F35 -IBRAR4 + > HO0kG ee en Tee SMITHSONIAN. DEPOSIT SRUE ARIANE Ni a F, MÉMOIRES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE. à PARIS, EL 15 rue des Mathurins S. 3. MÉMOIRES DU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE, PAR LES PROFESSEURS DE CET ÉTABLISSEMENT. OUVRAGE ORNÉ DE GRAVURES. DÉDIÉ AU ROI. TOME ONZIÈME. A PARIS, CHEZ A. BELIN, IMPRIMEUR-LIBRAIRE, RUE DES MATHURINS S.-J., HÔTEL DE CLUNY. 1024. NOMS DES PROFESSEURS. (PAR ORDRE D'ANCIENNETÉ. ) ÎWessieurs , A. THouin. . . . . Culture et naturalisation des végétaux. PoRTAL. . ’. . . . ‘Anatomie de l’homme. DE JussrEu . . . . Botanique à la campagne. VANSPAENDONCK. . . Iconographie, ou l’art de dessiner et de peindre les "AM productions de la nature. LaAcÉPÈDE . . + . ” “Réptiles et poissons. Zoologie, DEsFoNTAINES. . . . Botanique au Muséum. Ds Lamarck. + . Insectes, coquilles, madrépores, etc. Gsorrroy-Sr.-HiraiRE. Zoolosie. Mammifères et oiseaux. CuviER. . « .< . + Anatomie des animaux. VAUQUELINe + + + + Chimie des Arts. LAUGIER. . + . + + :Chimie-générale. Corprer. . . . . . Géologie, ou Histoire naturelle du globe. BRONGNIART. . . « . Minéralogie. DELEUzE. . . . « . Secrétaire de la Société des Annales du Muséum. MÉMOIRES DU MUSEUM D'HISTOIRE NATURELLE. OBSERVATIONS - Sur les genres Leucas et PuLomrs. Description de plusieurs Espèces. PAR M. DESFONTAINES. / Luxvrus a réuni le genre Leonurus de Tournefort à celui du PAlomus, et il y à joint trois espèces qu’il a désignées sous les noms de PAlomus Zeylarica, Indica et Leonitis. Vahl, Willdenow et autres, en adoptant le genre PAlomis de Linnæus, y ont encore ajouté plusieurs espèces dont les organes de la fructification offrent les mêmes caractères que ceux des trois précédentes : telles sont les PAlornis Marti- nicensrs Jacq., decemdentata Wilid., bsflora et urticifolia Vabl, Cinensis Retz, que M. Brown en a séparés avec raison pour en former un genre particulier sous le nom de Leucas, emprunté sans doute de Burman FI. Zeyl., p. 40, qui avoit donné ce nom à une des espèces mentionnées ci-dessus (PAlomis biflora Vahl); et en effet les véritables Phlomis ont le calice à cinq angles et à cinq dents, la lèvre supérieure de la corolle arquée, abaïissée sur la lèvre infé- Mémm. du Muséurn. t. 11. I 2 Genres LEucas rieure, comprimée latéralement et imitant la forme d’un casque. Les Leucas, au contraire, ont le calice à dix stries, terminé par huit à dix dents, quelquefois inégales, la lèvre supérieure de la corolle en voûte, barbue et non compri- mée sur les côtés, caractères assez tranchés pour les distin- guer et en former un genre à part dans une famille aussi naturelle que les labiées, où les divisions génériques ne peuvent être établies que sur de légères différences. Les Phlomis Leonurus, Leonitis ex Nepetifolia de Linnæus doi- vent être réunis aux Leucas, parce que le prolongement de la lèvre supérieure de la corolle, seul caractère qui les en distingue, n’est pas suffisant pour les en séparer, d’autant plus que la corolle du PAlomis Nepetifolia, dont la lèvre supérieure a peu”de longueur, établit le passage des uns aux autres. ; Les Leucas ont de l’affinité avec les Leonurus de Lin- næus ; mais ces derniers ont le calice à cinq dents et deux stigmates égaux. Le calice des Leucas est à huit ou dix dents, et, comme l’a très-bien observé M. Brown, un de leurs stig- mates, de même que celui des PAlomis, est toujours beau- coup plus petit que l’autre. Nous ajouterons encore au genre Leucas sept espèces nouvelles apportées de l’Inde par M. Le- chenault, et une à celui du PAlomis, recueillie en Perse, aux environs de Bagdad, par Bruyère et Olivier. Toutes ces plantes se trouvent dans les herbiers du Muséum. .1. LEUCAS HELIANTEMIFOLIA. L. caule fruticoso ; foliis sessilibus, ellipticis, margine revolutis, subtus tomentosis ; verticillis florum approximatis, terminalibus. 1. LEUCAS HALIAN TUEMIFOLIA. 2. LEUCAS TERNIFOLIA. ET Promis. 3 Arbrisseau rameux, de dix à douze pouces de hauteur; tiges presque cylindriques; jeunes rameaux cotonneux, feuilles opposées, elliptiques, à bords repliés en dessous, très-entières, sessiles ou presque sessiles, de la grandeur et de la forme de celle de l’hélianthème commun, Æelian- themum vulgare; leur surface supérieure couverte de pe- tites soies jaunâtres, l’inférieure blanche et cotonneuse. Fleurs sessiles; verticilles peu nombreux, rapprochés au sommet des rameaux, accompagnés de bractées filiformes, soyeuses, aiguës, un peu plus courtes que les calices. Calice un peu évasé, cotonneux, strié à dix petites dents égales, droites, aiguës. Corolle couverte de petites soies ‘blanches, très-serrées , ressemblantes à du coton; lèvre supérieure courte, obtuse, entière, en voûte, recouvrant les étamines et le style; lin- férieure plus longue, jaune en dedans, à trois lobes obtus, le moyen plus grand que les latéraux, un peu échancré. Quatre étamines, didynames; anthères à deux lobes dis- tincts, étalés, réunis à la base, s’ouvrant transversalement d'un seul côté. Style arqué; deux stigmates, le re très-petit; quatre ovaires glabres. Cette jolie espèce est indigène de la presqu’ile de l'Inde; elle croit sur la base des montagnes de Nelligerry. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fi. 1. Une fleur grossie. Fic. 2. Une corolle ouverte avec les quatre étamines. Fic. 3. Une étamine. Fic. 4. Le style, les deux stigmates inégaux et les quatre ovaires. ra _ Genres. Leucas 2. LEUCAS TERNIFOLIA. L. herbacea, foliis lanceolatis, ternatis, subsessilibus, subtus tomentosis; verticillis florum approximatis terminalibus. Tige herbacée , vivace , rameuse, droite , cotonneuse, longue de douze à quinze pouces. Feuilles sessiles, lancéolées, ternées, quelquefois opposées deux à deux, très-entières, longues d’environ un pouce sur trois à quatre lignes de largeur, couvertes de soies courtes en dessus, cotonneuses et blanches en dessous. Verticilles de fleurs peu nombreux, rapprochés les uns des autres au sommet des tiges et des rameaux, composés - de plusieurs fleurs sessiles, accompagnées de bractées aï- auës, très-étroites, un peu plus courtes que les calices. Calice, corolle et organes sexuels, semblables à ceux de l'espèce précédente, dont celle-ci ne diffère que par ses tiges herbacées, par ses feuilles lancéolées, et- communé- ment opposées trois à trois; elle croit également sur la base des montagnes de Nelligerry. 3. LEUCAS LAMIIFOLIA.. L. herbacea, villosa ; foliis ovato-cordatis, breviter petiolatis; ver- ticillis multifloris, approximatis, terminalibus , dentibus calicinis elongatis. Tige herbacée, rameuse, tétragone, haute d'environ deux pieds, couverte de soies rousses. ] l'euilles ovales ou un peu en cœur, crénelées, larges d’un pouce à un pouce et demi sur deux de longueur, ciliées - sur les bords; leur surface supérieure couverte de soies ee Au 1. LEUCAS LAMIIFOZLIA. 2. LEUCAS LANCEHÆEFOL TA. ET Puromrs. ess rtD N rousses et couchées ; l’inférieure ridée, garnie de petites soies blanches étoilées, sillonnée de nervures obliques qui naissent de la côte moyenne et longitudinale ; pétioles courts. He 200 Fleurs verticillées; verticilles au nombre d’un à trois aux sommntés des tiges et des rameaux, confluens ou peu écar- tés, composés d’un grand nombre de fleurs très-serrées. Bractées ciliées, étroites, de la longueur des calices, ter- iminées par une petite pointe. Calice soyeux, à dix stries, couronné de dix dents séti- formes, ciliées, ouvertes, et d’un anneau intérieur de soies rousses et touflues, qui entoure immédiatement le tube de la corolle; elle ne diffère pas sensiblement de celle des es- pèces précédentes; le style et les étamines offrent également les mêmes caractères. Cette espèce est indigène des montagnes de Nelligerry ; elle se plaît, dit M. Liéchenault, dans les terrains fertiles. “EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fic. 1. Une fleur entiere. Fic. 2. Un calice ouvert. Fic. 3. Une fleur du Leucas ternifolia. 4. LEUCAS LANCEÆFOLIA. . L. herbacea ; foliis lanceolatis, integris, breviter petiolatis, oblique uervosis, subtus canescentibus; verticillis axillaribus, superis approxi- mais. Tige droite, herbacée, rameuse, tétragone, haute de sept 6 GENRES LEucas à huit pieds, suivant M. Lechenault; jeunes rameaux cou- verts de soies roussâtres. Feuilles opposées, lancéolées, longues de cinq à sept pouces, sur trois à cinq lignes de largeur, entières ou munies de quelques dents très-petites et très-écartées, marquées de nervures transversales obliques, qui naissent de la côte moyenne et longitudinale. Leur surface supérieure garnie de poils très-courts, l’inférieure couverte de soies blanches et couchées. Les pétioles courts, garnis de soies rousses. Verticilles axillaires, composés d’un grand nombre de fleurs sessiles ; les inférieurs distincts, ceux du sommet des rameaux et des tiges très-rapprochés. Bractées étroites, ciliées, de la longueur des calices, terminées par une petite pointe. Calice soyeux, à dix stries, à dx petites dents droites et aiguës. Corolle de la forme et de la grandeur de celle des espèces précédentes, un peu moins garnie de soies. Les étamines, le style et les stigmates, n'offrent aucune différence re- marquable. Cette espèce est indigène des montagnes de Nelligerry. . LEUCAS MARRUBIOIDES. L. ue pubescente; foliis ovatis, pubescentibus , crenato- serratis, verticillis distinctis, plurimis , multifloris. Tiges herbacées, tétragones, droites, couvertes de petites soies couchées sur sa surface. Feuilles ovales, soyeuses, blanches en dessous, plus courtes que les entre-nœuds, légèrement dentées en scie, Zorm : 27 - 1.LEUCAS MARRUBIOÏDHS. 2. LEUCAS PROCUMBENS. ET PHLomis. 7 longues de huit à neuf lignes sur quatre à cinq de lar- geur, ressemblantes à celles du Marrubium peregrinum Linn. Verticilles distincts le long des rameaux, dans les aisselles des feuilles, composés d’un grand nombre de fleurs sessiles, très-rapprochées les unes des autres, accompagnées de petites bractées sétiformes, ciliées, plus courtes que les calices. Calice cylindrique, soyeux, à dix stries longitudinales, terminé par dix petites dents droites, aiguës, à peu près égales. Corolle; petite lèvre supérieure entière, voûtée, obtuse, garnie de soies blanches, semblable à celles des espèces décrites précédemment ; lèvre inférieure jaune pâle, éga- lement à trois lobes, le moyen plus grand. Les étamines, le style, les stigmates, n’offrent aucune différence. Cette espèce est indigène de Ceilan. 6. LEUCAS PROGUMBENS. L. caule herbaceo, debili; foliis ovato-lanceolatis, serratis, gla- bris, nervosis; verticillis paucifloris ; floribus pedicellatis, Tige herbacée, grêle, glabre, tétragone, rameuse , tom- bante ou couchée, longue de deux pieds. Feuilles glabres, opposées, ovales-lancéolées, dentées en scie, les unes obtuses, les autres aiguës, longues de cinq à six lignes sur trois à quatre de largeur, marquées de nervures obliques; les supérieures plus courtes que les entre-nœuds; pétioles grêles, plus courts que les feuilles. 8 GENRES Lrucas Calice glabre, cylindrique, un peu évasé , à de stries, à dix petites dents droites aiguës, égales. Corolle jaune pâle; lèvre supérieure entière, en vote, couverte de petites soies blanches, plus longues; sur ses bords; lèvre. inférieure à trois lobes, obtus,, le moyen plus grand, Étamines, style et stigmates comme dos les, autres es- pèces. Le Leucas. procumbens. est indigène du Bengale. IL à beaucoup d’affinité avecle PAlomus biflora, Valh, Symb. bot., ou Leucas bifiora, Brown, Prod., décrit et figuré par Burman, Flor. Zeyl.;,, p. 140, tab. 63, dont. il diffère par ses. feuilles. lancéolées. et: dentées en scie. Celles du Lezucas biflora, sont, ovales, et bordées de, dents obtuses. Nous croyons utile d'observer que le Leucas bgflora, dont l’her- bier du Muséum possède. des échantillons recueillis à Ceïlan par M. Lechenault, a souvent les verticilles composés. de six à dix fleurs. \ 7. LEUCAS CAPITATA. L, foliis lanceolatis, glabris, petiolatis, serrulatis; verticillis com- pactis, terminalibus; bracteis angusto-lanceolatis, ciliatis, mucronatis. Tige droite, rameuse, tétragone, à angles obtus, excavée longitudinalement sur ses quatre faces. Feuilles lancéolées, glabres, longues. de: deux à trois pouces sur sept à huit lignes de largeur, bordées de petites dents aiguës; pétioles: courts. ë Tiges et rameaux terminés par une tête de: fleurs nom- breuses, serrées, accompagnées de longues feuilles; brac- Tor. 2. | 2727 LEUCAS CAPITAT'A. h] (AEUTE AAC) (NI VAN" RE NES FRA ANIES ET PuLromis. 9 tées nombreuses, étroites, lancéolées, ciliées, de la longueur des calices, terminées par une petite pointe. Calice un peu évasé, à dix dents droites, égales, aiguës, couronné intérieurement de petites soies. Corolle semblable à celle des espèces précédentes; lèvre supérieure également en voûte, obtuse, non comprimée, couverte de soies blanches’; l’inférieure a trois lobes, le moyen plus grand. Cette espèce est indigène de l'Inde. PHLOMIS BRUGUIERI. P. suffruticosa , tomentosa ; foliis ovato-lanceolatis , subsessilibus ; lacinüs calicis bracteisque elongatis ; verticillis confluentibus. Sous-arbrisseau d’environ un pied, dont toutes les parties sont couvertes d’un coton blanc et épais. Les tiges, qui sont droites, simples, ou rarement ramifiées, naissent plusieurs ensemble d’une même souche. Feuilles ovales lancéolées, presque sessiles, longues de deux à trois pouces sur huit à dix lignes de largeur, entières ou très-légèrement crénelées et un peu ridées. Fleurs sessiles, verticillées à la partie supérieure des tiges; verticilles axillaires, très-rapprochés ; bractées filiformes, barbues. Calice cotonneux, à cinq angles, à cinq divisions étroites, soyeuses, lâches et très-longues. Corolle d’un rouge foncé, cotonneuse à l’extérieur, de la grandeur de celle du PAlormis herbavent Lin. Lèvre supérieure arquée, en voûte, comprimée latérale- Mérm. du Muséum. v 17. 2 10 Genres Leucas ET PHzomis. ment, un peu échancrée au sommet. L’inférieure a trois lobes; le moyen, large, arrondi au sommet et légèrement crénelé. Quatre étamines didynames, rapprochées, presque égales en longueur, renfermées dans la lèvre supérieure de la co- rolle; les loges des anthères étalées latéralement, s’ouvrant d’un seul côté, les deux stigmates très-inégaux, caractères communs aux autres espèces de PAlomis, ainsi qu’à celles du ZLeucas, et déjà indiqués par M. Brown. Le Phlomis Bruguiert est indigène de Perse ; il a été découvert aux environs de Kermadan par Bruguière et Oli- vier. L’herbier du Muséum en possède des individus bien conservés. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fic. 1. Une fleur entiere avec les bractées. Fic. 2. Une corolle fendue longitudinalement. On y voit les quatre étamines, le style et les deux stigmates inégaux. er rn ; PS PHLOMIS BRUCÇCUIERZ. > lu L2 ais F4 Na lu La ce APE A DES AP ATTE Ma gi adPe) a Li (A LS doter IT MONOGRAPHIE DES GENRES SAUVAGESIA Er LAVRADIA. PAR M. AUGUSTE DE SAINT-HILAIRE. ( Lu à l'Académie des Sciences, le 27 octobre 1823.) Lzs ouvrages les plus utiles, sans doute, sont ceux qui, embrassant un vaste ensemble, permettent à leurs auteurs de se livrer à des considérations générales et de s'élever à des vues philosophiques. Mais la main qui construit l'édifice ne sauroit en même temps en préparer les matériaux, et si l’on peut espérer un Sys{ema naturæ qui approche de la perfec- tion, c’est lorsque les différens groupes qui doivent entrer dans cette composition immense, auront été traités séparément par des monographes attentifs. Ces considérations m’ont engagé à tracer aujourd'hui lamonographie des genres Saupagesia et Lapradia; et, comme ces genres sont extrêmement voisins, j'ai cru devoir présenter leur histoire dans le même cadre; ce 2 * 12. GENRES SAUVAGESIA sera le meilleur moyen de faire connoître en quoi ils se res- semblent et par quels caractères ils diffèrent entre eux. SL Caractères généraux ; observations sur les caractères. Les genres Sauvagesia et Lapradia réunissent une ou deux plantes herbacées et des sous-arbrisseaux glabres dans toutes leurs parties, d’un aspect généralement agréable et d’un port élégant. Dans les espèces dont j'ai examiné les rAGNES, je les ai trouvées fibreuses. Les Tices sont presque toujours droites et cylindriques, quelquefois simples, plus souvent rameuses. Les FEUILLES sont constamment alternes, simples, portées par un pétiole extrêmement court, rarement tout-à-fait ses- siles, le plus souvent dentées en scie et quelquefois entières dans le Zavradia. Lorsqu’elles sont entières, on n’y aperçoit d'autre nervure que la moyenne; mais le plus souvent elles portent des veines latérales qui, fort rapprochées et paral- lèles, les font paroître striées plus ou moins finement. Un bord calleux fait ordinairement le tour de la feuille; il se montre des deux côtés dans quelques espèces, et dans d’autres il ne paroïît qu’en dessous. Deux srrpures caulinaires accompagnent la feuille, l’une à droite, l’autre à gauche, et, après sa chûte, elles persistent sur la tige. Elles sont constamment ciliées, roussâtres, mem- braneuses, scarieuses, ou du moins d’une consistance sèche. Si un savant laborieux les a décrites comme axillaires, c’est ET JL AVRADIA. 13 que sans doute il n’avoit sous les yeux que des échantillons mal conservés. é Ixrcorescence. Tantôt les fleurs sont axillaires; tantôt elles sont disposées en grappes simples ou composées : dans une seule espèce eiles offrent des panicules. Les grappes com- mencent toujours, à ce qu'il paroït, par être terminales; mais, dans plusieurs espèces, elles deviennent latérales par l'allongement du bourgeon le plus voisin. PéponcuLes, Pénicezes. Les grappes ou panicules sont or- dinairement pédonculées, et chaque fleur est toujours portée par un pédicelle filiforme ou capillaire, le plus souvent droit et quelquefois penché. Bracrées. Les pédicelles et les rameaux des grappes ou des panicules sont accompagnées de bractées qui, n'étant, comme partout ailleurs, que des feuilles moins développées, em- pruntent ordinairement quelque chose des formes de celles de la tige; qui également sont presque toujours accompagnées de stipules ciliées, et qui enfin diminuent de grandeur à mesure qu'elles s'élèvent davantage, parce qu’alors il n’arrive jusqu’à elles qué des sucs moins abondans. . Parries De LA FLEUR. Les fleurs sont toujours hermaphro- dites et présentent à leur centre un seul pistil. Mais tandis que, dans la plupart des autres végétaux, on ne trouve autour des organes femelles que deux ou trois verticilles, le Lapradia en présente quatre et le Sawvagesia cinq. Ce sont : r0. le calice; 20. une corolle extérieure; 30. des filets plus ou moins nombreux qui manquent dans le Lavradia; 4°. une corolle intérieure; 50. les étamines. On sait que, dans la plupart des autres plantes, chacun des verticilles qui composent la fleur 1/ GENRES SAUVAGESIA est le plus souvent alterne avec les verticilles les plus voisins; ainsi les pétales le sont ordinairement avec le calice et les éta- mines avec les pétales. Cette même loi se maintient ici mal- gré l’augmentation du nombre des verticilles. Les filets placés au-dessus de la corolle extérieure se trouvent alternes avec les pétales, et, par conséquent, opposés aux divisions du calice, quand ils sont en nombre défini ou disposés par groupe; les pétales de la corolle intérieure , lorsqu'elle est polÿpétale, comme dans le Sauvagesia, alternent avec les filets et les divisions du calice, et sont opposés aux pétales extérieurs; les étamines enfin alternent avec les deux rangs de pétales et sont opposées aux filets et aux divisions calici- nales. On voit, d’après ceci, que je m’étois trompé, en disant autrefois (Obs. Sauv. in Mem. Mus., vol. 11, pag. 215 et suiv.) que les pétales extérieurs du $. erecta étoient alternes avec les pétales intérieurs : c'est une inadvertance que je dois d'autant plus m'empresser de réparer ici, qu’elle a induit d’autres botanistes en erreur. | Carice. Le calice a été indiqué tantôt comme 5-partite et tantôt comme étant composé de cinq folioles distinctes. Quelques espèces peuvent laisser du doute; mais, comme il en est d’autres où l’enveloppe dont il s’agit n’est évidemment que 5-partite, j'ai cru devoir la décrire ainsi dans tous les cas. Ses cinq divisions sont, dans les deux genres, ovales ou ovales-lancéolées , ou ovales-oblongues, le plus souvent ai- guës, constamment concaves, souvent un peu membraneuses sur les bords, quelquefois colorées. Pendant la floraison, elles sont constamment étalées; mais elles se replient sur le fruit et persistent autour de lui. Dans une foule de plantes, on ET LAVRADIA. 15 voit les mêmes formes se reproduire dans les diverses parties avec des altérations plus ou moins sensibles. Les genres La- vradia et Sauvagesia nous offrent dans leur calice un nouvel exemple de ce fait, car l'extrémité de ses divisions est sou- vent bordée de cils, comme le sont les stipules, et comme on en trouve même, dans quelques espèces, à la pointe de la feuille. Corozre exrérieure. Elle se compose de cinq pétales hy- pogynes, caducs, parfaitement entiers, étalés, blancs ou roses, qui, avant la floraison, recouvrent chacun par un de leurs bords une portion du pétale voisin (Præfloratio contorta, Dec.). La première différence qui distingue les genres Sau- vagesia et Lapradia se trouve dans la corolle; car, dans le premier, les pétales, largement onguiculés, sont obovés et très-obtus, et, par conséquent, leur plus grande largeur est au sommet ; tandis que dans le Lapradia où les parties de la corolle sont simplement ovales ou lancéolées, c’est au sommet qu'est leur moindre largeur. Linné, qui dans son Genera avoit très-bien décrit les pétales du S. erecfa, crut que, dans son Systema naturæ, où il visoit surtout à la concision, il pourroit donner tout à la fois une idée de la corolle et des filets, en disant, avec Pat. Brown, que les pétales étoient fran- gés ; mais aucune considération ne doit faire sacrifier la vérité; des esprits trop timides perpétuent jusqu'aux moindres erreurs des grands hommes, et, de nos jours encore, lorsque le S. erecta est dans tous les herbiers, on a répété que les pétales des Saupagesia étoient garnis de franges. Frcers. Au-dessus des pétales, on trouve dans le seul genre Sauvagesia un ou plusieurs rangs de filets fort grèles à leur 16 GENRES SAUVAGESIA base, plus épaissis au sommet, colorés, le plus souvent fort nombreux, quelquefois au nombre de cinq, de trois, ou même moins; qui affectent différentes formes; qui tantôt présentent celles d’une massue, d’un clou ou d’une spatule, et qui tantôt sont réniformes à leur sommet, et offrent ainsi l’image d’une étamine terminée par son anthère. Linné, dans la seconde édition de son Genera, avoit décrit ces filets comme étant placés entre le calice et la corolle; mais leur véritable situation a été reconnue non-seulement par moi, mais par Jussieu, Ruiz et Pavon, Kunth, etc., et très-bien figurée par Aublet, Lamark, et plus récemment par Sprengel (Grunds. , tab. 6, fig. 12). Corozre inréÉrtœurE. Des botanistes ont désigné cette en- veloppe par les mots de zectaire où d’écaille; mais comme elle ne diffère de toutes les corolles connues, ni par sa forme ni par sa consistance, et que si elle existoit seule, personne ne seroit tenté de lui donner un autre nom que celui de co- rolle, c’est également ainsi que j'ai cru devoir l'appeler. Dans le Saupagesta, la corolle intérieure est à cinq pétales distincts, allongés, obtus au sommet, et qui mutuellement se recou- vrent par leurs bords. Le Layradia, et c’est la troisième différence des deux genres, le Lapradia, dis-je, présente une corolle monopétale, ovoïde, conique, fort étroite à son som- met, et dont le bord est crénelé ou denticulé, Cette corolle est constamment plus colorée que DEMATARE ét te un peu celle des bruyères. "1" x EÉramnes: Dans les deux genrés on les trouve constamment au nombre de éinq. Elles sont toujours incluses dans la corolle intérieure, et, comme je l'ai dit, alternes, dans le Sauvagesia, ET LAVRADIA. 17 avec les pétales extérieurs. Cette même position est évidente dans le Lapradia, s'il ne s’agit que des pétales extérieurs; mais ici on ne peut déterminer la situation des étamines par rapport à la corolle intérieure, parce que ses dents ou créne- lures sont ordinairement fort petites, et souvent au nombre de dix. Les filets sont très-courts; le connectif est parfaite- ment continu avec le filet; l’anthère est attachée par sa base, et, de plus, immobile, J’avois dit autrefois que, dans le Sau- vagesia erecta, la face de cette dernière étoit tournée vers les corolles (Obs. Sauv. in Mem. Mus., vol. 111 ); depuis j’ai retrouvé ce même caractère dans toutes les espèces des deux genres. Je dois ajouter que, dans l’un et l’autre, l’anthère est à deux loges, d’une couleur roussâtre, et qu’elle s'ouvre laté- ralement; mais les fentes qui se prolongent jusqu’à la base dans le Lapradia s'arrêtent dans le Saupagesia plus ou moins près de l'extrémité supérieure. La forme de cet organe con- tribue encore à distinguer les deux genres : il est, dans le der- nier, étroit et linéaire; dans le Lavradia , au contraire, il se montre plus ou moins elliptique, et quelquefois membra- neux. C’est la quatrième et dernière différence qui se trouve entre les deux genres. Observations sur les Filets, la Corolle intérieure et Les Étamines. On doit naturellement se demander ce que sont ces filets et cette corolle intérieure intermédiaire entre la co- rolle extérieure et les étamines. Pourrépondre à cette question, il est nécessaire, suivant le conseil d’un habile iconographe (7. Turp. Icon.), d'examiner leur situation relative. Les filets sont placés au-dessus des pétales et alternent avec eux; or, cette position est celle qu'ont ordinairement les étamines; Mém. du Muséum. ?. 11. 3 18 GENRES SAUVAGESIA donc ces corps doivent avoir une grande analogie avec les or- ganes mâles , et leur forme ajoute encore à cette analogie, car ils sont toujours épaissis au sommet, comme l’anthère l’est par rapport au filament, et quelquefois même is ont, à leur extrémité, toute la forme d’une véritable anthère. Il est à re- marquer de plus qu’ils sont placés, avec la corolle intérieure et les étamines proprement dites, sur le court gynophore qui porte l’ovaire, tandis que les pétales extérieurs sont insérés au-dessous de cette petite colonne; il est à remarquer encore que les filets tiennent par leur base à l'extérieur de la corolle interne, tandis que les étamines sont soudées avec elle du côté intérieur; enfin on ne doit pas oublier que ces trois verticilles persistent ensemble autour du fruit, pendant que la corolle extérieure est caduque. D'après tout ceci, il est clair que les filets, lacorolle intérieure etles étamines, ont plus de rapports entre eux qu'ils n’en ont avec les pétales extérieurs; en un mot, nés du même support, ayant une base commune, ne se détruisant qu'ensemble, ils paroïssent réellement ne former qu’un seul corps. Les filets et la corolle intérieure ne seront donc en quelque sorte que des appendices des étamines, ou, si lon veut, des étamines dégursées où avportées; ex- pressions que l’on auroit raison de reprocher aux botanistes, s'ils les prenoient dans un sens littéral, mais dont on ne s’est servi, je crois, que métaphoriquement, pour indiquer la plus grande analogie possible. Quoi qu'il en soit, puisque voilà une enveloppe absolument semblable à une corolle, qui cependant fait en quelque sorte partie des étamines, il est clair que nous trouvons ici une preuve de plus de cette vérité annoncée depuis si long-temps, savoir, l'extrême analogie de la corolle avec les organes mâles. ET LAVRADIA. 19 Le sryce est cylindrique, le plus souvent grêle, quelquefois un peu rétréci à sa base, toujours persistant. Le sTIGMATE est terminal et se distingue à peine. Ovarme. Il est le plus souvent d’une forme ovoïde. Dans plusieurs espèces, je l’ai vu porté sur un court gynophore qui, comme je l'ai dit, soutient à la fois les étamines, la co- rolle interne et les filets, et, si je n’ai pas noté l’existence de ce support dans toutes les espèces que j'ai trouvées, c’est que probablement il m’'aura échappé à cause de son peu de lon- gueur. L'organisation interne de l’ovaire diffère peu de celui de la capsule; mais, pendant la maturation, le bord rentrant des valves paroïît se développer dans une proportion plus sensible que les autres parties. Fruir. L’ovaire se change, dans les deux genres, en un fruit capsulaire , et reste entouré des filets de la corolle interne et des étamines qui persistent. Comme la corolle interne du La- vradia ne prend plus d’accroissement après la floraison, l’o- vaire, en grossissant, la déchire, et ce sont les lambeaux de cette enveloppe qui persistent autour de lui. Rarement la capsule est simplement ovoïde; plus souvent elle est ovoïde, 3-lobée et très-aigué. Elle s’ouvre en trois valves; mais celles- ci ne s'étendent guère au-delà du milieu de sa longueur. Intérieurement elle est ordinairement vide dans une partie considérable à partir du sommet. Le reste de son organisation se nuance dans les différentes espèces. Dans le Savpagesia tenella, la capsule est à une seule loge; c’est le bord des valves qui est seminifère, mais elles ne rentrent nullement en dedans, et l’intérieur de la loge n'offre pas l'inégalité la plus légère. Dans les Sauvagesia erecta et Sprengelii, les 3 # 20 GENRES SAUVAGESIA valves- rentrent en dedans à commencer au tiers ou à la moitié de leur longueur; elles se prolongent fort avant vers le centre, mais sans se toucher en aucun point, ni se recourber vers la circonférence, et elles portent les semences à leur extrémité. Les bords seminifères rentrent à peine dans le Sau- vagesia linearifolia; cependant, tout-à-fait à leur base, ils avancent jusqu’au centre, serencontrent, sesoudent et forment réellement trois eloisons extrêmement basses et autant de loges. Les valves rentrent davantage dans le S. racemosa, qui d’ailleurs offre la même organisation. Je retrouve des carac- tères à peu près semblables chez le ZLavradia glandulosa , si ce n’est que les valves rentrent en dedans, en décrivant un arc renversé. Dans le Z. V’ellozu, le bord des valves est nu jusqu'à moitié; plus bas, il devient seminifère; mais, à leur base, ces mêmes valves se prolongent vers le centre, en décrivant aussi un arc; se soudant intimement, elles forment trois cloisons et autant de loges; et ce qu’il y a de très-remar- quable, c’est que les semences ne se trouvent point dans l'angle de ces loges, mais seulement sur le sommet des cloi- sons continu avec le bord libre et également seminifère. Enfin, dans le Lapradia elegantissima., les bords des valves ne sont nullement seminifères ; mais, au tiers inférieur de la capsule, ces mêmes bords avancent jusqu’au centre en dessinant un croissant, se soudent intimement, forment trois cloisons et trois loges, et c’est seulement au bord libre supérieur et en croissant de ces cloisons, que sont attachées les semences : organisation dont je n'ai jusquici jamais trouvé aucun exemple. Observations sur la Capsule. Lies caractères que je viens ET LAvVRADIA. 21 d'indiquer dans les genres Sauvagesia et Lavpradia, doi- vent nécessairement donner lieu à quelques observations. 10, Contre l’opinion de M. de Jussieu, j'ai cru long-temps, avec lillustre Richard, qu'on ne devoit dire, dans aucun cas, que les cloisons étoient formées par le bord rentrant des valves (77. An. Fr., p. 16); mais les divers modes d’or- ganisation que j'ai signalés plus haut achèvent de démontrer que ce sont les valves qui, dans la déhiscence septicide, forment les cloisons, ou, pour parler d’une manière plus exacte, que celles-ci sont continues avec le bord des valves, et ne forment qu'un corps avec elles. En effet, nous voyons le bord mème de la valve porter les semences sans aucune expansion quelconque; ailleurs il s’avance peu à peu, sui- vant les espèces, vers le centre de la loge; ailleurs encore les bords rentrans se soudent inférieurement au centre de la capsule, et y forment trois cloisons intimement unies; enfin, pour que nous n’ayons aucun doute sur l’origine des trois cloisons, nous voyons ces mêmes bords s’avancer en biais, de la circonférence du péricarpe vers le centre, et ne se réu- nir qu'après avoir éprouvé dans le même fruit tous les dé- grés d'expansion. 20, Avec d’autres botanistes, j'avois cherché dans quels cas l'axe de la columelle d’un fruit appartient au système central, c’est-à-dire, à celui de la tige et des parties qui la représentent (1), et dans quels cas il dépend du système latéral (2), celui des organes placés latéralement par rapport à la tige. Comme ces botanistes, j'avois été tenté de croire (1) Système axifere, Turp. (2) Systeme apendiculaire, Turp. 22 GENRES SAUVAGESIA que cet axe n’étoit que la prolongation des vaisseaux du pé- doncule, quand il persiste après la déhiscence au centre de la capsule, et je m’étois imaginé, au contraire, qu'il dépen- doit des cloisons, lorsque, par la déhiscence, il se sépare, et qu'il est par parties entrainé avec elles. Mais la nature, comme l’a si bien dit M. Mirbel dans des cas analogues, la nature réprouve toutes ces distinctions rigoureuses ; tantôt elle laisse des intervalles entre les formes qu’elle se plait à varier à l'infini, et plus souvent elle les nuance par des dé- gradations insensibles. Nous savons que les semences éma- nent toujours d’un faisceau de fibres simple ou divisé, qu’on a appelé cordon pistillaire; et, lorsque le faisceau existe sur le bord même des valves, sans aucune expansion inter- médiaire, nous pouvons dire, sans aucun doute, qu’il dépend du système latéral. Si une expansion se manifeste entre le bord des valves et le cordon, mais qu’elle laisse encore un large intervalle vide au centre de la loge, nous attribuerons toujours les placentas au système latéral, et nous dirons en- core qu'ils sont pariétaux. Mais, si, après s'être avancés vers le centre, de manière à ne plus laisser entre eux que la pointe d’une épingle, ils arrivent enfin, dans d’autres espèces, jusqu'au centre de la loge, comme cela a lieu dans une foule de familles, telles que les Aypéricées, les Gentianées, les Cistées, etc.; que là ils se soudent par le moyen d’un parenchyme intermédiaire, et que, placés immédiatement au-dessus du pédoncule, ils paroïssent continus avec lui; à quel système appartiendront-ils? Je crois voir qu'en général, après la déhiscence, l’axe reste isolé au centre de la capsule quand les cloisons sont peu épaisses, et que les valves, s’é- ET LAvVRADIA, 23 cartant, les déchirent sans peine ; je vois que les cloisons entrainent avec elles les cordons pistillaires, et qu'il ne reste rien au centre, quand ceux-ci n’étoient unis que par un tissu cellulaire rare où peu serré; qu’enfin il n’y a point de sépa- ration, quand la ténacité du parenchyme de la cloison et celle de l’axe sont à peu près égales. Si l’un de ces divers modes se trouvoit avoir de la constance dans une famille évidemment naturelle, il est.évident qu’il pourroit, comme tout autre caractère, servir de pierre de touche; mais, il faut le répéter, suivons la nature dans toutes ses nuances, évitons de lui tracer ces limites fixes si commodes pour notre esprit, et dont elle s’écarte sans cesse, et ne cherchons point à porter une rigueur mathématique où elle s’est plu à laisser du vague et de l'incertitude. Semences. Elles sont attachées sur deux rangs, et par de petits cordons ombilicaux, à la partie qui leur sert de pla- centa. Elles tiennent tout à la fois de la forme elliptique et de la forme arrondie; elles sont fort petites, et, dans toutes les espèces où je les ai observées, je les ai trouvées mar- quées de points enfoncés disposés par séries. Elles présentent à leur extérieur une raphe et une chalaze terminale. TÉGUMENT PROPRE Crustacé. Omuaicic terminal. PéRispeRME charnu et un peu succulent. Emsrvon. Je l'ai toujours trouvé placé dans l’axe du pé- risperme. Il est droit, à peu près cylindrique, assez long et obtus aux deux extrémités. La radicule est tournée vers l'ombilic (ex. : S. erecta), et plus res que les cotylédons (ex. : S. racemosa). - 24 GENRES SAUVAGESIA S II. Ærstoire. Surian fut, à ce qu'il paroît, le premier qui apporta des Antilles en Europe la plante dont on a fait le type du genre Sauvagesia. I lindiqua dans son herbier sous le nom d’Yaoba, emprunté des Caraïbes, et à ce nom il ajouta une phrase insignifiante, comme on en faisoit si souvent alors. Quelques échantillons recueillis par Surian passèrent dans l'herbier de Vaillant, avec la même phrase et toujours le nom d'Yaoba (1); mais, ni Vaillant, ni le compagnon de Plumier, ne publièrent rien sur notre plante. Environ un demi-siècle plus tard, P. Brown parcouroit la Jamaïque. Ÿ ayant découvert l'espèce que Surian avoit trouvée dans nos îles, il lui donna le nom d’/ron, et, en 1756, il la fit connoître dans son Historia naturalis Ja- maïcæ, par une figure passable et par une phrase assez exacte. Une description écrite en anglais, et qui, dans l’ou- vrage de Brown, vient à la suite de la phrase latine,#peint assez bien les caractères de la végétation ; mais ceux de la fleur y sont tracés tout à la fois d’une manière inexacte et incomplète ; car l’auteur, confondant les étamines stériles avec les pétales, décrit ces derniers comme s'ils étoient frangés, et il ne fait aucune mention de la doblue corolle. Tandis que Brown retrouvoit à la Jamaïque l Yaoba de Surian, Linné l’étudioit en Europe sur des échantillons qui, ESS (1) J'ai puisé ces détails dans l’herbier de Surian, conservé par M: de Jussieu, et dans celui de Vaillant qui fait partie des collections du Muséum de Paris. ET LAVRADIA. 25 sans doute, venoient originairement de ce dernier voyageur. Ayant saisi les caractères de cette plante, il vit qu’elle devoit former un genre distinct , et il la dédia au médecin Sau- vages, qui lui avoit fait le généreux abandon de son herbier. Ce fut en 1742, dans la seconde édition de son Genera Plantarum, que Linné décrivit son nouveau genre ; mais bientôt il nes en Saupagesia le nom de Sauvagea qu'il lui avoit donné d’abord. Le Sauvagesia fut cité plu- sieurs fois dans le PAosophia botanica, et indiqué dans la première édition du Species, avec des observations assez exactes, où l’auteur compare le port de sa plante à celle de l’Æypericum, et beaucoup plus heureusement à celui du Corchorus. En montrant tout ce que fit Linné pour la coonnissance de notre plante, nous ne saurions pourtant nous empêcher d'exprimer quelque surprise de ce qu’au milieu des nom- breux caractères qui la distinguent, il lui ait choisi le moins remarquable peut-être pour nom spécifique, et qu'il l'ait appelée Sauvagesia erecta. S'il avoit eu sous les yeux deux Sauvagesia, et que l’un d'eux eût été rampant (1), il auroit ‘été fort naturel sans doute qu'il donnât à l’autre le nom d'erecta ; mais, comme il n’en connoissoit qu’un, et que les neuf-dixièmes peut-être des végétaux qui couvrent la (1) Quelques auteurs laïssent au féminin, en français, les noms de plantes qui, empruntés du latin, sont au féminin dans cette langue ; d’autres au contraire font masculin en français tous les noms latins, quel que soit leur genre dans la langue originale. J’adopte ce dernier parti parce qu’il me paroît conforme à l’ancienne regle de notre grammaire qui veut que les mots étrangers empruntés sans au— cune altération prennent toujours le genre masculin (ex. :.opera.) Mérm. du Muséum, t. 11. 4 26 GENRES SAUVAGESIA terre ont des tiges droites, il étoit vraisemblable que les espèces que l’on découvriroit encore présenteroient le même caractère, et qu’alors la première ne seroit plus distinguée. Mais en supposant même que le S. erecta restât la seule espèce de son genre, ce nom lui convenoit si peu que ses tiges sont moins souvent droites qu’elles ne sont étalées ou ascendantes; ce qui a été, pour les successeurs de Linné, la source d’une foule d’incertitudes et de quelques erreurs; car il étoit difficile de penser qu’une plante à tiges cou- chées füt la même qu’on appeloit erecta. Linné, au reste, ne dut pas tarder à s’apercevoir de cette faute; car, dans la seconde édition de son Spectes, où il admit pour syno- nyme l’/ron de Brown, il reconnut, avec la sagacité qui le distinguoit, que cette plante ne pouvoit pas même être considérée comme une variété du S. erecta ; et cependant l’auteur de l’'Arstoria Jamaïcæ dit expressément que sa plante a les tiges ascendantes. ' Jaquin parcouroit les Antilles, pendant que Linné observoit en Europe. Ayant retrouvé à la Martinique la plante de Brown, il en publia dans ses Strpes Americanæ, imprimés en 1763, une figure assez bonne et une description détaillée. Il adopta les noms générique et spécifique que Linné avoit indiqués dans la première édition de son Spectes ; et Linné à son tour cita Jaquin dans les éditions de son Genera, pos- térieures à l’ouvrage du botaniste viennois. Quelques années plus tard (1775), Aublet faisoit paroître ‘la description des plantes qu’il avoit recueillies à Cayenne. Le Saupagesia erecta fui du nombre; il en donna une nouvelle figure, et à cette première espèce il prétendit en ET LAVRADIA. 27 ajouter une seconde, son Sauvagesia Adima;, dont il publia également la figure avec une description très-détaillée. Linné et Jaquin avoient reconnu que leur plante et celle de Brown n'étoient qu’une même espèce, et, ainsi que je l'ai dit, il ne les avoit pas même distinguées comme variétés. Aublet en fit deux plantes distinctes; il rapporta à son Ædima celle de Brown, et à son erecta celle de Jaquin. Cela seul devoit suflire pour faire naître des doutes sur l'existence de | Ædima comme espèce; car qu'étoit-ce quele témoignage d’Aublet contre celui réuni de Linné-et'de Jaquin? Il s’en faut bien sans doute que je ne sache reconnoître le mérite de la Flore de Cayenne ; mais il faut avouer qu’ilest peu de livres’ où l’on trouve des inégalités aussi frappantes, et il est difficile de ne pas y reconnoitre les traces de deux mains différentes. Ainsi, tandis que, sous le nom d’Æduma (vol. 1, p. 252 et 253), on trouve dans ce livre une description excellente du $. erecta, on voit cette même espèce reproduite une page plus loin avec le nom Linnéen. Il suflit, au reste, de jeter un coup d'œil sur les figures de ces plantes pour reconnoître leur identité; tous les caractères sont les mêmes, et si le S. erecta est plus petit, c’est qu’il est venu, comme le dit Aublet (1. e. p. 255), dans une terre sablonneuse ; de là ses tiges plus grèles, ses feuilles plus petites, ses pédon- cules plus courts. Quant aux feuilles très-rapprochées qu’Au- blet représente à la naissance de la tige, elles sont encore un signe de la foiblesse de la plante; ce sont, comme j'en ai eu des exemples: au Brésil, ‘celles des bourgeons qui étoient nés à l’aisselle des premières feuilles ‘déj tombées, et si ces bourgeons ne se sont point étendus en rameaux, 4* 28 GENRES SAUVAGESIA c'est qu'un: terrain trop maigre ne leur fournissoit point les sucs nécessaires. Îl'n’est aucune des plantes de nos cam- pagnes. qui n’oftre :à chaque pas des différences plus sen- siblés que les,S: 4dina et erectæ d'Aublet; et, malgré la scrupuleuse attention avec laquelle on distingue aujourd’hui les, moindres, variétés, on: a presque toujours le: bon esprit de négliger celles qui ont aussi peu d'importance. Ces considérations n’ont point échappé à Willdenow(7oy. Sp. 1, p. 1185), car il indique le-S. Ædima d’Aublet comme un double emploi de lerecta ;:et, dans le nouveau Species, imprimé en 1797, l'on ne trouve toujours qu'une seule es-. pèce de Sauragesia. Mais tel est le danger des erreurs, qu’elles se propagent long-temps encore après qu’elles: ont été reconnues par de bons esprits. I suflit qu’une espèce ait été indiquée par un, botaniste pour que ceux qui le suivent persistent. à la. retrouver; les compilateurs , afin que rien ne leur échappe, l’inscrivent dans leurs catalogues; et c’est. ainsi: que) lesi espèces imaginaires, les doubles em- plois, les fausses indications. de localités, se perpétuent, même dans.les Klorés des pays les:mieux connus et les plus fréquentés. 19 Le plan. que le savant Lamark suivoit dans ses [Uustra= tions.ne lui permettoit d'entrer. dans aucune discussion ; il admit, comme espèces distinctes le S. erecta Li. et l {dima de:la Flore-de-Câyenné;, et emprunta, pour les appliquer à ce dernier, les figures d’Aublet et de Brown, qu'il considéroit comme représentant deux:variétés différentes. Mais si M. La- mark æépétoitun double emploi, en même tempsil faisoit con- MOIS JHLOU ET LAVRADIA. 29 noître, par une phrase excellente, une espèce bien réelle- ment nouvelle, le Sauvagesia net (AL. , vol. 11, p. 119), que M. Claude Richard avoit recueillie à la Guyane. C’étoit, depuis Surian, la première espèce véritable qui eût été ajou- tée au genre does veste. Le laborieux continuateur de M. de Lamark donna quel- ques détails de plus sur cette dernière plante (Ene., vol. vr, p. 669); il conserva les S. erecta et Adimna. comme espèces distinctes ; mais deux passages de son livre (1. c., p. 669 et 670) prouvent suflisamment qu'il étoit tenté de réunir - ces plantes; et qu'il ne les conserva que par respect pour ceux qui l’avoient précédé. , Cependant M. Dupetit-Thouars, de retour de ses voyages, commença à publier la description des nouveaux genres qu’il avoit recueillis ; et, dans une des excellentes disserta- tions qu'il a répandues dans son ouvrage, il annonça qu'il avoit trouvé un Saupagesia dans l'ile de Madagascar (Afr., p. 58). 2 M. Persoon, rédigeant son utile Syopsis, ne put se per- suader qu'une espèce de Madagascar füt la même que celle qui croit à Cayenne et aux Antilles, et il signala la plante d'Afrique comme une espèce distincte sous le nom de S. 7u- ans (Syn.1,p. 253). Mais les caractères indiqués par Persoon conviennent également bien au $. erecta, et il ne peut plus rester de doutes sur leur identité, car M. Dupetit-Thouars a bien voulu me permettre de comparer les échantillons recueillis à Madagascar avec ceux que j'ai rapportés du Brésil, et nous avons reconnu, non sans quelque surprise, 30 GENRES SAUVAGESIA qu'ils ne pouvoient pas même être distingués comme va- riétés (r). Il étoit de la destinée du S°. erecta de donner lieu à une suite de doubles emplois. Ruiz et Pavon l’avoient aussi trouvé au Pérou (F1. Per., t. m1, p. 11), ils lui avoient conservé son nom, et ils en avoient publié une description détaillée où ils reconnoissent qu’il existe souvent deux ou trois fleurs à l’ais-- selle des feuilles. Comme ce caractère n’avoit encore été si- gnalé par personne, Rœmer etSchultes crurent qu'il indiquoit une nouvelle espèce, et désignèrent, dans leur utile ouvrage, la plante du Pérou sous le nom de S. Peruviana. Mais déjà on avoit pu remarquer des fleurs disposées deux à deux dans la figure attribuée par Aublet à son S. dima ; les échantillons de Cayenne; des Antilles et du Brésil ont indifféremment une ou deux fleurs à l’aisselle de leurs feuilles; ceux recueillis au Pérou par M. de Humboldt, et qui ont des fleurs binées et ternées comme la plante de Ruiz et Pavon, ne diffèrent nullement de celle de Cayenne; enfin, MM. Kunth et Persoon n'ont pas hésité à rapporter la plante de Ruiz et Pavon au S. erecta, et en effet, jusqu’à ceux-ci, il n’avoit été fait de cette espèce aucune description plus parfaite que la leur. Cependant la confusion causée par l’ancienne erreur d’Au- bletétoit arrivée à son dernier période. M. Rœmer et Schultes admirent les S. Ædima et erecta, et jugeant avec raison que les observations de Linné conviennent également à tous les (x) C’est ce double emploi de M. Persoon qui a porté M. de Candolle à citer, dans son excellente Géographie botanique (NVoy. le Dict. des Sciences naturelles), le genre Sauvagesia comme un de ceux dont les espèces peu nombreuses sont par- tagées entre les deux mondes. ET LAVRADIA. 31 deux , ils ne savent plus auquel ils doivent les attribuer, et prennent le parti de ne les rapporter ni à l’un ni à l’autre. Ainsi. le nom de Linné subsiste encore dans le nouveau Sys- tema , mais Sans la citation de son auteur, et c’est ainsi qu’il a passé dans l’utile compilation de M. Steudel. Cette faute cependant n’est que la conséquence naturelle de celle d’Au- blet;et loin de pouvoir la reprocher aux auteurs du Systeme , elle est bien plutôt une preuve de leur logique et de leur exactitude. Quoi qu'il en soit, les cinq espèces citées par Rœmer et Schultes se réduisent toujours à deux, Sauvagesia erecta Lin. et enella Lam .; les trois autres, Ædima, Perusiana, nutans, ne sont, comme je l'ai prouvé, que de doubles emplois de la première; et cependant, par une singularité fort remar- quable, l’un de ces doubles emplois vient encore d’être ré- pété sous un nom différent. Moncino et Secé ayant trouvé au Mexique le Saupagesia erecta, en avoient tracé une figure tellement grossière, que la corolle extérieure y est représentée comme monopétale. Cependant, malgré ses défauts, cette figure reproduit si clai- rement la plante linnéenne, qu'il est impossible de ne pas reconnoitre une identité parfaite. Mais les fleurs y sont indi- quées comme géminées, et la même raison qui avoit engagé Rœmer et Schultes à ériger en espèce le S. erecta de Ruiz et Pavon, a paru suflisante à l’intéressant auteur du Mémnotzre sur les Violacées (p. 27, tab. 11, n°. x), pour en faire une de celle de Moncino, sous le nom de S. geminiflora (1). (r) Je ne sais si, en général, il n’est pas un peu hardi de décrire des plantes 32 GENRES SAUVAGESIA Il a cependant été publié une troisième espèce véritable de Sauvagesia, et c’est à M. Sprengel que l’on en doit la con- noissance. Sous le nom d’Ædima , ce savant auteur reproduit le véritable erecta de Linné, et sous celui d’erecta, il décrit avec exactitude une espèce qui jusqu’à lui étoit restée in- connue aux botanistes. Une plante qui a des feuilles extrème- ment rapprochées, longues seulement de trois lignes, et des fleurs terminales, ne peut être l'espèce à laquelle Linné rap- portoit les figures et les descriptions de Jaquin et de Brown, et à laquelle il attribuoïit positivement des fleurs axillaires. La plante de Sprengel a été recueillie à Cayenne avec l’erecta par l'illustre Claude Richard, il les avoit parfaitement distin- guées, et avoit reconnu que la première étoit une espèce entièrement nouvelle. Cependant, comme M. Richard n’avoit rien publié sur sa plante, honneur de l'avoir fait connoître reste à M. Sprengel, et le nom de Sauwvagesia Sprengelii qu'elle prendra, au lieu de celui de S. erecta, sera un foible hommage rendu à l’auteur érudit de l’'Æstoria ret herbarieæ. Avec les Saupagesia Sprengelir et erecta, Richard avoit encore rapporté de Cayenne un autre Saupagesia qui se trouve également dans l’herbier du Musée, et y est indiqué comme croissant au Brésil. Cette plante, intermédiaire entre les deux espèces que je viens de citer, avoit été considérée comme distincte par M. Richard, et je crois que l’on peut ef- fectivement la regarder comme telle. L'auteur de l’Æralyse du Fruit n’avoit point fait connoître les caractères de la Ÿ d’après de simples figures, surtout lorsqu'elles laissent autant à désirer que celles de Moncino.. : ET LAVRADIA. 33 plante dont il s’agit; mais son fils M. À. Richard a bien voulu me communiquer les échantillons qu’il possède, ainsi que ceux du $. Sprengelit, et la description des deux plantes trouvera naturellement sa place dans la monographie que je publie aujourd’hui. Aux Saupagesia erecta, tenella, Spren- gelir et rubiginosa, je joins encore deux espèces fort remar- quables de la Flore du Brésil, les Sauvagesia linearifolia et racemnosa; et ainsi, le genre Sauvagesia qui, jusqu'à pré- sent, n’étoit composé que de deux espèces véritables, en comprendra actuellement sept, toutes parfaitement distinctes. Le genre Lavradia, long-temps négligé par tous les bota- nistes, n’a pu faire naître autant d’erreurs et d'incertitudes que le Sauvagesia. | L’heureuse impulsion que Linné avoit donnée aux sciences naturelles, s’étoit sentie dans toutes les parties du monde, et les Portugais ne firent pas moins de sacrifices que les autres peuples pour accélérer les progrès de la botanique. Aïnsi ils dépensèrent 50,000 cruzades (125 mille francs) pour faire voyager un naturaliste dans les diverses parties de la pro- vince des Mines (:). L'abbé Vellozo de Villa-Rica (2), qui fut chargé de cettte commission honorable, réunis- soit plusieurs des qualités nécessaires pour former un bota- niste habile, du zèle , un tact sûr et le goût de l'observation; (1) I faut convenir que les sacrifices faits en faveur des sciences par le gouver- nement Portugais n’ont pas eu, en général, les résultats qu’on devoit en espérer ; mais ce n’est pas ici le lieu d’en rechercher la cause. k : (2) Il ne doit point être confondu avec le Père Vellozo, auteur du Flora Flu- minensis dont il existe deux éxemplaires manuscrits dans la bibliothèque de Rio- de-Janeiro et dont il seroit si fort à désirer que l’on publiât les magnifiques dessins. Mém. du Muséum. 1. 115. 5 34 GENRES SAUVAGESIA mais malheureusement il vivoit éloigné des livres et des ob- jets de comparaison, et cédant trop au préjugé qui, dans sa patrie, condamnoit les hommes blancs à fuir le travail, il her- borisoit beaucoup moins lui-même que par l'intermédiaire de ses esclaves. Ses dessins ont été perdus, et ses manuscrits, qui sont tombés entremes mains, nesauroient avoir aucune utilité. Vellozo envoyoit à Vandelli une partie de ses descriptions; celui-ci, après y avoir ajouté quelques mots, les publioït dans son F'{oræ Lusitanicæ et Brasiliensts spectmen (1), et pour me servir de l'expression qu'emploie Linné en écrivant à Vandelli lui-même au sujet de Grisley (Lin., bitt. in FI. lus. spec., p. 81), le professeur de Coïmbre offroit aux botanistes, dans un livre plus nuisible qu’utile, une suite d’énigmes qu'un OEdipe seul auroit pu deviner. Parmi les plantes de Vellozo, publiées par Vandelli, est le Layradia, dédié par le premier de ces naturalistes au mar- quis de Lavradio qui, vers 1774, gouvernoit le Brésil en qua- lité de vice-roi. Vandelli ne dit pas même quelle étoit l’origine du nom de £apradia, et les botanistes crurent, d’après son orthographe, qu'il falloit lire Lauradia. Ce genre, au reste, étoit si mal décrit, et figuré si imparfaitement, que, pendant de longues années, il fut, pour ainsi dire , oublié par tous les botanistes. A la vérité, M. de Jussieu en dit deux mots dans son Mémoire sur les Meliacées, famille à laquelle il croyoit devoir le rapporter (Mem. Mus., v. 6, p. 440); mais la des- (1) Il en a paru-une contrefaçon à Nuremberg, sous le titre de Scriptores de piantis Hispanicis, Lusitanicis , Brasiliensibus. ET L'AVRADIA. 35 cription incomplète de Vandelli l’avoit si peu frappé, qu'il attribue à Loureiro le genre dont il s’agit. M. Poiret parla aussi fort succinctement du Lavradia ; mais il crut que Van- delli avoit voulu écrire Leuradia, et il pensa, sans doute d’après ce qu'avoit avancé Jussieu, que ce genre pouvoitavoir quelque affinité avec l’_Æglaia. Cependant l’illustre Brown, dans ses Observations sur les plantes du Congo, rappela enfin aux botanistes le genre Layradia, et donna une singulière preuve de sagacité, en disant que sans doute il faudroit le rapprocher des V’iolettes. I paroît porté à croire en même temps que ce genre n’est autre chose que le Conohorta; mais si ce soupçon est erroné, c’est encore la mauvaise figure de Vandelli qu’il faut en accuser. Malgré la courte phrase de Vellozo, copiée par le profes- seur de Coïmbre, je ne doute pas que son espèce, à laquelle celui-ci ne donne aucun nom, ne soit celle que j'ai appelée Lapradia Vellozu. Dans l’Æpercu de mon Voyage (in Mem. Mu, vol. 0) j'ai déjà fait connoître une seconde espèce de ce genre, le Layradia elegantissima ; mais, comme cet Æpercu a été imprimé, ainsi que j'en ai averti, avant que mes manuscrits fussent tous rassemblés et mes plantes réunies, j'ai indiqué celui dont il est ici question sous le nom impropre de Sau- vagesia elegantissima. À ces deux espèces j’en ajoute trois autres, que j'ai égale- ment recueillies dans mes voyages, et ainsi le genre La- vradia se trouve monter aujourd'hui à cinq espèces, au lieu d’une seule, qu’on étoit presque tenté de considérer comme une plante imaginaire. 5 * 36 GENRES SAUVAGESIA $ II. Géographie. Peu de genres présentent pour la géographie botanique des faits aussi remarquables que le Saupagesia et le La- vradia. Un examen attentif avoit fait dire à M. de Humboldt qu'aucune plante dicotylédone n’étoit commune aux deux mondes ( Dist. Plant., 62 et 65). Le Saupagesia erecta fait une exception à cette règle (1). Cette plante croît au Pérou, à Surinam, à la Guyane, au Brésil; traversant l'Océan, elle se retrouve sur la côte de Guinée (2). M. du Petit-Thouars et M. Perottet en ont rapporté de Madagascar des individus qui ne diffèrent nullement de ceux de Rio-de-Janeiro et de Minas-Geraes ; et enfin M. Perottet m'en a aussi montré des échantillons qu'il a recueillis à Java. Ainsi voilà une espèce qui parcourt à peu près toute la zône comprise entre les tropiques ; et l’on ne peut raisonnablement soup- conner qu’elle ait été transportée par l'homme en tant de contrées diverses. Le Saupagesta erecla n’est point en effet une plante d’une utilité générale, telle que le Bananter, les Céréales, ou la Canne à sucre ; elle ne sert point aux em- ballages comme autrefois l’Erigeron Canadense; et enfin (1) Mon estimable ami le P. Leandro do Sacramento, professeur de botanique à Rio-de-Janeiro, m’a dit que sur trente plantes recueillies à Angola et à Benguela, il en avoit reconnu vingt-neuf comme appartenant au Brésil, et il est difficile de révoquer en doute l’assertion d’un homme aussi véridique et aussi instruit. Le fait que je rapporte a déjà étéçcité par M. Malte-Brun ( Geog. vol. V, p. 677). (2) L’indication de cette lecalité appartient à Willdenow. Je crois qu’on ne peut guère avoir de doute sur son exactitude à présent que l’on sait que le S. erécta croit à Java et à Madagascar. dre f ET LAVRADIA. 37 ses semences n'étant ni ailées, ni visqueuses, ni accro- chantes, ne peuvent être enlevées par les vents, ni s’atta- cher aux poils des animaux ou aux vêtemens des hommes. Nous ne voyons dans la plante dont il s’agit qu'une herbe où un sous-arbrisseau obseur, négligé presque partout où il croît; et, ce qui est encore fort remarquable, c’est que, naissant dans un si grand nombre de pays différens, il ne paroit être cependant fort commun nulle part. Mais ce n’est pas seulement dans le sens de l'équateur que s’est répandu le Sauvagesia erecta ; il est aussi du nombre de ces végétaux qui, suivant lobservation de M. Ramond (Ann. Mus., vol. 1v, p. 497), s'étendent dans le sens des méridiens. Ainsi il croit au Mexique, dans les Antilles, à la Guyane, au Brésil, et je l’ai retrouvé jusque sur les bords du Rto-Jaguaricatu, situé à peu près par le 21e2< degré de lat. sud. Je ne serois pas étonné non plus qu'on le ren- contrât dans les endroits marécageux de l’ile de. Sainte- Catherine, car la végétation de cette ile a une extrême analogie avec celle de Rio-de-Janeiro; et d’ailleurs il est incontestable que le Jaguaricatu ne sauroit être indiqué comme sa limite positive. Cette rivière en effet coule sur ce plateau élevé qui s'étend au midi de Saint-Paul à l'ouest de la grande Cordillière Brasilienne parallèle à la mer. Cependant, comme je lai déjà fait observer dans l’Æpercu de mon Voyage, la limite des plantes sur ce plateau n’est pas déterminée seulement par leur éloignement de la ligne équatoriale, mais aussi par l'élévation du sol. Le Jagua- ricatu est situé sur le plateau entre la limite de la Canne à sucre et celle des Cofonmiers ; or ces mêmes limites se re- 38 GENRES SAUVAGESIA trouvent dans le pays plat, à peu d’élévation au-dessus du niveau de la mer, l’une vers le 30e degré et l’autre vers le 3162; donc la limite que j'ai trouvée au $. erecta équi- vaut à peu près à 309 24/. Ce qui sans doute paroîtra fort singulier, c’est que les autres espèces, tant du genre Sawpagesia que du genre Lavradia, sont bornées à des espaces de terrains peu con- sidérables. Le Saupagesia tenella na été trouvé qu'à Cayenne; c’est du même pays que M. Richard a rapporté les S. rubiginosa et Sprengelir, et si ces espèces croissent au Brésil, comme on l’a vaguement indiqué, il est assez vrai- semblable que c'est uniquement dans les parties les plus voisines de la Guyane, car je ne les ai jamais rencontrées dans le cours de mes voyages. Le Lapradia racemosa ne se trouve que dans les pâturages marécageux et assez élevés des provinces de Saint-Paul et des Mines. Les Lapradia Fellozu et capillaris sont limités à cette chaîne de montagnes que M. d’'Eschwege a nommée Serra do Espinhaco; et enfin, quoique j'aie beaucoup parcouru cette chaîne, je n'ai trouvé chacune des trois espèces, que j'ai appelées S. Zncarifolia, L. elegantissima et ericoïdes , que sur un seul point et en- core en très-petite quantité. Ainsi, tandis que le S. erecta fait, d’un côté, le tour du globe, et, d’un autre côté, s’étend du Mexique jusqu’au 24e degré et demi de lat. S., et probablement beaucoup plus loin encore, des espèces très- voisines paroissent bornées à un seul point, comme l'O ganum Tourneforti du rocher d'Amorgos ( 7. Mirb. elem. p-. 426). Pour expliquer cette singulière différence, peut-être fau- ET LAVRADIA. 39 droit-il dire que les racines du S$. erecta, vivant dans des lieux mouillés, trouvent partout une température à peu près semblable, tandis que le S. Znearifolia et les L. ericoïdes et elegantissüuna, qui croissent dans des lieux secs et très- élevés, du moins pour le Brésil, ne pourroïent probable- ment trouver ailleurs la même température combinée avec la même nature de sol. Mais si l’on comprend ainsi pour- quoi le $. erecta se conserve sous tant de climats divers, on ne voit pas, en supposant qu'il ait commencé à croître sur un point plutôt que sur un autre, supposition au reste entièrement gratuite; on ne voit pas, dis-je, comment il a pu s'étendre dans des espaces aussi immenses, surtout n'ayant pour se répandre aucun des moyens dont sont pour- vus tant d’autres végétaux. . S IV. Usages. Des douze espèces qui composent à présent les genres Sauvagesia et Lavradia, le S. erecta est la seule à laquelle on attribue quelques propriétés. A la vérité on n’en fait au- cun usage au Brésil; mais la phrase de Surian prouve qu'il la considéroit comme ophtalmique. Ruiz et Pavon assurent (FI. Per., nr, p. 11) que les Péruviens s’en servent souvent dans les affections de poitrine, et enfin M. Richard qu’elle est diurétique. Ce qu'en dit Aublet suflit pour expliquer ces propriétés diverses, et prouve qu’elles tiennent au même principe. Suivant cet auteur, en effet, les feuilles mâchées de la plante dont il s'agit sont mucilagineuses, et les nègres de Cayenne les mangent en guise de carourou. Si donc le S. erecta est utile dans les affections de poitrine, c'est, 4o GENRES SAUVAGESIA comme notre 72aupe et notre gwnauve, parce quil est mucilagineux; par une raison semblable, il doit être oph- talmique , comme le sont les mêmes plantes dans les cas où il se manifeste une inflammation ; et s’il agit aussi comme diurétique, c’est que sans doute il est appliqué comme tel lorsqu'une irritation rend les adoucissans nécessaires. Bientôt nous allons retrouver des principes semblables et une partie des mêmes usages dans une plante très-voisine, le Cozo- horia Lobolobo (x). Is nous aideront à confirmer les affinités que les caractères auront déjà établies, et nous aurons une preuve de plus de l'identité de propriété dans les végétaux qu'une organisation analogue tend à rapprocher dans les mêmes groupes. ? $S V. Affruités. Linné s’étoit contenté d'indiquer les rapports d'habitus du genre Sauvagesia. B. de Jussieu rechercha ses affinités botaniques, et ne les découvrit point, puisqu'il plaçoit ce genre près du Pourpter, entre la Cuscute et le Saxifrage. On pourroit croire qu'Adanson fut plus heureux que son maitre, parce qu'il avoit rangé le Sauvagesia parmi ses Cistes ; mais cette famille n’étoit réellement pour lui qu'un cadre où il plaçoit les genres dont il étoit embarrassé, puis- qu'on ytrouve tout à la fois le Monzotropa, les Hypéricées, l'Hipocratea, le Paris, le Cortaria, etc. (Fam. u, p. 434 (1) Conoharia Lobolobo N. foliüis breviter petiolatis, in apice ramulorum confertis, oblongo-lanceolatis , angustis, utrinque acutis obsolete serratis, glabris; pedunculo pubescente ; floribus racemosis ; nectario nullo; ovulis basi placentarum aflixis. ET LAVRADIA. ht et suiv.). Il ne faut pas s'étonner par conséquent si M. Ant. Laur. de Jussieu ne fit aucune attention àl’arrangement d’A- danson, et s'il a laissé le Sawvagesia parmi les végétaux dont la place est incertaine. Il entrevit cependant ses véri- tables affinités ; car il demande, à la suite de sa famille des Cistes, s'il ne faut pas rapprocher le Sauvagesia des V'iolacées (1). Après avoir étudié ce genre sur le frais, je confirmai (Voyez Mém. Mus., vol. mr, pag. 215), il y a déjà plusieurs années, les rapports indiqués par Jussieu, et depuis par du Petit-Thouars, Je montrai que, dans le Sauvagestia et dans le Frole, les feuilles étoient alternes et munies de stipules ciliées; que les fleurs étoient régulières dans le premier de ces genres comme dans le Conohorta; que, dans les Jiolacées et le Sauvagesia, le fruit, égale- ment capsulaire, s’ouvroit en 3 valves; que les étamines étoient en nombre déterminé, l'embryon droit, menu, à peu près cylindrique, placé dans laxe d'un périsperme charnu, et enfin que la radicule étoit également tournée vers l’ombilic. Mais la famille des J’zolacées, qui ne faisoit que commencer, lorsque je m’en occupai pour la première fois, s’est formée peu à peu; ses genres, comme je l’avois prévu, se sont groupés par enchainement (Mém. plac., p. 38), et il n’est peut-être pas inutile de revenir sur les affinités que j'ai déjà indiquées, pour les faire mieux con- (1) Je n’écris ici 7zolacées au lieu de J’iolariées : qu'après avoir ‘consulté :un grand nombre de botanistes, qui tous m'ont paru rejetter ce dernier nom, qu’on ne peut faire dériver du mot Ÿïola. Il est vrai qu’en latin le mot ’iolaceus a une autre signification ; mais cet mconvénient bien léger est commun à une multitude d’autres mots qui cependant ne donnent lieu à aucune amphibologie. Mérm. du Muséurn.\. 10. 6 2 GENRES SAUVAGESIA noitre, et pour résoudre quelques-unes des difficultés qui existent encore. Le genre qui se rapprochera le plus du Sauvagesta sera incontestablement le Lapradia, puisque les caractères de la végétation sont les mêmes dans l’un et dans l’autre, et que ceux de la fleur offrent pour toute différence des pétales obovés ou ovales, des étamines linéaires ou elliptiques, une seconde corolle interne, polypétale ou monopétale, entourée de filets stériles ou bien nue; puisqu’enfin les caractères du fruit se nuancent de l’un à l’autre genre par des dégradations insensibles , et que la déhiscence de leur capsule est égale- ment septicide. Un troisième genre que j'ai fait connoître dans l’Æpercu de mon Voyage s’'unit intimement aux deux précédens, c’est le Luxemburgia. Ce genre, en effet, offre également des sous-arbrisseaux ; les feuilles y sont de même alternes, rele- vées de nervures parallèles, bordées de dents calleuses, ter- minées par une petite pointe comme cela a lieu dans le Lavradia glandulosa, et enfin accompagnées de stipules ciliées. La corolle du Zuxemburgia est également composée de cinq pétales hypogynes; les anthères sessiles s’ouvrent au sommet comme dans le Sawpagesia, et ont la face tournée en dehors comme celles de tous les Zavradia et Saupa- gesta ; Vovaire est uniloculaire ; les valves rentrent en dedans sans adhérer ensemble; les semences en nombre indéfini sont attachées à l'extrémité des valves rentrantes; enfin l’em- bryon est droit et entouré d’un périsperme charnu. | Voilà par conséquent trois genres, Sauvagesia, Lapradia et Luxemburgia, qui s'unissent d’une manière intime, et seront à jamais inséparables. ET LAVRADIA. 43 J'ai démoniré ailleurs (Obs. Sauv. in Mem. Mus. , v. mr, p. 215 et suiv.) que le Saupagesia ne pouvoit être éloigné des Frankeniées, et qu’il étoit aussi très-voisin des /zolettes. D'un autre côté, dans mon premier Mémotre sur le Pla- centa central (p. 37 et suiv.), j’avois déjà fait sentir plus anciennement les rapports des ’zolacées et du Frankenia, et en adoptant cette dernière opinion, MM. de Candolle, Kunth et Sprengel (Ken. Gew., t. nr, p. 828) lui ont donné une nouvelle force. L’ovaire du Frankenia est en effet unilo- culaire comme celui des F’zolacées; leurs placentas sont également pariétaux, le fruit est capsulaire, et l'embryon également droit dans un périsperme charnu. Je faisois observer, dans le mémoire que je viens de citer, qu'il y avoit à la vérité une grande différence de port entre le Frankenia et les Volettes; mais je puis dire aujourd’hui que le port qui a tant de valeur dans les familles en groupe (Mirb.), n’en a aucune dans celles par enchainement, comme les 770- lacées, et, certainement, l’Aabztus de la Folette odorante ressemble encore plus à celui du Frankenia qu’au port du Conohoria. 3 Une différence bien plus réelle est celle de la déhiscence, septicide dans le Frankenia, et loculicide dansles Ÿ7olacées ; mais cette différence existe aussi entre les Æzolacées et le Sauvagesia qui sont si voisins; donc, par cela même, celui- ci et le Frankenia s'unissent intimement, et comme je l'ai dit autrefois ( Obs. Sauv. in Mem. Mus., v. m1, p. 220 ), une partie de l'intervalle qui existoit entre le Frankenia et les Violacées semble comblée par le Sauvagesia; et, de plus, aujourd'hui, par le, Lapradia et le Luxemburgia. Je puis 6* 44 GENRES SAUVAGESIA ajouter que lesmèmes propriétés se manifestent dans les 0- lacées etles Frankeniées, puisque les nègres des environs de Rio-de-Janeiro mangent en carourou les feuilles mucilagi- neuses du Cozohoria lobolobo, comme les nègres de Cayenne celles du Sauvpagesia erecta. Le mode de déhiscence restera pour différence principale entre les Vzolacées proprement dites d’un côté, et de l’autre les genres Frankenia, Sauvagesia, Lapradia et Luxemburgia qui formeront le groupe des F'rankeruiées. Nous allons bientôt montrer les différences qui existent encore; mais, procédant par gradation, achevons de faire connoître les F'rankeniées. Outre les rapports que j'ai indiqués entre ces plantes, je trouve encore un lien commun que je n’avois pas montré dans mes premiers mémoires. Les anthères du l'rankenia ne sont point à la vérité immobiles, comme celles des Saupagesiæ, Lavradia et Luxemburgia; mais, dans toutes les espèces de ces quatre genres, elles ont également Ze dos tourné du côté de l'ovaire. Il est vrai que, dans plusieurs Saupagesia , le bord semi- nifère des valves s'étend presque jusqu’au centre de la cap- sule, et il ne rentre point dans le Frankenia ; mais il ne rentre pas davantage dans le Sauv. tenella, et j'ai fait voir que le fruit des Saupagesta,et des Lavradia offroit une foule de nuances diverses. Une différence plus. sensible se trouve dans les feuilles opposées ou 4-ternées et toujours connées du Frankentæ, et les feuilles stipulées des trois genres Sawpagesia, Lapradia et Luxemburgia: Pour atténuer cette différence, je disois d ET LAVRADIA. 45 dans mon Mémoire sur le Placenta (p. 38), que deux des feuilles des Frankeniées pouvoient se comparer àdes stipules, comme deux des feuilles du Galzurn cructatum, par exemple, semblent représenter les stipules intermédiaires des Rubra- cées exotiques. Mais ceci change peu de chose à la difficulté, car, dans tous les cas, les feuilles des Frankeruées restent opposées. Il est plus conforme à l’analogie de montrer que si le Frankenia a les feuilles opposées, un même genre de Wiolacées, V'Ionidium, comprend tout à la fois des plantes à feuilles alternes. et d’autres à feuilles opposées, comme nous nous en sommes convaincus, M. Kunth et moi, lui par les plantes de M. de Humboldt, et moi par celles que j'ai re- cueillies au Brésil(r). Peut-être aussi sera-t-on tenté de trou- ver quelque léger rapport entre le bord membraneux et cilié du pétiole des feuilles des Frank. læris et surtout pul- verulenta et les stipules des autres Frankeniées. Quoi qu’il en soit, on pourra, si l’on veut, trouver dans ce groupe deux sections, dont l’une, composée des genres Sau- vagesia, Lavradia et Luxemburgtia, se distinguera par ses feuilles alternes à stipules ciliées etsesanthères immobiles, et dont l’autre qui renferme un seul genre, le Frankerua,, sera caractérisée par des feuilles connées et des anthères mobiles. Si l’on vouloit aussi distinguer ces sections par des noms particuliers, on pourroit choisir ceux de Saupagesiées et de Frankeniées proprement dites ; mais je ne sais réelle- ment si les différences qui existent ici sont assez importantes et assez nombreuses pour qu’on doive les rappeler pardes dé- nominations spéciales. (1) Linne l’avoit déjà observé plus anciennement. 46 GENRES SAUVAGESIA À présent que nous avons formé le groupe des Franke- riées, voyons quelles sont les plantes qui doivent les suivre. M. de Jussieu plaçoit autrefois le Frankenia à la suite des Caryophyllées, et je ne dois point oublier ce rapprochement, parce qu’il est bien rare qu’il n’y ait pas quelque chose de vrai dans les rapports indiqués par cet illustre observateur. Il est incontestable que les Frankeniées ont les feuilles dis- posées comme celles des Caryophytllées, un calice semblable . à celui des 5e, et 6e. sections de cette famille, telle qu’elle est divisée dans le Genera de Jussieu, des pétales à longs onglets comme ceux du Dianthus et du Lychrus, enfin, à ces mêmes onglets, une duplicature qui n’est pas sans ana- logie avec celle des Sz/ene et des Agrostema. Lie Frankenia fait donc réellement le passage des 77olacées aux Caryo- phryilées qui, elles-mêmes, se confondent presque avec les Paronichyées, comme celles-ci se rapprochent des Poréu- lacées. Cette série que j’ai indiquée autrefois et qui a été adoptée par M. de Jussieu (in Mirb. elem., p. 856), semble d'autant plus nécessaire à conserver, que les familles dont il s’agit, étant placées sur la limite des Polypétales à étamines hypogynes et de celles à étamines périgynes, emprunteront de nouveaux rapports des anomalies que quelques unes de leurs espèces présentent dans l’insertion;et, par cela même, ces anomalies seront bien moins sensibles. Il n’y aura plus à s'étonner autant de rencontrer, comme j'ai fait au Brésil, des Jzolacées (1) à étamines périgynes, de voir dans le Larbrea les organes mâles insérés sur le calice, d’observer {1) Dans le Noisettia, VIonidium et mon nouveau genre Spathularia. ET LAVRADIA. 47 des pétales périgynes dans l’Ærenaria rubra, et ensuite de retrouver une insertion hypogyne dans le Z'alinum ; si, après les Frankeniées et les Caryophyllées, commence la série des familles où l'insertion est généralement périgyne, et que l’une des premières d’entre ces familles soit présisément celle qui offre des exceptions. Il est à remarquer en outre que le style du Frankenia est absolument celui des Portulacées, et, d’après l’arrangement dontil s’agit, les Frankenia doivent se trouver voisins des plantes de ce dernier groupe, parmi lesquelles est le Talimum hypogyne comme le Fran- kenia. Je sais très-bien que lillustre auteur de la Théorie éle- mentatre à mis un intervalle immense entre les Caryophyl- lées et les Paronichyées (Théor., p. 244 et suiv.); mais en même temps il faut observer que, d’un côté, il a laissé ces dernières près des Portulacées, et que, d’un autre côté, il range les Caryophyllées après les Cistées et les Franke- nées. Ainsi il a conservé les rapports que j'indique, autant que le lui permettoit le plan qu’il s’étoit tracé; et ce plan consiste à ranger, pour la facilité de l'étude, les familles si nombreuses de la treizième classe de Jussieu, sous des titres communs que fournissent un ou deux caractères tirés du nombre des pistils et de leur structure interne. Malgré les entraves que s’étoit données M. de Candolle, il a eu l’art de ménager les rapprochemens, les plus heureux; mais la série linéaire qui présente déjà tant d’inconvéniens, court tellement le risque de devenir purement artificielle, pour peu qu’on veuille la soumettre à d’autres divisions qu’à celles indiquées par les 48 GENRES SAUVAGESIA étamines (1), que M..de Candolle s’est vu souvent forcé de négliger les titres qui distinguent ses Cohortes. Ainsi, c’est parmi les familles à placenta central qu’il a rangé les Fype- ricées , et l’on rencontre un grand nombre d’entre elles qui ont des placentas pariétaux; les Rutacées placées dars la cohorte à ovaire solitaire présentent plusieurs ovaires dans le Zanthoxylum , et la cohorte des carpelles solitaires ou soudées offre des familles, telles que les zolacées , les Frankeruées et les Cistinées, où l'ovaire ne me paroït pas moins symétrique ni moins simple que dans les Malpigluées et dans les Malpacées. Si M. de Candolle a éprouvé quelques embarras dans la formation de sa série, j'aurois tort de me plaindre d’en ren- contrer également aujourd’hui. Ayant groupé les plantes qui doivent être placées entre le Sauvagesia et les Portula- cées, je dois chercher naturellement à disposer celles qui, en sens contraire, se rattachent au même genre. Je trouve d’abord les rolacées et les Cistées qui ont, comme tout le monde sait, les plus grands rapports ; j'hésite long-temps pour savoir lequel des deux groupes je placerai le plus près des Frankentiées , mais je finis par donner la préférence aux Cistées , et voici sur quoi je me fonde. Le port des Ciséées et des Frankentées présente moins de différence que celui de ces dernières et des Ÿzo/acées, et plusieurs Luxemburgia en particulier ressemblent singuliè- rement aux Crstes. Lies anthères dans les Cristées, les Vro- lacées et la première section des Frankeniées sont égale- ment immobiles , et le filet est souvent très-court ou même 1) On a vu plus haut que l’insertion même étoit sujette à beaucoup d’exceptions. P q ] P P ET LAVRADIA. 49 nul dans les Jrolacées et la première section des Franke- niées ; mais les Frankeniées ont toute la face de leur anthère tournée en dehors, tandis que les Ÿ’zolacées l'ont tournée du côté de l'ovaire, et si un très-grand nombre de Crstées ne diffère point en cela des J’olacées, je trouve cependant une exception dans l’Æelanthemum guttatum(x). Les J’iolacées ont toujours cinq étamines, et le Sauvagesia n'en à non plus que cinq fertiles; mais le Luxemburgia a le plus souvent des-étamines en nombre indéterminé; et ces filets ordinai- rement très-nombreux qui existent dans le Sawpagesia au- dessus de la corolle inférieure ont, comme je l'ai prouvé, toute l’analogie possible avec les organes mâles (2). La déhis- cence est, 1l est vrai, la même dans les ’zolacées et dans les Cistinées; mais dans les premières, les placentas sont toujours appuyés immédiatement sur le péricarpe, tandis que chez les Cistées, je retrouve des modifications semblables à celles que j'ai signalées dans les genres Sawpagesia et La- vradia, et cette même tendance à avoir un fruit à plusieurs loges (3). Ainsi pour ne parler que du genre Helianthemum, M. de Jussieu a décrit sa capsule comme étant r1-loc. (Gen. 204); Adanson ,comme étant tantôt uniloculaire et tantôt 3- loculaire, et dans la réalité on peut observer, je ne dirai pas seulement dans le fruit, mais dans les ovaires des plantes de (1) Cette espèce est encore remarquable par son stigmate sessile, large et hérissé de glandes cylindriques. Il faudroït cependant se garder d’en faire un genre. (2) On est frappé de la ressemblance de ces filets avec les étamines de plusieurs Cistées. . (3) J'ai observé les mêmes modifications entre mes quatre espèces de Luxem- burgia, speciosa, corymbosa, polyandra, heptandra, à la même tendance à avoir un fruit 3-loculaire. Mém. du Muséum. t 11. 7 5o GENRES SAUVAGESIA ce genre, toutes les nuances possibles entre le placenta pu- rement pariétal, comme dans les Ÿ’rolettes , et des loges par- faitement distinctes; nuances qui ne coincidant avec aucun autre caractère, ne sauroient même donner lieu à aucune subdivision. Dans diverses espèces, telles que l'Helianthe- mum mutabile , une lame plus ou moins large s'étend entre le péricarpe et le placenta; chacune des lames dans l'A. ul- gare occupe le sixième du diamètre de la loge; celles de V7. guttatumn en occupent le tiers, et comme les ovules n’au- roient pas eu assez de place pour se développer entre les cloi- sons incomplettes au centre de la capsule, ils sont reportés vers le péricarpe par de longs cordons ombilicaux; les pla- centas de l’Æelianthemum salicifoliumn au contraire sont aussi peu proéminens que chez les Yzolertes et le Sauva- gesta tenella ; dans VA. Lippu si voisin du »ulgare, les cloi- sons s’avancent jusqu'au centre, se rencontrent et se tou- chent sans contracter beaucoup d’adhérence; enfin, chez l'A. lævipes, Vadhérence des cloisons devient aussi intime qu’elle peut l'être. Les rapports que je viens d'indiquer entre les Cistées et les Frankeniées ne sauroïent, ce me semble, être com- pensés par la similitude de l'embryon dans ces dernières, et les Jzolacées où il est également droit; tandis qu’il est di- versement courbé dans les Cristinées et avec une radicule et des cotylédons qui, par une exception fortremarquable, sont tournés en sens contraire de l’ombilic (1). Je crois donc (1) Tel est du moins le caractère que j'ai reconnu dans les espèces où j'ai re- cherché la position relative de ces parties. ; ET LAVRADIA. 5x que, tout balancé, il faut, comme je l'ai dit, mettre les Cistées immédiatement avant les Fran/emées, et faire précéder les premières des /’zolacées (1). On a proposé de diviser ces dernières en deux sections : celles à fleurs régulières et celles à corolle inégale. Il n’y à pas sans doute de grands inconvéniens à admettre cette divi- sion; cependant j'observerai que, pour être conséquent, il faudroit aussi diviser la section des Frankeniées munies de stipules, puisque les pétales du Zuxemburgia sont un peu inégaux ; et que, d’un autre côté, mon genre Spathularia(2), qui vient immédiatement à côté du Conohorta, et en offre le port, a aussi un pétale un peu plus grand que les autres. L'égalité de la corolle a mème si peu d'importance dans les V'iolacées, et la tendance vers l’irrégularité y est telle, que dans ce même genre Spathularia, où les cinq pétales sont longs, entiers et terminés en spatule , jai vu quelquefois le pétale le plus grand s’échancrer en cœur, l'extrémité spa- tulée disparoïtre dans deux autres pétales, et, enfin, la co- rolle devenir à peu près celle des Zoridium. Plusieurs auteurs ont proposé de rapprocher le Drosera des J’iolacées , et en effet leurs rapports sont très-sensibles, (1) L’arrangement que je propose aujourd’hui est le même à peu près que j’avois déjà ébauché , loin des livres et des objets de comparaison, dans mon mémoire sur le Sauvagesia erecta. (2) Spathularia. N. Calyx parvus, 6-partitus. Petala 5 basi calycis inserta , eodem- que multo longiora, unguiculata, spathulata subinæqualia ; unguibus longis in tubum conniventibus. Stamina 5 ibidem inserta; antheræimmobiles, anticæ in mucronem membranaceum apice desirentes. Stylus 1. Ovarium liberum 1-loc., polysper- mum. Ovula placentis 3, parietalibus aflixa, — Frutex, Folia alterna et opposita. Supulæ valde caducæ. Flores subumbellati. * 7 « 52 GENRES SAUVAGESIA. puisque le Rossolis a, comme les Frolettes, des étamines et des pétales hypogynes au nombre de cinq et des semences en nombre indéterminé portées dans une capsule 1-loculairé sur le milieu des trois valves. Il faut ajouter encore que les anthères du Drosera sont immobiles, comme celles des Frankeniées, et qu'elles ont, comme ces dernières, la face tournée en dehors, et cependant les Drosera s’éloi- gnent déjà un peu plus, ce me semble, des zolacées que les Cristées et les F'rankeruées, parce qu'ils ont plusieurs styles, que leur.embryon se trouve rejeté à la base de la se- mence, et qu’enfin les stipules du Dyosera, différentes de celles des Z’zolacées, des Cistées et des Frankeriées, sont uniques à l’aisselle des feuilles dans les espèces à hampe, et qu’elles n’existent pas dans les espèces caulinaires. Pour grouper les plantes quise rapprochent le plus des Sauvagesia ei des Lapradia, ÿ ai procédé, en avançant succes- sivement sur deux lignes divergentes, à peu près d’après la méthode conseillée par Brown, et j'ai obtenu une série qui se compose d’abord des Drosera, des Violacées, des Crs- tées, des Frankentées, et sera continuée par les Caryo- phytllées, les Paronichyées et les Portulacées. J'aurai formé ainsi un de ces vastes groupes qui comprennent des plantes à jamais inséparables et que cet illustre anglais a appelés classes, nom qui est impropre sans doute, mais par lequel Brown na prétendu qu'indiquer des rapports plus intimes. a Dans la série que je viens de proposer, je n’ai point fait mention des Zinées. Accoutumés à voir ces plantes à la suite des Caryophytllées de Jussieu (Gen. 303), nous avons de F ET LAVRADIA. 53 la peine à les en séparer; mais, excepté la forme de la fleur, presque tout diffère dans les deux familles. M. de Candolle me paroit avoir montré parfaitement une partie des rapports des Zinées, en les plaçant auprès des Malvacées (Théor. p. 244), et M. Dumortier (Obs. bot., pag. 61) a, ce me semble, achevé d'indiquer les aflinités de la famille dont il s’agit, lorsque, revenant à l’ancienne opinion de Linné (Phil. bot., p. 32), il range cette même famille près des Oxa- lidées. Les Drosera, les Violacées, les Cistées et les Fran- keniées qui composent le groupe, ou, si l’on veut, la classe que j'ai formée plus haut, doivent-ils être considérés comme des tribus d’une grande famille ou comme des familles dis- tüinctes ? Je répondrai que pourvu qu’on laisse ces plantes les unes auprès des autres, il importe peu quel titre l’on choi- sisse ; la solution de la question que je viens de proposer est en elle-même à peu près arbitraire, et lorsqu'il s’agit de choses aussi indifférentes, ce que les botanistes peuvent faire de mieux, c’est d'adopter aveuglément ce qu’ont fait ceux qui les ont précédés. Après avoir montré les aflinités des Drosera, des Fio- lacées, des Cistées et des Frankeniées, etc., il ne sera peut-être pas inutile de passer en revue celles qu’on leur a supposées. Je crois que tout le monde sent aujourd’hui combien peu sont fondés les rapports que Linné croyoit découvrir entre les Jrolettes et les Lobélie, et, par conséquent, il seroit su- perflu de revenir sur ce point. Si un savant botaniste a proposé de mettre le Saupagesia 54 GENRES SAUVAGESIA dans les Capparidées , cela üent uniquement à ce que, d’un côté, il avoit reconnu les rapports que j'ai indiqués entre ce genre et le Drosera, et que, d’un autre côté, il trouvoit le Rossolis, dans l'ouvrage de Jussieu, à la suite du CZeome et du Capparis ; mais on connoît trop bien aujourd’hui les limites de la famille des Capparidées, pour qu'il soit nécessaire de démontrer que le Drosera s'éloigne de cette famille par son port, par le nombre des parties dont sa fleur est composée, l'ensemble de son pistil, et, enfin, par les caractères de la semence. : Dans son intéressant mémoire sur les /’zolacées, M. de Gingins place le Lapradia avec le Conohortia, et il range dans une autre tribu le Sauvagesta etle Piparea. X] n’est pas étonnant qu'il se soit trompé, comme Brown, sur le La- vradia, puisque ce genre n’étoit connu encore que par la description défectueuse de Vandelli; quant au Piparea, quelque idée qu’on se forme de ce genre (1), il est évident qu'il ne peut être placé auprès du Sauvagesia, car sa dé- hiscence est celle des 7zolettes, et Aublet dit positivement, que les trois valves de la capsule sont partagées dans leur lon- gueur par une côte saillante à laquelle sont attachées une, deux ou trois graines (Aub. sup. , p. 31). Les Polygalées sont un des groupes que l’on a rappro- chés des Frolacées etdes Frankeniées. Je sais que les Poly- galées ont des fleurs irrégulières comme les zolettes, qu’il y à aussi quelque resssemblance entre le stigmate de ces (1) Je pense actuellement avec M. Kunth que c’est auprès des Bixinées que doit être rangé le Piparea. _ ET LAVRADIA. 55 plantes, et qu’enfin, dans ces deux genres, l'embryon est également droit dans l’axe d’un périsperne charnu ; mais ces ressemblances assez vagues, se retrouvant dans d’autres fa- milles, ne me semblent établir aucun rapport bien intime entre les Polygalées et les Fiolacées (1); tout d’ailleurs me pa- roit différent dans ces plantes: les feuilles, la composition dela fleur, les étamines et leur nombre, l'ovaire, le fruit et l’exté- rieur de la semence. M. Brown indique, il est vrai, son genre Hymenanthera comme ayant, par sa fleur, des ressemblances avec la Frolette, et quelques rapports avec les Polygalées par son fruit qui est une baie 2-loculaire et disperme, à se- mences suspendues. Je ne connois pas, je l’avoue, de Poly- galées où l’on trouve une véritable baïe; cependant il n’est pas moins certain que l'Aymenanthera établit un point de contact entre les 7’zolacées et les Polygalées, et c’est quel- que chose sans doute. Mais beaucoup de genres ont tout à la G) M. de Gingins l’a parfaitement senti, puisqu'il ne fait de ces prétendus rap- ports que l’objet d’une question; et la lecture du texte de M. Kunth aura bientôt levé tous ses doutes , car il y aura vu que le Monina pubescens n’avoit point de stipule. Si deux des étamines de l’'Hybanthus Havanensis ont une anthère 1-loc., il est clair d’après la position latérale des loges subsistantes que la disparition de l’autre n’est que le résultat de cette tendance aux avortemens que M. de Gingins a si bien observé dans les Violettes (Mém. Viol. , p.11), et qui paroît s'étendre à toutes les F'iolacées. Or il est bien clair que l’anthère terminale des Polygala n’a éprouvé aucun avortement quoiqu’uniloculaire ; et parce qu’une loge avorte dans deux étamines d’un Hybanthus , il semble que ce n’est pas une raison pour comp- ter pour double les étamines où il ne se manifeste aucun avortement. Au reste, en me rappelant les avortemens auxquels les Ÿ’iolacées sont sujettes, M. de Gingins a reporté mon attention sur la plante que j'avois appelée dans l’Apercu de mon Voyage, Tonidiun, indecorum , et je lui dois d’avoir reconnu , après un nouvel examen, que cette plante n’est qu’une variété de l’Jonidium Ipecacuanha. 56 GENRES SAUVAGESIA fois des rapports avec plusieurs familles fort éloignées les unes des autres, et si, avant la découverte de lAyrmenanthera, les plantes de la famille des 7zolacées et celles de la famille des Polygalées, n’avoient, je suppose, aucune affinité, est-il bien certain que leur état respectif puisse avoir changé par cette dé- couverte. M. Brown, en considérant avec juste raison son Æy- menanthera comme intermédiaire entre les Jzolacees et les Polygalées, ne dit point en même temps qu’il faillemettre ces familles l’une à côté de l’autre, etles caractères de la semence paroissent avoir peu de valeur dans celle des Polygalées, puisque M. Kunth doute si.les Morina qu'il a examinés ont un véritable périsperme, et que le Securidaca en est certainement dépourvu. Je sais que les racines de quelques Polygalées sont émétiques comme celles des zolettes ; mais si les plantes d’une même famille présentent générale- ment des propriétés analogues , il n’en est pas moins vrai que des principes semblables se retrouvent souvent dans les vé- gétaux les plus éloignés , et personne assurément ne songera à rapprocher des F’rolettes ou des Polygala, les Rubiacées dont un si grand nombre a des racines émétiques. Les Poly- galées n’auroïent-elles pas des rapports plus réels avec les S'apindées par l'inégalité de leur calice dont deux divisions sont pétaloides, comme dans le Schmidelia, par leur corolle irrégulière, par leurs étamines au nombre de8, par le nombre déterminé des ovules, enfin l'absence du périsperme dans le Securidaca? L'ovaire du Polygala ne ressemble-t-il pas à celui du Schmidelia ordinairement 2-loculaire et 2-sperme? N’a-t-il pas aussi quelque ressemblance avec celui du Do- donæa? Ne trouverons-nous aucun rapport entre le fruit ET LAVRADIA. 