MEMOIRES _POUR SERVIR A L'HISTOIRE ET A L'ANATOMIE DES MOLLUSQUES, Conseiller d'Etat ordinaire, Secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences de l'Institut royal ; Membre de la Société royale de Londi'es , de l'Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Prusse , de l'Académie impériale des Sciences de Pétersbourg , des Académies royales des Sciences de Suède, de Turin, de Bavière, des Sociétés royales de Goettingue, de Copenhague, d'Edimbourg, de l'Institut royal des Pays-Bas, etc., etc. ^yéveo Su /uoûtcaeJ en ùacue"= douce. A PARIS, CHEZ DETERVILLE, LIBRAIRE, RUE HAUTEPEUILLE, N." 8. DE L'IMPRIMERIE DE LEBLANC. 1817. AVERTISSEMENT. UJt J-JA plupart de ces Mémoires ont été publiés sépa- rément dans les annales du Muséum d'Histoire naturelle. L'Auteur , en les rassemblant et en les complétant par quelques Mémoires nouveaux , se proposait d'abord de faire précéder cette collec- tion d'un Discours préliminaire sur les rapports des animaux sans vertèbres , et sur leur véritable classification; mais il a pensé que les principes qu'il aurait pu développer dans ce Discours , sont devenus tellement vulgaires depuis quinze ans , soit par ses propres travaux, soit par ceux des naturalistes qui ont adopté ses idées, qu'il est presque superflu de les reproduire séparément. 11 se borne donc à offrir aux Amateurs de la science des descriptions et des figures propres à leur rendre très-sensible l'orga- nisation compliquée de ces animaux. On y verra à quel point plusieurs d'entr'eux se rapprocbent des animaux vertébrés, et l'on se convaincra qu'il n'est plus possible de les laisser, comme l'avait fait Lin- nœus, dans la dernière classe du règne animal, con- Tj AVERTISSEMENT. fondus avec les polypes à bras et d'autres zoopliytes aussi simples. Au reste l'oii trouvera l'exposé de leur véritable distribution méthodique dans l'ouvrage que l'auteur publie, en même temps que celui-ci, sous le titre de Règne animal. TABLE DES MEMOIRES. Pag. PI. ï.«' Sur les Ccphaîopofles et leur anatomie. : 54 4 ÎI. -Sur ic- Glix) BoreaKs lO l III. Sur Z^Hj'^le, sur un nouveau genre de Mollusques nuds {.leVnenmoàevmeyetsur l'établissement (l'un nouvel ordre de Mollusques ( les Pléropodes). . . 12 1 tV. Sur le genre Tritonia , ai^ec une espèce nouvelle ( Tiilonia Honilierj^ii ) 16 3 V. Sur le genre Doris 28 2 VI. Sur la Scyllée, /^Eolkle, le Glaucus, avec des additions au Mémoire sur la Tritonie 3o i \II. Sur h gejire ^héûns, et sur son anatomie i4 1 VIII. Sur la Pliyllidie et le Plcurobranche 12 1 IX. Sur le genre Aplysia , vulgairement nommé Lièvre marin 24 4 X. Sur les Acères, ou Gastéropodes sans tentacules apparents 18 2 XI. Sur la \Àmnce et le CoWmacon 46 2 XII. Sur la Dolabelle, la Tcslacelle et la Parniacelle. ... 10 l XIII. Sur Z'Oncliidie et sur une espèce nouvelle ( Onchidlum Peroiiii) l4 1 XIV. Sur le Limnée et le Planorbe l4 l XV. Sur la Janlbine et la Pliasianelle 16 1 XVI. iS«r/a Vivipare d'eau douce, les Turbo, les Trochus, etc. 20 1 39751 jj- -viij TABLE DES MÉMOIKES. XVII. Sur le Bucinum undalum 12 l XVIII. Sur Z'Haliotido, /^ Sigaret, Za Patelle, /a Fissurelle, /^Emarginule, la Crépldule, la Na-vicelle, le Cabo- chon, Z'Oscabrion et la Plérolrachée 4o 3 XIX Sur les Thalides et les Biphores 24 l XX. Sur les Ascidies et leur anatomie . . . 5o 3 XXI. Sur la Llngide 12 XXII. Dissertation sur les espèces d'Ecrevisses connues des anciens 20 1 MÉMOIRE SUR LES CÉPHALOPODES ET SUR LEUR ANATOMIE. J^URPASSANT en grandeur tous les autres mollusques de nos mers , frappant les yeux par des formes bizarres , compli- quées , et qui n'ont point leurs pareilles dans le reste du rè- gne animal, fournissant un aliment, sinon agréable, du moins abondant^ se fesant l'emarquer enfin par Cîtte liqueur noire que la nature leur a donnée , comme principal moyen de défense , les seiches , les calmars , et les poulpes ont dû de ' bonne heure être observés par les pêcheurs et attirer l'attention des physiciens : aussi Aristote paraît-il avoir connu leur histoire * et même leur anatomie , à un degré vraiment étonnant; les modei^nes n'ont presque rien ajouté à ce qu'il a dit de la première , et l'ont peu trouvé en défaixt sur la seconde. Pendant près de deux siècles après la renaissance des let- tres, on se borna à-peu-près à copier Aristote, etSwammer- dam fut un des premiers qui s'occupèrent de compléter ce qu'il avait dit. On trouve vers la fin du Fiiblia JSatnrœ^ une lettre de ce grand anatomistesur la seiche, adressée au cé- lèbre Redi, où il en décrit, avec beaucoup de soin, les parties * Du Hist. An. L. IV, c. I el c. 8 ; 1. V, c. 6 et i8 ; 1. vi, c. i3 ; 1. viii , c. 2 et 3o ; 1. IX, c. 56. De Pari. An. L. iv, c. 9. ' I 2 MEMOIRE extérieures et la langue , un peu moins exactement les viscères et les nerfs , et d'une manière tout-à-fait fausse les oi'ganes de la circulation. Plusieurs années après , Alexandre Monro , dans sa Phy- siologie des Poissons, donna l'anatomie du calmar, oii il rec- tifia ce que Swammerdam avait dit d'erroné sur les cœurs , et où il ajouta encore plusieurs faits împortans à ceux qu'avait fait connaître l'observateur hollandais ; nommé- ment l'absence de chambre antérieure dansl'œil, celle delà veine porte, la présence des pierres de l'oreille, etc. 11 y proposa cependant aussi quelques hypothèses hasardées. Plus récemment encore, M. Scarpa^ dans son Traité des Organes de Vouie et de V odorat, publia, sur l'oreille et sur les nerfs de la seiche, des détails précieux et dignes de cet excel- lent anatomiste, sauf de légères erreui^s sur le cours des nerfs. M. Tilesius , enfin, a donné depuis peu , dans le Magasin anatomiqiie d' Isenjlamm , deux longs Mémoires , l'un sur les céphalopodes eu général , et sur leurs parties dures, notamment sur la structure de l'os de la seiche ; l'autre sur le système nerveux de la seiche en particulier, où il s'est aussi glissé plus d'une erreur. Mais personne que je sache n'a disséqué le poulpe, ou du moins personne n'en a fait l'objet d'un traité spécial ; c'est pourquoi je le prends pour type de cette classe de mollusques , et pour objet principal de mon travail. Chacun sait que Linnaeus avait réuni tous les céphalo- podes nus , en un seul genre , nommé scpia , et que Scopoli et M. de Lamark ont rétabli la division , anciennement in- diquée par Aristote, en poulpes , seiches et calmars. Ces mollusques forment, en efTet , trois groupes, auxquels le poulpe commun {sep. octopodia L.), la seiche [s. offici- SUR LES CÉPHALOPODES. 3 naîisL.) , et le calmar ( s. loligo L. ) , servent de types. Les deux derniers ont , outre leurs huit pieds, deux organes de mouvemens beaucoup plus longs , munis de ventouses à leur extrémité seulement , qui paraissent leur servir d'an- cres pour se maintenir pendant les tempêtes , et d'instru- iiiens pour accrocher au loin leur proie. Leur corps est bordé de nageoires , et dans la chair de son dos est enchâs- sée une partie dure, calcaire dans les seiches et cornée dans les calmars. Le premier groupe, celui des poulpes, n'a point les longs tentacules , ni les nageoires , et son dos ne contient que deux petites pièces cartilagineuses, qui sont loin d'en garnir toute la longueur. Ces différences dans l'organisation, en nécessitent dans le genre de vie. Les poulpes , qui ont de longs pieds et le corps rond et petit , marchent aisément. 11 viennent souvent à sec , cherchent les endroits rocailleux et inégaux 5 cependant ils sont aussi d'excellens nageurs , et en redressant et rapprochant su- bitement leurs pieds , ils se meuvent dans Teau avec ra- pidité , portant toujours leur sac en avant et leur tête en arrière. Les seiches et calmars , dont le corps est long et pesant à cause de l'os, et les pieds très-courts, préfèrent le fond de la mer , et ne vont guère qu'à la nage , pour laquelle ils n'ont même que des organes médiocrement appropriés ; ils pei^dent à terre la force et le mouvement. C'est la brièveté des pieds qui leur a rendu un autre organe nécessaire , et qui a exigé ces longs tentacules , nommés bras , dont les poulpes n'avaient pas besoin , à cause de la longueur de leurs pieds. Tous les céphalopodes se nourrissent de coquillages , d'écrevisses , de crabes , etc. ; ils les enveloppent de leurs longs bras, semblables à des serpents j les serrent avec leurs \ 4 MEMOIRE ventouses; leur ôlent tout mouvement et se rendent ainsi maîtres d'individus souvent plus grands qu'eux; les cui- rasses si dures, et souvent épineuses des crustacés, ne ré- sistent point à leur bec tranchant, et ils ne s'eflPrayent guère des serres si fortes , et si bien garnies de dents , de ces ani- maux, he poulpe , sur-tout, est en horreur sur nos côtes de la Manche, à cause delà destruction qu'il fait, pendant l'été, des crustacés les plus recherchés.; à peine les pêcheurs peu- vent-ils alors trouver des homards ou des crevettes dans les heux rocailleux; et presque tout ce qui échappe au poulpe, reste plus ou moins mutilé. Ce céphalopode n'est pas sans danger pour les nageurs j il est très-vrai qu'il entortille quelquefois leurs jambes , et les fait périr en empêchant leurs mouvemens ; mais nous croyons devoir ranger parmi les fables tout ce que l'on a dit de poulpes, assez grands pour dévorer les hommes; à plus forte raison les récits extravagans renouvelés des auteurs du moyen âge , où il est question de poulpes grands comme des îles ou des montagnes. Une particularité remarquable des céphalopodes , est cette encre dont ils obscurcissent l'eau qui les entoure, à la moindre apparence de danger, ou même simplement pour se cacher aux yeux des animaux dont ils veulent faire leur proie. Cette liqueur, dont je décrii-ai les organes., est du même genre que la véritable encre de la Chine, et peut en tenir lieu. Sw^ammerdam l'avait déjà soupçonnée pour l'encre de la seiche; et, en effet, chacun sait qu'on la prépare aujourd'hui en Italie , de sorte qu'elle ne diffère de celle de la Chine , qiie parce qu'elle est un peu moins noire. M. Bosc assure avoir ouï dire que les Chinois font la leur avec l'encre du sepia rugosa ; j'ai vérifié, par l'ex- SUT\ LES eÉPHALO rODES. 5 périence, que celle du poulpe et du calmar en approche plus que celle de la seiche. Ou l'exprime du tissu cellulaire qui la contient dans un état de bouillie un peu épaisse ; mais elle se délaie dans l'eau, et en teint, en un instant, un volume très-considérable. Reçue dans un vase, elle s'y des- sèche en peu d'heures, et s'en détache en écailles , sem- blables à celles de l'encre de la Chine ; je m'en suis servi pour dessiner les planches de ce Mémoire. Il sei^ait facile d'en faire une petite branche d'industrie, sur-tout sur les côtes oii ces animaux sont très- abondans. Comme la bonne encre de la Chine est assez chère , et que son usage augmenterait si le prix venait à en baisser, on pour- rait espérer quelque profit de ce genre de travail. Les céphalopodes ont tous les sexes séparés , mais on ne leur a point reconnu d'organes propres à l'intromission j et si , comme quelques-uns l'ont avancé, la ponte est pré-' cédée d'embrassemens , etd'approches entre les mâl^s et les femelles , ce ne sont , à coup sûr, que des moyens irritans , comme l'accouplement des grenouilles; d'autant qu'on sait que le mâle asperge de sa laite les œufs déjà pondus. Ces œufs ont des formes singulières , et différentes selon les espèces; ils sont ordinairement réunis en grappes, par un enduit commun, gélatineux et transparent dans les cal- mars; opaque et corné dans les seiches, oùles grains, ronds et séparés, resseiaiblent tellement à ceux du raisin, que les pêcheurs leur ont presque par-tout donné le nom de raisin' de mer. Quant aux êtres singuliers qui se trouvent, à certaines époques, dans la laite, et que les observations deNeedham ont rendus si célèbres , nous y reviendrons en traitant des organes de la g.éaération. 6 MÉMOIRE BU Poulpe. §. I. — Des parties extérieures ^ et de leurs différences selon les espèces. Le corps du poulpe a la forme d'une bourse ovale , ou arrondie , ouverte par devant , comme une gibecière , et continue par la partie postérieure ou dorsale, au cou et à la tête ; en sorte que, par derrière , la tête n'a pas l'air de sortir du sac , comme dans la seiche et le calmar. Celte tête n'est pas plus grosse que le cou, et de sub- stance assez molle. Les yeux sont à sa partie postérieure; leur iris est doré ; l'ouverture de la pupille paraît en rec- tangle longitudinal. Le sommet de la t^te s'évase en cône renversé , obtus , et se divise en huit pieds presque égaux et fort longs j dans l'individu que j'ai décrit, ils avaient un pied et demi de longueur, et dix-huit lignes de diamètre à leur base. Ces bases sont réunies par une membrane quis'étendàquelquespouces, et fait le même effet que celle d'entre les doigts des canards. Les pieds se terminent en pointe très-déliée, et sont sus- ceptibles de toutes sortes de mouvemens et d'inflexions. Leur face supérieure est garnie de deux rangs de suçoirs, qui vont en diminuant et se rapprochant toujours de la base à la pointe. Auprès de la bouche , il n'y en a qu'un seul rang de trois ou quatre sur chaque pied. On compte en tout environ deux cent quarante suçoirs sur chacun. Ce sont des disques orbiculaires , plats , sillonnés en rayons , à surface grenue et rude au toucher , percés dans SURLEPOULPE. H leur milieu d'une petite ouverture ^ les disques sont immé- diatement appliques sur la peau, et non portés sur des éminences ou des pédicules, comme dans le calmar et la seiche. Nous verrons plus bas leur organisation interne. Au centre des pieds est la bouche , ouverture circulaire de quelques lignes de diamètre , entourée d'une lèvre char- nue, sous laquelle on aperçoit le bec. A l'orifice de la bourse , en avant du cou , et sous la paire antérieure des bras est l'entonnoir ; organe charnu ,' conique, et ouvert aux deux bouts ; il sert de bassin ou de cloaque ; et comme l'animal marche toujours le corps en haut , l'encre , les excrémens , et la laite , sont transmis au-dehors par l'entonnoir, sans salir aucune partie exté- rieure. Toutes ces parties sont reyêtues d'une peau très-làche , épaisse, pointillée de brun. Un lacis de vaisseaux y forme par-tout des aréoles de diverses grandeurs; une liqueur rousse épanchée dessous , y produit des taches de même couleur , qui changent de situation à chaque instant ; le dos , et la face externe des pieds sont plus constamment roux que les parties opposées. Tel est le poulpe le plus commun le long de nos côtes; mais il en existe quelques autres qui ont été bien distingués par M. de Lamark : le premier, le poulpe granuleux , a le corps plus grenu ; les bras moins longs à proportion , et garnis seulement de quatre-vingt-dix paires de suçoirs. Les deux autres n'ont qu'une seule rangée de suçoirs sur cha- que pied; caractère qu'Aristote avait déjà parfaitement saisi , distinguant , par le nom à'élédons , les espèces qui en étaient pourvues. 8 MÉMOIRE §. II. — Intérieur de la bourse. Si l'on fend longitudinalemenl la bourse par un côté , on voit que la peau se réfléchit en s'amincissant , pour en tapisser l'intérieur, jusque vers son milieu , où elle revient sur la niasse des viscères , et jusqu'à l'entonnoir; on aper- çoit , des deux côtés de la hase de l'entonnoir, une calotte ( kk. fîg. 1 , pi. I. ) qui ferme cette partie de la hourse , et empêche que rien ne puisse sortir ni entrer que par l'entonnoir. On observe que la masse des viscères, ainsi enveloppée de la peau, adhère à la bourse, i*'. par le fond; 2°. à son bord postérieur derrière le cou; 3°. par une bride longitudinale charnue h. ih. , sous le bord anté- rieur; 4°- par deux brides latérales également charnues /./. ih. On est frappé par les deux branchies m. m. ib. , en forme d'arbres pyramidaux , situées de chaque côté entre la bourse et les viscères, adhérentes par les troncs de leurs gros vaisseaux à la masse des viscères , et par un de leurs côtés à une bande charnue n.n. ib.^ qui, elle-même, est sus- pendue à la bourse parsonbord postérieur. Unpetit faisceau charnu part de la base du gros vaisseau antérieur, et s'épa- nouit sur l'enveloppe des viscères o. o. On distingue deux pilliers charnus et saillans e. e. , qui partent des côtés de la base de l'entonnoir, et vont se terminer dans l'angle entre chaque branchie et la masse des viscères. L'enveloppe générale de la masse des viscères est percée dans la femelle de cinq, etdanslemâle de quatre ouvertures, qui donnent dans la cavité de la bourse. La plus élevée donne mémedans l'entonnoir; c'est l'anus /;.Lesdeuxsuivantes , Jig. 3 ; pi. I , qui reçoit des brandies ww des intervalles de tous les pieds, sous la SUR LE POULPE. xj couche musculaire externe de la membrane qui les unit. Les deux côtés du cercle se réunissent sur le devant de la tête, derrière l'entonnoir, en un tronc commun z,fjg. i, pi. II, qui descend au-devant de la tunique charnue du foie, et au côté gauche du rectum, et se loge dans la bride antérieure de la bourse , et dans la cloison qui sépare les deux cavités veineuses jusqu'aux deux tiers de la profon- deur de la bourse où il se bifurque en (5», pi. Il, /. i . Les deux branches du cercle veineux de la tête entrent dans le tronc commun d'une manière oblique, et leur ori- fice y est accompagné d'une forte valvule semi -lunaire. (M, Jîg. 2; pi. II. Derrière l'entonnoir le tronc reçoit les veines de l'en- tonnoir même, i, i , fig. i, pi. II; un peu plus bas il lui en vient de la face antérieure du foie , 2 , 3 , 7(^. ; plus bas encore il en reçoit une de la bourse au travers de la bride musculaire antérieure , 4 j i^- Immédiatement après la bifurcation, chaque branche en reçoit une presque de même force qu'elle, qui a cela de remarquable qu'elle s'y rend sous un angle entièrement contraire à la direction du sang. Labi'anche accessoire du côté droit, 5, ilf. , qui s'enfonce promptement en arrière, tire ses rameaux du bas du foie de ce côté, et des circonvolutions voisines de l'intestin-, il lui en vient aussi un du testicule ou de l'ovaire 5 celle du côté gauche, 6, i^., Gtjîg. 3, pi. 11^ qui monte un peu plus, et reste plus en avant, tire ses rameaux du côté gauche du foie , de l'estomac , et des parties voisines de l'œso- phage. La branche principale, de chaque côté, descend encore un peu, se recourbe eu dehors, et remonte pour se ter- 3 l8 MÉMOIRE miner dans le cœur latéral , ou branchial de chaque coté. Outre cette grosse branche , l'oreillette de chaque cœur latéral reçoit une autre veine, '], '])Jîg' i, pi- III, etjig. 3, pi. II, qui a deuxbranches, et qui amène le sang des parties latérales de la bourse, et du ligament charnu qui porte la branchie. Cette oreillette est même plutôt le sinus de ces deux veiues , qu'une oreillette véritable ; il faut dire , ce- pendant, que sa partie, qui reçoit les veines de la bourse et du ligament , est bien garnie de petites colonnes char- nues. Ainsi , tout le sang veineux des diverses parties du corps aboutit à ces deux cœurs latéraux , qui le transmet- tent aux blanchies. 2°. Des Corps spongieux adhérens aux' quatre grosses veines. Les deux branches principales dans lesquelles le tronc veineux se divise, et les deux branches accessoires qui aboutissent à celles-là, traversent les deux cavités que nous avons appelées veineuses , ou plutôt font saillies dans leur intérieur, en restant cependant couvertes par leur tunique muqueuse. Dans tout cet intervalle , elles sont garnies de corps de l'espèce la plus singulière, marqués xx ,Jig. i et 3, pi. II, et/ig. I , /;/. III, d'apparence spongieuse, de couleur jaune , répandant , quand on les presse , une mucosité opaque et jaunâtre ; et , ce qu'il y a de plus ex- trordinaire et peut-être d'unique , communiquant par des trous fort ouverts dans l'intérieur des veines auxquelles ils adhèrent. Voyez u,u , u .^Jîg. 3 , pi. II. Les canaux courts où ces trous donnent, sont eux-mêmes percés d'autres SURLEPOTJLPE. ig trous fort nombi^eux , et ainsi de suite ; en sorte que cha- que corps spongieux est creusé intérieurement d'une in- finité de vaisseaux courts, donnant tous les uns dans les autres, et définitivement dans la veine. Comme il est im- possible que ces vaisseaux ne soient pas aussi remplis de sang, on peut , si on le juge à propos , les considérer comiiie des veines ; mais leur étendue, compai'ée aux très -petites artères des corps spongieux, ne permet pas de croire qu'ils n'ayent autre chose à faire que de rapporter dans le tor- rent veineux le sang fourni par ces artères. Il est donc beau- coup plus probable que ce sont ou des diverticules dans lesquels le sang veineux aurait à se subdiviser, pour éprou- ver, au travers des parois du corps spongieux, 1 influence de l'élément ambiant; ou, ce qui reviendrait au fond à-peu- près au même, des canaux excréteurs, par lesquels le corps spongieux verserait dans la veine quelque substance qu'il n'aurait guère pu lui-même extraire que de cet élé- ment ambiant; ou, enfin, des émonctoires, par le moyen desquels le sang se débarrasserait de quelque principe qu'il verserait au-dehors par les pores et les replis extérieurs des corps spongieux. Cette dernière idée prend assez de vraisemblance , par cette abondante mucosité jaunâtre que les corps spongieux répandent si tôt qu'on les presse. Quoi qu'il en soit , il est certain que la communication , entre l'intérieur de ces corps et le dehors, est très-ouverte; car, en soufHant ou en injectant la veine, l'air ou l'injection passe très-aisément dans la cavité veineuse que cette veine traverse ; et, réciproquement, en soufflant dans la cavité, par son orifice extérieur, il arrive assez souvent que la veine se remplit d'air. ao JHE MOIRE 3°. Des Cœurs latérauar. Chaque cœur latéral 9 , Qijig- i et 2 , pi. I , Jîg. i et 3 , pi. il , et fig. 1 , pi. III, est situé à la base de la bran- cliie de son côté ; sa forme est à-peu-près celle d'une poii'e arrondie vers l'entrée de la veine , rélrécie à la sortie de l'artère 5 sa substance est assez épaisse et d'une couleur noirâtre , qui lui est particulière 5 sa solidité est médiocre; et son tissu semble plutôt cellulaire que charnu. Sa surface interne estci'euséede beaucoup de petites cavités rentrant les unes dans les autres, lO; 10, Jig. 3, pi. II. L'orifice par oii il reçoit le sang veineux est garni de deuxlarges valvules 12, «7»., à qui leur fonction et leur figure peuvent valoir, à juste titre, le nom de mitrales ; mais il n'y a aucune valvule ni rien qui puisse en tenir lieu à l'origine de l'artère branchiale 13, ib. 4°. Des Branchies. Elles se voient en place m ,fg. i , pi. I , etfg. i , ;;/. Il ; détachées rn, fg. 1 , pi. i , eifig. i , pi. III; les détails en sont exprimés dans cette dernière /g^/^re; et sur- tout dans la troisième de la ;?Z. II. Chaque branchie est suspen- due à un large et épais ruban charnu A, qui lui-même tient à la bourse , par la peau qui les revêt l'un et l'autre , et par de la cellulosité. Elle se compose de deux rangs de feuillets branchiaux, tenant d'une part au ruban charnu par des pé- dicules a, a, et s'unissantde l'autreavec les feuillets du rang opposé-, et comme les feuillets d'un rang ne sont pas opposés, mais alternes avec ceux de l'autre rang , chacun d'eux s'unit SUR LE POULPE. 2f toujours à deux feuillets de l'autre rang, et ils sont par con- séquent tous unis ensemble par le Lord de la brancliie op- posé au ruhan charnu , et le long duquel marche la veine branchiale hb. Chaque i'euillet est lui-même garni trans- versalement de feuillets plus petits ce , et ceux-ci le sont encore , en sorte que la branchie totale est ce que les bo- tanistes appellent tripimiatijide ; mais les feuillets particu- liers ne laissent pas entre eux les mêmes vides que les feuil- lets généraux qui les portent. Je n'ai pas besoin de dire que tout cet appareil compliqué est recouvert par la peau générale qui pénètre dans les plus petites subdivi- sions. Entre le ruban et les pédicules charnus, qui portent lés feuillets, marchent l'artère branchiale, qui porte le sang qui doit respirer, i3,f/.5 l'artère qu'on peut appeler bronchique, et qui fournit le sang qui doit nourrir, i45 la veine bronchique, qui rapporte ce sang dans la veine cave, 7; enfin, le nerf bran- chial 8 , qui dérive lui-même du grand nerf des viscères. Uartère branchiale donne une branche à chaque feuillet qui marche le long du bord par lequel les feuillets re- gardent ceux de la face opposée , et qui se subdivise aux feuillets du deuxième et du troisième ordre. Il en est de même du nerf branchial , mais la veine et l'artère bronchiques, outre les ramuscules qu'elles donnent aux feuillets , en fournissent aussi au ruban charnu qui les supporte tous. Les veines branchiales naissent et se réunissent dans l'ordre inverse des artères; mais la veine de chaque feuillet en sort par l'extrémité opposée ; et toutes ces veines par- ticulières donnent dans la veine branchiale générale, i5, qui rampe entre les lobes extrêmes de tous les feuillets, le long du bord de la branchie opposé au ruban charnu, et 52 MEMOIRE après avoir traversé la cavité, aboutit au cœur du milieu.' A celte veine branchiale adhère un ruban musculaire mince, i6, qui s'épanouit sous la peau qui recouvre l'en- semble des viscères. Nous l'avons déjà vu en O; o ,Ji§. i , pi. I. S*'. Du Cœur du milieu. On le voit en place, pi. U^Jig. i , pi. ïil .,Jig. i , pi. IV, Jjg. I , toujours marqué i8 ; il est ouvert , Jig. 4 , pi. II. Sa substance est charnue et blanche, et non pas noirâtre et molle comme celle des cœurs latéraux. Sa forme est en demi-cer- cle, et sa convexité regarde le fond de la bourse. Il reçoit le sang des veines branchiales, i6, i5, à ses angles supérieurs , par deux ouvertures garnies chacune de deux valvules, dont le côté libre est tourné vers l'intérieur du cœur. Ses parois sont revêtues de cordons charnus, plus nombreux et plus minces 5 mais plus robustes que dans les cœurs latéraux, et qui laissent entr'eux de légères cannelures plutôt que de vraies cavités. 6". IDes artères. Le sang sort du cœur mitoyen pour se rendre à toutes les parties, par une grande artère que j'appellerai l'aorte, ig, et par deux petites. L'une de celles-ci , 20 , part de sa face inférieure , et se rend au testicule ou à l'ovaire, qui en sont très-voisins. L'autre, 21, part de la face antérieure; elle donne de chaque côté de sa base un rameau mince et long , qui suit la grande veine branchiale du même côté ; ensuite elle se sur. LE POULPE. 23 partage en deux branches, clontl'une, 23, monte au-devant de la grande veine cave , et passe au travers de la bride antérieure , pour se distribuer à la substance de la bourse ; l'autre, 23, aboutit à l'un des replis de l'intestin , 'y donne l'une des principales artères intestinales , et fournit aussi quelques rameaux aux parties voisines du péritoine. La grande aorte sort du cœur par la face postérieure à l'extrémité de son côté droit. Il y a à son origine deux valvules senii -lunaires. Elle se glisse d'abord en arrière et à droite dans la paroi péi-itonéale qui sépare la poche des intestins de celle de l'estomac spiral et de celle du gé- zier , monte le long du gézier , pénètre à droite du cardia , et par un trou particulier du diaphragme , dans la cavité qui est derrière le foie, et dans sa tunique charnue, et y monte le long du côté droit du jabot et de l'œsophage, jusque sous l'anneau cartilagineux de la tête. Dès sa base , elle donne un rameau péritonéal j un peu- plus haut , elle en donne un autre qui se partage en deux branches, 24, ^4 , pour les deux côtés de la bourse , les- quelles s'y insèrent derrière les brides latérales inférieures. Elle fournit ensuite au gézier quelques rameaux , puis vers le cardia, une branche, aS, pour le haut de l'intestin et les estomacs , et deux pour le foie , 26 ; elle en donne ensuite plusieurs petites au renflement ilu haut du jabot ^ enlin , étant sortie tout en haut de la poche de derrière le foie , elle se partage en deux branches , 27, jîg-. 2 , 3 et 4 , pi- iïl, qui forment un cercle entier autour de l'œsophage , d'oii les parties environnantes reçoivent leurs artères , savoir, à partir de la bifurcation, deux petites , 28 , 28 , qui traver- sent l'anneau cartilagineux , et se rendent à la masse de la bouche et aux glandes salivaires supérieures ; puis deux 24 MEMOIRE grandes, 29, 29, qui, après être rentrées clans la poche de derrière le foie, aboutissent aux glandes salivaires in- férieures , et après leur avoir donné des branches , s'unis- sent entr'elles par un rameau transverse qui fournit encore quelques ramuscules au jabot. Les deux principales branches qui ont formé le cercle, s'étant rapprochées en avant , traversent ensemble uq canal particulier de l'anneau cartilagineux de la tête , et étant arrivées entre les bases des pieds, pi. I, Jig. 4, 3o , et montées à quelque hauteur, chacune de son côté , prennent une direction transverse et rétrograde , 3i , 3i , d'oii elles donnent chacune quatre branches pour les quatre pieds du même côté : ces artères des pieds pénètrent avec leurs nerfs dans le canal dont l'axe de chaque pied est percé , et arrivent ainsi jusqu'à l'extrémité, donnant sur toute leur longueur une induite de petits ramuscules qui pénètrent transversalement dans la chair du pied. Ainsi , chaque pied a une artère et deux veines princi- pales. L'artère marche dans son intérieur; les veines sont à la surface. La veine d'un côté d'un pied s'unit à la veine du côté contigu du pied voisin , et les huit troncs abou- tissent dans un cercle qui entoure la tête et se termine dans là grande veine du devant du corps *, les quatre ar- tères de chaque côté viennent au contraire d'un tronc in- térieur , qui lui-même est une branche de la grande artère aorte , situé dans la cavité la plus centrale du corps. Le tissu des artères et des veines est analogue à ce qu'on voit dans les animaux vertébrés. Les premières sont fortes , musculeuses , opaques j les autres minces et transparentes. sunr.EPOiTLPE. ■ af) §. VI. — Des Organas de la digestion. 1^. De la BoiicJie. Au centre des pieds est un petit trou circulaire, entouré d'un repli légèrement dentelé de la peau , qui tient lieu de lèvres , pi. 111 , Jig. 3,4 et 5 , «. Sous ce repli est le bec , fornaé de deux robustes mandibules cornées et d'un bruu noir, dont la forme ue ressemble pas mal à celle d'un bec de perroquet, b, Jig. 4; mais ici la position est invei'sej c'est-à-dire que la mandibule la plus crochue , celle qui déborde et enveloppe l'autre , est Tinférieure , ou , en d'au- tres termes, qu'elle est située du côté du ventre. Eu fen- dant le cercle que les pieds forment par leur réunion , l'on trouve entr'eux une masse charnue , d, Jig. 3 et 4 > à-peu- près globuleuse , dans laquelle les mandibules sout en- châssées. Cet organe , que j'appellerai dorénavant la masse charnue de la boiidie , existe plus ou moins volumineux dans presque tous les mollusques céphalopodes et gasté- ropodes, et se compose de fibres diversement entrelacées, dont l'objet est de produire les mouvemens des mâchoires et de la langue. Les mâchoires doivent simplement s'écar- ter et se rapprocher ; mais la langue a besoin d'exécuter un léger mouvement péristaltique , au moyen duquel les épines dont elle est armée poussent successivement les ali- mens dans l'œsophage. Une couche rayonnée de fibres , partant des bords des lèvres , et se fixant aux parois internes de la cavité que les bases des pieds laissent entr' elles, ce , Jig. 3 , 4 et 5 , peut faire enfoncer cette masse de la bouche j mais pour res- 4 26 MEMOIRE soiiir et saillir elle a besoin que les bases des pieds so contractent. Ses fibres intrinsèques sont difficiles à suivre. Les man- dibules ayant chacune une double lame cornée , éprouvent un double sertissement , parce qu'une portion de la sub- stance charnue s'introduit entre les lames. [Yojez fig. 6, pour les mandibules, Gtfig. 5, pour les chairs dans les- quelles elles étaient enchâssées.) On voit à la partie infé- rieure, des libres , / , fg 5, dont l'objet est nécessairement d'écarter un peu la mandibule externe ou antérieure, de l'autre. Quant à la langue , elle se meut par le propre tissu de sa partie charnue, comme la langue humaine. Sa surface, hérissée d'épines , regarde , k ,Jig. 5, la mandi- bule antérieure. De la partie la plus élevée de cette sur- face , les alimens tombent dans l'ouverture de l'œsophage,, qui est immédiatement derrière , et de là ils traversent la partie de ce canal qui est enfermée dans la masse charnue, et qui rampe le long de la face interne de la mandibule postérieure, h, fîg. 5. Les épines de la langue sont disposées en quinconce , et attachées sur des lames cartilagineuses , transverses , qui revêtent cet organe. Elles forment, parleur ensemble, une plaque triangulaire très-flexible dans le sens longitu- dinal , dont les bords latéraux s'unissent en arrière , et donnent naissance à un long cornet , qui semble être à la plaque ce que le manche est à une pelle. Lorsque ce cornet est allongé et tiré en arrière, la plaque devient plane et presque concave ; si le cornet , au contraire , se raccourcit , la plaque est poussée en avant , devient convexe , et saille contre la mandibule antérieure. Cette alternative de mou- Yemens ondulatoires se communiquant aux épines , leurs SUR LE POULPE. S'y pointes saisissent successivement le bol alimentaire, elle poussent vers l'œsophage. a**. Glandes salivaires. Aux deux côte's de la masse charnue de la bouche , tou- jours dans cette cavité entre les bases des pieds, sont situées les glandes salivaires supérieures, pi. III 5^g-. 3, e, petites, diversement lobées , et donnant chacune un canal excréteur e , fig. 5 , qui pénètre dans la masse charnue , et va verser sa liqueur dans le haut de l'œsophage h. Les glandes salivaires inférieures, beaucoup plus grandes et moins divisées [pi. III, fig. i et 2 , «a; fig. ^ , ff. et pi. IV, Jig. I, «rt) , sont situées au-dessous de l'anneau cartilagineux de la léte , dans la poche de derrière le foie , et aux deux côtés du haut du jabot. Elles donnent chacune im canal excréteur , et les deux canaux s'unissent en un tuyau commun m, fig. 3,455, dans le trajet de l'anneau cartilagineux-, ce conduit pénètre sous la partie antérieure de la masse charnue , la traverse en dedans de la mandibule antérieure , et va s'ouvrir vers le bas de la face épineuse de la langue , de façon à humecter les aUmens au moment où ils viennent d'être divisés par les mandibules, et oii ils vont êti'e saisis par les épines. 3°. Œsophage et Jabot. L'œsophage h , pl.ï, fi'g. 4, pi- HI ,/%. 2 , 3,4 et j , est assez mince. Né derrière la langue , traversant la masse charnue de la bouche en dedans de la mâchoire postérieure, il descend par l'anneau cartilagineux de la tête , et par l'an- aS MÉMOIRE neau artériel qui termine l'aorte dans la chambre ou poche de derrière le foie , et après quelque trajet , il s'y dilate subitement pour former le jabot, pi. I ,^'g". 4 5 ^^5 V^- IHi Jig. I et 2 , ^)fig- 3, g^; pi.., IV fig. I et 2 , bb. Celui-ci parcourt toute la longueur de cette chambre parallèlement à l'aorte, dont il reçoit beaucoup de petits vaisseaux, et en sort en b,fig. i , pi. IV, par un trou du diaphragme pour donner dans le gëzier. Nous repre'seutons l'intérieur de ce long jabot enfig. 2, pi. IV, bb. Sa veloutée est ridée longitudinalement. Dans plusieurs individus, j'ai trouvé le haut du jabot di- laté en une grande poche comparable à celle du jabot des gallinacés 5 ses parois sont parsemées, à cet endroit, de grains glanduleux assez sensibles. 4°. Le Gëzier et l'Estomac spiral. Immédiatement après avoir traversé le diaphragme , le ca- nal aliinentaire se transforme en un gézier encore épais par- tout, déforme ovale, renforcé encore dans son milieu d'une couche musculaire, aussi forte que dans aucun oiseau; il est profondément sillonné dans sonintérieur, et revêtu, encore comme le gézier des oiseaux , d'une membrane cartila- gineuse d , fig. 3 , qui se détache sans nul effort de la veloutée. Ce gézier est contenu dans une poche particulière du pé- ritoine, dans le fond de laquelle il reçoit quelques rameaux de l'aorte qui marche dans la paroi de cette poche du côté droit; le pyloree , fig. 3, estprès du cardia, pi. IV, /. i, II et 3, CC) et immédiatement de lui, presque dans la continua- lion du jabot, naissent le cœcum ou estomac/fspiral, pi. IV, SUR LE POULPE. o.f) /. 1, sel 3,el/>/. m,/. 1. et le duodénum ou giand iiitesliu,. i( o, ib. , en sorte que le jabot conduit presque aussi aisé- ment dans Tune que dans l'autre de ces trois parties du ca- nal alimentaire. Le ccecum ou estomac spiral est logé dans une poche particulière du péritoine, à gauche et un peu plus bas que celle qui contient le gézier. Sa spirale fait un tour et demi. En dedans, il est garni d'une lame saillante , aussi en spi- rale, comme celle de l'intestin des raies et des squales , mais dont les tours sont infiniment plus nombreux. C'est dans la columelle de cet intestin que rampent les canaux hépa- tiques /?/i, pour s'ouvrir enfin vers sa pointe , en sorte que c'est parmi les replis infinis de sa valvule spirale intérieure que le magma alimentaire éprouve l'action de la bile. Le premier tour de ce cœcum a en outre beaucoup de folli- cules reconnoissables à de petits points blancs qui séparent une humeur épaisse et jaunâtre. 5°. L'Intestin, gg)Jjg- i et 2, pi. IV, Ptfig- i , pi- II. En quittant le pylore , il traverse sous le foie , et va se loger dans une poche péritonéale située adroite , et vers le fond de la bourse , derrière la cavité veineuse de ce côté j il y fait deux replis , retenus par un repli du péritoine, qui peut être appelé mésentère , puis il se reporte en haut sous, le foie , se dirige alors en avant , et monte au-devant de la tunique charnue du foie , à côté de la principale veine cave descendante entre les deux lames de la bride muscu- laire antérieure, pour se terminera l'anus (\ j fig- i , />/• H , qui s'ouvre clans la base de rentonnolr,à sa face postérieure interne. Le diamètre de l'intestin varie peu. Ses parois sont 3o MÉMOIRE assez minces, peu musciileuses , mais sensiblement glandu- leuses , sur-tout dans le voisinage du pylore. Les matières alin>entaires y sont sous forme de bouillie très-liquide, de couleur orangée et d'odeur fétide. 6°. Le Foie ; t ,Jig. I , pi. Il, est une masse considé- rable , de couleur orangée , de forme ovale , applatie an- térieurement ^ 11 est contenu avec l'œsophage , les glandes salivaires inférieures, et la grande artère ascendante, dans la tunique charnue, que nous avons décrite au paragraphe II; mais il a en outre une tunique membi^aneuse , qui ne lui est commune qu'avec la bourse du noir, tt, fig. 4 , pi- IV; elle se détache aisément, et m'a paru dériver du péritoine. La membrane propre de la glande iiu, est si ténue, qu'on peut la regarder seulement comme la fin du tissu cellulaire qui réunit les lobules de son parenchyme, rjK- On y remarque une légère fissure longitudinale , et en son milieu une cavité, TV, exactement remplie par la bourse du noir. La substance propre du foie est très-molle , et d'ap- parence spongieuse. Deux canaux biliaires, remplis d'une humeur orangée, partent du bas de cet organe, nn, em- brassent le duodénum à son origine , se collent l'un à l'autre au-dessous, et se déchargent dans le cœcum par une ou- verture commune très-apparente , située vers le bout du canal de la paroi interne. En ouvrant les canaux, et en les suivant dans l'intérieur de la glande, x, on voit leurs parois percées par-tout, des orifices de canaux plus petits, qui, en se subdivisant ainsi jusqu'aux derniers lobules , donnent au foie l'apparence spongieuse qu'il présente , quand la liqueur qu'il contient a été bien exprimée. SURLEPOULPE. 3l g. VII. — Bourse du noir. Le corps qui produit et contient l'encre, est comme enchâssé clans le foie. Les membranes propres de ces deux viscères sont collées l'une à l'autre par une cellulosité rare et courte. L'intérieur de la bourse du noir n'est pas une simple cavité , mais un tissu cellulaire ou spongieux assez rare, rempli par-tout d'une sorte de bouillie noire. Son canal excréteur v , pi. III, /. i , après être sorti du foie, aboutit à la même ouverture que l'anus. On voit en FF, f. 4 , pi- IV, la cavité creusée à la surface du foie, et dans laquelle cette bourse du noir était enchâssée. On sait que ce rapprochement de la bourse du noir et du foie avait fait croire à Monro que le noir n'était que la bile; il a suiB, pour détruire cette idée, de savoir que dans la seiche, l'organe du noir est à une toute autre place. §. VII I. — Les Organes de la génération. Ils occupent , dans les deux sexes, le même lieu , c'est-à- dire tout le fond de la bourse , dans une poche périto- néale qui leur est rései'vée. On voit ceux de la femelle en place, y^/. \i.,fig. i, elpl. III, j/?g-. i , savoir l'ovaire RR,, et les oviductus rr. ha fig. 6, pi. IV, les représente déta- chés , l'ovaire et un oviductus ouverts. L'ovaire a est un sac assez considérable à parois épaisses. Les grappes d'œufs bb y tiennent toutes par des pédicules à un seul point , le même par où les vaisseaux y pénètrent.. Quand elles se détachent , elles sortent par un large ori- fice d, qui donne d'abord dans un canal commun assez s?. MKMOir. E court/; celui-ci se partage bientôt eu deux oviductus. Dans l'ëtat ordinaire, ce sont de simples canaux membraneux, qui n'ont d'inégalité qu'un renflement glanduleux g ,fi^. 6 , jyl. IV, au tiers à-peu-près de leur longueur; mais lorsque l'animal se dispose à pondre , ils se renflent beaucoup , prennent de l'épaisseur et de la consistance*, leur membrane propre est toute ridée intérieurement , et la membrane muqueuse qui double leur intérieur suit les inégalités de ces rides. Voyez celui qui est représenté ouvert en hh,Jig. 6, pi. IV. Les renflemens glanduleux ont à l'intérieur une structure lamelleuse; fort petits dans le poulpe, nous verrons qu'ils deviennent énormes dans les seiclies et les calmars. Il ne nous paraît pas douteux qu'ils ne servent , comme les or- ganes analogues de l'oviductus des raies et des squales , à fournir la matière qui doit envelopper les œufs et leur servir de coquille. Il faut que les poulpes mâles soient moins nombreux que les femelles*, car dans le grand nombre de ceux que j'ai dis- séqués, à peine un cinquième s'est-il trouvé du premier sexe. Leurs organes sont représentés développés^g". 5, pi. IV. Ils consistent dans le testicule a, le canal déférent b, Une sorte de vésicule séminale c , une sorte de prostate d , la bourse qui contient les fameuses anguilles de Needham e , enfin la verge/. Le testicule a de singuliers rapports de structure avec l'ovaire : c'est de même un grand sac , à l'un des points in- térieurs duquel adhèrent des rubans branchus, on des es- pèces de grappes de glandulesg', qui ont probablement pour usage de sécréter la semence. Ce fluide s'épanche entre cet SUR LE POULPE. 33 amas de glandes , et le sac qui le renferme et sort de celui-ci par un orilîce //, qui donne naissance au canal déférent bl»; canal mince, infiniment replié et entortillé sur lui-même-, il aboutit à un autre canal plus gros ce, que j'ai appelé vé- sicule séminale, dont l'intérieur est divisé par des rides et des demi-cloisons saillantes , et dont k texture paraît mus- culaire-, en sorte qu'il pourrait , par ses contractions, faire jaillir l'humeur qu'y aurait amenée le canal déférent. En /Q»^>i sortant de la vésicule séminale, le sperme traverse l'extré- l^/cP^ mité d'une glande d oblongue, de structure compacte, r j'"|_,g5 grenue, à laquelle je donne le nom de prostate, parce que ' -^ je ne lui vois d'auti'c usage que de sécréter quelque liqueur accessoire aux fonctions génératives. Vient enfin la bourse musculaire ee, qui contient les fa- meux filamens, machines ou animalcules découverts par Needham , et que les uns regardent comme des êtres pa- rasites , les autres comme des organes appartenant essen- tiellement à l'économie naturelle des céphalopodes. Leur première apparence est celle de filamens blancs , longs de six à huit lignes , serrés parallèlement les uns aux autres , et fort régulièrement. 11 y en a trois ou quatre rangs les uns sur les autres , depuis le fond de la bourse jusqu'à son entrée , et ils sont maintenus dans cette disposition par un repli spiral de la membrane de la bourse, mais sans au- cunement adhérer à ses parois. Long-temps après la mort ils jouissent encore de la faculté d'éclater et de se mouvoir en différens sens , sitôt qn'on les humecte. Chacun sait que les œufs des céphalopodes sont disposés en grappes de différentes formes , selon les espèces. Je n'ai malheureusement pu me procurer ceux du poulpe ; 5 34 MEMOIRE ainsi je renvoie à ce que je dirai plus bas de ceux de la seiclie et du calmar. §. IX. — Système nerveux. 1°. Du Crâne. L'anneau cartilagineux qui sert de base à la couronne formée par les pieds, est d'une forme peu régulière. Dans son milieu est le canal que traverse l'œsophage , accompagné de la grande artère et du canal excréteur commun des glandes salivaires inférieures. La partie postérieure de l'anneau contient le cerveau ; sa face externe est presque membraneuse; les parties laté- rales renferment les deux grands ganglions en forme de pattes d'oie \ la partie antérieure, qui est la plus épaisse et la plus dure, contient les deux ca^ ités des oreilles et la por- tion médullaire qui achève de former le collier commun à tous les animaux mollusques et articulés. De chaque côté de cet anneau cartilagineux naît une lame également carti- lagineuse qui soutient l'œil, et s'amincissant et se ramol- lissant de plus en plus , lui fournit une enveloppe mem- braneuse sur laquelle nous reviendrons. 2**. Cerveau et Nerfs principaux . Le cerveau «, Jîg. 4, pi. I, est divisé en deux parties; une postérieure, plus grise, à-peu-près globuleuse, et une antérieure , plus blanche , plus plate , plus carrée. On peut comparer la première au cervelet; l'autre au cerveau. SUR LE POULPE. 35 Des Lords antérieurs et latéraux du cerveau naissent i» des nerfs très-fins /3 ^ , qui vont en dedans de la Lase des pieds, aux muscles du tour de la houclie et aux lèvres. 2®. Un nerf de chaque côté qui va former le ganglion latéral de la bouche. 3°. Un faisceau large et court qui va se joindre au gan- glion en patte d'oie. De chaque côté du cervelet naît le large faisceau qui , en s'unissant à son analogue , forme le collier. De son bord antérieur , près de sa naissance , sort un faisceau également large , qui , en s'épanouissant, produit le ganglion en patte d'oie y , sorte d'expansion médullaire large et aplattie , qui occupe le côté entier de l'anneau car- tilagineux, et donne de son bord supérieur les quatre nerfs des pieds de ce côté, cTcT; sonbord postérieur reçoit le faisceau cérébral dont nous avons parlé ci-dessus. De l'origine de ce même collier , et à sa face externe , au point même où il sort du cervelet , sort le nerf optique , qui demeure très-court , et immédiatement après avoir pé- nétré dans l'orbite , se renfle en un très-gros ganglion ^ dont nous reparlerons. Du boid postérieur du collier, vis-à-vis du nerf optique , nait le nerf a?v , qui se rend , en suivant le pilier postérieur supérieur de la bourse , à la base de ce pilier , oii il se renfle subitement pour produire le ganglion étoile. Plus en avant, ce même bord postérieur donne de chaque côté le grand nerf des viscères, /j.: Plus en avant encore , et plus haut , le collier donne le nerf de l'entonnoir, ^j et entre ces deux-là, il fournit le petit nerf acoustique, cp. Les nerfs des pieds , comme les pieds eux-mêmes , sont 36 M É M 0 1 rs E au nombre de huit; ils se glissent le long de la face interne de la cavité qui contient la niasse de la bouche , pénètrent chacun dans le pied situé vis-à-vis de lui , et parcourent toute sa longueur dans le même canal où marche aussi l'ar- tère. Dans ce trajet , ce nerf se renfle légèrement à des dis- tances très-rapprochées , et donne de chaque renflement une infinité de petits nerfs qui pénétrent dans la substance charnue du pied. Immédiatement après avoir pénétré dans l'épaisseur du pied, et avant de produire des renflemens ; chaque nerf donne deux gros cordons, un de chaque côté , qui vont, au travers de la substance charnue des bases des pieds , s'unir aux deux nerfs des pieds voisins , en sorte que les huit nerfs sont joints ensemble par une ceinture nerveuse ^^; et cette ceinture se dédouble vis-à-vis de chaque nerf, et y forme une petite anse. Le nerf qui produit le ganglion étoile de chaque côté on, /. 2 , /j/. I , /. I , pi. II , /. 1 , pi. IV, marche tout droit et sans division le long du pilier charnu latéral supérieur, et, arrivé à sa base externe; ilforme son ganglion, d'où sortent, à ce qu'il paraît , les nerfs qui se distribuent à la bourse. Un nerf important est celui des viscères f^y-, pl.I, f. 4? pi. II , /. I et 3 , pi. m ,/. I . Après avoir donné des filets aux muscles du cou, il descend parallèlement à son congé- nère , le long de la grande veine cave ; détache de son bord interne quelques rameaux, qui forment une sorte de plexus derrière cette veine, le rectum, et le conduit du noir , s'é- carte un peu pour marcher parallèlement à l'oviductus , jusque vers le cœur latéral , où il se renfle en un petit gan- glion , et se divise en trois principales branches. L'une se dirige vers, le ruban charnu qui supporte la bran- SURLEPOULPE. Sj cliie , s'y renfle encore en un gauglion oblong , puis marche parallèlement à l'artère branchiale , pour de là donner des lilets à tous les feuillets de cet orgaue. La seconde descend vers le fond du sac, en suivant le ruban musculaire qui tient au pédicule veineux de la bran- chie. La troisième se dirige en dedans et vers le cœur du milieu. 3». DeVmi. L'œil des céphalopodes est une des parties les plus re- marquables de leur orgatiisalion , par la beauté de sa struc- ture , par sa complication, qui égale pour le moins celle des animaux vertébrés les plus élevés dans l'échelle, et par les diflpérences fort notables qui le distinguent cependant de cet œil des vertébrés. L'ouverture extérieure a,f. 2 et 3, pl.ï, est fort petite dans le poulpe ^ percée dans une peau épaisse et dans une couche de muscles allant de la bourse aux pieds, et qui peuvent encore contracter cette ouverture. Le bord postérieur et inférieur se glisse sous le bord opposé , et en s'amincissant il se change en une sorte de troisième paupière b,fig. 3, ou de valvule semi-circulaire, qui forme un rideau demi-transparent derrière l'ouverture extérieure. La peau, âpre, sèche, repliée soit sur le bord de l'ou- vei-ture circulaire , soit sur celui de la valvule , double en- suite ces sortes de paupières , et étant arrivée à une certaine profondeur, elle revient sur le globe de Tœil, auquel elle forme ainsi une véritable conjonctive jusqu'au bord de la pupille j et probablement cette conjonctive se recourbe en- core derrière la pupille, et revient ensuite tapisser le cris- 38 MEMOIRE tallin par devant : car il faut savoir que cet œil n'a aucune chambre antérieure, que le cristallin donne dans la pupille, et que si on enlevait les paupières , ce cristallin serait ab- solument à nu, sauf le voile que cette conjonctive peut lui fournir. Outre la couche des muscles extérieurs qui en- tourent immédiatement l'ouverture circulaire , il se glisse dans l'épaisseur des paupières deux tuniques qui viennent des bords de l'orbite ; l'une purement cellulaire , l'autre manifestement musculaire : celte dernière doit ouvrir les paupières. On en voit une partie en fi, J^g- 7 ? P^- HI. La conjonctive y est marquée bb. Sous la conjonctive de l'ceil se glisse une autre membrane, ib. ce , venant également des bords de l'orbite, et allant comme la conjonctive même jusqu'à ceux de la pupille. Elle renferme le globe même de l'œil f/, et une poche située derrière lui e, et contenant le ganglion optique/, et les glandes qui l'entourent gg. Cette poche e, est une membrane transparente qui naît des bords mêmes du trou optique. Elle occupe tout l'espace entre le globe proprement dit et les tuniques qui se rendent aux paupières: en sorte que le globe véritable ne remplit qu'à- peu-près le tiers de cet autre globe plus général qui pa- raissait d'abord être l'œil lui-même. On donne Jig. 5 , pi. II , une coupe de toutes ces parties ," où celles que nous venons de désigner sont marquées des mêmes lettres a — g. Le globe a trois tuniques propres, une externe hh, fig. 5, pi. II, de couleur argentée, de consistance un peu cartila- gineuse, que l'on pourrait comparer à la sclérotique. Elle est criblée en arrière d'une inlinité de petits trous, pour le passage des fdets qui viennent du ganglion optique , et elle va former au-devant des bords du cristallin le cercle SUR LE POULPE. 3g (le la pupille , qui , par sa nature , doit être sans mobi- lité. Une seconde, /?, blanche opaque, qui paraît sensi- blement résulter de l'épanouissement et de la coalition de tous les fdets nerveux qui ont traversé la membrane pré- cédente, et que l'on devrait par conséquent regarder comme une rétine. Cependant elle se termine par un cercle plissé en rayons très-iins de la plus grande beauté , que l'on peut comparer au procès ciliairc. Le bord de ce cercle va s'in- sérer dans la rainure circulaire qui sépare les deux hémi- sphères, qu'il sertit ainsi de la manière la plus solide. La troisième membx'ane, d'un brun-violet très-foncé, qui a peu de consistance, et que l'on pourrait plutôt con- sidérer comme une couche de vernis analogue à celui qui recouvre la choroïde dans l'homme , que comme une véri- table membrane. On ne conçoit pas comment elle n'est pas un obstacle insurmontable à la vision. Il y a de plus la membrane propre du vitré, toute fine et transparente ; mais elle ne se rend pas à la pupille ni à la rainure du cristallin : elle se réfléchit derrière celui-ci , en sorte qu'elle forme un sac conaplet, convexe en arrière, et creusé en avant d'une petite concavité. La conjonctive de l'œil, comme nous l'avons dit, après avoir recouvert la sclérotique jusqu'au bord de la pupille, se réfléchit sous elle pour la doubler, jusqu'à la base du procès ciliaire-, elle revient sur le procès ciliaire même , et passe sur le cristallin dont elle couvre la face antérieure , en y adhérant intimement , en sorte que l'on peut dire que le cristallin est immédiatement sous la peau , sans cornée transparente , sans chambre antérieure et sans humeur aqueuse. La face postérieure du cercle de la pupille est teinte du 4o MÉMOIRE même brun fonce que l'intérieur de l'ceil. On y remarque , un peu en arrière du bord , un cordon circulaire saillant , Le cristallin m. ib. est peu bombé en avant , mais il l'est beaucoup en arrière. Ses deux parties, distinguées par un sillon profond , oii s'insère le procès ciliaire , se séparent aisément. Elles se composent de calottes concentriques , formées elles-mêmes de fibres rayonnantes , et durcissant de plus en plus, à mesure qu'elles approchent du centre. La poche située derrière le globe contient, comme nous l'avons dit , le ganglion optique et les corps glanduleux. Le ganglion, /y^ est de la forme d'un rein , et d'une gros- seur énorme \ il égale presque le cerveau, auquel il tient par un filet nerveux, gros et court, qui sort du crâne par un trou particulier, percé au fond de l'orbite. Une portion oblongue du fond de la sclérotique , occupant toute sa lar- geur, mais non toute sa hauteur, répond au ganglion , et est percée d'un nombre de trous proportionné à celui des filets qui sortent du ganglion , pour aller former la rétine par leur réunion. Tout le pourtour du ganglion est rempli d'un corps sin- gulier, de consistance à peu près semblable à la laite des poissons , divisé en lobes irréguliers et arrondis , entre lesquels pénètrent des productions de la poche membra- neuse qui les enveloppe. Je n'ai pu voir de canal excréteur à ce corps , toute glanduleuse qu'est son apparence , et je ne lui peux supposer d'autre usage que de soutenir le globe proprement dit , et de l'empêcher de trop comprimer le ganglion situé derrière lui , quand les muscles externes le compriment lui-même. On ne peut se dissimuler que cet œil , en rappelant , par SURLEPOULPE. 4^ sa grandeur et par une partie des tuniques qui entrent dans sa composition, l'œil des vertébrés, ne s'en éloigne en des points bien essentiels. L'absence totale de cornée transpa- rente, de chambre antérieure et d'humeur acqueuse pour- rait à la vérité s'expliquer par l'inutilité de ces parties dans des animaux qui vivent dans l'eau , et où le cristallin est immobile. Les poissons ont déjà la cornée très-applatie et la chambre antérieure presque nulle. Mais ce qui est plus étonnant, c'est, entr'autres choses, l'absence d'une véri- table choroïde. 40. L Oreille, Dans la partie antérieure, et la plus large de l'anneau cartilagineux de la tête , celle dont les parois sont aussi les plus épaisses et les plus dures, sont creusées deux cavités à-peu-près sphériques , à parois lisses, qui représentent à elles seules tout le labyrinthe des deux oreilles. LTne vési- cule ou bulle à-peu-près sphérique aussi , à membranes très-transparentes , un peu moins large que la cavité , est suspendue au milieu de son vide par un grand nombre de filets, probablement vasculaires. Le nerf acoustique qui pénètre dans la cavité par un trou particulier, se divise eu deux ou trois rameaux sur la membrane de la bulle ; et dans son intérieur, à sa paroi postérieure, est attachée une petite pierre de la forme d'une demi-sphère, ou d'un cône très-évasé , teinte en jaune du côté où elle regarde l'intérieur de la bulle, blanche du côté par où elle adhère àsamembrane. La bulle est remplie d'un fluide gélatineux, parfaitement transparent. C'est là tout ce qu'on peut observer dans l'oreille du 6 /l-Z MÉMOIRE poulpe, qui n'a d'ailleurs ni ouverture extérieure, ni rien qui s'y rapporte. On n'a pu reconnaître encore aucune partie spécialement consacrée à l'exercice de l'odorat, quoique ces animaux paraissent jouir de ce sens , puisqu'ils sont attirés par l'odeur de diverses substances. Tels sont les principaux traits de l'organisation du poulpe, par lequel nous commençons celle histoire anato- mique des animaux mollusques. Il n'est sans doute per- sonne qui, à la lecture de cette courte description, et à la vue des ligures qui l'accompagnent, ne soit frappé de cet appareil de parties organiques lout aussi développées et de même nature que dans les vertébrés; employées à la com- jiosition d'un être entièrement différent, quant au plan et à l'arrangement général , tant intérieur qu'extérieur. Ces fibres, celle matière médullaire, ces artères, ces veines , ces valvules, ce parenchyme, ces intestins, cet œil, tout est semblable au fond, et tout est autrement entrelacé, autrement combiné. Si l'on .excepte les organes de l'odorat, le système de la veine porte, les vaisseaux absorbans, le sque- lette et les organes relatifs à l'urine , qui même sont peut- êlre remplacés par la bourse du noir, nous retrouvons à-peu- près ici toutes les fonctions qui s'exercent dans les poissons, et cependant il n'y a nulle ressemblance , nulle analogie de disposition. Même pour les imaginations les plus préve- nues, les bras qui couronnent la tête ne deviendront point des nageoires; les cartilages qui renforcent le dos ne se chan- geront point en vertèbres; ces trois cœurs au fond de l'abdo- men ne remonteront point vers la gorge pour se réunir en un seul. En vain chercherait-on à rapprocher ces mollusques de SUR LE POULPE. 4^^ quelques poissons, dont le squelette a presque disparu; ceux-ci n'en sont pas moins des poissons par tous leurs autres organes , par la forme de ces organes , par leur po- sition mutuelle , par l'ensemble de la configuration, et rien de tout cela n'existe de même clans nos céphalopodes. En un mot, nous voyons ici, quoi qu'en aient dit Bonnet et ses sectateurs , la nature passer d'un plan à un autre , faire un saut , laisser enlre ses productions un hiatus ma- nifeste ; les céphalopodes ne sont sur le passage de rien ; ils ne sont pas résultés du développement d'autres animaux, et leur propre développement n'a rien produit de supé- rieur à eux; considérations qui leur donnent en histoire naturelle une importance capitale, attendu qu'elles ren- versent un grand nombre de vains systèmes. C'est ce qui nous a engagé depuis long-temps à donner à leur étude une attention particulière. De la Seiche. La seiche diffère du poulpe, principalement par les points suivans : La bourse est de forme oblongue, et un peu applatie d'avant en arrière; sa forme est maintenue par un grand bouclier d'une substance pierreuse, particulière, enchâssé dans son dos. Le bord de la bourse est distinct du col dans tout son pourtour , et ne lui est point continu en arrière. Chaque côté est bordé d'une nageoire longue et étroite, qui règne depuis le bord jusqu'à la pointe. Les huit pieds sont beaucoup plus courts à proportion; 44 MÉMOIRE leurs suçoirs sont beaucoup plus petits, plus nombreux , semës sans ordre , et autrement construits. Outre les huit pieds, elle a deux très-longs bras ou tentacules, qui pren- nent naissance chacun dans un creux situé entre le pied antérieur de son coté et le pied suivant. Il paraît qu'ils peuvent se retirer en partie dans ce creux, ou même s'y cacher en se repliant. La bouche est entourée d'une triple lèvre circulaire , l'extérieure large et lâche •, la suivante serrée et mince •, la troisième , charnue, et hérissée de petites papilles rondes. Un fort repli longitudinal de la peau produit en avant de l'œil une paupière épaisse. L'entonnoir a, à chaque angle externe de sa base, un disque creux, dans lequel entre une proéminence de la partie correspondante de la bourse j ce qui doit servir à mieux clore celle-ci. • A l'ouverture de la bourse on observe qu'il n'y a point de bride charnue en avant , mais seulement des piliers la- téraux. I/anus a de chaque côté une sorte de tentacule en forme de feuille. A ses côtés, un peu plus bas, sont les orifices des deux cavités pulmonaires ; et un peu plus bas encore , dans la femelle , ceux des deux oviductus , qui se marquent d'ailleurs par les énormes corps glanduleux qui les garnissent, et que Swammerdam a comparés à des mamelles. La verge du mâle est du côté gauche , comme dans le poulpe , mais beaucoup plus grande. Les branchies ont une autre apparence , parce que leurs feuillets sont beaucoup plus nombreux et plus déliés. On en compte jusqu à trente-six à chaque face, tous en triangle scalène, dont le petit côté est près du muscle suspenseur. SURL A. SEICHE. [{'S Cliacun djeux est garni d'un nombre de feuillets particu- liers beaucoup plus considérable. Les corps qui garnissent les branches de la veine cave sont aussi beaucoup plus nombreux et plus déliés que ceux du poulpe \ ramifiés coinme des arbuscules , ils pré- sentent l'apparence d'une petite foret. La circulation et la distribution des vaisseaux sont à-peu- près les mêmes que dans le poulpe \ mais il y a de petites valvules pointues à l'entrée des artères bi'ancliiales. Le cœur intermédiaire est divisé en trois lobes , et les veines pulmonaires qui s'y rendent sont renflées dans leur mi- lieu; ce qui les a fait considérer comme des oreillettes par Swammerdam. Au-dessous de chaque cœur latéral , est suspendue une partie ronde , spongieuse et concave en dessous , dont je n'ai pu deviner l'usage; son pédicule est très-mince , et se divise en fibrilles , qui se répandent à sa surface ; mais il n'existe aucune communication entre sa concavité et celle du cœur , auquel cette partie est attachée. Le système musculaire de la seiche diffère en plusieurs points importans de celui du poulpe. La bourse n'est charnue que par-devant et sur les côtés. En arrière , le muscle qui la forme laisse une énorme solution de con- tinuité , occupée par la capsule membraneuse qui contient l'os , laquelle n'est recouverte extérieurement que par la peau. Des bords de cette solution , vers le fond de la bourse, partent deux grands piliers charnus, qui, après avoir donné un lambeau à la branchie de leur côté, se bifurquent. Leur partie antérieure forme le pilier de l'en- tonnoir; l'autre est le pilier de la tête , et donne des ex- pansions sur la tunique du foie. De la face postérieure de ce pilier de la tète naît transversalement la calotte charnue 46 MÉMOIRE qui va joindre l'entonnoir, et ferme le côté de l'ouverture de la bourse , comme dans le poulpe. Les deux ailes de la bourse ne font point corps avec elle, mais ne lui sont unies que par la peau , la cellulosité et les vaisseaux. Chacune d'ellesa sa partie cbarnue, com- posée de fibres transverses très-distinctes , et attachée in- timement au long cartilage mince et plat , au travers duquel passent les nerfs et les vaisseaux qui s'y rendent. L'os de la seiche est une production très-connue , et cependant très-singulière, par une structure dont il n'existe pas d'autre exemple. La forme générale est une ellijise alongée : sa face pos- térieure est convexe et grenue^ sa face antérieure est aussi convexe , en grande partie ; mais les bords tranchants y saillent au-delà de la convexité , et celle-ci devenant pointue vers le bout opposé à la tête, elle s'enfonce dans une partie concave, sur laquelle les rebords font saillie. Tout à cette extrémité est, en arrière du rebord, une pointe ou crochet conique, en partie enchâssée dans le vivant par des couches de matière cornée. La substance , qui est en général calcaire , dégénère à la face externe des bords, et sur-tout vers l'extrémité opposée à la tète , en une corne fibreuse et lamelleuse assez molle. La face interne de ces mêmes bords est calcaire et striée eu rayons, dont les latéraux monteot obliquement vers la tête. La partie épaisse et convexe des deux côtés de l'os de seiche , est foi-mée de lames minces , parallèles , et suivant la courbure transversale de la Aice antérieure , allant toutes se couper à la face postérieure par leurs deux extrémités, en sorte que c'est lalame la plus interne qui est la plus grande dans ce sens transversal. SURLA.SEICHK. l^'J Dans le sens longitudinal , elles sont disposées oLlique- ment , de manière qu'elles se coupent aussi toutes à la face externe ou dorsale , mais par l'extrémité seulement qui est du côté de la tête. L'extrémité opposée vient se terminer à la face interne ou ventrale , de sorte que la lame la plus ex- terne dépasse celle qui est immédiatement au-devant d'elle , et ainsi de suite , et que la plus interne ou la plus ventrale de toutes , dont l'extrémité supérieure est le plus près de la tète , est celle dont l'extrémité inférieure va le moins vers le fond du sac. Les bords par lesquels ces lames se ter- minent , forment à la face interne des stries transverses , sinueuses , assez irrégulières, qui , pour le dire en passant , répondent aux lames si joliment découpées des cornes d'ammon. La lame la plus interne, et en même temps la plus élevée vers la tête , y est la dernière formée; la portion de l'os qu'elle occupe n'a plus de stries , et sa surface est entièrement lisse. Les stries elliptiques qui se voient à la lace externe de l'os , correspondent aux bords externes et supérieurs de ces mêmes lames. Ainsi, le bord le plus voi- sin de la tête y est aussi celui de la lame la plus nouvelle ; mais à cette face, c'est la lame la plus profonde, tandis qu'à la face opposée elle est la plus superficielle. Ou sait, depuis long-temps, que les intervalles des lames sont occupés par de petites colonnes creuses , semées en quinconce, et allantperpendiculairement d'une lame à l'autre, La surface de la lame la plus interne , vue à la loupe, pré- sente une multitude de petits points saillans qui paraissent être les bases des colonnes qui doivent unir un jour celle lame à celle qui lui succédera. Dans la petite seiche qui vient de sortir dé l'œuf, il n'y a que des lamelles cartilagineuses comme dans les calmars. 48 MEMOIRE Ce n'est qu'avec le temps qu'elles deviennent calcaires dans la partie du disque, mais les bords i-esteut toujours cartila- gineux , ou plutôt cornés. La pointe aiguë qui termine l'os vers la queue est calcaire , mais presque toute encroûtée dans les lames cornées des bords. Cet os est contenu dans une capsule membraneuse du dos delaseiclie, pour ainsi dire comme un corps étranger qui s'y serait introduit', aucun vaisseau, aucun nerf ne le pénètre; il n'a point d'adhérence avec les chairs, et ne donne pas même attache à des tendons, comme les coquilles ordinaires. Cependant , la face de cette capsule qui est entre l'os et l'abdomen est rude , hérissée àe petits grains calcaires , et a quelque adhérence légère, par le moyen de ces grains, avec la face de l'os qui lui répond ; ce qui vient, sans doute , de ce que ce sont les transudations de cette partie de la capsule qui produisent les nouvelles lames qui augmentent l'étendue de l'os, et, en ce point encore, son analogie avec les coquilles sei'ait complète. Le canal intestinal est bien moins ample dans la seiche que dans le poulpe, quoique composé à-peu-près des mêmes parties. L'œsojîhage n'a point de renflement; le gézier est plus petit, plus mince; l'estomac spiral plus court, ainsi que l'intestin : celui-ci n'a qu'un seul léger repli avant de for- mer le rectum. Le foie est à la même place que dans le poulpe, mais il est divisé en deux lobes ijarfaitement distincts sur leur longueur , terminés en pointe à leur angle inférieur ex- terne. La bourse du noir n'est point enchâssée dans le foie ; au contraire , elle est située assez avant dans l'abdomen , sur. LA SEICHE. 49 au-Jcvanl du testicule et de l'ovaire. Elle est beaucoup plus grande à proportion que dans le poulpe; sou canal excréteur beaucoup plus large marche entre les deux ca- vités pulmonaires et devant le rectum , où il se déchai-ge près de l'anus. La liqueur est un peu plus noire que celle du poulpe commun , sansl'êtx'e autant que l'encre qui vient de la Chine. A en croire Swammerdam, et même M. Scarpa etN.Ti- lesius , les nerfs des pieds tireraient leur origine du cerveau proprement dit. Swammerdam et M. ïilesius représentent même un cordon naissant du cerveau , et se terminant su- périeurement par un ganglion qui donnerait en rayons les nerfs des pieds; mais, dans la réalité, ces nerfs sont les mêmes que dans le poulpe. Les cordons qui forment le collier donnent, de leur partie latérale et antérieure , une expansion qui , s'unissant avec sa congénère , forme uu ganglion alongé, qui donne les nerfs desbrasason bord su- périeur •, ainsi ils viennent , comme dans le poulpe , des parties latérales du collier. La seule différence , c'est que l'expansion en patte d'oie qui les produit est moins large , et plus intimement unie à celle du côté opposé. Les nerfs des viscères n'ont d'autre dlfiérence que d'être plus forts à proportion , £t de former derrière le rectum un plexus plus marqué. Mais il y a une très-grande différence, relativement aux nerfs de la bourse. Après avoir traversé le pilier charnu , le nerf se divise en deux grosses branches , l'une qui produit le ganglion rayonnant, comme dans le poulpe, l'autre propre aux céphalopodes munis de nageoires latérales , après s'être anastomosé avec un rameau de ce ganglion , perce le muscle de la bourse , et s'étale en une 5o MÉMOIRE grande patte d'oie qui donue une infinité de filets à toute la nageoire de ce côté. Les ventouses de la seiche sont beaucoup plus petites que celles des poulpes, et consistent en globules charnus portés par des pédicules grêles , également charnus , creux à la face externe , et ayant les bords de leur cavité soutenus j)ar un anneau corné élastique , qui se détache assez aisément du cercle charnu dans lequel il est serti. Les œufs de la seiche sont ovales , enveloppés d'une coque flexible, noirâtre , qui se prolonge en un pédicule par lequel chaque œuf est joint à d'autres en une grappe assez semblable à celle d'un raisin noir; aussi nomme-t-on vul- gairement les œufs de seiches raisins de mer. Leur coque se divise en plusieurs tuniques , dont les intérieures sont plus minces et plus molles ; toutes s'étendent , s'amin- cissent, et deviennent plus transparentes, à mesure que le fœtus prend de l'accroissement. On trouve ce petit animal, à une certaine époque, ayant encore le vitellus dont le pé- dicule pénètre dans son corps au-devant du bec , entre les deux grands pieds , et marche le long de l'œsophage. M. Diard, à qui je dois ces observations , n'a pu recon- naître dans quelle partie de l'intestin ce pédicule s'insère. Des Calmahs. Les calmars, en général, ressemblent plus aux seiches qu'aux poulpes. Ils ont les huit pieds , les deux longs bras , les ventouses pédiculées de la seiche; comme elle , ils manquent débride antérieure dans leur sac; leurs branchies sont organisées SUR LES CALMARS. Si de même •, leur cœur du milieu est divisé en loLes ; les cœurs latéraux ont des appendices 5 leur intestin est encore plus court à j)roportion^ leur anus a aussi ses tentacules; les corps glanduleux des oviductussont également très-con- sidérables , etc. Les principaux articles par lesquels ils diffèrent de la seiche , sont les suivans : Leur sac est plus alongé, les nageoires n'occupent qu'une partie de sa longueur, et sont plus élargies. Dans le calmar commun , elles font ensemble un rhomboïde ; dans le cal- mar sagitté, elles l'eprésentent un triangle renversé, à base très-large. La lame enchâssée dans le dos est simplement cornée et élastique , sans aucune partie calcaire. Dans le calmar com- mun, elle est de la figure d'une ellipse alongée, creusée d'un sillon le long de son milieu , qui se prolonge vers le haut en forme de pédicule. Dans le calmar sagitté, elle est linéaire; ses bords sont renforcés d'une côte épaisse, et ses deux bouts élargis , le supérieur en disque , l'inférieur en fer de flèche. Dans l'une et l'autre espèce , cette lame est enchâssée dans la chair même du dos , et non pas simplement logée entre des membranes comme dans la seiche ; elle se mul- tiplie avec l'âge , et dans les vieux calmars , on trouve sou- vent plusieurs de ces lames accollées les unes derrière les autres. Les pieds n'ont chacun que deux rangs de ventouses pé- dicellées. Lesbras difTèrent; dans le calmar commun, leur longueur approche de celle du corps , et la partie qui porte les ven- touses est élargie, et ne fait pas le quart de cette longueur 52 MÉMOIRE totale. Dans lé sagltté , ils sont plus courts 5 la portion qui porte les ventouses est plus étroite, et occupe une plus grande partie de leur longueur. J'ai des individus semblables en tout aux grands calmars sagittës , mais où les pieds , sur-tout les deux postérieurs , sont bordés sur leur longueur d'une large membrane mar- quée de faisceaux transverses de fibres , qui doit les aider puissamment dans la natation; je ne la trouve pas dans les grands individus. Est-elle un caractère spécifique? Je l'ignore. Dans le calmar commun, l'œil est sans paupière, la peau passe sur lui sans former aucun repli , et seulement elle y devient transparente comme dans l'anguille; mais le calmar sagitté , semblable en cela au poulpe et à la seiche , a une véritable paupière , formée d'un repli de la peau. A l'intérieur, les principales difîerences des calmars se marquent dans la position de leur bourse au noir , laquelle est suspendue devant le foie , mais non encliâssée dans son épaisseur, et dans la brièveté de rinlestiu, qui remonte de suite après le deuxième estomac. Celui-ci , ou ce que nous avons, appelé aussi le cœcum , est ramassé en une double et courte spirale dans le calmar sagitté; mais dans le calmar commun, il forme un long sac à parois minces , qui descend jusques dans le fond de l'abdomen , et où l'on ne voit de vestige de courbure et de sillons transverses que vers son origine. Le gézier est , comme dans la seiche , charnu et doublé d'une veloutée presque cornée. Les œufs du calmar forment des grappes minces, alon- gées et serrées, semblables, comme l'a remarqué AriS" tote, à des chatons de certains arbres, plutôt qu'à des SUR L\ SÉPIOLE, l'aRUON AUTE. 53 raisins : les grains en sont jaunâtres et transparens. Les petits y sont placés , et leur vitellus est disposé comme dans les œufs de seiche. La sépiole [sepia sepiola , L. ) appartient certainement au genre du calmar , quoique M. Tilesius, qui apparem- ment aura pris pour elle de jeunes seiches communes , ait dit le contraire. A l'extérieur, cependant , elle ressemhle davantage à la seiche, à cause de sa forme courte et largo. Ses nageoires orhiculaires n'occupent qu'un tiers delà lon- gueur du sac , vers son milieu. Sa lame cornée se réduit à un petit stylet fort étroit, situé dans le haut du dos, cl n'allant pas à moitié de sa longueur. L'animal de Y argonaute est semLlahle au poulpe ; mais «es deux pieds les plus voisins du dos ont leur moitié extrême élargie en un grand feuillet membraneux, qui, dit-on , sert à l'argonaute de voile pour naviguer , taudis que ses autres pieds lui servent de rames. Sa bourse se moule sur les formes de la coquille que tout le monde connaît, et je n'ai point trouvé dans l'épaisseur des chairs les deux petits cartilages propres au poulpe , ui les lames des calmars. C'est la coquille qui remplace toutes ces parties, dont elle n'est que l'analogue plus développé. L'animal de la spirule est semblable à la seiche : sa coquille n'est point extérieure, comme dans l'argonaute , mais intérieure, comme l'os de la seiche, et se montrant seulement un peu au travers de la peau. Les chambres qui la divisent et le syphon qui la traverse me paraissent 54 MÉMOIRE SUR LA SÉPIOLE, l' ARGONAUTE. même assez analogues aux lames de l'os de seiche et aux nombreuses petites colonnes creuses qui les unissent. Il est infiniment probable que les cornes d'ammon étaient comme la spirule des coquilles intérieures. Ouant au nautile proprement dit, les couleurs dont la croûte de sa coquille est peinte, font croire que cette co- quille était au moins en partie extérieure , comme celle de l'argonaute, bien entendu que dans l'une et dans l'autre, elle est toujours recouverte par Fëpiderme. i #" ^ ^" '"'lill «5/. POrLPE . PL . I . ('/(ime^ JTU^. ^^ y ■€r €/*•/. PO[rz,pji:.PL .11. t'/oanef- .fc/fW t.