les élémens libres; 366 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. cette opération eft feule réfervée à la végération. On fait aflez depuis combien d'années les Alchimiftes cherchent les moyens d'imiter la Nature, & les progrès qu'ils ont faits jufqu'à ce jour. La découverte de la fabrication de l'acide nitreux eft une opération de ce genre; & comme il faut recourir, dans ce moment, aux moyens les plus prompts de fabriquer du Salpétre, je prétends que l'Art ne peut fournir de procédés plus fimples & plus économiques que de mettre en œuvre le Salpêtre que la Nature nous offre. Si je métois engagé à former beaucoup d'acide nitreux, je dirois : Il me faut une combinaïfon des élémens ; recou- rons donc aux végétaux de qui la décompofition donne de l'acide nitreux : mais en voyant la quantité de cet acide qui exifte en France, j'ai jugé que le plus fimple moyen feroit plus difpendieux encore que celui que la Nature emploic chaque jour fous nos yeux. Cet acide eft fi commun, qu'on aura de la difficulté à fe procurer aflez d’alkali pour le mettre en œuvre , parce que la Nature ne fabrique pas de cette der- nière matière en proportion. La plupart des opinions différentes qui ont paru fur la formation de l'acide nitreux , font crès-faufles, & cependant elles ont toutes eu des partifans. Elles font trop connues, pour en furcharger mon Ouvrage ; elles font d’ailleurs rapportées dans mon Mémoie précédent. Je me bornerai donc dans celui- ci, à rendre les idées que m'ont fait naître mes différentes ob- fervations & mes découvertes. La terre purement calcaire , telle que les Chimiftes la dé- fignent, neft point propre à donner d'acide nitreux. Le marbre, de courtes les terres calcaires la plus pure, n'en produit jamais. En vain ai-je cherché dans les monumens les plus anciens, bâtis avec cet pierre , & fouvent fitués très- avantageufement, je n’en ai point trouvé. Mes recherches ont €té de même toujours infruétueufes dans toutes les pierres bien décidément calcaires, telles que celles des carrières de Bourgogne & de Franche-Comté. Il y a plus, c'eft que les craies plus dures que les craies ordinaires ne fe falpétrent ! MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 367 point, comme je l'ai dit ci-devant. Ces obfervations doivent donc fuffire pour prouver que la terre purement calcaire ne donne pas de Salpétre. Plus une terre calcaire eft pure, plus elle à d'union entre fes parties : aufli la terre calcaire la plus pure eftelle la plus dure (*). Celle qui renferme dans fa compoñition des maticres étrangères, ne pouvant avoir d'agrégation aflez forte, elle reftc molle & fans cohérence. De cette efpèce font les tut- faux de Touraine, les craies falpétrées, & les terres propres à la végétation. Je penfe donc que les terres calcaires qui produifent de l'acide nitreux, ne le doivent qu'aux matières végétales en- fermées dans leur fein & complèrement décompofces. Les terres de grange viennent à Fappui de mon fentiment. La chaux ne donne pas non plus d'acide nitreux , parce qu'elle peut très bien être préparée avec une pierre qui ne fe feroit jamais falpétrée, & que fi cette chaux provenoit d’une piÈrre) qui eût cette propriété , laétion du feu lui auroit enlevé le principe de la nirification. L'air fixe que perd la terre calcaire dans cette calcination, n’eft point le principe qui fournit l'acide nitreux. On peut, en traitant la chaux avec les matières phlogiftiques , lui ren dre fon air fixe & la rétablir dans l’état de terre calcaire, fans que pour cela elle ait acquis la propriété de fe falpètrer. Le marbre eft pourvu de fon air fixe, & cependant ne fe . pas. La Méca- nique opéreroit méme la divifion la plus fubüle de la pietre calcaire pure, qu elle ne donneroïit point de Salpêrre ; & fi on méloit à cette terre beaucoup de matières végétales en putréfaétion , on ne devroir le Salpètre qu'on en tireroit, qu'à la décompofition de ces matières. Je fuis bien éloigné de regarder le Salpètre contenu dans les plâtras, comme une produétion de cette matière. Éci la terre calcaire eft unie à l'acide vitriolique avec lequel elle a une (#) Note des Commifaires. Cette aflertion n'eft pas auf génttalement vraie que J'Auteur le fuppole. 368 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: affinité très-forte : la petite quantité de terre calcaire libre qui fe trouve dans le plare, ne pourroit, à coup für, produire autant de Salpêtre. Mon avis eft donc que le Salpétre qui fe trouve dans les platras & dans les briques , ne s'y rencontre que par la voie d'imbibition; que ces matières font l'une & l'autre l'effec de l'éponge, & qu'elles ne produifent du Salpètre que parce qu'elles fe trouvent à portée des matières qui pu- tcfent près d'elles. Sans décider fi l'élément terreux entre comme principe conftituant dans l'acide nitreux, je me bornerai à dire que l'expérience fait voir que les terres calcaires chargées de ma- uières putrefcibles donnentde l'acide nitreux. Sion pouvoit imiter le mélange des craies, on auroit une certitude de ce que j'a- vance; mais comme l'acide nitreux n’eft produit qu'après l'en- tière décompofition des matières, & que cette décompofition cit trées-complette dans les craies, nos derniers neveux ne verroïient pas le réfultat de cette expérience. Cependant, puifque l'on trouve fur la furface du globe des terres déjà chargées de matières phlogiftiquées, & que les végétaux pourris fous les planchers des granges donnent de l'acide nitreux , J'établis fur ces principes cette théorie : Qu'il faut que la terre calcaire foit unie aux matières ve- gétales dans l’état le plus compler de décompofition, pour donner de l’acide nitreux. Cette théorie n’eft ni auffi claire, ni auffi bien prouvée que celle du bleu de Prufle, je le fais : toutefois j'ai cru pouvoir hafarder un fentiment appuyé de l'expérience. J'ai cherché, par l'analyfe des craies propres à fe falpétrer, à connoître la nature du principe qui leur donne cette pro- prieté : de quelque manière que j'aye opéré, je n'ai rien obtenu de particulier ; j'ai remarqué feulement qu'elles phlo- giftiquoient l'argent. J'ai faturé d'acide vitriolique cette terre, je l'ai foumife à la diftillation; j'efpérois en urer du foufre, fi le phlogiftique étoit très-abondant, & je n’ai obtenu qu'un hlegme légèrement acide. J'ai converfe avec plufeurs Savans, qui penfoient que le gaz putide MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 369 putride étroit néceflaire pour former l'acide nitreux : j'ai cru devoir adopter cette opinion après eux. J'avois, depuis trois annces , , des matières putrides enfermées avec de la terre dans un Ealon de verre. J’ai ouvert ce ballon, & la terre ne ma pas donne un atôme de Salpétre; ce qui prouve qu'il faut laiffer la Nature fe débarraffer des différens gaz qui génent la formation de l'acide nitreux, & que ce n'eft qu'après que l'opération de la putréfation eft portée à fon dernier poinr, qu'on obtient cette formation. Je pourrois appuyer ce que je dis ici, de l'exemple des craies que l'on trouve falpétrces au milieu des campagnes éloignées de toutes habitations , & de celui des terres des cavernes qui fe trouvent en plufieurs endroits ; maïs il fuffira de faire obferver que les tufflaux & les craies ne donnent du Salpêtre qu après un contaét immé- diat avec l'air. Les tuffaux font falpérres à l'entrée de la car- rière, & ne le font point dans l'intérieur, malgré Fhabitation des Ouvriers; ce qui montre qu'il manque à ces tuflaux la diflipation de quelque principe qui nuit encore au dév clop- pement de l'acide nitreux. On ne doit pas imaginer que l'ait porte cet acide : il a une affinité cgale avec une terre calcaire, ou avec une autre, & il s'uniroit indiftin@tement aux craies dures, aux marbres & aux autres pierres , comme aux craies molles. Ainfi, puit que le contraire arrive, on doit conclure que la propriété des pierres calcaires molles de donner de l'acide nitreux , dépend des matières qui leur font unies. C’eft fur ces obfervations que j'ai confeillé de fabriquer de l'acide nitreux par le mélange de beaucoup de matières végétales en putrcfattion dans les terres. On m objeétera peut: être que des verres en couche de quatre pieds de hauteur, comme je propole de les faire fous hangars , fe nitrifient bien à la furface, & non point dans l'intérieur. Pour répondre à cette objection, il ne faut que faire voir par l'expérience que Jai faite moi-même dans une couche de quatre pieds, & par le travail du Salpètrier, que la nitrification fe fait plus profondément encore, & que fouvent on fouille à cinq A aa 370 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. & fix pieds de profondeur dans des terres tappées & non remuées ; défavanrage que n'auront pas les terres des hangars. Si dans les nouveaux voyages que je vais encore entre- rendre pour cet objet, je fais de nouvelles obfervations , j'aurai l'honneur de les communiquer. Je défire ardemment qu'une heureufe découverte puifle difpenfer d'un travail que je regarde comme néceflaire, & qu'un moyen que je n imagine pas, puifle fournir tout le Salpècre dont on a befom, à un prix bien inférieur à celui qui eft fixé préfentement. J'abandonnerai pour lors avec plaifir mon fyftème, pour me rendre à l'évidence , & remercier avec tous les bons Citoyens le Grand Homme qui aura fi bien fervi, par cette découverte, & l'Etat & notre glorieux Mo- narque. f ( \| L Æ pi MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 971 DISSERTATION Eu S AULVP ET RE: Avec quelques idées fur la Nurification, ainft que ur la manière d'augmenter confidérablement la récolte du Salpètre. Ouvrage qui a remporté le premier Æcceffit, par M. J. B. de Beunre , Médecin à Anvers, de l’Académie Himpériale des Arts & Belles-Lettres de Bruxelles. Credidimus fpriritus acidos nitri nufquam in rerum natura extitiffe ante inventum modumnitri parandi. Bocrhaavce. REA OMR RE CREER 5 Q PREMIER Concours, n.° 27. PPS) pe DISCOURS PRÉLIMINAIRE. M. Prersx dit dans fon Entroduétion : 2? Hoffmann, ni Stahl, ni Neumann, ni Becher, ni Schulze, ni Glauber, ni Lemery, ni Schelhamer, niaucun autre Chimifle n’a traité à fond la matière du nitre. Mais fommes-nous parvenus à une vraic connoiflance de ce fel, par les expériences de cet illuftre Académicien? Il me paroit qu'il nous refte encore bien des conjectures fur la nature de cette matière. A-t-il évidemment prouvé quelle eft ia nature de fon acide? la tranf- mutation de l'acide vitriolique en acide nitreux eft-elle bien Aaai 372 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. conftatce? L'älluftre Baumé n'en paroïît pas plus convaincu que moi, puifqu'il dit: Vous penfons qu ‘il n’efl pas plus pof- fble de changer l1 nature d’un acide, que de tranfmuer un note Clin » COM. 3, p. 5935; & dans un autre endroit: Le probléme de changer l’acide marin en acide nitreux eft de la méme nature que ceux de la pierre philofophale, de la guadrature du cercle, 6 de la médecine univerfelle. Je n’ofe donc c pas me fatter, Messreurs, de contenter la curiofité des Savans à qui j'ai l'honneur de préfenter ce Mémoire ; du moins j'expoferai ce qu'un nombre fuivi d'expériences m'a fait déve- PRE fur la nimiñcation ; je propoferai une méthode plus facile, plus prompte & moins difpendieufe de faire le nitre, que celle qu'en a fuivie JR préfenr, & je crois que c'eft-R l'unique but qu'on doit fe propofer. À cette fin, je diviferai mon Mémoire en trois Chapitres. Dans le premier, j'expoferai brièvement les principes & les qualités fpécifiques du nitre ; dans le fecond , je hafarderai quelquesidées fur la nitrification ; Bidais letroïfième, Je détaillerai la méthode d'extraire le nitre beaucoup plus copieu- fement qu'on ne l’a fait jufqu'ici. Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 373 CHAPITRE PREMIER. Des principes & des qualités du Nitre. LE nitre eft un fel neutre, compofé d’un acide qui lui eft uniquement propre (*), d'un alkali, foit calcaire, foit falin , Me , & de l’eau. e fel diffère des autres fels neutres, principalement sil eft pur, 1.9 Par fon goût rafraîchiffant. 2. Par fa figure pyramidale hexangulaire. 3.° Il dépouille les métaux imparfaits de leur phlogiftique, les réduifant en chaux. 4. Ce fel, mis fur un charbon ardent, détonne. 5s.® Mis dans un creufet, fans qu'il touche à quelque ma- üière inflammable, il fe fond comme de l'eau; fi en cet état on y ajoute quelque corps inflammable , il s'enflimme avec bruit, perd fon acide , & devient un alkali fixe. Je ne divife le nitre qu'en nitre brut, cru ou naiurel , & en nitre vrai ou raffiné, quoiqu'on puifle encore faire plu- ficurs nitres métalliques ; mais comme ils ne font pas en ufage, ni en Médecine, ni dans le Commerce , nous n'en difons rien Le nitre eft aufi un mélange d'acide nitreux, de terre calcaire , d’alkali fixe, d’alkali volatil, d’une matière grañle, de fel marin, de félénite (**). (#) On trouve l'acide vitriolique dans l'alun, dans le foufre, dans les vitriols, dans les gips, les félénires, &c. l'acide marin, dans le fel marin, dans des fources , dans des métaux, dans le fcl ammoniac natif de Model ; mais l'acide du nitre ne fe trouve qu2 dans le nitre feul, cemme l'immortel Boerhaave dit très-bien : Credimus fpiritus acidos nitri nufquam in rerurm natura extitiffe ante in- ventum modum nitr parandi, Chim. part. 2, pag. 405. (#*) On tire du nitre brut par la criftallifation des (els ci-deflus mentionnés ; par la diftillation on obtient l'alkali volatil , far-tout fi on y ajoute un peu de chaux pour dégager l'alkali volaril de la matière uraffe, 374 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Le nitre vrai ou raffiné eft un fel neutre , compofé d'acide mitreux & d’alkali fixe ; mais ce fel eft rarement fi bien purifié, quil ne contienne un peu de fel marin. Le nitre paroît être un fel qui n’eft ni purement minéral, ni purement animal, ni purement végétal; mais un fel pro- duit par le concours des divers règnes, & de circonftances heureules; il paroît devoir fa bafe alkaline au règne végétal, fon phlogiftique au règne animal ; mais fur fon acide, il y a diverfes opinions dont nous traiterons plus bas. Les fignes caraéteriftiques du nitre réfident uniquement dans fon acide, parce que l'efprit de nitre faturé d’alkali fixe végétal, donne le vrai nitre (*) faturé d’alkali minéral, pro- duit le nitre cubique. Cet donc l'acide de ce fel qui doit fixer toute notre attention , & il eft probable quil contient quelque chofe de plus que les autres acides, vu qu'il prôduit des effets cout par- ticuliers. Voyons fes propriétés fpecifiques , & tâchons par- à de developper en quoi il confifte. 1.® L'efprit de uitre avec les fels alkalis urineux fait le nitre ammontacal inflammable : or tout autre fel ammoniacal , faic par l'acide vitrioïique ou marin, n'eft pas inflammable ; confequemment l'acide du nitre contient du phlogiftique ou une matière inflammable. 2.° Le plomb & quelques autres métaux, même des parties animales diffoutes dans l'efprit de nitre & évaporées à ficcité, deviennent inflammables, & même font une explofion con- fidérable, fi on augmente la chaleur. Les autres acides, traités de la méme façon , ne produifent pas cet effer. 3.° L'efprit de nitre fumant, mêlé avec quelques huiles, prend feu à l'inftant ; ce qui n'arrive point avec l'acide vitrio- lique, quoique beaucoup plus acide & que la chaleur foit plus grande, (#) Le nitre régénéré ne diffère en rien du nitre ordinaire , fi ce n'eft par une petite caufticité qui fe manifefte quand on le fait bouillir dans un vaiffeau d'étain bien poli; mais il perd cette qualité par la recriftailifation, & encore plutôt par l'addition d'un peu de chaux MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 373 4.° Si on allume le nitre par le tartre, les charbons ou quelque autre matière inflammable , on obtient un alkali uris ñeux , cé qui a été obfervé par Stahl & Geoffroi. ° L'acide du nitre eft plus volatil que l'acide vitriolique; il PA ue concentre pas au feu comme ce dernier acide ; car ce qui s'élève dans la diflillation, eft aufli concentré que ce qui refte dans la cornue, aufh eft-il plus claftique. 6. Cet acide concentré, dès qu'il touche un charbori ar- dent, excite une inflammation & détonnation, parce qu'il fe forme un foufre nitreux qui eft beaucoup plus combuftible, & qui prend beaucoup plus tôt feu que le foufre ordinaire ; au brûle-t-1l dans les vaifleaux clos fans le concours de Pair, ce que le foufre vitriolique ne fait point; au contraire , fi on jette quelque autre acide fur les charbons ardens, l'extinc- tion s'en fuit. De toutes ces expé ences, ne doit-ün pas conclure que lacide du nitre contient une matiète imflammablé , phlogif- tique, ou peut-être phofphorique , puifque lation de cet acide fur les corps eombuftibles, prouve une efpèce de feu enfermé dans cet acide, comme dans le phofphore? Il ne m'eit pas inconnu que MM. Zemery, Barnerus , & plufieurs autres, nient le phlogiftique ou la matière du feu dans cet acide s mais leurs objeétions me paroïlent trop foibles, pour que je croye devoir en grofir cette Diflertation ; on peut en voir la réfutation (mais à fon ordinaire un peu trop âcre) dans les Ouvrages de M. Neumann (*. Nous croyons même avec le grand Stahl, que l'acide nitreux eft fi étroirement lié avec le ‘phlogitique , qu'il eft impoflhible de féparer lun & l'autre de ces principes, fans la deftruétion du total, fl paroît donc probable , que fi on pouvoit intimement unir le phlogiftique avec un acide quelconque, il en réfulteroïit l'acide nitreux. (#) Gafpar Neumann des Grundlichenfund mit experimenten ciweifinen Chimie, Tor. #3 part. 2, VA A 376 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE:. É SIT Sentiment de M. Pietsh fur la tranfinuration de l'acide vitriolique en acide nitreux. » Cet Auteur dit, $. 30 : J'ai eflayé de faire du nitre avec du camphre , avec la teinture d’antimoine tartarifée , avec les différentes fortes d’efprits inflammables tant fimples que redifiés , & avecune multirude innombrable d’eflences » de végétaux ; j'ai tâché de les unir avec quelques acides; » j'ai fai l'épreuve en changeant la proportion de plus de » cent manières; mais tout ce travail a été vain «. Néan- moins jai voulu répéter quelques-unes de ces expériences, & en ajouter quelques autres; à cette fin, Jai infufé long- temps de la poudre de chatbons, de la rapure de cornes, de la laine, de la fuie, des plumes , & plufieurs autres ma- tières qui abondent en phlogiftique dans l'acide vitriolique ; j'ai éteint plufieurs fois des charbons allumés dans ce même acide; jy ai mélé de lefprit de vin, plufieurs eflences in- Jammables, des réfines , des huiles & des fels volatils; J'ai faturé tous ces acides phlogiftiques avec de l'alkali fixe; des uns j'ai eu du tartre vitriolé ou du fel ammoniacal ; des autres , un fel neutre qui fe criftallifoit en aiguilles qui formoient des houppes, & qui avoient quelque reflemblance avec le nitre , mais qui au fond n'étoient que des fels fulfureux de Stahl. Tous ces fels fe convertifloient en tartre vitriolé, après qu'ils avoient perdu leur vhlogiftique, parce que ce principe n'adhère que foiblement à l'acide vitriolique, tandis qu'au contraire il eft inféparable dans l'acide nitreux. Voyons maintenant fi les quatre preuves que M. Piersh appelle importantes , & d’après lefquelles il conclut que l'acide du nire prend fon origine de l'acide vitriolique ;, font véritablement concluantes. Je fuis loin de chercher en cela à rien diminuer de la gloire de ce Grand Homme que je révère , & dont j'ai lu les favans Ecrits avec un véritable plaïfir; mais je veux feulement ajouter quelque lumière, fi cela eft pofhible mm” v MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 377 à une matière fi abftrufe, & qui a été jufqu'ici une pierre d'achoppement en Chimie. | « PREMIÈRE PREUVE. 6.20. Quatre parties d’acide nitreux & une partie de l’huile de terébenthine, aprés une évaporation fuffifante , produit (dit M. Pietsh ) le baume de foufre. Cette experience paroît empruntée de Neumann , tom. 4, part, 1; mais quelle conféquence en tirera-t-on ? L'acide nitreux fe joint aïfement au phlogiftique, fait avec lui un foufre nitreux; ce foufre, diflout dans l’ef- fence de térébenthine , fait un baume de foufre nitreux, mais non pas un baume de foufre vitriolique ; le phofphore avec les huiles fait un baume de foufre; pourroit-on de cela feul conclure que l'acide du phofphore foit vicriolique? vraiment non. SECONDE PREUVE. $. 21. $: on diflille deux parties de nitre cru diffout dans de l’eau, G une partie d'huile de vitriol , lefprit fulfureux monte fous la forme des vapeurs grisûtres, & ce qui refle dans la cornue eft une maffe [aline blanchätre, qui donne, par la criflallifation!, un fel criflallin blanc. Quelle con- féquence peut-on encore urer de cette expérience? Si cet cfprit fulfureux, obtenu par l'Auteur , étoit véritablement vitriolique , cela prouveroit tout au plus que l'acide nicreux a plus ou autant d’affinité avec la terre calcaire ou la bafe du nitre eru, que l'acide vitriolique fulfureux volatil. On voit arriver la même chofe, quand l'acide du nitre décompofe le tartre vitriolé dans lexpérience de M. Baume, tom. 1, pag. 436. On ne fera point étonné de ce réfultat, fi on fait réflexion que le nitre cru contient beaucoup de matière grafle phlogiftique , qui n’eft pas unie avec l'acide nitreux : or l'acide vitriolique ayant plus d'affinité avec le phlogiftique qu'avec la terre calcaire, il doit néceflairement produire un acide ful- fureux , qui, étant moins fixe que l'acide du nitre, doit monter avant les autres acides. Bbb - 3783 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, On n’obferve pas cer effet quand on prend le nire reffine ; parce que, dans ce cas, le phlogitique eft inféparable de l'acide nireux, & quil ne peut pas par confequent produire un cfprit acide fulfureux. Pourquoi les fclénies ne foncils point décompoiés par l'acide nitreux, comme le tartre vitriolé ? parce que ces iels ne contiennent pas autant de principes inflammables. Mon opinion fe trouve confirmée par ce que P'Auteur rapporte dans le paragraphe fuivant : Mais fi on aug- mente, dit-il, le degré du feu , cette hr ile de vitriol detache enfin Ll’efprit de nitre qui paflé alors en forme d’une vapeur rougeatre. Ainfi l'acide nitreux n'étoit pas métamorphole en en acide viriolique ; mais cette opération a produit un acide fulfureux , qui, étant plus volatil que l'acide vitriolique & nitreux, doit monter le premier ; enfuite l'acide vitriolique reftant , s'attachant à la terre calcaire , chafle l'acide du nitre moins fixe que l'acide vitriolique. TROISIÈME PREUVE. 6. 22. Cerre maffe (favoir le réfidu de la diftillation précédente) s’échauffant lorfqu'on verf2 de l’eau froide, nous donne à connoître que l’acide nitreux doit étre de la méme nature que l’acide vitriolique. Cette conféquence eft-elle jufte ? Cette mafle contient apparemment un peu de nitre brut & de lacide vitriolique qui doit être concentre, puifqu'on lui a ôté une partie de fon phlegme par la difillaion de l'acide fulfureux : or il eft wrès-naturel que l'eau s'échaufle, fi on la verfe fur un acide vitriolique concentré. QUATRIÈME PREUVE. 6. 23. Si on verfe de l'acide vitriolique fur le nitre cru , on n’ob- Jèrve aucune vapeur ni exhalaifon ; mais JE on fait cette ope- ration fur le nitre raffiné, Podeur de l’eau-forte fe manifefte d’abord. Quelle conféquence peut-on tirer de cette expé- rience en faveur de la tranfmutation des acides ? On pourra uniquement en conclure, que le nitre cru, enveloppé d'une MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 379 matière grafle, n'eft pas fi facilement décompofc par l'acide vitriolique que le nitfe raffiné , qui ne contient pas cette ma- tière onctueufe, CiNQUIÈME PREUVE. . 30. L'Auteut rapporte encore une autre preuve, qu'il appelle infaillible & feule fufffante pour prouver la jujieffe de [on [ÿyfiéme : fi on prend une terre calcaire qu° on humecle avec de l’acide vitriolique » & puis avec de l’urine ou quelque autre matière propre à produre du fel volatil par putréfailion , on en tire du nitre. Ce fait eft conftant, je l'ai répété plu- fieurs fois; mais que ce foit une preuve que l'acide vitrio- lique fe change en nitreux , la conféquence me paroît ha- fardée , parce que, 1.° j'ai trouvé dans le refidu de cette expérience une grande quantité de felénite; ainfi l'acide vitrio- lique ne s'étoit point converti en acide nitreux , mais il s’étoit combiné avec la terre calcaire : aufli en ai-je retiré du fel ammoniacal fecret de Glauber, par le mélange de l'acide vitriolique & de l’alkali volatil de l'urine. 2.° J'ai mis la même quantité de chaux avec de l'urine dans 1 méme place, & jen a au moins retiré la même quanthé de nitre. L'acide vitriolique ne paroît donc pas avoir contribué en rien, dans cette expérience , à la formation du Salpêtre ; ainfi la con- féquence de l’Auteur ne paroïît pas plus jufte que les précc- dentes. Jai tâché de pülogiftiquer l'acide marin de la même ma- nière que Javois fai l'acide vitriolique ; mais cet acide ne pa- roït pas fort difpoié à à le fair re; auffi, comme il eft beaucoup moins concentré , que fa gravité fpécifique eft moindre quecelle des autres acides minéraux, & que le phlogiftique ne peut pas beaucoup augmenter fon acidité ; ni fa gravité fpécifique, jenai pas fort multiplié ces expériences. Ce n’eft pas que) ignore que les Salpétriers croient généralement que le nitre prend fon origine du fel marin; ils fe fondent en cela, 1.9 fur ce que les urines & les matières fécales , qui font de la première néceflice pour la nirification, font amplement pourvues de fel marin; Bbb ï 380 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÊTRE. mais ils ne favent pas que ces matières font très-compofces d’autres principes; de plus, le fel mariff que ces matières ex- crémentielles contiennent, fe trouve dans leur ninc:& dans leurs eaux “mères. 2.9 Sur ce qu'ils ont obfervé que l'urine humaine, qui contient plus de fel marin que celle des autres animaux , eft aufli lus favorable à la nitrification ; mais ils ne confidèrent pas qu'elle eft aufli beaucoup plus a@ive & plus phlogiftiquée. 3.° C'eft une pratique prefque généralement reçue par les Salpètriers, de mêler leurs verres nitreufes avec du fel marin ou avec des matières qui en contiennent beaucoup ; mais cette pratique conftante ne: prouve encore fien : ils ont fou- vent d’autres vûes. J'en connois, entre autres, un qui méle parmi ces décombres & terres nitreufes , toutes les faumures de harengs , de morues, & le fel qui fe trouve dans les peaux de bœufs falées qui nous viennent d'Irlande; mais aufli fait-il un gros commerce de fel marin, qui lui eft peut- être plus lucratif que le Sa'pêcre même. 4° Sur ce qu'ils croient que le fel marin putréfié fe change en nitre; cette métamorphofe eft aufli deftituce de rout fon- dement : j'ai examiné plufieurs fois le nitre brut de nos Sal- pétriers qui emploient beaucoup de fel marin, & je ny ai Jamais trouvé de nitre cubique ; on devroit cependanten ren contrer, fi l'acide marin s'étoit changé en acide nitreux, à moins quon ne prétendir que la bafe minérale seft aufli changée en végétale; aufli ai-je fouvent examiné leurs eaux mères , & Je ny ai rien trouvé de pareil. J'ai une fabrique en propriété, où j'emploie quelques cen- taines de tonneaux d'urine humaine très -vieille & putréfiée; J'ai fouvent évaporé la fubfidence, pour en tirer le fel eflentiel d'urine, à la manière de MM. Slofler & Margraf, pour des re- cherches chimiques ; je n'y ai jamais trouvé un grain de nitre , foit à bafe végétale ou minérale, mais beaucoup de fel marin. Ce fel, au bout de quatre à cmq ans, au fein de là putréfaion, n’a pu fe changer en nitre; pourquoi le fera-tl chez les Salpétriers? De tout ceci, on peut conclure MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 381 avec beaucoup de probabilité, que l'acide marin ne peut être changé en acide nitreuxs foit par la putréfaétion ou quelque autre méthode connue jufqu’à préfent. On peut encore ajouter, à l'appui de tout ce qu'on avance, le travail qu'ont fait MM. Machy & Parmentier, pour détruire les expériences de Jun- ker fur la tranfmutation de l'acide marin en acide nitreux. Si doncles preuves alléguces par M. Pietsh font infuffantes, & fi tous mes efforts font vains; fi l'opinion des Salpétriers eft mal fondée, je conclus avec le célèbre Baumé, que la tranf- mutation des acides eft cout aufli difficile que la tranfmutation des métaux. 5 NS @ LT 382 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. C:H À PL ERA E EE De la Nitrification. L Es Anciens voyant que le nitre ne fe trouvoit qu'à la fuper- ficie de la terre ou des murailles, qui avoient eu pendant un temps convenable le contact immédiat de l'air, simagi- nèrenc que l'acide nitreux voltigeoit dans cet élément, & fe dépofant fur une terre calcaire, donnoit la naïflance au nitre; mais les preuves qu'ils allèguenc font fi foibles, que les ex- périences fuivantes les combattent d'une manière viétorieufe. 1. Un linge imbibé de l'huile de tartre par défaillance, expofe pendant quelque temps à l'air libre, puis lave dans de l'eau difullée qu'on fait évaporer, donne du tartre vitriolé & non pas du nitre (*) 2.° De l'alkali fixe végétal expofé à l'air, fe change, avec le temps, en tartre vitriolé; conféquemment l'acide de l'air n'eft pas nitreux, mais vicriolique. 3. Les terres calcaires expofces à l'air, ne donnent pas de nitre, fi elles ne font pas expofées à quelques vapeurs putrides (**). 4. Ce qui a encore beaucoup favorifé ce fyftéme, c'eft l'opinion prefque généralement reçue, que la ferulite de la rerre dépend du nitre; mais alors la plus grande partie de notre globe devroit abonder en nitre, ce qui eft contraire aux faits. J'ai analyfé trois clafles des terres végétales de nos envi- (*) Note des Commiffaires. Cette expérience a été répétée, & le réfulrat n'en eft pas exa@. Au lieu de tartre vitriolé, on obtient de l'alkali faturé d'air fixe & criftallifé, Il en cft de même de la feconde expérience. (##) J'avois expolé, il y a fix ans, à l'air libre, à un troifième étage, de la chaux vive pour l'éteindre, & pour l'employer à quelques expériences chimiques, relatives au fyftéme de M. Meyer; j'ai évaporé l'eau où j'avois détrempé cette chaux, & je n'ai pas crouvé un grain de nitre5 conféquemment l'air ne contient pas d'acide nireux. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 387 rons , & pour plus de certitude , j'ai répété les expcriences fur douze terres dificrentes de chaque clañle , prifes à la dif- trance d'un demi-quart de lieue ; celles de la première clafle croient des terres qui portent annuellement de beau froment & de l'orge; elles font fi fertiles qu'on ne les laifle jamais en jachère, ou engraïfler par quelque fumier, marne ou chaux: aufli font-eiles fi grafles, qu'elles m'ont donné de onze À treize onces d'argile par livre. Celles de la feconde claile étoient moins fertiles, mais cependant afiez bonnes pour produire du froment ; elles exigent d’être bien engraïflées, & donnent- depuis quatre jufqu'a fept onces d'argile par livre. Celles de la troifième clafle étoient très-peu fertiles, & prefque entière- ment fablonneufes ; mais de toutes ces terres, je n'ai pas tiré un feul grain de nitre (*). M. Andre dit avoit analyfe au delà de cent terres fertiles , & n'avoir trouvé que dans une feule un grain de fel par livre. D'après cela, peut-on croire que le nitre foit la bafe de la ferulité des terres, ou que la fuperficie de notre globe en contienne en abondance , comme le vulgaire le croit? Qu'on ajoute aufli les expériences de MM. Mariotte & Lemery, & on fera convaincu qu'il n’y a pas d'acide nitreux dans l'air. M. Lemery le fils a tâche de prouver que le nitre étoic un produit de la végétation qui fe formoit habituellement dans les plantes vivantes, d’où il pafloit dans les animaux; mais ce fentiment ne me paroït pas plus probable que les pré- cédens , quoïqu'il foit inconteftable qu'il y a des plantes qui contiennent du nitre. ‘ Le bétail, qui n'a qu'une nourriture tout-à-fait végétale , de- vroit alors étre plus abondant en nitre que l'homme ; néan- moins lurine des hommes eft plus propre à la génération du nive, que l'urine des animaux herbivores (**); conféquemment A] (#) J'ai détaillé les expériences chimiques que j'ai faites fur cesterres, dans ur Mémoire lu à l'Académie, fur la végétation. d (#%) AL eft indubitable qu'on trouve cent fois plus de nitre dans les latrines que dans les écuries. Un Salpétrier de mes amis, cherchcit autrefois la terre des écuries trois lieues à la ronde ; nous avons analyfé ces terres feules, & nousy avons trouvé fi peu de nitre, qu'il ne les cherche plus à un quart de Jieue de chez lx, 384 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ce ne font pas les plantes qui fourniflent à l'urine la qualité nitrificative ; au contraire , l'expérience prouve que les plantes beaueoup fumées ou A oléee d'urine, contiennent plus de nitre. J'ai analyfé plufieurs terres tourbeufes, qui ne prennent leur origine ; felon les expériences inconteftables de M. Barkhey (*) & les fentimens géhéralement adoptés des Phyficiens modernes, que des plantes putréfices, & je n'y ai jamais trouvé un grain de nitre. J'ai aufi analyfé nos terres noires, qui font fi fertiles qu'elles portent annuellement leurs fruits fans jamais être en jachères ; . elles donnent même bien fouvent deux récoltes par année ; mais elles exigent d’être confidérablement fumées par des végétaux putréfiés. C'eft dans de femblables terres qu'on de- vroit, fuivant M. Lemery, trouver du nitre en abondance, puifqu’elles font remplies de Végétaux ; & que la putréfaétion doit y avoir développé tous les fels fixes : néanmoins je n'y ai pas trouvé ce fel; conféquemment le fyftème de M. Le- mery , quoiqu ’aflez ingénieux ne me paroït pas aflez pro- bable pour être adopté. Ti ne fuffit pas d’abattre les édifices de nos prédécetfeurs ; uniquement par goût pour la nouveauté, il eft néceflaire d’en conftruire d’autres plus fermes, plus ftables, & mieux fondés que les précédens, fi cela eft poffible. No avons com- battu, peut-être renverfe les trois fentimens de la nicrifica- tion , propofés par le Prog mme; nous avons montré la foi- blefle des argumens de MM. Becher, Sthal, Neumann & Piecsh » qui croient que l'acide MORE eft l'origine de tous les autres acides , & qu'il fe transforme en acide nitreux. Nous avons tâche de démontrer que l'acide marin ne peut être changé en acide nitreux par les voies jufqu’à préfent con- nues. Le fentiment des Anciens, qui penfoient que l'air étoit le lieu natal & le grand magafin de lacide nitrEUX nous paroïît déjà renverfe par MM. Mariotte & Lemery ; néanmoins C*) Natuarlyke Hiftorie van Holland. ainfi que Mendes d'Acofta, Natural Hif- tory of foffils, nous s MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALrÈTRE. 385 nous y avons ajouté quelques preuves ultérieures. Le fyftéme de M. Lemery le fils, quoique très-ingénieux , nous paroît trop foible pour étre adopté, & nous en avons donné la raïlon. Îl ne nous refte donc plus qu'à expofer la manière dont nous penfons que la nitrification fe fait. Suivons les traces de la Nature, & empruntons d'elle les matériaux pour conftruire notre édifice, & pour fonder notre fvftéme. Pofons d'abord les axiomes fuivans. 1.® Le Salpètre ne fe trouve ni dans la mer, ni dans les rivières , ni dans l'air , ni dans l'intérieur de la terre , comme on trouve les autres fels. 2.% On ne le trouve pas dans les terres purement vitri- fiables , à moins qu’elles n'aient quelque matière calcaire dans leur proximité , comme on l'obferve dans les briques maçon- nées , où il eft engendré dans la chaux & confervé dans les pores des briques (*). 3.° Seroit:il bien vrai qu'on trouve aux Indes fi abondam- ment le Salpétre en pleine campagne , comme les Voyageurs nous le débitent? Ne feroit-il pas une manipulation artifi- cielle, comme le nitre qu'on prépare en Europe ? Combien cette Nation induftrieufe ne nous a-t-elle pas caché la por- celaine, le camphre & le borax? J'ai analyfé le Salpêtre brut de l'Inde, je l'ai, pour la plus grande partie , trouvé à bafe alkaline, tandis que le nôtre eft prefque entièrement à bafe calcaire ; ce fel fi difloluble à la fuperficie de la terre, ne feroit-il pas emporté par la pluie? Dans ce climat chaud, le folcil n'ompécheroit-il pas la génération du nitre, puifque nous voyons que les murailles expofces à cet aftre ne pro- duifent point ou très-peu de ce fel? Nous penfons donc qu'il eft plus probable que dans ces pays fi peuples d'hommes & de bétail, fi fouvent dévafté par les guerres & les rebellions, [°) \ . . fe trouvent des villages & des villes entières rendues inhabi- () Nous avons déja prouvé par l'analyfe, que les terres vitrifiables ne conriennent pas du nitre. Dans nos environs, il y a un village qui contient au delà de qua- rante briqueteries ; on y voit des tas confidérables de cette matière, même contre Les écuries, & je n'y aï jamais vu la moindre eflorefcence nitreufe. Ccc 386 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. tables, & que ce font ces endroits qui fournifient les terres nitreufes, dont la leflive leur donne le nitre ; 1l me paroït donc fort probable que les [ndiens tirent leur Salpêtre de la même matière & de la même fiçon que nous le tirons en Europe. î 4.9 La matrice du nitre eft une matière alkaline , foit ter- reufe ou falne, puifquon ne trouve d'acide nitreux dansda Nature, que mêle avec l’une ou l’autre de ces matières. 5.° Cette matrice alkaline ne donne de nitre que dans le fein de la putréfaction (*). : 6.° L'ation de la fermentation putride y eft abfolument néceflaire , & fans elle le produit de la putréfaétion (favoir l'alkali volatil) ne produit pas l'eflet défire. Jai mêlé quatre onces d'aikali volatil avec une livre de chaux, je l'ai dé- trempé dans l'eau, je l'ai expofe à l'air dans un lieu conve- nable, & l'ayant examine après plufieurs mois, je n'y ai as trouvé un grain de nitre ; par conféquent l’alkali volatil qui eft le produit de la putréfaétion , ne facilite pas la ni- trification , mais Ceft la fermentation putride même qui la produir; ceft ce qui fait qu'on ne voit de murailles nitreufes que dans le voifinage des cloaques , des latrines, ou des A écuries. 7. Sans le concours de l'air, il n’y a point de nitrifica- tion. 8.9 La génération du Salpêtre demande aufi une humidité modérée. Les endroits élevés ne donnent pas ce fel. On ren- contre rarement des murailles nitreufes au fecond ou au troi- fième étage (**), parce que la fermentation putride n’y règne pas. La fermentation eft un mouvement inteftin qui fe far à (#) Voyez les expériences de MM: Mariotte-&-Lemery. ‘ : (F#) Peur-érré.dans des,vides où tous.ies érages font habités, fouvent humeëtés & pourvus de latrines,.on pourroit les trouver ; mais dans Îa ville que J'habite, gui eft-du premier ordre, la qualité de Médecin me faifanc voir mille & mille chambres, je n'ai jamais vu une muraille élevée au delà de dix à douze pieds qui fût nitreufe, e MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 387 laide d'un degré de chaleur , de fluidité convenable , & de l'air entre les parties INCÉGIANTES , dont il réfulte une nouvelle combinaifon des principes, qui change entièrement leur na- ture; ainfi nous voyons que les farineux & les fucs mûrs des fruits produifent, par cette première fermentation, des liqueurs fpiricueules , qui ne fubliftoient pas dans ces corps, & d'où il étoit impoflible e de les tirer fans l’aide’ de la fermentation. Si on expole, avec les attentions convenables , ces liqueurs fpiricueufes à la feconde fermentation, elles produifent un être nouveau, favoir un acide qui eft le vinaigre. Si ces liqueurs font expofces à la troifième fermentation, il “en rélulteune putréta&ion , un alkali volaul, & un gaz très-fubtil, qui eft beaucoup plus abondant dans la putréfation animale, qui eft fi pénétrant & fi phlogiftique qu'il {uffoqueroit l'homme, comme les efprits acides fulfureux & le foufre brülant. Ce gaz concentre prend feu comme les mouffettes, ou le feu brilon qu'on trouve dans les houillères. L'immortel Boerhaave foutient que l'urine récente ne mani- fefte ni acide ni alkal ; l'expérience fuivante le prouvera. Jai trempé un papier bleu teint avec l’orfeille de Canarie, ou la pierre bleue de Hollande, dans l’urine récente , &la couleur bleue n’a été nullement altérée ; figne qu’elle ne contient pas d'acide. J'ai trempé dans cette même urine un papier teint en rouge par l'orfeille de cette couleur, & il n’eft pas devenu bleu ; marque qu'elle ne contient pas d’alkali. J'ai laïflé fe- Journer cette urine trois fois vingt-quatre heures ; alors y ayant trempé un papier bleu, il cft forti pourpre ; l'ayant trempé une feconde fois, il en eft forti rouge; figne non équivoque que la fermentation y avoit produit un a mais doutant fi l'urine fermentée ne contient pas du fel ammoniac, qui, quoique fel neutre , furabonde en acide comme lalun, & change par conféquent le bleu en rouge , j'ai faturé une urine rès-puride & alkaline d'acide vitriolique , à un tel point, qu'elle ne changeoït ni la couleur de l’orfeille bleu, ni celle de l'orfeille rouge; ee qui marque la jufte faturation. Je lai expoféc à une chaleur de cent degrés, couverte d'un papier Ceci LD 88 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. teint en b'eu, & le papier eft devenu rouge. Or l'acide vicriolique faturé d’alkali volatil d'urine, fait le fel ammoniacal fecret de Glauber ; mais ce fel ni l'acide marin ne peuvent pas monter à ce degré de chaleur; conféquemment c'eft l'acide de l'urine qui change la couleur dans ces cas. Ceci paroît confirmé par M. Haller, dans fes Elementa Phyfiologica, où il dit que l'urine (apparemment fermentée) contient un acide. Si donc on ne trouve d'acide nitreux que dans le nure feul , fi on ne tire de nitre que du fein de la putréfaétion, enfin, fi la putréfaion produit un acide; fera-t-il abfurde de croire que la fermentation putride, créatrice de nouveaux prin= cipes comme les autres fermentations, puifle unir le phlogif- tique (dont l'urine abonde, ainfi qu'il eft conftaté par le phof- phore) comme principe à l'acide? Or cet acide voltigeant fous la forme de vapeurs, rend l'air pernicieux , caufe des mouflettes, & produit le nitre quand il fe joint à quelque ma- tière calcaire ou alkaline. Cette théorie eft d'autant plus vrai- femblable , qu'on ne trouve ni mouffette ninitre dans le fable ni dans les carrières éloignées des matières inflammables. Les partifans de M, Meyer peuvent ajouter que l'acidum pingue contenu dans la chaux, coopère beaucoup à la produétion du nitre, puifque ce favant enthoufiafte avance même que / ’acide du nitre n’eft que l’acidum pingue méle de quelque fubflance qui s’exhale des corps putrefiés , tom. 2 , pag. 258. Sans aller aufli loin que. M. Meyer, & fans adopter en- tièrement les idces de MM. Macbride , Black, Cavendish, Prieftley , Jacquin, je crois qu'il ne fe fait pas un grain de nitre fans la concurrence de la putréfaétion , fans un air me- phitique produit par ce mouvement inteftin , & fans la pre- fence de la terre calcaire. Tâchons de multiplier ces heu- reufes circonftances, & je ne doute pas que la nitrification ne foit portée à fon plus haut degré. ESP MÉMOIRES SUR LA FORMATION Dü SAIPÈTRE. 389 CARE PAPE RUE SET ET Manière d’augmenter la Nitrificarion. LÉ Salpétriers choififfent les murailles & les plâtras les plus imprégnés de nitre; ils jettent les plus grofles pierres, ou, sils les trouvent imbibées de nitre, ils les brifent , y mélent des terres d’étables ou d’écuries , en font des monceaux & les arrofent d'urine, & après quelque temps ils en tirent le nitre ; mais nous croyons cette méthode très-dificile , très- difpendieute, & infufñifante. Les perquifitions , les ill es & les démolitions qu'ils ont le droit de faire dans les habica- tions des Particuliers, doivent abfolument entraîner une gêne générale , des abus infinis, des. difficultés fans nombre, & des dépenfes confidérables. L’arrofement de la fuperficie de ces monceaux par l'urine eft infufhfante , parce que l'urine ne peut pénétrer qu'à quelques pouces ; ainfi le gaz fi volatil eft bientôt emporté par le vent ou la chaleur, & peut tout au plus nitrifier la fuperficie. Si on veut de temps en temps changer de place ces terres, oùr aura un peu plus de nitre ; mais aufli les dépenfes augmenteront confidérablement : nous p'opoferons en eue ice une méthode plus facile, moins couteufe, & au oee de laquelle on obtiendra non feu- lement le triple de nitre, mais encore un Salpêtre qui fur- pañlera de beaucoup le Salpétre brut ordinaire. On rangera la matière propre à fe nitrifier, en forme de pyramide tronquée , carrée ou de telle autre forme qu'on ju- gera à propos, dans une place baffle, inacceflible aux inon- dations , & autant qu'il fera poflible à l'abri du foleil; on pré- férera pour la conftrution de ces pentes , les vieux plà- tras, les décombres des écuries, des érables, des latines , & des murailles ladrées ou nitreules. À défaut de ces maté- riaux, on prendra les décombres ordinaires, & on les pilera groflièrement. Ces pyramides doivent être percées , à chaque pied de diftance, d’un trou ou lacune de cinq à fix pouces 390 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de diamètre. On peut ménager ces wous par des perches coniques , qu'on introduit dans les pyramides en les conf- truifant, & qu ’on Ôte à melure que le. monceau avance; la hauteur doit étre de fo à quinze pieds. On couvre la pyramide d'un toit de paille attaché à quatre piliers , rous les mois, plus tôt où plus tard, fuivant la température ; on injeéte de l'urine dans les lacunes au moyen d'une pompe ou autre machine convenable. De certe façon, on aura raflemble routes les circonftances requifes pour une nitrification complete ; favoir, l'air, l'humidité , le phlogiftique, la fermentation pu- tride , & la terre calcaire , tandis que fans l'un ou fans l'autre on ne peut pas produire un grain de nitre (*). Pour ne laifler aucun doute fur la fupériorité de cette mc- thode, j'ajouterai l'expérience fuivante : J'ai conftruit deux pyramides , chacune de quatre pieds carrés & de trois pieds d'élévation , avec de la terre tirée d’une Salpétrière & bien leflivée ; lune étoit maflive & feulement arrofce d'urine ; l'autre, percée & injeétée de la manière que je viens de l'in- diquer : je les ai placées dans le même endroit à une voile de diftance, & apr res neuf mois je les ai lefivées ; la pyra- mide percée m'a produit au delà de trois fois autant de Sal- pêtre que la pyramide folide. Il eft donc inconteftable que les nitrières conftruites de cetre façon, doivent produire infiniment plus de nie que celles conftruites à l'ordinaire. Il eft aufli indubitable que cette méthode ne demande que la moitié du terrein » puifque la terre nitreufe ne doit jamais être remuée ou changée de plage; que par cette méthode on peut éviter les perquifitions ules fouilles & les démolitions; enfin, qu'il én réfulte une éco- noie confiderable. Quoiqu'aux termes du Programme , nous puiffions finir ici notre Mémoïre, cependant une foule d'obfervations économiques que nous avons été à portée de faire, nous force d'ajouter ce qui fuir. () Si ces trous ou lacunes fe comblent par la pefanteur de la male, on peut les ouvrir par une fonde, ou les conftruire ivec de mauvaifes briques fans chaux, ou des bufes faires de terre glaife, cuires & percées de plufeurs ou- VETures. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DÙ SALPÊTRE. 391 CAN PME CROIENT De la manière de tirer le Nirre de la terre nitreufe. Le nitre brut ou cru, comme nous l'avons dir, eft, pour la plus grande partie, un nitre à bafe calcaire, mêlé de beau- coup de fel marin, de quelques autres fels, & d’une ma- tière grafle ou onétueufe; par conféquent plus on peut puri- fier ce nitre dès la première fois fans augmenter les frais, moins aura-t-on de peine à le raffiner; à cette fin, il faut quatre opérations chimiques pour extraire le nitre brut de fa terre ; favoir , 1.9 La commixtion. 2.9 La lxiviation. 3.° L'évaporation. 4° La criftallifauion. Tâchons de porter l'économie & la perfection dans cha: cune de ces opérations. GE De la Commixtion. La commixtion eft le mélange de la terre nitreufe avec de la potafle , de la chaux , de la leflive des Savonniers ou des cendres de bois; chacun doit choifir parmi ces matières celle qui eft la moins chere dans fa province : ainfi les Alle- mands préfèrent la potafle mélée avec de la chaux ou de la leflive des Savonniers, parce que ces matières font à bas prix chez eux. D'autres emploient des cendres de bois avec de la chaux; cette commixtion eft néceflaire pour deux raifons : 1.9 Ja bafe calcaire, du nitre bruc doit être templacce! par un_alkali fixe, afin d'en faire le nitre véritable. 2.° On y ajoute la chaux, pour mieux, déoraifler Je. nitie. brut; il eft conftaré que la chaux: pofsède cette qualité , par les Raff- neurs de fucre , qui, fans l'ufage de chaux, ne pourroient 392 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. pas rendre leur fucre (qui n’eft qu’un fel eflentiel) ni fi blanc, ni fi bien criftallifé. On remarque de même, que l'addition de chaux favorife confidérablement la déguration des fels alkajis volatils. Voici les pratiques généralement adoptces; mais ne pour- roit-on pas y fubftiuer quelques matières plus viles? La po- tafle coute ordinairement trente à trente-fix livres par quintal; les cendres ne produifent d’effec qu'autant qu’elles contiennent d'akali fixe, ainfi que les leflives des Savonniers. Des expe- riences répétées mont confirmé dans l'idée, que dans quel- ques provinces on peut avoir à crès-vil prix une grande quan- tiré d'eau de favon noir, qui a fervi au lavage des linges (”). Cette eau contient beaucoup de favon ; ce favon n’eft qu'une compofition de la potafle rendue cauftique par la chaux, & d'huile ; l'alkali du favon ayant plus d’affinité avec l'acide nitreux qu'avec l'huile, décompofera le nitre brut en chaflant fa bafe calcaire , & conftituera un véritable Salpètre. L'eau de favon produira donc le même effec que la potalle, la lefive des Savonniers, ou les cendres de bois. De plus, dans les villes ou grandes Communautés, il n'y à pas de Chamoifeurs qui n'emploient annuellement plufieurs quintaux de potafle, pour enlever à leurs peaux l'huile de baleine dont on s'eft fervi pour le foulage. Dès que cetre leflive eft chargee d'huile à un certain point, ils la font bouillir , enlèvenc l'huile furna- geante, & rejettent cette leflive qui eft néanmoins très-chargée de porafle, & qui fera très-propre à la decompofition du nitre à bafe terreufe. On mêle donc dans des cuviers la terre nitreufe avec de la potafle, des cendres, ou de la leflive des Savonniers, ou, plus économiquement , avec l'eau de favon , ou mieux en- core , avec la leflive des Chamoïfeurs , mêlée d’un peu de chaux vive, & on les remplit d’eau. J'omerts ici la conftruc- C*) II faut que ce foit du favon noir dont l'alkali eft végétal ; car le favon blanc ftant fait avec l'alkali minéral, donnera un nitre quadrangulaire qui eft plus dé- liquefcent, & dont la criftallifation eft plus difficile, Voyez D Eure IRaUgU= ralis de nitra cubico, tion ; MiMorres SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 393 ton, l'ordre, & le nombre des cuviers, cet objet étant fuf. ffamment connu des Salpétriers. (IE À De la Lixiviation. L'eau verfée fur le mélange diflout les parties falines, les entraîne, & coule dans des baflins placés à cette fin : dès que l'eau eft égouttée des huit ou dix premiers cuviers, on la repañle fur les huit ou dix fuivans, & puis fur les reftans. Je n'infifte pas beaucoup fur cette manipulation , vu qu’elle doit varier felon la richefle de la terre nitreufe | aufli chagne Salpêtriet a fa manière particulière ; mais il me paroît qu'il feroit beaucoup plus exatt de mefurer le degré de force de cette leflive, au moyen d'un aréomètre conftruit de la ma- nière fuivante (*). On prend un aréomètre ordinaire d'argent fin, on le plonge dans une pinte de l'eau dont on fe fert dans fa falpétrerie, & on marque un zéro à la place de l’en- foncement, puis on diflout une once de nitre brut dans cetre cau , & à la place de l’enfoncement de l'hydromètre, on mar- que n.° 1 ,. puis on y diflout encore une once, & on y marque n° 23 & de cette manière on pourfuit jufqu'à la faturation complette de cette eau (**). Par cette méthode, on peut aifément reconnoître quand la liqueur fera dûment faturée pour étre mife en cuite; on peut aufli s’aflurer par ce même moyen, fi cette terre eft fufffammentleflivée; alors on dé- charge les cuviers, & on conftruit de cette terre leflivée des pyramides, comme nous l'avons dit ci-devant Si la terre n'eft plus propre à cet ufage, elle peut fervir d'engrais aux terres argileufes , marécageules, ou aux prairies. (%) Note des Commiffaires. Les Régifleurs des poudres ont donné en 1777, dans leur inftruction {ur Ja fabrication du Salpètre, la defcriprion & la conftruétion d'un aréomètre à peu prés femblable à celui qu'on propofe ici. (#*) On doit .obferver ici que l'eaa peut difloudre beaucoup plus de nitre en été qu'en hiver, comme nous le dirons ici-après ; par conféquent la cuite doit être plus chargée pendant les chaleurs que pendant le froid. On pourroit même faire une correction thermométrique au degré mefuré par l'aréométre; mais on la regarde comme inutile dans la pratique, é ’ Ddd 394 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $. IIE De l’Evaporation. On met cette eau égoutrée & imprégnée de nitre & d’autres fels dans une chandiéée de cuivre; on la fair lentement bouillir , on Ôte l'écume , puis on y ajoute fix à fept livres de fang de bœuf, qu'on aura foin de tenir liquide par Fagi- tation; On y ajoutera quelques pots d'eau de chaux claire : l'expérience m'a appris que cette addition fait encore jeter une quantité confidérable d'écume , que la liqueur devient beaucoup plus lympide, que la criftallifation fe fait beaucoup mieux, & que le nitre quien provient eft plus dégraifle (*). On peut Ron concevoir le profit qui endoitréfulter, fi on confi- dère l'efler que f produirle fang de bœuf & l’eau de chaux dans le raffinage du fucre ; ; après ces diflérentes additions, on écume; on pourfuit l'évaporation à à petit feu, & on enlève le fel com- mun qui fe précipite au fond de la chaudière, au moyen d'une cuiller percée ; car le fel marin fe criftalhife à l’eau chaude , & le nüre ne le fait que par refroidiflement. Des que la cuiflon eft au degré convenable, Ce quon connoîc quand la liqueur fe congèle aufli-t0t qu'on en mer un peu refroidir fur une hachette, on la tire de la chaudicte & on la met dans un refervoir, afin que le fel marin & les ordures fe dépofent; mais on ne doit pas l'y laïfler au delà d’une demi-heure ; car fi la cuite commençoit à fe refroidir, le nitre fe cnftalliferoi; c’eft pourquoi il ct crès-utile de couvrir le réfervoir, afin d'y retenir la chaleur le plus long-temps qu'il eft poflible. SUOMI De la Cra lallifation. F On retire la cuite par un robinet qui eft à trois ou quatre pouces du fond du réfervoir ; on la reçoit dans des baffins + (j'Ee fang de bœuf m'a beaucoup mieux réuffi que la coile qu'on emploie ordinairement ; d'ailleurs cetre matière eft à beaucoup meilleur marché que la colie, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 395 de cuivre ou des cuveaux de bois; on les couvre très- exaûte- ment, afin que le refroidiflemenc fe fafle très-lentement , ce qui contribue fort à la perfeétion des criftaux ; & en hiver, au bout de trois ou quatre Jous, on a la criftallifanion par- faire ; mais il n'en eft pas ainfi en été , il faut au moins cinq à fix Jours ; Encore n'a-t-On pas , à beaucoup près, la même quantité de nire , & n'obtient-on que de très-mauvais criftaux. Un Salpétrier de mes amis fe plaignoït, il y a troïs ans, qu'ilne pouvoit pasobtenir de fi beaux criftaux, nien aufli grande quan- tte, fur-tout en cté, qu'un defes Confreres; en conféquence il ob dene plustravailler pendantl'été. j'examinai fa manière de procecder, &) ‘obfervai que la place où il mettoit criftalhfer, éroit expolée d'un côté au foleil, & de l’autre contre le feu de fa chaudière. À Ja cuite Re , fachant que la criftal- lifation du nitre fe faifoit par refroidiflement, je fis mettre quelques baflins dans la place ordinaire , & quelques autres dans un autre endroit, où le thermomèie de Farenheit étoit à huit degrés plus bas. J'obtins dans cette dernière place preique le double de Salpêtre. Le voulant convainere que ce n’étoit que la chaleur de la place qui faioic ee fes opc- rations, un jour que la température étoit de foixante-quatorze degrés, je plaçai quelques baflins à l'ordinaire, & je plongeai quelques autres dans un bain d’eau mère, où io ois encore ajouté un peu de fel marin & du fél ammoñiac, » quoique dans la même place, je tirai beaucoup plus de nitre des baflins refroidis par l'eau falée. J'ai aufli oblervé que pour avoir de beaux cuftaux , il falloit que la criftalhfation fe fit très-lentement ; à cette fin, j'ai exaétement bouche quelques baflins, pour y retenir plus long-temps la chaleur ; au bout de deux jours, je mis ces bañlins dans l’eau ; le troifième, je les mis dans l'eau mère chargée de fel marin & de fel ammo- niac ; & de cette façon, non feulement j'ai obtenu plus de Salpêtre qu'à l'ordinaire , mais encore les criftaux croient beaucoup plus beaux. Pour me convaincre encore davantage : J'ai rempli en été un baflin d’eau mère qui avoit donné tout fon nie, je l'ai placé dans une faumure de fel marin & de fei Ddd ji; 396 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ammoeniac, & après quelque temps , elle ma donné encore beaucoup de’.nitre fans l'avoir approché du feu. De ces expériences on peut tiret les axiomes fuivans. 1.® Que fi on rapproche-trop la cuite, le fel marin & le nitre doivent fe précipiter entemble, 2.9 a on doit continuer de rapprocher la cuite, fur-tout due été, jufqu'à ce- que le fel marin fe précipite. 3. Que pendant l'été on doit un peu plus rapprocher la ente que pendant l'hiver. 4.° Qu'en été la cuite peut plus long-temps féjourner dans le io qu'en hiver. 9 Que le refroidiflement doit fe faire très-lentement. à ® Que plus le refroidiflement eft grand , "plus on enretire he DUIES ° Que le refroidiflement artificiel par le fel marin & le A ammoniac, doit être d’un wès-bon ufage, fur-tout en été. 8.° Que par le refroidiflement artificiel, on peut faire dépofer à une cuite dûment rapprochée, prefque tout le nitre qu “elle contient. Si on fait donc les opérations. de la manière indiquée, on aura beaucoup plus denitre, un nitre pour la plus grande partie à bafe faline, un nitre qui contiendra moins de fel marin qu'à l'ordinaire un nitre qui fera moins gras, par confequent moins difficile à rafñinér, & une eau mère pour la plus grande partie dépouillée de fes parties nitreufes. Au lieu d’en role les décombres, comme cela fe pratique ordinairement , ne feroit-il pas mieux de la garder jufqu'à ce qu'on en eût une quantité convenable , d'y ajouter de l'eau de chaux & du fang de bœuf, de la clarifier, de Ja rapprocher jufqu'a ce qu'elle déposât une partie de fon fel marin? Sion met de temps en temps un peu de ce fel précipité fur des char- bons ardens , lé détonnement inftruira du moment où le nitre fe précipite. Dans ce dernier cas, on ajoute DHpes d'eau, on décharge promptement après la chaudière dans le réfer- voir, & on faic criftallifer. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 397 1 Chosnictirwiserro) nn 9 Jai attaqué les trois fyflèmes propofés par le Pro- gone fur la nature de l'acide nitreux. J'ai tâché d'établir un nouveau fentiment qui fera ae à fon tour. Je l'ai appuyé de preuves, qui, quoi- que bien loin d’être convaincantes , me paroifent du moins auffi plaufibles que celles de mes prédécefleurs. Si je n'ai rien établi de nouveau, du moins aurai-je excité la curtofité des Savans, qui feront peut-être plus heureux que moi; & cela me dédommagera amplement de mes peines; car je ne crois pas que l'Académie CxI9C une manière courte , facile & peu cou- teufe de convertir l'acide vitriolique ou marin en acide ni- treux ; car l'Inventeur , fûüc-1l fi heureux, fe réferveroit le nus .% Mais je penle que les pyramides acrées & l'ingetion Re qe Ja propolé ées , donneront plus DEOPDENCRE & beaucoup plus de nitre que les monceaux de pläras or- dinaires , qe les murs propolés par M. Prerfth & les pyramides mides fo!ides de Srockholm; du moins leur conftruétion me pa- roit-elle plus conforme à la chéorie, parce que l'air & l'humidité qui doivent néceflairement concourir à la putréfaétion & par conféquent à la SA Cne pénétreront dans toute la fubf- tance de la pyramide , & fe répartiront dans toute la mafle, tandis qu'ils ne peuvent ae qu'à la furface dans les nitrières ordinaires. De plus, notre méthode occupe moins de terrein, eft moins difpendicufe, & procurera par-là une grande éco- norme. Nous avons fubftitué à la porafle , à la lefive des Sa- vonniers, & aux cendres, l'eau de favon noir , ou la leflive des Chamoifeurs ; ce qui fera une économie très-confidérable , vu que ces matières aboudent en alkali fixe, font tres-viles, & qu'il eft tres-facile de fe les procurer. 5.® Nous avons ajouté à l'évaporation des précautions très- cflenielles , coinme l'ufage du fang de bœuf & l'eau de chaux - 398 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÂTRE. pour le dégraiflage, qui, indépendamment de l'épargne , pro- duiront un nitre fuperieur & en plus grande quantité, 6.° Dans la crifallition, nous avons montré la raïfon pour laquelle on fait fi peu de nitre en été; non feulement nous y avons apporté le remède, mais encore nous avons montré la voie de tirer plus de nirre qu'on n'en tire par la voie or- dinaire, Voyez M. Machy, Recueil des Différtations Phi- Jico-Chimiques. D'après tout ceci, nous croyons d’avoir propofé des moyens plus prompts & plus économiques de procurer en France une ot G une recolte de Salpétre plus abon- dantes que celles qu’on obtient préfentement, & Jur-tout qui puiffént difpenfèr des recherches que les Salpétriers ont le droit de faire dans les maifons des Particuliers. 329. EN mme CAN En —— @ —— =") ES ho A el SUVR EE S MAO Y'EINNS De faire générer le Salpêtre en abondance & avec la plus grande économie. G— Ouvrage qui a remporte le fecond Acceflit. Par M. 1e Comte THoMassiN DE SAINT-OMer. Sic mareriis arte difpofitis, Narur& duce, abundanter generabitur Nitrum. NE 130) D:: différens fentimens établis fur la formation du nitre, fi judicieufement analyfés dans le Programme publie par MM. de l'Académie Roy ale des Sciences, celui de Staahl, qui n'ad- mer avec Becker qu'un feul acide primitif (l'acide vitriolique ) pour principe & pour l'origine de tous les autres, nous avoit d’abord paru préférable. Ce fyftème paroifloit confirmé par des expériences faites fur le même principe , notammeñt par une de M. Pietfch, qui, ayant imprégné une terre calcaire d'efprit de viriol & d'urine, obtint un véritable nitre natu- rel (*); mais confidérant que d’autres Chimiftes très-éclaires , poftérieurs à ces premiers, particulièrement M. Baume , avoient Obrenu du nitre d'un mélange de terre calcaire & d'urine, (#) -Differration [ur la génération du Nitre, Berlin , 1759, pag. 29; . 30. 400 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fans employer de matières vitrioliques (*) ; induits d’ailleurs par l'invitation du Programme, & le défir de reconnoître fi l'acide vitriolique entroit pour quelque chofe dans la com pofition du nitre, nous nous fommes portés aux expériences fuivantes. 1.9 Nous avons mis dans un vafe un boïfleau de marne (*) & feize pintes d'urine d'homtnes ; nous avons laïflc ce mé- lange pendant fept mois (**) expofe à l'air, à l'abri de la pluie & du foleil; on l'agitoit de temps en temps, & on y ajoutoit fufifante quantité d'urine, pour le rehumecter quand il ecoit fec; ce mélange, lefivé & évaporé, nous a donné fept gros de nitre à bafe de terre calcaire. , : 2.9 Un boifleau de marne écrafée , un demi-boïfleau de bonnes cendres de bois, & vingt pintes d'urine, mélangés & travaillés comme deflus, dans le méme efpace de temps, nous ont donné une once & demie de nitre à bafe d’alkali fixe. 3.° Un boifleau de marne, fix livres de vitriol vert & feize pintes d'urine , expofés aufli pendant fept mois, agités & ar- rofés comme les autres mélanges, ne nous ont donné qu'en- Os ne . \ (e) f 1 . MION ŒOIS Cros de nitre à bafe [érTEulIe Caicalrc. 2 NUÜn otate marne , un demi-boifleau de cendres, fix livres de vitriol vert & vingt pintes d'urine, expofés pen- dant le même temps que les mélanges précédens , agires & arrofés de même, ne nous ont donné qu'environ cinq gros de nitre à bafe de terre calcaire. 5° Un boifleau de marne, trois livres de porafle , feize pintes d'urine, expofés, agités & arrofes comme deflus , ont donnéune once fix gros de nitre à bafe d'alkali fixe. 6. Un boïfleau de marne , trois livres de potafle, fix livres de vicriol vert, & vingt pintes d'urine, agités & arrofés pendant le même temps, ont donné près de dix gros de nitre à bafe d'alkali fixe. (*) Chimie expérimentale de M. Baumé , tom. 3. pag. 594. (#*) Le boifleau tient dix pintes de Paris. (#*##) Commencé au mois d'Avril1776, pourjouir du temps propre à la fermen- tation, Q 7: MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 4or, 7% Un boifleau de cendres de bois, & dix pintes d'urine, mélangés, arrofes & expofés pendant le même temps que les préparations ci-deflus, ont donné deux gros de nitre à bafe d’alkali fixe. 8.° Une livre de porafle & deux livres d'urine, tenues en ex- périences aufli pendant fept mois, ont refté en déliquium, & ne nous ont point donné de nitre. 9.° Deux livres de vitriol & quatre pintes d'urine , tenues pendant le même temps, n’ont point donné de nitre. 10.° Six livres de vitriol, demi-boifleau de cendres & feize pintes d'urine , n’ont point donné de nitre. 11.9 Le fel marin employé au lieu de vitriol dans de pa- reils mélanges où le fel viriolique entroit avec la marne, na pas donne autant de nitre que les mélanges de marne, &c. fans ce fel; il en a cependant donné plus que ceux avec la marne où entroit le vitriol. 12.9 La chaux éteinte à l'air, & les décombres de bâtimens, pris dans les parties les plus élevées, où il n’y avoit point de nitre , employés au lieu, de marne dans de pareils mélanges, ont donné les mêmes produits, à peu de différence. Indépendamment du nitre provenu des mélanges ci-defus ; nous en avons tiré du fel marin, du vitriol à bafe de terre cal- caire, des alkalis furabondans , & du tartre vitriolé. Pour nous affurer d’où provenoïit ce dernier, dans le fecond mélange où nous n'avions pas employc de vitriol, nous avons leflivé à part des cendres; nous avons évaporé à confiftance convenable, & nous avons retiré par criftalhfation du tartre vitriolé ; nous en avons également obtenu de la potafle par le même procédé. Nous ne nous fommes point arrétés à ces fels, étant étrangers à ce fujet. 13.° Un mélange de marne, de cendres & d'urine , ayant été mis dans une bouteille bouchée pendant les fepr mois, & enfuite leflivé & évaporé, n’a produit aucun nitre; d’où il ré fulte que le concours de l'air eft néceflaire à la génération de ce fel. Eeo 402 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. REMARQUES. Ces différentes expériences confirment aflez clairement que l'acide vitriolique n’eft point néceflaire à la formation du nitre: il ne fait au contraire qu’en diminuer le produit; ce qui fe voit par l'expérience troifième, où la même quantité de marne & d'urine avec le viriol, donne moitié moins de nitre que le pre- mier mélange, où il n'entre que la même quantité de marne & d'urine, fans vitriol, Dans la troifième expérience, le vitriol , abandonnant fa bafe ferrugineufe pour s'unir à la terre calcaire , diminue la quantité de cette terre qui eft en jeu avec l'urine ; le felvitrio- lique qui y eft interpofc, ainfi que le précipité ferrugineux , font autant de caufes du retard & du moindre produit ni- ureux. Ê Le même raifonnement peut s'appliquer À la quatrième ex- périence. comparée à la feconde ; le mélange eft le même,, à l'exception des fix livres de vitriol qui font de plus dans la quatrième ; lon voit que le produit en Salpêtre eft moitié moindre dans l'expérience où entre le vitriol. L’acide virrio- lique abandonne fa bafe ferrugineufe pour sunit à lalkal fixe de la cendre, avec lequel il a plus d'affinité; de là du æarcre virriole, & de la cendre employée en pure perte à la produétion du nitre. Le tartre vitriolé & la terre ferrugineule incerpofés dans le mélange , font encore ici des caufes du re- tard de la production & de l'extraétion du nitre. Le fixième mélange démontre aufli les mauvais effets, du vitriol dans la produétion du nitre ; la quantité que nous. en avons tirée , beaucoup moindre que dans le cinquième mé- fange, qui cft le même à l'exception du vitriol, ne vienten- core que de ce que l'acide vitriolique quitte fa bafe pour s'unir à l’alkali fixe de la potañle. Mais comme il fe trouve plus d'alkali qu'il. n’en faut pour, décompofer le vitriol, il en-refte encore pour la produétion du:nitre ; auffi voit-on que ce mé- lange donne plus que ceux fans alkali, mais moins que: celmi de même compofition fans vitriols MÉMOIRES SUR LA-FORMATION DU SALPÊTRE. 40} On peut conclure des expériences ci-deflus , que le nitre retiré par M. Pietfch du mélange d’une terre calcaire, arrofée d'acide vitriolique & d'urine, ne doit point fa produétion à cet acide, mais à l'urine & à la terre calcaire ; qu'au contraire l'acide vitriolique me peut qu'avoir retardé & diminué le pro- duit. Si ces expériences ne rempliflent point entièrement les vües de l’Académie , elles confirment au moins deux points impor- tans : 1.° l'inutilité de l'acide vitriolique & du fel marin pour la formation du nitre ; 2.° la nécedité indifpenfable du con- cours de l'air. Ayant eu connoiflance, dans le cours de nos expériences, de la publication d’un Recueil de Mémoires & d’Obfervations fur la formation & fur la fabrication du Salpètre , par MM. les Commiflaires nommés par l'Académie , nous nous fommes cmprefles de nous en procurer un exemplaire; & la Préface de ce Recueil, également lumineufe , nous ayant fait con- noître que l'intention du Gouvernement eft mœins de favo- rifer la pofibilité de faire du Salpêtre , que la préfentation des moyens d'établir une bonne methode pour l'avoir en grande quantité & aux moindres frais poflibles; conduits par les con- noïflances acquifes par nos experiences, nous avons dirigé nos recherches pour remplir les vües de cette feconde annonce. Nous ne nous arrêterons pas à diflerter fur chacune des différentes matières propres à produire le Salpèrtre ; il nous fuffic de voir par le Programme de MM. de l'Academie Royale des Sciences, par le Recueil des différens Mémoires, & de favoir parnos propres expériences , que les fubftances animales, végétales & minérales, mélangées en certaines proportions dans un lieu à l'abri de la pluie & du foleil, avec le concours de l'air, produifent leSalpêtre par la putréfaétion , & que plus,la putréfa- tion eft grande , plus la produétion en Salpétre eft abondante, ainfi qu'il eft conftaté par lesnitrières deSuède, de Prufle , de Malte, &c. La feule obfervation que nous nous permettrons fur l'objet des matières annoncées par plufeurs Auteurs de ces Mc- moires , comme les plus abondantes en nitre ou les plus propres : ec 1} 404 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. à le produire, c’eft qu'ils en citentbeaucoup dont onne poutroit faire ufage, parce qu'elles feroient trop difpendieufes, telles que les fuperficies d'un jardin, d’un champ, d'une prairie > que les Propricraires ne permettroient den lever qu'en leur en payant la valeur, fouvent au double dela perte qu'ils éprou- veroient; fans compter les frais des enlèvemens , qui augmen- teroient en raïon des diftances. Il en eft de même des fientes de brebis & de pigeons, qui par cela feul que ces fubftances contiennent beaucoup de nitre , forment un engrais des plus recherché, notamment depuis la cherté des blés, & que les Agriculteurs favent l’apprécier à fa plus haute valeur. Au nombre des végétaux , font le foleil, la bourache , la fume- terre, &c. &c. qui ne font préférables qu'autant qu’elles ont été cultivées dans des terreins bien fumés, puifqu'il n'en eft pas de même lorfque ces plantes croiflent dans des terres qui ne con- tiennent pas de nitre (*). Il eft certain qu'indépendamment de ce que ces matières feroient trop frayeules , elles font trop rares pour fournir à l'abondance ; elles peuvent être employées dans un laboratoire en petit, mais elles ne fauroient fuffire à faire le fond d’une nitrière en grand. Les matières que nous propofons d'employer , fe trouvent par-tout, & par-tout en abondance; à la vérité, il eft des pays où quelques-unes ont une certaine valeur, en raïfon de l'atilité dont elles font pour l'agriculture où elles fervent d’en- grais ; & comme il eft de la dernière conféquence, pour réuflir dans ces fortes d’établifiemens , de porter l'économie fur tout ce qui concerne une nitrière , il eft eflentiel de ne fe charger que de celles de ces matières que l'on peut obtenir fans frais, ou à des prix qui foient proportionnés à l'avantage qu'on en peut rer dans la produétion du nitre. Il n’eft pas moins impor- tant d'introduire dans les mains d'œuvre le plus de mécanifme qu'il eft poffible , afin de les abréger ; car les bras des Journaliers s'achètent toujours à prixd’argent. Voici les matières minérales, végétales & animales les plus "E C) Chimie expérimentale de M. Baumé, tome 3, pag. 592. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 405 fufcepribles de produire abondamment du nitre, les moins cou- teufes de routes celles qui fe rencontrent en cette ville (*), lap- préciation des quantités annuelles qu'on peut en obtenir, & celle de leur valeur. Toutes perfonnes chargées de pareils établif- femens, doivent fe prémunir de ces connoïffances, relative- ment aux endroits où ils fe propofent deles former. Les proxi- mités des villes fonc les lieux les plus favorables aux nitrières , à caufe de la plus grande facilité à fe procurer les matières. 1.9 Les terres & décombres provenant de la démolition des vieux bâtmens , dont les Propriétaires ni les Entrepreneurs ne retirent aucun profit, qu'au contraireils font obligés de faire tranf- porter hors de la ville à leurs frais, fans favoir fouvent où les placer. Par l'évaluation que nous avons faite de cette reflource, d’après des informations exactes, la quantité de tombereaux qui sen exporte annuellement, monte de huit à dix mille. En prenant la moyenne proportionnelle, qui eft de neuf mille, & en portant à quaroïrze pieds cubes la contenance du tom- berçau , on auroit chaque année cent vingt-fix mille pieds cubes de matières qui ne couteroient rien. Pour remplir plus sûrement cet objet, il feroit à propos que le Gouvernement fit défenfe aux Entrepreneurs & Conftruéteurs de bârimens, de dépofer les matériaux falpétrés ailleurs que dans les nitrières. Ce regle- ment ne pourroit les léfer en rien, parce que ceft une des obligations des Entrepreneurs de débarrafler les décombres. Les Charretiers eux-mêmes y trouveroient de l'avantage, en raïfon de la plus grande proximité. Il conviendroit encore effentiellement d'exiger que les dc- combres fuflent tranfportés à mefure des démolitions & exca: vations , afin quils ne fuflent point expofes à perdre leur nitre par les pluies, commeils feroient s'ils féjournoient à l'in- jure du temps. 2.° Les boues , immondices & balayures des rues, remplies de végétaux & de fubftances animales , lefquelles ne coute- roient que la peine de les faire enlever, font un objet de fept (#) Saint-Omer, 406 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: mille tombereaux par an. Nous lesréduifons à moitié, à caufe du déchet dans l'affaiflement qu'occafonnera la pucréfaétion ; il en réfultera annuellement une quantité de matériaux de quarante-neuf à cinquante ‘mille pieds cubes effedifs. Les fu- miers desétables & écuries, ainfi que les pailles des litières, lorfqu'on pourra les obtenir à bon compte , font encore des matières très-{ufceptüibles de coopérerà la produétion du nitre; il n'y auroit que le prix d'achat qui pourroit les faire fupprimer. 3.° Les vidanges des latrines , tant des maifons bourgeoifes que des pavillons & cafernes, qui fe donnent pour les frais de l'enlèvement : cette ville peut en fournir annuellement fix à fept mille tonnes de trois pieds cubes par tonne ; on les obtien- droit aux nitrières à trois fous de la tonne, en s’engageant à routprendre , quoiqu'elles fe vendent aétuellement quatre fous pour fervir d'engrais. Mais comme il pourroit fe commettre des fraudes , en ce que les Vidangeurs pourtoient remplir les tonnes d’une partie d’eau qu'ils trouveroient aux pompes, dans les cours des Particuliers, pour en augmenterle volume à leur profit, il fera préférable que l'Entrepreneur de la nitrière fafle exploiter l'enlèvement de ces vidanges par économie, en fe conformant toutefois aux Réglemens de Police. Dans certe clafle fe trouvent encore le fang , les tripailles, & autres abattis des tueries des Bouchers ; ils font obligés de les faire tranf- porter hors de la ville à leurs frais, & ils n’en retirent aucun profit. On ne leur feroit donc aucun tort en leur ordonnant de faire tranfporter ces matières aux nicrières; c'eft un objet de deux cents tombereaux par an, & par conféquent de deux mille huit cents pieds cubes. A l'égard du fang, il eft aflez ordinaire que les Bouchersle laiflent couler dans les ruifleaux des rues; ce qui infecte les quartiers voifins. El feroic bon d’enjoindre aux Bou- chers de ramafñer le fang des animaux dans des cuverttes, & de le tranfvafer dans des tonnes qu'on fe chargeroit d'y de- pofer , & qu'on feroit enlever à des jours réglés ; dans le cas où les urines des vidanges ne fufhiroient pas pour arrofer con- venablement toutes les matières en putrcfaétion, on pourroit MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 407 auffi. dépofer des tonnes dans les cabarets les plus fréquentes, ainfi que dans les cafernes , pour y recevoir toutes les urines qui: en proviendroient. Nous. ne penfons pas qu'on puifle fe procurer des matières qui, par leurnature, foientcapables d’une plus grande produétion de Salpètre que celles inentionnées dansles trois articles ci-deflus, au moins pour une exploitation en grand, ni à meilleur compte , puifque nous introduifons dans les nitrières la quantité de cent foïxante-quinze mille pieds cubes de fubftances folides; favoir , cent vingt-fix pieds fans aucun frais, pas même ceux de tranfport, & quarante-neuf mille pieds qui ne couteront que les frais de l'enlèvement , fans y comprendre les vidanges des latines & les abatris des tueries. Il ne s'agira donc que de mélanger ces. différentes matières, de les arrofer & retourner de façon à agcélérer une putréfadtion complete; en obfervant de conduire les’mains d'œuvre avec la plus grande économie: ce que nous expliquerons ci-après. Le Recueil de Mémoires & d'Obfervations fur la formation duSalpètre., nous fournit plufieursidées de nitrières établies ou en projets , fous diverfes formes; mais nous penfons que la méthode des hangars deftinés à contenir des couches de ma- üères en putréfaétion , eft à préférer à toutes les autres voûtes propofées par: Glauber ; les murailles ufitées en Prufle nous paroiflent trop difpendieufes, & au furplus ces dernières n'é- tant couvertes que. d'un petit toit de paille au fommet, qui ne fauroit garanar les faces des pluies chaflées par le vent, ni des rayons du foleil, elles doivent néceflairement perdre une grande partie de leur nitre; les fofles ont aufh leurs défec- tuofités, parce que les matières y étant privées du concours d'un air fuffamment renouvelé , le Salpêtre ne peut s'y pro- duire que fort lentement; d’ailleurs les liquides qui proviennent des: arrofages, filtrant dans les terres , y entraînent le nitre qui S'y trouve, à moins que ces fofles ne foient revêtues en bonne maçonnerie en: ciment, en forme de citernes, & couvertes d'un toit pour les garantir des eaux de pluie, auquel cas elles 408 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. deviendroient fort coutcufes , eu égard au peu de volume de matières qu'elles contiendroient. En adoptant le fyftème des hangars, il fe préfente d’abord deux manières de les conftruire; l’une au folïde, l’autre à la légère : mais nous préférons la première pour des raïfons fi palpables , que nous ne nous arréterons pas à les difcuter. Quant aux dimenfions, les uns en propofent de fort étroits, d’autres, d’exceflivement larges. Nous trouvons les uns & les autres également defeétueux ; les premiers, en ce qu'ils contiennent bien peu de matières, & que, par cette raïfon , il faudroit confidérablement les multiplier ; & les feconds, en ce que leurs couvertures devant être élevées en raïfon de leur largeur (notamment fi on les couvre de paille), ils don- nent trop de prife au vent, & feroient bientôt détruits. Nous propofons à cet cgard un milieu qui pourra concilier le prodyir avec la folidité. Avant que d'entrer dans l'explication des dimenfions des hangars ; nous avons à obferver, 1.