497 de ces derniers et les capsules bordées d’une aile de plusieurs Polygalées ? N'y auroit-il pas non plus une affinité singuliè- rement sensible entre la fleur de ces plantes et celle du 77e- gonia , et, dans ce cas, ne faudroit-il pas changer un peu la place de ce dernier, déjà rangé par M. Laurent de Jussieu si près des Saprndées (1). B. de Jussieu avoit placé, il y a déjà long-temps, le Réséda auprès des J’rolacées ( Gen. rxvu), parmi les Cap- paridées; mais cette réunion paroît avoir eu pour tout fonde- ment l'existence des placentas également pariétaux, M. de Candolle a donné, ce me semble, une nouvelle preuve de sa sagacité, en mettant les Polygalées à côté du Réséda. H est certain, en effet, que ces plantes ont des rap- ports par l’irrégularité de leurs fleurs et par leurs étamines déjetées d’un même côté et quelquefois soudées dans le Ré- séda , comme elles le sont dans les Polygalées ( F. Tristan: Mem. Res. in Ann. Mus., vol. 18 ); peut-être le disque du Réséda et la glande du Monina ne sont-ils pas sans analogie; et enfin dans les loges 1-spermes du Reseda sesamoïdes les ovules d’abord péritropes deviennent bientôt, par l'inégalité des accroissemens, suspendus comme dans les Polygalées. On ne sauroit nier d’un autre côté que le Réséda ne pré- sente non-seulement par ses placentas , mais encore par ses (1) Dans mon mémoire sur les Ÿ’ochistées, écrit au Brésil loin des bibliothéques (Mém. Mus.), j’attribue à M. de Jussieu l’idée de rapprocher les Polygalées des Légumineuses ; mais, dans la réalité, cette idée appartient à Linné, et je reconnois aujourd’hui qu’elle a peu de fondement. Cela ne change rien, au reste, aux rapports que j'indique entre les Jochisiées, les Salicariées , les Rosacées et les Légumineuses ; rapports sanctionnés aujourd’hui par l'autorité de M. de Jussieu, Mém. du Muséum. 1. 11. 8 58 GENRES SAUVAGESIA étamines nombreuses , son gynophore, son embryon certai- nement dépourvu de périsperme, ne présente, dis-je, des affinités très-réelles avec les Capparidées, comme l'ont très- bien senti Adanson , B. et Laurent de Jussieu et tant d’au- tres. Si, par conséquent, on laissoit les Réséda à la suite des Capparidées, qu’ensuite on placât les Polygalées, puis les Sapindacées, on ménageroit autant que possible la plus belle série qui peut-être ait été proposée jusqu'ici, celle de M. de Jussieu; et l’on conserveroit tout à la fois les rapports indi- qués par lui, par son oncle, par M. de Candolle et par Adanson. C’est au dernier de ces auteurs qu'est due l’idée de rappro- cher les Passiflorées des Violacées (fam. IE, p. 389 et suiv.). Il y a sans doute des affinités entre ces plantes; il ÿ en a plus que jamais à présent surtout que M. Kunth et moi nous avons trouvé des /’zolacées périgynes; et l’on ne sauroit nier non plus que, malgré la différence d'insertion, la nature des filets du Saupagesia n'ait quelque analogie avec celle des couronnes frangées du Passiflora. Mais la série linéaire ne sauroiït con- server tous les rapports, et il faut nécessairement qu’en la formant, on sacrifie quelques aflinités pour conserver les plus importantes. Si des Vorsettia et le Spathularia ont des étamines périgynes, c'est simplement par exception, et je crois avoir démontré que, dans les Passiflorées , les étamines (Mém. Cucurb., p. 21 et suiv. ) émanent du calice ; qu’elles sont continues avec sa substance, et par conséquent toujours périgynes ; que ces plantes se lient aux Loasées par l’inter- médiaire du Zurnera, du Malesherbia, du Deïdanua; et que par conséquent elles restent ainsi voisines des Cucurbita- ET LAVRADIA. 59 cées qui touchent aux Comnbretacées et aux Onagraires. Ces idées que j'ai développées avec détail il y a déjà plusieurs années, ont depuis acquis un nouveau poids par la sanc- tion que M. Brownleur a donnée, du moins daus ce qu’elles ont de plus important (Congo. 19 et suiv.), car cet illustre botaniste dit que les Passiflorées ne lui paroissent pas aussi voisines des Ÿzolettes qu’on l’avoit cru et que leurs étamines sont différentes; enfin, il les rapproche des plantes qui ont l'insertion évidemment périgyne et paroît reconnoitre les rapports incontestables qu'elles ont avec les Sarnydées. Il me reste à parler encore de quelques genres sur lesquels a varié l'opinion des auteurs, et qui ne sont point sans rap- ports avec le groupe étendu que j’ai formé en particulier avec les Drosera. En indiquant une famille des Droseracées, M. de Candolle paroït avoir pensé que plusieurs genres devoient se grouper autour du genre Drosera ; car ce seroit s’écarter de l'heureuse métaphore qui a introduit le nom de famille dans l'histoire naturelle que de l'appliquer à un genre unique. Mais quels sont les genres qui doivent s’unir aux Drosera ? Le Drosophyllum, qui autrefois faisoit partie de ce genre, se présente d’abord, non-seulement à cause de la similitude de son port et de ses feuilles glanduleuses, mais aussi à cause de ses anthères dont la face est tournée en dehors comme dans le Drosera. Cependant quand j'ouvre sa capsule, je ne puis m'empècher d’être surpris des différences que j’observe entre elle et le fruit des Rossolis. Dans le Drosophyllum, en effet, je trouve d’abord cinq valves; je ne vois plus de placentas pariétaux ; enfin les semences, comme je lai ré- 8 * 60 GENRES SAUVAGESIA pété autrefois d’après Link et Tristan (Mem. Plac., p. 40}, et comme je l’ai moi-même vérifié depuis, les semences, dis-je, sont attachées à un placenta central cylindrique et très-court, par l’intermédiaire de cordons ombilicaux fort longs et dressés. 11 me paroît incontestable que ce placenta n’a jamais tenu à la paroi du péricarpe, et j'ai même aperçu à son centre une très-petite pointe par le moyen de laquelle l’analogie sembleroit indiquer qu'il se rattachoit autrefois au sommet dela loge, ainsi que cela a lieu dans les Caryophyllées uniloculaires. Sans doute il faudra rechercher soigneusement ces caractères dans des ovaires encore frais; mais quelques ‘ phénomènes qu’on y découvre, il n’en est pas moins certain que la capsule du Drosophyllum est celle des Caryophyl- lées et non des Drosera. Cependant cette différence singu- lière n’empèche pas les autres rapports, et notamment ceux de la semence, de subsister toujours. M. Turpin et moi nous avons vu dans le Drosophyllum (Mem. Plac., p. 41), un embryon fort petit, conique, droit, appliqué par ses coty- lédons contre la base d’un périsperme charnu avec une radi- cule tournée avec l’ombilic, et j'ai autrefois retrouvé abso- lument les mêmes caractères dans le Drosera rotundifolia. En observant aussi dans le D. Z/ongifolia un embryon droit, extrêmement petit, placé à la base de la graine avec une ra- dicule dirigée vers le hile, Gærtner et M. Kunth ont vu en même temps cet embryon entouré partout d’un peu de pé- risperme, et c’est également ce que j'ai retrouvé dans une espèce Brasilienne ( Drosera rillosa ). Sans doute il y a ici une différence; mais il est facile de voir qu’elle est bien foible, car on conçoit que cette légère portion de périsperme qui ET LAVRADIA. Gt entoure l'embryon dans les D. longifolia et villosa peut aisément soblitérer dans d’autres espèces. Reconnoissons donc que le Drosophyllum ne sauroit être séparé du Dro- sera; regardons-le comme une preuve nouvelle de la né- cessité de ne pas beaucoup éloigner les Ÿ’zolacees, les Fran- keniées, les Cistées et les Droseracées des Caryophyllées ; et enfin concluons encore de tout ce qui vient d’être dit, que les caractères du fruit n’ont pas toujours cette haute valeur qui leur est attribuée, mais que leur importance varie dans les diverses familles, comme celle de tous les autres ca- ractères (1). | En demandant si le Drosera ne devoit pas être, avec le Sauvagesia , réuni aux Vrolettes, M. de Jussieu faisoit au- trefois la même question pour le Dronæa. C'étoit par cela même faire pressentir des rapports entre ces derniers et le Drosera; mais ces rapports vont devenir bien plus sensibles à présent que nous connoissons le fruit du Drosophyl- lum qui, comme je l'ai prouvé, ne sauroit être séparé des Rossols. Je n’ai rien à ajouter à ce que les auteurs ont dit de la fleur du Dionæa; je n'ai pu même y observer la posi- tion des anthères, qui est si importante dans les Droseracées ; mais ce que jai vu, c'est que les valves de la capsule qui est uniloculaire, sont aussi peu seminifères que celles du Dro- sophyllum , et que les graines ovoïde-pyriformes, noires, (1) D’après des synonymies fausses ou obscures , j’avois soupçonné autrefois (Mém. Plac.) que le D. cistoïdes pouvoit être congénère du Drosophyllum. Il est bien vrai qu'il offre six styles comme ce dernier, mais son ovaire contient trois pla- centas pariétaux, comme celui des autres Drosera, et ses étamines ne sont qu’au nombre de cinq. G2 GENRES SAUVAGESIA lisses et luisantes sont enfoncées par leur petit bout dans les cavités d’un réceptacle discoïde, hémisphérique, charnu , al- véolaire, qui occupe le fond de la loge. Le Dionæa a donc déjà beaucoup de rapports par sa capsule avec le Droso- phyllum , mais on va voir qu'il en a davantage encore par sa semence. À la vérité j'ai trouvé un périsperme farineux dans le Dionæa, tandis que celui du Drosophyllumn et des Rossolis est charnu; mais, comme dans le Drosophyllum , le périsperme du Dionæa est fort grand; l'embryon estextré- mement petit, droit et conique; les cotylédons sont épais, tronqués et appliqués contre la base du périsperme qui les dépasse; et enfin, si l’on excepte le point où celui-ci est ren- contré par le sommet des cotylédons,le reste de l’embryon est partout ailleurs immédiatement revêtu par le tégument intérieur (1). D’après tout ceci, il est clair que le Dronæa ne sauroit être séparé du Drosophyllum, comme celui-cine peut l'être non plus du Drosera. Voilà donc trois genres qui en- treront irrévocablement dans le groupe des Droseracées, et le principal lien commun sera un embryon fort petit, droit, rejeté à la base du périsperme , mais intraire ou extraire (Rich). Nous allons bientôt avoir de nouvelles preuves du peu de valeur de la structure du fruit dans les Droseracées , et nous verrons même que les caractères de la graine n’ont pas chez elles une parfaite constance. Personne ne pensera au Drosophy Ulum ,sans se rappeler, comme M. de Jussieu (Gren. (1) Il existe deux tégumens dans le Dionæa muscicapa, l'extérieur crustacé , l'intérieur membraneux. ET LAVRADIA. 63 p. 426), le Roridula qui a le port, les feuilles et les cils de la plante du Portugal. Ce genre a en outre , comme le Dro- sera , Cinq pétales et cinq étamines , et ces dernières, malgré les singularités qu’elles présentent, tendent encore à rappro- cher les deux genres. En effet, dans les anthères du Rort- dula , le connectif se prolonge en une expansion ridée , char- une, semi-ovoide, qui, du côté du dos de l’anthère, offre une cavité ; c’est dans cette cavité que va se rattacher l'extrémité du filet courbé en hamecon, et, si l’anthère est mobile comme celle du Drosera, elle a également sa face tournée en de- hors, caractère qui est ici, comme je l'ai déja fait remarquer, d’une haute importance, puisque nous le retrouvons non- seulement dans tous les Drosera, maïs encore dans toutes les Frankeniées. Cette mème anthère offre encore un autre caractère qui lui est commun avec le Zuxermburera, le Sau- vagesia (1) et plusieurs 77olacées ; elle s'ouvre au sommet par deux pores. Voilà assez de motifs sans doute pour qu’on ne puisse pas songer à éloigner le Roridula du Rossolis et autres groupes voisins ; mais, comme je l’ai annoncé, nous trouverons dans le pistil de nouvelles différences ; car ici le style est unique et simple, l'ovaire oblong et hexagone est à trois loges dispermes, et les ovules sont oblongs et suspen- dus (2). La semence n’est pas non plus organisée comme dans les Drosera ou les Dionæa; mais elle ressemble beau- (1) On ne peut pas dire précisément que les antheres du Sauvagesia s'ouvrent par des pores; mais au moins l'ouverture ne s'étend pas jusqu’à la base. (2) Dans une des loges de l’ovaire que j'ai examiné, je n’ai trouvé qu’un ovule, et la troisième étoit vide; mais il est clair que cette irrégularité n’est que le ré- sultat d’un avortement. 64 GENRES SAUVAGESIA coup à celle des Saupagesta , car, chagrinée comme elle, elle offre aussi un embryon droit dans l’axe d’un péris- perme charnu (V. Gært. Fruct. 298, t. 62) (1). Je retrouve au reste la déhiscence loculicide du Drosera dans le Rori- dula (2), puisque, dans ce dernier, les trois valves de Îa capsule emportant avec elles sur leur milieu les cloisons assez minces, les détachent ainsi de l’axe triangulaire. Un genre plus embarrassant encore, le Parnassia , avoit été placé par Adanson auprès du Sauvagesia dans sa famille des Cistes; et il l’avoit été par M. de Jussieu à la suite des Capparidées , auprès du Drosera. Ces deux manières de voir tendent à se confirmer mutuellement , puisque le Drosera et le Sauvagesia sont actuellement placés l’un auprès de l’autre. Mais nous les avons tirés tous les deux des Cappa- ridées ; le Parnassia les suivra-t-il? Il n’a réellement rien du Factes de cette dernière famille; et ilne paroït pas s'é- loigner autant de celui des Droseracées, ou du moins il en montre à peu près les habitudes. Les divisions de son ca- lice, ses pétales et ses étamines sont au nombre de 5 et non {) Gærtner dit que les semences sont attachées au bas de l’axe central et que la radicule est inférieure. L’examen que j'ai fait de l’ovaire, et dont j'ai indiqué plus haut les résultats, prouve que tout ceci est une erreur. Ne seroït-on pas en droit de conclure de là qu’il sera nécessaire de revoir les caracteres de la semence, et que peut-être ils seront moins éloignés que ne l’a dit Gærtner, de ceux du Drosera. (2) Je sais tres-bien que, pour parler rigoureusement, il ne faudroit pas dire qu’il y a déhiscence loculicide dans les capsules uni-loculaires; maïs il n’est pas de botaniste un peu instruit qui ne sente que , lorsque les valves d’une capsule uni- loculaire portent les placentas dans leur milieu, la déhiscence ne puisse être dite loculicide par analogie , comme elle peut être dite septicide quand les graines sont attachées au bord des valves ( V. Rich. An. fr. ). j i ET LAvVRADIA, 65 de 4, comme cela arrive le plus ordinairement aux Cappa- ridées. Ces corps ciliés qui, chez le Parnassia, alternent avec les étamines, semblent avoir quelque analogie avec les filets du Saupagesia. La capsule n’est point portée sur un long gynophore comme dans les vraies Capparidées. Elle est certainement 1-loculaire comme celle des Drosera et des Capparidées, mais elle n’est point à 2 valves; elle en a le plus souvent quatre et quelquefois trois , ainsi que celle des Yzolacées , des Frankeniées et des Drosera ; et sa déhis- cence est loculicide comme dans ce dernier genre, puisque chaque valve porte dans son milieu une cloison incomplette et très-courte, terminée par un placenta arrondi. La semence a la ressemblance la plus frappante avec celle du Drosera rotundifolia ; car la partie à laquelle ce nom appartient pro- prement et qui est extrêmement menue se trouve placée dans les deux plantes au milieu d’une enveloppe membraneuse dont elle n’occupe que le quart. A la vérité, l'embryon du Parnas- sia palustris (1) est dépourvu de périsperme comme dans les Capparidées, mais il est droit comme celui des Drosera (2). Enfin les anthères du Parnassia ont la face tournée en (1) C’est la seule espece du genre sur laquelle j'aie fait des observations. (2) La semence proprement dite est rousse, cylindrique, arrondie aux deux extrémités, à peine un peu plus grosse du côté de l’ombilic, munie du même côté d’une petite pointe, placée vers le centre d’une enveloppe membraneuse, égale- ment rousse, de consistance lâche, dont elle n’occupe que le quart, et qui la fait paroître irrégulière, comme chiffonnée, semblable à de la sciûre de bois. L’om- bilic est placé à l’une des deux extrémités du grand diamètre de la semence. Le té gument propre est membraneux. L’embryon dépourvu: de périsperme est droit, à cotylédons tres-courts, obtus ; à radicile plus Se que les cotylédons, sf CE fois plus épaisse qu'eux. 1 Mém. du Muséum. t. 11. 9 66 GENRES SAUVAGESIA dehors (1), et ce caractère, je le répète, a ici une très- grande importance, puisqu'il ne varie pas dans les Drose- pacées. Je ne dirai pas, si l’on veut, que le Parnassia pa- lustris est une Droseracée ; mais je ne vois pas de plantes dont. il s'éloigne moins que les Drosera, et tout le monde sait que les genres qu’il faut nécessairement placer les uns auprès des autres n’ont pas toujours des rapports égaux dans les diverses familles. Après avoir fait connoître dans le plus grand détail les Droseracées, les Wiolacées, les Cistées et les Franke- niées , ilne sera pas inutile de les distinguer entre elles par leurs caractères essentiels, et je tracerai ces caractères de la manière suivante : :Dioseracées. Étamines en nombre indéfini. aEore le plus ‘souvent immobiles, dont la face ‘est tournée en de- hors. Semences attachées à la paroi du péricarpe ou au fond'de la loge. Déhiscence loculicide, quand les pla- centas sont pariétaux. Embryon le plus souvent très-pe- it, droit , conique , rejeté à la base du périsperme. Radi- cule tournée pers l'ombihc. Stipules axillaires ou nulles. - Violacées. Étamines-en nombre défini. Anthères-immo- biles, dont la face est tournée vers l'ovaire. Placentas pa- riétaux. Déhiscence loculicide. Embryon droté, cylin- drique , placé dans l'axe du RÉRSRErRE: Radicule tournée vers Hire. Stipules latérales. CTP : .(i) Les.cinq étaninessont/réellement insérées sous l'ovaire; mais duicôté inté- rieur leuncbafe adhère avec ia, sienne: Il n’est donc pas ‘exact de dire avec l'illustre M. Richard , que l’étamine est insérée sur le corpsmême de l'ovaire. 0 Al 3 UN à \ ere, À ET LAvVRADIA. 67 Cistées. Étamines en nombre indéfini. Anthères immmo- brles, ayant presque toujours la face tournée vers l'ovaire. Placentas axilles ou pariétaux. Déhiscence loculicide. Embryon diversement courbé et entouré de périsperme. Radicule et Cotylédons, tournés en sens contraire de l'ombilic (1). Stipules latérales ow nulles. Frankeniées. Étamines en nombre défini ou indéfini. An- thères mobiles ou immobiles, ayant la face tournée en dehors. Déhiscence septicile. Embryon droit , eylindri- que, placé dans l'axe du périsperme. Radicule tournée vers l'ombilic. Stipules latérales ou nulles: Peut-être est-on étonné de ce qu'après avoir dit autrefois que le genre Sarothra (Mem. Plac. ) devoit entrer dans le groupe des F'rankentiées , je ne fasse aujourd’hui aucune mention de ce genre. Je fondois le rapprochement que je rappelle ici sur les graines de la plante qui sont attachées sur le bord des valves et contiennent, suivant Gærtner, un em- bryon droit dans l'axe d’un périsperme charnu. Déjà, dans mes observations sur le Sauvagesia , je reconnus qu'il exis- toit des Æypericum à capsule uni-loculaire et à placentas pa- riétaux, et il en est réellement une foule qui se trouvent dans ce cas. Il ne restoit donc plus que l'existence d’un périsperme pour distinguer le Sarothra ; mais comme on sait aujour- d’hui qu’il existe de véritables Hypéricées munies d’un pé- risperme, cette différence disparoît encore, et, d’ailleurs, ce que j'ai vu dans des graines imparfaitement müres du (x) C’est au moins, comme je l’ai dit, ce que j'ai remarqué dans les espèces où j'ai observé ce caractère. x 9 68 GENRES SAUVAGESIA ET LAvRADIA. Sarothra m'inspire, je l’avoue, quelques doutes sur l’exac- titude de la description de Gærtner. Le Sarothra acomme les Hypericum un ovaire terminé par trois sommets, dont cha- cun est surmonté d’un style ; la forme de la semence et ses enfoncemens rappellent beaucoup plus les graines du AZille- pertuis que celles des Frankeniées; enfin, ce qui achève de décider la question, c’est que les anthères ont la face tournée du côté de l'ovaire, comme dans les Zypericum, et non leur dos, comme dans les Frankeriées, et, par con- séquent, me réunissant à André Michaux ( 7. F1 Bor. Am. un, p. 78), je ne dois plus voir dans le Sarothra autre chose qu'un vrai Mullepertuss. 69 ANALYSE D’UNE EAU MINÉRALE Située commune d’ Auteuil près Paris, dans une propriété appartenant à M. Hubbard, appelée la Tuilerie. PAR M. VAUQUELIN. Ovorqur les règles posées par le célèbre Bergman, et per- fectionnées par les chimistes qui l'ont suivi pour l'analyse des eaux minérales, soient réduites à des expressions assez sim- ples pour pouvoir être mises en pratique par les chimistes les moins exercés, cependant la nature nous offre quelquefois de ces eaux minérales tellement compliquées qu'il est difficile de leur faire avec succès l'application de ces principes. La raison nous annonce et l'expérience prouve que la dif- ficulté des analyses croit dans une proportion rapide à me- sure que le nombre des élémens d’un composé augmente, surtout lorsqu'on veut pousser l'exactitude jusqu’au mil- lième, comme M. Berzélius nous en donne des exemples. La séparation des parties intégrantes des corps est fondée sur la connoïssance de leurs propriétés opposées; mais comme iln’y'a rien d’absolu dans la nature, il y a toujours . 70 ANALYSE quelque chose de semblable dans ce qu’ils ont de plus contraire. Donnons un exemple, non pour les chimistes qui le con- noïssent aussi bien que moi, mais pour ceux qui n’ont de la chimie qu’une idée générale. Veut-on séparer le sulfate de soude, du sulfate de chaux qui se rencontre souvent ensemble dans la nature ? on em- ploiera de l’eau froide, fondé sur la différence de solubilité de ces deux sels; mais quelque petite que soit la quantité d’eau employée pour dissoudre le sulfate de soude, elle dis- soudra aussi une masse proportionnelle de sulfate “ chaux, et même plus grande que s’il étoit seul, parce que la pré- sence du sulfate de soude le rend plus soluble. L'on peut, il est vrai, décomposer le sulfate de chaux par l’oxalate d'ammoniaque, recueillir l’oxalate de chaux, le chauffer pour en obtenir la chaux, et larecombiner à d'acide sulfurique; ensuite évaporer la liqueur et chauffer le résidu pour volatiliser le sulfate nd et obtenir le sulfate _ de soude isolé. Mais il reste constammentune petite quantité d’oxalate de chaux.en solution, et la calcination volatilise quelques atômes de sulfate: de soude, si elle est portée assez loin pour qu’il ne reste pas de sulfate d’ammoniaque. Certes, ni l'une ni l’autre de ces méthodes n’est rigou- reuse , et cependant l'exemple que j'ai pris est um dés plus simples et-des plus favorables à l’exactitude où peut aller la chimie. Ce que je disici à l'égard de l’eau et à la différence de solubilité des corps qu'on expose à son action, est appli- D’UNE EAU MINÉRALE. 71 cable à la plupart des autres fluides employés à l'analyse. Les résultats de l'analyse s’approcheront sans doute d’au- tant plus de la vérité qu’on aura mis plus de soin dans son travail, et plus de précautions pour éviter les causes d’er- reur; mais il y en a, il faut l'avouer, dans l’état actuel de la science, qui sont insurmontables. Et quand je vois des ana- lyses très-compliquées où les élémens des corps qui en ont fait le sujet, sont énoncés au millième près , je dis ui ñily a là un peu de charlatanerie de métier. Cette charlatanerie, au surplus, n’est pas blâämable jusqu'à un certain point, elle peut être même utile au progrès de la science , en faisant naître aux jeunes chimistes le désir d'arriver à ce point de perfection; mais elle seroit nuisible si par des compensations calculées l’on vouloït couvrir les pertes, et les erreurs qu’on ne sauroït apprécier par l’expé- rience. Essai par les réactifs. L'eau qui fait le sujet de notre examen a d’abord été sou- mise à l'influence de quelques réactifs qui, en nous dévoi- lant la nature des principes qu’elle contient , pussent nous mettre sur la voie du meilleur mode d’analyse. 10. Sa saveur est sensiblement attramentaire, et cependant elle ne se trouble ni ne dépose aucun corps par son exposition à l'air; 20. La teinture de tournesol est sur-le-champ rougie par cette eau d'une manière tellement intense qu'il n’y a pas lieu de croire que cet effet puisse être produit par l'acide car- bonique; 72 ANALYSE 30. L’infusion de galles y développe à l'instant une cou- leur bleue qui annonce que le fer s’y trouve à l’état de pé- roxide , et conséquemment qu'il n’est pas uni à l’acide car- bonique ; 4°. L’hydrochlorate de baryte y forme un précipité très- abondant ; : 5o, Il en est de même de l’oxalate d’ammoniaque, ce qui prouve que l’eau contient beaucoup de sulfate de chaux; 6°. Le nitrate d'argent y détermine aussi un précipité assez abondant; il y a donc dans cette eau des muriates ou au moins de l’acide hydrochlorique ; 7°. L’ammoniaque y fait naître un précipité blanc, jau- nâtre , léger et floconneux; 80. La potasse occasionne le même effet, mais d’une ma- nière plus marquée ; 9°. La dissolution d’or n’en éprouve aucun changement, ce qui prouve de nouveau que le fer y est à l'état de péroxide. Ces épreuves préliminaires nous montrent déjà que l'eau dont il s’agit contient de l’acide sulfurique et de l'acide mu- riatique, de la chaux et de l’oxide de fer. L'existence des deux acidesnous rend incertaine la nature de celui qui donne de l'acidité à l'eau; mais les probabilités doivent nous faire penser que c’est l’acide hydrochlorique. La couleur _blanchâtre du précipité formé par l’'ammonia- que ( n°. 7), indique que ce n’est pas du fer pur; l’on verra par la suite que c’est un mélange de magnésie, de chaux, d’alumine et d’oxide de fer. D'UNE EAU MINÉRALE. 73 Précipitation de l'eau par divers réactifs et détermination de la nature et du poids des précipités. Comme dans le cas qui se présente ici le nombre des principes intégrans de l’eau minérale ést très-multiplié, et qu'il nous paroissoit impossible de les obtenir tous entiers par dissolution et cristallisation dans divers véhicules, il nous a fallu opérer par voie de décomposition et les recomposer en- suite par le calcul d’après les analyses faites antérieurement. Ainsi, 1°. nous avons précipité un litre d’eau par le mu- riate de baryte; le précipité recueilli et lavé à l’eau bouil- lante pesoit cinq grammes 31 centigrammes; 20. Nous avons également précipité un litre d’eau par le jitrate d'argent, et nous avons obtenu cinq décigrammes de chlorure d'argent; : La même quantité d'eau précipitée par l’oxalate d’am- A a donné deux grammes quinze centigrammes d’oxa- late de chaux très-pur; 4°. Enfin, un litre d’eau De par l’ammoniaque a donné une matière blanche, jaunâtre, floconneuse, qui étoit composée de péroxide de fer, d’alumine, de magnésie et d'une petite quantité de chaux. Ce précipité traité encore humide par la potasse caustique a pris une couleur brune, a diminué de volume et a cédé à la potasse trois centigrammes et demi d’alumine qui en ont été séparés par le muriate d’ammoniaque. La partie du précipité sur laquelle la potasse n’eut pas d'action, fut reconnue pour un mélange d’oxide de fer, de magnésie et d’une petite quantité de carbonate de chaux. Mém. du Muséum. ti. 11. 10 74 | ANALYSE La présence de la chaux dans ce précipité , attira mon at- tention ; l’'ammoniaque ne pouvant par elle-même précipiter cette substance ,je soupconnai que l’alumine et même l’oxide de fer pouvoient avoir contribué à cette précipitation; ce- pendant ayant constamment trouvé la chaux et même la ma- gnésie unie à l'acide carbonique, je pensai que ce dernier se trouveroit dans l’eau minérale, et que telle étoit la cause de l'effet observé. L’on s’imaginera bien que pendant la préci- pitation de l’eau par l’ammoniaque, j'ai eu la précaution de préserver le mélange du contact de l’air, et que j’ai examiné la matière immédiatement après qu’elle fut séparée du liquide. Quant à la présence de lamagnésie, je n’ai point été surpris de la trouver dans ce précipité, car quoique l’eau minérale soit acide, l’alumine qui l'accompagne doit nécessairement déterminer la précipitation d’une partie de cette sub- stance. Après avoir séparé l’alumine, comme nous l'avons dit plus. haut , nous avons traité le reste du précipité par l’acide sul-_ furique, en excès, et nous avons chauffé au rouge obscur jus- qu'à ce qu'il ne se dégaget plus de vapeurs , et enfin nous avons lessivé le mélange à l’eau bouillante; par ce moyen l’oxide de fer a été éliminé , il pesoit quatre ceritigrammes *. La quantité de chaux précipitée conjointement avec l’alu- wine , le fer et la magnésie, dans l'opération dont nous avons parlé , étoit de deux centigrammes: ce qui représente cinq eentigrammes de sulfate de chaux; celle de la magnésie étoit d’un centigramme; d’où il suit que deux centigrammes et À de sulfate de magnésie ont été décomposés. D’UNE EAU MINÉRALE. 3 75 Evaporation du liquide d’où l’alumine et le fer avoient été précipités par l’ammoniaque. Les quantités de l’alumine et de l’oxide de fer étant dé- terminées, nous avons fait évaporer à siccité le liquide duquel ces deux matières ont été extraites, et nous avons caleiné les sels qui en sont résultés pour vaporiser le sulfate d’ammo- niaque formé dans l'opération. Ainsi calciné ce résidu pesoit 2,81 grammes. Ce résidu qui étoit légèrement rosé, a été lavé avec sept à huit fois son poids d’eau froide pour séparer les sels solu- bles d'avec le sulfate de chaux : celui-ci pesoit après avoir été calciné deux grammes quinze centigrammes, auxquels il faut ajouter les cinq centigrammes représentés par les deux centigrammes de carbonate de chaux précipités par lammo- niaque dans l’opération rapportée plus haut. L'eau froide dont nous nous sommes servi pour laver le résidu de l’eau minérale évaporé à siccité, devoit avoir dissout les sels facilement solubles, tels que les sulfates de magnésie, de soude, de potasse, les muriates de soude , de magnésie et de maganèse qui pouvoient se trouver dans ce résidu. En conséquence nous avons précipité la magnésie par l’eau --de chaux, et après lavoir lavée à l’eau bouillante nous l'avons fait sécher à une chaleur rouge, elle avoit une légère teinte rose que nous avons attribuée à la présence d’une trace d'oxide de manganèse : elle pesoit douze centigrammes, mais l’on verra plus bas qu'il y en a un peu plus : cette quantité de magnésie représente trente-quatre centigram. sulfate sec. Cette magnésie étoit parfaitement pure, car elle se dissol- 10! 76 A ANALYSE voit en totalité dans l’acide sulfurique, et sa dissolution éva- porée a formé un sel entièrement semblable au sulfate de magnésie ordinaire. Ensuite, nous avons fait évaporer la liqueur de laquelle la magnésie ‘avoit été précipitée par le moyen de l’eau de chaux, le résidu sec a été traité avec huit à dix parties d’eau froide afin de dissoudre le sulfate de soude et d'attaquer le moins possible de sulfate de chaux formé par l'opération ci-dessus. La liqueur contenant le sulfate de soude évaporée à sic- cité a fourni, en effet , un sel pesant douze centigrammes et qui avoit toutes les propriétés du sulfate de soude. Il conte- noit cependant des traces de sulfate de chaux. Nous avons reconnu dans ce sel des quantités notables d’acide muriatique et de potasse ; ainsi il seroit composé de sulfate de soude qui en fait la plus grande partie , de sulfate de potasse et de mv riate de soude; car je crois so est ainsi qpe les acides sul- furique et mariatique doivent s'arranger à l'égard des deux alcalis dont nous venons de parler. Évaporation de l’eau minérale et phénomènes qu’elle présente pendant cette opération. Après avoir analysé cetté eau par les réactifs, ainsi qu'it a été dit au chapitre précédent, nous en avons évaporé six litres dans un vase de platine à une douce chaleur, en notant les phénomènes à mesure qu’ils se présentoient. : Pendant les : progrès de l'évaporation, elle n'a pas tardé à présenter à sa surface une pellicule blanche jaunâtre qui a augmenté successivement , et a fini par troubler le liquide et D’UNE EAU MINÉRALE . 7h former un sédiment au fond du vase : cet effet est sans nul doute produit par le sulfate de chaux et le sous-persulfate de fer. À Sur la fin de l’opération, lorsque le résidu commencçoit à se dessécher, il avoit une couleur grise jaunâtre, et répandoït des vapeurs d'acide muriatique très-sensibles à l’odorat et à Vammoniaque. De ce phénomène l’on peut conclure ou que Vacidemuriatique estlibre dans l’eau minérale, ou que l'acide sulfurique qui tient le sous-persulfate de fer en dissolution, se porte sur la base de l'acide muriatique, dégage ce dernier, ‘et abandonne le sous-persulfate qui devient alors insoluble. L'on verra plus bas que cette supposition est vraisemblable, Le résidu de l’eau doit être desséché avec précaution, car une chaleur trop élevée décompose non-seulement le per- sulfate de fer, mais encore le sulfate d’alumine, en sorte que ne se dissolvant pas dans l’eau lorsqu'on vient à laver le résidu, l’on pourroïit facilement ne pas les apercevoir. C'est ce qui est arrivé dans une de nos opérations. Le résidu desséché autant que possible pesoit 23 grammes, ce qui donne pour chaque litre 3 grammes 83 centigrammes. Mais je n'assurerois pas qu'il fût parfaitement sec; car, placé entrele danger de décomposer quelques sels ou de laisser un peu d’eau dans le résidu, j'ai préféré m’exposer à ce dernier. Après avoir desséché et recueilli avec soin le résidu de six litres d’eau évaporée, je l'ai soumis pendant quelques jours à l’action de dix fois son poids d’eau froide, en ayant le soin d’agiter souvent le mélange ; lorsque le temps eut permis à Peau de produire l'effet désiré, c’est-à-dire de dissoudre les sels facilement solubles, le tout fut jeté sur un filtre, et. \ 75 | ANALYSE quand, à l’aide de quelques secousses, il ne tomboït plus de liquide, le résidu fut lavé encore avectrois parties d’eau froide employées successivement. Il sera examiné plus bas. La liqueur provenant du lavage du résidu de l’eau miné- rale, étoit sensiblement acide : sa saveur étoit manifestement astringente. Comme j'avois appris par les expériences précé- dentes que cette eau contenoit de l’alumine, j’évaporai le la- vage ci-dessus, et le réduisis sous un petit volume pour voir s’il fourniroit de l’alun; mais je n’en aperçus aucun vestige même au bout de plusieurs semaines, ce qui autorise à penser\ ou que l’alumine y est unie à l’acide muriatique ou qu’elle y existe à l’état de sulfate simple ; cependant comme nous avons trouvé dans l’eau minérale des traces de potasse, il est probable qu’une portion de cette substance est à l’état d’alun. N'ayant donc pudécouvrir d’alun dans ce liquide, je l’étendis d’eäu pour le précipiter par l’ammoniaque, afin d’obtenir l’oxide de fer et l’alumine; mais cet alcali précipitant aussi une portion de magnésie d'autant plus grande qu’elle setrouve ici en présence de l’alamine qui l’attire, j’ajoutai à ce liquide une certaine quantité d'acide, afin de former un sulfate am- moniaco-magnésien, indécomposable par l’ammoniaque : ce qui réussit très-bien ; j'évitois par ce moyen la difficulté, même l'impossibilité de-séparer complétement l’alumine de la magnésie par la potasse. Le précipité obtenu de cette manière et be lavé fut traité par une solution bouillante de potasse caustique; sa couleur qui étoit le blanc jaunâtre fut changée en rouge foncé. Le tout fut mis sur un papier joseph séché et exactement pesé ; le lavage du précipité étant réuni à la liqueur alcaline, on D’UNE ÉAU MINÉRALE. 79 précipita l’alumine qu’elle contenoit, au moyen du mu- riate d'ammoniaque; enfin cette alumine lavée convenable- ment et séchée à une chaleur rouge, pesoit 315 milligrammes. Quant à l’oxide de fer, on fit sécher le papier où il étoit con- tenu, aussi long-temps et aussi fortement qu’il fut possible sans brüler le filtre, on pesa le tout et on déduisit le poids du papier : celui de l’oxide s’élevoit à 260 milligrammes. La quantité de l’alumine et de l’oxide de fer étant connue, nous nous occupàmes du liquide d’où ils avoient été séparés. Ce liquide devoit contenir les sels à base d’alcali et de ma- gnésie, plus le sulfate d’ammoniaque formé lors de la préci- pitation du fer et de l’alumine par cet alcali; nous le fimes d’abord évaporer à siccité dans une capsule de platine, et ensuite chauffer au rouge léger dans un creuset de même métal pour chasser le sulfate d’ammoniaque. Le résidu redis- sous dans une petite quantité d’eau, fut précipité par l’eau de chaux, pour obtenir la magnésie; celle-ci soigneusement la- vée et calcinée pesoit 627 milligrammes. Pour avoir les sels à base d’alcali contenus dans le liquide d’où l’eau de chaux avoit précipité la magnésie, nous avons fait évaporer le liquide à siccité, et nous avons lavé le ré- sidu avec une petite quantité d’eau froide pour ne dissoudre que le moins possible de sulfate de chaux. Cela étant fait, nous avons filtré la liqueur et nous lavons réduite, par l’é- vaporation, sous un petit volume pour la faire cristalliser, Au bout de quelques jours nous avons, en effet, obtenu des cris- taux en aiguilles que leur saveur amère et leur efflorescence à Pair chaud nous ont fait reconnoître pour du sulfate de soude, ce sel desséché pesoit 1,905 grammes. En examinant 80 - ANALYSE cette matière saline nous y avons reconnu Ja présence d’une petite quantité de potasse et d'acide muriatique:; ainsi, elle con- üent du sulfate de potasse , et probablement du muriate de soude. Nous n’avons point cherché à estimer la quantité de ces deux sels, ce qui, au surplus, auroit été très-diflicile sur de si petites quantités. ; I] nous falloit ensuite examiner la partie du résidu de l’eau minérale qui est iusoluble dans l’eau froide. Quoique nous fussions convaincus par les essais préliminaires qui ont été exposés plus haut que la majeure partie de cette matière füt formée de sulfate de chaux , il étoit bon de nous en assurer par l'expérience. | D'abord, nous l'avons traité par l'acide muriatique, et nous avons remarqué que celui-ci s’étoit coloré en jaune, ce qui pouvoit être dû, soit à de l’oxide de fer ou à quelque subs- tance végétale; l'acide muriatique évaporé à une douce cha- leur, a laissé en effet un petit résidu jaune brun qui repris par l’eau froïde a laissé une matière grasse de consistance et de couleur de bitume, lequel mis sur un charbon ardent, s’est réduit en fumée dont l’odeur ressembloit aussi à celle du bitume; la portion que l’eau a dissoute contenoit un peu de fer qu'on en a précipité par l’ammoniaque. | Cela prouve que malgré les ménagemens pris pour dessé- cher le résidu de l'eau minérale, une partie du persulfate de fer a été décomposé et converti en sous-persulfate qui est insoluble, que la plus grande partie du bitume contenu dans l’eau reste avec le sulfate de chaux, parce que la quantité d’eau que l’on emploie pour laver les sels très-solubles, n’est pas assez grande pour le dissoudre, étant privée d’ailleurs D’UNE EAU MINÉRALE. 81 d’une portion d’acide muriatique qui paroît contribuer beau- coup à sa solution dans le cas dont il s’agit. Je dois dire au sujet de ce bitume qu’on en retrouve des traces dans tous les produits qu’on obtient successivement de l’eau; ainsi l’a- lumine et le fer en contiennent une portion lorsqu’on les pré- cipite par l’'ammoniaque. La magnésie qu’on sépare par l’eau de chaux, en contient également qui la colore en brun, cou- leur qui nous avoit fait d’abord penser que l’eau contenoit une quantité notable de manganèse ; mais nous en avons été désabusés en voyant ces substances blanchir par la calci- nation. L'on peut obtenir la plus grande quantité de ce bitume en traitant immédiatement de résidu de l’eau minérale par l’al- cohol bouillant, et en laissant ensuite évaporer spontanément ce dernier; si on lave avec un peu d’eau le bitume laissé par l’alcohol, on trouve dans cette eau des traces de muriate de fer et d’alumine. Dans une autre opération où nous avons fait évaporer quatre litres d’eau et dessécher plus fortement le résidu, afin d’en connoître plus exactement le poids, nous avons re- marqué que son lavage à l’eau ne contenoit presque pas de- fer ni d’alumine; et soupconnant que les sulfates dont ils fai- soient la base dans l’eau minérale, avoient été convertis en sous-sulfates par la chaleur, nous avons traité par l’acide muriatique le résidu préliminairement lavé avec de l’eau, et nous avons en effet obtenu ces deux substances, plus une petite quantité de magnésie; la présence de cette dernière matière autorise à penser que l’eau contient un peu de muriate de magnésie, car le sulfate de cette base n’est Mém. du Muséum. À. 11. 11 82 ANALYSE pas susceptible de se décomposer à une chaleur aussi mo- dérée. Examen de la matière insoluble de l’eau minérale. Cette eau contenant un acide minéral libre, elle ne pou- voit contenir de carbonate de chaux ni de magnésie, et c'est ce dont nous sommes assuré en versant sur lé résidu insoluble de l'acide muriatique qui n’a pas produit la plus légère effervescence. Cette matière étoit entièrement soluble dans une suffisante quantité d’eau, et sa dissolution a présenté aux réactifs toutes les propriétés du sulfate de chaux; ce sulfate de chaux pe- soit 12 grammes 045 millièmes. @ La série des opérations auxquelles nous ayons soumis l’eau dont il s’agit, nous a fourni les résultats suivans : savoir, 10. du“péroxide de fer; 20. de l’alumine; 30. de la magnésie; 4°. du sulfate de soude mêlé de sulfate de potasse et de mu- riate de soude; 50. du sulfate de chaux ; 60. de l’acide mu- riatique ; 7°. de l’acide carbonique ; 8°. du bitume. Maintenant, il faut avoir recours aux lois des affinités res- pectives pour connoître la manière dont les substances qui viennent d’être énoncées, se trouvent combinées dans l’eau minérale. Nous n'avons aucune difficulté pour la soude, la chaux et la magnésie, parce que nous les avons obtenues toutes trois à l’état de sulfates cristallisés par l’évaporation; mais nous n'avons RUE le même degré de certitude pour le fer, l’alumine et même une partie de la magnésie. L’on se rappelle en effet que l’eau minérale contient de D’UNE EAU MINÉRALE. 83 l'acide muriatique dont la quantité s'élève à peu près à 15 centigrammes par litre, et que lorsque nous avons traité le résidu de l’eau minérale par l’alcohol, nous avons obtenu des petites quantités de muriates de magnésie et d’alumine, mais ces quantités demuriatessont probablement plus grandes que celles fournies par l'expérience, par la raison que surlafin de l’évaporation, où la matière commence à se dessécher, l'acide du persulfate de fer et peut-être celui du sulfate d’alumine agissant sur les muriates , en dégage l’acide muria- tique, et se substitue à sa place : telle est la cause des vapeurs d'acide muriatique qui se manifestent pendant la dessiccation. Dans six litres d’eau, il y a 10 grammes 62 centigrammes d'acide sulfurique ; sur cette quantité le sulfate de chaux seul en contient 7 grammes 508 millièmes, la magnésie 1,252, la soude 1,002; il nous reste donc 351 millièmes d’acide à distribuer entre l’alumine et le fer; mais une chose nous ar- rête, c’est le défaut d'analyse du sulfate d’alumine. | Quant à l'acide que renferme le bipersulfate de fer , nous . pourrons en connoître la quantité, si l'expérience suivante, rapportée par M. Thomson, est exacte. Il dit : «Si l’on fait dissoudre du protosulfate de fer dans une eau acidulée par l’acide nitrique, et évaporée avec précaution jusqu’à siccité, ayant soin de chasser tout l'acide nitrique , mais en n'élevant pas assez la température pour qu'il se dé- gage de l’acide sulfurique, le protoxide de fer est transformé en peroxide : en mettant de l’eau sur cette masse, il s’en dis- sout les trois quarts, et le quart qui reste est d’un jaune rougeâtre n'ayant ni odeur ni saveur. Ce sel est composé de péroxide 20, d’acide 5. » % II 84 ANALYSE Le protosulfate de fer étant composé d’à peu près parties égales d’acide et de base, il est évident que la composition de la partie dissoute par l’eau doit être dans des rapports inverses; ainsi le sel insoluble étant formé de 4 parties d’oxide et d’une d'acide, l’autre doit contenir environ 4 parties d’a- cide et une de base. Ayant trouvé dans six litres d’eau miné- rale 26 centigrammes de péroxide de fer, il faut donc y ajou- ter quatre fois autant d’acide sulfurique, c’est-à-dire 1 gramme 4 centigrammes pour en faire un persulfate soluble, mais nous - n'avons que 351 millièmes d’acide sulfurique à disposer; il en faudroit encore 689. Il faut maintenant trouver l'acide qui étoit uni aux 315 mil- ligrammes d’alumine que nous avons séparés de l’eau. Pour cela nous sommes forcé d’avoir recours à l’acide muriatique dont la quantité, estimée par le chlorure d’ar- gent produit dans une de nos expériences, s'élève à 900 milligrammes pour 6 litres d’eau ; d’après la composition de l'alun, il paroït que l’alumine se combine à deux fois et demi son poids d'acide pour former le sursulfate simple, d’où il. s’ensuivroit que 315 milligrammes d’alumine exigeroit 787 d’a- cide. En supposant que l'acide muriatique püt saturer au- tant d’alumine que l'acide muriatique, il resteroit 123 milli- grammes de cet acide que l’on pourroit reporter sur l’oxide de fer ; mais cette quantité ne peut pas équivaloir à 689 d’acide sulfurique qu'il faudroit pour mettre ce métal à l’état de bipersulfate. Il résulte de là, ou que nous avons perdu quel- ques parties d'acide, ou que nous avons élevé trop haut la quantité des bases existantes dans l'eau minérale : cette dernière supposition nous paroît plus probable. Il est encore D’UNE ÉAU MINÉRALE. 85 possible que les analyses qui nous ont servi de base pour calculer les proportions des sels, quoiqu'empruntées des meil- leurs chimistes, ne soient pas parfaitement exactes. Quant à l’état où se trouve l’acide muriatique dans l’eau , il semble, vu les forces relatives de l'acide sulfurique et de l'acide hydrochlorique à l'égard des bases, qu’une partie de ce dernier seroit libre dans l’eau, et constitueroit l'acidité qu'elle présente; que l’autre seroit combinée avec les bases les moins énergiques, telles que l’alumine et le fer. Cependant l'existence d’une certaine quantité de muriate de soude dans le sulfate , annonce que l’acide muriatique est combiné aux bases alcalines, et que l'acidité de l'eau est due au bipersul- fate de fer et d’alumine; quoi qu'il en soit, nous allons ex- poser ici dans un tableau les différentes substances comme nous les avons obtenues; d’autres plus habiles les arrangeront entre elles dans l’ordre qui leur paroïtra plus conforme aux lois de la nature. Tableau synoptique des substances contenues dans six litres d’eau minerale. Sar six litres. à l’état sec. à Pétat cristallisé. 1°: Sulfate de: chaux... 13,94b1gr.. 5... 4.1 16,733. 2°. ——— de magnésie.... 1,716..........., 3,240. 30: — de sonde... seen 130Bscece.ss.es: 45004 e 4e. Alumine..............- 0,315, qui supposés unis à l'acide sulfurique à l’état de bisulfate simple , donneroient 1,102 de ce sel. 5, Péroxide de fer 0,260, qui supposé uni à l’acide ‘sulfurique à l’état de bisul- fate de fer, donneroit 1,300. 6°. Acide muriatique libre 0,900; mais il est vraisemblable, comme nous l'avons dit plus haut, qu’une partie de cet acide est combinée avec une ou plusieurs des bases. 7°. Bitume, quantité indéterminée , mais notable. 8°. Enfin, acide carbonique quantité inappréciée , mais très petite. — 86 ANALYSE Tableau des quantités des substances ci-dessus pour chaque litre d’eau. sec. cristallisé. 1°. Sulfate de chaux.,............. 24324 4 4 ferelelele 2,789. 20. Sulfate de magnésie...... DH 0,286...... .. 0,540." 3°. Sulfate de soude......,.....,.., DHL Te see 0,755. 4°. Bisulfate d’alumine............ CNET AAA quantité d’eau 5°. Bipersulfate de fer....... de OfMIER.Ue GA SobEe 6°. Acide muriatique.............. 01902 eee cristallisation. 7°. Bitume, quantité..... HOUDN SH do inconnue. .... &. Acide carbonique libre.......... TIR 3,478 grammes. L'on voit par ce tableau que chaque litre d’eau contient une quantité de substances dont le poids à l'état sec s'élève à 3,478 grammes; l’on voit aussi qu'il n'y a pas une con- formité parfaite entre cette quantité de matière et celle du résidu de six litres d’eau, laquelle étoit de 23 grammes, ce qui donne pour chaque litre 3,83 grammes, mais on se rap- pelle que ce résidu n’avoit pas été desséché complétement pour les raisons que nous avons données plus haut; d’ailleurs il est impossible d’éviter dans l’analyse d’une matière aussi compliquée, la perte de quelques portions de ses élémens. C’est là le cas de dire avec Bergman , exacta aquarum ex- ploratio inter difficiiora chimiæ problemata merito nu- meralur. Cette eau minérale ressemble beaucoup à celle de Passy qui, comme on sait, est essentiellement ferrugineuse et qui contient aussi un sel alumineux, ce qui n’est pas étonnant, vu la proximité des lieux. La grande quantité de fer et de matière saline, surtout EN D’UNE EAU MINÉRALE. 87 des sulfates de soude et de magnésie, doit lui donner une grande puissance sur l’économie animale ; il est même pro- bable , si l'on en fait usage en médecine, que ses effets très- énergiques, obligeront à n’en prendre que de petites doses à la fois, ou au moins à la couper avec une certaine quantité d’eau ordinaire. REZ SP ID EE RE EXTRAIT d'une Lettre de M. LESCHENAULT DE LA Tour, naturaliste du Roi, à MM. les Professeurs du Muséum Royal d'histoire naturelle. Cayenne, 18 novembre 1823. MM. Depuis cinq mois, M. Doumerc et moi, nous avons quitté la France. Nous sommes restés environ un mois à Rio=Janeiro, et quelques jours seulement à Bahia; nous n’avons pas pu former des collections nombreuses, parce que pen- dant nos séjours à ierre nous ayons été. presque continuellement contrariés par les pluies. Cependant notre temps a été utilement employé, et nous avons dans les trois règnes quelques objets rares. La partie que je regarde comme la plus intéressante de nos collections, est celle des roches des environs de Rio-Janeiro. Les terres qui environnent la belle rade de Rio-janeiro ont un aspect tres- singulier. Elles sont formées d’une suite de montagnes élevées, dont la pente est rapide : ces montagnes sont séparées par des gorges étroites, et couvertes jusqu’à jeurs sommets d’une belle végétation : quelques parties sont cultivées. Des gneiss et des granits forment généralement leur charpente : le quartz laiteux , et en grosses masses, paroît abondant sur quelques points élevés : je ne l’ai point vu en place, mais je l’ai souvent trouvé roulé dans les rivières en quantité considérable et en morceaux assez volumineux. La charpente pierreuse est recouverte d’une argile rouge ou jaunâtre, qui se voit partout aux environs de Rio-Janeiro. Ce pays m’a rappelé par son aspect le royaume de Candi, dans l’île de Ceylan. M. Doumerc et moi nous avons recueilli une suite des granits, des gneiss, des quartz, des terres et des sables qui constituent le terrain des environs de la capitale du Brésil. é Se Notre séjour à Rio-Janeiro aura eu de l'intérêt pour l’agriculture de nos co- lonies; vous en jugerez, messieurs, par la liste raisonnée des plantes vivantes et des racines que j’ai apportées et qui sont dans le meilleur état. Je pense que vous y verrez ayec plaisir l'introduction de l’arbre à thé de Chine, qui peut devenir importante, même pour nos départemens méridionaux. M. Doumerc et moi nous partirons incessamment pour la Manna. Je suis à peu près certain de pouvoir vous envoyer dans le courant de l’année prochaine tous les objets de zoologie que M. Cuvier a signalés à nos recherches. J’ai l'honneur d’être, etc. MÉMOIRE Sur l Analyse de Pierres et de Fers météoriques trouvés en Pologne. PAR M. LAUGIER. M. Brongniart ayant recu de M. Horadecki de Vilna deux échantillons de pierres météoriques et de deux variétés de fer météorique tombés en Pologne à diverses époques, m'a invité, de la part de ce professeur, à en faire l’analyse. J’ai examiné ces quatre objets, et c’est le résultat de ce travail que je crois devoir communiquer à la section de phar- macie , en m'excusant auprès d'elle de l’entretenir d’un sujet déjà tant rebattu. Mais comme on ne sait presque rien encore sur l’origine de ces substances, et que le seul moyen de parvenir à la dé- brouiller est de multiplier les faits qui les concernent, il n’est peut-être pas inutile d'en augmenter le nombre. Un autre motif qui m'engage à publier le travail que j'ai fait sur ces objets, c’est la conformité qui se présente entre les résultats que m'a fournis le fer de Brahin, et ceux que j’ai annoncés à l’Académie des sciences, il y a quelques années, dans mon Mémoire sur le fer nauf de Sibérie. Je n’entrerai point dans les détails de mes nombreuses ex- Mém. du Muséum. 1. 11. 12 90 ANALYSE DE PIERRES . périences, que j'ai répétées jusqu'à trois et quatre fois sur chaque substance, je ne parlerai que du mode général d’ana- Jyse à suivre, et qui tend à raccourcir, sans inconvénient pour ceux qui voudraient les entreprendre, des travaux qui m'ont paru beaucoup trop longs. Autant l'emploi de lhydrate de potasse est indispensable pour constater la présence du chrôme dans les aérolithes et en déterminer la proportion, autant ce réactif est impropre à la détermination du soufre et de la petite quantité d’alcali récemment trouvée par M. Vauquelin dans quelques-uns d’entre eux. De là la nécessité de les traiter successivement par les alcalis et les acides, c’est-à-dire, de les soumettre à deux analyses. Maïs si par la première, à l’aide de la potasse, on peut réussir à déterminer la proportion de tousles élémens à l'exception du soufre et de l’alcali qui leur appartiennent, la seconde ne consisteroit plus que dans les expériences pro- pres à apprécier la quantité des deux derniers corps, et l’on épargneroit ainsi le temps qu'exigeroit une seconde analyse complète. Voici comment on peut procéder à la première analyse dans laquelle on auroit pour but de déterminer la propor- tion de tous les élémens , le soufre et l’alcali exceptés : 10. Fondre dans un creuset d'argent 100 parties de l’aëéro- lithe et 400 d’hydrate de potasse; délayer la masse dans l’eau, laisser reposer, décanter, laver à plusieurs reprises et chauffer chaque fois jusqu’à ce que l’eau soit insipide. La dissolution alcaline peut contenir de l’oxide de manganèse, du chromate de potasse, de la silice et un peu d’alumine; si elle est ver- dâtre, la faire bouillir jusqu’à ce qu’elle n’ait plus que la cou- ET DE FERS MÉTÉORIQUES. OI leur jaune, la filtrer pour recueillir les flocons qui se sont déposés pendant l’ébullition; concentrer la dissolution à moi- tié, la sursaturer d’acide nitrique affoibli, la précipiter par le protonitrate de mercure, laisser en repos, décanter la li- queur , verser le dépôt repris avec un peu d’eau dans un creuset de platine ; quand l’eau est sans saveur, la décanter, sécher le précipité, le calciner, peser l’oxide de chrôme; éva- porer la liqueur décantée, calciner le résidu au rouge blanc, redissoudre dans l’eau, et l’on obtieñt ainsi la silice et l’alu- mine que l’on sépare par les moyens connus. 2°. Délayer dans l’eau ie résidu encore humide insoluble dans l’alcali et ajouter assez d’acide hydrochlorique pour le dissoudre en totalité; évaporer la dissolution à siccité pour séparer la silice, filtrer, laver avec de l’eau aiguisée du même acide, précipiter par un excès d’ammoniaque, faire bouillir et séparer l’oxide de fer; évaporer la dissolution ammoniacale jus- qu'à ce qu'il ne se dégage plus d’ammoniaque et que sa cou- leur bleue soit devenue verte; verser quelques gouttes d’hy- drosulfate d'ammoniaque, recueillir sur un filtre les flocons noirs d'hydrosulfate de nickel, après avoir évaporé la disso- lution jusqu'à ce qu'elle ait été totalement décolorée, préci- piter la chaux par l’oxalate d’ammoniaque et la magnésie par la potasse caustique. La seconde analyse n'ayant d’autre objet que de déter- miner la quantité du soufre et de l’alcali, on peut se borner aux expériences suivantes : Verser sur 1 gramme de l’aérolithe 16 grammes d’acide hydrochlorique étendu d’un volume d’eau égal au sien, adapter à la fiole un tube dont l’autre extrémité plonge dans 127 \ 92 ANALYSE DE PIERRES une dissolution d’acétate acide de plomb ou de cuivre, et chauffer jusqu’à ce qu’il ne se dégage plus d’acide hydrosul- furique, filtrer et peser le sulfure; faire passer dans la dis- solution hydrochlorique filtrée un courant de chlore pour amener le fer à l’état de péroxide, précipiter le fer par l’am- moniaque, évaporer la dissolution ammoniacale à siccité, calciner fortement le résidu , redissoudre ce qui reste et verser de la dissolution de platine pur. On pourroit agir d’une manière inverse à celle que nous venons de décrire, c’est-à-dire, faire une analyse complète au moyen des acides et une portion d’analyse par la potasse, dans la seule vue de déterminer la quantité du chrôme; mais il est aisé de prouver que cette méthode seroit moins avanta- geuse que la précédente. é Eneffet, que l’on emploie l acide hydrochlorique où l'acide nitrique au traitement d’unaérolithe, celui-ci est toujours atta- qué incomplètement,, tous les élémens se fractionnent ou se partagent, une portion de chacun d'eux est enlevée par l'acide, et l’autre demeure dans le résidu sur lequel de nouvelles quantités de l’acide employé n’ont plus d'action; pour séparer les matières qui composent le résidu , il faut nécessairement opérer sa fusion avec la potasse pour y retrouver la portion des substances qui a échappé à l’action de l'acide employé au traitement de la pierre, puis réunir ces fractions séparées ; et cette réunion qui entraine des pertes inévitables nuit beau- coup à l'exactitude des résultats. La première pierre météorique que j'ai examinée est tom- bée le 30 juin 1820 à Lixna, près Dunabourg , à lembou- chure de la Duina. Elle ne diffère point par son aspect de ET DE FERS MÉTÉORIQUES. O3 la plupart des aérolithes et contient comme beaucoup d’en- tre eux de petits gobules brillans qui s'opposent à sa pulvé- risation et qui enlevés par le barreau aimanté se trouvent for- mer le quart de son poids. Ces globules se dissolvent aisé- ment dans l'acide hydrochlorique foible en exhalant une forte odeur d'acide hydrosulfurique. 100 parties de météorite de Lixna , non séparé de ses glo- bules, sont composées ainsi qu'il suit : Oxide de fer.....:..... DIEU HOCL tas het 40) SilICE een tiens eiersale c'e leete see Nes SEEN Magnésie........... RE ot OO CE 1317 Soufrensrs sien del del elaiele nie) tete cte-cte)e ss sn en 20: 00 AIUIMINES ee «1010 niece eLele pe ele se ele lotete eisieite ele s 010 late 9 cL0) ie ï Nickel....... PR Sr elo ararotte Doi lee sie 2f0I2 0 ele tohe eee ele ed 1,90 GRTOMES ne cine serre ss male Notainte AO MODES E Dan SOL AE DRE 1 GChanxs He een eee otcreie.e fe ete 0 RE AT ce 0,50 = Traces de cuivre et de manganèse. 101,00 On peut présumer qu'une portion du fer de cet aërolithe étoit à l’état de protoxide, puisque les résultats de l’analyse ne donnent point un excédant proportionné au poids que l’oxigène auroit dü y ajouter. Le second aërolithe tombé le 30 mars 1818 à Zaborzyca en Volhinie, ne renfermant pasde globules comme le précédent, se pulvérise aisément. 100 parties du météorite de Zaborzyca sont formées des principes ci-après désignés, savoir : Oxide de fer...... STE TROP D ROUES ASE CHARS ss A9 SIlICES - : AE MR DE TE AE SE CE RÉ ue Mapnésien is sine. entre RH DuoOOS ER MDN -CE ... 14,90 DOUÉTE se sta ee Le eleper Mes at elainie à oué Siafnie ce see AE sn aie lee 6 A GHauR Te Seite ATH à: OS D ARÉDE SAHUOE ë Nickel. ane on PEU GTS DO DA Ds ETS DO SE Alumine...... DE AO le PRE TOO IENE ÉBio SRE 0,75 CHTOM EN RS à Lt Le A Sale ir Traces de manganèse. 94 ANALYSE DE PIERRES Il est à remarquer que ces deux météorites contiennent à peine le tiers et même le quart de la quantité de nickel que l'on trouve dans la plupart des météorites. On peut se rappeler que dans un mémoire lu à l'Académie des sciences le 14 avril 1817, et intitulé : Expériences pro- pres à confirmer l'opinion émise par des naturalistes , sur l'identité d'origine entre le fer natif de Sibéricet les prerres météoriques ou aëèrolithes ; ÿ avois annoncé la présence dans ce fer natif du chrôme et du soufre dont les travaux des chi- mistes qui l’avoient analysé n’avoient fait aucune mention. J'y avois trouvé de plus de la silice et de la magnésie; et l’exis- tence de tous ces corps dont les aérolithes sont essentielle- ment formés m'avoit semblé devoir changer en certitude la présomption de l'identité d’origine entre le fer et les pierxes météoriques. Je désirois depuis long-temps vérifier ces faits importans sur d’autres échantillons de fer météorique , et j'ai saisi avec empressement l'occasion que n'en a offerte l'envoi du fer trouvé en 1809 à Brahin, district de Rziezyca-Minsk. Ce fer météorique ressemble par l'apparence au fer de Si- bérie ; il est comme lui rempli de cavités, qui sont revêtues intérieurement d’une substance jaune verdâätre comme vi- treuse, qu'on en détache aisément et que les naturalistes ont considérée comme de lolivine. Cette conformité entre les caractères extérieurs du fer mé- téorique de Brabin et ceux du fer de Sibérie, faisoit présumer une composition semblable. L'analyse ne laisse aucun doute sur l'identité de leur nature. J’ai retrouvé dans le fer de Brahin toutes les substances que m'avoit présentées le fer de Sibérie. ET DE ÊERS MÉTÉORIQUES. 9 Cent parties de la variété bleuâtre traitées par l'acide hy- drochlorique foible dans un appareïl propre à recueillir l’a- cide hydrosulfurique m’ont donné 12 parties de sulfure de plomb qui représentent 1 partie + de soufre. La dissolution hydrochlorique chauffée après y avoir ajouté assez d'acide nitrique pour amener le fer à l’état de péroxide, a été pré- cipitée par un excès d’ammoniaque ; l’oxide de fer, séparé et calciné , pesoit 120 parties qui représentent 87,35 de fer pur. La dissolution ammoniacale avoit une couleur bleue; je l'ai concentrée jusqu’à l’entier dégagement de lammoniaque libre , puis j'ai ajouté une petite quantité de potasse causti- que pour précipiter tout ce qu'elle pouvoit contenir; jai obtenu 7 parties d’un mélange de nickel, de magnésie et d’un peu de chaux, que j'ai fait chauffer avec un excès d’acide oxalique. Les oxalates qui ont résulté de cette opération ont été chauffés doucement avec un excès d’ammoniaque qui s’est colorée en bleu ; l'oxalate de nickel déposé de l’ammoniaque représentoit 2 parties et demie de protoxide; les oxalates in- solubles dans l’ammoniaque, calcinés et redissous dans l'acide sulfurique, ont donné du sulfate de magnésie qui contenoit 2 parties 1 dixième de cetoxide, et un peu de sulfate de chaux. L’acide hydrochlorique qui avoit dissous les quatre subs- tances déjà séparées avoit laissé un résidu d’un blanc jaunâtre dont le poids étoit de 7 parties et demie. Ce résidu a pris une légère couleur rose par la calcination. Pour connoître sa nature je l’ai fondu avec de la potasse qui s’est presque aus- sitôt colorée en jaune, j'ai retiré de ce résidu G parties 3 dixièmes de silice et une demi-partie d’oxide de chrôme d’un beau vert. 96 ANALYSE DE PIERRES ET.DE FERS MÉTÉORIQUES. Il résulte de ces expériences que 100 parties de la variété bleuâtre du fer météorique de Brahin sont formées de 87:35 parties de fer pur. 6,30 de silice. | 2,50 de nickel. 2,10 de magnésie. 1,85 de soufre. 0,50 de chrôme. Total.... 100,60. Ainsi ce fer tel qu'on le trouve dans la nature renferme exactement les mêmes substances que le fer de Sibérie, il n'y a de différence que dans les proportions de quelques- unes d’entre elles. J'ai traité de la même manière 100 parties de l’autre va- riété du même fer météorique qui, à l’exception du chrôme dont je n’ai aperçu que des traces, m’a présenté les mêmes substances dans les proportions ci-après indiquées : 100 parties de fer météorique de Brahin (variété blanche) sont composées de 91,90 parties de fer pur. 3 desilice colorée par un atôme de fer. 1,50 de nickel. 2 de magnésie. 1 de soufre. 97 MONOGRAPHIE DES GENRES SAUVAGESIA ET LAVRADIA. PAR M. AUGUSTE DE SAINT-HILAIRE. $S VI._ Descriptions. SAUVAGESIA. Lin. Jus. Cacyx profundè 5-partitus, patentissimus, persistens, in fructu clausus. Peraza ExTERorA 5, hypogyna, æqualia, patentissima , ob- ovata, decidua. Firt inter corollam exteriorem interioremque inter- medii, hypogyni, indefiniti, vel definiti et tunc cum petalis alter- nantes, iisdem breviores, apice dilatati, persistentes. PErALA 1 TERIORA D, hypogyna, exterioribus opposita , erecta, in tubum con- niventia, marginibus invicem incumbentia, persistentia. Sramina 5, hypogyna, cum petalis exterioribus interioribusque alternantia : filamenta brevissima, corollæ interiori basi adhærentia. AnrHerx basi aflixæ, immobiles , posticæ, lineares, 2-loculares , apice late- raliter dehiscentes. Sryrus terminalis, teres, erectus, persistens. Sricma obtusum , vix manifestum. Ovariun superum, 1-loculare, polyspermum. Carsura calice, filis, petalis interioribus stamini- busque persistentibus vestita , sæpiùs oblonga vel ovato-oblonga acuta et 3-loba, rarissimè (in S. /enella ) ovata et obtusiuscula, plüs minüsve profundè 3-valvis, supernè vacua. SEmINA 2-seriata, mi- nuta, favoso-scrobiculata : integumentum crustaceum : umbilicus Mém. du Muséum. 1. 11. 13 98 GENRES SAUVAGESIA terminalis. PerisPermom carnosum. Emwprvo rectus, axilis : radicula ad umbilicum spectans, cotyledonibus longior. Surrrurices glaberrimi, rarissimè herbæ. Forza simplicia, bre- vissimè petiolata, aut rard planè sessilia. Srrpuzx laterales, geminæ, ciliatæ, persistentes. FLores axillares, aut racemosi terminales et tunc bracteati, albi vel rosei aut subviolacei. PrærLoraTio contorta. 1. SAUVAGESIA RACEMOSA Ï (1). S. caule suffruticoso, subsimplici; foliis oblongo-ellipticis vel ovato-ellipticis aut ovatis, acutiusculis, dentatis; stipularum ciliis crispis ; racemo terminali, subsimplici; laciniis calycinis acutis, corollà brevioribus ; filis numerosis. Ranix fibrosa.Caurissuffruticosus,sesqui-2-pedalis,simplexautrard ramosus,.erectus, glaber. Forr4 alterna, stipulata, subsessilia, 8-15 1. longa , oblongo-elliptica vel ovato-elliptica aut ovata, acutiuscula, dentata,utrinque margine calloso-elevata, subcoriacea, glabra ; nervo medio proeminente; venislateralibus approximatis,parallelis.Sriruzx laterales, geminæ, lineari-lanceolatæ, acutæ, striatæ, marginibus membranaceæ, laciniato-ciliatæ; ciliis crispis. Racemi terminales, sæpius simplices, rard basi compositi , sessiles, vel breviter pedun- culati. Frores pedicellati, bracteati, r-6 in axillis bractearum : brac- teæfoliis conformes, stipulatæ, a basi racemi usquè ad apicem grada- tm minores, interdüm nullæ. Penicezr inæquales, filiformes, recti, glabri. Carvx profundè 5-partitus, subinæqualis, patulus, in fructu clausus , rubescens vel subviolaceus ; laciniis ovatis, acutis, margine membranaceis, breviter acuminatis. Perara exrerrora 5, hypogy- na,cum divisuris calycinis alternantia, iisdemque longiora , patula, recurva, obovata, acutiuscula, latè unguiculata, integerrima, glaberrima, carnea vel rosea , decidua. PErara inreriora 5, erecta, marginibus incumbentia , in tubum conniventia, ovato-oblonga vel # (1) Le signe + indique les espèces nouvelles. ET LAVRADIA. 99 elliptico-ovata, obtusa, apice denticulata, petalis exterioribus op- posita, glaberrima, rubella vel purpureo-violacea seu atropurpu- rea aut violaceo carneoque variegata, externè cincta filis indefinitis, iisdem basi coalitis, inæqualibus, clavatis vel spathulatis, brevi- bus, purpureo-violaceis vel atropurpureis. Sramma 5, cum petalis exterioribus interioribusque alternantia : filamenta brevissima , pètalis interioribus basi coalita : antheræ basi affixæ, immobiles, posticæ , lineares, fuscæ, 2-loculares, ab apice usquè ad medium lateraliter dehiscentes. Sryius gracilis, glaber. Sricma terminale, obtusum. Ovariun ovatum, 5-gonum, breve, 1-loc., polyspermum ; ovula placentis 3 parietalibus affixa, ex angulis ovarii ortis. Capsuza calyce, petalis interioribus, fitis staminibusque persistentibus cincta , ovata , acuta, 3-loba, glabra , usquè ad medium 3-valvis et vacua; valvulis infra medium introflexis, sed usquè ad centrum non productis , extremitate seminiferis, imà basi tantummodd coa- litis , loculamentaque 3, brevissima, vix manifesta constituentibus. Sema 2-seriata, minima, rotundo-elliptica, utrinquè obtusa, vix manifestè favoso-scrobiculata. INTeGumENTuM crustaceum. Perrsper- MIuM carnosum. Emsrvo rectus , axilis, longitudine ferè perispermi,, teres, utrinquè obtusus; cotyledones radiculà tripld breviores, sub- angustiores. V. 8. nana; caule digitali; foliis minoribus. In pascuis humidis vel paludosis provinciarum Sancti Pauli et Minas-Geraes non infrequens; circiter alt. 1500-2000 ped. Floret . Decembre-Maio. 2: SAUVAGESIA SPRENGELII. S. erecta Spreng. Endek. 1, p. 206. Excl. syn.(r). S. caule suffruticoso erecto, vix ramoso; foliis parvis, lanceolatis, {1) Je ne cite point ici le nom sous lequel M. Richard avoit indiqué cette espèee dans son herbier , parce que les noms que le voyageur joint ainsi à ses plantes, à 13* 100 GENRES SAUVAGESIA acutis, remotiusculè serratis; racemo terminali; calycinis laciniis inæqualibus, obtusissimis, corollà brevioribus; filisnumerosis. Cauus suffruticosus, spithameus, erectus, simplex aut basi vix ramosus, glaber, nigrescens. Foura alterna, stipulata, brevissimè petiolata, conferta, subpatentia, 3-51. longa , 1-2 lata, lanceolata, acuta, remotiusculè serrata, lineatim venosa, margine subtüs cal- losa, glabra. Sripuzx laterales, geminæ, erectæ, cauli adpressæ, angustæ, plumoso-ciliatæ , rubiginosæ. Racemus terminalis, bre- viter petiolatus, 1-2 pol. longus. Penicerrr 2-4, terni, rarissimè so- litarii, 3-5 1. longi , erecti, capillares, glabri, inæquales, e fas- ciculo braciearum enati inæqualiuin , quarum exterior ovato-lan- ceolata, acuta, rarè serrata, cæteræ multo minores, integerrimæ. Cazvx 5-partitus; laciniis ovatis, obtusissimis, apice dentato-ciliatis, concavis, glabris, purpurascentibus ; 2 interioribus manifestè ma- joribus. Perara exTertora 5, hypogyna , obovata, obtusissima, latè unguiculata, patentissima, decidua. Perara inrerrora 5, erecta, marginibus incumbentia, in tubum conniventia , lineari-spathulata, obtusissima, subretusa , externè cincta filis indefinitis, brevibus, apice subreniformibus; dispositis in fasciculis 5 cum petalis exte- rioribus interioribusque alternantibus. Sramma 5, glaberrima, cum petalis interioribus alternantia, iisdemque ferè duplo minora : fila- menta brevissima, basi petalorum' inferne adnata : antheræ basi affixæ , immobiles , posticæ , lineares , angustæ , apice paululüm at- tenuatæ, 2-loculares ; apice lateraliter dehiscentes , glabræ. Srvzus cylindricus, gracilis, rectus, glaber, persistens. Sriema terminale, vix manifestum. Ovarrum glabrum. Carsura calice, filis, corollä in- teriore staminibusque persistentibus cincta , ovato-oblonga , acuta , 3-loba , glabra, omnind unilocularis, tertiä parte superiore , 3-val- mesure qu’il les decouvre, sont rarement ceux qu’il adopte définitivement. Je dois d'autant plus m’abstenir ici de citations de ce genre que j’ai entendu M. Richard lui-même s’en plaindre avec raison comme d’un abus de confiance. ET LAVRADIA. 101 à vis et vacua ; valvulis inferiüs introflexis , seminiferis , parte intro- flex lat , nec tamen usquè ad centrum productà , et extremitate non revolutà. SEMINA 2-seriata , ovato-rotunda , favoso-scrobiculata , fusco-nigrescentia. Var. B. gracilis ; caulibus gracilioribus longioribusque ; foliis angustioribus, mins confertis ; racemis depauperatis; pedicellis brevioribus , bracteisque subsolitariis. Crescit in pratis Guayanæ (Rich. ); in Brasiliä (Spreng. ). Floret Maio ( Rich. ). 5. Sauvacesra Rusrcinosa. + S. caule suffruticoso ; foliis lanceolatis , angustis , utrinquè acutis, serratis ; floribus terminalibus, racemoso-spicatis, bracteatis ; la- ciniis calycinis vix inæqualibus, oblongis, acutis, corollà exteriori longioribus ; filis numerosis. SurrruTex erectus vel decumbens, densè ramosissimus (Rich. herb.), quandoquèsimplex, 1:-2-pedalis, glaber; cortice nigrescente ; ramis erectiusculis. Forra alterna , stipulata , brevissimè petiolata, patentia , 6-15 1. longa , lanceolata , angusta vel lineari-lanceolata, utrinquè acuta , serrata, subtùs margine callosa, lineatim venosa, glabra. Stipalæ membranaceæ, confertissimæ, cauli adpressæ, linea- ri-subulatæ, valdèplumosæ, rubiginosæ. FLores terminales, racemo- so-spicati , bracteati, pedicellati, in axillis bracteorum sæpiüs bini, rariùs terni vel solitarii. Penicezr breves, inæquales, sæpits erecti, capillares , glabri. Carvx 5-partitus , inæqualis , glaber, rubigino- sus, patentissimus, in fructu clausus ; laciniis oblongis, acutis, apice subciliatis. Perara Exrertora 5, hypogyna, cum laciniis calycinis alternantia , iisdemque breviora, obovata , obtusiuscula , unguicu- lata. Perara iNTerIoRA 5, erecta, marginibus incumbentia, in tu- bum conniventia, linearia, obtusa, exterioribus opposita, iisdemque subæqualia, externè cincta filis numerosis, capillaribus , tenuis- simis, apice subreniformibus. Sramina 5, hypogyna , glabra, cum 102 GENRES SAUVAGESIA petalis interioribus exterioribusque alternantia : filamenta brevis- sima, basi corollæ interioris infernè adnata : antheræ basi affixæ , immobiles , posticæ , longiusculæ, lineares, angustæ, 4-gonæ, acu- minatæ, SryLus teres, gracilis, glaber, basi subattenuatus, persis- tens. Sricma terminale, submanifestum. Ovariun glabrum. Caps. non mihi videre licuit. Inter S. Springelii et S. erectam intermedia ; huic autem affinior. Crescit in pratis siccis Guayanæ (Rich. Herb. ), in Brasilid (Herb. Mus. Par. ). Var. &. luxurians ; foliis minüs angustis; bracteis majoribus foliisque magis conformibus. Crescit in pratis humidis Guayÿanæ (Rich. Herb. ). 4. SAUVAGESsIA ERECTA, Tab. I, A. 5. caulibus suffruticosis, sæpiüsque ramosis, procumbentibus vel erectis; foliis lanceolatis, utrinquè acutis, serrulatis ; floribus axillaribus, solitariis , geminis etternis, sæpiüs nutantibus; laciniis calycinis ovato-oblongis, acutis, corollä paul longioribus ; filis nu- merosis. ! Gratiola Helxinoïdes ; folio glabro, leviter serrato, cum caule- piloso et rubro ; herba ophthalmica; Sur. herb. — Vaill. Lerb: Iron herbaceus minor; foliis oblongis , tenuissime crenatis; stipu- lis ciliatis ; floribus singularibus ad alas. Pat. Brown. Jam. 179, t. 12/2 Sauvagesia erecta, Lin. Sp. 1. ed. p. 241. — 2. ed. p. 204. —Jag. Am. p. 779 t. 51, fig. 5. — Wild. Sp. 1, p. 1185. — Ruiz et Pav. Flor. Per. ti. p. 11.— Aug. St.-Hil. Obs. Sauv. in Mem. Mus. 111, p.215. — Kunth Nov.gen., VW, p.389. S. erecta et adima, Aub. Guy. 1, p. 252, 5, 4, 5, t. 100, fig. a et b.— Lam. Il. 11, p. 119,4. 140 , fig. 1 et 2. S. erecta et nutans , Pers. Syn. 1, p. 253. ET LAVRADIA. 103 S. erecta , adima et nutans, Poir. Enc. v1, p. 669, 70, et Sup. Va pe 72 S. erecta, adima, nutans ef peruviana, Rœm. et Schult. Syst. LEZ. V3 Pe 457; 8. S. adima, Spreng. Endeck. 1, p. 294. S. erecta et geminiflora, Gin. Viol. p. 27,111, x. Yaoba, Caraïbeis (ex Sur. ). Adima , Galibis (ex Aub. ). Yerba de S. Martin , Peruvianis (ex Ruiz et Pav.). Pranra polymorpha, perennis. Ranix fibrosissima , fulva sive cinerescens. Caures plures vel solitarii, erecti aut sæpiüs patuli, ascendentesve seu procumbentes, rard radicantes (ex Ruiz et Pav. et Spreng. ) lignosi vel subherbacei, digitales-2-pedales, rard simplices, sæpibs ramosi vel ramosissimi aut basi tantummodd ramosi : rami ascendentes seu erectiusculi, subgraciles , angulati , glabri, nigrescentes seu atro-purpurei vel subvirides. Forra al- terna , breviter petiolata, 7-18 1. longa , 2-5 1. lata , patula, sæpiüus oblongo-lanceolata, rard ovata aut in eodem specimine inferiora ovata et superiora oblongo-lanceolata, superiora quandoquè sub- breviora , utrinquè acuta, serrata, subtùs margine callosa , glaber- rima; nervo medio proeminente; venis lateralibus approximatis. SrruLz laterales , geminæ, lineari-subulatæ, longè ciliatæ , striatæ, subscariosæ, rubiginosæ, persistentes. Pepuxcuzr axillares, solitarii, gemini aut terui, uniflori, subcapillacei, apice subincrassati, gla- bri,, folio sæpiüus breviores , floriferi nutantes vel quandoquè erecti. Cazyx profundè 5-partitus , vix inæqualis, patentissimus, in fructu clausus ; laciniis ovato-oblongis, acutis, apice vix denticulatis, in cilium desinentibus, concavis, glabris, viridibus, marginibus sub- membranaceis. Perara ExTERIORA 5 , hypogyna , cum foliolis calycinis alternantia , iisdemque paulo breviora , patentissima , obovata , bre- viter unguiculata, ungue latiusculo, obtusissima, apice vix crenu- lata, glabra, alba vel quandoquè carnea, decidua. Perara iNTE- riora 5, exterioribus opposita, iisdem breviora , erecta, marginibus 104 GENRES SAUVAGESIA incumbentia , in tubum conniventia, linearia, obtusa, subrétusa, subcrenulata, glabra, basi purpurea, apice alba, persistentia, externè cincta filis cum iisdem basi coalitis, crebris, uniseriatis, setaceis, obscurè purpureis, summo apice clavatis vel angulato-ro- tundis aut sæpiüs reniformibus. Sramia 5, cum petalis exterioribus interioribusque alternantia, iisdemque breviora , inclusa, erecta, persistentia, cum corollà interiore, filisque gynophoro brevissimo, vix manifesto inserta : filamenta brevissima, petalorum interiorum basibus infernè coalitis : antheræ basi affixæ, immobiles, posticæ, lineares , oblongæ, angustæ , 4-gonæ, 2-loculares, apice lateraliter dehiscentes. Sryzus terminalis, capillaceus , glaber. Sriema conti- nuum, vix manifestè dentatum. Ovariuu glabrum, sub-3-lobum, 1-loc., polyspermum, gynophoro brevissimo insidens. CapsuLa calyce, filis, corolla interiore staminibusque persistentibus cincta , ovato- oblonga , acutissima, 5-loba, 1-locularis , ab apice ad medium pau- lèque inferius vacua , et per valyvulas 3 dehiscens; valvulis infra medium usquè ad basim marginibus introflexis, nec usquè ad cen- trum omnind productis, extremitate seminiferis nec revolutis. Sema 2-seriata, subgloboso-elliptica , basi mucronulata , eleganter favoso-scrobiculata, fusca , glabra : umbilico terminali. Inrecu- MENTUM crustaceum. PErISPERMIUM carnosum. Emsryo axilis, rectus, teretiusculus : cotyledones obtusæ : radicula ad hilum spectans. Crescit in pratis humidis, ad fontes et ripas rivulorum, ct in pa- ludibus ; in Mexico (Moncino et Sece ex Gingins de Lassaraz); in Cuchero, Pillao, Ischutanam et Papato “Peruvianorum (Ruiz et Pav.);in Nové Andalusié propè Caripè et Cumanacoa, item inter Mariquita et Real de S. Anna Novo-Granatensium (Humb. ); in Caienné et Guay an ( Aub.); in Domingo (Willd.); in Porto-Rico (Baudin, in Herb. Jus.); in Jamaïcé, inter Mount-Diable et St.-Ann. (Pat. Brown); Martinicé (Jaquin); St.- Thomas (Ledru) ; in Surinamo ( Wild. ): inveni in Brasiliä, à faucibus fluminis valed Rio-Doce usque ad prædium Jaguarahy ba, in campis quos “ET LAvVRADIA. 10 dicunt Campos-Geraes , ultrà tropicos ; sed nullibi frequens (1): nascitur in Guine& (Willd.) ; in insulà Madagascar (Aub. Pet. et Perottet ); in Javé (Perottet). Floret in Peruviä Maio ad Octobrem (Ruiz et Pav.); Augusto et Septembre (Humb. ); in Guayané etin Brasilié toto ferè anno. Oss. Comme les modifications auxquelles sont sujettes les diverses parties de cette plante se combinent de toutes les manières , jai mieux aimé les indiquer dans la description générale, en traitant de chaque organe , que de faire un long catalogue de variétés qui peut-être encore se seroit trouvé incomplet. 5. SaAuvAGEsIA TENELLA. Tab. I, B. S. caule herbaceo , tenello, subsimplici ; foliis sessilibus, lineari- lanceolatis, rarè dentatis; stipulis minimis; floribus axillaribus terminalibusque ; petalis exterioribus calyce pauld longioribus ; filis 5 seu minus hypogynis. Sauvagesia tenella, Zam. II. 11, p. 119. — Poir. Enc. ri, P: 669. — Ræm. et Schul. Syst. r, p. 437. Ranix fibrosa , annua. Cauzis herbaceus , sesqui-8-pollicaris, te- nellus, erectus, simplex vel rard subramosus, glaber. Fozr4 alterna, sessilia, remotiuscula, parva, lineari-lanceolata , oblonga , acutius- cula, circiter 3-61. longa, 1 : 1. lata, rarè dentata, dentibus sub- callosis, desinentia in pilum nigrescentem deciduum, crassiuscula, subavenia, glaberrima. Sripuzx laterales geminæ, breves, lineari- subalatæ, nigrescentes, ciliatæ; ciliis subdistantibus. Penuxcuzr 1-6, axillares et terminales, capillares , erecti seu rarissimè nutan- tes, glabri. Carvx 5-partitus, subinæqualis, patentissimus, glaber- rimus, in fructu clausus; laciniis lanceolatis, oblongis, acutis, concavis, margine submembranaceis, in pilum desinentibus deci- duum. Perara ExTERIORA 5, patentissima, calyce pauld longiora, (1) Je ne me suis pas étendu surla côte du Brésil , plus au nord que le Rio-Doce; mais puisque le S. erecta se retrouve ensuite à Cayenne, il est à croire qu’il croît aussi entre le Rio-Doce et la riviere des Amazones. Mém. du Muséum, 1, 11, 14 106 GENRES SAUVAGESIA obovata, obtusa, unguiculata , basi latiuscula, integerrima, gla- berrima. Fr hypogyni inter corollam exteriorem interioremque in- termedii , quinque, quandoque minüs aut abortu nulla , cum petalis exterioribus interioribusque alternantia, clavata. PETALA INTER1ORA 5, erecta, marginibus invicem incumbentia, in tabum conniventia , exterioribus opposita, iisdem subæqualia, glabra : filamenta brevia : antheræ basi aflixæ, immobilés, posticæ , filamentis vix latiores, sublineares , angustæ , obtusiusculæ, 2-loculares, imo apice lateri- bus dehiscentes. Sryzus glaber, basi angustior, inclusus, persistens. Ovarium ovatum , glabrum, 1-loc., polyspermum : ovula placentis 3 parietalibus nec proeminentibus aflixa. Carsura calice, filis, co- rollà interiore staminibusque persistentibus vestita, ovata, obtu- siuscula, glabra, 1-loc., polysperma, apice 3-valvis; valvulis marginibus seminiferis nec minimè introflexis. SemIna favoso-scro- biculata , nigra. Habitat in Guayanä (Rich. ). 6. SAUVAGESIA LINEARIFOLIAÏ. Tab. Il, A. S. caule suffruticoso digitali ; foliis linearibus acutis, rarè ser- ratis ; floribus axillaribus , petalis calice pauld brevioribus; filis 5 hypogynis. Cavuis suffruticosus, digitalis , ramosus , rariüs simplex, cortice nigrescente vel fusco ; ramis gracilibus, erectiusculis. Forra alterna, subsessilia, patentia, 5-6 1. longa, : lata, linearia , per lentem rarè serrata, glabra , margine subtüs proeminente. SriPux geminæ , erectæ , fuscæ , persistentes ; tenuiter ciliato-plumosæ , subbifur- catæ ; ciliis 2 terminalibus , longioribus. Pepuncurt in apice ramu- lorum axillares, solitarii vel bini; folio paulo breviores , glabri, purpurescentes. Cazvx profundè 5-partitus , glaber ; laciniis ovato- lanceolatis oblongis, acutis, margine submembranaceis , apice ciliatis , ex viridi violaceis. Perara Exremora 5, hypogyna, paten- tissima, cum calycinis divisuris alternantia, iisdemque pauld bre- ET LAVRADIA. 107 viora, obovata, obtusa, unguiculata , integerrima, glaberrima , alba , decidua. Fr 5, hypogyni, inter petala exteriora et interiora intermedii et cum iisdem alternantes , interioribus dimidid bre- viores, clavati, albi. Prrara irertora 5, erecta, invicem incum- bentia , in tubum conniventia, exterioribus opposita , oblongo-el- liptica, obtusissima , integerrima , glabra , rosea. Srama 5, hypogyna, erecta, glabra, cum petalis alternantia, interioribus subæqualia : filamenta corollæ interiori basi adhærentia, longius- cula , antheris æqualia : antheræ basi affixæ, immobiles, posticæ ; lineares, angustæ, obtusiusculæ, 2-loculares , lateribus ab apice usquè ad medium dehiscentes. Srvzus brevis, cylindricus , basi an- gustatus, glaber. Sricma terminale, truncatum, vix manifestum. Carsuza calyce, corollà interiore , filis staminibusque persistentibus vestita, ovata , acuta , 3-loba , glabra , subpurpuresceris, ab apice usquè ad tertiam partem inferiorem 3-valvis et vacua ; valvula- rum marginibus inferius vix introflexis, seminiferis, imà basi, eàdem introflexione productâ , dissepimenta 3 brevissima , angulo centrali arcte cohærentia nec solubilia, totidemque loculamenta constituentibus. Sema ovato-elliptica, utrinque obtusa, favoso- scrobiculata. INTEGUMENTUM crustaceum. PERISPERMUM Ccarnoso-suc— culentum. Emsrvo rectus in perispermo axilis. Iuveni in arenosis partis provinciæ Minas-Geraes dictæ Distrito- dos-Diamantes, prope locum ubi eruuntur adamantes quem vulgd vocant Serviço-do-Rio-Pardo ; alt. circiter 4000 p.; rarissima. LAVRADIA. Vell., Vand. A Caryx profundè 5-partitus, patentissimus , persistens, in fructu clausus. PeraLa ExTERIORA 5, hypogyna, æqualia, patentissima , ovata vel ovato-lanceolata , decidua. Fizr ayroeyni nulli. CorozrA 1N- TERIOR monopetala, ovato-conica, apice angusto dentata, persis- tens, gynophoro brevissimo inserta. Srammwa 5, ibidem inserta, laciniis calycinis opposita, cum petalis exterioribus alternantia , 14 * \ 108 GENRES SAUVAGESIA inclusa, persistentia : filamenta brevissima , imæ corollæ interiori basi adhærentia : antheræ basi affixæ , immobiles, posticæ , ellip- ticæ, 2-loculares, à lateribus longitrorsumque dehiscentes. Sryzus terminalis, erectus, persistens. Sriema terminale vix manifestum. Ovarium superum, supernè 1-loculare, infernè 3-loculare, poly- spermum. Carsura calyce laciniisque corollæ interioris discissæ et slaminibus persistentibus cincta, ovata, 5-loba, acuta, supernè 3-valvis unilocularis et vacua ; infernè valvularum introflexione usque ad centrum productà, 3-locularis, polysperma ; dissepimentis lunulatim truncatis, apice seminiferis ; angulis loculamentorum in- ternis omnind nudis! Semina 2-seriata , minuta, favoso-scrobiculata. INTEGUMENTUN crustaceum : umbilicus terminalis. PerisPErRMuM car- nosum. Emsryo rectus, axilis: radicula ad umbilicum spectans, coty- ledonibus lôngior. Surrrurices glaberrimi. Forra simplicia, brevissima , petiolata. Sripuræ laterales, geminæ, ciliatæ, persistentes. Krores axillares aut terminales, racemosi, rariüsve paniculati, et in utroque casu bracteati , albi vel rosei. PrærLoraTio conterta. Lavrapra ERICOÏDES. f Tab. II, B. L. foliis confertissimis, parvis, linearibus, integerrimis, margine revolutis ; floribus axillaribus. Cauris suffruticosus, parvus, glaber, nigrescens. FozrA alterna, numerosa ;, confertissima ; patula, stipulata , brevissimè petiolata ; 3-41. longa, ? lata, linearia, a basi ad apicem paululüm attenuata, apice sphacelato acutiuscula, margine revoluta, suprà subavenia ; nervo medio rubello, subtüs proeminente. Srrruzx laterales, ge- minæ, subteretes, angustissimæ, subulatæ, acutissimæ, subsim- plices aut parum ciliatæ vel ciliis paucis dentibusque intermixtæ, basi incrassatæ, quandoquè apice recurvæ. Frores in apice ramu- lorum axillares, pedunculati. Peouxount foliis longiores, filiformes, glabri. Cauyx profundè 5-partitus , glaber, purpureo-violaceus ; la- k ET LAVRADIA. 109 ciniis ovato-lanceolatis, acuminatis, concavis, obscurè septem-ner- viis. Perara ExTERIORA 5, hypogyna, calice pauld longiora, ovata, acuta, integerrima , glabra, rosea. CororLA INTERIOR 1-petala , gyno- phoro brevissimo inserta , ovato-conica , subpyriformis , apice 5-den- tata , ab apice ferè usquè ad medium 5-sulcata, purpurea. Srauma 5, ibidem inserta, corolla interiore dimidid breviora , inclusa, glabra : filamenta brevissima, vix manifesta : antheræ basi aflixæ, immo- biles, posticæ, filamento multd latiores, oblongo-ellipticæ, acumi- natæ, complanatæ, 2-loculares, ab apice usquè ad basim lateraliter dehiscentes. Sryzus inclusus, gracilis, glaber. Sricma terminale, vix manifestum. Ovarrum glabrum, apice vacuum, basi seminife- rum. Fructum non vidi. Crescit in apice montis Caraça, in provincià dictà Jinas-Geraes ; alt. circiter 5700 ped.; rarissima. Floret Februario. 2. LAvRADIA ELEGANTIssIMA. { Tab. III, L. caule parüm ramoso; foliis minutis, confertissimis, fascicu- latis, ovato-ellipticis, obtusissimis, integerrimis, aveniis ; racemo terminali, brevi. Sauvagesia elegantissima. Æug. S. Hil. Mem. Mus. 1x, p. 325. . SuFFRUTEx sesqui-2-pedalis, erectus, parum ramosus, facie ferè Lycopodii ; cortice subramoso , fusco-rubescente ; ramis erectius- culis, vigidiusculis, cauli conformibus. Forra minuta, 1-1: 1. longa, brevissimè petiolata ; caulem ramosque undiquè obtegentia , con- fertissima , fasciatim disposita, obovato-cvatove-elliptica, obtusis- sima, subacuminata, integerrima, avenia, Concava, glaberrima, lucida, stipulis stipata fasciatim confertis; profundè piloso-mul- tipartitis, fuscis , persistentibus (foliorum fasciculi ex folio uno ex- teriore stipulato , tandem deciduo junioribusque ex axillà enatis, æquè stipulatis ). Racemi terminales et elongatione gemmæ propin- quæ demüm axillares, 2-12 pol. longi , multiflori, subcompositi ; rachi , gracili, obscurè purpureà; ramis brevissimis, vix manifestis, # 110 GENRES SAUVAGESIA obtectis bractcolis confertis, minutissimis, lanceolato-oblongis ; acutis, subscariosis, stipulis stipatis et piloso-laciniatis, rufis. Penr- ceux ex axillis bracteolarum orti, simplices, 6-8 1. longi, nudi, filiformes ; glabri , purpurei. Carvx profundè 5-partitus, parvus, submembranaceus, glaber; laciniis ovatis, obtusiusculis. PErara EXTERIORA D, hypogyna, patentissima, ovata, obtusa, integerrima, calyce 4-pld majora, glabra, carnea ,decidua. CororLA INTERIOR, mo- nopetala, ovato-conica , acutiuscula , apice 10-denticulata, ab apice usquè ad medium 5-sulcata , glabra , obscurè purpurea, apice pal- lidior. Sramma 5, hypogyna, imæ corollæ interiori basi adhærentia, glabra : filaments brevisssima: antheræ basi affixæ, immobiles, posticæ , latiusculæ, elliptico-ovatæ, complanatæ, apice vix cuspi- datæ, 2-loculares, ab apice ferè usquè ad basin lateraliter dehis- centes. SrxLus tenuis , glaber, purpureus, persistens, Sriema termi- nale, vix manifestum. Ovarium ovatum, acuminatum, glabrum, internè capsulæ conforme. Carsura calice laciniisque corollæ in- terioris discissæ , et staminibus persistentibus vestita ; ovata , 3-loba , acuminata, glabra, apice 3-valvis, superius 1-locularis et vacua, marginibus valvularum usquè ad tertiam pariem inferio- rem vix introflexis nudis ; infernè 3-locülaris, dissepimentis apice lunulatim truncato séminiferis ét post dehiscentiam ut antea co- “hærentibus. Crescit in arenôsis montium dictorum Serra-de-Curumatahy, in provincià Minas-Geraes prope Tejuco; alt. circiter 4000 ped. ; ra- rissima. 3. Lavrapia Vezzozrr. L. caule parüm ramoso; foliis lanceolatis , utrinque acutis, cal- loso:sérratis; racemis compositis, subpaucifloris. iLavradia foliis lancéolatis ,sérratis ; caule tereti; racemis termi- nalibus.7ez. Mss. — Vand. Fl: Lus. et Bras. p. 15, f..6. — Fandsin Rœm. Script. p.88, tab.1r, fig. 6. ET LAvRrapra. III Ranrx fibrosa. Cavris suffruticosus, sesqui-2-pedalis, erectus, parbm ramosus, teres , gracilis, obscurè purpureus. Forra alterna, stipulata, 1 5-3 : pol. longa , breviter petiolata, lanceolata, utrin- què acuta , calloso-serrata , glabra ; nervo medio proeminente; venis lateralibus arcuatis, parallelis. Srirux geminæ, 6-81. longæ, rectæ, plumoso-ciliatæ , fuscæ , persistentes. Racemr axillares vel subter- minales, compositi, pedunculati, subpauciflori : pedunculus erectus, gracilis, nudus, glaber, sæpè lutescens : rami breves, 1-6-flori, basi pedicellique bracteolati : bracteolæ subulatæ, subscariosæ , quandoque glanduloso-serratæ : pedicelli erectiusculi, filiformes , glabri, 2-5 1. longi. Caryx 5-partitus, glaber, submembranaceus; divisuris ovato-lanceolatis , acutissimis, vix acuminatis , 5-nerviis. Corozca exTerIoR 5-petala , hypogyna , patentissima , glabra; petalis cum laciniis calicinis alternantibus , iisdemque triplù longioribus , ovato-lanceolatis, oblongis, acutis, integerrimis , septem-nerviis , albis seu vix roseis. CorozLA INTERIOR ovato-conica , acutiuscula , apice angusto 5-dentata, 5-nervia, glabra, purpurea, persistens, cum staminibus pistilloque gynophoro brevi crassoque insidens. Sra- mixa 5, brevia, laciniis calycinis opposita , cum petalis exterioribus alternantia, inclusa , glabra : filamenta brevissima , imæ corollæ interiori basi adhærentia : antheræ basi afixæ, immobiies, posticæ, latè ellipticæ, breviter acuminatæ, complanatæ, submembrana- ceæ, rufæ, 2-loculares, lateraliter longitrorsimque dehiscentes. -Srvzus subulatus, glaber, primüm inçlusus, post anthesin exsertus, persistens. STIGMA terminale, vix manifestum. Ovarium ovato-coni- cum, 3-gonum , glabrum. Carsura staminibus corollæque interioris laceræ vestigiis cincta, ovato-oblonga, acutissima, 2-loba, saubmem- branacea , glabra , obscurè rufa, ultra medium 3-valvis, superiüs i-locularis et vacua; valvulis ab apice usquè ad medium nudis, in- feriùs marginibus seminiferis et basi, introflexione usquè ad cen- trum productà,, dissepimenta 3 totidemque loculamenta efformanti- bus; dissepimentis brevissimis, apice lunulatim truncato semini- feris nec dehiscentià solubilibus. Sema 2-seriata , ovato-elliptica, 112 GENRES SAUVAGESIA utrinquè obtusa , favoso-scrobiculata, glabra, rufa. Ivrecumexrus crustaceum. PErisPermum carnoso-succulentum. Emsryo rectus, cy- lindricus , parvus , axilis : cotyledones sublanceolatæ , radiculà bre- viores. Nascitur in sylvis humidis et rarissimè in aridis montium conti- nuorum Provinciæ Miras-Geraes (1), ex quibus: oriuntur fontes, hinc fluminis Rio doce , et indè fluminis S. Francisci, præcipuè in jugis altis dictis Serra-Negra, Serra-da-Caraça, Serra-da-Lapa ; alt. circiter 5700 ped. 4. LAVRADIA GLANDULOSA. f Tab. IV, A. L. caule parm ramoso; foliis confertissimis , obovatis , obtusis- simis, sphacelato-serratis , mucronatis ; racemis brevissimè ramo- sis; bracteis calycibusque glanduloso-serratis. Caunis suffruticosus, 1-2-pedalis, parum ramosus, nigrescens ; ramis erectis. For alterna, subsessilia, stipulata, confertissima , mbricata, 12-15 1. longa , obovata , obtusissima , sphacelato-serrata, breviter mucronata, margine calloso alboque elevata, tenuissimè ramoso-striata ; nervo medio hinc et indè proeminente, in mucronem producto jam supra memoratum. Bracrex cauli adpressæ, imbri- catæ, angustæ, ciliatæ; cilis longis, ascendentibus. Racemr termina- les aut demüm axillares, pedunculati, brevissimè ramosi, multi- flori ; pedunculi glabri, ancipites ; rami obtecti bracteis sessilibus , stipulatis, lanceolato-ovatis , glanduloso-serratis, confertissimis , deciduis. Peprcezct 5-12 1. longi, in axillis bractearum solitarii, uniflori , erecti, filiformes, glabri, rubelli. Cazvx profundè 5-par- titus, subinæqualis, laciniis lanceolatis, acutis, glanduloso-serratis. Pérara 5, lanceolata, acuta , basi latiuscula , integerrima , glaber- rima, alba, calyce ferè 2-pld longiora. Cororra INrerIOoR 1-petala, ovato-conica , :apice angusto 5-crenata, crenulis vix manifestè 2-dentatis, glaberrima , rosea. SraminA 5 , inclusa, laciniis calycinis (1) Serra-do-Espinhaco Eschw. ET AvVRADIA. 