DESCRIPTION DE L'ÉGYPTE. DESCRIPTION DE L'ÉGYPTE, RE CORRE DES OBSERVATIONS ET DES RECHERCHES QUI ONT ÉTÉ FAITES EN ÉGYPTE PENDANT L’EXPÉDITION DE L'ARMÉE FRANÇAISE, PUBLIÉ PAR LES ORDRES DE SA MAJESTÉ L'EMPEREUR NAPOLÉON LE GRAND. HISTOIRE NATURELLE. ROME.,SE COND. A PARIS, DE L’'IMPRIMERIE IMPÉRIALE. M. DCCC. XIII. DEUXIÈME LIVRAISON. HISTOIRE NATURELLE. MÉMOIRES. FOMEDR Mämorre sur les plantes qui croissent spontanément en Égypte; par Alire Raffeneau Delile, membre de l'Institut d'Egypte... .... Histoire des plantes cultivées en Égypte; par le même. — 1.7 MÉMOIRE. Sur les céréales graminées , les fourrages , et les grains de la classe des plantes légumineuses. |." #4 PERS. SR AA AS, FRERE , ’ Descriprion de la vallée de l'Egarement, et conséquences géologiques qui résulrent de la reconnoissance qu'on en a faite; par M. P.S. Girard, ingénieur en chef des ponts et chaussées , directeur du canal de l'Ourcq et des eaux de Paris, membre de l'Institut d "Ég ÉYDIC ES Eure PAPNES Discours sur la représentation des roches de l'Egypte et de l'Arabie par la gravure, et sur son utilité dans les arts et dans la géologie ; par M. de Rozière, ingénieur en chef des mines. es; ET Et Floræ Ægyptiacæ illustratio, auctore À. R. Délile............ Description minéralogique de la vallée de Qogeyr; par M. de Rozière, membre de la Commission des sciences et arts d'Egypte, 6t ingénieur en chef des mines... .... EF NUS Re se Description des mammifères qui se trouvent en Egypte; par M. le che- valier Geoffroy Saint-Hilaire, sembre de l'Istitut impérial. . .... LE 25. CE Nota. Cette table des Mémoires relatifs à l’histoire naturelle n’est que provisoire ; elle sera remplacée par une table définitive, lorsque le volume sera complet, = MÉMOIRE SUR LES PLANTES QUI Mr Be SPONTANÉMENT EN ÉGYPÉE: PAR ALIRE RAFFENEAU DELILE, MEMBRE DE LINSTITUT D'ÉGYPTE. Le vallée du Nil, bornée, sur ses côtés, par des déserts, comprend les terres fertiles de l'Égypte, et se trouve resserrée, dans le Sa’yd, entre deux chaînes de montagnes nues et desséchées. Elle touche , dans la basse Égypte, à des plaines stériles et sablonneuses , entre lesquelles elle acquiert une largeur proportionnée à l’écartement des branches du fleuve. Les plantes qui croissent spontanément dans cette vallée, se trouvent aussi presque toutes dans d’autres pays que l'Égypte. Les espèces indigènes ne sont point nombreuses ; il en est plusieurs qui ont suivi le cours du Nil et l'accrois: sement du sol. Les plaines formées par des couches de limon, et par une cer- taine quantité de sable que le fleuve charie particulièrement dans la direction où son courant est le plus rapide, prouvent un exhaussement qui ne s'est pas interrompu. On remonte, hors de l'Égypte, à l'origine du sol et des plantes, On reconnoît que beaucoup de graines ont été apportées par les eaux qui déplacent le limon de F'Abyssinie, et par les vents qui rejettent dans le Nil le sable des déserts : mais on sait combien il est rare que des plantes soient propres à un seul pays. On ne seroit donc pas fondé à dire qu'il n’y a d'indigènes en Égypte que celles qui ne se trouvent pas en même temps ailleurs, La végétation a commencé, sur les bords du Nil, avec l'écoulement naturel des eaux qui ont suivi l'incli- naison du sol. Ce fleuve n'avoit point charié le limon qui a depuis formé une partie du pays. Les plantes nées sur le sol qui sert de base au limon, se sont reproduites à sa surface exhaussée. Elles sont provenues, dans le Delta, des autres parties comparativement plus anciennes de l'Égypte. C'est ainsi que les plantes se multiplient sur les nouvelles dunes de sable du désert, en provenant des autres dunes voisines, ou de la terre qui supporte le sable. J'ai vu plusieurs fois, près du Nil, la végétation naître des gerçures profondes du sok, sur une seule coucherégulière, dans des endroits bas récemment abandonnés, H. N. TOME IL. A 2 MÉMOIRE SUR LES PLANTES après qu'ils avoient servi à des établissemens de machines à arroser, et après qu’ils avoient été comblés de limon par l'effort seul des eaux. La couche de terrain qui, pendant une année précédente, s'étoit trouvée garantie de l’inondation, et qui avoit été couverte de végétation, répondoit, la seconde année, à la couche enfouie d’où sortoient des plantes à travers les gerçures. Les graines germent, dans les campagnes, sous une couche de limon dont l'épaisseur dépend des degrés et de la durée de l'inondation. Cette couche, sur une grande surface , ne devient pas aussi promptement remarquable que celle qui comble des bas-fonds resserrés. L'Égypte, devenue le domaine de la culture, a éprouvé de grands change- mens ; beaucoup de plantes étrangères s'y sont naturalisées : elles croissent spon- tanément avec les espèces indigènes ; elles se confondent les unes et les autres. Je me propose de tracer ici, d’une manière générale , Fhistoire de ces plantes, et de considérer l'influence du sol et du climat sur leur végétation. J'indiquerai quelques-uns de leurs usages. ; La vallée du Nil, dans le Sa’yd , est considérablement élevée au-dessus du niveau le plus ordinaire du fleuve. La sécheresse y cause la rareté des plantes. La partie la plus méridionale de ce pays produit le Bocrhaavia repens, de Nubie (1) ; le Habbas, espèce de sensitive d'Abyssinie (2); le Dowm (3) et le Sey4/ (4), arbres qui ne croissent point dans la basse Égypte. L'Acacia nilorica est un des arbres qui appartiennent à la haute et à la basse Égypte. Le Dattier croît aussi dans toute l'Égypte. Les autres arbres les plus mul- tipliés ne croissent guère que dans les lieux où lon prend soin de les planter. Hs sont originaires de l'intérieur de FAfrique , comme le Sycomore, le Nabeca et le Tamarinier, ou originaires de l’Inde, comme le Cordia Myxa , Ÿ Acacia Lebbeck et le Cassia Fistula. La basse Égypte est un pays plat, facilement inondé. Deux espèces de Nymphæa épanouissent leurs fleurs à la surface des eaux. Ces plantes croissent à l'époque de inondation ; elles se fanent lorsque les eaux baissent. Leurs racines se conservent malgré la grande sécheresse qui succède à l’inondation. Les Nymphæa sont abondans près de Damiette et de Rosette : ils croissent en petite quantité plus au midi dans le Fayoum, et dans le seul étang de Birket-el-Rotly, près du Kaire. Le Papyrus, devenu très-rare en Égypte, paroît avoir autrefois suivi la pente de la vallée du Nil, et croît en Abyssinie {s). Les roseaux sont les plantes vivaces les plus fréquentes aux bords des canaux. Ils s'élèvent en haies, étant baignés dans l'eau ; ils rampent dans les lieux envahis par les sables. L'espèce de roseau la plus commune sur les îles basses du Nil, croît aussi dans les déserts. Il est probable que certaines plantes qui n’ont été observées jusqu'ici qu'en Égypte , appartiennent aussi à d'autres pays que l'on a moins visités, et où (1) Voyez H: N. Botanique, pl. >, fig. 1. G) Voyez H. N. Botanique, pl. r et 2. (2) C’est la sensitive décrite et figurée par Bruce, sous (4) Voyez H. N. Botanique, pl. s2, fig. 2. le.nom d’Ergett el-krone. Voyage aux sources du Nil, (s) Bruce, Voyage aux sources du Nil, rom. V, tom. V, pl 7. pag, 10. QUI CROISSENT SPONTANÉMENT EN ÉGYPTE. 3 elles n'ont pas été découvertes. Voici les noms de quelques-unes de ces plantes qui paroissent dépendre uniquement du sol arrosé par le Nil: 4 Panicum coloratum. ; Picris altissima (4). Poa ægyptiaca (1). Picris sulphurea (s). Convolvulus caïricus. à Crepis hispidula (6). Polycarpea memphitica (2). Crepis senecioïdes (7). Rumex ægyptius. : Büphthalmum pratense (8). Rumex dentatus. ’ Marsilea ægyptiaca (9). Dolichos nilotica (3). Les plantes sauvages, communes à la vallée du Nil et aux pays adjacens , sont plus nombreuses que les précédentes ; elles sont connues par les recherches de différens voyageurs. Je ne joins point au tableau que je donne ici de ces plantes, leurs synonymes détaillés, trop longs à rapporter : cette omission a été indispensable dans un travail sommaire. Je vais y suppléer, en indiquant les ouvrages auxquels j'ai eu recours pour nommer ces plantes : j'ai principalement consulté la Flore orientale de Rauwolf; celle de Palestine, d'Hasselquist ; les Décades de plantes de Syrie, de M. la Billardière ; la Flore ailanrique de M. Desfontaines, et la Flore d'Arabie, de Forskal. 1.° PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE ET À LA BARBARIE. Cyperus mucronatus, Crypsis aculeata. Cyperus fuscus. Potamogeton marinum. Scirpus maritimus. Sratice Limoniunt. Fimbristylis dichotomum. Gentiana spicata. Panicum numidianum, Juncus bufonius, Panicum repens. Gnaphalium luteo-alburi. Rotibollia fasciculata. Gnaphalium cauliflorum. Eleusine ægyptia. Chara vulgaris. Crypsis schænoïdes. Ceratophyllum demersum. 2.° PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE ET À LA SYRIE, Trisetaria linearis (10) Forsk. (Trisetum Raphanus recurvatus (13). (Enarthrocarpus arenarium , Billard. Déc. Syr. 5.) arcuatus, Billard, Dec, Syr. 5.) Festuca fusca (11). Cotula anthemoïdes. Saccharum ægyptiacum. Baccharis Dioscoridis, Echium Rawolfi (12). Senecio ægyptius. Potentilla supina. Centaurea calcitrapoïdes. (1) Voyez H. N. Botanique, pl. 10, fig. 2, (8) Voyez H. N. Botanique, pl 48, fig, 2, (2) Ibid. pl. 24, fig, 2. (9) Ibid. pl. so, fig. 4. G) Ibid. pl. 28, fie. r. (10) Ibid. pLrr, fig. r. (4) Ibid. pl 41, fig. 2. (1) Ibid. pl. r2, fig. 3. (5) Ibid. pl. 40, fig. 2. (12) Ibid. pl. 19, fig. ?. (6) Ibid. pl. 42, fig.r, (13) Ibid. pl. 26, fig. 2, (7) Ibid. pl. 42, fig 2. H, N. TOME IL A 2  MÉMOIRE SUR LES PLANTES 3.° PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE ET À L'ARABIE. Alternanthera sessilis. Acacia nilotica. Achyranthes argentea. Acacia Seyäl (1). Hibiscus Trionum. Cucifera thebaïca (2). Cucumis Colocynthis. 4.° PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE, À LA BARBARIE ET À LA SYRIE. . Cyperus rotundus. : Tamarix gallica. * Phalaris aquatica. Alisma Plantago. Saccharum cylindricum. Scolymus maculatus. Polypogon monspeliense. : Cirsium syriacum. Gentiana Centaurium. 5° PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE, À LA BARBARIE ET À L'ARABIE. Orobanche tinctoria. (Phelipæa lutea , Desfon- Inula arabica. taines , Flor, atl.) 6. PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE, À L'ARABIE ET À LA SYRIE. Poa cynosuroïdes. Hedysarum Alhagi. Tamarix orientalis. 7. PLANTES COMMUNES À L'ÉGYPTE, À LA BARBARIE, À LA SYRIE ET À L'ARABIE. Veronica anagallis. Scorpiurus sulcata. Glinus lotoïdes. Phænix dactylifera. Diverses plantes sauvages accompagnent, presque dans tous les pays, les espèces cultivées. Les Vicia sativa et lutea, Ÿ Anagallis arvensis et le Fumaria officinalis croissent avec le blé en France, en Égypte et en Barbarie. Les graines d'herbes potagères, telles qu'on les sème en Égypte et en d'autres pays, sont le plus ordinairement mélées d'Euphorbia Peplus et d'Urtica urens. Beaucoup d’autres plantes semblent naturellement inséparables des lieux cultivés, savoir : les Panicum viride et verti- cillatum , le Plantago major, le Cuscura europa, le Convobyulus arvensis, Y Alsine media, VOxalis corniculata , Ÿ Amaranthus Blium, &c. Ces plantes, devenues spontanées, sont le résultat de la culture qui substitue journellement des espèces acclimatées à celles qui sont indigènes. L Voici les noms de plusieurs plantes qui appartiennent à l'Inde et à l'Égypte : Nymphæa Lotus. Cyperus Papyrus. Nymphæa cærulea. Cyperus articulatus. (1) Voyez H. N. Botanique, pl. 52, fig. 2. (2) Ibid. pl, r et 2. QUI CROISSENT SPONTANÉMENT EN ÉGYPTE. $ Cyperus alopecuroïdes. Oftelia alismoïdes. Cyperus dives (1). Elatine luxurians (2), (Bergia capensis L.) Cyperus difformis. Jussia diffusa. Scirpus mucronatus. Pistia Stratiotes. x Scirpus fistulosus. Eïthulia conyzoïdes. Panicum fluitans. Grangea maderaspatana. Panicum colonum. Eclypta erecta. Ammannia auriculata. Sphæranthus indicus. ù Sphenoclea zeylanica. (Pongatium, Jussieu Genpl.) Ces plantes sont particulièrement marécageuses : elles se plaisent dans le sol humide de la vallée du Nil. Celles qui ont pu être importées de lInde avec le riz, sont aujourd’hui répandues hors des rizières, et ne peuvent plus être distinguées des plantes indigènes, Nous savons que les Nymphæa, le Papyrus et le Pistia ont existé en Égypte, avant l'introduction, soit du riz, soit de la canne à sucre et de quelques autres plantes de l'Inde. Nous ne manquons pas non plus d'exemples de plantes qui sont les mêmes dans des régions éloignées les unes des autres, lorsqu'elles y retrouvent un sol et sur-tout une température dont elles saccommodent. Il y a des plantes d'Europe, en Asie et en Afrique : elles sont principalement répandues dans la Syrie, dans la Barbarie et dans le nord de l'Égypte. L’uniformité du sol est un obstacle à la variété des plantes indigènes. Elles sont bannies des terres ensemencées ; et si l'on abandonne des champs qui ne soient pas arrosés, ils s'imprègnent de sel, et ne produisent ordinairement que des soudes, ou V'Hedysarum Alhagi et le Poa cynosuroïdes (3), plantes difficiles à déraciner : j'ai vu dans l'île de Roudah et dans le Delta des champs incultes et salés ; ils redeviennent propres au labourage lorsqu'ils sont lessivés par de grandes inondations. Les plantes des déserts prennent en général un accroissement lent et difficile. Elles sont souvent couvertes de duvet, Srachys palæstina , Astragalus tomentosus , Ærua tomentosa ; où hérissées d’épines, Convolyulus armatus (4), Fagonia arabica , Chrysocoma spinosa (s), Astragalus tumidus. Quelques-unes fort petites sont presque cachées par le sable, Avena Forskalii (6), Polycarpea fragilis (7), Alsine suc- culenta(8). On remarque sur-tout , parmi les plantes des déserts, plusieurs borraginées à feuilles rudes, Æeliorropium crispum, Heliotropium lineatum (9), Lithospermum cal- losum (10), Borrago africana , Echium prostratum (1 1); des soudes et des arroches, Salsola muricata, Salsola alopecuroïdes (12), Traganum nudatum (13), Atriplex Halimus ; plusieurs composées très-odorantes, Sanrolina fragrantissima (14), Arte- misia judaica (15), Inula undulata (16), et des graminées dont le chaume est dur () Voyez H. N. Botanique, pl. 4, fig. 7. (o) Voyez H. N. Botanique, pl. 16, fig. r. (2) Ibid. pl. 26, fig. r. (Go) Ibid. p£. 16, fig. 2. (3) Ibid. pl. 10, fig. 7. Gr) Ibid. pl 17, fig. 1. (4) Ibid. pl 18, fig, 2. (12) Ibid. pl 2r, fig. 7, (s) Ibid. pl. 46, fig. 3. (13) Ibid: pl. 22, fig: r. (6) Ibid. pl. r2, fig. 2, (14) Ibid. pl. 42, fig. 3. (7) Ibid. pl. 24, fig r. (15) Ibid. pl. 4, fig: 3. (8) Ibid. pl. 24, fig. 7. (16) Ibid. pl. 46, fig. 2 \ 6 MÉMOIRE SUR LES PLANTES et presque ligneux, Panicum mmrgidum (1), Penniserum dichoromum (2), Aristide pungens, Avena arundinacea (622 Il est rare que les lieux brûlans et desséchés des déserts produisent quelques plantes. Elles existent dans les lieux les moins arides : elles germent en hiver à Ja faveur des rosées ; elles s'alimentent de l'eau des pluies qui tombent quelquefois par ondées ; elles croissent auprès des sources et dans le voisinage de la mer. Les plantes grasses et celles à racines bulbeuses résistent à la chaleur et à la sécheresse. On découvre plusieurs plantes d'Arabie dans les déserts qui embrassent la vallée du Nil. Le Sodada decidua (4), espèce de buisson d'Arabie (5), croît à l'est et à l’ouest du Nil dans le Sa yd. Le Cynanchum pyrotcchnicum (6), autre arbuste d'Arabie (7), croît jusque dans le désert entre le Nil et la mer Rouge. Il semble que le Nil soit la limite à laquelle s'arrête cet arbuste; de même que les Oasis, et les déserts qui les avoisinent, sont la limite que ne passe point le Sodada. Plusieurs plantes d'Égypte croissent dans une partie de l'Afrique plus occidentale que celle où s'arrêtent les deux arbrisseaux que je viens de nommer. Je ne cite point, dans un aperçu général, les synonymes que je réserve pour accompagner des descriptions. J'ai déjà annoncé que je me servois de la Flore atlantique pour comparer les plantes de la Barbarie à celles de l'Égypte. Voici les principales espèces qui sont répandues dans les déserts des deux pays : Salvia ægyptiaca. Peganum Harmala. Aristida ciliata (8). Nitraria tridentata. Aristida pungens. Calligonum comosum. Stipa-tortilis. Anastatica hierochuntica. Pteranthus echinatus. f Cheiranthus Farsetia. Heliotropium crispunr. Brassica teretifolia. ÆEchiochilon fruticosum. Cleome arabica. Gymnocarpos decandrum.. Geranium pulverulentum. Pérgularia tomentosa. Geranium malopoïdes. Salsola mollis. Astragalus annularis. Salsola muricata.. Lotus oligoceratos. Bubon tortuosum. Picridium tingitanum. Forskalea tenacissima. Souchus chondrilloïdes. Fagonia arabica. Centaurea Lippii. Neurada procumbens. Parmi les végétaux des déserts, le Sa/vadora persica se trouve à l'est en Asie, à une très-grande distance ; cet arbuste habite la côte de Coromandel (9), la Perse, l'Arabie (10), la haute Égypte et la côte d'Abyssinie (11). (Gi) Voyez H. N: Botanique, pl. 9, fig. 2. (9) Roxburg, Plants ofthe coast of Coromandel, vol.I, (2) Ibid. pl. 8, fig. 7. i pag 26, tab. 26. (3) Ibid. pl 12, fig. 1. (10) Forskal (Flora Ægyptiaco-Arabica, pag. 32) a (4) Ibid. pl. 26, fig. 2. décrit le Salvadora persica d'Arabie, sous le nom de Cissus (s) Forskal, Flora Ægeyptiaco-Arabica, pag. 82. arborea. (6) Voyez H. N. Botanique, pl. 20, fig. 3. (11) Bruce a décrit le Salvadora persica sous le nom de (7) Forskal, Flora Ægyptiaco-Arabica , pag. cvijet$2. Rack. Voyage aux sources du Nil, rom, VW, pag. 59, (8) Voyez H. N. Botanique, pl. 1, fig. 3+ pl. 12. QUI CROISSENT SPONTANÉMENT EN ÉGYPTE. 7 Les plantes grasses , telles que les Mesembryanthemum copticum et nodiflorum, V'Aigoon canariense , les Zygophyllunt simplex et coccineum , et V Hyoscyamus Datora, se nourrissent abondamment par leurs feuilles , et tiennent au sol par des racines assez foibles. Les sucs qui remplissent le parenchyme charnu des feuilles, suffisent pour faire fructifier ces plantes, malgré Faridité du terrain. Plusieurs plantes vivaces des déserts deviennent annuelles dans les terres arrosées. Le Cassia Senna périt, après avoir fructifié une seule fois dans le sol humide de la vallée du Nil. Sa racine est ligneuse dans les déserts, et pousse de nouveaux jets lorsqu'une pluie passagère excite sa végétation. Le Bunias spinosa et, V Euphorbia retusa sont vivaces dans les déserts comme le séné, et annuels dans la vallée du Nil. Le désert est la véritable patrie de ces plantes : elles ne croissent qu'acci- dentellement sur les bords du Nil. J'ai plusieurs fois semé dans les jardins du Kaire les graines de plantes vivaces des déserts. Celles qui avoient été recueillies sur des arbrisseaux de Cassia Senna et de Bunias spinosa w'ont donné que des tiges et des racines herbacées. Le Sabia ægyptiaca , le Linaria ægyptiaca (1), et le Borrago africana, semés en France, dans des serres, deviennent des plantes annuelles, quoiqu’elles soient vivaces en Égypte. Il est probable que beaucoup d’autres espèces subiroient le même changement hors du sol aride qui multiplie toutes leurs parties ligneuses. Les plantes blanchâtres, telles que le Dolichos memnonia (2), VInula crispa (3), le Gnaphalium cauliflorum , l'Anthemis melampodina (4), &c., perdent leur duvet, lorsqu'elles sont arrosées. Les rameaux de 'Æeliotropium lineatum (5), ceux du Convobulus Forskalü (6), et Je rachis des épis de l'Ochradenus baccatus (7), ne se transforment en épines que lorsque ces plantes sont exposées à la sécheresse du désert. Le Cucumis Colocynthis et le Reseda canescens m’ont paru être des plantes vivaces, ou au moins bisannuelles dans les déserts : elles sont herbacées près du Nil, lors même que linondation ne les atteint point. L’humidité hâte toutes les périodes de la végétation, et communique aux plantes une contexture foible, en com- paraison de la roideur qu’elles acquièrent par l'aridité. J'ai vu cependant le Cassia Senna devenir ligneux près du Nil dans le Sa’yd. Le sol sablonneux dans lequel cette plante étoit cultivée, et la manière dont elle étoit taillée, avoient pu retarder la végétation , et donner aux tiges et aux racines une consistance ligneuse. On trouve fréquemment du sel cristallisé dans les déserts : l'eau des sources s'en imprègne plus ou moins. Elle arrose presque toujours des joncs, des roseaux et des dattiers sauvages. Le sel ne détruit point la végétation aux bords des lacs de natron de la basse Égypte. Les lits de plusieurs torrens creusés dans le sol bas et salé de l'isthme de Soueys, ne sont point tout-à-fait stériles. Il y a des Tamarix dans la vallée de Seba’h-byär, qui, de cet isthme, se dirige vers le Nil. La (1) Voye H. N. Botanique, pl. 72, fig. 2, (65) Voyez H. N. Botanique, pl. 16, fig (2) Ibid. pl. 28, fig. ?. (6) Ibid. pl. »8, fig. 3: (3) Ibid. pl. 45, fig. 2. (7) Ibid. pl. 31, fig: 1. (4) Ibid. p. 45, fig: de MÉMOIRE SUR LES PLANTES vallée de l'Égarement produit beaucoup de roseaux sur le bord de la mer Rouge. Hs remplissent un marais formé à l'embouchure de cette vallée par l'eau douce d'un ruisseau, mêlée à l’eau salée qui reflue. Le sable samoncèle dans le désert entre les branches et les tiges des plantes : il enfouit des buissons et les troncs même des arbres. Il forme des buttes autour des sources de Moyse, et reçoit un soütien naturel des tiges et des racines de roseaux qui le traversent. L'atmosphère , dans l'intérieur de V'Égypte ; n'est presque jamais rafraîchie par la pluie, et n'est chargée que de l'humidité du Nil et des rosées. Cette atmos- phère contribue à donner au feuillage des arbres un tissu coriace ou fibreux, et convient ausycomore et au dattier, dont les feuilles sont un peu sèches; aux Acacia ou Mimosa, dont les feuilles sont très-divisées; et aux Tamarix, qui ont les rameaux gris et très-fins. La basse Égypte, dont le climat est plus varié que celui du Sa’yd, admet des plantes d'espèces plus nombreuses. Il tombe assez de pluie le long de la Médi- terranée pendant les mois de novembre, décembre et janvier, pour qu'elles puissent croître.aux environs d'Alexandrie et sur les dunes d'Abouqyr et de Bourlos. Plusieurs de ces plantes ne diffèrent point de celles du midi de la France : * Salicornia fruticosa. Statice monopetala. Lygeum Spartum. Pancratium maritimum. Chrysurus aureus. Allium subhirsutum. Lagurus ovatus. Passerina hirsuta. Plantago albicans. Capparis spinosa. Lithospermum tinctorium. Delphinium peregrinum. Anchusa undulata. Teucrium Polium. Convolvulus althæoïdes. Saturéia capitata. Lycium europæum. Phlomis fruticosa. Hyoscyamus albus. Hieracium bulbosum. Paronychia nitida. : Carlina lanata. Salsola Kali. Scolymus hispanicus. Elles deviennent d'autant plus rares que lon s'écarte plus au sud de la Médi- terranée. Le Spartium monospermum et le Prenanthes spinosa d'Espagne croissent non loin de Soueys, dans lamoyenne Égypte. Le Tamarix gallica est le seul arbrisseau d'Europe qui soit multiplié jusque dans le Sa'yd. Les plantes cryptogames , propres aux régions froides et élevées, sont presque inconnues en Égypte. Il ÿ a des Lichen dans la partie la plus haute du désert, entre le Kaire et la mer Rouge. Ils recouvrent des pierres sèches ; ils ne se détruisent que par la plus grande vétusté : les brouillards les font-renaître, Ces mêmes Lichen se trouvent aussi près du sommet des pyramides de Gyzeh, du côté du nord seulement, et sur celles de Saqgqärah. On découvre dans la verdure qui reparoît en automne sur le limon du Ni, 1.° une mousse particulière’, extrêmement petite, le Gymnostomum niloticum (1) ; (1) Voyez H. N. Botanique, pl. 57, fig. 7 QUI CROISSENT SPONTANÉMENT EN ÉGYPTE. 9 2.° le Riccia crystallina et le Nostoc sphæricum , deux plantes cryptogames, qui croissént aussi quelquefois en Europe, dans les lieux qui ont été inondés. Les cryptogames marines, telles que les algues ou fxcus, sont abondantes à Soueys et à Alexandrie. : L’utilité des arbres indigènes les place au même rang que ceux qui sont accli- matés. Le dattier est le seul qui forme en Égypte des bois de quelque étendue : il ne donne pas de fruits bons à manger, lorsqu'il est sauvage ; il en donne d’excellens par Ja culture. On plante les grands arbres, le sycomore, le nabeca, &c. auprès des roues à arrosement, pour garantir du soleil les animaux employés à faire tourner ces roues. Les arbres procurent aussi de la fraîcheur dans les cours des maisons : leur bois est très-propre aux constructions. Les tiges coupées des roseaux, Arundo ægyptia et Arundo isiaca, tiennent quel- quefois lieu de bois. On les range par couches sur les planchers, les terrasses ; et on les revêt de maçonnerie. On emploie dans le Delta, pour faire cuire les briques, les plantes sauvages ; Atriplex Halimus, Suæda baccara, &c., un peu ligneuses, arrachées dans des terres abandonnées. Les souchets à tiges élevées, Cyperus dives et Cyperus alopecu- roïdes , servent à faire des nattes sur lesquelles on a l'habitude de se reposer, et qui remplacent des tapis de pied dans les mosquées et les maisons. Le sol livré à la culture se dépouille des herbes sauvages. Les animaux glanent, pour ainsi dire, celles qui croissent dans les terres non labourées. Ils reçoivent leur nourriture de la main de l’agriculteur : ils s’engraissent du fourrage épais des prairies artificielles. Les plantes des déserts suffisent aux besoins les plus pressans des Arabes. Les caravanes hâtent leurs marches, pour arriver à des stations où les chameaux puissent paître les branches de quelques buissons épineux. Les racines tirées de dessous le sable, servent aux Arabes à allumer le feu nécessaire pour cuire, sous les cendres, le pain qu'ils font à l'instant. Les quadrupèdes des déserts ne touchent point aux plantes grasses, pleines de sucs très-salés et amers, ni à celles qui con- tiennent un lait vénéneux. Les Mesembryanthemum nodiflorum et Zygophyllum coccineum , plantes grasses des déserts, rejetées à cause de leur âcreté, par les chameaux, les chèvres et les gazelles, portent des graines que les Arabes récoltent. Ils font de la farine et du pain avec celles du Mesembryanthemum; is vendent comme épice, aux droguistes du Kaire, celles du Zygophyllum. Les joncs très-lisses dont on fait les plus belles nattes, sont un des articles du commerce des Arabes. Ils apportent aussi dans les villes, des plantes aromatiques, Santolina fragrantissima , Artemisia judaïca , les sénés et la coloquinte. Les feuilles et les jeunes pousses des plantes des déserts sont fréquemment détruites par des insectes et par des limaçons attachés à ces plantes. L'o'char, où Asclepias procera, axbrisseau des plaines brülantes d'Ombos, nourrit une mouche qui gâte peu ses fleurs et ses fruits. Aucune concrétion ne couvre ni ses feuilles ni son écorce. Un ténébrion vit autour de ses racines. H. N. TOME II. B 10 PLANTES QUI CROISSENT SPONTANÉMENT EN ÉGYPTE. On récolte dans la Perse, sur les feuilles de cet arbrisseau, un sucre (1) blanc et doux, qui enveloppe le ver d’une mouche. Ce sucre, et l'espèce de mouche par- ticulière qui, dans la Perse, pique les feuilles de lo’char, n'existent point en Égypte. L’alhagi ou a'ägoul, sousarbrisseau très-épineux, du genre Æedysarum, et res- semblant à un genêt, produit, sans la piqûre d’aucun insecte, dans les déserts de la Perse et de l'Arabie (2), une manne ou plutôt un véritable sucre qu'il ne produit pas en Égypte. On coupe les branches de lo’char pour les brûler : elles sont remplies d’un lait âcre ; les chameaux n’y touchent point : ils mangent l'alhagi, malgré ses fortes épines. (1) Voyez la Description du sucre de l’arbrisseau ascher (2) Voyez Rauwolf, 74. part, 1, c. 8. — Niebhur, Des- Lo’char], par F. Ange de Saint-Joseph , dans la Phar- cription de l'Arabie, pag. 129, — Olivier, Voyage dans macop, Pers, pag. 361; Lutetiæ Parisior. ann, 168r, in-8° Vempire Othoman, tom, 111, p. 188. ‘Sérapion a parlé du sucre de hahoscer [o’char], eta Bruce rapporte, tom, V, p. 62, qu'il aperçut un suc décrit arbrisseau qui le produit, De Temperam, simplic., glutineux;'trés-sucré, sur quelques feuilles d’une graminée cap, 50, de Zucharo, sauvage d’Abyssinie, HISTOIRE D ES PLANTES CULTIVÉES EN ÉGYPTE ; PAR ALIRE RAFFENEAU DELILE, MEMBRE DE L'INSTITUT D'ÉGYPTE. A PREMIER MÉMOIRE. Su les Céréales graminées, les Fourrages, et les Grains de la classe des. Plantes légumineuses. L: Nil règle les travaux de l’agriculture. Ce fleuve décroît au commencement de l'automne , et abandonne par degrés les terres qu'il a inondées : elles sont . presque aussitôt. ensemencées de grains, de trèfle, et de plusieurs autres plantes de la classe des légumineuses. Les grains semés en octobre et novembre sont l'orge et le blé. Les Égyptiens ne connoissent ni le seigle ni l'avoine. Le trèfle sert de fourrage. Is sèment un peu de fenugrec, et le mangent vert, ou le donnent aux animaux. Ils cultivent abondamment les féves, qui sont la princi- pale nourriture des chameaux. Is sèment, sur la limite du désert, des courges et des concombres hätifs, qu'ils abritent des froids du nord, en opposant aux vents de petites haies sèches de joncs et de roseaux. Le lin et le carthame réussissent dans les terres qui ne sont pas assez tôt abandonnées par le Nil pour devenir propres à la culture de l'orge et du blé. La laitue, les lupins , la gesse, les pois chiches, les lentilles, le pavot, le tabac et le chanvre (1) appartiennent, comme les plantes précédentes , aux cultures d'automne et d'hiver, et se récoltent au printemps. j Le blé monte en épi à la fin de février et au commencement de mars. C'est alors que fleurissent les dattiers , à l'entretien desquels les Égyptiens consacrent (1) Le chanvre, associé en quélque sorte avéc le tabac, n’est cultivé en Egypte que pour en fumer les feuilles sèches, ou pour en préparer des électuaires enivrans. H. N. TOME II. PA 12 MÉMOIRE SUR LES PLANTES beaucoup de soins. On moissonne le blé en avril et au commencement de mai: la terre reste souvent ensuite dépouillée , et elle est gercée par le soleil. La plupart des cultures d'hiver sont suivies de la culture des plantes d'été, qui ne mûrissent qu'a l'aide d’arrosemens artificiels : celles-ci sont, le blé de Turquie ou maïs, le sorgho ou grand millet, le /amyeh, dont le fruit vert se mange bouilli, et le sésame , dont la graine sert à faire de lhuile. Le riz, la canne à sucre, la colocase, le coton et l'indigo, ont besoin d'arrosemens pendant tout le cours de l'été. Le Nil, commençant à croître à la fin de juin, oblige les cultivateurs à récolter sur les terres basses les plantes qui y ont été semées le plus récemment. En effet, ces terres , plantées ordinairement de beaucoup de melons et de pastèques, sont les dernières que le Nil a abandonnées, et elles se trouvent les premières submergées au retour de l'inondation. Les travaux de l'agriculture ne sont pas suivis dans un ordre uniforme par toute l'Égypte : outre la différence de température de la haute et de la basse Égypte , qui rend la première plus hâtive, les cultures varient suivant les pro- vinces. Le riz appartient presque exclusivement au Delta ; le sucre n'est extrait de la canne que dans la haute Égypte ; le dourah ou sorgho remplace le blé au- dessus de Thèbes ; et le trèfle, si abondamment cultivé dans tout le nord de l'Égypte, cesse de l'être dans le Sa'yd, au midi de Farchyout; les vignes, les olives, les roses, contribuent à la richesse du Fayoum : d’autres provinces tirent leur principal revenu de la récolte des dattes, des herbes potagères, des plantes légumineuses , du henné ou de l'indigo. S I er Des Céréales graminées, On destine à être semées en blé les terres qui viennent d’être inondées, ou celles qui, n'ayant point été inondées, se trouvent cependant pénétrées par humidité de la saison et par les filtrations du Nil. Un champ reçoit ordinai- rement deux labours; le premier, pour préparer la terre, et le second, pour enfouir la semence. La charrue Égyptienne est très-simple, et n’a point de roues (1); elle trace des sillons peu profonds. Un tronc de palmier, lié en travers «et traîné par des bœufs, supplée au rouleau ou à la herse, Lorsqu'il arrive que le Nil, après de grandes inondations, tarde trop à se retirer, on sème les terres sans les labourer. Les anciens Égyptiens jetoient le grain à la surface du limon, et le faisoient enfoncer sous les pieds des pourceaux (2). La coutume de semer fans labour est nécessitée par la durée de l'inondation. Dans une saison avancée, le blé ne profiteroit point; il pousseroit tout en herbe, Le grain, semé d’abord sans labour, est recouvert ensuite en labourant, si la terre est assez sèche , ou (1) Voyez la charrue représentée planches VIII et IX, (2) Hérodote, div, 11, chap, 14 Arts et Métiers, £, M, \ CULTIVÉES EN ÉGYPTE. 13 en trainant un fagot de branches d'arbres ou de buissons à travers la plaine, si la terre est molle et ressemble à de la boue. Cette dernière méthode est plus ordinaire, lorsqu'on sème de l'orge ou du trèfle, que lorsqu'on sème du blé. Non-seulement les terres que lon cultive en blé n’ont pas toujours été inondées; mais il y a des champs que l’on est obligé d’arroser quand le grain est levé. J'ai vu cultiver du blé par irrigation dans l'ile de Roudah, dans les plaines de Birket- el-Häggy, et dans plusieurs endroits de la haute Égypte. Le blé barbu , à épis lisses, est connu des Égyptiens sous le nom de gamlh sofyry, nom qui me paroît signifier blé jaune, parce que l'épi se dore lorsqu'il perd en môûrissant la poussière glauque qui a d’abord couvert ses balles. Les épis sont, où linéaires et alongés, ou fusiformes et médiocrement longs. Le blé qui a les épis les plus longs, est désigné par lesnoms de gamh soféyry roueyly; et celui qui a ses épis plus courts, est simplement nommé gawmh cha’yry, mot qui signifie blé à épis d'orge Ce blé a été indiqué par Forskal (1) comme variété de l’épeautre ou Tririoum Spelta Lin. On voit fréquemment du blé dont les épis sont rougeâtres ou enfumés, et que les gens de la campagne nomment gamh ahmar, blé rouge. Il y a en Égypte beaucoup de blé à épis velus; mais on n'observe pas que ce caractère soit constant dans les mêmes espèces: plusieurs variétés sont intermé: diaires. Le blé que les Égyptiens nomment gamk meghayz, a les épis courts, velus et d'une forme pyramidale. Ses épillets sont presque horizontalement couchés en dehors du rachis. Ils se dépouillent quelquefois plus ou moins de leur duvet, en sorte que le blé appelé gamh na’ygeh ne diffère du gamh meghayg que parce qu'il n'a point les épis velus. Deux variétés de blé à épis velus sont distinguées, lune par la forme alongée des épis , et l’autre par la grosseur qu'acquièrent les épis plus courts : la première de ces variétés est appelée gamh sébageh , et la seconde gamh a’raby. Toutes deux se rapportent au Trirticum turgidum de Linné, H n’y a en Égypte que du blé barbu. Son chaume s'élève un peu moins que celui du même blé cultivé en France. Les variétés nommées gamh meghayz, qamh na‘ygeh, Triticum sativum pyramydale (2), et gamh a’raby, Triicum sativum tureis dum (3), sont inconnues en France. e Le blé, lorsqu'il n'est point encore récolté, est distingué dans les campagnes par les noms arabes que j'ai cités , mais lorsque le grain est apporté dans les marchés, on le désigne par sa qualité, ou par le nom de la province d’où il vient. Il y a, dans les marchés, du blé appelé gamh ahmar, blé rouge, parce que son grain est corné, un peu rouge, et transparent à l'intérieur. Le blé du Sa’yd a le grain plus alongé que celui qu'on récolte dans les provinces de Charqyeh et de Bahyreh, Quoique ces grains diffèrent peu, les habitans assurent que celui du Sa’yd qui seroit semé dans la basse Égypte, n'y réussiroit point. On peut attendre sans risques, pour moissonner le blé, que le chaume et l'épi soient secs. On ne redoute ni les vents ni les pluies qui, dans d’autres pays, (1) Flora Ægyptiaco-Arabica, pag. 26: (3) Voyez H. N. Botanique, pl. 14, fig. 2. (2) Voyez H. N. Botanique, pl. 14, fig. 7, - 14 MÉMOIRE SUR LES PLANTES causent d’assez fréquens dommages. Les Égyptiens scient le blé avec une faucille fort petite, et moins courbée que celle dont on se sert en France : ils l’arrachent dans plusieurs cantons de la haute Égypte. Ils battent le blé sous un nereg, espèce de chariot qu'ils font promener circulairement sur les gerbes que lon étale par terre. La charpente de ce chariot est grossière ; elle est taillée en forme de banc ou de siége porté sur des essieux garnis de fortes plaques de tôle, qui servent de roues et qui hachent les épis et la paille. Il se mêle toujours un peu de terre avec le grain. On achève de le nettoyer et de le cribler dans les villes où on le consomme. La paille hachée sert à nourrir les chevaux, les ânes, les buffles et les chameaux : on la transporte dans des sacs formés de filets grossiers de cordes de dattier. On sème du blé dans les terres qui, une année auparavant, ont produit du trèfle ou des féves. Il faut deux tiers d’ardeb (1) pour semer un feddän (2), qui, dans les bonnes années, produit huit 2rdeb (3) aux environs du Kaire. L'orge est le grain que les Égyptiens donnent aux chevaux. Ils le récoltent trente jours plurôt que le blé; en sorte que, s'ils achèvent la récolte de ce dernier grain en mai, celle de l'orge est achevée dès le mois d'avril. Les anciens Égyptiens, selon Hérodote (4), ne mangeoient point d'orge ni de blé, et se nourrissoient d’olyra , espèce de grain qui servoit à faire le pain,.nommé cyllesiis (s). Mais un autre auteur, cité par Athénée (6), a rapporté que ce, pain étoit fait avec de l'orge; et suivant Diodore de Sicile, les Égyptiens se nourris- soient d'orge et de blé (7). Les doutes que les contradictions de ce genre, dans les récits les plus authentiques de l'antiquité, pourroient jeter sur l'histoire des usages de l'Égypte, sont faciles à lever, en considérant les motifs de ces usages, et en s'instruisant par la vue des tableaux sculptés dans les grottes et dans les temples. On peut ainsi concilier les observations d'Hérodote avec celles de Diodore de Sicile. Les anciennes institutions avoient prescrit à chaque province d’honorer une espèce particulière d'animal, et elles avoient interdit aux habitans l'usage d’une espèce de nourriture (8). La répugnance pour l'orge et pour le blé n'a pas dû être partagée par tous les Égyptiens, comme pourroit le faire croire l'opposition remarquée par Hérodote entre les coutumes Égyptiennes et celles des autrespeuples. L'espèce d'animal révérée dans une province était fréquemment proscrite dans une autre (0). Il est vraisemblable que les seuls habitans qui ont regardé l'usage de l'orge ou du blé comme honteux (10), sont ceux auxquels cet usage a été défendu. (1) C'est-à-dire, un hectolitre vingt-trois litres, ou (s) Liv. 11, chap. 77. neuf boisseaux quatre-neuvièmes, mesure de Paris. g (6) Nicandre de Thyatire, dans Athénée, Liv, IIT, (2) Le feddän, mesure carrée de vingt qaçab de côté, chap. 29, tom. IT, pag. 438 , traduction de Héfebasé de le qaçab ayant six coudées deux tiers, et la coudée ayant Villebrune ; et pag. 114, édit. gr. lat. de Casaubon. cinq cent soixante: dix. sept mil imétres et demi, équivaut (7) Diodore de Sicile, liv. Fe æ, sect, 1 re, tom, A Eh .30, à cinq ce -vingt-trei illièmes d’ R RL de NE Ve CÉRÉnEten dhectare, ce traduit par Pabbé Terrasson; et Lib, 1, pag. 27, lite. C, à un arpent soixante-treize perches et demie, à dix-huit $ : edit. gr. lat. Hanov, 1604. pieds pour perche. (3) C'est-à-dire, quatorze hectolitres soixante-dix- $ D AD. cdi I ; et pa . D, edit. gr. lat. neuf litres, ou cent treize boisseaux un tiers, mesure de P48: "9; CDD O0 MP .C CITE € Paris. (9) Diodore, ibid, (4) Liv. 11, chap. 6. (10) Am mopéar xa} nee Sr na tva Ain d r@ (8) Diodore de Sicile, Liv. 1.9, sect, II, trad. tom, 1, CULTIVÉES EN ÉGYPTE. 1$ Les Égyptiens ont cultivé ces grains très-anciennement. Les tableaux des grottes d'Élethyia (1) en sont des preuves convaincantes. On croit que l'o/yra des anciens est lépeautre. Hérodote rapporte que l'on donnoit quelquefois à l’o/yra le nom de ea (2); et nous apprenons de Diosco- ride, qu'il y avoit deux espèces de 7e, l'une à grains solitaires, et l’autre à grains géminés (3), description qui embrasse deux espèces d'épeautre, savoir, les Triricunt monococcum et Triricum Spelta. Mais Dioscoride (4) ne confond pas, comme Hérodote, le zea avec l'obyra. Théophraste fait mention de ces deux grains ($); et Pline les distingue aussi, L'o/yra récolté dans la Grèce étoit difficile à battre, comme l'est en effet l'épeautre. En Égypte, le même grain étoit facile à battre , et produisoit beaucoup (6). Pline ajoute que le za, commun en Italie, étoit appelé semer, c'est-à-dire du grain, et qu'Homère avoit donné par excellence à la terre l'épithète de (eiSwoss ou fertile en zea (7). Le gea de Dioscoride, ou o/yra et zea d'Hérodote , comprend les deux espèces d’épeautre, Triricum monococcum et Triricum Spelta ; il en existe une troisième espèce que Host a appelée Triticum Zea (8), et qui peut être prise pour l'olyra de Théophraste, de Pline et de Dioscoride. Aucune espèce d'épeautre, c'est-à-dire ni l’alyra ni le zea, ne se retrouvent en Égypte. Beaucoup d’autres plantes en ont également disparu. Plusieurs variétés de blé s'y sont conservées; et les caractères propres à les distinguer justifient l'emploi des dénominations de blé égyptien (9) et de blé alexandrin{10), adoptées chez les anciens, qui avoient observé la différence de ces blés, et de ceux de Rome et de la Grèce. La ressemblance des noms o/yra et oryza a donné lieu de confondre quelquefois ces deux grains, l'épeautre et le riz, lun avec l’autre. Pline cite un auteur qui prenoit l'olyra, épeautre, pour l'eryza, riz (11); et parmi les modernes, Goguet{12) dit qu’il n’est pas éloigné de croire que le riz n'ait été lohyra : mais ni Goguet ni Shaw n’ont expressément avancé, comme Paw le leur impute, que le riz fût loHra. Shaw se borne à dire que le n9o3 (13) kissemerh, mentionné dans la Bible hébraïque, peut bien avoir été le riz. Le traducteur de Shaw s'est servi du terme d'épeautre pour rendre celui de HD, auquel plusieurs versions de la Bible donnent une signification différente. Celsius (14) a démontré mieux que personne, que la signification d'o/yra | épeautre | est correcte. Les Égyptiens cultivent une grande quantité de riz pour leur consommation ] moitupére So réruy rhv Cenvoredos juéneer 6à. Herod. lib. 11, (7) Pline, ibid. pag. 447, edit. Lugdun. 1587. cap. 36, p. 107, edit. gr. lat. Lond. 1679, « Par-tout ailleurs (8) Triticum Zea, spiculis subquadrifloris ; rémotis , »onse nourrit de froment et d’orge:en Égypte onregarde muticis aristatisve, duobus racheos margine pilosæ inter- » comme infames ceux qui s’en nourrissent. » Traduction nodiis spiculé longioribus, Host, Gram, Austr.t. I, p.20, de Larcher, tom, I1, p. 30, édit. de 1802, tab, 29. (G) Voyez pl. 68, A. vol. I. (9) Pline, ibid, cap. Vi1, pag. 445. (2) Hérodote, Loco citato, Voy. pag. 228, ibid. Ja note (10) Theophrast, Hist. pl. lib.-VIIT, cap. 4, p. 931. de M. Larcher. (1) Natural, Hist, Mb. XVII, cap. 7, pag: 445. (3) Dioscorid. Jib,1r, cap. 117. (12) Voyez Origine des lois , des arts et des sciences, (4) Dioscorid. Lib, 11, cap. r13. tom, 1,7, pag, 236, (5) Hist. plant. Kb. vit, cap. 9. (13) Travels in Egypt, pag. 430. (6) Pline, Vatural, Hist, lib. XVIII, cap. 10. (14) Æierobotanicon , part. 11, pag. 98, 16 MÉMOIRE SUR LES PLANTES et pour l'exportation. Aucun historien ancien n’a parlé du riz d'Égypte; et je suis porté à croire avec Hasselquist (1), que cette culture ne remonte point chez les Égyptiens au-delà du temps des califes, qui favorisèrent l'introduction des plantes étrangères. Les anciens ont connu le riz de l'Inde. On lit dans Théophraste (2) que cette plante séjourne long-temps dans l'eau , et qu'elle croît en panicule et'non en épi. On ne faisoit usage du riz qu'après l'avoir dépouillé de sa balle et de sa pellicule, comme on fait encore de nos jours. Les espèces de riz sont nombreuses dans YInde. Rumphius en indique neuf (3), et Loureiro quatre (4). H n'y a en Égypte que du riz barbu à balles jaunätres. Les habitans du pays de Syouäh en cultivent une espèce différente, celle à grains rougeätres (s), et qui n’a pu être portée dans cet Oasis, au centre des déserts, que par des caravanes qui ont traversé l'Égypte. On choisit dans le Delta, pour semer le riz, le grain le plus beau. On en remplit des coufles, c’est-à-dire, des sacs de feuilles de dattier. On les porte dans un canal ou dans un réservoir près des roues d’arrosement : ces couffes restent à moitié plongées dans l'eau, et y sont retournées chaque jour. Le riz commence ainsi à germer. On sort les couffes de l'eau, le cinquième ou le sixième jour; et on les vide, en mettant le grain par tas sur une couche de trèfle frais, et en couvrant les tas avec du trèfle. On ne remue ensuite le riz qu’au bout de vingt-quatre heures. On létend, et on le laisse, pendant un jour, recouvert de trèfle que l'on ôte le soir: il est exposé à la rosée de la nuit. On le sème le matin dans un champ qui a été couvert d’eau , et d’où elle ne s'est même pas entièrement écoulée. On met, par la suite, le champ plusieurs fois à sec, à de courts intervalles , pour forcer le riz à prendre racine et à ne pas surnager. Plus tard on nettoie le champ de diverses mauyaises herbes; eten même temps qu’on les arrache pour les jeter, on arrache aussi quelques touffes trop épaisses de riz, afin de les porter , soit dans des endroits qui ont été clair-semés , soit dans des por- tions de quelque champ voisin, préparé pour les recevoir. Cette transplantation est facile dans la boue, d'où l’on tire le riz par ses tiges, et sur laquelle on le replace. L'eau dans laquelle baigne le pied du riz, jusqu'à ce que le grain soit mûr, provient des machines d’arrosement qui servent à la puiser dans le Nil; elle se distribue aussi d'elle-même au temps de l’inondation, et son cours est réglé par les digues qui protégent les champs. On récolte le riz en octobre, après qu'il est resté sept mois en terre ; on le bat sous le noreg (6). Le grain, séparé de la paille, conserve sa balle ou en- veloppe florale , fermement adhérente comme celle de Forge; et on l'appelle 4 dans cet état, roug cha’yr, riz en orge. Il s'agit de le piler dans des mortiers, jusqu'au point de le rendre blanc, en lui enlevant sa balle et sa pellicule propre, celle qui ressemble à la pellicule d’où résulte le son, quand on mout du (1) Voyage dans le Levant, part, 1,", pag. 163. (5)-Voyez Browne, Voyage en Égypte, tome 1, (2) Æist, plant, Kb. 1V, cap. $, pag. 347. pag. 25. (3) Æerb, Amboin, tom. V, pag. 198 et 2or. (6) Voyez le noreg figuré sur les planches Vi11 et 1x (4) Flora Cochinchin,tom. 1, pag. 267, edente Willden. des Arts et Métiers, É, M. vol. IL. Berol. 1793. blé, CULTIVÉES EN ÉGYPTE. : #7 blé. Les machines, garnies de pilons, sont mues par des hommes ou par des bœufs : les hommes marchent sur l’extrémité d’un levier en charpente, et la font baisser par leur poids, tandis que l'extrémité opposée s'élève pour retomber. Les bœufs tournent des roues auxquelles sont adaptés plusieurs leviers ; un cylindre de fer creux sert de pilon; il est enté à angle droit sous l'extrémité la plus longue. de chaque levier, de manière à frapper dans un mortier, en exécutant le même mouvement que feroit un martinet de forge. Le riz, suffisamment pilé, est passé au crible, qui, d’un côté, donne le grain seul, et de l'autre, rejette les fragmens enlevés de la surface du grain. On mêle avec le riz, du sel marin sec, qui l'empêche de se gâter. Cette utile denrée peut ainsi conserver son prix pendant très-long-temps : on la répand dans toute l'Égypte, et on l'exporte aussi, princi- palement par mer. j La haute Égypte produit beaucoup de sorgho, que les habitans regardent comme le grain le plus naturel à leur pays, et qu'ils nomment dourah beledy , ou dourah d'Égypte. On le sème dans les mois de mars et d'août, époques qui ne conviendroient pas au blé. La terre labourée-est aplanie avec un tronc de palmier traîné à sa surface : on la divise par petits espaces carrés, pour former autant de bassins à bords relevés. L'eau est amenée par une rigole entre plusieurs carrés alignés ; on enlève successivement, le long d’une rigole, assez de terre pour faire entrer l’eau dans les carrés, que l’on ferme ensuite en remettant de la terre dans les ouvertures que l’on avoit faites. Chaque carré d'un champ est appelé 4er; et c’est toujours dans des compartimens de cette espèce que les Égyptiens placent les plantes qui ont besoin d’être arrosées : ils suivent, dans les campagnes et dans les jardins, le même mode d'irrigation pour les plantes grandes et petites, telles que le pourpier et la laitue, et pour les arbres, tels que les dattiers. Le riz et la canne à sucre, ayant besoin de beaucoup plus d’eau, sont plantés dans des champs non divisés en carrés, mais imitant seulement de grands réservoirs. La manière de semer le sorgho ou dourah beledy, consiste à en laisser tomber plusieurs grains dans des trous que l'on couvre de terre avec les pieds. Le sorgho que lon sème près du Kaire au mois de mars, n'a besoin que d'un seul arro- sement : semé au mois d'août, il demande à être arrosé davantage. Son grain est mûr en quatre mois ; il est de la grosseur d'une semence de chenevis, un peu pointu à sa base, et rond au sommet, La panicule épaisse qui termine chaque tige, le produit abondamment : sa fertilité surpasse celle des autres céréales. Ce grain n'est point caché dans Ja balle à sa maturité, comme le grain du blé, de l'orge ou du riz : il paroît à nu par son sommet ; il est jaune, blanc ou noirätre. On bat les panicules du sorgho sous le noreg, après les avoir retranchées du sommet des tiges qui ontété auparavant coupées près de terre. Unroba (1) de grain suffit pour ensemencer un feddän {2}, qui rend cinq à six ardeb (3). (1) Le roba’ est la 24.° partie de lardeb;il équivaut à (3) C'est-à-dire, de neuf hectolitres et vingt-quatre sept litres sept-dixièmes, ou à sept-douzièmes de boisseau. litres à onze hectolitres, ou de soixante-dix boisseaux (2) Cinq cent quatre-vingt-treize millièmes d’hectare, cinq-sixièmes à quatre«vingt-cinq boisseaux. ou un arpent soixante-treize perches et demie. * H. N. TOME II. < 18 MÉMOIRÉ SUR LES PLANTES Ce grain est la principale nourriture des habitans du Say’d ; il donne une farine bonne pour faire des gâteaux, mais dont on ne fait point de pain levé, comme avec le blé. La manière de battre le grain contribue à ce que l’on puisse en retirer cette farine très-belle. Le noreg, ou chariot, sous lequel on écrase les panicules du sorgho , sépare tout-à-fait le grain de sa balle : un battage plus léger ne le rendroit pas aussinet. On mange les gâteaux de sorghotrès-bons dans la haute Égypte, tandis qu'en Europe, dans l'Istrie et le Frioul , par exemple, on fait, suivant les observa- tions de Host, du pain de sorgho médiocre avec de la farine à laquelle la balle du grain est mélée (1). Les tiges du sorgho sont fort légères, et longues de trois à quatre mètres [neuf à douze pieds | : on les charge sur des barques ; elles se vendent pour brüler. On ne se sert point d'autre combustible pour fondre le verre dont on a besoin dans les fabriques de sel ammoniac. Les Égyptiens appellent le maïs ou blé de Turquie, dourah chämy ou tourky, c’est-à-dire dourah de Syrie où de Turquie. Hs en récoltent communément les épis à demi-mûrs, pour les manger rôtis. Ils sèment le maïs aux mêmes époques que le sorgho, et l'arrosent beaucoup; ils en font deux récoltes de suite dans la même terre. Ils connoissent très-bien le millet ordinaire, et l’appellent dok4n. Nous avons vu, à Syène, quelques pieds du millet à chandelles, qui est un grain généralement cultivé aux pays des noirs, en Afrique. Le sorgho est fort abondant en Arabie; il ne s'y appelle point Œwrak , comme en Égypte , mais ra'am (2). Prosper Alpin a nommé le sorgho willet d'Éthiopie (3), désignation d'autant plus convenable que c’est le grain qui sert à nourrir les peuples de cette contrée, chez lesquels les céréales connues dans la plus haute antiquité, furent le millet et l'orge (4). Je ne crois pas, au surplus, que Pline, qui a parlé du millet des Éthiopiens, ait restreint cette signification au véritable millet seul : il y a, en Afrique, plusieurs espèces de grains qui ont dû être pris pour des millets. Le sorgho varie par la couleur des grains et par ses panicules. Belon vit cul- tiver , dans la Cilicie, du sorgho à grain blanc, qui différoit de celui de Lombar- die (5). Prosper Alpin a remarqué que le sorgho d'Égypte produisoit des panicules pendantes (6). Trois espèces de sorgho, auxquelles Linné a donné les noms d'Holcus Sorghnm , Holcus bicolor, et Holcus saccharams, ne sont indiquées que comme des variétés par Gærtner (7) et par Lamarck (8). Le mélange de ces espèces ou variétés est susceptible de les altérer ; mais elles sont presque toujours faciles à signaler, comme les souches d’autres variétés plus nombreuses. On cultive en- semble, en Arabie, l'Holcus Sorghum et V Holcus saccharatus (9). En Égypte, cette dernière espèce est rare: on l'appelle dokhn, comme le millet; et on la sème dans quelques jardins, pour en nourrir des oiseaux. (1) Host, Gram, Austr, tom. IV, pag. 58. (6) Prosper Alpin, Loco citato, (2) Forskal, Flora Ægyptiaco-Arabica, pag. 174. (7) De Fruct. et Semin. plantarum, tom. IT, pag. 2 et 3. (3) Prosper Alpin, Rer. Ægypt., tom. 1, pag. 176. (8) Dictionnaire encyclopédique, rom, 111, pag. 140. (4) Pline, Wat, Hist. b. XVIII, cap. 10, pag. 449. (9) Forskal, loco citato. (5) Belon, Observations, è7c, liv. 11, chap, 100. CULTIVÉES EN ÉGYPTE. 