° qu'en quelque endroit quon fe propole d'établir des nitrières, il eft neceflare , comme nous l'avons déjà dit, d’être informé exaëtement des quantités de chaque efpèce dematières qu'on pourra fe pro- curer annuellement fur les lieux, notamment de celles des différentes fubftances qui font les plus eflentielles, & dont il fe trouve le moins, afin de proportionner l'étendue de chaque nitrière, ainfi que les capacités des hangars & des bâtimens d’évaporation , au volume de ces matières. Si on n'avoit pas le foin de faire préalablement ces calculs, on s’expoferoit ou à laifler perdre de ces fubftances, fi les hangars n’étoient pas aflez étendus pour les contenir, ou à fe jeter dans des frais de conftruétion inutiles , fi on les faifoit trop vaftes. 2.9 La durée du temps que les matières devront féjourner en putréfaétion avant que de pañler à la lixiviation, doit auf influer dans la difpoftion des hangars : on doit faire fes dif- pofitions de manière à avoir des matières de tous les âges en fermentation, afin qu'on puifle lefliver fucceflivement & fans interruption. Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 409 interruption. Suivant ce qui eft rapporté dans le Recueil des Commiflaires de l'Académie, dans quelques nicières, on commence à leffiver au bout d’un an, dans d’autres, au bout de deux, enfin quelquefois au bout de trois Comme les matières que nous propofons d'employer ne font pas les moius fructifiantes , nous pourrions fuppofer la poffibilité de les lens flveraprès un an de putréfaétion ; mais comme il eft effentiel de leur donner toute la richefle dont elles font fufceptibles , pour ne pas s'expoler à faire mal à propos des frais d'évaporation, nous avons formé nos difpofitions fur trois années de putré- faétion , fauf à diminuer ou augmenter, felon ce que l'expérience pourra plus pofitivement déterminer. En confequence , confidérant que la ville que nous pro- pofons pour fervir de comparaïfon, contient trois portes, nous propofons d’établit à chacune d’elles une nitrière, que nous écaïtons à la diftance de foixante à quatre-vingts toifes, tant des barrières que de tous chemins, afin de ne pas infeéter les paflans, & de pouvoir, avee plus d'économie , faire tous les tranfports des matières qui proviendront des différens quar- tiers de la ville : sil ny avoit qu'une nitriere, les Propriétaires habitans dans les quartiers oppofés à celui où elle feroit placée , feroient léfés dans le tranfport de leurs terres & décombres , puifqu'ils feroient obligés de leur faire traverfer toute la ville pour les envoyer à la nitrière , tandis qu'ils feroïent à la proxi- mité d’uneautre porte ; les Conduéteurs exigeroient avec raifon doubles frais de voiture, & il y auroit une injuftice de con- craindre les Propriétaires à les fupporter. Néanmoins, comme les raïfons qui nous déterminent à divifer les nitrières en trois parties, pourroient être combattues par celles d'une plus grande économie , on pourroit placer les vingt-fept hangars, dontil fera ci-après parlé, dans le même terrein, & par-à on évite- roit la dépenfe de deux bâtimens d’évaporation. Cette pofition n'eft propofée qu'autant qu'il n’y auroit point d'incompatibilité avec le fervice des fortifications de la place, circonftance qui ne peut fe rencontrer dans les villes ouvertes de l'intérieur du Royaume, EG 410 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Ces trois nitrières uniformes fe:oient proportionnées de ma= nière que chacune d'elles contint le tiers des fubitances qu'on fe propofe d'obtenir de la ville. Chacune de ces nicrières occuperoït un parallélogramme reétangle de quatre cent foixanre pieds de Roi de longueur , du levant au couchant, fur trois cent ox2e de largeur , du midi au nord , le tout hors d'œuvre. On creuferoit dans fon pour- tour un fofle de dix-huit pieds de largeur en haut, de fix pieds de largeur en bas, & de fix pieds de profondeur, pour clorre le terrein, pour le tenir fec, & pour fournir les eaux néceflures à la lixiviation des terres. Un terrein fur ces di- menfions contiendra quatre mefures un quartier; il fe loue communément quarante livres la mefure (*). Les pofitions des nitrières qui pourront être à portée de quelque ruifleau, feront préférables, & pour lors il fera à propos d'y former , fi cela fe peut, un foflé de communica- tion, afin de faciliter, tant l'entrée de certaines matières neu- ves, que l'exportation de celles qui auront été leffivées. Chaque hangar fera formé fur deux files de pilors, places à onze pieds d'intervalle les uns des autres fur la longueur , & à vmgt-quatre pieds fur la largeur dans œuvre. Ces pilots , au nombre de trente-quatre, compris les deux qui fe trou- veront au milieu de chaque bout, feront autant de petits chênes capables de donner chacun un pied de diamètre en haut, fur feize pieds de longueur , favoir cinq pieds & demi de fiches, deux pieds pour le rehauflement du fol, hui pieds d'étage fous poutres, fix pouces de tenon à emmortaifer dans les poutres , dont chacune fupportera une ferme pour la formation du toit en tuiles creufes du pays. Nous preferons de laïfler les côtés & les bouts des hangars entièrement à jour, pour donner un acces d'autant plus libre à l'air, & pour facilirer l'entrée des tombereaux qui amènerone (#) Ce terrein pourra contenir neuf hangars de cent quatre-vingr-dix pieds de longueur, fur trente-quatre de largeur. On y entrera par deux. ponts de brique , qui traverferont le foflé, On y conitruira en outre un bâtiment pour l'évaporation & pour la criftallifation, we logement pour les Ouvriers, une écurie, &c. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 411 les matières : ces derniers pourront, par ce moyen, dépofer leurs charges au pied de la couche, à telle longueur qu'elle foit pro- longce; ce qui économifera des tranfports intérieurs, puifque l'Ouvrier n'aura qu'à ramafler les terres avec une pelle & les jeter fur la couche, en obfervant de placer foigneufement les differentes fubftances, de manière qu'il fe fafle un mé- lange parfait entre elles, à mefure que la couche fe formera ; idirigera à cet effet la décharge des tombereaux, de façon qu'il {oit approvifionné des matières de toute efpèce. Quoique ces hangars reftent à jour, nous ne craignons ni la pluie ni le foleil, au moyen de ce que le toit fera prolongé jufqu'à quatre pieds en dehors des pilots; la pluie, füt-elle chañlée fur un angle de quarante degrés, ne parviendroit point à atteindre le bas de la couche ; s'il y avoit d’ailleurs quelque danger à cet égard, il feroit aifé de prolonger le toit d’un pied de plus de chaque côté; enfin, il n'y a que de l'avantage à le defcendre, pourvu courefois que le tombereau puifle pañler aifément def- fous. Chaque hangar contiendra deux couches de matières en putréfaction, ayant chacune pour bafe foixante-onze pieds de longueur, vingt pieds de largeur , & an fommet foixante- cinq pieds de longueur fur quatorze pieds de largeur , & fept pieds de hauteur ; ce qui formera feize mille cent quatre-vingt quatre pieds cubes par hangar; fur quoi déduifant quatre vingt-dix-huit pieds de creux qu'auront les ventoufes prati- quées dans l'intérieur des couches, refte net par hangar quoze mille deux cent foixante-fix pieds cubes de fubftances propres à la nitrification. L REMARQUES. Nous avons dit ci-devant que la ville de Saint-Omer pou- voit fournir cent foixante-quinze mille pieds cubes de fubftances folides , & nous penfons que les fix mille tonnes annuelles de vidanges, tenues dans les réfervoirs ou citernes, jointes à celles qu'on pourra ramañler dans les cabarets & cafernes , fufiront pour arrofer les couches pendant les trois années de Fff ij 412 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. putréfaétion : il fera donc à propos de fe procurer la quan- tité de hangars néceflaires pour contenir fucceflivement lef- dits cent foixante-quinze mille pieds cubes de matières par an; c'eft par cette raïfon que nous propofons d'établir à chacune des trois nitrières neuf hangars, afin d’en avoir trois à remplir chaque année; ce qui fera neuf hangars occupés par an dans les trois ni- trières , & vingt fept pour les trois années : aïnfi multipliant les quinze mille deux cent foixante-fix pieds cubes que con- tiendra chaque hangar , par neuf, on n’aura encore que cent trente-fept mille trois cent quatre-vingt-quatorze pieds cubes, qui ôtes de cent foixante-quinze mille, il reftera trente- fept mille fix cent fix pieds cubes de fubftances excédentes au befoin de la nitrière. Mais comme pour en avoir aflez, il faut en avoir trop , on pourra négliger ce fuperflu, & abandonner les matières qui feront moins analogues au but qu'on fe propoie. On trouvera peut-être ces couches trop mañfives, & par-là d'un accès trop difficile à l'air; car comme il a été reconnu par maintes expériences, que le concours de cet élémene eft néceflaire à la formation du Salpêtre , dans la plupart des nitrières mentionnées dans le Recueil, on s’eft attaché à ne former que des couches étroites, peu élevées, confiruites triançulairement, & d'autant plus multipliées, afin qu'elles pré- fentafent plus de furfaces à l'impulfñon de l'air, proportionel- Jement à leur volume. Je conviens de l'avantage de ces conf- œuctions fous ce point de vue; mais ces fortes de couches ne cadrent pas avec'la dépenfe d’une conftruétion de hangars folides. Comme il faut un talus à chaque côte d’une couçhe, pour que les matières puiflent fe foutenir fans éboulement, moins elles auront de bafes, moins elles auront de hauteur, confequemment moins elles contiendront de matières. Si donc on laïfle un intervalle entre chaque couche; fi, par exemple, au lieu d’une couche de vingt pieds de largeur à la bafe, on en faifoit fix de trois pieds avec un intervalle d’un pied feu- lement entre chacune, & de fix pouces entre les poteaux des côtés du hangar, ces couches ne pourroïient avoir que quatre pieds de hauteur en confervant un pied de largeur au fom- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 413 met ; on ne pourroit par conféquent faire tenir que fix mille fept cent vingt pieds cubes de matières par hangar dans cette conftruétion , au lieu de quinze mille deux cent foixante-fix pieds que contiennent les couches que nous propofons ; d’où il doit réfulter que nos hangars pouvant contenir plus du double de matières , on doit en obtenir une plus grande abon- dance de nitre. On nous dira peut-être que l'air ayant plus d'accès fur les petites couches que fur celles que nous propolons , il peut ar- river que ces premières k quoique moins volumineufes , four- niflent autant de nitre que les nôtres? Nous répondrons à à cela, que la différence dans le produit qu'occafionneroit l'aétion de l'air, ne pourroit être qu'en raïfon des furfaces; & en effet, les nôtres ne préfenteroient que vingt-huit pieds huit pouces car- rés par pieds courant , tandis que petites en préfenteroient - fcinquante-huit pieds, différence du double pa hangar. Pour compenfer ce défavantage, nous établiflons dans les tas cinq ventoufes ou conduits d'air triangulaires, d’un pied de lar- geur à la bafe, & d’un pied de hauteur, qui règnentdur toute la longueur des couches , ainfi qu'il eft propofé dans le Recueil des Commiflaires de l'Académie, pag. 364. Ces cinq ven- toufes nous procurent une addition de furface de treize pieds huit pouces par pied courant , fans y comprendre le produit de onze autres pareilles ventoufes qui traverferont la cou- che dans fa largeur. Ainfi nous nous retrouverons à peu près au pair avec Es autres conftructions. Nous pourrions même mettre tout l'avantage de notre côté, en ajoutant encore trois de ces venteules fur les bouts, & pt fur les côtés de chaque couche. Nos grandes nitrières auroient alors plus de furfaces que les petites, & conferveroient néanmoins encore une aug- mentation de volume de fubftances de plus de huit mille pieds cubes par hangar (*). Enfin, les fix petites couches ainfi ajuf- (*) Il fera à propos de ne donner à ces ventoufes que fix pouces de bafe fur deux pieds de hauteur ; elles feront perdre moins de terrein, & préfenreront plus de [ur— face. # 414 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: tées dans deux moitiés du hangar ,. n’auroient entre elles que huit mille quarante pieds carrés de furfaces; & les nôtres arran- gées, comme nous l'avons prefcrit ci-deflus, fur la même étendue , en préfenteroient neuf mille cinq cent vingt-{ix. Pour maintenir ces ventoufes qui traverferont les couches fur leurs longueurs & largeurs, nous aflemblons trois brins de bois tailli commun, de deux à trois pouces de diamètre, avec des goujons de fix en fix pouces, en forme d’un double rate- lier renver{é , de longueur proportionnée à pouvoir en joindre quatre carrément bout à bout les uns contre les autres. Comme cette conftruétion ne peut occafionner de grands frais, on pourroit en augmenter le nombre , & on profiteroit aïinfi de tout le vide que laïflent néceflairement les petites couches dans de vaftes bâtimens, pour les remplir de matières fans rien perdre , & au contraire de l'avantage d’un concours d'air multiplié. Après avoir établi un hangar & deux couches , il faut fon- ger aux urines pour les arrofer; nous avons dit ci-devant, que la ville de Saint-Omer peut fournir tous les ans jufqu'à fix mille tonnes de vidanges , & que nous-préfumions que cette quantité pouvoit fuffire pour arrofer les cent trente-fept mille trois cent quatre-vingt-quatorze pieds cubes de matières folides qui feront tenues en putréfa&tion pendant trois ans. Sur les fix mille tonnes , nous eftimons quil y aura peut-être un fixième à déduire pour les matières épaifles qui s'y trou- veront, & qui feront mélangées avec les autres fubftances des couches ; mais nous. fommes moralement certains que ce fixième peut être wiplé par les urines, qu'il fera aife de faire ramañler dans les cabarets, les cafernes, les communautés, &c. ainfi point d'inquiétude fur cet objet. Il fera toutefois prudent deleséconomifer & dene pas en laïfer perdre. À cet effet, nous établiffons à chaque bout des couches, une citerne en bonne maçonnerie de briques & au ciment. Ces quatres citernes par hangar , à raifon de dix-huit pieds de longueur chacune, don- neront enfemble foixante-douze pieds fur fix de largeur & LA MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 415 cinq de hauteur, le tout dans œuvre; il en réfultera un folide de deux mille cent foixante pieds cubes, qui, divifes par trois pieds que contient chaque tonne , donneront de quoi placer annuellement fept cent vingt tonnes d'urine par hangar ; ce qui, mulciplié par neuf pour les trois nitrières par an, Fe un objet annuel de fix mille quatre cent quatre-vingts tonnes ; mais comme ces urines ne s'obtiendront pas dans le même temps , & quil sen confommera dans les arrofages à mefure des befoins des matières, on eft afluré que l'étendue de ces citernes fera plus que fuffifante, & qu'on pourroit même les réduire à de moindres contenances, pour d'autant diminuer les frais de conftrution. Nous voyons par le Recueil des Mémoires, que dans toures les nitrières propofces , on s’amufe à arrofer les couches à mains d'hommes, avec des arrofoirs de jardins, &c. Cette méthode doit être fans doure frayeufe ; car sil falloit occuper des gens pour arrofer ainfi convenablement deux couches contenant enfemble quinze mille deux cent foixante-fix pieds cubes, jufqu'à ce qu'elles fuflent humeétces de part en part, il faudroit fans doute deux hommes continuellement occupés à cetre feule opération ; & comme l’eflentiel dans cette exploi- tion eft d'accélérer & d’économifer les mains d'œuvre, nous propolons d'établir à chaque citerne une pompe de bois, par le moyen de laquelle on puifera les urines dans un réfervoir pole fur Ja longueur de la poutre au fe trouve directement au defius de Chaque bout des couches. Ce réfervoir fera com- pole d’un aflemblage de plañches de chêne en forme d’auge, d'un pied de largeur, d'autant de’hauteur , & de quatorze pieds de longueur; en forte que les deux réfervoirs feront, pour chaque couche, vingt-huit pieds cubes , c’eft-à-dire, au moins neuf tonnes d’urines , lefquelles fe répandront par cinq tuyaux de communication , dans cinq courfes de gouttières , dun pied de largeur & de fix pouces de hauteur, pofces fur les poutres d'un réfervoir à l’autre, à des diftances convenables, pour embrafier toute la largeur de la fuperficie de la couche; ces gouttières y verferont les urinespar des trous perces à leurs 416. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. fonds de fix en fix pouces. Il fera aifé de reconnoûre au pre: mier ou au fecond artolage, combien il faudra de tonnes pour humeéter une couche à chaque fois ; le réfervoir fera la me- fure pour fe régler dans la fuite. Par ce moyen, la main d'œuvre des arrofages É fera avec toute l'économie poflible , & la dc- penle fera infiniment moins grande que fi on Occupoit des hommes à puifer les urines dans les citernes , à les tranfporter fur toute l'étendue des couches, & à les verfer avec un arro- foir de jardin. Il ne faut pas perdre de vue que l'arrofoir, pendant qu'il coule, exige la préfence de l'Ouvrier qui le tient, tandis que nos gouttières répandent leurs urines à me- fure que leur en fournit la pompe, & que la préfence de lOuvrier n'eft néceflaire que pour remplir le réfervoir; une couche qui recevra des urines de fix en fix pouces fur coute fon étendue à la fois, fera fans doute également bien arrofée dans tout fon contenu. Pour qu'elle puifle l'être également dans fon intérieur , on pourra, à l’aide de la même pompe & de tuyaux, répandre les urines dans des gouttières roues ; qui feront placces dans les ventoufes du fecond étage, qui règnent fur la longueur ; ces arrofages ne doivent être faits qua propos, pour maintenir les mater daustuscrand hu midité convenable, autrement on rifqueroir de retarder la putréfaétion. On pourroit, dans la vüe de _proportionner les arrofages au befoin des couches , faire les trous des gouttières aflez petits pour qu'ils ne répandiflent pas les urines vec trop de précipitation, & pour leur donner le temps de s'imbiber len- tement. Lorfqu'on fera parvenu à une putréfaétion complete, & qu'on aura reconnu que les fubftances font faturées de nitre , on les laïfléra sècher avant que de les lefliver. On placera alors fur des chantiers élevés de fepc à à huit pouces entre chaque poteau, quatre Cuviers , mais feulement à l'endroit des couches, afin de laïfler à chaque bout & au milieu du hangar, un intervalle pour la facilité des manœuvres. On aura, par ce moyen, quatre bandes de vingt-quatre cuviers cha- çunc, Nous MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 417 Nous formons ces cuviers en cônes tronqués , renveriés , de quatre pieds de hauteur, fur trente pouces de dia- mètre en-haut, & dix-huit pouces en bas, pour contenir en- viton douze pieds cubes chacun; ils font percés d’un trou par le bas immédiatement au deflus du fond, pour l'écou- lement des lixiviations; ce trou eft fermé par un tuyau ou robinet , comme il eft d'ufage. Chaque cuvier fera garni d'un faux fond , percé de petits tous, pofé entre deux couches de paille , un peu au deflus du trou d'écoulement, afin de retenir les particules des matières , & d'empêcher qu'elles ne bouchent le tuyau. Dans ces cuviers, nous mettons d’abord la quantité de cendres qui fera jugée néceflaire pour fournir aux {cls contenus dans les eaux de lixiviation, tout l’alkali qui neo leur manquer. Cette circonftance étant dépendante du plus ou du moins de fel alkali qui fe trouvera dans les fubftances qui feront employées, l'expérience feule peut faire connoître par des épreuves réitérées, la dofe de cendres quil conviendra de dépofer dans chaque cuvier. Comme les cen- dres font fort chères en Flandres, puifque la bonne coute cinq à fix livres la rafière, il fera eflentiel de s'étudier à connoître fi la potafle ne Peut pas les remplacer avec avantage ; nous fommes portés à le croire, fur-tout pour ce pays. Par-deflus ces cendres ou potafle , ou fur l'une & l'autre enfemble , nous mettons un lit de paille d'un pouce où environ d'épaifleur, enfuite les terres nitreufes, pofces le plus légèrement poflible, après quoi nous y introduifons les eaux. Cet encore ici le cas d'économifer confidérablement les frais de main-d'œuvre & de tranfport, en élevant l'eau avec des pompes en bois, en les conduifant dans les cuviers par le moyen de gouttières de bois, & en les faifant couler de la même manière jufqu’à la chaudière. Il fera néceflaire dans ce plan, de conftruire au bout de chaque bande des réfervoirs ou citernes, où fe raflem- bleront les eaux qui auront pafñlé fur une première bande, & qui feront deftinces à pafler fur une feconde , fur une troi- fième, &c. Ggg 418 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. I feroit inutile d'entrer en explication fur la marche à obferver dans la lixiviation des matières nieufes que l'on met dans les cuviers des quatre bandes; on fait que les eaux qui proviennent de la première bande pañlent à la feconde, de la feconde à la troifième , de celle-ci à la quatrième, & que le produit de cette dérnière fe nomme eau de cuite, deftinée à pañler à la chaudière pour être évaporée, & de JR à la criftallifation : toutes ces pratiques font connues en France. H y a néanmoins cette différence, que les uns divifent leurs ateliers en deux bandes, d'autres en trois, & que nous jugeons plus avantageux d'en ajouter une quatrième, afin d’avoir des eaux de cuites d'autant plus fortes, & d'éviter un ” furcroît de dépenfe dans l'évaporation. Au refte, cette dif- tribution dépend de la qualité des matières plus ou moins riches en Salpêtre; & c'eft ce qu'il faut connoître, pour ré- gler le nombre de bandes : mais à telle quantité qu'on fe dé- termine , il en doit réfulter, qu'on en videra tous les jours une, qu'on la rechargera de matières neuves, de laquelle il proviendra aufli chaque jour deux cents pieds cubes d’eau de cuite ou environ à évaporer; ce qui fera la tâche journalière des deux chaudières. Nous trouvons qu'il eft plus onéreux que profitable d’em- ployer, comme on le fait dans bien des ateliers, des mains d'œuvre confidérables , à écrafer & pañler par des clayers les matières nitreufes ; il eft même à propos que celles en putré- fa&ion foient entre-mêlées de morceaux d’une certaine grof- feur : ces derniers forment & maintiennent des vides dans l'intérieur des couches, 8 par-là y procurent la circulation de Pair. Nous ne différterons pas fur la manière d'évaporer les lef- fives & de faire criftallifer le Salpêtre , non plus que fur celle de le purifier en le féparant des fels & autres matières hctérogènes, dontil fe trouve prefque toujours chargé; ces opérations font trop connues par-tout, & particulièrement en France, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE, 419 Comme le tranfport des eaux de cuites des recettes ou citernes des hangars, dans le bâtiment d'évaporation, con- fiftantes en foixante à foixantte-cinq tonnes par Jour pour four- nir aux deux chaudières , feroit très-difpendieux fi on le faifoit à bras, il fera néceflaire d'établir des pieux ou treteaux dans des direétions & alignemens convenables, pour y pofer des gouttières ou augets, lefquels recevront ces eaux de cuites qui feront pompces de ces recettes ou citernes des quatrièmes bandes, & qui les conduiront direétement dans l'atelier d’éva- poration. Les chaudières de fer feroient bien préférables à celles de cuivre ; les premières n'auroient pas l'inconvénient, comme les fecondes, de dépoler dans le nitre une fubftance meur- tière (le vert-de-gris) : nous avons reconnu que le nitre qui fortoit des falpétrières pour étre employé en médecine, con- tenoit fouvent plus ou moins de vert-de-gris ; ce qui ne pro- vient que des vaifleaux évaporatoires & de criftallifations, qui font ordinairement de cuivre. On fent de quelle confé- quence eft cette obfervation pour le bien de l'humanité ; ce feroir donc lui rendre un fervice fingulier, que de réformer lufage du cuivre en cette partie. Aux baffins de criftallifation de ce métal, on pourroit fubftituer des vaifleaux de bois, ce qui procureroit une économie confidérable dans les frais d’ex- ploitation, en ce qu'une chaudière de fer ne coute pas la moitié de celle de cuivre , & réfifte beaucoup plus à lation du feu. La différence du prix des baflins de cuivre à celui des vaifleaux de bois, feroit bien autrement fenfible. Au refte, fi on trouvoit de l'inconvénient à adopter dans la généralité le nouvel ufage qu'on propofe, au moins devroit-on réformer le cuivre pour les parties deftinées à la médecine. Voilà ce que nous fuggèrent, dans ce moment, nos con- noiflances fur les moyens de faire générer le Salpétre en abon- dance & avec la plus grande économie, Nous fouhaitons ar- demment que nos réflexions puiflent être de quelque utilité à l'Etat; notre zèle patriotique pour fes intérêts , nous à fait Gggi 420 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. hafarder le préfent eflai : fi nous n'avons pas le bonheur de nous rendre parfaitement intelligibles, nous prions les Lec- teurs de s'en prendre au peu de loifir que nous ont laïfle, pour le rédiger, nos occupations ordinaires ; mais c'eft avec la plus grande confiance que nous préfumons que nos pro- jets exatement exécutés, ne démentiroient aucunement la devife mife en tête de ce Mémoire. SUR LA FORMATION ET LA FABRICATION DÉUSSA TE PE T'ES Prefenté pour concourir au Prix propofé par lAcademie Royale des Sciences de Paris. Par M. RoMme, Profefleur Royal de Mathématiques, & Correfpondant de la même Académie. Utile au Gouvernement , funcfte à l'Humanité. Seconwp Concours. N°. 2r: Si lon confidère avec une attention foutenue tous les étres phyfiques de l'Univers, & fi on les compare à eux-mêmes dans des. temps dificrens , on remarque qu'ils éprouvent des variations continuelles. La Nature, dans une adtivité évale & conftante, ne femble être occupée qu'à compofer & à décom- pofer, ayant borné irrévocablement la durée des étres de chaque efpèce; après le temps marqué, elle alère leur forme, celle défunit leurs pardes, elle fépare leurs clémens , clle les diffipe,, & de leurs débris elle recompofe, foi ailleurs, foit aux mêmes lieux, d’autres corps qui fouvent fe montrent fous de nouvelles formes , mais qui difparoifent aufi fuccef-- fiycment., Attentifs à voutes ces transformations , vainement: 22 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. cherchons-nous à en rendre raifon; les caufës nous échap- pent, & nous voyons l'Univers fe renouveler fans que nous ayons pu découvrir les loix auxquelles il eft foumis dans fes révolutions. Cependant, malgré certe obicurité, un Obferva- teur Cclaire qui voit tous ces faits, les recueille pour en con- ferver le fouvenir ; enfuice, lorfqu'ils font aflez nombreux, il les compole , il les analyfe, il remarque l'ordre qui règne entre eux; il examine leur rapport, & par une analogie Ju- dicieufe il parvient quelquefois à acquérir l'heureufe facilité de les faire renaître où il veut, en préfentant à la Nature, dans des circonftances convenables , tous les matériaux qu’elle em- ploie pour les produire. C’eft ain, par des obfervations nombreufes , variées, & fuivies fur le Salpètre , qu'on peut découvrir tous les moyens favorables à fa formation, & par conféquenc indiquer quels font les élémens qui, raflemblés dans un lieu détermine , feroient promptement combinés par la Nature pour en compofer du Salpèrre. Il faut donc, pour les connoître , faire des recherches fur les parties intégrantes de ce fel, fur la pofition des lieux où on peut le recueillir, & fur toutes les circonftances qui concourent à fa régénéra- tion. Le Salpêtre eft un compofe de plufieurs élémens que la Nature Lie quelquefois dans certains points de l'efpace , mais qu'elle difperfe plus fouvent à de très-grandes diftances. Cette irrégularité, qui n'eft que varieté dans fes ouvrages , eft précifément ce qui fai le défefpoir des Obfervateurs, & ce qui produit la mal-adrefle des Salpétriers. Depuis que le Salpétre eft malheureufement devenu néceflaire, les fenti- mens des Phyficiens ont varié de mille façons, & fur fon ori- gine, & fur fa formation; on fait feulement jufqu'à préfent, qu'en faturantd’alkali végétal une portion quelconque d'acide nitreux , le corps compofé qui en réfulte , eft un fel neutre qui eft iden- diquement le même que le Salpêtre. Ce fel peut donc être regardé comme compofé d'acide nitreux & d’alkali végétal. Ainh, pour le multiplier dans un efpace déterminé , comme la France, ou une de fes provinces, où un terrein particu= MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 413 lier , il ne s'agiroit donc que de rafflembler beaucoup d'acide nitreux & d’alkali fixe , ou beaucoup de corps qui continflent ces élémens. Il n’eft pas difficile de former un grand amas d’alkali fixe, les cendres des végétaux en fourniflent une très- grande abondance, & la néceflité où nous fommes de biüler unc grande quantité de plantes pour les befoins de la vie, nous aflure d’une reflource toujours confidérable. Dailleurs on peut encore en retirer abondamment de ces lieux où la terre fertile fe couvre de végétaux qui font inutiles aux hommes qui l'habitent, & qui font propres à donner d'excellent alkali. Mais sil eft facile d’afligner les fources d’alkali fixe, il n'en cft pas de même de celles de l'acide nitreux ; cet acide eft répandu dans la Nature fous plufieurs formes différentes ; tantôt il a pour bafe une terre calcaire, tantôt un alkali mi- néral , tantoc un alkali végétal ; il sunit au phlogiftique , à tous les alkalis falins fixes & volatils, aïnfi qu'aux fubftances métalliques, & tous les réfultats de ces combinaïfons font différens, fuivant les fubiftances auxquelles il s'allie : mais cs connoiflances ne contribuent guère à développer ni la nature de cet acide, ni fon origine; & fi elles peuvent empêcher de ségarer, l'Obfervateur qui veut reconnoître l'acide nitreux par-tout où 1l fe trouve, elles ne fervent guère à lui indiquer les lieux où la Nature le dépofe. Sil cft vrai que cet acide s’unitaux terres calcaires , 1l eft aufli vrai que toutes les terres calcaires n’en contiennent pas. Il en eft de méme des autres corps phyliques avec lefquels cet acide a de l'affinité, tels que le phlogiftique, les alkalis, &c. Ainfi,. dés que tous les corps qui font propres à attirer & à re- tenir l'acide nitreux, ne font cependant pas unis à une por- tion de cet acide , il faut donc que ce ne foit qu'a certaines conditions & dans certaines circonftances que la Nature com- pole les alliages qu'on rencontre fur la furface de la terre. Ces confidérations ne permettent pas de douter main- tenant que la multiplication du Salpêtre dans un lieu deter- miné, ne dépende & re foit le rélultat de recherches nom- breufes & d'obfervations délicates fur le lieu , l'efpèce & la 424 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊÈTRE. polition dés corps fur lefquels la Nature fe plaît à dépofer de préférence cet acide fi recherché. Ainfi, pour trouver des moyens de produire la multiplication de ce fel, & pour les chercher avec autant d'ordre que de méthode , je dois préfenter une fuite de faits circonftanciés, ou bien faire l’énumérauon des lieux où jufqu'à préfent on a trouvé des terres nitreufes en y joignant l’expofe de tous les détails eflentiels; enfuite en comparant ces obfervations ou ces faits , il faudra , sil eft pofñible , remonter à quelques principes généraux qui condui- fent à une explication plaufible des effers obferves. Alors ces principes, en s'accordant avec l'expérience, fourniront feuls tous les moyens de multiplier le nitre avec autant de promptitude que d’abondance. C’eft en préfentant ces moyens, & c’eft en les rendant faciles & peu difpendieux, que je puis efpérer de répondre d’une manière fatisfaifante , & à l'attente du Gouvernement, & à la demande de l’Académie. On trouve du nitré dans des lieux habités, & dans d’autres qui ne le furent jamais. Il fe montre dans des terres expo- fées au foleil, & dans celles qui font à l'abri de fes rayons. On en tire des lieux frais & humides, ainfi que de ceux qui font frappés par un courant d'air continuel ; il naît au fein des terres imprégnées de fucs végétaux & animaux , & cependant on le: rencontre encore dans d’autres terres qui ne préfentent aucun veftige de végétaux ni d'animaux. Toutes ces variétés & trous ces contraftes fubfftent , font connus, & fe découvrent à tous ceux qui veulent prendre la peine de les obferver. Si on deicend maintenant dans les détails, & fi on com- mence par les nitrières naturelles, on doit mettre au premier rang le plus grand magafin de Salpètre qu'on connoifle fur le globe, favoir ; le Bengale & fur-tout les deux rives du Gange. Après la faïfon des pluies, ce fel végète ‘& paroîc dans tous les champs, excepté dans les lieux couverts de fables ou femés de rochers, Les royaumes de Siam & de Pégu , les environs de Mafulipatan, l'ile de Ceylan, méc- ritent aufli d'être cités comme des lieux très-abondans en Sal- pétre. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 425$ pêtre. M. Bowle nous à appris qu'en Efpagne des terres in- cultes, qui occupent un efpace égal au tiers de ce Royaume, contiennent du Salpêtre, & qu'on enfaitune récolte confidérable dans les provinces orientales & méridionales de ce Royaume. Ces terres font labourées exprès pour accélérer la produétion & la récolte de ce fel qui s'accumule & qui refte fixe dans ces mêmes terres, quoiquelles ne foient à l'abri ni du fojeil ni de la pluie. Dans tous ces lieux que je viens de nommer, la Nature feule, abandonnée à elle-même, forme un Salpètre abondant ; & c’eft dans ces mines naturelles, fur-rout dans l'Inde, que l'on à recueilli jufqu'à préfent la plus grande partie du Salpêtre néceflaire aux befoins de la France. En Europe, le nitre eft extrait de vous les lieux habités ; les mu- railles des vieux édifices, des vieilles écuries, des latrines ; les terres des caves, des granges, des étables, & en général tous les débris terreux ou calcaires des habitations des hommes ainfi que des animaux, contiennent beaucoup de nitre à bafe terreufe. On en trouve auffi dans des carrières de pierres ten- dres. Des façades de plufieurs bâtimens ; des portes de villes, de châteaux, d’églifes, lorfqu'elles font formées des mêmes pierres, paroïflent fouvent corrodées & dépolies par un nitre {enfible. Les furfaces extérieures de plufñeurs bancs de pierre calcaire préfentent auffi, dans certains endroits, l'empreinte d’un nitre deftructeur. Glauber rapporte lui-même , qu'auprès du lieu qu'il habitoit fur les rives du Mein, il y avoit des car- rières dont on tiroit des pierres qui donnoient du Salpétre; Stalh' dit aufli qu'il a vu des murs de boue & de chaume, qui, après avoir été recouverts de chaux & pénétrés d’hu- midité , laïfloient paroître fur leur furface une efflorefcence nitreufe. Telles font les nitrières naturelles d’où on peut extraire une grande quantité de Salpètre; mais les Gouvernemens d'Europe étant trop éloignés des grands magafins de l'Inde, & ne trouvant pas des reflources aflez promptes dans le Salpêtre qu'on peut extraire des lieux habités, ont eu re- cours à ‘des nitrières artificielles, dont ils ont fecondé & Hhh # 426 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. favorife l’établiffement. Il sen eft formé dans les Royaumes du Nord, dans la France ; & on voit à Malte une nitrière artificielle qui fournit feule tout le Salpètre néceflaire à cet Etat. C’eft ici le lieu d'expoer fuccinétement tous les moyens que l'Art à imaginés jufqu'à préfent pour produire & multi- plier le. Saipètre. Cette defcription ; rapprochée du tableau des mines naturelles de ce fel, fera voir en quoi l'homme a imiré la Nature, & dans quel point il s'en eft écarté. Glauber penfoit que les vieilles étables où écuries donnent pl us de Salpétre que les nouvelles, parce que le fel des urines & des excrémens . ont reçu depuis plus long-temps, de la part de l'air, le principe qui leur eft néceflaire. Selon lui 5 les pierres dures ne fe falpétrent pas ; mais la chaux qui Jeur ferc de liaïfon, étant plus poreufe & plus acceflible à l'air, acquiert bientôt cette propriété. C'’eft en conféquence de ces expériences & de ces principes, que Glauber à propoié, pour la formation d’une grande quantité de Salpètre , de raflembler fous des hangars “des matières animales & végétales, & d'en accélérer la putréfaétion en entretenant dans les terres où elles font mélées , une certaine humiditc. El recommandoit auffi que rien ne s'opposät fous ces hangars, ni à l'accès des rayons du foleil, ni à la libre circulation de l'air. Ces préceptes ont {esvi de bafe aux établiflemens fais en Suède., en Prufle, & en d’autres endroits. - | Stalh penfoit que le nitre feærouve non feulement dans les endfoits imprégnés d'urine, mais aufli par-tout où il y a quel- que matière en putréfadtion ; ; & qu'il eft dépofé en plus grande quantité dans les lieux où il y a beaucoup de matières alkalines & abforbantes, telles que les murailles, les terres & pierres calcaires. Il reconnoît la néceflité du concours de lait pour la production de ce fel ; mais il regarde comme contraire la chaleur desrayons du folcil. Le nitre:, fuivant lui , ne ure pas fon origine de la terre, mais il parole ; y être tranfmis, & il doit fa partie faline à la terre & à l'air. Il ditaufli que des végétaux contiennent du Salpétre , & il penfe que lacide nitreux provient des matières falinés & huileufes, telles que les urines déssanimaux. . MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 427 Selon Lemery, les matières pierreules, cerreufes & alka- lines font celles qui fourniflent le nitre ordinaire; mais fi on les examine avant qu’elles aient eu occafion de tirer leur nitre des fources étrangères qui le contiennent réellement ,,on n'y découvre aucune trace de ce fel. Elles font telles néanmoins, qu'elles peuvent en être chargées, dépouillées, & cependant en redonner encore, même au delà de leurs poids, fans être épuilées. Plus ces matières font poreufes, mieux elles ablor- bent les matières nitreufes quileurviennent de dehors. Iidit donc que la chaux, mêlée avec des matières animales, donne d’ex- cellent Salpètre; il ajoute que le contaët de l'air contribue parti- culièrement à la formation de ce fel, & que les lieux les plus propres à cette produétion fonc ceux qui, à l'abri du foleil & dela pluie, font bien aérés & naturellement humides. M: Pietfch, dans fes penfces fur la multiplication du nitre , ne difcute que la manière de conftruire des murailles pro- pres à cet objet. Il demande qu'elles foient formées de terres alkalines, de cendres non leflivées, & de paille. Il prefcrit de les arrofer avec des eaux de bourbiers, comme étant les plus favorables. Son fentiment eft de donner au nitre trois principes, une terre alkaline , l'acide vitriolique , & lalkali volatil ; & il croit que les mélanges des matières qui con- tiennent ces principes; doivent être très-féconds en Salpêtre. En Suède, on tire le Salpètre artificiellement des terres calcaires , auxquelles on a mêle des débris de tous les règnes. On accélère leur décompolition complete, en entretenant dans ces mélanges une jufte humidité , une chaleur modérée, & une libre circulation de lair. Dans le Brandebourg , on conftruit des murailles avec la terre des cloaques, des caves, des écuries, & on y ajoute des cendres avec de la paille. Ces murs font placés dans les lieux les plus humides, quoique cependant à l'abri de la pluie ainfi que du foleil. Au pied de ces murs, on répand de la fente de pigeons & de poules. M. Gruner avance que fans putréfaétion on ne peut pro- duire du Salpétre. Des excrémens , de l'urine, du tumier ; Hhh i 428 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. des végétaux , des cendres, de la chaux & des décombres méêlés onfeble , forment un compoie qui , étant arrofé d'urine ou d’eaux ‘de fumier 5 devient très-fécond en Sal- pêtre. À prefcrit d'y entretenir de l'humidité, parce qu elle attire l'acide de l'air; & il veut qu'on donne un libre accès à l'air du côté du levant ou du couchant. M. Neuham , de la ville de- Bienne, annonce que des matières propres à former du Salpêtre étant jetées irrégulièrement derrière fa maïfon, & étant arrofées d'eaux de chaux & d'urine, avoient produit du nitre en aflez grande quantité. Il aflure donc, d’après fon expérience, qu'un mélange d’excrémens danois de plan- tes, d'herbes amères, de pierres calcaires, de chaux, de cendres & de fumier, doit donner abondamment du Sal- pètre. M. de Vannes, couronné par l'Académie de Befançon, propofe «pour la production du nire, de former des amas de matières végétales & animales combinées avec des fels vi- trioliques & des terres alkalines propres à fervir de bafe à ces mélanges. Il regarde l'acide nitreux comme l'ouvrage de la végétation; & en reconnoiflant beaucoup de nitre dans les plantes , il dit que la fermentation putride en augmente en- core la quantite. M. Granit aflure que plufieurs plantes contiennent beau- coup de Salpètre , & qu'on en retire des matières animales & végétales putréfices » fur-tout lorfqu'elles ont été mélées avec de la chaux, & placces dans des lieux humides. D’ ailleurs, le Salpètre ne devient fenfible qu'autant que l'air peut cir- culer Hibrement autour des terres préparées; & un change- ment alternatif d'air, de chaleur & d'humidité , garantit une récolte abondante. M. le Comte de Milly, en rapportant fes obfervations fur une nitrière, artificielle d'Allemagne, dit aufli que la putre- faction eft néceflaire à la produétion de l'acide nitreux , mais que l'air lui eft encore plus favorable & plus eflentiel. Fr cette nitrière dont il fait la defcription, on mêlé du terreau des plâtras, du fumier, descendres, des eaux mères, de l'urine MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 429 de la fente de poules ou de pigeons, & de ce mélange on forme plufeurs couches fous un hangar. Une telle nitrière ne donne beaucoup de Salpétre qu'au bout de trois ans. M. Du Coudray décrit les pyramides de Prufle, qui font formées de la terre des prairies prife fous le gazon, de cen- dres neuves, & de paille. Ces terres font arrofées avec de l'eau de crottin de cheval ; elles font expofces au grand air, & couvertes feulement d’un chapeau de paille. Il décrit auffi les magafns de Malte, qui font bien acrés , mais impénétrables aux rayons direéts du foleil & à la pluie. On remarque dans cette nitrière, des couches formées de terres calcaires sèches, & mêlées avec de la paille. Elles font arrofées d'une cau compofée d'urine, d'eaux mères, de fumier , de lies de vin, & de toute matière putrefcible. À Drefde , on a faic des expériences intéreflantes fur la formation plus ou moins abondante du Salpêtre. Trente tonnes de décombres, mélces de cendres & de fumier, ont été expoñées à l'air pendant fix mois; des terres femblables & en même quantité, ont été wifes à l'air pendant un an: les premières ont produit fix livres de Salpétre, & les der- nières en ont donne vingt-cinq livres. Dans l'établifiement de Drefde, on croit que les matières animales font préférables aux matières végétales ; & on penfe que le Salpètre eft le produit de, la putrefattion. On y forme donc des hangars, fous lefquels on raflemble & on méle des terres des démo- litions , des fumiers, de la paille , des plantes, des matières ani- males, des cendres, & on les arrofe d'eaux de fumier; on donne aufli à l'air l'accès le plus libre, parce qu'on le juge très-néceflaire à la produ“tion du Salpètre. Dans l'Inde , où la terre produit naturellement du nitre complet, il y a quelques endroits dont les habitans, pour augmenter la récolte , arrofent le fol avec de l'urine. En EF pagne , fuivant M. Bowle, on fe contente de labourer les champs qui rapportent du Salpêtre. En Amérique, on arrofe le fol des magafins avec la leflive des feuilles rebutées de tabac , & laiflant un. libre accès à l'air extérieur, on retire 430 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. beaucoup de Salpétre des terres marneufes qui forment le fol de ces magafins. À Manille , à Kanton, on fait du Salpêtre en cultivant fous des hangars des terres qu'on arrofe d'urine. Enfin, en France on à établi dernièrement des nitrières artificielles, conformé- ment à une Inftruétion publiée fur ce fujet par MM. les Régifleurs des Poudres & Salpêtres : k qui aflurent que tout ce . peut tendre à accélérer la putréfaétion des matières quelconques, animales ou ve rétales , tend eufi à prefler la formation du Salpétre. Ils Pie ca ones de laïfler à l'air une libre circulation autour des mafies préparées, & d’y entretenir une légère humidite , parce que ces deux caufes font les grands agens de la putréfaction. Ces mafñles de terre dépense être, RARE ces Meflieurs, ou un mélange de terre calcaire & de matières animales & végétales , ou des terres déjà fal- pêtrées provenant des écuries, caves, granges, vicilles ma- {ures, démolitions, ou enfin de terres mélées de matières vé- gérales & animales; & elles doivent être arrofées avec route liqueur putréfiée ou putrelcible. Borñons-nous maintenant à comparer enfemble tous ces procédés, i imaginés pour produire artificiellement du Salpêtre. Les matières animales & végétales entrent dans là com- pofition de tous ces mélanges ; 5 clles y font employées fui- vant différentes proportions , & il y a autant de variétés dans ces rapports, qu'il y a de perfonnes occupées du Sal- être. Les terres parmi lefquelles ces matières fe trouvent imêlées, font différemment expofées & travaillées ; les unes font placées au foleil, tandis que les autres font privées de fa chaleur directe. Dans certaines nitrières, l'air circule libre- ment de trous côtés, & dans d’autres, on lui ferme tout ac- cès, ou onne le laifle aborder que lorfqu'il vient fous certaine direction & dans certaines circonftances. Malgré les différences qui règnent entre ces re qui produilent tous du Salpêtre , on apperçoït cependant quel- ques rapports généraux , & ils paroiflent fe reflembler en beaucoup de points. Si la chaleur n'eft pas généralement MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 431 admife comme favorable à la fécondité des mélanges , l'air & lhumidité font reconnus pour des agens néceflaires; les matières putrefcibles font regardées comme les feules fources du nire, & les terres calcaires abforbantes ou alkalines font uné bafe commune univerfellement adoptée. Cette confor- mité que nous obfervons entre quelques parties eflentielles des procédés adoptés pour la multiplication du Salpètre, ne doit cÉpeRCans pas décider la queftion fur le choix des moyens les plus convenables à cette multiplication ; car toutes ces mc- thodes peuvent bien s'être engendrées mutuellement, & les dernières peuvent n'être, par fucceflion, que les copies des pre- mières. L'ignorance fur les véritables Hier du Salpétre , "las crainte de faire des eflais difpendieux & fans fuccès, ont pu arrêter les progrès de l'Art, & forcer ceux qui ont formé des nitrières, de copier fervilement leurs prédecefleurs ,. dont les travaux EU Pa 5 etc infruétueux. Ainf, pour ne point tirer quelque qe hafardce, ou établir quelque prin- cipe mal fondé , d'après les procédés établis dans les ni- trières Hiicielles , il faut néceflairement chercher de nouveaux rapports, & nous en trouverons en mettant en parallele les ouvrages de l'Art & ceux de la Nature, c'eft-à-dire, les ni- œicres naturelles & les atifiçiel les Puifque dans les unes & dans les autres on recucille du Salpétre, & puifque les mêmes effets doivent avoir une bafe ou une caufe commune, on doit préfumer que la comparailon de ces deux efpèces de nitrières conduira néceflairement à la découverté de quelque erreut ou de quelque fource véritable du nitre. C'eft fur les rives du Gange, dans les champs du Bengale, de Siam, de Pcgu, de ee de Mafulipatan , que le Sal- pétre fe montre en abondance. C’eit des terres labourées qu'on l'extrait en Efpagne; il y a en France des terres & des débris de plufieurs carrières qui font char gées d'une aflez grande quantité de nitre, des bancs calcaires, des pierres ten- dres qui paroiflent attaqués, corrodés & délités par les effets du nitre qui agit conftamment pour les décompofer. Ainfi la Nature ; dans tous ces lieux qu'elle couvre de Salpétre, n'em- 432 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ploie aucune matière animale, ni aucun fuc qui en porte l'empreinte. Ces matières ne font donc pas, comme on l'a cru jufqu'ici, eflentielles à la formation du nitre ; mais les terres calcaires, ou les pierres de méme efpèce, font la bafe que la Nature admet par-tout comme la plus convenable à l'acide nitreux. Elle travaille, elle forme ce fel à ciel ouvert; & quoique fes préduétions foient échauffces par le foleil ou agitces par les vents, la récolte n'eft pas moins abondante. Ces circonftances doivent éronner d’autant moins, qu'il y a mille exemples autour de nous d'un Salpètre qui végète fen- fiblement malgré les vents, le foleil & même la pluie. Des murailles entières sécroulent fous nos yeux, par le feul effet d'un nitre naturel qui en a corrodc les matériaux & détruic les laïfons. Des bancs de pierres tendres, expofés à toute lintempérie des faïfons, changent de forme , perdent con- fidérablement de leur volume , & tombent en pouflière par l'aétion conftante d'un nitre naturel qui y refte attaché. M. Gruner cite dans un Mémoire un magnifique hôpital dont les fondemens étoient endommagés, & continuoient de l'être par la préfence d’un nitre dont on ne pouvoit arrêter la végétation & les progrès deftruéteurs. On voit des portes, des murailles , des maïfons conftruites en pierres calcaires tendres, qui font corrodées dans leur furface extérieure , & les pierres qui les compofent paroiflent avoir perdu leur pol, & ètre criblces de trous mulüpliés & peu profonds. Dans ces trous qui re- tiennent encore les débris de la partie détruite de chaque pierre, la pouflière calcaire annonce par fon goût la préfence du nitre, qu'on découvre plus clairement encore par la lixi- viation & lévaporation. On voit à Saintes les reftes d’un mo- nument des Romains, qui portent l'empreinte d’un nitre bien enraciné , foit dans les pierres, foit dans la matière qui leur fervoit de liaïfon. Il eft une infinité d’autres exemples parti- culers qu'on trouve dans routes les villes anciennes , & qu'on pourroit citer pour démontrer évidemment que la Nature forme du Salpêtre, & en plein air, & malgré les chaleurs du foleil. Si de ces confdérations on rapproche ce qu'on fait fur les terres MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 433 terres des caves, des granges, des écuries, & de plufieurs lieux où l’on ferme tout accès à l'air, ces contraftes con- fismeront l'indifférence que la Nature paroït avoir dans le travail du Salpêtre, & pour les lieux clos, & pour ceux qui font expofés à l'intempérie des faifons. Ces mêmes confide- rations raflemblées nous conduifent aufli à conclure avec vérité, que les matières animales ne font pas faites pour être comp- tées comme néceflaires à la formation du Salpétre, &ilya long-temps qu'on auroit dû être convaincu de l'impropriété des maticres animales, puifque d’habiies Chimiftes n’ont ja- mais pu retirer aucune parcelle de nitre de ces matières, dans quelque état qu'elles fuflent. es Auteurs des nitrières artificielles fe font donc bien Ccartés des vrais principes, lorfqu'ils ont admis dans leurs terres des matières animales, & lorfqu'ils ont fondé fur elles toures leurs efpérances. Si leurs opérations ont été fuivies de quelque fuccès, malgré une aufli faufle combinaifon , ils le doivent à des circonftances particulières & aux terres cal- caires qu'ils ont employées, & qui feules ont avec l'acide ni- treux une très-grande afinitc. Puifque d’ailleurs les terres de l'fnde, celles de l'Efpagne , & les débris de nos habitations font calcaires , ainfi que les bancs de pierres tendres , & les carrières que nous avons citées comme renfermant un nitre naturel; puifque cette bafe cal- caire eft le feul trait de reflemblance qu’on obferve entre les mafñles falpétrées par la Nature & celles qui le deviennent artificiellement , on pourroit d'avance conclure que cette ef pèce de terre eft ou la caufe première du Salpètre, ou la ma- trice qui attire, reçoit & conferve l'acide nitreux que d’au- tres fources y répandent. Mais ce fujet n’eft pas encore dif- cuté d’une manière aflez décifive, pour prononcer abfolument que la terre calcaire foit une mine de Salpétre, d'autant plus qu'il y a une très-grande quantité de terres de cette efpèce qui ne font pas falpêtrées. Il faut donc entrer dans de nou- velles confidérations , & Je vais tâcher de propofer quelques Jii 434 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. idées qui puiflent jeter un nouveau jour fur cette matière in- téreffante. + Lorfque je me fuis occupe de la meilleure manière d’ac- cclérer la formation du nitre, je me fuis moins attaché à expliquer les petits fuccès des pratiques aveugles des Salpé- tiers , qu'à confiderer les fabriques naturelles du nitre. Si on jetre les yeux fur la furface du globe, & qu'on compare en- femble, fous un nouveau point de "vue, tous ces lieux où la Nature feule & abandonnée à elle-même raflemble des amas immenfes de nitre , on ne peut s'empêcher de leur trouver des traits frappans de reffemblance, maloré leur éloignement & la différence des climâts où ils font. placés. On recueille le Salpétre le plus complet aux environs des em- bouchures du Gange ; ainfi que furles bords de ce fleuve en s'a- vançant dans les terres. À Cachemire, il végète fur la pente des montagnes , &il fe montre abondamment dans la plaine. À Ma- fulipatan & dans Tes environs, on voit des traces d’un Salpètre auffi abondant qu'ileft pur. A la pointe deGalles , dans l'ile de Ceylan, il paroït fenfiblement à la furface de la terre. Dans les royaumes de Siam & de Pégu, ainfi que dans quelque partie de l'ile de Sumatra, les terres renferment un Salpètre compler. Tels font les plus grands magañns de ce fel qu'on connoïfle dans JInde, & fans doute ils ne doivent pas être les feuls; mais il faut que nos remarques foient bornées par l'étendue de nos connoïflances phyfiques fur cette partie du.globe. Si on s'éloigne du Bengale, fi on fe tranfporte fur les bords de Ja Méditerranée, on voit les contrées orientales & méridionales de ce royaume fournir , comme celles de l'Inde, le nitre le plus parfait; & fi on fuit le contour de cette mer, on voit, dans le golfe de Lyon, tout le Bas-Languedoc, où le feul leffivage des terres nitreufes qu'on y ramañle, donne un Sal- pètre qui n’a pas befoin , pour devenir parfait, de l'addition. de la plus petite quantité d’alkali végétal. C'eft M. Monter qui, dans un excellent Mémoire fur cet objet, publié parmi ceux de l'Académie de Paris, a prouvé la pureté de ce fel ré MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 435 pandu dans cette partie de la France, en faifant voir que les cendres de tamaris, par lefquelles les Salpêtriers font pañer leur leflive , ne contiennent que du fel de Glauber. Voilà donc le Bengale , l'Efpagne & le Bas-Languedoc qui font dés fources & les feules fources connués du nitre le plus parfait. Si on compare enfemble ces mêmes contrées dont les productions font fi femblables, on voit entre elles des reflemblances & des différences. Sur le globe, les embouchures du Gange font voifines du tropique du cancer ; les royaumes de Siam & de Pégu font moins éloignés de l'équateur ; Cachemire eft de quel- ques degrés au nord du tropique; l'ile de Ceylan eft près de l'équateur, & Sumatra coupe ce cercle obliquement. Les cités d'Efpagne, fécondes en Salpêtre, fe trouvent fur les parallèles qui règnent depuis 34 jufqu’à 40° de latitude ; & le Bas- Languedoc occupe l'étendue du 44° degré de latitude. D'ail- leurs les terres de l'Inde & celles d'Europe font éloignées entre elles de plus de 80° en longitude. Enfuite les fafons re- gnent bien différemment dans les unes & dans les autres; le temps des pluies eft fixé au Bengale, & il eft variable en Europe. Les vents fontconftans dans l'Inde , la mouflon de l'eft- nord-eft fuccède à celle oueft-fud-oueft avecune régularité quin'a pas encore éte troublée ; tandis queles côtes de la Méditerranée font aflaillies de toute forte de vents, variés dans leur force comme dans leur dire&ion. Telles font les différences qu'on peut afligner entre les pofitions de ces lieux, dont les pro- ductions font fi femblables. Il faut donc que ces mêmes dif- férences, qui peut-être muifent à l'abondance du Salpètre, n'infuent aucunement fur fa formation, & par confequent les vents, ainfi que les orages , la proximité ou certain éloigne- ment de l'équateur, n'ont ou ne femblent avoir aucune part à la produétion de ce fel. Si ces contrées ont quelques différences dans leur pofition, elles ont auflkdes reflemblances qui méritent de fixer toute l’at- tention des Phyficiens. Les embouchures du Gange font placées dans le fond du golfe de Bengale, & ce golfe femble avoir Tiii 436 MÉMoiras SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: un contour formé pour raflembler, dans l'efpace qu'il ren- ferme , les rayons brülans du midi. La pointe de l'île de Cey- lan, où on a remarqué du Salpêtre fur la furface de la terre, eft expofce au fud. Le golfe de Siam eft ouvert comme celui du Bengale, & la côte forme devant le royaume ‘de Pégu une gorge ouverte au midi. Enfin la côte qui borde la mer au près Me Mafulipatan, forme un enfoncement direc- tement expolé au midi ; ; les environs de Bancoul , dans l'ile de Sumatra , font ficués vis-à-vis le fud-oueft dulMonde, Ainii tous les lieux de l’Inde qui donnent du Salpètre, font tous dans une expofition parfaitement femblable. Les mêmes traits de reflemblance rapprochent les parties de l'Europe & celles de l'Afe qui ont éte citces précédemment, M. Bowle, en parlant des terres d'Efpagne qui produifent naturellement du -Salpètre , ne nomme que les feules pro- vinces orientales & méridionales de ce royaume , & le Bas- Languedoc s'étend fur une partie du contour du golfe de Lyon, quis ouvre au midi précifément comme celui de Bengale; 5 ainfi les contrées falpétrées d'Europe font donc encore ex- pofées comme celles de l'Afic. À ces traits de reflemblance on pourroit ajouter celui de la proximite de la mer. Il eft vrai que dans l'intérieur de VAfie & loin de la mer, il peut y avoir des dcpôts de Sal- pêtre; ainfk cela ne décideroit pas fi le voifinage de la mer peut influer fu la fimilitude des DARECASEE di ces terreins. Cependanr, fi on veut juger par analogie, & fi on compare ce quon obferve dans l'intérieur de la France & fur la côte du golfe de Lyon, on remärquera que de toutes les fabriques de Salpètre éparfes dans l'étendue de ce royaume, il ny a que celles du BasLanguedoc où il ne foit pas néceflaire d’ajouter au leflivage des terres nitreufes une dif {olution d’alkali végétal pour obtenir un Salpétre parfait. Ainf on peut donc Cotes que la proximité de la mer & l'expo- ficton au midi paroiflent contribuer eflentiellement ou à la produétion du nitre, ou à fon abondance, ou à fa perfe&tion, parce que, quelle que foir la fource du Salpêtre, quelle que foit MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 437 la caufe qui le fafle naître , toutes les fois qu'on trouve des terreins où il végète naturellement, & qu’en comparant ces terreins on remarque entre eux des reflemblances frappantes, on eft très-fondé à n'atribuer qu'à ces traits de reflemblance la fimilitude des produétions. Ces premières conféquences, que nous failons réfulter de ces premières comparaïlons, font encore confirmées par des exemples nombreux , fur-tout fi dans ces recherches nous ne bornons pas nos vües aux feules terres qui produifenc un Sal- pêtre complet, & fi nous les étendons à toutes les fources naturelles d’un nitre quelconque ; car il eft peu de terres calcaires qui , étant expofées convenablement, ne préfentent des veftiges d’un acide nitreux engage dans une bafe variable. Les exemples à citer feroient immenfes en nombre, fi on vou- loit feulement rapporter ceux que la France feale renferme dans fon étendue, & cerrecueil feroit très-intéreffant pour lobjeren queftion; mais on n'a pas fait encore avec aflez de détail Hiftoire phyfique & naturelle de chaque partie du royaume, pour qu'on puifle raflembler tous les faits qui ont quelque rapport à la formation du Salpêtre. Aiïnfi, en atten- dant que nous connoïflions plus particulièrement la nature & les propriétés du terrein de chaque province, ainfi que les parties ifo!ées de ces terreins, qui, bien expofées, fontchargées ou dépourvues de Salpètre, nous nous bornerons à quelques faits épars çà & à, & nous obferverons leur rapport avec les autres faits cités précédemment. Si on parcourt un Mémoire répandu dans le Public par MM. les Régifleurs des Poudres & Salpètres, & qui a été: fait vour MM. les Entrepreneurs desfalines de Franche-Comté, on y voit l'Auteur aflurer pofitivement que des côteaux de craie coupés à pic, ne fe chargent abondamment d'acide nitreux , qu'autant qu'ils font expofes au midi ou au levant. Cette aflertion importante de lAuteur paroït mériter d’au- tant plus de confiance , qu'il l'a énoncée malgré la préven- üon particulière quil paroî avoit én faveur des méthodes LA 438$ MÉMOIRES SUR :LA FORMATION DU SALPÈTRE. pratiques des Salpérriers. Cette prévention la empêché d'en tirer quelque conféquence importante ; mais la généralité qu'il donne à cette remarque, annonce qu'elle eft le réfulrat de la comparaifon d'un grand nombre de faits «entre*lefquels il na pu s'empêcher de fentir cette reflemblance. Ces fairs compares par cet Auteur, doivent être fans doute ceux quil a cités dans fon Me Il dit qu'on trouve du Salpétre dans les carrières de la Touraine, dans celles du Berry, de la Saintonge, de la Normandie, de la Picardie, de la Cham- pagne, & qu'il y ena en Praiences dans le Bas- “Languedoc, ainfi que dans les Baumes de Revigny : mais dans l'énumé- ration de tous ces lieux, l' Auteur ne done aucun détail fur les circonftances locales, & aucune réflexion ne cara&crife leur reflemblance ni leur différence, fi ce n’eft quil eft conduit à cette remarque générale, que l'expoñtion au midi eft exclufivement EMA à la production du nitre. Certe remarque ajoute donc un nouvel appui aux idées que jai déjà préfentées, & les détails de ce Mémoire démontrent les reflources naturelles de la France pour fe procurer le Sal- pêtre néceflaire à fes befoins. Voici maintenant quelques autres faits particuliers que jai recueillis, & qui confirment fencore l'influence heureufe de lexpofition au midi fur la formation du Salpétre. Il y a près du grand chemin qui conduit de Montbazon à Sainte-Maure, un banc de roche calcaire qui s'étend l’efpace d'un quart de lieue, qui eft coupe à pic, & qui eft expofe aufud- fud-eft, fans être à couvert del la pl luie nidufoleil.. Cebanc a des veines de pierrestendres & de pierres dures, qui font quel quefois mélées & quelquefois bien feparces. Les parties tendres font très- corrodées par le Salpêtre dans certains points , & on ne peut toucher celles quifontattaquées par l'acide nitreux, fans qu'aufli- tot elles fe détachent du bane & fe réduifent en pouflière, Le nitre a fait, dans le contour intérieur de la furface du banc , une impreflion fi profonde , que fa forme eft fenfible- ment altérée , & par-tout la préfence de ce fel eft annoncce , - MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAPÊTRE. 439 foit par le goût falin qu on trouve aux pierres » foit par l'em- preflement des pigeons à venir fe repaître de ce fel qui les attire. J'ai fait dans ce même lieu une obfervation que je ne peux m'empêcher de rapporter, parce qu ‘elle a beaucoup de rela- tion au fujet que JC traite. Dans une coupure naturelle de ce rocher , qui forme une efpèce d’antre , & qui s'étend profon- dément dans l'épailfeur du banc, les bre voifins renferment chaque nuit un troupeau de brebis. La pierre intérieure & la pierre extérieure de cette retraïte fonc tendres, & de même cfpècer que le rocher dont elles font partie. L'intérieure eft placée aufli avantageufement qu “elle peut l'être, fi on ne con- falte que les Auteurs des nitrières artificielles ; car dans certe retraite il règne une chaleur modérée, une humidité légère, & on y trouve abondamment les excrémens les plus favo- rables , foit par eux-mêmes, foit par leurs exhalaïfons , à la produétion du nitfe; cependant les pierres extérieures & le contour de l'ouverture de cet antre font feuls falpêtrés, quoi- que ces parties foient expofces au foleil, à la pluie & au vent; & l'intérieur de lantre, malgré tous les avantages, ne préfente aucun veftige de Salpêtre. Il eft à propos de remarquer ici que cette retraite n'a qu'une iflue, qui eft la porte ; ainfi la circulationsde l'air n'eft pas en ce lieu aufli libre qu'on l'exige dans certaines nitrières. Les portes mcridionales de la ville de S. Maixent font très- anciennes , & les pierres qui compolent leur parue infe- rieure font corrodées , délitées & excavées par un nitre abon- dant. Pres de ces portes il y a une tour ancienne, dont les pierres n'ont plus entre elles la plus g grande partie du mortier qui leur fervoic de liaifon. Le nitre l'a réduit en pouflitre, &c cette poufliere s’eft diffipée; les pierres elles-mêmes font ex- cavées en mille points de leur furface , & leur démolition préfente lefpoir d’une belle récolte au Salpétrier qui les lef- livera. A S. Michel-enlHerm, on voit une grande Abbaye ds Bénédicins , dont une façade expofce au Gi oueft & du côté de 440 MÉMOIRES SUR LA FORMATION Du SALPÈTRE: la mer, eft dans un état qui la fait paroître bien plus an- cienne que la partie de ce même édifice qui eft vis-à-vis du nord. Les pierres de celle-ci ont confervé leur poli; mais celles qui forment la première n'ont plus un contour régu- lier, elles ont perdu beaucoup de leur folidiré, & on y re- connoït conftamment le goût & l'action du nitre. La villé de Saintes & fes environs font une mañle énorme de pierres calcaires, & la nature de ces lieux s'offre avec des circonflances que je me fuis empreflé d'obferver. La ville eft très-ancienne , {es rues font étroites, & les maifons, en grande partie, font bâties depuis des temps éloignés; auili y remarque-t-0n des effets mulipliés du nitre. Les pierres tendres qui ont 4ervi à former.les murs extérieurs des maï- fons, n’ont plus maintenant la forme qu'elles avoient reçue. Elles font rongées , excavées; mais ces excavations les plus confiderables , les plus nombreufes & les plus étendues, s'ap- perçoivent principalement fur les murailles expofées au midi, telles que celles qui bordent la rivière, & celles qui font dans la parte élevée de la ville ; on reconnoït aufli les mêmes effets fur la façade d’une églife ancienne, placée fur cette hauteur, & qui eft expofte à l’oucft. Si on s'éloigne de la ville, & fi on fuit le bord feptentrional de larivière, on trouve un banc calcaire qui forme un côteau dont le fommet eft aflez levé au deflus du niveau de l’eau. C’eft dans ce banc qu'il y a quelques excavations faites horizontalement pour l'extrac- a d'une pierre propre à bätir. Les bouches de ces carrières font éparles fur la longueur du côteau, & ces excavations u'ont aucune communication; elles s'étendent feulement dans l'épaifleur du banc jufqu'à une profondeur plus ou moins grande , & chacune n’a qu'une feule iflue. Dans l'intérieur de chaque carrière fraiche & humide , il n’y a aucune trace de Salpétre ; mais les débris calcaires répandus à l'entrée, pa- roi ent fortement falpétrées. La pierre même du banc ex- pofce à l'air & au foleil eft corrodée par le nitre. Ce même banc, qui a beaucoup détendue & qui fe fait voir en plu- fieurs lieux à la furface de la terre , préfente vis-à-vis du nord une {I MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE! 44 une face coupée à pic, & dans laquelle il y à auffi des ex- cayations horizontales qui ont plufieurs ouveitures & qui fe communiquent. La pierre eft tendre, les déblais font confi- dérables , l'air y circule librement, l'humidité y eft un peu fenfible, &.je nai vu ni au dehors ni au dedans de ces carrières aucun veftige de Salpètre. L Si on fe tranfporte aux arenes, qui font un ancien monu- ment des Romains, on trouve du nitre dans les feules par- tics de ces ruines qui font expolées au midi. Au delà des arènes ; il y a un banc de roches tendres très-étendues , coupé dipic. 18 qui fe montre à nu à la furface du côteau qu'il forme. La coupure de ce banc peut avoit vingt pieds d’é- Kvation, & elle femble un monument authentique de l'afñ- nité & de l'aétion deftrudtive du nitre. Trois lits épais d’une pierre tendre , & qui font placéshorizontalement l'un au deflus de l'autre, fans aucun intervalle qui les fépare , compofent la mafle apparente de cette partie de banc qui s'élève au deflus de la plaine. L’extrémité intérieure de chacun de ces lits qui font bien diftin&s, a été tellement décompofce, délitée par le Salpétre , que fa forme eft devenue angulaire, & la furface verticale de la coupure du banc femble étre excavée par deux fillons profonds qui s'étendent longitudinalement & patallelement à l'horizon. Ces fillons font couverts de pouf- fière calcaire, provenant de la décompofition de la pierre, qui auparavant remplifloit. les vides aétuels. Jai ramañlé une partie de cette pouflière , & elle m’a paru chargée d’un nitre très-fenfible ; j'ai remarqué d’ailleurs que ce banc formoit en s'étendant un angle faillant & à peu près droit, de forte que dans cette partie il préfente deux faces verticales qui for- ment enfemble un angle de 90°. L'une de ces faces eft ex- pofée au fudfud-oueft, & l'autre à left-fud-eft. La face du fud-fud-oueft cft-celle qui eft fi altérée par l'aétion du nitre; celle de l'eft-fud-eft eft aufli attaquée, mais fes fillons font bien moins profonds. La continuation du côteau qui devient enfuite, dans fa direétion, parallèle à la première face, a seçu des impreflions nitreufes aufli fortes que la face du fud- Kkk 442 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. fud-oueft. Dans ce même banc, on a fait autrefois des exca— vations horizontales ; mais les bouches de ces carrières font feules falpêtrées , & ce n’eft encore que dans leur contour extérieur. On remarque aufhi dans le chemin qui conduit de ces carrières à la ville, & qui a été creufé dans J'épaifleur de ce banc prolongé , que le bord. feptentrional, qui eft une patie du banc coupé à pic, eft chargé de beaucoup de nitre à bafe terreule. Sur les bords de la Charente & à quelque diftance de Saintes, on trouve de nouvelles carrières qui portent les noms- des lieux qu'elles avoifinent. L'une eft la carrière de Saint- Vaïze ;' & l'autre, celle de Saint-Sarinien; à Saint-Vaize, le banc de pierre tendre a été excavé horizontalement, & les ouvertures des excavations font les unes expofées au nord, & les autres à l'oueft. Dans l'intérieur.des carrières occidentales, on trouve des terres nitreufes en aflez grande quantité; Anais dans les feprentrionales , fi les terres ny paroiflent pas tout- a-fait infipides , foi à caufe de l'humidité é qui y règne, foït à caufe de l'expofñtion , le nitre néanmoins ny efl pas auf fenfible que dans les premières. Ces excavations cependant fe communiquent & font très-aérées; les pierres fonc tendres, & il y a des débris de toute groffeur ; ainfi il ne leur manque fans doute, pour fe charger abondamment d'acide nitreux ,. qu'une expolition plus avantageufe. La carrière de S. Savinien eft mieux fituée; fes. bouches nombreufes font toutes ouvertes au midi , & le banc calcaire a beaucoup d’étendue : ikeft coupé à pic, & le fommet du banc eft clevé d'environ quarante pieds au deflus du niveau de la rivière. Depuis long-remps les gens du pays & des en- vitons tirent des pierres *F fein de cette mafle, & les exca- vations qui fonc faites horizontalement, s'étendent tres-pro- fondément dans l'épaifleur du rocher. . . Les contours extérieurs des bouches de la carrière font tres-chargés d’un nitre très- apparent. En Jeflivant des morceaux du banc cafles exprès pour en faire l'épreuve , on a trouvé du nitre & du fel. marin. À l'entrée de ces bouches, il y a une quantité immenfe de terres calcaires & de déblais qui fe MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 443 montrent plus ou moins falpètrés, & il en eft qui font fur la langue limpreflion la plus -pénétrante , tant le nitre y cft abondant. On remarque d’ailleurs dans cette nitrière naturelle , que par-tout où l'air a pu circuler librement, & même dans les lieux que le foleil a échauffés de fes rayons diretts ou ré féchis, le nitre sy trouve en très-grande quantité. Au refte, quelque nombreufes que foient les bouches de la carrière, :ïl n'en eft aucune qui ne préfente des indices fenfibles du Sal- pétre. On aflure aufi que dans le Bas-Languedoc, il y a des cô- teaux calcaires dont la furface eft falpétrée ; mais j'ignore leur expofñition, & les circonftances locales qui les accompagnent. A ces faits on pourroit en joindre beaucoup d’autres cir- confcrits dans de plus petits efpaces, & qui ne feroient pas voir d’une manière aufli grande comment la Nature paroîc travailler ‘à la formation du Salpétre. Il me fufñt d'en avoir préfenté qui, tous enfemble, conduifent néceflairement à cette conféquence importante, que l'expofñtion au foleil & des terres calcaires font les fondemens les plus eflentiels de la produc- tion du nitre. Cette conféquence doit déformais être regardée comme un principe démontré par l'expérience & l'obfervation ; mais ce principe n'eft pas feul fuffifant pour donner une ex- plication plaufible de toutes les fources naturelles du nitre, fur-tout de celles où les rayons du foleil ne peuvent pénétrer. Il faut donc encore préfenter de nouvelles obfervarions , ou confiderer les précédentes fous de nouvelles faces , pour juger des conditions particulières auxquelles la Nature rend le nitre fenfble fur la furface du globe, & l’accumule dans des licux qui diffèrent fi étrangement par leur potion & leur tempc- rature. Si les bancs calcaires que j'ai déjà cités, & qu'on voit près de Saintes, de S. Vaize & de S. Savinien, préfentent des traces de nitre dans leur furface extérieure , lorfqu'ils font ex- pofés au midi ou qu'ils reçoivent les rayons du foleil pendant la plus grande partie du jour; fi nous avons dit que les terres qui fe trouvent fous les excavations faites dans ces bancs Kkk ij 444 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. font aufli chargées de nitre lorfqu'elles font expolces avec autant d'avantage , cela ne doit s'entendre que des terres, ré- pandues à l'entrée des carrières; ear il n’en eft pas de même de celles qui font placées plus profondément, & quine peuvent être frappces des rayons du foleil : celles-ci ne préfentent aucun veftise de nitre , quoique d’ailleurs la circulation de l'air foit rt libre qu'on peut l'établir. A S. Savinien, les terres qui font à vingt pieds de diftance de l'ouverture des carrières, & celles qui couvrent enfuite tout le fond des exca- vations, ainfi que les piliers qui foutiennent la mafle du banc, femblent être condamnées à ne jamais recevoir du nitre de la fource que'conque d’où il découle, tandis que celles qui font frappées de la lumière réfléchie ou direéte du foleil, & autour defquelles Pair peut circuler, plus où moins Curl font auf plus ou moins falpétrées dans leur furface. Cependant ces déblais qui capiffent l'entrée des carrières, font de même ef- pèce, de même forme, de même qualité que ceux qui font enfoncés plus Brefondément fous les carrières. Il faut donc que la différence d'expolition produife la différence de leur propriété , &.il devient maintenant néceflaire de remonter à l'origine de cette différence. É on confulte tous ceux qui oht parle des carrières, des cavernes , des grottes, & des caves profondes , & quiles ont confidérées en Phyficiens, ont remarqué que la température de tous ces lieux, obfervée à un certain éloignement du jour , eft au la même que celle des caves de lOb- {ervatoire de Paris, où le mercure du thermomètre fe tient toujours & dans tous les temps X'10° au deflus de la con- gélation. Dans les Mémoires de l'Académie, il y a un fair qui, par fes circonftances » prouve bien évidemment que cette égalité de température doit toujours avoir lieu, lorfqu'on s'avance à une certaine profondeur dans l'épaifleur de la terre. Sous la colline de Monte Teftaccic., il y a une cave dans lâquelle le* mercure du thermomètre s'élevoir à 9° :, lorfque . dehors il montoit à 18°, quoique cependant, rs Le l'ob- ” fervation de M. l'Abbé Noller . Cette, cave, für expofce di- Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 44% reétement au midi, & que fes portes tres-grandes fuflent fouvent ouvertes pendant le jour. D'ailleurs 1l n'eft perfonne si n'ait obfervé que dans toutes les caves & les lieux profonds éloi- gnés du foleil , la température de air qui y règne ne s'éloigne gucre du Re degré du thermomètre ; c'eft ce qui fait dire communément que les caves font fraîches en cie, & chaudes en hiver. M, Jars, de l'Académie des Sciences, a remarque dans des mines dont les excavations font faites horizontalement comme celles des carrières dont j'ai parlé, qu’en portant un thermomètre en dedans de la mine & à une toife de l'ouverture en été, le mercure étoit à r1°, lorfque dehors il s’elevoit à 20°. Il à obfervé aufli que le mercure fe renoic conftamment à-11°, à quelque profondeur qu'il le portat dans la galerie de la mine, pendant l'hiver ; ce même thermomètre , placé en des dans de la galerie , & à quarante- cinq pas de l'ouverture , marquoit 0°, c'eft-à-dire, qu'il marquoït le terme de la glace; mais porté plus profondément , alors le mercure s'élevoi &- fe foutenoit conftamment à ri° au deflus de o°. Un courant d'air qui circule par des puits & par l'ouverture de la ga- lerie, occafionnoit cette différence de température obfervée en hiver & en été. Quant à la différence de 2° entre, la tem- pérature des mines & celle des caves de l'obfervañion, M. Jars penfe qu'elle doit être attribuée à la chaleur que’ répandent dans ces lieux & les Ouvriers qui y travaillent, & les lampes qui les éclairent. C'eft à préfent que j'ofe joindre à ces ob- fervations, celles.que j'ai faites dans les carrières citées pré- cédemment; & pole aflurer qu'à certaine profondeur elles ont COPA Une & à peu près la température des caves. Comme les bouches de quelques-unes de ces carrières font nombreufes & voifines, comme les excavarions fe communiquent , il faut quelquefois s'éloigner de plus de quarante- cinq pas de lou- Yeiture, pour trouver le premier point de la carrière où la rempérature eft égale à celle des caves. Les circonftances lo- cales changent beaucoup cette diftance ; 5 mais au dela de ce point jufqu' au fond de la carrière & à quelque profondeur qu'elle sercnde, le mercure du thermomètre sy tient conf- 446 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ramment à la même hauteur. Nommons donc ligne d’egale température, une ligne qu'on imagincroit féparer le fond de la carrière où le mercure du thermomètre eft conftamment à 10°, & cette partie avancée de la même galerie où le mer- eure varie en hauteur, fuivant la proxunité & les variations de l'air extérieur. On voit bien que cette ligne fera d’autant plus voiline de l'entrée, que l'ouverture de la galerie fera plus bafle, & que cette galerie aura moins de communication avec les galeries voifines qui peuvent avoir des ouvertures plus ou moins élevées. On voit bien aufli que le mercure du ther- momètre, dont la hauteur varie dans le cours de l’année, à l'entrée de la galerie, variera d'autant moins en hauteur & se loignera d'autant moins du ro° degore, que les rayons du fo- leil dires ou réfléchis auront moins d'accès fous l'ouverture de la galerie. Ainfi on imagine aïfement toutes les variétés de température qu'on peut obferver, & à chaque inftant & dans chaque faifon, au milieu de cette mañle d’air qui s'éténd de- puis l’entrée de la galerie jufqu'à la ligne d’égale tempéra- ture. Si nous revenons à notre objet principal, nous remarque- rons qu'on peut faire fous les carrières citées l’obfervation de deux effets, qui ont lieu en même temps, qui font circonf- crits dans les mêmes limites, & qui finiflent aux mêmes points. Sous ces carrières, la température de l'air eft la même depuis la ligne d’égale température jufqu'au fond de toutes les ga- lcries ; de même les terres, les pierres calcaires font, dans le même efpace , également dépourvués de tout acide nitreux. Depuis cette ligne jufqu'à l'entrée, l'air eft variable dans fa température, foit diurne, foit annuelle, &les terres paroïflent contenir une quantité variable de nicre. Ces deux effets ayant lieu enfemble avec des circonftances qui établiffent entre eux Ra relation la plus marquée, il doit y avoir aufli entre eux une dépendance mutuelle qu'on ne peut s'empêcher de re- connoître, Puifque dans une carrière telle, par exemple , que celle de S. Saviniey, il eft un terme plus ou moins éloigné de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 447 l'entrée, au delà duquel le thermomètre ne varie plus & marque conftamment la même température ; puifque, depuis ce terme jufqu'à l'entrée de la carrière, le mercure change de hauteur dans le tube du thermoïnètre, fuivant l’état de l'air extérieur : 1l s'enfuit que le nitre ne fe montrant qu'à la fur- face des terres qui font fous cette feule région où le ther- momètre annonce des variations, on peut conclure par ana- logie, que la préfence du nitre eft due à ces mêmes varia- tions de l'air. Afin de juftifier cette conféquence d'une ma- nière qui ne permette plus d'en douter, examinons quels doi- vent étre les mouvemens de l'air à l'entrée d’une galerie pen- dant le froid ou la chaleur, & démontrons quels doivent en être les effets. Dès que l'air extérieur ceft échauffé par la préfence du foleil, alors l’air intérieur de la carrière étant plus frais , s'échappe par le bas de l'ouverture de ja galerie, tandis que l'air chaud de: dehors s’introduit dans la galerie par le haut de la même ou- verture. Plus la bouche de la galerie a de hauteur, & plus ces mouvemens de fair fonc confidérables, c’eftè-die, plus le courant d'air eft rapide. Cet air chaud qui s'introduit dans la galerie où il règne beaucoup de fraîcheur, fe condenfe promptement, perd la chaleur qu'il avoit reçu, & fe met bien- tôt à la température commune des couches d'air qui fonc dans la galerie; de orte que cet air chaud s'étend d'autant moins profondément dans ceite galerie, que celle-ci eft plus fraîche, ou que fon ouverture eft moins élevée; & la ligne: d'égale température eft aufli mgintente par ces mêmes caufes à une plus grande proximité de l'entrée. Ainfi, plus les ou- vertures des galeries font bafles, moins il faut s’avancer dans: ces. galeries pour arriver à la ligne d’égale température, & moins aufli, dans les mêmes circonftances, on trouve détendue: à cette portion de terres qui fe montrent chargées de nitre. J'ai-aufi obfervé que fi plufieurs galeries fe communiquent par des excavations collatérales, alors, dans ces mêmes lieux , la ligne ‘d'égale température s'éloigne beaucoup de l'entrée.» 