113 opposita, et cum petalis exterioribus alternantia , glabra : filamenta brevissima , corollæ interioris basi adhærentia; antheræ basi in- sertæ , immobiles , posticæ, lineari-ellipticæ, apice retusæ , fuscæ. Srvzus Capillaris , glaber. Sricma terminale, vix manifestum. Ova- RIUM ovatum, acutissimum, 3-lobum, glabrum, cum staminibus corolläque interiori gynophoro brevissimo insidens. Capsura globoso- ovata, acutissima , 3-loba , ultra medium 3-valvis et vacua ; valvulis valde concavis , infra medium curvatim introflexis, seminiferis et, imà basi introflexione usquè ad centrum productä , dissepimenta 3 brevissima totidemque loculamenta constituentibus. Sema 2-se- riata, minutissima , elliptico-ovata , utrinquè obtusa, vix curvata, tenuissime favoso-scrobiculata. Uusrricus ad extremitatem angustio- rem sublateralis. PerrsPERMuM carnosum. Emsrvo axilis, rectus, teres. Crescit inter saxa, in montibus provinciæ Minas-Geraes dictis Serra-de-S.-Toze prope urbem S.-Joao-del-Rey. Var. 8. rubra ; foliis minüs confertis ,sæpiüs pauld angustioribus, tenuiùs serratis; floribus majoribus ; pedunculis, calycibus, corol- lisque rubris; corollà interiore sæpiùs longiore et angustiore. An imera varietas ? Frequentior varietate & , invenitur in montibus benemultis provinciæ Minas-Geraes inter saxa, præsertim in locis dictis Tiambè, Ponte alta, Candonga , alt. circiter 2000 ped. Floret Fe- bruario, Martio. 5, LavrADrA carizraris. + Tab. V. L,. caule ramosissimo; foliis approximatis, numerosis, lanceo- latis, utrinquè acutis, glanduloso-serratis, lineatim venosis; pani- culis terminalibus, divaricatis, capillaribus, subpaucifloris. Caurus suffruticosus , 1 2-2 pedalis, ramosissimus. Forra nume- rosa, approximata, alterna, stipulata, 5-8 1. longa, lanceolata, utrinquè acuta, in petiolum brevem attenuata, serrata, lineatim venosa, margine subcallosa, in sinubus serraturarum glandulosa ; Mém. du Muséum , 1. 11. 15 z 114 GENRES SAUVAGESIA glandulis rotundis, medio depressis, fulvis. Sriruzæ geminæ , bre- ves, angustissimæ, plumoso-ciliatæ , fuscæ, persistentes. Paniouæ terminales (forsitan abortione gemmæ superioris), graciles, pauci- floræ, plis minüsve divaricatæ : pedunculus 1 :-2 : pol. longus, rectissimus, filiformis, glaber, rubellus vel atropurpureus : rami capillares, rectissimi, glabri, atropurpurei vel rubelli, bracteâ suffulti minutà , subulatä , substipulatä, scarios : pedicelli uniflori, 2-5 1. longi , capillares , ramis cæterùm conformes. Cazyx 5-partitus, submembranaceus, glaber; divisuris, ovato-lanceolatis , acutis. Co- ROLLA INTERIOR, 5-petala, hypogyna, patentissima, glabra; petalis cum laciniis calycinis alternantibus, iisdemque 3-plè longioribus, ovato-lanceolatis, acutissimis, integerrimis, roseis. CoROLLA EXTERIOR exteriore brevior, ovato-conica, acutiuscula,apice angusto 5-dentata, supernè 5-sulcata , glabra, rubra, cum staminibus pistilloque gy- nophoro brevi crassoque insidens. Sramma 5 , brevia , petalis exterio- ribus opposita, glabra, imæ corollæ interiori basi adhærentia : filamenta brevissima : antheræ basi affixæ , immobiles, posticæ , latè ellipticæ , acuminatæ, complanatæ, submembranaceæ, rufæ, 2-lo- culares , lateraliter longitrorsüsque dehiscentes. Sryius gracilis, glaber, primüm inclusus, post anthesin exsertus, persistens. Sriema terminale, vix manifestum. Ovarium glabrum, ovatum. Carsura ca- lyce laciniisque corollæ interioris discissæ et staminibus persis- tentibus vestita, ovato-oblonga, acuminata, 3-loba , glabra , usquè ad medium 53-valvis ; valvulis extùs medio costatis, intüs ultra me- dium nudis, basi introflexione usquè ad centrum productà, disse- pimenta 5 incompleta totidemque loculamenta efformantibus ; disse- pimentis breviter apice sublunulatim truncato seminiferis nec dehiscentià solubilibus. Sema 2-seriata. j Far. @. glanduloso-pubescenrs ; ramis glanduloso-pubescentibus ; foliis minoribus; stipulis subsimplicibus. Crescit in montibus aridis arenosisve prope Ztambè et Tapanhoa- canga, in provincià Minas-Geraes, alt. circiter 2000 ped. Floret Novembre — Aprili. jo a AE ME (AE PAT Lx PR TPICE DA ES ARR WE Liu NC II FU _ Zom.11. Tab. J. À. SAUVAGEÆSIA erectz. Tab. 1. B. SAUVAGESTA Cenellr- Blanchard delf x LODT 12: à 77 à) NA | = #4 \TE £ SE > 7 RER, : VE ÈEG El SA TS ZA \ NX \e 2) A in [2 <= \RX Blanchard del? Tab. 1. À. SAUVAGE SZA lovearfola Zab.IT.B. LAVRADIA. erccotdes. ET LAVRADIrA. 119 EXPLICATION DES FIGURES. Tab.l, A. SAUVAGESIA FRECTA. Fic. 1, 2, 3. Portions de rameaux de différentes variétés. Fic. 4. Fleur tres-grossie. Fic. 5. Division du calice; id. Fic. 6. Filet stérile : leur forme est variable. F1c. 7. Un pétale intérieur. Fic. 8. Une étamine. FiG. 9. d. plus grossie encore pour montrer sa déhiscence. Fic. 10. Capsule. Fic. 11. Zd. On voit qu’elle s’ouvre en trois valves. — a Calice persistant. — à Pétale intérieur, 2d. — c Les valves. Fic. 12. Coupe horizontale de la capsule : on voit que les valves rentrant en de- dans, s’avancent presque jusqu’au centre, mais sans adhérer entre elles. Fic. 13. Graine. Tab. I, B. SzurAGESIA TENÉLLA. Fic. 1. Tige entière du S. renella. Cette figure représente un des individus les plus petits. Fic. 2. Feuille tres-grossie, Fic. 3. Fleur :d.— a Calice.— à Pétales extérieurs. c Pétales intérieurs.— d Filet stérile unique : les autres avortent souvent. Fic. 4. Intérieur de la fleur montrant trois des pétales internes, les étamines et l'ovaire. Fic. 5. Capsule entourée du calice et des pétales intérieurs persistans. Fic. 6. Coupe horizontale de la capsule : on voit que les valves ne rentrent point en dedans. FiG. 7. Graine. £ Tab. il, À. SAUVAGESIA LINEARIFOLIA. Fic. 1. Fleur tres-grossie. Fic. 2. Feuille tres-grossie. Fic. 3. Stipule. Fic. 4. Division du calice. Fc. 5: Etamines. Fic. 6. Pistil. Fic. 7. Capsule 3-valve. Fic. 8. Semence. 15 * 116 GENRES SAUVAGESIA ET LAVRADIA. Fic. Fic. Fc. DE w b Tab. Il, B. LavrADIA ERICOIDES. ic - I. Stipule tres-grossie. . 2. Fleur tres-grossie. Tab. IT. LarrADIi4 FLEGANTISSIMA. . 1. Une feuille grossie. . Fleur tres-grossie. . Un des pétales de la corolle extérieure grossie. Corolle intérieure développée artificiellement et tres-grossie. Capsule entourée des étamines persistantes et des débris de la corolle interne. . 6. Etamines. . 7. Intérieur de la capsule : on voit que le sommet des cloisons incomplètes est seminifere. Tab. IV, À. LAavRADIA GLANDULOS4. . 1. Fleur tres-grossie. . 2. Division du calice. Tab.IV,B. Dronzs. . 1. Graine avec ses deux tégumens. . 2. Graine dépouillée du tégument extérieur. . 3. Amande (Rich.) — a Périsperme. —b Embryon : on voit par cette figure que l'embryon du Dionæa est, comme celui du Drosophyllum, appliqué contre la base du périsperme.— N. B. Cette figure se rapporte à l’article du paragraphe V de cette monographie, où il est traité des affinités du groupe des Droseracées: Tab. V. Lay raDIA caPirzaris. 1. Fleur tres-grossie. 2. Capsule 3-valve entourée des étamines persistantes et des débris de [a corolle interne. 3. Intérieur de la capsule. Fautes à corriger dans la Monographie des genres Sauvagesia et Lavradia. Page 65 , dernière ligne des notes , plus épaisse qu'eux, lisez : plus longue queue Page 106, ligne 3, nulle, lisez : nulli. Tbid. , ligne 4 , aliernentia clavata , lisez : aliernantes clavati. fl Blanchard del? Lab. I. L'AFRADIA elegantksséna À TRE Ve 1 NEO PE à AR PULL k FT EN L a ue " Blanchard del? « Tab.IV. À. LAVRADIA glenduosa. Tab.W.B, DIONAA 2772/27/22 # \ ta: F1 | K N TA ue NUS Blnchard del! Tab. V. LAVRADIA Capilarws. Ut vom LES #1! PNR DAAETS 117 Sur les parties de son organisation que la Baudroie emploie comme instrumens de pêche. (Rapport à l’Académie royale des Sciences. ) PAR M GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. No avons l'honneur, messieurs comte de Lacépède, baron Cuvier et moi, de vous reproduire, dans le rapport suivant, les principaux faits d’un mémoire de M. le docteur Bailly, que vous nous avez chargés d'examiner; mémoire ayant pour titre : Description des F'ulets-pécheurs de la Baudrote. La Baudroie, poisson qui abonde dans les mers de l'Eu- rope, et parce qu'il se plaît principalement sur les côtes si multipliées de l’Archipel grec, fut connu de la plus haute antiquité; ses habitudes parurent, aux pêcheurs de la mer Égée, une si exacte répétition de leurs propres habitudes à eux-mêmes, qu'ils le désignèrent par le nom même de leur profession, l’appelant le Porsson-pécheur (1), ou même simplement le Pécheur. Aristote nous met sur la voie de cette ellipse de langage, en employant la périphrase sui- vante : («C'est une sorte de grenouille, dit-il, qu’on appelle » le Pêcheur; » et s'étendant sur ses habitudes, il ajoute : (1) Encore aujourd’hui, il n’a pas d’autre nom, à Bordeaux et à Gênes ; in Ligu… riâ pesce piscatore appellatur, à écrit Aldrovande, L. de piscibus, page 464. 118 Fizers-Pécneurs « Elle doit ce nom à l'industrie merveilleuse qu’elle dé- » ploie pour se procurer sa nourriture; car elle a au-devant » des yeux des appendices qui s’allongent à la manière des » poils, et qui, évasés à l'extrémité, forment comme de » doubles appâts qu’elle porte avec elle. Après avoir trou- » blé soit la vase, soit le sable, elle s’y cache, et élève ces » appendices : les petits poissons venant à les saisir, elle les » retire et les approche de sa boûche.» Anisr. ist. des Animaux, iv. 1x, ch. 37. Un pareil trait d'industrie n’a pas manqué d’être recueilli et célébré chez les anciens, même en vers, et plusieurs fois. Cicéron le reproduit dans son livre De natura Deorum, liv.n, n°. 125; — Pline, dans ses Animalia aquatilia , Liv. 1x, ch. 42; — Plutarque, dans ses OÆEuvres morales et philosophiques, quand il traite des animaux les plus avisés; — Elien, dans ses Récits sur les habitudes des Animaux, Liv. 1x, ch. 24; — et Oppien, dans ses Halieutiques, liv. ne. Les modernes, plus occupés du rapport et de la classifi- cation des êtres que de leurs habitudes, ont peu ajouté aux récits des anciens. Cette observation n’est point cependant applicable à Bélon, qui a pour ainsi dire continué, parmi nous, l’école des Grecs, et qui, bien informé par de fré- quentes communications avec les pêcheurs, a parlé de la Baudroie comme d’un animal dont il a eu souvent occasion d'étudier les allures. Il l’a vue à Raguse, où les Esclavons la nomment Drable de mer; à Marseille, où elle a pris son nom français, à cause d’une fraise qui garnit tout le dessous de la mâchoire inférieure, et d’où semblent pendre, comme DE LA BAUDROIE. 119 au bout d’un baudrier (1), les nageoires pectorales, et prin- cipalement le sac branchial : Bélon l’a vue encore à Bordeaux, où son nom primitif de Poisson-pécheur paroît s'être per- pétué, et est, en effet, rappelé par celui de Pescheteau. « Car, dit Bélon, c’est un poisson moult laid à voir, du- _» quel on ne tient grand compte pour manger, mais seu- » lement pour l’éventrer et lui tirer les poissons qu'il à en- » core, tout en vie, dedans le corps; car c’est bien le plus » gourmand de tous les poissons de rivage; aussi a-t-il une _» gueule si grande, qu’il pourroit aisément dévorer un grand » chien d’une goulée. Il porte deux ailes sur le dos; l’une, ————————_————— (1) On nomme aujourd’hui baudrier le ceinturon qui porte une épée : mais dans le moyen âge, on appeloit ainsi une bourse suspendue à un ceinturon et que l’on portoit le plus souvent en sautoir. Les évêques, les juges, le recteur de l’université de Paris, tous les personnages enfin vêtus de robes dans leurs fonctions, portoient un tel baudrier pour leur tenir lieu de poche en dehors d’un costume ample et fort embarrassant. Il faut se rappeler cet antique usage pour comprendre ce qui est écrit dans nos vieux auteurs sur la baudroie; Massilienses BAUDROY dicunt, nimirum quasi BAUDRIER , id est marsupium. La fraise de la baudroie est régulière- ment frangée comme l’étoient les ceinturons, ornemens de nos prélats; et à cette fraise sont comme suspendus, chez la baudroie, les sacs branchiaux appliqués dans le besoin à tous les usages d’une véritable bourse. Gesner donne une autre étymologie du mot baudroïe : ce seroit son ancien nom grec, qu’on auroit conservé à Marseille, mais en l’altérant. Il reproduit cette pensée dans les deux passages suivans, tome IT, liv. 4, 1°. page 814; græcam autem vocem massiliensium vulgus adhuc imitatum Baudroium, nomine à Ba- tracho detorto, appellat; et 2. page 817; massilienses, Bodroyum, hoc est, Batrachum, corrupte , vocant : et quelque autre part , cet auteur dit tenir son ex- plication de Bélon , lequel n’a rien écrit de semblable. Cependant Gesner avoit, en outre, adopté l’opinion dominante, mais en la modifiant aussi à sa manière, comme cela résulte de cet autre passage; a massiliensibus Baudroy, à lato et amplo oris rictu : quo marsupium refert, quod Baudrier vernacula lingua nomi- natur. 120 Frcers-Pécueurs » quasi entre les deux yeux, composée de plusieurs petites » lignes, desquelles il y en a deux de la longueur d’un pied » et demi chacune, et au bout d’icelles il y a comme une » manière de chair blanche, semblable à un appât ou amorce » qu'on a en coutume de mettre aux hamecons, duquel » appt ce diable décoit les poissons, après qu’il a troublé » l’eau fangeuse; puis, s’étant attapy contre terre, il ne » montre sans plus que ses deux lignes par dessus l’eau. » Béron, Nature et Diversité des Poissons, p. 76. Le mot Zgne est ainsi articulé par Bélon. Plutarque avoit dit également que la Baudroïe pêchoit à la ligne. « On lui a » donné son surnom de Pécheuse, dit Plutarque, pour sa » façon de faire; car elle jette de son col un boyau en ma- » nière de ligne, qu’elle étend au loin, le lâchant et le reti- » rant à soi tout entièrement quand elle veut : quand donc » elle aperçoit auprès d’elle quelques petits poissons, elle » leur laisse mordre le bout de ce petit boyau, étant, elle, » cachée derrière le sable ou dedans la vase; puis, petit à » petit, elle le retire, jusqu’à ce que le poisson soît si près » d'elle, qu’en sautant elle le puisse engloutir. » Pur: #rad. À Are. œuv., etc., VOL. 17, p. 519. B. Cependant les naturalistes modernes n’admirent point un tel appareil de pêche, du moins avec une affectation aussi dé- terminée. On se refusa assez généralement à croire à une aussi exacte parité des mêmes moyens chez les pècheurs et chez la Baudroie. Le nouveau nom de ce poisson, Lopluus, exprimant une autre idée, n’attribuoit seulement à ces pré- tendues lignes, que l'office de filamens apparoissant et dispa- roissant tour à tour, en quelque sorte à titre de jouets : on DE LA BAuDrore. 121 voyoit ces filamens s’agiter en tous sens au-dessus de la tête de l'animal, donnant lieu à toutes sortes de fluctuations, et pouvant tout au plus faire naître, dans les poissons à allécher, l’idée que c’étoient des vers, allant çà et là, et revenant sur les mêmes traces. Ces filamens se réduisoient, dans ce sys- tème, à une sorte d’appat pour attirer et pour faire tomber dans des embuscades. C’est dans ces circonstances que, sans rappeler tous ces préliminaires, tous ces faits de l’histoire de la Baudroie, M. Bailly vient dire, comme une chose absolument positive, que la Baudroie pèche véritablement à la ligne. « Mais, ajoute l’auteur, cette singulière manière de pourvoir à sa subsistance de la part d’un poisson, passeroit volontiers pour une plaisanterie imaginée par des esprits exercés à » » » » trouver entre les choses les rapports les plus bizarres, si » elle n’étoit pas prouvée par l'anatomie, dont les résultats » sont les plus éloignés possibles des créations de l’imagi- » nation. » Puis aussi, et sans autre début, notre jeune auteur passe à la description des Filets-pècheurs de la Baudroïe; c’est le nom qu'il leur donne. L'histoire de la science nous fait connoître quelle hésita- tion existoit dans les esprits au sujet de ces Filets de pêche. Leurs noms ont varié comme les opinions que l’on s'est faites de leur usage. Ainsi ce sont des fils soyeux et pendans, file pendentia, pour Aristote; des cornes grêles et sail- lantes, eminentiæ corniculatæ, suivant Pline:ils parois- sent de petits boyaux à Plutarque; de petites verrues, parvæ earunculatæ, à Oppien; des appendices déliées, duæ ap- Mém, du Muséum. 1. 11. 16 122 Fizers-PÊcueurs pendices tenues, à Jonston. Le père Kircher les voit (et cette détermination mérite qu’on la remarque) comme des rayons de nageoires, prnæ oblongæ et versatiles. : Bloch les désigne sous le nom de houppes de matière cor- née; et enfin, dans ces derniers temps, on les a aussi em- ployées indifféremment sous les noms de filamens , barbilloris et filets, mais rarement sous celui de petites lignes, comme l’avoit fait Bélon. La description de M. Bailly en fixe la nature d’une manière qu'on peut dire aujourd’hui certaine. Ces baguettes sont os- seuses, et trouvent de plus leurs analogues, selon M. Bailly, dans les prolongemens employés sous le nom d’apophyses épineuses et montantes des vertèbres. S'il avoit adopté en- tièrement l'opinion de Kircher, il eut peut-être aperçu les . trois Filets-pêcheurs de la Baudroïe comme une annexe dé- tachée et rejetée loin des trois premières vertèbres, comme les rayons de ces vertèbres déplacés (eux et leurs apophyses tutrices) et entrainés sur la tête par une traction du périoste, comme présentant enfin des rayons pareils à ceux de la pre- mière nageoire dorsale, aussi au nombre de trois, et qui for- ment les vertèbres 4, 5 et G de la série. Bélon auroit-il embrassé, dès 1555, ces considérations, quand il en est venu à décrire deux ailes sur le dos, l’une des deux étant quasi entre les yeux; et ces deux ailes ou na- geoires ne seroient-elles qu’une disjonction, conservant tou- tefois ses rapports en série longitudinale, qu’une dissémina- tion des rayons, qui sont réunis en une seule nageoire dans l'espèce de silure, Prmelodus catus? Il est du moins certain que les filets et les rapports de la première nageoire de la DE LA BAUDROIE. 123 Baudroie sont une exacte répétition des rayons dorsaux du Pimelodus catus, à commencer par les pièces dont se com- pose l'articulation annulaire. Quoi qu’il en soit de ces déterminations, celle même adop- tée par M. Bailly a si foiblement tracé dans son esprit, et il l’a si peu considérée comme une chose évidente, qu'il a jugé ne devoir traiter des Filets-pêcheurs que sous le rapport des formes qu’ils présentent chez la Baudroie. La position toute extraordinaire de ces filets, leurs attaches et leurs usages, en forment un appareil unique et vraiment très-sin- gulier : revêtus de leur épiderme, et de plus terminés par un épanouissement membraneux, on croit voir de véritables rayons. Le père Kircher l’a judicieusement observé, et Bloch ne se seroit éloigné de cette manière de voir que pour n'a- voir donné d’attention qu’à la couche extérieure, membrane ambiante, toute entière de nature épidermique ou cornée. C’est en cet état de choses que M. Bailly décrit un support général pour les filets, mais ne s'appliquant qu'aux deux pre- miers, et qu'il nomme porte-filet. I] dit le troisième filet directement articulé avec l’occipital, ce qui n’est pas exact : ce troisième filet a sa pièce tutrice à part, mais celle-ci est plus ou moins engagée et retenue entre les occipitaux su- périeurs et sur leur ligne de suture. Qu’on veuille y donner attention (car de cette observation dépend la détermination de toutes les parties du plus singulier des appareils), qu’on veuille y donner attention; cette lame ou pièce tutrice qui porte le troisième filet est de même forme et l’exacte répéti- tion des lames ou pièces tutrices qui portent les rayons de la première nageoire. Le grand support général, ou le porte- 167 124 Frrers-PêcnEurs filet de M. Bailly, se compose donc, analogiquement parlant, des lames ou pièces tutrices des deux premiers filets, les- quelles lames seroient soudées l’une avec l'autre, et n’ap- porteroient à la Baudroie , pour toute innovation organique, qu’un cas de soudure de deux os d’origine distincte. Le porte-filet qui donne attache au premier et au second Filet-pêcheur, a glissé sur la tête au point d’être posé sur les frontaux déprimés vers la ligne médiane, et ayant ainsi ménagé au porte-filet une large gouttière, où cette pièce osseuse et ses muscles trouvent un emplacement suflisant. « Le porte-filet s'engage en arrière dans un amas de subs- » tances mucoso-gélatineuses, et se termine en avant par » un anneau vertical qui reçoit un autre anneau appartenant »_au premier filet, absolument comme font les anneaux d’une » chaine qui s’engrennent réciproquement. » Bazlly. L'un de nous, M. Cuvier, a décrit chez le silure une sem- blable enchevêtrure annulaire des parties osseuses, et ce qu'il y a de remarquable à cet égard , c’est que chez le silure, c’est de même un premier rayon de nageoïre dorsale qui pré- sente cette curieuse conformation. Au surplus, quant à ce qui concerne la Baudroie, on ne peut concevoir d’articulation plus appropriée à la variété des mouvemens dans tous les sens, et l’on conçoit combien cette eirconstance ajoute de prix à l’instrument de pèche qui en est favorisé, combien elle facilite en effet son évolution. Les mouvemens des trois Filets -pècheurs sont réglés par un appareil musculaire très-compliqué. M. Bailly y a reconnu jusqu’à vingt-deux muscles, tous très-distincts, et tous exclu- sivement employés aux mouvemens des filets. Le nerf sous- DE LA BAuDRroir. 12h oecipital, qui est très-volumineux, s’y distribue, et ces mus- eles sont disposés de façon qu’il y en a pour relever et étendre les filets, d’autres pour les ramener et les coucher, et d’autres enfin pour les renverser, soit à droite, soit à gauche. La description très-étendue et très-satisfaisante que M. Bailly donne des trois Filets- pêcheurs, et des muscles qui en opèrent les divers mouvemens, est de plus accompa- guée d’un dessin où tout ce riche appareil est rendu nette- ment visuel. Ce travail intéressant, et qui avoit jusqu’à ce jour manqué à la science, confirme les usages, et consacre même la destination des Filets-pècheurs, selon qu’on lavoit conçu dans l'antiquité; car, bien qu’on soit fondé à voir là le déploiement d’une industrie réellement très-admirable, ces habitudes sont cependant resserrées dans les limites des fàa- cultés instinctives départies aux animaux, etelles ne prennent pas davantage le caractère d’une destination déterminée, que cela ne s’observe chez d’autres animaux encore plus des- cendus dans l'échelle des êtres. Une ligne amorcée, et deve- nant décepante, comme l’a dit Bélon, pour les petits pois- sons qui s y laissent prendre, n'offre rien de plus extraordi- paire qu'une toile filée et tendue par l’araignée , que ces ré- seaux également décevans, au moyen desquels l'ingénieuse industrie d’un insecte enlace et retient d’autres insectes pour s’en repaitre. Cependant on conçoit difficilement que continuellement une pêche à la ligne soit assez productive pour suflire aux besoins d'un poisson aussi vorace que l’est la Baudroie; et c’est là sans doute la réflexion qu’aura faite M. Bailly, lorsque, considérant tout le parti que les Baudroies peuvent retirer 126 Friers-Pécueurs de leurs lignes repliées en arrière, «il est porté à croire que » ces animaux se rendent de plus le service réciproque de » pêcher les uns pour les autres, soit entre parens et enfans, » soit entre amis. Une fois l'instrument imaginé et organisé, » ses applications, ajoute-t-il, ne coûtent plus rien. » Cette conjecture est formellement contredite par les ob- servations de nos anciens auteurs, Rondelet et Salviani, les- quelles sont, en ces termes, reproduites par Aldrovande : Rana marina solitaria est, non gregalis. (Aiv. De pisct- bus, lib. 3, p. 468.) à La voracité des Baudroïes est ce qui leur a valu, de la part des Siciliens, le nom de Larmia, traduisible par loup-ga- rou ou monstre mangeur d'enfant. Des animaux dans ces dis- positions et avec de pareils besoins, ne souffrent point de ri- vaux dans leur voisinage; ils vivent seuls au centre d’un can- tonnement, dont toutes les proies qui s’y trouvent leur restent alors dévolues. * Mais cependant n’oublions pas la difficulté qui auroit sug- géré à M. Bailly sa conjecture : une aussi grande voracité n’est nullement en harmonie, et ne sauroit être satisfaite avec et par d’aussi foibles moyens que les lignes ou Filets- pêcheurs de la Baudroie; mais, ce qui répond à cette diffi- culté, ils ne formeroiïent pas non plus les seuls moyens mis en jeu par ce poisson pour se procurer la subsistance qui lui est nécessaire. Ce n’est point sur un examen superficiel qu’on peut se flatter de connoître la Baudroïe; il faut la voir dans son es- sence, et c'est alors qu’on en vient à comprendre qu’elle est A comme prise et faite à rebours de tous les animaux qui DE LA BAUDROYE. 127 vivent de proie. Il faut à ceux-ci autant d’agilité que de force pour arriver à l’improviste sur leur proie, et pour la saisir et la dépecer en un clin d’œil, sans combat, ni autre soin que de voir et de mettre prestement à mort. Combien la Bau- droie est au contraire éloignée de cette toute-puissance qui forme les brillantes qualités du lion et du brochet : c’est un lourd animal qui nage difficilement. « Il n’a, dit son historien » de l’époque actuelle, ni force dans les membres, ni armes » défensives; sa queue manque de souplesse; sa peau est » molle et flasque, sa démarche lente et pénible. » Lac. His- toire générale des Poissons. Et c’est cependant un être aussi misérable, qui est dominé par un instinct de gloutonnerie! Quand, pour assouvir sa faim insatiable, il lui faudroit cou- rir sur sa proie, il est tenu de l’attendre dans une embuscade. Cependant cette existence lui seroit-elle à charge? est-il exact de dire, qu’attendre dans une embuscade une proie qui pourroit s’y laisser attendre un temps indéfini, soit la po- sition désespérée, l’unique et triste industrie de la Baudroie ? Non, sans doute. On n’auroit donc encore célébré que ses ruses comme pêcheur à la ligne : la Baudroie déploieroit donc bien d’autres ressources ? Il faut en effet la considérer elle-même, elle toute entière, comme offrant un appt, comme se présentant soi-même pour curée aux petits poissons qui se nourrissent de vase ou des débris d’animaux qui y sont mêlés. À la mucosité dont sa peau et sa chair mollasse sont abondamment recouvertes ; et dont tous les petits poissons se montrent extrêmement friands, elle ajoute une vase fangeuse, dont elle enduit son corps et l’inté- rieur de sa gueule immense; elle s'habille, en quelque sorte, à 198 Fircers-Pécueurs d’un limon d’une odeur fétide, d’une odeur qui, par eonsé- quent, avertit au Join et fait accourir près d’elle. Qu’ elle réussisse à bien cacher la plus grande partie de son corps; qu’elle ne produise et ne rende visuelle qu’une chair gissante sur le sol, que des lambeaux en apparence et qui invitent à s’en repaitre; qu’elle reste immobile, patiente; qu’enfin elle demeure long-temps dans cette position, et elle est bientôt entourée d'êtres sur lesquels il lui devient facile de exercer ses qualités décevantes. Elle ne se laisse donc point préoccuper par une seule idée; et ce n’est point en effet pour pêcher uniquement à la ligne que se développent les combinaisons de son embuscade: tout au plus, ce seront ses préludes à l’égard des poissons les premiers rendus sur son appel. Elle a fait des apprèts pour pêcher en eau trouble; et comme si ce n’étoit assez de cette disposition des lieux, c’est avec les diverses portions d'elle- même qu’elle va opérer. Elle transforme tout et chaque partie d’elle-même en moyens de pêche, en instrumens actifs, qui la rendent sur tous les points également redoutable. Sa gueule immense, déguisée sous un lit de sable fangeux, et sous de petites parties d'algues et de varrecs, ouverte et menaçante comme l'embouchure d’un épervier, attend pour s’ébranler une heure opportune; et alors elle s’en vient, comme l'épervier, se fermer au-devant d’une proie abon- dante, ainsi surprise à l’improviste. Elle est également aux aguets sur ses flancs et à l'arrière du corps, également menaçante sur ces points, au moyen de deux autres instrumens de pêche. Elle possède en ce lieu deux vastes poches, avec cercles pour en soutenir la toile am- DE LA BAuDrots, 129 biante; on diroit, on croit voir ces instrumens de pêcherie connus sous le nom de bourses à poissons, ou de nasses. La Baudroie et les autres lophies ses congénères, jouissent seuls de cette singulière organisation; c’est une amplification du sac branchial. Après que celui-ci a fourni, comme à l’or- dinaire, une enveloppe aux organes respiratoires, il ne se termine point, comme de coutume, tout-à-coup par la fente des ouiïes, mais il se prolonge tout le long de l'abdomen, comme aussi tout le long du bras : car la Baudroïe a sa na- geoire pectorale dégagée de l'épaule, et portée par un pédi- cule. Les rayons branchiostèges , agrandis dans la même raison que le sac branchial, remplissent l'office des cerceaux qui soutiennent le filet des nasses. Les ouvertures des ouïes sont donc fort reculées en arrière, et ce sont elles qui consti- tuent les entrées des deux nouveaux instrumens de pêche. Les muscles des osselets branchiostèges, et ceux du bras, principal régulateur de ce nouveau moyen pour pêcher, ou- vrent ou ferment, au gré de lanimal, l'appareil. Ce n’est point théoriquement que les usages de ces bourses, comme instrumens de pêche, sont assignés (1). L’un de nous (1) On a élevé, pour infirmer les usages attribués ici au sac branchial, les ob- jections suivantes; 1°. cette bourse est une extension de la cavité des branchies : elle n’est ainsi et ne peut être qu’un organe de respiration; 2°. cette poche est accordée à un poisson qui se terre, pour lui donner le moyen d’emporter sous le sable une forte provision d’eau, où il trouve et puise l'élément respirable ; 3°. personne n’a jamais vu de poissons dans le sac branchial; 4°. et surtout per- sonne n’admettra la possibilité d’un tel fait. Toute cette argumentation porte réellement à faux. 1°. Cest et ce doit rester un organe de respiration. Que toutes les dépendances de la cavité des branchies restent acquises à l’organe respiratoire, c’est de règle, Mém. du Muséum. t. 11. 17 130 | Frzers-Pécueurs a trouvé dans leur intérieur des poissons qui s'y étoient en- gagés, et il a depuis provoqué des recherches sur nos côtes, qui lui ont donné l’assurance que cette habitude est générale- ment connue des pêcheurs. On peut consulter sur tous ces faits les tomes 1x, page 417, et x, p. 480, des Annales du Mu- séum d'Histoire Naturelle. Telle est sans doute la connoïissance à laquelle Bélon fait c’est tout simple; et j’ajouterai, personne au monde n’a de lecons à me donner sur ce point. Mais cela ne prouve pas qu’un organe ne puisse servir à deux fins. À combien de différens usages , la bouche et la main ne sont-ils pas employés ? Eh quoi! s’il m’arrivoit, par exemple, dedécrire les organes génitaux extérieurs et d’en donner les fonctions, seriez-vous fondé à reprendre ces mêmes parties comme organes urinaires, et à me faire, contre ce que j'ai avancé, une objection de leurs autres usages ; question différente de la mienne, qu’il ne seroit entré dans mon intention ni d'aborder, ni de contester : à l’égard d’organes à double emploi, un système n’exclue pas l’autre. 2°. La bourse branchiale de la baudroie lui aurott été donnée, elle lui serott utile pour un approvisionnement d’eau, quand elle s’ensable. C’est là une idée & priori, un véritable jeu de esprit : car, premièrement , la baudroïe devenant aussi énormément renflée sur les côtés, ne parviendroit pas à pénétrer en terre; mais se- condement elle n’en a nulle envie , il lui suffit de se barbouiller de limon fangeux, et même le plus souvent elle se cache dans des touffes d’herbe ; et froisièmerent les poissons qui véritablement se terrent, comme l’anguille, et qui n’ont point les poches de la baudroie, ne s’en soucient aucunement , devant toujours trouver dans une vase trempée assez d’eau pour l'entretien des fonctions respiratoires. 3. Personne n’a vu de poissons dans le sac branchial. Lisez le contraire dans les Annales du Mus. d'hist. nat., d'abord t. IX, page 417, et secondement, t. X, page 480; et de plus, n'oubliez pas la remarque de Bélon. 4°. Et surtout personne n’admettra la possibilité d'un tel fait. Lisez encore le contraire dans le Règne animal, etc.,-par M. Cuvier, tome Il, page 309: on y voit que les baudroies peuvent aussi saisir des poissons ou enretenir dans le sac des ouïes. ÿ M. Constant Dumeéril a eu le malheur d'introduire dans cette discussion sé- rieuse et philosophique des plaisanteries et des piquanteries déplacées. DE LA BAUDROTE. 131 allusion, quand il dit que les pêcheurs qui rejettent la Bau- droie ne manquent pas cependant de l’éventrer auparavant, pour en tirer des poissons qu’elle a tout vivans dedans le COrps. Pour nous résumer sur le mémoire de M. Bailly, nous fe- rons remarquer que cet anatomiste a pris pour sujet de ses études une espèce que l’antiquité, que lesnaturalistes à toutes les époques, ont observée attentivement, ont eu à cœur de connoitre dans le plus grand détail. Il est parvenu à ajouter de nouvelles et d’intéressantes particularités à ce qui étoit su déjà; il a ainsi complété l’histoire d’un animal extrêmement curieux. Nous croyons le travail de ce jeune médecin digne des éloges de l'Académie, et nous proposons de l’insérer dans le recueil des savans étrangers. L'Académie royale des Sciences approuve le présent rapport et en adopte les conclusions. ( Séance du 17 mai 1824.) 21 132 Sur FAnalogie des Filets-Pécheurs de la Baudroie | avec une partie des apophyses montantes des vertèbres, et spécialement avec les premiers rayons de la nageoire dorsale des Silures. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. À l'occasion, et après la lecture du précédent rapport, j'ai eu l'honneur d'exposer verbalement devant l'Académie, quelques idées nouvelles concernant la détermination des Filets-pêcheurs de la Baudroïe. Plusieurs préparations dont je m'étois pourvu m'ont permis de prolonger cette discussion, et d'en rendre la démonstration perceptible aussi-bien aux yeux qu'à l'esprit; j'ai cru devoir de suite, dans la journée même, rédiger ce court exposé, pour faire de ce précis une note supplémentaire à mon rapport. J'ai cherché à démontrer comment les Filets-pêcheurs de la Baudroie étoient facilement déterminés, quant à leur classe- ment philosophique, par leur identité avec les premiers rayons de la nageoire des Silures; et comment, par la ré- flexion et la rétroaction de ces faits, le développement ex- traordinaire de ces premiers rayons, ayant produit un casque gigantesque qui se réunit à la tête chez les Silures, se trouve naturellement et réciproquement expliqué par les singulières anomalies de ces pièces chez la Baudroie. ÂNALOGIE DES FiczeTs-PÊÈcHEuRrs. 133 Ce sont les seconde et troisième vertèbres qui acquièrent, chez les Silures, un accroissement aussi extraordinaire, et qui, dans quelques espèces, sont soudées non-seulement l’une à l’autre, mais de plus toutes deux, avec les os postérieurs du crâne ou les occipitaux. Quelques-unes de leurs parties laté- rales deviennent les larges cuillerons, dont la couche super- ficielle inférieure sert de coiffe, s'adapte et adhère aux parties supérieures de la vessie à air, dite zafatotre. Un développe- ment proportionnel a lieu, vers le haut de ces vertèbres, mais il est bien différent suivant les espèces; et c’étoit pour aider ma démonstration de la faveur de cette circonstance que j'avois choisi et placé sous les yeux de l’Académie deux espèces appartenant à deux sous-genres, Porcus bayad et Pimelodus clarias, que j'ai ainsi nommées et figurées dans le grand ouvrage sur l'Egypte, Pozssons, pl. 13 et 15. Les parties du casque suffisamment esquissées pour être recon- nues dans la première, contrastent singulièrement avec ces mêmes parties, d’une grandeur gigantesque dans la seconde; mais, quoi qu’il en soit, ces faits singuliers d’organisation, qui ont vivement intéressé les naturalistes, sont ramenés à un ordre de plus grande simplicité qu’on ne l’a cru, et bien davantage que chez tous les autres poissons, comme les carpes et les perches; et j'entends exprimer ici par sim- plicité, que ces faits montrent des rapports plus directs avec les animaux vertébrés qui respirent dans lair. Je vais me servir, pour poursuivre cet examen, des dé- nominations qu'il m'a bien fallu imaginer pour tant de pièces diverses qui composent une vertèbre, et qui, dans les ani- maux inférieurs, n’arrivant pas toutes à se réunir et à se sou- « 134 ANALOGIE der avec les corps vertébraux, ont ainsi un caractère d’indi- vidualité, Considérées dans les animaux supérieurs, où elles se soudent de très-bonne heure avec les centres osseux chez le fœtus, et bien avant qu’on connût la particularité de leur primitif isolement, ces pièces n’avoient paru que comme des points saillans ou des apophyses préparées pour multi- plier les surfaces et renforcer les attaches musculaires. J’ai proposé cette nouvelle nomenclature dans mes Considéra- tions sur la Vertèbre en général. (Voy. Mém, du Mus. d'Hist. Nat., t. 1x, p. 89.) Au-dessus du corps vertébral, ou du cycléal, sont deux os, les périaux, posés et articulés côte à côte : inférieurement ces deux os ne conservent plus leur parallélisme, mais s’écar- tent sous un angle de 45°; le cordon médullaire occupe tout espace inscrit dans cette fourche. Ces mêmes périaux sont surmontés par l'apophyse tutrice du rayon, l’un des épraux, où autrement par l’ez-épial; et, comme on le sait, et comme l'indique son nom, cette apophyse porte le rayon. Ce filet osseux, qui complète la vertèbre, prend le nom d’épial supérieur ou de pro-épial. Voilà ce qui est propre à toute nageoire dorsale de poisson. Or voici comment ce plan général est modifié chez les Si- lures : les deux paires de périaux (1), qui s'élèvent des corps vertébraux, sont de fortestiges, de robustes apophyses mon- tantes; sur leur faite reposent leurs derniers appendices, (1) Ces os se voient à la suite des occipitaux : cependant il existe intermédiaire= ment une très-petite vertèbre, la première du chapelet vertébral, dont nous ne croyons pas nécessaire de donner aujourd’hui une plus ample désignation. DES Fizers-PÊcneurs. 135 lesquels, par la raison qu’ils forment les dépendances de deux vertèbres amplifiées, participent au sur-développement des parties centrales. Telles sont les pièces qui, dans le clarias ou les Silures à casque, s'ajoutent au crâne, et y sont ferme- ment soudées, hors une seule, le second pro-épial : ce se- cond rayon est une pièce osseuse, robuste et lancéolée, qui doit son extrème mobilité à une articulation annulaire ou à charnière ; toutes ces dépendances vertébrales, qu’elles soient entièrement soudées comme dans le Pzmelodus clarias, ou bien qu’elles soient peu développées et écartées du crâne, comme dans le Porcus bayad, conservent très-exactement entre elles, ainsi qu'à l'égard du crâne, la position respective de l’axis et de la troisième vertèbre des animaux supé- rieurs. En ne jugeant que sur le préjugé qu'en donne l’organi- sation de ces animaux, cela paroïît une conséquence toute simple, et d’une prévision toute naturelle; cependant c’est pour moi un fait vraiment nouveau, et qui doit jeter un grand jour sur les formations beaucoup plus compliquées de nos poissons vulgaires; complication que personne n’avoit en- core même soupconnée. Mais puisque c’est l’ordre simple, l’arrangement des hauts- vertébrés que présentent les Silures, donnons une idée de leurs seconde et troisième vertèbres. J'ai dit plus haut quelle grande superficie, quelles adhé- rences et quels nouveaux services caractérisoient les portions inférieures de ces vertèbres. Les périaux forment deux os très-développés, et largement ouverts en bas pour contenir le cordon médullaire grand et fort; mais au surplus il n’est point d’autres différences. Les grandes variations regardent 136 ANALOGIE. spécialement les autres parties de l’apophyse montante, l’en- épial et le pro-épial. Ce qui vient d’abord frapper l'esprit, et ce qui apporte un nouveau fait d’anomalie dans cette organisation, c’est que ces pièces interviennent également à l'extérieur. Il n’y a chez les autres poissons que le rayon ou le pro-épial dans ce cas; mais cela n’étoit point connu à l'égard de l’apophyse tutrice du rayon ou de l’en-épial : cependant, en y regardant de près, l’anomalie n’est point aussi grande qu'on le peut juger sur ce premier énoncé : l’en-épial est toujours une pièce de l’intérieur, quant à ses parties essen- tielles, et il sert toujours de base au rayon ou au pro-épial. Mais ceci demande à n'être plus exposé dans la généralité, mais au contraire décrit comme considérations spéciales. Voici ce que sont les deux pièces pour la seconde ver- tèbre, celle dont la partie supérieure s'articule avec l’occi- pital dans un Silure à casque. On voit d’abord l'en-épial, la pièce la plus volumineuse, dont la forme est allongée, et qui, posée obliquement, s'articule, d’une part, avec et le long de la première paire de périaux, et d’autre part avec l’occiput, au moyen de deux ailes saïllantes extérieurement et recouvrant son propre corps à la manière d’une selle. Un bout de la portion intérieure de los a trois faces, et, se ter- minant en pointe, se porte du côté et s'élève au-dessus de l’en-épial de la troisième vertèbre; c’est sur cette extrémité qu'une pièce fourchue, qui est réellement le premier rayon, vient s'établir : la partie de celui-ci qui se prolonge, a peu d’étendue, et je n’ai point trouvé que les zoologistes y aient donné attention : car ils prennent pour premier rayon de la nageotre dorsale la forte épine dont nous allons parler. Des Firers-PÊCHEURS 137 Il est vrai que la troisième n’est quelquefois point assez pro- longée pour être aperçue dans l’animal entier. Décrivons les mêmes pièces de la troisième vertèbre. L’en- épial de celle-ci est de même forme que le précédent; mais il est moins étendu, etil ne fournit exactement que des ailes aux tégumens extérieurs (1) : le milieu est dégagé et occupé par la longue épine ou le rayon osseux; celui-ci est le pro-épial ou cette armure si puissante, au moyen de laquelle les plus petits Silures affrontent impunémentles plus voraces et les plus considérables des animaux aquatiques. Cela posé, revenons à la Baudroie. C’est le même arrange- ment vertébral, un ordre aussi simple, à quelques égards, que dans les Silures. Les Baudroïes ont de même une na- geoire dorsale faite avec les apophyses montantes de six corps vertébraux. L’anomalie propre à cette espèce consiste unique- ment dansune dislocation particulière, dans une dissémination, à la vérité fort singulière, de quelques parties de rayons, au- (1) Les Trigles montrent une organisation analogue et bien propre à faire com- prendre celle des Silures. L’en-épial est une pièce robuste, formée comme un clou à tête plate. La lame de la tête s'étend , moitié à droite et moitié à gauche, et a ses bords découpés comme ceux d’une aile d’insecte. Le pro-épial s’articule en avant de cette lame. Il est de ces en-épiaux(chezle grondin , par exemple, trigla-cuculus), en tres-grand nombre, depuis la tête jusqu’à la queue, les deux nageoires dorsales de ce poisson régnant sur toute cette longueur. Ces lames en série se recouvrent, l’antérieure passant par-dessus sa suivante: ainsi elles glissent les unes sur les autres. L’en-épial et le pro-épial , le premier servant de tuteur au second , forment en- semble un appareil de pièces solides , qui n’ont plus que des rapports éloignés avec leur vertèbre : car la queue de l’en-épial est placée à une telle égalité de distance entre les périaux des deux vertebres, que l’œil ne distingue pas instantanément à laquelle des deux vertèbres l'appareil, comme dépendance, doit être attribué. Un tel exemple dépose en faveur du caractere d’individualité des élémens vertébraux, Mém. du Muséum. t. 11. 18 138 ANALOGIE dessus de la tête. L/en-épial de la première vertèbre, et celui de la deuxième, forment la longue arête placée sur le crâne; cette arête, que M. Baïlly à proposé de nommer porte-filet, et les deux filets-pêcheurs qui s’y insèrent, sont alors, l’un le premier, et l’autre le second pro-épial du système verté- bral. J'ai dit, dans le rapport qui précède, que le troisième lilet avoit également sa pièce tutrice ou l’en-épial, sur lequel s’opèrent ses mouvemens d’ascension ou d’inclinaison. Une difficulté arrêteroit-elle, celle de concevoir un pareil déplacement, le mélange de parties dépendantes de la co- lonne épinière avec les os du crâne? Combien d’autres évé- nemens de cet ordre, et je pourrois ajouter, combien de beaucoup plus choquans, à s’en tenir aux apparences? Qui ne connoît cette extension, cette irruption, pourroit-on se permettre de dire, cette toute semblable distribution des rayons dorsaux sur la tête d’un grand nombre de poissons; et, par exemple, sur celle des Blenruius, des Scorpæna, des Pleuronectes? Trois forts rayons osseux, liés d’ailleurs en ar- rière , et embrassés dans les mêmes membranes que les rayons suivans , couvrent, à partir des yeux, le crâne du Blennius torvus de Gronow, le Tænianote tuberculeux. C’est, chez le flétan, chez le turbot, un égal envahissement de la tête par la nageoire dorsale; et cet envahissement est même total à l'égard de la sole, dont les rayons dorsaux sont prolongés sur les lèvres. Tous les faits précédens ainsi expliqués les uns par les autres, passez à la carpe; et vous concevrez la merveilleuse organisation qu'y a découvert et décrit M. Weber, mais que ce savant anatomiste n’auroit point comprise comme Des Fizers-PÊcuEuRrs. 139 philosophie générale, qu’il s’est donc trop empressé de déter- miner comme reproduisant les osselets de l’ouïe, et qu'il a injustement opposée à mes travaux sur l’opercule. La cause dont j'ai parlé plus haut au sujet des Silures, l’'adhérence de la vessie natatoire sur un point du système osseux, a produit aussi une sorte de révolution, a comme porté du désordre chez la carpe à l’égard de ses troïs premières vertèbres : mais de même que si un événement secon- daire s’étoit jeté à la traverse, des effets émanés de la même cause sont différens. La vessie natatoire des Silures a été toute dominée par le système osseux, celui ci ne s'étant ressenti de ses relations et de ses adhérences avec le sac aérien qu’en subissant un accroissement extraordinaire : c’est au contraire la vessie natatoire qui est devenue chez les carpes domina- trice, et qui a entravé les diverses parties des trois premières vertébres : ces parties assujéties aux mouvemens continuels de la vessie, qui sont restées isolées, composent les pièces que M. Weber a si exactement décrites et dont il a en effet donné comme considérations anatomiques une idée si satis- faisante (1). Ni M. Weber, ni aucun des anatomistes qui l'ont précédé, n’ont rien compris à la longue queue de l’oc- cipital chez la carpe. Cependant dans le système que je présente et dont la clef nous est manifestement donnée par les considérations précédentes au sujet des Silures, ïl n’est (r) Je renvoie :pour-tous les détails de-ces pieces aux planches II et IV de l’ou- vrage que M. Weber a publié sous le titre De aure.animalium aquatilium, Lipsiæ 1820. Je consacre.plus bas un article pour expliquer les découvertes de ce savant dans le sens de mes anciennes déterminalions. (Voyez mes recherches sur l’Oper- cule, Pix. ANAT. tomel,-p. 16.) : 18* 140 à ANALOGIE rien là que de fort simple. La longue queue de l’occipital chez les Cyprins forme un plancher inférieur sous les pre- mières vertèbres : elle est le produit d’un corps et d’appen- dices vertébraux, qui non-seulement sont soudés les uns avec les autres, mais quile sont aussi avec l’occiput : au contraire les autres dépendances des trois premières vertèbres, qu’un jeu continuel et unmouvement alternatif d’arrière en avant de la vessie aérienne privent d'assez de fixité pour se réunir et pour se grouper aux noyaux vertébraux, deviennent les prétendus osselets de l’ouie, les pièces mobiles ainsi nommées par VWVeber. Ce que ce savant appelle fossa auditoria est une de ces cavités qui existent parallélement et sur le côté des corps vertébraux chez les poissons, mais dont la grandeur ex- traordinaire forme ici une circonstance particulière de For- ganisation des Cyprins; et ce qu’encore il appelle Zguor oleosus, est une émanation du liquide qui est ordinaire- ment contenu dans les cônes des noyaux vertébraux. Voilà comment des faits, s'ils ne sont pas étudiés avec quelque soin, paroissent des contradictions choquantes, des anomalies désespérantes : mais cependant ce ne sont que des exceptions qu’on ramène enfin à la loi commune, de ces exceptions qui bien entendues prouvent au contraire en faveur de la règle. C’est en rencontrant de tels exemples que des esprits ardens, mais point assez réfléchis, s’en viennent triomphalement annoncer des découvertes qui prouvent un défaut d'unité dans l’organisation; et qu'ils se croient, au dix-neuvième siècle et après ces trente années si fécondes pour l’histoire naturelle, qu'ils se croient, dis-je, autorisés à proclamer le contraire de la PszuDo-10r générale que les DES Ê'ILETS-PÊcHEURS. 1h anunaux serotent faits sur un même plan; phrase toute aussi peu régulière grammaticalement que peu logique phi- losophiquement. De pareilles anomalies dévoilées ne sont qu’un achemine- ment pour l'explication d’autres points difficultueux de l’or- ganisation des poissons : celle-ci est si variée et son plan commun se répand en écarts quelquefois si désespérans, qu’un enchaîinement heureusement acquis de rapports est comme un filon à suivre. En effet, les Silures à nageoïire dorsale simple nous mènent insensiblement aux Silures à casque, c’est-à-dire, aux Silures chez lesquels les deux premiers segmens vertébraux vont se réunir et presque se confondre avec le crâne. Seroit-ce ce dernier cas, cela même qui chez les perches est plus contracté, plus confus et tout-à-fait fondu en une seule pièce ? Bojanus avoit donné une preuve de sa grande sagacité dans ces sortes de recherches, en reconnoiïssant à cette pièce un caractère étranger, en la voyant comme une sorte de hors-d’œuvre, et en ne la confondant avec aucun des occipitaux, soit supé- rieurs, soit latéraux, soit inférieurs : il lui a imposé un nom pris de sa position, crista occipiétis. Le premier corps vertébral chez les perches est sans ap- pendices (1) : c'est un cycléal tout nu, si je puis m’exprimer (1) Il est une autre maniere de concevoir ce noyau vertébral, comme détermi- nation philosophique : car ce n’est peut-être que le basisphénal (voyez PHiL. aNAT. t. 2, p. 73), c’est-à-dire , que la deuxième partie du sous-occipital. Au surplus , je me garde bien de donner aujourd’hui ces idées et celles de la suite du même paragraphe comme arrêtées. Une carriere nouvelle s'ouvre devant xous; voilà les seules inductions que je prie qu’on déduise de tout ceci. 142 ANALOGIE DES FiLETS-PÉCHEURS. ainsi. Nous n’en serons point surpris, si c’est en effet une partie dé ses appendicés, qui autoit passé à la tête et qui seroit devenu l'os de Bojanus ou le crista occipitis ; si, de plus, c’étoient aussi d’autres appendices de ce même cycléal, ou ses parties latérales qui composeroïent ces ailes occipitales qui servent d’anneaux intermédiaires au membre antérieur et qui joignent l'épaule à la tête. Ces pièces (pédicules de l'épaule) n'ont cessé de m'occuper depuis vingt ans, elles étoient une difficulté tracassière pour mon esprit : les aurai-je enfin aperçues dans leurs conditions philosophiques? J’examinerai plus attentivement ce point, dont l'importance exige qu'on ne se borne pas à n’en traïter qu’accessoirement. Aïnsi pour conclure : voilà chez la Baudroïe , comme chez les carpes, cornme chez Îles ennius, chez les pleuronectes, chez les perches, etc., beaucoup de parties vertébrales qui semblent déplacées. On les voit renoncer à leurs noyaux centraux pour se répandre à quelque distance et pour entrer dans de nouveaux services, pour agir enfin comme le font tous les organes tombés dans les conditions rudimentaires. Mais du moins ce sont des pièces d’un système établi, exis- tant partout ailleurs. Ces brins écartés ne sont donc point des choses d’une création nouvelle, des choses qu’on pour- roit diré appartenant à une composition inconnue : il n’y a à leur égard de nouveau que leur déplacement, leur dissé- mination et les usages divers auxquels les assujétissent les nouvelles relations que ces pièces se trouvent avoir acquises. Sur une nouvelle détermination de quelques pièces _ mobiles chez la Carpe, ayant été considérées comme les parties analogues des osselets de Poreille ; et sur la nécessité de conserver le nom de ces osselets aux pièces de Popercule. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. à € J ‘A1, dans l’article précédent, et comme transitoirement, parlé des recherches de M. Weber, qu'on m'oppose dans quelques écoles, et qu’on paroît considérer comme infirmant mes travaux de détermination des pièces de l’opercule : c’est le moment de m'expliquer à l'égard de ces recherches, dont on a donné, dès 1821, une analyse dans le Bulletin des Sciences (r). Cet extrait a surtout porté sur les points con- testés de ma principale découverte, quant à l’organisation des poissons : on y a applaudi à l’heureuse idée de M. Weber, en tant qu'il auroit justement attribué certains osselets de la carpe, tout à la fois à la vessie natatoire et à l’oreille. Ainsi la carpe auroït, autre part que dans les pièces de l’opercule, : des os analogues aux osselets de l’ouïe, des os, par consé- (1) Bulletin des Sciences, publié par la société philomatique , année 1821. page 118. 144 OssELETS DE L’OUIE quent, auxquels il seroit convenable de conserver les noms de rnarteau, d'éfrier et d’enclume. J’ai laissé suffisamment agir les insinuations de la rivalité, etil m'est, je pense, bien permis présentement de m’expli- quer sur le travail original, et d’ailleurs très-recommandable, qu'on m'oppose, comme sur les conséquences qu'on vou- droit en déduire, M. Weber, qui a réellement découvert chez la carpe un mode d’association inaccoutumé et fort curieux d’osselets, n'a cependant, selon moi du moins, nullement procédé, quant à la détermination de ces pièces, avec la philosophie et la logique qu'on ne peut se dispenser d’apporter, quand il s’agit de conclure après une comparaison de tant d'élémens divers. Ilne connoissoit point le système de la tête des carpes, puisqu'il déclare adopter de confiance un travail alors pu- blié sur ce sujet par Bojanus. Ainsi, sans s’appuyer sur le principe des connexions, dont ilignoretoute la valeur comme règle, ce n’est point à l'égard d’os voisins connus de lui avec certitude, qu'il prend certaines pièces étrangères et postérieures, quant à la tête, pour les analogues de celles qui, logées chez les mammifères dans le canal auditif, y portent le nom d’osselets de l'ouie, C’est donc une détermination faite a priori, une prétendue identité uniquement basée sur le fait ( circonstance bien précaire) d’une certaine ressem- blance dans les formes et le volume des pièces observées. Quelle autre marche étoit seule praticable? D'abord, vous ne devez tenter une détermination que si vous vous êtes au préalable assuré de la détermination de tout ce qui en- toure votre z2connu. C’est alors que vous pourrez, avec une CHEz LES Poissons. 145 juste confiance dans vos inspirations, rechercher quelles sont les véritables et nécessaires relations de vos nouveaux su- jets d’études. Ainsi, dans le cas des pièces de Weber, c’étoit aux procédés, aux questions les plus simples qu’il falloit re- courir. Il falloit connoître exactement le lieu de la scène, la situation de ces pièces. Où se voient-elles en effet ? der- rière et en dehors le crâne. Quelles en sont alors les con- nexions? c’est avec les premières vertèbres. La conséquence de pareils faits, est que c’étoient là des branches verté- brales, des appendices de la vertèbre, qui, au lieu d’être soudées avec leurs noyaux, étoient restées dans une sorte d'indépendance par suite d’adhérence avec la vessie nata- toire et de participation à l’activité de cet organe. Ces branches vertébrales, qui dans le système de M. We- ber n'’existoient que dans les cyprins et dans quelques es- pèces de deux genres voisins, deviennent au contraire, étant embrassées sous ce nouveau point de vue, des pièces appar- tenant à l’universalité des poissons. Les relations et l’in- fluence de la vessie natatoire leur ont procuré un caractère distinct dans les cyprins, les cobitis et les silures. Ce sont en effet les mouvemens alternatifs des parties latérales du sac aérien qui, entraînant et tiraillant en plusieurs sens les bran- ches vertébrales, les privent du repos nécessaire à tout élé- ment vertébral pour qu'il y ait union et soudure de toutes les pièces, soit entre elles, soit avec le noyau central. Je viens, pour les personnes qui ne lisent que les consi- dérations générales d'un écrit, de donner l'exposition som- maire de tout le mécanisme des os de Weber; mais je dois aux zootomistes la spécialité de ces faits. Puisque je pro- Mém. du Muséum. 1. 11. 19 146 OssELETS DE L'OUIE -pose de délaisser les seuls noms que ces os aïent jusqu’à présent portés , je dois leur rendre ceux qu’ils eussent reçus, si on les eût embrassés sous les rapports qui résultent de leur réelle analogie. = Weber, en parlant de ces os chez la carpe, n’étoit excité que par une seule pensée, l'oreille formant le but unique de ses recherches : il y ramenoit avec prédilection toutes les considérations qui s’offroient à son esprit. Il n’avoit point en- core fait assez d’études générales pour comprendre ce que sa manière avoit de trop exclusif et pour savoir qu'il résultoit au contraire, de la position des parties qu’il essayoit de dé- terminer, une nécessité pour lui d'en étudier l’entourage avec rigueur. Car enfin c’étoit tout au dehors du crâne, en arrière des épaules et dans le champ des premiers segmens de la colonne épinière, qu’étoit ce qu'il invitoit à nommer les osselets de l’ouie. Il s’en est bien fait une difficulté, mais il a glissé sur elle au moyen de cette réponse : « Des parties, » dit-il, situées inférieurement, tels que les vaisseaux res- » piratoires, se seroient portés en avant, et d’autres parties, » situées supérieurement, tels que les osselets de l’ouie, » auroient reflué en arrière. » Qu'on invoque le système des compensations, celui du balancement des organes, sil y a différence de volume, comme grandeur ici et là avor- tement, je le conçois; mais je.ne puis admettre même une compensation qui seroit acquise en blessant la règle des connexions. Dans la préoccupation qu'il voyoit et qu'il décrivoitdes parties dépendantes de la chambre auditive, Weber ne de- voit donner qu'une attention légère aux vertèbres. Il étoit CHEZ LES Porssons. 147 au contraire sur la considération de parties dépendantes du système vertébral; ce dont il fut tenu au moins de s’aperce- voir à cause de la situation de sa prétendue chambre audi- tive : des noyaux vertébraux dominoient par leur position centrale et par leur volume tout le lieu de la scène. Il y eut donc, pour ce savant, nécessité de rattacher la plupart de ses observations aux vertèbres, et il cite souvent én effet, et même il figure sous plusieurs faces, les première, seconde, troisième et quatrième vertèbres. Parties accessoires dans le système de Weber, les vertèbres ne sont pour lui que les points de l'horizon de son champ d'observation; mais princi- paux sujets au contraire des recherches actuelles, il m’ap- partient de les replacer sur le premier plan. * Pour ne pas compliquer la question, je ne m’occuperai point du rapport des parties et de leurs considérations, quant à la vertèbre vue de haut et d’une manière générale; j emploierai l’ancienne nomenclature, en préférant même les dénominations adoptées par Weber (1). Si, comme je le pense, tous les petits os, objets de cette discussion , sont des dépendances de quelques vertèbres sous des formes très-difficilement appréciables, leur détachement des milieux vertébraux place donc ces parties centrales sous des apparences à les rendre aussi presqu’également mécon- noissables. Or, pour arriver sur une circonstance bien dé- cidément normale, pour me procurer par conséquent un sujet de comparaison dans un état hors de toute équivoque, (1) Je vais employer les noms et je rappellerai de plus les figures de l’ouvrage De aure animalium , etc. * 19 148 OSSELETS DE L’OUIE je considère d’abord une des vertèbres du centre, laquelle je vois composée comme il suit. Soir, par exemple, dans la Croce cyprinus bra- a, la douzième vertèbre : cette vertèbre montre sortant de chaque flanc, 10. La côte (costa. W.). C’est une tige longue, curviligne, comprimée, finissant en pointe inférieurement et commen- çant au contraire par une tête épanouie en deux très-petites apophyses. 20, L’apophyse transverse ( processus transversus. W. ). On donne ce nom à un petit os plus large que profond, ayant une facette extérieure de toute l’étendue de la tête articulaire de la côte. 30. Tout au centre, le corps vertébral, os impair (»er- tebra proprie dicta. W\.), lequel est formé de deux cônes. adossés par leur sommet. 4°. Egalement impair et en dessus, l’os en V renversé (processus spinosus, seu arcus vertebræ. WW. ). 50. [’apophyse tutrice du rayon, pièce impaire. Et 6°. Le rayon, ou la pièce mobile de la nageoire dorsale. De la douzième vertèbre jusqu'à la quatrième inclusi- vement, c’est à chaque segment vertébral le même ar- rangement, sauf que le rayon avorté n'existe plus et que son apophyse tutrice n’est que foiblement apparente. J’en viens à la troisième vertèbre. Descrirron de la troisième vertèbre (vertebra tertia; vide tab. IF, fig. 29. W. ). On voit d’abord au centre le corps vertébral composé de deux cônes adossés, notre n°. 3: ce corps est de plus surmonté de l’os en V renversé, notre CHEZ LES POIssons. 149 no. 4; mais, quant au surplus, ce sont de très-grandes diffé- rences; les flancs du corps vertébral sont prolongés en une longue apophyse : courbée et dirigée inférieurement, Weber l'appelle et nous la nommons avec lui processus {ransver- sus permagnus ; sous une forme et un volume bien diffé- rens, c’est notre n°. 2, reconnoissable à sa connexion et à sa structure. La vessie natatoire a disposé à son gré du sur- plus de cette vertèbre : ce sont deux pièces concentriques aux apophyses transverses, qui sont également soudées au corps vertébral : elles en émanent d’un même point infé- rieurement, elles décrivent un demi-arc de cercle et elles se rencontrent l’une l’autre à leur autre extrémité. Leur bord interne dans une partie de son étendue fournit une expan- sion osseuse, laquelle devient la plaque où la vessie nata- toire est attachée et suspendue. Weber donne ces pièces pour des apophyses transverses surnuméraires, pars quæ- dam processus transversi : je les considère comme les côtes de la troisième vertèbre, comme les analogues du n°. 1 : l’intervention de la vessie natatoire a produit leur va- riation; nous expliquerons cela plus bas. Descriprion de la 2e. vertèbre ( ver{ebra secunda ; vide tab. PT, fig. 27 et:28. WV.). Ce corps vertébral est comme celui de l’article précédent : il en est de même des apophyses transverses, sauf qu’elles sont un peu moins longues, et qu’au lieu d’être infléchies, elles forment des ailes droites et horizontales: enfin il en est encore de mème des apophyses en V renversé, processus spinosus seu arcus, à quelques différences près dans les formes. Ainsi, dans un système comme dans l’autre, cette 150 OSssELETS DE L'OUIE vertèbre se compose des pièces analogues aux nos. 2, 3 et 4; et d’ailleurs il n’est plus question de celles no5.5 et 6, puisqu'il n’est plus là aucune trace de nageoire dorsale. Y auroit-il eu un semblable avortement, en ce qui concerne le no. r, ou la côte? Tout doit faire admettre l’idée contraire: car avec un corps vertébral aussi développé que l’est celui de la seconde vertèbre, développement assez considérable pour opérer quelquefois le dédoublement de ce même corps, il ne sauroit arriver que la côte ait entièrement disparu. Elle a été méconnue sans doute; mais ce qu’on sait à l'égard des autres vertèbres, c’est que le développement de toutes les parties vertébrales ne se montre jamais dans un ordre inverse, jamais pour reproduire le phénomène de la com- pensation de volume, mais qu'il est au contraire constam- nent proportionnel. Aussi la théorie nous révèle qu’il existe auprès du second corps vertébral une côte qui compléteroit son système : et s’il en est ainsi, la loi des connexions nous la signalera bientôt. L’apophyse transverse est allongée et pointue; c’est qu’elle ne se sera point concentrée sur elle- même pour fournir, comme à la douzième vertèbre, une large surface articulaire. La conséquence de ce fait, c’est que la côte aura pris son insertion sur le corps même de la vértèbre et en dedans de l’apophyse transverse; c’est-à-dire que le fait déjà constaté dans la description de la troisième vertèbre se trouvera reproduit à la seconde. Or y a-t-il en cette place désignée par la théorie un os auquel on fut ainsi induit à faire jouer le rôle d’une côte? Voyez ce qui en peut ètre; vous trouvez à la place indiquée un os fort et robuste. YVeber l’a vu et décrit : il n’auroit donc commis de faute CHEZ LES Poissons. 1Ô1 que quand, dans la préoccupation qui s’étoit emparée de son esprit, il lui a donné le nom de nalleus (voyez tab. IN, fig. 15). Ce prétendu marteau, c'est la côte de la seconde vertèbre. Comparez cette pièce à notre n°. 1 de la troisième vertèbre; c’est la mème forme et la même insertion relative: il y a ressemblance, hors un point; on ne trouve plus de lame osseuse pour servir de siége à la vessie natatoire; mais d’ailleurs c’est un osinséré sur le second corps vertébral, et, remarquez, un os mobile à la manière des côtes. Comparez de plus sa forme à ceile des côtes des grandes vertèbres ab- dominales, c’est encore, sinon une forme absolument sem- blable, une forme du moins philosophiquement identique : car, ce prétendu osselet de l'oreille ou ce rnalleus, est allongé et courbé en arc: il finit par une pointe aiguë et sa tête articulaire se compose d’une base terminée par deux apophyses. N'est-ce pas ce que nous avons rapporté plus haut de la côte, quand nous l’avons considérée dans la dou- zième vertèbre? Dans le prétendu marteau de Weber, elle est proportionnellement trop courte relativement à la lar- geur de sa tête articulaire : et pour cette différence, vous méconnoitriez cette identité, sur laquelle une règle plus certaine dans ses inductions vous auroit porté! Description de la re. vertèbre (vertebra prima; vide tab. PT, fig. 25 et 26. W.). Il existe en effet, immédiatement après le crâne, un premier anneau du chapelet vertébral; sa petitesse en forme le trait le plus remarquable. C’est un tron- con fort étroit, pourvu de deux ailes horizontales, courtes et droites. Ces parties se rapportent aux objets de notre grande vertèbre, savoir la rondelle au corps vertébral n°. 3, et ses 152 OSssELETS DE L’OUIE ailes aux apophyses transverses n°. 2 : voilà tout ce qui com- pose la première vertébre dans le système de Weber. Cependant cette vertèbre n’auroit-elle plus d’autres dé- pendances? Grandeur et petitesse ne constituent point des caractères en philosophie anatomique; il est vrai que les actions sont dans la raison des volumes : mais, toutefois l’im- portance d’un organe ne se mesure point sur ses dimensions. Ce que nous avons appris par ce qui précède, c’est qu'un corps vertébral a de nombreuses dépendances, que ces dé- pendances sont à son égard dans une proportion directe quant au volume, et que si l’apophyse transverse n’est point concentrée sur elle-même pour produire un adossement ar- ticulaire au profit de la côte, celle-ci prend attache sur le corps vertébral. Marchons avec ces données sur l’exploration de petits os, dont il nous est présentement permis de soup- conner l'existence, et voyons ce qui est tout autour du tron- con, point milieu de notre première vertèbre. Or, il existe sur les côtes de ce tronçon un très-petit osselet ayant une tête à double branche, et un corps formé d’une plus longue branche épineuse. En recherche de la côte n°. r, je ne puis douter que je ne l’aie déjà trouvée, car telle est la forme d’une côte : la même insertion, le même mode d’articulation se voient là également , la tête articulaire est de même munie de ses deux apophyses. Weber, qui a figuré eette pièce n°. 16, tab. IIT, a donné pour signes aux deux apophyses les no. r et 2, et comme s’il eüt agi dans l’esprit de mes préventions, les mêmes indications signalent égale- ment les deux apophyses de son malleus, fig. 15, le signe 3 étant de même affecté, fig. 15 :et fig: 16, à désigner l’extré- CHEZ LES POoIssoNs. 153 mité de la longue épine, ou ce qui est la même chose, l’ex- trémité libre de la côte. Je n’aurois point produit les raisons alléguées précédemment que je me croirois autorisé à m’en tenir aux rapports rendus visuels par ces deux figures, et à conclure l’analogie des deux pièces représentées. Or, ayant vu dans le précédent article que le z7alleus de Weber est la côte de la deuxième vertèbre, notre petite pièce est par conséquent celle de la première. Mais quel nom Weber, qui l’a si soigneusement et si souvent fait représenter, lui auroit-il donné? un nom relatif à sa préoccupation, un nom déduit de sa théorie; celui d’enclume, zncus. Weber donne une partie de plus à la première vertèbre, un processus spinosus, seu arcus vertebræ, et il ajoute, in os planum commutatus ; il représente cette apophyse épineuse, vue de face, tab. VI, fig. 25, et vue de profil, fig. 26. J'ai examiné très-attentivement cette pièce et je ne puis la considérer comme une dépendance de la première vertè- Pre : je la vois au contraire comme un fragment du processus spinosus situé en arrière, de l’apophyse épineuse et arquée de la deuxième vertèbre : très-friable, cet os se brise diffé- remment dans chaque sujet. Nous en avons fait plus haut la remarque : ceci tient à quelques parties latérales qui ont cédé sous l'entraînement d’un organe. La vessie natatoire en- trée en liaison avec elles en aura nécessairement dominé les conditions d'existence. Les choses se présentent en effet à l'observateur, comme si la vessie natatoire eût été dans l’ori- gine située plus en devant et qu’elle eût été dès lors rendue adhérente aux extrémités des côtes, et encore comme si, refoulée plus tard en arrière, elle n’eût cédé qu’en emme- Mém. du Muséum. 1. 11. 20 154 OssELETS DE L'OUIE nant les côtes à sa suite, lesquelles, tirées par leur extrémité bre, auroient oscillé sur un point de leur tête articulaire et se seroient abaissées le long des corps vertébraux. La tête articulaire ne tenant plus au corps vertébral que par une de ses apophyses, auroit, en se déplaçant, facilité le trajet et le développement des processus transpersus. Enfin un filet aponévrotique, vestige des anciennes attaches, séroit de- venu le tendon qui passe du séapes à l’incus, de l'ancus au malleus et du malleus à la vessie natatoire. Maintenant il est certain, qu’à quelque cause qu’on doive attribuer l’enchaînement de ces parties , elles sont détournées de leur service comme dépendances du système vertébral : ce sont toutes parties liées ensemble, eiles constituent par conséquent un appareil. Mais quelle est la fonction de ce puissant appareil (1 »? (1) Je compte présenter l’usage de ces pièces dans un Mémoire qui suivra dé près celui-ci. Cette explication, comme je la conçois, est pour moi le sujet d’une vraie découverte, puisqu'elle rallie et complète tous mes travaux sur l’organisa= tion des poissons. J’aurois désiré que le développement de mes idées ne procurât pas à ma démonstration, en ce qui concerne les os de Weber, le caractère d’une critique ; mais si je n’en ai pu sauver l'apparence, je m'en promets du moins un précieux dédommagement dans le mémoire suivant, où j'aurai, comme par une douce compensation , à exposer ce que l'ouvrage de Weber contient d’ailleurs de vues saines et profondes. Tous les os qu’il a étudiés, et qui sont si nettement dé- crits, bien que ce soient les vestiges des arcs osseux qui forment ailleurs le cou- ronnement du coffre pectoral, n’en sont pas moins détournés de leur application habituelle, pour entrer chez la carpe dans une association singulière , dans des relations insolites, et qui paroîtront telles, surtout à quiconque ne connoit encore qne l’organisation des animaux des trois premières classes. Ainsi, également domi- nés, engagés dans les mêmes entraves, concourant vers un même but, et propageant également toutes les excitations dela vessie aérienne , ces os composent un vaste ap- pareil , dont Weber, qui a donné sur ce point des preuves d’une bien grande saga- CHEZ LES Poissons. 155 C’est une autre question dont la solution n’intéresse en rien la détermination que je viens de donner : car sur ce point, je vais jusqu’à dire que ces parties auroient une très-grande influence sur l'organe de l’audition, que les osselets décrits par Weber n’en seroient pas moins très-certainement des parties dépendantes du système vertébral, de façon que la détermination des pièces de l’opercule düt toujours rester acquise aux osselets de l’ouie. Présentement, que sont toutes les pièces de Weber, eu égard à mes principes sur la Vertèbre en général? Il est facile de répondre, puisque, ayant ramené ces pièces à celles dont se compose la vertèbre la plus compliquée, à celles de l'un des segmens qui se prolongent dans la nageoire dorsale, je u’ai plus qu'une synonymie à produire. Or, je la donne comme il suit. Le milieu vertébral se compose du corps principal ne. 3, ou du cycléal. — Les quatre osselets supérieurs ou ceux du système médullaire sont 10. les deux parties de los en V ren- versé n°. 4 ( processus spinosus, seu arcus vertebræ ), que cité , auroiten partie connu le mécanisme. J'aurai occasion de nommer souvent ces pièces au fur et à mesure que j’en exposerai l’usage ; etalors ne pouvant les embrasser sous les noms de Weber , noms que portent et que devront toujours porter les pièces de l’opercule, j”y suppléerai par les dénominations suivantes: rnitral, claval, fulcral, . janual et claustral. Petit (Mém. de l’Ac. des sciences , ann. 17933) avoit déjà nom- mé mitral les côtes de la troisième vertebre, donnant attache à la vessie ; puis nous avons appellé claval la deuxième côte, c'est-à-dire, le #alleus de Weber, d’après sa forme en petite massue; et fulcral la premiere côte ou l’incus, laquelle oscille sur une de ses extrémités, et sert de support au tendon commun : ‘quant aux deux autres noms, janual, porte ou opercule, pour le prétendu stapés, et claustral, dérivé du mot même adopté par Weber, ils rappellent à l’esprit l’usage des pièces. 20 * 196 OSsELETS DE L’OUIE je connois sous le nom de périaux ; et 20. l’apophyse tutrice est le no. 5, notre ex-épral, et le rayon le n°. 6, ou notre pro- . épial. — Les quatre osselets inférieurs ou ceux du système sanguin , se retrouvent de même, savoir : 1°. dans les deux apôphyses transverses, n°. 2, les paraaux, et dans les deux côtes n°. 1, ou les cataaux. La conséquence de ce qui précède est que Weber auroit cédé trop facilement à une idée, d’ailleurs séduisante , quand il a transposé les noms de n7arteau, d’enclume et d’étrier à des pièces placées hors le crâne et sur les flancs des trois premières vertèbres : son échafaudage sur cela se réduit donc à un sentiment, à une opinion. Voilà dévoilé tout le mystère qu’on m’avoit opposé pour frapper de néant une détermination qui est la base, et comme l’arc-boutant de tous mes travaux sur l’organisation des poissons. Voilà donc ce que sont les petits osselets découverts par Weber. Ainsi, on ne devra plus les nommer "narteau, enclume et étrier (1); et, je le répète, mon ancienne déter- mination, si d’ailleurs elle est fondée sur des motifs avérés, peut et doit rester acquise aux os de l’opercule. M. Van der Hoeven, qui a publié en latin une thèse très- étendue et très-lumineuse sur le squelette des poissons (2), s’est toutefois, de même que le Bulletin des Sciences, pro- noncé pour l’opinion de M. Weber. « Les osselets le l’ouie, (1) Ces noms, que je propose de remplacer par Malléal, Incéal et Stapéal, conviennent exclusivement à l’Inter-opercule, au Sub-opercule et à l’Opercule proprement dit. (2) Dissertatio philosophica inauguralis de scezero riscrum. Opuscule de 11e pages , in-8. 1822, à Leyde, chez Hardingh. : CHEZ LES Poissons. 155 » dit-il, étant trouvés chez: quelques poissons avec les carac- » tères ordinaires de forme, de grandeur et d’usage, il n’y » a plus à les chercher dans l’opercule. » Ce jeune et discret auteur s’interdit le champ des hypothèses, et il s’applaudit d’avoir à s’en tenir, au sujet de l’opercule, aux dénomina- tions imaginées et adoptées par M. Cuvier, qui sont : l’oper- cule, l'inter-opercule et le sub-opercule. On ne pouvoit sans doute se placer sousune égide plusrespec- table ; mais c’est, ceme semble, dela prudence dansun moment inopportun. Car M. Cuvier n’a jamais prétendu exclure tout essai de détermination des pièces de l’opercule, et il auroit au contraire donné à l’un de ces essais (1) l’appui de son assentiment. Mais les noms d'opercule, de sub-opercule, et d'erter-opercule avoient plus anciennement été imaginés par lui, en raison du besoin qu’en avoit l'ichthyologie. Ces pièces font partie de l'extérieur des poissons et fournissent d’excellens caractères pour la distinction des familles. Il étoit donc utile, en attendant que la science eût saisi d’une ma- nière incontestable les rapports des pièces de l'opercule, de les nommer isolément : il n'y avoit que ce moyen de les adapter aux usages secondaires de la zoologie. Maintenant, sur le fond de la question, qui offroit le pro- blème le plus élevé et le plus important à résoudre dans l'état présent de nos connoïssances, je remarquerai que M. Van der Hoeven n’a eu, pour se refuser à croire aux apalogies des pièces de l’opercule, comme je les ai présen- (1) Analyse des travaux de l’Institut pour la partie des sciences physiques, an née 1817. 158 OSsSELETS DE L'OUIE tées, d’autres motifs que la prétendue découverte de M. Weber. Ë Or, on a vu plus haut que cette découverte, sous le point . dervüe des analogies contestées, se réduit à une opinion; et J'ajouterai, pour placer ces débats sous leur véritable jour, en tant qu'ils se réduisent à une lutte de dissentimens per- sonnels, j’ajouterai, dis-je, qu'il est d’autres suffrages ba- lançant ceux de MM. Weber et Van der Hoeven; d'abord celui même de M. Cuvier (Analyse de 1817), et puis, le témoignage de M. Oken, s’expliquant comme il suit, en pleine connoïssance, et mème à cause de la connoïssance qu'ilavoit des opinions de M. Weber. « Le véritablé opercule, à dit M, Oken (1), aboutissant » au mastoide, ne peut donc représenter que les osselets de : » l'ouie; ainsi l'idée de M. Geoffroy-Saint-Hilaire doit être » approuvée. L'opercule est l'étrier, le sub-opercule l'ez- »_clume, et linter-opercule le r2arteau (2). » (1) Esquissel ‘du système d'anatomie , de physiologie et d’histoire naturelle. Paris, 1822, chez Béchet jeune. ; : (2) Il y a lang-lemps que j'ai indiqué une rectification de mon ouvrage dans le sens de la proposition avancée par Oken : en effet, une fracture survenue à l’une des pièces ayant servi demodele aux figures 8 et 12 de la planche première de ma Philosophie anatomique tm’avoit fait croire à l'existence de deux pièces ou de deux sub-opercules : je les aï notées let e ; mais il n’en est rien. Je rappellerai à cette occasion que j'ai, dans ce recueil, tome 9, pl. 6,fg. 7 et8, donné sans explication, les pieces de l’ailetemporale du brochet ét du mérou. Ces représentations attendoient un mémoire que je me proposois d'écrire. Mais depuis, mon cadre s’est étendu à toute la tête; question importante, sur laquelle je présenterai incessamment un travail fort complet. Voici'en ättendant une courte explication de ces dessins ; #07-ez tome 0, pl. 6. Les os de l’oreille ne se sont pas seuls agrandis chez les poissons pour y devenir les os- CHEZ LES Potssons. 159 Nous appuierons le sentiment d’Oken de cet autre de M. le docteur Serres, témoignage non moins réfléchi et non moins recommandable par l’éminent savoir et la graide cé- lébrité de son auteur. « Mais quel est dans la tête des poissons l'appareil qui » correspond aux osselets de l’ouïe ? L’anatomie comparée a » cherché long-temps la szgrification des os de Popercule ? » Ilne falloit rien moins que les principes fermes et généraux selets de l’opercule ; le cadre du tympan s’y est accru dans la même raison. M. Serres a démontré (dans ses Lois de Postéologie, encore inédites) , que le cadre du tym- pan étoit chez l’homme primitivement séparé en deux pièces, l’une courbée en demi-cercle, et l’autre formant une grosse tubérosité. C’est dans l’ordre de cette séparation toujours persistante, que ces os existent chez les poissons : l’os en demi- cercle, fig. 7 et8, lett.p, ou le préopercule de M. Cuvier, retient le nom de tympanal, et j'ai donné à la seconde piece, lett. r, celui de serrial, du nom de l’auteur de la découverte. La lett. s indique le s#lhyal. M. Cuvier a donné la dé- termination des deux pieces u et d, la première correspondant à l’apophyse pté- rygoïde externe et la seconde à l’apophyse ptérygoide interne : j’appelle celle-là adgustal et celle-ci hérisséal. Restent deux pièces # et c : elles sont analogues, savoir; l’adorbital t à la portion orbitaire du maxillaire supérieur chez l’homme, et le cotyléal c à l’une des parties du rocher ou de la caisse auditive. On les avoit nommées dans d’autres essais de détermination jugal et temporal: mais ces os sont tres-certainement au-dessus et derrière l'œil. Je ne puis m’étendre aujourd’hui davantage sur ces faits d’un grand intérêt ; mais j'y reviendrai trés-incessamment. L'application de ces idées aux oiseaux est simple , etelle sera comprise facile- ment par les lecteurs de cet ouvrage, s'ils veulent prendre la peine de consulter la première série, celle des Annales, tome 10, pl. 27. J’y montre, fig. 14, sous l’indication des lett. C et M, tout le côté gauche des parties mandibulaires. Cette ligne est reproduite, fig. 9 et 10, en trois pièces, savoir, fig. 9, M', qui est le co- tyléal , et M", l’adgustal; puis, fig. 10, C, que j'ai donné alors pour un seul os, le maxillaire supérieur : mais cet os est tres-certainement aussi composé de deux, l'un en devant, le maxillaire, sans la portion orbitaire , et un autre en arriere, réduit à un très-petit filet osseux, qui est cette portion ou l’adorbital. Le jugal et le temporal sont aussi, chez les oiseaux, placés ailleurs et supérieurement. 160 OSSELETS DE .L'OUIE CHEZ LES Poissons. de l'anatomie philosophique, pour reconnoître dans ces pièces les analogues des osselets de l’ouïe des trois classes supérieures. Les opercules sont les agens mécaniques de la respiration des poissons; les muscles qui font mouvoir ces pièces reçoivent leurs nerfs de la portion dure de la sep- tième paire. Voilà donc le nerf facial devenu nerf respira- teur chez les poissons. Je ne doute pas qu’en pratiquant la section de ce nerf, on ne paralyse l’action de l’opercule, ( Cette expérience ayant été faite depuis, l’opercule a cessé de battre, et une asphixie dépendante de la para- lysie des muscles, a causé la mort du sujet. )... Si d’une part la découverte de M, Geoffroy-Saint-Hilaire confirme les idées physiologiques de Charles Bell, de l’autre les vues physiologiques de ce savant donnent à la détermination des os de l’opercule une certitude qui ne sauroit être con- testée (1). » J’aurois pu écrire cette réplique dès 1820, époque à la- quelle parut l’ouvrage De aure animalium aquatilium ; mais j'ai cru devoir attendre que d’autres objections vinssent se réunir à celles de M. Weber : il n’y a effectivement que les doctrines qui ont été controversées et qui sortent toute- fois victorieuses de la lutte, que l’on puisse considérer comme faisant décidément partie du domaine de la science. (x) SERRES, Anatomie comparée du cerveau, t. I, page 455. Paris, 1824, chez Gabon, libraire-éditeur, rue de l'Ecole de Médecine. 161 MÉMOIRE SUR UNE PLANTATION A TRAVERS DES ARBRES, dite GREFFE DES CHARLATANS. PAR M. A. THOUIN. Pa , le Naturaliste, dit : « J’ai vu, auprès de la campagne » de Tullius à Tibur, un arbre greffé de toutes les manières » possibles, et chargé de toutes sortes de fruits; une branche » étoit couverte de noix, une autre de baies (cerises, pru- » nes, etc.), une autre de raisins, une autre de figues, une » autre de poires, une autre de grenades; d’autres enfin de » toutes les sortes de pommes : à la vérité la vie de cet arbre » fut de peu de durée (1). » | Un savant aussi distingué que Pline, qui a recueilli dans les diverses parties du monde, et publié toutes les connois- sances acquises de son temps dans les arts et dans les sciences, a dû nécessairement être cru sur parole, quoiqu'il n’indiquât aucun des procédés mis en usage pour rendre raison d’un tel prodige. Il dit bien «7 arbre greffé de toutes les manières possibles; mais un historien de la nature entière, qui avoit G) Pline, liv. 17, chap. 26. Méin. du Muséum. t. 11. « 21 162 GREFFE DES CHARLATANS. dû passer une partie de sa vie à étudier les auteurs qui l’avoient précédé, et qui n’avoit pu donner par conséquent que peu de temps à l'observation des procédés de culture, pouvoit bien ne pas être en état de juger si les branches chargées de fruits si différens étoient réellement greffées sur le trone d’où elles sortoient. Il est certain que le plus habile cultivateur d’à présent auroit souvent beaucoup de peine à distinguer si une branche qui sort d’un tronc y est greffée ou implantée. On sait que les anciens ne connoïssoient que cinq ma- nières de greffer : en fente, en couronne, en écusson, en approche, et par térébration ou perforation. Les procédés employés pour la réussite de ces diverses greffes sont parfai- tement connus de tous les cultivateurs de nos jours; mais aucun de ces procédés ne peut donner les résultats que Pline annonce avoir vus dans la campagne de Tullius. On dit que les mêmes moyens peuvent donner des résultats différens en rai- son de la diversité des climats. La nature des sols, les situa- tions, les expositions, la culture et les climats, apportent certainement des changemens dans la naturalisation, la crois- sance, la vigueur, la fructification plus ou moins précoce, et surtout dans les qualités des fruits. Mais jusqu’à présent ces changemens n’ont été remarqués que sur les dimensions des parties, et sur la longévité des végétaux. On a reconnu que, en général, les plantes de climats chauds, transportées dans les pays froids, lorsqu'elles n’étoient pas tuées par le changement de température, diminuoient de dimensions tant en élévation qu’en largeur et en épaisseur; qu’au contraire les végétaux transplantés des régions froides sous les zones. GREFFE DES CHARLATANS. 103 chaudes, prenoient plus d’accroissement dans toutes leurs parties, excepté dans celles de leur fructification (1), qui le plus souvent avortent, ou du moins sont détériorées et ap- pauvries; mais aucun fait ne démontre que la différence de climat apporte des changemens dans les parties internes des végétaux. Si les climats avoient cette propriété, ils auroïent celle de produire des espèces qui n’ont point encore existé; car il est certain que de l’organisation intérieure dépendent les formes extérieures, et que celles-ci, modifiées souvent relativement à leurs dimensions, gardent toujours entr’elles la même disposition sous tous les autres rapports. La greffe ne peut pas avoir plus d'influence sur les végétaux, puisqu’elle n'a pour objet que de mettre en contact des parties dispo- sées, par la conformité de leurs organes internes, à s'unir ensemble et à vivre des fluides qui leur sont fournis par les racines de l’un des individus. Il faut donc chercher dans d’autres procédés de culture l’explication du fait observé et rapporté par Pline. On voit souvent des plantes et même des arbustes, tels que des epilobiumr, des houblons, des arundo, des parietaria, des clematites, etc., etc. , dont les graines transportées par les vents et jetées sur l’humus que renferment les troncs creux de vieux saules, lèvent, croissent, fleurissent et prospèrent. On trouve quelquefois dans les forêts des arbres dont le corps ligneux décomposé recèle des espèces très-différentes, comme, par exemple, des groseillers, des cerisiers, des pru- niers ; des poiriers, des pommmiers, et même des chènes dont (1) Les vignes , les légumes, les salades, les blés, étc., sont dans ce cas. * 21 164 GREFFE DES CHARLATANS. les semences sont tombées des arbres voisins ou ont été transportées par les oiseaux qui en mangent le fruit, et en rendent les semences avec leurs déjections. Les écureuils et autres aninaux frugivores sont aussi assez souvent, les agens de semblables semis qui ont été et sont encore regardés comme des greffes par plusieurs personnes, dont quelques-unes se sont occupées de culture, et citent ces faits comme des exemples irrécusables , que tous les arbres peu- vent se greffer les uns sur les autres. Quelquefois des arbrisseaux sarmenteux , tels que des chèvrefeuilles, des viormes, entourent les arbres de leurs tiges, les serrent étroitement et finissent par être enveloppés eux-mêmes dans le tronc de ces mêmes arbres. Ce fait est fréquent, surtout dans les zones chaudes, où les arbrisseaux sarmenteux qu’on appelle lianes, sont très-multipliés. Nous avons imité cet accident de lanature dans notre Ecole d'agriculture pratique, non -seulement avec des arbrisseaux sarmenteux, mais avec des arbres forestiers à tiges droites. On peut voir dans cette Ecole deux de ces groupes entre autres, dont les tiges, contournées les unes à côté des autres, s’élèvent en forme de colonne torse, à plus de deux mèêtrés de haut, et sont terminées.par une cime évasée, de laquelle on voit sortir à côté les unes des autres, ici, des branches de syco- more, de mahaleb, de faux-ébéniers et de bignone grim- pante ; là, des rameaux de pêchers, de baguenaudiers et de vigne-vierge. Quoique les tiges de ces groupes ne soient pas encore arrivées au point de remplir tous les vides qu’elles. laissent entre elles, il est beaucoup de gens du monde et des cultivateurs superficiels mème parmi ceux qui ont écrit qui, GREFFE DES CHARLATANS. 