-'f. A/. jpoui.i>£: . i>L . j/i. .^/. i>o[/z,ni .i>z.ir. C/o^ue/' j'Cii^. MÉMOIRE Sur le Clio bore^lis. Tja mer du Nord , qui nous étonne par sa fécondité en êtres animés, lorsque nous la comparons avec les terres des mêmes latitudes , produit , entre autres , avec une abon- dance extraordinaire, un petit mollusque, d'une forme assez particulière, dont nous allons nous occuper dans ce Mémoire. Dans les temps calmes, l'eau semble en fourmiller; ils viennent en foule à la surface comme pour resj)irer un instant 5 mais à peine l'ont-ils touchée, qu'ils se précipitent de nouveau vers le fond. La mer en est tellement remplie dans cer- taines saisons , que les baleines , ces autres habitans de l'Océan glacial, ne peuvent, pour ainsi dire, ouv^rir la bouche sans y engouffrer des milHers de ces petits molluscpies ; et quoique ces baleines mangent aussi des méduses et d'autres petits animaux marins , l'espèce dont nous parlons surpasse tellement les autres en quantité, que les matelots anglais lui ont donné plus j^articulièrement le nom de pâture de la baleine. Le chirurgien hambourgeois , Wrédéric Martens , est le premier qui en ait parlé , et qui en ait donné une figure dans son voyage au Spitzberg et au Groenland, planche P, fig. F. Sa notice fut, à la vérité , long-temps négligée par I 2 MEMOIRE les naturalistes : Lînnaeus n'en parla point même dans sa dixième édition ^ mais ayant adopté , dans sa douzième, le genre clio , établi par Brown dans VHistoii^e naturelle de la Jamaïque , 386 , il crut devoir y rapporter par conjec- ture l'animal de Martens, et il en parla de cette manière, en note , sous l'une des espèces de Brown. Cependant , il était facile de voir qu'il s'agissait d'animaux assez différens \ les clio de Brown avaient des fourreaux de diverses formes , dans lesquels leur corps était attaché , et Linuaîus remarquait lui-même qu'on n'eu voyait aucun dans l'animal de Martens. Pallas ayant reçu, cjuelque temps après ^ ce dernier de la mer du Nord, le décrivit extérieurement ( Spic. zool. X^ I, i8 , 19) sous le nom de clione borealis , et cette espèce s'étant trouvée par-là, de toutes, la mieux connue , elle est devenue dès lors le type du genre. Otton Frédéric Fabricius ( Faun. Qroenl. 334 ) la prit par erreur pour la même que le Clio refusa de Linnceus , qui était une des espèces de Brown , et lui appliqua ce nom j et Gmélin adoptant cette erreur , et y ajoutant comme à son ordinaire , laissa le synonyme de Brown avec la description de Fabricius sous ce nom de clio retusa y plaça séparément celle de Pallas sous celui de borealis ^ comme si elle eût appartenu à une autre espèce , et en fit encore une troisième du clio limacina, de Phips (/^. bor. , 195), c[ui n'est toujours que l'animal de Martens, cette pâture des baleines , et par consécjuent que le clio bo- realis. Ce même M. Gmélin demande, à la fin de son énumé- SUR LE CLIO BOnEALIS. 3 ration des clio , si le mollusque décrit par La Martinière {^Journal de phys. 1787, novembre, pag. 366. PL II, no i5 ) , n'est pas une espèce de ce genre. Un coup d'œil suitit pour faire voir que c'est un glaucus , le même qui était déjà décrit par Dupont {Trans. phiL, LUI, pi. III., p. 58 ) , et que Gmélin a nommé do?is radiata. Bruguière a commencé à éclaircirce chaos^ il n'a laissé dans le genre clio que le borealis, et une espèce nouvelle décou- verte par luij et il a renvoyé aux. testacés les espèces de Brown, qui sont pourvues d'étuis, promettant qu'il en trai- terait au ^Qure JjssureUe. Comme il est mort avant d'avoir fait ce genre , nous ne savons pas ce qu'il en aurait dit ; mais s'il avait en vue de placer dans ses lissurelles les patelles à sommet percé , aux- quelles M. de Lamarck donne aujourd'hui ce nom, on ne voit guère comment il pouvait y placer aussi ces clio. Bruguière annonce encore que La Martinière ayant observé un des clio de Brown, il s'était assuré qu'il était du même genre fineX aiiojnia tridejitata àe Forskaelil, nommée depuis hyale par ÎNI. de Lamarck. En effet , La Martinière a décrit dans le Journal de physique, septembre 1787,/?/. II , un mollusque à-la-fois très-semblable à celui de Brown, et à celui que nous décrirons sous le nom d'hyale , qui est \anomia tiidentata, et M. Le Sueur vient d'en décrire d'autres appartenant à la même famille dans le Nouveau Bulletin des sciences, juin i8i3. Toujours reste-t il vrai que, d'après les changemens faits par Pallas et Bruguière, le genre clio ne se trouve plus com- prendre aucune des espèces qu'y plaçait son fondateur Brown , 4 MEMOIRE et qu'une espèce étrangèi'e, qui n'y était entrée d'abord que par tolérance , et sur une simple conjecture de Linnœus , a fini par en expulser toutes les autres, sans cju'on sache en- core bien où celles-ci doivent aller; ce qui est peut-être la faute la plus fâcheuse cju'on puisse faire en nomenclature. On juge aisément qu'avec des idées si peu arrêtées sur ce genre , et des connaissances si superficielles de ses espèces , on devait être embarrassé sur la place qu'il devait occuper dans l'ordre naturel , et sur ses véritables rapports avec les autres genres. Une certaine ressemblance extérieure , et ce sac que l'on prétendait recevoir son corps , me l'avait fait rapprocher des sèches ; mais il me restait ti'op d'incertitude , pour que je ne désirasse pas d'observer et de disséquer moi-même cet animal. Je m'adressai à mon célèbre et savant ami, M. Fabricius, que son séjour à Riel, et ses relations avec les pays plus au nord , mettaient à même de me satisfaire ; il s'adressa lui- même à M. Vahl, célèbre botaniste de Copenhague, c[ui s'est aussi beaucoup occupé des mollusques et des vers , et qui en possède une belle collection. Ce dernier étant venu à Paris peu de temps après , m'apporta un individu de clio parfaite- ment conservé , et j'eus la satisfaction d'y fiûre toutes les observations anatomiques nécessaires pour en prendre une notion exacte. Cette anatomie aurait été plus détaillée , si j'avais eu un plus grand nombre de clio ,• mais si on considère la difficulté de tout voir dans un simple individu et de si petite dimen- sion , j'espère qu'on^me saura encore quelque gré des précau- SUR LE CLIO BOREALIS. 5 tions que j'ai prises pour décrire et pour conserver tant de parties. Le clio horealls a environ trois centimètres de longueur sur douze millimètres de largeur. Son corps est oblong , un peu a])lati , se terminant en pointe postérieurement, et se rétrécissant en avant en une espèce de cou, qui le distingue de la tête. Il n'y a rien qui ressemble au sac ouvert des sèches : l'enveloppe commune est, à la vérité, beaucoup plus ample que la masse des viscères 5 mais elle n'a point d'autre ouver- ture c[ue celle de la bouche, de l'anus et des organes de la génération. 11 n'y a point non plus de disque propre h ramper comme dans les limaces, ni de sillon propre à s'attacher comme dans les scyllées ; et les bras et les cotylédons des sèches manquant aussi , il est clair que le clio doit toujours flotter dans l'eau , quand il n'est pas couché au fond. La tète , placée à l'extrémité antérieure du corps , est di- visée par un sillon en deux tubercules sphériques, percés chacun d'un trou ou d'un ombiHc , dans lequel se retirent trois petits tentacules coniques. A la jonction du corps et de la tête, sont attachées deux pièces membraneuses, ovales, pointues, et que l'on a com- parées à des ailes ; l'animal les meut, dit-on, fréquemment , et s'en sert comme de nageoires, povu' se porter d'un lieu à un autre. Il n'est pas moins certain qu'elles lui tiennent lieu de branchies. Leurs faces , vues au microscope , présentent un réseau de vaisseaux si régulier, si serré et si lin, qu'il n'est pas possible de douter de cette destination : leur connexion avec 6 MÉMOIRE les vaisseaux intérieurs et le cœur, confirme d'ailleurs cetle idée. La bouche est entre les bases des deux tubercules de la tête. Au dessous d'elle sont deux tentacules triangulaires qui forment eux-mêmes comme deux petites ailes entre les deux grandes. L'ouverture de la bouche a trois angles , comme la plaie qu'aurait faite un trois-cjuart ; on voit, à l'intérieur, des rides longitudinales que Pallas et Fabricius paraissent avoir prises pour des dents, mais qui n'ont rien de dur, et sont entièrement charnues. Si on Tend la première enveloppe, on voit que c'est une peau mince, demi- transparente , molle, c|ui recouvre une seconde tunicjue. Celle-ci , qui double absolument la pre- mière , est plus épaisse , et présente des fibres musculaires longitudinales très-sensibles , qui viennent de deux faisceaux principaux, attachés aux côtés du cou. L'efFet de ces fibres doit être de raccourcir l'enveloppe générale du corps , et de la rapprocher de la forme sphérique. Je ne sais de quoi est rempli, dans l'état de vie , l'inter- valle entre cette tunique charnue et la niasse des viscères ; mais il est certain qu.e celle-ci n'occupe pas la moitié du vide que renferme celle-là. 11 est probable qu'il y a naturelle- ment c[uelque liquide épanché 5 ou peut-être est-ce seule- ment une masse d'air que l'animal peut comprimer à son gré pour s'enfoncer dans l'eau , et dilater pour s'y élever. Les viscères sont rassemblés par les vaisseaux et les cellu- losités r[ui les unissent en un petit paquet rapproché du cou. Le foie en couvre la plus grande partie , excepté un angle qui est occupé par l'ovaire et le testicule. Quand on a em- SUR L£ CLIO BOREALIS. 7 ployé les procédés anatomiques convenables, pour détacher les diverses parties qui composent cette masse , on y re- marque ce qui suit. L'œsophage, qui est assez long, descend de la bouche au travers du cou , et va se dilater en estomac , vers le fond de la masse. De là le canal intestinal, après avoir fait un seul repli , revient directement à l'anus, situé sous la branchie du côté gauche. Le foie est composé de plusieui's lobes et lobules, et enveloppe intimement l'estomac et une grande partie du canal intestinal : je n'ai pu voir l'insertion du conduit hépa- tique. Deux longues et étroites glandes salivaires flottent aux côtés de l'œsophage , et vont insérer leurs conduits excré- teurs dans la bouche. Le cerveau est à deux lobes placés sur l'origine de l'œsophage ; de chacun d'eux naît un petit filet , qui se renfle en un gros ganglion , lequel s'unit à son correspon- dant sous l'œsophage. Ces deux ganglions donnent chacun plusieurs filets aux parties environnantes 5 deux de ces filets, un de chaque côté , se renflent encore en ganglions , qui s'unissant ensemble par un nouveau filet qui traverse sur l'œsophage, y forment ainsi un second collier, lié avec le premier par le dessous ; ils donnent eux-mêmes chacun un filet deux fois renflé , et c'est de tous ces petits nœuds de matière médullaire que naissent les diflerens nerfs. Je n'ai pu apercevoir d'œil , quoique la figure de Phipps paraisse en indiquer un, ni aucun organe particuher des sens exté- rieurs , excepté forgane commun et général du toucher» 8 MÉMOIRE Pour la circulation, chaque brancliie donne une veine ^ qui s'unissant en Y à sa correspondante , forme le tronc qui aboutit au cœur. Celui-ci , situé dans son péricarde au côté gauche du paquet des viscèi'es, donne sans doute des artères pour tout le corps, mais il ne m'a pas été possible de les suivre. Enfin , les organes de la génération offrent les plus grands rapports avec ceux des gastéropodes , et réunissent de même les deux sexes. L'ovaire, dont j'ai déjà marqué la situation, donne un oviductus mince et court , qui aboutit , comme d'ordinaire , au testicule. Celui-ci , d'abord en forme de cœcum , s'amincit par degré en un conduit déférant, et se termine à une petite bourse ronde, qui remplit le tubercule gauche de la tète , et qui sort près du col. Je ne sais pas si la verge est cette partie droite et ferme qui termine le canal déférant, ou si elle est cachée dans la petite bourse dont je viens de parler. A côté de celle-ci en est une autre, oblongue , analogue h celle que nous appelons la vessie dans les gastéropodes ordinaires. Voilà ce que j'ai cru devoir faire observer dans le clio qui m'a été donné par M. Vahl. Cette description , sans être complète, suffira néanmoins, comme je l'ai dit plus haut, pour classer cet animal avec plus de certitude qu'on ne l'avait fait jusqu'à présent. On voit que n'ayant qu'un cœur, et étant dépourvu de sac , de pieds , et de tous les autres caractères particuliers aux sèches, ou à mes céphalopodes , on ne peut l'en rap- procher dans une méthode naturelle : il est sans contredit plus voisin des limaces, des doris et des autres mollusques SURLECLIOEOREALIS. g que j'ai appelés gastéropodes- mais comme le clîo n'a. point ce pied sous le ventre , dont j'avais fait le caractère , et d'où j'avais pris le nom de cet ordre , il faudrait changer l'un et l'autre , si , comme j'ai lieu de le croire , il n'é- tait pas plus convenable d'établir pour le clio lui-même un ordre particulier. Explication des Figures. Fig. I. Le clio borealis, vu par le dos. a. Le corps. b. Les viscères, vus au travers des enveloppes communes, c. Les tubercules de la tête et les trous où se retirent les trois ten- tacules de chaque côté. dd. Les branchies et nageoires. Fig. 2. Le même , vu par le ventre. «. c. d. Comme dans la fig. précédente. e. Les deux tentacules placés en avant de la bouche. Fig. 3. Le même , dont les tuniques communes sont ouvertes. ff. La tunique extérieure ou la peau. gg. La tunique interne ou le pannicule charnu. h h. Les principaux faisceaux de ses fibres. i. La masse des viscères. m. La principale veine des branchies. Fig. 4. Le même, grossi; la seconde tunique entièrement ouverte. c.d.f.g.h. Comme dans les fig. précédentes. i. Le foie. k. Le testicule. /. Les bases des trois tentacules , d'un côté. m. La principale veine des branchies. ni. Le cœur dans son péricarde. 2 10 ' MÉMOIRE SUR LE CLIO BOREALIS. n. L'ovaire, o. L'oviductus. 77. Le canal déféranf. p'. Sa portion droite. q. La bourse de la génération. /•. La vessie. s. La bouche, t. L'œsopliage. xi,u. I^es glandes salivaires. V' Le rectum. y. Les difFérens ganglions du système nerveux. Tl. XT'U. Pa, fig. 6,6,7, ^^^ long et grêle; la bouche ne consiste que dans son ouverture antérieure, et à peine y voit-on intérieurement quelques rides pour tenir lieu de langue. Il se renfle en une espèce de jabot membraneux, f(^<(', fig. 6, 7, 9, auquel succède un gésier à parois musculeuses, un peu épaisses, en forme de cylindre court, .ta;, fig. 6, 7,9. L'une et l'autre de ces cavités ont des rides longitudi- G S U R V II Y A L E nalesj elles sont plus étroites et plus nombreuses dans 1« jabot que dans le gésier. Vojez fig. 9. L'intestin j'j' , lîg. 6 et 7, est grêle et d'un diamètre égal dans toute sa longueur^ qui est assez considérable 3 il fait deux tours dans Tinlervalle des lobes du foie, zz, lig. 5, 6 et 7. L'anus est au coté droit du cou , sous l'aile du même coté; le foie n'est pas considérable , il forme une masse à- peu-près globuleuse. Les organes de la génération ressemblent à ce qu'on voit dansla plupart des gastéropodes j un ovaire, £-, fig. 4, 5,6, qui remplit la plus grande partie du côté droit; un oviduc- tus de médiocre longueur; un testicule, /3, fig. 6 , presque aussi fort que l'ovaire , et un canal déférent commun. La verge est encore ici un organe tout-à-f[iit sépare du testicule ; elle est placée , comme je l'ai dit , sous l'oesophage, repliée sur elle-même, et sort par un trou situé en avant et un peu au-dessous de celui de la bouche. On la voit sous le cerveau, fig. 7, et à part, fig. 8. Le cerveau «T, fig. 7 , est assez grand, plat, carré, un peu plus étroit en arrière; les nerfs sortent sur-tout de ses angles : deux d'entre eux vont former un double ganglion sous l'œsophage. Il faut que les glandes salivaires, s'il y en a, soient fort petites: je ne les ai pas vues. Le second genre dont j'ai à parler , est un mollusque hu, que dans l'ancienne manière de considérer ces animaux, on auroit sans doute regardé comme un clio , tant il ressemble aux espèces de ce genre; mais la position des branchies est toute opposée, et les tentacules placés aux E T L E -P ]S E U .AI O - D E R M E. 7 ^U's de la bouche , ainsi que plusieurs détails aiialomiques, confirment la différence du genre Le corps , B. fig. 1 , a , est ovale ; la tète b est ronde, portée sur un coït rétréci j la bouche c s'ouvre à son sommet ; en avant sont deux petites lèpres longitudinales et saillantes, d cl , sous lesquelles est une espèce de menton ou d'appen- dice pointue et charnue, e. Deux petites nageoires ovales, j(/", partent des cotés de ce cou: elles sont charnues, se rident après la mort, et sont plus petites que celles du cUo, et sur-tout beaucoup plus que celles de Xhyale. Il n'y a sur ces nageoires aucun tissu branchial. Les branchies ^'^' , sont placées à l'extrémité opposée du corps, et forment deux lignes saillantes en forme de OC adossés, réunis par une barre trans verse. Ces lignes sont garnies de chaque côté d'autres petites lignes ou feuillet» saillans , disposés comme lés folioles des feuilles que les botanistes nomment ailées. Au côté droit du corps, un peu au-dessus de l'extrémité des branchies, est tine ligne saillante simple , h j l'ouver- ture de l'animal m'a montré que celte ligne est le tronc de la reine branchiale , et qu'elle donne dans l'oreillette du coeur, i , lequel avec son péricarde est situé dans ce côté, k. Lorsqu'on a ouvert la peau qui est d'une substance un peu molle, on trouve quela masse des viscèresestenveloppée d'une tunique charnue, dont les fibres sont presque toutes longitudinales, //, fig. 4. Le péricarde n'y est point renfermé 5 cette tunique char- nue n'adhère presque à la peau qu'à l'endroit des branchies,^ 8 S U K L H Y A L E parce qu'il y a là des artères qui portent le sang du corps dans l'organe pulmonaire. Cette tunique une fois fendue, fig. 5, on voit que presque tout l'espace est divisé à-peu-près également entre le foie, m, le testicule, 7i , et.l'ovaire , o. Celui-ci est cependant d'un peu le plus considérable. L'ovaire est au fonds ; le testicule à gauche j le foie à droite. Ce qu'il y a de plus particulier dans tous ces viscères, c'est que l'estomac est très- vaste, enveloppé de toute part par le foie qui y adhère intimement , et qui y verse sa liqueur par une multitude de pores, absolument comme dans les bivalves. La membrane de l'estomac est mince, et son intérieur offre beaucoup de petites cavités dans le fonds desquelles ces pores s'ouvrent. Voyez l'estomac ouvert, jy, fig. 7. Le rectum est court, et s'ouvre sous l'aile droite, qq , fig. 6 et 7. La bouche est une masse charnue considérable , qui se termine en arrière en deux appendices, charnus aussi ,• dont j'ignore l'usage, rr, fig. 7 et 8. La langue est revêtue de petites épines, dirigées en arrière pour aider la déglu- tion, 5 , fig. 8, comme dans beaucoup d'autres mollusques. Cette partie postérieure de la bouche où est la langue, est séparée de l'antérieure, Ji , fig. 7018, qui n'est que mem- braneuse , par un rétrécissement charnu, où l'on voit trois tubercules, t 1 1 , fig. 8. Le bord de la bouche est garni de deux paquets de ten- tacules, ce , fig. 1 et 8 qui représentent deux jolis panaches : l'animal peut, à volonté, les faire rentrer dans Ta bouche ou les développer en les faisant sortir. Ces tentacules sont des filets terminés chacun par un j^etit tubercule dont le milieu ET LE PNEUMO-DERME. ^ «st creux. Peut-être l'animal les emploie-t-il comme des suçoirs, pour s'attacher aux autres corps, comme le font les seiches. Les glandes salivaires, vt^, fig. 7 et 8, sont longues et amples ; leur canal extérieur a en avant du cerveau un ren- flement marqué, XX, ib. Le cerveau est un ruban transversal assez étroit, y, fig. 7 ; parmi les nerfs qu'il donne, il en est deux de chaque côté qui vont former sous la bouche un groupe de six ganglions: quatre grands au miheuj deux très-petits aux côtes, z , fig- 9- Je n'ai rien à dire de particulier sur les organes de U génération : ils sont les mêmes que dans Vhjale et le cUo. La verge est petite et située sous la bouche , & , fig. 9. Elle sort entre les deux petites lèvres de la face antérieure de la tète , cl cl, fig. 1 et 5. Le canal commun des œufs et de la génération, s'ouvre un peu en avant de l'anus , et se pro- longe en dehors en un sillon qui se dirige en avant, /3, fig- 7- ' Il est facile de voir que l'animal décrit jusqu'ici, diffère du clio et de Xhyale, principalement par la position de ses branchies à la surface extérieure de la peau. Celui qui s'en rapproche le plus, est l'hyale qui a ces mêmes branchies dans le fond d'un repli de la peau; mais outre cette difîe- rence qui est déjà très-importante, la présence d'une co- quille dans l'hyale , et celle des nombreux tentacules et dos deux petites lèvres , et de l'appendice charnue dans mon animal, m'autorisent suffisanjarent a faire un genre de ca dernier. 2 io SURL'HYALE Je le nomme P neumo-derme , parce que son organe res- piratoire est sur la peau. Je dois [& p7îeumo-derme ainsi que Vhycile aux soins que fl'est donnés M. Pcron, l'un des naturalistes employés dans l'expédition du capitaine Baudin , et spécialement chargé de l'anatomie comparée, de m'adresscr un grand nombre d'échantillons tant de préparations anatomiques, que d'ani- maux entiers, pour en enrichir la collection que j'ad- ministre. Le pneunio - derme a été trouvé dans l'océan atlantique. Quiconque comparera Vhycde et le pneinno - derme avec le clio , verra que tous les trois ont de commun avec les mollusques la présence d'un cerveau , d'un coeur et d'un foie ; qu'ils ressemblent en particulier à la plupart des gastéropodes par l'hcrmaphroditisme ; qu'on ne peut cependant les ranger dans cet ordre , puisqu'ils n'ont aucun pied, et qu'ils ne rampent ni sur le ventre, ni autrement; qu'on ne peut non plus les regarder comme des céphalopodes, puisqu'ils n'ont, qu'un cœur, et qu'ils n'ont point de bras : personne ne sera tenté d'en faire des acéphales ; je crois donc qu'il faut les ériger en famille nouvelle, et je leur donnerai le nom de.ptéropodes ou de jnollusques à nageoires , mollu.sca pinnata. Le caractère de cet ordre sera, corps libre, nageant; tête distincte; point d'autre membre que des nageoires. Les trois genres que je range dans cet ordre, auront les caractères particuliers suivans : Clio. Corps nu; deux nageoires aux côtés du cou. Les branchies à la surface des nageoires. Pneumo-derme. Corps nu 3 deux nageoires aux côtés du ET LE P N E U INI O - D E R M E. n cou ; deux panaclies de tentacules à la bouche. Les branchie? à la surlace de la partie postérieure du corps. Hyale. Corps revêtu d'une coquille fendue par les côtés; /. ylct. Peirop. II. ( doris tetraq. Gmel. ) , est au moins très-voisin de celle-ci par sa forme carrée et par les lames cornées qui lui ser- vent de mâchoires 5 mais les trous du côté droit ne paraisssent pas dans la même position , et l'état de dessication de l'in- dividu a empêché l'auteur de décrire suffisamment les tenta- cules, et de parler des branchies. Il y a aussi lieu de soupçonner que Vainphiirîte frondosa d'Ascanius , ^ct. Dronth. 5 , pag. i55, est très-voisine de mon espèce. 2° Description extérieure du Tritonia Hombergii, ( Fig. 1 et 1. Cette tritonie est longue de six à huit centimètres (deux pouces à deux pouces et demi ) , et large dé deux ou trois ( environ un pouce ) selon cju'elle se dilate ou se contracte : son corps présente quatre faces distinguées par autant d'a- rêtes ; savoir , le dos , le pied et les deux flî\ncs ^ et ce serait presque un parallélipipède rectangle , si le dos n'était un peu bombé , le devant arrondi , et le derrière pointu. Les deux arêtes qui séparent le dos des flancs , forment quatre ou cinq courbes ou festons , dont la convexité est tournée en bas, les deux arêtes qui séparent le pied des (i) Depuis la première publication de ce Mémoire, une mort prématurée a enlevé ce jeune savant à l'histoire naturelle. SUR LE TRITONIA.. 5 flancs , forment un bourrelet ployé en festons beaucoup plus nombreux. Examinons à présent chacune des quatre faces. Le dos légèrement bombé , comme je l'ai dit , paroît avoir eu une couleur lilas ou gris de lin, II est tout recouvert de tubercules ou verrues irrégulièrement arrondies , inégales , molles , et qui paraissent avoir été blanchâtres; les plus grandes ont deux ou trois millimètres de large : il y en a de beaucoup plus petites : leurs intervalles sont plus étroits qu'elles. A la partie antérieure sont deux creux arrondis , d'où sortent les tentacules , et dans lesquels ils peuvent rentrer quand l'animal les retire; car il ne peut pas les faire rentrer entière- ment dans le corps , comme le limaçon. Ces creux sont en-' tourés d'un bourrelet saillant. Les tentacules eux-mêmes ont la forme de panaches composés de cinq pkimes , déchiquetées comme les feuilles de fougères ; l'œil doit paraître, à ce que je crois , sur la base de ces tentacules : mais comme je n'ai pas vu l'animal vivant , je ne suis pas certain de la position de cet organe, quoique je le sois de son existence, l'ayant vu en dedans après l'ouverture du corps. Les branchies commencent vis-à-vis des tentacules , et for- ment une rangée serrée, tout le long de l'arèle de chaque côté , jusqu'à l'extrémité de cette arête , où elle se réunit à sa cor- respondante pour former la pointe qui termine le corps en arrière. Les deux flancs sont lisses ; leur peauest blanchâtre et Une, ainsi que celle du dessous du corps. Le flanc gauche n'offre rien de remarquable ; mais on voit sur le droit , deux tubercules percés , placés de manière à diviser la longueur du flanc en trois parties à peu près égales. Le premier, qui est le plus grand , sert d'orifice aux parties de la génération ; il a deux 2 (5 IVIÉMOIRE trous , un supérieur plus petit et rond , un inférieur , plus grand et en forme de demi-lune. Le second tubercule est l'anus ; il est plus petit , ses bords sont plutôt membraneux qu'ils ne ressemblent à des bourrelets: il est un peu plus près de l'arête supérieure. La quatrième face enfin , ou le pied, est revêtue , comme les flancs , d'une peau lisse et blanchâtre 5 elle est plus souvent ridée , parce que le pied est la partie qui est le plus susceptible de se contracter. La bouche est placée entre le bord antérieur du pied , et celui du dos; une large membrane en segment de cercle, horizontale, mince , dentelée sur ses bords , forme dessus une espèce de voile ; deux lèvres charnues , ridées , saillantes , interceptent une fente longitudinale , qui est la bouche. Comme on ne peut voir que par la dissection les parties dures qui servent de dents , nous en renvoyons plus bas la description. 3° Ouverture du corps et position générale des viscères. ( Fig. 3 ^a , pi I ) Lorsqu'on ouvre longitudinalement le dos de cette tritonie , on aperçoit d'abord le péricarde, situé en travers, et divisant la masse des viscères en deux parties inégales. L'antérieur contient! la masse des mâchoires et de leurs muscles , qui peut être portée plus ou moins en avant selon l'état de con-= traction dans lequel l'animal est mort. Sur cette masse sont situés l'œsophage et les glandes salivaires , et sur l'origine de l'œsophage , le cerveau et les principaux nerfs. Le rectum entoure la partie du péricarde oîi est le cœur ; et à gauche et à droite de l'œsophage , quelquefois même sur sa partie posté- rieure , on distingue diverses portions des organes de la gêné- SUR LE TRITONIA. 7' ration : tout le reste du corps , sous le péricarde et en arrière , est occupé par l'ovaire et par le foie, qui sont réunis ensemble, par les vaisseaux et par la cellulosité , en une masse ovale , dans l'épaisseur de laquelle est caché l'estomac. 4" Organes de la circulation. ( Fig. Z, ^ et 5, pi. I.) Si on ouvre le péricarde , on voit au milieu, le cœur , et , en arrière , son oreillette , qui n'est elle-même qu'un vaisseau presque cylindrique et allant transversalement d'un côté à l'autre du corps. Le cœur est irrégulièrement et obtusément triangulaire ; il reçoit l'oreillette par le milieu de sa base , et donne Tarière de son sommet. Son intérieur [^g. 6), est revêtu de colonnes charnues, déliées, nombreuses, et dirigées en tous- sens ; sa communication avec l'oreillette est garnie de deux; valvules semi-lunaires, dont le bord libre est dirigé en dedans. Si on recherche de quels vaisseaux l'oreillette reçoit le sang qu'elle transmet au cœur, on s'aperçoit bientôt qu'ils sont au nombre de quatre , régnant tout le long des deux côtés du corps , deux en avant et deux en arrière j et cela ne pouvait pas être autrement. Puisqu'il est reconnu que le cœur uniloculaire des mollusques gastéropodes fait toujours les fonctions des cavités gauches du nôtre , il fallait que le sang y arrivât des branchies ; et par conséquent, que les vaisseaux qui l'y appor- tent eussent leur position réglée d'après celles de ces organes : mais il n'est point d'espèce oii il résulte de ce rapport un en- semble plus symétrique que dans cette tritonie. Lorsqu'on ouvre l'une de ces quatre grandes veines branchiales , on y voit de petits trous qui répondent à chacun des panaches des branchies , et qui sont les orifices de leurs veines particulières. Il fallait que les branchies reçussent , par des artères , le 8 MÉMOIRE sang qu'elles rendent au cœur après l'avoir soumis à l'action de l'élément ambiant, et c'est ce qui se fait avec la même régu- larité : les vaisseaux qui servent d'artères, par rapport aux bran- chies auxquelles ils envoient le sang, servent de veines-caves par rapport aux corps dont ils reçoivent ce fluide. Il y en a deux grands , qui rampent le long des côtés du corps, parallèlement aux veines branchiales, et sous elles : ils ont comme elles des branches correspondantes à chacun des panaches des branchies. Ces deux grands vaisseaux reçoivent le sang par six grosses veines , trois de chaque côté , qui viennent toutes de la masse des œufs et du foie. Deux sont situées presque sous le péricarde , deux en arrière, et deux en avant. Ces deux dernières sont obli- gées de faire un trajet plus considérable que les autres pour arriver àleurdestination. Il parait que toutes les veines des vis- cères aboutissent à l'une ou à l'autre de ces six la; quant à celles du pied et du reste de la peau , ils se pourrait qu'elles se ren- dissent directement dans les deux grands vaisseaux branchiaux, mais je n'en suis pas sûr. Toujours voit-on qu'il n'y a rien qui corresponde aux cavités droites du cœur. Il faut dire cependant que ces deux grands vaisseaux branchiaux sont plus enfoncés dans la substance mus- culaire des flancs, que les deux cjui apportent le sang des bran- chies au cœur , et qu'on peut les considérer d'après cela comme participant jusqu'à un certain point de la nature des ventricules. Le cœur ayant reçu le sang des branchies par les premiers grands vaisseaux que j'ai décrits , le transmet au corps par les artères. Leur tronc se divise presque à sa sortie en trois bran- ches; une s {^g- 5, pi. 1) pour l'ovaire c[ui rampe sur sa face supérieure ; une r pour le foie , l'estomac et quelques autres parties environnantes j et une troisième 9, qui est le tronc SUR LE TEITONIA. 9 principal , et qui se porte par le côté droit de l'œsophage vers la niasso. des muscles des mâchoires. La , ce troue se partage encore en deux branches, {fi^. i,ph II) , dont l'une donne à cette masse un rameau supérieur et un inférieur, et dont l'autre , qui est toujours la continuation du tronc , se bifurque transversalement pour pénétrer dans la masse du pied. 5° Organes des sensations. Le système nerveux de lia tritonie est un des plus simples et des plus réguliers qui existent parmi les gastéropodes : tous les nerfs partent du cerveau et se rendent aux parties comme des rayons , et il n'y a ni ganglions ni plexus épars , ni appa- rence de moelle épinière. Le cerveau est formé de quatre tubercules ou ganglions , placés en travers sur la naissance de l'œsophage \ les deux intermédiaires sont plus grands et oblongs , les latéraux arrondis et plus petits. Il part des deux côtés un nombre à peu près égal de nerfs ;^ en voici 1 enumération , en commençant par ceux cjui naissent du bord antérieur du ganglion oblong. Le premier et le second vont aux tégumens du museau; et le troisième au tentacule ; le quatrième , à l'oeil ; le cinquième et le sixième, aux muscles des mâchoires; et tout le reste, an nombre de six ou sept, dans les parties latérales de l'enveloppe générale et musculeuse du corps; les derniers de ceux du côté droit paraissent aussi donner des rameaux aux parties exté- rieures de la génération ; mais, pour le reste des viscères, je ne leur vois de nerfs que ceux c[u'ils peuvent tirer des deux gan- glions situés sous l'œsophage; mais ces nerfs-la , s'ils existent^ sont à peine visibles. lO MÉMOIRE Les deux ganglions dont je parle, ne me semblent pas encore certainement qualifiés pour tels : il y a bien un filet qui parait les joindre au reste de l'encéphale; mais comme il y a un autre filet certainement nerveux, qui complète le collier de l'œso- phage , et qui diffère un peu de l'autre par l'aspect , il me reste quelque doute à cet égard. Je n'aperçois à cette tritonie, non plus qu'à la plupart des autres gastéropodes, d'autres organes extérieurs des sensations que ceux de la vue et du toucher \ les premiers ou. les yeux ne sont regardés comme tels que par analogie , car ce sont deux points noirs , que l'anatomie ne peut certes analyser : les autres consistent dans l'enveloppe entière du corps , mais particuliè- rement dans les tentacules et dans les branchies , que leur sail- lie, leurs .divisions , et la délicatesse de leurs tégumens, rendent propres à percevoir les moindres contacts extérieurs, 6" Organes de la digestion. Ils se divisent, comme dans les autres animaux, en bouche , canal intestinal, et glandes qui produisent quelque fluide dissolaant. a. La bouche. Elle forme une très -grande masse ovale et charnue, qui renferme les mâchoires, leurs muscles, la langue et ses épines. Nous avons déjà vu qu'elle est précédée par les lèvres. Les mâchoires forment la base de tout cet appareil ; leur substance est cornée ; leur couleur d'un jaune-brun ; et leur forme , très-extraordinaire pour un organe de ce genre , ne peut èti'e mieux comparée qu'à celle des ciseaux avec lesquels on tond les moutons. Qu'on se représente seulement qu'au lieu de jouer sur un ressort commun, les deux lames jouent sur une articulation, et qu'au lieu d'être planes , elles sont un peu SUR LE TRITOMA. U courbes , de manière que leur articulation , située eu avant , se relève un peu par rapport à leur corps. Ces deux lames sont fort tranchantes, et il n'est rien de vivant qu'elles ne puissent couper lorsque l'animal en fait glis- ser les deux tranchans l'uu sur l'autre. Il a pour cet effet des muscles très-forts , dont les fibres sont transversales, et dont l'effet est de rapprocher les deux lames : quant à leur écartement, il parait qu'il est dû à l'élasticité natu- relle de leur articulation. C'estàpeu près au milieu de lalongueur des lames qu'arrivent les alimcns qui doivent y être coupés; ils y sont conduits par un tube membraneux, qui vient de la commissure des lèvres, et qui s'insère à cet endroit; ce tube, plus large à son insertion qu'à son origine, peut être considéré comme une espèce d'avant- bouche : il est garni de fibres longitudinales qui le raccour- cissent, et rapprochent les mâchoires de l'ouverture de la bouche quand il s'agit de saisir quelque chose, et d'un sphincter qui resserre son entrée; il a, de plus, un muscle palmé, c^ui s'insère au plancher musculaire du corps ou au pied, et dont l'effet est de retirer la bouche en dedans. Les alimens, une fois coupé par les mâchoires, sont aussitôt saisis par les papilles de la langue , qui , étant aiguës et recour- bées en arrière , conduisent continuellement, par leur mouve- ment péris tal tique, les matières alimentaires dans l'œsophage : il faut pour cela que ces matières montent et qu'elles se repor- tent en avant; car l'œsophage commence à la partie supérieure de la masse maxillaire, et plus près de son bord antérieur que l'avant-bouche n'avait fini. b. Le canal intestinal. L'œsophage est membraneux, ridé longitudinalement dans 12 MÉMOIRE soa intérieur. Il se porte en arrière , et un peu à gauche , pour aboutir h l'estomac, membraneux comme lui, et faisant à peine une légère dilatation du canal intestinal. Cet estomac est, comme nous l'avons dit plus haut, tout-h- fait caché sous et dans le foie; il en sort un canal court, qui se rencontre h la gauche du cœur, et, après avoir décrit un arc en avant du péricarde , se termine à l'anus , situé à droite , préci- sément sous l'angle droit de ce même péricarde. Il résulte de cette description , que le canal intestinal tout entier, en y comprenant l'œsophage , égale à peine la longueur totale du corps de l'animal. L'intestin est aussi strié longitudi- nalement dans son intérieur. c. Les glandes. Il y en a de deux sortes; savoir: les salîvaires et \efoie. Les salivaires sont placées aux deux côtés de l'œsophage sur la masse des muscles maxillaires. Leur forme générale est très-allongée. Ellesse divisenten une multitude de lobes et de lobules qui com- muniquent tous dans un canal excréteur pour chaque glande. Ces deux canaux, très-fins, passent avec l'œsophage dans le collier nerveux qui entoure l'origine de celui-ci , et vont s'ouvrir, à côté de lui, à la partie supérieure de l'arrière-bouche. Le foie est petit en comparaison de beaucoup d'autres mol- lusques. Il occupe la partie antérieure du côté gauche de la masse que l'ovaire forme avec lui : sa couleur est un gris-brun, et sa substance un parenchyme assez mou; tandis que l'ovaire est un peu plus roux , un peu plus ferme , et un peu plus grenu ; autrement, il serait assez difficile de discerner ces deux viscères , et j'y ai moi-même été trompé pendant quelque temps. SUR LE TRITONIA. l3 7" Les organes de la génération. Ils sont , comme dans la plupart des autres gastéropodes , composés de trois parties j savoir : a. L'ovaire et l'onductus. h. Le testicule et la verge. c. La vessie. L'ovaire est, comme je l'ai dit , une masse ovale, qui, s'u- nissant avec le foie , remplit toute la partie postérieure du corps; il est formé d'une quantité prodigieuse de petits œufs : l'ovi- vuctus, d'abord assez mince, devient ensuite si gros, que ses replis ont , au premier aspect , l'air d'appartenir au canal intes- tinal 5 il s'amincit de nouveau , et se termine , comme a l'ordi- naire , dans le testicule qu'il traverse , par une multitude de circonvolutions. Le testicule est fort grand : a l'ouverture du corps on le voit paraître des deux côtés de l'œsophage , c[a'il faut enlever, ainsi que le foie, pour le bien voir. Sa masse est irrégulièrement arrondie , et se compose de deux ou trois de ses replis; lui-même semble composé de deux substances hétérogènes ; l'une plus jaune , et l'autre plus blanche, qui a l'air de serpenter dans l'intérieur de la première. Je n'ai pu mieux développer encore son organisation intime à cause de sa mollesse ; mais j'espère trouver d'autres espèces où il sera plus facile à disséquer , et d'oii l'on pourra conclure à celle-ci par analogie. La verge est longue d'un à deux pouces, cylindrique, faisant beaucoup de replis serpentins , et se terminant par une pointe mousse et arrondie, qui n'est pas plus percée que dans le limaçon ordinaire. Entièrement en dedans du corps dans l'état de repos, 3 l4 MÉMOIRE cette verge ne peut sortir pour raccouplement qu en se dérou- lant comme un gant, commç cela arrive dans le même limaçon. On pourra voir a l'article de ce dernier ce que nous pensons sur la manière dont se fait la fécondation dans les animaux herma- phrodites. 8° L' enveloppe générale et le système musculaire. Ils sont des plus simples dans les tritoniesj ces animaux n'ayant ni coquille , ni vestige de coquille , ni manteau dé- bordant le corps , ni opercules de branchies, ni enfin aucune de ces parties qui exigent des appareils particuliers de muscles. Un tissu de fibres qui se croisent dans toutes sortes de sens, revêtu d'une peau mince , composée des mêmes parties que nous décrirons dans la limace j un pied en forme de disque ovale , encore semblable à celui de la limace : voilà tout ce qu'on dis- tingue dans cette enveloppe. Les seuls muscles des tentacules méritent une attention particulière ; ils sont disposés autour de leur base , comme des rayons, ainsi qu'on peut le voir {fig- ^ , pi- I.) Explication des Jigures. Planche I. Fig. 1. La tritonie, vue par le dos et du côté gauche. aa. Les étuis des tentacules^ bb. Les branchies. ce. Le bourrelet qui borde le pied. d. Le voile qui s'étend sur la bouche. Fig. 2. La même, vue en dessous et par le côté droit. a. Le pied. b. Le flanc droit. SUR LE TRITONIA. ID c. L'orifice des parties de la génération. d. L'anus. e. L'étui de la corne droite. Jl La bouche , ses lèvres et son voile. gg. Les branchies. J'^ig. 3. La même, ouverte. « a. Le cerveau. bb. Les tentacules. c. L'œsophage. dd. Les glandes salivaires. e. Le cœur. ^ /. L'oreillette. g. Le péricarde. h. Le rectum. i. L'ovaire. /•. Portion du foie. l. Portion des organes de la génération. Fig. 4- La même , ouverte de manière à montrer les principaux organes de la circulation. a, Cfd, ef, h, iyk, L Comme dans \a Jîg. précéd. j7immmmm. Les six principales veines qui portent le sang dans l'artère branchiale. nnnn. Portion de cette artère, dont une est ouverte. oooo. Portion de la veine branchiale, dont une est ouverte. pp. Les deux principaux troncs qui conduisent dans l'oreillette le sang revenu des branchies. Fig. 5. La masse des viscères, le cœur jeté sur le côté droit. a , c , dfCyf, h , i, k, l, m. Comme dans la fig. précéd. q. L'artère qui va à la bouche et dans les muscles du pied. r. Celle qui va au foie. s. Celle de l'ovaire. Fig. 6. Le cœur ouvert. a. Les valvules situées entre l'oreillette et le ventricule. l6 MÉMOIRE SUR LE TRITONIA.. b. L'intérieur du ventricule. c. L'origine des artères. Planche IL Fig. I. Les parties de la génération et la bouche, débarrassées de ce qui les cachaient. a. Le cerveau. • c. L'orifice de l'œsophage, qui a été enlevé. dd. Les glandes salivaires. t. La masse de la bouche. ^ u. L'artère qui se porte à la bouche et au pied. h. Portion du canal intestinal. /. L'ovaire. V. L'oviductus. XXX. Le testicule. j. Le sac de la pourpre. zz. La verge. Fig. 2. Tous les viscères enlevés, et la bouche soulevée , pour montrer de quelle manière les nerfs et l'artère se distribuent dans le pied. Fig. 3. La masse de la bouche , avec les lèvres et une partie de l'œso- phage , vue en dessus et par le côté droit. Fig. 4- La même , vue en dessous , avec le muscle qui l'attache au pied , et la couche superficielle de ses muscles propres. Fig. 5. La même, dont on a enlevé ces deux dernières sortes de muscles. Fîg. 6. La même, dont on a ôté les lèvres et le canal qui y con- duit, ainsi que la portion d'œsophage. Elle est vue en dessus. Fig, y. La même, ainsi débarrassée et vue en dessous. On aper- çoit une partie des mâchoires. Fig. 8. On a ôté toutes les parties qui recouvraient les mâchoires, et on les voit à découvert, en forme de ciseaux de tondeur. Fig. g. La langue développée. Fig. 10. La bouche , avec le cerveau et les principaux nerfs grossis. i PI .JCXXL. ?>,•/, TUITONIA IIOMUEIUtII j Cfot^utf^ Scii^. I PL yxxii . rilITONIA llOMl^lUlCrlI // CtWier />ei , Clô^Ufé K^culp mwmmmmm'w^^vm ' jmm^tmmftfV'mK'tm MÉMOIRE y Sur le Genre DO RIS, 1.° Remarques générales. lious avons déjà vu, d'une manière sommaire, à l'article des Tritonia, combien le genre Doris a été embrouillé par Linnœiis et ses commentateurs j retraçons-en l'histoire en peu de mots. Les anciens ne disent rien qui y ait un rapport évident quoiqu'on ait voulu en retrouver une indication àwLi&AElien', ni i?o/ïrfe/e/, ni Ge^ôvzer n'en parlèrent ; le premier mo- derne qui en ait donné une figure est Fabius Colunina , dans les Observationes aquatilàun qui sont à la suite de son EcjjJirasis , pag. 22. Il regardoit son animal comme une espèce de lièvre marin ; sa figure est très-mauvaise. jéldrovande en donna une autre fort grossière , aussi sous le nom de lièvre marin, hist. an. exs. p. 82, qui fut copiée par Jonston , exs. pi. I, fig. 6. Ces deux figures ne sont pas à beaucoup près assez pré- cises pour qu'il soit possible de déterminer quelle espèce de doris elles représentent. 2 MEMOIRE Aussi Linnœus n'eiit-il aucun égard ni àl'uneni à l'autre quand il forma le genre Dorisj dans sa lo.*' édition. Il n'en avoit alors observé qu'une espèce,, probablement celle que nous décrirons plus bas sous le nom de vejTucosa; du moins c'est elle que semble représenter la figure qu'il cite, Seba.II, t.6i , fig. 5. Si toutefoiscette figure représente un Doris, ce dont je doute beaucoup, car elle me paroît plutôt être l'image d'un oscahrioji. Le limax verrucosa , Rumpb. amb. rarit. cam. 58 , est aussi un oscabrion selon toutes les apparences , à en juger par la mauvaise descrip- tion sans figure de cet auteur. Linnoeus en examinant cette espèce unique, se trompa sur la position de la bouche j prit l'anus pour elle, et considéra les branchies comme des tentacules. Voilà pourquoi il fit entrer dans le caractère générique ces mots : teniacula ad os circiter oclo , qui autre- ment ne peuvent du tout s'expliquer. Il réfijrma le caractère du genre dans la 12.'' édition , lors- qu'il y fit entrer \ argus dcBohatsch ; il reconnut que dans celui-ci , l'ouverture entourée de franges , étoit l'anus 5 mais oubliant apparemment l'analogie de ces franges avec celles du doris <^e/rz^cosa qu'il n'avoit peut-être plus sous les yeux, il laissa toujours dans la description spécifique de celui-ci, ces prétendus huit tentacules autour de la bouche. Il ajouta dans cette édition au genre Doris, deux espèces observées par Kœnig en Islande, et évidemment analogues à l'argus. Z). bilamellata et lœvis. C'étoit donc cet argus qu'il prenoit désormais pour type de ses doris ; et nous l'imiterons en ce point, ne laissant parmi les doris que celles qui ressemblent à V argus dans les articles génériques, tels que Linnœus lui-même les SURLEGENREDORIS. 3 donne, et dont le principal consiste dans ces branchies en forme de franges qui entourent fanus; cmus posterais in dorso suprà , cinctus ciliis. C'est la circonscription que j'ai proposée depuis long- temps dans mon Tableau élémentaire, p. 387, et qui a été adoptée ensuite par M. Lamarck ( an. sans vert., p. 66 ). M. Bosc l'a adoptée aussi ( vers. 1 , 90 ) , mais en l'attri- buant à M. Lamarck, ainsi que la création du genre tri- tonie , quoique toutes deux m'appartiennent également- Aï. Bosc n'a d'ailleurs pas été fidèle au caractère qu'il avoit adopté, puisqu'il a laissé dans sesDoris, Varborescens et lefrondosa qui sont des tritonies. Or, si après s'être bien pénétré du vrai caractère géné- rique, on parcourt l'énumération de Gmelin, et si on la compare avec les écrits des naturalistes contemporains ou postérieurs à Linnœus, on remarque bientôt, ï.° Que sept espèces seulement sur les vingt-cinq dont le genre se compose , y appartiennent en réalité, et d'une manière certaine, savoir: D. argo ( l'argus de Bohatsch), slellata , fusca { le bilaniellata de l'édit. XII )/a?wSj obve- Lata, muricata etpilosa. Gnielin les a toutes comprises dans sa seconde section. 2.° Que le JD. verrucosa, si c'est réellement celui que je vais décrire, appartient aussi au genre , quoique Gmelin l'ait laissé dans sa première section, dont les autres espèces, n'y appartiennent pas, mais sont ou des tritojiies {\) , ou des (solides {^) , ou des cavolines (5) , ou des glaiicus (4). (1) Dor. clavigera , auriculata ? cerrina, coronata, arborescens et f rondo sa. (2) Dor. Fasciculata ^papillosa , lacinulata , minima ? etpennala, (S) Dor. Peregrina et affinia. {'») Dor. Radiala. 4 ME MO IRE 5.° Que les caractères assignés à ces huit espèces, ne les' «ilistingaent pas les unes des autres , de manière qu'on ne sait si plusieurs ne reviennent pas à la même; ce qu'on dit pour V argus , par exemple , cuto ciliato phrygio , et ce qu'on dit pour le steUata , stella ad aniiin octo radiala radiis ra~ ynosis, sont des expressions différentes pour dire une même chose , et une chose non-seulement commune à ces deux espèces là, mais à toutes celles qui appartiennent vérita- blement au genre , etc. 4.° Que les divers synonymes cités, ne sont pas à beau- coup près tous certains ; par exemple : La limace aplanie , Dicquemare , journ. de phys. 1779 r juillet, qu'on rapporte à Xai'gus, est du double plus grande, et tout autrement colorée j c'est une belle espèce tout-à-faiî distincte.. Le conclut sine testa , plane, app. t. V, fig. G et H, ne ressemble pas plus clairement ù Vohvelata sous lequel on le range, qu'à bien d'autres espèces; tout ce qu'on peut en dire , c'est que c'est un dons , et voilà tout. Il en est absolument de même, comme nous l'avons vu, du lepus jnariniis aller rninor du Columna. J\ai eu àina disposition treize espèces de véritables doris ,. toutes caractérisées par un cercle de houppes branchiales autour de l'anus, et par des tentacules supérieurs pouvant se retirer dans une cavité. Dix de ces espèces appartiennent à la seconde des divisions établies par Gmelin, c'est-à-dire, qu'elles ont le corps plane, obtus par k-.s deux bouts , et dé*- bordant le pied de toute part ( Corpus utrinque ohtusunty pla'nwii , tccfufn). Les trois antres apparliendroient à la première section, parce que leur corps est, pour ainsi dire;^ SURLEGENREDORIS. 5 prismatique, se terminant néanmoins quelquefois en pointe par derrière , et que le manteau au lieu de déborder le pied , se réfléchit vers le haut ( Corpus retrorsuni acumi- natiiin , suprà convcxum nuditni ). Mais elles ne ressemblent pas pour cela aux espèces que Gmelin a introduites dans cette section , comme nous l'avons vu tout à l'heure. Sur les dix espèces de première sorte , trois sont certai- nement comprises dans Fénumcration de Gmelin, savoir; les Doris pilosa, stellata et lœvis ; une quatrième me pa- roît y être aussi, quoique moins évidemment ; celle que je nomme D. verrucosa; et tout le reste me semble ne s'y point trouver, sans que je veuille soutenir cependant qu'il n'en soit point parlé dans d'autres auteurs. J'ai trouvé deux de ces espèces, les D. verrucosa et tu- bcrcidata, dans l'ancienne collection du cabinet d'histoire naturelle; une troisième, \q JJ. lœvis , m'a été procurée par feu M. Théodore Mo/nberg dn Havre , jeune homme plein de mérite, qui étoit pénétré d un véritable amour de la science, et que la mort vient d'enlever lorsqu'il se pré- paroit à rendre publics les fruits de ses grandes' recherches sur les animaux marins. J'acquitte un devoir bien cher , quoique bien douloureux, en rendant témoignage ici de toutes les obligations que j'avois à son amitié. Trois autres, les JJ. stellala, piiosa et io me/iio sa , ni' ont été adressées avec un individu du iub^ercidaéa , par M. Fleu- riaii de BMeviie , naturahste très-instruit et très-zélé, qui réside à la Rochelle, et auquel je dois beaucoup d'autres mollusques, dont j'enrichirai celte suite de Mémoires. M. de Bellevae a joint à son envoi des observations faites par lui-même , et d'autant plus précieuses , que les doris, ainsi 6 MEMOIRE que les autres mollusques, ont rarement été vus vivanspar de vrais naturalistes. J'ai observé et recueilli moi-même à Marseille, une sep- tième espèce, le D. lùnhata. Mais les six espèces les plus belles , les D. solea , lacera, scahra , pustulosa , niaciilosaei atro-marginata , nouvelles toutes les six, et dont les trois premières sont en même temps, avec l'espèce de Z>/cçfwe//za/e , les plus grandes qu'on ait encore décrites , m'ont été apportées de la mer des Indes, par M. Pérou, l'un dessavans qui onl accompagné le capi- taine Baudiii, et certainement l'un des voyageurs qui au- ront le plus enrichi l'histoire naturelle dans ces derniers temps. Je n'anticiperai point dans ce Mémoire sur ce que M. Péron doit dire de ces animaux dans la relation de son voj'age; il est trop juste qu'il publie lui-même ce qu'il a eu tant de peine à découvrir^ je me bornerai aux observations ana- tomiques faites par moi dans mon cabinet, sur les indi- vidus qu'il est allé chercher avec tant de dangers, à une autre extrémité du globe. J'ai plus particulièrement disséqué cinq de ces espèces , savoir : \qsD. lacera ^ solea , scahra , tuberculata et ver- rucosa. Mais les deux premières m'ayant donné plus de facihté à cause de leur grandeur, j'en ferai l'objet principal de ma description, ne parlant des autres que quand elles différe- ront en quelque point de celles-là. Ces deux espèces ont en même temps l'avantage d'être chacune le type d'une des deux grandes subdivisions du genre j JJ. lacera des prismatiques , D. solea des planes . SURLEGENREUORIS. 7 2° Description extérieure du Doris lacera. J'ai représenté le D. lacera, pi. l, fig. 1 ; sa longueur est à-pcu-près de 3 à4 pouces; sa largeur de 1 à 1 et demi, selon qu'il s'étend dans un sens ou dans l'autre ; il est plus étroit à proportion que les Doris ordinaires; les bords de sou manteau, a , a , s'étendent peu au-delà de ceux du pied, b , 6; ils sont minces, très-inégale ment repliés, en partie réfléchis, et tellement découpés qu'ils semblent avoir été déchirés. La peau du dos est comme renflée en grosses vésicules inégales, irrégulièrement placées , c, c, c, et dont l'inté- rieur n'est rempli que d'une cellulosité lâche. Les deux tentacules supérieurs, û?, d , sont, comme dans tous les Doris que j'ai vus, en forme de massue, c'est-à- dire, portés sur un pédicule plus mince que leur corps; celui-ci se termine en pointe et est finement strié entravers. Sous le rebord intérieur du manteau sont deux autres ten- tacules, e, e, charnus, larges, plats et légèrement dentelés entre lesquels est la bouche ou la trompe. Sur la partie postérieure du corps sont les houpes bran- chiales,/,y, au nombre de huit ou dix, en forme de petits arbres irréguliers. Elles ne sont point, comme dans les Doris planes, rapprochées par leurs pédicules de manière à représenter plus ou moins exactement une espèce de fleur ou d'étoile, comme on les voit, par exemple, dans mon Doris solea , pi. Il, fig. 1; mais elles sont disposées autour de l'anus en un cercle ou en une couronne dont le diamètre intérieur est d'un centimètre et demi. L'anus ^est au centre de ce cercle ; et à son côté droit. 6 M E ISI O I R E un peu en avant, est une autre petite ouverture, h , que j'ai retrouvée dans tous les vrais Doris , et dont aucun autre naturaliste n'avoit encore fait mention. Elle est très- remarquable , parce qu'elle donne issue à une excrétion fort singulière par ses sources dont nous parlerons en décrivant l'intérieur. Les organes de la génération ont leur issue par deux petits trous percés dans un tubercuîe, i, du côté droit du corps sous le rebord du manteau , veçs le quart antérieur; ce tubercule offre à-la-fois les orifices des deux sexes. Toutes ces ouvertures sont en même nombre et placées aux mêmes endroits clans les autres doris , même dans les planes; la seule différence essentielle de celles-ci consistant dans la forme du corps et la position réciproque des ra- meaux des branchies. Leurs tentacules inférieurs sont aussi simplement pointus. Dicquemare figure l'organe mâle de la génération sorti, dans sa limace à plante; il y est au même endroit que dans les nôtres. M. de Bellevue a fait la même remarque sur les individus vivans qu'il a observés. 3." Ouverture du corps et position des viscères. La figure II de la pi. i représente le D. lacera ouvert^ et ses viscères à-peu-près dans leur situation naturelle ; jjour les voir ainsi, il faut enlever un péritoine membraneux assez épais, qui les enveloppe, et qui se retrouve dans tous les autres Doris. a est la trompe, retirée au dedans du corps, par les deux ximscles i , i; 6 est le cerveau , placé comme à l'ordinaire SURLEGENREDORIS, g sur l'origine de l'oesopliago; c, est cet œsophage et la masse de la bouclie d'où il part; e, l'estomac;/', g , h , le canal intestinal j i, i, i, i, le foie; h, l'oreillette du coeur; /, le coeur; m^ la principale artère d'où partent les branches que nous décrirons par la suite, n,o,xcXu\yy est le canal excréteur de l'humeur particulière aux Doris, dont z est le réservoir; a et /3 sont les organes de la génération. 4.° Organes de la circulation. Ce qui frappe d'abord dans cette disposition, c'est la place qu'occupe le coeur à l'arrière du corps. Elle est la même dans tous les Doris, parce que les bran- chies y sont toujours en cet endroit, et que dans les mol- lusques comme dans les animaux des classes supérieures , le coeur est toujours à portée de l'organe pulmonaire. Son oreillette le s'évase beaucoup en arrière , et se ter- mine en deu* productions qui font un cercle, lequel cor- respond au cercle formé en dehors par les branchies. On peut voir ces deux productions en Je , k" , fig. 5. L© cœurZ, et son oreillette X- , y sont renversés en arrière pour montrer comment celle-ci fait son cercle. Elle reçoit un vais- seau veineux de chacun des arbres branchiaux, et transmet ainsi au cœur, comme dans tous les autres gastéropodes, le sang qui a respiré. Ce sang étoit venu aux branchies par des vaisseaux artériels marchant dans les troncs despetitsarbres branchiaux, parallèlement aux précédens, et dérivant des veines caves. La principale de ces dernières est située dans l'épaisseur du foie, et il faut enlever le cœur et les principales artères» 10 MEMOIRE et écarter l'un de l'autre les deux lobes du foie , pour la Hen voir. Elle est marquée z^, u^ dans la fig. 3. Après avoir reçu des branches des différentes parties du foie, elle sort de ce viscère , et se divise en trois pour se distribuer aux branchies. Il y a deux autres veines caves qui viennent de l'épaisseur des chairs du corps, aux deux côtés du pied. On les voit mieux dans le doris solea où il a été plus facile de les dis- séquer. Elles sont marquées M, M, dans les fig. i et 2 delà pi. II. La première de ces figures les représente intactes. Dans l'autre, celle d'un côté. M, est fendue pour montrer sa marche jusqu'aux branchies, par derrière l'oreillette , dont il ne reste qu'une portion Je. Celle de l'autre côté. M", est enlevée jusqu'à son entrée dans l'épaisseur des chairs, afin de montrer le muscle ", qui sert à faire retirer en dedans l'un des arbres des branchies. 11 y en a un pareil pour chacun de ces arbres. Celui de ces petits arbresauquel appartient le muscle", est fendu dans sa partie artérielle, laquelle est une suite de la veine cave, et l'on y voit en 2, 3, les ouvertures des petits vaisseaux par où le sang pénètre dans les petits rameaux branchiaux. L'arbre d'à côté n'est fendu que dans sa partie veineuse; les trous, 5 , 5, sont ceux par où le sang revient des ra- meaux , et se rend dans l'oreillette le. Le cœur et l'oreillette sont enveloppés dans un péricarde assez épais qui forme une poche distincte de celle du pé- ritoine. Le cœur arrondi et aplati n'a du reste rien de particulier. L'artère m , en sortant du cœur se divise de suite en deux branches principales 3 la première 0, continue la direc- SURLEGENREDORIS. n tîon du tronc m, donne dans son chemin, à droite , trois rameaux pour le canal intestinal, t, t , t; à gauche, un pour l'estomac /?, et un pour le duodénum \ Passant sous l'in- testin , et s'avançant vers la droite, il se bifurque en ^ ; la plus petite branche s , va au corps glanduleux cT- la plus grosse , s , r, se partage entre les organes de la génération , la bouche et le pied. L'autre grosse branche se partage en trois presque dès sa naissance, et tous ses rameaux sont destinés au foie. L'un n alimente la partie antérieure du lobe gauche j le second X est pour la partie postérieure ; le troisième u, se bifurque pour nourrir les deux parties du lobe droit. Le rameau Ji, en donne encore un v , qui se porte en arrière entre les deux lobes, se tenant cependant plus près du droit. La distribution des artères est à peu de chose près la même dans les Doris planes, comme on peut en juger par les fig. 1 et 2 de la pi. II , où les lettres sont placées sur les mêmes parties que dans celles de la pi. I. 5.° Organes des sensations. Le système nerveux des Doris est aussi simple que celui des tritonies; il consiste, comme je l'ai déjà annoncé, en un cerveau unique et sans ganglions épars, comme il y en a àansV aply sie ,\e: colimaçon, etc. On peut faire la même remarque que dans Vapljsie , à l'égard de l'ampleur des enveloppes de ce système. Le vrai cerveau n'occupe pas la moitié de l'espace que lui fournit la dure mère, ainsi qu'on peut le voir, pi. I, fig. 5 en b. Dans le doris lacera , le cerveau ne forme qu'une masse 13 MEMOIRE ovale, de petits globules brunâtres, mais dans le doris SO' lea, il est divisé en quatre lobes. Le premier nerf, i, i, pi. I, fig. 2 et 3, va au tentacule supérieur; le second, 2,2, passe sous le premier et sous le muscle transverse de la trompe, pour se rendre à toutes les parties antérieures du museau , et probablement aux tentacules inférieurs. Les suivaus , 5 — 10, se rendent en gé- néral dans les parties latérales , pour se distribuer aux muscles. Les deux dernières paires 11 et 12, serrent de prèsl'œso-^ pbage , et passent dessous ; 1 1 , pour y former par sa réu- nion deux petits ganglions , d'où naissent les nerfs de l'œso- pliage et de l'estomac, et 12, pour compléter le collierner- veux qui entoure ce canal. Cette disposition est absolument la même que j'ai décrite et représentée à l'article du tntonia. {Noyez cet article, pi. II, lig. i et 2.) Les tentacules supérieurs des Doris se logent dans deux gaines cylindriques et courtes qui leur sont I(.urnies par une saillie circulaire de la peau, ils ressemblent en cela à ceux des tritonies , mais ils en diffèrent beaucoup pour la f-^rme. Ceux des Iriionies sont souvent branchus; ceux des doris sont toujours composés de petits feuillets extraordinaire- ment minces, empilés les uns sur les autres, et comme en- filés dans un pédicule connnun. Je les ai trouvés tels dans toutes les espèces (jue j'ai observées tant mortes que vi- vantes. Il est vrai que R-ihatsch décrit autrement ceux de son argus. Ils sont , 'lit-il , semblables à une morille dont la tête seroitgarnie de petits luberculesou points noirsrson dessin les représente en effet comme deux petites grapes; il SUR LE GENRE DORIS, i5 regarde ces points comme autant d'yeux , et c'est même de cette multiplicité d'yeux qu'il a tiré le nom d^argus qu'il donne à cet animal. J'avoue que l'analogie si constante des autres espèces,' me force de soupçonner cet auteur estimable d'avoir été induit en erreur, et aucun autre exemple dans la nature ne me rend vraisemblable une différence aussi grande , dans un organe si important, entredcs animaux qui se ressemblent tant d'ailleurs. Les tentacules inférieurs ne sont pas aussi constamment semblables. Le (loris lacera les a comme la tritonie, en forme de deux larges lèvres ou feuillets charnus et crénelés. Dans le dorîs solea et dans les dorispla/iesen général , ce sont deux petites pointes ou cornes coniques, placées aux deux côtés de la base de la trompe. Bohatscli les a bien exprimées dans sa figure de l'argus. On ne comprend donc pas trop pourquoi Linnœus dans sa Xll.*^ édition , ne donne que deux tentacules aux f/om; ni pourquoi Gmeliu , en leur en attribuant quelquefois quatre, les place tous au-dessus du corps; ientacula 2 ad 4 , suprà corpus aritrorsani , intrà foramliia retraotilia. 6.° Organes de la digestion. a. Bouche. Les fZom diffèrent éminemment des /r/^GTz/es par la bouche en trompe et sans dents dans les premières, courte et armée de mâchoires tranchantes deijs les secondes. i4 MEMOIRE Il me semble que c'est une règle générale que les gasté- ropodes à trompe sont dépourvus de mâchoires. On voit la trompe du doris lacera en a , pi. \, fig. 2 et 3^ dans son état de rétraction. Cet état est produit par les muscles marqués ,qniforment autour d'elle une tunique conique, et dont l'attache à l'eu- veloppedu corps est en arrière. Ceux marqués aa, pro- duisent l'elFet contraire ; leur attache est immédiatement derrière les précédens, et ils s'insèrent en arrière sous la niasse de la bouchée, c, qu'ils portent-€n avant, et qui pousse la trompe devant elle. Celle-ci est en outre pourvue de fibres propres, pour s'allonger et se raccourcir. Sa tunique intérieure ou veloutée est extrêmement ridée lors de la contraction. Au fond de la trompe est une fente verticale, étroite, dont les parois sont revêtues d'une veloutée un peu carti- lagineuse j derrière est la langue qui ressemble à celle de la tritonic et de l'apljsie. L'oesophage y , est assez long et replié sur lui-même; son intérieur est extrêmement ridé ; les glandes salivaires du doris lacera ê', «T, sont longues et minces j elles s'insèrent dans l'oesophage près de sa naissance; leur extrémité pos- térieure s'y rattache près de son insertion à l'estomac. Celles du doris solea sont d'abord assez grosses, et en pas- sant au travers du collier nerveux qui entoure l'œsophage , elles deviennent si minces qu'on est tenté de \es prendre pour des nerfs qui iroient à l'estomac. Outre les vraies glandes saliv^aires, il y a sur la naissance de l'oesophage un grand corps glanduleux que j'ai long- temps pris pour elles. Il recouvre en partie le cerveau et I SUR LE GENRE DORIS. i5 la masse de la bouche, et se trouve généralement dans tous les Doris. Je l'ai marque S'-, sa couleur est brunâtre ; il reçoit une forte branche artérielle , et doit par consé- quent produire quelque sécrétion abondante, mais je n'ai pu encore découvrir où se porte rhumeur qu'il sépare. b. Ca7ial intestiîial. L'estomac des doris est membraneux et mince; il n'a rien qui ressemble à un gézier; sa surface interne n'a d'iné- galités que vers le cardia où les rides de l'oesophage se prolongent et se divisent en papilles. Le pylore est près du cardia, à gauche, et le duodénum croise l'oesophage en- dessus, pour se porter vers la droite. Le fond du cul-de-sac stomachal est percé de beaucoup de grands trous qui sont les orifices des vaisseaux biliaires. On conçoit à peine com- ment les alimens ne pénètrent point dans ces vaisseaux et ne les engorgent pas. On peut voir les orifices de ceux du doris lacera en e , fig. 5, pi. I. Ceux du doris solea, e , fpl. II, fig. 2, sont moins nombreux. Outre les vaisseaux biliaires, il y a dans les deux espèces une vésicule, O ^ fig. 5, pi. I, et fig. 1 et 2, pi. II, qui verse une liqueur quelconque dans l'estomac. Sasurface intérieure est toute hérissée de papilles coniques, mais elle n'a point de communication directe avec le parenchyme du foie. Il faut que sa sécrétion propre soit assez abondante, car elle reçoit un fort rameau artériel, de l'une des artères hépatiq'^es. Le canalintesliual est courtà proportion. Il va asse?direc- i6 jM E m O I R E tement à l'anus en restant logé dans un sillon du lobe droit du foie. c. Glandes. Le foie, ainsi qu'on a pu le voir, est très-volumineux, et reçoit un nombre considérable d'artères; il se divise longi- tudinalement en deux lobes; sa substance est grenue ; jus- que là il ne diffère pas beaucoup de ceux des autres mol- lusques; mais une circonstance l'en distingue éminemment. C'est ce canal qui aboutit à l'ouverture située près de l'anus; il est marqué y, pi. I,fig. 3, et pi. II, fig. 2. Il n'y a nul doute que c'est de la substance du foie qu'il tire ses branches; c'est un fait vérifié autant qu'il est possible par l'inspection anatomique; il faut donc que ce viscère, outre la bile qui se rend dans l'estomac, sépare encore quelque liqueur excrémentielle. En voilà le premier exemple dans la nature , et la chose étoit assez singulière pour me faire douter long-temps , et pour me faire mettre dans cet exa- men toutes les précautions possibles. Il n'y a qu'une seule supposition à faire qui soit contraire à mon idée; c'est que les lobules de deux glandes différentes seroient tellement entrelacés, qu'on ne pourroit les distinguer à la vue; une partie de ces lobules seroit hépatique, et produiroit la bile; l'autre donneroit la liqueur que le canal en question transmet au dehors. Je sais que Monro , dans son anatomie du calmar qui est à la suite de sa physiologie des poissons, regarde aussi l'encre que cet animal rejette comme une production excré- mentielle du foie , mais son opinion se réfute aisément; car gi dans le calmar et dans le poulpe, la glande qui produit SUR LE GENRE D O U I S. 17 l'encre est rapprodiée du foie , si elle en est même enve- loppée, dans la seiche elle est située dans une partie du corps fort opposée; et dans le poulpe même où le foie l'en- veloppe, il est aisé de l'en séparer, car elle en est distinguée par une double membrane. Il y a une différence pour ce canal , entre le doris solea et \e dons lacera; dans le premier, il remonte plus haut, et se contourne autour delà partie antérieure du foie , avant de s'enfoncer entièrement dans sa substance; dans l'autre, il se perd dès le milieu de la face supérieure du viscère. Celui du doris solea cache entièrement à la vue la veine hé- patique; mais celui du doris lacera marche simplement à coté, et ne la couvre point. Un peu avant de sortir du corps, ce canal communique par un petit conduit, avec une vésicule marquées, dans les figures des deux espèces; elle est fort plissée intérieure- ment sans l'être à l'extérieur, et paroît un peu musculeuse. Il est probable qu'elle sert de réservoir à la liqueur sécrétée, pour que l'animal puisse ne la faire sortir que quand il le juge à propos. J'ai trouvé ce canal dans tous les doris , et cependant le doris limbala que j'ai vu vivant, n'a rien fait sortir devant moi, que j'aye pu remarquer. M. Pérou croit se rappeler qu'il a vu répandre à quelques-unes de ces grandes espèces des liqueurs colorées. M. de Bellevue ne parle de rien de semblable , et je n'en trouve rien non plus Jans les auteurs qui m'ont précédé} ce sera un sujet de remarque pour les observateurs, 3 a8 MEMOIRE ' 7." Organes de la génération. Ils sont composés dans les dorls des mêmes parties essen- tielles t|ue dans les autres gastéropodes hermaphrodites y avec quelques circonstances accessoires de plus. L'ovaire est caché dans Tépaisseur du foie ; l'oviductus Ç>,^ , est long et tortillé comme à l'ordinaire; arrivé au testicule , il s'y colle intimement, et continue jusqu'à sa sortie. Le testicule", est gros et arrondi; dans le doris solea, il a l'air d'être fait des replis d'un vaisseau blanchâtre entor- tillé de mille manières; dans le lacera , il est creux, mais une partie de ses parois est épaisse et remplie de petits vais- seaux sans doute sécréteurs de la semence. La vessie, '^ , nommée par Svvammerdam de la pourpre ( mais assez mal-à-propos, ainsi que nous l'avons insinué à l'article de Ffl/^Z/s/a ) , et qui communique ordinairement avec le canal propre du testicule, a ici deux communica- tions ; Yurm ç , avec le canal que je viens de dire , et l'autre TT , qui va s'ouvrir près de l'extrémité de la verge. Dans le doris lacera, ces deu:Ç canaux s'unissent en un seul ,^ , avant d'arriver à la vessie, ^ ; dans le solea, ils» s'y rendent chacun séparément. La verge elle-même , a. , a , donne en arrière un canaF de communication ,*, ", avec celui du testicule, qui y aboutit fort près do celui de la vessie , ■^, et de Toviducfus/^.. C'est la première fois que j'ai observé dans les gastéropodes ces deux communications en quelque sorte surnuméraires. La verge du doris lacera est fort longue; son canal de s U R I. E G E N R E D O U I s. ^^ communication," est très-mmce; il se i-ctifle -en^, hranï d'aboutir au testicule. Dans le solea, elle est mince, aboutit à une crosse bourse charnue qui reçoit son canal de commu- nication ", avec le testicule. /:'> ' Ce qu'on voit, sans autre incision, de la verge du d'oria lacera, n'en est proprement que l'enveloppe charnue ; la véritable verge est au dedans , en forme de filet , d'un violet pâle. Elle se laisse aisément tirer de son enveloppe vers le dehors. Il y a encore une petite vésicule , <^, '^, sans doute ana- logue à celle marquée Z dans la IV.