4 + 418 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. & la région des terres nitreufes embrafle un efpace beau- coup plus confidérable. La malle d'air comprife entre l'ouverture & la ligne d'égale température n'eft doné jamais enrepos, foit lorfqu'elle eft plus échauffée que l'air extérieur, foit lorfqu'’elle a moins de chaleur. D'ailleurs 1] eft à remarquerque fi, par exemple ; le mercure cf à 20° en dehors de la galerie , ‘il doit y avoir dans la mafle d'air défignée une fuite de tranche dont la température parücu- lière cit différente , & toutes ces tranchestnfemble doivent avoir toutes les cempératures intermédiaires comprifes depuis ro° juf- qu'à 20 au.deflus de la congélation. Cetair extérieur & chaud qui s'inttoduiten été parle haut te galerie, doit donc, ens'avançant dans la galerie, changer er emenr de température, & ces changemens font he ou accompagnés de condenfations fuc- celles, jufqu'à ce qu'enfin cet air foit parvenu à 10° de tem- pérature. Puifque cet ait, lorfquil ctoit échauflé, a diflous, à proportion de fa chaleur ,"toutes les molécules fuides des corps ev aporables qu'il a pu toucher ; de même cet air, en fe mélant à un air plus frais, en fe trouvant en conta& avec des corps plus froids que lui, doit , en*{e condenfant, en perda ant fa chaleur, laifler auffi précipiter ces molécules fluides que fa. chaleur feule lui faifoit tenir en diflolution; & ce pré- cipicé eft d’ autant plus abondant, que le changement de tems péiature qu éprouve lait chaud de dehrs él plus confidé- rable, Quant à cette diflolution & cette précipitation dont je parle* ce font des faits dont on ne peut » -douter ; tout le monde peut les obferver , &sgeux qui auroient négligé de les remarquer, peuvent confulter les Mcmaires de l'Académie des Sciences , où il cft démontré par beaucoup d'expériences dé- cifives, que cette diflolution produire par l'air, eft en raïfon de fa chaleur, & que le précipité fuit toujoûrs. fon refroidif- fement. Aïnfi en été l'air chaud qui s'introduit dans une galerie dépole néceflairement, par fa condenfation , une partie plus où moins grande des molécules fluidesique fa chaleur lui L avoit MÉMOIRES SUR LA-FORMATION DU: SALPÊTRE. 449 avoit fait difloudre , & ce dépôt eft reçu par des terres où pierres calcaires qui font placées fous cette couche d'air re- froidie. Lorfqu'à ces faits bien connus on joindra maintenant l’ob- fervation de cet autre fait, favoit, que les terres ne paroïflent falpétrées que dans.cette partie de la galetie où l'air éprouve des variations de température ; lorfqu'on remarquera que ces terres peuvent être dépouillées plufieurs fois du nitre reçu, & sen charger encore autant de fois, en les plaçant toujours aux mêmes endroits ; lorfque d'ailleurs, en les analyfant chi- imiquement avant leur expofñition, on trouve qu'elles ne: con- tennent aucune trace de nitte, & que même, après en avoit fourni au delà de leur poids, elles ne fonc pas encore épui- fées : on peut conclure avec, aflurance que Je nitre qu'elles donnent n'eft pas un nitre qu'elles produifent,, mais qui leur eft tranfmis par une, caufe extérieure & étrangère. Enfuxe,, comme dans ces lieux ces terres font à l'abri de la pluie & du foleil, comme elles font éloignées de toute habitation des hommes ou des animaux, & comme aucun végétal ng couvre leur furface , il faut donc que l'air qui eft le feul corps qui les touche, qui les enveloppe, foit aufli, par fes change- mens , la feule caufe de la transformation de ces terres infi- pides en terres nitreufes. Puifque le nitre fe trouve fur la furface de ces terres ;' puifque l'étendue de ces terres nitreufes cft proportionnée à l'étendue de la mafle d'air dont la tem. pérature eft variable ; puifque d'ailleurs l'air eft propre, par fes condenfations fucceflives, à dépofer abondamment des mo- Jécules fluides quelconques qu'il tient en diflolution ; puifque cet air eft la feule caufe , la feule fource étrangère qui pa- roifle avoir quelque influence fur la transformationde cesterres, & quil eft démontré que le nitre eft dépolé par une caufe extérieure , 1l faut donc que le dépôt reçu par ces terres foit celui de l'air, & que l'air ne dépofe qu'un mélange d'eau & d'acide nitreux dont ces terres fe trouvent chargées. # L'air paroft donc étre la fource évidente de ce nitre na- zurel qu’on recueille dans les terres calcaires, C’eft en s'échaut- LI1 450 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. fant quil sempare de l'acide nitreux partout où il le ren- contre , & c'eft en fe refroidiffant qu'il labandonne, & quil le dépofe fouvent bien loin de la fource où il l'avoit puifé. Dès que les terres calcaires l'ont reçu , comme cer acide a plus d'affinité avec elle qu'avec l'air, elles le retiénnent; & c'eft après des dépôts muliiplies, qu'elles préfentent une abon- dance de nitre propoitionnée à leur expofition plus ou moins avantageule. LLC Je renouvelle ici une opinion abandonnée, en établiffant lair comme le véhicule du nitre; mais les obfervations & les raifonnemens m'ont conduit à ce principe, & je n'ai pu m'em- pêcher de l'admerttre. Les Chimiftes ne fe font décidés à le rejeter, que d’après une feule expérience, par laquelle on voit que des linges unbibés d’alkali fixe, & expofés en plein ai, fe font chargés de tartre vitriolé, & non pas de nitre; mais fi de cette obfervation on rapproche celles des terres cal- caires avec lefquelles l’acide vitriolique a plus d’affinité que l'acide nitreux, & qui étant expofées à l'air ainfi qu'à l’action de: tout l'acide viriolique contenu dans l'air, fe chargent néan- moins chaque jour d'un nitre à bafe terreufe qu'elles re- tiennent & qu’elles confervent fans que l'acide vitriolique le décompofe, on conclura avec vérité, que fi la première ex- périence démontre que l'acide nitreux n'eft pas répandu dans l'air, la feconde fait voir aufi évidemment que lacide vitrio- lique ne peut fe trouver en diflolution dans l'air : car fi ce dernier acide étoit préfent dans l'air, il Suniroit aux terres cal- caires, & en fépareroit l'acide nitreux. Les Chimiftes ayant également égard à ces deux expériences, auroient donc dû profcrire également les deux acides & nitreux & vitriolique ; mais ils oft continué de penfer* que l'air ne renfermoit au- cune partie d'acide nitteux, & qu'il contenoit de l'acide vitrio- lique. Laiflons icices{yftêmes, & reconnoiflons, d’après ces cxpé- riences bien analyfées & les obfervations rapportées précédem- ment, quil cft prouve démonftrativement que l'acide nitreux ainfi que l'acide vitriolique , & même l'acide marin, font rc. pandus dans l'air qui en eft le véhicule, If me femble même MÉMoIREs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 451 qu'un feul raifonnement le prouve aflez clairement : l'acide picreux eft évaporable , & continuellement il s’exhale en va- peurs rouges très-fenfibles:; or toute évaporation d'un fluide quelconque n’eft qu'une diflolution de ce fluide faite par l'air qui l'environne; parconféquent l'air doit contenir l'acide nitreux, sil y en a en contaét avec l'air fur la furface de la terre. D'ailleurs on peut encore ajouter ici, à l'appui de cette opi- nion, les experiences de M. Margraff, rappoitées dans les Mé- moires de l’'Âcademie de Berlin, par lefquels ce Chimifte a trouvé dans l’eau de pluie & dans l’eau de neige une petie quantité de nitre. Ainfi on ne peut douter que le nitre qui eft fi apparent, fi fenfble fur la furface des terres placées à l'entrée des galeries citées, ne foit réellement un précipité de l'air, & que l'air, dans toutes les circonftances où il fe condenfe, ne dépole l'acide nitreux avec les autres molécules fluides quil peut tenir en diflolution fur les corps avec lef- quels il eft en conta& : de plus, que fi ces corps ont ayec l'acide nitreux plus d’affinite que l'air, alors cet acide dépofé refte dans fes nouvelles matrices ; mais que, dans le cas con- taire, l'air, en s'échauffant , repompe cet acide dépofé & lenlève au corps fur lequel il l'avoit répandu. Ce principe eft fi vraïfemblable , qu'il fournit l'explication la plus plaufible de l'origine du nitre qu'on recueille dans rous les lieux habités, tels que les caves, les granges, les écuries, fous les halles, près des latrines , dans les églifes, ainfi que dans les vieux édifices. Si l'air , en fe condenfant, laïfle préci- piter l'acide nitreux’, tous les lieux où il peut fe condenfer en sy introduifant, doivent contenir du nitre; fi ces lieux d’ailleurs renferment une bafe convenable : de mème auf tous les corps qui attirent l'humidité de l'air, doivent en même temps & en même raifon attirer l'acide nitreux & le retenir fixement, Silsont avec lui plus d’affinité qu'il n'en a avec l'air. Par conféquent tous les corps couverts d’exhalaifons urineufes ou de fels qui ont la propriété de produire le refroidifle- ment de l'eau à laquelle ils font mélés, doivent aufli, par le Lili ’ 4$2 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, inéme principe, obliger Pair environnant de.leur abandonner l'acide nitreux qu'il recèle. ; C'eft par cette railon que le. nitre fe montre en fi grande quantité près des bâtimens , dans les écuries & dans les tables; c'eft à cette caufe qu'on peut, attribuer le: nitre recueilli dans les nitrières artificielles , où les terres font humeétées d’urines & mélées avec des matières qui ; par leur décompofition, donnent des fels qui attirent Fhumidité de l'air; enfin, ceft de cette fource que découle le nitre qui paroît par-tout où il y a des exhalaifons urineufes, des mélanges defel,. de cendres, d’excrémens, . d'eaux de fumier, & de matières ani- males putréfces ; lorfque: d’ailleurs, dans cous ces lieux, il y a des matières calcaires qui font des matrices propres à’re- cevoir &.à conferver le nitre depole, x Si le nitre fe forme dans les. caves, dans les granges, fous les halles, & dans tous: lés lieux habités, c'eft encore aux Variations de l'état de fair qu'on doit l'attribuer. En effer, dans les caves qui ont une ou plufieurs portes, au bien une porte .& un foupirail, l'air qui y règne, fi elles font pro- fondes , eft prefque toujours, foit à 10° de température comme dans les caves de l'Obfervatoire, foic àquelques degrésau deflus ou au deflous , fi pendant l'été leur pofition permet à l'air-d’ac- quérir une-certaine chaleur, & pendant l'hiver de participer au froïd extérieur. Mais cette variation de température eft ordmai- rement aflez peu confdetable, pour permettre de regarder en été les caves comme fraîches , relativement à: la température de l'air exterieur; & de les trouver chañdes en hiver malgre le froid qui y peut entrer. C'’eft certe fraîcheur conftante qu'on y obferve en:éré:, : qui fait précipiter l'acide nitreux: porté par cette male d'air, échauflé & extérieur qui s'introduit dans l'in- tétieur d’une cave. La circulation de l'air que. nous fuppofons ici, eft. facile à, unaginer dans routesles.caves où° l’air-a.feu- lement deux iflües, dont. l'une doit plus élevée que l'autre ,:& qui foient plaeces l’une: par rapport à l'autre dans des pofi- tions favorables. L'air chaud de l'été s’introduit par l'iflue. la plus élevée, tandis que l'air frais de la cave s'échappe par MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 453 l'ouverture plus baffle; mais ces caufes des courans de l'air font déjà trop connues, pour que je métende davantage fur leur développement, &# fur les conditions qui doivent avoir lieu pour que ces courans sctabliflent dans un lieu déterminé. Les halles dans les villes recèlent aufi du nitre par la même caufe ; l'air qui règne dans l'intérieur de ces lieux eft prefque toujours frais , & jamais il ne fe met à la température de l'air exterieur : il y a donc un courant continuel d'un air échauffé qui s'introduit dans ces lieux, qui*s’y condenfe, & d’un air froid qui eg fort & qui fe dilaré enfuire. J'ai vu dans plu: fieurs villes anciennes, des halles dont le terrein étoit chargé & fe chargeoïit encore d’un nitre très- abondant ; mais elles étoient étroites , renfermées &. fort vaftes, & elles étoient fituces très-favorablement pour que Pair intérieur confervât toujours une très grande fraîcheur, & ne püût fe renouveler que très- lentement. Au refte, dans tous ces lieux, le nitre wy eft abondant (toutes chofes d'ailleurs égales) qu ‘autant que les terres qui couvrent le fol ont une plus grande aff- nié que l'air avec l'eau & l'acide nitreux. Si cesterres, par exemple, font calcaires, elles attirent puiflamment & retien- rent fixement tout celui que l'air condenfé dépofe fur leur furface. Si le. fol de ces lieux n’étoit recouvert que de fables ou de terres vitriäables, l'acide nitreux qui n'a*avec ces ma- tières aucune: afñnité ; y feroit dépofé confequemment aux condenfations de l'air ;*mais cet air le repomperoit bientôr, lorfqu'il reprendroit quelque nouveau degré de chaleur ; peut- être même ne le dépoferoit-il pas, parce que fon afhnité. avec l'acide nitreux eft plus grande que celle de cet acide avec les terres vitrifiables & fableufes. "C'eft d'après ces principes quil eft aifé d'expliquer pour- quoi, dans d’autres lieux habités, tels que nos appartemens: qui, par leur forme & leur pofion, ne font pas propres à co ce long-temps un air différent de. l'air extérieur, à moins qu'on n emploie des précautions. particulières , il fe. trouve cependant du nitre aflez abondamment dans les dé- bris: des: muraïlles qui les entourent. En eflet, il fufhit de 454 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. favoir qu'on peut à volonté établir, fur-tout en été, une dif férence de plus de 10° entre la température de l'air intérieur & celle de l'air extérieur. L'expérience eh a été faire, & on a obfervé que dans unsappartement fermé & où les rayons du foleil ne pouvoient avoir d'accès , le mercure du cher- momètre fe tenoit à 18 ou 19°, lorfque dès-lors il s'élevoic à 28 & 29° Une moindre différence à lieu aflez conftam- ment, & fufhit pour faire dépofer à l'air l'acide quil. con- tient. . C’eft ‘encore fur ce fondement qu'on peut appuyer l'expli- cation de cette quantité de nitre, plus abondante dans les rues étroites dont les maïfons font élevées , & où le foleil ne peut pénétrer , que dans les rues larges & expofces à toute la chaleur du jour. La différence de température qui règne conftamment entre l'air frais des petites rues & l'air échauffe des plus grandes, doit feulement être indiquée, ici, pour an- noncer combien il eft facile de rendre raïfon pourquoi les Salpètriers * recueillent plus de nitre des débris des petites rues, que de ceux des plus larges. Si ce principe fournit une explication aufli facile de lori- gine du nitre dans tous les lieux où il fe forme loin du foleil, tels que les carrières , les édifices, les halles , les caves, les écuries, les fatrines, & les autres lieux habités ; il laïfle en- core à défirer des lumières fur la fource du nitre qui végete fous un ciel brülant dans des verres & fur des pierres peéné- ées des rayons d’un foleil qui les échauffe fans interrup- tion, pendant un certain temps , comme dans l'Inde, l'Ef pagne & tous les autres lieux où les pierres tendres & les terres fe chargent d’un nitre abondant & fenfble. Il faut en- core examiner cette matière fous un nouveau point de vué, & remonter à quelque caufe dont l'influence & l'énergie foient fafifantes pour la produétion de ces effets. Après tout ce qui a été dit précédemment, on ne peut maintenant ne pas regarder comme démontré, que l'air eft le véhicule de l'acide nitreux qui s'évapore fur la furface de la terre, qu'il doit le difloudre dans un lieu pour le tranf- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. 455 potter dans un autre, où quelquefois il le rediffout enfuite pour aller le dépofer dans une nouvelle matrice, avec laquelle enfin il contraéte une union intime qui ne lui permet plus de s'échapper. Ainfi l'air qui enveloppe la terre, doit être re- gardé comme chargé d'acide nitreux en plus ou moins grande quantité , quoique le refroidiflement qui fuccède à fa cha- leur, l'oblige d'abandonner cet acide, & produife la précipi- tation : l'air peut aufli être dépouillé de ce même acide par une caufe tout-à-fait différente; & on peut imaginer avec raifon, que tous les corps qui ont avec cet acide plus d’af- finité que l'air, doivent aufli lukenlever l'acide auquel il eft uni. L'acide nitreux a moins d’affinité avec l'air, qu'avec les terres calcaires; ainfi ces terres peuvent exercer avec fuccès leur puiflance attractive fur«l'acide de Pair. Si on obfeîve aufñi que rien n'égale, comme le dit M. Macquer, l'activité & limpétuofité avec lefquelles cet acide fe joint au phlogiftique, on doit penfer que tous les corps qui font plus ou moins chargés du principe igné, doivent attirer l'acide de l'air avec plus où moins d'énergie; & par conféquent fi des terres cal- caires ont reçu d'avance une grande quantité de phlogiftique , leur affinité avec l'acide nitreux s'élève au plus haut degré d'intenfité. ne Bien différentes de l'air qui eft peu denfe, très-fluide , très- perméable à la lumière, qui séchaufle aïfément, qui perd la chaleur acquife avec autant de facilité | & qui par conféquent ne peut fe charger de beaucoup de phlogiftique , les terres calcaires au contraire étant expofces à une chaleur vive & continue, en confervent la plus grande partie, & la retiennent tès-long-temps. < Si on confulte les expériences de M..de Buffon, on y voit que les terres calcaires ne font en partie compofces que d'air & de feu fixes, c'eftà-dire, qu'elles contiennent eflen- tellement une certaine quantité de phlogiftique. Si ces terres qui, par conféquent, font natutellement très-propres à s'unir à ce principe igné, font expolées au foleil & pendant long- 456 MÉMPIRES SUR ;LA FORMATION DU SALPÈTRE. temps; comme elles ne reficchiflent pas-tous les rayons qui les frappent , comme il refte dans ces terres une grande partie de ce feu élémentaire qui sy éteint, qui sy fixe > & qui de- vient enfin partie conftituante des terres qu'il a pénétrées , l faut donc qu'elles fe chargent d’une quantité de phlogiftique qui devient d’autant plus g grande, qu'elles éprouvent plus long- cemps & fans interruption de très-grands degrés de Ébaiene C’eft cette furabondance de. phlogiftique qui ajoute encore à la propriete qu'elles avoient déjà d'acurer l'acide de l'air, & certe force attradtive a d'autant plus d'incenfité, qu'elle eft en raïon des affimrés de cet acide, & avec les terres calcaires, & avec le phlogiftique qu'elles ont pu acquérir. Cette grande attraction doit par conféquent produire l'union la plus à intime entre les terres calcaires & l'acide nitreux dont elles dépouil- lent l'air qui en étoit chargé auparavant. Cet acide doit donc refter fur la furface de ces terres, quoiqu'elles foient expoléces en plein air; & la pluie feule peut afloiblir & dif- fiper ce nitre déjà formé. C'eft ainfi que les terres du Bengale attirent , reçoivent & confervent dans leur fein un nitre abondant, qu'on recueille chaque année, & qui fait une branche brillante du commerce de l'Inde, Ces terres font placées fous un climat qui ef brûlant pendant fix mois entiers de chaque année. Depuis le mois d'Oétobre jufqu'au mois de Mars, le ciel cft fuperbe dans ces parages , les vents font conftamment à l'eftnord-eft , & le foleil fans nuage, après avoir diflipé promp- tement toute l'eau dont les terres avoient été inondces , pé- nètre ces mêmes terres de la chaleur la plus vive ; alors ces terres fe chargent bientôt d'une très-grande quantité de phlo- giftique que la pluie ne vient plus difliper, & qui ajoute à leur affinité avec l'acide nitreux répandu dans l'air. Ces terres doivent donc recevoir du nitre en abondance & en quantité d'autant plus grande, que le vent, toujours très-chaud & par conféquent toujours très-charge de molécules Auides éva= porables, doit apporter. aufli. régulièrement que fucceflive- ment de nouvelles mafles d'air qui, dans leur contact avec CES MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 457 ces terres, leur abandonnent & leur cèdent un acide que leur moindre affinité ne leur permet pas de retenir. Sans doute il en eft de même des terres des provinces méridionales d'Efpagne , dont la latitude eft encore aflez peu confidérable, pour qu’elles puiflent recevoir du foleil de très- grands degrés de chaleur depuis le commencement du prin- temps jufquau mois d'Âoût, qui eft le temps de la récolte du Salpétre. Le foleil, pendant ce temps, a une déclinaifon borcale qui donné à fes rayons une direction moins oblique à la furface de ces terres. Il eft vrai que le Bengale eft plus voifin de l'équateur que ces provinces d'Efpagne; mais le temps des grandes chaleurs de l'Inde ne correfpond qu’à l'épo- que où la déclinaïfon du foleil eft auftrale, & on fait par les obfervations météorologiques, que fi la chaleur y eft plus continue, elle n'a pas plus d'intenfité que fur les côtes d'Ef- pagne , & même à Paris, en comparant feulement les plus hauts degrés de chaleur de l'Afie & de l'Europe. M. de Cofligny a obfervé que le mercure du thermomètre ne s'élève pasplus haut à Pondichery, que fous le climat de Paris; mais aufh il à remarqué qu'il fe tient dans le premier lieu plus long-temps , & plus ordinairement à la même hauteur qu'à Paris, où fa hauteur varie fingulièrement chaque jour & à chaque inftant. De même à Malte , à Alger & à Cadix, le mercure du thermomètre ne s'élève pas plus haut qua Paris; mais ily varie moins dans fa hauteur pendant la faifon d'été, & la chaleur ny paroît plus confidérable, que parce qu'elle y eft plus continue, plus long-temps la même, & moins interrompue par des pluies accidentelles. Cette différence entre la durée d’une chaleur également forte & régnante fur les terres du Bengale & de l'Efpagne , peut bien avoir quel- que influence fur le nitre qu’on recueille fous ces climats di- vers ; mais ce ne peut-être que fur fon abondance, dès que fur-tout la durée de la grande chaleur eft aflez longue & aflez continue, pour que les terres calcaires aient le temps de fe charger d’une certaine quantité de phlogiftique qui aug- mente fuffifamment leur affinité avec l'acide nitreux. Mais plus Mmm 458 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. la durée de la chaleur continue d’un climat différera de celle du Bengale, moins aufli la quantité de nitre dépofe fera con- fidérable dans ces lieux plus froids, & la récolte enfin. fera nulle dans tout pays où les chaleurs de l'été, quelque grandes qu'elles puiflent être, font interrompues par des pluies ou des refroidiflemens fréquens , ainfi que dans Paris & la plus grande partie de la France. C'eft ainfi qu'à Montpellier & dans le Bas-Languedoc , où l'hiver n'eft pas aufli froid que le printemps de Paris, où les chaleurs font plus continues & plus vives que dans le refte de la France, on trouve des coteaux calcaires qui font falpétrés. Si la chaleur continue qui règne dans plufieurs parties de la furface de la terre, eft fi favorable à la produétion &2 l'abondance du nxre, elle ne paroït pas moins propre à rendre ce nitre aufli complet qu'il doit l'être pour la compofition de la poudre , & c’eft peut-être le phénomène le plus fingulier & qui mérite le plus d’être remarqué, que la différence qu'on obferve entre le nitre recueilli dans l'Inde, l'Efpagne ou le Bas-Languedoc , & le nitre qu'on trouve en France dans les lieux habités, ainfi que dans les carrières. Le premier eft fem- blable au nitre à bale d’alkali végétal ; mais ie fecond à une bafe terreufe dont il faut le féparer par le moyen de lalkali végétal, pour lé transformer en Salpètre; le premier naït, végète & croit aux rayons du foleil; le fecond fe forme à l'ombre & dans les lieux clos où l'air va le dépofer. Des terres de même efpèce font chargées de le recevoir ; ainfi il n’y a donc que la difiérence d’expoftion , qui foit la caufe de la différence des nitres & de leur qualité. Cette différence in- dique donc démonftrativement que c’eft la chaleur du foleil qui donne au nitre de l’Inde cette bafe alkaline quil doit avoir pour devenir un nitre complet, tandis que cette cha- leur manquant aux terres des lieux clos qui reçoivent l'acide nitreux répandu dans l'air, ces mêmes terres ne peuvent renfermer qu'un nitre à bafe terreufe & non alkaline. C’eft donc la chaleur qui donne au nitre de l'Inde, de l'Efpagne & du Bas-Languedoc cout l'alkali néceflaire , & ceft l'ab- 4 : + MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE, 459 fence de cette chaleur dans les lieux clos, qui rend néceflaire l'addition d’une certaine quantité d’alkali pour former, du nitre qu'on ya recueilli, un nitre également complet. En effer, qu'eft-ce que l’alkali végétal? EN fuivant M. de Buffon lui-même s qu'un produit de l'air & du feu qui s'incorporent dans une fubftance dévorée par le feu ordinaire; & on s'en aflure aifé. ment en confidérant une pierre à chaux. Avant fa calcina- ion, elle ne donne aucun indice d'acide, elle ne life aucune impreflion d’alkali fur la langue qui lui cft appliquée ; mais eftelle pénétrée par la chaleur , elle devient auffi-tot alkaline, : & cette quantité augmente d'autant plus en force ou en quan- tité ou en intenfité , que le feu éft appliqué plus violemment & plus long-temps à cette pierre. Comme l'effet de cette cal- cination bte en ce que les molécules fluides qu'elle con- tient s'échappent, & que l'air ainfi que le feu pur fe fixent & sattachent fortement à la fubftance ; comme cet alkali de la chaux eft reconnu par les Chimiftes pour être de même elpèce que l'alkali végétal, & comme tous les alkalis fixes, tirés du règne végétal, fe reflemblent parfaitement, il eft dé bien démontré que le feu fixe cft le feul principe & même l'eflence de tout alkali végétal. C’eft doncun mélange d'air & de feu fixes, ou d’une quan- tité de phlogiftique, qui manque à l'acide nitreux pour de- venir du Salpétre ; & je dis une certaine quantité de phlo- giftique, parce que; fi à l'acide nitreux on n'ajoutoit qu'un alkali qui ne contient que peu de _phlogiftique , comme l'al- kali minéral, on ne formeroit qu'un nitre foiblement dcton- nant. Au contraire, fi à l'acide nitreux on ajoute du fel de artre, par exemple, il lui donne la qualité de détonner avec une vivacité & une violence étonnante, parce que cet alkali eft de tous les alkalis os le plus vigoureux , comme auf celui qui contient le plus de phlogiffique, puifqu'on a obfervé que la quantité d'air fixe, renfermée dans une mafñle de fel de tartre, éft fi confidérable , qu'elle excède le 8° de fon poids. C’eft doncindubitablement ce feu pur &cert air fixe réunis qui donnent à l'acide nitreux la forme & les qualités de Mmnm i) ; » : 460 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Salpêtre ; ainfi par-tout où le phlogiftique saccumulera juf- qu'à un certain degré, & que l'acide nitreux fe réunira à ce principe dans une bafe convenable, le Salpètre doi, dans tous ces lieux, devenir fenfible , & naître tout complet. Il doit donc paroître tel fur les terres de l’Inde & de l'Efpagne , qui, expofces fans interruption & pendant un long temps aux rayons brülans du foleil, fe chargent de feu & de chaleur. L'air qui eft en contaét avec ces terres, & qui eft aufli extrème- ment échauflé , eft par conféquent dans un haut degré de dilatation , qui eft encore augmenté dans linftant du contaét par la préfence du feu accumulé dans ces terres. C'eft alors que cet air dilaté à l'extrême , & engagé dans les pores ou- verts de la terre, y devient fixe , & sy incorpore en per- dant, pour ainfi dire , toutes fes qualités premières. C’eft cet air fixe réuni au feu fixe, qui eft retenu dans ces terres qui compofent tout le phlogiftique néceflaire à l'acide nitreux pour le rendre aufi détonnant qu'il doit étre. Il n'appartient donc qu'aux terres de l'Inde & de l'Ef- pagne, confequemment à leur pofition avantageufe, de produire un nitre complet, tandis que les terres de France, à l'abri du foleil ou échauffées trop peu long-temps par fes rayons ; ne peuvent acquérir une quantité de phlogiftique fuf- fifante, & ne produifent par conféquent qu'un nitre très-incom- pler. Les pluies ne troublent pas dans l'Inde la chaleur continue que les terres éprouvent pendant fix mois; en Franceau contraire, outre l’expofition moins favorable de ce Royaume aux rayons du foleil , le temps des pluies eft très-variable. On compte des jours pluvieux dans tous les mois de l’année , en plus ou moins grand nombre, & l'eau de pluie détruit cout l’eflec de la chaleur , c'eft-à-dire, la qualité alkaline qu’elle peut faire naître dans les terres qui en font fufcepribles. Les jours chauds de l'été font féparés par des jours pluvieux ou fombres, & les jours d'hiver, pendant lefquels le foleil échauffe la terre de fes rayons, font bien moins nombreux que les jours de pluie, de neige & de frimas. D'ailleurs des nuits longues fuccèdent à des jours trèscourts, & par-à accélèrent & entretiennent le MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÈTRE. 461 refroidiflement , l'engourdiflement général de la Nature. Il arrive fans doute que quelques terres calcaires bien expofées, elles que celles qui formentdes coteaux coupés pie , échappent à la dévaftation, & confegent une grande partie du phlogif- tique quelles ont reçu; mais il sen diflipe beaucoup par l'intempérie des faifons, & ce qui refte eft en fi petite quan- tité, que le nitre qu'on y trouve ne paroït plus être qu'un nitre très-incomplet ou à bafe terreufe. Cependant pourroit- on aflurer que dans nos carrières ou fur nos côteaux coupés à pic & bien expolés, il ne fe trouve pas naturellement un nitre abfolument complet comme on le recueille dans le Bas-Languedoc? L'oblervation n'en a pas été tentée , & cere analyfe feroic cependant fort intéreflante. Jufqu'ici le nitre in- complet a fans doute été mélé avec le vrai Salpêtre , & l’un & l'autre font reftés confondus dans les eaux nitreufes qui ré- fulent du leflivage des terres. Ces eaux ont été alkalifées, & tout le nitre a bientôt paru complet, fans qu'on ait diftingué fi telle terre, fourniflant même quantité de nitre qu'une autre, exigeoit comme celle-ci une même quantité d’alkali. C’eft ce- pendant une conjeéture bien vraifemblable, que celle de croire les terres des caves, par exemple , chargées d’un nitre plus éloigné de la perfe&ion, que le nitre qu'on extrait des débris d'un banc calcaire bien expof. Au refte, ce n’eft que par des expériences qu’on peut fe procurer tous les éclairciflemens néceflaires. Le nitre de la France doit donc ctre néceflairement un nitre incomplet, tandis que celui de l'Inde, de l'Efpagne & de toutes les terres calcaires placées convenablement , doit être un Salpêtre parfait. On voit auffi, en réfumant ce qui a cté dic précédemment, que ni les matières animales ni les végétales ne contribuent à la formation du nitre; que la Na- ture femble employer d'autres moyens plus fimples pour le compofer; qu'elle a chargé l'air d’être le véhicule de l'acide nitreux ; qu'elle a choifi les terres calcaires pour le recevoir, & le phlogiftique pour le transformer en Salpétre. Ce font ces principes qui, démontrés avec toute l'étendue 462 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: & l'évidence que l'état des chofes peut permettre, doivent donner maintenant les réfultats importans que demandent l'Académie & le Gouvernement : car c'eft en les fuivanc qu'il devient facile de prefcrire quell oit être la forme d'une nitrière artificielle, & quels {oins on doit prendre pour pro- duire auff promptement qu ‘économiquement la plus grande abondance de nitre dans un lieu quelconque, dont là pofi- tion ainf que les circonftances locales font bien déterminées. La France eft intéreflce à trouver dans fon fein tout le Salpètre fuffifant pour fes beloins, & le Roi, plein de bonté, dcfire de fonder cet approvifionnement fur des moyens qui lui permettent d’affranchir fes peuples de la fervitude de la fouille. Les confidérations précédentes fur l'origine du Sal- pêtre promettent fans doute des réfultats qui doivent fatif- faire à ces vües d’intérét & de bienfaifance 3 car, comme on voit, elles femblent dejà indiquer toutes les reffources qu'on peut fe ménager pour recueillir une très-grande quantité de Salpètre fans être obligé d’avoir recours à la fouille, Si on jette un coup- d'œil fur toutes les provinces de la France, & fi on cherche celles qui font placces le plus favo- rablement pour la produétion du nitre, on voit que le Bas- Languedoc doit fixer l'attention du Gouvernement à bien des égards. C’eft dans cette province que la Nature formeun nitre aufli complet que celui qu'on recueille dans FInde; c’eft cette province qui, placée dans le fond du golfe de Lion, eft dans une expolition prefque aufñli favorable que celle du Ben- gale & des côtes méridionales d'Efpagne. Si on parcourt les anciens états du produit en Salpètre des diverles pro- vinces du Royaume , on y voit que Touloufe & Montpel- her fournifloient feules annuellement au delà de quatre cent milliers de livres » tandis que les autres provinces fe tenoient toujours à une tres-grande diftance d’une récolte aufli abon- dante. MM, de l'Académie de Montpellier ont fait voir d’ail- leurs , que les cendres de tamaris employées en petite quan- ité parles Salpécriers du Bas-Languedoc, ne contiennent qu'un fel de Glauber & aucun atome d’alkali. Aïnfi il femble que MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 463 dans cette province la Nature fafle tous les frais de la com- pofition du Salpêtre. Dans les autres provinces plus fepten- trionales , non feulement il faut recueillir les terres nitreufes à grands frais , mais encore à ces premières dépenfes il faut ajouter celles de l'achat d'une quantité énorme de cendre ou de potañle dont le prix eft més-élevé. Ce feroit donc une économie du tiers des dépenfes, fi le Bas-Languedoc pouvoit fournir tout le Salpètre néceflaire ; mais cette pro- vince n'eft pas aflez crendue, & quand même on Joindroit à fes produits ceux du Rouflilion & de la Provence, qui font des provinces voifines qu'on peut lui affimiler, on ne re- cucilleroit peut-étre pas encore tout le Salpêtre fuffifant aux befoins du Gouvernement. Ces dernières provinces que je viens de nommer ne font pas aufli heurcufement expolces que le Bas - Languedoc ; mais l'été y eft fuperbe, & les jours chauds n'y font pas interrompus par des jours plu- vieux, comme dans le refle de la France ; ainfi je ne dote pas qu'avec des lumières & des foins, on ne pût recueillr dans ces provinces, & à moins de frais, plus de Salpétre que dans toute autre province feptentrionale. Si on confulte la Table des Obfervations météorologiques faites dans les différentes villes de France en 1777, on voit que les jours de pluie en Provence & en Languedoc font deux fois moins nombreux que fous le climat de Paris; ce qui donne à ces provinces deux fois plus d'avantages pour la facilité de la produétion du Salpétre. Si on parcourt aufli les Ob- fervations météorologiques raflemblées dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, on voit une très -grande diffé- rence bien établie entre la température de Montpellier , de la Provence , du Rouflillon , & celle des autres provinces du Royaume ; fe chaleur y eft Den plus continue, & les degrés d'une chaleur vive s'accumulent & fe fixent dans les terres de ces provinces cchaufles pendant un très-long temps. Si entre ces terres il y en a de calcaires, & que d’ailleurs elles foient expofces au midi, elles doivent , fuivant les principes établis précédemment, fe charger d’un nitre abondant. Il fe- 464 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. roit donc eflentiel que le Gouvernement fit faire dans ces provinces des recherches de tous les banes & terres calcaires que la Nature a déjà falpétrés, & ceux ou celles que l'Art pourroit préparer à recevoir l’acide nitreux répandu dans l'air. Toutes les reflources de l'Art confifteroient, foit à les arranger en couches & à leur donner une forme qui leur fit préfenter à Pair la plus grande furface poflible fousla même folidié , foit à les divifer & à les remuer, afin que le falpètre fe forme plus promptement & s'etende plus profondément , {oir enfin à les mettre à l'abri de la pluie, lorfqu’elles auroient reçu du foleil autant de degrés de chaleur que le climat pourroit le per- mettre; peut-être en certains endroits pourroit-on, comme en Efpagne, recueillir du Salpétre dans les cerres des champs, {oit en confultant la nature des terres, foit en choififlant les temps convenables ou pour les labours ou pour la récolte. C'eft un eflai qu'on pourroit faire trèsutlement dans des terreins qui ne feroient propres à aucune autre production. Enfin la dernière reflource feroit d'établir dans ces provinces , ainfi que dans toutes les autres provinces du Royaume, des hangars, fous lefquels on raflembleroit des terres propres à attirer l'acide nitreux. Le contour du golfe de Lion, à caufe de fon expofition favorabie , devroit être garni de ni- trières nombreufes, qui donneroient à la France la récolte la plus abondante & la moins chère. Dans les autres provinces, le nombre de ces nitrières feroït en raïfon de leur pofi- tion & de leur temperature. Voici maintenant ce que je penfe fur la manière de for- mer des nitrières artificielles , & fur les foins qu'on doit prendre des terres raflemblées. On a vu précédemment, que l'acide nitreux s’accumule dans les terres par deux caufes particu- lières & différentes. Ilfaut donc, dans une nitrière quelconque, donner à ces caufes toute l'énergie que la pofition des lieux peut permettre. Des degrés d’une chaleur vive étant accu- mulés dans des terres calcaires, leur communiquent une attrac- tion plus puiflante fur l'acide nitreux , & la fraicheur des lieux clos fait aufli dépofer à un air échauffé qu'on y introduit, une partie MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 465 partie plus ou moins grande de l'acide nitreux qu'il tient en diflolution. Ainfi cette double caufe de la formation du nitre dans les terres calcaires, indique un double moyen pour at- tirer le nitre dans les lieux où l’on fe propofe de le recueillir. C'eft par les mêmes lumières qu'on eft conduit a diftinguer quel eft celui des moyens qui convient à tel lieu parti- culier, & quels font les lieux où ces deux moyens peu- vent être employés avec fuccès. Si on confulte les Mémoires de M. Sauvages, on voit que les environs de Montpellier & d'Alais préfentent des bancs, des terres calcaires, qui par conféquent peuvent fervir de bafc dans des nitrières quelconques. Je ne doute pas qu'il ne s'en trouve aufhi beaucoup fur le refte du contour du golfe de Lion; ainfi dans ceite province on eft prefque afluré d’y wouver la matière première qui eft fi eflentielle à la forma- tion du Salpètre. Je ne peux pas afligner de même des fources où l'on expole de quelle nature font les terres du Roufillon & de la Provence. Ces provinces n'ont pas encore été exa- minées fous le point de vue qui les rend intéreflantes pour la rccolte du Salpétre. Dans le cas où ces provinces feroient fournies de terres calcaires , alors le Roi , qui n’a d’autre in- tention que de foulager le peuple du fardeau & du défa- grément de la fouille, pourroit fans doute abolir cet ufage dans ces provinces , en protégeant d'ailleurs & en encoura- geant des ctabliflemens de nitrières où l’on recueilleroit bientôt du Salpètre auffi abondamment que par le fecours de la fouille. Ces recherches incommodes poutroient aufli être abolies dans toutes les provinces où les terres calcaires font en abon- dance, telles que la Touraine, la Brie, la Champagne, &c. Alors fi dans les autres provinces moins favorifées & dont les terres feroient ou argileufes ou vitriñables , le Gouvernc- ment vouloit aufli établir des nitrières, 1l faudroit laifler fub- {ifter dans ces provinces le droit de chercher, au moins une fois, dans les habitations des hommes & des animaux, toutes les terres propres au nitre, & quon ne pourroit ramafler ailleurs, ce recherche une fois faite , fourniroit pour Nnn 466 MÉMOIRES SUR LA FOKMATION DU SALPÊTRE: coùjours la bafe fondamentale di produit & du fuccès des ni: trières Ctablies. Enfin, dans chaque provinée on proportion- néroit lé nombre des nitrières à la facilité de les former, & à la grandeur des produits qu'elles pourroient donner ; aïnfi, par ce moyen, les habitans de la France entière pourroient être préfque tous foulagés dé cés droits importuns que le Gouvernement cherche à ancantit. La conftruétion de ces nitrières feroit auf fimple que IS principes établis précédemment fur l'origine & fur la for- mation du nitre. Nous avons vu que les matières animalés ne fourniflént aucun nitre par ellesmémes, & que, mélées dans des terres, elles fervent feulement, par leur décompofi- tion , à attirer le nitre de l'air qui fe fixe alots dans les terres calcaires : afnft On peut bannir de toute niière les matières amimales, parce quil éft d'autres moyéns d'acier puiflam- ment l’hüurmidité de l'air, fans avoir recours à cetre reflource défagréable. Lés matières végétales bien choïfies peuvent donner un nitre complet par leur décompofition; ainf le mélange dé ces matières avec les terres calcaires ne peut que devenir très-uüilé à Ix multiplication du Salpétre. Je penfe donc que dés couches de rérre deviendroïent très-proptes à être fal- êtrées, fi elles étoient formées de terres calcaires très-porèules, ou de décombtes en pouflière, parmi lefquels on méleroit quelques végétaux choïfis qui y répandroient leur nitré, & qui angmentéroïent encore les intérftices de cesterres. Ces couches, dans les provinéés avantageufement fituées comme le Bas-Lan- guedoc ; produiroient peut-être du nitre comme les térres d’Ef pagne , fi On avoir le foin de les expofer à toute l’ardeur du foleil dans des hangars ouverts par le fommet. La conftruc- ton de ces hangars feroit telle, que coute la chaleur du foleil pourroit Saccumulér ; fe réflcthir & fe concéntiér dans les cérres préparées, qui alors, en vertu du phlogiftiqué acquis , attireroient puiflamment le nitre de Par & fe chatgeroient de Salpêtre. Il faudroit feulement donner beaucoup de futfice à ées tErres , leur faire acquétir de: très-vrands degrés de éha- IGir diréttemént où par réverbéraron ; le temit à l’abii de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 467 bien propre à raflembler dans les terres lacide nitreux fe- _pandu dans l'air fous des hangars; les terres feroient partagées €n couches pyramidales, féparées les unes des autres, & qui auroient la plus grande furface pofhble. Ces hangars feroient parfaitement & complètement fermés. Par ce moyen & des avis fages conyenables, on:feroit régner fur les terres qui y croient renfermées , une fraîcheur, contante, qui conferve- roit toujours en. été à l'air intérieur, une température bien in férieure à celle de l'air extérieur. Les terres feroïent arran- _gées fous les hangars, comme celles de la nitrière de Malte, & feroient, comme elles, faupoudrces de chaux réduite en pouflière, à caufe de fon action puiflante fur l'humidité. de l'air. Ces couches feroient arrofées de temps à autre avec une cau compoféc, &-certe eau feroit la'leflive, d’un mé- lange qu'on formeroit en mettant enfemble tous les débris _poflibles. de nitrières végétales , des lies de vin, des écumes de chaudières, des eaux de buanderie, & une partie des fels qui auroient été féparés du Salpètre dans fa fabrication. .C'eft en arrofant les terres de cette eau, qu'on entretiendroit fous Je hangar & fur la furface des terres une humidité où une fraicheur humide, qui produiroit promptement la condenfa- tion, de l'air extérieur plus chaud qui s'y introduiroit. .On voit bien aufli que fous ce hangar, où-les terres fonc ainfi préparées, où la fraîcheur règne conftamment, il fauc admettre, mais avec des précautions convenables , l'air ex- térieur, dont la chaleur doit être un peu plus grande que celle de, fair intérieur auquel on ménage une iflue. Cét air chaud de, dehors , entrant fous le hangar, perd aufli-tôt une païgie de fa:chaleur ; il £e refroidit , il fe condenfe, & dépofe auffi- tôt fes principes fur des terres qui les attirent, & qui font aufli propres à les recevoir qua les retenir. Cet air qui Nhnn ji 468 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. seft introduit, ayant bientôt acquis la température du han- gar, doit fortir de ce lieu, comme l'air qu'il remplace, & une autre mañle d'air extérieur qui lui fuccède, éprouve auf les mêmes changemens, & répand également de nouvelles molécules. C'eft par cette fucceflion & cette multiplication d'effets, que le nitre s’accumule dans des terres raflemblées fous. des hangars. Ainfi, pour diriger cette opération avec sû- reté, il faudroit placer deux thermomètres, l’un en dedans du hangar, & l’autre en dehors. Leur différence dans l'éléva- tion du mercure, indiqueroit les temps où l'on pourroit avec fuccès établir du dehors au dedans une circulation d’air aufli néceffaire qu'utile. Voici maintenant les moyens d'établir certe circulation de l'air à volonté & dans les temps convenables: foic un hangar quelconque, fous lequelon ait arrange des terres propres à atuirer les principes de l'air, & dans lequel la tem- pérature foit plus froide que celle de Fair extérieur. Si au faire de ce hangar on forme une ouverture moyenne, telle qu'une lucarne ; fi les parois du hangar font parfaitement fermés de tous côtés, & fi, à lextrémite de ce hangar ainfi qu'au niveau du fol, on pratique une autre ouver- ture en forme de foupirail : alors ces deux iflues étant ou- vertes, l'air frais du hangar eft forcé de s'échapper par les foupiraux, tandis que l'air extérieur & chaud s'introduit à fa place fous le hangar, fe répand dans l'intérieur , & la fraîcheur qui y règne lui fait bientôt éprouver une condenfation qui loblige à dépofer les molécules quil ne peut plus tenir en diflolution. On peut varier de mille façons le rapport de ces ouvertures, foitdansleur pofition , foit dans leur forme & leurs dimenfions, Ilfaut feulement obferver qu’elles foient très-élevées lune au deflus de l’autre, & que la circulation de l'air foit douce & légère, afin que l'air extérieur introduit dans le hangar ait le temps d'éprouver tous les changemens que doivent apporter à fa température , & la fraicheur du lieu, & les fels qui y font re- pandus, & que par conféquent il foit dépouillé aufli com- plètement qu'il peut l’étre de l'acide qu'il à diflous. Cer acide introduit, après s'être €ondenfé, gagne les heux MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 469 bas du hangar, & s'échappe à fon tour par les foupiraux. Il eft remplacé par un air nouveau qui vient dépoler à fon tour les molécules dont il eft charge. Il ne faut pas croire qu'il faille une très-grande différence entre la température de l'air intérieur & de l'air extérieur, pour qu'il s'établifle une circulation d'air continue & rapide. J'en ai fait l'expé- rience par le moyen de deux chambres qui fe communi- quent, & dont l’une étoit échauffée de façon que le mer- cure du thermomètre sy tenoit à 10°, tandis que dans la chambre froide il ne selevoit qu'à 7°: En ouvrant la porte de communication des deux appartemens, j'ai expofé deux boupies allumées, l’une au haut de la porte, l'autre au niveau du parquet, & malgré le peu de différence de température des deux chambres, les courans d'air fupérieur & inférieur m'ont paru très-rapides. Les flammes des bougies prenoïient une fituation prefque horizontale ; tant elles étoient chafées vivement, lune par l'air qui sintroduifoit dans l’ap- partement chaud , & l'autre par l'air chaud qui s'en échap- poit. Lorfque dans un hangar l'air a circule un certain temps, & qu'après s'être renouvelé plufeurs fois, fa température intérieure eft moins froide, les terres doiventfe fécher à leur furface , & c’eft alors qu'il faut rappeler la fraîcheur perdue , foit par des arrofages, foit aufli en interrompant toute com- munication entre lair intérieur & l'air extérieur. Enfuite on rétablita de nouveau cette circulation, lorfque la température de l'air intérieur différera aflez de celle de l'air extérieur. J'ai fait une épreuve aflez fimple de l'effet de cette circu- lation de l'air. J'ai mis de la chaux & quelques terres cal- caires dans un couvoir placé dans un lieu bas, & où jentre- tenois une fraîcheur & une légère humidité conftantes. Deux portes terminoient ce couvoir , d'ailleurs tres - fombre; lune toujours fermée, ne permettoit à l'air qu'une feule iflüe par une ouverture faire au bas & près du ol du couvoir ; l'autre porte oppofce étroit ouverte, & l'air extérieur qui répon- doit à celle-ci, étoit très-échaufle par le foleil, tandis que 470 MÉMOIRES SUR LA:FORMATION DU SALPÈTRE. l'air intérieur ducouroir étoit aflez-frais. Cet ir chaud sin- troduifoit par la porte ouverte ; il fe condenfoit en entrant, & la terre calcaire ne tardoït ;pas quinze jours à :fe couvrir d'une ,eflorefcence :nitreufe très-abondante. Je détuifois ge premier produit, -& quinze jours-après la récolreétoit la méme. Si on confulte l'inftruétion de Suède, où-lon donne les règles obfervées avec fuccès par les gens:de l'Art, on-y voit quil eft prefcrit .de fermer les luçarnes des hangars pendant cout l'hiver ,& les temps freids des autres fafons, & au contraire, de les tenir onvertes pendanties temps chauds. Ces préceptes s'accordent;parfaitement avec mes principes , «parce qu'ils fuppofent que let &:les jours chauds font favorables à la formation du Salpêire, em donnant dans ces temps dc- fignés, ‘un/libre accès à [l'air extérieur; c’eft un air chaud -qu'on admet, qui doit fe condenfer dans es ‘hangars dont l'air frais s'échappe par le bas des portes, :&-routes les -pe- tites ouvertures qui fe trouvent faites au -niveau du fol. Si Jes lucarnes doivent être fermées pendant les remps-froïds , c'eft que l'air extérieur, étant plus froid que l'interieur, -ne ,peut rien apporter dans le :hangar soù con :Fintroduiroit; au contraire il sy dilateroit néceflurement, & dans ce change- «ment il deviendroit capable: d'attirer lhumidire du heu, amfi que les principes féconds qui :y feroient répandus ‘fur les -couches.,: & qui ne)feroïent:pas encore bien unis -avec Jes “terres Gaicaires, Ainli on voit que pendant l'hiver :& les Jours froids , des terres des hangars, des caves , des éouxies & de tourJieu clos ne reçoivent aucun dépôt d'acide: nireux. C'eft -en été ,-c'eft, dans les beaux jours, que-la Nature répañd ce el avecabondance fur des.corps, qui d'ailleurs font, propres -à: l'attirer :& à contratter avec lui. une-union intime. La fraîcheur qui devient néceflure au centre: d'un hangar, exige donc qu'on emploie rous les: moyens. qui -peuvent la produire & la conferver.:Le fel commun répandu fur les couches, me paroit, ainfi que la chaux, trés-propre à :cet objer. D'ailleurs ce font deux :puiflans aimans:-pour attirer facide :de l'air. Je voudrois d’ailleurs augmenter :ençorc la MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 471 fécondité des terres, en formant, dans l'intérieur des couches pyramidales , des canaux qui, partant des fommets de la pyramide & des angles de fa bafe, aboutiroient tous au centre de cette pyramide. L'air qui entreroit fous le hangar, parcourroit auffi l'intérieur des pyramides, dont les terres fe- roient, par ce moyen, plus promptement & plus abondam- ment falpétrées. Je croiroïis aufli très-avantageux d'établir autour & en de- dans du hangar un petit canal qui auroit peu de profondeur & plus de largeur, dans lequel on retiendroit les eaux dont les couchés dévroient être arrofces. Le canal, toujours plein, & renfermant des matières propres à faire naître la fraîcheur & à l'entrétenit, feroit aufh utile que commode. Il empé- cheroït que l'air du hangar ne fe mit trop promptement à là cempérature de Fair chaud de dehors, & les eaux d’ar- rofagé feroiènt fous la main des Ouvriers. Si la différence de température de l'air extérieur & de l'intérieur devenoit trop petite, alors les émanations des eaux de ce canal ra- fraichiroient bientôt Pair imtérieur, donc on fupprimeroit la communication avec l'air extérieur. Cet arrangement eft bien conforme aux vües de M. Pietch, qui aflure que le nitre na- turel fe forme promptement dans une terre calcaire expofée à des exhalaïfons urineufes. Il affure aufli que le nitre fe trouve en plus grande quantité dans les lieux les moins expolés au foleil, & cela ne peut être autrement, fur-tout lorfque l'air, échaufle par les rayons du foleil, peut sintroduire dans ces lieux où il règne néceflairement un peu de fraîcheur. Jai dit que pout entretenir une circulation facile de Pair du dehors au dedans d’un hangar, il fufffoit de pratiquer une ouverture au fommet, & des foupiraux au niveau du fol; jai afluré que l'air froïd s'échappe par les foupiraux, & que l'air chaud sintroduit par l'ouverture élevée, & toutes ces affértions font fondées fur les principes connus de l'équilibre & du mouvement d'un fluide pefant. Mais ce n'eft pas ici le lieu de préfenter ces principes, je dois feulement les citer, indiquer leurs confequences, & démontrer l'utilité de leur 4712 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. application ; ainfi je ne donnerai pas une plus grande étendue, ni à leur difcufion, ni à leur développement. . On voit donc maintenant que dans toutes les provinces de France, en formant des hangars & en rempliflant toutes les indications que j'ai préfentces, on peut produire une très- grande quantite de Salpétre; on voit aufli par les réflexions précédentes, que les provinces du Nord doivent moins efpérer de fuccès que celles du Midi , & que par confequent il faut confulter les Tables métcorologiques de chaque pays, ani que la nature du terrcin, pour juger de ce qu'on peut attendre de l'établiffement d'une nitrière. Celles où la chaleur eft tres- grande , & où fa durce eft très-longue, font fans doute les plus propres à l'établiflement des nitrières, & à remplir les vûes du Gouvernement. Celles où les hivers font longs, où les pluies fonc fréquentes, où le nombre des beaux jours eft inférieur à celui des jours fombres , pluvieux ou froids, ne peuvent rendre que de très-foibles récoltes en Salpêtre. Dés que l'air qu'on y refpire a rarement une grande chaleur, il eft aufli rarement chargé de ces dépôts précieux qui fé- condent les terres qui les reçoivent; car l'air le plus chaud eft celui qui eft le plus chargé d’eau ou d'acide, & le plus froid ne peut tenir en diflolurion qu'une très-petite quantité de ces principes. Les provinces méridionales , telles que le Bas-Languedoc, la Provence, le Rouflillon , où pendant l'été il faic une très-grande chaleur , & ou cette chaleur, prefque conftante, n’eft interrompue que par des pluies rares, fe pre- fentent au Gouvernement fous le jour le plus avantageux. Enfin tout ce qui a été dit jufquàa préfenc , routes les réflexions que J'ai préfentées, & toutes les explications faciles & heureufes que J'ai faites des principes énoncés précédem- ment, & ctablis fur les comparaïfons des nitrières natu- relles , fufifent fans doute pour diriger le Gouvernement dans fes difpofitions relatives à la produétion du Salpètre. Dans tout cet expofé, on doit trouver non feulement une fimplicicé fingulière dans le travail & la compofition des couches propres au Salpètre, mais aufli des moyens aufli faciles MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 473 faciles que peu difpendieux, pour accélérer la formation de ce fel. On doit aufli préfumer qu'en fe conformant exadtement aux préceptes que nous avons donnés avec tant de détails, le Gouvernement peut fe promettre, comme il le défire, une produétion & une récolte de Salpêtre beaucoup plus abon- dante qu'il n'a pu encore l'obtenir. Cette abondance qu'il doit attendre, & ces moyens propofés pour la faire naître, n'étant plus fondés fur les reflources d’une fouille onéreufe, le Gou- vernement peut fuivre avec confiance fes intentions bienfai- fantes, & anéantir tout droit de fouille ; mais aufli, plus il montrera d'intérêt pour la tranquillité du peuple par cette abolition , plus aufli il doit étendre les droits des Salpétriers fur les décombres, les démolitions, & fur tous les débris de murs ou de maïfons. Si ces matières font falpétrées , c’eft un fervice qu'il rend au Particulier, en le contraignant de ne pas les employer, & d’en laïfler la jouiflance aux Salpétriers; fi elles ne font pas falpétrées , les Particuliers n'éprouvent qu'une petite privation, & alors le Gouvernement saflure des reflources très-grandes en les adjugeant aux Salpétriers. Il feroit fuperfu d'ajouter ici, qu'en fuivant les principes établis, la récolte du Salpétre doit être aufli prompte qu'elle peut l'être ; en effet, c’eft la Nature feule qui fe charge de le répandre, & nous avons indiqué les moyens les plus sûrs pour attirer, pour recueillir, & pour conferver fes dons. La jouiflance fera donc d'autant plus accélérée (toutes chofes égales d’ailleurs), que l'intelligence & l'attention de lAr- üfte feront plus grandes ; deux ou plufieurs thermomètres lui indiqueront les temps du repos & du travail; ainfi, avec cette règle infaillible & l'entière exécution des autres préceptes, il. peut compter fur le fruit de fes foins & fur une grande produétion de Salpètre, autant cependant que le local & fa pofition pourront le permettre. Je croirois donc, en bornant ici cette diflertation , avoir aflez fait pour répondre à la de- mande du Gouvernement & de l'Académie ; mais je dois compléter mon ouvrage, en donnant quelques règles plus pré- cifes que celles qu'on obferve dans le leflivage des verres. Ooo 474 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Lorfqu'on veut recueillir le Salpétre répandu dans des terres quelconques, il faut d'abord s’aflürer de la quantité de fels dont ces terres font chargées : on en prend donc une por- tion , on laleflive avec une quantité d'eau b ; on filtre la lefive, &, à l'aide de l'aréomètre, on voit quel eft le deyre d de ces eaux. Si on nomme + la fomme des fels folubles qui font dans la portion de terre leflivée, en repréfentant le nombre 100 par a, on aura À — —_— ; c'eft-là l'expreffion de la fomme des fels contenus dans l'échantillon de la mafle de terre dont on veut extraire le Salpêtre. Si dans un atelier on diftribue, comme à l'ordinaire , les terres dans tfois fuites de cuviers, dont la capacité eft con- nue ; fi on veut connoître la quantité d de fels folubles con- tenus dans les terres non leflivces qui rempliflent les .cuviers d'une feule fuite, en nommant 1 cette mafle de: terre , on ba > aura d —— IE On faura donc par un feul eflai & par la &= valeur des termes de cette formule, quelle eft la quantité de fels folubles renfermés’ dans les terres qui rempliffent une fuice entière de cuviers. Lorfqu'on veut procéder au lefivage de ces terres connues, il eft encore une attention qu'on doit faire, & qu'on néglige tous les jours; c'eft de favoir le degré de falure que doivent avoir les différentes eaux qu'on cher- che à obtenir par le leflivage. En fuivant la coutume or- dinaire des Salpécriers , on leffive les mêmes terres trois fois avec des eaux difiérentes & d’un degré différent , & on di- rige ce travail de facon que les dernières eaux foient d’une force & d’une concentration qui garantifle que leur évapo— ration doit fe faire le moins difpendieufement poflible. Ces dernières eaux devroient donc, fuivant l'opinion commune, être à 15° de.l’aréomètre ;. parce que c’eft dans cer état que le nitre terreux s'alkalife facilement. Ainf, dans le travail d'un atelier, il faudroir s'arranger de façon que les eaux de cuite fuflent à 15°; mais il eft peu d'ateliers où ces eaux loient à ce degré dcfigné, parce qu'on ne fait pas aflez d’at- tention, ou on ignoré le degré relatif que doivent avoir les eaux inférieures nommées fortes, petites, & de lavage. Ces 4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 475$ trois efpèces d'eaux doivent cependant avoir entre elles des rapports particuliers dont on ne peut s'écarter ; & c’eft à dé- terminer ces rappoits, que je m'attache ici. Dans tout atelier en aétivité il y a trois fuites de cuviers. La cerre de J'une de ces fuites a été leffivée deux fois; la terre de la feconde fuite a été leflivée une fois, & celle de la troifième fuite eft une terre neuve & qui n'a été leflivée par aucune eau quelconque. Les eaux de lavage fortent des cuviers dont on leffive la terre pour la troïfième fois avec de leau pure. Les petites eaux font celles qui fortent des cuviers dont la terre eft leflivée pour la feconde fois & par des eaux de lavage. Les eaux fortes font celles qu'on retire des cuviers remplis d'une terre neuve lavée par les petites eaux , & enfin lesfeaux de cuite font celles qui fortent des terres neuves leflivées par les eaux fortes. Ce font ces eaux de cuite qui doivent être à un degré c déterminé, & qui cft ordinairement de 15°. Si on nomme À la quantité d’eau que la terre d’une fuite de cuviers doit retenir néceflairement lorfqu'on la leflive pour la première fois, quantité qui paroïît être, fuivanc plufieurs expériences, d’un poids égal à celui des trois dixièmes de la terre leffivée ; fi on nomme p la fomme des fels contenus dans les eaux fortes, & E— A la vraie quantité d'eau pure contenue dans ces eaux; on aura ad—c{)+E—A) ST C—a4 dans les eaux de cuite fera donc E— 2 À. SiQ repréfente c —a, maintenant la fomme des fels contenues dans les petites eaux, Ep on aura Q =. — d. Si enfin on nomme 9 la fomme : la fomme des eaux pures contenues des fels des eaux de lavage g — Fe toutes mutuellement, & il faut sy conformer lorfqu'on faic dans un atelier un travail fuivi, régulier & dirigé vers un but déterminé. Si on trouvoit plus commode de fe régler par Farcomètre plutôt que par la quantité des fels, on le pourroit encore, en cherchant quel doit étre le degré auquel certaines eaux doivent foutenir l’arcomètre, lorfquelles font chargées Ooo ij , ces formules s'exigent 476 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. d'une quantité donnée de fels folubles. Soit 8 cette quantité de fels, B la mafñle d’eau qui les tient en diflolution , alors D étant le degré auquel elles doivent foutenir l'aréomètre , on aura D — IQUue Cet, air fe trouve tenx en diflolution autant Four qu'il peut en abfor- ber, à raifon de fa chaleur, tant à caufe de l'humidité qui fe diflipe, qu'a caufe du voifinage de la mer; l'évaporation de l’eau dont les terres avoient été imbibces, continuant tou- jours, & le refroidiflement de la furface de’ ces terres ne ceflant d’avoir lieu & d'agir, l'acide nitreux ne cefle auf de s'accumuler dans leur {ein par l'effet des condenfations de ces mafles d’air qui fe fuccèdent, & & qui dé pofent fans interruption cet acide précieux. Lorfque cette c\ aporation a éré aflez confidérable pour que l'humidité des terres ait diminué très-fenfiblement , alors l'acide nitreux qui seft uni à l’alkali de ces mêmes a nc pouvant plus être renu én diflolution Par les par- ücules d'eau qui n ont pas été évaporces, paroït néceflairc- 488 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ment à la furface fous la forme du Salpétre-bien criftallife ; & il n’y a que fon abondance qui puifle le faire végérer au milieu de la vale huntide produite par les deébordemens du Gange. Cette explication, auffi plaufñble qu'elle peur létre, ne permet pas de douter que les caufe$ déjà indiquées ne foient celles qui produifent aufli du Salpètre dans les autres terres qui font connues pour s'en charger périodiquement ; car on peut encore démontfér avec vraifemblance, que le nitre com- plet, ou le. Salpèrre extrait des terres d'Efpagne , ne dépend que de caufes abfolument femblables. Au mois d'Août on leflive les terres des champs, on en extrait le Salpêtre, & on étend enfuite ces mêmes terres hu- mides fur les mêmes efpaces qu'elles recouvroient auparavant; alors le foleil agiflant fur ces terres, fait évaporer leur humi- dité , & conféquemment à cette évaporation, leur furface eft maintenue conftamment plus froide que l'air envitonnant, qui, dans ces lieux & dans cette faifon, eft toujours d'une chaleur marquée par le 25 ou 26° du thermomètre. Les condenfa- tions fucceflives de l'air font donc précipiter fans interrup- tion fur ces terres une grande quantité d'acide nitreux ; qui, dans le premier moment, ne s’unit qu'à une terre calcaire; mais bientôt le defsèchement total de ces terres fuccedant à leur humidité , & la chaleur du foleil étant encote d’une très- grande aétivité fur ces mêmes terres, le foleil, par l'ardeur de fes rayons, rend ces terres auñi alkalines qu'elles doi- vent l'être pour que le nitre terreux, déjà formé , fe change en nitre abfolument complet. Si ces terres font labources en hiver & au printemps, Ceft pour faire difliper cette humi- dité intérieure qui doit leur refter, & faire ainfi dépoler de nouvel acide par l'air environnant. Les chaleurs des mois de Mars, Avril, Mai, Juin, Juillet & Août, achèvent de don- ner à ce nitre accumulé la bafe fixe qu'il doit avoir pour être transformé en Salpêtre, tel que celui qu'on reure chaque année de ces mêmes terres. L'acide nitreux & l'alkali végétal doivent donc toujours s'engendrer MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 489 sengendrer dans ces terres calcaires, qui, par des circonf- tânces particulières , peuvent alcernativement étre échauffées vivement, & devenir plus froides que l'air environnant, par l'éva- poration de l'humiditc qu’elles perdent & acquièrent fucceflive- ment, ou par le voifinage de ces matières reconnues pour être très-propres à reproduire le refroidifiement des fluides auxquels elles font mélées. Ces circonftances particulières font fur-tout d'être expofces au midi, & d’être en même temps placées fur les bords ou des étangs, ou des lacs, ou des rivières, ou de ja mer. Les murs qui bordent les rues de nos villes, font fouvent dans cette poliion avantageufe, & ils prouvent par l'état où ils font réduits, les effets dangereux, & de cette hu- midité qui s'évapore après les avoir pénétrés , & du voifinage de plufieurs matières falines propres à produire de très-grands degrés de froid. Toutes les immondices, les lavages des cui- fines & du linge, les débris d'animaux & de végétaux font jetés d’abord au milieu de ces rues, qui font les égouts des mailons, & ces matières ne font enluite recueillies qu'après quelque féjour, pour étre tranfportées loin des habitations quelles pouvoient infeéter. Ces matières courantes ou amon- celces re font jamais enlevées fi promptement que leur dé- compoftion ne foit déjà commencée, & on sen apperçoit fouvent par l'alkali volatil qui fe développe & fe fax fentir dans leur voifinage. Comme elles font répandues au milieu des rues, & même ordinairement entañlées au pied des murs des maifons, les exhalaïfons conftantes qui s'en élèvent, sé- tendent & s'attachent à tout ce qui les environne; elles fe communiquent fur-tout aux parties bafles des faces extérieures de ces murs, qui les abforbent d'autant plus évidemment, que leurs matériaux font des matières calcanes. Cette abforption eft d'autant moins troublée ou interrompue, que l'air dans nos rues n’a pas une circulation bien libre. Si ces murs ainfi humeétés font d'ailleurs expolés au midi, & réchautfés fou vent & vivement par la chaleur du foleil, leur humidité doit s'évaporer , & l'acide de l'air doit fe précipiter fur ces mêmes Qaq 490 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. parties de murs qui avoient été humeëétées. Les fels qui Je développent par la décompoftion de ces débris épars au pied des murs, ajoutent encore au refroidiflement produit par l'évaporation de leur humidire. C’eft aufli par de telles rai- fons, que les parties bafles des murailles qui bordent les rues des villes, font prefque toujours décrépies & Hs par un nitre abondant, & ces effets font d'autant plus fenfbles, que ces murs font plus vieux & expofes depuis un plus long temps à l’action des caufes indiquées. Ce nitre fe trouve com- plet, lorfque ces murailles font expofées au midi dans les pays tempcrés & méridionaux ; mais 1] pourroit bien n'être qu'à bafe terreufe dans les pays feprentrionaux, & dans les rues étroites qui Jamais ne font éclairées direétement par le foleil. Je pourrois fans doute boïner les applications qu'on peut faire des principes généraux établis précédemment, au déve- loppement que j'ai donné de l'origine de tout le nitre qu'on recueille dans l'Inde, dans l'Efpagne, & qu'on extrait des décombres de France , ainfi que de la nitrière de Malte, &c. Mais il y a des faits particuliers, confignés dans les Ménbice que l'Académie a fait raflembler particulièremenr, pour fervir fans doute de bafe ou de preuve à une théorie nouvelle; c'eft pourquoi je crois ne pouvoir me difpenfer d'expofer com- ment les mêmes principes Re piene roujours heureufement toutes les obfervations particu! ières , & tous les fuccès qu'on a pu obtenir par des procédés fuivis dans les nitrières artif- cielles qui nous font connues. Glauber , en aflurant qu'on ne peut retirer de l'urine au- cun atome de nitre, a cependant reconnu que cette marière écoir une des plus cflentielles pour accélérer & produire oc- cafionellement la formation de ce fel. Il en a arrofé des terres calcaires & de la chaux vive, tantôt feules, tantôt mélées avec de la cendre, & roujours de ces matières il a retire du Salpètre. De tels faits fonc faciles à expliquer. Les fels volails de lurine font , de tous les fels de cette cfpèce, ceux qui font defcendre davantage lemercure du ther- momètre. L'urine, en fe puréfant, laifle développer du fel ammoniac, & fur-cout du fel marin, qui eft un agent crès-puif- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALDPÊTRE. 491 fant pour produire un grand refroidiflement dans l'air envi- ronnant. Ainfi ces matières humeëées d'urine, & placées dans des lieux où l'air circuloit librement, ont dû fe charger d'acide nitreux précipité de fair, foit par le refroidiflement occafionné par les fels de l'urine, foic par l'évaporation dé la partie aqueufe ; évaporation qui, comme on l'a déjà dit, cft une des grandes caules du refroidiflement de l'air. Glau- ber rapporte un fait qui confirme particulièrement le grand effet de l'évaporation des liquides pour la produétion du nitre. I! dit que de la chaux vive ayantété plongée dans l'acide du bois, & féchée enfuite, foit au foleil, foit àune chaleur douce, en- fuite humeétée de nouveau , & refléchée plufieurs fois jufqu'à ce quelle füc réduire en pouflière , avoit donné une cer- taine quantité de Salpétre. On voit ici lévaporation de cet acide jouer le même rôle que les autres acides danslefquels les Phyficiens ont plongé les boules de thermomètre, pour obferver le degré de refroidiffe- ment occafionné par leur évaporation de deflus la furface de ces boules. Les furfaces des pierres de chaux vive fe re- froidifloient à raifon de la quantité d’acide qui fe difipoit, & faifoient précipiter fur elles-mêmes l’acide de l'air environnant. Cet acide dépofé trouvoit enfuite dans cette chaux des par- ties alkalines avec lefquelles il s'unifloit, & formoit ainfi le Sal- pêtre extrait par Glauber. Le même Auteur rapporte en- core d’autres faits : 1l dit avoir oblervé fur les bords du Mein, des côteaux calcaires pleins de nitre; alors ce fel n’étoit pas l'effet de l'ation de l'urine, mais d’autres caufes aufli puif- fantes , quoique moins promptes dans leur influence. Il en eft fans doure de ces côteaux comme des terres placées fur les bords du Gange, de la Méditerranée, de la mer du Sud , comme aufli des carrières qui bordent les rivières. Dans de telles poñtions , les terres fe falpétrent bien plus tôt & bien plus abondamment que lorfque de pareils côteaux font placés au milieu des champs, & éloignés de quelques males d’eau confidérables , telles que des lacs, des étangs, des rivières & des mers; car dans tous les lieux voifins de ces grandes Qgqi 492 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. mafñles fluides, l'air fe charge néceflairement de toute l’eau que fa chaleur lui permet & le force de tenir en diflolu- uon. Dans le centre des terres, au contraire, dans des lieux {ecs, arides, & au milicu des champs , l'air environnant ne peut jamais trouver à difloudre toute la quantité d’eau qui ieroit proportionnée à fa chaleur; ainfi, dans la première polñtion, la fraîcheur feule d'une foirce, de la nuit, du matin, & même le feul obfcurciflement du foleil, peuvent occafioner aflez de refroidiflement dans lair environnant, pour le condenfer & lui faire dépofer une portion de l'eau & de l'acide qu'il tient en diflolution , parce qu'il en eft chargé jufqu'à faturation. Le même effet ne peut avoir lieu au centre des terres. Ainfi les coteaux calcaires placés dans le voil inage des rivières , des lacs, des ‘étangs & de la mer, doivent, plus que vous les autres, fe charger d'humidité, & devenir des nitrières naturelles , qui préfentent > après quelque temps, une belle récolte de nitre, à caufe des variations journalières de la température de fair. Cette humidité que les terres reçoivent avec l'acide dépofe par l'air, 'évapore à {on tour aux rayons du foleil, & contribue elle-même à aug— menter la quantité de Pabide précipité. On ne a pas dourer de cette quantité d’eau differente , difloute pari ‘air qui avoifine les rivières,l& par celui qui recouvre des terreins fecs. C’eft un fait trop bien licorne par une obfervation faite à Montpellier , & qui démontre que les vents de mer font ceux qui tiennent la plus grande quantité d’eau en difolution à chaleur égale, & qu'ils en font ordinairement fi chargés, que le degré de faturation eft le même que celui de leur chaleur. Tous ces développemens donnent une nouvelle force aux principes établis précédemment ; en rendant fenfbles les vé- ritables effets qu'on doit atibuer, foit à l'urine & aux ma- tières animales, foit à l'évaporation des fluides, foit enfin à l'action des circonftances locales , ils font connoître toutes ces caufes comme étant des caufes feulement fecondaires ; ils font voir enfin, que fi elles fervent à faire naître le Salpètre, ÉMOIKES SUR LA FOK PÈTRE. 493 M $ SUR LA FOXMATION DU SALPÈTRE. 