19 L’AHolcusbicolor , caractérisé par la couleur noire des balles, qui se communique aussi quelquefois au grain, est plus fréquent dans l'Inde que les autres espèces du même genre (1). On trouve des pieds de ce sorgho noir, épars en Égypte, au milieu des vastes champs de sorgho jaune , qui est celui que l'on préfère. Pline a décrit le sorgho de l'Inde comme une espèce de millet à grain noir et très- gros, connu à Rome depuis dix ans, au temps où il écrivoit (2). Le sorgho jaune paroît n'avoir été cultivé que beaucoup plus tard en Italie. Une charte historique, concernant le bourg d'Encise, en Piémont, constate qu'avant l'an 1204, le grain appelé weliga n'étoit point connu dans ce pays, et que cette année-là, on lapporta de Natolie à Encise , pour essayer de le cultiver. Le nom de weliga étoit usité en Natolie (3); il fut conservé en Lombardie, où Matthiole (4) et Anguillara (s) , au seizième siècle, ont écrit que le sorgho étoit le grain appelé melica et meliga. E Belon appeloit le sorgho un blé (6); et Prosper Alpin, se conformant en quelque sorte aux expressions de Pline, l'appeloit un millet ; mais plusieurs historiens de lantiquité se sont servis des noms de blé (7), et même d'orge (8), pour désigner le sorgho : au moins est-il vrai qu'on ne sauroit appliquer qu'au sorgho ce que les historiens rapportent de la grandeur et de l'extrême fertilité des grains qu'ils ont indiqués dans les pays mêmes où l’on cultive le sorgho. : Héliodore dit que le blé et l'orge de l'ile de Méroé (9) rendoient trois cents pour un, et que leurs chaumes cachoient un homme à cheval, ou même monté sur un chameau. Les expressions répétées d'orge et de 4/é (1 o), presque inséparables dans divers passages des auteurs Grecs, nous suggèrent la pensée qu’elles ont été usitées pour désigner, d'une manière générale , les biens de la campagne, que lon sait être de différente nature, suivant lesspays. Hérodote parle de la grande fertilité et des feuilles larges de quatre doigts du blé et de l'orge d'Assyrie (11), tellement qu'il est naturel de croire, comme l'a énoncé Sprengel (12), qu'Hérodote avoit pour but de parler du sorgho. Nous appelons blé le mais d'Amérique, qui est d’un genre particulier ; et son nom spécifique de blé de Turquie nous semble dû à sa naturalisation dans diverses provinces de l'Orient, où il a été porté d’abord par les Espagnols et-les Portu- gais, sous un climat plus favorable que celui des régions moins tempérées de l'Europe. Les Égyptiens attribuent l'introduction du maïs au commerce avec la Syrie ou la Turquie : les noms de dourah chämy et dourah tourky , que j'ai cités, ndiquent cette origine étrangère. Jusqu'ici les communications entre l'ancien QG) Voyez Rumphius, Herb. Amb, tom. V, pag. 195. (2) Var. Hist. lib. XVIII, cap. 8, pag, 443. (3) Extrait de la charte insérée dans ouvrage Italien intitulé, Storia d’Incisa, da Gioseff Antonio Molinari, ann, 1810 , in Asti, tom. I, pag. 198. (4) Comment, in Dioscorid, pag. 416. à ñ (s) Sopra i Simplici, pag. 99. (6) Belon, Loco citato, (7) Theophrast. Hist. plant. Kb. VIT, cap. 4, p. 932. (8) Herodot. Hisr. lib.1, cap. 193; Heliodor. Æthiop. lib. 10, pag. 461, edit, 8.°, Hieronym, Commelin-ann, 1696, H, N. TOME II. (9) Heliodor. loco citato. (10) Celsius { Hierobot, 11, p. 124 et anteced.) a fait remarquer le retour fréquent de ces deux mots réunis dans les langues Grecque et Hébraïque. II cite, outre les auteurs Grecs dont je viens de faire mention, Thucydide, liv. VI, pag. 426; Diogène de Laërte, liv. VIII, pag. 279; Lucien, in Amoribus, pag: 897; Plutarque, M. Anton, tom. 1, p.934 ; Arrien, /nd, pag. 563, &c. &ec. (11) Herodot. Loco citato, (12) Historia rei herbariæ, tom. 1, pag. 79. Ca 20 MÉMOIRE SUR LES PLANTES et le nouveau continent n’ont point détruit la prééminence de chaëeun d'eux, relativement à leurs productions propres. Le maïs est la seule graminée indigène cultivée en Amerique dans le vaste espace compris depuis le quarante-cinquième parallèle nord jusqu'au quarante - deuxième parallèle sud (1). Quoique cette graminée ait été singulièrement multipliée en Europe , en Asie et en Afrique , l'Amérique a continué de la posséder plus abondamment encore que toute autre contrée. Le grain de maïs récolté en Égypte est arrondi, corné , peu farineux, jaune ou blanc au-dehors, et plus rarement brun ou un peu violet. Les pays les plus fertiles en maïs, comme la Virginie, par exemple , en produisent une espèce ou une variété dont le grain est aplati et très-grand , dont la tige et les épis acquièrent une longueur double de celui d'Égypte. Cette culture, facile à perfectionner , est très-négligée vu les Égyptiens , en comparaison de celle du sorgho, ou dourah du pays, qu'un long usage a établie. $. IT. Du Trèfle d'Égypte et du Fenugrec, cultivés comme fourrages. Les Égyptiens ne laissent point de terres en prés naturels, parce qu’elles produiroient beaucoup plus de roseaux et de plantes coriaces et épineuses , que d'herbes tendres, propres à nourrir les bestiaux ; ils trouvent de l'avantage à mettre en prairies artificielles une partie des plaines que le Nil a inondées. Ils récoltent , sur le trèfle qu'ils cultivent, une certaine quantité de graine propre à être semée. Ils n’exportent point cette graine, qui ordinairement dégénère ; ils en reçoivent fréquemment de la Syrie, où le même trèfle est cultivé, et où il existe probablement aussi à l'état sauvage. Ce trèfle, appelé par les Égyptiens bersym , est une espèce particulière | Trifolium alexandrinum Lin.) I est plus tendre que celui des prés de France (7Zrifolium pratense LiNN.); sa feuille est plus étroite :il fleurit blanc, et s'élève à environ sept décimètres | plus de deux pieds |; on le sème sans labour, dès que le Nil baisse, communément vers les premiers jours d'octobre : il change un peu par la manière dont on le cultive ; on en récolte la graine, soit dans les prairies, soit après l'avoir semée avec de Forge ou du blé, et l'avoir laissé mûrir en même temps que ces grains. On appelle khalys la culture du trèfle avec l'orge ou le blé. Ce trèfle est coupé en une fois à sa maturité ; et on lui donne le nom de #ersym fäl, tandis que le trèfle provenant des graines récoltées dans les prairies, à la suite d’une ou de deux coupes des tiges vertes de la plante, est appelé 4ersym bagly. On sème, pour être consommé vert, un quart de 4ersym fäl sur trois quarts de bersym bagly. Le bersym fäl pousse très-bien , malgré la grande humidité , aussitôt après l’inondation. Il défend de lardeur du soleil le 4ersym bagly, qui se dessécheroit par le défaut d'ombre, et dont les tigés serrées empêchent celles du /ersym fäl, plus élevées, de verser. I se fait ordinairement trois coupes de trèfle pendant un intervalle de cinq (1) Humboldt, Tableaux de la nature, tom. 1.", p.62. CULTIVÉES: EN ÉGYPTE 21 à six mois, entre octobre et mars, ou entre novembre et avril. On prolonge quelquefois beaucoup plus la culture du 4ersym en l'arrosant, et on double ainsi le nombre des coupes ; mais pendant ces coupes multipliées, la plante dégénère, et son produit ne fait guère que compenser les frais d'irrigation. Les propriétaires adoptent le mode de culture qu'ils jugent leur être le plus profitable par rapport à l'exposition du sol et au nombre d'animaux qu'ils y entretiennent. La première coupe de ersym s'appelle rés [ tête |; elle se fait avant que la plante ait fleuri, au bout de quarante jours : on appelle aussi là première coupe Jfäl, parce qu'elle se compose en grande partie du 4ersym fal, qui est très-fort , mais dont la racine périt après que la tige a été coupée. Le Lerspm bagly, au contraire, qui étoit très-délicat, repousse abondamment. Les seconde et troisième coupes du 4ersym sont désignées par les noms de #he/féh ou ribbéh, mots synonymes de regain, On laisse écouler deux mois depuis la première coupe jusqu'à la seconde, et deux autres mois depuis cette seconde jusqu'à la troisième. Le trèfle de da seconde coupe est le meilleur pour être séché et gardé : celui de la troisième, étant un peu attendu , donne des graines ; ce sont ces graines, récoltées sur du bersym bagly où bersym de plusieurs coupes, qui servent ensuite à la culture par mélange , appelée Æhalyr. Le berspm de la plaine de Gyzeh est toujours cultivé sans arrosement; on y sème un ardeb (1) de graines sur un espace de quatre féddän (2). Le fenugrec (7rigonella fenumgræcum LiNN.) est une plante annuelle connue en Égypte sous le nom de #e/bch : elle est fort ressemblante au trèfle; elle produit des fleurs plus grandes et moins nombreuses, non pédonculées, d’où naissent de longues gousses étroites , recourbées en manière de cornes. La graine du fenu- grec ne se gâte point, étant plusieurs jours noyée dans l'eau: elle germe très- facilement , et garnit bientôt de verdure la lisière des champs qui sont encore couverts d'eau, tandis que le Nil se retire. Le temps froid rend cette plante molle et aqueuse : les gens du pays la trouvent assez délicate pour en manger les jeunes tiges crues , avant qu’elles aient fleuri. On coupe ou l’on arrache le fenugrec vert en une fois; il n'y a point d'herbage plus hätif: on le donne en moindre quantité que le trèfle aux animaux ; il ne dure qu'environ deux mois, et il est déjà fané lorsque le trèfle est abondant. On vend, dans les villes d'Égypte, de la graine de fenugrec germée , par paquets, et que l’on a mis tremper dans de l’eau ; le peuple mange cette graine crue, avec le germe blanchätre qu'elle a poussé, et qui est long de cinq centimètres [environ deux pouces]. La plante de fenugrec a une forte odeur de mélilot, qu'elle perd un peu en se desséchant d'elle-même sur pied. Les tiges, écrasées sous le noreg pour retirer les graines, ne laissent qu'une paille très-médiocre, semblable à celle du trèfle ou de quelques autres plantes qui, après avoir donné leurs graines, seroient prises pour de petits rameaux de bois sec. La Syrie fournit à l'Égypte beaucoup de graines de fenugrec. | (1) C'est-à-dire, un hectolitre huit cent quarante-neuf (2) Répondant à deux hectares trente-sept, ares , ou à millièmes, ou quatorze boïsseaux et un sixième, six arpens quatre-vingt-treize perches et demie, #3 MÉMOIRE SUR LES PLANTES STI. Des Grains cultivés de la classe des Plantes légumineuses ; ou dont les fruits sont en gousses, On sème la féve de marais (1) par champs très-vastes, comme l'orge ou le blé. Elle pousse dés tiges droites non rameuses, et des feuilles ailées à deux ou trois paires de folioles. Ses fleurs, remarquables par la tache noire de chacune des ailes de leurs corolles, viennent aux aisselles des feuilles. Les fruits ou gousses sont épais et charnus; ils se dessèchent et noircissent avec le reste de la plante, après leur maturité : ils renferment les féves, qui sont petites et de l'espèce des féve- roles, mais qui n’ont point la saveur un peu amère des féveroles communes que l'on récolte en France; elles sont douces, et on les mange crues lorsqu'elles sont encore vertes; on les fait aussi griller au four dans leurs cosses. Aucune espèce de légume sec n'est plus abondante que les féves : la consommation en est si générale, qu'on trouve dans les villes à les acheter chaudes et bouillies aux heures des repas. Souvent on fait cuire des féves germées qui ont une saveur de fruit vert. On nourrit les chameaux avec la paille des divers grains, et avec une certaine quantité de féves, qui ordinairement ont été brisées sous des meules à bras. Les caravanes s’approvisionnent de ces féves, qui sont faciles à transporter. Hérodote a écrit que les anciens Égyptiens ne semoient jamais de féves, qu'ils n’en mangeoient point, et que les prêtres ne pouvoient pas même voir ce légume qui étoit impur (2). Diodore de Sicile contredit Hérodote, en parlant des féves (3) comme de lun des fruits les plus ordinaires en Égypte : mais il ajoute qu'il y avoit des Égyptiens qui n'en mangeoient point; en sorte que l'on peut croire qu'elles étoient particulièrement exclues du régime diététique des prêtres. Plusieurs idées superstitieuses avoient contribué à faire observer cette abstinence, à laquelle se soumirent les prêtres de Jupiter à Rome, d’après l'exemple de ceux de l'Égypte. Suivant Pline et Varron, les taches des fleurs de la féve étoient regardées comme des caractères de deuil; on croyoit que les ames des morts pouvoient.être conte- nues dans les féves, et on étoit dans l’usage de porter des féves en allant aux funérailles (4). Les historiens rapportent aussi que les philosophes Pythagoriciens, dont la doctrine a paru fondée sur celle des prêtres de l'Égypte, s'abstenoient des féves comme d’un aliment grossier, capable de troubler la digestion, d'émousser les sens, et de nuire aux opérations de l'esprit (5). Cette explication a quelque i (1) Faba, Tournefort, Jussieu; Wicia Faba , Linné: un autre, celui de fêves, le seul tout-à-fait exact, est aussi en arabe, Foul. le mot par lequel Hérodote et tous les auteurs Grecs ont (2) Hérodot. Hist. liv. Il, chap. 37, pag. 32, tom. II, désigné les féves. Il faut donc, dans la traduction de trad, de M, Larcher. Vabbé Terrasson, changer le mot de pois en celui de (3) Si l'on se contente de lire la traduction de Dio- fèves. Voyez sa traduction, tom. 11, pag. 189, et Dio- dore de Sicile, faite par l'abbé Terrassôn,on ne verra pas dore en grec. qu’il y soit fait mention de féves. Le mot grec xiawos, que (4) Voyez Pline, Natural. Hist. Kb. XXVIII, cap. 12, Pabbé Terrasson a cru peu important de rendre plutôt pag. 451, edit. Lugd. 1587. par un nom particulier de légume, celui de pois , que par (s) Pline, loco civato. — Ciceron, de Divin. Vib.11,8.58. CULTIVÉES EN ÉGYPTE, j É 23 rapport avec celle que Diodore de Sicilé a donnée dû motif d'utilité de plusieurs coutumes des Égyptiens. Il a observé que la religion leur faisoit un devoir d’une abstinence qui leur avoit été dictée dans le principe par les règles seules de la sobriété (1). Les Grecs donnèrent le nom particulier de fève d'Égypte à une plante différente de la féve de marais. Les taches noires et tristes des fleurs de la féve de marais, ou ancienne féve des Grecs {2) et des Romains, la font évidemment reconnoître pour avoir été celle que les prêtres Égyptiens croyoient impure. La five d'Égypte, dont plusieurs historiens font mention, est la plante qu'Hérodote à nommée #ys ou lotus rose du Nil, et dont les fleurs et les fruits sont sculptés dans les témples Égyptiens. Cette remarque est importante, pour que l'on ne confonde pas la féve d'Égypte ou le lors sacré avec la féve de marais, à laquelle on a attribué des qua- lités malfaisantes. Les lentilles (3), en arabe 4'd5, sont communes en Égypte, comme elles l'éroient autrefois; elles portoient chez les Romains le nom de Æntilles de Péluse (4), On les sème aujourd’hui sans labour dans la haute et dans la basse Égypte, et on les récolte sèches en grande quantité; elles sont rougeâtres et fort petites. On les monde quelquefois de leur écorce, en les broyant sous des meules à bras, afin de les rendre plus délicates lorsqu'on les fait cuire. On sème les pois chiches (s) dans des terres découvertes, ou à l'ombre des dattiers, comme la plupart des plantes de jardin. On apporte au Kaire, des plaines de Saqqärah et de Birket el-Häggy, des tiges fraîches de ces pois, pendant le mois de mars. Les habitans mangent les fruits verts qui garnissent ces tiges. Les pois chiches durcissent beaucoup en mûrissant ; on les mange secs après la récolte : ils deviennent friables étant grillés ou rôtis. On les fait quelquefois rôtir après les avoir mis tremper un peu dans l'eau; ils se boursouflent, et se fendent en morceaux blancs et farineux. Les lupins (6) sont ordinairement semés dans des terres sablonneuses ; leur cul- ture n'exige presque aucun soin, à l'exception des arrosemens, lorsque l’inondation n'a pas été suffisante. Les tiges de lupins sont droites et presque ligneuses; elles s'élèvent à douze et seize décimètres | quatre ou cinq pieds |, et produisent dans leurs deux tiers supérieurs des rameaux prolifères à feuilles alternes et digitées. Les fleurs naissent en grappes aux divers points d’où partent par étages plusieurs rameaux ; elles sont blanches et un peu roses dans l'espèce de lupin la plus ordi- naire, et bleues dans une seconde espèce (7) qui est rare. Les gousses sont larges et velues; elles renferment plusieurs graines comprimées, arrondies, et qui portent à leur bord un petit ombilic en godet. On ne coupe point les tiges de lupins ; on (1) Diodore de Sicile, loco citato, (s) Cicer arietinum LiNN.; en arabe, Aommos, On (2) Kiquos Emme, Dioscorid. lib. 11, cap, 127; nomme la plante dans les champs, ou cueillie fraîche, mot à mot fuba græca , féve grecque. melâneh. (3) Ervum lens LINN. (6) Lupinus Termis Forsk.; dans la langue Arabe, (4) Virgile écrivoit, Georg., lib. 1, v. 228 : termis, même nom que celui de Sws, qui en grec Nec Pelusiacæ curam aspernabere lentis, signifie lupin, (7) Lupinus hirsutus LINN., ou Lupinus digitatus Et Martial, lib, x 111, epigramm, 9 : F ORSK, Accipe Niliacam Pelusia munera lentem. 12 À MÉMOIRE SUR LES PLANTES CULTIVÉES EN ÉGYPTE: les arrache, et on les frappe ensuite par terre avec un bâton, pour faire tomber les graines. On brûle ces tiges, et on en fait le meilleur charbon qui puisse être em- ployé en Égypte à la fabrication de la poudre à canon. Les graines de lupins sont amères, et on ne les mange qu'après les avoir fait macérer dans de l'eau salée, et les avoir nettoyées de leur pellicule ou écorce. Le pois des champs (1) et la gesse (2) sont cultivés dans le Sa’yd , et se consom- ment en grande partie dans fa basse Égypte. On donne ces grains en automne aux buffles et aux chameaux, au lieu des féves que l’on garde pour les semer. I me reste à citer, pour compléter la liste des grains cultivés, deux espèces de haricots, l'une, Dolichos Lubia FoRsk., que l’on trouve au printemps dans les plaines de la basse Égypte ,et l'autre, Phascolus Mungo LiNN., que j'ai vue seulement aux environs de Syène. Ces deux espèces de haricots sont aussi connues en Syrie, dans la Perse et dans l'Inde. La première, Dolichos Lubia(3), a les tiges basses, et les grains blancs, ovoïdes, marqués d’un point noir à leur ombilic: la seconde, Phascolus Mungo (4), a les tiges et les feuilles velues; ses grains sont ronds, et presque aussi petits que du poivre ou de la coriandre. (1) Pisum arvense LINN. ; en arabe, besilleh,nom ana- Cette variété de Ja gesse est nommée, dans la langue logue à celui de bisaille, en français, qui signifie la même Arabe, gilbân. espèce de pois. (3) En arabe, loubyé et loubyeh ; et chez les Nubiens, (2) Lathyrus sativus LINN.; variété que PÉcluse a aux environs de Philæ et de Syène, méseh. appelée Cicercula Ægyptiaca , Plant. Hist. II, pag. 236. (4) Les Nubiens lappellent kacheryngy. DESCRIPTION DESCRIPTION DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT, ET CONSÉQUENCES GÉOLOGIQUES QUI RÉSULTENT DE LA RECONNOISSANCE QU'ON EN A FAITE; PAR M. P. S. GIRARD, INGÉNIEUR EN CHEF DES PONTS ET CHAUSSÉES, DIRECTEUR DU CANAL DE L'OURCQ ET DES,EAUX DE PARIS, MEMBRE DE L'INSTITUT D'ÉGYPTE. SE Description topographique de la Vallée de l'Égarement. — Facilités de la com- munication qu'elle offre entre le Nil et la mer Rouge. D'AxvILLE à tracé, sur sa carte de l'Égypte moderne, une vallée qui, à partir d'un village situé au pied du Mokattam , à environ deux lieues au-dessus du Kaire, s'étend jusque sur les bords de la mer Rouge à sept ou huit lieues au midi de Suez. . I importoit de reconnoître si cette vallée, désignée sous le nom de vallée de l'Égarement, pouvoit servir à établir une communication facile entre le Nil et la mer Rouge, soit par terre, soit par le moyen d’un canal. Le célèbre géographe, cité plus haut, a placé à l'embouchure de la vallée de l'Égarement, sur le côté de la mer Rouge, une ancienne ville appelée Chysma : son opinion portoit à présumer que cette vallée avoit été fréquentée autrefois; ce qui ajoutoit un nouvel intérêt à celui qu'offroit déjà la traversée de cette partie de la chaîne Arabïque que le P. Sicard; entre tous les voyageurs modernes, paroît seul avoir parcourue. Je suis parti du fre le 4 ventôse de l'an 8[ 23 février 1801 |, avec quelques membres de Institut d'Égypte et de la Commission des arts (1); pour me rendre (1) MM. Delile, membre de Institut d'Égypte; Ro- nieurs des ponts et chaussées ; Berthe, chef de bataillon zière, ingénieur des mines; Devilliers et Alibert, ingé- d'artillerie. H. N. TOME II. D 26 à Z DESCRIPTION à Suez par cette route. M. Devilliers, ingénieur des ponts et chaussées, qui nous accompagnoit, se chargea d'en relever à la boussole les diverses sinuosités, et le gisement des montagnes dont elle est bordée, travail dans l'exécution duquel il a mis autant de zèle que de précision. Je me propose de donner ici une description topographique de la vallée de l'Égarement , et de joindre à cette description quelques conjectures géologiques sur les causes qui ont amené cette vallée à son état actuel. On trouve à son entrée le village de Bagätyn, habité par des Arabes coñnus sous le nom de Terräbyn. Immédiatement au delà de ce village, la partie la plus basse du chemin que l’on suit, ést couverte de petits monticules formés de gypse et de fragmens de coquilles, autour desquels on reconnoît la trace de quelques eaux pluviales qui s’écoulent de la montagne dans le bassin du Nil. C’est aux envi- rons de cet endroit, que l’on exploite le grès blanc dont on fabrique les meules à “aïguiser qui sont en usage au Kaire. À sept kilomètres de son embouchure, la vallée commence à se rétrécir. Elle est bordée à gauche par une colline calcaire. La surface du sol est composée de caïlloux roulés, de fragmens de cristaux de gypse, et de bois agatisé. En continuant de monter, la vallée se rétrécit de plus en plus; on côtoie à droite une montagne coupée à pic, au pied de laquelle s'étendent, jusqu'au milieu de la route, des dé- bris qui semblent provenir d’un éboulement partiel de cette montagne, et qui, resserrant le vallon, le réduisent à n'avoir plus que deux cents mètres dans sa plus petite largeur. On arrive, en sortant de ce vallon, sur un plateau presque horizontal, dont la surface est encore sillonnée de traces de ruisseaux, que recouvrent un sable fin et de l'argile jaunâtre, Ce plateau est compris entre deux montagnes qui forment l'une et l'autre deux courbes concaves. On parcourt environ un myriamètre dans cette plaine; après quoi l’on entre dans un défilé de quarante mètres de Jarge, bordé de petites collines coupées à pic et dont le massif est composé de pierres coquil- lières, Laroute commence à se diriger vers le sud-est, à l'entrée de cette gorge. Celle- ci se prolonge pendant une heure de marche, et conduit sur un second plateau qui reçoit les eaux des hauteurs environnantes : elles se versent dans une vallée dirigée vers le sud, à peu près perpendiculairement à la route. Cette espèce de palier, dont la pente vers le Nil est très-douce, peut avoir sept à huit kilomètres de large. Il est couvert de caïlloux roulés, de gravier, et, en quelques endroits, de sel effleuri. Le chemin que l'on suit, est bordé de petites collines formées de débris provenant des montagnes voisines, et qui ont été chariés par les eaux. Ces collines sont disposées par gradins les unes sur les autres, et présentent beaucoup de coquilles dans leurs coupes abruptes. C’est après avoir marché l'espace de seize kilomètres, au milieu de cette petite plaine, que l'on arrive aux puits de Gandey. Hs sont situés au nord-est de la route, au fond d’une gorge où paroïssent se rendre toutes les eaux pluviales qui tombent sur le terrain des environs. Ces puits sont creusés dans un sol d'alluvions composé de marne et de terre calcaire. Ils sont au nombre de sept ou huit, n'ont “ DE LÀ VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. 27 au plus que deux mètres de profondeur, et sont environnés de plantes et d’ar- bustes dont la végétation nous parut très-active. ; : En quittant les puits de Gandey, on monte sur un plateau assez étendu, couvert au sud par une montagne qui forme un arc concave, à deux ou trois lieues de distance. C’est la partie la plus élevée de la vallée. On y voit dissé- minés sur le sol, des fragmens de cristaux de gypse, et de grandes coquilles bivalves non pétrifiées, parmi lesquelles on en remarque de fort bien conservées et dont les deux valves sont encore adhérentes {1). I parott, d’après les renseignemens que nous obtînmes de J’Arabe qui nous servoit de guide, que les caravanes, allant de l'Égypte supérieure en Syrie par le désert, viennent s'abreuver aux puits de Gandeÿ, et remontent ensuite sur le “plateau où l’on nous fit remarquer le chemin qu’elles pratiquent. On commence à descendre de cette plaine vers la mer Rouge, en suivant une vallée assez large, dans laquelle on observe de fort loin, sur la direction même de la route, un monticule conique de grès rouge, isolé, appelé par les Arabes Grayboun; d peut avoir quatre cents mètres de circuit à sa base, et quinze à dix- huit mètres de hauteur. Après avoir dépassé ce mamelon, distant de l’origine de la vallée à Baçätyn de cinq myriamètres environ, on suit pendant quelque temps le lit d'un ancien torrent qui s'incline d'abord vers lorient, et se dirige ensuite vers le sud-est, au pied d'une croupe calcaire, présentant le rocher à nu, sans aucun fragment de coquilles ni de gypse cristallisé. On passe de cette croupe sur un palier presque de niveau, où lon retrouve, à la surface du sol, les grandes coquilles bivalves dont nous venons de parler. On entre ensuite dans un vallon large de deux cents mètres. La colline qui le borde au sud, est ravinée profondément par les eaux. Le dessus de cette colline est couvert d’une terre fortement salée, et de caïlloux calcaires qui ne paroïssent point avoir été roulés, mais qui sont les débris mêmes du sol. En sortant de ce vallon, nous aperçûmes encore le rocher calcaire mis à nu dans le lit d’un torrent que nous suivimes pendant quelque temps ; sa rive droite, peu élevée, est une pierre blanche de même nature. On laisse à droite le lit de ce torrent pour se rapprocher de la montagne sep- tentrionale ; les collines qui bordent la route, sont disposées par échelons. I n’y a point là de cailloux roulés; mais on y remarque une suite de mamelons gypseux, dont les bases sont couvertes de coquilles fossiles non pétrifiées. Là commence un défilé de quatre-vingts ou cent mètres de large, compris entre une suite de monticules dont l'extérieur est formé de caïlloux siliceux ét dè quartz arrondis, et l'intérieur de gravier mêlé de ces mêmes matériaux, parmi Îes- quels on reconnoît aussi des fragmens de bois agatisé. Le cours des eaux se retrouve indiqué d’une manière plus apparente jusqu’à l'entrée d’une gorge que forme le rapprochement des deux chaînes qui, jus- qu'alors , n’ont été aperçues que dans Féloïgnement. Ces deux chaînes sont de (x) Ces coquilles sont représentées planche 2, H, N, Minéralogie, H, N. TOME IL De 28 DESCRIPTION pierre calcaire, dont les parties sont tellement hétérogènes, que, les plus friables ayant été détruites, la surface de ces pierres est toute crevassée. Cette gorge n'a tout au plus que soixante mètres de largeur. L'inclinaison des arbustes et des broussaïlles dont elle est couverte, prouve que lés eaux qui les submergent quelquefois, y coulent avec rapidité. J'ai jugé par les dépôts des matières qu’elles charient, que ces caux s'élèvent jusqu'à huit décimètres de hauteur : elles se rassemblent après les pluies, sur le bord du chemin, dans quelques fosses où les Arabes viennent abreuver leurs troupeaux; mais on n’est pas toujours sûr d'en trouver en cet endroit. À la sortie de cette gorge qui peut avoir trois kilomètres de longueur, la montagne + gauche se retourne presque carrément vers le nord, tandis que la montagne à droite continue de se prolonger vers l'est. Elles enferment ainsi une assez grande plaine, sur les confins de laquelle on aperçoit dans l'éloignement, au pied de la côte septentrionale, des collines de caïlloux roulés. Le cours des eaux s'appuie sur la rive droite : on le reconnoît à différens ravins, et à une ligne d’arbustes et de plantes dont le reste de la plaine est absolument dépourvu. Le sol de cette plaine est un grand attérissement formé de matières calcaires et gypseuses. Deux heures après y être entrés, nous commençâmes à apercevoir la mer Rouge. Nous desirions beaucoup nous diriger d’abord vers le sud, le long des montagnes qui bordent la côte, afin d’en parcourir un plus grand développe- ment, en remontant ensuite vers le nord, et de nous assurer de l'existence des ruines de Clysma ; maïs les besoins de notre escorte, qui n’avoit compté que sur trois jours de marche, nous obligèrent de prendre directement la route de Suez. Nous nous portâämes en conséquence sur les puits appelés el Touâreg , situés au bord de la mer, au pied de la montagne qui ferme au nord la vallée de l'Égarement. Les eaux de ces puits sont saumâtres, parce qu’elles sont le mélange des eaux douces qui descendent de la montagne, et de l'eau de mer qui vient à leur rencontre, en filtrant à travers le sable. On trouve toute l'année de l’eau à eLT4 ouäreq ; Ï est à remarquer seulement qu'elle est plus ou moins salée, suivant {a rareté ou la fréquence des pluies. Nous avons marché vingt-six heures dans la vallée de l’Égarement, depuis le village de Bagätyn jusqu'aux puits d'elToäreg. Si fon suppose la lieue d’une heure de chemin, la longueur de la vallée, conclue du temps employé à la parcourir, sera précisément de vingt-six lieues; ce qui s'accorde parfaitement avec l'estime du P. Sicard. : À partir des puits del Touäreg, on remonte vers le nord, entre une côte escar- pée et le bord de la mer. On se détourne ensuite au nord-est, et l'on fait sur une plage sablonneuse le reste du chemin jusqu'à Suez, où nous arrivâmes le 7 nivôse au soir, après trente-quatre heures de marche depuis notre entrée dans le désert. Les pentes suivant lesquelles le terrain s'incline à partir du point culminant de Ja vallée de l'Égarement, d'un côté vers le Nil, et de l'autre vers la mer Rouge, sont, pour ainsi dire, insensibles; et comme le sol de cette vallée est généralement DE LA VALLÉE DE LÉGAREMENT. ; ù 29 uni ct ferme, elle offre une communication praticable en tout temps, entre le Kaire et le port de Suez, non-seulement pour des caravanes, mais encore pour des convois de toute espèce; communication d'autant plus avantageuse, qu'on pourroit à peu de frais y établir des réservoirs d’eau douce, dans trois stations que l’on distribueroit à des distances à peu près égales sur toute la longueur de la route. Quant à l'exécution d’un canal dans cette direction, des difficultés presque insur- montables sy opposent, soit qu'on tire du Nil les eaux nécessaires à l’aliménter, soit qu'on les tire de la mer Rouge : car alors il faudroit le creuser presque de niveau d’un bout à l'autre; ce qui exigeroit une quantité prodigieuse de déblais, des excavations de rocher, ou des revêtemens de maçonnerie, par-tout où Ton seroit obligé de prévenir des filtrations à travers un terrain perméable. Les connoissances généralement acquises sur le climat et la température de ce pays me dispensent d'ajouter que la petite quantité d’eaux pluviales que l'on pour- roit, avec beaucoup de peines et de dépenses, rassembler au point de partage, est infiniment au-dessous de celle qu'il conviendroit d'y réunir, pour entretenir in canal, ne füt-ce que pendant quelques mois de l'année, en supposant que l’on adoptât ici le mode d'exécution de la plupart de nos canaux d'Europe. , Mais, si les pluies ne sont point assez abondantes sur le sommet de la chaîne Arabique, pour subvenir à la dépense d’un canal navigable, elles le sont assez pour offrir une ressource précieuse aux établissemens maritimes que la côte seroit susceptible de recevoir à l'embouchure de la vallée. : I suffiroit, en effet, de rassembler ces eaux dans la partie la plus étroite du der- nier défilé, de les y soutenir à une hauteur convenable par une chaussée de ma- connerie, et de les distribuer aux différens lieux où elles seroient nécessaires, au moyen d’aqueducs qui partiroïent de ce réservoir commun. J'ai dit plus haut que nous avions été obligés de nous rendre à Suez, sans avoir pu parcourir le rivage compris sur toute la largeur de la vallée, à son em- bouchure : voulant cependant compléter cette partie importante de notre recon- noïssance , nous obtinmes de Fofficier de marine qui commandoit dans ce port, deux bâtimens sur l'un desquels il voulut bien lui-même nous accompagner. Après avoir retrouvé le mouillage indiqué sur une carte Anglaise dé là mer Rouge, pubiée en 1781, nous débarquâmes à la rose méridionale de la baie; nous suivîmes d’abord le pied de la montagne qui court à l’ouest, et nous y obser- vâmes quatre fours à chaux, où l'on fabriquoit anciennement celle que l'on em- ployoit aux constructions de la ville de Suez. Nous nous rapprochèmes ensuite du bord de la mer, où nous reconnfimes une source d’eau, légèrement saumätre, qui nous avoit été indiquée. Elle est envi- ronnée de roseaux fort élevés, et forme une espèce de marais, autour duquel nous remarquâmes beaucoup de traces de chameaux. En remontant de cette fontaine vers le nord, la plage est couverte d’une terre jaunâtre et d’efflorescences salines; elle est aussi sillonnée de petites criques, où les eaux de la mer pénètrent à marée haute, ce qui la rend alors impraticable. 39 DESCRIPTION Nous l'avons parcourue avec d'autant plus d'attention, que nous desirions retrouver les ruines de C/ysma ; maïs nos recherches ont été complétement infructueuses , et nous nous sommes rembarqués pour Suez, vis-à-vis les puits d'el-T. ouäreg, Sans avoir “rien aperçu qui annonçât d'anciens établissemens sur toute cette partie de la côte. Gomibl Conjectures géologiques sur les causes qui ont amené à leur état actuel la Vallée de l Égarement et les déserts qui bordent l É, gypte. Après avoir donné la description topographique de la vallée de l'Égarement, et l'indication des avantages que pourroit offrir cette communication, entre la mer Rouge ét l'intérieur de l'Égypte, si jamais le Gouvernement de ce pays entrepre- noit de rouvrir au commerce de l'Inde une des anciennes routes qu'il a suivies, il me reste à exposer quelques réflexions sur deux faits particuliers que la recon- noissance dont nous venons de rendre compte, a donné lieu d'observer. La première observation porte sur les amas de cailloux roulés que l’on trouve aux deux embouchures de la vallée de l'Égarement, du côté du Nil et du côté de la mer Rouge. La seconde observation a pour objet les coquilles marines amoncelées vers le point cuiminant de cette vallée, et la salure du sol sur quelques-uns des plateaux qui la bordent. Ce n'est pas seulement à.ses deux embouchures que nous avons remarqué des monticules de caïlloux roulés. Tous les débouchés des gorges qui descendent dans le bassin du Nil transversalement aux deux chaînes de montagnes qui l'enferment à lorient et à l'occident, sont également marqués par de semblables dépôts : si lon pénètre à quelque distance au-delà de la limite du désert, à droite ou à gauche de ce bassin, on voit le sol couvert de graviers où de cailloux plus ou moins volumineux, doit les angles arrondis indiquent évidemment que ces ma- tières ont été transportées par les eaux. Nous en avons vu des amas considérables au nord et à l'est de la ville de Qené dans la haute Égypte (1); à l'entrée de la vallée qui conduit au port de Qoceyr, et qui a son débouché sur la côte de la mer Rouge; au pied de la mon- tagne Arabique, près du lieu appelé Gebel Selseeh ; et à Fembouchure d’une vallée au nord-est de la ville de Syène. De l'autre côté du fleuve et au pied de la montagne Libyque, nous en avons observé entre Edfoû et Esneh, au pourtour intérieur de collines peu élevées, qui forment une espèce d’anse où lon recueille du natron. On en remarque à em- bouchure de la gorge qui conduit aux tombeaux des rois, et sur toute la lisière du désert, à l’ouest des dunes de sable qui bordent le canal Joseph. La plaine de Saqqârah, où sont bâties lés pyramides, en est couverte. Enfin, si l'on entre dans (1) Ces observations ont été faites, au mois de prai- etles 24 messidor, 2 et 10 thermidor de Ia même année, rial de Pan 7, pendant notre séjour à Qoceyr et à Qené, en et en red dant le Nil. DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. 31 le Fayoum par la gorge d’el-Lahoun, et que l'on fasse le tour de cette province de l'Égypte, on reconnoît, au débouché de toutes les gorges qui y aboutissent de l'intérieur des déserts dont elle est environnée, des monticules de cailloux roulés. Il en est ainsi de tout le pays qui borde le pied de la montagne Arabique, à son extrémité, septentrionale où commence f'isthme de Suez, entre le Nil, la mer Méditerranée, et la mer Rouge (1). Tous les lieux de l'Égypte que nous avons visités à l'entrée du désert, nous ont toujours semblé remarquables par les mêmes amas de cailloux; et nous pouvons avancer que toutes les observations nouvelles que l'on sera dans le cas de recueillir, confirmeront le même fait. Ces cailloux roulés sont de différentes natures ; et les roches dont ils montrent les fragmens, ne se trouvent pas toujours voisines des lieux où ces matériaux sont amoncelés : d’ailleurs leurs formes sphéroïdales prouvent incontestable- ment qu'ils ont été transportés par des courans d'eau animés d’une vitesse consi- dérable. Lorsque des torrens qui doivent leur origine, soit à des fontes de neiges, soit à des pluies abondantes, roulent sur le revers de montagnes escarpées, les débris de ces montagnes sont chariés dans les plaines, et y forment des attérissemens, dont les crues de ces torrens fournissent une explication facile. Mais les mêmes causes ne peuvent servir à expliquer la formation des monticules de cailloux roulés que lon observe le long de la vallée d'Égypte. En effet, si, dans des cas excessivement rares, il tombe quelques pluies sur le sommet des montagnes qui la bordent, ces pluies s’écoulent de part et d'autre, en laissant à peine sur le sol la trace des courans qu’elles ont formés : ces courans parviennent rarement jusqu'à la vallée du Nil; et quand ils y parviendroient, ils n’atteindroient jamais à la hauteur de plusieurs mètres, à laquelle s'élèvent quelquefois les monticules de caïlloux dont il est question : d’où il suit évidemment que ces dépôts doivent leur origine à des courans d’eau qui ont existé dans un état de cette contrée différent de son état actuel. I falloit qu'à cette époque des courans rapides descendissent du sommet de la’ chaine Arabique à l'est vers la mer Rouge, au nord sur le plateau dont le pro- longement forme l'isthme de Suez, et à l’ouest dans la vallée du Nil; tandis que des courans semblables descendoiïent de la montagne Libyque sur la rive gauche de la même vallée, et des hauteurs qui environnent le Fayoum dans les parties basses de cette province. Des causes qui nous sont inconnues, et sur l'existence desquelles on ne peut former que des conjectures, occasionnèrent ces courans ; mais, si la supposition qui paroît la plus simple est en même temps la plus probable, il est permis peut-être de nous arrêter à celle-ci pour les expliquer. Par l'effet de quelque grand phénomène astronomique, les mers qui recou- vroient une partie du globe, auront été soumises à de grandes oscillations, en vertu (1) Faits observés les 20 et 24 thermidor deVan7,les floréal, 18, 21 et 29 prairial, les 29 ventôse de l'an 8, et 10#14, 15, &c. vendémiaire, le 26 frimaire, les 20 les 12 et 13 pluviôse an 9. Ü 32 DESCRIPTION desquelles quelques portions de nos continens auront été alternativement submer- gées et mises à sec (1) : ainsi ces marées prodigieuses se seront élevées, lors du flux, (1) On sait, par les lois de Pattraction universelle, que si un corps planétaire d’une masse suffisante venoit à s'approcher de notre terre, il exerceroit sur elle une action d'autant plus sensible, que sa masse seroit plus considérable et sa distance plus petite. Or, les comètes qui se meuvent en tout sens dans l’espace, sont des corps qui peuvent s’approcher très-près de notre globe; ilsepour- roit donc que lune d’elles occasionnât des oscillations prodigieuses dans fa masse des eaux dont la terre est recouverte : il faudroit sans doute un hasard extraordi- naire pour la rencontre de deux corps aussi petits, re- fativement à l’immensité de l’espace dans lequel ils se meuvent, « Cependant, dit l'illustre auteur de la Méca- » nique céleste, la petite probabilité d’une pareille ren- » contre peut, en s’accumulant pendant une Jongue » suite de siècles, devenir très-grande. Il est facile de » se représenter les effets de ce choc sur la terre. L’axe » et le mouvement de rotation changés; les mers aban- >» donnant leur ancienne position, pour se précipiter vers » le nouvel équateur; une grande partie des hommes et » des animaux, noyée dans ce déluge universel, ou dé- » truite par la violente secousse imprimée au globe ter- » restre ; des espèces entières anéanties; tous les monu- » mens de l'industrie humaine renversés : tels sont les » désastres qu’une comète a dû produire. On voit alors » pourquoi océan a recouvert de hautes montagnes sur » lesquelles il a laissé des marques incontestables de son » séjour ; on voit comment les animaux et les plantes du » midi ont pu exister dans les climats du nord, où l’on » retrouve leurs dépouilles et leurs emprei ; enfin on » explique la nouveauté du monde moral dont les mo- » numens ne remontent guère au-delà de trois mille ans. » L'espèce humaine, réduite à un très-petit nombre d’in- » dividus et à l’état le plus déplorable, uniquement occu- » pée pendant très-long-temps du soin de se conserver, a » dû perdre entièrement le souvenir des sciences et des »arts; et quand les progrès de Ia civilisation en ont fait » sentir de nouveau les besoins, il a fallu tout recom- » mencer, comme si les hommes eussent été placés nou- » vellement sur la terre.» (Æxposition du Système du Monde, pag. 208.) Si, pour rendre probable action d’une comète sur les eaux de notre globe , il ne faut qu’étendre indéfiniment la durée des siècles, n'est-il pas permis de supposer que cette catastrophe a déjà eu lieu dans le cours illimité des siècles passés? Whiston ( 4 new Theory of the earth, London, 1725), Boulanger ( Antiquité dévoilée par ses usages, Te.) et quelques autres, attribuent à l'approche d'une comète , le déluge universel: quelques anciennes traditions nous paroissent confirmer leurs conjectures ; et c’est chez les Égyptiens, c’est-à-dire, chez les peuples les plus anciennement connus, qu’elles ont été conservées. Pline rapporte (Histor, natur. lib. 11, cap. $) qu’un roi nommé Zyphon donna son nom à une comète qui parut de son temps, et qui fut reconnue funeste aux peu- ples de l'Égypte et de l'Éthiopie. D'un autre côté, le nom de Typhon, donné autre- fois à une comète, se retrouve däns les langues orientales pour signifier le déluge, Y,L: roufan Aïnsi cet événement, le plus ancien dont la mémoire se soit conservée parmi les hommes, a été désigné dans les plus anciennes langues par une dénomination qui futégale- ment attribuée à un phénomène astronomique : d’où l’on peut conclure que l'apparition d’une comète et le cata- clysme dont il s’agit ne sont que deux circonstances simule tanées d’une seule et même catastrophe. Remarquons en effet que si 7 yphon estle déluge, on ne peut entendre par le temps du règne de Typhon que celui pendant lequel le déluge inonda la terre, temps pendant lequelon dut observer la comète qui l’occasionna, et dont Fapparition fut, non-seulement pour les peuples de PÉ- gypteet de l'Éthiopie, mais encore pour tous les peuples, le présage funeste de leur destruction presque totale. S'il m'est question que de l'Égypte et de l'Éthiopie dans le passage de Pline, c’est parce que ces deux contrées étoient les seules dont les traditions lui fussent parvenues. Plutarque rapporte encore (Traité d’Isis et d'Osiris) que Ja mer, sous le nom de Typhon, étoit pour les prêtres Égyptiens un tel objet d'horreur, qu’ils rejetoïent jusqu'à lPusage du sel qu’on en retiroit, et qu’ils avoient en abo- mination ceux qui entreprenoient des courses maritimes. Il me semble qu’il suffit, pour rendre raison de ces superstitions, de remonter à leur origine, et de se trans- porter au temps où les débris de l’espèce humaine com- mencérent à se réunir après Ja submersion terrible à la- quelle ils venoient d'échapper. Témoins récens de cette catastrophe, ils demeurèrent encore frappés de terreur à Yaspect de la mer, Jors même qu’elle se trouva renfermée entre ses limites actuelles. Craïgnant sans cesse, malgré le calme de sa surface, qu’elle ne vint à s’enfler pour les abimer de nouveau, ils continuèrent de la désigner par le nom qu’elle avoit porté, pendant la durée de ses oscil- Jations dévastatrices. Il étoit tout simple enfin que per- sonnifiée sous ce nom, et jugée coupable de la destruction des générations passées, elle demeurât chargée des malé- dictions de la génération présente, L'auteur de l'Antiquité dévoilée, qui avait particuliè- rement dirigé ses études sur les cérémonies du culte et les usages des peuples, admet les idées de Whiston sur la cause du déluge, moins convaincu par les preuves physiques qu'on en retrouve, que par la terreur univer- selle qu’occasionna toujours lapparition des comètes chéz toutes les nations de la terre, sans que la diver- sité de climats, de mœurs ou de religion, y ait apporté quelque exception. D’où viendroit en effet l’universalité de ce préjugé, sinon de la tradition d’un bouleversement général occasionné par l'apparition extraordinaire d’un astre semblable ! N’est-ce pas encore cette tradition qui porta les hommes à chercher à découvrir leurs destinées dans le ciel, parce que les destinées de leurs ancêtres avoient autrefois dépendu d’un phénomène céleste Je terminerai cette note, en observant que si le nom de Typhon, par lequel on désigna dans l'antiquité une certaine comète, le déluge et les eaux de Ja mer, a été employé depuis dans un sens plus étendu, pour signifier des tremblemens de terre, des Ouragans, et généralement les divers accidens qui dérangeoient l’ordre physique d’une manière plus où-moins nuisible {Traité d'Isis et : au-dessus DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. 33 au-dessus des nas qui bordent la vallée du Nil, et, lors du reflux, auront laissé ces montagnes à découvert, en s'écoulant du midi au nord par la vallée d'Égypte, et du nord au midi par le golfe Arabique. Les courans alternatifs, produits par ces marées dans les gorges transversales de ces.chaînes, en auront détaché des fragmens qu'ils auront fait descendre jusqu’à leurs embouchures, où les courans plus considérables qui avoient lieu au fond de la vallée du Nil'et le long des côtes de la mer Rouge, les auront forcés de s’amonceler. Des géologues célèbres ont attribué à des marées extraordinaires la submersion presque universelle que notre globe paroîftavoir éprouvée à une certaine époque (1); ét cette explication d’une catastrophe dont on retrouve presque par-tout des témoi: gnages irrécusables, est d’autant plus admissible qu’elle peut servir à expliquer un plus grand nombre de faits. IH nous semble que la formation de Fisthme de Suez est un de ces faits les plus remarquables. Pendant que les eaux de la Méditerranée, venant de l’océan Atlantique, se portoient à l'est jusqu’au pied du mont Liban, celles de l'océan Indien, pénétrant dans le golfe Arabique, se dirigeoient du sud-est au nord-ouest sur les côtes de la Natolie. Ces courans, lors du flux, étoient animés d’une ässez grande vitesse et entraînoïent les débris des côtes qu'ils baignoïent : mais, cette vitesse ayant été en partie détruite à leur rencontre, il s'établit entre eux une sorte d'équilibre ; et les matières qu'ils tenoient suspendues , se déposèrent dans tout l'espace que l’isthme de Suez occupe aujourd’hui. On sait en effet que cet isthme est un grand attérissement. Son gisement et son étendue se trouvèrent ainsi déterminés par l'énergie et les directions de ces: deux courans dont la variation eût donné à cet isthme un tout autre emplacement et une forme différente. Ces grandes oscillations des mers fournissent encore l'explication du second fait que nous avons observé dans notre reconnoissance de la vallée de l'Égarement ; nous voulons parler des bancs de coquilles qui existent vers le point culminant de cette vallée, et de la salure du sol des plateaux: qui la bordent. Les eaux qui pénétroient de la mer Rouge et de la vallée du Nil dans les gorges de la montagne Arabique, se rencontrèrent en quelques points de ces gorges, et notamment vers le sommet de la vallée de l'Égarement : les deux cou- rans opposés se contre-balancèrent, et la stagnation de leurs eaux dans tout l'espace où ils se firent équilibre, détermina la formation d’un banc composé des diffé- rentes matières quils charioient; et comme les eaux qui couvroient ce:banc à marée haute éprouvoïent rarement de grandes agitations, il sy.