*" planche de Vapîysia, lig. 1 et 2, mais dont j'ignore absolument l'usage. 8.° Organes du mouvement. Les faisceaux musculaires sont peu marqués, et tout se réduit à un tissu de fibres qui s'entrecroisent dans tous les :seus pour former le piqd et l'enveloppe extérieure du corps. c)." Description comparative des espèces. A. Les doris planes. A. Le doris solea, type des doris planes, et dont j'ai décrit jusqu'ici l'anatomie, comparativement à celle du doris la^ cera, se fait remarquer par sa forme oblongue et extrême- ment aplatie. On peut sufiisamment la juger par les fig. r et 2 de la planche II ; elle est longue de 5 pouces 6 lignes, large de 2 pouces. Son pied n'a pas le tiers de la longueur du corps Sa peau ressemble à ua cuir par la consistance et le grain. On j io MÉMOIRE voit des élevures peu saillantes mais fort larges, et des rides peu marquées. L'étoile de ses branchies sort d'un creux ou d'une espèce de calice , bordé par cinq pointes ou valves saillantes et épaisses entre lesquelles passent les rameaux pulmonaires. Cette espèce vient de l'Ile-de-France. B. Le doris scahra. Il est presque aussi aplati que le solea ; il est plus petit d'un tiers : sa peau est un peu rude au toucher sans le pa- r ître à la vue, ce que les botanistes nomment scaber; ses branchies^ sont découpées plus menues , et se cachent plus complètement sous les valves de leur calice , que celles de la précédente. L^ouverture de ce calice est aussi beaucoup plus petite. La largeur du pied est à peine le quart de celle du corps. • Cette espèce vient de Timor. N. JB. Ces deux doris pourroient former dans la division des doris planes une petite subdivision fondée sur ce qu'elles sont encore beaucoup plus aplaties que les autres, que leur pied est beaucoup plus étroit , à proportion de la largeur du manteau, et sur-tout à cause des dentelures du calice de leurs branchies. Dans celles qui vont suivre, le clos est plus ou moins bombé , le pied presque aussi large que le manteau, et le tour du creux des branchies simple et sans dentelure. La première fait seule exception pour Fa- plalissement. C. T^e doris maculosa. \ Il est presque aussi plat que le scabra, mais de moitié SURLEGENREDORIS. ai pliispetitct encore plus rude; car les petites pointes courtes qui le rendent âpre au toucher, sont aussi, sensibles à la vue. Le calice de ses branchies n'a point de dentelures. Sa couleur est un brun foncé, avec des taches irrcgulières noirâtres. M. Pérou l'a trouvé à la ba je des Chiens Marins, GÔte de la JNouvelle-Hollande. D. Le doris vcrrucosa. Si les raisons que j'ai données au commencement de ee Mémoii'e ne suffisent pas pour prouver que c'est ici le vrai doris verrucosa deLinnœus, toujours est-il certain que c'est de toutes les espèces connues celle qui mérite le mieux cette épithète. C'est aussi celle pour laquelle on a pu le plus facilement prendre la figure de séba queLinnœus citCj quoique cette figure représente hien clairement un osca- brion. Outre les gros tubercules arrondis etsaillàns , et lèspetitis qui sont entre les gros, cette espèce se distingue encore des autres, parce que ses tentacules supérieurs ne se retirent point dans des creux ou tubes cylindriques , mais sont pro- tégés chacun par deux feuillets charnus , très-veinés à leur face interne. Ses branchies sont au nombre de i5 ou 16, et représentent autant de feuilles pennées; elles sont toutes séparées jusqu'à leur base, et ne se réunissent point en une grande feuille palmée, comme dans d'autres espèces , mais tiennent toutes à la circonférence d'un disque circulaire au milieu duquel l'anus saille en forme de petit tube. Les figures 4, 5 et 6 de la pi. I , représentent cette espèce do grandeur naturelle. On voit la trompe à demi sortie daus «2 ]M E M O I R E la figure 6, et l'un des tentacules grossi, avec son enve- loppe, fig. 7. Les individus que j'ai observés étoicnt blanchâtres, mais ils avoieut été long-temps conservés dans l'esprit-de-vin. Ils vcnoient de rilc-de-Francc. Contractés par la liqueur, ils étoient longsd'un pouce;leurs tubercules avoient jusqu'à une ligne ou une ligne et demie de grosseur. E. Le doris llmhata, ( PL II , fig. 5 ) Je l'ai observé vivant à Marseille, en jtlivôse de l'an XI , où l'on m'en apporta deux individus. Son manteau est brun _, marbré de noir, avec un bord étroit, jaune-clair tout autour. Ses branchies représentent une grande feuille palmée dont les folioles seroient ce que les botanistes nomment tripinnatilides , c'est-à-dire, trois fois découpées en lanières, disposées aux deux côtés des tiges comme des barbes de plumes. Ces branchies sont noires, excepté les pointes de tous les folioles qui sont blanches. Lestentacules supérieurs sont en forme de massue; la massue est composée de feuillets enfilés; ils sont noirs, et ont la petite pointe blanche. Tout le dessous du corps est noir; mais le pied est liséré de jaune comme le man- teau. Dans l'esprit-de-vin, l'animal se contracte beaucoup, et devient blanchâtre. La figure le représente grossi d'en- viron un tiers. Cet animal est d'un naturel aussi lent que nos limaces; si on le touche, il retire ses branchies, mais foiblement ; il ondule en marchant les bords de; son pied et de son manteau de mille manières différentes; quelquefois il redresse vers le haut les bords de son manteau, commç fait Vapljsie, SURLECriNREDORIS. aS Les matelots de Marseille lui donnent en Provençal ua nom qui équivaut à viilva marina. r. Le dorls taherculata , pi. II, fîg. 4. En tout semblable au précédent pour la forme du corps, des branchies, du manteau ; seulement un peu plus grand, ajant environ a pouces de long sur 18 lignes de large; la grande différence consiste dans la surface du manteau qui est semblable à du cbagrin, cVst-à-dire, toute couverte de petits tubercules arrondis qui se touchent, et dont les plus grands ont au plus un quart de ligne, mais parmi lesquels il y en a de beaucoup plus petits. Dans la liqueur, les deux individus que j'ai vus étoient d'un fauve un peu grisâtre. Je ne sais quelle estleur couleur dans l'état de vie. Ils venoient l'un et l'autre de l'île de Ré, M. de Bellevue qui m'a donné l'un des deux, le regardoit comme le doris ohvelata de Linnseus, mais je crois qu'il y a quelques distinctions à établir sur ce sujet. Ce ne peut pas être l'animal représenté parMuUer, Zool. dan. t. 47, fig. I et 2, et copié dans l'Encyclop. méth. vers. pi. 8a , fig. 5 et 4. L'étoile des branchies de cette figure est beaucoup trop petite et trop simple ; et les bords du man- teau s'étendent beaucoup trop au-delà du pied ; on dit d'ail- leurs dans la description que le corpsest demi-transparent, ce que celui-ci n'est certainement point. Mais il n'est pas impossible que notre animal ne soit le même que celui {[cFkmcus , App. t. V, fig. GH, que Gmeliu regarde comme synonyme de Vobve/ala. iSéaami>ins, le doris 0 6 w/«/a n'étant établi qpe sur- la si MÉMOIRE description autoptique de Mullcr, on ne peut transporter et nom à des animaux dilTérens du sien, sur la simple autorité d'une synonymie très-probablement erronée. Il y a cependant quelque apparence que M. OtJion Fra- hriciiis est déjà tombé dans cette erreur; le cZom qu'il re- présente, Mém. de la soc. d'hist. nat. de Copenhague, t. IV, pi. V,fig. 1 et 2, ctqu'ilcroit ro6ve/a/a, est très-voisin du notre, si ce n'est pas le même. G. Le do/is stellata. ginu H. Le d&ris jnlosa. gm. I. Le do/is tomentosa. m. M. Flcuriau de Bellevue qui a bien voulu m'envoyer ces petits doris, s'exprime ainsi à leur sujet, dans les notes intéressantes qui accompagnoient son envoi. « Ces animaux se trouvent sur les côtes de la Rochelle , » tantôt blancs , demi-transparens, tantôt d'une couleur w fauve ou gris de lin ou cendré, et ne passent guère la )) longueur de 3 centimètres. » Leur corps n'est point plat, comme l'indique le carac- » tère du genre , mais très-bombé , etc. » Les branchies forment une étoile frangée qui occupe » toute la partie postérieure, c'est-à-dire, le tiers de la » longueur de l'animal. » Les tentacules ont près d'un centimètre : leur moitié )) antérieure est en forme de plumet rond et fauve; le reste » est uni , blanc et transparent. Ils sortent d'un étui court » et lascinié, qui paroît seul quand ils sont repliés. SURLEGENREDORIS. aS » La bouche fendue verticalement se prolonge en forme » de trompe, quelquefois au-delà du manteau. Je n'ai pu )) apercevoir les yeux, )) L'organe de la génération est, comme dans les limaces, » du côté droit, sous le manteau, à peu de distance du » tentacule. Il consiste en un corps saillant , sortant d'un » trou plus grand que ce corps; ce trou est ouvert posté- » rieurement. » Ces animaux rampent sur leur pied et s'attachent assez » fortement par son moyen, même sur le vernis de la )) fayence , faculté qui leur permet de résister à l'action des » flots. Ils nagent aussi , mais d'une manière curieuse. Leur )) position, dans ce cas, est inverse de la précédente. Le )) pied, étendu au-dessus de la surface de l'eau, devient )) un peu concave, et s'alonge en forme de gouvernail, » tandis que leurs tentacules, et sur-tout le développement » de leur manteau les fait avancer comme un bateau à la » rame, ou plutôt comme une barque pontée et sans mâts. )) C'est aussi la manière de nager de la tritonie. )) Mis dans l'eau douce, ils replient leurs tentacules, et » presque toutes leurs branchies, et s'enveloppent entière- » ment de leur manteau; ils y meurent bientôt après. Ils » perdent près de la moitié de leurs dimensions dans l'eau » de vie. )) Ces animaux, sans être communs, ne sont point très- » rares sur notice côte ; j'en ai eu successivement jusqu'à six, )) qui ont vécu plusieurs jours. Le plus petit que je vous » remets paroît dépourvu de tubercules ; il ressembloit » d'ailleurs tellement aux autres, que j'attribue cette diffé- » rence à ce qu'il est encore jeune, etc. n 4 26 MÉMOIRE J'ai cru apercevoir entre les animaux envoyés par M. de Bellevue, des différences qui , si elles ne sont pascerlaine- ment spécifiques, ont pu le paroître aux naturalistes qui m'ont précédé , et que je crois avoir motivé la distinction entre le cloris stellata et \cpilosa. Les individus que je rapporte au premier, sont un peu moins bombés, plus bruns, et leur manteau est recouvert de petits tubercules arrondis ; ceux que je rapporte au second, sont beaucoup plus bombés, tout-à-fait blancbàtres, et leurs tubercules sont en cônes alongés, flasques et retom- bans, de manière à représenter des poils. Je leur trouve aussi neuf feuilles aux branchies, tandis que les autres me paroissent n'en avoir que sept. La figure de Bommé, Mém. deFlessingue, tome III, fig. 4, que Gmelin cite sous JD. stellata , se rapporte très-bien à nos premiers animaux. Quant au petit individu dontM. deBellevueparle à la fin de sa note, il a le znanteau plus débordant le pied, et sa sur- face est tout-à-fait couverte de ce tissu un peu laineux au tou- cher,et comme feutré , que lesbotanistes nomm-ewi superficies /o;7ze7z/osa. Ses branchies sont entièrement rentrées et ca- chées dans leur calice, ce qui n'arrive à pas une des autres espèces. Je crois donc encore pouvoir hardiment le considérer comme une espèce à part. K. Le doris lœvis. Il n'y a au lieu de tubercules que de petits points blan- châtres sensibles à la vue plus qu'au toucher. Le corps est plus oblong, plus convexe dans le sens de l'axe^ et les ten- SURLEGENREDORIS. 27 tacules plus longs que dans les trois espèces précédentes. La grandeur est à peu près la même. La couleur est blanchâtre autant qu'on en peut juger dans la liqueur. Il y a aux bran- chies neuf feuilles bien distinctes. M. Homberg l'a observé souvent aux environs du Havre. B. Les Dorts prismatiques. L. Le doris lacera. Suffisamment décrit au commencement de ce mémoire , surpasse de plus du double en grandeur tous les autres doris prismatiques. M. Pérou l'a rapporté de Timor, ainsi que les deux espèces suivantes. M. Le doris atro-marginata. Mérite bien ce nom par la ligne étroite, d'un noir foncé, qui règne sur tout le pourtour de l'arrête qui distingue le dos des flancs. Le reste du corps est blanchâtre j la partie postérieure finit en pointe aiguë. PI. II , fig. 5. N. Le doris pustulosa. Tout le corps est blanchâtre et garni de papilles larges très-peu élevées, dont le milieu est marqué d'un point en- foncé. La terminaison du corps est arrondie. Je laisse à M. Pérou à donner plus de détails sur ces espèces , ainsi que sur la multitude d'autres mollusques et zoophjtes qu'il a découverts. MEMOIRE Sur la ScYLLEE, /'EoLiDE et le Glaucus, avec des additions au Mémoire sur la Tritonie. i.° Observations sur le genre Scyllée. Jr EU de mollusques ont été décrits jusqu'à pi'ésent d'une ma- nière plus vague et plus contradictoire que la scjUe'e. Se'ha, qui paroit en avoir parlé le premier, en i'y34^Ia pi'it pour un jeune d'une espèce de lophins ^ et dans celte idée sin- gulière , il la fit représenter le dos en bas et le ventre en haut, afin que les branchies se trouvassent placées à peu près comme des nageoires de poissons. ( Voyez Séb a , Thés. 1. 1 , pi. LXXIV, fig. 7 , p. iig, n." 7 ). Au reste sa figure est si mauvaise, qu'il falloit que Linnœus fût presque devin pour y reconnoitre notre animal. Ce grand homme ayant trouvé divers individus de scjllée dans le caljinet du prince de Suède, les indiqua , en 1754, sous le nom de lièvres de mer., et tout en les laissant avec les lo- phius , témoigna quelques doutes sur l'origine que leur attri- buoit Sèba. « Credo eos esse ex génère zoopliytorum ; at » Seha statuit esse Jiuj'us lophii f twnidi J pullos uti gyrini » sunt rajïarimi, quodautoptis invivis excutienduni relinquo. ( Mus. Adolph, Fred. p. 5Ç>. J Osheck^ l'un des premiers disciples de Linnaeus, ayant ob- servé cette espèce dans l'océan Atlantique , en 1752, en pu- i a S U R L A S C Y L L É E, hlia une bonne description dans la Relation de sou voyage imprimée en 1757. Il témoigna, comme son maître, Leauconp de doute sur ce qu'en avoit dit Séha^ et rétablit la vraie posi- tion de l'animal, en regardant comme le ventre la partie où règne un sillon , et comme le dos , celle qui porte les branchies qu'il nomma nageoires. Il ajouta cependant en noie: iAPeiit- » être auvois-je bien fait de dire , au lieu des antennes , les » mains ^ et au lieu des nageoires les quatre pieds, f Osheck , » Voy.àlaCliine,p.3o6deréd. suéd., et3o2 delà trad. allem.^ Néanmoins Zy/7«7«<3?«.y introduisant, cette année-là même i']^']^ noti'e animal pour la première fois, dans sa dixième édition , comme un genre devers, et sous ce nom de sejllœa qui lui est resté depuis , se conforma encore au renversement opéré par Se'ba , et lui donna pour caractères le dos creusé d'un sillon y au moyen duquel il s attache aux fucus , et trois paires de bras. Ces prétendus bras ne sont autre chose que les tenta- cules et les bi'anchies. C'est ce qu'on peut appeler décrire un; animal absolmnent à l'envers. Il n'y eut aucun changement dans la douzième édition , qui est de 1766. En 1775, il parut dans les descriptions d'animaux faites en Orient par Forskahl , celle d'une scjllée trouvée dans la mer rouge , près de Ghomfod. L'auteur ne la croyant pas abso- lument la même que celle de Linnœus, à cause de quelques expressions peu exactes de celui-ci , lui donna un nom spéci- fique particulier: Se. glomfodensis. Il ne proposa aucun chan- gement dans les caractères du genre, et cependant il décrivit l'animal comme l'avoit fait Osbeck , et comme le feront tous- ceux qui le verront vivant ; je veux dire qu'il rendit les tenta- cules et les brauchies au dos , et qu'il regarda le sillon comme LE G L A U C U S, cic. 3 le pied. « Abdomen canaïiculatum expans'de ut limacum. » Illius ope in fuco répit. '>> f Vovsl.. descr. an.arab.j). io3J. Pallas , qui n'en dit qu'un mot, en 1778 (dans ses Mis- cellanea , p. 73 , note ) , y prouva cependant qu'il éloit du sentiment de Forskahl. « Pes limacum glutinans , cui suc- y> cedaneus in scjllœa sulcus. » Qui croiioit , d'après cela, que Gmelin laisse encore le ca- ractère du genre , comme l'avoit donné Linnœus , et qu'après avoir dit , sans témoigner aucun doute , que le scjUœa pela- g'ica s'attache par le dos aux fucus, il copie, pour le scjllœa ghomfodensis , la description de Forskahl où le nom de dos est donné à la partie opposée? Il a été imité aveuglément par tous les faiseurs d'abrégés. Forskahl avoit laissé de son scjllœa deux bonnes figures (Ic.pl. XXXIV, Ce); mais JSiehuhr ^ son éditeur, ne les reconnut pas , et , dans l'explication des planches de ce voya- geur , il les raj)porla à une espèce à^ alcyon. Aussi personne depuis ne les a ni reconnues ni citées , et Bruguières , qui copie toutes les figures de Forskahl., ïiéglige précisément celles-là. Il ne parle même point du tout de la scyllée dans le tableau qui précède le Dictionnaire des vers de l'Encyclopédie méthodique. J'ai donc été obligé de donner une nouvelle description de la scyllée faite sur nature , avec une nouvelle figure. L'une et l'autre ont paru en l'an VI, dans mon Tableau élémentaire., p. 388, et pi. IX,fig. 4; et quoique je n'eusse point vu alors ce qu'avoient dit Osheckei Forskahl., je m'étois rencontré avec eux dans la manière de considérer l'animal , la seule qui puisse indiquer son véritable or die et n'en pas faire un monstre. Mais nos naturalistes n'ont pas fait grande attention à ce ren- I * 4 S U R L A S C Y L L È E , seignement. M. de la Maick a passé entièrement la scjllée dans son Système des animaux sans vertèbres , parce qu'il a cru pouvoir la laisser parmi les tritonies , à ce qu'il m'a fait l'honneur de me dire verbalement : c'est en effet avec ce genre qu'elle a le plus de rapport. M. Bosc a changé entièrement le caractère du ^enre scjl/ée, dans son Histoire des vers , t. I,p. 85j mais tel qu'il l'arrange, ce n'est plus aux animaux de Liniiœiis, d'Osbeck et de Fors- kahl qu'il convient. C'est à un mollusque différent , dont nous parlerons bientôt , qui n'est autre que le ^laiicus de Foi^ster et de M. Blinnenhach^ et le doris radiata de Gmelin. Aussi M. Bosc ne range-t-il que ce glaucus sous son genre scjllée , en le nommant scjllée nacrée. Il semble avoir pressenti son erreur , puisqu'il dit, p. 88 :« La description ( de celte pré- » tendue scjllée nacrée ] paroîtra sans doute assez détaillée » pour que les naturalistes qui ont été à portée de voir la » véritable scyllÉe pélasgique de Linnoeus , puissent juger ^> s' il peut lui être réuni , ou s'il doit faire un genre à part » avec ï espèce de Forskahl. » Ce n'est ni l'un ni l'autre. L'espèce de Forskahl doit rester avec la scjllée pélasgique dont elle ne diffère point, et le glaucus doit rester séparé. Devenu plus hardi avec le temps , M. Bosc va bien plus loin encore dans le Dictionnaire de Déterville ^ t. XX, p. 2^6. sy Aujourdhui donc , dit-il , on peut rejeter comme incertaine » la scjllée pélasgique de Linnœus ^ et regarder les scj liées » comme bien distinguées des tritoines , puisque leur anus » est latéral^i tandis quil est dorsal dans ces dernières. » Ce passage est vraiment fait pour étonner de la part d'un aaluraliste aussi savant et aussi exact que M. Bosc. Première- LE G L A U C U S, etc. 5 ment il n'y a rien d'incertain dans un animal décrit par deux hommes tels que Osheck et Forskahl, sans parler de moi. En second lieu, le caractère donné par M. Uosc ne distingue ni les véritables scyllëes de Linnreus, ni celles de M. Bosc lui-même, c'est-à-dire les glaucii s , du. genre des tritonies ; car toutes les tritonies que j'ai examinées ont l'anus latéral , comme les deux autres genres ; et comme c'est moi qui ai lait le genre tritonie , on peut bien s'en rapporter à moi sur les espèces que j'y fais entrer. Ces éclaircissemens étoient d'autant plus nécessaires , que celte interversion involontaire de nomenclature faile par M. Bosc , si lidèle pour l'ordinaire aux principes posés à cet égard par Liimœus , a déjà été suivie par ceux qui ont écrit depuis lui. Le glaucus reparoît sous le nom de scjllée , dans le Voj âge aux lies dAf ruine , de M. Bory-Saint- Vincent ^ tome I, p. i36, et Atl. pi. VI,fig. I, A, B, et dans un ouvrage très- bon d'ailleurs, \ Histoire desynoUusqnes de M. de Boissj, tome V, p. i55. Ce dernier va même jusqu'à dire , p. i56 , que la scjllée pélasgir/ne na. point été revue depuis Linnœus , quoi- qu'il puisse voir journellement la ligure que j'en ai publiée , et que l'original soit exposé à tous les yeux dans notre Muséum, où je l'ai démontré plus d'une fois^ dans mes cours publics. Il n'y a point à douter que si quelque faiseur de système , soit des animaux en général , soit des mollusques en particu- lier, étoit venu à s'en mêler, le mal n'eût bientôt été sans re- mède , et que la trace de ce que Linnœus a entendu par scyl- lée ne se lût pi-esque entièrement effacée. J'espère du moins qu'après les détails où je vais entrer , les rédacteurs d'ouvrages généraux deviendront plus atlentils. « SURLASCYLLÉE, 2." Description extérieure de la scjllée. La scyllée représentée, fîg. i , par le côté droit 5 fig. 3 , par le ventre; lig. l\, parle dos, et fig. '^ , suspendue par le pied à un rameau à\x fucus natans ^ est un mollusque dont l'enve- loppe extérieure est gélatineuse et demi-transparente. Son corps est comprimé latéralement , et plus élevé au milieu qu'en avant et en arrière , s'abaissaut de part et d'autre pour former la tête et la queue. Celle-ci est plus comprimée encore que le reste. La face inférieure ou le pied est creusé dans presque toute sa longueur d'un sillon profond, H, H, fig. 1 et 3, dont les bords sont renflés, et par lequel l'animal embrasse les tiges des fucus auxquels il a coutume de rester ainsi attaché ou sus- pendu, apparemment pour résister aux vagues, ce qui n'em- péclie pas qu'il né puisse aussi les quitter quand il veut; car c'est volontairement qu'il y adhère , et non parce qu'il s'y colle comme les huîtres aux rochers. Linnœus , trompé sans doute par la position renversée dans laquelle la scjllée se suspend quelquefois , a pris , comme je l'ai dit, ce pied et son sillon pour le dos de l'animal. De là ces expressions : « corpus se affigens^ dorso caiiiculato » ; et ces autres : « dorsutn longitudinaliter canaliculatum ,fos- sulâ crenatd ^ quâ fuco affigitur quiescens » :, par où il vou- loit dire seulement qu'elle s'attache ainsi dans le temps du repos ( quiescens pour duni quiescit) , mais non pas qu'elle se fixe pour toujours. Les autres naturalistes, h commencer par Fors kahl, ont pris ces mots dans le dernier sens ; et c'est ce qui a fait méconnoître à ce voyageur la scjllœa pelagica , et ce qui a induit en er- LE GLAUCUS, etc. j reur tous ses successeurs. Gmelin a achevé de rendre la vérité inéconnoissaLle , en donnant au scjllœa pelagîca l'épilhète fixa^ et eu l'opposant à celle de vaga qu'il donne au scjllœa ghoTufodensis. Osbeck avoit cependant dit positivement : « en dessous est >♦ un sillon par lequel elle peut embrasser le fucus en long » ou en travers , avec sa partie postérieure ou avec l'anté- » Heure. y> Ce qui indiquoit bien qu'il n'enteudoit point qu'elle Ee fixât pour toujours. En avant du sillon se volt la bouche, qui est petite , dirigée en bas et entourée par devant d'un bourrelet en forme de fer à cheval. ( Voyez G, fig. 3.) La tête est fort peu apparente: elle porte deux tentacules ( A, A, lig. i , 3 et 4} comprimés , en forme de larges feuilles ondulées, ovales, plus étroites ti leur racine. L'animal peut les alonger plus ou moins. Leur bord antérieur est double, et dans le fond de la duplicature est un petit tubercule conique qui peut aussi s' alonger un peu. Ce sont ces tentacules que Linnœus appelle « prinuim par » bracldorum sub ore , minus rotundius.yi Osbeck les nomme des antennes , et les décrit très-bien. Toute la face qui forme le dos est étroite , plate et distinguée des deux faces latérales par des arrêtes prononcées. De ce dos partent deux paires d'ailes membraneuses, B, B et C, C, ovales , ondulées, tlexibl es dans tous les sens, au moyen de leurs fibres propres , comme le sont presque toujours les di- verses parties des mollusques. La première est un peu plus grande que l'autre. Sur la queue est une crête, D , ordinairement simple , uu peu moins élevée que ces ailes , mais flexible et onduleuse comme elles. Sa partie antérieure est quelquefois double. 8 SURLASCYLLÉE, Sur la face interne des quatre ailes , sur le dos lui-même , et sur les côtés de la partie antérieure de la crête caudale, sont les franchies , qui ressemblent à de petites houppes touffues , de filamens très-déliés, que l'animal contracte une fois qu'il est hors de l'eau, mais qu'il étend dans l'eau de manière à les faire ressem- bler à une forêt de palmiers ^ selon l'expression de ForskahL Du reste , ces houppes sont comme semées sans régularité. Les ailes sont la seconde et la troisième paire de bras dans Linnœus , et les houppes , qu'il n'aura vues que dans l'esprit-de-vin et contractées , sont nommées par lui des pa- pilles. Il n'attribue positivement de ces papilles qu'à la première paire d'ailes, et dit simplement de l'autre: « tertium siimle priori ,• » c'est-à-dire , aux tentacules. C'a été là une seconde source d'erreur pour ForskaJd; trou- vant à sa scjllée de la mer P«.ouge des houppes aux quatre ailes et point de papilles, il la crut spécifiquement différente, et ce fut d'après sou idée que Gmelin construisit ce carac- tère erroné qui a trompé tout le monde : Se. vEhXGicx, Jixa,te7itaculis ejçtremis similibus, mediis papillosis. Mais la preuve que la scjUœa pelagica ne diffère point non plus à cet égard du ghomfodensis , c'est que Osbeck, dont l'ani- mal est bien le scjllœa pelagica^ de l'aveu àe Linnœus même, nétabht aucune différence entre les quatre ailes , ou nageoires, comme il les appelle. Eu effet , toutes les scjllées que j'ai vues , non-seulement de la mer rouge, mais de l'Océan et de la mer des Indes, ont leurs branchies comme je les ai décrites ci-dessus. Je me crois donc autorisé à rejeter l'espèce du scjUœa ghomfo- densis , ou à dire au moins que son nom ne vaut rien, car on la trouve partout. LE GLAUCUS, etc. 9 Les faces latérales de la scjllée sont les plus étendues : ou y voit quelques tubercules peu saillans qui paroissent le plus souvent au nombre de cinq , rangés sur une ligne droite. On remarque de plus, au côté droit, l'orifice de l'anus, F, fig. i , qui est vers le liant, entre l'aile antérieure et la postérieure , et l'orifice commun de la génération , E , qui est vers le bord inférieur, plus en arrière que les tentacules. La longueur de la scjllée va jusqu'à deux pouces. Il y en a de beaucoup plus petites. Vivante , elle est , suivant Forskahl, jaunâtre, pointillée de roussâtre ; il y a au bord du dos et de la queue une ligne de points bruns , au milieu du dos une de points bleuâtres. Il y en a aussi sur les flancs quelques-uns de cette dernière couleur. Les individus que j'ai observés dans l'esprit-de-vin , étoient tous uniformément blanchâtres ou jaunâtres. Ce mollusque paroit répandu dans beaucoup de mers. Nous avons vu qiiOsbeck l'a trouvé dans l'Océan Atlantique, à la hauteur des îles du cap Verd , et Forskahl dans la mer Rouge j nous pouvons ajouter que les compagnons de Baudiii l'ont vu proche la terre d'Edels , côte sud-ouest de la jyoïwelle-IIol- lande. 3.° Observations anatomiques sur la scjllée. Forskahl décrit ainsi les intestins vus au travers de l'enve- loppe : « Intestina translucent in laterihus ; sub collo jilum » labjrinthiforme albidum, et globus albus; deinde globuli » très majores série longitudinali aurantii coloris. >,<, Ces globules et ce fil se voient en effet: les premiers sont le foie et l'ovaire ; le fil est la verge. 2 10 s U R LA se Y L L É E, Osheck a aussi vu cos globules , mais il a cru que c'étoient les parties de la fruclilicalion au fucus natans^ avalées par l'animal. Nous représentons les viscères de la scjllêe dans leur situa- tion naturelle , iig. 2 , et développés , fig. 5. a est la masse de la bouche 5 /» , le cerveau ; c , l'œsophage ; f/, le gésier ; terre, à distances à peu près égales du Cap et de lile de » Tristan d'AcunJia », le nomme comme M. Bosc. Enfin nous savons que les autres compagnons de Baiidiii l'ont encore pris dans le sud du canal de Mosambique ; en sorte qu'il paroit exister à peu près dans toutes les mers chaudes et tempérées. N'ayant point vu nous-méme cet animal , nous nous bor- nerons à en communiquer, fig. II, un nouveau dessin qui nous a été donné dans le temps par M. Homberg , et à retra- cer les caractères qui le distinguent des scj liées et des tritonies dont il se rapproche sans contredit plus que des autres genres. Son coprs est plus grêle; il se termine par une longue queue, i4 s U Pt L A s C Y L L É E, ce qui l'a fait comparer à une salamandre. Son anus et son orifice de la génération sont placés sur le colé, comme dans les scjUées et les tritonies. Il a quatre petits tentacules co- niques comme la limace , et non pas deux branclius comme la tritonie j ou deux comprimés comme la scjllée. Enlin ses branchies ont une forme qui n'est qu'à lui. Elles se composent de lanières étroites , disposées en éventail comme les feuilles de certains palmiers, et servent de nageoires eu même temps que de branchies. Leur position est horizontale, tandis que la scjllée et la tritonie ont les leurs redressées , la première en forme de larges feuilles, et la seconde en forme d'arbres ou de panaches. Feu Reinhold Forster a donc été parfaitei>ient autorisé à rétablissement du genre glaucus , et il n'y a point de raisoiî valable pour changer ce qu'il a fait. Il n'y a même qu'une lettre à ajouter au caractère qu'il a fixé; c'est hranchiis pabnatis , et non hrachiis , qu'il faut dire. Il faut aussi en laisser le nombre indéfini. La plupart des glaucus qu'on a observés n'en avoient que trois paires, et quand même celui de Forster en auroit réellement eu. quatre , ce ne seroit pas une différence générique. Le glaucus a tout le corps du plus beau bleu céleste , de- venant plus foncé aux extrémités des lanières de ses branchies. Le milieu du dos est d'un beau blanc nacré et bordé de chaque côté d'une raie d'un bleu foncé. Ou voit en dessous une tache brune qui est probablement produite par le foie vu au travers des enveloppes. Il paroit que sa grandeur varie depuis un pouce jusqu'à deux. L^espèce la plus coirmiune pourroit se nommer glaucus hexapterjgius ^ si celle de Forster a réellement huit branchies , LE G L A U C U S, etc. i5 on la iiomineraoc/oyy/e'/;^;5'«/5. Dans tous les cas, le nom spéci- fique d^atlajiticus ne lui convient pas , puisque l'autre g^/^uc/i^y est aussi dans l'Atlaulique , et qu'il paroit que le genre est dans toutes les mers. 5.° Sur le genre Eolide. De cette réunion indigeste à laquelle Gmelin avoit , contre toutes les règles d'une nomenclature raisonnable, étendu le nom de doris , nous avons déjà démembré et décrit en détail, 1.° Les doT'is véritables qui ont deux tentacules en dessus, deux en dessous d'un manteau plus ou moins étendu, en forme de bouclier, et les brancbies autour d'un anus placé sur l'ar- rière du dos. 2.° Les fr/Vo7«e.y qui ont deux tentacules en dessus seulement, les brancbies en forme d'arbres plantés le long des deux cotés du dos , et l'anus sur le côté droit. 3." Les glaucus qui avec l'anus des tritonies ont des bran- chies palmées , placées des deux côtés comme des nageoires , et quatre tentacules coniques à la tête , sans manteau distinct. Les e'olides ne méritent pas moins que tous ces mollusques de former un genre à part : elles ont quatre et quelquefois six tentacules coniques à la tète, et manquent de manteau comme les glaucus^ mais leurs branchies ont une forme particulière. Elles rer résentent des écailles ou des tuiles, et sont ainsi cou- chées sur un ou plusieurs rangs , le long des deux côtés du dos. J'avois indiqué ce dernier caractère dès l'an VI , dans mon Tableau élémentaire, p. 388, où je proposai, pour la pre- mière fois , de subdiviser le genre doris. i6 SURLASCYLLÉE, Néanmoins, MM. Delamarck el de Pwissy ^ qui ont adopté lîion genre tritonie , n'ont fait aucune mention des éoLides . et ^l. Base laisse les espèces connues de ce derniei' genre dans celui des irîtonies. Linnœus paroît être le premier qui ait décrit une éolide , d'après Martin, l'un de ses élèves qui l'a voit trouvée dans la mer de IXorwège ; c'est le Umax papillosus delà faujia pie- cica , 2/ édit. de 1^61. Il n'en dit autre chose, sinon qu'elle est grande comme im grain de riz , toute cowej^te en dessus de petites papilles aiguës et molles^ avec quatre grands ten- tacules. Baster en décrivit, l'année d'après, 1762 ( opuscula sub- cesiva , ï , 81 , pi. X , f. i), sous le nom de r/om, une des cotes de Hollande , longue de deux pouces, ayant aussi quatre ten- tacules ,1e milieu du dos nu , et les cotés couverts d'une très- grande quantité de petites écailles molles; le pied large et plat. En 1766, Linnœus regarda l'animal de B-asier comme le même que le sien , et les réunit ( Syst. nat. éd. XÏI ) sous le nom de Umax papillosus , demandant toutefois si ce ne seroit pas plutôt un doris. En 1770 , Gunnerus ., évéque de Drontlieim , redonna l'ani- mal de Baster sous le nom de doris hodoensis ( Mém. de l'ac. de Copenhague, tomeX, p. 170, pi. sans n.*',fig. i — r3;cette dernière tig. est copiée, Encycl. vers. pi. 82, (ig. 12). C'étoit sur les cotes de Norvv'ège qu'il l'avoit trouvé. Gmelin réunit ces trois synonymes sous son doris papillosa , et quoique celui de Linnœus paroisse déjà différent des deux autres , il y en ajoute encore deux, non moins différens, savoir : le Umax minimus de /^or.yAaA/ (desc. anim. Arab.p. 100, n.° 5 , et ic. XXVI , H h i et h 2 , copié, encycl. pi. 82 , lig. 10 et LE GLAUCUS, etc. a5 II), trouvé dans la MéditeiTanée , à quatre tentacules, très- petit comme celui de Linnœus , à milieu du dos nu comme celui àe B aster eiàe Gunner,ma\s à écailles beaucoup moins nombreuses , et à pied en forme de sillon ; et la limace épi- neuse de Dommê [Wén\. de Flessingue, tome III, fig. 2) des côtes de Hollande , aussi très-petite , à do^ entièrement garni d'écaillés peu nombreuses et à six tentacules. Au tort de confondre ainsi au moins trois espèces , il ajoute celui de doubler une des trois, celle de Forskahlj car, après en avoir rapporté la figure sous doris papillosa^ il en cite la description comme fondant sur elle l'espèce du doris minima. Outre ces éolides mal distinguées entre elles, les auteurs en ont décrit deux qui nous paroissent suffisamment déterminées , savoir : i.° Le Umax marimis^ Forsk. ic. XXVI. G i etg 2 , copié dans l'Encycl. p. 82 , fig. i3, doris fasciculata^ Gmel. Il a quatre longs tentacules et des écailles minces presque comme des poils. 2. La deuxième , limace de mer épineuse de Bommé , Mém. de Fless. III , fig. 3 , doris pennata , Gmel. Il a quatre tenta- cules , et de cbaque côté une seule rangée de neuf écailles. On n'en a vu que de fort petits individus. On trouve de plus une espèce que je ne rapporte aux éolides qu'avec doute : c'est le Umax tergipes de Forskahl , descr. an. p. 99 , n.° 45!^- XXVI ,fig. 4j copié Encycl. pi. 82 , fig. 5 et 65 doiis lacinuhita^ Gmel. Il a quatre tentacules , et de chaque côté de sou dos cinq proéminences en forme de massues creusées au bout , et dont il peut se servir pour marcber , comme de son pied ordinaire. U faudroit un nouvel examen pour assigner la place de ce 3 26 s U R L A s C Y l. L É E , singulier et très-petit mollusque , qui doit probableiueiU faire encore uu genre à part , et qu'on pourroit nommer tergipes. Nous n'avons vu qu'une seule éolide^des cotes tleia Mauche, qui nous a été donnée par feu M. Théodore Iloinberg. Elle ne ressemble complètement à aucune des précédentes^ niais il est probable que cela tient à l'imperfection avec laquelle on les a décrites. Voulant éviter ce reproche pour la nôtre, nous al- lons entrer à son égard dans tous les détails possibles. Nous la représentons, lig. 12 , par le dos, et, fig. i3, obli- quement par le ventre et le coté droit. Son corps est oblong et son pied étroit, en forme de sillon , avec deux bords. rentlés et ondulés 5 les flancs relevés vertica- lement rendent le corps presque quadrangulaire. La tête est peu renflée ; la bouche bordée d'un rebord charnu en forme de fer à cheval. Les deux tentacules infériem's sont au-dessous de la bouche, entre elle et le commencement du pied , se joi- gnant transversalement l'un à l'autre et sont creusés en dessous d'un sillon dans presque toute leur longueur. Les quatre ten- tacules supérieurs sont alongés, coniques, pointus; deux au bord supérieur de la lèvre ; deux un peu plus en arrière. Les^ lames branchiales commencent peu après ceux-ci : elles sont oblongues et aplaties comme des rubans ^s et terminées en pointe mousse. Ceux qui les ont représentées courtes comme des écailles , ne les avaient vues que sur l'animal hors de l'eau. Elles n'adhèrent qu'aux côtés du dos : le milieu est nu , plat , un peu gonflé au milieu où est la place du cœur. Le nombre des lames va à quinze ou vingt de chaque côté. Elles paroissent à peu près disposées sur quatre rangs. Un gros tidjercule du côté droit, percé d'un trou, est l'orifice commun de l'anus et de la génération. Mon individu, conservé dans l'esprit-de-vin , n'a qu'un pouce de long , et paroît d'un blanc uniforme. LE GLAUCUS, etc. 27 6.0 Supplément au mémoire sur le genre Trkonm et débrouil- lement entier de l'ancien genre Doris. Malgré toute l'attenlion que nous portons à la recherche de ce qui a été dit avant nous par les naturalistes sur les objets qui nous occupent , il est presque impossible que dans cette foule de mémoires séparés , répandus dans les collections aca- démiques ou dans les journaux, il ne nous en échappe de temps en temps quelques-uns. C'est ce qui nous est arrivé par rapport à notre tritonia Ilombergii. Nous regardions ce mollusque comme à peu près nouveau, et cependant Fabbé Diquemare en a donné une belle figure [Journai de Physique , octobre iy85 , pi. Il ] : il la nomme limace de mer palmifère. Son individu , péché près du Havre ^ étoit beaucoup plus grand que les nôtres, car il avoit huit pouces de long. Nous recueillons de sa description que la couleur naturelle de ce mollusque est cuivrée. Cette espèce est donc le géant du genre ; car toutes celles que l'on trouve dans les autres auteurs sont beaucoup plus petites. Nous donnons aujourd'hui, fig. 8, 9 et 10, celle qui en ap- proche le plus pour la taille; elle vient aussi de la Manche , et c'est encore au zèle infatigable de feu M. Théodore Hom" herg que nous la devons. Sa grandeur naturelle n'est que d'un tiers moindre que dans les figures. Son corps est mou , un peu gélatineux , légère- ment comprimé latéralement; son pied est en sillon avec des rebords ondulés. L'expansion membraneuse du dessus de la bouche, au lieu de deux lobes crénelés , eu forme quatre , di- a8 SURLASCYLLÉE, visé en petites lanières comme des arbres. Les tubes d'où sor- tent les tentacules , ont aussi leurs bords divisés en languettes dentelées ; les tentacules eux-mêmes sont coniques et striés transversalement. Les brancbies ne forment pas deux séries continues , mais cinq touffes de cbaque coté ressemblant à de jolis buissons épais. Les premières touffes sont les plus fortes: les autres vont en diminuant. L'anus et l'oriiîce de la généra- tion sont placés comme dans la tritonie d' Ilomherg. L'iuté- | rieur lui ressemble également, et surtout les mâchoires, en I forme de ciseaux de tondeur. Toute comparaison faite, je crois que la limace de mer, portant comme des cornes de cerf, de Bommé{ Mém. de Fles- singue, tome III, Cg. i ) ^doris cervina^ Gmel., n'en est qu'un très-jeune individu , car elle a absolument les mêmes caractères. Je pense aussi que le tliethjs aiiricidis duahus elevatis^ cor- nibiis dorsi ramosis de Strcem ( Mém. de Tac. de Copenh. X, pi. V, fig. 5 , copié Encycl. pi. 83 , fig. i ) , doris arhorèscens de Muller et de Gmelin , laissé mal à propos parmi les vrais doris par M. Bosc. n'en est qu'un individu un peu plus âgé, et mal représenté. Je la nommerai donc iritonia arhorèscens. Une troisième espèce 4e tritonie bien déterminée , mais que nous n'avons pas vue, est celle de Bommé, Mém. de Fless. I, pi. III, doris coronata, Gmel. Elle a des tentacules liliformes, rentrant dans un étui, une lèvre simple et six arbres bran- cbiaux de chaque côté. Quant au doris claçigera de Gmelin etde3Inller, Zool. dan. I, pi. 17 , fig. I — 3 , copié, Encycl. pi. 82 , fig. 7 et 8, il nous paroît différer des tritonies précédentes par les quatre petites houppes qu'il a sur le milieu du dos en arrière, à moins que ce ne soit une inadvertance du dessinateur. I '^^*6.z?î@^:gà DO HT S. PL.l. ùivier del- Ficj.3. Fi^.4. DORIS VL.n. Cuoier .del . Fm./>\^' Fn/.J- 7. ^cvWiViK pela<2^ioa, et son ai\?dçm\i.o .J'/i/. t'>-7n ■ Tritoiiia m^borosoeus J^z-çf.jz. CylavicT-is liexapteTvQ^'iiis . //ir/. /^ -y',?. Eolis . L E G L A U C U S, etc. 29 Le (loris aiiricnlata , Gtnel. et INIuller j thethys auriculis duabus, etc. de Strœî7i , Méui. de l'ac. de Copeuh. tome X, p. 16, pi. V, tîg. 6 , copié dans l'Encyclopédie , pi. 83 , Gg. 2 , dif- fère encore davantage par ses branchies de deux sortes, et doit très-proLablenient faire un genre. Enfin, après tous ces démeniLremens , il reste dans le genre doris de Gnielin, le doris quadrilineata , Mull. Zool. dan. pi. 1^ ,lig. 4 — 6, copié Encycl. pi. 82 , fig. i4 — 15, qui Lien cer- tainement doit encore faire un genre particulier. Il y avoit donc véritablement neuf genres confondus et mé- langés dans ce grand genre doris ^ tel que l'avoit compilé Gnielin , savoir : Les doris ^ les tritonies, les glaiicus^ les éolides^ les ter- gipes , les cai>oli?ies (i) et les trois que nous venons d'indiquer , sans vouloir encore leur donner de nom , parce que nous les connoissons trop peu. (i) Doris peregrina et affinis , Gmel. Carolini. Polip. mai". 5. p. 190. t. 7. f. 5. Copié Eucycl. vers. pi. 85. fig. 4 et 5. MEMOIRE Sur le aenre thethys et sur son anatomie. Uans l'état d'imperfection où se trouve encore le Sjstema naturœ , malgré tous les efforts des hommes de méijle qui travaillent depuis cinquante ans à l'enrichir et à le rendre plus correct , j'ai toujours pensé qu'il étoit plus utile à la scieuce de rectiiier les idées fausses ou confuses que l'on se fait des espèces anciennes, que d'entasser sans règle et sans choix des espèces nouvelles qui , lorsqu'elles ne sont pas décrites avec plus de précision que les autres, loin de rien éclaircir, ne servent qu'à augmenter le désordre, et qu'à le rendre plus difficile à débrouiller. C'est pourquoi dans tous mes travaux je m'efforce de re- connoître d'abord quelles ont été les idées de Liniioeus,en remontant aux sources oii il avoit puisé , et en le suivant pas à pas dans toutes les variations de sentmiens et d'expressions auxquelles il se livroit à chaque édition. C'est après avoir déterminé ainsi le véritable sens de ses I a T H E T H Y S. noms et de ses phrases descriptives, que je cherche à les cor- riger, quand il est nécessaire, en les comparant à la nature^ et ce n'est qu'après y être parvenu, que je tâche d'ajouter à ces descriptions des circonslances nouvelles , ou de placer à leur suite ce qui concerne les ohjels que Linnœus n'a pu connoître. Mais il est telle de ces phrases si obscure , et qui a été si souvent changée , qu'il seroit impossible de démêler ce que l'auteur a voulu dire, si l'on n'avoit un grand nombre d'objets à examiner successivement. Je u'aurois , par exemple , jamais pu mettre dans les mollusques nus l'ordre qui commence à y régner , sans les collections faites par moi-même ou par quelques-uns de mes amis et de mes élèves , dans plusieurs mers très-éloignées ; et si les amateurs de l'histoire naturelle trouvent que mes travaux sur cette classe ont été de quelque utilité à la science, c'est un devoir pour moi de leur déclarer qu'on les doit autant à MM. Homberg , Flemiau , Bosc , Péron , Maugé , Savigny , Geoffroy , Humboldt et Duméril qu'à moi-même. Cependant, malgré le zèle et l'amitié de ces savans et cou- rageux nalurahstes, et malgré les recherches et les demandes que j'avois laites sur les diverses côtes de la Méditerranée , je n'avois point encore de thethys , et ce genre aussi impor- tant qu'obscur, seroit encore fort mal connu, sans le voyage que M. de Laroche, jeune naturaliste, Gis d'un médecin res- pectable, vient de faire aux Baléares, par ordre du ministre de l'intérieur, avec les astronomes chargés de prolonger la méridienne, afin de recueillir les observations de physique et d'histoire naturelle que pouvoient offrir ces iles peu fré- quentées par des savans. M. de Laroche , à ma prière, a parti- T H E T H Y s. 3 cnlièrenient recherché des thetJiys^ et esl parvenu à en ras- sembler pkisieurs , en même temps qu'un grand nombre d'autres mollusques ou zoophytes et de poissons, qu'il a dé- posés au Muséum, et dont il se propose de décrire lui-même les plus înléressans. C'est ainsi que je me suis vu en état de décrire et de dis- séquer cet animal , dont la rareté paroit tenir à ce qu'il habite surtout le fond de la pleine mer, et qu'il ne s'élève à la surface , ou ne se porte au rivage que dans les tempêtes. C'est du moins ce qui paroît résulter du témoignage de tous ceux qui l'ont observé. Aussi est-il plus que douteux que les anciens l'aient connu. Leur tethjon éio'ii le mollusque appelé aujourd'hui ascidia. On n'en sauroit douter , quand ou lit quelques passages à'Aris- tote, qui en contiennent une description aussi bonne que celles de bien des modernes. « Les testacés appelés téthjes{à\t-'A ,lib. T) IV, c. G , hist. an.),sontlesseuls dont la totalité du corps soit r> cachée dans la coquille , qui est d'une substance moyenne » eutre les coquilles ordinaires et le cuir. On la coupe comme » un cuir sec. Les téthyes s'attachent aux rochers par leurs co- » quilles. Ils ontdeux ouvertures éloignées l'une de l'autre, pe- » tites, pour avaler et rejeter l'eau. On peut regarder l'une de ces )) ouvertures comme la bouche, l'autre comme l'anus, etcelc.» Rondelet Ç de Ins. et Zooph. ii'j ), et d'après lui Gesner ( A(/uat. 954 ) et Aldrovande^Exs. 583) , ont appliqué ce nom en partie à de véritables ascidies, en partie, à ce qu'il semble , à de simples alcyons ; et dans des temps postérieurs , Bohatsch en a plus rigoureusement restreint la signification ( de quibd. an. marin. 128). Linnœus paroît avoir d'abord aussi appliqué aux ascidies le nom défiguré de thethjs , dans 4 T H E T H Y s. sa quatrième édition ; car il donne pour caractère à ce genre , organa duo protensa tuhulosa spirantia , tentacula nulla. Comme il n'y cite point de synonyme , on ne peut juger que par ce caractère des espèces qu'il entendoit y réunir. Mais dans sa sixième édition , il cite Y holothurie et le troi- sième lièvre marin de Rondelet^ qui est notre thethjs d'au- jourd'hui ; et c'est de celui-ci qu'il donne , pi. VI, (ig. 3, une figure mal copiée de Fabius Columna ( Aquat. ohs. p. 26 ) ; aussi en cliauge-t-il considérablement le caractère, sans le rendre encore applicable à beaucoup près, ni à l'un ni à l'autre de ces animaux. Corpus oblongum hilahiatwn : corpusculo j7iedio cartilaginoso ohlongo. Auriculœ IV cunéiformes. Foraviina 1 spirantia. Dans la dixième édition , le caractère resta le même, excepté que les tentacules furent réduits à deux j mais les espèces cliaugèrent; il n'y eut plus de cité que le premier //wre ???«- rin àe Hondelet , c'est-à-dire une apljsia ., sous le noin de thethjs leporina , et une espèce voisine , originaire de la mer des Indes , sous celui de limacina \ et ce qui est fort plaisant , toutes les deux ont quatre tentacules, malgré le changement fait dans le caractère ; et aucune n'a ni corps à deux lèvres , ni corpujLule cartilagineux, ni deux ouvertures pour la respi- ration. Dans cette même dixième édition , comme dans toutes les précédentes, l'on donne à la plupart des coquillages bivalves un theihjs pour animal, tandis qu'aucun des animaux des bivalves n'a le moindre rapport avec aucune de ces espèces nommées désormais thethjs 5 mais c'est que ce nom éloit T H E T H Y s. 5 resté dans les dëGnitions des bivalves, depuis la quatrième édition, où il désiguoit des ascidies^ qui sont en effet les ana- logues des animaux des bivalves. Dans la douzième édition, nouveau changement déterminé par l'ouvrage de Bohatsch:\e thethys limacina et le premier lihre marin de Rondelet , réunis en une seule espèce, forment - le genre lapljsia\ et le nom de thethjs leporina est trans- porté au troisième lièvre marin , qui avoit été oublié depuis la" sixième édition : les caractères génériques , tant du laplysia que du thethjs^ rédigés d'après les observations de Bohatsch , devienneul maintenant couiormes à la nature. Ces variations , ces contradictions mêmes prouvent combien Linnœus connoissoit peu les animaux qu'il a entassés péle-méle dans sa classe des vers ^ et combien quelques naturalistes ont peu de raison de s'obstuier à le prendre pour guide dans la distribution de cette partie du règne. Néanmoins, son genre thethys^ tel qu'il l'a disposé à la fil) , n'a pas besoin de grande réi'orme, et il a été en effet con- servé avec ses caractères par Gmelin et j)ar Bntgiiière, qui place cependant le thethys parmi ses vers mollusques sans tentacules, tandis qu'il en a deux très-considérables. M. de Lamarck, M. Bosc et moi, n'avons fait à ces mêmes caractères qu'un léger changement, qui encore n'est pas heu- reux, car il ne consiste qu'en un seul mot ajouté sans motif: deujc ouvertures au coté droit du cou , pour la génération et peur la uESPiRATiOî*. Il y a bien deux ouvertures à cet endroit, mais ellessont \.o\x\.es\esàeux pour la génération. Les moisanus sinistrorsuni ^eini^oyés par Linnœus tl Gmelin, ont été rem- placés avec raison par ceux de coté droit. Ils avoient été pris 6 THETHYS. apparemment sur des gravures qui n'étoient pas faites au miroir, et qui renversoient les objets. Dans le fait, et Linnœus et nous tous, qui n'avions pas vu l'animal , aurions dû nous en tenir aux termes de ceux qui l'ont décrit sur nature, c'est-à-dire des seuls liondelet, Fa- bius Colunina et Bohatsch. La 6gure de Rondelet^ copiée dans Gesner , dans Aldro~ i'andre, dans Jonston^ et encore récemment dans M Encyclo- pédie méthodique , et dans l'ouvrage de M. Bosc , est recon- noissable , quoique grossière, et la description qui l'accom- pagne assez vraie, mais peu détaillée, comme toutes celles de ce temps-là. Bohatsch ^ en sa qualité d'auteur du dix-huitième siècle, a donné plus de détails; mais n'ayant eu qu'un individu mort et déjà altéré, il n'a pu être ni aussi exact, ni aussi complet que dans sa description de Xapljsia , et sa figure est presque aussi grossière que celle de Rondelat. Fabius Columna avoit été plus heureux dès le commen- cement du dix-septième siècle. Après avoir fait une mauvaise figure, d'après le mox\.{ Aquat. et terr. obs.p. XXII), il eut le bonheur de voir retirer un thethys vivant delà mer, et il en donna deux excellens dessins ( ib. p. XXVI) , accompagnés d'une bonne description dans laquelle seulement, pour com- pléter une prétendue ressemblance avec le calmar, il place des yeux sur les cotés du cou , chose tout-à-fait imaginaire. Fabius Colunma croit que c'est ici le vrai lièvre marin de Dioscoride; mais il n'a d'autre motif que la ressemblance attribuée par Dioscoiide à son animal avec un petit calmar j caractère beaucoup trop vague pour en faire une application fixe. Au reste , la vraie signification de ce nom n'importe T H E T H Y s. 7 guère, puisque Dioscoride ne donne à son lièvi^e marin , connue les autres anciens aux leurs , que des propriétés fa])u- leuses. Après toutes ces remarques, il reste à demander si Lin- nœiis dans sa douzième édition, et tous les autres d'après lui, ont eu raison de faire deux espèces du genre thethjs. Linnœiis au moins laissoit encore du doute (mdetvk a prcecedejiticlis- tincta ) 5 mais ses successeurs ont supprimé cette note très- nécessaire. Le seul caractère assignable est l'absence des franges autour du voile , dans l'individu décrit par Bohatsch , ou the- thjs Jimhria qui est la seconde espèce, tandis que la première, nommée leporina , et qui est celle que nous décrivons aujour- d'hui, a ces franges longues et nombreuses; mais Bohatsch n'ayant décrit qu'un individu altéré, il n'est pas impossible que ces filamens déliés en aient été enlevés avant qu'on le lui apportât. C'est une question sur laquelle iléloit bon de rendre les observateurs attentifs. Description extérieure. Le premier coup-d'teil jeté sur le thethjs , prouve que c'est du tritonia et du scjUœa qu'il se rapproche le plus, et non pas de Vapljsia 5 en effet il appartient à la tribu des gasté- ropodes nudibranches , qui portent leurs organes de la res- piration à nu sur le dos; mais la forme de ces organes, le nombre de ses tentacules , la forme de sa bouche et de la membrane ou du voile qui l'entourent lui donnent des droits suflisans pour constituer dans cette tribu un genre particulier. Les plus grands individus qui m'ont été rapportés par M. de Laroche^ ont de 6à 8 pouces de longueur, sur trois ou 4 8 THETHYS. de largeur ; mais ces dimensions doivent heaucoiip varier dans l'état de vie. Cet animal n'a point de manteau proprement dit qui dé- borde son jjiedj les bords de son pied sont Irancbans et sus- ceptibles des mêmes contractions, inflexions et festonnemens que dans les autres moilusfjues; le contour en est ovale, plus étroit et plus pointu en arrière, plus arrondi en avant, où il se porte sous le cou, s'en distinguant par un sillon profond. Le dos est peu élevé, plane, beaucoup plus étroit que le pied, mais aussi long, pointu en arrière, et bordé des deux côtés par les bouppes des braiicbies. Les flancs forment deux plans obliques qui descendent de ces deux bords latéraux du dos, pour s'unir aux bords du pied. Le cou est court , formé par la prolongation du dos et des flancs, et se dislingue de la partie antéi ieui e du pied sur la- quelle il s'avance. D'abord cylindrique, il s'évase prompte- ment pour s'épanouir en une large membrane qui entoure la boucbe comme un entonnoir ; mais la partie inférieure de cet entonnoir est plus courte que la supérieure, et celle-ci, vue d'en haut, a l'air déformer un large voile demi-circulaire. Au centre et au fond de l'entonnoir est une trompe cbarnue , courte, cylindrique, ouverte au bout, et y prenant tantôt la forme d'une large ouverture circuiaire à bords minces, tantôt celle d'une fente verticale à bords renflés. Cette trompe est la boucbe. Le voile ou l'entonnoir est cbari u et susceptible de toutes sortes de mouvement ; il doit beaucoup servir à l'animal poUr nager. Tout son bord est garni d'innombiables lilamens charnus très-minces , dont ceux de la partie inl^rieure sont du double T II E T H Y s. 9 plus longs que les autres. Il y a de plus à la face externe du voile, un peu en deçà du bord, des espèces de tentacules char- nus, coniques, isolés et placés à 2 ou 3 lignes de distance l'un de l'autre. Les vrais tentacules de l'animal, au nombre de deux , sont placés sur la base de la membrane ou du voile , tout près du cou et sur le côté supérieur. Ils ont de grands rapports avec ceux de la scj'llée;cav ce sont aussi deux lames charnues, à bord tranchant, ondulé, creusées en avant d'une fosse d'où sort un petit cône charnu , strié en travers , qui semble être essentiellement le siège de ce tact délicat que les tentacules appliquent aux divers objets. 11 n'y a sur les bords du pied ni franges ni tentacules. Les houppes branchiales que Fabius CoLumna a fort bien décrites, sont au nombre de quatorze de cha(pie côté, alter- nativement petites et grandes. Les grandes sont formées d'un cône charnu dont la pointe allongée se contourne en spirale > et qui porte sur un de ses côtés une suite de petits hlamens branchus et déliés qui sont les organes respiratoires. Les petites ne sont que des protubérances chargées de fila- mens semblables à ceux que portent les autres. La première branchie de chaque côté est une petite; mais la position des organes de la génération et de l'anus, repous- sant la troisième branchie du côté droit plus en arrière que celle du côté gauche, à compter de la quatrième, une grande branchie du côté droit se trouve placée vis-à-vis d'une petite du côté gauche et réciproquement. L'anus est un tubercule percé, situé en avant et un peu en dedans de la troisième branchie de droite. Sur son bord 2 ïo THETHYS. est percé un autre petit trou qui donne issue à une liqueur excrémenlitielle , comme dans les doris et les tritonies. L'organe de la génération se montre au-dessous de la pre- mière branchie de droite ; c'est une membrane irrégulièrement festonnée , au centre de laquelle est percé le trou de la vulve , et à côté de ce trou saille la verge comme un petit filament conique et contourné. Deriière chaque petite branchie, et par conséquent en avant de chaque grande , est une espèce de stigmate ou endroit circulaire enfoncé, dont les antérieurs sontlarges de alignes, et les postérieurs diminuent graduellement. La membrane en est blanche et plus (ine que celle du reste du corps, et il sort de son milieu, dans l'état de vie, un petit tentacule mou, jaunâtre, et quelquefois fourchu, dont j'ignore la nature et l'usage. Telles sont les formes de l'animal qui a reçulenom de thethys. Sa substance est plus molle et plus transparente que celle de beaucoup d'autres mollusques 5 sa peau , sans être rude n'est pas lisse 5 mais ses petites rides, Irès-rapprochées , sont plus sensibles à la vue qu'au toucher. Sa couleur est un grisâtre demi-transparent, comme seroit du cristal un peu trouble, avec des taches et des lignes d'un blanc pur et opaque. Sur le voile, les taches en partie rondes, en partie allongées, suivent des lignes parallèles au bord. Au dos , elles ont une direction trans- versale ; aux flancs , elles se rendent obliquement en avant et en dehors ; il n'y en a pas sous le pied. Le bord du voile est marqué d'une ligne bleuâtre, et l'on y voit à sa face interne , des deux côtés , uu peu en arrière du bord , trois taches d'un pourpre noir. THETHYS. II Description intérieure. La position des branchies, semblable à celle des tritonies et des scjllées , ne me laissoit pas douter que le cœur ne fût aussi comme dans ces deux genres situé sur le milieu du dos. On le trouve en effet immédiatement sous la peau. Son oreil- lette ovale et très-mince reçoit de toutes les branchies des veines qui s'y rendent comme des rayons à un centre. Quand on l'ouvre, on voit à son fond sa communication avec le cœur garnie de deux valvules bien sensibles. Le cœur lui- même plus charnu et plus opaque que l'oreillette, n'est pas très-robuste. Sa forme est ovale, et il est rempli de petits cordons musculaires. Il en part deux principales artères dont l'une se porte en avant, donne des branches à l'estomac , à l'œsophage , aux organes delà génération, aux deux côtés du dos et du pied , et se perd enfin dans le voile. L'autre, dirigée en arrière , se distribue principalement au rectum et au foie. Des veines très-visibles sortent des intestins et du foie , et se rendent dans les côtés du corps où elles forment , comme dans la tritonie, avec les veines provenues delà substance charnue du pied, du dos et du voile, deux grands vaisseaux qui re- portent le sang dans les branchies. Les branchies épanouissent ou recoquillent les tiges charnues qui les portent par le moyen des fibres propres de ces tiges. La cavité de l'abdomen, qui contient les viscères , n'est pas à beaucoup j)rès aussi large, ni surtout aussi longue , que le pied sur lequel elle repose. Il n'y a aucune sorte de dent, ni même de langue, et c'est le premier gastéropode où j'aie vu manquer celle-ci. La trompe la T H E T H Y S. charnue la remplace apparemment 5 sa face interne est toute hérissée de petites papilles molles et rondes. L'œsophage est très-court, et ridé longitudinalement. L'estomac est simple : c'est une sorte de gésier charnu , armé en dedans tout autour d'une veloutée cartilagineuse , comme celle des oiseaux. On y trouve des fragmens de co- quilles, des pales et autres morceaux de petites écrévisses. L'intestin est excessivement court, et se rend sans inflexion notable à droite, pour aboutir à l'anus. Sa première partie est garnie en dedans de nombreuses lames membraneuses et longitudinales en partie très-saillantes ; l'autre moitié est lisse. Lorsque Bohatsch dit a nentricido intestina in varias gj~ ros contorta procedunt , quœ hepar viridescens undique con~ coviitatur , c'est qu'il a pris le canal hépatique pour l'intestin. Le foie est une masse ovale divisée en beaucoup de lobes , qui occupe toute la moitié postérieure de l'abdomen. Le canal hépatique débouche dans l'estomac par une ouverture située à côté du pylore et presque aussi large que lui. Outre les veines, les artères et le canal de la bile , on trouve encore dans le foie cet autre vaisseau que nous avons observé dans les doris, et qui s'ouvre à côté de l'anus. Les glandes salivaires sont grêles, brauchues, et s'ouvrent aux deux côtés de l'œsophage. Le tliethjs est hermaphrodite, et ses organes de la généra- tion ont les plus grands rapports avec ceux des doris. L'ovaire que Bohatsch a pris pour le testicule est, comme à l'ordinaire, enfermé entre les lobes du foie. Il en sort un oviductus très- tortueux qui se colle en passant au testicule d'une manière intime, et se rend delà à la matrice. Celle-ci est un boyau assez large dont le fond s'élargit en une glande considéi able. THETHYS. i3 La vessie , comme à l'ordinaire , ouvre sou cou dans celui de la matrice; et à coté de l'entrée du canal spermatique, dans la base de la verge, est encore une petite bourse longue et étroite. Le cen'eau est considérable, de forme arrondie, d'appa- rence grenue, làcliement enveloppé dans ses méninges, et don- nant ses nerfs en rayons tout autour. Les deux premiers et les plus gros vont se distribuer dans la partie supérieure du voile. Les deux suivans vont aux deux grands tentacules. Les deux derniers , qui sont aussi très-forts , se rendent dans les cotés de la masse charnue du corps. Entre eux et les pi'écédens , il y en a plusieurs petits pour les côtés du cou , et pour les organes de la génération. Ceux des viscères naissent d'un gan- glion formé au côté droit par le collier nerveux qui embrasse l'cesopliage. II est peu de mollusques où les faisceaux musculaires qui contractent et qui dilatent les difiereutes parties du corps , soient aussi distincts les uns des autres, et aussi faciles à suivre que dans le thethjs ; mais je n'ai pas osé les représenter , de crainte de donner trop de peine au graveur. Plongés dans une cellulosité làclie et transparente, ils forment des rubans étroits et soyeux , dirigés dans tous les sens, et que l'on aperçoit même au travers de la peau. La couche la plus inférieure qui repose sur le plan du pied, est toute longitudinale; mais elle monte et se croise sur le cou pour se distribuer en divergeant dans la partie supérieure du voile. La couche plus intérieure , posée sur celle-là , se porte obliquement eu dehors et un peu en avant, et, entourant l'abdomen, va se réunir à sa corres- pondante sur le milieu du dos, Une troisième, plus interne encore que les précédentes, est aussi obliquement trans verse, i4 T HE T II Y s. mais en se dirigeant plus en arrière; enfin le voiîe et les tenta- cules ont encore leurs faisceaux de fibres propres , dirigées en deux sens opposés. II est aisé d'imaginer à quel point peut varier la figure géné- rale d'un animal qui n'a aucune partie solide, et qui peut faire agir à son gré chaque faisceau , chaque ordre de faisceau en- semble ou séparément. EXPLICATION DES FIGURES. Figure I." Thetliys de moyenne grandeur, vu par le dos. a, a, rt, Partie supé- rieure du voile, h, b, Les deux tentacules, c, Le cou. d, Les organes de la géné- ration, e, L'anus et le trou particulier pour une liqueur excrémentitielle./", _/, Quel- ques-unes des grandes branchies, g, g, Quelques-unes des petites, h, h, Les bords du pied. Fie. II. Le même, vu en dessous, a. Le pied, b, La bouche, c, e, La partie su- périeure du voile, d, d, La partie inférieure qui est plus grande et où les franges sont plus longues. FiG. III. Le même dont on a entrouvert le dos, pour faire voir le cœur et les veines qui lui arrivent des branchies, a, a, L'oreillette du cœur ouverte, b, Les valvules qui garnissent sa communication avec le ventricule situé dessous. Fie. IV. Le même dont la cavité abdominale est plus ouverte et le cœur enlevé, a, Le cerveau, b, b, Nerfs allant au voile, c, c, Autres se rendant aux tentacules. d, L'un de ceux qui se distribuent au corps, e, L'œsophage. f,fi Les glandes sali- vaires. g, L'estomac, h, Le rectum, i, i , Le foie, k, Les organes de la génération. l, Origine des artères. FiG. V. Thethys dont le pied a été fendu pour faire voir les viscères par dessous. Les viscères y sont développés, a, La trompe, b, Commencement de l'œsophage. c, L'estomac, d, L'intestin, e. Le canal hépatique./. Le foie, g. L'artère hépatique. h, Artère de l'intestin, i , Artère de l'estomac, k, Tronc principal de l'artère se dis- tribuant au voile et au pied. /, Collier nerveux sous l'œsophage, m, Ganglion, n, Verge, o, Matrice, p, Sa glande, g-, q, Oviductus. r, Testicule. Fie. VI. Les intestins ouverts, a, Trompe, b, Œsophage, c, Estomac, i, Intestin. e, Canal hépalique. /, Foie, g. Artère hépatique, h, h, Glandes salivaires. FiG. VII. Organes de la génération développés, a, Verge, b. Vulve, c, Vessie. d, Matrice, e, Sa glande. /, /, Oviductus. g-, Testicule, h, Canal spermatique. i, Bourse adhérente à la verge. /''ùr. 2 .^^^^^t j:.p Thethyh tf- A/ . i foaue/^ d-c^Zr ■ MÉMOIRE Sur la PHYLLIDIE et sur le PLEURO-BRANCHE , deux nouveaux genres de mollusques de l'ordre desqaste'^ ropodes , et voisins des patelles et des oscahrions , dont l'un est nu et dont l'autre porte une coquille cachée. J_j E s patelles et les oscabrions diffèrent de tous les autres gastéropodes testacés par la position et par la forme de leurs Lrancliies , et l'on ne leur connoissoit aucun analogue nu lors- que je publiai les caractères d'un nouveau genre de la nier des Indes , (pai leur ressendile presque en tout , à l'exception de la coquille 5 je lui donnai le nom de phjllidie , et comme je n'en avois qu'un seul individu mal conservé , je ne pus en faire çonnoître que les caractères extérieurs , que j'insérai dans le Bulletin des sciences , n." 5i , d'où ils passèrent dans le système des animaixx sans vertèbres de M. Lainarck,p. 665 et dans l'Histoire des vers de M. Bosc , t. I , p. 84. J'ai aujourd'hui la satisfaction d'ajouter à ces notions super- ficielles la connoissance de l'organisation intérieure de la phjl- lidie, et celle de deux autres espèces appartenant au même genre, ainsi que d'y joindre la description d'un nouveau genre qui se rapproche singulièrement de cette petite famille, et que. l'on pourroit presque nommer demi-phjllidie ; car il n'c^ I 2 PHYI. LIPIE (fii'à tleiiii ce caracière si singulier de branchies placées autour (le la Lase tlu pied , sous le rebord du manteau ; je veux dire qu'au lieu que \a p/ijl/idie en a, comme les yyrtft^//»'^ et les o,y- cahrions^ tout autour de sou corps, ce genre-ci n'en a que d'un côté seulement, du côté droit. Je lui donne , à raison de cette circonstance qui lui est en- tièrement pi'opre, le nom de pleuro-branche , qui signiOe hran- claes d'un c6'/e, comme on dit pleiiro-nectes pour les poissons qui nagent sur le côté. C'est à l'infatigable ]\I. Pérou que je dois encore et les nou- veaux individus de la phjllidie ordinaire , et les deux nouvelles espèces, et ce genre du pleuro-branche. Il a rapporté les vms et les autres de la mer des Indes : les seules pbyllidies , dont i.l^ a rapporté plusieurs individus, cl qui sont de la même espèce que j'avois décrites d'après un échantillon venu de l'iIe de Bourbon , sont d'une taille beaucoup moindre que n'étoit celui- ci 5 ce qui m'a forcé à être plus abrégé dans leur anatomie , que dans celles de beaucoup d'autres mollusques dont j'ai parlé jus- qu'à présent. U ne autre raison m'y force également pour le pleuro-branche , c'est cpie je n'en ai eu qu'tui seul individu , dont l'intérieur étoit ramolli par un esprit de vin trop foible. J'omettrai cependant peu de choses essentielles , et je donnerai toutes celles qui peuvent être caractéristiques. i.° Description de l'extérieur. A. Le corps de la phyllidie est un ovale allongé : le bouclier coriace qui en forme toute la partie supérieure est légère- ment bombé, et déborde le pied de toutes parts. Celui-ci est plus FT PLEURO-r, RANCH E. 3 étroit à sa partie supérieure qu'à celle par laquelle il pose sur le sol; et c'est dans ce canal ovale qui règne tout autoiu' entre lui et le manteau , que sont les Ibuillets minces , Iransverses et serrés les uns contre les autres, qui constituent l'organe de la respiration. Ce cordon de feuillets branchiaux est intcri'ompu en avant, à l'endroit de la bouche, où l'on remarque deux petits tenta- cules coniques, et au côté droit, vers le quart antérieur, pour un tubercule saillant , percé de deux trous et qui sert d'orifice aux organes de la génération. A la superficie du manteau ou du bouclier coriace , on remarque trois trous : deux pairs en avant pour recevoir les tentacules supérieurs , car la phjllidie en a quatre comme les (loris; le troisième en arrière est l'anus, placé par conséquent aussi comme dans les doris, mais non entouré, comme elles l'ont, par un cercle de branchies. Tels sont les caractères généricjues communs à toutes les phjlliclies : les trois espèces cpie j'en ai vues se distinguent les unes des autres par la disposition des verrues et des tubercules qui s'observent à la surface du manteau. Dans la première espèce que j'ai décrite autrefois, que M. Lamarck a nommée ensuite ph. varicosa , et que je crois devoir appeler plutôt tri- lineata,iparce que le noin de varicosa ne la distingue pas assez; dans cette espèce, dis-je ( A , fig. i et 4) ,lesverrues du milieu sont allongées et forment trois lignes presque continues qui régnent tout le long du dos. Celles des bords sont transversales et coupent ce bord perpendiculairement de toutes parts. Toutes ces verrues sont jaunes sur un fond noir. Dans la seconde espèce, que je nomme phjUidia pustulosa (A, fig. 8) , les verrues sont plus arrondies qu'allongées, placées sans régularité , d'un jaune pâle sur un fond noir , et resseiii- blaut à des pustules de i^etile vérole. {\. P H Y L I, I D 1 F. La lioi-sièine espèce, pliyllicUa ocellata (A, fig. 7 ) , a le mant(^au beaucoup plus orné ^ outre les petits tubercules jau- nâtres parsemés sur un fond gris, il y en a cinq plus grands cpie l(s iiulrcs , portés sur autant de petits pédicules , et entourés chacun d'un large anneau noir dont un eu avant, et deux de chaque côté du corps. Il y eu a de plus cinq autres aussi pédi- cules , mais sans auneau , et placés transversaleuient sur une seule ligne vers la partie antérieure du corps, derrière le pre- mier des tubercules entourés d'anneaux. Endn les petits tu- bercules du milieu du dos sont uuia les uns aux autres par une ligne saillante longitudinale qui s'étend depuis la ligue transverse dont je viens de parler , jusqu'à l'anus. B. Le pleuro-branche ( B, fig. 1^), a le corps moins allongé que la phyllidie, et sou pied est aussi large que son manteau, de uianière qu'il a absolument l'air d'être entre deux boucliers égaux , séparés l'un de l'autre par un canal qui lait tout le tour du corps. La bouche est en avant , en foriiie de trompe un peu grosse , et recouverte par un petit voile qui se rejoint par les côtés aux bords du pied. Sur la base de ce voile sont les deux tentacules cylindriques , creux, et fendus longitudinalement à leur côté externe , forme que je n'ai encore vue dans aucun autre mol- lusque. Il n'y a que ces deux tentacules, et, à ce que j'ai pu juger par l'anatomie , l'animal doit pouvoir en faire sortir un œil. Tous les autres organes extérieurs sont dans le côté droit du canal. Les branchies en occupent la plus grande partie. Qu'on se représente une lame longitudinale, saillante ,quiporte- Et P L n l R O - B R A N C n !■. «) en dessus et en dessous , des séries transversales serrées, d^c petits feuillets serrés eux-mêmes dans cliacjiie série , et l'on aura l'idée de cet a]>pareil pulmonaire : en avant sont les or- ganes extérieurs de la génération , consistant en un petit trou et en deux parties saillantes, comme nous en avons déjà re- marqué dans quelques autres gastéropodes. L'anus est en arrière des braucliies : c'est un petit tulie membraneux légèrement saillant. Le manteau est épais et charnu: sa superficie est légèrement ridée en arrière. Lorsqu'on l'ouvre , on trouve au-dessous de lui, sur le péritoine, un peu. eu avant et vers le côté droit, une petite coquille plate, mince, ovale ^ oblique, blanche et composée de couches , dont les plus nouvelles sont encore comme membraneuses. Voyez B, (ig. 3. C'est donc un niol- lusque de plus à coquille cachée, et une nouvelle preuve qu'on ne doit point diviser celte classe en mollusques nus et testacés, comme l'ont fait des auteurs très-récens. Il faut encore remar- quer que le bord du manteau est un peu échancré en avant en dessus des tentacules. 2.