165 irompés par l'apparence, croient que chacune de ces branches à feuillages si différens et de familles naturelles si éloignées sont autant de greffes opérées sur le même tronc (1). Il se pourroit qu’une aggrégation de cette nature eût occasionné l’étonnement de Pline, et qu'il l’eût rangée, par erreur, dans le genre des greffes. Il est une sorte de plantation en usage dans quelques parties de l'Italie qui semble encore plus propre à tromper non-seulement les hommes qui n’ont que des connois- sances superficielles en culture, mais aussi des cultiva- teurs praticiens; la voici. À Gênes, à Florence, à Venise et autres villes de l'Italie méridionale , quelques jardiniers choisissent un tronc d'oranger vivant dont ils suppriment les branches et qu’ils perforent dans sa longueur jusqu'au- dessous de la région des racines; ensuite ils réunissent de jeunes sujets de jasmins, d’amandier-nain à fleur double, de figuiers, de rosiers, de myrtes, et autres arbustes d’orne- ment, soit deux à deux, soit en plus grand nombre, suivant la capacité de l’ouverture de l’oranger et leur fantaisie. Ils plantent ces végétaux ou dans un vase ou en pleine terre, selon le climat, et font passer les jeunes pieds du groupe à travers la tige de l’arbre perforé, de manière qu’elles dé- passent le bord supérieur du tronc de quelques décimètres; enfin ils enterrent les racines de l’oranger jusqu’à leur collet, l’arrosent et le cultivent comme un arbre nouvellement (1) Voyez dans les Annales du Muséum d'histoire naturelle, description de l'École d’agriculture pratique , 6°. mémoire, classe 3°. et genre 3°., t. 16, p. 209 à230 , et 350 à 375, n°. XX, la greffe que nous ayons nommée Greffe Diane. 166 GREFFE DES CHARLATANS. planté. Cet arbre ne manque pas de pousser ainsi que les jeunes végétaux qu'il contient, et cette prétendue greffe si merveilleuse qui dure de dix à quinze ans, est opérée. On sent très-bien qu’une opération aussi extraordinaire a dû trouver place dans notre Ecole d’agriculture, où lon a pour but de réunir toutes les pratiques connues. Celle-ci méritoit d'autant plus d'y figurer qu’elle peut servir à ex- pliquer un fait rapporté, commenté, adopté et rejeté par un grand nombre d’écrivains et de cultivateurs, depuis dix-huit cents ans. Nous allons décrire les procédés que nos avons employés et faire connoître les résultats que nous avons obtenus. Sujet. Nous avons choisi un tilleul de Hollande dont le tronc À, fig. 1, avoit trois décimètres de diamètre. Il a été arraché avec une partie de ses racines et de son chevelu, et coupé horizontalement à la hauteur d’un mètre. Les racines ont été taillées à cinq décimètres tout autour de la souche, le chevelu a été ébarbé ou même supprimé dans les endroits où il sé trouvoit trop rapproché. Avec une forte tarrière de charrôn on a percé parle centre, le troncet la culasse jusqu'au- dessous des dernières grosses racines" ( voy. fig. 2 ), et enfin au moyen de ciseaux de menuisier, à fer droit où courbe, on a paré les plaies de l’intérieur du trone et de son orifice pour enlever la couche de bois échauffé ou gâté par les frotte- mens multipliés de la scie où de la tarrière dont on avoit fait usage. Choix des jeunes arbres. Ils étoient au nombre de sept (voy. a à, fig. 1 ), de genres et de familles différentes, pro- venus de semences, âgés de deux à quatre ans, bien enra- Jon V2: | TR = GREFFE DES CHARLATANS. a Res —— ES < MRrane 3 # WA GREFFE DES CHARLATANS. 167 cinés et ayant des tiges droites d'environ un mètre deux tiers de haut. Après avoir retranché des racines celles qui étoient ou trop longues ou trop viciées, on a enlevé à rez tige toutes les branches et rameaux qui s'y trouvoient, et on a coupé leur flèche ( 3, 8,8, fig. 2 ). Plantation. Elle eut lieu le 15 mars 1813, dans une fosse circulaire d'environ un mètre 3 décimètres de diamètre; on disposa au milieu de cette fosse, les racines des jeunes arbres, de manière que les plus fortes et les plus longues se trouvassent dans une position excentrique qui leur permit de s'étendre facilement en suivant chacune une direction différente : une très-légère couche de terre fut jetée sur ces racines pour les maintenir à leur place, seulement on eut soin de lier en faisceau lâche les tiges des jeunes sujets, au moyen de quelques at- taches de foible jonc afin de pouvoir les introduire tous dansle tilleul : ce qui fut fait par trois hommes, dont deux élevèrent au-dessus des arbres ainsi réunis, le tronc perforé danslequel le troisième fit pénétrer l'extrémité supérieure du groupe. À me- sure que les tiges des jeunes arbres s’introduisoient, le tronc descendoit vers le fond de la fosse; les racines y étant arri- vées, on le plaça verticalement de manière que les tiges des - individus réunis se trouvassent au centre de la perforation. On garnit ensuite de terre sèche et fine les interstices qui se trouvoient entre les racines, et on les en couvrit jusqu’à trois décimètres au-dessus du collet du ulleul. Un arrosement copieux termina la plantation. Appareil. Ymmédiatement après la plantation, les tiges des jeunes arbres furent maintenues à égale distance les unes des autres à l’orifice du tronc du tilleul au moyen de bour- 168 GREFFE DES CHARLATANS. relets de mousse; un cerceau d’un diamètre un peu plus grand que celui du tronc (fig. r ) fut placé au milieu des tiges supérieures des jeunes arbres, afin de les maintenir et leur faire prendre la forme évasée préférable à toutes les autres pour empêcher la confusion des branches, les faire jouir de l’air et de la lumière nécessaire à leur végétation et à la qualité de leurs fruits. Culture. Elle s'est réduite à quelques arrosemens d’eau bourbeuse, donnés dans les temps de sécheresse, de chaleur et de hâle, après avoir pratiqué autour du vieux tronc quatre ou cinq trous qui permissent à l’eau et à l'air d’arriver jus- qu'aux racines des jeunes arbres pour les alimenter; à quel- ques sarclages dans l'emplacement occupé par le groupe et les racines pour empêcher les plantes adventices d’absorber l’humus de la terre, et enfin à quelques binages à la surface du terrain de la plantation pour le rendre plus propre à lais- ser échapper les fluides qui pouvoient s’y trouver en excès et à se laisser pénétrer de ceux de l'atmosphère. T'aille. On conçoit que pour que sept arbres puissent vivre, se maintenir et fructifier dans un espace aussi rétréci pendant quelques lustres au moins, il faut équilibrer la croissance des individus afin que les plus vigoureux, les plus voraces, ne s'emparent pas de la portion de nourriture et de place affectée aux plus foibles ; pour remplir ce but il étoit nécessaire de supprimer aux premiers quelques-uns de leurs organes aériens, comme de petites branches, des ra- meaux, des ramilles, des bourgeons ou des feuilles seulement. C’est ce qui a été fait à plusieurs individus, en proportion de leur croissance et de leur vigueur pendant le courant de la GREFFE DES CHARLATANS. 169 végétation. Un autre moyen d'arriver au même but a aussi été employé : on a courbé les tiges trop fortes à différens degrés afin que les fluides séveux y circulant avec moins de facilité, leur croissance füt moins rapide. D’après un prin- cipe semblable on a, au contraire, dirigé verticalement les tiges des individus les plus foibles et on n’a retranché aucune de leurs parties aériennes. La taille d'hiver étant basée sur d’autres principes, on a taillé court les individus les plus foibles, et plus long les sujets les plus forts, afin que la sève amassée, pendant l'année précédente, par les premiers, n'ayant à alimenter que deux ou trois bourgeons, s’y portât avec affluence et _les rendit forts et vigoureux; tandis que dans les seconds, ayant à développer six, huit, douze, quinze gemma et plus, suivant leur force, et à en nourrir les bourgeons, cette même sève les fit croître moins rapidement, et par ce moyen diminuât leur vigueur individuelle. C’est ainsi qu'ont été et que seront conduits les arbres de ce groupe jusqu’à l’époque à laquelle ils fructifieront. Alors la taille sera modifiée selon les circonstances. Le tronc de tilleul, quoique perforé d’outre en outre, n’a pas laissé que de pousser un grand nombre de bourgeons de toute sa surface. On les a laissés croitre la première année ; la seconde et les suivantes on a écourté quelques rameaux qui se confondoient avec ceux des jeunes arbres. Résultats acquis. Parmi les arbres que contenoit le tilleul, quelques-uns ont d’abord poussé foiblement, mais peu d’an- nées après la plantation ils ont pris de l'accroissement d’une manière remarquable, leurs tiges ont rempli entièrement la Mém. du Muséum. x. 11. 22 170 GREFFE DES CHARLATANS. capacité du tronc perforé, la sève descendante ne pouvant plus retourner en totalité jusqu'aux racines par les canaux comprimés des jeunes individus, a formé un bourrelet à la partie supérieure de la vieille souche. Déjà ce bourrelet com- mençoit à déborder de chaque côté du tilleul et il avoit fait disparoître jusqu'aux moindres traces de la cavité dont il re- couvroit l’orifice, lorsque l’on fut obligé de supprimer le groupe, parce que ses tiges avoient pris à leur partie su- périeure, un accroissement qui les rendoit nuisibles aux cul- tures voisines. Il est à peu près certain que, si emplacement étroit de notre Ecole eût permis de continuer l’expérience, le bourrelet seroit devenu de plus en plus considérable; la sève auroit continué de monter des racines vers les tiges jusqu'à ce que le corps ligneux fût devenu totalement inerte (1); mais trouvant pour descendre un obstacle de plus en plus puissant, elle auroiït déterminé, dans la partie supérieure de chacun des jeunes individus, la formation de boutons à fruit dont le nombre croissant annuellement outre mesure auroit bientôt annoncé et occasionné la décrépitude des arbres. Dans une autre partie du jardin nous avons opéré, d’une manière un peu différente, une autre plantation du même genre, afin de pouvoir obtenir des résultats positifs en laissant l'expérience arriver à sa fin. Dans cet exemple, la souche qui contient les jeunes individus a été coupée à environ deux l (1) On sait que la sève monte par le canal médullaire et les vaisseaux qui se trouvent dans la partie ligneuse des jeunes arbres, et qu’elle descend au contraire par les canaux répandus à la surface externe de l’aubier et interne de l'écorce. GREFFE DES CHARLATANS. 171 mètres de haut et perforée sur place. La cavité pratiquée au moyen de la tarrière, n’est descendue que jusqu’à la hauteur du collet de la racine, et l’on a fait à cette même hauteur des trous qui communiquent de l'extérieur du tronc avec la partie creusée. On a introduit les jeunes sujets par ces ouvertures qui ont ensuite été recouvertes par le sol. Les mêmes résultats que nous avions obtenus dans la première expérience commencent à se manifester dans celle-ci. Résumé. N'est-on pas autorisé à croire, d’après ce qui précède, que le fait observé et décrit par Plirie ne peut être le résultat de l’art de la greffe? Il faut donc chercher dans d’autres procédés de culture lexplication de ce phénomène. La voie des semis, comme nous avons vu, peut produire des effets surprenans, mais elle est longue et insuflisante pour faire sortir du même tronc des branches dont chacune porte des fruits si différens. Le procédé de plantation paroît bien plus facile à trouver et beaucoup plus expéditif. La greffe Diane dont il a été ques- tion ci-dessus, dans la note de la page 165, pourroit se rap- procher de la prétendue greffe vue à Tibur. Elle auroit pu causer l'erreur d’un écrivain peu observateur, mais Pline ne s'y seroit certainement pas trompé. La plantation à travers un tronc d’arbre pouvoit seule produire une méprise semblable de la part de ce grand his- torien de la nature. Mais étoit-elle connue des Romains ? cela est très-probable. Les milliers d'esclaves nés dans tous les pays, qui avoient vu la nature de près et avoient ren- contré dans leurs forêts des modèles de cette plantation, n’auroient-ils pas pu chercher à limiter chez un maître fas- 22. 172 GREFFE DES CHARLATANS. tueux qui attachoit du prix aux choses extraordinaires, et dont ils vouloient captiver la bienveillance. Les habitans de diverses parties de l'Italie connoïssent cette pratique, et ce- pendant ils n’inventent pas en agriculture : on retrouve en- core chez eux presque tous les procédés agricoles décrits par Virgile. N’ont-ils pas pu conserver celui-ci des anciens Romains? Je le croirois d'autant mieux qu’il remplit si par- faitement les conditions indiquées par Pline dans sa note descriptive, que notre exemple a trompé souvent des culti- vateurs instruits. En voyant pour la première fois sortir d’un tronc, garni de ses rameaux et chargé de ses feuilles, des tiges qui sont implantées d’une manière non équivoque dans sa substance qu’elles recouvrent déjà en partie; en voyant ces arbres réunir en une même cime, des poires, des alises, des noi- settes, des prunes, des nèfles, des pommes et des cerises; quel est l’homme, même le plus instruit en agriculture, qui ne seroit surpris autant que le fut l'écrivain célèbre dont nous combattons ici l’opinion, si l’on pousse la supercherie jusqu’à greffer sur chacun de ces sujets des espèces congé- nères, différentes par la forme et la couleur de leurs fruits et de leur feuillage : un tel arbre deviendra plus merveilleux encore que celui dont a parlé le naturaliste romain, et il sera impossible de découvrir la vérité, à moins de fendre le tronc qui contient un groupe aussi étrange. Conclusion. Entièrement convaincu de l'identité des ré- sultats que nous avons obtenus et de ceux qui ont été ob- servés à Tibur, nous ne balançons pas à nommer dans l'École pratique du Muséum , l'exemple dont nous venons de parler, GREFFE DES CHARLATANS. 179 Plantation à travers un tronc, faussement nommée greffe de Tibur par les charlatans, parce que beaucoup d’entre eux citent le fait rapporté par Pline comme une preuve que l'identité de famille, et par conséquent l’analogie des genres et des espèces, ne contribuent en rien à la réussite des greffes; nous croyons avoir démontré d’une manière sa- tisfaisante dans ce mémoire et en plusieurs autres circons- tances la fausseté d’une pareille assertion. De quelques Espèces de Puoques et des groupes 1e TRES P STOup génériques entre lesquels elles se partagent. PAR M. FRÉDÉRIC CUVIER. L'uvrré de plan d'organisation , dans les différens systèmes de lanimalité, est une des idées les plus grandes et les plus fécondes que l'esprit ait conçu, depuis qu’il cherche à lier par leurs vrais rapports, les êtres vivans qui peuplentnotre globe, depuis qu’il considère l'univers comme l’œuvre d’une puis- sance universelle et d’une intelligence infinie. Aussi ancienne que l’étude de la nature, elle a présidé à tout ce qui s’est fait de grand et de vraiment philosophique dans cette science. C’est, soutenu par elle, qu'Aristote com- posa son traité des animaux; et si, depuis cette époque jusqu’à ces derniers temps, on n’a rien ajouté aux connois- sances qui étoient dues à cet illustre philosophe, si sous ce rapport l'esprit humain est resté stationnaire, c’est que cette idée s’étoit obscurcie, ou avoit tout-à-fait disparu; c’est que notre intelligence n’étoit plus fécondée par elle. Ce n’est que de nos jours qu’elle s’est de nouveau montrée, d’abord plus ou moins obscurément , et enfin plus éclatante qu’elle ne fut jamais. C’est elle qui a inspiré les principes des classifications vaturelles et a déterminé la direction que l'anatomie a prise; c’est-à-dire qui a conduit à rapprocher les êtres vivans, sui- PuoQueEs. 175 vant leurs rapports les plus nombreux et les plus intimes, et à rechercher l’essence des organes ainsi que la cause et les effets de leurs modifications. Linnæus qui en sentit toute la grandeur et toute l'importance, sans pouvoir toujours s’y soumettre, y trouva l'éclat de ses travaux; c’est à elle que les Camper, les Pallas, les Adanson, les Blumenbach, les Her- mann, les Vic-d’Azir, doivent incontestablement une partie du lustre dont ils brillent; et Buffon lui-même n’est jamais plus grand que lorsqu'il ne la repousse point. La science marche aujourd’hui sur les pas de ces hommes illustres; mais à quelle distance elle se trouve du. point où ils lavoient laissée! Il faut chercher avec soin les traces des classifications anciennes pour en retrouver les restes dans les classifications nouvelles ; et l'anatomie s’est élevée à une hauteur que rien, il y a peu d’années, ne permettoit encore de prévoir. La zoologie, considérée sous le point de vue des méthodes ou des rapports qu'ont entre eux les animaux, a donc une marche fixe, une direction invariable : elle tend à réunir les êtres qui font l’objet de ses recherches par les points les plus nombreux, et à les caractériser, à les définir au moyen de propositions plus ou moins générales, c’est-à- dire à s'élever de la considération des êtres particuliers, et de genres en genres, jusqu’àtette idée d’unité philosophique que l'esprit humain peut bien concevoir, mais qu'il ne pourra peut-être jamais démontrer rigoureusement. Cette science, comme toutes les autres sans doute, est bien loin non-seulement du terme vers lequel elle tend, mais encore de celui qu'elle peut justement espérer d’at- teindre. Un grand nombre de ses groupes généraux restent 176 Puoques. isolés, sans liaison avec ceux qui les avoisinent; et, parmi eux, il en est plusieurs dont les parties ne sont point unies aussi intimement qu'elles devroient l’être. Cependant ce n’est que par cette union intime que la nature animée pourra, malgré son étendue , se déployer à nos yeux dans toute sa simplicité. Plusieurs groupes génériques, parmi les mammifères, nous présentent encore des élémens confus, dont les vrais rap- ports ne sont point établis, qui, en un mot, n’ont point les uns avec les autres le degré de ressemblance que nous ren- controns entre les élémens de quelques autres; et de ce nombre est celui qui renferme les Phoques. Les règles de classification adoptées jusqu’à ce jour avoient produit tout ce qui étoit en leur pouvoir de produire danseur applica- tion à ces animaux; mais à mesure que les obstacles se multi- plient, les recherches et les moyens de comparaison aug- mentent, et les principes que nous avons suivis, dans nos mé- moires sur les marmottes, les porc-épics et les écureuils, nous paroissent pouvoir être appliqués avec avantage à ces amphibies carnassiers , qui sont étroitement liés l’un à l’autre par les organes du mouvement, mais qui se partagent en groupes distincts et naturels par d’autres considérations im- portantes, comme la suite de ce travail a pour objet de le montrer. Il y a peu d'années encore, les phoques ne formoient qu'un seul genre dans les méthodes de classification. Vic-d’Azir, mais surtout Péron, réalisant une idée de Buffon, les parta- gèrent en phoques pourvus d’une conque auditive, et en phoques dépourvus de cet organe, sans entrer dans d’autres : PHoques. 197 recherches sur leur constitution et sur leurs rapports (1); et M. de Blainville, adoptant ces deux groupes, tels qu'ils avoient été établis, les subdivisa par la considération des dents incisives. Il est trop évident, dans l’état actuel de nos connoïssances, que la présence ou l'absence d’une conque externe de l'oreille, plus ou moins développée suivant les espèces, ne présentent pas des caractères propres à fonder des divisions naturelles lorsque les animaux ne sont pas au moins, les uns à l'égard des autres, dans les rapports qui unissent entre elles les espèces d’un mème genre. A moins d’une structure com- pliquée, qui fasse supposer à la conque auditive un usage extraordinaire, cet organe n’a d'autre effet que de réunir les sons et de préserver l’entrée du canal auditif de l’intro- duction de corps étrangers. Le premier de ces effets aug- mente en proportion de l'étendue de cette conque; le second peut avoir lieu, même sans elle. Or la conque audi- tive, la plus développée chez les phoques, comparée à celle de plusieurs autres mammifères, paroïît être encore dans un état rudimentaire, et elle ne peut certainement donner à l’ouie de ces animaux, sur ceux qui en sont tout-à-fait pri- vés, qu'un très-foible avantage. Sans doute il peut arriver, il arrive même souvent, qu'un organe peu important en apparence sert, sinon à fonder du moins à caractériser des êtres distingués d’ailleurs de tous les autres par des parties d’un ordre beaucoup plus élevé, (1) Voyages aux Terres australes, t. Il, p. 37. Mém. du Muséum. 1. 11. 23 170 -Proques. mais qui, cachées profondément, ne peuvent être recon- nues que par des moyens anatomiques, c’est-à-dire par la destruction même de ces êtres, qu'il faut cependant pouvoir reconnoître sans les détruire. Alors ces organes superficiels sont des signes, mais des signes naturels, reconnus par l’ob- servation, et auxquels sont attachés intimement, comme choses signifiées, ces parties d’un ordre élevé, et seules vraiment caractéristiques. Sans cette union, ces signes n’au- roient qu'un sens arbitraire, et seroient sans rapport néces- saire avec les autres parties, ce qui est le caractère des mé- thodes artificielles. Or, le mot otarie a été employé dans les deux sens que nous venons d'indiquer. Pour Péron, comme pour Vicq-d’Azir, il n’étoit qu’un signe arbitraire. Mon frère est le premier qui lui ait donné une signification scientifique. Ces considérations, peut-être familières aujourd’hui pour les naturalistes, pouvoient leur être encore étrangères au temps de Buffon. On sait d’ailleurs que cet homme illustre mettoit peu d'importance aux classifications naturelles; mais Péron, travaillant à une autre époque, et même dans un autre esprit, auroit pu sentir que l’indication superficielle de Buffon ne méritoit pas importance qu’il lui a donnée, ou exigeoit de nouvelles recherches. A la vérité il a racheté cette erreur par des travaux qui ont commencé à montrer que ces phoques, rassemblés dans cinq ou six espèces, devoient être en nombre beaucoup plus grand, et pouvoient un jour don- ner lieu à des vues nouvelles et fécondes. C’est ainsi qu’un bon esprit se fait apercevoir, même quand les préventions auxquelles il se livre devroient complétement l’égarer. Les organes auxquels M. de Blainville s’étoit arrêté étoient Puoques. 170 d’une importance bien supérieure à ceux qui servoient de base aux divisions de Péron. Les incisives présentent en effet des caractères qui méritent beaucoup plus de considérations que les oreilles externes ; elles appartiennent à un système d'organes dont l'influence est des plus étendue, et nous les voyons se présenter toujours en même nombre et sous les mêmes formes générales, dans des genres et même des ordres très-naturels; tels sont les singes, les carnassiers, les ron- geurs, les ruminans, etc. Il paroït cependant que cette impor- tance n’est pas sans exception, et que si ces dents sont carac- téristiques pour des animaux chez lesquels elles jouent un rôle nécessaire, elles cessent de l'être au même point chez ceux où leur emploi est plus restreint; tels sont les cheirop- ières, les insectivores, plusieurs pachidermes, etc. Les inci- sives paroissent être dans ce dernier cas pour plusieurs pho- ques : les groupes qu'on obtient par l'application de ce carac- tère ne se forment point tous comme doivent l'être les genres naturels; et en effet dans beaucoup d’espèces ces dents ne sont, en partie du moins, que des dents rudimentaires. Il est cependant à remarquer qu’elles sont en même nombre dans tous les groupes naturels de ces animaux que j’ai été conduit à former. J'ai déja fait connoître, dans la quatrième livraison, page 115 de mon ouvrage sur les dents des mammifères, l'intention où j'étois d'exposer dans un travail particulier les caractères gé- nériques des phoques : on y a vu que ces animaux sont loin d'être tous organisés, sous ce rapport, d’après lemême mode; qu’à cet égard même ils présentent des différences d’un ordre très-élevé , qui annoncent desrelations beaucoup moinsintimes 25 180 Paooques. que celles qu'on leur avoit supposées, et que devoit faire conjecturer la ressemblance de leurs organes du mouvement; en un mot, qu'au lieu de ne former qu'un genre subdivisé par des organes d’un ordre secondaire , ils formoient un ordre des familles de nature assez différente , dans lesquelles ils se grou- poient encore en genres très-naturels et très-distinets ; mais ce n'étoit là, comme je l’annoncois, que les élémens d’un autre travail : en effet les dents mâchelières sont, pour plusieurs pho- ques, ce qu’elles sont pour plusieurs carnassiers, plusieurs in- sectivores, plusieurs rongeurs : quoique les espèces qui nous présentent des molaires semblables ne puissent pas être réunies à des espèces pourvues de mâchelières différentes, elles ne peuvent cependant pas toujours rester unies; car elles forme- roient, dans plusieurs cas, un tout hétérogène et tel que ne doivent point être les groupes génériques, si nous prenons pour type ces genres si naturels qui ont toujours été donnés en exemple comme des modèles à suivre dans la formation des autres genres. Nous devons donc pour cela recourir à d’autres systèmes d’organes, et comme celui des mouvemens ne nous offre que de foibles moyens naturels de distinction, nous prendrons les organes cérébraux et ceux des sens, ou autrement les parties osseuses de la tête, conformément aux règles que nous avons établies dans. notre mémoire sur les marmottes et les spermophiles (Mémoires du Muséum, t. IX, p.297), dont, comme nous venons de le dire, nous avons déjà fait l’application à plusieurs rongeurs (Mém. du Mus. t. IX et X ). Depuis que j'ai publié les dents des phoques, mon frère a été conduit, dans le cinquième volume de ses Recherches Puoques. 181 sur les Ossemens fossiles, à faire une partie du travail que je n’étois proposé, en donnant une description des diverses têtes de phoques de son cabinet : il a même porté ses re- cherches jusqu'aux espèces décrites qui pouvoient se rappor- ter à celles dont il faisoit connoître l’ostéologie; mais le point de vue sous lequel il considéroit ces animaux ne le conduisoit point expressément à les envisager sous leur rapport de clas- sification générique : c'est donc une tâche qui m'est restée, et que, grâce à son travail, je pourrai peut-être remplir d’une manière moins imparfaite que je n’aurois fait sans un te! secours. Les phoques sont, comme on sat, des animaux qui se nourrissent de proie et principalement de poissons, et dont les organes du mouvement ne sont formés que pour la nata- tion : les uns sont pourvus de dents tranchantes et dentelées, ayant plusieurs racines, et qui rappellent, par leurs formes, les fausses molaires des carnassiers; les autres sont pourvus de dents plus ou moins coniques, qui paroissent n’avoir ja- mais qu'une seule racine au moins chez les adultes, et qui, dans quelques espèces, se rapprochent un peu de celles des cétacés. Ces diverses sortes de dents nous présentent six mo- difications principales, auxquelles nous pourrions peut-être . nous bornér pour caractériser les genres que nous devons former; mais lexamen des parties de la tête nous en offre encore de non moins caractéristiques, puisqu'elles peuvent conduire à d’autres inductions relativement aux pen- chans, au naturel; d’ailleurs ces derniers caractères serviront de confirmation aux premiers; et nous retrouvons en eux de nouvelles preuves à la règle que nous avions déja eu occa- 182 Poques. sion plus d’une fois de faire remarquer; c’est que les genres naturels se composent d'espèces dont les dents et les têtes ont une intime ressemblance. Dans nos mémoires précédens nous avons cru qu'il nous suflisoit d'exposer les traits principaux par lesquels se distin- guoient les têtes des animaux que nous avions pour objet de comparer, ces traits ayant des rapports immédiats avec les fonctions des organes qu'ils caractérisoient ; mais les formes des organes peuvent différer à un haut degré, sans que leur influence sur les fonctions soit appréciable dans l’état actuel de nos connoiïssances, et c’est ce qui a lieu peut-être pour plusieurs phoques; c’est pourquoi nous décrirons avec quel- ques détails les principales parties de l’espèce qui fera le type de notre premier groupe, et les parties extérieures surtout; et nous nous bornerons ensuite à montrer les différences que nous trouverons entre elle et les autres : par là on aura en réalité, dans le point de vue sous lequel nous les envisageons, la description comparative de toutes. CarrocépaLe. (Planche 1. ) Le type de notre premier groupe, de celui qui, par l'étendue de la capacité cérébrale, nous porte à le considé- rer comme doué, à-un degré supérieur, de facultés intellec- tuelles , nous est offert par le Phoque commun, Poca vitu- lina, Linn., espèce avec laquelle plusieurs autres paroissent avoir été confondues, mais: qui nous est représentée par le dhoque dont nous avons donné la figure dans la 4re. livrai- son ( mai 1824 ) de notre Histoire naturelle des Mammifères ( édition im-folio ). Paoques. 183 Son système de dentition consiste en six incisives supé- rieures et quatre inférieures, et eu deux canines et dix mà- chelières à chaque mâchoire, mâchelières formées principa- lement d’une pointe moyenne, grande, d’une plus petite an- térieurement , et de deux, également plus petites, postérieu- rement. (Des Dents des Mammifères, ete., p. 116, n°. 36.) La tête du Phoque commun ( n°. r, &,b,c) a sa boîte cé- rébrale bombée sur les côtés, et un peu aplatie à son som- met, et son museau fait à peu près la moitié de sa longueur ; Foccipital s’arrondit pour se porter en avant, et ses crètes ne consistent qu’en de légères rugosités; les pariétaux, un peu aplatis au sommet de la tête, se bombent en s'étendant sur les côtés, et ils s’avancent en une bande étroite, entre les temporaux et les frontaux, de manière à s'unir à l’aile tem- porale du sphénoïde. Les temporaux, par leur suture écail- leuse, s'unissent avec les pariétaux en suivant une ligne courbe ; leur apophyse zygomatique se prolonge de manière > constituer la moitié de l’arcade, et elle se relève à son extrémité antérieure pour former, avec le jugal, l’apo- physe post-orbitaire inférieure, en remplissant une échan- crure à angle droit de ce dernier. Le basilaire et le sphé- noïde postérieurs sont bombés à leur point de réunion; le premier, dans les jeunes individus, n’est point entièrement fermé à sa partie postérieure et moyenne, où l’on voit un trou recouvert d’une membrane; l'ossification de cette partie n’est complète que dans les vieux. Ge sphénoïde se termine en avant par trois lignes; deux obliques sur les côtés qui viennent du trou sphéno - orbitaire, en se dirigeant en ar- rière, et une moyenne, droite, qui réunit l'extrémité 184 Poques. postérieure des deux premières. Les caisses sont sphériques ét volumineuses ; le trou sphéno-orbitaire est remarquable par sa grandeur. Le sphénoïde antérieur en dessous est très- découvert par les palatins, et paroïît se prolonger en une apophyse étroite antérieurement, parce que les deux ailes ostérieures du vomer recouvrent ses côtés. Les apophyses térygoides ont la figure d’un carré long, plus large à son ex- rémité antérieure qu’à l’autre ;ilssont , par leur bord externe, : peu près sur la même ligne que les palatins; leurs apo- physes tuberculeuses interceptent un espace beaucoup plus étroit que celui qui est renfermé entre les dernières mä- chelières, et cette apophyse partage à peu près en deux par- ties égales l’intervalle qui sépare les caisses de la dernière mächelière. Les palatins se terminent antérieurement dans le palais, vis-à-vis des dernières mächelières, par une ligne à peu près droite, qui se reploie en arrière sur les côtés et leurs bords postérieurs forment un angle droit; leur prolon- longement ptérygoïdien esthorizontal, sur la même ligne que le palais, et il vient se terminer à la base de l’aile temporale. Les frontaux se rétrécissent beaucoup, et assez subite- ment, entre les orbites, et ils sont dépourvus d’apophyse post- orbitaire; les os du nez sont, à peu de chose près, sur la ligne que ceux du front; ils ne dépassent les maxillaires que par une pointe allongée de leur bord externe, et une autre pointe de leur partie moyenne, mais beaucoup plus petite que la première: cette disposition résulte de ce que chacun de ces os est fourchu, et que leurs pointes internes, un peu plus petites que les externes, se réunissent sur la ligne moyenne, Ce que les maxillaires présentent de plus remar- PHoqQues. 185 quable est leur convexité en avant de leur apophyse zygo- matique ; ils forment une petite apophyse au bord de l'orbite, au point où ils se réunissent avec les frontaux, de sorte que ces derniers participent à la formation de cette apophyse, et ils embrassent, dans le palais, la moitié des palatins. Les intermaxillaires se prolongent en une queue “étroite jusqu’auprès des nasaux, sans toutefois pénétrer entre eux et les maxillaires. Dans l’intérieur de l'orbite est un vide recouvert d’une membrane, qui vient de ce que les maxil- laires, les frontaux et les palatins ne se réunissent pas en ce point, ce qui avoit fait penser que le lacrymal, qui ne se trouve pas,étoit remplacé par cette membrane. Le trou sphéno- palatin est remarquable par sa grandeur. Enfin les cornets ont une étendue et un développement qui doit donner à ces animaux une faculté olfactive portée au plus haut degré. Ce genre renferme plusieurs espèces très-voisines l’une de l’autre, dont quelques-unes sont originaires de nos côtes : mon frère en compte six, et il en donne les caractères dans ses Æecherches sur les Ossemens fossiles, page 200 et suivantes; et parmi elles s’en trouvent deux que nous avons vues vivantes, et que nous avons fait figurer dans notre ouvrage sur les Mammifères ( livraison IXe.), sous le nom impropre de Phoques communs. Je les désignai : ainsi, dans la crainte de transformer en espèces de simples variétés d'âge, crainte fondée sur le peu de connoiïssances qu'on avoit des Phoques, sur l’usage où l’on étoit généra- lement de considérer comme des Phoques communs tous les animaux de cette famille qui se prenoient sur nos côtes, et surtout sur ce qu'avoient appris aux naturalistes, Egède, Mém. du Muséum , 1. 11. 24 186 ; Proques. Lepechin, Fabricius, des grands changemens de couleurs que présentent ces animaux en passant du jeune âge à l’âge adulte, et de celui-ci à la vieillesse. Les connoïssances acquises aujourd'hui ne changent pas beaucoup les idées qui étoient nées des observations de ces savans; cependant il est permis de présumer que les variations des couleurs que le veau marin éprouve à mesure qu'il se développe, ne se rapportent point aux caractères des deux phoques que nous avons confondus avec lui, et qui, conséquemment, doivent recevoir des dénominations particulières. L'individu, qui est d’un jaunâtre uniforme, avec un demi collier en forme de croissant sur le cou, paroït, à mon frère, appartenir à l'es- pèce que Lepechin a nommée Leporina. Quant à celle dont le pelage est marqué de lignes tortueuses d’un gris jaunâtre sur un fond noirâtre, n'ayant encore recu aucun nom, je pro- poserai pour elle celui de Drscolor. Je donnerai à ce premier groupe générique le nom de Callocéphale , qui signifie belle tête. C’est à lui que je rapporterai encore trois espèces de pho- ques qui se distinguent par des caractères fort remarquables, et peut-être suffisans pour en faire des types de groupes particuliers; mais les Phoques sont, en général, des animaux si peu connus, que ce qui conviendroit pour des animaux mieux étudiés où plus voisins de ceux qui l'ont été, pour- roit ne pas convenir pour eux ; du moinsil est bon d’en dou- ter jusqu’à ce que des observations exactes aient bien éclairci cette question : aussi, dans l'incertitude, je me bornerai à rapporter les traits principaux de ces callocéphales anomaux. Le premier ( n°. 2, d,e,f) est le Phoca Groenlendica PHoqQues. 187 de Fabricius, Oceania de Lepechin; nous en devons la con- noissance à M. Reinhardt, de Copenhague; il en a envoyé des individus de tout âge à mon frère qui veut bien me per- mettre d’en faire usage. Ce phoque se fait remarquer, com- parativement au groupe auquel nous le rattachons, par des mâchelières plus petites, plus écartées l’une de l’autre, et qui n’ont qu'un seul petit tubereule en avant ou en arrière du grand, aux mâchelières supérieures, et un en avant et deux en arrière aux mâchelières inférieures : leur museau est encore plus développé, aux dépens de la boîte cérébrale, que celui du Phoque commun. Cette boite est non-seulement aplatie, mais un peu déprimée en dessus à sa partie antérieure; et le cerveau n’est en rapport qu'avec un peu moins de la moitié des os du front: le sphénoïde antérieur, dans les plus jeunes individus, se confond déjà avec le vomer. Les crêtes occipitales sont saillantes, épaisses à leur partie moyenne, et elles s’avancent, vers le sommet de la tête, presque jusqu’au milieu des pariétaux, où elles se réunissent en formant une ligne courbe; etle trou sphéno-orbitaire, très- petit, ne se présente que comme une échancrure: la ligne qui réunit ce sphénoïde au postérieur est à peu près droite: le ba- silaire est percé d’un grand trou à sa partie postérieure, même dans les individus les plus vieux. Les os du front se rétrécissent, plus que nous ne l'avons encore vu, entre les orbites, et ils sont plus allongés; les maxil- laires, fort allongés aussi en avant, sont très-élevés au dessus de leur apophyse zygomatique, et nous trouvons le tuber- cule du bord intérieur de l’orbite en avant du point de réunion du maxillaire avec le frontal. Dans l'orbite, ces deux 2 188 Paoques. os se réunissent tout-à-fait au palatin et ne laissent point de vide recouvert d’une membrane, comme nous l'avons vu chez le veau marin : ainsi ces animaux paroissent manquer bien réellement d’os lacrymaux. Les intermaxillaires, qui suivent en avant le prolongement des maxillaires, s’avancent entre ces os et ceux du nez jusqu'à près de la moitié de la longueur de ceux-ci. Les palatins sont terminés à leurs deux extrémités par des lignes courbes, et ils se réunissent aux maxillaires vis-à-vis de la dernière mâchelière. Les apophyses ptérygoïdes sont larges et courtes, sur une ligne plus élevée que celle des palatins, et leurs apophyses tuberculeuses dé- passent un peu ceux-ci, et interceptent un espace presque aussi large que les palatins, vers les dernières dents; les pro- longemens ptérygoïdiens des palatins se relèvent comme les apophyses ptérygoïdes. Les cornets du nez, à cause de la saillie des maxillaires, sont peut-être encore plus dévelop- pés que nous ne les avons vus jusqu’à présent. J’ai sous les yeux une tête de mâle adulte, une tête de femelle également adulte, et une tête de jeune qui ne pré- sentent aucune différence essentielle. Les sutures des unes sont seulement un peu plus effacées que celles des autres. C’est à cette espèce qu'il faut rapporter, suivant mon frère, la tête publiée par M. Everard Home, planche 28 des Tran- sactions philosophiques de 1822. Mais doit-on y rapporter également un Phoque qui a été envoyé de New-York au Muséum par M. Millebert, qui a beaucoup de rapport, par les couleurs et par les formes de la tête, avec le Phoque du Groenland, mais qui en diffère par un point bien important, par une dernière mâchelière de PHOQUES. 189 plus à la mâchoire supérieure ? C’est une question que Île temps décidera. Nous ferons seulement remarquer que cette tête, qui appartenoit à un très-jeune individu, semble ma- lade dans son ossification. C’est de ce Phoque du Groenland que se rapproche le plus une autre espèce bien distincte , le Phoca hispida (nc. 3, g, k, t), dont mon frère possède aussi deux têtes, qu'il doit également à M. Reinhardt, et qui ont des mâcheliéres un peu plus simples que celles du Phoque commun, une tête plus déprimée en dessus et des intermaxillaires qui s’avancent entre les maxillaires et les nasaux jusqu’à un tiers de la lon- gueur de ceux-ci; mais les maxillaires, les frontaux et les palatins ne sont point unis dans l'orbite, et ces derniers os présentent à l’attache du voile du palais une ligne semblable à celle qu'ils ont chez le Phoque commun. Le troisième callocéphale anomal est le Phoca barbata (n°. 4, &,4, m), qui se distingue du Groenlendica par une capacité cérébrale proportionnellement plus grande, des frontaux plus larges dans la région orbitaire , un orbite beau- coup plus étroit, une arcade zygomatique plus large, et sur- tout des maxillaires beaucoup plus élevés et plus larges. Le trou sous-orbitaire est en avant de l’apophyse dans laquelle il est ouvert au lieu d’être en grande partie recouvert par elle, comme dans les espèces précédentes. Il résulte de cette disposition que le chanfrein de ce phoque est très-arqué, et comme les crêtes occipitales ne sont pas très-marquées, il doit en tirer une physionomie toute particulière. Le basi- laire n’est point percé, et les mâchelières se rapprochent davantage de celles du type générique, du veau marin. 190 PHoqQues, Les animaux que nous venons d'examiner se lient d’une manière sensible par les formes de la tête, malgré les diffé- rences qu'ils nous ont présentées. Ces différences ne pa- roïssent être que des modifications secondaires d’un même système général de parties, et il suffit, pour les bien saisir, de les comparer immédiatement les unes avec les autres. Les ani- maux dont il nous reste à parler, tout en conservantles traits principaux que nous avons signalés, se présentent cependant avec des caractères propres, et lon ne peut pas, sans quel- ques soins, retrouver en eux ceux qui sont cCOMmMuns aux premiers; ils nous offrent donc véritablement un nouveau système général de parties, qui laisse entre eux et le groupe des callocéphales, une lacune sensible. STÉNORHINQUE. ( Planche Il. ) L'espèce qui semble s'éloigner le moins de celles qui vien- nent de nous occuper, a été nommée Leptonyx par M. de Blainville, à cause de la petitesse de ses ongles, et provient, dit-on, des îles Malouines. Elle se fait surtout remarquer par la singulière forme de ses dents toutes crochues. Ses in- cisives sont au nombre de quatre en haut comme en bas, et les mâchelières au nombre de cinq, de chaque côté de l’une et de l’autre mâchoire. Ce sont encore les mâchelières des autres phoques, mais divisées si profondément qu’à cet égard elles sont sans exemple. ( Des Dents, page 118, pl. 38, A.) La tête du Leptonyx (n°. 1,@,,c ) est toute en museau, comparativement à celle du groupe précédent. La partie de PHoqQuEs. IO1 lencéphale fait à peinele tiers de sa longueur totale. L'occipital donne deux crêtes latérales presque parallèles, très-saillantes et très-épaisses, qui laissent entre elles un creux profond. Les pariétaux, assez bombés à leur partie postérieure, Île sont beaucoup moins à leur partie antérieure, c’est-à-dire que la boîte cérébrale se rétrécit en avant; ils sont séparés de laile temporale par les temporaux et les frontaux qui s’unissent entre eux et cette aile; la crête sagittale est peu saillante, mais épaisse. Les temporaux ont leur apophyse mastoïde très-saillante; leur apophyse zygomatique se pro- longe horizontalement jusqu’au milieu de l’arcade où elle s’é- largit et est arrêtée par la saillie de l’apophyse post-orbitaire inférieure, à la formation delaquelleellene prend pointde part. Les frontaux continuent le rétrécissement commencé par les pariétaux et le terminent assez brusquement, aussi ne sont- ils que d’un petit nombre de lignes en rapport avec le cer veau. Le basilaire manque, cet os ayant été enlevé. Le sphé- noïde postérieur se rétrécit en avant, et il est plus long que large; il se réunit à l’antérieur comme chez le Phoque com- mun, et son aile temporale s'étend horizontalement au-dessus du trou rond au lieu de s'élever verticalement derrière lui. Le sphénoïde antérieur ne se montre en dessous que comme un triangle isocèle très-allongé, à cause du prolongement en arrière du vomer qui vient s’articuler avec l’ante-sphé- noïde, mais dont on ne voit pas bien les connexions vers ce point avec les palatins et les apophyses ptérygoides, l’âge de l'animal s’y opposant. Les caisses sont assez grandes. À mesure que nous avançons, la région du museau prend de plus en plus d'importance. Les frontaux, comme nous 192 PHOQUES. l'avons dit,immédiatement après leur union avec les pariétaux, et après une longueur d'environ vingt lignes, commencent à s’évaser de nouveau vis-à-vis de l'extrémité postérieure des os du nez, et ils se terminent antérieurement vers la moitié de ces derniers os; ils n’ont point d’apophyses post-orbitaires. Les nasaux sont sur le prolongement de la ligne à peu près droite des os du front. Les maxillaires n’offrent rien de très- particulier; leur surface mallaire est médiocrement renflée sur les côtés des cornets du nez; leur tubercule du bord de l'orbite est très-saillant, et leur apophyse zygomatique assez courte. Les intermaxillaires forment une bordure étroite le long des maxillaires, ét ne paroissent pas pénétrer entre ces os et ceux du nez: ils s’arrêtent à l’origine de ces derniers. On ne voit point de lacrÿymaux. Le jugal, presque horizontal, s'articule avec l’apophyse du maxillaire, en suivant une ligne oblique et montante, et avec l’apophyse temporale par deux points, l’un qui forme l’apophyse post-orbitaire inférieure, et l'autre qui s'étend obliquement et en descendant sous cette apophyse temporale, de manière à s'approcher de la cavité glénoïde. Les palatins s’unissentantérieurement aux maxillaires dans le palais par une ligne à peu près droite qui répond à la partie postérieure de l’avant-dernière mâchelière; postérieu- rement les bords de ces os forment entre eux un angle ren- trant à peu près droit; et leur aile orbitaire, au lieu de faire un angle aigu avec le palais, lui est presque perpendiculaire. Les apophyses ptérygoïdes suivent ce mouvement et forment avec les premières une cavité très-profonde aux arrières-na- rines, Ce que nous n'avons point encore Vu jusqu à présent ; leurs tubercules interceptent un espace bien plus étroit que Pnoques. 193 les dernières molaires, et elles ne dépassent point en saillie leurs os qui descendent à un niveau inférieur à celui des caisses. Les cornets de cette tête sont en assez mauvais état; il paroît cependant qu'ils sont aussi fort étendus et fort di- visés. Mon frère donne la description du Phoque leptonyx ; et une tête tout-à-fait semblable à celle que nous venons de décrire, a été publiée par M. Everard Home, dans les Transactions philosophiques de 1822, part. 1, pl. 29. Elle provenoit d’un individu pris aussi dans l'hémisphère austral, dans le voisinage des glaces. Ce Leptonyx sera pour nous le type du genre Sze20- rhinque, à cause de son museau étroit. Perace. ( Planche IT. ) En passant du Leptonyx au Phoque moine, PAoca mona- chus Hermann, nous faisons un saut plus grand encore que celui que nous avons fait en passant des Callocéphales aux Stenorhinques, et cependant nous avons encore évidem- ment sous les yeux une tête de phoque; mais nous n’y trou- vons plus la ligne presque droite sur laquelle, dans nos pre- miers genres, se trouvent les pariétaux, les frontaux et les nasaux , ni surtout le museau eflilé du Leptonyx. Malheureu- sement celte tête, provenant d’un individu très-vieux, a un grand nombre de ses sutures effacées, de sorte qu'il est im- possible d'indiquer la limite de la plupart des os de la région cérébrale; et les dents elles-mêmes sont tellement usées que nous concluons, de ce qui en reste, qu’elles ont la forme de celles de notre premier genre, plutôt que nous ne le voyons; Mém. du Muséum. à. 11. 25 194 Proques. mais les incisives à l’une et à l’autre mâchoire sont au nom- bre de quatre, comme dans le Leptonyx. Cette tête (no. 2, d, e, f), vue de profil, nous montre un occipital très-relevé, des frontaux qui s’infléchissent à leur partie postérieure et qui se relèvent à leur extrémité opposée, pour redescendre avec les nasaux et former un chanfrein très- arqué.Vue de face, nous trouvons l’extrémité du museau courte et se rétrécissant tout àcoup en avant de l’arcade zygo- matique. L’occipital s'élève presque droit, et ses crêtes, très- saillantes et très-épaisses, forment entre elles à peu près un angle droit. Les pariétaux ont de la convexité, et sont sépa- rés par une crête sagittale très- marquée. L’apophyse zyg0- matique du temporal s’écarte fortement, en s’abaissant un peu pour se relever ensuite et s’avancer jusqu'à la moitié environ de l'arcade. Les frontaux n’ont plus leurs limites marquées postérieurement, ce qui s'oppose à ce que j'in- dique leur relation avec le cerveau. C’est au point où ils se rétrécissent pour commencer le museau que se trouve la lame cribleuse, et c'est à où la crête sagittale est le plus élevée. En dessous, on voit au milieu du bagilaire une côte saillante longitudinale qui répond à un canal de même forme à l’intérieur du crâne. On ne trouve plus de ligne de dé- marcation entre les sphénoïdes; mais le trou sphéno-orbitaire, qu’on distinguoit par sa grandeur chez les Callocéphales, ‘et beaucoup moins chez les Sténorhinques, est chez le Phoque moine d’une grandeur démesurée. Les frontaux, en s’approchant des maxillaires, s’évasent un peu; ils n'ont aucune trace de l’apophyse post-orbitaire. Les pasaux sont légèrement creux dans leur partie moyenne, et Paoques. 195 ils se terminent par une ligne courbe sortante. Les maxil- laires n’ont point la saillie que nous avons trouvée chez le veau-marin; mais le tubercule du bord de l'orbite y est très- fort; leur apophyse zygomatique est courte et ne se prolonge point sous le jugal; elle se termine brusquement dans cette parte, et l’on ne trouve point, sous le trou sous-orbitaire, la dépression que nous avons fait remarquer dans d’autres têtes; chez celle-ci tout y est arrondi. Les intermaxillaires parois- sent pénétrer jusqu'au tiers de la longueur des nasaux, entre ces os et les maxillaires. Il n’y a rien des lacrymaux. Le jugal s’étend très-avant sous l’apophyse du temporal, et forme avec l'extrémité antérieure de celle-ci, qui est très-large, lapophyse post-orbitaire inférieure ; et il s’avance sur l’apo- physe du maxillaire jusqu’auprès du tubercule orbitaire de cet os. Les palatins sont très-courts; ils s'unissent aux maxil- laires dans le palais, fort en arrière de la dernière mâche- lière, et 1ls sont échancrés à leur partie postérieure. Les apo- physes ptérygoïdes ont beaucoup de ressemblance avec ceux des Callocéphales, autant qu'il est possible d’en juger sur le peu qui reste des sutures. Les cornets du nez ont aussi beaucoup de développement. Buffon (1) et Hermann (2) avoient décrit ce phoque d’après un même individu; j'en ai aussi donné une description (3), M. Lobstein (4) en a publié une anatomie; enfin Pabbé Ran- (1) Supplément, t. IV. (2) Mémoires des naturalistes de Berlin, t. IV. (3) Annales du Muséum d’histoire naturelle, t: XX. (4) Observations d’Anatomie comparée sur le Phoque à ventre blanc. 25* 196 Poques. zani (1) en a également eu un à sa disposition, dont il a dé- crit quelques parties. Il paroît n’avoir encore été pris que dans les mers de la Grèce. Il sera pour nous le type du genre Pelage, Pelagios. Jusqu'à présent nous n'avons eu à considérer que des phoques pourvus de mâchelières qui semblent formées d’a- près le même système, et qui nous ont offert, avec des dif- férences importantes, un grand nombre de points par les- quels ils se ressemblent, et qui ne permettent pas de les trop séparer. Les espèces dont nous allons examiner les têtes, comparées aux précédentes sous ce rapport, nous présentent des différences si nombreuses et si importantes qu’on ne peut plus guère voir en elles la simple modification du type général des premières, mais qu'on est en quelque sorte forcé de les considérer comme un type nouveau, et à beaucoup d'égards indépendant de tout autre; elles sont cependant en- core des phoques. Toutes ont à chaque mâchoire des mà- chelières à racines simples, courtes et larges, à couronnes striées plutôt que dentelées et sortant peu des gencives. Leurs incisives supérieures sont au nombre de quatre et les infé- rieures au nombre de deux. (Des Dents, etc., page 120, pl..38, B,etp. 123, pl. 39, A.) STEMMATOPE. (Planche IL. ) Le premier genre que nous formerons de ces phoques est (1) Opuscukiscientifici, Bologne. PHOQUES. 197 celui qui a pour type le Phoque à capuchon, Phoca cristata Linn., Phoca mitrata Camper. La tête de ce phoque (n°. 3, g, À, 1) est remarquable dans son jeune âge par la hauteur et la largeur de sa boîte cérébrale, l'étendue de sa fosse orbitaire et la brièveté de son museau; c’est-à-dire que tout y est donné à la capacité du cerveau. L’occipital très-large, s’arrondit pour se porter en avant et se réunir aux pariétaux; et ses crêtes ne consistent qu’en de légères rugosités. Les pariétaux, un peu aplatis au sommet de la tête, se bombent bientôt, en s'étendant sur les côtes, et ils remplissent la moitié de l'intervalle qui sépare les temporaux des frontaux et qu’occupe entièrement, dans d’au- tres carnassiers, l’aile temporale du sphénoïde. Les crêtes temporales ne se marquent aussi que par de légères rugosi- tés. Les temporaux ne consistent guère que dans leurs apo- physes ; ils s'élèvent peu vers les pariétaux, et ne se courbent que légèrement pour s'unir à eux; leur apophysezygomatique, très-courte, serelève subitement pour former avec le jugal l’apophyse post-orbitaire inférieure. Les frontaux, postérieu- rement, un peu déprimés à leur partie supérieure, forment un large pavillon pour suivre l’évasement des pariétaux, et ils sont en rapport avec le cerveau de plus de la moitié de leur longueur. Le basilaire, creux transversalement à sa face interne, est en saillie à sa face opposée, et il ne s’avance pour rencontrer le sphénoïde postérieur que jusqu’à la moitié de la longueur des caisses. Ce sphénoïde se termine en avant par une ligne courbe sortante, qui s’avance fort au-delà d'une ouverture étroite, laquelle communique, du trou rond, avec les parties latérales de cet 05, et qui paroit être 22 198 Puooues, le trou sphéno-orbitaire; enfin son aile temporale ne remplit que la moitié inférieure de l’intervallequi sépare les frontaux des temporaux. Le sphénoïde antérieur, caché en partie sous les apophyses ptérygoides , ne se présente que par une surface triangulaire et plane. Nous ne parlerons point de l’ethmoide qui se trouve entièrement caché. Les caisses sont sphériques et très-volumineuses. Si de la région cérébrale nous passons à celle du museau, nous trouvons que les frontaux se rétrécissent subitement; car ayant au-delà de trois pouces dans leur plus grande lar- geur, ils arrivent près des os du nez à en avoir à peine un; ils sont tout-à-fait dépourvus dapophyse post-orbitaire ; mais ils ont une protubérance sur le bord de la partie moyenne de l'orbite, c'est-à-dire presqu’à leur extrémité. Les os du nez, en s'abaissant, forment un angle trés-ouvert avec la ligne à peu près droite des frontaux , et ils dépassent de près d’un quart de leur longueur les maxillares. Ceux-ci très-étroits à leur partie supérieure présentent, sur le bord de l'orbite, un tubercule assez saillant, et leur surface mallaire n’est que légèrement arrondie; leur apophyse zygomatique est large et saillante , et sous le trou orbitaire est une dépression longitudinale assez profonde. Toute la partie antérieure de ces os offre quelques légers rapports avec ce que nous ob- serverons chez le Phoque à trompe. Lies intermaxillaires , très- petits, laissent un intervalle assez grand entre leur ex- trémité supérieure et les os du nez; et ils se terminent en des- sous, à la partie postérieure des trous incisifs. On ne trouve ni trou ni os lacrymaux, et le frontal, le maxillaire et le palatin ne se réunissent point dans l’orbite, et le vide qu'ils Puoques. 199 laissent entre eux n’est recouvert que par la membrane. Le jugals’articule en suivant une ligne oblique et montante avec l’'apophyse du maxillaire, et en suivant une ligne semblable à une S avec l’apophyse du temporal. Les palatins se réunis- sent aux maxillaires antérieurement, suivant un angle ren- trant très-ouvert, qui, par ses points les plus rapprochés des mâchelières, répond un peu en arrière de la dernière de ces dents; leur bord postérieur suit une ligne courbe dont la concavité regarde le museau, et ils se recourbent en haut, le long des apophyses ptérygoïdes, pour s’articuler au tem- poral du côté interne du trou oval. Les apophyses ptéry- goides présentent trois ailes bien distinctes, l’une qui va se réunir au vomer en formant avec sa congénère un angle très-aigu ; l’autre qui produit antérieurement une apophyse tuberculeuse, laquelle intercepte un espace aussi large que les palatins, et la troisième qui va se confondre vers la caisse avec le sphénoide postérieur; l'extrémité des premières ailes s’avance beaucoup plus que celles des secondes, et los est circonscrit entre ces deux ailes par une ligne concave. Enfin les cornets du nez ont une étendue et un développement qui ne se rencontre peut-être au même degré chez aucun autre animal. Ces traits pris de la tête d’un jeune individu se retrouvent en partie sur celle des plus adultes, qui cependant nous pré- sentent des différences notables. Ainsi chez ceux-ci l’areade zygomatique s’est évasée et a pris un développement très- grand; d’un autre côté les crètes occipitales sont devenues très-fortes et se sont étendues en arrière, et celles des pa- riétaux se sont marquées, ce qui a semblé aplatir les côtes 200 PHOQUES. de ces derniers os: on diroit qu'à mesure que les crotophytes prenoient de l’étendue et de la force, ils agissoient sur la boîte cérébrale, en la comprimant, et en l’empêchant de s'étendre. Des apophyses post-orbitaires obtuses se sont montrées à l'extrémité des frontaux qui se sont fort élargis, ainsi que les nasaux, et une arête aiguë s'est développée de chaque côté des narines, sur la partie moyenne des inter- maxillaires et dans le sens de leur longueur. Je désignerai ce genre par le nom de Sfermmatope, où front couronné. - Macrormne. ( Planche IL. ) Le second type que nous trouvons dans ce groupe de pho- ques nous est présenté par le Phoque à trompe, l’éléphant marin, PAoca proboscidea Péron, qui se fait remarquer par ses dents et surtout par les formes de sa tête (n°. 1,&,6,c). La structure de ses mächelières si simples, si foibles, presque entièrement cachées dans les gencives, ne permet de les considérer que comme des organes rudimentaires, et il en est à peu près de même de ses incisivés; mais ses canines épaisses et fortes qui, par leur mode de développement, ont tous les caractères des défenses, sont des armes puissantes. (Des Dents, etc. p.123, pl. 39, A.) La boîte cérébrale est réduite aux plus étroites dimensions; tout est donné à la région du museau, et surtout au sens de l’odorat. Aussi ne nous présente-t-elle plus ce crâne bombé sans crêtes et ces frontaux étroits qui caractérisent lestètes de nos premiers genres. Le crane du Phoque à trompe PHoQues. 20] ne se montre guère que par les crêtes occipitales, tandis que le museau bombé et élargi est en quelque sorte plus grand que le crâne lui-même. L’occipital s'élève presque ferticalement et se termine par deux larges crêtes qui forment entre elles à peu près un angle droit. Les pariétaux présentent un plan incliné et ne forment qu’une légère crête sagittale ; ils s’'avancent en pointe sur le frontal où ils se séparent en un angle très-aigu, et ils remplissent à eux seuls tout l'intervalle qui sépare, au-dessus des sphénoïdes, les temporaux des frontaux. Les temporaux suivent la direction inclinée des pariétaux, ainsi que le com- mencement de leur apophyse zygomatique qui se prolonge jusqu'au milieu de l’arcade où elle se relève subitement pour former avec une portion semblable du jugal lapophyse post- orbitaire inférieure. Les frontaux se prolongent en deux ailes, en descendant obliquement vers les temporaux, et c’est par là seulement qu’ils paroïssent en relation avec le cerveau. Je n’aipuexaminerle basilaire ni lespoints par lesquelsil s'articule avecle sphénoïde postérieur ; et il en a été de même pour celui- ci avec le sphénoïde antérieur. Les apophyses ptérygoïdes se relèvent presque verticalement, et leur tubercule s'approche de leur extrémité postérieure, et se trouve à la hauteur des caisses qui sont assez peu développées. Excepté une petite portion de l'extrémité postérieure des frontaux, tout le reste de ces os appartient au museau; ils acquièrent des dimensions considérables par le développe- ment de leur partie antérieure qui se relève et s’arrondit de manière à donner aux organes de l’odorat le plus vaste es- -Mém. du Muséum. À. 11. 26 202 Paoques. pace; ils n’ont point d’apophyse post-crbitaire; les os du nez sont excessivement courts et sont soutenus jusqu'à leur ex- trémité par le vomer. Les maxillaires, à leur partie supérieure, sont étroits ; ils s’articulent avec le bord externe des nasaux et le bord antérieur des frontaux ; leur tubercule orbitaire est très-grand; leur apophyse zÿgomatique est courte et s'avance en descendant obliquement sous le jugal; leur partie antérieure est au contraire très-allongée ‘et très-large ; mais la face mallaire est peu élevée et n’a aucune connexion avec les cornets; et les intermaxillaires qui sont larges, ne s’a- vancent pas jusqu'à la moitié de la longueur des premiers etse terminent brusquement. On ne voit aucune trace des trous incisifs, et il en est de même des lacrymaux et de leurs os. Le jugal se termine en avant par une surface obli- que et:montante avec laquelle il'se joint au maxillaire; en arrière il se partage en deux apophyÿses qui se séparent à angle droit ; la supérieure fait la moitié de l'épaisseur de l’apo- physe post-orbitaire, et l’inférieure s’étend obliquement en descendant sous celle du temporal. Les palatins se terminent antérieurement par une ligne irrégulière, ét fort en arrière des dernières mâchelières; postérieurement par une ligne el- liptique très-allongée, interrompue à son extrémité par une saillie des deux os qui répond à leur ligne moyenne. Leur élévation au-dessus des sphénoïdes, ainsi que celle des apo- physes ptérygoïdes qui suivent leur mouvément , forment une très-profonde cavité aux arrières narines. L'espace occupé par les cornets du nez fait présumer que leur développement doit être considérable ; car ces os ont tout-à-fait été détruits dans la tête que nous décrivons; mais ils s’avancent jusque dans PHoQuEs. 203 l’apophyse zygomatique du maxillaire, et remplissent toute la capacité des frontaux. Nous désignerons ce genre par le nom de Macrorhine, qui indique le caractère le plus remarquable de l’espèce sur laquelle il est établi. Outre la tête que nous venons de décrire, le cabinet de mon frère en possède encore une ( n°. 2, d,e, f), qui a plu- sieurs traits de ressemblance avec elle, mais qui est trop jeune pour que nous puissions la considérer comme carac- téristique. Cette tête, qui provient en effet d’un très-jeune individu rapporté de la côte des Patagons par M.***, montre à peine ses dents, et toutes ses sutures sont encore fortlâches. Ces dents annoncent un système de dentition sem- blable à celui des Phoques à capuchon et des Phoques à trompe; leur nombre, leur forme et leur structure sont les mêmes que celles que nous présentent les dents de ces der- niers ; et elles confirment une observation qu'on avoit déjà faite, c’est que toutes se développent à la fois, car toutes sont arrivées au même degré d’accroissement. C’est principalement par sa forme générale, l’étendue de la région cérébrale et la brièveté de la région du museau que cette jeune tête est remarquable; car quoique nous ne connoissions point celle de l'animal adulte, elle tend à con- firmer ce que nous a déjà montré le Phoque à capuchon : que sous ces divers rapports la différence entre les jeunes individus et les adultes est considérable. On diroit qu’à me- sure que les forces augmentent chez ces animaux l’intelli- gence diminue. ta6"%# 20/# Pnoques. L'occipital est largement déprimé dans sa partie moyenne. Les temporaux forment à leur suture écailleuse une protu- bérance remarquable qui correspond à un enfoncement du côté interne; leurs apophyses zYgomatiques se relèvent im- uemout au-dessus de la cavité glénoïde et viennent comme servir d'appui à l’apophyse post-orbitaire inférieure dont elles forment tout le bord postérieur. Les frontaux s’avancent chacun par une aile dans la partie supérieure des pariétaux qui, de leur côté, s’avancent par des ailes sem- blables dans les frontaux au-dessus des orbites. Le basilaire s’unit au sphénoïde postérieur par une ligne droite, et celui-ci est joint par une ligne courbe sertante, au sphénoïde antérieur. Dans la partie du museau les frontaux n’ont point d’apophyse post-orbitaire, et ils s’abaissent en suivant une ligne courbe après s'être beaucoup rétrécis entre les orbites, mais ils ne présentent point le renflement que nous a montré dans cette partie l’éléphant marin. Les os du nez suivent la courbure des frontaux et ne dépassent point les maxillaires. Ceux-ci ont leur partie Pupgienne étroite et leur tubercule orbitaire est très-saillant. Dans l'orbite ils sont séparés des frontaux et des palatins par une membrane, comme dans la plupart des autres phoques. Les intermaxillaires sont très-courts; ils ne s’avancent pas même jusqu'à l’origine des fosses nasales et se terminent brusquement par une ligne transversale. Les apophyses ptérygoïdes sont sur la même ligne que les palatins et leurstuberculesinterceptent un intervalle bien moins large que les dernières màchelières. Les cornets sont fort compli- qués, quoique l’espace qu'ils occupent ne soit augmenté par V'évasement d'aucun des os entre lesquels ils sont renfermés. O7 PHOQUES. 20 Les phoques qui vont nous occuper et par lesquels nous terminerons ce travail constituent un troisième groupe prin- cipal, par la considération des formes de leurs têtes, qui ont encore quelques traits de ressemblance avec celles que nous avons décrites, mais qui en diffèrent par plusieurs autres fort importans. : Le système de dentition de ces phoques leur est particu- lier; il consiste en six incisives supérieures et en quatre in- férieures, en de fortes canines, et en mâchelières formées, à leur couronne, d’un tubercule principal, conique, droit, long et épais, ayant à sa base, antérieurement et quelquefois pos- térieurement, une pointe plus ou moins développée; leurs racines, souvent plus larges à leur collet que leur couronne sont simples dans tous les individus que j’ai examinés. Ces dents, par leur couronne, se rapprochent de celles des Callocéphales, et par leurs racines de celles des Stemmatopes et des Macrorhines. (Des Dents des Mammifères, etc., p.122, pl. 39. ) Les têtes qui nous offrent ce système particulier de den- tition sont évidemment formées sur un seul et même mo- dèle; mais elles présentent deux types génériques que les modifications dans les dents indiquoient déjà. ARGTOCÉPHALE. ( Planche IV, n0, r,&, 0,0.) Les dents de notre premier type se caractérisent en ce que les mâchelières ont constamment une pointe en avant et une en arrière du tubercule principal; qu’elles sont plus larges qu’épaisses , et que leur couronne est plus étendue que leur 206 Poques. racine ; et en ce que leurs quatre incisives moyennes sont par- tagées transversalement dans leur milieu par une échancrure profonde. La région cérébrale est moins développée que dans nos deux premiers genres, et se rétrécit proportionnellement davantage en avant. Dans les individus, adultes, l'occipital est bordé de crètes saillantes qui se réunissent à angle droit au sommet de la tête, et qui viennent se terminer en une forte apophyse mastoïdienne en dehors de la caisse, sans se rattacher à l’apophyse. Les pariétaux sont bombés sur les côtés, aplatis en dessus, et réunis par une forte crête sagit- tale. Les temporaux ont leur aïle très-petite et leur apo- _physe zygomatique s’avance obliquement et en montant jusqu’à l’origine de lapophyse post-orbitaire inférieure. Les frontaux embrassent le cerveau presque de la moitié de leur longueur. Le basilaire présente de chaque côté de sa ligne moyenne saillante des dépressions longitudinales qui en oc- cupent toute la largeur; le sphénoïde postérieur forme, en se relevant, un angle avec le basilaire; quant à ses limites, je ne puis les établir, les sutures de cet os avec ceux qui l'avoisinent étant effacées en partie; mais il est à remarquer que le canal vidien se trouve entre l'apophyse ptérygoide et le prolongement ptérygoiïdien du palatin. Les sphénoiïdes anté- rieurs s’avancent jusqu'aux espaces vides que l’on croit tenir lieu des lacrymaux, et séparent ainsi entièrement les frontaux des palatins, ce qui ne se trouve dans aucun des genres précédens; mais ce qui doit surtout être remarqué, c’est que les trous optiques se réunissent dans cet os et se conti- nuent en un simple canal assez long jusque dans la boite PHOQUES. 207 cérébrale; c’est-à-dire que les nerfs optiques paroissent chez ces animaux se réunir long-temps avant que de pénétrer dans le cerveau, ou autrement ne se désunissent après leur croissement, qu'après être sortis de la boîte cérébrale. La région du museau l'emporte un peu en longueur sur ia région cérébrale. Immédiatement après les points qui sont en rapport avec le cerveau, les frontaux se rétrécissent beaucoup et se prolongent parallélement , jusqu'à leur apophyse post-orbitaire qui est très-forte et qui s’élargit même antérieurement, en arcades surcillères. Les maxillaires s’articulent avec les frontaux, sur le chanfrein, à la hauteur des os du nez; ils ont le tubercule orbitaire que nous avons fait remarquer dans les genres précédens ; leur apophyse zygomatique pénètre dans une enfourchure du jugal, et ils ne s'élèvent point dans leur face mallaire pour augmenter l'espace occupé par les cornets. Les os du nez se séparent en un angle plus ou moins aigu à leur extrémité postérieure, et ne dépassent pas les maxillaires à leur extrémité opposée. Les intermaxillaires pénètrent entre les nasaux et les maxil- laires presque jusqu'au tiers de la longueur des premiers; et ils sont terminés en avant, au point de leur réunion, par un tubercule obtus et rugueux. Le jugal , fourchu antérieure- ment, suit postérieurement une ligne oblique descendante, et il forme seul l’apophyse post-orbitaire inférieure. Les pa- latins sont allongés et étroits; ils s'étendent jusqu’en avant des dernières mâchelières et se terminent en arrière par une ligue courbe qui partage à peu près également l’espace qui se trouve entre leur extrémité antérieure et les apophyses pté- rygoides. Ces os sont à peu près au niveau des maxillaires, 208 PHoques. et ils forment aux arrières narines un creux profond avec les ptérygoïdiens qui se relèvent et laissent en dehors le canal vidien. Quant au trou sphéno-orbitaire, il se réunit à l’espace vide dont’ nous avons parlé plus nn et contribue à son agrandissement. ; ” Les jeunes individus de ce groupe n’ont aucune des crètes que les adultes nous ont présentés, quoique déjà POUR de toutes leurs dents. Nous donnerons au genre dont nous venons d’exposer quelques caractères, le nom d’Arctocéphale, parce que, à en juger par la note que porte la tête que je viens de décrire, nous prenons le type de ce genre dans l’Ours marin, Phoca ursina, dont la tête a en effet quelques ressemblances gé- nérales de formes avec celles de lours commun, wrsus arCios. PrarTyrHiNQuE. (Planche IV, n0. 2, d,e,f.) Le second type de ce dernier groupe a des mächelières formées d’un tubercule principal non moins épais que large, fort obtus et n’ayant qu'une pointe presque insensible à sa base antérieure. La seule racine de chacune de ces dents, à son collet, est renflée et d’un diamètre plus grand que celui delacouronne, et, par ce qui reste des incisives, on peut sup- poser qu’elles ne sont point coupées par une échancrure trans- versale, mais qu elles sont pointues. Les traits principaux de la région cérébrale consistent dans un crâne moins développé que dans les espèces précédentes et dans des temporaux dont l’apophyse zygomatique s’élève PHoqQues. 209 jusqu'à l'extrémité de l’apophyse post-orbitaire. Le basilaire, très-court, au lieu de deux dépressions parallèles, a ces dé- pressions obliques. C’est surtout par les caractères de la région du museau que cette espèce se distingue éminemment de toutes les autres. Ce museau, au lieu d’être eflilé, est beaucoup plus large à son ex- trémité qu’auprès des trous sous-orbitaires où il se rétrécit, et cette largeur est due principalement à celle des intermaxil- laires ; mais le caractère fondamental de ces parties consiste dans la structure des palatins: ils naissent antérieurement, vis- à-vis des dernières mâchelières, et s’avancent jusqu’à la base des apophyses ptérygoïdes, de manière à ne point laisser d’échancrure entre elles et leurs bords postérieurs, échan- crure qui est très-profonde dans tous les genres précédens; de plus, au lieu de former un plancher uni, ils constituent, avec les maxillaires, en s’élevant par leurs bords, une cavité profonde qui se continue jusqu'aux incisives. Les caisses sont aussi très-petites; et toute la partie postérieure de la mâchoire inférieure acquiert un développement que ne pa- roissent point acquérir celles des Arctocéphales, comme le montre notre figure. Le lion marin (PAoca leonina ) paroït être le type de ce dernier genre, auquel nous donnerons la dénomination de Platyrhinque, à cause de l'élargissement de son museau. Pour achever la classification des animaux qui font l’objet de ce Mémoire, il ne seroit peut-être pas inutile d’attacher les observations qu'ils nous ont présentées, et qui sont en Méin. du Muséum, t. 11. 27 210 PHoqQues. grande partie anatomiques, à des organes plus extérieurs encore, dépendans des tégumens, des sens, etc. Sans doute une telle association ne seroit pas dépourvue de quelque avantage, mais pour la réaliser aujourd’hui il faudroit que les phoques fussent mieux connus, qu’ils eussent été mieux observés à l’état vivant, mieux représentés, mieux décrits. Jusqu'à ce que de nouvelles recherches nous aient mis à même d'apprécier toutes les différences extérieures de ces animaux, nous nous bornerons à prendre les dents comme signes représentatifs de tous les autres caractères génériques, ce qui, au reste, existe déjà pour un grand nombre d’ani- maux. En effet, nous avons vu que la forme des dents a une correspondance parfaite avec la forme des têtes, et que l’une n’a été pour nous qu’une confirmation des inductions que nous tirions de l’autre. Cependant deux de nos genres nous offriroient de ces caractères extérieurs dépendans des tégumens et faciles à saisir : celui qui comprend le Phoque à mitre par l'organe particulier qui couvre la tête de cet animal, et celui du Phoque à trompe par le prolongement extraordinaire de narines extérieures de ce singulier carnassier. Il y a plus, la comparaison organique que nous venons de faire et les conséquences que nous en avons déduites ,, auroient besoin, comme complément, que nous fissions une comparaison du moral des Phoques, c’est-à-dire, de leurs besoins et des divers moyens qu'ils ont recus pour les satisfaire ; car ce n’est pas moins par les dispositions , les penchans, les facultés que les animaux se groupent en genres et en espèces, que par les organes, constamment subordon- nés aux causés qui les font agir. Nous remarquons en effet Puoques. 2it que des différences morales accompagnent constamment les différences organiques; car chaque fois que de nouvelles ob- servations des parties matérielles ont amené de nouvelles divisions spécifiques ou génériques, les animaux contenus dans ces divisions présentoient un naturel particulier. Ainsi les hyènes, réunies pendant long-temps aux chiens, n’ont pas moins dû en être séparées à cause de leurs mœurs qu’à cause du nombre de leurs doigts ou de leur système de dentition, ou autrement de leur influence dans l’économie générale de la nature : économie dont l'unité, pour le dire en passant, se montreroit peut-être mieux encore par les facultés que par les organes. Malheureusement l'observation des mœurs est infiniment plus difficile que celle des tégumens, des membres ou des sens; l'animal en vie et jouissant de sa liberté, fuit tout voisinage qui l’inquiète, et ne se prête point à une vo- lonté qui lui est étrangère; d’ailleurs on n’observe que ce qu'on sait voir, et les principes de l’étude des animaux, quant à leur manière de se conduire, ne sont pas mieux fondés sur les préceptes que sur les exemples. Si les classifications se sont perfectionnées dans l’idée des rapports naturels, elles sont tout-à-fait restées linnéennes quant aux caractères qu’elles emploient pour les établir; elles ont étendu leur but et non pas leurs moyens; et l’on étoit, comme on est en- core, forcément retenu dans cette direction par la nature des organes ou des phénomènes qui faisoient le sujet des observations. Les voyageurs naturalistes, qui seuls auroient pu faire connoitre les animaux dans toute leur intégrité, ne les ont pour la plupart observés que d’une manière imparfaite, et 27 212 Paoques. seulement pour décrire quelques-unes de leurs parties, celles que les méthodes dans lesquelles ils avoient été instruits leur faisoient paroître importantes; presque jamais ils n’ont parlé avec quelques détails du naturel, et ce n’est guère que sur des dépouilles que nos idées de rapports des animaux entre eux se sont établis; tout ce qui tient à la vie, tout ce qui en résulte leur est resté étranger, et nos descriptions du monde animal ne sont réellement que des descriptions de morts. Ce sont ces raisons sans doute qui avoient fait écarter des organes caractéristiques les formes et la structure de la tête. Pourquoi . se seroit-on arrêté à la considération d’un système d’organe dont on ne pouvoit apprécier les fonctions, dont les fonctions mêmes sembloient exclues de la zoologie? Les progrès qu’a fait cette science doit nécessairement lui donner aujourd’hui une autre direction. Lorsqu'on saura bien que les rapports des animaux ne doivent pas seulement s'établir par leur organisation, mais encore par l'usage qu’ils savent en faire; on ne se bornera plus à l’étude des animaux morts, et ce seul changement amènera tous les autres : l'animal sera ob- servé intégralement, et la nature animée pourra être offerte à nos yeux telle qu’elle est en effet, non-seulement riche d’une variété innombrable de parties, d’un mécanisme qui confond notre esprit, mais encore puissante de vie et d'intelligence. C’est alors que se pourra réaliser, peut-être, cette idée d’une union intime des êtres, qui semble être la conséquence né- cessaire de celle de l'unité de plan dans l’organisation; union qui, à en juger par les connoissances que nous possé- dons, est encore bien loin d’exister pour les mammifères; mais que les faits, dans quelques autres branches de l'histoire | ? ProqQues. 213 naturelle, laissent, pour ainsi dire, entrevoir. Il semble, en effet, qu’on en trouve des exemples d'autant plus frappans qu'on descend davantage dans l'échelle de l’organisation ; les oiseaux nous en offrent déjà de fort remarquables, et les plantes paroiïssent en offrir encore davantage. Ces exemples, joints à cette idée d'union universelle à laquelle ils donnent en quelque sorte un commencement de preuves, ont paru à plusieurs naturalistes équivaloir à une démonstration contre les classifications méthodiques et naturelles : comment ea- ractériser des genres prochains ou éloignés, et même des espèces, parmi des êtres qui ne diffèrent les uns des autres, suivant chaque système d’organe, que par des nuances en quelque sorte imperceptibles? Voilà bien en effet l’objection contre les méthodes, tirée de l'unité de composition, dans toute sa généralité rationnelle; et nous sommes cependant encore à concevoir comment on a pu l’élever, car si les faits ont de l'influence sur l'application ou les détails de la mé- thode, ils n’en ont point sur la méthode en général qui est un besoin de notre esprit, et ce besoin-là deviendra toujours d'autant plus pressant que le nombre des êtres augmentera, et qu'ils différeront par des caractères moins frappans. S’éle- ver contre les méthodes en termes généraux, c’est donc se perdre en de vagues déclamations et en de vaines paroles. Une méthode quelconque a pour objet de coordonner les êtres réellement existans qu'elle embrasse, suivant leurs rapports les plus naturels. C’est donc sur son application à ces êtres qu'elle doit être jugée et non pas sur un état de choses con- elu hypothétiquement d’une conclusion plus où moins hy- pothétique elle-même. Si les divisions spécifiques ou géné- 214 Paoques. riques admises ne sont point naturelles, si les caractères sur lesquels ces divisions sont établies sont vicieux, il faut l’un et l’autre les corriger : c’est par ce bon esprit que l’histoire naturelle a fait depuis Linnæus de si grands progrès, et c’est en s’y attachant qu'on sera même naturellement conduit à classer, à ordonner les êtres comme il sera nécessaire qu’ils le soient, quand on en sera arrivé à cette union parfaite, à cette dépendance intime de tous ceux qui existent, si jamais elle se réalise. A cette époque, sans doute, les genres et les espèces ne seront plus ce qu’ils sont aujourd’hui, ne se carac- tériseront plus comme ils se caractérisent. On passera des uns aux autres et dans toutes les directions, c’est-à-dire, suivant tous les systèmes de leurs organes, d’une manière graduelle et insensible; mais alors ce sera cette graduation que la méthode aura à établir comme elle le fait déjà dans beaucoup de cas; elle devra fixer les points où chacun de ces systèmes d’organe sera arrivé à son plus grand et à son moindre développement, et dans ce cas-là elle formera en- core des espèces et des genres, si on laisse aux organes la dépendance où ils sont les uns des autres, et à l'esprit les besoins qu’il a reçus de la nature. a CALLOCEPIHALEZ. SONO so er PTE ee ee de ÿ LA : 5% 7 N°1. STENORYNQOUE. N?2.PELAGE. N°5. STEMMATOPE. A SAS MIRE PHOQUES. Co N°1. MACRORHIN-. W?2. PHOQUE DES PATAGONS. FD T0: PHOQUES. N°1. ARCTOCLPHALE. N°2. PLATYRYNQUE. : s VIA RACE a AR NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX DE M. CORRÉA DE SERRA. (Lue à la Société Philomatique de Paris le 17 avril 1824.) PAR D. FRANCOIS D’ALMEIDA. Si, dans ces derniers temps, les sciences n’ont pas fait autant de progrès en Portugal que dans quelques autres pays de l'Europe, il ne faut cependant pas croire que les descendans des plus célèbres navigateurs modernes, dont les découvertes furent si utiles aux sciences, à l’industrie et à la civilisation, soient restés étrangers au grand développement de notre siècle. L’estimable savant sur lequel nous allons donner une courte et imparfaite notice, est une des preuves de ce que . nous venons de dire. Joseph-François Corréa de Serra, secrétaire perpétuel de l'Académie royale des sciences de Lisbonne, membre de la Société royale de Londres, correspondant de l’Institut de France, membre de la Société philomatique de Paris, et de plusieurs autres sociétés savantes, naquit à Serpa en Portugal, en 1750. Son père, propriétaire et jurisconsulte, ne possédoit qu'une médiocre fortune, mais il trouva dans une sage éco- 216 Notice nomie le moyen de donner à ses trois enfans une brillante éducation. Lejeune Corréa, montrant dès ses premièresannées une grande vivacité d'esprit et beaucoup degoût pour l'étude, son père se décida à le faire voyager, et le conduisit lui- même à Rome, et de là à Naples, où le célèbre abbé Geno- vesi se chargea de terminer son éducation. M. Corréa, après avoir fini ses études à Naples, revint à Rome, où il entra dans l’état ecclésiastique. Les nombreux monumens de cette ville, jadis si célèbre, excitèrent bientôt en lui le goût de l’étude de l'antiquité et des langues anciennes; mais ne pouvant se contenter de la seule connoissance de l’histoire des hommes, il s’appliqua aussi à l’étude des sciences naturelles, et après en avoir acquis des idées générales, il se livra de préférence à la botanique, science qu'il cultiva toute sa vie, et qui lui procura de grandes consolations dans ses malheurs. En 1777, le duc de Lafoens pressa M. Corréa de revenir en Portugal; il céda aux instances de son ami, et voulant si- gnaler son retour dans sa patrie par quelque service rendu aux sciences, il suggéra à M. de Lafoens l’heureuse idée de créer une Académie des sciences à Lisbonne. Le duc de La- foens, ami éclairé des connoissances utiles, suivit avec en- thousiasme le plan tracé par M. Corréa; l’Académie royale des sciences’ de Lisbonne se forma en 1779 sous la protec- tion de la reine Marie Ire., et dans la première séance de la nouvelle académie , M. Corréa fut nommé, à l'unanimité, son secrétaire perpétuel. Cette Académie, composée des savans les plus distingués du Portugal, profita de la liberté de la presse, qui lui fut accordée, malgré l’Inquisition, pour pu- blier dans ses Mémoires un grand nombre d’écrits très-in- sur M. Conr£éA DE SERRA. 21 iéressans : sur les sciences exactes , sur les sciences naturelles, sur l’agriculture, la législation , l’histoire, ete. M. Corréa jouissant de l'estime des hommes les plus éclairés de sa patrie, cherchant à y répandre le goût des sciences, et continuelle- ment occupé de travaux utiles, sembloit devoir être à l'abri de la malveillance; mais le fanatisme et l'ignorance ne pou- voient voir d’un œil tranquille l'ennemi de leur affreuse puissance. En 1786 il fut dénoncé à l’Inquisition, et il auroit été victime de ce tribunal s’il n’eût pris le parti de se réfugier - en France. Il y fit connoissance avec plusieurs des savans de cette terre hospitalière, où le vrai mérite fut toujours dignement apprécié. \ Cependant les ennemis les plus puissans de M. Corréa ayant perdu quelque temps après le pouvoir dont ils étoient revêtus, il revint en Portugal, et toujours dominé par l’a- mour de sa patrie, il reprit, sans songer à se venger, ses an- ciennes et utiles occupations. Ce fut à cette époque qu'il vit arriver à Fisbonne son ami Broussonnet, qui fuyoit les excès de la révolution de France. Corréa s’empressa de le présenter au duc de Lafoens, président de l’Académie, qui pourvut à tous ses besoins, et le logea dans le palais de l'A- cadémie, où Corréa et quelques savans distingués venoient tous les jours s’entretenir avec lui sur l’histoire naturelle. La protection du duc de Lafoens, et l’amitié de M. Corréa aurcient sans doute engagé Broussonnet à rester long-temps en Portugal, si quelques étrangers qui se trouvoient alors à Lisbonne, ne l’eussent accusé d’être partisan des principes d’une révolution dont il n’étoit que la victime. M. Corréa, prévoyant qu'on lui feroit un crime du dévoue- Mém. du Muséum. à. 11. 28 218 Notice ment qu'il avoit montré pour son ami, se retira à Londres, où sir Joseph Banks l'accueillit d’une manière fort distinguée, et le présenta à la Société royale, qui Padmit sur-le-champ au nombre de ses membres. En 1797, Don Rodrigue de Souza, alors ministre de la marine en Portugal, ami de M. Corréa, et digne apprécia- teur de son mérite, le fit nommer conseiller de légation à Londres; mais le ministre de Portugal près cette cour ne consentit jamais à ce que M. Corréa remplit les fonctions de sa place, et chercha même à donner contre luiles préventions les plus injustes. Tant de contrariétés dégoûtèrent M. Corréa de la carrière diplomatique, et lui firent préférer la société des savans à celle des diplomates. [l profita de la paix d’A- miens pour retourner à Paris, où il ne s’occupoit que de sciences et de littérature, et ne fréquentoit que la société des savans avec lesquels, disoit-il, on ne risque rien et on gagne “toujours. La troisième classe de l’Institut ( Académie des Inscriptions et Belles-Lettres ) le nomma son correspondant, et plusieurs autres sociétés savantes s’empressèrent de se lassocier. Il fréquentoit beaucoup le Jardin des Plantes, où il trouvoit le double avantage d'augmenter ses connois- sances et de pouvoir se livrer aux douceurs de l’amitié. Les illustres professeurs de cet incomparable établissement, ces savans aussi respectables par leurs connoïssances que par leur caractère, lui conservent le souvenir le plus honorable. M. Corréa, doué d’une mémoire étonnante, et d’un esprit _ plein de vivacité, étoit extrêmement agréable dans la société; ses nombreux voyages lui ayant fait connoître plusieurs hommés célèbres, lui avoient fourni un grand nombre d’anec- sur M. CORRÉA DE SERRA4 219 dotes qu'il racontoit de la manière la plus intéressante : on cite encore à Paris plusieurs de ses mots heureux ; ainsi nous avons souvent entendu répéter aux botanistes ce qu'il dit à propos des plantes, souvent si singulières, de la Nouvelle- Hollande. « La végétation de la Nouvelle-Hollande est Flore » au bal masqué. » En 1813, M. Corréa partit pour New-York, et quelque temps après il vint à Philadelphie, où il fit un cours de bota- nique avec un tel succès, que l'Université voulut le nommer professeur ; il refusa cet honneur, ne voulant pas se détacher de sa patrie, malgré les injustes persécutions dont il avoit été la victime. Il voyagea beaucoup dans l'Amérique septen- trionale, et quoique la botanique füt le principal but de ses voyages, il en profitoit cependant en véritable philosophe, et en homme d'Etat, cherchant à découvrir les causes des progrès rapides que ce pays a faits en si peu de temps; il en connoissoit les institutions, et les hommes les plus distingyés. En 1816, le gouvernement portugais rendit une jusüce (trop tardive ) au mérite de M. Corréa, en le nommant mi- nistre près le gouvernement des Etats-Unis. M. Corréa oc- cupa cette place avec une telle distinction, qu’en bien peu de temps sa réputation comme diplomate égala celle qu'il avoit déjà comme savant. Nommé en 1819 conseiller des Finances en Portugal, il ne voulut rentrer dans sa patrie qu'après avoir revu ses amis de Londres et de Paris; il arriva dans cette dernière capitale au commencement de 1821.Nous fümes témoins des honneurs qu'il y reçut, nous l'accompa- gnâmes le jour qu’il se présenta à l'Académie des Sciences ; les membres de ce-corps savant le comblèrent des plus grands A0" 220 , NorrcE témoignages d'estime. En sortant, il nous dit avec attendris- ment : que l'accueil que les plus illustres savans de l'Europe venoient de lui faire flattoit plus son amour-propre, que tous les honneurs qu’il avoit reçus comme diplomate. De retour dans sa patrie, il sentit s'aggraver de plus en plus un diabétès, qui depuis quelque temps le faisoit sout- frir beaucoup, et il ne lui fut plus possible de se livrer avec la même assiduité à ses utiles occupations. Elu en 1833 député aux Cortès, sa mauvaise santé ne lui permit pas de prendre une part très-active aux discussions : il fut cepen- dant membre de plusieurs commissions de cette assemblée, et Ses opinions furent toujours celles de l’homme éclairé, et ami de sa patrie. Lorsqu'un député osa attaquer l'Académie royale des sciences de Lisbonne, M. Corréa, malgré le mau- vais état de sa santé, lui répondit avec beaucoup de chaleur et d'esprit, et cette réponse, quoique fort courte, fit à l'instant décider la question en faveur de l'utile établissement. La maladie de M. Corréa s’aggravant tous les jours, les médecins lui conseillèrent d'aller prendre les eaux de Caldas; mais malgré les soins qui lui furent prodigués, il succomba le rr de septembre 1823, à l’âge de 93 ans. Il conserva jusqu'à la fin de sa vie la même vivacité d’es- prit; une mémoire étonnante et un grand amour dessciences, qu'il chercha toujours à communiquer à ses compatriotes. Sa vie fut trop ‘orageuse pour qu'il lui ait été possible de publier de grands ouvrages : cependant si ses écrits ne sont pas nombreux, tous contiennent desobservations très-exactes, très-importantes , et ‘entièrement nouvelles: à l'époque où il les publia; tous offrent ‘des idées lumineuses, des aperçus SR sur M. CoORRÉA DE SERRA. 291 ingénieux et un caractère d'originalité qui les rend toujours intéressans, lors même que les faits qu'ils ont fait connoître n’ont plus besoin d’être prouvés. On nous assure, qu’outre ce qu'il a donné au public, il possédoit encore un grand nombre ‘de notes manuscrites : nous espérons que ses dignes héritiers s’empresseront de publier celles qui peuvent contribuer au progrès des sciences et des lettres. Tout ce-qui portera le nom de M. Corréa sera recu avec le plus grand intérèt, ” OUVRAGES DE M. CORRÉA. * Io. M. Corréa ayant rassemblé un grand nombre de ma- nuscrits précieux sur l’histoire de Portugal, il publia, par ordre de l’Académie royale des sciences de Lisbonne : ro. Vie de l'infant Edouard; 20. Collections des chroniques et documens inédits des quatre règnes de Jean 1, Edouard, Alphonse et Jean IT de Portugal. Il. On the fructification of the submersed Algæ. — Phulosophical Transactions 1706, p. 494. Depuis que l’on a étudié les Algues avec tant de soin, ce Mémoire a presque entièrement perdu son intérêt. Mais on en sent tout le mérite lorsqu'on se reporte à l’époque où écrivoit l’auteur , et où l’on avoit encore si peu étudié la fruc- tification des plantes marines. M. Corréa se trompa, sans doute, lorsqu'il soutint que le 7zcus contenu dans les vési- cules des Algues en étoit le pollen; mais du moins il entrevit quelques vérités, et son travail excita les observateurs à faire des recherches plus approfondies. 