établit des familles de coquillages dont on retrouve maintenant les dépouilles presque intactes sur le plateau le plus élevé de la vallée : sa surface presque horizontale annonce en effet l'état de repos auquel il doit sa formation, tandis que les parties de la même vallée qui descendent de ce plateau , d'un côté, vers le Nil, et, de l'autre, vers la mer Rouge, Sont sillonnées de ravins plus ou moins profonds dont la chute est marquée par d’Osiris), cést que 1és Hommes furent naturel qu'ils appliq à tous les météores qui faisoient ‘conduits à faire de’ [a dénomination propre au plus ancien craindre de pareils désastres. phénomène dont on eût conservé le souvenir, et dont les (1) Mémoire sur la constitution physique de l'Egypte, effets avoient été les plus désastreux, un mot générique par Deodat Dolomieu. (Journal de physique, 1793.) H, N. TOME II. E 34 DESCRIPTION des amas de cailloux roulés, de graviers, de débris de coquilles accumulés dans le plus grand désordre, signe incontestable de la rapidité des eaux quiles transpor- toient et qui couroient périodiquement et en sens contraire lors du flux et du reflux. L’amplitude de ces marées extraordinaires diminua successivement jusqu'à ce que: l’ordre actuel se fût établi Des portions de nos continens, qui avoient été submergées par intervalles, furent définitivement mises à sec; et ces terres imprégnées plus ou moins profondément d’eau salée se trouvèrent, après l'éva- poration de ces eaux, mélangées d’une certaine quantité de sel, de même que toutes les terres qui sont actuellement, sur nos côtes, exposées aux inondations périodiques des marées. Cet état de choses eût persisté, et l’on retrouveroit le sel marin à la surface de notre globe sur tous les points qui portent l'empreinte de cette ancienne submer- sion, si les pluies ne lavoient point dissous dans un laps de temps d'autant moindre qu’elles ont été plus fréquentes : mais si, par une cause particulière, les eaux plu- viales n'avoient point lavé le sol que la mer couvrit autrefois, il conserveroit sa salure primitive, et formeroit une sorte d'exception au reste de la terre. Or, les déserts entre lesquels l'Égypte est placée, forment cette exception. Les pluies y sont, comme on sait, excessivement rares, et le sel marin s’y trouve presque par- tout, tantôt cristallisé sous le sable, tantôt effleuri à sa surface. Il se trouve, comme nous l'avons dit, dans la vallée de l'Égarement, en petites couches compactes, soutenues sur des lits de gypse : on l'avoit observé dès le mois de pluviôse de l'an 7, dans la vallée des lacs de Natroun, à trente-deux milles à l’ouest du Nil, entre la province de Fayoum et la Méditerranée (1); je l'ai reconnu au sud-ouest d’Esné, dans le vallon où l'on exploite le natron, et dont nous avons parlé plus haut (2). Toute la portion du désert qui se trouve à l’ouest du canal Joseph, au-delà des dunes qui le bordent, est couverte de cristaux de sel (3) ; les rivages du lac de Keroun dans la province de Fayÿoum , en sont également couverts. On le retire par l’'évaporation, non-seulement des eaux de ce lac, maïs encore de plusieurs sources de la même province (4). Le sol de la plaine de Saqqärah est chargé d’efflorescences salines (s): enfin le désert des Lacs amers, entre la mer Rouge et la mer Méditerranée, pré- sente une couche presque continue de cristaux de sel (6). Ce n’est point seulement en Égypte que le sel marin se retrouve à la surface du sol : les anciens historiens et les voyageurs modernes font mention de masses plus ou moins considérables de cette substance que l'on retrouve en différens lieux du désert de Barbarie, depuis le Nil jusqu’à la côte occidentale de l'Afrique. « Il existe, dit Hérodote, entre l'Égypte et les colonnes d'Hercule, à travers » la Libye, une élévation sablonneuse, le long de laquelle on trouve, de dix (1) Mémoire sur la vallée des lacs de Natroun et celle (5) Observation du 26 frimaire an 8. du Fleuve sans eau, par M. le général Andréossy, £. M. (6) Mémoire sur le canal des deux Mers, par M. Le tom, 1, pag. 179 et suiv. ’ Père, ingénieur en chef des ponts et chaussées, Æ, AZ. (2) Faits observés le 20 thermidor an 7. tom, 1, pag. 67. — Mémoire sur les anciennes li- (3) Observations faites le 14 vendémiaire an 8. mites de la mer Rouge, par M. du Bois-Aymé, ibid. (4) Observ. des 11, 21 et 26 prairial an 8. Mém,surle pag, 187. lac de Mœris, par M. Jomard, 4, M. tom. 1, pag, 8. DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. 35 » journées en dix journées, de gros quartiers de sel : c’est dans le: pays. des » Ammoniens et le canton appelé Agiles, où les Nasamons vont en automne » recueillir des dattes {1}. » L'existence du sel marin dans cette partie de l'Afrique fut, chez les anciens, , l'objet d’une question qui frappa les plus célèbres géographes. « Comment se » peut-il, disoit Ératosthènes, qu'à deux et trois mille stades des bords de la mer, » on trouve, dans beaucoup de lieux, des marais d’eau de mer, et quantité de » coquilles, soit d’huîtres, soit de moules’ Par exemple, auprès du temple » d'Ammon, et sur toute la route, longue de trois mille stades, qui mène à ce » temple, on rencontre encore aujourd’hui des amas d’écaillesd’huîtres et de sel (2).» Ces témoignages, et beaucoup d’autres que l’on pourroit recueillir dans les auteurs anciens, furent confirmés par celui de Pline (3), et l'ont été depuis par les voyageurs modernes qui ont pénétré dans l'intérieur de l'Afrique. Le docteur Shaw parle de lacs salés, situés près de l'ancienne ville de Car- _thage. Comme il n’y pleut que très-rarement, l’eau de ces lacs s'évapore pen- dant l'été, et la terre reste ensuite couverte d’une croûte de sel (4). Browne, qui voyagea dans ces derniers temps en Afrique, reconnut, sur la route d'Alexandrie à l'Oasis d'Ammon, aujourd’hui Syouäh, les mêmes plaines salées dont parloit Ératosthènes (s), et retrouva des blocs de sel fossile dans le royaume de Därfour, où il séjourna quelque temps après (6). Enfin, plus récemment encore, Hornemann, en décrivant le chemin qu'il suivit pour se rendre de l'Égypte dans le Fezzan, rapporte qu'à dix journées du Kaire, il parcourut un vaste plateau composé d’une masse saline (7), et qu'arrivé à Syouäh, où il existe des sources d’eau douce et d’eau salée, il vit au:nord-ouest la terre couverte d’une couche de sel, et à l'orient du même lieu deux monceaux de coquillages (8). Le major Rennell, dans ses remarques sur le Voyage de Mungo Park, nous apprend que l’on retrouve une grande étendue de terrains salés aunord de la Gambie, sur les confins du grand désert de Sahara (9). Ce savant géographe, rapprochant ailleurs les rapports unanimes de tous les voyageurs modernes sur l'existence du sel à la surface de quelques plaines sablonneuses de VAfrique, des récits d'Héro- dote sur le même fait, en tire la preuve évidente des connoissances géographiques de cet ançien historien (ro). Ce n'est pas seulement en Afrique que l'on a recueilli des observations ana- logues à celles qui viennent d’être rapportées. On savoit depuis longtemps que les terrains qui entourent la mer Morte, sont couverts de sel cristallisé,: jusqu'à quelques lieues de distance de cette. mer (11). (1) Hérodote, div. 1y, (6) Zbid, tom. II, pag. 34. (2) Strabon , rom, L®, pag. 113 et suiv, de Ja traduction (7) Voyage de F. Hornemann dans l'Afrique septen- Française de MM. Gosselin, la Porte du Theïl et Coray. trionale, tom. I", pag, 15, G) ÆHistor, natur, lib. Xxx1, Cap. 7. (8) Zbid. pag. 30 et 55- (4) Voyages du docteur Shaw en Afrique, tom, Le, (9) Voyage de Mungo Park, tom. ZI, pag. 304. pag. 307. (10) À geographical System, of Herodotus, (5) Voyage dans la haute et basse Égypte, par W.G. (11) Voyage d’Alep à Jérusalem, par le docteur Henry Browne, tom, 1, pag. 25. Maundrell, pag. 126. H, N. TOME Il: E 2 36 DESCRIPTION On sait également qu'en remontant plus au nord, toutes les plaines sablon- neuses qui-bordent la mer Caspienne, entre le Volga et le Jaïk, sont couvertes d’efflorescences salines, et entrecoupées de lacs et de ruisseaux salés : d’où le pro- fesseur Pallas a conclu que cette plaine immense avoit été autrefois submergée par les eaux de la mer (1). La description qu'il en a faite, indique une ressemblance remarquable entre ces steppes de l'Asie et les déserts que les voyageurs Browne et Hornemann ont parcourus en Afrique. N’estil pas naturel de penser qu’une seule et même cause a donné la même constitution physique et le même aspect à des contrées séparées par. d'aussi grands intervalles! On conçoit que les mers, en laissant à sec nos continens pour venir occuper leurs bassins actuels, auront continué de remplir les grandes cavités qui se trou- voient disséminées en différens points de ces continens, et auront formé de ces cavités autant de lacs salés. Dans les lieux où il se sera ouvert une communica- tion entre ces lacs et la mer, et où ces lacs auront pu être lavés par les pluies, les eaux salées dont ils étoïent remplis primitivement, se seront écoulées peu à peu, et auront été remplacées par’ des eaux douces, après un certain laps de temps : car, lorsque les pluies sont rares, le sel contenu dans les terrains qu'elles baïgnent ne peut être entièrement dissous qu'après une longue suite de siècles. Voilà pourquoi il existe encore dans les royaumes de Tunis et d'Alger plusieurs rivières salées (2); singularité‘que Pline avoit déjà citée, en parlant de quelques affluens de la mer Caspienne (3) qui, depuis, ont été reconnus par le professeur Pallas (4). ù La mer Noire offre l'exemple frappant d'un lac immense, dont les eaux pri- mitivement salées s’'adoucissent de plus en plus, suivant l'observation que les an- ciens en avoient déjà faite (5). En effet, la quantité d’eau qu’elle reçoit du Danube, du Borysthène et des fleuves de l'Asie mineure, étant plus considérable que le volume qui lui est enlevé par l'évaporation journalière, il s'est établi de cette mer dans celle de Marmara et la Méditerranée, un courant continu dont les eaux ont précisément la même salure que celles de la-mer Noire, tandis qu’elles sont rem- placées par les eaux douces des fleuves qui s’y jettent : de sorte que, si l’on con- noissoit la dépense due à l'évaporation sur toute la surface de cette mer, le volume de ses affluens, et la capacité de son bassin, on pourroit, à l'aide du calcul, assigner la loï de décroissement de son degré de salure, et déduire de son état actuel, soit l'époque à laquelle sa communication avec la Méditerranée a com- mencé d'exister, soit l'époque à laquelle elle sera parvenue à ne manifester qu'un état de salure déterminé. Quoique les eaux d’une mer intérieure tendent à s’adoucir de plus en plus par les affluens qu'elle reçoit, on conçoit cependant, pour peu que l'on réfléchisse Sur la quéstion dont nous venons de présenter l'énoncé, que les eaux de cette (1) Voyages de Pallas, rom, ., pag. 678; tom. V, (G) Pline, Fist, natur, lb. XXX1, cap. 7, Pag. 94, 187, 198-215. (4) Voyages de Pallas, tom, W, (2) Voyages du docteur Shaw en Afrique, tom. 1.7, (s) Strabon, tom. L.”, pag. 117 et suiv. pag, 296 et suiy, DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. ê7 mer ne deviendront jamais parfaitement douces; cela ne peut avoir lieu sensible ment que dans le cas où elle est en quelque sorte lavée par un courant d’un volume considérable, proportionnellement à la capacité de son bassin : ainsi le lac de Tibériade, que traverse le Jourdain, est aujourd’hui formé d’eaux douces, tandis que la mer Morte, qui reçoit ce fleuve et qui n’a elle-même aucun écou- lement dans un plus grand réceptacle, est beaucoup plus salée que la Méditer- ranée (1); et elle continuera de le devenir davantage, si, conformément à l'obser- vation du docteur Shaw (2), le volume d’eau qui l'alimente est au-dessous du volume qué l'évaporation lui fait perdre. En admettant la justesse de cette observation, il est clair que la superficie de la mer Morte doit diminuer continuellement, de même que M. le professeur Pallas a reconnu la diminution de la superficie de la mer Caspienne, jusqu'à ce qu'il se soit établi une compensation exacte entre le volume de l'eau évaporée de ces mers et celui des affluens qui sy rendent; et c'est alors seulement que leur régime sera devenu stable. Maïs si tout-à-coup les eaux du Jourdain et des affluens de la mer Morte, ou les eaux du Volga et des autres fleuves que reçoit la mer Caspienne, cessoïent d'alimenter ces deux mers, il est évident que le volume de leurs eaux diminueroit de plus en plus, et qu'elles deviendroient de plus en plus salées; enfin, après leur évaporation totale, on ne retrouveroit, au fond des bassins qu'elles remplissoient, que des masses de sel cristallisées ; comme on retrouve aujourd’hui dans les déserts de l'Afrique des plateaux salés et des mines de sel gemme sur l'emplacement d’anciens lacs, restes des eaux de la mer qui avoient rempli les cavités superficielles de nos continens, lors du dernier cataclysme que notre globe a éprouvé. Ce que nous venons de dire de la mer Morte et de la mer Caspienne, s'applique naturellement au lac de Keroun, dans la province de Fayoum. Le fond de son bassin seroit aujourd'hui couvert d’une masse saline, si ce lac ne recevoit pas chaque année une partie des eaux du Nil, qui, conduites dans cette province par le canal Joseph, continuent de tenir le sel en dissolution. Mais le degré de salure des eaux de ce lac est très-considérable, et l’est devenu d'autant plus que l'espace qu'il occupe est moins étendu qu'il ne létoit autrefois, si l'on s’en rap- porte au témoignage des anciens historiens (3). En considérant la salure des déserts qui bordent l'Égypte , et la perméabilité du sol d’alluvions dans lequel le lit du Nil est creusé, on conçoit que, lors de la crue de ce fleuve, une nappe souterraine d'eaux douces s'incline vers ces déserts, et en pénétrant à travers des sables qui ont conservé un certain degré de salure, elles dissolvent une portion de sel, et le laissent cristallisé par leur évaporation, au fond des cavités qu'elles étoient venues remplir sur les bords du désert. Cette explication s'accorde avec celle des sources salées qui alimentent les lacs de Natroun, telle que M. le général Andréossy fa donnée dans son Mémoire sur ces lacs (4); et je pense qu'elle doit s'appliquer également aux étangs salés (1) Voyage d'Alep à Jérusalem, par le docteur Henry (3) Voyez le Mémoire de M. Jomard sur le Jac Mœris, Maundrell, pag. 141. À, M. tom, 1,7 (2) Voyages du docteur Shaw en Afrique, tom. 11, (4 Mémoire sur les lacs de Natroun, par M. le gé- pag. 72. néral Andréossy, É, M, tom, L.", pag, 282. 38 DESCRIPTION qui bordent le canal Joseph au pied de la montagne Libyque : car on à observé que ces étangs étoient sujets aux mêmes crues périodiques ‘ le Nil. Ce que nous venons de dire, conduit naturellement aussi à expliquer com- ment la plupart des terres cultivables de F Égypte qui avoisinent le désert, acquièrent un degré de salure plus ou moins sensible, lorsque depuis quelque temps elles ont cessé d’être baïgnées par les eaux de linondation ou lavées par des arrosemens artificiels. I suffit en effet, pour rendre raison de ce phénomène, de se rappeler que la nappe souterraine des eaux du Nil, qui remonte vers le désert lors de la crue de ce fleuve, en redescend lorsqu'il décroit. Or, si cette nappe a rencontré dans le sol sablonneux au travers duquel elle a filtré, quelque gîte de sel marin, et qu'après en avoir dissous une certaine quantité, elle passe, en rétrogradant vers Je fléuve, au-dessous d’une terre légère et desséchée, elle montera, suivant la loi de l'ascension des fluides dans les tubes capillaires, jusqu’à la surface de ce sol: on y observera bientôt des efforescences salines; et il n’y croftra spontané- ment que des plantes de l'espèce de celles qui viennent sur le bord de la mer, suivant la remarque faite par M. Delile et ceux de nos collègues qui s'occupent de botanique. Nous avonsattribué , dans ce Mémoire, à de grandes oscillations des mers, la sub- mersion de plusieurs contrées voisines de l'Égypte; mais, quelque plausible que nous semble cette hypothèse, il convient ici de discuter une autre supposition adoptée par lés anciens, et qui présente peut-être une explication spécieuse du même fait. C'étoit l'opinion de Straton, « que jadis le Pont-Euxin n'avoit point d'issue du » côté de Byzance, mais que, les fleuves qui se dégorgent dans cette mer ayant » forcé l'obstacle et ouvert le passage, ses eaux sont tombées dans la Propontide, » et de là dans l'Hellespont; que de même la Méditerranée, remplie par les fleuves, » a rompu l'isthme qui fermoit le détroit des Colonnes, et, en s'écoulant par ce » nouveau canal, a pu laisser à sec ce qui formoit autrefois des bas-fonds (1). » C'est peut-être, ajoutoit Straton, par l'effet de l'écoulement des eaux, que le » temple d'Ammon, jadis voisin de la mer, se trouve maintenant reculé dans le » sein des terres (2). » Afin d'apprécier le mérite de cette opinion, à laquelle se sont rangés us savans modernes, examinons ce qui arriveroit, si le détroit de Gibraltar et celui de Constantinople venoient tout-à-coup à se fermer, de sorte qu'il n’existât plus de communication entre la mer Noire et la Méditerranée, entre cette dernière et l'océan Atlantique; et voyons si les conséquences de cet état de choses s'accor- deroïent avec ce qui existe aujourd’hui. Considérons d’abord les changemens qu'éprouveroit le niveau de la Méditer- ranée. On sait qu'un courant continuel, dirigé de l'ouest à l'est, entre dans cette mer par le détroit de Gibraltar (3); ce qui indique évidemment qu'elle perd, par lévaporation, plus d’eau que ne lui en rendent les fleuves qui s'y jettent. Si donc (1) Strabon, tom. I, pag. 116 de la traduction de (3) Géographie physique de lamer Noire, par M. Dureau , MM. Gosiellin, du Theil et Coray. de Lamalle fils. (2) Strabon, tom. L®, pag. 120. DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. 39 le détroit étoit fermé, le volume des eaux de cette mer diminueroit de plus en plus, et leur niveau s'abaisseroit. Ainsi, dans cette supposition, les côtes de l'Afrique, loin d’être submergées, auroient une plus grande étendue vers le nord. Un effet contraire auroit lieu sur les côtes de la mer Noire; car les fleuves qu'elle reçoit, y versent plus d’eau que l'évaporation ne lui en fait perdre, puisqu'un courant constant les verse de la mer Noire dans celle de Marmara, par le détroit des Dardanelles. IH arriveroit donc, en supposant ce détroit fermé, que le bassin de la mer Noire, s'agrandissant continuellement, se réuniroit à ceux du lac d'Aral et de la mer Caspienne, jusqu'à ce qu'enfin le niveau de ce grand lac se fût assez élevé pour surmonter ou rompre l'isthme qui sépareroit l'Asie de FEurope dans emplacement du Bosphore de Thrace; catastrophe qui paroît avoir eu lieu en eflet, et à laquelle on attribue le déluge de Deucalion (1), parce que cette espèce de débâcle dut produire en Thessalie une inondation dont le souvenir a été conservé. Aïnsi les eaux du Pont-Euxin et de la mer Caspienne se jetèrent dans la Méditerranée, laquelle, à cette époque, pouvoit être ou séparée de l'océan Atlantique, ou réunie à cette mer par le détroit des Colonnes. 1 Dans le premier cas, le niveau de la Méditerranée, inférieur de beaucoup à son niveau actuel, se seroit élevé jusqu'à ce qu'il eût pu surmonter les terres basses de l'isthme de Suez, et alors il est évident que les eaux de cette mer et celles du Pont-Euxin réunies se seroient écoulées dans l’océan Indien par le golfe Arabique; et comme l’isthme de Suez ne s'élève que de dix ou douze mètres (2) au-dessus du niveau de la Méditerranée, il s'ensuit que les eaux de cette mer n'auroient pu s'élever aussi que d'environ douze mètres. Dans le second cas, c’est-à-dire, en supposant l'existence du détroit de Gibraltar antérieure à celle du Bosphore de Thrace, le niveau de la Méditerranée auroit encore, à la vérité, acquis une élévation nouvelle; mais cette élévation auroit tou- jours eu pour limite celle de l’isthme de Suez dans sa païtie la plus haute. Soit qu'il existât entre l'océan et la mer intérieure la même communication que celle qui existe aujourd’hui, soit que cette communication ne tôt point encore ouverte, lorsque le Bosphore de Thrace se forma par la rupture des roches Cyanées, les considérations qui précèdent, semblent démontrer que l'exhausse- ment de la Méditerranée, au moment où elle reçut les eaux du Pont-Euxin, eut nécessairement, pour dernière limite, le niveau du point culminant de l'isthme de Suez, et que, si jamais elles atteignirent ce niveau, elles durent s'écouler par le golfe Arabique dans la mer des: Indes. Mais cet écoulement de la Méditerranée dans le golfe -Arabique, a-t-il jamais eu lieu! C'est ce qui ne paroît nullement probable ; car, s’il eût existé, il se seroit encore établi entre l'Afrique et l'Asie un courant rapide, lequel auroit en- traîné toutes les matières dont l'isthme de Suez est composé, et nous verrions aujourd'hui un détroit dans emplacement de cet isthme. Nous voici donc con- duits à conclure que, lors de l'ouverture du Bosphore de Thrace, les eaux de la (1) Géographie physique de la mer Noire, chap. XXVIIL, (2) Mémoire sur Je canal des deux Mers, par M. Le XXIX & XXX, Père. 4O DESCRIPTION DE LA VALLÉE DE L'ÉGAREMENT. Méditerranée n'arrivèrent point à la hauteur du point culminant de f'isthme de Suez, ce qui suppose évidemment qu’elles purent s’'écouler par le détroit de Gibraltar, qui par conséquent existoit déjà. Ce ne peut donc être à l'exhaussement du niveau de cette mer, lorsqu'elle fut grossie pour la première fois de la débâcle du Pont-Euxin, que lon peut attribuer la submersion des déserts qui bordent l'Égypte, et des plaines de l'Oasis d'Ammon, puisque ces portions de l'Afrique sont beaucoup au-dessus de l'isthme dont il s’agit. D'un autre côté, si l'on considère que les cailloux roulés qui se trouvent à toutes les embouchures des gorges dont sont entrecoupées les deux chaînes de montagnes entre lesquelles le lit du Nil est creusé, ne peuvent avoir été amoncelés que par des courans alternatifs, ayant des directions opposées, tels que seroïent ceux du flux et du reflux, on sera conduit à conclure que ces -amas de cailloux roulés doivent leur origine à des marées extraordinaires, aux- quelles on est également fondé à attribuer la submersion partielle de nos conti- nens; submersion dont les déserts de l'Afrique présentent autant de témoignages irrécusables qu'on y rencontre de lacs et de ruisseaux salés, ou de plaines sablon- neuses couvértes de sel cristallisé et de coquilles marines. . DISCOURS DISCOURS SUR LA REPRÉSENTATION DES ROCHES DE L’'ÉGYPTE ET DE L’ARABIE PAR LA GRAVURE; ET SUR SON UTILITÉ DANS LES ARTS ET DANS LA GÉOLOGIE; PAR M. DE ROZIÈRE, INGÉNIEUR EN CHEF DES MINES. \ LR DLL L'anr de représenter par le dessin et la gravure les objets d'histoire naturelle, quoique pratiqué depuis long-temps, n'a atteint que récemment un certain degré de perfection ; et l’on doit son avancement aux ouvrages de luxe publiés depuis un petit nombre d'années (1). La minéralogie et la géognosie, sur-tout, ont tiré peu de parti jusqu'ici de ces progrès de la gravure : on a très-bien rendu, il est vrai, des pierres herborisées, diverses sortes de pierres figurées; et le premier volume de l'ouvrage de Knorr est un chef-d'œuvre en ce genre: mais ces objets, qui peuvent flatter la vue par leur singularité, sont en eux-mêmes d’une médiocre utilité pour les sciences; et d'ailleurs ils ne présentoient aucune difficulté pour exécution. ; Buc'hoz, Schmidel, Dagoty, ont essayé, à diverses époques, de vaincre les obs- tacles qui s’opposoient à la représentation des minéraux proprement dits. Hamilton, dans son ouvrage sur le Vésuve, a rendu, à l'aide de gravures coloriées, les prin- cipales espèces de laves de ce volcan. Je ne veux point rabaisser le mérite de ces ouvrages, dont j'ai pu apprécier la difficulté ; mais il me semble que tous sont restés fort loin du terme où l’on pouvoit arriver. Au surplus, personne n’avoit gravé des collections de roches primitives, et sur-tout de roches granitiques. L'ouvrage sur (1) Les collections de quadrupèdes, et sur-tout celles Ies singes, sur les colibris, sur es oïseaux d'Afrique, &c. d'oiseaux, publiées par Buffon, ont été regardées comme La même différence se remarque éntre les plantes gra= un chef-d'œuvre de gravure à cette époque; etily a bien vées il y a trente ans et la collection des liliacées publiée Loin de là aux belles planches coloriées des ouvrages sur par Redouté, H. N. TOME Il. FE Â2 REPRÉSENTATION DES ROCHES DE L'ÉGYPTE YÉgypte est le premier où l’on ait tenté de le faire; et l'occasion en étoit peut- être unique. , L'ouvrage que l'on publie sur l'Égypte, a pour but de donner une connois- sance complète de cette contrée, la plus intéressante de toutes pour l’histoire des sciences. Sa constitution physique, ses monumens, l'industrie de ses anciens ha- bitans, ont été les principaux objets des recherches de la commission, comme ils seront long-temps ceux de la curiosité générale : on sent assez, sans que je m'arrête à le prouver, qu'il n’étoit pas inutile, pour un pareil but, de faire connoître d’une manière précise les roches qui constituent le sol de cette contrée, celles sur-tout dont on a construit ses anciens édifices, et sur lesquelles s’est exercée, pendant tant de siècles, l’industrie Egyptienne. On demandera peut-être si les seuls moyens du discours n'auroient pas pu en donner une idée suffisante, c’est-à-dire, qui permit de se les représenter avec toutes leurs circonstances, et qui en laissât dans la mémoire des impressions assez nettes, assez durables, pour qu’on se les rappelât facilement au besoin. On deman- dera si les géologues n'ont pas établi entre les roches, des distinctions précises, une classification invariable et une nomenclature détaillée, de manière à y rap- porter toutes les roches que renferment les montagnes de chaque contrée. Nous examinerons, plus bas, si les moyens du discours sufisent à cet égard aux natu- ralistes; mais il est évident, au moins, que, pour la plupart des antiquaires, des architectes, des géographes , des historiens, et pour une multitude d’autres per- sonnes fort instruites d’ailleurs, mais qui ne connoissent pas même les termes de minéralogie, les descriptions que l’on pourroit faire avec ces termes ne leur donneroient point des idées bien nettes. Cependant ces personnes desireront prendre quelque connoissance des montagnes de l'Égypte, de ses cataractes, des anciennes carrières , des déserts environnans ; elles desireront connoître d’une manière précise les matières dont sont construits les temples, les palais de la Thé- baïde et les pyramides, ces statues colossales célébrées depuis tant de siècles par les voyageurs, telles que le fameux colosse de Memnon, sur la nature duquel on a hasardé tant de conjectures et tant d'explications bizarres, faute de données précises sur la matière dont il étoit formé, les sarcophages , les colonnes, les obé- lisques, et cette multitude de monumens de toute espèce que l'on rencontre à chaque pas en Égypte. Les roches de l'Arabie, celles du mont Sinaï, du mont Oreb, exciteront une autre sorte de curiosité, non par leur emploi dans les arts, mais par leur rapport avec des faits célèbres de l'Histoire sacrée. Ces lieux sont assez connus par le séjour dés Israélites. Les religieux Grecs, qui les ont constamment habités depuis les premiers siècles du christianisme, passent pour avoir conservé par tra- dition la connoissance de tous les lieux, de tous les points dont font mention les histoires Juives; et c'est sur-tout cette connoissance profonde du local, qui a excité envers cette contrée la vénération des Chrétiens de l'Orient, et la ferveur des pélerinages. Le voyageur de toute secte, de toute communion, visite encore aujourd’hui, avec une admiration respectueuse, ces mêmes endroits où la puissance PAR LA GRAVURE. 43 de Dieu s'est manifestée jadis par tant de miracles (1). Ces monumens seront envisagés sans doute très- différemment, en raison de la diversité des opinions religieuses ; mais ils inspireront à tous les hommes éclairés un certain intérét : on voudra prendre quelque idée, non-seulement de leur forme, mais de leur nature; et les échantillons détachés de ces monumens mêmes, et gravés avec toute l'exactitude possible, satisferont à cet égard la curiosité, en même temps qu'ils nous serviront à faire connoître la constitution physique de cette contrée. k Les rochers du Gebel el-Mokarteb, où Montagne écrite, qui offrent, dans une étendue de plusieurs lieues, de nombreuses inscriptions Phéniciennes ou Sama- ritaines, les plus anciennes peut-être qui existent aujourd’hui, après celles de l'Égypte, n'’intéresseront guère moins les savans qui voudront connoître d’une manière précise la nature de ces montagnes. Ces exemples font sentir assez qu'il existoit, pour graver les roches de l'Égypte et des lieux voisins, des motifs par- ticuliers d'intérêt, tout-à-fait étrangers à la géologie, motifs qui n'auroient pas également lieu pour toute autre contrée. Par rapport aux géologues et aux minéralogistes, il est naturel de penser que des dénominations et des descriptions, si on les suppose exactes, seroient sufhisantes ; mais elles ne peuvent que rappeler le souvenir des roches déjà connues : encore cela n'est-il pas toujours sans quelque difficulté ; ét il faut me pardonner d'entrer, pour le faire sentir, dans quelques détails minutieux. Il n'existe point, entre les roches, d'espèces proprement dites ; elles n’offrent rien de fixe dans leur composition comme dans leur aspect: une suite de pas- sages gradués et insensibles unit les roches les plus différentes; et quelquefois les variations ont lieu dans le même bloc : ainsi, faute de limites naturelles, faute _de points fixes que l'esprit puisse saisir, l'étude des roches et leur classification deviennent très-difficiles. Pour ne pas s'exposer à tout confondre, il a fallu sup- pléer à ce que la nature n’avoit pas fait, et choisir arbitrairement, dans cette série continue, Certains points, comme des types auxquels on pût rapporter toutes les roches intermédiaires : c’est ainsi, à peu près, que s’est trouvée formée la nomen- clature géologique, si toutefois l’on peut donner ce nom au petit nombre de termes dont on se sert pour dénommer un nombre infini d'objets différens. IL est aisé de juger par-là, que les naturalistes qui s'entendent sur les points principaux, ne sont guère d'accord et souvent ne s'entendent pas entre eux sur les détails, et que le fecteur qui lit un fait géologique, ne sait presque jamais, d’une manière certaine, de quelle substance on lui parle, si on se borne à la dénommer. Pour suppléer à cet inconvénient, l’on prend le parti de décrire toutes les roches, au lieu de les dénommer ; mais cette méthode, longue et difficile, m'atteint pas toujours parfaitement le but qu'on se propose. () Ici, cest le rocher que Moïse frappa de sa verge, vers le sommet du Sinaï, on montre encore la roche d’où et d’où jaillirent des torrens d’eau douce, pour abreuver furent détachées ces tables de la loi que Dieu grava le peuple de Dieu ; là, est celui où ce peuple infidèle de sa propre main, et qu'il remit à Moïse, &c. &c. fondit et moula le veau d’or qu'il adora dans le désert : H, N, TOME IL. Fa 44 REPRÉSENTATION DES ROCHES DE L'ÉGYPTE Supposons que l’on trouve dans un ouvrage les descriptions suivantes, qui, très-bien faites, ont sur-tout le mérite de l'exactitude et de la concision : 1.© Roche feldspathique rougeâtre, avec quartz translucide ét mica noir (1). ° Roche résultant du mélange d'un quartz transparent, de feldspath jau- nâtre, et de schorl noir en lames médiocrement dures (2). 3.° Roche feldspatique, avec quartz gris, en cristaux irréguliers, dont les coupes forment, sur les surfaces des lames de feldspath, des figures anguleuses. 4° Roche granitique à gros grains, à quartz blanchätre, à feldspath, en petite partie, d'un blanc laiteux, et, pour la plus grande partie, d’une couleur de chair assez relevée, cristallisé en rhombes, d’une grosseur médiocre; enfin à mica d’un noir très-intense, et à contexture serrée (3), 5° Roche cornéenne dure, rouge, avec feldspath granuliforme, et souvent des parcelles d’amphibole. v Je choisis ces exemples, parce qu'ils ont quelque rapport à mon sujet, et je les choisis parmi les descriptions les mieux faites que nous ayons. Toute entreprise nouvelle. est sujette à éprouver d’abord des conirädietidis) et je ne serais pas étonné que plusieurs personnes fort éclairées blâmassent celle- ci. Pour toute réponse, je les engage à réfléchir sur les descriptions que je viens de citer, et qui sont, je puis l’assurer, les plus exactes, les plus précises que l'on trouve. dans les meilleurs ouvrages qui traitent de ces matières. Je demande si, trouvant ces descriptions, elles se représenteroient d’une manière fort nette les roches dont il est question, le granit de Syène, le granit graphique, le porphyre rouge antique. Je demande si elles reconnoîtroient que la même roche est décrite ici deux fois. Je demande si la connoissance d’une roche, acquise de cette ma- nière , se conservera bien fidèlement dans la mémoire. Je demande enfin si, dans le cours d’un long ouvrage, il est possible de donner toute son attention à une suite d'idées présentées d’une manière si abstraite. Si cette difficulté a lieu pour les roches les plus connues, que penser des descriptions de roches tout-à-fait inconnues ? Qu'on ne croie pas que l'extrême concision des HÉRARREES que j'ai rappor- tées, soit l'unique cause de la difficulté qu'on éprouve à se représenter l'objet décrit; plus on les complétera en multipliant les détails, plus effort d'attention deviendra grand. L'esprit réunit toujours mal les circonstances, dès qu’elles sont nombreuses ; vingt personnes différentes se feroient vingt tableaux différens d’une même roche, d'après sa description détaillée. On n’a qu'un moyen de donner, par le discours, des idées nettes d’un objet physique un peu composé, c’est de rappeler les sensations qu'il a produites. Si l'objet est nouveau, il faut marquer son rapport avec.un ou plusieurs objets connus: encore, pour peu que les dif- férences soient grandes, il restera toujours dans l'esprit du lecteur quelque chose de vague et d’incertain. Voilà pourquoi il est si facile, par les moyens du dis- cours, dé donner une image de ce qui est composé d'objets connus et familiers (1) Haüy, Traité de minéralogie, tom. IV. (3) Wad, Description du musée Borghèse, {2) Saussure, tom. 1.7, chap, 5. PAR LA GRAVURE. 45 au lecteur, téls qu'un site, un paysage; et si difficile, au contraire, de peindre ce qui a dans toutés ses parties une manière d'être particulière. On ne donnéroit ja- mais, avec des paroles, l'idée d’un cheval ou d’un bœuf, à celui qui n’auroit pas vu ces animaux ; de même, on ne donneroit jamais l’idée d’une roche particulière, à qui n'auroit rien vu de semblable : mais, en joignant aux descriptions une re- présentation fidèle, on levera les plus grandes difficultés. Si ce que je dis est fondé, il en résulte qu'en géologie, comme dans toute autre science naturelle, rien ne peut suppléer parfaitement à la vue de l'objet lui-même. Le meilleur moyen de parer à tout, seroit celui qu'ont adopté quelques natu- ralistes Allemands, de former des collections de roches qui soient exactement conformes entre elles, de les accompagner d'indications précises, et de les répandre dans les divers pays : mais ce moyen, excellent en soi, n'est pas d’une exécution facile; on sent qu'il n'est pas généralement praticable : c’est pour y suppléer que nous avons fait graver la collection des roches de l'Égypte. À ne considérer que la nomenclature, on m'objectera peut-être que les monu- mens nombreux formés avec les roches que lon appelle antiques, et qui sont répandus dans presque toutes les parties de l'Europe, fournissent une ressource pour établir quelque concordance entre les idées des naturalistes: mais il en résulte souvent des équivoques assez graves : en voici un exemple. Cette nécessité dont nous avons parlé, d'établir quelques distinctions dans cette série de roches que l’on confond sous le même nom, a été bien sentie par le célèbre professeur Werner, qui, plus que personne, a mis de la précision dans la nomenclature: entre autres changemens heureux qu'il a introduits, après avoir montré l'importance de restreindre le nom de granit aux seules roches composées de trois élémens, quartz, feldspath et mica, nettement cristallisés, roches qu'il faut absolument distinguer de toutes les autres, parce qu'elles sont les plus anciennes, les premières de toutes dans l'ordre de leur formation, et qu'elles constituent la base solide des montagnes et de tout le globe, il en sépara, et il désigna, par un nom particulier, une autre classe de roches primitives, n'ayant qu'imparfaitement la contexture granitique, renfermant, au lieu de quartz et de mica, une quantité assez grande de horn-blende {amphibole de Haüy), roches qui d'ailleurs diffèrent essentiellement des granits par leur gisement, puisqu'elles se trouvent liées dans la nature aux roches pérphyritiques. Cette distinction, dis-je, est très-juste et très-utile; mais M. Werner appliqua à ces roches un nom emprunté des auteurs anciens, celui de syénire, donné par Pline à la roche de Syène en Égypte, dont sont formés tant de nionumens anciens. Cette roche est, comme toutes les autres, assez variable dans sa com- position. Quelques blocs renferment, avec beaucoup de feldspath, une certaine quantité d’amphibole; et sans doute c’est d’après un de ceux-ci que M. Werner s'est déterminé dans l'application du nom, et qu'il a fait de la roche de Syène le type de son nouvel ordre. Mais cette conformité entre la roche ancienne et les nouvelles roches, est purement accidentelle; et je puis assurer qu'elles différent 46 REPRÉSENTATION DES ROCHES DE L'ÉGYPTE sous tous les rapports. L’amphibole y est assez rare: le mica, au contraire, fort abondant, s'y présente dans des états variés, et il est vraiment essentiel à sa compo- sition ; le quartz, quoique moins abondant, y manque rarement; le feldspath sy montre toujours en cristaux très-nets, très-grands et très-bien formés: la roche à entièrement la contexture granitique, et nullement celle des syénites de M. Werner: et ce qu'il faut sur-tout considérer, c'est que son gisement n’est pas du tout le méme; elle n'appartient point à la formation porphyritique : on ne rencontre même aucun porphyre dans les environs de Syène ni dans les déserts voisins, mais, comme on pourra le voir dans les planches de minéralogie, une multitude de granits à petits grains, des granits veinés, des gneiss, des roches feldspathiques semées de grenat, et toutes espèces de roches étrangères à la formation porphy- ritique (1). On voit par-là comment les monumens peuvent induire en erreur, parce que la même roche sy présente sous divers états, et qu'un accident peut être pris pour sa manière d’être constante; ajoutons que d’ailleurs on ne connoissoit nulle- ment jusqu'ici le gisement des roches antiques. On voit aussi qu'il faut avoir recours à d'autres moyens pour établir, d’une manière certaine, de nouvelles idées sur la nomenclature des roches. Ce n'est pas que je me propose d'entrer dans de très-grands détails sur la nomenclature des roches; ce travail s'écarteroit trop du but de notre ouvrage: je me bornerai à ce qui sera indispensable ; mais d’autres, plus capables que moi d’ailleurs de remplir cette tâche, l'entreprendront peut-être, et ils pourront trouver pour cela quelques secours dans une collection de roches assez nom- breuses, dont les figures sont représentées avec toute la fidélité possible : notre collection leur offrira quelques-uns de ces points qu'il faut choisir par convention pour en faire les types des dénominations et y rapporter les roches intermédiaires. Ces mêmes figures répandues dans les diverses contrées de l'Europe, pourront être consultées par tous les naturalistes ; et les exemplaires en étant tous parfaite- ment conformes entre eux et accompagnés d'indications précises , suppléeront jusqu’à un certain point aux collections des roches elles-mêmes, qu'il seroit impos- sible de multiplier autant, et peut-être de choisir de manière qu'elles fussent toutes parfaitement semblables. Nous venons d'exposer quelle pouvoit être, par rapport à la géologie, l'utilité de la représentation des minéraux; nous avons indiqué également l'intérêt qui pouvoit en résulter, à ne jes envisager que sous leurs rapports avec la connois- sance de l'Égypte, de ses monumens et de certains faits historiques ; et nous avons fait sentir la convenance particulière que l'ouvrage sur l'Égypte offroit pour une (1) Je puis invoquer, à l'appui de ce que je dis, plusieurs M. Daubuisson, ingénieur des mines, dont le zèle pour témoignages qui ne seront pas suspects. M.de Humboldt, Ja doctrine de M. Werner est bien connu et qui d’ailleurs si célèbre par ses travaux et par les connoïssances minéra- a composé, d’après les leçons et sous les yeux de ce Pro logiques qu'il a recueillies à Frayborg, a examiné avec fesseur, un Traité des roches, dont un extrait est inséré attention les diverses roches prises à Syène; il areconnu dans Mrs de Brochant, a partagé la même opinion, qu'elles appartenoient à un système de montagnes tout-à- et m'a autorisé à le déclarer. fait différent de celui quirenferme les syénites de Werner. PAR LA GRAVURE. 47 ielle entreprise. Tout cela suppose que cette représentation aura été exécutée avec un certain degré de précision. Ce sont les gravures que nous présentons, qui peuvent mettre à portée de juger si cette condition est remplie. Sans doute ce genre de figures n’offre pas à l'inspection le même intérêt que celui des figures d'animaux, de plantes, de coquillages et de beaucoup d’autres objets qui peuvent plaire à la vue par leurs formes, et dont il sufhiroit souvent de tracer les contours extérieurs pour en donner une idée assez nette : mais il ne faut pas oublier que les gravures offertes par nous, ne sont qu'un moyen auxiliaire pour faire connoître les objets représentés; que leur principal objet est, comme dans les plans et quelques autres genres de dessins, de suppléer à l'insuffisance du discours, et de fixer dans la mémoire les idées que l'on se sera faites en lisant les descriptions ; que souvent même on n’a eu en vue que de rendre quelques. cir- constances importantes à remarquer, et sur lesquelles on. appellera particulière- ment J'attention du lecteur dans les descriptions qui accompagneront chaque roche. Du reste, on se convaincra, je crois, en examinant les planches, que l'exécu- tion de cet ouvrage, éu égard aux difficultés qu'il présentoit, n’est pas inférieur à ce qui a été exécuté jusqu'ici avec Je plus de précision dans toute autre partie de l'histoire naturelle. Les imperfections que peuvent renfermer les gravures, seront d'ailleurs scru- puleusement indiquées. Au fond, voici à quoi tiennent les difficultés que nous venons de remarquer, et comment on peut les surmonter. La première chose à rendre, dans les roches composées, est la nature de leurs divers élémens; et le discours, j'en conviens, remplit très-bien ce premier objet, beaucoup mieux même que la représentation par la peinture ou par la gravure: mais les proportions de ces élémens ne peuvent étre exprimées, par le discours, d'une manière précise; et la peinture le fait très-bien, dès que l’on a levé, par une indication écrite, les incertitudes qui peuvent exister à cause de l'analogie d'aspect qu'ont certaines matières. / La forme particulière et le volume de chacun des élémens ne peuvent être rendus d'une manière détaillée qu’en les figurant tous: il y a d’ailleurs, dans la structure des roches, une infinité de circonstances curieuses qu'on n’est pas même conduit à observer, lorsque l'on se borne à des descriptions; et il seroit imposible de les rendre , à moins d'entrer dans une multitude de détails qui deviendroient très- fastidieux, inconvénient qui n'existe point dans la représentation , parce qu'en examinant un dessin, on est toujours le maître de borner son attention aux cir- constances qui peuvent intéresser pour l'instant. ; Comment rendre, sans le secours de la peinture , les couleurs et jusqu'aux nuances différentes qu'offrent souvent les divers cristaux de même espèce! Cela n'est jamais indifférent par rapport aux arts, et ne l’est pas toujours en géologie. Les accidens particuliers que présente chacun des élémens, ne peuvent être rendus, par des paroles, avec quelques détails; mais rien de plus facile par le dessin. 48 REPRÉSENTATION DES ROCHES DE L'ÉGYPTE PAR LA GRAVURE. Les cristaux de feldspath, par exemple, sont souvent sujets à renfermer des cristaux d'une matière étrangère, des lames de mica : on verra, du premier coup-d'œil, dans une gravure, la quantité, la grandeur de ces lames, et d’autres circonstances semblables dont la connoissance est utile pour servir à résoudre certaines ques- tions. Mais ce qu'il y a de plus important à faire connoître dans les roches, c’est la disposition respective des divers caractères, ou ce que l’on nomme la contexture de la roche; et à cet égard il n’y a aucune comparaison à établir entre les moyens du discours et ceux de la gravure. Chaque formation de roches a une contexture qui lui est propre, et qui peut la faire distinguer de celle des roches appartenant aux formations antérieures ou postérieures : c’est donc là le point le plus essentiel pour la géologie, et cela ne peut être révoqué en doute par ceux qui ont réfléchi sur le but de cette science (1). La position relative des diverses sortes de roches dans la nature, peut très- bien être rendue par le discours (dans la supposition, toutefois, que ces roches seroient d'avance bien indiquées): mais la gravure peut encore être utile pour cet objet, en réunissant et plaçant, sous un même coup-d’œil, les roches qui ont entre elles des rapports de position intéressans. De tout cela il faudra conclure que, pour bien connoître les roches, les seuls moyens du discours, ou de la représentation par le dessin, seroient insuflisans, pris chacun à part; mais que, réunis, ils rempliront très-bien cet objet. Or, c'est uniquement ce que nous nous sommes proposé. (1) Beaucoup de personnes cependant croient que lon diverses sciences avoient le même objet, et que les a tout fait quand on a indiqué la nature des substances qui entrent dans une roche; et parce que la chimie n’en- visage que ce seul point, on a pensé qu'il devoit en être de même en minéralogie et en géologie, comme si ces mêmes moyens pussent également leur convenir. C’est une erreur qui ne peut entrer que dans l'esprit des per- sonnes qui n’ont aucune idée du véritable but de la géologie. $ FLORÆ FLORÆ ÆGYPTIACÆ ILLUSTRATIO, AUCTORE À. R. DELILE, ST TS A ÈS CLASSIS PRIMA, MONANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. à Canna indica ZINN, Rosettæ in hortis. BOERHAAVIA repens, Vid. in Diandriä, + SALICORNIA fruticosa LINN. As. — — — herbacea LINN.-— Arab. chræsi, ex Forskal. As. — — — glauca. —/Salicornia virginica FORSKAL, As. — — — Cruciata FORSK, Alexandriæ, et ad littora maris Rubri. — Arab. sabta, ‘ex Forsk. = + — strobilacea PAzLAS, [H. N. Botanique , pL. 7, Jig. 2.] — Arab. do souyd. Às NY PS Pb CLASSIS II, DIANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. + BOERHAAVIA repens ZrWW. [H. N. Botanique, p/. 7, Fig. 1] Æg.sup. : MOGORIUM Sambac Juss., Lam.; DESFONT, — Nyctanthes Sambac LINN., et Nyctanthes undulata ; fx notis Amæn, acad, 4, pag, 449. — Arab. (8255 zanbag, CS fl, Kh. 9. JASMINUM officinale ZINN. Kh. , 10. = — — prandiflorum ZINN. — Arab. Giaus yasmyn. : Kh. 11. OLEA europæa ZINN. — Arab. Oo ze) toun. 12. VERONICA Anagallis LINN. Rs. 13. UTRICULARIA inflexa FORrsK. [H. N. Botanique, pl. 4, fig. 1.] — Arab. de Lamoul, Rosettæ et Damiatæ in fossis agrorum oryzæ. à VERBENA LINN. Vid.in Didyn. Angiosp. À 14. ROSMARINUS officinalis ZINN. Kh. — Arab. AS Klyl, Ye! aselbän. 15. SALVIA ægyptiaca ZINn. Kd. — Arab. de; raleh, Ja & chagaret el-ghazäl, id est, herba Gazellæ. 16, — — — officinalis ZrNn. Rs. 17. — — — verbenaca LINN, As, 18. — — Ÿ nudicaulis VAuxz, CRI NOTARUM EXPLICATIO. Æg. sup... Planta Ægypti superioris. Rh.... Planta Rosettæ hortensis vel cuita. Énanondoee Kahiræ spontanea. Alexandriæ spontanea. GE pets desertorum indigena. desertorum indigena. Kb hortensis vel culta. hortensis vel culta. Rs.. .. Rosettæ spontanea. Ta...s In Ægypto mihi non obvia, et inter ægyp- RARE Nereee ——— desertorum indigena, tiacas fide auctorum memorata. Æ. N.. TOME Il. G so FLORÆ ÆGYPTIACÆ 19. — — Ÿ spinosa, in Ægypto ex LINN. 20. — — — Janigera DESFONT. Hort. paris, — Salvia ceratophylloïdes FORSK AL. 21. — — Ÿ graveolens VAzz, In Ægypto ex herb. Juss. 22. — — 'F flavescens Juss, In Ægypto ex herb. Juss. 23. — — Ÿ nilotica MURRAY, JACQ., WrzLp. In Ægypto! 24. 25. A PEPLIDIUM humifusum. [H. N. Botanique, p/. 4, fig. 2.] Damiatæ. Plantula Gratiolæ et Lin- derniæ affinis, faciem gerens Peplidis, unde nomen desumptum. CLASSIS III; TRIANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. CERVICINA campanuloïdes. Dicitur Cervicina à Gervicarià, verbo Campanulæ olim synonymo. Herba exigua, vix à Campanulä recedens, distincta numero staminum et capsulà apice dehiscente. Vid. P/. s, fig. 2. Crescit in arvis prope Birket el-Häggy. TAMARINDUS indica LINN. Vid. in Monadelphià Triandriä. 26. ‘F IRIS germanica ZINN, An Iris Sambac FORSK.! 27. — — — Sisyrinchium ZI”. As. Kd. 28. SCHŒNUS mucronatus ZINN, —Scirpus Kalli 3 Alpini, FORSKAL, As. Rd. 29. CYPERUS articulatus ZINN. — Cyperus niloticus FORSK. Rosettæ et Damiatæ. 30. — — — mucronatus ROTTB., VAHL, — Cyperus lateralis FoRSx. Rs. Copiosè in arenà deserti ad fontes Mosis. 31. — — — alopecuroïdes ROTTB., VAHL, Rs. 32. — — — dives. / PI. 4; fig. 3] Rs. 33. — — — fuscus ZZNN. — Cyperus ferrugineus FORSK. Rs. 34. — — — michelianus. — Scirpus michelianus LIMN. Alexandriæ ad canalem. 35. — — — difformis ZINN. An Cyperus complanatus FORSK.! Ks. Rs. 36. — — — protractus. / PL $, fig. 3. ] In agris oryzæ prope Fouah. 37. — — — rotundus ZINN. As. Rs. Ks. — Arab. dau sa'ed. — In Nubit à tua mégysseh, 38. — — — esculentus ZINN. Rs.—Arab. > € = hab el-a'7yz, id est, granum dilectum. 39. — — Ÿ longus ZINN. In Ægypto à Fi Enum. plant, 4o. — — — melanorhizus. — Arab. ou 1, Jéal : 59 || se hab ela’zyz el-soghayr aou el-asouäd, id est, hab el-azyz un M nigrum, 41. — —'T fastigiatus FORSK, Descript, p. 14. 42. — — - ornithopodioïdes. Damiatæ. 43. — —'T Haspan ZZNN. In Ægypto ex herbario Vaillantii. 44. — — — Papyrus ZINN. — Arab. (6,> berdy. Damiatæ. 45. SCIRPUS palustris ZINN. Rs. In provincià Fayoum, JOMARD. 46. — — — caducus. / PL. 6, fig. 2.] Damiatæ. 47. — — — pollicaris. Damiatæ. 48. — — — fimbrisetus. / PI. 7, fig. 1.] Damiatæ. Setæ seminum fimbriatæ. 49. — — — mucronatus ZzNN. [H. N. Botanique, pl. 7, fig. 3] Rs. 50. — — — maritimus LINN, — Scirpus corymbosus FORSK. — Arab. Depsjæ, ex Forsk. 51. ISOLEPIS inclinata. Circa Sâlehyeh. Isolepis ex Brownii prodromo Floræ Nov. Holland. differt à Scirpo defectu setarum hypogynarum. 52. — — — uninodis. / PL 6, fix. 1.] Damiatæ. 53- — — — fistulosa. — Scirpus fistulosus FORSK, Rs. 54. FIMBRISTYLIS dichotomum VARL. — Scirpus dichotomus ZZNN., ROTTB. dti annuus ALLION., DESFONT. — Scirpus bisumbellatus FORSK. Rs. 55e — — — ferrugineum V4zz. [H. N. Botanique, pl 6, fig. 7.]— Scirpus ferrugineus Zzwn. + É provincià Fayoum. Hujus plantæ specimina communiçavit D. NEcroux. 56. LYGEUM Spartum ZINN, As. ILLUSTRATIO: SSE + PENNISETUM typhoïdeum RICHARD in Persoon Synops, [H. N. Botanique, pl. 8, Jg. 3] — Holcus spicatus ZINN: — Arab. o>3 dokhn, id est, Milium. — Incofis Nubix y CERCS hernek. .— — — dicothomum. /P1. 8, fig. 1.] — Panicum dichotomum et Phalaris setacea Z0RSx. Kd.— Arab. _+& remäm, NW. B. Gramina polygama cum triandris hermaphroditis huc conjunxi. ORDO, DIGYNIA. SACCHARUM ægyptiacum W1LLD, Enum, plant. — Saccharum biflorum FoRsx. — Ad ripas Nili et in insulis arenosis. — Arab. cd VU bous el-gezäyr, arundo insularum; os (pp bous färsy, id est, arundo persica ; y hych. . — — — officinarum LINN. Æg. sup. Rh. — Arab. “Sal ras gasab el-sukkar, id est, arundo Sacchari ; k ghäb ex Forsk. . — — — cylindricum LamARCK, DESFr. — Wagurus cylindricus ZLINN. — Arundo epigeios Forsx. Ks. Rs.—Arab. Aa 4alfh. + ANDROPOGON annulatum ForSk. [H. N. Botanique, pl. 7, fig. 2.] Ks. + — — — foveolatum. / PI. 8, fig. 2] Kd. S . LEERSIA oryzoïdes WILLD, — Phalaris oryzoïdes LINN. Rosettæ et Damiatæ. . PHALARIS canariensis LINN. As. . — — — aquatica LINN.. As. Ko. . — — — paradoxa ZLINN. Circa Sâlehyeh. . PANICUM verticillatum ZzNn, Ks. . — — — glaucum ZINN, Kahiræ et Damiatæ. .—— - viride LINN. Rs. .— — — stagninum RETZ., WIzLzD, — Panicum hispidulum Lamarcx Illustr, Rs. .— — — crus galli ZINN. Rs. Crescit inter oryzam. . — — — colonum ZINN. Ks. Rs. — Arab. axe", sl abou roukbeh, id est, geniculatum, fluitans RETZ., VAHL, Wizzp, — Panicum geminatum FORSK, As. Damiatæ à rusticis dicebatur ES zommeyr. Il il 1 — — - obtusifolium. / PJ. 5, fig. 1. ] Damiatæ. numidianum LAMARCK, DESFONT. Damiatæ, — Arab. 44, rikebeh, coloratum ZINN, Kahiræ et Damiatæ. .— — — repens LINN. Ks. Rs. . — — — miliaceum ZINN. — Arab. ES dokhn. Ks. sorghi. Æg. sup. — — — leiogonum, id est, nodis Iævibus. Ks. Affine Panico diffuso Indiæ occidentalis descripto à CI. SWARTZ, +. — — — prostratum ZAMARCK. Damiatæ. .— — — turgidum FORSK, [H. N. Botanique , pl, 9, fig. 2] Kd . DIGITARTIA sanguinalis. — Panicum sanguinale LINN. — Phalaris velutina Forsx. Ks. As. .— — — filiformis. — Panicum filiforme LINN. Rs. + — — — Dactylon. — Panicum Dactylon LINN.— Cynodon Dactylon RICHARD in Pers, Syn. — Arab. Jaé negyl. . CRYPSIS aculeata LAMARCK, DESFONT.