° Organes de la circulation et de la respiration, A cet égard , la phjllidie a plus de rapports avec la trc- tonie; et le pleuro-branche en a davantage avec Xapljsie^ et ces rapports tiennent uniquement à la position de l'organe pulmonaire : placé également des deux côtés dans la phjllidie comme dans la tritonie , il appeloit le cœur au milieu du dosf placé au côté droit dans le pleuro-branche, il attiroit le cœur de ce côté-là. Le cœur de la phjllidie , A, fig. 5 ,^5 est donc longitudinal 6 PHTliLIDIE au milieu du dos; il a son oreillette b derrière lui, est enve- loppé de toute part de son péricarde c , et reçoit le sang des branchies par deux veines semblables,^, J, l'une à droite et l'autre à gaucîie. Il n'en sort qu'une artère, e, qui se dirige d'abord en avant , et c'est par des veines situées latéralement que le sang retourne aux branchies. La ressemblance de ce système circulatoire avec celui de la tritonie est complète. Dans le pleuro-branclie , le péricarde occupe la partie an- térieure. L'oreillette , B , lig. 45^5 s'élargit à droite pour s'y étendre tout du long de la base des branchies. Le cœur «, dirige sa pointe vers la gauche , et il en sort trois grosses ar- tères j l'antérieure , c , va aux parties de la bouche et de la gé- nération. La postérieure , d' , au foie et à l'estomac ; la mitoyenne e , aux parties du pied , du moins autant que j'ai pu la suivre. 3-° Organes de la digestion. Ceux de Ya phyUidie sont aussi simples que' ceux de la tri" tonie ; c'est de même un estomac unique et membraneux , et un canal intestinal court. Le pylore est près du cardia. Voyez A , fig. 6 , a. Mais dans le pleuro-hranche , ils sont plus com- pliqués, et se rapprochent de ceux de Xonchidie. Un œsophage mendjraneux et élargi en arrière est une espèce de jabot, B, Cg. 5 et 6 , « , qui reçoit dans son fond l'humeur bilieuse par une ouverture Z», coiumunique tout près de là, par un cardia assez serré , avec un estomac c , étroit , et dont les parois sont musculcuses, mais non pas très-épaisses. A sa suite en vient un autre J, dont les parois sont membraneuses et produisent intérieurement des lames saillantes et longitudinales qui rap- pellent tout-à-fait le feuillet des runiinaus j un petit sillon j e j ET PLEURO-BRANCHE. 'J règne dans l'inlérieur du gésier, depuis nue de ses ouvertnrcs jusqu'à l'autre : peut-être est-il susceplible de se resserrer et de se dilater à la volonté de l'animal , et sert-il à uue sorte de rumination. A la suite de cette espèce de feuillet d vient une quatrième dilatation y, dont les parois sont minces et simples. Les ali- mensde ce pleuro-hranclie co\\s\s\.en\. en grande partie en petits alcyons et en autres petits zoophytes, dont quelques-uns sont pierreux ; ils forment dans le gésier une pâte ])lancl)àtre qui se moule en passant au travers des feuillets de l'estomac sui- vant , en longs cordons de même couleur , lesquels conservent cette forme dans le quatrième et dernier estomac. Le canal intestinal proprement dit est court, et le foie de grandeur médiocre. Ce dernier est plus considérable dans la phjUidie. Ces deux genres de molluscpaes ont , comme la plupart des antres , une bouche enveloppée de fibres charnues et formant une masse ovale , A , fig. 6 , g^, et B, tig. 5 , g. Une partie s'en développe au-dehors sous forme de trompe dans le pleiiro- branche. Voyez B, lig. 2 , «. Je ne sais s'il en est de même poiir la phjlLidie. Rien ne sailloit dans les individus que j'ai exa- minés j aussi ses muscles rétracteurs sont-ils beaucoup moins longs. Ils s'insèrent aux cotés de l'enveloppe charnue du corps vers le tiers de sa longueur, A , Gg. 5 et 6 , A , h. Ceux du pleiiro- hranclie ^ B, fig. 5, M, A', s'étendent aussi loin que le corps, et vont en passant entre les divers viscères se fixer à son extré- mité postérieure. Le pleurG-hranche n'a aucune sorte de mâchoires , mais la mendjrane linguale et hérissée qui se trouve sous tant de formes diverses dans les céphalopodes et les gastéropodes , est O P H V T. 1. V D 1 E ici disposée eu deux plans, aux deux côtés de la Louche : ses épines sont courtes, (Inès, très-nombreuses et disposées en quinconce 5 elles doivent pousser les aliniens dans l'œsophage , et eu même temps commencer un peu à les entamer. Je n'ai pu m' assurer entièrement de l'état de ces parties dans la plijllidie-^ mais j'ai remarqué du moins qu'il n'y a aucune mâchoire. Les glandes salivai res sont placées différemment dans les deux genres. La phyllidie les a petites , et tout près de la bouche . A, fig. 6, i. Celles du pleuro-hranche sont plus grande? et situées entre les replis des quatre estomacs , B , fig. 5, ? , /, i. La salive s'y rend à la bouche par deux longs conduits, A, A, qui s'insèrent aux côtés de la naissance de l'œsophage. Outre ces glandes , j'ai trouvé un autre corps glanduleux , B, fig. 5, 7W, qui est sans doute l'analogue de celui que j'ai vu dans les doris, mais dont je n'ai pu découvrir le canal excréteur ni dans un genre ni dans l'autre, 4-° Organes des sensations. Les deux genres ont des yeux : on les voit dans 1 un et dans l'autre sur le cerveau , lorscpi'ils sont retirés en dedans 5 mais ils se reportent probajjlement , comme dans la limace , sur quelques parties des tentacules , quand l'animal veut s'en servir. On les voit en o , o , A , fig. 5 , et B , (ig. 4 et 5. Le cerveau, outre le nerf de l'œil, en donne plus en avant, un de chaque côté pour la bouche et un autre en arrière , pour le ganglion sous la naissance de l'œsophage , d'où partent les nerfs des viscères. Les autres nerfs se distribuent dans les côtés de l'envelojipe générale : c'est parmi ceux du côté droit que les pai'ties mâles de la génération prennent les leurs. ET PLEURO-BRANCHE. () 5.° Organes de la génération. , Ils étoient trop peu développés pour que j'en puisse donner une description particulière 5 niais ce que j'ai pu en observer n'avoit rien de contraire aux règles générales déduites des autres gastéropodes hermaphrodites. L'issue des œufs et celle de la verge sont voisines et placées à peu près au même endroit dans les deux genres. 6." Organes du mowement Ils n'ont aussi rien de particulier. Explication desjîgures. A. Les Phyllidies et leurs détails. Fig. I. Phjllidia trilineata en dessus; «, «, les fossettes des tentacules supérieurs ; b , celle de l'anus. Fig. 2. L'anus vu sépai'ément grossi. . Fig. 3. Un tentacule supérieur de même. Fig. 4- La même, vue par le ventre. « , « , les tentacules in- férieurs entre lesquels est la bouche ; 6 , è, è, ô , les branchies du côté gauche ; c , l'orifice de la génération. Fig. 5. La même ouverte, a , le cœur ; &, l'oreillette ; c, c, le péricarde ouvert; r/,r/, les veines branchiales; e, la principale artère ;/, l'anus ; g^, g-, les tentacules supérieurs retirés en 'A 10 PHYLLIDIE dedans ; // , 7/ , les muscles i-étracteurs de la Loiiclie ; ï , les glandes salivaires ^ o, le cerveau ; p , partie de l'estomac. Fig. 6. La même dont on a enlevé le cœur et le cerveau, a , l'estomac ; b , l'œsophage j c , le canal intestinal \ cl , l'anus j e ^ e , les tentacules supérieurs ; y, les organes mâles de la génération j g-, la masse de la Louche; h, h, ses deux muscles rétracteiu'S j « , les glandes salivaires ; A, la verge; m^ni^ l'ovaire ; /z, w , le foie. Fig. ']. PhjIIidia ocellata. Fig. 8. Phjllidia pustidosa. B. Le Pleuro-branche et ses détails. ~ Fig. I . Le pleuro-hranchiis Peroniiyu par le dos. a, l'endroit occupé par la coquille ; b , l'échancrure antérieure du manteau au-dessus des tentacules; c, c , les tentacules ; fZ , le bout anté- rieur de la trompe ; e , e , le bord du pied débordant un peu ceux du manteau. Fig. 2. Le même, vu par le côté droit, a, la trompe; 6, le petit voile qui s'étend dessus ; c, c, les deux tentacules ; J, la verge ; e , un autre appendice placé dessous ; f, l'issue de l'ovi- ductus ; g-, g- , les branchies ; h , l'anus ; i, i, rebords du man- teau saillans tout autour; A, A, ceiLx du pied, saillans de même. Fig. 3. La coquille du pleuro-branche représentée sépa- i^ment. Fig. 4- Le pleuro-branche ouvert. «, le cœur; 6, son oreillette; c, J, e, ses principales artères ; y, le foie y g, le jaljot; A , /j , /^, le troisième et le quatrième estomac ; i , l'ovaire, A , le canal intestinal; 777, corps glanduleux dont les fonctions s^ni inconnues ; o , le cerveau et les yeux \p,p^ les tentacules j ET PLEURO-BRAjNCHE. II 47, <7, le voile qui recouvre la trompe; r, la trompe; ^, ^ , partie antérieure du rebord des pieds ;^', sa partie postérieure. Fig. 5. Le même, les intestins développés. «, l'œsophage; rt' , sa dilatation en un jabot; c, le gésier; J, le feuillet ou troisième estomac ; e , le quatrième estomac ; /", le foie ; g , la masse charnue de la bouche; A, A, ses muscles réti'acteurs ; z , /, /, les glandes salivaires ; A , A , leurs conduits excréteurs ; Z, les parties mâles de la génération ; m, corps glanduleux in- connu; n, n, les tentacules ; o', o', les deux moitiés du cerveau écartées sur les côtés et les nerfs qui eu partent ; p , l'ovaire ; ^, «7, l'intestin; r, l'anus. Fig. 6. Les estomacs. «, le jabot; &, l'entrée de la bile ;c, le gésier; d ^ le feuillet; e , le sillon qui mène du jabot dans le feuillet ; y, le quatrième estomac. I Fùj.i. Fin. 2 Fuj.4- ^^' />//. j^ - /y. Phyllidia trilineata. j^Vi/./.PhyDidia oceData. Fùj. V. ;5 PleuroWauchus pei^onvi. MEMOIPvE Sur le g€7îre Aplysi.^ , vulgairement nommé LiEf^^RE MARIN ; SUT sofi yinatouiie ^ et sur quehjues-unes de ses espèces. Xje mollusque , nommé lièvre marin par les anciens et par les premiers modernes , est peut-être le plus anciennement connu de tous ceux que la mer recèle : mais c'est peut-être aussi celui sur lequel on a débité le plus de fables. Les pêcheurs paraissent avoir eu de tout temps la manie qu'ils conservent même de nos Jours, d'attribuer des qualités mal- faisantes aux animaux marins qui ne servent point à la nourri- ture de l'homme. On sait que les livres des naturalistes ne sont encore que trop remplis des rapports de ces hommes ignorans, sur les orties de mer, sur les étoiles, et sur d'autres produc- tions semblables , quoique l'observation en ait depuis long- temps démontré la fausseté. Ces contes se multiplient , et augmentent en merveilleux lorscpe la figure, la couleur ou l'odeur de l'animal ont quelque chose d'extraordinaire ou de rebutant, comme il arrive dans le lièvre marin ^ aussi trou- vons-nous une longue liste des propriétés pernicieuses et éton- nantes de cet animal : non-seulement sa chair et l'eau dans laquelle on la fait infuser , sont venimeuses , et font mourir au bout d'un nombre de jours parfaitement égal à celui qu'a 2 MEMOIRE vécu l'individu dont on a mangé ou pris l'infusion 5 mais sa vue seule peut empoisonner. Une femme qui aiuait voulu cacher sa grossesse ne peut résister à l'aspect d'un lièvre marin fe- melle; des nausées et des vomissemeus subits la trahissent, et elle ne tarde pas à avorter , à moins qu'elle ne place dans sa manche un lièvre marin mâle , desséché et salé ; car c'est aussi la une des idées superstitieuses répandues de tout temps parmi le peuple , que chaque espèce malfaisante porte en elle-même le remède propre aux maux qu'elle cause. Il y a dans cette application-ci un embarras particulier, c'est que tous les individus des lièvres marins réunissent les deux sexes. Si les lièvres marins d'Italie sont si funestes à l'homme, c'est tout le contraire pour ceux de la mer des Indes : c'est l'homme qui est funeste à ceux-ci; et il ne peut les prendre vivans, parce que son seul contact les fait périr. On devine aisément que c'est Pline qui m'a fourni cette longue série de propriétés, et l'on est tenté de les rejeter toutes sur la seule considération d'une origine si suspecte. J'avoue C|ue j'y suis très-porté aussi, d'après mes propres recherches , quoique le témoignage unanime des anciens semble confirmer celui de Pline. Il paraît cependant qu'en Italie, ce pays où l'art des empoi- sonneraens a été pratiqué et raffiné si anciennement, on faisait entrer le lièvre marin dans quelques-uns des breuvages si usités dans les temps de corruption. Locuste l'employait, dit-on, pour Néron , et Domitien fut accusé d'eu avoir donné à son frère. Les médecins traitent au long des symptômes produits par le poison du lièvre marin : la peau devenait livide , le corps s'enflait, l'iu'ine se supprimait d'abord, et sortait ensuite, SUR LE GENRE APLYSIA. 3 tantôt pourpre , tantôt bleue , et souvent sanguinolente; enfin, le malade périssait avec des Coliques et des vomissemens affreux. Les remèdes qu'on a proposés contre ce poison sont presque innombrables. Il ne parait pas qu'on ait été guidé dans leur choix par des principes bien constans j car des substances de vertus toutes contraires sont proposées avec une égale con- fiance. Tels sont la mauve, le lait de femme, celui d'ànesse et de jument, le suc de cèdre, les os d'àne, le raisin, l'alisma et le cyclamen. Mais parmi tant de faits annoncés par les anciens louchant les propriétés du lièvre marin , on ne trouve , comme il est trop ordinaire , presque rien sur sa forme et sur son organi- sation. Aristote , qui était bien fait pour porter la lumière sur un objet si curieux , n'en parle point du tout. Pline le compare à une pâte informe qui n'a du lièvre terrestre que la couleur j Dioscoride, à un petit calmar; jElien, à un limaçon dont on aurait enlevé la coquille ; et cette dernière compa- raison est la seule qui commence à nous mettre sur la voie. Comment les auteursT auraient -ils examiné de près im tel animal.^ Outre que son air et son odeur devaient inspirer de la répugnance, on se rendai', suspect seulement en le recher- chant. Lorsque Apulée fut accusé de magie et d'empoisonne- ment , on rapporta , comme principale preuve , qu'il avait engagé , à prix d'argent , des pêcheurs à lui procurer un lièvre marin. Aussi est-ce à Apulée que nous devons le seul trait vraiment caractéristique qui nous lasse reconnaître un animal si célèbre. « Il a , dit-il , une propriété extraordinaire , et qui a été ignorée de mes prédécesseurs : c'est qu'étant d'ailleurs dé- 4 MÉMOIRE pourvu d'os , il en a cependant dans son ventre douze petits , pareils à des osselets ou astragales de cochon , attachés et liés ensemble ». Nous verrons, en décrivant l'estomac des aplysies , ce qu'Apulée a voulu dire. Bohatsch , à la vérité , conteste que cela puisse s'appliquer à notre espèce j mais je crois pouvoir montrer qu'il s'est trompé. Aussi Rondelet n'a fait nulle difficulté d'appliquer aux aplysies le nom de lièvre marin. Il a donné les figures de deux espèces assez exactes , cjuoique grossières (^de Piscib., p. 520 et 526) , copiées dans Gesner {de u4quatil., p. 47^ et 477 ]. et par Aldrovande ( de An. exs. , p. 81 ). Rondelet en propose une troisième ( Loc. cit., p. ^26 ) , cpii est le Jimbria de Bohatsch, ou le iheiys jimbria de Linnœus. Fabius Columna , le seul auteur qui ait bien décrit ce ihethys avant Bohatsch, le regarde également comme un lièvre marin {de Aquatil. et Terrest. observ., p. xxviij ) , et en propose un quatrième, qui est un doris ( Ibid , p. xxiv). Nous pensons que ni l'un ni l'autre ne peuvent être regardés comme tels , puisque le caractère indiqué par Apulée ne leur convient pas. Il est d'ailleurs facile de voir qu'on trouve dans la forme des aplysies la raison du nom de lièvre marin , comme on trouve dans leur odeur et dans la liqueur qu'elles répandent l'origine des propriétés pernicieuses qu'on leur a attribuées. Leurs ten- tacules supérieurs représentent très-bien, surtout dans l'espèce tachetée dont je parlerai , les oreilles d'un lièvre ; leur museau est presque fendu comme celui de ce cpiadrupède , et leur figure générale rappelle assez celle du lièvre , lorsqu'il est ramassé sur ses cjuatre pieds rapprochés. Linnœus parait n'avoir d'abord connu le lièvre marin que par les figures de Rondelet et de Columna. Il faut qu'il SUR LE GENRE APLYSIA. • 5 s'en soit fait une bien fausse idée , puisque dans ses- éditions 4'^ et 6' il le raugea dans le genre parasite des lernaea. C'est sous ce deruier nom que Bohalsch le décrivit : mais, pendant que ce naturaliste faisait imprimer son ouvrage , Linuxuis avait publié sa dixième édition , oii les lièvres marins de Rondelet et de Columna formaient un genre à part sous le nom de the- ihys. « Je voulus d'abord adopter ce nom , dit Bobatsch ; « mais comme je remarquai que ni le cai^aclère attribué au^ « lernaea^ ni celui des thethys , ne convenaient réellement « à mon animal , j'ai préféré laisser les cboses telles qu'elles « étaient, pour procurer à M. Linnœus l'occasion cju'il aime « tant de faire encore un nom nouveau. » Linnœus ne la manqua pas : le lièvre marin de Rondelet parut seul dans sa douzième édition , et fut appelé laplysia; celui de Colinnna resta seul sous le genre thethys ; et comme Bobatscb les avait bien décrits l'un et l'autre, leurs caractères génériques furent très-bons. C'était sans doute une faute d'impression, que YL en tête de ce mot ; le vrai nom que Linnœus avait voulu employer , et qui a été en effet rétabli par Gmelin , est aplysia. Il signifie ce qu'on ne peut lacer ou nettoyer^ et Aristote s'en sert pour désigner nue espèce d'épongé. C'est donc au voyage que Bobatscb fît en Italie lors de l'invasion des Prussiens en Bobème , sa patrie , que nous devons la première connaissance un peu exacte de ce curieux animal 5 il en a fort bien décrit l'extérieur et la plupart des principaux viscères ; et son travail aurait presque rendu le mien inutile, si ses procédés anatomiques avaient été assez délicats; surtout s'il avait eu , lorsqu'il se livra à ces reeberches , des con- naissances comparées de l'organisation des genres voisins. Ce G MÉMOIRE dernier délluit Ta fait errer en tlitférens points , et lui a fait négliger quelques objets essentiels : j'ai d'ailleurs à décrire des espèces dont il n'a point parlé. I . Description extérieure des aplysies ; leurs habitudes. Elles ont en tout beaucoup de rapports avec les limaces; leur corps est ovale, aplati en dessous pour former un pied long et étroit , bombé en dessus, plus ou moins pointu en ar- rière, et se rétrécissant un peu en avant en une espèce de cou, susceptible de plusieurs degrés d'allongement, et à l'extrémité duquel est la tète. La tète est la seule partie supérieure qui avance au delà des bords du disque qui fait le pied. Les autres bords de ce disque se redressent, et font une espèce de palissade qui entoure les côtés et la partie postérieure du corps : cette sorte de muraille charnue se redresse et s'élève plus ou moins, en s'amincissant, ou bien elle s'affaisse en se gonflant, ou enfin elle se plie en ondulations plus ou moins nombreuses , selon la volonté de l'animal , c[ui peut croiser l'une sur l'autre la partie droite et la partie gauche, ou les écarter et les évaser, leur donner enfin toutes les figures imaginables. Entre ses rebords, s'aperçoit une pièce presque demi-circulaire , attachée par son côté gauche seulement, mobile en totalité comme un couvercle à charnière et dont le bord, flexible au gré de l'animal, forme souvent une sorte de gouttière ou de demi-canal propre à conduire l'eau aux branchies. Les branchies sont, en effet, sous ce couvercle. A l'extrémité postérieure de son attache est percé l'anus 5 et entre l'extrémité antérieure de cette même attache , et celle correspondante du rebord membraneux du corps du côté droit, SUR LE GENRE \PI,YSIA. n est le trou par lequel sortent les œufs et la semence , ainsi que celui qui donne issue à cette liqueur acre cjue Ton a regardée comme un venin. Mais, outre celte liqueur, qui est blanchâtre, et qui ne sort que très- rarement, l'animal en répand une autre beaucoup plus abondante, et d'un rouge pourpre très-intense. Une grande aplysie peut fournir assez de cette liqueur pour rendre un sceau d'eau semblable a du vin pour la couleui-. Cette liqueur rouge n'est point contenue dans un sac particu- lier ; mais elle a son siège dans la substance même du cou- vercle des branchies, tout autour de sou bord libre. L'nnimal la répand pour peu c[u'il soit contrarié, et surtout lorsqu'on le met dans l'eau douce : elle sort, à ce cjue je crois, en transsu- dant au travers des pores de la peau ; du moins je ne lui ai point vu d'issue particulière. L'aplysie n'est pas le seul animal cjui répande une liqueur violette : j'ai observé que le murex hrcuidaris , et encore une autre espèce, en répandent une toute pareille dans les mêmes circonstances; et je ne doute pas un instant que ce ne soit là la véritable pourpre des anciens : par conséquent, je pense cjue Swammerdam , et tous ceux cjui, d'après lui, ont supposé que la pourpre était contenue dans une petite bourse en connexion avec les organes de la génération , se sont trompés. J'ai recueilli une certaine quantité de cette liqueur de l'aply- sie pour en faire des essais : elle prend à l'air, en se desséchant, une belle teinte foncée, comparable à celle de la scabiosa atro- purpurea^ et qui ne parait pas susceptible d'altération par l'air seul. L'acide nitrique, en petite cpantité, lui donne une teinte plus violette; lorscju'on en verse beaucoup, il la change en aurore sale. La potasse lui donne une teinte d'un gris vineux sale. Ces deux réactifs y produisent beaucoup de flocons blancs. 8 MÉMOIEE En effet, cette liqueur, très-semblable clans sa nature k celle du calmar, qui est la véritable encre de la Chine, contient sa matière colorante dans un excipient muqueux : elle n'a ni goût, ni odeur bien forte, et n'a aucune qualité malfaisante pour la peau 5 car j'y ai plongé les doigts pendant assez long-temps sans en éprouver d'inconvéniens. Les pêcheurs de Marseille croient cependant quelle pourrait faire mal aux yeux si l'on y en portait. La bouche est fendue sous la tête , non pas en travers , mais en longj et le bord antérieur de la tête forme de chaque côté nue production membraneuse, conique, comprimée, plus ou moins allongeable, qui représente un tentacule. Sur la tète, plus en arrièi'e, il y a de chaque coté un autre tentacule conique, que l'animal peut aussi allonger ou raccour- cir, mais qu'il ne peut pas faire rentrer dans le corps comme le limaçon. L'extrémité en est un peu pliée en deux, longitudi- nalement, ce qui le fait ressembler k une oreille externe de quadrupède. Au-devant de sa base est l' oeil, qui ne présente qu'un petit point noir. Sous le tentacule antérieur du côté droit, est un trou par lequel la verge sort en se déroulant : cette verge n'est pas plus percée cpe celle de la plupart des autres gastéropodes ; mais un sillon profondément creusé k la surface du corps vient de l'ori- iice des œufs k la base de la verge, et se prolonge sur le corps de celle-ci. C'est la seule connexion entre les organes des deux sexes. La verge se termine par un fdament blanc et mince : elle sort ordinairement du corps lorsque l'animal expire. Les parties que je viens d'indiquer sont communes k toutes les aplysies j mais ces animaux varient en proportions et en cou- leurs. SUR LE GENRE APLYSIA. 9 Dans l'espèce qui parait avoir été décrite par Bohatscli , le corps est plus mousse en arrière et très-ridé , de couleur livide , nuancé partout de brun noirâtre. Dans celle que je nomme cameiiis , il est pointu en arrière, et revêtu d'une peau lisse et blanchâtre; le cou est excessivement allongé. Mon aplysia aïba diffère du camelus par la brièveté de son cou. J\i l'une, ni l'autre de ces deux dernières n'a de trou à la membrane supérieure de son couvercle des branchies; mais il y en a un assez grand , de forme ovale, dans l'espèce que je nomme punctata, qui se distingue en outre par la hauteur ex- trême du rebord qui entoure son corps, surtout en arrière, par la longueur de ses tentacules supérieurs, et par sa couleur d'un noir pourpre tout parsemé de points pâles. M. Poiret parle, dans son Voyage en Barbarie , d'une es- pèce dont Gmelina fait sa seconde et dernière {^aplysia fas- ciata) , et qui diffère encore de toutes les précédentes; elle est noirâtre , et ses bords et ses tentacules sont d'une belle couleur rouge. Enfin , M. Bosc en indique une sixième , qu'il nomme verte (api. viridis), et qui est, en effet, de cette couleur, avec les rebords plus pâles. Comme elle a les yeux derrière les tentacules supérieurs , c'est une espèce bien différente des autres. Il n'y a que les personnes qui observeront vivantes mes aphlysia camelus et alba , et l'espèce de Bohatsch, qui pour- ront décider si ce sont des espèces constantes, ou seulement des variétés, ou enfin si les diversités qu'elles offrent ne viennent pas de la manière dont elles ont été conservées dans la liqueur. Comme je ne les ai vues que dans ce dernier état , je me borne à énoncer ce qu'elles m'ont offert , et je laisse les naturalistes 2 lO MÉMOIRE maîtres de les adopter ou uon dans leurs énuméra lions. J'Ignore même de quelle mer viennent les deux premières. Mais j'ai observé vivantes Y aplysia punctata et \afasciata, qui sont l'une et l'autre très-communes à Marseille , et je puis assurer que ce sont deux espèces différentes. Les pêcheurs pro- vençaux les distinguent très-bien^ ils savent que ]a fasciata est toujours noire, (juelque petite qu'elle soit, et que , par consé- quent , la punctata, quoique toujours plus petite que l'autre , n'en est cependant pas le jeune âge. Ces deux aplysies sont, au reste, des animaux très-innocens, et qui ne méritent point le mal que les anciens en ont dit. Elles n'ont pas plus de vitesse dans la mer, que nos limaces des jar- dins n'en ont sur la terre : ordinairement tapies sous cjuelque grosse pierre ou dans quelque trou de rocher , ou enfin dans quelque creux de sable, elles ne sortent guère que pour cher- cher leur nourriture, qui consiste en petits coquillages aussi lents qu'elles. Dépourvues d'armes offensives, n'ayant pas même cette coquille robuste cjui protège la plupart des gastéropodes marins , elles ont tout à craindre , et ne peuvent presque rien attaquer. Leur liqueur rouge les garantit, en obscurcissant l'eau autour d'elles, à peu près comme la sèche le fait avec son encre. Quant à leur humeur acre , je doute qu'elle soit assez abondante pour leur être d'un grand secours, surtout dans l'eau, où elle doit, k l'instant de son émission, se mêler et perdre sou effet. Il faut qu'elles soient fécondes , car elles sont fort abondantes 'en certaines saisons. Il y a des journées de printemps oii la mer fourmille de l'espèce fasciée. C'est au mois de mars cju'elle commence à pulluler. L'espèce tachetée paroit bien plus tôt; ■et, dès le mois de janvier, j'en ai eu des centaines de petites. Au SUR LE GENRE APLYSIA. H reste , on en trouve en tout temps quelques adultes , et même au fort de l'hiver. Les pêcheurs ont remarqué qu'elles ne sont pas plus d'un mois ou deux à prendre tout leur accroissement. Ces animaux répandent une légère odeur vireuse , qui aura donné lieu de leur attribuer toutes les propriétés venimeuses que j'ai citées plus haut. A Marseille, aucun pêcheur ne pasaît connaître ces propriétés. On ne mange point les aplysies , parce que leur figure et leur odeur sont dégoûtantes ; mais on n'a point pour elles cette crainte superstitieuse que témoignoient les anciens. Je n'ai pu même entendre parler de la dépilation que Linnœus attribue à la liqueur de sa première espèce. 2. Opercule des branchies. Cet opercule est formé par une duplicature de la peau , qui contient dans son épaisseur une pièce cartilagineuse, ou plutôt cornée , très-semblable pour la substance à l'épée du calmar , mais plus mince et plus flexible, demi-transparente, jaunâtre, de forme ovale, que je regarde comme un rudiment de coquille, et dont je montrerai, dans d'autres espèces , les passages gra- duels jusqu'aux coquilles ordinaires. Cette pièce n'a, comme l'épée du calmar, et comme l'os de la sèche, aucune adhérence aux parties qui l'entourent; et, en fendant la peau , on l'en retire sans rien déchirer. La peau de l'opercule s'étend au delà de cette pièce ; et c'est dans une substance spongieuse qui remplit l'épaisseur de ce bord purement membraneux, cpi'est contenue la matière rouge qui teint l'eau avec tant de force. Sous la base de l'opercule, est située une glande considérable, de figure triangulaire, dont l'angle antérieur du côté droit a une connexion si intime avec 12 MÉMOIRE la partie de l'opercule qui contient la liqueur colorte, que je ne puis douter que cette glande ne contribue à la produire. La glande donne deux veines remarquables, qui reçoivent elles-mêmes celles de l'opercule, et qui vont aboutir avec deux grandes veines-caves des côtés. 3. Les branchies et leurs vaisseaux. ^ Les branchies flottent sous ce couvercle ; et le cœur , enve- loppé de sou péricarde , est situé sous la partie antérieure, eu avant de la glande dont je viens de parler. Les branchies sont attachées aux deux faces d'une membrane qu'on peut com- parer à un croissant coupé par le milieu , et dont la ligne de section serait aussi celle d'attache. Le long du bord concave de ce demi-croissant règne le vaisseau qui apporte le sang du corps aux branchies, et, le long de son bord convexe , celui cjui le porte des branchies au cœur. Les branchies elles-mêmes sont des feuillets placés transver- salement sur les deux faces du croissant. Chaque feuillet, après s'être divisé deux ou trois fois dichotomiquement, en a d'autres plus petits, placés de même sur les deux siennes, et ainsi de suite jusqu'à une petitesse que l'œil nu ne peut plus aper- cevoir. Les subdivisions artérielles et veineuses sont dans le même ordre et le même nombre que ces feuillets. Les artères branchiales qui viennent du vaisseau situé le long du bord concave de la membrane en forme de croissant, régnent le long du bord superficiel de chaque feuillet. On les enfle aisé- ment en souiflant dans ce grand vaisseau. Les veines régnent au boxd de chaque feuillet voisin du bord convexe de la mem- SUR LE GENRE APLYSIA. l3 brane générale. Leurs embouchures dans la grande velue com- mune de toutes les branchies se font d'une manière curieuse : pour les voir, il faut fendre le bord convexe du croissant dans toute sa longueur, et poursuivre la fente sur son attache. On ouvre ainsi toute cette grande veine, et on aperçoit les embou- chures des veines particulières , disposées en cercle , et faisant comme des fleurons placés entre chaque paire de grands feuillets latéraux. ( Voyez pi. II , fig. i ). :-*,L'artère branchiale , qui sert aussi, si l'on veut , de veine- cave , puisqu'il n'y a pas de ventricule droit, est autrement disposée. ( Voyez pi. I , Jîg. i . ) Sa structure est même peut- être le fait le plus extraordinaire que la physiologie des mol- lusques m'ait encore offert. Après avoir reçu , ou plutôt avant d'avoir donné les artères particulières des feuillets par plusieurs tious semés sans ordre , elle reste quelque temps lisse et entière; mais une partie se courfie à gauche derrière l'attache de l'opercule, et une autre à droite, vers la base du rebord saillant de ce côté. Ces deux branches se portent ainsi en avant, et prennent subitement une texture bien singulière. Leurs parois se trouvent formées de rubans musculaires transverses et obliques , qui se croisent en toutes sortes de sens, mais c|ui laissent entre eux des ouver- tures sensibles à l'œil , et perméables à toutes les espèces d'in- jection , et qui établissent une communication libre entre ces vaisseaux et la cavité de l'abdomen; de manière que les fluides contenus dans celui-ci pénètrent aisément dans ceux-là, et réci- proquement. L'extrémité antérieure de ces deux gros vaisseaux ou de ces deux veines-caves se confond même absolument avec la grande cavité générale ; quelques rubans musculaires , éloi- gnés les uns des autres, et qui n'interrompent nullement la l4 MÉMOIRE libre communication , sont les seules limites apparentes qui distinguent ces veines de la grande cavité abdominale. Cette communication est si peu d'accord avec ce que nous connaissons dans les animaux vertébrés, que j'ai voulu long- temps en douter ; et même , après l'avoir fait connaître à l'Ins- titut il y a quelques années , je n'osai pas d'abord faire im- primer mon mémoire , tant je craignais de m'ètre trompé ; enfin je suis obligé de céder à l'évidence ; et dans ce moment , oii je peux disposer d'autant d'aplysies qu'il me plait , je viens de m'assurer par toutes les voies possibles, i" Qu'il n'y a point d'autre vaisseau pour porter le sang aux brancbies , que ces deux grands conduits musculaires et percés que je viens de décrire j 20 Que toutes les veines du corps aboutissent médiatement ou immédiatement dans ces deux grands conduits. Or , comme leur communication avec la cavité abdominale est évidente et palpable , qu'on les appelle veines-caves , ou cavités analogues au ventricule droit , ou enfin artères bran- chiales , car on voit qu.'ils remplissent les fonctions de ces trois organes, il résulte toujours que les fluides épancbés dans la cavité abdominale peuvent se mêler directement dans la masse du sang, et être portés aux branchies , et que les veines fout l'office des vaisseaux absorbans. Cette vaste communication est sans doute un premier ache- minement à celle bien plus vaste encore cpe la nature a établie dans les insectes oîi il n'y a pas même de vaisseaux particu- liers pour le fluide nourricier ; et nous eu avons déjà un vestige dans les mollusques céphalopodes, oîi, comme je le montre à leur article , certains corps spongieux portent aussi le fluide abdominal dans la veine-cave. SUR LE GENRE APLVSIA. l5 C'est d'après ces faits que j'ai pensé que le système absor- bant cesse entièrement dans les moUusqnes , et à phis forte raison dans les animaux situes au-dessous d'eux dans l'échelle. 4. Le cœur et les artères. La veine branchiale règne , comme nous l'avons dit , le long du bord convexe de la membrane en demi-croissant , qui porte ks branchies ; elle s'ouvre dans l'oreillette , précisément dans l'angle ou dans le sinus que l'opercule fait avec le corps. Le péricarde est une cavité ovale , située dans la partie antérieure de l'opercule , et contenant l'oreillette, le cœur et une partie des gros vaisseaux. L'oreillette est remarquable par son am- pleur et la ténuité de ses parois , qui , à l'œil , ressemblent à une fine gaze ; des filets charnus très-fins y forment un joli réseau. Le cœur est ovale, et ses parois sont assez minces, quoique garnies de colonnes charnues croisées en tout sens. Sa jonction avec l'oreillette est pourvue de deux valvules mitrales dirigées en dedans du ventricule , et ne laissant par conséquent rien retourner du côté des branchies. La grosse artère se divise d'abord en deux troncs. Le pre- mier, se portant directement à gauche, perce le péricarde, après un trajet très-court, pour se rendre dans l'abdomen , où nous le suivrons bientôt. Le second revient d'abord vers la droite, donne une branche qui perce aussi de suite le péricarde et se porte en avant j puis le tronc qui reste , le principal de tout le corps, perce le péricarde à son côté droit. Sa partie ren- fermée dans le péricarde présente une structure bien singu- lière j elle a deux crêtes , toutes composées de petits vaisseaux qui sortent du gros tronc et qui y rentrent, sans qu'on puisse ï6 MÉMOIRE voir quelle est leur utilité. Serait-ce là un organe sécrétoîre qui produirait la liqueur qui remplit le péricarde ? Toujours est-il fort aisé de souffler et d'injecter ce beau , mais problématique appareil. ( Y oyez pi. Il^fig. 4. ) Le premier tronc artériel est destiné au foie et au canal in- testinal ; le deuxième , à l'estomac et à l'oesophage ; le troi- sième, a])rès avoir passé entre les deux nerfs qui naissent du ganglion abdominal , donnent , presque sous ce ganglion, une petite branche pour les organes de la génération , et peu après une plus grande pour l'opercule , et une autre pour les parties droites du corps : toutes les trois sont rétrogrades. Ce tronc monte ensuite sous l'œsophage , où il donne une grosse et une petite branches pour les parties gauches , dont la première est rétrograde, et une pour les parties droites , et surtout pour la verge, et va se terminer sous la bouche par deux rameaux, dont l'un nourrit les parties de la bouche, et l'autre pénètre dans celles du pied qui sont situées au-dessous. 5. La bouche, ses muscles, les glandes salhaires. La bouche interne est, comme dans beaucoup d'autres gasté- ropodes, formée d'une masse de chair qui contient les organes de la mastication et de la déglutition ; elle a des muscles propres qui la contractent dans un sens ou dans l'autre, et des muscles extérieurs qui la tirent en avant , ou la font rentrer en arrière, ou la portent de côté. Les muscles extérieurs sont en forme de bandelettes, quelquefois divisés en digitations , et vont se fixer aux parties environnantes de la tête. J'ai représenté ceux de dessus, pi. III, Jig. i. Ils forment entre eux, et avec les nerfs, un entrelacement assez agréable à la vue. SUR LE GENRE APLYSIA.. I^ La masse de la Louche est vue du côté droit , pi. II ,Jig. 5 , avec ses muscles inférieurs , qui tendent tous à la porter en avant. II n'y a point de mâchoires , ni rien qui en tienne lieu; seule- ment les lèvres qui sont fendues verticalement, sont garnies chacune d'une plaque cartilagineuse, mince et lisse, qui les garantit un peu lors du passage des alimens. Tout le mécanisme de la déglutition consiste , comme dans les sèches, dans les mouvemens en quelque sorte péristaltiques d'une membrane cartilagineuse et armée de très-petits crochets, comme ceux d'une carde à carder, dont les pointes sont dirigées en arrière. On peut voir la bouche iéndue , la langue, le palais et les deux lèvres ,pl. II ,Jig. 6. Les glandes salivaires sont minces et très - longues ; leur extrémité postérieure va s'attacher au second estomac ; leurs canaux excréteurs s'insèrent dans la bouche aux deux côtés de l'origine de l'œsophage. 6. L œsophage , les estomacs et le reste du canal intestinal; le foie. L'œsophage, d'abord étroit, se dilate subitement pour former le premier estomac ou le jabot, qui est une grande et large poche, k parois membraneuses très -minces, sans apparence glanduleuse; il fait ordinairement un tour presque en spirale. On le trouve rempli de débris de fucus et d'algues , et de frag- mens de petites coquilles. Ce jabot est suivi d'un gésier en forme de cylindre court , et dont les parois sont musculaires et très- robustes; elles sont garnies intérieurement d'une armure fort extraordinaire , et dont je ne trouve point d'analogue exact , 3 l8 MÉMOIRE quoique les pièces osseuses de l'estomac des huilées y aient quelque rapport. Qu'on se représente des pyramides à base rhomboïdale , et dont les faces irrégulières se réunissent en utt sommet partagé en deux ou. trois pointes mousses. Leur subs- tance est demi-cartilagineuse, et composée de couches parallèles k la hase; leur nombre, dans les individus oîi je les ai recueil- lies avec soin , s'est trouvé de douze grandes , placées en quin- conce sur trois rangs, et de quelques petites, rangées sur le bord supérieur de ce gésier. L'adhérence de ces pyramides k la veloutée est si légère , que le moindre contact les fait tom- ber, sans qu'on aperçoive de traces de membrane , ni d'aucun- autre moyen d'union. Les endroits auxquels elles adhéraient sont bien marqués néanmoins par une surface lisse et saillante, tandis que les intervalles sont un peu creux et légèrement ridés. Les hauteurs de ces pyramides sont telles , que leurs pointes se touchent au milieu du gésier, et qu'il reste entre elles très-peu d'espace pour le passage des alimens, qu'elles doivent , par conséquent , broyer avec force. Le troisième estomac, aussi large que le premier , quoique moins long, a une armure aussi singulière que le second : ce sont de petits crochets pointus, attachés k l'un des côtés de sa surlàce interne, mais presque aussi légèrement que le sont les pyramides du gésier; leurs pointes sont diiigées vers le gésier, et je ne puis leur concevoir d'autre usage que d'arrêter au pas- sage les alimens qui n'auraient pas été suffisamment triturés dans ce gésier : en effet, on ne distingue presque plus la forme des substances alimentaires qui occupent le troisième estomac. Près du pylore sont deux petites crêtes membraneuses, sail- lantes en dedans, entre lesquelles on remarcpie l'orifice du oœcum et ceux des vaisseau hépatiques. SUR LE GENRE APLYSIA. IQ Le cœcum est aussi long que le second estomac, où il abou- tit -, mais son diamètre est petit , ses parois simples et sans val- vules, ni aucune partie saillante en dedans : il est absolument caché dans le foie. Le canal intestinal est également uniforme dans son diamè- tre, à parois minces et transparentes, plus que celles du troi- sième estomac, et s'en distinguant subitement par cette diffé- rence de qualité; il fait deux grands contours, embrassés par les divers lobes du foie, et se termine à l'anus par un rectum qui s'y rend transversalement. On ne voit dans son intérieur ni papilles ni valvules, et il n'a ni étranglement, ni dilatation sensible. L'intestin et le cœcum sont unis au foie par une grande quantité de vaisseaux sanguins. Les excrémens se moulent , dès les environs du pylore, en filamens minces, cylindriques, comme articulés, et d'une longueur prodigieuse. Le foie est d'un brun-verdâtre très-foncé , et d'une appa- rence grenue; il se divise en beaucoup de lobules, réunis en trois masses principales , dont les limites sont marquées par les contours de l'intestin. Les vaisseaux hépatiques sont d'un très-grand diamètre; ils viennent s'ouvrir autour de l'orifice du cœcum , dans le troi- sième estomac , par plusieurs trous très-visibles , qui donnent les uns dans les autres. Toute la masse des intestins est environnée d'une membrane péritonéale très-lîne , quoique assez forte. 7. Organes de la génération. Ce qu'ils ont de plus remarquable , outre la réunion des deux sexes danf chaque individu , commune aux aplysies et 20 MÉMOIRE à un grand nombre des mollusques gastéropodes , c'est leur dispersion aux deux extrémités opposées du corps , et surtout la séparation des deux parties qui constituent l'organe mâle. En effet, le testicule et l'ovaire sont d'un côté, et la \erge de l'autre; et les œufs et la semence ont un contact nécessaire avant de sortir du corps. L'ovaire est une masse ovale qui occupe tout le fond posté- lieur de l'abdomen , et qui , dans l'état ordinaire , est d'une couleur blanchâtre j l'oviductus y prend son origine par plu- sieurs vaisseaux qui viennent des différentes parties de la masse, comme les vaisseaux propres d'une glande secrétoire , et qui se réunissent en un seul : celui-ci , après avoir serpenté le long du côté droit du testicule , devient subitement très-mince , se con- tourne autour de la sommité de cette glande, et forme un canal qui , après avoir été collé pendant quelque temps au canal déférent , finit par y déboucher après avoir reçu une vésicule ou boyau aveugle qui est peut-être l'analogue des vési- cules divisées du colimaçon. Le testicule est d'un beau jaune, et ressemble à un sphé- roïde elliptique qui serait entouré d'un ruban en spirale ; son milieu est assez compacte , et semble presque homogène. Le ruban qui parait l'entourer est lui-même divisé en une bande principale, finement striée, et dont les stries sont proba- blement autant de vaisseaux propres , et en deux lisières lisses, qui sont des vaisseaux excréteurs. La lisière supérieure est le canal déférant commun à tout le testicule , et qui transmet la semence au dehors. Le cordon commun qui va à l'extérieur du corps, est d'abord divisé en deux canaux. Celui qui vient du testicule est formé d'une membrane plus mince et très-plissée ^ l'autre , qui vient SUR LE GENUE APLYSIA. 21 de l'oviductus , a des parois plus épaisses. Une fente établÏL entre ces deux canaux une libre communication dès le premier tiers de la longueur^ mais ils restent néanmoins distingués par une cloison membraneuse saillante. C'est vers le deuxième tiers que s'ouvre , par un petit conduit particulier , la vessie ovale que Swammerdam a regardée dans la limace comme le réser- voir de la pourpre , et qui doit être un organe assez essen- tiel ; car on le trouve dans tous les gastéropodes , et même dans les clio. Ne serait-ce pas tout simplement un analogue de la vessie urinaire ? mais alors oii seraient les reins ? La partie du double canal située plus loin que l'orifice de cette vessie forme une saillie visible à l'extérieur au cùlé droit du corps, et son orifice se continue avec une rainure profonde qui règne le long du côté droit du cou , et qui sillonne le corps de la verge. Cette rainure sert-elle à conduire la liqueur séminale d'une aplysie dans le corps de l'autre ? C'est de cette question que dépend l'explication de la manière dont ces animaux se fécondent. Mais pourquoi une telle rainure n'existe-t-elle pas dans tant d'autres gastéropodes qui n'ont pas non plus de com- munication intérieure entre leur verge et leur testicule ? Je crois qu'il est essentiel à présent qu'un naturaliste intelligent cherche à observer les aplysies avant , pendant , et après leur accouplement. 8. Cerveau et système nerveux. Ce système est fort intéressant par la dispersion de ses masses , qui forment cinq ganglions principaux , à peu de chose près égaux , et ayant presque autant de droits l'un que l'autre à porter le nom de cerceau ; de plus , par deux parti- 22 MÉMOIRE cularitës de structure qui méritent d'être développées. La pre- mière, c'est que, tant le cerveau que les ganglions sont d'une substance rougeâtre et grenue, très-dilférenle de celle des nerfs, qui est blanche et homogène ; les ganglions même les plus éloi- gnés sont semblables au cerveau à cet égard , et ne peuvent conséquemment être pris pour des replis ou des lacis de nerfs. On voit la même chose dans le bulime des marais et dans d'autres gastéropodes. La seconde , c'est que toutes ces par- ties sont enveloppées de gaines membraneuses ou de méninges plus larges cju'elles. L'intervalle du cerveau ou du nerf à son étui, est rempli d'une cellulosité lâche, de manière qu'on pourrait souiller ou injecter les gaines, sans pour cela avoir rien intro- duit dans le nerf. Cette circonstance , qui est plus ou moins commune au système nerveux de tous les mollusques , a fait croire à Le Cat que les nerfs de la sèche étaient creux, et a fait prendre à Poli le système nerveux des mollusques acéphales pour leur système lymphatique. Il est bon d'avoir ainsi l'explication des erreurs dans lesquelles sont tombés des hommes de mérite. Voici main- tenant la distribution des nerfs. Le cerveau est , comme à l'ordinaire , sur l'œsophage j de chaque côté est un ganglion à trois lobes , joint au cerveau par trois filets; et un troisième filet, qui passe sous l'œsophage, achève le collier , et réunit les ganglions. La gaine de tout ce collier est très-large. Les deux ganglions sont encore réunis par un second filet qui embrasse le grand tronc artériel. Le cerveau s'unit par deux filets avec un troisième gan- glion à deux lobes , situé transversalement sous la masse charnue de la bouche. Enfin, chacun des ganglions latéraux donne un gros nerf qui SUR LE GENRE APLYSIA. 23 va s'unir à son correspondant très-près de l'origine du grand tronc artériel et de l'orifice des œufs, en un ganglion ovale un peu plus petit que les trois autres. Voyons maintenant les nerfs qui naissent de chacune de ces cinq masses cérébrales. Le ganglion inférieur ou suboral en donne quatre de chaque côté, un pour l'œsophage et les glandes salivaires , et trois pour les muscles de la bouche. * Le cerveau en fournit trois de chaque côté pour les parties musculaires de la tête , dont ceux du côté droit donnent des filets à la verge, et un pour le grand tentacule, qui donne une branche à l'œil. Chacun des ganglions latéraux en donne douze ou treize , qui se perdent tous dans les parties musculaires de la grande enveloppe du corps j je les ai représentés avec exactitude. Le petit collier qui passe sous l'artère en donne un impair. Les viscères reçoivent les leurs d'un ganglion à part, qui fait par conséquent l'office de sympathique 5 c'est le quatrième ou le petit. Il donne un nerf au foie et aux intestins , un autre aux parties de la génération : celui-ci forme encore un gan- glion presque imperceptible, mais rouge comme les autres j un troisième aux branchies ; le quatrième se perd dans les parties nmsculaires situées sous le couvercle. 9. Organes du mouçefnent. Cet animal n'en a d'autre que son enveloppe générale, dont le pied lui-même fait partie. Toute sa peau est garnie en dedans d'innombrables faisceaux de muscles qui se croisent en tout sensj il y en a dans l'opercule, dans les rebords qui entourent ^4 'mémoire le dos , en un mot, par tout le corps. Seulement ceux qui sont sur les côtes et qui se portent vers la tète, forment des rubans longitudinaux fort marqués. On remarque vers la verge des fais- ceaux particuliers qui paraissent destinés à la faire rentrer en dedans, et des fibres annulaires qui produisent un effet con- traire. On a vu plus haut les nombreux nerfs qui animent tout cet appareil. C'est à son moyen que l'aplysie se contracte ou se dilate en tout ou en partie , en différens sens , et qu'elle se traîne en fixant alternativement au sol les diverses parties de son pied. Elle nage par des ondulations successives; enfin, elle peut aussi venir se suspendre à la surface de l'eau, comme nos bulimes d'eau douce. 10. Organes des excrétions. Nous avons suffisamment parlé de la glande qui produit la liqueur pourpre. Il suffit de dire un mot de celle qui donne la liqueur acre. C'est un corps en forme de grappe de raisin , c'est-à-dire , composé de petits grains ronds , hyalins , remplis d'une humeur limpide , qui sort par un trou rond sans bour- relet j percé un peu en aiTÏère de l'orifice de l'oviductus. Explication des figures. Planche I. Représente mes trois espèces ou variétés d'aplysies. A. camelus , Jlg. i , et alba , Jig. 6 , pourraient être la même , mais diffèrent à coup sûr des autres par labsence du trou sur lopercule. A. punctata , Jig. 2, est différente de VA.Jasciata de Poiret , par le témoignage des pêcheurs. Les Jig. 3 , 4 ^t 5 , représentent quelques-unes des formes variées que prend cet animal lorsqu'il est en vie. Je n'ai pas représenté TA Jasciata ; mais c'est d'après cette espèce que sont faites la plupart des figures anatomiques. Sun LE GENRE APLYSIA. 3$ PL II, Jig. I. L'aplysic , dont on a enlevé la peau supérieure du couvercle, la coquille, et dont on a coupé le bord libre du cou- vercle en entier. AB. Les deux extrémités de ce bord libre. Leur coupe présente une partie de la substance spongieuse contenant la matière rouge. CDE. La glande triangulaire située sous le couvercle. EF. Ligne à laquelle correspondait le bord gauche de la coquille. CD F. Espace sous lequel est le péricarde. EGH. Les branchies , vues à leur face supérieure seulement. El K. Base du ligament en forme de demi-croissant auquel elles sont attachées. Sa pointe est vers H. Dans son épaisseur est la veine branchiale. L. La grande artère branchiale ouverte , montrant les orifices des artères particulières uimm. N. Veine-cave du côté gauche. O. Id. du côté droit. PQ. Deux veines de la glande triangulaire, dont l'une se jette dans la veine-cave gauche, Faulre dans la droite. RS. Lambeaux de la peau supérieure du couvercle. T. Endroit où s'enfonçait la partie postérieure de la coquille. U. Repli postérieur de l'opercule, où est l'anus. Fig. 2. Le ligament qui porte les branchies , fendu pour montrer lin- térieur de la grande veine branchiale. A. Branchies supérieures. B. Portion des inférieures. C. Grande artère branchiale et partie des deux veines caves, ddd. Grande veine branchiale ouverte , et montrant les orifices des petites, dis- posées en fleurs radiées. E. Intérieur de l'oreillette du cœur. F. Valvules mitrales. G. Intérieur du ventricule. HA li. Intérieur des trois grandes artères. III. Cavité du péricarde. Fig. 5. Les branchies enlevées ; la glande triangulaire dépouillée de son enveloppe; le péricarde ouvert; les deux veines caves fendues et conduites jusqu'à leur grande communication avec la cavité générale. a() MÉMOIRE A. Partie du dos sur laquelle reposaient les branchies. B C D. La glande triangulaire. E. Portion antérieure restante du bord spon- gieux du couvercle qui contient la matière rouge. F. Le cœur. G. L'oreillette, h. Le tronc commun des trois artères. H. La crête de l'artère principale. 1 1. La grande veine cave gauche. i. Endroit où elle s'ouvre tout-à-fait dans la grande cavité. K R. La veine cave droite. L. L'endroit où ces deux veines se réunissaient pour former la grande artère branchiale. M. Le premier estomac, n. Portion de la vessie, o. Nerfs qui vont former le quatrième ganglion. P. L'anus. Fig. 4- Le cœur, avec la crête de la grande artère injectée. (On a oublié les lettres c, d, dans celte figure. ) F\g. 5. La masse charnue de la bouche, vue du côté droit, a. La glande salivaire droite, h. Muscle qui porte la masse en avant. c. Muscle qui la porte en arrière, d. Muscles inférieurs qui la portent en avant, e. Muscles qui la portent sur les côtés, f. Le gros muscle postérieur de la langue, g. L'antérieur , recouvert d'une couche charnue mince, h. Muscle qui joint la masse aux lèvres. iKLm. Les nerfs venant du troisième ganglion. Fig. 6. La bouche ouverte , le palais et la langue. a a. La plaque cornée , qui revêt les lèvres, b. La langue armée de ses pointes, c. Le palais et les deux crêtes charnues, d. L'œsophage ouvert. PL III, fig. I. La peau supérieure fendue tout du long. Les viscères à peu près en situation. A. La masse charnue de la bouche intérieure. B. Le muscle cy- lindrique qui la joint à la bouche extérieure, ce, ce. Les deux muscles qui la portent en avant, dd. Les deux qui la portent en arrière. ee,ff, gg , hh. Ses quatre muscles transverses et palmés, m. Les glandes salivaires. R. Le cerveau. LL. L'œsophage. m m. Les deux ganglions latéraux. N. La verge. OO. Le premier estomac. P. Le deuxième estomac ou le gésier. Q. Le troisième. SUR LE GENRE APLYSIA. 2y R. Portion du premier tour de l'intestin. S S. Portion du second. T. Le rectum. UU. Le foie. V. L'ovaire, u. L'ovidiictus. W. Le testicule. X. L'épididyme. Y. L'appendice de loviductus. zz. Le canal commun de la génération , &. La vessie, t. Le quatrième ganglion, r Les branchies supérieures. ^ Les inférieures, i: L'o- reillette. ©. Le cœur. yu. La crête de la grande artère. ^. Son tronc. L'artère hépatique. 2. L'artère stomachique, a. L'artère du côté gauche. D. L'anus. Fig. 2. A. Partie de l'intérieur du premier estomac. B. L'intérieur du second estomac, avec ses pyramides cartilagineuses. C. Celui du troisième avec ses crochets. D. Les crêtes du pylore , et entre elles les orifices des vaisseaux hépatiques. E. Le cœcum. On voit dans les deux estomacs les places d'où sont tombés , soit des pyramides , soit des crochets. Fig. 5. Les parois du pylore plus écartées et montrant mieux les orifices des vaisseaux hépatiques. PL IV, fig. I. On a enlevé les organes delà digestion, exceptée A A. La masse charnue de la bouche , soulevée ainsi que le commencement de l'œsophage B , pour montrer le ganglion an- térieur c , situé dessous , les quatre paires de nerfs qu'il donne , et les deux filets dd qui l'unissent au cerveau E. ff. Sont des portions de glandes salivaires. gg. Les muscles qui portent la bouche en avant, lih. Ceux qui la portent en arrière. II. La verge. R. Ses muscles rétracteurs. L. Portion saillante en dedans du demi-canal, qui va de l'orifice des parties internes de la géné- ration à la base de la verge, mm. Les deux ganglions latéraux. nn. Leurs filets d'union avec le cerveau, o. Leur filet d'union supérieur./?. L'inférieur, qq. Lenerf impair qui en résulte. /■/•. Les deux gros nerfs" qu'ils donnent pour aller former le quatrième ganglion. RF. Le cœur. G. L'oreillette. H. La crête de la grande artère. L. Le commencement de l'artère stomachique. M. De fhépatique. NN. La grande artère. PP. Sa branche aux parties de la génération. Q. Celle à l'opercule. S. Celle aux parties droites 28 MÉMOIRE SUR LE GENRE APLYSIA.. de l'enveloppe musculaire du corps. T. Celle aux parties gauches. U. Celle à la verge. V. Celle aux parties droites de la tète. X. Celle aux parties antérieures. Y. Sa terminaison à la bouche, r. L'ovaire, a L'oviductus. Z. Son appendice. 0. Le testicule. Sr. L'épididyme. «e. Le conduit commun de la génération. ^. La vessie, s. Le corps en forme de grappe. * Portions musculaires latérales , principalement longitudinales, 't't. Portions moyennes croisées en tous sens. N. B. L'origine et la terminaison des nerfs sont si clairement mar- quées , que je n'ai pas cru nécessaire d'y mettre des lettres , qui au- rient tout-à-fait embrouillé la figure. Fig. 2. Les canaux des organes de la générations ouverts. Les lettres y désignent les mêmes objets que dans la Jig. i . i^;i ^fr I.APLYSIA PL. J J I' ^ V #:^ . "*-^; %^s^ ■•*«!iii^ C/oifuef Oai/jp . 1, Laplvsia Camolus . :i , 3 , + . .S . T, . runctala (>. I, ARia l.APLYSIA PL . m . ^^-'■.., i'/oipief^ tKvÇ' . LaplA'sia FasoiaiA . Visreres ci> Siiuahou . IiWovkmiv tir l'h.sftunai' Laima SIA PL. I\ . Lttvt^r Jict HttCVlCy Svii/p l.a|>l\ SKI J''ast]/ii.i . Svstciiio iH'f\'eiiv, Oro'vuu'S i\v l,i ti-riifiMlioij Ax'teres M É M 0 1 11 E Sur les AcÈRES, ou Gastéropodes sans tentacules apparens. J E réunis sous le nom générique lacères ^ imagine par Millier, des aniinaux assez disparates au premier coup d'oeil, quoiqu'ils se ressemblent par tous les caractères essentiels, et dont on n'avoit jusqu'à présent que des notices eparses> auxquelles les naturalistes systématiques n'avoient pas donné assez d'attention. C'est .dans ce genre que l'on s'aperçoit peut-être le mieux des liens étroits qui joignent ensemble les mollusques à co- quille, et les mollusques nus, car on y trouve tous les degre's de développement de cette sorte d'armure, depuis sa simple figure tracée dans la forme d'un manteau tout-à-fâit charnu, jusqu^à une coquille épaisse, solide, spirale et donnant un asile suffisant pour le corps entier de l'animal. On voit également par ce genre qu'il existe parmi les mollusques des séparations très - marquées , très-naturelles , et tput-ii-fait indépendantes de la coquille et de sa forme. Toutes les acé/'es sont hermaphrodites; toutes ont leur canal spermatique débouchant avec l'oviductus, et se continuant par une rainure extérieure jusqu'à la base de la verge ; toutes ont leurs branchies attachées à un lambeau membraneux 1 2 ACERES. adhèrent au dos, et recouvert par le manteau; dans toutes, l'estomac est un gésier souvent très-puissamment armé; en un mot elles se lient par tout l'ensemble de leur organisa- tion, aux aplysia , aux dolabelles et aux pleurobranches , c'est-à-dire , aux gastéropodes hermaphrodites à branchies dorsales, autant qu'elles s'éloignent d'une part des hélix, lymnèes , planorhes , pliyses , testacelles , parmacelles et onchidles , ou gastéropodes hermaphrodites à poumons aériens, et de l'autre part de la foule des turbinées aqua- tiques ou gastéropodes à branchies pectinées cachées, et à sexes séparés. Fahius-Columna a le premier fait connoître quelque chose de l'anatomie de ce genre en donnant la coquille et l'estomac du huila aperta, dans son traité De Purpura, p. 5o, soiis le nom de conclut natatilis niinirna exotica. Il les avoit reçus ^Imperati et prenoit l'estomac pour un opercule. Janus Plancus représenta de nouveau le huila aperta sous le à' amande de mer, d'abord assez mal ( pi. v , f. ix et x ) , ensuite passablement et avec son estomac (pi. xi , f E — I. ), y joignant les osseletsde celui da bulla hydatis ( ib.M.. N. O. ) ^danson décrivit dans son voyage au Sénégal, p. 3 et suiv., une espèce au moins très -voisine de \ aperta; lui donna le nom de sonnet; annonça que l'animal du bulla ampulla ressembloit beaucoup au sien, et forma de l'un et de l'autre, son genre gondole qu'il caractérisa par l'absence des cornes. ,Ce même caractère observé dans une très-petite espèce de la mer du Nord, donna lieu a Millier d'établir son genre ACERES. 3 ahera : Zool. Dan. piodr. xxix et 242, et Zool. Daii. II, pi. 71, f. 1 - 5. Cependant l'animal du huila aperta fut reproduit par Ascanius sous le nom tle phyline quadripartita (Acad. de Stock. 1772, pi. X, f. A. B. ); et par Millier, prodr. Zool. Dan. XXIX et 226, et Zool. Dan. m, 5o, pi. 101, sous celui de loharia. JM'ùUer ne s'aperçut point de ses rapports avec Vahera; il crut même que le loharia avoit avalle sa coquille, et parla des pièces de son estomac comme d'un organe in- connu. M. Ahildgaard , son éditeur, remarqua seulement la ressemblance de Tanimal avec \ amande de mer de Plan- cus j et les rapports de sa coquille avec le huila hjdatis. Quant au double emploi fait par Gmelin, en parlant sé- parément du huila aperla comme d'une espèce rare venant du Cap, et en reproduisant le loharia comme un genre à part, et le plaçant entre les holothuries et les tritons avec lesquels il n'a pas le moindre rapport; c'est une des fautes les plus pardonnables de ce malheureux éditeur de Linnoeus, puisqu'il ne faisoit que suivre Millier l'un des naturalistes les plus exacts de ces derniers temps. De jBor/z(Test. Mus. Csesar,, p. 196 et suiv. ) avoit fort bien juge d'après ce (\\xAdanson et Plancus a voient dit de leurs animaux, que tous ceux des vraies huiles dévoient être à peu près semblables, et il avoit indique les séparations qu'il croyoit à faire dans le genre huila de Linnœus. Bruguière {Encycl. mëth., Dict. des Vers, I. 568 et suiv.) exécuta ces séparations indiquées par de Born; il adopta son idée sur la ressemblance des animaux des bulles, et l'étendit à Vakera de MùUer; il rapporta le huila aperta à l'animal 4 ACERE S. de Plancus/mais il attribua, on ne sait pourquoi, ses sin- gularités anatomiques au huila scabra de Millier, et ne dit rien du tout du lohcwla.- ■ Dans une première note sur Xo, huila aperta (Bullet. des Scienc., vendémiaire an viii), je montrai ses analogies avec Vaplysia, et je fis connoître la position de sa coquille dans l'épaisseur du manteau. Peu de ternps après Draparnaud (Bullet. de la Soc. dés Se. et Belles-Lettres de Montpell. , n°. vi, et Bullet. des Se, jDrairial an vin) décrivit l'estomac du huila lignaria y et du huila hydatis y et reconnut l'identité du premier avec le prétendu genre gioënia ou tricla. M. Huinphrey avoit décrit et représente ce même esto- mac, depuis quelques anne'es (Soc. liuneenne de Londres, II, p. i5 ); mais il ne s'è toit pas aperçu de cette singulière supercherie de Gioëni. D'après mon observation, M. La77iarck sépara le huila aperta des autres bulles, et en fit un genre rapproché de Vapljsie qu'il nomma huilée ( An. sans vert., p. 65); il fut suivi par MM. Bosc ( Vers, I,- 65 ) et Roissy ( Mollusques, V, 190); mais on ne peut savoir pour quelle raison ces trois naturalistes ont compris nommément le huila lig/iaria parmi . leurs bullées, car aucun observateur n'avoit dit que sa co- quille fut cachée dans le manteau, et en effet elle ne l'est point. On peut divifeer les acères en. trois sous-genres; les. unes ont une coquille ample, solide et visible au dehors : ce sont les Z»7//^es de M. de Lainarclc ; les autres ont une coquille cachée dans l'épaisseur charnue du manteau : ce sont les hul- ACERES. 5 lées du même auteur ; les troisièmes enfin que nous croyons avoir découvertes le premier, n'ont point de coquille du tout, quoique leur manteau en ait la forme extérieur : nous leur rëserverous plus particulièrement le nom d'acères. Je ne connois qu'une espèce de bullée, celle dont j'ai parle' ci-dessus sous le nom de huila aperta. 11 paroit qu'on la trouve dans toutes les mers. Celles que j'ai disséquées venoient de la INlanclie; Pennant y a aussi découvert cette espèce; Ascanius et Aliiller l'ont trouvée dans la mer du Nord; Plancus dans l'Adriatique; Fabius Columna , dans les mers de Naples; M. Pérou en a rapporte de la Nouvelle-Hollande, qui sont un peu plus grandes que les nôtres, mais où je n'ai pu découvrir d'ailleurs aucune autre difFërence ni intérieure ni extérieure. D'après le rapport de PlajicuSy de Coluimia et de Zinanni, l'animal répand, lorsqu'on le touche, une liqueur qui tache les doigts de couleur de sang; propriété qui lui est commune avec les apljsies et un" grand nombre de turbinées. On ne nous dit point où est le siège de cette liqueur, et comme nous n'avons vu que des individus décolorés par l'esprit-de- vin, nous n'avons pu le reconnoître par nous-mêmes; mais il y a toute apparence qu'il faut le chercher ici, comme dans les autres espèces, dans l'épaisseur des bords du manteau. Plaucus affirme que les bullées adhèrent fortement aux éponges, et autres productions mannes, ce qui les avoit fait appeler, dit-il, sa7igsues de werpar Zinanni. Olwi a observé que les bullées et les bulles a coquille mince, ont la faculté de nager en pleine eau, pour se transporter d'un lieu à un 6 ACERES. autre. M. Pérou a trouve en gênerai les huilées sur des fonds vaseux, où elles restent même quand la mer se retire; et alors s'il vient du soleil, elles s'enfoncent sous une couche extrêmement mince de vase; les bulles se tiennent de préfé- rence sur les fonds sablonneux. Vue extérieurement, la huilée ou le huila aperta présente un corps oblong, d'environ un pouce et demi de longueur sur trois quarts de largeur. Les individus de la nier du Sud ont plus de deux pouces. Ce corps est un peu plus étroit en avant qu'en arrière; il se trouve divisé transversalement en deux parties. La postérieure répond à la coquille; et quoi- qu'on ne voie point celle-ci, ses formes s'accusent un peu au travers de son enveloppe. La partie ant('rieure est revêtue de deux pièces charnues : une supérieure bombée, recouvrant la partie du corps qui ne peut rentrer sous la coquille et for- mée, comme nous le verrons par l'analogie des espèces sui- vantes , de la réunion des quatre tentacules ; je la nom- merai pour cette raison disque tentaculaire ; l'autre infé- rieure, plate et quelquefois concave, qui est le pied. Chacun des côtés du pied est renflé en un bourrelet qui se montre en dessus, entre la coquille et le disque tentaculaire; ce qui fait paroi tre la face supérieure de l'animal divisée en quatre lo])es; circonstance d'où l'on est parti pour lui donner le nom de loharia quadriloha. Sous la coquille est une autre pièce charnue et plate, qui sert de continuation ou d'appendice au pied, mais qui en est séparée par un sillon transversal. Un autre sillon longitudinal, très-large, règne tout le long du côté droit du corps, entre le pied et son appendice d'une part, la coquille et le disque tentaculaire de l'autre. A son -5 ACERES. 7 extrémité antérieure est l'orifice de la verge; vers la moitié postérieure on voit un creux qui s'enfonce sous la coquille et dans lequel sont les brancliies : sous ce creux, dans le sillon , sont, en avant, l'orifice de l'ovidnctus, et, en arrière, l'anus, qui est un petit tube saillant. Une.rainure étroite et profonde réunit, comme dans Vaplysia, l'orifice de l'anus k celui de la verge. "• La bouche est située en avant, entre le pied et le bouclier charnu supérieur, ou disque tentaculaire, qui lui forment chacun une espèce de lèvre. Pour obtenir la coquille, il faut fendre la peau étendue sur elle, à la partie postérieure du corps; on voit alors qu'elle est renfermée dans une gaine semblable à elle, et qu'elle re- couvre, comme à l'ordinaire, les principaux viscères et sur- tout le foie : mais, ce qui lui est particulier, elle n'a point de muscles qui l'attachent au corps; et, en effet, e?le est si mince, que le moindre effort de muscles n'auroit pu manquer de la briser. Cette coquille est arrondie ; un léger repli ou commence- ment de contour montre seul qu'elle appartient aux coquilles en spirale. Son ouverture est presqu'aussi large qu'elle-même, et d'un ovale presque circulaire; elle est transparente, et l'on y voit des stries, indices ordinaires de ses accroissemens suc- cessifs. • Quant aux bulles proprement dites, j'en ai disséqué trois espèces, bulla Ugnarlcij huila anipuUa et huila hjdatis, et je ne doute pas que le plus' grand nombre des coquilles du ^enre huila ne soient également à découvert, et qu'elles n'appartienneut conséquemment à la même subdivision. 8 ACERES. Le bulla lignana étant l'espèce dont la coquille eist le plus ouverte, est aussi celle qui ressemble le plus au bulla aperta par la forme de son animial. On y voit, de même les deux rebords latéraux du pied, a et Z>, fig. 9, qui donnoient à Vaperta cette figure divisée en quatre lobes ; mais ils sont proportionnellement plus petits dans le lignaiia. Le disque tentaculaire est plus court et plus large 5 et son bord poster rieur est déjà sensiblement divisé en deux pointes, c d.' La partie turbinée ou abdominale ef, a une grandeur pro- portionnée à celle de la coquille, qui l'enveloppe au lieu d'eu être enveloppée. L'extrémité de la membrane des branchies répond à peu près au milieu du bord du manteau g y qui répond lui-même au milieu de celui de la coquille. Quand l'animal est rentré dans sa coquille, l'ouverture en est fermée par le pied a , hji et par un lolîe charnu Je y adhérent à la partie abdominale dont l'analogue dans le huila aperia, où la fermeture complète de la coquille étoit sans importance puisque l'animal ne peut s'y retirer, étoit large et aplati , mais que nous verrons se rétrécir dans les espèces suivantes encore plus que dans le llgnaria , afin de se con- former à l'étroitesse de leur ouverture. L'anus, la vulve, l'orifice de la verge, et la rainure qui l'unit à la vulve, sont placées aussi bien que les branchies, de la même manière que dans les bullées, dans le sillon du côté droit du corps occupant seulement une ligue plus étendue, à cause de la forme plus allongée. L'extérieur an bulla Ugiiaria nous montre donc que ce n'est qu'un bulla aperta y dont la partie turbinée, ou co- quillière, auroit pris plus de développement. ACERES. cj Dans le biilla ampulla, fig. 2 et 3, où la coquille est plus contournée, et Touverture plus étroite, le pied devient plus ^ oblique dans son état de contraction; son extrémité posté- rieure droite a se porte plus en arrière; son lobe ascendant gauche b est presque réduit à rien; le lobe accessoire h est plus court; mais surtout les tentacules qui composent le disque charnu, se distinguent davantage et montrent mieux leur na- ture; les deux supérieurs c, cl, sont séparés par une fente très- sensible; les inférieurs /j m, qu'on n'apercevoit point dans le hgnaria, se font sentir ici, et ont un bord double, abso- lument comme ceux de Vaplysia. Le bulla hydatis, fig. 12 et 1 3, a la partie abdominale, ou coquillière, plus bombée, conformément à la forme de sa coquille; le pied tout -à-fait triangulaire dans son état de contraction ; le lobe ascendant du côté droit a plus considé- rable encore à proportion que dans Taw/Ji^/Za; les deux tenta- cules supérieurs c, d, séparés pas une échancrure seulement, mais formant par leur réunion une membrane marquée; les inférieurs /, m, aussi distincts que dans Vampulla. Les orifices de toute espèce ne présentent dans leur posi- tion que les différences nécessitées par les proportions rela- tives du corps et de la coquille. Une particularité remarquable du bulla hydatis est d'avoir sur sa coquille un épiderme très -sensible, facile à enlever, mais cependant trop mince pour masquer la nature du test. J'ai dit que j'appellerois acères proprement dites, les es- pèces entièrement dépourvues de coquilles. Je n'en connois qu'une jusqu'à présent, et je ne l'ai vue que dans l'esprit- de-vin; c'est au Cabinet impérial de Florence que je l'ai 10 ACERES. observée, et que j'ea al obtenu quelques iadividus pour noire Muséum. Elle vient de la Méditerranée, mais je n'ai pu en découvrir d'indice dans aucun auteur. Elle est re- présentée en dessus, fig. i5; en dessous, fig. 16; par le côté droit, fig. 1 7, et par derrière, fig. 1 8. Le nom de bulla carnosa lui conviendroit à merveille, car elle représente fort bien un bulla, comme Vajjerla par exemple, dont la coquille se se- roit évanouie et n'auroit laissé que les chairs qui l'envelop- poient. Ces chairs ou ce manteau ont même absolument la fi^rme d'une coquille, et se contournent de même en spirale par derrière j quand on en fend la peau extérieure, on trouve sous elle un vide possible, une solution de continuité entre deux membranes, dans laquelle pourroit être logée une co- quille très-semblable à celle de Yaperta; mais cet intervalle n'est occupé par rien; il n'y a pas même cette lame cornée et flexible qui tient Heu de coquille à Vaplysia; mais peut-être se fait-il en certaines saisons dans cet espace vide quelque sécrétion de nature plus ou moins calcaire , comme il arrive dans certaines limaces. Sou caractère extérieur le plus marqué, c'est que l'ouver- ture par où l'eau pénètre aux branchies, et les orifices de l'anus et de la vulve, sont plus en arrière que dans les espèces précédentes, et que le sillon qui va de la vulve à l'orifice de la verge , est par conséquent beaucoup plus long. Les deux lobes latéraux du pied , qui dans le bulla aperta remontent et forment de chaque côté du dos une proéminence charnue, sont ici, minces, aplatis, et en forme de nageoires, ce qui donne à l'animal un rapport sensible avec Vaplysia. Le disque tentaculaire est en revanche plus éloigné des ACERES. II formes de Vaplysla, que dans les autres bulles; il est ovale, et ne montre nulle séparation, nulle proéminence qui indique des tentacules; deux points bruns place's près de ses angles antérieurs annoncent probablement la présence des yeux, que je n'ai pu toutefois distinguer, f^'f^ O' Ce j)elit animal n'a guère qu'un pouce ou dix-huit lignes de longueur. Si après avoir ainsi examiné les acèresa l'extérieur, nous en faisons l'anatomie, nous n'y trouverons pas des traits moins frappans de ressemblance, entre elles et avec les apljsies. Les branchies sont attachées dans les cinq espèces, comme dans Yaplysictj aux deux faces d'une membrane triangulaire, adhérente par un de ses côtés au dos, sous le toit que lui prête la coquille ou le manteau; la seule différence consiste dans la direction, cfiri est plus en arrière dans Vaccra carnosa que dans les autres. Ces branchies sont des feuillets transverses subdivisés eux-mêmes en feuillets plus petits. La veine pul- monaire rampe le long du bord antérieur du triangle branchial. Elle donne dans l'oreillette du coeur, qui est placé sous la partie gauche de la cavité des branchies, dans la cavité abdo- minale, mais enveloppé dans un péricarde qui le sépare du reste des viscères. La plus grande partie de ce qui reste enveloppé dans la coquille, est remplie par le foie, dont les lobes embrassent d'une façon très-serrée les circonvolutions du canal intestinal. Tout au fond de la spire, ou du vestige de spire seulement est l'ovaire; l'oviductus et le testicule aboutissent presque ensemble auprès de la vulve où se rend aussi le canal de la Yessie. Celle-ci est voisine du cœur dans le côté gauche. 