AT. Ets | FE - ° : Pr & ÉCOLE SUPÉRIEURE DE PHARMACIE DE sé CONCOURS POUR L'AGRÉGATION. nt DES APPLICATIONS LA BOTANIQUE A LA PHARMACIE THÈSE PRÉSENTÉE ET SOUTENUE DEVANT L'ÉCOLE DE PHARMACIE DE PARIS Par J.-L. SOUBEIRAN, Professeur agrégé à TÉcCOté 48” Plarmacie, Licencié ès sciences naturelles, Aide d'histoire naturelle près la Faculté de médecine de Paris, Membre de la Société de Biologie, de la Société botanique de France, Non résidant de la Société Linnéenne de Maine-et-Loire. Simplicium medicaméntorum et facultatum quæ in eis insunt, cognitio ita necessaria ut sine cà nemo rectè medicare queat. {ORïBAZIUS. ) Mo. Bot:/Gard Garden, 1£ BTE PARIS. VICTOR MASSON, LIBRAIRE, Place de l'École-de-Médecine, 17. 1855 JUGES DU CONCOURS. me MM. BALARD, Président. BOUCHARDAT, CHATIN. CHEVALLIER. DUCOM. GUIBOURT. LECANU. COMPÉTITEURS, ——— MM. HÉBERT. LUTZ. SOUBEIRAN. VIALLA, DES APPLICATIONS DE LA BOTANIQUE À LA PHARMACIE. Simplicium medicamentorum et facultatum quæ in eis insunt, cognitio ita necessaria ut sine eà nemo rectè medicare queat. (ORIBAZIUS.) Omnium simplicium pharmacorum vires nosse oportet eum qui aliquot compositum est facturus. (AETIUS.) Medicus omnium stirpium peritiam habeat consultd, sin minus plurimorum saltem quibus frequenter utimur, (GALIEN.) Lorsque l’homme, destiné à régner en souverain sur tous les êtres, fit sa première apparition sur la terre, la puissance y SD PRFLMNT à des maîtres peu disposés à 44 en abandonner la possession , et que la nature avait faits redoutables. Le futur dominateur, dans toute la misère de sa faiblesse primitive, eut d’abord plus à s’occuper d'éviter leurs atteintes qu'il ne put penser à les assujettir à son joug et à en faire ses aides et ses esclaves. N’ayant recu de la nature aucune arme, ni pour attaquer ni pour se défendre, privé d'expérience, alors que ses instincts de soéiabilité mañquaient de l'élément qui devait bientôt multiplier sa puissance, force jet fut de se réfugier dans te quelques lieux retirés et sauvages, et de commencer, dans l'isolement et la crainte naturels aux êtres timides et faibles, le règne qui devait un jour soumettre tous les animaux à sa volonté. | Réduit à se nourrir des quelques fruits qu’il pouvait cueillir dans le voisinage de sa retraite, sa race se fût bientôt éteinte, si la nature ne l’avait fait naître dans un de ces climats heureux qui ne connaissent pas les sai- sons rigoureuses et stériles; car alors la prévoyance n'avait pu l’éclairer et lui faire réserver une provision d'aliments levée sur les produits de la saison de chaleur ét d’abondance. Les fruits savoureux et succulents de ces climats durent suffire longtemps à ses besoins, jus- qu'au moment où, sa race s’étant multipliée et ne trou- vant plus autour d'elle une alimentation suflisante, sentit le besoin de se créer des ressources nouvelles : le cercle de ses tentatives dut S'élargir, et l’enrichir de la découverte de racines féculentes et de graines farineuses. Si l’on peut appeler Botanique la connais- sance des végétaux, elle est sans contredit la première dés Sciences par droit d'ancienneté : elle fut créée le jour où l’homme, ayant constaté les propriétés alimen- aires d’uneplante, sut la reconnaître fe lendemain, et put en garder le souvenir pour le transmettre à ses suc- cesseurs, Le premier jalon était posé, et, si bien grande est la différence entre ce point de départ et la science de nos botanistes modernes , qui enregistrent dans leurs catalogues cent cinquante mille espèces de végétaux , et savent pénétrer jusque dans les derniers replis de leur organisation, bien grand aussi est le temps qu'il a fallu pour arriver à ce résultat, et des milliers de siècles se sont écoulés entre la première observation et la dernière. NE Que de fois, lors des recherches des premiers hommes, l'expérience a-t-elle été achetée par un accident fatal! que de fois, séduisant par une faussé apparence de suc- culence et de parfum, le poison ne s’est-il pas glissé à la place de l’aliment! Et si le hasard voulut qu'un malade ressentit des effets bienfaisants d’une de ces érreurs, qu’un esprit réfléchi prit souvenance du résultat, la ma- tière médicale fut créée à $on tour. Son berceau doit être évidemment placé dans les premières observations sur les propriétés des plantes ; et c’est aujourd’hui en- core dans le règne végétal qu’elle va puiser ses plus nombreuses ressources. Il suffirait, pour s’en convaincre, d'ouvrir l’un quelconque de nos traités de matière mé- dicale, et de mesurer la place qu’il a dû accorder à la série des médicaments fournis par chacun des trois rè- gnes. Ilne m'appartient pas de rechercher ici comment, pen- dant une longue suite de siècles, l’observation inintelli- gente, ou des idées théoriques plus ou moins bizarres, firent mêler à des médicaments utiles une foule de “db Stances qui n'auraient jamais dû sortir de leur obscu- rité : mais ce que je veux faire remarquer c’est que, lorsque ce chaos commença à se débrouiller, ce furent les botanistes qui y apportèrent la lumière. Le premier en France, le plus illustre peut-être de nos botanistes, Tournefort, appliqua ses vastes connais- sances à débrouiller l’origine des médicaments que nous empruntons au Levant et à l'Asie Mineure; il chercha à retrouver et à décrire les plantes qui fournissent” des produits à l’art de guérir, et nous en avons la preuve à chaque page en lisant la relation de Son voyage dans le Levant , et dans le traité spécial de matière médicale qui RS ame fut publié en 1717, après sa mort. Déjà avant lui, en 1699, Camerarius avait porté ses investigations dans la même direction, et tous deux furent suivis dans la voie qu’ils avaient ouverte par les botanistes les plus émi- nents, les Linné , les Gmelin, les Jussieu, les de Can- dolle , les Olivier, les Richard, les Endlicher, des Airness de Saint-Hilaire, etc. De cet exposé historique , ce qu’il me faut écess TU ment conclure, c’est que, de toutes les sciences, la bo- tanique est la plus propre à éclairer l’histoire naturelle des médicaments, et à porter la lumière dans cette bran- che si importante de la pharmacie. Ce n’est pas à dire que, pour faire progresser l’art auquel il s’est donné, chaque pharmacien doive, par ses connaissances, rivaliser avec les grands noms auxquels nous venons de rendre hommage. À chacun sa tâche : aux hommes de la science, les grands progrès; aux hommes dans une condition professionnelle, la nécessité d’avoir connaissance de ce que les savants ont fait, et d'y apporter à l’occasion, s’ils le peuvent, le produit de leur plus humble observation. Mais à moins d’être cou- pables envers leurs devoirs et envers eux-mêmes, il leur est d’une nécessité absolue d’avoir poussé assez loin la science botanique pour reconnaître, sans hésitation et sans erreur, les plantes qui font partie de la matière mé- dicale, ou qui, vivant autour de leur demeure, appar- tiennent à cette médecine populaire qui a ses préféren- ces et ses habitudes. C’est ainsi qu’il évitera des erreurs graves, qui lui se- raïent aussi préjudiciables qu'aux malades, en prenant une plante toxique à la place d’une herbe innocente où en employant une plante inerte là où il faudrait employer une substance active. Le professeur Gouan assure qu’il a vu le cerfeuil sauvage pris pour de la ciguë , et j'ai vu le même fait se renouveler à la pharmacie centrale des hô- pitaux, où un marchand présentait du Chærophyllum te- mulum pour du Conium maculatum. Thoré rapporte un exemple du même genre; il a vu le Scandix Anthriscus introduit dans une préparation où il aurait dû éntrer de la ciguë. ; La vertu médicinale d'une Ste étant constatée, si elle entre dans une composition pharmaceutique, tout le succès de l’opération sera fondé sur le choïx qui en est fait? et si un opérateur ignorant lui substitue quelque autre végétal, qu’importera alors qu’il apporte dans ses manipulations le savoir et les soins minutieux ? m’aura-t: il pas compromis par son choix malencontreux la valeur du produit qu’il prépare, l'espérance du médecin qui compte sur ses effets, la santé du malade qui devait en être le prix ? Dans les campagnes surtout, cette connais- sance de la botanique n’est-elle pas indispensable pour le pharmacien ? sera-t-il plus ignorant que les paysans qui l'entourent ? fera-t-il venir de loin et à grands frais, pour en garnir son officine, les plantes qui croissent à sa porte, et qu’il peut récolter si facilement? renoncera-t-il pour toujours aux ressources d’aisance et de fortune que pour- raient lui apporter la récolte et la dessiccation des végé- taux, qu’il laisse passer en d’autres mains, quand sa ré- sidence au milieu de populations laborieuses lui laisse si souvent des heures et des jours de loisir ? La nécessité pour le pharmacien de connaître les plantes pour ne pas les confondre les unes avec les autres n’a pas besoin d’être justifiée davantage; c’est une des applica- tions les plus évidentes de la Botanique à l’exercice régu- ss À lier. de la pharmacie. Mais il en est d’autres qui exigent de nous des développements plus étendus ; je les compren- drai dans les propositions suivantes : 4° Les connaissances botaniques ont contribué à enri- chir la matière médicale de nouveaux médicaments ; elles peuvent encore servir de guide dans de re re- cherches, 2° Les connaissances botaniques éclairent les substitu- tions à faire d’une plante à une autre, ou d’un produit, fourni par une plante, à des produits retirés de plantes différentes. 3 Les connaissances RoBhiques peuvent faire recon- naître les falsifications que l’on fait subir à divers médi- caments. h° Les connaissances botaniques ont une application directe à la préparation des médicaments, ont servi et peuvent servir à éclairer certaines parties de la “Pharma- cie pratique. PREMIÈRE PROPOSITION, Les connaissances botaniques ont contribué a enrichir la matière médicale de nouveaux médicaments ; elles peuvent servir de guide dans les recherches de même ridtüré, Les botanistes voyageurs explorant les diverses con- trées du globe, mettant à profit les observations pratiques faites par leurs habitants et appliquant à des recherches leurs connaissances dans la science botanique, ontenrichi notre matière médicale d’un grand nombre de médica- ments nouveaux. Les noms des Garcias, des Clusius, des Hernandez, des Pison, des Plumier, des Prosper Alpin, des Tournefort, des Olivier, des Humboldt et Bonpland, des Martius et de tant d’autres naturalistes, dénoncent bien haut les services que la matière médicale doit à ces hommes célèbres qui ont consäcré leur vie à la science des végétaux. Nous devons rechercher maintenant comment, en partant des caractères botaniques des plantes, on peut trouver le moyen d'arriver plus sûrement à la découverte de nouveaux médicaments; comment les botanistes, gui- dés par les analogies de structure des végétaux, parvien- nent plus facilement que d’autres à enrichir la méde- cine de nouvelles acquisitions. Le principe scientifique qui les guide dans cesrecher- ches est établi de la manière la gr nette dans la Philo- sophia botanica de Linné : 4) — Plantæ quæ genere conveniunt, etiam virtute conve- niunt; quæ ordine naturali continentur; etiam virtute pro- pius accedunt. Quæque classe naturali congruunt, etiam viribus congruunt. (Philos. botan ; p. 278.) li serait bien difficile de préciser l'époque à laquelle ce principe a été introduit dans la science ; il élait déjà entré dans les habitudes et dans les convictions avant que les botanistes se fussent avisés de le formuler. On en trouve la première application dans l'ouvrage publié en 1699 par Camerarius, sous le titre suivant : De convenientiä plantarum in fructificatione et viribus. Petiver dans la même année, et Blair vingt ans plus tard, s’en occu- pèrent à leur tour; mais il acquit un crédit immense le jour où Linné le formula nettement et lé fit soutenir par son élève Frédéric Hasselquitz en 4747. Depuis lors, un grand nombre de botanistes l'ont adopté et l’ont sou- tenu. Je citerai parmi les principaux : Gmelin ( Botanica et chemia ad medicicam applicata (1755). Wilcke (De usu systematis sexualis in medicinä) (A 76h). Isenflamm (Methodus plantarum medicine clinicæ adminiculum ) (176h). De Jussieu (Mémoire sur les rapports qui existent entre les plantes et leurs vertus) (1786). Yrolik (De viribus plantarum et principtis botanicis di- judicandis ) (1796). Barton (Gollections for an essay towards a materia medica of the United States) A801 à 1804). Decandolle (Essai sur les propriétés médicales” des plantes) (1804 et 1816), ER — À partir de ce moment l'opinion des naturalistes était formée, et nous voyons la théorie des rapports entre les caractères botaniques et les propriétés médicinales. des plantes être adopiée par la presque universalité des au- teurs qui ont écrit sur la matière médicale. Je citerai en particulier les noms du docteur Haine, de Cassel, de Gobel, de Nees, de A. Richard, de mon père, de Fée, de de Smyttère, de Kostelezky, de MM. Chevallier et Guil- lemin, et enfin de M. Guibourt, dont l'excellent traité de matière médicale est classé d’après les principes de la méthode naturelle, Cependant, ce ne fut pas sans opposition que l'opinion se forma à ce sujet, et les noms de Vogel (Materies me- dica), de Plaz (De plantarum virtutibus ex ipsurum charac- tére botanico nunguam cognoscendis, 1762, 1763), ainsi que le nom de Gleditsch, sont là pour en témoigner, Le principe des rapports entre les caractères d’orga- nisation et les propriétés des plantes est aujourd’hui in- . contesté, je dirai de plus incontestable. Je me hâte d’ajouter que son application exige une science élevée, et que des rapprochements grossièrement établis pour- raient aller directement contre le but que l’on se pro- pose. L’utilité de la botanique pour le perfectionnement de la pharmacie a un lel intérêt que l’on m’excusera de don- ner üne assez grande extension à la partie de ma thèse qui doit traiter de ce sujet. @ On ne peut pas nier qu’un même système d'organisa- tion dans des plantes différentes ne doive nécessairement y déterminer la formation de produits semblables; et lorsque nous voyons des végétaux distincts attachés au même sol, enveloppés de la même atmosphère, recevant, » — 12 — par conséquent, les mêmes matières nutritives, donner naissance à des produits dissemblables, force est bien d'admettre que les organes de ces végétaux, en faisant subir aux éléments alimentaires un autre genre d’éla- boration, les ont transformés en des principes différents, et que, tout au contraire, si les organes eussent été pa- reils, ils auraient sécrété des sucs semblables. Or la clas- sificationnaturelle réunit les plantes qui se ressemblent le plus par l’ensemble de leurs caractères, parmi lesquels il faut compter ceux qui appartiennent aux organes de la nutrition. Les plantes les plus voisines dans la classifica- tion botanique doivent donc être celles qui se ressemblent le plus par les principes qu’elles ont élaborés : et comme en définitive les propriétés médicinales dépendent de la nature de ces principes, elles marcheront d'accord avec la classification naturelle. Cependant les exceptions abondent, qui semblent donner beau jeu aux adversaires de la théorie des rap- ports; mais quand on soumet cesexceptions à un exa- men véritablement scientifique , on s'aperçoit qu’un grand nombre d’entreelles disparaissent, et l’on reste convaincu que le principe posé par Linné trouve son application dans la majorité des cas, : La méthode naturelle n’a pu être que la constatation des rapports et des différences que les végétaux présen- tent entre eux; elle à bien pu rapprocher ceux qui ont une grande ressemblance, mais il lui à fallu laisser écartés les uns des autres ceux que la nature n’avait pas voulu unir intimement par leurs caractères. On trouve certains groupes de végétaux, composés d'individus qui sont liés si intimement que les familles qu'ils composent ne semblent former qu'un grand genre : 5, A ce sont les familles dites Monogénées par M. Fée, très- naturelles au point de vue botanique et tout aussi natu- relles par la similitude des propriétés médicinales des plantes qui les constituent. Personne s’avisera-t-il de nier Cette analogie dans les Crucifères, les Caryophyllées, les Malvacées, les Chicoracées, les Borraginées, les Co- nifères et tant d'autres familles? Il est, au contraire, certains groupes de plantes où les genres se montrent plus distincts, plus séparés, plus indépendants : ce seront les familles Polygénées. de M. Fée, dans lesquelles les analogies se concentreront davantage dans les genres, et seront moins frappantes dans la famille. Les Caprifoliacées, les Rutacées, les Polygonées nous fournissent des exemples de cette nature, et souvent même il est arrivé qu’un examen plus atten- üif, c’est-à-dire un perfectionnement dans la science bo- tanique, est venu faire disparaître ces “exceptions en transportant dans des groupes différents certains genres que les anomalies de leurs propriétés médicinales distin- guaient tout d'abord. C’est ainsi que les Valérianes sont sorties des Dipsacées, les Fumaria des Papavéracées, le Menyanthes et les Globularia des Primulacées, les Poi- vres des Urticées, les Quassia des Magnoliacées. Les Krameria, qui se Mona si différentes des autres Po- lygalées, ont été mieux étudiées et ont été rejetées dans les espèces anomales, de sorte que les racines astringentes de ratanhia se trouvent séparées des racines vomitives des Polygala par leurs propriétés médicinales autant que ces plantes le sont par leurs caractères botaniques. La famille des Urticées, qui semblait être des. plus ano- males, a montré des analogies plus satisfaisantes quand elle a été divisée en quatre familles distinctes, savoir : HE — les Pipéritées, les Morées, les Artocarpées et les Urticées proprement dites. Dans la première sont réunis les Pi- per avec leurs fruits aromatiques chargés d'huile volatile et d'huile résineuse; les Morées se distinguent par leur suc laiteux et âcre que l’on rencontre jusque dans les fruits du Ficus carica avant leur maturité; les Urticées se lient entre elles par les genres Humulus et Cannabis, où l'on retrouve un principe narcotique. Mais les Arto- carpées nous montrent une différence des plus singuliè- res et des moins explicables, savoir un suc horriblement délétère dans l’Antiaris toxicaria ét un suc alimentaire dans l'arbre de la vache, Galactodendron utile. Remarquons , en outre, que la comparaison ne peut avoir de valeur qu'autant qu'elle porte sur les produits formés dans un même ordre d'organes : les sucs d’une racine ne doivent pas être comparés à ceux d'une feuille, ni les matières qui se déposent dans le tissu de l'écorce à celles que l’on peut trouver dans lé péricarpe d’un fruit ; et si dans une famille ou dans un genre il se ren- contre quelque plante qui possède un organe Spécial et faisant défaut dans les autres espèces, on ne devra pas s'étonner qu’elle possède seule les Propriétés dépendan- tes de cet organe. Ainsi la pulpe de la casse peut être purgative et celle de la vanille être aromatique et stimu- lante, sans qu’on puisse en tirer aucun argument con- traire à la similitude des caractères botaniques et des propriétés médicinales. Il est assez intéressant de rechercher si la chimie vient, par ses analyses, confirmer les prévisions des botanistes et des pharmacologues. Évidemment, à priori, l'analogie de propriétés implique l’analogie de composi- bon, et ce n'est pas seulement sur l’action médicinale ét proprement dite, mais encore sur les propriétés bro- matologiques des plantes que l'on peut s'appuyer. Si nous montrons que les êtres qui vivent aux dépens des végétaux, animaux ou végétaux eux-mêmes, choisissent les plantes voisines pour en tirer leur nourriture, nous aurons apporté un argument décisif en faveur de l’ana- logie de composition des plantes qui se réssemblent le plus. So Ïl est dans les animaux et dans les plantes des espèces rudes et vigoureuses à qui toute nourriture est bonne et dont nous ne pourrons tirer aucune lumière; mais il est des êtres plus délicats auxquels des aliments de choix sont indispensables et qui montreront l’'analogie de com- position de plantes différentes, par cela seul qu’ils pour- ront vivre sur plusieurs d'elles. Ainsi le Loranthus Eu- ropœus ne vit que sur les chênes à feuilles caduques ; les champignons parasites ne vivent que sur des plantes voisines, et plusieurs d’entre eux témoignent par leurs noms et leurs habitudes de l’analogie des végétaux sur lesquels ils s’attachent. Nous avons un Sphæria Grami- num, un Uredo segetum, Un Uredo Chicoracearum, un Uredo Ranunculacearum, etc., etc. Les animaux nous fournissent des arguments du mêmé genre : le Bombyx Mori mange les feuilles de tous les Morus , le Cynips Salicis , celles de tous les Salix ; le Cur- culio Rumicis se trouve sur tous les Rumex, là Psylla Juncorum sur toutes les espèces de Juncus; et le Cynips Rosæ s'attaque indifféremment à tous les rosiers de nos ‘baies. Parfois la famille tout entière convient à certaines espèces : ainsi la Cantharis vesicatoria et le Sphà x Liqus- tri vivent sur les quatre genres Frainus, Lilac, Li- qustrum et Olea; là Pieris Brassicæ , plus curieuse encore, Le DE non-seulement s’attaque à toutes les Crucifères, mais en- core, en cas de disette, va chercher sa nourriture sur le Reseda, qui a tant d’analogies avec elles. li n’est pas jusqu'aux animaux supérieurs dont lin- stinct ne distingue ces analogies : les Graminées , les Lé- gumineuses, les Chicoracées leur conviennent à tous ; tous aussi refusent les Solanées, et dans leur goût tout particulier , les chevaux laissent là les Crucifères , ét les bœufs rejettent les Labiées et les Véroniques. Consultons maintenant l’analyse chimique, et ne nous étonnons pas si elle ne donne que ce que nous sommes véritablement en droit de lui demander, non des simi- litudes, mais des analogies, de même que les caractères botaniques des plantes ne sont pas pareils, mais seule- ment analogues, Attendons-nous à trouver les divers principes chimi- ques d’origine organique avec leurs innombrables varié- tés. Quand on sait tout ce qu’un simple changement dans l’état moléculaire peut entraîner de différences dans leurs caractères , quand on se rappelle la facilité avec laquelle les composés organiques éprouvent des modifi- cations, quand on songe que les moindres varialions dans les organes en déterminent immédiatement dans les fonc- tions et par conséquent dans les produits, et que chaque plante n’est pas complétement identique avec ses sœurs, il ne faut pas s'étonner de la variabilité extrême que nous rencontrerons. Si les propriétés se montrent chan geantes, pour des composés qui conservent l’uniformité de corn position dans le nombre de leurs éléments , Combien ne pourront-elles pas varier plus encore quand il s'agira de ces principes immédiats formés par une aggloméra- tion nombreuse de particules, et qu'une molécule de PR plus où de moins modifie dans leurs caractères sans al- térer le type originel. Dans cette appréciation, il faut tenir compte encore de cette circonstance que les diverses parties des végé- taux contiennent le plus souvent des principes diflérents, ayant chacun leurs propriétés médicinales particulières , et lorsque nous verrons un changement dans les propor- tions relatives de ces composants en entraîner un dans les vertus médicatrices des végétaux, tout en reconnais- sant que ceux-ci ne peuvent être substitués les uns aux autres, nous serons cependant bien forcés de reconnaitre leurs analogies. Quelques exemples serviront à confirmer ces propo- sitions. Les huiles volatiles setrouveront dansles Labiées, mais se distingueront les unes des autres par les variétés de leurs caractères; les résines extraites des Conifères au- ront une composition semblable, mais elles se montreront différentes les unes des autres par leurs caractères de so- lubilité ou d’affinité chimique, et dans cette même famille, les huiles volatiles restant presque toujours fi- dèles au groupement remarquable C?°H'°,. participeront aux variations de constitution moléculaire qui lui sont si habituelles; de même, dans les Crucifères, nous verrons le principe âcre et volatil appartenir toujours à la série des huiles sulfurées et les plantes de cette famille devoir leurs principales propriétés tantôt à l’un, tantôt à l'autre, et souvent au mélange de ces deux composés analogues. Parce que dans les semences des Graminées, nous obser- verons que le principe albuminoïde n’est pas toujours le même et s'éloigne plus ou moins du gluten du blé, nous ne nous refuserons_pas, et personne n’hésitera à nous suivre dans_cette voie, à reconnaître l'extrême ana- Re : re logie qui he ensemble toutes les graines des Céréales. Les modifications peuvent être plus profondes sans porier atteinte encore à la théorie des analogies: C'est ainsi qué les différences observées dans l’atropine, la da- urine et l’hyoseiamine ne démentent pas les rapports des Solanées entre elles, non plus que la vératrine , la jervine et la colchicine; malgré leurs. différences, ne zoinpentwpas.les analogies du groupe.des Colchicacées. = M faut temir compteencore de la parenté des principes différents et ne pas s'étonner; par exemple, de la produc- tion des gommes-résines dans les Ombellifères qui crois- sent sous le soleil brûlant de la Perse, quand nous ne rencontrons guère que des huiles essentielles dans les nôtres. | = Gest.là une influence de climat qu'on ne peut mécon- naître et qui ,-en certaines circonstances, est assez puis- sante pour faire méconnaître les rapports essentiels des plantes à un observateur inattentif. C’est ainsi que si les Astragalus du Levant laissent suinter de la gomme adra- gante en assez forte proportion pour fournir aux besoins du commerce, et si les Astragalus de notre pays. n’en fournissent pas ou en montrent à peine quelques traces quand ils croissent dans nos départements méridionaux, -onn’hésiteræpas à reconnaître que les circonstances dans lesquellés ont vécu les uns et les autres ont fait seules va- rierles quantités de la production. Les diflérences de cette “nature ont tellement frappé l'esprit de quelques savants qu'ils ont voulu que l’on établit une théorie particulière pour chaque climat, tandis qu'il suffit de peser les circon- Stances dans lesquelles les plantes se trouvent et-de ne voir dans les différences que l’on observe qu'un motif Tagirävec une grande prudence dans l'application. 45 — I nous est bien permis aussi d’anticiper sur les re- cherches futures des chimistes et de prévoir parfois des ressemblances beaucoup plus rapprochées que celles qui résultent de leurs travaux actuels; c’est ainsi que si la salicine n’a pu être extraite encore que des écorces d’un certain nombre de Salix et de Populus, onne nous re- fusera pas d'admettre son existence dans les écorces amères des mêmes arbres qui ont jusqu’à ce jour refusé d’en fournir, et que si là picrotoxine n’a été extraite én= core que de la coque du Levant qui nous est apportée par le commerce, il n’est pas douteux qu’elle ne se trouvé dans les fruits des divers Cocculus et einen ques ont des propriétés semblables. se Les différences qui résultent des DOG is relatives des principes actifs ne peuvent non plus laisser aucun doute, Elles sont manifestés dans les Crucifères, qui sont alimentaires ou médicinales suivant que l’hüile volatile ou que les matières albuminoïdes ét amyloïdes y domi- nent ; dans les Pomacées, qui nous fournissent des fruits apébibles où des fruits acerbes, suivant les proportions d’acide, de sucre-ou de tañnin ; dans les Convolvulacées, dont les racines chargées de résine pürgativé dans l'Exe- gonum purga , les Convolvulus Syriacus, Turpethum et tant d’autres, en renferment à peine des traces dans le Ba- tatas edulis ; où tout au contraire le sucre : l’amidon LA toutes les causes qué nous avons étliiérées ci dés . sus, il nous faut encore ajouter les modifications qui peuvent résulter de l'inflienée du sol, de Ja lumière plus ou moins vive qui vient frapper les plantes, dé l'étiole- ment partiel qu’elles 6nt pu subir, de leur âge et tout aussi bien de l’âge de leurs différentes parties. | 0 De tout ce qui précède et en considérant que le plus grand nombre des familles végétales présente une vé- ritable analogie entre les caractères botaniques et les propriétés médicinales des plantes qui les composent, nous n’hésitons pas à admettre le principe si bien for- mulé par Linné, mais cependant avec cette réserve que nous ne l’acceptons pas dans toute sa rigueur, mais seu- lement, lorsqu'il à été interprété et vivifié par une étude savante. Cette théorie a reçu déjà d’éclatantes confir- mations qu’il n’a pas même été nécessaire d'aller de- mander à la science et dont le bon sens a fait seul tous les frais; c’est ainsi souvent que les drogues qui nous sont apportées par le commerce n’appartiennent pas à une seule espèce, mais sont fournies par un nombre plus où moins considérable de plantes voisines, dont les produits sont assez semblables pour que les négo- ciants aient pu les confondre sous le même nom; c’est ainsi encore que, lorsque les habitants industrieux des États-Unis d'Amérique ont voulu profiter des richesses végétales de leur pays et s'affranchir en partie des liens qui les rattachaient à la vieille Europe, ils n’ont pas hé- sité à aller chercher dans les Conifères de leurs forêts les produits qui pouvaient remplacer ceux de nos pins et de nos sapins, et qu’ils ont trouvé dans leurs chênés le tan nécessaire à leur industrie : c’est ainsi qu’à la même époque leurs médecins, guidés par notre science médi- cale, se sont adressés à des espèces analogues aux nôtres pour trouver des médicaments qui représentassent. les propriétés constatées par notre expérience. Gependant, lorsqu'on pénètre avant dans cette ques- tion, on rencontre des exceptions graves aux ere des analogies, = JE ze Les familles les plus naturelles soit souvent entachées par quelqu” une de ces anomalies contradictoires. On est tout surpris de rencontrer dans les Graminées le Lolium temulentum et la Festuca quadridentata du Pérou, dont les graines causent des vertiges à ceux qui les mangent, Dans les Frangulacées à fruits émétiques et purgatifs, on trouve les Zizyphus, à fruits sucrés et comestibles ; dans les Convolvulâcées, la patate, féculente, sucrée, ali- mentaire, est dans le même genre que les Convolvulus pur- gatifs; dans les Solanées, des fruits alimentaires, des fruits pleins d’une résine âcre et des fruits narcotiques se rencontrent; dans les Ombellifères, on voit les genres à propriétés narcotiques à côté des genrés à espèces aro- matiques et stimulantes, Dans les Loganiacées, la se- mence du Strychnos potatorum de l'Inde sert à purifier l’eau que lés noix vomiques ét la fève d’Ignace rendraient délétère ; dans les Asclépiadées, le suc du Tabernæmon- tana utilis ressemble à un lait crémeux, et il est alimen- taire, tandis qu’à côté le suc du Tabernæmontana persi- cariæfolia est très-vénéneux , et que cette même famille renferme le Couma, les Cerbera et les Thewetia, qui sont d’horribles poisons. Bien que les progrès de la science aient déjà fait dis- paraître un certain nombre de ces anomalies, il en est sûrement qui ne s’effaceront pas. Probablement encore, à mesure que le cadre des plantes médicinales viendra à s’agrandir, le nombre de ces exceptions augmentera. Il faut se garder de les nier ét de chercher des explica- tions maladroites à des faits qui ne sauraient être con- testés. Nous ne denranderons pas, comme on l'a fait, si l’action essentielle des narcotiqués ne serait pas une exagération de l’action de la gomme ét si les Ombelli- D SR Îères narcotiques n’ont pas cette propriété particulière parce.que l’extractif y abonde plus. .que dans les autres plantes de la famille. Mais nous préndrons en grande considération ce fait important, et auquel on n’a pas ac- cordé toute l'attention qu'il mérite,c’est que dans les fa- milles qui présentent les anomalies les plus remarquables et sur lesquelles se sont appuyés surtout-les adversaires de la théorie des rapports, l’analogie desscaractères bo- et des. propriétés médicinales est encore domi. LAN, nante et l'emporte de RAOUR pan le nombre sur celui des exceptions. k I serait très-intéressant. _ reprendre l'étude 4 fa- milles en appelant à son aide tous les. progrès réalisés dans la classification botanique. Un pareil travail m’est impossible dans les conditions où je suis placé par. le concours. actuel; cependant. j'essayerai, en prenant comme exemple quelques-unes des familles les plus ano- males, de montrer le parti qu'on pourrait tirer de cette considération, Je ne donne l'exposé. qui va suivre que pour ce qu'il vaut, c’est-à-dire comme une ébauche sans GRERQON, ‘ de nn ” 4e > LÉGUMINEUSES. " re — LR Re est pre FR une de celles dont les adversaires de la théorie des Tap- ports entre lés taractères botaniques et les propriétés médicinales peuvent le plus avantageusement signaler l'exemple. H n’en est äucune, en effet, qui présente-ine plus grande diversité dans ses produits et l’éparpille- ment de matières plus différentes dans de mêmes tribus et dans de mêmes genres: Cependant il faut dire que TC dans cette famille, composée d'espèces très-nombreuses, les plantes utilisées par le médecin ne, forment qu’une | JEAN, très-pelite, et aug nous s portons notre ipaapent n'avons de. renseignements que sur quelques espèces. | faut: ajouter encore que les botanistes, em séparant les Mimosées en une famille distincte, ont fait : disparaître une des grandes anomalies que l’on trouvait dans les Légumi- neuses. Cette. nouvelle famille des Mimosées se fait au contraire remarquer par la similitude de propriétés des individus: qui-la composent, dont les troncs et les fruits _sont chargés de tannin, et dont un nombre. considérable : d'espèces fournissent de la gomme au commerce, : Def Les services rendus par la famille des Lot Danses surtout aux : propriétés alimentaires, Tous les herbivores se nourrissent de leurs feuilles, et lès se- mences servent d’aliment à l’homme et aux animaux, : Tandis que les feuilles n’offrent généralement rien de particulier, il en est'un certain nombre quisontpurgatives, On.en rencontre dans les quatre tribus des Podalyriées, des Cœsalpiniées, des Lotées et des Hédysarées : aumilieu des genres qui ne paraissent pas. participer du tout à cette propriété. On a signalé sous ce rapport l’Anagyris foœtida dans les Podalyriées , le Bauhinia ceuminata et un + grand nombre de Cassia dans les Cœsalpiniées, la Coro- nilla varia dans les Hédysarées,._et dans les Lotées, les | Colutea-arborescens et-Orientalis,.-le, -Cyésus Laburnum, des Genista Scoparia, j juncea et le Robinig pseulo-Accaoia. Une-exception plus remarquable encore est. la pro- 5 priété que les Galega sericea et. toxiearie. pod d’eni- vrer les poissons, - rot nt ceal | On sait que lesracines des re et echi- — 9 — nata sont Sucrées par une malière de nature extractive. Elles appartiennent à la tribu des Lotées, ainsi que l'Astragalus glycyphytlos de nos bois ét l'A. ammodites de Sibérie qui ont le même caractère. La racine de l’Abrus precatorius dé l'Inde s’y vend sur les marchés. Tout au contraire, des racines purgatives se trouvent éparpillées comme les feuilles purgatives dans plusieurs tribus. On a signalé dans les Lotées l’Astragalus exscapus, le Robi- nia pseudo=Accacia, dans les Phaséolées le Clitoria ter- neata de l'Inde, les Dolichos ensiformis et catharticus, et dans les Dalbergiées les Geoffroÿa inermis et acutifolia; de “plus on retrouve encoré ici commé pour les feuilles quel- ques plantes dont les räcinés sont vénéneuses et servent à enivrer le poisson, Ce sont dans les Dalbergiées le Pisci- dia Erythrina des Antilles, dans les Lotées les Tephrosia piscatoria, emarginata et toxicaria, le Robinia maculata, et dans les Phaséolées le Glycine frutescens. =" Quelquesfruits sont purgätifs, on les rapporte pour le plus grand nombre aû genre Cassia. Il faut citer en outre ceux du Cytisus Laburnum, et landis que la pulpe qui remplit les loges dû fruit de la cassé est sucrée et laxative, celle qui entoure les graines des Sophora est ‘âstringente.- =; 55 soon olseniss ce mA qe - Les résines sont fournies par deux genres de la tribu des Gæsalpiniées, l'Hymenea et l'Aloexylon, et par le genre Myrospermum de la tribu des Sophorées. Les matières colorantes, $i l’on en excepie l’indigo, que fournit le genre Indigofera et que l’on a retrouvé dans le Galega qui appartient à la même tribu, se rencontrent dans deux tribus: les Cæsalpiniées fournissent les bois de teinture, à matière colorante soluble dans l’eau, sa voir : bois de campêche , 77 æmatoxylon Campechianum, = — bois du Brésil, Cæsalpinia echinata, Brésillet, C. Brasi- liensis, Brésillet de l'Inde, C. tinctoria. Les Dalbergiées fournissent les matières colorantes in- solubles de nature résineuse. C’est le santal rouge, Pterocarpus Santalinus, le sangdragon, Pt. Draco, le suc du Dalbergia montana, tandis que les Pr. éfinaceus ct Marsupium donnent un des sucs astringents qui portent dans le commerce le nom de Kino, Les graines des Légumineuses offrent tout autant d’a- nomalies, En général, elles sont alimentaires, et l’on sait qu’un grand nombre d'espèces empruntées surtout à la tribu des Viciées et à celle des Phaséolées sont man- gées habituellement dans diverses contrées. Il en est au contraire un certain nombre qui sont connues pour être purgatives. Quelques-unes même empruntées aux genres Tephrosia, peuvent enivrer les poissons. Il est à remar- quer que ces semences purgatives se rencontrent dans des genres dont le plus grand nombre d’espèces ont des graines alimentaires, et que même dans quelques an- nées, quelqués semences habituellement nutritives ont acquis une vertu éméto-cathartique très-prononcée. C’est dans la tribu des Phaséolées surtout que se trouvent les graines des Légumineuses qui sont purgatives. On cite les Dolichos minimus et obtusifolius , le Lathyrus Cicera , l’Ervum Ervilia qui peut produire la paralysie, l’Erythrina monosperma. Dans les Lotées le Cytisus Laburnum est connu pour avoir des semences purgatives; il en est de même du Piscidia Er: pen dans la tribu des Dalber- giées. En résumé, la faille des Léguminéusés pébéents un grand nombre de cas où les différences de propriétés ne sont nullement accusées par desdiflérencésdans les carac- — 926 — tèresbotaniques ; mais la famille prise dans son ensemble, c'est-à-dire dans le plus grand nombre des individus qui la composent est favorable à la loi des analogies. Les anomalies très-grandes qu’elle offre d’un autre côté sont un exemple très-sérieux de la. grande prudence qu’il faut mettre dans la pratique quand il s’agit de conclure d'une plante à une autre. | BUPHORBIACÉES, ns né ont en général des propriétés très-énergiques. Quel- ques-unes sont des poisons extrêmement violents, et d'autres, mais un très-petit nombre, sont alimentaires, Si parfois les propriétés médicinales semblent se concen- trer dans un.genre, de plus ordinairement elles se par- tagent entre les diverses tribus, Les deux petites tribus des Phyllanthées et des Buxées ne paraissent renfermer que des plantes sans âcreté; dans toutes les autres les principes âcres ou canstiques : dominent, et lorsque par hasard il s'y trouve une plante comestible, elle appartient à un genre où se : trouvent en même temps des espèces dangereuses. Dans la tribu des Euphorbiées sont les Euphorbia an- tiquorum ; Canariensis, Tirucalli d'Afrique, lEuphorbia myrtifolia. des Antilles, l'Euphorbia hirta de l'Inde, qui sont des poisons us. Nos Euphorbes indigènes pos- sèdent- aussi cette âcreté, mais à un degré infiniment moindre, L'Euphorbia ha ypericifolia est seulement astrin- &ent;. l'Euphorbia antiquorum sert à nourrir les cha- Meaux, mais après qu'il à été cuit; le principe actif est donc. volatil comme celui de l’ Euphorbia Cyparissias ; il D en est probablement de même de l'E. edulis que l'on mange à la Cochinchine. Dans la tribu des Hippomanses cas le muoniilés (Hippomane Mancenilla), dont la partie active est volatile, l'Excæcaria, le Hura crepitans, le Sapium aucuparium, toutes plantes à sucs très-âcres, et à côté le Mapronea Brasiliensis qui est comestible au ‘Brésil où il est connu “sous le nom de Marmaleirodiéampo, et qui ne doit peut- être son innocuité qu'&la coction qu’on lui fait subir. La tribu des Acalyphées comprend : l’Atragia volu- bilis ou liane brûlante, l’Acalypha Iadica qui est purga- tive, l’Acalypha betulina etle Tragia Ginelas qui n’ont qu’une sayeur astringente. - au moins à un degré aussi prononcé, un suc de la même nature; plusieurs espèces du genre Croton sont aromati- ques et résineuses, ce sontles Croton eluteriwet Cascarilla, qui fournissent l'écorce de cascarille du commerce ; le Copalchi provient du Groton pseudo-China, Schiede, et. les C.coriaceum, balsamiferum, thuriferum,. Hibiscifolium sont aussi résineux et aromatiques. C’est cependant dans cette tribu qu ’estle Janipha Manihot, dont le suc. est.un poison violent qui doit tous ses effets à l’acide prussique, Les racines de ces Croton sont signalées comme pur- gatives, ainsi que celles du Æicinus Mapps de Ceylan et du Jatropha opifera du Brésil, Un seul fruit est comestible, c’est le Gcté de l'Inde; tout. au contraire le fruit charnu du mancenillier esk.un violent ‘poison qui trompe par, sa bonne apparence et qui mérite bien son nom de pomme. d'enfer. Quelques semences sont connues par leurs propriétés purgatives; celles dont on. fait usage appartiennent aux … 78 — genres Croton, Jatropha, et Ricinus dans les Crotonées ; l’'Hura crepitans (Hippomanées) ét à l’Euphorbia La- thyris où épurge. Dans la tribu des Acalyphées les semences des Om- phalea diandra et triandra sont comestibles. En résumé, malgré un certain nombre d’exceptions bien constatées, la famille des Euphorbiacées, considérée dans son ensemble, est de nature à appuyer la théorie’ des rapports des caractères botaniques et des propriétés médicinales des plantes. RENONCULACÉES. Gette famille, considérée comme très-naturelle par tous leS botanistes , les a étonnés longtemps par la sin- gularité et la bizarrerie des formes de ses enveloppes flo- rales, jusqu’à ce que le beau mémoire de M. de Jussieu, en même temps qu'il lui servait à démontrer la subordi- nation des caractères les uns aux autres, lui ait permis de réduire à leur juste valeur les différences provenant de la variété des formes. Les Renonculacées prises dañs leur ensemble montrent une grande uniformité d'action : ce sont des plantes à suc âcré, quelquefois caustique , et si quelques-unes montrent peu d'activité, il est toujours prudent de s’en méfier, Le principe âcre des tiges passé pour volatil, et il est certain que beaucoup de ces plantes le perdent entièrement par la dessiccation. L'aconit fait exception , car le principe Volatil qui lui donne tant d’âcreté quand il est frais , est accompagné d’un principe fixe (aconi- tüne). Faute d'observations, il nous est tout à fait im- possible de dire si celui-ci appartient aussi aux genres as D — qui accompagnent l’aconit dans la tribu des Hellébo- ‘rées. — Mais cette tribu elle-même présente des diffé- rences très-marquées dans le mode d'action des racines dont les propriétés sont connues. Tandis que les racines des Aconitum sont stupéfiantes , et à petites doses sont diurétiques et exercent une action spécifiquesur les rhu- matismes, les racines des Helleborus-sont des purga- tifs drastiques ; on reconnaît biën cependant encore en elles un effet stupéfiant sur le système nerveux, Quant aux racines de l’Hydrastis Canadensis et du Zanthorhiza apüfolia, elles appartiennent, il est vrai, à d’autres tribus, mais on ne signale en elles qu'une simple amertume qui permet de les substituer à d’autres Substances amères. Nous n’avons de ruscighéments que sur les proprié- tés de deux espèces de graines ; ils ne sont pas favorables à la théorie ; car si la semence du Delphinium Staphysa- gria provoque des vomissements violents et des accidents nerveux, les graines des Nigella, qui appartiennent à un genre voisin, n’ont qu'une âcreté mordicante que l’on utilise pour relever la Saveur des mets (N. arvensis, poi- vrette ; N: sativa d'Égypte; N. Indica de l'Inde). La famille des Renonculacées, considérée dans son ensemble, confirme donc la théorie, en même temps qu’elle offre dans ses détails des anomalies inexplicables. LA OMBELLIFÈRES. Cette famille, si naturelle quand on la considère d’une manière générale, présente une extrême analogie entre les propriétés des diverses plantes qui la composent ; elles renferment de l’huile volatile dans toutes leurs par- D — ties, Ce sont des végétaux appartenant à ceite famille qui fournissent la plupart des gommes-résines du com- merce, J'ai déjà dit comment on ne pouvait voir, dans cette production, une contradiction à l’analogie des pro- priétés. Toutefois, il est assez curieux que les genres auxquels appartiennent ces gommes-résines soient tous rangés dans la même tribu ; ce sont les genres Opopa- nax; Ferulæ, Dorema, Bubon et Pastinaca. Le Galbanum, qui seul n’est. pas extrait d’une plante de cette tribu, esl fourni par le Galbanum officinale de la tribu toute voi- sine des Silérinées, + esfle nn La véritable anomalie que présente la famille des Om- bellifères consiste en ce qu’un certain nombre de genres renferment des plantes narcotiques , sans que les carac- ières botaniques viennent en aucune raison rendre compte de cette différence, Dans les Sésélinées sont les genres OEnanthe, Æthusa, Phellandrium, à espèces narcotiques ; dans les Smyrniées, le GConium-maculatum et dans les Amminées, les Cicuta-et les Sium , tous entremélés avec des genres analogues par leurs caractères botaniques , Mais. ne renfermant aucune espèce vénéneuse, C’est là un fait en contradiction manifeste avec la ressemblance que présentent entre eux tous les autres végétaux de SCROPHULARINÉES. La famille de Scrophalarinées contient des plantes qui ont généralement des propriétés très-actives, mais le peu que l’on sait sur leur histoire, les montre peu-sem- blables-entre elles, Les bolanistes les ont divisées en un grand nombre de ER" (re tribus, et les différences dans les propriétés ne paraissent pas non plus avoir de rapport avec les divisions bota- niques. La seule plante active de la famille dont l’action mé- dicinale soit bien connue est la Digitalis purpurea; qui paraît partager ses propriétés avec me ne du même genre. Le caractère qui setohetftefitel Est r'à àcreté et l'amer- tume qui ont été signalées dans les Scrophularia, les Li- naria,- les Antirrhinum et plusieurs espèces de la tribu désRhinanthées. Dans cette même tribu, se trouvent pour- tant les Odontites et les Euphrasia quisont des-plantes inertes, de même que les innocents Verbascum sont placés dans.la tribu des Verbascées, à côté des Scropliularia. La médecine a probablement encoré à faire quelques bonnes acquisitions dans cette famille peu connue. La Gra- tiola officinalis et la racine de Scrophularia sont des pur- gatifs qu’on pourrait utiliser davantage; l'Haismaradade la Guyane (Vandellia diffusa) y est employée contre la dysentérie, et paraît y rendre de véritables-services dans les affections du foie ; l’Amanaca du Brésil (Franciscea uniflora) a une racine antirhuinatismale: et antisyphi- litique qui, à dose un peu élevée, cause des tremblements ét le froid des extrémités, On peut dire de cette famille des Scrophularinées que si la plupart des plantes y sont actives et même dangereuses, on n’observe guère d’ana- togie dans le mode d'action que si lon se pres _ | = 29.2 SOLANÉES. La famille des Solanées, une de celles dont les carac- tères botaniques sont les mieux tranchés, les plus nette- ment définis, nous offre cependant des différences très- notables dans les propriétés des divers genres et espèces. G'est ainsi qu'à côté de plantes, et ce sont les plus nom- breuses, dont les racines sont narcotiques, nous en voyons d’amères, Solanum trilobatum et Sodomæum ; de diurétiques, Solanum mammosum, et de purgatives et fé- brifuges, Solanum undulatum. Les tiges sont presque toutes narcotiques, mais cepen- dant il en est d’amères et fébrifuges, Belonia aspera et Solanum pseüdokina. Les feuilles sont les parties des So- lanées dont on fait le plus souvent usage en médecine. On les emploie, et quelques-unes surtout, comme des narcotiques puissants; cependant on sait que les mou- tons mangent sans inconvénients les feuilles de la Mo- relle, et l’on sait aussi que cette plante, Solanum nigrumi, et quelques espèces voisines, sont mangées sous le nom de Brèdes. Il est vrai qu’on les cueille jeunes pour qu’elles soient tendres et qu’on les fait cuire à grande eau. __"Cest-surtout dans les fruits des Solanées que nous ren- contrerons les plus grandes différences de propriétés ; les uns agissent d’une manière fächeuse sur l’économie et renfermentdans leur substance des alcaloïdes puissants; parmi eux je citerai les Atropa Belladona et Mandragora. le Cestrum venenatum, les Solanum mammosum, Acanthi- Jolium, eic.; le Capsicum toxiferum usité au Pérou pour empoisonner les flèches; d’autres sont âcres mais n’exer- cent aucune action délétère sur l'homme, les Capsicum «r NE, annuum et frutescens, qui doivent leurs propriétés à une résine balsamique âcre (Capsicine), le Solanum Æthio- picum que les Japonais, au dire de Thunberg, emploient comme condiment; d’autres enfin sont usités comme comestibles, le Physalis Alkekengi, le Lcopersicum escu- lentum, les Solanum album, Anguivi et muricatum. Il est une espèce de Solanum, entre autres, que les uns rangent parmi les plus délétères, que d’autres au contraire aflir- ment être innocente, je veux parler du Solanum Melongena, que les observations de M. Dunal ont démontré être formé par deux espèces, l’une comestible, le Solanum esculentum qui est caractérisée par l'absence de pulpe autour de ses graines, l’autre très-vénéneuse, le Solanum ovigerum, dont les semences sont enveloppées par une pulpe âcre et dé- létère, On emploie quelquefois cette dernière espèce, comme aliment, de même que le Solanum pressum aux Indes, mais on a bièn soin de rejeter et les semences et la pulpe qui les entoure. L'observation faite par M. Du- nal nous donne l'explication des vers de Bontius quand il dit : | Früctibus in patrià Solani narcotica vis est : Iudia at è contrà Solanum producit edule ; Destituunt medicum sic medica mala, saporem Naturamque novam Europæ in finibus illa. O quoque sit utinam ! Vehimur quum per mare ad Indos Longum iter ; infames liceat deponere mores ! Gette explication de M. Dunal n’est pas applicable dans le plus grand nombre des cas ; car nous voyons-de nombreuses espèces de Solanées avoir des fruits délétères, bien qu’ils ne renferment pas de pulpe, et, d’autretpart, la pulpe des Zycopersicum ne fait pas qu’ils aient des qualités toxiques. Ge sont là des exceptions à la règle qu’il nous faut bien accepter. — 9h — RUBIACÉES. En comparant les divers produits que la famille des Rubiacées fournit aux arts et à la matière médicale, on est vraiment frappé de l'importance extrême que prend sous ce rapport cette réunion de végétaux. On est tout aussi frappé de la diversité de leur compositition ; mais lorsqu'on jette un coup d’œil sur les divisions nombreuses et tranchées que les botanistes ont été obligés de faire " on n’est plus surpris que les analogies de propriétés ne soient pas très-rapprochées. Je me bornerai à examiner ici les quatre productions principales de cette famille, savoir : les racines colorantes, lés racines vomitives , les écorces fébrifuges et le café; et je chercherai si l’analo- gie de composition a quelques rapports avec les analo- gies botaniques. s Les racines colorantes, dont le Rubia tinctorum offre le type, se retrouvent dans les deux groupes principaux qui composent la famille, savoir : les Cofféacées et les Cincho- nacées. La petite tribu des Étoilées, qui comprend toutes les Rubiacées de nos climats, montre une extrême ana- Jogie, sous ce rapport, et on retrouve la matière colo- rante dans le Mungith de l'Inde ( Rubia Mungistha }, et dans le Relbrun de la Chine (R. Relbrun). Les autres racines chargées de matières tinctoriales appar- tiennent aux Cinchonées, aux Guettardacées, aux Gardéniacées et aux Psychotriées. Le Chaya-ver_ de l'Inde (Oldenlandia umbellata } paraît contenir un prin- cipe colorant analogue à celui des garances, mais nous æavons aucun renseignement sur la nature de la matière rouge des Hedyotis, des Genipa, des Morinda ,; des Gar- * ee denia ét dés Palicourea ; il est même probable que la ra- cine du Danaïs fragrans de Madagascar doit sà couleur à quelque principe analogue au rouge cinchonique. Les racines vomitives, tirées des Rubiacées, se trou: vent aussi provenir des deux groupes principaux :*mäis les Spermacocées, et surtout les Psychotriées, fournisséht les produits les plus remarquables étles plus importants. Dans la première de ces sous