— Anthoxanthum aculeatum Zzww. Ks. . — — — schœnoïdes Lam, DESF, — Phleum schœnoïdes LINN. Ks. + — — — alopecuroïdes. / PL. :9, fig. 1.] — MHeleochloa alopecuroïdes Hosr. Ks. + POLYPOGON Monspeliense DESr, — Alopecurus Monspeliensis et Alopecurus paniceus LINN, — Phalaris cristata FORSK, (lege aristata) ex Descript, p. 17, ubi spica dicitur pilosa aristis, &c: — Arab. 5 a\ 33 deyl el-fér ; id est, cauda murina. . MILIUM lendigerum ZINN. As. Æ. N: TOME Il. G 2 1 1 1 ei \ige $ 2 : ÉLORÆ" ÆGYPTIACGZÆ 92 — + arundinaceum S/B7H, Flor. græc. — Agrostis miliacea LINN, As. 93: AGROSTIS alba DECANDOLL, Flor, franc, — Phalaris semiverticillata FORSx. Rs. Ks. 94. — — — pungens SCHREB,, DESFONT. Ad. 95. — — — spicata VAHLZ, [H. N, Botanique, p/. 10, fig. r.] Ad. 96. POA pilosa ZINN., SHRAD., Wizzp. Ks. 97. — — = ægyptiaca WILLD, Hort. berol. [H.N. Botanique, p. 10, fig. 2.]—An Poa amabilis FORSK.? 98. — + — cynosuroïdes RETZ., Van, Wizzp. [H: N. Botanique, pl. 10, fig. 3.] — Uniola bipinnata ZINN. — Cynosurus durus FOrsx, Ks. Æg. sup, — Arab. àë halfeh. — Incolis Nubix 450! anbarféh, 99+ — — Ÿ annua ZINN, Damiatæ ex Hasselquist. 100. — — ‘F bulbosa vivipara, Damiatæ ex Hasselq. 101. = — — divaricata GOUAN, DESFONT., WILZD, As. 102. BRIZA Eragrostis LINN, — Poa multiflora FORSK. Ks. In Nubiâ Cam gytt. 103. DACTYLIS glomerata LINN. As. 104. — — — repens DESF, Flor, at. As. 105. CHRYSURUS aureus PERSOON Synops, — Cynosurus aureus LINN.—Gramen n.° 08 FORSK. Descr, pag. 27. 106. ELEUSINE ægyptia GÆRTN, — Cynosurus ægyptius LINN. — Arab. crabal x naym elsalyb, id est, gramen Crucis ; vel ad DS rigl el-herbäyeh, id est, pes Chamæleonis. 107. FESTUCA cynosuroïdes DESFONT, Flor. atl, As. 108. — — — fusca ZINN.[H.N.Botanique, pl rr, fig. r.]— Arab. AL st abou el-nageh. Ks. Rs 109. — — — uniglumis SY1ITH Flor, brit. — Festuca fasciculata FORSKAL. As. Rs. 110. — — — inops. Rd. 111, — — — calycina ZINN. Kd. 112. — — — divaricata DESF. Flor, atl. —Festuca lanceolata et Festuca dichotoma Forsx. Ad. Rd. 113. DINÆBA ægyptiaca. / PL. 11, fig. 3. ] — Dactylis paspaloïdes WzzzD. Hort, berol.. Nomen hujus generis traxi ab arabicà voce ©ob> dendb cauda ; propter caudatas plantæ paniculas. 114. KŒLERIA phleoïdes PERSOON Synops. — Festuca phleoïdes DEsr. Flor, atl. Ks. 115. BROMUS mollis ZINN. Ks. 116. — — — rubens ZLINN., SIBTH, Flor. græc, [H. N. Botanique, pl. 11, fie. 2] As. 117, — — — purpurascens. — Bromus rubens CAVANILL., DESFONT,. As. 118. — — — madritensis ZZNN. An Bromus villosus FoORsKx.! Rd. 119. — — — distachyos LINN. As. 120. — — Ÿ polystachyos, Alexandriæ ex FORSK, Descr. p. 23, 121, — — Ÿ poiformis, ex FORSK, Descr. 122. STIPA juncea ZINN. Ad. 123. = — — tortilis Dzsr, For. atl. — Stipa paleacea V4Hz, Excluso Poiretii synonymo. Ad. Kad. 124. AVENA pumila D£sr, Flor. atl. Kd. 325. — — — Forskalit Var. [H. N. Botanique, pl. 12, fig. 2.] — Avena pensylvanica FORSK. In arenû prope Pyramides Sakkaræ. — Arab. Bal sÈ chagaret el-gemel , id est, herba Cameli. 126, — — — arundinacea. / PI, 12, fig 1.] Rd. 427, — — — fatua ZINN. — Arab. 3% zommeyr, Ks. 128. — — — sterilis ZINN, Ks. 129. TRISETARIA linearis FORSK. [H.N. Botanique, p2. 12, fig. 3.]— Trisetumarenarium BILLARD, Déc, syr., Ad. 130. LAGURUS ovatus ZINN. Ad. 131. ARUNDO Donax ZINN, — Arab. cmd gasab, In hortis ad sepes. 132. — — — ægyptia DESFONT. Hort, paris. 133° — — — isiaca. — Arundo maxima FORSK, In insulis niloticis et ad fontes deserti. Paniculam gerit flavescentem. — Arab. UV bous, 134. — — — arenaria ZINN, Ad, ILLUSTRATIO. : 33 ARISTIDA plumosa ZrNN. — Aristida lanata FORSK. — Arab. Chorus chefchouf, ep 5 deryreh, ex Forsk. Rd: - = = dliaa Desr, Emend, alt, For, atl. [H. N. Botanique, p£ 13, fig 3] Kd. . — = — obtusa. / PL 13, fig. 2.] Kad. - = = = pungens Desr, Flor. atl. Æg. sup. Et in Syrià ex.D. BERTHE. + LOEIUM perenne ZINN. As Ks. + — — — temulentum ZINN. Rs. . ROTTBOLLIA incurvata LINN. As, .— + -— filiformis RorH, As. Rs. . — — — fasciculata DESF, Flor. al, Rs. += = = hisuta Waaz, [H. N. Botanique, pl. £4, fig. 1.] — Triticum ægylopoides FORSK, «+ ÆGYLOPS triaristata WirzzD, Ad. . ELYMUS geniculatus: TPE, figure) Adi + HORDEUM vulgare LINN. — Hordeum hexastichum FORSK, — Arab. JA chayr, .— — Ÿ murinum ZINN. Damiatx ex Hasselq. += = = maritimum VA4L Symb, bot. Ks. + TRITICUM sativum aristatum; æ vulgare. Apr as hontah, be gamh. Kd, gamk ; variè 151. — — — 8 fusiforme; spic mediocri, basi et apice attenuat, — Arab. LEO é gamh sofeyry, 152. — — —,7 palmare; spicâ longä lineari. — Arab. ob se é gamk sofeyry toueyly. 153. — — — d'coloratum; glumis coloratis. — Arab. JA 5 gamh ahmar, id est, triticum rubrum. 154, — — — e turgidum. / PL 14, fig. 2.] — Triticum turgidum ZINN. — Triticum durum Desr, — Ægyptis te é* gamh a'raby, JA%e e gamh meghayz, ais é sébageh. 155. — — — Êpyramidale; spicà pyramidali. / PI. 14, fig: 3 ] — Arab. ASS Le gamk na’ygeh. 156. — —T compositum, in Ægypto ex LINN. Suppl. 157. — — — bicome ForsK. [H. N. Botanique, p/. r5, fig. r.] Ad. 158. — — Ÿ planum, ex Ægypto D£sr. Hort. paris, 159. — = — loliaceun Sw1TH, As, : 160. — — — junceum ZINN. As. 161. SORGHÜM vulgare PERSOON Synops, — Holcus Sorghum ZINN.— Arab, 32 dourai ; 162. — = — cernuum,—Holcus compactus LAMARCK.— Arab. éælsc s)@® dourah a'ouñgeh, 163. — — — bicolor. — Holcus bicolor Zz”n. 164. — — — saccharatum. — Holcus saccharatus ZzWN, — Holcus Dochna Forsk. Kh.— Arab. OS dokhn. ; 165. — — — halepense. — Hoïcus halepensis ZIMN, — Arab. ral Ve hackych elfarras. In Nubià L,luæ gyéraoi. Ko. ’ ZEA Mays. Vid. Monœc. Triand. ORYZA sativa. Vid. Hexandriam. ORDO, TRIGYNIA. x 166. POLYCARPON tetraphyllum Zzw, As. 167. 168. legitur +55 dorak et Lo dor&. — Linguâ incolarum Nubiæ ep mâreh, CLASSIS IV, TETRANDRIA ORDO, MONOGYNIA. GLOBULARIA Alypum, ZzNN, Ad, SCABIOSA arenaria ÆORSK. In arenosis prope Abouqyr. SA 169. 170. 171. 172. 173. 174. 175. 176. 177. 178. 179. 180. 181. 482. 183. 184. 185. 186. 187. 4188. FLORÆ ÆGYPTIACÆ — —Ÿ prolifera Zn. In Ægypto ex Willden. Spec. plant. GALIUM spurium ZINN. Ks. CRUCIANELLA angustifolia ZINN. Ad. — — ‘Ÿ ægyptiaca, in Ægypt. ex LINN. _ — - mritima LINN. Ad. RUBIA tinctorum ZrWN. Damiatæ in hortis. — Arab. 35 fouah. PLANTAGO major LINN. — Arab. al m) ) lissän el-hamal, id est, lingua agnina; agricolis Damiatæ alor massäsah. _ — — Jagopus ZINN. Ks. — — — albicans ZINN, — Plantago ovata FORSK, — Arab. | RA \ FA logmet el-na'gy, id “est, pabulum ovium. AU :2K _ — - cylindrica Forsx. Kd. —— — argentéa DESF, Flor, atl. — Plantago decumbens F0rsx, Kd. maritima LINN, Damiatæ. Coronopus LINN. As. _ = -— stricta SCHOUSE, Plant, maroc, Ad Birket el-Häggy. — — — squarrosa AURRAY, — Plantago ægyptiaca J4ce. Rd. — —'} indica, in Ægypto ex LINN. Spec. pl. CISSUS rotundifolia VAHL. — Sælanthus rotundifolius FORSK. — Arab. s) Ag oudneh rounty, id est, auricula græca. Kh. AMMANNIA ægyptiaca WILLD. Hort. berol. [H. N. Botanique, pl. 15, fig. 3.] = — - auriculata Wizzp. [H. N. Botanique, pl. 15, fig. 2.] In agris orÿyzæ cum præcedente, ELÆAGNUS orientalis LINN. — Arab. Va negdeh. Kh. (l I ( l ! 1 _ — — spinosa, in Ægypto ex LINN. Fadem est ac præcedens quæ spinas interdum exserit. PI BYP F QUE SD) 189. 190. T9. 192. 193. 194. 195- 196. 197. 198. 199. 200. 201: SALVADORA persica LINN.— Cissus arborea FORSK, In monte Ghareb Æg. sup. — Arab. J\ râk. PTERANTHUS echinatus Dezsr, Flor, atl. — Camphorosma pteranthus LINN. Kd. ORDO, DIGYNIA. CUSCUTA europæa LINN.— Arab. de hamoul, Ks. — — — monogyna V4xz. Non procul à Gyzeh in hortis, BERTHE. HYPECOUM patens W1zzp. Hort. berol. — Mnemosilla ægyptiaca FORSK. Ad. ORDO; L'ETRA GYNIA: POTAMOGETON crispum LIN. Rs. Ks. — — — marinum ZINN. Rosettæ et Damiatæ. RUPPIA maritima LINN, Alexandriæ, et in aquis lacûs Menzaleh. TILLÆA muscosa LINN. In arvis ad Birket el-Häggy. CLASSIS V, PENTANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. HELIOTROPIUM europæum ZLINN. — Arab. ox sakeräân, id est, inebrians. As. = — — supinum ZZNN. — Lithospermum heliotropioïdes FORSK. As... KS, = — — crispum DEsF, For, atl. — Lithospermum hispidum FORSK. Kad. — — — Jineatum W4AZ, Emendato Forskalii synonymo. [ H. N. Botanique, pl. 16, fig. r.] —Litho- spermum digynum FORSK. Circa Pyramides frequens.—Arab. 4ke >, raghlch, LS netech, jet LP forreych. EL LIU STRATEO, $5 202. LITHOSPERMUM tenuiflorum ZINN, Suppl As. . 203. — — — Arnebia. — Lithospermum tinctorium WAHL, — Arnebia tetrastigma ÆFORSK, — Arab, an | 5 S chagaret el-arneb, id est , herba Iéporina. Kd. 204. — — — tinctorium ZINN. Spec. plant, edit, 1753. — Anchusa tuberculata FORSK. Ad. 20$. — — — callosum V4zz. [H. N. Botanique, p/. 16, fig. 2.) —Lithospermum angustifolium FORSK, — Arab. all hälameh, ex Forsk. Kd. 206. — — Ÿ ciliatum, ex FORSK. Flor. æoypt. 207. ANCHUSA undulata ZINN. Ad. L 208. — — — spinocarpos FORSK. [ H. N. Botanique, p/. 17, fig. 3] Kd. 209. — — — hispida FoRSr. Ad Kd. 210. — — — asperrima, Prope Abouqyr. 211. — — — flava FORSK. — Asperugo ægyptiaca LINN. As. 212. — — Ÿ Milleri WrzzD, — Ex Ægypto, culta in Hort. paris. 213. Ÿ ONOSMA orientalis WIzLD. — Cerinthe orientalis LINN. Ex Ægypto, Hasselquist in Linn. Amœæn. acad. 4, p. 267. 214. BORRAGO offcinalis LINN, — Arab. Er) AE lesän el-tour, id est, Tingua Bovis. Kh. 215$, — — — africana LINN,.— Borrago verrucosa FORSK, — Arab. as losseyq , id est, adhærens; C7 horreyg. Kd. 216. ECHIUM prostratum DESFONT. Fort. paris. [H. N. Botanique, p/. 17, Sig. 1] — An Echium sericeum WAHL!/ — Arab. _» ! Se: säq el-hamêm. Ad Rd. 217. — — -— setosum VA4AL, [H. N. Botanique, pl. 175 fig. 2.] As 218. — — — Jongifoïium. / PJ. 16, fig. 3.] Ks. 219, — — — Rawolfi. / PL 19, fig. 3.] In insulis nifoticis prope Boulaq et Gyzeh. 220. ECHIOCHILON fruticosum D£sr. Flor. atl. Ad. 221. ANAGALLIS arvensis LINN, Ks. + 222. CONVOLVULUS arvensis LINN. — Arab. ske o’lleyg, id est, suspensus. Ks. Rs. 223. — — Ÿ hastatus FORSK,, VAHL. An verè distinctus à præcedente cujus peduneuli nonnunquam biflori! 224, — — ‘Y hederaceus ZINN.— Kahiræ in hortis ex Forsk. 225. — — ‘Ÿ Scammonia ZINN. —Damiatæ ex Hasselquist, 226. — — - siculus ZINN. As 227. — — — Imperati VAHL, — An Convulvulus biflorus FORSK.? Prope Abouqyr. 228. — — — althæoïdes LINN. Ad. 229. — — — caïricus LINN, Inter arundines ad ripas Nili, et passim in hortis. — Arab, oral Ce : set el-hosn, id est, venustus; CAS di cherk falek, id est, Iris seu coœlestis arcus. 230, —,— — Forskali. / PI 18, fig. 3.] Convolvulus Cneorum F0RSKx, — Arab, Uelo beyéd. Kd. 231. — — — armatus. /P/. 18, fix. 2.] In deserto ad fontem el-Touâreq prope Soueys. À 232. SPHENOCLEA zeylanica GÆRTN, — Pongatium JUs5, In agris oryzæ, Rosettæ et Damiatæ, + T COFFEA arabica LINN. In hortis Ægypti olim hospitata, teste Alpino.— Arab. es bun , nomen arbusculæ et seminum ; c965 gahoueh , decoctum pro potu. MIRABILIS Jalapa Lrw. — Arab. JAN CL & cheb él-leyl Kb. . CORIS monspeliensis ZINN, Ad. . VERBASCUM sinuatum ZzWN. Prope Sâlehyeh. + — — — spinosum ZINN. Ad, . DATURA Stramonium LINN. — Arab. Al el-nefyr, id est, tuba. Ks. — — — fastuosa LINN, — Arab. B] 4 le; zamr el-sultän, id est, tuba Sultani. HYOSCYAMUS reticulatus ZINN. Vernalis circa Sälehyeh et Qatyeh. — — —.albus ZINN. As. Arab. e beng. — — — Datora FORSK, — Hyoscyamus muticus LZNN, — Arab. D$Ù tétourah , 5 Sem elfér. Kd Æg. sup. ; — = — senecionis, ex Ægypto W1zLzD, Enum, plant, : NICOTIANA Tabacum ZzWw. — Arab, RES dokhän , id est, faumus. Kh, 56 FLORÆ ÆGYPTIACÆ 245$, 246. 247. 248. 249. 250. 2$1, 252; 25.3: 254. 255» 256. T0 258. 259. 261. — = — rustica ZINN.— Arab. 22 Qjle$ dokhän akhdar, id est, Nicotiana flore viridi. Cofitur circa Belbeys. PHYSALIS somnifera ZINN. — Arab. ob morgén, id est, corallium, è colore fructüs; vel oh sakerän, inebrians. As. Ks. SOLANUM Pseudocapsicum ZzNN. Kh. — — — microcarpum WA4HL, —Solanum diphyllum FORSK, An à Solano Pseudocapsico diversum? — — — Lycopersicum LINN.— Arab. Les LlÉxe bydinoän loumaten, — - — nigrum LINN. « vulgatum. — — — B patulum. — — — y villosum. — Solanum ægyptiacum FORSK. — — — S hirsutum. a, 8,739, Arab, ei cas c'nebel-dyb,idest, uvaLupi. As. Rs. Ks. — — = æthiopicum ZINN. — absäll te bydingän el-qoutah, id est, Solanum calathis idoneum; vel «955 ls tiffäh dahaby, mala aurea; 4 b5 tiféh el-heb, poma amoris. — —— Melongena LINN.— Arab. ave bydingän. Kh. --- coagulans Forsk. [H. N. Botanique, pl. 23, fix. 1.] Circa Syenem et Philas. Incolis Dia Raderänbes. CAPSICUM frutescens Lrw.— Arab. &\ Ja félfel ahmar. Kb. LYCIUM europæum ZINN. — Arab. we a'ouser. Alexandriæ et Damiatæ. ERYTHRÆA Centaurium RICHARD in Persoon Synops, — Gentiana Centaurium LINN. — Arab: ou 28 qantaryän, vel Ve L3 gantaryoun. . — — — spicata. — Gentiana spicata ZINN. In Delti. CORDIA crenata. / PL. 20, fig. 1.] — Sebestena Fee ALPIN,— Arab. Ls) Le mokhayer reumy, Ah. Kh. 262. — — — Myxa ZINN. [H. N. Botanique, p/. 10, fig. et ous domestica ALPIN, — Arab: = mokhayet. Rh Kh. 263. ZIZYPHUS sativa GÆRTNER, DESFONT, — Rhamnus Zizyphus ZINN. — Arab. ol o’unâb, Kh. 264. — — - Spina Christi DEsr. Flor. atl. — Rhamnus Spina Christi ZINN. — Rhamnus Nabeca FORSK. — Arab. ju sidr vel Co nabq designat arborem; EE) nabqah ; fructum: 265. VIOLA odorata LINN. — Arab. Cr benefsig. Kh. . VITIS vinifera LINN, — Arab. As e’neb, Kh. . ACHYRANTHES argentea ZamArcx, WizLD. — Achyranthes aspera FORSK. Ks: . CELOSIA margaritacea LINN, Ks. — — — Janata ZINN, Vid. Æruam tomentosam in Diœcià Pentandrii. 269. ALTERNANTHERA sessilis, — Illecebrum sessile LINN. — Arab. Jef hamoul, Rs. 270. PARONYCHIMA nitida GÆRTN, — Illecebrum Paronychia ZINn. Rd. 271. — — — arabica. / PL 18, fig. 1.] —Wlecebrum arabicum LINN. relie Forsx, Kd. 272. GYMNOCARPOS decandrum FORSK., DESFONT. — Arab. > garadah. Kd. 273. POLYCARPEA memphitica. / PL 24, fig. 2.] — Corrigiola repens ForSK. In insulis Roudah et el-Dahab , locis arenosis. 274. — — — fragilis. / PI, 24, Sig. 1.] Kd. 275$. THESIUM humile VAHLz, Ad. 276. NERIUM Oleander ZINN. — Arab. 4k&5 rifleh. Kh. 277. PERGULARIA tomentosa ZINN. — Asclepias cordata FORSK, — Arab. 5 APE & leben el-homärah, id est, lac Asinæ; vel 4x£> dymyeh ex Forsk. Kd. 278. PERIPLOCA Secamone LINN. — Arab. GHA] libbeyn. 270. T CYNANCHUM viminale, in Ægypto LINN. ex Alpin. 280. — — — pyrotechnicum F0r5kK, [H. N. Botanique, p/. 20; fig. 3.] Kd. 281. — — — acutum ZzNn, As. Rs. 282, — — — Argel. / PL, 20, fig. 2.] In desertis Philarum proximis. — Arab. DES argel, 283. ILLUSTRATIO. F7 283. ASCLEPTAS procera WrLLD, — Asclepias gigantea LINN. ex Alpin. — Arab, xs o’char; fructus dicitur it u2+ beyd elo'char, Ægypt. sup. — Incolis Nubix Jet abouk, 284. = — — fruticosa ZINN, Rosettæ in horto semel visa, ORDO, DIGYNIA. 285. HERNIARIA fruticosa ZINN. Ad. 286. F CHENOPODIUM rubrum Z1wNw. In Ægypto ex Forsk. 287. — — — murale ZINN. An Chenopodium flavum ÆORSK,! — Arab. AÂÂXS menteneh , id est, fœtens. Ks, ë 288. — — — album ZLINN, — Arab, HS" aus Jfisah KI@b, id est, flatus à ventre canis. Ks. 289. BETA vulgaris ZENN, — Arab. er selg. Kh. 290. — — — rubra. — Beta rubra radice rapæ, BAUH, Pin. — Arab. ES bangar, Kh. 291. —— — maritima LINN, « glabra As. Ks. 292. — — — R pilosa Às. : 293. SUÆDA baccata Forsx, Genus à CI. Forskalio constitatum, à voce arabicâ 3swv soud, dav souyd, quam sæpe audivi de plantis generis salsuginosi, exempli gratiâ, de Salicornià strobilaceä. Voces gallicæ soude, alkali, tartre, ex arabico sermone originem trahunt, As UKs, 294. — — — vera FORSK, — Arab. >eu soud. As. 295$. — — — vermiculata FORSK, As. 296. — — — salsa. — Salsola salsa ZINN. Rs. 297. — — — hortensis FORSK, — Arab. HP tartyr. Ks. 298. — — T pinnatifida. À CI. OLIVIER circa Alexandriam reperta. 299. — — — fruticosa. — Salsola fruticosa ZINN.— Suxæda monoïca FoRSk, As. Rs. 300. — — — mollis. — Salsola mollis DESF, For, at As. Et circa Sälehyeh. 301. SALSOLA Kali ZINN. Ad. Rd. 302. — — — Tragus ZINN. Ad. Rd. 303. — — — articulata FORSK,— Anabasis aphylla ZrNN. Ad. Kd. 304. — — — oppositifolia DESF, Flor, atl, — Salsola longifolia Forsk. Ad. 305. — — — echinus ZA4BILLARDIERE. [H. N. Botanique, pl. 21, fig. 2.] — Anabasis spinosissima LINN.— Salsola mucronata FORSK, Ad. 306. — — — alopecuroïdes. / PL, 21, fig. .] Prope pyramides Gyzenses. 307. — — — tetrandra FORSK. [ PI. 21, fig. 3.] Ad. Variat caulibus erectis vel prostratis. 308. — — — inermis FORSK. Ad. 309. — — — villosa. Ad. 5 310, — — — foœtida. — Arab. mulleyh, Æg. sup. 311. — — — glomerulata. Ex Lipp. in herb. Jussiæi. ; 312. TRAGANUM nudatum. / PJ, 22, fig. 1.] Kd. Salsolæ proximè accedit; sed diflert calyce basi in ossiculum monospermum indurato, et suprà nudo, nec in membranas laterales 1 P. producto. Nomen à voce grec Tezaos, quæ Tragi vel Salsolæ synonyma ést apud Dioscoridem, lib. IV, cap. 51. + CORNULACA muricata. — Bassia AZLIONI, ex Linn, Mant. pag, 512, — Salsola muricata LINN.— Salsola monobractea FoRsK, K d. Calix spinulas, nec membranas ut in Salsolis, producit. Cæterùm genus est Salsolæ prorsus æmulum. Cornulaca vox est synonyma Tragï aut Salsolæ in appendice Dioscoridis, lib. IV, cap. 5 r. 314. — — — monacantha, / PL. 22, fig. 3.] — Salsola ferox Lippr Ms, Crescit circa Pyramides cum præcedente. 315: CRESSA cretica LINN. Ad. Et ad littora maris prope Soueys. — Arab. 1 nadäouch, id est, roscida, + GOMPHRENA globosa ZINN. Kh.— Arab, X4S a’nbar. H. N. TOME Il. H s8 317 318. 35H19; 520: 321. 322; 323 324; 325: 326. 327: 328. 329. FAO RTE: MO NEPERTAIC Æ ULMUS campestris ZINN. Kahiræ in hortis rarissimè visa. Ægrè in fruticulum assurgit. — Arab. & + Harkhafty. ERYNGIUM campestre ZINN. À d. — Arab. Ji chagägel. — — — dichotomum Desr, For, atl.. Ad. BUPLEVRUM proliferum. [H. N. Botanique, pl. 22, fig. 2.] Ad. = = - rotundifolium ZINN, As, = — = semicompositum ZINN. ÀÂs. TORDYLIUM suaveolens. Ad. + HASSELQUISTIA ægyptiaca LINN. Habitat in Oriente, BUXBAUM, In Arabià et Ægypto, HASSELQ. ex Linn, Am, acad, tom, IV, p. 270 êt 453. + CAUCALIS daucoïdes ZINN. Idem ac Conium Royeni ZINN. Ex Ægypto, in Reich. Spec. pl = — — maritima DEsr. Flor. atl, — Caucalis pumila Gouan. Ad. = — - glabra Forsk, [H. N. Botanique, pl. 23, fig. 2et 3] Ad. Rd. — — — tenella. {PL 21, fig. 4.] Ad. = - = Anthriscus. — Tordylium Anthriscus ZINN, — Scandix infesta FORSK, — Arab. olbaädt F8 gazar el-cheytän. Ks. de koumeleh, aut fortè es goumeyly, Damiatæ. 0: — — — nodosa. — Tordylium nodosum Z7wN. As. . DAUCUS Carota LINN.— Arab. 2e gezar. . AMMI majus ZLINN. As. .— — — Visnaga DESFONT. Flor. atl, — Daucus Visnaga LINN, As. — — Ÿ copticum, in Ægypto JACQ. ex Forsk. ; “7 SISON Ammi, in Ægypto ex LINN. Spec. plant. , edit, 3%, P, 30% . BUBON tortuosum DEsr, Flor. atl. — Crithmum pyrenaïcum FORSK. — Arab. Jad Crau chebet el-gebel , id est, fœniculum deserti. CUMINUM Cyminum ZLINN.— Arab. US$ Lammoun; semina in officinis venalia. . CICUTA virosa ZINN. Copiosè illun crescere in insulà Roudah prope Kahiram refert HASSELQUIST It. p. 461. . CORIANDRUM sativum ZLINN. — Arab. = kouzbarah. Kh. SCANDIX Cerefolium ZINN, — Arab. LÉ UE bagedounis frangy, id est, scandix europæus. K h. «= — Ÿ trichosperma, in Ægypto ex LINN. . F SMYRNIUM ægyptiacum, ex H45SELQUIST. Linn. Am; acad. 4, p. 207. 343. ANETHUM graveolens ZINN. K h. — Planta arabicè dicitur CxAX chebet, et semina vocantur Et chamar. 344. CARUM Carvi ZINN. — Arab. ,— karäouih ; semina in officinis venalia, 345. PIMPINELLA Anisum LINN, — Arab. GES yansoun ; in officinis. 346. APIUM Petroselinum, LINN, — Arab. ds magedounis, vel V3 bagedounis, Kh. 347. — — — graveolens LINN,— Arab. U® Le kerâfs. ORDO, TRIGYNIA. 348. RHUS oxyacanthoïdes Desr, Hort. paris. Æg. sup. prope re Ghareb. 349. TAMARIX gallica LINN. Kd.— Arab. ETAA ne ve Le lobe hatab ahmar, id est, Hgnum rubrum, 350. — — — africana DEF, Flor, atl. Æg. sup. 351. — — — orientalis FORSK,— Arab. AM are. Kh. 352: — — — passerinoïdes. Hanc in provinciâ Fayoum legit JOMARD ; eamdem quoque legit REDOUTÉ, locis desertis prope Terrâneh. 353: ALSINE media ZINN, — Arab. j|3 gezäzeh, id est, vitrea, Rs. Ks. + — = — prostrata FORSK, / PI, 24, fi. 4.] Prope Birket el-Häggy. +. — — — succulenta. / PI. 24, fig, 3.] .Kd, 356. 369. 370. 372: 373: 374. 375- 376. 377+ C2 37 379: 380. 381. 382. 383. 384. 385. 386. 387. 388. 389. 390. LEO SR PO! $9 ORDO, PENTAGYNTA. STATICE Limonium Z1zNN, Rs. — Arab. jh SA €7q angibär. . — — Ÿ incana LINN. — Statice speciosa, in Ægypto ex FORSK. . — — — monopetala LINN,— Arab. «Se zeyty, ex Forsk. + — — — pruinosa ZINN. — Statice aphylla FoOrsk, Ad. Et ad littora maris Rubri. + — — — ægyptiaca VIVIANT in Person Synops. [H. N. Botanique, pl. 25, fig. 3.] Ad, .— — -— tubiflora. / PL. 25, fig. 2.] Ad. . LINUM usitatissimum LINN, — Arab. ot kittän, Oleum è semine Lini vocatur be Cr zeyt hr. .— — — hirsutum ZZNN, Non procul à Sälehyeh, et in Syrià, SAVIGNY. CLASSIS VI, HEXANDRIA ORDO, MONOGYNIA. . * BROMELIA Ananas LINN. Damiatæ olim culta ex Hasselq. It. : NARCISSUS Tazetta LINN. Damiatæ spontanea in hortis. — Arab. 1 narois. + PANCRATIUM maritimum LINN. Ad. — Arab. (paye sousan, . ALLIUM Porrum Zwn. Kh. — Arab. Ce Horrér, — — subhirsutum ZINN. Ad. — — — sativum ZINN, — Arab. Les coum, Affertur è Syriâ. — — —.roseum ZINN, Ad. . — — — pallens ZINN. Ad. — — — Cepa ZINN. — Arab. Je basal, Cepæ optimæ circa vicum Rahmânyeh cultæ, Mekkam usque exportantur. T ORNITHOGALUM arabicum, in Ægypto ex LiNN. Flor. palæst, — — Ÿ elatum ANDREWS Botanists repository, pag. ÿ28, ex Alexandrià. . SCILLA maritima ZINN.— Arab. Jaiul asqyl, Ski Jus basal el-fâr. Scillæ recentes ab Arabe quodam, è deserto, Alexandriam adyectæ. ASPHODELUS fistulosus ZLINN. Kd.— Arab. Oo bourag, ex Forsk. ASPARAGUS aphyllus ZINN., et Asparagus horridus ejusdem. — Asparagus stipularis et Aspa- ragus Agul FORSK. — Arab. ile a'éqoul; vel «Dev chouk, id est, spina. . POLYANTHES tuberosa ZINN,. Kh. HYACINTHUS serotinus LINN, — Arab. L > bereyt, wls; za'ytemän, ex Forsk. Kd, MUSCARI comosum ZOURNEF., DESFONT. — Hyacinthus comosus ZIwN. As, ALOË vulgaris LINN, — Aloë variegata FORSK. Kh. — Arab. JL sabbärah, JUNCUS acutus ZINN., SMITH Flor. brit, Ad. — —- maritimus SMITH, Flor, brit, — Juncus acutus 8 ZINN, —Juncus spinosus FORSK, Ad. — — — rigidus DEsr, Flor, atl, In arenä ad scaturigines deserti. — — — multiflorus DEsr. Flor, atl, — An Juncus subulatus FORSK.! — — — bufonius ZINN. In insulis niloticis, T FRANKENIA hirsuta ZINN, Alexandriæ ex Hasselquist. in Flor. palæst. — — — pulverulenta LINN. As. £ — — - revoluta FORSK, — Arab. A AS nemeycheh, A d. ORDO, D1G Y NTA. ORYZA sativa LINN. Colitur Rosettæ, Damiatæ, et parcè in provincià Fayoum, — Arab. 5 ji arz, et vulg pronunciatur 5 TOUZ. H. N. TOME IL H 2 60 397% 392 393° 394- 395: 396. 397+ N 39 4o4. 405. 406. 4o7. 408. 409. 2) ÉLIOR GE AIGY PITAIAC Æ ORDO;: 7RIGYNTA. RUMEX ægyptiacus LINN. Rs Ks. — ‘* Acetosella LINN, Damiatæ ex Hasselq. It. p. 50$. = — — dentatus ZINN. Rs, — — — vesicarius LINN. Kd.— Arab. Luis hunbeyt, ex Forsk. — — — roseus ZINN.—Rumex pictus ForsKk, Rd. — Arab. UE hommeyd. ; — = — spinosus LINN, — Rumex spinosus et Rumex glaber Forsx. As. Kd. — Arab, dd JE Jigl el-gébel, id est, rapum è regione montos, scilicet, è deserto. ORDO; HEXAGENLA. OTTELIA alismoïdes PERSOON Synops.— Stratiotes alismoïdes ZINN. Rosettæ in agris oryzæ.— Arab. à " 452 oucdneh cheytäny, id est, auricula diabolica. ORDO, POLYGYNIA. ALISMA Plantago LINN, Rs. CLASSIS VII, HEPTANDRIA. CLASSIS VIII: OCTANDRIA: ORDO, MONOGYNIA. . TROPÆOLUM majus Zzn. — Arab, AU 5 sortour el-béchah. At. . + AMYRIS Opobalsamum ZINN. — Le Baumier de la Mekke. — Arab. ou beyläsän, Tempore Belloni annis 1546-1549 in horto Matareæ, prope Kahiram, culta fuit hæc arbuscula ; et anno 1580, à P. Alpino non ampliüs visa. . LAWSONIA inermis. — Lawsonia spinosa et Lawsonia inermis LINN, — Arab. FÈREE _ tamrahenneh designat flores et arborem ; Fée henneh, folia in pulverem trita. — re Incolas Nubiæ LE kofreh. . PASSERINA hirsuta LINN. — Passerina Metnan FORSK. — Arab. le metnên, Ad. . SODADA decidua FORSK.—[H. N. Botanique, p/. 26, fig. 2.] Æg. sup. — Arab. EVE honbak (hombac), ex Lippi Ms. — In Arabi ren sodäd, ex Forsk. OR D OL ARTCNNIA POLYGONUM Persicaria ZINN. Rs. — — — éalicifolium. Rs. — — — tumidum. Nodis tumidis. Damiatæ. — — Ÿ melastomæum. In Ægypto, ZiPP1. V.S. herb. Vaill. — — À multisetam. Videtur varietas præcedentis, folio breviore, Lirpr Ms. et herb. Vaill, — - — orientale ZINN, Kh. IL LUS TER AT aHO, 61 410, = = = maritimum ZINN, Ad, 411, = = = aviculare ZINN, As. 412. = = — herniarioïdes. In insulis niloticis. 413. CARDIOSPERMUM Häalicacabum Liv, Kh . ORDO, TETRAGYNIA, 414. ELATINE luxurians. [ H. N. Botanique, pl. 36, fig. 1.] — Bergia capensis LIMN. —iBergia verticillata Wzzzp, — Bergia aquatica RoxzuRG. Rosettæ et Damiatæ in agris oryzæ. 415. FORSKALEA tenacissima ZINN. — Caïidbeja adhærens FORSK, — Arab, älal lusség, Kd: 416. KALANCHOË ægyptiaca ADANSON, DECANDOLLE. — Cotyledon nudicaulis ZINN. — Cotyledon deficiens FORSx. Kh.— Arab. 439 ouedneh , 14 est, auricula. CLASSIS IX, ENNEANDRIA. CLASSIS X, DECANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. 417. CASSIA Absus ZINN. Kh. Ë seminibus ab interiore Afric adyectis. — Arab. pa chichn, 418.— — — occidentalis ZzNN. Kh. 419. — — — acutifolia. / PL 27, Jig. 1] — Le Séné d'Alexandrie où à feuilles aiguës, — Arab. LoXAa Lau send sa’ydy, id est, senna thebaïca; vel sa re) Au sen& lesên cl-a’sfour, id est, senna lingua avis. In vallibus desertis, insulæ Philarum proximis. 420, — — — Senna Lin. Selectis synonymis. — Le Séné de Tripoli ou de Barbarie , à feuilles obtuses, — Arab. d> kw sen& gebely, id est, senna è monte seu deserto. — Aliis sd < A Lex (us sen& beledy vel baharäouy, id est, senna ægyptiaca seu nilotica, — Apud multos dicitur HE Ji Ae lu senû mekkeh vel hegäzy; senna Mekkensis vel è provinciâ Hepäz. Kd. Et in Æg. sup, at. — = — Sophera ZINN. — Arab. n& soffyr. Kh. 422. — — Ÿ ægyptiaca Wizzp. Enum, plant. hort, berol. 423. CATHARTOCARPUS Fistula PERSOON Synops, — Cassia Fistula LINN. — Arab. gi le khyâr chanbar. Kh. Rh. 424. RUTA chalepensis LINN, — Arab, CS sendeb, Kh. 425. — — — tuberculata FORSK, — Arab. AÂAAS megennyneh. K d.—In Nubii Jia! + geroyg el-ghazäl. 426. MELIA Azedarach LINN, — Arab. x; zenzalakht Kh. à 427. BALANITES ægyptiaca. / PL. 28, fig. 1.] — Myrobalanus Chebulus VESLING Obs. pag. 205. — Ximenia ægyptiaca ZIWN. Kh. Et in Æg. sup. 428. ZYGOPHYLLUM simplex LINN. — Zygophyllum portulacoïdes FORSK. — Arab. Je» garmal, ex Forsk. Kd. : 2 429. — — — coccineum ZINN, — Zygophyllum desertorum FORSK, — Arab. ASE kammoun Karmäny, id est, cuminum Karamaniæ, propter semina aromatica. Kd. 430. — — = album ZINN, — Zygophyllum proliferum FORSK, — Arab. Qe® hamcd, nomen col- lectivum plantarum in quibus est salsedo. Ad. — — — decumbens. / PJ. 27, fig. 3.] — Arab. gsiw sqoueh. In valle el-Tonâreq. 431. 432. FAGONIA cretica LINN. Kd. 62 FLORÆ ÆGYPTIACÆ 433. = — = arabica LINN. — Arab. D& gemdeh, ex Forsk. Kd. 434. — — - glutinosa. [H. N. Botanique, p£. 28, fig. 2.] — An Fagonia scabra Forsk.! Kd. 435. — — — mollis. / PL 27, fo. 2.] In isthmo Soueys. 436. — — — latifolia. / PL 8, fig. 23.] Ad Gebel Ahmar juxta Kahiram. 437. TRIBULUS terrestris LINN. — Arab. à: < Lopi & kharchoum elnageh ; —gatha , eddræjsi, ex Forsk. Ks, Æg. sup. — In Nubià = QUES kenyssä koul. 438. — — — alatus. — Tribulus pentandrus FORSK. Kd. Æg. sup. 439: JUSSLÆA diflusa FORSK, In Deltä. — Arab. forçaa vel frækahl, ex Forsk. OMSDOPDPECGNENT-A. 44o. GYPSOPHILA Rokejeka. [H. N. Botanique, pZ. 29, Sig. r.] — Rokejeka capillaris FORSK. — Arab. 84, rogeyeqah, id est, exilis. In isthmo Soueys. 441. DIANTHUS Caryophyllus LIWN. — Arab. DJs goronfel. Kh. ORDO, TRIGYNIA. 442. CUCUBALUS ægyptiacus, ex LINN, Mant, 385. 443. SILENE canopica. Rd. 444. — — — rubella ZINN. [H. N. Botanique , p/. 29, fig. 3.] Damiatæ in agris Trifolii alexandrini. 44s. — — — villosa FORSK. In arenosis circa Birket el-Hâggy. 446. — — T ægyptiaca, ex LINN. Suppl. plant, pag. 241. 447. — — — succulenta FORSK. [H. N. Botanique, p/. 29, fig: 2] Ad. 448. ARENARIA rubra ZINN. As. Rs. Ks. 449: — —‘# media ZINN. — Arenaria marginata DECAND. — In Ægypto, GRANGER, ex Catalog. Ms. Hort. paris. a.° 1736. Eamdem prope Alexandriam legit CI. OLrviEr. 450. — — — procumbens Vaxr. Ad. ORDO, PENTAGYNIA. 451. SEDUM confertum. — Sedum, n.° 243, FORSK. Flor, ægypt. — Arab. Pi «3 hay a'lem, Kh. 452. OXALIS corniculata LINN, — Arab. Ak2& hamdah, id est, acida. Kh. 453. LANCRETIA suffruticosa. / PI, 25, fig. 1.] Spergulæ affinis ; nascitur ad ripas Nili juxta Philas et Syenem. Dicatur gratæ memoriæ optimi MicH. ANG. LANCRET, qui insulam Philas descripsit, Antiquit, Vol, I, cap, 1. ORDOMDECAGENTA 454. NEURADA procumbens ZINN. — Arab. (y\aæu sa'dän. Ad Kd. 455. PHYTOLACCA decandra ZINN, — Arab. dAxau sabaghah, id est, tinctura. Kh. CLASSIS XI, DODECANDRIA. ORDO, MONOGYNIA. 456. PEGANUM Harmala ZINW. — Arab. Je,= harmal. Ad. 457: NITRARIA tridentata Desr. Fr, arl, — Peganum retusum FORSK. — Arab. SE oharged. Ad. Et Damiatæ in desertis. 458. PORTULACA oleracea LINN. — Arab. dkæ, rigleh. Kh. — In Nubii _olRé svgertémém 459. LYTHRUM Thymifolia LiNN. A d. Et circa Birket el-Hâgey. LL USE RATER; 6; ORDO, TRIGYNIA. 460. RESEDA Luteola LINN. — Arab. lb Hyhah, Ks. 461. — — — canescens ZINN, — Arab. LL, denäâbä, Kd. 462. — — — alba LINN.— Eadem est Reseda undata ZINN.— Reseda decursiva Forsxk, Ad, Kd, 463. — — - mediterranea LINN. — Reseda tetragyna FORSK. —. Arab. ES romeykh, ex Forsk. Kd. 464. — — — subulata Ad Kd. 465. — — — pruinosa — An Reseda Phyteuma FORSx.! Foliorum lJaciniæ crassiusculé, crustÀ pruinosâ tectæ. Alexandriæ in deserto semel reperta. Eamdem in Syrià legit D. BERTHE. 466. — — -— odorata ZINN, Ah. In Syrià et Barbarià sponte crescens. Videtur Reseda ægyptiaca LiNN. Flor. palest, in Amæn. acad, tom. IV, p. 457: 467. OCHRADENUS baccatus. [H. N. Botanique, pl 31, fig. 1.] Flores Resedæ spicati, sed corolla nulla, et fructus baccatus. Frutex, odore Erucæ et Capparidis. Folia basi utrinque glandulà Juteolà stipata. Inde nomen genericum &xes pallidus, ädiv glandula, In valle fontis el-Touâreq, prope Soueys; et in Æg. sup. . EUPHORBIA Tirucalli LrwN. In horto Kahiræ. + — — — thymifolia FORSK, Descr, p. 194. Æg. sup. et Damiatæ. + — — — Peplis ZINN. — An Euphorbia dichotoma FORSK.! As. + — — — punctata. / PI, 30, fig, 3.] Ad. 472. — — — parvula. / PL 30, fig. 4.] As. 473. — — — Peplus LINN. — Arab. Ah melekeh, 474. — — — retusa FORSK. — Arab. asles no’mänyeh. Kd. 475. — — ‘T tuberosa, in Ægypto ex LINN. Amœn, acad. tom. LIT, 117. 476. — — — alexandrina. / PI, 30, fig. 2.] — An Euphorbia obliquata FORSK,! Ad. 477. — — — Paralias LINN. Ad. 478. — — — helioscopia LINN. Ks. Æg,. sup. 479. — — — calendulæfolia. / PL. 30, fo. 1.] Ks. ORDO, TETRAGYNIA. 480. CALLIGONUM comosum Z’HERITIER, Kd. 48 mn 482. 483. 484. 485. 486. ORDIO; PEN TEA CHAN, + GLINUS lotoïdes LINN. — Arab. axé ghobbeyreh. Ad ripas Nili arenosas. CLAËSSIS XI ICOSANDAILA ORDO, MONOGYNIA. CACTUS Opuntia ZrwW, Ah. Kh. . Ad sepes in provincià Fayoum. — Arab. GE et lyn frangy, id est, ficus europæa. MYRTUS communis LIWNN, — Arab. Y as, Que mersyn, Kh. PUNICA Granatum Zzwn. Arab. QVes roummén. Kh. AMYGDALUS Persica LINN., Arab. => koukh, Kh. —— — communis LINN. — Arab. zt louz. In hortis quandoque sata. Fructus copiosè adve- huntur è Cypro et Syrià. GA FLORÆ ÆGYPTIACÆ 487. PRUNUS Armeniaca ZLINN, — Arab. TS mechmech. Kh. 488. — — — domestica LINN, — Arab. (525; bargoug. Kh. ORDO, PENTAGYNIA. 489. PYRUS communis LINN, — Arab. ré kommitrik ; sb st kommitrih beledy, pyra hor- torum Ægypti ; (S) 574 kommitrih toury, pyra ex urbe Tor et è monte Sinaï Kahiram quotannis advecta. 490. - — — Cydonia ZINN. — Arab. Jets sefargel. Kh. 491 = —- Malus ZINN. — Arab. le 25 tiféh; alu ci tiffäh châmy , mala è Syrià advecta ; «sk Li tiffäh beledy, mala ex hortis Ægypti. 492. MESEÉMBRYANTHEMUM nodiflorum ZIVN, — Arab. Jul ghäsoul, Ad. 493. — — — copticum Lin. Kd. 494. — — — crystallinum ZINN. As. : 495. AIZOON canariense LIwN. — Glinus crystallinus FORSK, — Arab. Ali ÂS heches el-beled. Kd. ORDO POLVYGTNTA 496. ROSA centifolia LINN. — Arab. DE ouard, Kh. 497. — — — alba LINN. Kh. 498. RUBUS fruticosus ZINN,. Rs. 499. 500. POTENTILLA supina ZINN. In insulis niloticis. CLASSIS XIIT,: POLYANDRTITA. ORDO, MONOGYNIA. CAPPARIS spinosa LINN, -— Arab. = kabar, Ad. — — — ægyptiaca LAMARCK. [H. N. Botanique, pl. 31, fo. 3.1 Æg. sup. so1. 5o2. CHELIDONIUM hybridum ZINN. — Chelidonium dodecandrum FORSX, — Arab. lai Ja) rigl el-ghoräb, id est, pes corvinus. As. 503. PAPAVER Rhœas ZINN. Às. 504, = — — somniferum LINN, — Arab. sil so! abou el-noum, id est, somniferum. Kh. 505: — — — hybridum LINN. As. 506. NYMPHÆA Lotus LINN, — Lotos HERODOT. lib. 11, cap. 92; THEOPHRAST. Hist. plant, lib. IV ,'cap. 10, pag, 437. — Arab. ET noufar ; ni RAS bachenyn el-khanz yr. Flores dicuntur in hac plantä, ut) in sequente, Jaill us a’râys el-nyl, id est, uxores Nil. Rosettæ et Damiate. 507. — — — cærulea SAVIGNTY. — Lotus cyaneus ATHENÆI, lib. III, Cap. 1, p. 72 — Arab. e CAM bachenyn a’raby. Radix dicitur Lu byéroû, Rosettæ, Damiatæ ; et in aquis Birket el-Rotly, juxta Kahiram. à = —Ÿ Nelumbo ZINN. — Nelumbium Juss., Wizzp. — Lilia fructu favo vesparum simili, HERODOT, loc. citat. — Faba ægyptiaca THEOPHR, lib, IV, cap, 10; STRAB. üb, XVII, pag. 677. In Ægypto non amplibs reperitur. Notissimä in Indiä orientali. 508. * HELIANTHEMUM niloticum Desr, Hort, paris, — Cistus niloticus LIN. In Ægypto, ex Linn. et ex Catalog, Ms. Hort, paris. a° 1731. 509. — — Ÿ ægyptiacum DESFONT, Hort, paris, — Cistus ægyptiacus LINN, In Ægypto, ex LINN. et ex Catalog, citat. , s10. ÿ1$s 516. Je 518. 519. 520. s21. $22. 523- ILLUSTRATIO. 65 .— — — Lippi — Cistus Lippit ZINN, — Cistus stipulatus FORSK. Ad. — Arab. OES khocheyn , ex Forsk. + — — — kahiricum. [H. N. Botanique, p£. 3r, fig. 2.] — Cistus stipulatus, Var. 8 ForSx, Kd, + — — — glutinosum. — Cistus glutinosus ZIVN,. Ad. . — — — roseum, — Cistus roseus J4CQ. Ad. + CORCHORUS olitorius LINN. — Arab. dam ele meloukhyeh. Kh. ORDO, TRIG YNTIA: DELPHINIUM Ajacis LINW. Kh. — Arab. el ayékbouk. — — — peregrinum LINN. Ad. ORDO, PENTAGYNIA. NIGELLA sativa LINN, — Arab. e2gau di habbak soudeh, id est, granum nigrum; lou D) $ Lammoun asouéd, cuminum nigrum. — — — arvensis ZINN, As. £ REAUMURIA vermiculata LINN, — Arab. & mulleyh, AS a'dbeh, Ad Kd. ORDO; POLYGANIA ANNONA squamosa LINN, — Arab. abs gechtah. Kh. ADONIS æstivalis LINN. As. — — — dentata. / PI, 53, fig. 1.] Fructu dentato. Ad. RANUNCULUS sceleratus ZINN. — Arab. Ji; 6; zaghlyl. Damiate, CLASSIS XIV, DIDYNAMIA. ORDO, GYMNOSPERMIA. 524. TEUCRIUM Iva ZINN,. — Moscharia FORSK, — Arab, à une meskeh, id est; moschata. À s. 525. — — — Polium ZINN. « album. Ad. 526. — — ‘T @ album corymbosum. In Ægypto ex herb, Juss. 527. — — — y luteum. Ad. 528. — — Ÿ S ægyptiacum. In Ægypto ex herb. Juss. — Teucrium ægyptiacum PERSOON Synops. 529. — — Ÿ creticum, in Ægypto ZLINN. 530. SATUREÏIA capitata LINN, Ad. 531. LAVENDULA stricta. / P1. 32, fig. 1.] Kd. 532. T SIDERITIS teucrüfolia, In Ægypto ex herbario Isnardi apud CI. de Jussieu. 533. — — ‘Ÿ perfoliata LINN. In Ægypto ex herb. Juss. 534. MENTHA sylvestris niliaca. — Mentha niliaca LINN. — Mentha longifolia FORSK, — Arab. (oAäaæ habagbag. Rs. : 535: + — — glabrata Waxz. —Mentha kahirina FORSK.— Arab. NAT lemmäm , > nana, Kh. 536: = — — sativa ZINN. Kh. 537: — — — Pulegium ZINN, — Arab. LAæ hobog. Ad. 538. LAMIUM amplexicaule ZzNN. Damiatæ i in agris Brassicæ oléracex. 539: STACHYS palæstina ZINN. — Arab. Cr) pie Kd. 540. MARRUBIUM Alyssum ZINnN. — Arab. cp \ 5 fiâsyoun, Ad. H. N. TOME II. 1 66 FLORÆ- ÆGYPTIACZÆ 541. + CHINOPODIUM œgÿptiacum ZAMAR OK, WILLD, — Clinopodium vulgare 8 ægyp- tiacum LINN. 542. PHLOMIS fruticosa ZrNn, À d. 543. ORIGANUM xgyptiacum ZINN. — Arab. Us 2 mardaqouch, vel Je 52 re Kth. s44. — - Ÿ Majorana LIN. In Ægypto ex Hasselquist. Flor, paltst. 545. * MELISSA officinalis Zrwn. Damiatæ ex Hasselq. 546. OCIMUM Basilicum ZINN. « vulgare. — Arab. SE) ryhân. Kh. 547. —- — — B lignosum. Kh. 548. PLECTRANTHUS crassifolius VAHL. — Ocimum Zatarhendi FORSK. — Origanum indicum VESLiNG Obs, et LINN. For. palæst. — Arab. jksÿ 5j ga’iar, Planta in viridario domûs Mourâd-bey intra pagum Gyzeh semel visa. À ORDO, ANGIOSPERMIA. 549. VERBENA offcinalis LINN. Rs. 550. — — — supina LINN, — Verbena procumbens FORSK, Ks. 551. ZAPANIA nodiflora LAmARCK.— Verbena capitata FORSK, — Verbena nodiflora LINN. Rs. 552. LINARIA Elatine DESFOonNT, Hort, paris. — Antirrhinum Elatine ZINN. As. 553. = = = spuria DESr. Hort, paris, — Anüirrhinum spurium ZzNN. Damiate, 554. — — Ÿ cirrhosa DESF, Hort, paris, — Antirrhinum cirrhosum, in Ægypto ex LINN. Mantiss, 555. — — — ægyptiaca DEsF, Hort, paris, [H. N. botanique, p/. 32, fig. 2.]— Antirrhinum ægyptiacum LINN, — Arab. cn \'éptue a’chib el-dyb, AS ko doreycheh. In isthmo Soueys. 556. — — — Hælava. — Antirrhinum Hælava FORSK, — Arab. > haléouak. 557. — — — virgata DESFONT, Flor. atl, Ex Ægypto à CI. OLIVIER allata. 5538. SCROPHULARIA deserti. [ H. N. Botanique, p/. 33, fig. 1.] In valle fontis el-Touâreq. 559- CAPRARIA dissecta. / PI. 32, fin. 3.7 In insulà el-Dahab, prope Masr el-A’tyq; et circa Belbeys. 560. BUCHNERA herménthica. / Pl. 34, fig. 3.] Æg. sup. In arvis prope Erment, Hermonthim veterum. — In Nubiä sb näourkou. 561. OROBANCHE crenata FORSK. Rosettæ et Damiatæ.— Arab. lo hâlouk, nomen aliarum quoque specierum hujus generis vulgare. 562. — — — ramosa ZINN, — Lathræa Phelipæa Forsx, Ks. 563. — — — media DESF, Flor. atl. As, 564. — — — tinctoria FORSK. Eadem est Lathræa quinquefida ForSx. Rs. Et in insulis lacûs Menzaleh. 565: SESAMUM orientale LINN,— Sesamum orientale et Sesamum indicum FORSK, — Arab. peu semsem, Ë seminibus conficiunt oleum (cs sprig. Kh. 566. VITEX Agnus castus ZINN,— Arab. 28,4 Le kaf maryam. Kh. 567. ACANTHODIUM spicatum. / PI. 33, fig. 2.] Flos Acanthi, semen Ruelliæ, In isthmo Soueys prope Ageroud. CLASSIS XV, TETRADYNAMIA. ORDO, SILICULOSÆ: 568. : MYAGRUM xgyptiacum Zzww. Ex Hassélquist. in Linn. Spec. plant. 569. BUNIAS spinosa LINN, —Zilla Myagrum FORSK, — Arab. al; zilleh Ass oumme, Kd. 570: — — Ÿ ægyptiaca ZINN. Ex Ægypto, Zoëga in Linn. Syst. nat. 571: CAKILE maritima ZOURNEF,, DESFONT. a pinnatifida. — Bunias Cakile ENS. — Jsatis pinnata FORSK. A  > NT) rechâd el-bahr, i4 est, nasturtium Dé ea JE Pigl el-gemel, rapum Cameli. As. ILLUSTRATIO. 67 . — — — À ægyptiaca. — Bunias Cakile 8 VAL Symb, bot, — Isatis ægyptiaca LINN., FORSKAL. se î VELLA annua LINN, Às, . ANASTATICA hierochuntica LrNNW, Kd, —— Arab. A DR kaf marya * LEPIDIUM perfoliatum Z1NN.In Ægypto ex Flor. palæst. .— — — sativum ZINN, — Lepidium hortense FORSK, — Arab. > %) rechäd, KR. .— — — latifolium ZINN. Ks. ; COCHLEARIA Coronopus LINN. — Lepidium squamatum FORSx, Ks. .— —— Draba, LINN. Ad. .— — — nilotica. [H. N. Botanique, p/. 34, fig. 2] In insulis niloticis. — Arab. Le rechâd, . ALYSSUM maritimum WILLDEN. — Clypeola maritima ZINN, Ad. . BISCUTELLA depressa WILLDEN.— An Biscutella didyma FORSK.! As, — — Ÿ apula ZINN. In Ægypto ex herb. Juss. LUNARIA parviflora. / PI. 35, fig. 3.] In arenis circa pyramides Saqqârah; hieme florens.— Arab. de > ) rechâd gebely. ORDO, SILIQUOSÆ. . F RICOTIA ægyptiaca LINN. Hanc in Syriä, non procul à Sälehyéh, legerunt DD. BERTHE et SAVIGNY. 586. SISYMBRIUM Irio ZINN. Ks. 587: — — — hispidum VAHL,— Sinapis Harra FORSK,— Arab. Hs hérah. Kad 588. — — — ramulosum. Olim in Ægypto à CI. Lippr detectum. V. S. herb. Vaill. Idem legit D. NECTOUX prope Minyet et Beny-soueyf. 589. — — — barbareæfolium. Siliquâ Sisymbrii sylvestris. — An Erysimum Barbarea FOrsx.!? Rs. 590. CHEIRANTHUS incanus ZIMNN, — Arab. D mantour, de kheyley. Ks. 591. — — - lividus. — Cheïranthus tristis Forskx. Kd. 5 592. — — — tricuspidatus ZINN. — Cheïranthus villosus FORSKx, Ad. 593: — — — Farsetia LINN.—Lunaria scabra FORSK. — Arab. Le garbä, Kd. 594. HESPERIS acris FORSK. [H, N. Botanique, pl. 35, fig. 2.] — Arab. ne meddid et Se sefeyry ex Forsk. 595. — — — ramosissima DESFONT, Flor. atl, Circa pyramides Sagqärah. 596. — — — pygmæa. In finitimis Ægypti et Syriæ, D. SAVIGNY. Prope Alexandriam, D. OLIVIER. 597. BRASSICA Napus ZINN. « edulis. — Arab. al lift. Kh. 598. — — — 8 oleifera. — Arab. b&w selgam. Culta in Ægypto superiore. 599. — — — oleracea LINN, — Arab. HN koronb, : 600. — — — teretifolia DESF, Flor. atl, Circa pyramides Saqqärah; decembre florens. 601. — — — Eruca ZINN.— Arab. x > gergyr. Kh. 602. — — — Tourneforti GOUAN. Rd. 603. SINAPIS philæana. / PI. 33, fig..3.] Supra Syenem prope insulam Philas. 6o4. — — — juncea LINN. — An Sinapis higra FORSK.! — Arab. I kabar, ES khardel. Frequens in agris Trifolii alexandrini. 6o$. - — — Allionii JACQUIN. [H. N. Botanique, pl. 35, fig. 1] — Arab. d 5 garilleh, Frequens inter segetes Lini. : 606. — — — turgida. — Raphanus turgidus PERSOON Synops. 607. — — ‘F parviflora Z1Ppr. Ex herb. Juss. à 608. RAPHANUS sativus ZINN. a edulis. — Arab. 2 fgt. 609. — — ‘T B oleifer. Colitur in Nubià, Lrppr. In Ægypto, GRANGER. — Arab. aalau symâgah. 610. — — — recurvatus PERSOON Synops, [H. N. Botanique, pl. 36, fig. 1.] — Raphanus Iyratus FORSK. — Arab. > 7 rechâd el-bar , id est, nasturtium desert. As, Ks. Æg. sup. 611. — — Ÿ pterocarpus PERSOON Synops. In Ægypto, GRANGER. Ex herb. Juss. H. N. TOME Il. : 12 68 612, 613. 614. 615$. 616, 617. 618. 619. 620. Ent 622. 623. 624. 625. 626. 627. 628. 629. Oo 630. or 63 632» 633. 634. 635. 636. 637 638. 639. 640. 641, FLORÆ ÆGYPTIACÆ ERUCARIA aleppica GÆRTN, Ad. — — — crassifolia. [H. N. Botanique, pl. 34, fig. 1.] — Brassica crassifolia FORSK., Van. Prope pyramides Sagqärah. CLEOME pentaphylla Zi, Ks. Æg. sup. — In Nubii ob! arêreg, — — — arabica ZINN. Circa Pyramides. -— — droserifolia. / PI. 36, fig. 2.] — Roridula droserifolia FORSK. In isthmo Soueys. CLASSIS XVI, MONADELPHIA. ORDO, TRIANDRIA. TAMARINDUS indica LIN. — Arab. GS LE tamar hendy. Kh. ORDO, PENTANDRIA. PASSIFLORA cærulea LiWN. — Arab. «As 9,4 chert fake. Kh. ERODIUM cicutarium L'HERIT., AITON, Wi£LD, — Geranium cicutarium Zinwn, Kd. — — — pulverulentum WzzLD, — Geranium pulverulentum C474N. Kd. — — — hirtum WrzzD, — Geranium hirtum FORSK., VAHL. Ad. = — — Jaciniatum WrLLD, — Geranium laciniatum DESFOoNT., Cavan, Kd. — - - reflexum. Caule pilis reflexis hispido.— An Geranium triangulare FORSK.! As. — — — glabellum. As. — - - grainum L'ÆERIT., AITON, WizLp. — Geranium gruinum ZINN. Ad. — — — glaucophyllum L'HERIT., AITON, Wizzp.— Geranium glaucophyllum Zrwn. Kd. — — — malacoïdes L'HERIT., AITON, WizLD. — Geranium malacoïdes LINN, As. — — — malopoïdes. — Geranium malopoïdes Desr. Flor. atl. Kd. — — — alexandrinum. Affine Erodio laciniato. Crescit in peninsulà Ràs el-Tyn. ORDO, OCTANDRIA. PISTIA Stratiotes LINN, — Arab, A de & day a'lem el-mä, id est, sempervivum aqua- ticum. ORDO, DECANDRIA. + GERANIUM dissectum ZzWN. In arvis prope Belbeys. ORDO, POLYANDRIA. SIDA spinosa ZzMW, — Stewartia corchoroïdes Forsk. Ks. — —- mutica Rh. Æg. sup. — In Nubii ulue,» gergydäns T ALTHÆA cannabinà Lin, Ex Forskal. — — — Ludwigit LINN, In arvis prope Belbeys. — = = ficifolia. — Alcea ficifolia ZEVN, — Arab, dañ Ahatmyel Kh. MALVA parviflora Lin, — Arab. Aa té Mobbeyzeh cl-cheytäny. — + — mareotica. Ad. — = — sylvestris LINN. Ad, — — — verticillata ZINN. — Arab. ejx& khobbeyzch. Kh. — = = Microcarpa DESrONT, Hort, paris. Inter Kahiram et Belbeys ad margines agrorum. ILLUSTRATIO,. : 69 642. - = Ÿ ægyptia ZLINN. Spec. plant, 643. LAVATERA arborea ZINN, Ah. 644. — — — cretica LrNN, Damiatæ frequens. 645. GOSSYPIUM herbaceum ZINN, & annuumi. -— Atab. où gotn. In Deltä circa Semenoud , Mehallet el-Kebyreh, &c. 646. — — — B frutescens, Æg. sup. — Arab. Obs got. — Tù Nubià Ce bennäbouk, 647. — — — vitifolium CA4VANILLES, — Arab. SSI OÙ gotn el-chagar, id est, Gossypium arbo- reum.. Rh. 648. HIBISCUS syriacus ZzwW. Kh. ; . 649. — — — Abelmoschus ZINN. Kh, — Arab, ul <> hab el-mosk, id est, granum moschi. 650. — - — esculentus ZZNN, « vulgaris. Kh. — Arab. bol al bämyeh toueyly, id est, Hi- biscus fructu longo. 651. — — — B præcox FORSK. — Ketmia ægyptiaca parvo flore, TOURNEFORT. — Alcea ægyptia CLUS, — Arab. «sb axe bämyek beledy, id est, Hibiscus ægyptius. — Incolis Nubiæ Loos gyoundôu ( djyoundoi). 652. — — — Trionum Zzww, In Deltà, CLASSIS XVIT, DIADEEPHIA. ORDO, HEXANDRIA. 653. FUMARIA officinalis LINN, — Arab. cie chabtres, Ks. 6$4. — — — capreolata ZINN. As. 65. — — — parviflora LAMARCK, SMITH. Ks. ORDO, DECANDRIA. 656. ABRUS precatorius ZzNN. In Ægypto ex Alpino et Hasselq. Sémina in hortis quandoque sata, 657. SPARTIUM monospermum ZINN. — Geénista Rætam FORSK; — Arab. #5 retam. Kd. 658. — — — thebaïcum [H. N. Botanique, pl. 37, fig: 1.] Æg. sup, — In Nubiä lai chouhäk ; ET touchy, k < 659. ONONIS pubescens ZINN. In arenis Ægypti et Syriæ conterminis, SAVIGNY: 660. — — — serrata FORSK., VAHL, Ad. 661. — — — vaginalis VAHL., VENTENAT, — Ononis Cherleri FORSK. Ad. 662. — — - Cherleri ZINN, Ad. : Ÿ Ononis spinosa ÆASSELQ. It, edit, gallie, Part. 1, pag. 138; pañt. IT, pag. 187; et edit. Stockholm, pag. 100, 514, 617, est omnino Hedysarum Alhagi LINN. 663. LUPINUS Termis FORSK, — Arab. 2 termis. Kh. 664. — — — hirsutus ZINN, — Lupinus digitatus FORSK. In arvis ad Birket el-Häggy, cum Lupino Termi. 66$. — — — angustifolius ZINN. — Arab. ol U2» térmis el-cheytén. Crescit ad margines agrorum Lupini Termis et Trifolit alexandrini , inter Gyzeh et Pyramides. 666. PHASEOLUS Mungo ZINN. — Circa Philas in campis colitur, dictus ab incolis LÉ u kacherynoy, 667. DOLICHOS Lablab LINN, — Arab. mA lebl&b, Kh: — In Nubi 2e ougoudky. 668. — - — Lubia Forsx. — Arab. Lol lubyé, et Aus oubyeh — In Nubià &ule mâset. 669. — — — nilotica. [PL 38, fig. 1.] — Dolichos sinensis FORSK, Scandit aründines in rip4 Nili. Rs.— Arab. Gé o’lleyg nomen commune scandentium. 670. — — — memnonia. / PI. 38, fig. 3.] Æg. sup. Juxta templum Memnonis, ad Thébas, 671 + PISUM arvense ZzVN. Kh. Damiatx et in Æg. sup. — Arab. aka esilleh, 79 F LORÆ: Æ GYPTITAC Æ 672. LATHYRUS Aphaca ZINN. Ks. 673: — — — sativus LINN. Æg,. sup. — Arab. HU gilbân, — = T tingitanus ZzNN. In Ægypto ex Pocock. It. vol. I, pag. 283. Huc. quoque acceduñt Lathyrus hispanicus ÆZ4SSELC. It. pag, 117, et Lathyrus ægyp- tiacus ejusdem, pag, 482. 674. VICIA biflora D£sr, Flor. all. Ks., 675. — — — sativa LINN, — Arab. seal el-bakhrh, ere dehoreg. Ks. 676. = — — lutea LINN. Ks. 677. FABA sativa TOURNEF., JUSSIEU, — Vicia Faba LINN. — Arab. (| fl. Kh. 678. CICER arietinum ZINN, — Arab. AM maléneh, quæ vox designat plantam fructu viridi onustam ; semina sicca dicuntur Ce hommos. Kh. 679. ERVUM Lens ZLINN. — Arab. X ads. Colitur copiosè circa Damanhour. 680. HIPPOCREPIS multisiliquosa LINN. Ad. 681. SCORPIURUS sulcata ZINN. Habitat ad margines agrorum prope Semenoud. 682. SESBANIA ægyptiaca PERSOON Synops.— Æschynomene Sesban ZINN, — Arab. SE seysäbän. Kh. 683. HEDYSARUM Alhagi Zrnn.— Arab. Je a'éqoul. Ad. Ka. 684. — — — ptolemaïcum [H. N. Botanique, p/. 39, fig. 1.] Kd. 685. ONOBRYCHIS crista galli. — Hedysarum crista galli ZINN. As. 686. INDIGOFERA paucifolia. / PI, 37, fig. 2.] Æg. sup. 687. — — — argentea ZINN, — Indigofera tinctoria FORSK. — Arab. at nylek. KR. 688. GALEGA apollinea. / PL 53, fig. 5.] Circa Edfoû, Apollinopolim antiquam. 689. ASTRAGALUS lanigerus. DE£Sr, Flor. atl. Ad. 690. — — — gyzensis. Prope pyramides Gyzeh. - 691. — — — hamosus ZINN. Ks. 692. — — — trimestris LINN. — Arab. dau A ais khansar el-a’rouseh, id est, digitus sponsæ, propter formam leguminis. K d. ‘ 693. — — — mareoticus. / P/, 39, fig: 3] Ad, 694. — — — hispidulus DECANDOLLE Astragal. Ad. 695. — — — Stella ZINN. A d. 696. — — — tribuloïdes, Capitulis forum sessilibus. À d, 697. — — — peregrinus W4rHLz. Caule prostrato. Ad. 698. — — — annularis FoRsx. Kd. 699. — — — bæticus ZINN. As. 700. — - — tomentosus LAMARCK Dicr, encycl. — Astragalus fruticosus Forsr, Rd. 7ot. — — — longiflorus. / PL. 39, fig. 2.] In valle el-Touâreq. — Arab. 2 keddédeh, 702. — — — tumidus WZZZD, — Colutea spinosa FORSK. — Arab. dE Keddéd, Kd. 703. — — — trigonus DECANDOLLE Astragal, — Tragacantha trigona Zippr Ms, et herb, Vaill, Ad. 704. PSORALEA palæstina LzNN, In horto Kahiræ nata, è seminibus forsan syriacis. 705. — — — plicata. / PI, 37, fo. 3] Æg. sup. 706. MELILOTUS indica Desr. Flor. atl, — Trifolium Melilotus indica LZNN. Ks. — Arab. ol5, regräq , 5 nafal. 707. — — — messanensis R4Y, TouRNEr., DESFONT, — Ttifolium Melilotus messanensis LIN. Ks. Rs. Et Damiatæ. à 708. — — — sulcata DEsr, For. at, As. Ks. 709. TRIFOLIUM radiatum. À d, 710. — — — alexandrinum ZINN. — Arab. Fe bersym. Pabulum in Ægypto vulgatissimum. Herba sicca et servata vocatur VU"? derys. 711. = = — resupinatum ZINN,—Trifolium fragiferum et bicome Forsx. Rosettæ et Damiatæ, 712, = — + tomentosum ZZNN, Ad. 713: — — Ÿ procumbens ZINN. Damiatæ ex Hasselq. 714. LOTUS oligoceratos LAMARCK, Drsr. — Lotus villosus FORSK. — Arab. Jia os garn el-ghazäl, id est, cornu Gazellx, Rd. 735: 736. 737- 738, 739: 740. 7Ar. 742. 743. 7h. 745. 746. 747. 748. 749. AE LOUIS SP RMA ER Pa atabicus ZINN. In insulis niloticis, creticus ZINN, Ad, dichotomus. Kd, corniculatus ZINN, As, DORYCNIUM argenteum. [H. N. Botanique, pl. 40, fig. 1.] Ad. TRIGONELLA hamosa LINN, — Arab. GUN Que achib el-mekk. Ks. — = maritima. Ad, £ media. Ks. aciniata LINN. Rs. Ka. Fœnumgræcum LINN, -— Arab, Ads Zelbeh Kh. anguina. / PI, 38, fig. 2.] Fructu flexuoso. Ks. stellata Forsx, A Trigonellà monspeliaci discrepans. Ks, — — occulta. In insulis Nili arenosis. . MEDICAGO circinata LINN. Ad. orbicularis ZLINN. Ad. intertexta LINN. — Arab, Je nafal. Rs, ciliaris LINN, As. recta DESF, Flor, atl, Ad. marina ZINN, Ad. truncatula GÆRTNER. Ad Rd. CLASSIS XVIIL, POLVYADELPENM ORDO, ZCOSANDRIA. CITRUS Aurantium ZINW, à fructu dulci. — Arab. #e> ob näring helon. + & fructu amaro. Aurantium acri medullà FERRARI Tub, 377: — Arab. à bb néring mâleh, jé > fructu amaro minore, — Arab, E have) ëv néring yousef effèndy. suave lusitanicum. — Arab. O5, bortuqän. Medica LINN, « fructu acido, — Limon pusillus FERRARI Tab, 211, — Arab, à wa leymoun mâleh. & fructu aurantiformi, cortice Iævi, medullä dulci. — Arab. me vw leymoun keloi, y fructu acido, seminibus parvis. — Arab. Spa os leymoun cha’yry. S Limon vulgaris FERRARI Tab, 193, — Arab. ; wsd leymoun zifèr. e Limon dulcimedullà FERRARI Tab, 230. — Arab. DE aalet adälyeh: helou, € Limon citratus FERRARI Tab. 265, — Arab. à als adälyeh mâleh, n fructu apice conico, medullà valde acidâ. — Arab. &œ &= hommäd. 8 Limon formä et magnitudine Cucumeris. Affine est Pomum paradisi FERRARI Tab, 307: — Arab. «sb ë torong beledy. : fructu crasso costato, — Arab. Ever ee torong mesabba’, æ Limon sponginus FERRARI Tab, 307. — Arab, ke Kebbéd, À Limon sponginus rugosus FERRARI Tab, 301, — Arab. JS neffäch, ORDO, POTLYANDRIA. HYPERICUM ægyptiacum ZINN. Compertum habemus hanc plantam, non in Ægyÿpto, sed in Syriä aut Cypro à CI. GRANGER olim detectam fuisse, Ex Catalog. Ms. Hort. paris. 2° 1736, in Biblioth. CI. de Jussieu, 7 2 FL'ORÆ :ÆGYPTIACZÆ CLASSIS XIX, SYNGENESIA. ORDO, POLYGAMIA ÆQUALIS, 750. UROSPERMUM picroïdes JUSSIEU, LAMARCK et DECANDOLLE. — Tragopogon picroïdes LINN. Damiatæ. 751. SCORSONERA undulata V4xz, Ex Ægypto communicata à CI. OLIVIER. — — T Veslingüi LINN. in Flor. palæst, ex Veslingio. Non satis nota, et ab auctoribus omissa. 752. PICRIDIUM tingitanum DESF. For, atl. — Scorsonera tingitana LINN., FORSK., et Scorsonera ciliata FORSK. — Arab. A5 nukd, eoæ houch. Ad. Kd. 753. PICRIS altissima. [H. N. Botanique, p£. 41, fig. 2.] An Picris Paote FORSK.! — Arab. na murreyr. Ks. 754. — = — Iyrata. / PI. 40, fig. 3.] — An Leontodon asperum FORsK.? Ad. 755. - — — pilosa. / PI. 41, fig. 1.] Ad. 756. — = — sulphurea. / PL. 40, fig, 2.] In insulà el-Dahab prope Masr el-A'tyq. 757. SONCHUS oleraceus LINN. — Arab. HA Zibbeyn, DES galäyl Ks. 758. — — — divaricatus DESF, Annal. Mus. et Hort, paris, Ad. Kd. Planta hæc est fortè habenda pro Chondrillà junceâ olim ab Hasselquistio circa Pyramides lectä. Wide Flor. palæst. Linn. Amoœn. acad. tom. IV. 759. + — — chondrilloïdes DESF.— Leontodon mucronatum FoRsK.— Scorsonera resedifolia LINN. Rd. Ad. 760. LACTUCA sativa LINN. — Arab. (je khass, Kh. 761, — — — virosa LINN. — An eadem cum Lactucâ salignä FORSK.? — Arab. oil libbeyn. Ks. 762. PRENANTHES spinosa Forsk., VAHL, Wizzp, — Arab. 735 zaggouch , NS heddäd. In valle fontis el-Touâreq. K d. 763. HIERACIUM bulbosum WrLLzD, — Leontodon bulbosum Zzwn. Ad. 764. CREPIS senecioïdes. / Pl, 42, fig. 2.] Ks. 765. — — — breviflora. Rs. 766. — — T pauciflora, ex Ægypto DESFONT. Catalog. Hort, paris. 767. — — — hispidula. / PL 42, fig. 1.] Ks. 768. — — ‘F radicata FORSK. Descr. pag. 145 769. HYOSERIS lucida LINN. — Lapsana taraxacoïdes FORSK. ‘Ad. 77o. — — — cretica LINN., CAVAN., DESFONT, — Hyoseris Hedypnoïs FORSK. Ad. 771. CATANANCHE lutea ZINN. — Catananche flore flavo FORSK., 772. CICHORIUM Intybus LINN. — Arab. de chikouryeh, DAS hendebeh. Ks. 773. — — — Endivia LINN. — Arab. nomen ut prioris. Kh. 774. = =" spnosum ZLINN. Damiatæ ex Hasselquist. 775. SCOLYMUS maculatus ZINN. — Arab. cr lehläh, Inter Rosettam et Rahmânyeh. 776. —— — hispanicus LINN. As. 777. = = Ÿ grandiflorus Desr. Flor. atl. In Ægypto ex Ms. Lippü, et ex herb. Vaillantit. 778. T CARDUUS argentatus LINN. In Ægypto ex Granger. Vide Linn. Spec. plant. 779. — — — marianus ZINN. Ks. 780. CIRSIUM syriacum GÆRTNER. — Carduus syriacus LINN., FORSK. — Arab. Hi chouk, id est, spina. Ks. 781. ONOPORDUM græcum ZINN. As. 782. CINARA Scolymus ZINN. — Arab. ie kharchouf. . Kh. 783. CARLINA Janata LINN. Ad. 784. ATRACTYLIS flava D£sr. Flor. at, — Centaurea Carduus FORSK. Ad. 785: CARTHAMUS tinctorius LINN. — Arab. ph? gortom, nomen plantæ ; es o’sfour, nomen florum. Kh. CN 786. ÉCAUES PARA PO; ne) 786. — — — creticus LINN. —— An Cnicus Spinosissimus FOR5k.! Ad. Rd, 787. — — — mareoticus. [H. N. Botanique, p/. 48, fig. 1] Ad. 788. ETHULIA conyzoïdes ZIzNw, = Kahiria FORSK. Descripe. pag. 153. Rs. 789. CHRYSOCOMA spinosa / PL. 46, fig. 3.] — Chrysocoma mucronata FORSK, — Stæhelina spinosa WAHL. — Arab. (ç,âxo dafiy. Kd. 790. — — — candicans. / PI. 46, fig. 2] "Ad. 791 SANTOLINA fragrantissima ForSK. [H. N. Botanique, pl. 42, fig. 3.] — Arab. Bree geysoun ; (\RAæ ba’yterän, dy» ba’bouny, Kd. 792. DIOTIS candidissima D£sr, Flor, atl, — Athanasia maritima ZINN,. Ad. 793: BALSAMITA vulgaris WILLD, — Tanacetum Balsamita ZZVN, — Arab. all belsäneh , vel Ce) melsäneh, Kh. 794 — — — tridentata. / PL. 47, fig. 1.] As. ORDO, POLYGAMIA SUPERFLUA. 795: T TANACETUM monanthos ZW, — Tanacetum humile FORSK. 796. ARTEMISIA judaïca ZrNN, [ H. N. Botanique, pl 43, fig 3:] — Arab. E* chyek, 797. — — — monosperma, / PI. 43, fig. 1.] Kd. -— Arab. ES a'deh. 798. — — — Abrotanum ZINN._— Arab. Aœune meskéh. Ah, 799. — — — arborescens ZINN, — Arab. AAAX cheybeh. Kh. 800. — — — inculta. / PI. 43, fig. 2.] In valle el-Touâreq. 8or. — — — valentina LAMARCK, WiILzLD, — Artemisia æthiopica ZINN, Ad, Kd. 802. — — ‘ Dracunculiüs ZZNW, In Ægypto ex Hasselq. It, pag. 454. 803. GNAPHALIUM Stoœchas ZINN, Ad. 804. — — — Juteo-album Zzwn, In insulis niloticis. 805. — — ‘Ÿ sanguineum, in Ægypto ex LINN. Spec, plant. 806. — — — cauliflorum D£sr, Flor. atl, — Chrysocoma spicata FORSK, — Gnaphalium spicatum Var. Kd… Rd, 807. — — — spathulatum Zawmarcr. [H. N. Botanique, p/, 44, fig. 2] Ks. 808. — — — pulvinatum. / PL 44, fig. 1] Ks. 809. — — — crispatulum, / PL. 44, fig. 3] Ks. 810. — — — germanicum DECANDOLLE, — Filago germanica ZINN,. As. Ks. 8r1. CONYZA Dioscoridis DEsr, Hort. paris. — Baccharis Dioscoridis LINN. — Conyza odorà et Eupatorium odoratum FORSK, — Arab. cos)» barnouf. Rs. Ks. Et Damiatæ. 812. — — — ægyptiaca DEsr. Hort, paris, — Erigeron ægyptiacum ZInn. Mantiss, — RES serratum ÆORSXx, Ks. 813. — — — rupestris LINN. — Conyza tomentosa FORSK. — Arab. «he motey, Ad. 814. SENECIO vulgaris LINN. Damiatæ. 81$. — — — arabicus ZINN., VAHL. — Senecio hieracifolius FORSK, Ks. 816. — — — verbenæfolius J4CQ., WiILLD, Prope Mansourah. 817. — — — belbeysius. / PL. 45, fig. 3.] In agris limosis prope Belbeys. — — À triflorus, tanquam planta Ægypti ex Hasselquistio memoratur, apud ZrNN. Flor. palest. ; sed delendum est Vaillantit synonymum in ZINN, Spec. plant. , et transferendum ad Sene- cionem ægyptium sequentem. 818. — — — ægyptius ZINN. Mutato Vaillantii synonymo , némpe , ut admissum à Linnxo, deest in Act. acad. paris. , et in herb. Vaill. Ks. 819. — — — coronopifolius DESF, Flor. atl, —Senecio glaucus ZINN, Ad. Rd. Et Damiatæ, 820. — — varicosus, in Ægypto ex LINN. FIL, Decad, plant, 821. — — — squalidus Zrwn. As. 822. * SOLIDAGO Virga aurea LINN.. Damiatæ ex Hasselq. 823. T CINERARIA maritima ZZWN.— Achaovan PROSP, ALPIN, de plantis Ægppi, Pag. 43, tab, 28 824. INULA undulata ZINN. [H. N. Mie pl. 40, fig. 1.] — Arab. .n%é ghobbéyreh. Kd. 825. — — — arabica LINN, — Arab. A] gi) ra’râa’ ayoub, Ks. H. N. TOME II. K 74 FLORÆ: £ÆGYPTIACEÆ 826, — = = crithmifolia LINN. — Senecio succulentus FORSK, Ad. 827. — — — crispa. / PL 45, fig. 2.] — Aster crispus FoRsKx, Kd, 828. TAGETES crecta Lrmn, — Arab. Ad gatyfh, Kh. 829. CHRYSANTHEMUM coronarium ZINN. — Chrysanthemum segetüm FORSY. Às, 830. COTULA anthemoïdes ZINN, Ks. 831. — — — aurea ZINN. Copiosè in campis cifca Sâleéhyeh. 832. — — — cinerea, [ H. N. Botanique, p/. 47, fig. 4.1 Juxta pyramides Sagqärah. 833. GRANGEA maderaspatana DESFONT, Hort, paris, — Artemisia maderaspatana ZINN, Alexan- driæ ad canalem. 834. MATRICARIA Chamomilla LINN. Rs. 835. ANACYCLUS alexandrinus W1ZLZD, [H. N. Botaniqué, pl. 48, fig. 3] Ad. 836. ANTHEMIS arvensis LINN. Ks. 837. — — Ÿ peregrina ZINN. In Ægypto, Hasselq. Flor. palæst. 838. — — — retusa. Seminibus striatis, retusis. Ks. — Arab. LA ES a'yn el-got, id est, oculus Felis. Huc Anthemides, n.° 454-457 Forsk. ; 839. — — — indurata. / PJ. 47, fig. 3] Corollularum basi callosä , persistente in vertice seminum. As, 840, — = — melampodina. / PL. 45, fig. 1.] Semma pappo ligulato coronata, ad instar seminum Melampodi. K d. 841. ACHILLEA santolina ZINNW. Ad. 842. — — ‘F ægyptiaca ZINN, 843. — — Ÿ falcata FORSK, Catalog. plant. ægypt. n° 458, 844. — — ‘F lobatifolia FORSK. Ibid, n° 459, absque descriptione. 845. ECLYPTA erecta ZINN. -— Micrelium asteroïdes FORSK, — Arab. Xaw sa'deh, Rs. 846. BUPHTHALMUM spinosum ZINN. Ad. 847. — — — graveolens FORSK, — Arab. %) rabd,, K d. 848. — — — pratense VAHL. [ H. N. Botanique, pl. 48, fig. 2.]— Ceruana pratensis FORSK, — Arab. oki garäouän. Ks. 849. HELIANTHUS annuus ZINN. — Arab. gl çXs ay el-chems , id est, oculus Solis; semina vocantur gr co hab el-chems. * Helianthum indicum in Ægypto non vidi. Planta in hortis Ægypti olim culta ex ZrNN. Mantiss.. pag. 117. F 850. CENTAUREA crupinoïdes DESF,. Flor, atl. Ad. 851. — — — moschata ZINN. — Arab. je a’nbar. Kh. 852. — — T erucifolia ZrNN. In Ægypto ex Hasselq. Flor. palæst, 853. — — — Lippit Zrvw. Rd. — Arab. GLlx& Wyzérén. : 854. — — — prolifera VENTENAT. Ad. Rd. — Hujus est varietas Centaurea acaulis FORSK. 855. — — ‘F benedicta ZrNN. Damiatæ ex Hasselq. 856. — — — ægyptiaca ZINN. [H. N. Botanique, pl 49, fig. 2.] — An Centaurea eriophora FORSK.! 857. — — — Calcitrapa ZINN. — Arab. si morreyr. Damiatæ. 858. — — — calcitrapoïdes ZINN. Ks. 859. — — — penicillata. Hanc in Ægypto invenerat COQUEBERT. 860. — — — pallescens. / PL 49, fig. 1] Ks. 861. — — — alexandrina. / PL. 49, fig. 3.] Ad. 862. — — — pumila ZINN. — Centaurea mucronata FORSK. Ad. ORDO, POLYGAMIA NECESSARTIA. 863. CALENDULA ægyptiaca DESF, Hort. paris, Kd. £ 864. — — = arvensis ZINN. — Arab. ça ob tob ayny , dE tahlh Ks. 865. — — — offcinalis ZINN. Ah. ts 866. FILAGO mareotica. / PL 47, fig. 2.] Ad 1-L_ LUS T RA-T:10: ns ORDO, POLYGAMIA SÉGREGATA. 867. SPHÆRANTHUS indicus ZrwN, — Polycephalos suaveolens FORSK. — Arab. (oèxe habagbag. Rs. 868. ECHINOPS spinosus ZINN. — Arab. pure khachyr; co Jeu chouk el-gemel, id est, spina vel carduus Cameli. Rd. Kd. CLASSIS XX, GYNANDRIA. CLASSIS XXI, MONŒECIA. ORDO, MONANDRIA. 869. CYNOMORION coccineum ZzNn. In arenosis humidis prope ostia Nili.— Arab. Ge es; zib elard, : 870. ZOSTERA bullata. [H. N. Botanique, p1. 53, fig. 6.] In mari Rubro. 871. CYMODOCEA xquorea XONIG et SIMS, Annals of botany. — Phucagrostis Caulini WrzLD, As. 872. ZANNICHELLIA palustris ZINN. Damiatæ. 873. NAYAS fragilis. — Caulinia fragilis WILLDEN. — Arab. Je hamoul. Rs, 874. — — — graminea. / PL 50, fig. 7.] Rs. 875. — — — muricata. / PL, jo, fig, 1.] In aquis salsis juxta Fareskour. 876. CHARA vulgaris LINN, — Arab. Cas neybt, Rs. ORDO, DIANDRIA. 877. LEMNA hyalina. Radice ligulatä, pellucidä. Damiate. 878. — —— gibba ZINN, Rs. 879. — — — polyrhiza ZINN. Rs. — Arab. üt yrX% a'ds el-m&, id est, lens aquatica. ORDO, TRIANDRIA. 880. TYPHA angustifolia Zrnn. Rs. 881. ZEA Mays ZINN. — Arab. 390 dourah , ve 392 dourah kyzêén. Kh. 882. F COIX Lacryma ZLINN., FORSK. — Arab. | dima’ ayoub, 883. CAREX divisa AuDs., Wizzp, As. 884. — — ‘Ÿ acuta maxima, in Ægypto ex HASSELQ, Flor, palæst, ORDO, TETRANDRIA. 885. * BETULA Alnus, folis oblongis; in Ægypto ex ÆASSELQ. Flor, palest. 886. URTICA pilulifera LINN, — Arab. 2? goreys , LOS Zorbeh, SH AS fisah kIGD. Ks. 887. — — — urens ZINN. — Arab. Mk; zaghlyleh. Ks, 888. — — ‘T dioïca maxima, in Ægypto ex HASSELQ. For. palest. Fe 889. MORUS alba LrNN. — Arab. C585 tout, (ok C5 tout béledy. 890. — — — nigra ZINN. — Arab. «8 Ce tout châmy, H. N. TOME Il. K 2 894. 896. 897. 911. 912. 913. 914. 915. 916. LEVÉ 918. 949: 920. FLORÆ ÆGYPTIACÆ ORDO, PENTANDRIA. XANTHIUM strumarium ZrwN, — Arab. LE Gé Hharag elbabr. Rs. . AMBROSIA maritima ZINN, — Ambrosia villosissima FORSK, — Arab. duuaueS demsyseh, As. K:s | . AMARANTHUS Blitum ZINn, Ks. DRDOE20T YA NID RIT A: CERATOPHYLLUM demersum ZINN, — Arab. Je hamoul, Rs. . POTERIUM sanguisorba ZINN. Ad. + PLATANUS orientalis ZINN, In hortis Kahiræ ex Forsk. ARUM Colocasia Zznn. — Ab. (Lllé golfs. In Deltt. . — — — Arisarum ZINN, Ad ORDO, MONADELPHIA. . PINUS halepensis AZrLLER, AITON, DEsr. Unica crescebat in horto prope Kahiram. — Arab. ET senoubar, . CUPRESSUS sempervirens ZINN, — Arab. É saroû. Kh. . CROTON tinctorium Zrmn. — An Croton argenteum ÆORSK.! — Arab. At ghob- beyreh, Ks. .—-- plicatum Wazxz. Ks. — In Nubi 5e goddeh. .— — — oblongifolium. [H. N. Botanique, p/. sr, fig. 1.] In isthmo Soueys prope Ageroud. .— — — obliquum, in Ægypto ex VAHL. Symb. bot. . RICINUS communis ZINN, — Ricinus medicus FORSK, — Arab. es kharoua”, Kh. Rh. — Linguâ incolarum Nubiæ zly rouâgy. MOMORDICA Balsamina LINN, — Arab, plu beyläsän, Kh. . = — — pedata LINN. Kh. = = = Luffà LINN, — Arab, @èe) luf. Kh. . — — Ÿ Elaterium, in Ægypto ex LINN. Flor. palæst, . CUCURBITA lagenaria LINN. — Cucurbita leucantha DUCHESNE, « fructu lagenæformi. — Cougourde ou Gourde des pélerins, LamarCK Dict, encycl. — Arab. y5424 ts qara’ medaouer, — — — B fructu ovato ampliore. — Arab. A5 7 5 gara’ debbeh. — — — 7 fructu longiore, eduli.—Za Course trompette, LamARCK Dict, encycl.—Arab. Jedls ei gara’ téouyl. : — + — Pepo ZINN. « maxima. — Le Potiron, — Arab. dore Hu - qara’ eslémbouly. — — — B polymorpha oblonga. — Le Giraumon, LamARCK Dict, encycl, — Arab. a ea gara’ moghreby. — = — 7 fructu minimo. — Arab. (6,5 Ca gara’ kouzy. — - — Citrullus ZINN. « carne rubrâ. — Arab. 39 | Z > batykh ahmar, — — — B carne flavescente. — Arab. giwl 2 batykh asfar. L —— — y carne albidÂ. — Arab, (ea ge batykh abyad, — — — À cortice maculato. — Arab. US 2 batykh el-nems. — — — « cortice sordido. — Arab. > = batykh agrab. NV. B, Citrulli è vais focis ortundi, À oebely dicuntur è locis desertorum proximis, ad bour- losy è promontorio Bourlos ;ubi optimi; Lsxb beledy vulgatissimi. ILLUSTRATIO, 77 921. CUCUMIS Colocynthis ZINN. — Arab. JXars handal. Kd.' Æg, sup. — In Nubii £S SES horky, 922. — — — Chate ZINN.—Arab, EN MS a'bd alläouy ; ne a’ggour nomen est fructûs adhuc immaturi. 923. — = — Dudaim ZINN, — Cucumis Schemmam FORSK, — ‘Arab, AE chemâm. 924. — — — Melo ZINN, — « fructu crasso. — Arab. Gps domeyry.. A h. 925. — — — 8 fructu oblongo. — Arab. sokge mahannäouy. Kh. 926. — — — y fructu costato. — Arab. on $ géoun, Kh. 927. — — — sativus LINN., « fructu minore, — Arab. ne Khyér, 928. — — — @ fructu flavo majore. — Arab. 4X5 gartek. 929. — — — y fructu albo. — Arab. UE Jfaqous. 930. — — Ÿ flexuosus ZINN. In Ægypto ex Hasselq. Flor. palæst. 931. BRYONIA cretica ZLINN, Ad. 932. 933: 934. 935: 936. 937: 938. 959: 940. CLASSIS XXII, DIŒGCIA. ORDO, DIANDRIA. SALIX babylonica ZINN, — Arab. 9) cols safsäf roumy. Kh. — — — Subserrata WILLDEN. — An Salix fragilis et Safsaf beledy FORSK, Flor, ægypt, n# sas et 527/—Arab. Lsxb clair safsäf beledy, Kb. / — — — ægyptia LINN.—Salix ægyptiaca et Salix Safsaf FORSKAL Flor, ægypt, n° 523 et 526. — Arab. OÙ /én, CG US Waléf Kh. ORDO, PENTANDRIA. PISTACIA vera ZLINN. — Arab. (&XaS festog. Fructus ex Aleppo Kahiram advectus. — — — Terebinthus ZZNN, — Arab, Pb botm. Fructus dicitur se dis habbeh khadrah ; Kahiræ in officinis. ‘ SPINACIA oleracea LINN. — Arab. gt selénakh. Kh. CANNABIS sativa LINN, — Arab. Er Carêneg, Dal el-hachych. Usus plante tex- tilis in Ægypto ignoratur. Pharmaca inebriantia è foliis parantur. Kh. ÆRUA tomentosa FORSK. — Celosia lanata ZLINN, — Arab. En] 3, € chagaretel-na'geh, Kh Æg. sup. ORDO, HEXANDRIA. T DIOSCOREA sativa ZrNW. Culta in Ægypto, ex Hasselq. Flor. palæst. PHŒNIX dactylifera Zrvnw. Per totam Ægyptum. — Arab. ak rakhlek, atbor; si el-dakar, arbor mascula ; al el-entâyeh, arbor femina; Ln£i zaa'f, frondes arboris; ee geryd, costa frondis; (yes khous, foliola; al Df, rete fibrosum in basi frondium. ab, zebätah, vel (ee a’rgoun, spadix ; er chamroukk, ramuli spadicis. À balak, LE tamr, fructus seu dactyli; 5, rotab, dactyli molles, valde maturi ; < a’goueh, dactyli servati, in massam compacti. 78 FLORÆ ÆGYPTIACÆ VARIETATES pACrTy1oRuM Kähire nonssime. cg a balak amhër, db Ë balah menâouâty; SR — — syouy, we UE — —— bent a’ych, èle _ hayény. Qu de — noql el-bâchà, Craall lue re sobäe el-set, dla TT ——— semäny, Se = a'omry. Zp“ = —— sirgp: agsall 26 —— sofr el-denyeh, ARBAO — seyfayeh. uit — d'vbéchy. = SE — o'mar bekry. dei C4 — — beyd el-gemel. Us lu TT ——— souâb el-a’rous. dll N'y — — zibd el-a'bd, Ji wo SE geroun el-ghazäl, Ska LR) — ryq el-benât. : de > sakkouty. sp! no 0 LS ads bourlosy. 2 NS adréhy. Cê— —— yemeny, &c. Phœnix dactylifera apud incolas Nubiæ dicitur LS fentigy, et fructus ES benty, vel eo betty, 941. CUCIFERA thebaïca. [H. N. Botanique, p£. 1 et 2, ]— Arab. Los> doum. Æg. sup. — In Nubiä L$942! ambouy. ORDO, OCTANDRIA. 942. POPULUS alba ZLINN. — Arab. > hour. Kh. 943. — — — nigra LINN. — Arab. ue bags. Kh. ORDO, ENNEANDRIA. 944 MERCURIALIS annua ZINN. As. ORDO, DODECANDRIA. 945. MENISPERMUM Lexba. [PI 51, fig. 2 et 3.7 Flores semi-dodecandri. — Lexba ZORSK, — Arab. Hz lebakh elgebel. Kd. Æg. sup. ORDO, MONADELPHIA. 946. EPHEDRA distachya Zrww. Kad. 947. — — — altissima DESFONT. Fier, atl, Prope Abouqyr et Etkoù. 948. RUSCUS Hypophyllum ZrWN, — Arab. SAR gafandar. Kh. CEASSTS XXIII, POLY GAMIA. ORDO, MONŒCIA. 949. MUSA paradisiaca LINN. — Arab, 5e mou. Rh. Kh. 950. POSIDONTA oceanica KONIG et SIMS, Annals of botany. — Zostera oceanica ZINN, — Arab. sw stenârah. In mari Mediterraneo. l'E L'US-PRAT TO! 79 ÿ$r. VALANTIA hispida ZznN. As. À 952: PARIETARIA officinalis ZINN, — Arab. &\ hu hachychet el-ryh, id est, herba Venti, 953+ — — — alsinefolia [H. N. Botanique, p/. 50, fig. 2.] Inter saxa ad Gebel-Ahmar, prope Kahiram, 954. ATRIPLEX Halimus ZINw.— Arab, La$& gataf As. Kd. 955: — — T hortensis ZINN. — Atriplex vulgaris, in hortis Damiatæ, ex HASSELQUIST, 956 — — — portulacoïdes ZINN. Rosettæ, et in insulis lacûs Menzaleh. 957. — — — glauca ZINN. Às. 958. — — — coriacea FORSK. [ H. N. Botanique, p/. 52, fig .] As. 959. — — — hastata ZINN. Damiatæ. 960. MIMOSA Habbas. — Abbas, ex GRANGER It, Pag. 241. — Erget el-krone BRUCE, tom, V, tab, 7, — Arab, ue habbäs. Juxta Koum-Omboùû et Asouân. 961. ACACIA Lebbeck WIZLD. — Mimosa Lebbeck ZINN.— Arab. 1] lebakh. Kh. 962. — — — farnesiana WrzzD, — Mimosa farnesiana LINNT — Mimosa scorpioïdes FORSK, — Arab. 4dAX fêétneh. Kh. 963. — — — nilotica WILLD, — Mimosa nilotiq ZzNN. Per totam Ægyptum. — Arbor appellatur LAS sant; Le garad , est nomen fructûs. — Incolis Nubix ce hong, = goouy ( djoouy ). 964. — — — albida [PL 52, fig. 3.] Æg. sup. 965: — — — Seyal [PL 52, fig. 2.} Kd. — Arab. Ju seyäl. 66. — — — gummifera. — Mimosa gummifera FORSK. in Flor, arabic, — Arab. (JS toull. Æg. sup. 9 8 8 î le 8: Sup 967. — — — heterocarpa. In Ægypto superiore juxta Qoceyr. — Arab. AnE Jéräeh. Fructus Kahiræ 973. 974. 97 ON in officinis pharmaceuticis venalis. T Mimosa Senegal, in Ægypto ex ZLINN. Flor, palæst., absque auctorum indicio.. — — Ÿ stellata FORSK, Flor, arab, Crescit in Arabiñ. Ægypto perperam adscripta in Persoon Synops. ORD'O POIL IPC TA; + CERATONIA Siliqua ZINN. — Arab. Syé Kharroub. Ah. Kh. . FICUS Carica ZINN. — Arab. © wr Kh. — — = Sycomorus ZINN, — Arab. x& gimmeyz. Kh. CLASSIS XXIV, CRYPTOGAMIA ORDO , AILIGES + ADIANTHUM Capillus veneris LINN, — Arab. pal = kuzbaret el-byr, id est, corian- drum cisternarum. As. + MARSILEA ægyptiaca Wrzzp. [H. N. Botanique, Pl. 50, fig. 4.] — Arab. Aol,,5 qourâyetah. IKUSOERIS: : k ORDO, MUSCI GYMNOSTOMUM niloticum. / PL. $3, fg 7] Ks FISSIDENS bryoïdes ÆEDWIG. — Hypnum bryoïdes ZLinw, In muris cisternarum Kahiræ et Damiatæ. + FUNARIA minor, Kahiræ ad muros rivulorum, 80 976: FLORNÆ ,/ÆGYPTIACZÆ ORDO, HEPATICÆ. RICCIA crystallina ZzNn. Ks, ORD'O; ZAICHENES. * LICHEN prunastri LIN. — Arab. AaAA& cheybeh, Affertur è Græciä, et venditur apud phar- macopolas. Decoctuim hujus Lichenis cum farinâ miscent Ægypti, ut sapor panis fiat inde jucundior. Simul occurrebant cum Lichene prunastri non planè mundato , Lichenes furfuraceus , farinaceus et barbatus. 977. URCEOLARIA subcærulea. [ H. N. Botanique, pl. 59, fig. 1.] 978. — — — conferta. / PL. 59, fig. 4.] 979. — — — rhizophora. / PI, 59, fig. 3.] In silicibus, juxta viam ad fontes Gandely. K d. 980. PARMELIA parietina ACHARIUS, — Lichen parietinus ZZNN, — Arab. 4RSS gamleh, all 5 chagaret el-nadeh. Rs. DT. + — — maciformis. [PL 53, fig. 2, 3, 4. ] În scissuris rupium altiorum montis Moqattam ponè arcem Kahiræ. 982. — — — pinguiuscula. / PL 9, fig. 11, r1'.] In fronte septentrionali pyramidis secundæ Gyzensis, propemodüm ad apicem. 983. — — — miniata ACHARIUS, [H. N. Botanique, p/. 59, fig. 2.] — Lichen miniatus HOFF MAN. In saxis pyramidum Sagqärah. 984. LECIDEA quinquetubera. / PL. 59, fig. 7.] Habitat in saxis, ferè ad apicem secundæ pyramidis Gyzensis. à 985$. — = — canescens ACHARIUS, [H. N. Botanique, pl. 59, fig. 10.] 986. — — - circum-albata. / PL. 59, fig. 8.] In saxetis vallis Gandely. 987. — — — vetusta. / PI. 59, fig. 9.] Kd. Cum priore. 988. — — — minima. / PL. 59, fig. 5.] In saxis ferè ad apicem secundæ pyramidis Gyzensis. ORDO, ALGÆ. 989. FUCUS latifolius POIRET Dict, encycl, IREÈ N. Botanique, pl. 54, fig. 2, 2'.] Frequens ad littora maris Rubri. — — — crispus FORSK. É portu Soueys cum præcedente, 990. 991. — — — natans 7URNER. Alexandriæ. 992. — — — lavendulæfolius. Alexandriæ. 993: — — — denticulatus FoRSk, [H. N. Botanique, p/. 55, fig. 2.] Soueys. 994. — — — tetrigonus. / PI. 56, fig. 3.] — Fucus dentifolius TURNER. Souéys. 995: — — — antennulatus. / PJ, 55, fig. 1.] Soueys. : 996. — — — trinodis FORSK. [H. N. Botanique, pl. 54, fig 1.] Soueys. — An Fucus fœniculaceus à mari Rubro, Hasselq. Flor. palæst. ! 997. — — — turbinatus ZZNN. — Fucus conoïdes FORSK. É portu Soueys. 998. — — — triqueter ZINN. — Fucus articulatus FORSK.. Soueys, 999. — — — crinitus DESF. Flor. atl. Alexandriæ. 1000, — — — barbatus TURNER Synops, fuc. Alexandriæ. TOO TA de nayadiformis. / PI. 56, fig. .] Alexandriæ et Soueys. 1002, — — — papillosus. Ë mari Rubro in porta Soueys. 1003. — — — spinulosus ÆSPER Icon. fuc. [H. N. Botanique, p/. 57, fig. 1.] . Alexandrix. 1004. — — — hamulosus 7URNER. Alexandriæ. 1005..—— — gelatinosus DESFONT. Alexandriæ. 1006. — — — cyanospermus. / PI. 57, fig. .] Alexandriæ. 1007. — — — diaphanus. É portu Soueys. 1008. — — — proteus. / PI. 58, fig. 1, 2, 3, 4] Alexandrix, ‘ 1009. ILLUSTRATIO, 81 1009, — = — taxiformis. [H. N. Botanique, p/. 57, fig. 2.] Alexandrir, 1010. — — — pinastroïdes GCHMELIN, Hist. fuc. Alexandrie. 1o11. — — ‘T felinus, Alexandrie ex ZLiPPr Ms, et herb, Vaill. 1012. —— — fungosus D£SF, Flor. atl. Alexandrie. 1013. DICTYOPTERIS polypodioïdes Lamouroux. — Fucus polypodioïdes DE£sr, For. atl, Alexandriæ, 1014. DICTYOTA implexa Zamouroux, [H. N. Botanique, PL 56, fig. 2.] — Fucus implexus DESFONT. Flor. atl, : Alexandrie et Soueys. 101$. — — — pavonia ZAMOUROUX, — Ulva pavonia LINN,, DESF. Alexandriæ. 1016. CAULERPA prolifera Lamouroux, [H. N. Botanique, p£. 56, Îg. 4, 5, 6, 7.] — Fucus ; prolifer FoRSK. — Fucus ophioglossum ZURNER Hist, fu.” Alexandrie, 1017. ULVA Lactuca ZINN, Alexandriæ, 1018. — — — fasciata. / PL 58, fig. 5.] Alexandrix. 1019. — — — compressa ZINN. Alexandrie. — — — oryziformis FORSK, Materies cellulosa ovis piscium aut vermibus priùs fœta, nunc detrita, et in littore siccata; Alexandriæ inter rejectanea maris, : 1020. CONFERVA amphibia LINN. Aquis defluentibus submersa, et limo inter saxa adhærens, ad ipsam Nili cataractam supra Syenem [ Asouän ]. 1021. — — — floccosa. In aquis stagnantibus, NOSTOCH sphæricum Zamarck et DECANDOLL. Flor. franc, — Ulva granulata ZINN. In limo, cum Ricciä et Gymnostomo, aquis Nili recedentibus. D D ORDO, FUNGL. 1023. AGARICUS campestris ZIVW. Rosettæ. — Arab. hs fatar, nomen commune fungorum. 1024. BOLETUS hispidus BUzLr4RD, Kahiræ in trunco arboris Nabeca putrido. 102$. — — — polymorphus BULLIARD. Rosettæ ad ligna rotarum aquas elevantium. 1026. LYCOPERDUM pedunculatum Zn. K d. — Arab. Cr barnoug. 1027. PHALLUS roseus. /P!. 59: fig. 6, 6", 6".] Damiatæ , et Syout in Æg. sup. 1028. — — Ÿ indusiatus WENTENAT. In itinere à Sälehyeh ad Qatyeh et el-A’rych. Général REYNIER. 1029. TUBER niveum DESFONT. For, atl, — Arab. \$ kaméeh, K d. 1030. CLAVARIA Hypoxylon Zrwnw. Crescebat ad ligna vetusta, circa partem mediam putei altè defossi in arce Kahirensi. FRUCTUS ET SEMINA ex officinis Kakire. = + MORINGA Nux Ben DESFONT. Hort, paris, — Guilandina Moringa LINN. — Moringa oleifera LamArCK Dict, encycl. — Nux Ben officinarum G£orFRoOY Mat, med, 2, pag. 401. —-Arab. dlat die habbet el-ghäly. — \dem Forsk, Mat. med. P. 164, n° 20, II. DATISCA cannabina LINN, — Arab. (çXk Jus gebel hendy. — Idem Forsx. Mat. med, pag. 155, n° 34. Hanc plantam ipsis ignotam, nasci in Indiâ putant Æpgypti, chm revera oriatur ex Cretà. Utuntur seminibus pro medicamento vomitorio. IT. PLANTAGO Psyllium ZINN. — Arab. aïls gotneh. — Idem FORSK. Mat. med. pag, 167. IV. SAPINDUS Ryteh. — Arab. av, ryteh, — Idem FORSKx, Mat, med, pag. 151, n° 38, Fructus à Sapindo Saponarià diversus. Ejus decocto absterguntur lanæ pretiosæ, ee V. RHUS Coriaria LINN, — Arab. ab. semmâg. — Idem FORSk, Mat, med, pag. 150, n° 10, Baccas acidulas cum oryzä coquunt Ægyptii, ut alvum solutum sistant, : VI. re] UVARIA aromatica LamarcK Dict, encycl, vol. I, pag. 596. — Piper æthiopicum LoBEL Icon, Pag. 205. — Espèce de piment appelée Kumba, BROWNE, Carte de la route que suit la Cara- vane du Soudan, au pays de Dar-four. — Arab. AXE génbeh, — Idem Forsk. Mat, med, Pag. 164, n° 8, Semina Kahiræ sata faustè germinärunt, H. N. TOME II. me 82 VIT. FLORÆ ÆGYPTIACÆ ILLUSTRATIO. AMOMUM Canon LINN, — Arab. de = hab hél, vel AE > hab hän, — Idem FoRSKx. Mat, med. p. 149, n° 4. VII. AMOMUM Grana paradisi ZINN. — Maniguetta officinarum, Grana paradis GEOFF, Mar. IX. x XI. med, 2, pag. 367. — Arab. Juil OS tn el-fjl. . ADANSONIA digitata LINN. — Arab. CSS habhab. — Tdem FORSK. Flor. ægypt. p. XLIX. — Baobab Pros?. ALPIN. de plantis Æpypti, pag. 37, tab. 17 et 18, Fructus integer ab inte- riore Africä affertur. . CROTON Tiglium Ziwn, — Abelmeluk PROSP. ALPIN. Rer. Ægypt. vol. I, pag. 178 et 181. — Arab. JA De hab el-molouk, id est, grana Moluccarum. — Pignons d'Inde, grains des Moluques, GEOFFROY Mat, med. Purgans vehemens. STRYCHNOS Nux vomica LINN. — Arab. SE kgleh, ea US &ych el-ghoräb, — Idem FoRrSK. Mat, med. pag. 151, n° 37. XII. FRAXINUS Ornus ZIWN. — Arab. sal Gba) lesän el-a'sfour. dem Forsk. Mat, XIII med, pag. 155, n° 28, Semen Janceolatum , sapore aromatico ; magni pretii in condimentis. . ÀX 39 bizr batteh ARAB. id est, seminaWvaria. Mixta erant in eadem pyxide semina numerosa ignotæ cujusdam speciei Chamæriphis, et paucissima Cannæ indicæ, pro granis precatoriis. DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE DE ‘. LA VALLÉE DE QOGEYR, PAR M. DE ROZIÈRE, MEMBRE DE LA CoMMIi$sioN DES SCIENCES ÊT ARTS, ET INGÉNIEUR EN CHEF DES MINES. Li chaîne du Moqattam, plus connue sous le nom de chaîne Arabique , borde la rive orientale du Nil, depuis le Kaire jusqu’au-delà de la première cataracte ; mais elle ne se prolonge pas sans interruption dans toute cette étendue. Elle est coupée à divers intervalles par plusieurs grandes vallées qui, se dirigeant géné- ralement vers l'est, traversent dans toute leur largeur les déserts compris entre l'Égypte supérieure et la mer Rouge.‘ À : La plus intéressante de toutes ces vallées a son embouchure vis-à-vis l'ancienne ville dé Coptos, à sept lieues au nord des ruines de Thèbes, et porte dans le pays le nom de vallée de Qoreyr. Elle a fourni aux anciens Égyptiens les maté- iaux de plusieurs monumens remarquables. C’est aujourd’hui la voie par laquelle se fait principalement le commerce de l'Égypte avec l'Arabie: et, sous le rap- port de l'histoire naturelle, elle présente des motifs particuliers d’intérét. Les troupes françaises partirent de Qené le 8 prairial an 7, sous les ordres des généraux Belliard et Donzelot, pour aller s'emparer du port de Qoceyr. Nous profitèmes de cette occasion, MM. Denon, Girard, Schouani et moi, pour parcourir cette grande vallée depuis le Nil jusqu'à la mer Rouge, et l'ob- server chacun sous des rapports différens. = En me préparant à présenter les résultats des recherches dont je me suis occupé, les premières qu'on ait encore faites sur la constitution physique de cette contrée, j'ai senti combien il étoit à regretter pour l'intérêt de la science que cette tâche n'ait pas été remplie par le naturaliste célèbre qui devoit s'en trouver chargé [M. Dolomieu] (1): il auroit ajouté À l'exactitude de ses observations, (1) Le commandeur de Dolomieu dont le:nom, ies Depuis long-tempsil desiroit voir de ses propres yeux cette travaux et Îés malheurs sont si connus, avoit fait partie contrée célèbre que n’avoit encore visitée aucun minéra- de l'expédition d'Égypte en qualité d'ingénieur des mines, logiste, Déjà même, bien des années avant l'expédition, H. N. TOME II. 14 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE 84 l'intérêt qu'il a toujours répandu sur ces matières naturellement arides. Il eût pu, appuyé d’une longue expérience, entreprendre de tracer dès-à-présent le tableau des états successifs des lieux qu'il auroit parcourus. J'ai pensé qu'il me conve- noit de suivre une marche différente. J'exposerai succinctement les observations que j'ai recueillies ; j'insisterai sur celles qui peuvent avoir quelque utilité directe, fussent-elles, à certains égards, étrangères à l'objet dont je m'occupe spécialement: mais j'écarterai avec soin, de ces premiers travaux, toutes discussions géologiques, pour ne présenter actuellement que des faits fournis immédiatement par lob- servation. $. À Eva Description de la Vallée depuis l'Égypte jusqu'aux puits de la Gytah. C’EsT à Byr-a'nbar que l'on quitte ordinairement l'Égypte pour entrer dans la vallée de Qoceyr. Cet endroit, situé à près de quatre heures de marche au sud de Qené, se trouve déjà sur la limite du désert, quoiqu'à peine éloigné d'une demi-lieue du Nil. On y trouve un puits dont l’eau, très-désagréable au goût, exhale une forte odeur hépatique (ce qui n’a pas lieu cependant lors des débordemens du Nil). Les caravanes en complètent souvent leurs pro- visions, parce que l'on ne peut espérer d'en trouver avant d'arriver aux puits de la Gytah, situés à neuf heures de marche, à l’est de Byr-a’nbar. L'endroit par lequel on entre dans la vallée, est une gorge resserrée entre des monticules, recouverts et peut-être entièrement formés de fragmens de pierres calcaires de diverses variétés, et de silex d’un tissu grossier: on reconnoît le plus grand nombre de ces fragmens, pour avoir appartenu à la chaîne du Mo- qattam, dont les couches voisines contiennent les mêmes variétés, et paroïssent bien évidemment avoir régné autrefois, sans interruption, sur toute cette partie de la rive droite du Nil, où débouche actuellement la vallée; ainsi que règne encore la chaîne Libyque sur toute {a partie opposée de la rive gauche. On s'avance, en se dirigeant vers f'est-sud-est (1). La gorge par laquelle on étoit entré, s’élargit bientôt; les monticules qui la resserroïent, disparoissent entiè- rement: et à quelques lieues de Byr-#nbar, la vallée se trouve si étendue qu'on distingue à peine d’autres chaînes basses et arrondies qui la bornent au sud et au l'Égypte avoit été le sujet de ses méditations : il avoit entrepris, avec le seul secours des relations dés voyageurs, de résoudre Pintéressant problème de linfluence des attérissemens du: Nil sur le sol cultivable; et il reste de Jui, sur ce sujet, un ouvrage assez étendu qui a excité l'attention des géologues et des antiquaires. Dans son voyage, il se proposoit principalement de parcourir les déserts qui environnent la Thébaïde, et d’où les anciens peuples civilisés ont tiré les matériaux d’un grand nombre de leurs plus curieux monumens. Par ses rapports avec l’ancienne histoire des arts, cette contrée avoit un intérêt tout particulier pour lui; car il avoit en+ trepris déjà de grands travaux pour déterminer la nature et l'origine des roches employées dans les monumens antiques. Contrarié dans ses projets par les circonstances de la guerre, M. Dolomieu se détermina malheureusement à quitter l’'Ég; gypte à l'instant où l'entière conquête de la Thébaïde permit enfin d’en parcourir les environs avec quelque liberté; et il laissa aux ingénieurs des mines qui l’avoient accompagné, le soin de recueillir les ob- servations qui avoient si vivement excité sa curiosité. (1) Etvers l'est, quand on part de l’ancienne Coptos ou de Benhout. DE LA VALLÉE DE QOCEYR. 85 nord. Derrière ces premières montagnes, on aperçoit du côté du sud une por- tion de la chaîne calcaire du Moqattam : quoique située beaucoup plus loin, elle se distingue plus aisément par sa grande blancheur, par sa hauteur et par ses formes escarpées. La vallée conserve à peu près le même aspect pendant plusieurs lieues. On ne voit, dans tout ce trajet, qu'une plaine immense et aride, dont les limites échappent souvent à la vue. Le sol qui la constitué, dénué de tout vestige de végétation, est formé d’une couche plus ou moins épaisse d’un sable partie cal- caire et partie quartzeux, recouvert de silex et de fragmens calcaires. On a occasion de remarquer, un peu plus loin, que ce sable provient de la destruction de mon- tagnes de grès friable : la base solide du terrain est aussi formée de couches du même grès, dont les tranches viennent se montrer au jour dans plusieurs endroits. Quelques lieues avant la Gytah, la chaîne qui bordée la vallée, du côté du sud, se rapproche beaucoup de la route suivie par les caravanes; elle la touche même dans quelques points. On y reconnoft alors le grès calcaire et quartzeux dont nous venons de parler; et il est facile de remarquer l'identité de ses #e- tritus récens avec le sable qui recouvre le sol de toute cette partie de la vallée: cette observation s’est représentée constamment dans tous les points où la route est bordée par des montagnes de grès. On voit ici les traces distinctes de plusieurs courans qu'ont formés les pluies, bien moins rares dans ce désert que dans la haute Égypte. Les Arabes Abäbdeh, qui parcourent habituellement ces lieux, assurent que pendant l'hiver elles y tombent quelquefois avec abondance. La Gytah, distante de treize heures de marche de* Qené, est une station habituelle des caravanes : on y trouve trois puits, dont leau fort abondante a un goût plus désagréable encore que celle de Byr-anbar; mais elle ‘n’est pas sensiblement salée et n'incommode pas. Ces puits, tous très-larges, sont maçonnés intérieurement, et paroissent encore en bon état; un ou deux ont une rampe douce par laquelle les chameaux descendent jusqu'au niveau de l’eau, où se trouvent des espèces de réservoirs destinés à les abreuver : on est ainsi dispensé d'élever l'eau jusqu'à l'orifice des puits, qui peuvent encore, par cette disposi- tion, servir à abreuver à-la-fois un plus grand nombre d'animaux. L'eau que l'on trouve ici, provient des pluies qui s’infiltrent avec lenteur dans les sables, et ensuite dans les grès spongieux qui existent dessous : aussi, en faisant dans tous les environs, des trous de quelques pieds de profondeur, on est sûr d'y rencontrer l’eau plus fraîche et moins désagréable au goût que celle qui est prise dans les réservoirs; c'est une preuve qu'elle ne doit qu’au séjour qu’elle y fait, ses mauvaises qualités. L'existence de ces puits, plusieurs ruines encore reconnoissables, quelques monticules de décombres épars aux environs, annoncent assez que ce lieu fut anciennement très-fréquenté. Nous n'avons rencontré dans le reste de la route aucune construction de ce genre; maïs les Arabes, qui servent ordinairement d’escorte aux caravanes, nous assurèrent qu'il en existoit plusieurs dans lune des 86 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE quatre ou cinq routes par lesquelles ils prétendent qu'on peut aller de la Gytah à Qoceyr. Leurs renseignemens étoient d’ailleurs fort vagues, et ne méritoient que peu de confiance; mais M. Bachelu, chef de bataillon du génie, ayant eu dans la suite occasion de suivre cette route, a constaté l'existence de ces monu- mens (1). On remarque encore dans cette route, des constructions plus multipliées, mais d'un autre genre : ce sont de petits massifs de maçonnerie, de forme cubique, placés dans tous les endroits où la route a besoin d’être indiquée ; ce qui prouve assez qu'ils ont été construits dans la vue de servir de termes. Quand même l'histoire ne nous auroit conservé aucun souvenir, ni de l'objet de ces monumens, ni de l'époque où ils ont été élevés, il ny auroit personne sans doute qui ne reconnût là l'ouvrage d’uné nation policée, à qui l'importance du commerce de l'Inde et de l'Arabie aura fait sentir l'utilité d’une communication commode entre l'Égypte et la mer Rouge, à une hauteur où les dangers de la navi- gation deviennent beaucoup moindres que dans le fond du golfe, et où la bande des déserts, qui séparent cette mer de l'Égypte, se trouve tellement rétrécie qu'elle a mérité le nom d'isthme. Mais après les détails que nous ont laissés les anciens écrivains, et notamment Strabon, il me paroft difficile de douter que ce que nous retrouvons ici, ne soit l'ancienne voie par laquelle on se rendoit dé Coptos à la ville de Bérénice, et par suite au port de Myos-hormos, jadis très-fréquentés, et qui furent successivement l'entrepôt de tout le commerce que les anciens ont fait par la mer Rouge. Aucun voyageur moderne m’avoit encore eu occasion de remarquer Îles monumens qu'on rencontre sur cette route: et leur existence étoit restée ignorée. Le défaut de cette donnée importante me paroîft avoir fait tomber plusieurs géographes, et le célèbre d'Anville lui-même, dans une méprise d'autant plus grave, qu'elle a dû entraîner un grand nombre d’erreurs dans la détermination des points connus par les anciens sur les bords de la mer Rouge. Il seroit hors de mon sujet d'entrer ici dans ces discussions : je l'ai fait avec détail dans un écrit particulier qui a pour but la détermination de tous les points connus des anciens sur les côtes de cette mer (2). SEE : De la Gyiah aux fontaines d'eLHavuch. EN s'éloïgnant de la Gytah, on se dirige vers le nord-est. A une lieue de lB, les chaînes de montagnes se rapprochent des deux côtés, et resserrent tellement la vallée, qu'au lieu de l'immense largeur qu'elle avoit précédemment; il est des endroits où il ne luï reste pas deux cents mètres. Ces deux chaînes sont générale- ment et plus élevées et plus escarpées que les précédentes. Leur couleur extérieure est d’un noir très-sombre : elles sont coupées fréquemment par d’autres vallées, qui viennent, sous différentes directions, se jeter dans celle que l’on suit. (1) On peut voir les observations que M: Bachelu a M. du Bois-Aymé, sur les mœurs des Arabes A44bdeh. recueillies, exposées dans un Mémoire sur la géographie (2), Voyez la partie des Antiquités, Mémoire sur la comparée de la mer Rouge, et dans un Mémoire de géographie comparée ide la mer Rouge. DE LA VALLÉE DE QOGEYR. 87 M. Bruce, le seul voyageur qui ait écrit avec quelque détail sur ces lieux, assure que tout ce qui existe dans cette partie de la route, ressemble aux pierres qui recouvrent les flancs du mont Vésuve, et qu’on sait être de nature volcanique. Je ne sais s’il a examiné avec soin ces montagnes; maïs je puis assurer que rien ne ressemble moins à des matières volcaniques que les couches de grès friable dont elles sontuniquement formées. Ce voyageur est tombé plusieurs fois dans cette sorte d'erreur. Il dit être de basalte tous les sphinx qui forment les avenues des monu- mens de Thèbes; cependant ces sphinx sont tous du même grès que les édi- fices de cette ancienne ville. Cette seconde méprise, qu'ont pu constater toutes les personnes qui ont visité la haute Égypte, confirme assez ce que nous rap- portons de la première. Après s'être avancé pendant six lieues par une vallée très-sinueuse, on com- mence à remarquer dans les montagnes des variations d’aspect, qui font présager un changement prochain dans leur composition. En effet, on voit bientôt se terminer ces uniformes montagnes de grès, qui vont se lier presque insensible- ment à des montagnes de brèches et de pouddings quartzeux : leur grain grossit rapidement, à mesure qu'elles s’en approchent, et devient de plus en plus sili- ceux. Les couches prennent beaucoup plus de consistance : leur couleur, qui ne varioit communément que du gris au jaunâtre, prend des nuances très-nom- breuses , souvent assez vives; les plus communes sont le violet, le jaune, le noiratrès-foncé , quelquefois aussi le vert. Rarement ces couleurs règnent sur une grande épaisseur : les couches de couleurs différentes alternent ensemble; et une épaisseur de trois ou quatre pieds les réunit souvent toutes. Ce sont pro- bablement ces grès colorés que quelques voyageurs ont désignés sous le nom de marbres rouges, de marbres jaunes et de porphyres mous et imparfaits ; car Yon ne trouve rien de tel dans cet endroit : il n’existe d’ailleurs de marbres en aucun point de la vallée de Qoceyr, et nulle part des porphyres mous et imparfaits. Après les brèches siliceuses à petits fragmens, on rencontre plusieurs mon- tagnes de nature et d'époques très-différentes , mais qui cependant alternent ensemble, ou plutôt sont mélées sans affecter d'ordre bien apparent. x Elles peuvent être réduites à trois genres principaux, savoir : 1.9 MONTAGNES GRANITIQUES. Ce sont les moins fréquentes. Leur aspect extérieur ne décèle nullement leur nature : c'est seulement lorsque le hasard conduit à en briser quelques blocs, qu’on les reconnoît pour granitiques. MM. Descostils et Dupuits, dans un voyage fait peu de temps après, ont eu principalement occasion de les observer. Ces granits sont généralement à grains fort petits, et tels quelquefois qu'à peine on les dis- tingue à l'œil nu; ils forment, dans ce cas, une masse d'apparence presque homo- gène, assez semblable, pour l'aspect, à la pâte de l'espèce de poudding qui va être décrite. 88 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE »° MONTAGNES DE BRÈCHES OU DE POUDDINGS. La matière qui compose ces montagnes est d’une espèce particulière que lon connoît en Îtalie sous le nom de Breccia verde d'Egitto, Elle est formée de frag- mens roulés et arrondis de roches primitives de toutes variétés, parmi lesquels abondent principalement les granits, les porphyres, et une roche particulière de couleur verte, qui a beaucoup de rapport avec le pétrosilex de Dolomieu, dont elle diffère cependant à plusieurs égards. Ces fragmens, dont le volume varie beaucoup, sont liés entre eux par une pâte qui n’est elle-même qu'un poudding à grain très-fin, et communément de même nature que la roche verte que nous venons d'indiquer. Il seroit trop long de décrire avec détail les différentes substances qui com- posent cette brèche. Je me borneraï à l'indication des principales. Les roches granitiques sont les plus nombreuses; j'en ai compté neuf ou dix sortes très-distinctes : elles font prendre aux masses où elles se trouvent, un aspect _ particulier. Les taches arrondies, de diverses grandeurs, communément grises, roses ou blanchâtres, qu’elles forment au milieu des fragmens de différentes nuances de la matière verte, donnent à cette brèche une richesse et une variété de couleurs qu'on ne pourroit trouver dans äucune autre roche. Tous ces granits, à l'exception d’un ou deux, sont uniquement composés de quartz, de feldspath et de mica. Le quartz y domine. La couleur rose de quelques-uns est toujours due au feldspath, comme les couleurs noires ou grises plus où moins foncées des autres, aux lames plus ou moins abondantes de mica. Leurs élémens sont d’une grosseur médiocre et fort inférieure à celui de Syène, dont sont formés presque tous les monumens en granit qu’on retrouve en Égypte. Quelques fragmens de brèche nous ont offert une roche granitique d’un aspect tout-à-fait différent : elle est composée de quartz, de feldspath, et d’actinote {1) ou horn-blende verte. Le quartz y domine aussi; il y est en grains irréguliers, transparens. L’actinote, quoique moins abondante que le feldspath, est beau- coup plus.apparente : elle s’y trouve répandue assez uniformément en lames de diverses grandeurs, de forme rhomboïdale et d’un vert sombre. Les roches porphyritiques observées dans cette brèche, sont au nombre de cinq ou six très-distinctes : leur base, ordinairement grise ou violette, offre un tissu assez grossier. Les cristaux blancs et rhomboïdaux de feldspath qu'on y voit épars, sont, tantôt rares et fort alongés, tantôt très-petits et très-denses. On remarque souvent, parmi les premiers, des grains de quartz transparens, isolés, semés dans la pâte de la roche à la manière des cristaux de. feldspath. C’est un fait qu'on observe également dans des roches venues de plusieurs autres endroits de l'Égypte. Ù (1) L'identité de cette substance, connue depuis peu. conjecture, ou prouvé du moins que ce sont deux subs- d'années, avec la horn-blende, a déjà été soupçonnée par tances extrêmement voisines et trés-susceptibles de se lier quelques naturalistes. Des faits assez nombreux, recueillis lune à l'autre par des passages gradués, dans cette contrée, nous ont démontré la vérité de cette Plusieurs DE LA VALLÉE DE QOCEYR. 89 Plusieurs variétés de brèche Égyptienne sont totalement exemptes de fragmens de porphyre; quelques-unes le sont encore de granits : ces dernières ne présentent à la vue qu'une masse de couleur verte, mais dont les nuances varient à l'infini: ce sont les plus connues. Ce sera probablement d’après elles qu’on aura donné à cette matière le nom de Breccia verde | nom assez impropre: car, outre que la couleur verte n'appartient qu'à quelques variétés, le mot de brèche ayant été con- sacré par l'usage à désigner les pierres agrégées secondaires, seulement quand elles sont formées de fragmens anguleux, ici où tous les fragmens sont roulés et arrondis, le terme de poudding eût été plus convenable. On peut facilement juger, par la diversité des roches dont se compose la brèche Égyptienne, par la grande variété de leurs couleurs et de leur contexture, com- bien des morceaux pris avec choix pourroïient être avantageusement employés dans les arts: mais cet emploi doit rencontrer deux obstacles; le premier tient à sa grande distance des lieux habités, qui s'oppose à ce qu’on puisse aisément s’en procurer des masses considérables; le second, à la difficulté de la travailler. Lorsqu'on la frappe avec violence, il arrive souvent que quelques fragmens moins adhérens que les autres, au lieu de se briser comme le ciment, s’en détachent, sortent des espèces de loges ou alvéoles qui les contenoient, et ne laissent à leur place, au lieu d’une cassure fraîche, qu’une cavité plus ou moins profonde, dont la superficie toujours terne est souillée dans beaucoup d’endroits par un enduit terreux gris ou jaunâtre, qui contraste très-désagréablement avec les couleurs vives du reste de la pierre. Souvent, comme nous l'avons déjà observé, on rencontre des blocs considé- rables, toutà-fait exempts de fragmens assez gros pour être distingués de la pâte: ces masses ont, avec certains granits à petits grains, une ressemblance si grande, que sans le secours des circonstances locales, on auroit quelquefois beaucoup de peine à prononcer si tel fragment est de pâte de brèche ou s'il est d’un granit à grains fins. Dans quelques endroits cette pâte a pour couleur le gris ou le jaunâtre, mais dans beaucoup d’autres le vert sombre ou un vert foncé, assez beau : c’estlà probablement ce qui aura donné lieu à l’opinion adoptée, sur le rapport de Bruce, qu'il existoit des carrières de marbre vert antique dans la vallée de Qoçeyr. Cette matière pourroit à la vérité le remplacer dans quelques cas, et même avec avantage; mais on voit assez que par sa nature elle n’a rien de commun avec lui. Les anciens Égyptiens ont connu et exploité les différentes variétés de ce poudding, dont ils ont tiré parti pour leurs arts. Malgré l'extrême difficulté qu'ils ont dû rencontrer dans ce travail, ils sont-parvenus à en former beaucoup d'objets monolythes que lon compte parmi les plus intéressans qui nous restent d’eux. Plusieurs ont été transportés à Rome, où on les voit encore. Ferber, dans ses Lettres sur la minéralogie de fltalie, décrit cette substance d’une manière fort reconnoissable, et la désigne aussi sous le nom de Breccia verde d'Egitto. H en cite un vase dans le jardin de la ville Albane, ajoutant qu'on en trouve des colonnes entières dans les ruines des anciennes villes. Winkelman, dans son H. N. TOME II. M 990 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE ‘Histoire de l'art chez les anciens, en indique à la ville Afbane plusieurs autres morceaux très-remarquables, dont le principal représente un roi étranger, captif chez les Égyptiens (1). Nous avons rencontré en Égypte plusieurs monumens de cette matière : quelques-uns, à en juger par leurs formes, paroïssent avoir été consacrés chez les anciens Égyptiens à des usages religieux. Les Turcs, sans s'inquiéter de leur destination première, les ont fait servir, comme béaucoup d’autres monumens antiques de ce genre, à l'ornement des édifices de leur culte : le principal et le mieux conservé est un grand sarcophage qui étoit placé dans une mosquée ruinée d'Alexandrie, et qui a été emporté en Europe. On voit les autres au Kaire dans des mosquées, des tombeaux, et quelques maisons particulières. Ces divers objets sont exempts de fragmens de porphyre; à peine y trouve-t-on quelques fragmens de granit. Il paroît qu'il en est de même de la plupart de ceux qui ont été transportés à Rome et dans d'autres villes de l'Italie. La préférence que les anciens Égyptiens semblent avoir donnée à ces variétés, vient probablement de ce que leur dureté étant plus uniforme, elles présentoient moins de difficulté pour être travaillées. 5 MONTAGNES SCHISTEUSES. Aux montagnes de brèche Égyptienne succède une substance de contexture schisteuse, qui paroît d’une formation contemporaine à la leur, puisqu'elle se lie avec elles par des passages gradués, et contient quelques fragmens roulés de même nature que ceux que nous y avons indiqués. Sa contexture est assez sem- blable à celle qu'affectent certains schistes magnésiens : ses feuillets ne sont nulle- ment parallèles; leur épaisseur est très-inégale, et ils sont infléchis de différentes manières : ces blocs se délitent en fragmens irréguliers ou cunéiformes, souvent recouverts d’un léger enduit blanc, magnésien, fort onctueux, que le toucher enlève facilement. Outre les noyaux arrondis, cé schiste renferme encore une wès-grande quantité de grains blancs, de forme indéterminée, tantôt de spath calcaire, tantôt de quartz. Généralement ils sont comprimés et tranchans vers leurs bords; ce qui prouve suffisamment que leur formation doit être contem- poraine de celle des schistes. [ls contiennent en outre dans leur intérieur quelque trace de la matière ‘qui les renferme. Ces montagnes règnent pendant environ dense lieues, des deux côtés de la vallée; mais elles éprouvent de fréquentes variations. Ici les schistes ont un tou- cher doux et onctueux; ailleurs il est simplement lisse et poli, mais le plus géné- ralement il est très-rude et très-Apre. Leur couleur passe plusieurs fois du vert sombre au bleuâtre. Tantôt ils se brisent facilement, et tantôt ils ont une assez grande solidité. Quelques variétés sont exemptes de toutes espèces de noyaux (1) Les auteurs des notes critiques ajoutées à son seulement, à tort, les fragmens de la roche verte comme ouvrage, décrivent cette substance, ou du moins quel- des fragmens de basalte, ques-unes de ses variétés, avec exactitude ; ils regardent DE LA VALLÉE DE QOGEYR. 91 intérieurs; leurs feuillets, dans ce cas, sont ordinairement plus réguliers, plus minces, plus parallèles : quelques autres donnent des étincelles par le choc du briquet; alors elles s'écartent déjà de l'aspect commun des principales variétés de schiste, et se rapprochent de celles qu'on a désignées quelquefois sous le nom de schistes pétrosiliceux. Dans tout l'espace qu'occupent ces montagnes, la vallée est généralement beau- coup moins large : il existe même quelques défilés où l’on ne peut faire passer que deux ou trois chameaux de front. Elle est très-sinueuse, et toujours encaissée entre des montagnes fort élevées. Il seroit difficile de donner une idée exacte de l'aspect plutôt bizarre que pittoresque de ce désert, et du tableau qu'offre aux yeux du voyageur la succession de ces diverses montagnes. Les formes’ sans cesse variées de leurs sommets; leurs flancs nus, qui n'offrent pas la plus légère trace de végétation; les ravins nombreux qui les sillonnent; les fréquens filons de quartz et de spath calcaire dont la blancheur tranche vivement sur les diverses couleurs des schistes; et sur-tout l'effet singulier des crêtes de ces filons qui s'élèvent sou- vent de plusieurs pieds au-dessus des flancs des montagnes, comme autant de murailles qui les diviseroient en divers sens, forment un spectacle particulier à ce désert; assez varié à la vérité, mais partout morne, inanimé, et dont sont loin de donner une juste idée nos chaînes de montagnes les plus arides, parmi les- quelles au moins l'œil découvre toujours quelque trace de culture ou quelques pentes habitées. Quoique formé des débris des montagnes voisines; et de ceux qu'entraînent les torrens qui descendent des environs, le sol de la vallée est'uni et très-ferme: il n'offre jamais de pentes pénibles; et lon peut assurer, sans exagération, que cette longue route, uniquement l'ouvrage de la nature, est aussi commode pour les voyageurs que les chemins les mieux entretenus de l'Europe. Depuis Qené jusqu’à Qoceyr on n'a rencontré qu'un seul pas un peu difficile pour le passage de l'artil- lerie; et il est aisé d'y remédier. Ce que l’on voit avec le plus de surprise, au milieu d’un désert aussi aride, ce sont plusieurs acacias très-beaux et très-vigoureux, qui croissent isolés dans quelques coudes de la vallée : nous en avons compté douze ou treize dans l’espace de deux lieues. On remarque aussi quelques plantes aux environs, mais jamais sur les mon- tagnes, et uniquement dans les lieux les plus bas : la plus commune ést la colo- quinte, assez répandue dans les déserts. I paraît que les lieux où ces plantes existent, reçoivent et gardent long-temps les eaux qui s’écoulent des montagnes voisines. C'est à peu de distance de là que se trouvent les fontaines d’el-Haouch , éloignées de Qené de vingt-cinq heures et demie de marche continue, et de dix-sept du port de Qoceyr. H, N. TOME Il. M2 92 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE $. IT. Des fontaines d'el-Haoueh à Lambägeh. Ces fontaines, dont l'eau est assez pure, consistent en une douzaine de trous de peu.de profondeur, pratiqués dans les angles de la vallée, et en quelques crevasses que présente paturellement le rocher. Une lieue plus loin, on en trouve encore de semblables, mais moins nombreuses. Les diverses sortes de schistes déjà décrites se continuent fort loin dans l'espace qui nous resté à parcourir : il s’en présente aussi de nouvelles. Pour éviter des détails fastidieux, j'en indiquerai une seule qui s'éloigne plus que les äutres du caractère des précédentes. Elle peut être rangée dans la classe des schistes tégu- laires, c'està-dire susceptibles d'être divisés en lames assez étendues et de peu d'épaisseur. Elle diffère des ardoïses, dont elle offre l'aspect et la couleur, en ce qu'elle a moins de solidité, paroît plus argileuse, a le grain plus grossier, le tou- cher moins onctueux, et ne seroit pas susceptible de fournir des feuillets à-la-fois aussi minces et aussi étendus. Les chaînes schisteuses sont souvent interrompues par des substances de nature différente, dont nous allons faire connoître les principales. La première est une roche particulière qui se rapproche beaucoup, pouraspect, de la variété de pétrosilex, appelée par Saussure pétrosilex jadien ; maïs elle paroît moins magnésienne. Quoique fort compacte, elle ne donne, par le choc du briquet, que des étincelles rares : son toucher est doux et lisse’ sans être ônctueux; sa couleur ést d’un assez beau vert dans les surfaces anciennes; les cassures fraîches sont d’un vert tournant au bleuâtre. Elle donne au chalümeau, comme le pétrosilex, un émail blanc, quelquefois cependant d’un blanc sale où un peu verdâtre. Ces masses se délitent en fragmens prismatiques irréguliers, trèsalongés, et sans appa- rence de couches. La seconde se rapproche du trapp par sa couleur sombre et par l'émail noir qu'elle donne au chalumeau : comme lui, elle étincelle très-vivement au briquet; mais sa contexture est plus écailleuse, son toucher beaucoup plus âpre et plus rude. ag: La troisième est une roche stéatiteuse, assez tendre, feuilletée irrégulièrement à la manière de certains schistes ou de certains gneïss : sa poussière est blanche et onctueuse; la couleur de la masse est d’un vert pâle. On y remarque en beaucoup d’endroits des points brillans, qu'on reconnoît à la loupe pour de pétits cristaux de fer oxidulé; leur forme, difficile À saisir, paroît être l’octaèdre régulier. Les mêmes cristaux se retrouvent aussi dans quelques-uns des schistes qui contiennent des fragmens roulés; ce qui me paroît contrarier les remarques faites jusqu'ici sur leur gisement. : Ainsi se continue long-temps la vallée, présentant toujours lesesubstances qui viennent d’être décrites, mais offrant dans leurs nuances une diversité très-pitto- resque : elle ne laisse voir de changement bien prononcé qu'à trois lieues de Qoceÿr. DE LA VALLÉE DE QOCEYR. 93 Là, elle s'élargit tout-à-coup considérablement, et les montagnes qu'on aperçoit au loin ont une autre nature et une autre disposition. Une grande partie sont gypseuses ou calcaires; leurs couches, toutes bien apparentes et très-régulières, sont quelquefois horizontales, mais très-souvent inclinées du nord au sud, ét rare- ment dans d'autres sens : fait qui n’a d'importance qu'en ce qu'il peut concourir à faire juger quelques opinions énoncées sur la formation de la vallée et dont nous parlerons ailleurs. Les premières couches calcaires qu’on atteint au nord de la route ont éprouvé un renversement qui les a fait avancer hors de la chaîne dont elles faisoient autrefois partie. Elles sont formées par l'accumulation de grandes coquilles bivalves fossiles, de huit à onze centimètres | trois à quatre pouces | de longueur, très-bien conser- vées. Ces coquilles, désignées en minéralogie par le terme assez vague d’ostracites , sont connues des zoologistes sous le nom plus précis d’ostrea diluviana. EMles sont si abondantes dans ces couches, qu’il n'y existe d'autre matière qu'une terre argileuse qui paroît s'être introduite postérieurement à leur accumulation dans les interstices qu'elles laissoient entre elles. Vers le sud, de hautes montagnes de pierre calcaire compacte, à couches horizontales, reposent immédiatement sur le granit : elles sont coupées à pic, et remplies de silex disposés avec une certaine régularité. On retrouve plus loin, parmi les montagnes calcaires, de nouveaux schistes, et diverses roches dont quelques-unes peuvent être regardées comme des porphyres peu prononcés. Leur base est le plus souvent d’une couleur grisâtre, ou tirant sur le brun. Les grains de feldspath cristallisé y sont si rares, que souvent des blocs d’un volume considérable en sont tout-à-fait exempts : aussi, par le nom donné à ces roches, n’avons-nous voulu qu'indiquer leur tendance à l'état porphyritique. Ce mélange singulier de montagnes de nature et d’époques nécessairement si différentes, qui se succèdent brusquement et sans être liées par des passages gradués, est un fait (1) géologique digne de remarque. II peut servir à prouver qu'entre chacune des époques où se sont formés les terrains de différentes sortes, il s’est écoulé de longs intervalles, pendant lesquels agissoient des causes analogues à celles qui font effort journellement pour modifier la surface actuelle du globe. Lesol de la vallée, ici comme dans les endroits précédemment décrits, est couvert (1) se trouveroit expliqué (que l’on me permette une supposition), en concevant ce terrain, composé actuelle- ment de substances si peu analogues, originairement uni sans coupures, et formé des seules substances qui pa- roissent les plus anciennes. De nombreuses vallées auront été ouvertes par les causes qui les produisent encore au- jourd’hui; et si lon suppose que dans cet état leur sol ait été recouvert par les eaux, ou, pour n’entrer dans aucune supposition systématique particulière, qu'il ait été soumis à l’action des causes qui ont produit successive- ment les pouddings à fragmens antiques, les schistes, Les terrains calcaires, gypseux, &c. alors les excavations ou vallées qu’il renfermoit auront dû toutes être remplies par ces matières de formation dé plus en plus récente. On concevra aisément qu'ouvert ainsi à plusieurs reprises par des vallées nouvelles, et rempli à chacune par une seule de ces matières, ce terrain sera redevenu autant de fois un plateau continu, mais chaque fois composé de substances de plus en plus nombreuses, tout-à-fait étrangères les unes aux autres, et sans liaison entre elles. Traversé enfin par les vallées actuelles, dont les direc- tions se croiseront avec celles des anciènnes, il devra nécessairement offrir à œil de qui les parcowrra, ces alternatives brusques et fréquentes de montagnes de na- ture et d’époques si diverses , remarquées en ces lieux. Peut-être ce que nous donnons comme une supposition , eût pu se déduire comme conséquence nécessaire des observations déjà rapportées; mais notre but étoit moins d'expliquer le fait que de fournir un moyen facile de se le représenter avec les circonstances qui Paccompagnent. : 94 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE d'une immense quantité de fragmens de roches de différentes espèces, qu'ont chariés les rorrens qui tombent des gorges voisines. On y distingue ‘plusieurs variétés de serpentine; quelques roches composées , où domine l'actinote; des schistes, des gneïss; une espèce particulière de stéatite, qui renferme des nœuds de la substance nommée par les Allemands, schieférspath ; des variétés nombreuses de porphyres et de granits , et diverses autres roches dont quelques-unes ne paroissent pas se rapporter parfaitement aux espèces connues en Europe. Ces fragmens peuvent procurer quelques données sur la constitution physique des lieux voisins qu'il est très-difficile de parcourir. Mais comme ils n'appartiennent pas précisément à la vallée, leur examen seroit étranger à sa description, et il for- mera l'objet d'une notice particulière. Parmi les substances trouvées seulement en petite quantité dans les montagnes qui bordent la vallée, il en est une qui présente beaucoup d'intérêt pour la minéra- logie. Elle paroît former une espèce particulière, ou au moins une variété nouvelle d’une substance déjà connue. Nous l'avons rencontrée, dans plusieurs endroits, presque toujours faisant partie constituante des granits, des porphyres ou des roches qui leur servent de base. Quelquefois elle y est si' disséminée qu’elle semble n’y servir que de substance colorante : alors elle teint toute la masse où elle se trouve, en un fort beau vert ; d'autres fois elle est étendue comme un léger.enduit sur les surfaces des fissures renfermées dans l’intérieur des roches. Elle ne s'est montrée nulle part en cristaux bien prononcés : mais lorsqu'elle se trouve accumulée en certaine quantité, sa contexture est cristalline, sa cassure vitreuse. Sa dureté est un peu inférieure à celle du quartz; cependant elle raie aisément le verre. Quand elle est pure, elle jouit d’une demi- -transparence, et son éclat est assez vif, mélangée avec les autres élémens des roches, elle devient terne et opaque. Elle a pour couleur le vert, tantôt vif, bien décidé et très-agréable, comme celui de l'émeraude, tantôt sombre ou livide, comme dans la thallite, et quelquefois le vert jaunâtre ou plutôt le jaune verdâtre de la chrysolite. Je ne rapporterai pas ici les épreuves faites pour s'assurer de ses autres caractères: sa petite quantité ou son état de mélange ne permettoit pas de les constater avec une suffisante précision (1 }. . De toutes les substances qu'on peut lui comparer, l'épidote de Haüy (ou schorl vert du Dauphiné) est la seule avec laquelle elle ait de véritables traits de ressem- blance. Les caractères bien constatés qui l'en éloignent, sont les états particuliers qu'elle affecte, son gisement bien différent de celui de l'épidote, et la variété de ses nuances, dont quelques-unes paraissent étrangères à cette pierre; différences assez importantes, mais fondées cependant sur des caractères trop susceptibles de {r) Cette substance vient d’êtrerencontrée récemment et, soumise à toutes les épreuves propres à constater sa en divers points des déserts du mont Sinaï, eten beau- nature, elle a été reconnuet pour une variété d’épidote. coup plus grande quantité que dans la vallée de Qoceyr; r DE LA VALLÉE DE QOGÇEYR. 95 varier pour qu’elles soient décisives. Il se pourroit que, malgré ses états si différens de ceux de l'épidote, cette matière n’en fût qu’une variété nouvelle. SAVE Des fontaines de Lambägeh au port de Qoceyr. C’EST à deux lieues et demie de Qoceyr qu'on rencontre la dernière source : elle est entourée d’une végétation fort abondante, comparée à là nudité absolue des environs. Ce lieu, connu sous lé nom de Lambägeh, est un des plus remar- quables de la vallée, et le seul qui offre un site agréable. La végétation yestcependant bien languissante : elle consiste en douze ou quinze dattiers peu élevés, quelques mimosa et un grand nombre de plantes et d’arbustes réunis dans un très-petit espace. Au milieu coule un ruisseau d’une eau très-limpide, mais qui, dans la saison des pluies, se change quelquefois en un torrent considérable. Diverses sortes d'oiseaux fréquentent cet endroit, le seul de la vallée où ils pourroient exister, si les caravanes ne laissoient pas toujours dans les lieux de leurs stations une grande quantité de grains. On aperçoit aux environs quelques gazelles : ces animaux, comme tous ceux des déserts, sont assez communs dans le voisinage des sources. Nous en avons également remarqué près des fontaines d’el-Haouch et de Ja Gytah: aussi c'est dans ces lieux que tâchent de les surprendre les Arabes qui s'occupent à les chasser. Ë L'eau de Lambâgeh sert à abreuver les chameaux des caravanes : mais les hommes se gardent bien d’en boire, car elle passe pour très-malsaine : elle m’a paru seule- ment douceâtre et un peu pesante à l'estomac; qualités qu'elle doit au terrain gypseux sur lequel elle coule. ; Au nord-ouest de ces fontaines, on aperçoit de hautes montagnes granitiques. Leur base est entourée d’un rideau de montagnes schisteuses, qui en rend l'accès diflicile ; mais on peut juger de leur nature d’après des blocs considérables qui, détachés de leurs sommets, ont roulé par-dessus les schistes. Le granit le plus remarquable, et dont les blocs sont les plus abondans, est de couleur grise mêlée de rose. Ses élémens sorit d’une grosseur médiocre; la plus grande partie, de quartz transparent; le reste, de feldspath, tantôt blanc, tantôt rose: des lames rares et brillantes de mica noir, sont distribuées entre eux assez unifor- mément. Cette variété paroît absolument la même qu'une de celles qui ont été remarquées dans la brèche Égyptienne. La plupart de ces blocs ont une-forme prismatique, assez régulière pour qu'au premier coup-d'œil on puisse penser qu’elle leur a été donnée à dessein : ce sont des divisions naturelles, très-fréquentes dans les granits qui existent en bancs épais. IL est fort probable que ce sont des blocs divisés de la même manière, mais plus considérables encore, que l’auteur du Voyage aux sources du Nil a rencontrés dans la vallée de Terfäoueh, voisine de celle-ci, et qu'il a pris pour des fragmens d’obé- _ lisques commencés. 96 Sans doute il existe, dans les carrières des anciens Égyptiens, plusieurs de ces monumens seulement ébauchés; on en remarque un fort reconnoissable dans celle de Syène : mais au sein de ces déserts, à plus de trente lieues de’la vallée du Nil, et avec les dimensions que cet auteur leur accorde, leur existence n’est rien moins que vraisemblable. En effet, un des fragmens de ces immenses obélisques n’a pas moins de six mètres [dix-neuf pieds environ ] selon un des côtés de sa base, Comme ce n’est qu’un fragment, il se pourroit que la base véritable en eût même davantage: ainsi, supposant le monument entier, dans les proportions ordinaires, il eût été lui seul plus pesant que vingt obélisques, tels que ceux qui existent encore sur les ruines de Thèbes ou d'Alexandrie. Quand on prouveroit que les Égyptiens auroïent jamais tenté d’en faire de semblables, il seroit encore bien difficile d’ex- DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE pliquer comment ils eussent pu leur faire franchir trente ou quarante lieues de désert (1), ou seulement comment ils eussent pu se déterminer à les aller prendre à cette distance, ayant près du Nil des matériaux beaucoup meilleurs. ÿ Cette partie de l'ouvrage de M. Bruce, la seule que je me permette de juger, est remplie d’assertions aussi peu fondées. Il avance, entre autres choses, que lim- mense fût de la colonne de Pompée (ou colonne de Sévère) doit avoir été tiré des environs de Qoceyr, et que les défilés de cette vallée sont les résultats des excavations pratiquées pour se procurer les matériaux dont sont construits presque tous les monumens Égyptiens. Je passe sous silence ses méprises en minéralogie. La manière dont il s'exprime prouve suffisamment qu’il étoit peu versé dans cette partie de l'histoire naturelle ; mais j'ai regardé comme indispensable de relever les autres méprises, beaucoup de personnes ayant cru, séduites par la confiance avec laquelle il Favance, que c’étoit en effet du fond de ces déserts qu'avoient été tirés la plupart des obélisques, et des matériaux des anciens monumens de l'Égypte. Cette opinion eût pu d’ailleurs acqué- rir d'autant plus de crédit, qu’elle vient d’être émise de nouveau par un voyageur recommandable (2) qui visitoit ces lieux peu de temps avant l'expédition. Les voyageurs qui ont décrit quelque partie des déserts voisins de l'Égypte, sont souvent tombés dans des erreurs de ce genre. Remplis de l'idée que tout devoit être gigantesque dans les opérations des anciens Égyptiens, ils ont cru voir par-tout les traces des travaux les plus extraordinaires; et les apparences les plus équivoques leur ont suffi pour annoncer en cent endroits, ou d'immenses carrières de marbre et de granit, ou des voies pratiquées de main d’homme au travers des montagnes. Nous avons les preuves de ces erreurs; l'observation nous a montré constamment (1) I est vrai que pour lever une partie des difficultés, Pauteur a soin d’ajouter, « qu’on pratiquoit en pareil » cas des chemins inclinés, destinés à conduire ces masses » énormes, par une pente douce, depuis leurs carrières »jusqu'au Nil; » ce qui auroit pu être d’un grand se- cours, si ces carrières n’eussent été distantes du fleuve que de quelques toises. M. Bruce auroit dû remarquer, d’ailleurs, que ces Blocs étant beaucoup plus voisins de Ja mer Rouge que du Nil, la pente générale du terrain se trouve précisément inverse de celle qui conviendroit pour ce transport, La plus légère réflexion eût suffi pour le détromper: mais il regardoit ces obélisques comme des monumens consacrés à l'astronomie, science qu’il aimoit; et il étoit naturel que, préoccupé de cette idée, il se laissât séduire par les plus légères apparences : c’est ainsi que, cédant aux mêmes impulsions, il a vu dans une couche de décombres, épaisse de douze pieds, où est engagée la base des obélisques de Lougsor, un sol des- tiné autrefois, et même propre encore actuellement, aux observations astronomiques (2) M. Browne, auteur du Nouveau Voyage en Égypte, en Syrie et dans le Darfour. que DE LA VALLÉE DE QOGEYR. 97 que les Égyptiens n’ont été chercher au loin que ce qu’il leur étoit impossible de trouver près d'eux : c'est dans les deux chaînes de montagnes qui bordent la vallée du Nil que se trouvent toutes leurs carrières de granit, de pierres calcaires, et de grès de différentes sortes; seules matières généralement employées dans la cons- truction des anciens monumens. Celles qui n’existent que dans le fond des déserts ne l'ont été qu’en petite quantité, et le plus souvent pour desmonumens monolythes d'un volume médiocre : tels sont l’albâtre, les porphyres, la brèche Égyptienne, différentes sortes de stéatites ou de pierre ollaire, la substance nommée impro- prement basalte Égyptien, &c. Ces indications suffisent ici; mais on trouvera un grand nombre de faits à l'appui de ce que nous avons avancé, dans la Description minéralogique de l'Égypte supérieure et des parties du désert que nous avons visitées. En quittant Lambâgeh, on côtoie plusieurs montagnes schisteuses ou pétrosili- ceuses, dont la base est enveloppée dans des couches de gypse, remplies de cristaux de même nature. C'est dans cet endroit que se trouve le passage incommode déjà indiqué : après lavoir franchi, on découvre la mer Rouge, et bientôt après le fort de Qoceyr. Les montagnes qu'on aperçoit en $’'avançant, et qui de part et d’autre s’écartent de plus en plus de la route, sont toutes gypseuses ou calcaires. On aperçoit dans ces dernières les carrières d’où l'on a tiré les matériaux du port. La route est bordée jusqu'auprès de Qoceyr par des ravins larges et profonds qu'ont creusés les torrens. Ces ravins étaient à sec, lorsque nous avons fait le voyage; mais à l'époque des pluies, les eaux qui s'y rendent de toutes les monta- gnes voisines, y coulent à pleines rives. Le port de Qoceyr occupe le fond d'un golfe très - étendu, ouvert à l'est, et dont la navigation est réputée dangereuse à cause de ses écueils. Le port se trouve formé, dans sa partie méridionale, par un crochet que fait la côte en s’avançant brusquement de l’ouest à l’est; au nord, par un immense rocher de corail et de madrépores, dont le milieu, relevé en arête, forme une barré dirigée vers l'est- sud-est, qui reste entièrement découverte à marée basse. Elle s’avance assez loin au large, et rompt en partie la violence des vents de nord. La portion du rocher, au sud de la barre, demeure constamment submergée; elle se prolonge très -loin horizontalement dans l’intérieur du port où elle est coupée à pic. C'est auprès, que mouillent les bâtimens. Ce rocher, dans sa partie submergée, s’exhausse encore par l'accumulation des coraux qui s’y attachent ou qui s’y forment journellement; la partie méridionale du port est garnie, aïnsi que les côtes voisines, de pétits récifs de même matière. C'est en partie en briques crues et en partie avec des fragmens de ces rochers, qu'est construit le petit nombre de maisons auquel on donne le nom de w{e de Qogeyr. Je sais quel intérêt doivent avoir des détails, soit sur la ville et le fort, soit sur le port et le commerce qui s'y fait; mais les travaux de MM. Girard et Denon ne H. N, TOME I, N 98 DESCRIPTION MINÉRALOGIQUE DE LA VALLÉE DE QOGÇEYR. peuvent manquer d'offrir tout ce qu'on desireroit à cet égard. J'ajouterai seule- ment, dans une notice séparée, quelques remarques sur divers objets qui me pa- roissent propres à compléter les renseignemens que devoit procurer ce voyage, pour lequel nous avons eu (j'en dois l'hommage à l'intérêt particulier qu'y ont pris les généraux Belliard et Donzelot) tous les secours que en: permettre les circonstances dans lesquelles il a été fait. DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES QUI SE TROUVENT EN GE D: PAR M. LE CHEVALIER GEOFFROY SAINT-HILAIRE, MEMBRE DE L'INSTITUT IMPÉRIAL. LL LL LL LL ST DES CHAUVE-SOURIS. A L'Homme accoutumé À juger de la nature vivante sur le petit nombre d’ani-. maux qui font partie de son système social, est en général disposé à ne trouver que dans ces modèles, des formes assorties, des proportions harmonieuses, des mou- vemens d’un accord parfait, et des fonctions faciles et naturelles. Aussi, quand parfois il vient à rencontrer des êtres d’une nature vague et indé- terminée qui, ambigus, à demi quadrupèdes et à demi volatiles comme la chauve- souris, ne ressemblent à aucun des types qui lui sont familiers, il a peine à se rendre attentif à une réunion de choses aussi disparates : tout entier à ses pre- mières sensations, il n'entre dans le détail d’élémens aussi hétérogènes que pour s'exagérer les incohérences qui l’ont choqué à la première vue. Ces chauve-souris, est-il dans le cas de se demander, parviendront-elles à ra- mener les pièces longues et déliées dont leurs mains sont formées ; à défendre, dans la marche, d'un sol âpre et rocailleux leurs doïgts beaucoup trop grèles et trop délicats ; à reployer les larges membranes dont leurs flancs sont comme embar- rassés; à trouver contre les moindres chocs une garantie suffisante dans les enve- loppes des vaisseaux de leurs ailes, foible appui formé d’un double réseau, mince ét transparent; et à employer enfin avec aisance et sûreté un appareil aussi com pliqué, contre sa destination ordinaire et primitive ! k Des êtres que le vulgaire juge aïnsi maltraïtés , se transforment bientôt à ses yeux en des monstres d’une laïdeur et d’une difformité révoltantes, Telle est effectivement l'idée qu'on s’est faite, de tout temps, des chauve-souris. On les a crues impures, et l'on a évité de les connoître. Les écrits des premiers naturalistes attestent l'ignorance où l’on füt d’abord à leur égard. H.:N. TÔME IL - Na 100 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Aristote les définit des oiseaux à ailes de peau : il ne sait, au juste, si ce sont bien des volatiles, à cause de leurs pieds; mais, d’un autre côté, äl ne peut se dé- terminer à les regarder comme des quadrupèdes, ne les voyant pas pourvues de quatre pieds bien distincts. Ses réflexions sur leur défaut de queue et de crou- pion, le conduisent à des idées théoriques, dont aucune n’est appuyée sur une observation positive. Pline n’en parle que pour remarquer qu'il y a des oiseaux qui engendrent leurs petits vivans, et qui les allaitent au moyen de mamelles. À la renaissance des lettres en Europe, on se borna d’abord à copier les anciens. Aldrovande commença le premier à s'étendre davantage sur les chauve-souris: cédant toutefois aux préjugés de son siècle, il en fit une même famille avec l'au- truche; et la raison qu'il en donne, est que ces deux espèces d'oiseaux participent tout autant de la nature des quadrupèdes. Scaliger, de son côté, fait de la chauve-souris un être tout-à-fait merveilleux : il lui trouve et deux et quatre pieds. Elle marche sans pattes, et vole sans ailes ; elle voit lors qu'il n’y a pas de lumière, et cesse de voir quand la lumière paroît. C’est, ajoutc-t-il, le plus singulier de tous les oiseaux, puisqu'il a des dents, et qu'il est privé de bec. Si plus tard on donna enfin quelque attention aux chauve-souris, ce ne fut pas d'abord pour en étudier l'organisation : on n’y regarda qu'autant qu'il le fallut pour parvenir à les comprendre dans des distributions méthodiques ; ou plutôt on n’alla consulter en elles que les points de leur conformation qui correspondoïent aux bases sur lesquelles on avoit fait rouler l'échafaudage des systèmes zoologiques. Toutefois il arriva qu'on eut de bonne heure une idée exacte des affinités des chauve-souris : c'est qu'on avoit fort heureusement choisi, pour point de départ de ces sortes de travaux, des caractères extérieurs correspondant à des caractères anatomiques plus généraux et plus profonds, Dès ce moment, on ne sépara plus les chauve-souris des quadrupèdes vivi- pares : une étude plus approfondie de leur organisation confirma les indications fournies par la considération de leurs dents. , En effet, les chauve-souris ont, comme les quadrupèdes vivipares le cœur Piloculaire, les poumons celluleux, suspendus et enfermés: dans la plèvre, un dia- phragme musculeux, interposé entre a cavité du thorax et celle de l'abdomen, un cerveau ample et ramassé, le crâne composé d'autant de pièces, et.de pièces également enchevêtrées. C'est le même système sensitif, et ce sont, les mêmes appareils pour la digestion et les secrétions. Leurs dents sont aussi des trois sortes : tout leur corps est également couvert de poils; et, ce qu'on savoit depuis long-temps, sans en avoir tiré la même conséquence que de nos jours, elles enfantent égale- ment leurs petits, et leur donnent le laït de leurs mamelles. Leurs os, leurs muscles, leuis vaisseaux, tout en elles est comme dans les quadrupèdes vivipares; cette res- semblance est telle, que les moindres détaïls de leur organisation suflroient seuls et séparément, pour montrer que ce sont de vrais mammifères, et qu'on ne sauroit se dispenser de les comprendre dans la même classe. ! QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE.: 10E£ Mais il y a loin cependant de ce résultat aux vues hardies de Linnéus, qui les rangea dans un même ordre avec l'homme et les singes, et qui ne craïgnit pas de donner aux uns et aux autres un nom semblable, tantôt celui d'antropomonphæ (êtres à visage humain), tantôt celui de primates (animaux de premier rang). Fout extraor- dinaire que parut cette classification, le grand nom de son auteur la consacra. Toutefois il survint, peu après, une opinion qui ne pouvoit s'en accommo- der; ce fut celle de quelques naturalistes qui avoient cru apercevoir entre tous les animaux des rapports suivis et gradués, et une marche progressive du simple. au composé. Cette échelle mystérieuse, dont on avoit fait descendre les premiers échelons de la voûte céleste, vraie sous quelques rapports, et quand on se borne à des énoncés généraux, c'est-à-dire aux principaux embranchemens du règne animal, fut cause qu'on ne s'en tint pas, à l'égard des chauve-souris, aux pre- miers aperçus de Linnéus. En effet, des animaux constitués comme les mam- mifères, et jouissant des plus belles prérogatives des oïseaux, formoient dans ce: système une famille à ne pas négliger. Aussi, on ne manqua pas de la considérer comme un chaînon visiblement destiné à faire arriver, par une transition insensible, du premier de ces groupes au second. De Fécureuil volant Ia famille douteuse , a dit le chantre des trois règnes de la nature, L'oreïllard déployant son aile membraneuse, Joignent le quadrupède avec le peuple ailé. C'étoit implicitement confondre l'effet avec la cause, et jusqu’à un certain point reconnoître que la faculté du vol, dans les oiseaux et les chauve-souris, résultoit au fond d’une même organisation. On examina ce point de fait; et Fon ne fut pas long-temps sans demeurer con: vaincu que si les chauve-souris se rencontrent dans les régions de l'atmosphère avec les oïseaux, elles s'y portent en y employant des instrumens diférens, dont toutes les anomalies dérivent du type des mammifères. La seule chose commune aux chauve-souris et aux oiseaux, c’est que,-des deux côtés, ce sont les extrémités antérieures qui, déviant de leurs formes habituelles, sont transformées en organes du vol, et deviennent des rames propres à fendre et à choquer l'air. Maïs, des deux côtés ausst, les choses sont essentiellement différentes. Les parties qui correspondent aux doigts, sont dans les oiseaux presque effacées : elles n'y existent que rudimentaires, atténuées et soudées les unes aux autres; d’où il résulte que la main des oiseaux n’est vraiment qu'un moignon. L’aile existe au: delà, appuyée et ajustée sur cette extrémité du membre, et consistant dans ses longues pennes terminales, c’est-à-dire qu’en dernière analyse, sa portion la plus utile n’est au fond composée que de tiges ou d’élémens appartenant au système épidermique. ; Dans les chauve-souris, au contraire, c’est le membre lui-même et principa- lement la main qui sont extraordinairement agrandis. Les .pièces osseuses, leur 102 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES principal support, sont d'autant plus grèles et déliées qu’elles acquièrent une plus grande longueur. Elles fournissent, sous ce. rapport, un nouvel exemple de ce qu'on trouve partout ailleurs chez les animaux, où un organe n’acquiert jamais de dimension exagérée dans un sens, que ce ne soit à ses propres dépens dans un autre. Qu'on se figure la main d’un singe, dont les parties solides auroïent passé À une filière et s’écarteroient du carpe, comme les rayons d’un segment de cercle, et l'on aura une idée nette de la construction d’une main de chauve-souris. Le pouce seul n'éprouve pas les mêmes modifications; il reste court, dégagé de toute entrave, et susceptible de mouvemens très- variés : tel est encore le pouce des singes. Comme il n’est pas employé en organe du vol, qu'il conserve sa fonction ordinaire, et qu'il est et reste doigt quant à l'usage, il est maintenu dans toute son intégrité, c’est-à-dire qu'il reste pourvu de sa dernière phalange et de son ongle. Les quatre autres doigts, au contraire, que leur longueur démesurée change en instrumens du vol, passant à un emploi étranger, ne sont plus susceptibles de leur service habituel, dès que c'est en se tourmentant et se fatiguant beaucoup que parfois les chauve-souris parviennent seulement à s’en servir pour se traîner sur un plan horizontal ou pour tenir leurs petits embrassés. Une autre anomalie rend, en outre, ces quatre doigts dignes d’attention; ils n'existent plus en leur entier : ce ne sont plus que des doigts sans ongle. Et, chose remarquable, comme si la phalange qui les termine et qui se montre par-tout ailleurs avec une forme calquée sur celle de ongle, en devoit suivre toutes les conditions, elle manque là où l’ongle a disparu. Aussi, si le nom de phalange on- guéale n’avoit pas été déjà donné à cette partie de la maïn, seroit-ce le cas de le créer, pour rappeler une subordination aussi constante. Les longues phalanges des chauve-souris ne sont à leur aïle que ce que sont les baguettes d’un parachute à l’ensemble de cet instrument, c’est-à-dire des sup : ports destinés à fixer une étoffe qui puisse résister à l'air. Celle-ci ne manque pas dans les chauve-souris; elle est produite par un prolongement de‘la peau des flancs : le dos et le ventre fournissent chacun leur feuillet; ce dont on s’est assuré en séparant en deux couches semblables l'épaisseur de la membrane des ailes. Toutefois, malgré que cette membrane soit formée de deux peaux accolées lune à l'autre, elle ne se manifeste À nous que sous l'apparence d’un réseau mince, transparent et léger. Ainsi, de même que les os de la main ne se sont alongés qu’en diminuant d'épaisseur, de même aussi, le système tégumentaire ne s’est étendu autant sur les flancs qu'en samincissant dans une égale proportion. Or, il est à remarquer que ce qui est ici l'effet d’une loi générale de l’organisation, complète merveilleusement les moyens de vol des chauve-souris, puisque des os plus com- pacts et une membrane plus épaisse et plus dense, sur-tout à une aussi grande distance de la force motrice, eussent ajouté au corps de ces animaux un poids que tous leurs efforts ne seroient sans doute pas parvenus à vaincre. . Cette analyse de l'aile de la chauve-souris, en nous montrant un bras et une QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. d 03 main de mammifère, dont le métacarpe et les phalanges sont unis par des membranes, suflit pour établir que non-seulement f'aile de la chauve-souris n’est nullement comparable à l'aile d’un oiseau, mais de plus que pour bien concevoir sés étranges anomalies, il convient de s'attacher à la considération des extrémités les plus favorablement disposées pour saisir, et les plus profondément divisées. Or les mammifères aux digitations les plus profondes, sont les quadrumanes. En retrouvant les chauve-souris plus voisines en cela de ce groupe que d'aucun autre de la classe des mammifères , nous sommes donc ramenés par cette consi- dération à reconnoître que Linnéus avoit bien jugé de leurs affinités. Nous sommes encore mieux conduits à cette conséquence par l'examen des autres traits qui les distinguent. Ayant plus haut indiqué les caractères anatomiques et profonds qui leur sont communs avec tous les animaux à mamelles, nous ne pouvons plus porter notre attention que sur leurs autres caractères qui les mettent en communication avec les choses de leur monde extérieur. Ces caractères du deuxième ordre, nous allons les examiner : 1.9 Les mamelles. Plus nous nous éloïgnons du groupe des quadrumanes qui ont leurs glandes mammaires situées sur le thorax, plus nous voyons ces glandes redescendre de la poitrine à l'abdomen. Leur déplacement, soit qu'elles se distribuent sur tout le tronc, comme dans les carnassiers, soit qu'elles se reportent tout-à-fait en arrière, comme dans les ruminans, fournit un caractère d’une assez grande valeur. Or, toutes les chauve-souris , à lexception des rhinolophes, ont exac- tement leurs mamelles semblables à celles des quadrumanes pour le nombre .et la position. if 2.° Les organes de la génération. Les chauve-souris ne sont encore, sous ce rapport, comparables qu'aux qua- drumanes ; leur penis est de même gros, ramassé, visible au-dehors, pendant sur les testicules et assez court pour se passer d’osselet, dont il n’y a de privés que l'homme, les quadrumanes et les chauve-souris. S'il faloit suivre les rapports de ces êtres jusque dans la conformité de leurs habitudes, nous verrions encore les chauve-souris ressembler aux quadrumanes par des inspirations désordonnées et l'entraînement d'une brutalité révoltante : j'ai en effet rapporté, d’après M. Roch (Annales du Muséum, tom. VIT, pag. 227), une observation qui prouve que les chauve-souris s’adonnent de même, en domesticité, à user seules des organes de la génération. 3° Les dents. Ce caractère est décisif, et semble indiquer qu'à l'exception des bras, c’est le type des quadrumanes que la chauve - souris reproduit; car, sans cela, com- ment concevoir cette exacte répétition des formes dans des parties aussi compli- quées et aussi peu essentielles à la vie que le sont les dents incisives! Cependant les roussettes ont ces dents comme les singes, et les vespertilions comme des makis : les molaires sont dans les mêmes rapports, c'est-à-dire , formées dans 104 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES céux-ci par une large couronne hérissée de pointes, et dans ceux-là par une tranche nette. : 4.° Les abajoues. Presque tous les singes de lancien monde présentent une dilatation très- grande des muscles buccinateurs, dans une convenance parfaite avec leur glou- tonnerie et leur caractère inquiet : on sait que les singes mettent à profit cette organisation, pour s'en servir Comme de poches, quand ils vont à la hâte piller des jardins et des champs cultivés. Ce sont aussi là des faits de l'histoire des chauve- souris : elles ont aussi leurs abajoues, qu’elles remplissent d'insectes dans leurs chasses, se réservant de faire curée à leur retour dans leurs retraites. Tant de rapports entre les chauve-souris et les quadrumanes, nous prouvent que Linnéus, en plaçant son genre Vespertilo , à la suite des makis, a vraiment présenté les chauve-souris dans l'ordre de leurs affinités naturelles; mais il a été plus loin, comme nous l'avons vu : il a jugé ces rapports si intimes qu'il n'a plus fait des uns et des autres qu’une seule grande famille ou Fordre unique’ Primates. Nous ne pouvons nous ranger à cette deuxième partie de son opinion. Le grand nombre de chauve-souris publiées aujourd'hui, et une connoissance plus profonde de leur organisation, les font présentement considérer comme un en- semble qui a des limites distinctes, ou comme une de ces grandes familles qui, sous le nom d'ordre, forment les premières coupes de la classe des mammifères. Déjà, en 1795, nous avions, M. Cuvier et moi, proposé pour ce nouvel ordre le nom de Chciroptera ; et cette partie de notre travail paroît avoir réuni l'assen- timent général. Montrons qu’en effet les caractères qui appartiennent exclusivement aux chauve- souris, exercent une assez grande influence sur leur économie pour justifrer cette nouvelle manière de les envisager. ; Une des choses les plus dignes de remarque que présente leur organisation, _est cette disposition du système cutané à se prolonger au-delà des contours de lanimal, et à procurer aux organes des sens plus d’étendue et plus d'activité. On n'a peut-être pas donné assez d'attention à la manière dont se fait cette extension. La peau des flancs ne se porte pas seulement sur les bras, pour de là se distribuer entre les phalanges des métacarpes et les doigts; elle “embrasse aussi les extrémités de derrière, et, en se prolongeant entre les jambes, elle se répand le long de la queue, de manière à former, autour des chauve-souris, une surface qui est réellement hors de toute proportion avec la petitesse de leur corps. Il n’y avoit en effet qu'une surface aussi considérable qui püt offrir les organes d’un toucher si parfait et d’un tact si exquis, que Spallanzani, qui en a observé les phénomènes, les attribuoit à un sixième sens: Les oreilles externes participent tellement à cette tendance du système cutané à Sagrandir, qu'il est de ces oreilles prolongéés sur le front et réunies en partie, et qu'on en connoît un exemple, le Vesp. auritus (voyez pl. 2; fig. 3), où elles égalent en longueur l'animal lui-même. Elles participent en outre à cette ten- dance d'une manière encore plus curieuse, étant doubles dans la plupart des chauve-souris. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 107 chauve-souris. En effet, indépendamment de la conque externe qui ne diffère de l'oreille des autres animaux que par plus d’étendue, il en est une seconde qui borde lorifice du méat auditif. Quoïqu'on ne trouve cette petite oreille, ou l'ereillon, que dansles chauve-souris, ce n'est pas un organe dont il n’y ait aucune trace ailleurs: Ja nature n'opère qu'avec un certain nombre de matériaux qui varient seulement de dimension. L’oreillon en est une preuve : il dérive du #ragus ; ou plutôt c’est le tragus lui-même qu'on est tenté de prendre pour une partie distincte, à raison de son étendue qui, quoique considérable, n’est que dans la proportion de l'oreille, et à raison aussi de la manière dont l'oreille est repliée et comme roulée sur elle-même. Cette susceptibilité des tégumens communs à saillir en dehors, se fait remar- quer de même aux abords d’autres cavités des organes des sens. I est en effet beau- coup de chauve-souris qui ont le nez bordé de crêtes et de feuilles formées par une duplicature de la peau : ces membranes sont disposées en entonnoir dont le fond sert d'entrée aux fosses nasales. ; I en est donc de l'organe de l’odorat comme de celui de l'ouïe: l'un et l'autre sont pourvus de conques ou de cernets extérieurs. Des membranes aussi étendues et aussi multipliées ne peuvent exister sans exercer une grande influence : aussi voyons-nous que le monde extérieur des chauve-souris en est agrandi. Il'est évident, par exemple, qu’elles acquièrent la notion de beaucoup de cor- puscules qui ne sont sensibles pour aucun autre animal. Les observations de Spal- lanzani nous apprennent que, si elles se décident sur l'indication du toucher, c'est le plus souvent sans recourir à un contact immédiat, et qu'il leur suffit, selon la judicieuse remarque de mon célèbre ami M. Cuvier sur ces observations, pour être averties de la présence des objets corporels, de palper l'air interposé entre elles et ces objets, et d'apprécier la manière dont il réagit sur la membrane de leurs aïles. à En veut-on une autre preuve! Qu'on considère ces vastes entonnoirs placés au-devant des organes de l’ouïe et de Podorat. Ne sont-ce pas Îà autant d'instru- mens perfectionnés, qui donnent aux êtres qui en sont pourvus, la faculté au plus’ haut degré de percevoir les plus petites particules du son et les moindres émana- tions odorantes ? Avec ces moyens de se rendre attentives et prêtes à toute espèce de percep- tions, les chauve-souris ont, en outre, la faculté de s'y soustraire ; faculté sans doute indispensable, puisqu'autrement elles eussent été accablées sous une aussi grande perfection des organes des sens. L’oreïllon est placé sur le bord du méat auditif, de manière qu'il devient à volonté une soupape qui en ferme l'entrée: il suffit pour cela d’une foible inflexion de l'oreille, et même, dans quelques indivi- dus, du froncement et du seul affaissement des cartilages. Les replis et les bourrelets des feuilles nasales remplissent fe même objet, à égard des narines. Ainsi, ce n’est point sans profit pour les chauve-souris ‘que le système cutané H. N. TOME I. 0 106 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES prend un accroissement si considérable : il est de toute évidence que les organes des sens y gagnent plus de volume et de perfection. D'un autre côté, l’excessive étendue de la main des chauve-souris a comme exercé une sorte de réaction sur les organes qui la font mouvoir : le cœur est placé plus haut ; les muscles pectoraux sont plus volumineux, et ils ont en même temps leur siége et leurs attaches sur un sternum formé de pièces aussi remar- quables par leur grandeur que par leur parfaite ossification : on sait au contraire que le sternum des quadrumanes est généralement foible, petit et simplement cartilagineux. Les os de l’avant-bras ne sont pas non plus susceptibles, comme dans ces der- niers, des mouvemens de pronation et de supination. Ce qui est une très-grande perfection dans les quadrumanes qui derheurent comme appendus toute la vie aux branchages des arbres, et qui ne peuvent prendre aucun soïn pour se conserver sans qu'ils soient portés à saisir, formeroit un grave, inconvénient dans les chauve-souris qui, à chaque battement d’aile, auroïent à redouter que la résistance de l'air ne causât la rotation de leur main. Tout mouvement de cette espèce leur est rendu impossible par le sacrifice de l’un des deux os de Favant-bras, ou le cubitus : cet os n’y est plus que rudimentaire; il n'y existe que dans son tiers huméral, et il est presque soudé au radius assez fort pour soutenir le carpe et toute la main. Ù On peut calculer de combien les extrémités antérieures se trouvent agran- dies dans les chauve-souris, en les comparant à celles de derrière, restées dans leurs dimensions ordinaires. Celles-ci ne sont en outre qu’en partie engagées dans la membrane des flancs : le pied est libre. La membrane a ses dernières attaches sur le tarse, dont un des osselets saille en dehors, prend la forme d’une épine, et rend à la membrane interfémorale le service de la maintenir, lors de son déve- loppement. é Les doigts postérieurs sont petits, comprimés, égaux entre eux, et toujours au nombre de cinq: le pouce ne s’en distingue point. Tous sont terminés par des : griffes ou de petites lames cornées, faites en quart de cercle, fort acérées à la * pointe, et remarquables par leur égalité et leur parallélisme. I] faut que cette conformation des doigts entre d’une manière bien nécessaire dans la constitution des chauve-souris : car elle n’éprouve nulle part de modi- fication ; et dans le fait, si lon y réfléchit bien, la chose ne peut manquer d'être ainsi. Les fonctions, ailleurs départies aux doigts, se trouvent dans la chauve-souris comme concentrées dans ceux de derrière, où seulement il en existe de véritables : nous avons vu qu'en avant, un seul reste conservé, les quatre autres n'étant, à proprement parler, que des brins solides, propres seulement à tendre ou plisser la membrane. : Telles sont les seules ressources de la chauve-souris pour la locomotion, quand elle n'est pas dans le vol : à lés considérer, on ne supposeroit pas qu'elle pût être tentée de les mettre en œuvre, pour changer de place à la manière des QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE.: 107 quadrupèdes. Cependant, quand cela lui est utile, elle sait en tirer un parti très- avantageux. Ses ailes reployées deviennent, au besoin, des jambes de devant : elle pose alors sur quatre pieds. Elle marche enfin, et se traîne même avec assez de vélocité pour qu'on puisse dire qu’elle court avec vitesse. Mais pour cela, que de peines, que d'efforts, combien d'actions diverses ! On la voit d'abord, porter en devant et un peu de côté son bout d’aile ou moignon, se cramponner au sol, en y enfonçant longle de son pouce; puis, forte de ce point d'appui, rassembler ses jambes postérieures sous le ventre , et sortir de cet accroupissement, en s'élevant sur son train de derrière, et faisant dans le même temps exécuter à toute sa masse une culbute qui jette son corps en avant: mais comme elle ne se fixe au sol qu’en y employant le pouce d’une des aïles, le-saut qu'elle fait a lieu sur une diagonale, et la rejette d’abord du côté par où elle s’étoit accrochée; elle emploie, pour le pas suivant, le pouce de l'aile opposée, et, cul- butant en sens contraire, elle finit, malgré ces déviations alternatives, par cheminer droit devant elle. Cet exercice finit par la fatiguer beaucoup : aussi, pour qu'elle s'y livre, ou il faut qu'elle jouisse dans son antre d’une grande sécurité, ou qu'elle y soit contrainte par une suite d'accidens qui Faient fait tomber sur un plan hori- zontal. Toute chauve-souris qui est dans ce dernier cas, s'y soustrait aussitôt, parce qu'il Jui est alors presque impossible de s'élever et de reprendre le vol : ses ailes ont trop d'étendue; et les efforts qu’elle peut faire, n’aboutissent le plus souvent qu'à heurter le sol et à lui procurer une nouvelle chute. Si, au contraire, elle parvient à gagner un lieu élevé, un arbre ou même un tertre, elle se remet facilement dans la seule situation qui lui convienne. Cette situation, c’est le vol. Ce n’est que dans les airs que les chauve-souris se complaisent, parce que c’est là seulement qu'elles jouissent de toute liberté, qu'elles mettent à profit toutes leurs ressources, et qu’elles ont une confiance sans bornes, quelquefois même jusqu’à s’emporter et aller braver des dangers réels. Maïs ces courses ne peuvent être continuelles : le repos doit les suivre. C’est pour ce moment critique que les chauve-souris réservent toute leur prudence. Le sen- timent des dangers auxquels elles sont alors exposées, les porte à rechercher les retraites les plus profondes et les plus inaccessibles, et leur fait prendre.la pré- caution de se suspendre à la voûte des cavernes, la tête en bas: simplement accro- chées par les ongles de derrière, elles n’ont plus qu’à lâcher prise, pour se dérober par le vol à une attaque imprévue. Nous entrevoyons maintenant les motifs de cette position inverse à laquelle il étoit remarquable qu'il n’y eût que les chauve-souris d’astreintes: En effet, nulle autre situation ne les rendroït aussi promptement à l'industrie qui leur est la plus familière; nulle autre ne leur fourniroit plus de facilités pour échapper, et aller se perdre dans limmensité des airs. Les chauve-souris prêtes à se lancer, ayant à déployer l’embarrassant manteau que forme la membrane de leurs ailes, et ne pouvant le faire qu'en se procurant H. N. TOME II. 0 à 108 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES sur les côtés un espace proportionnel à son étendue, ne pouvoient, pour ren- contrer toutes ces chances de succès, que tomber d’un lieu élevé. Les pieds de derrière des chauve-souris devoient donc, pour fixer ces animaux au plafond de leurs retraites, avoir une forme appropriée à cette destination: dès-lors, il devient facile de se rendre compte du parallélisme et de l'égalité de leurs doigts aussi-bien que de la courbure et de la pointe acérée de leurs ongles. Réfléchis- sant, en effet, que ces pieds, dont nous n'avions pas d’abord rattaché les formes au plan des chauve-souris, complètent au contraire leur système {ce qui donne aux diverses parties des organes de la locomotion des usages qui se correspondent et qui sont dans des relations nécessaires), nous ne nous étonnerons plus de l'invariabilité des formes de ces extrémités; ce dont nous avions fait précédemment le sujet d’une remarque. On n'entre point dans les souterrains des fauve: -souris qu'on ne soit d’abord affecté par l'odeur de leur fiente. On la trouve rassemblée en monceaux souvent très-considérables sur le sol, vers le centre des espaces qu'elles occupent : enfin on ne peut se méprendre sur le lieu d’où proviennent ces produits excrémentiels ; c'est de la voûte du souterrain. C'est bien là aussi le rendez-vous des chauve-souris ; c’est à eflectivement qu'elles s'assemblent côte à côte. Mais il ne faut pas oublier qu'elles y demeurent suspen- dues par les pieds de derrière ; et alors, comment concevoir qu’elles puissent se vider, dans une situation si peu convenable à cet objet! Je vais dire comment elles y procèdent : je raconterai ce que j'ai vu. Une chauve-souris, dans ce cas, met d’abord une de ses pattes en liberté d'agir, et en profite tout aussitôt pour heurter la voûte; ce qu’elle répète plusieurs fois de suite. Son corps, que ces efforts mettent en mouvement, oscille et balance sur les cinq ongles de l’autre patte, lesquels forment, par leur égalité et leur parallé- lisme, une ligne droite, comme seroit l'axe d'une charnière, Quand la chauve- souris est parvenue au plus haut point de la courbe qu'elle décrit, elle étend le bras et cherche sur les côtés un point d'appui pour y accrocher Fongle qui le termine, celui du pouce de l'extrémité antérieure. C’est le plus souvent le corps d'une chauve-souris voisine, qu'elle rencontre; d’autres fois, un mur sur les flancs, ou bien un autre objet solide : mais, quoi que ce soit, elle a atteint son but; elle s'est mise dans une situation horizontale, le ventre en en-bas, c'està-dire dans la situation qui lui convient pour se vider, et ee le faire, en prenant soin de sa robe. Nous avons montré les chauve-souris sous deux considérations ; d’abord sous le point de vue de leurs affinités avec les quadrumanes, et en second lieu sous celui des anomalies qui les isolent des autres mammifères : il nous reste pré- sentement à indiquer ceux de leurs traits qui les rapprochent aussi des animaux carnassiérs. Le plus grand nombre vit de proie ; leur estomac est petit, sans étranglement ni complication : le canal intestinal, d’un diamètre assez égal, est court, et le cœcum manque entièrement. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 109 Les dents répondent à cet ordre de choses: les incisives sont lobées; les canines longues et aiguës, et les molaires hérissées dé pointes. Quelques chauve-souris, qui vivent de fruits, ont les dents et les intestins un peu différemment conformés; elles n’ont pas non plus le derme aussi étendu : aussi sont-elles chauve-souris au plus petit titre possible. Les dents aiguës du plus grand nombre sont leurs seules armes et moyens pour attaquer, saisir et déchirer les insectes dont elles font leur nourriture :.elles ont pour les atteindre au vol une facilité qu'on ne leur avoit pas encore remarquée; c'est la grandeur de leur bouche : ce sont à cet égard de véritables engoulevens. La commissure des lèvres ne s'étend point, chez les mammifères, au-delà des dents canines; on diroit que la lèvre supérieure suit le sort des intermaxillaires, qu'elle lui est subordonnée et qu’elle en est la coiffe : en effet, la bouche n’ést large et bien fendue que chez les animaux dont les intermaxillaires sont très- longs, et se trouve au contraire d’une étroitesse extrême dans ceux qui ont ces os très-petits. Les deux genres de la famille des monotrêmes en offrent un exemple remarquable : l'ouverture de la bouche est on ne peut plus différente dans ces deux genres , les ornithorhynques et les échidnés ; et leurs intermaxillaires sont dans ces mêmes rapports. Les chauve-souris, du moins celles qui se nouïrissent d'insectes, sont la seule exception à cette loi générale que je connoisse : la commissure de leurs lèvres est très-reculée en arrière, et correspond à la pénultième molaire. On peut regarder leurs abajoues comme Îa cause de cette anomalie : car les joues que ces poches rendent flasques, se déplissent et s'étendent avec les lèvres; et dès-lors la mâchoire inférieure peut s’écarter de la supérieure jusqu'à former avec elle un angle de quatre-vingt-dix degrés. Les chauve-souris ressemblent aussi aux animaux carnassiers par les habitudes tristes, la vie nocturne, la susceptibilité de leurs organes des sens qui les force de fuir le bruit et la lumière, et leur moindre chaleur spécifique. Elles passent l'hiver ou plutôt la plus grande partie de l’année dans l’engourdissement : extrêmement sensibles aux plus petites impressions du froid et de l'humidité, elles ne jouissent d’une pleine activité et ne sortent de leurs retraites que dans les belles soirées d'été; mais alors vivement excitées, elles ne sont attentives à rien : occupées de la chasse avec une ardeur sans mesure, ou elles deviennent à leur tour une proie facile pour les oiseaux de proie de nuit, ou elles donnent dans les piéges qu’on leur tend; elles tombent dans des filets qu’on agite sur leur route, ou sont prises à la ligne, parce qu’elles happent, avec trop d’avidité, tout ce qu elles voient voltiger dans l'air. Les observations ci-dessus nous montrent les chauve-souris, d’une part, commé voisines des quadrumanes et des carnassiers, et de l’autre comme pouvant être rapportées à un type particulier : or, là conséquence où nous conduit le rappro- chement de ces résultats, est que les chauve-souris constituent un ordre qui se distingue nettement de celui des autres mammifères. En présentant toutes les considérations qui établissent la réalité d'un ype 110 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES particülier pour ces animaux, nous ñous sommes tenus dans des énoncés généraux: il nous reste maintenant à faire connoître les chauve-souris sous d’autres rapports. Nous n'eussions pas eu ces données de l’organisation, que le même résultat eût de même été obtenu par les seules considérations zoologiques; nous allons le montrer dans l'exposé suivant: î L Belon est le premier qui figura une chauve-souris, l'oreillard : Aldrovande en reproduisit la figure, et y ajouta celle de notre grande espèce d'Europe. Belon avoit en outre assez bien signalé une troisième espècé qu'il avoit vue en Égypte. Les voyageurs et les premiers naturalistes iconographes firent , dans la suite, connoître que chaque pays avoit ses chauve-souris distinctes: s'ils ne le dirent pas positivement, c'est du moins ce qui résultoit des publications de Clusius, Pison, Bontius, Flaccourt, Seba et Edwards. Cependant on possédoit ces matériaux dès 1748, qu'on ne croyoit encore qu'à l'existence de cinq espèces de chauve-souris : le catalogue de Linnéus ou son Jystema naturæ d'alors ne fait pas mention d’un plus grand nombre. Mais au moins on avoit jusque-là été d'accord sur l'établissement de la famille des chauve-souris : c’étoit un de ces genres qu'on avoit fait d'instinct avant l'invention des méthodes. D'autres principes dirigèrent Brisson, en 1 7563 il avoit rangé les quadru- pèdes suivant l'ordre numérique des dents incisives. Dès qu'il s'aperçut que les chauve-souris se séparoient, d'après cette considération, en deux séries, il se crut obligé de les partager également en deux genres, leur donnant les noms de Pteropus et de Vespertilio. On avoit alors si peu d'égard aux affinités des êtres, que personne ne fut choqué de voir ces deux groupes éloignés lun de l'autre, et leur intervalle rempli par des animaux autres que des chauve-souris. Comme on étoit dans cette fausse route, Daubenton cherchoit des sujets pour son anatomie comparée. Il vint à trouver en France quatré chauve-souris qu'on n'y avoit pas encore observées; et cette découverte l'engagea à revoir ce qui avoit été fait avant lui sur ces mammifères, et à en donner une monographie. Son Mémoire, monument précieux, sur-tout si l'on se reporte à l’époque de sa publication, fut imprimé dans le Recueil de l Académie des sciences pour l’année 1759. La monographie de ce célèbre naturaliste fut aussi enrichie , tant de plusieurs espèces étrangères trouvées à Paris dans des collections publiques, que de celles qu'Adanson venoit dernièrement de rapporter du Sénégal. Dès ce moment, la famille des chauve-souris fut établie sur des bases solides: on eut un guide qu'on apprécia et qu’on suivit. Linnéus en donna le premier l'exemple, mais non pas en toutes occasions, puisqu'il retira de son genre Vespertiho, la chauve-souris de Feuillée, ou le bec- de-lièvre, pour en faire, dans la douzième édition de son Systema naturæ (on ne Sait trop pour quel motif), le genre Moctiio de ses Glres. On s'étoit jusque-là si bien trouvé de l'emploi des dents incisives pour l'éta- blissement des genres, qu'il étoit naturel de beaucoup compter sur a valeur de Ce Caractère : on fut donc étonné d'apprendre, d’abord par Brisson, et ensuite d’une : QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE, LEE manière plus explicite par Daubenton, que les chauve-souris différoient entre elles sous ce rapport. Le nombre de ces animaux n'étoit pas encore considérable, et on donnoit déjà plus d'attention aux affinités des êtres : néanmoins on continua, à l'exemple de Daubenton, à comprendre dans un seul genre toutes les chauve-souris connues : et pour s’en excuser en quelque sorte, on affecta d’insister sur la discordance de leurs caractères génériques, et sur l'idée que ces êtres étoient comme frappés d'anomalies inexplicables. Il n'y eut qu'Erxleben qui reproduisit la division de Brisson, Pteropus et Vespertilio, et qui se montra en cela un compilateur peu judicieux; car il détruisit l'essence du genre Wespertilio, en le définissant comme Brisson, et en y faisant entrer les nouvelles chauve-souris de Daubenton, auxquelles cette définition ne convenoit pas. On ne fit plus dans la suite que se copier les uns les autres : d’ailleurs, on s’en tint à un seul genre; et l’on crut satisfaire à ce qu'exigeoit l’état de la science, en don- , nant, dans des annotations, l’'énumération des dents ‘incisives de chaque espèce. C'étoit ce caractère, qui, entendu de diverses manières, avoit motivé ces différentes façons de classer les chauve-souris : jy donnai attention. Je m'aperçus d'abord qu’une des circonstances de ces dents (1) avoit donné lieu à quelques erreurs , même de la part de nos plus habiles observateurs. Pallas avoit compté, à la mâchoire infériéure du Vesp. pictus, huit incisives au lieu de six qui y sont réellement ; et Daubenton n’en avoit point remarqué en haut au esp. Jérrum equinum. Je pus aussi apprécier une autre circonstance de ces dents, source d’autres erreurs : c’est qu'étant plus petites que leurs alvéoles, elles s’en détachent facile- ment, et manquent dans quelques“individus. Enfin, une troisième observation explique encore mieux leurs nombreuses anomalies ; c’est la dépendance dans laquelle elles sont des organes qui les avoisinent. k Ailleurs que dans les chauve-souris, il n’y a guère qu’une seule manière d’être pour les organes des sens, qui ont leur siége auprès des dents incisives. Ils sont, en général, contenus dans de certaines limites, et ne nuisent pas au développement de los intermaxillaire, qui lui-même à son tour fournit aux incisives tout l’em- placement et la solidité nécessaires. Rien ne troublant cet arrangement, les dents incisives croissent dans leur alvéole, selon l’action qu’exercent sur elles les élémens dont l'être est constitué : effets en quelque sorte du concours de beaucoup de causes très-disséminées et la plupart occultes, ces dents peuvent alors être employées à indiquer ces causes d’une manière générale, et c’est dans ce sens qu'elles sont appréciées comme un excellent caractère générique. Le contraire a lieu dans les chauve-souris. Leurs organes des sens se com- pliquent de cette tendance du derme à acquérir un accroissement considérable : Forgane de l'odorat, entre autres, est souvent obstrué par des espèces de soupapes ; mais comme il n'arrive presque jamais de développement extraordinaire en un (1) Les dents incisives de la plupart des chauve-souris sont crénelées, 112 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES lieu, que cela ne devienne ailleurs un obstacle, les développemens des fosses nasales influent sur l’intermaxillaire. Celui-ci devient d'autant plus petit que celles-Ià s'étendent et se prolongent davantage : il est quelquefois rapetissé, au point de n'être plus qu'un point osseux, qui nage et se perd dans le derme : quelquefois enfin il disparaît entièrement. Les incisives, qui en suivent nécessairement toutes Îles conditions, et qui devien- nent petites ou manquent avec lui, sont alors traversées dans leur développement par une influence spéciale : n'obéissant plus à une impulsion de toute l'organisation, elles n’en rendent plus le même compte; elles varient au contraire avec l'intensité de Jaction locale qui pèse sur elles, et dans ce cas elles sont un caractère d’une valeur moindre que dans les autres familles où leur croissance n’est en rien contrariée. Mais si elles le cèdent pour l'importance aux organes des sens qui les avoi- sinent, elles deviennent de nouveau un objet digne de considération :en relation avec ces organes, elles peuvent du moins nous en faire apprécier les modifications à diverses ; elles concourent avec eux à établir les caractères de quelques groupes particuliers, ou petits genres; et attendu que ces divers arrangemens sont aussi simultanés avec d’autres modifications qui affectent, soit les organes de la digestion, soit les ailes, la queue et la membrane interfémorale, il suit que nous avons une certaine quantité de caractères d’un rang encore assez relevé pour ordonner les chauve-souris dans des divisions tranchées, et les disposer en familles naturelles. Le tableau suivant va nous montrer qu'en effet les chauve-souris affectent quinze manières d'être diflérentes, ou se partagent, comme disent les naturalistes, en quinze genres distincts : 1. VESPERTILION. VESPERTILI 0. Dents incisives À canines à ; nolaires Es Nez simple et saillant. Oreilles de grandeur moyenne, latérales et isolées ; oreïllon au dedans de la conque, ou intérieur. Membrane interfémorale grande et formant un angle saillant, Queue longue et toute entière enveloppée. OBs. I y a dans ce genre jusqu’à dix-sept espèces. Je les ai décrites, Annales du Muséum, tome VIT, page 187. 2. OREILLARD. PLECOTUS, ane : 52. ; molaires 6%. Dents incisives a canines Nez simple et saillant; chanfrein large et méplat. Oreilles plus grandes que la tête, et réunies ; oreïllon éntériear. Membrane interfémorale étendue et à angle saillant, Queue longue et toute entière enveloppée. Os. Les trois espèces de ce genre sont, l’oreillard de Daubenton, la barbas- telle et une nouvelle espèce de Timor. 3. NYCTÈRE. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTÉ. 113 3: NYCTÈRE. WYCTERIS. Dents incisives : 3 canines ©; molaires ven Nez an centre d'une excavation, et operculé; chanfrein large et concave, Oreilles grandes, antérieures et contiguës ; oreillon intérieur, Membrane interfémorale très-grande et à angle saillant, Queue longue, enveloppée, et terminée par une double vertèbre, Ogs. Trois espèces dans ce genre : le nyctère de Daubenton, celui de la Thé- baïde, un troisième de Java. 4 RHINOPOME. RHINOPOMA. Dents incisives 43 canines ©; molaires Nez long, conique, coupé carrément à l'extrémité, et surmonté d'une petite feuille ; ouvertures nasales étroites, traêversales et operculées : chanfrein large et concave, Oreilles grandes, réunies et couchées sur la face; oreillon extérieur. Membrane interfémorale étroite et terminée carrément. Queue longue, enveloppée seulement à l'origine, et libre au-delà. OBs. J'en connois’deux espèces, le microphyle et le rhinopome de la Caroline. $- MULOT-VOLANT. MOLOSSUS. EPA La ; = Dents incisiyes à 3 canines ,3 olaires En Nez simple; chanfrein convexe. 2 Oreilles grandes, réunies et couchées sur la face ; oreïllon extérieur, Membrane interfémorale moyenne et coupée carrément, Queue longue, à demi enveloppée, et libre au-delà. O8s. J'en aï décrit neuf espèces (Annales, tom. VT, pag. rÿ 0). I n’en existe qu’en Amérique. 6. MYOPTÈRE. MYOPTERUS, 4—4 PRO NET : 2, : Dents incisives , ; canines , 3 molaires ©. Nez simple; chanfrein méplat. Oreïlles larges, isolées et latérales ; oreillon intérieur, Membrane interfémorale moyenne, Queue longue, à demi enveloppée, et libre au-delà, Ogs. On n'en connoît que la seule ce publiée par Datbentoë sous Îe nom de rat-volant. 7. TAPHIEN. TAPHOZOUS. : Dents incisives © 5 canines © 3 molaires PH Nez en groin; chanfrein concave. H. N. TOME II. 114 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Oreilles moyennes, latérales et isolées; oreillon intérieur, Membrane interfémorale grande et saillante. Ogs, Le lérot-volant et le F. Lpturus sont les deux seules espèces de ce genre qu'on ait publiées ; l'Égypte et l'Ile de France en nourrissent deux auttes. 8. BEC-DE-LIÈVRE. WOCTILIO. Dents éncisives = ; canines ; ÿe : Nez confondu avec les lèvres ; celles-ci largement et profondément feiduës, Oreilles petites, latérales et isolées ; orcillon intérieur. Membrane interfémorale #rès-grande er saillante. Queue moyenne , enveloppée en grande partie, et libre dans le reste en dessus de la membrane. 4—4 5 molaires 44 22 Os. On en connoît trois espèces. 9. NYCTINOME. WYCTINOMUS, 4—4 D PRE ML 5 2, Ya ents éncisives ,; canines ; 3 molaires © Nez confondu avec les lèvres; celles-ti largement et profondément fendues. Oreilles grandes, réunies et couchées sur la face; oreillon extérieur. Membrane interfémorale moyenne et saillante. Queue longue, à demi enveloppée, et libre au-delà. Os. “Les espèces de ce genre sont le nyctinome d'Égypte, celui du Bengale, et le nyctinome de Bourbon. 10. STÉNODERME, STENODERMA Dents incisives +8 canines LE molaires 2 Nez simple, Oreilles petites , latérales et isolées ; oreillon intérieur. Membrane interfémorale rudimentaire, bordant les jambes. Queue rulle, Os. Une seule espèce dans ce genre, le sténoderme roux. 11. PHYLLOSTOME,. PHYLLOSTOMA. ge 42 3—3 4—4 DNS de . 2 D Dents éncisives canines 5; molaires LL DR 3—3 Nezau-centre d'une excavation (bordée ‘en devant d'unecréte rer terminée en arrière parune Libé Oreilles moyennes, latérales et isolées ; oreillon intérieur. Membrane interfémorale grande et saillante. Queue rulle ou courte, OBs. J'ai aussi publié ( Annales du Muséum, tome VL, page 15 7) les neuf espèces dont le genre phylostome est formé. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE, 115 12. RHINOLOPHE. RHINOLOPHUS, Sn Abe Dents incisives : > canines # ,3 molaires LE 5e Nez au fond d'un entonnoir, bordé en devant d’une crête, et terminé en arrière par une feuille, Oreilles moyennes, latérales et isolées ; oreillon nul, Membrane interfémorale grande et saillante. Queue longue et enveloppée entièrement, Ogs. Six espèces composent le genre r#nolophe. 13. MÉGADERME. MEGADERMA. Dents incisives à 5 canines #5 molaires Sms. Nez au fond d'un entonnoir fermé par trois folioles ; une crête en devant, une feuille en arrière, une membrane sur l'entrée des narines. Oreilles grandes et réunies ; oreillon intérieur. Membrane interfémorale grande et saillante. Queue nulle, OBs. Même volume des Annales, page 14 , j'ai enfin traité des quatre espèces connues de mégadermes. 14. ROUSSETTE. PTEROPUS. US 4, : 2, Ë $—$. Dents éncisives 45 canines , 3 molaires EE, Nez simple et terminal. Oreilles petites , latérales et isolées ; oreillon nul, Membrane interfémorale rudimentaire, bordant les jambes, Queue rulle ou très-courte, OBs. J'ai donné, dans les Annales du Muséum, tome XV, page 86, la des- cription des onze espèces, dont ce genre est composé. 15. CÉPHALOTE. CEPHALOTES, Dents éncisives : ; canines se molaires cils Nez simple et terminal, Oreilles petites, latérales et isolées; oreillon nul. Membrane interfémorale rudimentaire, bordant les jambes. Queue #rès-courte. Ogs. J'ai publié également, même volume, page 104 ; les deux seules cépha- lotes que je connoïsse. Des soixante-dix-huit espèces annoncées dans ce tableau, il ne s’en est trouvé que huit en Égypte. On pourroit , d’après cette remarque, s'étonner que je ne me sois pas, dans cet ouvrage, borné à ces huit dernières : qu’on veuille bien me permettre d’en dire le motif. HN. TOMEFMS P 2 116 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Trop resserré dans mon cadre, en ne traitant que de ces huit chauve-souris, je n’eusse pas pu marquer avec assez de précision les intervalles qui les séparent : on craint, en pareil cas, de trop individualiser; on opère alors des réunions d'autant plus facilement, qu’on n’est pas toujours certain de rencontrer, dans la considération d’une seule espèce, les élémens d’un type distinct : ce n'est que quand on voit les mêmes formes reproduites, qu'on se détermine avec plus d'assurance. C'étoient des preuves de ce genre que je devois réunir pour montrer que les huit chauve-souris d'Égypte font partie de huit genres distincts. J'ai cru devoir indiquer leurs congénères; €t j'ai pensé, en outre, qu'il n’était pas de moyen plus efficace de rassurer les savans sur ces divisions, qu’en présentant les choses de plus haut, et qu'en montrant un ensemble qui embrassät toutes les espèces observées jusqu'ici. Je ne donne pas, d’ailleurs, un simple résumé de l'état de la science, mais un travail nouveau, et qui m'est propre. 1. VESPERTILION PIPISTRELLE. VESPERTILIO PIPISTRELLUS. Planche 1, N° 3. J'AJOUTERAI aux caractères des vespertilions tracés plus haut, qu'ils sont, en outre, remarquables par une tête grosse, le museau court, les naseaux renflés et écartés, le nez sans ornement ni membranes, et la queue très-longue. Leur vol est d'une grande étendue, leur envergure formant quatre à cinq fois la longueur du corps; la surface des ailes est augmentée en arrière par la membrane étendue entre les jambes, qui se prolonge au-delà, et suit la queue qu’elle enveloppe en totalité. Deux seules mamelles se voient à la poitrine, fort près des aisselles. La langue est douce; il faut une loupe pour y découvrir quelques papilles à la base. Enfin, parmi les doigts embrassés par la membrane des ailes, on distingue celui du milieu qui est pourvu de ses trois phalanges; lannulaire et le petit en ont deux, et l'indicateur une seule. Les dents des vespertilions, particulièrement les incisives et les molaires, les caractérisent encore mieux : leurs incisives ressemblent à celles des makis pour le nombre et la position, quatre en haut, séparées par paire, et six en bas, couchées et dirigées en devant: cette disposition les empêchant de se rencontrer et de frotter les unes contre les autres, elles ne s’usent pas et conservent leurs sommets; les supérieures restent constamment cylindriques et pointues, et les inférieures se voient toujours partagées en deux lobes et comme fendues. Les molaires antérieures sont coniques; mais les suivantes ont une couronne large et hérissée de pointes: les inférieures sont sillonnées sur les flancs; bien moins larges que celles d’en-haut, elles sont débordées et enveloppées par le tranchant oblique de celles-ci : toutes ces dents, profondément évidées à leur centre, et dans un alternat de pointes et de cavités à chaque mâchoire, s’engrainent respectivement, QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTÉ. 117 et présentent enfin tous les caractères des dents d'animaux qui se nourrissent d'insectes. De grandes abajoues complètent cet appareil: et par les facilités qu’elles pro- curent aux Vespértilions, elles contribuent à développer f'instinct qui les porte à la chasse, ù On croiroit, à juger de cet exposé, qu'il ne doit plus ÿ avoir, dans le genre ves- pertilon, que des espèces très-voisines, et d’une détermination très-difficile. On ne peut, en effet, que très-rarement faire usage de l'observation de leurs couleurs, toutes les chauve-souris étant plus ou moins brunes ou roussâtres. On en prend une autre idée en les examinant attentivement : on trouve qu’elles présentent assez de différences appréciables ; que leur physionomie varie beaucoup, et que leurs oreilles et oreillons ont dans chaque espèce des proportions très-différentes, La pipistrelle, entre autres, se distingue par sa taille; c’est la plus petite de nos chauve-souris. Elle ressemble à la noctule par les proportions et les couleurs, äu point qu'on est quelquefois tenté de la prendre pour un jeune individu de cette plus grande espèce : néanmoins elle en diffère, ainsi que je vais le montrer. Ses oreilles sont ovales-triangulaires et plus courtes que la tête; son oreillon est presque droit, et terminé par une tête arrondie; ses poils sont longs, d’un brun-noirâtre en dessus, et d’un brun-fauve en dessous. Ainsi la pipistrelle ne diffère pas seulement de la noctule par la taille, maïs aussi par loreillon , qui, au lieu d’être large à sa base et pointu vers l'extrémité, se rap- proche davantage de la configuration de foreillon du Vesp. lasiopterus. Sa longueur est de trente-neuf millimètres; celle de sa queue, de trente, et son envergure, de deux cents. Son crâne la rapproche aussi davantage du Vesp. lasiopterus. Sa boîte cérébrale est plus large que dans la noctule, plus convexe et plus saïllante au-delà du chanfrein et son occiput plus arrondi. Il n’est pas rare de trouver une pipistrelle le jour à terre : soit qu’elle se lasse plus vite, ou qu'elle ait moins de prévoyance, elle ne regagne pas son gîte aussi promptement que ses congénères ; elle se laisse prendre sans faire de résistance : mais souvent elle affecte plus d’insouciance et de fatigue qu'elle n’en éprouve. J'en ai vu peu après développer une si grande énergie, et exécuter des sauts si élevés et si bien mesurés, qu'elle réntroit dans le vol sans le secours d'aucun point culminant. à La pipistrelle d'Égypte m'a paru n'être qu'une variété de celle de France; c'est la même taille et les mêmes proportions. Le pelage est seulément un peu difié- rent; elle est cendrée, quand l’européenne est d’un brun plus décidé : c’est dans l'extrémité des poils que se trouve principalement cette différence. : La pipistrelle est également répandue dans toutes les parties de l'Égypte. Elle se contente d’une retraite peu profonde : j'en ai trouvé plusieurs individus à Thèbes, dans les catacombes des particuliers, et à Qâou el-Koubarä dans des inters- tices de colonnes, 118 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES 2. OREILLARD VULGAIRE. PLECOTUS AURITUS. Planche 2, N° 3. . Les orcillards ont été, dans la première détermination que j'en ai présentée (Annales du Muséum, tome VTIIT), laissés avec les vespertilions, auxquels ils res- semblent en effet par le port, la grosseur du museau, la situation intérieure de l'oreillon , le nez sans appendices, la longueur de la queue, l'étendue de la membrane interfémorale, et sur-tout par le nombre, la forme et les usages de toutes les dents: mais d’autres considérations qui m’avoient d'abord échappé, m'ont depuis porté à les en séparer. La boîte cérébrale est d'une plus grande capacité, plus longue et aussi plus élevée : la face, qui en est la moitié dans les vespertilions , n’en forme que le tiers dans les oreillards. Et comme, de ce qui reste, près de la moitié est employé en chambres de l'œil, il n’est que très-peu d’espace pour former les chambres olfac- tives; mais du moins il y est suppléé par la disposition des ouvertures nasales. Elles sont plus grandes, et formées chacune par une fente longitudinale , ayant, vers le milieu, un onglet qui couvre le bord opposé. Au moyen de cette disposition, il ne paroît, de chaque côté, que deux ouvertures circulaires, situées l'une au-devant de l’autre. Ces doubles entrées, en favorisant une plus grande respiration, supplée- roient-elles, en effet, au défaut de capacité des chambres du nez! On est d'autant plus dans le doute sur cela, qu'on trouve un autre sens très- développé, auquel il pourroit être donné d’avoir toute la prédominance, dans les déterminations de l'animal, Cet organe est l'oreille externe : sa dimension est vraiment un fait qui tient du prodige. On hésite, en effet, d'annoncer une oreille grande comme le corps. Telle est pourtant celle de l'oréillard; elle a une si grande ampleur, que, s'étendant sur le chanfrein, elle y rencontre sa congénère et y est unie. On sent tout ce qu'un pareil volume est dans le cas d'apporter de perfection à l'oreille de ces chauve-souris; le moindre frémissement de l'air ne peut manquer d'être perceptible pour elles, et cette sensibilité peut bien compenser ce qui manque aux oreïllards du côté de l’odorat. Il faut aussi qu’ils se conduisent autrement que les vespertilions dans la recherche de leur nourriture : car je n'ai point trouvé qu'ils puissent emmagasiner leur proie dans des abajoues. Ce sont ces trois considérations, communes également à la barbastelle et à une autre espèce non décrite de Timor, qui n'ont engagé à établir le genre Oreillard, Plecotus. Comme espèce, l’oreillard vulgaire nous intéresse, en ce qu'il a été notre premier point de comparaison : c’est la première chauve-souris qu'on ait connue et figurée depuis la renaissance des lettres en Europe : Belon la donna comme le type des chauve-souris de nos pays. Aldrovande , qui ne voulait qu’offrir la même considération, se trouva avoir donné une autre espèce : il s’en aperçut, €t QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTÉ. 1i9 reproduisit la chauve-souris de Belon, On ne connut d'abord en France qué ces deux espèces, qu'on s'accoutuma à distinguer par la différence de leur taille. L’oreillard devint le Vespertilio minor dans Brisson et dans les premiers catalogues de Linnéus, et cela, jusqu'à ce que Daubenton nous eût appris que l'Europe nourrissait de six à sept chauve-souris d'espèces différentes. Daubenton lui donna le nom qu'il porte aujourd’hui, et Linnéus l'adopta en le traduisant par awritus. L'oreillard d'Égypte ressemble beaucoup à celui d'Europe : il est plus petit; la dernière vertèbre de sa queue se détache davantage de la membrane interfémorale; son pelage est plus roux sur le dos, et d’un cendré moins foncé sous le ventre. Ce ne sont pas là des différences spécifiques, ou, s’il en était ainsi, les oreillards du nord de l'Europe seraient de même autres que ceux de France. J'en ai reçu de Vienne qui sont plus grands et plus foncés que les nôtres. Voici les principales dimensions de loreillard : son corps, 45 millimètres; sa queue 45, son envergure 262, et ses oreilles 32. Les oreilles sont réunies en devant dans la hauteur de trois millimètres ; le bord intérieur est plissé en arrière : des poils sont rangés sur la longueur de ce pli comme les cils sur le bord des paupières de l’homme. Au bas de ce même pli est un lobe sous l'angle de soixante degrés. L’oreillon est proportionné à l'étendue de l'oreille ; il est à bord droit d’un côté, et à bord arrondi de l'autre. Le pelage est gris-brun au-dessus, et cendré en-dessous : les poils sont de deux couleurs, bruns en grande partie et gris vers la pointe pour le dessus du corps, et blanchâtres pour les parties inférieures. J'ai trouvé l'oreillard à l'entrée de la grande pyramide : en Europe il se retire, comme la pipistrelle, dans des cavités d’une profondeur LE considérable. Mais dans les belles nuits de l'été, il tarde à paroître. Seroit-ce qu’à raison de la gran- deur de ses oreilles, il ne puisse, en se livrant à toute son activité, supporter le moindre bruit, et qu'il soit forcé d'attendre que tous les animaux diurnes se soient retirés ! 3 NYCTÈRE DE LA THÉBAÏDE. NrcTERIS THEBAÏCUS. Planche 1, N.° 2 Les nyctères forment un genre très-différent des deux précédens. C’est encore le même nombre d’incisives, mais non la même disposition : plus petites, sur-tout les inférieures qu’on distingue à peine à la vue simple, elles ne sont plus en haut (comme dans les makis) écartées par paire, mais garnissent, au contraire, sur une ligne continue, tout le bord de lintermaxiilaire, Cet os, subbrdonné aux variations de l'organe de lodorat, quoiqu'appuyé sur les maxillaires, jouit d’un mouvement propre; il est soulevé ou abaissé, oscillant comme sur un axe, par la lèvre supérieure, qui est d’une épaisseur et d’une con- sistance propres à lentraîner : aminci à ses points d'articulation, il ne pouvoïit participer à la fixité de toutes les autres parties osseuses. 120 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES C'est sans doute parce que l'intermaxillaire est ainsi maîtrisé par les organes qui l'entourent, qu'il est très-petit : il ne fait pas de saillie au-delà des canines; d'où il arrive que la mâchoire supérieure est plus courte que l'inférieure, et paroît comme tronquée : il en résulte aussi que les incisives des deux mâchoires ne se correspondent pas, et que posant à faux, elles n’usent point leurs sôm- mets, lesquels restent à deux lobes en haut et à trois crénelures en bas. Si l'on commence par examiner dans le crâne les fosses nasales des nyctères, on les juge d’abord sans profondeur , parce que les planchers qui en circonscrivent l'étendue sont très-bornés : le plancher inférieur ou la lame palatine ne se pro- longe pas au-delà de la deuxième molaire, et l’externe ou lés nasaux maxillaires sont des pièces réduites à des dimensions rudimentaires. Mais on prend, au con- traire, une autre opinion de ces fosses nasales, en les voyant recouvertes de leurs parties molles. Les arrière-narines s'ouvrent beaucoup au-delà du point où se termine l'os maxillaire; et les méats extérieurs ont leurs larges entrées remplies et pour ainsi dire encombrées de lobes et d’appendices cutanés : un repli du derme naît du milieu de chaque conduit. On diroit que les conques nasales, en saillie chez les vespertilions, et dans une cavité chez les nyctères, ne sont devenues aussi voisines, et ne sont ainsi descendues dans une sorte d’en: tonnoir, que parce qu'elles auroïent été contractées, repliées sur elles-mêmes et tirées à travers le crâne. Un lobe qui a la forme d’une tête de clou, et qui n’est autre que le cartilage de la narine, se voit de chaque côté, et concourt comme opercule, avec le repli intérieur, à fermer hermétiquement l’orifice nasal. I n’est pour cela besoin d'autre effort de la part de l'animal que de froncer toutes ces parties, et peut-être même de les abandonner à leur élasticité naturelle. É La cavité des narines se prolonge en arrière sur le chanfrein ; première circonstance déjà remarquable. Mais ce qui ne l’est pas moins, c’est la grandeur et la forme canaliculée de cette dernière partie : elle donne aux nyÿctères cette physionomie sombre et farouche qui les caractérise. Le chanfrein s'étend en effet au-delà de ses dimensions habituelles, et ce, au moyen de lames osseuses qui naissent des côtés de los coronal, et se réunissent au vertex : le canal ou fente longitudinale qui résulte de la saillie de ces crêtes, verse sur les narines; seule relation, en dernière analyse, que ces parties aïent entre elles. Cependant le chanfrein auroit-il subi ces étranges métamorphoses pour suppléer à la petitesse extrême des ouvertures nasales, et seroit-il une sorte d’entonnoir où se recueilleroient les fluides odorans! Les bords de la fente sont hérissés de poils longs et abondans qui la remplissent ; maïs ce n'est pas quand les muscles labiaux soulèvent les opercules, détendent les plis intérieurs et entr'ouvrent les conduits nasaux: ces bords, par la tension de la peau, sont ramenés en dessus, et avec eux les longs poils qui les garnissent. ; Des narines qui sont habituellement fermées, et qui, pour entrer en commu- nication avec les corps ambians, exigent la volonté de Fanimal et le jeu de quelques QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 127 quelques muscles, fournissent sans doute une considération intéressante en elle- même. Les nyctères ne peuvent manquer d’en tirer avantage; et il se trouve, en effet, qu'ils établissent leur demeure en des lieux d’où de fortes exhalaisons repousseroient d’autres animaux. Mais que la disposition des conduits nasaux soit dans un ordre inverse pour les soustraire ainsi aux inconvéniens d’odeurs infectes, c’est ce que je n'ai pu croire. Cet arrangement suppose ailleurs une autre modification, et j'ai dû m'en proposer la recherche. Le vol des chauve-souris a souvent ramené à l'idée de les comparer aux oiseaux; et l’on a trouvé que ceux-ci se distinguoient toujours par plus d’aisance et de grâces dans les allures, parce qu'indépendamment de plus de perfection dans les organes directs du vol, ils jouissent encore de la faculté de se gonfler d'air et de se rendre plus légers. En s'exprimant ainsi, on étoit loin de penser qu'on retrouveroit la même faculté dans les chauve-souris, dont en effet les fonctions pulmonaires sont si différentes de celles des oiseaux. C’est toutefois ce que les nyctères m'ont montré, des vésicules aériennes sem- blables, encore plus grandes, et que l'animal remplit, quand il le veut et autant qu'il le veut. Maïs, comme on le pense bien, les nyctères y portent l'air en vertu d'un-mécanisme particulier, et au moyen d’une organisation qui, dans ses ano- malies, dérive néanmoins du plan primordial et classique des mammifères. On pressent peut-être déjà les résultats d’un mode si nouveau d'organisation; les moyens:qui les donnent, sont d’une simplicité parfaite. La peau n'a d'adhérence au corps qu’en quelques endroits, où elle est retenue par un tissu cellulaire très-lâche et très-écarté : l'air s’y introduit, et en séjournant ainsi, comme on le dit, entre cuir et chair, donne à l'animal l'apparence de ces veaux soufflés dans les boucheries. II n'y a de brides aponévrotiques ou de tissu cellulaire que dans le voisinage des méats et sur les côtés du tronc : ainsi la peau se soulève entière sur le dos, à la poitrine et à l'abdomen; ce qui met les nyctères dans un bain d’air, ou, si l’on veut, dans une sorte de manchon que leur forme ce fluide élastique. Jusque-là, cel extraordinaire que soit un pareil fait, on ne voit pas qu'il soit en rien dérogé à l'essence du type des mammifères : il ny est pas dérogé davantage quant aux moyens de souffler cette unique, mais bien vaste cellule. Au fond de chaque abajoue est une ouverture de deux millimètres de large ; et c'est tout simplement par-là que le sac aérien communique avec la bouche. L'animal en ouvrant ses naseaux fait que l'air ambiant entre et gonfle sa poitrine: en abandonnant, au contraire, un moment après, toutes les membranes nasales à leur élasticité propre, et en tenant simultanément la bouche close, il force le gaz expiré à se rendre dans les abajoues, et de 1à dans le grand sac aérien. Quoiqu'il y ait, à l'entrée de ce sac, un sphincter très-apparent, ce n’est pas lui, ou lui seul du moins, qui s'oppose au retour de l'air : il y a de grandes valvules, sur le cou et le dos, qui en sont chargées. L'air ne suit de route qu'à partir du sphincter : il se rend, en passant , HN, TOME IR | e 122 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES au-devant de l'oreille, dans le sinus du chanfrein , d'où il gagne le vertex, l’occiput et le col supérieur : c'est 1à qu'il est versé dans le grand sac. Ainsi, le nyctère se conduit exactement comme le tétrodon; il porte , à volonté , une gorgée d'air dans son sac, puis une seconde, et ainsi de suite. I] soufle comme nous pouvons le fairé nousmêmes, et de là même manière, avec cette seule différence qu’il souffle dans sa bouche, dont il tient la cavité sans issue à l'extérieur. Sa peau devient une véritable vessie, au-dedans de laquelle le tronc se trouve comme déposé. Les nyctères agissent presqu'à son égard de même que si elle étoit un hors-d'œuvre, puisqu'ils la remplissent au point de lui faire prendre uné forme sphérique. Dans cet état, tout l'animal ressemble À un ballon auquel on auroit attaché des ailes, une tête et des pieds. Plus heureux que le tétrodon, qui ne recourt à la même industrie qu'en se réduisant à n'être plus qu'uñe masse inerte sur le miroir des eaux, il conserve toutes ses facultés, ou mieux il en augmente l'énergie, en devenant plus léger et susceptible de plus dé vitesse dans le vol. J'avois cru apercevoir que les étranges anomalies des conduits olfactifs pese- roïent sur un autre système d’organe, et occasionneroient peut-être ailleurs d’autres changemens ; et il se trouvé en effet qu'un grand sac modifie, dans les nyctères, ou plutôt procure à leur organe respiratoire, un précieux appendice. Si cet appareil, qui est si bien adapté à ce système, n'est pas le motif des modifications des fosses nasales, et n’en donne pas une explication entièrement satisfaisante, du moins on ne sauroit nier qu'il n'y ait entre toutes ces parties des relations réciproques et nécessaires. C'est aux différences que je viens de signaler que se borne l'énoncé des caractères distinctifs des nyctères : les dents canines et molaires de ces chauve-souris ressem- blent à celles des vespertilions; il en est de même des viscères abdominaux. Les tégumens offrent seulement plus d’étendue ; les oreilles sont plus longues qué la tête, sans que l'oreillon qui borde aussi le méat auditif soit agrandi en même proportion. Cette étendue se fait sur-tout remarquer entre les jambes, où la membrane caudale surpasse dans ses deux sens la longueur de l'animal. La dernière vertèbre de la queue est bifurquée ; séparation singulière , puis- qu'elle se trouve dans tous les nyctèrés, et n'existe dans aucun autre genre de chauve-souris. On n'a fait mention que d’une seule espèce de nyctère, le campagnol-volant de Daubenton, dont Linnéus a fait son Wesp. hispidus. Le nyctère de la Thébaïde en diffère, ainsi qu'une autre espèce qui a été rapportée de Java, et qui m'a été remise par M. Leschenault. Les dimensions de ces chauve-souris forment un de leurs traits distinctifs : le nyctère de Daubenton a trente-huit millimètres de long, de la tête à la nais- sance de la queue; le nyctère de la Thébaïde cinquante-quatre, et celui de Java soixante-sept. L'oreille a plus DDR dans l'espèce d'Égypte, « et le poil y est non moins long et touflu. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 123 Le pelage du nyctère de la Thébaïde est brun-clair en dessus, et cendré en dessous : c’est presque la même teinte dans le nyctère de Daubenton; mais elle passe davantage au roux sur le dos, et à un blanc sale sur le ventre, où se voit aussi un mélange de fauve : l'espèce de Java a les parties supérieures d'un roux-vif, et le poil inférieur cendré-roussâtre. Le nyctère anciennement décrit avoit été rapporté du Sénégal : ainsi tout le genre habite les contrées chaudes de l'ancien continent. Je présume qu’il en existe deux espèces au Sénégal; du moins Daubenton en a décrit deux variétés qui lui avoient toutes deux été données par Adanson : la seconde, qu'il ne constata que sur un individu desséché {voyez H. N. G., tome X, page 91), différoit de la première en ce que «la couleur blanchätre du dessous » du corps étoit mêlée d’une teinte de cendré, et que la membrane des ailes » n’avoit point de roussâtre. » J'ai sous les yeux le crâne et les principales parties osseuses du même individu; et ces parties ne s'accordent, ni pour les dimensions plus fortes, ni pour quelques détails de forme, avec les os, dans les nyctères de Daubenton et de la Thébaïde. 4. RHINOPOME MICROPHYLLE. RHINOPOMA MICROPHYLLUS. Planche 1, N° 7. L'ORGANE de l'odorat est aussi l’un des principaux caractères distinctifs des rhinopomies : en le voyant formé sur un tout autre plan, j'admire la fécondité des moyens mis en œuvre pour opérer tant de combinaisons diverses; mais en même temps je ne me dissimule pas qu'on aperçoit d'autant moins la nécessité .de tant de variations, que ces anomalies se font remarquer par plus d’exagération. On suppose en général que les choses extérieures exercent une sorte de réaction sur les organes des sens, ou du moins préviennent tout écart ou toute dégéné- ration qui feroient qu’elles n'en pourroïent être appréciées. Ainsi, qu'un phoque ait ses conduits auriculaires et ses naseaux fermés de sou- papes, rien de plus conforme aux autres données de son organisation : on recon- noît là l'influence du milieu où l'animal passe presque sa vie entière. Mais que des chauve-souris , qui disposent à leur gré du temps , de l'espace et des lieux, se montrent si différentes sous le rapport des organes des sens, on ne sauroit de même l'expliquer par une influence du monde extérieur. Je fais ces remarques au sujet des rhinopomes, parce qu'en effet leurs narines conviendroïent mieux à un animal qui terre ou qui va à l'eau. Elles tiennent de celles du cochon ou du phoque : elles constituent, avec la lèvre supérieure, un appareil assez compliqué qui s'étend au-delà de la mâchoire ; leur partie terminale paroît comme tronquée, et s'épanouit en une lame circulaire, surmontée d’une petite feuille, et percée, dans le centre, de deux fentes obliques. C'est, enfin, une sorte de groin qui a toute la mobilité de celui de la taupe. Les méats olfactifs ne se voient, sous l'apparence de petites fentes, que H. N. TOME II. . Q : 124 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES quand l'animal, les abandonnant à leur propre inertie, les laisse entre-baïller ; autrement il les entr’ouvre davantage ou les ferme entièrement. Il y réussit au moyen de deux petites lèvres dont chaque orifice se trouve bordé : entr'ouvertes, elles s'étendent au dehors: et fermées, elles rentrent en dedans. Nous ne con- noissions encore ce mécanisme que dans des animaux aquatiques ét particulièrement dans les phoques. La foliole, qui naît du bord supérieur du cartilage nasal, jouit aussi d’un mou- vement propre ; en sorte qu'il ne manque à ce singulier appareil que de la longueur pour ressembler plutôt à la trompe d'un éléphant qu'au groin d’une taupe ou d’un cochon. : Les conduits du nez, qui se prolongent à travers la longue lèvre de la mâchoire supérieure, sont très-étroits : ils versent dans une chambre olfactive , qui est très-courte d'avant en arrière, mais qui cependant retrouve toute l'étendue néces- saire à raison d’une disposition que nous n'avions pas encore remarquée dans aucun autre mammifère. L'’os maxillaire est renflé et ovoïde au dessus et en dehors de la dent canine; ce qui rejette les fosses nasales sur les flancs, augmente leur largeur, et leur procure, au total, une capacité qui indemnise ces cavités de leur défaut de longueur. L'intermaxillaire, qui est en deçà du groin, se trouve, par conséquent, en dehors de la sphère d'activité de celui-ci; et, dans ce cas, nullement contrarié dans les progrès de son ossification, il se soude aux os des mâchoires et reste fixe avec eux. Les dents incisives à qui, dans ces circonstances, le développement des narines importe peu, ne nous en révèlent pas moins la singulière modification : elles sont deux et écartées, en haut: quatre et entassées, à la mâchoire inférieure. L'orcille, outre ses développemens ordinaires, se porte en avant et sy réunit avec sa congénère : elle n'est point, à son fond, roulée sur ellemême; ce qui fait que, sans aucun changement de position, l'oreillon est à-la-fois extérieur et sur le bord du méat auditif. Le dernier trait qui caractérise les rhinopomes, est la briéveté de la membrane interfémorale, quand la queue reste aussi longue et est même plus longue que dans les vespertilions. En effet, s'il étoit curieux de voir comment la queue, appendice tout-à-fait inutile dans la plupart des mammifères, contribue dans les chauve-souris à l'union et à la confusion des membranes des ailes, et est transformée en un cinquième membre qui déploie ces membranes en arrière, il ne l’est pas moins qu’il existe des chauve-souris où elle n'a plus cet usage, et où elle rentre dans sa condition ordinaire d’inutilité. Un tel caractère a dû faire remarquer l'espèce qui vit en Égypte; et aussi voyons-nous qu'elle n'a point échappé aux deux naturalistes les plus distingués qui ont visité cette contrée. Belon la désigne assez clairement, quand dans son ouvrage, De lz nature des Oiseaux, lv. 2, chap. 39, il cite « certaines chauve-souris qui se logent en la QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. D25 » grande pyramide d'Égypte et qui portent la queue longue comme les souris. » Et Hasselquist en rapporta quelques individus, mais que le célèbre rédacteur de son Voyage omit d'y employer. On les publia en 1782 : ce soin fut pris par Brunnich, lorsqu'il entreprit de décrire le Cabinet du roi de Danemarck. Cette chauve-souris, qui en faisoit partie, y fut donnée sous le nom de Vesp. microphyllus (1), et y.est figurée d’une manière très-satisfaisante. On ne pouvoit sans doute faire davantage pour sa publication; mais elle ne fut pas pour cela portée à la connoïssance des naturalistes. Aucun ouvrage systématique n'en fait mention, comme aucun catalogue n’en rappelle l'existence. C'est que l'ouvrage de Brunnich fut peu répandu: il eut ce malheur, moins parce qu'il est écrit en danois, que parce qu'il fut interrompu après quel- ques premières livraisons. Le rhinopome microphylle est par erreur employé dans nos planches sous le nom de taphien filet. Il n'est guère plus grand que la pipistrelle : sa longueur totale est de $ 4 milli- mètres; celle de la tête, 16; des oreilles, 13; de la queue, 50; de l'envérgure, 200. Quand les oreilles sont dressées, elles laissent voir entre elles et le museau la fossette du chanfrein sous la forme d’une calotte exactement hémisphérique. Le pelage est cendré, et le poil assez long et touffu : la queue, forméé de onze vertèbres, est noire et lisse; c’est moins le nombre de ces pièces que leur longueur À qui lui donne l'apparence d’une ligne à pêcher. I n’y a point d'os du tarse isolé : il manque Îà où il ne peut contribuer à déve: lopper de membrane interfémorale; et c’est ce qui arrive dans le microphylle, où cette membrane est si courte qu’elle n’embrasse que la cinquième partie dé la queue. I existe, outre une nouvelle espèce de caroline, dont ce n'est pas ici le lieu de nous occuper, un autre rhinopome en Égypte, qui a la queue plus courte et le grôin moins aigu. J'ai observé le microphylle vivant : je l'ai vu répondre à mes provocations par des agitations presque convulsives du groin; mais quand il n’était pas irrité, il se bornoit à faire aller ses naseaux, selon les mouvemens alternatifs de sa poitrine : il les fermoit quelquefois jusqu'à ne plus laisser de traces d'ouvertures, et éten- doit ensuite dessus sa petite feuille. J'ai trouvé des Men où dans plusieurs monumens de l'Égypte supérieure, à Erment, à Ombos et à Thèbes. Hasselquist avoit trouvé les siens dans une des petites pyramides de Gyzeh. Enfin, je ne serois point étonné que cette cé fît sa nourriture d'insectes aquatiques, et qu’elle se tint de préférence à portée des eaux. Aux autres considé- rations que j'ai rapportées ci-dessus et sur lesquelles je fonde cette conjecture, il faut ajouter que c’est de toutes les chauve-souris qui vivent de proie la moins embarrassée de membranes. (1) Vmicrophyllus ,naso prominente, foliolo ponè nares BRUNN., p. 50, tab. C: fig. 1, animal de profil; fig. 2, elevato ; caud& ultra membranam interfemoralem elongatä. Va moitié du corps au trait; fig. >, la tête de face et Description des animaux du Cabinet de Copenhague, grossie ; fig. 4, les dents antérieures. z 26 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES 5. TAPHIEN PERFORÉ. TAPHOZOUS PERFORATUS. Planche 3, N° 1 UN des faits les plus remarquables de l’histoire des êtres organisés, est la repro- duction constante de tous les élémens qui les constituent : il semble que ce soient autant de données nécessaires, puisque, quand il est porté obstacle à leurs déve- loppemens, il en subsiste au moins quelques traces; et, en effet, combien de parties rudimentaires dont l'entière suppression eût présenté plus d'avantages ! S'il n'arrive donc que bien rarement qu'une de ces pièces, matériaux en quelque sorte obligés de Forganisation, vienne à manquer, cette circonstance doit être appréciée comme une des plus grandes anomalies qu’on soit dans le cas d'observer. ‘Or, c'est le genre d'intérêt que nous présentent d’abord les taphiens ; ils sont privés de los intermaxillaire, et par conséquent d’incisives supérieures. Une nouvelle modification de l'organe de l’odorat en peut seule être la cause, et l'est en effet. Je ne connoïs point de chauve-souris dont les chambres nasales aient moins de capacité, et l'entrée dans le crâne plus d'ouverture : la forme concave du chan- frein, en s’abaissant en quelque sorte sur ces chambres, les prive de toute l'étendue qu’elles pourroient avoir; et les os maxillaires sont si courts, que la mâchoire d’en bas dépasse de beaucoup la ie der Voilà ce que montre le crâne; mais la tête, revêtue de s ses parties molles, est dans un état tout différent. : La mâchoire supérieure est garnie d’une lèvre très-épaisse et qui se prolonge au point qu'àson tour elle déborde la mâchoire d’au-dessous : les conques nasales, d'autant plus longues que cette lèvre a plus d'épaisseur, s'ouvrent à leur extrémité, et ne présentent là que deux orifices très-étroits, de forme circulaire, et en partie bouchés par un petit onglet. L'épaisseur des lèvres provient de celle des muscles labiaux : la mobilité et la vive action de ces parties sont la conséquence d’une pareïlle disposition. Telle est peut-être la cause qui s'oppose à la formation de l'intermaxillaire : cette action perturbatrice est au moins dans le cas de luttér contre la cohésion des molécules osseuses, à fur et mesure de leur dépôt. A la place de F'inter- maxillaire, est un cartilage formant saillie en avant des canines, et qu’on pourroit, à la rigueur, considérer comme le vestige de la pièce absente. Le chanfrein est creux comme dans les rhinopomes. Les taphiens ont de plus les oreilles disposées de même et aussi grandes : celles-ci commencent en avant de l'orbite ; elles s'étendent en arrière pour envelopper la région du temporal et la caïsse, et reviennent finir fort près et au-dessous de la commissure des lèvres ; elles forment ainsi une conque d’une largeur remarquable : un oreillon est au bord du méat auditif. La tête, déjà comprimée, n’en paroît que plus large par cet arrangement: QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. TA enfoncée dans les épaules, elle ne se détache pas du cou. L'animal, enfin, à l'air d’un manchon informe, Le doigt index n’est composé que de los métacarpien ; dés trois aütres doigts, le medius, annulaire et le dernier, ont de plus deux osselets où phalanges. Les incisives inférieures sont au nombre dé quatre; et les môlaires sont, quatre en haut, et cinq en bas, de chaque côté des mâchoires : quant à la forme de ces dents, elle est la même que dans les vespertilions. La membrane interfémorale embrasse tout l'intervalle d'une jambe à l'autre; néanmoins sa coupe extérieure est à angle rentrant : un osselet du tarse la maintient de chaque côté. ; \ La queue {de six vertèbres) n'est pas aussi longue : elle présente une particu- larité remarquable, c'est d’être embrassée, dans sa première moitié, par la mem- brane , et d’en être dégagée dans la seconde, en la perçant pour säillir en dessus. Daubenton a décrit un taphien sous le nom de rot-volant, une première fois, dans son Mémoire de 1759, et en second lieu dans son Histoire naturelle, to. XUZ, pag. 231: C'étoit une des chauve-souris qu'Adanson avoit rapportées du Sénégal. La description du lérot- volant convient, à beaucoup d’égards, à notre espèce d'Égypte; mais comme à cette époque elle ne pouvoit porter sur les Caractères du genre, nous ne sommes pas en mesure de décider si notre taphien diffère réelle- ment de celui du Sénégal. Au surplus, cela n'empécheroït pas que nous ne donnions une nouveauté, dès qu'il n’est fait nulle part mention du lérot-volant : Linnéus lavoit négligé, parce qu'il n’en avoit pas été donné de figure, et à son exemple tous les nomenclateurs qui écrivirent après lui, parmi lesquels il faut comprendre Daubenton lui- même (1). Une chauve-souris que Schreber a fait connoître sous le nom de Wésp. lopturus, réunit tous les caractères des taphiens : elle est très-petite, et en outré rémar- quable par un petit sac membraneux qu’elle porte dans un repli de l'aile, près le coude. Elle est donnée comme de Surinam : mais n’en seroit-elle venue que pour y avoir été apportée de d'Inde hollandoise! Je le suppose, en voyant tous les autres taphiens placés dans l'ancien monde, et à peu près dans les mêmes lieux que les roussettes. L'Ile de France en nourrit un également. . C'est une nouvelle espèce dont je suis redevable aux recherches de M. le colonel d'artillerie Mathieu : elle ressemble beaucoup au taphien d'Égypte; elle en difière par les proportions de la tête, la forme des oreillons , la queue qui est plus courte, et l'étendue de la membrane interfémorale. Le taphien d'Égypte a le museau plus obtus : sa queue est plus longue que l'os du fémur ; elle est plus courte au contraire que cet os dans le Taphozous mau- ritianus , où le taphien de l'Ile de France : l'osselet du tarse est plus long que le pied dans celui-ci, et seulement d'égale longueur dans l'autre : l'oreïllon est en (1) Tableau méthodique des quadrupèdes ; voyez Encyclopédie méthodique, système anatomique des animaux , page 95. e 128 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES fer de hache et terminé par un bord arrondi dans le taphien d'Égypte : > il est accompagné à l'origine d’un lobule et terminé par un bord sinueux dans celui de l'Ile de France : enfin, les oreilles sont oblongues dans le premier, plus courtes et rondes dans le second. Je vais seppdrier les principales dimensions de ces deux espèces, que je ne puis faire mieux connoître qu’en les comparant l’une à l'autre ; premièrement dans le taphien d'Égypte, et deuxièmement dans celui de lle de France : Grandeur totale , du bout du museau à l'origine de la queue 79— 05 millimètres, Longueur de Ia tête... ..... des oreilles... . des ailes... .