12 ACERES. L'oesophage, l'estomac, le cerveau, les glandes salivaires et la verge, occupent la partie antérieure du corps, celle qui sort de la coquille, et dont la cavité' est distinguée de celle de l'abdomen par une membrane intermédiaire. Telle est la position des viscères dans mes cinq animaux. Dans tous les cinq la bouche est une fente verticale, garnie de chaque coté d'une lame coi'née, comme dans l'aplysie. Dans les espèces à coquilles, la masse charnue de la bouche n'est pas considérable; sur son plancher est une langue courte, armée de petites épines recourbées en arrière. Dans le buUa aperta, cette langue n'est qu'un petit tubercule. Le biilla ampulla a la masse de la bouche un peu plus grande et la langue plus étendue que les autres. Dans ce même huila ampulla les glandes salivaires, comme dans l'aplysie, représentent deux rubans étroits et longs, fixés d'une part au gésier, et de l'autre s'insérant à la masse charnue de la bouche. Dans Vaperta et le lignaria elles sont courtes , et libres en arrière. IJhydatis Xç.'i a très -longues, inégales, et celle du côte' gauche fourchue par son extrémité postérieure. L'oesophage est ample, et susceptible de dilatation. Le huila lignaria est l'espèce ori il est le plus long; il s'y replie deux fois avant d'entrer dans le gésier. Il se trouve dans toutes les espèces à coquilles un gésier musculeux armé de trois pièces osseuses, mais c'est par ce gésier et par son armure cjue ces espèces diffèrent le plus entre elles à l'intérieur. ACERES. i3 C'est dans le bitlla lignaria qu'il est le plus volumineux et que sa forme est la plus singulière. Il est arme de chaque côté d'une grande plaque pierreuse, convexe à sa face interne, concave à l'externe, dont le contour représente un ovale irre'- gulier, ou un triangle dont les trois angles seroient arrondis. Une première membrane enveloppe ces deux pièces; un tissu musculaire, très-épais, formé de fibres chai'nueset trans- versales les unit l'une à l'autre par tout leur contour. Une troisième membrane qui est la veloutée tapisse l'intérieur. Dans la tunique charnue, à sa partie supérieure, est enchâsse' le troisième morceau pierreux dont la figure comprimée est oblongue et irrégulière. La structure du gésier des autres bulles à coquille est au fond la même; mais les plaques pierreuses y sont plus petites et autrement configurées. Dans le huila aperta , leur grandeur est encore assez forte. Deux sont en triangle isocèle obtusangle, et une rhomboi- dale; la largeur de chacune des trois étant h peu près la même, le gésier paroît prismatique au dehors. Dans le huila amjjulla, le gésier ressemble un peu, à l'ex- térieur, à celui d'uiiu>|tôeau ; les pièces osseuses en-sont d'un noir foncé , irrégulièrement ovales, pointues aux deux bouts, et le côté par lequel elles regardent le dedans de l'estomac est à trois facettes; l'une des trois est plus symétrique que les autres. Dans le huila hydatis j le gésier est plus petit que dans les trois autres et représente un cylindre moins long que large, renflé par ses deux bases. Les trois pièces osseuses dont il est armé, sont noires, fort petites, et représentent des triangles dont deux côtés seroient en courbe convexe, presque 14 ACERES. comme des e'cussons d'armoiries. Leur face interne est mar- quée de quelques sillons Irausverses. On juge bien que de pareils estomacs doivent être destine's à broyer des corps durs; aussi les trouve-t-on ordinairement remplis des débris de petits coquillages. Draparnaud rapporte cependant avoir trouve' une fois dans le gésier du huila lignaria une petite coquille de turbo qui n'ëtoit point brisée et dont l'animal avoit cependant etë dis- sous : ce qui prouveroit que des sucs gastriques contribuent aussi à la digestion. Mais peut-être cette coquille avoit-elle ête avalée vide. Dans toutes les espèces, l'intestin fait quelques circonvo- lulions entre les lobes du foie, reçoit la bile vers son origine, et se termine a l'anus qui est plus ou moins en arrière du côte' droit. Le foie n'a point montré de différence importante. Le huila camosa, ou acère proprement dite, présente un système digestif assez différent pour être décrit à part. La niasse charnue de sa bouche est très-grande, elliptique, formée d'un tissu musculaire très-épais, et n'a point de langue épi- neuse sur son plancher. Un œsopijage à peine visible tant il est court, donne dans un estomac arrondi, membraneux, assez dilaté, d'oii l'intestin part immédiatement pour faire ses cir- convolutions entre les lobes du foie. Les organes de la génération sont disposés dans toutes ces espèces comme dans l'aplysia. La verge est toujours un muscle creux qui peut se retourner comme un doigt de gant, et qui sort par un trou au côté droit de la tête. Quand elle est dé- roulée en dehors elle a sur sa longueur un sillon, qui se ACERES. i5 continue avec la rainure qui va rejoindre l'orifice commun des oeufs et de la semence, et c'est là l'iuiique voie par laquelle le sperme peut pénétrer d'un individu dans l'autre. Le huila aperta l'a filiforme et très-longue. Dans l'état de repos elle se replie en peloton sous la masse charnue de la bouche. Dans le huila ampulla , elle est longue, grosse et cylindrique; elle se loge au-dessus du gésier en faisant deux ou trois plis seulement. Sa forme dans le huila hydatis est 2)lus particulière; d'abord grosse, près de l'orifice, elle s'amin- cit comme un pédicule, et se termine par une masse ovale semblable a un gland de chêne. Il est probable que dans l'érection elle prend une figure un peu plus égale. Le huila ligua? la et le ca/'nosa ont la verge cyliudric[ue et médiocre en volume. Le testicule est d'une forme allongée et d'une nature gé- latineuse dans toutes les espèces; il y a dans toutes une vessie globuleuse avec un long col mince; et une autre bourse cy- lindrique qui aboutit près de la vulve. Le canal de l'ovidac- tus est toujours très- plissé sur sa longueur comme dans les autres gastéropodes hermaphrodites. Le système nerveux est le même dans les cinq espèces ei encore très-semblable à celui de l'aplysia. Deux ganglions réunis par un filet transverse, représentent le cerveau, et donnent les nerfs. Deux de ces nerfs venant chacun de l'un des deux ganglions vont s'unir entre l'estomac et la vulve, pour former le ganglion principal des viscères. Il n'y a d'ail- leurs rien de remarquable dans la distribution particulière des nerfs nou plus que dans celle des artères. Comme dans tous les gastéropodes, l'enveloppe entière de ■"^ 16 ACERES. la partie antérieure du corps est d'une nature charnue; les muscles qui l'attachent h la coquille sont peu considérables; ils sont même à peu })rès nuls dans les bulle'es; on distingue mieux ceux qui retirent la bouche, et qui forment surtout des languettes nombreuses dans l'acera, où il paroi t que la masse charnue de la bouche peut en quelques circonstances se de'rouler plus ou moins au dehors comme une trompe. EXPLICATION DES FIGURES. Planche I. Fio. 1. Le bi/lla aperta entier, vu par le dos. FiG. 2. Le même, vu parle côté droit. FiG. 3. Le même, du même côté, où l'on a écarté la plaque charnue ventrale de la dorsale, pour mieux montrer ce qui est entre elles. FiG. 4. Le même, vu par dessous. Dans toutes ces figures, — a. Est la plaque charnue qui recouvre le devant du corps ou ce que j'appelle le disque teutaculaire. — /;. Celle qui tient lieu de pied. — c. La partie qui coniient la coquille. — d. Une partie des bran- chies. — e. L'anus. — f. L'ori(ice commun du testicule et de l'oviductus. FiG. 5. La coquille, vue en position naturelle. FiG. 6. La même, vue par sa face concave. Via. 7, 9 et 10. Représentent l'animal ouvert et plus ou moins disséqué. IjCS viscères sont à leur place naturelle en fig. 7. L'estomac est détaché de l'in- testin et rejeté en avant en fig- 9, où les branchies et le cœur sont aussi rejetés sur le côté. Enfin, eu fig. lO, on a enlevé le foie et développé les organes de la génération. Dans toutes ces figures, — a. Est l'estomac. — h. L'oesophage. — c. Les glandes salivaires. — d. Les branchies. — e. Le cœur. — f. Le foie. — g. L intestin. — A, Le testicule. — /. La vessie. — k. L'oviductus. — /. La verge. — tnm. Les muscles latéraux de l'œsophage. — n. Le muscle longitudinal qui retire toute la tête. — 00. Les ganglions latéraux. On n'a point iKs de lettres aux branches du système nerveux , mais on les distinguera aiseiffent. Fig. 8. Est la langue Irès-grossie. FiG. 1 1. L'œsophage et l'estomac ouverts. Fig. 12. Les mêmes, fermés, avec partie du système nerveux. ACERES. 17 Planche II. K. B. Le graveur ayant négligé de graver sa planche au miroir, toutes les figures sont en sens contraire de ce qu'elles devroient êlre. Fio. 1. La coquille tlu iz///« aTO^:)«//fl! vue la spire en haut, et la bouche enavant. FiG. 2. L'animal tiré de cette coquille, dans la même position, c'est-à-dire, la tête en bas et le pied en avaat. — aha'. Le pied. — d. Le tentacule supérieur droit. — f. La spire. — i. La bouche. — L: Lobe charnu servant à clore l'ou-- verture conjointement avec le pied. — l, m. Les tentacules inférieurs. — p. Muscle qui attache l'animal à sa coquille. Fio. 3. Le même animal vu parla face opposée, c'est-à-dire, parle dos. — a, b. Les deux lobes latéraux du pied. — c, d. Les deux tentacules supérieurs. — y. La spire. — i. La bouche. — h. Le lobe charnu qui acliève de fermer la coquille. — /, m. Les deux tenlacules inférieurs. Fio. 4. Le même animal vu par le côté droit, après que le manteau qq' a été coupé, et que sa partie droite q a été rejetée en arrière pour montrer les branchies o en position. Les lettres a, c, d,i , k , l, m , ont les mêmes si- gnifications que dans les deux figures précédentes. — ». La vulve. — r. L'ori- lïce de la verge. — nr. Le sillon qui joint ces deux ouvertures. FiG. 5. Le même, dont les brancliies sont détachées et rejetées en arrière, et dont le corps a été ouvert pour montrer les viscères en situation. — a , c, d, l, m, o ,qq' , signifient les mêmes choses que dans les figures précédentes. — s. L'oreillette du cœur. — t. Le ventricule. — u, La vessie. — u' . Son canal. — vvv. Le testicule. — if. Portion de l'oviductus. — .r.v. Le rectum. — yy. Portion de la verge. — z. Partie du gésier. FiG. 6. Le même, les intestins développés. — a. La masse charnue de la bouche et ses muscles. — bb. L'œsophage. — ce. Les glandes salivaires. — d. Le gésier. — e. Le duodénum. — ■//. Le foie. — g. Suite de l'intestin. — h. Rectum. — i. Le cœur avec son oreillette. — k. L'oviductus. — IL Le testicule. — Jn. La vessie. — n. Le cloaque de la vulve. — oo. La verge. — j]. Son muscle rétracteur. FiG. 7. La coquille du bulla lignaria tournée comme fig. i, FiG. 8 et 9. L'animal du huila lignaria tourné comme aux fig. 2 et 3. Les lettres ont les mêmes significations. — g. Mai'que l'endroit où-Tépond le bout des branchies. On voit d'ailleurs au travers du manteau l'endroit du cœur i , et celui de. la vessie h. Fig. 10. Les viscères du huila lignaria développés en partie. — a. Le cerveau sur 3 i8 ACERES. le devant de la masse cliariiucde la bouche. — h. Muscle rélracteur gauclie de la Ijouclie. — c. Claude salivaire gauche. — ci. Partie de l'œsophage. — h. Viilvc droite du gésier. — i. Valve mitoyenne. — k. Partie charnue qui unit les deux valves latérales. — l, l. Foie. — m. Duodénum. — n. Rectum. — o. Le coeur et son oreillette. — p. L'oviductus, — q. Le testi- cule. — r. La verge. — tv. La vulve. — x. Les branchies. — r. Corps glan- duleux tapissant un sinus de la cavité des branchies qui s'étend daus la spire. Il sert prohahlemeat à la production de la pourpre. Fiu. 11 , 12 et i3. La coquille et l'animal du l)ulla hydatis, tournés comme aux fig. 1,2 et 3. Les lettres ont la même signification. FiG. i3. On voit le lobe droit du pied a qui s'allonge en nageoire; on y remarque aussi en q la proéniinenee de la vulve, et le sillon qui conduit de là à la verge; et plus en arrière en z, l'orifice de l'anus. Fig, i4. Les viscères du huila hydatis développés. — a, La masse de la bouche. — h , c. Les glandes salivaires. — d. L'œsophage. — e. Le gésier. — f. Le duodénum. — ggg- Le foie. — Ji. Le rectum. — /. L'oviductus. — k. Le tes- ticule. — /. La vessie. — mm. La verge. — n. Les branchies. — ■ o. Le cœur. FiG. i5. h'acère proprement dite, on bulla cat-nona vue en dessus. — a. Le disque tentaculaire. — b. La partie qui devroit contenir une coquille. — c, d. Les nageoires. Fig. iG. La même en dessous. — a. La bouche. — b, c. Les nageoires. — d. La bran- chie vue par son extrémité sous la partie qui devroit contenir une coquille. Fig. 17. La même vue par le côté. — a. Le disque tentaculaire. — b. La partie coquillière. — c. La bouche. — d. L'orifice de la verge. — e. La vulve. — éd. Le sillon qui les unit. — /^ La branchie. Fig. 18. La même vue par derrière. — a. Le rebord postérieur du disque tentacu- laire. — b. La partie qui devroit contenir une coquille, et dont on voit ici le contour spiral. — • e. L'échancrure de la spirale sous laquelle se montre la branchie — c, d. Les nageoires. Fig. 19. ]ja même -ouverte. — a. La grande masse charnue de la bouche et ses deux muscles supérieurs. — b. L'estomac. — c. Le duodénum. — d. Le foie enveloppant l'intestin. .^— e. L'oviductus. — f. Partie du testicule. _ — g. Les liranchies. — à. Le cœur. — i. La verge. — L Les deux ganglions du cerveau écartés ; le filet qui les unit coupé. Fig. 20. La bouche et l'estomac du bidla carnosa ouverts. Fig. 21. Le gésier du huila liydaûs ouvert. Fig. 22. Le gésier du huila am,pulla ouvert. Fig. 23. Deux des pièces osseuses du gézier du huila Ugnaria. yy ju. j'iii/ /,>(>'. * ^ 11 S y^, ? V. J' Al }\ LU A. Œ A A PERTA . /.,/// Cui'u-r ,/r-/ CLufUi'^ .<\u//i. --c^K ^r^RES . M E M O I R E Sur la Limace ( Umax , L. ) et le Colimaçon ( lielix , L. ) I ? Remarques préliminaîves. J E ne puis mieux terminer l'histoire des gastéropodes nus y mieux montrer leurs rapports intimes avec les gastéropodes testacés , ni mieux préparer à l'histoire de ces derniers, qu'en réunissant ici l'anatomle de la limace et celle du coli" maçon : deux i^enres dont les ressemblances sont telles, jusque dans les moindres détails, qu'à peine oseroit-on les séparer, sans la grandeur de la coquille de l'un , et la petitesse de celle de l'autre , qui l'a fait regarder long-temps comme un molluscpie ab.-o'ument nu. Ces deux anatomies ne seront pas entièrement nouvelles. Severinus^ Murait ci Harderus en ont donné de premières idées assez obscures et imparfaites. Rai parla de l'hermaphroditisme des colimaçons et de leur accouplement réciproque , propriété extraordinaire qui les dislingue éminemment, eux et plusieurs mollusques gasté- ropodes, du plus grand nombre des autres familles d'ani- maux. a» SUHLALIMACE Rédi développa ce fait singulier, ei doiiDa des figures assez- exactes , quoique un peu grossières , (]es organes de la géné- ration , et de queKjues viscères. Lister essaya do décrire l'anatomie complète des deux genres, ainsi que celle de quelques autres , et l'accompagna de figures; mais il y commit encore plusieurs fautes graves. Enfin, un travail antérieur à celui de Lister ^Xa descrip- tion faite ])ar Swammerdam, parut , après la mort de ce grand aualomiste, dans son Bihlia naturœ , et peut encore être considérée aujourd'hui conmie ce que nous avons de mieux sur ce sujet. Néanmoins, mes procédés anatomiqucs m'ayant fait oB- server certains organes d'une manière plus complète , et les inductions que m'ont fournies les dissections de tant de genres voisins qui n'avoient pas été vus par les naturalistes que je viens de citer, m'ayant conduit à des idées plus justes sur les fonctions de diverses parties, je hasarde de reproduire une nouvelle description auatoniiipie de ces animaux. I Bies dessins étant d'ailleurs mieux gravés, et faits sur des ' projections différentes de ceux de mes prédécesseurs , ne peuvent qu'aider à éclaircir ce que ceux-ci ont encore laissé d'obscur et d'incertain. Je donnerai une description directe et absolue, sans m'ar- rêter à réfuter les opinions des auteurs dont je viens de parler , toutes les l'ois que les miennes en diiféreront. L'analogie des autres genres, ainsi que les connexions et la structure mieux déveh ppées des organes guideront suifisatii- ment un lecteur attenlil ,, et lui parieront d'elles-méufes tîiieux que je ne ponrroisle faire; il verra aisément , [)ar e.\eiM[;it!,qiie les glandes salivaires ne sont pas un dpiploon^ ni la vessie \xi\ ET LE COLIMAÇON. 3 testicule^ ui la langue une trachée-arlîrp ^ cnniino l'a pensé Lister. Il ne jirendra point, avec Jiedi, la matrice pour un canal défèrent^ et l'auloiilé même du grand Swammerdam ne lui fera pouit regarder les testicules comme un ovaire , ni les vésicules appendices du vagin comme des testicules. Je rappoi terai cependant les opinions de ces auteurs sur quelques points qui restent encore douteux, et que mes recher- ches ne décident pas. Les sujets principaux de mes observations sont les deux grandes espèces les plus aisées à se procurer : le gr^uid coli- maçon des lignes., que l'on sert sur les tables, et la grande limace rouge àes jardins. Le premier est nommé par Linnxus lielijc pomatia , et le nom spécifique pomatia lui appartient dès le temps de Dioscoride. Il vient de îr»«« , operculum , et se rapporte au couvercle que cet animal se labri([ue en hiver. On sait assez que les anciens en faisoient encore plus de cas que nous, qu'ils l'élevoient dans des enclos particulièrement destinés à cet usage (ij, et qu'ils en distinguoient plusieurs variétés. La limace rousse {^limax rufus ., Lin. ) n'est que trop commune en automne dans nos jardins qu'elle dévaste 5 elle ne nous paroit pas différer de la limace noire ( L. ater. \ autrement que par la couleur, et l'on observe même plu- slems nuances intermédiaires. Je ne sais si le limajc sitcci^ tiens de Midler est le même animal , comme le croit cet auteur , et dans ce cas je ne vois |)oint pourquoi il en a changé le nom , ui pourquoi Gmelin a suivi ce mauvais exemple. (1) Cet usage s'est couservé dans f|uelendanl pro- duite précisément comme la coquille elle-n>énie, et quand on la plonge dans l'acide nitrique, il reste également, après la dissolution de sa partie calcaire, un tissu gélatineux. En ouvrant la substance du bourrelet, on s'aperçoit aisé- ment qu'il est en grande partie forn:ké d'un lissu glanduleux, Idancbàtre, et tout pai'semé^ie petits points demi-transparens. Pour peu qu'on irrite le colimaçon vivant, on lui fait ré])andre en aboT>«lance par tous les pores du bourrelet un liquide lylanc opaque, et visiblement foinîé de uaolécules calcaire» ■j lo s U r. L A L I M A C E suspendues clans une viscosité. Il est évident que c'est la matière dont le couvercle se compose , et il est bien proLalile que c'est aussi celle rpii contribue aux augmentations de la coquille; mais il faut que, dans ce dernier cas, elle transsude , non pas au travers de la peau extérieure du bourrelet , niais par celle dç la portion de manteau qii est un peu au-dessus, et il faut avouer que celle-ci ne paroit pas glanduleuse. L'adhérence des muscles à la coquille est encore une des raisons qu'on a alléguées pour prouver que celle-ci est orga- nisée à la manière ordinaire, c'est-à-dire, vasculeuse. M. Poli a même pensé que c'est au travers des muscles que ses vais- seaux lui arrivent; mais cette adhérence, très-forte pendant la vie, disparoît entièrement par quelque séjour dans l'esprit de vin. Les muscles se décollent sans aucun déchirement : il est d'ailleurs constant qu'ils adhèrent successivement à diffé- rens points de la coquille. Les observations de M. Brisson sur le bidiine décollé ^ et celles que tout le monde peut faire sur les empreintes successives, laissées par les muscles au de- dans de différentes coquilles , le prouvent sans réplique. Com- ment pourroient - ils arracher leurs vaisseaux d'un endroit pour les implanter dans un autre ? 4." Division du corps en deux cavités. Le corps de la limace et du colimaçon se divise en deux cavités : la première est ouverte au dehors et l'air y pénètie ; c'est la cavité pulmonaire, aux parois de laquelle sont attachés, outre le réseau vasculaire- dans lequel le liquide nourricier vient s'exposer à l'action du fluide atmosphérique, le péricarde contenant le cœur et son oreillette, et un viscère sécrétoire E T L E C O L I M A Ç O N. n que nous décrirons. L'autre cavité , qui est beaucoup plus grande, est fermée de toute part, quoiqu'une partie des vis- cères qu'elle contient communiquent eux-mêmes au dehors par des ouvertures. Ce sont les organes de la digestion et ceux de la génération , ainsi que le système nerveux. Les premiers ont deux issues extérieures, la boache et l'anus j les seconds n'en ont qu'une que j'ai indiquée ci-dessus. Dans la limace^ la cavité pulmonaire est renfermée sous le manteau ; la grande cavité remplit toute l'enveloppe cliarnue du corps. Dans le coliinaçon , il n'y a que la partie antérieure du corps, proprement dit, qui soit occupée par une portion de la grande cavité ; le reste pénètre dans les contours de la co- quille , et le derrière du corps ou plutôt du pied est solide , charnu et sans viscères; la cavité pulmonaire occupe le devant du dernier tour delà spire; elle est fermée de toute part dans les deux genres, excepté au trou circulairequi lui sert d'orifice, circonstance par laquelle ces mollusques diffèrent beaucoup des testacés turbines proprement aquatiques , ainsi que nous le verrons ailleurs. Elle est séparée de la grande cavité par une cloison mince et charnue, et n'a d'autre communication avec elle que par les vaisseaux qu'elle en reçoit , ou par ceux que le cœur y envoie. 5." Sjstème musculaire. L'appareil musculaire de ces mollusques doit être divisé ainsi qu'il suit : i.° L'enveloppe générale charnue; 2.° Les muscles qui retirent le pied en dedans; 12 S U R L A L I M y C E 3° Ceux qui relirent la masse de la bouche ; 4° Ceux qui retirent les tentacules; 5,° Ceux qui relirent la verge. Ces trois derniers organes sortent par l'effet des fibres pro- pres à leur tissu , et le pied est cliassé au dehors paï les con- tractions de l'enveloppe gànërale. Comme la limace ne retire point son pied , les muscles nécessaires pour cela lui manquent, taudis qu'ils sont au con- traire grands et conq)liqués dans le colimaçon. Les libres qui composent l'enveloppe générale sont si ser- rées, que l'on ue peut guère les diviser en plans ni en fais- ceaux ; elles forment un tissu conq^iarable au muscle propre de la langue de l'homme : la macération fait voir cependant qu'elles se ci'oiseat en divers sens. Dans la limace^ cette enveloppe est une tunique complète qui détermine la ligure du corps» et qui la fait varier au gré de l'animal. A peine plus épaisse au pied que sur le dos, elle est très-mince sur la tète : à l'endroit de la cavité pulmonaire , elle semble se diviser eu trois plans; un inférieur qui forme le diaphragme, un moyen et un supérieur qui embi-assent la coquille. Les trois plans se réunissent pour former le bord an- térieur du manteau, qui reprend toute l'épaisseur du reste de l'enveloppe. Les libres les plus inteimes paroissent plus transversales; les plus extérieures sont longitudinales. Ces dernières se con- fondent tellement avec celles du derme ou de la peau, que l'on ne peut marquer leurs limites. La pointe postérieure du pied est un peu plus épaisse que le reste, parce qu'elle contient une petite glande d'où sort une viscosité par le trou situé au-dessus. ET LE C O L 1 iM A Ç O N. i3 Le pied du colimaçon est encoi'e plus comparable à nue langue que celui de la limace, par sa forme même, et parce que sa partie postérieure se continue sans cavité avec le dos Il n'y a entre les fibres du dos et celles du pied qu'un tissu glanduleux. Les filjres du dos remontent en grande partie pour rentrer dans le collier, et après s'être contournées sur son bord posté- rieur, se (ixer à la columellede la coquille, où elles prennent un point daitaclie pour tirer en dedans la partie postérieure du pied. Les libres extérieures des parties latérales de l'enveloppe et celles de la tète vont se fixer en convergeant au collier lui- même, en dedans de son bourrelet charnu 5 elles sont beaucoup plus minces que celles du pied et du dos. Il y a vers celte partie des fibres transversales , circulaires , et parallèles au bourrelet, dont l'action , en contractant toutes les parties exté- rieures et les forçant à s'allonger, commence aies faire sortir de la coquille. Le bom-relet contient aussi des fibres dans son tissu , et peut être considéré lui-même comme un muscle particulier , comme une espèce de sphincter, qui aide à la sortie du pied et de la tête , une fois que cette sortie a été commencée par les libres dont je viens de parler. On voit encore quelques fibres sur la paroi de la cavité pulmonaire contiguë à la coquille j mais il n'y en a plus du tout sur la portion de la grande cavité qui pénètre jusqu'à l'extrémité de la coquille, et qui y reste toujours 5 elle n'a pour envelo])pe qu'une membrane fine et transparente qui se con- tinue avec la lame interne du derme, comme l' épidémie de la coquille se continue avec sa lame externe.. 4 s U R L A L I M A C E Les muscles qui retii'entle pied eu dedans ou t leur attache fixe à la colunielle de la coquille, au-dessus de l'attache des Chres du dos. Ils forment deux heaux faisceaux ou rubans, et après avoir passé au devant du bord postérieur du bour- relet , et sous tous les viscères dans la partie antérieure de la grande cavité , celle qui n'est point toujours enfermée dans la coquille, ils se divisent en un grand nombre de languettes qui pénètrent , les unes à droite, les autres à gauche , dans la subs- tance même de cette portion antérieure du pied , en s'entre- croisant intimement avec ses fibres propres , comme une partie des muscles extrinsèques de la langue hnlt par se perdre dans le muscle lingual. Les muscles qui retirent les tentacules en dedans font partie de ceux qui retirent le pied. Ceux des tentacules supérieurs forment chacun la pre- mière languette , et la plus extérieure du muscle de son côté. Ceux des tentacules inférieurs viennent d'une autre lan- guette un peu plus interne, qui donne en même temps de petits faisceaux au voile ou lèvre supérieure. Ces quatre muscles ont à leur partie antérieure une teinte noirâtre qui est encore beaucoup plus forte dans la limace , et ce qui est plus remarquable encore , les grands ont celte partie noire, creuse, comme une bourse, et y logent le nerf optique. Entre les quatre tentacules est la masse charnue de la bou- che, dont l'organisation est la même que dans les autres ^'^a^- téropodes et céphalopodes. Elle est chassée en dehors parles contractions du bourrelet et des fibres annulaires de l'enveloppe générale, portée de coté ET LE C O L I M A Ç O N. - i5 par plusieurs petits faisceaux, qui s'unissent aux parties envi- ronnantes de la peau , et retirée en dedans par deux grands muscles attachés à la colunielle delà coquille , et marchant parallèlement sur les deux grands muscles du pied , ils s'insè- rent sous la masse charnue qu'ils retirent , et pour s'y rendre passent avec l'oesophage au travers du collier nerveux que le cerveau forme avec le ganglion inférieur. Ces deux grandes paires de muscles ( ceux de la Louche et ceux du piedj , qui restent symétriques dans toute leur partie inférieure , se tordent un peu en spirale à leur extrémité op- posée pour se fixer à la columelle. Dans la limace, l'appareil musculaire intérieur est bien moins cousidérahlcj le pied n'a aucun muscle extrinsèque. Les tentacules supérieurs ont chacun le leur, qui, passant à côté des viscères , va se fixer à la partie dorsale de l'enve- loppe générale charnue , immédiatement derrière la cavité pulmonaire , à l'eudroit qui répond au bord postéx'ieur dn manteau. Chacun de ces muscles donne une languette pour le tenta- cule inférieur , et une autre pour les parties voisines des lè^ vres. La masse charnue de Ta bouche a aussi deux très - petits muscles rétracteurs qui viennent se fixer près des précédens. Celui de la verge s'y fixe également ; il est un peu plus fort à proportion que les deux autres : au contraire, le muscle ré- ti-acteur de la verge du colimaçon est long et grêle; il se fixe à la partie moyenne des fibres, qui de la tète et des cotés vont joindre le collier.. )G S U R L A L I M A C E 6." Système digestif. Les organes de la digestion sont à peu près les mêmes dans les deux genres. La bouche consiste, comme dans les gûste'ropodes, sans trompe , et les céphalopodes en une petite masse charnue et ovale; elle peut rentrer en dedans, et alors la partie la plus voisine de la peau la suit , et forme un petit canal au devant d'elle 5 quand elle se porte en avant , cette portion de ia peau ressort et contribue seulement à dilater lès lèvres. Il n'y a qu'une mâchoire en forme de croissant, et de subs- tance cornée : elle est placée au-dessus de l'ouverture de la bouche , et se montre au dehors quand la masse de la bouche est tout-à-fait portée en avant. Le bord concave inférieur et traiiciiant dece croissant offre , dans le coUnuiçon.^ plusieurs dentelures qui se continuent à sa face antérieure en autant de petites cannelures. Dans la limace , il n'y a qu'une seule dentelure au milieu de la concavité. La langue, coname dans les autres gastéropodes aussi, est une pelile plaque cartilagineuse et élastique, placée sur le plancher de la bouche; elle n'est point armée de crochets comme dans tant d'autres genres, maison y remarque seule- ment de petits sillons transverses et parallèles très-serrés. Elle est pointue en avant, et se termine en arrière en un petit cône cartilagineux , court et mousse , dont l'extrémilé fait saillie hors de la masse charnue sous l'œsopihage, et au-dessus de l'inser- tion des muscles rétracteurs de la bouche. L'orifice de l'œsophage est à la face supérieure de la niasse E T L E C O L I M A Ç O N. i? ovale, et répond au-dessus de la plaque cartilagineuse de la langue. C'est par le soulèvement alternatif de cette plaque, lequel résulte lui-même des mouvemeus du petit cône qui la ter- mine en arrière, que les alimens coupés par lamticlioire sont introduits dans lœsophage. Lorsque la pointe du cône est tirée en arrière, il s'allonge aux dépens de la plaque , dont la partie postérieure se replie un peu, et qui s'abaisse; lorsque cette pointe est portée eu avant, l'ouverture du cône s'élargit ou se déploie; la plaque s'allonge et s'élève. O il y a quelques lanières charnues dis- posées autour de ce petit cône pour lui imprimer les mouve- mens que je viens de dire. Les unes partent de sa pointe, et vont en arrière se inèler au reste de la masse charnue de la bouche; les autres le prennent par ses côtés, et vont en ava-ut s'insérer à la même masse. Celle succession d élévations et d'abaissemens fait exécuter à la plaque linguale une sorte de mouvement péristaltique, ou une espèce de rotation, dans laquelle les côtes saillantes et transverses de la surface snisissent les alimens, comme pour-' roit le faire une roue dentée, et les présentent à l'orilice de l'tesophage. Ce que ces côtes transverses font dans le colimaçon et la limace ^ les épines crochues le font plus puissamment encore dans les seiches et dans beaucoup de gastéropodes. JNous verrons plusieurs de ceux-ci parmi les testacés marins , où 1.^ membrane linguale est d'une longueur extraordinaire, et armée de crochets disposés avec une régularité étonnante. Tout ce que je viens de dire est commun aux deux genres. L'insertion des conduits salivaires aii.\ deux côtés de l'oritice i î8 S U R L A L 1 M A C E de i'««l»nc mat, qui y fof mentunernagniCique broderie. Notre gravure w'a pu en exprimer que bien foiMcment î'a dé- Hcatesse. »o SUR LA L I M A C E L'un et l'autre produisent de chacun de leurs lo])uIes uti; petit vaisseau biliaire qui se réunit successivement à ses voisins, et forme avec eux une grosse branche pour chaque loJje. Dans le colimaçon , les quatre branches se réunissent en un gros tronc qui pénètre dans le pylore même , et de manière à verser au moins autant de bile dans l'estomac que dans l'in^ lestin proprement dit. Dans la limace^ il y a deux orifices aux deux côtés du pylore. L'un des deux introduit la bile produite par les trois lobes antérieurs; l'autre, celle des deux postérieurs : la bile est très- fluide et d'un verd tirant sur le brun. Il n'y arien qui ressemble à un mésentère, ni à une rate, ni à un pancréas , ni à une veine-porte. Lister^ trompé par la couleur, a cru que les ramifications blanches qui couvrent le foie et l'intestin de la limace sont des vaisseaux lactés : nous allons voir que ce sont des artères. Il n'y a , selon toute apparence , dans ces mollusques et dans tous les autres,, de vaisseaux absorbans, que les veines. 7.° Système veineux. Quand on examine par dedans l'enveloppe générale de la limace^ on voit de chaque côté un grand vaisseau longitudi- nal qui grossit en avant. Il reçoit beaucoup de branches de l'enveloppe même, et l'on voit sur sa longueur des trous par lesquels il lui en vient des viscères. Les trois principaux sont tout-à-fait à sa partie antérieure. Ces deux vaisseaux sont les deux veines caves. Ils embrassent chacun de leur côté, le contour de la cavité pulmonaire, dans tout ce cercle par lequel le manteau se joint au dos propre- E T L E C O L I M A C, O i\. sr ment dit. Il en part, dans ce circuit, une inlinité de petites hranclies qui sont les artères pulmonaires, et qui donnent naissance à ce beau réseau dont la cavité de la respiration est tapissée; réseau qui reproduit à son tour des vénules, les- quelles aboutissent toutes en dernière analyse dans l'oreillette du cœur. Il y a quelque cbose de fort semblable dans le colimaçon. L'enveloppe cbarnue du corps a , de cbaquecôté , une grosse veine ; il en vient une seconde qui descend du sommet de la spire , le long de sa partie concave , et rassemble les veines d'une grande partie des viscères; à son extrémité inférieure, elle marche parallèlement au rectum entre lui et le bord droit de la cloison du diaphragme, et va jusqu'auprès de l'anus se réunir avec la veine de la grande enveloppe charnue. Lorsqu'on l'injecte, tout le rectum se trouve couvert d'un réseau veineux. Une troisième veine, arrivant aussi des viscères par dessous le cœur, marche dans le plafond de la cavité pulmonaire, pa- rallèlement à son bord gauche. Un canal veineux va de son extrémité à la réunion des deux premières , de manière que la cavité pulmonaire est entourée, par trois de ces côtés, d'une continuité de grosses veines que l'on doit considérer à la fois comme veines caves et comme artères pulmonaires. 8.° Poumon.. La cavité pulmonaire de la limace est à peu près ronde,, et beaucoup plus petite que celle du colimaçon. Le réseau vasculaire s'y conrpose de mailles presque semblables entre elles, et couvre le plancher de la cavité comme son pla- fond, dans tout ce que n'occupent ni le péricarde, ni le sac g^lutiueux. »a S U Fx L A L I M A C E] Celle '(kl colimaçon est ])eaucoKp plus grande et presque triangulaire. Son plancher est absolument sans réseau vaseu- laire, et n'offre qu'une siuiple membrane qui recouvre la cloi- son fibreuse iuterposée entre cette cavité et la partie moyenne de celle qui comprend les autres viscères. Tous les vaisseaux adhèrent au plafond de la cavité pulmo- naire^ les uns viennent du pourtour du collier, c'est-à-dire, du canal veineux qui le borde; les autres, de toute la lon- gueur de la veine parallèle au rectum, en passant sous celui- ci et sous le canal excréteur de la viscosité. Les plus petits de ces vaisseaux sont à peine visibles à la loupe ; ils se réunissent successivement en rameaux qui finissent tous en deux branches, lesquelles se réunissent en un gros troue commim j)our aboutir à l'oreillette du cœur. Ce tronc commun est donc la veine pulmonaire. Le système tles vaisseaux pulmonaires du colimaçon res- semble donc davantage à un arbre , et celui d^ la limace à un véritaJile réseau. Dans celui-ci , les veines puhnonaÏTes n'aboutissent pas à un tronc unique, mais elles se rendent par plusieurs branches dans Toreillelte 'du cœur : aussi cette oreiè- lelle a-t-elle une autre forme, comme nous le ven-ons bientôt. C'est à son passage dans ce réseau que le sang de ces mol- lusques éprouve l'action de l'air, au travers des membranes déliées des vaisseaux , et cettse action est absolument de même nature que sur les animaux vertébrés , c'est-à-dire qu'elle a lieu par absorption d'osigène et formatiiora d'acide caibo- nique , ainsi que s'en sont assurés t^amjuelin et Spallanzam. Si l'on prive std^ilement d'air ces animaux , dans le temps de la plénitude de leur activité, ils ne lai'deut point à périr; ce qui ni'empéche pas qu'ils ûe pabseni aussi dans d'auti'es ET LE COLIMAÇON. 23 temps s'en passer lout-à- fait, puisque les co///«^/ço/z^ s'enferment eux-mèn>es, pour tout Vhiver, dans leur coquille par un cou- vercle , qui n'y laisse rien pénétrer , ainsi que Spallanzani l'a vérifié par des expériences fort exactes. Mais nous avons bien d'autres exemples d'une semblable différence , selon les époques de l'année. Les grenouilles })assent riiiver en létliargie, enfoncées dans la vase du fond des ma- rais , et cependant en été elles périssent au bout de quel(|ues minutes , si on les empoche de respirer en leur ouvrant la bouche de force. L'air est alternativement introduit et expulsé par la dila- tation et par la contraction de la cavité pulmonaire; l'animal dilate l'orilice de la cavité , et le referme ensuite quand il l'a bienrenqjliej puisillerouvrepour expulser cet air et en prendre de nouveau. C'est surtout en se retirant en partie dans sa coquille et en, refoulant ainsi la cloison inférieure de sa cavité, qu'il chasse l'air au dehors. Il fait entendre alors un petit bruit , produit naturel du passage rapide de l'air par une ouverture étroite. La dilatation de la cavité pour prendre de nouvel air est due en grande partie à la contraction delà cloison inférieure, qui, s'aplatissant , repousse en dehors les organes qui sont dessous, tandis que la supérieure reste tapissant la concavité de la co- quille. C'est uu mécanisme analogue à celui de notre dia- phragme. Il faut pourtant qu'il y ait encore des actions musculaires d'un autre genre ; car , d'une part , l'animal respire et fait gonfler son poumon, même lorsque la portion de coquille c{ui le recouvre est enlevée \ d'autre part il respire aussi lorsqu'entièrement rentré dans sa coquille il ne peut guère aljaisser sou diaphragme. a4 SU'RLALIMACE 9.° Cœur et système artériel. Le cœur de la limace est pîacé presque sur le milieu de la cavité pulmonaire , dans un péricarde qui le retient à la paroi supérieure de cette cavité, immédiatement sous celle de la coquille. Sa forme est ovale et sa pointe dirigée en arrière et en des- sous. L'oreillette y pénètre par sa face supérieure, venant du côté gauche, où elle se dilate en forme de croissant, dont les ^deux pointes s'étendent en avant et en arrière, se courbant cliacune un peu vers la droite, et rassemblant ainsi au bord externe et convexe de l'oreillette toutes les veines du réseau pulmonaire. Dans le colimaçon , le cœur placé, au tiers postérieur de la cavité des poumons , se dirige transversalement, l'oreillette à droite et la pointe à gauche. L'oreillette , qui n'a qu'une seule grosse venie à recevoir du poumon , forme une pyramide dont la base est adossée à la base de la pyramide plus grande du ■ cœur. 1 Dans l'un et l'autre genre , l'oreillette a des parois plus " minces, des cordes tendineuses plus grèies , et manque de valvules ; le cœur est plus charnu , plus opaque, a des colonnes charnues plus grosses, et son entrée du côté de l'oreillette est garnie de deux valvules membraneuses de forme à peu près carrée, tournées de manière qu'elles y laissent venir le sang du poumon par l'oreillette, mais qu'elles ne le laissent pas ressortir de ce côté -là. Je n'ai pu découviir aucune valvule à l'entrée de l'aorte , »i dans la limace , ni dans le colimaçon. ET LE COLIMAÇON. 25 L'aorte se divise, tant dans l'un que dans l'autre, dès sa sortie du cœur, en deux troncs, dont l'un est destiné au foie , à l'intestin et à l'ovaire , l'autre à l'estomac, à la bouche , aux organes de la génération et au pied; mais, à cause de la po- sition différente du cœur et des autres parties , la direction de ces deux troncs n'est pas la même. Dans la limace , après avoir percé le péricarde , ils des- cendent entre l'un des replis des intestins \ le tronc liépato- intestinal se porte directement en arrière ; l'autre se recourbe subitement en avant. Dans le colimaçon , îe premier suit d'abord les circonvolu- tions de la spire en montant vers la pointe, selon leur con- vexité; tandis que, comme nous l'avons vu, c'est en suivant la concavité que la veine en redescend : l'autre va d'abord en dedans , tournant sur le commencement du rectum , et ensuite directement en avant jusque sous la bouche. Les artères de la limace ont un caractère qui leur est tout particulier. C'est une blancheur opaque aussi pure que si elles étoient pleines de lait , et d'autant plus sensible qu'elles ram- pent sur des fonds très-rembrunis , comme les intestins qui sont d'un verd foncé, et le foie qui est d'un brun noirâtre. Les injections les plus parfaites n'ont rien produit d'aussi agréable à la vue que ces ramilications blanches de la /f>?irtC(?, et surtout de la limace noire. Les artères du colimaçon n'ont point cette opacité , et res- semblent par leur demi-transparence à celles de la plupart des mollusques. Le sang qui y circule offre une légère teinte bleuâtre. »S s U R L A L I M A C E 10." Organe sécréteur de la viscosité. Le péricarde est entouré aire^ de Yoi'iductus , de la matrice , du testicule ., du canal déférent , de la verge , de la vessie et de la bourse conmmne \ E T L E C O L I M A Ç O N. 27 de la génération , à laquelle la verge, la matrice et la vessie aboutissent chacune par un oritice particulier. Le colimaçon qui possède aussi toutes ces parties , en offre de plus deux qui lui sont propres, savoir : les vésicules mul- tijides et la bourse du dard. L'oriHce extérieur donne dans la bourse cominune de la génération , et c'est celle-ci qui, en se renversant et passant au travers de cet orifice extérieur, à l'instant de l'accoupleuient , présente au dehors les trois orifices particuliers. \Jovaire n'est qu'une grappe compliquée j il est situé à l'ar- rière du corps et enchâssé entx-e les dernières portions du foie. Uoviductus est un conduit gièle, replié en zigzags, et dans ])lusieurs sens sur toute sa longueur. Après s'être formé de la léunion des branches de l'ovaire, il descend en avant et.se colle vers l'endroit où le testicule se rétrécit, et y devient si mince lui-même, qu'il est très-difficile d'apercevoir sa termi- naison dans la matrice. Celle-ci est une espèce de boyau long et à parois extréme- nieut molles, qui sont cependant étranglées à chaque instant par des plis rentrans, et dilatées par des boursouflures, de manière à faire ressembler ce viscère à un colon. La capacité intérieure de la matrice est as.sez considérable , et les inéga- lités de sa surface lui permettent de se dilater encore beau- coup quand il faut qu'elle contienne les œufs. Il est probable que les ceufs sont imprégnés d'un fluide fourni par les parois de la matrice, et qu'ds prennent presque tout leur volume dans ce viscère , et après avoir traversé l'ovi- ductus. Le testicule se divise en deux parties : une masse ovale blanchâtre , molle et presque homogène, et une autre allongée, iniuce et grenue. Cette dernière se colle intimement à la ma- 28 SURLALIMACE trice,en fixe les divers replis, comme pourroit le faire mi mésentère , et descend avec elle jusque près de son entrée dans la liourse commune de la génération , où le testicule se termine. Cet organe est extraordinairement variable pour le volume. Dans la limace , il y a des temps où le testicule remplit à lui seul près de la moitié du corps; il y en a d'autres où il est réduit à n'occuper que les environs de l'cesopliage. On conçoit aisément que cette augmentation arrive à l'époque du rut. Je n'ai pas observé qu'elle soit aussi forte dans le colimaçon. La matrice grandit et se ramollit assez dans la même raison que le testicule. Le canal déférent naît de la partie étroite et grenue du testicule dont il est le canal excréteur. Celui de la limace aboutit au fond de la verge lorsqu'elle est repliée en dedans. Celui du co/w?«ço« pénètre dans la verge par le côté, vers le tiers de sa longueur le plus voisin de la bourse commune de la génération. C'est que la verge du colimaçon est beaucoup plus longue que celle de la limace. Elle ressemble à un long fouet, est creuse en dedans et non percée par le bout 5 mais l'extré- mité du canal déférent forme dans sa cavité un petit mam- melon percé d'un trou. Entre ce mammelon et l'entrée de la verge dans la bourse commune, on observe deux valvules ou plutôt deux prépuces , deux replis intérieurs dirigés vers cette entrée. Il faut pour l'accouplement que la verge se retourne entièrement, au moins jusqu'à l'orifice du canal déférent, de la même manière que les tentacules se retournent. C'est ce qu'elle fuit quand la bourse commune s'est renversée elle- même. i ET LE COLIMAÇON. 29 La verge de la limace, qui est beaucoup plus courte, est aussi obligée de se retourner ; mais ses replis intérieurs , qui servent comme ceux du colimaçon à donner à sa tunique interne l'étendue qui lui est nécessaire pour devenir externe dans le renversement; ces replis intérieurs, dis-je, ne sont pas Iransverses mais longitudinaux. Il y en a surtout un très- remarquable et qui forme encore une crèle dentelée lorsque la verge est retournée ; mais il est propre à la grande limace grise tachetée de brun. La verge de l'un et de l'autre genre est pourvue d'un muscle rélracteur. Celui du colimaçon est grêle, vient de la face inférieure de la cloison qui sépare la cavité pulmonaire de la grande cavité, et s'insère au côté de la verge à peu près au même endroit que le canal déférent. Celui de la limace est plus court et plus large, et vient avec les autres muscles dessous la partie postérieure du manteau. Le canal de la vessie est en proportion avec la longueur de la verge, sans qu'on puisse deviner la raison de ce rapport. Celle du coUmaçun s'étend jusque derrière la cavité pulmo- naire où elle est coucliée sur l'estomac. Son canal se colle à la matrice sur presque toute sa longueur , et c'est dans la fin de ce canal que la matrice déboucbe par un orilice rond dont les bords sont renllés et ridés. Dans la limace , au contraire, le canal court et ample de la vessie et celui de la matrice aboutissent cliacuu séparé- ment , quoique très-près l'un de l'autre , à la bourse commune de la génération. Il faut bien que cet organe que j'ai nommé vessie ait quel- que fonction essentiille , puisqu'il ne manque à aucun des gas- téropodes que j'ai décrits jusqu'ici ; mais j'avoue que j'ignore 3o S U R L A L I M A C E enlièremeut quelle elle est, à moins qu'elle ne consiste à four- nir la matière propre à enduire les œufs et à leur former une euveloppe. Dans ces deux, genres, cette vessie contient ordi- nairement une substance concrète d'un brun rougeùtre à peu près de la consistance du savon. Swammerdarn a pensé que la pourpre du murex est contenue dans un organe analogue ; mais je me suis assuré du contraire , ainsi qu'on l'a déjà vu à l'article de Vapljsie. La cavité ou bourse commune , ou , comme on pourroit en- core l'appeler, le vestibule de la génération, est, dans la li- mace , une grosse bourse ronde à parois épaisses, spongieuses et {ibreuses , qui se renverse aisément au debors, probable- ment par un mélange d'une sorte d'érection et de l'action musculaire exercée })ar les libres de l'enveloppe générale qui dilatent l'orilice de celte cavité en même temps qu'elles com- priment le corps entier. Dans le colimaçon , elle est presque réduite à rien quand les parties sont rentrées et tranquilles, mais elle prend du volume lorsqu'elle se renverse pour l'ac- couplement. Les vésicules miiltifides du colimaçon qui manquent à la limace et à la plupart des autres gastéropodes , et qui ne sont représentées même dans la parmacelie que par des vé- sicules simples , aboutissent dans la portion du canal de la vessie située entre le point où celui de la matrice s'y rend , et son entrée dans la bourse commune. Cette portion du canal de la vessie , qui est plus large que le reste, pourroit, si on le vouloit, prendre un nom particulier. Les vésicules midtijïdes méritent en effet ce nom, parce qu'elles se composent cbacune d'une trentaine de petits tubes grêles et aveugles s'unissant deux à deux, trois à trois, avant de se confondre tous avec le canal commun qui pénètre de E T L E C O L I M A Ç O N. 3i chaque coté dans celui de la vessie par un Irou à peine grand comme une piqûre d'épingle 5 dans d'autres espèces d'hé/ijc^ le nond)re des petits caicunis est beaucoup moindre et se ré- duit à cinq ou six ; il y en a même où les vésicules sont simples, comme dans la parmacelle. Ces vésicules produisent et versent dans le canal delà vessie, qui est aussi dans cet endroit celui des œufs , puisque la ma- trice va débouché au-dessus , une liqueur opaque et blanche comme du lait , mais d'ailleurs très-fluide , dont il est ])ien dif- ficile de deviner l'usage , puisqu'il faut que cet usage soit par- ticulier au genre du colimaçon. Un autre organe propre au colimaçon , c'est la bourse du r/^//Y/, ainsi nommée de rinstrimient. singulier qu'elle contient et qu'elle produit. La ligure de cette bourse est celle d'une cloche alloncée; sa nature musculaire, ses parois fort épaisses à proportion. Elle donne dans la cavité comixiune de la génération , et peut , comme elle , se renverser entièrement en dehors. Ses parois intérieures ont quatre sillons longitudinaux , et dans son fond est un mammelon dont la surface sécrète une matière calcaire et comme spathique , qui , s'allongeant toujours par de nouvelles couches intimement collées aux précédentes, et se moulant dans les quatre sillons de la bourse, finit par former un dard à quatre arêtes, qui ressembleroit aux lames d'épées ordinaires , si ce n'est que celles-ci n'en ont que trois. Ce dard renaît quand il a été perdu ou cassé. C'est avec ce singulier instrument que les colimaçons pré- ludent à leurs caresses amoureuses. Lorsque deux individus se rencontrent, ils commencent par se toucher , par se frotter l'un contre l'autre par toutes les parties de leur corps. Après élre restés plusieurs heures dans cette occupation , ou voit la 32 s U R L A L I M ACE bourse coimi. une sortir et se gor.iler j bieniot après se mani- feste la bourse du tlard, et celui des deux iudividus qui lu ren- verse le premier cherche à piquer , s'il peut , quelque endroit du corps de son camarade. Je dis s'il peut , parce qu'à peine celui-ci aperçoit-il la pointe du dard, qu'd se réfugie dans sa coquille avec une promptitude que ces animaux n'ont guère ac- coutumé d'avoir, il n'y a point de Heu particulièrement des- tiné à cette sorte de blessure. Ordinairement le dard se rompt aussitôt qu il a efiîeuré la peau 5 quelquelois il y reste liché , mais le plus souvent il tombe à terre. Le deuxième colimaçon ne tarde point à Anre sortir le sien et à l'employei- de la même façon. Ce n'est qu'après ces cérémonies préliminaires que le véritable accouplement a lieu par l'insertion réciproque des verges. Mais ce dard , à quoi sert-il ? Est-ce pour réveiller un peu par sa piqûre l'énergie de ces animaux apathiques? Mais pourquoi mauqueroit-il à la limace et à tant d'autres mol- lusques qui n'ont guère plus de vivacité ? Quant à la verge, il est probable qu'elle pénètre dans le canal de la matrice, ou au moins vis-à-vis de son issue dans celui de la vessie. Ses rapports de longueur avec le canal de la vessie ni'ont fait soupçonner autrefois que c'est ce dernier qui est destiné à la recevoir. On ne pourroit vérifier cette con- jecture qu'en mutilant avec adresse deux colimaçons accouplés; mais celte opération me paroit bien dijlicile , et je ne l'ai point tentée. 12." Sjstème nerveux. Le système nerveux se compose du cerveau et d'un gros ganglion placé sous l'œsophage et qui s'unit avec le cerveau par deux cordons latéraux 5 l'anneau formé par le cerveau, le E T L E C O L I M A Ç O N, 33 ganglion et les deux cordons , est assez large poux* que la niasse charnue de la bouche y passe toute entière , et elle y passe effectivement quelquefois lorsqu'elle se retire fortement en dedans. Ainsi le cerveau est tantôt placé sur la naissance de l'œsophage, et tantôt sur le tube membraneux qui précède la masse de la bouche, et qui est formé par les lèvres rentrées en dedans. Le cerveau est de forme oblongue transverse. Le premier des nerfs qu'il produit part du bord antérieur et de la face inférieure. Il se rend en dessous et en avant , et s'insère sous la partie antérieure de la masse ovale de la bouclîe. Le second part de la face supérieure , à peu près au-dessus du précédent ; il se rend en avant, et, après s'être divisé en deux outroisbranches notables, se distribue aux petits muscles extrinsè(|ues de la masse de la bouche et à la lèvre supérieure. Le troisième et le quatrième sont des filets d'une minceur inexprimable qui vont aussi aux parties de la peau voisines de la bouche. Un cinquième , tout aussi délié , se distribue sur la portion de peau rentrante et sortante qui forme la tunique extérieure du tentacule supérieur. Le sixième est le nerf optique. Il est assez gros; sa gaîne est légèrement teinte de noirâtre. Il pénètre dans la partie creuse du muscle du grand tentacule, et après y avoir fait une multitude de replis, il se termine au globe de l'œil. Du côté droit , au-dessus du nerf optique , naît un nerf im- pair qui est celui de la verge. Il se divise en trois branches , dont deux, après avoir formé un petit plexus , se rendent dans la gaùie de la verge à sa partie la plus voisine de l'extérieur. Ij' autre suit le canal déférent et pénètre avec lui dans le corps de la verge. 34' SUR LA LIMACE Immédiatement sons le nerf optique naît de chaque côté im petit nerf qui se rend sous l'origine de l'œsophage, et forme avec son congénère ce même petit ganglion que nous avons déjà vu dans plusieurs gastéropodes ^ et qui produit deux petits nerfs qui suivent la direction de l'œsophage. Vient eniiu de chaque coté le cordon du collier , qui va se- réunir à son correspondant sous les grands uuiscles rétrac- teurs de la houche en un ganglion arrondi presque égal en volume au cerveau , et d'où sortent les nerfs qui nous restent ù décrire.. Les uns partent de la face supérieure et du hord postérieur du ganglion j les autres , de toute sa face inlerieure. Parmi les premiers, il faut en distinguer dJabord un im- pair qui se colle à la grande artère de la tête et du pied , remonte en sens contraire d'elle vers le cœur, et, arrivé vers la bifurcation de l'aorte, suit ses principales branches, et se distribue surtout à l'estomac et au testicule. Ensuite, un du coté droit qui pénètre dans fenveloppe, vis-à-vis la jonction du collier au corps , et , s'étant bifurqué , va se distribuer aux environs de l'orilice de la respiration. Un autre du même coté, mais plus interne , pénètre dans fenveloppe générale un peu plus bas. Du côté droit, il y en a deux qui se rendent aussi à la jonction du corps avec le collier , et se distribuent tant au col- lier et au poumon qu'au diaphragme- Les nerfs qui naissent de la partie inférieure du ganglion , et qui sont très-nombreux , se rendent tous dans le pied , en passant entre les diverses languettes de son muscle rétracteur j il y en a qui vont en avant jusqu'aux lèvres. Ce que le système nerveux du colimaçon a de plus singa— ET LE COLIMAÇON. 35 lier , c'est sa soumission au système musculaire. Une cellu- losilé serrée unit les muscles rétracteurs des grandes cornes à l'enveloppe du cerveau ou dure-mère , et les principales lan- guettes des muscles rétracteurs du pied à celle du ganglion : d'où il résulte que ces muscles ne peuvent se raccourcir sans entraîner ces deux masses médullaires. Le système nerveux de la limace n'a pas une connexioji si intime avec les muscles , et il est aisé de sentir qu'elle ne lui étoit pas aussi nécessaire. Du reste , ce système consiste éga- lement en deux masses situées l'une en dessus, l'autre en des- sous de la naissance de l'œsophage. Ce qu'il y a de plus particulier, c'est que le ganglion infé- rieur donne naissance à deux gros troncs qui se rendent di- rectement eu arrière, et du Lord externe desquels sortent tous les nerfs du pied et de l'enveloppe générale , excepté ceux des côtés de la tête qui partent immédiatement du ganglion lui-iuéme. II en part aussi de là pour le diaphragme et pour la cavité pulmonaire. Ceux (ju'envoie le cerveau sont à peu près les mêmes que dans le colimaçon. Il faut remarquer eniin que dans la limace les cordons qui unissent le cerveau aux ganglions sont si courts, que ces àans. masses ont piesque l'air de n'en faire qu'une en forme d'an- neau. i3.° Organes extérieurs des sens. Le sens du tact est extrêmement développé dans une peau molle, liae et pleine d'expansions nerveuses et dans des ten- tacules avancés , que le moindre choc fait retirer avec une promptitude surprenante. Nous ne donnerons point de description de l'œil , parce qiie nous aurons occasion de faire connaître cet organe dans 36 SURLALIMACE des gastéropodes plus gi-aiids qui nous donneront plus de fa- cilité à en développer la structure. L'ouie ne paroit point exister dans cette famille. On n'y en trouve ni les signes extérieurs , ni les organes. L'odorat y est très-délicat à en juger par la promptiluile avec laquelle ces animaux sortent de leur coquille quand on répand autour d'eux les lierbes qu'ils aiment, et dont l'odeur seule peut les attirer alors; mais il est diflicile de déterminer le siège de ce sens : peut-être réside-t-il, jusqu'à un certain point , dans la peau toute entière , cpii a beaucoup de la tex- ture d'une membrane piluitaire. Le goût doit être foible dans une langue à peu près carti- lagineuse. Eu général , la lenteur des mouvemens de ces animaux ne permet guère de croire qu'ils reçoivent de leurs sens dés im- pressions bien vives. La faculté la plus étonnante de ce genre de mollusques est, sans contredit , celle que leur a découverte Spallanzani , de reproduire leurs tentacules et leur tête presque entière après l'amputation. Il est à désirer qu'on donne à ces expériences une précision plus grande en déterminant plus positivement, par la dissec- tion des parties amputées , quels sont les organes intérieurs qu'on enlève et qui se reproduisent. J'espère que la description que je viens de donner sera de quelque secours pour cet objet, dont le genre actuel de mes travaux ne m'a pas permis dem'occuper, mais qui me paroit du plus grand intérêt. E T L E C O L I M A Ç O N. 37 Explication des figures. \,a preniièro plauclie est entièrement consacrée au cnl.'maron. Fig. I. I,e colimaçon Je barrasse de sa coquille , et vu obliquement Ju côlc droit. c, a. Les grands tentacules à moitié développés. b , b. I,es petits, itl. c. L'endroit par où sortent les organes de la génération. ". Son muscle. « , a. L'estomac. «*. L'endroit où il reçoit le canal hépatique. /3, /3. L'intestin. ^. Les glandes salivaires. ale de toute celle partie antérieure qui se rend jusque sousla boucbe. 1. Le cerveau. a. Le gros ganglion inférieur ; dans le collier qui les unit , passolt la boucbe et l'œsopbage. 5 , 4' Nerfs allans à la cavité pulmonaire et au côté droit de l'enveloppe générale. 5. Nerf qui accompagne partout les principales artères. 6. L'un des drus nerfs du côté droit qui vont au diapbragmeet parties voisines. 7. Le principal faisceau des filets nerveux qui s'enfoncent dans le pied. ET LE COLIMAÇON. 43 Fig. 4- l'î» mâchoire du colimaçon détachée de sa bouche. Fig. 5. La cavilé commune de la génération , ouverte ainsi que les divers con- duits qui y aliouiissent. a. L'ifsue générale. /). La bourse du dard , ouverte et contenant encore son dard attaché au mamelon qui le produit. c , ,Jig- V est profondément cannelé à sa face externe, et encore plus en dedans : il a la figure d'un entonnoir. Les rides saillantes de son intérieur ont elles-mêmes vers leur origine une portion arrondie qui saille plus que le reste, et qui doit singulièrement retarder le passage des alimens , du gésier dans ce second estomac , tant qu'ils ne sont pas fort atténués. Le troisième estomac, v , fig. V , est cylindrique, court, ridé longitudinalement en dedans, mais ses rides sont beaucoup SUR T.ONCHIDIE. <) plus fines que celles du second , et d'une grosseur égale dans toute leur longueur. On voit ces trois estomacs ouverts, Jig. VII ; ils y sont marqués des mêmes lettres quc^g'. V;f"., f" , est la coupe de l'un des muscles du gésier '-,/"■,/", les parties de la veloutée qui répondent au muscle coupé 5 jT, celle qui répond au muscle resté entier. Le canal intestinal A-, /, h, g, Jig- V et VI ^ est deux fois et demie plus long que le corps. Sa grosseur est à peu près la même partout. c. Les foies. Ce que l'anatomie de cet onchidium nous a offert de plus extraordinaire, c'est la division de son foie en trois glandes qui ont leurs vaisseaux excréteurs distincts, et s'insérant à des en- droits difVérens. C'est le premier exemple c[ue nous en ayons observé ; les cétacés montrent bien plusieurs rates : les oi- seaux plusieurs pancréas \ ce n'est qu'ici que nous avons vu plusieurs foies, et il ne faut pas croire qu'il s'agisse de glandes de nature différentes : ce sont trois foies essentiellement iden- tiques, si l'on excepte les ciiconstances accessoires de la gran- deur de la figure et de la position; ils ont la même couleur , la même consistance , le même tissu ; leurs lobes et lobules sont divisés de même ; leurs vaisseaux sanguins et excréteurs ont une distribution pareille, et le fluide qu'ils sécrètent est semblable dans tous. Le plus grand, /, /, jig. V et VI esta droite , au milieu de la longueur du corps, et embrasse la plus grande partie de l'intestin. Son canal s'ouvre dans l'œsopbage , près le cardia , par le plus gros des deux trous percés en s. Le second , m , fg. IV, s'ouvre au même endroit ; dans le iO MÉMOIUE plus petit des deux trous; il est situé à l'arrière du corps sur la gauche ; et le troisième, n ,Jîg- IJ^, qui est en même temps le plus petit , placé immédiatemeut derrière le gésier , perce de son vaisseau les parois de celui-ci k l'endroit même , en arrière des deux gros muscles. Ce trou du gésier se voit en i , Jîg. V. Le second foie est représenté à part à sa face intérieure , fig. 9: a, est son canal excréteur; Z>, son artère, et cc^ les petites veines qui en partent pour aller aboutir aux deux grands vais- seaux latéraux C C , ^j»-, VI. L'insertion des deux premiers canaux biliaires au cardia , rappelle la sécrétion abondante qui a lieu dans le jabot des oiseaux, et qui humecte les alimens avant qu'ils entrent dans le gésier ; mais il est toujours singulier de voir le suc gastrique suppléé ici par un liquide hépaticpie. La troisième insertion qui verse directement la bile dans le premier des trois estomacs , est aussi fort remarquable, et ne se retrouve guère que dans quelques poissons, comme le diodon mola. 7° Organes de la génération. Ils occupent un très-grand espace dans le corps de l'onchidie, et sont divisés en deux groupes principaux. Le premier, r^ui a son issue entre les deux tentacules, contient les organes par lesquels l'animal exerce les fonctions du sexe masculin , et le second qui sort par le trou situé en arrière , sous la droite du manteau , contient ceux qui sont affectés aux fonctions de l'autre sexe. a. Organes mâles. Le premier groupe commence par une bourse membraneuse *' ^ fie- ^ ^^ ^I •> dont le fond est divisé en deux culs-de-sacs SUR L ONCHIDIE. 1 1 qui reçoivent chacun un vaisseau cylindrique. Celui du cul-de- sac antérieur , * est très-mince , entortillé en peloton trois ou quatre fois plus long que le corps, et se loge tout entier au côté droit de la masse de la bouche, en afi^' V^. L'extrémité qui tient à la bourse y pénètre par un tubercule représenté en E ,Jig. VIII ^ et portant une petite pointe de snbstance cornée. Le vaisseau mince lui-même, marqué 'i>if} Jig. V, Vil et VIII ^ recouibe son autre extrémité vers la base de la bourse , et il l'y fixe, mais, à ce que je crois, par de la cellulosité seulement. L'autre est beaucoup plus gros et plus long^ il occupe une grande partie de la cavité abdominale en d,d,e, e,e,Jig. IV, et éprouve dans sa longueur des changemens notables de structure. Sa partie postérieure ee, est un vaisseau large, à parois minces, huit lois plus long que le corps; il est entortillé et replié sur kii-même; une forte artère qui donne des branches à toutes les parties , en maintient les divers replis. Ouvert, il laisse sortir quelques parcelles blanchâtres et une matière moulée un peu noirâtre. Au vaisseau succède une masse elliptique , charnue et dure , marquée d,d; le canal en la traversant devient fort étroit. Elle est suivie elle-même d'un dernier vaisseau, •\,AiJlg. VI, qui se termine à la bourse par une espèce de gland percé, et entouré d'un prépuce E , Jig. VIII. On voit au travers des parois du vaisseau , a, a, en cet endroit marqué I) , fig. VI ., une pointe brune très-aiguë. En ouvrant ce vaisseau , comme il est représentée^. VIII, on remarque une sorte de pédicule charnu qui porte cette pointe, laquelle est très-aiguë et de substance cornée. Elle doit pouvoir facilement passer par l'ou- verture du gland E. 12 MÉMOIRE Que penser maintenant des fonctions de ces deux organes? La pointe qui termine le gros vaisseau est sans doute la verge ; mais qu'est alors celle du petit? Ou l'animal aurait-il deux verges comme en ont parmi les animaux à sang ronge , beau- coup de lézards et de serpens? Ces deux longs vaisseaux creux seraient-ils à la fois excréteurs et sécréteurs ? Le fluide qu'ils contiennent est-il sécrété par la substance de leurs parois? Est- ce la vraie semence , et par conséquent ces vaisseaux sont-ils les vrais testicules? Ces Mémoires n'eussent-ils d'autre objet que de rendre les observateurs attentifs à tant de particularités curieuses que l'histoire des mollusques ne peut manquer de leur offrir, je me croirais encore heureux d'en avoir entrepris le travail. h. Organes femelles. Ils comprennent l'ovaire et ce qui l'accompagne ordiuaire- rement, c'est-à-dire , ce que j'ai jusqu'à présent nommé le tes- ticule et la vessie. Ces trois organes forment un groupe qui , dans l'état naturel est caché sous les autres viscères; on le voit eu situation , Jig. J^:o, est le testicule ; x, l'ovaire ; y, la vessie. Ces mêmes lettres se retrouvent sur les mêmes parties, ^g^. f^I. L'ovaire -i se compose de deux lobes divisés eux-mêmes jus- qu'aux grains qui ne contiennent chacun qu'un œuf, et qui coiumuniquent tous par des canaux particuliers à l'oviductus ou canal commun. Celui-ci est replié comme à son ordinaire, et traverse aussi, comme à l'ordinaire, ce corps glanduleux que je prends tou- jours pour l'organe sécréteur de la semence ; il est ici blanchâtre et d'une forme irrégulière et inégale; l'oviductus JK , après y avoir fait divers circuits, parait se continuer avec un canal 3/, M, surl'onchidie. i3 qui se porte au dehors, et qui, selon ma théorie, donnerait issue aux œufs une fois imprégnés de semence par leur passage au travers du testicule o. Un autre canal , N, N, parait éta- blir une communication différente entre certaines parties de ce testicule et la vessie y : il se rend dans celle-ci, à côté du poiut d'où sort son canal propre Q. Quelle que soit la justesse de mes idées sur la nature de ces divers organes, on conviendra toujours de l'analogie extrême de leur disposition avec ceux de Yaplysie : même séparation de la verge et de ses appartenances d'avec l'ovaire et le testicule ; même connexion de ceux-ci entre eux et avec la vessie : seule- ment Yaplysie n'a point ces deux longs vaisseaux qui tiennent dans r onchidmm aux organes du sexe mâle , mais ou com- mence à en voir quelque vestige dans la huilée. 8° Système nerveux. Il est aussi simple et aussi régulier que dans les doris et les /n7o«/^5. Le cerveau, a,Jig. V et VI, enveloppé de sa dure- mère et d'une cellulosité serrée , présente, quand on enlève ses enveloppes, quatre tubercules grenus d'un brun-jaune, dont lesdeux intermédiaires sont plus petits. Le collier qui passe sous l'œsophage est très-élargi, par les méninges qui lui donnent la forme d'un ruban. Les deux premiers nerfs, lo, io,Jig. VI , vont former sous la naissance de l'œsophage en «, deux petits ganglions d'oii naissent les nerfs qui suivent cet œsophage , et qui probable- ment vont jusqu'à l'estomac et au delà. Ces deux ganglions sont analogues à ceux des doris et des tritonies , et sont comme dans celles-ci , les seuls ganglions 3 l4 MÉMOIRE SUR l'oNCHIDIE. différens du cerveau, que j'aie trouvés dans le corps de l'a- nimal. Les autres nerfs vont aux tentacules, à la bouche , aux or- ganes mâles de la génération , et le plus grand nombre se perd dans les parties charnues des côtés. l^^Jig: P^J \es représente tous très-exactement, et je n'y ai point mis de marques , de crainte de trop l'embrouiller. On notera seulement le nerf, 12 , 12, qui suit l'artère n» 2, et va avec elle jusqu'au rectum, et aux poumons. 9" Système musculaire. L'enveloppe musculaire du corps est très-épaisse ; la couche des fibres la plus étendue est transversale ; on la voit en S, »S, Jïg. J^I ; il y a au-dessus deux grandes bandes longitudi- nales R, R,R , Jig. VI' Le reste de l'enveloppe est composé de fibres entrelacées en toutes sortes de sens. IS. R. Depuis que j'ai décrit ce grand onchidium de la mer des Indes, j'en ai reçu un autre beaucoup plus petit des côtes de Bretagne ; il ne passe pas huit ou dix lignes de longueur. Le lîmax nudus cinereus terrestris , Sloane jam. pi. 278 , fig. I et 2 , est aussi un onchidium. Oncliidiwiu pcro/ui. iv del MÉMOIRE Sur le LiMNÉE {Jielix stagiialis , Juin. ) elle Planorbe ( hélix corjiea , ejusd. ) Xjes genres de la limace et du colimaçon nous ont servi à lier les gastéropodes mis aux gastéropodes testacés ; ceux de la limnée et du planorbe nous serviront à lier les testacés terrestres aux testacés aquatiques. En effet , presque toujours dans l'eau comme ces derniers , ils ont, comme les premiers, un poumon propre à respirer l'air élastique seulement , et non pas des branchies capables de sé- parer l'air contenu dans l'eau. Il faut donc qu'ils reviennent à chaque instant, à la surface de l'eau , ouvrir leur trachée et humer l'air atmosphérique, et si on les contraignoit de rester au fond, ils ne tarderoient point à périr. Ils ne sont aqua- tiques qu'à la manière des phoques et des baleines , et non pas à celle des poissons. On sait assez que Linnœus avoit réuni dans son genre hélix tous les univalves dont la coquille a l'ouverture entière, et plus ou moins approchante de la forme d'un croissant , ce qui y avoit accumulé une multitude d'espèces disparates par la forme et le genre de vie des animaux, et même par la configuration générale de la coquille. a SURLELIIMNÉE Muller essaya de les subdiviser d'après les animaux ; mais n'en connoissant qu'un petit nombre, il ne put répartir toutes les espèces dans des genres certains. Brugulcre fit une opération semblable sur les coquilles ; il sépara des colimaçons les bulimes à boucbe plus baute que large , et les planorhes à boucbe plus large que haute et à coquille enroulée à peu près dans un seul plan ; mais ses hu- limes comprenoient encore des espèces terrestres et ces aqua- tiques , des espèces à quatre tentacules et d'autres à deux; ces dernières avoient des opercules ou en manquoient, respiroient par des poumons ou par des brancbies , etc. M. de Lamarck , seulement dans la vue de ne point laisser ensemble les bulimes aquatiques et les terrestres, s'est vu obligé d'en faire un assez grand nombre de genres auxquels Draparnaud en a encore ajouté quelques-uns, principale- ment pour séparer les espèces à quatre tentacules de celles à deux. Nous renvoyons à ces auteurs pour la détermination de leurs caractères. Nous nous bornerons à dire que, quelqu'beureuses que puissent être les divisions de ces naturalistes, elles ne pour- ront être considérées jus(|u'à un certain point que connue des conjectures, tant qu'on n'aura pas des nolious précises, non- seulet'i.ent sur îe noujbre des tentacules et la présence ou l'ab- sence d'un opercule, mais encore sur la nature de l'organe respiratoire , celle des organes de la digestion et de la respi- ration, et la présence ou l'abseuce d'une trompe : caractères tous d'autant plus inqiortans qu'ils inlluent sur la nature des anmiaux beaucoup plus puissamment que ceux auxquels les concbyliologistes se sont arrêtés jusqu'à présent. ET LE P L A N 0 II B E. 1° Du limnée cï étang. Le genre des limnées que nous décrivons ici a la coquille plus ou moins allongée, à Jjouche entière, plus haute que large , à columelle marquée d'un seul sillon qui remonte en spirale dans la coquille. On en trouve dans nos eaux dormantes plusieurs espèces bien connues des naturalistes , et de la distinction desquelles nous n'avons pas besoin de nous occuper. Les figures de l'ou- vrage de Drapamaud sont plus que suftisantes pour les faire reconnaître par leurs coquilles. Nous donnons nous-mêmes ici celles des trois plus com- munes, avec leurs animaux. Limn. stagnalis j f. 2. Limn. ova- lis , f. 3 et Limn. palustris , f. 4- Nous nous attacherons seulement à la plus grande , le limnée d étang [ hélix stagnalis , Linn. ] qui est en même temps l'un des plus abondans de tous les coquillages d'eau douce de notre pays ; sa coquille est figurée par presque tous les eon- chjliologistes. Vo}ez seulement dans le nombre Lister, corich. t. 1 23 , f. 2 1 . Bonanni , Recr. pi. 53 , f. 55. Dargenville et Fa-- vanne , pi. 61 , f. iG. Drapamaud ., Moll. terr. et fluv. , pi. 2 , f. 38 et àçj.JXoissj , Moll. pi. 55, lig. 5 , etc., etc. j en remarquant toutefois que les figures de Favanne et de Draparnaud sont les meilleures. Lister et Swammerdam ont déjà donné de l'animal naême d.es descriptions anatomiques pleines de remarques vraies et intéressantes : le premier dans, son. Exercitatio anaùmiica al~ tera^p. l\g et sniv. ; le second, dans son Biblia natnrœ. Mais les mêmes raisons qui m'ont engagé à reproduire Fana- 4 SURLELIMNÊE tomie de la limace et du colimaçon , me portent à en faire autant de celle du limnée. D'une part , j'ai plusieurs faits nouveaux ou plus exacts et de meilleures figures à offrir. De l'autre , je ne peux négliger de compléter mon histoire des mollusques d'un genre aussi intéressant. A l'extérieur , le corps du limnée se divise comme celui du colimaçon en deux parties ^ celle qui reste toujours dans la coquille, et qui se termine au limbe ovx collier ^ et celle qui peut en sortir ou y rentrer, et qui se conqjose de la tète et du pied. Le collier est plus allongé que dans le colimaçon , ou , ce qui revient au même, il n'est pas si serré au corps, et l'enfonce- ment qui l'en distingue est plus profond. Son bourrelet est plus m:nce , apparemment comme n'ayant point dans son inté- rieur le tissu glanduleux nécessaire au colimaçon pour la pro- duction de son épipjiragme ou opercule tensporaire. I^ouver- ture du poumon est sous le coté droit de ce bourrelet, et se ferme par un petit lobe charnu et plat qui saille sous son bord inférieur, et qui se plie en canal arrondi quand l'animal veut respirer. C'est proprement sur ce petit lobe qu'est le trou qui conduit par un demi-canal assez étroit dans la cavité respi- ratoire j et dans l'angle que le lobe iait avec le reste du con- tour de l'ouverture, il y a un autre trou, qui est l'anus. Le pied est plus court à proportion qu'au colimaçon , et la tête plus large. Le voile échancré , placé au-dessus de la bouche , est surtout ce qui établit la largeur de la tète. Les tentacules , au nombre de deux seulement, sont laraes. courts, triangulaires et aplatis. L'ceil est un grain biauc, placé ETLEPLANORBE. 