229 Norice Ilo. On à submarine forest on the east coast of En- gland. — Philosophical Transactions 1709, p. 145. L'auteur donne dans ce travail une description fort dé- taillée des forêts submergées du Lincolnshire, et cherche à établir par une suite de raisonnemens et de faits l’histoire de leur engloutissement. IVo. On iwo genera of plants belonging to the natural family of the Aurantia. — Transactions of Linnean society, vol. V, pag. 218. Deux plantes avoient été appelées, l’une par Linné, Crateva marmelos; Yautre par Kœnig, Crateva balangas. Avec la sagacité qui le distinguoit, Corréa reconnut que non- seulement elles n’appartenoïent pas au genre crafeva, mais qu’elles devoient même sortir de la famille des Capparidées. Il en examina soigneusement les caractères; il reconnut l’iden- tité de ces caractères avec ceux de la famille des Orangers, et il fit des deux plantes deux genres nouveaux, Æzgle et Feronia qu’il décrivit d’une manière très-détaillée. Vo. On the Doryanthes a new genus of plants from New-Holland next akin to the Agave.— Transactions of Linnean society, vol. VE, p. 218. Dans ce petit Mémoire, l’auteur trace avec habileté les caractères du beau genre Doryanfhes , et montre qu'il doit être placé près de l4gave. + Vlo. Observations sur la famille des Orangers et sur sur M. CORRÉA DE SERRA. 223 les limites qu la circonscrivent. — Annales du Muséum, vol VI,:p. 377. L'auteur examine dans ce Mémoire quels sont les carac- tères de la famille des Orangers. Prenant pour type le genre Citrus, Vun des mieux connus de cette famille, il passe en revue l’organisation des diverses parties des espèces de ce genre, et cherche jusqu'à quel point d’autres genres peuvent s’écarter de la même organisation, sans devoir cependant être éloignés du groupe des Orangers. Ce travail peut servir de modèle aux botanistes qui discutent les rapports des plantes. On y remarque une tournure originale et une vivacité d’es- prit qui ajoute un nouveau prix à la justesse de l’observation. VIlo. Mémotre sur l& germination du Nelumbo.— Ann. du Mus., vol. XEV, p. 174. Lorsque l’auteur composa ce Mémoire, une discussion s’étoit élevée entre deux botanistes célèbres sur la classifica- on du Velumbo. M. Richard rapportoit cette plante aux monocotylédones; M. Mirbel, au contraire, en faisoit une dicotylédone et regardoit le corps radiculaire de Richard comme formé de deux cotylédons. M. Corréa prit un parti mitoyen entre ces deux illustres adversaires. Pour lui les co- tylédons de M. Mirbelsont, comme pour M. Richard, un corps radiculaire ; mais il n’en considère pas moins le VeZumbo comme monocotylédon, et il lassimile à la Cuscute qui, sans avoir de lobes, doit cependant être placée au milieu des végétaux bilobés. Les botanistes ne regarderont peut-être pas la question comme décidée; mais le mémoire de M. Corréa cr 224 Norrce Es té restera toujours comme une preuve de cette finesse d’ob- servation qu'il portoit dans tous ses travaux. Ville. Dans unesuite de mémoiresinsérés dans les Annales du Muséum , tom. VIIE, IX et X, M. Corréa, marchant sur © Jes traces de Gærtner, a donné sous le titre d'Observations | carpologiques , les caractères d’un assez grand nombre de fruits; et chaque fascicule est précédé de généralités dont quelques unes sont du plus haut intérêt. Ainsi il montre la nécessité de décrire avec les fruits les organes accessoires qui persitent autour d'eux, et qu'ilappelle z2dupzæ. Il entre dans des détails fort curieux sur ces faisceaux de fibres qu’il nomme cordon pistillaire , et qu'il avoit déjà fait connoître dans les Mémoires de la Société royale de Londres. Ailleurs il cherche à montrer la différence de l’embryon monocotylédon et de l'embryon bilobé, et c’est dans cette partie de son travail qu'il indique cette idée ingénieuse, et vraie peut-être, qu'il a depuis développée dans les Bulletins de la Société philoma- tique, savoir que toutes les semences ont originairement un périsperme, mais qu'il n'est pas dans toutes absorbé à la même époque par la plantule. A la tête d’un autre fascicule, on trouve une comparaison extrêmement ingénieuse entre les fruits des monocotylédons et ceux des dicotylédons, com- paraison que l’auteur termine en concluant : 10. qu'il y a, proportion gardée, plus de fruits monospermes parmi les monocotylédons que parmi Îes dicotylédons; 20. que le nombre trois domine dans les diverses parties des fruits polyspermes monocotylédons et le nombre deux et cinq dans les dicotylédons. sur M. CORRÉA DE SERRA. 225 IX. Mémoire sur la valeur du périsperme, considéré comme caractère d'affinités des plantes. — Bulletin de la Société plulomatique , vol. XE, pag. 350. L'auteur, adoptant dans ce Mémoire les idées de Malpighi, suppose que tout embryon végétal nage depuis le premier moment de sa formation dans la liqueur de l’ennios. C’est, dit-il, de cette liqueur que l'embryon tire par absorption toute sa nourriture; et, lorsqu'il est complet, ce qui reste forme le périsperme. Dans les plantes dont les graines man- quent de périsperme, l'embryon n’a employé qu'une ab- sorption simple et uniforme. Dans les semences où le péris- perme est d’une nature semblable à celle de l'embryon, le premier n’est que l’excédant de la substance qui a servi à former celui-ci; le périsperme a alors peu d'importance et peut tout au plus fournir des caractères spécifiques. Lorsqu’au contraire le périsperme et l'embryon sont d’une nature dif- férente, la liqueur de l’amnios devoit nécessairement con- tenir un mélange de diverses substances, l’absorption a opéré leur séparation, et alorsle périsperme prend, suivant l’auteur, une valeur caractéristique qu’il n’a pas dans le cas de l’ho- mogénéité. Xo. De l’état des sciences et des lettres en Portugal à la fin du dix-huitième siècle. — Archives littéraires de l’Europe, 1e. vol., page 63. Ce Mémoire est divisé en deux parties : dans la premiere, M. Corréa fait remarquer, que lors de la renaissance des lettres en occident, les Portugais marchèrent pendant un Mém. du Muséum. 1 11. 29 226 Notice demi-siècle à l’égal des nations les plus éclairées; il avoue que la fin du règne de Jean HT arrêta tous les progrès que les sciences avoient faits en Portugal, et il explique les causes de cette décadence. Il passe ensuite aux heureux effets du règne éclairé de Joseph Ler.; ce fut pendant ce règne qu'un grand nombre d'écoles primaires, un jardin botanique, un Muséum d'histoire naturelle, etc., furent établis à Lisbonne, que les entraves que l'ignorance et la superstition avoient mises à la publication et à l’introduction des livres, furent diminuées; enfin ce fut pendant ce règne que l’université de Coïmbre fut réformée, et mise sur un pied digne deslumières du temps. M. Corréa donne de grands détails sur cette uni- versité; cependant en rendant justice aux services qu’elle a rendus, il laisse échapper contre elle quelquestraits sâtiriques. Dans la seconde partie de ce Mémoire il donne de très- grands détails sur la création de l’Académie royale des sciences de Lisbonne, il en cite les travaux les plus intéressans, et fait remarquer l’heureuse influence que ce corps savant a eu sur les progrès des sciences, et de l’industrie en Portugal. Il ter- mine ce Mémoire en donnant une idée de l'Ecole mititaire et de celle pour la marine, de la Société royale de géographie, et enfin, en se livrant à quelques réflexions sur Pétat de l’université de Coïmbre, à l’époque où il écrivoit. XIo. Sur l’Agriculture des Arabes en Espagne. — Arch. litt., 1. 2, pag. 280. D'accord avec tous les gens instruits dans l’histoire d’Es- pagne, M. Corréa pense que l’agriculture n’a jamais été si florissante dans ce pays, que lorsqu'il étoit habité par les sur M. CORRÉA DE SERRA. Da Arabes, et ilse propose dans ce Mémoire, divisé en deux ar- ticles, d'examiner la cause de cette supériorité. Pour décider une question aussi intéressante, il fait l'analyse du traité complet d'agriculture d’Ebn-el-Awam, et du fragment d’un manuscrit sur la culture des arbres, par Kutsami ou Cucami, auteur chaldéen, que l’arabe-espagnol traduisit dans sa lan- gue, en l’accommodant à l’agriculture de l'Espagne, et en y faisant beaucoup d’additions. De l'examen de ces deux ou- vrages résulte , 1°. que du temps des Arabes on cultivoit en Espagne un grand nombre de végétaux utiles, dont quelques- uns sont à présent tout-à-fait inconnus, et d’autres à peine cul- tivés; 20. que les Arabes apportoient une grande attention aux différences des terres et à la composition des engrais; 30. qu’ils donnoient une grande quantité de labours aux terres, ce qui suppose, outre des connoïssances en agriculture, le bon marché de la main-d'œuvre, et conséquemment une grande population; 4°. qu’ils avoient eu grand soin de profi- ter de l’expérience des autres peuples. M: Corréa conclut donc que la supériorité de l’agriculture en Espagne, du temps des Arabes, doit être attribuée à leur nombreuse population, à leur laborieuse industrie, ainsi qu'aux connoissances pra- tiques dont ils s’étoient enrichis. XIlo. Sur les vrais successeurs des Templiers, et sur leur état actuel.— Arch. litt., 1.7, pag. 273. L'auteur donne un abrégé de l’histoire de l’ordre des Templiers en Portugal, et il fait ensuite remarquer la diffé- rence qui exista toujours entre les Templiers portugais et ceux des autres nations. En Portugal ils furent toujours oi 228 NorTice fidèles, soumis et utiles : ce qu’il attribue aux sages conditions qui leur furent imposées lors de leur réception, et à la sur- veillance que le gouvernement exerça toujours sur eux. Il raconte ensuite tout ce que le bon roi Denis ( connoissant non-seulement leur innocence, mais aussi leur utilité) fit pour les conserver dans ses Etats; il fut cependant obligé de les supprimer; mais sept ans après il créa l’ordre du Christ, auquel il donna les biens, la règle, l’habit, etc., des Templiers, et même dans le décret de création il dit plus d’une fois, que cet ordre n’est que la réforme de l’ordre des Templiers; conséquemment, selon M. Corréa, ce n’est pas dans des as- sociations secrètes qu'il faut chercher les successeurs des Templiers, mais on doit les voir dans les chevaliers de l’ordre du Christ. Il termine ce Mémoire en faisant remarquer que c’est aux successeurs des Templiers queles Portugais doivent leurs premières découvertes. XIIL. Observations and conjectures on the formation and nature of the soil of Kentucky. — Transactions of the American plulosoplucal society. Philadelphia 1818. L'auteur cherche à prouver, par une suite de faits et de raisonnemens, que le sol de la partie du Kentucky appelée Elkoin-tract, est formé par une couche de végétaux marins que l’Océan a abandonnés en se retirant et qui n’ont été re- à A 2 a Q » couverts par aucun autre dépôt d’un poids plus considérable. XIVe. Considérations générales sur l’état passé et futur de l’Europe. La première partie a été publiée dans un ouvrage périodique publié à Philadelphie : 4e Æmeri- sur M. CORRÉA DE SERRA. - 229 can review. Cahier du mois d'octobre 1812. L'auteur n’a pas terminé la seconde partie, mais il en a donné une esquisse dans une brochure sur les affaires de Russie, publiée en 1813, par M. Harper. Ces deux articles sont fort intéressans; dans le premier il fait remarquer avec beaucoup de sagacité tous les événemens qui, depuis la destruction de l'empire d'Occident jusqu’à nos jours, ont influé sur les destinées de l'Europe. Dans l’esquisse jointe à l'ouvrage de M. Harper, il se livre à des conjectures sur l’avenir de l’Europe; ces conjectures sont écrites avec beaucoup d'esprit et une grande connois- sance de l’état politique de l’Europe. XVe. M. Corréa publia avec M. Cels un Mémoire sur l'identité ou la différence du rufabaga ou navet de Suède, et du chou de Laponie. De l’examen des caractères de ces deux plantes, ces deux savans concluent qu’elles constituent sans doute deux espèces jardinières ; ils croient même qu’elles sont des variétés de deux espèces botaniquement différentes. Le rutabaga, selon eux, appartient à l'espèce brassica na- pus, et le chou de Laponie au brassica oleracea. NOTICE Sur la Roue du Lapidaire dont on se sert dans les Indes Orientales pour tailler les pierres fines. PAR M. LESCHENAULT DE LA TOUR, Naturaliste du Roi. Cire roue du lapidaire se nomme, en langue Tamoule, Couroundum-sane: ele est composée avec le corindon réduit en une poudre plus ou moins fine, auquel la résine-laque sert de ciment; la proportion est, en volume, d’environ deux tiers de poudre de corindon, et un tiers de résine- laque. On met la poudre de corindon dans un vase de terre, et on la chauffe sur un feu clair, ordinairement fait avec les feuilles sèches du cocotier; lorsqu'elle est assez chaude, ce que l’on reconnoît quand, en plongeant un morceau de ré- sine, elle se fond facilement, on y jette celle-ci peu à peu, en remuant la poudre pour faire l’amalgame. Lorsque le mé- lange forme une pâte, on le met sur une table de pierre unie, et on le pétrit en le frappant avec un pilon; on le roule ensuite sur un bâton, et on l’expose à plusieurs reprises sur un feu de charbon, en le pétrissant toujours jusqu’à ce que l’'amalgame soit fait exactement dans toutes ses parties; on le Rouz pu LAPIDAIRE. 231 détache alors du bâton, et on le porte de nouveau sur la table que l’on a saupoudrée avec de la poudre de corindon très-fine, puis on l’aplatit en forme de roue : on se sert pour cette opération d’un rouleau en fer ayant la forme de celui des pâtissiers; on polit la roue en la frottant avec une plaque en fer et la poudre de corindon; on fait ensuite un trou dans le milieu avec une verge de fer ou de cuivre qui a été chauffée. On fait des roues d’un grain plus ou moins fin : les plus grossières servent à dégrossir les pierres gemmes, et les autres à les tailler; on les monte à peu près de la même manière que le tour à deux pointes. ( Joy. la figure jointe, pl. XVE, fig. 1.) L’ouvrier, assis à terre, fait tourner la roue de la main droite avec un archet, et il présente la pierre à tailler de la main gauche contre la roue que l’on a soin de mouiller et de saupoudrer de poudre de corindon. Pour donner le poli, on se sert de roues de plomb et de poudre de corindon très-fine. Cette espèce de roue de lapidaire, que l’on ne connoissoit pas encore en Europe, et dont j'ai apporté deux échantil- lons qui sont déposés dans les galeries du Muséum d’his- toire naturelle, pourroit probablement être imitée, avec quelque avantage, par nos lapidaires, en employant soit la poudre d’émeril, soit celle de diamant. 232 NOTICE Sur le Cocotier et sur ses produits , principalement sur ce qui est relatif à l'extraction de l'huile. PAR M. LESCHENAULT DE LA TOUR, Naturaliste du Roi. L> Cocotier, (Cocos nucifera) est un des arbres les plus utiles des pays chauds; il croît dans presque toutes les ré- gions équatoriales des deux Mondes. Il appartient à la division des plantes #120720cotylédones ; à la classe de la 20onoécie hexandrie de Linné; à la famille des Palmiers de Jussieu. Il aime le voisinage de la mer. Un terrein mélangé, dans une juste proportion, de sable et de terre végétale, lui con- vient le mieux; il s'élève à 6o ou 70 pieds; son tronc, d’une grosseur à peu près égale dans toute son étendue, porte à son sommet douze à quinze feuilles longues de plus de 10 pieds, composées chacune de deux rangs de folioles étroites et pointues; les feuilles inférieures sont inclinées, les intermédiaires sont plus ou moins horizontales; les jeunes feuilles sont droites; par cette disposition elles forment un beau panaclie, qui donne au port de cet arbre la plus grande élégance, et le rend l’ornement des massifs de ver- dure qu’il domine. Les nouvelles feuilles, lorsqu'elles ne sont pas encore dé- SUR LE CocorTter. 233 veloppées, forment un gros bourgeon allongé et fort tendre, que l’on nomme Chou; il est très-bon à manger, mais en le coupant on feroit périr l'arbre. Tontes les parties du Cocotier sont utiles à l’homme. Son tronc se fend en soliveaux, que l’on emploie le plus ordi- nairement dans les constructions ; mais il a l'inconvénient d’être souvent attaqué par les fourmis blanches; elles dé- truisent la partie médullaire qui, comme dans tous les autres palmiers, est interposée entre les fibres ligneuses. Les feuilles de Cocotier servent à former les clôtures et à couvrir les maisons; on ne coupe pour cet effet que les vieilles feuilles : le cent se vend quatre fanores ( 1 fr. 20 c.). Mais c’est du fruit que l’on retire les plus grands avan- tages. Ce fruit est un drupe de la grosseur d’un melon moyen , composé de fibres fortes, flexibles et élastiques, qui recou- vrent un noyau monosperme à coque dure, d’une seule pièce, marquée de trois sutures saillantes, et creusée à sa base de trois trous inégaux. Le Cocotier commence à porter des fruits à cinq ans, flest en plein rapport à dix ; on assure qu'il produit pendant plus d’un siècle. A l'aisselle de ses feuilles il sort, deux fois par an, cinq à six panicules, nommées régimes, qui, d’abord, sont enfermées dans de grandes spathes ; en se développant, elles se chargent de petites fleurs jaunâtres, les unes mâles, les autres femelles, auxquelles succèdent, pour chaque régime, une dizaine de fruits qui mürissent succes- sivement. La coque de ces fruits, lorsqu'ils sont jeunes, est tapissée intérieurement d’une chair tendre, blanche, peu épaisse, et ayant le goût d'amande ; le reste de l’intérieur Mém. du Muséum. 1 11. 30 234 SUR LE COGOTIER. contient un grand verre, environ, d’une liqueur légèrement laiteuse, d’un goût très-agréable , et rafraichissante; en mü- rissant, la chair qui tapisse le noyau devient plus ferme, et acquiert l’épaisseur d’un demi pouce; le liquide qui rem- plissoit l’intérieur diminue et disparaît presque entièrement. Si l’on veut retirer du Cocotier le £art ou vin de palmier, nommé, sur la côte de Coromandel, kalou, il faut sacrifier les fruits : lorsque la panicule est encore enfermée dans sa spathe, on la coupe à deux pouces de son extrémité, et on fait dans cet endroit une ligature ; pendant plusieurs jours on frappe légèrementile long du régime, pour exciter l’écoule- ment du tari; lorsque l’on voit qu'il s'échappe quelques gouttes, on enlève la ligature, et on attache un vase en terre pour recevoir la liqueur. Chaque Cocotier en fournit environ une pinte par jour , moitié le matin et moitié le soir; on a le soin de rafraichir à chaque fois la plaie par une nouvelle taille. Lorsque les Cocotiers sont dans un bon sol, qu’on les arrose et que l’on essore la terre autour d’eux, ils peuvent donner jusqu’à deux pintes de liqueur. L’extraction du tari les épuise ; c’est pour cette raison qu'ordinairement, sur la côte de Coromandel, on fait alter- nativement une récolte de tari et une récolte de cocos. Le produit d’un Cocotier peut se calculer à environ une roupie et demie ou deux roupies par an (3 fr. Go c. à 4 fr. 80 c. ). Le tari, lorsqu'il est frais, est une liqueur agréable, mais enivrante; il fermente et $’aigrit promptement : en le distil- lant, on obtient environ un cinquième de son volume en arack à 50 deerés; on en fait du vinaigre: 1l sert de levain pour la boulangerie , et de ferment pour Us boissons que l’on prépare dans l’Inde. sur LE Cocotier. 235 Avec l'écorce fibreuse, ou 6rou, qui recouvre la coque, on prépare une filasse dont on fabrique des cordages. Avec la coque mûre on fait divers ustensiles, et de petits vases susceptibles d’un beau poli, et pouvant être élégam- ment sculptés. Lorsque l’amande est müre on s’en sert, fraiche et rapée, pour assaisonnement dans plusieurs préparations alimentaires. À Java, et dans les autres iles de la Sonde et des Moluques que j'ai visitées, l'huile retirée à chaud de l’amande fraiche sert exclusivement à la cuisine des indigènes; ils n'emploient ni la mantaigne ni le saindoux. de Sur toute la côte de Coromandel il se fait une consom- mation considérable d'huile de cocos, pour la lampe, pour les cérémonies religieuses, et pour diverses préparations dans les arts et dans la médecine ; on l’obtient par expression de la manière suivante. Lorsqu'on a dépouillé le fruit de son écorce, on casse la coque, et on l’expose à l'air et au soleil pendant deux jours; l’amande se sépare alors facilement de son enveloppe; on la coupe ordinairement en deux parties : elle prend alors le nom de cappera; on l’expose pendant environ huit jours au soleil, pour faciliter le développement des parties huileuses, et en- lever toute l'humidité des amandes; le cappera, bien pré- paré, doit être sec et cassant, et n'avoir pas une odeur forte ou désagréable; il doit être dans sa cassure d’un blanc grisatre. La côte de Coromandel ne fournit pas la quantité néces- saire à sa consommation; on en retire beaucoup de la côte de Malabar, des îles de Ceylan, des Séchelles, de Saint-Diégo- 30” 236 SUR LE COCOTIER. Garcia : celui des Séchelles est le meilleur. On m'a assuré que six cocos au choix pouvoient donner une pinte d'huile; mais ordinairement d'un candy de cappera, qui pèse quatre cent quatre-vingts livres marc, et qui contient douze cents cocos, on ne retire que trois cent soixante serres : la serre pèse huit onces marc, et la pinte vingt-deux onces. Le prix du candy de cappera a varié, depuis que je suis dans l'Inde, de cinq à sept pagodes à l'étoile. (42 fr. à 56 fr. 8o c.) Le moulin à huile de la côte de Coromandel est formé d’une espèce de mortier creusé dans un tronc de tamarinier, profon- dément enfoncé dans le terrain, et élevé au dehorsd’environ trois pieds ; on le choisit du plus grand diamètre possible; pour n’en rien diminuer on laisse subsister ses irrégularités. Le réservoir à un pied de diamètre à son orifice, et vingt pouces de profondeur; il a une forme conique, à partir de l'ouverture jusqu’à la profondeur d’un pied, où le diamètre n’est que de huit pouces; il s’élargit ensuite , et forme à sa base une cavité sphérique, dont la grande largeur est de dix pouces. Le pilon est une solive ronde de cinq pieds de long, dont la partie inférieure est arrondie et la partie supérieure terminée en pointe; cette pointe est reçue dans un trou pratiqué dans une pièce de bois qui est accolée à une autre au moyen d'un lien de corde : celle-ci tient, par une mortaise et une cheville, à l'arbre qui sert à la fois de bascule et de moteur à l'appareil. (La figure ci-jointe, PI. XVI, fig. 2, donnera une idée exacte decette machine fortsimple.) L'arbre, quia 18 pieds de longueur, tourne à la base du mortier dans une gorge qui y est entaillée ; à l’autre extrémité sont attachés deux bœufs, qui donnent le mouvement circulaire; on charge cette partie Zom..1. DATA SUR LE COCOTIER. 237 de plusieurs grosses pierres, pour augmenter l'effet : quelque- fois c'est le conducteur des bœufs qui sert de poids. Les deux morceaux de bois qui, en fixant le pilon, dirigent son action, tirés en bas par la force de la bascule, font ineliner le pilon de façon que sa partie inférieure presse contre les parois de la cavité sphérique, et que sa face latérale presse également contre les parois de la cavité conique; il écrase par ce moyen, dans son mouvement circulaire, le cappera qu'il rencontre, et le réduit en pâte : on ajoute au fur et à mesure de nouveau cappera; la pâte s'épaissit, l'huile se sé- pare du marc et s'échappe par en haut, où elle est retenue sur la table qui entoure l'ouverture du mortier par un rebord d’un pouce; on la recueille avec des cuillers. Lorsque le marc ne forme plus qu'une masse sèche, on le brise à coups de pince et on l’enlève: il reste au fond de la cavité une portion de l’huile, que l’on retire en y trempant des chiffons qui s’en imbibent. Pour exprimer l'huile d’un candy de cappera, il faut pendant quatre jours le travail du moulin durant dix heures; chaque journée on y emploie deux hommes et deux bœufs; un des hommes conduit les animaux, l'autre soigne le moulin et recueille l'huile. On paie par candy treize roupies (7 fr. 20 c.), et le marc reste à l’ouvrier, ou il sert à nourrir les bœufs ; les pauvres gens le mangent lors- que le grain est cher. Le pilon doit être fait d’un bois lourd et dur; on emploie ordinairement celui de l’Æcacia Arabica (acacia d'Arabie ), du Mimosa Lebbeck (bois noir), du Vertwm anti-dyssen- tericum (velle morun). J’ai encore vu des pilons faits avec la Swzeteria chloroxylon (bois satin), de Ceylan. 238 sur LE Cocorier. Le moulin à huile, de la côte de Coromandel, appartient : évidemment à l'enfance des arts mécaniques; on voit aisé- ment quil a pour origine le mortier ordinaire, auquel il a fallu donner, pour en tirer les substances huileuses, de plus grandes dimensions, et une action plus forte; et alors, faute d’un levier suflisant, on a été obligé de substituer à la per- cussion verticale la pression latérale et -eirculaire, dont lac- tion est bien moins considérable que celle de nos moulins d'Europe. Un autre vice essentiel de cette machine, est la multiplicité des frottemens, celui dans une double direction du pilon, et celui de l’arbre contre la gorge de la base du mortier; ils énervent inutilement, si j’ose m'exprimer ainsi, la force motrice, de sorte que, comme on l’a vu précédem- ment, les résultats de ce moulin ne sont point en proportion avec-la force et le temps employés. Le Cocotier a plusieurs ennemis qui lui portent de grands préjudices; le plus dangereux est un scarabée noir (Orycées Rhinoceros), qui dévore les jeunes feuilles non encore dé- veloppées : si on ne prenoit pas les précautions nécessaires, cet insecte feroit périr un grand nombre d'arbres. Le gou- vernement paie, à Pondichéry, deux hommes qui n’ont d’au- tre occupation que d'aller à la chasse de ce scarabée. La marte des palmiers ( en tamoul #20ra-royé : Parado- œurustypus, Fréd. Cuvier, Mém. du Mus. tom. 9), dont j'ai envoyé un individu vivant à la ménagerie du Roi, grimpe sur les arbres, et ouvre les jeunes cocos pour boire l’eau qu'ils renferment. Enfin l’écureuil palmiste, qui profite des trous faits par la marte pour manger l’amande des cocos. 239 ES, NOTE sur la présence de la Cholesterine dans la bite de l’homme. (Lue à l’Académie des Sciences, le 19 juillet 1824.) PAR M. CHEVREUI. LORSQUE Scheele eut retrouvé dans l'urine de l’homme l'acide urique qu'il venoit de découvrir dans les calculs urinaires, l’origine de ces cal- culs fut expliquée; et si dans la suite on a eu des idées justes sur la nature des lithontriptiques et sur le régime qu’on doit prescrire aux per- sonnes attaquées de la gravelle, c’est dans l'étude des propriétés chi- miques des calculs qu’on les a puisées. Le service que la chimie à rendu à la médecine sous ce rapport, n'a fait penser que l’Académie accueille- roit avec intérêt la découverte de la cholesterine dans la bile humaine, découverte qui explique l'origine des calculs biliaires appelés adipocire, comme la découverte de l'acide urique a expliqué l’origine des calculs urinaires formés de cet acide. La chimie donnera-t-elle sur le traitement des calculs biliaires de cholesterine des indications aussi satisfaisantes que celles qu’elle a données relativement au traitement de la gravelle? C'est ce que le temps nous apprendra. Je vais exposer succinctement le moyen par lequel j'ai extrait la cho- lesterine de la bile humaine. Je précipite la bile par l'alcool, après l'avoir étendue d’eau filtrée et concentrée; je traite l'extrait alcoolique par léther; celui-ci évaporé spontanément dépose une substance cristallisée qui, après avoir été purifiée, présente les propriétés suivantes : Elle n’est ni acide ni alcaline aux réactifs colorés. Elle cristallise comme la cholesterine , soit qu’elle se refroidisse après qu’elle a été fondue par la chaleur, soit qu’elle se dépose de l'alcool et de l'éther. Elle exige plus de 100 degrés pour se fondre. Elle n’est point saponifiée quand on la tient pendant vingt heures dans l’eau de potasse bouillante. 240 CHOLESTERINE. Mise en contact avec l'acide sulfurique elle se colore sur-le-champ en rouge orangé. Miseencontactavecl’acidenitriqueellesecomportecommelacholesterine. Toutes ces propriétés appartiennent à la substance cristallisée extraite de la première bile humaine que j'ai examinée. Cette bile provenoit du cadavre d’un homme mort deux heures après être tombé d’un troisième étage; le crâne avoit été fracturé et l'oreillette droite du cœur avoit été déchirée. J'ai retrouvé la cholesterine dans des biles extraites de huit individus différens par le sexe, l’âge et la maladie : la bile d’un homme mort d’une phthisie pulmonaire n’en contenoit que très-peu, celle d’un homme mort d’une carie à l'articulation iléo-fémorale en contenoit beau- coup; il en étoit de même de la bile d’une femme de soixante-dix ans, dont la vésicule renfermoit neuf calculs de cholesterine; la bile de cette femme étoit remarquable en cela qu'il ne se trouvoit qu’une petite quantité de la matière qui paroît dissoudre la cholesterine dans la bile humaine. Toutes contenoient en proportions variables des acides margarique et oléique. À J'ai trouvé dans toutes les biles que j'ai examinées la substance rouge que m'a présenté le sérum du sang des enfans attaqués de l’ictère et de l'induration du tissu cellulaire. Cette substance est insoluble dans l’eau froide, et presque insoluble dans l'alcool et dans l’éther. Elle est très- soluble dans l’eau de potasse, la solution est orangée, mais par le contact de l’oxigène elle se décolore en passant successivement par les nuances du jaune au jaune-verdâtre. L’acide nitrique la rend bleue, pourpre, rouge, puis Jaune. L'acide sulfurique concentré la fait passer au jaune, au vert, et enfin au bleu. Cette dissolution rappelle celle de l’indigo. J'ai tout lieu de penser que la substance que je viens de décrire est un principe colorant à l'état de pureté. La bile d’un ours mort au Jardin du Roi m'a présenté une quantité no- table de cholesterine, ainsi que des acides margarique et oléique. La bile de porc dont je n’ai examiné qu'un échantillon, cède à l'éther une petite quantité d’une substance qui m'a paru être de la cholesterine, et une matière grasse qui m'a paru formée d'acides oléique et margari- que, au moins a-t-elle été réduite en ces acides dans des circonstances où les stéarines et l’oléine n’éprouvent aucun changement. Sur la Nature, la Formation et les Usages des Pierres qu'on trouve dans les Cellules auditives des Poissons. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. Aviv ramené dans mon dernier article, contenant une nouvelle détermination de quelques singularités ostéologiques chez la carpe, les osselets qu'y avoit découverts Weber, à des dépendances du système vertébral (1), j'ai cru pouvoir insister sur cette conclusion naturelle que dans l’impossibi- lité de considérer ces osselets comme les analogues du mar- -teau, de l’enclume et de l’étrier, mon ancienne détermina- ton de ceux-ci quant aux poissons , si elle étoit d’ailleurs fondée sur des motifs avérés, devoit rester acquise aux trois parties de l’opercule. | Toutefois cette conclusion n'étoit pas absolument rigou- reuse, puisque Casserius avoit plus anciennement aperçu et proposé une troisième solution. Ce fut, quand décrivant le premier l'organe de l’ouie chez les poissons, il y eut trouvé trois osselets, les trois corps solides, que depuis on s’est ac- cordé à désigner par le nom de prerres. Le lieu de ces pré- (1) Voyez, pour un nouveau développement de ces idées; la note imprimée à la suite de ce Mémoire. Mém. du Muséum , 1. 11. 37 242 PrERREs DANS LES CELLULES AUDITIVES tendus osselets existans dans le centre de l’appareil auditif, soutenus par une gelée tremblante, et enveloppés par les derniers rameaux du nerf de la septième paire, parut à Cas- serius une circonstance favorable à sa supposition, à l’idée qu'il découvroit chez les poissons les véritables os de l’ouie, c’est-à-dire les pièces analogues chez l’homme et chez les quadrupèdes au marteau, à l’enclume et à l’étrier. Cette opinion est présentement abandonnée; je crois d’au- tant moins devoir y revenir, que je l’aurai discutée de nou- veau, quand j'aurai énoncé les principales considérations de cet écrit; Mémoire dans lequel je me propose d'examiner ex professo la nature, la formation et les usages des préten- dus osselets ou des pierres d'oreille des poissons. Qu'il y ait des pierres au fond de cellules auditives, c’est un fait dont la singularité a déjà beaucoup exercé la sagacité des naturalistes. M. Defrance, qui a remarqué qu’on en trouvoit aussi à l’état fossile (r),et qui a craint que ce fait ignoré avant lui n’occasionnât quelques méprises quant à la détermination des coquilles fossiles, s’est occupé dans ce point de vue des pierres auriculaires et en a rassemblé une suite assez nombreuse. Mais déjà plus anciennement divers 200- tomites, Klein, Koëlreuter, Pohl, Camper, Comparetti, et principalement MM. Cuvier et Weber, les avoient décrites. Camper en a.examiné très-attentivement les relations anato- (1) Les pierres auriculaires fossiles du cabinet de M. Defrance , proviennent des carrières de Grignon , Loignan et Parnes ; lieux abondans en coquilles fossiles. J'ai de plus remarqué dans ce riche cabinet une autre de ces pierres fossiles que M. Faujas de Saint-Fond avoit rapportée des environs de Hesse-Cassel , et qu’il y avoit trouvée dans un terrain volcanique. DES Poissons. 243 miques, pour en conclure, je crois prématurément, une théorie sur les usages. Il a prétendu que suspendues dans un fluide légèrement visqueux, elles devenoient passibles d’é- branlemens propres à être nettement perçues par les nom- breuses fibres terminales du nerf acoustique. Gamper n’au- roit donc point donné attention, en combinant les élémens de sa détermination , à ce fait décisif, qui l'eût sans doute porté à ranger au contraire les perceptions provenant de semblables secousses parmi les sensations d’un simple tou- cher; à ce fait, dis-je, que les pierres étant renfermées dans des cavités sans issue à l’extérieur, sont par là privées de ressentir la propagation des vibrations sonores, vibrations qui ne peuvent provenir que du dehors. Incapables par consé- quent de faire acquérir aux poissons une connaissance exacte des diverses qualités du son, les pierres auriculaires ont né- cessairement un autre objet que nous rechercherons ulté- rieurement, et par conséquent, après que nous nous serons rendus attentifs à ce qui peut en révéler l'essence et les con- ditions matérielles. Leurs formes diverses et principalement leur diverse con- sistance ont fixé l'attention. On les trouve ou fortement ré- sistantes et dures, ou singulièrement fragiles; elles sont, dans quelques espèces, fragiles au point de se laisser écraser et réduire en poussière sous l’effort d’une très-foible pression. On en connoît qui sont entièrement molles ou qui même n'ont qu'une consistance et une apparence muqueuses. Mais avant de commencer l'énumération de leurs qualités physi- ques, nous les examinerons sous un rapport dont personne ne 31 244 . Pierres DANS LES CELLULES AUDITIVES s’est encore occupé, sous celui de constituer un fait pure- ment et exclusivement icthyologique. Effectivement, iln’y a des pierres d'oreille que chez les pois- sons. Généralement je ne rencontre point de semblables ex- ceptions chez les animaux vertébrés que je ne m'en fasse un sujet de difficulté, et que je ne cherche aussitôt à m'expliquer de pareilles anomalies; car si, pour les personnes sans ins- truction comme sans vues philosophiques, tout diffère ; tout au contraire, à l'égard d’un naturaliste sagace et laborieux, tout .est lié par de communs rapports; tout l’est véritable- ment, du moins par un enchainement qu'un travail opiniâtre et que des méditations bien dirigées et approfondies ne man- quent jamais de faire découvrir. Sans les résultats que l’es- prit de ces recherches fait pressentir, l'existence des pierres auriculaires, qui n’auroient encore été trouvées que chez les poissons, déposeroit contre l’universalité du principe de l’unité de composition. ; Commençons par exposer les faits. On a vu jusqu'à trois pierres pour un côté dans quelques espèces, et ces pierres sont logées dans des portions différentes des cellules audi- tives; toutefois cette différence est renfermée dans des limites très-resserrées : leurs trois cavités sont bout à bout et à peu de distance, ou même elles se réduisent à deux; mais dans tous les cas elles sont comprises dans le même appareil, dans le long tuyau dont les canaux semi- circulaires font partie. Nous allons être attentifs à la situation de ces parties : car de cette exacte connoissance dépend la solution des prinei- pales questions. Le vestibule existant vers la coïncidence des canaux semi- pes Poissons. 245 circulaires, contient la pierre la plus voisine du palais; un sac en arrière en renferme une seconde, et quelquefois aussi la troisième; celle-ci, cependant, se trouve le plus souvent logée dans une large anfractuosité de l’occipital inférieur. Ces espaces, quelle qu’en soit la légère variation de forme ou d'écartement, communiquent toujours ensemble ; ils sont remplis d’un fluide huileux ou seulement aqueux, suivant les espèces, du fluide qui baigne les masses cérébrales, du même fluide aussi que contiennent et que fournissent les cavités coniques des corps vertébraux. Les pierres reposent au sein de ces masses liquides ; le nerf acoustique aide à les y soute- nir: car c’est immédiatement de ce nerf que les plus fortes de ces pierres sont entourées; les derniers rameaux nerveux les enveloppent et sont rangés sur leurs bords comme des étamines répandues autour de leur pisul; les filamens ner- veux serrent les pierres d’assez près, pour laisser à leur superficie des traces manifestes, qui sont des stries sur les parties plates, et des crénelures sur les bords. Ces empreintes, qui présentent les pierres comme étant le but final des épa- nouissemens nerveux de lappareil auditif, qui ramènent ainsi sur des relations intimes et exclusives, et qui font en effet connoître un enchevètrement de parties d’un caractère décidé, avoient bien pu donner à penser que ces pierres exercoient une influence prédominante sur l'organe auditif. Que ce soit comme cause ou comme effet, ce que je ne puis encore me permettre de développer, il est certain qu’elles sont rattachées à une fonction générale; et je reviens sur la remarque que j’ai présentée plus haut. Ce seroït pour n'offrir qu'une considération isolée et purement ichtyolo- 240 Pierres DANS LES CELLULES AUDITIVES pique; or, nous ne saurions trop insister sur cette remarque, qu’une telle conclusion est trop formellement contredite par les faits qui servent de base à la théorie de l’unité de compo- sition, pour que nous ne nous laissions pas entrainer dans la voie, aujourd’hui si largement et si heureusement ouverte, des présomptions analogiques. Je n’aperçois qu'un moyen d'y rester engagé; ce seroit d'admettre que l'apparition si inattendue des pierres dans l’oreïlle des poissons dépendroit d’une modification fondamentale, en même temps qu’exclu- sivement ichtyologique, des lieux où l’on trouve ces pierres. Mais cela est sans le moindre doute. Cette grande et prin- cipale différence, capable d’engendrer la différence partielle, qui est le sujet de cette discussion, nous l’apercevons dans une concentration singulière des moyens auditifs des pois- sons. Chose extraordinaire en effet! voilà un organe des sens qui n’envoie au dehors et qui ne propage ainsi dans le monde extérieur aucun de ses rameaux interrogateurs. Qu'on songe à ce contraste : car rien n'est plus contraire à ce que nous avons appris en étudiant les animaux supérieurs, où tout nous convie à ne reconnoître d’organe des sens qu’autant que l’ap- pareil seroit terminé par des brins nerveux ; lesquels, en gagnant les surfaces tégumentaires, sont de véritables ten- tacules extérieurs, tout autant de moyens de se porter au devant des émanations les plus déliées des corps. Ù C’est l'esprit ainsi prévenu que je vois cependant, chez le plus grand nombre des poissons, les plus grands appareils au- ditifs ; savoir : de doubles canaux semi-circulaires, un vesti- bule spacieux, un sac aux pierres, de profondes anfractuosi- tés dans les os de l'arrière crâne, que j’aperçois enfin un aussi \ DES PoIssons. 247 grand développement de moyens, sans qu'il y ait d’issue à l'extérieur. Le nerf acoustique est grand, et il parvient à s'épanouir tout-à-coup en extrémités rameuses; 1l est ainsi contenu, sans quitter toutes les cellules auditives, dans le crâne, près et sur les côtés de l’encéphale. Or, la conséquence de tout cela seroit-elle que voilà un appareil puissant, à juger par le volume de ses composans, mais rendu nul par son défaut de relation avec le monde ex- térieur? Nous savons, au contraire, que les poissons enten- dent; et dans un Mémoire sur les fonctions auditives, par lequel nous terminerons toutes nos recherches sur leur oreille, nous ferons connoiître cinq modes différens d’audi- tion, dont nous croyons les poissons susceptibles, et que nous aurions discernés nettement ; étant au surplus bien per- suadé qu'il en est en outre plusieurs autres que de nouvelles recherches nous feront aussi découvrir. Quoi qu'il en soit des fonctions, question pour le moment étrangère à l’objet €e ce Mémoire, nous observerons que l'exposé qui précède renferme les considérations que nous désirions découvrir, c’est-à-dire qu’il nous donne, comme présentement aperçue, une circonstance nouvelle, ou cette modification fondamentale et exclusivement ichtyologique de l'organe auditif, dont nous avions pressenti l'existence. Chez les animaux à respiration aérienne, l'oreille, sans cesser d'y être praticable par les vibrations sonores, est ce- pendant fermée du côté du pavillon ou de la conque externe. La membrane du tympan, bien qu'employée à transmettre au dedans des impressions acquises en dehors, n’en .est pas. moins un diaphragme qui, sous le point de vue d’un épanche- 248 PIERRES DANS LES CELLULES AUDITIVES ment possible de liquide, prive l'oreille de toute issue exté- rieure ; mais d’ailleurs elle s'ouvre en dedans et indéfiniment, d'abord dans la trompe d’Eustache, et par celle-ci dans le pharynx, dont il est sans doute inutile de rappeler la commu- nication par la bouche avec le monde extérieur. Chezles poissons, les choses sont établies différemment: l’or- clusion est complète, étant entière du côté extérieur et tout aussi réelle en dedans, étant telle indispensablement en ef- fet de ce côté, puisqu'il n’est plus là de trompe d’Eustache pouvant servir de canal dérivatif des cellules auditives. Ce n’est pas que la trompe d’Eustache ait entièrement disparu ; tout au contraire, elle a suivi le sort tant des osselets de l’ouie que du cadre du tympan; elle s’est agrandie dans la même raison, étant devenue le large sinus où les arcs bran- chiaux et généralement lappareïil respiratoire, enlacés sous la base du érâne, ont trouvé des surfaces articulaires. L’oreille interne qui, chez les animaux supérieurs, s’accom- mode très-bien, puisque c’est avec un profit notable, de l’in- troduction en dedans de ses canaux du fluide ambiant, s’en seroit au contraire fort mal trouvée, si elle eût conservé la même disposition chez les poissons : mais elle est toute réflé- chie en dedans; car elle existe logée en partie dans de larges anfractuosités des os de la base du crâne, et en partie dans la boîte cérébrale elle-même, ne conservant aucune issue dans le large sinus qui remplace la trompe d’Eustache # chez les poissons. De ces faits, il suit que nous avons découvert une Fils tion Fndibientalé: par laquelle l’oreille des animaux aqua- tiques diffère de celle des animaux aériens; et en effet, les pes Poissons. 249 cellules auditives des premiers sont sans aucune issue au de- hors, lorsqu’à l'égard des seconds il en existe une bien dis- üncte du côté intérieur. Cela posé, voici bien d’autres faits qui s’en déduisent comme conséquences. Il n’y ajamais de perception parles nerfs qu'il n’y ait un ébranlement, une secousse des organes mis en jeu, et subsidiairement qu’il n’y ait un mouvement in- testin des fluides, un changement dans l’état chimique des molécules, qu'il ne se manifeste enfin le phénomène qu’on a embrassé sous le nom de secrétion. L’audition qui, pour l'essentiel, est la même dans les deux sortes d'animaux, donne heu aux mêmes secrétions; mais on voit tout de suite ce qui doit arriver, en raison de la disposition différente des lieux. L'une des cellules, qui s’ouvre et qui verse dans la trompe d'Eustache, abandonne et laisse se répandre au dehors toutes les molécules secrétées, au fur et à mesure qu’elles sont pro- duites; l’autre, au contraire, qui est fermée de toutes parts, est forcée de conserver au dedans et de laisser s’accumuler ces mêmes molécules. Cette autre cellule se conduit donc comme la vessie urinaire qui ne parvient pas à repousser au dehors les parties salines que secrètent avec l’urine les voies urinaires; ces parties salines obéissent à l'attraction que des molécules d’une aussi extrême ténuité exercent les unes à l'égard des autres : le noyau formé, d’autres molécules l’en- tourent; c’est une première couche, puis une seconde, puis une troisième, et ainsi de suite : et le corps, ainsi composé par couches concentriques, est ce qui a reçu le nom de ca/- cul ou de pierre vésicale. Ce seroïit donc aussi une sorte de calcul; ainsi l’indique Mém. du Muséum. 1. 11. 32 250 PIERRES DANS LES CELLULES AUDITIVES manifestement l’analogie ; c’est un calcul que contiennent les cellules fermées de l'oreille des poissons, mais que ne peu- vent jamais être appelées à contenir les cellules ouvertes de l'oreille des animaux supérieurs. Le lieu, l’action nerveuse, la fréquence du phénomène de l’audition, et la conservation forcée des matières secrétées, donnent aux pierres de l’oreille des poissons la même origine qu'aux calculs vésicaux, les établissent comme des productions en tous points sem- blables. Or si je démontre, comme je me flaite en effet de le pou- voir faire, que ces productions dépendantes de causes sem- blables sont de même nature, j'aurai répondu victorieuse- ment à la première des questions que je me suis faites précé- demment. Il n’y aura, de la spécialité d’existence de ces pierres chez les poissons, aucune argumentation à produire contre la doctrine de l’unité de composition : l'apparition in- attendue d’une aussi bizarre composition, et le lieu où elle existe, sont ainsi des faits nécessairement restreints à la classe des poissons, parce qu'il n’y a que chez les poissons que les cavités auditives soient fermées de toutes parts (1). (1) Grâces aux soins obligeans de M. le docteur Boïsseau, je puis rappeler ici quelques faits pathologiques qui se rattachent à cette question. Ainsi Bartholin avoit déjà fort anciennement raconté (Journaux,tomel, Obs. 45), que sa femme avoit rendu de petites pierres , sorties du conduit auditif. Duverney (Traité de l’Organe de l’ouie, page 156) attribue le plus grand nombre des sardités à des formations sous l'apparence de plâtre ; ce qu’il a vu sur dix à douze sujets. Haig- ton: et J. Frank croient de même que des secrétions de l’intérieur de l'oreille se dessèchent pour devenir une masse caséuse. Arnemann, professeur à Gœttingue, auroit encore annoncé l'existence dans la caisse auditive d’une matière semblable à de ia craie : et de mêmes faits ont aussi été depuis observés et recueillis par DES Poissons. 251 Mais d’ailleurs les pierres restent étrangères au phéno- mène de l'audition comme cause; elles ne lui appartiennent qu'à titre d'effet, de résultat. Ainsi la théorie de Camper, sur leurs usages, n'est pas admissible, et c’est ce que je prouve- rai encore mieux, lorsque, présentant les divers moyens qu'emploient les poissons pour amener les vibrations sonores sur les parties essentielles de l'organe auditif, je montrerai chez tous, d’abord, un tambour qui puisse ressentir ces vi- brations, et puis une porte qui s'ouvre ou se ferme, pour en faciliter ou défendre l'accès. Que les pierres d'oreille soient certainement de simples le savant et respectable médecin des Sourds-et-Muets, M. Itard. Ce célèbre mé- decin rapporte, dans son 7raïté des Maladies de l'oreille et de l'audition , tome I, chap. 14, que, dans des cas d’occlusion des cavités auditives, on trouve « en outre » du cérumen, tantôt une matière qui a la consistance et la couleur du fromage, » et tantôt cette même matière blanche devenue solide. M. Itard revient un peu » plus bas sur cette considération, c’est-à-dire , sur un petit cylindre de ma- » tière crayeuse assez dure pour n'être pas écrasée sous les doigts. » Ainsi, même chez l’homme , si différent des poissons , mais dans son état patho- logique ramené au même fait organique par l’occlusion de la trompe d’Eustache, un calcul est produit ; et il en est de deux sortes : de consistance gélatineuse , comme chez les poissons cartilagineux, et de consistance solide, comme chez les poissons osseux. Ces calculs surviennent à la suite d’inflammation, et les chambres audi- tives bientôt remplies cessent d’être accessibles aux vibrations sonores. Chez les poissons, au contraire, la présence des pierres auriculaires ne nuit nullement à l’audition; c’est que les chambres auditives chez ceux-ci ont une capacité respective infiniment plus grande que chez l’homme , que les pierres qui sont dans ces cellules , n’en remplissent que la moindre partie, qu’elles ne forment jamais diaphragme au-devant des N on et en général que les phéno- mènes vitaux ne sauroient jamais s’élever chez les poissons au degré d’énergie et à l'intensité d’action où ils parviennent dans les affections inflammatoires de l’oreille chez l’homme. 32 * 252 PrerrEs DANS LES CELLULES AUDITIVES concrétions salines, de véritables caleuls auriculaires, c’est ce qui résulte en outre de leurs conditions propres, soit chi- miques, soit physiques. 10. Propriétés chimiques. les réactifs les plus simples ont prise sur ces concrétions, d’où l’on avoit été amené à les étudier avec facilité sous le rapport de leurs élémens, et à les déclarer de la chaux carbonatée ; mais il entroit dans l'esprit de ces recherches de ne relater cette observation qu'après l'avoir vérifiée et refaite attentivement. M. Chevreul s’en est occupé à ma prière, et tous ses essais lui ont donné les mêmes produits que présente l'analyse des coquilles. Les pierres d’oreille sont donc, comme on l’a dit, composées de chaux carbonatée, en outre de quelques parcelles d’autres sub- stances salines; et le tout est mêlé à une petite quantité de matière animale. 20, Propriétés physiques. L'aspect des pierres est différent, suivant leur volume. Sont-elles petites? on diroit une calcé- doine laiteuse, d’un blanc bleuâtre, et d’une demi-transpa- rence; ou bien elles ressemblent encore, pour la consistance, le degré de transparence et l’indécision de la teinte, à des dents naissantes. Telles sont les pierres dans les espèces des genres z2uræna et pleuronectes. Chez des poissons plus éle- vés dans la série, elles sont plus compactes, deviennent plus dures, gagnent en opacité, sont plus ventrues, et passent au blanc d'ivoire : c’est ainsi dans les gadus, scarus, perca, et principalement dans les sccer@: J'ai dit plus haut qu’il en est qui s’écrasent sous les doigts: telles sont, je n’ose plus dire les pierres, mais les concré- tons calcaires de l'oreille des poissons cartilagineux; c’est i DES POIssONs. 253 une pâte, et à la surface plutôt une bouillie, ayant la situa- tion et conservant encore l'apparence des pierres : on croit voir de la chaux éteinte qui auroit pris un commencement de consistance. L'analyse chimique a trouvé cet autre pro- duit composé comme les pierres solides et dures des pois- sons osseux : M. Chevreul s’en est aussi tout nouvellement \assuré. Les pierres dures, sous le rapport de l’arrangement de leurs molécules, ont aussi fixé mon attention : le tissu en est fibreux ; quelques parties, usées sous de certaines faces, et polies avec soin, ont montré des stries annonçant une com- position par couches concentriques. Je ne puis mieux com- parer les apparences de ces pierres, quant à la texture, qu’à l’état visuel que montre la cassure de certaines coquilles, comme les porcelaines par exemple. Toutes ces observations sont, jusques-là, favorables à l’idée d’une formation inorganique, d’une formation dite très-justement pierreuse; ce sont des produits, que les or- ganes abandonnent dans l’état moléculaire et sans en suivre la destination ultérieure, des parties salines qui, secrétées, obéissent ensuite ou à l'entraînement d’un mouvement vital, ou à la seule loi de la gravitation, et qui se déposent enfin en un amas, tantôt sans adhérence ni consistance, et tantôt avec tenacité et solidité de ces parties. À tout ceci, on peut cependant opposer une assez forte objection, prise de la considération des formes, dont le re- tour est invariable dans chaque espèce : cette fixité, dans le détail des formes, semble annoncer des conditions organi- ques assez élevées, S'il en est ainsi, il devient seulement né- 254 Pierres DANS LES CELLULES AUDITIVES cessaire de rechercher quelles elles sont; car ces conditions peuvent être primitives ou secondaires. M. Cuvier a publié, dans le deuxième volume de ses Le- cons, page 457, une histoire descriptive d’un assez grand nombre de ces pierres : chaque forme est notée avec exacti- tude; dentelures, rainures, découpures des bords, dimen- sions respectives, épaisseurs et largeurs proportionnelles; vels sont autant de caractères, qui nous donnent la condition spécifique de chaque pierre, et par conséquent des indica- tions certaines pour découvrir les familles chez lesquelles chacune se rencontre. Cependant je doute que cette fixité de structure dénote une formation primitive, qu'elle puisse mème être attribuée à un commencement d'organisation ostéologique. J’ai dit, plus haut, le tissu des pierres fibreux ; celui des os est réti- culaire et celluleux; le tissu osseux doit son organisation au travail des extrémités artérielles, dont chacune sert de vé- hicule à la matière déposée : leur enlacement avec les der- niers rameaux veineux, nerveux et autres, explique lirré- gularité des dépôts et l'existence d’un très-grand nombre de petites cellules entre les filets osseux. Telle n’est nullement la formation des pierres ; leurs élé- mens, produits de secrétions, ou sont fournies, mêlées avec le liquide des cellules auditives. ou bien déposées, molécule à molécule, à la surface du fluide, au fur et à mesure qu’une portion de ce liquide est consommée et absorbée par suite. des phénomènes de l’audition; et 1l faut que ces élémens, à la manière des molécules dont les stalactites sont composées, aillent se déposer et se réunir au noyau commun. De telles DES Poissows. 255 concrétions ainsi établies par couches concentriques rappel- lent la formation des cristallins, et jusqu'à un certain point celle même des dents. « Dans le Poisson-lune, a dit M. Cu- » vier, même chapitre de ses Lecons, le sac ne contient pour » tout osselet (osselef est mis ici au lieu de pierre), que » quelques grameaux d’une matière plutôt muqueuse que » crétacée. » Cet exemple est un dernier témoignage dont nous nous autorisons pour dire les pierres un produit de lor- ganisation, Mais non une œuvre organisée. Leurs formes arrêtées, qui ont porté les premiers anato- mistes à en juger différemment et à les reconnoitre pour de vrais osselets, pour des dépendances du système osseux, sont le produit de circonstances secondaires; c’est le bassin, où les pierres sont admises à commencer et à croître, qui leur donne ses formes : elles prennent le relief que déterminent les anfractuosités correspondantes de leur demeure; le con- tenu est ainsi moulé sur le contenant. Et en effet, si les stries de la surface, si les dentelures des bords annoncent un tra- vail plus compliqué, une exécution plus artistement ouvra- gée, on les doit aux empreintes d’un organe en contact, le plus puissant de l'appareil auditif, aux empreintes du nerf acoustique et des épanouissemens de sa cime rameuse, C’est donc en raison de formes préexistantes ailleurs, et par conséquent d’une manière secondaire, que sont produites les formes des pierres d'oreille. Aïnsi on peut expliquer com- ment un arrangement de molécules par couches concentri- ques révèle toutefois des conditions organiques tellement précises , tellement décidées, qu'on n'hésite pas en voyant une pierre inconnue, de la donner comme devant provenir d'un 256 PIERRES DANS LES CELLULES AUDITIVES poisson, appartenant à une telle famille. C’est en effet que la pierre, indifférente à toute espèce de forme par sa com- position moléculaire, trahit cependant des conditions orga- niques très-élevées, qu’elle rappelle des reliefs d’un retour aussi nécessairement invariable que tous les faits de la struc- ture organique ; elle apporte à notre esprit, elle dit les formes que lui ont prêtées quelques cavités de la base du crâne et les circonvolutions du nerf de la septième paire. - Ainsis’évanouit la seule objection qui nous avoit un moment arrêté, l’objection prise de la structure des. pierres, dont la fixité des formes et une grande complication dans le dessin nous avoient paru offrir une haute considération organique. Si je ne me suis point abusé dans l'exposition et l’explica- ion des faits de cet écrit, voici les propositions qui me pa- roissent naturellement en découler. 10. Les pierres qu’on trouve dans les cellules auditives des poissons ne sauroient être considérées comme placées dans la dépendance du système osseux : leur ancienne déno- mination d'osselets est à réformer. 20. Elles proviennent de la secrétion des cellules auditi- ves, ou du liquide répandu dans ces cellules. 3. Composées presque entièrement de chaux carbonatée et d’un peu de matière animale, leur arrangement molécu- laire les range parmi les concrétions calculeuses. 4°. Leurs formes compliquées et d’un retour invariable, suivant chaque espèce, sont principalement empruntées de celles des bassins où elles prennent naissance, et sont de plus, quant à l'extérieur, déterminées par les filets nerveux qui en ällonnent la surface. DES Porssoxs. 257 5o, Elles font partie de l’organe auditif des poissons comme résultat, et non comme principe actif. Go. Les secrétions que provoquent les phénomènes accom- plis de l'audition, ne donnent lieu à la formation d’un ou de plusieurs calculs que chez les poissons, parce que c’est seule- ment chez les poissons que les cellules auditives existent par- faitement closes. 70. Mais que les cellules auditives soient pathologique- ment fermées chez les animaux à respiration aérienne, il s'y forme également des calculs, d’une consistance variable, en analogie parfaite à ce qui est chez les poissons. IN. B. Quand je dis, dans ces corollaires, qu’il n’y a de calculs auriculaires que chez les seuls poissons, je ne leur oppose , dans ma pensée, que les animaux supérieurs, les mammifères, les oiseaux et les reptiles : je n’entends rien pré- juger à l'égard des mollusques. Entre les dépouilles solides de ces animaux, et les calculs auriculaires des poissons, j’aper- çois au contraire des rapports qui, un jour, deviendront pour moi un sujet de sérieuses méditations : car leur analogie s'étend à tout ce qu'il y a de plus caractéristique ; forme, structure, tissu et composition chimique. Cest le cas, sans doute, de rechercher si les coquilles elles-mêmes ne seroient pas de vrais calculs auriculaires, quant à leurs animaux, les mollus- ques, c'est-à-dire si les pierres d'oreilles des poissons ne seroient pas en effet les premiers linéamens, l’état rudimen- taire, et comme le commencement d'une organisation enle- vée ailleurs à son maximum de développement. Mém. du Muséum. 1. xx. 33 258 NOTE COMPLÉMENTAIRE De l'Article sur les prétendus Osselets de l’Ouie des Poissons (1). PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. J: croyois avoir le premier donné les rapports généraux et philosophiques de la chaîne d’osselets découverts chez la carpe par Weber, ce qu’on pourroit appeler la philosophication de ces petits os. Qu’on veuille bien ne pas trop s’effrayer de la nouveauté de ce terme : on est forcé de recourir à une expression nouvelle pour rendre une idée qui est entierement neuve, qui renferme des élémens tres-com- pliqués , et que la doctrine des analogues est appelée à reproduire continuellement. Les Allemands essaient en pareil cas de faire prévaloir le mot signification, qu’ils détournent violemment de son acception naturelle, qu’ils emploient, soit qu'ils s'élèvent des faits particuliers aux considérations générales, soit qu’ils descendent de Ja généralité à la spécialité, et que de plus ils vicient déjà en lui donnant encore une autre valeur, c’est-à-dire, en le faisant servir à donner l’expression philo- sophique des identités admises dans leur doctrine des homologues. J'ai été précédé dans la détermination des premiers os vertébraux de la carpe par un des célèbres professeurs de l’université d’Iéna, M. le docteur E. Huschke. Ce savant a bien voulu, tout récemment , lors de son voyage et de son séjour à Paris, me prévenir qu’il avoit traité le même sujet. Son article, écrit en allemand, se trouve dans l'Jsis, août 1822, p. 890. « M. Weber, expose l’auteur dès son » début, M. Weber, en donnant la description de ce qu’il nomme les osselets de » l’ouie chez les poissons, a sans aucun doute élargi le champ des considérations » organiques, mais il n’auroit encore donné que la morte forme anatomique de » la question. En effet, les osselets décrits seroient-ils des organes nouveaux ? ou » seroient-ils une répétition , mais modifiée à de certains égards, d’os déjà connus ? » et dans ce dernier cas, quelle est la signification de cet os? » Cette manière ferme d’énoncer et d’établir le problême, fait pressentir une dis- cussion lumineuse et une solution satisfaisante. « Ce ne sont pas des os nouveaux, (1) Voyez cet article, page 143. OSSELETS DE L'OUIE CHEZ LES Porssoxs. 259 » conclue définitivement le savant professeur d’Iéna, mais les processus des pre- » miers segmens de la colonne vertébrale : ainsi claustrum et stapes répondent » aux processus supérieurs (processus spinosus) de la première vertébre, incus » à l’épine latérale de la seconde, et malleus à la côte de cette même seconde » vertebre. » 3 Cette détermination diffère tres-peu de celle que j'ai présentée plus haui, page 150 , et seulement en ce qui concerne l’incus. Je m’étois renfermé dans les considérations exclusivement propres à la carpe : à des pieces rudimentaires et fortement modifiées , j’avois opposé des pièces du même chapelet vertébral , grandes et régulières : ainsi fondant le succès de mon entreprise sur les limites et les en- traves que je m'étois imposées, j'ai remonté des pieces postérieures normales et bien connues à la considération des pieces antérieures atteintes , dominées et modifiées par des portions de la vessie aérienne prolongées sur elles. Un autre esprit a dirigé les recherches de M. le docteur Huschke : il a comparé de premières veriebres dans deux espèces, la carpe et la truite. Au lieu de se porter, comme je l'ai fait, d’arrière en avant, n’embrassant que des considérations d’un même ap— pareil , il a pris son point de départ au commencement même de la colonne épi- niere : le crâne lui paroissoit dans ce système une limite propre à l’avertir et à lui procurer un appui plus assuré. Les anatomistes, qui s'intéressent à de telles dis- cussions , en effet du premier rang dans la science, suivront sans doute attentive- ment et compareront nos procédés, qui, fort différens , comme on vient dele voir, nous ont cependant fait arriver , M. Huschke et moi, aux mêmes conclusions. Maintenant je vais expliquer notre légère dissidence en ce qui concerne l’incus. Ce que j'ai nommé côte avec Weber, forme chez la carpe la dernière ou la plus descendue des pieces qui embrassent où qui tendent à embrasser tout l'appareil digestif : c’est le cataal. Au contraire , ce que, dans l'esprit qui a dirigé jusqu’à ce moment les ichtyologistes, on voudroit nommer , et ce qu’on a en effet nommé côte chez la truite, parce que cette partie s’étend en un filet long et curviligne, n’est pas la derniere pièce, mais l’avant-dernière du cercle destiné à entourer le système digestif : c’est le paraal. Les trois premières vertebres de la carpe, avons- nous vu dans notre précédent article, reproduisent ce même arrangement et montrent en effet les avant-dernières pieces ou les paraaux sous la forme d’un long filet, sous l’apparence d’une côte. Ce changement de forme, pour un motif que nous avons pressenti et exposé précédemment, ne nous avoit pas empêché, étant en ce point d’accord avec Weber, de nommer cette avant-dernière pièce processus transversus ; Ce qui étoit vraiment présenter sous une autre expression la même détermination que plus haut, des que l’apophyse transverse répond au paraal. 33: 260 OSSELETS DE L'Ouie CHEZ LES Poissons. Ces explications données, on voit qu’il doit exister chez la truite, au-delà de ce que les ichtyologistes ont nommé la côte, une autre pièce, c’est-à-dire, en dehors et au-delà du paraal, un osselet terminal ou le cataal. Cette partie existe effective ment ainsi chez la truite; mais parce qu’elle s’est sensiblement écartée du milieu vertébral, qu’elle s’est comme soustraite à la domination de ce milieu ou du cy- cléal, et qu’elle se trouve plus décidément sous la dépendance du systeme muscu- laire, on l’a méconnue dans son essence; d'où le nom d’épine latérale qu’on lui a donné. 4 F Devoit-on chercher un équivalent de cette épine latérale pour l'appliquer à Vincus' de la carpe? je ne le pense pas. En attribuant l’incus et le malleus à la deuxième vertebre, on ne pouvoit éviter de les voir en double emploi, quand tout au contraire en rentrant dans ce qui est donné par l’observation, c’est-à- dire, en restituant l’incus à la premiere vertebre et le rralleus à la seconde, et en les embrassant sous le même point de vue quant à l’essence, le rang et la fonction, leur détermination ne laisse plus d’équivoque : ce sont des pièces qui répondent au cataal, l’incus au cataal de la premitre vertebre, et le malleus à celui de la seconde. Cependant voici textuellement les idées de M. Huschke : « Chaque côte est » composée de deux pièces , l’une articulée et l’autre terminale ou costale ( c’est ».ce que nous venons d'employer sous les noms de paraal et de cataal). Dans » le plus grand nombre des vertèbres, V'articulaire est si petite qu’elle ne forme » en effet que la continuation condyloïdienne de la côte. Mais quant aux vertèbres » de la queue, c’est différent ; la côte manque et l’articulaire grandissant en con- » séquence devient un long processus transversus. En avançant d’arrière en avant, » le processus se rappetisse, pour n’être plus qu’un moyen d’articulation pour la » côte. Mais ce n’est là qu’une mélamorphose , comme en ont subi à la partie antérieure de la colonne les parties vertébrales, dites incus et malleus. » Aussitôt que j'ai été informé des droits de M. le docteur Huschke à la priorité de ces idées , je me suis occupé de le dire publiquement ; c’est l’objet de cette note complémentaire de mon précédent article sur les prétendus osselets de l’ouie chez les poissons. 201 EXAMEN CHIMIQUE DES TERRES DE LAMANA, DANS LA GUYANNE FRANCAISE, Et Réflexions sur leur nature et sur l'emploi qu'on él POurTOil faire. PAR M. LAUGIER. Css terres, de couleur grisätre, sont presque entièrement composées de sable quartzeux, dans lequel on voit briller ._ de petits fragmens de mica. On y remarque aussi des débris de végétaux. Parmi ces débris, les uns volumineux, sont des portions de branches et de feuilles qui ont conservé leurs formes; les autres en petites masses informes, molles et friables, ont une couleur brune ou noirede charbon; les uns et les autres peuvent en être séparés mécaniquement. D’autres enfin, sous forme de poudre fine, sont assez in- timement mêlés au sable quartzeux pour lui donner une teinte noirâtre qu'il perd en partie par le lavage à l’eau; celle-ci entraîne presque en totalité cette poudre beaucoup plus légère qui par l'agitation du mélange vient surnager le liquide. De deux onces ou 62 grammes de la terre inférieure du 262 EXAMEN CHIMIQUE poste supérieur j'ai séparé mécaniquement 1 gram. 26 cen- tigrammes de débris les plus gros, et à l’aide du lavage j'en ai enlevé une quantité semblable qui porte le total ( pour deux onces de la terre ) à 2 gram. 52 centigrammes, ce qui donne pour r00 parties de cette terre plus de 4 centièmes et demi de matière végétative, que les terres franches les meilleures ne renferment ordinairement que dans la pro- portion d’un centième, et au plus d’un centième et demi. Quoique le lavage eût été fait avec soin, les deux onces contenoient encore des matières végétales, car par la calci- nation elles ont noirci d’abord et exhalé une odeur d’em- pyreume. Le résidu a pris par la calcination une couleur rougeätre due à un oxide de fer qui n’étoit point combiné au quartz, car celui-ci est devenu parfaitement blanc par l’action d’une petite quantité d'acide hydrochlorique étendu d’eau. Il est plus vraisemblable que cet oxide de fer étoit com- biné à un peu d’alumine que lacide a enlevée en même temps que lui. Le même acide tenoït aussi un peu de chaux en dissolution, Mais toutes ces substances ne se trouvent mélées au sable qu'en proportion bien petite, car le fer, l’alumine et ‘la chaux réunis ne forment qu’un total de trois centièmes, dont le fer compose à lui seul la moitié. Aünsi de 100 parties des terres de Lamana le sable, ou la partie quartzeuse micacée, en représente les 92 centièmes, en comprenant dans ce nombre le poids de l’eau qui peut s’y trouver. Au premier coup d’œil les terres de Lamana ne paroissant presque autre chose qu'un sable quartzeux DES TERRES DE LAMANA. 263 d’alluvion, pourroient être considérées comme tout-à-fait impropres à la végétation. Mais on en juge tout autrement quand on en a séparé la grande quantité d’humus qu’elles renferment, et que l'on a distingué les divers états sous lesquels cet humus s’y trouve. On est conduit à penser qu'elles sont pourvues des élé- mens nécessaires à la végétation pendant plusieurs années ; que la portion pulvérulente, intimement mêlée au sable quartzeux et qui le colore, est destinée à être absorbée de suite par les végétaux que l’on y feroit croître; que la por- tion d’humus en masses brunes ou noires, molles: et friables, est déjà toute préparée pour la même destination pendant la seconde année; enfin que les débris de végétaux conser- vant encore leurs formes sont ultérieurement destinés à fournir les élémensde végétation qu’exigeroient une troisième et peut-être, selon l’opinion de notre confrère M. Thouin, une quatrième année. Ainsi ce sable quartzeux, tel qu'il est, seroit pourvu d'assez de matières nutritives pour suflire à l'entretien des végétaux que l’on y cultiveroit pendant quatre années, lors même qu’on ne tiendroit aucun compte des débris que ces végé- taux doivent y laisser, et d’autres circonstances qui peuvent contribuer à améliorer le sol. En effet, il est permis de supposer que de temps à autre, sinon chaque année, des eaux fluviatiles, ou des torrens venus des montagnes, peuvent entrainer vers ces terrains de nouveaux débris de végétaux ; qui sait, si ce n’est pas à l’une ou l’autre de ces causes que l’on doit attribuer en ce moment la richesse de cette terre en matières végétatives ! 264 EXAMEN cuimiQuE DEs TERRES DE LAMANA. D'un autre côté, il n’est point douteux que des arbres plantés dans ce terrain déjà si bien pourvu d’humus, ne contribueroient par les débris de leurs feuilles et de leurs fruits à y entretenir l'abondance, et à y suppléer ainsi pour l'avenir. M. le Professeur de culture, consulté, pense que dans l'état où se trouve aujourd’hui le terrain quartzeux de Lamana, à en juger par les échantillons qui sont parvenus au Muséum d'histoire naturelle, on pourroit y cultiver avec succès la canne à sucre, le caféyer et surtout le cotonnier pendant trois et peut-être quatre années. Au bout de ce temps seulement le sol seroit épuisé tout- à-fait, si les deux causes ci-dessus indiquées ne servoient à rendre sa fertilité plus durable. Les expériences ci-dessus rapportées ont été faites parti- culièrement sur la terre inférieure du poste supérieur. La terre supérieure du mème poste est tellement semblable à la première par tous ses caractères extérieurs, et par les simples essais auxquels on l’a soumise, qu'il a paru inutile d’en faire une analyse plus exacte. Rte er HE k io Dar É et k æ Fe TS 7 NA RS ME Î Ye = PÈ= PI 1 11 ' om 1 Lith: detlanghons 7} ernIie Le C | Pot CeTItUUn. fr (6 rton 7 ee” DESCRIPTION DU CERNIÉ : POLYPRION CERNIUM. PAR M. A. VALENCIENNES. | réfléchit sur la distribution des nombreuses es- pèces de poissons sur la surface du globe, on est frappé de la grande ressemblance de formes qui existe entre les espèces de la Méditerranée, et celles qui vivent dans la mer qui baigne les côtes du cap de Bonne-Espérance. En examinant dans la belle collection du cabinet du Roi ce que nous ont procuré les recherches faites au cap par M. Delalande, et dans la Méditerranée par M. Savigny, on est porté à croire que le nombre des espèces de cette mer est beaucoup plus grand que celui que l’on trouve sur les côtes de l’Afrique australe. Plusieurs d’entre elles sont parfaitement identiques; telles sont le Milandre (Squalus galeus ), la Daurade (Sparus pagrus, Brunn.), le 77igla hirundo, Lin. , le Scomber tra- churus, Lin., le Scomber amia, Schn., et le Scornber ly- zan, Forsk. La plupart des autres espèces du Cap diffèrent si peu de leurs analogues de la Méditerranée, qu'il faut la plus scrupuleuse attention pour distinguer les caractères qui les séparent, et que, sans commettre une erreur grave, on Mern. du Museum. 4. 11. 34 266 Description pu CEnxnié. pourroit les regarder comme des variétés l’une de l’autre. L’explication la plus naturelle de cette similitude seroit que les poissons d’une même espèce suivent les côtes d’un même continent. Quelques-uns, comme la daurade, le ca- raux, qu'Adanson nous a rapportés du Sénégal, paroîtroient confirmer cette opinion ; mais ce phénomène est sans doute compliqué par d’autres causes qui nous sont encore incon- nues : en effet l’on pêche, dans les mers d'Amérique, des es- pèces communes à la Méditerranée et aux côtes d'Afrique. Ces diverses espèces ont-elles existé de tout temps dans les lieux où on les trouve aujourd’hui, ou bien, traversant le grand bassin de l'Atlantique, se sont-elles propagées sur des points: si éloignés les uns des autres? La description de lune de ces espèces, vivant dans ces différentes mers, est l’objet de ce mémoire. Quoique ce poisson soit commun dans la Méditerranée, où on:le nomme Cernié, et où il atteint plus de six pieds, il est encore assez mal connu des ichthyologistes, et l’on ne peut en indiquer aucune bonne figure. Je ne le trouve pas dans les auteurs anciens, et bien cer- tainement Rondelet n’en fait pas mention. M. Schneïder ne l'a connu que par un dessin que le docteur Latham lui avoit envoyé de Londres; ce dessin étoit incorrect, et les dents y sont mal représentées, ainsi que l’observe M. Schneider lui- même. Je ne puis cependant comprendre comment il l’a . placé dans le genre des Æmphiprions, avec lesquels il n’a d’autres rapports que les dentelures des pièces de l’opercule. Latham lui a écrit que ce poisson portoit, en Amérique, le nom vulgaire de Girom, mais sans indiquer sur quelle côte ik a été pêché. Description pu CERNIÉ. 267 Si, comme je le suppose, la figure que Duhamel nous a laissée sous le nom de Pilote de haute mer représente, quoi- que assez mal, notre Cernié, Gmelin l’auroit mentionné dans le Systema naturæ, sous le nom de Scorpæna Americana. La description que M. Risso en a faite, sous le nom de Cer- nio qu'on lui donne à Nice, est exacte; mais il l’a rapporté, sans trop savoir pourquoi, à la Scorpène marseillaise de M. de Lacépède. Ce célèbre ichthyologiste n’a d’autres données, ni d’autres citations que le Cottus Massiliensis de Gmelin qui a copié Forskael, quoiqu'il ne le dise pas: or, en lisant Fors- kael, on voit qu'il doutoit beaucoup lui-même de ce Cottus Massiliensis, et qu'il le croyoit une variété de la Scorpène, truie ( Scorpæna scrofa, Lin. ). D'ailleurs M. Risso cite Brunnich, qui ne fait cependant aucune mention de cette espèce. M. Cuvier ayant reconnu qu'un poisson conservé dans le cabinet du Muséum sans indication d’origine, étoit l’_Ærnphi- prion americanus de Schneider, il en fit un genre qu’il nomma Polyprion ; il le rapprocha des scorpènes avec lesquels le Cernié a en effet beaucoup de rapports. Depuis la publication du Règne animal, nous avons recu plusieurs Cerniés du Cap par M. Delalande, et de la Médi- terranée par M. Savigny qui a donné au Muséum d'histoire naturelle, avec le plus noble désintéressement, la belle col- lection qu'il a faite pendant son séjour à Nice, à Gênes et à Naples. Ce savant nv’a appris que ce poisson portoit, à Mar- seille, le nom de Cernié que je lui conserve de préférence à tout autre, puisque les épithètes d’Æmnericanus et d’Aus- trale ne sauroient lui convenir exclusivement. Dés lors j'ai 34 268 Descriprion pu CERNIE. pu connoitre ce poisson dans ses différens âges, constater l'identité spécifique des individus de la Méditerranée et de ceux du Cap, et joindre à la description que je vais en don- ner une figure faite avec exactitude par M. Bessa. Le Cernié a, en général, la forme d’un serran; sa tête est . grosse et aplatie en dessus, à la manière de quelques scor- pènes; l’intervalle entre les yeux est assez large; la mâchoire inférieure est plus longue que la supérieure ; toutes deux sont garnies de dents en cardes fortes : il y en a de sembla- bles au chevron du vomer, aux palatins, et sur une plaque du milieu de la langue; le sous-orbitaire est étroit et dentelé en scie à son bord inférieur; le préopercule est dentelé à ses deux bases, plus fortement à son angle; une crète dentelée traverse l’opercule, et se termine en une pointe aigüe: le bord du sous-opercule et de l’inter-opercule est aussi dentelé vers le bas; près de l’angle postérieur de l'orbite il y a une grande écaille dentelée , et une autre sur la fente des ouïes. Los de l’épaule porte deux ou trois petites dentelures; deux faisceaux d’arêtes saillantes montent sur le crâne, et deux autres descendent vers les angles antérieurs des orbites : une crète occipitale est assez marquée sur la nuque. Les écailles sont petites, âpres à leur bord; elles couvrent le corps, toute la tête et la base des nageoires; les lèvres seules ne sont pas écailleuses. La partie molle de la dorsale est plus élevée que les rayons épineux qui sont très-forts; les pectorales, de moyenne grandeur, sont arrondies; les ventrales sont grandes, et leur rayon épineux est long et très-apre; la caudale est carrée. Le Cernié adulte est d’un gris-brun uniforme; la caudale est bordée de blanc. Dans sa jeunesse il est marbré de Descriprion pu CERNIÉ. 269 grandes et larges taches noires sur un fond gris; toutes ses dentelures sont plus fortes, surtout celles de l’épine des ventrales; la caudale est toujours bordée de blanc. Le foie du Cernié est médiocre et divisé en deux lobes à peu près égaux. L’estomac est grand, en cul-de-sac. Ses parois sont très-épaisses et sillonnées intérieurement par de gros plis irréguliers. Le pylore s'ouvre auprès du cardia: l'intestin qui le suit est long et fait six replis avant de 6e rendre à l’anus. Le diamètre de l'intestin dans le dernier re- pli est plus grand que celui des autres replis. Il y a près du pylore deux cœcums dont un est très-court, et l’autre très-long. La rate est petite et cachée sous les replis de l'in- , testin. La vessie natoire est grande, simple, à paroisargentées, assez épaisses. Les reins sont grands et très-renflés vers leur extrémité. Ils donnent directement dans la vessie urinaire, qui est médiocre, et qui s'ouvre derrière l’anus. Ce poisson se nourrit de mollusques et de petits poissons; j'ai trouvé des sardines dans son estomac. Voici comment on peut exprimer sa diagnose. PoLYPRION GERNIUM, Corpore griseo toto squamoso , capite magno subcomplanato, sulcis radiantibus exarato; maxillà inferiori longiori. Amphiprion Americanus. Schn. pag. 205. Amphiprion Australe. Schn. pl. 47. Scorpæna Massiliensis. Risso, Icht. de Nice, pag. 184. An Scorpæna Americana. Gmelin ? Pilote de haute mer. Duh. Trait. pêch., tom.ur, part.n, sect. vur, pl. vi, fig. 2? Br. 9. D. = P. 18. V. : A 8. C. 17. Habitat in mari Mediterranco, et ad promontorium Bonæ Spei. Reperitur quoque ad oras Americæ, doctore Lathamo teste. 270 oo MÉMOIRE GÉOLOGIQUE SUR L’ISLE DE SARDAIGNE. PAR M. LE Cu. ALBERT DE LA MARMORA. PREMIÈRE PARTIE. Des principales chaînes de montagnes qui composent le sol de l'ile de Sardaigne. Oo l'île de Sardaigne ne paroisse être qu’une conti- . nuation toute naturelle de l’ile de Corse ( dont elle fut peut- être séparée à une époque assez récente ), elle n’en diffère pas moins très-sensiblement par l'élévation bien inférieure de ses principales montagnes, et par un ensemble moins âpre et plus agreste. ; Ne pouvant, pour le moment, parler en détail de la struc- ture géologique de ce royaume, je me bornerai à donner, dans un court aperçu, les explications nécessaires à l’intelli- gence de la carte et du catalogue ci-joints; et je ne traiterai guères que des principales chaines, et des roches les plus in- téressantes qui composent le sol de cette ile. Première chaîne primitwe ( granite ). — La chaîne de montagnes, la plus importante par sa nature, sa position, MÉMOIRE GÉOLOCGIQUE. DAT et son étendue, commence au canal de Corse dit les Bouches de Borufacio , où elles constituent un petit archi- pel de nombreux ilots, parmi lesquels se trouvent La Maddalena, S. Stefano, Caprera, eic., etc. Partant éga- lement d’un lieu nommé Zongo-Sardo, elle appuie légère- ment vers l’esi, et après avoir traversé l'ile dans toute sa Jongueur, elle va se perdre dans la mer au cap Carbonara. Cette grande masse primitive, qu’on peut à juste titre nommer le noyau du petit continent Sarde, en constitue à elle seule toute la surface centrale. Le granite est la roche qui n'a paru y dominer davantage, puisque je lai trouvée, depuis le canal de Corse déjà cité, jusqu’au col dit Corru-Boë (corne de bœuf}, non loin du village de Fonni; son passage au 7n1- caschiste y est presque subit, du moins je n’ai pas observé dans les localités que j'ai parcourues de grandes traces de gneiss. Le granite qui, en cet endroit , cède sa place à cette roche schisteuse, ne laisse pas de se montrer fort près de là, vers lorient. Après avoir formé les montagnes de l’'Oglrastra et du Sarabus, il reparoît de nouveau dans la partie centrale, et présente de loin à la ville de Cagliari sa cime dentelée des Sette F'ratres (sept frères, sept dents). Je crois qu'avant de se perdre dans la mer, cette roche passe au porphyre. Même chaine ( schiste ). — Nous avons vu qu’auprès du col Corru-Bot, la montagne change de nature; elle s'élève assez rapidement, et forme une masse des plus impo- santes, puisqu'elle finit par dominer celles qui l'entourent. Le mont Genargentu (Janua Argenti) est supérieur à tous les autres, et sa pointe (dite Punta Schiuschiu) n'a plus d’émules sur toute la surface de l’ile. Je crois, d’après: 272 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE mes observations barométriques, pouvoir lui assigner dix- huit cent vingt-six mètres d’élévation au-dessus du niveau de la mer. Je la visitai en 1822 et en 1823; c’est le dernier séjour de la neige en Sardaigne (elle disparoïit ordinaire- ment à la mi-juin ). La qualité de la roche des monts de Ge- nargentu appartient presque exclusivement à un schiste très- luisant; voy. n°5. 62, 63. L’on trouve cependant sur les cimes de grandes veines de quartz, qui se présente également en feuillets singulièrement tordus et contournés; nos. 64, 65. Je crois pouvoir rapporter à une roche analogue le n°. 66 pris sur les mêmes lieux, et qui constitue ( par suite de la décompo- sition des parties talqueuses et micacées) une pente conique assez semblable à un amoncellement de débris, comme si on eüt en cet endroit détruit de fond en comble une cons- truction en pierres taillées, ou en grosses briques : ces pièces sont toutes mouvantes, et rendent ce passage assez difficile. De Genargentu la montagne schisteuse va toujours en baissant, et suit toujours la direction générale : elle finit par se perdre dans le granite. Seconde chaine. — Une seconde chaîne, dont le noyau est granitique, part du capdela Frascæ, près dugolphe d’Oristan, et se dirigeant vers le sud-est, elle se trouve tout à coup rom- pue par la grande vallée de FZla Massargia, pour reparoître bientôt, et se perdre dans la mer au cap Teulada, pointe la plus méridionale de lile. C’est près de là que se trouve la roche n%. 9 et 10, qui me paroît avoir de grands rapports avec le quartz poli, dont parle M. de Saussure. Ces pièces se trouvent vers la crête d’une montagne près du village Caputerra; la face polie de cette roche est couverte de terre végétale, et A SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 273 placée perpendiculairement à l'horizon. La montagne dite le Monte Santo di Pula, et qui est la troisième de ce nom en Sardaigne, appartient à cette région ( elle est granitique ). Troisième chaïtne. — Si Ton veut considérer comme chaine, la montagne de Monte Haso , qui n’est séparée de la grande masse centrale que par une belle et profonde vallée, ét qui d’ailleurs se lie avec elle par les monts de Patada, elle devra peut-être occuper le troisièrne rang dans ce mé- moire; le grarite, le gnetss, et la roche schisteuse y domi- nent ; voy. les n°5. 108, 109 et 110. :} Quatrième. —TLa quatrième chaine est celle de la Nurra, qui se trouve vers la partie occidentale du nord de l'ile; dirigée, comme toutes les autres chaînes principales, du nord au sud, elle passe par gradation du granite de l'ile de l Æ#s1- rara, n°. 136, au schiste luisant, et au schiste micacé, nos. 134, 135, puis enfin à la chaux carbonatée compacte, no. 133. Cinquième chaîne.— La cinquième enfin est celle dite des monts Zynbarra, qui est plutôt remarquable par son élévation et sa direction, que par son étendue. Elle se pré- sente comme une espèce de contre-fort, ou pour mieux dire de crochet de la grande chaine principale : sa cime la plus élevée, nommée Gigantinu, est considérée dans ces régions comme le point le plus culminant detoute l'ile; mais je crois pouvoir lui assigner la seconde place, puisque le Genargentu, dont j'ai déjà fait mention, conserve la neige deux mois après le Gigantinu, et le dépasse de près de 600 mètres. Ce qui, peut-être, fait considérer lesimonts Lyrrbarracommeles plus élevés de toutel'ile, c’est leur proximité de la plaine d’Ozieri, qui permet de les apercevoir dans leur plus grande élévation Méin. du Muséum. . 15. RE ONE Le 274 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE et leur plus grande étendue. Ces montagnes offrent une den- telure remarquable; leurs flancs ( septentrional etoccidental) n’ont cépendant présenté plusieurs crêtesbien arrondies, qui faisoient avec les autres un singulier contraste: Le n°. 162 appartient à de pareilles roches : ne seroit-ce pas une espèce de grüstein? Quant à la masse principale de celles des n°5. 163, 166 et 171, elle se trouve lement dans le petit archipel voisin, à l'ile de la Madelaine:, où Jai cru voir ce granite supérposé à un autre} peut-être plus ancien. Porphyre.—Au pied du mont Lymbarra, à Castel: d'o- ria, est une petite montagne de bien moindre élévation, que je crois appartenir dé bien près aux roches porphyritiques; voy. n°5, 159, 160. Elle tient aux nos 163, 166, 1771, par les ns%. 161,162: Une autre roche analogue se trouye également dans la partie orientale de l’île, qui regarde la mer de Tos- cane, et qui est comprise entre le rivage et la grande chaîne granitique de l’Oglastra, jusqu’au cap Carbonara. Forcé par des circonstances impérieuses de m'éloigner de ces con- trées, et de m’embarquer pour Cagliari dans le port de Z'or- tolr, je dus renvoyer mes courses dans ces régions à un autre voyage, et je ne pus recueillir que les pièces 178 au cap Be lapista, et 179 auprès du cap Sfera Capallo. : Autant que je pus en juger pendant mon trajet: maritime, la plus grande partie des roches de ces contrées sont de na- ture porphyritique; mon opinion me'paroit confirmée: par la plupart des cailloux roulés dont on sesert pour paver la ville de Cagliari: c'est en doublant le cap de C'arbornara, qué lon va chercher ces pierres aux embouchures dés diffé- renis torrens'et ruisseaux qui coulent de ces régions. Chaux carbonatée.—La plus ancienne roche de chaux 5 34 à Fe SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 275 carbonatée que j'aie vue jusqu'ici sur place en Sardaigne , c’est celle de Szlanus, n°5, 111, 112, 113, placée dans la partie méridionale des montagnes du Goceano et Monte Raso; elle tient au granite 108, ét surtout au schiste 109, 110. Cette carrière de marbre, qui n’est pas fort étendue, est do- minée, et même dans quelques endroits couverte par une masse volcanique (Porphyre pétrosiliceux ), 119. Les quatre premières chaînes de montagnes dont j'ai déjà fait mention, sont en quelques endroits flanquées ou surmontées par des masses de chaux carbonatée, le-plus souvent compacte, telles que celles des n°5. 173, 176. Cette roche qui pose sur un granite, 173, à Oltena , constitue les monts de T'apolara (ile), de Mont-Alvo (mons albus), de Galtelly, d'Oliena et de Monte Santo, toutes fort remarquables par leur cime à peu près tabulatre, et leur éclatante couleur blanc jaunâtre. Ne se- roit-ce pas là le calcaire alpin, ou du Jura? Les naviga- teurs de la mer Tyrrhénienne connoïssent très-bien 7'zpolara et Monte Santo. La chaux carbonatée compacte se voit également dans Ja partie occidentale de la Sardaigne, à $. Æn#iocho, au mont S. Giovanni, au Capo Pecora, au Capo Caccia, et à La Nursa, 133; on la trouve également près d’Zzlesias, 39, 32 et 33. Les deux dernières roches, qui me paroissent contenir beaucoup d'argile, et qui forment le gite de la mine dé plomb de Monte Pont, 35, reposent sur une argile schis- teuse de très-facile décomposition à l’air, 37. On la rencontre encore en différens autres lieux, mais prin- cipalement au pied des grandes montagnes; je l'ai observée à Samugheo, à Jiesfre, à Genone, etc, etc., etc. 35" 276 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE De grandes masses calcaires qui appartiennent à des for- mations bien postérieures sont également répandues sur la surface centrale et occidentale de l’île. Ces terrains, qui ne sont pas d’une grande élévation, se suivent presque sans in- terruption depuis le cap $. Ela, près de Cagliari, jusqu’à Castel Sardo. Ts sont découverts aux deux extrémités, et surmontés dans la partie centrale par une immense quantité de roches volcaniques. La ville de Cagliart est bâtie sur une colline de cette for- mation, n°. 3, 4, 5 ; elle est séparée de $. £a par une espèce de vallée, au penchant septentrional de laquelle se trouve une brêche osseuse que je crois fort analogue à celle de Grbraltar, de Nice, et d'Antibes ; elle me paroit s’y être formée par un dépôt d’eau douce dans les fentes et dans les petites cavernes de la roche n°5. 6 et 7. La description des ossemens de Gi- braltar, tirée du tom. X de la Biblioth. Brit. et insérée dans le tom. XI des Institutions géologiques de M. Breislak, convient exactement à cette brèche, surtout depuis la troi- sième ligne de la page 359 qui commence par « près de la base, » jusqu’à la fin du paragraphe. Les ossemens qu’on y voit principalement nb ap- partenir à une petite espèce de rongeurs campagnols ; j'en ai trouvé d’autresayant de plusgrandes dimensions; dans l’échan- tillon nos 8 qui fait partie de la collection du musée de Turin, Von voit deux dents de ruminans, peut-être de chèvres. La même brèche renferme des coquilles terrestres parmi. les- quelles je distinguai parfaitement un Æelx candidissuna. Elles sont toutes empâtées par une incrustation calcaire; la pièce 8 de l'envoi de Paris doit en contenir également. SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 277 La direction de la colline de Caglart est à peu près celle de toutes les autres montagnes de l'ile, c’est-à-dire appro- chant de celle du r2éridien. Le territoire de Sassart, qui appartient à une roche à peu près analogue à cette dernière, est en quelques endroits plus mèlée de znarne et d'argile. N..B. Je n’ai pas parlé ici du calcaire prinutif, vu que je ne puis rien préciser encore à ce sujet. Il en est de mème des gisemens du Xgrite et de l'anthracite, 56, 57, 58. Je me propose de faire sur cet objet des recherches ultérieures. Volcans éteints. Les débris des volcans éteints occupent, comme on le voit par la carte, une grande partie de la surface occidentale de l'ile de Sardaigne ; ils se présentent presque tous en groupes ou chaînes assez considérables, et offrent surtout dans leur en- semble cet aspect de coulée qu'on a également remarqué dans les terrains de cette nature qui sont connus ailleurs. Ils reposent pour la plupart sur des roches des formations plus récentes. 7. nos. 41 et 42, à Ussana et Monastir; 46, à Sardara; 89, à Gonostramazza; 72,73,174, et principa- lement, 85, 86 et 87, à les et aux environs; 124, 125 et 127, à Bonorra, Pozzo major, Keremule et plusieurs autres lieux environnans; 131, à Padria; 141, à Ploaghe; 159, à Martis et Nulyi; enfin 157, à Castel-Sardo. Une partie de ces volcans ont peut-être brülé à une époque postérieure au dernier creusement des vallées? Jai décidément reconnu une origine plus ancienne dans quel- 278 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE ques terrains des environs de Monte Leone, mais prin- cipalement dans certaines laves de la partie méridionale de l'ile. Le pays compris entre le village de Vurrz et la plaine dite le Carnpidano appartient presque tout à une formation calcaire ; il est composé de monticules offrant communément à leur sommet un plateau formé par une lave bien carac- térisée qui suit l'inclinaison générale de ces terrains de l’est à l’ouest. dr L'on donne : à ces plateaux le nom de fn es telles sont la Grarra de Serr, no. 55, de Gestort, etc., etc. L'inclinai- son précitée, la direction des cellules et la qualité des laves, qui se retrouve la même sur presque toutes les cimes cal- caires où marneuses de ces collines me font présumer qu’elles ont une seule origine, ou qu’elles appartiennent, pour mieux dire , à une même coulée venue d’un cratère voisin de Nurri à une époque antérieure au creusement de ces jotpise La décomposition et l’action des eaux ont tellement es sur ces roches, que l’on: ne distingue plus les cratères; j'ai cru pourtant reconnoître les traces de quelquesuns (ils sont marqués sur la carte par la couleur vermillon ). La forme et la directiôn des-cellules des laves m’a plutôt dirigé: dans les recherches des bouches i Entues que la Pre actuelle de leurs vestiges. :: : 2 32:28 5 D. L'on voit à la role inspection des ee que la na- ture de: ces roches est à peu près la même dans toutes les parties volcanisées de l'ile, et qu’elles n’offrent pas ces belles cristallisations que l’on trouve en Italie. Les plusintéressantes par leur qualité et leur variété sont, à mon avis, celles de S. Pierre et de S. AÆntioco. Celles des environs d’Æ/ghero SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 279 D et de Bosa, que je n'ai guère eu le temps de visiter pour ces sortes de recherches, doivent offrir à peu près les mêmes phénomènes. Porphyre pétrosiliceux vole. — Parmi les terrains volea- niques de la Sardaigne, la roche porphyritique pétrosiliceuse (Euritique ) paroït jouer le plus grand rôle; je l'ai vue en grandes masses dans les deux iles déjà citées, nos. 24, 25, aux montagnes d’Æ/es, 82, à celle de Bortigali, 119, aux envi- rons de Macomer ; elle forme également une grande partie des monts de Fa Nuova, Monte Leone, jusqu'auprès de Bosa et bien des pays voisins ; enfin on la retrouve à P/oaghe, 159; près d’'Oszlo et Castel-Sardo où elle passe à la roche, 158. Je puis dire, en un mot, qu’elle constitue: à elle seule les ; des roches Lithoïdes volcaniques dela Sardaigne... La plus remarquable des variétés auxquelles passe ce por- phyre est sans doute celle du n°. 27, dont la forme est pris- matique;je l’ai vue aux îles de S. Prerre, de S. Antioco, et à l'Zso/a prana. Le petit dessin n°. r indique la relation que les cinq pièces 25, 26, 27, 28 et 29 ont entre elles; les trois premières appartiennent au même bloc et se trouvent superposées aux deux autres, 28, 29, qui me paroissent { du moins la dernière, 29) une mèmesubstance en décomposition. Cette roche a tout au plus un mètre et demi d'épaisseur depuis sa surface supériéure jusqu’à l'extrémité des prismes ; elle est inclinée du sud au nord, et paroît venir de l’île de S. Antioco. Les prismes les:mieux formés se trouvent à l’ile de S. Prerre , mais toujours faisant partie de la roche no, 25, Ceux qui sont garantis de l’action de l'air et de la lumière conservent à leurs surfaces extériéures une belle couleur d’un 280 : MÉMOIRE GÉOLOGIQUE rose assez vif dont l'éclat est souvent relevé par de belles ramifications de dendrités très-larges et assez variées. C’est la seule roche à prismes bien marqués que j'aie pu découvrir jusqu'ici dans tout le cours de mon voyage. La montagne d’Æ{es en fournit une d’une pâte assez analogue, mais dont la structure est schisteuse. 77. n°. 82. Trachyte émaillé.—Vile de $. Antioco est encore extré- mement riche en Obsidienne perlée, n°%:18, 19, 20: je vis cette substance en quantité dans une espèce de conglomérat ou brèche, dont la masse principale est de la nature du n°. 12; celle-ci empâte et unit également d’autres boules et débris des pièces 13, 14, 15. Ce Perlstein paroît plutôt avoir été roulé qu'y être venu en coulées; il paroîtroit par son sisement indiquer un dépôt des eaux. Il sy trouve de toutes grosseurs , depuis celle d’une noix jusqu'à deux ou trois fois celle d’une tête humaine ; il ÿ est presque toujours accompagné d’une substance (n°. 16 )argileuse rouge (Pozzo- Jane) et alumineuse qui se trouve en certaine quantité, et bien souvent disposée en ‘espèce de filons. Je vis également le Perlstein dans les tufs et agglomérats volcaniques, près Bonorva, nos. 122, 123, et même uni avec d’autres roches porphyritiques, près br 132, ainsi que près de Castel-Sardo', 158. 7 Trachytevitreuxs.—1l’ ontrouve r inde vitrée àcas= sure conchoïde dans l’île de S. Pierre, aux environs d’Æ4/es, au village de Pau, à Ollastro, à $. Catherine de Pittinurri et DE d'A Ighero, où l on voit également l'Obsidienne verte. ( Je n’en pus voir qu'un petit échantillon, et j'ignore le lieu d’où il fut tiré. ) T’obsidienne noire se trouve sur la cime SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 287 de la Trebina, près d’ Ales, en rognons de différentes gros- seurs ; je lai particulièrement rencontrée avec la roche n°. 81. La véritable ponce a jusquici échappé à toutes mes re- cherches; j’en eus à la vérité quelques pièces qui provenoient du village de Szrescola, dans la partie orientale de Pile; mais j'ai tout lieu de croire qu’elles n’appartiennent pas à cette région: des coquilles marines très-fraiches logées dans leurs cavités m’ont fait penser qu'elles peuvent avoir été transportées par les eaux de la mer, peut-être de Lipari. Ces ponces furent ramassées sur la place dans un pays qui n’a pas du tout l'apparence d’être volcanisé; on trouve à la vérité des laves et scories à Crosez. Jaspes.— Les Jaspes, surtout les rouges, abondent dans l'ile de $. Prerre, et dans les terrains volcaniques des envi- rons d’'Æghero, d'Etrrr et de Bosa; un mont près de cette dernière ville en est, pour ainsi dire, tout formé. J'ai trouvé des rognons de Jaspe , n°. 128, avec les laves de Bonorva et de Puzzo-major, 129, 130, ainsi que dans les environs de Nulyret de Martis. Dans cette région les rognons de Jaspe rouge et jaune sont épars pèle-mêle avec ceux de Silex py- romaque, 155. Laves basaliiques.—Les Laves de la nature des nos. 97 et 107 forment la plus grande masse des monts de S. Lussurgus et de Caglieri. C’est principalement sur le flanc et au pied du versant oriental de cette montagne que l’on voit distinc- tement la lave qui est sortie du cratère actuellement effacé de S. Lussurgtu ; elle se présente presque partout avec les mêmes caractères, et offre principalement l'aspect de cer- taines boules à feuillets concentriques assez semblables par Mém. du Muséum. 1. 11. 36 282 : MÉMOIRE GÉOLOGIQUE leur structure à celle d’une rose. Ces boules sont empâtées dans une roche de même substance qui offre l’image d’un tournoiement de la lave dans son ancien état de fusion. Cette coulée forme une grande plaine, ou plutôt un assez vaste plateau compris entre la base des monts de $. Lussur- gt et du Marghine, et le lit du fleuve Tyrse. C’est là que sont les meilleurs pâturages de l’île et les haras royaux. Les roches de l’autre versant du côté de Cagliert sont exactement d’une même substance, n°. 107. Quoique l’on trouve des Laves basaltiques dans presque tous les terrains volcaniques de la Sardaigne, le véritable Basalte colonnaire prismatique n’a pas encore été rencon- tré dans les pays que jai parcourus. Observations générales. 10, Les véritables chaînes des montagnes de la Sardaigne sont toutes placées dans la même direction, qui est celle du méridien. 20, L’inclinaison des roches de sédiment, dans la partie occidentale de la Sardaigne ( que j’ai mieux observée ), me paroît être assez générale de l'esé à l’ouest, Quant à l’angle de cette inclinaison, je ne possède pas assez d'observations pour en parler d’une manière générale. 30, La direction des strates est analogue à celle des chaînes, c’est-à-dire du zo7d au sud. 40. Leur ordre de superposition est ( autant que j’ai pu en juger ) le même que celui de pareilles roches observées dans plusieurs autres contrées. 3 SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 293 59. La mnasse schisteuse de la cime la plus élevée de l'ile, n%. 64, 65, présente des strates singulièrement contournés et tordus en tous sens. 60. Le Granite paroit jouer le principal rôle dans la pre- mière formation de ces pays; mais le Schrste mnicacé qui lui est superposé en quelques endroits, constitue le point culmi- nant de toute la Sardaigne (r). 7°. Les terrains dits de #ransition me semblent occuper une assez grande place au pied et contre les différentes masses graritiques et schisteuses, surtout à partir du versant mé- ridional des montagnes de Patada, vers Benetutt, etc., etc. Leurs contours ne sont indiqués qu'approximativement sur la carte par la raison énoncée à la note du paragraphe précédent. 8°. Le calcaire alpin (ou du Jura) se trouve disposé en masses parallèles entre elles; on ne le voit guère qu'aux extrémités latérales de la grande chaîne, et sa position me paroit être analogue à celle que cette roche ( Calcaire alpin ou du Jura) occupe dans la constitution des Pyrénées ( 7. la carte de M. de Charpentier; 1823.) 9°. Les terrains de troisième formation ne m’ont paru se trouver en grande masse qu’au pied du versant occidental de (1) Je ne ferai point ici mention de quelques autres roches primitives, et prin- cipalement du calcaire qui appartient à cette formation, ne possédant pàs par moi- même assez de notions pour pouvoir en déterminer la nature et le gisement. J’ai pourtant lieu de croire que ce calcaire est assez rare en Sardaigne; quant aux roches amphiboliques et talqueuses (celles-ci surtout) on les trouve près du Corru-Boi, et vers l’Ogliastra ; mais n'ayant pu (à cause d’une aventure assez sé rieuse avec des bandits) m’y porter cette année, je me réserve de mieux visiter ges régions au voyage que j'y ferai tres-prochainement. 36 * 284 - MÉMOIRE GÉOLOGIQUE la grande chaine principale; ils forment les plaines du Car2- pidano, d'Ozrert, ainsi que les monts de Cagliari, de Sas- sart, de Sorso, sans compter presque toutes les bases sur lesquelles reposent les roches volcaniques. 109. Presque tous les volcans me paroissent très-certaine- ment antérieurs au dernier creusement des vallées; quelques uns sont peut-être postérieurs, mais dans ce cas ils appar- tiennent à une époque très-reculée, considérée historique- ment, SUPPLÉMENT A LA PREMIÈRE PARTIE DU MÉMOIRE. Ayant dernièrement lu le bel ouvrage de M. de Charpen- tier, sur la constitution géologique des Pyrénées, publié en 1823, je m’arrêtai principalement sur les imgénieuses con- jectures de ce savant, touchant la forme primitive et la cause des premières: dégradations des montagnes qu'il décrit si bien. Cet auteur ( page 116) établit originairement un terrain granttique (y compris le schiste micacé, et le calcaire pri- mitif), formant dans son hypothèse une chaîne, ou plutôt une ligne non interrompue de l’esé-sud-est à l'ouest-nord- ouest. 1 suppose qu'à une époque antérieure à la formation des autres roches qui lui sont adossées, cette chaine granitique à subi des dégradations causées par une puissance ( peut-être des courans }, qui agissant horizontalement du sx au x0rd i ou du z0rd au sud, a rompu son faite en beaucoup d’en- droits , l’a échancrée jusqu'à de grandes profondeurs, et l’a ensuite changée en une file d’éminences plus ou moinsisolées. SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 285 Plein de cette belle idée, j'en hasardai l'application à la structure géologique de l'ile de Sardaigne, et je me fis les questions suivantes : 10. Pourroit-on raisonnablement penser que la grande chaine centrale granrtique de l'ile en question, ait présenté dans son premier état (lorsqu'elle étoit encore intacte ) les mêmes caractères supposés par M. de Charpentier dans son hypothèse sur celle des Pyrénées ? 20, Si cette puissance ( ce courant ) dont parle le savant auteur, a réellement agi du sud au nord (ou viceversa, comme il me paroït plus probable ); si elle a réellement causé les ravages qu’on lui suppose, ne devroïit-on pas en recon- noitre les traces en Sardaigne, puisque ce pays ne se trouve pas à une distance bien considérable de cette partie du con- ünent ? 30. En admettant identité de formation et de cause de- gradante primitive , entre la chaine ou ligne granitique des deux pays en question, les résultats dans la forme de celle de Sardaigne ne devroient-ils pas être différens, vu que le cou- rant fut toujours le même, mais que les directions des deux chaines ne se correspondoient, et ne se correspondent pas du tout ? La simple inspection de l’île de Sardaigne, considérée, soit géologiquement, soit géographiquement, en rapport avec les Pyrénées et l’île de Corse, me paroit répondre à ces trois questions d’une manière aflirmative. 10, Le noyau de la chaine centrale, qui traverse sans in- terruption l’île de Sardaigne dans toute sa longueur, étant uniquement formé de substances cristallines, non superpo- 286 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE ses à des roches de nature différente, en un mot, ce noyau étant reconnu prünitif, et composé (ainsi que celui des Pyrénées) de granite, et de schiste micacé, tout porte à croire que ces deux chaînes appartiennent à une même for- mation, et qu'elles ont présenté les mêmes formes primitives, quoiqu’ayant une direction différente. 20, La puissance, ou plutôt les courans supposés, agissant dans le sens du méridien, paroiïssent réellement indiqués par la forme des chaînes de la Corse et de la Sardaigne, et peut- être encore par celle de ces iles considérées dans leur entier. 30. Que l’on observe bien cette chaine centrale et pri- mitive de la Sardaigne, composée de granite et de schiste mi- cacé, et l’on verra que loin d’être changée en une fe d’e- minences comme celle de cette nature dans les Pyrénées, elle traverse sans interruption l'ile dans toute sa longueur du 2074 au sud (ou vice versa). : Que l’on fasse attention à la forme actuelle de ce noyau, et au parallélisme de ses différentes crêtes, telles que celles du Sarabus, de l'Ogliasira, etc., l’idée d’une force érosive se présentera d'elle-même, ayant agi dans le sens du méri- dien, et non dans le sens perpendiculaire ou oblique. Je crois pouvoir conclure de tout ceci que l'opinion de M. de Charpentier sur l'existence et la direction du premier courant destructeur, paroît confirmée par les formes actuelles des masses granitiques de l'ile de Sardaigne. Peut-être son mouvement étoit-il du 2074 au sud (1)? (1) Cette idée seroit fondée en partie sur la dégradation du flanc septentrional dès Pyrénées, bien plus déchiré que le méridional. ( Foy. ta coupe transversale de l'ouvrage précité, pag. 118.) SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 287 Supposons maintenant qu'il en soit ainsi: l’on expliqueroit pourquoi l'ile de Corse, en éprouvant le premier choc, a pu être bien plus maltraitée que la Sardaigne, et comment en servant d'Ægrde à la masse primitive de cette dernière, elle en a couvert la partie qui lui correspond exactement en lar- geur et en direction. S'il m'étoit permis de manifester quelques conjectures sur les différentes formations qui composent le sol de la Sardaigne, je dirois que la masse primordiale (granttique) et schusteuse, étoit déjà d’elle-même dirigée du z20rd au sud, et qu'ensuite un courant dévastateur, mu dans la même direction ( celui dont il a été parlé plus haut}, étant survenu, détruisit ou rongea presque tout ce qui ne fut pas défendu par l'ile de Corse. Ce qui fut plus exposé à sa violence fut emporté et balayé, le reste fut seulement sillonné (x). De là ce canal bien marqué, ou pour mieux dire cette absence totale des roches primitives, que l’on voit au pied occidental de la chaîne granitique de la Sardaigne. C’est alors que le sillonnement parallèle aura eu lieu par l'effet du même courant. Amorti par la résistance des grandes masses de l’île de Corse, il n’aura pu exercer sur le centre de la Sardaigne les ravages qu'il fit, où il la trouva découverte. Peu à peu le calme se rétablissant, se seront formés, avec les débris des roches primitives, les terrains dits de éransition. (1) Il faudroit pourtant excepter de cette destruction générale une petite masse granilique, qui résistant aux efforts du courant forma l'ile de l’Asinara, et fut à la petite chaîne de la Nurva, ce que l’île de Corse fut à la grande masse centrale de la Sardaigne : la montagne d’Arbus paroît offrir les mêmes phénomènes. 288 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE La seconde catastrophe dont parle M. de Charpentier, et que ce savant Juge arrivée après le dépôt des Zerrains se- condaires, me paroît également marquée en Sardaigne par la position et la quantité de ce qui reste en ce pays des roches de cette formation, et principalement celles de chaux car- bonatée compacte, que je crois se rapporter au Calcaire Alpin (ou du Jura ). En Sardaigne , comme dans les Pyrénées, on ne voit guère cette formation que vers les parties extrêmes des flancs de la grande chaine. Je pense que la cause de cette seconde des- truction est exactement la même que celle de la catastrophe précédente, c’est-à-dire #2 courant mu dans le même sens. Que l'on fasse attention aux montagnes de Mont- Alpo, de Monte Santo dans la partie orientale, de T'eulada, de S. Antioco, de Capo Pecora, de Capo Caccta, dans l’autre, on les verra toutes plus ou moins garanties d’une force destruc- tive qui auroit agi du 2074 au sud, tandis qu’elles ne sont nullement à l'abri d’un courant mu en sens znverse, transver- sal ou oblique. Le calcaire de Samugheo et de Genone, que je crois pouvoir rapporter à une formation analogue, et qui se trouve dans la présente partie centrale, seroit au ver- sant occidental de la grande chaine, ce que le Monte Santo de Baonet et autres sont à la partie orientale. Je suppose donc que cette révolution ayant eu les mêmes causes que la première, l’île de Corse aura de nouveau influé sur les effets du courant destructeur, et, bien plus, elle en aura en quelque sorte déterminé la direction dans le sens déjà ienu. C'est ainsi qu'auront été détruites, emportées ou réduites SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 289 en derrains de #ransport, ces masses de chaux carbonatée compacte, qui, d’après les lois de la fluidité, doivent avoir occupé un si grand espace sur toute la surface de Pile, et dont il ne reste, pour ainsi dire, que de bien foibles échan- üllons. D’autres sédimens auront ensuite eu lieu, et de nouveaux dépôts calcaires auront rempli le vide formé par le canal (mais seulement à une certaine hauteur). C’est alors appa- remment qu'auront été déposés ces terrains de calcaire plus grossier et de craie qui se rencontrent presque sans inter- ruption, depuis le de $. Elia près de Cagliari, jusqu’à Porto Torres, et Castel Sardo , maintenant recouverts en partie par les produits des volcans. Je seroiïs tenté de reconnoître, après cette formation, une troisième vicissitude ; et celle-ci, quoique partielle, me paroît également annoncer les effets d’un courant marin. Je veux parler de lexcavation dans les terrains £ertiaires du Campidano, qui commence au pied de la colline de Ca- gliart, et qui finit au golfe d'Oristan. Mais ce courant n’a pas agi dans le sens des deux précédens, où donc le chercher? Que l’on prenne la carte de la Méditerranée, et que l’on considère la direction du littoral de la Sicile, qui fait face au sud-ouest, ou plutôt que l’on suive la direction du bras de mer compris entre ce littoral et le cap Bon près de Carthage, l'on aura exactement celle du Campidano Sarde. Ce seroit certainement de ma part une grande témérité, si je prétendois pousser plus loin mes conjectures; je ferai seu- lement observer, 1°. que si l’on en juge par l’enfoncement du Mém. du Muséum. t. 11. 37 200 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE golfe de Lyon déjà cité, ou plutôt encore de celui de la Grande Syrte, l'on arriveroit droit à l’autre, sans éprouver d'autre obstacle que le Camnpidano sarde ; 20. la majeure élévation de ce dernier, dans sa partie centrale, ne va pas au- delà de 150 mètres au-dessus du niveau de la mer; 30. au pied de la colline de Bonarta près de Cagliari, où commence ce Campidano, je trouve une brèche osseuse que je crois avoir des rapports avec celle de Nice, d'Antibes, de Gibraltar. ( Voy. les nos. 6, 7 et 8 de la collection.) SECONDE PARTIE. CATALOGUE DES ROCHES (x). IV. B. La colonne À présente les numéros d’ordre de la collection. Les chiffres de la colonne B indiquent, en mètres et fractions de niètre , l'élévation des licux au - dessus du niveau de la mer. Cette élévation a été mesurée barométriquement , lorsqu'il n’y a pas de point d'interrogation. Elle a été seulement évaluée par approximation, lorsque le nombre est suivi de ce signe. Nes. Mètres. A. ne A Cagliari. 60? Substance contenant des débris de coquil- les, grains de quartz, etc. , recouverte de cristaux calcaires, retirée du centre de la coiline de Cagliari par-l’excavation d’un puits; elle sert de lit à la roche suivante. à 2. Idem. 61? Substance argilo-calcaire bleue, superpo- sée à la piece précédente; je crois qu’elle est disposée en couches peu épaisses: ne RSS AE ER RE RE (x) Les roches décrites dans ce catalogue ont été envoyées au Muséum par M. de la Marmora. Elles sont déposées dans les galeries. (Vote du Rédacteur.) SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 201 Nos. à Mètres. L pourroit-elle pas avoir du rapport avec l'argile bleue de la place Saint-Domi- nique de Gênes et de bien d’autres lieux d'Italie, dont il a été dernièrement parlé dans une note de M. Alex. Brongniart à un article de M. Laurent Paretto , in- séré dans le premier cahier des Annales . des Sciences naturelles, tome 1*%., jan- vier 1824, page 86. Cagliari. 61 à 100? } Roches calcaires qui forment la colline de Idem. 100?) Cagliari, dont la plus grande élévation Or ÆS © Idem. 129,92.) est indiquée ci-contre. La roche n°. 5 forme presque toujours la couche supé- rieure , etelle est la plus commune. On s’en sert pour bâtir comme de la m0- lasse ; elle se décompose cependant très- facilement ; on y trouve desrnadrépores et autres coquillages, dont malheureu- sement je n’ai pas tenu compte, me m’é- tant occupé de ce genre de recherches que depuis mon départ de ces contrées. 6. Colline de Bonaria, 18? Ces échantillons , qui se trouvent à peu de : pres de Cagliari distance de la colline de Cagliari, ap= ©œ 1 et de Santo Elia. partiennent à la brèche osseuse dont j’ai déjà parlé , et que je crois assez analo- gueàcellequ’on trouve à Gibraltar, etc.; elle est comme adossée à la colline de Bonaria, dont la formation correspond à celle de Cagliari. Montagne de Capoterra, à 200? Fragment de la roche polie dont il a éga- 10. trois heures de Cagliari, à lement été fait mention ; on la voit sur l'est. la cime d’un mont que je juge apparte- nir à un terrain de transition; elle est 9 posée au pied et contre une masse assez considérable d’une substance quart- zeuse, formantle n°. 10. 11. Pula, pres de la mer. Conglomérat calcaire quise trouve au bord : de la mer , près d’un vieux môle de l’an- 37* 202 Nes: 32. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22, MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Santo-Antioco. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Idem. Isle de Saint-Pierre. Metres. 20? 20,35? id. id. id. id. id. id. id. 5o? 10? cienne ville de Nora, et formant comme une espèce de jetée. Je la crus au pre- mier abord un ouvrage des hommes; ne seroit-elle pas( peut-être) analogue à la roche de Messine qui se forme journel- lement? Substance formantla base,et même la pâte de la brêche volcanique dans laquelle se trouvent les matieres suivantes. Lave qui fait parlie de cette brèche en masses roulées. Même localité et circonstance. Idem. Arpgile rouge , pouzzolane ? qui se trouve en filons ou en petils rognons, et pres- que toujours unie aux roches suivantes. Mème substance , avec des fragmens d’ob. sidienne perlée. Obsidienne perlée. Idem. Idem plus compacte, et polie naturelle- ment en quelques endroits. On trouve cette roche en plus grande abondance que les précédentes. Elles paroissent toutes avoir été roulées, et déposées par les eaux. Porphyre volcanique? formant une grande partie des monts de l’île de Santo-An- tioco et des lieux voisins. Roche de l’île de Saint-Pierre, qui est en partie colonnaire. On la voit dans la partie de cette île qui approche da- vantage de celle de Santo-Antioco. Elle y forme, par des cassures verticales, plusieurs espèces de colonnes informes etcomme grossièrement articulées. Leur base est couverte par les eaux de la mer, etelles sont détachées de quelques pas SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. Nes, 3 Mètres. 4. 23. Isle de Saint-Pierre. 15? 24. Idem. 24? 25. Îdem. 5,20. 26. Idem. 19,90. 27. Îdem. 18,50. 28. Idem. 18,20. 29. Îdem. 18,50. 3o. Isola piana. 0. D) 93 du rivage : voy. la fig. 2 qui accompa- gue la carte. Cette substance est très- sonore sous le marteau. Même localité vers l’intérieur de l’île. Roche volcanique des environs, rouge, avec plusieurs crist. de feld-spath blanc. Porphyre à base de pétrosilex ? tres-com- mun dans les environs de Carlo-Forte; il offre l’aspect d’une coulée inclinée du sud au nord, et ne fait qu'une même masse avec les deux variétés suivantes : voy. fig. I. Le même , appartenant au même bloc, et qui paroît avoir été plus garanti de l'influence des agens atmosphériques. Prismes dont les faces sont couvertes d’une belle teinte rose , souvent ramifiées par des dendrites (voy. fig. 1). Ils appar- tiennent encore à la même masse que les deux roches précédentes. Masse argileuse dans laquelle se perdent les têtes des prismes. Substance argileuse servant de lit à la pré- cédente , et que je crois être de même nature que les n°. 27, 28 et 29; mais en décomposition. La fig. n°. 1 se rap- porte à ces cinq variétés. On trouve la même substance à Santo-Antioco et à Y’Isola piana , non loin de Saint-Pierre. Les prismes de cette dernière variété me _ paroïssent jusqu'ici les plus parfaits ; l’é- paisseur de cette roche, qui est un peu inclinée du sud au nord , ne passe guère un mètre et demi à partir de la super- ficie jusqu’au n°. 29. Elle paroît avoir coulé , et être venue de Santo-Antioco. Mème gisement et circonstance que le n°. 20. Nes. 33. 34. 35. 36. 37. 38. 39. 4o. MÉMOIRE GÉOLOGIQUE mètres. Iglesias Monte Pont. 140? Argile schisteuse rouge qui me paroît ser- vir de base à une masse calcaire qui con- tient les numéros suivans. Idem. id. Roche superposée à la précédente (gite de la mine de plomb). Idem. 149? Masse argilo-calcaire (cale. de transition?). Cette substance constitue principale- ment les gites des filons. Idem. 148? Baryte sulfatée? et autres substances, gan- à gue du numéro suivant. Idem. 148. Galène de Monte Poni. On trouve encore en cet endroit des échantillons de plomb carbonaté. Domus-Novas. 100? Conglomératsd’obsidiennes et autres subs- tances volcaniques qui se trouvent dis- posées en couches dans le fond de la val- lée; ces roches ne s’aperçoivent que dans les endroits mis à découvert par leruis- seau. Château de Siliqua. go? Roche qui forme une petite montagne isolée dite Siliqua , et qui se trouve éga- lement pres du village de ce nom et les environs. Je la crois volcanique. Domus-Novas. 120. Fer roulé dans le ruisseau qui traverse la grotte dite de Santo-Giovanni. J’ai trouvé dans un précédent voyage un au- tre fragment qui avoit les propriétés magnétiques. Idem. 5 150; Chaux carbonatée de Domus-Novas. Cette fé roche constitue plusieurs monts assez élevés, parmi lesquels se trouve une grotte assez spacieuse qui communique d’une vallée à une autre. Je serois tenté de placer cette substance dans les ter- rains de transition. Ussana. 298,90. Granite des monts qui se trouvent au pied - de la grande chaîne. Je vis près de là un poudingue quartzeux de la plus grande 41. Ussana. 42. Monastir. 43. Idem. 44. Idem. k 15. Sardara. 46. Idem. 47. Îdem. 18. Idem. A9. Îdem. 5o. Idem. 51. Îdem. 52. dem. 53. Idem. 54. Idem. 55. Giarra de Serri. SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 205 Mètres. 298,90: 252. 300. 310. 253,9. id. 360 ? 500 ? dureté ( dont on m'’égara l’échantillon), Espèce de tripoli? en couches paralleles, occupant le fond des vallées , et formant la majeure partie des terr. des environs. Idem. Roche d’une montagne volcaniqueisolée , superposée au n°. {2. On voit cette roche en masse et en blocs roulés. Idem sur l'extrême cime. Substance analogue à celle du n°. 41: elle est en strates également paralleles, de quelques pouces d'épaisseur , et servant de lit à plusieurs autres roches. Même localité que la précédente. Roche qui en quelques endroits est super- posée aux deux précédentes , et qui reu- ferme des débris de coquilles. Localité des bains de Sardara (dans la vallée). Lave schisteuse, zdem. Roche grenue superposée aux n°. 46, 45. Supérieure à la précédente. Idem à strates. Idem, idem. Cime dela montagne de Sardara, strates visiblement inclinés de l’est à l’ouest. Lave grise cellulaire , formant le faite d’un plateau incliné de l’est à l’ouest. Cette lave repose sur une roche calcaire for- mant un petit mont maintenant isolé par l’excavation des vallées voisines. Je crois que cette couche volcanique est venue du volcan de Nurri: voyez le profil n°. 7. Anthracite. ; Lignite ?... Il me fut impossible, à cause d’un temps affreux , de visiter cette ré- gion, et de reconnoître le gisement de 206 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Nos: Mètres. ‘ j ces substances, et de bien observer les roches volcaniques qui s’y trouvent éga- lement. Je me propose de visiter ce À pays à mon prochain voyage. 58. sil. Lignite, mêmes circonstances. J’ignore ab- solument comment se trouve ce com- bustible ; je le crois pourtant, d’apres ce qu’on m'a dit, en couches inclinées dans ù un terrain calcaire, ou analogue au n°. Gr. 59. Laconi. À 500? Tuf calcaire, avec empreintes de feuilles de quercus ilex. On s’en sert dans le pays, comme l’on fait à Rome du tra- vertino ; on l’emploie de préférence à la construction des voûtes (Je ne pus éga- lement visiter ces localités.) 60. Sarcidano. 545. Substance argileuse rouge, peut-être un grès ? 61. Idem. td. Même localité. On trouve cette roche po- sée sur les schistes qui forment la base de la montagne centrale. Ces deux ro- ches (60, 61), (mais principalement cette derniere) constituent comme une espece de grand plateau incliné de l’est à l’ouest, et présentent vers la grande montagne , non loin du fleuve Flumen- dosa, une coupure à pic de plus de 100 metres de profondeur. On la voit former, dans quelques endroits, des espèces d’arguilles ou colonnes, que l’on nomme dans le pays campanili (clo- chers). Je regrette infiniment que le mauvais temps ne m'ait pas permis d’e- tendre mes observations dans cette con- trée, où l’on trouve d’ailleurs le /ignite et la houille , à ce qu'on m'a assuré. La surface de ce plateau, que l’on nomme Sarcidano, est couverte par une grande G2. 63. 66. SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 207 Aritzu. Sommité de Corrubor. Punta Schiuschiu. Idem. -Mém. du Muséum. it. Mètres. forêt de chênes ; le sol est tout parsemé de galets de sa propre nature (n°. 61). L'on trouve également de grands blocs isolés qui présentent l’aspect de certains débris d’édifices; je vis même, tout aupres de la grande montagne schis- teuse, ce terrein (n°. 61) offrir comme l'image d’une forêt coupée, dont il ne resteroit sur pied que la base des troncs : tel est le mode de décomposition de cette roche à sa surface. 845. Roche schisteuse, qui, ainsi que la sui- vante, forme presque toute la masse de la grande montagne centrale. 1000? Idem. Genargentu. Punta pes 1826. Cette roche schisteuse appartient à la cime la plus élevée de l'ile, ainsi que cela paroît résulter de deux voyages que j'ai faits en ces lieux : ce schiste présente des formes irrégulierement tordues, avec des feuillets de quartz. id, Roche quartzeuse de la Punta Schiuschiu II, du Genargentu, distante de 200 pas de la précédente et de la même élé- vation. Idem. Elle se présente sous la forme de débris de constructions ; on diroit, en montant sur cette cime, que l’on mar- che sur les ruines mouvantes d’un ch4- teau , d’une tour. C’est de ce point que, par une journée heureusement très- claire (le 25 mai), je vis lever le soleil, et je pus voir distinctement la mer dans toutes les directions autour de l’île ; quoique les montagnes de Zym- barra bornassent un peu ma vue, je ne distinguai pas moins une bonne partie de la Corse méridionale. 58 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Mètres. ÂAzuniet Samugher. Subslance volcanique, tres-commune en ces régions. Idem. x à Même localité, porphyre pétrosiliceux. Gonostramazza. 120. Conglomérat, grès? qui contient les deux substances suivantes. Idem. 119. Bois pétrifié ? Idem. id. Bois bitumineux, renfermant des veines blanches de quartz? On le trouve assez abondamment, et l’on distingue bien la forme des troncs , qui, par leur position entre eux, offrent les indices d’un grand désordre à la suite duquel ils furent en- tassés pêle-méêle. On s’en sert dans le pays comme combustible à l’usage des. forges. Âles.. Espèce de grëes.vert, qui se trouve à une certaine profondeur, et au-dessous des deux roches suivantes. Je l'ai trouvé au fond d’un vallon, au-dessus du village d’Ales, et j’en ai eu des morceaux par l’excavation d’un puits. L’échantillor de celte roche, qui est déposé au musée de Turin, sous le même n°. 72, contient une coquille (peigne) blanche. N. B. Les numéros suivans, jusqu’au n°. 78, sont ici rangés par ordre de su- perposition directe jusqu’au sommet de la montagne dite de la 7rebina, où se trouve ledit numéro ; ceux qui du n°. 58 arrivent au 87, ayant été ramassés dans Ja descente , se présenteront dans l’ordre inverse, c'est-à-dire que le n°. 87 sera ! progressivement inférieur au n°. 78. Ales, à la montée sur le versant de l’est. 220? Autre grès, gris. Idem. 221? Idem, avec des empreintes de corps étran- gers et organisés. 240? Roche volcanique en coulées. (we) + © SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 209 Mètres. 300? 350? Cime de la Z'rebina. 719,7: Idem. 7o0? Idem descente vers le nord-est. id. Idem. 656? Tdem. 600-500. Idem. 500-400. Pau, village sur la pente 300? de ladite montagne. Continuation deladescente. 260? Idem. id, Idem. 213. Mont. entre Ÿ’i{la Urbana 200? et Fordungianus. id. Idem. 400 ? Idem. 400 ? Fordungianus, 212.° Roche volcanique, en masses plutôt rou- lées que coulées. Idem, en coulées de l’ouest à l’est. Roche de la sommité de la montagne de la T'rebina. Idem. Idem. Lave de la descente vers le village de Pau ; la localité où se trouve cette roche n'a paru indiquer un ancien cratère, ver sant vers l’est et l’est-nord-est. On ÿ voit plusieurs fragmens d’obsidienne. Porphyre à base de pétrosilex en coulées et schistoide : l’on en voit de grandes masses. Lave cellulaire, même descente. Obsidienne vitreuse noire, semblable à celle qui se trouve sur la cime. On la voit en plus grande quantité dans le village , et même (selon quelques personnes) elle se trouve en masses coulées dans celui d'Ollastra. (Jene pusm’y rendre.) Espèce de grès servant de lit au n°. 83. Idem. Masse argilo-calcaire ? avec spath calcaire, base générale de toutes les roches sub- ordonnées aux laves de ces régions. Jaspe. Idem. Schiste micacé. Granite. Ces échantillons furent recueillis dans une montagne, au pied dela grande chaïne centrale, que je crois appartenir aux terreins de transition. Roche volcanique rouge, tres-commune dans les environs, et d’un grand usage dans les constructions. 38” 300 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Nes. Mètres. 93. Fordungianus. 200. Grès vert, même localité. L’on trouve à Fordungianus, jadis forum Trajani, les restes .des thermes romains aupres d’une source d’eau chaude minérale, dont je parlerai dans la relation de mon voyage. 94. Busaqu. 378. Roche quartzeuse avec mica ? Elle fait par- tie du pied des montagnes centrales , et se trouve en plusieurs endroits couverte par des laves. La localité du village de Busaqui, qui est bâti dans une espece d’entonnoir, paroît, soit par sa posi- tion , soit par la nature des roches vol- caniques qui l’entourent , indiquer un ancien cratère. Il domine le plateau de Ghillarza, formé, comme je l’ai dit, par les laves du n°. 107 et autres, ve- nues du cratère de Santo Lussurgiu qui est en face , ainsi que de celui de Monte Santo Padre, pres de Bortigali, qui est vers le nord. 95. Uras Lave noirâtre cellulaire, qui me paroit venir de la montagne de la 7rebina ; on trouve aussi à Uras des obsidiennes vitreuses noires, venues apparemment du même volcan : ce sont les mêmesque l’on voit sur la cime déjà citée, et au village de Pau. Voyez n°. 84. 96. Milis et Bonarcado. Lave cellulaire en grandes masses coulées, venant de la montagne de Monte Ferru. 97: Santo Lussurgiu. 502,3. Laves en masses, 98... Idem. id. Idem, avec plusieurs taches arrondies à rouges.Ces roches se trouvent en grandes masses à l’entrée du village. 99. Zdem. id. Idem, à taches plus fines. 100. dem. id. Lave scoriforme grise, même localité. 101. Jdem. id. Lave rouge cellulaire, idem. 102. Jdem. id. Idem, grise. 107. 168. 109. 110. SÛR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 307 Mètres. Santo Lussurgiu. Bo2,3.: Idem. 502,900? Sommite de la montagne dite Monte Entu (Mon- te Vento). go1,80. Âu versant occidental. 680 ? Cugliert. 409,6. Silanus. 300? Idem. id. Tdem. id, Idem. id. Idem. id. Tdent. id. Idem. id. Montée de Bortigali. Idem: si ? Idem.” fo Cime des monts de Borti- : üo0 ? gali, de Silanus, etc. Lave grise porphyritique? dans le village même. Roche tres-commune, eu grandes masses. Idem. Cette roche se trouve sur la cime; elle estégalement répandue sur les deux versans. Idem. Roche volcanique. Cette substance se trouve également des deux côtés, et forme en quelques endroits des espèces de boules à feuillets concentriques , dont j'ai déjà fait mention. Granite en décomposition. Schiste. Idem. Ces trois roches forment en partie la montagne du Goceano et de Monte Raso; elles sont à Silanus en contact avec les marbres suivans (calcaire de trAnsition ) ? Calcaire de transition ? Idem gris, dit Bordiglio , dans le pays. Idem grenu, plus blanc. Albâtre. Ces quatre roches, dont on tire les marbres les plus estimés du pays, ou, pour mieux dire , les plus connus, sont unies au schiste , et sont en grande partie couvertes par des coulées de roches volcaniques , parmi lesquelles se trouve celle qui correspond au n°. 119. Roches argileuses volcaniques de la mon- tague de Bortigali. Elles sont abondan- tes, ainsi que les suivantes. 1dem , nom- imée dans le pays cantone (ou pierre à bâtir). Cette roche, porphyre pétrosiliceux ? do- minetoutela cime de cesmontagnes; elle couvre en certains endroits la carrière de Silanus, et constitue une grande 302 . MéÉmorrE Nes. Mètres. 190. Cimedesmontsde Bortt- : gali, de Silanus , etc. 121. Plateau de Ponorva, et Macomer. 122, Idem. 123. dem. 124. Près de Bonorva, de. 476,35. ) Pozzomajor, Giave; F1 Semestene, Keremulez. 125. Jdem. 304. 126. Jdemi: 360. 124. Tdem. >| 2641 Î 4oo? 128. Puzzo major. GÉOLOGIQUE partie des terrains de Bortigali, de Macomer, etc., etc. Mêmes localités. Substance argileuse , peut-être une espèce de pouzzolane, formant des strates assez épaisses, ‘et contenant les.roches sui- vantes. Obsidienne. Idem , ou espèce de pechstein ? Ces roches se trouvent en rognons ou galets semés sur la surface du terrein, ou bien em- pâtés dans la substance n°. 121 : leur grosseur n'excède guère celle des deux poings. Roche calcaire , espèce de craie? qu’on peut considérer comme la principale substance de toutes ces régions, et qui sert de lit aux produits volcaniques. . Idem. Argile verte, avec des fragmens de la- ves,, etc., qui se trouve danslevillage, et la vallée au-dessous de Bonorva. Portion d’un échinite spathique , contenu en grande quantité dansla roche n°. 126. "Tous les monts ou plateaux qui 5e trou- vent à huit ou dix lieues à la ronde ap- partiennent à une même formation; ils sont presque généralement recouverts par des laves; on y trouve même des indices d’anciens crateres..Le plateau au-dessus du village de Bonorva, qui est plusélevé de 120 mètres, est forméde semblables roches calcaires, recouvertes d’une coulée basaltique de trois à quatre mètres d'épaisseur. \. Et Jaspe jaune; on le trouve en rognons épars sur la lave ou avec des débris de roches SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 303 No. Mètres. calcaires; l’on en voit également de rouges mélées avec des obsidiennes vi- VE: trees noires. 129. Puzzo major. 400? Lave grise un peu cellulaire, contenant - des cristaux ; on trouve cette roche dans un lieu dit Puzzo major, qui est un pe- tit cratère des mieux caractérisés que j'aie pu voir dans mon voyage. Il en existe également un autre en un endroit dit Keremulez, où monta M. le profes- seur Keyser de Christiania , qui y fit de irès-intéressantes observations. 130. Bonver (Buonavia). 450? Cette roche se trouve sous de différentes formes. Elle paroît venue en coulées du cratère de Keremulez, et présenié sur plusieurs cimes,un aspect basaltique co- lonnaire informe. 131. Fond de la vallée de Pa- 200? Roche composée de quantité de testacees dria, formant je fond de la vailée de Padria.. La collection qui suit ce numéro , et qu? comprend les échantillons de la mon- tagne de Monte Leone, m'a été égarée. Cette région ne differe guère des voi- sines ; la montagne de Monte Leone, qui a une forme tabulaire, et qui est isolée et taillée à pic, est sur sa cime légère ment inclinée dans le sens de ses strates de l’est à l’ouest. Les couches volcani- ques qui couvrent toutes les cimes voi- sines ne s’y trouvent pas; je ne pus en mesurer l’élévation, car on me cassa: u3x: dans cet endroit mon baromètre, et je ne pus de sitôt le remplacer. 132. Scala piccada d'Alghero. 450? Obsidienne unie à une roche porphyriti- #l que semblable à celle des n°. 21, 25 et 119. 133. Nurra, Capo Caccia, 300? Calcaire compacte de la Nurra , qui forme Porto Conte: ; également les localités de Porto Conte :: 304 Nos 152, MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Nurra. Id. et île de l'Asinara. ASinara. Idem. Osilo. Capo de Mela. Dépôt dela source Santo Martino. Ploaghe. Ploaghe. Oschiri. Idem. Idem. Fontana del Fico. de Mètrese 200 ? 100 ? 250? id. 600? 350? id. 380? 5oo ? 266,5. c’est dans cette roche que se trouve une grotte fort renommée dans le pays. Elle communique avec la mer, et ne peut être visitée que dans le plus beau temps de calme. Roche schisteuse des montagnes centrales de la Nurra. Idem, passant aux deux roches suivantes. Granite, roche générale de cette île. Même localité. Substance volcanique qui forme la base d’un mont isolé que je crois avoir fait partie d’un ancien cratère. Lave? qui forme plusieurs monticules su- perposés au calcaire, Tuf calcaire, formé par une source miné- rale, connue dans le pays sous le nom de Bains de Codrungianus; l’eau sort d’une roche semblable à la précédente (139), et dépose journellement des parties calcaires à sa surface. Masse calcaire , qui sert de lit aux roches volcaniques suivantes ; elle contient des coquilles marines (des moules ?). Substances volcaniquesdelamêmelocalité. Idem , avec des taches vertes : cette roche est sonore. Autre substance volcanique, dont on se sert pour bâtir. Espèce d’argile verte en strates horizon- tales. Lave rougeâtre avec des cristaux de feld- SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 305 Nes. Mètres. spath. Elle forme des petits monticules qui se perdent dans la plaine. 153. Nalvi. 350? Lave grise, très-pesante, avec quantité de cristaux : elle est en couches sur d’au- tres laves et sur un terrein calcaire. 154. Martis. 320? Substance argileuse blanche, qui repose sur du calcaire (craie? ). 155. Idem. id. Silex. Cette pierre à feu se trouve en cou- ches dans le calcaire (craie?}), et en rognons dans les substances volcaniques, telles que le n°. 154. Toute la vallée est couverte de ces pierres roulées, avec lesquelles on trouve également des ga- lets de jaspe rouge et jaune , tels que ceux du n°. 128 ,etc., et de Saint-Pierre. 156. Castel Sardo. 240? Lave qui m'a paru venir du cratère de Ploaghe où d’Osilo. Elle recouvre plu- sieurs collines calcaires, et se perd en- suite dans la mer. 157. Idem. Substance friable, servant, près de la mer , de lit à la précédente. 158. Idem. 20? Obsidienne, qui passe, comme celle du n°. 132, à une espèce de porphyre pé- trosiliceux , 21,25, 119. 159. Castel d’Oria. 320? Roche granitique, approchant du por- phyre ? 160. Idem. id. Roche que je crois de nature porphyriti- \ que , et qui forme une petite montagne de 8o mètres de hauteur. C’est celle dont il est parlé plus haut, à l’article Porphyre. 161. Scaffa, prèsde Tempio. 200? Substance qui me paroît tenir de la précé- dente, et s’unir au granite. 162. Entre Castel d'Oria; et 480. Roche que je juge être une espèce de Tempio. grunstein ? Elle forme des groupes à cimes arrondies, qui contrastent fort avec les arêtes dentelées des roches sui- vantes. - Mém. du Muséum. 1 11 39 306 M£MOIRE GÉOLOGIQUE Nes. Mètres. 163. T'empio. 616. Granite des monts Lymbarra et de T'em- pio. 164. Longo Sardo. 2. Calcaire de formation tres-récente ? On le trouve aupres de la mer, posant sur la roche 166. 165. Santa Reparata. 1. Idem. ; 166. Idem. 5. Granite semblable à celui du n°. 63. On le | - voit au bord de la mer en grosses masses un peu arrondies , de 15 à 20 metres de diametre. Ces blocs, surtout ceux qui se trouvent battus par les vagues, sont taillés par l’art ; et l’on en a tiré plus de quatre-vingts pièces qui offrent presque toutes la forme de prismes triangulaires. Quelques-uns de ceux-ci sont déjà gros- sièrement réduits à la forme cylindri- que, et ont environ 10 mètres de lon- gueur sur un de diamètre. Je crois (d’après ces observations, et sur- tout d’après certaines inscriptions funé- raires de quelques sarcophages et autres monumens de même roche, faits sur le lieu ) pouvoir considérer cette carrière comme l’ouvrage des Romains; et peut- être pourrois-je la désigner comme celle d’où ce peuple tira les colonnes du fa- meux Panthéon de Rome, quoiqu’une mauvaise carte de l’île de Sardaigne la place dans l’intérieur des montagnes de la Gallura. 167. Ile de la Madeleine. 100? Granite. 168. dem. 20? Roche qui me paroît avoir rapport avec celle du n°. 162. 169. der. 4 Roche granitique ? ou peut-être analogue à celle du n°. 160. On trouve encore dans cette île le granite des n°. 163, 166, que je serois peut-être tenté de croire d’une époque plus moderne que Y N CS 190. T'erranuova.- 171. Îdem. 1792. Ozieri. 373. Nuoro, 1794. Siniscola. 175. Îdem. 176. Dorgali, SUR L'ILE DE SARDAIGNE. 307 Mètres. celui du n°. 167. Seroit-il contemporain de la sienite? Je n’ai pas vu dans toute cette roche ces longues veines de quartz que j'ai remarquées dans les autres gra- nites. 1. Roche granitique à gros cristaux de feld- spath rouge. Il se trouve près de la mer, et sert de lit à la chaux carbonatée de l’île de Tavolara , placée vis-à-vis. (Ce calcaire est pareil à celui du n°. 176.) 6. Granite semblable à celui desn°. 163, 166, dont sont bâties toutes les maisons de la Gallura. 400? Roche granitique? que je crois appartenir au terrein de transition. 600? Granite entre Nuoro et Oliena. Cette ro- che, qui constitue une grande partie des montagnes des environs , se décom- pose en quelques endroits tres-facile- ment, et se réduit soit en gravier, soit en blocs arrondis. Je vis un de ceux-ci, ayant 2 ou 3 mètres de diamètre , posé en équilibre sur un autre quartier de même nature, de manière à pouvoir être mis en mouvement avec une tres- sfaible impulsion de la main. Ce granite est à Oliena et lieux voisins, recouvert par une tres-grande masse calcaire, 174, 176. (Calcaire alpin?) 20. Schiste micacé, base de la montagne cal- caire de Monte Alvo (Mons albus). 700? Chaux carbonatée en grandes masses du Monte Alvo de Siniscola. La forme de cette montagne est plate à sa cime; son élévation me paraît être de mètres au-dessus du niveau de la mer. 600? Autre roche calcaire , qui forme la monta- gneisolééde Galtelly, ainsi quela grande 308 Nos. 179. MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Mètres. masse des monts d'Oliena, de Dorgalr et de Monte Santo. Cette substance est en quelques endroits superposée au gra- nite, et en d’autres au schrste, ou à la roche suivante. Buon Cammino. 4oo? Roche servant de lit à la précédente dans le centre de la masse calcaire. T'ortolr. 12. Roche granitique, ou peut-être espèce de porphyre? du cap Bellavista, près de T'ortoli. Plusieurs montagnes de cette côte orientale appartiennent à 7 cette substance. Capo Sfera Cavallo. 18. Roche qui me paroït approcher de la pre- cédente : elle se trouve encore tout le long de ce même littoral. J’ai vu, pen- dant mon trajet maritime , quelques lieux où cette roche présente une struc- ture prismatique. Les autres échantillons non numérotés, n'ayant pas été recueillis par moi, et ne faisant pas partie de la collection, sont placés à part. Ce sont des produits volcaniques , ou jaspes de l’île de Sains- % Pierre. ie CIRTE GÉOLOCIQUE D# SARDAIGNE CANIL NA CORNE TES Lokgo Sunte Ya “ à 7 7 £ 7 ÿe. Madalena me Caprere © Foro os, L'un Ceprom Z ASINARA L'Rassa 27 14 €? Ceraso î Ru z = a = Ver: : F- L Tavol ne = Z Tavolara Roches Vol ü : se j : Volcaniques, de Ile S! Pierre, +7 RSR NE Ko EE Re. re , 7/2 Partie cférwnre se divise er Prises. (NP 25-29) À! à É + d () # re | GÜDI PE TORRES Carcir de anna ' TR # 5 g PNEU E 5 R... . We = légers re Le = FE Wecéion Pite 1727/4 (274 RS $ C?Comino FA = 7 = = ee Section férte ver la Lyne PQ œ - AC Santo ë& PR 7e \ \ 2 — Æ À 0 1 N F 0 N CO Bellavs | à Section file ser la Ggre NO C?Bellavista o & o | à Fig.6. ; G Ÿ Va | : Z Methoentre Se . 2 Sferacavall | & ZLCasetx dé Done Ce SMarce Es GC. ANORISTAWO = IL, S ï , L ï ; : CHE rato . FE die Ë = Carb sel dE Cor caecram 2Carbonara é 4 L'éé Corot m LR ” : Echelle de 15 Myriametres servent cyalement la \Crrteetibises Gupes. ; = = = == —|— nn “à = == ail ES = ' 3 ee s | < 1} 1 TE = = F es dx , C T'eulada ; SR —— == : 25 -+ 2 7 i FJ 7 at de famgis Ÿ ur PA PET . 272 AL de Mo mee The Ge: S TN j Lucie Lornsjrame SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. 309 EXPLICATION DE LA PLANCHE QUI ACCOMPAGNE LA CARTE GÉOLOGIQUE. Fic. 1. Roche volcanique de l'ile de Saint-Pierre, divisée naturellement en prismes dans sa partie inférieure (voy. les n°. 25, 26, 27, 28, 29 de la Collection ). Fic. 2. Un des colonnes naturelles de l’île de Saint-Pierre, substance volcanique { voy. le n°. 22). Fic. 3. Coupe transversale sur la ligne R. S. a. Montagne de la Nurra (voy. n°. 134, 135, 136). b. Ville de Sassari (n°. semblable aux 3, 4et5). c. Mont d’Osilo ( n°. 138 superpose au calcaire ). d. Village de Ploaghe (n°. 141-148). e. Monts de Lymbarra (n°. 162-163). f. Pointe Congianus pres de Terra-Nuova ( granite )- Fic. 4. Coupe transversale sur la ligne P. Q. a. Capo Caccia, Porto-Conte ( n°. 133). b. Monte d'Oglia ( calcaire à strates inclinées de l’est à l’ouest )? c. Montagne de la Nurra( voy. a, fig. 3). d. Montagnes de la Minerva ( volcaniques ). e. Montagne de Monte-Leone ( calcaire ). f. Padria (n°. 131 à la base, et volcanique au sommet ). g. Plateau au-dessus de Bonorva (base, n°. 124, 125, 126; cime, lave ba- saltique ordinaire ). ; h. Monte-Raso (n°. 108, 109, 110 ). . Montagne de Patada ( granite ). j- Montagne d’Alà (idem ). k. Montagne de Nuoro ( granite, n°. 173 et autres). 1. Monte-Alvo (Mons Albus), de Siniscola ( n°. 174-175). m. Mont isolé de Galtelly (n°5. 175-176). . Orosei (lave cellulaire }. Fic. 5. Coupe transversale sur la ligne N. O. LA 5 a. Cuglieri (volcanique, n° 107 et autres ). b. Gime du Monte-Ferratu (n°. 105 et autre }). c. Santu-Lussurgiu (n°%. 97-105 ). d. Plaines de Ghillarza, de Paulilatino, etc. ( volcanique , 107 et autres ). e. Monte Santo-Padre de Bortigali ( n°. x 15-120 )E 310 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE Jf: Busaqui ou Busachi (n°. 94 et volcaniques). g. Monte-Raso (ut supra, fig. 4, A.) h. Montagne de Corruboi (n°. 63 ). z. Mont d’Oliena ( base n°. 173, masse n°. 176). j. Monte-Santo (base schisteuse, masse n°. 176). ] FiG. 6. Coupe transversale sur la ligne L.-M. a. Plaine d’Oristano, dite Campo S.-Anna. b. Cime de la Trebina, ou Trebia au-dessus d’Ales ( n°. 78 et autres). c. Giara (ou plateau volcanique superposé au calcaire). d. Mont de Genone ( calc. compacte). e. Laconi (idem, et volcaniques, plus le n°. 59 ). f. Plateau du Sarcidano, grès ? ( n°5. 6o-61 ). g. Montagne d’Ariizu et Genargentu (n°. 62-66 ). h. Vallée de Flumendosa (schiste ). i. Montagne de l’Ogliastra (granite ). j. Idem , prolongée... (idem ). k. Monte-Cuadazzoni (porphyre )? n°. 159. Fic. 7. Coupe transversale sur la ligne I. K. F a. Cime de l’#rcuentu d’Arbus (granite ). b. Plaine du Campidano-( alluvion ). c. Montagne de Monte-Reale (n°. 45, et autres ). d. Montagne de Sardara (n°. 45-54). e. Montagne de Lunamatrona (n°. 45-46 et autres). f. Giara de Serri ( base calc., cime volcanique, n°. 55). g. Nurri (idem ). h. Volcan de Nurri, cratere ? i. Lit du Flumendosa ( voy. k, fig. 6). j- Montagne du Sarabus ( granite ) ? k. Roche porphyritique? n°. 179. Fc. 5. Coupe transversale sur la ligne G. H. a. Isle de S. Pierre (volcanique, n°. 22-20 ). b. Canal deS. Pierre. c. Montagne S. Giovanni ( calcaire alpin ? voy. n°°. 133 et 176). d. Vallée de Villa-Massargia et de Siliqua (terr. de transport, et n°*. 36-37, e. Château de Siliqua (volcanique ? n°. 37). fe Commencement du Campidano (terrain de transport ). g. Mont de Monastir (n°. 42-44). / SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. STI Fic. 9. Coupe transversale sur la ligne E. F. a. Ile de Santo-Antioco ( base mérid. calc., le reste volcanique, n°. 12-20 ). db. Golfe de Palmas. . Montagne près du Monte-Santo (voy. c, fig. 8). . Cime de la montagne de Capoterra (terr. de transition ? voy. n°*. Q-10 ). . Capaterra (T. trans. ? ). : Etang de Cagliari. . Montagne de Cagliari (n°. 1-8 ). . Campidano de Cagliari ( transport ). 1. Sinia (transition ? ). j. Montagne des sept Frères, sette fratres (granite ). SH 9 À 0 Fic. 10. Coupe longitudinale sur la ligne C. D. a. Monte-Santo de Pula (granite). b. Mont au-dessus de Siliqua. c. Montagne de Siliqua (voy. e, fig. 8, et ne. 39 ). d. Monts d’Eglesias et de Domus novas (n°. 31—36). e. Campidano (terrain de transport et volcanique ). J. Cime de l’Arcuentu ( voy. &, fig. 7). g- Monte-Reale (voy. c, fig. 7). k. Montague de la Trebina ( voy. bd, fig. 6). &. Montagne entre Fordungianus et Villa-Urbana ( n°°, 88-00 ). Je Fordungianus (volcanique, et n°. 92, 93). k. Plaine ou plateau de Ghillarza Paulilatino, etc. ( volcanique, voy. d, fig. 5). L. Santu-Lussurgiu ( voy. c, fig. 5) m. Cime de Monte-F'errato ou Monte-Entu ( voy. bd, fig. 5 ). n. Carriere de Silanus (n°. 108—114) o. Monte Santo-Padre ( voy. e, fig. 5). p. Cime de Monte-Leone (calcaire secondaire ?). ” n g- Monts de Villanuova , Monteleone ( volcaniques, et n°. 132). r. Monte-Santo (calcaire et volcanique ? }. s. Montagne de la Nurra (voy. a, fig. 3). t. Monts de Ploaghe (voy. d, fig. 3). u. Nuloi et Martis (n°5. 153—155). v. Castel d’'Oria (n%. 159—160 ), x. Partie des Monts de Gallura (n°5. 161, 162, 163). y. Asinara (n°%. 136—137). 312 MÉMOIRE GÉOLOGIQUE SUR L'ÎLE DE SARDAIGNE. Fi. 11. Coupe longitudinale sur la ligne A B. a. b. Bonifaccio en Corse. Canal de Corse , dit le Bocche di Bonifaccio. . Santa-Reparata (n°. 165—166). . Monts de Gallura (n°. 166). . Pointe Congianus ( voy. f, fig. 3). Tempio (n°. 163). . Mont Lymbarra (idem). . Oschiri (n°*. 149—161). . Montagne de Monti-d’Ala, etc. (granite ). . Montagne de Patada (granite ). t. Base du Monte-Raso et Gaeano (voy. k, fig. 4). . Vallée de Bono (granite et autres ). . Montagne de Corrubor (voy. h, fig. 5 ). . Montagne du Genargentu (voy.g, fig. 6). . Aritzu où Arisso (n°. 62). . Plateau de grès ? du Sarcidano. . Laconi (voy. e, fig. 6). . Monts de l’Ogliastra (voy. 1, fig. 6). . Environs d’Isili (base calcaire et recouvrement volcanique ). . Giara de Serri (voy./f, fig. 7). . Volcan de Nurri? ( voy. k, fig. 7 ). . Giara de Gestori (idem). æ. Monts de Gonni (transition ?). r. Mont de Serrenti (base calcaire recouvrement volcanique }. . Mont de Monastir ( voy. g, fig. 8). a a. Montagne des Sette-Fratres, Sept-Frères (voyez j, fig. 9). b&. Colline de Cagliari, et Santa-Elia ( voy. g, fig. 9). cc. Isles de Santo-Macario et Santo-Effisio de Pula (volcaniques ). NOTE DE M. CORDIER SUR LES ROCHES DE SARDAIGNE DÉCRITES CI-DESSUS. APS eu sous les yeux les échantillons qui ont été décrits ci-dessus par M. de la Marmora, j'ai pu les comparer avec ce que nous connoissons. Voici le résultat de cette comparaison, en commencant par les roches que l’on a coutume de re- garder comme les plus anciennes. Les n°%. 136, 167 et 172 sont des variétés du granite gris ordinaire, à grains moyens. Le n°. 177 offre un accident commun du granite; cet accident consiste en un nœud de matière granitique à grains fins, colorée en vert-noirâtre par une sura- bondance de mica auquel se joint un peu de pinite. Les n°°.163, 166 , 171 et 173, présentent un granite prophyrique à gros grains, qui a la fausse apparence d’une syénite, à raison de la couleur noire du mica et de la couleur violette des grands cristaux de feldspath. Le n°. 170 est une roche analogue aux précédentes, mais un peu décomposée, pauvre en mica et renfermant en échange une substance verte qui paroît être de la pinite. Le n°. 74 constitue une véritable syénite à grains moyens, dont le fond est formé de feldspath blanc, et contient en outre assez peu d’amphibole noir et de mica de la même couleur. Les n°. 108, 159, 160, 161 et 160, offrent des pegmatites communes, à grains fins ou moyens, roche que la plupart des géologues confondent encore avec le granite ordinaire , mais qui en diffère cependant à tous égards. N°. 91 et 135. Gneiss ordinaire. NS. 89, 90 et 174. Micacite (schiste micacé ) à grains fins, passant au micacite phylladiforme par le mélange d’un peu de tac compact. N°. 62. Talcite (schiste talqueux) quartzifere, d’un gris-verdâtre. Le quartz est en petites plaques qui alternent avec le talc compact. Nes. 109, 134. Talcite ( schiste talqueux) ordinaire, en feuillets plissés, d’un gris-verdâtre. N°. 110. Talcite phylladiforme carburé , quartzifere; le talc noir alterne ayec des plaques de quartz gris ou noirâtre. Nos. 64, 65. Pétrosilex (feldspath compact) imparfaitement schistoide. Il est Mém. du Muséurn.\. 11. 39 bis. 14 Guêre LECHEGUANA. édition du zouveau Dict. d’hist. natur., arücle Mélipone. ) Cependant les faits recueillis par M. de Saint-Hilaire, dans son voyage au Brésil, au sujet de l’une de ces guêpes, celle que d’Azzara nomme Lecheguana, prouvent incontestable- ment que cet auteur avoit bien jugé les rapports naturels de cet insecte, et que des espèces de guêpes de l'Amérique méridionale, en employant pour la construction de leurs nids les mêmes matériaux et essentiellement le même genre d'architecture que les nôtres, destinent néanmoins une partie de leurs gâteaux à recevoir un miel excellent, ayant plus de consistance que celui des abeilles, et dont M. de Saint-Hilaire nous a donné une quantité suflisante pour en connoitre la nature ( voyez ci-après son analyse chimique ). Au premier examen des gâteaux apportés par ce savant botaniste, je n’ai pas hésité à reconnoître mon erreur et à déclarer que l'in- secte qui les avoit construits devoit appartenir à ma sous- famile des guëpiaires et se rapprocher des guëépes carton- nières et autres espèces composant aujourd'hui mon genre Poliste. Get hyménoptère est aussi désigné sous le nom de Lecheguana dans la belle collection zoologique formée au Brésil par M. de Saint-Hilaire, collection d’autant plus précieuse pour le Muséum d'histoire naturelle, qu’elle offre un très-grand nombre d’espèces recueillies dans des provinces qui n’avoient pas été explorées. J’ai eu la facilité d’en étudier les caractères. Lie résultat de cet examen a été que l’insecte étoit réellement de ce genre, et qu'il n’étoit pas indiqué ou décrit dans les auteurs systématiques. D’autres naturalistes ou voyageurs, antérieurs à d'Azzara, tels que Pison, Marc- grave, Hernandez, etc., en ont-ils fait mention? c’est ce qui GuèPpe LECHEGUANA. 315 est plus problématique. En comparant les descriptions que fait d'Azzara des guëpiers construits par les insectes qu'il ap- pelle Lecheguana ex Camuatis, avec ce que le dernier, dans son Histoire naturelle de la Nouvelle-Espagne, liv. o, page 133, nous dit de deux espèces d’abeilles, dont il figure les nids sous les noms de 772icatzonteco , mimniaoatl et yzaxalaginitl, figures que j'ai reproduites dans mon Mé- moire sur les abeilles de l'Amérique ( Rec. d’Observat. et de Zoolog. et d’Anat. comp. de MM. de Humboldt et Bon- pland ), j’ai lieu de soupconner que ces insectes sont iden- tiques ou peu différens. La première de ces ruches seroit celle de la guëpe Lecheguana. V’abeille dont, selon Marcgrave, le miel est appelé Æzéshaare, et dont la ruche longue d’une demi-aune, et formée d’une espèce de papier grossier, est suspendue à des arbrisseaux ou à de petits arbres, pourroit bien encore ne pas différer de l’insecte précédent. Les ob- servations que m'a communiquées à l’égard de celui-ci, M. de Saint-Hilaire, concordent assez bien avec celles de Marc- grave. Les sociétés de nos guépes indigènes finissent aux appro- ches de l'hiver. Mais il est probable qu'il n’en est pas ainsi de celles des guêpes propres à des pays dont la température at- mosphérique est beaucoup plus élevée, et où cette saison n’est tout au plus distincte que par le repos de la végétation ou moins d'activité dans ses développemens. C’est peut-être pour mettre à profit ce luxe de végétation qui caractérise les contrées équatoriales ou avoisinant les tropiques, et pour se précautionner contre les temps de disettes que ces guêpes recueillent du miel. Celle que les Brasiliens appellent Zeche- 4o* 316 Guèrz LECHEGUANA. guana se rapproche beaucoup, ainsi que j'en ai prévenu plus haut, de la guépe cartonnière de Réaumur, que Fabricius place avec les guêpes proprement dites, en la désignant sous le nom de zudulans (System. piezatorum, pag. 266), et que j'avois d’abord séparée dans un genre propre, celui d’é- pipone (-epipona ). Mais il est évident que l’épistome ou le chaperon et les organes masticatoires de cet insecte, sont les mêmes que ceux des polstes, et qu'il doit être rapporté à cette première division du genre que j'ai caractérisée ainsi dans le quatrième volume de mon Genera crustaceorui et tnsectorun , p.141 :metathorax poshce et abdomen antice abrupte truncata; hoc brevissime pediculato;illius segmento antico in pediculum elongatun non angustato. Les formes de ces parties sont communes tant aux guêpes proprement dites ou à celles de notre genre vespa, qu'à plusieurs guèpes solitaires. Voilà pourquoi Fabricius, ne consultant que ces analogies, a confondu génériquement ces hyménoptères. Ses guêpes sericea et scutellaris paroissent avoir une grande affinité avec notre poliste lecheguana ; mais la première s’en éloigne par la couleur de l’écusson, et la seconde par celle des pieds. Les mandibules de ce poliste sont terminées par quatre dents, dont les trois supérieures très-aiguës, diminuant peu à peu de grandeur, et dont la quatrième ou l’inférieure comme tronquée et échancrée. Le thorax est plus fortement tron- qué à son extrémité postérieure que dans d’autres espèces de la même division, la z#zdulans notamment, de manière que l’écusson, en forme de carré transversal, un peu échan- cré ou concave au milieu de son bord postérieur, s’avance Guère LECHEGUANi. 317 un peu au-delà du métathorax , et qu'une portion supérieure de la base de l'abdomen peut s'appliquer contre lui. Le se- cond anneau de cette partie du corps étant fort grand et pouvant recevoir les suivans, elle se présente sous une forme presque globuleuse, mais se terminant en pointe. Ce n’est qu’en entrant dans ces moindres détails de formes, que lon pourra distinguer rigoureusement et sans équivoque les es- pèces très-nombreuses du genre vespa de Linnæus. En ad- mettant la division exposée ci-dessus, les caractères spéci- fiques du Poriste LecHeGuana, polistes lecheguana, devien- nent très-simples et peuvent être exprimés ainsi : Corps noir, un peu soyeux , ponctué ; écusson avancé; tête, thorax et pieds sans taches; métathorax unidenté de chaque côté; bord postérieur des einq premiers anneaux de Vabdomen jaune ; ailes supérieures enfumées à leur base. Corpore rugro, subsericeo, punctato ; scutello promi- nulo ; capite, thorace pedibusque tnimaculatis ; metatho- race utrinque uridentato ; abdominis segmentis quinque primis posterius flavo marginatrs ; alrs superis basi obscuro- Jflavida. L’abdomen est plus luisant et plus finement ponetué que les autres parties du corps. Le jaune qui borde postérieure- ment ses cinq premiers anneaux tire un peu vers l'orangé,. Les deux dents du méthatorax sont formées par le prolon- gement de ses angles postérieurs. Le duvet soyeux est géné- ralement obscur : mais sur les côtés inférieurs du mésothorax et près des angles du métathorax, il est un peu luisant et semble y former des espèces de taches. Je n'ai vu que des individus neutrês. La longueur du corps 1 318. GuËÊPE LECHEGUANA. est d'environ huit millimètres. M. Langsdorif m’avoit envoyé cet insecte, mais sans indication particulière. Un jeune chimiste, élève de M. Vauquelin, attaché en cette qualité à l'Ecole vétérinaire et royale d’Alfort, déjà connu par de bons travaux en ce genre, M. Lassaigne fils, a bien voulu s'occuper de l’analyse du miel fourni par cet in- secte; ainsi que de celle de la matière dont ses gâteaux se composent. En voici textuellement le résultat. | © EXAMEN CHIMIQUE D'un Miel récolté par des Guépes, et rapporté du Brésil par M. Auguste de Saint-Hilaire. ( Août 1822.) PAR M. LASSAIGNE, Préparateur de chimie à l’école d’Alfort. Ce miel avoit une couleur d’un jaune brunûtre clair, une odeur légère de sirop fermenté, une saveur agréable et une consistance syrupeuse. Îl rougissoit le papier de tournesol ; sa solution aqueuse ne précipitoit point l’acétate ni le sous- acétate de plomb. Soumis à la distillation dans une cornue de verre avec une petite quantité d’eau, il a donné un produit d’une foible odeur vineuse et qui rougissoit la teinture de tournesol. On s’est assuré que l’acidité étoit due à de l'acide acétique; quant à l'odeur vineuse du produit distillé , sa petite quantité a em- pêché de déterminer si elle appartenoit à un peu d’alcool qui se seroit formé antérieurement. Au reste, ces résultats prou- vent que ce miel auroïit subi, pendant son transport, une légère fermentation. Une partie de ce miel agitée avec de l'alcool à 330 s’est dissoute presque entièrement, à l'exception de quelques flo- cons jaunâtres d’une matière gommeuse, et de quelques dé- bris des cellules d’où on l’avoit retiré. Sa solution alcoolique, 320 EXxAMEN CHIMIQUE D'UN Mer. évaporée en vaisseaux clos, a laissé un sirop incristallisable, d’un jaune rougeûtre et d’un goût agréable, semblable à celui du sirop fabriqué avec le miel de nos abeilles. La solubilité totale du miel de guëpes dans l'alcool, établit une grande différence avec celui des abeilles, qui, comme on le sait, abandonne, lorsqu'on le traite par ce dissolvant, une matière sucrée, solide et cristallisable. Le miel de guëpes diffère donc de celui d'abeilles qui est formé de deux principes sucrés, l’un solide et l'autre liquide et incristallisable, en ce qu'il ne contiendroit que cette der- nière espèce de sucre. Les rayons où étoit déposé ce miel paroissent formés d’une matière fibreuse qui auroit été pétrie et réduite en pâte comme le présente le papier ; on y trouve au fond de petites particules de feuilles et de pétioles. La substance de ces rayons jouit de toutes les propriétés ‘chimiques de la fibre ligneuse; on n’y rencontre que des traces inappréciables de cire, qu'on doit plutôt considérer comme existant dans les matériaux propres à la confection de ces cellules, que comme produit par ces insectes. 327 NOUVELLES OBSERVATIONS Sur une altération singulière de quelques Tétes humaines , ( Lues à l’Académie des Sciences, le 16 juin 1823.) PAR M. le Bo. G. CUVIER. Dares a fait représenter assez grossièrement, dans son Oryctologie (pl. 17) une tète humaine d’uneépaisseur et d’une grosseur extraordinaire , qui est aujourd’hui déposée dans le cabinet de notre illustre confrère M. de Jussieu. Dargenville la considéroit comme une pétrification, soit, disoit-il, qu’elle se füt renflée et durcie seulement dans le sein de la terre, ou qu'ayant été ramollie et gonflée pendant la vie, elle fût ensuite redevenue solide et compacte par la pénétration des sucs lapidifiques (+). On trouve d’autres figures de cette tête vue par ses dif- férentes faces, mais encore moins exactes que celles de Dar- genville, dans les mémoires de Guettard, tome VI, p. 337, pl. Let IL. ; Mais la notice la plus exacte que l’on ait, est celle que (1) Dargenville, Oryct., p. 330. Mérm. du Muséum. À. 11. Lx 322 TÈTES HUMAINES RENFLÉES. M. Jadelot, savant médecin de Paris, a publiée séparément en 1799 {1}, avec des figures au trait. On trouve dans cet écrit la description, le poids, les dimensions et l'analyse chimique de ce singulier morceau. L'auteur juge que c’est une monstruosité, et le produit d’une maladie qui consistoit en un ramollissement et un gonflement des os, et que cette tête doit sa densité et son apparence pierreuse à du carbo- nate calcaire qui sy est déposé après la mort, et depuis qu’elle a été ensevelie (2). Il pense même que les dents qui se trouvent enveloppées dans lépaisseur des màchoires y sont rentrées par la pression qu'elles ont éprouvée dans la mastication (3). Cette dissertation fort bien faite et fort dé- taillée de M. Jadelot, n’a pas empêché M. Edouard Szern (4) de soutenir, en 1818, que la tête en question ne peut provenir que d’une race gigantesque aujourd’hui anéantie, dont les facultés étoient inférieures de beaucoup à celles des hommes d’à présent et à laquelle cet écrivain attribue ce- pendant des ouvrages qui supposent quelques moyens in- tellectuels , tels que le Stone-Henge de Salisbury et d’autres monumens qui passent pour celtiques. Le docteur Wendelstadt, médecin renommé, adopte cette opinion de M. Stern (5). Il prétend que cette tête a dû appartenir à un géant préadamite de 13 pieds de haut; (1) Description anatomique d’une téte humaine extraordinaire, etc. in-8°. Paris, 1709. Cette dissertation a été traduite en allemand par Heun en 1805. (2) Page 26. (3) Page 10. (4) Allgem. Anzeig. 1818, n°. 9, p. 86. (5) Allgem. Anz. 1818, n°. 31. TÊTES HUMAINES RENFLÉES. 223 et M. Ballenstedt se joint à ces deux auteurs, et fait de ce morceau extraordinaire un argument capital en faveur de son système sur l’existence d’une race gigantesque dans le monde primitif (1). Le docteur Mo7/7 de Nimègue, traducteur hollandais de M. Ballenstedt, nie, à la vérité, que cette tête vienne de lancien monde, et néanmoins il croit qu’elle a appartenu à un homme sain, mais gigantesque, et de la taille de 9 ou 10 pieds (2). En vain un anatomiste du premier ordre, M. de Sœmme- ring, est-il revenu à la charge et a-t-il cherché à prouver de nouveau, comme M. Jadelot, que c’étoit une tête ma- lade; en vain a-t-il appuyé ses raisonnemens d’une autre tête semblable, long-temps conservée dans le Cabinet élec- toral de Bonn, et aujourd’hui dans celui du grand-duc de Hesse à Darmstadt, d’une troisième décrite par M. Jourdain, dans son Traité des maladies chirurgicales de la bouche (3), d’une quatrième qui se trouve à Charkow, et de plusieurs aètres exemples plus ou moins analogues tirés de Sandifort, de Baillie, de Malpighi et de Haller. En vain cite-t-il un homme vivant qu'il a vu souffrant d’une maladie semblable, et assure-t-il que M. Wedekind, médecin fort connu, en est mort. (1) Nouvelle preuve de l'existence des géants dans l’ancien monde dans les archives des découvertes relatives au monde primitif, tome T, pag. 48. (2) Archives du monde primitif, par Ballenstedt et Krüger, tome II, p. 314. (3) Voir Jourdain , Maladies chirurgicales de la bouche , tomelI, où il y a une tête semblable. 4r* 324 FÊTES HUMAINES RENFLÉES. M. Ballenstedt n’en a pas moins soutenu derechef que c’est la tête d’un géant du monde primitif (r). Ce qui m'a le plus étonné dans cette longue discussion, c’est que aucun des hommes de mérite qui ÿ ont pris part, n’ait eu l’idée d'examiner quel pouvoit être l’âge de cette tête et des têtes analogues. Cependant c’étoit un point si peu étranger à la question principale que le docteur Moil, parmi ses raisons pour prouver que ce n’est point une tête malade, allègue que des maladies semblables sont très-rares dans les adultes, mais en même-temps il admet sans autre examen, que c’est ici une tête d’adulte. Quant à M. Jadelot et à M. Sæmmering, je ne vois pas qu'ils aient songé à donner leur opinion sur son âge. Ayant à traiter dans mes Recherches sur les os fossiles de tout ce qui peut concerner l’ancienne existence des hommes sur nos continens. actuels, avant la catastrophe qui en a bou- leversé la surface, jai dû examiner tous les faits dont on a cherché à étayer cette existence, et ces têtes monstrueuses étant surtout alléguées en sa faveur, il étoit naturel que je m'occupasse de vérifier ce qu’on en à dit. M. Schleyermacher a bien voulu m'adresser un moule de la tête de Darmstadt, semblable à celui que possède M. Sæm- mering, et M. de Jussieu, avec sa complaisance ordinaire pour tous ceux qui s'occupent de travaux relatifs aux sciences, m'a confié le morceau même qui a donné naissance à toutes ces contestations. J’ai l'honneur de mettre les pièces sous les yeux de l’Académie. (2) Voyez la lettre de M. Sœmmering, et les remarques de M. Ballenstedt dans les Archives du monde primitif, vol. III, p. 24 et suiv. TÈTES HUMAINES RENFLÉES. 325 On ne sait pas très-bien dans quelle position cette tête du cabinet de M. de Jussieu a été déterrée; tout ce que l’on en dit, c'est qu’elle étoit à quinze pieds sous terre sur les col- lines voisines du village de Sacy, à deux lieues de Reims; mais ce rapport n'a rien d’authentique, et on ne sait à qui il a été fait ni quel a été le témoin de la découverte. Cette incertitude a dû contribuer beaucoup à multiplier les con- jectures vagues que l’on a faites sur son origine. Quant à celle de Darmstadt, on sait positivement qu’elle a été trouvée dans un ossuaire à Bz{lerbeck, dans l'évêché de Münster, d’où elle fut envoyée à Bonn pour le cabinet de l'électeur de Cologne, évêque de Münster; elle y est demeu- rée assez long-temps, et c’est de là qu’elle a été transportée à Darmstadt. Il est donc bien certain que celle-là n’est pas fossile et qu'elle appartient à la création actuelle. Dès le premier coup d’œil que j'ai jeté sur ces deux têtes, j'ai été frappé de plusieurs marques qui m'ont semblé an- noncer qu’elles n’appartenoient point à des adultes, et sen- tant aussitôt tout ce qu'il résulteroit de ce fait bien constaté, je me suis occupé à l'instant de vérifier ce premier aperçu. L’âge d’une tête, quelque déformation que les maladies du système osseux lui aient fait subir, peut toujours se déter- miner dans des limites assez étroites, par le nombre des dents et par leur configuration. La raison en est que les dents ne se développant point comme les os par intus-susception, mais croissant à la manière des coquilles par juxta-position, et que leurs parties une fois formées n'étant plus susceptibles d’inflammation ni 326 TÈTES HUMAINES RENFLÉES. d’altération par un principe interne, tout ce qui se passe dans le tissu interieur des os leur demeure à peu près étran- ger; de même que leurs propres maladies n’affectent point les os d’une manière immédiate. Faisant application de ces vues aux têtes en question, j'ai trouvé dans celle de Darms- tadt les alvéoles à demi-remplis de six dents de chaque côté; deux incisives, une canine, et trois molaires. Dans la mà- choire inférieure dont on n'a que le côté gauche, on ne voit même pas l’alvéole de la troisième molaire. C’étoit un premier motif pour conclure que l'individu avoit à peu près six ou sept ans, et que les dents qui avoient rempli les alvéoles étoient ses dents de lait. En effet, c’est vers la sixième ou la septième année que commence à se montrer la première des molaires qui ne doivent pas être remplacées, ou la troisième de chaque côté, et c’est à la même époque que les dents de lait du devant des mâchoires commencent à tomber pour céder la place à. des dents de remplacement. Ce que les alvéoles de la tête de Darmstadt n’avoient paru annoncer, les dents elles-mêmes m'ont semblé:le con- firmer dans la tête du cabinet de M. de Jussieu. Cette tête n’a aussi que six alvéoles de chaque côté à lune et à l’autre mâchoire, et même la sixième lui manque du côté gauche à la mâchoire supérieure; ainsi elle étoit à peu près au même âge que celle de Darmstadt; mais par un bonheur particulier elle conserve deux molaires, la seconde du côté gauche à la mâchoire supérieure et la seconde du côté droit à la mâchoire inférieure. Or, il n'y avoit rien de si aisé que de savoir si c’étoient des TÊTES HUMAINES RENFLÉES. 327 dents de lait ou des dents de remplacement, puisque la se- conde molaire est d’une forme totalement différente dans les deux dentitions. En effet dans l’homme, ainsi que dans la plupart des qua- drupèdes, les molaires de lait ont des formes pluscompliquées, plus semblables à celles des arriëres-molaires, que les dents qui doivent leur succéder, et l’objet de cette différence est bien facile à comprendre; c'est que aussi long-temps qu’au- cune des arrière-molaires n’est venue, c’est aux molaires de lait qu'il appartient de remplir leurs fonctions. Ainsi dans l’homme, à la mâchoire supérieure, la première molaire de lait a un fort tubercule en dedans et une crète divisée en deux lobes en dehors; et la seconde quatre tuber- cules disposés obliquement; à la mâchoire inférieure, la pre- mière molaire de lait a quatre tubercules peu saïllans et la seconde cinq, dont trois en dehors et deux en dedans, et chacun de ces deux-ci est encore un peu bilobé, En d’autres termes la seconde molaire de lait ressemble dans chaque mâchoire à la première arrière-molaire, ou à la dent non susceptible de remplacement qui doit pousser derrière elle, et non pas à celle qui doit venir sous elle et la faire tomber, - Les dernières, les molaires de remplacement, sont en effet à chaque mâchoire ce que l’on a appelé les ficuspides, ou des dents à deux gros tubercules : un en dedans et un en de- hors; les tubercules de la mâchoire inférieure sont seulement un peu plus crénelés ou sillonnés que ceux de la supérieure. Les racines de ces deux suites de dents sont aussi très-dif- férentes et toujours plus écartées et plus nombreuses aux molaires de lait qu’à celles de remplacement. æ 328 TÊTES HUMAINES RENFLÉES. J’ai examiné, d’après ces règles, les dents et les racines demeurées à la tête du cabinet de M. de Jussieu. La deuxième molaire restée à la mâchoire supérieure a ses quatre tubercules et sa couronne cassée, et l’on voit, par l’alvéole correspondant du côté opposé, qu’elle a trois ra- cines écartées ; or puisque, ainsi compliquée, elle occupe ce- pendant la seconde place, c’est incontestablement une mo- laire de lait. Il en est absolument de mème de celle qui la précédoit, et qui avoit aussi trois racines encore bien marquées par leur empreinte dans l’alvéole; derrière elle étoit une troisième molaire qui est cassée, mais qui a laissé trois racines : c’est la première arrière-molaire ou la dent de sept ans, et ce ne peut être qu’elle. Il n’y a en effet que l’âge de sept ans où l’on puisse voir à la fois, à la mâchoire supérieure, trois molaires de suite ayant chacune trois racines, car avant cet âge la première arrière-molaire n’est pas venue, et, plus tard, les deux molaires de lait sont remplacées par des bi- cuspides qui n’ont qu’une racine, ou tout au plus deux : à la vérité la seconde arrière-molaire vient ensuite, qui a aussi trois racines, mais la troisième ou la dent de sagesse ne les a jamais. Ainsi, comme je l’ai dit, passé les sept ans ou à peu près, il n’y a plus que deux molaires à trois racines de chaque côté à la suite l’une de l’autre. Celle de la mâchoire inférieure a ses cinq tubercules ab- solument comme une deuxième molaire de lait de cette mà- choire, et ils sont même un peu usés, ce qui prouve que l'individu s’en servoit depuis quelque temps. A la vérité si cette dent se voyoit isolée, on pourroit soutenir que ce n’est TÈTES HUMAINES RENFLÉES. 329 pas la deuxième de lait, mais la première des arrières -mo- laires, car ces deux dents ont à peu près la même forme, ainsi que nous l'avons dit ci-dessus; mais cette supposition n’est pas admissible, parce qu'il n’y auroit pas assez de dents en avant. Les deux fossettes placées immédiatement avant la dent en place ne sont pas deux alvéoles, mais la place de deux racines d’une même dent; et cette seule existence de deux racines, séparées jusqu’au collet, annonce que cette dent elle-même étoit une molaire de lait, et non pas une bicuspide. La canine, de ce côté, est rompue, et non pas rentrée dans l’os comme l’a pensé M. Jadelot. Quant à l’incisive, cette idée lui est encore moins appli- cable. Les alvéoles de toutes les incisives sont marqués, et à leur place ordinaire; ils sont à moitié remplis, ce qui prouve que les dents qui les avoient occupés étoient tombées. | La dent qui reste encastrée dans l’épaisseur de l'os, et tout près de la face inférieure, a son tranchant bien entier, et avec ses dentelures, telle que doit les avoir une incisive de remplacement. Ainsi elle n’a jamais servi, car alors elle seroit usée comme la molaure restée en place. De cette intégrité, et de l’existence d’un alvéole qui est la marque certaine d’une autre incisive qui avoit précédé celle- là, je conclus que cette dent, bien loin d’avoir été repoussée dans l’os ramolli par la pression de la mastication, a été au contraire empèchée de sortir par la dureté et l’épaisissement de los, qui a opposé un obstacle invincible à son éruption, Mém. du Muséum, te 17. 42 330 TèTES HUMAINES RENFLÉES. Tout près de cette dent restée à l’intérieur, on voit une autre cellule plus grande, qui contenoit sans doute aussi une dent, laquelle sera tombée quand la mâchoire s’est rompue à cet endroit. Je suis persuadé que si on l’ouvroit dans le voisinage, on y trouveroit encore de ces dents qui n’ont pu sortir. La surface des mâchoires examinée en détail, confirme ce que les dents et les alvéoles annoncent. On y voit, derrière les alvéoles, des incisives, les restes des petits trous qui, dans l’état naturel, offrent un premier jour à l’éruption des incisives de remplacement ; mais ces petits trous sont presque entièrement obstrués par le gonflement des os. Il reste aussi à la mâchoire supérieure des trace très-mar- quées de cette fissure, seul vestige, dans l’homme, de la su- ture qui sépare, dans presque tous les animaux, l'os incisif du maxillaire. Ce reste de fissure nous est précieux, parce qu'il marque sans équivoque la place de la canine, et qu’il nous fait voir clairement que la dent placée derrière elle, ou la première molaire, avoit trois racines, et par conséquent que c’étoit une molaire de lait. Si je ne me trompe, toutes ces circonstances s'accordent pour nous prouver que les têtes que nous examinons sont des têtes d’enfans morts à l’époque de leur changement de dents, et chez qui ce changement n’a pu s’effectuer. Cela posé, on aura sans doute beaucoup moins de nu gnance à croire que ce sont des têtes malades. Leur maladie résultoit du dépôt trop abondant de matière calcaire dans le tissu de leurs os, qui les a développés uni- TÈTES HUMAINES RENFLÉES. 331 formément dans toutes leurs dimensions, en a rétréei toutes les ouvertures, et en a obstrué une grande partie. Il suflit de la plus légère idée de la marche de lossification et de celle de la fossilisation, de lincrustation ou de la pé- trification, pour voir que la première de ces causes a seule agi sur ces têtes. On à d’ailleurs un grand nombre d'exemples de ces dé- pôts surabondans de matière osseuse, qui dilatent les os en même temps qu'ils en rendent le tissu plus dense; c’est ce que quelques-uns nomment la maladie éburnée. M. Sæm- mering, dans le mémoire que j'ai cité, en allègue plusieurs, et je ne doute pas que les membres de cette académie, qui appartiennent à la Faculté, n’en aient vu d’autres, ni que l’on ne puisse en trouver dans les nombreuses collections d’ostéologie pathologique de cette capitale. Au reste, quand même il seroit possible de croire que la tête du cabinet de M. de Jussieu vient d’un adulte, elle offre plusieurs autres marques qui auroient dû empêcher de la faire considérer comme celle d’un géant. Les dents sont, à la vérité, plus grosses que celles d’un enfant de l’âge que je crois devoir lui attribuer, mais elles ne surpassent point les dimensions d’un adulte de taille ordinaire. Le diamètre antéro-postérieur de la base du crâne, à prendre du bord incisif jusqu’au trou occipital, est notable- ment moindre que dans un adulte : les condyles occipitaux ne sont pas plus grands ni plus écartés que dans un homme de petite taille, en sorte que l’atlas n’avoit rien d’extraordinaire dans sa grandeur; et il n’y a aucune raison pour croire que les vertèbres suivantes aient eu d’autres proportions que atlas. (Eh 332 TÊTES HUMAINES RENFLÉES. Cette tête étoit donc d’une grosseur monstrueuse, mais tout prouve qu'elle étoit portée par un corps de taille très- ordinaire, si même il surpassoit celle que doit avoir un enfant de sept ans. Quand on entre dans l’examen suivi de toutes les altéra- tions produites dans ces têtes, on en est étonné et effrayé ; et, bien loin de croire qu’elles aient appartenu à des hom- mes sains, l’on a peine à concevoir que les individus auxquels elles appartenoïent aient pu vivre assez long-temps pour que leur maladie arrivät à un excès aussi monstrueux. Dans celle du cabinet de M. de Jussieu, la calotte du crâne a plus de quinze lignes d’épaisseur, et loin que les mailles du diploë se soient dilatées, il semble qu’elles soient encore plus serrées qu’à l'ordinaire. Mais le diamètre interne du crâne n’est point agrandi à pro- portion; je ne le crois même pas plus grand que celui de beaucoup d'hommes ordinaires : la selle turcique n’est pas plus large; les crètes qui séparent les fosses ne sont pas plus écartées, mais elles sont toutes renflées et arrondies comme toutes les crètes, toutes les lames, toutes les apophyses in- ternes et externes. On ne voit plus de traces de suture, si ce n’est celle qui sépare l’un de l’autre les maxillaires et les palatins, et celle qui distingue les os propres du nez. Les arcades zygomatiques sont si épaisses qu'il'ne reste plus, entre elles et le crâne, qu’un très-petit passage pour le crotaphite. Les apophyses ptérygoïdes, le vomer, les palatins, les os propres du nez sont renflés de manière à obstruer presque entièrement la cavité des narines. TÈTES HUMAINES RENFLÉES. 333 Par une exception remarquable, le canal lacrymal est de- meuré libre. Les trous optiques sont aussi demeurés ouverts, mais rétré- cis; la fente sphéno-orbitaire et la fente sphéno-maxillaire ne se montrent plus que comme deux sillons étroits; et, cepen- dant, je les crois encore perméables. Je crois qu'il reste aussi un passage au trou ptérygopalatin, au trou stylomastoïdien ; mais s’il en existe encore au trou rond, il est imperceptible pour moi. Ce qui me paroit être le trou ovale n’a pas la sixième partie du diamètre naturel. : Je ne puis voir de canal pour la carotide, ni de trou jugu- laire; mais en général toute cette partie est tellement chan- gée de forme et de proportion, par le renflement inégal des os, qu'on a peine à reconnoître les petits trous et les pe- tites éminences. Le trou occipital est réduit à moins de moitié de son dia- mètre, et son contour est rhomboïdal, ayant de chaque côté un angle ou une échancrure, apparemment pour les artères vertébrales. Les sinus de la dure-mère devoient être aussi gros qu’à l'ordinaire, à en juger par les rainures de l’intérieur du crâne. Il ne me paroit pas que le méat auditif externe ait été obsirué. M. Jadelot a présenté des conjectures détaillées, et qui me paroissent, pour la plupart, fort justes, concernant les effets que cette déformation a du produire sur le malheureux qui en étoit affecté : mais il en a poussé quelques-unes un peu plus loin que je ne le ferois, parce qu'il n’a pas aperçu toutes les communications qui restent encore pour certains nerfs. 334 TÊTES HUMAINES RENFLÉES. Long-temps avant sa mort, les sens de ce pauvre enfant ont dû s’affoiblir, ont du se perdre; peut-être a-t-il été paralysé dans plusieurs parties de son corps, et il est probable que la nutrition du cerveau auroit été totalement supprimée si, comme la très-bien remarqué M. Jadelot, les artères vertébrales n’avoient conservé leur canal de chaque côté du trou occipital, et n’avoient ainsi suppléé à loblitération des carotides. Fa conservation de l'articulation de la mâchoire inférieure, et celle d’un passage pour le muscle crotaphite sous l’ar- cade, prouve que la mâchoire avoit conservé quelque mou- vement; et c'est sans doute ce qui a soutenu, pendant quel- qué temps, la vie de cette misérable victime des infirmités humaines, TABLEAU MONOGRAPHIQUE Des Plantes de la Flore du Brésil méridional appartenant au groupe (classe Pr. ) qui com- prend les Droseracées, les Violacées, les Cisti- nées et les Frankeniées. PAR M. AUGUSTE DE SAINT-HILAIRE. Ass avoir montré dans mon Mémoire sur les Saupage- sta et les Layradia que les Droseracées, les Violacées, les Cistinées et les Frankeriées, ont entre elles les rapports les plus intimes et forment un vaste groupe de plantes insé- parables, je crois devoir présenter le tableau des plantes du Brésil sur lesquelles j'ai fait mes observations. Les bota- nistes jugeront mieux la valeur de celles-ci, quand j'en aurai exposé tous les détails; et ce sera pour moi une occasion de faire connoître quelques genres nouveaux et un grand nombre d'espèces qui n’ont point été décrites. DROSERACEZÆ (1). Drosera, Linn. Juss. Dec. Cazyx profundè 5-fidus vel rarius 5-partitus, sæpiüs subirregu- Jaris. Perara 5, hypogyna , vel fundo calycis inserta , cum laciniis ca- (1) Ayant déjà donné dans ma monographie des Sauvagesia et Lavradia, les caractères différentiels des Droseracées, etc., je crois inutile de les répéter. 336 - DRrOSERACÉES. lycinis alternantia, subunguiculata , obovata , obtusissima , glabra. Sramina ibidem inserta, cum petalis alternantia , ovario longiora, glabra , persistentia : filamenta complanata : antheræ obtusæ , basi affixæ, immobiles, posticæ, 2-loculares, longitudinaliter dehiscen- tes. Sryzus unicus, terminalis, profundè 3-5-partitus ; divisuris simplicibus vel sæpiùs profundè 2-fidis, quandoquè penicellato- multipartitis. Sniemara totidem quot styli divisuræ , continua , ter- minalia, completa, sæpiüs simplicia, quandoquè multipartita. Ova- rium liberum, sessile, subglobosum, 3-lobum, glabrum, x loc., polysp. : ovula numerosa, placentis 3 semi-cylindricis affixa parieta- libus. Capsura vestita calyce persistente petalisque et staminibus marcidis, obtusa, glabra, 5-valvis; valvulis medio seminiferis. SE- MINA numerosa , minuta , oblonga, integumento modo simplici? crus- ‘taceo , modù duplici ; exteriore multd majore : umbilicus terminalis. Emsryo minutissimus, rectus in imà parte seminis intra vel extra perispermum locatus: cotyledones truncatæ, crassæ; radicula ob- tusa ad umbilicum attingens quando embryo extrarius et ferè at- tingens quando extrarius. Hersæ acaules, scapigeræ , rariùs caulescentes. Four ciliis glan- dulosis obtecta, integra, interdum dichotomo-divisa , in acaulibus sæpiüs rosaceo-cespitosis et spathulatis. Sriruzæ axillares, cauli ab- breviato aflixæ vel sæpius è basi petiolorum enatæ, in caulescentibus nullæ. Scarr juniores in spiram involutæ foliaque juniora. FLos rard unicus aut bini, sæpiùs plures, terminales, racemosi , secundi, pe- dicellati; pedicello inferiore ebracteato ; cæteris sæpits bracteä basi stipatis. Perara albi, rosei vel purpurei. Osservarios. 