493 c'eft occafonellement & fans entrer aucunement dans fa com- ofition. Stalh a fait des obfervations qui méritent d'être difcutées. T1 remarque fur-tout que le nitre s’engendre dans les débris calcaires des incendies. J'ai été à portée d'examiner de fem- blables évènemens , & j'ai fait la même remarque fur un cdifice dont les murs ne donnoient, auparavant qu'il fût in- cendié , aucun indice de nitre. Les pierres de ces murs éprouvèrent le feu le plus violent , & les parties bañes ref tèrent feulcs élevées fur leur bafe. Ces reftes de murailles qui fembloient avoir été calcinés, furent en peu de temps couverts d’une pouflière fortement falpétrée. Sans doute ja pierre calcaire avoit reçu, parle moyen du feu, une qualité alkaline, qui, après l'évènement, lui avoit fait attirer l'acide de fair qu'elle avoit retenu, parce quil y avoit trouvé une bafe fixe. Cet Auteur rapporte aufli que la voûte d’une cave placée fous uneécurie ,s'écoit couverte d'eflorefcences nitreufes, lorfque la chaux, dontelle avoit été enduite , avoit cte dé- truite par le pañlage de l'urine à travers l'épaifleur de cette voûte, On voit ici l'urine fe faire jour entre les ‘pierres de la voûte, s'étendre fur fa furface intérieure, détacher, entraîner, par fon humidité , l'enduit de chaux qui la recouvroit, & faire naître à fa place un duvet nitreux en quantité tres-confidé- rable. Dans toute autre cave, ce n'eft pas à la voûte qu'on trouve du Salpêtre ou du nitre quelconque, c'eft dans le {ol; & fi l'on obferve le contraire dans la cave citée par Stalh, cette différence étonnante ne vient que de ce qu’auprès de la voûte, l'air environnant eft expofé à lation des fels urineux, qu'il y eft néceflairement condenfé, & qu'il dépofe l'acide qu'il pouvoit tenir en diflolution. Jai vu un phénomène à peu près femblable, & qui dépend des mêmes caufes comme des mêmes circonftanceslocales. Dans la maiïfon d’un particulier , il y avoit un canal de latrines qui s'étendoit depuis le troifième étage jufqu'au rez de chauflée, où étoit fituce la fofle d’aifance. Ce canal étoit placé derrière le mur d’un efcalier qui recevoir le jour d’une grande cour par des galeries, & par coufé- 494 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, quent l'air extérieur frappoit librement la furface extérieure de cette muraille. En examinant cette furface, on remarquoit depuis le fecond étage jufqu'au rez de chauffée, une trace pro- fonde, une dégradation non interrompue & formée par le nitre qui abondoiït dans cette partie de la muraille. C'etoic comme un fillon qui annonçoit fur le mur la direétion du canal caché derrière fon épaifleur. Les fels nitreux & marins dont ce mur étoit rempli, avoient fait tomber toute la chaux qui le recouvroit auparavant. Pourquoi donc le nitre qui, fur les murailles des mailons, ne s'élève ordinairement qu'à une hauteur de quelques pieds , & ne dégrade que leurs par- ties les plus balles, sécendoit:il ainfi, & avoit:il porté le ravage fur la feule partie du mur correfpondant au canal des latrines , jufqu'à une hauteut quatre ou cinq fois plus confidérable ? Cet eflec ne doit fans doute étre attribué qu'à la préfence des fels & de l'urine dont ce mur étroit pénétré, & par conféquent à la condenfation fouvent répétée de l'air environnant, Cette humidité produite par l'urine eft fufcep- tible de fi grands effets, que Stalh lui-même a remarqué que dans les murailles de quelques maïfons de payfans, (mu- railles pérries de boues, de limon & de paille), le nitre s’'accumuloir & fe trouvoit en grande quantité. Il a même ob- fervé que la couche de terre nitreufe étoit d'une épaileur toujours égale à la couche de terre que la pluie avoit pu pénétrer. Si l'urine & l'humidité réunies attiroient l'acide nitreux dans le mur des latrines dont nous avons parlé, c’eft l'humidité feule ou fon évaporation qui produit le nitre qu'on extrait des débris des murailles des maifons de payfans. La pluie hu- meéte ces murs, la chaleur du foleil les defsèche , & certe évaporation produifant un certain refroidiflement dans l'air qui eft en contaét avec ces murs, l'acide nureux doit y être de- pofé ; & l'effer érant proportionné à fa caufe occafonelle, l'étendue du dépôt doit étre égale à la profondeur de la couche humide. Stalh femble même n’avoré voulu laifler rien à défier pour la confirmation de mon opinion ; car il ajoute MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 495 que fi ces murs fe rempliflent de Salpêtre, ce n'eft que parce qu'ils ont éte humeétés. M. Lemery cite plufeurs expériences qui peuvent être ex- pliquées de la manière la plus plaufble. I dit que M. Ma- riotte avoit laifle pendant deux ans, au deuxième étage d’une mailon, de la terreleffivée & dénitrée, qui ne s’étoit chargée d'aucun atome de nitre; mais que de pareille terre ayant été placée au milieu du fol d’une cave, elle éroit redevenue nitreufe. La caufe de ces diflérens réfukats fe préfente d’elle-même, lorfqu'on fe rappelle comment j'ai déjà expliqué la formation du nitre dans les terres des caves, & lorfqu’on réfléchir que cette terre, mife dans un érage élevé, & dépouillée de tous fels, ne contenoit par corféquent aucune matière propre à chan- ger la température de l'air environnant. Une terre calcaire placée dans des circonftances aufli peu avantageufes, & n'é- tant Jamais humedtée ni defléchée, n'auroit jamais pu ac- quérir ce nitre que Glauber avoit fu y produire par un pro- cédé plus convenable. Lemery a éprouvé que des terres mêlées de matières ani- males, de chaux & de fel de tartre, ont produit beau- coup de Salpêtre , après avoir été expofces dans un licu où l'air circuloit avec liberté ; tandis que fans matières animales, ces mélanges mont pu jamais fe charger d'aucun nitre. Sans doute dans ce lieu d’expofition , où l'air entroit par plufieurs iues , & où il avoit un cours très-rapide, les fels du tartre & de la chaux n’étoient pas aflez puiflans pour produire vive- ment & promptement le refroïidiflement de cet air qui paf. foit avec virefle fur la furface de ces mélanges. Il falloit ap- paremment de plus grands agens, tels que le fel commun & les fels volatils qui fe dégagent des matières animales pen- dant leur décompofition. Si d’ailleurs les murs circonvoifns paroilloient eux-mêmes falpétrés, cétoit fans doute parce que la couche d'air qui les rouchoit, ne preroit pas tout le mouvement ni coute la vitefle dont étoit animée la mafle d'air qui circuloit plus librement au milieu de l'efpace. Quelques Voyageurs aflurent auffi, fuivant Lemery, que 496 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: le Salpètre ne vient dans toute forte de champ, qu'après des pluies confidérables qui ont inondé la campagne, comme on le remarque au Bengale : nouvellement, M. Dombey a obfervé, auprès de Lima, fur les côtes de la mer du Sud , une très-grande quantité de Salpêtre répandu fur-tout fur les terres qui fervent pour les pâturages. Ïl ne pleut jamais à Li- ma; mais des brouillards Cpais couvrent cette côte pendant fix mois, & entretiennent dans ces terres une très-grande hu- midicée. Pendant les fix autres mois, la chaleur eft propor- tionnée à celle qu'on cprouve dans tous les lieux fitués fous la zone torride à 10° de latitude auftrale. Les mêmes prin- cipes expofes précédemment fufhfent feuls, pour expliquer ces phénomènes femblables. L'evaporationde l'humidité fait encore naitre ce Salpêtre qu’on trouve , fuivant Lemery, aux voûtes des grottes, après que le terrein qui les couvre a été arrofé par des pluies abondantes. Ce Salpètre lui a paru être occa- fioné par la pluie, parce que toujours il a remarqué fous ces voûtes & au centre de ces grottes une mafle d’eau. Il cite même Stalh, qui parle de deux endroits femblables chargés de Salpetre , & où il a remarqué de l'eau & de la terre gypleufe. Cette eau de pluie qui tombe fur la terre, traverfe l’épaifleur de la voûte, & tombe au fond de la grotte, en laiffant feulement à la furface intérieure de la voûte une humidité qui, en s'évaporant , condenfe l'air environnant, & fait précipiter fon acide. C'eft ainfi qu'on peut expliquer les réfulrats de l'expérience de M. Pietfch, qui, après avoir veife de l'urine fur de la terre calcaire, après avoir laïfle fécher cette terre, & l'avoir réarrofce pour la faire fécher enfuite, a obtenu du nitre par le moyen de ces humectarions & de ces deflications réirérees. C'eft par les mêmes caufes qu'on voit croître du nitre dans des murs qui n'ont pas été faits pendant un beau temps, & qui font d’ailleurs expofés à des exhalaïfons urineufes. Ces obfervations ont engagé M. Pietfch à recommander expref fément de conferver un certain degré d'humidité dans les murs deftinés à fournir du Salpétre , fur-tout lorfque ces murs n'ont MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 497 n'ont pas été compofés de parties alkalines affez abondantes pour atirer l'acide de Pair. Il prefcrit par couféquent de for- mer les murailles avec de la terre convenable, des cendres & de la paille, mélange qu'on doit humeëter avec de l'eau de fumier. Si le nitre s'accumule dans les murs du Brandebourg , c'eft qu'ils fonc placés dans des lieux humides & enveloppés d’exha- lifons urineules , par le foin qu'on à de répandre au pied de ces murs de la fiente de pigeons, de poules, dont les clprits volatils produifent leffec le plus convenable. M. Gruner cire un magnifique hôpital de Berne, comme un monument de la végétation prompte & abondante de Sal- pêcre. Les parties bafles de fes murs font toutes dégradées & corrodces par ce fel; mais il explique prefque feul, fui- vant mes principes, la caufe de fa préfence & de fes pro- grès : car il annonce que les lieux où ce fel croît le plus abondamment, croient autrefois les emplacemens de latrines, de buanderies , & de réfervoirs d’urines. D'ailleurs ) il aflure qu'au temps même où il écrit, on eft dans l’ufage de vider par les fenêtres les pots de chambre des malades. Tant de caufes rcunies au pied de ces murs, tant d’exhalaïfons fc- tides doivent fans doute agir avec énergie fur l'air qui fe trouve en contatt avec les parties bafles de ces murs, & lui faire dépofer beaucoup d'acide nitreux avec beaucoup d’humi- dité. La même caufe eft celle de la naïffance du Salpètre dans certains barrils ouverts par leurs. extrémités , & remplis de terre mélcée de cendres, de fels, & arrofée d'urine. Ces barrils employés étoient fufpendus au milieu d'une cave ; on formoit plufieurs trous qui traverfoient l'épaifleur de la terre, & c'eft fur le contour de ces trous que le Salpêure végétoit fenfi- blement ; l'air circuloit par ces mêmes trous, & la terre frai- che, humide, pleine d’exhalaifons urineufes , le condenfoit à fon pañlage, & précipitoit l'acide nitreux qui s'unifloit à elle. Si M. Neuhans à tiré du Salpêtre d’un amas de plufeurs Rr: 498 MÉMoirrs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, matières convensbles, c'eft qu'arrofées d'urine, d'eau de lef- five, de chaux, & remuces de temps en temps, ces terres dalles expofces au midi, fe chargoient & de fels & d'hu- midité qui faifoienc feuls naître cette abondance de nitre qu'on y trouvoit. Dans la defcription que M. le Comte de Milly donne d'une nitrière artificielle , on voit que l'Entrepreneur n'em- ploic que des matières que j'ai indiquées comme les plus con venables à une prompte produétion de Salpêtre ; ce font des fumiers, des urines , de la terre calcaire, une nitrière bien clole, & des fenêtres qui ne s'ouvrent qu'au nord & au midi; on y voit fur-tout que la terre qui eft deftince à être leflivée la première, eft celle qui eft placce dans la partie fepten- trionale de la nitrière, comme étant fans doute celle qui s'eft falpétrée le plus promptement; ce qui doit être en efler, puifque ce n'eft que dans cetre partie que l'air chaud, qui eft entré par l'ouverture du midi, vient cprouver la condenfa- tion la plus grande, & que c'eft là par conféquent qu'il dépofe plus d'acide que dans toute autre parte des han- gars. En Prufe, ce font des murailles faites de terre, de cen— dres , & de fumiers. À Malte, on voit des magafins où l'on met à couvert des pyramides compofces de terre calcaire feulemient & de fumier , qu'on arrofe avec un mélange de matières putréfices & qu'on faupoudre de chaux. Nous avons déjà expliqué comment de tels mélanges doivent fe charger de nitre, foit au grand a, foit à l'abri de la pluie, fe foleil & des vents. Il fera aufli aifé de concevoir comment ce fel peut fe former dans la nitrière de Drefde, & comment il a pu fe trouver des différences fenfibles entre les produits en Salpétre réfultant des volumes égaux de terre, dont les uns avoient été mis à l'air & arrofés d'urine , & dont les au- tres n'avoient CtC nirémués ni humectes. Dans lnde, quelque abondante que foit la récolte en Salpétre , quoique la terre produife ce fel naturellement, cependant les Indiens induftricux ne peuvent sen contenter. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAIPÊTRE. 499 Ils cherchent & réuffiflent à l'ausmenter , en arrofant d'urine les terreins propres au Salpêtre, parce que l'urine contribue doublement & à la formation & à l'abondance de ce fel. Les Chinois trouvent auf de grands avantages à employer ces mêmes moyens; & c'eft pour ce feul objet qu'ils ramaflent les urines avec le plus grand foin , comme dans certains pays de la France on recueille fur les grands chemins les excre- mens des animaux. Le Salpétre qu'on recueille dans les magafns de tabac en Ainérique , ne fe trouve fur la furface des terres de ces ma- gehins, qu'à caufe de l'humidité & des fels qu'on répand fur leur furface, en les arrofanc d’une leflive où d'une infufion de feuilles de tabac. Je pourrois à tant de faits en joindre encore une foule immenfe, dont l'explication , fuivant mes principes, feroit aufli facile que fatisfaifante; mais je me contenterai d'en rapporter quelques-uns qui me paroiflent trop décilifs pour être pañles fous filence. Dans des Lettres fur la Suifle , on cite le Salpétre comme un objet de commerce très-confidérable pour l’'Appenzel, & qui coute peu de foins aux Bergers qui le recueillent. Les étables de leurs beftiaux font conftruites fur la pente des montagnes où ils païflent. Le plan du fol, qui doit être ho- rizontal, fait, avec la ligne de pente de la montagne, unangle plus ou moins aigu, & ceft fous ce fond de l'etable, dans cet cfpace angulaire, que les Bergers creufent une fofle de trois pieds de profondeur, qu'ils rempliflent de terre très-poreufe, & deftinée à recevoir les urines des beftiaux. L'air circule li- brement fur la furface de cette mafle de terre, humeétée con- tinuellement d’urines, & mélée d’excrémens. Lorfque cette terre a refté deux ou trois ans dans eette fofle, elle donne une aflez grande quantité de Salpètre, en la leflivant fui- vant la manière ordinaire. Les principes expofés précédem- ment, ne permettent pas de douter que le nitre ne doive s'accumuler dans des terres ainfi expofées; mais auf ils don- nent À penfer que ce fel ne peut être qu'à bafcterreufe, & fans Rr:ij $soo MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. doute en leflivant à l'ordinaire : on mêle à ces terres, des cendres qui fourniflent un alkali fixe néceflaire. Un autre fait que j'ai obfervé dans un couvent de Capu- cins, prouve bien cvidemment l'influence des exhalaifons uri- neufes fur la multiplication du Salpétre. Ces Pères avoient fait ramafler auprès de leurs latrines, de la terre de jardin; elle étoirt amoncelée, & formoit un volume de près de 405FPP, Le petit réduit où on avoit dépolé ces terres, n'etoit fépare des lieux d’aifance que par une cloifon formée de planches mal jointes, & dans laquelle on avoit pratiqué l'ouverture d’une ” porte qui n’étoit jamais fermée. Le lieu étoit éclairé par une petite lucarne élevée au deflus du fol, & qui souvroit au midi. Après deux ans d’expofrion das ce voifinage des latrines, cette terre s'étoit tellement falpêrrée, qu'on en a tire 1 307, au moins, qui Ont ére leflivées avec le plus grand avantage. On voir évidemment par les circonftances locales, que ceft l'air chaud du midi, qui, s'introduifant dans ce lieu , & éprou- vant l’aétion des exhalaifons urineufes , a dû dépoler cette abondance de nitre qu'on a recueillie à la furface de cet amas de terre. Il y a auprès de Ruffec une nitrière naturelle, qui prouve encore particulièrement , comme celle de S. Savinien , combien le voifinage des grandes mafles d’eau contribue à la formation prompte & abondante du Salpètre; c'eft un rocher calcaire, dont les pierres extraites ont une très-grande dureté. Une face de ce rocher fe montre à nu fur le revers du côteau, & le plan de cette face eft _prefque vertical. Elle eft placée le long des bords de la rivière de Charente, & on trouve fur la furface plufieurs parties très-falpêtrées. Au pied de ce rocher & dans fes veines, on trouve aufli une pouffière cal- care provenant de la décompofition du rocher, & qui eft très-chargce de nitre. Enfin, le dernier fait que je dois rapporter, cft celui qui démontre le plus clairement tout l'avantage qu on peut at- tendre d’une nitrière aruficicile enfermée, clofe, & dirigée ivaur ls méthode que j'a prefcrite dans le Mémoire prece- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, SOI dent. À Saint-Jean-d'Angely il y a une haile qui fert de bou- cherie; fa forme eft un parallclogramme ; elle eft abfolu- ment fermée, fur trois faces qui n'ont d'autres ouvertures que deux pertes portes bafles qui ne s'ouvrent même que le Samedi & le Dimanche. À dix pieds au deflus du fol de cette halle, il y a une ouverture longitudinale, dont la lon- gueur eft celle de certe face, & dontla hauteur eftenviron de deux pieds. Cetre ouverture eft la feule par laquelle cetre halle cft éclairce , & c'eft dans le fol de cette halle afi difpofée, qu'on a recueilli une quantité immenfe de terres rieufes. Le Mare Salpètrier , chargé de choïlir & de faire ramafler ‘ces terres , cite ce lieu comme un des plus riches en Salpètre. Si j'avois été chargé de former, d'après mes principes, une nitrière artificielle fur un terrein pareil à lem- placement de cette halle, je n'aurois pu m'ermpècher de la difpofer comme elle eft aujourd'hui, quoique deftinée à rour autre objet ; j'aurois donné à la circulation de l'air, “8 la direc- tion & la liberté qu'on lui remarque dans la halle de S. Jean; Jaurois prefcrit d'arrofer de terrem d'urine, ou de lenvelopper d’exhalaïfons urineufes , & les mêmes fonétions font remplies par les débris des animaux que ce fol a dû recevoir jufques à préfent, conféquemment à fa deftination. Ces débris, en fe d£compolant comme lurine, donnent à la terre des fels tès-propres à aturer l'acide de lair. Après le grand nombre de faits que Y'ai rapportés, & l'ex- plicarion plaufble que j'ai donnée des phénomènes obfervés, je dois maintenantme borner à renvoyer à-la méthode que jai prefcrie dans le Mémoire «précédent ; relativement à la conftruétion, aux difpofitions & au travail des nitrières arti- ficielles. Il y a quelques atentions ‘ou précautions particu- Bères que Je n'ai pas dctaillées , mais qu'on pourra imaginer aifémercr. Jai donné toutes les idées principales , & je me crois difpenfé de détails minutieux ; d’ailleurs il ne faut que réfléchir fur les applications que j'ai faires de mes principes, au développement d’un grand nombre de fais, & on en conclura prefque autant de règles particulières à fuivre pour so2 MémMorres sUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. obtenir quelques fuccès de l’établiflement d’une nitrière art ficielle. Je ferois bien trompé dans mon attente , fi cette addi- ton à mon Mémoire, en donnant plus de force à la théorie que j'ai préfentée, n'infpiroit pas une nouvelle confiance dans la méthode que je me fuis permis de prefcrire. Je crois main- tenant pouvoir dire avec beaucoup d'aflurance, que j'ai fait voir avec route l'évidence dont une telle matière eft fufcep- üble , à quellesconditions on peut faire naître du nitre promp- tement & avec abondance , quelles font les matrices con- venables à ce fel, quelles fonc les difpofitions ou le foin quil faut prendre pour le faire naître, foic au grand air, foit à l'abri du foleil & de la pluie, & comment enfin on peut diftinguer sûrement les pays, les terreins, les climats qui font les plus favorables à une prompte & abondante produétion de Salpètre. C'eft à ces objets que le Gouvernement a borné fes demandes; c’eft à y répondre dignement que j'ai donné tous mes foins; & maintenant le fufrage de l'Académie ef le feul but de mes défirs, parce quil feroit la récompenfe la plus flatteule de mon travail. GE a QE 0) MEMOIRE DES TERRES NATURELLEMENT SALPÉTRÉES, FOULIS CEA NETMEUS MEUNIER AU NICIE ; Lu à l'Académie le $ Juillet 1777, Par MM. Crousr & Lavorser, Régifleurs des Poudres & Salpètres CE n'eft point à nous qu'appartient originairement la re vérte que nous annonçons aujourd’ hui ; la reconnoiflance & d'efprit de vérité qui nous animent, nous obligent d'en ire hommage à M. le Duc de la Rochefoucault ; & nous coin- mencerons en conféquence par un récit exact & fidèle des circonftances qui ont donné lieu à la publication de ce Mc- moire. Le château & le village de la Roche - Guyon ont batis fur la rive droire de la Seine » au pied d'un côteau efcar pes coinpolé de craie dans toute fa hauteur. Ceïre craie eft ri vent découveite & coupée à pic, & on l'a creufée en plufieurs endroits, pour y pratiquer des caves, des écuries , des habi- tations. La même difpofition de terrein fe retrouve à quelque dif- tance avant & après le village de la Roche-Guy on; de forte que depuis Vetheuil jufqu'a Beneco t, c'eft-à-dire , dans l'ef- pace LÉ plus de deux lieues, tout le côteau n fe que des se Meinoixgs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. rochesr de craie découverts, rongés par les injures de. l'air, & dégradés par le temps. L'infpedtion du local ne permet pas de douter que la ri- vière de Seine n'ait autrefois miné le picd de ce’ côreau , qu'elle n'y ait caufé des-éboulemens confidérab'es, & qu'elle n'y ait formé des efpèces de falaifes femblables à celles qui exiftent fur les bords de la mer. L’aétion des eaux pluviales , ceile desravines formées par l'écoulement des eaux de la plaine, a cnfuite dégrade ces falaifes ;. elle les à ‘comme dentelées, & les portions détachées du haut, & cboulces, ont formé dans le bas des atterriflemens confidérables. On peut donc diftin- guet à la Roche-Guvon, & dans les.environs, deux forces de bancs compofés également de craies, mais qui ont été for- més à des époques très-différentes ; les uns, qui ne font autre chofe que les falaifes mêmes ;. les autres, qui fe font formes de leurs débris. C’eft dans le pied même de ces falaies que font creufces une parc des habitations de Vecheuil, Auchile , la Roche- Guyon & Clachalofle; & ce qui eft remarquable, c’eft que les cuifines, les bûchers, les buanderies , les communs du château de la Roche-Guyon, enfin l'églife même d’Authile, font également creufés dans cette craïc. . M. le Duc de la Rochefoucault & M. Defmareft, Mem- bres de l'Académie des Sciences, qui ont fréquemment vifité ces cantons, ont remarqué que les craies dans les environs des lieux habités étoient toutes couvertes d’efflorefcences de Salpètre. Les Salpêtriers établis à la Roche-Guyon cétoient, depuis long-temps, dans l'ufage d'enlever ces eMlorefcences avec une efpèce de hachetre ; ils les leffivoient enfuite à la maniere ordinaire, & en tiroient du Salpètre qu'ils livroïent aux ma- gafins dela Régie des poudres. ÿ Ces premières obfervations de M. le Duc de la Roche- foucault l'ont conduit à foupçonner que les craies qui com- pofent ces montagnes, pouvoient bien être naturellement fal- pétrées; & en effet, en ayant leilivé des portions prifes à quelque diftance de la furface, & les ayant traitées avec de la © Mémonrss SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. so$ la cendre, il en a obtenu de vrai Salpétre à bafe d’alkali fixe vegetal. Un autre fait très-important , que M. le Duc de la Roche- foucault à conftaé, ceft que de la craie de ces mêmes côteaux, bien lefivée, bien épuifée de toutes les parties faïinés qu'elle contenoit, expofce enfuite à l'air en forme de MUS ; COUVEITS feulement d'un léger voit de paille, fe falpé- troit à la longue, & fe chargeoïit même de différens autres fels. M. Bucquer, compagnon zélé des travaux de M. le Duc de la Rochefoucault , à annoncé ces découvertes il y a plus d'un an, dans fes Leçons publiques & particulières. M. Def mareften a parlé lui-même à plufieurs de fes Confreres , de forte que les expériences & les obfervations de M. le Duc de la Ro- chefoucault ont acquis peu à peu une efpèce de publicité. Obligés par état de veiller à tout ce qui peut contribuer à l'augmentation de la récolte du Salpêtre dans le Royaume, nous avons cru quil étoit de notre devoir de prendre les précautions les plus promptes pour tirer parti d’obfervations auffi importantes; & nous avons penfe qu'elle pouvoit êtrele germe de plulieurs découvertes de même genre. M. Clouet seft en conféquence tranfporté dés le mois d'O&tobre 1776 à la Roche- Guyon ; mais la faifon qui étoit avancée . ne lui ayant pas permis de compléter fes recher- ches, nous y fommes retournés dans le mois de Mai de cette annce (1777); & ceft du réfultac de nos expériences &.de nos oblfervations, que nous allons entretenir l'Académie. Nous diviferons ce Mémoire en deux parties ; nous rendrons compte dans la première, des détails de nos expériences; nous les rapprocherons & nous les combinerons dans la fe- conde, pour en tirer des conféquences. Ceux qui ne prennent aucun intérét aux détails chimiques; & qui font plus curieux d'arriver à des réfulrats que de fuivre la route qui nous y a conduits, pourront pañler route la premiere partie de cet Ouvrage , & confulter feulement le tableau qui fe trouve à la fin, & qui en préfente le réfultat. Sff 506 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Ne mn PARTRL I LR E PAR HRURE. Détail des Experiences, La manière dont nous avons opéré ayant été la même pour tous les échantillons , nous allons commencer par en donner le détail ; il ne nous reftera plus enfuire qu'à avertir à mefure des légères différences que les circonftances ont exigées dans la manipulaton, Les échantillons fur lefquels nous avons opéré, ont été dé- tachés des carrières ou habitations avec un pic; nous les re- cevions fur une grande toile érendue au deflous de l'endroit où l'on travaïlloir; nous les mettions enfuire dans des facs de toile rrès-propres , qu'en lioit & qu'on criqueroit fur le champ : en même temps l’un de nous ccrivoit fur un regiftre toutes les circonftances Jocales qui pouvoient être intéreflantes. Lorfque les échantillens n'étoient que de quelques onces, on les mertoit dans un corner de papier gris. Nous avons opéré, autant qu'il « ét pofble, fur douze livres & demie de terre, c'eft-à-dire , fur un huitième de quinral; mais lorfque les échantillons des marières que nous avions recueillies , {e font trouvés peu confidérables, nous avons été obligés de diminuer les doles, & nous nous fommes quelquefois trouvés réduirs à opérer fur quelques onces ou fur quelques gros; ceft ce qui nous eft arrivé relativement à la fubftance que les Ouvriers nonument la mort du Salpétre , à celle à laquelle ils donnent le nom de Sulpétre de pigeons , & à quelques autres dont il ef fouvenr difficile de recueillir une grande quantité. Quelques-unes des terres n'ont été que groflièrement con- caffees; d’autres, & c'eft le plus grand nombre, ont été ré- duites en poufhère æès-fine. On les a imifes dans des terrines féparées, &on a verf par-deflus une quantité connue d'eau bouillante ; après quelques heures de dépôt, ona jeté la liqueur & la terre fur un filtre de toile fupporté par un carré MÉMorREs SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE: 507 de bois & recouvert avec une grande feuille de papier gris; enfin on a pefé la liqueur obrenue par la filtration, & on en a déterminé le degré par le moyen du pèfe-liqueur, décrit dans l’article XE de l{nftruéion fur lécablifiement des ni- trières, publiée cette année (1777) par ordre du Roïi:en- fin on a fait évaporcr. On conçoit que dans toutes ces opérations on m'a point retiré par la filtration la totalité de l’eau qu'on avoit employée pour lefliver : une partie de cette eau eft reftée dans les terres, & pour l'obtenir, il auroit fallu relaver un grand nombre de fois la terre, jufqu'à ce qu'elle eût été entièrement épuifée de toute matière faline. Cette méthode, qui peut-être auroit été la plus exaéte, feroit devenue très-embarraflante dans une fuite d'expériences aufli nombreufes que celles dont nous allons rendre compte ; elle auroit exigé d’ailleurs un temps confi- dérable pour relaver les terres, un plus confidérable encore pour évaporer cette grande quantité d'eau, & d'ailleurs à n'eft pas démontré que les fels, par une ébullition trop long-temps continuée, & par les collifions nombreufes qui en font la fuite, n'éprouvent pas des altérations, des décompolfitions, & peut- être une évaporation totale ou au moins partielle. Nous avons donc préféré de laïifler dans les terres la portion d’eau fal- pêtrée qui ne fe féparoit pas par la filtration & par l'égout ; mais il nous a paru qu'on pouvoit l'évaluer par calcul, & con- noître, avec une grande exactitude , la quantité de matières falines qu'elle contenoit. En effet, lorfqu’on délaye de la craie dans de leau bouillante, on ne fauroit douter que lorfque les marières ont été fuRifamment aguces & mélées, toutes les portions de l'eau ne foient également chargées des fels contenus dans la craie. Lors donc qu'on a féparé la majeure partie de l’eau par filtration, on à droit de canclure que ce qu'il en refte dans la terre contient une proportion de fubf- rances falines égale à celle contenue dans la liqueur fée : ainfi, par exemple , fi on a employé douze livres d'eau & qu'il n'en foit venu que hui livres par filration, on peut conclure qu'il refte dans la terre un uers des fubftances S{f ij 508 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. falines, comme il y refte un tiers de l'eau ;-& en ajoutant un tiers à tous les produits obtenus , on doit avoir la quantité de fels réellement contenue dans la terre. S'il étoit pofible de {e tromper par cette méthode, ce feroit plutôt en moins qu'en plus. Quant à l'évaporation, nous l'avons commencée dans des vaifleaux de cuivre au degré de l'ébullition, & quand nous foupçonnions que la liqueur approchoit du degré de crif- tallifation, l'évaporation fe continuoit dans des caplules de verre, & on tranfvafoit fréquemment d’une caplule dans une autre, pour feparer les fels de nature différente qui criftalli- foient fucceflivement. Il eft inutile de dire que ces expériences exigent un grand ordre, fur-tout lorfqu'on en fait marcher un grand nombre à la fois; quil faut étiqueter chaque cap- fule avec beaucoup de foin, & diftinguer non feulement le numéro de l'expérience, mais encore les différentes criftal- lifations de la même expérience. Lorfque les fels obtenus par criftallifation étoient impré- gnés d’eau-mère , nous les lavions avec de lefprit de vin reétific ; l’elprit de vin diflolvoit l’eau-mère ou les fels à bafe terreufe , & laifloit les fels à bafe alkaline blancs & purs. Cet efprit de vin étoit enfuite remélé avec la liqueur décantée , & :il étoit enleve par une évaporation fubféquente. Lorfque nous avions ainfi féparé les fels criftallifables, & qu'il ne reftoic plus que de leau-mère, nous étendions cette dernière dans quatre à cinq fois fon poids d’eau diftillée , & nous opcrions la précipitation de la terre par l'addition d'une liqueur alkaline tès-pure , compofée de cinq parties d'eau diftillée & de quatre parties d’alkali ; nous pefions exactement , avant & après la précipitation, le flacon qui conte- noic certe liqueur alkaline, & après avoir conftaté la quantité de liqueur employée , nous déterminions, par calcul ; la quan- tit d’alkali concret qu'elle contenoit; enfin, nous féparions la terre parle filtre , & la liqueur obtenue étoit mife de nou- veau à évaporer, pour obtenir fucceflivement les différens fels qu'elle contenoir. Après avoir déterminé, comme on vient de lexpoler,, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. $0o9 la quantité & la qualité des fels contenus dans l’eau mife à évaporer » il nous reftoit encore deux opérations à faire; la première , d'y ajouter la portion de ces mêmes fels contenue dans l’eau reftée dans la terre ; la feconde, de transformer toutes ces quantités en celles que nous aurions obtenues , fi nous euflions toujours opéré fur une quantité égale de terre, par exemple, fur un quintal , afin de pouvoir établir des comparaifons d’une terre à l'autre : ces calculs fe réduifent aux deux proportions qui fuivent , & qu'il faut répéter pour chaque efpèce de fel. PREMIÈREUNPROPORTION, dont l’objet eff de déterminer la quantite’ réelle de chaque efpèce de [el contenue dans la terre mife en expérience. La quantité d’eau mile à eévaporer Eft à la quantité de chaque efpece des [els obtenue, Comme la quantité d’eau employée pour leffiver Eff au quatrième terme que l’on cherche, c’eft-à-dire, à la quantité reelle de chaque efpèce de [él contenue dans la terre leffivee. Ce qui fe réduit à multiplier fucceflivement les quantités de chaque efpèce de fels obtenus par évaporation, par la quantité d’eau employée pour lefliver, & à les divifer par la quantité d’eau mife à évaporer. SECONDE PROPORTION; dont l’objet eff de transformer tous les refultats obtenus en ceux qu'on auroit eus en opérant fur un quintal de terre. La quantité de terre leffivée Eft à la quantite de chaque efpèce de [els contenue dans le ‘ serre, d’apres le réfultat de la proportion précédente, Comme cent livres Eff au quatrieme terme cherché. sro MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Les exemples multipliés qui vont fuivre, faciliteront l'intel- ligence de rous ces calculs. : On dira peut-être qu'il auroit été préférable de faire ces expériences beaucoup plus en grand , & cette obfervarion fans doute eft fondée jufqu'à un certain point; mais nous prions de confidérer en mème temps, que fi les expériences très en grand ont leurs avantages, elles entraînent aufli de grandes difficultés qui les compenfent. Iln'eft, par exemple, aucune des opérations dont nous rendons compte, que nous nayons faites par nous-mêmes. Nous avons ramaflé les terres dans les coupes & carrières, nous les avons fait tranfporter fous nos yeux; enfin nous avons procédé nous-mêmes aux lixivia- tions & évaporations : nous n'aurions pu opérer fur de très- grandes quantités, fans employer un plus grand nombre d'a- gens , dans nous en rapporter à eux fur beaucoup d'objets , & nous n'aurions pu nous rendre garans de tous les réfultats , comme nous pouvons le faire d'après la méthode que nous avons adoptée. D'ailleurs , quand, par les circonftances où l'on fe trouve, on n'a qu'un temps limité à donner à un objet, l'art con- fifte à choifir les moyens de faire le plus de chofes poflibles en un temps donné, & de la manière la plus utile relative- ment à l'objet qu'on a en vue. ' Notre premier projet, pour éviter de multiplier les dé- tails, avoit été de préfenter en forme de tableaux le ré- fulrat de nos expériences ; mais indépendamment de ce que ces tableaux auroient été néceflairement très-compliqués , il auroit été impoffible d'y faire entrer une infinité d’obferva- tions & de réflexions, qu'il nous a paru eflentiel de ne pas fupprimer. En conféquence nous nous fommes déterminés à donner le réfultat de nos expériences , telles que nous les avons obtenues , c’eft-à-dire, numéro par numéro. Cette marche aura d’ailleurs un avantage, c'eft que tous ceux qui voudront travailler fur cette même matière, pourront où prendre pour modèle notre manière d'opérer, ou changer, sils le jugent à propos, tout ce qui pourra leur paroître fufceptible de perteétion. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. S$If EXPÉER PENCES fur la craie. NOT Cette craie a été prife au deflus de la Roche-Guyon, en fortant par le chemin qui conduit à Gagny, dans une coupe pratiquée le long du chemin, dans les bancs de craie, pour la facilité des voitures ; cet endroit eft fort élevé au deflus de toute habitation. La coupe ou tranchée où a été prife la craie dont il eft ici queftion, préfentoit dans le haut une petite couche de terre végétale; c'eft à dix pieds environ au deflous de cette couche de terre qu'on a fouillé : on a com- mencé par abattre avec un pic environ quatre pouces de la craie qui fe préfentoit à la furface, & ce n'eft qu'au deflous de ces quatre pouces qu'a été pris l'échantillon dont il va être queftion dans cet article. On entrera dans des détails de manipulation un peu plus étendus pour ce premier numero & pour quelques-uns des fuivans , afin de lever les difficultés que pourroient rencontrer ceux qui voudroient s'occuper de recherches de ce genre. On a mis douze livres huit onces, ou le huirième d'un quincal de lacraie n.° I, dans une terrine vernifiée ; on a verfé par-deflus fept livres douze onces d’eau bouillante ; on à agité avec une fpatule pendant aflez long-temps, puis ayant filtré, conune il a éré expofe plus haut, on à retiré crois livres de li- queur, qui donnoir un degré au pefe-liqueur. On à evluite procédé à une cvaporation lente, & on a obtenu d’abord un peu de fclénire; après quoi il ne s’eft plus montré aucun fel criftallifable , & il n’eft refté qu'une petite quantité d’eau-mère cpaifle, mais blarche & limpide ; on a étendu cette dernière de quatre à cinq parties d’eau , puis ayant précipité par une liqueur alkaline , la quantité néceflaire pour arriver au point de faturation, s'eft trouvée d'un gros dix-huit grains d'alkali concret. La liqueur ayant été filtrée, il eft refté fur le papier gris une terre calcaire d'un blanc un peu fale, qui, séchée , pefoit foixante-fix grains. 512 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. On a enfuite procédé de nouveau à l'évaporation de la li- queur filtrée , & on a obtenu, Par une première criftallifation, deux gros vingt-quatre grains de Salpêtre, qui, purifié, s'eft trouvé contenir un quart de fel marin à bafe d’alkali végétal; Et par une feconde & dernière criftallifation , vingt-quatre grains d'un mélange de vingt grains de fel marin à bafe d’alkali végétal, & quatre grains de Salpêtre à bafe d’alkali fixe. RVÉNCMAUDELNTEUT TA TU ON des produits obtenus après la décompofition de l’eau-mére. livres. onces. gr@s. grains. Salpètre à bafe d'alkali végétal. ...........,,...... » » 1 TE Sel marin à bafe d'alkali végéral RHUME SE M. » >» » 61. Certe quantité de matières falines étoit bier celle obtenue des trois livres de liqueurs mifes à évaporer; mais ce n’étoit pas la véritable quantité des fels contenus dans les douze livres huit onces de terres mifes en expérience. En efler, il eft évident quil étoit refté dans la-terre quatre livres douze onces d'eau, c'eft-à-dire , plus de la moitié de celle qui avoit été employée pour lefliver; mais comme, d’après la manière dont nous avions opéré, l'eau reftée dans la terre devoit être, comme nous l'avons déjà expofé plus haut, propor- tionnellement aufli chargée de matières falines que celle ob- tenue par filtration, il étoit poñlible de déterminer la quan- tité inconnue par la quantité connue, & il eft évident, d'a- près les principes établis ci-deflus, que l'opération fe réduifoit à multiplier les quantités de fels obtenus par fept livres douze onces , & à les divifer par trois livres, Ce calcul nous a donné les réfultats qui fuivenr. Quantité des matières [alines contenues dans douge livres huir onces de la craie mife en expértence. Sans addition d'alkalis 222 RNEUTEe ,. Un petite portion d'eau-mère. Avec addi- tion de 4 gros 22grains d'al. k livres. onces. gros. grains Salpêtre à bafe d'alkali végéral. ...... De Lis 7 4 RSe Sel maria à bafe d'alkali végéral. ..... es MS kalifixe végé- tal, Mêmes MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. St; Mémes produits pour un quintal de la méme craie. Sans addfion d'UKARES PRE RE EL EM. ee +... Une pctite portion d'eau-mère. Avecaddi- tion de 4on- livres. onces. gros. grains, ces 2 gros 32 À Salpêtre à bafe d'alkali végétal. ..., DRE 4 1$e 3% grains d'al- { Sel marin à bafe d'alkali végétal... ... » ORES CU 7: kali fixe vé- gétal. En fuppofant qu'on voulût traiter un quintal de cette terre, il en couteroit pour le prix de quatre onces deux gros trente-deux grains de potafle à huit fous la livre, deux fous deux deniers ; on retireroit pour le prix du Salpêtre à dix fous la livre, deux fous onze deniers; ainfi il ne refteroit que neuf deniers par quintal de terre pour la main d'œuvre, pour le leflivage & pour les frais d'évaporation. EXPÉRIENCES Sur la craie. N° II. À peu de diftance de l'endroit où a été prife la craie, n.° L, prefque au même niveau, en fuivant le côteau vers Clas chalofle, on trouve une première roche de craie découverte. Ces roches , qui font en grand nombre dans les environs de la Roche-Guyon, paroiïflent étre, comme nous l'avons dit au commencement de ce Mémoire, les fommets dégradés d'une ancienne falaife de craie , dont le pied fe trouve caché par les éboulemens qui fe font faits fucceflivement; il y à donc apparence que les parties les plus élevées font expo- fées à lation de l'air depuis une longue fuite de fiècles. Les endroits de cette roche qui étoient abrités de la pluie; croient recouverts d'une efpèce d’eforefcence blanche, de confiftance farineufe. Les pigeons font très-friands de ces eforefcences , & s'aflemblent de tres-loin pour les becqueter ; aufi font-elles défignées dans le pays fous le nom de Sal- petre de pigeon. M. Clouet, lun de nous, avoit leflivé l'année précédente cinquante livres de cette matière, prife fuperficiellement en cet endroic, & il en avoit obtenu par Ace 514 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. lixiviation avec des cendres de bois neuf, & pat évaporation ; du fel marin à bafe d’alkali végétal, du fel marin à bafe terreufe, & environ un quart de Salpètre. Pour dérerminer fi les mêmes fubftances falines fe trouvoient à une certaine pro- fondeur , nous avons abattu dix pouces de la fuperficie, & nous avons trouvé deflous un craie très-blanche, dont nous avons pris un échantillon. Nous avons mis douze livres huit onces de cette craie dans fept livres huit onces d’eau de rivière bouillante ; nous avons remué ce mélange, nous l'avons Jaïflé repofer un temps fuffifant; puis ayant filtré, il a pañlé quatre livres huit onces de liqueur marquant ! de degrés foibles à l'aréomètre , & qui évaporée n'a donné qu'une cau-mère incapable de criftalli- fer. À yant étendu ce réfidu avec de l’eau, nous avons employé, pour précipiter la terre , quarante-fix grains un cinquième d’al- kali fixe concret; après quoi, ayant procédé de nouveau à l'évaporation , nous avons obtenu par une première criftalli- fation , trente-fix grains de beau fel marin à bafe d’alkali végétal bien blanc , & par une feconde, trente grains du même fel coloré & chargé de matières extraétives. En opérant comme fur le n.° Ï, ceft-à-dire, en muli- pliant les produits obtenus pour fept livres huit onces, & divifant par quatre livres huit onces, on trouve : Quantité de matière [aline contenue dans douze livres huit onces de terre. Sans addition d’alkali.......44..4.......2. Une petite quantité d'eau-mère, Aprés l'addi- tien d'uneros 7grains+ d'al kali végéral. L livres. onces, gros. grains, Sel marin à bafe d’alkali végétal. .,... H » I. 443 Méêmes produits rapportés au quintal de terre. Sans addition d'alkali............,....,... Une petite quantité d'eau-mère, Avecl'addi- tion d’une on- livres. onces. gros, grains. . . \ ; . La ce éegrains ? » Sel marin à bafe d'alkali végétal. ...., D, TL AS. 2e d'akali ‘fixe végétal. MÉMoiREs SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $1$ Ces réfultats prouvent que la craie, à une certaine pro- fondeur, ne contient pas les mêmes matières falines qua fa furface, ni en même quantité; car le produit en fel matin que M. Clouet avoit obtenu l’année précédente, étroit beau- coup plus abondant, & il avoit retiré en outre une petite poition de Salpétre. EX PRÉ R DENICE S Sur la craie. N° III. A peu de diftance de la roche, dont on a tiré l'échan- tillon de craie, n.° II, fe trouve une autre roche de craie, connue dans le pays fous le nom de pierre fourchée ; elle eft coupée à pic des deux côtés ainfi que par-devant, & forme une cfpèce d’éperon ; mais on peut y arriver par-derrière , quoiqu'avec quelque difficulté. Nous avons trouvé vers le haut de cette roche, dans un endroit abrité de la pluie & à l'expofition du nord , la même efflorefcence blanche, jau- nâtre, farincufe, que ci-deflus, & que nous avons déjà défignée fous le nom de Salpétre de pigeon. Nous en avons pris un échantillon, peu confiderable il eft vrai, que nous avons gratté à la furface , & fur lequel nous avons fait les expc- riences qui fuivent. Nous avons verlé trois onces d’eau bouillante fur quatre onces de cette fubftance ; nous avons retiré par filtration une once quatre gros de liqueur, qui, mife à évapotgr, nous a donné fix grains de fel marin à bafe d’alkali minéral, aflez bien criftallifé ; & il nous eft refté une eau-mère qui, def- féchce , pefoit huit grains. Cette eau-mère, d’après Jes expc- riences auxquelles nous l'avons foumife, croit compofce d'en- viron trois parties de nitre calcaire, & d'environ une de fel marin calcaire; en appliquant à ces réfulrats les calculs rap— portés au n.° [, c'eft-à-dire , en multipliant les produits par trois onces, & divifant par une once & demie, on trouvera: Tctij çté MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Quantité de matières falines contenues dans quatre onces de terre. livres. onces. gros. grains: se Sel marin cn criftaux réouliers....... æ » ES CE Sans addition Nitre à bafe calcaire............... » » ne Ce d'alkali. Sel marin à bafecalcaire........... D » DA: RAISON EEE, »” » LE 184. Mémes produits rapportés au quintal de terre. ; .. ) Sel marinen criftaux réguliers....... » 8. 2. 48. Fee © Nitre à bafe calcaire... ... Aoadoone CES 3 2048. ai Sel marin à bafe'calcaire. ..5.. 1... D MU CNT: 1.1. 3e 32, 40 Il eft inutile d’avertir que des opérations faires fur d’auffi petites quantités , ne font pas fufceptibles d'une trés-grande précilion ; aufli ne les rapporte-t-on ici au quintal, que pour mettre de l'uniformité dans les téfulrats, & pour qu’on puille les comparer plus aifément entre eux. On avertit donc, une fois pour toutes, qu'il n’y a dans ce Mémoire de réfultats très exacts, que ceux qu'on a obrenus d'échantillons de terre au moins du poids d’une livre ; les expériences qui ont été faites fur de moindres quantités, ne doivent être regardées que comme des à peu près : au furplus, on à pris même dans les moindres expériences toutes les précautions nécefaires pour arriver dtdes réfulrats aufli exaëts que ce genre d'opérations peut le comporter. Pour traiter un quintal de cette terre, il faudroit employer environ fept onces de potafle, qui, à huit fous la livre , cou- teroit crois fous fix deniers; on obtiendroit environ fept onces de nitre, qui, à dix fous la livre, vaudroit quatre fous quatre deniers : : 1l refteroit par conféquent pour la main d'œuvre & jes frais d'évaporation, dix deniers ? par quintal de terre. On verra par les expériences qui fuivent, qu'en général l'eforelcence farineufe, nommée Sulpétre de pigeon, content MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. g17 principalement du fel marin à bafe terreufe, & qu elle ne pourroit être le plus fouvent traitée qu'à perte ; mais l'expé- rience précédente prouve qu'on ne doit point en faire une loi generale, & qu'elle contient quelquefois une quantité aflez confidérable de Salpètre. EXP PEUR D 'EINCES Faites [ur la fubflance, N.° V, vulgairement appelée mort du Salpètre. Les Salpêcriers de la Roche-Guyon font, comme on la déjà dit, dans l'ufage de détacher avec une efpèce de ha- chette , les cMorefcences de Salpêtre qui fe montrent à la furface des rochers dans le voilinage des habitations. Ils reviennent au bout de fix femaines ou deux mois dans len- droit qu'ils ont précédemment travaillé, & communément ils y retrouvent à peu près autant d'efflorefcences falpétrées qu'ils 1. x 705. grains d’al- kali. Mémes produits rapportés au quintal de terre. Sans addition dr Inè d'alkali. } De l'eau-mèêre de Salpètre pur. . Avec addi- tion de 3 on- ces 4gros 53 p Salpètre pur...>............. LEE CNE ST ET grains 5 d'al- kali. EH eft évident que cette terre contient du Salpètre tout formé à bafe d’alkali fixe, quoiqu'elle n'en ait pas donné par évaporation MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, S$2r évaporation avant la décompofition de l'eau mère par l'al- kali; fans doute ce Salpétre étroit empâté dans l'eau mère qui ne lui a pas permis de criftalifer. Ce quil y a de cer- ain, ceft que les trois onces quatre gros cinquante-trois grains d’alkali qu'on a employés, ne pouvoient pas former, en portant tout au plus haut, au de'à de cinq onces de nitre: or on a retiré près de neuf; ainfi des huit onces fept gros foixante-un grains : de Salpêrre que cette terre a donnés par quintal, il y en avoit quatre onces au moins de tout formé à bafe d'alkah fixe. Le prix de la potaffe néceflaire pour exploiter un quintal de cette terre, feroit d’un fou neuf deniers :. La valeur du Salpêtre qu'on 6btiendroit, feroit de cinq fous fept deniers :; ainfi il y auroit trois fous onze deniers : de bénéfice par quintal de terre, pour les frais de main d'œuvre & d'évaporation. EXPÉRIENCES Sur leflorefcence. N.° VIIL. Vers le bout du village de Clachalofe , nous avons trouvé une habitation ou cave, dont l'entrée avoit été bouchée pen- dant un grand nombre d'années par un éboulement de craie. Cette cave venoit d’être décbarraflée & ouverte tout récem- ment; elle étoit encorc fort humide : la craie qui formoit les murs & les voûtes étoit couverte d’une efflorefcence terreufe, blanche, pulvérulente , farineufe, dont nons avous pris un échantillon, Il paroït qu'on trouve aflez communément de ces mêmes cforefcences dans tous les fouterrains du pays, dans lefquels il ne fé fait pas une libre circulation d'air. Les Salpêtriers confondent en général toutes ces efflorefcences fous le nom de Salpètre de pigeon. -Nous avons leflivé trois onces de fubftance avec trois onces d’eau bouillante ; nous avons retiré une once un gros de liqueur qui, mife à évaporer, a donné quatre grains d’un fel terreux d’une nature particulière ; on le prendroit pour de la fclénite, sil métoit un, peu plus folubie, &fi, par Vvy $22 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. l'acide vitriolique, on n'en dégageoit beaucoup de vapeur d'acide marin, Nous cara&ériferons, dans la fuite de ce Mé- moire, ce fel fous le nom de fel marin à bafe terreufe parti- culière. On a obtenu enfuite, en continuant d'évaporer, quatre grains de Salpètre à bafe d'alkali végétal. En calculant d'après ces produits, on trouve : Quantité de marières [alines contenues dans trois onces de terre. livres. onces. gros. grains. . Sans addi- 7 Sel marin à bafe rerreufe particulière. >» » » 10 % tion d'alkali. $ Sel marin à bafe d'alkali végétal. ..... x» » » 10 + > » PL 11)S Mémes produits rapportes au quintal de terre. Sans addi- ? Sel marin à bafe rerreufe particulière. VEREUNE 9 6 69 : tion d'alkali. f Salpètre à bafe d’alkali végétal. ....... 5 9 6 69 À 1 3 s 67 Ti. | Comme cette fubftance n'exige aucun débourfé pour la potafle, & que le Salpêtre y eft tout formé à bafe d’alkali fixe, on voit qu'elle pourroit être traitée avec beaucoup d'avantage par les Entrepreneurs ou Salpètriers. EX PRÉ RAEN CES Sur la craie du trou de Bon-Fourquières. Dans le bas de la côte entre la Roche-Guyon & Cla- chalofe, trois fois plus loin environ du premier de ces deux endroits que du fecond , à foixante dix ou quatre-vingts pieds au deflus du niveau de la rivière, on trouve une ouver- ture triangulaire, qui fe prolonge aflez avant fous la mon- tagne. Ce trou n’eft pas une fente perpendiculaire de l'ef- pèce de celles qu'on obferve dans prefque tous les bancs horizontaux ; car, dans ce cas, l'ouverture devroit avoir eu lieu MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 23 à peu près du haut en bas de la montagne, tandis qu'au ou de Bon-Fourquières les bancs de craie font bien joints au deflus du trou, & n'offrent aucune apparence de fente. En rapprochant cette oblfervation de quelques autres air- conftauces , il nous à paru très-probable que cette ouverture avoit été faire par une fource ou ruifleau qui couloit autre- fois en cet endroit, & dont le cours a été détourné, & s'eft ouvert fans doute quelque autre voie fouterraine. Quoi qu'il en foit , cette ouverture, qui eft aflez grande à fon embouchure pour laïfler entrer trois ou quatre perfonnes de front, va en fe rétréciflant au bout de quinze à dix-huit pas , au point qu'un homme de moyenne taille n'y pañe qu'avec peine, encore n'y peut-il tenir que courbc. Nous avons pénétré dans cette ouverture jufqu'à foixante ou foixante- dix pas; plus loin elle fe rétrécit au point qu'il eft impoffible d'aller plus avant. Ce trou eft creufé en pleine craie, & fes parois offrent, dans toute l'étendue quenous avons parcourue, qu'une mafle de craie mêlée de cailloux. Le fo! fur lequel on marche, s'élève infenfiblement à mefure qu'on avance; ce qui femble confirmer l'idée que ce canal fourerrain à été formé par les eaux. Il paroït que les enfans vont jouer & pénètrent fort avant dans ce trou; on y trouve des noms écrits à une aflez grande profondeur : & ce qui nous a paru fingulier , c’eft que, dans la partie la plus intérieure où nous ayons pénétré, la craie étoit tapiflée d'un grand nombre d’infeêes ailés ou de mou- cherons, dont nous n'avons pas déterminé l'efpèce. EXP É RU 'EUN CES Sur La craie, N.° IX. Nous aurions défiré fans doute pouvoir prendre un échan- tillon de la craie dans la partie la plus enfoncéce du canal fouterrain de Bon - Fourquières; mais comme il étoit trop reflerré, & quil étoit impoflible d’avoir le jeu- du pic, ni même celui d'un marteau un peu fort , à caufe du peu d'efpace, Vyvi $24 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. nous avons @té forcés de nous borner à quarante pieds environ de l'ouverture extérieure. Cet échantillon a été pris à un pied & demi de niveau du fol. On a abattu d’abord cux pieds de craie fur le côt, & ce n'eft qu'après ces deux pieds, & par conféquent en plein banc, qu'a été prife la craïc qui fait le fujet des expériences fuivantes. On à leflivé douze livres huit onces de cette craie avec fept livres douze onces d'eau bouillante; on a filtré, & on a reuré cinq livres de liqueur à : de degré de l’aréomètre ; ayant mis à évaporer, on n'a obtenu aucun autre fel criftal- lifable , que de la félénie. L'eau mère qui reftoit, croit très-amère , mais limpide & peu foncée en couleur; on la étendue d’eau , & on a été obligé d'employer, pour préci- piter toute la terre, un gros dix-huit grains: d’alkali concret; ayant enfuite fait évaporer de nouveau, on a obtenu un gros trente-quatre grains de Salpétre à bafe d’alkali fxe. En opé- rant fur ce réfultat comme fur les Numéros précédens, on trouve : Quantité de matières falines contenues dans douge livres huit onces de craie. Sansaddition } De l'eau mère de Salpètre d'alkali. Aprèsl'addi- À tiond'un gros "CI { SEX ives. onces pros. grains, A RE Salpètre pur à bafe d'alkali végétal... , of DE aq Kalï fixe. Méêmes produits rapportés au quintal de terre. Sans addiri Ex AE } De l'eau mère de Salpêtre, Après l'ad- dition d’une once 24 me ET Salpètre pur à bafe d'alkali végéral. » ° 2 md PE kali fixe vé- | gétal. \ MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 425 Il en couteroit un fou en porafle, pour travailler un auinral de: cette terre; on retireroit un fou quatre deniers : de Sal: pêtre : ainfi il ne refteroit que quatre deniers = par quintal pour les frais de la main d'œuvre & d’évaporation. ENX-PAE RIT EUNECE!S: Sur la craie. N° X. Ï! nous à paru effentiel de comparer avec la craie précedente celle de l'entrée du même trou de Bon-Fourquières , qui avoit été éxpofée à l'air pendant une longue fuite d'années. En conféquence, nous avons gratté , à une toife environ de l'ou- verture du trou; un pouce de la craie fuperficieile qui étoit couverte de lichens; après quoi nous avons creufé environ de quatre pouces , pour prendre l'échantillon qui fait l'objer des expériences fuivantes. On a verfe fur fix livres quatre onces de cette craie, trois livres quatorze onces d'eau bouillante, & on a retiré, par fiiration , deux livres huit onces de liqueur à quatre degrés & demi de l'aréomètre : ayant mis enfute à évaporer, on n'a reuré que de l’eau mère peu colorée , maïs très-Cpaifle ; on la étendue d’une fuffifante quantité d'eau ; puis ayant pre- cipié, la quantité d’alkali employée s'eft trouvée d’une once fept gros trente-un grains. Ayant mis à évaporer , on a ob- tenu par une fuite de criftallifations fucceflives , deux onces trois gros trente-neuf grains de Salpètre pur à bafe d'alkah , & foixante-onze grains de fel marin à bafe d’alkali végétal. En mul- tipliant ces produits par trois livres quatorze onces, & divifanc par deux livres huit onces , comme on la enfeigné ci-deflus, on trouve: Quantité de matières falines contenues dans fix livres quatre onces de la craie mife en expérience, Pt } Eau mère de Salpêtre & de fe] marin, 526 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Avec addi- tion de zon- livres. onces. gros. grains ces6 gros 56 | Salpétrepur............ cc cpetes DIE 6 20 + grains 1 d'al- { Sel marin à bafe d'alkali végétal. ..... » nn 1 38 kali fixe vé- gétal. Toraz des matières faliness......,........4. 1: n 3 7 583 Mémes produits rapportés au quintal de craie. arr } Eau mère de Salpètre ou fel marin. Avec addi- tion de 2 liv. 13 onces 4 À Salpêtre pur à bafe d'alkali végéral. ... UE TANET gros4ograins {” Sel marin à bafe d'alkali végétal. ..... se 4e s uZz d'alkali fixe végétal. sinon ToTaL par quintal de craic..... dense eee IE 4 18 Ïl en couteroit en potafle, pour traiter chaque quintal de cette craie, une livre deux fous neuf deniers ; on reüreroit en Salpêtre une livre onze fous quatre deniers : donc il y auroit de bénéfice par chaque quintal huit fous fept deniers ; fur quoi ily auroit à déduire les frais de main d'œuvre & d’évapora- tion. EXP RGB NEG ES Sur la terre. N.° XI. 5 Nous avons jugé qu'il étoit impofñlible que la craie qui forme les parois du trou de Bon-Fourquières, füt imprégnée de Salpêtre , fans que la terre qui forme le fol de ce même trou n'en contint aufi plus ou moins. Cette terre étoit un mélange de craie, de terre végétale, de débris végétaux, &C. On y trouvoit même de petits oflemens d'animaux. Nous avons verfé fepr livres douze onces d'eau bouil- lante fur douze livres huit onces de cette terre ; nous avons enfuice retiré, par fiiration, trois livres fix onces de liqueur MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $217 qui donnoiït 1 { degrés à laréomètre ; ayant mis enfuire à évaporer, nous avons obtenu, d'abord un peu de félénice, puis une eau mère d’un aflez joli vert. Ayant étendu cette dernière d’une fuffifante quantité d’eau , nous avons procédé à la précipitation, & nous avons employé, pour arriver au point de faturation, deux gros foixante-dix grains : d’alkali concret ; ayant évaporé de nouveau, nous avons obtenu quatre gros foixante grains de Salpètre pur , d’où nous avons conclu : Quantité de matières falines contenues dans douze livres huit onces de la terre mife en experience ren F Un peu de félénite. Avec addi- tion de 6 gros éograins d'al- kali concret. ; ï ë livres. oncés. gros. grains, Salpêtre à bafe d’alkaliun peujaunâtre. » or ET Mémes produits dans la füppofition où on auroit cpere fur un quintal de terre. Sans addition Séléni d'alkali. CRE Avecaddi- tion de 6 on- ces 6 gros47 V Salpètreabafe d'alkaliun peujaunâtre.. » 11 » 36 ge d'alkali xe végétal. Six onces fix gros d’alkali repréfentent à peine neuf onces & demie de Salpêtre ; cependant on en a obtenu onze onces, ce qui paroît prouver que certe terre contient un peu de Salpèrre à bafe d’alkali tout formé, mais qui n'a pas criftal- fé, parce qu'il étoit intimement uni avec l’eau mère, & comme empaté par elle. Ïlen couteroit , pour traiter un quintal de cette terre, trois fous cinq deniers en potafle ; mais on retireroit pour fx fous onze deniers de Salpêrre : ainf il refteroit trois fous fix de- 528 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. niers de bénéfice par quintal de terre, fur quoi il y auroic à déduire les frais de main d'œuvre & d'évaporation. E X P.É RE N'CES Sur les craies f'alpêtrées de Mouffèau & des environs. Après avoir parcouru toute la partie comprife entre la Roche-Guyon & l'extrémité du village de Clachalole, nous nous fomimes tranfportés à celui de Moufleau, Ce village, qui neft éloigné de la Roche- Guyon que d’une lieue tout au plus , préfente à peu près les mêmes circonftances : la craie y eft également découverte & coupée à pic dans une cten- due de côteau de trois cents toifes environ ; mais cette craie eft en général plus tendre que celle de la montagne de la Roche- Guyon; fes parties font moins liées entre elles, elle eft plus fendillée, elle s’'alrère plus facilement à l'air, & les éboule- mens y font plus fréquens. L'expoñition du côteau eft à peu près la méme qu'à la Roche Guyon & à Clachalofe, il ya de même des habitations creufées dans le bas , avec cette différence feulement que la | montagne cft beaucoup plus élevée à la Roche-Guyon & à Clachalofe qu'à Moufleau. EXPÉRIENCES Sur la craie. N.° XII. Un peu après l'églife de Moufleau , en defcendant vers le couchant, fe trouvoit une cfpèce de reflerre ou de hangar creufe dans la craie, ouvert en plein air, & qui paroifloir abandonné depuis long-temps. Toutes ls parois intérieures Ctoient couvertes FRA IE falpétrées en longues & fines aiguilles entrelacées les unes dans les autres, & qui for- molent une couche de trois ou quatre lignes d'épaifleur. El s'étoit détaché des parties confidérables de ces efHlorefcences fat lpétrées > qui croient tombées par terre, & qui y formoient yne éfpece de neige. Nous avons esartlé comme inpor- tant MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 529 tant de conftater fi le Salpétre , dont étoient tapifiées les parois de ce hangar fouterrain, étoit purement fuperficiel, ou bien sil pénétroit à une certaine profondeur dans la craie. En conféquence , nous avons abattu d’abord à l'un des côtés de la reflerre où hangar, & à quatre pieds environ du niveau du fol, trois ou quatre pouces de la craie qui fe préfentoit à la farface , & nous avons pris à la fuite l'échantillon qui fait le fujet des expériences qui fuivenr. Nous ayons verfé fept livres douze onces d’eau bouillante fur douze livres huit-onces de cette craie; nous avons retiré, par filtration, quatre livres onze onces d’une liqueur claire mar- quant cinq degrés : à l'aréomètre; ayant fait évaporer, nous avons obtenu, fans addition d’alkali, quatre gros foixante grains de beau Salpètre , très-blanc & très-pur; après quoi il n'eft plus refté que de l'eau mère. Cette dernière ayant été étendue d’eau , il a fallu employer, pour en précipiter la terre, une once un gros cinquante-huit grains : d'alkali : ayant éva- poré de nouveau, nous avons obtenu, par fix criftallifations fucceflives , une once fept gros trente-quatre grains de Sal- pêtre très-beau & très-pur, & trois gros trente-huit grains de fel marin à bafe d’alkali végétal. En multipliant ces produits par fept livres douze onces, & divifant par quatre livres onze onces , on trouvera : 4 Quantite’ de matières falines contenues dans douxe livres huit onces de la craie mife en expérience. livres. onces. gros, grains s dditi Salpêtre à bafe d’alkali fixe parfaitement ansiaeon PUNCGETES-Dlanc ete. ssloiste mois cie AUS Le pin A Eau mère de Salpêtre & de fel marin, Avec addi- tion de z on- HAS ‘ . ù À Slaana tale daté. 4 ANUS grains+ d'al- À Ju 0. L kali fixe, Xxx 530 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Mémes produits rapportés au quinral de la même craie. livres: onces. gros. grains» à AL, VS FRERES : PME NT Salpêtre à ba{e d'alkali fixe parfaitement DRE à pur & très-blanc....:........... n ÉPAE ORET d'alkali. \ Eau mere de Salpètre & de fel marin. Avec addi- tion d’une li- ! | vre 1 once r À Salpêrre à bafe d'alkali fixe très-pur... x. 94 ASE gros 2$ gr. + { Sel marin à bafe d'alkali végéral. .... PSS $- PORTES d'alkali fixe végétal. À TorTALz des matières falines par quintal.....,.... 2. Te ©. $9+ Il en couteroit, pour traiter un quintal de cette terre, huit fous un denier en potafle ; le produit en Salpétre , à dix fous la livre, feroit de vingt fous dix deniers 1; ainfi le béné- fice feroic de douze fous neuf deniers ? par quintal de terre, fur quoi eft à déduire la main d'œuvre & les frais d'éva- poration. EXPÉRIENCES Sur la craie. N° XII, Près de là étoit un autre endroit creufe dans la craie, éga- lement ouvert à l'air, & dans lequel le Salpêtre fe préfen- toit prefque en aufli grande abondance. On a détaché dans cette efpèce de cave un morceau de craie de trois pouces d’épaifleur , iequel étoit rout couvert d'efflorefcences, & on a fait fur ce morceau les expériences qui fuivent. On a verfé fur quatre livres de cette terre trois livres d’eau froide , & on a tit, par filkration, une livre douze onces : d’eau à cinq : degrés de l’aréomètre. On a mis à évaporer, & on a obtenu, par une première criftallifation, quatre gros douze grains de nitre à bafe d’alkal fixe. On a enfuite précipité la terre de l'eau mère par fix gros foixante-quatre grains d'alkali fixe; puis évaporant de nouveau, on a obtenu une once un gros vingt-huit grains de Salpêtre à bafe alka- line, & deux gros trente-deux grains de fel marin à bafe d'al- kali végétal. En opérant fur ces produits comme ai-deflus , on trouvera: Mémoires SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 531 Quantité de matières falines contenues dans quatre livres de la craie mife en experience. F2 J È à livres. onces. gtos. grains, Sans addition ? Sa'pêtre pur à bafe d'alkali Vécétal.. ss sals a | pue Le d’alkali. Eau mère de Salpètre & de fel marin. Avec ad- dition d'une once 3 gros | Salpètre pur à bafe d’alkali végétal....,, ss 1. 9. 582 8 43 grains + f Sel-marin à bafe d'alkali végétal. ....,.. » on» 4, Le, d’alkali fixe végétal, Mémes produits en opérant [ur un quintal e craie. Sans addition ? Salpêtrepur à bafe d'alkali végétal. .,..,, 1, O$. 7. 3r, d'alkali. Eau-mère de Salpètre & de fel marin. Avec addi- tion de 2 livr. 4onces2pros | Salpêtre pur à bafed'alkali végétal. ....:. 3: Nr NIES NT 4 gr. + d'al- { Sel marin à bafe d’alkali végétal. ......, T2. 06.17 66 kali fixe vé- gétal. | ee Totaz des matières falines contenues dans 100 livres defCrAICs. ES else aie ele Soie anne anne cire Fe 5e al 7 Tr 49e A RE PEREZ Pour traiter convenablement un quintal de cette craie, il en couteroit en potafle dix-huit fous un denier ! ; on retireroit par la vente du Salpètre deux livres quatre fous fix deniers :. I ref croit donc en bénéficeune livre fix fous cinq deniers par quintal, ce qui furpafle de beaucoup l'avantage des terres les plus riches, même des meilleurs plâtras de Paris. EXPÉRIENCES Sur la craie. N.° XIV. ‘Sous le morceau N.° 13, onen a détaché un fecond égale: ment de trois ou quatre pouces d’épaifleur, afin de conftater jufqu'à quelle diftance de la furface fe rencontroit le Salpérre. On a leffive à froid quatre livres de cette terre par trois livres d’eau. Ila pañfé une livre treize onces : de liqueur à deux degrés de l’aréomètre. À yant fait évaporer, on aeu, par une première criflallifation X xx ij 532 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: & fansaddition d’alkali fixe, deux gros de Salpêtre à bafe d’alkali fixe aflez pur; après quoi l'eau mère ayant €té décompofée parun gros quarante-huit grains d'alkali, on a obtenu, en continuant d'évaporer , environ deux gros de nouveau Salpètre également à bafe d’alkali fixe, & point du tout de fel marin. En tenant compte, comme ci-deflus, du Salpèrre diflous par l'eau & reftc dans la terre, on trouvera les réfultats qui fuivent : Quantité de matières falines contenues dans la craie mife en experience: | livres, onces, gros. grains: Sansaddition Y Salpêtre à bafe d’alkali fixe végétal... > MEME TE d'alkali. Eau-mère de Saïpètre. Avec addi- tion de 2 gros $1 grains ? P Salpètre à bafe d'alkak fixe végétal... » TT d'alkali fixe végéral. Mémes produits en opérant fur un quintal de cette craie. Sans addition Ÿ Salpêtre à bafe d'alkali fixe végétal... » 10. 1. 5 Fe d'alkali. f Eau mère de Salpërres Avec addi- tion de 8 on- ces 3 gros $7 grains d'al- Salpêtre à bafe d'alkali fixe-végéral.... » 10: 1 $2X kali fixe vé- gétal. Toraz des matières falines par quintal Il en couteroit en potafle, pour traiter un quintal de cette craie, quatre fous trois deniers ; on retireroit pour douze fous dix deniers de Salpètre : ainfi il y auroit huit fous fept de- niers de bénéfice par quincl; ce qui, déduction faite des frais de main d'œuvre & d’évaporation , laïfleroit encore aux Entrepreneurs un profit très-confidérable. Au deflous du niveau de la cave ou reflerre fouterraine dont on vient de parler, & à peu de diftance, fe crouvoit une petite vacherie bien fermée & peu aérée. Elle croit creufce & voütée en pleine craie; cependant les parois intérieures ne MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $33 préfentoient aucune apparence d’efflorefcences falpétrées. La voûte au contraire étroit recouverté de lichens , fous lefquels fe trouvoit une efpèce de craie farineufe qui avoit un goût de fel matin. Par quelle circonftance ne fe trouvoit-il point de Salpêtre dans un lieu qui paroïfloit fi avantageufement fitué pour en produire? Etoit-ce faute d'un courant d'air aflez libre? ou bien eft-ce que la craie ne peut pouffer que pendant un certain temps des efflorefcences falpétrées , & qu'après qu'elle seft épuifée, elle n offre plus que des eforefcences farineufes, chargées de fel marin à bafe alkaline & cerreule ? C’eft ce qu'il ne nous à pas été pofhble de déterminer. La cave du fieur Gritte, Débitant de fel & de tabac, & Marchand de vin à Moi , fituée vers le milieu du vil- lage , dans fa maïfon d'habitation, nous a donné lieu de faire une obfervation fingulière. Cette cave eft creufée en plein banc de craie , elle eft affez bien fermée & humide ; la voûte ainfi que les parois n'ofltoient aucune apparence de Salpètre : mais il avoit été conftruit au milieu de cette cave un mur de féparation en moellons de craie, qui offroient un fpectacle fingulier ; tous les moellons étoient couverts d'efflorefcences falpécrées , tandis que le mortier ter- rcux & fableux qui formoit les joints , n'en préfentoit pas un atome. Il eft donc clair que cette cave étoit fuffifamment aérée, & qu’elle étoit dans des circonftances propres à la formation du Salpètre. Il n'y a donc d’autres moyens de con- cevoir pourquoi la voûte & les parois nen contenoient pas, qu'en fuppofant que cette cave étoit très- ancienne, qu'elle avoit produit ; comme toutes les autres, du Salpétre Fa fon temps; mais que la craie qui fe préfencoit à à la furface, s'étoit épuilce à à la longue, & ne contenoit plus les matériaux né ceflaires pour ns formation du Salpêtre. Tout près de là étoit une autre cave un peu plus acrée , il eft vrai, mais qui fe trouvoit couverte de toutes parts d’efflorefcences falpétrées. Le même fieur Gritte à une fuperbe cave de foixante-dix pieds de profondeur à l'extrémité du village; elle eft éga- le] lement creufée dans la craie, & elle lui fert À conferver 1 :534 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. vins qui font l'objet de fon commerce. Cette cave, dans le partie antérieure , & par confequent la plus aérée, préfentoit des eforefcences falpètrées ; mais à peu de diftance de l’en- trée, on cefloit abfolument d'en voir, & toute la craie fe trouvoit à la place recouverte du même lichen dont on a parlé plus haut. Cetre obfervation fembleroit indiquer la néceflité d’un courant d'air renouvelé pour la produétion - du Salpêtre. Ce- pendant une autre obfervation femble détruire cette première, c'eft qu'en hiver le fol de cette cave fe couvre jufqu'au fond d’eftlorefcences falpétrées très-2bondantes, qu'on balaye, & qui fe reproduifent au bout de quinze jours. Ce n'eft donc pas faute d’air qu'il ne fe forme pas de Salpètre a la voûte, puifqu'il s'en forme dans le bas où l'air ne fe renouvelle pas beaucoup mieux : ily a donc une autre caufe qui s'oppofe à la formation du Salpêtre dans la partie la plus enfoncée de cette cave. L’arclier du fieur Benoît, Salpétrier, qui eft creufe dans la craic, & qui fe trouve à peu de diftance de la cave dont il vienc d'être queftion, donne lieu à la même obfervation ; l'entrée de cet atelier étoit coute tapiflée d’efflorefcences falpèurces, & le fond au contraire ne préfentoit qu'une matière farineufe dont -nous avons raflemblé un petite quantité fous le n.° XV. EXPÉRIENCES j Faites fur la fubffance farineufe. N.° XN. Nous avons leflivé deux onces de cette matière avec une once & demie d’eau ; nous avons retiré deux gros & demi de \ liqueur, qui, mife à Cvaporer , a donné fix grains d'eau mère très-épaifle , dont il s'eft dégagé, par l'addition de Fhuile de vitriol , des vapeurs d'eau régale très-pénétrantes ; Cette eau mère contenoit par conféquent deux tiers à peu près d'efprit de nitre contre un de fel marin. En fuppofant qu'on eût opéré fur un quintal de la même terre, on auroit eu, d'après des calculs analogues à ceux ci- deflus indiqués, deux livres huit onces de la même eau mère, compolée de deux tiers de nitre calcaire, & d’un tiers de fel marin calcaire. J1 ne paroît pas qu'il faille un intervalle de temps très- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DÙ SALPÊTRE. $35 confidérable, pour que le Salpêtre à bafe terreufe fe tranf- forme en Salpêtre à à bafe d’alkali fixe, & fe montre à la furface de la craie; car ayant examiné un endroit où la montagne s'étoit éboulce deux années auparavant, & où de nouvelles fur- faces de craie avoient été découvertes , les eMorcfcences de Salpêtre y étoient auffi abondantes qu'en aucun autre endroit. EXP ÉRIEN-CES Sur la craie. N.° XVI. Le point important étoit de déterminer fi la craie, prife au centre de la montagne & dans des endroits qui n’avoient jamais été expolés à à l'air, contenoït du Salpêtre, foit à bafe terreufe, foit à bafe alkaline : un endroit de Moufleau où la montagne s’étoit choulce l'année précédente, & où on venoit de creufer tout nouvellement une cave, nous a paru propre à fixer nos idées fur cet objet. Ce n'eft pas même à l'entrée de cette cave qu'a été RE Feéchantillon dont il va être quef- tion ; mais dans la partie la plus profonde, & qui n’éroit creufée que depuis quelques jours : on a de plus abattu un bon pied de craie, pour ne prendre aucune des furfaces qui pouvoient avoir été en contact avec l'air, & c’eft fous ce pied de craie qu'on a pris l'échantillon qui fait l’objer des expériences fuivantes. Nous avons leflivé douze livres huit onces de cette craie avec fept livres douze onces d’eau bouillante ; nous avons re- tiré quatre livres fix onces de liqueur, qui marquoit : de degré à l'arcomètre. Nous avons mis à évaporer, & nous avons obtenu quelque apparence de fel marin en très-petite quan- tité ; il eft refté enfuite un peu d'eau mère, dont la terre a été précipitée par vingtun g grains . = d’alkali fixe concret : ayant enfuite éva aporé de nouveau, nous avons obtenu une matière falme, partie dépofée au fond du vafe, partie for- mant pellicule , mais fans aucune Eure ni cuiftalhfacon ré- gulière; elle pefoit trente grains : la portion qui occupoic le fo du va, pers être un {el marin à bafe d’alkali vé- getal;2& en verfant deflus ‘de l'huile de vitriol ; il s'en élevoit É lé champ des vapeurs trés-fufloquantes d'acide marin, 536 MÉMoIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Quant à la pellicule , elle nous à donné, au moyen de fhuile de vitriol, des vapeurs crès-analogues à celles de l’eau régale; en conféquence , nous avons évalué que la portion nitreule de ce dépôt falin pouvoit pefer environ fix grains, & la portion marine vingt-quatre. Ce nicre, au furplus, quel qu'il foit, ne déconne pas fur les charbons, ce qui femble prouver qu'il n’eft pas à bafe d'alkali fixe; d'un autre côté, ce fel n'éroit nul- lement déliquefcent ; ce qui femble écarter toute idée de nitre à bafe terreufe. La petite quantité de ce fel qui nous eft reftée, ne nous a pas permis de poufler plus loin nos recher- ches pour en déterminer la nature. En appliquant le calcul ordinaire aux produits de cette IE opération ; On trouvera; Quantité de matières falines contenues dans douye livres huie onces de la terre mife en experience. Sans addition , ” livres, onces, gros, graius, d'alkali, À Sel marin... a RU n » . 7 Avec addi- ah tion de 37 Subftance faline qui paroît tre pref- grains Zd'al- € queenentier de nature marine... ..... » » » fe kali fixe. Mémes produits rapportes au quintal de la méme terre. Sans addition 3 Hfs d'alkali. ? Sel marin ordinaire......... SAYS 5 5 » 31. Avec addi- Subftance faline qui paroît être prin- tion de 4 gros cipalement de nature marine, mais qui 30 grains $ À pourroit bien contenir quelques vef- d'alkali. tiges d'acide uitreux............... » ss S+ ‘64. TOTAL, aid. oh eds iefs rate » 6. 1124. EXP. RLIE N°C2ESS Sur la craie. N.° XVII. Une cave voifine étoit encore dans les mêmes circonf- #ances ; elle venoit à peine d’être ouverte dans un endroit cboulé \ MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 5$37 éboulé. Cette feconde cave étoit plus profonde que la pré- cédente ; nous avons également rejeté un pied de la craie qui fe préfentoit à la furface, & nous avons pris par - deflous l'échantillon de craie qui fait le fujet des expériences ci-après. Nous avons verfé fept livres douze onces d'eau bouillante fur douze livres huit onces de cette craie ; nous avons retiré , par filtration , quatre livres huit onces de liqueur, marquanc : de degré foible à l'aréomètre. Nous avons mis à évaporer quatre livres de cette liqueur, & nous avons obtenu un peu de félénice, puis il eft refté un peu d’eau mère; nous avons précipité la bafe terreufe de certe dernière par dix grains d’alkali, & ayant évaporé, nous avons obtenu ciuq grains de Salpêtre un peu impur, & huit grains de fel marin à bafe d’al- kalt végétal. D’après ces produits , on trouvera, en calcu- lant comme ci-deflus , ‘ Quantité de matières falines contenues dans dou?e livres huct onces de craie. Sans addition ? Un peu de félénite. d’alkali fixe. De l'eau mère de Salpêtre & de fel marin. di ne “50 livres, onces, gros. grainée SES : An Salpètre de mauvaife qualité. .... Lure Minute rm OTUSUE ; 2 d'al- se : RTE Bi me LE Sel marin à bafe d'alkali végétal. ...... » » » 13 à géral. Mémes produits rapportés au quincal de la méme ladite craie. Sans addition p Un peu de félénite. d'alkali. Eau mère de Salpêtre & de [el matin. Avec ad- don CRE Salpètre de mauvaile qualité. ........ » ss » 65% LENS rin 2 ’alkali végétal. ..... » » 14138 alkali Fe Sel marin à bafe d’alkali végéta végétal. TOTAL: ete dos se = sie se ete 50e On voit que cette terre eft extrêmement pauvre en Sal- être, & quil s'en faut beaucoup qu’elle puifle être traitce PERMET Yyy 538 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. avec avantage; mais il réfulte cependant de cette expé- rence, que les craies, méme à une certaine profondeur , con- tiennent queiques veftiges d’acide nitreux. On difcutera de nouveau cet objet dans la feconde partie de ce Mémoire. Os ISAENRSY ANTIINONNES Sur les efflorefcences farineufes , ou Salpétre de pigeon. N* XVIII & XIX. ‘ Ces efflorefcences farineufes ont été prifes dans deux ha- bitarions abandonnées à l'extrémité du village de Moufleau , du côté du chemin de la Roche-Guyon; des cboulemens qui font fucceflivement furvenus, empéchoient qu'on ne püût par- venir à ces habitations autrement que par des échelles. Ces matières leflivées & traitées comme ci-deflus, ne nous ont donné que du fel marin à bafe de terre calcaire, & quelques indices de Salpêtre également à bafe terreufe, mais en très-petite quantité. Une confufion arrivée dans le refultat d’une de ces deux épreuves, empéche d’en donner les détails comme on l'a fait pour les autres numéros. En general , le Salpètre à Moufleau ne fe trouve que dans le bas du côteau ; & pour donner une idée de la difpof- tion dans laquelle il fe trouve, nous oblerverons que le fol du village eft élevé de forxante ou quatre-vingts pieds en- viron au deflus du niveau de la riviere, & que c’eft à compter du niveau de ce fol, dans un efpace d'environ trente ou quarante pieds en hauteur, que fe trouvent les terres fal- pêtrées. On voit par-là, que le niveau du Salpètre s'élève d’une trentaine de pieds au deflus des lieux habités; mais une cir- conftance remarquable , c'eft que dans les endroits où le fol du village s'élève, & où la rue principale va en montant, ce qui s'oblerve du côté de Méricourr, le niveau des efflo- refcences falpêtrées paroît s'élever auffi à peu près dans la même proportion; ce qui femble prouver que l'habitation des hommes & des animaux concourt à la formation du Sal- pêtre. MÉMoïREs SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 539 Après avoir ainfi examiné dans un grand détail, d'une part, les craies de Moufleau , & de l'autre, celles qui fe trou- vent découvertes depuis la Roche- Guyon jufqu'à Clacha- lofle , il ne nous reftoit plus qu'a vifiter celles fituées à left de la Roche-Guyon, du côté d’Auchile & de Vetheuil; 8 d’après les obfervations que nous avons déjà faites, il nous importoit principalement de fixer nos recherches fur les en- droits non habités , & de déterminer l’état des craies à diffc- rens niveaux : ce côteau étant trois ou quatre fois plus éleve que celui de Moufleau , il offroit un champ plus vafte pour ce genre d'obfervations. EXPÉRIENCES Sur la fubftance farineufe. N.2 XX. À un quart de lieue environ, à left de la Roche-Guyon, dans le bas du côteau, à quatre-vingt pieds du niveau de la rivière , fe trouvoit une coupe dans la craie, difpofée de ma- nière que le haut faifoit abri pour le bas, & que la craie croit bien défendue de la pluie & des injures de fair. Cette coupe ne préfentoit pas un feul atome de falpêtre criftallifé, mais feulement des eMorefcences farineufes, blanches, falées, déjà défignées fous le nom de Salpêtre de pigeon, dont nous avons pris un échantillon fur lequel nous avons fait les expériences qui fuivent. Nous avons verfé une once & demie d’eau bouillante fur deux onces de ces efflorefcences; nous avons filtré , & nous avons retiré quatre gros ! de liqueur, qui, évaporce, nous a donné environ cinq grains de fel marin à bafe terreufe parti- culière, non déliquefcent , qui donnoit des vapeurs d’efprit de fel très-fuffoquantes , par l'huile de vitriol, & qui ne paroifloit contenir rien de nitreux. En appliquant à ces réfulrats les cal- culs employés pour les précédens numéros, on trouvera que ces cMorefcences farineufes contiennent environ une livre une once par quintal de fel marin à bafe terreufe particulière. Yyyÿ 540 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SAILPÈTRE. EXPÉRIENCES Sur la fubjlance farineufe. N.