5 près de l'angle antérieur de leur base à la surface même de la tête. Du coté droit sont deux ouvertures pour la génération, très- éloignées l'une de l'iiutre. Celle des organes niàles est comme à l'ordinaire sous la corne droite; celle des organes femelles, dans le fond du repli qui sépare le corps , du limbe ou collier. C'est à cet éloignement de ces deux orifices que le limnëe doit la faculté singulière de s'accoupler à la fois avec deux in- dividus, dont l'un lui sert de mâle et l'autre de femelle. Tous les naturalistes connoissent, depuis les observations de Geof- froy ^ riiabitude extraordinaire de ce coquillage de former des cbaines quehjuefois très-nombreuses, dont tous les individus sont ainsi liés cbacun à deux autres. La boucbe fait plus ou moins de saillie , sans jamais former une véritable trompe. Lorsqu'elle est le plus développée , elle représente un gros mamelon au milieu duquel est un trou en- touré de trois petites màcboires : lorsqu'au contraire elle est retirée , elle forme un sillon transversal qui ne ressemble pas mal à la bouche humaine. Un sillon plus profond la sépare du bord antérieur du pied comme dans le colimaçon. La divrsion intérieure du corps en deux cavités, et les or- ganes compris dans chacune sont les mêmes que dans le coli- maçon et dans t(jus les testacés turbines dont nous avons à parler dans la suite. La cavité julnionaire est fermée de toute part, au moyen de l'union de la racine du collier avec le corps, et n'a d'autre ouverlure (pie la trachée, caractère qui lui est commun avec tous les gastéropodes qui respirent l'air en nature. 6 SURLELIMNEE Le rectum rampe de même le long de son côté droit , et le péricarde est dans le fond de son côté gauche. L'organe de la viscosité est bien plus considérable , et occupe tout le iond de la cavité, depuis le côté gauche sur le péricarde , jusque dans le voisinage de l'anus. Son intérieur est composé de laines et d'une belle couleur jaune citron. Le réseau vasculaire du poumon est bien moins apparent que dans le colimaçon : à peine aperçoit-on la principale veine cave; mais la veine pulmonaire est très-forte et rampe tout le long du bord antérieur de l'organe de la viscosité , pour se rendre dans l'oreillette. Le reste de la voùle de la cavité pulmonaire , en avant de l'organe de la viscosité et de la veine cave , est un peu renflé et spongieux. Toute cette voûte , et même l'extérieur de l'organe de la viscosité, est teint d'un cendré violet assez foncé, que Tespril-de-vin n'altère pas, et qui, à la loupe, se divise eu une infinité de points de celte couleur. La distribution des artères se fait coinme dans le colimaçon par deux troncs, dont un remonte vers le sommet de la co- quille, en suivant la convexité, et dont l'autre se recourbe en avant et se distribue à la tète et au pied. La mâchoire supérieure est comme celle de la limace, en croissant avec une seule dentelure au milieu ; les deux laté- rales sont simples et petites. La masse de la bouche et la langue sont coinme dans le colimaçon. Les glandes salivaires sont blanches, à beaucoup de lobes et de forme ramassée, n'allant pas plus loin que l'origine àe\ œsophage. Celui-ci est plissé longitudinalement et d'une teinte noirâtre. ETLEPLANORBE. 7 Uestomac est dans la partie de la grande cavité qui est der- rière la cavité pulmonaire et sur le côté convexe ou gauche très-près du cœur. C'est un véritable gésier ressemblant poui' la forme et pour la composition de ses parois à celui (ïxxn oi- seau grcnwore. IJster l'a comparé un peu moins heureuse- ment à celui d'un poisson muge. On peut s'en faire une idée juste en se représentant deux ren- flemens membraneux, l'un du coté du cardia, l'autre du côté du pylore , et une portion intermédiaire resserrée entre deux gros muscles qui se joignent l'un à Taulre de chaque côté par un tendon mince. Après le deuxième renflement , l'on voit en dedans deux arêtes saillantes qui conduisent dans le duodénum , et peu après vient l'entrée de la bile. A partir de cet endroit , l'intestin n'offre plus rien de remar- quable et ne change plus de diamètre 5 il fait deux replis entre les lobes du l'oie , avant de revenir à la cavité pulmonaire et de se terminer à l'anus. Le foie est brun clair, plus grenu que celui du colimaçon, mais remplissant de même la plus grande partie des tours de la coquille. Les organes de la génération ont quelque chose de très-re- marquable; l'ovaire est, comme à l'ordinaire, vers le sommet de la coijuille et enchâssé dans le dernier lobe du foie, l'ovi- ductus mince et tortueux ; mais la matrice est formée de deux poches de substance molle, blanche et glanduleuse, commu- niquant ensendjle par un canal assez ample et aboutissant par un autre à la vulve. Ou les trouve quel({uefois pleuies dœufs. Ces deux poches sont collées au testicule et au canal défé- 8 SURLELIBINÉE rent par de la cellulosité , mais elles s'en détachent bien plus aisément que ne fait la matrice du colimaçon. Le canal de la vessie se termine à la vulve. Le testicule est une glande blancliàtre, placée en travers dans l'abdomen , derrière la cavité pulmonaire. Elle fournit d'abord un canal déférent court et large qui se termine en une large bourse ronde et extrêmement plissée, qui doit pouvoir contenir une grande quantité de sperme dans la saison de l'amour. De là part le véritable canal déférent, blanc, mince et très-long 5 il se rend auprès de la vulve, et sendile s'y ter- miner, mais en l'examinant avec un peu de soin, on voit qu'il ne fait que s'enfoncer dans les chairs voisines , et qu'il en res- sort bientôt plus en avant, pour faire encore quelques replis et se terniiner dans le fond de la verge. Celle- ci est charnue , placée à côté de l'œsophage , et se rat- tache au grand muscle du corps par trois muscles, divisés cha- cun en plusieurs digitations. Ils doivent la retirer en dedans. Elle en a en avant un autre qui se fixe à la tunique générale, vers le côté droit, et doit aider à la faire sortir. La verge est considérable et a dans son intérieur deux crêtes saillantes , comme nous en avons déjà observé une dans la li- mace ^rise. L'enfoncement du canal déférent dans l'épaisseur des chairs me paroît remarquable en ce que c'est une première nuance vers ces espèces àe gastéropodes^ où la communication du tes- ticule à la verge ne se fait que par un sillon extérieur , tels que \apljsie , la bullée et Xonchidie. Lorsqu'on le débarrasse des fibres qui le recouvrent et qu'on rélend,on trouve qu'il a plus de quatre fois la longueur du pied de l'animal. E ï L E P L A iA O li ii E. 9 Le système musculaire du limnée est plus simple que celui (lu colimaçon. La partie postérieure du pied forme un gr( s muscle qui se recourbe pour se lixer àlacolumelle. Ses parties latérales donnent les libres de la tunique générale , qui sont fort épaisses , et vont se lixer au collier tout autour de sa base. Les premières de ces libres se détachent en deux petites languettes pour se rendre aux côtés de la masse de la bouche et la tirer en dedans. Du gros muscle postérieur, en naissent deux qui se dirigent en avant et se divisent en languettes qui s'entrecroisent avec celles des libres latérales de chaque côté de la tunique ; et entre ces deux-là en est un très-gréle qui se porte en avant et se fixe au collier médullaire et à la partie postérieure de la masse de la bouche. Nous avons exposé plus haut ce qui concerne les muscles de la verge. Les tentacules qui ne peuvent se retirer en dedans n'ont au- cun muscle extrinsèque, et se raccourcissent ou s'allongent simplement par le moyen des libres propres à leur tissu. Le cerveau du limnée se compose de trois petits glo- bules de chaque coté , et d'une partie étroite dans le milieu. Le gros ganglion inférieur en a lui-même trois; le petit gan- glion de la base de l'œsophage est plus considérable que dans le colimaçon : mais la distribution des nerfs est à peu près la même. Dans l'état frais, les masses médullaires sont revêtues d'une matière rougeâtre, interposées entre elles et leur enve- loppe membraneuse ou dure-mère, ce qui fait paroitre le cer- veau rouge. 2 lo SURXELIMNEE 2.° Du planorhe corné. , Malgré la grande différence dans la configuration extérieure de la coquille et dans la forme et la proportion des tentacules ^ aucun mollusque ne doit être placé plus près du limnée que le planorbej car toutes leurs })arties intérieures et toutes les extérieures un peu essentielles se ressemblent. Lister et Swammerdam en ont donné une anatomie abrégée. Ils ont très-bien remarqué Fun et laulre que les oriiices qui out coutume d'être adroite dans les gastéropodes, sont à gauche dans celui-ci. Comme sa coquille est à peu de cbose près enroulée dans le même plan, l'on a hésité si elle est tournée à droite comme le plus grand nombre des coquilles, ou bien à gauche, comme celles qu'on nomme uniques ou inverses [tesUe peiversœ ou sinistrorsœ. ) Cependant, quand l'animal rampe et qu'il porte sa coquille à peu près verticalement sur son dos, c'est du colé droit qu'elle est le plus concave. Il éioit naturel de penser que ce coté concave répond à Tombilic et l'autre à la spire ; par con- sé([uent que la coquille est inverse^ car la spire des coquilles ordinaires est toujours dirjgée à droite quand l'animal marche. Je ne sais ])ourquoi les cyncliyîiologistes n'ont pas été tou- chés de celte considération , et ont mieux aimé regarder le côté creux comme celui qui répond à la spire. Linmeus, Mdller et tout récemment Draparnmuh quoique expressé- ment averti par M. liichard^ soutiennent celte idée : de là ré[>ilhète de supra umhilicata qu'ils donnent à la coquille du planorhe conié. E T L E P L A N O R B E. ii La position inverse des orifices dans l'animal démontre évi- demment qne la coquille est inverse aussi , et le démontre ménae d'autant mieux qu'elle s'accorde avec la position de tous les viscères. Le rectiivi, la verge, la. matrice sont à gauche, et le cœur au contraire est à droite. C'est même probablement ce chan- gement de position qui a déterminé le changement de direc- tion de la coquille. Celle-ci , comme toutes les autres , n'est qu'un long cône roulé en spirale. Le coté extérieur de la spi- rale est celui où la sécrétion de matière calcaire est plus abon- dante. Il est assez naturel que ce soit le côté du cœur et des principales artères.. Le pied, naturellement proportionnel à l'ouverture de la coquille, est ici très-court j le limbe , au contraire, est très-long comme dans le limnée , et le contour de la cavité pulmonaire fermé de toute part, excepté à la trachée. La bouche est de nîême surmontée d'une sorte de voile large, court et échancré. La principale différence extérieure consiste dans les deux ten- tacules longs, minces et pointus connue des soies 5 ne pouvant que se raccourcir et non se retirer en dedans et portant les yeux à leur base interne. Le bourrelet du limbe est mince et entier , ne débor- dant jamais la coquille. L'orifice de la trachée fait dessous une saillie assez considérable. Ceux des organes des deux sexes sont séparés connue dans le limne'e. La couleur générale de sa peau est un noir de suie. Pour peu qu'on le tourmente, il répand une liqueur d'un rouge de sang, sécrétée comme la liqueur pourpre des murex et de Yaplj- 3* 12 SURLELIMNÉE .ç/rt, par le tissu glanduleux du limbe qui, dans les testacés, répond au manteau des gastéropodes nus* La bouche , l'œsophage , les glandes salivaires , le gésier et l'inleslin sont comme au limnée; seulement le gésier est plus cylindrique , et le rectum est renflé et plus épais que le reste du canal. Le foie est plus blanchâtre. L'intérieur de la cavité pulmonaire est aussi d'un gris violet, et l'organe de la viscosité considérable et composé intérieure- ment de lames jaunes. J'ai déjà indiqué la transposition du cœur : celle des artères y correspond. Le canal déférent a aussi dans une partie de sa longueur un grand sac plissé , et s'engage ensuite dans les chairs près de l'oriiice du vagin pour en ressortir et se rendre à la verge , qui est grosse et charnue. La matrice est un long sac gélatineux où aboutit l'oviductus et d'où part le vagin , qui s'ouvre au-dehors au même endroit que le canal de la vessie. En(in le cerveau est divisé de même en petits globules et teint en rouge; ainsi il seroit bien diflicilede trouver deu.v animaux différens par l'es- pèce, dont l'anatomie fût plus semblable que celle de ces deux mollusques. Je n'ai pas besoin de dire que le suc rouge du planorbe n'est pas du sang. liC véritable sang, celui qui circule dans le cœur et les artères, est d'un blanc bleuâtre comme celui du colimaçon et du limnée.. ET LE P L A i\ O n B E. Explication de la planche. Fig. I appartient encore au mémoh-e précédent ; elle représente les organes de la génération de la grande limace tachetée, a. La bourse commune de la génération, b. La vessie, c. La verge ouverlo. e}. Son muscle rr'lraclcur. , qui la terminent, et où l'imagination a cherché encore une autre ressemblance, ne sont que des replis de la membrane linguale. Les tenta- cules c,c, sont aunombrededeux,et non de quatre, comme on l'a cru; mais ils sont plus profondément fourchus que ceux des murex. Le seul organe réellement propre à la janthine est donc son appendice vésiculeux d, d^ mais il ne tient pas lieu de pied, comme on l'a dit, au contraire il est attaché à la partie pos- térieure du pied, à-peu-près au-dessous de l'endroit où se trouve l'opercule des autres genres. Je penserois même assez volon- tiers que c'est un vestige d'opercule qui éprouve dans sa forme et dans son tissu des changemeus pareils à ceux que la nature nous fait observer dans tant d'autres de ses productions. L'expression de Fabius Columna pour désigner cet organe 'sés\c\Aa\ve{spuma cartilaginea), est excellente. Ce sont des vésicules transparentes conime celles de l'écume, mais leurs parois sont quelquefois comme de cartilage, assez dures même vers la racine et la partie postérieure; plus molles, plus mem- ETPHASIANELLE. 5 braneuses en avant et à l'extrémité. Dans d'autres individus, je les ai trouvées plus étendues et entièrement membraneuses. Leur enveloppe générale y étoit teinte en noirâtre. L'oigane n'a point de communication directe avec l'inté- rieur du corps ; c'est un simple appendice des tégutnens , et il ne paroit pas que l'animal puisse à son gré le vider ou le remplir d'air : il peut seulement le comprimer eu le faisant rentrer dans sa coquille, ou l'abandonner à sou élasticité na- turelle, en l'en laissant sortir. C'est du moins là ce que me suggère son inspection aua- tomique, et ce qu'une partie des observateurs ne paroît pas contredire. « Je ne me suis point aperçu ( dit M. Bory- » Saint -Vincent , Voy. I, p. i4i )■, que l'animal eût la fa- culté de le vider ou de le remplir à volonté et avec promp- titude. » Fabius Cohimna , Brejnhis et Forskalil ne disent rien de positif M. ^ojiC seul annonce que V animal absorbe l'air de ses vésicules ( (-oquiliesIV, p. ■y 4) ? et tjp'il les enfle à volonté' ( Ib. p. 72). Mais comme je n'ai pu trouver aucune commu- nication, ni aucun réservoir intérieur où cet air se puisse rendre, j'imagine que cette assertion de M. Bosc n'est qu'une supposition et non un fait constaté par des expériences directes. Tous les individus n'ont pas cet organe : j'en ai trois qui n'en montrent aucun vestige, et j'en représente uu, figure 4- M. Boiy dit aussi ( Loc. cit.) , qu'il en a vu dans lesquels l'organe avoit été écrasé ou emporté aux trois quarts , sans qu'ils parussent avoir beaucoup souffert. Sa nature est en effet telle, que les janthines qu'on en priveroit de force n'éprouveroient probablement d'autre gène que celle qui 6 JANTHINE résiilleroit de la diiTicullé de se rendre à la surface de l'ean. Mais j'ai lieu de croire qu'il y en a aussi qui en sont privées nalurelleni.cut , soit qu'il ne se développe qu'à un certain âge ou dans une certaine saison; et mon motif est que je n'ai pu apercevoir aucune cicatrice , aucun reste de cette partie dans les individus qui en manquent et que je possède. Le pied . II, 182) se réglant sur la position des yeux et la pré- sence de l'opercule, la réunissent, avec d'autres espèces delà même famille , au genre des nérites. Poiret[ Coq.fluv. et terr. du dép. de F Aine ^ p. 60 ) la met avec les bidimes démembrés des hélix par Bruguières, mais où. celui-ci ne l'avoit pas comprise. Drapamaiid ( Loc. cit. et tahl. des Moll. de la Fr. p. [\o\ , et M. de Férussac { Essais (Finie méth. Conch. p. 66) d'après l'indication de M. de Lamarck^ la rangent parmi les cjclos- tomes , où ils font entrer toutes les coquilles à bouche à-peu- près ronde et à bords continus qui ne sont ni turriculées, ni garnies de côtes , ni dentées à l'ouverlure. Rien n'empêche sans doute qu'on ne prenne le vivipare pour type du genre cjclostome) mais il est probable qu'alors on sera obligé d'en exclure plusieurs des espèces qu'on y a laissées jusqu'ici , et notamment toutes les terrestres. Les observations que nous allons exposer aideront à trouver les bases de ces déterminations. L'animal de la vi\>ipare a deux tentacules coniques plus ou moins allongeables, mais non rétracliles, et qui portent les yeux vers leur base extérieure. Le tentacule droit du mâle est plus gros que l'autre , et percé vers son extrémité et un peu en dehors d'un trou par lequel sort la verge. Le trou n'est pas difficile à remarquer eans dissection , et l'anatomie montre promplement son usage. Ainsi j'ai de la peine à comprendre comment Draparnaud a pu s'y tromper. 4 VIVIPARE. Entre les tentacules est une trompe courte et ronde. Il n'y a point de trachée tubifornie, quoique Draparnaud l'ait dit; mais la membrane latérale du côté droit du corps s'avance jusque sous le tentacule du même côté , où elle se re- courbe en un demi-canal qui se continue jusque fort avant dans la cavité des branchies, au moyen d'un repli élevé du plancher de cette cavité. • Il est probable que c'est, comme le syphon des buccins et des murex, un moyen de laiie pénétrer l'eau vers les branchies quand l'animal est rentré dans sa coquille. Du reste, la ca- vité branchiale est ouverte sous tout le bord antérieur du manteau, et son entrée est aussi large que dans aucun pecti- ni-branche. Les deux petites membranes latérales sont simples et sans franges, dentelures ni tentacules. Le bord antérieur du pied est muni d'une double lèvre ^ cet organe, comme dans tous les genres operculés, se replie en deux pour rentrer dans la coquille 5 et l'opercule, attaché sur le dos de sa partie pos- térieure , bouche alors l'entrée sans y laisser de vide. En ajoutant à ce que nous venons de dire que l'on aperçoit sous le bord antérieur du manteau, et par conséquent à l'en- trée de la cavité des branchies, quelques houpes de celles-ci, l'orifice de la matrice et celui de l'anus, on aura une idée complète de ce que l'animal montre sans dissection. Pour en voir davantage, il faut, comme à l'ordinaire, couper la membrane qui sert de voûte à la cavité branchiale, au côté gauche, suivant la ligne de sa jonction au corps. En la rejetant sur le côté droit, l'on voit qu'elle porte les branchies, le rectum, le canal de la viscosité, et, dans les femelles, la matrice. TURBO, etc. 5 Cette dernière partie est celle qui frappe le plus, surtout au printemps lorsqu'elle est toute remplie de petits animaux dans leurs coquilles, déjà prêts à marcher. Il y en a ainsi, non-seulement dans la partie de la matrice attachée à la voùle delà cavité branchiale, mais encore beau- coup plus haut et dans toute la longueur du preuiier tour de spire. C'est dans cet état que nous représentons cet organe en figure 2. A mesure que l'on remonte vers son fond, l'on trouve des coquilles plus petites et enveloppées d'une matière glaireuse plus abondante. Vers le fond il n'y a plus que des globules de cette ma- tière , dans le centre desquels on voit à la loupe le très-petit animal avec une coquille d'un demi- tour, et qui est loin en- core de pouvoir le renfermer. Cette substance des œufs se durcit dans l'esprit-de-viu, et se comporte en tout comme de l'albumine. Cet animal est donc proprement ovo-vivipare , conmae les vipères. A côté de la portion de matrice qui est au-delà de la ca- vité branchiale, se trouve un organe glanduleux blanchâtre qui pourroit bien être l'ovaire primitif, ou au moins servir à sécréter l'enveloppe glaireuse des ceufs. La matrice se termine vers le bas par un tubercule charnu percé d'un trou qui se dilate au moment du part. Les branchies se composent de trois rangées de filamens coniques, disposés très-régulièrement. Entre elles et la matrice sont le rectum et le canal de la 6 VIVIPARE. viscosité. Le premier s'ouvre un peu plus bas que l'autre, et par un orifice un peu plus grand. Dans les deux sexes il y a une ligne saillante et charnue qui part de dessous la corne droite et se continue sur le plancher et jusque dans le fond de la cavité branchiale; elle l'orme nécessairement, avec le bord droit de la voûte de celte cavité, une espèce de demi-canal qui se continue, avec le petit syphon, dont j'ai déjà parlé, sous la corne droite. L'autre extrémité de ce demi-canal est aveugle, et je ne peux, comme je l'ai dit, lui apercevoir d'autre usage que de laire entrer et sortir l'eau pour la respiration. L'organe sécréteur de la viscosité, le péricarde et le cœur occupent , comme à l'ordinaire, la région située derrière le fond de la cavité des branchies, et n'ont rien que nous n'ayons déjà vu dans les autres gastéropodes turbines. Le reste de la spire est encore renq)li , comme de coutume, par l'estomac, l'intestin et le foie. L'œsophage est d'une minceur et d'une longueur remar- quables; il fait un re})li avant d'avoir quitté le dessus du pied, et il en fait un second dans la spire avant d'entrer dans l'estomac. Celui-ci est un sac assez vaste et divisé intérieurement par diflérens replis. Il s'amincit et revient eu avant pour former le pylore; la première partie de l'intestin se porte en arrière, se collant au bord droit de l'estomac; la deuxième revient en avant, en longeant tout le bord gauche de la matrice, et s'ouvre à l'anus sans'avoir éprouvé de renflement remarquable. La bouche est une petite masse charnue et cylindrique qui ne peut former de trompe considérable. TURBO, etc. 7 La langue n'est qu'un petit tubercule hérissé qui fait une légère saillie sur le plancher de la bouche. Il n'y a que deux glandes salivaires peu considérables. Le cerveau est divisé eu deux lobes écartés l'un de l'autre par un Blet iniuce. Le seul nerf uu peu particulier part du lobe droit, croise sur l'œsophage, et va donner des branches aux muscles qui attachent l'animal à sa coquille. Ceux de la bouche, des yeux, des tentacules sont comme à l'ordinaire. Dans le mâle, la verge occupe la plus grande partie de l'espace situé au-dessus du pied , et cet espace se trouve par là bien plus gros que dans la femelle; mais comme il n'y a point de matrice attachée à la voûte de la cavité bi'anchiale, le vide de celle-ci n'est pas plus rempli. Cette verge est cylindri({ue , très-grosse, entourée de (Ibres annulaires et charnues très-vigoureuses. Elle doit pouvoir se retourner comme celle des limaces, et alors elle sort, ainsi que nous l'avons dit, par le trou du tentacule droit. Le tes- ticule occupe dans la spire l'espace que la matrice et l'ovaire tiennent dans la femelle. Il communique avec la verge par un canal court et tortueux. Tout ce que nous venons de dire prouve que la vivipare est déjà plus voisine de la janlhine et de la phasianelle ^ décrits dans le Mémoire précédent, que des hélix ^ des planorbes et des limnées, dont on auroit pu être tenté de la rapprocher, d'après sa coquille et d'après le genre où l'avoit placée Linnœus. Ces trois premiers coquillages commenceront doue pour nous une grande famille qui est celle des gastéropodes à bran- chies pecliuées et à bouche entière, et qui comprend toutes les espèces aquatiques des anciens genres turho , trochus et nerita de Linnœus. s VIVIPARE. Les gniiresà branchies pectinées et à syphon , ou au moins à échanci'jre, savoir buccinum, stromhus , murejc ^ voluta, et tous leurs déiiiemhremeus , ne diffèrent essentiellement des premiers que par le petit prolongement du manteau qui passe par le syphon ou par l'échancrure de la coquille. Eutre eux, ces divers animaux varient d'une manière faci- lement apprécia])le. 1." Par la longueur de la trompe; 1° Par les découpures et les productions des deux mem- hranes qui garnissent les côtés du pied , et de celle qui couvre plus ou moins le devant de la tête ; 3.' Par le nombre et la position des peignes de leurs branchies; 4.° Par la position intérieure ou extérieure de la verge dans l'état de repos; 5." Par la longueur de la bande hérissée de la langue; G.° Par un jabot plus ou moins marqué en avant de l'estomac. Mais ils ont tous en commun, outre ce qui appartient en général à tous les gastéropodes , deux tentacules pointus por- tant les yeux tantôt sur le côté de leur base, tantôt sur un petit cylindre particulier qui pourroit très-bien passer pour un autre tentacule; une trompe charnue contenant une langue hérissée de crochets, mais sans autres mâchoires; un estomac membraneux situé à la base du foie, et donnant dans un in- testin de longueur variable ; enOn des sexes séparés. On ne peut pas s'attendre que dans une telle ressemblance nous nous attachions à décrire les différences minutieuses qui pourroient se rencontrer dans les nombreux genres établis récemment dans cette famille, d'après de légères nuances dans la forme de la coquille. TURBO, cic. 9 Nous choisirons seulement les sujets de nos dissections à des distances convenables, pour donner des idées suffisantes de toute la série; et pour commencer, nous allons joindre à l'anatomie de la vivipare , celle d'un grand turho marin qui a beaucoup de ressemblance avec elle; la veuve ou le turbo pica de Linnœus. Ce que l'étude des gastéropodes à coquille spirale offre peut-être de plus embarrassant , c'est de se bien représenter comment des parties aussi développées que celles que l'animal montre au-dehors quand il rampe, peuvent se replier sur elles-mêmes, et se concentrer dans la cavité étroite de la co- quille. C'est ce que nous cherchons à éclaircir par nos figures 5 et 6 qui représentent l'animal de la veuve, enlevé à sa coquille, mais dans ses deux états :1a première le montrant relire ; l'autre l'ampant. Tout dépend de la rétraction de la léte et du repliement de la partie antérieure du pied contre la partie postérieure. Cette dernière circonstance, qui a lieu plus fortement encore dans les nérites et les volutes où le pied est beaucoup plus grand, est surtout essentielle. L'opercule, qui est toujours at- taché sur le dos de la partie postérieure du pied, se trouve ramené par là vis-à-vis l'ouverture de la coquille, qu'il bouche, en y jjénétrant d'autant plus que l'animal contracte d'avan- tage sou muscle. Le muscle est marqué a dans les deux (igures, à l'endroit par où il étoit attaché à la colu nielle. La figure 7 en montre la coupe, et comment la plus grande 2 10 VIVIPARE. partie de ses fibres se rend vers l'opercule, tandis qu'une autre se perd dans la masse charnue du [)ied, el qu'il en va quelques-unes jusque vers la trompe et les tentacules. On peut s'y faire une idée de la manière dont le muscle tirant fortement l'opercule, pousse tout le reste du pied, de la tête et des parties adjacentes en dedans , et finit par les mettre dans l'état de contraction qu'exprime la figure 5. Cependant aucun gastéropode aquatique ne retournant ses cornes ni sa télé au-dedans de son corps, comme le font les limaces el limaçons terrestres, il est plus facile de juger, d'après l'animal contracté, de la forme qu'il doit prendre quand il est étendu. Il n'y a qu'à se représenter toutes les parties du pied, de la tête et des deux membranes latérales dilatées en tout sens, et surtout en longueur; la tète s'avançant sous le bord externe de la coquille; la queue, sous le bord opposé, c'est-à-dire sous la columelle; et l'opercule se réfléchissant contre celle-ci, comme une porte contre un mur, quand elle est tout-à-fait ouverte. On peut ainsi retrouver la figure d'un gastéropode, même quand il seroit venu des pays les plus éloignés, enfermé dans sa coquille et contracté par sa propre action et par celle de l'esprit-de-vin. Il est certain qu'il vaut toujours mieux l'observer vivant, ou au moins lorsqu'avant de le mettre dans l'esprit-de-vin on l'a retiré de sa coquille et laissé mourir dans l'eau; mais comme les voyageurs sont rarement à même d'observer exactement sur les lieux un animal vivant, ni de prendre les précautions nécessaires pour le conserver parfaitement, il est toujours bon d'avoir ce moyen subsidiaire. TURBO, etc. n Nous l'avons employé avec avantage pour un grand nombre des gastéropodes à coquille dont il nous reste à pax'ler. Tel est ce turbo pica dont nous traitons maintenant. Notre figure 6 le montre étendu artificiellement. Ses tenta- cules sont grêles, sétacés; l'œil est porté par un petit tenta- cule cylindrique et latéral. Il n'y a que deux très petites lo- bules sur le devant de la tête, et le manteau n'a aucun sy- phon. La membrane latérale du côté droit est découpée en plusieurs filets un peu rameux; le bord antérieur du pied est divisé en deux lèvres; la queue n'a ni créies ni franges : elle porte un opercule circulaire, mince, corné, d'un brun-foncé, marqué d'une spirale à contours très-nombreux. La figure 7 montre le plafond de la cavité brancbiale détacbé à gauclie et rejeté sur la droite, et la grande cavité ouverte et privée de ses tégumens du côté gaucbe, pour montrer ce qu'elle contient par ce côté, depuis la boucbe jus- que derrière l'estomac. On a vu que les tentacules et autres appendices extérieurs de cet animal ont les plus grands rapports avec ceux de la phasianelle : ou va voir que ses viscères n'en ont pas moins. lia aussi deux peignes de branchies formés d'une multi- tude de feuillets triangulaires; mais ils ne sont séparés que vers le fond de la cavité branchiale par un vestige de cloison, plutôt que par une cloison véritable; car elle n'occupe pas le quart de leur longueur. Le cœur, l'oreillette, le péricarde, l'organe de la viscosité n'ont rien de particulier. L'œsophage après avoir parcouru un assez long trajet, mais sans s'être replié, donne dans l'estomac, qui est énorme et divisé par des replis de sa membrane interne en plusieurs sinus et poches différentes. Il se rétrécit ensuite en un boyau qui «a VIVIPARE. revient en avant, absolument comme dans la phasianelk , jus- que vers la niasse charnue de la bouche , puis se recourbe en arrière, va passer derrière le cœur , et se réfléchit encore en avant pour former le rectum, qui est grêle et se termine par une petite pointe. Il y a une valvule au repli du canal situé derrière le cœur. La masse charnue de la bouche est très-forte, et son or- ganisation assez compliquée. La langue , ainsi que dans \a. phasianelle et dans d'autres gastéropodes , est un cartilage excessivement long et garni de petites épines ; enveloppée dans un tube membraneux , elle s'étend depuis le point du plancher de la bouche qui répond immédiatement au-dessous de l'ouverture de l'œsophage, jus- que très-haut dans la spire et fort en arrière de l'estomac, où elle se roule encore cinq ou six fois en spirale sur elle- même. Il n'y a que l'extrémité antérieure de ce long ruban qui serve à l'animal, et tout le reste n'a d'autre objet, à ce qu'il me semble , que de remplacer cette extrémité antérieure à me- sure qu'elle s'use. Il en est de cet organe comme des dents des quadrupèdes herbivores et de celles des oursins. Ces der- nières surtout offrent une ressemblance frappante: très-dures à l'endroit qui mâche, elles se ramollissent en arrière et fi- nissent par un long ruban flexiide qui avance et durcit à mesure que la partie triturante se détruit. Cette langue du tarho pica est garnie de rangées trans^ versales de lames triangulaires et tranchantes^ chaque rangée comprend huit ou dix lames implantées sur une petite bande transversale qui joue sur une bande semblable placée der- rière elle, et sur une antre placée devant. La langue entière TURBO, eic. î3 doit avoir plusieurs centaines de ces bandes transversales , et par conséquent des milliers de petites lames tranchantes. La masse charnue de la bouche a pour olîjet de donner à l'extrémité antérieure de celte bande linguale une sorte de mouvement péristallique propre à entasser , à limer et à percer par degrés les corps qu'elle attaque. Elle contient deux cartilages parallèles dont l'extrémité anté- rieure soutient la partie correspondante de la bande linguale 5 €t en s'écartant, s'avançant , se rapprochant, se retirant, la soulève et l'abaisse, en iait jouer les parties les unes sur les autres, et fait frotter ainsi les petites lames tranchantes sur la surface qu'elles doivent entamer. Les glandes salivaires sont peu volumineuses, et le cerveau n'a rien de bien particulier, non plus que le système nerveux. L'individu que nous représentons est femelle. On voit la partie inférieure de.^on oviductus en o, fig. 7. Elle a son ori- fice tout près de celui de l'organe de la viscosité. Je ne puis savoir si celle esjièce est vivipare, ne l'ayant point observée dans un état voisin du moment où elle met bas. Ces deux anatomies nous fournissent deux types différens d'animaux à coquilles entières et à branchies peclinées et aquatiques. La vivipare d'eau douce sera chef de file pour toutes les espèces à tentacules simples ; et le turbo pica ainsi que la phasianelle pour toutes celles à tentacules doubles : car il est difficile de ne pas considérer comme un tentacule particulier i4 VIVIPARE. le pelil cylindre charnu qui porte l'œil , ici surtout où il est distinct jusqu'à sa base du grand tentacule sétacé. La rè^le que l'on a voulu établir sur le nombre des tenta- cules, quaternaire, disoit-on dans les gastéropodes terrestres, binaire seulement dans les aquatiques, n'est donc rien moins qu'exacte. En effet , nous savons déjà que Xapljsia en a quatre, que la huilée et toutes les acèies n'en ont aucuns, et nous verrons bien d'autres exceptions par la suite. Pour revenir à nos deux types, il y a des espèces de l'un et de l'autre, et qui ne sont pas distribuées, comme on auroit pu le croire, en jugeant sur les coquilles. y^danson, qui a Ires-bien connu cette différence, a établi sur elle sa distinction de la toupie et du sabot ^ et celle de la natice et de la vérité \ mais il est obligé, du moins dans les deux premiers, de séparer des coquilles très-semblables. Dans le premier type, celui de la vivipare, j'ai disséqué aussi le vignot de nos côtes de la Manche ( turbo littoreus de Linuœus, alie-kruik de Swammerdam; Bibl. nat. t, IX, fig. i4-i8). Son ouverture et son opercule ont un angle vers le haut, et ses tentacules sont simples, portant les yeux sur une légère proéminence de leur base externe. On sait déjà par Adanson ( Séiiég. p. 70 ), qu'il a les sexes séparés, et je l'ai effectivement vérilié; mais je n'ai pu savoir s'il produit des petits vivans. A l'intérieur, sa principale différence est la longueur du ruban lingual, par laquelle il se rapproche des espèces du deuxième type. Nous représentons cet animal retiré de sa coquille, fig. 10. Le marnât d'Adanson , ( Sénég. pi. 12 , g. VI, fig. i ), ap- parlienl également à ce premier type. Le deuxième type est beaucoup plus nombreux; il comprend ,,^*-a TURBO, eic. i5 non-seulemenl la phasianelle et le turho pica, mais encore tous les turho à coquille arrondie et abouche tout-à-fait ronde, et tous les trochus à coquille conique, dont j'ai pu voir les animaux. Il y a toujours alors le pet^t pédicule de l'œil; et les diffé- rences spécifiques portent sur les lobes en avant de la léte, et sur les ornemens des membranes latérales. "Ainsi le turho pica est pour la tète un des plus simples, n'ayant que deux très-petits lobes ou vestiges de voile; mais ses membranes latérales sont assez compliquées. Son opercule est mince et corné. Le turhochrjsostomusa leslobes du voile un peu plus gi-ands; mais ses membranes latérales sont simples et sans filets. Son opercule est pierreux, très-convexe et granulé à sa face ex- terne, plat et marqué d'une spirale régulière à l'interne. Nous le dounons, ainsi que son opercule en figure ii. Un ft/rZ>o nouveau , rapporté par M. Péron^ de la forme àxvpica^ mais d'un brun-marron, à bouche nacrée-verdâtre, à ombilic simple, a des lobes et des membranes crénelées, et celles-ci terminées en arrière chacune j)ar un filet. Son oper- cule est également pierreux, mais à surface externe bosselée. Le grand trochus mauritianus a les deux lobes du voile assez larges pour se toucher ; les membranes latérales simples; l'opercule mince et corné. Un autre trochus pyramidal, mais ombiliqué ( Gualtieri^ pi. 60, fig. Cj, se distingue par une cré e élevée et frisée qui borde sa queue de chaque côté, et dent la partie supérieure se loge dans l'ombilic quand l'animal rentre dans sa coquille. Il a de plus trois tentacules cylindriques et obtus de cbaqno côté, sous la meuJjrane latérale. Voyez notre figure 1 j>. i6 VIVIPARE. Le troclnis pharaonius a trois filets attachés de cliaque côté, comme dans la phasianelle , aux bords de la membrane laté- rale, et toutes ses membranes et leurs filets sont ciliés. Voyez figure i3. On peut juger, ^ar AdajisoJi [ Séneg. tab. 12, fig. 1 ),f{ue Vosilin de cet auteur Çtrochus tesselatus^ Gmel. ), est habité jiar un animal iort voisin de celui-ci. Nous en avons un autre sur nos côtes {trochus cinerarius , L.) qui a tous ces fileis , et dans lequel il sont de plus colorés par anneaux noirs et blancs. Midier en donne quatre figures mé- diocres ( Zool. don. pi. 102 ). Il y a des trochus à deux et d'autres à un seul filet latéral. Dans tous, l'opercule est rond, mince, corné. Les sexes sont séparés dans tous ces animaux. Je n'ai point de notion particulière à donner sur les ani- maux des genres démembrés, par M. f/e Latnarck , des tiirbo et des Irochus , tels que les .irca/a/re.y , les maUlots, les cadrans^ les monodontes , les tuirîtelles et les pjravùdelles^ et quoique je n'aie aucun doute que pour l'essentiel ils ne se rapprochent «les autres, je ne puis dire quelles particularités spécifiques les distinguent, n'en ayant pu encore examiner aucun par moi- même Cependant nous voyons déjà dans Plancus ( Conch. min. nat. pi, V, fig. 7 et 8 ) , une scalaire ( tnrbo clathrus , Lin. ), qui se rapporte à notre premier type, et qui montre une longue verge sortie. L'ancien genre npriîa^ divisé aujourd'hui en ne'rites et en nati ce s ., coin\)\e\.e avec les précédens la tribu des coquilles aquatiques à bouche entière. Outre la forme exactement demi- TURBO, eic. i^ circulaire de leur ouverture, ces deux genres se fout remar- quer aussi par la graudeur relative de celte ouverture, et en général de tout le dernier tour. C'est , comme dans \es volutes et autres coquillages dans ce cas, un signe du grand volume du pied qui doit se loger dans cette partie de la coquille. Les animaux qui l'habitent répondent aux deux types que nous avons déterminés plus haut ]K)ur les turbo et les trochus^ et c'est d'après la position de leurs yeux qu'yidcifison les a sé- parés. M. de Lamarck , en adoptant ce caractère pour les ani • maux, y joint celui de la coquille , ombiliquée dans les natices^ et non dans les néviles. Effectivement, dans les espèces dont nous connoissons l'animal, ces formes des tentacules et des coquilles se correspondent; mais l'exemple des turho ^ où des coquilles de même forme générale contiennent des animaux si différens , doit nous mettre en garde , et nous faire attendre des observations plus nombreuses. Nous donnons, figure i4 , l'animal d'une natice ( nerita can- rena , Lin ) , et ligure 1 5 , celui d'uue nérite ( nerita exwia^ L. ). On peut juger à quel point le pied du premier est étendu j ce léger sillon qui divise en deux lèvres le bord antérieur de celui de quelques turbo, est ici une fissure profonde qui établit deux larges lobes, l'un au-dessus de l'autre, b, c, dont le supérieur c est échancré dans son milieu. La même chose a lieu en arrière où l'opercule , au lieu d'être simple- ment collé sur le dos de la queue, se trouve attaché sur un lobe charnu particulier J, qui contribue probablement à for- mer l'ombilic de la coquille, ou du moins qui s'y loge eu partie quand l'animal rentre. La verge de cet individu est sortie; on la voit pendre en a. 3 F{q .^ Cut'ti-r aC>/ . /.am/'^ré- J'cuff • MEMOIRE Sur le grajid Buccin de nos cotes ( Buccinum undatuiî^ Lin. ) , et sur son anatomie. jVIuLLER , en décrivant son tritonium undatum , qui est notre buccin { Zool. dan. II, p. i3), se plaint qu'aucun auteur n'ait songé à faire connoître un animal aussi commun II ou- blie la description de Lister ( Exerc. anat. II ^ p. 68 ) qui est beaucoup plus exacte que celle de Midler lui-même, non-seulement parce qu'elle est anatomique ,mais encore parce que Lister y parle en détail de deux parties extérieures dont Midler ne fait aucune mention, la verge et la trompe. Cependant Lister n'a point donné encore des détails sufïi- sans , ni des ligures assez claires ; et les autres naturalistes qui ont fait représenter des animaux de buccins, se sont bornés à l'extérieur : tels sont Fabius Columna {de purpura^ p. i6) , copié dans Lister ^ tab. anat. 8, Gg. 7 , pour le buc' cinum arcularia^ Réauinur { Mém. detacad. l'^ioet 1711) 2 GRAND BUCCIN. pour le huccinum reticulatum ; Adanson ( Séné g. pi. IV, fig. I ) pour le buccinuni miran^ Brug. ; et ( pi. X^fig. i ) pour le buccinum oculatum, ej'usd.:, enûn, Plancus [ Conch. îiiin. not. pi. III ^Jig. 3 ) , pour le buccinum neritceum. Ils ne nous laissent pas même tous juger si la partie al- longée, et qu'ils représentent comme un troisième tentacule, est la verge ou le syphon , et très-peu annoncent avoir re- marqué une trompe. 4|i J'ai eu sur les côtes de la Manche l'occasion d'observer un assez giand nombre de buccinum undatum vivans , et d'en faire une anatomie assez détaillée, que j'ai perfectionnée en- suite par le moyen d'individus conservés dans la liqueur. Je ne donnerai point la (igure de l'animal vivant dans son état de repos; MiUler l'a fort bien rendu : il ne diffère d'ail- leurs alors de celui qu'on vient d'arracher à sa coquille que par la plus grande extension de ses tentacules et de son sy- phon. Quant aux diiférentes positions que la trom[)e et la verge du mâle peuvent prendre , mes figures anatomiques en donneront une idée suffisante. Sa peau est blanchâtre, irrégulièrement tachetée et piquetée de noir. Sa tête n'a point de voile ni de frange j et quand la trompe est rentrée, elle ne laisse apercevoir que les deux longs tenta- cules coniques , à la base externe desquels sont les yeux. Le corps n'a point de membranes latérales, et est par consé- quent dépourvu des filets et autres ornemens qu'on y voit dans certains trochus et iurbo , et que nous retrouverons en bien plus grand nombre dans les haijotides. L'opercule est médiocre , corné , demi-elliptique et attaché sur l'extrémité GRAND BUCCIN. '6 de la queue. La longue trompe et l'énorme verge sont les caractères les plus iVappans de cet animal. On a surtout peine à concevoir le volume de celle-ci, qui égale le pied en lon- gueur, et qui est deux ou trois fois plus large que la trompe, Notre Ggure i , réduite à moitié comme toutes les autres, montre ce buccin par le côté gauche, la trompe rentrée et la verge a réfléchie et cachée dans la cavité branchiale j car elle ne rentre pas dans l'intérieur du corps , et ne peut se retourner. Elle ne paroît pas non plus susceptible de se renfler beaucoup par l'érection , tant se&~tégumens sont épais et peu flexibles. Notre figure 2 représente la trompé b et la verge a éten- dues. Elle exprime très-bien la forme comprimée et élargie à l'extérieur de celle-ci j on y voit les rides transverses qui en sillonnent la surface et la petite pointe a', oîi est percé son orifice. Enfin la troisième et la sixième font encore voir cette partie dans d'autres positions et avec d'autres renflemens. La trompe b est cylindrique et susceptible de s'allonger beaucoup ou de se cacher entièrement dans l'intérieur du corps. Son extrémité est fendue verticalement , et présente deux lèvres hérissées d'épines recourbées en dedans et atta- chées sur la langue. Ce sont les seules dents du buccin^ comme des autres gastéropodes à trompe. Enfin le syphon c est un prolongement du bord droit du manteau , plié selon sa longueur , et logé dans le syphon de la coquille , pouvant la dépasser plus ou moins , ou s'y retirer et s'y cacher entièrement, au gré de l'animal. Ce n'est autre chose qu'an demi-canal qui conduit l'eau 4 GRAND BUCCIN. clans la cavîté des branchies , et dont l'usage est de favoriser la respiration. Celle-ci s'exécute, comme à l'ordinaire par l'intermède de l'eau et au moyen de branchies pectinées qui forment deux rangées de lames triangulaires , dont une grande et une petite. On entrevoit déjà leur position dans notre figure i , oii elles paroissent au travers du manteau en d , d, du coté gauche du plafond de la cavité ; on y voit aussi la position du cœur e, au même côté gauche, entre elles et le foiejet celle des lames mu»}ueuses,/, situées à leur coté droit. La ligure 4 montre une de ces rangées branchiales d, dont les vaisseaux sont injectés d'air, ainsi que la grande veine qui en rassemble le sang et le porte dans le cœur. Le manteau et le péricarde y sont ouverts pour laisser pa- roitre le cœur e, et son oreillette g, que l'on a aussi gonflés par le soulfle. L'oreillette est d'une figure anguleuse, et a des parois assez minces ; le cœur au contraire est rond , très-épais et muni de fortes colonnes charnues à l'intérieur j il a, comme toujours, deux valvules , dirigées de manière à laisser entrer le sang de l'oreillette. L'intérieur du cœur est représenté, figure i3, et celui de l'oreillelle , figure 1 4- Parmi les branches artérielles qui sortent du cœur, nous avons représenté celle qui se rend dans l'or- gane de la viscosité et dans les feuillets muqueux. ( Vojez fi- gure G, ^/ , «7 , z^) ,et celle qui pénètre dans le thorax sous l'œso- phage, et se distribue à la masse charnue du pied et à la trompe. ( Vojez figure ^ , i^j-^r). GRAND BUCCIN. 5 Dans la figure 3 , on a détaché le plafond de la cavité branchiale du côté gauche, et laissé le péricarde et le cœur comme dans la figure 4- On voit les oLjets attachés à ce pla- fond; savoir , en allant de gauche à droite, la petite rangée de branchies d' , la veine branchiale cl' , la grande rangée d , les feuillets muqueuxy*, le rectum /t, et l'anus i , enfin une partie du canal déférent k. Ces feuillets , dont je n'ai point encore parlé , parce que je ne les ai point observés dans les pectines sans sjphon, et que j'en ai seulement vu des vestiges dans la jantine^ sont des parties dont les fonctions me paroissent fort obscures. II ne faut pas les confondre avec l'organe que j'ai appelé de la viscosité, et qui est toujours près du cœur, d'un tissu tout différent , et muni d'un canal excréteur. Cet organe existe indépendamment des feuillets , et on le voit aussi dans notre buccin',, en situation, figures i, 3 et 5, et ouvert, figure 6, en /,• mais les feuillets sont toujours attachés au" plafond de la cavité branchiale. Ils sont moins nombreux, moins élevés, et surtout beau- coup moins délicats que ceux des branchies. Leur tissu est d'apparence glanduleuse, et leurs intervalles sont remplis d'une quantité prodigieuse de mucosité qu'ils paroissent sécréter. Je soupçonne que ce sont eux qui produisent et façonnent les capsules plus ou moins compliquées , dans lesquelles les œufs et les petits de plusieurs gastéropodes à syphon sont logés pendant quelque temps. Cependant les mâles ont de tels feuillets aussi bien que les femelles, mais plus petits. En seroit-il comme des mamelles des quadrupèdes, que les mâles ont aussi , quoiqu'elles ne leur servent poiat à donner du lait? 6 GilAND BUCCIN. Tout le fond de la spire est partagé longitudinalement et à- peu-près en portions égales , par le foie et par le testicule que l'ovaire remplace dans la femelle. Ou distingue aisément les deux premiers l'un de l'autre, à la couleur et au tissu. Le foie est brun et grenu ; le testicule blanc et lisse. Il naît de celui-ci un très-petit cordon déférent, replié mille fois sur lui-même avant de grossir et de se séparer de la masse , pour suivre le côté droit du corps , pénétrer dans la verge, y faire de nom- breux zig-zacs, et se terminer «nOn à la petite pointe de son extrémité. , La figure 5 représente cette partie. On voit en m, m, les nombreux replis qu'on pourroit appeler épididyme. La verge a, ouverte sur toute sa longueur, montre à la fois les fibres qui remplissent sa substance, et le canal tortueux qui occupa son axe. Il est probable que quand la verge est en érection, ce canal se trouve redressé. Dans cette figure , ainsi que dans la sixième , n , n est le testicule , o , o le foie. Avant de parler du canal intestinal, il est bon de décrire la trompe qui entraine l'œsopliage dans ses divers dévelop-r pemens. Organisée avec un merveilleux artifice, elle n'est pas simplement pourvue , comme celle de rélé[)hant , des mou- vemens de flexion , joints à uu allongement et à une rétraction bornés ; mais elle peut rentrer dans le corps en se repliant au dedans d'elle-même, de manière que sa moitié de la base contienne et renferme fa moitié de la pointe^et elle peut en sortir en se développant , comme un doigt de gant , ou comme les cornes d'un colimaçon terrestre: seulement elle n'est ja- mais complètement déroulée en dedans j mais elle y est tou- ■ jours doublée sur elle-même. GRAND BUCCIN. ^ On peut se la représenter comme formée de deux cylindres flexibles qui s'enveloppent, et dont les bords supérieurs sont unis, de manière qu'en tirant en dehors le cylindre intérieur, on l'allonge aux dépens de l'autre, et qu'en le repoussant, on le raccourcit, et on allonge l'exlérieurj mais on l'allonge du côté supérieur, parce que ce cylindre extérieur est fixé aux parois de la tête par son bord inférieur. Qu'on se représente maintenant une multitude de muscles longitudinaux , tous très-divisés par leurs deux extrémités. Les lanières de leurs extrémités internes ou supérieures se fixent aux parois du corps ; les autres aux parois internes du cylindre intérieur de la trompe dans toute sa longueur et jus- qu'à son extrémité. On conçoit que leur action doit faire rentrer ce cylindre et toute la trompe en dedans. Lorsqu'elle y est, une grande partie de la surface interne du cylindre intérieur vient à faire partie de l'externe du cy- lindre extérieur, et c'est le contraire lorsque la trompe est allongée et sortie. Les insertions des muscles varient en con- séquence. L'allongement du cylindre intérieur par le déroulement de l'extérieur, ou, ce qui est la même chose, le développement de la trompe , est produit par les muscles intrinsèques et annulaires de celle-ci. Ils entourent toute sa longueur , et c'est en se contractant successivement qu'ils la chassent en dehors. Il y en a surtout un , près de l'endroit où le cylindre extérieur s'attache aux parois de la tête, qui est plus robuste que tous les autres. Lorsque la trompe est allongée, ses muscles rélracleurs, en n'agissant pas tous à la fois, servent à la fléchir de côté et 8 GRAND BUCCIN. d'autre et ilans ses différens points, se tenant réciproque- ment lieu d'anlagouisles pour cet office. Les figures 8 , 9 et i o expliquent à l'œil ce mécanisme in- téressant. En (igure 8 , la trompe est à demi-retirée en dedans. Le cylindre externe a enveloppe la moitié de l'interne Z>, dont le bout c est le bout de la trompe. Les niuscles qui Torit retiré en dedans, J, d , sont dans l'état de contraction. En e, se voit le grand muscle annulaire qui sert à pousser le cylindre interne en avant , et à allonger la trompe. En figure 9 , ce muscle et toutes les fibres annulaires ont exercé une grande partie de leur action. La trompe est fort allongée, et ses muscles rélracteurs d^ d sont étendus et à découvert: le cylindre extérieur a est fort court , et l'intérieur b fort long. En ligure 10 , on a fendu les deux cylindres sur toute leur longueur , pour montrer ce que Tinlerne contient, et de quelle manière les muscles rélracteurs se distribuent sur ses parois inlernes. Le corps y est un peu plus entr 'ouvert, afin de montrer les attaches que ces mêmes muscles y prennent. Dans le cylindre intérieur sont renfermés la langue avec tout son appareil e, e, les canaux salivairesy, /", et la plus grande partie de l'œsophage g ^ g '^Xe but principal de l'allon- gement de la trompe est de porter l'extrémité de la langue sur les corps que le buccin veut entamer et sucer. La langue est comme à l'ordinaire une membrane carti- lagineuse, armée d'épines très-crochues et très-aiguës j mais elle n'a pas ici , comme dans les tinbo et dans d'autres gas- téropodes, une grande longueur. Elle est tendue sur deux GRAND BUCCIN. 1^ cartilages allongés qui peuvent écarter ou rapprocher succes- sivement leurs deux extrémités , et se mouvoir eux-mêmes dans leur totalité , en avant ou en arrière. Cette langue, ces cartilages et leurs muscles occupent la moitié de la longueur de la trompe, comme on les voit en e., e , figure jo. Nous les représentons , figure 1 1 , où le bout actif de la langue, tendu sur les deux pointes de ses cartilages , est mar- qué a-j les muscles qui tirent les cartilages en arrière b; ceux qui y retirent la membrane linguale c, c; ceux qui la ramènent en avant, et qui en même temps rapprochent l'une de l'autre les extrémités antérieures des cartilages^, dj ceux qui pro- duisent deux effets précisément contraires e , e 5 l'œsophage g 1 g't les canaux salivaires /, f. Ainsi quand les cartilages se resserrent en avant , la langue étale ou abaisse ses épines en se portant en avant, et quand ils s'écartent, elle redresse ces mêmes épines en se recu- lant. C'est la répétition de ce mouvement , aidée peut-être de la vertu corrosive de la salive , qui entame les coquilles les plus dures. Les canaux salivaires s'ouvrent aux deux cotés de ces épines antérieures de la langue, et l'œsophage commence au-dessus. Comme les glandes salivaires sont dans le tronc de l'animal, leurs canaux sont aussi longs que la trompe. L'œsophage suit l'axe de la trompe; par conséquent, lorsque celle-ci est dans une grande extension , l'œsophage est à-peu-près droit; quand elle se retire en arrière, l'œsophage est plié en deux, une portion. dans la trompe, et l'autre qui se fléchit sous elle, pour retourner en avant vers la tête où ce canal est retenu par la bride que forme sur lui le cerveau. Il se replie alors 2 w G*RAND BUCCIN. une seconde fois, et va en arrière débouclier dans l'esiomac qui se trouve immédiatement derrière le cœur. On le voit de profil dans cette position, en ligure n. Un }>eu en avant de l'estomac est un très-petit jabot ou espèce de cœcum A, figures 6,76! 16; l'estomac lui-même /, figures 6 et 16 , est médiocre, à- peu-près rond; sa membrane interne est ridée irrégulièrement. L'intestin A, figures 6 et 16, est fort court et se termine promptement dans un gros rectum h, figure 3, et/?, (igure 6 et iG, qui a dans son intérieur des cotes longitudinales fort saillantes, et qui occupe, comme à l'ordinaire et comme nous l'avons dit, le bord droit de la voûte de la cavité brancbiale , n'ayant plus à droite dans le mâle que le seul canal déférent A, figure 3. Les parois du rec- tum sont épaissies j)ar unesubstance blancbàtre, grasse et un peu grenue, que j'ai retrouvée dans divers autres animaux de cette famille , sans en connoître l'usage. Dans la femelle la place du canal déférent est occupée par l'utérus, qui y fait une saillie mar- quée , à cause de son épaisseur ; ses parois sont en effet for-r mees de deux substances glanduleuses , une jaunâtre et une autre blancliàlre, et ne laissent entre elles qu'un intervalle comprimé qu'il iaut que les œufs traversent. . . ■ L'ovaire j)artage avec le foie, comme le testicule dans le mâle , la plus grande partie des tours de la spire. Le cerveau est placé sous la trompe et sur la partie anté- rieure du pied: c'est sa position ordinaire 5 mais dans cette espèce, la grandeur de la trompe et de son appareil muscu- laire le fait puroître plus éloigné de ce que l'on nomme com- munément la tête dans les mollu-^ques gastéi opodes. Nous l'avons marqué j, figure 7. ïl enveloppe, comme à l'ordi- naire, l'œsophage ^, d'un cordon nerveux dans lequel passe GRAND BUCCIN. n aussi l'artère de la tête et de la trompe r, r, et il envoie des nerfs partout le corps, tels que u^ qui se rend dans la spire et aux viscères; v, v, v , qui vont à la trompe et à ses muscles j "W, au tentacule; jc, jc, jr, dans l'épaisseur de la masse charnue du pied. Cette ligure 7 a en général l'avantage d'assez bien expliquer les rapports des parties situées dans le thorax ou dans toute cette portion du corps placée sous la cavité branchiale. On y a fendu la peau suivant la ligne 55 , et on l'a rejetée sur le côté droit. Le disque du pied i , i , et sa masse charnue ont été coupés suivant un plan vertical, pour montrer de quelle manière le muscle 2, qui fixe l'animal à la spire de sa coquille, se distribue en divergeant 2', 2', dansla masse charnue; 3 est le rebord postérieur du manteau; 4^ l'opercule. La tête a été ouverte pour iaire voir , par son côté interne, le trou qui laisse sortir la partie antérieure de la trompe Z»; les muscles du coté droit, qui altachoient la trorripe aux côtés du corps 6,6, ont été détachés , et le corps de la trompe lui- même rejeté sur le côté droit pour laisser à découvert l'œso- phage et son repli g, gj le cerveau j; ses nerfs vv, u , w, jcxjc'j les glandes saiivaires z, z; le canal excréteur de celle du côté gauche j-,jk; l'artère principale de la tête et de la trompe r /•; euOn les muscles rétracteurs de la trompe du côté droit encore attachés aux parois du corps. En 10, 10 , se voient les restes des attaches de ceux du côté oauche 66. c N. B. Cette figure a été mal placée dans la planche :1e pied 1,1, devroitêtrehorizonlal, au lieu d'être dirigé verticalement. 1 /■'tjf.J, i i'twtt-r {/e/ . JUCCimrM UJVnATUM. C/vJti^t j-cit/p. MEMOIRE SU7' rHALWTIDE , OU OrEILLE DE MER; SUr le SiG.^RET j sur le genre Patelle et ses démeni' bremens y savoir : la Fissurelle ^ I'Em^^rgi- NU LE _, la Crepidule, la Nai^icelle et le Cabochon s enfin sur I'Oscabrion et la Ptérotrachée, V^'ROYANT avoir donné dans mes anatomies des turbo et des huccins des notions suffisantes sur les pectinibranches ordi- naires ou à coquilles turbinées, je vais terminer l'histoire des gastéropodes par ceux des pectinibranches qui s'éloignent un peu de cette forme commune. J'ai réuni tous ces genres afin de mieux prouver qu'il ne faut pas toujours se hâter de conclure de la forme de la co- quille à celle de l'animal j la coquille du sigaret considé- rée sous certains rapports ressemble à celle de l'haliotide , sous d'autres à celle des hélices ; celle de l'haliotide , comme la sienne, ressemble à beaucoup d'égards à celle de quelques espèces qu'on a rangées parmi les patelles; et cependant les deux genres dont nous parlons n'ont point des animaux analogues. Celui du sigaret ne ressemble ni à ceux des ha- liotides, ni à ceux des hélices , ni à ceux des patelles, mais bien à ceux des buccins. Les fissurelles et les eraarginules , que leur coquille avait 2 MEMOIRE fait ranger avec les patelles par tous ceux qui ont précédé Bruguières et M. deLamarckse trouvent cependant avoir des rapports beaucoup plus marc[ués avec l'haliotide. On voit enfin par l'exemple de la patelle que les branchies elles-mêmes, leur ligure extérieure et leur situation ne sont pas toujours un indice infaillible de l'organisation intérieure , car elle diffère beaucoup à cet égard, des phyllidies, et même des oscabrions, c[uoique ses branchies ressemblent absolu- ment aux leurs^. Ce cjue les haliotides, les patelles , les fissurelles, les emar- ginules, les oscabrions et leurs démembremens ont de plus remarquable , ce qui fait de tous ces animaux une famille très- particulière dans l'ordre des gastéropodes, c'est cju'il est im- possible d'y apercevoir cette séparation des sexes , générale dans les autres pectinibranches, ni même ces sexes réunis, mais avec un appareil développé, et propre à un accouple- ment réciproc|ue qui distingue si éminemment dans tout le règne animal les gastéropodes que j'ai appelles pulmonés , nudibranches et tectibranches. Aucun individu des genres que je viens de nommer ne m'a offert autre chose qu'un ovaire plus ou moins développé , mais dans la composition duquel entrent quelques parties glanduleuses qui pourraient être regardées comme servant à la sécrétion du sperme, en sorte que je suis assez porté à croire que ces animaux sont des hermaphrodites qui peuvent se suffire à eux-mêmes comme les acéphales. Du SiGARET. Le SiGARET s'éloigne d'eux encore en ce point ; il a comme les pectinibranches ordinaires les sexes séparés , et la verge SUR LE SIGARET. 1 du mâle ressemble nommément beaucoup à celle des buccins. Toutefois, il s'en faut que sa ressemblance avec les buc- cins ne soit complète, et l'énorme ampleur aussi-bien que l'épaisseur charnue de son manteau qui cache entièrement sa coquille aux yeux, le distingueront toujours suffisamment de tous les autres coquillages. C'est ce manteau qui lient vraiment Heu de coquille, et qui en fait les fonctions, ayant à lui seul une échancrure et un canal qui représentent à la fois le syphon pierreux et le syphon membraneux des autres mollusques de la famille des buccins, des murex, etc. La véritable coquille que ce manteau renferme a l'air de n'être destinée qu'à le soutenir et à lui donner un peu de consistance ; elle a son bord bien entier, en sorte qu'à elle seule elle ferait placer le sigaret parmi les turbinées à ouver- ture ronde, tandis que la configuration de son manteau lui donne réellement le genre de vie et les fonctions des turbi- nées à ouverture échancrée. Je crois être le premier qui ait fait connaître cet animal ( Bulletin des Se. ) d'après quelques individus apportés du Sénégal, que M. de Lamarck avait bien voulu confier à mon examen. AduTison, qui en avait trouvé fréquemment la coquille dans les sables de l'embouchure de ce fleuve , dit expressé- ment qu'il n'en a point vu l'animal. ( Sénég. p. 24. ) Il est vrai que Muller représente sous le nom de bulla veliitina^ Zool. Dan. III. pi. loi.Jig. 1 — 4, un animal que son éditear A ôildgaardt regarde, n». 2900, ainsi que Fabri- cius, Faun. Groénl. n». SSy, p. 890, comme identique avec 4 MÉMOIRE I'Helix Haliotoidea de Lùmœus, que nous considérons icr comme le sigaret. Mais cette coquille de MUller est toute différente de la nôtre , ayant des côtes longitudinales , et une ouverture presque circulaire; c'est d'elle que Cheninitz fait son turbo neritoides ( Conch, X, p. 3o6, t. i65, f. i SgS — 99) , et Martini son cû!ft)2«j/ac//,s( Conch. I, p. 194 — 197 , t. XVI, f. i5i — i54).Elle avait été expressément distinguée de l'hélix haliotoides par Millier lui-même dans son Prodromus , no. 2900 et 2922. Je ne crois pas en effet que l'on puisse douter que Linnaeus n'ait entendu par hélix haliotoidea, notre sigaret. Et la co- quille de Millier, si ce n'est pas une espèce particulière, répondrait plutôt à Xhelix neritoïdea de Liniiaeus encore très-jeune. Il suffit, pour s'en convaincre, de jeter un coup-d^ïsH sur les phrases caractéristiques et sur les ligures citées dàîis la Xllme. édition Gualtieri , 64, I, pour le neritoidea, et 79, F, pour Y haliotoidea : toutes les autres figures citées sous cette dernière espèce, conviennent aussi au sigaret; excepté Bonani : MusKircher, n». 404 , qui est le neritoïdea. Ginelin, comme à son ordinaire, n'a rien débrouillé; au contraire, il a supprimé la citation de Gualtieri, qui seule expliquait X^neritoïdea (i). J'ai eu depuis de nouveaux individus de sigarets, rapportés (1) N. B. iJhel. neritoïdea de Lin. n'a rien de commun avec Vhel. jieri^ toïdes de Chemnilz, ?iel. naùcoides , Drap. Moli. de Fr- pi. "V, f. 26—27^ qui est un hélice terrestre. SUR LE SIGARET. 5 de risle de France par M. Mathieu , et mieux conservés que les premiers. Leur manteau fongueux est ovale; sa l'ace su- périeure est bombée , et irrégulièrement creusée de quelques sillons. Elle doit avoir dans l'état de vie une teinte toi't brune. Sur le bord antérieur, un peu vers la gauche, se montre l'é- chancrure que continue en dessous un demi canal, qui con- duit à la cavité branchiale. Celle-ci est située au dessus du col , comme elle le serait dans un buccin ou tout autre pec- tinibranche à grande coquille. Le pied est sous le manteau, et de même forme, mais beaucoup plus étroit en tout sens. La tète a la même forme que celle du buccin; déprimée, et portant à chaque angle un tentacule aplati, qui a l'œil au côté interne de sa base. La bouche forme une petite trompe; l'anus est à gauche vis-à-vis le demi canal ; et à droite dans le mâle , est la verge, aussi grande à proportion que celle du buccin , et terminée par un petit filet pointu. Dans l'état de repos elle se replie et se cache dans la cavité branchiale. Quand on fend la peau supérieure ou l'épiderme fongueux du manteau, on découvre la coquille, dont l'existence n'était nullement manifeste à la vue. On l'enlève aisément , car elle ne tient au corps que par un petit muscle inséré près de lacolu- melle. On distingue alors aisément (Jig- 5), au travers de la peau inférieure, les principaux viscères; les branchies, qui occupent obliquement en écharpe le plafond de la cavité branchiale, par deux bandes de petites lames transverses; le cœur et son Oreillette situés en arrière vers la gauche ; le foie et l'organe de la génération. On peut alors fendre le plafond de la cavité branchiale , pour voir immédiatement les branchies comme en fîg. 6. Et en ouvrant la peau du cou et celle de l'abdomen, comme 6 MÉMOIRE en fig. 7 , on peut , par une dissection aisée , développer les viscères plus intérieurs. La masse charnue de la bouche et les glandes salivaii-es sont assez considérables ; la langue ar- mée d'épines comme à l'ordinaire se prolonge beaucoup et se roule en spirale. L'œsophage donne par le côté dans un sac stomachal simple placé au côté droit; le pylore est près du cardia j l'intestin assez court proportionnellement ne fait que deux replis avant de se rendre à l'anus. Le foie et l'ovaire dans la femelle ou le testicule dans le mâle remplissent le reste de l'abdomen. Celui-ci a un long canal déférent très- replié, qui se termine dans la verge. En un mot, pour faire du sigaret un buccin il suffirait que les tours de sa coquille , moins inégaux, se prolongeassent en une spirale plus aiguë, De lHaliotide. Venons maintenant à ces gastéropodes herma2)hrodites sans accouplement que nous avons annoncé devoir faire une famille particulière. Quoique Xlialiotis tuherculata ou V oreille de mer or^ dinaire , soit fort commune sur nos côtes, on n'a encore que des figures imparfaites de son animal , et l'anatomie n'en a point été publiée. Il serait difficile de se représenter toute la beauté de ce mollusque d'après les dessins de cl'Argenville , et même d'après ceux d'Adanson 5 c'est pourquoi j'ai cru devoir en donner, fig. 9, un nouveau portrait que j'ai fait à Marseille sur l'animal vivant. Ce qui y frappe davantage, c'est la double rangée de fes- tons découpés en feuilles d'acanthe , et avec bien plus de dé-^ SUR L HALIOTIDE. *J licatesse que je n'ai pu le rendre, qui entoure la base du pied, et forme tout autour de la coquille une riche gar- niture. Le vert de pré, et le blanc s'y marient agréablement; des filamens déliés d'un vert foncé alternent avec les fes- tons , et des tubercules verdàtres couvrent l'espace assez large qui sépare les deux franges. Cet ornement magnifique n'est pas aussi complet dans toutes les espèces. JJhaliotis iris et quelques autres n'ont qu'une seule rangée de festons et de filamens sans tubercules; mais quelle que soit la garniture des côtés, il n'y a toujours sous la tête qu'une membrane festonnée simple , divisée en deux lobes par une échancrure. Deux longs tentacules verts sont placés sur ces lobes qui les enveloppent quelquefois, et un peu en arrière et en dehors sont deux petites productions ciliudriques qui portent les yeux. C'est ce qui a fait dire que les haliotides , par une exception particulière parmi les gastéropodes aqua- tiques , avaient quatre tentacules ; mais cela n'est pas plus vrai pour elles, que pour beaucoup d'autres genres marins qui ont aussi les yeux placés sur une proéminence : on peut surtout en voir une bien marquée dans la phasianelle. Entre les deux grands tentacules et les deux lobes dont nous venons de parler ;, est une courte trompe charnue. L'animal porte sa coquille de manière que la spire est sur sa queue , et l'échancrure que forme à l'extrémité opposée le trou non encore fermé, sur son col. Ainsi le bord columel- laire est sur sa droite , et le bord le long duquel règaeut les trous sur sa gauche. Le manteau est court et ne déborde point la coquille , à laquelle l'animal est attaché par un seul large muscle ovale , qui se fixe à peu près au milieu de la concavité du dernier tour 8 MÉMOIRE un peu plus vers la droite , c'est-à-dire vers le côté colu- mellaire. La cavité branchiale est située au côté gauche de ce muscle, et la masse des viscères contourne le même côté , et le bord postérieur, en passant sous la cavité branchiale. Le manteau à l'endroit où il couvre la cavité branchiale a une longue fente , sur laquelle régnent les derniers trous de la coquille. Trois ou quatre filamens qui garnissent les bords de cette fente passent par ces trous et il n'est pas im- possible que l'eau entre et sorte aussi par ces ouvertures quand l'animal ne veut ou ne peut pas l'introduire par la voie ordinaire de l'échancrure. Le lobe du) manteau , qui est séparé du reste par cette fente, est placé contre la columelle, et en déborde quelque- fois l'extrémité, quand l'animal se contracte dans sa co- quille; mais du reste le manteau de l'haliotide ne se pro- longe point en tube, ni en syphon, comme dans les buccins, volutes etc. Cette fente qu'il a sur la cavité branchiale est une disposition toute contraire, et dont je ne connais pas d'autre exemple parmi les turbinées. Les emarginules de La- marck sont même les seuls gastéropodes où l'on observe une pareille fente , mais elle est établie sur le milieu du devant du corps , et non , comme ici , sur le côté gauche. Quand , après avoir détaché fanimal de sa coquille, on écarte un peu les bords de la fente, comme enfig. ii , on voit que le rectum répond à son fond, en sorte qu'il ne serait pas impossible que le trou de la coquille le plus voisin servît à l'animal pour se débarrasser de ses excrémens. On remarque aussi que la cavité branchiale a tout son plancher occupé par deux longs peignes prismatiques b b , composés de SUR L nALIOTIDE. g de feuillets branchiaux , et une partie de son plafond et de son côté gauche, par cet organe de la viscosité ce, que nous trouvons constamment de la même forme dans tous les pec- linibranches, et que je suppose toujours avoir pour fonction de fournir une enveloppe aux œufs quand l'animal les dépose au dehors. En continuant l'examen de l'animal enlevé à sa coquille, on observe derrière la cavité branchiale une pochée, que l'on soupçonne aisément être le péricarde et qui l'est en effet. En l'ouvrant comme enjig. 12, on aperçoit d'abord une oreillette e longue, demi-transparente, toute frangée sur ses bords, qui reçoit un vaisseau de la branchie droite 6. Plus sur la gauche, et vers le fond, on trouve ce que je n'ai point encore vu parmi les gastéropodes , uue deuxième oreillette J^, qui reçoit le sang de la branchie gauche b ; mais ce qui est plus curieux encore et non moins inoui parmi les gastéropodes , le cœur g est un ciliudre charnu au travers duquel passe le rectum , absolument comme dans les bivalves. J'avais été long-temps sans pouvoir découvrir de véritable cœur, quand j'imaginai de fendre avec précaution la pre- mière tunique du rectum qui me semblait un peu enflée et à lac]uelle je voyais adhérer les deux oreillettes; je reconnus aussitôt que cette première tunique était vraiment le cœur. Elle a intérieurement dans sa partie postérieure des colonnes charnues très-marquées , et chaque oreillette y communique de son côté par un orifice muni de deux petites valvules. On a représenté plus en grand , le cœur ^ les oreillettes et l'appareil de la petite circulation,^^. i3. Je n^ ai pas besoin de dire que le grand vaisseau ^ ,^^-. i3, qui va de chaque branchie à l'oreillette , est la veine bran- 2 lO MEMOIRE chiale. A la face opposée de la branchie est l'artère bran- chiale i, i, Jig- 13 et i3, qui tire comme à l'ordinaire son origine du tronc commun auquel aboutissent les veines du corps. Pour découvrir l'aorte, il faut disséquer l'animal par dessous, et enlever son pied^ comme eujig. i6 et 17. Quand on a écarté l'œsophage et l'estomac, et ouvert le péricarde et la cavité branchiale, on retrouve dans un autre sens tous les organes dont nous venons de faire mention, et que la^^. 1 7 désigne par les mêmes lettres que laj^^. 