… Le taphien d'Égypte a son poil assez fourni; il est gris-roux en dessus et cendré en‘dessous : il n’y a que la pointe du poil qui soit de cette couleur; en dedans il est blanc. Notre taphien diffère encore, sous ce rapport, de celui de FIle-de- France, dont le pelage est marron sur le dos et roussâtre sous le ventre. J'ai trouvé le taphien d'Egypte dans des retraites très-profondes, à Ombos, et à Thèbes dans les tombeaux des rois. 6. NYCTINOME D'ÉGYPTE MNYCTINOMUS ÆGYPTIACUS. Painche 2, N° 2. ANNONCER un nouveau genre, c'est faire pressentir une autre organisation, un arrangement nouveau des organes des sens. Cette nouvelle combinaison frappe ou plutôt blesse à la première vue dans les nyctinomes. Nulle chauve-souris n’a la physionomie plus repoussante, nulle ne présente des formes plus hideuses; ou, pour parler le langage plus-exact du natu- raliste, qui n'est passible d'aucune prévention, nulle ne s'éloigne davantage du type commun des mammifères. C'est le nez camus et les lèvres pendantes du dogue, mais avec plus d’exagé- ration. La tête paroît comme écrasée sous le poids ét est vraiment cachée sous Jampleur des oreïlles : celles-ci ne sont pas seulement de simples vestibules pour le tuyau auditif; unies lune à l'autre par leurs bords internes, en même temps qu'attachées à la ligne moyenne de la tête, elles s'étendent sur le chanfrein et se prolongent jusqu'à la région des intermaxillaires , ou plutôt elles couvrent le crâne en sa totalité : prenant un développement aussi grand, elles acquièrent une autre sorté d'utilité; au moyen d’un repli ou lobe intérieur, elles s'appliquent sur l'œil ét lui tiennent lieu d’une seconde paupière. Il faut, én effet, le fronce- ment des tégumens de la tête pour que les oreilles soient tenues soulevées, et pour qu'elles deviennent, d’une part, une conque au devant du méat auditif, et que de QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE, 129 de l'autre, elles rendent à l'œil son axe de vision. L'entrée de chaque oreille est. bordée par un oreillon. ‘Les narines paroftroient d’une assez grande simplicité, si ce pi écb a les lèvres supérieures qui sont fendues et qui vont se perdre sur les cartilages du nez: ceux-ci ont la forme d’un manchon: alors les méats olfactifs sont de côté et à distance : ils sont en même temps circulaires, et, ce qui est un résultat de l'épais- seur du cartilage, ils ne paroïssent pas susceptibles de s'ouvrir et de se fermer alternativement. C’est cependant, comme nous avons vu jusqu'ici, ce qui arrive dans la plupart des chauve-souris. Mais ce n'est vraiment:[à qu'une apparence dans les nyctinomés : il est, sous les tégumens , un appareil qui, au besoin, produit le même éffet. Les lèvres charnues et pendantes de ces chauve-souris, à l'extrémité desquelles, comme nous venons de le dire, existent les narines, excèdent de beaucoup le crâne et anticipent sur la mâchoire inférieure. Un assez long tuyau établit donc la communication du méat cartilagineux dés narines à leur entrée dans le crâne. Ce tuyau est formé par une aponévrosé qui est mince : un tendon est inséré sur sa partie moyenne et extérieure ; et ce tendon, qui règne sur le chanfrein, aboutit à une portion du panicule charnu, ramassée sur la tête en une sorte de muscle distinct, et logée entre les deux muscles élévateurs de la mâchoire inférieure, ou les deux crotaphites. Quand cette portion de muscle se contracte, elie tire à elle les, tuyaux du nez; et en les coudant, elle les affaisse au point de supprimer la communication du dehors avec les fosses nasales. La lèvre supérieure, ridée de chaque côté de cinq à huit plis transversaux, est, en outre, rendue rugueuse, au moyen de verrues disséminées auprès de Toreille; d’autres, plus grosses, se voient aussi à la lèvre supérieure. L’aplatissement de la tête n'est pas simplement une illusion produite par la - disposition des oreilles ; il est réel. La boîte cérébrale est tout-à fait large et déprimée; les os pariétaux sont convexes; et une autre convexité, répondant à Toccipital supérieur, se voit en arrière. Le crâne est derrière comme coupé car- rément,; on y trouve là le trou occipital, lequel se fait remarquer par une grandeur excessive. Les dents deviennent un excellent indicateur de cette organisation; les incisives sont au nombre de deux en haut, et de quatre en bas : celles-là sont fortes, coniques et contiguës, quand les secondes sont très-petites et comme entassées au devant des canines. Je n'ai point trouvé de traces d’abajoues : pour les autres dents, c’est la même chose que dans toutes les chauve-souris insectivores. J'ai déjà donné le nombre des molaires {-#. L’aile est comme dans le genre Noctiho , à qui les nyctinomes ressemblent aussi par le bec-de-lièvre. Le pouce est d’une briéveté extrême ; maïs il est toutefois pourvu de ses osselets, quoi qu'en ait dit Buchanan, pour l'espèce qu’il a observée au Bengale. Le doigt indicateur est sans phalanges ; le #edius en a trois, et les deux autres, l'annulaire et le petit, n’en ont que deux. H. N, TOME II. 130 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Les pieds de derrière sont couverts de poils si longs, qu'ils dépassent les ongles. Il est remarquable qu'il faille placer cette circonstance au nombre des caractères génériques-de ce petit groupe : cela ne se voit que dans les nyctinomes, et se trouve dans tous. É La queue offre enfin une combinaïson encore nouvelle; c'est d’être presque aussi longue que dans les vespertilions, mais de n'avoir qu'une portion d’elle- même engagée dans la membrane interfémorale : celle-ci est moins grande; mais ‘elle est d’ailleurs plus épaisse, soutenue ou plutôt ramence en dedans par des muscles coccygiens plus forts, et elle forme le sac par des plis naturels, parce que la membrane des ailes glisse par-dessus le carpe, pour se lier sans interruption avec l'interfémorale, Cette description d'organes convient à trois espèces, 1.° à la chauve-souris qui est proprement l'objet de cet article; 2.° à une espèce décrite et figurée dans les manuscrits de Commerson , qu'Hermann a employée dans ses Observationes zoologicæ, page 19, sous les noms de chauve-souris du Port-Louis et de Vesp. acetabulosus ; et 3.° à une chauve-souris du Bengale, décrite en 1799 par Francis Buchanan, et que ce voyageur a nominée, à cause de ses lèvres plissées, Vesp. plicatus. Le nyctinome d'Égypte est de même taille { 80 millimètres) que celui du Bengale; mais la chauve-souris du Port-Louis est d'un cinquième plus petite : celle-ci se distingue en outre, des deux autres, par sa membrane interfémorale qui, plus grande, accompagne la queue dans les deux tiers de sa longueur, quand dans les deux autres nyctinomes elle n’en embrasse que la moitié. Notre espèce d'Égypte difière du nyctinome du Bengale, par sa queue plus grèle et par l'absence de brides dans la membrane interfémorale; je pourrois ajouter, si l'analogie ne me détournoit d'y croire, par l'existence des orcillons et un nombre double d’incisives inférieures. Le nyctinome d'Égypte est roux en dessus et brun sous le ventre; le poil est plus long et plus touffu à l'occiput et sur le cou, et y est aussi d’un roux plus pâle: un liséré de la membrane des ailes, tout près des flancs, est velu; il s’en trouve un semblable dans le nyctinome du Bengale. ‘ Les nyctinomes habitent les vieux édifices et les cavernes; ils vivent de proie, et se jettent de préférence sur les phalènes : par toutes leurs habitudes, ils se rapportent au grand groupe des chauve-souris insectivores. Ils attendent que la nuit paroisse, pour se livrer à toutes les inspirations de leur bien-être; c'est à quoi nous avons fait allusion, en leur donnant le nom de syctnomes. 7. RHINOLOPHE TRIDENT. RHINOLOPHUS TRIDENS. Planche 2, N° 1. QUELQUES naturalistes sont dans l'opinion qu’il n'y a pas de limites bien cer- taines pour les genres, et qu'il n’est souvent besoin que d’une ou de deux espèces QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE, 131 pour unir d’un lien indissoluble des groupes qu'on croyoit auparavant à d'assez grands intervalles. Les genres des chauve-souris me paroïssent fournir une objection très-forte contre ce système. En eflet, n'est-il pas remarquable que, dans chaque région zoologique, quelles qu’en soïent les distances, les chauve-souris aïent une organisa- tion qui rentre rigoureusement dans une de nos familles, ou plutôt que chaque famille ait dans chacune de ces régions un représentant qui lui appartienne sans ambiguité comme sans partage! Pour prendre une idée plus exacte encore de cette limitation des genres, il faut sur-tout s'attacher à la considération des rhinolophes : je ne connoïs pas de genre qui soit mieux -circonscrit, et qui présente en même temps des espèces plus distinctes. Un des principaux caractères de ce genre, est le nombre de ses mamelles : je J'ai vérifié et wouvé constant dans les cinq espèces dont j'ai pu disposer. Outre les deux mamelles pectorales , qui sont les seuls moyens d'allaitement des autres chauve-souris, les rhinolophes en ont deux autres, situées l'une près de f’autre et au dessus des os pubis. On ne manquera pas sans doute de donner attention à un fait d’anomalie aussi singulier. Ce sont aussi les seules chauve-souris insectivores qui aient une Scie sans oreillon; c’est-à-dire une oreïlle droite sur la tête, sans repli ni tragus, et qui est constituée par un pavillon conique dont le sommet aboutit au méat auditif. Rien ne supplée au défaut d’oreillon; les muscles de l'oreille ont seulement la faculté de la tendre à sa base et de l’entr'ouvrir davantage. Aussi résulte-t-il de cette disposition que les rhinolophes recherchent les exca- vations les plus profondes, et s’enfoncent sous terre à de trèsgrandes distances. Privés de la faculté de se rendre sourds à volonté, ils vont en des retraites où ne peuvent arriver les cris et le bruit produits par les animaux diurnes. Si l'oreille est de cette simplicité, en revanche l'organe, de lodorat présente une complication dont nous n'avons pas encore eu jusqu'ici d'exemple : pour la première fois, nous eni.apercevons les abords aussi favorablement disposés que ceux de forgane de louie; nous les voyons formés par une conque, comme s'il en étoit des émanations odorantes ainsi que des molécules du son, et qu’elles fussent dans le cas d'être recueillies et dirigées dans les chambres olfactives. Qu'on ne croïe pas que ce soit là un simple accident d'organisation, assez indifférent en soi : de semblables narines, placées de même au fond d’un enton- noir, existent dans deux autres genres de chauve-souris , les mégadermies et les phyllostomes. Nous observons R, en effet, un arrangement trop soigné dans ses détails, pour que nous ne dussion$ pas y voir un dessein fixe et y trouver toutes les conditions d'un type. Les chambres nasales ne s'étendent pas, dans les rhinolophes, au-delà des premières molaires; mais du moins elles sont renflées et globuleuses : l'entrée des _narines existent en devant et au dessous; c’est une large ouverture que termine H.N. TOME II. Re 132 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES l'intermaxillaire, réduit à n'être qu'une simple lame et à obéir aux mouvemens des lèvres. Celles-ci, que leur renflement élève à la hauteur du chanfrein, laissent entre elles et les chambres nasales, un vide au fond duquel, et comme dans un entonnoir, sont les deux ouvertures des narines. Un repli du derme protége et garnit le pourtour de l'entonnoir, et forme, de cette manière, la er j'ai annoncée plus haut. Il s'étend, au-devant des narines,, en fer-à-cheval, d'où un des rhinolophes en a pris le nom; et il se détache et s'élève en arrière, en manière de feuille, dont la-forme varie selon les espèces. L'épaisseur des lèvres résulte d’un agrégat de fibres musculaires, qui sont serrées les unes sur les autres et opposées dans leur direction. L’intermaxillaire est entraîné par le froncement de cette masse charnue. : Les dents sont telles que nous les avons observées dans les Se et les nyctinomes : incisives ;; canines ?; molaires SEA Les molaires m'ont paru plus fournies de pointes; et j'ai déjà dt comment il étoit arrivé qu'on avoit cru les rhinolophes sans incisives à la méchoire supérieure : la lame qui porte ces dents est très-mince, et au moindre effort elles tombent. Je ne sais où M. Iilliger a N trouvé qu'il y avoit des rhinolophes à six incisives inférieures. Je puis assurer que Je ne leur en aï jamais vu que quatre. Au surplus, il est aisé de se tromper sur cela, ces “dents étant crénelées dans toutes les. chauve-souris qui se nourrissent d'insectes. Les phalanges des doigts de l'aile se rapportent, pour le nombre, à celle des taphiens et des nyctères : le doigt indicateur en est privé, et les autres en ont deux, ou trois si l'on y comprend Posselet du métacarpe. Enfin, la queue est longue, et entièrement ou presque entièrement embrassée par la membrane interfémorale. à Je connois six chauve-souris à qui tous ces détaïls d'organisation conviennent entièrement et exclusivement : ° Le ferà-cheval. Rhénolophus uni-hastatus. 1 est commun en.Europe ; il grandit rarement au- -delà de quatre-vingts mil- limètres. Sa feuille nasale offre l'aspect le plus bizarre ; $a surface, tapissée de replis en godets, est surmontée au centre, d’une crête à base caverneuse. 2.° Le rhinolophe lancéolé. Rhinolophus bi-hastatus. Je reproduis sous ce nom le petit fer-à-cheval de Daubenton : il est d'Europe comme le grand; et il en diffère par ses feuilles lancéolées et plus étroites, ses oreilles plus profondément échancrées, et sa taille moindre ( $o millimètres } 3.° Le cruménifère de Peron, Rhinolophus speoris, décrit plus anciennement par Schneïder sous le nom de Wesp. speoris. C'est une chauve-souris de Timor, à peine plus grande que la précédente; le trait d'organisation qui la distingue ne peut manquer de se tracer dans la mémoire : c'est, derrière la feuille nasale (laquelle est courte et arrondie), c’est-à-dire tout au milieu du front, une bourse assez profonde ; elle est pourvue de lèvres à l'entrée, et s'ouvre par un sphincter : on diroit un œil de cyclope, qui seroit fermé. r£°be oc — Rlainolophus-diadema. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 533 Nouvelle espèce de Timor, la plus grande du genre (10oÿ millimètres); sa feuille à bord arrondi est trois fois plus large que haute : elle répète en arrière le fer-à-cheval étendu au devant des narines, et forme avec cette dernière membrane une sorte de couronne qui entoure l'organe olfactif. 5° Le rhinolophe de Commerson, Rhitolophus Commersonit. J'ai trouvé cette nouvelle espèce parmi les dessins et manuscrits de Commerson, et Je la lui dédie. Madagascar est sa patrie : comparée À la précédente, elle est un peu plus petites sa feuille est d’un tiers moins large, et sa queue, du tiers éga- lement, plus courte; la membrane interfémorale est aussi plus courte et rentre en dedans, tandis qu'elle est à angle saïllant dans le rhinolophe-diadème. 6.° Enfin, c'est à ces cinq espèces que je me suis proposé de comparer et d’op- poser le rhinolophe qui fait proprement le sujet de cet article. Je lui ai donné le nom de #rident , en l'empruntant de sa feuille qui est terminée par trois pointes bien distinctes : ses oreïlles sont plus larges et moins fermées sur le devant; une bride tégumentaire les attache en partie au chanfrein : la queue est fort courte, et, de plus, remarquable en ce qu’elle est, dans un tiers de sa longueur, libre au-delà de la membrane interfémorale ; celle-ci est coupée carrément, et supplée à ce qui lui manque en longueur par plus de largeur. Les principales dimensions du rhinolophe-trident sont les suivantes: Longueur du corps, 5$ millimètres; — de la queue, 24; — de l'envergure, 240; — de la membrane interfémorale, 6; — largeur de cette même mem- brane, 60. Tous les rhinolophes se ressemblent par les couleurs et la longueur du poil : dans tous la toison est épaisse, bien fournie et moelleuse ; ils sont fauves en dessus et blanc-jaunâtres en dessous : les jeunes commencent par être cendrés. J'ai trouvé le trident dans les plus profondes excavations des montagnes, en Égypte, et notamment dans les parties les plus reculées des tombeaux des rois, et du temple de Denderah. Ainsi, dans les pays chauds comme dans les pays froids, les rhinolophes recherchent également les lieux écartés ; l'état de la température ne leur en fait donc pas une nécessité : en aurois-je trouvé la véritable raison, en l’attribuant au défaut d'oreille interne ! Les rhinolophes, en France, ne rentrent pas tous les soirs, en été, dans les cavernes qu'ils habitent pendant l'hiver. Songeroient-ils à épargner des allées et venues, et les fatigues du trajet dans leurs demeures souterraines’ On ignore où ils se retirent pour passer le jour. 134 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES 8. RoUSSETTE D'ÉGYPTE PrERoPUSs Æcyprracus. LES sept genres de chauve-souris dont je viens de traiter, composent, à quelques égards , un seul et même grand genre : toutes ces chauve-souris ont l'es- tomac, les intestins, tous les viscères abdominaux et les dents molaires conformés de même ; toutes aussi se nourrissent d'insectes. Il est, en outre, d’autres raisons de les comprendre, comme je l'ai déjà fait, sous le nom de chauve-souris insectivores. Aux organes de la digestion corres- pondent ordinairement ceux de la locomotion ; et, en effet, ce qui est ailleurs dans une corrélation si bien suivie, qu'il ne survient point de modifications d’un côté qu'elles ne soient comme par contre-coup éprouvées de l'autre, ne sauroit manquer d'avoir son application dans le cas qui nous occupe, puisque les chauve- souris seroïent envain déterminées, par leur organisation, à vivre de proie, si elles n'avoient les moyens de la poursuivre et de la gagner de vitesse dans les régions atmosphériques. Or, c'est précisément ce que nous allons trouver. Nous avons bien constaté quelques différences dans les principaux organes du mouvement, principalement dans l'aile, en traitant séparément des genres dont se compose le groupe des chauve-souris insectivores; mais si l’on y a fait atten- tion, on a vu que ces différences ne portent que sur les parties extrêmes de l'aile, et sont de peu d'importance. Au contraire, l'aile considérée de plus haut et dans ce qui lui est tout-à-fait essentiel, est conformée, chez toutes les chauve-souris qui vivent d'insectes, d'une manière uniforme, et toute propre à leur procurer une extrême vitesse dans le vol. Sa partie humérale ne repose pas sur le tronc comme dans la plupart des mam- mifères ; maïs, comme dans ceux qui fouillent, ou plus généralement dans ceux qui font un continuel et violent usage des extrémités antérieures, elle prend naissance vers la moitié du cou. Comme en même temps la tête de lhumérus ne sauroit abandonner son lieu ordinaire d’articulation, c’est-à-dire, la cavité que lui forment lomoplate et la clavicule à leur rencontre, il arrive que ces pièces, chargées. de supporter lhumérus, sont agrandies hors de toute proportion, et en quantité suffisante pour que, sans quitter leur station ordinaire sur le tronc, elles four- nissent à leur autre extrémité, vers la ligne des vertèbres cervicales, les moyens d'articulation qu’en exige l'humérus. 4 Il résulte de cet accroissement des os de l'épaule, que les muscles qui en forment le revêtement sont beaucoup plus amples et plus forts, ét ce sont pré- cisément ceux qui meuvent l'aile ; que Finsertion au-delà et en avant du tronc change l'équilibre de toutes les parties du corps à l'égard de l'axe autour duquel se font tous les efforts du vol; et qu'enfin cette modification a son influence sur le port des chauve-souris, laquelle se manifeste, en ce qu'elles semblent privées de cou et paroïssent avoir la tête soutenue par les épaules. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 135 Celles-ci, plus longues et plus renflées, laissent entre elles un vide qui est rempli par une masse d'apparence graisseuse, dont il reste à déterminer la nature, et qu'on peut, en attendant, considérer commé un barrage de consistance douce et molle qui prévient le trop grand rapprochement des épaules. C'est, enfin, dans toutes ces chauve-souris qu'on trouve le derme développé en excès aux abords des organes des sens, et disposé à se prolonger sur toutes les parties qui ont de la saïllié en dehors. Telles ne sont point, au contraire, les chauve-souris qui se nourrissént de fruits, les roussettes et les céphalotes. Leur tête existe à l'extrémité d'un cou toutà-fait visible; c'est qu'alors les épaules ne dépassent point le tronc, que les clavicules s'étendent à-peu-près droites d'un côté à l'autre, et que les omoplates sont plus courtes; d’où il résulte aussi que les muscles pectoraux et les grands dorsaux sont moins grands et moins épais. Ces chauve-souris, à qui il ne faut que se porter sur tous les arbres où elles trouvent à vivre, n'éprouvent pas le besoin d’un vol aussi rapide que celles qui ont à poursuivre leur proie dans les airs : cette diminution de leurs moyens, à cet égard, se manifeste en outre dans le reste de leur organisation. Leurs ailes ont moins d'envergure et sur-tout moins de largeur : elles ne se pro- longent pas au-delà des cuisses pour sy réunir en membrane caudale; quelques traces de cette membrane montrent les vestiges d’une organisation plus développée ailleurs. Le nez est toujours sans complication; et les oreilles sont privées, non-seulement d'une grande étendue, maïs encore de l'oreille interne ou de l’oteillon. À voir ces chauve-souris sans leurs ailes, on les croiroit des singes : feurs dents, particulièrement les incisives, qui ressemblent à celles de l'homme et des orangs pour le nombre, la position et la forme, fournissent sur-tout cette indi- cation. : Les roussettes ou manquent de queué ou n’en 6nt qu’une extrêmement courte. Leur tête longue et régulièrement conique leur 4 fait trouver de la ressemblance avec quelques carna$siers ; d’où le nom de chien-volant que leur a donné Seba. Tels sont les caractères qui font de ces chauve-souris üne famille parfaitement naturelle. J'en aï décrit, dans les Annales du Muséum, onze espèces, toutes des pays chauds de l’ancien continent. Celles qu'on trouve à Madagascar, à l'Ile de France et dans les Indes, où elles sont réputées comme un mets délicat, et ont reçu un nom générique différent des chauve-souris qui vivent d'insectes, n'avoient point échappé aux Européens qui ont visité ces contrées, parce qu'outre ces raisons de les distinguer, elles se font remarquer par une taille presque gigantesque. La roussette d'Égypte, eu égard à sa taille, tient le milieu entre toutes les roussettes connues : mesurée du bout du museau à l'anus, elle porte quatorze centimètres , et son envergure cinquante-six. Elle a une petite queue entièrement 136 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES dégagée des vestiges de membrane interfémorale qu'on voit sur le bord interne des jambes. Sa tête est plus courte et plus large que dans aucune autre rous- sette : son poil est épais, fort doux, court, gris-brun, et plus foncé en dessus qu'en dessous ; enfin, ses incisives sont plus petites et rangées avec plus de, symétrie qu’elles ne le sont ailleurs. Elle est répandue dans toute l'Égypte : je l'ai particulièrement trouvée garnis- sant en abondance les plafonds des chambres de la grande pyramide. Telles ne sont pas les habitudes de toutés ses congénères dans les lieux peu habités et couverts de bois : elles ne s’éloignent pas des arbres qui leur four- nissent leurs fruits, et y demeurent appendues en très-grand nombre; non que, pour cela, elles soient animaux de troupe, maïs parce que les mêmes besoins les rassemblent autour des fruits les plus doux et les plus savoureux. Les huit premiers Européens qui s’établirent, il y a cent ans, à l'Ile de Ro- drigue, virent les roussettes de ce lieu, libres de toute inquiétude, se répandre le jour même dans leurs champs, et n'éviter que la grande lumière, et, sans doute, les fortes chaleurs des heures méridiennes. Nous savons, par M. Roch (Annales du Muséum, tome VIT, page 229), qu'elles sont susceptibles de s'attacher aux personnes qui en prennent soin : on les accou- tume à être caressantes pour tout le monde; elles lèchent comme lés chiens, et en ont toute la familiarité. D'autrés fois elles n’épargnent que leur maître, et témoignent cette affection exclusive, en mordant ceux qu’elles ne connoïssent pas, ou en les égratignant avec leurs crochets. ; Néanmoins on est peu disposé à en élever en domesticité, à cause de l'odeur qu'elles exhalent, et de celle, tout-à-fait infecte, de leurs urines et de leurs excrémens. Enfin, les roussettes ne se nourrissent pas si exclusivement de fruits, qu’elles ne puissent, dans la nécessité, recourir à la chair. M. Roch, qui rapportoit une roussette vulgaire en Europe, ne sut que lui donner, quand elle eut consommé une provision de bananes qu’on lui avoit destinée : cet animal fit bientôt cesser toutes ces hésitations, en se jetant avidement sur une perruche laïssée morte auprès de lui. On suivit cette indication, et on le nourrit, le reste du voyage, des rats qu'on prenoit à bord. Cela ne dura que jusqu'à ce qu'on eut gagné terre : élle reptit aussitôt ses anciennes habitudes; les fruits redevinrent son unique nour- riture. Quelque soin qu'on se donnât, on ne put la décider à prendre de la viande cuite ou crue. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 137 s. IL DE L’'ICHNEUMON. ZCHNEUMON PHARAON, Planche 6. Le: culte que l'antique Égypte rendoit à l’ichneumon, et la mention qui s'en trouve dans le plus ancien et le plus estimé des historiens Grecs, lui ont procuré une si grande célébrité, qu'il n’est, dans les deux âges de la littérature, presque point d’érudits, de voyageurs et de naturalistes qui ne s’en soient occupés. Cepen- dant, il est arrivé qu’en en parlant davantage , on La moins bien apprécié : on n'a pas toujours répété dans le même sens ce qu’en avoient dit les observateurs, quelquefois pour avoir trop voulu lui trouver la physionomie et les habitudes de son rôle däns la théogonie Égyptienne. On en est venu au point presque de le méconnoître, en ce que, si l’on consulte les derniers écrits à son sujet, et notam- ment ceux de Buffon, on n’y voit plus figurer lichneumon que comme un être descendu de son rang d'espèce primitive, modifié par la domesticité, et ayant perdu jusqu'au nom sous lequel tant de générations l'ont connu. Buffon avoit cru en reconnoître les traits dans une espèce qui, sous le nom de lui avoit été envoyée de Inde : il ne trouvoit qu'à ce seul animal, étranger à l'Égypte, ces’ caractères fixes et spécifiques qui sont le propre des indi- vidus sauvages. Il cherchoït ainsi ailleurs que dans l'ichneumon lui-même une base à des observations solides, pour avoir entendu dans un sens trop absolu un passage de Belon; CURE où ce voyageur parle du plaisir que les habitans d'Alexandrie prenoient à élever de ces animaux. D'autres détails confirmèrent Buffon dans l'opinion, que l’chneumon est domes- tique en Égypte, comme le chat l'est en Europe : « Les paysans en apportoient de » jeunes dans les marchés ; on s'en servoit pour détruire les rats et les souris, et » l'on s’amusoit de leur douceur et de leur aimable familiarité. » Ce fait admis, une autre supposition en devenoit la conséquence : dès qu'il n'y avoit en Égypte que des ichneumons vivant en domesticité, ils avoient dû, comme les autres animaux qui sont dans le même cas, éprouver toutes les in- fluences de cette position ; ils devoient y avoir dégénéré, y avoir subi quelques variétés ; et dans ce cas, il étoit naturel de rapporter à une seule espèce toutes les diversités de taille, de poils et de couleur, qu’on avoit jusqu'alors constatées. La vérité est qu'on n'est dans aucun temps parvenu, en Égypte, à rendre l'ichneumon domestique : l'espèce y vit par-tout à l'état sauvage. On n’en apporte de jeunes individus aux marchés que quand par hasard on en trouve d'égarés dans les champs ; et si, parce qu'on entire d’abord quelques services, on les souffre dans les maisons, ils s'ÿ rendent bientôt à charge, en étendant leur ravage sur les animaux des basses-cours. A. N. TOME II. s 138 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES L'ichneumon forme donc une espèce particulière. Il n’y a plus lieu d’en douter, présentement que nous avons eu l'occasion de le voir dans son pays, et que, depuis, nous lui avons comparé deux autres mangoustes, qui ont vécu, comme lui, dans nos ménageries. Nous sommes enfin certains que la conformation des mangoustes se rapporte à un type particulier, qui est reproduit, mais avec quelques légères modi- fications, dans chaque grande contrée de la zone torride. C'est le cas de mettre cette proposition dans tout son jour; et nous allons le faire en traitant rapidement de chaque espèce : . Nous commencerons par celle qui a servi a base aux déterminations de Bufon, par sa mangouste de l'Inde, ou la zangouste à bandes. Elle porte aux Indes le nom de wungo où de wungutia, d'où Buffon a dérivé celui de mangouste, que nous conserverons comme nom générique. Sa taille est de vingt-cinq centimètres; sa queue, moins longue, finit en pointe : son pelage est orné de bandes transversales, alternativement rousses et noirâtres, au nombre de vingt-six à trente. Le dessous de sa mâchoire inférieure est fauve, le bas des jambes noir, et la queue d’un brun noirâtre uniforme, Il en est question dans les Aménités de Kempfer; dans les Actes de la société des Curieux de la Nature, dans les Voyages du P. Vincent-Marie, et dans Linnéus, sous le nom de V'iverra mungo. Buffon en a donné une bonne figure, que j'ai comparée à un indi- vidu de la même espèce qui vivoit, il y a quelques années, chez le Ministre d'état comte Regnault de Saint-Jean-d’Angely. 2. Une deuxième espèce, dont je ne juge que sur une figure, est la angouste d'Edvards (Oiseaux, p/. 199 ). Son museau est brun-rougeâtre ; tout son dos, et en même temps sa queue, sont annelés de brun sur un fond olivâtre : c’est enfin la seule mangouste qui ait les ongles noirs. On la donnoit comme venue aussi des Indes orientales. 3. Une autre espèce, également des Indes orientales, est la xangouste nems, de Buffon (Suppl. III, pZ. 27). File est d’un cinquième plus grande que l'espèce à bandes : sa queue se termine de même en pointe; son pelage est plus clair, d’une couleur uniforme, tant sur le dos que sur les pattes : de petits traïts d’un brun rous- sâtre, disséminés également, et dont il y a autant que de poils, font voir en gris-roux la teinte totale, qui est, au fond, jaune couleur de paille. Daubenton a connu cette mangouste, et la décrite dans la première partie de son article, IL N. G. tom. XIII. 4. Le vansire, décrit, même volume, p2 21, et donné jusqu'ici comme une espèce voisine du furet, est une vraie mangouste. Je m'en suis assuré sur deux indi- vidus qui ont vécu à la ménagerie. Il est plus petit que notre première espèce; son poil est gris-brun, pointillé de jaunâtre, et ses pattes sont brunes. Cette mangouste vit à Madagascar, d’où elle a passé à l'Ile-de-France : son crâne diffère de celui de Fichneumon, en ce que-la boîte cérébrale est, à proportion, plus renflée et plus large, et que fapophyse du jugal et celle du coronal ne sont pas assez prolongées, pour se rencontrer, s'unir et cérmpiéter l'orbite. + Une wangouste de Java, espèce nouvelle rapportée par M. Leschenault, a QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. PT les plus grands rapports avec la précédente. Elle lui ressemble par la taille et à peu près par les couleurs : seulement elle a en marron ce qui est en brun dans l’autre; ses poils sur la tête et les jambes, sont d’une seule couleur et d’un marron foncé. 6. Une autre espèce nouvelle, dont nous ne connoïssons pas la patrie, est la mangouste rouge : son pelage, d’un roux ferrugineux, est très-éclatant; ses poils sont annelés de roux et de fauve; sa tête et ses épaules passent au rouge canelle : elle surpasse d’un cinquième notre première espèce, et a sa queue plus épaisse et plus longue. 7. La grande mangouste est une autre espèce de ce genre, ainsi nommée et figurée par Buffon (Suppl. III, pZ 25). Son poil est annelé de fauve et de marron ; maïs les anneaux fauves sont si étroits, que l'autre couleur domine par-tout. Sa queue, qui se termine en pointe, prend, vers l'extrémité, une couleur plus foncée. Les doigts sont couverts de poils ras et serrés, comme en montrent les animaux qui vont à l'eau : cette mangouste se livreroit-elle de préférence à la pêche! Double de l'espèce à bandes, on n’en connoît pas de plus grande. On est sans renseignement sur son pays, seulement je la crois rapportée par Sonnerat. 8. La dernière espèce de ce genre, dont il nous reste à parler, est notre ichneumon (1). Ce que nous venons de dire de ses congénères, nous aidera à le caractériser avec plus de rigueur et de précision. On ne pourroit le confondre, sous le rapport de sa taille (cinquante centi- mètres), qu'avec l'espèce précédente, dont il est toutefois plus petit d’un sixième. Sa queue l'en distingue nettement, aussi-bien que de toutes les autres mangoustes, parce qu’elle est, d’une part, de la longueur du corps, et que, de l'autre, elle est garnie, à son extrémité, d'une touffe de très-longs poils nos, qui divergent de haut en bas, et s’étalent en éventail. Son poil est plus gros, plus sec, plus cassant, et annelé de fauve et de marron. Un anneau fauve termine chaque poil; et quoïque les anneaux marrons soïent plus larges, il résulte de leur arrangement une distribution de couleurs si égale , que la teinte générale n’est autre que le mélange de ces deux couleurs; les pattes et le bout du museau sont simplement marron-foncé (2). Le crâne annonce un animal d'un goût décidé pour la chasse ; les sutures sagittales et occipitales sont relevées en crêtes très-saillantes ; son chanfrein est large et voûté; l'orbite est fermé entièrement en arriere : enfin, un caractère dont il y a une trace chez les fouines, mais qui n’est pas aussi fortement exprimé que dans lichneumon, est le renflement de la partie postérieure de l'os coro- nal, renflement ovoïde et qui égale une noix en volume. (1) Nous donnons aux espèces de ce petit groupe les noms triviaux qui suivent : mangoustes; ses poils sur-tout offrent une disposition et des couleurs semblables : mais son crâne eæ plus court, 12 Jchneumon mungo ; 2° ichneumon Edwardsii ; 3.° ichneumon griseus ; 4.° ichneumon galera ; 5° ichneu- mon javanicus ; 6. ich ruber; 7. ich major; 8.° ichneumon pharaon, (2) La suricate a beaucoup de rapports avec les H. N. TOME Il. son chanfrein plus bombé, et ses tempes plus écartées ; ses dents, ses naseaux et ses pieds annoncent d’autres habitudes : je n’ai pas cru devoir la faire entrer dans un genre où elle se seroit fait remarquer par de trop nom- breuses anomalies, S z 140 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Toutes ces espèces se ressemblent si parfaitement par les proportions des parties, qu'il n’est pas étonnant qu'on les ait confondues. Leur tête paroît courte, un peu aplatie vers le front, et, à cela près, exactement conique : la lèvre supé- rieure est un peu plus avancée que l’'inférieure. Des six incisives, il y en a deux à la mâchoire de dessous (les secondes dents de chaque côté), qui sont plus étroites et que le défaut d’espace oblige de rentrer un peu en dedans; les canines sont fortes, courtes et coniques. Les molaires sont au nombre de cinq de chaque côté, et à chaque mâchoire : il en existe, dans le premier âge, une sixième très-petite, en avant des autres ; sa chute, qui n'arrive pas toujours à une époque fixe, est ordinairement occasionnée par le développement de la dent canine. Les deux premières molaires sont presque exactement coniques ; la troisième d'en haut, et les troisième et quatrième d’en bas, sont larges et hérissées de fortes pointes qui s'entre-croisent. À la dent du fond, rangée à la suite de ces deux-ci, sont, à la mâchoire supérieure, opposées les deux dernières molaires, les plus étroites de toutes, placées plus en dedans, ct très-peu évidées. Le poil est court, dans toutes les espèces, sur la tête et les pattes; aussi s’éloi- gnent-elles très-peu des rivières, ce qu'indique en outre la demi-palmure de leurs doigts. La briéveté de leurs pattes leur donne le port des martres et des furets; elles marchent de même sur les doigts, et ne posent sur leurs talons que pour prendre du repos, ou se dresser sur les pieds de derrière; ce qu’elles font pour examiner ce qui se passe autour d'elles. ; Enfin, trois autres caractères d’une assez grande influence séparent nettement les mangoustes de tous les animaux qui vivent de proie : ce sont les papilles longues et acérées de leur langue, une membrane nictitante entière dont leurs yeux sont aidés, et une sorte de poche qu'elles ont au devant de l'anus. C’est au-dessous de cette ouverture que sont les poches des civettes : mais, dans les mangoustes, c’est au-delà du sphincter de l'anus que les tégumens communs, alongés et repliés sur eux-mêmes, forment un sac que l'animal ouvre et ferme à son gré. Il faut qu'il trouve une grande jouissance à rafraîchir le fond. de cette poche ; car il la met en contact avec tous les corps froïds et saillans qu'il aper- çoit. Il n'étoit, en domesticité, visité d'aucun amateur, qu'il n’allât se poser sur ses souliers. Cette observation n’avoit pas échappé à Belon: il parle « d’un grand » pertuis, tout entouré de poils, au-delà de l'anus, lequel conduit l’ichneumon » ouvre, quand il a grand chaud.» Il paroît que les anciens ont eu aussi connoïssance de cette poche : c’est sans doute ce qui les a mis dans le cas d’attribuer à l’ichneumon la plupart des contes ridicules qu’ils ont faits sur l’hyène. Élien dit que les ichneumons sont herma- phrodites ; qu’à la saison d’amour, ils se battent à outrance, et que les vainqueurs, se réservant les droits et les jouissances des mâles, soumettent les vaincus à la condition des femelles. ‘ I est assez rare d’apercevoir un ichneumon , et très-difficile de l'approcher. Je QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE, 141 ne connois point d'animal plus craintif et plus défiant; aucun n’est plus cauteleux , a, dit Belon. Il n'ose se hasarder de courir en pleine campagne; mais il suit tou- jours, ou plutôt il se glisse dans les petits canaux ou les sillons qui servent à l'irrigation des terres: il ne s'y avance jamais qu'avec beaucoup de réserve; et en effet, il ne lui suffit pas de ne rien voir devant lui dans le cas de lui porter ombrage ; il n’est tranquille et ne continue sa route que quand il l'a éclairée aussi par le sens de l'odorat. Telle est sans doute la cause de ces mouvemens ondoyans et de l'allure incertaine et oblique qu'il conserve toujours dans la domesticité. Quoiqu'assuré de la protection de son maître, il n'entre jamais dans un lieu qu'il n'a pas encore pratiqué, sans témoigner de fortes appréhensions ; son premier soin est de l’étudier en détail, et d’en aller en quelque sorte tâter toutes les sur- faces, au moyen de l’odorat. Cependant on diroit qu'il a quelque peine à percevoir les émanations odo- rantes des corps; ses efforts pour y réussir sont rendus sensibles par un mouve- ment continuel de ses naseaux, et par un petit bruit qui imite assez bien le souffle d'un animal haletant et fatigué d'une longue course. Il faut que ce soit pour sup- pléer à la foiblesse de sa vue qu'il fasse un si grand usage du’sens de lodorat; et comme alors il n’acquiert de notions distinctes des corps, que lorsqu'il en est à portée, on ne doit pas s'étonner qu'il vive dans une défiance perpétuelle de tout ce qui l'entoure. Pour connoître jusqu'où il porte‘cette défiance, il faut le voir au sortir d'un sillon, lorsqu'il se propose d'aller boire dans le Nil. Combien de fois il lui arrive de regarder autour de lui avant. de se découvrir! Il rampe alors sur le ventre; il n'a pas fait un pas que, saisi d'eflroi, il fuit en marchant à reculons. Ce n’est qu'après avoir beaucoup hésité et flairé tous les corps environnans, qu'il se dé- cide et fait un bond, ou pour aller boire, ou pour se jeter sur sa proie. Un animal d’un caractère aussi timide devoit être susceptible d'éducation; et en effet, on l’apprivoise facilement : il est doux et caressant ; il distingue Ja voix de son maître, et le suit presque aussi fidèlement qu’un chien : on peut l’employer à nettoyer une maison de rats et de souris, et on peut être assuré qu'il y aura réussi en bien peu de temps. Il n’est jamais en repos, furete sans cesse par-tout; et s'il a flairé quelque proie au fond d’un trou, il ne quitte point la partie qu'il wait fait ses efforts pour s'en saisir. Il tue sans nécessité : il se contente alors de sucer le sang et le cerveau des animaux qu’il a mis à mort; et quoiqu'une proie aussi abondante lui soit inutile, il ne souffre pas qu'on la lui retire. Il a coutume de se cacher pour prendre ses repas; il s'enfuit avec ce qu'on lui donne, dans l'endroit le plus retiré et le plus obscur du lieu où on le tient : il ne faut pas alors l'approcher; il défend sa proïé en grognant, et même en mordant. Ces habitudes lui sont communes avec les grandes espèces carnassières, le lion, le tigre, &c. ; il en a d’autres par lesquelles il ressemble davantage au chien, comme de lapper en buvant, et de pisser en levant une des jambes de derrière: quand'ila bu, il renverse son vase de manière à se verser sur le ventre toute l'eau qui y étoit contenue. 142 | DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES Nous possédions à la ménagerie impériale un mâle que j'avois rapporté d'Égypte. On lui donna dans la suite une compagne de son espèce, dont le général Aymé, qui l’'avoit aussi rapportée d'Égypte, me fit présent. La première entrevue de ces deux animaux fut signalée par un combat, où le mâle fut très-maltraité. Ce premier choc décida des prétentions de chacun des combattans : la supériorité de la femelle fut établie. Le mâle, n’osant plus se mesurer avec elle, abandonna le champ de bataille, et alla se réfugier dans F'endroit le plus sombre de sa loge. On ne pouvoit user plus rigoureusement de sa victoire : un coup de dent, ou même une simple menace, ren- voyoit le mâle à son gîte accoutumé, dès qu'il avoit la témérité d’en sortir, et de gagner les devants de la loge où il n'étoit jamais souffert. Même rigueur au temps des repas; il ne prenoit sa part des distributions, que quand sa femelle étoit repue. Mais à la saison d'amour, arrivée en janvier, tout changea de face : le mâle devint moins timide. Il employa d’abord les manières les plus propres à se rendre sa femelle favorable. Son cri d’amour qu’il ne cessoit de faire entendre, étoit un grognement sourd qui avoit quelque douceur. Se voyant repoussé, il songea à se procurer par force ce qu'il ne pouvoit obtenir de bonne grâce. La femelle, accoutumée à le mépriser, voulut aussitôt réprimer son audace ; mais à la suite d'engagemens où elle eut constamment le dessous, elle s'aperçut qu'elle n’avoit été jusque-là redevable de sa domination, qu'au caractère de douceur de son mâle : elle se tint dès-lors sur la défensive, et ne fut plus occupée que des moyens de lui résister. Le mâle en conçut plus d'ardeur : il fit pendant quatre jours et quatre nuits les plus grands efforts pour l’amener à ses desirs et la dompter. Il la tourmenta pendant tout ce temps sans le moindre intervalle de repos : elle ne s'étoit pas plutôt étendue sur le flanc pour le renverser, qu'il reprenoit la position qu'elle lui avoit fait perdre. Je n'ai point connu d'animal plus ardent en amour. Maïs ce qui montra qu'il n’entroit point de colère dans ses transports, c'est qu'il conserva toujours son caractère de douceur pour les curieux qui le venoïent visiter: on fa quelquefois arraché d’auprès de sa femelle, sans qu'il parût s’en plaindre, et qu'il ait cherché à mordre. L'ichneumon se nourrit en Égypte de rats, de serpens , d'oiseaux et d'œufs. L’inondation l'obligeant d'abandonner les campagnes, il se réfugie aux° environs des villages, auxquels il fait un grand tort, en se jetant sur les poules et les pigeons. Cependant les Égyptiens ne seffiaient pas beaucoup de ses dévastations ; ils se reposent du soin de le détruire sur le renard et le chacal, que les grandes eaux font aussi abandonner les plaines. Les ichneumons, jetés au milieu d’ennemis aussi rusés, et réunis sur un terrain fort étroit, leur échappent difficilement. A ces causes, qui s'opposent à leur multiplication, s'en joint une de plus à l'égard de l'Égypte supérieure : ils trouvent à Girgeh et au-dessus, dans le tupinambis, un ennemi acharné à leur destruction; c'est un grand lézard qui vit des mêmes proies, qui use des mêmes artifices pour se les procurer, et qui furetant de même dans les profonds sillons des campagnes, se trouve sans cesse sur leur chemin. Il n’est guère plus grand que lichneumon ; mais comme il est beaucoup plus courageux, et sur-tout plus agile, il en vient facilement à bout. QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. 143 L'ichneumon, de son côté, s'oppose à la trop grande multiplication des croco- diles, dont il détruit les œufs par-tout où il en rencontre. Ce n’a jamais pu être que pour ce service qu'il à été en Yénération dans l'antique Égypte; car il est faux qu'il attaque le crocodile de vive force. Une telle résolution n'est point compatible avec le caractère timide de l'ichneumon. Ce m'est pas non plus par antipathie qu'il se jette avec tant d'ardeur sur les œufs de ces grands reptiles, mais parce que les œufs de tous les animaux indistinctement sont la nourriture qu'il recherche de préférence. Les anciens ont publié sur ses mœurs quelques détails que nous n'avons pas été à portée de vérifier. Pline dit qu'il ne vit pas au-delà de six ans. Nous savons qu'il en met deux à SARRoEUte son entier accroissement. Strabon et Aristote pré. tendent qu’on ne le trouve qu'en Égypte : ce dernier parle dé sa timidité si grande u'il ne combattait jamais de grands serpens qu’en appelant d’autres ichneumons à son secours. Aussi, au dire d'Horapollon, sa figure, dans le langage hiéro- glyphique, servoit-elle à exprimer un homme foible qui ne peut se passer du secours de ses semblables. Élien dit pourtant que lichneumon se livroit seul à la chasse des serpens ; mais c’étoit en usant de toutes sortes d'artifices et de précautions. H se rouloit dans la vase, dont il séchoït ensuite la boue au soleil; et dans cet équipage de guerre, et sous la protection de cette espèce de cuirasse, ainsi que lappelle Plutarque, il se jetoit sur les plus grands serpens, en ayant soin toutefois de préserver son museau par sa queue qu'il replioit autour. L’ichneumon porte en Égypte le nom de nems, que depuis Buffon a appliqué à une autre espèce. Î1 y a lieu de croire que ce nom nous vient des anciens Égyptiens. Comme monosyllabe , il a dû traverser les siècles, sans trop éprouver d'altération. Le nom que les Grecs y ont substitué, échneumon, tiré tout entier de leur idiome, et qui exprime un animal continuellement occupé de la recherche de sa nourriture, en est sans doute la traduction. Du moins ce n’est qu'ainsi qu'on peut se rendre compte de la justesse de cette dénomination, quand d’ailleurs on réfléchit que c'est Hérodote qui Fa le premier employée, et qu'il a dû le faire avant d’avoir pu apprécier toutes les qualités caractéristiques de l'ichneumon. On trouve dans Belon une figure de cet animal : Schreber en a gravé une meilleure, p/. 4, B. Enfin nous en donnons une autre qui ne laisse rien à desirer: c'est celle que nous devons aux pinceaux de Maréchal. J'ai eu aussi occasion de voir la célèbre hyène d'Orient, en Égypte : elle y vit dans les lieux les plus écartés, sur la lisière du désert, et principalement sur la pente de ces profondes excavations qui forment de petites vallées aboutissant à la grande vallée du Nil. Il en existe aussi dans le bas Delta, où de vastes atté- rissemens de sable et des lieux tourmentés et déchirés à leur surface lui offrent quelque abri. J'ai été à portée de m'en assurer : ayant un jour passé dans le Delta, à peu de distance de Damiette, j'y aperçus une hyène qui conduisoit un petit, âgé de huit à douze jours. Elle ne pensa point à le défendre, et prit la fuite, en sorte que je pus disposer de son petit. 1 4 4 DESCRIPTION DES MAMMIFÈRES QUI SE TROUVENT EN ÉGYPTE. J'en examinai le premier poil ou la livrée. La toison étoit épaisse, inégale et fine. Le pelage étoit d’un blanc tirant un peu sur le cendré : une raie noirâtre ; interrompue au milieu, se voyoit le long du dos; elle sembloit donner naïssance, de chaque côté, à cinq autres raies, disposées en travers, et à des distances à- peu-près égales : quelques taches étoient semées entre ces bandes. Le front, le cou, la queue et le ventre étoient d’un blanc pur, l'iris noir, et les pattes rayées de blanc et de noirâtre. Cette description nous prouve que les jeunes hyènes n’ont pas de livrée pro- prement dite : elles ressemblent à leur mère, sauf le ton plus vif et plus décidé de ces teintes chez les adultes. L'hyène est bien loin d'imprimer, en Égypte, la même terreur, et d'y montrer autant de férocité qu’elle l’a fait en Europe, sous le nom de la bête du Gévaudan. Elle n'y attaque guère que les troupeaux des Bédouins, et le fait toujours avec une extrême circonspection. En général tous les animaux d'Égypte y ont moins de férocité: le crocodile luimême s'y montre moins entreprenant et plus timide qu'ailleurs. Seroit-ce que se trouvant dans un des pays les plus anciennement habités, ils ont éprouvé da- vantage à la longue l'action des sociétés humaines, et mieux connu ce qu'ils ont à en craindre!