6 I. Nombre ; Géographie. Les plantes de la famille des Drose- racées que j'ai rapportées du Brésil méridional appartiennent au seul genre Dro- sera et à la section de ce genre où Les feuilles sont radicales et les fleurs portées par une hampe. Ces plantes sont au nombre de douze, et, à l’exception d’une seule, | toutes sont entièrement nouvelles. Si nous consultons le catalogue de plantes le plus complet qui ait été publié jusqu’à ce jour, l’utile Prodromus de M. de Can- DROSERACGÉES: 337 dolle, nous y trouverons que le nombre des Drosera connus au commencement de l’année 1824 s’élevoit à trente-deux, dont neuf appartiennent à l’Océanique, huit à l'Afrique, cinq à l'Amérique du nord, quatre à l'Asie, trois à l’Europe et également trois à l'Amérique méridionale. On devoit croire, d’après ce compte, que, des diverses contrées que je viens de citer, l'Amérique méridionale étoit, avec l’Europe, la moins riche en Drosera; mais actuellement que j’en ajoute douze à celles déjà décrites, il se trouve au contraire qu'aucune partie du globe n'offre autant d’especes de ce genre que l'Amérique du Sud. , On avoit recueilli des Drosera, non-seulement sous tous les méridiens, mais encore dans les contrées qui se ressemblent le moins pour la température; à Ma- dagascar et au détroit de Magellan, dans le nord de l'Europe et à Coromandel : et ce qui achève de prouver aujourd’hui que ce genre appartient aux climats les plus différens, c’est que j’en ai récolté des espèces sur le littoral vers la ville de Campos et à peu près à la même latitude sur le sommet des montagnes les plus élevées du Brésil; dans les déserts brûlans du Rio-de-S.-Francisco, et au mois de juin sur la frontière de la province de Rio-Grande de S.-Pedro-do-Sul, lorsque le ther- momèetre étoit à peine au-dessus de zéro. Ce phénomène paroît extraordinaire, sans doute; mais il ne faut pas, ce me semble, lui assigner d’autre cause que celle qui a déjà servi à nous expliquer la dispersion étonnante du Sauvagesia erecta L. Les Drosera croissent, sans exception., dans les lieux humides, et par conséquent la température varie réellement beaucoup moins pour les espèces de ce genre qu’on ne pourroit le croire, si l’on se bornoit à considérer les latitudes et les hauteurs. Les familles de végétaux qui appartiennent aux deux hémisphères ne s'y pré- sentent en général qu'avec des diversités de formes très-remarquables, et souvent, dans un même pays, les especes du même genre offrent aussi les plus grandes différences de port, suivant qu’elles croissent dans des terrains humides ou dans des lieux secs, dans un sol fertile ou au milieu des sables. Il n’en est pas ainsi des Drosera. Les espèces des contrées les plus éloignés ont entre elles une très- grande ressemblance, et le botaniste a souvent une peine extrême à les bien carac- tériser. Aïnsi, pour ne parler que de celles du Brésil, mon D. vrllosa rappelle le D. Capensis L. du cap de Bonne-Espérance; le sessilifolia a une analogie frap- pante avec les D. cuneifolia Thun. et Burmanni Wahl qui croissent en Afrique; le parvifolia avec le capillaris Poir. qu'on trouve dans l'Amérique du nord; le maritima en a davantage encore avec le spathulata Lab. de la Nouvelle-Hollande, et enfin j'ai retrouvé au nord de la province de Rio-de-Janeiro, le D. intermedia Hayne, tel absolument qu’il croit auprès de Paris à l'étang de Saint-Léger. Mais dans quelque contrée qu’on trouve des Drosera, c’est toujours dans le même Mém. du Muséum. r 11. 43 338 DROSERACÉES. sol qu’on les voit naître, on n’en rencontre jamais que dans les terrains mouillés où le sable domine; d’un autre côté j’ai déja montré que l'humidité devoit atté- nuer, pour ces plantes, la différence de température, et par conséquent il ne faut pas s'étonner si les circonstances étant à peu pres les mêmes pour toutes les espèces, elles offrent ordinairement tant dé ressemblance entre elles. SH. Considérations sur les organes. 1°. Tice. Quoique, pour la facilité des descriptions, on dise que la plupart des Drosera n’ont point de tige, il n’en est pas moins vrai que cet organe leur manque aussi peu qu'à tant d’autres végétaux ; mais cette tige, probablement toujours vivace, est extrêmement raccourcie; les feuilles y sont alternes; la hampe n’est qu’un véritable pédoncule axillaire; un bourgeon terminal continue la plante, et, quoique l’allongement successif de cette dernière soit fort lent, sa tige parvient quelquefois à avoir une couple de pouces de longueur, comme j’ensai eu des exemples dans mon D. ascendens. 2°. STIPULES. C’est un Caractère assez remarquable sans doute que ces stipules qui semblent naître de la base du pétiole des feuilles; mais ce n’est pas toujours la place qu’elles occupent : dans le D. graminifolia les stipules sont portées par la tige, et elles ont plus de largeur que la feuille; dans le D. communis, il est assez difficile de décider avec certitude si c’est sur la tige ou sur la base de la feuille qu’elles sont appuyées ; ailleurs enfin, quoique portées par le pétiole, elles le dé- bordent un peu de droite et de gauche, et par conséquent je crois que, sans abuser des idées métaphoriques de greffe ou de soudure, on pourroit, quand la stipule des Drosera paroît naître du pétiole, la considérer comme naissant de la tige même, et comme étant soudée avec la base de la feuille. 3. Insertion. Les pétales et les étamines sont certainement hypogynes dans nos D. anglica et rotundifolia ; elles le sont également dans mon D. hiriella et surtout dans le communis, où le calice est décidément 5-partite; mais si l’on observe les étamines du côté du calice dans une suite d’espèces brasi- liennes, c’est sur lui qu’elles paraissent attachées , et, lorsqu'on abaïsse cette en- veloppe , on entraîne avec elle et les pétales et les étamines. A la vérité lorsque, dans ces mêmes espèces , on examine les organes mâles du côté de lovaire, ils semblent insérés au-dessous de Jui, et de là on pourroit conclure qu’ils ne paroïs- sent à l’extérieur naître du calice que parce qu’ils sont un peu soudés avec cette enveloppe. Mais on sait que les faisceaux qui produisent les étamines émanent toujours du pédoncule; ce west point par des considérations anatomiques, par des conjectures ou des analogies qu’on doit déterminer linsertfon , maïs par ce qu’on voit réellement, et il est clair que lorsqu’en abaïssant un organe j'en abaisse encore un autre auquel je ne touche point, celui-ci est porté par le premier. Il faut donc reconnoître la périgynie comme existant dans quelques Drosera, admettre DROSERACÉES. 339 une exception nouvelle au caractere si important de l'insertion, et la considérer ici comme uve raison de plus pour ne pas éloigner les Droseracées des F'iolacées parmi lesquelles on trouve aussi des espèces à insertion hypogyne et d’autres à in- sertion périgyne. 4. Cauice. Les auteurs le décrivent comme régulier , mais je l’ai trouvé plus où moins inégal dans les espèces brasiliennes, et ce caractère me paroît offrir un nouveau motif pour rapprocher les Droseracées des iolacées , parmi lesquelles l'irrégularité de la fleur est presque général. 5°. SYYLE, STIGMATES. On s’est accordé à attribuer plusieurs styles aux Drosera ; mais cela n’est point parfaitement exact. Les branches dont on fait autant de styles distincts naissent d’un empatement, ou, pour mieux dire, d’une souche commune, el, lorsque la capsule s'ouvre, cette base se détache des valves et forme une sorte de couronne simple qu’on partage en autant de divisions profondes qu’on a indiqué de styles. Quelquefois ces branches restent simples ; plus souvent elles se subdivisent. Le nombre des branches primaires et secondaires varie sui- vant les espèces, et souvent même il varie dans des espèces tres-voisines. Ainsi, mon D. sessilifolia a cinq divisions primaires, le cuneifolia Thun. n’en a que trois; et ce qui prouve combien on doit attacher peu d'importance au nombre des branches, c’est qu'après avoir observé un style simplement 3-partite dans les échan- üllons du D. villosa que je recueillis en 1817 sur la Serra-Negra, je trouvai chaque branche profondément bifide dans tous les individus de la même espèce que je récoltai au même lieu en 1822. Le savant M. Labillardière a tres-bien re- marqué (Holl. vol. I, p. 79) que dans son D. binata chacune des trois branches primaires du style se partage comme un pinceau , en divisions capillaires. Profi- tant de cette observation , l’illustre auteur du Prodromus à eru pouvoir diviser le genre Drosera en deux sous-genres, Rorella et Ergaleium (Prod. 1, p. 317 et 319), et il attribue au premier un style dont les branches sont entières, et au second des branches partagées en manière de pinceau. Mais, dans le D. binata, ce sont véritablement les styles qui sont multifides, comme je viens de le dire, et par conséquent il y a dans cette plante autant de stigmates que de sous-divisions ; au contraire dans le D. pellata également rapporté de la Nouvelle-Hollande par M. Labillardiere et que M. de Candolle met aussi dans l’Ergaleium , c’est seule- ment la partie stigmatique qui est divisée : il n'existe donc réellement dans cette espece qu’un stigmate multifide, et voilà par conséquent une différence tres-sen- sible entre deux plantes rangées sons le même titre. D'un autre côté, M. de Can- dolle place, dans son Rorella, le D. cistiflora L., et cependant les stigmates y sont divisés comme dans le D. peltata , ainsi que M. de Jussieu l’a observé il y a long-temps (Gen. 245); enfin je trouve les stigmates de mon D. sessilifolia 13" 340 DrosErRAcÉEs. partagées à la maniere de ceux des Turnera, et cette espèce se nuance avec les D. cuneifolia Thun. et spathulata Lab., où les stigmates sont simples. Concluons donc que si nous nous en tenons aux régles de la Théorie élémentaire (2°. éd., p: 222), et aucun livre n’en offre de plus sages, nous serons obligés de faire dis- paroître les sous-genres Rorella et Ergaleium. 6°. Semences. Elles ne sont point, comme on l’a dit, disposées sur un seul rang, mais sur plusieurs. Deux espèces, les Drosera rotundifolia et Anglica Huds. ont, outre le tégument propre appliqué sur l’amande, une autre enveloppe beaucoup plus grande que lui. On a appelé cette enveloppe un arille; mais il me semble qu’il est mieux de la considérer comme le tégument extérieur; car l’amande qu’elle renferme porte deux petites pointes dont chacune , placée à l’un des bouts de la se- mence, indique, comme dans le Nepenthes (V. Ad. Brongn. Annales des Sciences naturelles, vol. 1), l’extrémité des faisceaux soit nourriciers soit spermatiques, et l’on sait que ces faisceaux ne rampent jamais que sous les tégumens propres. D’ail- leurs , dans le Parnassia palustris L. où l’on a également appelé arille une enve- loppe analogue à celle des D. rotundifolia et Anglica, dansle P. palustris, dis-je, l'enveloppe dont il s’agit m’a offert une continuité vasculeuse entre elle et le tégu- ment intérieur, ce qui n’a jamais lieu entre un véritable arille et la semence. Quoi qu’il en soit, l'enveloppe extérieure de la semence des D. rotundifolia et Anglica doit avoir bien peu d'importance , puisqu'on ne la retrouve plus dans l’es— pèce la plus voisine le D. intermedia Hayne. 7°. PÉRISPERME. J'ai trouvé le périsperme farineux dans le Drosophyllum et le Dionæa, c’est-à-dire dans deux des Droseracées où les parties de la semence sont le plus faciles à observer; je l’ai de même trouvé farineux dans le D. spiralis, et si j'ai noté un périsperme charnu dans les D. villosa N. et rotundifolia L. comme Gærtner, dans le D. intermedia Hayne (1), je serois presque tenté de croire que l'extrême petitesse des objets nous a fait illusion à tous les deux. 8. Ewsryon. Le savant auteur du Prodromus Systematis indique comme axille l'embryon des Droseracées (Prod. 1, p. 317 ). Il est clair qu’il a eu en vuele Ro- ridula où il est réellement tel; mais dans le Drosophyllum le Dionæa, les Dros. spiralis, villosa, rotundifolia , embryon extrêmement petit est rejeté à la base de la semence ; et même simplement appliqué contre le périsperme dans les trois premières plantes ; Gærtner l’a aussi trouvé à la base de la graine dans le D. in- termedia ; Kunth a vu la même chose dans le D. Anglica, et par conséquent je crois que c’est uniquement par exception que l’on doit indiquer comme axille (1) Il est évident que Gærtner a figuré les semences de deux plantes sous le nom de D. longifolia , mais c’est celle du D. intermedia dont il a donné l’analyse. DROSERACÉES. 341 l'embryon des Droseracées, ainsi qu’on pourroit les dire dépourvues de périsperme à cause du Parnassia palustris. I est fort important de faire remarquer en passant que la position de l'embryon dans le Drosophyllum, le Dionæa et le D. spiralis infirme ce qu'avoit avancé le savant et ingénieux abbé Correa (Ann. Mus. vol. IX, p.288) sur la différence des embryons unilobés et bilobés dont les premiers n’é- toient jamais, disoit-il, simplement appliqués contre le périsperme. Plus on fera d'observations, plus on reconnoitra que les distinctions rigoureuses et tranchées doivent être bannies d’une science qui ne montre partout que des dégradations in- sensibles. S IT. Rapports des espèces entre elles. Si l’on confond les deux sous-genres Rorella et Ergaleium, comme j'ai prouvé, ce me semble, que cela étoit indispen- sable, il se trouvera d’ailleurs que l’arrangement proposé par M. de Candolle pour les especes de Drosera est le plus naturel possible ; et cet arrangement consiste à diviser le genre en espèces dites acaules et en espèces caulescentes, et à passer de celles qui offrent le développement relatif le moins sensible à celles qui semblent être le plus développées. Ainsi, commençant comme M. de Candolle, par les petites espèces du détroit de Magellan, du cap de Bonne-Espérance et de la Nouvelle-Hollande, où la hampe est presque nulle ou pauciflore , nous viendrons à mon D. sessilifolia, près duquel se rangent les D. cuneïfolia, Burmanni et spa- thulata ; nous placerons successivement ceux où les feuilles s’allongent peu à peu; nous arriverons de cette manière aux D). ëntermedia, communis, Anglica, Capen- sis; ce dernier, le villosa et l’ascendens nous conduiront aux espèces à feuilles décidément linéaires, telles que graminifolia, spiralis, etc., qui amèneront assez naturellement les D. binata et pedata, et de ceux-ci nous passerons aux espèces caulescentes. 1. DroserA sessicrFoLra. + Tab. XIX, A. D. foliis radicalibus , sessilibus , cuneatis, apice obtusissimo la- ciniato-ciliatis, usquè ad medium ciliato-glanduliferis, basi sub- tüsque nudiusculis ; stipulis ciliato-multipartitis ; scapo complanato, glabro; calycibus glanduloso-pubescentibus , stylo 5-partito. Ranix fibrosa , nigra. Forra radicalia, creberrima , rosaceo-cespi- tosa , 6-8 |. longa , sessilia, cuneata , apice obtusissimo laciniato-ci- liata, viridia , supra ab apice circiter usquè ad medium ciliis rubris obtecta, basi subtusque nudiusculis; stipulà basi interiore ins- tructa in semi-circulum disposità. SripurA ciliato-multipartita. Sca- 542 DRroOSERACÉES. eus solitarius, subspithameus, complanatus, hinc et indè 1-striatus, glaber, pauciflorus. Frores secundi , pedicellati : pedicellus 1-3 1. longus, glandulis rariusculis obsitus, calyce brevior ; infimus ebrac- teatus ; cæteri bracteà stipati parvä, lineari, obtusà. Cazvx turbina- tus, profondè 5-fidus, glanduloso-pubescens , persistens; laciniis latiuseulis, lanceolato-linearibus , obtusis. Perara 5, hypogyna, cum laciniis calycinis alternantia , iisdemque longiora , subunguiculata , obovata, obtusissima, integerrima , glaberrima, purpurea, persis- ientia. Sramina 5, hypogyna , cum petalis alternantia , glabra , pis- tillum subadæquantia, persistentia ; filamenta filiformia , compla- nata; antheræ subcordatæ, inter lobos basi affixæ, immobiles, posticæ, 2-loculares, externè longitrorshm dehiscentes. Sryzus 1 terminalis, profundissimè 5-partitus, glaber, persistens. Sricmara 5, terminalia, 5-7-partita; divisuris teretibus, albidis. Ovarrum 5-gono-globosum, glabrum , 1 loc., polyspermum : ovula numerosa, placentis quinque affixa parietalibus , semi-cylindricis. Capsura ves- tita calyce petalisque et staminibus marcidis , stylo coronata , 5-val- vis; valvulis medio septiferis., Semma ovata, nigra. Affinis D. cuneifoliæ Lin. sup. et D. Burmanni Wahl. ; differt autem à priori præcipuè foliis reverà sessilibus , inferius ad medium nudiusculis et scapis glabris; à D. Burmanni notis foliorum su- prädictis glandulisque calycinis pedicellatis. In paludibus propè prædiola Tapeira et Riachaô in deserto provinciæ Minas-Geraes dicto Certaô-do-Rio-de-S.-Francisco.Flo- rebat Julio, Augusto. : ! 2. DROSERA MONTANA. + D. foliis radicalibus, brevibus, oblongis , obtusissimis , in petio- lum brevissimum attenuatis , suprà marginibusque ciliato-glanduli- feris, utrinquè pilosis; stipulis linearibus usquè ad medium laci- niatis ; scapis complanatis, glanduloso-puberulis ; rachi, pedicellis calycibusque glanduloso-pubescentibus. DROSERACÉES. 343 Forra radicalia, rosaceo-cespitosa , crebra, circiter 4-5 1. longa , oblonga , obtusissima, in petiolum brevissimum attenuata , suprà marginibusque ciliis glandulosis obtecta , utrinquè pilosa, obscurè rubra ; petiolo vix 1 : 1. longo, suprà ciliato-glandulifero , utrinque piloso. Pic longi, cinerei. Srmuzæ lineares, latiusculæ , usquè ad medium laciniato-ciliatæ , scariosæ. Scarr solitarii aut rard bini cum rachi 5-6 pol. longi, recti, complanati , glanduloso-puberuli , 3-5-flori , rubri. Frores secundi, pedicellati : pedicelli glanduloso- puberuli, calyce breviores, basi stipati bracteä lineari acutà ; infe- rior ebracteatus. Caryx turbinatus, profundè 5-fidus , glanduloso- pubescens, subinæqualis; laciniis lanceolato-oblongis, acutis vel apice 2-dentatis. Peraza 5, obovata, obtusa, glaberrima, rosea , fando calycis inserta. Sramma 5, ibidem inserta, cum petalis alter- nantia, glabra : filamenta complanata : antheræ subcordatæ , obtusæ, aureæ, basi aflixæ, immobiles, posticæ, longitudinaliter externe dehiscentes. Sryrus profundè 3-partitus ; divisuris 2-fidis. Sriemara 6 terminalia , dilatata. Ovariun globosum , glabrum , 1 loc., polysper- mum. Fructum non vidi. Inveni in jugis altioribus montium dictorum Serra-do-Papagay o in parte australi provinciæ Minas-Geraes. Florebat Martio. 3. DROSERA TOMENTOSA. Ÿ D. foliis radicalibus, oblongo-ellipticis, obtusissimis, margine ci- liato-glanduliferis , suprà subciliatis , subtüs villosis ; petiolo laminä 5-triplo breviore; stipulis usquè ad medium ciliato-multifidis : scapis rectis, tomentosis, apice glanduloso-puberulis; calycibus densè glanduloso-hirtellis. For radicalia, crebra, rosaceo-cespitosa, brevissimè pétio- lata, stipulata, cum petiolo circiter 5 |. longa, r 2-2 1. lata, oblongo-elliptica , obtusissima, margine et præcipuè apice ci- liata, suprà subciliata, subtùs villosa, obscurè rubra, in petio- lum latiusculum complanatum attenuata laminà 5-tuplo brevio- rem. STIPULE sCariosæ , usquè ad medium ciliato-multifidæ, co- 344 DROSERARÉES. lore stramenti seu rosei. Scarr 1-3, recti, 3-9-pollicares, filiformes, complanati , hinc et indè costà quandoque elevati , tomentosi, apice glanduloso-puberuli, circiter 5-11-flori. Prur simplices , complanati, molles , subcrispi, foliorum albidi , scaporum ferruginei. FLores racemosi, terminales, secundi, pedicellati. Penrceuur calyce brevio- res, densè glanduloso-hirtelli ; inferior ebractealus, cæteri bracteà lineari stipati. Cazvx profundè 5-fidus, inæqualis, densè glandulo- so-hirtellus ; laciniis linearibus, acutiusculis. Perara 5, imo calyci inserta , obovata , obtusa , glabra, purpurea. Sramina 5 ibidem in- serta, cum petalis alternantia, glabra, filamenta complanata : an- theræ ellipticæ, obtusæ, aureæ basi affixæ, immobiles, posticæ , 2-loculares , externè longitrorsum dehiscentes. Srxzus profundè 3- partitus , glaber; divisuris ascendentibus, profundè 2-fidis. Sricmara 6 terminalia, continua , clavata, subemarginata. Ovarrum globosum, glabrum. Fructum non vidi. ; Crescit in paludosis montium propè Ztambè in prôvincià Winas- Geraes, alt. circiter 2015 ped. Var. B. glabrata; scapis plüs minüsve glabratis. Nascitur propè vicum Milhoverde in parte provinciæ #1 inas-Geraes vulgd Distrito- dos-Diamantes; alt. circiter 3700 ped. 4. DROSERA HIRTELLA. Ÿ D. foliis radicalibus, spathulatis , laminä obovato-rotundà , utrin- què et præcipuè supra margineque ciliato-glanduliferà ; petiolo la- minà duplo breviore ; stipulis 3-partitis, laciniato-ciliatis ; scapo basi ascendente, molliter hirsuto;, apice pubescente ; calyce glan- duloso-hirtello. Forra radicalia, rosaceo-cespitosa , petiolata , stipulata, spathu- lata ; laminâ obovatä seu obovato-rotundà , obtusissimà , utrinquè et præcipuè marginibus ciliis glandulosis, rubris obsita, quando- què subtüs nudiuscula ; petiolo ab apice ad basin attenuato, utrin- que ciliato , laminâ breviore. Srrrucæ 5-partitæ , laciniato-ciliatæ. DROSERACÉES. 345 Scapus circiter 6 pol. longus, basi ascendens, molliter hirsutus , apice pubescens , ruber, circiter 5-florus. Pr simplices, patuli ; flexuosi ,rubri. Frores racemosi, terminales, secundi, pedicellati. Peprcerrr calyce mulid breviores, glanduloso-hirtelli ; inferior ebrac- teatus ; cæteri bracteä lineari acutissimà basï stipati. Carvx oblongo- turbinatus, profundè 5-fidus, subinæqualis, glanduloso-hirtellus : laciniis oblongo-linearibus , acutiusculis. Peraza hypogyna , obovata, obtusa , in unguem attenuata , integerrima, glaberrima , purpurea. Sramma 5, hypogyna , glabra : filamenta complanata : antheræ ova- to-ellipticæ, obtusæ, basi aflixæ , 2-loculares , externè longitrorshm dehiscentes. Srvius 1, glaber, profundè 3-partitus, divisuris pro- fundè 2-fidis, ascendentibus. Sriemara G, terminalia, clavata. Ovarrum glabrum, obtusum, x loc., polysp. : ovula numerosissima, placentis 3 parietalibus affixa. Ixrieuvenrum exTERIUS sEMINIS certè non mem- branaceum. Affinis 2. tomentoscæ , seû distincta. Inveni ad paludes exsiccatos propè pagnm Formigas in parte de- sertà occidentalique provinciæ Ainas-Geraes (Certaé)et in montibus dictis Serra-dos-Pyreneos in provincià Goyaz. Florebat Junio, Julio. ; Var. B. (lutescens ) foliis minoribus : laminä obovalà , subts sæ- piüs nudà; pilis scapi marifestè rigidioribus, lutescentibus. Inveni in montibus dictis Serra-dos-Pyreneos in provincià Goyaz. 5, DRrOSERA PARVIFOLIA +. D. fois radicalibus , parvis, subspathulatis ; laminà subrotundä, basi attenuatà vel obovatà, obtusissimä , suprà margineque ciliato- glanduliferà , subtùs glabriusculà ; petiolo-utrinquè villoso ; scapo basi ascendente , glabriusculo, 2-5-foro , laciniis calycinis glandulo- so-puberulis , linearibus , acutis. ForxA radicalia, petiolata ; stipulata, parva, r 5-4 1. cum petiolo . Jonga ; laminä subrotundà , basi atienuatä vel obovatà , obtusissimä, Mém. du Muséum. à. 11. 44 346 DroOsERACÉES. suprà et præcipuë margine cihis glandulosis rubrisque obsità , sub- tüs glabriusculà, viridi ; petiolo latiusculo, laminà longiore utrinquè villoso vel subvilloso. Sruzæ multipartitæ , ciliatæ. Scarr solitarit, breviusculi , basi ascendentes, glabri, seu basi vix pilosi apiceque vix glanduloso-puberuli, virescentes, basi rubelli , 3-3-flori. Frorxs secundi, pedicellati : pedicellus viridis, vix glanduloso-puberulus; inferior ebracteatus ; cæteri bracteà stipati , lineari. Caryx oblongus, profundissimè 5-fidus , sabinæqualis, glanduloso-puberulus, viridis ; laciniis linearibus , acutis. Perara 5, ovato-oblonga, obtusa , glabra, rosea. STamINA 5, cum petalis alternantia,ovario duplà longiora : fila- menta complanata : antheræ suborbiculares , apice subbilobæ , lu- teæ , basi affixæ , immobiles, posticæ , 2-loculares, externè longi- trorsimque dehiscentes. Sryzus profundissimè 3-partitus , glaber ; divisuris profundissimè 2-fidis , ascendentibus. Srremara 6, termina- lia, completa , subclavata. Ovarium subglobosum, glabrum, : loc., polysp. ; ovula numerosa, placentis 3 parietalibus aflixa. Fructum non vidi. Affinitas cum D. capillari Mich. ; sed calyx non glaber;, nec folia cuneato-rotunda. Inveni in fossis argillosis propè urbem S.-Joa6-del-Rey in provin- cià Minas-Geraes: 6. DroserA mariTimA Ÿ. Tab. XIX, B. D. foliis radicalibus, spathulatis, subexstipulatis ; laminä cuneato- rotundà , suprà ciliato-glanduliferà, marginibus ciliato-laciniatà , subtüs pilosiusculàä; petiolo laminæ subæquali; scapo brevi, fili- formi , basi teretiusculo, superius complanato, glanduloso-puberulo, supernè calycibusque glanduloso-pubescentibus. Focra radicalia , subnumerosa , rosaceo-cespitosa, petiolata , cum petiolo circiter 6 1. longa ; laminä 3-5 ; 1. latä, cuneato-rotundà, obtusissimä , apice laciniato-ciliatà , suprà ciliis glandulosis obtectà, subtùs pilosiusculä; petiolo complanato, suprà ciliis glandulosis DROSERAGÉES. 347 obtecto, infrà pilosiusculo, laminæ subæquali. Ad basin petiolorum STIPULARUM vVicem gerentes pili quidam rari, vix manifesti. Soapr in quolibet cespite solitarii, filiformes , erecti seu basi vix ascendentes, cum rachi vix 2-pollicares, basi teretiusculi , superiùs complanati , rachisque glanduloso-puberuli, 3-G-flori. FLores racemosi, termi- nales, secundi , pedicellati : pedicellus glanduloso-pubescens ; infe- rior ebracteatus; cæteri bracteà stipati lineari. Carvyx profundè 5-fidus, subinæqualis, glanduloso-pubescens, laciniis subovatis, obtusis. Perara 5 fundo calycis inserta , obovata, glabra, purpurea. Srama 5, ibidem inserta , cum petalis alternantia, glabra : filamenta complanata , tenuia : antheræ ovatæ , luteæ , basi vix 2-loba affixæ, immobiles, posticeæ , 2-loculares , externè longitrorshm dehiscentes. Sryzus 1, glaber, profundè 5-partitus; divisuris profundè 2-fidis. SrTiGmaTa 6 , continua , terminalia, completa, oblonga , obtusa. Ova- RIUM globosum, glabrum, 1 loc., polyspermum : ovula numerosa placentis 3 proeminentibus affixa. Fructum non vidi. D. spathulaiæ Lab. valdè aflinis; differt autem præcipuè scapis ‘brevioribus ; floribus majoribus, sæpits magis numerosis ; laciniis calycinis subobovatis, obtusis nec Lnsaétbus acutis ; obtectis glan- dulis pedicellatis nec sessilibus. DIT Inveni , Junio, in arenis maritimis propè Ærarangua add fines pro- vinciarum $. Catharinæ et Rio-Grande de S.-Pedro-do-Sul, et, Oc- tobre, in monte dicto Pa6 de Assucar ad littora maris in provincià Cisplatinà. 7. DROSERA INTERMEDIA. D. foliis radicalibus, spathulatis ; laminâ obovatä, suprà margine- que ciliato-glanduliferà, subtüs nudà ; petiolo angusto, nudo, laminä 5-pid ampliüusve longiore; stipulis ciliato-5-7-partitis; scapo bre- viusculo , ascendente, glabro ; seminibus tuberculatis. Drosera intermedia. Drew. u. Hayne Bild. p. 18. — Dec. Prod. vol. 1, p. 318. jh” 348 DRrOsSERAGÉES. D. longifolia. Lin. sp. 403. — Smith Brit. p. 347. — Ræm. et Schult. vol. r1, p. 761. Forra radicalia, rosaceo-cespitosa , stipulata, spathulata ; laminà circiter 3 1. longà, obovatà , obtusissimä, suprà margineque obsità ciliis glandulosis; petiolo laminà 3-plù longiore et ampliüs , angusto, canaliculato, nudo, glaberrimo. Srrrurx pauld suprà basin petioli affixæ, 5-7-partitæ, ciliatæ, scariosæ, ferrugineæ. Scarr in quolibet cespite 1-3, erecti sæpiusve basi ascendentes, cum racemo circiter 2-3 pol. longi, basi teretes, superiüs complanati, nudi, glaberrimi, 6-12-flori. Frores racemosi , terminales, secundi , pedicellati ; rachi complanatà , per lentem vix puberulä, scapo subæquali. Penrcerrr _ calyce breviores, glabri vel oculo armato vix puberuli, basi stipati bracteâ lineari acutà ; inferior ebracteatus. Carvx profundè 5-fidus , vix inæqualis, glaber vel per lentem vix puberulus, persistens ; la- ciniis linearibus, obtusis. Perara 5 , ohovata, obtusa, alba ; persis- tentia. SrameA 5, cum petalisalternantia, glabra , ovario longiora , persistentia : filamenta complanata ; antheræ parvæ, ovatæ, luteæ, basi aflixæ, immobiles, posticæ, externè longitrorsim dehiscentes. Sryius 1, glaber, profundè 3-partitus; divisuris profundè 2-fidis, ascendentibus. Srremara 6, completa, oblonga. Ovarrun obovatum , 3-gonum, 6btusum, glabrum; x loc., polysp. : ovula numerosissima , placentis 3 affixa parietalibus. Carsura vestita calyce persistente pe- talisque et staminibus marcidis, ohovata, 3-gona, obtusissima, breviuscula , glaberrima, 3-valvis; valvulis obtusissimis medio se- miniferis. SEmINa minutissima, oblongo-ovata, acutiuscula , apice obtusa , tuberculata , glabra. Inveni in paludibus prope prædiolum dictum Sitio do Paulista haud longè à littore maris urbeque Hacahè in provincià Rio-de-Ja- neiro. Florebat Septembre. HORS ES Oss. La plante que je décris ici est certainement celle que Linné avoit appelée longifolia , mais comme cette dénomination a été appliquée tantôt à mon espèce et tantôt au D. Anglica, suivant que les floristes trouvoient l’une ou l’autre dans le DROSERACÉES. 349 pays dont ils vouloient faire connoître la végétation, je crois que le nom de Zongi- folia ne peut plus donner lieu qu’à des confusions, et, à l'exemple de M. de Can- dolle, j'adopte le nom d’intermedia proposé par Hayne. 8. DroSERA commMunis f. D. foliis radicalibus, spathulatis ; laminä subovatà, obtusissimä , suprà marginibusque ciliato-glanduliferà , subtus nudiusculà; sti- pulis capillaceo-multipartitis; scapis subascendentibus , rachi fo- liisque multotiès longioribus , glabris vel basi subvillosis ; calycibus 5-partitis, glanduloso-puberulis. Drosera communis — Aug. de S. Hil. Plant. Us. Bras. n°. XF. 9. DROSERA VILLOSA. Ÿ D. foliis radicalibus, lineari-lanceolatis , in petiolum attenuatis ; laminà suprà marginibusque ciliato-glanduliferä, subtùs villosà ; petiolo utrinquè villoso; stipulis 2-partitis, laciniato-ciliatis ; scapis erectis , foliis 4-plù longioribus ; seminibus oblongis, striatis , trans- . versè reticulatis. Raprx crassiuscula , flexuosa, nigra. ForrA radicalia , crebra , rosa- ceo-cespitosa , cum petiolo 1 3-5 : pol. longa, :-1 : 1. lata, lineari- lanceolata, angusta , acutiuscula, in petiolum attenuata ; laminà su- prà marginibusque ciliis obtectà obscurè rubris , glandulosis , subtüus villosà ; petiolo à laminà non absolutè distincto , utrinquè villoso, nec ciliato. Picrcomplanati , subcrispi , ferruginei. SriPucæ 2-partitæ, la- ciniato-ciliatæ, scariosæ, ferrugineæ. Scarr in quolibet cespite solita- ri (rard 2 vel3)7-14 pol. longt, erecti, complanati , vel subtetragono complanati ,sulco uno alterove sæpè exarati , basi villosi aut subvillosi velglabrati, medioglabri, apice subglanduloso-puberuli, rariüs à basi villosà ad apicem subglanduloso -puberuli, foliis 4-plo longiores. FLores 4-14 terminales , racemosi , alterni , secundi , pedicellati, re- motiusculi. Peniceru 2-3 L. longi, subflexuosi , glanduloso-puberuli ; inferior ebracteatus; cæteri bracteà stipati, lineari, obtusà, glan- 350 DRrOSERACÉES. duloso-puberulà. Cazyx turbinatus, 5-fidus , glanduloso-puberulus, persistens ; divisaris lineari-ellipticis, obtusiusculis , integerrimis , subinæqualibus. Perara 5, fundo calycis inserta , æqualia , subun- guiculata , obovato-oblonga , obtusa , apice denticulata, purpurea, glaberrima , persistentia. Srammxa 5, cum petalis alternantia , gla- bra, pistillo longiora, persistentia : filamenta complanata, filifor- mia : antheræ ovatæ , obtusæ, basi subbilobæ , immobiles , posticæ, 2-loculares , externè longitrorsùm dehiscentes. Sryzus profundè 3- partitus , glaber ; divisuris ascendentibus , simplicibus aut profundè 2-fidis. Sricmara 3-6 terminalia , completa , clavata. Ovarium globo- sum, glabrum, 1-loc., polysp. : ovula placentis 3 parietalibus affixa semi-cylindricis. Capsura vestita calyce petalisque et stamini- bus persistentibus, subglobosa , 3-loba, obtusa, nigra, 1 loc., apice 3-valvis; valvulis ou, seminiferis. SEMINA numerosa, minutis- sima, oblonga , angusta, utrinquè attenuata , subcurvata , longitu- dinaliter striata , transversè reticulata , glabra , atra. INTEGuMENTUM crustaceum. PerisPeruum farinaceum. Eusryo minimus, rectus, glo- boso-conicus, in imâ basi perispermi : cotyledones crassiusculæ : radicula umbilicum ferè attingens. D. Capensi. Lin. quodam modo aflinis, sed distinctissima. Crescit in sabuletis humidis montis dicti Serra-Negra in provinciâ Minas-Geraes, haud longè à finibus provinciæ Rio-de-Janetro. Flo- ret Januario, Februario. DROSERA ASCENDENS. D. foliis radicalibus, linearibus, basi subattenuatis, subtüs vil- losis , suprà marginibusque ab apice usquè ultra medium ciliato- glanduliferis ; scapis ascendentibus ; pedicellis omnibus ebracteatis ; calycibus glanduloso-puberulis. Rapiees crassiusculæ , nigrescentes. Fozra radicalia, creberrima, rosaceo-cespitosa ; 9-15 1. longa, 1-1; |. lata, linearia, obtusius- cula , basi subattenuata, subtüs le » Supra marginibusqne ab DROSERAGÉES. 351 apice usquè ultrà medium ciliis glandulosis rubrisque obsita, per- sistentia. Sripuzæ laciniato-ciliatæ , scariosæ , ferrugineæ. Pirr sim- plices, complanati, subcrispi, ferruginei. Scarr in quolibet cespite 2 vel 5, basi ascendentes, 6-10 pol. longi, complanati, obscurè ru- bri, infernè ciliis obtecti, superiùs glanduloso-pubescentes. Frores terminales, racemosi, secundi, pedicellati. Peprcerrr circiter 2 < 1. longi, glanduloso-puberuli, omnes ebracteati. Caryx turbinatus, profundè 5-fidus, subinæqualis; laciniis lineart-ellipticis, latius- culis. Peraza 5, obovata, obtusa, vix retusa, purpurea , fundo ca- lycis inserta. Sramina 5, ibidem inserta, cum petalis alternantia, ovario duplù longiora, glabra : filamenta complanata , tenuia : an- theræ oblongæ , obtusæ , albidæ , basi aflixæ, immobiles, posticæ, 2-loc., externè longitrorsam dehiscentes. Srvzus 1, profundè 3-parti- tus , divisuris 2-partitis, subgracilibus, glabris, apice subinfundi- buliformibus. Sricmara 6, ad superficiem partis styli terminalis et concavæ. Ovarium 5-gono-globosum, glabrum, 1 loc., polysp. : ovula numerosa , placentis 3 parietalibus aflixa semi-cylindricis. Fructum non vidi. Affinis D. villosæ , sed distincta. Crescit in sabuletis humidis montium dictorum Serra-de-Curu- matahy, in parte boreali provinciæ Minas-Geraes dicta Distrito- dos-Diamantes; alt. circiter 3700 ped. Florebat Septembre. & 11. DROSERA GRAMINIFOLIA. Ÿ Tab. XIX , C. D. foliis radicalibus , sessilibus , linearibus , longis, erectis, mar- ginibus supraque glanduloso-ciliatis, subtùs villosis; stipulis ova- Us, apice laciniato-ciliatis; scapo 5-angulari, villoso , simplici. Forra sessilia, stipulata , 6 pol. longa , vix 1 1. lata, linearia, obtusiuscula , marginibus supraque glanduloso-ciliata, subtüus vil- losa, primüm erecta, deindè variè contorta. Srræure axillares, extrà basin foliorum, cauli abbreviato aflixæ , 4 1. longæ , 3 1. latæ, ovatæ, apice laciniato-ciliatæ , scariosæ, glabræ , fulvæ : ad basin stipula- 352 DRrOSERACÉES. rum pili graciles, longissimi, fulvi. Soarr solitarii, simplices, 3-angulares, villosi, 7 pol. longi. FLores racemosi, terminales, se- cundi, pedicellati, majusculi. Penrceuxx villosi. Carvx turbinatus, profundè 5-fidus , inæqualis , subvillosus ; laciniis linearibus, obtu- siusculis. Perara 5 , subunguiculata, obovata, obtusissima , integer- rima, glabra. Sramina 5, cum petalis alternantia , glabra : filamenta complanata : antheræ ovatæ, obtusæ, basi affixæ, immobiles , pos- ticæ , 2-loc., externè longitrorsimque dehiscentes, luteæ. Sryrus unicus, glaber, profundè 3-partitus , laciniis profundè 2-fidis , as- cendentibus. Sriemara 6, terminalia , subcapitata. Ovarium subglo- bosum , glabrum. Haud vidi fructum. Affinis videtur D. fiiforimi. Pursh. Crescit in summis montibus dictis Serra-da-Caragça, in provincià Minas-Geraes ; alt. circiter 6000 ped. Florebat Februario. 12. DROSERA SPIRALIS Ï. D. foliis radicalibus , linearibus, sessilibus , longis, demum spi- raliter contortis ; stipulis lanceolatis apice vix ciliatis; scapo com- planaio , glanduloso-pubescente , 2-fido. Forra radicalia, sessilia, stipulata, subnumerosa, subrosaceo- cespitosa, circiter 5-6 pol. longa, vix 1 I. lata, linearie , acutius- cula, demüm spiraliter contorta, suprà ciliis glandulosis obtec- ta, subtùs villosa et demüm glabrata. Sripuzæ axillares, circi- ter 8 L. longæ, lanceclatæ, acutæ , apice vix ciliatæ, ferrugineæ, demüm laceræ. Scapus circiter 8 pol. longus, complanatus, glandu- loso-puberulus , apice 2-fidus ; divisuris floriferis. Frores racemosi, secundi, pedicellati, glanduloso-pubescentes. Pepicezrr approxi- mati, breves, villosi. Carvx turbinatus, profundè 5-fidus , subin- æqualis, villosus, pérsistens ; laciniis linearibus , obtusiusculis. Prrara 5, imo calyci inserta , longiuscula ; unguiculata, obovata,, glabra ; purpurea, persistentia. Sramna 5, cum petalis alternantia , ibidem inserta, glabra, capsulà longiora, persistentia : filamenta WT Le “a 3 Lane ROLUEr QUE “ ê : à Tab , X XV. ÿ “4 A.DROSERA sesstfolia. BD... mardma. ©. D... grummfola . DROSERACÉES. : 353 complanata : antheræ oblongæ , ohtusæ , apice basique 2-lobæ, basi affixæ, immobiles, posticæ, 2-loculares, externè longitrorstmque dehiscentes. Sryrus unicus, glaber, profundè 3-fidus; divisuris as- cendentibus, profundè 2-fidis. Sricuara 6, terminalia, continua, subclavata. Ovariun non observavi. Capsura vestita calyce , petalisque et staminibus persistentibus , obtusa , glabra, 1-loc., ab apice us- què ad basin 3-valvis; valvulis medio seminiferis. Semma minu- tissima , cylindrica , utrinquè acutiuscula, longitudinaliter striata transversèque tenuius, glabra, nigra. INTEGUMENTUM crustaceum. PerisPermum farinaceum. Emervo minutissimus , extrarius, in basi se- minis situs, rectus, cylindrico-conicus, luteus: cotyledones truncatæ, perispermo applicatæ : radicula umbilicum attingens. Crescit in montibus dictis Serra-de-Curumatahy , ad rivulum Corgo-Novo, in parte provinciæ Minas-Geraes dictà Distrito-dos- Diamantes ; alt. circiter 3700. Inveni Septembre cum fructibus. EXPLICATION DE LA PLANCHE. À. DROSERA SsEssrciFroZr4. — 1. Son ovaire surmonté d’un style. Profon- dément 5-partite, dont les stigmates sont 5-7-partites. B. DRoSERA MARITIMA. C. DrOSERA GRAMINIFOLrA. — 2. Une stipule détachée. (Nous donnerons la suite de ce Mémoire.) Mém. du Muséum. t 11. 45 354. DESCRIPTION D'un nouveau genre de Mammufères carnassiers sous le nom de PROTÈLE PAR M. ISIDORE GEOFFROY SAINT-HILAIRE. Moécorirr, sur l’ordre de mon père, de déterminer et d’étiqueter les nombreux Mammifères récemment arrivés au Muséum, j'ai trouvé parmi eux un nouveau carnassier digitigrade, rapporté du cap de Bonne-Espérance par notre intrépide et malheureux voyageur, M. Delalande : je veux parler de l’animal auquel M. Cuvier a donné le nom provi- soire de Civette ou Genette hyénoïde. Cet animal qui a, comme ce nom l'indique, de grands rapports avec les ci- vettes et les hyènes, qui ressemble aussi, sous plusieurs points de vue, aux renards, frappe d’abord par sa grande ressemblance extérieure avec les hyènes, et surtout avec la hyène d’orient : c’est le même fond de coloration, le même système de rayures transversales ; enfin une semblable cri- nière, et une grande brièveté apparente des membres posté- rieurs, viénnent encore ajouter à cette ressemblance vraiment remarquable. Cette circonstance organique de la brièveté des membres postérieurs est d’une importance très-grande par l’aspect par- / 4 ANJOU j V222774 ‘p gL'fPT 2 4‘ potpou A DID op 6 UZS HS 010 v20pr57 ‘8e ounol YANV'IV'I AA A'TALOUd L°] N by TT ‘MS. AGE “ SE Joe PROTÈLE. 355 ticulier qu'elle donne à l'animal, la gène qu’elle lui impose dans sa démarche, et, par suite, la grande influence qu’elle a sur ses habitudes. Sans doute beaucoup des fables accrédi- tées dans l'antiquité au sujet de la hyène, ont eu leur source dans cette disproportion des parties, d’où résultent un as- pect, une allure, qui la signalent à l’œil le moins observateur comme un être anomal et extraordinaire. Un animal qui reproduit un caractère si bizarre, si domi- nant, est bien digne d’attention; aussi, quoique arrivé en France depuis peu de temps, a-t-il déjà occupé plusieurs zoologistes. MM. G. et Fr. Cuvier, et M. Desmarest , dans leurs ouvrages (1), mon père, dans ses Cours, en ont déjà donné les principaux caractères. M. Cuvier a reconnu que, malgré tous ses rapports de ressemblance avec la hyène, l'animal découvert par M. Delalande n’est point une hyène, mais qu'il doit former un genre nouveau. Je me propose, dans cet article, d'établir le nouveau genre que je désignerai sous le nom de Proteles(2) (Protèle); ce nom rappellera que les pieds antérieurs du nouvel ani- mal sont complets, quant au nombre des doigts, par oppo- sition avec ceux de la hyène qui ne sont que tétradactyles. Tiré, il est vrai, d’un caractère qui est loin d’avoir une im- portance majeure, il a du moins l'avantage d’indiquer une (1) Joy. G. Cuvier , Ossemens fossiles, tome IV ; Fr. Cuvier, Dictionnaire des sciences naturelles (de Levrault), tom. XXII, au mot hyène; et, Desmarest, Mammalogie de l'Encyclopédie, supplément. (2) De #0, devant, et de Teasus, parfait, complet. Je prends ici ce dernier mot comme équivalent de pentadactyle. Mon père l’a déjà employé dans le même sens. 45° 356 PROTÈLE. distinction extérieure très-nette et très-facile entre deux ani- maux qui se ressemblent autant à l'extérieur. Je vais donner les rapports principaux du Protèle avec les genres les plus voisins, ceux des civettes, des hyènes et des chiens. Malheureusement les individus que possède le Mu- séum, sont tous jeunes, ce qui me privera sans doute de quelques considérations intéressantes : j'aurai soin, à cause de cette circonstance, de comparer le Protèle, autant que possible, non-seulement aux adultes, mais aussi aux jeunes des genres voisins. Des Os de la tête. Les grandes ressemblances extérieures que je viens d’in- diquer entre la hyène et le Protèle portent sur le tronc, et spécialement sur les extrémités qui diffèrent beaucoup de : celles de la hyène, surtout par leurs dimensions proportion- nelles; néanmoins, malgré tous ces rapports de ressemblance extérieure, ün coup d'œil suffit pour distinguer les deux ani- maux. En effet, un museau obtus et comme tronqué termi- nant une tête ramassée, caractérise les hyènes; un museau assez fin et allongé, terminant une tête à proportions élé- gantes, caractérise au contraire le Protèle : de sorte que sa tête se rapproche davantage de celle de la civette où du re- nard par sa forme générale. Ce rapport donné par l'inspec- tion immédiate des parties extérieures, l’est pareillement par l'étude du crâne. En général, le système osseux de la tête présente bien toutes les conditions du jeune âge; les os, peu denses, peu épais, sont séparés par des sutures très-prononcées partout, PROTÈLE. 397 si ce n’est à l’occiput où déjà se remarquent d’assez fortes crêtes. Une tête de jeune hyène, d’un quart moins longue que celle de l’adulte, a les sutures et les crêtes à peu près dans le même état; mais l'épaisseur et la densité de ses os sont, même proportion gardée, beaucoup plus considérables. L’arcade zygomatique diffère beaucoup de celle de la hyène, en ce qu'elle offre de plus important; mais, par ses détails secondaires, elle lui ressemble d’une manière remar- quable, différant au contraire beaucoup de celle de la ci- vette. Chez ce carnassier, elle est longue, mince et parallèle à l'axe de la tête; le jugal est étroit et grêle; son apophyse orbitaire, ainsi que celle du frontal, n'existent pas (1) : au contraire, chez le Protèle comme chez la hyène, les arcades zygomatiques sont fortes, épaisses, plus écartées vers le temporal que vers l'orbite; le jugal est très-large, et les apo- physes orbitaires sont très-prononcées. La différence con- siste en ce que, chez le Protèle, l’arcade est moins rejetée en arrière, et surtout beaucoup moins écartée, l’apophyse zygomatique du temporal étant beaucoup plus courte, et le jugal ne pouvant plus s’articuler avec elle qu'en se rap- prochant beaucoup du crâne. Ces conditions organiques font, que le Protèle passe de la forme élargie de la tête des hyènes à la forme allongée de celle des renards; que la boite céré- brale est plus étendue, la masse encéphalique plus considé- (1) Cette remarque est applicable à la civette proprement dite, et à plusieurs autres animaux du même genre, mais non à tous : chez quelques uns même, les apophyses orbitaires existent si prononcées que l’œil est entouré d’un cercle osseux. complet. 358 PROTÈLE. rable, la masse des muscles moteurs de la mâchoire inférieure diminuant au contraire. Les ouvertures des arrière-narines sont larges et très-re- jetées en arrière; le palais a aussi beaucoup de largeur. Les deux rangées de molaires sont sensiblement parallèles, ce qui se voit aussi chez les ours, tandis que le parallélisme n’a lieu que pour les deux ou trois dernières molaires chez les hyènes, les chiens, les civettes et les autres carnassiers. Cette disposition fait que le museau, d’ailleurs beaucoup plus court que celui du renard, est beaucoup plus large à son extrémité. Les os propres du nez s'allongeant avec le museau, et dimi- nuant avec lui, sont aussi beaucoup plus courts que chez le renard ; mais ils sont plus longs que chez la hyène. La lar- geur du museau donne aux chambres olfactives une assez grande capacité. On ne remarque point de gouttière le long de la suture des os propres du nez, comme cela se voit chez les renards, la civette et les hyènes. . Le jeune Protèle ayant, comme la jeune hyène, les crêtes de l’occiput déjà très-prononcées, il est à croire quelles sont trés-saillantes chez le Protèle adulte, comme chez la hyène adulte. De la Mächotire inférieure. La mâchoire inférieure courte, et assez semblable à celle de la hyène, présente néanmoins quelques modifications re- marquables. Les deux branches du maxillaire sont à peine obliques l’une sur l’autre dans toute l'étendue où doivent s'implanter les molaires; puis les deux bords dentaires se rapprochent en se contournant, d'où résulte une sorte PROTÈLE. 359 d’échancrure qui répond aux canines supérieures, et sépare les molaires inférieures des canines et des incisives infé- rieures. Cette disposition fait que, malgré le parallélisme des deux rangées de molaires de la mächoire supérieure, les mo- _laires inférieures sont, comme chez tous les carnassiers, re- çues entre les supérieures, et sont alternes à leur égard, tan- dis que les incisives supérieures et inférieures sont opposées. Cette disposition se retrouve chez les ours, qui ont aussi, comme je l'ai remarqué, les bords du maxillaire supérieur parallèles. Le maxillaire inférieur du Protèle est d’ailleurs beaucoup moins fort que celui de la hyène; son condyle, et surtout son apophyse coronoïde, sont peu développés. Des Dents. C’est ici surtout que la connoiïssance de l'adulte est à re- gretter, tous les individus que j’ai examinés n’ayant encore que de très-petites dents de lait. M. Fr. Cuvier, celui de tous nos zoologistes qui a porté le plus d'attention sur les dents considérées comme caractères zoologiques, ayant examiné les dents du Protèle, je ne puis mieux faire que de renvoyer à son travail. Je dirai seulement qu'il y a de chaque côté, à la màchoire supérieure, trois incisives, une canine, quatre molaires; et, à l’inférieure, une molaire de moins. Les mo- laires de la mâchoire inférieure sont séparées des autres dents par un vide assez considérable; celles de la mâchoire supé- rieure sont écartées les unes des autres. Toutes ces dents sont très-petites; les incisives supérieures sont en biseau : chez l’un des deux individus que j'ai examinés, elles sont larges 360 PROTÈLE. et divisées par un sillon longitudinal, visible particulière- ment sur la face antérieure, de sorte qu’elles présentent deux petits sommets. Chez un autre individu elles sont beau- coup plus étroites, et le sillon est à peine sensible. Dans un troisième elles sont larges, et le sillon est encore moins mar- qué. Les incisives inférieures ont deux sommets plus dis- tincts ; les canines supérieures et inférieures sont peu sail- lantes. 4 Les dents du Protèle sont dans un état complet d’ano- malie. C’est, dit M. G. Cuvier, que les dents persistantes ont été retardées, comme il arrive assez souvent aux genettes. Il pense d’ailleurs que, dans leur état normal, elles doivent ressembler à celles des civettes et des genettes; et c’est ce qui lavoit déterminé à donner au nouveau quadrupède le nom de Civette hyénoïde, que, du reste, il ne regardoit lui- même que comme une désignation provisoire. Cependant les “mâchoires du Protèle sont courtes: la portion de la mâchoire inférieure où doivent s'implanter les molaires est, propor- tion gardée, d’un quart au moins plus petite chez le Protèle que chez la civette. Du Tronc. C’est avec la hyène que le Protèle à le plus de rapports, quant aux os du tronc. Par le nombre des côtes il tient le mi- lieu entre la hyène et la civette; il en a quatorze; elles sont aplaties et assez longues : les huit premières sont les seules qui s’articulent avec le sternum. Cet os ne présente rien de bien remarquable, et ne fait en avant des côtes qu’uné saillie peu considérable. Les vertèbres cervicales sont très- _ PROTÈLE. A61 fortes; toutes leurs apophyses sont très-élargies. Les ver- tébres lombaires sont au nombre de six, les sacrées au nom- bre de deux : ce qui fait vingt-neuf vertèbres, sans compter les caudales qui sont au nombre de 21 ou 22. La série des apophyses épineuses présente une disposition remarquable: Vatlas et l’axis sont comme chez les autres carnivores : dans les cinq dernières cervicales, les apophyses épineuses sont élargies, mais peu saillantes : à la région dorsale, elles de- viennent tout-à-coup des tiges très-allongées. Cette disposi- tion est particulière au Protèle et aux hyènes, surtout à la hyêne tachetée ; car chez les civettes, les chats et les autres _carüivores, les apophyses épineuses des dernières cervicales ont déjà pris la forme allongée de celles des dorsales. Vers la fin du dos, et dans la région lombaire, ces apophyses de- viennent plus larges et moins saillantes; enfin, à la région sacrée , elles sont minces et allongées comme à la région dor- sale, mais plus petites. Les quatorze ou quinze dernières vertèbres caudales ne sont plus que des cycléaux grèles et allongés : les autres ont des apophysés dont quelques-unes sont même très-saillantes. Le bassin est, comme chez la hyène, moins oblique sur la colonne vertébrale qu’il ne l’est ordinairement : l’iléum ést plus étroit et plus allongé que chez ce carnassier; la cavité cotyloïde a peu de largeur : elle résulte de l'union de l'iléum, de l’ischium, du pubis, et d’un quatrième os découvert il y a quelques années, dans l’homme et les mammifères, par notre célèbre anatomiste M. Serres, qui le regarde comme l'analogue de l'os marsupial des animaux à bourse. ( Voyez Analyse des travaux de l’Académie Royale des Sciences Mém. du Museum. + 11. 46 362 PROTÈLE. pour 1819, page 40.) L’os pénial des chiens n’est aussi, suivant mon père, que le même os soudé à son congénère, et ne for- mant avec lui qu’une seule pièce placée sur la ligne médiane. (Voyez tome IX deces Mémoires, page 399.) Ainsi ce qua- trième os existeroit dans la cavité cotyloïde chez tous les mammifères, ceux excepté qui ont ou l'os pénial ou l’os mar- supial : il est, chez le Protèle comme chez la hyène, placé entre l’ischium, le pubis et l’iléum. Le Protèle de mème que la hyène (déduction de la théorie de mon père) n’a donc pas d'os pénial. ! # Des Membres. On saisit, à la simple inspection des membres du Protéle, quelques-uns de ses rapports avec la hyène et la civette. Le membre antérieur du Protèle, par ses proportions, ressem- ble à celui de la hyène, et diffère de celui de la civette; par le nombre des doigts, au contraire, il ressemble à celui de la civette, et diffère de celui de la hyène, qui manque de pouce, ou du moins, qui n’a qu’un pouce rudimentaire. Quant au membre postérieur, sons ces deux rapports également, il ressemble à celui de la hyène, et diffère de celui de la civette. Ainsi, à la simple inspection, les membres du Protèle pa- roissent avoir plus de rapports de ressemblance avec ceux de la hyène qu'avec ceux de la civette. Un examen détaillé des parties nous donnera ce même résultat. L’extrémité an- térieure même ressemble plus à celle de la hyène qu’à celle de la civette. | L’omoplate a peu de largeur, mais il est très-allongé ; cet os est remarquable par cette forme allongée, et surtout par PROTÈLE. 363 son épine très-peu oblique sur les bords de los. Cette même disposition, qui n’existe ni chez le renard, ni chez la civette, se retrouve chez la hyène. Je n’ai point vu la elavicule; elle manquoit au squelette que j'ai examiné : il est probable qu’elle est petite et suspendue dans les chairs. L’humérus est arqué, très-fort, surtout vers l'extrémité scapulaire. La tête, les tubérosités, tout le tiers supérieur de l'os est remarquable par sa largeur : déprimé dans une partie de sa longueur, comprimé dans l’autre, il est arrondi vers sa moitié. Les os de l’avant-bras sont, dans toute leur lon- gueur, appliqués l’un contre l’autre, et mème si intimement qu'ils se recoivent dans de légères facettes dont ils sont creusés à leur partie supérieure; tous deux, et le radius sur- tout, sont larges et aplatis. Le cubitus, moins large, a plus d'épaisseur; sa portion carpienne, arrondie et assez sembla- ble à une phalange, n’est pas encore réunie au corps de los. La portion inférieure du radius est au contraire soudée à la supérieure; mais on voit une suture très-prononcée, indice de la séparation primitive des deux parties de l'os. La première rangée du carpe est formée de trois os, dont l'interne, plus grand, est reçu dans la facette articulaire du radius; l’externe plus petit dans celle du cubitus. Le troi- ” sième os est placé au-dessous, et forme une sorte de talon extrêmement saillant : il y a de plus’un petit osselet lenticu- laire placé dans la ligne du pouce. La seconde rangée est formée de quatre os : à la partie inférieure de l’interne est placé un petit osselet, suivi de trois autres osselets plus ou moins allongés ; c’est le pouce. Le même os et le suivant sou- tiennent le métacarpien du second doigt; le suivant porte 46” 364 : -PROTÈLE. celui du troisième; enfin sur l’externe ne les deux der- niers métacarpiens. Tel est le carpe du Protèle, remarquable par une grande analogie de composition avec le tarse. Il est très-différent de celui de la civette, moins de celui de la hyène. Ainsi, par le nombre des doigts semblable à la civette, et différent de la hyène, le Protèle est cependant, par son carpe, plus semblable à la hyène. Le pied offre encore une considération plus importante, qui le rapproche pareillement de celle-ci. Les carnassiers ont ordinairement le pied de devant plus court que celui de derrière, et particulièrement, car c’est sur eux que porte la différence (1), les métacarpiens plus courts que les métatar- siens. La hyène fait exception : chez elle le métacarpe ne le cède en rien pour la longueur au métatarse. Il en est de même chez le Protèle, qui se rapproche ainsi de la hyène jusque dans ses ee Le pouce est formé de trois os : le premier est aussi long que les phalangés métacarpiennes des autres doigts; le se- cond est court; le dernier, qui est la phalange unguéale, est encore beaucoup plus court : cette petite phalange porte un. ongle pointu, placé vers le bas du métacarpe. Les quatre grands doigts ne présentent rien de remarquable. Les deux (1) Je pourrois dire presque tous les mammifères. Les chauve-souris, plusieurs édentés , etc., font cependant exception. Dans les marsupiaux qui manquent de pouce au pied de derrière, l’allongement de ce pied ne vient pas uniquement de l'allongement des métatarsiens ; il porte en grande partie sur les phalanges digitales. C'est qu'il ya ici un excès de développement dü à des conditions organiques propres aux marsupiaux. Mon père a donné l’explication de ce fait dans l’article marsupiaux du Dictionnaire des Sciences naturelles de Leyrault. Voy.tom. XXIX. PROTÈLE. 365 métacarpiens externes sont beaucoup plus courts que les in- ternes : aussi les doigts, auxquels ceux-ci appartiennent, sont-ils plus allongés que les autres; et les ongles du deuxième et du cinquième doigt placés beaucoup plus en arrière qué ceux du troisième et du quatrième. Aux pieds de derrière, les métatarsiens internes sont les plus allongés, comme le sont les métacarpiens internes aux pieds de devant: par suite, aux pieds de derrière comme aux pieds de devant, les ongles externes sont rejetés en arrière. 4 On remarque, à la partie postérieure de chaque articula- tion métacarpo-phalangienne, deux os entre lesquels glisse, dans la flexion, l'extrémité supérieure de la phalange corres- pondante. Ces deux os se retrouvent dans les chats, les hyènes, etc., où ils finissent par se souder ensemble. Cette soudure a sans doute pareillement lieu chez le Protèle. Enfin il ya en devant, dans les ligamens de la même articulation, de petits osselets qui ressemblent tout-à-fait à la rotule par leur position et par leur forme. Tous ces os, placés derrière les articulations métacarpo-phalangiennes , et ces osselets sésamoides placés au devant, se retrouvent aux parties cor- respondantes du membre postérieur, à l'examen duquel je vais maintenant passer. Be fémur et la rotule du Protèle ressemblent beaucoup à ceux de la civette et de la hyène; la tète du fémur est cepen- dant plus saillante que chez la hyène. Le péroné n’est encore qu'une tige aplatie, un peu renflée et arrondie à ses extré- mités : contigu au tibia dans sa moitié inférieure, il s'en écarte dans la supérieure. Cette disposition produit une courbure dont la concavité est tournée vers l’extérieur. Sans 366 PRrOTÈLE. doute, dans les vieux individus, les deux os de la jambe sont soudés dans une grande partie de leur longueur. Dans les civettes comme dans les chats ,. au contraire, les deux os ne se réunissent qu'à leurs extrémités, et sont toujours écartés lun de l’autre dans le reste de leur longueur. Au dessous du péroné est une épiphyse qui se soude plus tard avec le pé- roné, dont elle doit faire partie, et avec le tibia. A l’extrémité supérieure du péroné sont deux autres épiphyses, dont l’in- férieure sert aussi de point de réunion pour les os de la jambe. Il y a de plus un petit osselet placé au côté externe. Le péroné de la hyène ressemble à celui du Protèle ; il est même encore plus étroit chez elle, proportion gardée. Les chiens ont aussi les os de la jambe disposés de la même manière, et soudés pareïillement dans leur, moitié inférieure ; ils se réunissent même quelquefois dans. la portion de leur longueur, où ils sont écartés, au moyen d'une lame osseuse qui va d’un os à l’autre, comme feroit un Jigament interosseux. Je parle de cette disposition, que je n’ai observée que chez les chiens, parce qu’elle doit se rencontrer pareillement chez les vieux Protèles. Le tarse ne diffère que très-peu de celui des autres car- nassiers, et particulièrement de la civette : analogie remar- quable entre les pieds de deux animaux dont l’un est penta- dactyle, dont l’autre est privé de pouce. Au reste, comme on sait, un élément organique de plus ou de moins dans une série de parties analogues n’est pas un caractère d’une impor- tance majeure : c’est ainsi que varie fréquemment dans le même genre, quelquefois dans la même espèce, le nombre des doigts, des côtes, des vertèbres, des, dents, etc. PROTÈLE. 367 Îl y a toutefois une légère modification chez la civette: les cunéiformes portent les trois métatarsiens internes; le cu- boïde soutient le suivant, et ne s'articule à l’externe que dans une très-petite portion. Telle est aussi, à peu près, la disposi- tion de ces os chez l’homme. Dans le Protèle, le tarse est aussi large; mais l'absence d’un métatarsien rend le méta- tarse plus étroit, ce qui fait que les quatre métatarsiens qui restent sont moins gênés, et s’articulent avec le tarse d’une manière plus pleine et plus entière. Il est à remarquer au reste que le pouce joue, chez la civette, un rôle très-peu impor- tant; en effet, le métatarsien de ce doigt est placé hors de rang, s'articule avec son cunéiforme presque tout entier au dessous du métatarsien du second doigt, et reste caché sous lui dans une grande partie de sa longueur : il est d’ailleurs ex- trèmement grêle. Les phalanges métatarsiennes et digitales du Protèle sont très-semblables à celles de la civette, surtout quant aux trois doigts externes; car l’interne, grêle chez la civette, est très- fort chez le Protèle, C’est à l'absence du pouce qu'il faut at- tribuer le volume remarquable de cet os, nourri chez le Protèle de tout le sang qui, dans le cas normal, se seroit porté au pouce. Dernières considérations. T'elles sont les principales particularités que nous présente le squelette du Protèle. J’ai montré que cet animal est très- voisin des hyènes; qu'il l’est plus même que ne semblent l'avoir pensé les naturalistes qui se sont occupés de lui avant moi. En effet, si nous omettons les caractères extérieurs qui. 368 PRrOTÈLzE. ne sont pas eux-mêmes sans importance, pour nous baser uniquement sur les considérations que présente le squelette, que trouvons-nous ? L'ensemble de la colonne vertébrale, le bassin, le membre postérieur tout entier, l'épaule, les os de la jambe, du carpe, les quatre doigts externes, qui sont les plus importans dans ces familles, nous rappellent entièrement et presque uniquement la hyène. Les côtes, le sternum, res- semblent autant aux os correspondans de la hyène qu’à ceux de tout autre animal. Le Protèle a un doigt de plus; mais ce n’est pas là une différence bien importante : ce doigt est petit, grêle, sans usage, comme surnuméraire ; et d’ailleurs, on trouve des rudimens de pouce chez la hyène. La forme de la tête est différente; l’arcade zygomatique est beaucoup plus écartée chez la hyène: l’arcade zygoma- tique qui, étant pour le naturaliste comme l'indice du volume de la masse encéphalique et:de la force des muscles moteurs de la mâchoire, renferme en elle un caractère d'importance majeure. Nous sommes enfin ici sur une différence fonda- mentale, et qui ne permet pas de laisser le nouvel animal parmi les hyènes; mais n'est-il pas remarquable de trouver encore, jusque dans les points où la dissemblance est la plus grande, des rapports de ressemblance dans ies détails secondaires ? | . Que conclure de tont ceci? c’est que le nouveau mammi- fère doit être regardé comme le type d’un genre nouveau, selon l'opinion de M. Cuvier; et que ce genre, qui se rap- proche à certains égards des civettes et des renards, a des rapports très-nombreux avec les hyènes. J’acheverai de faire connoître l'animal qui fait le type du PROTÈLE. 369 nouveau genre, en disant quelques mots des couleurs de son pelage et de ses parties extérieures. L'aspect général est, comme je l'ai dit, celui des hyènes. Ses jambes de derrière sont en apparence très-courtes, ce qui vient de la flexion continuelle où il en tient les diverses parties, et non de leur brièveté réelle : car malgré Fallon- gement du carpe dont j'ai fait mention, les membres posté- rieurs sont aussi longs que les antérieurs. Les oreilles sont allongées et couvertes d’un poil très-court et peu abondant : elles rappellent celles de la hyène d'Orient. Les narines font une saillie prononcée au-delà du museau qui est noir et peu fourni de poils : on y remarque de longues moustaches. Les poils de la crinière, et ceux de toute la queue sont de longs poils rudes au toucher et annelés de noir et-de blanchàâtre; ce qui fait que la crinière et la queue sont aussi dans leur ensemble annelées des mêmes couleurs. La crinière s'étend de la nuque à Porigine de la queue : les poils qui la composent, sont plus rares et plus courts vers le haut du col et vers la queue. Le reste du corps est pres- que en entier couvert d’un poil laineux, entremèêlé de quelques poils plus longs et plus rudes. Le fond du pelage est blanc- roussâtre; mais il est varié sur les côtés et la poitrine, de lignes noires transversales, inégalement prononcées et espa- cées. Les tarses sont noirs; le reste de la jambe, de même couleur que le corps, est varié aussi de bandes noires trans- versales dont les supérieures se continuent avec celles du tronc. ; . A paroït qu'il ÿ avoit un sillon sous l’anus, comme l'a remarqué M. Cuvier. Méin. du Muséum. ?. 11. 47 370 - ProTÉLE. Jci se termine tout ce que pouvoit apprendre l'inspection du nouvel animal. M. Jules Verreaux, neveu de M. Delalande, et qui l’a accompagné dans son mémorable voyage au Cap, a bien voulu compléter mon travail en me communiquant ce qu'il a pu savoir des habitudes du nouvel änimal. Les Protéles sont nocturnes : ils ont une grande facilité pour fouiller la terre, et se creusent des terriers à la manière des renards. Ils ont toujours soin de se ménager plusieurs issues. Lorsqu'ils sont excités, leur crinière se dresse, et leurs poils sont hérissés depuis la nuque jusque sur la queue. Ces animaux paroissent assez prompts à la course (x). Les trois individus que M. Delalande a tués, habitoient ensemble : ils sont sortis de leur terrier par diverses issues, pour éviter un chien qui s’y étoit introduit. Ils fuyoïent avec une grande vitesse, les crinières hérissées, le corps très- oblique sur le sol, les oreilles et Ia queue baissées. L'un. d'eux se voyant en danger, se mit à fouiller le sol, comme pour se creuser un nouveau terrier Ch (1) Je ne puis m'empêcher de remarquer que les habitudes du Protele ressem- blent sous plusieurs rapports à celles des hyènes ; ainsi les hyènes sont nocturnes comme le Protele : comme lui, elles ont pour fouiller la terre une facilité dont elles font usage, non pas, il est vrai, pour se creuser des terriers , mais seulement pour exhumer les cadavres dont elles veulent se repaître. Cette ressemblance’ entre les habitudes des deux animaux est à la fois et la suite nécessaire et la preuve de: celle qui existe entre leurs organes. (2) Voyez la planche qui accompagne ce Mémoire. La découverte du Protèle étoit, aux yeux de M. Delalande, d’un grand intérêt : aussi à peine de retour du Cap, s'est-il empressé de le faire peindre sous ses yeux par l’habile peintre, M. Devwailly. Une pelleterie préparée ne pouvoit donner qu'une idée insuffisante et peu exacte du nouvel animal : cependant M. Delalande, doué d’un grand talent d'observation , et suppléant à ce qui manquoit par les nombreux souvenirs deson PROTÈLE. 371 C’est au fond de la Cafrerie que M. Delalande a tué les animaux qui fontle sujet de cetravail. J'ai consulté les relations des principaux voyages faits dans ces contrées encore presque inconnues, et dans toute l'Afrique méridionale. Je n’aitrouvé le Protèle indiqué dans aucun : ce qu’expliqueroïent au besoin très-facilement le petit nombre de voyageurs qui ont encore pénétré dans ces contrées, et l'habitude qu'ont ces animaux de ne sortir que la nuit. Mais il est une cir- constance qui l'explique encore mieux : c’est leur très-grande rareté. Les Protèles sont en effet si rares qu'ils étoient in-_ connus même aux naturels du pays. C’est une raison de plus pour nous d’attacher un grand prix à la découverte de M. Delalande, puisque sans lui, le Protèle nous seroit sans doute inconnu pour long-temps encore. Je proposerai d'appeler le nouvel animal du nom du voya- geur auquel nous en devons la connoissance, Proteles La- Zandii ( Protèle Delalande ). Qu'il me soit ainsi permis de rattacher son nom à sa découverte, et de ramener l'attention et le souvenir reconnoïssant des naturalistes, sur le plus in- faugable et le plus intrépide de nos voyageurs : foible hom- mage, bien dû sans doute à l’un des hommes qui ont rendu le plus de services à la zoologie; qui a vécu pour elle; et qui même a péri à la fleur de l’âge, au retour du plus glorieux et du plus beau de ses voyages, victime de son ar- deur, de son zèle et de son dévouement pour les sciences. voyage, a: fait ce que lui seul pouvoit faire, a obtenu une bonne figure, Il a fait représenter l'animal tel qu’il l’a vu, c’est-à-dire, sortant de son terrier. C’est ce précieux dessin que j’ai fait graver, et qui accompagne mon mémoire. L’original fait partie de la riche collection des vélins du Muséum. 47° GÉOLOGIE.. Observations sur les Ossemens humains découverts dans les crevasses secondaires , et en particulier sur ceux que lon observe dans la caverne de Durfort, dans le département du Gard. PAR M. le Chevalier Marcez DE SERRES. —— Æd hoc usque tempus, Anthropolithi veri nondum inventi sunt. (SoëmmerNc de Corporis humani fabrica, tom. 1, p. go.) La question de savoir s’il existe ou non des traces de l'espèce humaine à l’état fossile, a occupé de tout temps les natura- listes. Les anciens observateurs ont cru pouvoir la résoudre d’une manière aflirmative, en prenant pour des ossemens humains, différens débris d'animaux étrangers à notre es- pèce ; et parmi les modernes, ceux qui ont admis l’existence de l’homme fossile or s'être mépris sur ce que l’on -doit entendre par le mot fossile. C’est donc pour ramener cette question à son véritable point de vue que nous avons cru utile de soumettre les réflexions suivantes au jugement des géologues. k Nous avons déjà dit de les anciens avoient pris POpS des ossemens humains différens débris d'animaux qui n’avoient OSSEMENS HUMAINS. 373 aucun rapport à notre espèce. En effet, M. Cuvier a démontré que les groupes d’ossemens rapportés par Spallanzani, de l’île de Cérigo, appartenoient à des baleines, et que l'Æomo dilupi testis de Scheuchzer, n’étoit qu’un protée de taille gigantesque et d'espèce inconnue. Il a également fait voir que les os et ouvrages humains découverts à Canstadt, y avoient été recueillis, sans que l’on tint compte des circons- tances géologiques de leurs dépôts; et que dès lors on ne pouvoit rien en induire. D’après ces faits, cet habile et pro- fond observateur en a conclu que les véritables os d'hommes, découverts dans différens points du globe, étoient les restes des cadavres tombés dans des fentes ou enterrés dans des anciennes galeries, et recouverts d'incrustations, et qu'il en étoit de même des objets de fabrication humaine. Ainsi, d’après lui, les restes de l'espèce humaine n’existeroient point dans les pays où se découvrent les os fossiles; point de fait auquel on auroit pu également arriver, en observant que la vie avoit marché sur cette terre du simple au composé; et que les fossiles Sarrêtant aux quadrumanes, il étoit à pré- sumer que l’espèce humaine n’avoit point péri avec les ani- maux que nous découvrons à l'état fossile dans les continens qui sont hors du sein des eaux. Tel étoit à peu près l’état de la question, lorsqu'on dé- couvrit à la Guadeloupe des squelettes humains qui ne pou- voient laisser le moindre doute sur l'espèce à laquelle ils avoient appartenu. Les seules circonstances géologiques pouvoient donc permettre de décider si ces squelettes dé- couverts au milieu d’une masse fort dure et assez compacte, étoient fossiles ou non? 374 GÉoLOoGIE. Ces os humains, enveloppés par un calcaire très-hétéro- gène, conservent leur gélatine et leur phosphate de chaux. La pierre à la surface de laquelle ils sont incrustés est com- posée de petits grains calcaires blancs et rouges, unis par un ciment calcaire très-dur. On-a cru reconnoitre dans les grains rouges des fragmens de millepora minicacea de Pallas. On voit aussi dans cette roche quelques fragmens de coquilles et de madrépores. D’après ces faits, ces ossemens ne seroient point enveloppés par une couche ancienne régulière, mais bien par une incrustation locale et moderne : ce qu’on sait de leur position achève de donner à cette opinion une en- tière vraisemblänce; car quoique ces squelettes soient en assez grand nombre, ils ne sont qu'à demi enclavés dans la substance calcaire madréporique qui les enveloppe et à une hauteur si peu considérable au-dessus du rivage , que les grandes marées les recouvrent d’une manière régulière. D'ailleurs la présence des nombreux volcans que l’on voit à la Guadeloupe, et l'influence qu'ils exercent sur la nature des terrains qui les environnent, pourroit bien avoir été la cause de la roche calcaire très-hétérogène qui enveloppe ces squelettes, dont certains os paroissent avoir été altérés par la même cause. ñ Cette découverte ne prouve donc pas qu'il existe des osse-- ‘mens humains dans des couches régulières d’anciennes for- - mations qui n’ont pas été remuées par les mains de l’homme; bien entendu que nous ne regardons pas comme couches régulières, les stalactites ou les tufs qui se forment journelle- ment par les dépôts de certaines eaux, et qui enveloppent quelquefois des os humains, comme cela est arrivé à ceux OSsEMENS HUMAINS. 375 de la grotte de PDurfort dont nous parlerons plus tard. Après des faits aussi positifs, parlerons-nous de ces tradi- tions conservées encore parmi les habitans de la Guadeloupe qui nous apprennent que ces squelettes sont les corps des Caraïbes jetés à cet endroit après un combat dont le souve- nir s’étoit conservé à ce qu'il paroît parmi cette peuplade lorsqu'elle existoit encore. Ces traditions peuvent être vraies; mais comme il n’est pas impossible que ce soit là une expli- cation imaginée après coup par des peuples amis du mer- veilleux, nous nous en tiendrons aux données fournies par le gisement de ces squelettes humains, pour penser qu'ils ne sont nullement fossiles, c’est-à-dire, antérieurs aux causes actuellement agissantes sur nos continens. Depuis la découverte des squelettes humains de la Gua- deloupe, M. Schlottheim a annoncé (1) que dans les forma- tions du gypse secondaire ancien, subordonné au ealcaire secondaire ancien, de Kostriz en Saxe, soit dans les cre- vasses et les cavités qui s'étendent en tous sens dans la masse du gypse, soit dans les terres glaises qui remplissent les crevasses, l’on trouvoit par nids et dans des circonstances parfaitement semblables, une multitude d’ossemens d'animaux terrestres, parmi lesquels il a reconnu des ossemens humains. Ces derniers ne se rencontrent guère, d’après ce que lui ont rapporté les ouvriers, au-dessus d’une profondeur de dix à trente pieds. On lui a encore assuré que ces ossemens humains avoient été trouvés jusqu'à présent de la même manière que les ossemens des autres animaux, c’est-à-dire, # LS (x) Bibl. univ. Novembre 1820, page 175. cs -#76 GÉOLOGIE. qu’on rencontre des os différens en petits amas sans qu'ils forment un squelette entier au milieu de la terre glaise qui remplit les crevasses et les autres cavités. Les autres animaux terrestres que l’on découvre dans ces crevasses sont, d’après le mènre observateur: 10. Des os de ruminans parmi lesquels on reconnoît prin- cipalement des bois de cerfs incrustés de parties calcaires. 20, Des ossemens appartenant à des animaux voisins du mouton et du chevreuil, quoique non identiques aux espèces vivantes. 30. Les ossemens d'un animal très-voisin de l’écureuil, mais paroissant différer de l'espèce actuellement vivante, 40. Des ossemens d’une espèce de souris qui paroît ap- partenir au Mus terrestris, très-semblable à celle décrite par M. Cuvier, comme se trouvant dans les brèches osseuses de Corse. 59. Une quantité d’'osde petits di dripe des très-ressem- blans aux genres des so7ex, vespertilio et alpa, mais qui en diffèrent D cntellonen Quelques os semblables aux os des couches de tuf de Meissen, où l’on rencontre comme à Kostriz, des ossemens d'espèces fe grandes de grenouilles. 6°. Des ossemens d'oiseaux appartenant à des gallinacés et à des palmipèdes, qui diffèrent un peu des espèces VI vantes. Ces os sont très-peu altérés et paroissent fort anciens, quoique moins incrustés de parties calcaires que les bois de cerf. M. Schlotiheim a conclu de ces faits, que les ossemens humains découverts dans les fentes des gypses, étoient réel- lement fossiles et contemporains des autres os, avec lesquels a OSSEMENS HUMAINS. 377 ils se trouvent, et qu'ils ont été amenés et déposés par les eaux qui ont formé les attérissemens ou les alluvions qui recouvrent les roches secondaires de cette contrée. Il con- vient cependant qu’il est encore nécessaire d'examiner de plus près, si cette opinion est la plus vraisemblable, ou sil faut admettre que diverses causes aient produit un mélange d’ossemens provenant de diverses époques. Il paroït que le même doute n’a point été partagé par M. d'Hombres-Firmas, au sujet des ossemens humains que l’on découvre dans une petite caverne des environs de Dur- fort, dans le département du Gard, puisqu'il intitule ses observations: Notice sur des ossemens humains fossiles(r). Ayant visité cette caverne en 1818, et y ayant recueilli un assez grand nombre d’ossemens hnmains, j’étois loin d’ima- giner que d’après les circonstances de leur gisement, on püût les considérer comme fossiles. Les géologues tels que MM. Gazzola, Lichstenstein, Brochant, et le professeur Jan de Parme avoient eu la mème pensée, en voyant dans mes collections les nombreux ossemens humains que nous avons recueillis, M. le docteur Salendre de Saint-Hippolyte et moi, dans les grottes de Durfort. Cependant comme un savant recommandable à plus d’un titre, a considéré ces débris comme fossiles, débris qui, sans aucun doute, ont appartenu à l’espèce humaine, nous avons cru utile dans l'intérêt de la science, de relever une opinion qui pourroit induire les géologues en erreur, et ne pas devoir attendre l’époque où nous pourrons publier nos voyages géologiques dans les Cevennes. (Gr) Bibl. univ. Mai 1821, pag. 33. Méim. du Muséum. 1. 11. 48 378 GÉOLOGIE. Pour mieux nous faire saisir, nous ferons quelques ob- servations sur les débris des corps organisés que l’on peut _ considérer comme fossiles. On a assez généralement donné le nom de fossiles aux dépouilles des corps vivans altérées par un long séjour dans la terre ou sous les eaux, mais dont la forme et l’organisa- tion étoient encore reconnoissables. Cette définition du mot fossile, ainsi conçu, ne paroït pas tout-à-fait exacte, puis- qu'elle suppose une altération qui peut ne pas avoir eu lieu, et le corps n’en être pas moins d’une date antérieure à l’exis- tence des causes actuelles, et devant par cela mème être com- pris avec les débris des corps vivans les plus décidément fossiles. Seulement laltération plus ou moins grande de la substance animale, et surtout sa disparition totale, sert d’in- dice à l’âge relatif des divers ossemens enfouis dans la terre; il paroït même que lorsque cette matière animale manque totalement, les os où elle ne se trouve plus, ont été déposés avant l'existence des causes actuelles. Mais, lorsque les corps organisés conservent encore leurs principaux tissus organi- ques, ou que leurs os n’ont point perdu leur matière ani- male, les circonstances de leur gisement sont essentielles à connoitre, pour décider avec certitude si ces corps organisés sont fossiles ou non, ou, en d’autres termes, s'ils appar- tiennent ou non aux temps actuels. La conservation ou la non altération du tissu organique ne nous apprenant rien, dans certaines circonstances, sur la date à laquelle des corps orga- nisés non altérés ont pu être détruits, et cependant la date est ici absolument nécessaire pour décider s’ils sont fossiles ou non. e OSSEMENS HUMAINS. 379 Pour rendre ceci plus clair, citons quelques exemples. Les observateurs qui ont défini le mot fossile dans le sens que nous venons de rapporter, ont pourtant rangé parmi eux le Mammouth et le Rhinocéros trouvés presque entiers dans les régions polaires, et si peu altérés que leurs chairs, leurs poils étoient parfaitement conservés. D'un autre côté, ces mêmes physiciens n’ont point considéré comme fossiles les squelettes humains découverts sur les côtes de la Guade- loupe, au milieu des masses calcaires qui renferment des madrepores et des coquilles marines. Cependant, d’après la définition adoptée, les derniers de ces débris devroient plutôt être considérés comme fossiles que les premiers, puisqu'ils sont tellement altérés qu'ils ne conservent plus que leurs parties solides, et qu'ils sont enve- loppés par une matière calcaire assez compacte, qui ne peut s'être formée que successivement et après leur dépôt (1). De” même les insectes contenus dans le succin, et qui sont des dépôts antérieurs à l’ordre des choses actuelles (car le succin est aux insectes qu'il renferme ce que les glaces sont aux ani- maux qu’elles ont conservés), ne pourroient pas non plus être considérés comme des fossiles, tandis qu’on l'admettroit pour certains débris de corps organisés qui, à moitié détruits et altérés, sont recouverts par des dépôts calcaires ou autres, qui composent des tufs plus ou moins abondans. 11 faudroit donc, d’après ces faits, restreindre la définition (1) Si nous avions pu nous procurer quelques débris de ces ossemens humains de la Guadeloupe, nous aurions répété l'analyse qui en a été faite, afin de nous convaincre par nous-mêmes, s'ils renferment de la gélatine, ou toute autre matière animale. Nous n’avons pourtant aucun doute qu’il en soit ainsi. 48" 386 GÉOLOGIE. du mot fossile dans un sens, et l’étendre dans un autre. Aussi cette dénomination devroit être bornée aux corps organisés ou à leurs dépouilles, ou à leurs débris enfouis, soit dans les couches vieilles et solides de la terre, soit dans l’intérieur des eaux, soit enfin répandus sur la surface des continens par des alluvions ou par toutes autres causes, pourvu toutefois que celles qui les ont ensevelis ou transportés soient antérieures à l'existence des causes actuelles. La dénomination de fossile ne doit pas être considérée comme synonyme de pétrification ; car tous les corps qui ont existé et qui ont subi l'effet des grandes eauses qui ont bou- leversé l’écorce de notre planète ont pu, lorsque leurs débris se sont conservés de quelque manière que ce soit, passer à l’état fossile dans le sens où nous l’entendons; maïs tous n’ont pas pu devenir de véritables pétrifications. En effet l’on ne doit, avec Daubenton, considérer comme susceptibles de se pétrifier que les corps qui, étant en partie solides et en partie cartilagineux, sont devenus tout-à-fait solides par la perte de leur substance animale, et se sont empierrés, si l’on peut s'exprimer ainsi. Les squelettes des animaux vertébrés et le têt solide de certains mollusques, crustacés, radiaires et z00- phytes, sont aussi les seules parties des animaux qui peuvent se pétrilier ou permettre cette substitution d’une molécule inorganique à une molécule organique. Les autres parties des animaux n’en sont pas plus susceptibles que les tissus orga- niques des végétaux, puisque les uns et les autres, n'ayant rien de solide dans leur charpente, peuvent bien servir de linéament à la substance solide qui tend à leur succéder, mais ne peuvent se pétrifier eux-mêmes, ou passer, en OSSEMENS HUMAINS. 381 conservant une partie de leur tissu, à un état plus solide. Donc, l’altération ne décide pas toujours si un corps est ou non à l’état fossile; elle nous apprend seulement quel étoit l’état ou le tissu de ce corps, et, lorsqu'il n’en reste plus que la forme, on peut présumer, sans rien généraliser cependant, que le corps organisé ne renfermoit point de matière solide. Il n’en est pas de même des pseudomorphes ou des substitu- tions d’une matière organique en une matière inorganique , substitutions qui se sont opérées dans un tel ordre qu’elles représentent aussi fidèlement que possible le corps primitif dont elles retracent la forme. Aïnsi les végétaux qui ne peu- vent point se pétrifier parce qu'ils n’ont aucune de leurs par- tes qui soit solide, nous offrent ou leur propre tissu, ou des pseudomorphoses, ou une imitation fidèle du bois, puisque à inesure que le tissu ligneux se décomposoit, les molécules solides venoient le remplacer. Comme cette substance s’est le plus souvent opéréeravec la plus grande régularité, l’on peut supposer qu'elle s’est faite de molécule à molécule; mais c’est un point de fait étranger à la question qui nous occupe. D'autres débris’de corps organisés nous présentent de pareilles pseudomorphoses qui paroïssent toutes avoir été produites par les mêmes causes, et tenir à une régularité d’action qui, quoique diflicile à concevoir, n'en paroït pas moins évidente. Si l’altération d’un corps organisé ne peut toujours servir d'indice à son degré d'ancienneté, il paroit qu’il n’en est pas de même de sa pétrification ou de sa pseudomorphose; en effet, il semble que dans les temps actuels les corps organisés abandonnés dans des circonstances propres à opérer la 382 - GÉéoLoate. à . substitution de leurs principes constituans à celle des matières qui les incrustent, cette substitution n’a pas liea, quoique la substance cellulaire se décompose, et qu’il y ait par suite un vide dans le corps. Comment se fait-il que des ossemens en- sevelis depuis des siècles, imprégnés de toutes parts de sucs lapidifiques , n’aient point reçu cette matière inorganique entre leurs vacuoles, et ne se soient pas pétrifiés à la manière des anciens fossiles? Comment se fait-il encore que les vé- gétaux que la terre recouvre depuis les causes actuellement agissantes se pourissent ou se conservent à l’aide des épaisses incrustations qui viennent à les envelopper, mais ne forment plus de véritables pseudomorphoses comme celles que l’on voit si fréquemment dans ce que l’on:nomme vulgairement bois-fossile? Le temps leur a-t-il manqué? car l’on ne peut pas dire que ce soit la matière inorganique nécessaire pour une pareille substitution; c’est ce qui reste à décider. Il en seroit donc des pétrifications eu des pseudomor- phoses comme de tant d’autres phénomènes de la nature, c'est-à-dire, qu’ellesne se reproduiroïent plus dans l'ordre des choses actuelles. Les débris des animaux ou des végétaux qui meurent maintenant, peuvent être plus ou moins incrustés par telle ou telle substance, mais on ne les voit jamais passer à l’état de véritable pétrification ou de pseudomorphoses plus ou moins complètes; ces divers modes de substitution ne sem- blent donc plus se produire aujourd’hui. Les véritables fossiles, ou ceux qui ont été ensevelis avec les couches vieilles, solides ou meubles de la terre, et qui ont été solidifiés avec leurs masses, ou enterrés avec leurs débris, se sont conservés parce qu'ils ont été mis à l’abri des OSSEMENS HUMAINS. 383 agens extérieurs; sans cela il en auroit été d’eux comme des débris des animaux et des végétaux qui périssent sur ce globe, et qui se décomposent promptement, sans laisser, pour les siècles à venir, aucun vestige de leur existence. Ces principes posés, voyons si l'on peut considérer les dé- bris organisés, qui se trouvent dans la caverne de Durfort, comme étant des ossemens fossiles, et enfin si ces ossemens ont réellement appartenu à des individus de notre espèce. Nous examinerons d'abord cette dernière question, sa solution devant nous faciliter les moyens de résoudre la pre- mière. Tous les débris des corps organisés que nous avons pu reconnoitre dans la grotte de Durfort, nous ont paru être des ossemens humains qui avoient appartenu à des individus d’âges et peut-être de sexes différens. Malgré l’examen le plus scrupuleux, nous n’avons pu reconnoître, avec ces os- semens, aucun autre débris de corps organisé, si ce n’est un seul individu de l'Æelix striata qui avoit été saisi par les in- crustations calcaires qui enveloppent la plupart de ces os. Cette circonstance, jointe à celle de l'identité de tous les os- semens que l’on doit rapporter à notre espèce, est loin d’être indifférente, ainsi que nous le ferons observer. Les principaux ossemens sont : 1°. un grand nombre de crânes plus ou moins entiers ou plus ou moins incrustés de tuf calcaire ; 20. un os maxillaire supérieur, avec l’os de la pommette droite, ayant une partie des arcades orbitaires; un assez grand nombre de dents, soit incisives, soit canines, soit molaires, de la plus parfaite conservation. Ces dents ont leur émail aussi brillant et aussi net que si elles avoient été enterrées d'hier; seulement les racines qui se sont trouvées à , 384 GÉoLOGIE. l'extérieur (les portions osseuses qui les recouvrent ayant tout-à-fait été décomposées) sont recouvertes par une pous- sière jaunâtre très-fine, qui fait fortement effervescence avec les acides minéraux, et qui n’est que du carbonate de chaux. Lorsque les dents manquent tout-à-fait, la place qu’elles oc- cupoient a été remplacée par une chaux carbonatée, ter- reuse et ferrugineuse. Ces dents étant généralement très-peu usées, on doit en conclure que l'individu auquel cette mä- choire supérieure avoit appartenu avoit au plus trente ans; et, quoiqu'on ne puisse pas mesurer avec précision son angle facial, on reconnoiît cependant qu’il s’éloignoit peu de 80o. Ce premier fragment auroit donc appartenu à un jeune homme de la race blanche ou caucasique. Quant aux os eux-mêmes, ils sont spécifiquement plus lé- gers que les os frais; ils ont perdu une partie de leur subs- tance animale, ce que l’on pourroit presque deviner par l'étendue des cavités qui existent dans leur substance cellulaire. Nous verrons plus tard que la matière animale est plus abondante dans les os longs que dans les os plats. | Quant à la substance calcaire qui enveloppe ces osse- mens humains, on en reconnoït facilement deux variétés principales ; toutes deux appartiennent au calcaire concré- tionné, calcaire qui s’y est déposé à la manière des sta- lactites. La variété la plus compacte a formé des masses assez con- sidérables autour de ces ossemens; quoique souvent compo- sée par des couches successives qui ont dû se déposer avec plus ou moins de lenteur sur les os, on ne voit jamais que les OSSEMENS HUMAINS. 385 sucs lapidifiques soient venus remplacer la substance osseuse solide, de manière à la pétrifier et à se mouler dans son inté- rieur, Nous avons, entr'autres, recueilli un pariétal entouré de toutes parts par des couches de calcaire sédimentairedur, où l'analyse ne démontre pas le moindre excès de carbonate de chaux, à l'exception du carbonate qui, après avoir tra- versé la substance compacte, est venu se déposer dans les vides de la matière cellulaire, ou entre les interstices du diploë. Ceci est d'autant plus remarquable que le dépôt de la matière calcaire s’y est opéré avec une telle régularité qu'il retrace toutes les inégalités de l'os, et que, par exemple, l’ar- tère méningée y est dessinée en relief, comme cela arrive lorsqu'un corps solide se moule dans un corps creux. Ce cal- caire fait fortement effervescence avec les acides minéraux; iks’y dissout en entier, caractère que l’on n’observe pas dans le calcaire terreux, tendre, qui incruste aussi bien l’intérieur que l'extérieur des os : ce dernier n'est point du carbonate de chaux pur. En examinant le résidu qu'il laisse dans les acides, on reconnoît que ce calcaire tendre est un mélange de sous-carbonate de chaux et d'argile, auquel mélange s'ajoute un peu de silice et du protoxide de fer qui le colore en brun roussâtre; ce calcaire est si tendre que l’ongle le raye avec facilité, tandis que le calcaire dur est à peine rayé par le cuivre. Du reste, les plus épaisses des incrustations calcaires, qui recouvrent la surface extérieure des os, ne dé- passent guères 30 à 4o millimètres. 30. Des os frontaux, avec les arcades orbitaires et une partie des os propres du nez, ayant appartenu à des sujets ’âges très-différens. Dans quelques-uns les sinus frontaux ne Mém. du Muséum. 1. 11. 49 386 GÉOLOGIE. sont point développés, et le diamètre, pris au-dessus de l’ar- cade orbitaire, n’est guère que de 90 millimètres, tandis que chez d’autres ce même diamètre est de 110 à 140 mil- limètres, et les sinus frontaux ont alors un tout autre déve- loppement. Parmi les grandes quantités d’os frontaux que nous avons observés dans la caverne de Durfort, nous avons cru en reconnoitre un qui avoit appartenu à une femme. Il étoit sensiblement plus petit dans toutes ses proportions, quoique d’un sujet adulte, plus grêle et moins dense que les autres frontaux ; les sinuosités, comme les diverses élévations ou éminences de la face externe, y étoient également moins sensibles, en sorte que cet os étoit beaucoup plus. lisse. Ces caractères, joints à ceux qui ont été indiqués par Che- selden, Albinus, Tarin et Sæœmmering, nous portent à pen- ser que cet os frontal pourroit bien avoir appartenu à une femme. 