1 2. Et l'on voit de plus l'aorte k, qui sort du cœur par la même extrémité où le rectum y entre, marche transversalement, et après avoir donné des branches /, //z, n, aux intestins et aux parties voisines , se rend en o dans le muscle prin- cipal Aj d'où elle ressort par le devant pour se rendre à la masse charnue de la bouche en p,Jig. 16. Cette masse qq ,Jig. i4, 16^ 17, donne naissance au canal intestinal comme dans tous les gastéropodes et les céphalo- podes. En l'ouvrant, on y observe deux plaques latérales cornées, minces, sans dentelures rr^^g. i5, seuls vestiges de mâchoires j et entre ces plaques une langue armée d'ai- guillons s , qui se prolonge en dessous et en dehors de la masse, en un long cône t, fig. 16, garni aussi d'aiguillons en dedans et terminé par une double pointe. Les glandes salivaires uu, sont fort petites. Le pharynx naît de la face supérieure de la bouchej il est fort dilatable, et divisé par des plis , en trois côtes longitu- dinales , finement ridées en travers. A sa suite vient un petit œsophage «j, puis un premier estomac de forme oblongue qui se termine dans l'épaisseur du foie en x\ Ses parois pré- SUR L HALIOTIDE. H sentent h l'extérieur un tissu glanduleux , et à l'intérieur uu grand nombre de })etites stries longitudinales. Vers son fond est un orifice r^ où plusieurs vaisseaux hépatiques aboutissent et versent leur bile. Une forte valvule semi-lunaire z , le sé- pare d'un deuxième estomac F, qui est plus petit, a des stries transversales _, et deux orifices G O, pour les vaisseaux, biliaires. Dans son fond est une double arête longitudi- nale, et à la partie opposée une proéminence pointue H, qui en rétrécissent la cavité en cet endroit. Une petite valvule L, le sépare du duodénum M, qui après être sorti du foie remonte parallèlement au premier estomac et à l'œsophage, se courbe un peu vers la droite au devant du muscle principal , se replie sur lui-même en N , retourne en arrière parallèlement à son premier chemin, arrivé vis-à-vis le péricarde en Q se replie pour y pénétrer, est alors enveloppé parle cœur^, et en ressort pour former le rectum A, qui est suspendu au plancher de la cavité branchiale, et se termine à l'anus vis-à-vis la fente de cette cavité, comme nous l'avons dit en commençant. Le système nerveux ressemble assez à celui de la pha- sianelle et d'autres pectinibranches. La partie supérieure du colUer œsophagien au Ueu d'être renflée au milieu pour for- mer une sorte de cerveau , est un simple cordon , renflé seulement aux deux extrémités en deux ganglions «.a, j*?^. lo, i4 et i6. Cependant ce cordon transverse donne quatre filets nerveux, ^(i,Jig. i4, aux parties antérieures de la tête et surtout à la trompe. Les nerfs des tentacules et des yeux partent des ganglions latéraux a.», qui donnent aussi chacun deux cordons y y, ^g. lo, pour former le colHer autour de l'œsophage , et ces quatre cordons s'unissent en un 12 MEMOIRE ganglion S'^Jig. lo et \Ç) , un peu enfoncé dans la face anté- rieure du muscle principal A. De ce ganglion naissent en avant les nerfs «s qui vont aux viscères et aux parties latérales de l'enveloppe, et en arrière cpiatre cordons^ deux de chaque côté ^ -9- -9", qui traversent le muscle A et régnent jusque vers l'extréinité postérieure cîu pied , eu donnant des filets de chaque côté. Surplus de vingt individus d'haliotides c{ue j'ai examiués, aucun ne m'a rien présenté qui ressemblât h une verge, ni à aucun autre organe d accouplement. Je n'ai jamais trouvé qu'un orifice situé à côté de l'anus, comme l'organe femelle des buccins et des murex, ^ifig. 12, 1 4 et 17 5 un ovaire caché en partie dans l'épaisseur du foie , y aboutit. J'ai observé dans cet ovaire des parties glanduleuses que je ci'ois être les organes mâles j mais comme je n'ai disséqué que des indi- vidus conservés dans l'esprit de vin , je désirerais c£ue les naturalistes des bords de la mer pussent développer plus nettement cette partie de l'organisation des haliotides. De la F I ssurelle. Si l'on excepte les différences qui résultent de la parfaite symétrie de la coquille , et de celle des branchies et des or- ganes correspondans qui en est la suite , on pourrait presque dire que la Fissurelle est une haliotide qui n'a qu'un trou; mais ce trou est placé au sommet d'un cône équilatéral formé par la coquille ; il perce la coquille et le manteau qui la double en dedans , et c[ul se réfléchit tout autour de ses bords. Le pied a la même foi'me ovale que le manteau et en est peu débordé 5 il s'échancre un peu en avant pour SUR LA FISSURELLE. l3 la place de la tête et de la courte trompe qui la termine. Ses côtés sont légèrement rugueux, mais dépourvus de ten- tacules et d'autres ornemcns ; on ne voit que les deux ten- tacules de la tète , à la base externe descjuels sont placés les yeux , qui ne sont portés sur aucun tubercule sensible. Quand on a enlevé la coquille et fendu ou soulevé la portion du manteau c[ui recouvre la cavité branchiale , on voit deux pyramides égales de branchies, une de chaque côté, et entre elles dans le fond de la cavité un petit tube saillant et percé au bout, c|ui est l'anus. Son extrémité est un peu en arrière du trou du sommet de la coquille et il est probable que l'animal peut l'avancer jusques-là quand il doit se débarrasser de ses excrémens. Il est possible en- core que ce trou serve, comme ceux des haliotides, à faire pénétrer l'eau dans la cavité branchiale , ou à l'en faire sortir cpiand la fîssurelle ne veut pas se servir pour cela de la large ouverture cju'elle a sur le cou , comme les autres pectini- branches. C'est aussi en disséquant l'animal par le dos , que l'on voit le mieux, le cœur et ses oreillettes. Chaque branchie donne de son bord externe une veine cjui aboutit clans l'oreillette de son côté. Le cœur, comme clans l'haliotide, entoure le rectum, et reçoit le sang de ces deux oreillettes égales entre lesquelles il est situé. Le rec- tum traverse le péricarde et le cœur, avant de sortir de l'ab- domen entre les deux branchies. Le cœur m'a paru donner une artère de chaque côté qui se dirige en arrière, et il m'a semblé que les veines caves se portent en avant sur le rectum pour aboutir aux vaisseaux du bord interne des brancliies qui sont les artères branchiales. La bouche, les glandes salivaires, ï4 MÉMOIKE la langue , le pharynx , ses replis , sont les mêmes que dans l'haliotide. L'œsophage après s'être porté en -arrière, revient en avant en s'élargissant en une sorte d'estomac qui fait un repli, se reporte en arrière, contourne une partie du foie, revient en avant et y fait encore deux petits replis avant de donner le rectum et d'entrer dans le péricarde et de là dans la cavité branchiale. Le système nerveux a aussi la plus grande ressemblance avec celui des haliotides. Enfin il n'y a pour tout organe de la génération qu'un ovaire placé au dessous du foie. De l E margi nu le. Ce que j'ai dit des rapports de la fissurelle avec l'haHotide est également vrai de l'émarginule ; elle a même un rapport de plus dans une rangée de petits tentacules d'inégale gran- deur qui entoui-e son pied, et qui rappelle un peu la riche parure de l'haliotide ; mais au lieu d'un trou, l'émarginule n'a qu'une échancrure au bord antérieur de sa coquille et de son manteau. Du reste le nombre des branchies, leur position symétrique, celle de l'anus entre elles, les deux oreillettes , le cœur et le rectum qui le traverse , tous les organes de la digestion, le système nerveux enfin sont les mêmes que dans la fissurelle, ainsi qu'on peut les voir dans les figures que j'en donne. J'ai même représenté séparément le système nerveux et l'intérieur de la bouche , afin qu'on puisse mieux juger de la ressemblance de ces organes dans ces deux genres, avec ceux qui leur correspondent dans l'haliotide. SUR L EMARGINULE. l5 A l'extérieur, outre la coquille et les ornemens de son pied , rémarginule diffère encore de la fissurelle parce que ses yeux sont portés chacun sur un gros tubercule situé à la base extérieure du tentacule comme dans l'haliotide. Il m'a paru aussi que les tentacules de l'émarginule doivent être plus courts que ceux de la fissurelle. De la Patelle. La Patelle diffère essentiellement des genres précédens par la position et la conformation de ses branchies. Pour les bien voir il suffît de renverser la coquille , et de rapprocher la tête du pied , comme ewjig. 8 , pi. II. La tète, ^, se termine en une trompe charnue large et courte. Ses tentacules pointus ont chacun à leur base interne un tubercule peu saillant sur lequel est l'œil. Le pied forme un large disque ovale. Le manteau déborde de tous côtés le pied et la tète , et a tout autour , à sa face interne , un cor- don de petites lames triangulaires, minces et serrées, qui sont les branchies. Le nombre en est très -considérable. Dans certaines espèces , comme celle qui est représentée^^. i3 , la série de ces lames est interrompue en avant sur un assez large espace ; dans d'autres , et nommément dans celles de \dijig. 8 , elles se continuent sans interruption. Dans l'enfoncement situé au dessus de la tête on aperçoit du côté gauche le péricarde dans lequel, quand l'animal vit, il est aisé de voir battre le cœur, et du côté droit deux petits tubercules percés chacun d'un orifice. Le plus gros des deux est l'anus. En dehors de la série des lamelles branchiales on aperçoit l6 MÉMOIRE un vaisseau qui fait le tour entier. C'est la veine branchiale , qui reçoit le sang des branchies et qui le porte au cœur par un seul tronc dans les espèces où la série branchiale n'est pas interrompue , par deux dans celles où elle l'est. L'artère branchiale est en dedans de la série des branchies et en suit le bord interne , de la même manière que la veine suit l'externe. Si vous ajoutez un bourrelet légèrement renflé qui renforce tout le bord du manteau, et une infinité de petits filamens charnus cjui le garnissent, vous connaîtrez tout ce que l'on voit à l'extérieur de la patelle. Pour pénétrer plus avant dans sa structure , il faut la dé- tacher de sa coquille à laquelle elle adhère par un muscle presque circulaire et interrompu seulement au devant de la tète. Ses fibres pénètrent tout autour dans l'épaisseur du disque du pied, et s'entrecroisent avec les fibres propres de ce disque , comme dans l'émarginule et dans la fissurelle. L'intervalle entouré par ce muscle est revêtu d'une mem- brane fine c[ui n'est que la partie supérieure du manteau. En l'ouvrant comme enjig. i4 , on découvre le cœur dans son péricarde , et la masse du foie, dans l'épaisseur de laquelle l'intestin a l'air de faire ses nombreuses circonvolutions , tant il est étroitement retenu entre ses lobes. Si l'on fend de plus la peau supérieure de la tête , on aperçoit la masse charnue de la bouche et le cerveau. Pour voir l'ovaire, il faut prendre l'animal par-dessous et enlever le discpie du pied, comme enjig. ii et i3. Alors on observe encore la langue qui se contourne vers le côté droit, et lorsque l'ovaire n'est pas trop gonflé , comme en SUR LA PATELLE, J'J Jig. i3, on distingue quelques-unes des circonvolutions in- férieures de l'intestin. On peut aussi avec un peu de soin enlever, comme en fig. i5, l'intestin et le foie, et laisser l'ovaire, la masse char- nue de la bouche et la langue reposant sur le disque du pied. L'opération la plus difficile est de dégager, comme enjïg. 1 2, les circonvolutions de l'intestin, des parties du foie qui les enveloppent et les serrent de toute part ; quand on y est parvenu , l'on connaît à peu près tous les organes intérieurs de la patelle. La masse charnue de la bouche n'est pas très -grande. Quand on l'a dépouillée de ses muscles, on y trouve de chaque côté une branche cartilagineuse composée de deux pièces; la langue est tendue sur leur extrémité antérieure^ et ce sont leurs mouvemens qui font agir les petites dents dont elle est armée , en les fesant se redresser et s'abaisser. Au dessus est placée une lame osseuse demi -circulaire, fig. 17, tenant lieu de mâchoire supérieure. C'est en tritu- rant les alimens entre les dents de sa langue et cette plaque, que l'animal les divise ; c'est ainsi qu'il entame les corps les plus durs. Il a de quoi fournir long-temps à la détrition qui s'opère sur sa langue même, et de quoi la réparer prompte- ment , car cette langue se prolonge en arrière , en se repliant sur elle-même et en se roulant en spirale , de sorte qu'elle est trois fois plus longue que le corps. Voyez en le dévelop- pement^^. 19. Elle est armée de trois séries de rangées transversales d'épines recourbées en arrière. Les rangées de la série mi- toyenne ont chacune quatre épines, celles des séries latérales chacune deux ; la partie antérieure de la langue et ses épines 3 îS MÉMOIRE ont seules pris leur accroissement et leur dureté. En arrière l'organe est de plus en plus grêle et mou; mais à mesure que le devant s'use, les parties postérieures se développent , se durcissent, et avancent pour succéder à celles qui se dé- truisent ; mécanisme analogue à celui du palais des scares , et qui se retrouve plusoumoins dans tous les gastéropodes. Les gkndes salivaires sont si petites qu'on a peine à les apercevoir. Le pharynx comme à l'ordinaire s'ouvre sur le devant de la masse charnue de la bouche. Il est dilaté , et ses parois , comme dans l'haliotide, ont trois replis saillans et finement plissés en travers, de manière à pouvoir se dilater dans tous les sens {^voy.fig. 7). L'œsophage se rétrécit et se porte en arrièi'e et sur le côté droit , où il se dilate en une espèce d'estomac ,yi^^. 12, qui occupe transversalement le der- rière de l'abdomen. L'intestin se replie six ou sept fois sur lui-même dans des directions assez inutiles à décrire , et finit par se terminer à l'anus , situé comme nous l'avons dit sur le côté droit du cou. L'ovaire est placé sous le foie, plus vei's le côté gauche. Dans les individus qui ne sont pas prêts à pondre, il n'oc- cupe que moitié de la largeur du disque, et sa structure intime offre à l'œil des différences qui rendent assez pro- bable l'existence des organes des deux sexes. Tel est celui que représente \d. Jîg. i5. Mais lorsque les œufs ont grossi et sont prêts à sortir, il devient plus gros que la masse du foie et des viscères ;, qu'il couvre entièrement quand on re- garde l'animal par dessous. C'est ainsi qu'on le yoïl Jig. 11. L'oviductus s'ouvre à côté de l'anus. Le système nerveux est fort semblable à celui de l'halio- SUR LA PATELLE. 19 tide. Un cordon transverse sur la bouche, se renfle aussi de chaque côté en un gangUon qui donne des nerfs aux yeux, aux tentacules et aux parties voisines. Deux cordons de chaque côté se rendent en dessous pour former un ganglion transversal d'où naissent les nerfs du pied , ceux du muscle circulaire et ceux des viscères. Il y a de plus un cordon transversal qui unit les deux extrémités de ce ganglion mais sans emlirasser l'œsophage ni former par conséquent un deuxième collier. Du Cabochon, Le Cabochon (^capulus M-onii. patella hiuigaricalÂu..) porte comme la patelle une coquille conique et non tur- binée ; néanmoins le sommet en est un peu recourbé en ar- rière , ce qui l'a fait compaier aux bonnets que portaient anciennement quelques peuples de l'orient de l'Europe. On doit aussi remarquer que dans le cabochon le diamètre trans- verse de la base du cône est le plus grand. L'animal est attaché à sa coquille comme celui des patelles par un muscle circulaire, interrompu seulement en avant, pour le passage de la tête, et pour l'entrée de la cavité brancliiale. En effet le cabochon n'a point ses branchies le long des côtés de son pied, comme la patelle, mais dans une cavité au dessus de sa tète, comme le grand nombre des pectinibranches ; mais ce qui le distingue des autres, c'est que ces branchies, com- posées de beaucoup de lames étroites et longitudinales, adhèrent par une seule rangée transversale au plafond de lear cavité 5 le cœur, auquel elles envoyeut le sang qui a respiré, est en arrière sur l'extrémité gauche de cette rangée, 20 MÉMOIRE et le fond du cône de la coquille est rempli par l'abdomen et par les viscères qu'il contient ordinairement et dont je n'ai pas pu faire un examen particulier. Le cabochon se distingue encore des genres voisins par les ornemens de sa tête. Sa bouche est une trompe suscep- tible d'un certain prolongement, et creusée en dessus d'un sillon profond. Ses tentacules portent les yeux à leur face extérieure vers leur base, et sur une partie renflée. Sous la gorge, et en avant du bord antérieur du pied, est une sorte de fraise formée des nombreux replis d'une double mem- brane, qui dans l'état d'extension, sert peut-être à pro- longer le pied en avant et à faciliter la reptation de l'animal. L'anus est vers le côté droit de la cavité branchiale. L'indi- vidu unique dont j'ai pu disposer ne m'a point fait voir d'or- gane du sexe mâle j mais je n'oserais prononcer que ce genre n'en ait point, car je lui trouve dans son ensemble de l'or- ganisation, au moins autant de rapport avec les sigarets et les buccins, cpi'avec les patelles, fissurelles, etc. De la Crépi du le. Je porte un jugement semblable sur les Crépidules Lam. ( patella fornicata j — aciileata j — solea- — crepidu- la, etc. L. ) Leur coquille à base longitudinalement ovale, h pointe obliquement dirigée en arrière et sur le côté droit , est à moitié fermée en dessous et en arrière par une lame ho- rizontale. Cette lame sert à loger et à soutenir la portion saillante du sac abdominal, qui est appuyé dessus. Le manteau passe SUR LA CREPIDULE. 21 dessous. Il garnit comme à l'ordinaire tout le pourtour de la coquille. Sous le manteau , l'on voit en arrière un pied demi- ovale, et eu avant la tête. Les yeux adhèrent à la tète même, sous la base des tentacules. Les branchies forment une rangée transversale de longs fdamens adhérens au plafond de leur cavité, et dont les extrémités peuvent flotter au dehors. L'anus est à droite dans la même cavité , et j'ai cru apercevoir dans quelques individus ime proéminence au côté droit du col que j'ai prise pour la verge. Il n'est pas difficile de suivre de l'oeil les intestins au travers de la peau transparente qui revêt le sac abdominal. L'estomac est vers la droite; l'intestin ne fait qu'un repli avant de se rendre à l'anus ; le reste du sac est rempli par le foie et par les organes de la génération. Je dois les crépidules que j'ai examinées aux attentions de M. Beudant, cjui les a recueillies sur les bords de la Mé- diterranée, aux environs de Toulon, De la Navicelle. Les Navicelles de Lamark , Septaires de Ferussac , et CiMBER de Montfort , {patella neritoidea Gm. et pat. borbonica Bory St. Vincent ) ressemblent par la coquille aux crépidules, excepté que le sommet est symétriquement couché sur le bord postérieur , et que la lame horizontale est moins large ou saille moins en avant. Le caractère le plus marqué de ce genre consiste dans une plaque testacée , mobile, irrégulièrement anguleuse, cachée dans le sac abdominal. Comme je n'ai eu qu'un animal desséché de navicelle, je ne puis décrire avec précision 22 MEMOIRE les connexions de cette pièce singulière, dont je ne connais aucun autre exemple parmi les coquilles. J'ai pu juger néan- moins cjue cet animal est assez semblable à celui des crépidules. Je suis moins instruit sur les Caltptrées Lam. {^patella equestris — p. sinensis — p. trochijomiis — p. auricu- la, etc. L. ), car je n'ai pu encore m'en procurer l'animal; mais la forme demi-turbinée de sa coquille doit faire croire cju'il s'approche encore plus des buccins que les genres pré- cédens. De lOsc abrion. {Chiton.Ij.) M. Poli nous a donné l'anatomie de I'oscabrion (Chi- TON L.) dans son magnifique ouvrage sur les testacés des deux Siciles , et il est à ma connaissance le seul auteur qui s'en soit occupé. Son travail est aussi exact qu'il était possible de le faire sur les petites espèces qu'il a eues à sa disposition j mais comme j'ai pu en disséquer de beaucoup plus grandes, je crois avoir observé c|uelques points avec plus de détails. Celle qui a fait le principal sujet de mes recherches, est représentée de grandeur naturelle , pi. III , Jig. 8 en dessus , Gijïg. 9 en dessous. On sait que les oscabrions ont le dos garni d'un manteau ovale , de substance très-coriace , c[ui déborde de toute part le pied et la tête, et sur' le grand axe duquel est implantée la série longitudinale des valves testacées qui caractérise ce genre. Elles sont ordinairement au nombre de huit; le bord postérieur de chacune recouvre l'antérieur de la suivante, et celui-ci est enfoncé dans un repli reutrant du manteau, d'oià on l'arrache aisément, surtout quand l'animal a séjourné SUR l' ose A BRI ON. z3 quelque temps dans l'esprit-de-vin. La portion moyenne de ce manteau, celle où sont enchâssées les valves coquillières , n'est que membraneuse , et c'est en dehors des valves seu- lement qu'il prend sa grande épaisseur et sa dureté compa- rable à celle d'un cuir mouillé. Les bords épais ne renfer- ment rien , et tous les viscères sont placés sous la partie men- braneuse et protégés par les valves. Quand on examine l'animal eu dessous, l'on aperçoit son pied , beaucoup plus étroit que le manteau , et semblable à celui des doris et des phyllidies. ' Les branchies sont placées des deux côtés, dans l'enfon- cement qui est entre la base du pied et le bord saillant du manteau , ce en quoi l'oscabrion ressemble encore aux phylHdies; mais il en diffère beaucoup par son anus, placé symétriquement en arrière de l'extrémité postérieure du pied, et par sa bouche, qui n'est entourée que d'un petit voile circulaire et plissé comme une fraise, mais auprès de laquelle on n'aperçoit, non plus qu'à la partie supérieure du manteau , nuls vestiges de tentacules. L'oscabrion diffère en cela de tous les autres gastéropodes , puisque les AcÈREs mêmes n'ont mérité leur nom, ainsi que nous l'avons dit , que parce que leuis quatre tentacules sont réunis en une sorte de bouclier quadrangulaire. La bouche est assez renflée, et ridée , et l'on juge aisément que dans l'état de vie , l'animal doit pouvoir la faire saillir comme une petite trompe. Chaque branchie est en forme de petite lame triangulaire., adhérente par le côté le plus étroit, finement striée en travers sur les deux faces, et ayant à chaque bord un vaisseau prin- cipal. L'anatomie fait connaître que le vaisseau du côté exté- 24 MÉMOIRE rieur est la veiue et celui du côté intérieur l'artère. Les stries transversales sont les petits vaisseaux qui se rendent de l'une à l'autre, et où le sang est exposé par sa grande divi- sion à l'action pleine de l'élément ambiant. Pour observer commodément l'intérieur, il faut enlever les valves, et ouvrir la partie membraneuse du manteau où elles étaient enchâssées ,j%. lo, i3, 14. La plus grande partie des intestins est recouverte par l'ovaire / 1-2 F/SSl/RELZA' . 3-^. I^MARGIJVl^LJS . S-iç . PATELLES. -Zh^/t ,rr//^. F.I. . J^-3. ierd-/. ^.^.^ cABocifûJV. j/ c/iÉpinuzi:. â-j^ osaABnio^.y^j;, j^rénorjiACJisi: . ^«^ ..„^ ^a^^p— Bi I wiPniuL'.tiwni MÉMOIRE Sur les THALIDES {Thalla. Brown. ), et sur les BIPHORES ( Salpa. Forskaohl. ) I J_iORSQUE le capitaine Baudin partit pour sa seconde expé- dition , aucun naturaliste n'avoit vu, depuis ^/■0(^7^, les ani- maux appelés par lui ThaUa, ni depuis /^or,sX'ao/î/ ceux que ce dernier a nommés Salpa , et auxquels Bruguière a en- suite appliqué le nom de Biphores ; on n'avoit aucune notion précise sur leur organisation, et c'étoit absolument au ha- sard qu'on les a voit rangés dans les méthodes. Je dus donc rendre les naturalistes, qui partoient avec ce capitaine, attentifs à ce besoin de la science , et je recom- mandai particulièrement à M. PcVo/ïquiavoit pour mission spéciale tout ce qui regardoit Tantropologie et l'anatomie comparée, d'observer et de recueillir, le plus qu'il pourroit, de ces animaux. Dans l'intervalle, M. 5osc fit son voyage d'Amérique j il décrivit, dans sa traversée, plusieurs espèces nouvelles de salpa, et fut conduit à l'idée que les thalia de Brown, ne diffèrent point des salpa pour le genre; c'est ce qu'il a pu- blié, avec plusieurs remarques curieuses sur les habitudes de ces animaux, dans son Histoire naturelle des çer^ , qui i 2. S U R L E S T H A L I D E S fait suite au Buffbn ue Déterville, et qui a été imprimée en l'an X , tome II, pag. 168 et suiv. Un peu auparavant, M. TUesius , naturaliste allemand, naviguant près des côtes de Portugal, y avoit aussi observé et décrit une grande espèce de salpa ; mais il en méconnut le genre, et la publia sous le nom tout-à-fait impropre de tethys vagma dans son Annuaire cV histoire naturelle* Léipsick, 1802, p. i5o, et pi. V et YI; de manière que loin d'éclaircir la matière , il l'embrouilla davantage. Voilà où en étoient les choses , quand le second navire de l'expédition de Bauclin nous arriva. Quoique M. Péron, parla mort, ou par la retraite de plusieurs de ses cama«> rades ait été contraint de s'occuper de toutes les parties de la zoologie, il ne s'en éloit pas moins acquitté avec un bril- lant succès, de la branche à laquelle il s'étoit voué d'abord; et il me rapportoit, entre autres, six espèces de ce genre salpa que j'étois si désireux de voir. J'en rcconn is une au premier coup-d'œil pour être une des thalia de Brown, et Torganisation de celle-là s'étant trouvée semblable à celle des autres pour l'essentiel, la con- jecture de M. BosCy sur l'identité des deux genres , fut complètement vérifiée. Je reconnus de plus par l'anatomie, comme nous le verrons, que les salpa sont Aes Mollusques acéphales, c'est-à-dire, analogues à ceux qui habitent les coquilles bivalv( s; ainsi une simple inspection termina l'em- barras où l'on étoit sur ce genre si bisarrement balotté. Rappelons en peu de mots l'histoire de ce que les na- turalistes ont fait à son sujet. Brown en fut donc le premier créateur , et en publia ETLESBIPHORES. 5 trois espèces sous le nom de thalia\ Hist. naturelle de la Jamaïque, pag. 281. Linnoeus , par une première erreur , dans son édition X." , I. 657, réunit ces trois animaux avec Yarethusa du même Brown , qui ne leur ressemble en rien, qui même est un vrai zoopliyte, comme je le montrerai ailleurs 3 il les réu- nit, dit-je, sous le nom iS! holotliuria. Ce nom étoit mal appliqué à tous égards. Il signifie dans Aristote un animal qui , sans être attaché , ne peut néan- Tuoins se jnouvoir ( Hist. an. lih. I , cap. I ), et qui ne clij- fère des éponges que parce qu^ il est détaché {de part. an. lih. IK, c. V. ) P///ze,lib.IX , c. 47, fait participer l'Ao/o^/izz/ïe à la nature de la plante; il conserve le mot grec qui en effet se^ roit difficile à traduire, car l'étimologie n'en est rien moins que claire. Gaza l'a remplacé par celui de tuher. Il n'y avoit assurément dans tout cela rien qui indiquât les tha~ lia, animaux qui nagent , et qui n'ont point une analogie si marquée avec les plantes. L'usage que les modernes avoient fait du mot, ne con- duisoit pas non plus à l'appliquer aux thalia , car Ron-< delct , hist.pisc. ( de ins. et zooph. p. i25 ), l'avoit donné précisément à celles que Linnœus ajouta depuis aux pre- mières , et dont nous allons parler. On peut dire effectivement qu'à la mauvaise combinaison qu'il avoit opérée d'abord, Linmeus en ajouta une seconde bien plus mauvaise encore dans sa XIl." édition , p. io8g , loqi , en joignant à ces quatre premiers animaux , hol. phy salis , thalia, caudata et denudata , quatre autres es- pèces totalement différentes par la forme extérieure et par 4 SURLESTHALIDES l'organisation intérieure, savoir: \\o\.Jrondosa , pha?ita- pus , tremula, ei peiitactes, et en les plaçant les unes au commence ment, les autres à la fin du genre, de manière à ne pas même laisser soupçonner que celui-ci pouvoit au moins contenir deu x sous-genres distincts. Pallas condamna bien cette réunion {niiscell. zool. p. i53 , et splc. zool. X , 26) , mais il proposa de joindre ces nouvelles ou plutôt ces anciennes holothuries de Rondelet, aux actinies qui ne leur ressemblent guère plus, idée qui ne pouvoit avoir de succès ; et il eut d'ailleurs le tort d'approuver la prétendue analogie établie entre Varethusa et les tlialla. Pallas décrivit en même temps une quatrième espèce vraiment analogue aux trois blialia ou aux Jiolothuries de Linnœus de la. première forme ; c'est Vholothiaia zonaria spic.zool. X, tab. I, fig. 17 , A. B.C.; mais Forskaohl qui ob- serva, quelque temps après, onzeanimaux tous semblables, n'en saisit point le rapport avec les thal'ia ou holothuries de première forme, et en ayant fait un genre sous le nom de salpa, on ne les compta pas parmi les holothuries dans l'édition XIII.'^ du syslema /za^w/'ce, quoiqu'on ait bien rap- porté au genre holothuria les espèces que Forskaohl nom- moh Ji a tularia, et qui n'étoient semblables qu'aux holo- thuries de seconde forme. Muller et Fabricius de leur côté multiplièrent beaucoup ces holothuries de la seconde forme, je veux dire semblables à celles de Kojidelet , à celles ajou- tées au genre dans la douzième édition, à celles que Fors- kaohl avoit nommées j^s/îw/«r/a, de manière qu'aujourd'hui cette seconde forme qui n'auroit pas du appartenir au genre ^ E T L E s B I P II O R E s. fi en occupe la plus grande partie, et que Gmelin s'écrie , ù propos des trois lalia de Brown , an hujus generis ? Ainsi par le revirement de nomenclature le plusbisarre, on conteste leur place dans le genre, aux espèces qui le constituoient seules autrefois; celles qui s'y sont introduites contre toute raison , en chassent les véritables propriétaires j et ce qu'il j a de plus plaisant dans cette révolution , c'est que pendant que les espèces changcoient ainsi du tout au tout , le caractère générique restoit presque le même, et qu'un ou deux mots seulement s'y glissant àchaque édition, le rapprocîioient par degrés de ce qu'il devoit être, pour indiquer réellement les espèces qui marclioient sous sa bannière. Il est sûr que dans l'état actuel des choses, il est infini- ment plus commode, en oubliant tout ce qui a pu se passer auparavant, de détacher du genre actuel des holothurie s\-a. famille la moins nombreuse, et comme à cause de rétabli:» sèment du genre sa/pfl, c'est la première forme, celle des ihalia qui comprend le moins d'espèces, c'est celle que nous séparerons. De cette manière nous altérerons moins la no- menclature aujourd'hui reçue, qui d'ailleurs se rapportera alors entièrement à la nomenclature la plus ancienne de toutes , celle de Kondelet. Bruguière avoit déjà pris ce parti , non pas à la vérité dans le texte de son Dictionnaire des vers, mais seulement dans les planches, où les ^Aa/i'es figurent à la suite des /ioZo- thuries. Apparemment que ce ne fut qu'au moment où il recueillit dans les difterens ouvrages les figures dont il com- posa ces planches , qu'il s'apperçut que deux formes aussi 6 SUR LEST H ALI DES différentes ne pouvoicnt rester ensemble. Voyez Eucycl. meth. planehes d'iiist. nat. vers. pi. 88 et 89. Je Fimitai dans mon tableau élémentaire des animaux y imprimé en l'an V, p. 58c),et M..dela March dans son sys- tème des animaux sans vertèbres, p. 556, en changeant toutefois le nom de tlialia en thalis, parce qu'il y a déjà une plante nommée thalia. M. delà Marck sépare deplusl'are- thuse , des thalies , dont elle diffère en effet beaucoup, et la wGXWVCidi i:)hysalia. Mais ni M, de la MarcTc ni moi,ne fumes assez hardis pour réunir les thalies e^wx bipJiores ou salpa, et nous n'eûmes ni l'un ni l'autre les données nécessaires pour leur assigner leur véritable place dans la méthode naturelle. En rangeant les biphores comme ils doivent l'être parmi les mollusques acéphales , je mis les thalides parmi les mollusques gastéropodes. ^\. de la Marck les mit encore plus loin de leur vraie place , parmi ses radiaires qui répondent aux premières familles de mes zoophytes; mais il laissa les hlphores^AYmi les acéphales. M. Bosc qui avoit cependant vu des unes et des autres vivantes , compléta l'interversion en plaçant et biphores et iJialides dans les radiaires , tout en avouant que leur organisation extérieure ressemble plus à celles ascidies qu'à celles des méduses. C'est en effet à côté des asczAcs , c'est-à-dire, dans l'ordre des mollusques acéphales , et dans la division Aes acéphales nus qu'il faut placer tous ces animaux, et ce mémoire va, j'espère, le démontrer. J'ai eu à ma disposition, comme je l'ai dit plus haut, six espèces de ce genre, toutes rapportées par M. Péron. La première me paroît être la même que le troisième thalia E T L E s li I P II O 11 E s. 7 de Bro"\vn holothuiia denudala de Linnœus ) , et peut-èlre que Je deuxième salpa de l'orslao/il ( scilpa pi/uiata. L. ) La seconde qui est plus analogue aux salpa ordinaires, est à coup sûr le même animal que le prétendu i!c//(/s pagina de Tilesius. Les quatre autres me paroissent ù-peu-près nouvelles; mais leur analogie avec les espèces de Forslcaohlei de Bosc , est assez grande pour que je puisse juger de l'organisation de celles-ci d'après celle des miennes, et pour nie faire étendre à toutes, les résultats généraux que m'ont fournis ces dernières, M. Pérou en a décrit, et MjNL Petit et Lesueur, dessi- nateurs de l'expédition , en ont représenté plusieurs autres, en grande partie nouvelles, qu'ils n'ont point rapportées, et dont je ne parlerai point dansce mémoire, parce que ces messieurs les publieront bientôt, ainsi que les observations intéressantes qu'ilsont faites sur ce,genre et sur tant d'autres. Ce que je dirai suffit à mon objet , et résulte de mon propre travail sur les espèces existantes au Muséum. Je commencepar décrire la première , représentée entière par le côté gauche, fig. i, et ouverte , fig. 3. Espèce première. SALPA CPtISTATA. Cette espèce, comme toutes les autres, est revêtue d'une double enveloppe. L'extérieure est d'une nature intermédiaire entre le car- tilage et la simple gelée j son épaisseur est fort grande dans certains endroits, et sa transpai-ence parfaite. 8 SURI. ESTHALIDES L'inlériciire est membraneuse, mince, d'un tissu ferme, tenace et en apparence homogène. Le corps est d'une forme oblongue, légèrement comprimé par les côtés, et ouvert aux deux bouts. La partie dorsale est plus épaisse que la ventrale; on voit sur son tiers posté- rieur une crête coupée carrément, aa{]g. i , dont on ignore l'usage, et à sa partie antéricureune protubérance arrondie , b, dans l'intérieure de laquelle se loge l'estomac, c. L'ouverture postérieure du corps, cl , e,f , est fort large, coupée en travers, et on l'a comparée à la gueule d'un ani- mal. C'est sans doute ce qui a fait que tous les auteui^s l'ont prise jusqu'à ce jour pour la bouche du hiphore. La lèvre inférieure de celte ouverture, d, f, g, est mince et tranchante. La supérieure d , e , g , ne présente en dehors qu'une saillie arrondie eu tout sens ; c'est que la peau qui la forme, se réfléchit en dedans, pour y former avec son bord rentrant une véritable valvule semi-lunaire qui laisse bien entrer l'eau dans le corps quand l'animal se dilate, mais qui ne la laisse point sortir quand il se contracte. On peut voir la structure de cette valvule dans la fig. 2 où les deux lèvres sont séparées; d,f,g, est la lèvre inférieure simple ; f/, e, g, est lalèvre supérieure réfléchie, et qui a son véritable bord en h. Donner entrée à Feau est en effet la seule fonction immé- diate de cette ouverture postérieure ou prétendue bouche. Ce liquide sort par l'ouverture opposée qui est l'antérieure, puisque c'est celle qui est voisine de la vraie bouche de l'ani- mal. On la voit en i, k , fig. 1 et 2. C'est un simple tuyau cylindrique , terminé par une large ouverture ronde sans valvule j apparemment que quand l'animal se dilate, il ferme ETLESBIPHORES. <» cette ouverture au moyen des anneaux musculaires dont elle est comme cerclée, et qu'il empêche ainsi qi;c l'eau n'entre par là. On conçoit que ce mouvement de dilatation et de con- traction peut servir à l'animal à changer de lieu; lorsqu'il chasse l'eau hors de lui par son ouverture antérieure , la résistance doit pousser tout son corps en arrière. La tunique intérieure du corps forme un tuyau membra- neux qui va d'une ouverture à l'autre, et qui est absolument vide, à l'exception de la branchieZ,;7z, n, qui le traverse en descendant obliquement d'avant en arrière dans un plan vertical. Les autres viscères sont tous entre la tunique ex- térieure et l'intérieure. La tunique intérieure est garnie de bandes colorées en blanchâtre ou en grisâtre qui ont d'abord une apparence vasculaire, mais qui , examinées de plus près, se trouvent être des muscles. Elles ont une disposition particulière et constante pour chacune des espèces, et peuvent bien servir à distinguer celles-ci les unes des autres. Dans l'espèce que nous décrivons , il y en a d'abord en avant deux, o, r, q,p, qui se rapprochent en deux points de leurs cours, s et^, pour former de grandes mailles rhom- boïdales ;puisen vientune simplement circulaire u; ensuite deux autres encore réunies en mailles, vetw, mais leurs points de réunion x et y, au lieu d'être latéraux, comme ceux s et t, des deux premières bandes o, ;•, q, p, sont l'un en dessus , l'autre en dessous. La dernière bande w , donne plusieurs branches z , a , /3 , qui se portent en arrière et se distribuent dans les deux lèvres de l'ouverture posté- rieure. 2. *o SURLESTHALIDES De deux I>andes p ettc^-partent deux languettes de chaque côté, el^,qui se réunissent chacune avec sa correspondante^ pour monter dans la crête a, a , l'une à son bord anté- rieur, l'autre au postérieur. L'organe l, ni, n , qui traverse obliquement le grand vide de la tunique intérieure, et que quelques-uns ont comparé à une trachée artère, n'est autre quelabranchie, mais c'est une branchie singulière. C'est une double membrane formée par un repli de la tunique intérieure , et Hxée d'une part en /, à la partie dorsale et tout près de la bouche , de Tautre en /z , à la partie ventrale, derrière la dernière grande bande musculaire u^. Le bord supérieur de cette espèce de mésentère, est garni d'une infinité de petits vaisseaux transverses tous parallèles entre eux, ce qui rappelle parfaitement la structure des branchies dans les acéphales ordinaires ou coquillages bi- valves. Seulement dans ceux-ci il y a quatre feuillets bran- chiaux , et dans nos biphores il u'j en a qu'un seul. On verra par la suite une autre modification de cet organe dans le§ ascidies. Il y a vers l'extrémité u , un petit cercla irrégulier , vas- culairc ou nerveux que j'ai pris long-temps pour une ou- verture, et que je supposois conduire dans l'intérieur de la branchie, mais je ne l'ai point trouvé percé , et il m'a été impossible d'y introduire le soufle. De l'extrémité l de la série des petits vaisseaux, il en part un plus grand z, qui reçoit sans doute le fluide qui a circulé dans la branchie. Il traverse sous la bouche, et va gagner le coeur situé au cùlé gauche, en cT. Ce coeur est mince, en forme de fuseau , en- veloppé dans son péricarde, et l'un et l'autre sont si traoïs- EfLESBÏPHORES. ii pareil^, qu'on a toutes les peines du monde à les voir; mais sa nature de coeur n'est pas douteuse, car M. Pérou en a observé les pulsations sur l'animal vivant ; il en a vu sortir un sang un peu jaunâtre. Il paroît que le coeur ayant reçu le fluide qui à respiré, le distribue au corps , et sur- tout aux viscères; on revoit un vaisseau sortir vers A, de la masse des viscères, et se reporter vers l'extrémité n^ de la branchie. Il est probable que c'est l'artère pulmonaire; mais toutes ces parties étant si frêles et si transparentes qu'il est impossible de les injecter, ni d'y voir des valvules s'il y en a , on ne peut rien donner comme absolument certain à l'égard de la marcbe de la circulation. La bouclie ii, fig. 2 , est une ouverture ronde dont les bords sont làcbes et plissés; elle est située à l'origine supé- rieure de la braucbie j vers le côté par où l'eau sort du corps. Lorsqu'on y souffle, on remplit l'estomac et le canal in-- testiual. L'estomac C est dirigé en sens contraire du reste du canal; c'est un cul de sac , situé précisément dans l'épaisseur de la protubérance arrondie h , fig. 1 , de la tunique exté- rieure. Il est membraneux, transparent, et contient d'or- dinaire un peu d'une humeur grisâtre. Le canal intestinal, ^ , ^,- est un boyau tout simple, partant de la bouche , et allant directement vers la partie postérieure où il s'ouvre en un anus assez large , tt. Les matières contenues dans cette portion du canal sont verdâtres et filamenteuses. La seule partie qui puisse être le foie, est celle marquée €3 ; mais son tissu est différent de celui que ce viscère a ordinairement Elle est composée comme de gros filamens 3s SUR LEST H ALIDES rangés parallèlement; sa couleur d'un blanc opaque n'est pas non plus celle qu'on voit à la plupart des foies. Cepen- dant l'analogie me force à lui en supposer les fonctiona, JlUe se termine en arrière en un petit filet pointu Z. Tous ces viscères, estomac, foie, coeur, intestin, sont situés en dehors de la tunique intérieure, au-dessus d'elle, sous l'extérieure et dans la position de la fig. 5; ils sont re- couverts par la première. On remarque encore de ce côté dorsal, et parallèlement à ce paquet de viscères, une fente longitudinale , % % ou plutôt un repli creux de la tunique intérieure , qui con- tient plusieurs rides; lorsqu'on en écarte les bords, on y voit plusieurs petits filamens blanchâtres et courts, sem- blables à de petits vers qui y reposent librement et sans y être attachés ; on peut aisément les extraire : j'ignore ce qu'ils sont; peut-être sont-ce des oeufs. Enfin le dernier viscère qui nous reste à décrire, con- siste en deux corps oblongs, situés aussi entre la tunique intérieure et l'extérieure, mais à l'opposite des viscères précédens . c'est-à-dire , au côté ventral du corps. Ils s'étendent depuis la bande musculaire z/, jusqu'à la bande ; il yen a aussi un assez grand nombre sur toute la face inférieure du corps. Il y a de plus à différens endroits de petites tumeurs per- cées d'une fente. Six sont placées assez régulièrement sous la partie ventrale. M. Tilesius leur a donné le nom de spiracula. Il y en a aussi une sur la petite protubérance située sur l'ouverture postérieure. Cette protubérance rem- place la crête de Tespèce précédente, mais on ne voit point dans l'intérieur de celle-ci les deux organes +,^, que j'ai pris pour des ovaires dans l'autre. La branchie l, m, n, l'anneau irrégulier qui la ter- mine en arrière, ?i , le cœur avec son péricarde ^, n'offrent rien de différent de ce qu'on voit dans l'espèce précédente; la bouche ' est placée au même endroit, mais les viscères de la digestion sont autrement configurés. Ils sont ramassés en une seule masse ovale, », composée du foie, et des cir- convolutions de l'intestin. Celui-ci fait deux tours de spi- rale, et se termine subitement à l'anus , , près de l'origine de la branchie ; l'anus est donc placé tout autrement que dans la première espèce ; et tout l'espace qui règne entre la masse des viscères digestifs et l'extrémité postérieure du corps n'est occupée que par le sillon >* , '*. M. Tilesius qui a observé cette espèce vivante , dit qu'elle est transparente, et que de loin elle paroît d'un beau bleu de ciel avec les reflets de l'Iris 3 que le globe de ses viscères 3. i8 SURLESTHALIDES est d'un rouge ardent, et qu'elle répand la nuit une forte lueur phospliorique. Cette dernière faculté est attribuée par M. Pcron à la plupart des espèces. Ses raouvemens sont très-lents j et ses signes de vie très-foihles. Quelques indivi- dus se rapproclioient et s'altaclioient ensemble par paires. Il leur sortoit du corps, par l'ouverture que je nomme anté- rieure, mais à laquelle, comme presque tous les auteurs, M. 27/eszws donne le nom contraire, faute d'avoir remarqiié la véritable bouche, de longsfilamensjaunàtresqui peuvent se retirer en dedans. Il paroît qu'ils ont quelque rapport avec la génération. M. Tilesius semble croire que la masse des viscères ou le noyau en est entièrement composé, en quoi il se trompe évidemment. Sa description des viscères est ttrès-obscure, et a tenu à ses mauvais moyens anatomiques. Il trouva dans l'intérieur plusieurs petits animaux marins. M. Tilesius termine son article en rapportant qu'ayant consulté ses amis sur le genre dans lequel cet animal devoit être placé, ils jugèrent, après ime longue discus- sion que c'étoit un tetliys. Mes lecteurs voient sans doute suffisamment que c'est un salpa. En lisant mon mémoire sur les telhys , ils seront encore plus convaincus que l'animal de M. Tilesius n'en est pas un , car les tetliys de Linnœus ^ \efiinbna de Bohatsch , etc. sont de vrais gastéropodes très voisins des limaces. Espèce III. SALPASCUTIGERA. La troisième espèce me paroît nouvelle. Les figures 4 et 5 la représentent. E T L E s B I P H O R E s. 19 Ses deux envclojipes, ses deux ouvcrlurcs, sa brancliie , son cœur sont comme dans les deux précédentes. Ses vis- cères sont réunis, comme dans la dernière , en une masse ovale, protégée par une proéminence cartilagineuse et dure, mais moins avancée du côté de l'ouverture antérieure, et dépourvue d'épines ainsi que tout le reste de la surface. Néanmoins cette espèce a trois caractères dont deux très- particuliers. D'abord ses bandes musculeuses sont moins nombreuses; il y en a au milieu quatre , rapprochées dans leur partie moyenne , et représentant des X ; puis on en voit quelques autres petites vers les deux ouvertures. Le second caractère consiste dans un viscère marqué O dans les deux figures ; il est placé au-dessus de la masse du foie et des boyaux; contourné en portion de cercle, in- terrompue vers le coté droit , et sa structure consiste en petits lobes, ou mieux en petites lames comme enfilées à la suite les unes des autres; et qui semblent autant de petites, capsules. La ressemblance de cet organe avec les ovaires de cer- tains mollusques gastéropodes, que je décrirai ailleurs, me fait lui attribuer les mêmes fonctions. i^orsX-aoA/ semble in- diquer quelque chose de semblable à l'article de son salpa fasciata , en ces termes : siiprà iiiicleiim, quasi intestmum parvujii , filiforme transversè striai uni ; primo curvatum , clein apice incurvum magis , longituclinc unguis. JVI. Pérou m'a non-seulement confirmé dans l'idée que c'étoit là l'ovaire , mais il a observé que les biphores le rendent tout entier , et il croit que les petits biphores qu'il contient restent unis pendant long-temps comme ilsl'étoient aa URLESTHALIDES dans l'ovaire, et que c'est là l'origine de ces chaînes de biplioressi remarquables. A un certain âge, ces animaux se séparent, dit M. Péron, car tous les grands individus sont solitaires. Enfin ce qui achève de distinguer cette espèce, c'est un amas de petits grains bruns formant un disque ovale , dans l'épaisseur de la protubérance transparente , au - dessus des viscères de la digestion et de l'ovaire. Est-ce un premier germe ou vestige de coquille ? sont-ce les oeufs avant qu'ils entrent dans ce viscère que nous avons nommé ovaire , et qui ne seroit alors qu'un très-singulier oviductus ? Cette dernière conjecture prend quelque vraisemblance, de ce que dans quatre individus que j'ai observés, ceux qui avoient le boyau strié plus gonfle , avoicnt cet amas plus petit, et l'un d'eux même ne l'avoit presque pas apparent. On voit facilement que cette espèce est très- voisine de celle nommée salpa gibba , par M. Jîosc, Hist. nat. des vers, II, 178, pi 20. fig. 5. Il ne manque à la nôtre pour ressembler à celle-ci, qu'une saillie pointue au-dessus de l'ouverture postérieure. Il faut remarquer que M. J5o5c qui a pris comme Forskaohl cette ouverture postérieure pour la bouche, a donné à la saillie qui est au-dessus, le nom Affront, mais très-iinpropremcnt. Espèce IV. SALPA OCTOFORA. La quatrième espèce, fig. 7, est très-différente des précé- dentes pour la forme générale. Elle varie dav^antage pour E T L E s B I P II O R E s. 21 la granclcur^ et il y en a des individus deux fois plusgrands que celui que j'ai représenté. Le corps est ovoïde ; la partie étroite de l'oeuf est vers l'ouverture postérieure; la partie large est en avant ; mais ici l'ouverture i, >6, n'est pas terminale; elle est à la face inférieure du corps ; c'estla protubérance caftilaginense,, hb , (jui forme la partie large et arrondie de roeiif. Cette pro- tubérance est ici très-grande et en forme de demirsphère. Elle contient dans son centre la masse a, des viscères digestifs, qui n'a au reste rien de différent de ce qu'on voit dans les deux espèces précédentes; ifenest de même de la brancliie l ,vi , n , et du sillon

. Les bandes musculaires sont en forme d'X X, comme celles de la troisième espèce. Ce qui caractérise le plus l'espèce actuelle, se sont liuit petites proéminences percées de part en part , et pénétrant jusque dans l'intérieur delà seconde tunique; il y en a quatre vers-la grande protubérance cartilagineuse, deux de chaque côté, et quatre autres vers l'ouverture postérieure. Elles sont toutes marquées a a, dans la figure. L\isage de ces proéminences ne sera pas douteux pour quiconque aura lu avec attention les descriptions du salpa confœderata de t^orskaohl , et du salpa socia de Bosc. Ces deux espèces ont aussi de pareilles proéminences, et s'en servent pour s'unir avec d'autres individus, côte à côte et dos à dos, de manière à former ces grandes chaînes si sin- gulières , et que l'on est d'abord tenté de prendre pour un seul animal, tant leurs mouvemens sont réguliers et uni- formes. Ces proéminences font sans doute alors l'office d'au- tant de suçoirs. J'ai trouvé dans l'intérieur de quelques individus , des 22 SURLESTHALIDES corps de l'aDinial de Vanatifère , mais dont tout le dedans étoit fondu et disparu , et dont il ne restoit que la peau par- faitement conservée j commenty étoien t-ils entrés ? comment sont-ils ainsi vidés? Si c'est par l'action du salpa,on ne peut dire pour cela que ce soit une digestion, car elle ne se fait point dans l'estomac. L'anatifère n'est pas non plus avalée, puisqu'elle ne passe point au travers de la véritable bouche. Est-elle seulement sucée par celle-ci? Espèce V. SALPA CILINDRICA. La cinquième espèce, fig. 9 et 10 , est plus petite que les précédentes; elle a le corps égalementlarge par-tout, un peu déprimé, et sa partie dorsale cartilagineuse, saillante , sur- tout au-dessus de la masse des viscères où ; les bandes mus- culeuses sont au nombre de onze, dont les six premières sont parallèles et transversales ; les quatre suivantes se rap- prochent dans leur partie moyenne A, pour former une fi- gure rayonnante. La branchie , les viscères digestifs , le sillon dorsal n'ont rien de différent des trois espèces pré- cédentes. L'ovaire est très-grand , d'une structure semblable à celui de l'espèce troisième , ployé en deux, et placé sur le milieu du dos. C'est à cette espèce que ressemble le plus Vholothii/ia zonarla de Pallas , que Qnielui a laissée mal à-propos dans les holothuries; seulement ses ouvertures ne sont pas tout- à-fait terminales. Bruguièrc paroît bien s'être aperçu, en composant ses planches, que cedevoit être un hiphore\ car E T L E s B I P II O R E s. 25 c'est avec ceux-ci qu'il en a fait graver la figure ; mais il n'en a fait aucune mention clans son texte qui ctoit rédigé avant qu'on s'occupât des planches. Espèce VI. SALPA FUSIFORMIS. Ma sixième espèce est la plus petite de celles que j'ai eues à ma disposition. Elle est représentée, fig. 5. Comme dans Vliolotliurla zonaria de Pallus , ses deux ouvertures sont à la face inférieure du corps; etlcsdeuxlégumenss'alongentde part et d'autre en deux pointes qui donnent à l'animal entier la figui'c d'un fuseau. La masse des viscères est disposée comme dans les quatre espèces précédentes; mais au lieu d'être dans le milieu même du dos , elle est un peu penchée sur le côté droit. Le sillon et la branchie n'ont rien de par- ticulier. Les bandes musculaires sont au nombre de sept, dont les deux premières se rapprochent vers leur milieu; et les cinq autres ensuite , de manière que celles-ci ont l'air de former des branches. Cette espèce ressemble beaucoup au salpa giganlea de de ForsJcaohl; peut-être même est-elle celle que ce natura- turaliste regarde comme une petite variété de son espèce géante ; il n'y a pas jusqu'à la position oblique de la masse des viscères qui ne soit exprimée dans sa description par ces mots : « Appendix ad anum suprà nucleum ad dcxtruni » latiis. Forsk. descr. anim. in it. or. obs. p. 112. » Il faut toujours se rappeler qu'il prenoit [pour a7ius ce que nous avons montré être V ouverture antérieure du sac, ouverture à la vérité par laquelle l'eau sort. Thalides i-i r>ipliores EMOI RE SUR LES ASCIDIES ET SUR LEUR ANATOMIE. J E SUIS obligé, comme à mon ordinaire, de commencer mes recliei'ches par un exposé historique des variations bi- zarres que la nomenclature de ces animaux a éprouvées. Les Ascidies sont du petit nombre des mollusques dont îe nom ancien ne laisse point de doute. Aristote les appelle thetliywn; il les avoit jiarfaitement bien observées, et la description générique cju'il en donne {^Hist. An. ,\^. IV, cap. VI; et de Part. An., lib. VI, c. V) est aussi exacte que celles de nos auteurs modernes. Rondelet paroît les avoir bien reconnues, quoique sa figure et sa description {de Ins. et Zooph. , 127) ne puissent faire déterminer positivement l'espèce dont il a parlé. On distingue un peu mieux deux autres animaux dont il traite ensuite (p. 128 et 129) sous le nom de mentida marina, et qui sont également deux espèces d'ascidies. En effet , les pécheurs de la Méditerranée, gens peu réservés dans leur langage, donnent encore aujourd'hui aux ascidies, dans leurs divers jargons, des noms qui équivalent à celui-là. Gesner et Aldrovande commencèrent à embrouiller l'his- I 2 SURLEsAsCIDIKS. toire de ce genre en joignant aux tétliyes de Piondelet celles de Béloii ( Aqiiat. , 433 ) , c[ui ne sont c[iie des alcjo- niwn. Linnasus, dans sa IV^. édition, plaça un ihethyimi dans son système en défigurant un peu son nom et en l'appelant thethjs; Il indicpia même que l'animal des bivalves étoit un thetliys , ce cjui prouve qu'il n'ignorolt pas l'analogie des bivalves avec les ascidies. Mais comme Redi ( Opusc. III, pi. XXIÏ) avoit décrit une espèce d'ascidie, et l'avoit nom- mée microcosiniis , à cause des petites coquilles et autres objets variés qui s'attachent àson enveloppe, Llnnaeus adopta aussi le genre inicrocosnms , et je ne sais par quelle incon- cevable confusion d'Idées il donna ce petit molluscjue pour identique avec le rnicrocosmus de Bartholin , prétendu ani- mal de la mer du Nord assez grand pour paroître comme une île, et pour tromper les navigateurs. Dans la 6«. édition, il se fit, sous le genre Thetys, un mé- lange presque aussi singulier des caractères des ascidies et de ceux de la tJiethjs d'aujourd'hui; il n'y eut même que celle-ci de figurée comme type du genre ; et toutefois l'ani- mal des bivalves porta encore le nom de thethys , qui ne lui convenoit plus du tout. Le inicrocosmiis fabuleux, et celui c[ui reposoit sur un objet réel, disparurent également dans la dixième édition; s^il y fut question à' ascidies, elles n'y furent indiquées que fort obscurément sous le genre priapus , et le nom de the- thjs fut appliqué à Yapljsia ou Heure de nier , qui y fut confondu avec le thethjs d'aujourd'hui; néanmoins les bi- valves eurent toujours des thethjs pour habitans. SURLESASCIDIES. 3 Cependant Bohatsch ( Anbn. viar., pi. X), et Plancus ( Conch. min. not. , pi. V et VII ) , décrivirent et repré- sentèrent avec assez d'exactitude plusieurs espèces auxquelles ils donnèrent leur véritable nom de ihethjimi; Baster (Opi/sc. subsec.,lî, X , 5 ) en observa une qu'il caracté- risa fort bien, et pour laquelle il imagina le nom d! ascidàon , dérivé d'àcr;coi' ( outre ) , parce qu'en effet cette espèce a quel- que rapport de figure avec une outre. Ce naturaliste ajouta à sa description une remarque très-juste sur l'analogie de la structure intérieure de son ascidiwn avec celle de l'huître. Pallas {MiscelL ZooL, 74) proposa la réunion des the- thywn et de Xascidium, et Linna:îus l'effectua dans sa Xlle. édition, sous le nom à'ascidia, joignant aux trois es- pèces de Bohatsch trois autres espèces observées dans la mer du Nord par Kœnig , et donnant enfin aux bivalves, des ascidla pour habitans. C'est aussi seulement dans cette Xlle. édition qu'il fixa le nom de thethjs exclusivement sur les animaux qui le portent aujourd'hui. Depuis ce temps-là Ottojt Frédéric MiiUer ( Zool. daiiic), Otton Fabricius {Faim. Groënl.), l'abbé Diquemare ( Journ. de Phjs. ) , et Pallas ( dans ses Spicil. et dans les Mém. de Petersb. ) , ont décrit et représenté un assez grand nombre d'ascidies, que Bntguières et Gmelin ont rassem- blées dans leurs compilations à peu près comme ils les ont trouvées dans ces auteurs , et sans apporter beaucoup de critique dans la distinction des espèces. Il seroit, en effet, très-difficile de les caractériser d'après les documens que l'on possède. La forme extérieure des as- cidies étant sujette à beaucoup de variations , leur surface 4 SURLESASCIDIES. oflVantpeu de diflerences, leur couleur ne se conservant pas après la mort, et différant probablement pendant la vie, selon l'âge et les lieux oii elles ont pris leur croissance , il est malaisé de les distinguer sûrement, quand on n'a pas recours à leur intérieur, et cet intérieur n'a jamais été indi- qué que d'une manière superficielle. A entendre la plupart des auteurs il n'y auroit qu'un in- testin à deux issues, l'une qui admettroit l'eau, la seconde qui la rejetteroit. Les branchies et tous les autres organes ne sont annoncés que sous les noms vagues de tuniques, de membranes vasculaires, etc., et leurs vraies connexions ne sont jamais bien saisies. On peut juger de l'imperfection de nos connoissances sur les ascidies, et du peu de résultat qu'ont obtenu les recherches de Miiller , de Plancus et des autres naturalistes, par le résumé que l'on en trouve dans l'article sur ce genre, cjue Bruguières a rédigé pour l'En- cyclopédie méthodique. L'analogie même que Linnœiis paroissoit avoir saisie ;, et qui a été plus exphcitement indi-, quée par Baster et par Pallas. entre \ ascidie et X huître y quoique réelle à plusieurs égards, est un renseignement in- suffisant parce qu'on ne dit point jusqu'où cette analogie va, ni à quel point elle s'arrête 5 et M. Poli qui sembloit naturellement appelé à traiter des ascidies, dans son bel ou- vrage sur les coquillages des deux Siciles, et qui, s'il s'en étoit occupé, ne nous auroit probablement rien laissé à dé- sirer sur leur organisation, les a cependant omises, parce qu'il n'a voulu traiter que des testacés proprement dits , c'est-à- dire, des animaux revêtus de véritables coquilles. Tout nou- vellement encore, M. le chevalier Everard Home , dans SURLESASCIDIES. 5 ses belles Leçons d'Anatomie comparée , I, p. 3^0, et II, pi. LXXIV, se borne à traiter des organes de la digestion, et ne parle des branchies que comme de tuniques C[ui en- velopperoient les viscères. J'avois donc à compléter une lacune importante dans l'histoire des mollusques^ et je me suis donné depuis long- temps beaucoup de peine pour rassembler diverses espèces d'ascidies, principalement de celles qui par leur grandeur pouvoient me faire espérer plus de succès. J'ai donné, il y a dix-huit ans, une courte Notice de mes premières observa- tions à ce sujet {^Bulletin des Sciences, avril 1797 ). J'ai inséré quelques détails de. plus en divers endroits de mes Leçons d'Anatoniie comparée , nommément au II<". vol., p. 3i2, et au IV<". , p. 1^5 et l\'i.%'-) mais je présenterai au- jourd'hui l'ensemble de ce que j'en ai observé, à diverses époques, et je l'accompagnerai de figures. Je regrette que mon travail soit encore aussi imparfait; mais les individus que j'ai eus à ma disposition n'ont pu me conduire plus loin ; les naturalistes qui pourront en observer dans un état plus frais feront ce que je n'ai pu faire. L'ascidie est toujours fixée, par sa base, aux rochers ou dans le sable, ou sur des varecs, ou sur des coquilles séden- taires, telles que des huîtres, des anomies, ou enfin sur d'autres ascidies, quelquefois d'espèces différentes. Assez généi'alement cependant les individus d'une même espèce sont rapprochés les uns des autres et forment des espèces de groupes; lorsqu'ils s'attachent les uns sur les autres ils ont quelquefois l'air ramifié; mais cette ramification n'est qu'apparente et n'établit point d'union organique entre le? 6 SUR LES Ascidies. individus, comme il en existe, par exemple, entre les branches d'un même tronc de polype (i). On peut donc se borner à la considération des individus isolés. Chacun d'eux présente une masse, ou une sorte de sac, fixé par sa base ou par un de ses côtés, dont la forme varie à l'infini, selon les espèces, et dans chaque espèce se- lon les corps voisins qui en ont gêné le développement; tantôt ce sac est globuleux, tantôt ovale, ou conique, ou cylindrique; dans certaines espèces sa base s'allonge en un pédicule grêle; sa surface est tantôt égale, tantôt bosselée, ou mammelonnée, ou ridée, ou plissée, ou tuberculeuse, ou même épineuse , ou enfin garnie d'excroissances bran- cliues; mais ce qui est constant, et ce qui fournit le carac- tère extérieur le plus essentiel du genre , ce sont deux ou- vertui-es, dont les bords forment un bourrelet que l'animal retire ou fait saillir, dilate ou rétrécit à volonté, et qui est ordinairement sillonné en rayons lorsqu'il est rentré, et di- visé en festons lorsqu'il est épanoui. L'une de ces ouvertures, presque toujours placée au som- met du sac extérieur, reçoit l'eau de la mer et l'introduit dans la cavité des branchies; c'est aussi par elle que l'eau est rejetée quand l'animal veut en renouveller la provision. Lorsqu'on irrite une ascidie elle fait jaillir cette eau en un filet qui s'élève quelquefois à plusieurs pouces. (i] Cette obsei-valion n'est certaine que par rapport aux ascidies proprement dites; mais il paroîl qu'il existe des animaux composés, ou au moins groupés d'une manière Intime ^ qui ont beaucoup d'analogie avec les ascidies dans leur structure individuelle. M. Savigny vient d'eu faire l'objet d'un Mémoiie très- tntéressant. s u R L b; s A s C I D I E s. ij La seconde ouverture est d'ordinaire placée un peu plus bas que la première, et si l'on s'en rapportoit aux auteurs qui ont parlé de ces animaux, l'ascidie rejetteroit aussi par cet endroit l'eau de la mer j il y en a même qui ont écrit que cette eau entre par une ouverture et ressort par l'autre. L'anatomie ne confirme point ces idées; la seconde ou- verture, comme nous le verrons, ne reçoit que le rectum et l'organe de la génération , il n'existe aucune communication entre elle et la cavité branchiale; et si il est arrivé quelc|ue- fois que l'eau de la mer ait été lancée par là, ce n'a pu être, à ce qu'il me semble, qu'à la suite de quelc[ue rupture occa- sionnée par les efforts de l'animal. J'engage toutefois les per- sonnes c[ui observeront des ascidies vivantes , à s'assurer de ce cju'il peut y avoir de réel à cet égard. On ne voit rien de plus au dehors de l'ascidie, et pour connoître le reste de sa structure il faut ouvrir le sac exté- rieur, ce qui est d'autant plus facile, qu'il est d'une subs- tance généralement cartilagineuse, se laissant aisément divi- ser, presque toujours demi-transparente, et d'une épaisseur variable, selon les espèces, depuis plusieurs lignes jusqu'à des fractions assez petites de lignes. Celte substance est très - bien organisée; elle reçoit du corps proprement dit des troncs artériels et veineux, c[ue sa substance demi-transparente, dans certaines espèces, permet à l'œil de suivre jusqu'à leurs dernières ramifications, et qui forment un magnifique réseau. Outre un épiderme extérieur plus ou moins visible, cette première enveloppe est toujours doublée étioitement à l'in- térieur par une membrane d'une autre nature. Le plus sou- 8 SURLESASCIDIES. vent elle est très -mince et séreuse; dans quelques espèces elle prend de l'épaisseur et de la consistance et se rapproche de la nature du cartilage; elle est aussi généralement arro- sée de vaisseaux très-visibles. Le corps proprement dit de l'animal est suspendu dans la cavité du sac; il n'est jamais aussi volumineux, que cette ca- vité, en sorte qu'il reste toujours entre le corps et le sac, mi intervalle assez considérable et que je suppose rempli clans l'état de vie par quelque liquide; mais je pense que c'est un licjuide sécrété ou transsudé au travers de la tunique propre du corps ou de la membrane interne du sac, car ce corps a deux productions qui s'unissent aux bords des deux ouvertures du sac, en sorte que l'eau extérieure ne me pa- roît pouvoir pénétrer que dans le corps même et spéciale- ment dans la cavité des branchies. En effet, la membrane qui tapisse en dedans l'enveloppe extérieure de l'ascidie, se réfléchit sur son corps proprement dit, et le revêt en dehors, comme le péritoine après avoir tapissé les parois de l'abdo- men se réfléchit sur l'intestin, avec cette diflerence cepen- dant qu'il n'y a point de mésentère , et que la connexion se fait seulement près des deux orifices. La veloutée et en général les membranes muqueuses se continuent de la même manière avec l'épiderme de cette enveloppe extérieure; ce- pendant comme j'ai trouvé souvent leur continuité déchirée, dans les ascidies c[ue j'ai examinées , il se pourroit qu'il y ■ eut, dans l'état de vie, auprès des deux ouvertures quelques pores ou même quelques communications plus directes, et c'est encore un point que j'engage les observateurs h vérifier. Outre 1 adhérence de ses deux productions aux bords des SUR LES Ascidies. 9 deux ouvertures, le corps proprement dit tient encore au sac par le double tronc de vaisseaux qu'il y envoie, et dont nous avons parlé ci-dessus. Dans tout le reste de leur étendue le corps et le sac n'ont point d'union directe. Le corps proprement dit a, comme je viens de le dire, une tunique propre qui l'enveloppe en entier; on peut y distinguer une lame extérieure séreuse, qui se continue avec la membrane interne de l'enveloppe extérieure, et un tissu musculaire, plus ou moins continu; l'on y voit aussi des ra- mifications nombreuses de nerfs et de vaisseaux. C'est à cette tunique cju'adhère le ganglion nerveux le plus considérable de l'ascidie. Lorsqu'on ouvre avec précaution la tunique propre du corps, on voit que celle de ses productions c[ui va à l'ouver- ture supérieure du sac , ne renferme que le col de la cavité branchiale, laquelle cavité s'enfonce plus ou moins, selon les espèces, dans l'intérieur de la tunique propre , mais n'a d'autre ouverture dans son fond que la bouche, et ne com- munique nullement avec la seconde production de cette même tunicjue qui se rend à la seconde ouverture du sac, et qui ne contient jamais c[ue l'extrémité du rectum et celle de l'organe génital. Le reste des viscères est enveloppé dans un péritoine par- ticulier et le cœur a en outre son péricarde ; ainsi l'on peut considérer le corps proprement dit, comme divisé en trois cavités : celle des branchies qui communique avec l'extérieur par l'ouverture supérieure du sac, et dans le fonds de la- quelle s'ouvre la bouche; celle du péritoine qui ne commu- nique point avec l'extérieur par elle-même, mais qui est 2 lo SUR LES Ascidies. traversée par le tube intestinal, lequel après avoir pris nais- sance dans la cavité branchiale communique au dehors par le rectum et la deuxième ouverture du sac; enfin celle du péricarde, qui n'a point de communication médiate ni im- médiate avec l'extéiieur. La cavité branchiale est un grand sac qui reçoit l'eaiT, en conduit une partie à la bouche avec les petits animaux ou autres molécules alimentaires qu'elle peut contenir, et qui rejette l'autre partie après c|u'elle a servi à la respiration; on pourroit donc dire en quelque façon que les ascidies ont leurs organes respiratoires dans la bouche ou clans l'œso- phage, mais alors il faudroit nommer bouche l'ouverture supérieure du sac, et pharynx ou cardia, ce que nous avons appelé bouche; or, je crois cette dernière dénomination plus juste, parce que c'est le seul nom qui puisse convenir dans les huîtres et autres bivalves à l'orifice analogue. Quoi qu'il en soit, cette cavité branchiale a un col, ou un tube d'introduction, plus étroit qu'elle-même, et dans lequel i le tissu respiratoire ne s'étend point. 11 est garni d'une rangée M de filamens charnus, ou de tentacules très -fins, qui servent " sans doute à l'animal pour l'avertir des objets nuisibles qui pourroientse présenter et qu'il doit repousser. Il n'est pas im- possible qu'en certaines occasions les ascidies renversent assez cet orifice de leurs branchies, pour que ces tentacules pa- roissent au dehors, et c'est ce qui les aura fait prendre pour des caractères particuliers de certaines espèces ; mais je les crois commu.ns à toutes. Il y en a même qui en ont deux rangées. La cavité branchiale est un grand sac aplati par les côtés. SURLESASCIDIES. II et qui varie beaucoup pour rétendue, pour la profondeur, et même pour la forme. Quelquefois, comme dans Xascidia clauata, elle n'occupe qu'une petite portion de la longueur du corps; plus souvent, comme dans Xascidia viicrocosmus ^ elle occupe toute la longueur et la largeur d'une des faces du corps, et le reste des viscères occupe l'autre face j alors sa forme est oblongue, ovale ou rectangulaire; quelquefois, comme à^n^X ascidia que je nomme niamr i dilata , et dans le reclus marin de Diquemare que j'appelle ascidia mona- chiis , après être descendue jusque dans le fonds de la tu- nique du corps, elle se recourbe, et son fonds à elle est au milieu de la longueur et regarde son entrée. C'est dans ce dernier cas que ses parois ont le plus d'étendue. Le plus souvent les parois du sac branchial sont étendues et sans plis; mais dans quelques espèces, et à ce qu'il paroit dans toutes celles dont la tunique propre du corps est très-coriace ^ ces parois forment des plis profonds et réguliers , premiers indices des quatre feuillets branchiaux des bivalves. Quelle c[ue soit au reste la forme et la disposition géné- rales de ce sac , le tissu de ses parois reste le même , et est fort remarquable; aussi plusieurs auteurs en ont-ils été frap- pés, sans en connoître l'objet. Il consiste en une infinité de petits vaisseaux qui se croisent à angles droits et intercep- tent des mailles quadrangulaires; au microscope on remarque des vaisseaux plus petits qui subdivisent encore les mailles. Avec un peu d'attention, l'on aperçoit bientôt que les pe- tits vaisseaux verticaux viennent des vaisseaux transverses, et que ceux-ci tiennent par leurs deux extrémités à deux grands troncs, aussi verticaux , qui occupent chacun l'un des 15 SUR LES Ascidies. côtés ou plutôt des arêtes du sac; ainsi il est naturel de croire que l'un de ces troncs est l'artère et l'autre la veine branchiale. L'un des deux aboutit au cœur, et quoique je n'aie pu bien distinguer les valvules, l'analogie des mollusques gasté- ropodes et plus encore celle des bivalves ne me permet pas un instant de douter que le sang n'aille de ce tronc dans le cœur, ou en d'autres termes que ce tronc ne soit la veine branchiale. Le tronc opposé qui est souvent double, sera donc l'artère, et recevra les veines du corps; en effet, l'on voit beavicoup de filets vasculaires qui s'y rendent, soit de la tunique générale du corps soit des viscères. L'ascidie n'au- roit donc, comme les gastéropodes et les acéphales, qu'un ventricule gauche ou aortique , et il n'y auroit point de ven- tricule sur la réunion delaveinecaveet de l'artère pulmonaire. Ce ventricule, ou ce cœur aortique, n'est pas toujours fa- cile à observer. Lorsque la branchie est simplement oblongue, il est situé vers son fond , et par conséquent lorsqu'elle est aussi longue que le corps il est vers le fond de lu tunique propre ; et quand la branchie est plus courte que le corps il se trouve vers le milieu de cette même tunique. Lorsque la branchie est recourbée il se trouve dans sa courbure et alors il est toujours vers le milieu de la tunique propre ou du corps. En général , sa position paroît déterminée par celle de la bouche plutôt que par celle du rectum, et le rectum ne le traverse jamais, comme dans le plus grand nombre des bi- valves. Sa forme est oblongue, amincie aux deux bouts; sa sub- SUR LES Ascidies. i3 stance est extrêmement mince et transparente, em sorte qu'on a souvent peine à le distinguer au milieu de son péricarde. Par mie extrémité il reçoit le tronc des veines branchiales, et par l'autre il donne l'aorte qui distribue le sang à toutes les parties. Je dois cependant convenir que dans les espèces à bran- chies recourbées, il m'a été impossible d'apercevoir une di^ latation assez marquée pour mériter proprement le nom de cœur; l'artère en fait-elle la fonction, ou n'ai-je pu découvrir le véritable organe? c'est ce que des observateurs plus heu- reux parviendront peut-être à déterminer. Nous avons vu que la bouche est dans le fond de la ca- vité branchiale; ainsi cjuand cette cavité pénètre jusqu'au fond de la tunique propre , c'est aussi dans ce fond qu'est la bouche. Lorsque la cavité branchiale s'arrête au miheu du corps, ou lorsqu'elle y revient en se recourbant, la bouche se trouve aussi vers ce milieu. Tantôt la bouche est un simple trou rond, tantôt c'est une fente, ou même une ouverture divisée par plusieurs sillons, mais qui n'a ni lèvi'es ni tenta- cules particuliers. La position de la bouche détermine la posi- tion et la direction de Tœsophageet la'position de l'estomac. L'œsophage est court, et plissé longitudinalement. L'esto- mac est simple, médiocreme nt dilaté, diversement ridé à l'intérieur, selon les espèces, et a ses parois percées pour re- cevoir la bile; le foie adhère d'une manière intime- aux côtés de l'estomac , et y verse sa bile par plusieurs orifices, comme dans les bivalves; l'intestiu est simple, sans cœcums, et n'a généralement qu'un ou deux replis. Ses parois sont épaissies par un tissu glanduleux qui y verse probablement l4 SURLESASCIDIES. aussi quelque liqueur. Il se termine par u.n rectum qui sort du jjéritoine pour faire flotter son extrémité dans la deuxième production de la tunique propre du corps, eu sorte que les excrémens tombent dans cette production qui leur donne issue au travers de la deuxième ouverture de l'enveloppe extéiieure. Les ascidies ne me paroissent devoir se nourrir que des molécules déliées qui pénètrent avec l'eau de la mer dans leur cavité branchiale. J'ai trouvé à la vérité assez souvent des petits crustacés et d'auti-es débris d'animaux dans cette cavité ; mais comme ils doivent en blesser aisément le tissu délié, comme j'ai même observé de ces petits crustacés qui avoient déchiré ce tissu et avoient pénétré entre lui et la tu- nique propre , je pense que la déglutition de ces animaux est un accident fâcheux pour l'ascidie, et non pas son moyen naturel d'alimentation. On ne trouve dans l'estomac cju'un magma très-atténué ; les intestins renferment des excrémens terreux moulés en petits filets courts comme dans beaucoup d'autres mollusques. On ne peut guère considérer que comme appartenant à la génération, un organe glanduleux, blanchâtre, placé entre les replis de l'intestin avec le foie , mais dont le canal exté- rieur, souvent très-ondulé, suit le rectum et y débouche tout près de son extrémité. J'ai trouvé quelquefois de petits grains que je suis disposé à prendre pour des œufs, entre le sac branchial et la tunique propre. Cette position est assez analogue à celle que les œufs prennent dans l'épaisseur des branchies des bivalves. Comme le rectum débouche dans la deuxième production de la tunique propre, il ne seroit pas SUR LES Ascidies. i5 impossi])Ie que la liqueur séminale versée par le conduit ex- créteur dont j'ai parlé, allât féconder les œufs du même in- dividu placés comme je viens de le direj il seroit possible aussi cju'elle se répandit au dehors pour féconder ceux que d'autres individus auroient pondus dans le voisinage: cepen- dant comme les ascidies n'ont point de locomotion, je pense cju'elles doivent se suffire à elles-mêmes, La partie bien visible du système nerveux consiste en un ganglion oblong très- facile à reconnoître pour ce qu'il est, placé dans l'épaisseur de la tunique propre , entre la pro- duction qui donne entrée aux branchies , et celle où répond l'anus. Il donne des branches que l'on suit aisément, parmi lesquelles on en distingue dans les grandes espèces deux qui se rendent à l'œsophage et l'entourent d'un anneau. L'ana- logie ne permet pas de douter que cet anneau ne soit le cer- veau. Le ganglion répond à celui qu'on trouve dans les bi- valves, entre les branchies, et vers l'origine du tube qui amène l'eau. "Telles sont les remarques générales auxquelles donne lieu l'anatomie des ascidies dont j'ai pu disposer. Je vais mainte- nant passer aux observations relatives à chaque espèce eu jiarticulier. Je commencerai par une espèce qui, bien que connue et décrite l'une des premières, ne figure point séparément dans Gmelin; c'est le jmcrocos?ni(s de Hédi [Opusc. III), qui me paroît le même que le rnentula marina infomiis de Plancus ( Co72c/i. min. not. Ap. YII, et Comment, bon., V, II, 4-7)) et que Xascidia sulcata de M. Coquebert ( Bidlei. des Se, avril 1797, I, i )• Gmelin ne cite point i6 SUR LES Ascidies. du tout le premiei- de ces synonymes , et place le second sous Xascidia mentula , niais très-mal à propos , comme nous le verrons. Bruguière le transporte sans meilleurs motifs à Xascidia rustica. C'est une espèce très -distincte, remar- quable par sa grandeur, par la dureté tout-à-fait coriace, et par l'extrême rugosité de son sac extérieur. Ce sac est dif- ficile à entamer avec des ciseaux, ridé comme un vieux par- chemin qui auroit été mouillé et desséché. Sa couleur est en dehors d'un gris jaunâtre, en dedans d'un blanc opaque. La dureté de cette enveloppe la rend sans doute à peu près insensible, puisqu'il s'y établit des corallines, des sertulaires, des sabelles, des néréides, toutes soites de polypes^ des fu- cus, et jusqu'à de petites coc[uilLes sans cj[ue l'animal prenne aucun soin pour s'en débarrasser; c'est l'accumulation de ces êtres divers, qui avoit fait imaginer à Rédi, pour cet animal, l'épithète de microcosme ou de petit monde. La forme gé- nérale de ce sac varie. Tantôt conique et assez allongé, comme dans l'échantillon de M. Coquebert, tantôt ovale ou reniforme, comme dans celui de Plancus et dans le nôtre, il devient quelquefois fourchu, comme dans celui de Rédi; mais les orifices sont toujours percés dans deux parties plus molles cjue le reste de l'enveloppe, comparables à deux mam-. melons, susceptibles de saillir ou de rentrer, et toujours lé- gèrement striés en rayons. Leur position mutuelle diffère plus peut-être que dans les autres espèces. Dans mon échan- tillon, c'est l'orifice branchial qui est inférieur; dans celui de Plancus ils étoient à peu près à la même hauteur , et l'animal s'étendoit transversalement; dans celui de Rédi, le sac extérieur étoit fourchu, et chaque orifice étoit au som- «UR LES Ascidies. 