° XXI. Plus loin, à peu près aux deux tiers du chemin, entre la Roche-Guyon & Authile, une coupe naturelle de craie ou- verte au même niveau que la précédente, préfentoit encore les mêmes eMorefcences farineules; nous en avons cgalement pris un échantillon fous le numéro XXT. Quatre onces de ces efflorefcences ont été leffivées par trois onces d’eau bouillante ; nous en avons retiré par filtration une once un gros de liqueur, qui , évaporée , nous a donné quatre grains de fel marin à bafe cerreufe particulière , non déliquefcent, & douze grains de fel marin à bafe de terre calcaire. En appliquant le calcul ordinaire à ces réfultats, on trouve : uantité de fubflances falines contenues dans les quatre onces d’efflorefcences farineufes mifes en experiences. livres: onçes,'glos. grains, Sans addition Sel marin à bafe terreufe particulièrenon d'alkali déliquefcent sonner 3 » 2 10 5 S Sel marin à bafe calcaire............ » >») w 32 Mémes produits rapportés au quintal des mêmes efflorefcences. Sans addition d'alkali, TEUTC/paRtICUlICTE re cette MNT TMS INIÈTE ê Sel marin non déliquefcent à bafe ter- Sel marin à bafe deterre calcaire... ,:. 1 6. 1. 42. EXP ÉRAJENCE.S Sur efflorefcence blanche. N.° XXTT. Ayant trouvé près d’Authile une coupe femblable, couverte des mêmes eforefcences farineufes, nous en avons pris un échantillon fur lequel. nous avons opéré ainfi qu'il fuit. Nous avons leffivé une once de ces efflorefcences par une once d'eau bouillante ; nous ayons retire trois gros de liqueur, qui, évaporce, nous a donné cinq grains d'un fel à bafe cal- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. S4r Caire, qui, par l'épreuve de l'huile de viriol, nous a paru contenir environ un tiers de nitre à bafe calcaire, & deux tiers de fel marin également à bafe calcaire. En appliquant à ces réfultats les calculs précédens, on trouvera: Quantite’ de matières fülines contenues dans une once des efflorefcences mifes en expérience. Le , livres. ontes. gros. grains, Sansaddition % Sel marin à bafe calcaire............ ls SHAGS 9 d’alkali. Nitreabafetcalcaires 22.1 eee 5 > 4 ve Produits contenus dans un quintal des mêmes efflorefcences. Sans addition ? Sel marin à bafe de terre calcaire... Trials d’alkali. Nitre a bafe de terre calcaire, ....... » 7a bad Il paroît que toutes les roches de ce canton font couvertes de femblables eflorefcences plus ou moins falées; mais on ny trouve pas un atome de Salpêtre criftallifé, fi ce n'eft dans le voifinage des lieux habités, comme on va le voir ci-après. La première maïfon d’Authile, en venant de la Roche- Guyon, eft un château ancien, appartenant à M°° la Du- chefle d’'Enville (*). Le fol fur lequel il eft bati, eft elevé er- viron de quatre-vingts pieds au deflus du niveau de la rivière de Seine. Ce château eft fitué précifément au pied du rocher ou de la falaife de craie, & on a creufe en plein banc dans la cour plufeurs hangars, refferres ou caves profondes, très- ouvertes & très-acceflibles à l'air. Les parois de ces fourer-- rains étoient entièrement couvertes d’efforefcences criftallines de Salpêtre, en aiguilles de lépaifleur de trois ou quatre hgnes; dans les endroits abrités, ces aiguilles formoient une () La Terre d’Authile appartenoit à M. Dongois, Grefher en chef du Parlement de Paris, & avoit enfuite pafé à MM. Gilbert de Voifins. C’étoit ce M. Dongois que Boileau appeloit fon refpeétable neveu, chez qui il venoit pafler un mois tous les ans. On voitencore, au haut du parc d’Authile , les reftes d’un cabinerou Boileau alloic travailler; & l’on trouve une defcription d'Authile dans fon Epire à M. de Lamoïgnon. 542 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. efpèce de givre ou de neige infiniment légère ; mais dans les endroits qui avoient été “frappés par la pluie, ces aiguilles avoient été difloutes & transformées en plaques falines qui couvroient la craie. E'X PUB:R I EN C’E'S Sur des plaques ou croûtes jiunes, N.° XXIII & XXIV, nommées Re les Ouvriers, Mort du Salpêtre. On à parlé Plus haut d’une croûte jaunâtre qui fe forme à la furface de la craie , dans les endroitstravaillés par les Salpé- triers , qui empêche, fuivant eux , la produétion du Salpètre, & qu'ils nomment en conféquence Mort du Salpétre. On en obfervoit de la même nature dans quelques endroits des caves ou hangars du château d’Authile; mais l'abondance de Sal pêtre qui fe formoit par-deflous, étoit telle, qu'elle foulevoit la croûte en différens endroits, & principalement vers les angles, la forçoit de fe plier, & quelquefois la détachoir entie- rement. Dans quelques endroits, les aiguilles criftallines de Salpètre fe faifoient jour, pañloient par-deflus la croûte, & y formoient des ramifications. Nous avons détaché de ces plaques jaunes, que nous avons mifes à part fous le n.° XXITI; &, malgre l'opinion des Ouvriers, elles fe font trouvées con- tenir une aflez grande quantité de Salpêtre à bafe d’alkali fixe. Il n’eft pas abfolument effentiel à la fubftance que les Ou- vriers nomment Mort du Salpêtre , d'être en plaques jaunes; Ce le voifinage de l'endroit où ont été détachées celles ° XXII, on en trouvoit de très-blanches, qui, leffivées & évaporées , ont donne aflez de Salpêtre pour pouvoir être exploitées avec profit , moins cependant que les précc- dentes. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 543 EXPÉRIENCES Sur la croite jaune. N° XXV. On obfervoit à un pilier d’une des caves où ont été pris les échantillons précédens, une grande quantité des mêmes croûtes jaunes, par feuillets appliqués les uns fur les autres. Comme ce pilier étoit expofé à la pluie & aux injures de l'air , nous avons jugé que la grande cpaifleur des croûtes jaunes en cet endroit , & leur difpofition par lames ou feuil- lets , tenoient à ce que la pluie avoit diflous, à différentes reprifes , le Salpètre qui s'étoit préfenté à la furface de la craie ; que la croûte jaune au contraire, étant infoluble dans l'eau, s'étoit amaflée en formant des couches fucceflives. Nous avons pris un échantillon de cette croûte , fur laquelle nous avons fait les expériences fuivantés. Nous en avons leflivé trois onces par trois onces d’eau bouillante; nous avons obtenu une once trois gros de liqueur, qui, mife à évaporer, nous a donné fix grains de Salpêtre à bafe alkaline, fix grains de Salpêtre à bafe de terre cal- caire, & deux grains de fel marin également à bafe de terre calcaire. Ces produits donnent les réfultats qui fuivent. Quantité de matières falines contenues dans trois onces de la croûte mife en experience. livres. onces, gros. grains, PRPRTE Salpètre à bafe d'alkali fixet............ ME P:CÎT2S nn ae Salpêtre à bafe de terre calcaire ....... » 53 DT aa Sel marin à bafe de terre calcaire....... om "5 ÉD Produits contenus dans un quintal de la méme matiere. dditi è Salpêtre à bafe d'alkali fixe.......,... ROLE LS COR De ms pion Salpêtre à bafe de terre calcaire........ 5 IANL2. Di 12114 ali. Sel marin a baie de terre calcaire. ....... » GE S: 545 Cette expérience confirme encore que la fubftance nom- mée communément Mort du Salpètre, loin d'être à rejeter ; 544 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. comme les Salpétriers font dans. l'ufage de le faire, contient encore aflez de Salpètre pour pouvoir étre travaille avec profit. ENT P EE RIT ENICHESS Sur une efflorefcence blanche. N.° XXVI. La roche au pied de laquelle eft creufce l'églife d’Au- thile, eft très-efcarpce , & dans un état de deftruétion, comme toutes celles de ce canton. Le haut de cette roche formeunerête pointue détachée du corps de la montagne , & qui selève environ jufqu'aux deux tiers de la côte. Nous fommes parvenus, non fans de grandes difficultés ; jufqu’à la cime de cette roche, & nous y avons trouvé, dans un endroit prefque inacceflible, un creux de quatre cinq pieds de. profondeur , formé naturellement, à ce quil paroït, dans la partie tendre de Ja craie : la faillie que formoit le rocher au deflus de ce creux, le défendoit complètement de la pluie & des injures de l'air ; aufñi cout l'intérieur étroit - il tapiflé de la même fubftance farineufe blanche , dont il a déjà ete queftion plus haut, On à leflivé quatre livres de cette terre avec deux livres d’eau bouillante; on a retiré, par filtration , une certaine quantité de liqueur, dont on n'a mis que quatre onces à évaporer. On a obtenu d’abord quinze grains de fel marin, en beaux criftaux, & enfuite dix grains d’un mélange à peu près de parties égales de nitre & de fel marin calcaire. D'après cela, & en adoptant les calculs employés pour les numéros précédens, on trouvera : Quantité de matières falines contenues dans un quintal des effloreftences mifes en expérience. livres. onces. gror. grains. Sans addi- } Sel marin pur, en beaux criftaux...... » A 2/52: tion d'alkali & Sel marin à bafe de terre calcaire..,... » » 6. 68. fixe, Nitre à bafe de terre calcaire......... » » 6. 68. EXPÉRIENCES MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 545$ EXPÉRIENCES Sur lefflorefcence blanche. N° XXVII. Vingt-cinq ou trente pieds au deflous du niveau du trou dont on vient de parler, fe trouvoit, dans la même roche, une ancienne habitation creufée à l'expofition du fud-eft. On voyoit encore dans cet endroit les débris d’un four ruiné, & on y avoir dépofé quelques fagots & du marc de raifn. Quoique cet endroit eût été Habite , & aux parût être dans les circonftances les plus favorables à la formation du Sal- pêtre, on ny en remarquoit pas un atome; mais tout étoir recouvert de la même cfHorefcence blanche falée que «= deflus. On à leflivé une once de cette eMlorefcence , avec une once d’eau bouillante ; on a fetiré , par filration , cinq gros de liqueur, qui, mife à évaporcr , a fourni dix-fept grains de Salpètre un peu imprégné d'eau mère. En de ces produits comme on à fait pour les numéros précédens, on trouvera : Quantité de matières falines contenues dans une once d’efflorefcence blanche, mife en experience. livres, onces. gros. grains. Sans addition Salpètre à bafe d'alkali fixe un peu im- d'alkali. PROMO TICAUITMIEl OL eee ce ere D ol 7e Produit contenu dans un quintal de la méme matière, Sans addition Salpètre à bafe d’alkali fixe un peu im- d'alkali. } prégnéid'éau;ymères... see... ANT TS 4 03e Ces efflorefcences ne contenant que peu d'eau mère, y auroit peu de dépenfe en potafle à faire pour les exploiter ; prefque tout feroit bénéfice. LIZZ $46 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: EXPÉRIENCES Sur Peffloreftence blanche. N.° XXVIIL. Entre cette roche & la fuivante, prefque au haut de x côte, environ cinquante pieds plus haut que la partie fupé- rieure de la roche où a été pris l'échantillon N.° XXVI, fe trouvoit une carrière ouverte à lexpofñtion du fud-oueft , & creufce dans la craie; on y voyoit encore des auges, du fumier , & tout ce qui pouvoit indiquer qu’elle avoit été au- trefois habitée. L'intérieur de cette carrière n'offroit cepen- dant aucun veftige de Salpètre criftallifé ; mais feulement des efflorefcences blanches farineufes, comme ci-deflus. On a pris quatre onces de ces cfflorefcences, fur lefquelles on a verfe trois onces d’eau chaude ; on a enfuite retiré, par filtration, une once de liqueur qu'on a mife à évaporer, & onena obtenu, par criftallifation , huit grains de fel marin imprégné d’une petite portion de fel marin à bafe de terre calcaire, & qui, en con- équence, étoit fort amère. L'eau mère, au furplus , ne paroif- foit rien contenir de nitreux. En appliquant à ces produits les mêmes calculs que ci- deflus, en trouvera: Quantite’ de matieres falines contenues dans guatre onces des efflorefcences fur lefquelles on a opéré. livres. onces, gtos, grains. Sans addition ? Sel marin ordinaire imprégné d’un peu de fel d'alkalifixe. marin à ba(e de terre calcaire. ..... SABE x. [0 ,n-1 24% Mémes produits rapportes au quintal de la méme matière. Sans addition ? Sel marin ordinaire imprégné d'une petitepor- d'alkalifixe. tion de fel marin à bafe deterre calcaire.. +7. » $fi 24 EXP ÉRIENCES Sur le N.° XXIX. Après avoir reconnu la nature des matières falines conte- - . 2 a \ nues dans les eflorefcences farineufes qui fe préfentoient à % MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $47 furface , nous avons été eurieux de déterminer fi ces eAloref. cences ,. une fois broflées & balayées , la craie qu'elles re- couvroient contenoit encore quelque chofe de falin. Nous étions d'autant plus portés à le croire , qu ayant abattu quel- ques morceaux fuperfciels de cette craie, nous les avons trouvés falés, même du côté de l'intérieur. Nous avons abattu, en conféquence, une quantité fuff- fante de cette craie; nous en avons mis douze livres hui onces dans une terrine, & verfé par-deflus fept livres douze onces d’eau bouillante, & nous avons reuré trois livres douze onces de liqueur à un degré : de l’arécmètre. Ayant mis à évaporer, nous avons obtenu d'abord trois gros vingt- fept grains de fel marin bien criftallifé ; après quoi il n'eft plus relié que de l’eau mère, La quantité d'alkali néceflaire pour précipiter toute la terre de cette eau mère, s’eft trouvée de cinquante-huit grains :; après quoi, ayant évaporé de nouveau, nous avons obtenu quatre gros feize grains de fel marin à bafe d'alkali végétal, & feize grains de Salpétre à bafe d’alkali fixe. En calculant d’après ces produits, on trouvera: Quantité de matières Jalines contenues dans douge livres huit onces de la craie mife en expérience. livres. onces. gros. grains. Sansaddition Ÿ Sel marin à bafe d'alkali fixe minéral... » #16. 7OUE d'alkali. Eau mére de nitre & de fel marin. Avec ad- dition d'un Sel marin à d'alkali bafe végétal. ...... » TAN LENS EN gros 49 gr.3 ( Salpêtre à bafe d'alkali végétal. .....,.. 0 Lilerl 35e d'alkali. \ Mémes produits en fappofant un quintal de la même craie. Sans addition ? Sel marin à bafe d’alkali minéral... ..... » ARE NES d'alkali. Eau mère de nitre & de {el marin. Avec ad- RARE Sel marin à bafe d’alkali vé ÉtAl seit » & fs (54 Once BTS © Salpètre à bafe d'alkali v Séeal + ” UP de dan alpé € ég en ne es . x FE végétal. 548 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Ilen couteroit dix deniers en potafle, pour traiter un quin- tal de cette terre, & on ne retireroit de Salpètre que pour la valeur de trois deniers :, fans compter les frais de main d'œuvre & d’évaporation, ainfi il s'en faut de beaucoup que cette terre puifle être traitée avec profit. E X-LÉRILE N'C'ESS Sur la craie. N.° XXX. Comme cet endroit eft à peu près le plus élevé de ceux auxquels nous ayons été à portée de faire des obfervarions , & qu'il nous à paru important de connoître la nature des matières falines contenues dans la craie à différentes hauteurs, nous avons abattu un pied & demi à deux pieds de la craie qui fe préfentoit à la furface; puis, en continuant de creufer, nous avons pris un échantillon de craie qui n'avoit eu au- cune communication avec l'air. Nous avons verfé fept livres huit onces d’eau fur douze livres huit onces de cette craie; nous avons retiré, par fil- tration, trois livres douze onces de liqueur qui donnoit un peu plus d'un quart de degré à l'aréomètre ; ayant mis à éva- porer, nous avons retiré un peu de félénite & une pctite portion d'eau mère; ayant précipité la terre par l'addition de trente-cinq grains + d'alkali concret, & ayant mis à éva- porer de nouveau, nous avons obtenu quarante-cinq grains de Salpêtre aflez pur, mais jaunâtre , & cinq grains de fel ma- rin à bafe d’alkali végétal; d’où l'on peut conclure : Quantité de matières falines contenues dans douze livres huit onces de la craie mife en expérience. Sans addition ? Unpeu de félénite. d'alkali. Un peu d'eau mère de Salpétre& de fel marin. ste li gr Trains iri x Ivres. OnCeS. OS € 4 ee Me Salpétre à bafe d'alkalifixe végétalaffezpur. » » TAN DT Tale bre Selmarin à bafe d'alkali végétal. ........ 23 Fe » 10 +. végétal. F” MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 549 Mémes produits contenus dans un quintal de la méme craie. Sans addition ? Un peu de félénite. d’alkali. Un peu d'eau mère de Salpêtre & de fel marin. Avec ad- dition d'une livres. onces. gros. grains, once » gros Salpêtreà bafe d’alkalifixevégétalaffezpur. » CANE 22240 4 grains + f Sel marin à bafe d'alkali végétal. ....... » SU TS 10 NS d'alkali fixe végétal. Il en couteroit fix deniers en potafle, pour traiter un quin- tal de cette craie, & on retireroit en Salpêtre une valeur de neuf deniers :; ainfi il y auroit trois deniers : par quintal de bénéfice, pour repréfenter les frais de main d'œuvre & d'évaporation. EXP MRIENCES Sur les efflorefcences blanches, N.° XXXI, € fur le Salpétre, N.° XXXIT. Près de la carrière dont on vient de parler , & prefque at- tenant , eft une roche très-efcarpce, plus élevée que celle au pied de laquelle eft placée l’ancienne maïfon de Boileau; c'eft précifément dans le pied de cette roche qu'eft bârie l'éghie d’Anthile. Tout le haut de cette roche a été creufe pour y faire des habitations; mais elles font devenues inacceflibles par les éboulemens de craie qui fe font faits, & elles font prétes à s'écrouler de toutes parts. La plus cl élevée de ces ha- bitations , jufqu'à laquelle il nous ait éte poflible de parvenir, e trouvoit un peu au deflus du niveau du pied de la tour de la Roche-Guyon, c'eft-à-dire, à peu près au même ni- veau que l'obfervation n.° XXVI. Cette carrière ou habita- tion a dix-huit à vingt pieds de profondeur, huit à dix pieds de hauteur, & eft entièrement ouverte & accefhible à Pair. Quels paiüt avoir éte aufli anciennement aban- donnée que la précédente, on y yoyoit cependant une grande ÿ5o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, abondance de Salpètre, partie en efflorefcences, partie en plaques. Ayant leflivé des unes & des autres, prifes en diffé- rens endroits, nous avons reconnu que ces efHorefcences fa- lines contenoient foixante , foixante-quinze , & quelquefois juf- qu'à quatre-vingts livres de Salpètre par quintal; la matière reftante après la lixiviation n’étoit autre chofe qu'une craie très-fine. Les plaques ne font pas toujours aufli riches, on n'en tire fouvent que vingt-cinq ou trente livres par quintal; ce qui refte infoluble eft de la craie plus groflière que la pré- cédente , & qui nous a paru contenir de la félénite. Il eft inutile de faire fencir combien il y auroit d'avantage à raflembler ces efflorefcences & ces plaques, & à les crai- cer pour en obtenir le Salpètre. EXPÉRIENCES Sur la craie. N.° XXXIII. Comme l'endroit où nous avons ramafie les efflorefcences & plaques de Salpètre, n° XXXI & XXXIL, eft à peu près placé à la hauteur moyenne de la montagne , nous avons penfe qu'il étoit intéreflant d'y prendre des échantillons de craie; en con- féquence, nous avons jeté bas environ un pied d’épailleur de craie, puis nous avons pris un échantillon de la craie qui étoit abfolument intérieure, & qui n’avoit point éprouvéle contat de l'air. Nous avons leffivé douze livres huic onces de cetre craie avec fept livres douze onces d’eau, & nous avons retiré une livre douze onces de liqueur qui marquoit un degré fort à l'aréo- mètre ; ayant fait évaporer, nous avons obtenu un peu de félénite, point d’autres fels criftalifables, & il nous eft refte un peu d'eau mère ; ayant étendu d’eau cette dernière, & l'ayant décompofée par cinquante-fix grains d’alkali fixe con- cret, nous avons 1nis de nouveau à évaporer , & nous avons obtenu un gros vingt grains de Salpêtre pur , & quatre grains de fel marin à bafe d’alkali. PR ne 7 Lun MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. S$t + En appliquant à ces produits les calculs ordinaires, tels qu'ils ont été détailles ci-deflus, on trouve : Quanuite de matieres falines contenue dans douxe livres huit onces d’eau. Sans addition } Un peu de félénite. d'alkali fixe. Avec addi- tion de 3 gros FRE 4 livres. onces. gros. grains, a Te Salpétre à bafe d'alkali fixe végéral...... » SEAT 328 Sel marin à bafe d'alkali végétal. ....... » 5 5 17 kali fixe végé- tal. Produits contenus dans un quintal de ladite crace. Sans addition } Un peu de félénite. d'alkali. Avec ad- dition de 3 onces 3 gros | Salpêtre à bafe d'alkali fixe végétal...... » HORPURCE acgrainsd'al-_{ Sel marin à bafe d'alkali fixe végétal... » MEME kali fixe végé- tal. Il en couteroit en potafle , pour trairer cette craie, un fou huit deniers :; on obtiendroit en Salpètre une valeur de trois fous fix deniers : ; il refteroic par conféquent un fou neuf de- niers ? pour les frais de main d'œuvre & d'évaporation. EXPÉRIENCES Sur la-craie. N.° XXXIV. Il sétoit. détaché du haut de cette même carrière , à ce qu'il paroît, aflez récemment, un gros quartier de craie; ce morceau avoit été expofé à l'air, & il avoit un goût légeré- ment falin : nous en avons pris un échantillon, que nous avons foumis aux mêmes expériences que ci-deflus ; mais l'enregiftrement n’en ayant pas été fait fur le champ, & crai- gnant quelque confufion , nous préférons de n'en point faire ufage, $52 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Plus bas, dans cette méme roche, on rencontre encore des carrières habirées ; le Salpétre y exifte en fi grande abon- dance, qu'il fe montre prefque par-tout à la furface de la craie, foit en aiguilles, foit en lames. “ EX PMÉRIENCES Sur l’efflorefcence. N.° XXXV. A fix pieds du haut de la roche fuivante, la première après celle dans le pied de laquelle eft creufée l’églile d’An- thile , étroit une efpèce de trou de trois à quatre pieds de diamètre, dans lequel fe trouvoit une très-grande quantité des eflorefcences blanches ci-deflus, ayant un goût de fel ma- rin très-marqué. Cet endroit répond environ au tiers de la hauteur de la tour de la Roche-Guyon : ayant leflivé trois livres de cette terre avec deux livres d’eau bouillante, nous avons retiré , par filtration, cinq onces fix gros de liqueur ui a été mile à évaporer; nous en avons obtenu cinquante grains de fel marin à bafe d'alkali minéral , en beaux criftaux, imprégné d'une petite quantité d’eau mère de fel marin, & qui ne nous a pas paru contenir d'acide nitreux. En calculanc d’après ces produits, on trouve : Quantite’ de matières falines contenues dans trois livres de la terre mie en expérience. livres. onces gros. grains. True Sel marin à bafe d'alkali minéral en beaux PA ïk fi Lu criflaux, feulement un peu imprégnés CES d'eau rnère de fel marin. ,...... Es Dors ze Mémes produits rapportes au quintal de ladite terre, Sans addition E Ë n d'alkali, criftaux , feulement un peu imprégnés Se! marin à bafe d’alkali minéral en beaux d'eau mère de fel marin............. 1. - » 63. EXPÉRIENCES. mnt... #7 ñ ET 2 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 9953 EXPÉRIENCES Sur lefflorefcence blanche. N.° XXXVI. Toute cette roche & ja fuivante préfentent les mêmes re- fulrats dans tous les endroits qui font à l'abri de la pluie, & qui n'ont pas cré durcis à un certain point par l'aétion de l'air ; on trouve des mêmes efHorefcences blanches farineufes, ayant plus ou moins d’anertume, & un goût de fel marin plus ou moins marque. Etant parvenus , non fans danger, jufqu'à une efpece de creux ou d'excavation, formé dans le banc de craie tendre , & où trois ou quatre perfonnes pouvoient tenir couchées , nous y avons trouvé une grande abondance d’eforefcences falces farineufes. Nous avons leflivé quatre livres de ces effloref cences par deux livres d'eau bouillante, & nous avons obteau fept onces de liqueur , qui, mife à évaporer , a donné trente- neuf grains de fel marin en beaux criftaux. [left refté enfuire dix grains de fel àbafe terreufe , dont moitié paroïfloit étre du £el marin calcaire, moitié du nitre calcaire. D'après ces pro- duits, on peut conclure, en opérant comme ci-deflus : Quantite de matières [alines contenues dans quatre livres des efflorefcenc:s mifes en expérience livres, onçes. gros. grains : Sel marin très-blanc en beaux criftaux & à Sans addi- ion d'alkali bafe d'alkali minéral... ....,......., HR MEL NI 4ES fe Es Salpêtre à bafe de terre calcaire......... 2 D SD 22 ire Sel marin à bafe de terre calcaire... ... D M0 Lo AU Mémes produits fur un quintal des mêmes efflorefcences. s ddi Sel marin en criftaux réguliers , très-blanc ; SET " & à bafe d'alkali minéral. ...... Dane D 07 A ES a Se (0 Salpetre tibale calcaire... PRODES AUS » Doi NOT CE Sel marin à bafe de terre calcaire....... DM TU C7. 2 Cette matière, contenant autant de fel marin à bafe ter- rcufe que de nitre à bafe terreufe, ne pourroit être exploitée Aaaa 554 Mémoires suR LA FORMATION pu SALPÈTRE. avec profit. Il faudroit employer beaucoup plus de potafñfe qu'on ne retireroit de Salpétre , & par conféquent la dépenfe excéderoit le bénéfice. EXPÉRIENCES Sur l’efflorefcence blanche. N.° XXXVII. La roche où a été pris l'échantillon N.° XXXVI, eft féparée de la füivante par un petit ruiflau qui defcend du haut de la côte, & qui gagne la rivière de Seine, en laïf fant à gauche le hameau de Chantemelle. Cette roche, qu'on trouve après le ruifleau, eft très-découverre & très-efcarpée. . Les parties les plus dures ayant mieux réfifté que les autres aux injures de l'air , il s'eft formé , d'une part , des faillies dans là partie dure, & des excavations dans la tendre. Les bancs les plus tendres fe trouvent, par ce moyen, à l'abri de la pluie, & on y retrouve en grande abondance les mêmes corefcences blanches, farineufes, amères, falées, nommées Salpètre de pigeon. Nous nous fommes attachés principalement à une de ces EXCavations, qui avoit au moins douze pieds de profondeur fur une hauteur à peu près égale; nous en avons balayé légèrement toute la furface avec un balai de bouleau, & nous en avons pris un échantillon fous le N.° XXXVIL. Nous avons leflivé fix livres quatre onces de cette fubf- tance farineufe , par trois livres quatorze onces d’eau; nous avons retiré, par filtration , une livre de liqueur marquant trois degrés à l’aréomètre. Ayant mis à évaporer, il na criftallifé aucun fel, & nous n'avons obtenu que de l'eau mère ; ayant érendu cette dernière d’eau, nous avons précipité la terre par l'addition d'un gros quarante-huit Z grains d’alkali fixe concret. Nous avons enfuite procédé de nouveau à l'évaporation, & nous avons obtenu , par plufieurs criftallifations fucceflives, un gros foixanté-huit grains de fel marin à bafe d’alkali végétal, & treize grains de Salpêtre également à bafe d’alkali végéral. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. $ÿ$ En calculant d'après ces produits, on trouve les réfultats qui fuivent : Quantite” de matières falines contenues dans fix livres quatre onces des efflorefcences fuperficielles en expérience. Sans addition : J d'alkali. } De l'eau mère. Avec ad- dition de 6 livres. onces. gtos. grains. r0S 37 gr. Salpêtre à bafe d'alkali végétal. ........ » » ee te x FE lkal fixe ( Sel marin a befe d'alkali végétal. ...... n de ANR CET végétal. Mémes produits contenus dans un quintal A “1 de la méme matiere. Sansaddition } Pointde felscriftallifables, feulement del'eau d'alkali. mère. _ Avec ad- dition de 12 onces 3 gros | Salpêtre à bafe d’alkali fixe végétal. ..... » ne 24 s gr. À d'al- ( Sel marin à bafe d'alkali fixe végétal. .... mn 15. » 48. kali fixe vé- gétal. Il faudroit , pour traiter un quintal de cette fubftance , employer pour fept fous fix deniers de porañle ; il n'en réful- teroit que dix deniers de valeur en Salpètre : aïnfi il y auroit perte de fix fous huit deniers par quintal, fans compter la main d'œuvre & les frais d’évaporation. EXPÉRIENCES Sur l’efflorefcence blanche farineufe. N° XXXVIII. Nous avons enfuite ratiflé avec un rateau de Jardinier cette même furface que nous n'avions d’abord que légèrement ba- layée , & nous en avons enlevé une petite couche de trois ou quatre lignes d'épaifleur. La grande étendue de la fur- face fur laquelle nous opérions >; NOUS ayant mis à portée de Aaaaïj 556 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. recueillir une: grande quantité de cette matière , nous en avons lefivé cinquante livres avec trente-une livres d’eau bouillante ; nous avons retiré, par filtration, douze livres de liqueur qui marquoit deux 2 degrés à l’aréomètre ; nous avons mis à éva- porer au-bain de fable à-une chaleur très-douce , en changeant fréquemment les caplules , afin de bien féparer les fels; & nous en avons obtenu , fans addition d’alkali, les produits qui fuivent: 1. foixante-deux grains de félénite ; 2.9 deux gros feize grains d’un fel marin à bafe particulière , dont ila déja été queftion plus haut, & dont nous neconnoïflons paint la nature ;.3.° 34 grains de fel marin très-pur à bafe d’alkali minéral; 4.° deux gros du même fel, mais très-imprégné de matières grafles & ex- tractives ; $.° une aflez grande quantité d’eau mere. Nous avons étendu cette dernière d'eau fufifante, puis nous avons précipité par un alkali fixe : la quantité néceflaire pour arriver au point de faturation, a été d’une once fept gros, après quoi ayant évaporc de nouveau , nous avons obtenu deux onces deux gros cinquante grains de fel marin à bafe d’alkali végétal, & quatre gros cinquante grains de Salpètre également à bafe d'alkali végétal. En appliquant à ces réfulats les calculs employés pour les numéros précedens, c'eft-a-dire, en multipliant par trente-un & divifant par douze , on. trouvera : Quantité de matières falines. contenues dans cinquante livres de la craie mife en experience. livres, onces. gros: graine. Sélénite....2. AE © 6 5 DR STEP PER She ar © COR OR CE Sans addi- f Sel marin à bafe rerreufe particulière. ... » $. $3. tion d’alkali » Sel marin imprégnéde matièresextraétives. >» 2 $f. 12. fixe. - Sel marin à bafe d'alkali fixe minéral. .... 5157 NS UI20. Eau mère de Salpétre & de fel marin. Avec ‘ad- dition de 4 onces 6 gros | Sel marin à bafe d'alkali végétal. ....... D'NÉ. Le ILT, 54 gr. d'al- { Salpêtre a bafe d'alkali végétal: .....,... » 1. 4: 2 kali fixe vé- À. gétal. Re ep hu ie er ne 4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. $57 Mémes produits rapportées au quintal de la méme matière. livres. onces. gros. grains. SélÉmitE ee ed needs le Reis ele ce GREEN MT ES Sans addi- #° Sel marin a ba(e rerreufe particulière... DAETE 3 AE tion d’alkali > Selmarinimprégné de matieres extraétives, » 1. 2. 24 fixe. \ Sel marin à bafe d'alkali fxeminéral. . DIT ENT. 40: Eau mère de Salpêtre & de fel marin. Avec ad- dition de 9 | onces ÿ gros | Sel marin à bafe d’alkali végétal. .... DHOM METIER EDIT tes 36 gr. d'al- { Salpêtre à bae d’alkali végéral........, 1e 3 DOTE kali fixe vé- . gétal. \ Il en couteroit en potafle, pour traiter un quintal de cette: terre, quatre fous dix deniers, & on ne retireroit en Salpêtre qu'une valeur d'un fou onze deniers; par conféquent il y auroit perte de deux fous onze deniers par chaque quintal de terre. Er X:P'ÉER L'E'N C' E'S Sur la craie, N.° XXXIX. Pour avoir enfuite de la craie du même endroit, mais plus intérieure, nous avons abattu, à coups de pic, un pied de celle qui fe préfentoir à à la furface, & nous avons pris enfuite par- deflous un échantillon fous le N.° XXXIX. Nous avons lefivé douze livres huit onces de cette craie, par fept livres douze onces d'eau, & nous avons retire deux livres fix onces de liqueur qui marquoit ; : de degré foible à laréomètre. Cetre liqueur , évaporée, n'a laïflé qu'une petire portion d'eau mère qui à exigé, pour être décompolée, trente-deux grains d’alkali concret; après quoi ayant procédé de nouveau à l'évaporation , nous avons obtenu vingt-quatre grains de Salpétre , & dix-huit grains de fel marin, l'un & te] l'autre à bafe d’alkali végétal ; d'apres quoi nous avons conclu: 558 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Quantire de matières falines contenues dans douye livres huit onces de craie mife en expérience. Sans addi- tion d'alkali De l'eau mère de nitre & de fel marin. fixe. Avec ad- dition d'un gros 249r.75 d'alkali fixe végétal. L livres. onces, gros. grains. Salpètre à bafe d'alkali végétal... > » I. 6 =. Sel marin à bafe d'alkali végétal........ mn» oo » S$& = Mémes produits rapportes au quintal de la méme crale. Sans addi- con d'alkali & De l'eau mère denitre & de fel marin. c. Avec ad- dition d'une ence 3 gros | Salpêtre à bafe d'alkali fixe végétal. .... DUAL Ma TO NE 45 grains # { Sel marin à bafe d’alkali fixe végétal... » » € 37 & d'alkali fixe végéral J I! en couteroiten potafle, pour traiter un quintal de cette terre, huit deniers 2; on ne retireroit en Salpètre qu'une va- leur de huit deniers : : ainfi il y auroit perte, indépendamment même des frais de main d'œuvre, de leflivage, évapora- tion, &c. EXPÉRIENCES Sur la craie. N° XL. Nous n'avions opéré jufque-là que fur de la craie prife dans le haut ou dans la partie moyenne de la montagne; nous avons cru devoir prendre également un échantillon de la craie du bas de la même montagne ; nous avons profite à cet effet d’une coupe faite l'année précédente, à cinquante pieds à peu près au deflus du niveau de la rivière, entre Au- thile & la Roche-Guyon. La craie en cet endroit n'étoit point MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. $5$9 à l'abri des injures de l'air ; & comme la faifon avoit été fort pluvieufe , il y a toute apparence qu'elle avoit été leflivée , en quelque façon , à fa furface par l'eau du ciel. Au refte, on n'a pas pris la craie qui fe préfentoit précifément à la fur- face, on 2 au contraire creufé environ deux pieds, & ce n’eft qu'au delà qu'a été pris l'échantillon fur lequel ont été faires les expériences qui fuivent. On a leffivé douze livres huit onces de cette craie, par fept livres douze onces d’eau bouillante ; on a retiré douze onces de liqueur à : de degré fort à l'aréomètre : on n’a obtenu d’abord , par évaporation, qu'une petite portion d’eau mère ; mais ayant précipité par 10 grains : d’alkali fixe végétal concret , on a obtenu , en évaporant de nouveau , trente grains de Sal- pêtre à bafe d’alkali végétal, & quinze grains de felmarin éga- lement à bafe d’alkali végétal. En appliquant à ces produits les calculs précédens , on trouvera : Quantité de matières falines contenues dans dou7e livres huir: onces de terre. Sans addi- tion d’alkali & Eau mère de nicre & de fel marin. fixe. s) Avec ad- dition de 22 livres. onces. grains. gros: a A LE Salpêtre à bafe d'alkali fixe végéral. . .... 33 à 50 0leltes 62. Pal Fee ol Sel marin à bafe d’alkali fixe végétal. ... 2» >» 31:- géral. … Méêmes produits en operant fur un quintal de la méme matiere. Sans addi- tion d’alkali > Eau mère de nitre & de fel marin. fixe. Avec ad- dition d AIOLE : 2e ii ee Salpètre à bafe d'alkali fixe végétal...... » 6. 64 Malkali fre ( Sel marin à bafe d'alkali fixe végétal... » #2 32 végétal, $6o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. La quantité de Salpêtre qu'on a obtenue étant environ double de celle qu'on auroit dû obtenir, d’après la quantité de potafle employée pour précipiter , il y a toute apparence quil exifte dans cette craie au moins trois gros par quintal de Salpétre à baie d’alkali fixe tout formé. Ce Salpêtre fans doute à été empâté par l'eau mère , ‘qui l'a empêché de criftallifer. Au refte, la quantité de Salpêrre contenue dans cette terre cit trop petite, pour mériter d'être exploirée direétement & fans bonification préalable. EXPÉRIENCE Trés-importante de M. le Duc de la Rochefoucault. M. le Duc de la Rochefoucault a fait tirer dans la mon- tagne une quantité aflez confidérable de craie, & l'ayant fat leffiver , il a jugé qu'elle ne contenoit point, ou au moins que très-peu de Salpêtre. Il a fait conftruire avec cette craie des murs de cinq à fix pieds de haut, & les 4 fait couvrir d'un toit de paille. Ces murs font refles ex- pofés à l'air depuis le mois de Mars 1776 jufqu'au mois de Juillet 1777 3 le toit de paille s'eft en partie détruit, & la craie a été expofce à la pluie, qui a dûen lefiver la fur face & en difloudre les fels ; ils ont été en outre defléchés pendant l'été par l'ardeur du foleil : cependant M. le Duc de la Rochefoucault en ayant fair lefliver deux portions de cinq cents livres chacune, au bout de quinze mois , comine on vient de le dire, on en aretiré, par la première expé- sience , fans aucun mélange, un peu de Salpêtre à bafe d’al- kali végétal & de l’eau mère, & par une feconde expérience, en y mélant une livre de poraffe , une quantité confidérable de Salpêtre aufli à bafe d’alkali végétal. EL AS SECONDE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DÜ SALPÈTRE. SG — SE CRONNMDNERME AUR, TT E; Des conféquences qui réfultent des expériences précédentes , foit pour la théorie, foit pour la pratique. Nes s nous fommes bornés, dans la première partie de ce Mémoire, à raflembler des obfervations & des faits, & nous nous fommes abftenus de les accompagner d'aucune ré- flexion. Il nous refte maintenant à mettre en œuvre les ma- tériaux que nous avons raflemblés, & à appliquer à la pra- tique les connoïflances que l'obfervation & l'expérience nous ont procurées. Pour éviter des tranfitions inutiles, qui alongeroient le dif- cours fans lui donner plus de clarté, & pour bien diftin- guer ce qui eft de fait & d'obfervation, d'avec ce qui eft de raifonnement & de conclufion, nous allons raflembler en un petit nombre de paragraphes, 1.° tousles faits établis & prouvés dans la première partie de ce Mémoire ; 2.° les conféquences qu'on peut en tirer. Premier fait. L'acide nitreux exifte dans les craies des environs de Moufleau & de la Roche-Guyon , dans des lieux éloignés de toute habitation, & à plufieurs pieds de profondeur : on peut confulter à cet égard les expériences rapportées dans la première partie de ce MémorenNi®lr, 32m 26 #22 38, 39 & 40. On n'apporte point ici en preuve les expériences faites fur les craies du trou de Bon-Fourquières, attendu que ce trou fert d'abri aux gens de la campagne dans les temps de pluie ; il eft de plus probable qu'il fert de retraite à des animaux de différentes efpèces. Second fair. L'acide nitreux en général eft plus abondant à la furface Bb 562 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ou dans le voifinage de la furface, qu'à une certaine pr- fondeur; il paroït ne prouvé que ve parties de la craie abfolument intérieures, & qui ne peuvent avoir aucune com- munication avec l'air extérieur , ne contiennent aucune por- tion d'acide nitreux. L'examen de l'eau des fources & des uits de ce canton fournit une preuve convaincante de cette vérité : en effet, fi les craies, à travers lefquelles elles cou- lent, contenoient du Salpétre, elles devroient s'en charger elles-mêmes; cependant, d'après les expériences auxquelles nous les avons foumifes, elles ne nous ont pas paru en contenir en quantité fenfible. Troifième fair. L'acide nitreux exifte dans deux états différens dans les craies des environs de Moufleau & de la Roche-Guyon; tantôt il eft combiné avec la terre calcaire, & forme ce qu'on nomme nitre calcaire , ou, €n langage de Salpécrier » eau mère de nitre; tantôt il eft à bafe d’alkali fxe vegétal ; & forme le Salpétre proprement dit. Quatrième ait. Le Salpètre qui fe forme dans des lieux éloignés de toute habication , cft toujours à bafe terreufe, c’eft-à- dires dans l’état d'eau mère, & on n'y rencontre jamais , ou prefque jamais, de nire à bafe d'alkali fixe; il n'en eft pas de même des craies des environs des lieux habités, le Salpêtre à bafe d’al- kali fixe y exifte prefque par-tout , non feulement à la fur- face fous forme d’efflorefcence , mais encore à un & 4 pieds de ProoRsEn À pl us ou moins , fuivant le local , fuivant la qualité des craies, Cinquième fait. Le Salpêtre à bafe d’alkali fixe, qui exifte dans la craie, paroît tendre continuellement à gagner la furface, & à sy montrer fous forme d'eflarefcences criftallines; & voici ce MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $63 qu'on oblerve à cet égard dans les lieux qui ont été tra- vailles par les Salpétriers. On fe rappelle que ces Ouvriers emportent avec une cfpèce de hacherre de Maçon la’ petite couche de Salpétre qui s'eft formce à la furface de la craie; la partie tranchante de cet inftrumenc, fur-touc lorfquil a fervi quelque temps & qu'il s'eftuf, ne forme point une ligne droite, mais une courbe ; par ce moyen chaque coup de hachete laïfle dans la craie une impreflion plus creufe dans le milieu que vers les bords, & il en réfulre qu'il refte entre chaque coup de hachette une élévation anguleufe ou efpèce d'arête qui excède d’une ligne environ l'endroit où a pale le. milieu de la hachette. C'eit fur cette élévation ou arête que fe forment les pre- miers rudimens des eflorefcences falpêtrées. D'abord il part un filet imperceptible de Salpètre, qui s'alonge en formant avec l'arête un angle de quarante degrés environ. Ce filet groflit peu à peu, puis à une petite diftance de l'aréte, il en part un autre qui fe ramifie fur le premier & fous le même angle. Ces filets, en traçant ainfi fucceflivement & en fe ramifiant , forment, en termes de Naturaliftes, des dendrites de Salpétre. Lorfque les filets & aiguilles fe font multipliés à un certain point, qu'elles fe font rejointes à celles qui partent de l'arèce oppolée, & qu'il ne leur refte plus de place pour fe propager , elles commencent à jeter des ramifications qui s'élèvent hors du plan de la furface de la craie , toujours en formant un angle d'environ quarante de- grés avec le file: dont elles partent. Ces ramifications, en fe multipliant & fe confondant , forment un réfeau qui s'épaiffit de plus en plus. Chaque aiguille ou ligne droite en païti- culier , n’a jamais plus d'une ligne de longueur en droïture ; mais l’'enfemble de toutes ces ramifications forme fouvent, avec le temps , une épaïfleur de trois ou quatre lignes. Cet amas d’aiguilles crès-fines, & qu'on ne diftingue bien quà la loupe, eft le vrai Salpéue de houflage ; il eft en totalite à bafe d'alkali végétal parfaitement pur, & ne con- tient ni eau mère ni fel marin, Bbbb ij 564 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: L'arclier du nommé Renoule, Salpêtrier à Moufleau, pré- fentoit à cet égard une variété fingulière : la hacherte dont il s’éroit fervi pour recueillir le Salpètre qui s'éroit fornié aux parois de fon atelier, étoir ufée ; il s'y éroit fair des brèches, des dents prefque comme à une fcie ; les endroits par où la hachette avoit pale préfentoient en conféquence une trace fillonnée aflez femblable à un ruban rayé. Chaque raie ou arête devenoit l’origine d’une ramification femblable à celles qu'on vient de décrire. Sixième fair. Les circonftances qui accompagnent le développement où la formation du fel marin dans les craies de Moufleau & de la Roche Guyon, font à peu près les mêmes que celles qui accompagnent la formation du Salpêtre. En général le {el marin y exifte prefque toujours à bafe terreufe , quelquefois à bafe d’alkali minéral, comme au N.° 38 ; mais jamais , x »* A A > . 1er — à ce quil paroït, à bafe d'alkali végétal. Septième fait. Il paroïc conftant, d’après les obfervations rapportées aux N27, 28, 33, que les craies s'épuifent avec le temps des principes propres à la formation du Salpêtre ; ainfi la même habitation creufce dans la craie qui auroit donne per- pétuellement ou au moins très-long-temps du Salpètre, fi elle eût continué d'être habitée , cefle d'en donner au bout d'un certain temps, fi les environs ceflent d’être habités. De ces faits, qu'on peur regarder comme certains, on peut tirer un nombre de conféquences plus ou moins cer- taines 3 & nous allons, d’après les motifs expofés plus haut, les préfenter ici d’une manière ifolee comme les faits. Première conféquence. L'acide nitreux n'eft pas préexiftant dans les craies de la Roche-Guyon, mais il s’y foime par l'aétion de l'air & par MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $6S le concours de différentes circonftances difficiles à faifir, & à peu près de la même manière que dans les nitrières artifi- cielles. L'expérience de M. le Duc de la Rochefoucault, fur la propriété qu'ont les craies lorfqu’elles ont été leffivées , de fe falpétrer de nouveau d'elles-mêmes par leur fimple ex- pofition à l'air, forme prefque une démonftration de cette conféquence, Seconde conféquence. Non feulement il fe forme de l'acide nitreux dans les craies de la Roche-Guyon, mais il paroît prouvé qu'il sy forme aufli de l'alkali fixe , & la formation de ce dernier ne paroit pas même très-lente à s’opérer. Trorfième confequence. De ce que les craïes expofées à l'air dans des lieux éloignés de toute habitation , fe chargent de nitre à bafe terreufe, on peut en conclure que la feule aétion de l'air fuffit pour former ou pour développer ce fel dans la craie. Probable- ment comme les montagnes de ce canton, qui font évidem- ment formées de débris de corps marins, elles contiennent encore des portions de matières animales qui ne font point entièrement décompofées, & dont la putréfaétion, s’ache- vant par l'aétion de l'air, donne lieu à la production du Sal- pètre. Quatrième conféquence. Il n'en eft pas de même du Salpètre à bafe d’alkali fixe; ce dernier ne fe rencontre que dans le voifinage des lieux habités ; d’où il paroït qu'on eft en droit de conclure que le concours des exhalaïfons animales eft néceflaire à fa forma tion, Cinquième confequence. Peut-être foupçonnera-t on que l’alkali fixe qui fert de bafe 566 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. à l'acide nitreux dans le voifinage des lieux habités, provient de la décompoftion des matières animales & végétales; qu'il s'infinue enfuite dans les craies, qu'il y grimpe, & qu'il dé- compofe le nitre à bafe terreufe qui sy eft formé, pour le transformer en vrai Salpêtre. Cette opinion féduifante a de grandes difficultés; premièrement, les eMorefcences falpêtrées s'élèvent fouvent à quinze & vingt pieds au deflus du niveau des habitations, & il paroïtroit difficile qu'il s'élevàt par la feule imbibition une aflez grande quantité d’alkali jufqu'à cette hauteur. Secondement, fi l’alkali fxe grimpoit, comme onlefuppole , à travers la craie , il decompoferoit, chemin fai- fant , non feulement le nitre, mais encore le fel marin à bafe terrcufe ; cependant les craies de Moufleau & de la Roche- Guyon ne contiennent jamais de fel marin à bafe d’alkali végétal , rarement même de fel marin à bafe d’alkali mi- néral : ce qui femble prouver fufffamment que lalkali vé- gétal qui fert de bafe au Salpêtre , ne vient point par im- bibition de la deftrution des végétaux & des animaux. Sixième conféquence. Les craies, lorfqw'elles font bien difpofées & que toutes les circonftances font favorables, n’exigent, pour donner du Salpétre, même à bafe d'alkali fixe , qu'une très-petite quan- te d'exhalaifons animales. Telles font les confequences que femblent préfenter les faits dont nous avons rendu compte. Elles ne font pas, il faut l'avouer, pleinement fufffantes fur l’origine & la formation de l'acide nitreux, mais elles, pourront au moins nous fervir de guide pour feconder la Nature, & nous indiquer les méthodes les plus sûres pour accélérer fa formation dans les craies , & pour transformer le nitre à bafe terreufe, qui sy forme prefque naturellement en Salpêtre à bafe d'alkali vé- gétal. C’eft par ces applications de la théorie à la pratique, que nous allons terminer ce Mémoire. On a vu, dans la première partie, qu’en général les Craies, prifes à une certaine profondeur dans la montagne, contenoient MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 567 peu d'acide nitreux , qu'il y étoit le plus communément uni à une bafe calcare ; le but qu'on doit fe propofer pour for- mer des établiflemens utiles en ce genre, confifte donc: À augmenter la quantité d'acide nitreux contenue dans les terres. 2.9 À transformer le nitre à bafe terreufe en nitre à bafe d’alkal fixe : or, ce moyen , la Nature femble nous le pré- fenter ; on à vu que c'étoit principalement par l’exhalaifon des matières animales qu’elle remplifloic ces deux objets ; 4l ne s'agit donc que de limiter, & voici le plan que nous croyons devoir tracer à cet égard. On choifira d'abord, pour former un établiflément, l'en- droit de la montagne où l'acide nitreux femblera exifter na- turellement en plus grande abondance , & où les craies pa- roitront avoir le plus de difpofron à fe falpécrer ; ; tel fera, par exemple, le trou de Bon Fourquières, Où ; 1 nicux encore, des caves ou hangars fouterrains, dont les parois feront très- chargés de Salpêrre à à bafe alkaline, tels que ceux de Mouf- feau (voyez a-deflus N.% 12, 13 &14)3 les refcrres ou rémufes ficuées dans la cour du château d'Authile, & auel- ju ques-unes des habitations abandonnces, fituécs entre Authil & Chantemelle. On fermera ces fouterrains avec des portes à claire voie , & on ménagera méme une ouverture au deflus des portes, afin de lai Mers la circulation la plus libre quil fera pofñble, Si les caves qu'on aura choïfies pour opérer contiennent déjà, comme celles de Moufleau , du Salpêtre à bafe d’al- kali fixe, on fe contentera d’abattre, tant de la voûte que des parois latérales, trois ou quatre pouces d'épaifleur de craie, on concaflera le tout, puis on mettra la terre dans des cu-. veaux pour la lefliver, ainfi quil eft prefcrir page 28 de l'Inf- œuétion , pour enextraire le Salpétre. Lorfque cette craie aura été lefivée, on la laïflera s'egoutter & fe fecher pendanc quelques jours ; on accélèrera cette deflicaion en y mêlant un peu de paille très-menue; lorfqu'elie aura été fuffifamment refluyée , on l’arrofera légèrement d'urine ou d’eau de fumier 563 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. puréfice ; enfin on en formera une couche qu'on garnira par-deflous d'une claie triangulaire, femblable à celle repréfentée planche premiere , fioures” quatre & cinq de lInftruion fur létabliflement des nitrières : on fera en outre dans la couche un grand nombre de trous avec une tarière, pour ménager ie accès multiples à Pair. Si les caves ou licux fouterrains dans lefquels on opérera font nouvellement OUVENTS , sils n'ont pas été expolés un temps fuffifanc à l’aétion de l'air, enfin sil ne sy eft pas formé de Salpètre à bafe alkaline ; alors, au lieu de lefliver fur le champ la craie qu'on aura abattue, on la mettra en couche en larrofant durine , & on attendra, pour la lef- liver, que la quantité de Salpêtre, & fur-tout de Salpétre à bafe alkaline, y foic fuffifamment augmentée. Au bout de deux, trois ou fix mois, plus ou moins, car ce terme ne peut abfolument fe fixer que d’après l'expé- rience » on abatra de nouveau trois ou quatre pouces de craie à la voûte & aux par rois du fouterrain , & on en fera une nouvelle couche féparée de la première, & conftruite fur jes mêmes principes. On conçoit que tandis que l'urine & eau de fumier enrichiront , en fermentant, la couche en Salpêtre , les exhalaifons de ces mêmes matières agiront fur la voûte & fur les parois du hangar fouterrain, qu'on remplira par conféquent deux objets par cette méthode, & qu'on mettra en aëtion la plus grande quantité poflible de craie. On continuera d'opérer fur le même plan, jufqu'à ce que le lieu fouterrain foit entièrement rempli de couches à Sal- pêtre , en ménageant cependant l'efpace néceflaire pour l'em- placement des cuveaux. On augmentera ainfi de jour en jour la grandeur de l'atelier; on s’enrichira en matières falpétrces; & ce plan, qu'on fera obligé de fuivre pendant plufieurs années, n ‘empéchera pas que , ÉTE faifant, on ne leflive les cou- ches qui paroîtront fufffamment riches, & qu'on ne les réta- blifle après les avoir leffivées. On conçoit que huitou dix ateliers , montés fur ces principes, deviendroient MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $69 deviendroient un jour une fource immenfe de richefles pour les Propriétaires ; ils verroient leurs fonds s'augmenter de jour en jour, & leur bénéfice ne feroit limité que par leur in- duftrie. Quoique les craies du trou de Bon- Fourquières ne fourniflent que peu ou point de Salpètre à bafe d'alkali fixe, cerendroit peut néanmoins fervir à former un atelier d’une grande impor- tance. On a vu, en effet, Ne D RGALOE quelle contenoit une très-grande abondance de nitre à He rerrcufe, & que cette qualité nitreufe s'étendoit fort avant dans la montagne : il feroit donc pofible de lefliver les craies à mefure qu’on creuferoit le fouterrain;, & loin qu'il en coutât pour la main d'œuvre, il refteroit probablement au contraire un bénéfice confidérable. Parmi les emplacemens commodes pour un établiflement de ce genre, on croit devoir infifter fur les enfoncemens ou remifes ee dans la craie dans la cour même du château d'Authile. Le Salpètre à bafe d’alkali fixe sy montre de toutes parts. Ces craies fans doute en contiennent jufqu'à une cer- taine profondeur ; ainfi on commenceroit à lefliver dès les premiers inftans. Les caves ou reflerres fouterraines, firuces à l'entrée du village de Moufleau (voyez N° 12, 13 & 14), pré- fentent bien le même avantage ; mais comme elles font environ- nées de toutes parts d'habitations creufces dans la craie, le tra- vail y feroit limité, & on ne pourroit augmenter les excava- tions fans rifquer de caufer des choulemens dangereux. Enfin, fans fe borner aux feuls endroits habites , on peut former des établiffemens fruétueux , en creufant en pleine craie des hangars fourerrains, & en y formant des couches. Le côteau qui s'étend depuis Bennecouït jufqu'à Vetheuil, offre des endroits favorables pour une pareille entreprife ; 5 peut- être dans ces terreins neufs & où l'acide nitreux n'eft pas abondant , faudroit-il forcer un peu davantage en urine, en arrofage & en fumier ; peut-être aufli faudroicl un plus long intervalle de temps, pour développer dans les craies une quan- tite fufifante de Salpêtre : mais en oubliant ds un où Ccc $7o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: deux ans les couches qu'on auroit formées, on ne manque- roit pas de les trouver très-riches, & prêtes à être leflivées. Les moyens d'exploitation qu'on vient d'indiquer pour les environs de la Roche-Guyon, font également applicables aux craies de Dreux, qui ne font pas moins riches en Salpôtre, à celles d’Ivry fur Eure, à un grand nombre de carrières de tuffeau fituées en Touraine ; enfin aux côteaux de craies de- couvertes qu'on rencontre fréquemment le long de la Seine, en Normandie, & dans les Provinces de Champagne & de Picardie. C’eft principalement pour ouvrir les yeux du Public fur cette richefle nationale , & fur les moyens d'en tirer parti, qu'a été rédigé ce Mémoire. Nous nous propofons de faire un trayail de même genre fur le Salpètre naturel de Touraine.. 572 MÉMOIRE SUR DES TERRES ET PIERRES NATURELLEMENT SALPÉTRÉES DANS LA TOURAINE ET DANS LA SAINTONGE; Par MM. CrouEer G@ DE LAVOISIER. IN avons rendu compte à l’Académie, dans un Mé- moire qui lui a été lu le $ Juillet 1777, des Obfervations que nous avions faites fur les craies naturellement falpétrées des environs de la Roche-Guyon, fur la quantité & la qualité des fels qu'on obtenoit en les leflivant, & nous y avons joint quel- ques réflexions fur la formation du Salpêtre. Le Mémoire que nous prélentons aujourd'hui eft une fuite de ce travail, ou plutôc c’eft le même travail appliqué à une Province cntière qui ne préfente pas moins de richefles en Salpètre, que les environs de la Roche-Guyon. Le voyage qui a donné lieu aux Obfervations dont nous allons rendre compte, a été fait dans les mois d'Avril, Mai & Juin 1778. Il m'étoit pas difficile de s’'appercevoir, à cette époque, que la guerre, & fur-rout la guerre maritime avec l'Angleterre, étoit inévitable ; les préparatifs qui fe faifoient de toutes parts en Europe, la quantité prodigieufe de vaifleaux en armement & en conftruétion dans nos ports, les demandes confidérables de poudres que la Marine du Roi avoit déjà faites, tout annonçoit que notre fervice alloit devenir plus important , plus difficile, & que nous avions à nous préparer Grec) 572 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. _ à des fournitures fupérieures , même de beaucoup à celles faites dans les guerres précédentes. Les magañns de la Régie éroient, il eft vrai, bien appro- vifionnés en poudre & en Salpèrre ; & quelque puñlent être les fournitures, le fervice des deux ou trois premières campagnes étoit complétement afluré; mais il éroit poflible que la guerre durât plus long-temps, & il auroit été de la derniere imprudence de ne pas combiner d’avance-les reflources néceflaires pour continuer la guerre aufli long-temps que la gloire & la fûreté de l'Etat pouvoient l'exiger. Cette ciconftance nous parut celle de mettre en jeu tous les reflorts de l'adminiftration qui nous étoit confiée, & de déve- lopper tout ce que nous avions de moyens pour augmenter la fabrication du Salpêtre , & pour perfectionner celle de la poudre. Nous partimes en conféquence, M. Clouet & moi, le 9 Avril 1778, pour parcourir, à nos frais, une partie des Pro- vinces de France , celles fur-tout où il exifte des fabriques importantesde poudres, & où nous jugions qu’on pouvoitefpérer d'étendre le plus la récolte du Salpêtre. Nous n'avons pas pour obiet de rendre compte de tout ce qui nous a occupé dans ce voyage; la plupart de ces détails ne préfenteroient ni intérêt ni utilité pour le Public: nous nous bornerons à expofer ce qui a le plus de rapport à notre objet, à l'exiftence du Salpêtre naturel dans la Touraine & dans la Saintonge. F Dans les environs de la Roche-Guyon, nous n'avions à faire qu'à une feule & même fubftance, à dela craie, c'eft-à-dire , à de la terre calcaire prefque pure. Il n’en eft pas de même en Touraine. Les terres & pierres que nous avons trouvées falpé- crées, font des matières compolées; leur nature varie fuivant leur pofitton, fuivant leur niveau; en forte que les Obferva- tions minéralogiques fe font trouvées néceflairement liées à notre travail, & que nous nous fommes trouvés prefque indif- penfablement engagés à déterminer, par des expériences chi- miques, la nature des pierres que nous avons été dans le cas d'obferver. Certe liaifon néceflaire de l’objet qui nous occupe, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 573 avec la Minéralogie, nous .oblige de préfenter ici un tablea général de la Minéral logie de la Touraine & des pays adjacens; & nous partons à cet cher de la plaine de Beauce qui eff à à peu près le point le plus élevé de ce canton, qui a été peu entamé par les eaux , & où les bancs ne font point déformes. La hauteur moyenne de cette plaine, au deflus du niveau de la Seine au Pont de l'Hôtel- Dieu, eft d'environ trois cent quatre-vingt-trois pieds. Sa hauteur au contraire, au deflus du niveau de la Loire à Orléans , n’eft que de cent foixante-onze; d'où il fuit que le lit de la rivière de Loire eft plus haut que celui de la rivière de Seine, dans les deux points que nous venons de défigner , de deux cent douze pieds. Il arrive de là, que toutes les vallées qui defcendent à la Seine font creufces de deux cent douze picds plus profonde- ment que celles qui defcendent à la Loire; qu'on pénètre par confequent plus avant dans les couches terreftres, dans les environs de la Seine à Paris, que dans les environs dé la Loire à Orléans, & qu indépendamment des différences qui refultent de la différente nature du terrein, il y a des différences qui dépendent de la différence du niveau. Dans les fouilles qui ont été faites dans la plaine de Beauce, foit par la Nature, foit par l'Art, on obferve, *. Une couche aflez épaifle de terre végétale limoneule & très-fertile. 2°. Environ cent cinquante pieds d'une efpèce de marne, hanelle renferme des pierres calcaires en rognons, & qui ne forment pas des bancs fuivis : ces pierres RÉ communément. ces se , d'un grain fin; ce font des clpèces de cos. Une épaifleur de fablon blanc très-confidérable.. î ne paroit pas qu'on ait pénétré au deflous de ce niveau; mais en liant les obfervations faites en Beauce, avec celles faites dans ies environs de Paris, du côté de Verfailles, Sèves & Meudon, on feroit tenté de croire que le fable repofe fur un fecond maflif de pierres calcaires, ce dernier fur un banc € épais de fable ; enfin, que le tout porte fur un maflif immenfe de craie , db le niveau eft très-variable. s74 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Telle eft la nature des couches. qui compofent la Beauce ; d'après les obfervations faires fur les vallées qui la coupent & qui fe jettenc dans la Seine ; mais, comme on l’a déjà obfervé, le lit de la Loire n'étant pas creufe aufli profondément, & la furface de ce fleuve n'étant que de cent foixante-dix pieds envi- ron au deflous du niveau de la plaine de Beauce, près d'Or- Icans, toutes les vallces qui y aboutiflent font moins profondes, & toutes les ouvertures qui ont cte faites , foit naturellement où par l'art, ne pénètrent pas dans ce canton au delà de lépaifleur marneule qui forme le premier des bancs de la Beauce; le lit de la Loire fe creufan® enfuite peu à peu à raifon d’un pied & demi par mille toifes environ, à mefure que ce fleuve chemine vers la mer , il entame la couche infc- rieure à la Marne; c'eft ce qu'on obferve déjà dans les envi- rons de Blois, & ce qui devient plus fenfble & plus frappant vers Chaumont, village fitué entre Blois & A mboile. Le fable fe retrouve donc dans cette partie à peu près au même niveau que dans les environs d'Erampes, mais avec une différence très-remarquable ; c'eft que vers Chaumont , entre Blois & Amboile , la couche fableufe ne fuccède pas brufquement à la couche marneufe ; elles fe mêlent au contraire enfemble, & il en réfulte une pierre mixte, partie calcaire , partie fableufe, qui porte le nom de tuffeau en Touraine, & qui cft très - propre à être employée dans les bâtimens. À mefure qu'on avance vers la mer, le lit de la Loire fe creufe de plus en plus; le tuffeau prend peu à peu une couleur bleuâtre, & il eft alors formé d'un mélange defchite, de terre calcaire & de fable; enfin le tuffeau repofe fur une mañle de fchite & d'ardoife , dont la furface n'eft point horizontale , & qu'on ne commence à découvrir que dans les environs d'Angers. C'eft à ce tuffeau qu'eft dû la grande quantité de Salpêtre que fournit la Touraine. La combinaifon de fable & de terre calcaire où de craie dont il eft compofe , lui donne préci- fément le degré de porofité néceflaire, pour que l'air & les Te D 7 UT MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 575$ émanations putrefcibles puiflent le pénétrer, & pour que la fermentation s’y achève. Non feulement le tuffeau fe falpêtre dans les villes & dans les lieux habités, il contient même fou- vent du Salpètre dès la carrière même, lorfqu'il a été expofé quelque temps à l'air. Les carrières de tufleau fe reffemblent toutes par l'arrange- ment des bancs; elles different feulement un peu par la nature de la pierre, & par la proportion de fable & de terre calcaire dont elle eft compofée. Les premiers bancs font communément formés de pierres anguleufes mal arrangées : à mefure qu'on defcend, la pierre prend plus de confiftance ; alors on y trouve quelques noyaux de coquilles & de madrepores , & quelques filex. Plus bas, les bancs deviennent de plus en plus épais , & forment des mañles confiderables. C’eft dans cette mafle que font creufées les carrières de tuffleau de Touraine ; on les taille en parallélogrammes alongés, toujours à peu près des mémes dimenfions, Toutes les villes fituées le long de la Loire, font bâties de cette pierre. On en tranfporte à Nantes, à Bor- deaux, & même jufque dans les Colonies. Il feroit difficile de déterminer quelle eft l’épaifleur de la: mafñle de tufleau, parce qu'il ny en a qu'une partie de deé- couvert. On en voit fouvent dans le bas des côteaux, une épaifleur de foixante ou quatre-vingts pieds au deflus du niveau de la Loire; elle cft méme de cent vingt pieds dans les environs de Saumur. Comme toutes les fouilles qui ont été faites ne pénètrent pas au deffous du niveau des rivières, ileft impoñlible de favoir jufqu'où s'étend le tuficau. [1 paroît feulement qu'il eft plus ou moins épais, fuivant que la male de fchite fur laquelle il eft aflez probable qu'il repofe, s'approche plus ou moins de la furface de la terre. Notre premier projet avoit été de joindre une Carte à ce Mémoire, & nous en aurions rendu l'intelligence un peu plus facile; mais l'étendue de terrein qu'embraflent nos Obfervations, étant fort confidérable , ou nous aurions été forcés d'employer des Cartes très-grandes & très-multipliées, ou de les faire faire fur une très-petite échelle, & elles auroïent été inutiles. D'al-- 576 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE! leurs la Carte de France de l’Académie eft maintenant entre les mains de tout le monde; il fera par conféquent facile -à ceux qui voudront faire une étude particulière du local, de nous fuivre dans les lieux que nous avons en ils auront à fe munir des Cartes ci-après : n°. : » Paris; n°. 7, Etampes & Fontainebleau ; n°. 8, Oiléans ; n°28 VERRE PNR Blois; n°. 65, Toutes ARLON EE oder Richelieu, Chinon; n°. 67, Poitiers ; n°. 69, la Rochefoucault; n°. 70, Angêu- lême , Aubeterre; n°. 102, Saintes. Après avoir donné des idées générales de l’arrangement des couches depuis Etampes jufqu'à l'extrémité de la Touraine , nous allons entrer dans le détail des localités. Nous avons déjà fait obferver que c’eft vers Chaumont, c'eft-à-dire, entre Blois & Amboile, que les carrières de tuffeau commençoient à fe découvrir dans le bas des côteaux : nous avons pris un échantillon de celui que M. le Ray de Chaumont Res à Chaumont dans une nitrière. qu'il avoit établie, & dans des couches à la Suédoife. Ayant diffous ce tuffleau dans de l'acide nitreux afloibli, nous avons reconnu qu'il contenoit : par quintal: livres. onces. Nértoncal repertoire ere Re L ETC CES TB NL Sablon très-fin , très-blanc, en poudre prefque impalpable, qui ne con- tenoit pas de paillettes talqueufes. ....... HSE ho o ons DROIT PEL » MOT A Tes epten tele rentre eh 2e eee TOQ Au delà de Chaumont, & après le village de Mofne , la sive gauche de la Loire ne préfente plus prelque jufqu'à Am- Los » qu'une fuite de carrières de tuffeau, où l’on a tire des pierres de taille. Nous avons obfervé quelques tes de ces car- rières à la Calonniere & à la Cave. La carrière où nous nous fommes le plus arrêté, fe nomme Notre-Dame-de-Bonne-Cave; elle préfente une coupe d’environ foixante pieds, toute de tuficau ; les premiers bancs n’ont point de continuité ; vers le milieu elle forme de beau moellon, & dans le bas, de la pierre de taille, Le Ps MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 577 Le banc fupérieur, à l'endroit où la pierre commence à fe décider en pierre de taille, eft rempli de coquilles fofliles ; on y trouve fur- tout beaucoup de tuyaux marins, quelques-uns droits, d’autres vermiculsires, des cames ftriées , des fragmens de madrepores & d’ourfins. La mañle de pierre de taille a environ vingt pieds d’épaifleur, & probablementelle fe continue plus avant, & peut-être au delà du niveau de la rivière. Nous avons obfervé que la furface de ces pierres s'altéroit aifément à l'air; le fable dont elles font compofées rombe, & ilrefte une eforefcence calcaire qui fouvent a un goût falin ; du refte on ne voit dans les carrières aucune eforefcence de Sal- pêtre à bafe d’alkali fxe. Le tuffeau de tout.ce côteau eft à peu près de même nature que celui voifin de Chaumont; il contient foixante-quinze à quatre-vingts livres de terre calcaire par quin- ral, & le furplus en fable fin. Ce n'eft pas feulement dans le bas des coteaux de la vallée de la Loire qu'on obferve ces carrières de tuffeau ; on les trouve dans toutes les vallées voifines qui font aflez profondes, & notamment le long du Cher; & c’eft dans cette partie qu'elles font fouvent falpétrées. On trouve quelques-unes de ces carrières ouvertes entre la Croye & Civray, ainfi qu'au village de Chiffay ; la pierre y eft affez dure, d'un grain brillant, & ne préfente pas d’effloref- cence falpétrée. Vers Chiflay, la pierre commence à devenir plus tendre & plus fine; la même nature de terrein fe continue après Montrichard , & on trouve à Bourré & à Vinneuil des habitations formées dans les carrières mêmes; on y remarque aufli d'anciens travaux abandonnés, qui pénètrent fort avant dans la montagne. Quoique ce côteau ne foit pas fort riche en Salpètre , le Salpètrier de Montrichard y trouve l'aliment de fon atelier, principalement dans les environs des carrières habirces. C'eft fur-tout fur les confins de la paroïfle de Bourré & de celle de Monthou , que les carrières font le plus confidérables. La pierre qu'on en üre eft connue dans le canton fous le nom de pierre de Bourré; elle eft tendre, & fe taille plus facilement D ddd 578 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. que celle de Saint-Leu même : elle eft d’une grande blancheur, & la conferve long-temps; mais elle à l'inconvénient d'être trop tendre, de fe décompoler aifement à l'air, & elle fe fa!- pètre très-promprement. On en tranorte par la Lorie à Or- léans, à Tours, à Nantes, & même à Bordeaux. Souient à l'ouverture de ces carrières on trouve fur le rocher des eflo- refcences qui ont un goût falin & amer; mais on n'y trouve point de Salpêrre à à bale alkalme, ni en eflorefcences, ni en plaques comme à la Roche-Guyon. Pout connoître exactement la nature de ces pierres & celles des fubftances falines qu'elles pouvoient contenir , nous en avons pris des échantillons dans une carrière de Monthou , fur les confins de la paroïfle de Bourré. [1 y avoit des parties decette carrière nouvellement exploitées , mais elle s'étendoit à une grande profondeur & communiquoit avec des travaux anciens. Nous allons rendre compte & du local où nous avons pris les échantillons , & des expériences auxquelles nous les avons foumis. Zuffeau pris à l'entrée de la carrière de Monthou , confins de la paroiffè de Bourré, à la Jürface d'un pillier, & Jeulement à a un pouce de profondeur & à quatre à cinq pieds au deffus du niveau du fol. Ayant leffivé un quintal de cette matière avec un quintal d'eau, on en a obtenu, en tenant compte de l’eau reftée dans la terre, les quantités de matières falines qui fuivent: onces. gros. grains} Merre calcaires... PÉCOCI GER CES EI : =: Eat SR MAT IE EE due Gels e ALES CT 9» RES Salpêtre à bafe d’ alkali ec CoOC OS Me En ICE Eau mère, Avec addition de $ onces 6 gros f4grains < Salpètre..... OSELOPC “Htébae re INA Me 6Te d'alkali fixe. Quantité de terre calcaire, précipirée de l'eau mère, 3 onces $7 grains. Toxazr de /prodiie flinss, A CRAN 60 RE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 579 Deéblais pris à l’entree de la méme carrière de Monthou dans un lieu expofé à l'air , mais à l’abri de la pluie. Produits falins obtenus par lixiviation. P'AUR | Q U I'N T'A L, onces. gros, grains: ‘Terre calcaire... ...... ceci 70. mL: Sans addition d'alkali, Sélénite.. eee celle dereeseseserese 52e » Salpêtre à bafe alkaline ...... seb CON APE FAnEmere Meier AVebere re È Avec addition d'une once 6 gros 20 grains Salpêtre................... es tus ete 1. V6 M2 O. d'alkali. Quantité de terre calcaire, précipitée par l'alkali, r'onc. 1 gr. 38. Toraz du produit falin.......... Diboln teste 2: F5 GO Produit obtenu par { ’analyfe avec les acides. PAR QUINTAL. livres, onces. gros, graine, Terre CAlCAIrE. +25 some sie cree eescieniole if Se ES: 07e 3, Sablon blanc, très-fin, crès-divifé, mêlé de beaucoup de paillettes talcqueufes......... atetotele s lets s'en De uen AM IU 7 CEE Toraz des produits terreux........,.... 100. . 2. » n Tuffeau détaché dans la méme carrière de Monthou , fous la montagse , à quatre cent quatre vingts pieds de l'ouverture de la carrière dans une partie d’anciens travaux abandonnés. Produits falins obtenus par lixiviation. PAR QUINT A1 onces, gros. grains, MOTrEMCAICAITES ie oies eetelciele DEMEURE Fe TC Sélénites rene cerise OS SO: Sans addition d’alkali. < Sel marin.................... TN 3T ROS Salpêtre à bafe alkaline........... » ‘1, 6x7 Eau mére. Avec addirion de Salpètre Ram ERA THE HN ol IE $ gros d’alkali. { Sel marin. végétal.............. to: 008 155318 Quantité de terre calcaire , précipitée par l'alkali, 3 gros so grains. Toraz du produit.......,...ssedesnssses NO OPEN 58o MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: Produit obtenu par l'analyfe avec les acides. PSLAYR: , Q UUI NUTÉ A Le livres. onces. gros grains: Terre calcaire. ........ nrssssseneseesseenesene HN CO NE QE 24: Sablon blanc très-fin, très-divifé.................... 35 AT RU 48. OL ALL Me ee ee are c'en to aiais soelete e ce eleiepe 100. » EE EN Déblais de la-méme carrière de Monthou , pris fur le fo! au méme endroit, c’eft-a-dire , à quatre. cent quatre- -vingts pieds de l’ouverture de la carriere, Produits falins obtenus par lixiviation. P À R° > QUU AN T, AL: onces. gros. grains Terre calcaire. :...... HAE SON O0 Sr Ne Sans addition d’alkali: + Sélénite............ rer De M IS OÙ Eau mère, Avec addition d’une once 6 gros 14 grains 4 Salpétre....... roreoreme sc Zr TU 48e d'alkali. TorTaz du pfoduit falin..................... 2002 PRET 6 SRE TA CRE SRE TELE Produits obtenus par l’analyfe avec les acides. PAR: QUU TNT) AL. livres. onces. gros. grains. Terrecaltaiter. sense alerte 7 NA TR 2 42 Sablon bianc, très- DER , très-divifé, contenant beatconps de paillettes ralcqueuf Ce ao ele ces ee eee DOME C'ÉNC CCE ToTaL des produits terreux............ 100. » » » Nous obferverons ici qu’on trouve dans le banc qui forme ié ciel de cette carrière & de la plupart de celles de ce canton; une grande quantité. de noyaux de bivalves, de l'efpèce de celles qu'on nomme cœurs. Le banc fupérieur , quoiqu'à peu près de même nature que les autres, eft moins tendre & moins craitable, MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTRE. 481 Le tuffeau, dans toute cette partie, paroit avoir une grande épaifleur, par exemple, de cent ou de cent vingt pieds; fans compter ce qui s'étend au deflous du niveau de la rivière , & qui eft entièrement inconnu. Nous terminerons ce que nous avons à dire fur les carrières qui font le long du Cher, en obfervant qu’elles préfentent fouvent, fur-tout dans les environs de Montrichard , de grandes fentes perpendiculaires de deux ou trois pieds, qui ifone toutes remplies d’une efpèce d'argile d’un jaune brun. Le Salpétrier de Montrichard nous a afluré que les blaireaux faifoient de pro- fonds terriers dans cette glaife, & qu'elle étoit fouvent riche en Salpêtre. Ce Salpétrier pénètre dans ces tanières, en retire la terre le plus avant qu peut, & elles produifent par lexi- viation jufqu'à une livre & dernie de Salpêtre à à bafe terreufe par quintal, Le même tufleau fe retrouve le long de la Loire depuis Amboife jufquà Tours, & dans tous Îcs environs de cette ville. Nous nous fommes d'abord attachés à obferver avec foin les environs de Vernon & de Vouvray, villages fitués près de la Loire & à fa rive droite. Tout le côteau & les vallées adjacentes font compofées de tuffcau, Le niveau auquel il com- mence peut être de cent cinquante à deux cent pieds au deflus du niveau de la Loire. On trouve d’abord, dans le haut, d’aflez bonnes terres à bled; dans quelques endroits, elles contiennent des cailloux ou efpèces de meulières pleines; enfuite vient la mafle de tuffleau qui defcend jufqu'au niveau de la rivière de Loire. La pierre, dans le haut,-eft très-dure, & fe falpêtre difficilement; mais lorfqu'on n'eft plus qu'à une cinquantaine de pieds du niveau de la Loire, elle devient plus tendre; Nous avons trouvé aux Echenots, près Vouvray , une veine jaunâtre de ce tuffeau, qui étoit remplie de coquilles, & principalement d'huîtres alongées. Il étoit tout pénétré de Salpètre à bafe terreufe, & on trouvoit même, dans quelques endroits, du Salpêtre à bafe alkaline en efflorefcence & en plaques. [l'y à aux Echenots même un Salpétrier qui exploite: 532 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ce tuffeau, & qui en tire, chaque année , une grande quantité de Salpètre. En fuivant ce côteau jufqu'à Vernon & Chançay , le tuffeau continue, & on trouve en plufieurs endroits des caves & ref- ferres qu'on y a creufées. Dans prefque routes celles qui font fuffifamment aérées, on trouve du Salpêtre à bafe alkaline en clorefcence : en pénétrant plus avant & dans les endroits où l'air circule avec moins de facilité, on ne trouve plus de Salpêtre à bafe alkaline, mais feulement du Salpêtre à bafe terreufe , qui eft fenfble au goût, & qu'on obtient par Lxiviation. On a pris à Vauzel, paroïfle de Vouvray , un échantillon de ce tuffeau, à quatre pouces de profondeur, à l'entrée d’une cave ou reflerre, & on en a retiré les produits qui fuivent: Produits falins obtenus par lixiviation. PPANRE QYU ENT ANT. onces. gros. grains. Terre calcaire... ... Joromecre: ste dd AT De Sans addition d’alkali. Sel'marin...-.e mener ST EM Eau mère. 5 D ANS M Salpétre.e nue emmesresesesce aur d'alkali, ? D Sel fébrifuge .......... ses » 6. 48. Terre calcaire, précipitée par l’alkali fixe, 3 ences 1 gros. Toraz des produits falins.......…........... 9. 2 52. Nous avons trouvé dans ce canton, comme aux Echenots, des veines de tuffeau jaunâtre, qui contiennent beaucoup de débris de coquilles; on n'en trouve point au contraire dans celui qui eft blanc, & il ne contient d’autres corps étrangers que quelques cailloux de la nature de ceux qu'on rencontre dans la craie. À un quart de lieue au fud-oueft de Chançay, eft une ferme nommée le Verger ; on trouve à peu de diftance , à la croifière d'un chemin au nord, une veine d’une fubftance blanche qu'on prendroit pour une craie marneufe. Dans les MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SaLrÊTrE, 583 endroits où elle eft à l'abri des injures de l'air, elle a une amertume très-décidée. On trouve une veine de la même fubftance dans la cour même de la ferme & dans le jardin ; cette dernière eft encore beaucoup plus amère que la précé- dente, & nous en avons pris un échantillon pour le leffiver, Produits falins obtenus par lixiviation de la fubflance (rÿ marneufe & fableufe du Verger. PAR QUU=IANNT AL: Sans addition dalale Eau mère de Salpêtre & de fel marin. livres. onces. gros. grains, Avec addition de 3 Ne fivres 4 gros 64grains Salpètre Mir daen tee teNe 2 Net De Lalkal. Sel fébrifuge minials a diese eo sv +. » 15. $« $7- Quantité de terre calcaire , précipitée par l'alkali, x livre © onces 7 gros $1 grains, Toraz des produits falins.........,...,, FN EN (6025. if Nous avons foumis ces deux maticres à l'analyfe par les acides, & nous avons reconnu que , quoique compofées l’une & l’autre de terre calcaire & de fable très-fin , elles différoienc beaucoup par la proportion de ces deux fubftances. Produits obtenus par les acides du premier échantillon pris au Verger. PA RAA QUUTINNLER AL. livres, onces. gros. grains, OLTE CAÎCAITES se noce mo sue ds es es 9 srroo ss des ares Sie ER CE Matière douce au toucher, très-fine, efpèce de kao-lin, mêlé de paillettes talcqueufes............ PÉRUOE 23. NET. (148 OR LE 0 colo u vie remmereuaree ver ve: DLOQS » » » Produit Mobtenus par les acides du fecond echantillon pris au Verger. livres. onces. gros grains, MÉPTOICALEA IE eee eiciele seins sie Fra oO one tionc DER CR ET I7L Subftance très fine & comme impalpable, tenant cependant de la nature, du fablon............ so daslsitseneler LÉDINE NT CNET E TOTALE Me ste emenee de me eestre serve ser TOO 2) D >» 584 ‘MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. En fuivant de Vouvray pour aller à Tours, le côteau con- tinue à être garni de rochers de tufleau, & cette pièrre s'étend depuis le haut du côteau jufqu'au niveau de la Loire : nous avons eu occafion de nous en aflurer à Saint- -Georges , dans la maïfon de M. Grailler; cette maïfon eft fituée à foixante ou quatre- vingts pieds au deflus du niveau de la Loire ; cout auprès eft une defcente fouterraine très - rapide, qui conduit à une carrière profonde , dont les rues s'étendent fort avant fous la montagne. Le fond de cette carrière eft prefque de niveau avec la Loire, au point que l'eau y pénètre dans les crues de cetre rivière ; la pierre eft à peu près de même nature que celle de Bourrc; elle fe laifle aïfément entamer , & l’humi- dite feule fuffit pour en détacher des particules de fable qui s’amafñlent par terre, & il refte en même temps fur la furface de la pierre des efflorefcences calcaires blanches. Cette pierre contient aufli de la felénite; car l’eau qui pénètre dans la carrière, en charic, & on en trouve des Plaques & même des feuillets très-blancs & grès-minces accumulés-fur le fol de la carrière. On y trouve aufli quelques caïlloux de la nature de ceux que préfente la craie; ils font ramifies & branchus comme 4 corail ou des bois de cerf; enfin on y obferve quelques noyaux de coquilles, des cœurs en fubftance , &c. C eft ainfi qu'on nomme une efpece de grande camme foflile, dont les deux valves réunies préfentent l'apparence d’un cœur de bœuf, Nous avons remarqué dans cette carrière un filon ou fente perp endiculaire, tout femblable à ceux qu'on trouve dans les carrières des environs de Bleré & de Montrichard; cette fente avoit à peu près un pied de large, & étoit route remplie de glaife ; on y avoit ouvert une longue galerie, fans dqute pour en tirer de la glaife. La furface du tuffeau de cette carrière ne préfente aucune apparence de Salpêtre à à bafe d’alkali fixe; les circonftances paroïfloient méme peu favorables à la RER attendu quil n'y a prefque aucune circulation d’air dans ce fouterrain Nos expériences nous ont cependant appris, comme on va fe voir, ms he. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÂTRE. 585 voir, que même dans la partie la plus profonde, la pierre de la carrière contenoit une petite quantité de Salpêtre. L'échantillon fur lequel on a opéré, a été pris aux parois dé cette carrière, à cinq cents pieds de l'ouverture ; il a donné les produits qui fuivent : Produits falins obtenus par lixiviation du tuffeau de la carrière Saint-George. PAR QUINTAL. onces. gros. prainis. He echo Hovart rente DT CDS GélentE: MS LITE ANUS » » 3$- Sans addition d'alkali. < Sel marin très-amer........... AL ET LAN TO SS Salpêtre à bafe alkaline....... sn el 08 LIN 22p Eau mère, Avec addition de Per 6 gros d'alkali. { APE Quantité de terre calcaire, précipitée par l'alkali, 1 gros 69 grains. Toraz des produits falins.........,..,...... 2. 2: $2 Produits obtenus par la diffolution dans les acides. P'atn) Qlu/r Nix AL. livres. onces. gros. grains. Terre calcaires... .. Sans mess nee eee nt) lele ele ets 82:17 ro: rt fée Sable en poudre impalpable.. ..…. bte irnlent ea ITS CNT: TOTAL IN sons ssosnenoseesres re, 00199 » » n Cet échantillon, comme nous l'avons déjà oblervé , a été pris environ à douze ou quinze pieds du niveau de la rivière de Loire, tout au plus; c'eft le point le plus bas où nous ayons porté nos obfervations dans ce canton. Le côteau fitué de l’autre côté, c’eft-à-dire, fur la rive gauche de la Loire, préfente à peu près la même nature de terrein. Celui qui règne derrière Saint-Avertin préfente d’abord dans le haut de gros cailloux ou efpèces de meulières pleines, mélées dans la terre végétale; enfuite commence la mafle de pierres calcaires ou tuffeau; elle eft quelquefois coupée dans la partie fupérieure par des bancs d’une efpèce d'ocre, ou par du fablon gris & noir, Plus bas, les bancs de pierre font continus, Ecee 586 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU -SALPÈTRE. & ne fonc plus interrompus jufqu'au niveau de la Loire. On a ouvert dans ce côteau un grand nombre de carrières qui s'étendent fous là montagne; elles font à différens niveaux. La pierre eft à peu près la même dans routes; elle eft Jau- nacre & dure. On y trouve quelques noyaux de coquilles, principalement de vis & de nautilles. On avoit profité d’une de ces carrières abandonnées à la Roche-Grueau près Saint-Avertin, pour y former une nitrière; les matériaux dont on avoit formé les couches, confiftoient : 1.° dans les deblais de la carrière même , qui font, comme on le verrabientôt, naturellement un peu falpêtrés : 2.° dans des materiaux de démolition leflivés par les Salpétriers de Tours, & qui avoient été charroyés dans cette carrière : 3.° dans quelques matériaux de démolition non leflivés, tranfportés également de Tours. Toutes ces terres, tous ces décombres étoient difpofés par couches de deux pieds, & la quantité en étoit déjà très-coni- dérable. Cet érabliffement devoit reuflir, s'il eût été bien conduit; mais on ne méloit dans les couches aucune fubftance fufceptible de fermentation ; & des matières abfolument abandonnées à elles-mêmes ne peuvent donner de Salpètre que très à la longue & en quantité très- médiocre. Pour connoître fi les matériaux de cette carrière étoient natu- rellement falpêtrés, on à pénétré fort avant fous la montagne dans des travaux anciens, très-cloignés des couches & où lon n'avoit point apporté de matériaux falpêtrés ; on en a obtenu les produits qui fuivent : Produits falins obtenus par lixiviation des deblais de la carriere Saint-Avertin, pris à cent vingt pieds de l’ouverture. P AR! Q'UMT N°T! À L onces. gros. grains. Terre calcaire & félénite........... Le LUE Cond LE Sans addition d'alkali: Sel marin amer......... tit et SONT OS 24: Salpêtre à bafe alkaline............ DUT IS. Eau mère. Avec addition d’une: C cajpêtre Lo Ep A SL esse deteste. TNT : ë dalle 59 8 Sebfébrifugetstist he. 2e. SAC 5 6 TT ONSES Terre calcaire, précipitée par l'alkali, 1 once 24 grains. TozAz desAproduits falins..….... ere vb » 41: MÉMOIRES SUR LA:FORMATION DU SALPÈTRE. 587 Produits falins obtenus des déblais de la méme carriere de Saint-Avertin, à quatre cents pieds de l’ouverturé. PAR QUINTAL. onces. gros. prailté. Terre calcaire & felénite........... UE 64. Sans addition d’alkali. < Salpètre............. sénat MN RUT < Eau mère. defféchée, . ............. Sins 21 ToraL des produits falins.................... 4 4 28. Produits obtenus par La diffolution dans les acides d’un échantillon de la pierre de la carrière Saint- Avertin, prife en plein banc. PXAGRE-QU‘I-N; TUANL, livres. onces. gros. graîns. Moine ole{ole eielslelate etelolsle)e AE OA En > où 1 AN ONRE T0 0 .d6 Sablon fin dun gris jaunätre....... DEPART DE SORT re 17. 1. $6. TOTAL OL RE ARR. M ex 007 » » n” Ce dernier produit eft fenfiblement. le même que celui obtenu du tufleau de la carrière Saint-Gcorge. À près avoir parcouru les environs de Tours & les principales carrières qui l'avoifinent, nous avons continué à fuivre les côteaux qui bordent la Loire jufqu'à Saumur & au delà. Le chemin de Tours à Vendôme, au fortir du nouveau pont, eft ouvert à travers la mafle de tuffeau; il eft exac— tement femblable à celui de tout ce canton. La même nature de terrein fe continue le long du côteau jufqu'à Luynes. Depuis cet endroit jufqu’à Saint-Mars , le côteau eft garni d'habitations fouterraines creufées dans le tuffeau; le Salpêtre, principale- ment à bafe terreufe, y abonde de toutes parts. Nous nous fommes contentés de goûter les rerres & les pierres ;' leur amertume nous à fait connoître qu'elles contenoient de Peau mère, & nous avons trouvé le Salpètre à bafe alkaline en corefcences , ou en plaques en beaucoup d'endroits. Un Salpérier qui étoit établi à Luynes, avoit profité de cette difpofition pour former dans là montagne même un bel atelier à Salpêtre; on remarquoit dans l'endroit où il s'étoit établi, trois rangs ou étages de caves ou carrières qui éroient Eceec ji] 588 Mémoires sur LA FORMATION DU SALPÊTRE. féparées les unes des autres par un lit de tuffeau, contenant des cailloux & des noyaux de cœurs fofliles. Un échantillon de tuffeau, pris dans la cave ou carrière intermédiaire , s'eft trouvé contenir par quintal : livres. onces. gros. grains Mesretcalcairess. Cia LI EN REn int TNT EURE SE: Sablon nr einen ON nn eds à de 27 0 CURE. over Co Code ane EcAGS 100. » » » FR Te Sn Ne Ur ne - |] La cave ou carrière inférieure eft fituée à foixante pieds environ au deflus du niveau de la Loire; elle étoit ouverte dans un tuffeau fort tendre, très-propre à fe falpêtrer, & on y voyoit même du Salpètre à bafe alkali fixe en plaques. Le tufleau de cette carrière inférieure , analyfé par la diflolurion dans les acides, s'eft trouvé contenir par quintal : livres, onces. Terre calcaire. ....1.., LIRE SO TN A NN 7 RATS Sablon fin mêlé de mica. de use. EL anni ere. sf CN 2106 $- L'on PUR A RE ie neue, anis let laide ecretets CLOS » EE On trouve à l'entiée de Langeais quelques habitations creufées dans le tufleau ; mais, à cela près, les coteaux des environs font en pente douce, le ruffeau m'eft à découvert prefque nulle part,.& il n'y a ni fouilles ni carrières ouvertes. Lorfqu'on eft arrivé près de Saint-Patrice, la grande route qui fuic le bord de la rivière s'éloigne du côteau , & on entre dans une plaine bafle, peu élévée au deflus du niveau de la Loïre, qui ft toure remplie de quartz, de filex, de granits roulés par:cette rivière; cette vafte plaine fe continue, le long de la rive droite de la Loire, jufqu'à cinq à fix lieues au deffous de Saumur. Le grand cloignement des coteaux, le long de la rive droite de la Loire, nous à naturellement engagés à porter nos obfervations fur les côtéaux fitués le long de larive gauche. La Loire les-ferre de fort près de ccôte, aufli font-ils très-efcarpés; le -tüffeau y «ft fréquemment à découvert. #&-On y à ouvert un grand nombre de icarrières. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. $89 Le château de Saumur eft bâti lui-même fur un côteau de tuffeau de cent vingt à cent cinquante pieds de hauteur; on y a creufc des caves en plufeurs endroits. En fuivant la côte, en defcendant la Loire, on trouve, à trois quarts de lieue environ de Saumur, à un endroit nommé Pigereau, de grandes carrières de tuffeau , mais qui donnent peu d'apparence de Salpètre ; on y trouve plufieurs belles lources, dont l’une dépofe des incruftations fpatheufes calcaires. - Une demi-lieue plus loin, à Mineroles, on trouve des habitations creufées dans un tuffeau blanc ; indépendamment de l'eau mère dont le tuffeau eft pénétré , on y voit prefque par-tout du Salpètre à bafe d’alkali fixe en elorefcences & plaques. Plus loin , à deux lieues au deflous de Saumur , fe trouvent le village des Tuffeaux & les carrières de même nom : on ignore fi c'eft le village qui a donne le nom à la pierre, ou la pierre au village. Les carrières font en grand nombre, & on en trouve une fuite qui font ouvertes le long du côteau , un quart de licue avant & un quart de lieue après la paroiïfle des Tuffeaux ; elles s'ecendent crès-avant fous la montagne. C’eft de là que fe tire une grande partie des pierres qu'on emploie à bâtir à Angers & à Nantes; on les exploite par blocs de dix-huit pouces de longueur, fur huic, neuf & dix fur chacune des autres faces : ces blocs ainfi taillés fe nomment tuffeaux. Ceux qui font tirés à une grande diftance fous la mon- tagne , font d’un gris cendre , ardoife , fur-tout lorfqu'ils fortenc de la carrière & qu'ils fonc humides; mais ils deviennent prefque blancs en féchant. Cette couleur grife ou plutôt bleuâtre eft due à une petite portion de fchit ardoifé crès-fin qu'ils con- tiennent; en forte que ces tuffeaux font compofés d'environ trois quarts de terre calcaire, d’un quart de fablon & d’une petite portion de {chir. Cetce circonftance de contenir du {chit eft commune à prefque routes les pierres calcaires qui avoifinent des montagnes de fchir; & ceft un motif de plus pour croire que fi on .creufoit plus avant on trouveroit le $90 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. fchit ardoiïfe , ou peut-être l’ardoife le -même au deflous des bancs chérie de ce canton. Nous avons pénétré dans une de ces carrières, environ à trois mille pieds fous la montagne ; la pierre n'y étoit pas diftinguce par bancs, elle ne formoit qu'une feule mafle, dont on détachoit des blocs en les cernant tout autour avec des pics, & en les faifant partir avec des coins de bois ; on les débite enfuite en cuffeau, ou en pierres plus ou moins fortes, & qui portent toutes un nom particulier, fuivant leurs dimenfions. Cette pierre eft en géncral fableufe & tendre, d'un grain uniforme : il n'eft pas fans exemple d'y trouver quelques corps marins; mais ils font rares. On y trouve quelquefois du bois pourri, & le hafard nous y en a fait rencontrer un morceau. Quelquefois on obferve dans l'intérieur de la mafñle des rognons d’une pierre plus dure ; mais qui cependant eft à peu près de même nature. On tranfporte les tuffeaux, du fond de la carrière à l'entrée, fur des traïneaux conduits par des bœufs ; ils fe vendent 9 liv. le cent. Ces pierres ne contiennent point de Salpêtre dans le fond de la carrière, à moins que ce ne foit dans des travaux très — anciennement abandonnés; mais ils ont une grande dif- pofition à s'en pénétrer. La tour de Trèves, qui eft à une demi-lieue au delà des tuffeaux , eft fondée fur une butte de tuffeau blanc qui eft falpétré dans tous les endroits où il eft abrité de la pluie. L'échantillon que nous avons pris & que nous avons leflivé, nous a donné les produits qui fuivent: . Produits falins obtenus du tuffeau fur lequel eff bâtie la tour de Trèves. PAAYRALOEURINNET ANT, livres, onces. gros. grains. SAIpÉrrE secte cel Dale a ete ete et E O EMNEe D USCS Sans addition d'alkali. < Sel marin.,..,....,.,...,... # 1. 6. $s. Eau mère F2 SAIPÉTIE RS Lee eee ana NON EME HE nc AE ARomMEe Sel fébrifuge de Silvius........ COLLE Tee PA Toraz des produits falins..,...,..,.,.,.. 1. 30. 4. T MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE, 9 Il y a dans cette même paroïfle de Trèves plufeurs caves ou habitations creufées dans le tuffeau : on y trouve prefque par-tout des apparences de Salpètre, même à bafe d’alkali fixe, Le hautde ce côteau, au deflus des tuffeaux, eftcompofe d'un fable talcqueux qui contient des bancs de grès horizontaux: on trouve de ces mêmes blocs de grès répandus le long de la côte, entre Trèves & Saint-Hilaire. Une carrière abandonnée près de Trèves, dans un endroit qu'on nomme Barbacanne, nous à donné lieu de faire une obfervation d’un autre genre; elle étoit peu profonde , très- acrée, &coutes fes parois étoient tapiflées d’une grande quantité d'efflorefcences falines que nous avons ramafñlées , & qui par lexamen fe font trouvées être de l’alkali fixe minéral très- pur, à peu près faturé d'air fixe. Entre les Tuffeaux & Mineroles , plus près de ce dernier endroit, nous avons trouvé une autre petite coupe faite dans le tuffeau, qui étoit parcillement couverte d’efforefcences, ou plutôt de plaques d’alkali fixe minéral. On a déjà annoncé que le château de Saumur étroit bâti fur un côteau de tuffeau blanc; la même nature de terrein fe continue en remontant la Loire à Dampierre, Souzé , Parnay, Turquan, Caudes & Montforeau : c’eft en ce dernier endroit que la Vienne fe jette dans la Loire; & en remontant cette rivière jufquà Chinon , & beaucoup par delà, on continue à trouver le même tuffeau. Tout le côteau, au moins depuis Saumur jufqu'à Mont- foreau , paroït compofé comme il fuit. : On rrouve d’abord. dans le haut une efpèce de filex plein & fort dur, c’eft une efpèce de meulière pleine; ces cailloux repofent fur un banc de huit à dix pieds d’un tuffeau fableux, fans confiftance, qui contient des pierres mamelonnées fableufes & calcaires, & fouvent des coquilles fofliles de différentes efpèces. Ce tuffeau paroît compofe de fable plus fin en général que celui de la mafle inférieure; les corps marins qu'on y trouve font principalement des pointes d’ourfins, des vis, &c, Ce banc eft fuivi d’un. banc de pierre coquillière poreufe fort dure, 592 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE:. dans laquelle, entre autres corps fofliles, on trouve des ourfins; enfin viennent les bancs de vrai tuffeau blanc ; qui ont environ cent vingt pieds d’épaifleur jufqu'au niveau de la Loire. C'eft entre Parnay & Turquan que nous avons été à portée de mieux oblerver ces difpofitions. Après avoir donné une vue générale de la difpofition des bancs, nous pañlons aux détails, & prin- cipalement à ceux qui concernent la production du Salpêtre. On trouve à Dampierre, au fond du jardin de M. l'Evéque de Varennes, à crente pieds au deflus du niveau de la maïfon, & à quatre-vingt pieds de celui de la Loire, d'anciennes carrières ui s'étendent fort avant fous la montagne; le tuffeau en cft plus fableux que celui des environs de Saumur ; aufli fe décom- pofe-t-il aifément à l'a, le fable tombe, & il refte fur la face des rochers une efflorefcence calcaire qui eft communément falpérrée, fur-tout dans le bas. Ayant fait ramafler des déblaïis de cette carrière, & les ayant lefMivés, nous avons reconnu qu'ils contenoient: P'AR QUI NT AL onces. gros, grainse SERIES. 3 else JE DT 00.0 OÙ DZ. $6. Sans addition d'alkali. $ Matière extraétive. .... eee D Te 29e Eau mère. Salpêtre imprégné d'eau mère & de Avec addicion de 7 matières exrra@tives............ ST UT onces7grosiograins € Sel fébrifuge de Silvius............ LP: 8. d'alkali. Sel fébrifuge imprégné de matières extraétives 0 lie Gékro DOETD CADET 35e Terre calcaire, précipitée par l’alkali fixe, 4 onces o gros 48 grains. ToraL du produit falin..................... 9. Of. 1. Derrière & attenant la maïfon de M. l'Evêque , on trouve d’autres carrières ouvertes dans le tuffeau, environ vingt-cinq ieds au deflous du niveau des précédentes; la pierre y eft blanche & fableufe, les bancs ont jufqu'à trois pieds d’épaifleur , ils ne contiennent point de cailloux. On y trouve quelques veftiges de Salptre en aiguilles; mais beaucoup d'indices de Salpérra à bafe terreufe. Il y a à Souzé un Salpêtrier qui fait quatre ou cinq milliers de MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 93 de Salpêtre ; il emploie principalement des matériaux de dé- molions, & fait peu d'ufage des reflources que lui préfente le grand nombre de carrières abandonnées de ce canton. Nous avons entrevu que le veritable obftacle tenoïr à ce que prefque tout le Salpètre de ces carrières eft à bafe terreufe, & qu'il faudroit une très-grande quantité d’alkali pour le décompofer. Les Salpétriers , à l'époque de notre voyage, n'employoient que des cendres, & lufage de la potaile leur étoit entièrement inconnu : or il auroit fallu des volumes énormes de cendres pour décompofer du Salpêtre purement à bafe terreufe, & la dépenfe en cendres auroit abforbé le benefice , d'autant plus qu'en leflivant la terre & la cendre enfemble, une partie de l’eau falpétrée feroit reftée dans la cendre. L'ufage de la potaflé que nous avons introduit dans la fabrication du Salpètre, levera cet obftacle, fur-tout lorfque cet alkali, dont le prix a confidérablement augmenté pen- dant la guerre, aura repris fon niveau. Cette circonftance, jointe à l'augmentation de prix accordé par le Roi, mettra avec le temps en activité toutes les reflources de la province, & l'on peut juger déjà combien elles font confidérables. Nous avons pris dans le haut du côteau de Turquan un échantillon du tuffeau fableux jaunâtre , qui contient des coquilles fofiles ; ce cufleau, analyfé par la diflolution dans les acides, s'eft trouvé contenir : livres. onces. gros. grains, Terre calcaires... soie oo se nnioie e aie g'e/e ei) eln olosele 7Oc L11Ge |! 2e 48e Sablon jaunâtre très-fin, contenant des paillettes talcqueufes. 29. 2. $. 24, La mafle de tuffeau qui eft au deflous à été anciennement fouillée profondément en cet endroit, pour y tirer de ia pierre. On exploite même encore une carrière qui s'étend jufqu'à une demi-lieue, horizontalement fous la montagne ; elle eft ouverte à quatre-vingts pieds environ au deflus du niveau de la Loire; la pierre en çft blanche, fableufe, & fort mélée ÉÉFE 594 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de paillettes talcqueufes. En ayant analyfé un échantillon par les acides , elle seft trouvée compofce ainfi quil fuit : PHANRATQRUAI NT AZ livres. onces. gros. grainsi T'ERTONCAICAITE Eee cire eimierene Ste de jeis oise stelesrtelee ere cite ES LIT IE 2 AR Sable blanc un peu grisâtre très-fin................. AT NONASCNENS PERL 4: TOTAL: 210 210.01 ee eje orales ciebiet ces ie 100. » » n Les environs de Parnay préfentent également un grand nombre de carrières abandonnées, qui font loin de toute habitation; elles font ouvertes à cent pieds au deflus du niveau de la Loire. On trouve fréquemment dans ces carrières des eMorefcences calcaires appelées lac lunæ ; la diflolution de cette fubftance dans les acides nous à fait connoître qu’elle étroit une terre calcaire prefque pure, & la lixiviation nous a appris qu'elle contenoit du Salpêtre à bafe terreule. Toutes les parties de ces carrières en font pénétrées ; ; mais on nen obtient du Salpètre proprement dit, qu'avec l'addition de lalkali ; la quantité en varie entre huit onces & une livre par quintal , indépendamment d’une petite portion de {el marin végétal & minéral. Au deflus de la mañfle de tuffeau on retrouve comme à Dampierre le tuffeau fableux coquillier, & ce tuffeau, pris dans les endroits abrités de la pluie & expolés à À l'air, eft lui- même falpétre. Nous en avons leflivé, & nous avons obtenu les produits qui fuivent : - Produits falins obtenus du tuffeau coquillier du haut du côteau de Parnay. PR AR! QUU'I/N:T A1. ; onces. gros: grains, Sélénite. ...". de es e en hS it Tee 3 MEL 7: Sans addition d'alkali. < Sel marin...,...........,... DHPARL TS MCE Eau mère. Salpétre helene meet "T4 A O22 ae Sel fébrifuge dont les dernières por- g « FDL à E £ LR Avecaddition d'alkali. tions étoient imprépnées de matières CXÉTACUINCS ess fete teleia e let slots ie ES Re EE re pe DE Terre calcaire, précipitée par l'alkali, 1 once 6 gros 4 grains. TorTaz des produits falins...,..., MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE, $ÿ9$ Quoique cette quantité de Salpétre foit très-petie, elle prouve cependant que ce côteau , même dans le haut, & à une grande diftance des lieux habitées, n’en eft point exempt, Il paroît qu'on faifoit très-anciennement du Salpétre dans cet endroit ; & c’eft une tradition du pays, qu'il y en avoit des fabriques établies avant l'invention de la poudre à canon. Il y a à Turquan un Salpétrier qui a établi fon atelier dans des carrières abandonnées; les parois en font prefque par-tout couvertes de plaques de Salpètre à bafe d’alkali fixe; inde pendamment du Salpêtre à bafe terreufe , dont le tuffeau lui-même eft pénétré. On pourra fabriquer dans cet atelier des quantités de Salpétre, pour ainfi dire, illimitées , dès que le Salpétrier pourra s'approvifionner de potafle à bas prix. Au bas du côteau où eft établi l'atelier du Salpétrier de Turquan, on voyoit une coupe où le tuffeau étoit à découvert; il étoit tout couvert d’eflorefcences d’alkali minéral, dont nous avons ramaflé plufieurs onces avec les barbes d'une plume. Nous avions aufli pris un échantillon du tuffeau, & nous l'avions leffivé; mais un accident arrivé à la terrine qui contenoit la liqueur concentrée , nous a empêchés de fuivre notre expé- rience. Îl paroïc que c'eft dans le bas du côteau que fe trouve toujours l'alkali minéral, & c'eft une préfomption pour croire qu'il provient de matières qui {ont dans la couche inférieure fur laquelle repofe le tuffeau. A Caudes, nous avons quitté les bords de la Loire & fuivi ceux de la Vienne; nous avons trouvé le long des côteaux les indices du même tuffeau, & nous nous fommes aflurés qu'il s'étendoit fort au delà de Chinon. A l'égard de la vallée où coule la Vienne, elle préfente des cailloux roulés de quarts & de granits , qui annoncent que cette rivière vient d’un pays où ces pierres font communes; & on fait en effet qu'une partie du Limofin, où cette rivière prend fa fource, eft compofce de granits. Nous avons été à portée d'examiner, dans quelques détails, la nature du terrein fitué entre Parilly & la Roche, à une lieue de Chinon au fud-oueft, La plaine haute, qui eft entre F fff ij 596 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. ces deux endroits, eft ftérile & inculte; la terre en eft légère; & compolce d’un fable fin qui contient une grande quantité de cailloux fort durs, les uns d’un aflez beau rouge, les autres tenant le milieu entre la meulière pleine & le grès dur. Beau- coup de ces cailloux font compofés de morceaux anguleux, non roulés, liés & réunis entre eux. Au deflous de cette terre légère & de ces cailloux , eft une couche de fable aflez paille, & enfuite le tufleau blanc; même dans les endroits éloignés des habitations, il préfente quelques indices de Salpétre à bafe terreufe. Le hameau nommé le côteau de Reuflé, paroïfle de la Roche, eft ficué vers le haut de la côte oppofce à Parilly, à peu près au niveau où finit le fable & où commence le tuffeau. Il y à dans ce hameau beaucoup de caves creufces dans le tuffeau , qui eft toujours blanc & fableux; la plupart de ces caves ou carrières, fur-tout celles qui fontabandonnées, pré- fentent , outre la grande quantité de nitre à bafe terreufe dont elles font pénétrees, du Salpètre alkalin criftailifé en plaques. Nous avons pris des échantillons de ce tuffeau dans deux de ces caves. où carrières, &. nous ‘avons eu les réfultats qui fuivent : Produits falins obtenus par lixiviation du tuffeau pris dans une cave ou carriere peu profonde , abandonnée & autrefois habitée, au côteau de Reuffé, paroiffè de la Roche, PAR QUINT AL livrés; onces. gros. grains, Sansaddition d'alfal: Sélénite. SA OR OAHAE At dE Or D. nn DE Eau mére. HS Et » $. 6. 48. Quantité de terre calcaire précipitée, 2 livres 7 onces 2 gros 32 grains. Tor:a1 des produits falins......,.,..,.. OR CT E En tournant ce côteau pour revenir à Chinon, on trouve près d’un hameau nommé le Bas-Paye, derrière des maifons, plufieurs carrières abandonnées, ouvertes dans le cuffeau, à un niveau beaucoup plus bas que celui des caves du côteau de Reuffé. Le haut de ces carrières préfente un tuffeau blanc fableux; mais le bas eft compofe d'un tufleau gris beaucoup plus doux au toucher : cette dernière efpèce de tuffeau eft prodigieufement imprégnée d'eau mère. Nous avons encore été à: portée d'examiner le même tufleau fableux au château de Bertignolles, paroïfle de Sazilly , appar- tenant à M. le Marquis Turgot; ce tuffeau eft en apparence à peu près de méme nature que celui des côteaux de Dam- pierre, Parnay & Turquan. Nous l'avons fourmis aux mêmes expériences, &t nous avons obrenu les réfultats qui fuivenc : Produits falins obtenus du tuffeau d’une excavation faite derrière le chäteau de Bertignolles. P' AR 1EQUU LNETI AL ' À livres. onces, gros. graincs ( SÉLÉRITÉ release ae loto sie ete 3» JF 3) $o- Sans addition d’alkali. Sels marinesislirs omega use 2 ls 3e, 28. 3 t Eau mère. Avec. addition d'une Ç.. livre 13 onces 3 gros Sel fébrifuge........ s aa 2 LANDE Te 2. 36 grains d'alkali. Quantité de xerre calcaire, précipitée par l'alkali, 1 livre 3-onçes 4 gros 38 grains. Toraz des: produits falins...,,..1,., CRT ET ESPN 593 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Ce tufleau, analyfe par les acides, a donne : PEAPR UQYUII N TA Le livres. onces, gros. grains, Terre Ntalcatre MP EE LME CMS ERREURS CLR ALL NT UNS: SION MERE. « de sine economie a ne OO se eee BR IR As 64 ÏIl y a plufieurs caves & carrières peu profondes, dépen- dantes du château de Bertignolles, creufées dans ce même tuffleau; par-tout il eft très-amer & pénétré d’eau mère, mais de fel marin feulement. En montant vers le midi, à un bon quart de lieue de Bertignolles , fe trouve un champ qu'on nomme Champrouy; il y a crès-peu de terre végétale, & au deflous fe trouve le tuffeau blanc. Au milieu de ce champ, on remarquoit dans une excavation peu profonde, des veines d’une terre jaunâtre qui fe trouvoit par bancs horizontaux mêlés avec le cuffeau; elle avoit un goût marqué. Nous avons pris un échantillon, tant de cette terre que du tuffeau qu'elle accompagnoit, & ayant leffivé féparément, nous avons eu les produits qui fuivent: Produits falins contenus dans le tuffeau du Champrouy, pres Bertignolles. PTA"R UT QUE N TAA TL onces, gros. grains. Terre calcaire & félénite.......... PATES) € MAC LAN ee : : Sel MATINS. Lie sie ele mie » ETTRZ tion d’alkali. à RU Ae SE SRE Sans addi Eau mère defléchée, partie nitreufe, partie marine...... sels isole tte Te LANALAIALLS TorTawudes -produits falins. 4x. :... 4404402 SP Ts NUS Produits falins de la veine glaifeufe du Champrouy , près Bertignolles, PAR QUI NT AL. OnC2s. gros. grains. Terre calcaire jaunâtre. .... see cou * ‘12 001.22178, 112: Sans addition d'alkali. Sélénite. . tedereenesse DEPEEEEEEE » 2. jé. Eau mère defléchée, qui s'eft trouvée principalement nitreufe....... 1, EMMA A0. Toraz des.praduits, falins ses secesiee sous :) 8 Je 42. MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. $99 Comme on na point traité cette eau mère par l’alkali fixe, pour en tirer du fel fébrifuge & du Salpêtre, & qu'on n'a déterminé fa nature que par celle des vapeurs qu'on en dégageoit par l'huile de vitriol, ces deux expériences ne font pas aufli füres que les autres. Le château de Chinon eft bâti fur une butte ou côteau peu élevé, compofé de tuffeau argileux. I contient , d’après le) les expériences faites par la diflolution dans les acides : PYAUR CC UUILN TU A FE, livres. onces. gros. grains, cosssess Z4r 13. 1. fée ns ee ie ele 7$- 2. 6... 16: Terre calcaire. Ne 502 ets ete es srerepéieise Terre jaune ocreufe mêlée de parties fableufes sos... 100. 3» » 22 On a été curieux de voir fi la nature argileufe du tufleau tenoit à la différence des niveaux; en conféquence on en a pris deux échantillons dans un côteau, à un quart de lieue au deflous de Chinon, l'un à cinquante pieds au deflous du niveau de la Vienne, l'autre à vingt-cinq pieds feulement, & voici les réfultats : Produits obtenus par l’analyfe avec les acides du tuffeau, pris à cinquante pieds du niveau de la Vienne, à un quart de lieue au defjous de Chinon. PNR EM QNUTILN ET ATES livres. onces. gros. grains, Harreicaleaiteste the snisneitescabidolfetelee ses ols/elereieiole FO: T3. Ù 2. 48. Sablon très-fin avec paillettes calqueufes. ........., “ht 2o MAR 2e rl 15 al HOorA Liduiproduiti.is si sdaeieres tele ile esete To0ëKL) 35 5 z Produits obtenus par l’analyfe avec les acides du tuffeau, pris à vingt-cing pieds du niveau de la Vienne, à un quare de lieue au deffous de Chinon. PAS RE QUUAI: NT A! Le livres. onces. Ferre calcaires: . 24, Ars ie nm IQ ein nie st oeLersieann ere pts 2e nie ses es ere en SLA 2t Terre jaanâtre argileufe, fablonneufe & ferrugineufe........,... 18. 14. TOTAL, rersevesveserer ere srueeesenpensensere 100. 3 600 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. D'où nous avons conclu que le tuffeau, au deffous d’un certain niveau & en s'approchant de celui de la rivière de Vienne, changeoïit de nature; qu'au lieu d’être un melange de terre calcaire & de fable, il devenoic argileux & ferrugineux. De Chiron nous avons quitté la rivière de Vienne pour aller à Richelieu, & ce n’eft qua Châtellerault que nous avons retrouvé certe rivière. Îans cout cer intervalle la nature du terrein eft la même que dans les environs de Chinon. On obferve dans le haut des côteaux, du fable avec grès & cailloux rougetres qui tiennent de la meulière pleine; lorfqu'enfuire on a defcendu environ un: quart ou un tiers, à compter du haut jufqu'au fond des vallées, on retrouve le tuffleau blanc. Il arrive quelquefois de trouver du fable , même dans le bas des côteaux; mais il paroït alors évidemment être éboule d'en haut, ou avoir été charie par les eaux. Les vallées , au furplus, qu'on traverfe depuis Chinon jufqu'a Richelieu, & depuis Richelieu jufqu’à Châtellerault, étant moins profondes que celle de la rivière de Vienne, les obfervations minéralogiques y font moins intéreflantes; les tuffeaux s’y indiquent plutôt qu'ils ne sy montrent ; ils font rarement decouverts, & on nen trouve pas de falpétrés. On obferve cette même difpoftion, c’eft-à-dire, le fable dans le hauc des côteaux, & le tuffeau au-deflous, en fortant de Châtellerault par le chemin de la Guerche, & notamment à la Chapelle. Le haut des bancs de tuffeau en cet endroit eft de plus de deux cent vingt à deux cent quarante pieds au deflus du niveau de la Vienne. Les côteaux fableux s’apperçoivent enfuite à quelques diftances , & ils ont-environ quatre-vingts pieds de hauteur au deflus du niveau des bancs de tuffeaux ; ainfi la hauteur des lieux les plus élevés de ce canton peut être évaluée au moins à trois cents pieds par rapport à la Vienne. Dans les endroits où le fable manque, le tuffeau eft recou- vert de quartz blancs, roulés , mélés avec une terre végétale fableufe. On voyoit à quelque diftance du hameau de la Chapelle; près d’une maïfon, une carrière ouverte dans le cuffeau ; elle : ya MÉMOIRES SUR. LA FORMATION DU SALPÊTRE. Cor: va en s'enfonçant fous la montagne par une pente douce. L'ouverture de cette carrière prélentoit des plaques de Salpêtre à bafe alkaline. En s’enfonçant davantage, le Salpétre difpa- roifloit; mais les parois de la carrière avoient encore quelque goùt. On a pris un échantillon de tuffeau de cette carrière À l'entrée; on l'a leffivé à chaud comme à l'ordinaire, & l'ayant mis en évaporation, on a remarqué une odeur de foie de foufre très-fenfible. Produits falins obtenus du tuffeau de la carrière de la Chapelle près Chatelleraulr. PAR NQUU I NT AZ. livres. onces. gros. graine. Terre calcaire: tu. e tlisast » 2H HMAN (02e sans addition d’alkali, Sélénite NO IOS L'O 010 DO 0 MAO » 1. 10 18. Selinanine ASE Eee » CHANT Eau mère Avec addition de 11 Sel fébrifuge. Mere miel esiets ACTE ENT 40! ONCes 4 gros 43 grains Sel particulier qui fe bourfoufle d'alkali. l fürileschatbons....:.°2"1e » ENT AO: Toraz des produits falins......,.. SAAOLEIES MAT DOTE TN En fuivant la plaine, au deflus de la Chapelle, vers le Lcvant, on trouve un hameau qu'on nomme le Petit-pot: à un demi-quart de lieue, au milieu des bruyères , eft une excavation de douze pieds de profondeur , formée dans une terre blanche. À un des bouts de cette excavation , qui eft ouverte en plein air, fe trouve un trou de trois pieds de diamètre, quidonne entrée dans une efpèce de carrière; d'abord elle s'enfonce par une pente aflez rapide, à quinze pieds de profondeur. La pierre ou terre, dans cette partie, eft aflez dure, & ne préfente aucune apparence de Salpètre; elle devient plus tendre à mefure qu’on avance, & elle eft de plus en plus falpétrée jufqu’au fond de la carrière, qui a quatre-vingts pieds de profondeur horizontale. Nous avions d'abord penfé que certe pierre étoit du tuffeau ; mais fon examen par les acides Gggg 6ox MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE! nous a détrompés. Nous en avons pris deux échantillons, fun dans la première excavation en plein air, l’autre au fond de la carrière, c’eft-à-dire, à foixante-quinze pieds de l’ouver- ture, & ayant verfé deflus de l'acide nitreux , il ne s’eft fait aucune efflorefcence. En examinant cette matière avec plus d'attention, nous avons reconnu que c'étoit une efpèce de fablon très-fin, mêlé de paillettes ralcqueufes ; elle a, au pre- mier coup-d'œil ; quelque rapport avec le kao-lin; mais elle en diffère en ce qu’elle eft rude au toucher, tandis que le kao-lin eft doux. Cette terre ou fable eft précifément le même qui fe mouve mêlé avec la terre calcaire dans le ruffeau ; mais ce qui nous a le plus furpris , c'eft de trouver cette terre très-falpétrée. Produits falins obtenus d’une efpèce de RE talcqueux, de La fouille ouverte près le Petit-pot, pris à foixante-quinge pieds de l’ouverture. PPASR QUE D NIT AT: livres: onces. gros. grains, Sans addition’d'alkali: Sélénite & terre calcaire....... » 1p: (EN 8 Eau mère. Avec addition d’une livre 6 gros 43 grains Salpétie tn ste esete nie ts he}: FT: d’aikali. Voilà donc du Salpètre qui fe forme en abondance dans une matière qui n’eft nullement calcaire, d’où il fembleroit réfulter que les terres ne contribuent que mécaniquement à la formation du Salpètre; & en effet, il s'en forme dans la craie, qui eft la terre calcaire pure, dans le fablon très-fin qui ne contient point de terre calcaire ; enfin dans le tuffeau, qui eft le mélange de lun & de l'autre. La vallée de Chatellerault, dans le bas, préfente des granites & des quartz roulés par la rivière. Il s'en trouve fouvent de gros! morceaux , & prefque toutes les bornes de la ville fonc compofées de ces pierres. En allant de Chatellerault à Poitiers, on traverfe la partie à MÉMOIRES SUR LA FORMATION: DU SALPÊTRE. 603 baffle de la forêt de Chatellerault; elle eft principalement compofée de grève & de dépôts de rivière. Ce n’eft qu'une demi-lieue par-delà Nintré qu'on retrouve les côteaux ; ils font toujours du même tuffleau qu'aux environs de Chatellerault, & on les fuit à Jaulnais; Chafleneuil & Grand- Pont, hameaux fitués à l'endroit où la petite rivière de Vaudeloigne fe jette dans le Clain. On voit encore du tuffeau dans une coupe faite le long du chemin de l'autre côté de cette rivière; mais le terrein change tout à coup à cette même coupe, & il eft remplacé par un amas de pierres calcaires roulces très-menues, qui forment une efpèce de grève, fem- blable à celles que roulent quelques rivières, mais dont les différentes parties ont quelques liaïfons entre elles. Un peu plus loin, cette grève qui fert, à proprement parler, de tran- fition entre le tuffeau & la pierre dure, difparoït, & on voit à fa place & au même niveau, une fuite de rochers de pierre dure de cinquante à foixante pieds de hauteur, coupés à pic, qui bordent le Clain jufqu'à Poitiers. Ces pierres font purement calcaires & fe diflolvent prefque complettement dans les acides; elles laïflent feulement un réfidu d’une livre environ par quintal d’une efpèce de terre bolaire. Quoique la ville de Poitiers ne foit pas dans des circonf- tances favorables à la formation du Salpètre , parce qu’elle eft prefque entièrement bâtie avec la pierre dure qui fe trouve dans fes environs, cette pierre cependant fe falpêtre à la longue, D'ailleurs , les ceintres des portes & le tour des fenêtres font formés d'une pierre plus tendre qui fe falpêtre plus aifément. On trouve dans cette ville les veftiges d’un ancien cirque ou amphithéatre ovale , conftruit en menues pierres calcaires, liées par du mortier qui eft très-pénétré d'eau mère, de Salpêtre & de fel marin. À compter de l'endroit où la pierre calcaire commence à devenir dure, les carrières ne préfentent plus aucune apparence de Salpêtre. En fortant de Poitiers par la route d'Angoulème, on quitte la vallée du Clain , & on monte dans les plaines; elles font de Ggggi 6o4 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. cent cinquante pieds environ au deflus du niveau du Clain à Poitiers, On y trouve une terre végétale aflez fertile; au d:flous des pierres calcaires de groffeur médiocre , & à mefure qu'on defcend plus profondément , de la pierre de taille. Ces bancs de pierre de taille s’obfervent dans toutes les vallées, & notamment le long du Clain, depuis Poitiers jufqu'à Vivonne & au deflus. Ayant pris un échantillon de certe pierre à peu de diftance de Vivonne fur le Clain, elle nous a donné, par l'analyfe avec les acides : livres, onces. gros. grains. Terrelcalcire te. .#nrccnt : SOS S DC 160 700 c CENOLEN ES RER TS EorrcAbolure es des ete dec re Hosts CRETE A ISSN LT T ON CNRC: MNOTFALS 1. éétresiemee MAO 0 DIS 21100 Mn ln 5» Cette pierre eft dure, & d’un grain ferré fpathique ; elle eft coupée en des endroits par des bancs de filex. La méme nature de pierre fe trouve le long des côteaux qui bordent la Dive, & nous en avons pris un échantillon un quart de lieue avant le Couché. Cette pierre eft blanche . & dure; on en fait des auges, des bornes & autres ouvrages de cette nature; analyfce par les acides , elle nous a donné : Hvres. onces. Tértelcalcairel 7 MES Cm TÉL R fe hc cf BROEOESEE CEE Terre\bolaire.s 1. G cobbnée ofe bobo Horde CRD HO COLE LS LES S I 4 OT AL er eee echo doaeise reste int ss TOO: » PF BIE VE PSN Un quart de lieue avant Chaunay , la pierre calcaire change de forme , fans changer beaucoup de nature. Elle fe préfente à la furface en feuillets minces comme du fchit; au deflous on trouve des pierres plates calcaires d’un pouce d'épaifleur, & dont on peut tirer des morceaux aflez grands; fans doute en creufant plus profondément, on trouveroit de la pierre de taille. Lorfqu'on eft près d'entrer en Angoumois, le terre s'élève infenfiblement , & on monte fur un vafte plateau, élevé de ñ MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÉTR£Z. 60$ cent cinquante pieds environ au deflus du niveau des plaines du Poitou. Ce plateau , qui comprend la forêt de Ruffec & une grande étendue de terrein adjacent, eft compote d’une terre rouge grafle , mélée de pierres calcaires. La couche de cette terre cft très-cpaifle; on y tire, à douze ou quinze pieds de profondeur, principalement dans la forêt de Ruffec, de la mine de fer. En defcendant enfuite à Ruflec, on retrouve Îa pierre calcaire femblable à celle des bords de la Dive & du Clain, d’abord en menues pierrailles , enfuie en pierres de taille. Il paroît que tous les côteaux de l’Angoumois & de la Saintonge font compolés d’une pierre à peu près femblable; quelquefois elle eft dure & fpathique; & ceft ce qu'on obferve dans une carrière de pierre à meule , fituéce entre Angoulême & le moulin de Montbron, Cette pierre , analyfée par les acides, a donné : livres. onces. Ferreicalcaires si lesree Mnetlesnneentinise NA abiee Rats ere SONO SN T2 Terre argileufe ou bolaire.............. TBE ARE oo DROITE T1 4e HROT AMLserelete ciereloieletsleteejale (etes DO Ho 0 TOO D élite DTOO! » LE TEE | L'expérience précédente a été faite fur un des premiers: bancs de la carrière ; ayant fait la même expérience fur la: pierre du fecond banc, nous avons obtenu : livres. onces: FDÉFÉCNCAICALTE Se A ee den esslieeisisieteielelele els elciols ee neonicbter TO RS Terre-bolaire ocreufe."..... .....: Dane MERE ; » 8 SO TA ET Te les eee tslere she telle lelesofets le Sc cler 100. 2» Do: >. 7 Cette pierre fe trouve le long des côteaux, à une ceitaine élévation au deflus de la Charente ; mais il paroït qu'en. creufant plus profondément, & à un niveau plus bas, on trouve une efpèce de tufleau, mais plus dur que celui de Touraine; en effet, en allant du fauxbourg de l'Houmeau , dépendant de la ville d'Angouléme , à la forerie de canons, , AE } LH / PEER qui en eft peu el Ignce , nous avons trouve uñe pierre 606 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPËTRE. bleuâtre qui paroït compoler le pied des côteaux ; elle ContenoOI : livres. onces. gros. grains. Terre calcaire......... Reese sonomoesbeseeer GNT Ll EMULE Sablon LACET ER EN REEE RETEReS eRre Et 37 00: 62 176 TOTAL MI. sers CEE REA À 1 LATE T 4 ES ICO... » » D Une demi-lieue avant Saintes, en venant d’Angoulème par la grande route, on traverfe un côteau qui eft rout de pierres calcaires, & dans lequel on a ouvert des carrières. Ayant analyfé par les acides un échantillon de eette pierre, nous avons obtenu : livres. ances, Terre CAÎCAITES see 2 oies sn me eee 01e ele os ae à + ct} HS bad ole 97 0 8 Terre argileufe d'un gris un peu Ado LR RCE nets afsion ets 2 US: MOTALACE derele rte dercleninelets ee ere Sn ss biais ae s SAME EL » Tous les coteaux de la Charente, au deflus & au deflous de Saintes, font de cette même pierre ; il paroît feulement qu'elle devient plus cendre à mefure qu'on approche de la mer. On trouve à Saint-Savinien, près de la Charente, à cinq lieues environ au deflous de Saintes, une carrière très-confidérable ouverte dans cette pierre, & très-anciennement abandonnée ; c'eft une tradition du pays, qu'elle a fervi de retraite aux Proteftans. Nous en avons pris un échantillon à l'entrée, en plein banc, à quatre pieds de niveau du fol, & après l'avoir leffivé, nous en avons obtenu les produits qui fuivent : L Produits falins de La pierre de Saint-Savinien, prife à lentrée de la carrière, en plein banc, à quatre pieds du niveau du fol. PA RU QU IINNT AL, onces. gros. grains. Sélénite & terre calcaire........... SIL 7- Sans addition d’alkali. SÉÉmATINE SEE sente ei eiete Se ieieieie ACTE Eau mère. Avecaddit. de éonces { Salpêtre........s...s..s...ise RAS 2-62: x gros 1 grain d’alkali. Sel fébrifuge..................... 2 MGR GE: Quantité deterre, précipitée par l'alkali, 2 onces 4 gros jo grains. Toraz des produits falins................. 14 2: 9: | ERIC EEE MMPE EEE RTE EE MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 607 Ayant fourmis aux mêmes épreuves des déblais de la même carrière, pris à dix-huit pieds de l'entrée , ils nous ont donné : Produits Rae obtenus des deblais de la carrière de Saint- a vinien, à dix-huit pieds de l’ouverture. PA RQ UIUI,N,T'ATE. onces. gros. grains: Salpètre 2.7..07 See ete sen elelenreefets ES TPE CE Sans addition d’alkali. Selémarinhesre.s ee Dies TRE TES Eau mère. Avec addition de 12 SAIDÉCREs Aersiere tete plarelelesreseterstee Lolo raie TOP ss 0022 onces d’alkali fixe. Sel fébrifuge ..... ABC S A0 ne JUUDO LOU SES CE Quantité de terre calcaire, précipitée par l'alkali, 5 onces 6 gros £6 grains. On trouve encore d’autres carrières fort confidérables à cinq lieues de Saintes, près du village de Sainte-Mefne , un quart de lieue à gauche du chemin qui conduit de cette ville à Poitiers ; Le pierre de ces carrières eft blanche & très-dure.. elle neft point en conféquence fufceptible de fe falpérrer ; aufli n'en avons-nous retiré, par lixiviation, rien de falin ;, l'ayant analyfée par les acides, elle nous a donné: livres: onces. gros. grains Terreicalcairez::.-#". ROC DO UD 0 Qo ae Ciee HD MAT 7 Se Terre argileufe grisatre ......... noue 206 non HT IN CA TOTALeslye-ore see ae ODA D DOC DEA 1004 5 > Telles font les obfervations que nous avons été à portée de faire fur la minéralogie de la Touraine & de la Saintonge, & fur le rapport que la nature du terrein de ces deux pro- vinces peut avoir avec la formation & la fabrication du Salpètre: Nous avons élagué tous les détails qui nous ont paru étrangers à notre objet. Nous avons fupprimé, par le même motif, voutes les obfervations minéralogiques relatives à la Bretagne ; cette province n'eft eompofce que de fchit, de granite, de piertes quartzeufes , toutes pierres qui font peu ufcepribles 608 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. de fe falpètrer ; aufli cette province eft-elle une de celles où lon tenteroit en vain d'établir une récolte de Salpêtre. Il ne nous refte plus, après avoir préfenté nos obfervations d'une manière ifolée, qu'à les rapprocher en terminant ce Mémoire, & qu'à examiner les conféquences qu'on en peut tirer relativement à l'Art de fabriquer du Salpêtre. Il n’eft pas étonnant d’abord que le tufleau de Touraine foit de routes les pierres connues celle qui fe falpêtre le plus aifément, lorfqu’on l'emploie dans les bâtimens, puifqu'elle fe falpétre même dès la carrière, lorfqu'elle eft long-remps en contaét avec l'air. On conçoit d'ailleurs que cette pierre étant fort poreufe, fort fufceptible d'imbiber l'humidité , d’être pénétrée jufqu'à un certain point par l'air & par les fubftances gafeufes qu'il charie, elle réunit routes les circonftances favo- rables à la formation du Salpétre ; mais on peut regarder comme un fait conftanc & par-tout uniforme, qu'il ne fe forme que du Salpêtre à bafe rerreufe dans les endroits éloignés des habitations. Si quelques anciennes carrières abandonnées femblent faire exception à cette règle générale, il eft à obferver que le Salpêtre à bafe alkaline n'y exifte qu'en très-petite quantité, & que le peu qu'on y en trouve tient à ce que ces carrières ont été fréquentces par des hommes & des animaux pendant le temps qu'on les exploitoit. Il réfulte delà, que, quoique la Tourraine préfente des reflources immenfes pour la fabrication du Salpêtre, les progrès en font néanmoins arrêtés par la grande dépenfe à faire en alkali. La Régie des Poudres à fait les plus grands efforts pour lever cet obftacle, qui étoit devenu beaucoup plus grand endant la guerre , en raifon du renchériflement confidérable des fubftances alkalines ; elle a obtenu du Roi de fournir de R potañle à perte aux Salpétriers ; ellé a multiplié les inf tuétions fur la manière d'en faire ufage; enfin le prix du Salpêtre a été augmenté. À l'aide de ces précautions, la fabrication du Salpêtre a été dans un état de progreflion même pendant la guerre, & cette progreflion cft devenue beaucoup plus rapide depuis la paix, On MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 609 On nous demandera peut-être, fi l'alkali fixe, qui fe combine avec l'acide nitreux dans le voifinage des lieux habités, eft le réfultat d’une formation réelle, de la combinaifon de quelques gas particuliers qui émanent des matières animales ou végétales en fermentation ; ou bien fi ce n’eft pas l’alkali qui étoit tout formé dans ces matières végétales & animales, & qui, devenu libre par la putréfaction, simbibe dans les pores de la pierre, & va décompofer le Salpêtre à bafe terreufe. Nous avouons que dans l'état atuel de nos connoïflances, il nous paroit impoffble de répondre d’une manière précife à ces queftions : nous croyons cependant que les expériences de M. Thouvenel font favorables à la première des deux opinions. Quoi quil en foit, on peut toujours en tirer une conféquence - relative à la pratique ; ceft que par l'addition ou même l'approche de matières végétales ou animales qui fe putréfent, on peut convertir le Salpètre à bafe terreufe, en Salpètre à bafe alkaline, Il paroïît donc que les Propriétaires des carrières abandonnées pourroient faire une fpéculation avantageufe ; elle confifteroit à mettre dans ces fouterrains, des fumiers, des gadoues, des excrémens d'animaux, & à les y laiffer pourrir & fe détruire. Il eft probable qu’au bout de dix, de quinze, de vingt années, ils auroient fait prefque fans frais de ces carrières , des nitrières infiniment riches. Ce confeil n’eft pas feulement applicable à la Touraine & aux tufleaux ; il le feroit également à toutes les carrières de pierres tendres. Ce moyen de former des nitrières, a l'avantage de n’exiger aucuns frais de conftruction , prefque aucune avance, de ne comporter aucun tifque, en un mot, de préfenter une très-grande probabilité de reufite, fans prefque aucun inconvénient : dans le cas où on ne réufliroit pas, la dépenfe feroit d’autant moins confidérable , qu'il n’eft pas néceflaire d'employer une grande quantité de matières végétales & ‘animales, *X + ra Hhhh 610 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: QE — (es à —? MÉMOIRE SUR LA GÉNÉRATION DU SALPÊTRE D'AMN SIDE ACER A FE Par M. le Duc de là RocHEFOUCAULD. Enyoyé en Mai 1778 Ce. T un fait connu depuis très-long-temps dans les environs de la Roche-Guyon, que l’exiftence du Salpètre, au moins à la furface de la craie : les pigeons furent les premiers indicateurs ; ces oïfeaux aiment beaucoup le fel marin, & comme il y en à prefque toujonrs de mêlé au Salpêtre, ils vont béqueter ces endroits , & les creufent quelquefois aflez profondément pour faire détacher & romber les filex dont cette craie eft parfemée. Guidés par les pigeons, les gens du pays tentèrent d’exploi- ter cette cforefcence faline, & ils firent une récolte fuffifante pour les animer à ce travail ; mais bientôt le régime féodal mit cette récolte en monopole entre les mains du Seigneur. Le Roi s'étant enfuite rélervé à lui feul le droit de faire fabriquer le Salpètre & la poudre dans le Royaume, les Seigneurs de la Roche-Guyon lui firent ceflion de leur droit pour une rente an- nuelle de deux cents livres de poudre; & la récolte du Salpétre nc fe fit plus que par quelques privilégiés trop ignorans pour vouloir perfectionner aucune méthode, & trop pauvres pour le tenter : ils fe bornoient à fournir , tant bien que mal, la quan- té de Salpêtre à laquelle ils étoient taxés, & ne fongcoient qu'à conferver les priviléges attachés à leur titre de Salpétriers MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. Gt du Roi, & fouvent à vexer les autres habitans par l'exercice de ces priviléges , fans que la fourniture de l'Etat en augmentät. La même forme d'exploitation étant établie dans toute la France , on vit diminuer confidérablement la produétion du Salpétre, & plus de la moitié de la confommation du Royaume dur être tirée de l'Inde , au rifque de la voir manquer dans les momens peut-être les plus intéreflans. Enfin un Miniftre, ami du peuple, & éclairé fur les moyens de faire le bien de l'Etat, porta fes vües bienfaifantes fur cette partie de l'Adminiftration, & crut poflble de détruire toutes les vexations fous lefquelles le peuple des Provinces gémifloit, tant pat la fouille généralement établie, que par le droit attribué aux Salpétriers dans certaines Provinces, de fe faire fournir leur chauffage par les Communautés, & cependant d'augmenter beaucoup la recolte du Salpétre en France. L'Adminiftration des Poudres & Salpètres, qui depuis long- temps Ctoit en ferme, fut mife en régie , & confiée à des per- fonnes en état, par leurs connoiïflances, de trouver des mé- thodes nouvelles, de perfectionner les anciennes , & portées par leur zèle à l'exécution des vües bienfaifantes du Gouverne- ment. Un prix fur les moyens les plus économiques d’augmen- ter la production du Salpètre, fut propofé par l'Académie Royale des Sciences, au défir du Gouvernement, & cette Compagnie nomma cinq Commiflaires , & les chargea non feulement d'examiner les Mémoires envoyés au Concours , & de répéter les expériences qui y feroient annoncées , mais encore de faire par eux-mêmes des expériences tendantes au même objet. D'heureux effets ont déjà réfulté de ces nouveaux établiffe- mens ; les vexarions les plus oncreufes & les plus odieufes ont été abolies ; la produétion du Salpètre dans le Royaume a déjà augmenté , & l'Etat a tiré un revenu confidérable de cette pat- tie. qui ne lui rapportoit rien auparavant. Parmi ces heureux effets, on doit compter l'attention pu- blique, & celle de tous les gens inftruits, dirigée fur cet objet par la publicité que le Gouvernement à donnée à fes opérations & Hhhh ij 612 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. à fes demandes. Mais c'eft aflez de cette efquifle hiftorique , il eft temps d'entrer en matière, & de me reftreindre à la craie de la Koche Guyon, qui doit faire le fujet de ce Mémoire. Cette craie, que la coupe de la montagne de la Roche- Guyon laifle à découvert, forme une couche d'une grande épaïfleur & contenant une grande abondance de filex, qui s'étend depuis les environs de Paris, danstoute la Normandie, la Picardie, l'Artois , la Flandre, & jufques en Angleterre dans le Comté de Kent; fouvent elle n’eft apparente que dans les vallons que les fleuves & les rivières ont creufés ; car dans la plupart de ces Provinces, le fol des plaines eft fupérieur au niveau de la craie. Mais dans les environs de la Roche Guyon, où elle eft à décou- vert, on trouve réculièrement, à mefure qu'on s'élève au deflus de cette couche, 1°. une couche d'argile jaunâtre qui retient l'eau & forme un niveau de fources ; 2°. une couche de pierre coquillière fort dure, qui a été employée avec fuccès au pont de Mantes; 3°. une autre couche mince de pierre calcaire dure & à grain fin , que l'on appelle cliquart ; 4°. une couche de fable mêlé d'argile dans laquelle il y a beaucoup de grès le plus fouvent en blocs féparés , mais aufli formant quelquefois une mafñle continue; 5°. enfin, une couche de pierres meulières. M. Defmareft, de l'Académie Royale des Sciences, a obfervé conftamment une femblable difpofition de couches depuis Paris jufques à la Roche-Guyon, & elle s'étend beaucoup plus loin. La montagne dont il s’agit dans ce Mémoire, eft l'extrémité d’une vallée que la Seine a creufée; les eaux pluviales en ont depuis fillonné l'efcarpement, & y ont formé des vallans ou anfes perpendiculaires au cours de la rivière ; qui font féparées les unes des autres par des mañles de craie à nu, que le temps & les eaux ont figurées de manières différentes : cette montagne, qui court du nord-eft au fud-oueft en formant un arc de cercle, a deux lieues environ de longueur , & fe termine par un plan in- cliné dans une des finuofités de la Seine vers fon confluent avec l'Epte; les mafles de craie difparoiflent vers les deux tiers de fa longueur. Les habitans des villages adoflés à cette montagne y (2) Le 4 . creufent des logemens, & c’eft dans ces habitations & autour MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 613 que fe fait la récolre du Salpêtre, de veritable Salpétre de houf- Jäge ; mais le plus communément il n'y exifte que fous la forme d'eMlorefcence blanche & farineufe, & dans l'état de Salpêtre à bafe terreufe. Frappe de l'abondance de cette fubftance dans les endroits où la craie étoit à découvert, je tentai, il y a quelques années, de déterminer fi, à l'abri de l'air & éloignée des habitations, elle en feroit auf imprégnée; j'en fis venir à Paris , où j'étois alors , quelques échantillons que nous eflayâmes , M. Bucquer, de l'Academie Royale des Sciences, & moi; & nos expériences nous conduifoient à prononcer pour lafirmative , Me nous reconnümes que nous avions été trompés par de fauñles éti- quettes, & que, croyant travailler fur de la craic prife à une certaine profondeur dans l'intérieur de la couche, nous avions opéré fur tous échantillons pris à la furface, mais à différentes hauteurs de la montagne. Un nouvel eflai que je fis l’année dernière avec M. Clouet , lun des Révifleurs généraux des Poudres & Salpètres, penfa nous jeter encore dans la même opinion ; deux cents livres de craie prie à à fix picds dans l'intérieur du rocher de Caflenoix, que je décrirai ci-après , leflivées dans deux cents livres d’eau , nous fournirent, par une première criftall ifation , une once que gros & dix-huit grains de Salpêtre à à bafe d'alkali végétal, & l'eau mère trairce Cure contenoit encore Une once quatre gros de Salpêtre véritable, & quatre gros trente-fix grains de Salpêtre: à bafe terreule. Ce fac cependant l'abondance du réfulat qui nous tira d’er- reur, & l'ayant attribuée, avec raïfon , aux uftenfiles du Salpé- trier dont nous nous étions fervis, & à fon atelier dans lequel nous avions opéré, quoiqu'avec beaucoup de précautions ;, nous réfolûmes de répéter l'expérience d'une manière inconteftabl le. Nous primes à Caflenoix, & dans deux autres endroits, différentes hauteurs de la montagne, & à plufieurs pieds de profondeur , foixante livres de craie dans chacun, que nous leffivimes dans foixante livres d’eau chaude , & qui ne nous donnèrent aucun veftige de Salpétre. 614 [MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 4. Enfin, pour déterminer le fait avec toute la certitude poffble; j'ai entrepris l’analyle complete de craïces prifes dans des lieux différens & fort éloignés les uns des autres , & je vais rendre compte de la partie de cette analyfe qui détermine la non- exiftence du Salpêtre dans la craie, lorfqu'elle n’a été foumife ni à l'adion de l'air, ni à la putréfaétion des fubftances animales & végétales. Je voulois pouffer plus loin mon analyfe, & traiter mes craies par le feu & les acides , comparativement avec le criftal d'Iflande, qui eft la fubftance calcaire la plus pute; mais mon départ précipité pour me rendre à mon Régiment , m'a forcé de fufpendre ce travail, dont j'efpère que l'Académie me permettra de l'entretenir lorfque j'aurai pu le completter. Les craies fur lefquelles j'ai opéré cette dernière fois, ont été prifes : Le n°. premier , au rocher de Caffenoix. C'eft une de ces males ou contre-forts de craie à nu qui féparent les anfes dont la montagne de la Roche-Guyonettfillonnée;il eft fitué un quart de lieue nord-eft de la Roche-Guyon : j'ai fait enlever encore un pied dans lexcavation qui avoit été faire au fommet de ce rocher pour les expériences précédentes ; ainfi, la craie de ce lieu que j'ai employée, a été prife à fept pieds environ dans l'intérieur du rocher. Le n°. 2, dans le trou de Bonnefourquières. C’eft une ou- verture longue & étroite qui fe trouve au bas de la montagne, un quart de lieue au fud-oueft de la Roche-Guyon, & à demi- lieue de Cafenoix; cette ouverture, qui s'enfonce dans la mon- tagne, paroïît avoir été formée par un ruifleau intérieur qui fe fera fait jour de ce côté, & qui depuis a tari ; les parois & le fol de ce trou font par-tout recouverts d’eforefcences falpé- trées : j'ai encore fait enlever un pied de l’excavation latérale, que M. Clouet y avoit fait faire quelques jours auparavant ; ainfi ma craie a été prife à fept pieds dans l'intérieur de la montagne. PS RE CP Mémoires suR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 61$ Len°. 3, au fommet d’une des falaifes qui bordent la mer a un quart de lieue de Dieppe vers l’oueft. Cette craie a été prife à fept ou huit pieds de profondeur , à compter de la fur- face du fol, & à cinq ou fix dans la couche crayeufe qui y eft recouverte de deux pieds environ de terre ; & elle a été traitée trois femaines environ après avoir été tirée. , J'ai pris vingt-cinq livres de chacune de ces craïes, que jai leflivées dans de l'eau diftillée; favoir, le n°. premier dans quarante-une livres d’eau ; le n°. 2 dans vingt-cinq livres dix onces, & le n°! 3 dans vingt-cinq livres dix onces auf. Après une heure de forte ébullition , j'ai filtré mes leflives & j'ai “ IQUrE : Du n°. premier , vingt-une livres quatorze onces un gros de liqueur. Du n°. 2 , treize livres fix onces un gros. Du n°. 3, quatorze livres une once trois gros. Ces liqueurs avoient pris une teinte jaunâtre légère ; mais l'aréomètre de M. Baume ne s’y foutenoit pas fenfiblement plus haut que dans l’eau diftillée. Je les ai fait évaporer dans des capfules de verre au bain de fable , & après les avoir réduites à une pinte chacune, Je les ai apportées à Paris , où feuf traitement, que je vais expofer , a été achevé par M. Lavoifier, de l'Académie Royale des Sciences, & par M. Clouer, dans leur laboratoire de lArfenal, N°. premier ( Caflenoix). Par le prosrès delévaporation, la liqueur s'eft troublée , & il s’eft formé peu à peu un dépôt féléniteux qu'on a mis à part, & qui pefoic vingt-deux grains. Ayant poufle l'évaporation jufqu'à ficcité, on a obtenu un réfidu , partie falin , partie feléniceux, & fort imbibé de matières. extra@ives; il peloit trente-huit grains. On à pañle fur ce réfidu de l'eau diflillée bouillante, on a décanté, & il eft refté vingt-un grains de félénice. On a 616 MéMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. enfuite verfé fur l'eau diftillée qui avoit été décantée , de l’al- kali fixe très-pur; il y a eu un léger précipité terreux: puis ayant mis à évaporer, on a obtenu vingt grains d’une fubftance faline, imbibée de matières extradtives , qui fe bourfoufloic fur les char- bons, mais qui ne donnoit pas la plus légère apparence de dé- tonnation : cette fubftance faline paroifloit être un mélange de fel marin avec quelque autre fel; mais on n’a pas pu parvenir à en opérer la féparation. RÉCAPITULATION des produits de la craie de Caffénoix. grains, Première portion de félénite..,........ 22 Sans addition d’alkali. Deuxième portion de félénite...........:.. 21 Subftance faline, mélée de matières extratives. 17 AOTAÏE Se etes sis etae ss sis silriele elles secs es elsie 60 SERRE SCIE grains, Sélénite, en tout......,.., D Ddrbebooue 43 À IE : ar Après avoir décompofé \ Subftance faline, qui fe bourfoufle fur les la dernière fubftance charbons, qui eft mêlée de beaucoup de ma- faline par l'alkali. tières extractives, & qui ne contient point COR Sonde c cuite où dB bog 008 20 DO TA NL eee ses sssosee msi. 63 ae 7 2: ] Pas ur acôme de Salpêltre, ni avant, ni après la décompofi- tion des fels à bafe terreufe par l'alkali fixe. N°.2 (Bonnefourquières). Pendant l'évaporation, la liqueur s'eft croublée; fur la fin on a décanté : le premier produit étoit de la félénite pefant dix-fept grains. Ayant continué l'évaporation jufqu'à ficcité, on a eu un rcfidu partie féléniteux , partie falin , fort imbibé de matières cxtraétives , & qui, bien defféché, a pefé dix-huit grains & demi. Ce réfidu contenoïit encore fept grains de félénite, qu'on a féparés par le lavage avec de l'eau diftillée : on a enfuite ds ur < « % ‘ t 4 + * MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 617 fur cette même eau, qui avoit fervi à laver la félénite, un peu d’alkali fixe en liqueur; il s’eft fait un très-léger précipité, après quoi, avant évaporé, on a obtenu douze grains d’une matière faline imbibée de beaucoup de matières extractives. Cette ma- tière faline étoit compofce pour la plus grande partie de fel marin, qui décrépicoit fur les charbons ; mais il y avoit aufli quelques portions de Salpêtre qui détonnoient , & on a évalué à un grain la quantité de ce dernier fel. R ÉCAPITULATION des produits de la craie de Bonnefourquières. rs ; grains, Sélénite , première portion............, en l7 ans addition dalle Sélénite, deuxième portion...... cree 7 Sel marin à bafe d’alkali minéral........... 11 Salpêtre à bafe terreufe, au plus........... L MO THAM eee eiole s)alelelare sols a iale s siaofeie oletela sie eiels asie leleie 36 Less = "7 4 . grains. Après avoir décompofé Ç Sélénire, première & deuxième portion...... 24 par l'alkali la dernière 2 Sel marin.............................. 11 fubftance faline. Salpétre à bafe d'alkali végétal, au plus..... 1 TOTAL. sons ooooosssceosero cree rereopersoerse 36 a À N°. 3 (Dieppe). Par évaporarion la liqueur s’eft troublée, & il s'eft fait un précipité qui, féparé fur la fin de l'éva- poration par la décantation, s’eft trouvé peer feize grains & demi. Ayant évaporé jufqu'à ficcité, on a obtenu une fubftance faline jaunâtre imbibée de beaucoup de matières extraétives, & qui pefoit quarante-deux grains. On en a féparé par le lavage fix grains de félénire, après quoi ayant verfé fur l'eau difüllce, qui avoit fervi à faire ce lavage , un peu d’alkali fixe en liqueur , onena eu un léger précipité : ayant enfuite mis à évaporer, on a eu quarante-cinq grains de fel marin décrépitant fur les charbons , & imprégné de matières extraétives. fi13 618 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: RÉCAPITULATION des produits de la craie de Dieppe. grains. Sélénite, première portion. ..........sss.s 16+ Sélénite , deuxième portion............. a Sans addition d'alkali. < Sel marin imbibé & imprégné de matières extradives, & mêlé d'un peu de fel marin à bafe terreufe......... Messe es dors ent AS ——— HOTAL success iaeee scislaetiehe es nesnidepe een ee pe Pas un atome de Salpètre, ni avant, ni après la précipita— tion par l'alkali. On fe croit en droit d’aflurer, d’après ces expériences, que ni le Salpêtre ni l'acide nitreux n’exiftent dans la craie avant fon expoficion à l'air; car, quoique celle de Bonnefourquières en ait fourni peut-être un grain, cette quantité eft trop petite pour contre-balancer le réfultat des deux autres qui n'en ont pas donné la moindre apparence, & fur-tout fi l'on confidère que le trou de Bonnefourquières étant tour recouvert de Sal- pètre dans fon intérieur , il eft bien difficile d’avoir évité quel- que mélange dans l'extraétion de la matière eflayée , quoique l'on y ait pris toutes les précautions poffibles. Les mêmes expériences prouvent qu'à la profondeur où la craic cefle d’être imprégnée d’acide nitreux, elle l'eft encore & méme abondamment d'acide vitriolique , avec lequel elle forme la félénite, & de fel marin; & cela ne paroïtra pas extraordi- naïre , la craie étant reconnue pour être formée de débris de corps marins, & dépofés par la mer, où le fel marin en nature eft très-abondant, & qui contient aufli beaucoup de fels vi- trioliques ; cependant il feroit bon d’eflayer cette fubftance prife encore à une plus grande profondeur , afin de déterminer plus précifément fa nature; & c’eft ce que je me propole de faire dans mon prochain travail. Avant les trois expériences décifives dont je viens de rendre compte , j'avois eflayé de la craie prife à Rangiport près Mantes, dans l'intérieur de la verre ; mais n'ayant pas alors un laboratoire MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 619 monté, je n'avois pas pu opérer avec la même exactitude : cependant, comme elle ne fournit point de Salpêrre , je puis maintenant la citer , & j'ajouterai que la furface de cette craie expofée à l'air, eft une des mines du canton la plus fertile en Salpètre ; peut-être doit-elle cette richefle à l'argile dont elle eft, je crois, mêlée; car l'argile eft auffi très-propre à devenir matrice de Salpêtre; on s'en fert avec fuccès dans les nitrières artificielles de Suède, & plufieurs Auteurs recommandent d'en mêler aux matières calcaires dont on forme les couches à Sal- pêtre. Je vais tranfcrire à cette occafion un paffage d'une lettre que j'ai reçue de M. le Chevalier de Dolomieu , dont l'Aca- démie connoît le zèle & les talens, & qu'elle s’eft attachée en qualité de Correfpondant. J'ai vu, mécritil, qu'une partie d'argile & deux parties » à peu près de terre calcaire , ou de detritus de rocher de » cette efpèce, formoient un compofé plus propre à la pro- » duétion du Salpêtre que la fimple terre calcaire expofce au » contaë de l'air. Toute notre terre végétale de Malte formée » par une petite portion d'argile rouge, ou par le détritus du » rocher calcaire, étoit employée avec fuccès dans notre » manufacture; elle fe falpétroit en crès-peu de temps, & pro- » duifoit un nitre plus abondant, plus pur & plus facile à dé- » graifler, qu une terre calcaire fimple. On pourroit , en répé- » tant cette expérience, favoir fi l’obfervation eft particulière » auclimat de Malte , quelle eft la proportion entre ces terres, » la plus propre pour fervir de matrice au nitre, & fi elles » donnent plus de nitre à bafe alkaline que la craie feule «. À cette obfervation , M. le Chevalier de Dolomieu ajoute une vue fur la comparaifon des progrès de la génération du Salpètre,& de ceux de la végétation,qui m a paru fort ingénieufe, & dont ilme prie de faire hommage, ainfi que de l’obfervation précédente , à l'Académie. » Je crois, ajoute M. le Chevalier de Dolomieu , que » les découvertes fur la génération du Salpêtre que doit lit ij 620 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. » nous donner le Concours au prix de l'Académie, pourront » bien aufli nous inftruire fur les principes de la végétation. Pour mettre un terrein dans fon plus grand rapport, dans » fa plus grande valeur, fait-on autre IE par les labours » multipliés , que préfenter fucceflivement au contact de Pair » les différentes parties de la furface du terrein ? On introduit > des fubftances animales ou végétales en putréfaétion, on > mêle à une terre trop arpileufe & trop tenace, de la marne » calcaire, & différentes efpèces de fels; à une terre maigre » & cretacée , de l'argile, &c., tous moyens employés avec » fuccès pour avoir du nitre. Aufli n'eft-il point de terre en » plein rapport en France & ailleurs, qui ne donnent du nitre par la Hixiviation ; Jen ai fait lexpéñence dans plufeurs Pro- vinces de France & à Malre; M. Bowles l'a faite en Efpagne. » D'après cela, ne Pourroit- on pas PA a “an des prin- > cipés de la végétation, une de fes principal es caufes , & » qui la met en-aétion, eft ce même fel nitreux dont on cherche maintenant à deviner la génération? On pourroit » fuivre plus loin cette analogie entre les moyens. de produire » du Salpètre, & ceux dont on fe fert pour mettre une terre » dans fa plus grande valeur; mais ce fimple apperçu doit » fuffire pour faire faire des obfervations relatives à ce double > objet «. C'eft avoir fait un pas , que d’avoir prouvé la non-exiftence du Salpècre & de l'acide nitreux dans la craie qui n'a pas fubi le conta& de l'air 3 mais il refte encore à déterminer de quelle manière elle simprègne de lun & de l’autre des principes qui conftituent le Salpêtre; & c'eft ce que je vais tenter , en ren- dantcompte de quelques expériences entreprifes dans cette vüe, En 1776, au mois de Mars, je formai, avec de la craie qui, lefivée , ne m'avoit point donné de Salpêtre, un mur de quatre pieds de hauteur, d’un pied d’épaifleur à fa bale, de huit pouces environ en haut ; j'avois réduit la craie en mor- ceaux de la grofleur du poing , & à chaque demi-pied j'avois mis un lit de paille pour féparer les lits de craie , & donnez MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. Gif pañlage à l'air qui circuloit d’ailleurs dans les interftices des différens morceaux ; j'avois couvert le fommet de mon mur de deux ou trois planches & de paille qui le mettoient à l'abri des grandes pluies, mais imparfaitement ; malgré cela, une pat- tie de ce mur, leffivée au mois de Juillet 1777, me fournit une petite quantité de Salpêtre à bafe d’alkali végétal, & une beaucoup plus confidérable de Salpétre à bafe terreule , que je convertis en véritable Salpètre, en y mélant de la porafle. Lorfque je conftruifis ce mur , j'engageai le nommé Jerôme, Salpètrier à la Roche-Guyon, à en former un avec des terres falpétrées après qu'elles auroient fubi routes les leffives; je les fs ftratifier, ainfi que ma craie, avec de la paille ; & comme la matière en étoit plus compaéte, je fis les lits moins épais, pour faciliter l'introduétion de l'air : au bout du même temps, ces couches leffivées donnèrent un aflez bon produit. Mais comme ces expériences avoient été faites dans le voi- finage de l'atelier du Salpétrier , & auprès de matières déjà falpêtrées , j'ai voulu les répéter d’une manière plus füre, & en conféquence, j'ai choifi une remife dans la bafle-cour du château de la Roche-Guvon, où mes expériences étoient bien abritées de la pluie, mais bien expofces à l'air; & M. Goubert, employé dans ce pays par MM. les Régifleurs Généraux des Poudres & Salpêtres, a bien voulu, pendant mon abfence, y : former des couches fuivant plufieurs méthodes différentes: cinq ont été conftruites avec de la craie tirée de l'intérieur de la montagne, & eflayce auparavant, pour s'aflurer qu’elle ne contenoit point de Salpétre : l'une de ces cinq couches ou murs a été conftruire avec des morceaux de craie de la grofleur du poing fans paille ; une autre avec de la craie broyée très-me- nue & percce de trous ; les trois autres, de craie auñli broyée, ont été mêlées & pétries avec de la potafle difloute dans deux fois fon poids d’eau ; on a mêlé à l'une demi-livre, à une autre une livre , & à la troifième une livre & demie de potafle; elles ont été aufh percées de trous : enfin, M. Goubert à pris de la craie à la furface de rochers qui contenoient beaucoup de Salpétre , & après l'avoir leflivée jufqu’à ce qu'elle n'en donnâc 622 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. plus aucun figne , il en à formé deux couches, percées aufli de trous comme les précédentes. Le 24 Novembre dernier , j'ai pris vingt-cinq livres de chacune de ces couches , que l’on a leflivées pendant une heure & demie dans quantité égale d’eau chaude. Je n’alongerai point ce Mémoire, déjà volumineux , en donnant fur les réful- tats de ces leflives, les mêmes détails que j'ai donnés fur celles de la craie native ; ils n'ont pas d’ailleurs été tirés avec la même précifion, parce que mon objet étoit d’obferver le fait général de la génération du Salpétre , laïflant à MM. les Commiflaires de l'Académie, & à MM. les Régifleurs Généraux des Poudres le foin de déterminer les quantités dans leurs expériences beau- coup plus nombreufes & mieux faites que les miennes. Je me bornerai donc à dire que des deux dernières couches (formées avec de la craie falpêtrée bien leflivée), l'une m'a donné du Salpétre à bafe d’alkali végécal, par deux criftalli- fations fucceffives, fans y avoir mêlé de potafle; l’autre , effayée à la vérité en quantité beaucoup moindre ( de cinq livres feu- lement), ne m'a fourni que de la félénite , quelques atomes de {el marin, mais point de Salpêtre au moins apparent. Quant aux cinq premières, elles ont toutes refufc de crif- tallifer avant que j'y mélafle de la potañle ; mais coutes con- tenoient du Salpétre à bafe terreufe, ce dont je me fuis afluré d’abord en les effayant avec l'acide vitriolique , qui en a dégagé des vapeurs nitreufes ; & toutes, traitées avec de la potafle, m'ont donné du Salpêtre à bafe d’alkali végétal : la couche formée de craie en gros morceaux, eft celle dont le produit a été moindre; toutes contenoient aufli de la félénice & du fel marin. Le contrafte entre le réfultat des deux couches formées de craie falpêtrée bien leflivée, m'engage à les négliger toutes deux; je crains que l'abondance de lune ne tienne à quel- que manque de précaution dans les lavages qu'on lui à fait fubir avant de former la couche; & pour le déficit de l'autre, peut-être vient:l feulement de la trop petite quantité fur la- quelle j'aiopéré , puifqu'il paroît fuffifamment prouvé d’ailleurs, par des expériences faites ad hoc, & par l'ufage foutenu des MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈÊTRE. 623 Salpêtriers , que toutes les matières falpêtrées, après avoir été employées , font très-propres à devenir de nouveau matrices de Salpètre. Le réfulrar des cinq autres prouve très-évidemment que la feule expofition à l'air fufñc pour que la craie s'imprègne au moins d'acide nitreux, puifque toutes ont donne du Salpètre à bafe terreule; & le prôduie moindre de celle formée de craie en morceaux, femble tenir à fon état de moindre divifon. Pour réfumer, il paroît donc que la craie native, ou du moins prife à à une certaine profondeur dans Vinitéieue de la terre, & quina pas été expofée à la putréfaétion des fubftances animales ou végétales, ne contient encore que de la félénite & du fel marin ; refte à déterminer fi ce mélange eft effentiel à fa nature, ou sil provient de caufes étrangères. Il paroït auffi que l'aétion feule de l'air fuffit pour imprégner cette craie native d'acide nitreux , & que l’état de divifion de la craie favorife cette imprégnation; que lation de l'air aug- mente aufli fenfiblement la quantité d'acide marin que conte- noit la craie, & vraifemblablement aufli la quantité d'acide vitriolique : peut- étre;pour dérerminer ces faits avec toute l’exac- titude que mérite leur i importance ; ; feroic-il bon de répéter ces expériences à différentes élévations, & d'y joindre des obfer- vations fur l’état de l air ambiant. Les expériences qu'on a faites depuis plufieurs années en Angleterre & en France, rendent très- probable l'opinion que l'air entre pour beaucoup dans la formation des acides. Enfin, il paroît que l’alkali végétal, qui eft la bafe du véri- table Salpètre, eft entièrement dû aux fubftances animales ou végétales, puifqu'on ne trouve le Salpêtre véritable naturelle- ment formé qu'aux environs des habitations, où , COMME aux Indes & en Éfpagne, fous & parmi la terre végétale, & que dans les nitrières artificielles, on n’en retire que lorfqu' on y a mêlé les fubftances propres à le fournir. L’arrofement des couches par la potafle paroît même un moyen infuffñfant pour en obtenir du premier abord, parce que la grande proportion de Salpêtre à bafe terreufe l'empêche de crfallifer. Au refte , 624 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. il feroit bon encore de déterminer par des expériences jufques à quel point il faudroit charger des couches à Salpêtre, de fubftances alkalines , pour obrenir tout Salpêtre véritable , & comparer enfuite les frais de cette préparationavec ceux qu'exige le traitement du Salpêtre à bafe rerreufe. Je me propoie, aufli- tôt que je ferai libre , d'entreprendre un travail fur ces difié- rens objets , & de reprendre aufli l'analyfe des craies par tous les moyens chimiques ; & fi l'Académie daigne accueillir ce premier effai que J'ai l'honneur de lui préfenter, & le trouve digne d'encouragement , Je lui foumettrai la fuice de mes opé- rauons , dans lefquelles je défire cependant d’être fecouru par des mams & des yeux plus habiles que les miens , & même d'être prévenu, pour que ces vérités utiles au Public foient mieux & plus promptement déterminées, EXPÉRIENCES MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE. 625 EXPÉRIENCES SAULR LA DÉCOMPOSITION DU NITRE PAR LE CHARBON. PRATR ML EVA NV NOËT S'ISENR Ï L eft néceflaire, pour l'intelligence de ce Mémoire , de fe rappeler les experiences nombreufes que j'ai publiées dans le volume de 1781, page 448 , fur la formation de l'air fixe ou acide charbonneux ; 1l en réfulte que cet acide eft compofé de vingt-huit parties de charbon , ou plutôt de fubftance char- bonneufe pure , & de foixante-douze parties d'air vital, ou plus exattement de principe oxygine. Il fuit de là , qu'étant donnée une quantité d’air fixe ou acide charbonneux, provenant d’une combinaifon quelconque, on peut toujours y fubftituer fa valeur en fubftance charbonneufe & en principe oxygine; & il eft aifé de fentir que c’eft un moyen précieux pour reculer, dans un grand nombre de cir- conftances , les bornes de l'analyfe chimique. Je fuppofe encore qu'on admet avec moi, ce que j'ai fait voir dans les Mémoires de l'Académie des années 1775 & 1777, que l'air de l'atmofphere eft compofe de deux fluides élafti- ques fimplement mêlés ou léyèrement combinés; favoir, d’en- viron vinot-fept parties d'air vital, & de foixante-treize d’un fluide méphitique, que j'ai appelé mofette atmofphérique. Enfin, pour n'avoir plus à revenir fur les données qui fer- viront de bafes aux expériences dont je vais préfenter le détail, je fuppoferai qu'à la preflion d'une colonne de vingt-huit pouces de mercure & à dix degrés de température, les fluides élafti- KKkKk 626 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ques dont J'ai fair ufage pefoient le pouce cube; favoir : grains. L'ANItaR Et nee DACiO: nat 10 Sd Oe 0,47317 L'aficonmmonEer ete tement ee less cie ee. . 0,46811 L'air fixe ou acide charbonneux & aériforme. ............. 0,69$00 La mofétre atmofphérique.....................,........ + 0,46614 Tai lieu de croire ces déterminations ou très-exactes, ou très- près de l'être; mais il feroit trop long de difcuter ici les expc- riences fur lefquelles elles font fondées. On fait , d’après des expériences de M. Cavallo, rapportées dans fon Traité de-la nature & de la propriété des airs & autres fluides élaftiques permanens, partie IV , chap. V, que quand on fait détonner enfemble du nitre & du charbon , on obtient un mélange d'air fixe & de mofette atmofphérique. M. Ber- tholet à obtenu le même réfultat, en faifant détonner du nitre & du charbon dans un canon de fufil. ( Voyez Mémoires de l’A- cadémie 1781 , page 231 ) Quoique ces expériences jetaflent déjà un grand jour fur la nature des principes conftituans de l'acide nitreux , cependant, comme MM. Cavallo & Ber- tholet n’avoient tenu aucun compte, ni du poids du nitre em- ployc, ni du volume des airs obtenus, il m'a paru néceflaire de reprendre entièrement ces expériences. Je me fuis muni à cet effet d’un tube de cuivre jaune ou laiton , de huit lignes de diamètre environ , & aflez long pour contenir près de deux onces des mélanges fur lefquels je me propofois d'opérer. Je n'ai employé que du Salpètre très-pur , & du charbon bien calciné. Je pefois l'un & l’autre bien fecs ; après quoi Je les pilois dans un mortier de verre, en y ajoutant un peu d’eau, pour empêcher que le charbon divifé en poudre fine ne fût chaflé hors du mortier par le mouvement du pilon. Je char- geois enfuite le petit canon, en comprimant légèrement la compofition avec un cylindre de bois qui y entroic fort jufte, & je prenois les plus grandes précautions pour qu'il ne reftât rien , ni au pilon, ni au mortier ; ni au peut cylindre de bois : cette opération faite , j'ajoutois une petite mèche , connue fous le nom d'éroupille , & après l'avoir allumée, je plongeois bruf- MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 62% quement le canon fous des cloches remplies d'eau, ou des jarres remplies de mercure. La détonnation une fois commencée, fe continue très-bien fous l'eau , pourvu que le petit canon foit toujours maintenu la bouche en bas, afin que l'eau ne sy introduife pas, & ne foit point en contaét avec le nitre & le charbon. Elle à également lieu fous le mercure, mais alors il eft néceflaire d'opérer fur de plus petites doles. Je ne rendrai pas compte de chacune de mes expériences en détail, non plus que des tâtonnemens que j'ai été obligé de faire, pour reconnoître la jufte proportion de nitre & de charbon neceflaire à la détonnation , & je me contenterai de donner le réfultat moyen des expériences qui mont paru mériter le plus de confiance. Pour opérer la détonnation complette d’une once & demie de nitre, il m'a paru qu'il falloit un gros quarante-deux grains de charbon. L'alkali qu'on obtient après la détonnation eft parfaitement blanc, & il ne feroit pas impoflible qu'il continc encore quelques portions de nitre non décompofces ; mais fürement la quantité n’en eft pas confidérable. Après avoir opéré comme je viens de lexpoler, & avoir recueilli avec foin les fluides aériformes réfultans de la détonnation , j'ai diflous l'alkali qui m’eft refté dans de l’eau ditillée ; & comme il sy étroit uni une portion d’air fixe ou acide charbonneux aériforme , je l'ai dégagée par le moyen d’un acide , & j'en ai mefuré la quantité ; enfin j'ai féparé l'acide charbonneux aériforme ou air fixe obtenu pendant la détonnation par l'alkali cauftique , tous moyens connus, & dont j'ai donné de noimbreufes applications. Le réfultac a éte : en volume. en poids. MAIN. 5 s 4 pouces. gros. grains, Air fixe, ouacide charbonneux aériforme. 585,82 $ 47,143 Mofette atmofphérique............. n 161,76 1 3,419 Alkali cauftique reftant.............. 6 6:,438 once. gros: grains. DOTAL eine nette DOCS C MR: 5 1,000 Mais l'acide charbonneux ou air fixe, eft compofc de vingt- KEkKK ij 623 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: huit parties de fubftance charbonneule , & de foixante-douze de principe oxygine , ou air vital; je puis donc fubftituer dans “2 ce réfultat, à l'acide charbonneux , fa valeur , & j'aurai alors: en volume. en poids. PL TS Û PATN pouces. gros. grains.) Charbon....... Dee elec iiiebies 1 41,000 ATTVIER Enter e ee 240 os clolstojoefsis cieialee 619,53 4 $,143 Moferte..................e..sese. 161,76 1 3419 Alkali cauftique................ se 6 63,438 once. gros. £'aInSe FMOÏTIA TRE ee ete eiee is mieicieete « DUC ET O D $ 41,000 D'après cette expérience, $ gros 8,562 grains d’acide nitreux fec , feroient compofés ainf qu'il fuit; favoir : gros grains. Air vital ou principe oxygine....... ae tete Smet ets ae LAU NS, 145 AOFCETE Se ENS Endr ei Oe le le Ps en et lai e ot e REA Ne 1003419 TOTAL. - 6 nes telieientsnte sise ciesleteletietels $ 8,562 D'un autre côté, j'ai fait voir, dans différens Mémoires ; que l'acide nitreux étoit le réfulrat de la combinaifon de qua- rante parties d'air vital, & de foixante-huit d’air nitreux. Cinq gros 8,562 grains d'acide nitreux fec font donc compofes comme il fuit; favoir : Aïitinitreuxe cie SRE CE DOME LE Éretpies silos ee de 3 19,66 Aityitaliete sonne der nie AIS CLR PA ES EEE 1 60,90 HOTAL ue see ri/s etes steele etre nee del ere SULUES 8,56 En faifant une équation de ces deux réfultats, on aura : A gros S1,43 grains air vital + 1 gros 3,219 grains mo— fete = 3 gros 1,966 grains d'air nitreux + 1 gros 60,90 grains d’air vital. D'où il eft aifé de conclure pour la valeur de l'air nitreux; mofette atmofphérique, 1 gros 3,42 grains < air vital ou prin- cipe oxygine, 2 gros 16,24 grains ; Ce qui donne pour l'acide HITIEUX : MÉMOIRES SURLA FORMATION DU SALPÊTRE, 629 Compofition de 5 gros 8 56 grains d'acide nitreux ec enpoids. gros. grains. AG QUEUE 250 NII AE Principe oxÿgine employé à former du gas nitreux. 2 16,14 DITTEUX Reel seine ed Ce AE SPA AE 1 60,90 DOTA LE: 0e snsosossesreses de e sisi éinoislei am efeieis eee e DOS ECS Sn sn 7 Pre À Compoftion d'un quintal d’acide nitreux fec. PO; ; Mofette atmofphérique........... IP E DOTE é 010:4635 ue Principe oxygine employé à former du gas nitieux. 0434771 Principe oxygine employé à convertir le gas nitreux en acide AULTCUX ee ete ere sinslélerealelefet dela si eloidrateiolele dldte ose ner 36,0$94 Aïr nitreux. OTAL re ae een LR TE ET A à 41e I00 JO00 Le nt 0 © 7 Après avoir donné la compofition de l'acide nitreux en poids, il refte à donner ce même réfulrat en volume des deux airs ou gas qui le conftituent , & c’eft ce qui eft facile, d’après la con- noiflance qu’on à de leur pefanteur fpécifique, Le calcul donne les réfultats qui fuivent : Compofition de l'acide nitreux en volume, exprimée en 6 p pouces cubiques. À poucess FRE anis te a sien lila feielele Sosa lel delete 0,79 Air nitreux. J Mofette.. RD PDT | Air vital employé à former l'air nitreux......... 43:3456 Air vital employé à transformer l'air nitreux en acide nitreux.. 35,900 PRET MOTTE Re ue Seite eee cle eee ce 100,0000 ‘À Les expériences, dont j'ai déduit ces réfultats, ont été faites dans le courant de 1784, & je les ai répétées en préfence de M. de là Place, de M. Meufnier , & d’un aflez grand nombre de petfonnes, le 2 3 Septembre de cette même année. Quelque concluans que puflent paroître ces fairs, quelque lumière qu'ils jetaflent fur la nature des principes qui entrent dans la compofñtion de l'acide nireux, je ne les regardois cepen- dant encore que comme des apperçus dont je n'aurois pas même 630 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. ofé déduire des conféquences, fi elles n’euflenc été appuyées & confirmées par la fynthèfe. M. Cavendhish eft le premier qui ait publié des expériences de ce dernier genre ; il a obfervé que dans la formation artifi- cielle de l'eau par la combuftion de l'air inflammable & de l'air vital, quelquefois on obrenoïit de l'eau très-pure, quel- quefois de l'eau chargée d’un peu d'acide nitreux. Dans la combuftion que nous avions faite à Paris le 24 Juin 1783, M. de la Place & moi, l'eau ne s'étoit pas trouvée fenfible- ment acide. Mais comme l’eau que nous avions obtenue nageoit fur du mercure, la petite portion d'acide nitreux , fi elle en eût contenu, pouvoit s'être combinée & nous avoir échappé. Dans k combuftion faite à Mezières par M. Monge, l'acidité, quoi- que foible, étroit fenfible ; enfin, dans l'expérience très-authen- tique que nous fimes à Paris les 27 & 28 Février 1785, l'eau {e trouva tellement chargée d'acide, qu'en la combinant avec de l’alkal fixe végétal très- pur ; & en faifant évaporer , nous retirâmes foixante grains de nitre bien détonnant. La quantité d'eau que nous avions formce dans cette expérience croit de fix onces environ ; mais quelque précaution que nous euflions priles pour n'employer que de l'air vital pur , nous conftatâmes par l'épreuve de l’endiomètre , avant de commencer la com- buftion , qu'il contenoit environ un huitième de mofette atmof- hcrique. La combuftion fe faifoit dans un grand ballon de dix-fept à dix-huit pintes de capacité , qu'on avoit d'abord rempli d'air vital, & dans lequel on faifoit arriver le gas inflammable par un tuyau uës-fin. Ce qui fe confommoit Fes deux airs croit remplacé au moyen de deux réfervoirs qui en fournifloient de nouveau; mais avec cette circonftance que l'air vital arrivoit avec une preflion égale à celle de l'atmofphère , & que le gas inflammable étoit comprimé en outre par une colonne d’eau de deux pouces. Il eft évident que puifque la combuftion fe fait aux dépens de l'air viral & de l'air inflammable, & que la mofette ne brüle pas, la portion de cette dernière contenue dans l'air vital a dû s’'accumuler infenfiblement dans le bal- lon; & en effer il n’eft aucun des Spcétateurs , qui étolent en MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 631 très-grand nombre , qui ne fe foit apperçu que la flamme diminuoit peu à peu d'intenfité. Enfin, quand la mofette n'a plus été mélée d’une aflez grande quantité d'air vital pour pou- voir entretenir la combuftion , la flamme seft éteinte. Le mélange de mofette , qui n'étoit originairement que d'un huitième , & qui a toujours fucceflivement augmenté pendant tout le cours de l'opération, a donc néceflairement pale par la proportion convenable pour la formation de l'acide nitreux ; &'on ne peut guère douter que ce ne foit à la combinaïfon de cette mofette avec l'air vital qu'eft dû l'acide nitreux que que nous avons obtenu. En vain prétendroit-on afloiblir cette explication , en fuppofant que cet acide préexiftoit dans l'air vital que nous avons employé , & qui en ceflet avoit été tiré du précipité rouge ; les précautions que nous avions prifes paroiflent prévenir cette difficulté : cet air vital avoit été non feulement pendant plus de quinze jours en contaét avec l'eau, mais encore on l'avoit fait pafler , avant de l'employer , à la combuftion , 1°. à travers deux flacons d’alkali cauftique en liqueur difpofce à la manière de Woulfe, 2°. à travers deux longs tuyaux de verre remplis d’alkali cauftique concret, grof fièrement concaflé. Il étoit donc impoñible qu'il reftât dans cet air le moindre veftige d’acidité, & il auroit plutôc été pof- fible d'y foupçonner une qualité contraire. D'ailleurs M. Ca- vendish a levé toute incertitude à cet égard, en employant de l'air vital obtenu des plantes par la végétation, & il a cgale- ment obtenu un peu d'acide nitreux. On ne peut donc pas fe refufer de reconnoître qu'il s’eft formé de l'acide nitreux dans les combuftions faites par M. Cavendish, & dans les nôtres; & puifque nous trouvons dans les circonftances de cette for- mation les mêmes matériaux qu'on obtient de l'acide nitreux par fa décompofition , on ne peut douter qu'ils ne foient en- trés réellement dans la compolition de celui que nous avons formé. Toutes ces vérités, que nous n'avions apperçues que confufé- ment , viennent de recevoir un très- grand degré d’évidence par les fuperbes expériences de M. Cavendish , dont M. Blak- den, Secrétaire de la Société Royale de Londres, vient de 632 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. nous donner connoiflance. M. Cavendish a mêlé enfemble, dans un tube de verre, trois parties de mofette atmofphc- rique, & fept d’air vital; il a renferme le tout par de l'eau de chaux, & il a enfuite tire dans ce mélange un grand nombre d’étincelles éleétriques. Chaque étincelle diminuoit d’une petite quantité le volume de Fair, & en continuant un temps fufifant , il eft parvenu à en abforber prefque la totalité. L'eau de chaux n'a point été troublée dans cette expérience ; mais il s'eft forme une véritable eau mère de nitre ou nitre à bafe terreufe. En opérant de la même manière fur de l'alkali cauf- tique au lieu d'eau de chaux, la diminution eft plus prompte, & en faifant enfuite évaporer l'alkali, on a un véritable Sal- pêtre. L'etincelle cleétrique ne diminue le volume ni de Pair vital , ni de la mofette, lorfqu'ils font feuls. Une partie de ces expériences ont étc répétées dans le laboratoire de M. le Pré- fident de Sarron, & on s’eft afluré que les deux airs s’abfor- boient en effec prefque entièrement, comme l’a annoncé M. Blakden. Il réfulte donc des expériences de M. Cavendish, que l'acide nitreux eft un compofé de fept parties d'air vital & de trois de mofetre atmofphérique : & il penfe que pour opé- rer la combinaïfon de ces deux airs, il faut un certain degré de chaleur; c’eft ce qu'opère l'étincelle cleétrique , ou la eom- buftion de l'air vital & de l'air inflammable. Les expériences que j'ai rapportées au commencement de ce Mémoire, don- neroient une proportion de mofette atmofphérique plus foible que celle déterminée par M. Cavendish : mais il ne feroit pas impofhble que la différence tint à l'état de l'acide nitreux; on fait en eflet que la proportion d’air vital & d'air nitreux varie beaucoup dans cet acide depuis celui qui eft blanc & fans cou- leur, jufqu'à celui qui eft fumant, rutilant & rouge. Aurefte, les expériences de M. Cavendish n'ayant été faites que fur de très-petites quantités , elles peuvent être fufcepribles d’er- feurs ; je me propole d’ailleurs de vérifier encore les miennes, afin d'établir, d’une manière de plus en plus certaine , la bafe d'élémens auffi importans, MÉMOIRE MÉMotRes SUR La FORMATION DU SALPÊTRE. 633 = MÉMOIRE SUR LA FABRICATION ARTIFICIELLE D'U "SA UL PE TRUE Ox a toujours été perfuadé que les méthodes de fabriquer arüficiellement du Salpêtre venoient d'Allemagne ; cependant l'obfervation fuivante prouve qu'il y avoit des nitrières établies en France, près d’un fiècle avant qu'il ait été fait mention de celles d'Allemagne. Il y a près de l'Abbaye de Long-Pont , à deux lieues de Villers-Coterêts, à l'extrémité de la forêt du même nom, une carrière anciennement abandonnée : il paroît que c’eft de à qu'ont été tirées les pierres de taille dont eft bâtie une grande partie de l'Abbaye. Cette carrière eft ouverte dans le flanc d'un côteau; elle eft peu profonde , maïs les ouvertures en font larges, de manière que l'air y circule avec aflez de facilité. Il y à environ cent quarante ans qu'il s’eft établi un Salpé- trier dans cette carrière; & depuis cette époque, ce font coujours les mêmes terres qu'on y leflive, & dans lefquelles le Salpêtre fe renouvelle dans une révolution de trois années. Aujourd’hui l'atelier fe trouve, par des partages de famille, divifé en deux, & il eft occupé par deux Salpêtriers ; ils tra- vaillenc abfolument l’un comme l’autre; ainfi, décrire les opé- rations de l'un , c’eft décrire celles de tous les deux. Chaque Salpêtrier n’a que fix cuveaux, qui ne contiennent chacun que deux pieds cubes & demi de terre falpétrée ; ainfiils Li11l 634 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE: ne leffivent à la fois que quinze pieds cubes de terre : ils paflent d’abord fur les terres neuves les petites eaux qui font reftées du leflivage précédent, & ils obtiennent ainfi des eaux de cuite à huit degrés du pèfe-liqueur. Ils relavent enfuite ces mêmes terres avec de l'eau pure, ce qui leur donne de petites eaux, lefquelles fonc deftinces à repañler à leur tour fur des terres neuves pour former de la cuite. Ils ne mélenc point de cendres avec leurs terres, mais ils ont deux cuveaux quils chargent particulièrement de cendre, & ils y pañlent leurs eaux de cuite avant de les mettre en évaporation dans la chaudière. Quand ils manquent de cendre, ils y fuppléent par la potafle, conformément aux inftruétions qui leur ont été données par les Régifleurs des Poudres ; ils la mettent dans la chaudière , lorfque la cuite eft rapprochée environ à moitié. Chaque cuite n'eft que de quatorze fceaux, & ils en tirent dix livres feulement de Sal- pètre, ce qui revient à dix ou onze onces par pied cube. Lorfqueles terres ont été ainfi le£ivées, on vuide les cuveaux, on laifle écouter les terres fur d'autres terres deftinces à être elles-mêmes lefivées, afin de ne rien perdre ; puis on les met en couches pour y régenérer le Salpètre. On met d’abord fur le fol où doit être élevée la couche, fix à huit pouces de terre leflivée bien meuble ; on met par-deflus un lit de fumier de quatre pouces d’épaifleur : c'eft principalement le fumier de vache qu'on emploie ; celui d'âne ou de mulet eft beaucoup moins bon & donne plus de fel. On recouvre ce fumier d’un lit de terre , jufqu'à ce qu'on cefle de voir le fumier , & ce lit peut être évalué à crois à quatre pouces d'épaifleur. On remet par-deflus alcernativement un lit de fumier, & un de terre, jufqu'à ce que les couches aient atteint trois à quatre pieds de haut : alors on finit par un lit de terre de fix à huic pouces. Plus les couches font bafles, mieux elles reufliflent ; mais on eft obligé , faute de terrein, de les élever fouvent jufqu'à quatre pieds. On laiffe les chofes dans cet état au moins pendant huit mois : la couche s'échaufle dans cet intervalle , elle s’affaife ; alors on la retourne , on mêle Mémornes SUR LA FORMATION DU SALPÊTRE. 635$ bien les matières, & on les change de place. Au bout de huit autres mois, ou les remue de nouveau, & on les change en- core de place : enfin, huit mois après, c'eftà-dire au bout de deux ans révolus, elles font bonnes à être leffivées. Cependant, comme on n'eft point toujours exact à faire le remuement & les mélanges à l'époque des huit mois, pour plus de füreté on ne leffive que tous les trois ans. Jamais les couches ne font arrofées , & l'humidité des car- rières les entretient dans un état de fraîcheur fuffifant. Quand elles paroiflent trop sèches , on y ajoute du fumier , pourvu que ce ne foit pas à l'approche du temps où l’on doit faire le lefHi- vage ; car alors, quand même elles feroient trop fèches, on n’y ajoute abfolument rien. Ce font, comme on l’a déjà dit, toujours les mêmes terres que l’on lefive ainfi ; quand il s’en accumule trop , on en jette dehors, & elles font perdues. Quelquetois auffi on mêle avec les anciennes terres quel- ques portions de terre de fouille; & c'eft ce qui arrive lorf- qu'on a néplige de remuer à temps les couches, qu'elles ne font point encore confommées , & qu'on ne les juge point aflez riches : alors, pour ne pas laïfler chommer l'atelier, les Sal- pérriers fe procurent des terres falpétrées des environs; mais elies font rarement la dixième partie du travail de l’année, Le bois ne coute aux Salpétriers que la peine de le ramaf- fer ; ils fe fervent de bois mort qu'ils trouvent dans la foréc de Villers-Coterêts , aux environs de la carrière où eft établi leur atelier; aufli ne s'attachent-ils pas à l'économifer. Pour obtenir une médiocre quantité de dix livres de Salpêtre par jour, ils entretiennent un feu prefque continuel fous leur chaudière, au moins pendant le jour, car ils ont coutume de difcon- tinuer pendant la nuit : mais, d’un autre côté, cette manière de travailler leur procure une grande abondance de cendre qui leur épargne de la potafle. Leur fourneau eft aufli très- mal conftruit, il confomme beaucoup crop de bois ; mais ils s'embarraflent peu de le mieux conftruire, par les motifs qu'on vient d’alléguer. La chaudière n'eft, à proprement parler, que polée fur quelques pierres : il ny a pas Fo de cheminée Ill is 636 MÉMOIRES SUR LA FORMATION DU SALPÈTRE: pour le dégorgement de la fumée , & elle fe répand libre- ment dans la carrière. Il arrive de là qu'elle eft enfumée & noire, & qu'elle eft recouverte, fur-tout dans le haut , d'une couche cpaifle de fuie. Rien ne feroit plus aifé que d'augmenter chaque année le travail de cet atelier , en augmentant le fonds aétuel de terre avec de la terre de fouille; mais il faudroit un emplacement plus grand ; il faudroit conftruire des hangars, & le local ne sy prête pas. D'ailleurs, les Salpêtriers, qui ne payent à eux deux, aux Religieux de Long-Pont, qu'une redevance annuelle de 6 livres, voient avec effroi la néceflité où ils feroient de faire une avance de 1 2 ou 1 $oe livres : ils ne font pas perfuadés que des hangars foient aufli favorables que des carrières à la rége- nération du Salpêtre. Enfin, ils ont peu d’ambition, & fe bornent à un travail qui les fait vivre eux & leur famille. On trouveroit au furplus, dans beaucoup d’autres endroits, les mêmes reflources qu'à Long-Pont, fi ce n’eft l'avantage d'avoir le bois gratis, & une grande abondance de cendres qui ne coutent rien ; à cela près, il n’eft pas de carrière aban- donnée qui, avec du fumier , ne puifle être transformée en peu d'années en un atelier de Salpêtrier. On ne peut finir fans remarquer que cette méthode, em- ployée depuis fi long-temps en France, & qui n’a été connue en Allemagne que vers la fin du fiecle dernier, fembleroit indiquer que l'art & les principes des nitrières artificielles y ont été portés, comme tant d’autres branches d'induftrie , par des François réfugies en 1685. FIN du Tome XI des Savans Étrangers. 637 a TABLE DES MATIÈRES DE LA PARTIE HISTORIQUE ENT: DES MÉMOIRES. A. H indique la Partie Hiflorique, & M les Mémoires. Les indications de pages quë ne font précédées ni d'une H ni d'une M, fe rapportent aux Mémoires. Aou Rovaze pes Sciences de Paris, reçoit une Lettre de M. Turgot, Contrôleur Genéral des Finances, pour la propofñition d'un Prix fur la formation du Salpêtre , H, pages 1,2 & 3.— Nomme cinq Commiflaires pour rédiger un Programme, & pour examiner les Mémoires propolés, H, pag. 3, 4, 5, &c — Faitimprimer & diftribuer le Programme, H, pag. 4. — Les Commiflaires font priés de faire traduire tout ce qui a été fait fur cette matière dans les pays étrangers, H, pag. 20. Notice de l'Ouvrage qu'ils ont publié, H, pag. 21. — Regarde comme indifpenfable de retarder la proclamation du Prix , H, p. 98. — Annonce dans un nouveau Programme que le Prix qui devoit être proclamé à la Séance publique de Pâques 1778, fera retardé Et celle de la Saint-Martin 1782, H, pag. 100.— Décerne la couronne au Mémoire de MM. Thouvenel, H, pag. 129. — Jugement du Prix, H, pag. 184 & fuiv. De Befançon, propofe pour Re du Prix de 1766, de déterminer /4 manière la moins onéreufe de fabriquer du Salpêtre en Franche-Comté, H, pag. 12, 13 & 26. — Couronne le Mémoire de M. de Vaunes, pag. 13 & 19.— Tous les Mémoires qui ont concouru pour le Prix, contiennent beaucoup d'affertions & un petit nombre de preuves, H, pag. 18. AciDe pu Bots. Si on y plonge de la chaux vive à plufieurs reprifes, on en obtient enfuite du Salpêtre, M, page 491. ACIDE MARIN, H.— Peut fe tranfmuer en acide nitreux , felon Stahl, H, pag. 9, & M, pag. 20. Glauber croyoit à cette tranfmutation, M, age 11, M. Woulfe eft dans la même opinion, H, pag. $o. — M. Pietfch a Ae fans fuccès de le phlogiftiquer, H, pag. 72.— Expériences de M. Cornerte, dont le rélulrat eft der aucunement dans la compofition de l'acide nitreux, H, page 82, M, pag. 11, 20. Autres preuves, d'après l'Auteur du Mémoire N°. 13, H, pag. 131. — Se trouve uni aux bafes rerreufes dans les craies des environs de la Roche Guyon, H, page 193. — Il réfulte de la décompofition des corps organiques, M , page 81. — Explication de cette affertion, M. 81, 82. — Son mélange avec de la terre & des plantes fraîches, M, page 175. —Il cft moins nuifible à la nitrification que l'acide vitriolique, page 179. On en trouve moins dans les graies qui n'ont point été expofées à l'air, M, page 623. Voyez SEL MARIN: 638 T'4,5\7 E,, 0 Es, M AT n'EtR res: ActDE NITREUXx. H. Les Chimiftes ne connoïffoient pas bien encore {a véritable origine, & les principes dont il eft compolé , H, page 8, M, page 83.— On a penfé que l'air étoit fon lieu natal, ibid. & 81.— Stahl & Beccher penfoient qu'il ne confifte que dans l’union de l'acide vitriolique à un principe inflammable, 16id. & 22, M, page 11 & $7. — Peut, felon M. Lavoïfier, e partager en deux fubftances aériformes, l'air nitreux qui entre pour un quart dans fa compofition, l'air viral où déphlogiftiqué pour un autre quarr; le refte eft du phlegme, H, page 30. — Sa narure & les différens principes qui entrent dans fa compoñtion, H, page 31. — Compofé d'air crès-pur, ibid. — Sufceptible de fe combiner avec les terres calcaires, les alkalis fixes, les fubftances métalliques, bd. — Eft un acide particulier, & ne réfulte pas de la transformation des acides vicrioliques , marins, &c. C'eft le fentiment des Commiflaires de l'Académie, H, page 37. — Suivant l’Auteur du Mémoire N°. 2, il eft l'acide uuiverfel, modifié par l'addition des matières putréfiées, H, page 38. — IL contient peu de phlooiftique, felon l'Auteur du Mémoire N°. 15 , & comme l'4 déja avancé M. de Fourcroy , H , p. $7. — Eft une modification de l’acide vicriolique, felon l’Auteur du Mémoire N°. 13 , H, p.:54. — Opinion de Stahl, H, page 81. — N'eit pas une modification de l'acide vicriolique, felon M. Beunie. Réfutation des preuves rapportées à cette occafion par M. Pietfch, H, pages 71 & 72. — Contient beaucoup de phlogiftique, & ne tire pas fon origine de l'air, felon M. Beunie, H, pages 71 & 72. — Eft le produit de la fermentation putride, H, page 73. — Ne fe forme , fuivant M. Cornete, que lorfque la putréfiétion eft à fon dernier période , H, page 82. — Réiulte, elon lui, de la combinaifon de l'air fixe avec le phlosiftique , 284. — Se dégage des matières en putréfattion, pendant les chaleurs de l'été, felon MM. Chevrand & Gaviner, H, page 87. — Elt, felon eux, un compofé d'air, de feu, & d'une terre fubtile, H, page 87. — N'eft aucunement dû à la transformation de l'acide vitriolique , ni à celle d'aucun autre acide , d'après les expériences de l’Auteur du Mémoire N°, I { fecond Concours), H, page 106. — Eft une combinaifon d'acide vitriolique & de phlogiftique, felon l'Auteur du Mémoire N°. 6, fecond Concours. Combinaifon qui s'opère, dit-il, par le moyen de la putréfaétion, H, page 117. D'après les expériences de l'Aureur du Mémoire N°.13, ce n'eft une modification ni de l'acide vitriolique, ni de l'acide matin, & tous les acides minéraux nuifent à fa formation , H, p. 130. — Expériences de M. Lorgna, qui confirment cette opinion, H, pag. 160, 165 & 166. — Cet acide ne fe forme point dans les plätras, il ne s'y introduit que par voie d'imbibition; aflertion fans preuve , aui paroît hafardée , Mémoire N°. 18, H, p. 145. — Suivant M. Chevrand, le gas putride eft néceflaire à fa formation, Mémoire N°. 18, H, page 146.— Théorie de fa formation , felon M. Rome, H, page 147. — Il penfe qu'il eft tout formé dans l'air, qu'il y eft tenu en difolution , & que les pierres calcaires ne fervent que de réfrigérent pour le condenfer, page 149.— Explication de fa formation dans les terres végétales du Bengale , &c. & des murailles, H, page 149. — Son germe eft dans les terres calcaires, Mémoire N°. 24, H, page 158. — L'air de l'atmofphère en charic quelques molécules ; c'eit pour cette railon que l'on tronve du nitre au haut des clochers, Mémoire N° 24, H, page 160. — Les anciens Chimiftes regardoiert l'air UE AD comme le magafin où il fe formoit, M, pages 8 & ÿo. — L'air atmolphérique & la putréfaétion font les deux grands agens de fa géné-ation, M, page 73.— Expériences pour connoître les matières fubtiles, tant de l'air que des corps organiques qui entrent dans fa compofition, M, pe, 73. & fuivantes. — Expériences fur le même objet, M, page 74. — Paroït & dépofer de préférence dans la verre calcaire, M, page 80. — Il paroît certain k | | TAB1IE DES MATIÈRES. 639 w'il fe forme le premier, qu'il s’unit à une bafe terrenfe , & que ce n’eft qu'au des terme de la putréfaéion que s'engendre l'alkali qui précipite la terre, M, page 81. — Regardé comme principe conftitutif de l'air, M, pege 58. — Motifs qui paroiloient juftifier cette opinion; elles prouvent au contraire que l'air eft le principe conftituant de l'acide nitreux , M, p. 85, 86 & 87.— Il fe forme & fe décompofe. dans l'atmofphère, M, pag. 90 & 91. — Son mélange à différentes dofes avec l'acide vitriolique, M, page 171. — Dificulté d'en féparer les fels, M , pages 170, 171, 172, 173. — Combiné avec le fel marin, M, page 173. — Expériences pour favoir fi les acides vitrieliques & marins fe tranfmuent en acide nitreux, M, page 174, — Combinaifon de quatre parties de cet acide, & d'une d'huile de térébenthine, M, page 182. — Tout fel neutre dont il eft l'acide, eft un véritable nitre, M, page 187. — Se combine également avec l'alkali marin ou le végétal, M, page 197.— Il ne peut être rangé parmi es acides minéraux, M, page 207. — Les fubftances animales paroiflent plus pop que les végétales pour le produire, M, page 133. — Son odeur fe fait fentir quelquefois dans les environs des fubftances en putréfaétion, M°, page 274. — Théorie fur fa formation, M, pag. 278, 279. — Sentiment différent de celui de M. Lavoifer , fur la décompodtion de l'acide nirreux, M, pages 280, 281. — Son développement eft beaucoup plus lent dans les murs que dans les couches, M, page 337. — 11 fe produit fans un accès très-libre de l'air, & fans fecours de matières en putréfaction , fous les aires des granges à blé, dans les montagnes de Franche-Comté, M, page 356.— Sa formation, M, page 365. — N'cft pas contenu dans les pierres calcaires, dures & pures, M, page 366. — N'eit contenu dans les p'âtras que par voie d'imbibition, M, page 368. — Il ne fe produit que lor‘que la putréfaétion eft à fon dernier degré, M , page 369. — Il faut, pour en former en abondance, réunir beaucoup de matières végétales & animales en putréfaétion, M, pag. 369 & 370. — Contient une matière inflammable, M, page 375$. — Il eft l'ouvrage de la végétation, M, page 428. — Refte dans les pierres calcaires lorfqu'il s'y eft uni, parce qu'il a plus d'affinité avec elles qu'avec l'air, M, page 450. — Il eft contenu dans l'air de l'armofphère; expériences de M. Margraff qui le prouvent, M, pages 450 & 451. — Il a plus d'aflinité avec le phlogiftique qu'avec aucun autre agent, M, p. 455. L'air eft fon véhicule, M, page 461. — Il exifte dans les craies éloignées de toute habitation & à plufeurs pieds de profondeur aux environs de la Roche-Guyon & de Moufleaux, M, page 561. — Pourvu qu'elles aient été expolées à l'air, M, page 618. — Il eft plus abondant à la furface qu'a une certaine profondeur , M, p. 562. — Il cft tantôt combiné avec la terre calcaire , tantôt avec l'alkali fixe végétal , M,p. 562.— Il fe forme dans les craies par l'adtion de l'air, & par plufeurs circonftances difficiles à faifir, M, pages $64 & 565. — M. Cavendish eft le premier qui ait formé de l'acide nitreux par la combinaifon de l'air viral & de la mofette atmofphérique dans une certaine proportion, H, pages 197 & 198, p. M,630. — Il s'en eft trouvé dans routes les combuftions d'air vital & d'air inflammable, qui ont fervi à produire de l'eau dans les expériences de MM. Cavendish & Lavoifier , p, 630. — Les quantités de moferte , déterminées par M. Lavoifier, par voie de décompofition, ne quadrent pas avec celles déterminées par M. Cavendish, page 632. Acipes. Aucun ne mérite le titre d'acide atmofphérique, M, p. 70. — Leur tranfmutation eft auffi difficile que celle des métaux, page 38r. AciDes MINERAUXx. Different beaucoup les uns des autres par leurs principes conftituans, M , page 22. ACIDE UNIVERSEL, Aucun ne mérite ce nom; M, page 68. 640 TA4B1E DEs MATIÈRES: ACIDE VITRIOLIQUY. Seul acide primitif, felon Beccher & quelques autrés H, page 8, M, page $7. — Peut {e rranfmuer en acide nitreux , felon Stahl, H, pages, M, pag. 11 & 57. — Moyen pour s'en aflurer , p. 9. — Expérience de M. Cornetre à ce fujer, page 81. — L'on ne croit plus à cette converfion, H, pag. 22, M, pag. 165. — C'éroir l'opinion de M. Pietfch, H, page 14. — Réfutée par M. Granit, H, page 27. — Par l'Auteur du Mémoire N°. 1, fecond Concours, H, page 169. M. Pietfch ayant effayé d'en phlogiftiquer avec du camphre , du charbon, de la laine, des huiles, &c.de le faturer enfuite d’alkali fxe , a eu du tartre vitriolé , du fel fulfureux , ammoniacal, &c. mais pas de nitre , page 72. — Ne concoutt en rien à la formation de l'acide nitreux, felon M. Cornette , H, page 82, M, page 15. — Ne fe change pas en acide nitreux, d'après les expériences de MM. Chevrand & Gavinet, IH, page 26, M, p. 271. — Expérience ingénieufe qui le prouve, M, page 272. — N'eft pas le plus abondamment répandu furla nature, H , pag. 108 & 109. — Se trouve rarement dans les matières organiques rendant à la nitrification, M, pag. 83. — Réfultac de fon mélange à différentes dofes avec l'acide nitreux, page 171. — Avec de la terre végétale & une fuffifante quantité de plantes, page 175. — Nuit à la | nitrification en s'emparant des alkalis ou il les trouve , page 179. Acrpvm rINGUEr.Ileft, fuivant quelques Auteurs, un des principes conftituans de l'acide nitreux, M, page 33. — Il a été regardé comme le feu pur, 4bid. — Son exiftence eft précaire, M, page 35. Acus PAsTorrs. Ses feuilles defléchées déronnent au feu, Mémoire N°. 28, H, page 178. ADMINISTRATION DES POUDRESET SazrÊTREs. Changemens ordonnés par le Roi, fous le Miniftère de M. Turgot, M, page 611. Heureux effets qui en réfultent, 28id & 189. — Supprimg ce que la fouille a de plus onéreux , H, p. 189. Progrès rapides de la récolte dSalpérre , depuis l'établiffement d'une Régie pour le compte du Roi, H, page 155. Etat des quantités de Salpétre , récoltées en France depuis 1775 jufqu'en 1785, H, p. 189. Etat particulier pour la Touraine, H, page 194. Inftruétion publiée en 1777 par les Régifieurs des Poudres, fur la fabrication artificielle du Salpêtre , H, pages 31 & fuiv. Inftruétion fur la fabrication du falin & de la potafle, par les mêmes , H, p. 188 & fuiv. Sur le travail des eaux mères, par les mêmes, p.... Voyage fait par. les Régifleurs des Poudres aux environs de la Roche-Guyon, M, pag. 503 & fuiv. Dans la Touraine & dans la Saintonge, pages $72 & fuiv. Leurs obfervations fur les craïes & les tuff-aux naturellement falpêtrés, depuis la page 503 jufqu'à 608. Le Roi autorife les Régifleurs à fournir la potafle a perte aux Salpétriers pour en répandre l'ufage , page 608. Ils découvrent de l'alkali fixe minéral naturel près Saumur, M, page 591. Au bas du côteau du Turquan, page 595. Voyez CLouer & Lavoisier. (MM:) AIR ATMOSPHÉRIQUE. Abfolument néceflaire à la formation du Salpèêtre, H, pages 6, 9, 10, 18, 27, 77» 82, 114, M, pages 26, 58, 73, 94, 180, 356, 564 & $65. — N'eft pas le réceptacle de l'acide nitreux, comme les Anciens l'ont cru , mais contribue à fa formation, H, page 10, M, page 8.— Il eft le véhicule de cer acide, fuivant M. Rome, M, page 461. — Favorile & accélère la putréfaétion , H, pages 10 & 49, M, page 73. — Ne fufit pas pour produire le nitre, comme plufieurs Anciens l'ont cru, H, page 22. — Se combine avec leserres nitreufes pour y former l'acide nitreux, H, page 49. — Sragnant préférable à un air trop renouvelé , d'après le réfultat des expériences de MM. Thouvenel, H, pages 78, 83, 127.— M. Cornette paroît être d'une opinion contraire, H, page 83. — Ce n'eft point à l'acide vitriolique qu'il contient , qu'eft due la nirification des terres , d'après l'ingénieufe FPS RE (3 LL FABLE DESNM AT ÉtRE’S: 64r de MM. Chevrand & Gavinet, H, p. 87.— N'entre, felon eux, dans la formation du nitre, que comme l’eau de la criftallifation dans les {els , 2hid. — Contient des tfluves putrides propres à former l'acide nitreux, felon le rélultat des expériences de l’Auteur du Mémoire N°.2, H, p. 110. — Se divile en plufieurs efpèces : mélanges & combinaifons de ces différentes efpèces avec la craie, l'alkali, &c. H, p.125. — Il eft prouvé, par les expériences de M. Lavoilier, que l'air atmof hérique eft compofé de deux fluides élaftiques très-différens ; que l'air vital ou déphlogiftiqué , le feul propre à la formation du nitre, n'entre que pour un quart dans ce mélange, H, p. 127 & 128, M, p. 73. — Entre matériellemenc dans la formation du Salpêtre, H, p. 128. — Déphlogiftiqué entre en très- grande proportion dans la compofition de l'acide nitreux , £bid. — L'emploi de fon action pour l’évaporation des eaux falpêtrées, Mémoire N°. 14,H , p. 163. — Effet qu'il produit fur les pierres calcaires à l'entrée d'une catrière, fuivant les différentes températures , H, page 148, M, p. 447 & fuivantes. — C'eft en s'échauffant qu'il s'empare de l'acide nitreux par-tout où il le rencontre, & c'eft en fe refroïdiffant qu'il le dépofe, M, p. 450. — Contient l'acide nitreux; expériences de M. Margraff qui le prouvent, M, pages 450 & 451. — Manière d'en diriger lation dans les nitrières, M, pages 467, 468 & 471. — Expériences qui tendent à faire connoître la différence de température néceffaire à la condenfation, page 469. — Les fels de l’urine font ceux qui le refroidiflent le plus, M , page 491. — Son action feule fuffit pour former ou développer le nitre dans les craies, page $6$. AIR DE LA PUTR#FACTION. Son mélange avec l'air déphlosiftiqué, conftitue l'acide nitreux, H,p. 112$, M, p. 123. — N'eft plus propre à la nitrification quand il a paflé à travers l'eau de chaux, H, page 128. A1R FIXE. Entre dans la compofition du Salpètre & de l'acide nitreux , fuivant M. Cornette, M, pages 22 & 32. — Il eft poffible qu'il ferve à la formation de l'acide nitreux, M. page 35. — Il eft néceilaire que la chaux en contienne pour étre propre à la formation du Salpêtre, M, page 31. — Se dégage, pendant la pucréfaction, dans les vaiffleaux fermés, M, page 72. — Cet acide eft compofé de vinot-huit parties de charbon, & de foixante-douze d'air vital, fuivant M. Lavoifier, page 625. Air NiTREux. N'eft autre chofe, fuivant M. Lavoifier, que l'acide nitreux privé d'une partie de principe oxygine, H, page 197. Ars. Ont tous une analogie entre eux, page 85. ALKALI FIXE MINÉRAL, ou Narrum des Anciens, doit être diftingné du nitre des Modernes, H, p. 21. — On le retire des lacs de Perle, & on l'obtient par la combuftion des plantes marines, ibid. — On en trouve en France, page 595. — Il eft la bafe du nitre quadrangulaire, H, p. 108. — Imprégné des différentes efpèces d'air, M, page 75. — Peut fuppléer à l'alkali végétal pour dégager l'acide nitreux des bafes terreufes, M, p. 199. — Peut fuppléer, fuivant M. Lorgna, à l'alkali végétal pour la fabrication de la poudre, M, p. 19# & 199. — Mille livres de fel marin contiennent environ 705 livres d'alkali fixe, page 199. — Très-pur, retiré d'une carrière abandonnée, rrès aérée & peu profonde, en Touraine, près de Trèves & de Mineroles , & au bas du côteau de Turquan, M, pages for & 595. ALKAL! FIXE VÉGÉTAL. Tire fon origine des plantes, H, p. 6 & 7. — Doit être mêlé avec les terres des murailles, fi l'on veut obtenir un nitre à bale alkalne , H , page 24. — Expofé à l'air tombe en deliquium, & l'on obtient du tartre vitriolé , fuivant l'Auteur du Mémoire N°. 2, H,p.38, M, p. 392 Mmmim 642 TaBiEe DES MATIÈRES. — Cette opinion fe trouve démentie par plufieurs expériences, H, pages 39, 108, — Expolé à des vapeurs urineufes donne du Salpêtre, fuivant le même Auteur , dont les expériences font contraires aux réfultats obtenus par MM. Thouvenel & par les Commiflaires de l'Académie, H, page 39.— On nedoit pas en faturer entiérement les eaux falpétrées, comme le penfe l'Auteur du Mémoire N°. 12,H ,p. 53. — Opinion de l’Aureur du Mémoire N°. 24 à ce fujet, H, p. 68. — Expofé à l'air ne fe neutralife pas, & ne donne pas de nitre , vérité pr A par les expériences de plufieurs Concurrens, H, pages 61 & 72. L'Auteur du Mémoire N°. 26 eft dans la fauile opinion qu'il n'entre pas dans la formation du Salpètre, H, page 69. — Se forme, dans les derniers temps, de la putréfaétion, ceinme femblent le prouver les expériences de MM. Thouvenel, H, page 69. — Se forme, felon M. Cornette, & conformément à l'opinion de M. Beaumé, par la combinaifon de la terre calcaire avec le phlogiftique, H, P- 83.— Eft la bafe du nitre triangulaire, H, p. 108. — Se forme aulfi, d'après les expériences de MM. Thouvenel, par le mélange de l'air putride & de l'air atmofphérique, H, page 126. — Le foleil contribue à fa formation , fuivant M. Rome, H, page 151. — Précipite l’alkali minéral, H, page 169. — Table de la quantité que chaque efpèce de bois en contient, d'après M. de Lorgna , & d'après les Résiffeurs des Poudres, H , p. 170 & 190,M , p. 198. — Deux moyens nouveaux pour s'en procurer , donnés par l’Auteur du Mémoire N°.24, H ; p- 158, 159. — Imprégné de différentes efpèces d'air, M, page 75. — Produit par l’expofition de la terre animale 2 l'air de la putréfiétion, M, page 78. — Cette terré paroït plus propre qu'aucune autre à fa formation, M, p. 80. — Il entre un principe acide dans fa compofition , M, p. 81. — Son acide conftirutif eft formé par une farabondance de feu , M, p. 81. — Il ne fe forme qu'au dernier degré de la putréfition, M, p. 81. — Expériences pour connoître fa nature, M, p. 187 à 200. — Comment on l'extrait des corps qui le contiennent, M, p. 194. — Le végétal & le marin abforbent la même quantité d'acide, M, p. 197+ — On ne peur plus en retirer des plantes lorfqu'elles ont été dépouillées de Jeur acide concret par la macération, M, page 208. — Ils ont leur lource dans les (ucs acides des végétaux, M, page 233. — La potafle & le falin font les fubftances qui peuvent fournir à l'acide nitreux la bafe qu’il n'a pas trouvée dans les terres, M, page 317. — Le falin ef l’alkali retiré des cendres de bois, M, page 318. — Ne fe rencontre jamais à nu dans la leflive des terres, page 339. — Rend beaucoup d'air fixe quaud on le diflout dans les acides, M, page 363. — Eft un produit de l'air & du feu qui s'incorporent dans une fubftance dévorée par le feu ordinaire, M, page 459. — Contient plus du 8°, de fon poids d'air fixe, M, p. 459. — A autant de part que l'acide nitreux à la formation du Salpêtre, M, page 479. — La Nature le produit fans le fecours de la combuftion des végétaux, fuivant M. Rome, M, pages 479 & 485$. — Il penfe qu'il n'eft dû qu'à la chaleur des rayons du foleil, M, p. 484. — À la propriété d'abforber l'acide que l’airtient en diffolution , M, p. 486. — Se forme dans les craies de la Roche-Guyon en même temps que l'acide pitreux, M,p. $6s. — Ne vient point par imbibition de la deftruétion des végétaux & des animaux, M, page 566 ; quoique le concours de ces matières foit néceflaire à fa formation, M, page 623. — La quantité prodigieule qu'il en faut pour neutralifer le nitre à bafe terreufe des ruffeaux de Touraine, retarde les progrès de la récolte du Salpêtre, M, page 608. Azkari voLraATiL. Sert, felon Stahl & Beccher, à tranfmuer l'acide vitriolique en acide nitreux, H, page 8. — N'entre point dans fa compofition, felon M. Granit, H, page 27. — Mêlé avec de la chaux fans addition de matières putrefcibles, n'a pas donné de nitre, H, page 73. — Retiré de la viande TABLE DES MATIÈRES. 643 hachée par la feule putiéfa@tion, ne faifoit pas effervefcence avec les acides, H, page 103. — Il eff la bafe du nitre ammoniacal, H, page 108. — Compolé de cinq parties en poids de mofette atmofphérique, & d'une d'air inflammable, fuivant M. Bertholet, H, page 198. — Il s'en dégage pendant la putréfadtion dans les vaifleaux fermés, M, page 71. — Quatre onces mêlées à une livre de chaux décrempée d'eau après plufieurs mois, ne donnent pas de Salpêtre, M, page 386. ALUN. Peut être employé dans les couches, H, page 25. — Son utilité dans les nitrières, felon l’Aureur du Mémoire N°9. 2.H, — Démentie par les expériences des Commiflaires de l’Académie, H, page 40. ARDENNES. (les) Sont aufli favorables qu'aucun autre pays à la fabrication du Salpètre, M, p.17, H, p. 137. — Manquent de matériaux de démolitions & de terre calcaire, Mémoire N°. 17, H, page 138. ARÉOMÈTRE. Pour connoitre le degré des eaux falpêtrées, M, page 393. ARGILE ROUGE. Entre dans la compoftion de la terre végétale de Malthe, M, page 619. ARGILES. Mélées avec la craie, font très-propres à devenir matrices de Salpètre, unies au fumier de cheval, M, page 19. ARROCHE. ( voutes les efpèces d’) Détonnent au feu, Mémoire, N°. 18, H, page 178. ARROSEMENS. Moyens de les faciliter & d'économifer la main d'œuvre, La lie de vin & l’eau de buanderie font très-propres à entretenir l'humidité néceffaire à la formation du Salpètre , p. 467. AuTHizes (cour du chateau d'}) Propre à former un atelier de Salpêtre, M, Pages f41, $69. AVERTIN. (Saint) Analyfe des déblais de la carrière, pris à 1120 pieds de l'ouverture, M, page 586. B. Bérxoanse , BOURRACHE, BRIONNE, BUGLOSE. Les feuilles de ces lantes defléchées détonnent fur les charbons, fuivant l'Auteur du Mémoire Ke. 28, H, page 178. BASSINS DE CRISTALLISATION. Devroient être de bois & non de cuivre; ils n'auroient pas le danger du verd de gris, & feroient moins couteux, M, page 419. Beauce. Difpofitions des bancs qui la compofent jufqu'à 383 pieds de profondeur, M, pages 573 & fuivanres. BENNEcOURT. Endroit favorable pour former des couches en pleine craie, M, page $69. BERGERIES, ÉcuRtESs. M. Chevrand a obfervé celles du Berri, qui donnent beaucoup de Salpêtre, H, pages 143 & 144. BERTHOLET. ( M.) A trouvé que l'akali volatil étoit compolé de cinq parties en poids de mofette atmofphérique, & d’une d'air inflammable , H, pag. 198. BERTIGNOLES. Analyfe du tuffeau de fes carrières, M, page 597. Beunze. ( M.) Divife fon Mémoire en trois Chapitres. Traite dans le premier, des principes du nitre, page 373. — De fes propriétés. — Des changemens qu'il éprouve au feu avec les {ubftances inflammables, ibid. — Diftingue le , nitre en brut & en naturel, ibid, — Le nitre brut contient de la terre calcaire, de la félénite , une matière grafle. Le nitre raffiné contient roujours un peu de fel marin, p. 374. — Ses fignes caractériftiques font dans fon acide , page 374+ M mmm i] 644 Taie DES MATIÈRES. — Conclut des propriétés du nitre qu'il contient une matière inflammable , p. 37$.— Sentiment de M. Piet{ch fur la tranfmutation de l'acide vitriolique en acide nitreux , page 376: — Ses preuves, pages 377 & fuivantes. — Elles fonc infuffifantes, page 381. — La tranfmutation des acides eft auf difficile que celle des métaux , zbid. — De la nittification , page 382. — Les Anciens croyoient que l'acide nitreux voltigeoit rout formé dans les airs, #bid. — Expériences pour combattre cette affertion , £bid. — M. Lemery a cru que le nitre étoit tout formé dans les végétaux, page 385.— Expériences qui détruifent cerre afiertion , pag. 383 & fuivantes. — Syftème de l'Auteur, p. 385. — Lieux ou l'on trouve ï nicre ; fub{tances avec lefquelles il fe:trouve uni; menftrues néceffaires pour s'en procurer, — Il en infère qu'il ne fe fair pas de Salpètre fans la concurrence de la putréfa@ion, d'un air méphitigne & de la terre calcaire, pages 385 & fuivantes. — L'alkali volatil ne facilite pas la nitrification, p. 366. — Définition de la fermentation, #4. & 387. — Ses différens états, p. 387. — L'urine fraîche n'eft ni acide, ni alkali, p. 387; mais fermentée, elle devient acide, #4. — Le aitre eft, fuivant lui, le produit du gas de la putréfa@tion , uni au phlogiftique &c aux fubftances alkalines ou terreules, page 388. — Manière d'augmenter la production du nitre, p. 389. —- Les méthodes actuelles font très-difpendieufes & peu profirables. Celle de former des pyramides tronquées de 12 à 15 pieds, percées de trous de $ à 6 pouces de diamètre à un pied de diftance, raffembleroient toures les circonftances favorables à la nitrification complette, pages 389 & 390.— Avantage de cette méthode fur les autres, id. — Procédé pour retirer e nitre des terres nitreufes, page 391. — Procédé pour le raffiner. En quoi confifte cette opération, pages 391 & fuivantes. — Moyens de fuppléer à la potafle & aux cendres de bois par l'eau de favon noir après le lavage du linge, page 392. — La leflive des Chamoïfeurs produit le même effet, id, — De la lixiviation des terres, pag. 393. — Conftru@tion d’un aréomètre pour connoître le degré des eaux, id. — Manière de s'en fervir, id. — Mélange du fang de bœuf avec la cuite pendant l'évaporation. Inconvéniens de trop rapprocher la cuite, page 396. — La criftallifation s'opère beaucoup plus lentement l'été que l'hiver , page 395. — Plus elle eft lente, plus les criftaux font beaux, 14. — Les Commiflaires ont cru devoir décerner au Mémoire de M. de Beunie, une fomme de 800 livres, comme acceffir. Il contient des faits inftrudifs, & ne peut que contribuer à l'avancement de l'art de fabriquer le Salpêtre, H, p. 186. BOrLE A U.Maifon qu'occupoit ce célèbre Poëte à Authile, près de la Roche-Guyon, page f41. BoO1s. Sa difette a retardé les progrès de la fabrication du Salpètre, H, p. 145. — Quelle quantité chaque efpèce de cendre contient d'alkali, d’après M. Lorgna, H, page 170. — D'après l'inftru@tion de la Régie des Poudres, H, page 19e. — L'on peut y fuppléer par la tourbe ou le charbon de terre pour l'évaporation des eaux, M, page 350. Bourré & MONTHOU. Les pierres de ces carrières font blanches , tendres, & fe décompofent facilement à l'air; elles contiennent quelquefois, dès la carrière même, un peu de Salpêtre, M, pages 577 & 578. BRETAGN=. Compolte de pierres fchiteufes & quartzeufes, peu fufceptibles de fe falpêtrer, M, pages 607 & 608. Briques. Neuves, fe falpêtrent en fix mois, fuivant l’Auteur du Mémoire N®. 16, H, page 136. — Sont peu propres à la formation du Salpêtre , fuivant M. Chevrand, M, page 358. Taie DES MATIÈRES. 645 Cs C AROTTES, (feuilles de) Defléchées, déronnent fur les charbons, Mémoire N°. 28, H, page 178. CARRIÈRES ABANDONNÉES. Pourroient devenir des nitrières extrémement riches, fi on y expofoit des matières fermentefcibles, M, page 609. CarRièkres. Elles ont à une certaine profondeur à peu près la même température que les caves de l'Obfervatoire, M, page 445. — Le Salpêtre ne fe forme, fuivant M. Rome, que dans la partie fujette aux variations du thermomètre. Il ne s'en forme plus aux endroits où la température eft conftante, M, pag. 446 & 449. CavenNpisH. (M.) Détail de fes expériences fur la formation de l'acide nitreux, pages 631 & 632. Caves. Il ne s'y forme de Salpêtre, fuivant M. Rome, que parce que leur fol & leurs parois condenfent l'air chaud qui circule dedans, page 452. CENDRES. Leur analyfe, par M. Lavoifier, M, page 481. — Préférence due a celle de bois neuf, M, page 318. — Elles ne font pas auffi riches en alkali qu'on le croit communément, M, page 199. — Celles de tamarin ne contiennent point d'alkali, mais du fel de Glauber, M, page 462. — Doivent entrer dans la compolition des murs & des couches, H, pag. 24, 25, $1, 63, 68, 84, 105. — Ont l'inconvénient, dans le rafinage du Salpëtre, d'y introduire des fels qui nuifent à fa qualité, H, page 32. — De chêne, de hêtre, de bouleau , mouillées & féchées, donnent par lixiviation du Salpétre , fuivant l'Auteur du Mémoire NS: 2, page 38. — Lorfqu'elles n'ont point été leflivées, elles ont l’avantage de contenir un alkali qui donne une bafe fixe au Salpêtre, H, page sr. — Leffivées, elles ne font pas à rejetter, £bëd. — En y fubftituant la porafle, le Salpêtre eft beaucoup plus beau , H, page $2. — Seules expofées dans une cave, donnent du Salpêtre, felon l'Aureur du Mémoire N°, 13. — Et en grande abondance lorfqu'on y joint des marières putrefcibles, H, page 54. — Le fel des cendres qui n'a point été converti en potafle par la calcination, & que l'on nomme falin en Franche-Comté, peut fervir avec fuccès pour donner une bafe d'alkali fixe au Salpêtre, H, pag. 92. — La difculté de fe procurer des cendres dans plufieurs Provinces, s'elt oppofée long-temps aux progrès de la fabrication du Salpêtre en France; la potafle y fupplée aujourd'hui, H, p. 145. — Les cendres étoient regardées autrefois comme fervant à dégraifler les eaux mères, H, page 188. — Tableau de la quantité produite par la combuftion de 4000 livres pefant de différens végétaux, H, page 190. — La quantité que les différentes plantes & les différens bois en fourniflent, n'eft pas relative à leur dureté, ni à leur pefanteur, H, pag. 190 & 191. — Il eft aifé de connoître la quantité d’alkali qu'elles contiennent, H, page 191. — Un demi-boifleau de cendres, 6 livres de vitriol verd , vingr piates d'urine ont donné, au bout de fept mois, cinq gros de Salpêtre, M, page 400. — Un demi-boifleau de cendre mélée à un boiffeau de marne & vingt pintes d'urine expolées à l'air, ont produit , en fept mois, une once & demie de Salpétre, M, page 400. — Un demi-boiffeau de cendre, 6 livres de vitriol, fcize pinces d'urine, n’ont pas donné de Salpètre ,M, page 401.— Un boifleau de cendre mélée à dix pintes d’urinc, pendant fept mois, ont donné deux gros de Salpètre, M, page 401. CHaLeur. Nécellaire à entretenir dans les couches, felon l’Auteur du Mémoire No. 4, H, page 42. — Elle accélère la putréfaction, H, page $o. — Trop 646 TAB1zE DES MATIÈRES. grande devroit nuire à la formation du Salpêtre, dans la doétrine de MM. Rome & Thouvenel, page 43. — Circulation d'air qu'elle occafionne continuellement dans les fouterrains, M, pages 445 & fuiv. CHAMPAGNE. Ses craies font favorables à la formation du Salpêtre, pag. 570: CHAMPROUY. Analyfe des tmffeaux de fes carrières, page 578. CHARBON DE TERRE. Peut [uppléer au bois pour l'évaporation des eaux falpétrées, page 350. CHauDrères. Celles en fer font préférables à celles de cuivre, qui dépofent toujours un peu de verd de gris dans le Salpêtre , page 419. CHaumonT en Touraine. C'elt là où les cuffeaux commencent à fe montrer, page 576. CHaux vive. Son mélange avec du fel ammoniacal vicriolique & avec du crottin de cheval, page 13. — Avec le vitriol de Mars, page 16. — Déwuic les mucilages , page 31. — Nuit à la formation du Salpêtre, £bid. — Imprégnée de différentes efpèces d'air, page 75. — Humeétée d'eau diftillée , contenue dans des terrines, & placée dans des étables , n'a donné que de foibles indices de Salpètre, p. 118. — Eft utile dans la nitrification , parce qu'elle ablorbe les huiles & les graines des fubftances animales, p. 234. — Elle fert à débarrafler le nitre des parties graffes qu'il contient, page 392. — Mélée avec de la chair de mouton & des herbes hachées, page 235. — Eteinte à l'air, unie à de la potaffe & de l'urine, produit du nitre, page 401. — M. Rome confeille d'en faupoudrer les couches à Salpètre, pages 467 & 470. — Placée dans un lieu ‘bas & frais où l'air échauffé n'entroit que par une illue, a donné des cflorefcences de Salpêtre en quinze jours, pages 469 & 470. — Plongée à plufieurs re rifes dans l'acide du bois, produit du Salpêtre, page 491. — L'Aureur du Mémoire N°. s prétend qu'il en faut introduire dans les matériaux propres à conftruire les voûtes, H, page 17. — Doit entrer dans la conftruction des couches, H, pages'2$ , SI, 63. — Peut produire un cet avantageux lorfqu'elle eft employée en petite quantité, H, page ÿr. — Dans le lefivage, elle fert à blanchir & à purifier le Salpêtre, H, page 52. — Peut produire quelques inconvéniens dans les mélanges, felon M. Cornette ; il préfère la craie lévèrement ouverte par le feu, H. page 85. — Trop chère, & fon effer équivoque, felon MM. Chevrand & Gaviner. Celle des Tanneurs & Mégifliers k plus propre qu'aucune autre matière, à caufc des parties animales qu’elle contient , H, p. 88.— Entraîne plufieurs inconvéniens dans la fabrication du Salpêrre, felon l'Auteur du Mémoire N°.37,H, page 96. —Blanchit l'eau mère, /bid. — A la propriété de fufpendre les progrès de la putréfaction; ne doit par conféquent être employée qu'en petite dofe, felon l'Auteur du Mémoire N°. 1, fecond Concours, H, p. 104. — Employée en trop grande proportion, nuit à la formation du Salpêtre, H, pages 131, 132, 133. — Erteinte fait le même cer que la marne dans les combinaifons propres à produire du Salpètre, H, page 77. — Il lui manque nn principe pour être terre calcaire, c'eft l'air fxe, H, page 110. — Regardée comme trop chère & comme inutile, par l'Auteur du Mémoire NP.2, fecond €oncours, H, page 111. CHELrDOINE, Caoux,CyNoeLosse. Leurs feuilles defléchées détonnent fur les charbons, H, page 178. Cnen. Les tuffeaux qui font à découvert le long de cette rivière, font falpètrés, pige $77. CHsvranD & Gaviner.(MM.) N'ont point tourné leurs vûes fur la fabricaticn artificielle du Salpètre, M, page 268. — Ils blâment le leflivage trop fiéquent des terres, M, page 269. — Expériences qui prouvent que l'acide vitriolique nc fe change pas en acide nitreux, M, pages 271, 272 & 273. = L'odeur de -TaBmzstnes MATréRres. 647 l'acide nitreux fe fait fentir quelquefois dans les environs des fubftances en putréfaétion , M, page 274. —- Le nitre fe forme dans l'intérieur comme à la furface des terres jufqu’à une certaine profondeur, M, p.27$.— Obfervation à l'appui de ce fait, M, page 276. — Théorie fur la formation de l'acide nitreux, M, pages 278 & 279. — Ils ne penfent pas comme M. Lavoilier, fur la décompoñtion de l’acide nitreux, M, pages 280 & 281. Leurs réflexions fur la queflion propolée, M, pages 282 & 283. — Plans de hangars propres à former des établilfemens én grand pour la production du Salpêtre, M, pages 284 & fuivantes. — Enumératien des matières propres à étre employées dans les nitrières ; moyens de fe les procurer, M, pages 289 & fuivantes. — La plupart de celles indiquées par les différens Auteurs, font trop chères pour qu'il foit poflible de les employer avec profit, bd, — Manière d'afleoir les couches, M, p. 295 & 296. — Frais de conftruétion des nitrières comparées avec leur produit, M, pages 297, 298, 299.— Bénéfice qu'on peut efpérer, M, page 299. — Expériences faites fur différentes fubftances pour connoître leur produit en Salpêtre, ihid. & fuivantes. — Projets de hangars pour les villages, M, page 305. — Comparaifon de l'érabliflement propofé avec celui des Régitleurs des Poudres, M , page 303.— Les terres des écuries à moutons & à chèvres, font celles où l’on recueille le plus de Salpêrre, M , page 365. — Conftructions des nitrières - bergeries , bd, — Les Communautés pourroient fe charger de Ja conftruétion de ces hangars, M, page 308. — Réunion des Communautés & des particuliers pour la formation , l'enpretien & l'exploitation des nitrières-bergeries, M, page 309. — Pioduit de la récolte du Salpêtre en Franche-Comté, pendant 6 ans, M, page 310. — Du leflivage des terres, M, page 315. — Des fubflances alkalines qu'il faut employer pour donner unc bafe au Salpêtre, M, page 317 — La fubftance qu'on débite fous le nom de potaffe , dans les falines de Franche-Comté & de Lorraine, n'eft que du fel marin prefque pur, M, page 318.— Le falin eft un alkali retiré des cendres de bois, shid. — Defcription d'un hangar-écurie , & calcul du béréfice qu'on peut en tirer, M, p. 315 & 320. — Moyens de connoître le degré des eaux de leflive fans pèfe-liqueur, M, p. 321. CHivranp.{M.) Voyage dans les différentes parties du Royaume, pour juger par comparaifon du parti qu’on peut tirer des matières qu'elles renferment pour la fabrication du Salpêtre, M, page 323. — Juge qu'il cft facile de tirer fix millions de livres de Salpètre de Ja France, M, page 324. — La Nature préfente , dans les grandes Villes, les démolitions qui font extrêmement avantageufes, M, page 325. — Les Salpêtriers de Paris n'en tirent pas tout le paru poflible, M, page 326. — On pourroit faire une entreprife de l'enlèvement des plâtras comme il en exifte une pour celui des boues, bid. — Le battage des plâtras à bras d'hommes, affervit trop le Maître aux Ouvriers, M, p. 327. — L'on peut y fuppléer par un moulin dont les Salpérriers de Touraine fontufage, #8. — La plupart des Provinces fourniffent des matériaux rrès-falpétrés , M ,p. 328.— Les démolitions de la ville de Caen font à 8 pour £, M, p. 329. — Il feroit utile d'engager les Communautés à faire des entreprifes pareilles pour leur compte, z2hid. — Le tuffeau de Touraine fournit les démolitions les plus abondantes , M, page 330. — Les craies des côtes de la Roche-Guyon, Moufleau , Evreux, Dreux, donnent beaucoup de Salpêtre, M, page 331. — Elles ne (ont pas toutes de nature à fe nitrifier, #hrd. — Par exemple , celles de Chempagne & celles des bords de la Seine, depuis Rouen jufqu'au “Havre, ibid. — Ce font principalement celles qui font douces au toucher, & qui donnent en les gcûtant une faveur facrée, qui ont cette propriété, M, page 332. — Le Salpérre s’y reproduit après qu'elles ont été lefivées par leur # 648 TABLE DES MATIÈRES. feule expofition à l'air, £b£d. — Formation de nitrières avec les craies ou tuffeaux ; tbid. & 333. — Les craies leflivées miles à couvert, & arrofées légèrement des fucs de vévéraux , donnent une récolte abondante au bout d'un an, M, page 334. — Lorfqu'elles font imprégnées de fel marin, elles ne fonc plus fufcepribles de fe falpétrer, M, page 355. — Epreuves en petit, pour {avoir fi les craies non falpétrées peuvent produire du Salpêtre , M, page 336. — Le développement de l'acide nitreux eft beaucoup plus lenr dans les murs que dans les couches, M, page 337. — Par-tout où les craies font de nature à fe falpérrer, les terres des habipations le font auñi, 46/4, — Proportion d'un hangar, & méthode pour la formation des couches, ibid. — Manière de conduire ces couches, temps d'en lefliver les terres, M, pag. 337, 338 & 339. — Pour que l'exploitation du nitre fe fafle avec avantage, il faut que les eaux des lefives foient à 6 ou 8 degrés du pèle-liqueur, M, page 339. — L'alkali ne fe trouve jamais feul, zhid. — On nc trouve le Salpêtre a bafe alkaline, que lorfque les craies font abreuvées de fucs de végéraux , ibid. — Du leffivage des craies, M, page 340. — Deux manières, la filtration & le braïlage; la première préférable , M, pages 341, 342, 343 & 344. — Diftinétion des différentes efpèces de nivrières, M, pages 345 & 346. — Leur conftruétion, M, pages 352 & fuivantes. — Celles formées de terres neuves, prifes dans les campagnes pour les amender, font d'un foible produit , pag. 346 & 347. — Celles formées par des amas de terres falpétrées font avantag-ufes. Preuves tirées de l'examen des différentes nitrières du Royaume, M, pages 347, 348, 349 & fuivantes. — La poffibilité du produit de celles de Franche-Comté peut être évaluée à 800 milliers par an, M, page 349. — La difficulté de fe procurer des cendres nuifoit à la récolte du Salpêtre, M, page 350. — La porafle a remédié à cet inconvénient, 2bid. — L'on peut fuppléer au bois pour l'évaporation des eaux falpécrées par la rourbe oule charbon de terre, £hïd. — Par-tout où les terres font favorables à! végétation, celles font propres à la production du Salpêtre, M, page 350. — Moyen de fuppléer à la fouille, M, pages 351 & fuivantes. — Les verres fa'pé-rées les plus avantageufes fe trouvent fous les aires des granges à blé, dans les montagnes de Franche-Comté, M, page 35 5. — L'acide nitreux eft plurôr le produit des fubftances végétales que des fubftances animales, M, page 356. — La putréfaétion le produit plus promptement dans les lieux clos, & où il n’y a pas uu courant d'air continuel, M, page 357. — Les meilleures fubftances animales font le fumier de cheval, de vache, de mouton, & de pigeon. Les urines font nuilibles pour les arrofages, en ce qu'elles produifent crop de fel marin, M,p. 357 & 358. — Le tuf de Franche-Comté eft une pierre calcaire dure , qui ne fe falpètre pas, & qui n’a rien de commun avec le tuffeau de Touraine, M, p. 358 & 3$9. — Les terres ne doivent pas être entretenues trop humides; il faut au contraire qu'elles parviennent à une certaine ficcité, M, pages 360.— Du lellivage des terres, page 360 & fuiv. — De la précipitation de la rerre calcaire par l’alkaï, M, page 363. — Elle s'opère de deux manières, à chaud & à froid. L'alkali fondu à chaud neutralife plus d'acide nitreux, bid. — Explication de ce fait; différens procédés pour en neurralifer une plus grande quantité, M, pages 364 & 365. — Sentiment de l’Auteur fur la formarion de Facile nitreux, £4id. — La terre calcaire pure & dure n'en produit jamais, M, p. 366. — Cell:s qui en produifent ne le doivent qu'aux fubitances végétales qu'elles contiennent, & qui font décompolées , M, page 367. — La chaux n'en contient jamais, £b£d. — Les p'âtras ne contiennent l'acide nitreux que par voie d'imbibition, M, page 368. — L'analyfe chimique des terres & pierres calcaires n'offre aucune lumière fur le principe qui leur donne la propricté de fe falpétrer, M; page 368. — L'acide nitreux ne fe produit que lorfque Taie DES MATIÈRES. C49 lorfque la patréfadtion eft à fon dernier terme, M, page 369. — Confeils pour favorifer la formation de l'acide nitreux, ébid. — L'Académie accorde à M. Chevrand le fecond Prix, H, pages 185 & 186. CHINE. L'on y recueille avec foin les urines, pour en arrofer les terres propres à fournir le Salpêtre , page 499. CirQUuE Des Romains. Ce qui refte à Poitiers de cer édifice eft pénétré d'eau mère de Salpêtre, page 603. Crourr &Lavoisitr.(MM.) Leurs obfervations {ur les craies falpétrées des environs de la Roche-Guyon , H, page 192, M, p. 503 & fuiv. — Les craies des environs des lieux habités , font couvertes d'efflorefcences de Salpêtre, ibid, — Priles à quelque diftance de la furface, & leffivées avec de la cendre, elles donnent du Salpétre à bafe d'alkali végétal, page sos. — Ces mêmes craics, expolées à l'air fous un toit de paille après avoir été leffivées, fe falpétrent de nouveau, & fe chargent de quelques autres fels, page $o6. — Détail des expériences faites fur les craies de la Roche-Guyon & des environs, p. 0€ juiqu'a 528. — Mort du Salpêtre, efpèce de croûte faline jaunätre, qui fe montre à la furface des rochers près des lieux habités, page 517. — Cetre fubftance contient du Salpètre, pages 542, 543. — Expériences fur les craies de Mouceau , pages 528 & fuiv. — Le Salpétre à bafe rerreufe eft transformé ailez promptement en Salpétre à bafe d'alkali végétal, page 535. — Craie prife dans les montagnes éloignées de toute efpèce d'habitation, pag. 535, 536 &c #37. — Le Salpètre , à Mouceau, ne fe trouve que dans le bas des côteaux, p. 538. — Salpétre de pigeons ; ce que c'eft ; il ne contient pas de Salpêtre, p. 539. — Il contient du fel marin, p. 540. —. Expériences fur différentes eMlorefcences qui fe trouvent à la furface des rochers, pages 544 jufqu'a 548. — Craie lefivée, mile en mur, en quinze mois a donné, quoiqu'expofée à la pluie, un peu de Salpêtre à bafe d'alkali végétal, & de l'eau mère, p. 560. — L'acide nitreux exifte dans les craies de la Roche-Guyon, éleignées de toute habitation & à plufieurs pieds de profondeur, page 561. — Il eft plus abondant à la furface qu'à une certaine profondeur, zbid. — On n'en trouve plus lorfque la mafe cft crop épaïfle pour que l'air extérieur puiffe la pénétrer, page s6r. — I eft tantôt combiné avec la terre calcaire , rantôt avec l’alkali fixe , ibid, — Le Salpêtre qui fe forme loin des lieux habités, eft toujours à bafe de terre calcaire; celui qui fe forme près des habitations , eft fouvent à bafe alkaline , 4/4. — Le Salpètre qui cexifte dans la craie, cherche à gagner la furface; il criftallife en forme d'aiguilles, p. 563. —'Ces aiguilles réunies forment le Salpêtre de houffage, 2bid, — Les circonftances relatives à la formation du fel marin & du Salpêtre, font à peu près les mêmes dans les craie de la Roche-Guyon & de Mouceau, p. f64e —Le fel marin y eft fouvent à bafe de terre calcaire , & quelquefois à bafe d'alkali minéral, jamais à bafe d'alkali végétal, 2854. — Les craies paroiflent s'épuifer des principes propres à la formation du Salpêtre, ibid. — L'acide nitreux {2 forme dans les craies par l'action de l'air, p. 564 & ÿ65.—Il s'y forme de l'alkali fixe, p. 565. — L'air feul fufit pour développer le Salpêtre à bafe terreufe, page ibid. — Le concours des exhalaifons animales eft néceffaire à la formation du Salpêtre à bafe alkaline, Zbid. — L'alkali végétal ne vient point par imbibition de la deftru&tion des végétaux & des animaux , page 566. — Les craies, dans des circonftances favorables , n'exigent, pour donner du Salpêtre à bafe d'alkali végétal, que très-peu d'exhataifons animales, page 26/d. — Application d2 la théorie à la pratique, pages $66 & fuiv. — But qu'on doit fe propofer pour des érabliffemens en grand, pages $67 & fuivantes. — Plan à cet égard , 142. — Le trou de Bonne-Fourquières peut fervir d'atelier, p. 569. — Etabliflemeac de hangars fouterrains creufés en pleine craie, près du château d'Authile, kids Nnen 650 TABLE DES MATIÈRES. — Les côteaux de craie qui fe renconrrent le long de la Seine en Notmandie , à Yvri fur Eure, & en quelques endroits de la Champagne, font favorables à la formation du Salpètre ; page 570. — Voyage de MM. Clouet & Lavoifer en Touraine & en Saintonge, M, p. $72. — Exiftence du Salpètre naturel dans ces Provinces, ibid. — Le lit de la rivière de Loire eft plus élevé que celui de la Seine, p. . — Nature des bancs qui compofent la plaine de Beauce jufqu'à 380 pieds de profondeur, M, page 573 & fuivantes, — Defcription des carrières de tuffeaux, M, p. $75. — ls commencent à fe découvrir près Chaumont ; aaalÿfe des tuffeaux de ce canton, M, page 576. — Les tuffeaux font principalèment falpétrés le long du Cher, M, page 577. — Les carrières de Bourré & Monrhoux font les plus confidérables ; le tuffeau en eft blanc, très-tendre, & il s'effleurit à l'air, page 578. — Son analyle à différentes profondeurs, pages 578, 579, 580. — Les carrières, le long du Cher. piéfentent fouvent des fentes perpendiculaires de 2 ou 3 pieds, toutes remplies d'araile d'on jaune brun, qui cit fouvent très-riche en Salpètre, M, p. 581. — Obfervations minéralogiques, depuis Amboife jufqu'a Tours , page $81. — Analyle d’un échantillon de tuffeau de Vauzel, page 582. — Analyle des fubftances fableufes du Verger, page 583. — Defcriprion du côteau de Saint- George, p. 584. — Analyfe des ruffeaux qui compofent fes carrières , p. 585. — Obfervations sminéralogiques faites fur la rive gauche de la Loire, ibid. — Defcriprion de la nitrière de Saint-Avertin , page 586. — Terres dont elle eft cempotée , ibid. — Analyfe d'échantillons pris à différentes diflances de l'ouverture, p. 586 & $87. — Obfervations Pt loeidués de Tours à Saumur , en paflanr par Luyues, Langeais, pages 587 & fuiv. — Analyfe de divers échantillons de tuffeau pris dans des caves ou carrières à différentes profondeurs & à différentes hauteurs , M,p. 587, 588 & ç89. — Defcription des carrières des ruffeaux au deffous de Saumur, ébid. & 590. — On n'oblerve point de Salpêtre dans le fond de la carrière , ibid. — Analyfe du tuffeau fur lequel eft bâtie la tour de Trèves, Zhid. — Aïlkali fixe minéral très-pur, retiré d'une carrière abandonnée près de Trèves & de Mineroles, page 591. —. Oblervations minéralogiques , depuis Saumur jufqu'a Montforeau , £hid. — Analyfe des tuffeaux de Dampierre, page $92. — Le Salpêtre qui fe forme dans les carrières de Souzé, eft tout à bafe terreufe, page 593. — Analyle des tuffeaux de Turquan & de Parnay , pages 593 & 594. — L'akali minéral eft fort abondant au bas du côteau de Turquan , pace 595. — Analyfe d'échantillons de tüffeau pris fur les côreaux de Rouffé, Berignoles, Champrouy, pages 596 & fuivantes. — Analyfe des tuffeaux des bords de la Vienne, près Chinon, pris à des niveaux différens , page $96. — Oblervations minéralogiques de Chinon à Châtellerault, page 600 — Analyfe du tuffeau de la carrière de la Chapelle, près Chatellerault, page 601. — Analyle de la terre d'une excavatior ouverte en plein air, près de Petit-Pct, page éor. — Cette terre n’eft pas calcaire, p. 602. — Obfervetions minéralogiques de Châtellerault à Poitiers, pages 602 & 603. — £.ucien Cirque des Romains à Poitiers, eft pénétré d'eau mère de Salpétie, p. 603. — Quoique la pierre y foit fort dure, elle fe (alpétre aifément, iäd. — Examen d'une terre prife le long du Clain, entre Poitiers & Vivonne , page 604. — Obfervations minéralogiques {ur l'Angoumois, pages 605 & 606. — Analyfe des pierres calcaires de ce canton, ibid. — Analyle de la pierre calcaire de Saïnt-Savinien & de Saint-Mefme , page 607. — La Bretagne cit compolée de pierres fchiteufes € quaruzeufes, qui ne font pas fufceptibles de fe falpérrer, pages 607 & 608. — Les tuffeaux (ont de routes les pierres les plus fufcepribles de fe falpèrer, p- 608. — Cet cffer a lieu même dans les carrières ; la porofité de ces pierres les send fufceptibles d'être pénétrées des fubftances gazeufes que l'air charie, ibid, D'ART EN BNES M ATIER ENS ésû: — Le Salpêtre à bafe terreufe fe forme dans les lieux inhabités; & forfque J'on y trouve da Salpètre à bafe alkaline , il y à apparence que les hommes or les animaux des ont fréquentés, £bid. — Les prog:és de la récolte du Salpêtre en France, four limités plutôt par le manque d'aikali que par celui d'acide vitreux , bd, Voyez Lavoisier. (M.) CorcorHan. Peut étre employé dans les nitrières, felon l’Auteur du Mémoire N°. 2. Son inutilité reconnue par les Commiflaires de l'Académie, H, page 40. Couicres Fossizes. Expofées pendant long-temps dans l'urine, ne pro- duifent qu'un fel marin âcre & amer, Mémoire N°, 28, H, page 181. — L'on trouve beaucoup de bivalves, communément appelées cœur, dans les carrières de Monthoux, page 580. CoRrNETTE. (M.) Raïfons qui l'ont obligé de retirer fon Mémoire du Concours, M, page 3. — Introduction à fon Mémoire, M, page 6. — Regarde la quef- tion comme en partie rélolue en différens pays de l'Europe , M, page 7. .— Il penfe que les principes de l'acide nitreux font inconnus, M, page 8. — Qu'il ne peut être regardé jufqu'ici que comme un corps fimple ou un mixte du fecond ordre , 2bid. — Idées des anciens Chimiftes & de quelques Modernes , fur l'acide nitreux, M, pages 9 & 10. — Opinion de Stahl; expériences qui prouvent que l'acide nitreux n'eft pas une modification de l'acide vitriolique , M, pages 13, 14, 15, 16. — Expériences dont l'objet eft de prouver que le gas putride contribue à la formation du Salpêtre, M, pages 16, 17, 18, 19. — Les fels marins & vitrioliques ne font pas décompofés par les gas putrides , M, pages 19, 29, 21. — Regarde les acides minéraux comime très-différens les uns des autres, M, p. 22. — Penfe que l'air fixe entre dans la compofirionr de l'acide nitreux, M, id. — Cherche à le prouver, en rapportant des expériences de M. Lavoifier & de M. de Laffonne, fur l'acide niereux & l'air fixe, M, pages 2, 4 & 25. — Le Salpètre eft produit comme les autres fels, M, page 26. — Il peur fe former par-tout, 26id. — Cette Science eft plus avancée en Chine qu'en Europe, #hid, — Toutes les fubftances putréfiées , toutes les circonftances effentielles à la putréfaétion, un libre cours d'air & un peu d'humidité favorifent la formation du Salpêtre, M, page 27. — Regarde le vent de Nord comme plus favorable à la nitrification qu: celui du Midi, M, ibid. — Expériences à l'appui de cette opinion ; l'Auteur a toujours obtenu du Salpètre de houilage dans une nitrière à lui, lorfque le vent du Nord fouffoit, M, page 28, — La terre calcaire n'eft plus propre à la formation du Salpêtre quand elle a perdu fon eau & fon air, M, pages 39, 31 & 32. — Regarde l'air fixe comme piincipe conftituant de l'acide nirreux , 2béd. — II lui paroît tout auf admiflible que l'acidurr pingue, M, page 33. — Rapport de ce fyftème avec celui des Anciens fur le feu pur, M, pages 53, 34, 35. — Moyens d'augmenter la récolte de Salpêtre , M , paye 36.— Mélanges de terres calcaires & de matières putrefcibles, M, p. 37. — Celles qui contiennent du phlogiftique plus développé y font plus propres, M, ibid. — Les verres végétales fonc préférables elles fourniflent le phlogiftique & l'alkali fixe , b£d. — Expériences de MM. Monnet & Baumé, à l'appui de ces faits, M, page 38. — Choix des matières animales, M , page 39. — Mélanges & proportions des fubftances végérales &c animales, M, pages 40 & 41. — Quantité d'humidité, M, pag. 42 & 43. — Moyens pratiqués en Suède & en Pruffe, pour augmenter la récolte de Salpètre 3 ils peuvent être appliqués à Paris, M, p. 43, 44, 45 & 46. — Moyens propolés au Gouvernement pour augmenter cette récolte dans lc Royaume, M, P. 47» 48, 49, 50, S1, 523 53» 54 & 55. Coucnes Suédoiles faites en pyramides avec des cendres, de la chaux, d# chaume, &ec. page 7. — Peuvent être leflivées au bouc d'un an, ibid, 26 89 Nnnnïi &5s2 TABLE ND: MAT FA RES. 122, M, p. 141.— Doivent être garanties de la pluie , 8/4. & çr.— Manière de les faire, fuivanc un Auteur anonyme, H, page 25. — Selon l'Auteur du Mémoire N°. 12, H, page $1. — Faites {clon l'Auteur du Mémoire N°. 2, {ont très-profitables , H , page 39. — Manière de les placer & de les arrofer fous les hangars, H, pages 40, 142 & 143, M, pages 135 & 137. — Leur produit, M, pages 138, 139 & 140.— Les plus petites font plus produétives que les grandes, M, page 141. — Selon l'Auteur du Mémoire N°. 2, elles doivent êcre faces avec une grande quantité de matières végétales & animales purréfiées , H , p. 42. — Très-favorables à la récolte du Salpêtre , felon l’Auteur du Mémoire N° 12, H, page $1. — Doivent être formées fur un fol argileux; pourquoi? H , 264. — Manière de les faire, felon l'Aureur du Mémoire N°.24, H, pige 68. —:Peuvent être leffivées au bout de fix mois, terme jugé trop couit par l'Académie, ibid. — Leur confiruétion , felon M. Beunie, H, page 73. — De 71 pieds de longueur fur 14 de largeur, felon l'Auteur du Mémoire N°. 29, H, page 78. — Petites & pyramidales, propofées par MM. Chevrand & Gavinet ; leur conftrution, H, page 88. — 11 faut, fclon eux, celler d’arrofer fix mois avant de lefliver, H , page 89. — 11 faut ne les lefliver qu'au bout de trois ans, H, page 91. — Faites felon l'Auteur du Mémoire N°. 1, fecond Concours. — Il en a retiré, au bout de dix-neuf mois, environ 3 onces de Salpêtre par pied cube , H, pages 104 & 105. — Manière dont on les fait en Efpagne , H, page 123. — Faites par MM. Thouvenel, leur ont donné au bout de dix-huit mois ou deux ans, une livre de Salpêcre par quintal, H, page 128. Craïe. Les expériences de MM. Thouvenel fembleroient indiquer que quelques- uns de fes principes concourent à la formation de l'acide nitreux, H,p. 126. — Son mélange avec l'urine & l'acide vicriolique , page 13. — Avec le crottin de cheval, zbid. — Avec le fel de Glauber & l'urine, zhid. — Avec le tartre vitriolé & la viande , page 16. — Avec le vitriol de Mars, bid. — Avec l'acide marin, page 20. — Sert d'abforbant aux acides qui fe forment pendant la putréfaction, page 71. — Sertaufli, fuivant MM. Thouvenel, à maintenir la putréfation dans de certaines bornes, 16id. — Expofée en poudre groflière dans des terrines de grès ou dans des cloches, humeétée ou recouverte d’eau diftillée , on à fec pendant huit mois dans des étables ou latrines, page 116. — La nitrification eft plus abondante dans la terre calcaire que dans la VA ttale : p- 117, — Les craies ne fe ER toutes naturellement : parexemple, celle de Champagne, & celle des environs de Rouen jufqu'au Havre, ne contiennent pas naturellement de Salpêtre, p. 331. — Celles naturellement falpétrées fe trouvent principalement dans les Généralités de Paris & de Rouen ; elles acquièrent en un an, par la fimple expoftion à l'air, jufqu'a deux livres de Salpêtre par quintal, Mémoire N°. 18, H, page 142. — Elles ne font falpêtrées que d’un pied d'épaiffeur au plus, pages 331, 332 & 557. — Leur leflivage donne des réfulrats diférens , fuivant la profondeur dont elles font tirées, page s15. — Ce font celles qui font douces au toucher, & qui ont une faveur fucrée, qui font propres à fe nitrifier, page 332. — La régénération du nitre s’y fait auf promprement que li nitrification, ébid. — Formation des nitrières dont elles font la bafe, a. — Miles à couvert après leur lefivage, & arrofées avec de l'eau légèrement chargée de fucs véétaux , donnent une récolte au bout d'un an, p. 334. — Elles ne {e falpécrent pas aux bords de la mer, parce qu'elles fe reçoivent pas les émanations des fubftances végérales & animales en putréfattion, Nore, page 335. — Lorfqu'’elles font imprégnées de fel marin , elles ne font plus fufcepribles de fe falpêtrer , i6id. — Elles fe leffivent par filtration ou par Le braffage ; le premier moyen eft le plus avantageux, page 341. — Leur analyle TAB IE DES, M'aTr ÈR ES. 653 chimique ne fait point connoître la ‘nature du principe qui leur donne la propriété de fe falpêtrer, page 368. — Celles des environs de Mouceau & de la Roche-Guyon font naturellement falpétrées jufqu'a une certaine diftance de la furface, p. 506 jufqu'à $59.— Leur analyfe, par MM. Clouet & Lavoifer, H, p. 192 & 193.— Elles ont une telle tendance à fe nitrifier, qu'elles s'impregnent de Salpêtre crès-promptement après qu'elles ont été leflivées , fuivant MM. de la Rochefoucauld, Clouct & Lavoifier, H, page 193. — Analyfe de celles prifes dans le haut des falaifes qui bordent la mer à Dieppe, par M. le Duc de la Rochefoucauld, H, pages 194 & 195. — Celle prile dans la partie la plus profonde d'une cave creufée nouvellement, ne contenoit pas de Salpêtre, pag. 535 & 536. — Salpètrée de l'habitation de Boileau, à Authile, page sat, — Produit de la lixiviation de celles qui n'ont eu aucune communication avec l'air, pages 548, 549. — Celle de Champagne font favorables à la formation du Salpêtre. — Toutes celles qui font le long de la Seine en Normandie, peuvent être employées à la formation du Salpêtre, page 570. — Celles de Dreux & d'Yvri fur Eure, ne font pas moins riches en Salpétre que celles de la Roche-Guyon & de Mouceau, p. 570. — Dans des circonftances favorables, elles n'ont beloin que de très-peu d'exhalaifons animales pour former du Salpètre pur, page 566. — Elles s'épuifent, avec le temps, des priucipes qui forment le Salpêtre , page 564. — Celles des environs de la Roche-Guyon s'étendent depuis Paris jufqu'en Normandie , dans la Picardie , la Flandre , & jufque dans le Comté de Kent, en Angleterre, page 612. — 11 n'y a que celles des furfaces qui foient falpêrrées , pages 613 & fuiv. — Examen de cell: du trou de Bonne- A dE Dit M. le Duc de la Rochefoucauld , pages 614 & 617. — Du rocher de Caflenoix, par le même, p. 616. — De Rangiport, parle même, p. 618 & 619. — Des falaifes de Dieppe, par le même, pages 615 & 618. — Les craies font encore imprégnées d'acide vitriolique quand elles ne contiennent plus d'acide nitreux , page 618. L'air fulñt pour les imprésner d'acide nitreux, page 623. — Lorfqu'elles n'ont pas recu le contact de l'air, & qu’elles n’onc point été expolées aux émanations de la putréfa@tion , elles ne contiennent que de la félénite & du fel marin, 2612. CRISTALLISATION. Doit fe faire dans un endroit frais pendant l'été, H, page 74 — Elle s'opère plus lentement en été qu'en hiver, M, 395. CROTTIN DE CHEVAL. Uni à la craie, M, page 13. — Unia 8 onces de fel amimoniacal vitriolique, & 6 livres de chaux éteinte, 2h54, CROTTIN DE CHÈVRE & DE MOUTON, Très-favorable à la formation du Salpètre, M , page 39. Cuviers. Forme qu'il convient de leur donner , page 417. D: Danrirrre en Touraine. Analyfe des pierres des carrières qui font aux environs , pages 592 & 593. D£comsres & DÉMOLITIONS abandonnées aux Salpêtriers, mais qui n’en tirent pas aflez exactement les matériaux felpérrés, page 32$.— En les employant toutes, on obriendroit une récolte abondante de Salpérre, fans nuire à la tranquillité des particuliers, page 323. — Ils contiennent toujours une partie de nitre à bafe terreufe, & une de nitre à bafe alkaline, pages 480, 481, 482. Bozomieu. (Commandeur de) Sa lettre à M. le Duc de la Rochefoucauld, fur la génération du Salpêtre, pages 619 & 620. 64 Taie rs MArr£éREs Domssy (M.} À vu beaucoup de Salpètre répandu fur les terres qui fervene au pârurage des beftiaux dans les environs de Lima, au Pérou, page 496. Dreux. Les craies des côteaux voilins font propres à la formation du Salpttre, page. 70: E E AU. Un certain degré d'humidité néceflaire à la formation du Salpètre, pages 27 & 451. — Cette humidité doit avoir des bornes & être convenablement ménagée , pages 41 & 230. — Doit pénétrer jufqu'au centre des couches, p. 240. — Trop de fécherefle eft préférable à une trop grande humeétation, p. 360. — D'arrofage doit être expofée à la même température que les couches, p. 471. — Il ne pleut jamais à Lima; d'épais brouillards riennent lieu de pluies, page 456. — Le voifinage des grandes mares contribue à la formation du Salpètre, page 500. EAU #OUILLANTE, Diflout beaucoup plus facilement l’alkali des cendres que la froide, H, page 191. Eau DE FUMIER. Employée en arrofage, favorife [a nitrificarion dans la craie, page 340. Eau De MER. Verfée dans des fofles fur du fumier bien gras, donne, dit-on, du Salpêtre en deux ou trois ans, H, page 37. EAU DE MORUE ou toute efpèce de faumure, mais pourtant peu chargée de fel, peuvent fervir à la formation du Salpêtre , (elon l'expérience de l’Auteur du Mémoire N°. 5, H, page 43. — Regardée comme nuifible par l’Auteur du Mémoire N°, 13, fecond Concours, à caufe de la quantité de fel marin qu'elle contient toujours, H, page 132. Eau MERE. Obtenue des cuites, contient toujours une portion de Salpétre , H, page 6. — On doit les employer à arrofer les rerres déjà épuifées de vicre, 614. — Avec une addition d'alkali fixe on peur les conv:rtir routes en Salçêtre, H, p. 19. — Contiennent quatre fels différens ; l'addition d'un alkali en fait difparoître deux, & en forme un nouveau, H, p.13. — Doivent être traitées différemmént, depuis que l'on fait qu'elles décompofent le fel marin à bafe d'alkali végétal, H, p: 33: — Lorfqu'on a précipité la terre par de l'alkali, de la foude ou de la potalle, on obtient, par évaporation, avant le nitre quadrangulaire, de vraie nitre en aiguilles ; il ne faut pas en conclure, avec l'Auteur du Mémoire N°. 37, que le Sa'pèrre eft rout formé à bal: d'alkali fixe, H, page 96. — Décompole le fl de Glauber, page 107.:— Obfervations fur la manière de traiter les eaux mères, H, pages 175 & 176, M, p. 251, 252, 253. — En employant moins de potalle que les Salpécriers, p. 163, 164. — Eau mère de nitre obtenue par le lefivage des craïes des roches efcarpées d’Aunthile, page g5 5. — Cbtenue par le levage des cflorefcences blanches des craies d'Authile, page 556. — Obtenue du leffivage des craies du bas de la montagne, entre la Roche- Guyon & Authile, page 559. — Obrenue par le leffivage des murs de craies, expolés pendant quirze mois aux injures de l'air, page 560. — Obtenue par l'analyfe d'une terre qui n'eft point calcaire, page 602. EAU RENDUE PUTRIDE par la chair des animaux. Propolée pour arrofer les couches, par l'Auteur du Mémoire N°. 22, H, p. 66. — Moyen peu difpendieux âe mulripiier les arrofages , ibid. & 78. L < Eaux DE Lessive. Moyens d'en connoître le degré fans le fecours du pèfe- liqueur, page 221. AB IENDES ( MOATTÉÈRES. 655 ÆcHENOTSs. Les carrières des environs contiennent beaucoup de coquilles, principalement d'huîtres alongées , p. 581. — Le tuffeau jaunâtre de ces carrières contient du Salpétre à bafe terreufe , 2bid. Ecur1Es BANALES. Dans les carrières de Belleville, propofées par l'Auteur du Mémoire N°. 11, H, page 130. ErFLOREscENCESs blanches. Recueillies à la furface des craies des environs de la Roche-Guyon, Authile & Mouceau ; prifes loin des habitations, ne contiennent que du Salpêtre à bafe terreufe ; dans le voifinage des lieux nouvellement ou anciennement habités, donnent du Salpêtre à bafe d'alkali, pages 534, 540 , Sal, S44, 545, S46 549 » 550 552, $54 & 555. EncGRaA1s. Trop rares & trop précieux à l'Agriculture, pour qu'on puifle {es appliquer à la formation du Salpètre, H, p. 129. ESPAGNE. Le Salpètre s'y trouve dans les terres labourables fans aucun fecours des matières animales, pag. 438 & 432. — Mine naturelle de Salpétre, p. 435. Evarorarion. Un des plus grands agens de la formation du Salpètre , pag. 420 jufqu'a 500. EvarORATION des eaux falpérrées. Ne doit pas être trop pouffée rapidement, felon l’Auteur du Mémoire N°. 12. — Raïfon qu'il en donne, H, page 53. Fe Force DE POUDRE. Etablie autrefois à Saint-Hubert, trouvoit ad% environs le Salpêtre qui lui éroit néceffaire, M, page 17, H, page 137. FERMENTATION. Sa définition, page 386. — Ses différens états, £bid. — C'eft par la fermentation putride que le Salpètre eft formé, page 386. Voyez PUTRÉFACTION. F£u. Donne aux pierres calcaires Ja propriété de fe nitrifier, page 495. FIrENTE de pigeons & de volaille. Sert dans la conftruction des voûres, H, page 17. — On en méle avec les terres pour faire des couches, H, p. 18 & 84, M, pagz 39. — Eft de toutes les matières animales celle qui réuffit le mieux pour la fabrication du Salpètre, H, pages 24, 121, M, page 39. — A linconvénient d’être rare & chère, parce qu'elle eft précieufe pour les engrais, H, page 77, M, page 285. — À l'égard de la fiente des autres animaux, veyez CROTTIN-. Fruines Écasriques. Leur pefanteur fpécifique, relativement à la preffion qu'ils éprouvent & à leur température, fuivant M. Lavoifier, page 626. FORESTIER (M.) Les Commiflaires de l’Académie ont cru devoir faire une mention honorable de fon Mémoire. Il à fait une fuite nombreufe d'expériences fur 1e Salpètre qui fe trouve dans les terres des champs; ces expériences ne fe font pas trouvées d'accord avec celles des Commiflaires, H, page 186. Fosses. Moyen propofé pour faire le Salpêtre, H, page 16. — Exigent beaucoup de rerrein ; la nitrification ne s'y fait qu'à quelques pouces de profondeur, H, pages 18, 27, 0.=— Ne produifent du Salpétre qu'à la longue, H, p. 25. — M. Gaddén a inventé une nouvelle efpèce où l’on introduit l'air par des tuyaux, H, p. 27. — Ont quelques avantages pour commencer la putréfation 2 H, pag. 39, 105. — Propofées aux habitans de la campagne, par l'Auteur du Mémoire N°9. 25, H, page 69. — Propoftes par M. Cornette, H, p. 84. Fouizze chez les particaliers. Fatiguoit encore le Public en France, lorfqu'en 656 Tasre Des MATIÈRES Suède & en Allemagne la produétion artificielle du Salpêtre faifoir déjà des progrès rapides, H, page 26. — Le Gouvernement François s'occupe des moyens de fou'ager le Peuple de la gêne qu'elle entraine, H, pages 2, 23, 47, 99-— Le Roi fupprime ce qu'elle a de plus onéreux, H, p. 189. — Manière d'en délivrer les particuliers, propofée par l'Auteur du Mémoire N°. 15, fecond Concours, H, p. 134. — Ilpenfe quon ne devroït pas la fupprimer en entier, ibid. — On propole, en la fupprimant, d'obliger les habitans des campagnes à paver leurs écuries, pour raffemb'er Îles urines des animaux; cbjeétion des Commiflaires à ce fujec, [1, pages 157 & 158. — Autre moyen d'y fuppléer, M, pages 351 & fuivantes. Four, pour la calcination du falin. Sa defcription, H, page 191. Fourquières. (crou de Bonne-) Sa defcriprion, p. $23 & 614. — Favorable pour former un atelier de Salpètre, page 569. Foxe de foufre alkalin ou terreux. Impréoné des différentes efpèces d'air, p. 75. Fumererre. Ses feuilles féchées & pulvérifées , détonnent fur les charbons, Mémoire N°.218, H, page 178. Jumiers. Mélés avec des terres, fourniflent une quantité confidérable de Salpètre ; H, pages 6 ; 13,47; 63 > 84, M, page 39. — Trop chers , felon l’Auteur du Mémoire N°. 29, pour qu'on puifle les employer à la fabrication du Salpétre, H, pages 77 & 129. — Procédé propolé pour les employer, par l'Auteur du Mémoire N°, 37, pages 96 & 97. — Leur combinzifon avec la craie, M,p. 13. G. G:: INFLAMMABLE. En quoi il concourt à la nitrification, page 231. Gas rurx1De. Contribue à la formation du Salpêtre , H, page 146, M, pag, 16,17, 18, 19. — Se développe par le renouvellement des furfaces des terres, page 16. — Effets de ce gas fur les fels vicrioliques, pages 17 & 18. GAviNET. Voyez CHEVRAND. GErANIUM. Herbe à Robert; fes feuilles féches & réduites en poudre, détonnent au feu, Mémoire N°. 28, H, page 138, Grauser. Croyoir que le fel marin pouvoit fe changer en Salpêtre, page :1; — Son fyftême a fervi de bafe aux érabliflemens de Suède & de Prufle , p. 416; — À obtenu du Salpêtre de la chaux vive plongée dans l'acide du bois à plufeurs reprifes, page 491. — Son fyftème démontré faux, page 68. Gozre de Lion. Devroit être, fuivant M. Rome, garni de nitrières, qui donneroient la récolte de Salpêtre la plus abondante & la moins chère, p. 464. GRANNIT. (M.). À obfervé que le Salpètre fe trouvoit tout formé dans quelques plantes, page 428, &rarres des rapés de raifin. Très-propres à [a génération du Salpêtre, & 4 être mêlées avec les terres dans les nicrières; elles fournifent beaucoup d'alkali à Mémoire N°. 25, H, page 163. Gravas. Cent livres fur dix de fubftances végétales & animales, forment la meilleure proportion pour la prompte génération du Salpêtre, p. 237. GRuNER. (M.) Avance que, fans putréfaétion, l'on ne peur obtenir du Salpéere, age 427. — Les fairs qu'il rapporte s'expliquent très-bien par la condenfation de l'air & l'évaporation de l'humidité, page 497. H Tagre DES MATIÈRES. 657 En Have ARS: ( Les terres épuifées de nitre par les leflives, en refourniffent lorfqu'elles ont féjourné quelque remps fous les) H, pages 6 & 110, — C'eit, felon l'Académie de Befançon, le moyen le plus économique’& le plus avantageux pour produire le Salpêtre, H, page 18. — L'on s'en fert en Suède, & l'on obtient, par leur moyen, une récolre abondante, H, page 25. — On s’en fert dans l'Inde » à Manille & à Kanton, malgré la grande abondance de Salpètre qui fe trouve tout formé dans cespays, H, p.29. — Ils font également en ufage à Berne & à Laufanne, M, p. 118.— En Suabe, H, p. 45. — Ils font p'éférables aux murs, M, page 407. — Doivent être conftruis folidement, M, p. 408. — Confeïllés par l’Auteur du Mémoire N°. 6. — L'Aureur du Mémoire N°. 13 propolfe d'en faire conftruire par toutes les Communautés du Royaume, H, page $5. — Leur conftru@ion, fuivant MM. Chevrand & Gavinet, H, p. 87. — Propofés par l'Auteur du Mémoire N°. 22, H, pages 65, 66. — Propofés par l’Auteur du Mémoire N°. 30, reviendroient exceflivement cher, H, p. 80. — Leur conftruétion, fuivant l'Auteur du Mémoire N°. 37, H, p.96. — De cent quatre-vingr-dix pieds de long fur trente-quatre de large, felon l’Aureur du Mémoire N°. 29, H, page 78. — Bâtis en carté autour d'une grande cour, fclon l'Auteur du Mémoire N°. 2, fecond Concours, H, page 110. Doivénc être établis dans les villes, felon l'Auteur du Mémoire N®. 1. — Leur conftruétion eft chère, H, page 107. — Doivent être couverts en tuiles, felon l’Auteur du Mémoire N°. 3, fecond Concours; il prétend que les tuiles cuites à grand feu fe falpétrent davantage que les autres, H, p. 116. — Détails des manipulations qu'on y donne aux tertes, H,p. 133. — Leur conftruction, Mémoire N°. 18, H, P. 143, M, p.40$, 410 & 411. — Inutiles pour la formation du nitre, fui- vant M, de Verreux, H, p. 152. — Erreur fuppolée dans les frais de conftruc- tion, H, pages 154 & 155. — Paroiflent peu profitables à l'Auteur du Mémoire N°. 28, à moins qu'ils ne foient près des grandes villes, H, p.177. — Plan propoié par M. Chevrand, pour leur conffrution & pour la formation des couches, pages 337, 338 & 339. HANGARS-BERGERIES. Propolés par MM. Thouvenel, pages 100 & fuiv. pag. 134 & fuivantes. Hancars-caves. Confeillés par l'Auteur du Mémoire N°. 24, pour remplacer la fouille; leur proportion & leur conftruétion, H, page 159. HANGARS-ÉCUR1ES. Propoféspar MM. Chevrand & Gayinet, p. 308. — Leur defcription ; état de la dépenfe, du produit & du bénéfice, pag. 319 & 320. HuiLe DE TÉRÉBENTHINE. Son mélange avec l'acide nitreux, page 182. — Idem avec le foufre, #bid HuiLe DE virRiOL, & nitre à bafe calcaire diftillés enfemble, p. 187. Fo RP Ses mines naturelles de Salpètre, pages 434 8& 435. — Le Salpètre s’y trouve naturellement dans les pays inhabités, & fans mélange de matières animales, page 432. — On y arrofe avec de l'urine les terres propres à la génération du Salpètre , page 499. f Ivri sur EURE. Les craies des environs font propres à la formation du Salpêtre , page 570. LR Jusouiame. Ses feuilles defféchées détonnent fur les charbons, Mémoire N°.:8, H, page 178. Ooo0 658 Taxe WoEis : MAT NE RES. L. EX -Lu®zÆ, ou cfflorefcences calcaires qui fe trouvent dans les carrières abandonnées de Parnay, page $94. — Son analyfe, ibid. LaiTues ; féchées au feu, elles détonnent jufqu’à entière combuftion, & répandenr des vapeurs nitreufes quand on verfe deflus de l'acide vitriolique, Mémoire N°. 28, H, page 177. LanGur»oc. (Bas) On y trouve un Salpêtre auffi pur que celui de l'Inde, page 434 — La chaleur y eft plus vive & plus continue que fous le climat de Paris, page 463. — Cette Province, fuivant M. Rome, devroit fixer l'attention du. Gouvernement , relativement aux reflources dent elle eft fufceptible pour la pro- duétion du Salpétre, page 462. Lavorsier. (M.) Son analyle des cendres, page 481. — Ses obfervations & expériences faites en commun avec M. Clouer.( W. MM.CLouEr & LAvOISiER.}" — Son analyfe de l'air de l'atmofphère; fa décompofition du nitre par le charbon, p. 625 & fuivantes. — Retrouve la moferte atmofphérique dans le nitre par voie de décompatdonsiprse 617. — Donne l'analyfe de l'air fixe, page 625. — Donne la pefanteur fpécifique de différens airs , page 626. — Sa defcription des nicrières de Long-Pent, page 633. Le Comre THoOMmassiN (M.) avoit cru d'abord que l'acide vitriolique étoit le principe de tous les acides , page 359.— Ses doutes, page 400.— Expériences pour connoître s’il entroit dans la compofition du nitre, pages 400 & 407. — Remarques fur ces expériences , ibid. — Elles prouvent que l'acide vitriolique & le fel marin nuifent à la formation du Salpétre, & que le concours de l'air y cft abfolument néceffaire , page 403. — Ces fubitances, qui font chères , ne peuvent être employées à la génération du Salpêtre, page 304. — Les plus abondantes, celles qui font à meilleur marché, font les décombres des vieux bâtimens, les boues, les immondices, les fumiers des érables & écuries, les vidanges des latrines , les débris des tueries, le fans, pages 405$, 406 ; 407, — La ville de Saint-Omer peur fournir 175,000 pieds cubes de matières folides propres à la génération du Salpêtre , page 407. — Les hangars font préférables aux voûtes & aux murs en plein air, ibid. — Projet d'établir une nitrière à chacune des crois porres de Saint-Omer , page 409. — Plan de ces nitrières , ibid. 410 & 411. == Saint-Omer peut fournir écco tonnes de vidanges par an, qui peuvent fuflire pour amender les fubftances folides, p. 411. — Etablifle- ment de ventoufes où conduits d'air fur la furface des couches, p. 413 & 414. — Pompes pour faciliter les arrofemens , pages 415 & 416. — Cuviers pour le Jeffivage , page 417. — Il cft inutile & quelquefois nuifible d'écrafer les matières nitreufes, page 418. — Les chaudières de fer font préférables à celles de cuivre, qui dépofent fouvent dans le nitre le verd de gris, page 419. — Les bafins de criftallifation devroient étre en bois; ils feroient moins couteux & fans aucun danger, bid. — Les Commiflaires croyent devoir décerner à fon Mémoire un Acceffit , de valeur de $oo livres, H, page 186. LemEery. Ses expériences fur la formation du nitre, peuvent être expliquées par la condenfation de l'air, fuivant M. Rome, pages 495 & fuivantes. LessivaceDpescrates. Moyens de prévenir le pelotage dans le lellivage des craies , Mémoire N°. 18, H, p. 143. LESSIVAGE pes TERRES, Chaque Salpêtrier a fa manière particulière, page 393. — Procédé décrit par M. Rome, pages 474, 475 K 476: — Formule TAB Et NE.s M:A4 Tir ER FE: 659 algébrique pour conuoître la quantité de Salpêtre contenue dans les terres, ibid. — Procédé pour les craies de la Roche-Guyon , pages s07 & fuivantes, LEssIvVAGE pes TERRES. Ne doit fe faire qu'au bout de trois ans, parce que le nitre augmente dans les derniers temps, & que c'eft alors que l'alkali, prove- nant de Ja décompofition des végétaux, devient libre & fait du Salpêtre à bale alkalinc, Mémoire N°. 18, H, p. 145. Lessive Des CHamoiseuRrs, Peut fuppléer à la potafle & à la cendre, page 392. Lima. Il n'y pleut jamais, mais d'épais brouillards y tiennent lieu de pluie, page 496. Loïre. Obfervations minéralogiques faites en fuivant (on cours d'Orléans à Saumur, pages 573 & fuivantes. Lonc-Ponr. (Abbaye de) Defcription d'une carrière dans fes environs, qui fert d'atelier à un Salpétrier, page 633. — On y traite les mêmes terres depuis plus de deux cents ans, tbid. LORGNA. (M. de) Sa differtation fur les acides en général; fur l'acide & l'air nitreux , pages 168 & 169. — Regarde l'opinion d'un acide univerfel comme une hypothèfe phyfique, page 169. — Ses Expériences pour favoir fi la tranf- tran{mutation des acides vicrolique & marin en acide nitreux, eft pofible, pages 17$ , 176, 177, 178. — Elles prouvent que l'acide vitriolique & marin nuifent à la nittification, page 179. — L'air eft abfolument néceffaire à la nitrification, page 180. — La prétendue conveifion du fel marin en Salpêtre, eft illufoire , £bid. — Expériences contre la doëtiine de M. Pietfch, p. 181, 182,183, 184 & 185.-— Diflertarion fur les nitres & les alkalis ; tout fel neutre dont l'acide nitreux fait l'effence, eft un véritable nitre , page 187.— Expériences pour connoître la nature des alkalis & leur combinaïfon avec l'acide nitreux , thid. — Quantités que les cendres de chaque efpèce de bois en contiennent, page 198. — L'alkali marin peut fuppléer à l'alkali végétal pour dégager l'acide nitreux uni aux bafes rerreufes, ibid. — Le nitre quadrangulaire qui en réfulte, peut être employé à la confe&tion de la poudre, page 199. — Expofition des connoïflances aétuelles fur la génération du nitre, pages 1202, 203,204. — Expé- riences qui prouvent que les matières animales en putréfaétion favorilent la génération du nitre à bafe terreufe , & que les fubftances végérales en putré- faction favorifent la génération du nitre à bafe d'alkali végétal, page 204. — Les terres , les décombres, &c. ne fervent que comme macrices pour recevoir l'acide nitreux qui fe trouvoit enveloppé dans d'autres principes avec lefquels il a moins d'affinité, page 120$. — Expériences à ce fujet, pages 105 & 206. — L'acide nitreux ne peut étre rangé parmi les acides minéraux , page 206. — Differtation pour favoir jufqu'à quel point l'air & les gas font nécellaires à la formation des nitres, pages 207, 208, 209, 210, 211. — Expériences fur les terres des marais qui produifent de l'air inflammable , page 212. — Le réfultat prouve qu'elles ne fourniffent prefque pas de Salpêtre lorfque l'air inflam- mable a été enlevé, & qu'elles en Cent beaucoup lorfqu'elles en font pourvues, pages 213, 214 — Réflexions fur le rélulrat de ces expériences, pages 215, 216, 223 & 224,— Expériences pour connoître les fubftances les plus propres à favorifer la formation du nitre par la putréfaétion , page 217. — Les plantes épuifées de leur fuc réfineux ou extraétif par l'eau ou l’efprit de vin, ne font plus propres à la formation du mr » pages 217, 218, 219. — Differtation pour déterminer fi le nitre fe trouve tout formé dans les plantes, pages 219, 220, 221 , 222, — M. Lorgna eft porté à croire que le nitre cft de nouvelle formation, & qu'il n'eft dû qu'à là Ooooi 660 T'AtB rit vptats © M AIT T'ÉMRIENS, décompofition totale des corps organilés, page 223.=—— Qu'il eft le produit des matières végérales & animales portées au plus haut point de putréfation, page 225. — Réflexions fur la putréfa@tion , fur la quantité d'air, d'humidité & de chaleur qui convient le mieux pour favorifer la nitrification, pages 226, 227, 228, 229, 230. — Confdérations [ur les avantages du mélange des matières végétales & animales, page 233. — Expériences pour déterminer fi la chaux eft avantageuf: dans la confcétion des nicrières , page 2.35. — Elle nuit à la putréfaétion des fubftances végétales & animales, #6id. — Proportion la plus avartageufe des fubftances végétales & animales, & des terres ou plâtras pour la génération du nitre, p. 237. — Diflerration pour déterminer les avantages du fel & des faumures, page 238. — Elles peuvent fuppléer quelquefois à l'alkali; la dofe la plus avantageufe et inconnue, page 239 — Les arrofages de liqueurs putrefcibles font nuifibles à la nittification, lorfque la fermentation eft au poiot de ne plus reconnoître les fubftances végétales & animales qui ont été employées, p. 240. — L'eau ou la leffive des cendres eft le meilleur arrofage, ibid. — Proportion & méthode la plus avantageufe pour traiter les fubftances propres à la nitrification , p. 241. — Terreins & emplacemens convenables, p.241, 242 , 243. — Subftances les plus favorables , p. 243. — Les terres des marais en particulier font de ce nombre, par la quantité d'air inflammable qu’elles produifenr, P: 244, 245. — Les fonds vafeux des follés des terres labourées, font propres à la génération du nitre, p.246. — Degré de chaleur néceflaire pour exciter la fermentation des fubftances végétales & animales, p. 247. — Defcriprion d'une nitrière champêtre végétale, p. 248 , 249. — Oblervations fur les leflivages des terres {alpêtrées & fur les eaux mères, p. 250, 251, 252,253. — Plan d'admi- niftration pour la multiplication du nitre, p. 254 & fuivantes. — Les nitrières pro- duiront difhcilement une récolte aflez abondante & affez prompte pour fournir aux befoins du Royaume, p. 158. — M. Lorgna propofe d'en faire un objet de commerce libre, lorfque le Gouvernement en aura une quantité fuftifante , p. 265.— Autres réflexions, p. 26$, 266, 267. — L'Académie lui accorde le fecond Prix, H, page 185. Luynes. L'on trouvedu Salpétre naturel dans les carrières habitées de fes environs, page 587. M. Mine (Ifle de) Sa terre végétale eft compofée d'un peu d'argile & du detritus des rochers calcaires dont elle eft compofée, page 619. Marars. (terres de) Sont d'autant plus favorables à la formation du nitre, qu'elles contiennent plus de gas inflammable , pages 244, 245. Marne. Ne contient pas de Salpêtre, comme le prétend l'Auteur du Mémoire N°. 75 eft feulement propre à s'imprégner d'acide nitreux quand on l'expofe à l'air avec les conditions données, H, pag. 121. — Tirée de deffous les bancs de coquilles à 45 pieds de profondeur, arrofée d'urine, n’a produir que de l'acide marin, Mémoire Ne. 28,H, page 181. — Son mélange avec la otafle ou la cendre, le vitriol martial & l'urine, donne un peu de Salpêtre à bafe alkaline, page 400. — Le vicriol verd eft plus nuifible qu’utile dans ces mé- langes, ibid. MarErraux de démolitions. Offrent de grandes reffources aux Salpêtriers de Paris, dont ils ne tirent pas tout le parti poffible; manière de les exploiter, H, page 141. — Il eft très-effentiel qu'ils n’entrent point dans la conftruétion de nouveaux bâtimens lorfqu'ils font falpétrés, H, page 150. MATIÈRES ANIMALES, Les plus propres à fayorifer la nitrification, font le rt TABLE. DES MATrARES. 661 fumier de cheval, de vache, de mouton, de pigeon , de poules, pages 39, 357» 358. — Les urines employées en arrofage font nuifibles, en ce qu'elles contiennent trop de fel marin, pages 3$7 & 358. — Inconvénient des matières grafles , p.40. — Néceflité de divifer les parties dures & folides, 6. — Les excré- mens font préférables , £3id. — Proportions les plus favorables à la nicrification, page 42. — Leurs principes désaués par le feu, ne font pas propres à la formation du Salpêtre, page 73. — Les fubftances parenchymateufes font plus avantageules dans les commencemens de la putréfaétion, & les excrémenteufes, fur-tout l'urine, dans les derniers temps, page 83. Mauve. Ses feuilles defféchées déronnent au feu, Mémoire N° 18, H, p.178. MErcCURIALE. Ses feuilles defféchées détonnent au feu , Mémoire N°. 28, H, 56, MINÉRALOGIE, voyez OBSERVATIONS MINÉRALOGIQUES. MiNEROLES. Les carrières habitées de fes environs donnent du Salpêtre à bafe alkaline, page $89. MOFETTE ATMOSPHÉRIQUE. Entre dans la compofition de l'acide nitreux, fuivant MM. Cavendish & Lavoifier, H, p. 197. — Entre dans la compolition de l’alkali volatil, fuivant M. Bertholer, H, page 198. MONTAGNES de craie des environs de la Roche-Guyon, Moufleau, Dreux en Normandie , Saint-Avertin, près de Tours, &c. contiennent une quantité nétable de Salpêtre dans le voifinage des furfaces expofées à l'air, d’après les expériences de MM. le Duc de la Rochefoucauld, Clouet & Lavoifier, H, page 102. À MONTHou &BourRé en Touraine. Analyfe du tuffeau des carrières des environs à différentes profondeurs, p. 577, 578 & 579. — MONTHOU, voy. BOURRÉ. Mouzins deftinés à concaffer les plâtras; leur ufage à moins d'inconvéniens que celui de les battre, page 328. Mousseau, près la Roche-Guyon. Defcription des craies falpêtrées de fes environs. Muraizres. Pour fabriquer le Salpêtre; M. Pietfch eft le premier qui en ait parlé , H, page 17. — Qui fervent à clorre les héritages en plufieurs endroits de l'Allemagne, faites de paille hachée & d'argile, fe falpétrent & peuvent être leffi- vées avec avantage, H, Z6id. — Ont donné l'idée d'en faire de fadices, ibid. — Exigent, comine les voûtes , une main-d'œuvre couteufe, H, p. 18. — Lor{- qu'elles font conftruites avec une terre pétrie , l'air ne les pénètre pas affez facile- ment, H,p. 24, 39, $o. — Faites de démolitions de vieilles maifons , fur-touc de celles qui ont été incendiées, donnent, dit-on, des efflorefcences que l'on enlève, & que l’on leffive au bout d'un mois, H, page 37. — Faites de terres laifes & de feuilles pourries, donnent aufli du Salpétre'; mais cette méthode exige plufieurs années , Zbid. — Sont plus avantageufes lorfqu’elles ont peu d'é- païffeur ; leurs inconvéniens , page fo. — Manière de les conftruire, fuivanc lAuteur du Mémoire N°. 37. — Il prétend les avoir employées avec fuccès, H, pages 97. — Moyen difpendieux & peu profitable , felon l'Auteur du Mémoire N°. 15, H, page 58. — Leur compoñition, d’après le Mémoire N°. 17, H, pages 138 & 139. — Conftruites en briques recouvertes d’un mortier jaune, donnent du Salpétre au bout d’un mois, Mémoire N°. 16, H, p. 136 & 137. N. N ICOTIANE ou Tagac. Ses feuilles defféchées déconnent au feu, Mémoire N°. 28, H, page 178. NiTrières, Doivent être placées aux environs des grandes villes, à caufe des 662 TA BIE DEs MATrIÉRES fumiers, des urines, &c. H, pages 25, 26, 59, 60, 61, 67 & 87. — Il faut en former le fond avec des terres déjà falpétrées, H, page 31. — Artificielles multipliées en Suède, H, p.26, 27. — Etablies dans le Palatinat, le Margraviat de Bade & plufeurs autres Etats de l'Allemagne, aux frais des Souverains, le Salpètre leur revient cher, H, page 54. — Etablies en Prufle, partie aux frais du Roi, partie aux frais des Communautés, H, page 55. — M. Cornerte n'eft pas d'avis qu'on les forme aux environs des grandes villes, à caufe de l'infec- tion qui pourroit être dangereufe, H , p- 84. — En plein air & d'une nouvelle fabrication , felon l'Auteur du Mémoire N°. 18 , H, page 63, & felon l'Auteur du Mémoire N°. 21,H, p. 65. — L'Auteur du Mémoire N°. 34, propole avec aflez de raifon, de les (ubftituer aux voieries des grandes villes, H, p. 93. — Leur établiffement doit être fait aux frais des Villes & Communautés, felon l'Auteur du Mémoire N°. 37, parce que la fouille étant une charge publique, le Public doit fupporter la charge qui la remplace, H, page 96. — L'Auteur du Mémoire N°. 13, propofe d'en établir pour le compte du Gouvernement, afin de fuppléer à la fouille, H, page 134. — Manière la plus avantageufe de les former , d'après M. Chevrand, H, p. 144. — La fuppreflion partielle de la fouille a retardé la formation des nitrières, H, p. 145. — Nitrières-bergeries propofées par MM. Thouvenel, p. 100 , 134 & fuiv. — Critique del'inftru@ion publiée par les Régifleurs des Poudres. — Obfervations de l'Académie, H, pages 154, 1$$ & 156. — Leur conftruétion eft plus onéreufe que la fôuille même, fuivant l'Auteur du Mémoire No.23, H, page 156. — Principes fur leur formation & leurs proportions , d'après les expériences & les idées de l'Auteur du Mémoire N°. 24, H, page 162. — L'eau de buanderie eft favorable à la nitrification , Mémoire N°. 24, H, page 162. — On peut les conftruire en plein air, fur des aires pavées ou carrelées , Mémoire N°. 2$5.— Leur proportion & leurs dimenfions; moyen de remédier aux injures de l'air, H, pages 163 & 164. — Suédoifes & Françoifes font peu profitables, page 141. — Ecuries propofées par MM. Chevrand & Gavinet, pages 308 & fuivantes. — Formées avec des craies ; néceflité de laifler du Salpêrre aux fuperficies, lorfqu'on les gratte pour faire la récolte, page 333.— Formées de terres neuves, font en général d'un foible produit, pages 346 & 347. — Les terres qui y font traitées , leffivées au bout de deux ans, donnent deux degrés & demi, page 348. — Il en exifte cinquante-quatre en Franche-Comté, qui fe font diftribuées par départemens une grande partie des terres falpêtrées de la Province , page 349. — Celle de Mignovillars a retiré au bout d'un an, du leflivage du quart de fes terres , vingt- deux milliers de Salpêtre , page 349. — La totalité de celles de Franche-Comté pourroit donner , année commune, huit cent milliers de Salpêtre , £béd. — Détails fur la conftruétion des nicrières, pages 352 & fuivantes. — Les claies, dont on à confeillé l’ufage , font plus nuifibles qu'utiles à la génération du Salpètre , page 353. — Defcription de celles d'Allemagne , d’après M. le Comte de Milly, page 428. — Détails fur leur formation, pages 464 & fuiv. — Les fubftances animales ne fervent qu'à y attirer l'acide nitreux de l'air , page 466. — Couches pyramidales, p. 467. — Procédés pour les conduire , ibid. — Nécef- fité de conferver fous les hangats une température plus fraîche que celle de l'air extérieur , £8id, — De confulter , avant d'en établir, les tables météorologiques du pays, page 472. — Détails fur la nitrière de Malthe, page 467. — Elle fournit à peu près la même quantité de nitre à bafe terreufe que celles de France, pages 483 & 484: — Celles de Montpellier produifent du pitre pur , page 483. — M. de Milly, dans fa defcriprion, a fuivi, fans le favoir , les principes de la condenfation de l'air & de l’évaporation de l'humidité, page 497. — Pofhbilité de former des nitrières dans les craies de la Roche-Guyon, FRA 2 LE M DES M A TT FRE s: 66; Mouffeau, &c. p. 567 & fuivantes. — Détails fur celle de Saint-Avertin, p. 586. — On en peur former dans toutes les carrières abandonnées, page 636. Exemple, page 609. — Leur conftruétion , page 134. Leur produit, H, p. 129. (Voyez HANGARS.) 1 k NEuHAUSs.(M.) Le réfulrat de fes expériences fur la formation du nitre, pages 497 & 498. ©. Oise VATIONS MINÉRALOGIQUES. Sur la Touraine & fur la Saintonge, pages 73 & fmvantes. — Sur les côteaux qui bordent la rive gauche de la Loue, page $85.— Sur les environs de Tours & de Saumur, pages $87 & fuivantes. — Depuis Saumur jufqu'a Mont-Soreau , page 521. — Depuis Mont-Soreau jufqu'a Chinon, pages $9s & 596. — De Chinon à Châtellerault, en pañlant par Richelieu, p. 600. — De Châtellerault à Poitiers , pages 602 & 603. — Sur l'Angoumoïs , pages 60$ & 606. OrcNoNs & PorrEAuUx. (feuilles d') Defféchées détonnent au feu, Mémoire N°.28, H, page 178. OnrT1r. (grande) Ses feuilles defléchées déronnent au feu, Mémoire N°, 18, H, ébia. P: Prise Sert à couvrir les voûtes & les hangars, H, p. 17. — Coupée, s’em- ploie à former une efpèce de mortier, ibid. — Eft utile dans les couches, fuivant l'Auteur du Mémoire N°. 26, H, page 70. Panars. Ses feuilles defléchées détonnent fur les charbons, Mémoire N°. 18, H, page 178. Parc à Lapins. On pourroit en établir près d’une nitrière; les terres qu'on en retireroit pourraient fervir à former des couches & des murs , Mémoire N°. 27, H, page 176. Parcours. ( droit de) Sa deftruétion ft utile à la formation du Salpétre, Mémoire N°. 23, H, page 157. Pari£raire. Ses feuilles defléchées déronnent fur les charbons, H, page 178. Pavor DE JARDINS. Ses feuilles defféchées déronnent fur les charbons, H page 178. PÈSE-LIQUEUR. Son ufage pour connoître la quantité de Salpêtre que contient chaque quintal de leflive, H, page 32. PHLOGISTIQUE. Sert dans le fyflême de Stahl à convertir l'acide vitriolique en acide nitreux, H , pages 22 & 38. — Selon M. Cornette, il entre dans la combinaifon de l'acide nivreux, H, page 823 & dans celle de l’alkali fixe, felon M. Baumé, H, page 85. PIERRES CALCAIRIS. Arrofées d'acide vitriolique & d'urine, donnent de la félénite, & non pas du Salpêtre, comme M. Pietfch l’avoit avancé, H, p. 95. — De Touraine, natureilement couvertes de Salpêtre en eforefcence, H, page 101. — Manquent dans les Ardennes, H, page 138. — Celles qui font très- dures ne contiennent pas d'acide nitreux , p. 366. — Ne donnent d'acide nitreux que lorfqu'elles contiennent des fubftances végétales & animales décompofées, page 367. — Ne {e falpétrent dans les carrières que jufqu'a vingt pieds de l'ou- verture, à moins qu'elles ne foient frappées du foleil ou de fa réflexion, p. 444. — Confervent l'acide nitreux, parce qu'elles ont plus d'affinité avec lui que les 664 TaBre DES MATrIÉERES autres corps, page 450. — Celles des débris d'incendies produifent du Salpêtre ; page 493. — Tirées d'une carrière entre Angoulême & Je moulin de Mont-Bron; eur anolyle, page 605$. Bleuatres, prifes Cntre le fauxbourg de l'Houmeau & la Forerie de canons, Zbid. — Leur analyfe, page 606. — Prifes entre Saintes & Angoulème ; leur analyfe, 2bid. — Prifes dans les carrières de Sainr-Savinien 5 leur analye, ibid. — Prifes dans les carrières de Sainte- Même ;- leur analy{e, . page 697. PrerscH (M.) A adopté entièrement le fyftème de Stahl, fur la formation de l'acide nitreux, H, pages 12, 168, 169. — Expéiences qui renverfentr ce fyfème, H, page 13. — Il le regardoit comme une modification de l'acide vitriolique , M, p. 181, 182, 183, 184, 185, 376. — Preuves au'il en rap- porte, page 377. — Ses expériences s'expliquent par les principes de la conden- fation de l'air & l'évaporation de l'humidité, page 496. Pranres. Contiennent du nitre à bafe d'alkali fixe avant d'avoir éprouvé aucun commencement de putréfaétion , fur-tout lorfqu'elles croiflenc dans des terres bien famées & aux pieds des murs, H, page 7, M, page 428: — Il faut, pour l'obtenir avec profit, attendre la putréfaétion complette de ces plantes, felon l'Auteur du Mémoire N°. 12, H, page so. — Les plus aqueufes, & celles qui viennent le long des murailles | font les meilleures, felon M. Cornette, H, page 83. — Accumulées & pourries , elles forment l'efpèce de rerreau propre a la formation du Salpètre, FH, page 135. — Chaque efpèce donne une quantité plus ou moins grande de cendres par la combultion, H, page 190. — Leurs cendres ne donnent prefque pas d'alkali, lorfqu'elles ont été dépouillées de leur acide concret, par la macération , la décoétion ou La diftillarion , page 218. — Elles ne font plus alors propres à la fabrication du Salpêtre, ibid. — 11 en eft de même lorfqu'on leur a enlevé leur principe réfineux ou refino-extraéhif par l'efpuit-de-vin , £Pid, Voyez VÉGÉTAUX & SUBSTANCES VÉGÉTALES. PLaTras. Ne contiennent d'acide nitreux que par voie d'imbibition, p. 368. — Il eft nuifible de les-écrafer trop, page 418.— L'on pourroit les paffer au moulin au lieu de les battre, page 327. — Sont préférables à la terre calcaire pour la nitrification, en ce qu'ils font plus poreux, page 236. PLaTRE cuir. A été regardé par pluficurs Chimiftes, comme le plus propre à la formation du Salpètre, page 29. — N'y contribue pas cependant, H, p. 30. PLATRIERES DE BELLEVILLE. L'Auteur du N°, 11 propofe d'y former des nitrières, H, page 130. Porrirxs. Quoique la pierre y foit dure, elle fe falpêtre aifément, p. €o3. Porasse. Son ufage eft préférable à celui des cendres dans beaucoup de circonf- tances, H, page 32. — Sert à précipiter la terre calcaire des eaux mères, H, 6. — Il s'en fabrique dans les Ardennes, H, page 137. — Manière de - l'employet dans lg traitement des eaux mères, pages 163, 164, 165.— Il n'y a pas dix ans qu'on connoît la néceffité de fon emploi dans la fabrication du Salpêtre, H, page 188. — Son ufage a fait prefque doubler la récolte du Sal- pêtre en France , dans l'efpace de dix ans, H, 16id. M, page 350. — Art de la fabriquer, H, page 188. — En quoi confifte fa différence d'avec le falin, H, page 190. — Ce qu'on diftribue fous ce nom dans les falines de Franche- Comté & de Lorraine, n'eft que du fel marin prefque pur, page 318. — Peut être fuppléée par l'eau de favon noir , même après qu'elle à fervi au lavage du linge, page 352. — Effer de fon mélange avec les matières propres à la nitrification, pages 400 & 401. Pausse. Méthode qu'on y emploie pour la fabrication du Salpêtre, p. 43, 44, â5.— Ses nitrières font établies d'après le fyftème de Glauber, page 416. PurréFACTION. Eft le principal agent de la formation du Salpêtre, H, pages fs TVANBITIEN QDNE se MA Tr EORIES 665 5:73 9» 14, 31,49, 50, 57, 70, 112$, M, pages 0, 37, 39, 67, 733 417. — Ne peut exifter fans air humide , H, page 135. — Ne peut, fuivant - M. Beunie, changer le fel marin en Salpêtre, comme on l’a prétendu , H, p. 72. — Elle ne fufñit pas feule pour donner naiflance à l’acide nitreux, p. 73. — La terre calcaire la retient dans de certaines bornes , p. 71. — Son Hiftoire n'eft pas complettement connue , page 236. — Subftances qui s'exhalent pendant qu'elle s'opère, page 73. — Elle fait une véritable analyfe des fubftances végérales & animales ; comparaifon de cette analyfe avec celle faite par le feu, par l'Au- teur du Mémoire N°. 1, fecond Concours, H, page 103. — C'eft le moyen que la Nature emploie pour retirer les principes des végétaux & des animaux, & les faire pafler dans d'autres combinaifons , :bid. — Toutes fes époques ne donnent pas un air également propre à la nitrification , page 83. — Il faut qu'elle foit à fon plus haut point pour produire l'acide nitreux, page 369. — Produit un acide qui nuit au phlogiftique , & forme du nitre quand il trouve à s'unir à quelque matière alkaline ou calcaire, page 388. — L'alkali ne fe forme que dans le dernier degré , page 81. — Deux époques, une d’acef- cence, une d’alkalefcence, 1brd. — Les matières animales font préférables dans les commencemens de la putréfaétion, & les excrémentaires vers la fin, p. 83. — Examen des corps putréfiés dans des vaifleaux clos, pages 72 & 73. — Les fubftances animales qui fe putréfient fans le concours de l'air, ne produifent pas de Salpëtre, p. 273. — Toute liqueur putrefcible ne doit plus être employée dans les arrofages , lorfque la fermentation eft affez avancée pour ne plus recon- noître les matières qui y font employées, page 240. PYRAMIDES TRONQUÉES, & percées de trous coniques , au lieu de couches, raffemblent toutes les circonftances les plus propres à une abondante nitrification, pages 389 & 390. PYRITES MARTIALES. Peuvent.être employées dans les nitrières , fuivant l'Au- teur du Mémoire N°, 2; jugées inutiles par les Commiflaires de l'Académie, H, page 40. R. R AFFINAGE DU NITRE. Quatre opérations pour en extraire toutes les fub(- tances étrangères, page 391. RANGirORT. Son côteau eft plus riche en Salpêtre que ceux de la Roche-Guyon; pire de cette richefle, fuivant M. le Duc de la Rochefoucauld, H, p. 194, M, page 619. RocHEroOucauzp. {M.le Duc de la) Eft le premier qui ait obfervé que les craies du côreau de la Roche-Guyon fe falpêtroient naturellement, H, p. 192. — Expériences très-importantes faites par lui, fur les craies de la Roche-Guyon, page 560. — Ses obfervarions fur les changemens faits dans l'Adminiftration des Poudres, page 611. — Defcription des montagnes de la Roche-Guyon, p. 612. — Les habirans des villages adoffés aux montagnes , y creufent des habi- tations , & c'eft dans leurs environs que fe trouve le Salpêtre de houflage, P- 612 & 613, — Expériences pour favoir fi la craie, à une certaine diftance de la fuperficie, contient du Salpètre, p. 613, 614, 615, 616, 617, 618. — Croit que le Salpètre, ni l'acide nitreux, n'exiftent pas dans la craie lorfqu'elle n'éprouve pas le contaët de l'air, p. 618.— Mais qu'elles contiennent de l’acide vitriolique, lors même qu'elles ne font plus imprégnées d'acide nitreux, £bid. — La terre de Rangiport, à la même épaifleur, ne fournit pas de Salpêtre, page 619. — Sa farface eft une des meilleures mines de Salpêtre du canton, ibid. — Cette richefle P ppp 666 TAaAsie DEis MATIÉRES. eft due à l'argile qui eft mêlée avec elle, p. 619.— Rapporie à cette cccafion une lettre du Chevalier de Dolomieu , qui confirine cette opinion. Comparai‘on du progrès de la génération du Salpêètre & de ceux de la végération , bd. & 610. — Expériences pour connoître de quelle manière les craies s’imprègnent de l'un & de l'autre principe pour former le Salpêtre , 24id. & fuivantes. — Le réfulrat de la plupart prouve que la feule expoftion à l'air faffñit pour que la craie s'imprègne d'acide nitreux, page 623.— L’alkali végétal parox étre entic- rement dû aux fubftances végétales & animales, £h£d, — L'arrofement des couches avec la potafle . paroît infufifant ; il faut que les fubflances propres à le former aient été mélées dans les couches, page 623. — Croit qu'il feroit rrès-bon de dérerininer les quantités de fübftances alkalines , dont il faudroit charger les couches pour obtenir du Salpêtre à bafe alkaline, 2brd. RocHEe-Guxon. (la) Les coteaux de craïe qui l’environnent, font couverts de Salpètre de houffige, pages 504 & fuivantes. Rome. (M.) Ses réflexions fur les Loix de l'Univers, & fur la formation & [& compoltion du Salpêtre en paticulier, pages 421, 422 & 423. — Lieux où le Salpècre naturel fe trouve abondamment , pages 424 & fuivantes. — Pour produire du Salpètre , il faut raflembler des corps propres à fa formation , dans les mêmes circonftances où ils fe trouvent dans la Nature, page 414. — Il fe rencontre dans les lieux habités & dans ceux qui ne le font pas, 26id. — Expolé fuccinét des mérhodes que l'Art emploie pour produire le Salpètre, pages 426 & fuivantes. — Syfléme de Glauber, qui a fervi de bafe aux érabliffemens de Prufle & de Suède, ibid. —Syftême de Lemery, 2bid.— Syftème de Stahl & de Pietfch, page 427. — Méthode de Suède & du Brandebourg, hd. — Sentimens de M. Grunner, ibid. — M. Vannes regarde l'acide nitreux comme l'ouvrage: de la végétation, page 418. — D'après des expériences faites à Drefde , on donne la préférence aux fubftances animales putréfiées fur les végérales, p. 429. — Moyens employés en différens pays pour augmenter la récolte du Salpêtre, pages 419 & 430: — La chaleur n'eit pas regardée généralement comme favo- rable à fa formation, page 430. — L'humidité eft indifpenfable, page 431. — Parallèle des opérations de l'Art & de celles de la Nature pour la formation du Salpêtre, ibid. — Les fubftances animales ne font pas toujours néceflaires à la formation du Salpêtre, page 432. — Les pierres calcaires paroïffenr être les dépôts généraux de l'acide nitreux, ibid. — Le Salpèrre fe forme indifféremment dans des lieux fermés & à l'air, p. 433. — Les matières animales font au moins inu- tiles à fa formation , ibid. — Le Salpêrre eft plus pur dans l'intérieur des terres, le long des fleuves, qu'à leur embouchure, page 434. — Le golfe de Lion, dans le Bas-Langucdoc, en produic d’auff pur que l'Inde, 1bid.— Le Bengale, l'Efpagne & les côtes de la Médirerranée , font des fources de nitre pur, p. 435. — Oblerva- tions fur leur pofition , leur climat, ibid. & 436. — Le vent du Midi & la proxi- mité de la mer paroiffent contribuer à la formation du Salpëtre ou à fa perfection ;. ibid, — Cette opinion ne s'éloigne pas de celle des Régiffeurs des Poudres, qui croient l’expofñtion dn Midi favorable à la formation du Salpètre, p. 438.—Obfer- vations à l'appui de cette affertion, p 438, 439, 440, 441 & 442. — Les terres des cartières ne {ont falpêtrées que jufqu'à 20 pieds de diftance de l'ouverture, à moins qu'el!es ne foient frappées du foleil où de fa réflexion , p.444. — À une cer- taine profondeur, les carrières ont une température à peu près égale a celle des caves de l'Obfervaroire, p. 445. — Le point où elles prennent cette rempérature, dépend des circonftances local:s & des ouvertures qui s’y trouvent; le vitre ne fe forme que dins l’efpace qui eft fujet aux variations du thermomètre , pages 446 & fuiv. — Effets de l'air à l'entrée d'une carrière, pag. 447 & fuiv. — M. Rome induit de ces fais, que le nitre que donnent ces pierres, leur eit tran{mis par Taie DES MATIÈRES. 667 une caufe étrangère , page 449. — Er que l'air eft la feule qui puifle opérer ce phénomène , £6id. — L'acide nitreux ne les abandonne plus lot(qu'il les a imoréynées, à caule de fon affinité avec elles, page 450. — Expériences de M. Margraff à l'appui de ce fyftême , page 4ç1. — Les fubftances animales ne produifenc le nicre que par la propriété qu'elles ont de condenfer l'air, & par conféquent l'acide nitreux qui y eft uni, pages 451 & fuivantes. — Les caves ne contiennent du Salpêrre que parce qu'érant toujours à la même température, elles {ervenc, en certaines circonftances, à fire précipiter l'acide nitreux que l'air contient, page 452. — Raifons pour lefquelles nos appartemens n'en con- tiennent pas, page 454. — Les murs qui en produifent, ne le doivent qu'à la différence de température, ibid. — Par le même principe, les maifons des rues écroites en fournilfent davantage, ébid. — Diflertation fur la queftion pourquoi le nitre abonde dans un climat aufh brûlant que celui de l'Inde, p. 4f4, 455, 456, 457. — L'acide nitreux a plus d'afinité avec le phlogiftique qu'avec un autre corps, page 4ç7. — Difpofition locale qui donne au Salpêtre de l'Inde ou du Bas-Languedoc, une qualité différente de celui qu'on recueille dans les endroits habités, page 458. — C'eft la chaleur qui donne au nitre {a bafe alkaline, £bid. — Il n'y a que les terres des pays chauds qui puiflen: produire du Salpêtre à bafe alkaline , page 460. — Les pluies détruifent la qualité alkaline, 10rd. — Les Provinces Méridionales , & fur-tout le Bas-Langucdoc, doivent fixer l'attention du Gouvernement pour la formation de nitrières artificielles, p. 462.— Les cendres de tamarins contiennent du fel de Glauber, & point d'alkali, z6id. — Les jours de pluie en Languedoc, font moitié moins nombreux que fous le climat de Paris, page 463. — La chaleur y efl plus continue & plus vive ; le golfe de Lion devroir être rempli de nitrières qui donneroient une récolte abondante & peu coutenfe , page 464. — Procédé pour la formation des nitrières artificielles , ibid, 8 45ç.— La conftruétion des hangars doit être telle que les rayons du foleil puiflent s'accumuler , fe réfléchir & (e concentrer fur les terres préparées, tbid. 8 page 466. — Les fubftances animales ne fervent, dans les nitrières, qu'a y attirer l'acide nitreux de l'air, £4id. —.Manière de conduire des nitrières, page 467. — Er d'y faire circuler l'air, pages 467 & 468. — D'Hérence de température néceffaire pour la condenfation de l'air, page 469. — Expériences à l'appui de ces faits, cbid. & 470. — Les fels & la chaux qu'on emploie, font très- propres à entretenir la fraîcheur des couches , #5. — Pour féconder les terres plus promptement, il faudroit y faire circuler l'air intérieurement par des canaux qui prendroient de la furface au centre, page 471. — Néceflité d'expoler les eaux d'arrofages à la même température que celles des couches, zh/d. — Raifons de ce procédé, ibid, — Néceflité de confulter les tables Météorologiques , avant d'établir des nitrières, page 472. — Un pays eft d’autanc plus propre à la nitri- fication, que la chaleur y eft plus grande & de plus de durée, £bid. — Formule algébrique, pour connoître la quantité de Salpê:re dont les terres font chargées, lorfqu'on veut les leffiver, page 474. — Procédé pour le leffivage , éd. 475, &c 476. — L'évaporation eft d'autant plusprompte, que la partie embrafée par le feu eft plus grande, & la (urface de l'eau en contact avec l'air, plus étendue, zbd, — L'acide nitreux a des affinités différentes avec les corps auxquels il peut s'unir, p. 478.— L'alkali végétal a autant de part à la formation du nitre que l'acide nitreux, page 479. — Moyens qu'on peut employer pour faire dépofer l’alkali végétal dans les terres ou il fe dépofe de l'acide nicreux , 24/4. — La Nature le produit fans Le fecours de la combuftion des végéraux, 1h11. & 485.— Les lieux couverts ne produifent que du nitre à bafe terreufe, page 480. — Les terres falpêtrées à l'air dans l'Inde, en Efpagne, &c. donnent du nitre à bafe alkaline, £hid. & 484. —Le nitre eft compofé de partic égale d'alkali & d'acide nitreux, p. 480.— Expofé Ppppi 668 TABLE DES MATIÉRES. du travail ldes Salpêcriers de Paris. Ils trouvent dans les terres & décombres qu'ils amaflent, du nitre à bafe terreufe, & du nitre à bafe alkaline, p. 480 & fuivantes. — Analyle des cendres, par M. Lavoifier, page 481. — Les nitrières de Montpellier produifent du Salpètre à bafe alkaline , page 483. — Remarques fur celles de Malthe, pages 483 & 484. — Les décombres font préférables aux terres de fouilles, page 484. — L'alkali n'eft dû qu'à la chaleur des rayons du foleil, zbid. & 485. — Les rerres calcaires, placées près de la mer , ou de mares d'eau , & expofées au Midi, font dans les circonftances les plus favorables à la formation du Salpêtre à bafe alkaline, page 484, 485. — Les rayons du foleil donnent cette qualité alkaline à la terre calcaire, page 485. — Les rerres calcaires ne paroillent falpétrées que par l'humidité & la qualité alkaline qu’elles acquièrent, page 486. — L'alkali végétal a la propriété d'attirer l'acide tenu en diffolution dans l'air, £6ëd. — La formation du nitre dépend des mêmes caufes qui fonc varier le thermomètre , page 487. — Développement de ce fyftême ; il explique, fuivanr M. Rome, tous les phénomènes de la formation du Salpêtre dans les villes, p. 489. — Dans les lieux non habités, p. 492 & 493. — Il ne contrarie pas les faits avancés par Stahl, par Lemery , pages 493, 494, 495. — Ni les obfervations de M. Dombey, page 496. — Ni les expériences de M. Pietfch, 2bid. — Si le nitre s'accumule dans les murs en Brandebourg, c’eft qu'ils fonc placés dans les lieux humides , enveloppés d'exhalaifons urineufes, page 497. — M. Rome explique, par les mêmes moyens, les faits cités par M. Grunner , 2bid, — Et le réfultat des expériences de M. Neuhaus , pages 497 & 498. — La nicrière , décrite par M. de Milly , eft formée, fuivant lui, d’après les principes de la condenfation de l'air, page 458. — Dans l'Inde, on arrofe d'urine les terres deftinées à produire du Salpètre, pages 498 & 499. — Les Chinois emploient le même moyen , ibid. — Formation du nitre du canton d'Appenfel, fondée fur les mêmes principes, £hid. — Rapporteun fait obfervé dans un Couvent des Capucins , qui prouve évidemment l’influencedes exhalaifons urineufes fur la formation du Salpêtre, page 500. — Une nitrière naturelle à Ruffec, prouve combien le voifinage des grandes mafles d’eau y contribue, zbid. — Halle de Saint-Jean-d'Angely prouve l'avantage d'une nitrière, dirigée d'après la méthode indiquée, pages $00, sor. — L'Académie, dans fon Programme de diftribution du Prix, fait une mention honorable du Mémoire de M. Rome, H, p. 18& Rurrec. Analyle des pierres de fes carrières, page 596. S. Sasres DE DÉMOLITIONS de la ville de Caen, fourniflent 8 pour 2 de Salpètre, page 329. SaAINT-GEORGE en Touraine. Obfervations minéralogiques fur fes environs , page $84. — Analyfe des tuffeaux de fes carrières, page 585. Sarnt-Marc. L'on trouve du Salpètre naturel dans Îles carrières habitées de fes environs , page 587. SAINT-SAVINIEN. Carrière de pierre calcaire abandonnée, page 606. SAINTONGE. Quelques carrières de cette Province contiennent du Salpêtre naturel, page $72. SaziN & Porasse. En quoi confifte leur différence, H, p. 190 & 191. SaALPÈTRE. La récolre en diminuoit de plus en plus er France, H, pages 1, $ & 16. — Connoiïflances aétuelles fur À génération , p. $.— Se dépole dans les murs de pierres tendres & poreufes, 2bid. & 63. — Les lieux bas & humides font les plus favorables à fa produétion, H, page 6. — EÎt contenu dans MR AÏBIE EN DIEU S& IMVA:T IT EVRIE S 669 plafeurs plantes, H, page 7. — Tout formé dans les végétaux, felon Lemery, H, pages 9, 10, 22. — Selon Glauber, H, pages 21, 57. — Son origine, Suivant cet Auteur, H, page 21. — Opinion de Stahl & de Lemery ic fils, H, page 22. — Moyens propofés pouf établir une récolte fans fouille, H, p. 16. — Ce que fa récolte coutoit en Franche-Comté , H, page 14. — Le rétabliffement de cette récolte ne peut être opéré par une Compagnie d'Entrepre- neurs, H, page 16. — Muliplié en Suède par le moyen de couches & de hangars, en Prufle par des murailles faires exprès, H, page 23.— Sa fabrication à Maïche eft la même qu'en Suède; on y a établi des hangars, H, p. 28. Sa formation, felon M. Lietfch, H, page 24. — Se forme naturellement & en abondance dans les terres des Indes, & criftallife en aiguilles à Ja furface, H, page 29. — Sc tire en mafle de mines qui exiftent dans les royaumes de Cachemire , de Siam & de Pégu, où il fe trouve en bancs d’une -certaine épaifleur, H, zbid. — Ne l'a-t-on pas confondu avec le sarrum, H, ibid. — Ce n'eft que depuis peu d'années qu’on a eflayé d'en’ fabriquer en Amérique, H, page 30. — Eft en général le réfultat de l'union de l'acide nitreux & de l'alkali fixe végéral, H, page 31. — Soluble dans l'eau, on le fépare de la terre par les leffives, H, pages 31 & 32. — On le fépare a’avec l’eau par l'évaporation & la criftallifation , H, p. 32. — N'eft pas toujours à bafe d’alkali fixe , mais fouvent à bafe terreufe ; alors ilne criftallile pas , & n’eft pas propre à la fabrication de la poudre, H, page 32. — On le débarrafle du fel déli- quefcent par l'addition de lalkali fixe végétal, 464. — On propoie plufeurs moyens de le faire par la voie fèche & par la voie humide, H, page 37. — Moyen d'en obtenir une riche eMorefcence ; fel marin arrofé d'urine putré- fée, felon l’Auteur du Mémoire N°. 2, H , page 38. — Manière de l’obtenir, felon lui, avec le fel marin & le vicriol, H, page 39. — Manicre de le faire en trois jours, felon l’Aureur du Mémoire N°. 33 c'eft la théorie de MM. Thouvenel; mais le temps doit étre bien plus long que ne l'annonce l’Auteur, H, page 41. — Manière dont on peut augmenter fa production dans les écuries, H, page 46. — Etabliffemens faits en Pologne, £bid. — Sa fabrication cft confiée à une clafle d'Ouvriers en général peu inflruits, H , page 49. — Se forme par la réfolution des principes des végétaux & des animaux , réfolution qui s'opère par la putréfaétion, H, page 49. — N'eft pas inflammable, felon Auteur du Mémoire N°. 15, & ne fair qu'exciter très-rapidement fa propa- gation du feu dans les corps inflammables allumés , H , page 57. — Sentiment de l'Auteur du Mémoire N°. 15, fur le nitre aérien, H, page 59. — Eft une combinaifon du gas putride & de l'air de l'atmo(phère , felon les expériences de MM. Thouvenel, H, page 60. — Eft préexiftant dans les mines, felon PAuteur du Mémoire N°. 16, H, page 61. — Manière dont on le récolre en Efpagne , ibid. — On peut l'extraire des terres par le braflace, au licu de l'extraire par lixiviation , felon l'Aureur du Mémoire N°. 17 ; méthode longue & embarraflante, H, page 62. — Manière de le retirer des démolitions , ftlon l'Auteur du Mémoire N°. 120, jugée impraticable par les Commiflaires de l'Académie, H, page 64. — M. Beunie prétend qu'il n’eft pas l'ouvrage de la végétation, comme l'a avancé Lemery, H, page 72. — C'eft le fentimenc de M. Cornette, H, page 81. — L’Aureur du Mémoire N°. 30 , prérend que les marcs de raifin font très-favorables à fa production, H, page 80. — Retiré des expériences de M. Cornerte, H, pages 81, 82.— Les méthodes à prefcrire pour fa formation, ne doivent pas étre les mêmes pour toutes les Provinces, felon M. Cornerte, H, page 84. — Retiré des expériences de Auteur du Mémoire N°. 29, H, page 75. — Retiré des différentes expé- siences de MM. Chevrand & Gaviner, H, pages 89, 90 & 91. -- Les érables 670 TABzE Des MArrkRESs. de moutons & de chèvres font, felon eux, les endroits où il fe forme en plus grande abondance , H, page 91. — Etat de ce que la Franche-Comté en 2 fourni depuis 1772 julqu'en 1776, H, page 92. — Prix auquel il lui revient, H, p. 120. — L’Aureur du Mémoire N°. 35, le regarde comme une efpèce de moi- fiflure ou de mouffe qui croît & qui végète ; fyflême oppolé à routes les connoif- fances acquifes , H, page 94. — Eft tout formé dans la Nature, felon l'Auteur du Mémoire N£. 37. — Scs preuves font des plus foibles, H, p. 96. — Diftinc- tion de quatre efpèces de nitres, H, page 108. — Les plantes n'en donnent par lanalyfe, qu'autanc qu'elles ont cru dans un terrein qui en contenoic [ui- même, H, page 109. — Eft le produit de la fermentation pucride : c'eft un compolé d'air, de phlogiftique , d'eau & d'une portion de terre, felon l’Auteur du Mémoire N°. 2, H, page 109. — Manière dont on le fair en Prufle, H, pages 115 & 116. — D'après les connoiflances a@uelles, n'eft pas, à propre- ment parler, un {el minérals pourquoi , H, page 121. — Obrenu par MM. Thouvenel, du mélange de l'air déphosiftiqué avec celui qui fe dégage des matières végétales & animales en putréfa@tion, H, page 125. —< Produit des nicrières-bergeries , H, page 129. — Opinion de l'Auteur-du Mémoire N° 13, fur fon origine & fa formation, H, page 132.— Produit des hangars au bour de quatre ans, H, page 134. — Ne peur exifter fans purréfition, H, page 135. — Les travaux de fa fabrication peuvent s'allier avec ceux de l'agriculture, M, p.17, H, page 137-— Sa fabrication pourroit être fuivie par les grands propriétaires de terres, Mémoire N°. 17, H, page 137. — Moyens que pré- fentent les Ardennes pour fa fabrication, H, idem. — Plufieurs Provinces de France [e refufenc à cette production, H, page 140.— Examen des pays où il fe trouve naturellement, page 148. — Provinces où l'on doit établir de préfé- rence des nitrières artificielles , fuivant M. Rome, H, page 150. — Se forme en plein air, fuivant M. de Vercux, H, page 152. — L'Auteur du Mémoire N°. 25, le regarde comme l'ouvrage de la végétation; réflexions des Commif- faires, H, pages 156 & 157. — Différentes méthodes pour en augmenter la récolte, H, pages 157 & 158. — Expérience fur fa production artificielle, H , pages 169 , 161. — Réfultat d'expériences d'après lefquelles l'Auteur du Mémoire N°. 24, détermine les terres qui font les plus propres à {a formation, H, P- 161, 162. — Recherches & expériences mulripliées de M. de Lorgna fur fa formation, H, p. 167, 168. — Salpètre quadrangulaire pourroit également, fuivant lui, fervir dans la fabrication de la poudre, H , page 169. — N'eft pas tout formé dans l'air ; il vire fon origine du règne végétal & minéral, H, ibid. page 171. — Sa formation tient à la tranfmiflion du phlogifti ue d'un corps dans un autre, H, page 171 Et 172. — Moyens deteste produétion , H, pages 172 & 173.— Plan d'aiminiftration pour fervir à la multiplication du Salpêtre, H, p. 174. — Raïlons qui ont empêché les Commiffaires de donner le premier Prix à M. de Lorgna, H, pages 174, 175. — Le règne végéral eft le principal atelier où il fe forme du nitre, Mémoire N°. 28, H, pige 178. — Mélange de plantes nitreufes & de terre, H, pages 179 , 180. — Nitre obtenu par le mélange de terre de jardin, de colombine, de fuie & de bois neuf, H, page 180. — Obtenu par le mélange de laitues groffiéremenr hachées, & de terre de jardin arrofée d'urine putréfiée , H, p. 181.— Produit par le mélange de nico- tiane, de rerre de jardin & de boue de rue, arrofé d'urine, H, ibid. — Nitre produit parle mélange de terreau & de chicorée , arrofé d'urine , H, ibid. — Etat de la récolte du Salpérre en France, depuis 1775 jufqu'en 1786, H, pag. 189, — En Touraine, pendant le même intervalle de temps, H, page 194, — Cons noïflances fommaires {ur a génération, pages 202, 103 & 204. — Elt, fuivanc £emery, l'ouvrage de la végération, page 9. Difficultés de cette opinion, #bid. TAazie D6$ MATIÈRES. 671 — N'eft pas tout formé dans les plantes, page 219. — Glauber croyoit que fon acide n'étoir qu'une modification de l’acide marin, page 11. — Retiré d’un mélange de craie & de fel de Glauber, p. 14. — Retiré d'un mélange d'argile & de fumier de cheval bien pourri, p. 16. — Le gas putride contribue à fa forma- tion, p. 16, 17, 18, 19. — L'air & l'humidité n'ÿ font pas moins effentiels , page 26. — Le vent du Nord eff plus favorable que celui du Midi au progrès de la nitrification , felon M. Cornette, pag. 28 & 29. — L'air fixe entre dans fa compofition ,p 32. — Les fubftances végétales, en fe putréfant, fourniflent de l’alkali fixe à l'acide nitreux , p. 37. — Les terres calcaires ou abforbantes, font néceffaires à fa formation , zhid. — La craie ou la terre calcaire pure, eft celle qui donne les réfultats les plus abondans ; page 76. — La magnéfie du fel d'Eplum, même la terre alumineufe, ne font point abfo'ument impropres à la nitification, page 77. — Le Salpêtre fe forme au dernier degré de la putré- faétion, page 39. — Queiles font les fubfiances végétales & animales qui conviennent le mieux pour fa formation, #bid, — Les {ubftances dégagées par Ja violence du feu, n'y font pas propres, page 73. — Méthode pratiquée en Suède & en Prufle , pour obtenir une récolte abondante de Salpêtre, pag. 43, 44 & 45. — Projet propofé au Gouvernement pour la France, pag. 47 & fuiv. juiqu'à $5.— Expolé des divers fentimens fur la formation du Salpétre, p. 59, 60, 61, 61, 63, 64, 65, 66. — La végération & la purréfaction font les deux principaux agens de fa génération, page 67. — Stahl a retardé la marche de nos connoiflances fur fa: formation, bid. — 11 ne fufe pas fur les charbons lorf- qu'il eft à bafe de terre calcaire, page 78. — Nicre alkalin & terreux, pro- duic par l'expoftion de la terre animale à l'air méphitique peñdant quatre ans, ibid. — Son acide conftitutif efl formé d'une furabondance d'air, p. 81. — Cet air eft fon principe fondamental, page 94: — Produit par l'expofition de terres ab!{orbantes à l'air atmofphérique dans les plaines, & fur-tout dans les étables & dans les latrines, page 87. — Sa fabrication en grand, utile au peuple & au Gouverneinent , pages 96, 97: 98,99, 180, 101, 102, 103, 104 & 10$: — Combiné avec le vicriol de Mars, page 174. — Expériences pour recon- noître l# nature de fa bife , pages 18? , 188: — Tour fel dont l'acide nitreux eft l'effence, cft un véritable nitre , page 187. — Sa combinaifon avec l'alkali tarcareux, ibid. — Quantité qu'on en obtient par la combinaifon de l'alkali végétal & de l'acide nitreux, page 196. — Salpètre produit par une com- binaïfon de terre végétale , & d'eau imprégnée de fucs extractifs des plantés, page 217. — Eft un être de nouvelle création ; fa génération n'eft due qu'à’ la décompofition totale des corps organifés, page 223. — C'eft le produit des matières végétales & animales, portées au plus haut point de putré- fadtion , page 225. — Lorfque le principe inflammable des faBlances végétales leur a étéealevé, elles ne font plus propres à la nitrification , page 230.-— Pro- portion la plus-avantageufe de fubftances végétales & animales, & de terres ou plâtras pour la prompte génération du Salpètte, page 137. — Le remuage des mélanges eft indifpenfsble , p. 240.— Proportions les plus avantageufes & méchode la plus favorable pour traiter les fubftances propres à la génération du Salpêtre, page 241. — Emplacemens & terreins , pages 241 & 241: — Ses matériaux fe trouvent {ur toute la furface du globe page 243. — Avancages des vidanges de latrines , ibid. — La Roche-Guyon eft un exemple des nitrières naturelles, page 244. — Defcription d'une nitrière champêtre végétale ; pages 248 & 249. — Plan d'adminiftration pôur la multiplication du Salpêire, pages 254 & fuivantés. — M. de Lorgua penfe que les nitrières artificielles ne produi- ront jamais une récolte affez abondante de Salpêtre pour fournir atx befoins du Royaume . page 258: — Conféille de faite entrer fa produétion dans la mafe- 672 TABLE DES MATIÈRES: Jibre des richeffes vénales de fa Nation, page 259. — Réfexions [ur les moyens de former des fabriques de Salpêtre en grand, pages 282 & 183. — Plan de hangars pour les villes qui pourront fournir les matières néceffaires à {a forma- tion, pages 284, 285$ & fuiv. jufqu'à 288. — Manière d'arrofer les couches, pages 29$ & 296. — Dépenfe pour la formation d'une nitrière, p. 297, 298, 299. — Bénéfice réfultant ; intérêt des avances compris, page 299. — Quantité de Salpètre obtenue du leffivage des terres, des bergeries à moutons & à chèvres, page 300. — Cg font les plus riches de toutes les terres, page 305. — Conf- cruétion de hangars plus économiques que ceux propolés par les Résiffleurs des Poudres , page 303.— Quantité de Salpètre qui a été récoltée pendant fix ans en Franche-Comté , page 310. — L'on pourroit en récolter en France environ fix millions de brut, page 324. — Sans compter les pays où les terres ne font pas propres à cette fabrication , comme la Bretagne , page 325. — Quantité confi- dérable qu'on en peut obrenir des démolitions de Paris, ébrd. — Les Salpétriers en perdent beauconp par leur mauvaife manière de lefliver, page 328. — Sa régénération s'opère très-promptement dans les tuffeaux , page 332. — Il fe trouve à bafe alkaline dans les craies abreuvées de fuc des végétaux , autrement il eft à bafe terreufe, page 339. — Pour qu'il puifle dédommager des frais de fabrication, il faur que les eaux des leflives foient à 6 ou 8 degrés du pèfe- liqueur ; zbid. — 11 pourroic s'en récolter huit cent milliers par an, dans la Province de Franche-Comté , page 349. — Il fe trouve en grande abondance fous les aires des granges en Franche-Comté, ce qui prouve qu'un air habi- tuellement renouvelé n’eft pas néceflaire 2 fa formation, page 355. — Il contient, faivant M. Beunie, lorfqu'il eft brut, de la terre calcaire, de la félénite, une fubftance grafle, du fel marin , page 373. — N'eft, à proprement parler, ni minéral, ni animal, ni végétal , page 374. — Ses fignes caraétériftiques réfident dans fon acide , bid, — Raffiné, il contient toujours une portion de fel marin, 2bid. — Ne fe trouve pas dans l'intérieur de la terre, comme les autres fels, page 385. — Doutes fur l'abondance de la récolte de l'Inde , ibid. — Ne fe trouve pas dans les terres purement vitrifiables , ibid. — Sa matrice eft alkaline ou terreufe , page 386. — Il eft produit par l'acide de la putréfaétion uni ae giftique & aux fubftances calcaire & alkaline, page 388. — Obrenu de différens mélanges d'urine, de vitriol, de cendres & de terres, page 400. — On en trouve dans les lieux habités, & dans ceux qui ne le font pas, page 424. — Les plantes en contiennent de tout formé, felon M. Granit, page 428. — La chaleur n’eft pas généralement admife comme favorable à fa formation, pages 430, 431. — L'air & l'humidité en font des agens néceflaires , page 430. — L'air n'elt, fuivant M. Rome, néceflaire à fa formation que lorfqu'il vient de certaines direétions , 2h14. — C'eft en comparant l'Art & la Nature qu'on peut parvenir à des connoiffances exactes fur fa formation, pages 431 & fuivantes — Se trouve dans l'Inde , dans les pays inhabités , en Efpagne, dans les terres labourées , fans le fecours des matières animales , pages 431 & 432. — Ces matières font donc au moins inutiles à fa formation , page 433. — Le Bengale, l'Efpagne & le Bas-Languedoc en font des mines naturelles, page 4354 — Il paroît que dans l'Inde il eft plus pur le long des rivières, dans l'intérieur des terres, qu'à leur embouchure, p, 434. —On en recueille en Bas-Languedoc, dans le golfe de Lion, d’aufli pur que dans l'Inde , ibid. — Obfervations fur les climats , les pofitions des pays qui en contiennent des mines naturelles, p. 435 & 436. — La proximité de la mer eft favorable à fa formation, p. 436. — L'ex- pofition des terres calcaires au foleil eft un des objets effentiels à {a formation, page 443. — Ne fe forme que jufqu'à 20 pieds de diftance de l'entrée des carrières, page 444. — On le trouve d'autant plus abondamment & plus L profondémeng T4) BLUE WOLENS : . MAT NÉ RES: 673 profondément dans les carrières, qu'elles font plus aérées, & que l'accès de l'air extérieur en change la température, p. 448 & 449. — Celui qu'on trouve dans les pierres calcaires leur eft tranfmis par des caufes étrangères & extérieures, page 449. — Ne fe'forme dans les carrières que dans l'efpace qui eft füujet aux variations du thermomètre, pages 446 & 447. — Ne fe produit, fuivant M. Rome , dans les habitations & dans les écuries, &c. que par la propriété qu'ont les fubftances animales de condenfer l'air , & par conféquent l'acide nitreux qu'il contient, page 451 & fuivantes. — Ne fe produit dans les caves, fuivant le même, que parce qu'elles condenfent l'air qui y circule, pages 452. — Celui des murailles des maifons ne s'y dépofe de même que par la différence de temm- pérature, page 454. — On ne le trouve à bafe d'alkali que dans les pays très- chauds , pages 458 & 460. — Peur fe former fans le fecours des fubftances végérales & animales, page 461. — Sa récolte prompte & abondante dépend de l'intelligence de ceux qui font chargés de le recueillir, page 473. — Il cft à bafe terreufe ou alkaline, felon les pofitions locales, page 479. — Il eft à bafe terreufe dans les caves, celliers, dans tous les endroits couverts, pages 480 , 484. — Il eft à bafe d'alkali végétal dans les terres expofées à l'air dans les climats chauds, p.480 , 484. — Eft compolé de parties égales d'acide nitreux & d'alkali végétal, page 480. — Sa formation tient en grande partie à la caufe qui produit la defcente du mercure dans le thermomètre, p. 487. — Se forme toujours dans les terres caïcaires, qui, par des circonftances particulières, peuvent être alternativement plus échauffées & plus refroidies que l'air environnant, pages 488, 489. — Celui qu'on retire des fubftances imprégnées d'urine, n'eft dû, fuivant M. Reme, qu'au refroidiflement que les fels occafionnent dans les corps qui en font humeétés, pages 490, 491. — Produit par l'union de la chaux vive à l'acide du bois, page 491. — S’accumule dans les murs en Brandebourg , parce qu'ils font placés dans des lieux humides & enveloppés d'exhalaifons urineufes, p. 497. — Kecucilli d'après les moyens de M. Neuhaus, ibid, — Pour en augmenter la récolte, les Indiens arrofent d'urine les terres propres à le produire, pages 498, 499. — Ne fe trouve à Mouceau que dans le bas des SAÉEAUR Pi 538. — On n'entrouve pluslorfqu'on cft parvenu à trente pieds au deffus des habitations , 26id. — Obtenu par la précipitation de la terre calcaire , des eaux mères, des craies de la Roche-Guyon, Authile, Mouceau, &c. pages 507 & fuivantes, — Obtenu par le leflivage des craies expofées 2 l'air pendant quinze mois, après avoir été dépouillées de tous les fels qu'elles pou- voient contenir, page 560. — ER à bafe calcaire, lorfqu'il fe forme éloigné de toute habitation , page 562. — Eft à bafe d'alkali végétal , lorfqu'il fe forme près des habitations , 2b:d. — Celui qui exifte dans la craie tend à fe montrer à la furface fous forme criftalline , & fous la figure de dendrites compofées de petites aiguilles, pages 562, 563. — Formation ces efflorefcences falpétrées , page 563. — Le Salpètre à bafe alkaline a befoin, pour fe former , du concours des exhalaifons animales , page $65. — A bafe terreufe , fe forme par l'action de l'air feul, £bid. — Il n'eft befoin que de très-peu d'exhalaifons animales pour la formation du Salpêtre à bafe alkaline dans les craies, page $66.— On en trouve de naturel en Touraine & en Saintonge, comme aux environs de la Roche-Guyon, pages 572 & fuivantes, — Se trouve abondamment dans une efpèce d'argile qui remplit les fentes psrpendiculaires des carrières de tuffeau, page 581. — Se trouve abondamment dans les carrières des environs de Chau- mont, Monthou, Bourré, Luynes, Saint-Marc, Mineroles, Trèves, Souzé en Touraine, pages 587 & fuivantes. — Dans les carrières de Sainte-Mefme & Saint- Savinien en Saintonge , page 606. — On en retire à bafe terreufe de l'analyfe des e 1 | À hEs é V + à à: 3 : j + su Fpt 5 pra RTE nl [4 à - - F4 ‘ h LT AT: 1° A - "LE like * : (er ET Yu NUDATTURTE Pad e ÿ ' 4 SO TT ns " A: 144 dés eh die ML De à MA, dir ï Fogtt 1E4 + ps 3 FEU Prada 9 de “en 2 vph dpi CL. } Ed à A Lee “> LA COTE AT 7 Ps ÿ" ; 4 J CRC | [D PRO LITE 2 sf £ Mt i- à mont ï nn + . 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