4°. Des os pariétaux plus ou moins recouverts d’incrusta- tions, et ayant appartenu, comme les frontaux et les occipi- taux, à des individus d’âges très-différens; seulement, les os qui proviennent de jeunes individus ou de vieillards y pa- roissent les plus rares. Nous n’avons pas pu en démèéler de ces derniers. En faisant cette recherche, nous avons rencontré un pariétal où la partie spongieuse, c’est-à-dire, le diploë com- pris entre les deux substances compactes de l'os, étoit ex- trêmement apparent, par une suite de l’écartement des lames osseuses. :Tels sont les principaux os plats que nous avons observés dans la grotte des morts de Durfort. Je dis les principaux, car nous n'avons pas été assez heureux que d’y trouver une tête OSSEMENS HUMAINS. 387 entière, comme des médecins du pays qui se sont occupés de cette recherche. Nous avons recueilli beaucoup d’autres frag- mens d’os plats de diverses parties du corps, tels que des dé- bris d’omoplate, des os du bassin, mais ils ne sont point assez importans pour mériter d'être décrits. Parmi les os longs, nous citerons des portions de clavicule, de calcanéum, de phalange, de radius, de tibia et de fémur : nous ÿ avons aussi recueilli une portion inférieure d’humé- Trus, qui n’a que 14 millimètres de longueur au-dessus des cavités qui se trouvent à sa partie inférieure et antérieure; comme cet os quitte peu à peu sa forme cylindrique, et s'élargit beaucoup vers son extrémité, on juge aisément qu'il a appartenu à un très-jeune sujet : il n’en est pas de même des tibia et des fémurs; tous ceux que j'y ai observés prove- noient d'individus adultes. Souvent la même incrustation réu- nit les os les plus différens, par rapport à leur position dans le squelette, tandis que d’un autre côté on en voit qui ont enveloppé et des tibia et des fémurs, les uns de sujets très- edifférens, les autres pouvant bien être du même individu. * Les os longs comme les os plats ont été incrustés par le même calcaire sédimentaire ou tuf, soit à l'extérieur, soit à l’intérieur; ainsi, tantôt leur canal central a été rempli de sucs lapidifiques, tantôt il est resté vide; jamais les sucs calcaires ne se sont substitués à la matière organique ou à la substance animale, qui est le lien commun qui unit la partie solide des os. Quelle qu’ait été l'abondance des dépôts calcaires, tout s’est borné à des incrustations ou à des infiltrations, qui ont tapissé de leurs dépôts le vide qui avoit pu s’opérer entre les lames osseuses, sans que la matière infiltrée se soit combinée 49° 388 GéoLocrE. avec la partie animale ou terreuse des os, comme cela est ar- rivé dans les vrais fossiles. C’est ce que prouvent et les analyses de ces ossemens, et, les caractères que l’on y reconnoïit en les examinant avec soin. Il est facile de s’assurer que le léger excès de carbonate de chaux, que les os humains de Durfort renferment, n’est ‘point dû à une véritable combinaison chimique, mais seule- ment à ce que des molécules calcaires plus ou moins nom- breuses, ayant rempli les vides de la substance cellulaire des os plats, ou réticulaire des os longs, y sont ensuite démon- trées par l'analyse; en sorte que, si l’on n’étoit point assuré que ces molécules y étoient simplement interposées, on pourroit les considérer comme s’ÿ trouvant par suite d’une véritable substitution ou d’une combinaison. On ne peut avoir aucun doute au sujet des os humains de Durfort, en raison de la diversité de leur couleur avec celle du carbonate de chaux qui les enveloppe et les pénètre. La couleur des os est d’un blanc assez prononcé dans toute leur substance compacte, tandis que le carbonate de chaux, qui a pénétré le diploë des os plats, ou la substance réticulaire des os longs, a la même teinte roussâtre du sédiment exté- rieur. Vues à une forte loupe, ces molécules calcaires, ainsi interposées, offrent la cassure et le mode de clivage de la chaux carbonatée, en sorte que l’on ne peut les confondre avec les os qu’elles ont imprégnés. Cette observation est essentielle à faire, pour s'assurer si le carbonate de chaux que lon découvre dans l’intérieur des os y est combiné chi- miquement avec le carbonate et le phosphate de la même base propre à la composition de ces os, ou sil n’y est au OSSEMENS HUMAINS. 389 contraire qu'interposé mécaniquement entre les vides des James osseuses. L'on se demandera peut-être, comment des eaux chargées de carbonate calcaire peuvent traverser toute la substance compacte des os, soit longs, soit plats, de manière à remplir les vides que les deux lames de cette substance laissent entre elles. Pour concevoir cette pénétration, il suflit de se rappe- ler que généralement les os sont poreux, et qu’en outre ils sont criblés d’une infinité de petits trous et de petites ouver- tures dans lesquelles circulent les divers vaisseaux nécessaires à y entretenir la souplesse et la vie. D’après cette organisa- tion, on juge aisément comment des eaux chargées de mo- lécules calcaires peuvent pénétrer par tous ces vides, et y déposer successivement les mêmes molécules, lorsque, ayant perdu leur excès d’acide carbonique, elles n’ont plus la même force dissolvante. Ce qui arrive aux os enfouis dans la terre, ou placés dans des eaux qui tiennent en dissolution des matières terreuses quelconques, est arrivé également aux os du plus grand nom- bre des momies conservées à l’aide du bitume. En brisant les os de ces momies, on observe que le même bitume qui re- couvre leur substance compacte est venu se loger dans leurs cavités médullaires, où il a conservé tous ses caractères, puis- qu'il s’y trouve sans aucun mélange avec les parties osseuses au milieu desquelles il est logé. Dans les momies des Guan- ches on n'observe rien de semblable, parce que ces momies n’ont point été préparées avec du bitume comme celles des Egyptiens, et que l’on s’est borné à les dessécher ; en sorte que souvent les os conservent encore leur périoste et les 390 GÉOLOGIE. cartilages qui les unissent entre eux. Cette remarque n’est pas, du reste, nouvelle; le célèbre Sæmmering l’avoit faite il y à long-temps dans son important ouvrage de Corporis hu- man fabrica, en observant que les cavités médullaires des os des momies étoient ordinairement remplies de bitume ou de la résine du cèdre (1). Mais pour établir que dans les temps actuels les parties solides des corps organisés ne passent plus à l’état de véri- tables pétrifications, nous devons faire quelques remarques sur la composition des os et des diverses parties solides des animaux. F _ On sait que, généralement, les principales parties solides -des animaux, comme les os, les dents, les coquilles, sont composées de sels terreux, de graisse, de gélatine, de carti- lage ou de matières animales molles, et que si, dans les os et les dents, la chaux est principalement unie à l'acide phos- phorique, c’est avec l’acide carbonique qu’elle est unie dans les coquilles. Mais dans toutes, si une partie de la substance animale dont elles sont formées y semble étrangère, n'étant nullement combinée avec les sels terreux qui les constituent, il en est une grande partie qui paroît au contraire être le lien commun qui retient unis les sels terreux, et les empêche pour ainsi dire de se séparer, en même temps qu’elle leur donne la souplessé et la solidité convenables. D’après cette manière de voir, il existeroit dans les parties solides des corps organisés deux espèces de substance animale, l’une qui ——_— (x) Ossium mumiarum cava medullaria asphaltum vel resinam cedri continent. Tome, pag. 90. … OSSEMENS HUMAINS. 391 en rempliroit les cavités et les interstices sans jamais entrer en véritable combinaison chimique avec les sels terreux ,-et se détruisant aussi avec facilité; FPautre au contraire qui, combinée chimiquement avec les sels terreux, y tiendroit tellement qu’elle ne seroit jamais entièrement détruite dans les os dont les dépôts ne seroient point antérieurs aux causes actuelles. Nous sommes loin d'avancer qu'il en soit de toutes les dé- pouilles solides des corps organisés, comme nous croyons l'avoir découvert à l’égard des os; on peut tout au plus le présumer; aussi attendons-nous que les recherches que nous avons entrepris sur cet objet soient terminées pour émettre une opinion à cet égard. Il nous paroît seulement que, par rapport aux os, il n’y a que ceux dont les dépôts sont anté- rieurs à l'existence des causes actuelles qui soient entière- ment privés de toute leur substance animale, soit de celle qui y est chimiquement combinée, soit de celle qui s’y trouve simplement interposée entre leurs lames. On conçoit que si l’on démontre que les seuls ossemens fossiles sont privés de toute leur substance animale, cette ab- sence si facile à constater deviendra un caractère excellent pour les faire distinguer des os non fossiles, lorsqu'on ne pourra se procurer des renseignemens exacts sur le gisement des uns et des autres. Il faut cependant faire cette observation, que s’il paroît exact de dire qu'il n’y a que les os fossiles qui ont entièrement perdu leur substance animale, il ne le seroit pas également de prétendre que tous les ossemens fossiles l'ont perdu. En effet les Mammouths ei les Rhinocéros dé- couverts près du pôle y ont certainement été portés par des 392 GÉOLOGIE. causes autres que celles que nous voyons agir sur nos conti- nens; et par conséquent ils sont bien fossiles dans le sens que nous attachons à ce mot: cependant leurs os avoient con- servé leurs parties animales, parce que la gelée qui les avoit saisis au moment même où ils y avoient été transportés avoit préservé de la putréfaction jusqu'aux parties les plus délicates de leurs corps. Aïnsi les corps organisés, de quelque nature qu'ils soient, ensevelis avec des circonstances semblables, peuvent fort bien avoir conservé leurs parties animales sans cesser pour cela d’être fossiles, et sans pouvoir être dis- tingués par le caractère que nous venons de signaler. Il n'en est probablement pas des débris des végétaux comme il en est des débris des animaux. En effet les premiers ne peuvent se pétrifier puisqu'ils ne renferment aucune par- tie solide, en sorte que, dans les fossiles végétaux pierreux, il n'y a plus rien de végétal; ce sont des molécules inorga- ‘niques qui ont remplacé les molécules organiques. Quant aux fossiles végétaux non pierreux, ou ceux dans lesquels il existe encore quelques traces du tissu organique, ils présen- tent des modifications extrêmement nombreuses et différens genres d’altération; mais quelque diversité qu’offrent ces altérations, il paroït qu’on peut les ramener à un assez petit nombre de types principaux. Comme cet objet est d’un grand intérêt pour la géologie, nous y reviendrons dans un mé- moire subséquent. Voyons maintenant les résultats auxquels nous ont con- duits les analyses des os humains de Durfort, analyses que nous avons faites avec M. Balard, préparateur de la Faculté des Sciences de Montpellier, dont l'exactitude nous est aussi connue que la sagacité, OSSEMENS HUMAINS. 393 Nous nous sommes d’abord occupés de l’analyse des os plats de Durfort. Nos premières expériences ont porté sur un fragment de pariétal humain, dans l’intérieur duquel on distinguoit même, à l’œil nu, de petites molécules calcaires d’un jaune roussâtre, qui occupoient les vides qui se trouvoient entre les deux lames compactes. Ce pariétal fut dépouillé avec soin de tout le carbonate de chaux qui encroûtoit ses deux surfaces externes ; mais il fut im- possible d'enlever celui qui étoit logé dans les vides du diploë. Cent parties de cet os furent exposées à l’action d’une température suffisante pour en chasser l’eau et décomposer la matière animale, mais pas assez élevée cependant pour dé- composer le carbonate de chaux. L’os prit une teinte noire foncée, qui disparut bientôt par l’action combinée du calo- rique ; il avoit perdu, sur les cent parties, onze parties, et d’après cette perte le pariétal humain de la grotte de Dur- fort contiendroit encore 11 pour 100 d’eau et de matière animale ; fait qui, avec les circonstances de son gisement, est déjà un indice pour douter que cet os soit réellement fossile. Ce pariétal, ainsi calciné, s’est dissout entièrement dans l'acide hydrochlorique foible ; une effervescence accompa- gnoit cette dissolution; l’'ammoniaque, versé dans la dissolu- tion, en a précipité du phosphate de chaux mélé d’un peu d’oxide de fer. Le précipité, lavé avec soin dans de l’eau distillée, y a été traité par le sous-carbonate de soude, qui a occasionné un dépôt de carbonate de chaux. On y a ensuite versé de l’hydrochlorate de barite, en sorte qu'il Mérn. du Muséum. t. 11. 5o 394. © GÉOLOGIE. s’est formé une certaine quantité de sulfate de barite, lequel représentoit trois grains de sulfate de chaux. D’après ces essais, les os plats de Durfort, qui ont appar- tenu à notre espèce, seroient composés après leur calcination, c’est-à-dire, après avoir été débarrassés de toutes les parties animales qu’ils pouvoient contenir; sur cent parties : 1°. De phosphate de chaux....................... see 179 2°. De carbonate de chaux.............s.e..sssooseosee 17 3°, De sulfate de chaux... 4 con smce cet sacs cessent 3 A 5 BU DO BORNE 08 000 CO See 1 Total........ AS AOÛ À SOLDES (0 ou sur cent parties non séparées de leur matière animale : 1°. D’eau et de matière animale... sssosocosessosesse 11 2°, De phosphate de chaux. .......,...essossssee ss TOI 3°. De carbonate de chaux. ....... esse. escos 10,02 4°. De sulfate de chaux... .....ssesseceeseoeosssosee 2:07 100,00 On juge aisément, d’après ce que nous avons observé, pourquoi ces ossemens présentent à l’analyse un excès de carbonate de chaux, excès qui provient de celui qui se trouve interposé entre les deux substances compactes de ces osse- mens, et dans les vides de leur substance cellulaire ou réti- culaire. L'analyse ne peut pas permettre de déterminer si ce carbonate de chaux est ici combiné chimiquement avec les autres sels terreux, ou s’il n’y est interposé que mécanique- ment ; mais, à défaut de l'analyse, il est facile de s’en assurer en enlevant le carbonate de chaux interposé dans les va- cuoles, et voyant qu’iln’est combiné avec aucun autre des sels terreux qui entrent dans la composition des os. Ce carbonate OSSEMENS HUMAINS. 305 de chaux que l’on détache des vacuoles de ces ossemens hu- mains, conserve du reste tous ses caractères. Cet exemple prouve combien il est nécessaire de distinguer, dans les ana- lyses des minéraux, les substances qui y sont simplement in- terposées mécaniquement, ou bien engagées entre leurs lames, de celles qui s’y trouvent réellement combinées, soit en proportion définie, soit en proportion indéfinie, afin de reconnoitre la substance qui imprime ses caractères aux es- pèces, dans la composition desquelles elle entre, de celles qui ne s’y trouvent que d’une manière accidentelle. Cette marche, que l’on suit maintenant dans les analyses des miné- raux, ne doit pas non plus être négligée dans les analyses des ossemens comme des autres débris fossiles ou non fossiles des corps organisés ; et, d'après ce que nous venons d'observer, il est facile d’en saisir les motifs. Nous avons ensuite analysé par le même procédé la sub- stance compacte la plus externe d’un #bia humain, de la même caverne de Durfort : après en avoir enlevé la sub- stance compacte, cet os ne présentoit pas dans sa cassure le même aspect que le pariétal de l'analyse précédente. On y voyoit beaucoup moins de vacuoles ; mais celles qui yexistoient étoient remplies du même carbonate calcaire ferrugineux, qui recouvroit la surface extérieure de tous ces os. Ces mo- lécules calcaires, quoique sensiblement moins abondantes que dans los plat de la première analyse, y étoient toujours visiblement interposées dans les vides de l’os, et non ailleurs. Ce tibia étoit moins facile à pulvériser que le pariétal, en raison de ce qu'il contenoit une plus grande quantité de matière animale, et de ce qu’il étoit également moins altéré; 306 GÉOLOGIE. —OSSEMENS HUMAINS. " aussi s’aplatissoit-il un peu sous le pilon avant de se réduire en poudre. Cent parties de cet os calciné ont perdu jusqu'à vingt-six parties, par le dégagement de l’eau que l’os contenoit, et la décomposition de la matière animale, perte qui est plus du double que celle que l’action du feu avoit fait perdre au pariétal. Cent parties de cet os calciné ont présenté par l’analyse : 1°. Phosphate de chaux mêlé de traces d’oxide de fer..... 85 2°. Carbonate de chaux..........., SLA G30 Dh tele ee co LI 3°. Sulfate de chaux. ....,........4. HÉRTEe, ANNE A 3 0. PRET ECER MR à cles teis à ci ele se als Ne SG opus I 100 ou sur cent parties non calcinées et non privées de leur eau et de leur matière animale : 1°. Eau et matièreanimale........,........,....... 20 2°. Phosphate de chaux mêlé d’oxide de fer....,........ 62,90 3°. Carbonate de chaux. ....... Joe HAE DO Me 8,14 4°. Sulfate de chaux... . ee 0 D'oteo vOE STE A 222 99:26 PENLE sf se tie oi c\oje ee o deistele 74 Total..,...4.1 128.8)/10000 (Nous donnerons la suite de ce Mémoire.) GÉOLOGIE. Suite des Observations sur les Ossemens humains découverts dans les crevasses secondaires , et en particulier sur ceux que l’on observe dans la caverne de Durfort, département du Gard. PAR M. le Chevalier MarcEez DE SERRES. Ad hoc usque tempus, Anthropolithi veri nondum inventé sunt. (SOEmMERNG de Corporis humani fabrica, tom. I, p. go.) ie nous assurer si les ossemens humains n’avoient pas perdu une partie de leur substance animale par leur séjour prolongé dans l’intérieur de la terre, nous nous en sommes procurés de diverses époques. Ainsi nous avons pu comparer des ossemens qui avoient été enterrés depuis environ trente ans, et d’autres, qui l’avoient été lors du siége de Montpellier en 1621, c’est-à-dire, il y a déjà plus de deux siècles, Les os enterrés depuis trente ans, traités toujours par les mêmes procédés, ont paru contenir jusqu’à trente-neuf pour cent d’eau et de matière animale; tandis que, sur cent parties Mém. du Muséum. 1. 11. Bt 398 GéoLocre. de ces os calcinés et dégagés de l’eau et de la matière animale, nous n’avons pu reconnoitre que 6,5 de carbonate de chaux. Les ossemens qui datent du siége de Montpellier ne ren- férmoient plus que vingt-huit pour cent d’eau et de matière animale, mais la quantité de carbonate de chaux y étoit plus considérable, puisque nous l’y avons observée de neuf par- ties sur cent. Nous avons enfin analysé des os trouvés dans destombeaux romains, où ils étoient depuis environ dix-huit siècles; mais ces os ayant été calcinés lorsqu'ils avoient été enterrés, ne nous ont pas présenté la moindre trace de substance animale, en sorte que nous n'avons pas pu nous en servir comme terme de comparaison. Ces analyses terminées, nous avons soumis aux mêmes épreuves des ossemens des environs de Montpellier, que d’après les circonstances de leur gisement nous considérons comme fossiles. Nous avons examiné ces os non pour reconnoïître tous les principes qui les composoient, mais seulement pour nous assurer s'ils contenoient encore quel- que portion de matière animale, et dans quels rapports le carbonate de chaux s’y trouvoit. Le premier ossement que nous avons examiné, étoit un fragment de côte de cétacé découvert entre les assises du calcaire grossier des carrières de Boutonnet, près Mont- pellier. Ce fragment ne contenoit plus de trace de matière animale; aussi ne changea-t-il pas de couleur’par la-calci- ation. Il étoit d’ailleurs composé de phosphate et de car- bonate de chaux comme les autres os. OSSEMENS HUMAINS. 399 En effet les os de cétacés de nos calcaires grossiers, mon- trent par l'analyse, sur cent de leurs parties: LOS AUS ant ste 01 dorer ae stef ele) ete Cite tefe ces eisseaseéonreese | Oil 2°. Phosphate de chaux....................,... HO SEE 78,33 ‘2°. Carbonate de chaux. ....... brule ent DEA 9,44 Total. DITS DES PMR TE 96,88 Ü La perte que cette analyse indique provient de ce que le phosphate de chaux, que l’ammoniaque avoit précipité de sa dissolution muriatique, a été imparfaitement lavé, et que l’hydrochlorate d’ammoniaque qu'il retenoit, a emporté sous la forme d’hydrochlorate d’ammoniaque ferrugineux, l’oxide de fer que l’ammoniaque avoit aussi précipité de la dissolu- tion hydrochlorique, laquelle se trouvoit par conséquent mêlée avec le sous-phosphate de chaux. Le second ossement fossile que nous avons analysé, étoit un fragment d’os long, d’un mammifère herbivore, découvert à environ six toises au-dessous du sol, dans un terrain d’al- luvion marin ancien, des environs de Lunel. Cet os ne nous a présenté aucure trace de matière animale; quoique chauffé fortement, il n’a point pris cette teinte noire qui se mani- feste dansles os qui en contiennent encore quelques portions; seulement il a perdu par la calcination neuf parties sur cent, perte due à la grande quantité d’eau qu’il renfermoit, et que la légèreté de los pouvoit déjà y faire supposer. Cent parties de l'os desséché, ont paru contenir sept parties de carbonate de chaux. Comme l’un de nous, M. de Serres, avoit démontré la GK 400 Géorocre. présence du fluate de chaux dans des os fossiles (1} d’une espèce particulière de rhinocéros qu'il a découverte dans les environs de Montpellier, nous avons cherché à recon- noître, s’il en existeroit de même dans nos ossemens fossiles. Ces derniers chauffés dans un vase d’argent, dans lequel on avoit versé de l’acide sulfurique, et que l’on avoit eu le soin de recouvrir d’une lame de verre, n’ont pas, paru en renfermer en quantité appréciable, puisque le verre n’a point été dépoli par une action assez prolongée. Enfin, voulant nous assurer si d’autres os fossile ne contiendroient pas encore quelques portions de matière animale, nous avons soumis à l’action d’une vive chaleur dans un creuset d’argent, une portion de la mâchoire infé- rieure du palæothertum magnum , des formations gypseuses de Montmartre près de Paris. Ce fragment de mâchoire n’a point noirci par l’effet de la chaleur, en sorte qu’il semble ne plus offrir de traces de substance animale, seulement il avoit perdu par cette calcination 7,5 parties sur cent, perte due à l’eau que ces os fossiles contiennent encore. Cent parties de l’os ainsi calciné ont offert par l’analyse: 1°. Phosphate de chaux........ annees elec aeleemen ces COIDALL 2°. Carbonate de chaux. .........,..,....,......,,....... 9,10 3%.Sulfäte-deichauxs lemme Ce DOI AO NS E0 DA LUI) Hotal: een SRE US. 2109, 80 DETÉC eee erefelenee en lee 20 100,00 Le petit excès de sulfate de chaux que cet os de Palæo- (1) Journal de physique et Bibliothèque universelle. OSSEMENS HUMAINS. 4ot. fhertum a donné par l’analyse, paroït dépendre du gypse qui lui servoit de gangue, et de quelques molécules gypseuses, interposées entre les vides de la substance réticulaire, molé- cules que l’on distingue facilement à l’aide d’une forte loupe. Du reste, l’on sait que Hatchett a également observé que le sulfate de chaux entroit dans la composition des os, et que Berzelius, tout en contestant la présence de ce sel ter- reux, que l'analyse y démontroit, a cru qu'il se formoit pendant la calcination, aux dépens de l'acide sulfurique ou du soufre à l’état de liberté, qui s’y trouve. Nous ferons encore remarquer que l’on ne doit pas re- garder la composition des os, comme constante; car la pro- portion des principes qui les constituent, varie avec l’ani- mal, l'individu, et l’âge mème de cet individu. Il seroit donc possible qu'il n’y eût point d’excès de sulfate de chaux dans les os de palæothérium, puisqu’on en a trouvé trois parties sur cent dans les os humains, et que rien n’annonce qu’il n’en existe pas des proportions plus considérables dans les os: d’autres animaux. Il semble que l’on peut déduire des faits que nous venons de rapporter quelques conséquences générales. La première: et la plus importante, seroit que les os, que par les circons- tances de leur gisement on doit considérer comme fossiles, sont aussi les seuls qui puissent être assimilés aux os brülés, c’est-à-dire, à des ossemens qui ne contenant plus de sub- stance animale, sont uniquement composés de sels terreux, principalement des sels à base de chaux combinés, soit avec l'acide phosphorique , soit avec l’acide carbonique, soit avec l'acide sulfurique , soit enfin avec l’acide fluorique. ko2 Géoro&re. Si tous les os fossiles avoient entièrement perdu la matière animale qui entre dans leur composition, rien ne seroit plus simple que de les distinguer à l’aide de ce caractère, des os enfouis depuis la dernière inondation générale et passagère qui a laissé tant de traces sur la surface actuelle du globe et qui, par cela même, ne peuvent être considérés comme fossiles. Mais ce caractère, tout certain qu’il paroiït être pour distinguer les os fossiles de ceux qui ne le sont pas, n’a pas la même importance, lorsqu'on veut lappliquer à l’universalité des os fossiles que l’on trouve dans les diverses parties de nos continens, puisque certains d’entre eux con- servent encore de la gélatine. Cependant si la putréfaction, ou le séjour très-prolongé dans l’intérieur de la terre, ne peut détruire la partie cartilagineuse ou animale des os, ainsi que la fait remarquer Hatchett, et que, d’un autre côté, certains os fossiles l’aient entièrement perdue, if faut que ces derniers aient subi l’action de quelque agent étranger et inconnu, dont les effets ne se manifestent. plus sur les os enfouis même depuis des siècles (1); aussi le chimiste que nous venons de citer a-t-il été conduit à cette conséquence en observant le résidu cartilagineux, presque aussi abon- dant dans des os déterrés dans un tombeau saxon, que l’on avoit découvert près du Hythe, dansle comté de Kent, que dans des os d'hommes morts il y avoit peu de temps. Donc, s’il est certain qu'il n'y ait que les os fossiles qui soient entièrement privés de leur matière animale, il ne l’est pas moins, que certains ossemens déposés sur nos continens (1) Philosoph. Transact. 1800. OSSEMENS HUMAINS. 403 par le dernier cataclysme général, conservent non-seulement la gélatine qui entre dans leur composition , mais encore leur graisse et leur substance cartilagineuse. Aussi ces ossemens sont-ils recouverts par leurs muscles, et ceux-ci par les té- gumens, en sorte que les animaux auxquels ils avoient ap- partenu se trouvent comme s'ils avoient été enterrés de la veille; parce qu’à l'abri absolu du contact de l'air, ils ont été constamment sous l'influence d’une température trop peu élevée, pour que la fermentation putride püt se dévelop- per (1). Telles sont les dépouilles des animaux qui ont été ensevelis au pôle sous des masses de glaces; l’on peut aussi ranger dans la même catégorie les corps organisés qui ont été saisis par le succin, et qui ayant conservé toutes leurs parties n’ont point perdu leurs principes constituans, c’est-à-dire , les principes qui caractérisent la nature organique. Quant aux dépouilles des animaux que l’on ne peut s'em- pècher de considérer comme fossiles d’après les circonstances de leur gisement, et qui sont réduites à des os conservant encore leur gélatine presque en totalité; cette conservation paroîït toujours due à la nature des terrains qui les ont enve- loppés, et surtout à la température peu élevée des lieux où ils sont enfouis. C’est ce que M. Buckland (2) a fait récem- ment remarquer au sujet d’un assemblage de dents et d’os (1) Il paroît que la fermentation putride ne se développe guère dans les tissus des corps organisés que par l'influence d’une température au-dessus du zéro de l'échelle, qu'au-dessous elle n’a plus lieu; et que la température de 10 à 25° est la plus favorable à son développement. (2) Annals of Philoss March 1822. 404 Géorocit. fossiles appartenans à des espèces détruites d’'éléphans , de rhinocéros , d'hippopotames et d’hyènes, découverts dans un caveau du comté d’York en Angleterre. Ces os, observe ce physicien, ne sont poirt minéralisés; ils ont encore leur gélatine, qu'ils doivent, selon lui, à la nature de la boue dans laquelle ils ont été ensevelis, et qui a conservé cette matière animale par une suite de causes que nous avons déjà signalées. Ainsi, de cela seul que des ossemens ne conservent plus leur gélatine, ou pour s'exprimer plus exactement, leur substance animale, on peut être certain que ces os sont fos- siles, dans l’acception véritable de ce mot. Mais on ne peut l'être également, lorsqu'ils en renferment des quantités plus ou moins considérables, puisque des os peuvent avoir été ensevelis depuis des siècles, comme être antérieurs à l’exis- tence des causes actuelles, sans avoir perdu pour cela leur substance animale. Si la disparition de cette substance est un caractère certain que les ossemens ont été déposés par des causes qui ont cessé d'agir, sa présence n'indique pas toujours la date de leurs dépôts, puisque la conservation.de la matière animale a quelquefois dépendu des circonstances particulières du gisement des os fossiles. On pourroit peut-être inférer des faits ci-dessus rapportés, que les os seroient composés de deux sortes de matière ani- male; dont l’une mécaniquement engagée entre les molécules osseuses, se détruiroit promptement par la putréfaction; tandis que l’autre, le lien commun des divers sels terreux, ne se détruiroit jamais entièrement ni par la putréfaction ni par un long séjour dans la terre; mais seulement par l’effet OSSEMENS HUMAINS. ho d'un cause inconnue, qui, comme tant d’autres, semble avoir cessé d’agir pour toujours. Il reste encore à savoir si lorsqu'une partie de la substance animale des os vient à se décomposer, par l'effet de leur séjour dans la terre, c’est la graisse qui disparoît la première, ou si c’est la gélatine, ou la substance cartilagineuse : comme nous n'avons pas terminé nos recherches sur cet objet im- portant, nous n’osons pas émettre d'opinion à cet égard. Tout ce que nous pouvons dire c’est que la matière ani- male interposée mécaniquement entre les vides, les cellules et les cavités des os, est la première à se détruire, en sorte qu'ils en contiennent d'autant moins, que les circonstances ont favorisé la putréfaction, et non pas en raison de leur séjour plus ou moins prolongé dans la terre. Il est une autre conséquence qui découle des précédentes, c'est que puisque la cause qui a fait disparoiître dans certains os fossiles leur substance animale, a totalement cessé d’agir, il ne se forme plus dans les temps actuels de véritables pseu- domorphoses organiques, ou de substitution de molécules à molécules, entre la matière organique et la matière inorga- nique. Nous voyons bien dans les temps présens des sucs lapidifiques pénétrer les tissus organiques , les recouvrir mème de manière à prendre leur forme : mais ces incrustations, ces pénétrations n’ont rien de semblable aux véritables pé- trifications qui s’opéroient autrefois, et qui représentent parfaitement le tissu organique dont elles ont pris la place, et auquel elles se sont complétement substituées; car dans ce que l’on appelle vulgairement bois pétrifié, il ne reste plus de trace du tissu organique végétal : il en est quelque- Mém. du Muséum. 1. 11. 52 406 GÉOLOGIE. fois de même des ossemens et des coquilles fossiles, quoique ces corps en partie pierreux , se soient souvent conservés en partie. Les ossemens humains qui font Pobjet de cette Notice se trouvent dansune petite caverne ou grotte, située à une petite demi-lieue au nord-ouest du village de Durfort près de Saint- Hippolyte, dans le département du Gard. Cette caverne est aux deux tiers supérieurs de la pente occidentale de la montagne de la Coste, dont l'élévation au-dessus de la Méditerranée est d'environ trois cent cinquante mètres. Placée au nord-ouest des mines exploitées de plomb sulfuré de Durfort, la caverne à ossemens connue dans le pays sous le nom de la Baume-des-Morts, n’est qu’à environ cinq ou six cents mètres de ces mines, dont l'entrée est beaucoup plus basse que l’intérieur de la caverne. La montagne de la Coste présente deux formations calcaires aussi distinctes par leur position que par leur nature minéralogique. La plus inférieure de ces formations, celle où se trouvent les mines de plomb, se compose d’un caleaire de transition, et d’un grès noirâtre, à grains irréguliers, et à cassure granulaire. Cependant ce calcaire présente un grand nombre de lames rhomboïdales distinctes, indice d’une cristallisation ébauchée. Cette roche fait lentement effervescence avec les acides; elle est souvent assez dure pour scintiller sous le briquet, à raison de la silice qu’elle contient; quelquefois traversée par de petites veines de chaux carbonatée spathique, elle sert de gangue aux métaux que l’on rencontre dans les mines de Durfort, métaux qui sont en assez grand nombre. En effet, outre le plomb et le zinc sulfuré qui y sont les plus OSSEMENS HUMAINS. 407 abondans, on y voit encore le manganèse oxidé et le fer oxidé ochreux, ayant pour gangue le calcaire de transition, ou le spath calcaire, ou enfin la chaux fluatée. On ne voit jamais aucune trace de corps organisés dans la masse de ce calcaire, et si, à raison de cette absence de tout fossile, de sa position et de sa texture, nous croyons devoir le rapporter aux calcaires de transition, nous ferons remarquer qu'il semble appartenir aux plus récens de cette époque de formation. | Le calcaire supérieur ou celui que l’on voit immédiate- ment superposé au premier, paroit appartenir à la formation du calcaire jurassique ou caverneux (rauch#æacke des alle- mands), calcaire qui compose la plus grande partie des mon- tagnes des Basses-Cevennes. Ce caleaire offre dans cette chaîne un grand nombre de cavités souterraines de la plus vaste étendue (1). Il est compacte, à grain fin, à cassure unie, légèrement conchoïde; sa couleur est le gris-bleuâtre, ou le gris-brun tirant sur le noir. Quoique très-effervescent, il ne se dissout pas en entier dans les acides minéraux. Le peu de fossiles qu'il contient se borne uniquement à des ammonites, des belemnites, des pectinites, ou des gry- phites, d'espèces perdues. Sans doute cette petite quantité de débris de corps orga- nisés tient à l’ancienneté de ce calcaire; mais elle peut éga- lement dépendre de sa grande compacité. Il est cependant + (1) Parmi les plus grandes de ces cavités , on peut citer celle dite des Demoiselles, entre Saint-Beauzille de Putois et Ganges, et celle de Mialet, près Saint-Jean du Gard. Il seroit facile d’en citer dans la même chaîne plus de trente autres, mais moins considérables. 52 * 408 GÉoLoctE. quelquefois traversé par de petites veines de spath calcaire; rarement elles y sont abondantes. On ne les observe même que là où ce calcaire devient moins compacte. Ses couches suivent, en général, l’inclinaison de la montagne où elles se trouvent, et coincident assez avec cette inclinaison. L'ouverture de la caverne ou de la grotte des Morts, est de niveau avec le sol; elle offre la forme d’un carré long, dont l’un des côtés a environ cinq pieds, et le plus petit, un pied et demi. Cette ouverture descend perpendiculairement environ vingt pieds; c’est au fond de cette espèce de tuyau ou de fente verticale, que se trouve l’entrée de la grotte, qui est si étroite qu'elle n’a guère plus d’un pied carré. On entre de là dans une espèce de galerie, qui se divise en se prolongeant, soit à droite, soit à gauche. L'entrée de droite conduit par une pente douce dans la salle principale, dont les dimensions se réduisent à huit à dix pieds dans le sens de la longueur, sur une largeur de trois pieds. La plus grande élévation se trouve vers l’entrée et ne dépasse pas cinq pieds et demi; aussi comme le reste de la grotte est plus bas, un homme de moyenne taille ne peut guère s’y tenir debout. Le couloir qui mène à la salle principale est remarquable, en ce que ses côtés et son toit paroissent d’une seule masse calcaire, dont la surface est presque aussi unie que celle des schistes argileux qui accompagnent les houilles. La galerie de gauche se prolonge à une distance égale à celle de la droite. On y pénètre plus difficilement, parce qu'elle est beaucoup plus basse. Cette galerie se termine par une espèce de trou, d'environ deux pieds en carré d’ouver- ture sur une douzaine de profondeur, et d’une inclinaison OSSEMENS HUMAINS. 409 d'environ 600. On n’y observe aucun ossement; il en est de même dans le couloir ou galerie de droite. Le calcaire de cette partie paroiît d’un bleu moins foncé que celui qui forme la salle principale; la surface extérieure est couverte d’une couche assez épaisse de stalactites et de stalagmites calcaires, d’un brun-jaunâtre sale. Sa masse est également traversée par de nombreux filets spathiques. La grotte des Morts se termine par une petite salle de trois pieds carrés, dans laquelle se trouvent tous les ossemens hu- mains. Au fond de cette salle s’élève un trou incliné d'environ 45° au-dessus du pavé ou du sol de la grotte qui est horizon- tal. Ce trou peut avoir cinq ou six pieds d’élévation; on le voit communiquer par un autre trou supérieur à une se- conde excavation, parallèle à la salle principale, dans laquelle on rencontre quelques ossemens humains ; mais qui, quoique adhérens au rocher, ont sans doute été posés dans cet endroit par quelque curieux. Cette excavation d’une élévation d’en- viron cinq pieds, est légèrement inclinée en arrière, en se terminant par une arète de deux à trois pieds. Sa base, pres- que elliptique, a six pieds de long sur trois de large. Ce trou n’a aucune issue : quant au toit ou plancher de la salle prin- cipale, il se trouve élevé d’un demi-pied au-dessus du vrai sol qui est couvert d’ossemens humains, dont quelques-uns sont isolés. On ne peut pas trop reconnoitre l'épaisseur de cette couche d’ossemens, non plus que la profondeur d’un trou que l’on voit sur la gauche. Il est de la largeur du bras et descend perpendieulairement. On s'aperçoit qu’une assez grande quantité de ces ossemens sont unis au rocher même, et qu'ils y ont été fixés par des incrustations calcaires qui les 410 GÉoLocre. enveloppent et qui les recouvrent encore. En général, ils n’y sont fixés que jusqu'à une très-petite hauteur, et cela dans un lieu qui est lui-même très-peu élevé. Vers le fond et sur la droite de l’excavation ou salle principale, on remarque la cavité d’une tête dont la face étoit tournée vers le ciel, et dont il ne reste plus aujourd’hui que le crâne. Les parois de cette salle sont formés par un calcaire com- pacte bleu-foncé, sans aucun filon de chaux carbonatée spathique, et qu’une couche très-épaisse de stalactites , éga- lement calcaires, a presqu'entièrement recouvert. À peu près partout, dans la salle principale, lon découvre des ossemens humains, principalement des os de la tête et des os longs. Ces os s’y trouvent sans aucun rapport avec le squelette, et il seroit impossible d’en retrouver assez pour reconstruire un squelette entier. Quand on considère la ma- nière dont ces os y sont réunis pêle-mêéle, et leur rapproche- ment ou leur éloignement ne coïncidant pas avec l’âge des individus auxquels ils ont appartenu, il est difficile de ne point supposer qu'ils ont dù être transportés dans les lieux où on les découvre aujourd’hui, non avec les cadavres dont ils avoient fait partie, mais déjà séparés des parties molles qui les entouroient. Lorsque nous visitämes cette petite caverne, nous détachimes un assez grand nombre d’ossemens soit du sol, soit des parois mème. Comme le sol nous parut très- sonore, nous supposämes qu'il pouvoit être creux. Nous fimes donc sonder le point le plus retentissant, mais nous reconnümes bientôt que ces parties sonores n’étoient que des portions peu épaisses de tuf calcaire qui avoient enve- loppé les os, lesquels étoient remplis en partie par une OSSEMENS HUMAINS. 4ix terre calcaire d’une grande finesse, colorée par les oxides de fer. Telles sont les principales particularités de la caverne de Durfort, où existent disséminés de nombreux ossemens humains, soit de jeunes sujets, soit d’hommes adultes (et ce sont les plus abondans), soit enfin de quelques femmes. On n'y découvre aucun débris qui ait appartenu à des ani- maux quelconques, à l'exception de la coquille que nous avons déjà signalée, ce qui prouve la nouveauté du calcaire sédimentaire ou tuf qui enveloppe les os. Quant à la grotte en elle-même, elle n’a rien de remarquable et mériteroit peu d'être visitée, si elle n’offroit pas ce grand nombre d’ossemens humains qui étonne, à cause des diflicultés que l’on éprouve pour la visiter. Elle ne présente point, comme presque toutes les cavernes, si nombreuses dans le calcaire jurassique des Cevennes, ces sillons profonds, à rebords ar- rondis et à peu près parallèles, qui signalent le travail des eaux souterraines. Les eaux se sont bornées ici à incruster d’une couche plus ou moins épaisse de stalactites les parois ou le sol des galeries , et à revêtir de leurs dépôts des osse- mens qu'elles ÿ ont rencontrés; aussi est-il probable qu’il n'y entre d'autre eau que celle qui filtre en tout temps au travers de la montagne, et dont il est facile de reconnoître la distillation, en observant les gouttes qui tombent de la voûte dans la salle principale comme dans les autres cavités. Ces faits établis, on se demande, à quelle cause peut être attribuée la présence d’une si grande quantité d’ossemens humains dans une pareille cavité. Plusieurs hypothèses se présentent comme d’elles-mêmes. &12 GÉOLOGIE. On pourroit d’abord supposer, que ces ossemens sont les restes des individus qui y ont péri, soit parce qu'ils ÿ avoient été renfermés, soit par l’effet de la chute des ro- chers qui forment la voûte de cette grotte. La première idée se réfute d’elle-mème ; car si des êtres de sexes et d’âges différens y avoient été renfermés vivans, quelques-uns d’entre eux auroient été périr ailleurs que dans la salle principale, et. leurs os conserveroient quelque rapport avec l’ordre qu’ils ont dans le squelette. La même observation s'applique à l’idée de les concevoir comme les restes d’infortunés, vic- times d’un éboulement fortuit; d’ailleurs les rochers qui composent la grotte des Morts, formant une voûte encore assez élevée , n’auroient pu les écraser. On ne peut pas non plus les considérer comme les restes des cadavres que l’on y auroit enterrés, même quand la difficulté de l'entrée n’y mettroit pas un obstacle invincible, parce que leur arrangement s'op- pose à l’idée de cadavres entiers qui y auroïent été déposés. Il ne reste donc plus qu’à les concevoir comme des osse- mens isolés qui ont été transportés par une cause quelconque; mais il s’agit de savoir, si ce sont les eaux qui les ont ainsi réunis; l’on ne peut le supposer, en considérant que si les eaux les avoient charriés, elles les auroient plutôt disséminés de la manière la plus irrégulière, que rassemblés dans une seule de ces cavités souterraines. Dès lors ces os semblent y avoir été transportés déjà dépouillés des parties molles qui les recouvroient, et cela par les habitansdu pays, et non par des causes naturelles. Ces habitans les auront uniquement placés dans la salle principale, afin de ne point obstruer les passages déjà bien resserrés qui y conduisent, espérant peut- OSSEMENS HUMAINS. 413 être de remplir, avec le temps, cette salle des objets de leur vénération; mais par la suite, les peuples qui rendoient ce dernier hommage à la mémoire de ceux qui leur étoient chers, ont eux-mêmes disparu , et ce pieux usage a fini par s’éteindre tout-à-fait. Cette opinion est suggérée par l’aspect des lieux, par la manière dont cette caverne a été découverte de nouveau, et surtout par les pierres plates posées l’une sur l’autre, unies ensemble entre les rochers, par un ciment solide, à l’aide desquelles on a cherché à soutenir le pilier gauche de la salle principale. Ce pilier ayant été construit de main d’hom- me , il ne peut avoir été bâti que dans le but de soutenir la voûte, et d'assurer le pieux usage que l’on vouloit. donner à cet édifice. Ce ne sont point les seules constructions qui prouvent que les ossemens humains renfermés dans la grotte de Durfort y ont été transportés. En effet, lorsque le maitre mineur, Mathieu, découvrit, il y a une soixantaine d’années, cette grotte, il s’aperçut qu’il existoit dans la partie de la montagne de la Coste, qui se trouvoit au-dessus des mines de plomb, une ouverture naturelle dans le rocher, laquelle avoit été bâtie. Supposant que cette ouverture, ou fente du rocher, devoit conduire à quelque mine déjà ouverte, il dé- molit les matériaux à l’aide desquels on l’avoit fermée: il ne fut pas peu surpris après avoir franchi cette ouverture, de ne trouver dans les excavations auxquelles elle conduisoit, que des ossemens humains au lieu des filons qu’il espéroit y ren- contrer. Il conçut alors pourquoi la fente du rocher avoit été fermée et murée avec tant, de précaution, et lui-même il y fit jeter une grande quantité de pierres pour empêcher Mém. du Muséum. 1. 11. 53 hi4 ‘ GÉoLocrE. d'y pénétrer. La curiosité l’a emporté sur ses pieuses inten- tions; les voyageurs qui ont parcouru ces lieux ont cherché à rendre moins pénible l'accès de ce souterrain; et peu à peu les pierres qui obstruoïent le passage ont été enlevées. Après des faits aussi positifs, il est presque inutile de discuter la question de savoir si ces ossemens peuvent être considérés comme réellement fossiles? Cependant puisqu'ils ont été décrits comme tels, il faut bien faire quelques ob- servations à cet égard. Et d’abord, les couches, évidemment modernes, qui en- veloppent les os, ne peuvent être assimilées à ces couches vieilles et solides de la terre, qui ne se forment plus de nos jours. Les calcaires sédimentaires et les tufs se précipitent et se forment encore dans les temps actuels; -et comme les os de Durfort ne sont enveloppés que par des tufs calcaires, ou par des terres meubles, on ne peut, ce semble, les con- sidérer comme fossiles, au moins dans la véritable significa- tion de ce mot. Dira-t-on que ces ossemens sont incrustés d’une couche très-épaisse de tuf, et que cette couche n’ayant pu se déposer que peu à peu, il a fallu un temps considé- rable pour la former; mais, par temps considérable faudroit- il entendre plusieurs centaines de siècles, lorsqu'il est cer- tain que les eaux souterraines chargées de carbonate de chaux, à raïson de l'excès de l'acide carbonique qu’elles con- tiennent par une suite de la grande pression qu’elles sup- portent, le laissent précipiter presque: instantanément, dès qu’elles ont le contact de l'air extérieur. Aussi voit-on les eaux incrustantes former dans peu de temps des dépôts très- étendus, et àtel point, que dans certaines icavités ‘même OSSEMENS HUMAINS. 4x5 souterraines, ces dépôts fmissent par les encombrer et les obstruer presque entièrement. Dès lors, il est aisé de juger qu'il ne faut pas un temps bien long pour former des tufs de quelques lignes d'épaisseur. À ces faits bien connus, nous ajouterons un exemple assez remarquable de la célérité avec laquelle les eaux souterraines incrustent et enveloppent les objets sur lesquels elles se pré- cipitent. Nous prendrons cet exemple dans la manière dont des ossemens ont été incrustés dans des cavernes, depuis une époque peu éloignée. M. de Marsolier, que nous avons déjà cité, descendit le 15 juillet 17980, dans la grotte des Demoiselles, près de Saint-Beauzille, dans le département de l'Hérault; il y laissa une bouteille, bien scellée, avec le procès-verbal de ce qu'il y avoit observé, une plaque de plomb sur laquelle on avoit gravé les noms de ses compagnons, et enfin une tête de veau et une de cochon. Les premiers de ces objets furent placés de manière à éviter autant que possible toute incrus- tation. Le 27 février 1817, c’est-à-dire, trente-six ans et huit mois après leur dépôt, la bouteille fut trouvée pleine d’eau, sans trace de bouchon ni du procès-verbal. La plaque de plomb, recouverte seulement de quelques grains de chaux carbo- natée concrétionnée , offroit encore les traces des noms qui y avoient été gravés; mais il en étoit bien autrement des têtes de veau et de cochon. La première avoit été décomposée en entier dans de certaines parties, dont on ne pouvoit sup- poser l’existence que par la présence des dents qui signa- loïient la place où devoient exister les mâchoires. La chaux 523% 29 #16: : GÉOLOGIE. carbonatée qui incrustoit cette tête étoit d’une dureté, telle qu'il ne fut pas possible d'enlever cette couche d’albâtre- dont l’épaisseur étoit environ de quatre à cinq pouces. Il en étoit à peu près de même de la tête de cochon; mais ici les os existoient encore, n'ayant point perdu leur substance ani- male, à l'exception de la portion qui remplissoit l'intérieur des cellules que les os offrent entre leurs lames compactes. Quant à la partie animale qui semble réunir le phosphate et le carbonate de chaux, celle-ci subsiste encore comme dans les os non fossiles, dont nous avons donné l’analyse ; à peine quelques grains de chaux carbonatée ont-ils rempli les vides laissés par la décomposition de la substance animale interne ou médiane. Ces os, quoique incrustés dans une couche d'albâtre de trois à quatre pouces d’épaisseur, n’offrent donc pas une plus grande proportion de carbonate de chaux chi- miquement combinée que s'ils étoient frais. Les seules petites molécules calcaires que l’on observe dans les vides de la substance cellulaire y sont si peu combinées, qu’il est facile de les enlever, puisqu'elles n’y adhèrent que mécanique- ment, comme dans tous les dépôts qui s’opèrent encore de nos jours. Le calcaire concrétionné qui enveloppe ces os de cochon, est aussi blanc que le plus bel albätre. Quoique composé en petit, de lames rhomboïdales éclatantes, on reconnoit sa structure concrétionnée, et sa formation par couches suc- cessives, lorsqu'on fait une cassure perpendiculaire au sens des couches. Cet albâtre est remarquable par sa grande dureté, dureté telle, que le cuivre ne le raie qu'avec peine , et qu'il raie facilement les marbresles plus compactes. OSSEMENS HUMAINS. 417 Il ne peut cependant pas entamer le verre blane, tandis qu'il l'est facilement par l'acier. Ce calcaire est à la fois si dur et si tenace, qu'il n’a pas été possible d’en détacher en entier la tête de cochon qui s’y trouvoit incrustée. Tout ce qu’on à pu faire a été d’en enlever une portion de los ma- xillaire inférieur, portion que nous conservons dans nos col- lections. L'autre portion, mise cependant à découvert, est restée dans la grotte; et pour la faire retrouver plus facile- ment, les marteaux et les ciseaux qui s’étoient brisés par le choc contre ces stalagmites si dures, ont été laissés à côté de la mâchoire même. Les stalactites comme les stalagmites de cette caverne, paroissent le plus généralement composées de chaux carbonatée pure, avec excès d'acide; aussi se dis- solvent-elles en entier dans les acides minéraux, avec une vive effervescence et une grande rapidité. Les autres objets laissés par M. Marsolier, furent trouvés plus ou moins altérés. Une poutre qui avoit servi à faciliter les passages les plus dangereux, étoit presque pourrie, re- couverte d’une mousse épaisse et d’une terre argilo-calcaire, remarquable par sa finesse. Les assiettes, au moins celles qui n’avoient pas été incrustées dans le rocher par les stalagmites, étoient remplies d’eau et recouvertes d’une couche plus ou moins épaisse, de chaux carbonatée concrétionnée. Mais les objets naturels que M. Marsolier avoit décrits avec détail, dans sa Relation imprimée en 1785, parurent encore bien plus changés. L’on auroïit pu se croire dans un lieu différent de celui qu'il avoit décrit, sinon en naturaliste, du moins en écrivain élégant et fidèle, tant les changemens que Îles eaux otcasionent dans les cavités souterraines, surtout dans 413 GÉoLoctre. celles aussi vastes que la caverne des Demoiselles, sont prompts et rapides (1). Toutes les recherches furent vaines pour retrouver la tête humaine, et M. Marsolier et ses compagnons furent extré- mement surpris lorsqu'ils la rencontrèrent dans la dernière salle de la grotte, salle où ils n’avoient pu pénétrer qu'après avoir fait jouer la mine. Aussisupposa-t-il que cette tête y avoit été entraïnée par les eaux, qui pendant l'hiver inondent quel- quefois cette caverne. L'on peut aisément s’imaginer quelles méprises cette tête auroit pu entraîner, sion lavoit déta- chée du même rocher où se trouvoient des ossemens de veau et de cochon, et si à cause de cette réunion on s’étoit per- suadé que ces débris y avoient été ensevelis par les anciennes catastrophes qu'a subies la terre et dont les vrais fossiles sont des témoins muets, mais irrécusables. Il en est à nos yeux des ossemens humains découverts dans la grotte de Durfort; comme de la tête humaine trou- vée dans celle des Demoïselles. Les uns et les autres y ont été transportés; et s'il'est probable que ce soient les eaux qui aient charrié la tête décrite par M. Marsolier, cela ne l’est certainement pas relativement aux os de Durfort. Nous dirons avec une sorte d’orgueil, que notre opinion à {) M. Marsolier estima que la grandeur de la dernière ou de la plus vaste salle de cette caverne, étoit au moins égale à la moitié de la ville de Ganges, ville d’une population de six à sept mille âmes. Quant à son élévation, il présuma qu’elle dépassoit cinquante toises. Ces dimensions, quelque extraordinaires qu’elles puissent paroître, sont loin d’être exagérées : c’est du moins l'opinion que nous a donné la vue de cette étonnante caverne, d’une étendue bien autrement consi- dérable que la fameuse grotte d’Antiparos. . OSSEMENS HUMAINS. 419 cet égard a été partagée par MM. les docteurs Salendre et Teissier, qui ont visité avec le plus grand détail la caverne des Morts, et qui nous ont éclairés de leurs lumières, Se- lon ces naturalistes, le peu d’altération des os de Durfort, la manière dont ils sont ensevelis, les terres qui les enve- loppent, tout annonce qu’ils y ont été transportés par les hommes, et non par l'effet d’une inondation ou par toute autre cause naturelle, qui loin de les réunir dans un même lieu, les auroit disséminés çà et là, sur un espace plus ou moins étendu. Ces observateurs pensent encore qu'il devoit exister une ouverture plus considérable pour pénétrer dans cette caverne, ouverture que l’on n’a pas encore su découvrir. 420 De l’ Aile operculaire ou auriculaire des Poissons, _ considérée comme un principal pivot, sur lequel doit rouler toute recherche de détermination des pièces composant le crâne des animaux ; Suipi de Tableaux synoptiques donnant le nombre et expliquant la composition de ces pièces. PAR M. GEOFFROY-SAINT-HILAIRE. + M: premiers essais de détermination touchant les pièces crâniennes , datent de 1805 et 1806. Déjà persuadé que la tête des animaux vertébrés étoit formée de parties analogues, je ne voyois alors de difficultés pour établir cette proposition par les faits, qu’à l’égard des poissons, et ce fut uniquement à titre d'acheminement vers cette solution désirée, que je donnai, en 1807, un premier travail sur le crâne du crocodile et un autre sur celui des oiseaux. ( Voyez Annales du Muséum d'histoire naturelle, tome 10, p. 249 et 342.) Je reprends toutes ces recherches en ce moment , et déjà j'ai commencé cette révision par deux mémoires publiés dans un nouveau recueil, les Annales des Sciences naturelles, tome 3. Le premier article, page 173, traite du créne comme faisant partie du rachis et comme étant composé de sept vertèbres, et le second, page 247, des pièces cräniennes chez le crocodile, comparées à leurs analogues chez tous DE L'AILE OPERCULAIRE OU AURICULAIRE DES POISssONs. 421 les animaux ; d'une part ramenées à l'identité pluloso- phique, et de l’autre , considérées sous le rapport de la spécialité et des anomalies de leurs formes. J’ai joint au premier travail, comme contenant une appli- cation de mes vues, un tableau lithographié qui exprime visuellement la manière dont je conçois la division du crâne sous sept chefs différens; mais ce tableau, déjà publié le 4 wars dernier, m'a paru susceptible d’une grande amélioration quant au fond des idées et d’une exposition formelle plus claire : j’en donne plus bas une nouvelle rédaction à la date du 22 novembre 1824. Je ne reproduirai pas ici, dans la crainte de faire un double emploi, l'énumération de tant d'idées successives et progressives, ainsi que l'exposé des motifs sur lesquels cet échafaudage repose ; je renvoie pour cela aux écrits précités. Tous les efforts de ma vie entière ont eu pour but la connoissance en philosophie, c’est-à-dire la détermination du grand nombre des pièces crâniennes des poissons. J’ai donné pour cet effet une suite de mémoires sur ces pièces, sur cette inextricable forèt de petits os, suivant une ancienne expres- sion d’Artedi ; et présentement que je tiens l’ensemble et tous les détails de cette grande composition organique, je sens que je ne saurois produire une masse aussi considérable, aussi imposante de faits, qu’en marchant avec mesure et graduelle- ment. Un mémoire sur les os crâniens des oiseaux, qui fera suite aux deux premiers articles, est sous presse, et d’autres écrits devront encore précéder mes dernières et définitives publications sur les poissons. J’ai, en attendant et pour prendre date, déposé le 2 novembre 1824, à l'Académie : Mém. du Muséum. 1. 11. 54 422 DE L'AILE OPERCULAIRE royale des Sciences ; la planche déjà gravée des os de la tête du Mérou, Serranus gigas Cuv., qui accompagne le pré- sent Mémoire, en même temps qu'üne indication détaillée de mes déterminations et dénominations. On trouve le même travail aussi publié dans le Bulletin des annonces scientifiques, section des sciences médicales, n° 113; novembre 1824, p. 191. Voilà un aperçu de mes nouvelles recherches sur le crâne des poissons : je les regarde comme tout-à-fait concluantes, comme amenées aujourd'hui à un tel point d’évidence, que je m'occupe avec une pleine confiance de la révision de mes premières tentatives, et que j'ai cru en pouvoir présenter les définitifs perfectionnemens dans les Tableaux synoptiques, pages 440 et 44r. Et en effet, il sera manifeste que ces efforts sont récents; car j'ai montré, dans certaines parties du pré- sent volume de ces Mémoires, quelques hésitations, et j'aurois même prononcé jusqu’à deux jugemens que je tiens aujourd’hui pour erronés. J'écris donc à la hâte aujourd’hui les réflexions présentes pour relever et rectifier ces inexacti- tudes, et surtout pour l'avoir fait, avant que ce onzième Volume soit terminé. ARTICLE I. a Sur les inconvéniens d'écarter , sans la remplacer par une autre, la détermination donnée des os operculaires. Le groupement et le mélange apparent des parties cépha- liques et thoraciques chez les poissons, regardés jusqu'ici comme formant une confusion inextricable , ont eu sur les recherches entreprises cette influence, qu’on s’est attaché à obtenir enfin une solution, qui fût d’un résultat aussi compliqué OU AURICULAIRE DES Poissons. 423 et tout autant extraordinaire que les données desquelles lon étoit parti. Quelques tentatives malheureuses de détermina- tions, entre autres celles de M. Ernest H. Weber, étoient aussi venues à la traverse , et l’on a cru pouvoir en finir avec les recherches ichtyologiques, en admettant qu’à l'égard d’une portion de l'être organisé, la Nature, impuissante à poursuivre son plan admirable de simplicité et d’uniformité, se seroit tout à coup, et dans ce cas particulier uniquement, détournée de sa marche si franchement suivie partout ailleurs. Ce ne seroient plus les mêmes matériaux, et cela est imaginé pour -lexplication des faits respiratoires, pour rallier les divers moyens d’un semblable système d'organisation ; ce ne seroient plus, dis-je, les mêmes matériaux, habilement modifiés pour satisfaire à de certains rapprochemens de parties, qui constitue- roïient chez les poissons les organes de la tête et de la poitrine! D’intimes rapprochemens auroient élevé une difficulté insur- montable , seroient venus paralyser les moyens usuels! et pour renverser ces obstacles, il y auroit eu nécessité d’opérer avec bizarrerie, de se jeter dans des contrastes, de tout boule- verser enfin! Car c’est cela véritablement qui se trouve implicitement déclaré et comme proclamé dans les jugemens de quelques naturalistes ; lesquels, décidant à priort, admet- tent en effet que la Nature, faute d’avoir su prédisposer son plan primitif, de manière à le combiner sur les données diffé- rentes d’un autre milieu pour la respiration, se seroit jetée dans les écarts et les soins d’une seconde création , auroit imaginé un autre type, et auroit ainsi ajouté aux élémens connus dans les familles voisines d’autres ét de tout nou- veaux élémens pour la classe des poissons. 54* 424 = DE L'AILE OPERCULAIRE - Je ne dis pas que les choses aient été aussi fermement exposées , aussi hautement professées que je viens de le rapporter ; mais c'est très-certainement ce qui découle d’écrits récemment publiés en Hollande (1). Cependant je pourrois demander quelles garanties viennent appuyer ces opinions ? Nulle autre, il faut le dire, si ce n’est qu’on auroit cherché et qu'on ne seroit point parvenu à trouver les rap- ports de toute l'aile auriculaire des poissons, qu’on se seroit trop légèrement accordé la supposition qu’on ne les décou- vriroit jamais, et qu’on auroit enfin jugé tout simple de rem- placer la futilité de pareilles recherches par une heureuse invention de quelques termes, par l'emploi des mots sy7- plecticon, operculum, etc. Mais si cette impuissance caractérisoit bien moins les prétendues aberrations d’une sublime pensée créatrice que les lumières, toutefois très-étendues (je me plais à le re- connoître ), que les lumières elles-mêmes de nos deux savans naturalistes! Voilà sans doute ce qu'il eût été conve- nable de mettre d’abord en question et ce qu'il me paroît plus logique en effet, plus physiologique, et, je crois devoir encore ajouter, plus religieux d'admettre. Qu'on y fasse bien attention : ces expressions de réserve, prudentis est animi (2), cette répugnance témoignée àse porter (1) De sceleto piscium , auctore Van DER HoEvex; 1822. De osseographi& pis- cium, auctore GERBRAND BARKER ; 1822. (2) « Ce seroit perdre son temps (bonas horas consumere ) que d’examiner les » hypothèses sur l’opercule. En conséquence , je m’en tiendrai aux noms vulgaires » (vulgaria horum ossium nomina retinere prudentis hominis esse ‘arbitror). » C’est ainsi que s’explique la Dissertation sur le squelette des poissons, en la page 87. OU AURICULAIRE DES PoIssons. h25 en avant, ce dessein formel de rester dans le vrai, tout cela n’est sagesse que relativement. Effectivement, auriez-vous entendu dire par là, vous classant vous-même sur la ligne d’un simple Appareilleur, que vous ne voulez contribuer à l'érection de l'Edifice que dans le degré de votre capacité? on vous saura gré alors de soins aussi prudens. Mais si au contraire vous n'affectiez ce rigorisme que pour glisser une critique indirecte, que pour trouver mauvais qu’on eût songé à ériger l’Edifice ; prenez-y garde : ce seroïit vouloir retirer la science d’une question, où elle auroit pénétré et où il avoit bien fallu se déterminer à l’introduire. Car nous donner les pièces de l’opercule sous le rapport de leur nombre, de leur forme et de leurs usages, c’est comme si en zoologie vous vous borniez à décrire une espèce isolément. Ilest bien vrai que se sont là des préliminaires indispensables, des matériaux faconnés ; mais la science n’y sera introduite qu’autant que vous nous donnerez la valeur philosophique de ces pièces, les rapports naturels de l’espèce d’abord considérée à part. Cependant, dira-t-on, l'édifice a pu être mal établi; fau- dra-t-il reconnoître que les déterminations seroient toutes exactes? Non, non, sans doute ; que cela soit réexaminé, rien de mieux. Voilà se placer sur le terrain de la science. Que chaque point avancé soit saisi par la controverse et renversé, s’il y a lieu. N’épargnez pas, sapez dans ses fondemens la vicieuse construction qu'on auroit follement proposée. Je ne vous demande pas même de la remplacer par une meilleure ; car on voit tous les jours des hommes de goût signaler et critiquer avec esprit et vérité toutes les imperfections d’un poëme, bien qu'ils ne puissent en produire de semblable. 426 DE L'AILE OPERCULAIRE Visconti, dont la main ne sauroiït faire usage du ciseau de Canova, ou de la palette de Girodet , n’en est pas moins lappréciateur le plus capable des conceptions et du génie de nos artistes. Mais ce que j'ai le droit, je pense, d’exiger , c’est qu’on cesse de déclarer linutilité de la recherche; c’est qu'on ne donne plusle conseil de s’arrêter dans la voie des découvertes; c’est qu'on ne jette plus une sorte de défaveur sur la question particulière de cet écrit. Elle est dificile, ardue, mais ce ne sauroit être un motif suffisant pour ne point s'en occuper. Il y a mieux : la solution de cette question est dans les besoins de la science; elle est aujourd’hui indispensablement réclamée. Car, qu’en désespoir de cause elle soit délaissée, iln’y a plus de base pour l'anatomie comparative. Et, en effet, qu'il ne soit point raisonnable de s’enquérir des rapports généraux des os operculaires, pourquoi le seroit-il plus de rechercher ceux de toutes les autres productions organiques ? Je vais plus loin : é’est que si toutes nos tentatives échouoïent véritablement à Fégard des os operculaires des poissons, il n°y° auroït plus de doctrine de comparaisons, plus de détermina- tions possibles. Tout l'édifice crouleroit, et nous ne serions plus tenus à observer les corps naturels qu’en eux-mêmes, que pour eux-mêmes, et sans qu’ils fournissent prise à des rapports cCOMMENS. Voilà sans doute de graves inconvéniens; mais signalés comme ils le sont ici, il est facile de s’apercevoir qu'ils ne - valent que par la fausse route dans laquelle quelques préjugés voudroient où nous lancer ou nous retenir. Combien d’avan: tages au contraire à retirer des voies de la science? que de OU AURICULAIRE DES PoIssons. 427 vues générales et élevées, les comparaisons et les rapports qui s’ensuivent, ne portent-elles pas à l'esprit? qui ne se rendra en effet à l'évidence de ce dernier raisonnement ? Il y a deux milieux, dans lesquels se passent les phéno- mènes de la respiration ; mais cela n'empêche pas qu'il n’y ait qu'une seule composition organique pour ce service ; néces- sairement pour un service unique, dès qu'on ne peut comp- ter que sur un seul résultat, dès qu’il n’y a de susceptibilité que pour une seule métamorphose, l'oxtgénation du sang. À ces milieux différens s'appliquent des instrumens divers à quelques égards; mais que peuvent-ils être ? sinon d’une nature au fond identique , sinon respiratoires. Or, s'ils sont respiratoires, il faut bien qu'ils soient essentiellement et par- tout les mêmes. Cependant voudroit-on encore revenir sur cette différence des milieux ? soit; mais alors cette différence n'aura qu'une importance relative, et celle uniquement que comporte une pareille diversité. Les matériaux des instru- mens respiratoires seront plus ou moins agrandis, plus ou moins rapprochés, plus ou moins disséminés, de manière à pouvoir satisfaire aux résistances variables et contingentes des fluides ambians. Telles sont aperçues, je pense, toutes les difficultés du problème : et, si er effet nous nous rendons attentifs à ce que le détail des faits nous apprend, nous trouvons que le problème a été très-exactement résolu conformément à ses données, et que par conséquent nous sommes dispensés de prêter des vues rétrécies au souverain Arbitre des choses, dont la toute-puissance, comme la sagesse infinie, se manifestent dans le maintien irrévocable de lois simples, bien plus dignement qu’elles ne le feroient par les petites subtilités qu’on y croit de ressource. 428 DE L'AILE OPERCULAIRE ARTICLE IL De l'influence qu'exercent les deux milieux respiratoires sur les organes de la respiration, et par contre-coup sur la composition du crâne. Est-ce là une question tant soit peu plausible, dira-t-on ? et peut-on effectivement admettre à priori la possibilité que l'influence des deux milieux respiratoires, qui doit être très- vivement ressentie par les organes mêmes de la respiration, puisse encore se propager dans le crâne et le faire, au point d’en affecter et d’en modifier la composition ? Je le crois ainsi, et je vais dire comment je conçois ces dissémination et reten- tissement d'effets. À peine nous sommes-nous donnés le temps de réfléchir que nous avons formé beaucoup de nos idées générales, en y employant des faits qu’auroit seulemert fournis l'observation d’une seule espèce. La tête existe, à part, en avant, avec de certaines fonctions bien déterminées ,et la poitrine est ailleurs, en arrière, éloignée, avec des fonctions non moins distinctes. Voilà ce que l'anatomie humaine nous enseigne et ce dont nous avons fait ensuite l’attribut général de tous les animaux de la respiration aérienne. Cela posé, M. Bakker ( de osseographiä prscium ) a pu se croire autorisé à penser que l’union, chez les poissons, de la tête et de la poitrine, formoit une considération toute nouvelle eu égard aux autres animaux vertébrés ; que cette jonction, non prévue dans le plan de ces derniers , a pu devenir un fait ichtyologique, en conséquence et par l'appel de nouveaux matériaux. Déjà M. Cuvier en avoit considéré et nommé OU AURICULAIRE DES Porssons. 429 quelques-uns operculum , præoperculum , suboperculum et anteroperculum. Notre savant professeur de Groningue seroit venu compléter ces idées, en imposant aussi des noms nouveaux à quatre autres pièces , souches de celles-là, et en les nommant aussi de leurs fonctions #7atériaux de jonction ou syrnplecticon prünum , symplecticon secundum , ter- étum et quartun. Ces phrases, dans ce degré de concision, ne se lisent réunies nulle part, mais tout l’ouvrage de M. Bakker les contient dans de longs développemens. Ce savant, considérant qu’il avoit sous les yeux poür le moins huit nouvelles parties inconnues partout ailleurs, s'est alors donné ample et pleine carrière ; il a détaché les poissons de l’embranchement des vertébrés et a procédé à leur égard comme sur de nouvelles existences organiques; car, donnant une attention exclusive à la considération des fonctions, il a divisé avec une méthode qui n’est pas d’ailleurs sans habileté, toutes les parties qui concourent à la respiration, savoir : 1°. en appareil branchial externe ; 20. en appareil branchial m0yen, et 30. en appareil branchial z2{erne. Cependant ce ne pouvoit toujours donner qu’une détermination faite dans l'esprit de l’ancienne Ecole; on ne peut pas encore suffisamment se dé- fendre de délaisser la considération des formes et des fonc- tions qu’on sait pourtant aujourd’hui être fugitives d’un ani- mal à l’autre, J’ai dit, et il faudra souvent le redire encore, que les organes ne sont pas toujours semblables quant au mode d'association des élémens qui en font partie, et que surtout ils peuvent considérablement différer de grandeur respective, et, par conséquent, dans leurs formes et dans leurs fonctions. S'il est question de déterminations philoso- Mém. du Muséum. 1. 1x. 55 430 DE L'AILE OPERCULAIRE phiques, qu’on soit bien convaincu qu’une seule chose peut demeurer invariable, c’est l'essence de l’élément, lequel est soi, toujours soi, grand ou petit, utile ou inutile, employé seul ou avec plusieurs autres, pour former un appareil, c’est- à-dire pour devenir un organe actif. Mais pour rester dans les limites de la question présente, il suffit de remarquer que la nouvelle doctrine de M. Bakker a pris naissance dans une hypothèse sans fondement; car il n’est point vrai que le crâne des animaux de la respiration aérienne, reste étranger à leur appareil respiratoire. Il en est une partie arrangée ad hocau contraire et toute dévolue à son service; c'est le canal nasal qui, fort court chez l’homme , ne s'y est guère fait remarquer qu'à l’égard de l’une de ses moindres utilités. Mais que ce canal soit vu sans prévention, principalement chez les animaux à longue mächoire, comme le cheval, le crocodile, un oiseau , etc., on s’aperçoit bientôt qu'il est formé par deux parties réunies, mais non confondues: savoir ; supérieurement par les fosses nasales, qui forment cul-de-sac en avant de la boîte cérébrale, ou plutôt qui y pénètrent par les trous nerveux, et inférieurement par des tuyaux percés de part en part, qui ne sont vraiment qu'une sorte d’antichambre pour l’organe respiratoire. Ce sont des cavités tellement distinctes par un caractère de spécialité, qu’elles sont séparées dans quelques chauve-souris et dans la plupart des cétacés; le canal osseux restant en propre chez ces animaux à l'organe respiratoire. Une aussi étrange modification , cas d’anomalie dans ces deux familles, devient au contraire l’état normal des poissons. Les voies cranio-respiratoires , comme nous venons de les OÙ AURICULAIRE DES Poissons. 43: décrire, sont limitées en dessus par un plafond servant de lit à l'organe olfactif et au cerveau, et en dessous par un plan- cher formé des os maxillaires et palatins. Voici comme l'observation des formations fœtales nous apprend que ce dernier plancher s'établit. Les intermaxillaires, et à leur suite les maxillaires arc-boutés en dessus, chacun sur son congénère, se plissent et prolongent leur partie coudée sur la face pala- tine, jusqu'à ce qu'ils aient gagné le bord opposé, c’est-à-dire la ligne médiane. Chaque palatin s’étend pareillement du dehors vers cette même ligne; le même fait est également reproduit chez les reptiles, en ce qui concerne le palatin postérieur ou l’hérisséal. Il suit de là que toute la lame osseuse du ‘palais est le produit du prolongement vers la ligne moyenne de toutes les pièces latérales, les intermaxillaires, les maxillaires, les palatins et les hérisséaux; mais plus on remonte haut dans les développemens du fœtus, et moins cette ligne est fermée; et en parcourant la série des espèces, on trouve que chez plusieurs cette ligne n’arrive que d’une manière incomplète à son entière ossification. Que voit-on à cet égard chez les poissons? tantôt l’état embryonnaire et tantôt les heures suivantes du développe- ment, c’est-à-dire les conditions du premier âge fœtal, les- quelles sont maintenues. Toute la face palatine est ouverte à partir de la ligne médiane; il n’y a ni palais en dessous, ni canal respiratoire en dedans ; ou peut-être est-ce le cas d'admettre au contraire deux palais , mais rejetés sur les côtés; deux palais, l’un à droite et l’autre à gauche; et au surplus il est bien entendu que je ne présente ces résultats qu’à titre explicatif et qu’en faisant allusion à ce qui existe 55* 432 DE L'AILE OPERCULAIRE chez les autres vertébrés ; car pour exprimer ce fait dans toute sa simplicité, il me suffit de dire que le développement pro- gressif manque à ces pièces qui, en effet, croissent et vieïllis- sent en retenant le caractère des premières formations. Mais quoi qu'il arrive , la couche osseuse qui formoit la voûte palatine est largement entr'ouverte; elle s’est rompue sur le centre de telle façon, qu’au lieu d’un long canal osseux respiratoire, il ne reste plus qu'un large sinus; et comme c'est dans ce large sinus que tous les élémens composant les appareils branchiaux viennent prendre attache , je puis ajouter, il ne reste plus qu’un large sinus osseux respiratoire. La voûte de ce sinus n’a point éprouvé de modification : elle est dans les animaux respirant dans les deux milieux également formée par les faces inférieures des lames qui ser- vent de lit à l'organe olfactif et au cerveau. Les choses sont à cet égard restées dans le même état. La conclusion de tout ceci est donc que le dessous des cel- lules olfactives et de la chambre encéphalique, est chez les animaux des deux systèmes également dévolu à l'organe de la respiration; mais qu'arrivant le cas où l’un d’eux est comme passé à la filière et se trouve formé d’un appareil vésiculaire et sanguin par derrière, et d’un long pédicule canaliculé par devant, le dessous du crâne, proprement dit, est de même disposé en un tuyau plus ou moins long, qui n’est au fond que le premier segment du long pédicule formant les voies aériennes des poumons. Mais arrivant le cas contraire, où l’autre système est rassemblé, ramassé et comme concentré, ce large amas de parties respiratoires vient très-heureusement s’encastrer dans le large sinus qui se trouve développé par la OU AURICULAIRE DES Poissons. 433 retraite ou du moins par l’écartement des os maxillaires et palatins. Ainsi , quoi qu'arrive à l’un ou à l’autre des deux systèmes de respiration , comme dans quelque mesure que se trouve être la base du crâne, soit ouverte, soit fermée, elle est cons- tamment dans un même rapport de situation à l'égard de l'appa- reil respiratoire qu’elle recoit ou qu’elle précède. Aïnsi la règle suprème de la Philosophie anatomique, Le principe des con- nexions, recoit dans ce cas, où certes on n’en attendoit point la rigoureuse observation, l'application la plus lumineuse, en même temps qu'il lui est de cette manière rendu un témoi- gnage non équivoque et sans doute bien admirable de sa fécondité et de son immutabilité. Par conséquent, enfin, les deux milieux où se passent les phénomènes de la respiration viennent aussi porter leur influence sur une des surfaces crâniennes. C’est la question que j'avois posée au commencement de cet article, et l’on n’a sans doute point déjà perdu de vue l’irrésolution de mon esprit au moment de l’énoncer, tant nos anciennes idées sur l’organisation nous avoient mal disposés à ce que ce put même devenir un point à controverser. ArTicLe I. Détermination de l'aile auriculaire des poissons. à En attendant que je puisse donner le travail étendu que j'ai préparé sur le crâne de ces animaux, je profiterai aujour- d’hui de ce que j'en aï autrefois fait graver les os operculaires ou auriculaires pour en présenter la détermination. Je ne 434 _ DE L'AILE OPERCULAIRE puis songer à revenir sur l’opercule proprement dit, lui ayant consacré un fort long article dans le premier volume de ma Philosophie anatomique ; 1 suffira aujourd’hui d’un simple extrait, que je trouve habilement resserré dans le passage qui suit, et que je transcris textuellement. « Le premier mémoire de M. Geoffroy a pour objet la nature de l’opercule. Son opinion à cet égard est très-hardie, ef cependant c’est peut- étre dans toute sa théorie celle qu'il sera le plus difficile d'attaquer, du moins en n’employant que la voie de compa- raison. l’auteur pense que les quatre pièces reconnues depuis long-temps dans l’opercule, répondent au cadre du tympan et aux osselets intérieurs de l'oreille des quadrupèdes. Selon lui, le cadre du tympan est ce que M. Cuvier nomme préopercule. L'opercule répond à l’'étrier, l’intéropercule au marteau, le subopercule à l’enclume, etc. » Voyez l'Analyse des travaux de l'Académie royale des sciences pendant l’année 1817, par. M. Cuvier; page 25. J'ai fait figurer ces pièces, celles même de l’opercule, dans mon ouvrage précité, pl. F, fig. 8 et 12, où elles sont dési- gnées, savoir : le Stapéal (létrier ou l’opercule ) par la Lett. o; le Malléal (le marteau ou l’interopertule) par la Lett. », et l’Incéal (l’enclume ou le subopercule ) par les Lett. el. (J'avais, en 1817, sur une indication trom- peuse, considéré cette pièce comme partagée en deux frag- mens distincts. ) J'ai donné plus tard, avec plus de détails et de précision, la détermination des pièces formant la souche ou le support de ces dernières, et; je les avois fait représenter (Voy. vol. 9 de ces Mémoires, pl. VI, fig. 7 et 8), en me réservant de leur OU AURICULAIRE DES Porssons. 435 consacrer un texte plus tard. Les réflexions qui suivent m'’acquitteront de ce devoir. Nous avons vu dans l’article précédent tous les os de la voûte palatine quitter la base du crâne pour s’écarter du centre et pour s’incliner sur les côtés ; nous les avons vus, murailles sans épaisseur, venir s'établir au-dessous du cercle inférieur de l'œil, cercle formé de l’adorbital et des osjugaux, afin d'accroître en ce lieu l'aile ou la région de la joue; c'est-à-dire que les parties palatines et jugales reproduisent ce fait singulier. du système operculaire, le rejet en dehors et l’'aplatissément de parties, existant ailleurs, au contraire, sous une forme globuleuse; mais ce n’est pas seulement en avant et en arrière que ces circonstances se manifestent, cela même caractérise encore toutes les parties situées intermé- diairement. Quelles seroient ailleurs ces parties indiquées par cette situation ? La réponse est facile : chez les Mammifères, la caisse , et chez les Oiseaux l’os carré. Liesquelles existent chez les poissons, entre les arrière-palatins et les osselets de louie? Nous ne pouvons que répéter la réponse précédente. Il ne sauroit exister là que la caisse comme chez les Mammi- fères , que l’os carré comme chez les Oiseaux ; mais, devons- nous nous empresser d'ajouter, ce sont ces mêmes parties alors nécessairement frappées du caractère propre à tout maximum de composition, caractère dont l'essence est d’ac- croitre, de désaggréger , de multiplier les effets de la fonction générale, comme de sous-diviser ces parties distinctement - en les disséminant. Il ne pouvoit tomber sous le sens que les osselets de l’ouie, si petits chez les animaux de la respi- 436 DE L'AILE OPERCULAIRE ration aérienne, deviendroient du plus grand volume chez les animaux de la respiration aquatique, sans que la cage qui contient ces os ne s’en ressentit dans une même raison et pro- portion : et il falloit bien encore que cette cage, accrue outre mesure , opérât le détachement, la désarticulation de ces élémens constitutifs. Ainsi il n’y a là rien d’extraordinaire , rien qui doive nous jeter dans la surprise; le contraire, le mésaccord des os contenus et des os contenans eussent fait naître, etalors à bien juste titre, ce sentiment. Un autre fait, résultat nécessaire des mêmes engagemens et réactions respectives, c’est l’aplatissement de toutes les parties de la caisse, aplatissement qui contraste singulièrement avec les formes sphéroïdales de cette chambre auditive chez les Mammifères. Dansles félrs, chez lesquels tousles élémens qui concourent à sa formation sont remarquables dans leur ten- dance à former un organe parfaitement isolé, dans le volume qu’ils prennent, dans le ressaut qu’ils montrent en dehors des temporaux, et dans leur diaphragme intérieur donnant lieu à plusieurs compartimens, chaque pièce est une lame arrondie, | laquelle s’emboîte sur une autre ; mais dans les poissons, ce 7 sont des lames minces et droites et qui s’articulent bord contre bord; de là cette grande étendue de tout l’ensemble. M. Serres le premier, dans ses Lois de l’Ostéogénie, a dit le cadre du tympan composé de trois pièces ; je trouve trois pièces correspondantes chez les poissons, J’avois reconnu l’une d’elles dès l’origine comme analogue au cadre tympanique : telle est celle que j’avois, dès 1817, déjà désignée sous le nom de #yrpanal, ou tel est le préopercule de M. Cuvier. Mais je n’avois alors sous les yeux qu'une partie de ce même 0 OU AURIGULAIRE DES Poissons. 437 cadre; la grosse tubérosité du cercle et un petit filet ter- minal m'étoient alors inconnus. Ce que M. Serres avoit trouvé chez l’homme, je l’observai chez tous les animaux, et principalement avec plus de netteté chez les poissons. C’est dans le mouvement de reconnoïissance qu'un secours aussi inespéré, au profit du point le plus difficultueux de mon entreprise, minspira pour son auteur, que je me déterminai à consacrer à ce célebre anatomiste les deux pièces qu’il avoit découvertes, et que j'appelai la grosse tubérosité du cadre serrial et son filet terminal wro-serrial. C’est un acte de justice; tout me garantit la durée de cet hommage. Maintenant qu'on veuille bien distinguer ces pièces dans les figures, dont ceci est le texte explicatif (voyez Mé- moires etc., tome 9, pl. VE), savoir : dans la fig. 7, à gauche de l'observateur, faite d’après le brochet, et dans la fig. 8, à droite et prise du mérou, et nous trouvons les trois pièces du cadre du tympan fournies par les pièces portant les Lett. p,r, s ; p est le tympanal, r le serrial, et s l’uro-serrial. Si c’est la planche T de l’atlas de ma PArlosophie anatomique que l’on consulte, voici les significations des lettres : p est le tympanal, c le serrial, et s{ l'uro-serrial. Mais nous n’avons encore donné que les parties du cadre da tympan. Il entre, dans la formation de ce qu’on nomme caisse chez les mammifères, une pièce qui les recouvre: c'est le cofyléal dont je ne dois la connoïissance qu’à moi- même, l’ayant trouvé d’abord dans le hérisson, puis dans l'homme, et généralement après partout ailleurs : voyez ce que j'en dis dans mon Mémoire sur les os crâniens du ero- codile, Annales des Sciences naturelles, tome 3, page 253. Mém. du Muséum. 1. 11. 56 438 . DE L'AILE OPERCULAIRE . Je n’ai admis quetout récemment que cette pièce est double chez les poissons, et qu’elle se compose d’un cotyléal supé- rieur et d’un cotyléal inférieur. J’y ai attribué dans les fig. 7 et 8 de ces Mémoires, les lettres, savoir : c à l’épr-cotyléal, et à l'Aypo-cotyléal. Ce sont d’autres lettres dans la PI.T de mon ouvrage : # est l’épi-cotyléal et 7 l’hypo-cotyléal. Le cotyléal remplit partout trois principaux emplois, les- quels sont nécessairement persévérans, parce qu'ils dépen- dent des connexions : c’est de servir d'attache à l’hérisséal, d'offrir un point de sa surface à l'articulation de la mächoire inférieure et de couvrir en tout ou partie les os tympaniques. Or, bien qu’une révolution importante soit venue détruire ici un autre arrangement, c’est-à-dire, bien qu'une disposi- tion sphéroïdale soit remplacée par une autre en table, les connexions et les usages indiqués ci-dessus sont parfaitement maintenus. Le cotyléal, ou du moins sa portion inférieure, sert à l'articulation de la mâchoire d’en bas : par son bord antérieur, il s’unit avec l’hérisséal en 4 et avec l’adgustal (x) (1) Il est certain que chez l'embryon humain , l’apophyse ptérygoïde externe forme un os à part du reste de la grande aile : puis il l’est également que l’apo- physe du palatin (portion externe de los) qui se rend du maxillaire sur la gorge faite par la jonction des deux ptérygoïdiens , y est de même alors une pièce isolée. Est-ce à l’une ou à l’autre, ou plutôt à l’ensemble de ces deux pieces, que corres- pond l’adgustal? Penchant vers ce dernier système, j'avais fait, en 1820, établir un dessin par M. Huet, représentant plusieurs palatins de sujets très-jeunes. Mais j'ai depuis réfléchi que, de quelque manière que cette question se décidât en théo- rie, ce n’ajouteroit rien quant aux ovipares à l’essence de l’adgustal ; et je m’en suis tenu jusqu'ici à la détermination de M. Cuvier, d’abord dubitative dans son article Crocodile (Ann. du Mus., t. 12, p. 6), et puis, affirmative à l'égard des serpens -dans les planches du Règne animal. Cependant j’aperçois une autre solution, !et c'est enfin la véritable : voyez le tableau ci-après au mot adgustal. OU AURICULAIRE DES Poissons. 439 en 4; et par son bord postérieur, s’il n’embrasse entièrement, du moins il borde en leur totalité tous les os du cadre du tympan. DRE Mais je n’ai obtenu ces idées pie et, j ose ajouter, tout- à-fait concluantes, que quand j en suis venu à concevoir que le maximum de composition nous donne le Cote séparé en deux pièces. Le trouverai-je ainsi ailleurs? c’est une re- cherche dont je m’occuperaï. Avant cela donc, et il n’y a pas long-temps ( car c’est dans ce présent volume, page 159 ), j'avois donné cette détermi- nation différemment. J’avois ramené l’adorbital vers la mà- choire inférieure; mais l’adorbital est au contraire la pre- nuère partie du cercle inférieur de l'œil; les os qui suivent correspondent au jugal. Cette pièce près la mâchoire, que par erreur j’avois donnée pour ladorbital, qui fournit une apophyse articulaire au maxillaire inférieur, est décidément un deuxième cotyléal ou la seconde portion de cet os. Il m'est aussi échappé de dire inconsidérément, dans ce même volume, page 142, qu'une partie de la première ver- tèbre est exposée à passer sur le crâne, et pourroit bien être devenue la coiffe laissée indéterminée par M. Bojanus, sousle nom de crrsta occipitis. C'est une autre erreur que je cor- rige encore. Cette pièce n’est autre que l’inter-pariétal et les os qui la bordent; l’un à droite et l’autre à gauche, sont les occipitaux supérieurs. M. Cuvier a proposé ces détermina- tions en 1817, dans le 4e. tome de son Règne animal, et je pense qu'elles doivent être approuvées. es 108 A COMPOSITION DE LA TETE O SSEUSE CHEZ L'HOMME ET LES ANIMAUX, SYSTÈME VERTÉBRAL. NO MENCLATURE NOUVELLE POUR L'HOMME ET LES ANIMAUX. NOMENCLATURE ANCIENNE DE L’ANATOMIE HUMAINE. Quatrième vertèbre. VERTÈBRE CÉRÉBRALE: Cotyléal....4,..5, sos... Cotyléal...... Ptéréal.... NRA EU A loi se «se, Ptéréal.. sr Corps antérieur du sphénoïde. Pièces inaperçues. Grandes ailes. CE A $ gl Ethmophysal............,...... Ethmophysal. | Cornets supérieurs, 5 % | Adnasal...... eiNe JU EM DSQNE Adnasal..... . | Maxillaires (segment des incisives ). 3 8 ee... Protosphénal.......... . | Pièce inapercue. À É Adgustal...... ae TR Le STATS ... Adgustal...... | Maxillaires (segment palatin). es E Rhinophysal........... ........ Rhinophysal.. | Cornets inférieurs du nez. Ed $ Lacrymal.............. Mobile Lacrgmal...... | Os unguis. è © Addental.......... HARAS ...... Addental...,. | Maxillaires ( segm. des dents moyennes) 8 F jette. La Rhinosphénal.........21| Lame ethmoïdale. È ë Palatal... JR IAA Pere Palaleeste Palatins. ë ë Moméral2ieinetene Rennes + Voméral,.... | Vomer. Se $ £ Näsal. 2, 10 DARDPAASA AG AUE Nasal....,.,. | Os du nez. È 5 Adorbital..... DAT ART RS Adorbital..... | Maxillaires ( segment orbitaire ). à 2 à . eetoleede le tene Ethmosphénal. ses... | Corps de l’'Ethmoïde. ë À Hérisséal Le ..... Hérisséal. Apophyses ptérigoïdes internes. © E< e . . . . > . & à Iügrassial..60.294.441100.2,93 .. Ingrassial..... | Petites ailes on ailes d'Ingrassias. Frontal...:.,........ ss... Frontal....... | Coronaux. Jugal......... dafioe ec slesie ae vraie Jugal......... Jugaux ou zigomatiques. Cinquième vertèbre. VERTÈBRE QUADRIJUMALE. Pariétal..… Temporal. 0... salioetePariétals aura Lhodono bb one +... Temporal..... Ne Hyposphénal. . AAA an PRE Pariétaux. Portion écailleuse du temporal. . Corps postérieur du sphénoïde. Serrial..... Dore ice AÉrBbuE a lieie Serrial.....,.. | Grosse tubérosité. 2°. Segment. Uro-serrial...............:. .... Uro-serrial.... | Pointe de celle-ci. 5°. Segment. $ £ Inter-pariétal.....,......,.,.,. «+ Inter-pariétal. . | Segmens antrs. de l’occipital supérieur. $ 5 Rupéal, 21e lee euois eeleieielLiotetess Rupéal....... Rocher. - D 2 d 1 » Sa de DO Oro 0e Otosphénal. ess +... | Segment antérienr du basilaire. $ a i à £ Tympanal..…... een suetseieese Tympanal.. Cercle du tympan. 1°. Segment. a ë Malléal...... 5 A ALESIS HérstMalléal es Marteau. - > 3 Fe S. R | Sur-occipital............,.. .:... Sur-occipital.. | Segmens post':. de l’occipital supérieur. S SE jte NE ; SRE Ex-occipital......,.,..., le et Ex-occipital... | Occipitaux latéraux. RUE Ÿ à = : à “ul Salle leisiete Re .Basisphénal. ss... | Segment postérieur du basilaire. À à ë Stapéal..….. DEA SR RENTE EN Se co + Stapéal.... ... | Etrier. S É Incéal..... SHO ARTE EEE Sins eiateiee Incéal........ | Enclume. pal ES “Yaqi 21qu9n0u tt 2 a . y agi 21q 1 € sepueepe see cpercee tereeeesesesereuten (68 28ved pt — SDW ÿ 9 —————— GX A XL" fomomeu dnoistpp uns “hagr Aomoof gt 97 ‘uononnsuoy “1 UN NP Ssoromupp sof ‘[erpu?8 U9 AUAILUIA VI 10$ “AO 7 ‘UO192DP21 2WPIS101? AN] D IUOS TNDI]Q01 27) “uMmEUDs ous Âs np 2711009 RER OR AAC GS CAL CT ARE "JDL9S-01N 19 701128 9 pBeyred tssne {sotpimnueut 5 S2[ 7949 19 suossiod so] 7049 ‘159 [ELI0S 9'T °7097/409-0dÂy uvippiu sd102 “AUTTLUI À 29 097/109-1d2 wo pSvuvd suossrod say 2949 159 [2214109 T ronomemdsai-otuvis junvo o[ suep ooejd 1sure auouuoid sopo foiqoutos omonqoupd eç op suawofo sonbjonb op suepop us quesodiaquis : SIDILOP S9] 299 SJ9U109 so[qei DE LAS EP RCE EE ES De AS CHA ‘end 4a -H?A 0p 1uomnSU0) 19 S2SNOUIAVO SUTOU no sn[d somgux ° 70 1821047) ÆLAOL -SaT[9 JS SoronT}t ‘sapuinouo9 AHOUISIRAID quos sors 91IPUO) ne puenb € srormro1d Sa[ Z9U9 Ssouuaque Sep uryuo TIVAGI -a11D/qnpout 15 ÂS AUdUUIIA9D 19 SOUHOJIp} ‘sosnopnqu ‘saiuveqpes 019109 uo np SapsS0dS1p 19 S99STAIP 100$ 2A19JIO ouviquou eg quorod mb ÿ l PSIA b : sepprdrpioocsoeoo se 271809 ° ete1d SaSN2SSO SAP SOL ÉSPIQPIIIA XNEUWIUE So] 2049 owanqnuod 10 ET gi 7e F1 4 "IVHAALUHA ANALSAS