17 met d'une branche. La plus grande dimension de cette es- pèce^ varie de 3 à six pouces. Son sac intérieur ou son corps proprement dit, est remarquable par l'extrême épaisseur do sa lame musculaire, pi. I, fig. 2; chacune des deux produc- tions a et b, qui se rendent aux orifices, est garnie de fibres longitudinales , bientôt croisées à leur base par des fibres an- nulaires qui se répétant concentriquement sur le corps même, viennent à se croiser encore obliquement avec les fibres annulaires de l'autre production. Il résulte de cet as- semblage une sorte d'outre qui par sa contraction doit pou- voir éjaculer l'eau des branchies avec beaucoup de force. 11 n'est pas si aisé de voir comment cette eau est introduite , mais on peut croire que les fibres longitudinales du sac d, d , en se contractant lorsque les fibres annulaires se relâchent , ren- dent la capacité de ce sac plus considérable, et que la dureté du sac extérieur résistant au poids du fluide ambiant et de l'atmosphère, l'eau se précipite dans cette capacité ainsi aug- mentée. Peut-être y a-t-il aussi une sorte de déglutition qui fait passer successivement l'eau du dehors dans le tube bran- chial, et de celui-ci dans le sac des branchies. C'est dans cette espèce que le système nerveux est le plus difficile à voir, le ganglion n'y paroît que comme un filet délié un peu grisâtre. Dans cette espèce et dans V ascidia papillosa , le sac bran- chial a aussi un caractère tout particulier dans les plis longi- tudinaux et saillans en dedans^ qui régnent dans tout son pourtour. On en compte douze ou quinze , et ils sont main- tenus constans, quelles c[ue soient d'ailleurs les dilatations du sac branchial, par des ligamens et des vaisseaux sanguins 3 i8 svR LES Ascidies. qui traversent sur leurs bases, et enveloppent tout ce sac, comme autant de cerceaux. Au fond du col des branchies (a, fig. 4 ) et à l'entrée du sac branchial se voient d'abord cinq petits replis saillans, c|ui pourroient passer pour autant de valvules, lorsque l'ascidie contracte ce détroit, ce qu'elle fait peut-être cjuand quelque petit animal menace de péné- trer, mais qui doivent aussi pouvoir s'écarter assez pour ne point mettre obstacle à l'entrée et à la sortie de l'eau néces- saire pour la respiration. Immédiatement au-dessous de ces petites proéminences est une membrane circulaire légèrement festonnée, et garnie sur son bord de petits filamens, et encore au-dessous, à l'en- trée même de la cavité branchiale, est une rangée circulaire de tentacules courts et fourchus. La bouche (^, fig. 4, 5 et 6 ) est dans le fond de la cavité branchiale , très-près de la place où le rectum finit hors de cette cavité 5 l'ouverture en est assez grande, et plissée. La masse des Intestins est située toute entière d'un côté du corps entre une des parois du sac branchial et la paroi correspondante de la tunique charnue. Le foie est composé de plusieurs lobes grenus, et enveloppe les côtés de l'esto- mac. Celui-ci est peu volumineux , et son intérieur est re- marquable par des trous irréguliers, percés dans leur fond d'autres trous, où aboutissent les vaisseaux biliaires. Cinq petites papilles coniques rétrécissent le pylore. L'intestin (o, o, o, fig. 5 et 6) se porte vers le côté de l'entrée des branchies, ne fait qu'un repli, revient près de la bouche, et là se recourbe pour se terminer à l'anus j celui- ci s'ouvre derrière le bord de la cavité des branchies, vis-à-vis la Sun LES Ascidies. 19 deuxième production de la tunique musculaire. Deux larges valvules sémilunaires placées à la base de cette production et embrassant l'anus, empêchent que ce qui est sorti du rec- tum ne puisse rétrograder et s'introduire entre la tunique et le sac branchial. IjC reste de la production est tapissé par une membrane blanche et conduit les excrémens en dehors. Le cœur est h côté de l'estomac, très-mince, transparent, et en conséquence difficile à bien reconnoître. Il n'est pas non plus très-facile de suivre ses connexions avec les gi'ands vais- seaux, mais ce que nous allons bientôt dire d'autres espèces suppléera à ce que celle-ci n'a pu nous offrir clairement. On observe dans cette espèce et dans V ascidia papillosa, un petit tubercule ( d, fig. 4 et 5 ) situé à l'intérieur du sac branchial, non loin de son orifice, entre les deux veines branchiales que je n'ai pas revu dans les autres ascidies, et dont il m'est impossible d'assigner la nature (i). Ce que le inicrocosinus a de plus particulier, ce sont des lobes d'une substance gélatineuse sans organisation appa- rente {^d, d,d, fig. 3) interposés entre la tunique charnue et le sac des branchies. Ils servent apparemment de provision nutritive, comme la graisse des autres animaux. \J ascidiapapillosa (^Bohatsch. , X, i), depuis long-temps décrite par Bohatsch, diffère beaucoup à l'extérieur de la précédente, par son enveloppe régulière, et uniformément semée d'une petite scabrosité, comme si elle avoit été sablée; mais à l'intérieur elle est presque la même. La substance de son enveloppe est également dure et coriace ; la tunique (i) On en retrouve l'analogue dans toutes les petites ascidies composées de M. Savigny. 20 SUE LES Ascidies. propre de son corps est également munie de fibres cliarnues épaisses; ses branchies sont également plissées, et ont aussi le tubercule d'une nature inconnue dont j'ai parlé; mais on y voit bien plus distinctement le ganglion nerveux, placé entre les deux orifices; les tentacules sont disposés sur deux rangées autour de l'orifice branchial; la masse des intestins est plus concentrée vers le fond du sac, etc. Voyez les fig, i , 2,3 de la pi. IL L'espèce dont je parlerai maintenant sera le type de celles oix le sac branchial, sans être plissé comme dans les précé- dentes, descend cependant de même jusqu'au fond de la tunique propre, mais sans s'y recourber. Je la représente (pi. I, fig. 7), et je pense que c'est la même que Forskahl a x-eprésentée pi. XXVII, fig. D, E, et à laquelle son éditeur a appliqué le nom ^alcyoniwn phusca. Il est bien vrai que \ alcyoïiiiun phusca de Forskahl est une ascidie, mais je doute que ce soit celle de la figure en question. Quoi qu'il en soit, l'espèce que j'examine se ca- ractérise par son sac extéiieur mince, demi -transparent, élastique-, légèrement cartilagineux, à surface lisse, par ses deux orifices saillans eu forme de mammelons striés. Elle se fixe tantôt par luie extrémité, tantôt par le côté, et il naît de la surface du sac de petites ramifications, qui aident à affermir son empâtement. Quelquefois la surface entière du sac extérieur produit de ces excroissances branchues qui res- semblent alors à autant de petits fucus qui y auroient pris naissance. Lorsqu'on ouvre ce sac et la membrane qui le tapisse à l'intérieur on est frappé ( fig. 8 ) du double tronc de vaisseaux SUR LES Ascidies. 21 qui s'y rend du corps proprement dit, ainsi que des belles raniilications qu'il y produit. La tunique propre du corps est beaucoup moins musculeuse et plus transparente que dans l'espèce précédente; on distingue très-bien au travers les contours de l'intestin. ' On peut l'ouvrir en ménageant le sac branchial, qui n'est point du tout plissé. Son col est garni d'une rangée circu- laire de tentacules très -longs et très- fins, cjui dans l'état d'extension doivent pouvoir se montrer au dehors. La bouche est tout- à-fait dans le fond du sac, d'un côté, et le cœur est placé près d'elle, au-dessous du milieu de ce fond, en sorte c£ue c'est lui qui occupe le fond de la tunique propre. L'estomac est membraneux, peu plissé; l'intestin se replie une fois et se roule une fois en spirale avant de donner le rectum qui, vu la position de la deuxième production de la tunique propre, est plus éloigné de la bouche que clans l'es- pèce précédente. Je viens à présent aux ascidies où le sac branchial, après être descendu jusqu'au fond de la tunique propre , se re- coui'be et remonte jusque vers le milieu du corps pour prendre plus d'extension. Nous en avons une belle et grande espèce de la Méditer- ranée que je crois proprement celle c[ui a servi de type au -pudenduin marmian altennn de Rondelet, et qui en con- séquence seroit la véritable ascidia lyientida de Linnoeus, mais non pas celle cjue Mûller et Gmelin ont confondue en- suite avec elle. L'espèce dont je parle a de 4^6 pouces de longueur sur 2 ou 3 de largeur; sa teinte est d'un jaunâtre clair; sa 32 SUR LES Ascidies. surface est toute mammelonnée ou comme bosselée, par grosses inégalités arrondies. Sa substance est cartilagineuse et épaisse, en quelques endroits, de plus de 6 lignes. Pour ne point donner lieu à de nouvelles confusions de synonymie, je lui assigne le nom à' ascidie bosselée, ascidia niammillata. Le sac extérieur produit en dedans une arête saillante qui s'insinue entre la partie droite et la partie recourbée du corps proprement dit, pour maintenir l'une et l'autre en situation, et c'est vers le bas de cette arête qu'il reçoit les vaisseaux dont les ramifications pénètrent toute sa subs- tance et y produisent un très-bel effet en se montrant au travers de sa demi-transparence. La tunique propre est mince, ferme; son tissu est très- distinct et montre des fibres musculaires, des filets nerveux et des vaisseaux très-aisés à apercevoir. Le ganglion nerveux y est placé d'un côté et ne laisse aucun doute sur sa nature, tant à cause de sa couleur et de sa consistance que des rameaux qui en sortent. Le sac branchial peut aisément être dégagé de la tunique j)ropre du corps, et se fait beaucoup remarquer par sa grande étendue et la régularité très-visible de son tissu vas- culaire. Le cœur est plus difficile à bien voir dans cette es- pèce que dans les autres; je n'oserois même affirmer qu'il y existe autre chose qu'une réunion des gros vaisseaux, ce qui est d'autant plus singulier que ceux-ci sont bien apparens et •très-aisés à suivre. Dans cette espèce, l'estomac a ses parois sillonnées longitudinalement par de gros plis; et l'intestin ne fait que deux replis. Le canal de la génération est gros et se termine au même point que le rectum. SUR LES Ascidies. aS L'espèce la plus voisine de celle-là, et que la plupart des auteurs ont confondue avec elle, est Xascidia rnenUda de Mùller ( Zool. dan. VIII), le reclus marin de l'abbé Dique- mare {^Journ. de Phjs. , 1777, mai, pi. n,fig. i, 2,3); elle devient beancoup moins grande , est d'une forme ovale , souvent aplatie, beaucoup moins bosselée, d'un brun foncé, quelquefois noirâtre; mais elle ressemble d'ailleurs à Yascî- dia Jiiaimnillata , par l'épaisseur cartilagineuse de son sac, par son arête saillante à l'intérieur et par toute la disposition de ses viscères. Il suflit d'un coup d'oeil sur la figure de Diquemare pour voir qu'elle ne peut être la même que Xascidia i^ustica àe Mùller (^Zool. dan. XV), comme le pense Bruguières. Je prendrai pour type des ascidies , où la cavité branchiale ne pénètre pas jusqu'au fond de la tunique propre, une espèce presque cylindrique, à orifices rapprochés vers l'une des extrémités, h sac extérieur demi - transparent , mince, mou, et presque membraneux, souvent un peu ridé trans- versalement, décrite par Rédi ( Opz/jc. ^ III, XXI, 6) et Plancus ( Conch. min. not. , V, fig. 5 ). C'est à ce que je crois la même cjue Yascidia canina de Millier (^Zool. dan. XV) et de Gmelin, et je ne pense pas qu'elle diffère ànsaxi anijnal àe Diquemare {^Journ. de Phjs. , 1777, février, pi. I, fig. 1-7 ), quoique Bruguières ait voulu faire de ce dernier une espèce particulière ( ascidia virescens ) , ni du thethyum de Bohatsch , X, 4 5 ou du thethyion sociabile de Gunner ( Mém. de Drontheim , \W- , 11 1 , 3) que Gmelin réunit sous le nom à' ascidia intestinalis . Peut-être même Xascidia patida Mùll. LXV, et son ascidia corritgata , 24 SUR LES Ascidies. TjXXIX, 2, n'en sont-elles que de légères modifications.. Le sac extérieur est très -mince, très -mou, très- transparent, légèrement rugueux et h surface un peu scabre. La mem- brane qui le double est plus épaisse, plus consistante , souvent d'une transparence parfaite. La tunique propre est par elle- même entièrement transparente, et l'on voit les viscères au travers; mais elle est garnie de trousseaux de fibres muscu- laires qui descendent des deux orifices et se portent en se dilatant et s' amincissant jusque vers son fond. La figure de Mùller (ZooZ. dan., hY) donne une idée de ces deux ca- ractères. C'est du fond de la tunique propre que partent les vaisseaux qui unissent le corps au sac. Le ganglion ner- veux est dans l'angle que font ensemble les conduits des deux orifices, assez gros, et bilobé. La cavité branchiale ne vaque jusqu'au milieu du corps. Dans un angle de son fond est la bouche. Le cœur dans un large péricarde est derrière ce même fond. Il reçoit la veine branchiale, à ce qu'il m'a paru, du côté opposé à la bouche et donne de l'autre côté l'aorte cjui se divise en troisbranchesprincipalespour distribuer le sang aux parties. L'estomac est membraneux, sans inégalités à fintérieur. L'organe génital forme une masse bien séparée des viscères, logée dans un repli de l'intestin. Le conduit génital marche à côté du rectum et se porte plus avant que lui dans la deuxième production de la tunique propre. Uascidia clauata de Bolten {^Pall. Spic, fasc. X, pi. I, fig, i6 ) (i) appartient à la même tribu que Xascidia caiiina, (i) Gnielin a brouillé ses caraclères et ses synonymes avec ceux de l'ascidict padunculata. SUR LES Ascidies. r>.5 malgré sa forme très -allongée. Sa cavité branchiale est fort petite, son estomac peu ou point dilaté, son intestin tiré en longueur et ne faisant qu'un repli pour revenir sur lui-même, et atteindre l'orifice anal. Du reste, son organisation est la même que dans la précédente (i). Voilà ce que les ascidies, pour la plupart macérées dans l'esprit-de-vin, dont j'ai pu disposer, m'ont permis d'observer relativement à leur anatomie. Mes remarques pourront être complétées et rectifiées par ceux qui en disséqueront de fraîches. Telles qu'elles sont, elles suffisent pour marquer aux ascidies une place parmi les mollusques, et plus près des acé- phales ou animaux des bivalves ^ que d'aucune autre classe de cet embranchement. En effet, comme beaucoup d'acéphales, elles sont dé- pourvues d'organes de locomotion f comme beaucoup d'autres elles sont renfei'mées dans un sac à deux tuyaux; comme tous, elles ont leur bouche dans le fond du sac, à l'opposite du tuyau par lequel l'eau de la mer pénètre , et de manière à ce que cette eau ne puisse y arriver qu'après avoir arrosé la surface des branchies ; mais il y a cette différence essentielle que dans les acéphales ordinaires , les branchies représentent par leurs replis quatre lames ou feuilles parallèles, comme les feuillets d'un livre, tandis que dans les ascidies elles forment un sac ouvert seulement à l'orifice extérieur et h la bouche. Les caractères pris du sac, de la position de la bouche, et (i) C'est dans cette même subdivision, et spécialement dans le voisinage de Vascidia clavala , que viennent ces ascidies aggrégées ensemble, sur lesquelles M. Savigny vient de communiquer à l'Institut des observations si curieuses. 4 nô SUR LES Ascidies. de la disposition des viscères, sont les mêmes dans les salpa^ mais les salpa ne sont point fixées; elles nagent librement au moyen des contractions et des dilatations de leur sac; elles ont bien deux ouvertures, mais autrement faites et autrement situées: l'une, en forme de gueule et munie d'une valvule pour laisser entrer l'eau, est à l'opposite de la bouche; l'autre, en forme de tube pour faire sortir l'eau et les excrémens, est placée derrière la bouche; enfin les branchies, au lieu de former un sac que l'eau rempliroit, représentent un ru- ban placé en écharpe dans la grande cavité du corps et que l'eau frappe en passant. Je dois dire à cette occasion qu'il est maintenant constaté que les dagysa de Banks et de Gmelin ne sont autre chose que des salpa, comme on pouvoit déjà le soupçonner par le peu qui en est dit dans le premier voyage de Cook. M. Eve- rard Home vient de publier, dans ses Leçons d' Anatomie comparée , LXXI, LXXII, deux figures de ces dagysa^ faites pendant ce voyage, et qui ne laissent aucun doute. La seconde est même extrêmement voisine demon,ya^« tilesii. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. Fi&. I. Aacidie microcosme à l'extérieur, couverte de divers corps marin». a. Trompe ou orifice qui conduit aux branchies. — b. Orifice des excrémens. FiG. 2. Son corps proprement dit, enveloppé dans sa tunique propre, très-char- nue. — a. Première production qui conduit aux branchies. — b. Deuxième production qui conduit les excrémens. — c. Ganglion nerveux. FiG. 3. La tunique charnue ouverte, en laissant intact te sac branchial. a. Le tube ou col branchial qui étoit enfermé dans la première production. — tfr.Le petit anneau charnuquiallschoitsa baseà celledela produclioD,— SUR LES Ascidies. 27 ec. Les lambeaux de la tunique charnue rejetés. — d d d. Les loles gélati- neux qui adhérent à la face interne de la tunique charnue. E, E. Le sac branchial vu à l'extérieur. — e e e. Les plis concaves qui indiquent les plis saillaus eu dedans. — ff. Les vaisseaux qui passent sur ces plis et lient ensemble la totalité du sac. — g g. Le grand vaisseau ou veine branchiale. — gg- La grande artère branchiale. — /;. L'anus. — i. Partie non vasculaire répondant à l'œsophage. — k. Tube membraneux ta- pissant l'intérieur de la deuxième production , ouvert. — II. Anneau mus- culaire qui l'attacholt à la base de cette production. — mm. Valvules de l'intérieur de ce tube. Fi&. 4. Le sac branchial et son tube ouverts. — a. Le tube branchial. — b. Petites valvules de sa base. — c. Double rang de filamens. — d. Tubercule membraneux placé entre les deux veines branchiales et dont l'usage est inconnu. — eee. Membrane propre des branchies et ses plis saillans en dedans. — f. Veines branchiales. — g. Artère branchiale. — h. Bouche. — i. Anus vu au travers de la membrane. — k. Place du cœur vue au travers de la même membrane. FiG. 5. On a enlevé la plus grande partie de la membrane branchiale, pour montrer les viscères placés derrière elle. —a,b, c, d,e,f,g,h,i, comme dans la fig. 4, La bouche A conduit à l'œsophage/. — m. L'estomac. — n. Le foie. — 0 0 0. L'intestin. — p. Le cœur dans son péricarde. — IIQ- La tu- nique charnue. Fig. 6. L'œsophage, l'estomac et le commencement de l'intestin ouverts. — A, l,in, n,o, comme fig. 5. — Le foie est coupé en ra, n. — r /-.Sont les ouvertures par où la bile entre dans l'estomac. — En s s sont des papilles charnues qui rétrécissent le pylore. FiG. 7. Ascidie pJiusca entière. — a. Orifice branchial. — h. Orifice de l'anus. Fig. 8. La même, dont on a ouvert le sac et laissé intacte la tunique propre. — a, 5. Productions de la tunique aux deux orifices du sac. — c. Les troncs vas- culaires qui vont se distribuer au sac et à la membrane qui le double inté- rieurement. — d d. Les intestins paroissant au travers de la tunique. Fig. 9. La même dont on a ouvert la tuniquepropre, rabaissé la masse des intestins et laissé intact le sac branchial situé derrière. — a,b. Les productions de la tunique. Celle des branchies a, renferme encore le col des branchies. L'autre b , contenolt le bout du rectum p , qui a été déplacé. — c. Le sac branchial vu par sa face extérieure. — d. La veine branchiale e. L'artère branchiale. — y^ Une des principales veines du corps g. L'artère aorte. — h. Le péricarde et le cœur. — i. L'œsophage. — k. L'estomac. — ( l. Lin- •>8 SUR LES A SCIDIES. lestin. — m. Le foie et l'organe génital. — n. L'orifice séminal. — p. Le rectum. PLANCHE IL FiG. I. Ascidie papillcuse entière. — a. Orifice brancliial. — h. Orifice de l'anus. — ce. Productions palmées par lesquelles elle se fixe aux rocliers. Fjg. 2. Son corps proprement dit enveloppé de sa tunique charnue. — a. Orifice branchial. — b. Orifice de l'anus. — c. Ganglion nerveux, et les branches qui en sortent. — d. Vaisseaux allant du corps à l'enveloppe extérieure. FiG. 3. La tunique cbarnue ouverte pour montrer le sac branchial et les intestins. — a a a. Lobes de la tunique charnue. — Zi. Orifice branchial ouvert. — ccc' Les deux rangs de tentacules qui le garnissent. — dd. Le sac branchial , plissé comme àsasVascidie microcosme , ouvert en e, e, pour laisser voir une partie de son intérieur et le tubercule f. — g. Le cœur dans son péri- carde. — h h. Partie de l'intestin. — /;'. L'estomac. — i i. Rectum. — k. Anus. — /. L'orifice de la tunique charnue où répond l'anus , ouvert. —Tra m. Organes de la génération. — nn. Reste d'une sorte de diaphragme charnu. FiG. 4, Ascidie intestinale entière. — a. Orifice des branchies. — b. Orifice de l'anus. Tous deux dans l'état de rétraction. — ce. La masse du corps pro- prement dit, paroissant au travers de l'enveloppe extérieure. Fio. 5. La même dont l'enveloppe extérieure est ouverte. — a a. Lame externe de cette enveloppe. — b b. Lame interne. — ce. Tunique charnue envelop- pant le corps proprement dit. — d. Orifice branchial. — e. Orifice de l'anus. — f. Vaisseaux allant du corps à l'enveloppe. — g. Le ganglion ner- Teux. — II. Le cœur vu au travers de la tunique. FiG. 6. Le corps proprement dit de cette ascidie dont la tunique charnue est ouverte. — a. Orifice branchial fendu. On voit comment il se retire sur lui-même. — bb. Ijambeaux de la tunique charnue. — c. Orifice de cette tunique où répondent l'anus et l'orifice de la génération. — d. Sac bran- chial ouvert seulement vers son orifice. — e. Le péricarde renfermant le cœur. — f. Masse des organes de la génération — g g. Portion d'intestin. — h. Anus. — i. Canal excréteur de la génération. FiG. 7. La même, où le sac branchial et le péricarde sont ouverts , et les intestins développés. — a a a. Tunique charnue. — b b. Sac branchial. — c. Son ori- fice. — f/. La bouche. — e. Le vaisseau qui reçoit les veines du corps et donne les artères branchiales. — g. Veine branchiale. — h. Le cœur, dont le double péricarde a été ouvert. — i. L'aorte. — k. L'estomac. — II. L'in- SUR LES Ascidies. 29 teslin. — m. La masse des organes tle la généralion — n. L'anus. — o. Le canal excréteur île la génération. — p. L'orifiee tle la tunique charnue où ce canal et l'anus répondent. F1G.8. Individu de Vascidie pJiusca, remarquable par les nombreuses excrois- sances de son enveloppe extérieure. FiG. 9. L'ascidie en massue {ascidia clavala ) entière. — a. Orifice des branchies. — h. Orifice de l'anus. Fio. 10. La même ouverte. — a a. Enveloppe extérieure. — h. Sac branchial ou- Ycrt. — ccc. Intestin. — d. Rectum ouvert et enveloppé d'une substance glanduleuse. PLANCHE II L FiG. 1. L'enveloppe extérieure de Vascidie mammelonnée onverte pour montrer l'épaisseur de ses parois, la lame saillante qu'elles envoient intérieurement et les nombreux vaisseaux qui les parcourent. — a. Orifice branchial. — b. Orifice de l'anus. — c. Lame saillante pour maintenir le repli du corps. — d. Tronc de vaisseaux allant du corps proprement dit à l'enveloppe extérieure et se distribuant dans toute celle-ci. FiG. 2. Le corps proprement dit revêtu de sa tunique fibreuse entière, et retiré de son enveloppe extérieure. Son repli est à la face opposée. — a. Orifice branchial. — 6. Orifice de l'anus. — c. Ganglion nerveux et distribution des filets qui en sortent. — d d d. Principaux faisceaux de fibres. FiG. 3. Le même corps dont la tunique charnue est en partie ouverte pour mon- trer l'anus, l'œsophage, et une partie des vaisseaux et du sac branchial en situation. — a. Orifice branchial. — b. Orifice où répond l'anus, ouvert. — c. Le ganglion nerveux. — d d. La veine branchiale. — e e. Vaisseaux qui paroissent des artères portant immédiatement dans le corps le sang de la veine branchiale. — f. L'œsophage. — g. L'anus. — /;. Vaisseaux excréteurs de la Génération. — i i i. Face externe du sac branchial. — k h l: Lambeaux de la tunique charnue écartés. — /. Portion du sac branchial qui pénètre dans le repli du corps. FiG. 4. Le sac branchial ouvert dans toute son étendue. — a. Orifice branchial ou- vert.— b. Rangée de tentacules qui le garnit intérieurement. — c c. Les deux vaisseaux qui remplissent la fonction d'artères branchiales. — d. Partie la plus profonde du sac branchial, qui pénètre dans le repli du corps. — e. La ■veine branchiale. — f- La bouche. 3o SUR LES Ascidies. FiG. 5. Le canal intestinal détaché, et laissé dans sa disposition naturelle. — a. La bouclie. — b. L'œsophage. — c. L'estomac. — clJ. L'intestin. — e. Le rectum et l'anus. FiG. 5'. La masse des intestins, détachée et un peu développée, — a. L'œsophage. — &. L^estomac. — ce. L'intestin. — rfc?. Parties glanduleuses blanchâtres qui paroissent appartenir plus spécialement à l'organe de la génération. — e. L'anus. — f. Canaux excréteurs de la génération. FiG. 6. Les intestins ouverts. — a. L'œsophage. — b. L'intérieur de l'estomac et les sillons profonds qui le divisent. — c. Première partie de l'intestin mar- quée de sillons tranver.ses mais légers. — dd. Côte arrondie, saillant dans l'intérieur de l'intestin sur une partie de sa longueur. — eeee. Epaisseur glanduleuse des parois de l'estomac et de l'intestin. FiG. 7. Une partie de la tunique branchiale vue au microscope et montrant la disposition des vaisseaux. z (>//f . ^ F/. Ctfuier i^/. Ascin/ES . rz ./. MuTi irt-i/Ap. I /y. 2. ^utft'^r rt^/. Ascin//':s . />/. . //. J^UTi ,rcn^ ■ (>.'// . 2 . /'/.J. /'./. Ciajtér- e&^. JSC//J/A\S . /'/, . ///. /^tf/t jtjjA/ MÉMOIRE SUR L' ANIMAL DE LA LINGULE, (LINGULJ ANATINA LA M.) L n'est pas de genre de testacés qui prouve mieux que ne fait celui des Lingules^ la nécessité de connoitre l'animal, et de ne pas se borner à la coquille , pour ranger convenable- ment ces mollusques dans une métliode naturelle. En effet, les coquilles des Lingules, quoique d'une forme assez particulière, ne pouvoient faire soupçonner les grandes différences qui séparent leur animal des autres genres de sa classe; et tant qu'on n'a connu qu'elles, on les a ballottées arbitrairement de genre en genre. Comme elles n'ont point de dents à leur charnière, on ne pou voit deviner , en les voyant isolées , qu'elles étoient bivalves j et Llniiaeus qui n'en avoit vu qu'une , l'avoit placée parmi les patelles, sous le nom ai un guis ^ sous lequel elle paroît encore, qiioiqu'avec doute, dans l'édition de Gmélin. Rumphe^ et d'après lui Favamie j avoient pensé que ce pouvoit être le bouclier testacé de quelque limace. Chemnitz ayant eu occa- sion d'en voir les deux valves, jugea, je ne sais trop 1 a MiMOlRE pourquoi , qu'elle devoit passer clans le genre des jambonneaux, et la nomma pinna unguis. Bruguière est le premier auteur systématique qui ait su que ces deux valves sont naturelle- ment attachées à un pédicule membraneux, comme celles des téréhratides et des anatlfes ^ et qui en ait fait en consé- quence^ dans les planches de l'Encyclopédie , un genre par- ticulier , dont il ne donne point de description , parce que son V^vage et sa mort l'empêchèrent de conduire jusque-là son dictionnaire d'Helminthologie. Mais le citoyen Lamark a adopté et caractérisé ce genre^ et il restera d'autant plus sûrement , que l'animal , ainsi qu'on va le voir par ma des- cription , diffère considérablement de tous ceux des bivalves ordinaires. Il est assez singulier que les auteurs systématiques aient été si long-temps dans l'erreur au sujet de la Lui gale , tandis que cette coquille étoit déjà parfaitement représentée avec ses deux valves et son pédicule , dans Séba , tome III ^ pi. i 6, n°. 4 ; mais l'indication que cet auteur en donne en peu de taots , comme d'une espèce particulière de conque anatifèi'e , aura sans doute donné le change aux naturalistes. Quoi qu'il en soit , l'échantillon possédé par Séba , et com- posé de deux individus^ étant passé depuis dans le cabinet du Stathouder , et de-là au Muséum , le citoyen Lamark a bien voulu me permettre de disséquer l'un des deux individus. J'en ai observé un autre , rapporté par Riche de la mer des Indes , et déposé dans le cabinet du citoyen Alexandre Brongniard : c'est d'après ces deux morceaux que j'ai fait la description suivante. Les deux valves n'engrènent l'une avec l'autre par aucune dent 5 elles ne sont pas non plus attachées par un ligament SUR I.A lilNGULE. 3 dorsal élastique^ capable de les ouvrir, comme le Sont celles des bivalves ordinaires 5 mais elles sont suspendues l'une et l'autre à un pédicule commun, semblable^ pour la forme et la structure , à celui des anatifes j c'est-à-dire , d'une demi- mollesse , et revêtu d'une membrane cylindrique et circulai- rement fibreuse. L'animal n'a donc point , comme la plupart des autres bivalves , la faculté d'ouvrir sa coquille en relâchant ses muscles intérieurs ; mais il a un autre moyen qui consiste dans ses bras : lorsqu'il les fait sortir, il écarte avec eux les bords des valves comme avec des coins. Si l'on enlève les deux valves , on voit qu'elles sont exaçr tement doublées l'une et l'autre par les deux lobes du manT- teau, qui ont précisément le même contour qu'elles. Sur ce manteau sont différentes taches brunes et rudes, formées par les extrémités des muscles qui l'attachoient à la coquille, et qu'il a fallu couper pour l'en séparer : elles correspondent à des impressions musculaires qui restent à la face interne des valves. Entre ces taches, est un espace où le manteau est transparent , et laisse apercevoir le foie et quelques parties d'intestins : cette partie du manteau est adhérente au corps j mais tout son pourtour et toute sa moitié inférieure , c'est- à-dire, opposée au pédicule, sont libres, et cette moitié, en particulier, peut s'écarter de la partie correspondante de l'autre lobe. Tout le bord du manteau est légèrement renflé en bourrelet, et garni tout autour de petits cils fins, courts, serrés et bien égaux. La membrane elle-même est mince, demi- transparente, et parsemée de fibres blanchâtres et musculaires , destinées à contracter le manteau. '4 MilÉMOIRE Lorsqu'on soulève cette partie libre de l'un des lobes, on aperçoit les branchies attachées aux surfaces internes des lobes , et les bras ou les tentacules situés entre eux. Ces bras ou tentacules sont le seul organe par lequel l'animal puisse agir au-dehors , soit pour saisir sa nourriture , soit pour amener à lui de l'eau nouvelle lorsqu'il en a besoin, soit enfin pour écarter ce qui pourroit lui nuire. Si, comme nous avons lieu de le croire, le pédicule n'est pas doué de contractions volontaires, ces bras peuvent encore procurer à l'animal quelque légère loco-motion. En les agitant avec plus ou moins de force , il peut éprouver de la part de l'eau assez de résistance pour se balancer de côté ou d'autre. Mais ce sont des instrumens encore beaucoup plus délicats de toucher, ainsi qu'on va en juger: leur substance est char- nue; leur forme, un cône comprimé très-allongé, environ vingt fois plus long que sa base n'est large ; leur longueur est d'à peu près un tiers plus considérable que celle de la coquille j ils sont garnis à leur côté externe d'une série de petits filamens charnus , très-serrés et très-nombreux , ressemblans parfaite- ment à une frange , et devant être des tentacules très- sensibles. Cette frange, arrivée à la base de chaque bras, se continue d'un côté du corps seulement , de manière à se réunir à la frange du bras opposé, et à ce que les deux séries ri'en forment réellement qu'une. Ces deux bras sont probablement organisés à l'intérieur comme ceux des seiches, et ils donnent à l'animal de la Linguîe un certain rapport avec ces céphalopodes ^ mais nous n'avons pu en faire une anatomie plus profonde. SUR I-A riNGULE. 5 Lorsqu'ils sont dans l'état Je repos , ils sont roulés en spirale , entre les parties libres du manteau, de manière qu'ils se touchent par leurs franges. Entre leurs bases d'un côté est située une proéminence charnue et conique , qui adhère au manteau de ce côté-là, et au sommet de laquelle est percée la bouche , qui n'est qu'une ouverture de grandeur médiocre , sans dents ni autres parties dures. On voit qu'il n'y a aucune analogie entre ces organes et le pied toujours unique des autres bivalves , pied d'ailleurs toujours situé vis-à-vis le ventre, au-devant de la bouche , mais jamais à ses côtés 5 pied enfin qui n'est jamais garni de tentacules. Les branchies des Lingules ne diffèrent pas moins de celles des autres bivalves. On sait que dans ces dernières^ ces organes sont toujours quatre feuillets, placés, en dedans du manteau, aux deux côtés du pied lorsqu'il existe^ et dans les- quels les vaisseaux sont disposés en dents de peigne. Ici on ne trouve rien de pareil j mais les branchies sont adhérentes au manteau même , ou plutôt en font partie. On voit sur chacune de ces parties libres deux vaisseaux artériels venant de l'intérieur du corps, et formant l'un avec l'autre une figure de V. Chacun d'eux donne de son bord externe des vaisseaux tout parallèles , qui forment une belle figure de peigne sur la surface interne du lobe 5 dans les intervalles des premiers , il en revient d'autres qui entrent dans un vaisseau veineux parallèle au vaisseau artériel. Les deux vais- seaux veineux du même côté_, c'est-à-dire, celui d'un lobe, et celui qui lui est opposé dans l'autre lobe , entrent dans le cœur de ce côté-là. Nous verrons tout-à-l'heure qu'il y a deux cœurs. 1 6 MEMOIRE On poiirrolt tout au plus trouvei* uno analogie l(5gère entre cette forme de branchies et celle des patji'ei, des oscab rions, et de mes pliillidies , qui sont en quelque sorte aux patelles ce que les limax sont aux helicc} mais dans ces animaux il y a, au lieu de simples vaisseaux , de petites lames saillantes , et d'ailleurs leur manteau n'étant que d'une seule pièce ^ il n'y a qu'un seul cordon de ces lames , tandis qu'ici il y a quatre rangs de vaisseaux. Telles sont les choses qTi'on aperçoit dans les Lingules, sans faire aucune incision. Ouvrons à présent l'intérieur de leur corps, et, pour cet effet, enlevons le manteau et ses appartenances. Cet intérieur est rempli par les muscles et les principaux viscères, qui s'entrelacent les uns dans les autres, chose éga- lement presque particulière à cet anhnal. Ce qui l'est encore plus, c'est l'obliquité d'une partie des muscles qui réunissent les deux coquilles. Dans les bivalves ordinaires, ils sont perpendiculaires d'une valve à l'autre, et ne peuvent que rapprocher ces valves dans cette direction; et comme elles sont articulées par ginglyme, elles ne peuvent en effet en prendre d'autre : mais dans la Lingule, où elles sont sim- pleuient adli(''rentes à un pédicule mou, elles pouvoient encore glisser l'une sur l'autre 5 c'est ce que produisent les muscles de cet aniuial. Ils se croisent obliquement; les uns se portent de droite à gauche, les autres de gauche à droite, en passant d'une valve à l'autr.? et en descendant en dehors. Un coup d œil sur la figure suffit pour faire juger que ces muscles agis- sant ensemble, doivent fermer les coquilles, et qu'en agis- sant séparément , il y en a assez pour les faire glisser dans toutes sortes de directions. SUR I-A LINGULE. 7 Il y en a aussi un près de la charnière , et deux vers le milieu de la longueur des coquilles, qui vont directement d'une coquille à l'autre , et qui n'ont d'autre usage que de les rapprocher. Le canal intestinal est un tube simple qui n'a point de renflement apparent, et qui, par conséquent, ne se divise pas en estomac, et en intestins grêles et gros. C'est encore là une grande différence entre ce genre et les autres bivalves, qui ont toujours au moins un estomac large, et d'une surface très- inégale. Le tube intestinal de la Linaule^se rend d'abord directement vers les sommets des valves; il fait un repli, et, après être un peu revenu sur lui-même , fait un arc de cercle , un second repli, et se porte sur le côté, où il s'ouvre au-dehors en faisant une petite saiUie en cône tronqué entre les deux lobes du manteau. Tout l'intervalle restant entre les muscles et autour de l'in- testin est rempli par deux espèces de substances glanduleuses; l'une, d'un vert blanchâtre, du moins dans les individus qui ont macéré long-temps dans l'esprit-de-vin , forme une masse ronde , assez compacte , de chaque côté de l'œsophage ; elle nous a paru communiquer avec lui par de petits canaux ; et nous croyons, sans oser l'affirmer, qu'elle tient lieu de glandes salivaires. L'autre substance glanduleuse se divise en beaucoup de lobes et de lobules, qui forment comme des grappes; elle entoure la première et remplit tous les intervalles des muscles, des cœurs et de l'intestin; sa couleur est un jaune orangé , beaucoup de vaisseaux sanguins la parcourent ; et quoique nous n'ayons pas vu ses vaisseaux excréteurs, nous ne doutons pas que ce ne soit le foie. 8 MEMOIRE Les cœui's occupent les deux côtés du corps , sur la racine de chacun des vaisseaux qui forment les V des branchies j ces cœurs sont très-comprimés , et d'une figure à' peu près demi-elliptique. Leur grandeur est assez considérable, à pro- portion du reste du corps j en les ouvrant , on y remarque des rides ou des colonnes charnues, dont la direction est longitu- dinale, et cette face interne est teinte d'un violet noirâtre. Un gros vaisseau communique des deux branchies d'un coté, dans le cœur correspondant 5 et quoique nous n'ayons pu bien reconnoître les valvules^ l'analogie des autres mollusques ne: nous laisse pas douter que le sang n'aille de la branchie dans le cœur. Ce nombre et cette position des cœurs sont encore absolu- ment particuliers à la Lingulej les céphalopodes en ont trois, comme on sait 5 les gastéropodes un, et les bivalves aussi un, si on excepte les arches _, où le cœur est partagé en deux à cause de la partie rentrante de la coquille. Ici ce nombre de deux est indépendant de toute figure de la coquille 5 ce n'est pas ime légère déviation d'un type commun , mais c'est une structure faite sur un plan neuf , et dont les parties sont inti- mement liées : la position des branchies exigeoit celle des cœurs. C'est dans le foie que se distribuent d'abord les principales branches qui sortent des cœurs. Le cerveau m'a paru être quelques ganglions qui se font apercevoir vers l'espèce de col ou d'étranglement situé à la base des brasj mais il n'a pas été possible de suivre les nerfs, en examinant les autres viscères , et il faudra attendre l'occa- , sion de disséquer un troisième individu de Lingule, pour les décrire. Il n'y a point d'yeux, ni, àce qu'ilparoît, d'autres organes des sens que celui du toucher : la boxiche ne contient aucune langue ni aucune dentj c'est un simple commencement d'œ- sophage , comme dans les acéphales ordinaires. Nous n'avons rien vu qui nous ait paru se rapporter à la génération , et nous jugeons d'après cela que les Lingules se multiplient comme les autres bivalves , sans avoir besoin d'ac- couplement j qu'elles n'ont par conséquent aucun organe mâlej et que si nous ne leur avons pas trouvé l'organe femelle, c'est que les individus que nous avons disséqués, n avoient pas été pris dans une saison où les œufs fussent assez déve- loppés pour être visibles. Cette structure de la Lingule paroitra sans doute assez dif- férente de celle des bivalves ordinaires, pour justifier l'éta- blissement , dans la classe des mollusques , d'une quatrième famille , qui sera caractérisée par l'absence de tête et de pied , par les deux bras charnus et ciliés qui entourent la bouche, iujiHB et par la position et la forme des branchies. En effet , soit ^ qu'on adopte la méthode de M. Poli ou la mienne , méthodes qui reviennent à la même quant au fond , on ne peut y placer la Lingule sans faire entorse aux caractères. Il est vrai que dans la division du citoyen Lamark, elle entre tout simple- ment dans les mollusques acéphales , mais l'énorme distance qui la sépare des autres genres , est une raison suffisante pour un peu ajouter au caractère d'ordre de ceux-ci , afin qu'elle n'y entre plus. Il suffit de jeter les yeux sur la figure que Millier a donnée de l'animal de son patelin anornala y pour voir qu'il ressemble à la Lingule par ses bras ciliés et en spirale ; et quoique nous ne l'ayons pas vu , nous ne douions pas qu'il n'appartienne lO Mi^MOlIlE à la même famille : c'est ce qui nous a porté à en faire le genre orhlcule , qui a été adopté par le citoyen Lamark. Quant aux térébratules , nous avons eu d'abord quelque incertitude; leur pédicule indiquoit bien quelque affinité; la description que Linnœus donne de l'animal des a?ioniies , description qui se rapporte sans doute à l'une des espèces d'anomies dont Millier et Bruguières ont fait depuis leurs téiébratules , sembloit confirmer cet indice ; ces bi^as ciliés , linéaires f avancés j alternes avec les valves j plus lojigs que le corps , paroissoient annoncer beaucoup de ressemblance. Mais , d'un autre côté , on trouve dans le dernier voyage de la Peyrouse, une description et une figure de l'animal de la térébratule par Lamanon , obscure , et même à coup sûr fausse en quelque point, mais accompagnée d'une figure pas- sablement dessinée, d'après laquelle il sembleroit que ce coquil- lage a des branchies semblables, quant au fond, à celles des bivalves ordinaires, quoique soutenues par des osselets, mais manquant de bras ciliés. Heureusement une troisième description, celle de Walch, dans le Natiir-forscher , III, 80 , quoique faite sur un indi- vidu desséché , suffît pour lever tout embarras. On y voit bien que les deux parties que Lamanon et Walch lui-même ont prises pour des branchies , sont précisément des bras charnus et garnis de franges libres comme ceux de nosLingulesj seu- lement ils ne paroissent pas roulés en spirale. Le petit lobe du milieu, que Linnseus avoit appelé ligula^ n'est qu'une apparence produite par les franges de la base des bras qui reviennent sur elle-même : ce que Walch nomme , je ne sais pourquoi, la langue , n est que le corps ou l'abdomen ; et les vraies branchies seront restées adhérentes au manteau , sans que Lamanon ni Walch les aient aperçues. STIB. I.A riNGULE. 11 Ainsi, quoique nous n'ayons pas encore vu par nous- même l'animal des térébratules, il ne nous reste cependant aucun doute, d'après les réflexions précédentes,, qu'il ne doive entrer dans le même ordre que ceux des lingides et des orbicules. Explication des Figures. Fig. 1. La Lingule entière ayec sa coquille et son pédicule. Fîg 2. Un côté du manteau, lorsqu'on a enlevé la coquille. a. Portion des glandes atilivalres, vue au travers du manteau. b. Portion du foie, vue de même. cccc. Diverses extrémités muscu- laires. Fig. 3. L'intérieur de la valve qui couvroit ce côté du manteau. Fig. 4- Le côté opposé du manteau. Les mêmes lettres signifient les mêmes choses. Fig. 5. L'intérieur de la valve qui couvroit ce second côté du manteau. On y voit, ainsi qu'àla^^. 3, les empreintes des muscles. Fig. 6. La Lingule dans la position de la-^g. 4- U^ ^l^s lobes du manteau soulevé. aa. Les branchies. i6. Les bras roulés en spirale, avec leurs franges. F/g. j. La Lingule du côté opposé , l'autre lobe du manteau relevé. Fig. 8. La position de \a.fg. 6j le manteau encore plus relevé, pour montrer ce que je crois être le cerveau, a. Les bras écartés pour montrer la bouche, b. Fig. 9. Le côté opposé. La bouche b fendue, pour montrer le commencement de l'œsophage. Fig. 10. La position desj%. 4 et 6. La partie du manteau qui couvroit les viscères, enlevée. a. Glande salivaire. hb. Portions de foie. ce. Lts cœurs. 12 MÉMOIRE SUR I.i. I-INGULE. dd. Les vaisseaux principaux des brancliies vus au travers du manteau. ee. Portion d'intestin. f. Anus. Fier. 11. La même partie, où les cœurs sont mieux â découvert, et où l'un d'eux est ouvert. Les mêmes lettres ont les mêmes significations. Fi"-. 12 et i3. Tout le manteau, les glandes et les cœurs enlevés, on voit à. nu tout le canal intestinal et les principaux muscles. PaiJ (>\). \ ' ' W 6 -m (^ ^ ''Cfm %1^^ 10 t'/t^^at/ ii''ttJ/> LlNGlI..! Ay.iTINA D I s s E R T AT ION CRITIQUE Sur les espèces d'écrevîsses connues des anciens , et sur les noms qiCils leur ont donnés* DISSERTATION CRITIQUE S cr R les espèces d'écrevlsses connues des anciens-, et sur les noms qu'ils leur ont donnés. V A R G. C U V I E R. J'exposerai les espèces d'Aristote; je tâcherai de rap- porter les synonymes de Pline et des autres auteurs ; enfin , j'y ajouterai les espèces que ceux-ci pourroient avoir décrites , et qui ne seroient ni dans Pline ni dans Aristote. Je cite Aristote d'après la traduction de Gaza. Je ne mettrai les mots grecs que lorque je le croirai nécessaire. Aristote, Hist. an. lib. IV, cap. II, partage tous les crus- tacés en quatre genres. Voici ses termes : a Crusta intectorum ( r»v fiaXax.iç^àxm ) , genus primum locuata {raii x.a,(aXZ , Ce passage ne laisse point d'équivoque j il démontre que (i) Comme je prouverai dans la suite que Gaza a eu tort de traduire «,-t«k«î- par gammams , je substituerai le premier mot au dernier dajis toutes mes citaiioqs. l (4) les kol^-a'ivoi sont nos cancres , et que les autres genres sont ceux dont la queue est étendue. Mais quelle est la différence entre les zct^â^oi et les zaç/J^îç^? De part. an. lib. IV, cap. VllI. M Cancrariiim et locuslarium genus iiiter se sunt siinilia , eo quo J utrumt[ue bvachia forcipibus (lenticulalis Labeat (ra ;>;>)>«s' ix'-''' «,«'p'7'Ç'* )• " Et plus bas : ce Sqiiillas à cancrario génère differiint , eo qiiod caudam habeant j à locus- tario (i) verù qiioJ forcipe careant. n Donc les carabes sont celles des ëcrevisses à queues étendues qui ont les bras armés de serres , et les carides celles qui n'en ont point. En prenant les termes d'Aristote à la lettre , la crevette seroit aussi comprise dans les carabes , puisqu'elle a des serres \ mais comme elles sont fort petites , les Grecs les ont regardées comme nulles ; et c'est même à cette crevette que le mot de karis se rapporte plus parti- culièrement. Ceci a besoin de preuves : je vais les donner. Elien et Oppien me les fourniront. Ils racontent tous deux le même fait, ou , si l'on veut, la même fable , car il est bien difficile qu'il ait été observé j c'est que le labrax fait une guerre vive aux karldes , et que ces petits animaux ne pou- vant ni lui résister ni lui échapper , en tirent au moins une juste vengeance , et l'empêclient de leur survivre , en lui en- fonçant dans le gosier la corne de leur front. Elien décrit cette corne de manière à la faire reconnoître. AEl. Hist. an. lib. I, cap. XXX. « rastigium quod eminet à capite , quodque simile est aculissimo triremis Tostro , atque in siimmà parte secturas habet , modo serrulœ unciiiatœ.» (i) Giiza a mis par inégarde à crustario. ( 5 ) Il paroît que le carabos 6toit l'espèce la plus connue des Grecs ; car c'est à elle qu'ils comparent toutes les autres , et l'on ne peut , clans toutes ces comparaisons , s'empêcher de reconnoitre la langouste. Les passages suivans vont lo démontrer, en même temps qu'ils prouveront que l'astacos n'est autre que notre homard. Ar. Hist. an. lib. IV, cap. II , iiiilio. « Differt astacus à carabo, tZ ixAih j;i!A«r. » Ce passage déjà cité plusliaut pavoît d'abord contradictoire à cet autre aussi déjà cité. De part. an. lib. IV, cap. VIII. a Caucrarium et locustarium genus iiiler se sunt similia , -a x'-^'^'^ ^1C^"- '» Mais si l'on fait attention à la petitesse des serres de la langouste et à la' grandeur de celles du homard , on sera moins étonné de celte contradiction apparente. Aristote d'ailleurs l'explique lui-même. Hist. an. lib. et cap. cit. ce Astaco pedes grandes longé majores j extremàque parte latiores , quàm lo- custse (i). " Voyons le reste de la description de l'astacos, Id. lib. et cap. cit. « Astaco color , quôd ex loto dixerim , nitet , nigrisque maculis dispersis e-variat : pedes inferiores , ad grandes usque disposili octo : tùm grandes ipsi longé majores, extremàque parte latiores, quàm locustae liabentur , sed non spccie eàdcm. Dexter enim suum cxtremum , lalum , oblongum et tenue habet ; sinister , crassum et rotuiidum : ulerque tamen scissus in extremo , perindè ut maxilla, làm infià quàm suprà , dentatus est. Verùm dexter pusillos serratosque dentés continet omnes ; Lcvus , primes serratos , intimos velut ma- xillares , scilicet parle inferiore quatuor et continues , superiore 1res non con- tinuos. 53 (i) Gaza a traduit caralos ^zi locusta. Je prouverai plus bas qu'il a eu raison: ainsi je laisserai cette expression provisoirement. ( 6 ) Cette description est on ne peut pas plus exacte ; mais Aristote se trompe en disant que la serre gauche est toujours plus grande. Il est en contradictiozi avec ce qu'il dit lui- même plus bas : ce Mari et femince forceps alterutra grandior more et incertum est. » Et De part. an. lib. IV, cap. VIII. ce Astaci soli non certum , sed alterutrum , £equè at sors tulerit , forcipem luibent grandiorem , tàm mares , quàm femince. " Reprenons la suite de la description du homard. « Duo supra eos grandes (pedes) liabentur : alii lurtiusculi , paul6 ab ore inferiores. — Flectit atque in os adducit duos illos hirtiusculos pedes. Surculi eliam graciles geruntur à pedibus , qui cri proxinii habenlur. Dentés liulc cjuoque duo , ut locustcc : supra quos cornua breviora tenuioraque quàm locustEe. Quatuor item alia adsunt cornua, specie quidem illis similia , sed tenuiora et breviora. » La bouche et les antennes du homard sont, comme on le voit, décrites avec la plus grande exactitude. a Super 11 .-Bc oculi constituti sunt parvi, crassiusculi , non ut locustae majus- culi : frons quasi quœdam acuta et aspera , supra oculos exstat latior quàm locustae. Denique faciès acutior et pectus latins quàm locustae , totumque corpus mollius et carnosius. Pedum autem octo numéro, pars scissa in extremo desinit indivisa : quatuor enim bifurces sunt^ reliqui quatuor simplices ex toto pertendunt. » Cette structure des pieds ne se trouvant que dans le homard et dans l'écrevisse de rivière , est l'article le plus caractéristique de toute la description. « Pectus corpusque totura laeve est, non more locustarum acuieatum et as» paru m. » Ce dernier trait est décisif pour la langouste , et dé- montre que c'est elle que Aristote a entendue par le mot carabos. ( 7 ) Pline parle en plusieurs endroits d'un crustacé qu'il nomme locusta, et que je crois, ainsi que tous les ci'itiques, être le carabos d'Aristote , parce que , /ib. IX ^ cap. XXJC.) où il fait une énximération de tous les genres de crustacés , il y nomme le carabos , et non le locusta ; ce qui montre que le premier de ces mots est l'équivalent de l'autre. a Cancrorum gênera caiabi , astaci , majae, paguri heracleotici , et alia igno- biliora. » Au reste, ses autres passages sur le locusta ne sont pas bien décisifs , si ce n'est dans plusieurs qui sont visiblement pris d'Aristote, il substitue toujours locusta à carabos. Voici la plupart de ces passages. Lib. IX, cap. XII. « Crustis integuntur locustœ. y> Lib. IX, cap. XXX. » Locustcc crustà fragili nuiiiiuntur. » ■. I " ■ « reptantium modo iluitant. »j \' ; « — — cornibus inter se dimicant. » Lib. IX, cap. Ll. « — — — squillae et cancri coeunt ore. » Lib. XI, cap. XXXVII. ce Locustis squiUisque oculi magnâ ex parte praîduri eminent. -n J'avoue qu'il n'y a rien là de bien démonstratif pour mon opinion. Mais comme rien ne la détruit non plus , on peut la laisser subsister , fondée sur ce que j'ai dit plus haut de la synonymie des mots carabos et locusta. Elle s'appuie encore sur la ressemblance du mot lan^ gouste à celui de locusta , et sur la ressemblance plus grande de celui alagousta , qui désigne cet animal à Gênes. . Enfin , si l'on admet dans cette matière le témoienaaie ( 8 ) d'un auteur qui n'étoit pas naturaliste ^ voici un passage de -Suétone, qui ne peut sûrement s'appliquer qu'à la langouste. SuET. Tlh. Cacs. c. 60, p. ij6 , cdiL, Lvgd. Gryph. i565. « Gratulanli ([nscatori) aiitetn iiiter pœnaci , quod non et locustam , quam jirtegi andem ceperat , obtulisset , locusta quoque lacerari os imperavit. » Il n'y avoit qu'un animal dont le corps est aussi couvert de piquans que l'est celui de la langouste qui pût déchirer le visage d'un mallieureux. Quel est le nom latin de i'astacos? Pline l'aj^pelle e/e- phantus. Il est aisé de le jDrouver : 1 . D'une manière analogue à celle que nous avons suivie pour la langouste. En effet , dans son énumération des oenres d'ccrevisses, lib. IX ^ cap. JlXXI^ il nomme l'astacos , et ne parle pas de Velephaiitus, 2°. D'une manière plus dii-ecte. La description suivante ne peut convenir qu'au homard , puisque seul entre les écre- visses de mer il a les quatre premiers pieds fourchus. Lib. XXXII -, cap. XI. K Eléphant! IcKustarum generis nigri , podibus 4 bisiilcis : prx-l.erea bracliia duo binis arliculis , singulisque lorcipibus Jenticulatis. n Quant au mot g-ammarus dont Gaza se sert pour rendre l'astacos d'Aristote, il est bien sûr que les Romains ne l'ont pas employé dans ce sens-là. 1°. Pline ne s'en sert qu'une seule fois , lib. XXXII, cap. XII , où il donne une énumération générale des animaux marins par ordre alphabétique ; encore met-il cariwiariis et non gammariis. Il n'y a aucune indication qui puisse le faire rcconnoîtrc. Cependant, comme il p^rle immédiatement ( 9 ) après de son elephantus ^ il est impossible que ces deux ani- maux soient la même chose. 2°. Galien , llh, III , De alimentoruni facultatïbus ^ nomme Pastacos et le gammarus dans la même phrase comme deux animaux différens, 3°. Le passage suivant d'Athénée prouve que c'étoit une espèce de squille ; par conséquent qu'elle n'avoit; pas de serres , ou du moins n'en avoit que de fort petites. Ath, Dtipnosopli. lib. VII , p. 3c6 , edit. Xi/^t/. Casub. iGii^fol. D. « Cammari : Epicharraus in nuptiis hebes : Praeter hos boces , sprardes aphyae , cammari. » « Sopliron in niuliebribus eorum meminit. Est autem squillarum gémis. Romani ver6 sic appellant. m Il n'est pas aussi aisé de découvrir ce que ce peut être , que de prouver ce que ce n'est pas, E-ondelet y Histoire des Poissons , traduction française , liv. XVIII, p. 3^3 , croit prouver que le cammarus étoit la cigale de mer. C, arctus j Lin. Voici ses raisons. j". Le cammarus éloit , selon Atliénée , une espèce de squille : aussi est la cigale. 2°. Martial dittjue le cammarus a la couleur rouge du surmulet; et la cigale est, de toutes les espèces , la plus rouge lorsqu'elle est cuite. Pour voir combien Rondelet est dans l'erreur, il ne faut que lire attentivement l'épigramme de Martial , lib. H, Ep. 43.'^ Il y compare la médiocrité de sa fortune au luxe de son ami , et lui dit entre autres choses : « Immodici tibi flava tegunt ctrysendeta mulli ; 3j Concolor in nostrâ gammare lance rubes. » Il est clair que Martial ne dit pas que le cammarus soit ( io ) concolor inullo , mais lance : donc la belle couleur de la cigale prouve trop ; car, pour avoir celle de la terre cuite, il n'est pas nécessaire d'être du plus beau rouge. D'ailleurs , si Rondelet , qui a si bien prouvé que sa cigale étoit la même que le tettix d'EIien , avoit lu attentivement le cliap. XXVI du livre XIII de VHist. <7/z//«., il auroit vu que la cigale étoit réputée sacrée , et que l'on n'en mangeoit pas : or , tous les auteurs latins nous parlent du cammarus comme d'une espèce qu'on mangeoit coïnmunément 5 donc ce n'étoit pas la cigale. Scaliger, in lib. De subtilitate ^ Exerc. CCLV , p. 7^0, éd. Francof. 1607, in-xi.^ avance que le cammarus est l'écrevisse de rivière, parce que_, dit-il, sans cela elle n'au- roit pas de nom j et Varron , voulant qu'on en donne aux oies , n'a pu l'entendre d'une bête marine. J'ai vérifié la citation de Varron. La voici : M. Varu. De re rustica , lib. III, cap. XI, edit. de R. Etienne. Par. i5/\2i. a. Pabulum ils (anatibus) datur triticum , ordeum, vinacei , uvœ, nonnun- quara etiam ex aqiiâ cammari, et ejusmodi aqnatilia. 3> J'expliquerai dans peu ce passage j mais , en attendant , je vais y répondre par celui-ci de Columelle , qui semble prouver qu'il y avoit aussi des cammarus marins : je parle 4e la nourriture à donner aux poissons des étangs d'eau salée, CoLuM. De re rustica. lib. VHI , cap. XVII. « Nam et halecula modo capta et cammarus exiguusque gobio , et quisquis denique est incrementi minuti piscjs , majorem alit. » Quant à la première raison de Scaîiger , elle n'est pas bien forte j car l'écrevisse pourroit n'avoir eu aucun nom propre , ou , si elle en avoit eu , il scroit très-possible qu'il ( lO ne se rencontrât pas clans les auteurs qui nous sont restés. Pour moi , je pense que le cammarus étoit l'espèce de crevette que l'on appelle en Normandie cardon , et en Lan- guedoc cLvade, C'est le cancer crangon de Lbinaeiis . Il a les serres fort petites j ainsi il pouvoit fort bien passer pour une squillc , couime le dit Athénée. Il est très-commun, et, lorsqu'il est cuit, sa couleur est \m\ roux gris, appro- chant de la couleur de la terre cuite : ce qui se rapporte aux vers de Martial. Enfin , les vers suivans de Juvénal ne laissent, à mon avis, aucun doute sur mon opinion. JuvÉlf. Sat. V, V. 80 , sqq, « Aspice , quàm longo distendat pectore lancem , Quae fertiir domino squilla Sed tibi dimidio constrictus cammarus ovo Ponitur , exigu^l feralis C(«na patellà. " Je demande si la cigale , l'écrevissc de rivière , ou toute autre espèce , excepté le cardon , pourroit se mettre dans la moitié d'une coque d'œuf ? — - Mais on dira: que faites- vous du cammarus que Varron vovdoit donner aux oies ? Ce n'est pas le cardon. — Non ; mais c'est de toutes les espèces d'eau douce celle qui en approche le plus, c'est la chevrette des ruisseaux , le cancer locusta , Liir. Cela cadre aussi très-bien avec le passage de Galien , où il les nomme Ka,,uua,piJ^iç , avec une terminaison diminutive, et les place après tous les autres. De cette manière , il me semble que tous les témoignages touchant le cammarus sont conciliés. Avant de quitter l'astacos , il faut examiner ce que peut 2 ( 12 ) être le leo Je Plire , qui paroxt en apprôclier beaucoup, Voici ce qu'en dit Pline. Lib. XXXII , cap. XI. « Leones , quorum bracliia cancris similia sunt , relltjiia pars lociistas. » J'avoue que je ne puis me déterminer d'après une indi- cafion aussi vague ; et je ne crois pas Rondelet fondé à donner ce nom au C. strigosiis, puisque Athénée dit positi- vement , sur le témoignage de Dij^hilus , que le lion est plus grand que l'astacos : or, le C. strigosus est bien plus petit. A TH. Deipnos. lib. III, p. io6, D. ce De Iiisce malacostracis Diphilus siphnius ad liunc modum scribit. Ex ina- lacoitracis astacus , squiUa , lociista , leo , quamvis eodem génère contineantur , iiiler se tamen differunt : astaco leo major est. 33 Eelon et Jonston pensent que le lion dont parle Elien n'est autre que le homard. Mais il est facile de voir que le lion d'Elien est le même que celui de Pline , puis- que sa description est presque prise mot à mot de celle que nous avons alléguée plus haut. Or , le lion de Pline est différent de son elephantus ou de notre homard , p)uisqu'il parle de tous deux dans le môme chapitre. Voici le passage d'Elien. Hist. an. lib. XIV, cap. IX. ce Marinum leoncm {Xiil,nx B-aXxrliov ) , locuslae fermé similem esse scio , prseterquam quod tenuior et gracilior apparet , et ex aliquâ crnsfarum suarum parte cacruleus. Ignavus est : forcipes illius maximae cancroium forcipibus figura simi:es sunt. » D'ailleurs , Elien parle en plusieurs endroits de l'astacos 5 ainsi il le connoissoit bien , et il n'en auroit pas parlé sous un autre nom sans le remarquer. — J'avoue que je n'ai pu encore découvrir à quelle e.'spèce des écrevisses que nous ccnnoissons se rapporte ce nom de Iio;i. ( i3 ) Après avoir suffisamment éclaircl deux des genres d'Aris- tote , passons à un troisième , aux karides ou squilles. Nous savons déjà qu'il nomme ainsi les espèces qui n'ont pas de serres, ou qui les ont fort petites. Il en compte trois. Hist. an. lib. IV, cap. II. « Squlllarum génère continentur glbLa^ , crangines , et parvae, q.use majore» riunquam effici possunt. » Ces dernières ne peuvent pns nous embarrasser. Ce sont sans doute les petites espèces , comme le C. locusta, ou même, si l'on veut, le C. crangon. Mais les deux premiers noms pourroient s'étendre à toutes celles qui n'ont point de grandes serres , si le passage suivant ne les déterminoit plus précisément. Id. ib. et Squillls gibbis cauda et pinnae quaternse. Cranginis quoque lateri caudae , utrinque pinnas adnexse sunt. j^ Voilà donc exclues toutes celles qui ont cinq nageoires à l'extrémité de la queue , comme la cigale , l'orclietta. Plus bas : a Quarum pinnarum média utroque in génère spinulis liorrent. ■>■> Ces lignes-ci excluent le cardon , qui a bien au lieu de nageoires du milieu une écaille inflexible , mais sans petites épines. Il ne nous reste donc absolument que la crevette et la mante , qui , au lieu de nageoire du milieu , ont une écaille épineuse. Enfin , la ligne qui suit en fixe la diffé- rence. « Verùm in crangine latiora , ingib!)is aciitiora sunt. »» Dans la crevette, Fécaille du milieu est étroite et pointue 5 dans la mante , elle est ronde et large. Celle-ci est donc le crangon 'j celle-là, la squilla glhhù.. ( ^4 ) Je condamne donc entièrement le sentiment de Rondelet , qui pense que la mante étoit inconnue aux anciens , et qui nomme crangon une espèce trop appi'ocliante du squilla gïbha (si môme ce n'en est pas une simple variété) pour que Aristote l'en ait séparée dans une division générale. Gessner n'a fait que le copier , et Jonston a copié Gessner j ainsi leur avis ne mérite guère d'être compté. Scaliger s'é- loigne encore bien davantage des termes d'Aristote , puis- qu'il donne le nom de crangon à la cigale , qui a cinq nageoires à la queue. Au reste , quoique Aristote et Pline n'aient pas parlé de la cigale ni de l'orchetta , elles n'étoient pas pour cela entièrement inconnues aux anciens. Il est difficile que ce que dit Athénée des grandes xa.pîcP'iç que Apicius mangeoit à Minturnes en Campanie , et qui surpassoient encore celles de Smyrne et les homards d'Alexandrie, ne se rapporte pas à l'orchetta. Athen'. Deipjios. lib, I , p. 7 , D. « Squillis vescebatur inagno emptis , et qiice illic (MInturnis) nascentes, et iiiaximas smyrnBeas , et astacos alexandrinos amplitudine vinceb;mt. 5> On sait que Apicius ayant ouï dire que la côte d'Afrique en produisoit de plus grandes , équipa un navire pour y aller, et que ne les ayant pas trouvées comme on le lui avoit dit , il revira de bord , sans être curieux de descendre à terre. Or, c'est encore aujourd'hui le long des côtes de Barbarie que les orchettas sont le plus communes. C'est encore à cette espèce qu'il faut rapporter ce que Elien dit des grandes écrevisses des Indes. Hist. an. lib. XVI, cap. XIII. m. Svjuillse locustis majores indicœ sunt , etc. » ( ^-^ ) Le même Elien nous donne une fort bonne description de l'espèce que , d'après lui, Rondelet a nommée cigale. Jlisf. an. llb. XII, cap. XXVI. «c Est etiam cic'adarum genus marinum , quarum maxima parvi carabi simi- litudiiiem specieuique geiit. Veiùm tamen cornua non sitniliter atqiie ille magna, iiec aculeos habet. Aspectu etiam nigrior est, et cùin captus est, stridorem quemdam edere videtur. Piniias ipsius exiguae sub oculis enascuntiir. jj Voilà à peu près tout ce que j'ai pu rassembler sur le genre des karides ou squilles. Nous voyons que toutes les espèces de la Méditerranée que nous connoissons aujour- d'hui , étoient aussi connues des anciens. Quant au dernier des genres d'Aristote , ses x,a,pyJvoiy j'ai peu de ~ chose à en dire, parce que, d'après ses pa- roles , il est presque impossible d'en déterminer les espèces. Il en fait quatre familles , Ilist. an, lib. IV, cap. IL 1°. Les maja , qui sont les plus grands. 2 . Les paguri et les héracléotiqucs. 3 . Les fluviatiles. 4°. Les petits , auxquels on n'a point donné de nouiâ. Dans le même chapitre , il assure qu'il y en a une espèce en Pliénicie qui marche si vite , qu'on l'appelle hïppac : c'est vraisemblablement une des espèces à longues jambes; d'autant phis que , De part, an. lib. IV. cap. VIII, il parle des majœ et des héracléotiqucs comme marchant mal et ayant des jambes très-courtes , de façon que la dureté de leur test contribue seule à leur conservation. Au même endroit, il dit que les majœ ont les jambes menues, et que les héracléotiqucs les ont plus courtes. Voilà à peu près le résumé de tout ce que Aristote dit touchant ce genre. Pline en a copié une partie^ lih. /A~, cap, XXJlI,^ sans y rien ajouter j et Llicn ni ( 1^ ) Athénée ne m'ont pas donné plus d'éclaîrcissemens. Il n'est donc pas étonnant que les modernes aient tant varié dans l'application de ces noms. Rondelet , par exemple , donne le nom de maja au pou- parS, fondé du moins sur sa grandeur. Selon etFracastor, Ap, Gesnerum , le donnent à l'araignée^ ainsi que Mathiole et Jonston. M. Linné donne le nom de maja à une espèce différente des deux précédentes. Le nom de pagurus n'appartient pas à moins d'animaux. Rondelet le donne à l'araignée ; Belon et Scaliger, au pou- part. M. Linné les a suivis. Mathiole le donne au C. maja de Linné. Rondelet nomme notre araignée C. héracléotique. Belon , au contraire, et Scaliger, ont donné ce nom à la crête-de- coq , et prétendent que le C. héracléotique de Rondelet est une petite maja. Rondelet avoit donné à la crête-de-coq le nom à^arctos^ qui se rencontre une seule fois dans Aristote pour désigner un crustacé. Belon et Scaliger, au contraire, donnent ce nom à l'orcîietîa. Ces variations ont étonné sans doute le lecteur. Si j'avois allégué les raisons dont chacun de ces auteurs éîaie son opinion , leur foiblesse eiit fait rire. Pour moi , je n'irai pas augmenter le nombre de ces nomenclateurs, qui ressemblent à des pilotes voguant en pleine mer sans boussole et sans étoile. Il nous reste à examiner deux espèces d'écrevisses que l'on trouve dans des demeures étransères ; l'une est le Bernard l'hermite , qui loge sa queue molle et sans coque ( ^7 ) dans les coquilles univalves qu'il rencontre sur le rivage , et qui en change à mesure qu'il grandit. Un instinct aussi singulier a été remarqué par tous les auteurs : ils ne varient que dans les noms. Aristote le nomme Kctpuviov , Hist. an. lib. V, cap. XV, et De part. an. lib. IV. cap. VIII j dénomi- nation peu analogue à celle qu'il avoit fixée pour les autres genres, puisque le Bernard approche beaucoup plus de ses za.pci.Co) que de ses y.xpyJvoi. Pline en parle , lib. IX, cap. XXXI^ sous le nom de pinnothère j preuve du peu d'attention qu'a mis cet auteur dans sa vaste compilation , puisque dans le même livre, cap. XLII.^ il donne ce nom de pinnothère, d'après Aristote , à Técrevisse qui habite les bivalves. Les mœurs , l'existence même du pinnothère , sont aussi incertaines que celles du Bernard Thermite sont sûres. Les anciens et les modernes varient tous tant sur la forme du premier que sur ses habitudes. Aristote en parle de ma- nière à faire croire qu'il ne l'avoit pas vu , puisqu'il ne sait si c'est une squille ou un crabe j et il dit qu'il sert de gardien à la pinne. Hist. an. lib. V, cap. XV. Quelques lignes plus bas, il dit qu'on trouve de petits crabes dans plusieurs coquillages , comme les moules , les pinnes , les huîtres et les peignes. Il paroît même , par le passage sui- vant, qu'il y avoit trouvé quelquefois le C. depurator. De part. an. lib. IV, cap. VIII. « Cancelli autcm qui perquàin exigui in piscicuHs reperiiintur, pedes novls- GÏmos latiusculos habent , ut ad nandum utiles siut , quasi pro pinnulis avit remis pedes Laberentur. » Pline prétend que c'est une petite squille , et qu'il fournit la pinne de nourriture, en l'avertissant de fermer sa coquille lorsqu'elle est pleine de petits poissons. Hist. nat. lib. IX , cap. XL VIII. ( i8 ) Cicéron avoît déjà avancé cette opinion dans le passage suivant^ dont il paroît que celui de Pline est emprunté. Clc. De Nat. Drnr. lib. II, cnp, XLVIII. ce Piiina vero (sic enim graecè dicilur) , diialius grantliljus conclijs patulis , cnm parvà squll'à quasi societatem coit coinparandi cilii. Itaque , cùm pisciculi paivi in concham hiaulem innataverunl , tùm , admonita à squiUàj pinna morsu coinprirait conclias. jj Oppien imagine tout au contraire que le crabe mange la pinne ou l'huître , et il lui prête pour cela un artifice très-ingénieux; c'est que, lorsque la pinne s'ouvre, il jette une petite pierre entre ses écailles pour les empeclier de se refermer, Belon , Rondelet , et, après eux, Gessner , reviennent au dire d'Aristote. Ils croient que le pinnotlière fait sentinelle pour la pinne contre les attaques du poulpe j ils le rejjré- sentent comme un petit crabe. Hasselquist a embelli le roman de Cicéron et de Pline. Il prétend que le pinnotlière va à la provision , et que y lorsqu'il revient , il pousse un cri pour se faire ouvrir. Le cri d'un crabe doit être curieux. L'inconvénient qu'a cette opinion par-dessus toutes les autres , c'est qu'il est physiquement impossible que la pinne mange rien de ce que le crabe pourroit lui apporter , et • qu'elle ne se nourrit que de l'eau de la mer. Sur l'autorité de son élève , Linné , dans la dixième édition du Systema naturae ^ regardoit encore le pinnotlière comme une écrevisse à longue queue. Il marquoit cependant son doute par un point d'interrogation. Dans la douzièiue édition , il décrit un tout autre animal , et le place parmi les crabes. Cependant il cite toujoius la même figure de Jonston^ ( 19 ) qu'il avoît citée dans la dixième édition ; et il faut remarquer que cette figure n'est qu'une mauvaise image du Bernard l'hermite. Tout cela me fait croire que Fliisloire du pinnothère n'est qu'une imagination semblable à plusieurs autres , dont les crabes ont été l'objet ; et que toutes les espèces d'écre- visses peuvent se rencontrer entre les écailles des bivalves , lorsqu'elles sont assez petites et assez imprudentes pour s'y laisser prendre. Moi-même j'ai trouvé souvent dans des moules le crabe commun et l'étrille , et dans des coeurs le C. strigosus ^ sans pour cela leur prêter toutes les inten- tions que les auteurs attribuent à leurs pinnothères. BAUDOUIN , Imprimeur de l'Institut national , rue de Grenelle- Saint-Germain , n° ii3i. Ther:midor an xi. t iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii K