-J^.W- /■ -^i: .■^■• > >r n : ^ rS ■~'f^ ^ ; :r^.. \^ LIBRARY OF 685_l©56 w:^^, ->. -^ NOUVEAU DICTIONNAIRE D^HISTOIRE NATURELLE, APPLIQUEE AUX ARTS, A l'Agriculture , à l'Economie rurale et domestique, à la Me'decine , etc. PAR UNE SOCIÉTÉ DE NATURALISTES ET D'AGRICULTEURS. Nouvelle Édition presqu'entièrement refondue et considé- rablement augmentée ; AVEC DES FIGURES TIRÉES DES TROIS RÈGNES DE LA NATURE. TOME XV. 1)K L'IMPRIMERIE D'ABEL LANOE, RUE DE LA IIARI'E. A PARIS, Chez DETER VILLE, libraire, rue hautefeuille, no 8. M DCCC XVIIi Indication des Pages ou doivent être placées les Planches du Tome XV, avec la note de es quelles représentent. E 38. Diverses races d'hommes. . . . : . . Pag. 8a Race Mongole. —Américaine. — Malaie-Australe. -^ ( Hottenlote-Boschisman). — Mesure de l'angle facial dans une tête antique (Jupiter olympien ) ,; dans le Nègre et dans l'Orang-outang. E 37. Vénus grecque et Apollon pytliien . i54 E 14. Insectes 201 Hanneton foulon. — He'Iops lanipède. — He'me'robe perle. — Herminie ventilabre. — Hespérie prote'e. Hexodon réticule'. — Hippobosque des chevaux. — Hispe âtre. — Horie maculée. —Hydrophile brun^ '-Hylée marquée. — Hylotome sans nœuds, E i3. Oiseaux Hocco noir. — Huitrier commun. — Houtou , ou Mo^nriol du Brésil. 4o8 E 35. Coquilles r^^ Donace pamet. — Erodone maclroïde. — Fîstulane grouppée. — Glycimère incrustée. — Gryphéear- ouate. — Haliotide ormier. —Harpe vulgaire. — Hyppope chou. —Houlette spondyloïde. — Hyale iridentée. -Hyale cuspidate. -Hyatelle à deux fentes. E 16. Quadrupèdes mammifères 4g6 Hocheur (guenon). -Indri à courte queue— Hyène . d'orient. NOUVEAU DICTIONNAIRE D'HISTOIRE NATURELLE. H 0 I\I ri O MME, Homo ^ Kv^puTn-oç. Nous ne connoissons point d'objets sur la terre , quelles que soient leur grandeur et leur împortance , qui nous intéressent de plus près que notre étude Placés à la tête du règne animal , et revêtus de la suprême puissance sur tout ce qui respire , c'est à nous qu'il appar- tient de descendre en nous-mêmes, d'examiner les ressorts de notre vie , et de sonder les profondeurs de notre propre na- ture. Il a été réservé à Vhomme seul entre tous les êtres de pouvoir contempler son âme , et de mesurer ses devoirs et ses droits sur ce globe. L'homme ne diffère point de Thomnie par ces attributs extérieurs et ces rangs que la société dispense souvent avec tant d'injustice aux individus , parmi chaque peuple ; mais seulement par cette connoissance intime de soi-mêine , qui nous dévoile toute notre diijniié et tonte notre foiblesse , qui nous apprécie et nous place au véritable rang que nous assigne la nature. En comparant notre conformation et nos qualités pure- ment matérielles aux autres animaux , nous ne trouvons que des difïerences légères, qui ne nous séparent point de leur classe ; mais lorsque nous mettons en parallèle toute l'étendue de nos facultés morales et intellectuelles avec la foible lueur qui dirige la brute , nous trouvons entre elle et nous un préci- pice immense. Par le corps, nous appartenons au rang des ani- maux, par la raison et l'âme , nous émanons de la Divinité Ce- pendant c'est de notre corps que nous tirons notre principale élévation morale : il est l'instrument de notre intelligence et lappm fondamental de cet édifice de grandeur et àe puis- sance qui nous a mérité le sceptre du moïïflc. 2 H 0 M C'est donc sous le double aspect du corps et de resprU , du physique et du moral , que nous devons envisager Thomme , puisqu'il tient l'un et l'autre des mains de Dieu et de la na- ture ; mais les difficultés de cet important examen sont de plusieurs genres. Premièrement, en nous examinant nous-mêmes, nous apportons souvent dans ces recherches un sentiment d'or- gueil qui nous dérobe nos véritables dimensions ; ou même des préventions troublent notre jugement , nous ravalent jus- qu'à la brute , ou nous transportent à une trop grande élé- vation au-dessus de Thumanité. En second lieu, l'identité de l'être humain , les connexions intimes de l'esprit et du cœur, de l'intelligence pure avec les passions, répandent un nuage sur les objets de ses recherches ; et, confondant perpétuelle- ment l'illusion avec la vérité , le soustraient à sa propre intui- tion. Enfin , nous ne pouvons nous connoître parfaitement qu'en nous comparant avec les autres êtres ; car sans euxnotre existence seroit incompréhensible , puisque nous n'aurions aucun moyen de nous apprécier ; mais comme nous ne con- noissons guère que le physique des animaux, la partie la plus profonde de nous-mêmes demeure encore dans l'obscurité, parce que nous ne pouvons pas la mettre en balance avec celle de la brute. Cependant l'homme ne consiste pas seu- lement dans la masse de chairs , de sang , d'os , de nerfs , de membranes , qui composent son corps , mais encore dans tout le développement des facultés de son âme , qui dépen- dent des lois les plus sublimes de la nature. Tout ce que nous regardons sur la terre comme l'ouvrage de l'homme , étant le produit de la raison qu'il a reçue , rentre donc dans le domaine de son histoire. De même que nous décrivons l'industrie des castors et des abeilles , parce qu'elle est le résultat de leur propre instinct, ne devons-nous pas con- templer aussi l'intelligence de la race humaine dans toute sa fraudeur? Ne prend -elle pas sa source dans nous-mêmes? )e quelle main étrangère l'homme a-t-il reçu sa puissance in- tellectuelle , si ce n'est de la main de Dieu même , ainsi que son corps ? L'homme est donc tout entier dans la nature avec ses lois , sa civilisation , ses connoissances et son industrie ; tout est le résultat de son organisation et de son âme. Il né peut pas se soustraire à la nature ; il naît et il meurt dans son sein ; il se nourrit et il engendre de même que les autres ani- maux. S'il transgresse les lois qui lui sont imposées comme à toutes les créatures vivantes, il en subit la peine; car nous ne contrarions jamais impunément ce qui nous est prescrit par notre destination naturelle. Article I.^"^ Si nous ne considérons que l'homme pure- H O M 3 ment corporel, si nous éludions sans préjugé sa conformation interne et ses formes extérieures , il ne nous paroitra qu'un animal peu favorisé au physique , en le comparant au reste des êtres. Il n'est pourvu d'aucune des armes défensives et of- fensives que la nature a distribuées à chacun des animaux. Sa peau nue est exposée à l'ardeur brûlante du soleil , comme à la froidure rigoureuse des hivers et à toute l'Intempérie de l'atmosphère; tandis que la nature a protégé d'une écorceles arbres eux-mêmes. La longue folblesse de notre enfance , notre assujettissement à une foule de maladies dans tout le cours de la vie , l'insuffisance individuelle de l'homme, l'in- tempérance de ses appétits et de ses passions , le trouble de sa raison , et son Ignorance originelle , le rendent peut-être la plus misérable de toutes les créatures. Le sauvage traîne en languissant , sur la terre , une longue carrière de douleurs et de tristesse ; rebut de la nature, il ne jouit d'aucun avan- tage sans l'acheter au prix de son repos , et demeure en proie à tous les hasards de la fortune. Quelle est sa force devant, celle du lion , et la rapidité de sa course auprès de celle du; cheval .'' A-t-11 le vol élevé de l'oiseau , la nage du poisson , l'odorat du chien, l'œil perçant de l'aigle et l'ouïe du lièvre ? S'enorguellllra-t-ll de sa taille auprès de l'éléphant , de sa dextérité devant le singe , de sa légèreté près du chevreuil ? A-t-U la magnificence du paon, la voix mélodieuse du chanire desbols? Chaque être a été doué de son instinct, et la nature a pourvu aux besoins de tous ; elle a donné des serres crochues , un bec acéré et des ailes vigoureuses à l'oiseau de proie ; elle arma le quadrupède de dents et de cornes menaçantes ; elle protégea la lente tortue d'un épais bouclier ; elle enri- chit le papillon de ses plus éclatantes couleurs, et enseigna aux oiseaux des forêts leurs plus douces chansons : l'homme seul ne sait rien , ne peut rien sans l'éducation ; il lui faut en- seigner à vivre, à parler, à bien penser; Il lui faut mille labeurs et mille peines pour surmonter tous ses besoins ; la nature ne nous instruisit qu'à souffrir la misère, et nos premières voix sont des pleurs. Le voilà , gisant à terre, tout nu , pieds et poings liés , cet animal superbe , né pour commander à tous les autres. Il gémit, on l'emmaillotte , on l'enchaîne , on commence sa vie par des supplices , pour le seul crime d'être né. Les animaux n'entrent point dans leur carrière sous de si cruels auspices ; aucun d'eux n'a reçu une existence aussi fragile que l'homme ; aucun ne conserve un orgueil aussi démesuré dans l'abjection ; aucun n'a la superstition , l'ava- rice, la folle, l'ambition et toutes les fureurs en partage. C'est par ces rigoureux sacrifices que nous avons acheté la raison et l'empire du monde , présens souvent funestes à notre bon* 4 H O M hejjr et à notre repos ; et l'on ne peut pas dire si la nature s'est montrée envers nous , ou plus généreuse mère par ses dons, ou marâtre plus inexorable parle prix qu'elle en exige. Placés au sommet de l'échelle des règnes organisés, c'est à nous que viennent aboutir tous les mouvemens qui s'opèrent parmi eux, parce que c'est aux extrémités que se font sentir les plus grandes secousses. Tout ce qui est extrême pèse prin- cipalement sur l'espèce humaine ; elle est comme la tête , la partie pensante des corps organisés ; elle en est la fleur la plu» délicate et la plus sensible. ISous étendons notre vie sur tout le globe; et tenant à toutes choses par nos besoins ou nos vo- luptés, nous sommes devenus vulnérables dans tous les objets de nos désirs ; rien n'est demeuré indifférent pour nous. Rois de la terre , nos trônes , comme ceux des princes, sont tou- jours environnés de soucis et d'alarmes. Des pierres , un mé- tal, quelques pieds de terre, en voilà assez pour mettre en feu les quatre coins du monde , et pour arroser la terre de sang humain. S il a été donné à Thomme d'être le plus sen- sible des animaux, il est aussi le plus exposé à d extrêmes infortunes; car les bêtes n'éprouvent guère que des maux phy- siques. Tout être n'éprouve de douleurs qu'autant qu'il a de susceptibilité pour les souffrir, de sorte que le plus sensible est toujours le plus malheureux ; mais comme il peut éprou- ver le bonheur dans la même proportion, il est difficile de dire si son état est plus digne d être plaint que d'être envié. Sans doute , il est plus raisonnable de penser que l'un est le contre-poids naturel de l'autre , et que ces extrêmes de mi- sère et de félicité ne sont que des oscillations correspondan- tes qui agitent tour à tour les hommes ; mais ils seroient plus satisfaits peut - être de racheter cette existence tumultueuse par un sort plus tranquille. La nature a donné à la race humaine , de plus qu'aux ani- maux, une faculté spirituelle , qui est pour nous le fruit de la science du bien et du mal ; elle nous a rendus capables d'im- pressions plus profondes et plus pénétrantes ; par cette voie, elle a versé sur nous , sans mesure , la coupe des plaisirs et des peines. Aucune créature ne naît plus foible que nous , et aucune ne devient plus puissante. Quel animal , à sa nais- sance , n'a pas plus d'instinct et de facultés que l'enfant ; mais lequel peut acquérir, comme Thomme, ce brillant degré d'in- telligence etd'habileté qui sait asservir l'univers,'' La brute , en entrant au monde , est presque aussi instruite , par l'instinct, que ses parens ; Thomme , au contraire , est , à son origine , dépourvu de toute connoissance , et plongé dans une stupide imbécillité : mais l'instinct de la première est stalionnaire ; la science du second s'accroît sans cesse et s'élève aux plus su- H O M 5 blîmes vérités. Le cercle moral de ranimai est resserré dans d'étroites limites; 1 homme peut s'élancer aux plus éclatan- tes vertus, ou se précipiterdans Tabime des plus horribles scé- lératesses ; il parcourt tous les exirêmes. Kien n est eu même temps si majestueux et si abject que Thommc en général; et par ses excès de bien et de mal , c'est une des merveilles les plus incompréhensibles que la nature ait jamais formées. Ce qui dislingue éminemment l'homme de tous les autres êtres , ce sont donc ces qualités exorbitantes de domination et de servitude , de bonheur suprême et de misère insuppor- table , de science et d'ignorance , enfin de vertus et de vices , par lesquelles il est à la fois la gloire et l'opprobre de la terre. La nature lui a tout ôté pour lui tout accorder ; elle l'a fait naître impuissant , esclave de tout , pour le combler de force et de souveraineté ; elle Ta crée stupide , pour l'exciter à la plus sublime raison ; elle lui a donné une sensibilité profonde comme un instrument tout-puissant de perte ou de salut , et lui a également ouvert les portes du crime et de la vertu. Quel animal a jamais possédé ces prérogatives? La nature a écarté toute barrière de l'âme humaine , parce qu'elle nous a éclairés du flambeau du génie; elle les a multipliées, ren- forcées autour de l'animal , parce qu'il est aveugle dans la science du bien et du mal. L'homme est donc un être excessif en toutes choses ; il l'est par son rang suprême dans l'ordre des corps animés; il l'est par ses facultés corporelles , qui surpassent , en général , celles des animaux et des plantes ; il l'est surtout par ses forces morales et intellectuelles , qui lui ont conquis le sceptre de la terre. L'homme réunit toutes les qualités extrêmes des règnes organisés ; on peut dire qu'il est, en quelque sorte , leur cer- veau , leur partie pensante et sensible par excellence ; tandis que les autres espèces en composent le corps ou la masse brute. De même que le cerveau est formé pour diriger l'économie vivante de chaque individu , le cerveau des corps organisés, qui est la race humaine , est établi par la nature comme un suprême modérateur, pour faire régner entre eux: une sorte d'équilibre et de subordination. C'est un grand ba- lancier destiné à peser tour à tour sur tout ce qui s'élève au- delà des limites naturelles , et à faire remonter au niveau tout ce qui s'abaisse trop au-dessous. Voyez ces contrées couvertes de plantes et d'animaux de toute espèce qui les surchargent ; l'homme , attiré par l'abon- dance de leurs productions , y fixe sa demeure , subjugue et détruit les animaux, réduit en servitude les plus doux, frappe de terreur ou de mort les plus indomptables , renverse les forêts , retranche cette exubérance de vie végétale par le feu, 6 II O M la cognée et la faux , purifie les airs , dessèche les marais , donne un libre cours aux eaux stagnantes, anime la nature moite , et y fait régner une perpétuelle harmonie. Mais bien- tôt l'espèce humaine prenant un accroissement prodigieux par l'établissement des sociétés , des empires , des lois civiles et religieuses , par la perfection de la civilisation , la nature est de nouveau encombrée. Jadis elle étoit étouffée , envahie par une surabondance de végétaux et d'animaux de toute es- pèce ; maintenant elle est accablée , dévorée par des hôtes puissans qui épuisent la terre de ses plantes, et détruisent ses animaux. Alors elle cherche à se débarrasser de cette multi- tude fatigante qui l'oppresse ; elle renverse la puissance de l'homme , change ses cités en déserts par la famine et les pes- tes, détruit les empires , met , pour ainsi parler, l'épée dans la main des conquérans, fait déborder des régions du Nord des hordes dévastatcices , renouvelle par des révolutions po- litiques la masse des générations humaines , envoie des ma- ladies qui attaquent la reproduction de l'espèce, et rétablit parcesformidablessecoussesl'équilibre entre les êtres organi- sés. Il est réservé , sans doute , dans les destinées de la na- ture , des époques redoutables de ravages et de destruction au genre humain , et les temps sont marqués par la divine Providence pour la ruine des empires et les renouvellemens de la face du monde. Voyez s'élever successivement les royau- mes des Mèdes, des Assyriens, des Scythes, des Perses; écrasés par les conquérans macédoniens , ils sont tombés à leur tour devant les Romains. La puissance colossale de ces derniers s'écroula ensuite sous les coups des vaillans enfans du Nord , qui accoururent comme des loups dévorans à la chute de ce grand cadavre. Les Cimbres , les Huns , les Goths, les Vandales , les Alain§ , les Visigoths et toutes ces races bel- liqueuses qui débordèrent par torrens , morcelèrent , enva- hirent les vastes provinces de l'empire romain ; et conduits par les Alaric , les Attila , les Genseric et les autres fléaux de l'espèce humaine , se déchirèrent entre eux , en s' arrachant de sanglans débtis. En Asie , je vois s'élever l'empire des Sarra- sins , à la voix de Mahomet. En Europe , Charlemagne fonde une nouvelle puissance ; les Tartares , sous les Tamerlan et les (Tenghis-Khan,inondentrAsie;lesTurcsanéantissentrempire d'Orient ; les Espagnols envahissent le Nouveau-Monde ; la destruction succède sans cesse à la destruction ; et au milieu ,de ce fracas élernel des empires qui s'élèvent, qui s'écroulent les uns sur les autres , la nature immuable tient la balance et préside, toujours impassible, à ces bouleversemens. Ces marées ou refluxdc l'espèce humaine , ces dévastations, ces colonies, ces irruptions , enfin ces conquêtes et toutes ces H 0 M 7 révolutions opérées dans le long cours des siècles , ne sont que des rétablissemens successifs d'équilibre dans le système des corps organisés ; car on observe que ce sont presque tou- jours les nations pauvres , ou, ce qui revient au même, trop nombreuses eu égard au peu de produit de leur territoire , qui exécutent ces grands bouleversemens. Il est donc un rap- port nécessaire entre le nombre des hommes et la quantité des substances organisées , qui fournissent à leur nourriture et à leurs nécessités ; rapport qui venant à se déranger , en- traîne à sa suite des famines, des ruines de pays , des sou- lèvemens , des convulsions politiques , des guerres , des ma- ladies pestilentielles et tous les ravages qui en sont la suite. Ainsi les habitans des régions stériles du Nord , refluent tou- jours , les armes à la main , dans les plaines fertiles de l'Asie , de sorte que l'équilibre ne s'établit pas seulement de peuple à peuple ; mais il se coordonne encore avec l'ensemble des corps organisés qui servent à leurs besoins. Les pays froids et peu productifs sont , par cette raison , les moins peuplés ; les époques de disette diminuent sensiblement le nombre des naissanceshumaines; les mouvemenspolitiques,lesrévolutions s'exécutent toujours par les classes indigentes de ta société contre les riches et les heureux. La politique elle - même n'est souvent qu'un instrument de la nature , sans que nous nous en doutions ; les vicissitudes des nations ne dépendent pas uniquement des hommes ; il est une plus haute né- cessité des choses , un concours fatal de circonstances qui les déterminent. Les rois eux-mêmes ne sont-ils pas dominés par cette puissance supérieure de la nature , qui impose le joug de ses lois à ceux qui en donnept aux autres hommes Rien n'est durable dans le monde ; les empires ont leurs âges comme les individus, et ils n'existent que par rapport aux corps organisés , qui servent à la sustentation et aux besoins des membres de la société. L'impulsion primitive émane donc de la propriété de l'homme sur les substances naturelles , et les agitations secrètes qui donnent le branle aux états , re- montent à quelque source semblable, de manière que la Pro- vidence de la nature qui veille sur tous les êtres , en tient tou- jours le gouvernail. Cet équilibre général que l'espèce humaine est chargée de maintenir dans les règnes organisés , chaque classe d'animaux l'établit dans les diverses provinces de la nature : comme les oiseaux, par leurs émigrations perpétuelles du Midi au Nord, et du Nord au Midi; les poissons , parleurs voyages annuels au sein des mers. On aperçoit même de semblables débordemens parmi les quadrupèdes ; et il se trouve sans doute de pareilles migrations dans la classe des insectes. (>ù 8 .HO M. rallnient abonde , là -se porte le consommateur; de sorte que sa matière organisée ne demeure jamais dans l'inachon. Ainsi , l'espèce humaine n'existe pas uniquement pour elle-même ; mais elle est constituée relativement à l'ensemble des êtres animés ; elle n'est donc point l'objet et le but de tout ce qui est créé , mais plutôt son conlre-polds et sa force modératrice. Nous sommes placés au faîte des corps orga- nisés, pour y établir, par notre masse, une sorte de pondé- ration et de nivellement par la destruction que nous y exer- çons. De même que le règne animal est institué pour ré- primer l'excessive abondance du règne végétal par les dépré- dations qu'il y exerce , les espèces carnivores ont été créées aussi pour retrancher l'excès des espèces qui vivent de vé- gétaux , de peur qu'elles ne parvinssent à affamer la terre: la race humaine est de même formée pour faire régner l'har- monie entre ces différens êtres, en châtiant également les uns et les autres, et en les maintenant dans leurs bornes res- pectives. Cette fonction est prouvée par la faculté accordée à l'homme de pouvoir régner dans tous les climats , et de se nourrir également de végétaux et d'animaux. Comme le nombre des espèces herbivores , dans les pays méridionaux , ne suffit pas pour retrancher l'abondance des végétaux , la nature a rendu frugivore Ihomme de ces contrées. Au con- traire , elle l'a fait principalement carnivore dans les zones froides , parce que la proportion des animaux y est trop con- siclérabie relativement aux plantes , dont le froid empêche la multiplication et la croissance. Le frugivore n'eût pas pu trouver à se nourrir au Nord , et le carnivore au Midi eût laissé encombrer la terre de substances végétales , en y dé- truisant les animaux herbivores pour son propre aliment. Enfin , lorsque la puissance despotique de l'homme devient trop onéreuse aux corps organisés , la nature engendre des maladies épidémiques, qui ne sont jamais plus contagieuses et plus funestes que dans les grandes sociétés humaines ; elle fait naître de soudaines catastrophes politiques , dont la com- motion est d'autant plus violente , que la population est plus rapprochée et plus nombreuse ; elle suscite des discordes ; elle établit des guerres qui sont des sortes de cautères ou de saignées, qui diminuent la pléthore, pour ainsi parler, de l'espèce humaine ; et enfin elle maintient toujours, par quel- que moyen, une sorte d'égalité entre les forces vitales de la matière organisée. 11 suit de là que la nature ne considère jamais les indivi- dus; qu'elle maintient la perpétuité des espèces par de vi- goureux retranchemens dans les races qui empiètent sur les autres ; et que , loin d'avoir tout ordonné pour le bonheur de H O M 9 Phomme physique, elle le fait servir, même à ses (dépens, flans l'équilibre du système des corps organisés , et l'immole ou le brise comme un foible roseau lorsqu'elle n'en a plus besoin.EUe a peu favorisé l'homme individuel; mais elle a tout fait pour l'homme intellectuel et social. Les temps de mal- heurs pour le genre humain , sont des époques d'accroisse- ment et de développement pour les règnes de la nature ; notre muhiplication et notre prospérité sont une période de dégra- dation , de ruine ou de dépérissement pour eux; car nous ne nous enrichissons que de déprédations sur la nature , nous n'engendrons qu'aux dépens des êtres vivans que nous dé- truisons ; de sorte qu'il s'établit un balancement perpétuel, une oscillation plus ou moins voisine de l'équilibre, entre nous et les règnes organisés. Si l'homme n'est qu'un instrument nécessaire dans le sys- tème de vie , tout ce qui existe n'est donc pas formé pour son bonheur ; et s'il est le plus puissant , le plus parfait de tous les animaux , c'est afin d'être le centre d'action , le mo- bile commun auquel viennent aboutir toutes les forces parti- culières. De même que les souverains sont institués pour faire le bonheur des peuples, l'homme a été établi le chef de tous les êtres pour faire leur bien général ; et il seroit également faux de prétendre que les sujets fussent formés exprès pour le souverain, etque toute la nature ait été créée exclusivement pour l'homme. La mouche qui l'insulte, le ver qui dévore ses entrailles, le vil ciron dont il est la proie , sont-ils nés pour le servir .''Les astres, les saisons, les vents obéissent-ils aux volontés de ce roi de la terre , aliment d'un frcle vermisseau? Quelle démence de croire que tout est destiné à notre féli- cité , que c'est l'unique pensée de la nature ! Les pestes , les famines , les maladies , les guerres , les passions des hommes, leurs infortunes et leurs douleurs prouvent que nous ne som- mes pas plus favorisés au physique que les autres êtres ; que la nature s'est montrée équitable envers tous , et que pour être élevés au premier rang, nous ne sommes pas à l'abri de ses lois ; elle n'a fait aucune exception ; elle n'a mis aucune distinction entre tous les individus; et les rois, les bergers naissent et meurent comme les fleurs et les animaux. L'homme physique n'est donc pour elle qu'un peu de matière organisée qu'elle change, transforme à son gré; qu'elle fait croître, engendrer, périr tour à tour. Ce n'est pas l'homme qui règne sur la terre , ce sont les lois de la nature dont il n'est que l'in- terprète et le dépositaire ; il tient d'elle seule l'empire de vie et de mort sur l'animal et la plante : mais il est soumis lui- même à ces lois terribles, irrévocables i; il en est le premier esclave ; et toute la puissance de la terre , toute la force du H O M genre humain se tait en la présence du maître éternel des mondes. Par rapport aux créatures vivantes , l'homme doit donc être considéré comme leur modérateur , comme un instru- ment d'équilibre et de nivellement. Par cette raison, il étend ses relations physiques et morales dans l'ample sein de la nature ; il tient à tout ; il est la chaîne de communication en- tre tout ce qui existe. L'animal, la plante , sont circonscrits dans leur sphère ; la nôtre embrasse l'univers par nos besoins naturels ou factices de nation à nation , par nos connoissan- ces et par le commerce ; nous sommes l'âme du monde phy- sique. Par ses facultés et son nombre , Thomme s'est acquis la prépondérance sur la terre ; il est devenu le dominateur des continens et des mers ; il a su dompter ou écraser les races les plus terribles. C'est à lui seul qu'appartient le droit de vaincre et de régner ; il en est digne par son génie et maître par ses facultés; quels animaux peuvent lui disputer le irôneP II n'a point fondé seulement ses droits sur la violence, mais ils sont établis sur son mérite et ses qualités. Si l'empire appartenoit uniquement à la force, le lion et le tigre combat- troient pour le sceptre du monde ; la baleine et le requin se disputeroient la domination de l'Océan ; mais tous recon- nolssent la supériorité de l'homme : sa main qui pétrit le sal- pêtre, qui aiguise le fer et fait sauter les rochers en éclats, sait encore asservir le tigre , soumettre l'éléphant , harponner l'énorme cachalot ; la balle va dompter l'orgueil de l'aigle au sein des airs ; les bêles les plus farouches , les tyrans de la terre et des airs, les monstres de l'Océan, fuient sa pré- sence ou tremblent à sa voix. Un animal de cinq pieds donne la loi aux puissantes baleines , et fait agenouiller l'éléphant à ses pieds ! Sa supériorité est telle sur les animaux, qu'il leur est plus avantageux de s'en faire oublier comme l'insecte , que de lui résister comme le lion et le rhinocéros. Leur vie n'est en sûreté qu'autant qu'il leur permet d'exister, ou qu'ils la dérobent à sa vue. Enfin , si l'on compare l'homme tout entier avec les créatures, on ne saura si l'on doit admirer da- vantage ou la domination prodigieuse et la grandeur déme- surée du premier, ou la sujétion et l'excessive impuissance de ces dernières. SECTION PREMIÈRE. De l'Homme considéré par rapport a lui-même; de sa constitution physique el indinduelle ; de ses différences des autres animaux. • Nous venons de contempler le genre humain par rapport H O M ,1 à la nature et au système des corps organisés; nous avons recherché quelles fonctions il y exerce , et quel rang il y tient; considérons-le maintenant en lui-même et dans chacune de ses races. Mais l'homme étant un être multiple par le nombre de ses facultés , il est nécessaire de l'envisager sous plusieurs points de vue, afin de le mieux connoître. En effet, il faut l'observer dans son organisation individuelle , soit intérieure, soit extérieure ; déterminer les formes qui le rapprochent , et celles qui l'éloignent des autres animaux ; le contempler dans ses différens âges, dans son enfance, sa jeunesse , sa virilité , sa vieillesse et sa mort ; il faut étudier son mode de nutrition et de reproduction; enfin il faut décrire ses races di- verses sur toute la terre , ses variétés, sa population, ses mélanges, etc. Après avoir traité de Vhomme physique , il faut descendre dans les profondeurs de ïhomme moral çl intellectuel ; exami- ner son caractère , ses affections , ses mœurs originelles et ses facultés; ensuite nous verrons s'ouvrir devant nous cette immense carrière de l'établissement des diverses sociétés hu- maines; la naissance des langues, la fondation des religions, des lois , les coutumes , les connoissances, la perfectibilité , enfin la vie et la mort des peuples , des gouvernemens , et tout cet édifice politique élevé pour le maintien de l'espèce humaine en société. Si nous éludions la structure anatomique du corps humain , nous trouverons qu'elle est analogue à celle des quadrupèdes et des singes , dont elle ne diffère que par des changeniens de proportions dans les parties les plus extérieures. On distingue le corps de l'homme en diverses portions, comme la tête, le tronc et les quatre membres ou extrémités. La tête est une boîte osseuse, composée de plusieurs pièces renfermant le cerveau , qui est , pour ainsi dire, la racine de Ihomme , et l'origine de l'arbre des nerfs qui se disséminent dans toutes les parties du corps. On partage la tête en crâne et en face ; celle-ci se compose des yeux, du nez , de la bouche, des joues et des oreilles. La capacité du crâne est d'autant plus considérable , que la face a moins d'étendue. Dans l'homme , le cerveau est proportionnellement plus grand que dans tout autre animal ( Consultez les articles Squelette, Cerveau , CrÀise) , ce qui est une des principales causes de la supé- riorité de son intelligence sur celle de la brute. A mesure que la face s'agrandit et que le museau se prolonge, dans les dif-^ férentes espèces d'animaux, leur crâne se rétrécit et leur stu- pidité augmente ; cet allongement de là figure la ravale vers la terre, et l'animal est obligé de marcher à quatre paUes, à ,2 . H O M cause de la conformation de sa télé, qui n'est point en équi- libre sur le cou , comme dans Thomme , mais qui penche en Las , comme pour marquer la nature terrestre de ses appétits et la pesanteur de ses idées. L'homme , au contraire , porte une tête élevée et fière, qui contemple les cieux, et mesure de ses regards le vaste domaine de l'univers; son attitude est droite, c'est celle du commandement et de la supériorité; l'animal se courbe et marche en tremblant devant lui; il n'ose lever les yeux sur ce front majestueux qui porte l'empreinte d'une céleste origine. L'homme est destiné à marcher debout; il ne touche la terre que par ses extrémités ; il semble s'en éloigner et tendre sans cesse vers les cieux, héritage éternel et patrie commune du genre humain ; tandis que la brute , pen- chée sur le sol, ramène ses regards avec ses désirs vers cette terre dont elle est sortie, et qui doit l'engloutir un jour toute entière. En effet, la station droite ou exactement verticale étoit 1 unique moyen d'attribuer sans gêne à notre espèce un cer- veau volumineux et la liberté des mains, instrumens indis- pensables pour exécuter les actes et les inventions de l'in- telligence; l'homme est donc le scnlhimanc g\ bipède. F. Face. La position de la tête sur le cou et sur la colonne verté- brale, détermine la station du corps de chaque animal. Dans l'homme , le trou occipital étant à peu près également placé entre la face et le derrière de la tête, maintient celle-ci en équilibre sur les vertèbres du cou, ce qui étoit nécessaire se- lon la remarque de Daubenton. ( Mém. Acad. dessdcnc. , 1764, pag. 569. ) J'observe même que, dans le nègre, cette posi- tion de la lete commence à sortir d'équilibre ; la partie an- térieure est plus pesante que la postérieure ; aussi les nègres ne se tiennent pas très-droits , comme les Européens; ils ont les reins reculés, afin d'établir une sorte de contre-poids à leur museau, à leur face qui s'avance. Dans les singes, cette conformation est encore plus prononcée ; car, à me- sure que le museau se prolonge , la tête penche davantage en devant ; d'où il suit que les hanches et les fesses ressortent proportionnellement en arrière, ce qui donne au corps une attitude transversale et une allure éreinlée. L'homme blanc, est droit , le nègre commence à se pencher vers la terre , le singe se tient dans une position oblique; enfin le quadrupède place son corps dans une position parallèle au sol, parce que sa tête est encore plus penchée que celle du singe ; aussi la nature a été obligée de donner aux quadrupèdes un ligament cervical pour soutenir leur' tête ; mais elle l'a refusé à l'homme. De plus , le cœur est situé, chez les quadrupèdes , de manière que sa pointe pose près du sternum, et sa base regarde l'é- H O M x3 pine dorsale ; mais chez l'homme , son péricarde est attaché au médiastin , de sorte que la pointe du cœur descend obli- quement à gauche, vers le diaphragme. De là résulte une courbure de l'aorte, un peu différente de celle des quadrupè- des, et sans doute une plus grande tendance aux palpitations, aux anévrysmes et aux concrétions polypeuscs du cœur, que n'en ont les animaux. On dit que des hommes trouvés sauvages marchoient à quatre pattes , ce qui est peu probable; car la fille sauvage de Champagne, le jeune enfant d'Hanover, les deux hommes sauvages des Pyrénées , le sauvage de l' Aveyron ( Foyez mon Hisl. nai. du Genr. hum. , tom. 2 , p. 807 ) , marchoient de- bout ; et si Camerarius , Connor et Tulplus ont prétendu que les sauvages trouvés , soit vers Bamberg , soit dans la Hesse , soit en Islande ou en Pologne, se traînoient sur leurs quatre membres, cette démarche paroît peu compatible avec notre conformation. En effet, la face est dans ce cas tournée con- tre terre, et ne permet point de voir au loin devant soi ; le poids de la tête fait bientôt tomber en lassitude des muscles trop foibles pour la soutenir sans ligament cervical; la lon- gueur des bras, non plus que leurs forces et la disposition des clavicules, ne sont point proportionnées à celle des jambes; de sorte qu'il faut ou se traîner sur ses genoux, ou bien s'ap- puyer sur les orteils qui supportent alors tout le poids du corps, parce que le pied ne repose point à plat sur la terre. D'ail- leurs, dans cette position , le corps n'est plus parallèle à la terre, les fesses sont plus élevées que la tête , et les bras sont trop foibles pour soutenir toute la pesanteur du train de de- vant. En outre , l'homme n'a ni la queue des quadrupèdes , ni leur peau couverte de poils serrés, ni leurs habitudes, etc. Dans cet état, il ne pourroit ni voir à quatre pas de lui, ni courir avec autant de vitesse et d'agilité que sur ses deux pieds seulement. D'ailleurs une station horizontale ne permet pas aux animaux d'avoir une tête fort volumineuse , ni par consé- quent un grand cerveau, et par suite une intelligence très éten- due. D'abord cette tête trop pesante à soutenir se courberoit vers la terre et feroit succomber l'animal en avant, et le sang nécessairement abondant qui devroit y affluer , le foudroie- roit bientôt d'apoplexies funestes. La nature a donc du pré- voir ces inconvéniens chez les quadrupèdes. Elle a d'abord suspendu leur crâne , dans la plupart , au moyen d'un liga- ment cervical ou occipito -vertébral ; ce ligament n'appar-- tient pas à l'homme, oùil n'étoit pas en effet nécessaire, ainsi que l'a démontré l'anatomiste ISicolas Slénon; mais il est au contraire très-robuste chez l'éléphant à cause de la grosse i4 H O M tête de ce dernier, appesantie encore par la trompe et les défenses ; aussi cet animal a le cou très-court. Pour prévenir l'afflux trop rapide de sang au cerveau des quadrupèdes , la nature a divisé leurs artères carotides in- ternes en plusieurs artérioles formant ce lacis admirable arté- riel décrit par Galien comme appartenant à Thomme ; mais il n'en étoitpas besoin pour notre station droite; aussi n'existe- t-il pas chez nous, comme l'a fait voir Vésale. Au contraire, le sang poussé à plein canal dans nos artères carotides , s'il nous dispose à de dangereuses congestions cérébrales , nour- rit aussi davantage, développe, étend , agrandit notre cer- velle ou l'instrument de notre intelligence. Il seroit donc ridicule de soutenir, avec le comte Moscati et d'autres auteurs , que l'homme est fait pour marcher à quatre pattes. Les singes ont des bras dont la longueur correspond à celle de leurs jambes, ce qui leur est utile pour marcher à quatre pat- tes et pour grimper. Le pied de l'homme a un iralon plus allongé que celui des singes, et ceux-ci ne' le posent jamais contre terre. D'ailleurs la force des muscles gémeaux et soléalres qui composent le mollet de l'homme ou son gras de jambe , an- nonce évidemment leur destination de soutenir la masse du corps ; aussi les singes n'ont pas de vrai mollet. La poitrine large de l'homme contraste encore avec celle des quadrupè- des , qui est comprimée sur les côtés ; et les os des hanches et dubassin de l'espèce humaine sont plus larges et plus apla- tis que ceux des autres animaux ; ce qui augmente la solidité de la position droite , en donnant un point d'appui plus ferme aux muscles qui s'y attachent; aussi l'homme a des fes- ses plus grosses, plus rentlées, plus robustes que les quadru- pèdes. La direction du vagin de la femme est transversale , de l'os saèrum au pubis , tandis qu'elle est parallèle à l'axe du bassin dans les animaux. Par cette raison , l'accouche- ment est devenu plus laborieux pour l'espèce humaine ; fu- neste prérogative que nous accorda la nature , et qu'elle refusa aux autres êtres ; mais cet arrangement étoit néces- saire ; car si le vagin eût été dans une direction perpendicu- laire , la femme enceinte n'eût pas pu marcher debout sans que la pesanteur du fœtus n'eût fait un continuel effort pour sortir , ce qui eût infailliblement causé l'avortement. Il suit encore de là que l'union sexuelle de l'homme doit être diffé- rente de celle des quadrupèdes. D'ailleurs , le coccyx et le sacrum qui retournent en de- dans chez nous , et ressortent au contraire pour s'allonger en queue chez les quadrupèdes , ont dû changer la direction du vagin, qui suit toujours l'axe des vertèbres chez ces der- Il O M ,5 niers animaux; leurs femelles accouchent et urinent en ar- rière, l'accouplement doit se faire {jnoreje.rurum; venus prœ- posiera'). Il n'en est pas ainsi des singes et surtout de la femme, dont la station plus ou moins rapprochée de la per- pendiculaire , ramène en devant l'ouverture du vagin. De là l'obliquilé du canal utéro-vaginal , de devant en arrière ; delà l'écoulement des urines , des menstrues , en devant, de même que l'accouplement {venus antùa), et de là cette grande difficulté pour l'accouchement. En effet, si l'on mar- choit à quatre patles et si le prolongement coccygien res- sortoit en queue, comme l'affirment certains voyageurs men- songers de quelques peuples, toute lélendue du bassin res- tant libre pour la sortie du fœtus , il faudroit que la femme enceinte ne se tînt pas debout sous peine d'avortement, mais elle accoucheroit sans peine comme les quadrupèdes. En outre le volume de la tête du foetus humain, plus que celle des autres mammifères , est une cause de la difficulté du part. La nature, pour éviter le trop grand poids, d'ailleurs, n'a formé la femme que pour être unipare , ou rarement gé- mellipare, tandis que la plupart des quadrupèdes, onguiculés surtout, sont multipares. C'est un caractère propre à l'homme , d'avoir deux mains; les singes en ont, pour ainsi dire, quatre ; aussi les appelle- t-on çuadfumanes , ou plus exactement pédimanes ; mais les autres animaux n'en ont point. Anaxagore , et plus récem- ment Helvétius, ont pensé que l'homme devoit sa supériorité à l'usage de ses mains : ce que nous examinerons ailleurs {^Voy. l'article Toucher). Les singes sont destinés à grimper; l'homme seul a donc de véritables mains; seul il est véritable- ment destiné à marcher debout , car les singes les plus parfaits ne demeurent sur leurs pieds qu'en vacillant conti- nuellement , ou en s'appuyant sur leurs bras allongés; aussi l'homme seul est capable de se tenir en équilibre sur un seul pied, parmi tons les singes et les quadrupèdes : il n'a point ce prolongement coccygien ou la queue qui recouvre . chez les quadrupèdes l'anus et même les organes sexuels contre l'in- tempérie des saisons. Notre corps est bien moins velu que celui des autres ani- maux, et notre nudité naturelle indique que nous sommes créés principalement pour vivre dans les pays chauds, comme les singes , ou forcés de nous couvrir de vêtemens. Les poils sont plus serrés et plus longs sur le dos que sur le dessous du corps, chez les quadrupèdes ; dans l'homme, au contraire, la poitrine , le pubis, sont plus velus que le dos. La crinière de certains animaux est remplacée dans l'espèce humaine par la chçvelure. Au reste , on trouve des individus plus vel us ,6 H O M les uns que les autres ; tels sont ceux d'un tempérament Li- lieux, sec , et les mâles les plus robustes. 11 y a même des races d'hommes très-velus dans les îles de la mer du Sud , comme à Mallicolo , à Tanna , dans la Nouvelle-Calédonie et à Sumatra. Les femmes, les eunuques, les tempéramens froids et humides ont beaucoup moins de poils que tout au- tre. Le grand développement des organes génératifs augmente la quantité des poils sur le corps des hommes. Il y a peu de différence entre les dents des hommes et celles des singes; le nombre est très-ordinairement le même , quoi- que celles des derniers soient plus écartées. Nous avons qua- tre incisives et deux canines à chaque mâchoire. Les dix mo- laires de chacune d'elles sont émoussées et obtuses, tandis qu'elles sont tranchantes et anguleuses dans les espèces car- nivores. Chez les mammifères, les dents sortent plus prompte- ment des alvéoles que dans notre espèce ; nous sommes aussi privés d'os intermaxillaires. Ceux-ci existent dans les singes et tous les quadrupèdes; ils servent àprolonger leur museau, et leurs dents incisives supérieures y sont ordinairement implan- tées. Nous différons encore des autres animaux, par la palpita- tion et l'ouverture de la fontanelle à la naissance, par notre foiblesse originelle , par la longue durée de notre enfance, par la menstruation chez les femmes, par la délicatesse et la sen- sibilité de notre peau, la faculté d'engendrer en toute saison, les pollutions nocturnes, etc. Dans les quadrupèdes, le cœur est posé sur le sternum ; dans l'homme, il repose sur le dia- phragme , à cause de la station droite. Le tube alimentaire de l'homme , son estomac , ses intestins sont conformés d'une manière mitoyenne entre ceux des herbivores et ceux des carnivores-, de sorte que, participant de ces deux genres , nous sommes omnivores , et vivons également de substances Végétales et animales. On ne trouve point dans l'espèce humaine, le muscle bul- beux ou suspenseur de l'œil , parce que nous ne sommes pas destinés à tenir constamment les yeux baissés vers la terre, ainsi que les quadrupèdes qui broutent l'herbe, comme le fait observer à cet égard Fallope. Nous manquons aussi de pa- nicule charnu ou muscle sous-cutané, du pancréas d'Asel- lius, du corps d'Higmor, des conduits hépato-cystiques, de la membrane clignotante, du trou incisif derrière les dents supérieures, etc. Nous avons déjà dit que le ligament cervi- cal , ou suspenseur du cou, nous étant inutile , ne nous avoit point été donné. On trouve dans les enveloppes du fœtus hu- main l'analogue de la membrane allanloïde des quadrupèdes. De même, le volume et la situation de la tête sont des obsta- H O M ,7 clés qui empêchentrhomme denag^rnalureliement comme le font les quadrupèdes dès l'enfance même. Au contraire, l'enfant iroit à fond la tête la première , parce que le poids de celle- ci l'emporteroit, et même l'homme nage mieux sur le dos que sur le ventre. On voit par-là que notre espèce n'est point destinée à la vie amphibie ou aquatique , comme on l'a sup- posé, et que les prétendus hommes marins sont des phoques ou des lamantins. V. Homme marin. Quelles que soient, entre les animaux et l'homme, les diffé- rences dont nous venons de faire rénumération,il n'en est pas de plus importante que celle du cerveau humain comparé à celui de la brute. Comme c'est de cet organe qu'émanent les facultés intellectuelles dans les différens êtres , il est essen- tiel d'en observer les rapports. On adit, depuis long-temps , que l'homme avoit, proportionnellement à sa taille , plus de cervelle qu'aucun des animaux; ce que nous avons écrit aux mots Crâne et Cerveau , pourra suffire à cet égard ; mais il est une autre considération remarquable. Il paroït qu'il existe un rapport entre la masse du cerveau et la grosseur des nerfs qui en sortent; par exemple , l'homme qui a un gros cerveau, a des nerfs proportionnellement plus petits que le chien ou tout autre quadrupède. Au contraire, à mesure que le cerveau est plus petit, les nerfs deviennent plus considérables ; et l'on diroitque dans ce cas, toute la cervelle s'écoule dans les nerfs, tandis que, dans le cas inverse, les nerfs semblent diminuer de volume pour augmenter la masse ducerveaud'après la belle r^;- marqued'Ebelet de Sœmmerring. Les facultés de la vieparois- sentsuivre lesmêmes rapports. Lorsque le cerveau est grand, et que les nerfs sont petits, comme dans l'homme, les qualités corporelles^ comme la force musculaire^ l'activité et l'éten- due des sens, diminuent à mesure que les facultés intellec- tuelles du cerveau , telles que la pensée , la profondeur de l'esprit, augmentent. Dans la brute , nous voyons tout le con- traire; car , à mesure que les facultés corporelles acquièrent beaucoup d'extension, les fonctions intellectuelles se rétré- cissent. Nous en trouverons même des preuves d'homme à homme. Ceux qui excellent dans les exercices du corps, ceux qui sont remarquables par leur vigueur, leur appétit, leur puissance générative , ou par toute autre fonction purement corporelle, ont communément une intelligence très-bornée, un esprit lourd, grossier et stupide; mais les caractères médi- tatifs, les esprits du premier ordre, les hommes de génie sont foibles de corps, épuisés, absorbés par leurs pensées, et pres- que toujours languissans, maladifs. Le corps est tout dans lej premiers, il n'est rien dans les seconds. La pensée et l'âme est ce qui constitue Thorame ; la matière et les sens sont le do- ,8 II O U iiiâine de la brûle. Celle-ci est toute en isensalions , en appe- lits corporels, en actions matérielles; tout son cerveau s'é- coule dans ses nerfs; Thomme, au contraire , ramène toute sa substance nerveuse dans son cerveau, pour Fétendre, le for- tifier; il semble dédaigner son corps et vouloir sortir de cette prison terrestre qui retient captive une âme sublime. On re- marque déjà dans l'espèce du nègre, que les nerfs sont plus gros, relativement à la masse du cerveau , que dans l'espèce blanche; aussi le nègre est adonné en général à ses sens ma- tériels, et il a toujours montré moins d'industrie et de facul- tés intellectuelles que l'homme blanc ; les exceptions à cette règle sont assez rares; aussi le crâne des nègres est commu- nément plus étroit que celui des Européens. Ayant rempli d'eau un crâne d'homme blanc d'Europe, je la retirai pour la verser ensuite dans un crâne de îiègre, et j'en trouvai près de quatre onces de reste. Dans une seconde expérience sur d'au- tres crânes de nègres et de blancs comparés, j'ai trouvé jus- qu'à neuf onces d'eau en plus dans ces derniers. Les crânes des femmes, soit blanches, soit négresses, ont toujours de deux à trois onces d'eau de moins que ceux d'hommes de même race , et les crânes de femme blanche ont encore un peu plus de capacité que ceux de l'homme nègre. Je ne sais si ce résultat seroit plus ou moins égal dans d'autres crânes de ces deux races d'hommes; mais à la simple vue , on ob- serve que la tête du nègre a moins de capacité pour le cerveau, et plus d'étendue pour la face, que celle des blancs. Or, nous avons dit que plus la face s'agrandissoit et s'avançoit , plus la cavité du crâne se resserroit , de manière qu'on peut deviner l'un par l'autre. (^Voyez Face.) Je trouve encore un autre moyen d'estimer le rétrécisse- ment du crâne des hommes et des animaux; c'est de mettre la tête dans sa position naturelle sur l'atlas ou la colonne ver- tébrale , et de mesurer ensuite l'angle que formeroit une ligne tirée du menton au trou occipital, avec une autre ligne qui passeroit par l'axe de la colonne vertébrale. Plus cet angle est ouvert et obtus, plus le crâne est rétréci , et le trou occipital reculé. Ainsi on trouve plus de distance du menton à la poi- trine dunègre , que du menton à la poitrine du blanc : cette distance est encore proportionnellement plus grande dans le chien , le lièvre , la brebis , le cheval , le cochon , enfin dans les cétacés, chez lesquels la face est parallèle à la colonne vertébrale. Au contraire, à mesure qu'on se rapproche des animaux plus pensans, la face se retourne , s'abaisse naturel- lement davantage du côté de la poitrine , et le front prend plus d'avancement. Plus un animal peut regarder près de sa gorge en devant , plus sa face est petite , et plus son cerveau a H O M ig d'étendue. Un quadrupède placé debout , auroît la vue tour- née en arrière ; un singe qui se tiendroit bien droit , ne pour- roit voir que le ciel ; il faut que le nègre courbe davantage sa tête que le blanc , pour regarder à ses pieds ; et parmi les Eu- ropéens, les hommes méditatifs et à grandes pensées portent assez communément leur tète baissée; ils recueillent leurs re- gards près d'eux-mêmes ; mais le nègre porte sa vue hors de lui, d'une manière moins réfléchie; et le singe a les yeux hagards, effarés. Les anciens avoient même senti cette obser- vation. Voyez leurs statues de Jupiter, elles ont toujours la tête baissée , et le regard recueilli : c'étoit le dieu suprême , l'ordonnateur de l'urivers , le père de la sagesse ; mais leurs sylvains et autres dieux subalternes portent une face relevée et montrent un air évaporé , irréfléchi. Les têtes sensées pè- sent en avant , les têtes folles se relèvent et relombent en ar- rière. Les singes diffèrent de l'homme , quoiqu'ils s'en rappro- chent beaucoup , et à ne nous considérer ^e du côté matériel, nous sommes de la même famille qu'eux. Supposez un corps d'homme privé d'âme , d'esprit, de connoissance : qu'est-ce autre chose qu'un genre de singe particulier .'' Mais la raison , l'âme, mettent une distance infinie entre nous et- la brute; nous ne sommes donc singes que par le corps , mais nous sommes presque dieux par l'esprit; et ce n'est pas la moins incompréhensible de toutes les merveilles de la nature , d'a- voir rendu l'homme en même temps un sujet d'abjection la plus basse , et d'admiration la plus sublime. Le singe le plus par- fait n'est pas un homme ; mais l'homme physique seulement , est de la famille des singes. Pourquoi ravalerions-nous notre âme et notre raison au rang de la brute .'' Qui pourroit nous confondre avec elle ? Le contemplateur des cieux, l'adorateur de la divinité , l'homme de génie , le héros , auroient-ils l'âme stupide d'uij singe? auroient-ils la même destinée sur la terre? Non sans doute : il est dans nous-mêmes tm principe supérieur à celui de l'animal , nous portons dans notre sein une par- celle de la divinité : Est Deus in nouis , agitante ralescirnus illo ; de plus nobles espérances nous sont réservées au sortir de la vie. N'est-ce déjà point assez de ressembler , par le physique, au singe , sans se confondre dans son rang f Quelle âme ab- jecte , quelle triste philosophie osera se dégrader à ce point ? L'homme commande, il a la raison en partage, il counoît la vertu , et il est le roi de la terre ; la bêle obéit , elle est es- clave et faite pour servir. Les attributs de la noblesse et de l'indépendance , le caractère sublime de l'âme humaine, sont MXi domaine réservé à lui seul ; une impuissance éternelle , la stupidité et la servitude ont pesé dans tous les temps sur rani" H 0 M mal ; il est vraiment né le sujet de l'homme, car si la nalurè avoit voulu l'égaler à nous, elle lui en aurolt accordé les fa- cultés. ISotre prééminence vient donc moins de notre corps que de noire esprit ; et comme nous tenons l'un et l'autre des mains de la nature, il est raisonhabie de penser qu'elle nous a voulu rendre supérieurs aux autres animaux ; que notre empire sur eux est légitime, et qu'il est moins encore fondé sur la violence que sur l'industrie et l'intelligence. Comme les mains sont l'un des principaux instrumens de notre prééminence , il faut montrer combien elles sont évi- demment organisées pour la préhension , mieux encore que celles des singes. Leur peau sensible et mollette n'est pas natu- rellement épaisse ou calleuse; de longs doigts divisés et flexi- bles , un pouce assez long et opposé à ces doigts, donnent toute facilité et des moyens par excellence pour exécuter toutes les opérations. Quoique très-propre à saisir , la main des singes est, en effet , moins parfaite que la nôtre ; ils ont un pouce beaucoup, trop petit , et presque ridicule , comme dit Eustachi ; ensuite leurs doigts n'ont aucun de leurs mou- vemens séparés et indépendans l'un de l'autre comme les nô- tres , car tous leurs tendons sont unis , ce qui n'a pas lieu pour notre main, excepté pour l'annulaire et le petit doigt qui ont des tendons communs. Aussi jamais les singes , biert que fort adroits , n'ont la facilité des mouvemens que notre main nous attribue. De plus, chez nous le radius s'articule avec l'humérus de telle sorte que nous pouvons beaucoup plus tourner le bras en pronation et en supination que les singes. Ces animaux d'ailleurs ont toujours besoin de leurs mains, soit pour grimper, soit pour marcher, et même les orang- outangs, les plus voisins de l'espèce humaine, ne peuvent mar- cher eu se tenant constamment droits comme nous; de là vient que leurs mains ne sont jamais libres comme les nôtres , ce qui nous attribue un immense avantagie. En effet , les pieds des singes sont encore des espèces de mains placées oblique- ment, ïls ont un calcanéum fort court et le talon un peu re- levé, de sorte que s'ils vouloient appuyer bien à plat sur le sol , ilstomberoient en arrière. Ils n'appuient donc que sur le métatarse et encore sur le bord externe du pied , non du coté du pouce qui étant très-court et relevé, peut s'oppo- ser aux longs doigts de ces pieds comme à des mains. iJe là Aient que les singes ne marchent guère, et ces quadrumanes sont formés pour vivre plutôt sur les arbres et se nourrir de leurs fruits. Ils giimpent en effet mieux que Thomme. La station de l'orang-outang (^simi'a satyrus , L.) , du chimpan- 7.ée ( s. troglodytes , L. ) et des plus parfaits singes sans queue de l'ancien monde, ne sauroitdonc être qu'oblique outrans^ H 0 M 21 versale. Aussi ces animaux, et surtout les gibbons (^simia lar, L.), ont, au contraire de Thoinme, les bras à propor- tion plus longs que les jambes, ce qui est utile pour empoi- gner de loin les branches d'arbres , et se retrouve de même chez les makis (I-emzir). Au contraire, nos cuisses, nos jambes sont plus fortes et mieux conformées que celles des singes pour la marche ; l'homme a des mollets , tles mus- cles gastrocnémiens plus robustes et plus forts que les autres animaux, afin de tenir les jambes droites; car les singes ayant Ces muscles plus grêles et attachés moins haut sur le fémur, tiennent les genoux à demi-fléchis et ne sont pas so- lidement établis sur le terrain. L'homme pose d'ailleurs son pied à plat; le calcanéum ou le talon reculé en arrière sou- tient le poids du corps. Mieux conformés pour marcher, nous ne pouvons pas grimper aussi facilement. • Notre bassin qui est large, présente des moyens Rattache à de gros muscles; l'articulation du fémur avec l'os des iles se fait au moyen d'un condyle ou d'une tête placée oblique- ment, ce qui élargit encore cette base de sustentation du tronc , et des muscles fessiers épais et vigoureux maintien- nent aisément droits les os des cuisses. De là résulte la saillie des fesses , qui ne s'observe pas chez les singes ; aussi, quoi- que ceux-ci s'accroupissent , ils ne restent point assis sans fa- tigue. Adrien Spigel trouve dans ces sortes de coussins na- turels pour nous asseoir, une cause de la facilité que nous avons à vaquer longuement à la réflexion , ce qui n'a point lieu chez les animaux. Si l'on ne peut pas nier la ressemblance grossière du singe à l'homme , on trouvera néanmoins d'autres différences re- marquables entre l'un et l'autre. \j' orang-outang qui , de tous les singes , s'approche le plus près du nègi-e et de nous , mon- tre dans son squelette d'autres différences essentielles. Sa face se rapproche beaucoup de celle de la brute par l'alon- gement de son museau ; le trou occipital de sa tête est plus reculé que dans l'homme ; ses cuisses et ses jambes sont pro- portionnellement plus courtes que les nôtres , tandis que ses bras ont une longueur démesurée. L'orang-outang ne se tient jamais bien droit; ses genoux sont toujours à demi-fléchis, sa démarche est vacillante , et il se soutient' souvent avec ses longs bras qu'il pose à terre. En général , le singe ne mar- che pas debout; mais il s'avance en posant les mains un peu loin devant lui et en faisant cheminer le train de derrière tout d une pièce , à la manière des culs-de-jatte ; ainsi sa position est toujours diagonale. On trouve aussi que le bassin de l'o- rang-outang est plus étroit que celui de l'homuie , car ne se tenant pas debout , il ne lui falloit pas une si large base de 32 H O M sustentation qu'à nous ; qu'il existe des os intermaxillaires k sa mâchoire supérieure ; qu'il a une vertèbre lombaire de plus que nous, enfin que ses proportions de taille, comparées à celles de l'homme , sont comme six est à huit , c'est-à-dire, que la tête du singe est le sixième de la grandeur totale de l'individu, tandis que la tête est un huitième de la taille de l'homme? malgré cette disparité , les bras de V orang-outang sont aussi longs que les nôtres. Les dents des singes ressem- blent aux nôtres, mais leurs canines sont un peu plus fortes et plus écartées ; ils ont les organes de la digestion tout sem- blables aux nôtres, et sont frugivores. Leur cerveau a un peu moins d'étendue que le nôtre. Lits singes de la famille des orang-oidangs sont encore pourvus de sacs thyroïdiens , ou de poches membraneuses placées au- devantjÉ^u larynx , de manière que Tair qui sort de la glotte , s'engouiÏFre dans ces sacs , et y produit un murmure sourd. Cette conformation empêche le singe d'articuler des sons et d'apprendre à parler : ce qui met une distance infinie entre lui et l'homme en le séparant de toute conversation sociale. Voyez Glotte où nous décrivons l'appareil des orang-ou- tangs à leur larynx. En outre , les singes s'accouplent à la manière des hom- mes ; la durée de la gestation des femelles est, parmi les grandes espèces , de sept à neuf mois ; elles ont une sorte d'écoulement menstruel plus ou moins régulier , et souffrent le coït dans le temps de la grossesse, de même que la femme. Elles accouchent ordinairement d'un seul petit, rarement de deux , et lui offrent leurs mamelles , qui sont placées sur la poitrine comme dans notre espèce ; elles ont aussi pour lui le plus tendre attachement ; elles le portent dans leurs bras , le couvrent de baisers, et le placent sur leur dos, de môme que les négresses, etc. C'est même une chose remarquable jus- qu'à quel point les grandes espèces de singes nous ressemblent par la conformation, et nous imitent par leurs habitudes na- turelles , par leurs manières et leur instinct. Aussi plusieurs peuples ne font aucune difficulté de les regarder comme de vraies espèces d'hommes. Les Africains, surtout les nègres, qui sont déjà fort inférieurs à l'espèce humaine blanche , admet- tent une sorte de parenté entre eux et les singes , au rapport de tous les voyageurs; ils les regardent comme des hommes pa- resseux et sauvages qui ne veulent point parler, de peur qu'on ne les force ensuite à travailler. Ces idées peuvent entrer dans l'esprit d'un nègre sauvage et peu policé, dont l'esprit est si peu cultivé qu'il n'a guère plus d'instruction que le singe ; ce- pendant les voyageurs attribuent ces mêmes idées aux Chi- nois , aux Péguans, aux Indous, aux Tibétains; ceux-ci se H O M a3 croient même issus d'une race originairedes ^in^cs.D ans Tlndc, on leur offre des nourritures , on leur bâtit même des hôpi- taux, enfin on les traite comme une espèce d'hommes. Si nous étions nés dans ce pays, si nous examinions chaque jour les, mœurs, les manières des singes , nous n'aurions peut-être pas autant d'éloignement pour cette idée qu'en Europe , où nous n'observons que des animaux trop différens de nous, tels que le chien , le cheval, etc. Il seroit bien curieuxde comparer l'homme sauvage et pu- rement naturel avec V orang-outang. Celui-ci a les mêmes pen- chans , les mêmes habitudes que nous , c'est parce qu'il est conformé de la même manière ; car il est évident que les muscles, les os rangés d'une certaine façon, doivent déter- miner des mouvemens très-semblables dans des conditions pareilles. Les appétits , les passions, les besoins , les désirs, et les mœurs naturelles, dépendant aussi de l'organisation, doivent donc se ressembler dans l'homme et dans le singe , puisque leur structure est analogue. Mais l'homme est bien perfectionné au moral , par l'effet de la civilisation, de sorte qu'il méconnoît aujourd'hui son état primitif. Pour le re- trouver , il faut l'étudier dans le singe ; c'est là que nous dé- couvrons les premiers linéamens de V homme physique et ani~ mal. Le singe est né imitateur et pantomime ; il est revêche,' et indocile; sa gourmandise égale son plaisir de dérober et de nuire ; il est plein de curiosité , de pétulance , et toujours soupçonneux; il querelle ses voisins et les bat ; sa mémoire est excellente et il est très-porlé à la vengeance. Tous ces vices sont inhérens à l'homme, et l'éducation a beaucoup de peine à les déraciner. Nous naissons, pour ainsi dire, singes ; c'est l'éducation qui nous rend hommes. (Consultez mon Hisl. nai. du Genre hum. , t. i , p. i8o à igi , et l'article de TGaANG - OUTAMG dans ce Dictionnaire. ) U homme est im animal nu , à deux mains et à deux pieds , çjii marche debout, qui est capable de raison., dun langage ariiride, et qui est susceptible de civilisation ; ces caractères n'appartien- nent dans leur totalité à aucune autre espèce. Par sa confor- mation physique , il est de la division des animaux à double système nerveux et à vertèbres. Sa classe est celle des espè- ces à sang chaud et à deux ventricules avec deux oreillettes au cœur. Comme la femme est vivipare et qu'elle allaite ses enfans , elle appartient , ainsi que l'homme , à la grande famille des animaux à mamelles , appelés mammifères. Les avantages qui nous distinguent nous placent à la tête de tout le règne animal. En elïet, la complication de nos organes multiplie en morne proportion les fonctions que nous exer- çons : ce qui étend nos facultés dans une semblable progrès- 24 H O M sion. Ainsi , plus un animal sera compliqué , plus son exis- tence relative se développera ; plus son intelligence , ses af- fections , ses besoins s'agrandiront ; plus il tiendra «le place ' dans la nature par la multiplicUé de ses rapports. Un animal très-simple, comme le polype, est circonscrit dans des bornes très-resserrées ; par la simplicité de son organisation , il ne forme qu'un point dans l'univers matériel ; l'insecte plus corh- pliqué que lui , montre , par cette raison , des rapports plus étendus ; il pèse davantage dans la balance de vie , il se rap- porte à un plus grand nombre d'objets, et remplit de plus im- portantes fonctions dans l'ensemble des corps organisés : le poisson joue encore un rôle plus élevé dans la scène du mon- de; l'oiseau, beaucoup plus compliqué que le précédent, mul- tiplie ses rapports dans la même proportion ; enfin le quadru- pède surpasse l'oiseau, et à son tour il est effacé par l'homme, qui remplit l'univers de ses désirs, de ses besoins, de ses su- perfluités, et tient à tout dans la nature. Ce qui se passe à la Chine n'est point indifférent à l'Européen ; il lui faut l'or de l'Amérique , le diamant de l'Inde , le thé de la Chine , le café de l'Arabie , la porcelaine du Japon , le sucre des Iles ; il asservit ses semblables et les immole à ses volontés ; il cher- che la perle au fond de l'Océan ; il demande la muscade aux forets des îles Moluques ; le monde entier ne peut suffire à ses déprédations et à ses inépuisables nécessités; il ambitionne tout, il règne partout sans en être satisfait. Cette énorme exten- sion de besoins que rien ne peut assouvir, et qui s'accroît à mesure qu'on les remplit , annonce la prodigieuse activité de notre âme , qui veut tout posséder et tout connoîlre. L'ani- mal, au contraire , est aussi borné dans ses désirs que dans ses facultés ; car tout se proportionne au degré de compli- cation des organes et à l'étendue de la puissance intellectuelle de chaque être. C'est parce que nous tenons à toute chose , que nous avons cru être le but de tout ce qui existe ; c'est une illusion de notre amour-propre , fortifiée par le sentiment de notre supériorité ; elle combat contre une évidence affligeante que l'on voudroil se dérober. Cette multiplicité de fondions, cette variété si compliquée d'organisation, qui distinguent l'espèce humaine, étend aussi nos qualités intellectuelles et morales dans la même progres- sion. L'homme est composé de plusieurs systèmes d'organes qui jouissent chacun d'une vie individuelle , qui ont leurs propres facultés, leurs affections spéciales, qui sentent, qui existent chacun d'une manière particulière. Il y a plusieurs individus dans un seul homme : on y trouve l'mdlvidu ner- veux, l'individu osseux , 1 individu musculaire , membraneux, sanguin ou vasculaire , viscéral, etc. Chacun d'eux est plus H O M a5 ou moins actif, plus ou moins prépondéramt dans l'homme, ce qui produit, toutes les variétés qui se remarquent entre les diverses personnes , telles que les tempérameus , les modifi- cations des sexes, des caractères, des âges, et tout ce qui fait différer naturellement un homme de tous les autres hom- mes. Par rapport aux quadrupèdes , nous jouissons de la pré- pondérance du système nerveux, soit par la masse du cerveau, soit par la délicatesse du toucher, soit par le haut degré de sensibilité morale. Or, chacun de ces individus partiels qui composent l'ensemble de l'homme , ayant sa vie spéciale , peut être affecté de plusieurs manières ; de sorte que le cer- veau , qui est le rendez-vous commun de toutes les impres- sions des sens , peut aussi recevoir les modifications qu'é- prouve chaque partie du corps. Cette multitude de sensa- tions diverses ne contribue pas peu à augmenter le nombre des comparaisons ou des jugemens de l'esprit, et à donner plus d'étendue à l'intelligence. Il n'est donc pas étonnant que celle des animaux augmente ou diminue progressivement à mesure que leur organisation se complique ou se simplifie ; et l'on pourroit établir qu'en général l'étendue des facultés intellecluelles d'un animal indique le degré de complication et de susceptibilité de ses orgajies. Nous traiterons de cet objet en parlant de l'homme considéré au moral. La nature ne considère point les individus isolément ; elle les crée et les détruit chaque jour ; elle ne leur demande que la perpétuité de l'espèce. Empreintes passagères d'une espèce nelle, nous naissOns et périssons sans cesse; nous passons successivement de la vie à la mort par des nuances imper- ceptibles ; de sorte que l'existence n'est , pour ainsi dire , qu'un long mourir, Tempora labuntur , tacitisque senescimus annis, Etfggiunt, freno^non remorante, dies. OviD. La marche graduelle des âges présente deux caractères principaux dans tous les corps vivans et organisés : i.° celui de l'accroissement , de la vigueur, de la vie expansive et sura- bondante ; 2." celui du décroissement, de l'affoiblissement, de la vie convergente et devenue insuffisante. Le premier est le temps de la jeunesse et de la reproduction ; le second est la période de la vieillesse et de la destruction. Toute notre exis- tence est partagée presque également en jouissances et en dégoûts : telle est la principale cause qui change nos affec- tions et nos idées à mesure que nous avançons en âge; car 35 H O M elles suivent la même progression que notre constitution physique. Ces diffe'rens degrés par lesquels passent tous les êtres vi- vans, présentent une évolution continuelle des organes, qui, ayant rempli leurs fonctions , se flétrissent , s'usent, se dé- gradent, et périssent enfin; non-seulement le corps entier a ses âges, mais chacune de ses parties jouit de ceux qui lui sont particuliers. Cette gradation , dont les commencemens sont foibles , le milieu fort et rapide , la fin abattue et lan- guissante, nous présente les mêmes phases que la marche ordinaire des maladies. La vie est un état d'activité qui tend perpétuellement à la mort, et qui s'en rapproche par des nuances successives : la mort est la crise de cette longue maladie, que nous appelons la vie. De même qu'une fièvre aiguë offre dans son origine un état de chaleur et de tur- gescence, un pouls vif et dur; dans son milieu, un caractère d'impétuosité, d'exacerbalion et de trouble continuel; enfin, vers sa terminaison , un affoiblissement de tous les symp- tômes, accompagné d'excrétions; ainsi, la jeunesse est le temps de crudité , l'âge fait est la période de coction , la vieillesse et la mort sont l'époque de l'évacuation critique et de la cessation de la maladie. Comme les maladies aiguës suivent ordinairement des périodes septénaires, la maixhe des âges éprouve aussi plusieurs changemens marqués tous les sept ans. Ueiifunce est l'époque comprise entre la naissance et la chute des dents de lait , qui arrive vers la septième année. Tu âge puéril est formé par le second septénaire, et finit vers la quatorzième année, qui annonce de nouveaux change- mens, par le développement des organes sexuels et la muta- tion de la voix. 1j^ adolescence fait le troisième septénaire ; celte époque se termine vers la vingt-unième année , lorsque la barbe croît et que le corps cesse de grandir. La quatrième se- maine d'années finit à vingt-huit ans , lorsque les dents de sagesse , ou les dernières molaires sortent de leurs alvéoles, et que le corps est achevé dans toutes ses dimensions; c'est le temps de là jeunesse la plus brillante. Li'dge viril forme le cinquième septénaire, et présente l'homme dans sa plus grande vigueur de corps et d'esprit ; il s'étend à la trente- cinquième année. La sixième semaine des ans est le midi, l'entière perfection de l'existence, V âge staiionnaire ^ pendant lequel les forces d'accroissement et celles de décroissement demeurent dans l'équilibre ; il dure jusqu'à la quarante- deuxième année : à cette époque, l'abdomen grossit souvent; l'homme qui n'est rien ne montera jamais plus haut dans sa vie. \S âge mûr sucrAàc à cet âge héroïque, et s'étend depuis H O M 27 quarante-deux jusqu'à quarante-neuf. Dans cette période , la femme commence à perdre sa fécondité; ses mois cessent vers ce temps criique ; l'homme sent déjà défaillir sa pre- mière vigueur ; c'est le temps de la fortune et de rétablis- sement de la famille. Lorsque ie corps commence à se casser et, à s'affoiblir, il parcourt son huitième septénaire, et finit à cinquante-six ans : alors les cheveux grisonnent , la faculté généralive diminue beaucoup. Le commencement de la vieil- lesse se compose du neuvième septénaire , et se termine à la soixanle-troisième année, qui est quelquefois mortelle pour l'homme : on l'appelle année climatérique \ c'est l'âge cri- tique des hommes ; ils perdent ordinairement alors leur fa- culté d'engendrer, comme la femme, qui cesse d'être féconde à la septième semaine d'années : ces deux époques sont fa- tales à chaque sexe, parce que la mort partielle des organes générateurs qui arrive alors , peut entraîner la mort géné- rale de l'individu. Le nombre de soixante-trois est formé de sept fois neuf, et de neuf en neuf années il s'opère aussi des changemens dans le corps humain , mais moins sensibles que ceux de sept en sept : lorsque ces deux nombres coïn- cident, comme à l'époque de soixante-trois , le changement est plus considérable et plus dangereux , bien qu'il ne faille pas attacher, comme on le faisoit jadis , une idée de fatalité à ces nombres fixes. En effet , il y a beaucoup de modifications dans ces âges septénaires et novennaires ; les climats chauds précipiient leur marche ; les pays froids la ralentissent , et le genre de vie la fait varier : il ne faut donc pas l'admettre avec rigueur, mais seulement comme une considération ap- proximative. Le dixième septénaire est le temps de la dimi- nution de tous les sens ; la vue baisse , l'oreille devient dure , le toucher insensible ; le goût se blase ,, l'odorat se perd , l'esprit commence à radoter, et la mémoire s'éteint. Les pé- riodes qui suivent ne sont plus que des dégradations succes- sives; l'homme retombe en enfance, son corps se penche vers la terre , et semble aspirer à la tombe. Quel spectacle nous offrent tous les êtres et cette grande procession d'hom- mes de tout état , qui s'avancent successivement vers la mort ! les vieillards marchent à la tête , en chancelant ; l'âge mûr les suit avec tranquillité ; l'homme adulte vient ensuite plein de vigueur; la jeunesse marche derrière, la tête levée, et l'enfance folâtre après elle. Nous faisons tous ce grand che- min des âges, nous sommes tous des voyageurs sur cette terre; l'enfance pousse la jeunesse ; celle-ci pousse l'âge mûr , qui précipite à son tour la vieillesse dans le tombeau : ainsi nous descendons sans cesse ; nous nous écoulons par une pente rapide du sommet de la vie dans les profondeurs de la mort. 2$ HO M L'existence est un cercle aussi-bien que les ans; la vieillesse se rapproche de l'enfance ; on diroit que la matière vivante tend en quelque sorte à se rajeunir; car la destruction n'est qu'une tendance des corps organisés à passer dans de nou- veaux corps pour s'y retremper, en y puisant une nouvelle existence ; et la vieillesse témoigne déjà ce penchant par une seconde enfance , par le regret de sa jeunesse , et par la louange continuelle qu'elle fait de l'ancien temps ; c'est une gravitation du corps vers son renouvellement , par le moyen de la destruction , puisque la mort n'est que la préparation à de nouvelles vies. Deux forces principales produisent les différens âges des animaux : i.° la force d'accroissement, d'expansion et de développement; 2.° la force de décomposition , de concen- tration, de diminution : l'une est la puissance de vie, l'autre est celle de mort. Nous apportons en naissant le germe de notre destruction ; nous le fomentons , nous le développons Eerpétuellement , jusqu'à ce qu'il nous ronge entièrement, ►ans la jeunesse , la puissance d'accroissement et d'expansion domine; dans l'âge viril, elle se maintient en équilibre avec la puissance de destruction ; celte dernière domine à son tour dans la décrépitude. Il s'établit toujours un rapport entre ces deux forces ; lorsque l'une augmente , l'autre diminue , et réciproquement. Les âges ne sont que la diminution suc- cessive de certaines propriétés , ou l'augmentation graduelle et proportionnée des propriétés contraires : ainsi l'accrois- sement est d'autant plus lent , qu'il est plus éloigné de la naissance. Le corps, d'abord humide et gélatineux, acquiert, par nuances successives , de la solidité et de la sécheresse. Les mouvemens faciles et prompts dans la jeunesse devien- nent peu à peu roides et difficiles. Le pouls , qui avoit jusqu'à cent trente battemens dans une minute, à l'époque de la naissance , se ralentit graduellement jusqu'à cinquante pul- sations par minute , dans la caducité de l'âge. Le besoin de la nourriture , presque continuel dans l'enfance , se modère par degrés, et finit par l'abstinence dans l'âge avancé. Le sommeil , si fréquent et si profond dans la jeunesse , devient une triste et longue insomnie à la fin de la vie. La mémoire diminue progressivement depuis l'âge de raison jusqu'à la vieillesse. Il en est de même des passions ; ainsi , l'amour et la joie , si vifs pendant le jeune âge , se tempèrent , se re- froidissent, et disparoissent entièrement avec la vigueur et la vie. L'activité devient langueur ; la gaîté se change en une morne et sévère mélancolie ; l'élourderie est remplacée par la réflexion et la prudence; la témérité par la crainte; la franchise et la naïveté de l'enfance, par l'esprit renfermé H 0 M 29 et soupçonneux de la vieillesse ; la légèreté du jeune homme, par la gravité de l'ancien dâge ; la prodigalité du premier se tourne peu à peu en économie , puis en avarice ; la sen- sibilité du cœur dégénère en indifférence , ensuite en dureté d'âme ; l'émulation généreuse se transforme "en une maligne envie; la défiance de tout succède à l'extrême confiance, et la ruse à l'innocente simplicité. Le jeune homme aspire à de grandes choses , le vieillard se renferme dans le présent ; le premier jette sa vie dans l'avenir et cherche à la répandre ; le second ramène tout vers le passé et cherche à se con- centrer. Cl'est ainsi que toutes les qualités du corps et de l'es- prit vont ue l'expansion à leur concentration , depuis la jeu- nesse jusqu'à la vieillesse , en passant par des nuances inter- médiaires. Dans le bel âge , nous aimons le temps présent , parce que tout rit autour de nous, tout est joie, plaisir, agrément ; la mobilité de nos orjganes produit la mobilité de nos idées, de notre caractère et de nos désirs. Nous aimons le mouvement, les exercices du corps; nous sommes ardens, impétueux, agiles , robustes. La danse , la chasse , les com- bats nous plaisent ; nous aspirons à de grands objets : l'ar- gent ne nous coûte rien dans les plaisirs; nous cherchons à satisfaire nos goûts avant de songer aux choses utiles : indo- ciles aux sages conseils , nous sommes enclins à tous les^vices ; mais dans l'âge fait , nous contractons des alliances utiles : nous formons des établissemens et amassons de la fortune ; nous recherchons les honneurs et les biens solides. Dans la vieillesse , nous nous plaignons sans cesse du présent , parce que nos organes ne font plus leurs fonctions qu'avec peine et douleur : ne pouvant plus jouir des plaisirs actuels , nous louons ceux du passé , et nous nous imaginons que le monde se détériore, lorsque c'est nous-mêmes qui nous détruisons. C'est ainsi qu'un homme en bateau croit que le rivage avance, et que lui seul reste immobile. Multa senem circumveniunt incommoda : vel quod Quaerit et inventis miser abstinet , ac timet uti ; Vel quod res omnes timide gelidèque ministrat, Dilater, spe longus , Iners, avidusque futuri ; Difficilis, querulus, laudator temporls acti. Les quatre principaux tempéramens coïncident encore avec les âges. Le lymphatique correspond à l'enfance ; il est, comme elle, humide, pâteux, endormi, lourd, vorace, d'un esprit inactif, hébété, d'un caractère sans chaleur, inca- pable de longues et profondes impressions. La jeunesse est toujours d'un tempérament analogucau sanguin ; celui-ci est yif , agile , changeant , désintéressé ; porté à la volupté et aux 3û H 0 M appétits des sens, gai , babillard, avide , curieux, et prodigue «le même qu'elle. On rapporte l'âge fait au tempérament bi- lieux, qui est ardent, robuste et nerveux, colérique, emporté, entreprenant , passionné , brûlant d'amour ; ses sentimeos sont fiers et élevés. Dans Tâge mûr et la vieillesse , nous ac- quérons un tempérament mélancolique , dans lequel tous les mouvemens sont rigides, les ipuscles secs et durs, l'appétit sobre , les désirs réfléchis , le caractère prudent et même trom- peur, l'esprit triste , sombre , caché , circonspect , prévoyant et craintif: ainsi les tempéramens nous offrent des progressions analogues a celles des âges. Le lymphatique a le corps épais, le système cellulaire gonflé , blanc , spongieux, plein de graisse et de lymphe. Le sanguin est bien conformé, gracieux; sonteint est fleuri , délicat ; son caractère sensible , mais inconstant. Le bilieux est sec; sa couleur est haute et brune ; ses formes sont rudes et prononcées ; sa structure est solide, mâle , pleine de vigueur et de feu. Le mélancolique est doué d'une constitu- tion maigre , aride , tendue , d'un teint livide , d'un caractère tenace et avare, qui subordonne ses passions à sa raison pour son propre avantage. On observe encore que chaque âge porte ses influences sur quelque partie du cprps vivant. L'enfance a le ventre , le tissu cellulaire et le cerveau prépondérant sur tous les autres or- ganes : aussi les enfans sont exposés aux maladies de la tête , au carreau , aux cngorgemens des glandes , etc. La jeunesse a le système vasculaire artériel dans un état de supériorité aux autres fonctions, ce qui la rend sujette aux hémorragies, aux maladies pléthoriques et inflammatoires , aux péripneu- monies , aux esquinancies et aux affections dépendantes des organes du haut du corps. La virilité a les systèmes musculaire, hépatique et sexuel dans une activité prépondérante aux au- tres parties du corps; aussi est-elle exposée aux fièvres arden- tes, au cholera-morbus, aux coliques, à toutes les autres ma- ladies qui dérivent d'un excès de stimulation dans les intestins et les parties sexuelles. Nous trouvons dans la vieillesse une diminution d'activité dans les viscères du bas-ventre , et dans le système veineux hépatique , d'où naissent des affections chroniques , des fièvres intermittentes , le scorbut , les ulcè- res , l'hypocondrie , etc. Il y a d'ailleurs un mouvement de dilatation et une impul- sion à l'extérieur dans le jeune âge ; tandis qu'il s'opère un mouvement inverse ou de concentration , et une impulsion à l'intérieur dans la vieillesse. Le corps , l'esprit du jeune homme cherchent à se répandre au-dehors, à s'étendre en tou- tes dimensions ; chez l'hromme âgé, le corps se resserre, l'es- prit se reploie sur lui ; tout se réfléchit au-dedans. Le premier H 0 M 3^ est tout en déploiement ; le second, tout en contraction. Les âges intermédiaires participent plus ou moins de ces deux impulsions contraires , et , placés dans un juste milieu , ils aperçoivent les objets sous leur point de vue le plus exact ; car dans le premier âge on voit trop au-delà du vrai , et dans le dernier on voit trop en-deçà ; telle est sans doute la cause principale de nos faux jugemens et de nos préjugés. Si nous comparons les âges avec les climats et les caractères physiques et moraux de leurs habitans , nous trouverons que le septentrional a beaucoup d'analogie avec le tempérament et les mœurs de la jeunesse ; qu'il est vorace , bouillant , im- patient, belliqueux, d'une belle complexion , d'un caractère mobile, gai, généreux, attaché aux plaisirs des sens , entre- prenant , sincère , facile , bon ami , curieux de nouveautés, et porté à l'indépendance. L'habitant des tropiques est, comme le vieillard, maigre , amorti, lent, timide, constant, sobre et languissant ; sa complexion est aride et fibreuse ; son caractère opiniâtre , triste , avare et circonspect ; son esprit sombre , soupçonneux, méditatif, plein de difficultés en affaires, trom- peur, et aimant à dominer ou disposé à servir, car tes deux choses ont beaucoup d'analogie. Les habitans des contrées intermédiaires participent plus ou moins des deux extrêmes ; mais , en outre , ils sont actifs , industrieux , habiles , modérés , laborieux, faisant tout avec choix et raison , aimant la gloire et la politesse , cultivant leur esprit , déployant leur génie et exerçant leurs talens: ils ressemblent ainsi à l'homme fait. Les habitans des pays froids représentent le genre humain dans sa jeunesse ; ceux des climats tempérés nous le montrent dans l'âge viril, et ceux des contrées chaudes nous l'offrent dans sa décrépitude. On a jadis divisé les âges en quatre périodes , et on les a comparés aux quatre saisons de l'année : l'enfance est le printemps , la jeunesse est l'été de la vie , l'âge viril est son automne , et la vieillesse son hiver : ou bien on les met en parallèle avec le jour , dont l'adolescence est le matin , l'âge pubère le midi, la maturité de l'âge est le soir, et la vieillesse est la nuit de notre vie. Nous pensons qu'on peut réduire plus exactement à trois époques principales , les âges de Ihomme et de tous les êtres organisés : la première est celle de Vacrrois- sement ; la seconde est celle de la reproduction ; la troisième est celle du décroissement ou de la destruction. Il est certain qu'en établissant quatre âges , on est obligé de diviser par le milieu une époque unique , celle de la perfection et de la re- production; ce qui ne s'accorde nullement avec ce qui se passe dans l'homme , les animaux et les plantes, où l'on n'observe que trois temps marqués. On peut en dire autant des saisons. 3s H O M qui ne sont réellement qu'au nombre de trois , l'hirer , }ç printemps et Télé ; car la partie de l'automne qui produit des fruits appartient encore à l'été, et celle qui dépouille la terré de sa verdure a les qualités de l'hiver : d'ailleurs , l'hiver et la nuit correspondent plutôt à la mort qu'à la vieillesse ; cel- ïe-ci ressemble davantage à l'automne et au soir. Quoi qu'il en soit , il paroît plus naturel et plus simple de diviser les âges en trois époques qui seront, i.° la jeunesse ou le temps de l'accroissement , depuis la naissance jusqu''à l'âge adulte, vers trente ans ; 2.° l'âge viril, depuis trente jus- qu'à soixante ans ; et 3.° la vieillesse , depuis soixante ans jusqu'à la mort. Un homme bien conslilué peut être trente ans à s'accroître en toute perfection , trente ans à vivre dans cet état parfait, et trente ans à deaieurer dans une verte et vigoureuse vieillesse, ce qui fait en tout quatre-vingt-dix ans. La treizième semaine d'années se termine à la quatre-vingt- onzième ; et si nous n'abusions pas autant de nos forces par nos excès et notre genre de vie insalubre ; si nous suivions la loi naturelle , à la manière des animaux, nul doute que nous ne pussions parvenir à une grande vieillesse sans accldens, comme on en observe de .nombreux exemples chez les bommes sobres, les habitans du Nord, chez plusieurs peu- plades sauvages et les brames de l'Inde , qui ne vivent que de végétaux , qui sont chastes , tempérans et sages. L'existence du quadrupède est de sept fois la durée qui se trouve entre sa naissance et l'époque de sa puberté , selon la règle établie par Buffon , d'après des observations certaines. Ainsi , plus un animal est capable d'engendrer promptement , plus sa vie sera courte. L'homme qui est à peine pubère à quatorze ans , devroit donc vivre cent ans environ ; tout ce qui est re- tranché de ce nombre d'années qui nous a été donné par la nature, vient de notre faute ou de la folblesse de notre cons- titution , causée parla mauvaise complexlon denosparens: mais tous nos maux dérivent originairement de notre manière de vivre, peu conforme aux lois naturelles. Il y a trois termes dans l'époque de l'accroissement : celui de l'enfance , celui de la puberté , et celui de la virilité. De r Enfant. A peine l'enfant est-il sorti des entrailles maternelles , que ses premières voix sont des gémlssemens ; 11 annonce déjà la misère de sa destinée , et semble ne se présenter à la lu- mière de la vie que pour en partager aussitôt les douleurs. *S ous avons touspassé par cet état de folblesse et d'innocence , à la merci des maux de toute espèce , et ne pouvant rien par nous-mêmes ; car nous naissons plus folbles qu'aucun des ani- B O M 35 maux, et noire existence est attachée à celle de notre mère. L'homme prend naissance entre l'urine el les excrémens ; il vit dans un état de trouble et de tourmens continuels , puis il descend dans la tombe : élolt-cc la peine de naître , et n'eût-ilpas mieux valu n'exister jamais ? Lorsque l'enfant vient au monde , on le lave dans de Peau tiède avec un peu de vin; ou l'essuie ; on lie son cordon om- bilical , et on le coupe au-dessus de la ligature. Des femuics sauvages tranchent ce cordon dun coup de dent, et ne le lient pas toujours ; cependant , il arrive rarement des hémorra- gies dans ce 'dernier cas. Les Hotlcnloles ne lavent point leurs enfans pour enlever celle légère mucosité que les eaux de l'aninios déposent sur sa peau. Un grand nombre de na- tions du Nord plongeaint leurs enfans naissans , dans l'eau froide , ou même les étendaient sur la neige. C'étoit la cou- tume des Ecossais, des Llandais , des anciens Helvétiens et Germains, des premiers habitans de l'Italie , dont un poète a dit : Durum è stirpe geniis , natos ad flumina primum Deferimus saevoque gela duramus etundis. Les Morlaques , les Islandais , les Sibériens , et plusieurs autres , pratiquent encore cet usage aujourd'hui ; ce qui ha- bitue de bonne heure l'homme à la froidure , et lui donne une santé plus robuste ; néanmoins , il faut redouter l'endur- cissement du tissu cellulaire , qui rend violets ces enfans , et les fait périr. J.-J. Rousseau , loin de préconiser cette pra- tique et de blâmer la médecine , auroit rendu plus de services en étudiant mieux les facultés de notre organisation. En comprimant les enfans dans le maillot, leur poitrine est serrée, ce qui leur donne une tendance à la phthisie. La compression des viscères du bas ventre empêche la libre di- gestion, d'où résultent des engorgemens et la cacochymie , causes premières du rachitisme. Le sang, trop resserré dans le corps, reflue au cerveau, et y produit des convulsions, des paroxysmes d'épilepsie. Les langes nous torturent et nous déforment. Une position contrainte devient fatigante, en- gourdit les organes, cause de la douleur, force Tenfant à s'a- giter avec violence, et parses tiraillemens, elle fait quelque- fois sortir des hernies ou démettre quelque articulation. Le maillot est donc une coutume insensée et cruelle , qui ne peut produire aucun bien , et qui cause beaucoup de mal. Les na- tions sauvages et les animaux, qui ne font jamais usage du maillot , sont-ils plus déformés que nous ? Trouve-t-on parmi les chiens, les chats, les brebis, les chevaux, les poules, les serins, des individus bossus, boiteux, contournés, rachi- XV. 3 34 H 0 M tiques, comme dans les géne'rations des hommes mis aa maillot? Cet emprisonnement de tous les membres, cette douloureuse contrainte , ne doivent-Ils pas aigrir le carac- tère pour toute la vie , en la commençant par des actes de violence et des leçons de servitude? Il s'opère , à la naissance , un changement dans la circu- lation du sang ; des élernumens soulèvent la poitrine , font sortir la mucosité des narines, el entrer Tair dans les pou- mons. Le sang , qui pénètre dans ces viscères , y est impré- gné d'air, retourne au cœur par la veine artérieuse, et se dis- tribue ensuite à tout le corps , par l'artère aorte et ses bran- ches. Avant cette époque, le sang passoit immédiatement du ventricule droit du cœur dans son ventricule gauche. Néan- mioins ce changement de circulation ne s'exécute pas subite- ment ; mais il est préparé , dès l'état de fœtus , par des nuances successives. L'enfant naissant a les os encore cartilagineux , les extré- mités petites , les chairs molles , gélatineuses , humides ; ses vaisseaux sont grands et larges , ses nerfs sont gros, son cer- veau est considérable , son ventre est distendu, le tissu cellu- laire qui enveloppe ses organes est lâche , spongieux, rempli de lymphe ; ses glandes sont gonflées, et pleines d'humeurs douces et fades. On peut même exprimer une liqueur laiteuse de ses mamelles pendant les premiers jours de sa naissance. Les yeux sont ternes , ridés , et couverts dune légère tuni- que (^tunique de Haller) ^ qui empêche l'action trop vive de la lumière sur ces organes encore délicats. Les oreilles sont fer- mées par une mucosité qui arrête les sons trop forts; les sinus pituitaires, enduits d'une humeur visqueuse , sont incapables de sentir les odeurs ; la peau trop molle ne peut donner en- core aucune idée du toucher, et la langue peut à peine goûter quelque saveur. Il faut que nous nous apprenions peu à peu à nous servir de nos sens ; nous n'avons qu'un instinct borné qui nous porte machinalement vers le sein maternel, et nous enseigne à le sucer. Ordinairement l'enfant naissant a vingt-un pouces de lon- gueur, et pèse de six à dix livres. Les premiers cris qu'il pousse annoncent l'impression nouvelle et inaccoutumée qu'il reçoit de l'air ; bientôt il évacue quelques glaires de la gorge , et il urine. Le sommet de la tête ou la fontanelle est une partie de son crâne qui n'est pas encore devenue solide ; elle est placée entre Tos frontal et la réunion des deux os pariétaux; on la sent battre à la naissance. Il paroît que cette ouverture , qu'on ne trouve dans aucun animal , existe dans l'espèce humaine , à cause de la compression que doit éprou- ver le cerveau dans la matrice, et afin qu'il puisse se râpe- H 0 M 35 tîsser ou se prêter plus facilement dans l'accouchement., Les animaux n'ayant pas la tête si grosse que l'enfant, n'ont pas eu besoin de cette précaution de la nature. Quelques jours après la naissance, l'enfant e'prouve une jaunisse passagère , parce que la bile et le système hépatique commencent à entrer en fonctions. C est ordinairement le premier jour que l'enfant rend le meronium , matière noirâtre des intestins du fœtus. Le premier lait de la mère , ou le colos- irum , est séreux et laxatif, ce qui aide à débarrasser cette ma- tière excrémentitielle ; cependant on ne laisse téler l'enfant que douze heures après sa naissance. La nature a sagement proportionné les qualités du lait maternel aux besoins de l'enfant ; aussi le lait des nourrices lui est beaucoup moins convenable ; il est trop vieux el trop épais , car il est plus séreux dans la mère à mesure qu'il est plus voisin de l'accou- chement. D'ailleurs, le lait d'une étrangère n'est pas aussi approprié au tempérament du nourrisson que celui de sa propre mère , et à plus forte raison le lait d'un animal : il n'est donc rien de tel que de suivre la nature. Le nouveau-né dort presque toujours , et demande à léter chaque fois qu'il s'éveille. Les négrillons se pendent eux- mêmes à la longue mamelle de leur mère, et s'attachent si bien à ses reins , qu'elle peut travailler et agir sans les tenir. Le bercement des enfans les fait quelquefois vomir, et leur est souvent nuisible; leurs cris violens peuvent produire des hernies; la malpropreté dans laquelle les laissent croupir des nourrices négligentes, leur cause des excoriations qu'on guérit avec de la poudre de bois vermoulu ; les coliques qui les tourmentent peuvent être apaisées avec des adoucissans et de légers laxatifs , et les acides qui se forment dans les pre- mières voies se corrigent aisément par les mêmes moyens. Ce n'est que vers le quarantième jour que l'enfant com- mence à rire et à connoître ceux qui l'approchent. /«a^e,;oar('« puer^ risu cognoscei'e matrem; mais il ne balbutie que vers le dixième ou douzième mois. Les mots les plus naturels sont ceux de baba, papa , marna; c'est pour cela qu'ils se trouvent dans toutes les langues , et qu'ils désignent les noms des père et mère. On ne doit nourrir l'enfant , pendant les trois premiers mois, que du lait maternel ; seulement on peut , au bout d'un mois et demi , faire usage de la panade; mais la bouillie est une très-mauvaise nouVriture, qui empale l'estomac de l'en- fant , engorge et farcit ses intestins , et le fait souvent périr. La panade étant bien plus facile à digérer, doit être préférée. L'allaitement doit naturellement durer jusqu'à l'époque de la dentition. Les dents incisives , au nombre de huit , dont no II o M quatre au-devant de chaque mâchoire , croissent à huit ou dix mois. Ce développement est douloureux , et s'annonce par un clat de lièvre et d'innammation. A cette époque , il faut donner très-peu de nourriture à l'enfant : sans cette pré- caution , Ton risque de le mettre en danger de périr. Les quatre dents canines ou les œillères sorlent vers le dixième mois, et au douzième ou quatorzième , les màchelières ou molaires poussent et se développenl au nombre de seizt* , ce qui fait en tout vingt-huit dents. A Tâge de vingt-six à trente ans, ou même beaucoup plus toi , i! se développe quatre mo- laires, deux au fond de chaque mâchoire , ce qui complète le nombre de trente-deux dents. Ces dernières molaires sont appelées dents de sut^esse. Vers l.'^g;.' de six à sept ans, il s'o- père un nouve;ui dévi'loppement dans le système nutritif de 1 enfant ; il devient plus vigoureux; les incisives, qu'on ap- pelle dents de lait, tombent, et sont remplacées par d'autres plus larges et plus fortes. 11 en estde même , vers dix à douze ans, des quatre canines et des quatre premières màchelières. il y a donc un renouvellement dans les seize dents anté- rieures ; miis les seize autres postérieures ne se renouvellent point. Les femmes n'ont pas toujours trente -deux dents , car souvent les dents de sagesse ne se développent point chez elles. On cite des enfans (jui sont nés avec des dents inci- sives-, mais ces exemples sont rares. Les cheveux des enfans naissanssont toujours plus ou moins Llonds dans la race européenne ; mais dans les autres races humaines , ils sont déjà tout noirs. 11 en estde même de l'îris. La couleur des cheveux et des yeux devient plus foncée à me- sure qu'on avance en âge; elle se déteint ensuite lorsqu'on a passé 1 âge mâr , et qu'on entre dans la vieillesse. Les enfans des nègres et des peuples dont la peau est d une couleur Irès- foncce , naissent blancs ; mais ils se colorent peu à peu , quoiqu'on ne les expose point au soleil. Plus on est jeune , plus l'accroissement est rapide. Il en est de même dans l'espèce humaine que dans les animaux et les plantes. On observe encore que cet accroissement est plus considérable en été qu'en hiver, parce que la chaleur le favorise. La nutrition est comnumément en rapport avec la croissance des corps. En effet , dans la matrice , le fœtus se nourrit à toute heure du sang maternel ; aussi son volume augmente en toute dimension en peu de temps. L'enfant mange sauvent, et grandit aussi plus vite que le jeune homme, car celai-ci mange moins à proportion. D'ailleurs, à mesure que les orgaues prennent de la solidité, de la sécheresse, ils grossissent pîus lentement ; les fibres deviennent moins ex- tensibles, les canaux s'obstruent peu à peu, le$ mailles se H 0 M 57 remplissent, la nourriture passe plus difficilement; et ne trouvant plus d'emploi dans la composition des organes , elle se sécrète en graisse , ou se transforme en semence pour produire un nouvel être. Il y a des enfans q«i s'accroissent avec plus de rapidité que d'autres, et qui ont plus de précocité dans toute Féco- nomie. Les filles sont plus tôt formées que les garçons, soit que leur organisation ait Lesoin de moins de solidité et de nutrition ; soit que la sensibilité de leur système nerveux ait donné plus de rapidité à leur croissance ; soit enfin que leur corps, ayant naturellement plus de délicatesse, leurs fibres plus de ténuité, le tissu de leurs organes moins d'épaisseur et de force , elles parviennent plus tôt à leur point de per- fection. D-e la puberté, de V amour, et de la menstruation cliez les femmes. Jusqu'à présent nous n'avons vu dans l'homme qu'un être individuel dans un état de dépendance, de misère et d im- puissance ; bientôt nous Talions voir sortir de tutelle, s'affran- chir de cette folblesse originelle , et porter en lui-même les germesdenouvelles vies. L'enfant n'existe que pour lui-même; il n'est, pour ainsi dire, d'aucun sexe, et n'appartient qu'au présent. L'être pubère n'est plus isolé dans la nature ; il tient, à l'espèce entière, et se trouve , en quelque sorte, citoyen de la postérité : son existence est due aux âges futurs; de lui doit s'élever une lige dont les rameaux iront se perdre dans l'éter- nité des siècles. Il ne vit plus pour lui-même , il existe pour l'espèce humaine ; devenu membre intégrant de cetla grande famille , il n'appartient plus à lui seul, mais à tous. A cette brillante époque de la vie , l'enfant perd sa nul- lité ; il devient homme onjemme ; son sexe se prononce et lui révèle le secret de ses forces. Un sentiment nouveau s'élève au fond des cœurs, et leur apprend qu'ils ne peuvent pln.'î demeurer indifférens sur la terre, que le corps a plus de vie qu'il ne lui en faut pour lui seul, et que celle-ci tend à se répandre au-dehors. Nous n'existons, à vrai dire, que pour notre espèce , et non pas pour nous-mêmes; car, dans notre enfance, nous ne vivons qu'à peine, nous ne possédons qu'une demi-vie; et dans la vieillesse , nous traînons avec chagrin les débris et les ruines de notre existence. Mais lorsque nous jouissons d'une vitalité pleine et entière, elle n'est plus pour nous, elle cherche sans cesse à s'en séparer pour former de nouveaux êtres. L'âge de la reproduction est tout selon l'ordre de la nature ; c'est pour lui seul que sont créés la farce , la santé , le plaisir, la beauté et l'amour; c'est à celle 38 H 0 M unique époque qu'éclatenirintelligence et la vigueur de l'âme: en perdant ia faculté générative , nous perdons tous nos avan- tages : l'amour disparoît, la beauté se flétrit, la vigueur se casse, le génie s'éteint, le plaisir s'enfuit avec la santé; le temps nous enlève toutes nos illusions et nos voluptés , et ne laisse plus qu'une lie amère dans la coupe de la vie. Il semble que nous ayons été jetés sur la terre par la nature pour la seule reproduction. Hors ce temps, tout est foiblesse, peine, misère , impuissance dans la vie. Les deux termes de notre existence se plongent dans deux fleuves éternels , celui de la naissance et celui de la destruction ; et le milieu appartient à l'espèce , parce que c'est d'elle seule que nous tirons notre vie , et c'est à elle seule que nous devons la rendre. En elTct, cette étincelle de vie que nous portons en nous^ mêmes, est un don de nos pères qui l'ont eux-mêmes reçu de leurs ancêtres, et ceux-là d'autres hommes qui les ont pré- cédés dans la longue carrière des âges. L'existence n'est donc qu'une transmission , une continuité de la même faculté , de- puis l'origine de l'espèce humaine jusqu'à nous ; ou plutôt nous ne vivons point par nous-mêmes , mais par l'espèce qui nous donne l'être , puisque nous n'existerions pas sans elle. On peut dire que les individus n'existent pas réellement par eux-mêmes : ils vivent d'emprunt; ils ne sont que des usu- fruitiers éphémères d'un fonds de vie élémentaire qui réside dans la masse des êtres organisés. La génération n'est que le passage du mouvement vital d'un corps organisé à une ma- tière disposée à s'organiser, et la nature ne connoît que l'acte de la génération : c'est l'unique but de tous ses travaux. Ce que nous appelons amour n'est que la manifestation ex- térieure de ce mouvement vital qui tend à se répandre dans d'autres êtres , pour leur communiquer la vie. Ainsi, nous sommes tous animés par l'amour; c'est de lui seul que nous tenons les semences de notre existence. La puissance créatrice ou le mouvement vital que nous avons reçu par l'acte de la génération , opère de deux manières : i." Dans l'intérieur des individus mâles ou fe-^ melles, en les faisant croître, nourrir et fortifier. 3." A l'ex- térieur, par les organes sexuels , et en se communiquant à une matière susceptible d'en être imprégnée. Tant que cette puissance d'amour agit dans l'individu seulement , elle y est concentrée ; mais lorsqu'elle a porté le corps à un état de force et de perfection qui ne peut plus s'augmenter, elle est forcée de se débor-ler au-dehors. Plus elle se porte à l'exté- rieur, moins elle opère dans l'intérieur de l'individu : en ef- fet. Ton observe que la génération affoiblit extrêmement la vie propre du corps, et qu'il nous en reste moins à mesura H O ^I 39 que nous en communiquons davantage. Cette loi est ana- logue à celle de l'impulsion dans les corps bruts; ils se ralen- tissent en proportion du mouvement qu'ils communiquent aux obstacles environnans. Indépendamment de ces communications vitales entre les deux sexes pour la reproduction d'un nouvel être , il y a , d'un individu à un autre , de ces sympathies et de ces anti- pathies singulières qui dérivent de la même source. La pre- mière et la plus puissante des sympathies est celle de l'amour. Cette propagation des affections animales entre deux sexes , s'exécute suivant certaines lois qu'il est nécessaire d'appro- fondir ici ; car elle n'a pas lieu indifféremment entre toute femme et tout homme, puisque nous trouvons des personnes qui nous plaisent plus ou moins que d'autres, et qu'il est des rapports secrets qui conviennent aux uns, tandis qu'ils n'o- pèrent pas de même chez d'autres. Voici comment nous concevons ces sympathies. On sait que si l'on fait vibrer un corps sonore près d'un semblable corps sonore en repos, ce dernier vibrera bientôt à l'unisson: ainsi, une corde tendue près d'une autre corde agitée , une cloche auprès d'une autre cloche qu'on sonne, entreront en vibration. Or , le corps humain et son système nerveux , peuvent ac-» quérir un certain état de sensibilité et de mobilité (non pas que les nerfs soient jamais distendus comme des cordes, ainsi qu'on l'a jadis imaginé mal à propos , car nous voyons qu'ils sont relâchés même dans le corps vivant); mais il est très- sûr que leur activité peut être plus ou moins grande , puis- qu'on l'excite par des spiritueux , des aromates , et qu'on la diminue par des narcotiques ; et puisque nous voyons que certains hommes sont plus vifs , plus ardens , plus irascibles que d'autres. Supposons donc un corps humain dans un état déterminé d'excitabilité. On peut le comparer à un corps sonore en vi- bration. Si l'on approche un autre corps humain d'une na- ture analogue , celui-ci doit se mettre à l'unisson du pre- mier , de même qu'une corde fait vibrer une corde de pa- reille nature. Cette condition de similitude est nécessaire pour produire la sympathie ; sans cela elle n'a pas lieu. Qu'on mette en rapports un jeune homme avec une Jeune Jille; il est très-certain que leur constitution physique et morale , étant dans un état à peu près semblable , soit pour l'âge , soit pour le degré de sensibilité , les émotions ner- veuses de l'un se communiqueront à l'autre ; et il y aura sympathie , concordance , amour. Mais si l'un des individus a sa complexlon dans un état différent; si l'un est vieux et l'autre jeune, il n'y a plus d'unisf 4o H O M son ni d'accord dans rébranlement des nerfs, il n'y a plus de sympathie, mais indifférence ou inaction. Enfin , si les deux complexlons sont dans des condition» très-contraires , si Tune est très-inilable et l'autre très-apa- thique ; alo.rs la dissonance se prononce , et il y a anti- pathie mutuelle. Voilà, je pense, ce qui fait que les carac- tères ardens, impétueux, ne peuveni pas supporter les carac- tères mous , apathiques , et réciproquement. C'est donc la similitude qui existe entre deux complexions qui fait éclore l'amour, la symp.ithie , l'amitié , la compas- sion ; enfin tout ce qui dérive des rapports d'humeur. C'est la discordance des SNsièm.es nerveux qui détermine l'anli- palhie et la haine; c'est leur inaction qui cause 1 indifférence. Ce rapport des systèmes nerveux -ou des complexions se marque dans tous les états de la vie ; ainsi, l'enfant reciierche l'enfant , les jeunes gens se plaisent avec les jeunes gens , les vieillards avec les vieillards , parce que tout le monde cher- che sa consonnance de compîexion. Et comme celte harmonie a lieu aussi selon une cer- taine manière dépendante de riuibitude , nous aimons sur- tout les personnes chez lesquelles cet accord de sentimenset d'idées s'exécute dans le même ordre que dans nous-mêmes. C'est aussi pour celle raison que nous nous plaisons ?lavan- tage avec nos amis qu'avec des étrangers qui ne sont point à notre unisson. Deux amis ne sont autre chose que deux or- ganes nerveux dont les ébranlemens simultanés jouent sui- vant le même ordre dans des circonstances pareilles ; ce qui produit un accord parfait. L'un et T autre sont affectés de la même manière, tout de même que les deux yeux ou les deux moitiés du corps qui sentent pareillement; car notre corps est formé de deux moitiés amies , c'est-à-dire, actives et sensi- bles au même degré. Si un œil est plus fort que l'autre, on est louche ; il en est de même dans l'amitié ; si un ami est inégal à l'autre , il y a du louche dans leur union : l'intimité , la communauté, ne sont plus aussi parfaites ni aussi Uniformes. Pourquoi , dans le jeune âge , cherche - t - on avec tant d'ardeur à aimer ? Pourquoi nous faut-il des amis , des maî- tresses , des plaisirs ? C'est que le système nerveux est dans un état d'extrême excitabilité, et qu'il aspire partout à sa consonnance, parce qu'il n'est que comme une moitié, étant seul. C'est par une suite de notre organisation double ou formée de deux moitiés accouplées , que nous demandons des sensations doubles. De lîiême que nous avons deux.yeux ou deux oreilles , qui nous donnent simultanément une même sensation à l'unisson , il nous faut , piir similitude , des affec- tions doubles , telles que les affections mutuelles. Nous res- H O I^ï 4i sentons alors des plaisirs analogues aux consonnances iiar- uioniques. Plus l'unisson des deux systèmes nerveux est partait , plus le plaisir est vif, parce qu'alors nous recevons en quelque sorte une double vie, nous agranlissons une fois piur, noU\i sphère ; un autre système nerveux devient pour ainsi dire le nôtre ; il s'incorpore avec nous par sa conformité, qui de- vient d'autant plus intime qu'elle est plus exacte. Les personnes les plus vives, les plus excitables, sont aussi les plus susceptibles d'éprouver l'effet des sympathies et des antipathies, comme nous le voyons chaque jour, parce que leur système nerveux est dans un état d'excitation, ou Irès- analogue , ou très-contraire à celui des personnes affectées. C'est cette connexion intime de deux systèmes nerveux qui fait îe plus grand charme de l'amour. Ainsi, au milieu des délices et de la volupté, les plaisirs ne sont jamais plus vifs qu'à mesure que les irausports sont plus partagés ; de ma- nière qu'on jouit non -seulement de ce qu'on éprouve soi- niêuie , mais encore de ce qu'éprouve une personne aimée. La jouissance est alors doublée, parce que les sensations ou 1 âuie de deux appartiennent en entier à chacun. De uicmc , si Ton pouvoit regarder en même temps, et par ses yeux et par ceux d'un autre , je ne doute pas qu'on n'en éprouvât également un grand plaisir. Nous aimons tant ces conson- nances que nous voulons être aimés , et que nous sommes charmés d'être approuvés en toutes choses. On nous demandera pourquoi un homme est moins porté vers un autre homme que vers une fenune : c'est qu il faut bien distinguer ici deux genres de sympathies; l'une n'a rap- port qu'aux individus , Taulre au sexe. Deux hommes sont attirés l'un vers l'autrF par une sympathie simple , indivi- duelle , qui émane de la correspondance de leur organisa- lion ; mais un homme et une femme sont attirés non-seule- ment par cette première sympathie simple, mais encore par celle qui émane des sexes. Un état particulier de l'organe sexuel mâle , produit un étal semblable dans l'organe sexuel féminin correspondant. Cette sympalhie'est même l'une des plus marquées : tout devient commun entre deux organes correspondans, lorsqu'ils sont au même degré d'excitation. En effet , toutes les parties de notre corps ayant une vitalité qui leur est propre, ont aussi des synjpalhics particulières ; nos organes réagissent les uns sur les autres, et s'entre-commu- r.iquent toutes leurs affections ; ils ont chacun leur sphère de sensibilité, qui s'engrène dans les sphères des organes voisins. Mais pourquoi ce besoin d'affections semblables dans un autre corps ? 11 nous vient, ce me semble , de notre coufor- /t2 lî O U mation organique double ; car on reconnoît aisément que le corps de l'homme et de la plupart des animaux est composé de deux moitiés accolées dans leur longueur; ce qui fait que nous avons deux yeux, deux oreilles , deux narines, deux hémisphères au cerveau , deux pieds , deux mains , deux tes- ticules , etc. Les parties du milieu du corps , comme la lan- gue, la verge , etc. , sont aussi formées de deux moitiés sy- métriques réunies et soudées par le milieu. Cette conforma- tion double dans les organes des sens procure des sensations physiques doubles ; mais parce qu'elles s'opèrent dans le même moment, elles nous parolssent uniques et simples; car elles se mêlent et se confondent en un seul corps , de même que nos organes doubles. Or , nous sentons par des organes doubles qui ont des forces à peu près égales , c'est-à-dire , consonnantes ; nos idées et notre entendement sont donc composés par ces sensations doubles et simultanées, et nous y sommes accoutumés depuis notre naissance. Par suite de cette habitude et de la confor- mation double des hémisphères du cerveau ; par analogie , nous cherchons hors de nous-mêmes des sensations doubles. Voilà pourquoi nous aimons la symétrie dans les objets; c'est encore pour cela que les correspondances nous plai- sent , que les comparaisons nous sont agréables , que les rapports , les harmonies , les consonnances nous délectent. Tout ce qui est isolé , nous paroît déchiré de la grande trame des êtres; l'unité qui nous charme, est leconcours égal de deux semblables; car tout est relatif à quelque chose; dans l'uni- vers tout a ses liaisons et ses harmonies , jusqu'à la discorde même. Ce principe d'union et de correspondance qui est en nous, me paroît donc émaner de notre conformation double ; et j'en retrouve des preuves irrécusables dans tous les animaux dont le corps est de deux moitiés égales , tandis que les co- quillages univalves et les bivalves (i), les zoophytes, qui ne sont pas formés de deux moitiés également symétriques , et les espèces dont le .corps mou n'a pas une figure constam- ment régulière , manquent de ce principe de sympathie et de consonnance. C'est un fait très-reconnu en histoire naturelle ( V. Hermaphrodite) , que tous les animaux symétriques , tels que les quadrupèdes , les oiseaux , les reptiles , les pois" sons , les crustacés et les insectes ont toujours leurs sexes sé- parés sur deux individus différens ; mais les coquillages , les zoophytes , les vers ayant tous un corps , ou privé de symé- (i) Quoique ces animaux paroissent doubles , leur organisation n'est jnullemenl egnle et symétrique de chaque côte'. H O M ^3 trie , ou de nature molle et capable de prendre momentané- ment des formes non symétriques , sont tous hermaphro- dites ou androgynes. En effet, s'ils n'ont pas des organes sy- métriques , ils ne sentent pas d'une manière également double et instantanée, comme les autres espèces ; ils n'ont alors aucune sensation consonnanle ; ils n'éprouveront donc aucun rapport de sympathie et d'antipathie ; ils ne pourront donc ni s'entre-aimernis'entre-haïr ; cela étant, les sexes ne doivent pas être séparés chez eux , car ils seroient très-peu portés à s'unir , et l'espèce ne pourroit pas se perpétuer. Une huître est parfaitement indifférente pour une autre huîlre ; elle n'a de rapports qu'avec elle seule , et peut se suffire à elle-même. Les limaçons, quoique androgynes, s'accouplent, à la vérité , mais sans s'aimer beaucoup ni se plaire mutuelle- ment ensemble ; car chacun d'eux étant mâle et femelle , chacun donne et reçoit en même temps : c'est donc une sorte d'échange, de marché, de troc, dans lequel ils demeurent quittes l'un envers l'autre, parce qu'ils ne cherchent que ce qui leur est agréable, sans se soucier ensuite de leur voisin. Plus les animaux sont d'une organisation simple , moins ils ont de correspondance entre eux; au contraire, l'homme ayant la constitution la plus compliquée parmi tous les animaux, jouit aussi du plus grand nombre de relations entre les divers indi- vidus de son espèce; aussi ses sympathies sont très-multiplices. Comme , chez les animaux à sexes séparés , il faut un désir , une affection réciproque , et comme il leur est nécessaire de s'agréer , de se rechercher pour parvenir à se reproduire , leur sensibilité extérieure et le domaine de leurs correspon- dances sympathiques doivent être plus agrandis que dans les autres espèces. Il faut qu'il s'établisse entre les sexes des rela- tions nerveuses plus intimes. Or, comme nous trouvons ces sympathies chez les animaux doubles , et comme nous ne les rencontrons nullement chez les espèces non symétriques et en même temps hermaphrodites, il reste démontré que ces relations nerveuses sont liées à l'organisation double et à la séparation des sexes, V. Sexes. En effet , à mesure que les correspondances sexuelles se développent, l'indifférence cesse dans tous les êtres; et lors- que la vieillesse les rompt , toutes les sympathies d'amour dis- paroissent. C'est donc ce transport de la vie dans les organes extérieurs pour se mètre en contact avec un autre corps , ce sont donc ces relations sexuelles, sources délicieuses des sym- pathies, qui constituent la puberté. Dans l'espèce humaine de nos climats, on n'aperçoit ordi- nairement les premiers signes de la puberté que vers l'âge 4e douze à quatorze a«s chez les filles, et de quinze à dix- sept 44 H O M ans chez les garçons ; mais ces époques varient par toute la terre, i.° suivant le degré de température du climat; 2" par la quantité et la qualité des nourritures; 3." selon le dévelop- peiueut des facultés morales;/}, "suivant la naiiue de tempéra- ment ; 5." parla complexion propre de chaque race humaine. Premièrement , la chaleur augmentant 1 activité de la puissance viiale dans tous les corps organisés, rendant lac- croissement plus rapide, et faisant consumer plus dévie en moins de temps , doit rapprocher de la naissance l'époque de la puberté. C'est aussi ce que nous déuiontre le genre hu- in;iin depuis les pôles jnsqu à la zone lorride. I)n Finlandais, un Danois, sont à peine pubères à dix huit , ou mén)e vingt- deux ans, parce que la froidure retarde leur développement; les filles n'y deviennent nubiles qu'h dix-sept ou dix-neuf ans. Au contraire, un Hindou, un Persan, un Arabe, sont en état d'engendrer dès T.^ge de treize à quntorzt; ans, et on voit des filles déjà mères chez ces peuples à dix ou douze ans. Les contrées tempérées et internuidiaires volent accélérer ou re- tarder la puberté de leurs hahitans, suivant leur plus (»u moins grande chaleur. Il est rare qu une fille ne soil pos formée eu Italie à quatorze ans ; au nord de la France , il lui faut en- viron quinze ou seize ans; mais en tout pays les garçons ne deviennent pubères qu'un peu plus tard, parce que ieurcorps étant plus robuste , plus compacte , et en général plus gr;>,nd et plus solide que celui du sexe féminin, il lui faut un plus long espace de teiitps pour le porter au même degré de perfection. Ce n'est pas un avant.ige pour riiomnie que la précocité du développement de ses parties génitales; au contraire , les peuples qui deviennent pubères de bonne heure, sont aussi, par cette raison, vieux et inipuissans de bonne heure ; tandis que les hommes dont la puberté est lente et tardive, conser- vent leur vigueur, leur jeunesse etleurs forces géneralivesjus- que dans un âge avancé. Chez les Orientaux qui sont pubères à treize ou quatorze ans , la faculté propagatrice décroît dès 1 âge de trente ans; ils sont déjà cassés et ruinés; il leur faut des remèdes stimulanset aphrodisiaques pour les rendre capables de remplir le devoir conjugal. Leurs femmes ces - sent aussi, à cette époque, d'être réglées; toute leur beauté se fane et se (lélrit dès lâge le plus tendre, ainsi qu'une jeune fleur dont la racine est atteinte d'une langueur mortelle. Les peuples du Nord ne devenant pubères qu'à une époque plus reculée , leur corps a tout le temps de se fortifier; aussi conservent-Us plus long-temps la faculté d'engendrer. Il n'est pas rare d"y rencontrer desy(?7«m^5 qui conçoivent à l'âge de quarante-cinq ans ou n»ême cinquante ans , et des hommes capables d'engendrer par-delà l'âge de soixante ans. TT 0 M 45 L'on a pu considérer que les climats chauds animoient î'nr- deur amoureuse dans le sexe féminin , dévclopp ->ien! même davantage ses organes sexuels; que les jouissances prémalu- rées , ou qui précèdent l'entier accroissement, abrégeoient sa taille dans Tlnde orientale comme partout ; on en pour- roit encore citer des o!)scrvations à ()l.^hili , ^ Sumatra ( Alarsden , Histoire de Suniat. , tom. ii ) ; et c est aux ma- riages piécoces et à la corrtiplion des niosurs germaniques qu'un médecin ( Herm. Gonringius , de Hahi'u Gernianor. , chap. IX) attribue la diminution de la hante taille qu'avoient anciennement les peuples allemands, lorsqu'ils vivoient dans leur primitive innocence ( Csesar , Be/l. gall. 1. V; et Tacit. , Mor. Qennanyr. , cap. Vlll ). Des observations nombreusesfont voir encore que si la cha- leur du climat n'est pas la seule cause de la précocité dans le flux menstruel, elle y influe singulièrement. En effet, dans la race blanche d'Europe, les femmes sont, au nord, plus tard sujettes à celle évacuation, qu'au midi. Dans la Saxe , la Thu- ringe et la Haute-Allemagne, la menstruation ne commence qu'à quinze ans, même dans les villes (Blumenbach, Ins'ii. physiol.^ Gottlng., 1798, in 8", p. ^27 et JSoGl; elle est en- core plus tardive dans les contrées plus septentrionales (Burg- grav. , Aer.^ lac. et aq Francof, , pag. i45; Klein, Hist. nat. Epac. , p. i83); et dans les lieux élevés , on la voit reculée jusqu'à vingt ou vingt-((uatre ans ( Sa/yr. si/esiac , n.° v ) ; aussi les femmes conservent leur fécondité jusqu'à un .Ige Irès- avanré, selon Martine, (JVesleniJslamh;, p. 368), danslesiles du N()rd, les Orcades, les Hébrides; et même on voit en Irlande des femmes devenir mères à soixante ans(Ro.ile, Of Ire'and. ^ p. 178; Plot, Oxfurdshire, p. 199; et Bresluuer sammiiiiig. , an 17:14, janv. ). En France , la menstruation commence, pour l'ordinaire, à quatorze ans, et même à treize, dans les départemens méridionaux et les grandes villes où l'esprit est plus précoce, la nourriture plus abondante, les passions sont plus excitées. En Languedoc, lesfillessontplustôtréglées quà Paris (Fizgérald , Mém. , p. 3 ). En Italie , les femmes se voient formées dès douze ans ( Ulmus , De iitcr. , p. i3o ) ; il en est de même des Espagnoles; et à Cadix, on les marie sou- vent à cetâge(Osbeck, /imfi Oslitid., p. 20; liayman, Beiz., tom. I , p. 16 ). A Minorque , la puberté se marque dès l'âge de onze ans ( Cleghorn , Nai. Hid. of Minore. , p. 53 ). A Smyrne, on a vu des mères âgées seulement de onze à douze ans ( Timceus , Cas. medic. ; Solingen , Emffr/oiog. , p. 8 ). Les Persanes sont communément réglées à neuf ou dix ans , selon Chardin ( Voyag. , tom. vil , p i63 ). Jl en est à peu près de même au Kaire( Reuati , dans V Histoire méd. de l'ar- IQ H O U mée d'Orient de M. Desgenettes , Paris i8o3 , pai'L tt ^ p. i^i^.)'^ les femmes barbaresques sontsouventmèresàonzeans(Shaw, Foyag. en Barhar. , ly^^ , in-^.o. , tom. i , p. SgS ) , ainsi que celles des Agows en x\byssinie , d'après Bruce ( Voyag. aux sourc. du Nil , tom. m, p. 84.9 , in-^"). Dès l'âge de neuf à dix ans , on voit des signes de puberté chez les filles au Sénégal ( Adanson, Voyag. au Sénégal. , pag. 20 ). 11 paroît que 1 âge de dix ans est le plus général pour la menstruation , non-seu- lement en Arabie (Niébuhr , D^sa-. de l'Arab. , p. loi ), mais encore en diverses parties de l'Afrique ( Démanet , Afr. fr. tom. II j pag. 60 ; Labarthe , Côte de Guin. , p. 128; et Hist. gériér. des voyag. , tom. IV , p. 112 ). Il y a même des exemples d'une plus grande précocité , et l'on cite en Arabie , à Alger (Prideaux, Vie de Mahomet , p. 78; Laugier de Tassy , Hist. d'Alger^ p. 68), à la côte de Malabar (Dellon, Voyag. aux Ind. , tom. i , p, 277), des exemples de femmes mariées dès l'âge de huit à neuf ans , et devenues mères peu de temps après. AuDécan , suivant Thé^ venot ( Voyag. , part, v , 1. i , c. 48) » des femmes ont en- fanté à l'âge de huit ans. Paxman (^Med. Indor. , p. 17)3 vu des mariages de filles âgées de quatre à six ans ; mais il n'est nullement croyable qu'elles fussent pubères ; on sait en effet que c'est une coutume générale dans les Indes de fiancer ou même marier des enfans ensemble (Sonnerai, Voyag. aux Ind.., tom. î , p. 1 18; Collect. de Thévenôt , tom. i ; Mélhold, Ptelat. de Golconde , p. 7 ) ; c'est pourquoi l'on trouve des femmes mères à dix ans, h Java (Philos. Transaci., n." 24-3), et dans rindostan (Thévenôt , tom. m , 1. i-, ch. 29 ; et Grose , Voyag. , p. 343); mais ces faits ne sont pas généraux, car on observe, même dans des régions froides de l'Europe , des ex- ceptions en ce genre ; ainsi Haller cite des Suissesses réglées à douze ans {Physio/. élém. , lib. xxviii , tom. Vli , p. i^o) ; et Smellie {On midwifiy , p. 107) a vu des Anglaises mariées à cet âge. On a vu, même dans la Belgique et la Suisse (Jou- bert , Err. popul. , liv. Il , ch. 2 ; et Acla hehetica , tom. iv , p. 107) , des filles de neuf ans être enceintes et accoucher; mais on ne peut rien conclure de ces particularités. D'ailleurs en Guinée l'on excite le flux menstruel de bonne heure par le coït chez les plus jeunes filles. A Porto Real et Ardée , ce flux est déterminé , chez les petites Négresses, en introduisant un pcssaire de bois tendre , creux et rempli de fourmis , à plu- sieurs reprises, dans leur vagin ; et le prurit, of.casioné par ces insectes, détermine l'aftlux du sang dans les parties sexuel- les {Coutumes et cérémon. relig. de Picart , tom. vii , p. 229). L'emploi des lotions stimulantes et aromatiques , chez les Egyptiennes et plusieurs Asiatiques, afin d'enllammer les dé- H O M 47 sirs et la volupté , ne peut qu'accéle'rer, dès la première jeu- nesse , l'évacuation des règles ; et les aliraens très-succulens que les Banians donnent à leurs filles, produisent un effet analogue (Ovington , Voyag. , tom. il , p, 28 , irad. fr.). Il en résulte surtout la confirmation de cette loi générale , que plus la jeunesse des femmes est courte et rapide sous les cieux des tropiques , plus leur vieillesse est communément longue: ciiiùs pubescunt , citiits senesciint. Semblables aux fleurs des mêmes contrées , à peine écloses le matin , elles sont flétries bientôt par l'ardeur du jour. Aussi les femmes se ren- ferment-elles dans les soins domestiques et l'éducation des enfans , lorsqu'elles ne peuvent plus conserver des prétentions à plaire par les agrémens du corps. Toutefois, comme leur vieillesse est plus précoce , elle est moins vieillesse que la nôtre ; les cheveux des femmes ne blanchissent pas aussi promptementque les nôtres ; elles deviennent rarement chau- ves , et leur vie s'écoule moins vite que celle des vieillards ; car en général les femmes parviennent souvent à un très- grand âge avec moins d'inconvéniens que l'autre sexe. Seroienl-elles plus vivaces , parce que leur constitution , naturellement molle, acquiert moins de roideur, de sécheresse, d'ari- dité? Dans la race nègre , lors mêïne que les individus sont trans- portés sous des climats plus tempérés que l'Afrique , comme dans l'Amérique septentrionale et l'Europe , ils deviennent plus tôt pubères que la race blanche ; il existe à peu près un an ou plus de différence à cet égard ; ce qui prouve que la race noire est naturellement plus précoce que la nôtre. Cet exemple se remarque bien évidemment aussi dans là race mongole. Non-seulement à Siam (LaLoubère , Description du royaume de Siam, tom. i , p. i55) , à Golconde, au rapport de Mélhold, en Chine , et au Japon , d'après divers voyageurs , la puberté du sexe féminin commence vers onze et douze ans ; mais même dans les contrées beaucoup plus froides que les nôtres, on re- connoît qu'elle est plus précoce que parmi nos climats. Une Kalmouke, une Mongole de la Sibérie, sous un ciel aussi froid que celui de Suède , sont nubiles dès l'âge de treize ans ; tandis que la Suédoise ne l'est guère qu'à quinze ou seize. Mais plus au nord encore, et jusqu'aux confins de la mer Gla- ciale , les femmes samoïèdes sont menstruées dès l'âge de onze ans, et souvent mères à douze (Klinstsedt, Mém. sur les Sa- mdied.^ p. 4-I-4-3). Quoique foiblement réglées, les Lapones le sont vers douze ans (Linn. , Fauna , suec. ; Van Swieten , Comm. in Boerhaap., tom. iv, etc.) ; et il paroît en être de même de toutes ces races de myrmidons polaires, comme 48 H O U ks Osliafjues, les Jakutps, lesKamlschadales, etc., et mêm« les Esquimaux en Amérique. Peut-elre que la piîliU'sse naturelle de la taille accélère \é~ poque de la puberlé r';cz ces peuples; mais aussi une nour- ri'are touie animale , de poissons, qu'on sait être slimulanle et aplirouisiaque en général , et une habitation presque con- tinuelle sous des iourles souterraines où règne une chaleur étouffante au moyen des vapeurs de l'eau versée sur des pierres rougies au feu; toutes ces causes, disons-nous, peu- vent avancer l'époque de la puberté chez les deux sexes , parmi les peuplades polaires. Dans rÂmérique méridionale , la puberté se déclare vers dix à douze ans. suivant les relations des voyageurs (Chappe d'Auteroche , Voyage en Californie^ page 2$ ; Stedmann , Voyage à Surinam et à la Guyane , tom. H, pag 122 ; Azara, Voyage en Amérique méridionale ; Lapeyrouse , Voyages , lome IV, page ^3 , etc.). Mais ces femmes , nubiles de si bonne heure , perdent aussi la faculté de concevoir bien avant Tâge de quarante - cinq à cinquante ans , qui est ordinairement , pour celles de nos climats , l'époque de la cessai ion àes règles. Dès 1 âge de trente à trente-cinq ans, les femmes sont vieilles en Asie {^ iWVCiâXi ^ Medlcitta ludoruni^ p. 17; (a rose. Voyage^ p. 3/^3; Thévenot , Voyage , part, v , liv. i , ch.V^-B). Passé trente ans, les femmes ne conçoivent plus à Java (^Philos. Tramact. , n.° 243). En Perse meine , il y a des femmes qui perdent dès l'âge de vingt-sept ans (Chardin, Voyage, tom, vi , p. 236). Quoique pubères de bonne heure , les Siamoises ont des en- fans jusqu'à quarante ans. On peut donc établir comme un fait constant que la puberfé des femmes commence, sous les cicnx ardens des Tropiques , de neuf à douze ans , et se ter- mine vers trente, ou au plus tard à quarante ans. ( V. aussi Chervin , Revh. méd. pliilos. sur ta polyg- , Paris , in-4..°, 1812, pag. 54-) Au contraire , les femmes samoïèdes , pubères si jeunes , voyent encore leurs règles à quarante et un ans. 11 paroîl que la quantité de ceiles-ci varie pareillement en raison desclimats, caries Laponnes, les Samoïèdes n'évacuent qu'une très-petite quantité de sang (en été seulement, d'a- près Linnseus, Flor. lapon. ^ pag. 324) , et les Groënlandaises n'en rendent presque pas (Oiéarius, V.irad. de TVirquefort ^ pag. i32 ; Péchlin , Ohs. méd. 34-. cent, i), à cause du grand froid qui empêche le développement des facultés gé- nératrices, comme il s'oppose à la iîoraison des plantes. Dans les régions froides de la Haute-Allemagne, de l'Angleterre, l'évacuation périodique est tantôt de trois onces, selon De- H O M 49 haen ; tantôt de quatre onces, d'après Smellie et Dobson; ou de cinq onces , au rapport de Pasta ; elle s'élève ordinaire - ment à six onces en Hollande ( Gorler , Compend. med. , pag. i4-8), et jusqu'à huit en d'autres lieux d'Allemagne (Blu- menbach, Physiol. , pag. 4-^8), ce qui paroit être générale- ment la quantité que perdent les femmes en France ; mais plus on s'avance au midi , plus cet écoulement augmente en quantité ; il s'élève souvent à douze onces en Italie , et dans l'Europe méridionale. Robinson {Food of dîscharg. , p. i6o), Emett {Flux. mul. , pages 4-3 et 84.), et Fizgérald {Mém. , pag. 5), l'ont vu s'élever à une livre, en Espagne ; enfin, sou.s les tropiques, il va jusqu'à vingt onces, ou deux hémines, (Freind, Emmenol. , cap. i, pag. i ) ; et même à deux ou trois livres, si l'on en croit Snellen. ( V. Menstrues. ) Au reste , il y a les plus grandes variétés à cet égard , selon la constitution des femmes , tellement que les Grecques des îles de l'Archipel , quoique plus précoces et placées sous un ciel plus chaud que les Italiennes, ne donnent guère au-delà de trois onces de sang menstruel ( Sonnini , Voyage en Grèce , tom. II , pag. 112 ). Mais il est certain que les Européennes qui passent aux Colonies ou aux Indes , deviennent bien plus exposées au ménorrhagies , et même aux avortemens , par cette cause , que sous des cieux plus tempérés. La qualité même du sang menstruel diffère aussi selon les températures ; car s'il est , dans nos régions, aussi pur que le sang d'une victime , selon l'expression d'un médecin célèbre, il peut acquérir, dans des climats plus ardens , certains de- grés de fétidité. L'opinion populaire de la putridilé des mens- trues n'est pas seulement originaire de TArabie et l'Orient, comme on l'a cru ; elle se rencontre même chez les sauvages Américains , puisqu'ils séquestrent leurs femmes pendant lecir temps critique. En effet, dans la chaleur, quand les excrétions de la peau, des glandes sébacées, des cryptes du vagin aug- mententen abondance et en fétidité, iln'estpasétonnantquele sang menstruel , pour peu qu'il séjourne en ces parties voisines de l'anus, qui sont dans un état d'orgasme , acquière bientôt de l'odeur.Tavernier , parlant de la menstruation des Négresses et des Hottentotes, en a vu des preuves. {Voyage., liv. 11, c. 27.) La seconde cause qui influe sur l'époque de la puberté , est la quantité et la qualité des alimens. En effet, les person- nes bien nourries sont plus tôt en état d'engendrer que celles qui éprouvent une disette d'alimens, ou qui prennent des nour- ritures malsaines et peu profitables , parce que leur corps est plus rapidement porté à sa perfection. Nous voyons que les babitans des villes et les personnes riches ou qui peuvent vi- vre dans l'abondance , deviennent plus tôt pubères que les 5o HO M pauvres vill.^geois qui man^^ent rarement de la viande, et qui n'ont mênie pas toujours du pain. D'ailleurs, la nature des aliniens contribue aussi à reculer ou à avancer l'époque de la T)uberté. Les ragoûts , les viandes échauffantes , les alinmens succulens , arciiialiques , lusage habituel du vin, du café, des liqueurs , etc. , excitent rapidement celte époque ; mais les légimies, les farineux, la diète pythagoricienne ou végé- tale , Tusoge continuel du lait, du fromage , etc., retardent la puberté , comme nous le voyons dans les Suisses, les pay- sans auvergnats, hollandais, écossais, etc. Troisièmement , il est certain que le développement des organes peut être excité pai:rélat du uioral.Dans nos grandes rilles , où la jeunesse a perpétuellement sous les yeux des images de volupté , où l'oisiveté , la lecture des romens , les prestiges des spectacles , la vue des peintures et des sculp- tures représentant des nudités et des scènes licencieuses; où les conversations d'amour , la promiscuité conllntieile des sexes , les bals et tant d'autres causes , sollicitent sans cesse les sens à mille jouissances , la puberté est bien plus précoce que parmi les habitans des hameaux , où les mœurs sont sim- ples , où le travail , l'éloignement des sexes , l'absence de toutes les illusions, laissent l'âme dans l'innocence et la paix de l'ignorance. On ne sait pas combien ce développement prématuré est fatal à la vie , combien il diminue la vigueur du corps et la force de l'âme , combien il détériore toutes les qualités morales. On sent d'autant plus cette vérité à me- sure qu'on s'avance dans la carrière de la vie -, car c'est dans l'âge mûr qu'on recueille avec amertume le fruit des erreurs du jeune âge. En quatrième lieu , la nature des lempéramens apporte , pour chaque homme , des causes de variation dans l'époque de la puberté. Les constitutions phlcgmaliquesou piluileuses sont les plus tardives, à cause de l'empâtement et de la mol- lesse des organes , qui ne peuvent agir qu'avec lenteur. De même les habitans des territoires humides et bas , où l'air est chargé de brouillards stagnans et de vapeurs froides , sont aussi d'une complexion Ilasque et hébétée, qui retarde la pu- berté. Les lempéramens sanguins , plus vifs et plus remuans , accélèrent celte époque ; mais elle est encore plus précoce dans les constitutions bllleusesetmusculeuses, chez lesquelles le corps a beaucoup d'énergie vitale et de feu. Les tempéra- mens mélancoliques ayant une grande activité nerveuse et une inlelligence forte et raisonnable de bonne heure , sont • aussi plus tôt pubères que les précédens. Chez ces derniers, l'amour prend un caractère profond et sérieux qui tient du fanalisme et du délire ; tandis qu'il est moins vif à mesure H 0 M 5i i\ne les constilulîons sont moins précoces. Si le phlegmatique est analogue à Tcnfant; le sanguin, à l'adolescent; le bilieux, à Ihomine fait ; et le mélancolique , au vieillard : il suit de là que les conslilulions analogues à la vieillesse doivent être plus tôt développées que les autres. Cinquièmement enfin , nous voyons que les races humaines ont des compiexions particulières à elles seules, et un mode propre de vie. Ainsi le jeune nègre, qu:»ique naturalisé en France , dès sa naissance , y devient cependant plus tôt pu- bère (toute chose égale d'ailleurs) qu'un Français; et comme il est capable d engendrer plus tôt que nous , il vit aussi moins long-temps en général. Un Kalmouk , un Sibérien ,■ de race mongole , quoique placés dans un climat aussi froid que la Suède , deviennent cependant pubères dès 1 âge de treize à quatorze ans ; tandis que le Suédois Test à peine à seize ou dix-huit ans. Ces faits sont constatés par tous les voyageurs qui ont visité ces contrées. Les femmes Samoïèdes voient couler leurs règles dès l'âge de douze à treize ans , ainsi que les Lapones ; tandis que des femmes d'une autre race , pla- céesplusprès de l'équateur, comme les Françaises, les Alle- mandes , les Anglaises , etc. , sont nubiles beaucoup plu4 tard. Il y a donc une nature propre pour chaquje race hu- maine ; l'une peut être formée plus tôt que l'autre , toute proportion gardée , et indépendamment des influences com-^ muues à chacune d'elles, telles que le climat, les nourritures» les tempéramens, etc; nous apercevrons encore d'autres dif- férences dans la suite de cet article. De la Différence entre le sexe masculin et le sexe féminin^ Quoique la puberté ne soit guère complète parmi nous que vers l'âge de seize à dix-sept ans environ , le développement des organes sexuels se prépare dès la première jeunesse. Vers la première semaine d'années , à la mutation des dents de lait , les traits des enfans des deux sexes commencent à se prononcer davantage. Les petits garçons montrent du goût pour des occupations mâles. Ils cherchent le bruit, le tapage; ils sont déjà querelleurs et aiment à être les plus forts > les plus hardis , les plus courageux ; ils se font des armes de bois ; ils courent , sautent , s'exercent ; mais les filles pré- fèrent déjà les doux travaux que la nature leur a destinés ; elles habillent leurs poupées , les soignent , les embellissent, se préparant ainsi de loin pour l'époque du mariage. Elles ont même , à cet âge tendre , de petites coquetteries ; le suf- frage des hommes ne leur est pas indifférent ; elles veulent déjà qu'on les trouve aimables ; les garçons recherchent au contraire l'estime qui est le prix de la vigueur et du courage. 5. H O M ïls ont déjà des formes pias masculines , un caractère plus audacieux , une peau plus brune , un regard plus assuré que les petites filles. L'instinct sexuel commence même à poindre, mais ce n'est encore que de la curiosité ; les enfans de huit à neuf ans s'examinent quelquefois entre eux et se cachent pour se livrer à de petites privautés qui , bien qu'innocentes et sans but , leur paroissent devoir être répréhensibles. En même temps que la nature fait ainsi naître dans l'homme l'impulsion sexuelle , elle lui donne la pudeur pour contre- poids moral. Nous ne trouvons pas la pudeur dans les ani- maux , mais elle n'est certainement pas l'effet de nos conven- tions sociales dans notre espèce ; car par toute la terre , dans ïe sauvage et dans Vhomme cmlisé , elle accompagne toujours l'acte de la génération, et le congrès ne peut même pas s'exé- cuter en présence du monde , pour l'ordinaire. , Vers la seconde semaine d'années , les jeunes gens sentent dans l'esprit une inquiétude secrète ; leurs idées reçoivent une teinte de sensibilité inconnue; leur âme , agitée d'un sen- timent de douleur et de plaisir tendre, se plonge dans des rêveries de félicité; leur tête est pleine d'illusions, et leurs occupations ordinaires leur deviennent indifférentes ou même à charge; bientôt la société humaine les fatigue ; une douce et triste mélancolie s.'insinue dans leurs cœurs et les attire parmi les solitudes , à l'ombre des bois, où leurs désirs errent dans toute la nature sans pouvoir se fixer; plusieurs courent alors s'ensevelir dans les monastères, où ils ne trouvent bientôt après que le repentir et le désenchantement. Les filles surtout éprouvent ces secrètes inquiétudes ; elles aspirent après les rêveries solitaires et la paix des déserts. Les combats de la nature et de la pudeur, la mélancolie des cœurs tendres, les idées religieuses confondues avec tout ce qui fait le charme de la vie , enfin ce vertige de la raison dans des âmes neuves et innocentes , ont de tout temps peuplé les couvens de jeunes prosélytes dévoués au service des autels. Cette époque ora- geuse est même plus marquée et plus durable chez les filles que chez les garçons , parce qu'elles ont un système nerveux plus mobile et plus sensible. Le premier effet de la puberté ou du délire de l'amour, est le désir de vivre dans la chasteté; contrariété singulière , et qui est pourtant la cause de l'amour moral. On se figure aimer avec tant de désintéressement , qu'on donneroit son sang et sa vie pour l'objet îjue l'on ido- lâtre ; on ne songe pas même à la jouissance , qui est pour- tant le but secret, mais entièrement caché . des premières amours. On voudroit n'exister que pour ce qu'on aime ; son seul nom fait tressaillir le cœur ; sa présence trouble , fait perdre la voix et la raison; le «eul toucher de son vêtement H O ^î 53 fait bouillir le sang dans les veines ; et Ton a vu alors des jeunes gens surpris tout à coup d'hémorragies. L'idée de la jouissance semble souiller la personne qui possède toute votre vie ; en effet , après la jouissance , toute illusion est évanouie ; on n'a plus le même amour; on n'aime alors que par un plaisir brutal , par un instinct tout physique , le charme est brisé ; on ne voit plus les femmes que comme des instrumens de volupté ; le prestige une fois détruit ne revient plus le même ; jamais le second amour n'égale le premier, qu'on regarde comme une folie romanesque lorsque l'on est désenchanté. Les jeunes gens qui jouissent de bonne heure , et avant que d'éprouver cet amour moral, ne connoissent que la lie de la volupté , et deviennent presque toujours des débauchés, sans cœur et sans âme. Il en est de même des filles ; mais elles sont bien plus réservées d'aboi'd que les garçons ; et plus elles sont sensibles , plus elles cherchent à fuir, en laissant toutefois quelques ijiar- ques de leur amour. Ce moment de la vie offre une nuance singulière dans le moral , qui ne s'observe à nulle autre époque de notre exis- tence. L'éphèbe est tout à la fois pétulant comme l'enfant , puis timide et pudibond comme la jeune vierge ; il a la har- diesse d'un page et la tendresse d'une fervente novice. C'est tantôt un folâtre Chérubin , tantôt un Hippolyte rêveur, dii,~ trait et sauvage ; il n'est pas encore homme , et il n'est plus enfant. Je ne sais quels vagues désirs s'élèvent dans ce jeune cœur ; un besoin indéfinissable du bonheur, une sourde fer- mentation, présage des tempêtes des passions; des pleurs sans motif, des joies involontaires, mille projets sans suite , des soupirs sans but encore : tout décèle ce tumulte secref , celte évolution interne d'organes, source des plus délicieuses et des plus funestes émotions de la vie. Lorsque cette période ne s'accomplit qu'imparfaitement , et qu'une organisation lente et molle retarde l'élan de la pu- berté , l'éphèbe tombe dans la chlorose ; il végète pendanfe quelque temps dans une morne apathie. C'est alors que la se- cousse d'une vie active, les voyages , la chasse, les armes , peuvent donner du ton aux organes, et principalement à ceux du bassin; les alimens stimulans et foïtifians font également éclater et fleurir, pour ainsi parler, les organes sexuels ; il a quelquefois été recommandé pour compléter ce développe- ment, d'exciter le prurit vénérien par l'union sexuelle. Mais ce moyen toutefois nous paroît une source d'énervation dans un âge si tendre. La preuve en est que la nature , en dispo- sant l'éphèbe à l'amour , le rend très-timide auprès d'un autre sexe. Il y a plus : ce5 femmes hardies et complaisantes qui se hâtent de cueillir les prémices d'une jeuncàst* Bi H O M ardente et încopsîdérée;. celles quise plaisent àybrm«run jeun© homme, à faire son éducation dans le monde, ne recueillent que haine et mépris de celui à qui elles ont donné La première leçon du plaisir a inoureux. Aristote qui , déjà de son temps, avoit remarqué ce fait (^Problèmes, seci. 4-, probl. ii), cherche à l'expliquer, en disan| que ce sont ordinairement à^s femmes ou publiques , ou déjà avancées en âge, auxquelles s'adressent les éphèbes. Après l'acte, ils en reconnoissent toute la turpitude , et ne conser- vent que du dégoût pour ces jouissances sans charme ; mais il en découvre une meilleure raison, en faisant voir qu'à cette époque le corps étant encore imparfaitement formé , tombe dans l'abattement et la foiblesse après le coït ; aussi l'adolescent prend en aversion la personne qui l'a réduit à cet état. A l'égard de la jeune fille éphèbe , son premier amour n'est pas celui des sens , non plus que chez les garçons-, car on commence toujours par le platonisme, et Ion finit parle cynisme ; mais elle s'attache beaucoup plus à l'homiTie , à qui elle a livré sa première fleur, que l'homme ne s'attache i\ \dk femme. Tel est l'ordre de la nature ; le plus foible ayant be- soin de protection, doit en effet se rapprocher davantage du plus fort. Chez les Germains et les Barbares , il n'étoit pas permis , sous peine d'infamie , aux adolescens de se livrer au penchant àts sexes avant l'âge de vingt ans , selon Jules César. Ce gran4 capitaine attribue, avec raison, à celle continence la force et la hautç taille de ces peuples; tandis que les nations civilisées, plus débauchées , voient leurs générations s'abâtardir par le commerce prématuré entre les sexes ( V. Dégénération). Ainsi, la nature d'elle même , indépendamment des pré- ceptes salutaires de la religion, inspire aussi les lois de la morale, parce qu'elle tend à la perfection des êtres. C'est un admirable instinct de la nature , d'offrir les pre- mières affections d'amour sous les traits de leloignement et d'une apparente inimitié ; la jeune fille fuit afin d être pour- suivie , et si le jeune homme se retire , elle revient à lui ; elle semble haïr ce qu'elle aime, et vouloir aimer ce qu'elle hait; plus elle se jette en sens contraire de son penchant, plus elle en montre l'impétuosité; elle n'aime jamais plus que quan Golconde et de Visapour ; elles sont vives et leur regard lante comme de la gelée. Cette graisse étoit contenue entre les lames fort écartées du tissu cellulaire ou lamelleux sous-cutané de ces parties, et s'étendoit molle- mont autour des hanches dont elle augmentoil l'ampleur appa- rente. Les maraelk'S longues et pendantes de cette Hottentote, commedelaplupart des négresses, contenoient pareillement une abondante quantité de la même graisse, presque fluide. Nous pouvons facilement , ce nous semble , expliquer la foi'mation de ces loupes graisseuses et leur situation chez la plupart des femmes sauvages de l'Afrique australe. Qu'on se représente ces femmes toujours nues dans leur kraal ou at- troupement, accroupies tout le jour à un soleil ardent , pres- que à la manière des babouins, des mandrills, des magots et autres singes à fesses nues et calleuses , du même pays. La grande chaleur du climat tenant fluide la graisse qui se dépose dans les aréoles du tissu cellulaire sous-culané, fera descen- dre et amasser celle-ci dans la partie la plus déclive de cet individu accroupi; ce sera donc vers le coccyx; de môme la graisse des parties antérieures de la poitrine s'écoulera dans le tissu celluleux des mamelles comme dans deux bissacs. Les femmes ayant surtout un tissu moins dense et moins so- lide que les hommes , ou que les jeunes gens dans lesquels les organes jouissent encore de toute l'énergie de leurs pro- priétés contractiles , seront plus exposées à ces collections graisseuses que les individus mâles qui , d'ailleurs , prennent plus d'exercice que n'en font ces femmes sédentaires dans les soins de la maternité. De petites loupes graisseuses s'observent pareillement dans le tissu celluleux sous-cutané des fesses nues et calleuses des mandrills et des babouins femelles, quoique en moindre quantité que chez les femmes houzouânasses et boschismens. Chez divers quadrupèdes et oiseaux , la graisse se dépose vers le croupion ou sur le sacrum ; elle descend abondam- ment, comme on sait, jusque dans la queue des moutons de Barbarie ou d'Afrique en général; et cette queue devient par- H 0 IVÎ gr, fois si yoluminousc , qu'elle a besoin alors d'être supportés par un petit chariot , chez ces animaux domestiques. Une telle collection de matière sébacée ne. peut être due qu'à cet écoulement de suif fondu de l'animal , sous un climat brûlant. Les autres animaux qui présentent au soleil des parties où le tissu cellulaire peut se gonfler, se dilater avec moins d'efforts par la chaleur, reçoivent de semblables dépôts de suif. Ainsi les bosses des chameaux, des dromadaires , sont le résultat de pareilles collections sébacées, de stéatômes naturels de leur dos, et non pas le produit des- longs frotte- mens dûs à la charge continuelle que portent ces chameaux et ces dromadaires , ainsi que le soutenoit Euffon. Le zébu ne devroit pas, en effet, sa bosse humérale à une pareille cause, puisqu'il ne porte pas de fardeaux, et vit même la plupart du temps sauvage , de toute antiquité. De la structure particulière des organes sexuels des lîottentotes bo»~ chismens , et recherche des causes de celte confurmation. Les premiers voyageurs qui revinrent du Cap de Bonne- Espérance , et surtout Kolbe , décrivirent complaisamment; un prétendu tablier de peau qui , selon eux , descendant du pubis des Hottentols , voiloit les organes que la pudeur doit dérober aux regards. On lit encore jusqu'au uiilieu du xviii.e siècle, des auteurs qui répèlent la même erreur, tandis que des voyageurs plus récens ont nié que ces femmes fussent autrement conformées , à cet égard , que celles d'Europe. J'ai fait remarquer cependant que le médecin Wilhclm Ten Rhyne , dans un petit ouvrage peu connu (i), avolt assez bien examiné la conformation des Holtentotes dès le xvii.= siècle ; il montra que ce prétendu tablier n'étoit qu'un pro- longement des nymphes ; mais il crut que ce prolongement étoit artificiel , parce qu'il avoit observé quelques-unes de ces nymphes digitées ou comme festonnées. Le respectable sir Joseph Banks, qui fit dessiner au Cap, d'après nature, ces organes dans une Hottentote , les regarda comme des grandes lèvres prolongées de six pouces et demi ; telle fut aussi l'opinion de Levaillant , qui figura ces lèvres allongées de six à neuf pouces dans une Hottentote , et artificiellement comme il le présume. Cette opinion prévalut sur celle de Querhoent et du capitaine Cook , qui avoient reconnu des nymphes plutôt que des grandes lèvres. Enfin Péron et Lc- sueur dessinèrent les organes sexuels d'une jeune Hottentote boschisman , et représentèrent, dans la figure qui nous a été communiquée par M. Lesueur, un appendice triangulaire , {i) De promontorio Bonœ Spei\ chap. x , pag. 33; Schaffoiisc 1686, //Z-8.0 Voyez Dict. des Sciences me'd., art. Femme, ^ag. 514, SG H O M charnu, rugueux, brunâtre, tenant par un pé<îicule à la commissure supérieure des grandes lèvres, s'élargissant et se divisant par le bas en çleux branches qui pendent d'ordinaire et recouvrent la vulve. On peut les écarter; alors cette partie prend une figure triangulaire de quatre pouces environ. Les filles apportent en naissant cet appendice qui s'accroît avec l'âge et se perd dans les alliances des Hottentotes avec d'au- tres races humaines , ou avec les Hottentots civilisés. Dans la Hottentote disséquée au Muséum d'Histoire na- turelle, et dont les organes sexuels ont été modelés en cire colorée, d'après nature, le prétendu tablier n'est rien autre chose que les deux nymphes prolongées et saillantes de chaque côté hors des e;randes lèvres qui sont presque nulles. Ces nymphes réunies par le haut forment une sorte de capu- chon ou prépuce au clitoris. Ces nymphes, brunes à Tex- térieur, d'un rouge noirâtre à l'intérieur, longues et larges déplus de deux pouces, couvrent l'entrée de la vulve et du méat urinaire ; elles peuvent se relever au-dessus du pubis , à peu près comme deux oreilles, car elles adhèrent moins vers la région inférieure ou près du périnée. Quoique le prolongement ou la saillie des nymphes ne soit pas rare chez plusieurs femmes blanches, elle est plus fré- quente dans toutes les femmes de la race nègre, au p,oint que beaucoup de celles-ci sont obligées, en certains cantons d'Afrique, de retrancher la grande saillie de ces organes, comme on circoncit le long prépuce chez plusieurs nations des pays chauds. V. plus loin ce que nous disons de la circuncision L'on voit pareillement se prolonger les lobes des oreilles, se gonfler ou s'étendre les lèvres , le mamelon du sein aux hommes et aux femmes des régions voisines de Téquateur. Une humidité constamment chaude qui y domine , permet l'extension facile de toutes ces parties ramollies ou presque sans ressort de contractilité , et la force d'accroissement y porte une surabondance de nutrition. Ces faits se remarquent même chez des végétaux. Les géranions «du Cap de Bonne- Espérance , distingués par les botanistes sous le nom gé- nérique Ae pelargoniuw, etc., ont une fleur irrégulière, parce que les deux pétales supérieurs étant les plus échauffés du soleil , prennent un accroissement plus prompl el plus fort <]ue les pétales inférieurs ou ombragés ; de même les trois étamiincs inférieures avortent souvent par la même cause , et font paroîtreheptandriques ces fleurs naturellement décan- driques, comme celles d'Europe plus régulières, parce que la chaleur, moins intense, se distribue plus uniformément. Les fleurs personnées , irrégulières , ou en gueule , des bi- gionias , àcs sésames , des labiées, et mille autres, surtout H O M 87 des pays chaacls , doivent peut-être cette irrégularité origi- nelle aune croissance inégale de leurs parties; car ce sont toujours les parties supérieures de ces fleurs , ou les plus échauffées du soleil, qui se gonflent, se dilatent, se voûtent, tandis que les parties inférieures restent pe^|les , étroites oa même étiolées, et plus pâles , faute de chaleur et de lumière égale. La même cause qui agit sur les végétaux d'Afrique ne peut pas demeurer étrangère à l'espèce humaine aussi ex- posée qu'eux, sous le môme climat, aux influences perpétuelles <î'un ardent soleil. Les pétales sont les nymphes de la fleur , comme dit l'ingénieux Linnceus , et le prolongement des unes est analogue à celui des autres; la chaleur y porte un surcroît de nutrition et de force : il ne seroit pas difficile de trouver encore dans ce développement des organes sexuels, l'origine des passions furieuses qui s'allument chez ces êtres; ils riva- lisent même dans leurs excès avec l'impudente hrutalité des singes et d'autres animaux lascifs. AV. Ten Rhyne dit que les hottenlôts voient leurs femmes par derrière. Ce déploiement des organes sexuels et des passions qui en résultent, contribue sans doute encore à diminuer les fa- cultés morales et intellectuelles des peuples de ces régions ; il peut conduire à l'explication de l'infériorité naturelle de la race nègre à l'égard de celle des blancs, sous les rapports des talens et de tous les genres d'industrie. Nous y remarquerons une cause puissante qui ravalera toujours l'homme noir vers l'animalité , bien qu'il demeure notre égal aux yeux de l'hu- manité et de la nature. En effet , si nous examinons les femmes de la race , ou plutôt de l'espèce nègre, nous leur trouverons généralement une disposition plus grande à la lascivelé, et même une con- formation particulière dans les organes sexuels. Comme cette espèce d'hommes est moins propre au développement des fa- cultés intellectuelles, elle est aussi plus disposée aux fonctions purement physiques ( Voyez Nègre), et la plupart des nègres sont benè mutonaii (^ Biumeuhach, Gen. hum. i>ar. nal.^ P^g» 24.0). Les négresses sont pareillement conformées dans la même proportion. Toutes ont , comme on sait , une gorge très-volumineuse, et bientôt molle et pendante, même dans les clifriats où Ton ne peut pas en accuser la chaleur atmos- phérique, comme au nord des Etats-Unis. Mais ce qui paroît surloutles distinguer delà raceblanche, c'est ce prolongement naturel des nymphes, et quelquefois du clitoris, bien moins commun chez les femmes blanches que chez les négresses. Il en est résulté, dans plusieurs pays, la coutume ,. ou plu- tôt le besoin de retrancher ces prolongemens incommodes. C'est un caracière particulier à plusieurs femmes d origine S3 HO M égyptienne ou copte ( qui descendent de la race nègre ) , de porter au pubis, dit Sonnini ( Voyag. en haute et basse Egypte y Paris, 1799, in-8,'^, tom. i ), une excroissance charnue, épaisse , flasque et pendante , recouverte de peau ; l'on s'en formera une id^ assez juste, si on la compare, pour la gros- seur, et même pour la- forme, à la caroncule pendante dont le bec du coq d Inde est chargé. Cette caroncule allongée prend de l'accroissement avec Tàge ; je l'ai vue, ajoute l'au- teur, longue d'un demi-pouce à une fille de huit ans; elle auroit eu plus de quatre pouces chez une femme de vingt à vingt-cinq ans. C'est dans le retranchement de cette espèce de difformité gênante que consiste la circoncision des filles : on les circoncit de sept à huit ans, au commencement de la crue du Nil. Ce sont les femmes de la haute Egypte qui font cette opération ; elles crient dans les rues du Kaire : A la bonne circonciseuse. Un rasoir et une pincée de cendres suffi- sent pour cela. Un semblable usage existe chez les Syriennes, les Arabes ; et l'on voit dans Niebuhr ( Beschreilung von Ara- lien^ pag. ']'] ^ et seq. ), le dessin d'après nature d'une fille arabe de dix-huit ans , circoncise. On pense, dans le pays , que l'effet de cette circoncision a pour but d'empêcher l'amas dusmegma blanc et fétide qui se sécrète entre les nymphes des femmes, comme sous le prépuce de Thomme ( Osiander, Ib. tom. II, tab. VI, fig. i); mais Belon observe {Obs., pag. 4.26 ) , que toutes les femmes coptes ont des nymphes natu- lurellement fort longues ; Thévenot ( Voyag. , tom. 11, chap. 14.), l'a remarqué chez les Mauresques ; c'est une pratique générale au Bénin (Léon, Àfric. lib. m ), et en Ethiopie, et si connue depuis les âges les plus anciens, que tous les au- teurs en ont parlé ( Paul d'Egine, lib. vi ; Aëtius , TetrabtbL lib. IV, serm. 4-, cap. io3 ; Galien , Us. part.; Moschion, Sui- das, Lexic. , pag. 81; mais surtout les médecins arabes, Albu- casis, lib. i i, cap. 7; et Avicenne, lib. m, fen. 21, tract, iv, cap. 24, au mot albathara, c'est-à-dire, le clitoris; car cet auteur veut qu'on le retranche lorst[ue les femmes peuvent en abuser par sa longueur; fen. 21 , tract, i , cap. 28. Voyez aussi Mathias Zimmermann, De Mthiopum circumcis. cap. 9). De la Virginité. C'est une opinion répandue de toute antiquité dans le genre humain, que la chasteté est l'une des vertus les'pluséminentes, et qui nous rapproche le plus de la perfection. L'acte de la gé- nération est lié, chez tous les hommes, à l'idée d'une fonc- tion brute et purement animale , qui semble dégrader notre espèce et nous rabaisser au rang de la bête. Toutes les reli- gions ont même consacré la pureté du corps, et exigé le sa- crifice des voluptés corporelles ; ainsi , dans plresque tous les H O M 89 pays , les ministres des cultes, les personnes rlévouées aux au- tels, font souvent vœu de chasteté , et s'imposent le devoir d'immoler les plus douces affections de la nature. Cet effort de tempérance et de vertu, qui annonce l'empire de l'âme sur les sens, se faitioujours admirer des hommes, parce qu'il annonce une nature supérieure et un caractère sublime, qui rapprochent Ihomme en quelque sorte de la Divinité. II est certain que la chasteté conservant la vigueur des fonc- tions vitales, etreportantdans tous les organes celte surabon- dance de vie, qui se concentre dans les parties génitales , doit augmenter l'énergie de toutes nos fonctions. C'est aussi ce qu'on observe parmi les hommes, car l'abus des voluptés et la profusion de la liqueur séminale , produisent bientôt sur eux des effets très-analogues à ceux de la castration , comme lim- puissance , l'affoiblissement , l'abattement de l'esprit , la pu- sillanimité de l'âme , cette timidité de l'imagination qui grossit les moindres dangers , et succombe aux craintes les plus fri- voles. Au contraire , les hommes les plus célèbres par la gran- deur de leur génie , par l'élévation de toutes leurs facultés morales etintellecluelles, sont ordinairement chastes. Legrand Newton mourutvierge, dit-on ; les plus fameux philosophes de l'antiquité , les personnages illustres parleurs talens et leurs vertus , sont pour la plupart bien moins adonnés aux plaisirs de l'amour que les autres hommes ; et un gratid nombre d'en- tre eux ont vécu dans le célibat, ou n'ont produit que des enfans indignes d'eux. Par la même cause , plus les mœurs d'une nation se dépravent , moins celle-ci produit d'hommes célèbres. Les êtres les plus frivoles et les plus incapables de tout, sont précisément ceux qui ont consumé le plus leur vie au sein des voluptés. La vigueur du corps suit les mêmes rapports que Télévalion de 1 esprit ; ainsi les athlètes vivoient dans le célibat pour conserver leurs forces, et Moïse défendoit aux Hébreux de s'approcher de leurs femmes lorsqu'ils dé- voient aller à la guerre. « Soit que l'estime due à la virginité vienne de l'observation de ses effets sur le corps humain , soit qu'elle émane des opi- nions religieuses , même dans les climats où cejles-ci encou- ragent la multiplication de l'espèce, on la trouve par toute la terre. Chez les peuples sauvages, tels que les nègres, les na- turels américains, les insulaires de la mer du Sud , etc., qui n'ont point d'autre système religieux que le fétichisme ou la loi naturelle , la chasteté n'est pas aussi reconuiiandée ; mais l'innocence des mœurs la maintient , au défaut des lois qui la prescrivent. A mesure que l'ardeur des climats augmente la dépravation des mœurs, les inslicultons religieuses et civiles se liguent da- go H 0 M vantage pour maintenir le frein des passions. II est , dans le droit civil lie l'Asie , d'exiger le témoignage de la virginité dans les mariages. Les Hébreux , les Egyptiens , les Persans, les Turcs , les Hindous, les Chinois, les Arabes, les Maures et même les Tartares , etc. , demandent comme condition es- sentielle de l'union conjugale, une marque de défloration, comme l'effusion de quelques gouttes de sang. C'est la cou- tume dans l'Orient, de montrer, le lendemain des noces, les draps ensanglantés de la mariée , comme un signe infail- lible de sa virginité. Cet usage existe même encore dans quel- ques lieux d Espagne, où les Maures Tont introduit, dans plu- sieurs cantons d'Allemagne, et surtout en Moscovie. Une femme chasie peut bien cependant ne pas présenter ce té- moignage douteux, soil que ses organes sexuels soient natu- rellement dilates , soit qu ils le deviennent à la suite de la menstruation qui relâche toutes ces parties. La présence de la membrane de Thymen (^Foyez l'article Hymen) , n'est pas toujours un caractère authentique de virginité ; car certaines filles chastes peuvent l'avoir très-peu apparente , et des filles déOorées la conservent quelquefois intacte. Le frein de la verge est aussi une sorte de membrane de l'hymen dans l'homme, La virginité du corps supposoit la pureté de l'âme , chez la plupart des anciens ; aussi les prémices des jeunes filles étoienl consacrées aux dieux, Slrabon et Agathias rapportent que les Arméniens immoloienl la virginité de* leurs filles à l'idole Anailis. Saint Augustin, Arnobe et Lactance assurent que les Komains consacrèrent un temple à Priape , où les vierges étoient obligées d'apporter leurs prémices. Les Canarins de Goa suivent encore celle coulu;iie aujourd'hui. Ce qu'il y a de plus bizarre dans toutes ces opinions, c'est que chez d'au- tres peuples , comme à Madagascar et en divers lieux d'A- frique , on fait si peu de cas cïe la virginité , qu'on reg rde comme une œuvre servile la peine qu'on prend de la cueillir. Ces peuples s'imaginent qu'une feinpie olire la preuve de son peu de mérite en demeurant vierge, et les plus débauchées , selon eux, sont précisément les plus piquantes à leurs yeux. Ces opinions , toutes contradictoires qu'elles nous paroissent,. sont assez ordinaires dans les hommes. Comme la virginité n'a qu'un prix imaginaire , et d'au- tant plus grand qu'il est plus rare , les habilans des pays, chauds, où les femmes sont si faciles , ont cherché tous les moyens de s'assurer de leur chasteté. Ils les renferment dans des hareais, ils leur mettent même des ceintures qui dé- fendent toute approche à la jouissance. ( Voyez l'article Ceinture.) Dans quelques pays on réunit, par une cou- ture , dès l'âge le plus tendre , les parties sexuelles de la H 0 M 91 femme , en ne ménageant qu'une très-petite ouverture pour la sortie des évacuations naturelles ; et , à l'époque du ma- riage , il faut diviser ces mêmes parties qui se sont soudées. Plusieurs peuples , tels que les Egyptiens, les Ethiopiens, les.Péguans , etc. , coupent les nymphes des femmes, que la chaleur du climat fait allonger; et plusieurs médecins arabes, tels que Avicenne , Albucasls, prétendent même qu'on leur retranchoit le clitoris. Le Eu^'UQUES ( Voyez ce mot) n'ont été mutilés que pour servir la barbare jalousie des Asia- tiques , et devenir les gardiens des voluptés de leurs maîtres. La virginité, dans les hommes, n'a eu pour objet que d'en obtenir quelques avantages. Ainsi les anciens Romains infi- buloient leurs histrions pour conserver la délicatesse et la flexibilité de leur voix. L'infibulation est l'introduction d un anneau ( appelé ^ÔM/a) dans un trou qu'on fait au prépuce des hommes, pour leur ôter la liberté de jouir. Dans l'Asie, des santons, des derviches, des marabous, des calanderset d'autres religieux, se condamnent volontairement à porter d'énormes anneaux à leurs prépuces, et l'on assure même que les dévotes viennent pieusement baiser ces marques vé- nérables de leur continence. V. Infibulation. Si la cbasteté est une vertu, son abus peut entraîner des inconvéniens graves , surtout lorsqu'un tempérament ardent exige impérieusement qu'on cède au vœu de la nature. Ainsi les femmes consacrées au célibat , par religion ou par choix , sont exposées à être attaquées de cancers au sein ou à la ma- trice. Les plus cruelles maladies nerveuses, telles que la fureur utérine, l'hystérie, les délires éroùques, les spasmes attaquent principalement celles qui se refusent pendant toute leur vie à l'amour. Beaucoup d'affections dangereuses frappent les hommes qui se vouent à une continence trop sévère , telles que la manie , Tépilepsie , etc. Mais les dangers produits par les abus de la volupté, sont beaucoup plus à craindre. La nature sait d'ailleurs se débarrasser d'elle-même d'une humeur séminale trop abondante , dans les illusions des son- ges , chez l'un et l'autre sexe. Cette évacuation est même exclusive à l'espèce humaine , et ne s'observe dans aucun des animaux , soit qu'elle dépende de l'activité de notre ima- gination , soit qu'elle vienne de l'abondance des alimens , et d'une sensibilité plus grande que dans toute autre espèce d'ê- tres vivans. De la Circoncision. L'on prétend que la plupart des Orientaux auroient le pré- puce naturellement trop long , et fort gênant dans l'union sexuelle, s'ils n'avoient pas la précaution de le retrancher; y, H 0 M car la chaleur dilate toutes les parties du corps ; ainsi les ma- melles des femmes s'allongent et s'affaissent d'autant plus que les climats sonl plus ardens. Il en est de même de leurs par- ties sexuelles , puisque les nymphes et le clitoris des femmes de l'Orient sont beaucoup plus développés que dans nos cli- mats ; cet accroissement est semblable à celui des plantes et des fleurs , qui sont beaucoup plus grandes et plus vigou- reuses, à mesure que la température est plus douce , et le sol plus prospère , comme nous l'avons dit ci-devant au sujet des Holtentotes. On a dit encore que l'allongement du prépuce pouvoit s'op- poser à la libre sortie de la liqueur séminale dans le devoir conjugal , et c'est à la circoncision qu'on a attribué la fécon- dité des juifs et des autres peuples circoncis (Bauer, de Causis fœainditatis gentis drcunirîsœ. Lips. 1719- 4-° )• Un autre motif a pu introduire cette coutume ; la propreté , si né- cessaire dans les climats chauds, exige qu'on ne laisse point amasser autour de la base du gland cette sécrétion blanche et case'euse que des glandes y versent continuellement, sur- tout lorsque la chaleur augmente leur activité. En effet , cette négligence , chez les Européens qui voyagent dans l'Orient , leur cause souvent des inflammations et des excoriations dou^- loureuses dans celte partie, à cause de l'âcreté de cette ma- tière ; au lieu que les Orientaux circoncis n'y sont point exposés , puisque l'absence du prépuce ne permet pas à cette humeur de séjourner et de s'accumuler sous ces replis. Toutefois, il me paroît que les religions de l'Orient n'ont introduit la circoncision que pour un but plus moral et plus utile au genre humain. Comme l'ardeur du climat développe rapidement les passions , et exalte à l'excès le sentiment de l'amour , les législateurs égyptiens , hébreux et arabes ont voulu mettre un frein à l'abus que l'homme peut faire de lui- même. Ils ont opposé des obstacles à la masturbation , si fré- quente et si meurtrière dans ces climats brulans, et chez les jeunes gens surtout (i). La propreté a pu nécessiter aussi la circoncision des fem- mes , c'est-à-dire l'amputation des nymphes trop longues et gênantes ; car il s'amasse aussi vers le clitoris de la femme une humeur acre çt stimulante , semblable à celle du gland de (i) Parmi ies aniinaux, ce vice n'est pas inconnu ; on voit souvent des singes s'y livrer à l'aspect des femmes avec la plus brutale et la plus dégoûtante impudence. J'ai vu l'ele'phant mâle de la Ménagerie de Paris se serrer la verge en érection entre ses jambes de derrière , et éjaculer une humeur visqueuse. F. nos articles Singes , Eléphant. Nous devons remarquer que tous les animaux ayant deux ma- melles pectorales , et la verge libre o» pendante hors d'uu fourreau, H O M 93 Uhomme , etlesjiymphes la recourrent en parlie. Cette rna- lière blanche , d'une odeur forte , est l'un des plus grands ex- cilans des organes sexuels. Aussi les personnes qui se tiennent tiès-propres , sont moins excitées pour l'ordinaire à l'acte de la génération, que celles qui ne prennent aucun soin. Dans les contrées froides , ou même tempérées, cette sécrétion est moins abondante, et cette matière moins Active ; aussi les or- ganes sexuels sont moins souvent stimulés que dans les pays méridionaux. Selon plusieurs voyageurs , les femmes de l'O- rient préfèrent les hommes incirconcis , parce qu'ils leur pro- curent plus de volupté. ( Nous traitons de la castration à l'article Eunuque. Voyez ce mot). I)e Vélat du Mariage. Il n'est pas bon que l'homme soit seul, dit le livre de la Ge- nèse , faisons-lui une compagne qui lui ressemble. Quand la per- pétuité de l'espèce n'exigeroit pas le concours des sexes , il ne seroit pas bon que l'homme demeurât seul. Voyez ces tristes célibataires , étrangers à toute famille, et consumant leur vie sans attachement , sans postérité , sans lien d'affection dans le monde. Si vivre c'est aimer, ils ne vivent point , ils traî- nent le fardeau de leur existence hors du bonheur domesti- que ; ils n'ont ni patrie , ni zèle du bien public ; ils sont exi- lés de la société humaine, et, renfermant leur vie en eux seuls, ils s'entourent d'une indifférence générale ; ils sont pour un état, ce que sont des pierres tombées de la voûte d'un édi- fice immense , et qui accélèrent sa ruine entière. Il me seroit facile de montrer combien le lien du mariage importe à la durée et au bonheur politique des sociétés hu- maines ; et comment le célibat et la violation du lien des fa- milles entraînent bientôt la chute desempires. Aquelgouver- nement , à quel pays peuvent appartenir des hommes que rien n'attache sur la terre ? Par cela même que le célibataire peut vivre indépendant , quelle sera sur lui l'autorité des lois et mœurs .'' Comment servira la patrie , celui qui n'en adopte aucune ? L'histoire gous montre , en effet, que les progrès de la dé- cadence des empires sont précisément en rapport avec la multiplication des célibataires. A mesure que la république comme tous les primates^ L. (les genres de singes, de makis, de chauve-souris) , et aussi l'e'iepîiant , senties êtres les plus inleliigens €l susceptibles aussi d'onanisme. M. Geoffroy a vu des rousseUes {pteropus de Brisson) se lécher le pénis pour cet edat. Les animaux qui ont le plus de cervelle sont plus lasciis que les autres; ainsi l'âne l'est plus que le cheval , les moineaux et petits oiseaux, plus que les oies, etc- 94. H 0 M romaine perdit de ses rigides vertus et de ses mœurs aus- tères, le nombre des célibalaires s'augmenta avec excès. Le sénat fit en v?.in des lois pour les obliger au mariage ; Tini- moralité publique , et la difficulté de faire subsister les fa- milles , à cause de Taccroisscment du luxe , s'y opposoient de plus en plus. Dans les pays pauvres, laborieux et pleins àe mœurs, il n'y a point de célibataires, parce qu'il est avan- tageux d'avoir des enfans pour cultiver la terre, et parce qu'on peut aisément nourrir une famille à cause de la fruga- lité et de la simplicité des mœurs. Dans les villes riches , et pleines de luxe et d'oisiveté , on se marie rarement par des raisons contraires. Voyez qui peuple le plus, à Paris, par exemple , des riches ou des pauvres. Les quartiers les plus misérables fourmillent d'enfans et de ménages; les quartiers ou règne l'opulence sont presque déserts. Les relevés com- paratifs de naissances , prouvent qu'elles sont bien plus nom- breuses , proportion gardée , dans les campagnes que dans les villes. 11 est démontré que la population des grandes villes de l'Europe, va sans cesse en diminuant, tandis que celle des campagnes s'augmente, et répare les hommes que dévorent ces gouffres de l'espèce humaine. A mesure qu'une nation marche vers sa décadence , le nombre des mariages diminue et la quantité des célibataires augmente; aussi la population s'y affoiblit sans cesse , tandis qu'elle se multiplie chez les peuples dans la jeunesse et la vigueur de leurs institutions. Voyez Rome sous la sagesse de ses consuls , et Rome abattue sous le despotisme de ses fé- roces empereurs. Voyez la Grèce au temps des Aristide , des Léonidas , et la Grèce corrompue du bas-empire. Les états despotiques sont remplis de monastères , de mendians , de religieux solitaires , d'hommes retirés du monde ; tous fuient une société sur laquelle pèsent la main des tyrans et le joug de l'arbitraire. Ce fut à la chute de l'empire romain que s'éta- blirent dans l'Orient et dans l'Europe des milliers de monas- tères. Comparez l'Espagne, le Portugal, l'Italie, peuplés de moines et de prêtres , aux contrées plus septentrionales de l'Europe , telles que l'Angleterre , la Suisse , la Hollande, la Suède, etc., où la population s'augmente chaque jour, et deviendroit trop considérable si elle ne relluoit pas au-dehors par de continuelles émigrations. Ainsi les hommes sont portés au mariage dans les pays li- bres , pauvres , et où les mœurs sont respectées; ils sont portés au célibat là où les mœurs sont corrompues, où ré- gnent le luxe et toutes les superfluilés de la vie. Les misérables se recherchent et sunissent; les ht ureux et les voluptueux aspi- rant après la variété des jouissances, redoutent les devoirs HOM g5 austères de père de famille. Le mariage prolége et soutient les mœurs, la société et ses lois ; le célibat engendre le liber- tinage , dissout les liens sociaux et se soustrait aux lois. Le premier domine dans les peuples sobres, laborieux et peu policés ; le second augmente de plus en plus à mesure que les gouvernemens oppriment davantage les hommes , que les lois et les religions perdent leur influence , que le luxe et la poli- tesse s'introduisent dans les nations. Le célibat entraîne né- cessairement à sa suite l'adultère et la prostitution , dont la multiplication dissuade de plus en plus les hommes du ma- riage. Cette promiscuité des sexes ôte aux enfans le respect qu'ils doivent à leurs parens , et aggrave la détérioration des mœurs jusque dans la racine des générations kumaines. La facilité des jouissances énerve les corps et abâtardit les âmes. La rareté dés mariages rend les pays déserts ; on ne cherche plus dans le lien conjugal que les avantages de la fortune ou des jouissances illimitées ; on craint de produire des enfans, soit à cause de la dépense qu'exige leur éducation, soit pour éviter l'embarras et les soins qu ils causent. L'esprit de ga- lanterie , en multipliant les rapports des sexes , engendre le luxe , la parure , la fureur des spectacles , des assemblées d'hommes et de femmes. Le dégoût , suite ordinaire de la fa- cilité des jouissances , cherche la variété ; enfin , blasé sur tous les plaisirs, l'esprit aspire après des voluptés désordonnées et criminelles. On remarque , en effet , que les vices les plus effrénés ne sont jamais plus communs qu'où les femmes sont les plus faciles et en plus grand nombre, comme dans les pays chauds et les empires despotiques. ( Voyez, mon Hisl. nat. du Genre humain^ tom. i , pag. 289.) On reconnoîtra aisément combien ces causes affoiblissent les nations , minent les gou- vernemens et énervent les hommes ; c'est aussi à cette époque que s'opèrent les plus grands changemens politiques et les ré- volutions les plus désastreuses. Tous les sauvages sont peu amoureux; mais à mesure que les peuples se policent, la galanterie devient plus fréquente et plus générale. On a remarqué que les nations qui connois- soie^e mieux le véritable amour, étoient aussi les plus belli- queuses. Aristote, qui a fait cette observation, cite en exem- ple les Grecs et les Gaulois. Le véritable amour ne se trouve que dans des âmes fières et généreuses ; il se nourrit d'espé- rances et de rigueurs , et s'éteint dans les voluptés. Aussi l'é- poque où ce sentiment produisit les plus éclatansprodiges,fut celle des croisades et de la chevalerie errante. Ce fut un âge d'amour et de guerre , choses qui semblent opposées et qui se réunissent presque toujours , comme si la nature se plai- gG H 0 T\T soit à mettre en contraste la mort et la vie , et à faire réparer par l'une les destructions de l'autre. Dans les conlEées polaires et tempérées, la nature n'ac- corile qu'une seule femme à chaque homme; dans les régions ardentes, elle a institué la polygamie en créanf plus de fem- mes que d'hommes. Le but de ces différences est sensible , car les habitans du Nord sont plus lents en amour, leurs femmes plus long -temps fécondes et moins exposées aux avortemcns que dans le Midi. De plus , les pays froids îîc doivent pas être aussi peuplés que les climats chauds, puis- qu'ils offrent moins de nourriture à leurs habitans. Les con- trées ardentes, en revanche, avivent à l'excès le sentiment de Famour; les femmes y deviennent bientôt stériles, et sont sujettes à l'avortement. D'ailleurs, la richesse et la fertilité du sol des pays chauds nourrit sans peine une grande quantité d'hommes. Parmi les températuresfroides,J'amourvient lard, demeure chaste et tempérant, et dure long -temps ; dans les pays chauds, il s'éveille de bonne heure, s'enflamme avec violence , et s'use bientôt. Un méridional pubère à douze ans, est usé à trente; mais un seplentrional pubère à vingt ans , peut engendrer au-delà de soixante ans. L ne Indienne qui peut concevoir dès l'âge de dix ans , est déjà vieille et cassée à vingt-cinq ans, tandis qu'une Islandaise qui connoît à peine l'amour à dix-huit ans , fait encore des enfans à cinquante. Si l'amour est plus précoce, plus violeiU etplus rapide au Midi, il dure aussi bien moins de temps que dans le Nord. Il faut donc que les hommes prennent à la /ois un plus grand nom- bre de femmes au Midi, puisqu'un seul honnnc peut en im- prégner plusieurs en peu de temps, et épuise bienlôi toutes ses facultés prolifiques. D'ailleurs, les femmes se fanent pronip- tement dans les pays chauds , et deviennent stériles ; il faut donc compenser le défaut de durée de leur fécondité par leur grand nombre. Aussi les générations se succèdent plus rapi- dement au Midi, et plus lentement au Nord. La jeunesse , la fraîcheur, la beauté des formes et la vigueur du corps se conservent long -temps chez les hommes et les femna|||s du Septentrion, parce que leur vie ne s'use que lentement ; nindis qu'elle s'écoule avec rapidité dans les contrées équatoriales, entraînant avec elle toutes les joies et tous les plaisirs du jeune âge ; aussi les méridionaux sont déjà vieux dès l'âge de la jeunesse, et les septentrionaux toujours jeunes dans l'âge même de la vieillesse. Les Européennes qui se marient dans les ïndes sont expo- sées, comme toutes les femmes des pays chauds, à périr de ménorragies ou d'hémorragies utérines ; elles avoitent fort souvent par celte raison. Comme l'activité de la ma- H O M 97 trice esl diminuée par le froid dans les contrées du Nord , la grossesse des femmes y est plus heureuse et moins exposée aux dangers ; elles produisent souvent des jumeaux ; leurs accouchemens sont suivis de moins de maladies , mais ils sont plus laborieux, à cause du resserrement naturel des par- ties par le froid. La grande ardeur des méridionaux est moins favorable à la multiplication de l'espèce, que le chaste amour des septen- trionaux. Les premiers cherchent plutôt à assouvir leur ar- dente passion; les seconds ne pensent qu'à satisfaire tranquil- lement un besoin ; de là vient que les uns centuplent leurs jouissances et s'énervent, tandis que les autres n'obéissent qu'à l'instinct et s'arrêtent aussitôt; c'est encore pour cela que les premiers engendrent plus de filles, et les derniers plus de garçons. Les peuples pauvres et chastes, tels que ceux des pays froids ou montueux, suivent le vœu de la nature sansl'ou- tre-passer par des excès, à la manière des nations corrompues et pleines de luxe qui habitent les pays chauds. Aussi la po- pulation s'accroît sans cesse chez les premiers , et diminue parmi les derniers , parce que rien n'est plus contraire à la reproduction que l'abus des voluptés. Voilà pourquoi les pros- tituées sont ordinairement stériles , car la multiplicité des jouissances en émousse la sensation; elle sème l'indifférence dans le champ des plaisirs, tandis que la chasteté aiguise les traits de la volupté. Comme l'ardeur des climats de la zone torride provoque les excès de l'amour et en fait prodiguer les délices , tandis que les pays froids rendent les hommes chastes , il s'ensuit que la multiplication de l'espèce hu- maine est proportionnellement moindre dans les contrées chaudes que dans les régions froides. Les zones tempérées et glaciales se surchargent donc dhabitans, lorsque les zones ardentes se dépeuplent progressivement ; mais comme les premières ne peuvent nourrir qu'un nombre borné d'habi- tans, à cause de la stérilité de la terre , au lieu que les se- condes offrent beaucoup de productions relativement au nom- bre des hommes , l'équilibre n'est plus maintenu , et il faut qu'il s'opère un refoulement des peuples du Nord dans les réglons méridionales. Il en est de même deshabitans des mon- tagnes par rapport à ceux des plaines. Pourquoi le Nord verse-t il de temps en temps ses redoutables enfans dans les fertiles campagnes de l'Asie méridionale ? L histoire compte onze irruptions des peuples septentrionaux dans le Midi , mais aucune ne s'est opérée en sens inverse. Les Ara- bes ou Sarrazins, qui ont pénétré si loin dans l'Asie et l'A- frique , n'ont pas pu s'avancer au-delà du midi de l'Europe , cl les Romains eux-mêmes n'ont jamais entièrement soumis XV. 7 98 H 0 TM les peuples septentrionaux. C'est , au contraire , des retrai- tes du Nord que se débordèrent ces fiers guerriers qui écra- sèrent l'empire romain, tels que les Golhs , les Huns., les Vandales, les Francs, les Saxons, les Normands et les Turcs. Ce sont les hordes tartares qui ont plusieurs fois inondé la Chine et Flndostan. Du sein des stériles montagnes d'Atou- rie , sortirent jadis les Chaldéens et les Assyriens , qui enva- hirent l'Indus jusqu'à la Méditerranée. Les pauvres et froides montagnes de l'Elymaïde furent la patrie des Perses, que Cyrus conduisit à la conquête de l'Asie ; et les Macédoniens sortis des tristes monts Rhodopes , suivirent Alexandre-le- Grand dans la Perse, l'Orient, l'Egypte et les Indes. Les rochers de la Suisse envoient leurs nombreux habitans chez les nations voisines plus opulentes, et dans des contrées plus fertiles. Les montagnes de la Savoie , des Alpes , de l'Au- vergne, se débarrassentpresque chaque année d'une surcharge de population; l'Ecosse, l'Irlande, l'Angleterre, les diverses nations du norl de l'Europe envoient une foule d'habitans en Amérique et dans les colonies , mais on ne voit aucun In- dien , aucun Asiatique , aucun Méridional émigrer dans les pays du Nord. Pourquoi les pays froids et stériles regorgent- ils d'habitans, tandis que les climats fertiles du Midi man- quent de consommateurs ? Pourquoi le Nord a-t-il été regardé comme la pépinière du genre humain, officlna gentium ? Nous venons d'en assigner les causes. On a essayé d'évaluer la somme totale des habitans de la terre; mais on n'a pu donner que des conjectures fort incertaines au lieu de faits positifs. La population ne change-telle pas par une foule de circonstances , telles que les années de di- sette et celles d'abondance , les temps de paix ou de guerre , les maladies, commf la peste , la petite vérole, la fièvre jaune, ou par des révolutions, des inondations, des tremble- lïiens de terre , etc..'' Qui calculera les habitans de tant d'é- tats et d'empires, dans des pays qu'on n'a jamais bien vus , tels que le centre de l'Afrique , de la Nouvelle-Hollande, les vastes contrées de l'Amérique, du cœur de l'Asie, etc.? On a dit au hasard que la terre pouvoit contenir neuf cent millions d'habitans. On en a passé cinq cent quatre-vingts millions à l'Asie en y comprenant les terres australes, la Nouvelle-Hol- lande et les autres îles ; et Ton suppose que la Chine en donne le cinquième (i) elle seule. L'Afrique en peut avoir, dit-on, quatre-vingts et quelques millions ; l'Amérique avec ses îles quatre-vingts millions , et l'Europe cent soixante mil- (i) Un aperçu officiel publié à Pékin , n'eii donue que cinquante- cin(j millions. H O M ,^5 lions. Quelle masse d'êtres vivans ! Quel mélange d'indivi- dus blancs, jaunes, rouges , bruns ou noirs, enfumés ou oli- vâtres , grands ou petits ; beaucoup d'ignorans , peu de savans, beaucoup de barbares, peu de policés, beaucoup . Espagne, tom. i » p. i3o); car le vrai moyen d'effacer les impressions mala- dives héréditaires, la goutte, les scrophules, la phthisie, etc., c'est de mélanger les races , de compenser le défaut d'un indi- vidu par l'excès de l'autre , et de répartir ainsi une égalité de forces bien proportionnées dans les constitutions. Les Juifs, en refusant de se fondre dans les autres peuples, se transmet- ÎT O M tent plusieurs dispositions vicieuses et des maladies cutanées; mais lis conservent aussi par ce moyen \it\xr fades hébraïque en tout pays. La monogamie paroît êlre une loi de lanaturehumaine dans les pays froids et tempérés. D'abord le nombre des femmes, loin dvsurpa-iserbabituellement celui des liomines, est même un peu moindre par les naissances. En France, il naît cent mâles pour quatre-vingt-seize femelles , ou un dix-seplième de mâles de pins, suivant Pomelles et Messance: en Angleterre, lorsqu'il naît dix-huil garçons, ily n.^î^di\-septfilles(Monlmor, Analyse des jeux de hasard^ 2.^ édit.) , ou même dix-septgarçons pour seize ûlles : le rapport est moindre dans certaines cir- constances; en Suède, ilnaît vingt-quatre mâles pourvingt-trois femelles ; à Pétersbourg, vingt-un garçons pour vingt filles ; à Paris , vingt-sept garçons pour vingt-six filles. Dans un dé- nombrement fait sur trente départemens en France, sous le ministère de M. Chaptal , on obtint vingt-un garçons pour vingt filles ( Voy. Peuchet, Statist. élém. de France , p. i32); à Toulouse , on a vingt-deux mâles sur vingt-une femelles (^Mêm. sao.élr. tom. iv, pag. 12 1); mais on a vu quelquefois à Paris vingt-neuf garçons sur vingt-huit filles ( Acad. des se. j 1752). Graunt établit qu'en Europe il naît, en général , quatorze mâles sur treize femelles. Sussmilch assure qu'il y a quinze garçons pour quatorze filles dans le nord de l'Amérique ( Goîdicli. oidnung^ tom. 11, p. 257). A la Nouvelle Espa- gne, il naît cent mâles et quatre-vingt-dix-sept femelles ( Humboldt, Essai polit, sur la Nouo.-Kfpog. , tome i , 187 ). On a dit que dans l'Inde orientale ilnaissoit cent vingt-neuf garçons et cent vingt-quatre filles (Sussmilch , iô., p. i56). C'est en admettant, contre toute probabilité, qu'on a pu ob- tenir des renseignemens certains sur le nombre des naissances des deux sexes, chez les Indiens et les Orientaux, où il n'y a nul registre d'éîat civil, nulle donnée probable de population dans le secret des harems; les Français même, maîtres de l'Egypte, n'ont pu faire de recensement exact à ce sujet. Il existe une grande perte d'hommes qui résulte, par toute la terre, soit des guerres et de la marine, soit des arts et métiers nuisibles ou dangereux , soit des accidens, des excès de tout genre plus fré- quens dans le sexe mâle; de sorte que le nombre des femmes devient égal et très-souvent Supérieur dans nos climats. En total, d'ailleurs, un nombre donné de femmes vil plus long- temps que le mc^me nombre d'hommes , dans le rapport de dix-huit à dix-sept, selon Kerseboom et Dcparcieux ( Tahl. , pag. 97), etpassé l'âge critique elles ont plus d espoir de vivre que nous. S'il meurt plus de femmes mafiées que de maris, de vingt à tronle-cinq ans , à cause des acciJeus des couches et àes maïadics qui en dcpendenl; il meurt plus de garçons que de fiilcs , et à peu près dix hommes pour neuf femmes , à Paris, à Londres et ailleurs. Kn 1778, il y avoit, suivant Mo- heau ( Rech. sur la pop. franc. , pag. 71), un seizième de fem- mes de plus que d'hommes en France. D 'Expilly en admet un quinzième, de même que Wargcntin l'observa aussi en Suède en 1763. A\enise , en 1811, il se trouvoit dix femmes pour neuf hommes ; il paroît qu'à Paris il en existe neuf pour huit hommes. Dans de plus chaudes contrées, le nombre de femmes augmente encore ; Kempfer rapporte qu'à Méaco , grande ville du Japon , il y a environ six femmes pour cinqhommes; à Quito de même, suivant Ant. Ulloa (^Relarion hist. del-viag.., tom. i,p. 372). M. Labillardière observa à peu près onze femmes pour dix hommes dans le sud de la Nouvelle-Hol- lande ( Voy. à la rech. delà Peyrouse , tom. 11, p. 4-9)- Chez les Guaranis, en Amérique, il y a environ quatorze femmes pour treize hommes, selon M. d'Azara. {Voyage en Amer, mé ■ rid. tom. 11, p. 60), Le major Pike a trouvé une bien plus grande proportion de femmes chez les tribus sauvages {Voyage au noui>. Mexique , tom. i , p. 227 ) ; car il y a dans quelques- unes de ces nations sept femmes pour six hommes , ou même douze femmes pour huit hommes ; et chez les Sioux, deux femmes pour un homme. Dans les grandes villes du Mexique, il y a cinq femmes pour quatre hommes (Humboldt, Essai poliiiq. , liv. 1 1 , etc.). Mais cet excédant de femmes est surtout considérable sur les cotes de Guinée et en diverses îles des Indes , comme à Java (Macartney , Voyage en Chine, tome n , pag. ^8), à Banlam (Stavorinus, Voyagea Batavia^ tom. m, page 5g), où les princes mêmes se font garder par des femmes armées; et sur les côtes du Malabar et du Bengale. Il faut considérer, comme l'a fait, avec raison, M. Chervin ( Rerh. méd. philos, sur la polygamie. Paris , 1812) , que la traite des Nègres en Afrique , que le commerce et la navigation dans l'Inde , em- portent un grand nombre d'hommes, d'où résulte en partie cette surabondance de l'autre sexe ; mais de plus , il y naît probablement un plus grand nombre de femmes que d'hom- mes, suivant presque tous les voyageurs, bien qu'on n'ait pas pu se procurer des dénombremens précis. On assure qu'il existe un sixième de femmes plus que d'hommes au Kaire , un cinquième dans l'Inde , un quart ou même un tiers de plus en diverses régions de l'Asie méridionale. La polygamie semble donc être, à plusieurs égards, dépen- dante de ce rapport du nombre des sexes, surtout dans les pa , ^ chauds , quoique les femmes n'y soient point trois fois io4 H O U plus nombreuses, comme le dit Bruce Ç Voyage aux sources du Nil , lom. I , pag. 322). Elle a même été en usage chez toutes les nations de la terre (Seldenus , de Po/ygamid ; et Pierius Valerianus, sous le pseudonyme Theophilus Alelheus, Polygamia iriumphatrix ^ Lond. , 1682, in- 4..", édit. de Tol- lius ); elle existe encore chez les Samoïèdes , les Kamtcha- dales, les Osliaques, lesTonguses et autres Sibériens, comme chez les sauvages du nord de l'Amérique, quoique dans des régions extrêmement froides. Jadis la monogamie n'a existé que chez les peuples policés de la Grèce, de Kome, et chez les Gaulois, les Germains , seules nations monogames en- tre les barbares. La bigamie fut même permise à Athènes ; et Socrate , ce qui est beaucoup pour un sage, avoit deux femmes. Il est vrai que, dans les contrées où la polygamie est léga- lement instituée , elle n'est pas générale , excepté chez les riches et les grands , qui peuvent sans peine acheter et nourrir plusieurs femmes; car le bas peuple, qui en a moins le moyen, est monogame , et ne prend une seconde épouse que lorsque la première a vieilii.Une des raisons pour lesquelles le christia- nisme ne fait pas autant de progrès dans les Indes que le ma- hométisme , c'est qu'il lutte contre la polygamie ; s'il est par- venu à l'abolir chez plusieurs Ethiopiens , les chrétiens du Congo l'ont conservée. Il n'est pas si ordinaire de trouver ia polygamie chez les peuples républicains que dans les gouver- nemens despotiques; cependant elle existe chez les Araucans, nation aristocratique du Chili. Il semble, en effet, que cette coutume résulte de l'abus du dcspostisme, car partout où elle est en usage, les femmes sont nécessairement esclaves et ache- tées par le mari. Ainsi dans tout l'Orient, il paye la dot ou le kallm aux parens desquels il achète la fille. Celle-ci n'est pas l'égale d'un homme qui , partageant son cœur ou plutôt ses plaisirs entre plusieurs épouses, n'a l'amitié parfaite d'aucune d'elles , et il les regarde moins comme ses compagnes que comme les instrumens de ses voluptés (Salluste , Jugurlh.^ n.° 82 ). Cette coutume est donc contraire aux usages des nations policées ; il en résulte enfin une sorte de barbarie dans toute société où la femme n'est point également admise à partager tout avec l'homme ; la polygamie n'est cependant pas con- traire à la naf-ure qui tend toujours à la plus grande reproduc- tion des êtres. En effet, la femme a des temps de menstrua- tion, de grossesse, d'allaitement, qui s'opposent d'ordinaire à de nouvelles conceptions ; elle est plus souvent stérile que l'homme n'est impuissant, et d'ailleurs celui-ci peut impré- gner, dans peu de jours, plusieurs femmes ; il semble que H 0 M , ,o5 la nature n'ait pas borné l'homme à une seule épouse, surtout SI l'on considère que celle-ci perd , dans les pays chauds principalement, plustôt que lui la faculté d'engendrer; ainsi, quand la polygamie ne seroit pas établie habituellement en ces régions, elle le deviendroit successivement. Saint Augus- tm même pense qu'elle n'est nuiiement contraire au droit naturel (Voyez aussi (irolius , Be jure hclli ac pacis , 1. n , cap. 5 , § 9). Les lois de Mahomet , de Zoroastre , de Con- fuciuset de tous les législateurs de l'Asie ont pourvu à cette pluralité des femmes, en les assujettissant beaucoup à rhommc pour conserver la tranquillité des ménages. Aucunes nations ne se sont autant policées que celles qui ont été monogames , et la polygamie a toujours retenu les peuples dans la servitude de l'ignorance ou dans la stupide barbarie de l'état sauvage. La polygamie légale suppose et nécessite le despotisme , parce que l'asservissement de la femme en est la suite , et que l'esclavage domestique se re- porte naturellement dans l'état civil. « Dans les républiques , « dit Montesquieu, les femmes sont libres par les lois, cap- « tives par les mœurs.... Dans les états despotiques , les femmes « n'introduisent point le luxe , mais elle's sont elles-mêmes un « objet de luxe ; elles doivent être extrêmement esclaves. Cha- « cun suit l'esprit du gouvernement , et reporte chez soi ce « qu'il voit établi ailleurs» ( Esp. des Lois , 1. vu , c.'ix.). Le même auteur dit encore; « Les femmes ont peu de retenue « dans les monarchies, parce que la distinction des rangs les " appelant à la cour, elles y vont prendre cet esprit de li- « berté qui est le seul qu'on y tolère.... et comme leur foi- « blesse ne leur permet pas l'orgueil, mais la vanité , le luxe « y règne toujours avec elles. » Il suit de tout ce que nous avons dit: i.° que les pays froids, pauvres , grossiers , et les états républicains , sont les plus favorables à la multiplication de l'espèce humaine ; 2." que les monarchies, les climats tempérés, les sociétés policées, les pays médiocrement fertiles , lui sont moins avantageux; 3.0 enfui , que les empires despotiques, les climats chauds et très-fertiles, les nations polygames lui sont contraires. Dans le premier cas , les hommes deviennent laborieux , actifs et de mœurs très-simples ; dans le 2.^ , ils sont habiles, industrieux et de mœurs polies ; dans le 3.^, ils sont fainéans, débau- chés et de mœurs corrompues. Ainsi l'état des femmes coïn- cide très-bien avec les formes des gouvernemens et la nature des climats; voilà pourquoi les changemens dans les mœurs, ou dans les rapports des sexes , tendent à en produire d'ana- logues dans les constitutions politiques. Par exemple , les gou- vernemens favorables à la liberté étant naturellement très-fé- loG H O M conds en hommes, sont nécessaîremeni ou conquérans , ou guerriers (i) , ou commerçans, parce qu'il leur faut en quel- que sorte un cautère qui les débarrasse de cette pléthore de population ; la Grèce ancienne , Rome , et aujourd'hui la Suisse et la France (2) pour la guerre ; Carthage , Venise , la Hollande , l'Angleterre (3) pour le commerce , nous en offrent la preuve. Les empires despotiques étant nuisibles à la multiplication de Tespèce humaine , sont foibles et expo- sés à être conquis. Ainsi , Rome république fut conquérante ; Rome , esclave sous sesempereurs,perdittoutesscsconquêtes. Ainsi les empires despotiques d'Asie ont souvent été subju- gués par une poignée de guerriers Tartares. Les républiques, semblables à l'homme dans sa jeunesse , tendent à se fortifier et à s'agrandir; les états despotiques , de même que le vieil- lard , s'affoiblissent et se concentrent. Ainsi la plupart des gouvernemens établis sur la terre , ont commencé par un état plus ou moins libre , et finissent tous par l'esclavage qui est comme la vieillesse et la mort des institutions politiques, en même temps qu'il dépeuple la terre d habitans , et tarit la source des générations. Les hommes sont plus rarement impuissans que les femmes- ne sont stériles ; au contraire, on remarque que l'avortement est presque toujours la suite d'une trop grande irritation de l'utérus; aussi les femmes d'une complexion très-ardente, les messalines font rarement des enfans. Dans les contrées du Midi , les organes sexuels entrent fréquemment en exci- tation , et les femmes sont très-exposées à des hémorragies utérines qui, décollant le placenta, causent presque toujours l'avortement. L'ardeur du climat introduit ensuite ces mons- trueuses et criminelles voluptés qui répugnent à la nature , et que les législateurs ont voulu proscrire, en recommandant expressément aux hommes de faire des enfans, et de rendre le devoir conjugal à leurs femmes. ( Voyez le Coran de Mahomet , le Zeiid-A\>esla de Zoroastre , les luis de Moïse , les cinq Kings des Chinois, et tous les Codes religieux de l'Asie.) Lés relevés de naissance , dans les différens pays de l'Eu- rope , ont constaté , i.° que les villages et les bourgs où se (1) Qu'on nous explique poiircjuoi la population s'est augmentée en France pendant cette re'volution qui a coûté la vie à tant d'hommes ! (2) La France seia toujours portée à un gouvernement tempéré, qui ne doit être ni une république pure et démocratique, ni une mo- narchie trop voisine du despotisme. L'histoire de France elles révo- lutions de ce pays le témoignent, aussi bien que le caractère naturel de ses peuples et la liberté dont y jouissent les femmes. (3) L'Angleterre est une république monarchique, dont l'espiit tst le commerce, à cause de sa sitasllon dans une île. H O M ,07 trouvent beaucoup tle bas peuple el peu de gens ricbes, éloient plus féconds que les villes opulentes ; 2.° que les années de disette étoient nuisibles à la population ; 3.° que les mois les plus heureux pour la fécondation des femmes, étoient ceux d'été et du printemps ; 4.» que dans nos pays , il falloit compter une naissance par vingt-cinq personnes , ou un peu plus ; de sorte que le nombre des naissances surpasse celui des morts , qui est un trente-cinquième dans les villages , et un trente-deuxième dans les villes; enfin des relevés pu- bliés récemment sur la population de la France , annoncent que la fécondité y a élé proportionnellement plus grande pendant la révolution qu'auparavant. L'expérience a montré que les nations agitées par des révolutions qui tendent à la liberté , comme dans la Grèce et Rome ancienne , se pcu- ploient davantage que les nations les plus pacifiques : c'est pourquoi Tite-Li ve s'étonne que Rome république ait pu four- nir tant de soldats , tandis qu'elle en produisoit si peu sous le règne tranquille et affermi d'Auguste. On diroit que l'esprit guerrier et turbulent des peuples les rende plus prolifiques que ces nations douces etefféminées parle calme d'une longue ser- vitude; aussi les états les plus agités, c'est-à-dire les pluslibres, sont plus chargés de population que tous les autres , et les royaumes les plus absolus sont les moins peuplés; témoin l'Espagne comparée à la France , à la Suisse , à la Hollande , etc. Les pays pauvres s'accroissent en hommes , comme la Russie , la Suède ; les pays pleins d'or et de richesses de luxe, comme l'Espagne, le Portugal , etc., vont en se dépeuplant. Aussi les villes opulentes consomment la population , les villages misérables l'augmenlent. En Russie , les naissances sont annuellement le douzième ou le quinzième de la popu- lation, et il ne meurt quelquefois qu'un quarante-cinquième ou un cinquantième des vivans : ainsi les naissances doublent les morts. Cet état, déjà colossal , augmente journellement avec une rapidité effrayante. Quelque jour , devenu trop peu- plé pour le rapport de son territoire , il fera sortir de son sein des peuples entiers qui viendront, à main armée , inon- der le Midi. La Russie engloutira l'Europe , et de grossiers Cosaques rempliront nos régions civilisées, comme au temps de la chute de l'empire romain, (i) De la Grossesse^ de T Accouchement et de F Allaitement. Lorsque la femme a reçu dans son sein le germe d'une nou- relle existence , de grands changemens se manifestent dans sa constitution. Toutes ses puissances de vie viennent se réunir dans sa matrice. Son visage se décolore , l'éclat de sa peau se (i) Ceci étoit écrit eu l'àvo , à ia pieniicie édition. io8 H O M ternit, son estomac affolbll rejette souvent les alimens, sur- tout le matin; les forces du corps sont abattues, Tespril et la gaité sont remplacés par le caprice , le dégoût universel , la langueur , et par cette tendre mélancolie si attrayante pour des âmes sensibles ; toutes les sécrétions du corps sont alors diminuées ou suspendues. La femme n'est plus dans elle- même ; elle est toute dans son utérus , où l'activité du sperme humain appelle , concentre les forces de la vie. V. les mots Màïiiice et Menstrues. Un saisissement , un frisson est le signe le plus ordinaire de la conception ; cependant quelques femmes avouent n'eu avoir jamais éprouvé ; d'autres se sentent transportées d'une joie extraordinaire. Celles qui ne ressentent rien , sont ordi- nairement d'un tempérament {legmatique et difficile à émou- voir ; aussi la conception manque souvent chez elles , à cause du défaut d'excitation de leur matrice. Après l'imprégnation , l'orifice de l'utérus se ferme , et ne laisse plus sortir les évacuations menstruelles. Il y a ce- pendant des femmes d'une complexion très-pléthorique , qui voient encore leurs règles pendant les premiers mois de la grossesse ; cette observation se présente même assez fréquem- ment chez les femmes du midi de la France ; mais cette cons- titution du corps est communément nuisible au foetus , soit en le privant d'une partie de sa nourriture , soit en exposant le placenta à se décoller, ei à causer ainsi l'avortement. On a d'ailleurs observé que l'utérus ayant une fois avorté , contractoit, dans les conceptions suivantes, de la tendance à cette habitude qui est plus dangereuse que l'accouchement na- turel , à cause des hémorragi' qui en sont les suites ordi- naires. La femme est plus exposée à cet accident, que les fe- melles des animaux , i.° à cause de sa position droite qui tend à décoller l'œuf humain de ses adhérences avec la matrice ; 2." par l'habitude des hémorragies menstruelles; 3.° par l'a- bus des plaisirs de l'amour pendant la grossesse ; intempé- rance inconnue à la plupart des femelles des animaux qui re- poussent le mâle lorsque la conception est opérée (i) , et qui ^ n'imitant pas la fille d'Auguste , ne reçoivent plus de passa- gers, quand le navire a sa cargaison; 4-° enfin par un genre de vie trop échauffant , trop nourrissant , par l'usage des li- queurs irritantes , ou par des passions trop vives, etc. 11 est rare que la superfétaiion ait lieu ; on en trouve cepen- dant des exemples ; tel est celui rapporté dans les Transaclious philosophiques , d'une femme européenne , de race blanche , (i) La jumeiil ne refuse pas alors ie mâle ; ni la haze , la lapine et d'autres menues espèces sujettes à la superfetation. H 0 M ,o|, comme son mari , et qui accoucha dans une colonie anglaise, de deux enfans , dont l'un étoit blanc , et l'autre mulâtre. Elle avoua qu'un nègre avoit eu commerce avec elle après son mari. Quand une femme accouche de deux jumeaux, ceux-ci peu- vent avoir été engendrés par un seul acte , comme dans les fe- melles multipares. Quoique la menstruation soit une marque de fécondité , on a cependant vu des femmes devenir fécondes sans avoir été réglées ; et par une raison contraire, toute cessation de règles n'est pas un caractère certain de grossesse , puisqu'il y a des affections qui suspendent la menstruation ; telles sont les pâles couleurs et l'aménorrhée des filles nubiles. Ces maladies sont causées par un défaut d'activité de l'organe utérin; aussi les remèdes stimulans , et principalement le mariage , guérissent ces sortes de maladies. Comme nous exposons , à l'art. Génération , la manière dontiip' opère le développement de l'embryon et Taccroisse- ment du fœtus, nous n'en parlerons pas ici. Vers le troisième mois de la grossesse , les mouvemens du fœlus sont déjà sensibles pour la mère ; les anciens physiolo- gistes , tels qu'Hippocrate et Aristote , avoient pensé que les fœtus femelles se développoient plus lentement ; de sorte que leurs premiers mouvemens n'étoient guère sentis par la mère qu'après le quatrième mois. Ces mouvemens sont causés par les diverses situations que prend l'enfant dans la matrice , ou il se tient ordinairement replié en boule , pour être moins gêné. Nous devons remarquer que tous ces mouvemens sont pro- duits par l'instinct et non par la volonté , parce que le jeune animal n'ayant encore aucune idée , ne peut agir que machi- nalement , comme lorsque nous nous retournons dans le lit pendant notre sommeil. En effet , le fœtus est dans un état de sommeil ; et , de même que tous les animaux endormis , il se recourbe et rapproche ses membres , comme pour se tenir plus chaudement. Tout le monde sait que le terme naturel de la grossesse est de neuf mois , à quelques jours près en plus ou en moins. Les anciens prétendoient que les enfans mâles, étant plus tôt formés que les femelles , sortoient aussi plus tôt du sein maternel. Ils croyoient que les individus femelles provenoient d'une sorte d'imperfection ou de foiblesse de la nature , ce qui exigeoit un plus long espace de temps pour leur formation entière et parfaite. On a beaucoup cherché jusqu'où pouvoit s'étendre le plus long terme de la grossesse , afin de pouvoir décider jusqu'à quelle époque un enfant né après la mort d'un mari, pouvoit être considéré comme son fils. (F. Gestation.) On a demandé encore si un enfant né peu de mois après le ma- îiô H 0 M riage , pouvoit avoir été procréé depuis la célébration du mariage. Ces cas de médecine légale intéressent la morale et les lois civiles-, ils prononcent sur Texistence sociale d'un particulier, décident si la femme est adultère , si la fille a été séduite , ou l'enfant illégitime. Le résultat de l'observation des faits a été souvent contesté par les parties intéressées, comme en toute autre affaire litigieuse ; les lois ont mieux aimé interpréter bénignement les faits, que de les observer à la rigueur, afin d'éviter le scandale des mœurs, de ne pas compromettre le sort des particuliers, ou crainte de trou- bler la paix des familles. Ainsi , Ton a porté à dix mois (et même à onze et douze en certaines occasions) la durée de la gestation, et un enfant né six à sept mois après le ma- riage ( ou même beaucoup plus tôt ) a été considéré comme légitime. 11 est vrai que des enfans naissent fort souvent avant terme et sont viables, surtout après le sixième mois; on a i||ême observé des enfans qui ont long-temps vécu , quoique nés au sixième et au cinquième mois. Le célèbre médecin génois Furtunlo Liceti étoit né à cinq mois , et son père , aussi mé- decin , Tavoit élevé avec beaucoup de soins dans du coton , en le tenant dans une chaleur douce , et en lui faisant sucer du lait sucré. Dans cet état, il dormit constamment jusqu'au complément de ses neuf mois, puis se réveilla alors, et vécut de même que les autres enfans. Dans la suite, il devint cé- lèbre par Ses profondes connoissances et par les ouvrages qu'il donna au public. Les anciens admettoient , je ne sais sur quel fondement , qu'un enfant né à huit mois ne pouvoit pas vivre, tandis que, seloneux, celuiné à sept mois pouvoit vivre. Il ne paroît point que l'expérience ait confirmé celte opinion. L'enfant a la tête tournée en bas , et la face du côté de l'os sacrum de la mère , à la manière de tous les animaux vivipares , parce que leur tête est la partie du corps la plus pesante; c'est de cette manière qu'il se présente dans les accouchemens ordinaires et les plus heureux. Il paroît que le retour périodique des règles influe beaucoup sur le terme des accouchemens , et le détermine le plus souvent. Lorsque le terme approche, le corps de l'enfant s'engage de plus en plus dans la cavité du bassin, l'orifice de la ma- trice, s'humeclant d'une liqueur muqueuse , se dilate peu à peu ; le vagin s'élargit; le fœtus hâte peut-être, par ses efforts, le moment de sa délivrance; enfin, les enveloppes qui le tenoient captif se déchirent, les eaux de l'amnios s'échappent, et l'enfant passe au milieu des douleurs les plus vives , et dont les suites coulent quelquefois la vie à sa mère. Ces dou- leurs ne sont pas continues; elles viennent par intervalles II O IM quelquefois assez longs, car on voit malheureusemeni unp souvent des accouchemens laborieux qui durent plusieurs jours. Uécoulement des eaux de Tamnios, ou le hain, facilite la sortie du fœtus; mais il arrive quelquefois que ses meui- Lranes ne se déchirent pas, et que Tœuf humain, se déta- chant tout entier , sort de la matrice. D'autres fois , l'enfant entraîne sur sa t^te une partie des membranes de l'amnios ou du chorion en forme de calotte: c'est ce qu'on nomme naître coiffé. H arrive, dans quelques cas, que l'enfant ne présente pas sa tête à l'orifice de la matrice, mais ses pieds, et qu'il sort de cette manière. Les anciens nommoient ceux nés ainsi agrippa. Quand l'enfant se présente de travers, les sages-femmes ou les accoucheurs tâchent de changer sa posi- tion ; mais il y a des circonstances critiques qui forcent de re- courir à des moyens plus violenspour sauver la vie de l'enfant ou celle de lamère. Si le bassin a une ouverture trop étroite , on essaie d'extraire l'enfant par Xt forceps , espèce de pince de fer. En d'autres cas , comme dans le déchirement de la ma- trice et la chute de l'enfant dans le bas-ventre, on pratique l'opération césarienne , qui consiste à ouvrir les tégumens abdominaux, et à retirer l'enfant. Quelques accoucheurs modernes ont conseillé, avec des succès plus ou moins attes- tés , la section de la symphyse du pubis, afin de procurer* l'écartement des os du bassin. Toutes ces opérations ne sont pas exemptes de danger; mais dans une circonstance criti- que qui met en péril la vie de la mère e^ celle de l'en- fant , il est cruel d'avoir à opter l'une ou l'autre. Cependant, je crois que l'humanité, la raison et les lois doivent préférer de sauver la vie de la mère plutôt que celle d'un être à peine vivant , et dont l'existence incertaine est même compromise par la mort de sa mère. La Genèse, livre très-philosophique, dit que Dieu con- damna la femme qui avoit goûté l'arbre de la science du bien et du mal, à un accouchement douloureux. L'allégorie, si c'en est une , comme l'ont cru plusieurs Pères de l'Eglise ( Saint Jérôme , etc. ) , est belle et juste. C'est la vie sociale qui a rendu la femme sujette à ces maux, puisque les femmes de tous les peuples sauvages, les Négresses , les Américaines, les Sibériennes, les Kamtchadales, les Insulaires de la mer du Sud, les Hottentotes , etc., accouchent presque sans douleur; tandis que les femmes des nations civilisées sont précisément celles qui éprouvent des accidens funestes dans leurs couches. Plus on se tient près de la nature , plus elle nous favorise ; plus on s'en écarte , et plus elle nous punit. Les femmes labo- rieuses des campagnes accouchent sans peine , et se rétablis- sent au bout de quelques jours. On en a vu en Suisse , en iVis- 1,2 H O M sle , prendre dès le lendemain leur nouveau-né sur leur dos, et retourner à leurs pénibles travaux dans les champs. Les femmes des sauvages n'interrompent pas même leurs ouvrages pour accoucher. Quelle différence entre elles et nos pe^ tites - maîtresses si délicates ! Aussi combien de celles-ci périssent! Une Hottentote se délivre elle-même en plein champ, coupe avec ses dents le cordon ombilical, et rapporte l'enfant à sa hutle comme un paquet. Chez nous, ce n'est jamais fini avec nos sages-femmes et nos accoucheurs. Sou- vent même leur impéritie ou leurs brutales opérations aggi'a- vent les maux de l'accouchement; tantôt ils estropient les femmes, déchirent les enfans par morceaux, fendent le ven- tre, arrachent la matrice en tirant le placenta , font naître des hémorragies utérines mortelles , des inflammations de ma- trice , etc. , parce qu'ils veulent trop souvent violenter la na- ture. D'ailleurs , le virus vénérien , les affections rachitiques , les vices scrophuleux introduits dans l'économie animale de la femme dès sa jeunesse, suspendent l'entier développement de son système osseux ou le déforment, et maintiennent le bas- sin dans un état de rétrécissement très-funeste dans l'accou- chement. En outre, lesvêtemens étroits, la fainéantise, l'abus des plaisirs, l'intempérance dans la nourriture , l'excès des boissons irritantes, comme le café et les liqueurs, l'habitude de rester continuellement assise , et mille autres causes, con- trarient le but de la nature , qui tend à rassembler toutes ses forces pour cette excrétion. C'est pour cela que l'étude et la lecture sont si pernicieuses aux femmes, parce qu'elles ra- mènentleurs forces vitalesverslecerveau, etdépouillent ainsi les organes sexuels de leur énergie naturelle ; aussi Us femmes beaux - esprits sont communément stériles, ou deviennent sujettes aux plus graves accidens dans leurs grossesses. Sans cette habitude, si répandue aujourd'hui parmi les femmes, de lire continuellement ou d'exalter leur imagination par des peintures romanesques , les malheurs des accouchemens se- roient moins fréquens et moins funestes. Madame deSévigné attribuoit la plupart des maux des femmes à la coutume d'ai^o/r toujours le cul sur selle. La santé ne se trouve , en effet , que dans le travail du corps ; l'hystérie et tous les maux qui en dérivent, sont nés d'un genre de vie contraire. C'est donc réellement pour avoir goûté le fruit de l'arbre de science, que la femme accouche avec douleur; puisque les femmes samages et nos bonnes paysannes, qui ne vivent que des fruits d'ignorance , se délivrent avec la plus grande faci- lité. Des auteurs prétendent aussi que les femmes de l'Orient ont le bassin naturellement fort large , ce qui rend leurs accouchemens bien moins laborieux. Il me paroît que le Il O M ,,3 froid rétrécit aussi les organes sexuels des femmes, tandis que la chaleur doit les relâcher; d'où il suit que les accou- chemens doivent être plus pénibles dans les pays froids, et plus faciles dans les climats chauds, toute proportion gardée. Après l'accouchement, la matrice, gorgée d'humeurs et de sang pour la nourriture du fœtus, exprime en se resser- rant sur elle-même , ces humeurs qui (luent pendant quelques jours, et qu'on nomme les lochies. Jl faut bien se garder de les arrêter, à moins qu'elles ne dégénèrent en hémorrhagies dangereuses, ou de les exciter, à moins qu'elles ne soiect Suspendyes par un froid subit ou par des astringens, etc. Dans cet écoulement, le placenta et les membranes du foetus se détachent et sortent d'eux-mêmes, quand la main de l'accoucheur ne les a pas décollés; mais, d'ordinaire, on les retire doucement par le cordon ombilical après la' sortie de l'enfant: cest ce qu'on appelle la délwrance de là femme. On coupe le cordon ombilical de Tenfant à deux pouceS du ventre, après Tavoir noué ou lié au-dessous pour éviter une hemorrhagie. 11 y a cependant beaucoup d exemples d^enfans auxquels on n'avoil pas noué l'ombilic, et qui n'ont cependant éprouvé aucune hemorrhagie ; d'ailleurs^, les sauvages ne le nouent pas, de même que les animaux; ii n'en résulte cependant aucun inconvénietit. A peine la femme est-elle délivrée, qu'elle est saisie d'un épanouissement de joie intime, qui lui fait oublier toutes ks souffrances de la maternité pour n'en goûter que les dou- ceurs. C'est une admirable inicniion de la nature d'inspirer ainsi aux mères un attachement d'autant plus vif pour feurs énfans, qu'ils leur ont causé plus de douleurs. Bientôt les parties naturelles se resserrent d elles-mêmes, et se rétablis- sent dans leur premier état. Les forces vitales se transpor- tent, de la matrice où elles dominoient, dans les mamelles , et y déterminent un aftlux d'humeurs pour la sécrétion du tait. Cette métastase, ce déplacement si remarquable des forces vitales , nous découvre combien sont sages et intelligentes les vues de la nature , puisqu'elle pourvoit ainsi à la nourriture du nouvel être qu'elle a formé. Elle a placé surtout dans le cœur des mères ce sentiment tendre et généreux, cet atta- chement si vif qui les rend capables d'immoler leur vie même pour conserver le fruit de leurs entrailles et de leur amour. Pour des êtres si foibles et si pleins de besoins, il fallolttout I^cœur d'une mère, et cet infatigable dévouement qui s'ac-" croît en proportioa de ses douleurs, qui se paye de caresses ii4: H O M et de sourires enfantins-. Philosophes, qui rapportez toutes les actions humaines à l'amour de nous-mêmes, au vil égoïsme , dites-moi pourquoi cette mère se dévoue à la mort pour sauver son fds ? Dites-moi quel profit lui revient de toutes SCS souffrances? Ce sentiment est-il le résultat du mé- canisme des sensations, ou le fruit d'une raison mûrie par les lois sociales ? N'en voyez -vous pas aussi des exemples touchans dans les oiseaux ? Voilà le cri de la nature ; c'est l'impulsion irréfléchie de l'âme, qui n'a besoin ni des leçons du moraliste , ni des raisonnemens du philosophe ; c'est qu'il est en nous une puissance qui nous porte à tout ce qu'il y a de généreux et de sublime dans la nature ; c'est elle qui nous inspire de la compassion pour les malheureux, qui nous range du parti des opprimés , et nous fait braver la hache des tyrans pour venger l'innocence. Foy. Instinct. Qu'il me seroit aisé de montrer combien cet instinct gé- néreux est dégradé par les vils calculs de notre raison ; tandis que les animaux les plus féroces nous en donnent eux-mêmes de mémorables exemples ! Pourquoi celte tigresse si farouche défend -elle ses petits contre le chasseur avec une fureur si acharnée ? L'espèce humaine, douée de raison, n'a peut- être pas autant d'instinct naturel que les bêtes ; et tandis que la lionne cruelle remplit avec joie tous ses devoirs mater- nels , la femme dénaturée néglige les siens; elle laisse passer son fils dans des bras mercenaires. Où le misérable trouvera- t-il des entrailles de mère et des soins si nécessaires à sa foi- blesse , puisque celle qui lui donna la vie l'abandonne à la merci des étrangers ? Les bêles les plus stupides sont pourvues de cet instinct conservateur de leurs espèces; et les mères, chez les sau- vages , en ont davantage que les femmes des nations policées. Et parmi nous-mêmes , voyez combien nos bonnes et sim- ples villageoises sont meilleures mères que nos dames des grandes villes. Celles-ci ont trop d'esprit pour s'amuser avec des bambins ; les plaisirs de la société sont beaucoup plus in- téressans pour elles : c'est l'affaire des paysannes d'avoir soin de cette racaille. L'affection ne peut se partager sans s'af- foiblir. Quiconque aime les plaisirs de l'esprit, les agrémens de la société , le charme des spectacles , etc. , ne peut pas se livrer aux occupations de sa famille. Voilà pourquoi toutes les femmes coquettes, beaux- esprits, sont nécessairement mauvaises mères , craignent d'avoir des enfans , ou négli- gent de les élever ; aussi ceux-ci , nourris loin de la maison paternelle, n'ont aucun attachement pour leurs parens, aucun respect pour leur mère : ce qui rend la famille étrangère à ellc-mêiuc , et dissout tous les liens du devoir et du sang. H O M „5 Enfin, comme les gouvernemens suivent Téfat parllcuiier île chaque famille , il arrive qu'il n'existe Ijienlôt plus de patrie ni de lois qu'on ne méprise ; d'où résultent les révolutions des Etats et les grands crimes publics qui détruisent la société civile. Mais l'affection maternelle a ses charmes ; elle trouve sa récompense dans ses propres devoirs, si doux , si délicieux à remplir. Lorsqu'une mère s'entend appeler , pour la pre- mière fois , par une petite voix, lorsqu'un jeune visage sourit en la voyant , lorsque des bras enfantins se pressent autour de son cou, lorsqu'une petite joue vient chercher un baiser, quelle jouissance pour le cœur d'une mère ! Ce n'est plus de l'amour, mais c'est un sentiment si tendre et si pur, qui! surpasse l'amour. Il influe beaucoup aussi sur l'organisation. Ainsi, la présence de l'enfant, près du sein maternel , y fait aussitôt sécréter le lait en abondance , et quelquefois même le fait jaillir de la mamelle. ( F. le mot Mamelles. ) Le ma- melon s'enfle , se grossit, et semble chercher de lui-même la bouche du nourrisson. La sécrétion du lait paroît être en rapport avec celle des règles, car les Islandaises, comme toutes les femmes des pays froids , ont fort peu de lait. L'évêque de Troïl dit même qu'elles allaitent à peine quelques jours , et qu elles substituent du bouillon au lait. Mais en Egypte et dans la plupart des pays chauds et humides , les femmes peuvent al- laiter long-temps , et ont des mamelles énormes. C'est le contraire dans les pays secs, venteux, élevés, en Provence, dans la Castille , etc. On dit qu'en Russie il y a , au con- traire , des hommes en état d'allaiter des enfans, de leurs mamelles. ( Comment, peiropol. , tom. m , pag. 278. ) Le premier lait formé après l'accouchement est très-séreux et un peu laxatif; c'est pour cela qu'il convient beaucoup à l'enfant, en débarrassant ses intestins du méconium qui les enduit. Nos sages-femmes, souvent mal avisées, font rejeter ce lait à la mère , craignant qu'il ne soit nuisible à l'enfant ; mais cette précaution trompe les intentions de la nature , qui ne fait rien en vain. Aussi les enfans , n'ayant pas été débar- rassés de ces matières noires qui farcissent leurs intestins, sont presque toujours attaqués de tranchées violentes qui les mettent en danger de périr -, accident qu'on auroit prévenu en suivant les intentions de celui qui a tout combiné avec sagesse dans le monde. L'usage de donner un peu de vin sucré à l'enfant naissant n'est pas moins nuisible encore , en agaçant, par une liqueur un peu spirilueuse , des fibres et un estomac si foibles à cette époque ; car il est extrêmement îi6 n 0 i\ important de ne pas forcer alors le tempérament , pufsnqatf' toute la santé de la vie dépend de ces premiers inslans. A mesure que Tenfant acqiiierl plus de forces et de déve- loppemeiil , le lait de la mère devient plus épais et plus subs- tantiel. On doit aussi doimer, parla suite, quelque nourri- ture plus solide, telle que de la panade; mais la bouillie faite avec la farine et le lait forme une espèce de colle ou de masse glulineuse très-difficile à digérer. Foyez ci-devant l'ar- ticle de \ Enfance. Ordinairement . les cnfans doivent téter jusqu'à l'âge de dentition -, mais plusieurs mères fournissent peu de lait , et sont obligées de les sevrer auparavant. On assure que les Is- landaises ne donnent à téter que les trois premiers jours de la naissance. Des femmes sauvages de 1 Antérique et plusieurs négresses allaitent jusqu'à l'Age de trois ou quatre ans , parce qu'elles sont bounes nourrices et fort cbastes. Les nourrices qui voient leurs maris, corrompent leur lait ou en tarissent la isource. Les passions vives cbangent la nature du lait aussi bien que le coït, et le rendent nuisible à l'enfant. Cependant, une trop grande ardeur amoureuse qu'on s'obstine à ne pas satisfaire, peut aussi comnmniquer de mauvaises qualités au lait. Une nourriture végétale abondante, un genre de vie calme , sont très-favorables à la production du bon lait. Les' femmes d'un tempérament sanguin sont bien meilleures nourrices q'ie les autres. Si la femme a quelque vice dans les bumeurs , elle peut en communiquer le levain à son nourrisson , comme le virus vénérien, dartreux, scrophuleux , etc. On peut purger l'en- fant en purgeant la nourrice, carie lait participe des proprié- tés Je tous les remèdes qu'on donne à ceiie-ci. Ainsi, en trai- tant une femme de la maladie vénérienne , on guérit son nour- risson; il semble que l'enfant soit encore une dépendance du corps de sa mère tant qu'il la tette , tout comme nous parti-^ cipons aux qualités des climats et du sol dont nous sommes les nourrissons , et dont nous suions, pour ainsi dire , les mamelles. Parmi beaucoup de femmes, la sécrétion du lait suspend la menstruation, parce que les humeurs sont naturellement' attirées vers les mamelles. Elles ne conçoivent point ausst pour l'ordinaire , ou si elles deviennent enceintes , leurs ma- melles se tarissent, l'économie vivante ne pouvant suffire à deux sécrétions à la fois. On a trouvé cependant des femmes qui étoient réglées, modérément à la vérité , pendant Fallai- tement. Il y a des exemples de filles très-chastes qui, ayant fait sucer leur sein à des enfant , ont fourni du lait assez abondamment H 0 M ,,7 «ourles nourrir aussi bien que leurs propres mères. La suc- cion de Tenfant avoit excité l'organe lactifère , et y avoit dé- terminé un afflux (rhumeurs. On cile même des observations de femmes bors d'âge (de cinquante - cinq ans , de soixante ans, de soixante-seize ans) qf\i , ayant essayé de faire sucer par des enfans leurs mamelles flétries , ont produit encore du iait au bout de quelques jours ; mais ces exemples sont fort rares. Des auteurs ont rapporté qu'un marin ayant perdu sa femme , et se trouvant en pleine mer avec son enfant à la mamelle, cherchoit à l'apaiser en lui présentant la sienne; mais il fut très-étonné , au bout de trois ou quatre jours , de se voir venir du lait. Voilà donc la nature justifiée du reproche qu on lui fait d'avoir donné aux hommes des mamelles inutiles. La longue impuissance des enfans, le besoin qu'ils ont de leur mère jusqu'à un âge a.ssez avancé , nécessite une com- munauté, une association qui est sans doute le fondement pri- mitif de toute société humaine ; car l'on conçoit qu'il doit s'établir bien plus de rapports entra une femme et son enfant pendant sept ou huit années, qu'entre une femelle de quelque animal que ce soit et ses petits pendant peu de semaines; aussi notre éducation étant plus longue , nos sociétés plus in- times , nos rapports plus étendus , nos sens et notre entende- ment plus parfaits , nous devons nécessairement surpasser en toutes choses les autres animaux ; l'on doit attribuer leur état non social à cette rapidité de leur croissance, qui les met bientôt en état de se passer de leurs parens, et qui les isole pour toujours. On voit encore par-là combien cet usage des nourrices qui brise le plus saint des liens, celui qui attache l'enfant à sa mère , est nuisible à l'état social , en créant des indifférens au lieu de fils respectueux et affectionnés à leurs parens. D'ailleurs le lait d'une femme étrangère peut-il leur convenir comme celui de leur propre mère.'' Sont-iis accli- matés , pour ainsi dire, à une nature qui leur est inconnue, à des humeurs différentes de celles qui les ont nourris dans le sein maternel ? On a prétendu que les enfans héritoient du caractère phy- sique et moral de leur nourrice, qu'ils en suçoient, pour ainsi dire, l'âme avec le lait; celle assertion, sinon vraie, est au moins spécieuse , car le lait d'une femme bilieuse et colérique, par exemple, doit participer des modifications d'un sembla- ble tempérament et influer sur celui de l'enfant. Le lait des animaux , quoique peu analogue à notre nature , seroit peut- être plus sain que celui de beaucoup de nourrices. Le climat opère déjà dès le sein maternel , à ce qu'il semble. Qu'un Anglais blond ou roux, ainsi que son épouse, aient un enfant à Londres , il sera blond coinme eux ; s'ils se transportent à la ii8 H O M Jamaïque , ils auront des enfans créoles naissant avec des yeux d'un noir d'ébène, et une chevelure, une peau plus bru- nes, que chez leurs frères et sœurs d'Europe ( Hawkesworth, Collect. et TraQch., tom. 3, pag. S/^- ) Il faut apporter quelques niénagemens à l'époque du se- vrage de l'enfant, modérer la quantité de ses aliniens, et ne lui en offrir que de faciles à digérer, surtout au moment de la dentition , car les diarrhées et les convulsions qui surviennent alors lui sont souvent funestes. C'est ordinairement vers quarante-cinq ans que les femmes de nos climats cessent d'être réglées et fécondes. Celte épo- que est très-critique ; souvent elles ne la traversent pas sans de graves maladies et même sans périr; mais quand elles ont passé cet âge , leur vie est beaucoup plus assurée que celle des hom- mes. Dans les pays chauds , les femmes étant plus tôt pubères, sont aussi plus tôt hors d'état d'engendrer. Ainsi les femmes arabes, les persanes et plusieurs négresses cessent de conce- voir dès l'âge de trente ^ns. Elles se fanent, se rident et pa- roissent très- vieilles. La mort des organes sexuels dans tous les individus produit de très-grands changemens dans le corps, dont il peut entraîner la mort universelle. De la Vieillesse. Rien ne dure éternellement dans la nature ; tout naît , augmente , décroît et périt à son tour. Les animaux et les plantes vieillissent et meurent comme V homme ; ioxxi ce qui a vie passe tt s'éteint ; c'est une loi qu'il n'est permis à aucun être d'enfreindre. Ces astres, ces mondes que nous voyons rouler dans les cieux, se détruiront peut-être, un jour , aussi bien que V homme; la puissance qui les fait mouvoir dimi- nuera , ils tomberont de langueur et de vieillesse ; leurs gran- des ruines serviront de matériaux pour la reconstruction de mondes plus jeunes et qui fourniront une nouvelle carrière de vie dans le vaste cercle de l'éternité. En effet, la terre, le ciel et les astres qu'il nourrit dans son sein immense, ne nous paroissent sans doute immortels que relativement à notre courte durée. A peine existons-nous un siècle, et les monumens les plas reculés de notre histoire se perdent dans les ténèbres, s'obscurcissent de fables, ou re- montent tout au plus à six on sept milliers d'années. Combien l'espèce humaine a-t-elle vécu de siècles dans une profonde ignorance, sans s'informer du passé, sans s'inquiéter du pré- sent, sans songer à léguer ses connoissances à l'avenir ? Tels que les arbres des forêts, les premiers humains vivoient et mouroicntsans laisser des traces de leur existence; ils se con- lentoient de jouir de la vie présente, sans étudier la nature. H O AI ,,,^ sans rechercher leur premlèi'C origine. Les changemens lents et gradués de la nature ne pouvant s'apercevoir que dans une longue continuité d'observations qui rassemblent les pensées de tous les siècles, Vhommc ne parviendra jamais à les re- connoître, parce que les sciences sont trop sujettes à s'étein- dre , les observations sont en trop petit nombre , et l'esprit humain trop foible pour juger sainement des choses qui sur- passent sa portée. Nous ressemblons sur la terre aux généra- tions de pucerons qui se succèdent sur quelque plante. Ils naissent et meurent dans l'espace de quelques jours, et voyant dans le même état l'herbe qui les nourrit , ils la doivent sup- poser éternelle, parce qu'ils n'ont aucun moyen de s'assurer de sa durée et de ses périodes de vie; et ils concluent qu'elle fut et qu'elle sera de tout temps ce qu'elle paroît à leurs yeux. Nous reconnoissons dans la nature des corps vivans deux forces principales qui président à leur existence. La première est une puissance d'accroissement et d'expansion ; la seconde est une force de décroisseraent et de concentration. Les deux extrémités de la vie nous montrent chacune de ces forces dans son plus grand état d'action ; lorsqu'elles viennent à se mêler par nuances da*js le trajet de la vie, elles se modèrent réci- proquement, et d'autant plus qu'elles s'approchent davantage de réquilibre. Notre vie se partage ainsi en deux moitiés , dont la der- nière offre un perpétuel contraste d'opposition avec la jeu- nesse. A mesure qu'on vieillit, toutes les fibres se durcissent de plus en plus, le système de la circulation veineuse devient prépondérant au système artériel , c'est pourquoi l'assimila- tion et la nutrition diminuent par degrés ; la peau se ride et se brunit ; les glandes perdent de leur volume et de leur ac- tion -, le corps se dessèche ; les humeurs prennent plus de consistance, et deviennent plus colorées, plus acres; les sécré- tions sont moiîis abondantes ; les facultés s'affoiblissent; toutes les sensations deviennent pénibles et difficiles ; le caractère tombe dans la crainte , la défiance , l'irrésolution ; le cœur s'endurcit ; l'envie maligne, l'avarice, l'égoïsme et la haine sont les affections naturelles de la vieillesse, de même que la modération, la sagesse, la prudence et la prévoyance de l'a- venir sont aussi le résultat de la longue expérience de la vie. La vieillesse offre en toutes choses l'inverse de la jeunesse, et cet ordre ne s'établit que par des nuances graduées. Autant les facultés du corps sont actives dans le jeune âge , autant celles de l'esprit deviennent profondes dans l'âge avancé ; plus le corps prédomine, moins l'esprit a de force et d'é- tendue. Depuis la naissance jusqu'à l'âge de trenle-cinq à quarante I20 H O M cans environ, toutes les puissances de rie se portent vers ia lirconférence du corps et vers les parties supérieures , telles que la tête, la gorge et la poitrine. La peau est bien tendue, lisse et d'une couleur vive ; les membres sont arrondis, d'une forme pleine, d'un embonpoint médiocre et qui facilite tout le jeu des organes. La souplesse, la grâce, la vigueur et la beauté brillent dans toutes les parties. Les mouvemens sont vifs ; la joie et le plaisir semblent s'exhaler de chaque mem- bre. A peine a-ton passé ce bel âge, que les forces vitales se retirent en dedans et vers les régions inférieures, comme le bas-ventre, les reins, etc. La peau devient lâche, elle se flétrit, se décolore, jaunit; les membres se dessèchent, leurs formes deviennent rudes et anguleuses; le tissu cellulaire s'affaisse et laisse prononcer davantage la figure des muscles; ceux-ci devenus rigides, ne se meuvent plus qu'avec lenteur. L'âpreté, la roideur, la maigreur des formes se marquent sur tout le corps par des traits frappans. Que l'on compare le corps nu d'un vieillard avec celui d un jeune homme, ces différences sont extrêmement remarquables, et les artistes les ont très- bien exprimées dans l'Apollon du Belvédère , représentant l'homme dans toute la fleur de sa beauté, et dans le Laocoon représentant une vieillesse encore verte et vigoureuse. Ces contrastes seront encore bien plus heurtés, si l'on compare le corps dune jeilne fille avec celui d'une vieille femme. 11 se fait donc dans le cours de la vie une conversion des forces vitales du dehors au-dedans. Le corps s'use par sa cir- conférence, toutes ses pièces se durcissent peu à peu. L'or- gane, encore muqueux à la naissance, devient pulpeux et vasculeux, ensuite tendineux dans l'âge mûr, puis cartiLigi- neux, et enfin osseux dans la vieillesse. Les humeurs d'abord aqueuses et limpides se chargent, se colorent, s'épaississent, se concentrent avec l'âge, et si l'homme pouvoil vivre jusqu'à deux ou trois cents ans, il deviendroit peut-être aussi sec que la pierre, î)ans la jeunesse , le sang se porte vers les parties supé- rieures et à la superficie du corps ; aussi le visage est rouge, animé, le cerveau réfléchit peu d'idées, et le sommeil est long et fréquent (i) ; les hémorragies du nez , les crachemens de sang, etc. , sont communs dans le premier âge ; les organes digestifs vivifiés par l'abondance du sang artériel opèrent la (i) I 'exfit'rienre prouve que le sang veineux fait tomber l'organe ce'rébral dans un état de sommeil et d'inertie, tandis que le sang arté- riel l'excite , l'éveille , et fait penser davantage. Ainsi le système vei- neux domine da.'s le cerveau des jeunes gens , le système artériel y domiue dans la vieillesse": ces états sont le contraire de ce qui a lieu dnns les organes digestifs pendant le jeune âge et la Ti'eillesse. H O M ,2, çutrilion et rassimilation avec facilité. Dans la vieillesse, au contraire, le système veineux devient prépondérant au sys- tème artériel; un sang noir reflue au-dedans du corps, s'ac- cumule et s'engorge dans le bas-ventre, distend les rameaux de la veine-porte, y cause des stases dangereuses, et diminue extrêmement l'activité des organes digestifs. De là, l'hypo- condrie, les hémorroïdes, et toutes les maladies chroniques qui attaquent les vieillards. A mesure que les organes de la digestion s'affoiblissent, le cerveau a plus d'activité, et l'état inverse a lieu réciproquement dans la jeunesse. Ainsi le jeune âge pense peu, agit, mange et dort beaucoup ; ses chagrins passent aisément, ses affections sont légères et changeantes, et les impressions les plus graves ne font qu'effleurer son âme; mais l'âge avancé médite sans cesse, agit avec circonspection et lenteur , mange et dort très-peu ^ ses chagrins sont profonds; ses affections constantes, opiniâtres; les objets les plus légers se grossissent et s'enflent de terreur dans ses sombres pensées. L'imagination, la dernière des facultés de l'esprit qui s'étei- gne, si légère et si joyeuse dans la jeunesse, devient grave et sinistre chez le vieillard ; l'avenir, qui promet un champ iné- puisable de plaisirs au jeune homme , ne présente à l'autre que le triste cercueil où viennent s'engloutir toutes les affec- tions humaines ; c'est pour cela que la vieillesse loue toujours le passé, et blâme sans cesse le présent, parce qu'elle a été heureuse dans son jeune âge et qu'elle souffre maintenant. Comme la jeunesse est pleine d'ardeur, que l'habitude de son corps est pléthorique, sa constitution humide et sanguine, elle est très-exposée aux maladies inflammatoires, aiguës, surtout dans les pays chauds. Le vieillard qui est froid, dont la constitution est sèche, mélancolique, l'habitude du corps aride, est très-sujet aux affections chroniques, principalement dans les régions froides et humides; aussi l'été est convenable aux vieillards, l'hiver aux jeunes gens. Les maladies lentes n'at- taquent presque jamais la jeunesse, ni les maladies inflamma- toires, la vieillesse ; ainsi la peste, la petite-vérole, les fièvres ardentes, bilieuses, putrides, etc. , sont presque exclusives k la jeunesse, tandis que l'hypocondrie, la goutte, les rhumatis- mes , les hémorroïdes, les fièvres lentes, les maladies de langueur, etc., appartiennent plus particulièrement à l'âge avancé. De même que le tempérament flegmatique appartient à l'enfance , le sanguin à la jeunesse , le bilieux à l'âge fait; ainsi le tempérament mélancolique est particulier à la vieil- lesse. Ce sont des degrés successifs d'une même constitution, qui se modifient suivant les âges, indépendamment du teiu- pérament primordial. La débilitation des viscères du bai- H O M ventre, l'activité du cei-veau, l'hébétation des sens externes , la diminution des forces vitales, sont des caractères communs à la vieillesse et à la complexion nrïélancolique , ainsi que la congestion du sang veineux dans le système de la veine-porte. La jeunesse déploie sa vie hors d'elle-même, par ses désirs irtimodércs, ses passions et ses excès. Plus on est jeune, plus on est aimant; c'est qu'on a une surabondance de vie qu'on répand sur tous les objets qui nous environnent. Plus on est vieux, plus on devient dur, égoïste pour l'ordinaire ; on n'aime plus que soi-même, on hait tout le reste. Lorsqu'on sent que la vie nous fuit , et qu'on n'en a plus assez, on veut la rete- nir, la ramasser dans soi-même, lui fermer toutes les issues par lesquelles elle pourroit sécliapper. Demander de l'amour à la vieillesse, c'est vouloir lui voler sa vie ; c'est aussi parla môme cause qu'elle devient avare; sages précautions de la nature, qui se ménage des ressources pour l'hiver de la vie , et qu'on auroittort de blâmer, puisqu'elle est dans l'ordre des choses! La jeunesse n'est si prodigue, que parce qu'elle se sent capable de travailler et d'acquérir. Le principal effet de la nutrition dans un être vivant, est d'agrandir, de forlificr et de durcir toutes ses parties ; car on conçoit qu'un corps pulpeux et humide comme est l'enfance, doit contenir dans son tissu lâche, une infinité de vides gon- flés d'humeurs , de même qu'une éponge imbibée d'eau; mais à mesure que ces vides se remplissent par des matières so- lides qui s'incorporent au tissu même , les liqueurs en sont chassées, et le corps acquiert plus de densité, plus de soli- dité. Enfin, lorsque la nutrition obstruant tous les pores , a donné plus d'épaisseur, de dureté à la fibre, et resserré tous les espaces, la quantité des liqueurs diminue dans le corps animé ; Vhumide radical, comme disoient les anciens, est dis- sipé. La rigidilé de la fibre l'empêchant de se prêter, de s'é- tendre pour recevoir de nouvelle matière nutritive, le défaut d'humidité durcissant les organes, et la petite quantité de sang ne pouvant plus suffire à nourrir les membres, ils s'usent par leur propre action, sans se réparer. Il suit de là que la vie doit s'éteindre peu à peu à mesure que toutes les parties se soli- difient. Ces diverses proportions de liquides et de solides dans un corps, respectivement à sa nature, constituent les différens âges et les tempéramens qu'ils déterminent. Ainsi, plus un corps est jeune, plus «on tissu est lâche, et plus son accrois- sement est rapide ; ce qu'on remarque de même dans les ar- bres d'un bois tendre, tels que les saules, les trembles, les fromagers, les baobabs, etc. Plus un corps est vieux, plus son tissu est serré et son accroissement difficile : ainsi les arbres H 0 M 123 les plus durs, comme les chênes, le gaïac, le bois de fer, etc., croissenl très-lentement et avec peine. Enfin il arrive un point où la nutrition devenant impossible par l'obstruction des vais- seaux, le corps vivant se détruit et se désorganise. Dans l'arbre et la plante, l'obstruction commence par le centre, parce que les organes nutritifs sont placés à la circonférence; dans l'homme et les animaux, l'obstruction commence par la cir- conférence , parce que les viscères nutritifs sont renfermés dans l'intérieur ; ainsi la partie qui meurt la dernière est tou- jours celle qui nourrit. La vie se détruit donc par la continuité des causes qui la maintiennent ; et il faut que tout ce qui vit meure un jour. Comme on pourroit supposer que la vieillesse et la mort n'ar- rivent que par une dureté absolue des fibres, il faudroit alors les tenir dans le relâchement et la mollesse pour vivre plus longuement ; mais il paroît que les fibres n'ont qu'une cer- taine somme de force et d'activité qui se dissipe par l'usage, de sorte qu'elles s'épuisent et meurent d'elles-mêmes par la continuité de leur action. En effet, le corps vivant étant com- posé de plusieurs systèmes d'organisation , tels que les systè- mes nerveux, musculaire, osseux, vasculaire, cellulaire, etc., chacun de ceux-ci a sa vie particulière , qui , réunies , forment la vie totale de l'individu. Or, chacune de cespuissances se con- sume plus oumoins vite, et meurt plus ou moinspromptement; de sorte que le corps s'use partiellement et en détail ; ainsi les senss'affoiblissent, l'oreille devient dure, la vue s'obscurcit, la peau se ride , le goût se blase , l'odorat devient obtus , les dents tombent , le corps se courbe et semble aspirer au tom- beau , les genoux tremblent , les cheveux blanchissent et tom- bent comme les feuilles jaunies des arbres à l'entrée de l'hiver. Les organes sexuels sont morts et flétris ; cette mort partielle est même assez souvent funeste aux hommes , de même que la suppression des menstrues l'est aux femmes , parce qu'elle peut entraîner la mort universelle de l'individu , à cause des con- nexions sympathiques de tous les organes entre eux. Ainsi, lorsqu'un système organique éprouve quelque affection , elle se répercute , et retentit , pour ainsi dire , dans toute l'éco- nomie animale. L'homme , de même que tous les autres animaux , est com- posé de deux ordres d'organes. Le premier ordre est celui des organes élémentaires et communs à toute machine animée ; tels sont l'appareil digestif et les tissus dans lesquels s'opère l'assimilation ou la nutrition , comme les tissus vasculaire , lymphatique et rellulaire. Le second ordre est celui des or- ganes particuliers à chaque classe d'êtres vivans ; tels sont les sens, le système nerveux et cérébral , etc. Or, les organes 124 H O M généraux et alimentaires étant les plus simples , sont aussi les plus vivaces ; car à mesure qu'une partie est plus compliquée et que ses forces vitales sont employées de plusieurs manières , il est manifeste qu'elle doit s'user plus promptement. Les corps yivans périssent donc par degrés et suivant les quantités de vie que dissipe chacun de leurs organes. L homme se dé- grade par les nuances inverses de son élévation ; de sorte que les parties les dernières à se perfectionner, dans le premier âge , telles que les organes sexuels, sont aussi les premières à se détruire dans la vieillesse ; tandis que les parties les plus simples et les plus générales , sont aussi les plus durables. On conçoit donc qu'un être composé d'une plus grande proportion d'organes simples , relativement à ses organes compliqués, doit avoir, toutes choses égales, une vie plus essentielle et plus durable; tandis qu'un être composé d un grand nombre de pièces compliquées , et d'un petit nom- bre de simples , doit être plus sujet au dérangement et à la destruction. C'est en effet ce qu'on observe dans l'homme comparé aux animaux ; car on sait que les bêtes ne sont pas attaquées d'une aqssi grande quantité de maladies que nous y et que leur vie n'est point abrégée , comme la nôtre , par des excès qui tiennent à notre nature. Car , ayant été créés très- sensibles , nous sommes , par cela même, très-susceptibles d'affections extrêmes de bien ou de mal ; choses qui détrui- sent presque également notre frêle machine ; les plaisirs , les joies , les voluptés immodérées n'étant pas moins funestes à la santé que les misères et les douleurs de la vie. C'est pour cela . sans doute , que la raison nous a été accordée , puisque? sans elle nous serions les plus misérables de tous les animaux. La femme , et les femelles des animaux, étant ordinaire- ment d'une constitution plus molle et plus humide que les mâles , et ressemblant à ceux-ci dans leur enfance , elles de- yroient arriver plus tard au même degré de durcissement, et vivre ainsi plus long-temps. Mais, outre que la gestation elles fatigues de la maternité usent beaucoup leur vie , les femelles ne parviennent jamais à la solidité du corps des mâles. Néan- moins , lorsqu'elles vieillissent , leur constitution enfantine re- prend alors les caractères de celle du mâle; ainsi la femme qui a passé l'âge de la menstruation, acquiert souvent une comple- xion virile ; ses formes douces et arrondies , d"viennent plu^ rudes et plus carrées; ses muscles se prononcent ; sa voix , quoique cassée , acquiert plus de gravité ; une espèce de barbe légère couvre son menton et sa lèvre supérieure, comme chez les jeunes garçons. L'on a même vu de vieilles femmes obli- gées de se raîer; et l'on sait depuis long-temps que la sup- pression des menstrues détermine souvent , dajîsle sexe, l'ac- H O M croissement de ces poils de la face. Il y a des exemples de femmes, couvertes à cette époque de poils sur la poirrine comme les hommes. L'expérience a montré que si la jeu- nesse des femmes étoit plus courte que celle des hommes , leur vieillesse éloit communément plus longue. La cessation des menstrues reporte dans l'cccnomie h surabondance des lorces vitales de la matrice ; ce qui transforme , po'jr ainsi dire , la femelle en mâle. Si le corps change dans les différens âges , l'esprit ne change pas moins, parce que notre âme ne pouvant agir et connoitre que par le moyen de nos organes et de nos sens, ses actes sont modifiés parla nature des instrumens qu'elle emploie ; mais sa nature intime ne change point; elle ne paroît si diffc-^ rente dans chaque homme, que parce qu'elle agit avec des organes plus ou moins parfaits. Elle est emprisonnée dans notre corps, qui lui communique toutes ses illusions et tous ses besoins : mais lorsque, débarrassée des liens de la chair et du sang, elle s'élèvera vers l'auleur de son existence, les prestiges de nos sens seront dissipés; ellécontemplera en toute liberté ce vaste univers, le grand esprit qui l'anime , et tous les objets qu'elle n'apercevoit qu'au travers du prisme de nos passions ou de la matière de notre corps. De la durée de la vie humaine , et de ses probabilités. La longueur de la vie est presque toujours proportionnée à la quantité qu'on a reçue et à celle q.u'on dépense ; elle est surtout en rapport avec la durée de l'accroissement du corps. L'expérience a fait connoître que l'homme, de même que les quadrupèdes , pouvoit vivre six à sept fois le temps qu'il mettoit à s'accroître jusqu'à la puberté. Comme il de- vient pubère vers Tâge de quatorze ans environ , sa vie peut s'étendre jnsqu'à cent ans et plus ; s'il n'atteint pas souvent ce grand âge , c'est encore plus sa faute que celle de la nature , puisque ses passions, ses excès et les maladies qui en sont la suite , abrègent extrêmement ses jours. Il existe de nombreux exemples de longévité dans notre espèce, et à cet égard nous avons tort de nous plaindre de la brièveté de notre vie. Ne faut-il pas bien mourir un jour.'' Que sert d'en reculer le terme , si nous ne pouvons plus goûter les douceurs de l'existence ; et pourquoi boire à longs traits la lie amère du vieil âge ? Il n'y a de bon que le milieu de la vie , encore est-il rempli de passions et de grandes mi- sères. Si nous savions mieux employer notre temps , nous n'aurions pas tant de regrets de la vie. Combien d'années perdues pour le bonheur! si nous séparons de notre existence tout k temps du sommeil, tout celui des infirmités de l'enfance ,26 H O M et de la caducité de la vieillesse ; si nous retranchons les temps de maladies , ceux des maux que nous avons éprouvés, les heures perdues dans l'ennui, le désœuvrement, le chagrin , et toutes les douleurs de l'âme, il nous restera à peine quelques journées de plaisirs. Un auteur a calculé qu'une vie moyenne donnoitàpeu près trois années de bonheur, délayées dans soixante* à quatre-vingts ans de misères ou d'insipidité ; et ce- pendant , tous tant que nous sommes , nous buvons avidement dans la coupe des âges, nous la vidons jusqu'à la lie. L'exis- tence l'essemble à la boite de Pandore, d'où sortent tous les Liens et tous les maux qui couvrent la terre ; l'espérance seule demeure au fond de notre vie : c'est sous cette belle allégorie que les anciens nous l'ont représentée. Pour ce que nous faisons dans le monde, notre durée est toujours assez longue, Combien d hommes se traînent dans la carrière de l'existence, inutilement pour eux et pour leurs semblables? Ils se laissent négligemment entraîner par les années dans l'océan de la mort ; il leur faut , dans ce voyage , des délassemens à leurs ennuis : ils ne vivent que par hasard. La terre est couverte de troupeaux humains qui n'ont point demandé la naissance à leurs pères, et qui regrettent le néant, si préférable à une vie malheureuse et précaire. Que Ton pense en effet que sur neuf cent millions d'hommes que peut nourrir le globe, il en est à peine quelques milliers de riches et d'heureux, tandis que tout le reste croupit dans l'infortune et se nourrit du pain de l'afdiction. Tant de misérables sauvages répandus dans le Nouveau-Monde , dans l'Afrique, la Nouvelle-Hollande et les îles de la mer Pacifique ; tant de pauvres peuplades au nord de la terre , tant de nègres asservis, tant d'Indiens sou- mis au joug du despotisme ; tant de guerres, de famines, de pestes, de troubles politiques et religieux ; tant de haines, de passions, de crimes et d'oppressions parmi les hommes de tous les pays , me font croire que notre espèce n'est pas plus favo- risée que celle des autres animaux, et que nous nous enor- gueillissons à tort des prérogatives que la nature nous a accordées , puisqu'elles ne nous délivrent d'aucunes de nos fureurs. A quoi sert cette sensibilité si profonde et si étendue, qui agrandit tant noire intelligence et nous élève si fort au- dessus des bêtes, si elle nous rend aussi capables de sentir tout le poids de nos douleurs''^ Q."^^^ avantage pour l'homme , si les élémens mêmes de sa puissance sont les instrumens de sa dégradation? pourquoi redouter la mort, si elle n'est que l'affranchissemeut des infirmités humaines? et quel insensé vou- droit acquérir l'immortalité au prix de toutes les peines qui croissent dans le champ de la vie f Heureusement pour l'homme , tout est songe , illusion dans H O M ,,j, la vie : c'est un sommeil plus ou moins profond, que l'accou- tumance nous rend supportable , et dont nous ne sommes désabusés qu'à l'époque où il va cesser. Un homme qui ne s'évelUeroit jamais, depuis sonenfancejusqu'à sa mort, et qui songeroit toujours, auroit autant vécu qu'un homme éveillé. Eh! qui sait si notre existence ne seroit pas une espèce de somnambulisme auprès d'êtres plus parfaits et d'une nature bien supérieure! Vivre, ce n'est pas végéter, traîner de longues journées dans l'apathie; c'est penser, c'est sentir, c'est agir. Tel homme de quatre-vingts ans n a pas vécu dix années de sa vie. Que de journées perdues dans les illusions des sens, et combien d'humains ne s'éveillent qu'à l'heure de la mort! Notre réveil n'est donc peut-être qu'un sommeil un peu moins profond; un état perpétuel de songe, qui ne diffère des rêves de la nuit que du plus au moins , mais que nous pre- nons pour de la réalité, parce que nous n'avons aucun objet de comparaison qui puisse nous en montrer toute l'erreur. Lorsque nous sommes près de sortir du monde , lorsque notre âme se dégage de ses liens de chair, de soudaines illu- minations lui découvrent quelquefois toutes les chimèresde ce long rêve, que nous appelons l'existence. Pourquoi des regrets si amers , et des vérités si cruelles viennent-elles obséder nos dernières années, nous dévoiler le néant et les prestiges de notre vie ? C'est que nous commençons à nous réveiller de ce long sommeil qui nous déroboit la connoissance de nous- mêmes; c'est que les illusions des sens, qui offusquoient la lumière de notre raison , se dissipent. Mais pourquoi sommes-nous créés ? quelle est l'utilité de cet univers? Pourquoi tant de générations se succèdent-elles sans cesse ? plus j'y médite , et plus je m'y perds : celui-là seul qui a tout fait est le seul qui sait tout. Pour nous, foibles mortels, pourquoi vouloir mesurer dans les bornes étroites de notre entendement les profondeurs de Dieu et de la nature? Il faut se taire et adorer. L'homme seroit bien malheureux, si l'habitude ne diml- nuoit pas le sentiment de ses misères. Tel berger vit content toute sa vie, qui seroit inconsolable s'il avoit été roi. On s'ac- coutume aux plus affreux états , et l'on peut y vivre heureux. C'est la comparaison qui nous rend misérables ; mais nous ne le sommes point réellement en nous-mêmes. Tant que nous proportionnons nos désirs et nos besoins à l'étendue de nos moyens et de nos facultés, nous demeurons heureux; mais lorsque , sortant de notre condition , nous voulons nous étendre au-delà de nos véritables bornes, nous sommes In- fortunés, parce que nous sentons toute notre impuissance et le joug inflexible de la nécessité, Dans un état au-dessous ,à8 H Ô M de la médiocrité, on peut jouir du bonheur comme les ènfans des rois, par cette bienfaisante habitude qui nous fait trouver la félicité dansnous-mêmes,enquelqueétat que nous aitplacés la fortune. De même que Taccoutumance nous rend les maut d'abord supportables par leur durée , puis indifférens, elle détruit aussi, à la longue , le charme des voluptés et les délices de la jouissance, jusqu'à nous les rendre insipides -, de sorte qu'il s'établit un équilibre entre nous et les biens et les maux qui nous entourent, équilibre qui compense les uns par les autres. ïln homme très-malheureux, trouvera les moindres plaisirs extrêmement vifs, tandis qu'un homme constamuient heureux , n'en sera pas seulement effleuré. Un homme mou- rant de faim , trouve une volupté inexprimable à dévorer un aliment grossier qui répugneroit à une personne rassasiée de bonne chère. Pour sentir tout le prix de la santé , il faut sortir de quelque longue et cruelle maladie; c'est ainsi que la privation aiguise la volupté des plaisirs , et la tempérance peut devenir un calcul de la sensualité pour augmenter nos jouissances -.ainsi le secret d être heureux est de savoir être un peu malheureux à propos. Voilà pourquoi je comprends bien que les hommes qu'on regarde conmie si fortunés dans ce monde, peuvent ne Têti'e pas plus que d'autres ; et puisque les grandes peines donnent lieu aux grands plaisirs, les grands plaisirs doivent aussi produire les grandes peines. Tout se compensant par des réactions égales , je ne vois pas pourquoi tant de gens sont assez peu sensés pour désirer d'autre condition que la leur ^ lorsqu'elle est supportable. Ils ne savent pas qu'ils ne seroient pas plus satisfaits qu'ils peuvent l'être, puisque leurs besoins et leurs passions croîtroient en même proportion que \eut fortune. Et qu'on prenne garde que ceci n'est point un sys- tème inventé par les riches pour diminuer l'envie des pauvres, mais une observation constante et sans exceptions, que l'ex- périence confirme chaque jour. Si donc l'on peut jouir dans la plus courte vie d'autant de bonheur que dans la plus longue, et si les biens et les maux sont à peu près mêlés chez tous les hommes, pourquoi se plaindre de la nature r' pourquoi redouter les approches de la mort? pourquoi désirer une longue vie.f* les cruelles infir- mités de la vieillesse n'en empoisonnent-elles pas toutes les douceurs ? Voyons , cherchons toutefois ce qui peut prolonger notre existence , car nous n'espérons point guérir le genre humain de ce désir, si général el si naturel: chacun se plaint, et cependant tout le monde veut vivre. Nous ne citerons pas ici les exemples de la longue vie des patriarches et des premiers humains , rapportés par la Genèse?' ils appartiennent plutôt à la Religion qu'à THistoire nalu^ H O M r,g relie ; nous en donnerons de plus récens. HaUer dît avoir rassemblé des exemples déplus de mille centenaires dans ses recherches.il avoit connoissance de soixante-deux personnes environ de cent dix à cent vingt ans; de vingt-neuf personnes âgées de cent vingt à cent trente ans; de quinze personnes parvenues depuis cent trente jusqu'à cent quarante ans. Passé ces grands âges, les exemples de longue vie sont moins attes- tés et beaucoup plus rares. Cependant on sait que plusieurs hommes ont certainement surpassé cet âge ; tels sont Ecdeslun^ anglais, mort à cent quarante-trois ans; Jean Effinglium , décédé en 1757, à l'âge de cent quarante-quatre ans; un Norwégien parvenu à cent cinquante ans ; les Italiens , âgés d'un siècle et demi , cités par Pline le naturaliste , et plusieurs autres dont les exemples sont moins sûrs. On sait que Thomas Parre mourut le 14. novembre i635, à l'âge de cent cinquante- deux ans, et fut disséqué par l'illustre anatomiste Harvey (le même qui découvrit la circulation du sang). Il auroit peut- être vécu davantage, si une pension que le roi Charles I lui accorda , ne lui avoit pas fait changer son genre de vie simple et frugal. On cite encore des paysans suédois parvenus à cent cinquante-six et cent cinquante-sept ans ; mais leur histoire n'est pas authentique. Enfin , celui qui a certainement surpassé en âge tous les hommes de nos temps modernes, est Henri Jenkins ; les témoignages et les preuves s'accordent à lui donner cent soixante-neuf ans. Il avoit été soldat, et s'étoit trouvé dans n\\ grand nombre de batailles. Nous n'admettrons pas ces Té- meswariens âgés de cent soixante-douze , de cent soixante- quinze , et de cent quatre-vingt-cinq ans ; ni Pierre Czaiian , qu'on prétend être parvenu à ce dernier âge ; ni l'évêque Ken- iigern , aussi âgé et cité par Cheyne ; ni ces veillards des Or- rades, âgés de plus de cent quatre-vingts ans; ni ces Indiens que quelques voyageurs ont dit avoir vus âgés de trois cehls ans et plus. Le London chronicle du 5 octobre 1780, annonce qvLQ Louisa Tnixo^ négresse esclave, mourut au Tucuman , à l'âge de cent soixante-quinze ans. C'est un des plus forts exemples cités d'une longue vie dans le sexe, surtout sous un climat chaud, Sussmilcli assure que sur mille personnes, une seule arrive à quatre-vingt-dix-sept ans , et qu'on no voit guère un cen- tenaire, que sur quatorze cents personnes. En 1751 , il mou- rut à Londres vingt-un mille vingt-huit personnes , dans le nombre desquelles on trouva cinquante-huit nonagénaires, plus de treize centenaires, et un seul de cent neuf ans; ce qui donne un centenaire sur seize cent dix-sept. En 1762, sur vingt-six raille trois cent vingt-six morts à Londres, on trouva XV, 0 ,3o H 0 M qualre-vhigl-clnq nonagénaires , et seulement deux cen1c- naires : on volt ainsi que ce nombre est fort variable. Dans ie recensement des habitans de Tllalie fait au temps de Vespa- sien, il se trouva cinquante-quatre centenaire^, cinquante- sept personnes âgées de cent dix ans, deux hommes de cent vingl-cinq ans , quatre hommes de cent trente , autant d'hoiri- mes de cent trente-cinq à cent trente-sept , et trois de cent quarante. Siméon Cléophas, évêque de Jérusalem, fut martyrisé à cent vingt ans, et saint Polycarpe à plus de cent ans. Saint Paul ermite , vécut cent treize ans dans un désert, et saint Antoine , cent cinq. Plusieurs autres pieux anacho- rètes sont parvenus à un âge très-avancé , en se traitant d'une manière rude , sauvage et austère au milieu des solitudes. La secte des Esséniens, sorte de philosophes juifs, dont le genre de vie se rapprochoit beaucoup de celui des pythagoriciens , a fourni un grand nombre de centenaires. Xénophile, philoso- phe pythagoricien, parvint à l'âge de cent six ans , et Hippo- crate à celui de cent quatre. Beaucoup d'anciens philosophes ont vécu long-temps : témoins, Démocrile, mort à cent neuf ans; Xénocrate , à cent; Gorgias, à cent>huit; Démonax, à près de cent, etc. Les Brachmanes, philosophes indiens, arrivoient quelquefois jusqu'à cent cinquante ans, selon le* anciens. Hiéron, roi de Sicile , mourut à cent ans; et Pline rapporte que le roi Arganthonîus vécut dans l'Espagne méri- dionale jusqu'à cent cinquante ans. L'empereur mogol iViVam el Muluk parvint à cent quatre ans. Il est rare de trouver des princes d un âge très-avancé, parce que les grands plaisirs el les grandes peines, inséparables du trône, concourent à diminuer leurs jours. Massinissa, Artaxerxès, Agésilas, Hié- ron , Aureng-Zeb et quelques autres , sont presque les seu- les exceptions à cette remarque générale. Nous avons cepen- dapt parmi des rangs moins élevés, plusieurs exemples de vieillards d'un très-grand âge. Ainsi, Lancisi prétend que le tiers des cardinaux parvient à plus de quatre-vingts ans. Henri Dandolo , doge de Venise , devint nonagénaire. Louis Acu- gna , ambassadeur portugais, n'avoit, à cent cinq ans, pres- que rien perdu de ses forces et de sa mémoire. Le fameux i..ouis Cornaro, noble vénitien, qui sembloit toucher àlafiti de sa carrière dès l'âge de quarante ans, à cause de la foiblesse de sa constitution, sut pourtant se maintenir en santé par sa sobriété jusqu'à l'âge de quatre-vingt-dix ans. Chez les Ro- mains , Q, Mélellus , plusieurs fois consul, Porcius Catoo, Appius Cœcus, M. Perpenna , Valerius Corvinus, et quel- ques autres qui passèrent leur vie dans la perpétuelle agita- tion des affaires publiques , parvinrent cependant à un âge tîcs-avancé. Beaucoup de femmes sont aussi parvenaes à H OU ,3 ces longues vies: telles que cette femme de Favenlin (Lour^ d'Italie du temps des anciens P^omains), âgée de cent trente-deux ans, et celle de Rimini, de cent trente-sept ans, suivant Pline le naturaliste; telle fui Junie, femme deC. Cas- sius et sœur de Marcus Brutus; Livie, femme d'Auguste ; Térentia, épouse deCicéron; Clodia, Luceia, Galeria, etc. Chez les modernes, Eléonore Spicer, morte en Virginie en 1773, à cent vingt-un ans; Marguerite Bonnefaut, à cent quatorze ans; Rosine Jwiwarovvska, à cent treize; Marie Cocu, à cent douze , etc. La plupart de ces hommes qui sont arrivés à de si grands âges, ont mené une vie fort active; ainsi le Norwégien Dra- chenberg, mort à cent quarante-six ans, avoit été voyageur , soldat et esclave enBarbarie. Lesieurde la Haye, mort âgé de centvingt ans, avoit parcouru à pied les Indes , la Chine , la Perse et l'Egypte. Il n'étoit devenu pubère qu'à cinquante ans, et, marié à soixante-dix, il avoit eu cinq enfans. Jean Bayles, mort à cent trente ans, étoit un pauvre marchand de boutons. Henri Jenkins qui vécut six ans de moins que lÉcri ture n'en donne à Abraham, étoit un misérable pêcheur qui traversoit encore à cent ans les rivières à la nage. On l'ap- pela un jour en témoignage pour un fait passé depuis cent quarante ans, et il comparut avec ses deux fils, dont l'un avoit cent deux et l'autre cent ans. On voit encore dans l'é- glise de Bolton, près de Richemont, dans l'Yorkshire, soii épitaphe posée en 1670, année de sa mort. Hanow, profes- seur àDantzick, cite des vieillards âgés de cent quatre-vingt- quatre et même de cent quatre-vingt-dix ans ; mais ces faits sont tout au moins exagérés. Il paroît que la vie philosophique prolonge souvent la d^urce de l'existence, et qu'elle n'est point incompatible avec les grands travaux de l'esprit. Numa, Solon , Sophocle , Pin- dare, Anacrcon, Xénophon , Philolaiis, devinrent octo'^é- naires. Platon mourut à quatre-vingt-un ans; Théophraste , Carnéade, à quatre-vingt-cinq; Protagoras d'Abdère, Dio- gène le cynique , Caton l'ancien , à quatre-vingt dix ; Zenon citlien, ïsocrate , à quatre-vingt-dix-huit ; le grammairien Orbilius, du temps de Cicéron, à cent; Démocrite et Gor- gias, à cent huit: Xénophane, à cent deux ; Epiménide , à cent cinquante-sept, si l'on en croit Thistoire; Moïse, à cent vingt, etc. Tous furent des hommes de grand caractère et d'un esprit plus ou moins élevé. On connoît la longue vie de Voltaire et d'autres illustres modernes. 11 faut avouer ce- pendant que beaucoup d'hommes de génie, dont le déve- loppement intellectuel s'est fait de bonne heure, ont été bientôt vieux, et sont morts presque à la fieur de leurs ans : i32 H 0 M comme Pascal, à Irente-neuf ans; Descaries , Baratier, ete. Au contraire , la plupart de ces centenaires cités ci-devant (les philosophes exceptés), et une foule d'autres que nous omettons , furent des hommes d'un esprit simple et très-ordi- naire , des paysans, des raanouvriers, des soldats, qui ne se sont point distingués du commun des hommes. Presque tous ont mené une vie dure, austère; ont suivi un régime grossier, mais frugal ; ont vécu dans la pauvreté et le besoin. C'est ainsi que les cénobites des monastères du mont Sinaï vivent souvent jusqu'à cent et cent vingt ans ; que les Ara- bes parviennent à une extrême vieillesse, et conservent en- core à cet âge un caractère de beauté et de vigueur. Tour- ne fort vit dans ses voyages, un caloyer grec de cent vingt ans. Saint Jean, saint Jérôme, saint Luc, qui parvinrent à un âge avancé , le durent en partie à leurs jeûnes , à leurs auslérités , à leurs longues macérations, ainsi que saint An- toine et saint Paul , ermites. Beaucoup d'Egyptiens , d'Ara- bes, d'Ethiopiens vivant sobrement, sous un climat chaud et aride, arrivent à un grand âge. Les Brasiliens, les Cana- diens et une foule d'autres peuples sauvages, acquièrent une vieillesse longue et très-vigoureuse; car on trouve chez ces nations, des chefs de guerre encore agiles, robustes, coura- geux , dans l'âge de la décrépitude. Cependant , les peuples du Midi étant pubères dès l'âge de dix ou douze ans , sont déjà vieux à cinquante, et décrépits à soixante , tandis que les nations septentrionales, étant plus tard pubères , conser- vent aussi leurs forces jusque dans les âges les plus avancés. On a remarqué encore que les fous, les imbéciles et ceux qui vivoleiit sans souci , sans inquiétude , avoient une plus longue existence que les autreshommes. Des hommes célèbres, même par leur esprit et leurs connoissances, ont vécu long- temps, parce qu'ils ont éprouvé peu de chagrins, et ont eu un esprit toujours joyeux. Ainsi, (Guillaume Postel , hommetrès- érudll , mais dont l'esprit étolt un peu aliéné , vécut plus d'un siècle ; Duverney, illustre analomiste , l'enjoué Fontenclle, le savant anglais Hans Sloane , les médecins suisses Plater père et fils , l'Espagnol Morales , Scipion Maffei , mademoi- selle Scudéri , le célèbre Daubenlon , etc. , vécurent long- temps; ils eurent un caractère assez gai, porté aux affections agréables. Plusieurs centenaires ont même été déréglés dans leur jeunesse. Un homme de cent neuf ans , cité par Scheuch- zer , avoit été un soldai très-adonné aux fennnes , ainsi que Thomas Pane ; M. Longueville se maria dix fois dans sa vie qui fut très-longue. Un autre centenaire s'enivroit souvent d'eau-de-vie. Enfin , la plupart furent ou soldats , ou labou- I eurs ou voyageurs , ou de quelque autre métier très-rudes H O n ,33 Les chartreux, les capucins, les hommes qui se nourrisseTit habituellement de poisson , qui suivent un genre de vie sobre et simple , arrivent plus souvent à une vieillesse avancée que tous les autres. Un homme quin'avoit vécu que de lait , par- vint à cent vingt ans. Lessobresbrachmanesdeviennenttrès- vieax, ainsi que les montagnards des Alpes, de lEcosse, etc. D'après la comparaison de plusieurs tables de mortalité , Buffon a dit : « Le quart des enfans d'un an périt avant l'âge « de cinq ans révolus ; le tiers avant l'âge àc dix ans révolus, « la moitié , avant trente-cinq ans révolus; les deux tiers « avant cinquante-deux ans révolus ; les trois quarts , avant « soixante-un ans révolus. » De six ou sept enfans d'un an , il n'y en a pas un qui aille «f à soixante-dix ans; de dix ou onze enfans, un qui aille k « soixante-quinze ans; de dix-sept, un qui aille à soixaiUe- « dix-huit ; de vingt-cinq ou vingt-six , un qui aille à qualre- « vingts ; de soixante-treize, un qui aille à qualre-vint;i-cinq « ans ; de deux cent cinq enfans , un qui aille à quatre-vingt- « dix ans ; de sept cent trente , un qui aille à quatre-vingt- « quinze ; et enfin de huit mille cent soixante-dix-neuf , un « seul qui puisse aller jusqu'à cent ans révolus ». Hlst. nat. de rHomm. ( édit. Sonn.) , tom. 19, p. 121 et 122. II ajoute plus loin : « La vie moyenne des enfans d'un an « est de trente-trois ans ; celle d'un homme de vingt-un ans « est aussi à très-peu près de trente-trois ans. Un homme âgé « de soixante-six ans peut parier de vivre aussi long-temps « qu'un enfant qui vient de naître De même un homme « âgé de cinquante-un ans ayant encore seize ans à vivre , il « y a deux contre un à parier que son fils qui vierit de naître « ne lui survivra pas ; il y a trois contre un pour un homme « de trente-six ans , et quatre contre un pour un bomme de « vingt-deux ans , un père de cet âge pouvant espérer avec « autant de fondement trente-deux ans de vie pour lui que « huit pour son fils nouveau-né Une raison pour vivre est « donc d'avoir vécu; cela est évident dans les sept premières « années de la vie, où le nombre des jours que l'on doit es- « pérer va toujours en augmentant ; et cela est encore vrai « pour tous les autres âges, puisque la probabilité de la vie ne « décroît pas aussi vite que les années s'écoulent, et qu'elle « décroît d'autant moins vite qu'on a vécu plus long-temps. " Buffon , ibid. A dix ans, on peut espérer encore quarante ans de vie.; à vingt ans, on peut en espérer près de trenie-trois et demi; à trente ans, l'homme peut en espérer vingt-huit de plus ; à quarante ans, on en doit espérer vingt-deux; à cinquanîe ans , on a encore seize ans et sept mois d'espérance prcbabl* i3.; H O M de vie ; à soixante ans, on en peut espérer onze ans un mois; à soixante-dix ans , on peut encore avoir six ans deux mois à vivre ; à soixante-quinze , restent encore quatre ans et six mois de vie probable : à quatre-vingts ans , 1 homme peut en- core espérer trois ans sept mois ; et enfin à quatre-vingt-cinq ans , trois années de plus. Ainsi Thomme ne marche point à la mort à pas égaux. La femme a moins d'espérance de vie que l'homme , tant qu'elle n'a pas passé le temps critique de la cessaiion de sas règles ; mais après cette époque , elle a plus d'espérance de vie que l'homme. On observe encore que les femmes célibataires ou les religieuses sont plus sujettes à la mort que les hommes célibataires. En général, on compte , dans nos climats, un mort par trente-deux à trente-cinq vivans ; ainsi, en multipliant le nombre des morts d'un pays quelconque de l'Europe , par trente-deux ou trenie-cinq , on a le lotal de la population , à peu près exactement. A Paris, et dans toutes les grandes villes, la mortalité est plus considérable que dans les villages et dans les bourgs. Il périt aussi un peu plus d'hommes que de femmes , tandis que le nombre des femmes qui meurent est plus considérable dans les campagnes. Le commencement du printemps et la fin de l'automne sont 025 époques de l'année plus meurlrièresqueles autres, à cause du changement des saisons. Le temps des équinoxes est sur- tout fatal , les solstices sont njoins dangereux. En Asie et sous les tropiques , où il n'y a que deux saisons, les mois les plus meurtriers sont ceux où ces saisons changent. C'est à ces époques que les morts subites sont les plus fréquentes, 11 paraît encore que certains âges compromettent davan- tage l'existence que d'autres ; ainsi les révolutions qu'éprouve le tempérament du corps , le mettent souvent en danger de périr. Par exemple , l'âge de la première dentition à deux ans , la seconde dentition à sept ans, la puberté vers qua- torze ans , l'éruption de la barbe et la formation complète du corps à vingt-un ans , l'âge de la force de vingt-huit à trente- cinq ans , le commencement de la décroissance à quarante- deiix-ans, la cessation des menstrues chez les femmes de qua- rante-cinq à cinquante ans , la perte de la faculté généralive dans la plupart des hommes de soixante à soixante-cinq ans ; toutes ce5 époques , dis-je , offrent plus d'exemples de mala- dies et de morts que les autres années , parce qu'elles sont celles des cliangemens qui s'opèrent dans le corps. Les an- ciens avoient fondé sur cette observation la théorie de leurs années climatériques , quoique ces faits ne soient pas abso- lument conclnans. Prenez mille enfans à leur naissance , à peine ont-ils vu le H O U ï35 jour, qu'il en périt vingt-trois ; la denlitîon en emporte cin- quante ; les convulsions, les vers, les coliques du premier âge enlèvent plus du quart ou deux cent soixante-dix-sept ; la petite vérole en fait mourir quatre-vingts; la rougeole, sept; ensuite les accouchemens malheureux font périr environ huit femmes. La phthisie et l'asthme enlèvent en Angleterre près du cinquième de la population, ou cent quatre-vingt-onze sur mille. Les maladies inflammatoires font périr plus du septième de la population , ou cent cinquante sur mille, (iraunt pense que les fièvres aiguës détruisent deux neuviè- mes de la population , et les maladies chroniques—. Enfin, dans un âge avancé , l'hydropisie enlève quarante-une per- sonnes, et l'apoplexie avec la léthargie une douzaine ; sur mille, restent environ soixante-dix huit personnes qui par- viennent à un âge fort avancé. Mais chaque pays a ses mala- dies, qui frappent la population et diminuent les prohahilités de vie ; le scorbut et les maladies de poitrine sont communs dans le Nord ; dans les pays méridionaux régnent les fièvres aiguës; sous les tropiques, on trouve les fièvres ardentes dans les chaleurs , et les dysenteries dans la saison des pluies ; enfin , la peste en Egypte , en Syrie , en Turquie ; la fièvre jaune en Amérique ; le tétanos dans tous les climats chauds , etc. La nature du sol produit encore des causes de destruction : ainsi les pays marécageux donnait naissance à des fièvres intermittentes d'un mauvais caractère et à des fièvres perni- cieuses. Le genre de vie de chaque homme influe encore sur sa santé ; ainsi tous les tailleurs de pierre, les marbriers, les plâtriers , les perruquiers, vivant dans la poussière , ont une tendance à la phthisie ; ceux qui travaillent le plomb, le cui- vre, l'arsenic , etc. , les chimistes , et une foule d'autres per- sonnes , sont plus exposées aux maladies et à la mort que le commun des hommes. En supposant environ neuf cent mil- lions d'habitans sur le globe, et qu'il naisse un individu sur 29 -j- , et qu'il en périsse un sur 33 ; on aura au moins une naissance et une mort par chaque seconde de temps ; plus de soixante naissances et soixante morts par minute, ou de trois à quatre mille de chaque , par heure : et les flots de l'espèce humaine rouleront ainsi sans cesse dans le cours des siècles. On doit rapporter à six chefs les causes qui peuvent pro- longer ou abréger la vie des hommes. ï." Les régions et le sol; 2.° les races et les familles humaines ; 3.° les complexions et les statures ; 4-° les temps d'accroissement, et ceux de la gestation dans le sein maternel ; S." le genre de vie , les exercices et le régime ; &.° les passions , les occupations , les accidens , etc. i36 H o ^\ Premièrement, les pays froids (i) et secs sont les plus fa- vorables à la longueur de la vie, car le plus grand nombre des centenaires se trouve daris les régions froides et arides. La sécheresse est même la principale cause de la longue vie des Arabes, des Ethiopiens, etc. ; tandis que les régions maré- cageuses et pleines de brouillards , telles quel.» Hollande, offrent peu de vieillards fort âgés ; Aais les montagnes sca- lueuses de la Suisse , des Alpes , du Dauphlné , de la Savoie , de l'Auvergne , des Apennins , du Tyrol ; les îles de l'Archi- jpei , les Orcades , les Hébrides , les Tercères , les Canaries , les monts de Syrie , du Caucase , de rAbyssinle , de Tlm- maiis , le plateau de la grande Tartarle , les montagnes du Thlbet , les chaînes des Andes et des CordilicT-cs nourrissent des races vigoureuses d'hommes sobres et durs , qui parvien- nent souvent à la plus grande vieillesse, sans perdre presque leur sève et leur verdeur. Aussi l'air est pur , vif et sec dans la plupart de ces contrées. Les sols stériles sont encore plus favorables à la longueur de la vie que les pays fertiles, et les îles ou les lieux marilimes exposés auvent, plus que le mi- lieu des continens où Tair est stagnant. Secondement , il existe des races humaines qui , devenant pubères de bonne heure , comme les races Calmouque ou Mongole , et la Malaie , produisent des Individus à vie plus courte en général que laiîj^tre ; mais la race européenne est Tune des plus vlvaces , surtout au nord , comme en Suède , en Russie , en Pologne, en Norvvége , en Ecosse, parce que les hommes n'y deviennent pubères qu'à un âge avancé. D'ail- leurs , on trouve certaines familles chez lesquelles une lon- gue vie devient héréditaire , tandis que plusieurs autres ont une vie fort courte. Bacon rapporte que dans l'Héréforshlre, vers le temps des fêles du printemps , on avolt formé une danse de huit vieillards qui avolent entre eux huit cents ans. Dans la famille de Thomas Parre , on avolt observé quatre générations d'hommes de cent douze à cent vingt-quatre ans; on en cite de semblables en Pologne , en Angleterre , en Suisse. Les familles des Seblz , des Plater, des Falconet, ne sont pas moins renommées par. la longue vie de ceux qui en sont sortis, que par les savans hommes qu'elles ont produits. De même que plusieurs maladies sont héréditaires , la lon- gue vie l'est aussi dans diverses races. Il est certain encore que les enfans nés de père et mère déjà vieux ou affolblis par les maladies , vivent moins long-temps et ont moins de vigueur (i) Dans ces contiées, les arbres qui ne sont pas encore vieillis à cent cliquante ans, sont déjà près de leur mort à cent ans dans le* régions du Midi. Tî 0 M 13; que ceux nés clans la jeunesse et la force de leurs parens. Les personnes qui ont abusé des plaisirs de l'amour, surtout dans leur jeunesse , les ivrognes engendrent des enfans foibles , ca- cochymes , et qui vivent peu. Ainsi les bonne's moeurs sont nécessaires dans tout état qui veut avoir des hommes robustes et capables de le servir. Voilà encore pourquoi les généra- lions s'affoiblissent à mesure que les mœurs se dépravent. En troisième lieu, les tempéramens un peu humides , tels que les sanguins , mettantplusde temps às'accroître et à se for- mer, devenant plus tard pubères que les bilieux et les mélan- coliques , vivent aussi davantage pour l'ordinaire. Ainsi les enfans qui paroissent mous , indolens , foibles , étant plus long-temps à s'accroître , parviennent souvent à un très- grand âge, tandis que les caractères vifs , ardens , les esprits trop précoces ( comme sont la plupart des enfans rachitiques), ne vivent guère. On dit même en proverbe : cet enfant ne viora pas , il a trop (ïesprit. Lorsque ces petits prodiges en réchap- pent, ils ne produisent souvent que des sots par la suite ; tel fut ce rhéteur de l'antiquité , Hermogène , qui, à dix-huit ans, surprit tout le monde par son esprit et ses connoissances, et qui radota depuis trente ans jusqu'à la fin de sa longue vie ; ce qui donna l'occasion de dire qu'il avoit vécu à rebours, ayant mis son enfance à la fm de sa carrière , et son âge de raison à sa naissance. C'est une grande imprudence des pères , d'ins- truire forcément leurs enfans trop jeunes; en hâtant leur moral , ils abrègent leur existence , parce qu'ils détournent cerveau les forces vitales destinées au corps. Si les statures très-hautes et fluettes sont défavorables à la longueur de la vie, les statures rabougries et ramassées ne lui sont pas moins contraires. Cependant un corps plutôt court que haut, plutôt sec que trop gras, plutôt musculeux et ferme que fluet etnriou , une poitrine large , sont plus convenables au prolongement de la vie que les constitutions contraires. La structure des organes de l'homme est plus molle que celle des animaux ; c'est pourquoi il peut vivre plus long- temps qu'eux. Quatrièmement. Les enfans venus avant terme vivent sou- vent moms que ceux qui sont sortis après neui mois révolus, ou même plus. Ceux dont l'accroissement est long et gradué, sont aussi plus vivaces que ceux qui se développent tout à coup. Il paroît encore que ceux qui sont longuement allaités par leur mèresont d'une plus longue durée, pour l'ordinaire, que ceux qui sont allaités par des nourrices ou sevrés de bonne heure. En cinquième lieu, le genre de vie actif, sans être trop fatigant ; le mouvement habituel du corps , en plein air sur- ,38 H O M tout; une manière de vivre dure, austère , sobre , même mi- sérable et un peu irrégulière, confribuenJ bien plus àprolon- ger l'existence que toule autre chose. Le régime végétal , le service militaire , la vie rustique , les voyages , la chasse , la pèche , sont très-favorables à la prolongation de la vie. La plupart des centenaires ont été des paysans pauvres, élevés dans la misère, vivant fort mal , travaillant beaucoup , tantôt sobres , tantôt intempérans, plus souvent chastes qu'adonnés aux femmes , presque toujours joyeux et insoucians , ne son- geant point au lendemain, ne craignant jamais la peine, se confiant au hasard en toute sécurité , et prenant avec une égale indifférence la douleur et le plaisir , le bien et le mal, la faim , la soif, la chaleur et la froidure. Les corps habitués à une trop grande régularité dans le régime de vie , ne peu- vent s'en écarter sans danger ; tandis que les tempéramcns habitués à tout supportent avec facilité les plus grands chan- gemens. Les anachorètes et les ermites accoutumés à la so- briété vivent très-longuement. Un apologiste du jeûne (^Jour- nal de médec. tom. 28 , p. 34o. ) compte que iSa anachorètes pris en divers temps et pays , ont donné 11,589 ^"^ '^^ ^^^ totale , ou 76 ans 3 mois et plus pour chacun. Le même nom- bre d'académiciens, moitié de littérateurs et moitié desavans, ont donné io,5n ans ; ce qui est 69 ans et plus de 2 mois pour chacun ; mais ceci est toujours plus favorable que la proportion ordinaire des autres rangs de la société , puisque la durée moyenne de leur vie est de 3o à 4o ans. Aussi, dans le monde, voil-on périr et naître annuellement un individu, sur 3o à 4-0. Dernièrement enfin, les sensations légères, le caractère gai , Téloignemcnt de toule passion ardente , contribuent à la longueur de la vie avec l'espérance , le courage , la cons- tance , la fierté et même l'amour-propre ou la .vanité ; mais les passions violentes , telles que la colèi'e , la haine , l'envie, la vengeance , la jalousie , et les affections tristes ou sombres, comme les craintes , les chagrins , l'amour malheureux , le désespoir, l'anxiété et les soucis rongeans ou les désirs effré- nés , abrègent beaucoup les années. La douceur du caractère, l'indifférence , la variété des goûts , la gaîté franche , le con- tentement, agrandissent la vie, ainsi que le sommeil facile, la vie religieuse et contemplative, comme celle des philosophes et des moines; il en est de même de la tempérance dans les plaisirs de l'amour, l'eau pure pour boisson, la couche dure, i'éloignement de toute sensualité , de tout ce qui efféminé le corps et amollit l'âme, l'air froid et sec, les habits rudes, les frictions d'huile en hiver, l'usage modéré des bains en été, les .alimens rafraîchissans et astringens , etc. H O U i39 Lorsque les femmes ont passé l'âge critique , elles vivent souvent plus que les hommes, leurs fibres molles parvenant plus tard à la rigidité. Plus les périodes de vie sont lents , plus celle-ci est durable; aussi une puberté tardive , un pouls lent , un esprit qui se développe tard , annoncent la longé- vité. Fontenelle disoit que pour se porter bien, il falloit avoir bon estomac el mauvais cœur, c'est-à-dire de Tinsensibilité et une certaine apathie de caractère. La profonde sensibilité , l'affliction , les chagrins dévorent la vie ; les cœurs tendres et passionnés , les imaginations ardentes , les âmes tristes et qui s'affectent trop des misères humaines, abrègent leurs jours. Aussi la philosophie douce et enjouée est autant amie de la vie, que la philosophie austère des stoïciens, la pointil- leuse scolastique , et le péripatétisme , plein d'arguties fati- gantes, lui sont contraires. Enfin la meilleure maxime à suivre, pourquiconque veut vivre longuement, est celle-ci; benèvivere eilœiari, vivre sagement et se réjouir. Le soin excessif que les uns prennent de leur santé , ne leur est pas moins fatal que l'intempérance des autres ; en tout évitons les extrêmes , lais- sons-nous conduire à la bonne nature et à l'instinct, autant qjie le comportent les choses humaines et les conventions so- ciales. Celui qui a le plus tranquillement vécu , a le mieux vécu. La médiocrité de la fortune , le doux loisir, la vie sim- ple, le caractère bienfaisant , les charmes de l'amitié, lapais de l'âme , sont des biens inestimables les plus conformes à notre nature, et les plus favorables à la longueur de la vie. Ce sont noj passions, c'est l'ambition dévorante, c'est l'avarice, l'amour insatiable de l'or, la poursuite des rangs, des honneurs de ce monde ; ce sont toutes ces ténébreuses intrigues, toutes ces sourdes malignités, ces calomnies, cette ardeur inconsi- dérée de la vanité, ces envies méprisables, qui rongent la plu- part des hommes, et qui les font mourir pour des petitesses. Heureux celui qui coule de douces journées au sein de ses devoirs, de sa famille et de ses amis, qui fait le bien, vit content et dans l'indépendance ! de longues années l'at- tendent , et sa carrière est une suite non interrompue de félicité. De la Mort. Nous demandons en vain une longue vie , nous espérons en vain quelques journées de plus sur la terre ; il est u^ terme inévitable : il faut mourir un jour. Il faut mourir ! cette idée ronge de chagrin la plupart des hommes. Le chemin de la vie est terminé par cette triste perspective, et à mesure que nous avançons, les soucis nous accompagnent et nous en rendent ies approches plus afûi- lio H O M géantes. Gloire, renomme'e , fortune, beauté, plaisirs, joies du monde : la tombe va tout engloutir. Qu'est-ce donc que la vie ? un songe , et rien de plus. Tant d'hommes sont passés sur la terre, tant d'autres doi- vent passer à leur tour, la vie est si courie et les siècles sont si longs, enfm nous sommes entourés de choses si grandes et si incompréhensibles dans le monde, qu'on ne peut rien dire d'un être aussi passager, aussi fragile que l'homme. Lui seul prévoit la mort: elle ne fait point le tourment des animaux : ne la connoissant pas, ils la subissent sans regrets. Les hommes les plus grossiers, les sauvages les plus stupides, les enfans , ne songent presque jamais à elle. L'homme dans la force de l'âge fait gloire de la mépriser; c'est notre foi- blesse de corps dans la vieillesse ; c'est cette prévoyance dé- sespérante de l'avenir , qui nous fait boire à longs traits toute l'amertume de notre dernière heure. L'insouciance , la dissi- pation, nous dérobent la triste vue de noire fin ; mais nous avons beau lui tourner le dos, la mort nous attend là; elle nous entraîne à la tombe chaque jour, à chaque heure , à chaque minute; rien ne peut nous soustraire à son bras. L'heure sonne , l'homme n'est plus ! ce roi du monde eai terrassé ; cette main puissante qui ordonnoit la mort a suc- combé elle-même. Six pieds de terre font désormais toute la grandeur d'Alexandre , de cet homme qui remplit l'univers de sa renommée ; il est foudroyé au sein de ses triomphes, et la terre demeure dans le silence. Yoilà un petit dérangement dans le corps d'un homme ; c'en est assez, la face de l'Eu- rope et de l'Asie est changée. Qui peut comprendre les mystères de notre vie ? Qu'est- ce que la mort? et pourquoi la redouter, si elle est l'affranchis- sement de nos misères ? Est-ce à cause du tourment qui l'ac- compagne.''mais nous souffrons souventdavantage sans périr ; une jambe qu'on ampute cause plus de douleur qu'une mort de maladie ou même qu'une mort violente. Combien de morts sont tranquilles et douces ! Quelle paix , quelle séré- nité dans les regards des mourans! Quel rayon d'espérance , quelle joie pure, brillent sur le visage de ï homme (ù bien ! Il ne périt pas , il s'élance à une nouvelle vie j et c'est alors qu'il paroît dans toute sa grandeur. Mais ce qui rend la mort cruelle , ce sont les âttachemens que nous laissons sur la terre ; cependant ils sont si péris- sables, si fragiles, que nous devrions apprendre à les quitter sans regret. La vie est un long apprentissage du trépas , pour quiconque sait réfléchir. Placés dans un point du cercle de l'éternité , tout ce qui nous environne atteste notre néant. Combien de milliards d'hommeis sont moissoncés tour à tour H O M ,4, dans ce monde, semblables à l'herbe des prës sous la faux de l'agriculteur ? Pourquoi donc élever nos désirs au-delà de notre commune destinée ? Enfans du temps , il doit un jour nous dévorer. La philosophie nous apprend à vivre en nous montrant à mourir ; c'est du sein de la tpmbe que sortent les hautes vérités qui nous détrompent du' monde , et la sagesse n'est qu'une méditation sur la mort. Notre raison ne se perfec- tionne et ne s'agrandit même qu'au milieu de cette sombre pensée ; elle seule nous donne nos véritables dimensions. La science et la vertu, semblables à la toison d'or, ne s'acquiè- rent qu'en affrontant les terreurs du trépas. Tous les grands hommes ont trouvé le génie au sein des méditations que leur suggéroit l'étude de la nature humaine et la vue de sa fin. A mesure que les hommes réfléchissent davantage , ils songent plus souvent à leur destruction; mais ceux qui pensent peu s'élancent aveuglément dans la carrière de la vie. Ainsi nous voyons que les peuples sauvages redoutent peu la mort et y pensent rarement, tandis qu'elle est un objet d'effroi chez les nations civilisées , parce qu'à mesure qu'on perfectionne l'esprit, le corps se détériore et languit. Le sauvage, comme l'enfant ., songe à peine au lendemain; l'homme civilisé^ comme le vieillard, redoute un avenir qui le tourmente sans cesse ; la sagesse outrée devient une vraie maladie de l'esprit. La mort est la cessation de tous les mouvemens de nos organes. La pensée s'éteint d'abord, les yeux ne voient plus, les oreilles n'entendent plus , la langue ne goûte plus, le cœur cesse de battre , la respiration s'arrête , les muscles s'affais- sent, tout tombe; plus de chaleur, plus de sentiment ; le froid, l'immobilité, s'étendent partout. Ces joues, autrefois si ro- sées et si gracieuses dans la jeune fille, deviennent hâves et livides ; cet œil , d'où jaillissoit le feu de la pensée, est fixe et terni; cette bouche vermeille, asile du rire , est noire et hi- deuse ; ce beau corps, si plein de charmes lorsqu'une douce chaleur le vivifioit, est aujourd hui une charogne infecte et dégoûtante, que les vers dévorent, qui tombe par lambeaux tout pourris, d'où sortent une sanie purulente et un sang noi- râtre et figé. Retirons nos regards de cet affligeant tableau , pour les reporter sur la face du monde où vivent tant de peuples di- vers; et sans nous occuper davantage du sort commun de tous les hommes, examinons-les dispersés sur la terre, fécondant sa surface, peuplant ses solitudes , régnant sur les animaux, et disposant des plantes et des fleurs. Recherchons les attributs qui les distinguent , décrivons leurs caractères, et établissons leurs différences. Celte scène de vie , toujours brillante et i/;z H O M toujours animée , nous offrira des images plus agréables et des considérations moins attristâmes. SECTION DEUXIÈME. Des espèces, des races et des variétés du genre humain. L'homme est cosmopolite -, ses innombrables familles se sont répandues sur tout le globe , et des feux de la torriHe aux glaces des pôles ; ses vaisseaux ou ses pirogues ont sil- lonné , dans toutes les directions , les ondes de TOcéan ; les îles les plus reculées , les déserts et les rochers qui sembloient inaccessibles, ont vu Thomme, roi de la terre , venir prendre possession de cet antique royaume , noble héritage que lui avoit dévolu la nature. 11 est le seul être , absolument par- lant, qui soit véritablement cosmopolite : car aucun animal , aucune plante ne vit ou ne prospère spontanément surtout le globe, parce qu'aucune autre espèce que la nôtre ne sauroit se soustraire , par Tinduslrie, à l'injure de tous les climats, aux rigueurs de toutes les températures. Mais 1 homme ayant une grande capacité d'intelligence et des mains , instrumens merveilleux qui exécutent les prodiges créés par la pensée, a trouvé le feu , des vétemens , des abris , des armes ; il a reçu le don de vivre, également partout, de végétaux et de chairs, et fier de ces magnifiques prérogatives, il s'est levé debout sur la face de la terre , comme pour admirer les cieux , et commander en maître à toutes les créatures. Cependant, à considérer de haut la race humaine éparse sur la terre , et ces grandes fourmilières des nations, ces cités populeuses où tant d'individus s'agilent un instant pour disparoitre et se succéder tour à tour dans l'immensité des âges , on revient un peu de l'idée exagérée que l'on s'étoit formée de notre espèce. On la voit, comme tous les autres êtres , soumise aux influences des climats , tantôt foudroyée par les orages, sous les tropiques, tantôt fuyant dans ses asiles souterrains la bise piquante du Nord, ou les ardens rayons du soleil de la canicule, tantôt décimée par des pestes, chassée par les inondations , dispersée par la calamité des famines , traversant péniblement les déserts arides , ou re- cueillant en hordes nomades des tributs rares et passagers d'une terre avare ; tandis qu'en de plus heureuses conirées le sol prodigue presque sans effort, à d'autres habitans, des nourritures surabondantes. Il faut donc que l'homme se familiarise avec tant de des- tinées que lui présentent ses diverses habitations sur le globe. Ici, laborieux agricirheur, il faut qu il arrose les guérets de ses sueurs ; là, navigateur intrépide, il cherche au milieu H O M des ondes la riche nourrifure de sn famille ; ailleurs il dompte ie cheval, le chameau, ouïe renne, et parcourt d'immenses solitudes , en se contentant , soit du lait, soit de la chair de ces innocens compagnons de ses peines, qu'il immole à ses besoins. Partout nous ne verrons dans le genre humain que le premier parasite du globe terrestre , subissant toutes les variations qu'éprouve la surface de notre planète , suivant les saisons , les latitudes, les diverses élévations et la qualité des terrains , les météores de l'atmosphère et une foule d'au- Ires modifications commandées par les grandes lois de la nature. Ainsi l'homme terrestre doit se mettre en rapport avec la terre qui le nourrit ; il doit considérer les puissances qui l'entourent et qui dominent sa vie. Ne pouvant les domp- ter , il faut qu'il apprenne à se mettre en harmonie avec elles, s'il veut vivre sain. Les hommes étant, pour ainsi dire, une production du globe terrestre 'nrlytai c<.th^a-:!sol ■ comme nous appelle Homère, ainsi que les végétaux et les autres animaux , tous ont besoin de se conformer à la constitution propre de notre planète. Ainsi, pour bien connoître l'homme, il faut étudier notre monde. A la vérité , cet opulent citadin , toujours bien vêtu, bien logé et nourri, constamment à l'abri, dans son carrosse, des injures de l'air quand il sort, ne ressentant "ni la glace des hivers près de son foyer, ni même les effets des saisons sur les productions de la terre , dans ses alimens cuits, préparés avec soin ; cet être heureux jouissant , par le moyen de sa fortune, de toutes les délices, est plus soustrait que les autres hommes à l'influence des climats, des saisons, des divers lieux de la terre. La loi des climats s'applique moins d'a- bord à lui qu'à la généralité des nations , toujours pauvres et exposées , presque sans défense , à l'action directe de la na- ture. Mais si l'homme riche et tout artificiel subsiste molle- ment comme la plante en une serre chaude , il se rend aussi délicat , débile ou sans résistance contre les impressions du dehors , faute de s'endurcir à les tolérer. Il en est plus dou- loureusement affecté quand il s'en trouve atteint , et par-là la nature revendique son empire avec d'autant plus de force qu'on l'avoit plus dédaignée. De plus, en se soustrayant avec soin à l'action des élé- mens, l'homme civilisé des villes , se concentrant dans les travaux des arts, les objets de son industrie ou de son luxe , laborieusement occupé des besoins de sa fortune, soumis im- médiatement au gouvernement qui le régit , aux habitudes , aux moeurs sociales , oublie les hautes lois de cette nature qui pose les fondemens primitifs des gouvernemens et de la civilisation. En observant les effets, nous négligeons trop i44 H O M souvent les sources dont ils émanent ; nous menons la vie des fourmis travaillant dans leurs étroites demeures, sans porter nos regards au-delà des sillons qui enclosent nos petits inté- rêts. Bientôt nous ne comprendrons plus la puissance de la nature; nous ne verrons jamais que l'homme artificiel, moulé sur le type d'une société factice et variable. Indépendamment des attributs des â^es et des sexes , la na- ture nous présente toutefois sur la terre un grand nombre de variétés. Les unes dépendent des tempéramens particuliers; les autres du caractère national , ou des races et des espèces qui distinguent le genre humain sur toute la terre. Des affec- tions morbiûques, des habitudes long-temps continuées, les empreintes des climats et des nourritures, modifient beaucoup la conformation des hommes, et allèrent leurs mœurs, leur manière d'être, dans les mêmes proportions. Il est aisé de s'en convaincre en examinant spécialement ces modifications dans toutes les parties du corps humain. La chevelure qui pare la tête de l'homme est plus courte que celle de la femme , dont les cheveux sont longs et liexi- bles. En général , ceux des hommes du Nord sont droits et longs ; ceux des méridionaux sont bouclés et même crêpas , lorsque le climat est très-chaud. Dans les nègres , c'est une espèce de laine frisée ou de bourre. Les habitans du nord de l'Europe ont sojivent des cheveux blonds ou roux ; les che- veux châtains se trouvent le plus communément dans les Européens àes climats tempérés , et les cheveux noirs, chez les hommes des pays méridionaux. La couleur de Tiris des yeux suit une semblable progressioh. Les yeux cendrés ou bleuâtres sont communs dans le Nord; les yeux noirs dans le Midi , et les yeux d'une nuance intermédiaire , dans les ré- gions tempérées. On observe la même progression dans les différens âges : les enfans sont blonds , et la couleur de leurs cheveux, de leurs yeux, de leur peau, devient plus foncée à mesure qu'ils avancent en âge. Dans les hommes, autres que ceux d'Europe, les yeux et les cheveux sont toujours plus ou moins noirs. Les races mongole, chinoise etlapone, ont constamment cette couleur noire de cheveux et d'yeux, à quel- que âge et dans quelque climat que ce soit ; on n'y observe que de légères variétés, selon les âges et les climats. Ces peu- ples ont peu de barbe naturellement; leurs poils sont clair- semés, noirs, droits et rudes. On a long- temps prétendu que les Américains manquoient toujours de barbe ; il existe ce- pendant un grand nombre de témoignages contraires ( Blu- menbach les a cités dans le Gotting. rnagaz. an 2, part. 6, pag. 419)» et l'on sait qu'ils se l'arrachent. (Selon Charlevoix, Fiancé aitt.tom. 3, pag. 179; Lafiteau, Vo)-. miss., p. 333, H O M .^, «•t Mœurs dçs Saiwag. , tome i , p; io/[; Molina , Chili ^ préf. p. iio, et Maicgrave, Bvasil, c. 4, p. i3, disent que plu- sieurs d'entre eux ont des barbes noires; Gumilla , Orénoq. t. I ; Denys, Am.sept, t. 2; Bougainville , Carteret , Cook et Forster, Lapeyrouse , etc. ). En général , il paroît que les cheveux et les poils blanchissent plus tard dans la vieil- lesse , aux races étrangères qu'aux Européens. Dans la race mongole, les yeux sont plus écartés que chez 1 Européen; les paupières sont aussi plus bridées et s'ouvrent moins Les yeux des Chinois, des Japonais, des Siamois sont .placés obliquement; les habitans de la Nouvelle-Hol- lande tiennent toujours leurs yeux à moitié fermés. Le front est comprimé chez les Omaguas et les autres peuplades de a race américame ; il est reculé dans le Nègre, avancé dans 1 Européen , large et plat chez les Mongols ou Kalmouks. Les nez de ces derniers sont si épatés et si larges , que leurs na- rines sont à découvert et n'ont presque point de proéminence E)ans les Nègres, le nez est plat et écrasé ; il est grand chez la plupart des Européens , court et gros comme une figue aux Chinois septentrionaux ; aplati chez les Caraïbes. La bouche est large et très-fendue chez les Malais , les Kalmouks et beaucoup de peuples du Nord ; petite , étroite dans les Èuro^ peens méridionaux. Les lèvres sont épaisses et gonflées chez les Malais , et surtout dans les Nègres ; petites aux Euro- péens; larges aux Chinois , aux Alongols, et aux peuples du nord de l'Asie. On trouve des joues extrêmement saillantes trers 1 os de la pommette dans tous les Kalmouks et les Tar- tares-Mongols ; la saillie est encore plus forte parmi les Hottentots; elles sont rentrantes chez plusieurs Européens et surtout chez les anciens Grecs. Les Hindous ont des oreilles placées plus haut que les nôtres; les Biscaïens en ont naturellement de fort grandes , et beaucoup de peuples in- diens les allongent d'une manière extraordinaire , y font des ouvertures , etc. On connoît plusieurs exemples d'hommes qui peuvent faire mouvoir leurs oreilles, et j'en ai vu moi- même. Les Siamois et les Chinois ont une tête plus ou moins conique ; la face des Kalmouks représente un losange • celle des Hottentots un triangle, dont la pointe est en bas ; celle des Européens forme un ovale plus ou moins parfait. ' Camper a déterminé l'avancement de la figure d'une ma- nière assez exacte par la mesure de l'angle facial. Supposez: une ligne droite tirée du front , à la racine des dents inci- sives supérieures , et une autre ligne passant de la mâchoire supérieure au trou occipital , vous obtiendrez un angle oui sera ouvert depuis 85 jusqu'à 90 degrés dans Vhomme hlLc û £.urope , qui aura environ 80 à 85 degrés dans les Kal- î{6 H 0 M mouks, les Mongols , les Chinois , les Malais el les Caraïbes , et qui aura de 80 à 76 degrés dans le Hotlentot , le Nègre , surtout les Eboës , dans les Caaiguis et quelques Mallicolois. Cet angle devient encore plus aigu dans TOraisg-Outaisg, ( V. son article ) , dans les autres singes , et dans toute la série des quadrupèdes. La grande ouverture de Tangle facial se rapporte assez bien au degré de beauté et de perfection morale que nous reconnoissons dans chaque peuple. A me- sure que cet angle devient plus aigu , la face s'allonge en mu- seau, elle montre un visage ignoble et approchant de la bêle; lorsque cet angle se redresse, la figure prend un air de grandeur, dé noblesse et de sublimité. Cette considération n'étoit point ignorée des anciens sculpteurs grecs ; ils paroissent en avoir fait usage dans leurs travaux , et nous reconnoissons même qu'ils avoient augmenté encore plus que la nature, cette ou- verture de l'angle facial, en lui donnant jusqu'à 100 degrés dans les figures de Jupiter. V. la planche E 38, ci- devant. Les proportions de la tête avec le corps ne sont pas les mêmes dans toutes les races d'hommes. Chez l'Européen , la hauteur de six ou sept fois celle de la tête, donne la grandeur totale des individus. Dans le Kalmouk , la proportion n'est que de cinq fois et demi ; et chez les Esquimaux , les Sa- moïèdes , de cinq fois seulement. Hippocrate a dit , que des peuples voisins de la mer Noire ou du Pont-Euxin , ayant adopté la coutume de comprimer le crâne de leurs enfans, ce continuel usage avoit passé en nature , et que de son temps ces peuples naissoient macro- céphales , avec de grosses têtes allongées. Strabon les crut retrouver dans la nation des Sigynes du Caucase. Pallas , dans son Voyage en Tauride et en Crimée {iom. 2 ,^. i56, ir.fr.^ pi. xxxvii, Jîg'. 2 ), observa des Tatars montagnards de Kikeneis , Liména , Simseus , ayant la physionomie la plus bizarre et une tête singulièrement allongée. Seroient-ce ces anciens macrocéphales , ou les descendans des Génois dont parle Scaliger ( Comment. Theophr. de raus. plant. , /. v , pag. 287 ) , ou une modification particulière causée par le cli- mat ? On voit , en effet , de très-belles nations à côté des plus hideuses, comme les Géorgiens à côté des affreux Nogaïs, et autres Kalmouks. A l'égard des déformations acquises , on peut citer les Omaguas qui avoient l'habitude de comprimer, entre deux planches , la tête de leurs enfans ( La Condamine , Mém. acad. scienc. 174^, p-'^-k']- V. aussi les instrumens pour cette compression dans le Journal de Physiq. 1791 , août, p. 82 ). Cet usage étoit si général dans presque toute l'Amérique ( aux Chactas de la Géorgie , aux Waxsaws de la Caroline , Tï 0 M ,/^ eux Péruviens, aux Caraïbes, selon Oviédo , Hist. gêner, de las indias ; Torquemada , Monarch. indiana , /. 3; Don Ulloa , Relacio del viag. , t. 2, p. 533 ; aussi aux nègres des Antilles, d'après Chanvallon, Voy. Martiniq., p. 39 , et au déiroit de Nootka, selon Meare's , Voyage, p. 349 ) qu'il fallut qu'un concile le proscrivît dans toute l'Amérique Espagnole ( Jos. Saenz de Aguire, Collect. maxim. concilior., Hisp. et tiuv. orb. , tom. VI, p. 2o4). Ces singulières habitudes de pétrir les têtes humaines se i:etrouvent encore aux îles de ]Sicobar(Nic. Fontana dans les Asiat. research., Mil, p. i5i), et à Sumatra, suivant Marsden ; elles ont été plus ou moins pratiquées chez des anciens Grecs , selon le médecin Eplrote , Philites , cité par Blu- menbach, et chez des nations modernes d'Europe, comme les Génois d'après Vésale , les Belges, selon Spigel, les français ( Andry, Orthoped. , tom. 2 , //. 3) , les Allemands , les Turcs , etc. ; comme si la nature ne savoit pas bien for- mer nos cervelles d'elle seule! Toutefois la nature reprendconsiamment sa forme primitive: çesse-t-elle , en effet , de produire des prépuces aux Juifs et aux Orientaux qui se circoncisent depuis tant de siècles ? Ce sont plutôt les climats et les nourritures qui gravent à la longue leur empreinte sur notre espèce. Les habilans des zones ardentes de la terre ont le corps grêleet maigre, tandisquilest piusépaiset large parmi tous les peuples des climats froids. Les Indiens , les Chinois , les Pé- ruviens , les Hottentols, les habitans de la Nouvelle - Hol- lande y les Kamtchadales et les Esquimaux , ont des pieds et des mains proportionnellement petits pour leur taille. On sait que les Chinois déforment artificiellement les pieds de leurs femmes , dès leur jeune âge , en les reployant en dessous , et les maintenant ainsi à l'aide de bandages. (Macarlney , Ambass. en Chine., tom. i.) Les Indiens ont des jambes fort longues , tandis que les Kalmouks et les autres Tartares- Mongols en ont de courtes. Les Ir'landaises ont, à ce qu'on assure , de très grosses cuisses. Dans la Nouvelle-Zélande, chez les naïres de Calécut , et les habitans de l'île de Saint- Thomas , les jambes sont épaisses, massives, et comme œdémateuses ; ce qui paroît être Un état de maladie , un gon- flementassez ordinaire chez les vieillards , et parmi les habi- tans des pays humides et malsains. Les peuples qui ont cou- tume de s'asseoir à terre, les jambes croisées, comme font les tailleurs , portent ordinairement les genoux en dehors , .de sorte qu'en se tenant droits , les pieds rapprochés, on voit beaucoup d'espace d'un genou à l'autre. Cette conformation ùuncrocheesï fort commune aux Turcs et aussi aux Kalmouks , »48 H 0 M parce qu''ils se tiennent à cheval pendant là plus grand* partie de leur vie et dès la plus tendre eniance. La déforma- tion des pieds est assez ordinaire chez les peuples qui mar- chent sans chaussure, dans des pays raholeux , comme les Pécherais, et autres habitans de la Terre-de-Feu , au sud de TAmérique méridionale. (Bougainville , roy. autour du Monde, pag..i47 , et Forsler, Ofjs.) Les Américains ont des jambes courbées ou cambrées; mais cette courbure est en- core plus prononcée parmi les nègres ; et les anciens Ta- voient observée dans les Ethiopiens et les anciens Egyp- tiens. ( Aristote, Prof>l. 5, arl. i4) On a prétendu que les couleurs des différentes races d'hommes étoient principcslement dues à l'inlluence des cli- mats et de la lumière ; quoiqu'on ne puisse pas nier que cette dernière ne contribue beaucoup à brunir et noircir le teint , on n'a pas suffisamment ex.tminé la condition proj^ré de chaque race humaine à cet égard. En effet, nous voyons tous les jours d.ms la même ville des enfans , des hom- mes, dont la peau est naturellement plus blanche chez les uns et plus basantie chez les autres. Un individu d'un tenï- pérament sanguin ou lymphatique, est plus blanc qu'un au- tre d'un tempérament bilieux ou mélancolique ; enfin les uns sont blonds , les autres bruns , quoiqu'ils soient également exposés à la lumière , qu'ils aient toujours habité le même lieu, et qu'ils vivent de la même manière. Si le nègre ne doit la noirceur de son teint qu'à l'ardeur brûlante dn ciel de l'A- frique et à de mauvjiises nourritures , pourquoi rie blanchit-^ il pas en Europe ? Pourquoi y engendre-t-il des enfans aussi Boirs que lui avec une négresse .f* Les colons hollandais qui habitent depuis plus de deux cents ans dans les terres du Cap de Bonne - Espérance , et y vivent à la manière des Hot-^ tentots , mais sans se mélanger à eux par des mariages , ont conservé leur caractère primitif de figure et la couleur blanche de leur teint ; il est seulement hâlé , mais il redevient très- blanc en se tenant hors des rayons du soleil. Adanson (F07. au Sénég., pag. 88) cite des mahométans blancs qui , établis depuis long-temps dans l'intérieur de l'Afrique , au milieu des peuples noirs, y ont conservé toute leur blancheur. Le milieu de l'île de Madagascar est habité par des hommes basanés ; on ne trouve des nègres que dans certains cantons et près des ri- vages de cette île , qui regardent la cfite orientale de l'Afrique. Une foule de voyageurs témoigne que les Européens établis dans la zone torride , s'y hàlent ; mais , tant qu ils ne s'allient point aux nègres , ils n'y deviennent jamais noirs. De plus , on «rouve despenplesnègres dans des climats tempérés, et des na- tions de race blanche ou basanée , sous la torride. Par exemple, H O M j49 Ja terre de Diémen est presque aussi froide que l'Irlande; cependant elle est habitée par une rare noire. Les îles des Moluques et de la Sonde sont immédiatement placées sous la zone torride , et elles sont peuplées de Malais peu olivâ- tres. Au Malabar, à la côte de Çoromandel , à la presqu'île de Malaca , la chaleur et la lumière sont plus fortes qu'au midi de la Nouvelle-Hollande et au Cap de Bonne-Espé- rance ; cependant les habitans des premiers sont basanés , et les seconds sont nègres. Les témoignages de plusieurs voya- geurs, comme HatUns, Bruce , Adanson , etc. , nous affir- ment qu'il existe des peuples blancs au cœur de la plus brû- lante partie de l'Afrique. D'ailleurs les animaux restent blancs sous la zone torride. Le nègre transporté au nord de l'Améri- que , y conserve sa couleur , même après plusieurs généra- lions , sans mélange (Kalm. , Amer. res. , tom. 2 , pag. Ifii , sq. et 54.2 ), Si le climat influe tant sur les couleurs, pourquoi les Guèbres ou Parsis ( anciens Perses adorateurs du feu) , gardent-ils leur teint blanc p?rmi les nations brunes de l'Inde, depuis un si grand nombre de siècles? Pourquoi le Hongrois est-il plus basané que le Suisse et le Grison , qui habitent sous le même parallèle ? On trouve dans l'Amérique méri- dionale des lieuse au§si chauds que certaines contrées de l'A- frique ; cependant les premiers n'ont que des habitans de cou- leur de cuivre , et les secondes sont peuplées de nègres. Les filles maures qui ne s'exposent pas au soleil , sont aussi blan- ches que nos Provençales ou les Italiennes , et les Polonai- ses sont souvent aussi brunes que les Espagnoles. Mais que penser encore de celte prétendue influence unique de la chaleur et de la lumière sur les couleurs , en trouvant chez les Lapons , les Samoïèdes , les Kamtchadales , une peau plus brune que chez les Arabes, les Indous, les Malabares et les Malais ? Les Suédois , les Islandais sont plus rappro- chés du Midi que les Lapons , cependant ils sont bien plus blancs ; le Péruvien , le Caraïbe , placés près de la zone tor- ride, ne sont pas plus noirs que les Patagons et les Iroquois; les bruns et hideux Kalmouks sont les voisins des blanches et belles Géorgiennes , des Circassiennes et des Mingréliennes ; et les Abyssins hâlés sont entourés de hordes toutes noires ; le Sibérien est brun , tandis que l'Européen , placé plus près du Midi , est blanc. Considérez la terre sous tous ses paral- lèles, depuis les pôles jusqu'à l'équateur, vous ne trouverez aucun rapport constant entre les degrés de chaleur ou de lu- mière , et les couleurs des races humaines ; car , suivant l'o- pinion de ceux qui attribuent uniquement la noirceur à la lu- mière ou à la chaleur des climats , il faudroit que les régions polaires fussent peuplées d'hommes très-blancs , 1. 38. Il y a cependant des ex- ceptions produites par la différence des climats et par l'état social de chaque peuplade; ainsi plusieurs insulaires de la mer du Sud, comme les Otaïtiens , les Malais des îles de la So- ciété,de celles des Amis, ont un caractère beaucoup plus doux, La race malaie se trouve dans la partie intérieure de l'île de Madagascar, aux Maldives, à Ceylan , aux îles de la Sonde, comme Sumatra, Java, Bornéo, à la péninsule de Malaca, aux îles Moluques, aux Philippines , aux Célèbes , à presque tout l'Archipel indien , à la Nouvelle-Zélande , aux îles de la mer du Sud, à Otaïti , aux îles Sandwich, aux Mar- quises , etc. Cette race est toute maritime , et fait un conti- nuel cabotage avec des pirogues extrêmement légères , dans tous les parages de l'Inde. Les Malais sont très-actifs, auda- cieux, ardens au gain , rusés , trompeurs , habiles marchands : <'.e sont les courtiers et les facteurs de toute l'Inde , comme les Juifs le sont en Europe , et les Arméniens en Orient. La langue malaie est l'une des plus douces qui existent dans l'uni- vers ; elle n'est presque composée que de voyelles. La reli- gion de ces peuples est une idolâtrie ou un fétichisme , peu supérieur à celui des peuplades nègres. Les constitutions po- litiques des Malais sont des espèces de républiques entière- ment féodales, et il y a toujours deux classes d'individus ; les Tiobles qui forment une plus belle lignée , parce qu ils sont les mieux nourris , les moins exposés aux injures de 1 air , et H O AI ,67 le bas peuple plus laid. En général , les Malais sont polyga- mes : rarement ils se couvrent de vêtemens, car ils habitent un climat très-cbaud; mais ils ornent leur peau de peintures, de points etdedessins de diverses couleurs qu'ils y impriment. On nomme tatouage cette sorte de bigarrure. Elle est aussi en ^rand usage parmi les hordes nomades des Américains et des jSiègres; enfin , chez tous les peuples qui n'ont pas l'usage des vêtemens. On trouve même de ces peintures , de ces marques imprimées dans la peau par des piqûres , chez des nations plus policées. Les Asiatiques au-delà du Gange , les Siamois , les Péguans, et même les Chinois, peignent quelquefois des {leurs sur leur peau. Les Nègres découpent la leur en en- tailles , ce qui la fait paroître gercée et raboteuse en ces en- droits, indépendamment des véritables gerçures qu'y pro- duit la chaleur. En Arabie , en Egypte , les habitans peignent leurs mains en jaune orangé. Les Kréeks , Américains du Nord , figurent sur leur peau des serpens, des crapauds , etc. , pour paroître plus redoutables à leurs ennemis. Au détroit de Davis, les femmes se découpent le visage et y mettent une peinture noire. Les anciens Pietés et Bretons se peiguoient en bleu , avec la guède ou le pastel. Les Malais font un grand usage de bétel et d'arec, sortes de feuilles (^piper betele , Linn.) , et de fruits ( ar^ca <:a- techu) , acres, aromatiques, qu'ils mâchent continuellement. Ils vivent de riz , de sagou , des fruits d'arbre à pain et d'é- pices , et cultivent peu la terre. Leurs armes sont presque tou- jours empoisonnées ; ils sont cruels', et quelquefois même anthropophages dans leurs guerres. Cinquième race. — Noi're , Nègres. Le nègre se perpétue dans son espèce noire , dans sa figure et ses caractères , sous tous les climats ; il ne change point essentiellement , tant qu'il ne se mélange point aux autres races. Il est plus porté aux affections des sens qu'aux pures contempLitions de l'esprit ; il existe tout entier dans ses nppétits corporels; passionné pour les exercices agréables, les jeux, la danse , la pantomime , il sent plus qu'il ne pense. Son intelligence est ordinairement moins grande que celle des blancs, comme nous l'avons dit ; sa conformation se. rapproche même un peu de celle de l'orang-outang. Tout le monde connoît cette espèce de museau qu'ont les nègres, ces cheveux laineux , ces grosses lèvres si goeffées , ce nez large et épaté , ce menton reculé , ces veu-î ronds et à fleur de tête , qui les distinguent et qui [&è feroient reconnoître au premier coup d'œil , quand Uiéme ils seroient blancs comme les Eu- ropéens, Leur front est abaissé et arroadi ; leur tête est com- ,feS KO M primée vers les tempes; leurs dents sont placc'es oLiiquement ensaillie.Plusieursont les jambes cambrées; presque tous ont peu de mollets, des genoux toujours demi-fléchis , une allure «ireinlée , le corps et le cou tendus en avant , tandis que les fesses ressortenl beaucoup en arrière.Tous ces caractères mon- trent véritablement une nuance vers la forme des singes, et s'il est impossible de la méconnoître au physique , elle est même sensible dans le moral. L'homme noir est né imitateur, comme le singe ; il reconnoît la supériorité intellectuelle du blanc, supporte assez aisément son esclavage, est très-insouciant et paresseux. Ces habitudes annonccntune mollesse naturelle ou innée de l'âme. 11 faut observer encore que l'avancement des dents et leur inclinaison empêche les nègres de prononcer la lettre R; il en est de même des Chinois; elil est remarquable que tous ces peiiples sont cxiremement timides : au con- traire , tous les habltans du iSord de la terre prononcent cette lettre avec beaucoup de facilité, et on la trouve fré- quemment dans leur langage ; ce sont aussi des peuples rem- plis de courage et d'une valeur indomptable. La plupart des juremens qui expriment la colère et la fureur, ont également cette lettre, dont l'exacte prononciation dépend de la posiùon verticale des dénis et du peu d'avancement des mâchoires ; car à mesure que les mâchoires se rapetissent , le front s'a- vance , le cerveau s'étend et s'agrandit , le naturel prend plus d'énergie , et l'âme plus d'activité. 11 suit de là que le nègre est en quelque sorte Tinverse de l'Européen, par la forme, la capacité de son crâne , et par la foiblesse et la dégrada- tion de son âme. F. la planche E 38. M. Volney remarquant que la forte chaleur gonfle les joues , les lèvres , a présumé que celte sorte de moue con- tinuée pendant des siècles chez les nègres, pouvoit être la cause du prolongement de leur museau. Mais il faudroit que cette action fût bien active pour reculer le trou occipital, et prolonger les os de la face du nègre , rétrécir sa cavité céré- brale, etc. En outre, il faudroit que cette chaleur eût noirci jusqu'à la cervelle et les viscères les plus intérieurs des nègres; ou reconnoît en effet cette diathèse noire intérieure en les disséquant , tout comme la chair et le sang du lièvre sont plus noirs radicalement que dans l'espèce du lapin. I." L'espèce noire se distingue en deux branches : celle des Ethiopiens ou des nègres proprement dits, et celle des Cafres. La première famille renferme les loloffcs , les Foules, les peuplades du Sénégal , de Serre-Lione, de Maniguette , de la Gôte-d'Or, d'A.rdra, du 6eni;j , de Majombo , de la Ni- gritie, des Mandingues , de Loango , du Congo , Angola, Labolo et Benguela , enfin de toute la côle occidentale de HO M ,6r} i^ Afrique , depuis le Séne'gal jusqu'au cap Négro , en y com- prenant les îles du Cap-Vert. On les distingue des Cafres par la mauvaise odeur qu ils exhalent lorsqu'ils sont échauffés, par une peau très-huileuse, satinée, d'un noirfoncé. Leur na- turel est assez paisible ; ils sont robustes , mais lents et très-paresseux. On les préfère, dans les colonies euro- péennes, à tous les autres Africains. Ces misérables , dévoués à l'infortune pour satisfaire nos voluptés , ont sans doute à se plaindre de la nature qui les a rendus inférieurs aux blancs ; mais du moins elle a ôté une partie de l'amertume que leur asservissement doit répandre sur leurs jours , en les rendant plus capables d'en tolérer la rigueur. Cet abus inhumain de notre supériorité est une tyrannie condamnable devant Dieu et les hommes; aucune loi ne peut l'autoriser: c'est ériger la force en droit et le crime en devoir. Il est clair que si l'Eu^- ropéen avoitle droit d'enchaîner les nègres et de les soumet- tre à un travail pénible, dont il dévore seul tout le fruit, le nègre auroit le même droit sur les Européens quand l'occasion s'en présenteroit. C'est donc un état de guerre perpétuelle , et l'épée est toujours placée entre le tyran et l'esclave. Si une nation plus robuste, plus puissante et plus habile que celles d'Europe, y venoit faire la îraije des blancs, elle ne feroit que nous rendre les maux dont nous accablons ces malheureux nègres, qui ne nous avoient jamais fait la moindre offense. Mais quand l'intérêt parle , la compassion se tait. Néanmoins il s'élève , dans la conscience , un secret murmure , qui nous accusera un jour à un tribunal irrécusable : cette injustice est trop révoltante pour être pardonnée. On pourroit du moins adoucir le sort de ces infortunés , en établissant une sorte de contrat entre eux et nous , afin de ne pas leur rendre la vie insupportable. Consultez l'article Nègre. Dans l'Afrique , les nègres vivent d'une manière assez pré- caire dans des huttes , cultivant quelques champs de mil, de couzcouz, et sont soumis à de petits princes héréditaires qÉi les tyrannisent. Ils ont pour religion un grossier fétichisme; ils adorent des serpens, des animaux, ou quelque idole de pierre ou de bois. Plusieurs sont musulmans , et se circonci- sent. Ce sont dos peuples très-pauvres , qui se vendent pour quelques bouteilles de rhum, pour de la tuile bleue, ou des barres de fer. Les rois de ces pays se font de petites guerres, ou plutôt tâchent de se piller mutuellement et d'enlever un grand nombre de prisonniers, pour les vendre ensuite aux Européens , qui attisent entre eux des querelles à cet effet. En général , le nègre est presque toujours gai , même dans l'esclavage, et chante sur un air monotone quelque refrain insignffiant. Le son du tam-tam , espèce de tambourin , le 170 H 'O M Lruit rufle et sauvage du Lalafo , etc. , suffisent pour le faire tressaillir de joie et bondir en cadence. Alors tout son corps s'agite , se trémousse; chacun de ses muscles participe h la danse •, le sentiment de l'amour anime tous ses meuve- mens; ses gestes deviennent lascifs ; ils expriment l'ardeur qui le consume. La négresse partage ces affections ; elle orne sa lête d'un mouchoir rouge , graisse sa peau luisante , et en- toure son cou d'un collier de graines rouges ( de ïerjihrina coruUodendroTi^ Linn.). Toutes les négresses ont des mamelles grosses , longues et pendantes , ce qui est commun à toute la race noire et à la lignée mongole; car les Lapones, les Groën- landaises, les Kalmoukes, les Mongoles, les Hongroises, les Isiorlaques, etc., ont aussi leurs mamelles pendantes, avec un mamelon noirâtre. Ce n'est donc pas la chaleur seule qui fait ainsi tomber le sein , quoiqu'elle y contribue beaucoup , mais la constitulion naturelle de ces races , sous quelque climat qu'elles habitent. Les négresses sont bonnes nourrices, très-fécondes et fort lascives , de même que les nègres. Dès l'âge de dix à douze ans , ils sont en état d'engendrer ; ce qui se remarque aussi dans la tige mongole , soit dans le midi, soit dans le nord de l'Asie ; mais ils sont vîeux.de bonne heure , et tous poly- games. 2.° La seconde famille est celle des Cafres , qui habitent dans la partie orientale de l'Afrique, depuis la rivière de Magnice ou du Saint-Esprit jusqu'au détroit de Bab-el-Man- del. Cette vaste étendue comprend le Monomotapa, les Jag- ,gas, la Cafrerie, les Borores, toute la côte de Zanguebar et du Mozambique, Mongaîe, Monbaze, Mélinde, le Monoë- mugi, les Anzicos, les royaumes d'Alaba, d'Ajan et d'Adel, ainsi que le pays des Galles. Peut-être l'intérieur de l'Afrique est-il habité par des nations semblables ; mais elles sont fé- roces, et même anthropophages. La famille des Cafres se distingue fort bien de celle des nègres par un caractère plus îiabile , plus fier, plus indomptable et plus guerrier. Elle a un teint moins foncé et moins luisant, une face moins allon- Êjée, des traits plus réguliers et plus beaux, un corps très- robuste et bien constitué, grand, quoique moins gros que celui des nègres; enfin, lorsque le Cafre est échauffé, sa sueur n'exhale pas d'odeur désagréable. Naturellement pas- leurs et nomades , les Cafres sont des peuples simples , mais plus courageux, plus guerriers que les nègres, et qui for- ment de grands empires, comme ceux de Tombuctu, de Ma- coco , du Monomotapa et du Monoëmugi. Ces peuples sont moins connus que les nègres, parce qu'on ne fait pas la traite chez eux comme sur la côte occidentale d'Afrique, et que le H O M lyt Cafre est mutin et impatient de l'esclavage. On peut bien le mettre sous l'empire de la domesticité, mais non pas sous le. joug de la servitude ; aussi les Européens amènent rarement des Cafres dans leurs colonies, et n'en fontpresquejâmaislare- cherche ; tandis que lesmalheureux nègres sont opprimés, par- ce qu'ils sont plus doux, plus tolérans,etd'uncaractèremoins turbulent ; ce qui nous apprend bien qu'il y a de plus grands avantages à être méchant que bon près des tyrans. La côte occidentale de Tîle de Madagascar est aussi peuplée de la lignée cafre: ces diverses nations prennent plusieurs femmes en mariage. Cette grande famille de nomades fait le commerce des bestiaux, des pelleteries , du morfil ou ivoire, de la poudre d'or, etc. Les Cafres voj-ngent en caravanes ou en hordes, conduisant leurs bestiaux dans les gras pâturages de l'Afrique, construisant des huttes dans chaque canton, vivant du lait de leurs troupeaux, de fromage et de chair boucanée, ne cultivant presque aucun terrain, et portant toujours leurs armes , qui sont des espèces de piques appelées zagaies , qu'ils lancent fort loin , avec beaucoup d'adresse et de vigueur. Ils sont beaucoup plus intelligens que la plupart des nègres, moins superstitieux et moins frédules, et cependant fort ignorans et plongés dans l'idolâtrie , ce qui les a fait nommer Kafr par les Arabes et les Maures , mot qui signifie infidèle; mais beaucoup d'entre eux deviennent mahométans, car ils aiment Je dogme de la fatalité. Quoiqu'ils aient du goût pour la danse et les amusemens, ils en sont moins engoués que les nègres, qui oublient tous leurs malheurs au moindre son de quelque instrument; aussi les esclaves qu'on transporte d'Afrique aux îles d'Amérique, mourroient de chagrin si l'on n'avoit pas soin de les réjouir parla musique. Cette facilité d'oublier son infortune est un dédommagement que la nature a donné au nègre dans sa misère , et qu'elle accorde à tous les êtres folbles. Voilà pourquoi Ton s'habitue au malheur, de même qu'au plaisir, et à la longue, tout devient indifférent. m- Sixième race. — Noirâtre, Hoilentots et Papous. On la distingue de la race noire , ou de celle des nègres et des Cafres, par un museau encore plus prolongé, un visage triangulaire et qui finit en pointe, un angle facial de jS de- grés environ; par une peau d'un brun-noir ou d'une couleur de terre d'ombre, des yeux écartés entre eux, toujours à demi-fermés, un nez entièrement écrasé et extrêmement large; par des lèvres plus gonflées que celles du nègre, et des cheveux qui ressemblent à de la bourre en pelotons ; par des pommelles très-saillantes, et un front tellement aplati , 172 H O M qu'il ne parpît presque point. En outre, le naturel des Hot- tentots et des Papous est extrêmement stupide; leur esprit est incapable de la moindre conception ; ce sont les plus pa- resseux et les plus insoucians des hommes. Us sont peureux aussi; néanmoins, ilsse Lattcntavccbeaucoupd'acharnement lorsqu'ils s'y sont déterminés. Rien n'égale la simplicité d'esprit de ces peuples; leur cœur est bon et incapable d'un crime audacieux. lisse laissent opprimer par mollesse de ca- ractère ; mais on ne peut pas en faire de bons esclaves, car ils préfèrent la mort à tout travail long et pénible ; et autant ils sont apathiques pour tous les soins de la vie domestique , Autant ils sontportés à toutes les voluptés sensuelles , comme la danse , l'amour, la gloutonnerie, l'ivrognerie, le som- meil, etc. Ils pen>bient être tout corps; à peine ont-ils quel- que idée d'un Etre-Suprême; ils ne peuvent s'élever à au- cune pensée qui ne tombe pas sous les sens , et n'ont guère plus d'esprit que l'orang-outang; enfin, ils mènent une vie (entièrement animale. Cette race a deux variétés ou familles principales dans l'hémisphère austral , ou elle senjble être uniquement confinée. i." La souche ou lignée hottentole s'étend dans toute la pointe du sud de l'Afrique , depuis»lc Cap-Négro jusqu'au Cap de Bonne-Espérance, et de là jusqu'au Monomotapa. Elle renferme les Namaquois, les Heusaquois, Conaquois', CUamouquois, Gouriquois, Gassiquois, Sonquois , les ba- bitans de la terre de Natal, les Houzouânas et autres peu- plades analogues, qui vivent sauvages , ou qui nourrissent des bestiaux. 11 y a des Hottentots très-sauvages, que les Hollandais nomment Boshmans,, et qui se tiennent d^ns les cavernes , les bois, faisant des excursions à l'improviste , vi- vant de proie, de racines agrestes, n'ayant presque aucun langage , étant toujours nus , et aussi peu sociables que les animaux des forets. Les autres Hottentots vivent aussi sans lois, sans règle fixe; mais comme ils sont doux, tranquilles et bons, ils ne se font aucun mal; car il semble que les lois et les gouvernemens soieat d'autant plus perfectionnes et plus coercitifs, que les hommes sont plus capables de s'entre-nuire ; de sorte qu'on peut calculer la méchanceté d'un peuple par la multiplicité de ses lois et de ses entraves sociales. Rien de plus stupide et de plus malpropre que ces Hot- tentots; ils sont toujours graissés de suif mêlé avec de la suie, ou couverts de bouze de vache , et portent, en guise de bra- celets, des lanières de peaux non tannées, et qui se pour- rissent sur leur corps. Ils Inangent les intestins des animaux Sans les laver , melleal leur lait dans des outres de peaux H O M 173 crasseuses et très-malpropres-, enfin, ils sont toujours sales, toujours encroûtés, toujours slupùlement étendus sur le sable , d'un air indolent, et la pipe à la bouche. Le tabac est pour ie Holtenlot un objet sans lequel il ne peut plus exisler ; il lume du malin au soir, et on exige tout de lui en promettant «le lui donner du tabac. Les Hottentotes fumeni beaucoup aussi. Elles ont de grandes mamelles pendantes comme des besaces , et donnent à téter à leurs enfans par-dessus l'épaule. Elles ont naturellement les lèvres du vagin fort allongées et larges comme un double fanon de bœuf: quelques-unes ont même la coutume de découper cette peau en festons ; d'au- tres, comme lesHouzouânasses, portent ces loupes graisseu- ses décrites préccdemaient. Les voyageurs avoient aussi avancé qu'on enlevoit un testicule aux jeunes Holtentots , pour les rendre plus viles à la course. Ce fait est l>ien dé- menti aujourd'hui ; mais lorsque les Boshmans veulent courir, ils font rentrer leurs testicules dans la cavité abdominale, au rapportde Barrow.Les Hottentots n'ont presque aucune re- ligion ; ils paroissent seulement rendre quelques hommages à des fétiches, et des devins leur font peur des mauvais esprits. Lorsqu'ils se marient, ces sortes de prêtres répandent leur urine sur les époux en signe de fécondité. Le langage des Hottentots est un clapement, ou plutôt un gloussement sin-: gulier de la voix, analogue à celui des coqs d Inde. 2." L'autre famille , ou variété de cette race, est celle des Papous de la Nouvelle-Guinée, des sauvages de la Nouvelle- Hollande et de ceux de la Nouvelle-Calédonie. Ce sont, en» général, des hommes fort bruts. Les Papous aiment la guerre sans être braves , végètent en hordes sur un sol fertile , vivent de sagou , de fruits, et font usage des épiceries. Les habitans de la Nouvelle-Hollande sont très-misérables ; ils vont en bandes recueillir sur les rivages de la mer les coquillages , les crustacés et les poissons qu'elle y fait échouer : voilà pres- que leur seule nourriture, avec quelques fruits acerbes et des racines sauvages. Ils marchent tout nus , et ont toujours les yeux à demi-fermés, à cause de la multitude des mouche» rons qui les fatiguent. Ils font des gravures sur leur peau et nagent fort bien , mais ne sont pas assez habiles pour cons- truire des pirogues et de légères embarcations comme les Malais. Ces hommes , en général très-stupides, serrtblent incapables de réfléchir , et ne veulent rien faire ; ils demeu- rent accroupis tout le jour comme des singes , et se cons- truisent des huttes de feuillage , dans lesquelles on ne peut entrer qu'en rampant et en y restant couché. Si on les ha- bille, ils demeurent dans une stupide immobilité jusqu'à ce qu on les ait déshabillés. Ils n'ont ni règles , ni «sages , ni X74. îi 0 M coutumes. Leurs armes sont des piques ou z.agaies , qu'ils lancent fort adroilenient ; mais elles n'ont qu'un os , une pierre pointue, ou une épine au lieu de fer, et ne sont pas dangereuses. A la Nouvelle-Calédonie et au Cap austral de la terre de Diémen, ces hommes sont plus courageux et plus médians que ceux de la Nouvelle-Guinée, parce qu'ils habi- tent dans un climat plus froid, et se montrent même anthro- pophages; mais ils n'ont pas plus d'industrie, quoiqu'ils pa- roissent être, en général, un peu plus habiles et plus actifs que les Hottentots. Leurs cheveux, très-crépus, sont cepen- dant moins pelotonnés que ceux des Hottentots , et ils les poudrent avec une terre rougeâtre ou de la chaux de coquilles d'huîtres. On rencontre aussi quelques-unes de ces peupla^ des mêlées avçc celles des Malais dans plusieurs îles de l'Ar- chipel indien; mais elles n'y sont considérées par ceux-ci que comme une race fort inférieure; ce qui prouve combien la nature les a mis au-dessous des blancs d'Europe , puis- que les Indiens les plus barbares sont encore supérieurs à eux.La preuve que les Hottentots diffèrent des autres hommes dans toutes leurs parties , c'est qu'ils reconnoissent , à la seule inspection des traces d'hommes sur le sable , si ce sont de» pieds de Hottentots ou d'autres hommes, et y trouvent beau- coup de différences F. aussi la figure, planche E 38. De r Origine et des Causes des variélés humaines. On a pu voir par ce que nous avons exposé sur les diverses races et familles d'hommes, que leurs variétés ne dépendent pas uniquement du climat, et qu'il existe des souches fonda- mentales et originelles dans le genre humain. A-t-il été créé ainsi , ou tire-t-il sa source d'un seul homme ? voilà ce qu'on ne peut.pas décider par les lumières de l'histoire naturelle* Si la création des animaux a devancé celle de l'homme, ainsi que l'annonceroientles ossemensfossilesdes animaux perdus y entre lesquels on ne trouve point encore de vieux squelettes humains ( V. Aïsthropolithe et le mot Géant) ; si l'homme est le faîte de la puissance créatrice, sur la terre, et le der- nier venu des animaux, pour les gouverner tous , on pourroit croire que les singes ont précédé le nègre , et celui-ci le blanc, dans leur formation. 11 nous faudroit donc remonter aux épo- ques antiques de notre monde, et chercher dans les monumens qui nous restent , quelques traces du berceau du genre humain ; mais cesrecherches, que nousprésen tons aiileurs(art. Homme, du Dict. des Sciences médicales'), ne remontent guère, chez la plupart des nations, qu'à l'époque d'un déluge ou de grandes inondations , desquelles notre globe offre d'ailleurs tant de témoignages. H O ?V[ î-5 En a<1me1tantle récit de la Genèse et la dispersion des trois fils de Noé, on peut regarder Japhet comme le tronc origi- naire de la race blanche ou arabe-indienne, celtique et cauca- sienne. Son nom a même été connu des anciens grecs et ro- mains. Aiidax Japeii genus {lïorac. od.). Sem sera la tige de la très-nombreuse race basanée et olivâtre , ou chinoise , kai- mouke-mongole et lapone. Comme les Américains parois- sent être une branche de cesgrandes familles, on peut les regar- der aussi comme de la génération de Sem. Cham, maudit pri- son père, qui lui prédit qu'il seroitresclavedesdescendansde ses frères, peut se reconnoître dans les races nègre et liolîen- toîe. Les Malais, qui composent notre quatrième race, pa- roissent être un mélange des générations de Sem et de Cham. Cet ensemble comprend donc tout le genre humain sous trois tiges originelles principales. Chacune des six races humaines, ou plutôt chaque grande famille, paroît avoir eu, dansle principe, des foyers primitifs d'où elles se sont disséminées et répandues de proche en pro- che par des augmentations successives de population. Ces foyers de propagation peuvent se reconnoître à la beauté et k la perfection corporelle de chaque famille qui les peuple ; et comme le genre humain s'est dispersé par des colonies , il est naturel de croire qu'il a suivi d'abord les terres avant de s'ex- poser à un océan inconnu et à l'inconstance des eaux. Ainsi, ïes familles humaines paroissent avoir établi leurs foyers pri- n^tifs près des élévations du globe , et de là elles se sont écou- lées comme les fleuves des montagnes jusqu'aux extrémités des terres et aux rivages des mers. C'est dans les pays de mon- tagnes que l'espèce est plus florissante, plus libre et plus fé- conde; c'est la patrie première du genre humain; c'est de là que coule sans cesse l'urne des générations ; c'est du sein des montagnes que sortent les conqucrans et les colonies pour descendre dans lesplaines fertiles, comme l'aigle et ses enfans fondent du haut des rochers sur la proie paisible des cam- pagnes. Considérez de plus que chacun de ces foyers est le centre d'une langue mère d'où sont découlés différens idiomes ou dialectes. Par exemple , le point central et originaire de la famille celtique qui est placée au Nord , a répandu la langue germanique partout où les peuples de ces contrées se sont éta- blis. Si la France , l'Italie et l'Espagne ne parlent pas aujour- d'hui une langue d'origine teutonique, c'estparce que la langue latine a prévalu et a modifié considérablement la première. Mais avant les conquêtes des Romains, et l'introduction du latin dans l'Europe australe , le langage Ats Celtes, des Ibc- riens ressembloit à celui des Helvatiens, des Germains et des i^e H 0 M autres peuples Teutons, comme l'ont fait voir PelloulTer, Cluverius , Gesner , etc. 11 en est de même de la famille escla- vonne dont on entend la langue depuis le golfe de Venise jusques aux exUétnilés de la Russie, ({uoiqu't.'Ue subisse plu- sieurs dialectes. On sait que les langues de l'Orient, comme cellesdes Arabes, des Syriens, des Phéniciens, des Persans , des Juifs , etc., -ne sont que les divers idiomes d'une langue mère , l'araméenne. Non-seulement la forme du corps , le langage , préseiitent des trails communs dans chacune de ces grandes familles humaines, mais de plus les mœurs, les usa- ges , les coutumes et les idées religieuses semblent indi(}uer aussi une source commune pour chacune d'elles, quoiqu'une foule de clrconslances ait beaucoup multiplié les accessoires. 11 nous paroît donc vrai que chaque race humaine a des points ou dés foyers d'où sont sorties les diverses familles que nous trouvons répandues aujourd'hui sur la terre. Nous renvoyons , au reste, à l'article Nègre, ce que nous avons à dire sur les mélanges des diverses races humaines entre elles. Nous y exposerons l'échelle des dégradations suc- cessives de chacune. On pourra consulter d'ailleurs les mots Mulâtre et Métis, qui en traitent particulièrement. Nous ne traiterons ici que des races pures et regardées comme primitives. i.° La race blanche ou la génération de Japhet a quatre points principaux de population. En Europe, la famille celtique a son foyer vers la Suède et les montagnes du Nord, appelais jadis h fabrique du genre humain , selon Saxon le grammairien (F. VAllantica de Ùudbeck). Elles ont versé à diverses epo-' ques de nombreux essaims d hommes sur l'Europe australe ^ tels que les Clmbres , les Goths , les Suèves, les Teutons, les Alalns, les Francs, les Normands, les Danois, les Saxons, etc. C'est delà que paroissentémanertousles Euro- péens. Le second foyer de la race blanche est placé vers le flanc occidental delà chaîne du mont Caucase, entre la mer Noire et la Caspienne. C'est de là qu'ont émigré tous les peuples de la jMoscovle, de l'Ukraine, de la Pologne, de la Turquie , enfin toutes les générations Scythes, Esclavonnes, Vandales, Sarmates, Illyriques, les Huas et les Tartaresqui ont successivement inondé l'Europe orientale. Le troisième foyer se trouve dans les montagnes de l'Ac ménle , d'où se sont écoulées jadis les familles arabes, Israé- lites , syriennes , persanes, et ensuite les Maures, les îiarba- resques et les Marocains ; ces derniers peuples ont pris une teinte brune sur le sol aride el brûlant de l'Afrique. Enfin les familles indiennes et mogholes sont sorties dcl montagnes du Khorasan , province de Perse (autrefois la Bac- I H 0 M Ï77 tfîahe ). C'est une continuation du Caucase et lé flanc orien- tal de sa chaîne. Les familles indiennes se sont répandues jus- qu'au Gange, au Malabar et à la côte de Coromandel. 2.° La race basanée^ olivâtre , ou la tige de Sem , tire sa source de trois centres principaux ; le foyer des familles po- laires de Samoïèdes, de Tunguses, de Jakutes , d'Osliaques , est placé dans les vastes montagnes entre la Lena et le Jenl- séik. Celte famille a étendu ses branches vers l'orient jus- qu'au Kamstchatka, aux régions habitées par les Jukagres et les Tschutchis ; vers l'occident elle a peuplé la Laponie et ie Groenland, le Labrador avec le pays des Eskimaux, dans le Nouveau- Monde. La seconde souche prend sa racine dans l'immense pla- teau de laTarlarie , habité par les hordes de Kalmouks-Mon- goles et Eleuths, qui étendent leurs vastes rameaux dans toute l'Asie septentrionale , et sans doute aussi sur les côtes du nord-ouest de l'Amérique septentrionale. On trouve le troisième foyer dans les montagnes duThibet, d'où sont descendus tous les Mongols orientaux et méridio- naux , tels que les Chinois , les Siamois , les Japonais , etc. La race américaine a deux principaux foyers de popula- tion. Le Pérou et une partie de l'Amérique méridionale ont reçu des habitans de la chaîne des Andes , montagnes très- élevéesquiontpufournir aussi des émigrations au Yucatan, au Mexique, à la Louisiane et à la Californie par l'isthme de Panama , comme on paroît en avoir observé des traces. Le second centre de population émane des Cordillères , qui a envoyé des colonies au Brésil, au Paraguay, au Chili, et aux Terres Magellaniques. C'est vers les îles de la Sonde , des Moluques et des Phi- lippines, qu'il faut chercher la racine primitive de cette race Aialaie qui a répandu ses nombreuses colonies dans toutes les îles de la mer du Sud, jusqu'à la Nouvelle-Zélande, et à Ma- HAGES. ) Dans cet état de pica , il faut faire Usage de to- niques et d'aromatiques comme fortifians. Ainsi le genre dé vie est subordonné au climat, ou plutôt à la température. Si nous examinons les goûts naturels de chaque peuple, nous y retrouverons encore la preuve de ce que nous établis- sons ici. Les voyageurs nous disent tous que les habitans des contrées polaires avalent avec délices la graisse et l'huile de baleine, de requins, d'ours, et d'autres animaux. Les Pa- pous, les Groënlandais, les Islandais (Pechlin, Obs. phys. et mèd. , png. 58 ; Aderson , hl. , pag. 24.7) , les sauvages de r7\.niérique septentrionale , les Iroquois et les autres Cana- diens (Denys, Voy. c. 28 , pag. 862 ; LaffUeau , Mœurs des sain>ag., lom. 2 , pag. 91 , etc. ),les Kamtchadales se gorgent, avec une voluplé incroyable, de lard de baleine , d huile rance de poissons, etc.; le suif, le vieux oing, sont pour eux des ragoûts délicieux ; leur estomac digère avec une facilité étonnante ces alimens extrêmement indigestes , parce que le froid exalte beaucoup la force de ce viscère , tandis que sous la zone îorride la chaleur l'affoiblit à l'excès. Dans les con- trées de s 1rc.pi(,ues , onjnend, au contraire, des aliniens très- légers, comme du sucre , des gelées , des fruits succu- lens , etc. Depuis le pôle jusquà l'équalcur, on observe une diminution graduelle d'aiimens. 11 faut de la graisse et du i83 II O M sang au Groënlandais ; de la chair au Suédois et à l'Aile- mand; du pain et peu de chair au Français; de la polenta, des macaronis et des légumes à l'Italien ; un peu d'orge et de riz au Levantin ; quelques figues ou un peu de gomme ara- bique au Maure , à l'Abyssin. Les peuples de la zone tor- ride graissent leur peau pour l'empêcher de se gercer et de se crevasser ; tels sont les Nègres qui sont presque toujours gluans de suif et de graisse; en Afrique, cette coutume leur est très-utile pour assouplir leur peau. Les Orientaux et autres peuples du Midi se baignent fréquemment par une raison analogue. Ainsi dans le Nord, il faut de la graisse à l'intérieur du corps, et dans le Midi, jl en faut à l'extérieur. Dans les contrées polaires , c'est l'intérieur du corps qui jouit de toute la chaleur et de toute l'activité de la vie ; dans les régions équatoriales, c'est la circonférence du corps. Cette distribu- lion de la puissance vitale, relativement aux climats, exige beaucoup d'alimens dans la froidure , et beaucoup de tem- pérance dans la chaleur. Il en résulte encore que les habi- tans des pays froids peuvent négliger l'extérieur de leur corps , pour avoir soin de son intérieur, tandis que les habi- tans des climats chauds doivent prendre un soin tout con- traire. L'homme du Nord doit donc être Carnivore, et le méri- dional, frugivore. ( V. Carnivore et Herbivore.) La con- formation des dents et des mâchoires d'un Nègre avec cellea d'un Tartare, indique même cette destination. Le Nègre a des dents grosses, plates, larges, serrées, les mâchoires al- longées , les muscles crotaphiles et autres qui servent à la mastication , plus folbles que chez le Tartare ; celui-ci a des dents écartées, pointues, la mâchoire forte, les muscles vi- goureux ; tout est analogue chez lui , en quelque sorte , au lion et à l'ours, tandis que ces organes, ciiez le Nègre , ap- prochent beaucoup plus de ceux des singes qui sont tous fru- givores. Les caractères de ces peuples sont d'ailleurs fort sem-^ blabjes à ceux qu'on trouve dans ces animaux. Des philosophes ont soutenu que 1 h^omme étoit naturelle- ment Carnivore , et selon d'autres , herbivore ; mais il est évi- dent qu'ils n'avoient pomt examiné les faits que nous venons d'exposer, et qui prouvent que tout dépend des températures. Cependant , à considérer l'homme de la nature dans son ha- bitation primitive , et suivant son instinct, il est plus porté à la nourriture végétale qu'au régime animal ; car il n'a point reçu des armes naturelles de même que les animaux carni- vores , et ne se nourrit pas de chair crue comme eux. Dans, nos maladies et nos fièvres , qui ne sont que le réveil et le sovil^Yement de l'instinct vital contre un état ^uilui est nui- H 0 M i8ç^ sîblé , nous sommes plus portés vers un régime rafraîchis- sant et végétal, que vers des alimens animaux; ceux-ci nous répugnent et soulèvent notre estomac. La femme préfère tou- jours les fruits à la chair , par goât et par une sorte d'instinct. Je ne sais d'ailleurs si cette piàé naturelle pour un animal qu'on tue, si cette horreur d'un cadavre et du sang, qui s'é- lève au fond du cœur de tout homme qui n'est pas endurci au meurtre , n'est pas la voix secrète de notre instinct , qui crie à la conscience et repousse nos sens de cette nourriture. Sans doute , cette horreur du sang est bien plus forte chez le méridional que dans le Tartare , où l'habitude de la cruauté l'a presque anéantie ; mais c'est encore ici l'un de ces adnû- rables rapports de la nature qui sait se proportionner à tout. En outre, la chair des animaux est plus déplaisante au goût et plus tôt putréfiée au ^ïidi qu'au Nord. Le septentrional a besoin de chair presque vivante pour réparer la vie qu'il perd à chaque instant sous son climat rigoureux. Les pays froids doivent donc être habités par des peuples chasseurs oupêcheurs, puisque l'homme y doit vivre de chair; et les pays chauds ou tempérés, doivent se peupler de nations agricoles , par une raison contraire. Les contrées arides et stériles qui refusent toute culture , seront habitées par des peuples nomades et pasteurs, qui vivront, en été , du lait , et en hiver , de la chair de leurs troupeaux. Les climats ex- trêmement chauds nourriront des peuplades sauvages , qui se contenteront des fruits offerts par la simple nature. Toute l'Asie méridionale fait sa principale nourriture du riz. Le Nègre, l'Ethiopien , vivent de millet , de durra (Jiolcus bicoIor,h[an.) , et l'habitant de l'Amérique méridionale cul- tive le maïs. Les Africains de race blanche et des rivages de la Méditerranée se nourrissent de dattes , de figues et des fruits du lotos (^ ziziphus lotus) ; les Malais vivent de sagou et du fruit de l'arbre à pain {arlorarpus incisa , Linn.). Pres- que tous lespeuples maritimes , qui deviennent communément nombreux, sont ichthyophages. (K. Ichthyopuagie.) Les Eu- ropéens vivent principalement de froment , et cette culture, exigeant le partage des terres, des propriétés fixes , des soins -^ continuels , est une des principales causes de la civilisation. Les Esquimaux, les Samoïèdes et les Kamtchadales , vivent de poisson et de chair. Les Cafres , les Holtentots sont des peuples pasteurs , qui se nourrissent de lait cotnme la plu- part des Arabes bédouins.Les Mongols et Kalmouks mangent la chair de cheval , souvent toute crue , où légèrement mor- tifiée , et boivent le lait de leurs jumens, en y ajoutant quel- quefois du sang. Tous les sauvages de l'Amérique septen- trionale sont chasseurs. Les Persans , les Egyptiens vivent xgo H O M de dattes, de pastèques; les Arabes, les Levantins , des figues du sycomore : les habitans de l'Archipel, de figues or- dinaires ; les châtaignes , les glands du quercus ballota^ nour- rissent beaucoup d'Européens méridionaux. Les Califor- niens se contentent des fruits de nopal ou cactus et de pal- miers ; les Brasilicns, de l'acajou-pomme (^anacardium oc- cidentale^ Linn. ) -, les Péruviens et les Mexicains, de la cas- save , des patates , des ignames , etc. ; les Abyssins , des f raines de sésame; les Chingulais, A\i cynosurus coracanus , ànn. {E/eiisine , Willd.), etc. En Afrique , on achète pour 20 fr. huit cents livres de millet ou couscous , qui suffisent pour l'aliment d'un esclave pendant un an , car on ne lui donne pas autre chose. Avec 2000 francs, on peut donc nour- rir cent hommes par année , ce qui prouve combien il est facile de vivre dans les pays chauds. Sous les zones froides , la chair , les alimens solides et en grande quantité sont né- cessaires à l'existence ; elle doit donc coûter davantage, La nourriture animale échauffe le corps et donne des forces; aussi les peuples du Nord soutiennent sans se plaindre une froidure insupporlable à tout autre. Ils aiment excessivement la^graissc , l'huile de poisson , le suif Des sauvages invités à un repas chez des Américains des Etats-Unis , ne trouvoient rien de plus délicieux qu'à manger plusieurs livres de chan- delles. Leur estomac robuste digère fort bien ces substances qui seroient mortelles pour un méridional. Celui-ci a l'esto- mac extrêmement affoibli , et il est même obligé de le forti- fier sans cesse par des aromates , du poivre , de la cannelle , du gingembre , de la muscade que la nature offre avec pro- digalité aux habitans des climats chauds, comme si elle prc- voyoit qu'ils en ont besoin. Ln Samoïède qui se gorge d'huile rance et fétide de baleine , qui dévore par grands lambeaux la chair coriace et pesante d'un marsouin , et boit le sang tout chaud des veaux marins, digère facilement ces alimens ; mais le brame indien supporte à peine quelque fruit doux et sucré , ou une crème de riz légère et aromatisée. On doit considérer le genre humain comme divisé en trois zones, par rapport à la nourriture. L habitant des tropiques est frugivore ; l'habitant des pôles est Carnivore , et ^es peu- ples intermédiaires ont un genre de vie mélangé de substances végétales et animales , en diverses proportions , suivant les degrés de chaleur ou de froid , le temps d'hiver ou d'été , et quelques autres circonstances semblables. ( Voyez mon Hisi. nat. du Genre hum. , t. i , p. 2^-8 pt ^uiv- ) A l'égard des boissons , les différences qu'on y observ.e , émanent aussi des climats. Par toute la terre , l'homme re- cherche des boissons qui portent un ti-ouble d «ns les sens , et H O M ,9, qui charment la vie par de douces illusions. La tristesse, l'en- nui , les misères rendent trop souvent l'existence à charge, la remplissent de soucis , d'amertumes et de chagrins , ou la laissent dans une fatigante monotonie. La sagesse est alors bien moins profitable que la folie. Quand j'envisage ce concours universel de toutes les nations vers un état d'ivresse et d'illusion , cette tendance générale de tous les humains à une vie animale , tandis qu'un si petit noujbre aspire à cultiver sa raison et succombe même souvent aux foiblesses du corps , je ne puis me refuser de croire que la nature nous a moins disposés à nous servir de notre intelligence , qu'à vivre à la ma- nière des autres animaux. J. J. Rousseau a dit : L'homme qui médite est un animal dépravé , parce qu'il a considéré que nous naissions ignorans , que nous tendions sans cesse vers une vie animale , et que l'usage de la raison introduisoit dans l'état de société beaucoup de maux avec beaucoup de biens ; cependant la preuve que la vie sociale et raisonnable n'est pas hors de la nature , c'est que tous les hommes aspirent, par un instinct général , à un état de perfectionnement et à une organisation sociale plus ou moins régulière , afin de se conserver. Le premier besoin du genre humain est de subsis- ter ; le second est de jouir , et celui-ci est la source primitive de nos connoissances et de notre civilisation , comme il est aussi le premier instrument de nos vices et de nos misères. Si toutes les nations aiment l'ivresse et s'y abandonnent , ce sont surtout celles du Nord. Parcourez les zones diverses depuis la torride jusqu'au pôle arctique , vous trouverez que le besoin des boissons spiritueuses augmentera en proportion de la froidure. Au midi de l'Europe et de l'Asie , l'ivresse passe pour un vice brutal et insupportable ; dans le nord, c'est un mérite et presque une vertu. Il est certain que l'usage des boissons spiritueuses est nécessaire dans les pays froids , pour réveiller les fibres , qui s'engourdissent sans ce moyen. Le système nerveux de ces hommes a besoin de la commotion de l'ivresse pour acquérir plus d'activité, et pour empêcher la torpeur de l'âme ; mais dans les pays chauds , le système nerveux est dans un état d'exaltation et de susceptibilité que l'ivresse ne feroit qu'augmenter d'une manière dangereuse. C'est donc une loi très-sage de Mahomet , de Zoroastre et des autres législateurs orientaux , d'avoir défendu l'usage des boissons enivrantes , tandis que Odin , ancien législateur du Nord, sembloit, en revanche, les recommander. Les méridio- naux tempèrent, au contraire, l'activité de leur système ner- veux et sa trop grande sensibilité par lusage des narcotiques, et surtout par l'opium, dont ils font une consommation extra- ordinaire. Us ont encore trpuvé des boisgpojS qui portent dans t^i tl O M l'âme une clouce thaieur , et procurent de la rîvacité aux seri^ abattus par l'ardeur du climat , sans exalter leur sensibilité; tels sont le thé , chez les habitans de l'Asie orientale , et le café , chez les Asiatiques occidentaux. Parmi les nations po- laires , comme les Samoïèdes y les Kamtchadales , les Os- tiaques et même les Moscovites, vers Archangel et Petzora, on prépare une boisson spirifueuse , une espèce de bière , dans laquelle on fait infuser des champignons vénéneux ap- pelés fausses oronges {agaricus miiscarius, Linn.). Cette liqueur plonge dans une agitation extraordinaire , dans une ivresse furieuse et guerrière , qui cause beaucoup de querelles et de meurtres. Lile dure quelquefois pendant trois jours , et finit par de violens étourdissemens et par un affaissement extrême. On assure que l'urine de ces hommes ivres retient encore* ces qualités enivrantes, et les domestiques s'empressent , dit- on , de la boire , n'ayant pas le moyen de s'enivrer autre- ment qu'avec l'urine de leurs maîtres. Lorsque les Malais ont avalé une préparation d'opium, ils deviennent furieux et redoutables; car ils courent, le poi- gnard nu ou le cric à la main , et frappent tout ce qu'ils ren- contrent, en criant amok^ amok. On est souvent obligé de les tuer. Kœmpfer rapporte qu'en Perse, on lui fit prendre une composition d'opium et d'aromates, qui lui causa une ivresse extrêmement agréable ; en montant à cheval, il se crut trans- porté dans les airs sur Pégase, entouré de l'arc en-ciel, et aspirant la volupté par tous ses pores. Le bangue ou le chan- vre de rindè, le tabac, causent aussi l'ivresse, et l'usage de ce dernier est devenu presque universel sur la terre. Les In- diens préparent un vin avec la sève des palmiers ; les Chi- nois font une bière de riz ; les Américains sauvages préparent la chica, ou bière de maïs, etc. L'usage du vin paroit être utile, à dose modérée, aux ha- bitans des contrées tempérées, en donnant plus d'activité au système nerveux; car on voit que les peuples qui ne boivent pas de liqueurs spiritueuses ont l'esprit plus lourd et plus gros- sier que les autres, témoins les Turcs auprès des Grecs leurs voisins. J'avoue que l'excès du vin est nuisible; mais il est certain qu'il excite l'esprit et monte l'imagination lorsqu'on en use modérément, tandis que le Musulman demeure dans une stupide apathie, que l'opium redouble encore. La culture de la vigne est peut-être l'une des grandes causes de la civilisa- tion de l'Europe. Les peuples adonnés à l'ivrognerie aont en général moins vicieux que les nations sobres ; les premiers sont francs et braves; les secondes, dissimulées et trom- peuses. Cette différence se remarque constamment entre les hommes du Nord et ceux du Midi. H « M • ,^3 Les nourritures animales donnent aux habitans du Nord une taille grande et belle, avec une vigueur musculnire re^ marquable. La nourriture végétale des méridionaux les rend délicats, foibles et doux. On observe encore que Tusagede la chair communique à la peau une teinte plus brune, des cou- leurs plus foncées que le régime végétal. L'abus de l'eau-de- vie et des liqueurs spiritueuses empêche l'accroissement du corps, raccourcit les fibres, diminue beaucoup la fécondité et fait vieillir de bonne heure. * Dégénéralions et maladies purtindihes à f homme. Si nous vivions dans l'état de nature, et si nous ne contra- ruons jamais l'instinct qui veille à notre conservation , nous serions sobres, tempérans et presque toujours en santé- car les animaux, qui suivent mieux que nous les lois naturelles ne sont presque jamais malades, ou se guérissent d'eux-mê- mes. Notre genre de vie est insalubre, et nous communiquons rosmisères aux espèces que nous avons rendues domestiques V. Degenération et Instinct. L'homme a seul, de plus que les animaux, presque toutes les maladies exanthematiques, telles que la peste, la petite vérole, la rougeole, la fièvre scarlatine, les éruptions miliaires et pétéchiales ; il est sujet aux hémorragies du nez, de l'utérus aux hémorroïdes, etc. Il doit à l'étendue de son système ner- veux, les innombrables maladies qui en dérivent, telles que l'hypocondrie , l'hystérie, les maladies du cerveau ou lesdé- rangemens de l'esprit, comme la folie, l'imbécillité la mé- lancolie, la nostalgie, peut-être aussi la nymphomanie , le satyriasis, et les affections utérines, qui sont une source iné- puisable d incommodités pour les femmes. Nous sommes en- core exposés au rachitisme, aux scrophules, au crétinisme à la maladie vénérienne, à la lèpre, à l'éléphantiasis, à l'alopé- cie, etc. Les hernies, les cancers, les chutes de matrice de vessie, la teigne, les dartres, l'aménorrhée, la migraine sont des maladies qui attaquent l'espèce humaine seule, ou qui sont très -rares dans les animaux; mais nous ne sommes exempts de presque aucune des leurs. On peut dire que 1 homme est l'être le plus maladif elle plus foible de tous cei.x qui existent dans le inonde. Non-seulement il est misérable par les maux du corps, mais il l'est encore par les tourmens et les folies de son esprit. Est-ce la peine de s'enorgueillir d une raison que troublent une indigestion, un peu de vin ou d opium, que les passions bouleversent, que l'amour ou la hame dérangent, qu'une maladie affoiblit, et qui prétend tou- jours a 1 empire, sans cesser d'être esclave ? On obserye dans l'espèce humaiiîe une de'génération parti- ,94 H 0 M culière dans la couleur de la peau et des poils. Nous en avons traité en ge'néral à Tarticle des dégéuérations. La teinte de la peau réside dans leréseaumuqueuxdécritparMalpighi, etqui se trouve place sous Tépiderme. Ce tissu réticulaire est blanc dans l'Européen, noir chez les Nègres, olivâtre chez les Mon- gols, etc., et inij^régné d'une humeur oléagineuse plus ou moins colorée, qui fournit sa teinte aux cheveux, à l'iris des yeux aussi, comme à toute la surface du corps. Mais il existe des individus d'une constitution languissante, débile, molle, qui sont prives de ce réseau muqueux, et qui n'ont alors que la couleur pâle et fade du derme, avec des poils, des cheveux blancs et soyeux, des yeux dont l'iris est rouge et ne peut pas supporter Téclat de la lumière. Tout leur corps est sans vi- gueur ; leur esprit demeure dans une sorte d'imbécillité ; ils végètent plus qu'ils ne vivent, et ne voient clair que pendant le crépuscule , car le grand jour les offusque. On les nomme Blafards^ en Europe ; Bedas, Chacrelas^ ou Kakerlaks^ aux In- des ; Albinos^ Nègres blancs, Dondos, en Afrique ; Dariens , en Amérique. Cet état maladif venant communément de nais- sance, ne peut pas se guérir; il est enraciné dans la consti- tution , et quelquefois héréditaire. Ces individus, mâles ou femelles, sont peu disposés à la propagation pour l'ordinaire ; leur peau est molle, flasque, ridée; leur caractère timide et impuissant. Cette dégénération se rencontre aussi parmi les quadrupèdes, par exemple, chez les lapins blancs aux yeux rouges, et chez les oiseaux, tels que les pigeons, etc. On a remarqué des singes, des écureuils, des souris , des cochons d'Inde, des taupes, des martes, des chèvres, des éléphans, des cochons , des chevaux, des vaches qui étoient blancs et qui avoient des yeux rouges, une vue foible , un tempérament débile. Parmi les oiseaux, on a trouvé les perroquets tapirés, des corbeaux, des merles, des serins, des perdrix, des paons, des poules, des moineaux, etc. , qui avoient la même maladie. Elle se rencontre même dans les plantes ; car la panachure des fleurs et des feuilles est une sorte de dégénération très- analogue. Quelquefois elle n'a lieu que partiellement et d'es- pace en espace dans le même être : ce qui produit dans l'espèce du-nègre, des individus bigarrés de noir et de blanc pâle. La rougeur des yeux dépend de ce que l'uvée n'a reçu aucun coloris, et ne montre que le lacis des vaisseaux sanguins qui la parcourent. La couleur de l'iris est toujours en rapport avec celle de la peau et des cheveux; il est gris, bleuâtre ou cendré chez les blonds, plus ou moins brun dans les châtains, et noir dans les hommes bruns ; parmi les peuples du nord de l'Eu- rope , l'iris est bleu, et il devient plus noir à mesure qu'on fivânce vers le midi ; car la peau et les cheveux preauent des H O M ,95 teintes plus foncées en même proportion. Les races mon- gole, nègre, américaine et malaie ont toujours Tiris noir, soit au Midi, soit au Nord, parce qu'elles ont toujours des cheveux noirs et une peau plus colorée que celle dos Euro- péens, ce qu'on remarque dans les enfans, même à l'époque de leur naissance. Les Qitimos sont, dit-on, une variété d'hommes à peine hauts de trois pieds et demi, ayant des bras très-allongés", une figure de singe, une peau blafarde et ridée : on les trouve dans les montagnes de l'île de Madagascar, où ils se cachent et se défendent avec beaucoup de courage. Les femmes n'ont pres- que point de mamelles ; ce sont des individus tristes et d'un esprit stupide. Je pense que c'est une dégénération particu- lière qui approche de celle des blafards, mais qui ne forme pas une race distincte. Plusieurs voyageurs ont fait mention à'hommes à queue dans les îles de l'Océan indien ; soit qu'ils aient pris des singes pour des hommes, soit qu'ils aient mal observé, il est assez pro- bable qu'ils se sont trompés. Les singes les plus voisins de notre espèce, comme le satyre ou l'orang-outang, le jocko ou chimpanzée et les gibbons, n'ayant pas de queue, l'homme doit en être privé à plus forte raison. L'homme, quoique organisé pour vivre principalement dans les climats chauds, a cependant sa constitution assez flexible» son tissu cellulaire assez modifiable, pour s'acclimater dans tous les pays. Les singes ne se multiplient guère qu'entre les tropiques;, mais l'homme étant omnivore peut subsister par- tout, et il sait se mettre à l'abri de la froidure ou des intem- péries de l'atmosphère, par des habillemens et des maisons. Le chien est devenu avec l'homme un animal cosmopolite ; c'est un compagnon fidèle qui l'a suivi sous les zones glacées des pôles, comme parmi les plages brûlantes de Téqualeur. Dans les pays chauds, l homme est surtout exposé aux mala- dies bilieuses, diarrhoïques , aux fièvres ardentes et malignes , aux éruptions cutanées et aux affections spasmodlques. Dans les pays froids , il est surtout susceptible de maladies catar- rhales , inflammatoires , scorbutiques et pléthoriques. Ainsi l'action morbifique se porte principalement sur le système nerveux et viscéral, au Midi, et sur les systèmes membra- neux, sanguin, musculaire et osseux, vers le Nord. Les con- trées humides , peuplées de nations d'un tempérament fleg- matique, engendrent diverses cachexies, l'anasarque, l'hydro- pisie, les fièvres quotidiennes , catarrhales, vermineuses , pu- trides, saburrales, etc., ainsi que des flux de ventre, desfl.uxions séreuses, des engorgemens de glandes, desflueurs blanches et autres maladies humorales. Les septentrionaux qui habi- ,96 " O M tent dans les lieux bas, les nègres et les méridionaux des pays humides , éprouvent ces mêmes maladies. Parmi les climats tempérés et les peuples d'une conslilu- tion sanguine, comme les Français, les Italiens, les Grecs, les Arméniens, les Persans, etc., on rencontre principale- ment des inflammations, des péripneumonies , des hémor- ragies, des coliques néphrétiques, la goutte, la phlhisie , le flux hémorroïdal , les céphalalgies, fièvres synoques, asthme , apoplexie sanguine , etc. Les tempéramens bilieux et chauds, tels que ceux des Tartares- Mongols , des Caraïbes, des Turcs, et autres races humaines , surtout lorsqu'elles habitent des pays secs et ardens , sont sujets aux fièvres bilieuses, à la frénésie, à l'angine, à l'hémoptysie, à la fièvre hectique, à l'hépatitis, au gaslritis, aux inflammations des intestins, au cholera- morbus , au pourpre , et à toutes les maladies aiguës. L'âge viril , l'été , les territoires secs et brûlans, favorisent la nais- sance de ces affections. On trouve chez les constitutions mélancoliques, les habi- tans de la zone torride et des pays étouffés et chauds, une foule de maladies chroniques, l'hypocondrie , les obstructions du foie , de la rate , le scorbut, les ulcères , le calcul urinaire , les hémorroïdes, l'ictère, les affections hystériques et spas- modiques. C'est principalement au midi de l'Asie que se dé- veloppent ces symptômes particuliers à l'espèce humaine. Plusieurs auteurs ont observé des- hommes qui avoient la faculté de ruminer , ou de faire remonter leurs alimens de leur estomac pour les remâcher. D'autres ont vu des hommes cornus, écailleux; mais toutes ces singularités particulières, vraies ou fausses, n'appartiennent point essentiellement à l'histoire naturelle. F. ci- après Homme porc-épic. Les nations ichthyophages sont toutes exposées aux mala- dies de la peau, comme la lèpre, l'éléphantiasis, la gale, etc., surtout dans les pays chauds ; c'est pourquoi les sages législa- teurs des Egyptiens, des Hébreux, des Lydiens et des autres méridionaux, défendirent l'usage excessif des poissons, comme alimens insalubres. Les nourritures animales produisent , dans les climats chauds , des fièvres malignes et putrides, des dysenteries, des éruptions funestes, des flux et autres mala- dies analogues. Dans les contrées froides, un régime pu- rement végétal seroit trop affoiblissant, et ne pourroit pas être supporté long-temps sans produire diverses affections de langueur et d'épuisement. L'usage des boissons et des ali- mens chauds est fort peu naturel, car aucun animal n'en a l'usage ; d'ailleurs, ce régime rend le corps lourd et diminue sa vivacité. lï O M ,9; On observe encore que les peuples méridionaux sont tous plus ou moins maigres , et que ceux du Nord sont plus gras. On a même des exemples d'individus qui sont devenus d'un excessif embonpoint , tels que cet Anglais du comté de Lin- coln, pesant cinq cent quatre-vingt-trois livres, ayant dix pieds de circonférence, et mangeant dix-buil livres de bœuf par jour. 11 mourut h vingt-neuf ans , et laissa sept cnfans ; un autre pesoit six cent neuf livres , et sept personnes de taille ordinaire pouvoient tenir ensemble dans son habit et le boutonner ; enfin un dernier pesoit six cent quarante-neuf livres ; il étoit obligé de se promener en voiture ; sa largeur d'une épaule à l'autre étoit de quatre pieds trois pouces. En France on ne trouve pas d'hommes aussi monstrueux , et à plus forte raison dans le Midi. Nous parlons des GÉAKS et des Nains à leur article , qu'on pourra consulter. Pour éviter dans cet article d'autres détails qui s'appli- quent à tous les animaux, nous renvoyons au mot Muscles ce que nous avons à dire de la force du corps dans l'homme , et de ses divers degrés d'activité. Nous remettons aussi aux mots Nerfs, Sens, Sensibilité, tout ce qui a rapport à cette matière si curieuse et si difficile à connoître. Nous y recherchons les causes de tant d'effets surprenans , comme les sympathies, les passions, les caractères, et ce qu'on ap- pelle la connoissance du co'ur humain, étude qui tient plus qu'on ne pense à celle de la constitution du corps. Ainsi les mots OEiL , Oreille , Toucher , Odorat , Goût , nous offrent des observations importantes. Les mots Squelette, Crâne, Cerveau, Cœur, Intes- tins, Mamelles, Matrice, Menstrues, Os, Respira- tion, Circulation, Nutrition, Vie, Génération, et plusieurs autres, donnent des notions sur l'organisation et les fonctions vitales du corps de l'homme. L'article Instinct ex- plique plusieurs faits obscurs de notre constitution, et certains mouvemens dont nous ne sommes pas maîtres. L'article des Sexes présente encore des objets fort inté- ressans à connoître pour l'étude de l'homme, A celui de la Voix , nous examinons ses différentes modulations , suivant l'âge, le sexe, le pays, et l'expression de la pensée par des sons articulés, ainsi que la na'ure du langage. L'article Visage et Physionomie expose des considéra- tions non moins curieuses sur l'expression des passions, sur le jeu des traits de la figure , sur les caractères moraux qu'ils indiquent, sur les sentimens secrets qu'ils dévoilent aux yeux attentifs. Enfin , comme l'examen de plusieurs coutumes et des usages particuliers au genre humain , nous tiendroit trop ,98 H O M de place ici, j'ai cm devoir les partager en plusieurs articles,: re'partis dans ce Dicllonnaire. Par exemple , le mot Amu- lette offre quelques remarques qui demandent attention, ainsi que les mots Bracelets, Ceinture ( où nous parlons delà ceinture de virginité), Arc, Armes, Canot, Hamac, Eunuque, Infibulation , Hermaphrodisme, Polygamie. F. encore le mot Femelle. On pourra consulter aussi ce que nous disons du Som- meil, où nous traitons des songes, du sonftiambulisme , de l'ivresse , etc. Nous pensons avoir exposé dans "plusieurs articles, des considérations neuves et des vérités utiles à la science; nous laissons au lecteur éclairé et impartial le soin de distinguer ce qui nous appartient de ce qui est tiré des auteurs; mais je ne n! :^uis jamais servilement borné à copier les autres; je ne preîrnds pas demander grâce pour les erreurs qui m'ont éch. ppé. .le sais assez que le bien est sujet à être mêlé de mal dans la vie , et que mon esprit est trop imparfait pour ne pas être expose à se tromper. SECTION III. DE l'homme intellectuel ET MORAL. § I. Des facultés intérieures de notre espèce, qui la distinguent des animaux. L'bistoire naturelle embrassant tout ce que la Suprême Sagesse a voulu créer dans cet univers, j'ai pensé qu'en écri- vant sur l'homme , on ne pouvoit pas se dispenser d'en exa- miner la partie la plus importante , qui est son âme et son intelligence. L'âme humaine est aussi dans la nature ; celui qui dispose de tout l'a ainsi ordonné ; il l'a réunie au corps organisé ; il a voulu qu'elle lui servît de loi première , et de directrice dans le chemin de celte vie. Et comme nous expo- sons, en parlant des animaux, les facultés qui les dirigent, nous nous sommes crus autorisés, par analogie, à traiter de même l'histoire naturelle de l'homme , quoique nous soyons bien loin de confondre son âme raisonnable et immortelle avec l'entendement borné de la brute. Toutefois nous sentons , autant que tout autre , la grandeur et la difficulté de cette entreprise , et nous en serions effrayés si nous ne demandions pas quelque indulgence au lecteur, en lui faisant considérer que si les plus grands génies ont souvent failli dans ce sujet obscur, nous avons bien le droit de récla- mer ici toute sa bienveillance. Un autre motif seroit capable de nous détourner de ce travail ; c'est l'impossibilité d'éclaircir pleinement cette ma- H O M ,93 tière. Quoique personne assurément ne soit plus éloigné que nous de contredire les sentimens de la religion chrélienne , puisque les Newton, les Pascal, les Descartes, les Bossuet, les Fénélon, et tant d'autres hommes illustres , s'y sont bien soumis , il se pourroit que des personnes mal intentionnées cherchassent à envenimer nos plus Innocentes pensées -, car, si le vertueux Fénélon lui-même a été condamné , et si Buffon a essuyé des censures , qui se flattera d'en être à l'abri ? Néanmoins , songeant que des opinions purement philoso- phiques ne peuvent point détruire une loi morale de dix-huit siècles, quand même elles lui seroient opposées ( ce qui, j'espère, ne se trouvera pas ici), me confiant surtout dans la pureté de ma conscience et la simplicité de mon cœur , j'exposerai avec franchise les observations que j'ai pu recueillir moi-même , étant prêt à abandonner tout ce qui blesseroit les vérités les plus consacrées. Je conçois que la matière n'a, par elle-même , et indé- pendamment de toute influence extérieure , aucun mouve- ment , aucune énergie propre ; car si elle en étoit d'elle- même pourvue, il s'ensuivroit nécessairement que l'arran- gement merveilleux et les rapports surprenans que nous re- marquons dans toutes les productions de l'univers, seroient le résultat spontané de sa force et de son mouvement. Or, on ne peut nier que l'organisation du moindre insecte, de la plus petite plante, comme celle de l'homme, ne soit produite par une cause Intelligente; car il faut de l'Intelligence pour créer «ne intelligence. Si l'on affirme que la matière peut penser sans être organisée, j'Invoquerai les témoignages de la raison et du simple sens commun , qui me disent qu'une pierre ne réfléchit pas , qu'une masse de terre ne raisonne pas. SI l'on me soutient que la totalité de la matière brute pense , mais que ses parties également brutes ne pensent pas , c'est comme si l'on prétendolt qu'une montagne raisonne à la vérité , mais qu'un caillou isolé ne peut pas raisonner. Si l'oa accorde de l'intelligence à la seule matière organisée , on sera forcé d'admettre que la matière brute ne pense pas ; car il faudrolt être bien déterminé pour assurer qu'un quar- tier de roche ou un morceau de fer peuvent penser. Mais si la matière ne pense que lorsqu'elle est organisée , elle n'a donc pas pu s'organiser d'elle-même , puisqu'il auroit fallu qu'elle pensât pour s'organiser , c'est-à-dire , avant de pou- voir penser. Si l'on prétend qu'elle a été de tout temps or- ganisée, on recule la difficulté d'expliquer l'organisatlbn , et l'on montre l'impuissance de la résoudre , en cherchant à la dérober ainsi dans les abîmes de l'éternité. On volt donc combien sont énormes les difficultés d'unpa- 200 H 0 M reil système , celui des matérialistes; car il s'ensnîvroit en- core que tout ce qui existe aujourd hui auroit existé abso- lument de la même manière dans tous les temps ; cependant nous reconnoissons que notre terre a éprouvé une foule de révolutions et de changomens très-variés, qui n'arriveroient pas si la matière avoil , comme on le suppose , une régularité constante et uniforme dans toutes ses opérations. F. Créa- ture, Espèce, GÉA^T, Déoé^ération, etc. 11 est, selon nous, contre toute évidence , d'accorder la fa- culté de penser à des pierres, à de la terre, à de l'eau, à des métaux, enfin , à toute matière brute II est inconcevable que le hasard ait produit Torganisalion de la plus petite mouche. Je reconnois une sagesse élonnanle dans toutes les œuvres de la nature. Les merveilleux rapports des êtres entre eux me démontrent une Suprême Intelligemce : je la vois, ou plutôt je la sens. Cette intelligence ne peut pas venir de la matière , puisque la matière en est modifiée elle-même. Appelez cette intelligence suprême , nature ^ destin , providence^ dieu; regardez- la comme une force ^ ou comme un ê:re , un esprit^ nous ne disputerons point ici sur les mots , son existence reconnue suffit. Cette force , ou plutôt cet esprit divin , agit sur la matière : nous le voyons par ses effets journaliers ; et cette action n'est pas plus difficile à comprendre que l'attraction de la lune sur les eaux de l'Océan, et du pôle Nord ou Sud sur l'aiguille ai- mantée, malgré la distance des lieux. Je remue mon bras , parce que ma pensée l'a résolu. Je reconnois donc que la matière a reçu le mouvement de ce grand esprit, de cet être que l'univers m'a montré. Je re- connois encore que ce mouvement communiqué peut être détruit, parce qu'il n'appartient pas en propre à la matière ; aussi la vie d'un animal , d'une plante , ne subsiste pas tou- jours , puisque cette faculté n'est point de l'essence de la matière. Ce mouvement vital des animaux et des plantes dépend ainsi d'une force particulière qu'on appelle âme ou principe de vie. Elle n'appartient point en propre à la matière, puis- qu'elle s'en sépare à la mort. De même les forces de la ma- tière brute, telles que le mouvement, l'attraction, etc., pourroient en être séparées , si cette matière brute étoit placée au-delà de la sphère de leurs influences , et hors de l'enceinte de l'univers. Alors elle demeureroit immobile et inactivie , tant que nulle force extérieure ne se communique- roit pas à elle. Cette âme, cet esprit qui'agite la matière , c'est Dieu ou la suprême sagesse qui gouverne le monde. Nous obser- H 0 M 201 vous ainsi deux principes dans l'univers : le premier est cette cause suprême et intelligente; le second est la matière ou la substance corporelle. Ce sont les influences plus ou moins grandes du premier principe qui organisent les élémens et tous les êtres de notre monde. En effet, les plus simples observations de la nature nous démontrent une chaîne de vie graduée et immense de l'homme jusqu'à la brute, de la brute à la plante , et de la plante jusqu'au minéral. Tout l'univers paroîl animé d'une vie générale qui se distribue en quantités plus ou moins grandes , suivant l'ordre des substances créées. Ainsi, une petite partie de celte âme du monde , infusée pour ainsi dire dans les masses brutes ou minérales , y a produit l'attraction , les diverses combinaisons et tous les mouvemens que nous y apercevons. Une influence plus immédiate et plus parfaite de la divinité dans une portion déterminée de matière, a donné naissance aux corps organisés, tels que les plantes : cette influence vitale , augmentée encore en d'autres corps , a composé les animaux, depuis le polype jusqu'au quadrupède ; enfin une portion du principe spirituel, plus grande et plus épurée , a formé l'espèce humaine. Cette vie universelle de la matière qui constitue ses pro- priétés, se trouve eu effet dans tous les Règnes (F. ce mot.): cependant, à mesure qu'elle augmente en quantité dans les dif- férens êtres, elle devient moins universelle. Ainsi, la vie de la matière brute qui consiste dans ses attractions, sa pesanteur, sa porosité , sa dilatabilité , etc. , se rencontre également dans les animaux et les plantes ; mais la vie végétative n'ap- partient déjà plus aux substances minérales ; elle ne se ren- contre que dans les plantes et les animaux. ( V. l'article Vie.) La vie animale est encore plus circonscrite, puisqu'elle n'appartient qu'aux seuls animaux. Ainsi, plus la divinité s'infuse , pour ainsi dire , immédiatement dans la matière , plus elle tend à se concentrer, à s'épurer, et moins elle est adhérente aux corps. La vie des animaux les plus parfaits peut cesser d'un seul coup; mais dans les espèces moins perfectionnées elle est bien plus tenace. Ainsi, les insectes, les vers et même les reptiles, subsistent toujours long-temps après avoir été coupés en morceaux ; les polypes se régénè- rent même par ce moyen ; les plantes se reproduisent de boutures; des mousses que la dessiccation a fait périr, re- prennent leur vie dans l'eau. 11 en est de même de plusieurs animalcules infusoires ; il semble que ces êtres si vils et si foibles en apparence, soient immortels. La matière brute a des propriétés encore plus indélébiles; l'homme ne peut même pas lui enlever sa vitalité générale. Ainsi, moins la vie est active , plus elle est adhérente à la matière. L'organisation se aoa H 0 M simplifie dans les mêmes proportions ; car l'on conçoit que des parties très -compliquées sont bien pUis aisément <îé- truiles que des parties simples ei immcj^'i^nes. Dans le ;ii- néral, chaque molécule a s^n .^xislr-nce individuelle, son moi d'action; dans la p! 'uU- n cs animaux les plus simples, tels que les polypes , i! ■ a p usieurs /7?w' agrégés ensemble , et qui peuvent vivre se[)Aiies , comme le prouvent les bou- tures ; dans les animaux les plus compliqués , il n'existe qu'un seul moi de vie , aussi la division les fait soudain périr. Nous reconnoissons donc une véritable gradation de vie et de facultés dans tous les corps de la nature; car nous pou- vons descendre par nuances de Vhomme blanc au nègre , et du nègre au hoftenfot ; la gradation est très-prononcée du hoi- tentot à Y orang-outang ^ puisque le premier des singes est déjà bien inférieur au dernier des hommes. La famille des singes nous mène par des progressions également insensibles à toute la classe des quadrupèdes; de là aux oiseaux, aux rep- tiles, aux poissons, au\ mollusques, aux crustacés, aux in- sectes, aux vers et aux zoophytes. Les polypes font une nuance très-remarquable entre lés animaux et les plantes, puisqu'ils sont nommés zoophytes , c'est-à-dire , animaux- plantes. ( Voy. Animal.) La série àe& végétaux ne nous présente pas moins de nuances de dégradations que celle des animaux ; et enfin nous arrivons à ces dernières limites qui se rapprochent ex- trêmement des pierres et des minéraux les mieux figurés. Parmi ceux-ci, l'on retrouve encore cette même loi d'ac- croissement du principe organisateur. Tout est donc nuance , gradation de l'esprit divin , directeur de la matière. Il semble voir cette âme du monde germer d'une manière obscure et incomplète dans les minéraux, s'étendre et s'accroître dans les diverses branches du règne végétal , se développer avec vigueur dans le règne animal , y manifester sa présence par la sensibilité ; enfin s'épanouir, s'exalter au plus haut degré dans l'homme, et remonter ainsi par des transitions presque infinies jusqu'au sein de la Divinité, Dieu est partout; sa puissance éternelle , immense, em- brasse tout l'univers, et le pénètre en tous sens; cette grande vérité nous est confirmée , non-seulement par le témoignage unanime de tous les siècles et de toutes les nations, mais en- core par l'aspect de ce monde si sublime , si magnifique dans toutes ses parties, et qui atteste en tous lieux la gloire et la sagesse de son créateur. Voyez cette voûte descieux, ce soleil, ces astres de l'empirée , cette profusion étonnante de plantes et d'animaux de mille espèces ; examinez les rapports mer- veilleux de tous CCS êtres entre eux ; ces liaisons , ces cor- H O U 2o3 respondances , cette suLlime harmonie qui les unit , et vous reconnoîtrez combien Dieu , ou cette grande âme du monde, est admirable dans toutes ses œuvres et dans toutes ses nuan- ces de vie. Mais l'homme est surtout son être de choix , le chef-d'œuvre snv lequel la suprême intelligence s'est plu à verser ses dons , et qu'elle orna d'un rayon éclatant de sagesse et de génie. Nous existorr. en Dieu , nous vivons en lui, comme l'a dit l'apôire : In D'i vwimus , mocemur, et sumus , et k notre mort, la puissance qui nous anime retourne à sa céleste origine. Comme l'âme du monde physique conserve une attraction perpétuelle vers sa source, elle communique cette même ten- dance à la matière avec laquelle elle est unie ; plus cette âme se rapproche de son origine, plus elle acquiert de prépon- dérance sur la matière , de même qu'un corps se pénètre d'autant plus de chaleur à mesure qu'il s'approche davan- tage du foyer qui la répand. Ainsi , la terre remonte gra- duellement à l'état végétal , la plante aspire à l'état animal, et la bête aspire à celui de l'homme, à mesure que la ma- tière se pénètre davantage de l'esprit de vie. Nous aspirons de même à un état plus noble et plus relevé par l'instruction , par les lois, les religions, les sciences; nous essayons de nous élancer jusqu'au trône de la Divinité ; tout nous y at- tire et tend à nous réunir avec notre essence ; mais le poids de la matière nous retient sur la terre pendant cette vie. Ainsi , l'homme est le fils du ciel et de la terre , c'est-à- dire , de Dieu et de la matière. Nous sentons en nous-mêmes ces deux principes contraires. Dans l'enfance, l'élément matériel domine, et le principe spirituel ne se développe entièrement qu'à l'époque de l'âge mùr; il se dégage de plus en plus de la substance purement corporelle pour retourner librement à sa mort vers son ori- gine. Tous les senlimens abjects, les vices et toutes les cupi- dités basses de l'homme, appartiennent à la partie la moins noble de son être , à celle qui participe le moins de la Divi- nité ; mais les pensées grandes , les affections sublimes et généreuses sont du domaine de la partie spirituelle. Aussi voyons-nous que la sagesse, la raison , le jugement, augmen- tent dans les hommes , à mesure que leur cerveau se per- fectionne, c'est-à-dire, à mesure que leur portion divine surpasse la partie terrestre. L'homme est donc de deux natures : l'une qui l'anime , l'autre qui est animée, c'est-à-dire, l'âme et le corps , la partie divine et la partie matérielle. La première est répartie dans tous les organes du corps, mais en proportions diverses ; ainsi, le cerveau, les nerfs, le cœur, les organes sexuels, en 2o4 H O T^I contiennent plus que tout le reste. Les nerfs ont même , se- lon plusieurs physiologistes célèbres , et surtout Reil , une sorte d'atmosphère de sensibilité qui les environne et qui agit à quelque distance d'eux. C'est un esprit de vie qui s'en exhale perpétuellement. D'ailleurs, le principe vital se modifie» suivant l'espèce d'organe qu'il anime, et chaque partie du corps a son mode de sentiment quidiffère de celui des autres parties. Ainsi, quoi- qu'on distingue dansl'homme la vie intérieure ou végétative, des fonctions extérieures ou animales et de la puissance générative , il n'y a pourtant qu'une seule espèce d'âme, mais diversifiée en raison de ses proportions avec la substance matérielle. Il y a dans l'homme et les animaux, des substances appartenant aux trois règnes: mais la substance animale , qui est la plus vitale, el, si j'ose ainsi dire, la plus divinisée, y est aussi plus abon- dante que la matière végétale ou moins animée; celle-ci est encore plus abondante que la matière brute ou presque entiè- rement inanimée. La même gradation qui se remarque dans les règnes de la nature, existe de même dans l'homme ; c'est sans doute pour cela que plusieurs philosophes l'ont nommé ïnîcrocosme ou petit monde ^ parce qu'il semble représenter en quelque sorte la nature entière. Et considérez encore que , formé des substances des trois règnes, l'homme a par conséquent avec elles des liaisons et des relations plus ou moins intimes, selon que ces substances sont plus ou moins abondantes dans sa constitution. Ainsi , nous tenons plus des animaux que des végétaux, et plus des végétaux que des minéraux , soit par notre corps , soit par nos facultés et nos besoins. De plus, l'essence de notre pro- pre nature nous est moins explicable que cellp de l'animal ; celle-ci Test moins encore que la nature végétale ; et enfin , telle du végétal l'est beaucoup moins que la substance brute. Ceci est facile à concevoir, si l'on réfléchit que la vie et l'or- ganisation se simplifient de plus en plus depuis l'homme jus- qu'au minéral; car plus une substance se complique, plus il est difficile d'en dévoiler la nature intime. L'âme n'aperçoit les choses qu'au travers de nos organes des sens; et comme ceux-ci sont modifiés suivant les lempé- ramens, les sexes, les âges, les alimens, etc., il s'ensuit qu'elle doit les voir dilTéremmeat suivant ces diverses circonstances. Ainsi, dans la jeunesse, tout nous paroît agréable, nous cause du plaisir; dans la vieillesse , c'est tout le contraire; de même, les pensées se modifient autrement dans la femme ^ que dans l'homme, dans le flegmatique que dans le bi- lieux, etc. Yoilà ce qui fait paroître des âmes si différentes entre elles, quoiqu'elles soient probablement égales etsem- H O M 2o5 blables, puisque tous les hommes ont une même origine et les mêmes droits devant leur créateur. Plusieurs philosophes modernes ont très-bien expliquécom- mentnos sensations transmises aucerveaupar les nerfs, et com- parées entre elles, puis coordonnées en raisonnement, forment toute la trame de notre intelligence. C'est le développement de l'axiome d'Aristote: que rien n'est dans V entendement qui ne soit passé par les sens; ce qui a fait naître à Condillac le des- sein de composer, en quelque sorte, l'homme intellectuel, en animant graduellement chacun des sens d'une statue. Il seroit long et fastidieux de répéter ici ce système si bien dé- veloppé par Locke. Cependant, il me semble que cet illustre philosophe a négligé une considération très-importante , en faisant de l'homme un être tout passif, et en négligeant l'é- tude de ces impulsions internes du cœur, ou du moral, et de l'instinct, qui se décèlent dès la naissance. Nous n'apportons en naissant , dit ce philosophe , aucune idée; notre intelligence est vide; c'est une table rase, sur laquelle rien encore n'a été inscrit , mais qui est prête à re- cevoir des idées par le ministère des sens. Si cela est ainsi , nous ne pouvons avoir aucune pensée dans l'esprit qui ne nous vienne des sens. Cependant les idées de vertu, de justice , de vérité, n'étant pas des objets matériels, ne peuvent pas être saisies par les sens. On m'objectera qu'elles offrent les rapports de ces objets matériels comparés entre eux; mais c'est l'esprit qui juge de ces rapports, et d'a- près quelle règle les juge-t-il? Il a donc une mesure primi- tive de comparaison , mesure sur laquelle il règle tout ce qu'il aperçoit. L'esprit n'est donc point passif; mais il réagit sur les idées , il les combine , il les digère, pour ainsi dire , il les assi- mile à sa nature , tout de même que notre estomac transfor- me nos alimens en un chyle nourricier; comme l'ont bien remarqué Th. Reid, Kantetd'autresphilosophcsmoderaes. L'imagination, ce principe actif de l'âme, se crée aussi des idéesquin'ontaucunlypedanslanature, etqui neluisont point toutes parvenues par les sens, puisque ceux-ci la détrompent souvent de ses chimériques pensées. C'est elle qui inventa tout ce que l'homme a fait sur la terre. Si toutes nos pensées ne sont que des sensations transformées , pourquoi l'homme a-t-il trouvé des choses qui surpassent ses sensations.'' Pourquoi Newton devine-t-il le système du monde? Pourquoi l'at- traction planétaire n'est-elle pas aperçue par la plupart des hommes, qui ont pourtant les mêmes sens que ce grand géo- mètre ? Les sensations ne font donc pas tout l'homme intel- lectuel; notre esprit ne pénètre donc pas seulement en nous par ces cinq portes extérieures que nous nommons sens; il nous 3o6 H O M est donné k notre naissance; car quoique la plupart des hommes soient pourvus de sens presque également parfaits , cependant rien n'est moins uniforme que leur intelligence. Enfin l'instinct n'est point le produit des sensations; il leur est antérieur. ( F. Instinct. ) L'enfant sortant du sein maternel cherche aussitôt la mamelle, ne s'y trompe pas» sait envelopper le mamelon de sa petite langue , et faire le vide dans sa bouche pour y attirer le lait. Qui lui a donné cette connoissance , avant même d'avoir connu qu'il exis- toit? Pourquoi le jeune taureau frappe-t-il de la tête , sa- chant déjà l'usage des cornes avant d'en être armé? Comment le poussin sortant de son œuf va-t il reconnoître et choisir le grain de blé entre des petites pierres de gravier ? Pourquoi la poule s'effraie-t-elle d'un épervier qu'elle aperçoit pour la première fois? D'où vient l'antipathie du chat pour la souris? Tout cela vient de l'instinct; mais ce mot, ou n'ex- plique rien, ou signifie qu'il existe dans chaque homme et dans chaque animal, une série d'actions et d'impulsions autocra- tiques, c'est-à-dire spontanées, innées, naturelles, et qui ne nous sont aucunement transmises par les sens. C'est l'impul- sion intérieure des organes de la vie. Cette impulsion primitive est même d'autant plus forte , que les idées acquises par les sensations sont en moindre quan- tité ; ainsi l'homme ayant plus d'idées que la bête , a bien moins d'instinct qu'elle, et les personnes les plus instruites en ont moins que les personnes les plus ignorantes. Plus on a d'acquis , moins on conserve de naturel. Les lumières qui nous viennent du dehors absorbent celles du dedans; notre esprit préoccupé des pensées que lui transmettent les sens, entend moins la voix intérieure de l'âme; notre instinct si vif dans l'enfance , s'éteint à mesure que nos connoissan- ces extérieures augmentent avec l'âge. Notre esprit est composé de trois facultés principales , qui renferment toutes les autres ; ce sont la mémoire, V imagination et le jugement. Dans l'enfance, la mémoire est presque la seule faculté qui s'exerce en nous ; elle emmagasine , pour ainsi dire , tous les matériaux de nos futures pensées. Avec la puberté se développe l'imagination , c'est l'époque de la poésie et de tous les rêves de la vie qui enchantent l'âme hu- maine. L'âge mûr amène l'empire du jugement, qui soumet tout à la réflexion, et renverse tout ce qui n'est pas fondé sur des faits réels et sensibles. Les animaux sont presque entière- ment bornés à la mémoire; ils donnent cependant des preu- ves de raisonnement, mais fort simples pour l'ordinaire , car les pensées compliquées et abstraites surpassent leur portée. Ils ne paroissent guère avoir d'imagination , et sont peu ca- H O M ^,7 pables d'invention ; ils se tiennent tous dans une éternelle uniformité d'actions et dans un cercle étroit d'idées sim- ples. Les phénomènes qui accompagnent la production df la pensée , ressemblent beaucoup à ceux qui ont lieu dans les excrétions. Il en est du cerveau comme des organes de la génération , et même ils s'influencent mutuellement , car il n'y a guère d'exemple qu'un eunuque ait montré du génie. On sait combien les excès de l'amour affoiblis- sent la faculté de penser; enfin l'esprit ne se développe ja- mais davantage qu'au temps de la plus grande vigueur géné- rative, vers trente ans environ, et il baisse extrêmement lors- que la vieillesse enlève cette puissance. La plupart des hommes de génie ont même une puberté précoce et vigou- reuse , sans avoir toutefois des organes sexuels plus gros et plus développés que les autres hommes, et sans être aussi adonnés qu'eux à la volupté. Au contraire, les hommes dont les organes génératifs sont fort développés, passent pour hébétés, de même que ceux qui s'adonnent trop aux femmes, parce que tout l'effort de la vie est alors attiré vers leurs par- ties sexuelles. Dans les hommes les plus émînens parla grandeur et l'é- lévation de leur esprit , il y a , tout au contraire, une ten- dance de la force vitale vers le cerveau , ce qui diminue d'au- tant plus celle des autres organes , et ce qui explique pour- quoi les hommes de génie n'ont eu presque jamais des enfans qui leur ressemblassent, ou même ne se sont point mariés. Quand le cerveau engendre et produit des enfans immortels, les parties sexuelles ne peuvent point produire des enfans mortels. Lorsqu'on médite profondément, le cerveau entre dans une sorte A' érection^ de spasme ou de tension particulière ; le sang artériel y afflue , et abandonne en partie le reste du corps ; il faut encore un repos de tous les membres , une inactivité de tous les sens ; il ne faut rien voir, rien entendre, rien sentir ; toute lâmedoitse rassembler dans la tête. Quel- quefois même cette concentration est telle qu'on tombe dans un état d'insensibilité qu'on nomme extase ; c'est l'excès de la contemplation sur quelque grand objet. La douce chaleur, rimmobilité, le silence, la nuit , la solitude , favorisent ex- trêmement la méditation, de même que la position horizon- tale , qui rend l'abord du sang dans le cerveau plus consi- dérable; aussi les pensées qui surviennent dans le lit, lors- qu'on passe les nuits sans dormir , sont bien plus fortes et plusvivesque pendant la journée où divers objets nous dis- traient sans cesse. Nous voyons encore que les personnes qui 2o8 H 0 M s'occupent d'un grand nombre de choses, qui se mêlent de tout, n'ont pas des pensées très-étendues et très-profondes, parce qu'elles n'ont pas le temps de réfiéchir longuement sur chaque sujet ; tandis que les penseurs profonds aiment le re- pos , le silence, la solitude et l'isolement de tonte sensation distrayante (i). Nous voyons encore que plus le cerveau a de propension au sommeil, c'est-à-dire à devenir inactif, moins il se trouve capable de produire des pensées. Plus on dort, plus on diminue sa faculté de penser; plus on pense , moins on peut dormir. Les hommes de grand esprit ne dorment guère; Boerhaave cite un médecin qui devint hébété pour avoir dormi trop long-temps. Tout ce qui excite l'esprit , comme le vin , le café,, etc. , empêche le sonnneil. La pensée est une sorte de sécrétion du cerveau, à la vé- rité immatérielle, mais qui s'opère comme la sécrétion de la semence , de la bile et de toute autre humeur, parce que le cerveau est une véritable glande ; et comme une glande ne peut agir sans que les autres demeurent inactives dans le même moment, la fonction de penser ne s'exerce guère qu'aux dépens des autres fonctions vitales. Ainsi la digestion ne peut pas se faire quand on médite fortement, et récipro- quement la digestion suspend le libre exercice de la pensée ; d'où il suit que quand on mange beaucoup et qu'on digère bien, on réfléchit peu, et que quiconque mange peu et a l'estomac foible ou peu capable de digérer, pense beau- coup ; de là vient encore que tous les hommes de lettres et les savans ont l'estomac délicat : Imhecilli stomacho oinnes penè ciiptdi lilteranim sunt. Celse, de medicin. 1. i , c. i. Il y a plus, l'homme se dislingue des animaux , non-seule- ment par l'étendue de son cerveau , sa puissance nerveuse plus grande que celle des autres créatures, par la flexibilité de son organisation qui le met facilement en rapport avec tous les climats, toutes les nourritures; mais nous montrons ail- leurs (Homme dans le Dict. des sciences médic.') ce qui fonde sa haute supériorité intellectuelle. Offrons-en l'abrégé ici. Des sens plus délicats qu'énergiques, plus proportionnés que ceux des autres espèces pour juger sainement des choses; un tact délicat et universel; de grands besoins pour exister, sources de travaux et d'accoutumances utiles, durant une lon- gue enfance ; de là l'éducation lente pendant une période de foiblesse et de docilité ; un langage articulé ou des signes atta- chés aux idées pour se fixer dans le trésor de la mémoire ; l'emploi de toutes sortes de nourritures, en diverses contrées. (i) Scriptorum chorus omr.is araat nemus et fugit urbes. Hobacb. ^r/. poèt. H O M ,09 «î'oii naissent des éludes multiples et une expérience très- étendue nécessairement ; tous ces objets élaborent la nature humaine au-delà des autres races d'êtres créés, et la perfec- tionnent sans cesse dans le cours d'une assez longue vie. Ensuite , la réunion fréquente des sexes , par la possibi- lité de l'amour en tout temps; la formation de la famille ratta- chée par les liens des enfans , dont l'impuissance réclame sans cesse les soins maternels; cette éminente sensibilité qui rend notre espèce si susceptible de maladies et de détériora- tions; telles sont encore des causes d'expériences et de perfec- tionnement. La station droite du corps humain qui élève notre vue et nos sens au-dessus de la terre , qui laisse libres les mains, ces merveilleux instrumens, fabricateurs des autres instrumens , donne à notre cerveau une prépondérance extraordinaire sur telui de tous les autres êtres, et fait de l'homme, pour parler comme Platon , une plante céleste. L'homme , placé à la tête de la création, ne reçoit, pour ainsi dire , d'ordres et d'émanations directes que de la divinité même ; lui seul s'élève jusqu'à connoître cette première cause ; il se coordonne en harmonie avec toute la nature dont il devient le ministre. Aussi, l'homme est l'être curieux, in- telligent, avide de savoir, par excellence, et doué des facultés du bien et du mal. La nature a élargi notre voie ; elle nous a donné le sceptre sur l'un et l'autre ; elle nous a laissés libres dans le choix , car nous n'eussions ni tout connu , ni été in- dépendans et dignes de louanges ou de blâme, si nousn'eus- sions pas pu faire le bien et le mal par notre libre arbitre. Aussi l'animal , réduit à l'esclavage de son instinct ou de ses impulsions, n'est, par cela seul , ni un agent méritant , ni un être doué de toute faculté de connoître. Que dis-je? la cor- ruptibilité morale de l'homme dérive même de sa perfecti- bilité , dont elle est le contre-poids inévitable ; et la connois- sance du mal ne sert pas moins à l'extension de la puissance morale et intellectuelle de l'homme, que la connoissance du bien. L'état social nous rend plus maladifs, plus délicats, par cela même qu'il perfectionne nos facultés intérieures aux dé- pens des corporelles ou animales. Les névroses et autres affec- tions du cerveau contribuent aussi, à quelques égards, à rendre l'homme plus intelligent, supérieur aux brutes, et même aux individus de son espèce qui vivent plus corporellement. Les excès sont, en quelque sorte , la preuve de notre grandeur; c'est par eux que nous nous élevons dans l'avenir, dans l'amour de la gloire et le mépris de la vie ; ils nous donnent la faculté de sortir du commun de l 'animalité. Nos passions servent d'aile s XV. I| .lo H O M à notre essor et nous transportent, soitjusqu'àrhéroïsme,soît au comble des altenlats. Aussi , ces pouvoirs transcendans que nous accorde la nature , nous obligent à établir des règles, le frein des religions, le joug salutaire des lois ou des gouver- nemens, et par-là nous surpassons encore tous les autres êtres en sociabilité. Le genre humain héritant alors de l'expérience des siècles par la perpétuité des sociétés, des découvertes dans les scien- ces et les arts, faites par nos devanciers, et auxquelles il nous est permis d'ajouter sans cesse, l'édifice de la civilisation s'é- lève au plus haut faîte de sa perfection ; ce qui est étranger à la brute qui meurt toute entière, et dont les petits recommen- cent sans cesse à zéro. Enfin, les divers peuples de la terre s'entre-communiquent leurs lumières; ils se font part de leur commune industrie , comme des frères d'une immense famille. On traverse les on- des et les continens ; le genre humain ne forme plus, malgré ses querelles particulières entre quelques nations, qu'un grand corps dont nous sommes les fnembres. Diverses sortes de gouvernemens favorisent plus ou moins l'essor de l'indus- trie; la variété des coutumes et des mœurs devient un specta- cle instructif, et désormais le genre humain marche dans une carrière infinie qui lui ouvre les plus sublimes destinées. S'il existe des temps de crise et des retours vers la barbarie, néan- moins plusieurs découvertes semblent mettre à l'abri d'une entière destruction les élémens de toute civilisation. La boussole a donné la clef de tout le globe; l'imprimerie con- serve le dépôt des sciences et des arts ; et même la poudre à canon, en changeant le système des guerres chez les mo- dernes , place lés peuples dans l'heureuse impuissance de s'entre-détruirç entièrement, comme le faisoient les anciens. De la Parole et des dwerses Langues. Les premières voix de l'homme sont des accens inarticulés,' arrachés par les besoins, la douleur, les passions ou le plai- sir; c'est le cri de nos organes. Le premier des langages fut la pantomime, et connne les hommes ne pouvoient exprimer ainsi que des idées simples et des sensations , elles durent suf- fire tant que le genre humain demeura sauvage et dispersé. Cependant les rapports d'amour entre les sexes faisant éclore de nouveaux sentimens , des besoins aussi tendres qu'impérieux forcèrent les hommes à inventer des termes conventionnels pour les exprimer. L'amour fut ainsi le pre- mier inventeur du langage ; cette vérité nous paroîfra plus évidente encore, si nous faisons attention qu'il en est de même parmi les, animaux, comme nous l'exposerons en H O M .1, détail à l'article Voix ; car c'est au temps du rut que les qua- drupèdes ont le plus de voix et de relations entre eux; c'est à l'époque de la ponte que les oiseaux déploient tous les agré- mens de leur ramage. L'influence des organes de la généra- tion sur ceux de la voix est même très - digne d'attention. C'est ainsi que les eunuques et les enfans ont la voix douce et argentine , tandis que vers l'âge de la puberté elle acquiertplus de gravité et de timbre. De même , les maladies vénériennes qui attaquent les parties sexuelles , changent beaucoup la voix , et souvent la font perdre entièrement. Lorsqu'on devient in- habile à la génération , la voix se casse. Après l'acte de la propagation, le son de voix devient plus sourd ; et dans les oiseaux il change tellement qu'il est méconnoissable. C'est alors le temps où cessent toutes les corresj>ondances entre les sexes , ce qui diminue le besoin du langage. Ainsi le rossignol n'a plus qu'un vilain cri , .à peu près semblable à celui d'un crapaud , après le temps de la ponte. Les insectes qui ont des instrumens pour produire du bruit, tels que l^s criquets , les cigales, legrillons, etc.,ne les exercent qu'àl'époque de l'a- mour. Le chant, dans Thomme et la femme, estpresque toujours i'expression de l'amour, et annonce le désir de la jouissance. Et voyez avec quelle sage prévoyance la nature a distin- gué l'homme des singes qui lui ressemblent plus ! Elle n'a pas voulu qu'une bête vînt se mêler à la conversation hu- ' maine , par cet empêchement artificieux , ou ces sacs mem- braneux situés au larynx des orang - out'angs , pour engouf- frer et assourdir leur voix. Ainsi Vliomme seul parle ; car si Ton apprend aux perroquets et à d'autres oiseaux à répeter des molsarticulés, tout le monde comprend que cesanima^ix n'y attachent point , comme nous , des idées. Ils ne parlent donc point, dans la rigueur de l'acception. Les premières langues des hommes furent des chanis plu- tôt que des discours. Les sauvages chantent , c'est à dire , mo- dulent, en parlant, leur langage , par une muhitude d'accens inarticulés; ils expriment plulôt leurs sentimens que leurs idées , et s'adressent encore plus au cœut*qu'à l'espril. (]omme ils ont plus de sensations que d'idées, ils sont obligés de se servir d'objets physiques pour exprimer presque toutes les abstractions de leur esprit : voilà pourquoi ils font un si grand usage des métaphores , des emblèmes , des allégories; voilà pourquoi ils personnifient les objets inanimés , et em- ploient les tropes les plus énergiques pour se faire compren- dre ; ce qui donne à tous leurs discours un caractère très-poé- tique. Comme ils ont peu de signes représentatifs des idées, dans leur esprit, ils en cherchent hors d'eux-mêmes ; de là viennent , chez les Américains sauvages , le calunul de paix , 2ia n O M la hache de guerre , la ceinture d'amitié^ et tant d'autres em- blèmes de leurs pensées. Tout est poésie chez eux ; c'est même la langue primitive des hommes. Des Européens vou- loient engager une de leurs hordes à sortir de sa patrie ; leur chef repondit : Comment pourrons - nous quitter cette terre notre mère ? ÎJiions-nous aux ossemens de nos pare/is, sortez de vos tombeaux , et venez aoec nous dans une patrie étrangère ? Quand un sauvage se lie d'amitié avec un autre homme , il échange son nom contre celui-ci , pour exprimer qu'il l'aime comme un autre lui-même , et qu'il est en quelque sorte passé dans le corps de son ami. Les Massagètes et les anciens Scythes faisoient même plus ; ils suçoient du sang l'un de l'autre. Voilà le langage de la nature ; il parle aux sens , il ébranle l'imagination. S'il exprime moins nettement la pensée , en re- vanche il frappe mieux l'âme; il semble animer tout l'univers. On trouve ce même langage dans V Ancien Testament. C'est ainsi que David et les prophètes apostrophent le Jourdain, font parler et mouvoir les arbres , les montagnes , etc. Ho- mère , et tous les anciens poètes , ont prêté du sentiment aux objets inanimés ; ainsi la flèche est avide de sang, l'épée brûle de se venger, les arbres sont sensibles , les animaux parlent, tous les phénomènes naturels sont personnifiés. Plus les langues s'enrichissent de mots ou de signes repré- sentatifs des idées, plus elles deviennent claires, méthodiques, plus elles sont nettes, précises , mathématiques. Elles parlent donc beaucoup à l'intelligence et peu au cœur. Elles font penser , non pas sentir; elles sont propres à la philosophie , aux sciences , à la métaphysique : non à la poésie , à 1 élo- quence ; elles n'admettent que des constructions exactes ; elles rejettent les inversions hardies , les expressions vives et pitto- resques , qui sont toujours au-delà de la vérité; elles analy- sent le discours , elles exposent les pensées d'une manière froide et didactique. Les premiers langages , au contraire , font sentir rapidement tous les objets , donnent au discours une forme dramatique , ils peignent à l'imagination ; tandis que nos langiîfes n'offrent plus que des abstractions. Homère , VÉcriture sainte , ne racontent point ; ils nous montrent les hommes, les héros agissant et parlant. Dans nos langues mo- dernes, l'écrivain est toujours à la place de celui qui parle et agit. De la vient que le discours perd tout son intérêt ; nous ne VOYOUS plus les objets eux-mêmes , mais le travail de l'au- teur ; la couleur de la vérité n'y est plus. C'est parmi les sauvages ou,les barbares qu'il nous faut au- jourd'hui chercher la véritable éloquence et la haute poésie ; elles ne se iroivcnt plus chez les peuples très-policés. Pour peu qu'où ait roUechi sur 1 histoire des lettres, on s'aperçoit H 0 M 2i3 que les poètes ont toujours devancé les philosophes et les sa- vans dans chaque nation , et qu'à mesure que ces derniers ont brillé , la poésie s'est éclipsée. Ne voyons-nous pas que le dix-huitième siècle , qu'on a nommé le siède de la philoso- phie a suivi le siècle poétique de Louis xiv ? Lorsque les Vir- gile , les Horace , les Ovide eurent brillé sous le grand siè- cle d'Auguste , on ne vit plus ensuite de véritables poètes. Lucain, Stace, Silius Italiens , Claudien, etc. , sont presque la lie de la littérature ancienne. Comparera-t-on le style de Sénèque à celui de Cicéron ? Chez les Grecs, Homère, Hé- siode, etc. , devancèrent de long-temps tous les philosophes. Après Démosthène on ne trouve plus que des déclama- teurs, Pourquoi l'Italie élolt-elle pleine de poètes , de peintres et de grands écrivains aux quinzième et seizième siècles , tan- dis qu'elle est presque veuve aujourd'hui de tous ces hommes illustres ? Pourquoi notre littérature s'éclipse-t-elle à me- sure que nous devenons plus savans ? On donne cependant à la jeunesse une foule de traités pour lui apprendre la poé- sie et l'éloquence , mais nous ne trouvons plus de vrais poè'tes et d'illustres orateurs. On connoit fort bien l'art; mais ce qui manque , c'est la nature : elle n'est cependant pas plus affoi- blie aujourd'hui que dans les anciens temps; mais nos mœurs et notre langage ne sont plus les mêmes. Au lieu de poésie , on ne trouve que de la prose versifiée ; au lieu d'éloquence , une vaine déclamation ; au lieu d'histoires , des romans ; au lieu de représenter des choses , on arrange des mots ; la forme devient tout , le fond n'est plus rien ; on ne recherche pas le vrai, mais le spirituel et le brillant. La littérature grecque , qui fut la première littérature de l'univers , périt par les rhéteurs , les grammairiens , les petits versificateurs. 11 en fut de même de la littérature latine , comme l'observe Velleïus Paterculus. L'italienne n'offre plus aujourd'hui que du clinquant, des jeux de mots et des anti- thèses. La frant^aise dépérit de jour en jour. Il en sera de même de toutes les littératures du monde. Si l'on veut réflé- chir à cette marche uniforme des choses humaines , on re- connoîtra facilement qu'elles tiennent à des causes générales bien importantes. Nous avons vu quw tous les hommes barbares étoient natu- rellement poètes ; leurs lois, leurs histoires , leur religion , se chantent en vers. Les premiers législateurs, les prêtres, les oracles des dieux, ne s'exprimoient qu'en vers; parmi ces peuples nouveaux , les mœurs sont simples et pastorales ; l'a- mour de la patrie , le vif sentiment de la liberté , la religion du cœur, l'ignorance des causes naturelles , l'aspect d'une nature majestueuse et sauvage , enfm la solitude qui agrandie 2x4 H O M toules les affections ; voîlà ce qui imprime à toutes leurs pen- sées un caractère naturellement poétique. Nos bons aïeux chantoient des ronianccs ou des histoires en vers ; ils avoient des bardes , des troubadours , avant même que leur langage (ut formé ; les plus anciens Grecs avoient aussi leurs rapsodes, et les peuples Scandinaves, leurs scaldes : on connoît les poé- sies erses et les chants d'Ossian. Lorsque le langage se perfectionne et s'enrichit, comme dans les âges moyens ; lorsque les moeurs de la nation se po- licent un peu plus , alors la poésie et les aris brillent du plus vif éclat. Tel fut en (jirèce le siècle de Périclès, illustré par les Sophocle, les Euripide et les Phidias, etc. Tel fut à Rome l'âge de César et d'Auguste , qui vil fleurir Cicéron , Virgile , Horace , etc. Dans ITtalie moderne, nous avons le siècle de Léon X , qui donna naissance au Tasse , à TArioste , à Ra- phat;! et à Michel-Ange. Sous Louis xiv , Racine , P. Cor- neille , Fénélon, Bossuet , Pascal , et les peintres Lebrun , le Sueur , etc. A la suite de ces siècles glorieux succèdent toujours les âges de la science et de la philosophie , parce que les mœurs et les connoissances nous enlèvent bientôt les douces chimères de la poésie. En effet , un physicien qui explique l'accrois- sement et la vie des plantes , fait évanouir les faunes , les dryades qui peuploient les forêts ; la fontaine n'a plus sa naïade tutélaire ; la montagne solitaire , ses satyres et ses dieux champêtres. Qu'un philosophe nous montre l'électri- cité dans le tonnerre, ce n'est plus Jupiter armé de la foudre pour châtier les Titans ; on n'y peut plus croire désormais ; c'est ainsi que la science désenchante l'âme , et dissipe ces illusions de nos sens , qui font les délices de l'imagination. Ce changement dans les idées , est le résultat inévitable fie la civilisation et de l'instruction des hommes. Les peuples voisins de l'état de nature sont ignorans et crédules ; ils sont donc portés à la superstition, aux prestiges; comme ils pensent peu , ils doivent sentir beaucoup ; ils vivent sous l'empire du cœur. Les nations très-policées étant plus instruites , devien- nent par conséquent peu crédules ; elles se rapprochent donc plus de la vérité des choses; mais comme elles pensent beau- coup , elles sentent moins ; elles viveal plutôt par la tête , que dans le cœur ; leurs mœurs cessent alors d'être poétiques ; chez elles , par exemple , l'amour n'est plus un dieu , c'est seulement un acte physique accompagné de volupté. Le langage suit aussi la même progression que celle de la civilisation et des idées répandues dans le corps de chaque nation ; les livres n'en sont que les résultats. Rien loin de donner l'impulsion à leur siècle , les auteurs la re^^oivent H 0 M '2,5 d'orclinaîre ; en effet, nous voyons briller le même genre de littérature dans chaque état, aux pareilles époques de leur durée. Le siècle donne donc toujours le ton aux ouvrages , 11 leur fait prendre sa livrée. La moindre réflexion sur le gonre d'écrits qui a le plus de vogue aujourd hui , siiffit pour faire juger de l'état de la. langue et des mœurs. Ainsi !a multipli- cation des journaux, des dictionnaires, des romans , des li- vres élémentaires , la propagation des sciences dans toutes hes classes de la société, nous montrent avec quelle rapidité la poésie , la littérature et lesbeaux-aris doivent tomber en décadence. Quand on voudroit s'y opposer, on ne le pour- roit pas, puisque la force de l'opinion et des mœurs nous y entraîne invinciblement. Les langues ne se régénèrent pas plus que les empires, car elles suivent leurs mêmes périodes d'accroissement et de dégradation. Les premiers Komains avoient une langue imparfaite et fort rude ; elle devint riche, sonore , grave au temps de Cicéron et de Virgile ; puis elle se dégrada à mesure que l'empire romain s'alfoiblit sous la corruption et le despotisme de ses empereurs, Nous pouvons apercevoir une gradation semblable dans la langue française , qui fut d'abord barbare dans son origine; c'cfoit un mélange de celtique et de basse latinité ; ensuiie elle forma la langue romance , qui étoit plus homogène et plus douce ; vers le i5.*^ siècle, elle prit un nouvel essor , parce «|ue le gouver- nement français éprouva des agitations à cette époque; en- fin , sous Louis XIV elle acquit toute sa perfection. Les nsœurs qui commencèrent à se corrompre sous la régence et le rè- gne de Louis XV , portèrent atteinte à la pureté de la langue , en créant un style maniéré et pointilleux. Enfin , elle se dé- tériore toujours de plus en plus ; on ne pourroit la réformer qu'en régénérant l'état et les mœurs. C'est précisément à l'époque où les langues se répandent parmi les peuples circonvoisins , qu'elles commencent à se dégrader. Lorsque la langue grecque" s'étendit en Egypte , en Syrie , en Italie et à Rome , elle fut presque défigurée ; lorsque la langue latine devint commune chez toutes les na- tions vaincues par la puissance romaine , elle se changea bien- tôt en basse latinité ; la langue française , qui se propage beaucoup eï\ Europe , commence de même à perdre sa pre- mière pureté. On peut juger que les langues tombent en dé- cadence , quand elles se surchargent d'omemens inutiles , qu'elles multiplient les épilhètes , et affecfent un vain luxe de paroles : en voulant tout exprimer , elles se noient dans une multitude de détails. Le langage , c'est Fhomme lui-même considéré au moral ; c'est Tindice de son caractère , de son tempérament; le style 2i6 H O M signale ses mœurs et peint ses sentimens ; il montre la per- sonne qui se cache sous les dehors apprêtés d'un auteur. Un naturaliste disoit : Donnez-moi une dent d'un animal quel- conque , je vous dirai si elle appartient à un Carnivore ou à quelque herbivore ; tout lecteur un peu exercé pourra de- viner de même , par le style , l'esprit et le caractère de cha- que auteur. Ainsi le style des hommes d'une constitution ner- veuse , maigre et mobile , est ordinairement éclatant et spi- rituel : celui des mélancoliques est obscur, serré, fort , celui des bilieux est rapide , véhément et dur ; celui des sanguins , diffus, varié, frivole ; celui des flegmatiques, traînant , lourd et ennuyeux : enfin, les mélanges des caractères , les âges , les différences des sexes et l'état civil d'une personne , four- nissent encore d'autres différences. Comme les amateurs distinguent le faire , ou la manière de chacune des grandes écoles de peinture, on reconnoîtra de même la manière générale d'écrire de chaque siècle. Ainsi la naïveté règne dans les écrivains des quinzième et seizième ^siècles ; la grandeur et la beauté se trouvent réunies dans la plupart des auteurs du dix-septième siècle; le commence- ment du dix-huitième nous offre un caractère plus brillant et plus superficiel ; ensuite on trouve le style affecté , fade , et ce qu'on nomme le hel-esprii. Il est très-remarquable que la même dégradation se présente dans les littératures grecque , latine et italienne. En effet, le style est le thermomètre des mœurs et du genre de gouvernement dans chaque nation. Les pays libres ou républicains ont une langue énergique , parce qu'elle doit peindre les passions , et qu'elle est plus près des sentimens de la nature. Tel fut le langage des premiers Grecs et Romains, quand les Phocion et les Démosthène , les Gâtons et les Brutus montoient à la tribune aux ha- rangues ; telle est encore lalartgue anglaise comparée à l'ita- Jienne , à la française, qui sont celles de peuples plus doux. Cependant la française avoit acquis de l'énergie au temps de Montaigne et du cardinal de Retz, parce que ces écrivains parurent à l'époque de la ligue et de la fronde ; de même la langue anglaise acquit plus de force et d'énergie au temps de Cromvvel. Sous l'empire poli et flatteur des monarchies , le langage devient doucereux , efféminé , parce que les femmes y donnent presque toujours le ton. Les langues des empires despotiques sont pleines d'hyperboles, de Ipuanges outrées, et d'abjection extrême. Plus une nation a de rapports exté- rieurs et de commerce, ^lus son langage s'enrichit et se per- fectionne. Plus on trouvera de termes abstraits dans une lan- gue , plus le peuple qui la parlera sera policé et savant. Une iangue statlonnaire , comme celle des Chinois, nous annonce H O M 2t7 que le gouvernement , la religion , les mœurs et les lois ne changent point ; car telle est la nature des choses , qu'un seul dérangement en entraîne une foule d'autres, dans le monde iniellectuel comme dans le monde social. Il est encore d'autres différences très-remarquables dans les langues ; elles suivent la constitution physique des hom- mes. Les habitans des pays froids , qui sont grands , ro- bustes , et dont les organes sont presque insensibles, ont des langues chargées de consonnes âpres et gutturales : ils sem- blent plutôt hurler que parler ; il leur faut des sons forts et violens pour ébranler leurs sens durs et massifs. Les habitans des pays chauds étant , au contraire , délicats, et leurs sens très-irritables, ont aussi des langues remplies de voyelles douces et de labiales. D'ailleurs, la langue s'adoucit chez les peuples à mesure que le nombre des femmes s'y multi- plie ; aussi les pays chauds et à doux langage sont remplis de femmes, tandis que le nombre des mâles est le plus considé- rable dans les régions froides du Septentrion. Les divers dé- lectes de la langue malaie (i) forment un langage presque tout en voyelles, et en très-douces consonnes: c'est le con- traire dans le Nord ; on n'y rencontre que des monosyllabes ou de dures consonnes gutturales ; plusieurs peuples du Nord, Américains, Tartares et Groënlandais , manquent même de labiales. Il semble que le froid ait enrhumé leurs langues, de sorte qu'il faut faire des efforts extrêmes de gosier pour les prononcer. Voyez dans les Voyages du Nord, quels noms rudes portent les lieux, les rivières, les villes, etc. En Eu- rope , on observe une gradation de rudesse dans les idiomes comme dans les hommes , depuis le Midi jusqu'au Nord ; ainsi l'italien est plus doux que le français, celui-ci l'est plus que l'anglais , qui est moins rude que l'allemand , le suédois et les autres dialectes teutoniques du Nord. Comme la froi- dure engourdit les organes extérieurs , l'habitant du Nord parle plutôt du fond de la gorge que des lèvres ; mais la cha- leur des contrées méridiqnales attirant les forces vitales à l'extérieur , on y fait plus d'usage des lettres labiales. Les septentrionaux parlent du fond du cœur, pour ainsi dire; les méridionaux , seulement des lèvres : l'on observe , en effet , que les premiers sont très-francs et fort simples , parce qu'ils sont robustes et courageux; tandis que les méridionaux sont dissimulés et menteurs, parce qu'ils sontfoibles et timides. D'ailleurs les langues du Nord sont âpres, surtout à cause des affections pénibles que ce climat fait éprouver à leurs •9 » (i) Voyez les Vocabulaires donnés par Cook tt les autres vo\a^ geurs. 2i8 II 0 M habltans. Elles expriment micnx la colère, la férocité guer- rière qui caractérisent les Tartarcs , les Scandinaves ; elles dépendent surtout de cette dureté de tempérament et de cf s corps de fer que forment les pays froids Les doux idiomes du Midi ne respirent, au contraire, que la volupté et l'amour. Dans nos climats intermédiaires, les hommes lesplus brutaux f)arlcnt d'une manière rude ; ils font résonner les consonnes es plus âpres , telles que l'/î, le P , ÏF, le A', etc. ; nos petits- maîtres, ou ceux qui affectent une extrême délicatesse, gras- seyent , et changent les lettres les plus rudes en consonnes plus douces , comme 17î en i, If en F, etc. Les juremens les plus grossiers sont même chargés des plus âpres con- sonnes. Nous avons encore fait remarquer ci devant que les peuples qui ne pouvoient pas prononcer les consonnes âpres , comme les Chinois, les Nègres, qui ne rendent jamais la force de l'jR, éloient ordinairement moins courageux que les autres : aussi lœ Chinois sont bien plus lâches que les Tartares , qui les ont toujours subjugués. Les Nègres ne sont pas assez courageux pour se soustraire à l'esclavage des blancs , à moins qu'ils ne soient bien supérieurs en nombre. La musique suit les mêmes différences que le langage ; elle est vive et bruyante chez les septentrionaux, douce et tendre chez les méridionaux ; elle inspire l'ardeur martiale aux uns, la volupté et la mollesse aux autres ; l'Indien chante le repos et l'amour , le Tarlare chante les combats et la victoire. . Consultez encore les articles Voix et Glotte, J'observe que plusieurs législateurs indiens voulant cou- vrir leurs religions d'un voile mystérieux, pour les rendre plus vénérables , introduisirent , dans le culte de leurs dieux, un langage étranger au reste de la nation ; ainsi les mollahs turcs se servent dans leurs mosquées de la langue arabe ; les parsis , ou anciens sectateurs de Zoroastre, emploient le langage pelhwi ; les bfames indiens se servent du shanscrit ; les talapoins siamois , ceux d'Ava, de Laos et du Pégu, de la langue balie : c'est ainsi que les anciens prêtres égyptiens usoient de caractères hiéroglyphiques. L'église catholique romaine adopta le même usage , en se servant du latin , tandis que les communions chrétiennes réformées ont adressé leurs hommages à Dieu dans leur langue maternelle. Comme en Asie les trônes et les autels se prêtent un mutuel appui , la politique s'est emparée du même moyen que la religion : c'est ainsi qu'on se sert dans plusieurs cours asiatiques, d'un autre idiome que celui de la nation, selon Chardin. Si ^e moyen est utile pour entourer le gouvernement d'un respect en quelque sorte sacré , il rend étrangers à la nation ceux H O M a,j, qui la commandent , et il isole le peuple de ses chefs. Cet usage est, au reste, très-avanlageux pour les états despotiques. Il n'est aucune langue pure aujourd'hui sur la terre : les ronqucles , les émigrations des peuples, les mélanges conti- nuels des hommes entre eux , les influences perpétuelles des climats , des religions , des gouvernemens, modifient tous lesi langages humains ; nos idiomes modernes sont un ramas de lus disposée aux croyances religieuses au Midi qu'au Nord : d'ailleurs les longues veilles, la vie contemplative, la soli- tude , le repos , si ordinaires chez les habitans des pays chauds , les ont rendus plus propres à embrasser les systèmes de religion , et plus capables d'y adhérer avec fanatisme. L'exaltation continuelle de l'esprit , qui est la suite de cet état, donne aux méridionaux une prodigieuse intempérance d'ima- gination et de jugement ; de là vient leur penchant si général à l'enlhousiastne , aux extases , aux idées gigantesques ; telle est aussi la cause de leur langage hyperbolique et de cette foule de chimères dont ils repaissent leur esprit. Cet état d'exaltation mentale existe chez tous les hommes dont les viscères inteslinaux sont foibles , comme dans les mélanco- liques , les hypocondriaques , les hémorroïdaires, enfin chez tous ceux dont le système de la veine-porte demeure engorgé d'un sang noir, que les anciens rcgardoient comme de l'a- îrabiie. En effet, la chaleur attirant toutes les forces de la vie vers le cerveau et l'extérieur du corps, elle affoiblit les organes internes. Cette surabondance de sensibilité à l'cxlé- rieur , expose le genre nerveux à de continuelles excitations et à des secousses violentes par tous les objets circon voisins ; voilà pourquoi l'on rencontre d'autant plus de fous, de ma- niaques , de frénétiques , à mesure que les climats sont plus ardens.De là vient encore le besoin de s'isoler de toute sen- sation ; mais comme le propre de la solitude est de grossir les affections ou les pensées les plus fortes aux dépens des plus foibles , le remède est un nouveau mal. Cet état de uiéditalion et de sensibilité exlrénie empêche le sommeil , cl la continuité des veilles aggrave encore la foiblesse et la sensibilité , aussi bien que le repos des membres commandé impérieusement par une chaleur accablante. Nous voyons îes Indes et l'Afrique remplies de cénobites ou de moines superstitieux, qui passent leur vie dans la contemplation, dans les veilles , les macérations et la solitude ; tels sont les bonzes, les fakirs, les derviches, les santons, les marabous, îes talapoins , etc. A mesure qu'on s'avance du nord vers le .Tiidi de l'Europe, on voit s'accroître le nombre des monas- tères, comme en Italie, en Grèce, en Espagne, tandis qu'ils diminuent à mesure qu'on se rapproche du septentrion , où la froidure exige dans IcvS hommes une vie plus active. H O M .3i C'est sans doute à cet éclat des astres, à ces beaux cieux del'Oi'ient, et aux grandes pensées qu'inspire leur coiilem- plation , qu'est due l'une des premières religions , \Qsahélsrne ou l'adoration des astres , d'abord par les pasteurs arabes , ensuite par les Guèbres ou anciens Perses qui vénéroient aussi le feu , comme l'epréseniant les astres sur la terre. Cette reli- gion des Mages, adorateurs de l'armée céleste, parmi les Chal- déens , les Perses ( V. Hyde, devellg. Persan), s'est retrouvée chez les Incas ou Péruviens au Nouveau-Monde , et chez les Natchez ou d'autres sauvages. Dut^uïs {Ong, de tous les rMlies) a retrouvé des traces de sabéisme dans presque toutes les. religions. Une autre cause qui exalte l'imagination , est l'abstinence des alimens. Nous avons dit ci-devant pourquoi les hommes étoient obligés de manger beaucoup au Nord , et peu au Midi. On sait qu'une diète sévère rend le cerveau creux , em- pêche le sommeil , affoiblit l'estomac , donne à Timagina- tion plus de vivacité , au caractère une foiblesse excessive ; on observe tout le contraire dans les hommes qui ont l'habi- tude démanger beaucoup , tels que les septentrionaux. Aussi les religions ont recommandé les jeûnes et exigé des absti- nences régulières avant les jours destinés aux fêles , et les ordres monastiques sont tous assujettis à des privations de nourriture pendant certains temps. Les jeûnes , les mortifi- cations de la chair, l'abnégation des sens , la prière ou la méditation , sont très-propres à maintenir l'esprit dans un certain délire d'imagination , 1res -favorable aux opinions religieuses : il en est de même des autres cultes, tels que ceux des arts , de la poésie , de l'éloquence , de la musique et de la peinture, dans lesquels les hommes ne réussissent jamais mieux que quand ils ont exalté leur sensibilité et monté leur imagination par une sorte d'enthousiasme. C'est pour cela que Platon et Aristote observent qu'on frappe vainement aux portes de la poésie et des beaux arts, si l'on n'a pas un petit grain de folie ; et Cicéron assure qu'on n'a jamais vu d'homme devenir un personnage illustre, sans une sorte d'inspiration divine : Nemo igilur vir magnus sine aliquo afflatu divino unc/uam fuit Nat. Deor. , 1. 2 , n." 4-6. Les prophètes , les devins et tous ceux chez lesquels domine l'imagination, sont communs dans les pays chauds. Ce sont des hommes d'un tempérament mélancolique , d'une sensibi- lité profonde : ils vivent dans la solitude , dans la méditation. Leur genre de vie est Irès-sobre , leurs mœurs sont austères , leur caractère stoïque , et leur esprit préoccupé de l'objet de leur croyance. Les terrains arides et brûlans de l'Arabie , de l'Idumée , de TKgvpie et des contrées environnantes, sont 23a H 0 M très-favorables à cet état d'exaltation religieuse. C'est aussi là que se sont formées presque toutes les religions de la terre. L'Egypte fut le berceau des dieux de l'ancienne mythologie grecque, romaine et celtique. De là est venu le polythéisme. 11 se distingue en plusieurs espèces : s'il cherche les attributs de la Divinité sous les formes des animaux, c'est le zoomor^ phisme des anciens Egyptiens; s'il les trouve sous la forme humaine , chez les héros, c'est V anthropomorphisme àes Grecs et des Romains; ce que les Syriens , les (ùhaldéens et les Celtes , les Phéniciens unirent avec le sabéisme ou l'adora- tion des astres. On appelle théomorphisme , les religions du polythéisme qui admettent des transformations et des incar- nations de la Divinité sous diverses formes d'hommes ou d'animaux. C'est ce même système théologique , qui règne dans l'Asie et l'Afrique. Ainsi le brahmanisme répandu au Mogol et dans l'Inde; le /am/sme du Thibet , du Boutan et de la Chine; le schamanisme de la Grande-Tartarie et de la Sibérie, ne sont au fond que les vastes branches du même sys- tème religieux. Srama, F/s^now et C/iwe/i, ou la trinité indienne; Mifhra , des anciens Perses ; Xat^a et Amida , des Japonais , dont le Daïri représente le Dalaï-Lama des Thibétains ; Fohi, chez les Chinois; Mahamounie, principale idole des Thi- bétains; Boudh ou Buddha^ du Bengale; Goudma ou Goutom , des royaumes d'Ava , du Pégu , d'Aracan, d'Asam ; Herma-^ raja, des B outaniens ; 5'o7nmona-co£?om , des Siamois, suivi aussi à Ceylan , etc. , ne sont rien autre chose que le même symbole de la nature vivante et personnifiée , comme elle le fut dans l'Asie mineure sous les emblèmes A Atis et à^ Adonis ; en Egypte, sous celui à'Osiris; dans la Grèce et l'Italie , sous les mythologies de Bacchus , di' Hercule , S!' Apollon , etc. Les mêmes opinions se sont répandues au sein de l'Afrique et dans presque toute l'Europe avant la publication de l'É-^ vangile et du Coran. Ainsi la religion des Druides, les dieux des Scandinaves, la mythologie de Thor et Odin , renfermée dans l'Edda des Islandais , n'étoient que des émanations de la théogonie indienne ou égyptienne. Les daims-lamas et les kutuchtus , prêtres de la Tartarie et du Thibet , les schamans des peuples mongols , offrent plusieurs traits de ressemblance avec les anciens druides des Gaules. Tous ces systèmes religieux sortent donc d'un tronc com-^ mun , qui a pris naissance dans les pays chauds de la terre. L'arbre des religions idolâtres, planté dans l'Egypte ou dans l'Inde, a couvert de ses vastes branches l'orient et l'oc- cident , le nord et le midi du monde. Aucune d'elles n'a pris naissance sous des cieux froids ; elles y ont été trans- portées. Ainsi Odin , législateur des Sc*indinaves , avoit ap^ H O M ,33 porté son système religieux de l'Asie , et l'on trouve même , dans les fragmens qui nous en restent, les noms de plusieurs animaux qui ne vivent que sous les tropiques , tels que les lions , les tigres , les éléphans , les grands serpens , etc. Mais ce conquérant législateur sut approprier son culte à la nature des habitans des pays froids , et à leur caractère belliqueux. Odin sanctifia la guerre et les armes ; il encouragea , par l'espoir des récompenses célestes , la valeur des peuples du Nord , et recommanda le mépris de la mort. Les Goths , les Danois et tous les peuples septentrionaux, déjà portés à la guerre par leur climat , s'élevèrent à un héroïsme inconnu dans les annales du monde. Ils apprirent à trouver des dé- lices dans la mort , et à la chercher avec joie au sein des ba- tailles ; ils ne craignoient que le trépas paisible. C'est d'eux que nous est venu l'usage féroce des duels : Animaeque capaces Morlis et ignavum rediturae parcere vilse. LucAiN , Phars. I. i. Telles furent les hordes barbares qui , sortant de leurs fo- rêts glacées, envahirent l'empire romain, et vengèrent le monde avili et courbé sous son sceptre tyrannique. Il est encore d'autres religions idolâtres , comme le féii- chisme ou l'adoration des objets physiques qui inspiroient l'effroi ou une secrète admiration aux hommes : ainsi les Nègres adorent les serpens fétiches ; les anciens Egyptiens rendoient un culte au chien anubis, au bœuf apis, aux cro- codiles , aux ibis , aux chats, aux ognons et à d'autres plantes utiles ; chez eux le loiiis (i) étoit sacré. Les peuplades sau- vages du nord de l'Amérique ont leurs manitous y comme les Nègres ont leurs gris - gris , leurs fétiches ; comme les Sibériens , les Kamtchadales , les Ostiaques , les Lapons , les Samoïèdes ont leurs idoles ou leurs marmousets ; c'est la première religion des hommes. Ils ont tous adoré d'abord la fontaine qui les désalléroit , l'arbre qui leur donnoit ses fruits, la montagne qui leur offroit du gibier , la forêt solitaire , l'antre obscur , le fleuve rapide , et tout ce qui étoit pour eux un objet de quelque affection de l'âme. Ce culte s'est ré- pandu par toute la terre , lorsque les hommes étoient sau- vages. Leurs premiers sacrifices se faisoient alors sur les hauts lieux ou sur le sommet des montagnes , parce qu'on les croyoit les plus voisins du ciel et de la Divinité, D'autres aspects de la nature ont donné naissance à d'au-^ (i) Plante aquatique du genre Nénuphar, Nymphœa , Linn. Voy. siissi, Debrosses, //tf Culte des dieux fétiches^ ovi parallèle de V ancienne religion d'Egypte. Paris, 1760, in- 8.° 334 H O M très cultes. Ainsi cette perpétuelle circulation des êtres animés de la vie à la mort, ces résurrections de la matière tour à tour active et passive , ont créé le dogme de la métem- psycose , et ont aussi établi le dualisme , ou la religion des deux principes, Oromaze, ou l'être bienfaisant, et Ahrimane, ou l'être méchant. Zoroastre créa ce système, que les Mani- chéens voulurent ensuite faire revivre dans les premiers siè- cles du christianisme. Le fatalisme, la prédestination, sont aussi, admis dans plusieurs religions différentes et dans quel- ques sectes de philosophie. 11 en est de même du panthéisme ou matérialisme qui admet que le monde ou la matière même est Dieu et capable d'Intelligence, comme le suppose Spi- nosa. D'autres ont établi le système des émanations divines, àes génies ou esprits et démons; tels sont aussi les zéphirots des caballstes. ( T. Cudworlh, Sysi. intellect. ^ c. i-3. ) La plupart des religions reconnoissent rimmortalité de l'âme, et les punitions ou les récompenses dans une autre vie. La religion judaïque , telle que Moïse l'avolt établie , n'annonce ïiulle part une nouvelle vie et rimmorlalhé de l'âme. Les Stoïciens et les Chinois de la secte de Confucius, la nient. Odin inventa pour les peuples du Nord, vailians guerriers et grands buveurs, un paradis nommé vahalla^ où de jeunes iilles appelées valkyries^ offrlroient à boire aux plus coura- geux, de la bière, dans les crânes de leurs ennemis, et où ils ne cesseroient pas défaire bonne chère, de chasser et de «se battre. Le paradis de Mahomet, rempli de houris toujours vierges, offre à l'imagination des Orientaux, si sensuels, des images qui les transportent de plaisir. La métempsycose in- dienne est encore un autre dogme approprié à la nature des climats des hommes qui les habitent. Lorsqu'un peuple n'ad- met pas le dogme des récompenses et des peines dans une autre vie, la religion est moins efficace par rapport aux ac- tions civiles; d'où il suit que la morale de la nation est plus sujette à se corrompre, comme chez les anciens Juifs, où les lois doivent être d'une extrême sévérité , de même que chez les Japonais. Il est un autre genre de système religieux qui paroît avoir été inconnu aux anciennes nations, excepté aux Hébreux. Ce sont les religions révélées , au nombre de trois ; le: judaïsme , le christianisme et le mahométîsme. Elles ont rejeté le culte des objets physiques, et ont donné aux homme's une idée de la Divinité plus grande et plus sublime que toutes les autres. Laprenuère, qui est le tronc primitif des deux suivantes, est divisée en trois sectes principales : i.° celle des Raba- nistes, 2.° celle des Karaïtes ou Rabbins attachés à la let- tre : ils se trouvent en Pologne et en Turquie ; ils ne recon- H O M 235 noîssenl que le Pentateuque on les cinq premiers livres de l'Ancien Testament, tandis que les précédens attribuent aussi de l'autorité au ïalmud ; 3." celle des Samaritains , qui existe à Naplouse , l'ancienne ville de Sichem , et dans la Palestine, Le christianisme , répandu dans presque toute l'Europe et dans beaucoup de contrées d'Asie, d'Afrique et d'Amérique, nous paroit la plus sage et la plus raisonnable des trois. On en voit la preuve , en considérant que les nations qui la pro- fessent sont en général les plus policées, les plus industrieu- ses et les plus instruites de l'univers ; car la civilisation , les arts et les sciences n'ont jamais fait d'aussi grands progrès chez les autres peuples modernes de la terre. Elle n'a pas la férocité du mahométisme, ni la morale grossière du judaïsme; l'Evangile est regardé comme le code de la morale la plus su- blime et la plus pure ; aussi fut-il adopté par les sectes les plus renommées de l'ancienne philosophie , et surtout par les platoniciens. On connoît trois principales branches dans le christianisme. i.° La catholique romaine, ou l'Eglise latine occidentale, dont le pape est le chef, a plusieurs diversités entre les jan- sénistes, les ultra-montains et 1 Eglise gallicane, qui soutient ses libertés. Le catholicisme est professé en Italie, en Es- pagne , en France , en Irlande , dans l'Autriche et la Pologne , ainsi que dans les possessions de ces peuples aux Indes et en Amérique. 2." Le protestantisme se di- vise soit en luthériens , dans le Danemarck , la Suède , l'Alle- magne septentrionale, la Hongrie, la Transilvanie et une partie de la Pologne ; soit en calvinistes, répandus en Angle- erre , en Hollande , sur le Rhin, en Suisse, à Genève, et ians plusieurs possessions des Européens aux Indes. L'Église mgiicane réformée , qui appartient à cette classe , domine îansla Grande-Bretagne et dans plusieurs contrées des Etats- Unis d'Amérique. Elle a conservé la hiérarchie épiscopale , ^^xcepté chez les dissenters ou non-conformistes. On trouve nicore d'autres sectes, mais moins considérables, telles que les quakers en Angleterre, les sociniens en Transylvanie , ies anabaptistes , les memnoniiesen Hollande, les hernhut- ers ou frères moraves , etc. 3.° Une autre grande secte est elle des schismatiques grecs, ou melchites , en Grèce, en I\ussie , en Asie et en Afrique, sous les patriarches de Cons- ;antinople, d'Antioche, de Jérusalem et d'Alexandrie ;. elle i-omprend encore les Moscovites, les Géorgiens et les Min- .;réliens. Il y a plusieurs autres schismatiques désignés sous le nom <:e chrétiens orientaux; tels sont les eutycbéeris, com- ;?renant les Syriens et les Arméniens, qui ont des patriar- 23& H O M ches; tels sont aussi les jacobites, ou les coptes d'Egypte et les Abyssins, dont le patriarche est celui d'Alexandrie. On trouve encore des nestoriens répandus en Syrie, au Kur- distan ou Diarbek , dans l'Irak et quelques provinces de Pef se.^ Ils ont pour chef le patriarche de Séleucie. La troisième religion révélée est l'islamisme ou la religion de Mahomet. Elle est séparée en deux sectes principales : i.** celle d'Omar, suivie par les Turcs, une partie des Tar- tares, et par les Arabes, ies Egyptiens, les habilans de la Barbarie, du Bilédulgérid , du Sahra, de la Nubie, de la !Nigritie , du Zanguebar et de plusieurs autres contrées d'A- frique. Ce sont les sunnites, ou ceux qui admettent le com- mentaire du Coran appelé là sunna , et qui reconnoissenl les Kalifes légitimes successeurs d'Omar, a." La secte d'Ali ou des schiltes, c'est-à-dire, des séparatistes, est adoptée par les Persans, les Mogols, les peuples des Indes qui ont reçu le mahométisme , comme les habilans des îles Maldives , des Moluques, de la Sonde , etc. Le Coran met le cimeterre en la main des princes asiatiques; le dogme delà fatalité dé- truit l'indépendance des hommes, et rive les fers du despo- tisme. Dieu Ta résolu ainsi, ce qui est armé étoit inévitable : voilà la barrière des peuples musulmans. Toute religion n'est ni bonne pour tous les hommes , ni faite pour tous les climats. Elles prennent toutes leur nais- sance vers les contrées équatoriales , et viennent s'étendre vers les régions glacées du Nord. Elles ont à peu près la durée des empires, naissent, croissent et périssent avec eux; mais il est rare qu'elles disparoissent entièrement. Les nou- velles religions prennent toujours racine sur les anciennes ; la commune durée de chacune d'elles est environ de i5oo à 2000 ou 3ooo ans; mais elles vivent plus au Midi, moins au Nord. Dans leur naissance, elles se divisent en plusieurs sectes, parce qu'elles ne sont pas encore bien affermies ; ainsi le mahométisme se sépare entre Omar et Ali, le christianis- me entre Arius , Manès , Nestorius , Pélagius , Eutychès, etc ; la judaïque, en samaritaine et en hébraïque , etc. Les peu- ples du Nord changent plus facilement de religion ou de secte, comme on l'a vu au temps de Luther, de Calvin, de Jean Hus , de Wicleff, etc. , que les méridionaux , parce qu'ils y tiennent moins. Les hommes ne choisissent point leurs religions; ils pren- nent celle de leurs parens et de leur pays; cependant ils sont, pour la plupart, intolérans envers les autres religions, qu'ils auroient défendues s'ils y fussent nés. Pour moi , si j'avois à choisir librement entre toutes celles qui existent dans le monde, je préférerois naturellement, ce me semble , la H O M 237 chrétienne, à cause de la sublime morale qu'elle enseigne, et de la chanté qu'elle inspire à tous ceux qui la suivent de cœur, non de paroles, qui écoutent plutôt la voix des Féné^ Ion, des Las-Casas et des Vincent-de-Paule^ que celle des in- quisiteurs. Toute religion a servi de prétexte aux abus, aux criuîes, aux attentats; mais les bienfaits du christianisme sur- passent les crimes et les malheurs auxquels on l'a fait coo- pérer ; il a civilisé l'Europe ; il a donné à ses habitans une existence plus sûre et plus aisée qu'à tous ceux de l'Asie; il a policé le Paraguay; il a même créé des chefs-d'œuvre en poésie , en peinture , en éloquence ; il a beaucoup adouci les misères des guerres, et amaintenu un droit desgens entre les na- tions. Ce sont des bienfaits que tout homme juste doitrecon- noître en tous les temps, et indépendamment de l'esprit d« son siècle. De V Homme en société , et de ses divers gouvernemens. L'homme n'est pas fait pour vivre seul ; c'est un animal sociable par sa nature. La multiplicité de ses besoins natu- rels, puisqu'il naît le plus impuissant et le plus misérable des animaux, la sensibilité de ses organes , l'étendue de ses dé- sirs, la longue foiblesse de son enfance, son genre de vie essentiellement omnivore et sa nudité, nécessitent un état de société pour le maintien de son espèce. En effet , les animaux analogues à l'homme par leur con- formation, sont sociables, comme nous le voyons chez les singes. Les espèces frugivores et herbivores vivent toutes en société, tandis que les races carnassières sontsolitaires et enne- mies entre elles, à cause de la difficulté de se procurer en- semble une proie vivante sans querelles et sans combats ; dif- ficulté qui ne se rencontre point chez les animaux frugivores, parce que le règne végétal offre plus de latitude et de facilité dans le genre de vie. Les frugivores n'ayant entre eux aucun germe d'inimitié , aiment donc se rassembler entre eux pour se porter des se- cours réciproques, parce qu'ils sont foibles; tandis que les carnivores , mieux armés et plu» robustes , cherchent à sub- sister seuls et à vivre isolés , à cause de la concurrence de la chasse. La foiblesse est donc une cause de sociabilité parmi les animaux; et comme l'homme est foible relativement à ses besoins , à ses désirs , à ses facultés, la nature l'a rendu so- ciable. Cette même foiblesse individuelle est un élément de la sympathie entre les différens êtres ; car la femme , l'enfant , qui sont plus foibles que l'homme , sont aussi plus que lui 238 H O M capables d'attachement et d'affections. Voilà l'une des prin- cipales causes de la sociabilité humaine. D'ailleurs, les sexes, chez les animaux, n'ayant qu'un temps passager d'amour, se recherchent et se quittent aussi- tôt; mais dans l'espèce humaine, le temps de Tamour durant continuellement pendant une grande partie de la vie, i! oblige les sexes à demeurer sans cesse réunis. De cette union résultent des enfans , dont la longue foiblesse oblige les parens à poui-voir en commun nécessairement à leur nourriture jusqu'à un âge assez formé. Pendant ce temps, il survient de nouveaux enfans, qui perpétuent la nécessité de vivre en famille. Enfin , la longue habitude de se voir, de se connoî- tre, les accords du caractère, et les avantages mutuels qui en résultent, sont des motifs très-puissans de la formation des sociétés, bien qu'un illustre écrivain, J. J. Rousseau , ait soutenu le contraire. L'état de société est même si naturel à l'homme , qu'il y est par toute la terre , quoiqu'en divers degrés de civilisation. Il ne faut pas croire que les sauvages soient dans un pur état d'isolement ; ils forment des familles et de petites nations , dont les divers particuliers gardent entre eux la plus étroite union-, laplupart émanent originairementd une seule famille, ce qui les rend tous alliés, parens et frères entre eux. C'est ainsi que les douze tribus Israélites sortoient des douze fils de Jacob , comme toutes les branches d un arbre sortent primi- tivement d'un seul tronc. La trace de ces antiques divisions du genre humain se reconnoit même parmi chaque peuple par la nature de son langage et par ses coutumes, qui ont une origine commune dans chaque race d'hommes. C'est, en effet, dans les pre- mières familles que la parole a été inventée , à cause des re- lations continuelles de l'enfant avec la mère, et de celle-ci avec le père. A niesure que les familles se sont agrandies , multipliées, répandues sur la face de la terre, elles ont aussi étendu leur langage primitif, et formé divers dia- lectes qui ont pris la teinte des climats, des religions, des gonvernemens «•( des coutumes que chaque peuple Woil adop- tés primilivenient. Dans 1 origine, les sociétés humaines vivoient éparses sur la terre , des fruits de la chasse , de la pêche et de quel- ques herbes sauvages (jue la terre bienfaisante faisoit croître sous leurs pas. L'M'croissenient du nombre des individus sur un sol que la charrue n avoit pas encore fertilisé , la concur- rence des chasseurs, la rareté du gibier , la difficulté de sub- sister pendant ics saisons rigoureuses, força les hommes à H 0 M 39 «lever du bétail pour s'en nourrir pendant la disette , et ils devinrent pasteurs. Il n'y a nulle société réglée chez les nations qui vivent dans l'état chasseur et sauvage, comme sont les naturels améri- cains , tels que les Canadiens , les Illinois, les Créeks , les Iroquois, etc., vers le Nord ; et les Patagons, les Chiliens , etc., au midi du Nouveau-Monde , les habitans de la Nou- velle-Zélande , de la Nouvelle-Calédonie , de la Nouvelle- Hollande, les Hottenlols et une foule d'autres sauvages. Chaque père de famille gouverne par l'autorité naturelle qu'il déploiesurses enfans, et s'il s'unit quelquefois avec sesvoisins, c'estpourrepousserlaviolence ou pour tirer quelque vengeance d'une agression et d'une insulte. Il n'existe parmi eux aucune autre loi que celle du talion , loi primitive et originelle dans le cœur humain. Cet état de chasseur endurcit extrêmement le caractère. L'habitude de vaincre les bêtes donn.int à l'homme un sentiment d'orgueil et des idées de supériorité , il regarde la moindre injure comme une rébellion criminelle qu'on ne peut assez punir ; de cet orgueil blessé suit une vengeance d'autant plus cruelle , qu'on la croit moins pro- portionnée à la grandeur de l'outrage ; et comme ces hommes ont coutume de dévorer les animaux qu'ils ont combattus , ils ont de même osé dévorer , par un excès de haine , solli- citée peut-être aussi par la faim, leurs semblables vaincus dans les combats. Telle fut l'origine de l'anthropophagie. ( Voyez Aî^THROPOPHAGES. ) Lorsque les hommes cessèrent de l'être , cette coutume n'appartint plus qu'à leurs divinités, car les premiers dieux des nations barbares furent plutôt des tyrans que des dieux. L'homme fait toujours sa divinité à son image, et parce qu'il étoit féroce, il lui fallut des dieux san- guinaires ; car comment des dieux bienfaisans eussent-ils pu en imposer à des caractères impétueux et farouches qu'on ne pouvoit subjuguer que par la terreur ? Consultez l'article Fé- tiches. Esse Deos timorfecit, quâ nempè leniotâ Templa ruent, nec erit Jupiter ullus. Mais les plus vastes terrains ne pouvant nourrir qu'un nombre borné de chasseurs , lorsque ceux-ci , devenus plus nombreux, adoptèrent l'état pastoral , leur caractère s'adou- cit dans le repos. Nourris du lait de leurs bestiaux, couverts de leurs chaudes toisons, passant leur vie au sein des prairies et des fleurs , leurs moeurs se polirent, leurs esprits s'accou- tumèrent à réfléchir et à contempler la nature , dont l'aspect les remplit d'admiration. Ce sentiment leur inspira de gran- des pensées , et les rendit poètes. Tels sont encore aujour^ a4o H O M d'huiles Arabes Bédouitis, et tel fut Tâge d'or de l'espèce humaine. Alors les premiers législateurs éloient des poètes sacrés. C'est ainsi que les Orphée , les Linus et les Am- phion policèrent les hommes , et bâtirent les premières cités ; aussi le même nom fut donné d'abord aux lois et aux chansons. Enfin , dans l'état pastoral , où le gouvernement est pa- triarchâl, la nation est toujours ambulante en petites hordes, parce qu'il faut changer de prairies à mesure qu'elles sont épuisées par les bestiaux. Cette vie précaire et nomade , comme celle des Cafres , des Maures , des Arabes , des Tar- tares , tient beaucoup encore de son antique rudesse. A me- sure que les hommes se multiplient , la quantité de bétail ne peut pas suffire dans le même terrain , et malgré les émigra- tions , les dispersions d'hommes , il arrive enfin , parla suite des temps , un point de multiplication qui les force à prendre un état plus productif. Jusqu'alors nous avons vu l'homme indépendant sur la terre ; il étoit partout sur son terrain , puisque chacun n'en possédoit que l'usufruit, et que le fonds appartenoit en com- mun à tout le genre humain. Mais le temps étoit arrivé où il ne pouvoit subsister des biens offerts par la seule nature , et s'il fût resté en cet état, il auroit été obligé de s'entre-dévorer faute de nourriture suffisante , ou de périr affamé. Cette cruelle alternative frappa les esprits. Alors il s'éleva des hommes de génie qui conçurent le projet de forcer la nature à nourrir des peuples nombreux. Pour cet effet, il falloit non- seulement partager la terre et fixer le droit de propriété, mais encore obliger les hommes à respecter le travail d'autrui, et à maintenir réciproquement la sûreté de leursbiens et de leurs personnes. L'expérience du cœur humain ayant appris que des lois purement civiles ne pouvoient ni empêcher , ni prévenir les contraventions secrètes, ces grands hommes sentirent la né- cessité de lier les consciences , et d'épouvanter au moins les esprits de ceux dont ils ne pouvoient retenir les mains cri- minelles. Alors ils eurent recours aux religions, institutions, sublimes et vénérables sur lesquelles est fondé tout pacte social. Aussi tous les législateurs ont eu recours à la Divinité : Zoroastre, à Oromaze , en Perse; Thaut , à Mercure ou Hermès, en Egypte ; Minos, à Jupiter, en Crète ; Charon- das, à Saturne, chez les Carthaginois ; Lycurgue, à Apollon, pour Lacédémone ; Dracon et Solon , à Minerve, chez les Athéniens ; Numa, à la nymphe Egérie ; Mahomet, à l'ange Gabriel; Zamolxis , à Vesta , chez les Scythes; Platon, à Jupiter et à Apollon , pour les Magnésiens , etc. Les pre- miers gouverneniens qui établirent le droit de propriété, f«- H O M .41 rent donc <îe véritables théocraties : heureux alors les peuples lorsqu'ils n'avoient pour rois que des divinités bienfaisanles et vengeresses des crimes les plus cachés! Un pareil état de croyance, ou ces gouvevneniensthéocra- tiques ne pouvoient convenir qu'à des hommes très-simples et très-crédules; mais à mesure que Tinégalilé se prononça davantage entre les membres d'une même société , il fallut établir une puissance coercitive qui pourvût efficacement à la sûreté de tous , puisque l'autorité de la religion devenoit d'autant plus insuffisante, que les différences de richesse et de pauvreté excitoient davantage l'envie des uns et l'ambition des autres : alors on créa des gouvernemens civils. Les nations sont pauvres dans leur origine ; les rangs des hommes y sont peu distincts; tous sont obligés de travailler pour vivre ; leur esprit est encore grossier, et leur caractère naturel. Les mariages sont fréquens, à cause de l'utilité mu- tuelle qui en résulte pour les besoins de la famille. Enfin, la culture de la terre exige que chacun demeure épars dans Us campagnes. Tontes ces raisons et plusieurs autres nécessitent une forme de gouvernement très-populaire ; aussi tout peuple a commencé par le gouvernement républicain, après 1 état pasteur ou patriarcal. Les prétendus rois de Kome ancienne et d'Athènes, les juges d'Israël, et même les rois de France de la première race (i) , enfin les chefs des peuples nouveaux étant élus parla nation, ne sont pas ses souverains, mais ses magistrats populaires : c'étoit une suite du sysîème du gou- vernement de famille ou patriarcal. Les petits états placés dans un sol stérile, montueux ou sur le rivage des mers ; enfin, tous le^ pays où la subsistance ne peut s'obtenir que par beaucoup de travaux ou de périls , se forment nécessairement en républiques plus ou moins dé- mocratiques. C'est quel'égalitédesfortunesy reste fort grande, les mœurs y sont très-simples, le caractère des hommes y de- vient plus ferme, l'argent plus rare, la justice plus impartiale, l'esprit public plus patriotique, plus belliqueux; l'hospitalil e, la franchise et la cordialité,y sont générales ; enfin, les familles mieux unies que partout ailleurs, à cause de la pauvreté et du travail. La religion y consiste plutôt en sentiment qu'en culte extérieur; de làsuit uneplusgrande liberté des consciences. Le sacerdoce y est donc pauvre, peu nombreux, et il n y a point de monastères. Les lois sont simples, vulgaires, consacrées par l'assentiment général; aussi la propriété y est plus res- (i) On peut voir dans Hotman, Boulainvilliers , Robertson et autres auteurs, que la France fut une vraie république sous la pre- mière dynastie de ses rois. Son gouvernement étoit aristocratique. XV. 16 .42 " O M pectée , les droits civils y sont plus solitloment étaLHs que partout ailleurs. Si l'arf^ent est rare , il circule aussi plus ra- pideuient, et cor.inie les besoins y sont pressans, 1 industrie redouble d'aclivilé. L'éducation tend plus à 1 utilité qu'à l'a- grément, aussi les enfans sont élevés à l'école de la tempé- rance , des privations et du respect paternel. Les travaux rustiques ou commerciaux sont honorés, encouragés; les punitions plutôt infainanles que corporelles ; le genre de vie est laborieux, le caractère franc, entreprenant , les formes de politesse rudes et même grossières, l'autorité douce, les femmes rangées au devoir du ménage et regardées comme inférieures aux hommes, les spectacles naïfs, mais sou- vent féroces. On y trouve l'ivrognerie unie à la générosité, à une certaine communauté de biens et de cœur. Les cam- pagnes y sont plus peuplées que les villes ; enfin , le soin , l'ordre, la propreté, régnent dans l'inicrieur des maisons. L'esprit des hommes, encore peu cultivé, y est sujet à la superstition, à une extrême crédulité. Des romances histo- riques chantées sur des airs simples, quelqifts arts grossicMS, voilà tout ce qu'on trouve de plus relevé dans la nation. Toutes ces choses sont liées et s'observent plus ou moins- parmi les peuples laborieux et indigens,à cause de la nature de leur terrain, comme chez les Suisses, les Corses, les Ecos- sais, et chez presque tous les peuples pauvres et montagnards. En yVsie , les Druses du Liban, les habitans du Caucase, etc., offrent de semblables caractères ; il n'y a même aucune na- tion maritime qui ne penche vers la démocratie, comme l'Angleterre, la Hollande, Hambourg, Gènes, Venise, les républiques de la mer Adriatique (i), etc. Les empires des- potiques n'ont jamais eii de succès bien constans sur la mer, comme la Turquie, la Russie, l'Egypte, la Chine, le Japon, et la plupart des Indiens maritimes. Aussi, malgré les con- trées chaudes et fertiles où le despotisme semble être endé- mique, les^Ugériens, les Tunisiens, et les autres barbaresques descendans des antiques Phéniciens et Carthaginois ; enhn , les Maures des bords de la mer Rt)uge, les (libustiers et les pirates malais qui remplissent 1 Océan indien ; tous ces peu- ples, dis-je, ont conservé un esprit violent de républicanisme sous le climat de la servitude : c est parce que la mer est le patrimoine des peuples libres. Un autre rapport entre les hommes et la nature de leur gouvernement , c'est que dans les extrêmes de chaleur ou de (i) I.es Alhi-iîiins % froidure, les caractères des hommes se perlent aux exlrêmes. 11 faut donc des gouvernemens qui leur soient analogues, tandis que dans les températures modérées, les esprits étant plus tempérés, les gouvernemens doivent tenir une sorte de milieu. Ainsi, la violence des peuples du Nord exige mie cer- taine brutalité dans le gouvernement, comme on le voit chea 1e donne Aldrovande à son hlppocarcln hipide. ( Voyez ce que nous en avons dit plus haut. ) Sous ce rapport , le dorippe Cimer se rapprocheroit davantage du crustacé que ce dernier 4it être semblable à l'hippocarcin , hippocarcino similis, p. 180 H O M a83 et i8i. Celui-ci forme probablement une troisième espèce dont les pinces sont proportionnellement plus longues, et dont la queue se termine par une pièce pentagone. Les indi- vidus de ces deux espèces décrites par Aldrovande, étant des femelles , ces différences ne peuvent être sexuelles. Suivant M. Risso , le dorippe Cuvier fait son séjour dans les plus grandes profondeurs de la mer. La femelle dépose ses œufs en août : ils sont d'un jaune pâle, (l.) HOMOMELIS des Athéniens. V. Hamamelis. (ln.) HOMONIA, Omonia. Chez les Grecs , ce nom étoit sy- nonyme d'orgemowe; celui-ci lire son origine du nxoi argema qui signifie taie , et rappeloit ainsi , que l'herbe qui le portoit , étoit utile pour la guérison des maux d'yeux. On em- ployoit ses feuilles à cet effet. Elle ressembloit en tout au pa- vot sauvage; ses feuilles avoient du rapport avec celles del'a- némone; sesfleurs étoient d'un rouge-ponceau. Laplanle lais- soit couler un suc jaune, acre : sa racine étoit ronde. Les Ro- mains la nommoient argemone et concordialis , pergalia , corona- gallis , etc. , et les Grecs , œnone , anthémis , etc. ijartepione ou artemonia étoit une autre espèce voisine , employée aux mêmes usages dans la dyssenterie et pour activer la cicatrisation des blessures. C'est dans le genre Pavot que l'on croit retrouver cette plante; c'fest ce qui fait que la plupart des espèces de ce genre ont été nommées argemone; mais il ne paroît pas que cela soit , encore \x\\nx\?,\ adonide et la potentille anserine^ comme on l'a cru, et pas du tout l'AiGREMOiisE, dont le nom, dit-on, est dérivé A^ argemone. luarg. armeniaca ., Jj. , n'a aucun rap- port avec V argemone des anciens , ainsi que V argemone pyre- naica, L. Ces deux plantes constituent , avec V argemone mexi- cana , un genre qui se distingue à peine des Pavots. V. ce mot et Argemone. (ln.) HO]VlÔNlAI^THE,/fomoni<7n;/t?«. Genre établiparBon- pland , qui ne diffère du Chetanthère que par ses fleurs tou- tes hermaphrodites et semblables. Il renferme des herbeç à feuilles simples pu pinnatifides originaires de l'Amériquç méridionale, (b.) HOMONOIE, Homonoia. Arbrisseau de la Cochinchine, à feuilles alternes , lancéolées , linéaires , tomenteuses , a fleurs très-petites , portées sur des chatons liiiéaires , qui forme un genre dans la dioécie polyadelphîe. Ce genre offre pour caractères , dans les chatons mâles , trois écailles aiguës , inégales , à la base de chaque fleur ; un calice à trois divisions ovales , concaves et colorées ; point de corolle; environ deux cents étamines réunies en vingt fais- ceaux. Dans les chatons femelles , une écaille simple , dentée , a84 H 0 N persistante , à la base de chaque fleur ; point de calice ; point de corolle; un ovaire supérieur, arrondi, à trois stigmates sessiles , oblongs et velus ; une capsule à trois lobes , à trois valves et à trois lobes raonospermes. (B.) HOMOPTÈRE, Homopiera. Section d'insectes , de l'or- dre des hémiptères, aynnt pour caractères : bec naissant de la partie la plus inférieure de la tête , ou près de la poitrine et de l'entre-deux des pattes antérieures; étuis de la même consistance dans toute leur étendue , tantôt demi-coriaces , tantôt presque semblables à des ailes ; premier segment du tronc de la grandeur, au plus, du suivant , et souvent plus petit. Ces hémiptères ne se nourrissent que du suc des végétaux- La plupart des femelles ont une tarière , souvent composée de trois lames dentelées, et logée dans une coulisse à deux val- ves. Elles s'en servent comme d'une scie , pour faire des en- tailles dans des végétaux et y placer leurs œufs. Les homoptères se divisent en trois familles : les Cicadai- RES , les Hyménélytres et les Gallinsectes , etc. V. ces articles, (l.) HONBAC , HOMBAK , suivant Lippi ; et Sodad , sui- vant Forskaè'l. Noms arabes du sodada , Êorsk. (ln.) HONCKEÎNYE, Honckenya. Arbrisseau de Guinée, à feuilles alternes , velues , dont les supérieures sont spatulées, et les inférieures à trois ou cinq lobes dentés, à (leurs ter- minales , ternées , violettes , qui forme un genre dans Toc- tandrie monogynie, et dans la famille des liliacées. Ce genre a pour caractères : un calice de cinq folioles ; une corolle de cinq pétales ; huit étamines ; un nectaire sta- minifère ; un ovaire surmonté d'un seul style ; une capsule épineuse à cinq loges , à cinq valves , et à un grand nombre de semences, (b.) HOND. Nom hollandais du Chien, (desm.) HOND BESSEN. Nom hollandais du valti-kara de Rhecde (Malab. 7 , t. i8), employé par Adanson pour désigner un genre qu'il fonde sur cette plante de l'Inde. V. Valli-kara. (LN.) HONDE.LesTungousesdonnentce nom au Musc. (DESM.) MONDE PINTEN des Hollandais. V. Tali. (ln.) HONEYSCUKLE-GRASS des Anglais. C'est le Trè- fle DES PRÉS, (ln.) HONEYSUCKLE. Les Anglais donnent ce nom au Cor- nouiller de Suède, au Chèvrefeuille des bois, et aii Sainfoin. En Amérique , ils l'appliquent à I'Azalée vis- queuse , à la Grenadille a Feuilles de laurier, et à I'Hallerie a feuilles luisantes, (ln.) H 0 O ,85 HONFA. L'un des noms arabes du Cresson, (ln.) HONGRE. Cheval auquel on a enlevé les testicules. Cette opération , qui ôte aux chevaux une partie de leur énergie , et leur donne plus de douceur et de docilité , se pratique or- dinairement à deux ou trois ans. Pline a rapporté une erreur , lorsqu'il a dit que les dents de lait ne tombent point à un cheval qu'on a fait hongre avant qu'elles soient tombées ; ces dents tombent également aux j'ednes chevaux hongres et aux jeunes chevaux entiers. Le cheval hongre peut encore s'accoupler : l'on en a des exemples ; mais il n'a plus la puissance d'engendrer, (s.) HONIGDORN et HONIGERBSE des Allemands. Noms du gledilsia triacanihos, V. FÉVIER. (LN.) HONIG-STEIN, ou Pierre de miel , MelUlUe, Kir- van ; Mellile , Haiiy; Succin octaèdre , Lamétherie. V. Suc- CIN. (PAT.) HONKENIA. Ehrhart donnoit ce nom à la Sabline pé- PLOÏDE {Arenari'a peploides , L.) , dont il faisoit un genre par- ticulier, (ln.) HONNIGSGRAESS. C'est, en Gothlande , province de Suède , le Gaillet à fleurs jaunes , Gallium verum. (ln.) HONTAH. Nom arabe du Blé , Triticum satlvum, L. (ln.) HONORÉ. V. Onoré. (s.) HOOKERE, Hookeria. Genre de plantes établi par Sa- Ijsbury , depuis réuni aux Brodies. (b.) HOOKERIE , Hookeria. Genre de plantes de la famille des mousses , proposé par M. Schwaegrichen , et différent de celui établi par Smith. Il a pour caractères : un seul péris- tome externe à seize paires de dents très-longues , très-min- ces et membraneuses. Fleurs mâles, selon Hedwig, disciformes, terminales sur le même rameau ou sur des rameaux dlfférens. On n'en connoît qu'une seule espèce, découverte par Schlei- cher en Suisse, (p.b.) HOOKERIE, Hookeria. Genre de plantes établi par Smlih, dans la famille des Mousses , et qui rentre dans ceux appelés Leskée et Anictange. Il offre pour caractères : une capsule ovale , réticulée par des points et accompagnée laté- ralement d'un périchèse écailleux; le péristome extérieur à seize dents; l'intérieur est membraneux, la coiffe entière réti- culée par des cellules. L'Hypne luisant sert de type à ce genre, qui est figuré 386 H 0 P dans le quatrième et dans le neuvième volume des Transac- tions de la Société Linnéenne de Londres , et qui renferme iieuf espèces, (b.) HOOP. Nom anglais de la Huppe, (v.) HOORMA-DABAD. C'est, dans l'Inde , le nom de TAn- TiLOPE A QUATRE CORNES de M. de BlainviUe. V. l'article An- tilope, (desm.) HOPEA, Hopea. Arbrisseau de quinze à vingt pieds de haut, dont les feuilles sont alternes, pétiolées , ovales, lan- céolées, très-glabres, légèrement dentées dans leur jeu- nesse; et If s fleurs jaunes, disposées en bouquets ou en grap- pes courtes, munies de bractées velues à l'extrémité des rameaux. Cet arbrisseau forme un genre, dont les caractères sont : un calice monophylle, campanule , à cinq découpures obtuses ; cinq pétales oblongs, concaves , joints ensemble à leur base par leur adhérence aux faisceaux des étamines ; un grand nombre d'étamines, dont les filamens sont réunis inférieu- rement en cinq faisceaux , et portent des anthères quadran- gulaires; un ovaire inférieur, arrondi, surmonté d'un style persistant, qui s'épaissit insensiblement vers son sommet, à .stigmate un peu comprimé; un drupe sec, ovale, obiong, cauronné par le calice , à noix glabre , divisée intérieurement en trois loges, dont deux avortent. Cet arbre croît dans la Basse-Caroline , aux lieux humides et ombragés. J'ai observé , dans son pays natal, qu'il fleurit! un des premiers au printemps, avant la pousse des feuilles, et même très-souvent avant la chute des feuilles de l'année précé- dente ; que ses fleurs , d'un beau jaune clair, sont légère- ment odorantes , et produisent un très-bel effet par leur abon- dance. 11 est très-rare que ces fleurs produisent du fruit, comme beaucoup des autres plantes qui fleurissent de très- bonne heure; car,surplusde ceni pieds, je n'enaitrouvéqu'un, lequel avoit fleuri fort tard, qui en fùl pourvu. Ces fruits ressemblent complètement à une petite olive , et leur brou est violet dans sa maturité. J'ai encore observé que les chevaux étoient extrêment friands de ses feuilles, qui sont épaisses et un peu succulentes. Ce sont elles que les sauvages em- ploient pour teindre en jaune leurs étoffes de coton; mais la teinture qu'elles fournissent, comme toutes celles produi- tes par la seule matière extractive des végétaux, n'est pas solide. Lhéritier, dans une monographie du genre Symploque, HOP ,87 insérée dans le premier volume des Transactions de la SorAété Linncenne de Londres, regarde Vhopea comme devant lui être réuni. Son opinion étant aujourd'hui adoptée par les botanistes \'Villdeno\v a donné le nom d'HoPEA à une plante annuelle de Tranquebar, à tiges tétragones , à feuilles opposées, sessiles , ovales , à fleurs solitaires ou ternées, qui forme un genre dans la monandrie monogynie , et dans la famille des Lysimachies, appelée Globifère par Gmelin, et My- cranthè;me par Michaux. Ce genre offre pour caractères : un calice divisé en quatre parties égales; une corolle à quatre divisions recourbées; deux étamines, dont une stérile ; un ovaire surmonté d'un style très-court; une capsule ovale à une loge et à deux valves, contenant une grande quantité de semences, (b.) HOPFEN, Nom du Houblon, en Allemagne, (ln.) HOPFENBUCHE. Nom allemand d'une espèce de Charme ( carpinus ostrya ). (ln.) HOPIA. Nom de I'Argent, en Finlande, (ln.) HOPKOKO, Nom que les Tartares Tungusses donnent à Yalysswn montanum^ suivant Georgi. (ln.) HOPLIE, Hoplia. Iliiger nomme ainsi un genre d'insectes coléoptères , confondu jusqu'alors avec celui des hannetons. Il en est distingué par la réunion des caractères suivans : lés antennes n'ont, généralement, que neuf articles, dont les trois derniers forment la massue ; les mandibules sont mem- braneuses au côté interne et terminées en une pointe simple ou entière ; les mâchoires sont comprimées et ne présentent que de petites dentelures ; les palpes maxillaires , une fois plus longs que les labiaux, se terminent par un article allongé^ épais, ovoïde et pointu; le corps est déprimé, couvert ou par- semé de petites écailles brillantes, avec l'abdomen presque carré ; les élytres unies, plus larges, ou comme dilatées à leur base extérieure, et les pattes postérieures grandes ; l'ex- trémité de leurs jambes n'offre pas ces épines fortes, que l'on désigne sous le nom d'éperons ou d'ergots ; les quatre tarses antérieurs sont terminés par deux crochets, dont l'un petit , sans division, et l'autre plus grand et bifide; on n'en voit qu'un seul à l'extrémité des tarses postérieurs : il est fort et sans divisions à sa pointe. Les hoplies sont de petits coléoptères qui paroissent pro- pfres aux contrées occidentales de l'ancien continent ; on les trouve plus spécialement dans les parties chaudes ou tempé- rées. Elles se tiennent tranquilles sur les feuilles de différens régétaux, qu'ils rongent. Plusieurs espèces semblent préférer 288 HOP ceux qui viennent au bord des ruisseaux, des rivières, on dans des lieux humides. I. Antennes de dix articles. HOPLIE PHILANTHE , Hoplia philanthus ; Meloloniha pitlveru- lenia^ Fab.; Hanneton argenté^ Oiiv. , Col..^ tom. i, n.° 5, pi. 3., flg. 22. Son corps est long d'environ quatre lignes , noir , parsemé de très-pelites écailles argentées , tirant sur le bleuâtre , plus abondantes en dessous, avec les élytres, les palpes, et souvent les pattes, d'un brun fauve. Elle est quelquefois entièrement noire. Cette espèce est commune en France, en Allemagne, etc. II. Antennes de neuf articles. HoPLiE BELLE, Hoplia formosa , IIHg. ; Melolonthafarinosa, Fab. ; Hanneton écaiîleux , Oliv., ihid.., pi. 2.ifig. i4- Entière- ment couverte d'écaillés brillantes; les supérieures d'un bleu argenté , les inférieures argentées , avec une teinte verdâtre ou un peu dorée. Cette espèce est trèsrcommune dans les dé- partemens méridionaux de la France , sur la menthe sauvage et autres plantes, le long des ruisseaux et des rivières. Je ne l'ai jamais trouvée aux environs de Paris. Le hanneton farineux^ d'Olivier {^Melolontha squamosa ., Fab., ejusd. M. argentea.') , diffère du précédent en ce que le dessus du corps est couvert d'écaillés d'un jaune verdâtre et sans éclat. Le h. royal de Fabricius est très-voisin de l'espèce pré- cédente ; mais sa tête est noire. Les hannetons : spinipes , deniipes., podagrira , arthrilira , go^ nagra^ crassipes, cakarata^ du même , sont, à ce que je crois, du même genre, (l.) HOPLITE, Hoplitus, Clairville. Genre d'insectes. Voyea Haliple. (l.) HOPLITE. Ce nom, qui signifie un cuirassier, un soldat armé d'une cuirasse, a été donné, par les anciens naturalis- tes, à une corne d'ammon droite, ou orlhocératite, qu on trouve aux environs d'Hildesheim , parce qu'elle a quelque- fois la couleur de l'acier poli, (pat.) HOPLITIS, Kliig. Genre d'insectes qui ne nous paroît pas distinct de celui d'OsMiE. F. ce mot. (l.) HOPPE. Nom que porte la Jument, en Danemarck, (desm.) ÎIOPPE. L'un des noms allemands du Houblon, (ln.) HOP-TP».ÉË. Synonyme anglais du lieux, (ln.) H O R 289 HORAU, (de Krempfer. Planie de Tlndé , À^eùilles oppo- sées, et à fleurs hermaphrodites , solitaires ei^rminales. Ses fleurs offrent quatre ou cinq divisions et quatre étamines; il leur succède des capsules ovoïdes contenant chacune une graine dure. Cette plante se rapporte au saga des Malais. Adanson en fait un genre particulier, (ln.) H OR D A. D'après Varron, les Latins nommoient ainsi une Vache pleine; et les sacrifices où Ton immoloit une vache pleine^ s'appeloient HoRDlCALl et HoRDiciDiA. (desm.) HORDEOLA. C'est, dans Charleton, le Bruant fou.' V. ce mot. (s.) HORDEUM. Nom de TOrge, chez ies Latins. On lui donne trois étymologies différentes: suivant la première, il dérive d'un vieux mot hordiis, pesant , et Vorge auroit été ainsi nommé , parce que ce grain est plus pesant que tous les au- tres , sous un volume égal. Selon la deuxième étymologie , il viendroit d'un verbe qui signifie pousser, croître , parce que l'Orge pousse promptement {ab ojiendi ceîeritaté). Enfin , en tire le mot Hordeum du latin horrere^ parce que les épis de Vorge sont garnis d'arêtes extrêmement rudes, et dangereuses à avaler. Le criihèàes Grecs est la même plante que l'H ordeum. Les anciens croyoient que les premiers hommes abandon- nèrent les glands pour se nourrir d'orge^ aussitôt qu'ils eurent découvert celui-ci. Dioscoride ne cite qu'une espèce d'orge. Avant lui, Théophraste en avoit indiqué quatre sortes: Vorge à grains petits et ronds, Voige à grains plus gros et oblongs, Vorge blanc, et l'or^g tirant sur la couleur pourpre. Pline est d'accord avec Théophraste; il ajoute seulement que l'orge est originaite de l'iade. Les botanistes des premiers siècles nommèrent hordeum, les plantes que nous appelons hordeum vu/gare, hordeum hexastichon , et hordeum distichum. Celui que Cokgrielle appelle caniheiinum paroît èlreVhordeiim hexastichon, ^Kff orge a six rangs, qui est plus grand, et qui se semoit en automne. Le galathirum étoit plus petit et se semoit au printemps , c'est V hordeum distichum , ou Y orge à deux rangs. J^e gymnocrithon ou z^o/9jron de (ialien, est encore une espèce âoige, peut-être Vhordeum cœleste , variété de l'o/'^g comman, dont les grains sont nus. Le nom à'hordeum fut encore donné à quelques graminées jusqu'à Tournefort, qui établit le ^enia hordeum. Linnaeus le conserva. 11 estnombreux en espèces, très-naturel , et ne pa« roit pas dans le cas d'être divisé , comme on l'a fait en éta- blissant à ses dépens le genre Zeocriton. V. ce mot el Orge, (ln.) HORDICALIA. V. Horda. (desm.) HORDICIDIA. r. Horda. (desw.) 9« H O R HOREHOUNG. Les Anglais donnent ce nom à plu- sieurs labiées qui ont une odeur forte. Ce sont le Marrube COMMUN, TEpiaire DES BOIS, la Crapaudine, la Ballote •^'OIRE, la Terrette, et le Lyçope d'Europe, (ln.) HORG et GOOUY {Djoouy). Noms que l'on donne en Nubie aune espèce de Sensitive, Mimosa nilotica. C'est l'a- 'cacia nilotica, Willd. et Delil. , Egypt. (ln.) HORIALES, Horiales. Tribu ( auparavant famille ) d'in- sectes, de l'ordre des coléoptères, section des bétéromères, famille des tracbélides, ayant pour caractères : tous les tarses à articles entiers, avec deux crochets dentelés en dessous et un appendice, en forme de soie, au bout du dernier ; antennes filiformes, simples et courtes ; mandibules fortes; palpes fili- formes ; corps épais, avec la tête pencbée; les yeux allongés ; le corselet carré ; la poitrine grande, et les pieds postérieurs plus forts dans les mâles. Je soupçonne que ces insectes vivent dans le bois. Ils ne forment qu'un genre, celui d'HoRiE. V. ce mot. (l.) HORÏE, lîorïa. Genre d'insectes, de l'ordre des coléop- tères, section des bétéromères, famille des tracbélides , tribu des boriales. Ce genre, formé par Fabrioius, dans son Mantissa inserio- riim, est composé de deux espèces, placées par cet auteur , dans ses premiers ouvrages, parmi les fymexy/ons. Le corps de ces insectes est allongé, cylindrique; leur tête est grosse et Inclinée, avec les yeux allongés, les mandibules fortes et les palpes filiformes ; les mâchoires et la languette bifides; les antennes sont filiformes, guère plus longues que le corselet et simples; celui-ci est carré, légèrement rebordé ; l'ccusson est petit, triangulaire ; les élytres sont coriaces et ilexibles ; elles cachent deux ailes membraneupes, repliées ; les pattes sont de longueur moyenne ; les tarsèssonl filiformes; les quatre antérieurs sont composés de cinq articles, et les deux postérieurs de quatre ; le dernier article de tous les tar- ses est terminé par quatre crochets égaux, dentelés en dessous, avec un appendice, en forme de soie, dans leur entre-deux ; les pieds postérieurs sont plus grands dans les mâles. Nousneconnoissonsni la larve , ni la manière de vivre des hories, quisonttoutes étrangères à l'Europe; mais à défaut de connoissance positive, l'analogie, surtout en histoire natu- relle, est un moyen assez sûr pour nous guider dans nos con- jectures ; et d'après les rapports qui se trouvent dans les hories et les cantharides , les mylabres, les inéloés, nous pouvons croire que le genre de vie de tous ces insectes doit être le même, ou ne doit pas beaucoup différer. E .j4' 7)t\i\'t'e (/<'/■ ulfoAy/ Jc/i//> a. 7/,:f;>,/<>// /r/fcu/i- .//■/' (). 7/orri' //} 77//,7/i>/>/u7t' />/////■ ■yj. ////7rr /y/fi'/;/u<'(' ■ j2.7/t//û/ûnte - o\///,i//if/M,i- H O R ,g, L'HORIE TESTACÉE, Horia testacea^ Fab.; Olîv. , Col. , tome 3, n.o 53 bis, pi. I, fig. 2 a, b, est fauve ; ses antejines, ses jambes et ses tarses sont noirs. Elle se trouve à Tranquebar. Latreille pense que Vhorie maculée de Fabricius pourroit former un genre propre (Cissite) ; la tête et le corselet sont de la largeur des élytres, ce qui n'est pas dans la précédente. Cependant, n'ayant pu étudier les parties de la bouche de ces insectes, il les laisse provisoirement dans le même genre. L'HORIE MACULÉE, Horia maculata, Fab.; pi, E. izj., 9 de cet ouvrage , est d'un jaune fauve ; ses élytres sont marquées de plusieurs taches noires. Elle se trouve à Saint-Domingue. (o etL.) HORIZON. Portion de la surface de la terre ou de la mer, qui, de tous côtés, termine notre vue et semble se con- fondre avec le ciel ; c'est ce qu'on nomme ï horizon sensible. On appelle horizon rationnel., un grana cercle qu'on suppose passer par le centre de la terre, et qui, étant parallèle a Vhorizon sensible., divise le globe terrestre en deux hémisphères, l'un in- férieur et l'autre supérieur, (pat.) HORKY. V. H AND AL. (LN.) , HORLETTA. Nom suédois du Gremil des champs, (ln.) HORLOGE DE LA MORT. On donne vulgairement ce nom aux vrillettea et au psoque pulsaleur, parce que ces in- sectes font entendre assez souvent un petit bruit continu ^ semblable à celui que produit le pendule d'une horloge, (o.) HORMESION. Nom d'une /j/er/-£ connue des anciens: elle étoit cotaleur de feu, et par les reflets de la lumière , il parois- soit sortir de cette couleur une autre qui étoit éclatante et ressembloit à celle de l'or ; et le reflet produisoit encore sur les contours de la pierre, comme une lueur blanche. Bruck- raann demande si Vhormesion n'étoit pas un œil de chat (felds- path ) de couleur jaune? Delaunay ( Min. des anciens) ne décide pas cette question, (desm.) HORMÎNELLE, Horminum. Genre de plantes très- rapproché àes Mélisses, et qui lui a été réuni par plusieurs botanistes. En lui adjoignant lesLEPECiiiNlES, il renferme trois espèces, dont la plus commune est I'Horminelle des Pyré- nées, (b.) HORMINODES. C'est une pierre connue des anciens. Çuffon observe qu'ils donnoient ce nom aune agafhe (une calcédoine ) qui présentoit un cercle de couleur d'or, au centre tiuquel étoit une tache verte. Rruckmann croit que Vhormi- nudes peut avoir été un Jaspe, (desm.) HORMINUM, op^«<»«y. Ce nom étoit,chez les Grecs, celui 39» H O R d'une plante dont la vertu principale étoit d'exciter à TamOur avec violence; c'est ce qu'exprime le nom à^horminum qui dé- rive d'un mot grec ayant cette signification. Dioscoride donne à Yhorminum une tige quadrangulaire, et le dit semblable au marrubium. Il en admet deux sortes : l'une cultivée, à graines rondes et brunes ; l'autre sauvage , à graines noires et oblon- gues. Pline compare au cuminum , l'horminum des Grecs , et il en indique aussi deux sortes distinguées par la forme et la couleur des graines. Théophraste place Yhorminum au rang des fruits. Suivant Gesner et Guilandinus, cette plante est le phorbion de Galien. Paul d'Egine lui donne effectivement les deux noms àliormmum et de phorbion. Gaza changea le mot horminum en celui de geminalis. Les commentateurs de tous ces anciens botanistes croyent qu'une espèce de sauge est Yhorminum ou ormi'nondfts Grecs, et selon la plupart d'entre eux, ce seroit la Sauge HORMIN ( sahia horminum, L. ). Quel- ques-uns ont cru que ce pouvoit être la Sclàrée ou Toute- liONNE. C'est d'après la présomption qu'on a eue que la pre- mière de ces plantes estYhorminum, que les botanistes, jusqu'à Linnseus, ont rangé sous ce nom un grand nombre de plantes qui lui ressemblent et qui sont toutes des Sauges {V. Salvia), ou des labiées des genres Bétoine, Chataire (nepeta), rfoR- MINELLE, Bartsie, etc. Tournefort crut dcvoir conserver un genre horminum pour les espèces de sauge dont les fleurs ont la lèvre supérieure de la corolle concave en forme de cuil- leron, Linnaeus et les botanistes qui lui ont succédé, n'adop- tent pas ce genre; mais Linnaeus en établit un dont les carac- tères non moins vagues, ont fait penser qu'il falloit l'abolir; eneffetses espèces sont de vraies S auges ou de vraies Mélisse*. V. Sauge, Horminelle, Lepechinia, PAsmA. (ln.) HORNBERG. F. Hornstein. (s.) HORNBLENDE. Les minéralogistes étrangers com- prennent sous ce nom une grande partie des variétés de l'am- phibole qu'ils distinguent par les épithètes de basaltique, com- mune, schistdide, etc. La ^ornWe«(/e proprement dite est le schorî n masses lamelleuses de Romé-de-l'Isle et des anciens miné- ralogisles; le gabbro de Desmarest. V . Amphibole. La Hornblende c^ato/a/i/tf (Schillemde Hornblende, 'BLeuss)^ est une variété de Diallage. F. ce mot. HORNBLENDE-SCHIEFER. Variété schistoïde de l'amphibole qui se trouve en masses considérables. Foyez Amphibole et Roches. « HORNBLENDE DU LABRADOR ( Labradorisché Hornblende, Werner ). Minéral particulier, de la classe deg pierres , qui a quelques rapports avec l'amphibole , par son tissu lamelleux, et arec le feldspath chatoyant, par ses reflets; H 0 R ,g3 mais qui en diffère par d'autres caractères împortans. Voyez. Hypersthène. Emmerling a donné ce nom à la variété de diallage qua M. Werner appelle hornblende chatoyante ou Schiller-spath. V. plus haut. HORNBUCHE. Nom du Charme, en Allemagne, (ln.) HORNEI S. Suivant M. Beurard, on appelle ainsi, en Hesse et à Eisienach, une variété de chaux carbonates fibreuse. (LUC.) HORNEMANNIE, Hornemannîa. Genre établi par Will- denow , aux dépens des Gratioles, dont il diffère par une corolle en masque et quatre étamines didynames. 11 renferme deux plantes annuelles des Indes. V. MonniÈRE. (b.) Cegenre eslle irevîrana de Roth. SuivantM. Decandolle,ilne se distingue pas du/zWe/72m , et principalement des espèces exo- tiques de ce genre, avec lesquelles il forme un groupe distinct du lindemia pyxidaria. Hornemann , botaniste instruit , Tun des continuateurs delà Flore danoise et auquel ce genre est dé- dié , le rapporte aux gratioles ; mais il paroît qu il en est très-différent. V. Decand. HoH. mons. i8i3, p. ll^. (ln.) ^ HORNERKUMMEL. Le pied-d'alouette des champs et Thypecoon couché portent ce nom en Allemagne, (ln.) HORNERO.Nom du Fournier, à la Rivière de la Plaïa. V, ce mot. (v.) HORNERZ ou Mine cornée. Nom allemand de 1' Ar- gent MURiATÉ ; on en distingue plusieurs variétés. FoYez Argent. -^ Le Quecksilber-Hornerz est le Mercure muriaté ; enfin Ihornerz silberschwarze des mineurs ou mine cornée noire , est un argent antimonié, sulfuré, altéré. V. Argent noir, (luc.) HORNFELS ou Roche -cornée, ^och^ feldspathiqne, sui- vant les uns , dans laquelle sont empâtés des grenats ; ce qui la rapprocheroit du leptynite de Hauy (Eur/'/e, Brongniart ; Weiss-st^in , Werner ) , et roche quarzeu^e suivant d'autres' y. Hornstein. (luc.) aORNSCHIEFFER ou Schiste corné. Cette déneml- nation, qui n'a p,as de sens fixe et déterminé, a été appliquée à une foule de roches., mais plus généralement à V amphibole schistmde^ et quelquefois aussi au schiste micacé et au porph schistdide lyre Certaines roches à base d'amphibole compacte et des scUsies argileux mélangés de quarz ont été également appelés schistes cornés , coméennes , etc. (luc.) HORNSTEIN ou Pierre de coene. On trouve décriiez 294 lî O R sous ce nom , dans les ouvrages des minéralogistes étrangers,^ des substances pierreuses dont la couleur et la demi-trans- parence tirent sur celle de la corne , mais qui sont de nature très-différente. Les unes , qui sont fusibles au feu du cbalu- meau , appartiennent à ces variétés du feldspath qu'on a dé- signées plus particulièrement sous le nom de Pélrosilex. ( V. ce mot. ) Elles sont en grandes masses , et forment la base de certains porphyres. Les autres, dont le tissu est également ccailleux , et qui se rencontrent aussi en masses plus ou moins considérables ou en pseudo-cristaux , sont des quarz- agathes pour M. Haiiy. De Saussure, quia le premier établi cette division en /?/.';/'- lies et infusibles ^ parmi les hornsteins , avant observé en outre qu'ils appartenoient à des époques de formation très-diffé- rentes, nomme les premiers paldiopètres , c'est-à-dire, pierres d'origine ancienne ; et les secondes , néopètres ou pierres nou- velles. M. Patrin voulant rappeler que ces substances forment des roches , et en même temps qu'elles ont de la ressem- blance avec certains silex , les désigne par les dénominations de pétro-silex primitif et de péiro-silex secondaire. \ oyez PÉTRO- SILEX , QUARZ-AGATHE et RoCHES. (LUC.) HORNSTEIN-PORPHYR. Variété de porphyre à base de hornstein ou feldspath compacte , contenant des cristaux d'amphibole , et appartenant à la formation trappéenne de Werner. V. Terrains, (luc.) HORNSTETIE, Homstetdia. Genre de plantes établi par Retzius, pour placer deux espèces d'AMOMES, qui ne conve- noient pas entièrement aux autres. Ce genre a pour caractères : un calice biCde ; une corolle à tube long, filiforme, et à limbe double, dont l'extérieur est divisé en trois parties ; un nectaire tubuleux ; une é lamine; un pistil ; une capsule oblongue à trois loges. Ces plantes se trouvent au détroit de Malacca, et ont du reste l'aspect des Amomes. (b.) HORN-UG(iLA. Nom suédois du moyen Duc. (v.) HORNUNGSRLUMCHEN. Nom allemand delà Ga- lantine, galanthus nivalis, L. (ln.) HORREYO et LOSSEYQ. Noms arabes d'une espèce de Bourrache {bora go af ricana, Linn.) (ln.) HORSE. Nom anglais du Cheval, (desm.) H0RSEB./Œ:NNE. Nom de I'Iris faux-acore (/m pseudoaconis), en Danemarck. (LN.) HORSE-HEAL, Nom vulgaire anglais de I'Aunée, Inula hehnium. (ln.) HORSEMYNTE. C'est la Mente aquatique , en An- gleterre et dans le Norid. (ln.) H 0 R 295 HORSE-RADISCH. Les Anglais donnent ce nom au raifort {cochleana armoracia^. (ln.) HORSE RADISH-ÏREE. Les Anglais des colonies nomment ainsi le Guilandbia moringa. (ln.) HORSFIELDIE, Horsfieldia. Arbre de Ceylan, à feuilles grandes, alternes, oblongues, aiguës, veineuses, coriaces, gla- bres en dessus, à fleurs très-odorantes, disposées çn tête, se.^- siles, accompagnées d'un involucre m onophylle ferrugineux, qui seul forme dans la dioécie monadelphie , un genre fort rapproché des Mollavi. Ce genre a pour caractères : une corolle trigone à trois di- visions rapprochées -, dans les pieds mâles , des étamines réu- nies parleurs anthères; dans les pieds femelles, un ovaire supérieur sans style; dans les fruits, un drupe monosperme.(B.) H-ORSGJCËK. Nom suédois du Bécasseau, (v.) HORÏENSE DU JAPON, ROSE DU JAPON, Hortensia opuloides , Jjamarck ( décandrie in'gj'nie ). Arbris- seau charmant, qui semble appartenir à la famille des Saxifragées , et qu'on cultive depuis long-temps , dans les jardins de la Chine et du Japon , pour ses fleurs , qui ont l'aspect de celles des Viornes et encore plus celui des fleurs des Hydra^gelles, Linn. Elles sont sans odeur , mais d'une jolie couleur de rose, et très-nombreuses ; elles viennent aux extrémités des rameaux , et y forment , par leur réunion, des corymbes touffus et convexes, d'une écla- tante beauté. Les fleurs du centre ou de l'intérieur du co- rymbe ne sont pas tout-à-fail semblables , même pour les caractères, aux fleurs extérieures. Celles-ci ont un calice mar- cescent fort grand ( d'un pouce de diamètre ) , ressemblant à une corolle, et composé de quatre ou cinq folioles ovoïdes, un peu inégales, ouvertes, veinées, et terminées à leur base par un court onglet. Leur corolle est formée de quatre ou cinq pétales très-petits , concaves , ovales, disposés en étoile, et non-persistans ; elle renferme dix étamines de la longueur des pétales, et dont les anthères sont jumelles, droites et arron- dies : on voit au centre le rudiment d'un germe avorté, chargé de deux ou trois styles courts et épais. Dans les fleurs inté- rieures, le calice est adhérent et a quatre ou cinq dents; la corolle est plus grande que le calice ; les pétales , alternes avec ses dents, sont concaves, très- ouverts et caducs. Il y a un ovaire adhérent à trois loges, et deux à quatre styles écar- tés et à stigmate obtus. Les étamines sont en même nombre que dans les fleurs extérieures. Le fruit nous est inconnu. Les feuilles de ïhortcnse sont grandes, opposées, elliptiques, pétio- lées, dentées et unies sur les deux surfaces. Cet arbrisseau est devenu fort à la mode (depuis dix o\\ douze ans). On K"! .06 H O S multiplie facilement de bouture ; il demande à être élevé dans la terre de bruyère, et à être garanti du froid en hiver. On cii produit une variété à fleurs bleues en la cultivant dans utic terre ferrugineuse. Ses fleurs se succèdent, et conservent leur éclat pendant une grande partie de la belle saison, (d.) Hortensia. Commerson consacra ce genre à sa maîtresse qui Taccompagnoit dans son voyage autour du monde. L'hor- tensia est un bel arbrisseau connu à présent de tout le monde, et qui est originaire de laChine etdu Japon où il esttrès-cullivé. On le voit peint avec les Camellia , sur les papiers qui nous viennent de ces contrées. Commerson en fit, lé premier, un genre distinct ; mais avant lui Vhorfensia avoit été décrit par Thunberg , comme uneespèce de Viorne {vibumum') ; puis par Loureiro qui le prit, mais à tort, pour une espère de Pri- mevère (primula mutabilis). Lesbotanistes ne balancent pa's ac- tuellement àleclasseravecles/ytimrt^^a, desquels il se rap- proche infiniment et plus que de I'Obier ( v//v«mMm opulus ). L'hortensia s'appelle, au Japon sijo; et à Canton , en Chine, sau eau hoa. (ln.) HORTICiA. Nom de I'Ortie, en espagnol, (ln.) HORTOLE, Horlolus. Genre de coquille établi par Denys de Montfort, aux dépens des Lituites des oryctogra- phes. Les caractères qu'il lui attribue sont: coquille libre, uni- valve, cloisonnée, recourbée au sommet, mais droite en se prolongeant vers la base; bouche ronde. Ouverte, hori- zontale; cloisons réunies, percées par un siphon central; la spire du sommet évidée et non adhérente au test. C'est le dernier de ces caractères qui éloigne le plus les hortoles des LiTUtTES ; mais en même temps il ks rapproche des Spirules. Les espèces fossiles qui appartiennent à ce genre sont très nombreuses ; beaucoup sont figurées dans les ouvrages des oryctographes. On les trouve , comme les Lituites , lés Be- LEMNITES, etc., dans les marbres et les argiles des montagnes d'ancienne formation; plusieurs sont d'un gros volume, mais en général elles offrent moins de six pouces de longueur. Il est fortàdésirerqu'ellesdeviennentl'objetd'mie monographie. (B.) HORTSOK {Hortschok). En Hongrie , c'est le nom du Hamster, (desm.) HORTULANUS. En latin moderne, c'est 1 Ortolan. A Bologne , on l'appelle Hortulana. (s.) HOSLUNDIE, Hvsluridia. Genre de plantes à teuillcs opposées, à fleurs disposées enpaniculesterminales , doit être placé dans la décandrie monogynie et dans la famille des .verbénacées. Ce genre présente pour caractères: un calice tubulcux a. H O T 297 «inq dents ; une corolle Lilabiée à lèvre supérieure concave ; quatre étamines , dont deux stériles ; un ovaire supérieur sur- monté d'un style à stigmate bifide ; une baie à dix angles, ren- fermée dans le calice et contenant quatre semences. On connoît deux espèces A'hoslundies. Ce sont des arbris- seaux qui croissent en Guinée et au Sénégal, et dont les propriétés ne sont pas connues. Leurs feuilles sont odoran- tes, (b.) HOSTE, Hosta. Arbuste de l'Amérique méridionale, fort voisin des Agnanthes; mais que Jacquin croit de- voir constituer seul un genre dans la didynamie angiosper- mie. Les caractères de ce genre sont: calice légèrement bilabié à quatre dents; corolle en masque: la découpure intermé- diaire de la base inférieure très-grande et émarginée ; noix à quatre loges et à quatre semences, (b.) HOSTEA. Ce genre , dédié parWilldenow à N.T. Host, auteur d'un Synopsis, de la Flore d^ Autriche et de plusieurs autres ouvrages , est le mênae que le Matelea. d'Aublet, F. Matelée. (ln.) HOSTEBAER. C'est I'Obier ivihumum opulus) , en Norwége. (ln.) JiOSïER, L'un des noms du Charme, en Allemagne, (LN.) HOSTIA. Moënch donne ce nom à un genre de plante qu'il dédie à Host, le même botaniste cité à l'article hostca. Moënch y rapporte le crépis fetida, Linn., qui diffère des au- tres espèces de crépis par les aigrettes à poils simples , celles des graines marginales sessiles , enveloppées dans les écailles du calice; celles du centre pédiculées; et par le ré- ceptacle qui est garni de poils, (ln.) HOT-DAUT-GIO. C'est le nom qu'on donne , en Ca- chinchina^ à Vignaiia amara, Linn. suppl., arbrisseau qui y a été transporté des îles Philippines. Ces graines sont toniques-, diaphorétiques et emménagogues , etc. V. Yasug. (ln.) HOTME. L'un des noms de l'AmELLE des marais {vac-r cinium uliginosum), en Suède et en Danemarck. (ln.) HOTÏENTOT. Geoffroy donne ce nom à un insecte Ai, genre AteuchuS. Cet insecte, décrit dans mon Entomologie sous le nom de bousier laticolle , est noir et luisant. Il a envi- ron sept lignes de longueursur cinq de largeur. Son chaperon porte à sa partie antérieure six dentelures grandes et bien marquées ; son corselet est large , arrondi et uni ; ses élytres ont chacune six dentehires longitudinales peu profondes. It 298 H O T se trouve dans les bouses de vache. On le rencontre fréquem- menl dans la France méridionale, et il est si rare aux envi- rons de Paris, que Geoffroy est peut-être la seule personne qui l'y ait trouvé, (o.) HOTTONE, HoUonia. Plante d'Europe qui est fort remarquable par son aspect lorsqu'elle est en fleur. Sa racine est fibreuse , et pousse dans l'eau des tiges stériles, abondam- ment pourvues de feuilles, et une seule tige, nue, flstuleuse et florifère, qui s'élève au-dessus de l'eau d'un à deux pieds. Ses feuilles sont verlicillées, pinnées , à folioles linéaires, étroites, disposées comme des dents de peigne. Ses fleurs naissent solitaires sur des pédoncules verticillés, au nombre de quatre à cinq à chaque étage. Cette plante forme un genre dans lapentandrie monogynie et dans la famille des primulacées , qui a pour caractères: un calice monophylle divisé, au-delà de la moitié, en cinq dé- coupures linéaires à demi-ouvertes; une corolle hypocraté- riforme àtube court, à limbe plane, à cinq lobes; cinq éta- mines ; un ovaire supérieur, globuleux, chargé d'un style à stigmate sphérique; une capsule globuleuse, acuminée, uni- loculaire , qui contient des semences nombreuses, rondes, situées sur un placenta libre et rond. L'hottone se trouve en Europe dans les fossés pleins d'eau, , sur le bord des étangs, etc. Elle Heurit au milieu de l'été. Lorsqu'elle croît hors de l'eau, ses feuilles pinnatifides se changent en feuilles lancéolées simplement dentées, qu'on a de la peine à soupçonner appartenir à la même plante. On a réuni trois plantes de l'Inde à ce genre ; mais on ne les connoît encore qu'imparfaitement: l'une d'elles estTHY- DROPYTION de Gœrtner. Uhoifone à feuilles dentées sert de type au genre appelé Serpicule et Elodie. Le genre appelé Limnophylle , par R. Brown, ne dif- fère pas assez de celui-ci pour être conservé, (b.) HoïTONi , du nom de Pierre Hottoun, botaniste hol- landais qui publia, en lôqS , un catalogue des plantes cul- tivées dans le jardin de Leyde. Boerhaave et Linnseus sont créateurs de ce genre ; on y a rapporté plusieurs plantes qui doivent en être ôtées. Ainsi Vhottonia indica forme, d'après Gsertner, un genre distinct qu'il nomme hydropityon ^ et que Jussieu place dans la famille des caryophyllées; Vhotionia serrata de Willdenowest la même plante que le serpiculaver- iicillala; VhoUonia li'ltoralis de Loureiro se rapproche de la précédente, et par conséquent ne doit pas rester dans le genre hotlonia; enfin celui-ci se trouvera réduit peut-être à la seule espèce de nos contrées communément appelée Plumeau , H 0 U 299 plume d'eau , à cause de la forme de ses feuilles. V Hot- TONE et Lymnophyle. (ln.) HOUAT. C'est, en bas-breton , le Canard domesti- que. (V.) HOUATTE. Espèce de coton qui entoure les semences de I'Apocyn de Syrie, (b.) HOU-BAARA ou HOUBARA. Petite outarde huppée d'Afrique. V. le mot Outarde, (s.) HOUBLON ou VIGNE DU ^O^Ji , Humuluslupulus , Linn. {^dioécic peniandrie.') Plante sarmenteuse et grimpante, de la famille des urticées, qui croît naturellement en Europe dans les haies, et qu'on y cultive en plusieurs endroits pour ses fruits, employés à la composition de la bière. Cette plante a beaucoup de rapport avec le Chanvre; comme lui , elle est dioïquc, c'est-à-dire qu'elle porte des fleurs mâles sur certains individus, et des (leurs femelles sur d'autres. Les premières , assises sur un pédoncule, naissent aux sommités des rameaux en petites grappes axillaires et terminales; elles n'ont point de corolle, mais un calice divisé profondément en cinq parties, et cinq étamines libres, à filets courts et à anthères oblongues. Les secondes viennent dans des cônes écailleux et comprimés , placés communément aux aisselles des feuilles, et soutenus pareillement par des pédoncules. Ces cônes, de forme ovoïde et obtuse, sont munis à leur base d'un involucre à quatre feuilles , et sont composés d'écaillés entières et colorées, attachées à un axe commun, et se re- couvrant les unes les autres. Chaque écaille , roulée en cor- net par le bas, sert de calice à une fleur sans corolle, la- quelle n'offre qu'un petit ovaire chargé de deux styles à stig- mate simple. Le fruit consiste en une petite semence rous- sâtre et amère, qu'enveloppe une tunique membraneuse. Les racines du houblon sont vivaces, rameuses et stoloni- fères. C'est par ses nombreux rejetons que cette plante se multiplie. Ses liges sont minces , dures , légèrement angu- leuses , et parsemées d'aspérités. Quand on leur donne un soutien, elles s'élèvent à plus de douze pieds de hauteur; elles se garnissent de feuilles opposées et dentées, quelque- fois simples et en cœur, mais plus souvent partagées en trois lobes. Ces feuilles , dont la surface est verte et rude au tou- cher, sont larges, accompagnées de stipules, et portées par des pétioles chargés de petits aiguillons réfléchis en arrière. La couleur des fleurs de houblon est herbacée , et celle de ses fruits jaunâtre: ils brunissent à l'époque de leur parfaite ma- turité. Cette plante constitue seule un genre. La culture du houblon e^t beaucoup trop négligée en 3oo HOU France. On voit, il est vrai, quelques houhlonnQres dans ïa Flandre et la Picardie; mais le fruit qu'on y récolle a une qualité bien inférieure à celui des pays étrangers. Ce défaut résulte de plusieurs causes, et principalement du peu d'aî- tenlion qu'on met à le bien cueillir. Les brasseurs français qui jouissent de quelque réputation , n'emploient presque que du houblon étranger, quoiqu'ils le paient plus cher que celui qu'oM récolte en France. Ce fut en iSa^, sous le règne de Henri VIII, qivon trans- porta de Flandre en Angleterre les premières ptanlcs de houblon. On les provigna d'abord dans les comtés de Kent, d'Essex et de Surrey , et bientôt après on en culliva dans le sud et dans l'ouest de ce royaume. l)epuis le commencement du dernier siècle , cette culture y a eu un si grand succès, qu'elle suffit maintenant pour approvisionner rAne;!elerre , l'Ecosse et l'Irlande, et qu'on exporte encore beaucoup de houblon à l'étranger. De tels progrès semblent annoncer que la cuhure de cette plante est très-avantageuse. C'est aussi ce que prétendent plu- sieurs agronomes. L'auteur des instructions rédigées en i']?i'^ par ordre de la société de Dublin, pour encourager cette culture, est de ce nombre. Hall, auquel on doit le Gentil- homme culthateur^ traduit de l'anglais par Dupuy d'Emporté, pense de la même manière. Mais Arthur Young est d'un avis différent; il révoque du moins en doute les grands avantages qu'on retire de la culture dont il s'agit; il prouve même -par un calcul ( Voyez son Voyage dans le Sussex ) , que souvent le produit est au-dessous de la dépense. L'opinion et les doutes d'Arthur Young sur une des bran- ches les plus inportaotes de l'agriculture anglaise, méritent certainement quelque attention. Cependant, puisque ses com- patriotes se livrent, d'une manière suivie, à la culture du houblon, il faut croire qu'ils y trouvent des avantages, non- seulement éventuels et soumis au hasard des circonstances, mais constans et annuels. Comment se persuader que toute une nation, surtout commerçante, et qui par conséquent sait calculer , puisse embrasser avec ardeur et conserver une culture dont le résultat seroit préjudiciable à chaoun ou au plus grand nombre de ses propriétaires ou fermiers ? Les raisons qui portent ceux-ci à s'y livrer, doivent accréditer la même culture dans le nord de la France. LTne foule de inollfs se réunissent pour y étendre et y encourager cette culture : la convenance d'une grande partie du sol de ces contrées, la température, la facilité d'y trouver des échalas nécessaires, l'emploi d'un nombre considérable de personnes des deux sexes él de tout âge, le bon marché de notre main-d'œuvre,. HOU 3,„ la facilllë de Se procurer du plant , celle du débouché , en- fin , le profit raisonnable qu'on en peut espérer dans un pays où il se trouve déjà beaucoup de brasserie^ établies, et où la vigne ne croît pas. Pourquoi achèterions-nous aux Anglais le houblon que nous pouvons avoir chez nous d'aussi bonne qualité et à meilleur marché ? Je ne puis donc m'empêcher de parler avec quelque éten- due de la cuhme de cette plante. C'est dans Miller , dans le Gentilhomme cultioateur de Hall , et dans les instructions de la société de Dublin citées plus haut , que je puise ce qu'on va lire sur celte matière , fondant ensemble , dans mon texte , tout ce que celui de ces auteurs contient de substantiel et d'in- téressant. On distingue ordinairement quatre sortes de houblon : le sauvage , celui à longues tiges rouges , le houblon blanc , et le hou- blon court de la même couleur. Le premier est le type des trois aalres, qu'on doit regarder comme des espèces jardi- nières. Le houblon sauvage est p«tit , et ne vaut guère la peine d'ê- tre cultivé ; le long, àiige rouge., çst de très-bon goût , mais n'est pas aussi marchand , à cause de sa couleur ; le blanc long est le plus estimé ; le çouH l'est aussi ; il a une belle cou- leur, mais il n'est pas d'un produit aussi considérable que le houblon blanc et long. Celui-ci mériteroit seul les soins du cul- tivateur, si tout terrain lui convenoit ; mais il demande un sol moelleux et riche > tandis que le houblon à tige rouge réus- sit très -bien dans un terrain médiocre : il vaut mieux avoir «ne récolte abondante de cette dernière espèce , qu'une pau- vre récolte de l'autre. En général , il faut au houblon une terre qui ait de la pro- fondeur, parce que ses racines pivotent beaucoup ; elle doit être en môme temps douce , sèche , et d'une qualité pl-is sa- blonneuse qu'argileuse. La terre noirâtre des jardins lui con- vient assez ; il périt dans celle qui abonde en argile , et il réussit mal dans tout sol graveleux , pierreux ou marécageux. Une houblonnîère épuise tellement le sol , que , les arbres exceptés , toute plantation qui lui succède prospère peu. Au contraire on peut , avec avantage, faire succéder le houblon à toute autre production , si l'on excepte les plantes à raci- nes pivotantes. Un bon sol qui a déjà produit du blé , four- nira très-bien pendant huit ans à une houblonnière la nour- riture nécessaire : un sol vierge la soutient pendant douze ans; mais, passé ce temps, elle se trouve épuisée. Par cette raison , on conseille de planter des pommiers et des cerisiers dans le mâiue sol où l'on pUnte des houblons ; lorsque b So:. HOU houblonnîère n'existera plus , ces arbres seront productifs et dans leur force. Une pièce de terre un peu en pente du côté du sud , et abritée des autres côtés par des montagnes ou par des arbres , est la plus avantageusement située pour une hou- blonnière. Les abris naturels ou qu'on lui donne ne doivent pas intercepter l'air dont elle a besoin. S'il y a des sources dans le canton , il sera convenable de la placer auprès. Dans quel- que situation qu'elle se trouve, on doit l'entourer de bonnes haies vives , propres à garantir les rejetons des vents froids du printemps , et assez fortes et touffues pour empêcher les animaux d'y pénétrer. Après avoir choisi la terre , il faut la préparer. De quelque natui'e qu elle soit, et de quelque manière qu'on la laboure , soit à la charrue , soit à la bêche , on doit toujours l'ouvrir à une grande profondeur , la rompre et la bien ameublir. Si le terrain est humide , on le dispose en sillons élevés , afin qu'il puisse bien se sécher , et que les tranchées ou rigoles soient nettes et ouvertes, surtout en hiver, de manière que l'eau ne s'y forme point en glace , ou n'y croupisse pas sur les racines. Une terre rude demande plusieurs labours croisés faits dans l'année qui précède celle de la plantation. Si la terre est ex- cellente , douce et sèche , soit qu'elle soit inculte ou en ja- chère , il faut la labourer en octobre , la laisser ainsi exposée à l'action de l'hiver; la herser et la labourer de nouveau en février ; la herser encore en mars , et ensuite l'aplanir entiè- rement. Un sol naturellement bon n'a pas besoin d'être en- graissé la première année. Dans une terre médiocre et que la préparation n'a pas rendue légère , on doit porter d'autre terre fraîche, mêlée avec du terreau ou autre engrais. Après ces opérations , auxquelles des circonstances locales peuvent apporter quelques changemens , on dispose le ter- rain en monticules qui , dans un sol ordinaire , doivent être à neuf pieds de distance et à sept pieds dans un sol riche. Pour cet effet , on étend sur le côté du champ parallèle à la haie, un cordeau garni de nœuds , espacés selon les distances qu'on a dessein de donner à ces monticules , et à chaque nœud on fiche en terre un petit piquet pour marquer la place de chaque monticule , laissant en tous sens la même distance. Si le sol n'est pas excellent, il faut y faire porter de la meil- leure terre qu'on puisse trouver, soit pure , soit mêlée à quel- que engrais, comme à un quart de vieux fumier bien pourri , et à une dixième partie de sable ; et, après avoir fait à chaque piquet un trou profond d'un pied et demi et large environ d'un pied carré , on l'emplit de la nouvelle terre , pure ou HOU 3o3 mélangée. Rien ne donne plus de vigueur et de céle'rité aux plants. On doit apporter beaucoup d'attention dans le choix des plants de houblon ; car si on forme celte plantation avec deux ou trois espèces qui mûrissent en différens temps , on éprou- vera beaucoup d'embarras, etmême de la perte. Le7ioublon à longues tiges rouges mûrit plus tard que le blanc commun. L'es- pèce la plus précoce est le houblon court et blanc. Eh plantant trois terrains différens avec ces trois variétés , on aura l'avan- tage de pouvoir les cueillir successivement à mesure qu'elles parviendront en maturité. La saison la plus convenable pour planter le houblon , est depuis la fin de février jusqu'au lo avril , au plus tard , c'est- à-dire , lorsqu'il commence à pousser; ce qui arrive daqries terres sèches et légères , et dans les années précoces , vers la fin de février ; mais dans les terres fortes et humides , et dans les années tardives, vers la fin de mars. Ce n'est pas que le mois d'octobre ne soit aussi bon pour planter , surtout dans un terrain sec et léger ; mais il est plus difficile alors de se pro- curer du plant , et d'ailleurs on a les gelées et les pluies d'hiver à craindre. On doit prendre les pieds ou plants dans une houblonnière où l'on ne cultive que la seule espèce qu'on désire avoir; il faut préférer ceux des monticules les plus élevés, et choisir les plus gros , d'environ six à huit pouces de longueur, et qui aient trois à quatre nœuds »u boutons. Quelques personnes ; dit Miller, ont essayé de former une plantation de houbloa par semences , mais elles n'en ont retiré aucun avantage , non-seulement cette méthode est ennuyeuse , mais les hou- blons ainsi produits sont communément de différentes espè- ces , les uns sauvages , et d'autres stériles. Pour planter le houblon , on fait à chaque piquet un trou d'environ seize pouces de diamètre , et dont la profon- deur dépend de la nature.du sol ; il suffit qu'on puisse lui en donner une de dix à douze pouces. On ne doit apporter au champ à la fois que le plant nécessaire pour les trous déjà pré- parés; il faut le mettre enterre le plustôtpossible, ayantgrand soin de le tenir jusqu'à ce moment dans la paille mouillée , pour l'empêcher de se dessécher. Celui qu'on est obligé de faire venir de loin, doit être mis dans du sable ou de la terre sèche aussitôt qu il est coupé , et ensuite empaqueté de fa- çon que l'air ne puisse pas l'allérer ; quand on le reçoit , on l'enterre dans un endroit frais et humide jusqu'au moment de la plantation. ' Ce moment arrivé , on remplit les trous avec de la terre qui en a été tirée , si elle est bonne , ou avec celle qu'on a ap- 3o4 HOU portée , et un homme armé d'un plantoir met dans chaque trou quatre ou cinq pieds, l'un perpendiculaire et au milieu , les autres autour et inclinés vers celui-ci, tous espacés de quar- tre pouces environ , et enfoncés de manière que leur sommet soit au niveau de la surface du sol ; on les couvre d'une bonne terre douce et légère , à la hauteur de deux ou trois pouces. Le plant doit être placé dans sa position naturelle , c'est-à- dire dan» celle qu'il avoit en poussant, et s'il avoit commencé à pousser avant la plantation , il ne faudroit pas couvrir les jeunes pousses. Quelques personnes ne remplissent les trous qu'après y avoir mis le plant. Cette méthode est également bonne. Pendant le printemps et l'été qui suivent la plantation , on doit entretenir la houblonnière propre , et ne laisser croître aucune herbe , ni dans les allées , ni sur les monticules. En mai, on bêche et l'on enlève les cailloux. Vers le commen- cement de juin , on lie les jeunes pousses en faisceaux , ou on les noue légèrement ensemble. La première année , on ne doit point leur donner d'appui , ni chercher à faire produire le houblon : la moindre production affoibllroit la plante, et le bénéfice serolt très-peu considérable. On peut , si l'on veut , peu de temps après lu plantation , mettre deux rangs de fèves dans chaque allée entre les monticules ; outre la ré- colte qu'elles donneront, elles serviront à abriter les jets de houblon. A la fin de septembre, ou auircommencement d'octobre, on porte du terreau ou tout autre engrais entre les monli- cules ; et lorsque la terre est labourée ou bêchée en no- vembre ou décembre , on y enfouit alors l'engrais. Quelques cultivateurs donnent en octobre un petit labour à leur jeune plant, ouvrent les monticules, coupent les branches un peu au-dessus de la surface de la terre, et couvrent ensuite, à la hauteur de deux ou trois pouces, le plant de bon terreau , sur lequel Us mettent une autre couverture de terre des allées , > pour le garantir de la gelée ; mais cette méthode ne doit être employée que la première année de la plantation. Vers la fin de février de la seconde année , lorsqu'il fait beau, on en- lève , avec une bêche ou quelque autre Instrument , toute la terre des hauteurs, de manière que la tige soit découverte jusqu'aux racines principales, et avec une serpette on coupe les pousses de la première année à un pouce de la souche , ainsi que les jeunes rejetons déjà enracinés ; l'on recouvre ensuite la souche d'un pouce de terre fine. Après avoir taillé le houblon, il n'y a plus rien à faire jus- qu'au moment de l'échalasser. C'est vers le milieu d'avril , et lorsque les jets ont huit à douze pouces hors de terre , qu'oa HOU 3o5 commence à planter les perches ; on peut les planter, dans les bons terrains , quinze jours après la taille. Elles doivent avoir quinze ou vingt pieds de longueur, plus ou moins , sui- vant la nature du sol, et selon Tannée où on les place. La première année on n'en met point, comme je l'ai dit; la se- conde , c'est-à-dire à Tépoque dont nous parlons , on les choisit de dix à douze pieds , avec une grosseur propor- tionnée ; la troisième année elles seront plus hautes , et auront quelquefois jusqu à vingt-quatre ou vingt-six pieds , si le sol est excellent. L'accroissement du houblon est , en quelque façon , déterminé par la longueur et la grosseur de la perche qui le soutient ; si elle est trop longue et le sol pau- vre , toute la nourriture s'épuise en tige et en feuilles , et ne produit presque point de fruit. Dans une terre riche , malgré la hauteur énorme des perches , la tige du houblon atteint leur sommet , et cependant sa racine est assez forte pour; nourrir le fruit. La houblonnière ne doit pas être surchargée de perches; deux petites par monticule sont suffisantes pour un jeune plant; communément on en met trois, et quelquefois quatre, lorsque les monticules sont larges et éloignés les uns des au- tres. Pour les ficher en terre , on se sert d'un plantoir de fer de trois pieds de long , et qui ait un peu moins de grosseur que les perches. On ne peut fixer leur profondeur dans le sol ; elle dépend de sa qualité, de son exposition , et de la hau- teur des perches. En général, elles doivent être plantées as- sez solidement pour rompre plutôt que de renverser, aussi près des buttes qu'il est possible, et penchées en dehors par leurs sommets , pour empêcher les sarmens de s'entrelacer. On doit aussi laisser une ouverture entre deux perches , du côté du midi , pour donner un plus facile accès aux rayons du soleil. Enfin , si on veut garantir jusqu'à un certain point toute la houblonnière de la violence du vent, il convient de placer les plus fortes et les plus grandes perches aux trois premiers rangs extérieurs du côté de Touest ou du sud-ouest. Les meilleurs bois à employer pour ces perches, sont le frêne et le châtaignier ; cependant on se sert de l'aune , du l>Ouleau, du peuplier, du saule. Lorsque les jeunes pousses de houblon sont parvenues à la hauteur de trois ou quatre pieds , si elles ne s'attachent pas d'elles-mêmes à la perche la plus voisine , on les y con- duit doucement avec la main , en les tournant vers le soleil , et on les y fixe avec de la laine ou du jonc fané , sans trop les serrer; car, pour peu qu'on les endommage , on les fait périj-. On choisit ordinairement le milieu de la journée pour cette opération ; le matin elles sont trop pleines de suc , et XV. 20 3o6 H O U le soir elles ?orit trop cassantes. Pendant les mois d'avril et mai, on continue à guider ainsi les tiges autour des perches; on les lie une seconde fois aussi haut qu'il est possible , et l'on se sert après d'échelle. Une doit y avoir que deux tiges vigou- reuses , ou trois médiocres par perche. Quand les sarmens sont trcs-foris et surpassent de beaucoup les perches , quel- ques personnes en rompent les sommets avec de longues gaules , pour faire pousser au-dessous un plus grand nombre de branches. Vers la fin de mai , lorsqu'on a fini de lier, la terre doit être labourée ; on doit au moins en ratisser la surface , et jeter sur chaque monticule une forte pellée de terre fine, pour lui donner plus de hauteur et d'étendue : en môme temps on coupe les pousses superflues, et l'on arrache les mauvaises îterbes. La même opération se répète de mois en mois pen- dant Tété. En août, on emploie des femmes à dépouiller les branches du houblon de leurs feuilles , jusqu'à deux ou trois pieds au-dessus des monticules , pour donner à la houblon- nière plus d'air et de soleil , et pour faciliter la maturité dcr fruit. Si , dans les étés chauds et secs , on pouvoit arroser la plan- tation, soit avec l'eau d'un ruisseau placé dans le voisinage, soit , à son défaut , avec celle qu'on feroit porter dans des tonneaux, il est certain qu'oii obtiendroit , lors de la récolte, un produit plus considérable. C'est au cultivateur à balancer ee produit présumé , avec la dépense qu'entraîneroit l'arro- sement. L'un des auteurs que nous suivons prétend que cet arrosement , même fait à bras d'homme , est toujours avan- tageux , parce qu'il assure la fleuraison du houblon pendant / ia sécheresse qui empêche les autres houblonnières de fleurir, et qu'un arpent de houblon en bon rapport, peut, dans une année diselteuse , produire quinze à dix-huit cents livres. Ce sont les fruits ou cônes écailleux du houblon qui font l'objet de sa récolle. On a vu qu'il y avoit des espèces de houblon plus hâtives les unes que les autres. La température indue aussi sur l'époque où le houblon fleurit. En Angleterre, il commence à entrer en fleurs vers la fin de juillet ; il s'é- panouit au commencement d'août , et mûrit à la fin du même mois ou au commencement de septembre, selon que la saison a clé plus ou moins favorable. En Irlande, il mûrit ordinai- rement quinze jours plus tard. Il est de l'intérêt du culti- vateur d'épier avec soin le moment où il doit faire sa ré- colle. La moindre négligence sur cet article peut lui porter beaucoup de préjudice. Une fois que le houblon a acquis sa malurité , si l'on perd un seul jour pour le cueillir, il dépérit; H O U 3o7 et si, dans l'intervalle, il survient par malheur un grand vent, le dommage est considérable. e, nous remarquerons d'abord les mines de houille des environs de Sarrebruck , sur la frontière de France. Elles produisent annuellement i5 cent mille quin- taux métriques de houille. Celles du départementde la Roër, aux environs d'Eschweiler , en produisent i3 cent mille emintaux métriques. Celles de la rive droite du Rhin , dans il O ÎT 355 îe comté de la Mark , le pays de Teckienbôufg , etc. , pro- duisent plus de trois millions de quintaux métriques de houille. En Silésie, plus de cent mines de houille sont en activité % Les plus importantes sont situées dans les environs de Schweidnitz ; leur produit total annuel est d'environ deux millions et demi de quintaux métriques de houille. Toutes ces mines , ainsi que celles moins considérables de Weltin et de Lœbejun sur la S aale , appartiennent à la Prusse. Toutes sont sur des gîtes de la première formation. En Saxe , trois bassins houillers sont exploités prés de Zwickau, de Chemnitz, et entre Dresde et Freyberg, dans des terrains de même nature. Leur produit total est de 600 mille quintaux métriques, annuellement. En Bohème , il existe des bassins houillers de la première formation, dont l'exploitation est peu considérable. Les gîtes dunorddelaBohème, quisont probablementdes lignites, sont exploités avec plus d'activité. En Autriche , en Tyrol, en Bavière , et dans le nord de la Suisse, on exploite des gîtes de houille situés le long des chaînes des Alpes. Laplupart sont dans le calcaire, quelques- uns sont dans le grès. Ces exploitations sont beaucoup moins considérables que celles des diverses provinces prussiennes. En Hanovre , et dans le Duché de Brunswick , on exploite la houille dans le grès blanc. Ces mines sont peu importantes sous le rapport du produit. Il existe aussi quelques gîtes de houille peu considérables , dans le terrain de psammite , au pied du Hartz. Les deux versans du Thiiringer-Wald, le pays d'Osna- briick, celui de Schaumbourgen Hesse, etc., renferment aussi des gîtes de houille exploités. L'Angleterre et I'Ecosse sont extrêmement riches en gîtes de houille. L'exploitation de ce précieux combustible y a lieu avec une prodigieuse activité , et elle est une des sour- ces principales de la richesse manufacturière de la Grande- Bretagne. On évalue à 76 millions de quintaux métriques la quantité de houille extraite annuellement des mines de ce pays. Les principaux centres d'exploitation sont , en allant du sud-ouest au nord-est : i." En Glamorgan, entre Swansea etMerthyr-Tydvil, contrée presque inhabitée il y a cinquante ans, et que l'exploitation de la houille et du fer a rendue de- puis peu, et rend de plus en plus , florissante. On y voit des usines à fer qu'on peut appeler gigantesques pour leurs pro- portions et leurs produits; on y amène presque tous les mine- rais de cuivre de Cornouailleset d'Anglesea, pour y être fon- dus. 2.0 En Shropshirc , aux environs de Colebrookdale. 3.° En Stâffordjshire, entre Woivverhamptou et Birmingham. 4,0 356 H O U En Lancasliire, aux environs deWigan. 5.° Au nord du Der- byshire et enYorkshire, près de Wakefield, de Sheffield, etc. 6.'^ En Cumberland , notamment aux environs de Whiteha- ven , où sont les travaux les plus profonds de l'Angleterre , et d'où Ton exporte annuellement plus d un million de quin- taux métriques de houille pour 1 Irlande. 7.° Au nord du comté de Durham et dans le Northumberland, particulière- ment aux environs de Newcastle. Ce sont ici les mines de houille les plus productives de la Grande-Bretagne et du monde entier. L'exploitation y emploie , dit-on, plus de soixante mille individus ; elle y produit annuellement d'après un mémoire de M. Winch, inséré dans le tome 4 des Traj.isac- tions delà société géologique de Londres 36 millions de quin- taux métriques de houille. De cette quantité il se brûle sur les haldes environ 5 millions de quintaux de houille menue ; on consommeutilement,dansle pays, à peu près la même quan- tité de bonne houille ; on en envoie par terre, dans le comté de Durham , 2 millions de q"intaux, et l'on exporte par mer 24. millions de quintaux de houille , dont environ la moitié est transportée à Londres, et sert au chauffage des habitans de cette ville et aux nombreux ateliers qu'elle renferme. 8." Dans toute la partie étroite de l'Ecosse , entre le golfe de Forth et le golfe de Clyde , et particulièrement aux environs d'Edimbourg, de Glasgow, dans les comtés de Fife, de Stir- ling , de Lintlikgow , à l'extrémité méridionale du comté d'Argyle, et dans l'île d'Arran. La célèbre usine à fer de Carron, la plus considérable qui existe, située dans le comté de Stirling, consume, dit-on , à elle seule, huit cens tonnes ou huit mille quintaux métriques de houille, par semaine. Toutes les mines de houille d'Angleterre et d'Ecosse sont situées dans le terrain de psammite, ou dans un calcaire mêlé de psammite et de schiste , que les minéralogistes anglais regardent, ainsi que nous l'avons vu, comme antérieur à la principale formation houillère. En Irlande , on connoît des couches de houille dans un assez grand nombre de localités ; cependant celles de Kii- kenny dans le comté de ce nom , celles du comté de Queen , et celles de Newry, dans le comté deDown, sont les seules qui soient exploitées. Les autres pays de l'Europe sont beaucoup moins riches en houille que la France, l'Angleterre et l'Allemagne. En Portugal , on ne cite qu une mine de houille exploi- tée au Cabo de Buarços , province de Beïra; depuis quel- ques années , on a découvert des couches tie houille près de Vialonga , au nord-nord-est d'Oporto. En Espagne , on connoît des gîles de houille en Anda- H O TT 357 lonsie, en Estramadure , en Catalogne, en Arragon , en Caslille et dans les Asturies. Ces derniers paroissent être les plus nombreux; mais les couches sont peu épaisses, cl toutes les. exploitations sont peu importantes. Des recherches, ten- tées près de Madrid, n'ont pas donné de résultats satis- faisans. En Italie, les Apennins renferment quelques mines de houille peu importantes. On exploite très-peu de houille en Hongrie. En Galli- ciE, deux grandes exploitations sont en activité cl fournissent annuellement environ cent mille quintaux métriques de houille. Dans le cercle de Cracovie , sept exploitations ne produisent qu'environ cinquante mille quintaux. Il n'existe de mines de houille en Suède , que dans la pro- vince de Scanie. Il paroît qu'où commence à leur donner une assez grande activité. La NoRWÉCE paroît entièrement privée de ce combustible, ainsi que la Russie. On en cite quelques gîtes exploités en Sibérie, et il est probable que la grande abondance debois que ces contrées renferment, a em- pêché jusqu'ici de chercher à connoître les combustibles que le sol peut contenir. On a peu de renseignemens sur les mines de houille de& autres parties du globe. On sait cependant qu'on en exploite ^ beaucoup en Chine et au Japon, qu'il en existe dans l'île de Madagascar, que l'Afrique n'en est point dépourvue, qu'on en a découvert depuis peu dans la Nouvelle-Hollande. En- fin , l'Amérique en renferme aussi: il y en a peu de connues dans les Cordilières; nous avons déjà cité le gîte de houille de Santa-Fé de Bogota, qui y est situé à 44^° mètres au- dessus du niveau de la mer ; on indique des couches de houille aux Lucayes , à Saint-Domingue, dans Tile du Cap- Breton, au Canada, en Louisiane et surtout aux Etats-Unis. Dans ce dernier pays, toute la partie occidentale de laPen- sylvanie et ^e la Virginie renferme des dépôts de houille extrêmement abondants, mais jusqu'à présent peu exploités. On en indique aussi sur la côte du Groenland. § IV. Ojjinions diverses sur l'origine de la houille. Les idées qui ont été émises par les naturalistes, sur les causes de la formation des houilles, peuvent se rapporter à trois opinions principales. Les uns croient que la houille doit son origine à des végétaux enfouis ; d'autres pensent que les matières animales, seules ou mêlées avec les substances vé- gétales, ont formé les couches de houille. D'autres, enfin, attribuent à la houille une origine purement minérale. Oi\ s'appuie, dans la première opinion, sur les nombreur 358 HOU ses empreintes végétales que le terrain houiller renferme, em- preintes dont quelques-unes sont, en totalité ou en partie , changées en véritable houille ; sur la substance nommée charbon de bois fossile ^ qui se rencontre, en plus ou moins grande abondance, au milieu des couches de houille , et qui conserve encore sa structure et l'éclat du charbon végétal ; sur la nature même de la houille qui est formée surtout de charbon, principe éminemment végétal , et de bitume que l'on regarde aussi comme un produit des végétaux. Les ob- servations et les expériences de M. Hatchett , rapportées dans les tomes 20 et 2 1 du Journal des Mines , tendent à faire croire que le bitume des combustibles fossiles est principalement produit par les principes résineux contenus dans les végétaux. M. Hatchett pense que la. bituminisaiion est complète dans la houille, tandis que dans le lignite elle n'est achevée qu'à moitié. Il a reconnu, dans le lignite de Bovey en Devonshire, une substance qu'il regarde comme intermédiaire entre la résine et le bitume, et qu'il a nommée réiinasphalie. Il croit que les forêts sous-marines que l'on atrouvées en divers points des côtes de France et d'Angleterre , dans lesquelles le bois n'a éprouvé aucun changement dans ses caractères végétaux, les gîtes de lignite, dans lesquels on trouve tous les intermé- diaires entre une texture ligneuse parfaite, et une substance entièrement semblable à la houille , enfin les couches de bouille , dans lesquelles l'origine végétale n'est plus immé- diatement reconnoissable , forment les différens termes d'une même série indiquant la marche de la nature. Beaucoup de naturalistes ont émis des idées analogues , mais ils pensent que la houille peut provenir soit de forêts en- fouies, soit d'amas de plantes marécageuses qui ont formé d'abord des tourbières. On cite, à ce sujet, des passages entre les diverses variétés de tourbe et plu&ieurs variétés de lignite terreux, M. Voigt, au contraire, n'admet point ces divers passa- ges , ni les principes sur lesquels se fonde cette opinion. Il croit que la houille est principalement d'origine végétale; mais il croit que les circonstances qui ont concouru à sa for- mation , sont tout à-fait différentes de celles qui ont formé les lignites et les tourbes. Il s'appuie principalement sur la différence constante qu'on remarque entre les terrains àhouille et les terrains à lignite , pour conclure qu'il n'y a eu entre les causes et les époques de leur formation, rien autre chose de commun que leur origine végétale. Dans tous les cas, et par quelque cause que ce soit, on reconnoît que l'altération des substances organisées est bien plus complète dans la houille que dans le lignite, et qui! est HOU 359 nécessaire qu'il y ait eu pour la houille , décomposilion , fer- nieniation , et une espèce de dissolution entière des matières végétales. Autrement il seroil impossible de concevoir, par exemple, la formation de ces petits filons de houille, d'un demi'-pouce d'épaisseur, cités par M. de Charpentier et par M. Werner. Comment, en effet, le bois auroit-il pénétré dans des fentes aussi étroites, s'il n'avoit pas été préalable- uient dissous et converti en une substance liquide ? Il paroît, dit M. Voigt, que certains végétaux, les roseaux entre autres, ont plus contribué que d'autres à la formation de la houille, Il paroît que les couches de houille ont été des tas de plantes charriées et accumulées les unes sur les autres, que la fermentation s'est mise dans ces tas, que les plantes ont perdu leurs formes, et que pressées parla masse du ter- rain qui étoit au-dessus, elle ont fini par ne plus faire qu'un toni. En effet, la houille elle-même ne contient aucune im- pression déplante, et tous les roseaux, que l'on trouve cou- chés dans les schistes du terrain houiller, paroissent avoir été aplatis par une grande pression. Toutes les foiS , au con- traire, qu'on en rencontre de verticaux, ils sont ronds et traversent plusieurs couches. Ce fait, assez rare, s'observe quelquefois; le roseau est rempli intérieurement parla subs- tance pierreuse ; son écorcc est convertie en houille ou en bitume. Il paroît alors évident que le végétal est en place , et que, sans être enlevé, il a été enveloppé par le dépôt pierreux. Quelques personnes pensent que les matières végétales qui ont formé les houilles, ont été charriées par d'anciens courans, et déposées par eux au fond des vallées sous-mari- nes. Beaucoup de gisemens de houille, dans les vallées pri- mordiales, viennent àTappui de cette opinion. On ajoute que les grands fleuves des pays inhabités, de l'Amérique septen- trionale , par exemple, transportent encore incessamment à la mer d'innombrables débris des forêts qui ombragent leurs rives, débris qui vont sans doute s'accumuler au fond des eaux, dans des gisemens analogues à ceux que nous pré- sente la bouille des continens, et comme pour préparer les gîtes de houille du monde futur. On peut objecter à cette idée: i." le gisement des houilles qui ne sont point dans de semblables vallées primitives, par exemple, celui de la grande zone houillère de la Belgique, et tous ceux de l'An- gleterre; 2.° la hauteur considérable à laquelle se présentent certains gîtes de houille, et sur laquelle nous reviendrons tout à l'beure ; 3.° l'absence totale de corps marins que pré- sente le terrain houiller proprement dit, et les débris de co- quilles, qui paroissent d'eau douce, qu'on y a reconnus en. 36o H O TT Angleterre. IN ous avons remarqué, au contraire, des débris de corps marins nombreux dans la formation de houille du cal- caire. L'origine de celte houille du terrain calcaire, dont les couches renferment une grande quantité de coquilles, est, par celte raison , rapportée au règne animal , cl beaucoup de savans pensent aujourd'hui que les matières animales ont aussi contribué, en plus ou moins grande proportion, à la formation de toutes les houilles. Celte opinion est appuyée sur la inariière dont la plupart des houilles grasses se conduisent à la distillation, où elles donnent de Tammoniaque , généra- lement regardée comme un produit de matières animales. On pense que les substances huileuses ou graisseuses des animaux marins peuvent avoir donné naissance à une portion du bitume des houilles. M. Héricart de Thury a développé cette idée dans le tom. i6 du Journal des Mines; et M. Proust a conclu, d'un grand nombre d'expéri»^nces chimiques, que les carac- tères des substances ]>itumineuses ne les metloient pas plus en relation avec les végétaux qu'avec les animaux. Il a fait observer , entre autres, que le coak , ou charbon de houille , conlenoit toujours de Tazote, qui diminue la facilité de sa combustion , et que, traité par la potasse, il donnoit de la lessive prussiquc, propriétés qui léloignent des charbons végétaux. {Journal de Physique ^ tom. 63.) Enfin, plusieurs minéralogistes pensent que la houille ne doit son origine ni aux végétaux ni aux animaux; mais qu'elle est le produit d'une formation purement minérale, comme la plupart des autres terrains. On fait observer, à l'appui de celle opinion : i." qu'aucune observation directe ne prouve que les corps organisés donnent du bitume, par leur décom- position (celles de M, Hatchelt, rapportées plus haut, pa- roissenl cependant donner au moins des induction:; très-forlcs à cet égard). 2° Qu'il existe des roches imprégnées de bi- tume , sans aucune trace de son origine végétale ou animale ; tels sont les rochers schisteux de Gistain, dans les Pyrénées ; les rochers calcaires des environs de Genève ; les couches de sable voisines du Rhône, depuis Seyssel jusqu'au fort de l'Ecluse, etc. 3.° Que les couches de houille, elles-mêmes, ne renferment, en général, point de iraces de végétaux, et que celles qui s'y rencontrent quelquefois, ainsi que les nom- breuses empreintes, parfaitement conservées^ qu'on obse rve dans les schistes qui accompagnent la houille, semblent auta ni de té- moins que la masse des couches de houille ne peut pas être for- mée de végétaux parfailementûéi-.omposés.^.^QnQ si les ^/égétaux avoient la propriété de se convertir en substances bitumi- neuses, daxîs ie sein de U icne , il en serait ainsi pour tous les TT O TT 36i végétaux enfouis; que, cependant, on trouve des bois fossiles et pétrifiés, dans tous les états et de toute sorte de nature , qui n'offrent pas un atome de bitume. Ceux de Hon- grie sont convertis en pecbstein , ceux des environs de Sois- sons et d'Etampes sont convertis en silex; ceux des scbistes des terrains houillers sont souvent pyriteux ou changés en minerai de fer; ceux des marais de la Sibérie sont aussi con- vertis en minerai de fer; ceux dessables cuivreux des monts Oural sont changés en minerai de cuivre, etc. La nature des bois fossiles bitumineux peut donc être due aux couches bitu- mineuses dans lesquelles ils se sont trouvés. 5." Que la houille contient une proportion de charbon (60 — 80 pour 100) trois fois plus considérable que celle que donne le bois , et telle qu'il semble impossible de la concilier avec l'organisation élastique et robuste , dont ont besoin les arbres des forêts et tous les végétaux; que d'ailleurs, d'après les expériences de M. Proust, le charbon est, dans la houille, très-foiblement combiné, très-mal enchaîné par Thydrogùne, l'azote et l'oxy- gène , et qu'on peut l'en séparer avec une facilité et par des moyens qui ne réussiroient pas pour aucune des productions végétales ou animales que nous connoissons. 6.° Qu'il paroît impossible de concevoir, comme produits de \'^gétaux charriés par les courans et déposés sous la mer , les couches de houille qui sont situées à une très-grande hauteur, telles que celles observées par Leblond , dans les Cordillères , à 44oo mètres d'élévation ; car si la mer étoit assez élevée pour former de pareils dépôts , en quel endroit pouvoient exister les végétaux dont on supposeroit que ces dépôts sont formés? 7.° Que les houilles n'offrent pas, entre leurs lits , le moindre vestige de poissons, de coquilles, d'ossemens, aucun corpsenfm, étran- ger à leur pâte, qui retrace ces bouleversemens que la pensée sépare difficilement des grandes dévastations de continens, de forêts, etc. 8.° Que l'alternation des couchesde psammite, de schiste et de houille , répétée régulièrement et un grand nom- bre de fois, dans les terrains houillers, ne permet pas de concevoir comment ont pu s'opérer et s'accumuler ainsi, exclusivement à tout autre, ces deux ordres de sédiment, auxquels on suppose une origine si différente, etc., etc. Nous ne prendrons point parti entre ces différentes opi- nions ; il nous suffit d'avoir exposé les motifs sur lesquels on fonde chacune d'elles; on voit qu'il est facile de faire des sys- tèmesgéologiques, etfacile de les attaquer. Nous croyons qu'il faut, long-temps encore , se borner à faire des observations , avant de vouloir chercher à expliquer le mode que la nature a suivi dans la formation des houilles , comme dans la forma- tion de tous les autres terrains ; et d'ailleurs : « les événemens 352 H O II «' qui ont réellement accompagné les premières formations « minérales , ont-ils aucune analogie que notre esprit soit as- «' sure de saisir, avec les conditions qui régissent maintenant « la surface du globe ? Est-il réservé à notre intelligence de «t réunir toutes les parties de la longue chaîne , avec laquelle «f on rattacheroit aux causes qui, de nos jours , agissent sur les «» minéraux, les causes si différentes qui, dans les premiers « âges du monde, ont opéré la création successive des diver- « ses sortes de terrain? » {Mémoire de M. Beaunier, sur les Mines de houille du département de la Loire ; Annales des Mines , t. I , p. 37.) Nous devons faire mention, avant de terminer cet article , de l'opinion développée par M. Palrin , dans la première édition de ce Dictionnaire, surl'origine de la houille. Il y corn, Lat toute idée qui attribue cette origine aux dépouilles d'êtres organisés; il développe et étend, à ce sujet, plusieurs des motifs et des raisonnemens que nous venons d'indiquer. Il croit que des émanations de volcans sous-marinspeuventseules rendre compte, d'une manière probable, de la formation des terrains houillers , et expliquer surtout le retour périodique et régulier des différentes couches qui constituent ces terrains. Cette idée se rattache à celles du même auteur, par lesquelles il attribue une origine analogue à une grande partie des ter- rains secondaires. {V. lexposition de son système , à la fin de Tariicle Géologie, ) § V. Indices , Recherches et Exploitation de la houille. On divise les indices en prochains, éloignés ^ négatifs et faux. h^s, indices prochains sont une marque à peu près certaine de la proximité d'une couche de houille. Tels sont : i.° l'af- fleurement dune couche à la surface du terrain, reconnois- sable ordinairement par une trace noire , ou par des fragmens de houille ou de schiste bitumineux, arrachés par la charrue. 3." La rencontre de fragmens de houille dans les ravins. 3." Le suintement, à travers le terrain, d'eaux ferrugineuses et bitumineuses , laissant , à l'évaporation , un résidu de houil- le, etc. Les indices éloignes donnent seulement une probabilité plus ou moins vague ; telle est, surtout, la nature duterrain.Cet indice devient beaucoup plus probable, pour le terrain houiller proprement dit, que pour la formation du calcaire et celle du grès, parcequ'ilestpeu àt terrains houillers qui ne renferme des couches de houille ; au lieu que les terrains de grès et de cal- caire n'en contiennent que rarement. Ainsi, partout où l'on rencontrera le psammite micacé ou granitoïde , vulgairement HOU 363 nommé grh des houillères ; partout, surtout, où on le verra al- terner avec des schistes argileux, renfermant des empreintes de fougères , de mousses , de graminées , ou d'autres plantes propres au terrain houiller, on pourra raisonnablement es- pérer de rencontrer des couches de houille. Les fragmens de ces deux roches , charriées par les ravins, sont un indice de leur existence dans le voisinage. Enfin, les fragmens roulés, dans les mêmes circonstances , de jaspe schistoïde ou schiste siliceux { kiesdschieffer) , traversé de veines de quarz , sont encore un indice éloigné , parce que cette roche forme sou- vent des rognons dans les couches de houille, et dans le terrain houiller. On peut aussi regarder comme des indices, offrant quel- quefois beaucoup de probabilité: 1.° l'existence reconnue, dans le voisinage, d'un terrain houiller , et de couches de houille exploitées, dirigées de telle manière qu'elles doivent pas- ser sous le sol où l'on ne voit que des terrains plus modernes qui peuvent les recouvrir ; 2.° la disposition d'un terrain primitif auquel des couches de houille , connues plus loin , sont superposées, et peuvent être superposées encore dans une autre direction, mais en suivant les sinuosités et les contours des montagnes et; des vallées primitives. Les indices négatifs sont pris également dans la nature du terrain. On ne doit point rechercher de houille dans les formations primitives ou intermédiaires, ni dans les terrains secondaires postérieurs au calcaire coquillier. Enfin , parmi les faux indices , ou indices accrédités par l'ignorance ou le charlatanisme, et qui ne peuvent qu'induire en erreur, il faut ranger le climat , l'âpreté du sol , les exha- laisons sulfureuses que l'on a prétendu se dégager des cou- ches de houille pendant les chaleurs de l'été , etc., et surtout la baguette divinatoire , à la vertu de laquelle beaucoup de mineurs croient encore. Les indices conduisent à faire des Uaoaux de recherche. LeS recherches s'exécutent, soit par iranc^é'w, soit avec lasonrfe, soit par galeries ou par puits. Une tranchée ouverte à la surface du terrain peut servir : i.o à faire reconnoître un affleurement de couche, recouvert par le sol végétal ou par l'altération des schistes de la surface; 2." à retrouver le prolongement d'une couche exploitée plus loin. Cette tranchée doit toujours être dirigée perpendicu- lairement à la direction des couches du terrain , afin de couper toutes ces couches. La sonde est une espèce de grande tarière, formée de plusieurs tiges de fer qui se vissent au bout les unes des au- tres, et terminées, d'un côté, par des outils de différentes 3G4: HOU espèces, ciseaux, cassepierres , éqiiarrîssoirs, cuillers, etc., destinés à percer le terrain et à vicier le trou qu'ils ont fait , et de Tautre côté par une fêle ou première tige , garnie d'un anneau et de deux collets au moyen desquels on manœuvre linsirument. Cette manœuvre consiste à le soulever pour le fan e retromber , à le tourner un peu à chaque coup , et à le retirer avec \.Ç:S matières réduites en poussière. Les sondes sont de différentes dimensions : les unes sont destinées à pénétrer seulement jusqu'à i5 ou 20 mètres; d'autres vont jusqu'à 100 et même 200 mètres de profondeur ; celles-ci ne se manœuvrent qu'avec des machines. Le plus ordinaire- iiïcnt, on manœrvre la sonde verticalement; quelquefois cependant on lui donne une direction inclinée , ou même lîorizontale. La sonde est employée dans beaucoup de pays, et particulièrement en Angleterre, pour rechercher les cou- ches de houille dans le terrain houiller ; elle fait connoître la nature et l'épaisseur de toutes les couches de terrain qu'elle traverse ; mais il faut une grande habitude pour bien reconnoître les matières que la sonde ramène au jour , ré- duites en poussière et mélangées entre elles, La sonde sert aussi à rechercher le terrain houiller au-dessous des terrains plus modernes qui le recouvrent. Elle est fort utile, dans ce but, en Flandre et en Belgique. Cependant, lorsqu'on a à traverser beaucoup de terrains argileux et humides, le bour- souflement des glaises qu'on perce empêche de pénétrer à une grande profondeur, et souvent on ne se sert alors de la sonde, que pour reconnoître à quelle profondeur se trouvent les couches argileuses, qui doivent servir d'appui au boisage des puits , destinés à arrêter et à retenir les eaux du terrain. On emploie aussi la sonde dans l'intérieur des exploitations, soit pour percer un trou destiné à écouler les eaux ou à faire circuler l'air, soit pour s'assurer s'il n'existe pas, dans le voi- sinage, d'anciennes excavations abandonnées et pleines d'eau. Les recherches par galeries souterraines sont beaucoup plus dispendieuses, et elles ne doivent être employées qu'a- vec une extrême prudence. 11 faut toujours diriger les gale- ries de recherche perpendiculairement à la direction des couches du terrain, afin de traverser le plus grand nombre possible de ces couches. Les galeries offrent cet avantage , qu'elles font beaucoup mieux connoître les couches qu'elles traversent , que les tranchées ou les trous de sonde. Les recherches par puits sont encore plus dispendieuses que celles par galeries, à cause de l'obligation qu'elles en- traînent d'épuiser les eaux intérieures avec des machines. On ne doit les employer que quand on a à peu près la certi- tude de rencontrer des couches de houille exploitables. Quel- HOU 365 quefois on ne donne que peu de profondeur au puits , et on continue la recherche avec une sonde. Ailleurs, on perce , au fond du puits , une galerie qu'il faut toujours alors diriger au mur des couches qu'on a traversées, pour en reconnoîlre de nouvelles, et toujours perpendiculairement à la direction de ces couches. Il ne suffit pas de rencontrer une couche de houille, nu moyen de ces travaux de recherche ; il faut encore que ceîîe couche soit, en raison de sa puissance, de son allure, de la profondeur à laquelle elle se trouve , de la qualité de sa houille, etc., exploitable avecavantage. Cette circonstance dé- pend, en grande partie, de la manière dont l'usage de la houille est plus ou moins répandu dans la contrée, du prx auquel on peut la vendre, des débouchés que l'exploitaticm peut espérer. Lors des recherches entreprises aux environs de Valenciennes , on est arrivé plusieurs fois à des couches de houille qui, aujourd'hui, suffiroient pour enirelenir une exploitation , mais qui , à cette époque où l'emploi de ia houille étoit borné dans le pays à un petit nombre d'usages , ne pouvoient pas être exploitées avec bénéfice. Ces recher- ches, commencées en lyiGparM. le vicomte Désaudrouin , pour retrouvera travers les terrains de craie et d'argile qui re- couvrent le sol de la Flandre , la suite du terrain houiller et des couches de houille exploitées depuis Aix-la-Chapelle jusqu'à Mons, ont été poursuivies pendant dix-sept ans, sans succès. Ce n'est qu'au bout de cette longue période , ?près des dépenses énormes, et après avoir creusé en vain quatorze puits sur les territoires des communes de Fresnes, Aubry , Eteux, Courouble, Brouay, Crépin et Valenciennes , qu on arriva enfin , le 24 juillet lyS/}., sur le territoire d'Anzin , à une très-belle couche de houille de la meilleure quaJilé. Bientôt après, on en rencontra d'autres; bientôt l'établis- sement d'Anzin devint l'exploitation la plus considérable de France. L'exploitation des couches de houille n'a jamais lieu à ciel ouvert, mais toujours par des travaux souterrains, dont l'ensemble constitue une MiiSfE. Les aflleuremens ou traces que les couches montrent sou* vent à la surface du sol, la nature même de cette espèce de gîte qui est formé à peu près en entier par la substance utile qu'il renferme , l'emploi utile que chacun peut faire de ia houille immédiatement après son extraction , et sans qu'elle ait besoin de subir aucune élaboration ultérieure ,' enfin le peu d'inclinaison qu'affectent souvent les couches , tous ces motifs portent les propriétaires du sol, dans les contrées où le terrain houiller se montre au jour , et où l'usage de ia 366 H O 11 houille est répandu, à attaquer la portion de l'affleareméfit de la couche qui passe dans leurs propriétés, et à poursuivre cette extraction à l'aide de galeries ou de puits , jusqu'à quelque profondeur. C'est ainsi que prennent naissance , dans un grand nombre de pays, une foule de petites exploi- tations superficielles qui houleversent la surface du sol , et la rendent perdue pour l'agriculture , qui se nuisent d'ail- leurs les unes aux autres, par l'Infiltration des eaux des tra- vaux supérieurs dans ceux qui sont situés plus bas , et dans lesquelles on ne peut établir, faute d'espace suffisant et faute de moyens pécuniaires, aucuns travaux propres à épuiser les eaux souterraines ou à entretenir la circulation de l'air. Sou- vent alors le gaz hydrogène qui se dégage de la houille s'ac- cumule dans l'intérieur des ouvrages , s'enflamme par les lumières des ouvriers , et produit des événemens désas- treux. Mais bientôt , à mesure qu'on s'enfonce , l'air de- venant de plus en plus vicié, les eaux de plus en plus abon- dantes, l'extraction des eaux et des matières de plus en plus dispendieuse , l'exploitant est forcé d'abandonner son en- treprise , et les ouvrages qu'il avolt creusés et folblement étayés s'éboulent promptement. Les dérangemens que les couches de houille éprouvent souvent dans leur allure , et que nous avons indiqués plus haut , sont autant de motifs de plus au délaissement de cette espèce d'exploitation. Quel- quefois l'influence de l'humidité , sur les pyrites que la houille contient, produit dans les travaux éboulés un em- brasement spontané qui se communique de proche en proche, s'étend au loin sur la couche de houille qui l'alimente , et devient à peu près impossible à éteindre. Ailleurs les exca- vations abandonnées se remplissent d'eau , et forment des lacs souterrains , lesquels menacent d'engloutir les exploi- tans qui, dans la suite, au moyen de travaux plus en grand, voudrolent mettre à profit la partie inférieure du gîte. Les éboulemens se font souvent sentir jusqu'à la surface du sol , où Us produisent des affaissemens considérables; et s'il ré- sulte de cet état de choses un profit momentané plus ou moins grand pour l'exploitant , il en résulte aussi la détério- ration de la propriété de la surface , et la perte de la plus grande partie de la propriété souterraine. La plupart des contrées de l'intérieur de la France où le terrain houiller se montre au jour, et particulièrement les dc- partemens de la LoIre|, de TAveyron, de la Haute-Loire, de l'Allier, etc., présentent des exemples nombreux de cette dévastation des gîtes de houille , par ces extractions superficiel- les que les Allemands nommeniexploilationsdepillageiRaubbau). On en retrouve de semblables dans tous les pays qui offrent HOU 36/ des circonstances naturelles analogues , et où l'exploitation des mines n'a pas été, dès son origine, assujettie par lesgou- vernemens, aux règles voulues par la nature des choses et con- sacrées par l'expérience. Plus l'exploitation libre et irrégu- lière des propriétaires a été prolongée, plus il est devenu dif- ficile de réparer le mal qu'elle a fait, et de se soustraire aux dangers qui en sont la suite. Aucun exemple ne peut être plus frappant à cet égard, que celui qu'offre le pays de Liège. Tou- tes lés ressources de l'art, toutes les mesures dictées par la prévoyance,trop tardivement invoquées,sont continuellement employées aujourd'hui, dans ces vastes exploitations, à lutter contre les dangers multipliés auxquels sont exposés les mi- neurs ; et trop souvent elles luttent sans succès. Les jour- naux de l'Europe entière ont retenti , il y a quelques années , de la catastrophe du 28 février 1812. Une inondation subite, produite par la rupture des digues qui séparoient l'exploitation de Beaujonc d'anciennes excavations abandon- nées et noyées , a enfermé dans les travaux de cette mine , yoouvriers et Hubert Goffin leur chef, qui, pouvant se sauver seul, préféra se réunir à ses compagnons ; ils n'ont été déli- vrés que trois jours après, au moyen d'un percement, dirigé d'une mine voisine vers la partie de la mine Beaujonc ou l'on présamoit avec raison qu'ils dévoient être réfugiés, et conduit avec autant de courage que d'habileté, par M. Migneron, in- génieur des mines de France. D'autres événemens de cette nature n'ont pas toujours un dénoûment aussi heureux. Dans les pays, au contraire , où l'exercice du droit régalien des mines, c'est à dire des dispositions législatives par les^ quelles les gîtes de minerai n'appartiennent à personne, de sorte que l'état seul peut en disposer et en autoriser l'ex- ploitation , à certaines conditions et pour le plus grand avantage de la chose publique, où l'exercice de ce droit, di- sons-nous, a contenu et dirigé dès l'origine, l'exploitation des mines de houille (i), on voit un petit nombre d'ouvertures n'enlever que peude terrain à la culture, et de vastes travaux intérieurs sagement dirigés et coordonnés entre eux, produire une grande quantité de houille, en ménageant cependant soi- gneusement l'extraction, de manière à préparer et faciliter l'exploitation future, et à ne rien faire perdre à l'avenir, de (i) Dans quelques pays, le droit régalien des mines ne s'étend pa» à la houille : il en résulte les inconvéniens qu'on vient de signaler ; la Saxe offre un exemple remarquable à cet égard. Dans tout le reste de i'Allemagne , la houille est soumise au droit régalien. Il en doit être de même en France, d'après les anciens documens de la législation française , sur les mines. Une ordonnance de Henri 11, classe le char- 368 HOU ce qui n'est pas absolument nécessaire aux jouissances du présent. Telles se présentent, par exemple, les mines de houille des environs de Sarrebriick, celles de Silésie, et celles des autres états dépendans de la monarchie prussienne. Dans plusieurs de ceux-ci, Textraclion avoit été commentée avec toute Tirré- gularité des exploitations abandonnées aux propriétaires de la surface ; mais le gouvernement est intervenu assez promp- tement pour réparer les désordres, et il a établi des exploi- tations qui seront long-temps florissantes. Des résultats aussi satisfaisans ont lieu par d'autres causes et dans d'autres circonstances. Lorsque la disposition des gîtes houillers nécessite de grandes dépenses , dès le commence- ment de l'exploitation, les travaux ne sont entrepris que par des compagnies qui peuvent supporter ces dépenses , et qui appellent aussitôt à leur secours toutes les ressources f1^ l'art. Telles sont, en France, les mines de houille d'Anzln (dépar- tement du Nord), de Litry ( département du Calvatlos), de Carmeaux (déparlement du Tarn), etc.; telles sont plusieurs des grandes exploitations de houille de l'Angleterre. Pour que l'exploitation d'un gîte de houille soit conduite avec régularité et puisse être durable, il est nécessaire que les parties du gite, voisines de l'affleurement, soient réservées entièrement intactes, afin d'éviter linfiltration des eaux de la surface dans Tinlérieur des travaux; il faut aussi que les travaux soient commencés au point le plus bas possible, efc conduits en remontant sur la couche, après avoir préparé, à ce point le plus bas, pour les eaux de l'exploitation qui doi- vent s'y réunir, des moyens d'épuisement, soit au moyen de machines, soit, lorsque cela est possible, au moyen de galeries d'écoulement ; il faut que des ouvertures, pratiquées à des ni- veaux différens et communiquant entre elles, assurent la libre circulation de l'air dans les ouvrages , afin que les mineurs respirent un air sain, et afin que le gaz hydrogène soit emporté à mesure qu'il se dégage de la houille; il faut que des boisages suffîsans, des muraillemens et des remblais assurent la solidité des excavations ; il faut que la couche de houille soit attaquée de telle sorte qu'on puisse en extraire, soit la totalité, soit une grandepartie, en ne laissant que les piliers nécessaires au sou' bonde terre parmi les substances qui ne peuvent être exploite'es que par concession du roi. Des ordonnances rendues en 1601 el en 1698, avoient, au contraire, permis l'exploitation aux propriétaires du sol, mais ces dispositions ont e'ié révoquées par l'ordonnance de 1744. D'après la loi du 2i avril ï8io, la houille ne peut être exploitée qu'en vertu d'un acte de concession délibéré en conseil d'état. "OU 35^ lien des terrains du toit, et disposant ces piliers de manière à poiivoirlesreprendreenrevenant sur ses pas, lorsqu'on se sera avancé sur la couche, aussi loin que possible des puits ou gale- ries d'extraction ; il faut, enfin, n'abandonner que les ouvrages devenus à jamais inutiles, et construire les galeries d'écoule- ment de manière à ce qu'elles puissent servir, après l'aban- don des travaux, et pour ainsi dire éternellement, à conduire au jour les eaux qui y affluent. Ces règles sont à peu près applicables à toutes les espèces de mines ; mais nous en avons off'ert ici le tableau abrégé , pour montrer combien elles sont opposées en tout à ce que peuvent faire de petits propriétaires qui exploitent chacun sur son terrain. Dans les mines de houille particulièrement , la régularité des travaux est d'autant plus nécessaire, que la grandeur des espaces excavés est plus considérable que dans les filons, et que le gaz inflammable qui se dégage incessam- ment de certaines qualités de houille, sur tous les points où la couche est attaquée, offre au mineur des dangers toujours renaissans, auxquels il ne peut échapperqu'en conduisant son exploitation avec une sagesse extrême. De trop nombreux accidens, qui sont presquetoujours la suite de l'imprévoyance attestent la nécessité de cette sagesse ; les journaux anglais en rapportent de fréquens exemples. A la mine du Horloz près Liège, une explosion souterraine, qui a eu lieu le lo janvier ibi2 , a coûté la vie à 69 ouvriers. A la mine de Latour près Saint-Etienne( département de la Loire), une explo^ sion semblable, qui a eu lieu le 8 juin 1817 ' au fond d'un puits de 80 mètres de profondeur, a blessé mortellement le mineur dont la lampe a allumé le gaz Inflammable , et la se- cousse produite s'est fait sentir si violemment à l'embouchure du puits , que les machines d'extraction, ainsi que la toiture qui les couvroit, ont été enlevées à une grande hauteur et qu'un ouvrier, placé à la surface près de la macliine, a été jeté à 100 mètres de distance. (F. Grisou. ) Dans les mines de houille entourées d'anciennes excavations abandonnées, dont on n'a point conservé de plans exacts, on court aussi continuellement le risque d'être submergé par les eaux amoncelées dans ces vastes réservoirs souterrains en s'en approchant imprudemment. Il faut alors faire précéder tous les travaux d'excavation sur les couches de houille, par des trous de sonde, que l'on perce dans plusieurs directions et que l'on avance continuellement, de manière à ce que leur extrémité soit toujours de 20 à 3o mètres en avant des tailles d'extraction ou de l'extrémité des galeries. Lorsque la sonde- rencontre des réservoirs d'eau, on les laisse s'écouler par le trou de sonde, ou si l'on juge qu'ils sont trop abondans, il 370 HOU- faut reboucher les trous avec soin, construire une digtie so- lide derrière le front de la taille , et reporter 1 exploitation d'un autre côté. Nousn'entreronspoint ici dansd'autresdétailssur la manière dont on doit préparer et conduire les travaux généraux d'cx- j>loilation dans une mine de houille, nous renverrons pour cet objet au mot Mine ; nous indiquerons seulement brieve ment quelques-uns des principaux modes employés pour Textraction même des couches de houille. Il est d'abord et surtout nécessaire , ([nedesiraimuxàerecon- noissance, c'est à dire des galeries menées soit sur la direction, soit sur la pente de la couche , aient bien fait connoître l'al- lure de cette couche, sur une assez grande étendue , et l'aient divisée en massifs préparés pour l'exploitation. Lorsque, dans ces reconnoissances , on rencontre des failles qui ont fait subir des dérangemens à la couche de houille, il faut recher- cher la partie de la couche qui a été rejetée hors de son aligne- ment, d'après les règles connues. ( V. Faille. ) L'exploitation proprement dite, a lieu par des modes très- variés, d'après la puissance de la couche à extraire, son degré d inclinaison, le degré de solidité du toit, etc. Quand les couches de houille sont très-inclinées ou pres- que verticales, on peut exploiter par les méthodes dites ou-, vragcs à gradins droits ou à gradins renversésy qui ont été indi- quées pour l'exploitation des filons {_V. Filons); c'est-à-dire qu'on dispose les entailles, de manière à donner à l'ensemble la forme d'un escalier, ou celle d'un escalier vu par-dessous. Ce dernier mode est ici préférable au premier, parce que le mineur ne marche alors jamais que sur les déblais, et ne court pas risque d'écraser la houille ; dans les deux modes, on en- lève toute lahouille.il faut, pourqu'ilspuissentêtre employés, que la couche ne soit pas trop épaisse ; lorsque l'épaisseur est de plus de deux mètres, on ne peut enlever , par un ouvrage , qu'une partie de la couche, et alors on fait successivement deux ouvrages à gradins, à côté l'un de l'autre, en commençant par la partie de la couche voisine du mur. Dans quelques mi- nes du midi de la France, on exploite les couches de houiite presque verticales, par de simples galeries d'allongement ou- vertes à diverses hauteurs, et entre lesquelles on laisse des massifs plus ou moins épais, pour servir de plancher, (^e mode a le double inconvénient de laisser une partie de la houille inexploitée , et de ne présenter jamais celle qu'on exploite à découvert que sur une face, ce qui augmente la difficulté de l'extraction; tandis qu'il y a toujours deux faces libres dans les gradins. Quelquefois on prend une partie de la houille laissée en massifs, au moyen de puits ou cheminées allant d'une galerie à l'autre. HOU 3,, Lorsque rinclinaison des couches est moindre, il faut plus de précautions pour soutenir le toi( ; il en f;:ul plus encore lorsque la couche est tout à fait horizontale. 11 arrive rare- ment, dans ce cas, qu'on puisse enlever Joule la houille; ce- pendant quelquefois le toit est assez solide pour le permettre. On exploite alors, soit encore par ouvrages à gradins, en donnant aux gradins, d'après les circonstances locales, des dimensions qui varient depuis 2 jusqu'à lo ou i5 mètres, soit par une seule taille droite qui a, dans les mines des environs de Mons , jusqu'à 5o mètres de front. Les gradins se pour- suivent en général sur la direction de la couche. Quand ceite couche est très-inclinée et quand les gradins sont fort grands, on pratique, pour chaque gradin, auquel on donne alors le nom de taille^ un chemin oblique à travers les déblais qu'on entasse derrière soi, pour descendre la houille jusqu'à la ga- lerie inférieure. Dans tous les cas, il faut rapprocher, autant que faire se peut,les déblais du front des gradins, pour forcer le courant d'air à passer au lieu même où travaiilentles mi- neurs. L'exploitation par une seule taille droite a cet avantage que la circulation de l'air est plus facile ; mais la houille n'est à découvert que sur une face. En général , les ouvriers sont placés sur la pente de la couche , et la taille se suit horizon- talement. Cependant, quand la pente est trop forte , on fait suivre à la taille une ligne oblique entre la direction et l'in- clinaison de la couche. On la dispose aussi quelquefois de cette manière , pour profiter des fissures qui existent dans la houille , qui affectent toutes à peu près la même direction, et qui rendent plus facile l'abattage en gros morceaux, A Gerschweiler, près Sarrebriick , on exploite une couche de I mètre 3o centimètres d'épaisseur , inclinée seulement de 10 à 12 degrés , par une seule taille droite, dont le front est à peu près sur la pente de la couche , et qui a près de 4.00 mètres de longueur. On étaye avec soin derrière soi , avec des pièces de bois de deux décimètres d'équarrissage , espacés de 3 mètres les uns des autres , et on disp(»se les rem- blais en piliers ou petits tas situés entre les étais; mais bientôt les étais se brisent ou ils entrent dans le nmrde la couche, et le toit s'affaisse peu à peu, sans se rompre ni s'ébouler, jus- qu'à ce qu'il repose en entier sur les tas de déblais bien comprimés qui n'ont plus alors que cinq décimètres de hau- teur. L'affaissement total a lieu dans le cours d'une année. On recoupe ensuite ce toit affaissé , dans la direction des voies qui vont de la taille à la galerie principale , afin de donner à ces voies la hauteur nécessaire à un roulage com- mode. Cet affaissement de toute la montagne , sans aucun 3^2 HOU ébranlement ; sur une aussi grande étendue , est un faîtà peil près unique dans l'exploitation des mines. Lorsque le toit n'est pas assez solide pour permettre d'extraire toute la houille , ce qui a lieu le plus souvent, on exploite par tailles ou chambres , que l'on avance, soit sur la direction de la couche , soit sur sa pente , soit sur une ligne oblique entre la pente et la direction , et entre lesquelles on laisse des massifs ou piliers de houille. La largeur des tailles et l'épaisseur des massifs varient en raison du degré de soli- dité du toit. Les tailles ont quelquefois jusqu'à 12 ou i5 mètres de largeur. Leur disposition, relativement aux ga- leries , est aussi très-variée d'après les circonstances locales. Ordinairement des galeries obliques descendent , de chaque taille , à la galerie principale, par laquelle les houilles sont conduites hors de la mine ou au bas du puits destiné à l'ex- traction. En avançant dans chaque taille , on remblaye et on boise derrière soi. Dans les mines sujettes au grisou ( V. ce mot) , on avance continuellement le mur qui sert à la conduite de l'airage , jusque tout près du front de la taille ^ pour que le courant d'air balaye et emporte sans cesse le gai inflammable qui se dégage de la houille. Quand on veut abandonner une partie des travaux , on extrait les massifs, en totalité ou en partie , en revenant du fond de l'exploitation vers le puits ou la galerie d'extraction. La méthode d'exploitation par ehambres est employée avantageusement quand on craint le voisinage de quelque amas d'eau , qu'on peut alors arrêter, au moyen d'une digue placée entre deux massifs. Dansd'autresminesà couches àpeu près horizontales, on ex- ploite par galeries parallèles à la direction que l'on croise par d'autres galeries qui leur sont perpendiculaires , en laissant comine piliers, des massifs à base à peu près carrée. Cette mélhode , appelée ejoploilation en échiquier , est désavanta- geuse à plusieurs égards, et surtout parce que les massifs qu'on a laissés isolés au milieu des remblais et des éboule- mens , sont ordinairement perdus. Quand les gites de houille sont extrêmement puissans f il faut les exploiter par les méthodes qui ont été indiquées pour l'exploitation àes atnas parallèles {V.GîtES DE minerai). Mais souvent , au lieu de suivre les modes prescrits par les règles de l'art, on extrait , à tort et à travers, dans la masse de houille, sans pouvoir étayer d'une manière conve- nable ; on occasione alors des éboulemens nombreux , d'où il résulte quelquefois une inflammation spontanée , et l'in- cendie du gîte entier. Quand,au contraire, les couches de houille sont extrêmement n o u 3^s minces et qu'on peutcependant les exploiter avec avantage, oa perce les galeries de roulage à travers les couches du toit , en leur donnant la hauteur nécessaire; mais en ne donne aux tailles qu une hauteur suffisante , pour qu'un homme puisse s'y tenir et s'y traîner , couché sur le côté. C'est dans cette position que le mineur entaille et arrache la houille , et que des enfans amènent la houille extraite jusqu'aux gale- ries, dans des espèces de traîneaux attachés a l'un de leurs pieds. Ce mode péniblese nomme tramil a coltordu (Krumm- hais arbeii); on l'emploie dans les mines de houille des environs de Meisenheim, pour exploiter des couches qui n'ont pas plus d'un à deux décimètres de puissance. On extrait sou-f vent alors , avec la couche de houille , une couche de pierre calcaire qui lui sert de toit, surtout quand celle-ci est pro- pre à la cuisson de la chaux , et l'on cuit la chaux au moyen de la houille , à la sortie même de la mine. Dans l'arrachement de la houille de son gîte , on cherche toujours à l'obtenir en aussi gros morceaux qu il est possible, parce que la houille menue et la houille en poudre ont moins de valeur. Il faut, pour parvenir à ce but, découvrir sur plu- sieurs faces le massif de houille qu'on veut arracher ; à cet effet , on creuse au moyen du pic , une rainure parallèle aux feuillets de la couche, à laquelle on donne, selon la puis- sance de la couche , depuis 3 ou 4- centimètres jusqu'à 2 dé- cimètres de hauteur , et que l'on entre aussi profondément qu'on le peut, quelquefois fusqu'à près de 2 mètres. On creuse cette rainure ordinairement au mur de la couche, en profitant de l'espèce de glaise qui s'y trouve souvent. Quel- quefois cependant , on la creuse dans l'épaisseur de la cou- che de houille , sur un des lits de schiste bitumineux qui la divise ; cette opération se nomme hamge. On soutient le L^oc de houille au dessus de l'entaille, au moyen de petits huôt saiûc que euigible. Oa Jui attribue de§ propriétés Ti O TT 375 saliilaires aux poitrines foibles , propriétés analogues à celles de la fumée des résines et des baumes. On prétend aussi que l'usage du feu de houille arrête la propagation des ma- ladies contagieuses, La houille produit , dans sa combustion , une chaleur beaucoup plus forte que celle produite par la combustion du bois. Les expériences de Lavoisier et de Kirwan, répétées depuis par des ingénieurs des mines de France , ont prouvé que , pour vaporiser une même quantité d'eau , il falloit em- ployer en poids 100 parties de houille, 100 parties de char- bon de bois, et 18^ parties de bois. Des essais comparatifs faits en grand dans les verreries, ont montré que, pour ces usines , 6 parties en poids de bonne houille produisent le même effet que 10 parties de bon bois de hêtre bien sec. En partant de la donnée de Lavoisier, sur T effet égal, à poids égal , de la houille et du charbon de bois , on peut conclure que les neuf millions de quintaux métriques de houille , extraits annuellement en France , et dont la va- leur sur le carreau des mines est de loà 11 millions de francs , remplacent, pour 1 usage, environ 3 millions de cordes , ou 12 millions de stères de bois, lesquels vaudroient sur place à peu près 20 millions de francs, exigeroient la coupe an- nuelle de 4^5 mille hectares de bois , et répondroient à un aménagement de qoo mille hectares. Les différentes qualités de la houille ne sont pas également propres à tous les usages. On peut , sous ce rapport , établir trois distinctions principales : i.° Pour la forge et pour les dift^érentes opérations qu'on fait subir au fer forgé, on ne peut faire usage que de houille, dite à maréchal^ qui est grasse , légère , qui se boursoufle et se colle en brtilant. Elle forme alors une voûte au-dessus du fer forgé , et y concentre et conserve la chaleur suffisante à son ramollissement, La houille propre à cet emploi peut être en poussière , comme en morceaux d'un gros volume. 2.° Pour les foyers domestiques, il faut que la houille brûle facilement , avec flamme brillante , et ne répande au- cune odeur désagréable. On peut employer de celle ma- nière, soit de la houille très-grasse, soit une qualité inter- médiaire entre la houille grasse et la houille sèche ; mais il est nécessaire qu'elle soit, au moins en pariie, en morceaux de grosseur moyenne. Quand elle est en très-gros morceaux, on peut en tailler des bûches qu'on place au fond des che- minées , qui durent long-temps et renvoient beaucoup de chaleur. Quand elle est en poussier , on en fait des boules , des briques ou des bûches , en mêlant ce poussier avec une bouillie d'argile delà) ce. De cette manière, la houille brûle. 376 H O U moins vile que quand elle est pure, mais elle donne moins de chaleur et moins de flammé. 3.° Pour les grilles des fourneaux à réverbère, des foyers de chaudières, des verreries, etc., il faut que la houille soit en morceaux, et brûle bien avec flamme. Toutes les variétés de houille peuvent d'ailleurs servir à ces emplois , mais elles donnent des degrés de chaleur très-dlfférens. La houille trop grasse y est moins propre que les autres qualités, parce qu'en se collant elle intercepte le courant d'air. Quand on emploie la hauillc dans les fours de verrerie à verre blanc ou à cristal, on recouvre les pots ou creusets, pour que les vapeurs bitumineuses de la houille n'allèrent pas la blancheur et la transparence du verre. On emploie la houille avec avantage dans les faïenceries , même pour cuire la faïence à pâle fine ; mais on n'a pas pu , jusqu'à présent, l'appliquer à la cuisson de la porcelaine dure. On emploie la houille de toute qualité dans la cuisson de la chaux. Plusieurs petites couches de mauvaise houille sont exploitées uniquement pour cet usage. La houille crue peut être employée pour la fusion et l'af- finage des métaux , sur la grille des fourneaux à réverbère. On l'emploie avec beaucoup de succès, de cette manière, en Angleterre , pour la conversion de la fonte en fer forgé ; mais on ne peut pas en faire usage dans les fourneaux à manches , ni dans les hauts fourneaux , où elle seroit en contact immédiat avec les minerais métalliques , parce qu'elle se boursoufleroit , se prendroit en masse, et empê-^ chèroit lefondage, et parce que les parties sulfureuses qu'elle contient s'uniroient facilement aux métaux et altéreroient leur qualité. Pour rendre la houille propre à cet emploi , il faut la priver de son bitume et des autres principes volatils qu'elle renferme, par une opération analogue à celle par la- quelle on réduit le bois en charbon , opération qu'on a ap- pelée à tort dcsoufvemenl de la houille , le soufre n'y étant qu'un principe accidentel, mais qui est une véritable car- bonisation, et dont le produit, nommé coak ou ciiiders par les Anglais , est un vrai charbon de houille. Toutes les houilles ne sont pas également propres à la carbonisation ; la houille grasse , qui contient beau- coup de bitume et peu de parties terreuses , donne seule de bon roak. Il ne faut pas cependant que le bituma 6oit en trop grande proportion, parce que, dans ce cas, tel ménagement que l'on apporte dans la conduite du feu , la houille se colle et se prend en une masse qui ne permet pas la combustion du bitume seul. Ainsi, les houilles les plus grasses sont réservées poyr être employées, crues, i. HOU 377 la forge, et l'on carbonise seulement les houilles grasses un peu moins bitumineuses. La carbonisation de la houille s'exécute soit à l'air libre," soit dans des fours, soit dans des fourneaux fermés. Dans la première méthode, on forme, sur le sol, des tas de houille, coniques ou en dos d'âne , de grandeur et de pro- portions très-variées. On place les plus gros morceaux de houille au centre du tas , et la menue houille près de la sur- face, qu'on recouvre d'un peu de terre ; on ménage, dansl'é- paisseur du tas, de petits soupiraux^qui aboutissent quelque- fois à un canal central ; on allume , par-dessus et près de l'un des soupiraux, avec quelques morceaux de houille en- flammée , et on laisse le feu se communiquer dans toute la masse , en ayant soin de boucher, avec de la houille en pous-^ sier ou avec de la terre , les ouvertures par lesquelles la flamme s'échappe avec force. Lorsque cette flamme, ces- sant d'être longue et rougeâtre , devient courte et blanche , on étouffe le feu. Une semblable opération dure , selon les dimensions du tas , d'un à quatre ou cinq jours. Ce mode est employé en Silésie , en Glamorgan et en Shropshire en An- gleterre , etc. Ailleurs, on élève des tas coniques de houille, au milieu d'une aire circulaire de maçonnerie , dans les murs de la- quelle sont pratiqués les évents ou soupiraux destinés à entre- tenir le courant d'air. Telle est la méthode usitée àDuttweiler, près Sarrebriick. Ailleurs on construit, au contraire, les tas coniques de houille autour d'un petit fourneau en briques , par lequel on met le feu , et par lequel le courant d'air s'établit. Ce mode est usité près de Wolvverhampton en Stafîordshire , pour une houille peu bitumineuse. A Carron en Ecosse, de grands monceaux de houille en dos d'âne sont mélangés de couches de minerai de fer, que l'on grille par la même opération , qui réduit la houille en coak. Dans quelques usines du Glamorgan, on grille aussi le mi- nerai de fer en carbonisant la houille ; mais cette opération s'exécute dans^ des espèces de fours à chaux, en cônes ren- versés , où l'on met des lits successifs des deux substances. Ici, le but principal est le grillage des minerais, et quelque- fois la houille se brûle entièrement, parce que le courant' d'air est plus vif. A Waldenburg en Silésie, on carbonise une houille très- grasse réduite eu poussière, en l'étendant, en couche de 18 à 20 centimètres d'épaisseur, sur le sol d'un four semblable aux fours de boulanger.On la laisse brûler pendant dix heures 378 K O II environ, sans la remuer; puis, lorsque la nature de Ja flamme change , et qu'on s'aperçoit que le charbon com- mence à se consumer, on le retire et on l'éteint avec de l'eau. Il est pris alors en une seule masse, qu'on est obligé de casser. Dans toutes ces opérations, le soufre que la houille con- tient se brûle aussi , mais seulement à la fin de la combus- tion du bitume. Le lord Dundonnald a indiqué un procédé pour carbo- niser la houille dans dei^vaisseaux fermés , en distillant une partie du bitume qu'elle renferme. Ce procédé est employé dans plusieurs usines d'AnQ,leterre et d'Ecosse. On remplit de houille des fours de brique de forme conoïde, ayant a à 3 mètres de hauteur et autant de diamètre à la base. On allume par une ouverture placée sur le sol. On conduit ensuite le feu à volonté , au moyen de plusieurs petits trous , placés à dif- férentes hauteurs, sur les parois du four, et qu'on ferme successivement, en allant de bas en haut, à mesure que la flamme gagne et que la houille se carbonise, il faut que le feu soit très-doux, et l'opération très-lente, pour qu'il ne se brûle qu'une partie des substances bitumineuses , et que l'autre soit seulement vaporisée. Au sommet du four est un conduit horizontal , par lequel la fumée se rend dans des tuyaux, qui serpentent dans des bassins d'eau froide, et où elle se condense en grande partie. Le reste se dégage par des cheminées très-élevées ; ce n'est presque que du gaz hy- drogène carboné qui se d.^gage ainsi , et quelquefois il s'en- flamme et fait explosion dea, Genre de plantes établi par R. Brown » aux dépens des Poiréties de Smith. Ses caractères sont : 3go H R A calice à deux lèvres, la supérieure k demi-divisée, obtuse î carène obtuse ; légume ventru, sessile , disperme ; semences couronnées. i^B.) HOVÈNE, Hovenia. Plante du Japon, qui s'élève à la hauteur d'une toise. Elle a une racine vivace , une tige épaisse, des rameaux cylindriques , des feuilles alternes , pétiolées , presque en cœur, ovales, acuminées , dentées et pendantes; ses fleurs sont disposées en panicules dichotomes , dont les pédoncules sont cylindriques , s'épaississent, et deviennent charnus et rougeâtres après la floraison. Cette plante , qui est figurée par Kœmpfer sous le nom de sicku , forme un genre , qui a pour caractères : un calice monophylle , velu intérieurement à sa base , et partagé en cinq découpures ovales, réfléchies et caduques ; cinq pétales ovoïdes, obtus , roulés en dedans et attachés au calice ; cinq^ étamines attachées au calice; un ovaire supérieur , convexe , glabre , chargé d'un style court, à stigmate trifide ; une cap- sule globuleuse , trivalve, triloculaire, contenant, dans cha^ que loge , une seule semence lenticulaire et rouge. Les Japonais mangent les pédoncules de cette plante. Sai saveur est douce , agréable , et approche presque de c^Ue d'une poire, (b.) ' HOVILEI. Nom de I'Haliotide oreille d'âne, llaliotis asinus ^ à x\mboine. (DESM.) HO-XEN-U. V. H^-TU-O-NAM. (LN.) HOXOCOQUOMACLÏT des Mexicains. Si l'on s'en rapporte à J. Gâmerarius et Glusius- , ce seroit le cassia so- phera ; mais il est plus probable qu'il s'agit d'une autre es- pèce, (ln.) H()-XU-U. Nom chinois d'une- l'acine citée par Cleyer , et qui est employée pour teindre les cheveux en noir. 11 est possible que ce soit la plante Co-MUC des Cochinchinois qui est employée au même usage. F. Cb-MUC. (ln.) HOYA, Hoya. Genre de plantes établi par R. Brown , pour quelques AscLÉviADES , qui n'ont pas rigoureusement les Caractères des autres. L'Asclépiade grimpante lui sert de type. La Stapélie de la Chine en fait partie. Il se dis- tingue par une corolle en roue ; des étamines à folioles charnues, dont l'angle intérieur se prolonge et retombe sur les anthères qui sont terminées par une membrane, (b.) HOYA. Nom vulgaire du Roseau DES SABLES , sur les côtes de la Manche, (b.) HRACH. Nom bohémien du Pois cultivé, appelé Hroch et Groch en Servie, (ln.) HRAFN-REYDUR et HRAFN-REYDCS. Noms is- HUA Sgt landais cle la Baleinoptère jubarte , selon M. Lacëpède. (DESM.) HRAFNAKLUKKA. Nom du Cresson des prés ( Car- damine praiensis , L. ) , en Islande, (ln.) HRAFN-OND. C'est, en Islande, le nom d'un Canard. (V.) HRAFN-TTNNA. V. Gagathes. (luc.) HREFNA. Nom d'un célacé , en Islande, selon M. Lacé- pède. (desm.) HREIN-DYR. C'est l'un des noms norvvégiens du Renne, quadrupède du genre des Cerfs, (desm.) HROGÎI. V. Hrach. (ln.) HRUTABOER. Nom donné, en Islande , à la Ronce DES ROCHERS ( Ruhus saxaUlis). (LN.) HU-LU-PA. Nom donné , en Chine , à la Carotte ( Baucus carotta^ L.). C'est aussi le nom d'une racine amère citée par Cleyer, et qui nous est inconnue, (ln.) HU-MUON. Nom donné, en Chine, à une plante que Loureiro appelle pergulan'a divaricata. (LN.) HU-PE. Au rapport de Cleyer, les Chinois nomment ainsi la Résine ou la liqueur résineuse qu'ils tirent du cyprès, (LN.) HU-QUA et HO-LO. Noms donnés par les Chinois à la Gourde ( CucurhUa lagenaria , L. ) , cultivée partout dans l'Asie. (LN.) HU-TSIAO, C'est, en Chine, le Poivre noir ( P/>rr nigrum , L.). (ln.) ' HUACAMOTE. Nom mexicain du Manioc doux, (b.) HUACO. Noni donné à I'ëupàtoire ayapana , dans l'Amérique méridionale , suivant Cavanilles. (ln.) HUAN. Un des noms vulgaires du Milan, (v.) HUANACO , HUANACU , ou GUANACO. V. Lama. (desm.) HUANACANE, Huanacana. Plante omljellifère à racine épaisse , d'oii sortent les feuilles et les pédoncules ; à feuilles longuement pétiolées, deux fois pinnées, les folioles linéai- res; à pédoncules plus longs que les feuilles, portant au- dessus d'un involucre général de six folioles linéaires , trois ombelles , dont l'intermédiaire , plus courte , est seule fer- tile ; chacune de ces ombelles pourvue d'un involucelle de près de vingt folioles très-courtes. Le fruit est ovale , aigu, composé de deux semences convexes et glabres en dehors. Cette plante , qui croîi, dans l'Amérique méridionale , forme ua genre qui se rapproche des SisoNs. (b.) 3q2 h U D HUANACUS. C'est, au Pérou, le Lama. V. ae mot, (s.) HUART. F. Plongeon LUMME. (v.) HUAU. Le mi/an se nommoit ainsi en vieux français. V. Milan, (s.) HUAU {Fauconnerie). Ce sont les deux ailes d'une huse ou d'un milan , qu'on altaclie au bout d'une baguette , avec des grelots ou sonnettes, (s.) HUBELBEERE. Nom allemand de la Canneberge , espèce d Airelle {Vardnium oxycoccus). (ln.) HUBERT. Nom vulgaire de I'Attelabe de la vigne, (b.) HUBERTIE , Huhertia. (ienre de plantes établi par Bory- Saint-\incenl ( Voyage aux îles de VAjricriie^, dans la syngé- nésie superflue. Il dilïère peu des Séneçons , et offre pour caractères : ud calice simple à écailles linéaires; un récep- tacle nu ; des demi-fleurons bifides ou très-enliers à la cir- conférence ; des semences munies de petites arêtes et sur— nion;ées d'une aigrette soyeuse ou sessile. Ce genre , qui diffère des Conyses par son calice simple, et des Baccarides par ses demi-fleurons , renferme deux espèces dont l'une , THubertie ambaville , est figurée pi. 14. de l'ouvrage précité. Ce sont des arbustes à feuilles alternes lancéolées et à fleurs disposées en panicule termi- nale eldichotome, qu'on trouve sur le sommei des montagnes volcaniques de l'île de la Réunion, et dont les feuilles sont employées avec succès contre les fièvres. Le genre Eriotrix de H. Cassini se rapprocbe beaucoup de celui-ci. (b.) HUGES, HURCES,HUZ.Divcrs noms de Bruyères; en Espagne, (ln.) HUCH. Poisson du genre Salmone , Salmo hucho , Linn. (B.) HUCXOLOTL. Nom mexicain du dindon mâle , selon Fernandez; la dinde s'appelle dhiiatotolin. (s.) HUDSONE , Hudsonia. Arbuste fort rameux, dont les rameaux sont filiformes et imbriqués de feuilles petites , en alêne , sessiles , droites et chargées de poils , les fleurs so- litaires , et sortant de bourgeons foliacés. Cet arbuste forme un genre dans la dodécandrie môno- gynie, qui a pour caractères : un calice tubuleux , ouvert au sommet, composé de cinq folioles lancéolées et obtuses; point de corolle ; quinze étamines ; un ovaire supérieur , oblong, velu supérieurement, et chargé d'un style de la lon- gueur du calice , à stigmate obtus ; une capsule cylindrique , plus courte que le calice , uniloculaire , et qui contient trois gem.nces arrondies d'un côté et anguleuses de l'autre. H tJ G 393 L'HuDSONE ÉRiCOïDE croîl dans la Virginie, (b.) HUÉMUL. V. GuÉMUL. (desm.) HUEN. L'Agrostide ou Eternue des blés ( Agrostis spica venii) porte te nom en Suède et en Daneinarck. (ln.) HUEQUE {Camelus amuranus) , Linn. Quadrupède amé- ricain du genre Lama. V. ce mot. (ln.) HUERNIA. Genre de plante consacrde par Robert Brown à la mémoire de Huer, premier botaniste qui récolta des plantes du Cap de Bonne-Espérance , et qui le premier donna des figures de stapeUa. Ce genre, de la famille des asclépiadées , a pour caractères: corolle campanulée, à limbe à dix découpures dont cinq denliformes contenant les parties de la fructiticationi couronne staminifère double , l'ex- térieure à cinq découpures écbancrées, Tintérieure à cinq folioles entières, subulées, gibbeuscs à leur base , alternes avec les divisions de la couronne extérieure ; cinq élamines; anthères à sommet simple -, masses du pollen droites , fixées par la base, ayant un côté cartilagineux; stigmate obtus; follicules presque cylindriques, lisses, à graines chevelues. Ce genre comprend un certain nombre d'espèces de sta- pelia , entre autres les st. campanuluia , venmia et giiilata ; peut-être doit-on y rapporter toutes les espèces de la troi- sième section du genre stapelia de Willdenow. (ln.) HUERON. C'est, dans le Rrabant, laKuPPEoulePuPUT. (V.) HUERTE, Hiiertea. Arbre du Pérou, qui forme, dans la pentandrie monogynie, un genre peu différent des ArÉties. Il a pour caractères : un calice à cinq dents; cinq pétales ovales et sessiles ; cinq étamines; un ovaire supérieur sur- monté d'un style à stigmate bifide; un drupe uniloculaire. (b.) E'arbre qui constitue ce genre de Ruiz et Pavon, paroit voisin du manguier dans la famille des térébinlhacées , sui- vant Jussieu. Les Espagnols du Pérounomment cette plante Cédro-macho. (ln.) HUET, HUETTE. Noms imposés tantôt à la Hulotte, tantôt au Scops. V. le genre Chouette, (v.) HtJEXOLOTL. Nom mexicain de I'Urubu mâle, et CiHUATOTOLiNest celui de la femelle, (v.) HUGONE, Hugonia. Genre de plantes de la monadel- phie décandrie , et de la famille des malvacées , dont les ca- ractères présentent: un calice simple, persistant, composé de cinq folioles ovales, concaves et coriaces; cinq pétales arrondis ou en cœur , plus grands que le calice , et adhé- rens par leur base à l'anneau urcéolé qui porte les ét.imines ; dix étamines réunies à leur base ; un ovaire supérieur, glo- buleux, chargé de cinq styles droits , à stigmates en tête ; une 3c,4 H TT T baie globuleuse , peu succulente , à peau coriace , k cinq lobes Liralves et monospennes. Chaque loge est une arilie qui s'ouvre en deux valves. Ce genre a été Tobjet d'une monographie de Cavanilles , el renferme trois espèces : la plus connue est I'Hugone de l'Inde, Hugonia mystax , Linn. , dont les feuilles sont alternes, ovales, entières et très-glahres, et qui a des épines opposées, roulées en dehors. C'est un arbrisseau sar- menteux qui croît dans l'Inde et les îles qui en dépendent; son écorce et sa racine ont une odeur qui approche de celle delà violette ou de l'iris de Florence; ces parties sont sudo- riGques , diurétiques , bonnes contre la morsure des serpens et les poisons. Oa en fait un grand usage dans les fièvres « dans les indammalions , et appliquées à l'extérieur pour ré- soudre les tumeurs. Des deux autres espèces, une a des épines semblables à celles de la précédente , c'est I'Hugone dentée; l'autre n'en ' a pas, c'est I'Hugone tomenteuse. La première croit k nie-de-France, où elle est connue sous le nom de liane à crochets, (b.) HUHNERBIST. Cinq plantes de la famille des caryo- phyllées portent ce même nom dans différentes parties de l'Allemagne ; ce sont : la Morgeline {Alsine média ) , le ^z/- r.uhalus bacciferus , le sagina procumbens ^ le linum radiola , et Varenaria pepldùles. ( V. Sabline.) (ln.) HUHUL. V. au mot Chouette, l'article des Chouet- tes ÉPERVIERS; (s.) HUILE VÉGÉTALE. C'est une espèce de suc propre qu'on trouve dans quelques végétaux. L'onctuosité, une flui- dité plus ou moins grande , l'indissolubilité dans l'eau , la combustion avec flamme , la volatilité à divers degrés de chaleur, sont ses propriétés principales, La plupart des plan»- tes contiennent plus ou moins de parties huileuses , ou d'élé- mens propres à les former. Les sels essentiels, les mucilages, les gommes, les résines , en fournissent par la distillation. Il y a deux espèces d'huile végétale , ïhuile grasse ou ficçe , et y huile essentielle ou volatile. De l'Huile grasse ou fixe. — L'huile grasse n'est pas aussi ré- pandue dans les végétaux que V huile essentielle. On trouve celle-ci dans presque (ouïes les parties des plantes , et on ne rencontre guère celle-là que dans les graines où elle doit former l'émulsion qui servira de lait à la plantule. Toutes les semences dont l'intérieur est rempli par une amande, don- nent de l'huile fixe. C'est un suc plus ou moins épais , sans odeur, peu coloré, onctueux, immiscible à l'eau, et qui n'en- tre en ébuUition qu'à uu degré de chaleur supérieur à celtu K U I 395 qui fait bouillir ce dernier liquide. Si cette huile est mêlée avec un mucilage très-abondant , elle devient susceptible d'être suspendue dans l'eau : telle est la nature des émuisions, des laits d'amande. On obtient les huiles grasses par expression. Les plus en usage dans les arts, sont celles d'OuYE, d'OEiLLETTE ou de Pavot, de Çolsa, de Raye ou Navette , de Moutarde , de Cameline, de Lin, de Chanvre, de Hêtre, de Sésame, de Semences froides , de Noix, d' Amandes, de Pignons. Chacune de ces huiles a des qualités qui lui sont propres ; {V. leurs articles). Il y a des huiles qui sontbutireuses, comme celles de cacao , de coco , de palmier, de baies de laurier , et beaucoup d'autres. Elles s'obtiennent par la décoction dans l'eau bouillante ; elles surnagent, et on les retire facilement. V huile d'ûlioe qu'on retire delà pulpe, est la plus parfaite de toutes. La pulpe qui recouvre le fruit de I'Argna de Maroc , faisant aujourd'hui partie du genre ELjEODENDRE , donne une huile propre à tous les usages. Quand on presse au moulin les graines à Vhuiie, celle qu'on retire la première, et par la simple expression, est la meil- leure et la plus douce. On la nomme huile vierge. On donne le nom à^échaudée à la seconde huile qu'on arrache des tour- teaux de la première, au moyen de plaques chaudes ou avec l'eau bouillante ; on appelle tourteau le marc qui sort de la presse; bons tourteaux ctMx qui contiennent encore un pea à'huile; etiourleaux secs ceux dont on ne peut plus en retirer par le pressoir. U huile grasse existe toute formée dans les graines ; niais pour qu'elle y soit sensible , et pour qu'on puisse la retirer ^ il faut que ces graines aient acquis une certaine maturité capa- ble de faire évaporer une partie de l'eau surabondante de vé- gétation ; tant qu'elles sont dans un état laiteux, on les tour- mentera vainement par le pressoir ; elles ne donneront pas un atome d'huile. Il se mêle toujours un peu à'huile volatile à Yhiùle grasse. Quand celle-ci perd son mucilage , elle se rapproche de l'au- tre, rancit et devient dissoluble dans l'esp rit-de-vin. Ces àQ\x% huiles st trouvent souvent dans la même graine , mais placées différemment. L'une est contenue dans l'amande, et l'autre dans la pellicule. Les huilés grasses se gèlent aisément, mais à différens de- grés de froid; sept ou huit degrés suffisent pour geler l'huile dolioe. Elles se combinent avec les acides ; elles s'unissent surtout avec les alkalls causti^es , et font avec eux le sa- 396 H U I von; elles dissolvent les résines, les gommes -résines , les baumes naturels, la cire , le caniplire , les parties colorantes des plantes. Quoique ces huiles aiëntde grands rapports entre elles , elles diffèrent par la proportion qui règne entre les élémensqui lés forment, ou par leur combinaison. Uhuile de paoot est très-douce et en même temps détestable pour brû- ler, parce qu'elle contient une grande quantité de mucilage. Plus ce mucilage est précipité et extrait àèshuîies., moins elles sont tenaces, épaisses et filantes , moins elles donnent de fu- mée en brûlant. Celles qu'on retire des crucifères ont un pe- tit goût acre et caustique; elles sont moins visqueuses que Vhui/e d u/ive ^ écument beaucoup plus ; échauffées au même degré de chaleur , elles déposent plus promptement et plus abon- damment , au fond des vases , un marc mucilaginèùx qui ne leur est plus miscible , et rancissent plus tôt en vieillissant ; mais elles lui sont préférées pour l'apprêt des étoffes de laine, quand même leur prix seroit égal , parce que , dans les pré- parations des laines, l'objet est de dissoudre des enduits et vernis graisseux déjà très-mucilagineux, et sur lesquels , par conséquent , les huiles les plus grasses auioient moins. d'action dissolvante. ' En général, la bonté relative des huiles grasses végétales consiste dans la juste proportion de leurs principes consti- tuans: il est donc essentiel de ne pas altérer ces principes quand on fabrique des huiles. Voy. dans le Cours d'Agriculture ce qui est dit sur la fabrication et la conservation de ces substances si utiles dans les arts, et pour la préparation des alimens. L'i^j//7eesliabase de tous lesa^pprêls, surtout dans le midi de la France où le beurre est rare. 11 importe donc de l'avoir dé- pouillée de mauvais goût, de l'empêcherde se rancir. Quand elle est détériorée , elle est préjudiciable à la santé, sans parler du goût rebutant qu'elle donne aux mets. La meilleure^ quand on la fait assez fortement chauffer, prend un goût fort qu'elle communique aux alimens. Dans ces pays, les fritures en con- somment beaucoup , parce qu'on la renouvelle chaque fois. Celle qui a servi est jetée, ou destinée aux lampes : c'est une perte. 11 est prouvé que cette espèce de causticité que Vhuile contracte au feu, se perd insensiblement après la troisième ébullition. Vhui/e alors est même beaucoup plus douce que la première fois : elle n'a ni mauvaise odeur, ni mauvais goût ; elle est très-saine. Il est donc avantageux de toutes snanières de se servir long-temps pour les fritures de la même huile. Les huiles à^olioe et à'amande sont indiquées dans les mêmes cas. La première est à préférer, à moins que celle d'à- H U I %; mande ne soit très-récemment faite. Vknile des graines des cucurbltacées produit le même effet, ainsi que toutes les huiles douces. Elles deviennent pernicieuses dès qu'elles sont acres et rances. L"'usage interne et habituel de 17?H/7e relâche beaucoup , et cause souvent des hernies : elle est en général indigeste. U huile grasse est un des liquides employés pour détremper les couleurs. On se sert, pour cet objet , de Vhuilede lin , de V huile de noix, àeV huile d œillet , ou. de pMot, etc. Celle de Un est le plus en usage , parce qu'elle est la plus facile à se dégraisser, qu'elle est la plus siccative et lamoins chère. Il faut la choisir claire , fine, ambrée, très-amère au goût ; la meil- leure vient de Hollande et de Flandre. Si l'on veut blanchir cette huile, on la met dans une cuvette de plomb , exposée pendant un été au soleil , et on y jette du blanc de céruse et du talc calciné. hliuile de noix est naturellement plus blanche que celle de lin, mais n'est pas aussi dessiccativc.On l'emploie de pré- férence pour broyer et détremper les couleurs claires, telles que le blanc , le gris et autres teintures brillantes qui se ter- nissent peu à peu à ïhuile de lin. Il faut choisir Vhuile de noix blanche, et sentant son fruit au goût et à l'odorat. lUhuile d'œillette est la plus blanche de toutes. Sa bonne qualité est d'être claire et sans odeur. On l'emploie principa- lement pour broyer et détremper le blanc de plomb. U huile d'ulii>e a trop d'onctuosité ; elle ternit les couleurs , les dorures et les vernis. U huile d'aspic ( F. Lavande) est inférieure à celle de lin, et sujette à être falsifiée avec l'essence de térébenthine. Elle est d'ailleurs au nombre des huiles essentielles dont nous al- lons parler. De l'Huile essentielle ou volatile. — Cette huile est placée dans la racine des plantes, dans la tige , l'écorcc , les feuilles, le calice des fleurs , les enveloppes des fruits et des semences , et jamais dans l'intérieur de ces dernières parties. Elle dif- fère de ïhuile grasse par sa fluidité , sa vaporabilité , son goût acre et pénétrant , par son odeur qui est celle de la plante qui l'a formée , par sa dissolubilité dans l'esprit-dc-vin , et son inflammabilité prompte et facile. On l'obtient ordinaire- ment par la distillation. Elle existe dans toutes les plantes au momentmême de leur naissance; mais elle se manifeste sur- tout quand elles sont sur le point de fleurir. Quelquefois on la remarque toute formée dans les loges ou vésicules qui la renferment, comme dansl'écorce d'orange et de citron; alors on la retire par expression. Chaque plante fournit son huile essentielle t^vot^vq ; et toutes sgs îi u i ces huiles quî ont entre elles les rapports que nous venons d'indiquer, diffèrent en même temps de goût, d'odeur , de couleur , de fluidité et de pesanteur. En général , leur cou- leur est blanche , tirant sur le doré, h'hmle de camomille est bleue : celle Ôl absinthe est verte; il y en a de rougeâtre. Quoique bien enfermées, la plupart jaunissent en vieillis- sant. Leur consistance varie comme leur couleur. Elles sont plus ou moins limpides; il s'en trouve même de figées. Quel- ques-unes nagent sur l'eau , d'autres sur l'esprit-de-vin ; d'autres vont se placer au-dessous de ces deux liquides. Elles ne se trouvent pas toujours dans les mêmes parties des diffé- rentes plantes. Dans le romarin , la menthe et beaucoup de labiées, ce sont les feuilles qui recèlent ces huiles ; c'est le calice des fleurs dans la lavande ; Tenveloppe des semences dans les ombellifères, etc., l'écorce des fruits dans les arbres de la famille des orangers, etc. Les huiles volatiles perdent , avec le temps , leur odeur et leur fluidité. On les leur rend en les distillant seules pour con^ centrer dans un volume plus petit le principe qui les rend aromatiques et fluides, ou avec d'autres plantes fraîches pour leur rendre ce principe qui leur manque , et qu'elles peuvent, reprendre aux corps qui l'ont; elles en sont alors l'excipient. Ces /z««Ve5 brûlent avec une extrême facilité. Les acides, et surtout l'acide nitreux, les enflamment. Elles dissolvent le camphre, le soufre, le phosphore, les baumes, les savons, les huiles grasses , les résines, les fécules colorantes, et quel- ques métaux. Les huiles par distillation , dont on fait le plus usage, sont les huiles de cannelle , de girofle , de cédrat , de berga^ motte , de citron , de lai>ande , de genièvre , à'origan, etc. Les parfumeurs donnent le nom d'essences à ces huiles^ et ils les combinent avec l'alcohol, les pâtes, les pommades et d'au- tres substances. Leur esprit recteur s'évapore aisément, mais il n'est pas si fugace que dans les hidles, ou prétendues essences àejasmin^ de iuljéreuse., de narcisse^ de jacinthe , de lis, etc. Celles-ci et plusieurs autres de cette nature , ne se tirent pointpar distillation, mais par transfusion et expression : pour cela, on prend la bonne huile de ben qu'on imprègne de par- fum. F. Ben et Jasmin. « Souvent, dit Bomare, on altère les huiles essentielles qui sont rares ou chères , soit arec de Vhuile grasse de ben ou d^ amande douce , soit avec de l'esprit-de-vin , ou avec quel- que autre huile essentielle de peu de valeur. » Voici la manière de connoître cette falsification : Une goutte dliuile essentielle pure, mise sur du papier, doit s'évaporer à une douce cha- leur, et ne laisser sur le papier , ni giaisse ni transparence*, H U I 399 elle doit aussi se dissoudre entièrement dans l'esprît-de-vin ; mais elle ne doit pas diminuer de quantité dans reau,nl ren- dre l'eau laiteuse, ni effacer récriture, ni donner au linge qui en seroit imbibé une odeur de îérébenthine. (d.) HUILE DE BANCOUL. On la retire du fruit du Ban- COULIER. Le commerce qu'on en fait dans les Iles-de- France et de la Réunion est de quelque importance pour les colons qui la recueillent, (b.) HUILE DU BRÉSIL. C'est le BaumedeCopahu. (ln.) HUILE DE CADE. V. Genévrier oxycèdre. (ln.) HUILE DE CASTOR. Synonyme de Huile de ricin. (B.) HUILE DE GABIAN. F. Bitume liquide, (desm.) HUILE GRASSE. V. Huile végétale, (s.) HUILE DE MÉDIE. C'est le Naphte, espèce de Bi- tume LIQUIDE, (ln.) HUILE MIINÉRALE ou DE PIERRE , de Gabian, DES Barbades, d'Ecosse , de Médie, etc. Ce sont autant de noms de cette variété de Bitume liquide , connu vulgairement sous le nom de Pétrole , et dont la couleur tire sur le brun. Quand il est d'une couleur très - claire et volatile, c'est le Naphte^ qui a été aussi appelé huile éthèrée minérale. Voyez Bitume, (luc.) HUILE DE PÉTROLE. V. Bitume liquide, (desm.) HUILE DE RAZ. V. Galipot. (d.) HUILE DE \ITRIOL. V. Acide sulfurique. (luc.) HUISTIS-DOCHI des Arabes. C'est I'Hipociste. (ln.) HUIT. Un des noms qu'on donne au Pinson dans l'Or- léanais, (v.) HUITIÈME CIEL. V. Firmament, (pat.) HUIT AIN. C'est, parmi les oiseleurs, un Chardon- neret qui a huit pennes de la queue terminées de blanc, (v,) HUITRE, Ostrea. Genre de coquilles de la classe des Bi- valves , dont les caractères sont d'être : irrégulière , adhé- rente , inéquivalve , à charnière sans dents , avec une fossette oblongue , sillonnée en travers, donnant attache au ligament. Il n'est personne qui ne connoisse les huîtres , au moins de nom. Le grand usage qu'on en a toujours fait, comme ali- ment, les a de tout temps rendues célèbres. Pline, Cicéron , Horace , et autres anciens écrivains, en parlent avec enthou- siasme. Le premier rapporte qu'on en étoit si friand de son temps , qu'elles étoient payées des prix énormes , et qu'Api- cius , ce fameux gourmand , avoit inventé une méthode pour les conserver. Celles qu'on estimoit le plus à Rome , nais- soient près d'Abyde , au détroit des Dardanelles ; dans le 4oo H U I lac Lucrîn, près de Pouzzole, el à Brindes, ville de la Cala- bre. A-i'Istote dit qu'on les iiourrissoit pour les avoir plus grasses. Ltes huîtres d'Angleterre passent aujourd'hui pour les meil- leures de l'Europe. Les plus estimées de France se trouvent sur les côtes de la Bretagne ; et les plus grosses , sur celles de la Normandie , d'où elles sont apportées à grands frais à Paris , pendant l'automne et l'hiver. On appelle huîtres vertes, celles qui, après avoir été pêchées. dans la mer, sont jetées dans des elangs ou fosses où aborde la mer dans les plus hautes marées seulement, et où la tran- quillité de l'eau favorise la naissance et l'accroissement des plantes marines vertes , telles que les uh>es, varecs , conferves^ etc. Ces huîtres , au bout d'un certain temps, plus ou moins long , suivant la saison , prennent la couleur de ces plantes , en s'imprégnant de bourgeons scminiformes de même cou- leur, qu'elles ne cessent de produire pendant tout l'été , et qui les rend beaucoup meilleures au dire des amateurs. Pour avoir de honnes huîtres , il faut les choisir nouvelles , d'une grandeur médiocre , et qu'elles aient été prises dans une eau claire. Celles qui vivent dans la vase conservent tou- jours un goût désagréable. On prétend qu'elles sont apéritives et sudorifiques , mais qu'elles nourrissent peu. Le fait est qu'elles sont de très-facile digestion , et que les amateurs en consomment souvent, sans aucun inconvénient , des quanti- tés très-considérables. Beaucoup de personnes ont une ré- pugnance invincible à manger des huîtres crues , soit par l'idée attachée à leur nature glaireuse , soit par celle qui naît de leur état de vie ; et cependant on les mange plus rarement crues que cuites. Lorsqu'on ouvre une huître , on trouve d'abord son man- teau divisé en deux lobes qui tapissent les valves , et qui sont cillés en leurs bords , ensuite quatre feuillets membraneux , traversés de stries, qui sont autant de tuyaux capillaires ou- verts à leur extrémité postérieure ; ces feuillets , qu'on peut appeler les ouïes ou les branchies , car \\s font réellement la fonction des poumons, c'est-à-dire, qu ils séparent de l'eau l'air nécessaire à l'existence de raninial( Voyez au mot Co- quillage), s'étendent inégalement sur le devant de son corps. La bouche est formée par une ouverture assez grande , bordée de quatre lèvres assez semblables aux ouïes , mais six à huit fois plus courtes. Derrière les branchies, on trouve une grosse partie charnue , blanchâtre et cylindrique , qui tourne sur un muscle abducteur central , et qui renferme l'es- tomac et les intestins. Cette partie est semblable au pied des autres testacés ; mais elle u'est pa^ susceptible de dilatation HU I 4„ ttl de contraclion. Enfin , siir le dos du muscle on voit encore îe canal des intestins. L'anatomie de Vhuîlre a e'té faite anciennement, mais d'une manière incomplète , par Lister. Depuis peu , Poli l'a refaite dans son ouvrage sur les tesiacés des mers des Deux-Siciles, et il n'a rien laissé à désirer. C'est au texte de cet ouvrage et aux superbes planches qui l'accompagnent, qu'on renvoi© ceux qui voudroient de plus grands détails à cet égard. Ce naturaliste a appelé Peloris 1 animal de Vhuître. Les recherches des anciens et des modernes, sur la génération des huîtres , n'avoient rien appris de positif sur la manière dont elle a lieu; mais Poli s'est assuré, par l' obser- vation , qu elles sont hermaphrodites et vivipares , c'est-à- dire, qu'elles produisent leurs petits d'elles-mêmes ou sans accouplement. Le mode de leur multiplication diffère très- peu de celui des Anodo^tes, si bien développé par Cuvier. Elles jettent, au commencement du printemps, un frai qui res- semble à une goutte de suif, dans laquelle on voit, avec l'aide de la loupe , une infinité de petites liuîtrcs toutes formées, et qui s'attachent aux rochers , aux pierres , et aux autres corp» solides dispersés dans la mer. Les huîtres ont un grand nombre d'ennemis. On rapporte que les crabes, pour les manger avec sécur-ilé, ont l'instinct de jeter une petite pierre entre leurs valves, lorsqu'elles sont entr'ouvertes,pour les empêcher de se refermer; mais ce fait est plus que susceptible d'être mis en doute. Parmi ces en- nemis, il en est plusieurs qui s'introduisent furtivement et se laissent enferme/ dans la cavité des valves ; d'autres \cs per- cent lentement , et tous finissent par tuer l'animal pour vivre à ses dépeoB. Dicquemare a observe que Vhuîire, pour se dé- fendre des premiers, avoit la faculté de lancer très-fortement Teau qu'elle tient en réserve dans son corps, et on sait de- puis long-temps qu'elle peut retarder et même empêcher l'ac- tion des seconds , en augmentant à volonté 1 épaisseur de sa coquille à l'endroit du danger. Toutes les huîtres , proprement dîtes , s'attachent aux rochers , aux racines Aes arbres ou à elles-mêmes , de manière à ne pouvoir plus , sans un effort étranger , chan- ger de place pendant tout le cours de leur vie. Les circons- tances locales seules déterminent le mode de leur position. Au Sénégal, dans l'Inde et dans l'Amérique méridionale, aux embouchures des rivières, c'est principalement aux ra- cines desarbres, et surtout des mangliers , qu'elles s'attachent. Dans les lieux où il y a des rochers, elles s'y fixent de préfé- rence , et lorsqu'il n'y a ni arbres ni rochers , elles se fixent les unes sur les autres, et forment des bancs qui s'épaissis- XV. .^(j Uo^ H U I sent journellement, et qui ont quelquefois plusieurs lieues de gueur sur plus ou moins de largeur. J'en ai observé de celte espèce sur les cotes de rAmérique septentrionale , où les coquilles se superposoient annuellement et éloient tellement amoncelées, quonne pouvoit s'empêcher de croire qu'elles ne dussent un jour être le type de bancs de pierre calcaire, semblables à ceux qu'on trouve dans l'intérieur des continens. Beudant , en procédant lentement, est parvenu à faire vivre dans l'eau douce , quelques espèces de ce genre. Dans les pays peu habités , où il se trouve une grande quantité à^ huîtres , on les ramasse pour en faire de la chaux , et cette chaux est de la meilleure qualité. Les huîtres fossiles sont très-communes dans la nature ; les unes sont littorales, et les autres pélasgiennes. Linnseus avoit réuni aux huîtres, des coquilles qui, quoique leur convenant par le caractère commun de n'avoir pas de dents à la charnière , s'en éloignoient beaucoup sous les autres rapports. Bruguière , et après lui Lamarck , les ont séparées en formant des genres nouveaux, sous les noms de pEiGisE , de Marteau , de Lime, de Perne , de Houlette et de Gryphée. ( Voyez ces mots. ) U ne reste donc«dans le genre que celles qui se fixent, par leur test même, aux corps étrangers ; le nombre , dans Linnœus , n'en est pas très-considérable ; mais on voit dans les douze planches pu- bliées par Bruguières, dans V Encyclopédie par ordre de matières^ qu'il s'est fort augmenté par suite-de ses recherches, tant en coquilles marines qu'en coquilles fossiles. Les espèces les plus communes ou les plus remarquables dans ce genre sont donc : L'Huître commune , qui est presque ronde > ondulée et imbriquée par des lames , et dont une des valves est apla- tie et entière. Elle se trouve sur les côtes de l'Europe f de l'Afrique et de l'Asie. C'est elle qu'on mange à Paris. L'Huître gasar esttnince , et sa valve inférieure est con- vexe et plus épaisse que l'autre , qui est très-plate. Elle se trouve attachée aux racines des arbres , à l'embouchure des rivières de l'Afrique et de l'Inde. On la regarde comme très-délicate. L'Huître feuille est ovale , et a les côtés obtusément plissés. Elle se trouve dans la mer des Indes , attachée aux gorgones et autres polypiers. L'Huître cochléate est demi-ovale , très-excavée , écail- leuse , presque en spirale à son somnxet , avec un opercule très-mince. Elle se trouve dans la Méditerranée , attachée aux madrépores et autres corps étrangers. L'Huîtreplicatule a la coquille plissée longitudinalemcnt, HUI 4o3 lesplis rugueux ; la valve libre, plus petite et plus aplatie. Elle se trouve sur la côte d'Amérique ; c'est celle que j'ai observée en si grande quantité en Caroline. On la mange , et on préfère les individus péchés dans les rivières où re- monte la marée. Elle est toujours fixée sur d'autres coquilles delà même espèce, et parvient rarement à une grandeur re- marquable, attendu que les jeunes qui s'attachent annuelle- ment sur les vieilles, gênent d'abord les mouvemens d'ouver- ture des valves de ces dernières , et finissent toujours par les empêcher complètement de s'ouvrir. Une de ces coquilles que j'ai rapportée, en porte seule douze petites de différens âges. L'Huître diluvienne est courbée en arc , plissée exté- rieurement , et ses bords ont des dents intrantes , droites et aiguës. Elle se trouve souvent en état siliceux, dans les schistes et les marbres , en France et ailleurs. On trouve dans la même nature de terrain , des huîtres fos- siles d'une grandeur gigantesque , de plusieurs pieds de dia- mètre, par exemple ; mais elles sont encore peu connues. Quinze espèces à' huîtres fossiles sont figurées par Lamarck , vol. 14. des Annales du Muséum, (b.) De la Pèche , du Parcage et du Commerce des Huîtres en France , phr M. LaïR , secrétaire de la société d agriculture et de com- merce de la ville de Caen , et membre associé de la société phi- lomathiquede Paris. Parmi les phénomènes que la nature , si féconde en mer- veilles , offre de toutes parts à nos yeux, ïkuître est un des animaux le plus capable de piquer la curiosité et d'exciter l'étonnement ; privée , du moins en apparence , de la vue , de l'ouïe et de l'odorat , elle ne présente d'abord à l'obser- vateur qu'une existence problématique ; emprisonnée entre deux valves aussi dures que sa chair est molle , à peine peut- elle les entr'ouvrir pour prendre sachétive subsistance. Aussi, pour l'ordinaire , n'arrache-t-elle de nous qu'un regard de pitié. Mais dans sa demeure paisible , dont l'extérieur rabo- teux oppose une forteresse inexpugnable aux plus redouta- bles tyrans des mers , et la dérobe aux regards de l'homme , elle jouit de facultés , qui , mieux connues , la vengeroient , sans doute , de notre injuste mépris. Je laisse au naturaliste à observer la forme et le genre de vie de ce mollusque , au médecin à raisonner sur la salubrité de l'aliment qu'il four- nit ; âmi personnes délicates , à vanter son goût exquis. Je ne me propose ici que d'examiner les huîtres comme objet pro- ductif; je vais parler de la manière de les pêcher , de les par- quer , et de l'importance de leur commerce. mosus). Dioscoride ne parle que d'un hyacinthus. Il lui attribue une tige verte de la grosseur du petit doigt, lisse , de la lon- gueur d'une palme , et terminée par une grappe chevelue , courbée , à fleurs pourpres et pleines. Elle naissoii d'un bulbe. Anguillara veut encore que ce soit la jacinthe orientale. Cor- dus est pour Vhyacinihus racemosus , mais Tragus prend ce dernier pour Vhyacinthiis àonl parlent Virgile , Ovide , Co- lumelle , Gallien, Palladius, Anguillara n'est pas de cet avis, puisque , selon lui, il s'agiroit ici de la Flambe ou im germa- mVa.Lobel croit que Vhyacinthus deThéocrite et d'autres poètes grecs , est l'iris xiphium ou une espèce voisine. Enfin , il est des naturalistes qui disent que Vhyacinthus des botanistes grecs et Vhyacinthus des Latins sont des iris. Les Grecs nom- moient aussi Hélonias purphiranthes (fleurs rouges ) et hacci- rtûm (^vaccinum ) , une plante que l'on paroît confondre avec le* iris et le lin ( V. Saima$. inSoUn^ 1222 ). On l'emplovolt 4lo H y A pour teindre les toiles et la laine en bleu ou en violet, et il paroît que la pierre précieuse , dite Hyacinthe, devoit ce nom à sa couleur semblable à l'une des couleurs fournies par la plante ci-dessus, que l'on croit être le Vacciet (hyacinihus <:omo5M5) , à fleurs bleues , dont le suc abondant teint en un bleu noirâtre. Les anciens ont dit peu de chose sur les pro- priétés et les vertus de la plante hyacinthus ; nous ignorons même si c'étoit un objet de culture, d'utilité ou d'agrément; mais nous ne devons pas douter qu'ils aient connu notre Ja- cinthe originaire du Levant , si agréable par son odeur suave et les richesses de ses variétés. L'on voit d'après le Pinax de C. Bauhin , que de son temps les botanistes avoient classé sous le nom à^ hyacinthus .<\xxq.\- ques Iris , la Tubéreuse , les Jacinthes et les Scilles à fleurs bleues. On nommoit celles-ci spécialement hyacinthes étoilées ( hyacinthus stellaris ou stellatus ) , parce que leur co- • rolle à six divisions s'ouvre en étoile lors de son parfait épa- nouissement. Après Bauhin, on a étendu le nom à hyacinthus à I'Agapanthe ou Tubéreuse bleue du Cap , à des Alétris et à quelques liliacées , jusqu'à Tournefort qui a établi sur les vraies hyacinthes un genre auquel il réunit la Tubéreuse (polyanihes iuljerosa), assemblage bizarre de plantes, les unes à ovaire infère et les autres à ovaire supère. LinnaKus ne laissa pas subsister cette réunion; il en fit une autre , Vhyacinthus et le muscari de Tournefort , consacrée par l'usage , quoi- que on se soit élevé contre. En effet , Adanson blâma le premier cette réunion de Linnœus , et il sépara de nouveau les Hyacinthes à fleurs en grelots (muscan, Tournefort.) des espèces à fleurs tubuleuses, {hyacinthus, Tour.). Des- fontaines, Moënch, Decandolle sont de cette opinion, mais Adanson réunit la cyanella et \ hyacinthus , Linn. ; ce qui est encore plus sujet à critique. Depuis Adanson, les naturalistes ont essayé d'établir quelques genres particuliers sur des es- pèces à' hyacinthus , offrant quelques différences dans les ca- ractères. Ces genres sont : i.° L'Argolasia de Jussieu ou Vanaria d'Ailon, ouheriliera de Michaux, ïonàé SUT (l' hyacinthus lanatus, L.); Lamarckavoit d'abord réuni cette plante au genre J//a/m , et avoit été imité par M., Persoon ; ce diiatris et Vargolasîa sont très-voisins et appartiennent à la même famille , les Iridées ; 2." le Zuc~ CAGNIA de Thunberg, fondé sur Vhyacinthus viridis ; 3."* le Bellev ALLIA de M. Lapeyrouse; il a pour type Vhyarintlius romanus; ces deux genres n'ont pas été adoptés ; et 4-*' le DiP- CADI de Moënch, constitué sur ï hyacinthus se rôti nus , L. , es- H Y A ^3, pècs qu'on rapporte maintenant aa genre lachenalîa de Jac- quln , lequel est très-voisin du drimia du même botaniste , au point que quelques-uns les ont réunis à Vhyacinthus. V. Jacinthe, (ln .) HYAGOU. r.YACou. (s.) HYADES. Assemblage de petites étoiles placées sur le front du taureau, près de la brillante étoile d'Aldebaran. (pat.) HYADE , Hyas , Léach. Genre de crustacés. V. Inachu.*; (L.) HYiENANCHE. Lambert a donné ce nom à un genre que Thunberg a appelé Toxicodendron, (b.) HYiffiNOPSOLON , Yainopsolon. Suivant Dioscoride , c'étoitun des noms du Basilic sauvage. V. Ocymastrum et OCYMOÏDES. (ln.) HYALE, Hyalea. Genre de coquilles , qui offre pour ex- jpression caractéristique : coquille bivalve , régulière, à valves inégales , bombées , cornées , transparentes , bâillantes sous le crochet, tricuspides à leur base. Ce genre a été établi par Lamarck sur une coquille décrite et figurée par Forskaël et placée parmi les Anomies, coquille qu'Abildgaard avoit nommée Gavoline , et qui est figurée pi. E 35 de ce Dictionnaire. Cette coquille, de la grandeur d'une noisette , est jaune mince, demi-transparente, tronquée sur le devant, pointue en dessus vers le milieu, latéralement aplatie avec un angle aigu- la valve la plus courte est striée dans différentes directions , et la plus longue a quatre sillons. L'animal qui habite cette coquille fait sortir de la cavité , qui résulte de la différence des valves , deux ailes lobées , comprimées , transverses, mobiles, violettes à leur milieu, minces et transparentes en leurs bords ; entre ces deux ailes se voit une carène comprimée, violette, à la base de laquelle est attaché xm étendard élevé, comprimé, transverse, mo- bile, demi-orbiculaire, fixé des deux côtés aux ailes , transpa- rent et violet en son milieu. Ce singulier animal s'éloigne, comme on voit, des autres mollusques. C'est du Clio dont il se rapproche le plus. Il déploie ses ailes, dit Forskaël , pour voguer sur la surface de la mer , et il le fait avec une grande rapidité. Il se trouve dans la Méditerranée et dans l'Océan ; mais partout il est rare. Guvier en a publié l'anatomie , n." 92 du Bulletin des Sciences , par la Société Philomathique Bory Saint- Vincent, dans son Voyage aux îles d'Afrique , en a décrit et figuré une espèce plus petite. Il l'appelle 4^. II Y B Hyale papilionacée , et lai donnepour caractères -.valve in- férieure trlfurquée, tronquée antérieurement et obliquement. Brown et Laraartinière avant lui, en ont décrit et figuré une autre , dont la coquille est triangulaire , et dont l'a- nimal n'a qu'un très-petit étendard avec de grandes ailes. Deux espèces nouvelles de ce genre, les Hyales lai>*céo- lÉE et A angles relevés sont figurées par Le Sueur, dans le nouveau Bulletin des Sciences , par la société Philoma- thique, année i8i3. J'ai observé, voguant sur la mer entre l'Europe et T Amé- rique une espèce fort remarquable par les longues poin- tes courbées dont les angles sont armés. Je lui ai donné le nom d'HYALE cuspidate, et je l'ai figurée planche E 35 ; cependant il seroit possible qu'elle n'appartînt pas à ce genre. J'ai vu les ailes de l'animal développées ; mais il s'est contracté au moment de sa capture, et est mort san» me permetre l'examen de son organisation. Ce n'étoit cer- tainement pas un mollusque , mais plutôt un animal ana- logue à celui qui habite dans les Daphnies et autres genres voisins. Le monoculus telemus àe Linneeus est une espèce de ce genre , ainsi que l'a reconnu Hermann fils, (b.) HYALITHE. ou Muller-Glass des Allemands. Variété de quarz-hyalin concrétionné qui a été regardée par quelques- uns comme unhydrate de silice, et à laquelle se rapporte aussi la Fion'ie ou Amiatite de Thomson. Voyez Quarz-hyalin CONCRÉTIONNÉ. (LUC.) HYALOS. L'ambre a été désigné sous ce nom chez les anciens, (ln.) IIYATELLE. F. Hiatelle. HYBANTHE , Hybanthus. Nom donné par Jacquin à une plante qui a été depuis réunie aux "Violettes, (b.) HYBEMACE. Synonyme de Bouton (G^mma), dans les ouvrages de Linngeus. (B.) HYBLÉE, Hyblœa. Genre de lépidoptères établi par Fa- bricius , et que je crois devoir rapporter à celui des Hermi- îsiES, V. ce mot. (l.) HYBOS, Hybos. Genre d'insectes, de l'ordre desdiptères, famille des tanystomes , tribu des empides , établi par Jd, iVIeigen et adopté par Fabricius. M. Bonelli m'en avoit communiqué une espèce , avec le nom générique à^acromya. Ce genre est très-voisin de celui que le premier de ces naturalistes appelle tachydromye , mais que j'avois établi long- temps avant lui sous la dénomination de SiQUE , siens. Dans l'un et l'autre les antennes sont insérées sur le devant de la tête , beaucoup plus courtes qu'elle , et com- posées, de de,u* articles ovoWes ou coniques , avec une soi€ E. jo ,M. Gfairon J/oruIe/ i>ri///' j. /)i)ntr ,) . 'J^,.'//,'//,/,- or/ut,-/- ■ ïî Y B ^33 longue à son extrémité, leurs palpes sont courbés au-dessus de la trompe , deux de leurs patles ont les cuisses renflées ; mais dans les hybos , ce caractère n'est propre qu'à leur der- nière paire de pattes ; les intermédiaires ou les antérieures , ou même les quaîre , nous le présentent dans les siques; ici la trompe est perpendiculaire , là où dans les hybos elle se dirige en avant , de sorte que ces diptères se rapprochent à cet égard des asillques, etparoissentlier celte tribu avec celle des empides. M. Meigen cite deux espèces dhybos, rapportées aussi au même genre par Fabricius. L'une est 1' Hybos funèbre, liyhos funehiis. Son corps est d'un noir foncé ; les ailes sont obs- cures avec une tache marginale noire; les cuisses postérieures sont grandes et dentelées en scie en dessous. L'autre estl'HY- BOS à PATTES JAUNES hybos flaiùpes ; elle est très-noire , avec les pieds jaunes et les ailes hyalines. L'une et l'autre se trou- vent en France et en Allemagne. Le stomoxe asiUfovme de Fabricius, et qui me paroit peu différer de son diuctrîa muscaria , figuré par M. Coquebert , Illust. icon. insecl., dec.,3. tah. 25, fig. 12, estaussiun hybos. Son corps est noirâtre , avec les ailes tachetées de cette couleur. On trouve cet insecte en Italie, et quelquefois aux environs de Paris. Je l'ai pris dans des prés humides, près de Montmo- renci. Ces diptères sont petits et doivent avoir les habitudes des autres de la même tribu, (l.) HYBOUCOUCHU. C'est un fruit d'Amérique , dont oïl retire une huile qui sert de remède contre des vers subcuta- nés, auxquels les habitans sont sujets. On ignore à quel genre appartient l'arbre qui porte ce fruit, (b.) HYBRIDE du grec v-lp:? métis; se dit des animaux et des végétaux nés de père et de mère de différente espèce, comme le mulet de l'âne et de la jument. La question de la formation des métis est fort curieuse en histoire naturelle ; nous en traitons aux mots mélis , mulet , monstre ai génération , V. ces articles, (virey.) HYB RIDELLE , HyhrideUa, Genre de plantes établi par H. Cassini dans la famille des synanthérées, pour placer la Camomille globuleuse d'Ortega. Son caractère le plus re- marquable consiste en ce que l'ovaire des fleurs hermaphro- dites semble muni d'une aigrette formée d'une touffe circu- laire de poils, lesquels appartiennent à la base de la corolle. (B.) HYBRIZON , Hybrizon. Genre d'insectes, de l'ordre des hyménoptères, tribu des ichneumoi^ides , établi par M. Fal- len , auquel il donne pour caractères : antennes grêles ; 434 H Y D abdomen péliolé ; ailes supérieures à trois ou deux cellules costales ; la cellule intermédiaire et la cellule spiculaire nulles. Il dit que ce genre, dont il a observé quatre espèces en Suisse , est très voisin de celui de hracon ; je soupçonne qu'il répond à celui que j'ai nommé aiysie. V. le ajple en massue de Panzer , Faun. insecl. Genn., suppl. 102, iah. i5, 16. (l.) HYCH, Bous el-gezàyr {^roseau des îles)^ Bous FARSY {^roseau de Perse'). Autant de noms arabes de la canne a sucre d'Egypte ( saccharum œgypiiacum , W. ) Voyez. Canamelle. HYCLEE , Hycleiis. Je désigne ainsi ( Règne Anim. par M. Cuvier, tom. 3. pag. 817 ) un nouveau genre d'insectes coléoptères, de la famille des trachélides , formé aux dépens du genre des mylabres. Leurs antennes n'ont que neuf articles, v et dont le dernier très-grand , en forme d'ovoïde. Je rapporte à ce genre le mylabre argenté de Fabricius et ceux qu'Olivier anommés, dans la partie enlomologique de l'Encyclopédie métbodique ,argus ci imponctué. On en trouve une autre espèce aux environs de Montpellier et en Espagne , qu'IUiger avoit aussi placée avec les mylabres, soijs le nom de claoieorne. Elle est très-voisine de la précédente, (l.) HYDATIDE, Hydatis. Genre de vers intestinaux , qui offre pour caractères: un corps vésiculeux, au moins postérieu- rement , et terminé antérieurement par une tête munie de trois à quatre suçoirs, avec ou sans crochets. Budolphi lui a donné le nom de Cysticerque. Les vésicules lymphatiques , appelées hydaiides par les mé- decins , et qu'on remarque sur le foie , le cerveau et les autres viscères de l'homme et des animaux , sont connues de tout temps ; mais ce n'est que depuis un petit nombre d'an- nées qu'on sait qu'elles sont produites par un ver fort voisin des ténia par ses caractères génériques , ou mieux qu'elles «ont le ver lui-même. F. au mot Ténia. Ce genre'jdiffère de celui des ténia , principalement parce que les espèces qui le composent offrent postérieurement une expansion membraneuse , semblable à un sac. il en dif- fère encore par l'habitation , qui n'est jamais l'intérieur des intestins, mais la surface des viscères , des membranes , et quelquefois l'intérieur du lard ; du reste , les organes de la bouche sont les mêmes , c'est-â-dire , qu'on y remarque quatre suçoirs ; et au centre de leur réunion , ou une cou- ronne de crochets, ou une dépression qui est peut-être la bouche. Il n'est pas étonnant , pour ceux qui ont étudié les animaux des hydatides , que leur connoissance ait échappé si Long- H Y D 435 temps aux observateurs. Il faut, lors même qu^on est certain de leur présence , une longue suite de tentatives , souvent infructueuses , pour pouvoir découvrir leur tcte , la seule partie de leur corps qui porte des caractères organiques particuliers. Edvv. Tyson, anglais, a le premier découvert les hydatides sur le foie des brebis ; ensuite Thomas Berlholinus les ob- serva sur le foie des chèvres; Peyerus, dans les cochons , etc. ; mais c'est à Pallas que l'on doit le premier travail bien or- donné sur elles. Il est inséré dans ses Miscelhinea zoologica. Depuis lui , Goèze , Batsch , Blocb et autres ont multiplié les faits ; cependant, malgré les recherches de ces hommes célèbres , il reste encore beaucoup de choses à désirer sur les animaux de ce genre. Mougeot , jeune médecin , vient de publier un Essai zoolugique et médical , en forme de thèse , où on trouve réuni tout ce qu'on a écrit jusqu'à présent sur elles , quelques faits nouveaux et un mode de traitement , contre une de leurs espèces. Les hydatides sont assez généralement superficielles , c'est- à-dire , qu'on voit une partie de leur corps engagée dans la substance du foie ou de tout autre viscère, et une partie sail- lante en dehors : on dit assez généralement, parce qu'il ar- rive souvent, surtout lorsqu'elles sont très-multipliées, qu'on en trouve qui sont entièrement cachées. Les espèces qui vi- vent dans le lard, telles que la ladrique et la delphiniqiie ^ sont, au contraire , bien plus souvent renfermées dans 1 intérieur de cette substance , que visibles à la surface. Il ne paroît pas qu'elles puissent jamais changer de place. La grandeur des hydatides varie suivant les espèces, selon l'âge et le tempérament de l'animal aux dépens duquel elles vivent. Pallas en cite de la grosseur du poing , et Fortassin m'en a fait voir une encore plus grande. On m'a dit qu'on en avoit montré une à la Société de Médecine de Paris , qui étoit plus grosse que la têle ; mais celles de cette taille sont fort rares. Leur figure varie infiniment , en se rapprochant cependant plus ou moins de celle d'un sphéroïde ou d'un ovale aplati. Leur couleur est ordinairement blanche ou de- mi-transparente ; leur substance composée de membranes superposées plus ou moins épaisses , et formées de fibres cir- culaires visibles seulement à la loupe. On remarque toujours dans leur intérieur, à la partie opposée à la tête, un disque plus épais , et souvent une grande quantité de tubercules grais- seux , que l'on a pris pour des œufs. Elles sont à moitié remplies d'une lymphe , ordinairement transparente , d'une saveur huileuse , salée , très - foible , qui devient nébu- leuse comme de la gélatine, lorsqu'on lui fait éprouver l'effet '435 II T D de la chaleur k une haute température. Ces vésicules ont uii mouvement propre qu'on pourroit appeler péristallique , et qui est souvent très-vif. L'animal, dont la membrane de ces vésicules fait partie, varie dans ses proportions , relativement à la vésicule , selon les espèces. La tête n'est pas toujours terminale; lorsqu'elle est en place , souvent elle est placée dans son intérieur par le refoulement de sa partie antérieure et de son cou. C'est de là que cette tête agit sur le viscère pour sucer la lymphe , et en remplir la capacité de la vésicule. J'ai été souvent dans le cas d'observer les animaux des hydatides , et j'ai eu d'abord beaucoup de peine à voir leur tête. J'indique comme moyen le plus prompt et le plus cer- tain d'y parvenir , de détacher la vésicule , de la placer en- tre deux lames de verre , en ayant soin de ne faire appuyer ces lames sur la partie antérieure , qu'en dernier et très- lentement ; alors la tête , poussée par la lymphe , devient saillante ; la vésicule se crève , et on voit distinctement au microscope , même souvent à la loupe , et les quatre su- çoirs , et les crochets , s'il y en a. Cette partie ainsi préparée , peut se conserver desséchée un laps de temps in- déterminé. Leshydatides, dansl'homme, serencontrentprincipalemont Burle foie etlarate; mais onen voilaussisur la paroi interne de la matrice, sur le placenta, dans l'intérieur des muscles , etc. on accuse celles qui se placent sur le sac hydropique , d'être une des causes d'une espèce d'hydropisie; et celles qui se trou- rent sur le cerveau, de donner lieu quelquefois à la folie. Sou- vent les hydatides existent dans les viscères de l'homme , sans qu elles produisent d'effets sensibles; mais souvent aussi des douleurs extrêmement aiguës, temporaires ou continues , en sont la suite. On a des observations qui prouvent qu'elles ont conduit directement à la mort. Outre les douleurs citées, on peut encore préjuger leur présence par la débilité des su- jets , leur maigreur , l'oppression qu'elles font éprouver à iVstomac , etc. Mallieureusement , il n'y a pas de remède assuré contre leurs ravages. Fuyez l'ouvrage de Mougeot , précité. En général , elles sont peu communes dans l'homme ; mais il n'en est pas de même dans les animaux. Il est très-rare de tuer un lièvre , surtout dans un pays marécageux , sans en trouver plus ou moins sur son foie. Les rats y sont également fort sujets. Elles produisent , dans les moutons, deux terri- bles maladies , qui en enlèvent chaque année de grandes quantités , et qui queUjuefois dépeuplent des pays entiers ; ça Veut dire le vertigo , occasioné par l'HYDATtDjE céré- H Y D 437 BRÀLE , et I» pourriture causée par les Hydatides VERvéciNE et OVILE. Elles forment dans le cochon celle niai.iflie con- nue de tout tenips sous le iiom de hiârerie: On les trouve aussi dans le renne , la chèvre , le bœuf; mais elles y sont bien moins dangereuses. On reconnoît qu'un mouton a des hydatides dans le cer- veau, lorsqu'il tourne souvent el vivcmenl la lête d un même côté ; lorsqu'il. court très-vite , et sarrêle subitement sans cause apparente ; enfin', lorsqu'il paroil conmje fou. Les ra- vages de ces hydatides sont lenis, mais presque toujours cer- tains ; ils conduisent à la mort. A l'ouverture des cadavres «i on trouve le cerveau rapetissé. Mais les désastres causés par cette espèce dhydatide sont moins fréquens et moins généraux que ceux de celles qui at- taquent les poumons , et causent ce qu on appelle la pourri-' ture^ espèce d'hydropisie par épanchement, qui est très-com- mune , surtout parmi les moulons qui paissent dans les en- droits marécageux ; et elle en enlève souvent d immense» quantités. Les signes caractéristiques de celte maladie, sont la pâleur des yeux et des gencives , la contenance peu fenne de l'animal , la facilité qu'a la laine de se détacher pour peu qu'on la touche , la foiblesse toujours croissante , et enfin la mort. A l'ouverture des cadavres, on trouve le foie d'un brun pâle : on voit , à sa surface , une grande quantité d'hydatides , ainsi que sur les poumons et autres viscères. La lividité et la mollesse affectent généralement toutes ces parties. On a remarqué que les moutons qui paissent dans les lieux arides sont bien moins sujets à la pourriture, et que ceux qui paissent dans les lieux salés , ne, le sont point du tout. On en a conclu , et avec raison, que le meilleur préservatif et le meilleur remède étoit une nourriture très-sèche , et l'usage habituel du sel. La pratique s'est ici trouvée d'accord avec la théorie. Cependant , quand on voit des moutons évidem- ment attaqués de celte maladie ou du vertigo , le mieux est de les vendre au boucher. L'usage de leur viande n'est d'au- cun danger pour l'homme ; seulement , quand la maladie est avancée ,, elle est molle et fade , et par conséquent moins agréable à manger. Des injections d'eau salée sont aussi le remède contre les hydatides de la matrice , selon l'observa- tion de Précy. V. l'ouvrage de Mougeot. Dans les cochons , les hydatides se logent non-seulement dans les viscères , mais encore , comme on l'a dit , dans la substancemême du lard et des muscles. J'en ai vu un où il s'en trouvoit tant , qu'elles se touchoienl presque partout. On A appelé la maladie qu'elles occssionent dans cet animal, ln-drme , païce^u'oû s'est imaginé qu'U y ayoit de grand» ^38 H Y D rapports entre elle et la lèpre. Cette maladie est connue de tout temps, et la vente des cochons qui en sont infectés, est défendue par les anciennes ordonnances de police ; on avoit même créé des charges sous le titre de jurés langueyeiirs de porcs , dont Tobjet étoit de s'assurer , par l'inspection de la base inférieure de la langue , lieu où les hydatides se pla- cent volontiers , si les cochons , exposes sur le marché , n'étoienl point ladres. Outre ce symptôme qui est certain , lorsqu'il se montre, on juge encore que les cochons sont at- taques d'hydatides , lorsqu'ils sont tristes, qu'ils se remuent difficilement , que leurs forces les abandonnent , que la racine des soies devient sanguinolente , etc. Les remèdes qu'on a indiqués pour cette maladie , ne sont rien moins qu'assurés, et le mieux est de tuer les animaux qui en sont attaqués. Les Allemands appellent celte maladie ^««^/z. Les genres Hydatigère , Cénure et Echitsocoque r.nt été établis aux dépens de celui-ci; le premier par Batsch, les deux autres par Rudolphi. Lamarck les a adoptés tous trois. Au moyen de ces soustractions , ce genre ne contient plus qu'une douzaine d'espèces. Comme ces divisions ne sont pas encore généralement adoptées , je ne les prends pas en considération dans l'énu- mération suivante. L'Hydatide globuleuse est cylindrique ; sa vésicule est terminale , globuleuse et très-grosse. Elle se trouve sur le foie , la rate , et autres viscères de l'homme et du cochon ; c'est celle dont il a été fait principalement mention ci-de- vant , et qui parvient à la grosseur du poing. L'Hydatide viscérale est globuleuse ; sa vésicule est an- térieurement large, et postérieurement pointue. Elle produit souvent les fausses grossesses. ( Voyez l'ouvrage précité de Mougeot. ) Treuller a décrit et figuré dans une dissertation imprimée à Leipsick;, une hydatide viscérale, qui n'avoit pour lête qu'un petit tubercule non rétractile. Cet auteur croit que plusieurs espèces ont été confondues sous ce nom. L'Hydatide celluleuse est renfermée dans une vési- cule cartilagineuse , qui a deux prolongemens à sa partie postérieure. Elle se trouve dans les tégumens des muscles de l'homme. Steinbuch a cherché à prouver, dans une thèse imprimée à Erlang , que cette espèce ctoit la même que celle des cochons , mentionnée plus loin. L'Hydatide uydatique a le corps allongé , plus large an- térieurement , la vésicule très-petite , et la tête sessile. Elle ae trouve sur le foie des rats. L'Hydatide vervécine a la vésicule très-grande j le corps H Y D /^^ court, rugueusement imbriqué. Elle se trouve sur le périioine des moutons. Voy. pi. D 20 où elle est figurée sous le nom d'H\DATiDE DES MOUTONS , qu elle porte vulgairement. L'Hydatide cérébrale , qui vit en grand nombre sur une vésicule commune , n'a point de vésicule propre visible. Elle se trouve sur la cervelle des moutons, à qui elle cause le vertigo. J'en ai compté jusqu'à cinq cents sur une seule. Il est possible que ce soit cette espèce qui cause quelquefois la folie dans l'homme. L'Hydatide du cochots, qui est conique , renfermée dans un double sac , âont l'intérieur est adhérent par sa base. Elle se trouve dans le lard et sur les viscères des cochons, chez qui elle cause la ladrerie. Les hommes n'en sont pas toujours exempts. On en a fait un genre sous le nom de Finna. Wer- ner et son éditeur ï'ischer, représentent de petits globules pé- doncules en place de la couronne de crochets ; mais je suis certain d'avoir vu de véritables crochets. L'Hydatide du dauphin est conique , renfermée dans un double sac ; sa tête est grise , cylindrique et sans crochets. Voy. pi. D 20 où elle est figurée. Je l'ai trouvée dans le lard et sur les viscères d'un dauphin, pendant ma traversée d'A- mérique en France. Outre ces espèces , 11 y en a encore trois qui se trouvent sur les viscères du lièvre , trois sur ceux de la brebis , et une sur ceux du bœuf. Elles méritent d'être mentionnées , mais ne sont pas encore suffisamment distinguées. Treutler a publié , à Leipsick, une dissertation sur plu- sieurs vers intestinaux observés dans l'homme. Il décrit une nouvelle espèce A'hydalide , qu'il appelle tœnia albo punctata , trouvée dans le plexus choroïde d'un homme qu'elle a fait mourir imbécile et fou. Les individus de cette espèce , au lieu d'être, comme ceux de ïhydatide cérébrale., placés en grand nombre sur un sac commun , sont agrégés , et s'unis- sent par leur base au moyen d'une membrane. Leur forme est globuleuse ; les plus grands ont six lignes de diamètre , et les plus petits une ligne ; leur couleur est gris ponctué de blanc ; leur tête n'a que six crochets. Il seroit possible de croire , contre l'opinion de Treutler, que cette espèce ne fût réellement pas distincte de la cérébrale , et que le lieu où elle s'étoit fixée, a seul motivé les différences qu'elle pré- sente. Elle est , au reste , très-bien figurée en couleur dans l'ouvrage de ce médecin. Il est probable que ce genre est très-nombreux ; mais son étude n'a pour ainsi dire été qu'effleurée. On doit beaucoup attendre des recherches qui se font en ce moment dans difTé- renies parties de l'Europe, (s.) 44o H Y D HYDATIGÈRE, Hydatigera. (ienre établi parBalsch, aux dépens des Hydatides. Ses caractères sont, selon Lamarck, vessie externe et kisteuse, contenant un ver libre presque tou- jours solitaire ; corps allongé, aplati, ridé transversalement, ayant postérieurement une vessie caudale , pleine d'eau , plus courte que le reste du coîps et se terminant antérieurement par un renflement muni de quatre suçoirs et d'une couronne à crochets. Ce genre, qui fait le passage entre les Hydatides et les Té- nia, renferme trois espèces, dont l'une, IIIydatigère lan- céolée, se trouve entre les muscles des bonnnes et des singes. Les deux autres sont figurées dans Rudolphi, tab. ii, n.^* 1 et 2, et se trouvent : lliiDATiGERE témacée dans le foie du rat, rHYDAiiGÈRE chalumeau dans le péritoine du che- val. (B.) HYDD. Nom du cerf dans le pays de Galles; la biche y est appelée hyddes^ et le faon élain. (desm.) KYDERE, Hydera. Genre d insectes, de l'ordre des co- léoptères, section des pentamères ''amiile des clavicomes, tribu des macrodactyles, ayant pour caractères : tarses à cinq articles distincts, entiers ; le dernier terminé par deux forts crochets; antennes presque filiformes, guère plus longues que la tête, insérées près du bord interne des yeux, toujours sail- lantes, de onze articles ; le premier^ de la longueur des autres pris ensemble, presque cylindrique, aminci vers sa base, un peu courbe; le second le plus grand ensuite, presque en forme de cône renversé ; les autres très-courts, transversaux, un peu en scie, formant, réunis, une petite tige presque cylindrique, un peu amincie vers son origine, obtuse au bout; palpes ter- minés par un article pins gros, tronqué, presque obtrigone ; mandibules arquées, ayant trois dents, dont deux à la pointe, et une plus petite au-dessous ; menton très-court et transvei- sal ; avant sternum point avancé sur ta bouche. Ces caractères distinguent évidemment ces insectes des parnes de Fabricius, ou des dryops d'Olivier , avec lesquels ils ont été confondus, et des hélérocèrcs, autre genre de la tribu des macrodactyles. Leshydères avoisinent les premiers, sous le rapport de la forme des pattes, des tarses particuliè- rement ; et les seconds, quant à celle des antennes. Mais le premier article de ces antennes est très-long : ies mandibules ne sont dentelées qu'à leur extrémité ; ies palpes se terminent en une petite tête ou massue fortement tronquée; le menton est très-court et ne se présente que sous la figure d'une ligne transverse à la base de la lèvre ; le lobe extérieur de l'extré- mité des mâchoires paroît plus étroit que l'interne et se re- courbe sur lui i celui-ci offre d'ailleurs un petit crochet écaii- H Y D 44t leux, de même que dans les dryops; enfin, l'avant-sternum n'est point dilaté et avancé sur la bouche. Les hydères ont le corps elliptique et convexe ; le labre saillant, grand, en cône transversal, un peu échancré au ntii- lieu du bord antérieur ; les palpes courts, et dont les maxil- laires plus grands ; les deux lobes des mâchoires membra- neux, courts et ciliés; la languette grande, membraneuse, évasée vers l'extrémité supérieure, qui se termine par un bord presquedroit, oulégèrement échancré; lecorselettransversal, en trapèze, rebordé sur les côtés, plus large postérieurement; l'écusson petit ; les élytres crustacées, allongées et recouvrant des ailes ; les pattes allongées, avec les jambes longues, grê- les, sans épines; les tarses à cinq articles, dont les quatre premiers courts, presque égaux, et dont le dernier beaucoup plus long, grossissanl vers ie bout, est armé de deux crochets forts et mobiles ; ces articles sont entiers. J'ai établi ce genre (Règne animal, de M. Cuvier, tom. 3, p. 268.) sur le parnus aruwinalus àcT Rhi'iclus, figuré parPanzer, Faun.insect. Gcrm., fosc.&, tab. 8. Son corps est long d'environ trois lignes et demie, noirâtre, avec les pieds bruns; le cor- selet a une échancrure à ses angles postérieurs, ce qui les fait paroîlre bidentés ; les élytres se terminent en pointe , et ont des rangées longitudinales de points enfoncés. Il se trouve au nord de l'Allemagne, mais très-rarement aux environs de Paris ; il a été pris sur les bords de la Seine, par M. Desma- rest. Le dtyops picipes d'Olivier me paroît être congénère, (l.) HYDNE. V. Eriîîace et Eurchin. (b.) HYDNOCARPE, Hydmcarpus. Arbre de Ceylan, à feuil- les alternes, pétiolées, lancéolées, dentées, glabres, à fleurs axillaires , qui seul forme un genre dans la polygamie dioc- cie. Les caractères de ce genre consistent : dans les pieds her- maphrodites, en un calice de cinq folioles ; une corolle de cinq pétales : un nectaire de cinq écailles; cinq étamines ; un ovaire surmonté d'un seul style ; une baie uniloculaire et po- iysperme. Les pieds femelles portent des fruits. Les feuilles de cet arbre mentionné, par Burmann sous le nom de makulii , font vomir et servent à enivrer le poisson, (b.) liYD^OPïiOKE.Hydnophoru. Genre de polypier, établi par Fischer, dans les mémoires de la Société des naturalistes de Moscou. Il est caractérisé ainsi : Polypier pierreux, crustacé , en masse glomérulée ou en expansions lobées, subfoliacées, ayantla surface supérieure parsemée d'étoiles lamelleuses à centre solide pyramidal, et plus ou moins élevées. > i^^3 H Y D Ce genre faisoit partie des Héliolitiies de Guettard , des AsTROÏTES de Knorr, et des Monticulaîres de Lamarck. Il renferme huit espèces, savoir : i.° \S liydnophore de Demidoff^ figuré dans le Muséum de ce nom , tab. 4- Originaire de la mer des Indes. 2.0 U Ilydnopliorf. de Pallas, figuré tab.49, "•" ^^^ Solander et Ellis. De la mer des Indes. 3.» hTIydnophored'Esper, figuré dans Esper, tab. 3i, n.° 3. Fossile en Allemagne. 4.." IJIIydnophoie de Cimer^ figuré dans ieâ Mémoires de Moscou, fossile. 5." h' HYd/iopIiore de MoU , figuré dans les mêmes mémoires et également fossile. 6.0 U lîydnopharede Knoir^ figuré dans Knorr, supp. b, d, 4i fossile. 7." h'Hydnophore de Guettard^ figuré dans Guettard, lom. 3, pi. 6-1, n."* I et 4-, fossile. 8." UHydnopJiore de Bourguel , figuré dans Guettard, tom. 3, tab. /S, fig. 6, 7 et 8. (B.) HYDNORE , Hydnoi-a.^om donné par Thunberg au genre Apiiyteia de Linni»'us. V. ce mot. (ln.) HYDNUM. Théophraste nomme ainsi la Truffe (Jycoper- don tuher , Linn. ). (b.) ; HYDRACHNA, Fabric. Genre d'insectes coléoptères. V. Hygrobie. (l.) HYDRAGHNE, Hydrachna. Genre d'arachnides tra- chéennes , famille des holètres, établi par Millier, et compre- nant, d'après lui, toutes nos acarides à huit pattes ciliées et propres à la natation, Linnœus , Geoffroy et Degeer, ont confondu ces arach- nides avec les mites ou acarus. Le dernier cependant en avoit fait , dans ce genre , une division particulière , celle des miles aquaticfues. Millier les en a séparées sous lenomd'hydrachnes, et en a donné, en 1781 , une belle Monographie, enrichie d'excellentes ligures. Fabricius les a d'abord réunies à ses trombidions ; mais, dans son iS/s/ème des AnÛiales^ il les dis- tingue génériquement, et comme par un renversement de noms qui lui étoit familier. 11 avoit déjà consacré celui à' hydrachna , à un genre de co- léoptères (F". Hygrobie); il appelle aiax^ les hydrachnes de Millier. Ces acarides , ainsi que toutes celles dont la bouche consiste, suivant lui, en un suçoir, forment, avec les nyctéribies, sa huitième et dernière division des antliates, caractérisée par l'absence des antennes ; ainsi des arachnides sont associées à des insectes diptères , réunion monstrueuse ou opposée à l'ordre de ia nature, mais qu'on ne peut guère H Y B 413 éviter, toutes les fois que l'on ne fonde une méthode que sur un certain nombre d'organes. Millier paroît n'avoir été conduit à séparer les hydrachnes des acarides que par la considération de la différence des mi- lieux qu'elles habitent. Lescaractères qu'ilassigne à ces acarides aquatiques, ne les distinguent nullement des acarides terrestres. Il n'a pointfait d'ailleurs une étude spéciale de laforme de leurs organes de la manducation. Il est néanmoins certain que plusieurs de ces hydrachnes offrent, à cet égard, de grandes dissemblances. Ainsi les unes ont de véritables mandibules et se rapprochent destrombidions. Parmi celles qui en sont dé- pourvues et dont la bouche forme un suçoir, que j'ai désigne sous le norn de siphon, afin de le distinguer de celui des insec- tes suceurs, les unes ont le siphon saillant, en forme de bec; leurs palpes sont avancés avec un appendice mobile au bout, en manière de doigt; leur corps est globuleux; les autres ont le corps déprimé, le siphon très-court ou point saillant, et les palpes simples et courbés. Telles sont , quant aux parties de la bouche, les modifications que j'ai obseivées, et d'après lesquelles j'ai partagé, dans le même ordre de rapports, les hydrachnes en trois genres : Eylaïs, Hydracune, Limtso- CHARE. Leur réunion a composé ma famille des Hydrach- NELLES ; mais n'ayant étudié qu'un petit nombre d'espèces, et ne pouvant, avec le seul secours de Miiller, rapporter d'une manière certaine , à chacun de ces trois genre , les espèces qu'il a décrites , je présenterai ici le genre d'hy- drachne tel que ce naturaliste l'a établi , ou dans ses ancien- nes limites. Les hydrachnes, que Rœsel considère faussement comme des araignées aquatiques^ vivent uniquement dans les eaux tranquilles ou stagnantes, mais non corrompues, et où vé- gètent des plantes; elles y sont très-communes au printemps ; elle nagent avec facilité, au moyen des poils et des cils dont leurs pattes , particulièrement les postérieures , sont frangées, et se nourrissent d'animalcules aquatiques. Les plus grandes n'ont guère plus de deux lignes de long , et il n'est pas sur- prenant que parmi les plus petites, plusieurs aient échappé aux observations des naturalistes pour les ces. On les voit par milliers pendant tout! eîé, dans les mares et toutes les eaux douces de la Caroline ; et comme ces mares sont sujettes à se dessécher, la nature a donné à ce poisson, comme à TExocet, au moyen d'une membrane qui ferme sa bouche , membrane observée par Duméril, la faculté de vivre hors dei'eau, de marcher en sautillant, pour aller chercher d'antres mares. Je me suis souvent amusé à les mettre sur la terre, et toujours je les ai vus se diriger du côté de l'eau la plus voisine, qu'ils étoient dans l'impossibilité de voir. On ne les mange pas, mais ils servent de nourriture à uKegrimde quan- tité d oiseaux , de reptiles, etc. Ce poisson a été gravé, d'après mon dessin, pi. 10 du 5.^ vol. de V Histoire des poissons. (B.) HYDRASTE, Hydrastis. Plante herbacée , uniriore , mu- nie de deux ou trois feuilles alternes, péliolées , palmées par des lobes pointus, dentés en cœur et échancrés à leur base , qui forme un genre dans la polyandrie polygynie et dans la famille des renonculacées. Ce genre a pour caractères : trois pétales ovales, arrondis, égaux et ouverts, sans calice: un grand nombre d'étamines i anthères.comprlmées ; des ovaires nombreux, ovales, amon- celés ou ramassés en tête , à styles nuls ou fort courts et a 45o H Y D stigmates comprimés; un grand nombre de petits graiils oblongs, pulpeux, rougeâtres et monospermes, qui forment tjne baie composée , semblable à celle de la ronce. L'bydrasle croît naturellement au Canada, dans les lieux aquatiques. Ce genre a été appelé Warner par Miller. (B.) HYDRx\STINA. Bioscoride donne ce nom comme un de ceux du Chanvre sauvage, chez les Grecs, (ln.) HYDRATE. Combinaison de l'eau avec un oxyde. On connoît , dans la nature, les hydrates d'alumine, de cuivre, de fer et de magnésie. V. les articles Alumine native, Cuivre hydraté , Fer hydraté et Magnésie. M. Proust a publié , sur ce genre de combinaisons , qu'il a fait connoître le premier, un mémoire très-important, qui est inséré dans le Journal de Physique , t. 72 , p. 36. (LUC.) HYDRE. En astronomie, c'est le nom de deux constella-i lions de la partie méridionale du ciel : I'Hydre mâle est tout auprès du pôle Sud, et conséquemment n'est jamais visi- ble sur notre horizon. L'Hydre femelle est une des quarante-huit constellations formées par Ptolomée : elle est placée au-dessus de la bous- sole , de la machine pneumatique et du centaure^ et au-dessous du lion et de la vierge. L'étoile nommée le cœur de Vhydre est de la première grandeur, (pat.) HYDRE , Hydra. Genre de vers polypes , qui a pour ca- ractères: un corps gélatineux, diaphane, cylindrique ou coni- que , se fixant spontanément, et ayant, autour de la bouche , «n rang de tentacules cirrheux. Les animaux de ce genre sont célèbres sous le nom de;oo- lypes d^eau douce. Leur découverte, que fit Trembley en 1742 , a, soit directement, soit indirectement, singulièremeitt con- tribué aux progrès de l'histoire naturelle, par le grand nom- bre de faits dont elle a donné l'explication, et les consé- quences physiologiques qu'on en a tirées. Les hydres sont formées par un sac membraneux plus ou inoins long, plus ou moins large, terminé par une ouver- ture autour de laquelle sont implantés de six à douze tenta- cules ou bras plus ou moins longs , qui leur servent pour arrêter leur proie. Tous ces tentacules paroissent comme des fils qui s'allongent, se contractent et se meuvent en tous sens, à volonté et indépendamment les uns des autres. Ils sont en- duits d'une humeur visqueuse qui facilite leur action. On ne découvre dans leur intérieur aucun viscère ; mais leur peau , vue au microscope, présente, tant à l'intérieur qu'à l'exté- rieur, une grande quantité de petits grains, que l'on peut H Y D is, soupçonner être des organes ; car lorsqu'ils viennent à se détacher, c'est un signe certain de mort. C'est dans l'eau que vivent toutes les hydres. Elles se fixent par la partie postérieure de leur corps , sur une base solide , telle que les plantes aquatiques , les racines des arbres, les branches tombées dans l'eau , et ce tou- jours du côté le plus exposé à la lumière. Lorsqu'elles veulent changer de place , elles le font par un mouvement alternalif de dilatation et de contraction, ou bien en faisant la roue avec leurs tentacules ; mais leur marche est fort lente. Un demi-pied de chemin exige chez elles l'emploi d'une journée d'efforts continuels. Aussi les hydres ne courent-elles pas après leur proie, elles l'attendent. Les daphnies à quatre cornes^ autrement appe- lées pucerons rouges , les autres entomoslracés ^de Muller , les jeunes miis , les larves de cousins et autres insectes sont leur nourriture la plus habituelle. Lorsqu'un de ces animaux passe à la portée d un des tentacules d'une Iiydre , il en est entouré , conduit au centre à l'aide des autres tenta- cules , et, qu'il se défende ou non , il est englouti , toujours dans la position où il se présente , fût-ce même par son plus grand diamètre. Le corps des hydres étant transparent , on voit de quelle manière se fait la digestion. Ce qu'on aperçoit est égale- ment favorable aux divers sentimens de ceux qui prétendent que la digestion se fait par trituration ou par dissolution. Lorsque ces polypes n'ont encore mangé qu'avec modération, on voit facilement le ballottement des alimens qui sont poussés et repoussés du haut en bas dans le corps par un mouvement perislaltique. Lorsqu'ils sont absolument pleins, on ne voit plus ce mouvement, et cependant la digestion n'en a pas moins lieu. C'est par la bouche que sortent toutes les matières ou portions de matières indigestibles. Les hydres s'avalent souvent les unes , les nutres ; mais l'avalée , après être restée quelquefois plusieurs jours dans le ventre de 1 avaleuse, en sort toujours intacte et vivante ; elles sont indigestibles les unes pour les autres. La génération des hydres est ce qui a paru de plus surpre- nant aux observateurs qui les premiers les ont connues ; mais aujourd'hui elle ne produit plus le même elonnement, attendu qu'on y est accoutumé , et qu'on sait qu'une très-grande quan- tité d'animaux de leur classe et des classes voisines n'ont pas d'autre moyen de se propager. Elles multiplient comme les plantes , par rejetons et par boutures. Pendant l'été , on voit souvent paroître sur le côté d'une hydre une petite excroissance qui bientôt prend la forme d'un 45. H y D bouton , ensuite pousse des bras , el devient enfin un polvpe complet. Ces nouveau-nés n'ont pas encore pris tout leur accroissement, qu Ils deviennent déjà père et mère d'autres polypes qui sortent de même manière de leur corps. On a compté jusqu'à dix-huit hydres ainsi réunies. Lorsqu'un mem- bre de la famille saisit quelque proie et qu'il l'avale , la nour- riture se distribue à tous les autres, ainsi qu'on s'en est assuré par le moyen d'allmens colorés. Cette vie , commune à plu- sieurs individus , donne lieu à des considérations physiolo- giques d'une très-grande importance. On a calculé que , par ce mode de génération , la multi- plication de ces animaux est telle , qu'un Individu peut être devenu , au bout d'un mois » la souche d'un million d'enfans. La reproduction des hydres par boutures ne présente pas des faits moins remarquables. Lorsqu'on coupe un polype en deux , la partie où est la bouche marche et niange le même jour , pourvu qu'il fasse chaud ; elle semble n'avoir éprouvé aucun changement. A l'égard de l'autre partie , il lui pousse des tentacules au bout de vingt-quatre heures, et en deux jours elle devient un ani- mal parfait , marchant, saisissant sa proie , etc. Lorsqu'on coupe le polype en trois, en quatre , en vingt parties , si on le peut , toutes deviennent en peu de jours chacune un ani- mal complet. \oi\â.ï hydre de la fable bien réalisée , et voilà pourquoi Linnœus a changé le nom de polype, donné par Réaumur, en celui d'hydre. Tremblay a retourné un polype comme on retourne ua gant. On auroit pensé que son organisation auroit été renver- sée , point du tout : au bout de deux ou trois jours il n'y pa- roissoit pas. Il ne faut pas croire que cette étonnante manière de se multiplier n'ait lieu que par des causes étrangères; souvent les hydres se déchirent et se séparent en deux , trois ou quatre parties, qui deviennent autant d'animaux parfaits, sans qu'on puisse deviner pourquoi et comment se fait cette sé- paration. On n'a reconnu aux hydres d'autres sens que le toucher ; cependant il n'y a pas de doute qu'elles ne soient sensible» à la lumière et au bruit. On les voit , lorsqu'on les nourrit dans une chambre , se fixer toujours sur les parois les plus éclairées du vase , et changer de place lorsqu'on varie la po- sition de ce vase. Elles se contractent lorsqu'un bruit subit se fait entendre. Ce dernier fait s explique fort bien par l'action de l'air ébranlé sur la surface de l'eau; mais on n'a pas en- core trouvé d'explication au premier. C'est dans les eaux dormantes ou très-peu coulantes, mais H Y D 453 pures , qu'il faut chercher les hydres. Elles sont trcs-rarps pendant l'hiver, qu'elles passent contractées au fond de Tcaii ; mais elles sont souvent fort abondantes pendant les chaleurs de l'été. Il y a deux modes pour se les procurer : le premier , en observant dans l'eau les racines et les branches des arbres qui y plongent et sur lesquelles elles sont fixées , et font mou- voir leurs tentacules; le second , en prenant une poignée de lentilles d'eau ou d'autres plantes aquatiques, et en les met- tant dans un vase de verre rempli d'eau. Au bout de quelques minutes de repos, les hydres., qui s'étoient contractées , se développent de nouveau , et on les voit facilement agitant leurs tentacules. On peut les garder et le» faire facilement propager dans la chambre, en les nourrissant de daphnies et autres animaux aquatiques plus petits qu'elles. Les lieux où on en trouvoit le plus aux environs de Paris , éioient la Gare, la mare d'Auteuil au bois de Boulogne , et l'étang de \ille- davray. Elles y sont devenues plus rares. Les hydres sont sujettes à être attaquées par un ver plat qui s'en nourrit. Elles sont la proie de beaucoup daulies vers, de larves d'insectes , de mollusques, de poissons , elc. Ce genre est extrêmement voisin de celui des Actinies et de celui des Sertulaires. Il diffère du piemier, parce que les animaux qui le composent n'ont qu'un petit nombre de tentacules sur un seul rang ; et du second , parce que leur corps est membraneux ou non corné, et qu'ils n'ont jamais de vésicules oviformes. On connoît huit espèces A' hydres ^ quatre d'eau douce et quatre de mer, parmi lesquelles on doit distinguer : L'Hydre verte, qui est verte et a la bouche entourée de dix tentacules plus courts que le corps. Voy. sa figure pi. D 20. Elle se trouve dans les eaux dormantes, attachées aux plantes. L'Hydre brune., qui est brune et a la bouche entourée de huit tentacules blancs extrêmement longs. On la trouve avec la précédente, mais plus rarement. L'Hydre grise, est grise avec sept à dix leuiacules deux fois aussi longs que le corps. On la trouve dans les eaux stag- nantes. Les Hydres jaijne , CORYisaire et coîïique, rapportées par moi de la mer Atlantique, sont légèrement cartilagineuses, et font le passage entre ce genre et les Sertulaires. Voya leur figure pi. D 20. (b.) HYDRE. Plante du genre Gornifle. (b.) HYDRE , ifyJrus. Genre de serpens établi par Schneider, et qui rentre dans ceux appelés Hydrophis et Pelamide. Cuvier pense que ce genre doit être cousetvé , et It-s 454 H Y D genres ci- dessus être considérés comme des sous -genres , auxquels il ajoute le sous-genre Chersydre, quoique fait aux dépens des Acrochordes. (b.) H YDR lîlRON. Synonyme de I'Erinos desGrecs. F.Erimus. HYDRILLE , Uydnlla. Petite plante aquatique flottante , de rindc , à feuilles ovales, sessiles , verlicillées quatre à quatre ou cinq à cinq , qui avoit été placée parmi les Serpi- CULES , mais dont Richard a fait un genre particulier dans la dioécie Irlandrie , et dans la famille deshydrocharidées. Les caractères de ce genre sont : dans les fleurs mâles une spathe axillaire , presque globuleuse , hérissée de pointes , se déchirant irrégulièrement au moment de la floraison, ellaissant échapper une fleur qui monte à la surface de l'eau, s'y épanouit et féconde les fleurs femelles. Cette fleur a une corolle à six divisions, dont trois intérieures plus étroites, et trois éta- mines; dans les fleurs femelles, une spathe axillaii-c , allon- gée , d'où sort un long filament, au sommet duquel s'épanouit une corolle de sis divisions semblables à celle de la fleur mâle , qui renferme trois stigmates sessiles. Le fruit est une capsule allongée , renfermée dans la spathe , et contenant un petit nombre de graines oblongues, noyées dans une ma- tière gélatineuse. On voit , par cette description , que la fécondation de cette planle , qui est figurée dans les Mémoires de l'Institut pour l'année i5ii , s'exécute comme celle de la Valisnérie. HYDROBATA (qui se promène dans l'eau). Nom que j'ai employé comme générique pour !e Merle-d'emj , parce qu'il m'a paru lui convenir mieux que celui de cindiis déjà consacré par divers auteurs, pour quatre ou cinq oiseaux de £;enre différens. V. Aguassière et CiNCLUS. (v.) HYDROCANTHARES , JJydrocaïUhan. Tribu ( aupara- vant famille) d'insectes , de la famille des carnassiers, ordre des coléoptères, ayant pour caractères : six palpes ; des pieds propres à la natation ; les deux ou quatre derniers compri- més , rétrécis , terminés en pointe et ciliés , ou en forme de lames ; mandibules presque entièrement recouvertes ; corps toujours ovale , avec les yeux peu saillans ; le corselet beau- coup plus large que long ; la languette encadrée dans l'échan- crure du menton, et la pièce crochue terminant les mâ- choires arquée dès sa base. Ces insectes composent les genres dytiscus et gyrinus de Geoffroy. Ils vivent sous la forme de larves et en état par- fait dans les eaux douces des lacs , des marais , des étangs , etc. ; ils nagent très-bien , et se rendent , par intervalles , à la sur- face de leau afin de respirer. Ils y remontent aisément , en ne faisant presque pas agir leurs pattes , et se laissant flotter. H Y D 45!-, Leur 'corps étant renversé , Ils élèvent un peu son cxirémiié postérieure hors de l'eau , soulèvent le bout de leurs étuis, en inclinant leur derrière , et l'air s'insinue dans les stigmates que ces élytres recouvrent. Tous ces insectes sont très-carnas- siers dans leur premier et dernier état. Ils se nourrissent de petits animaux qui habitent, comme eux, le même élément. Ils ne s'en éloignent que pendant la nuit ou à son approche , et la lumière les attire quelquefois dans nos appartemens. Leurs larves ont le corps long et étroit , composé de douze anneaux , dont les trois antérieurs portent les pattes, et dont le premier est le plusgrand; la tête eslforte, avec des mandibules grandes , arquées , percées près de leur pointe , de petites antennes , des palpes , et six yeux lisses rapprochés de chaque côté ; les pieds sont assez longs, souvent frangés de poils , et terminés par deux petits ongles. Elles sont agiles, et res- pirent soit par l'anus , soit par des appendices latéraux , en forme de nageoires , et qui imitent des branchies. Elles sortent de l'eau pour se métamorphoser en nymphes , et se cachent dans la terre ou sous quelque corps près du rivage. Je divise cette tribu en deux coupes. I. Les Dyticites , Dyticites. — Antennes filiformes , beaucoup plus longues que la tête ; deux yeux ; les deux ou quatre der- niers pieds terminés par un tarse allongé , rétrécis vers leur extrémité , finissant en pointe et ciliés, harves respirant par l'anus. A. Antennes de onze articles distincts ; palpes exte'rieurs filiformes ; aucun des pieds n'étant couvert à sa base par une lame en bou- clier. * Antennes sans renflement dans leur milieu; palpes labiaux point fourchus à leur extrémité. ■j- Tous les tarses à cinq articles distincts; le troisième des quatre antéHeurs, ne recevant point dans une division profonde, ou en- tre ses deux lobes , le quatrième et une partie du dernier. Les genres Dytique , Colymbète (Yoy.Dytique ). Hygro- BIE {^Hydrachne , Fab. Clairv.) ff T. es quatre tarses antérieurs n'ayant qne quatre articles appa- rens ; le troisième bifide, cachant le suivant, et recevant une partie du dernier. Le genre Hyphydre {Hydropore ^ Clairv.) '^^ Milieu des antennes plus épais ou dilaté; dernier article des palpes labiaux échancré ou fourchu. Le genre NotÈRE. B. Antennes n'ayant que dix articles distincts; palpes extérieurs ter- minés en alêne , ou par un article plus grêle; une lame en forme ^56 H y D de bouclier, à la bas.e des pieds postérieurs, et recouvrant une partie de leurs cuisses. Le genre Hai.iple ( Cnemidofe^ Illlg. ; Hoplite^ Clairv.). ïî. Les TouRiNIQUETS , Gyriniles. — Antennes terminées en masiiie , presque en fuseau , plus courte que la tête ; leur second article prolongé extérieurement en forme d'oreillette; quatre yeux; les deux pieds antérieurs allongés , semllahles à des bras , se repliant en double; les quatre tarses postérieurstrès-minccs, commç membraneux ; articles de leurs tarses formant de petits feuillets , disposés en falbalas. Larves respirant par des nageoires latérales , imitant des branchies. Le genre Gyriis. Yoyez ces articles, (l.) HYÛROC ANTH ARIDES, //r^/or^/2///«r/. Quelques au- teurs ont compris sous ce nom plusieurs insectes dont Lin- nceus a depuis formé son genre Dytiscus. (l.) HYDROCERATOPHYLLU.^î. Ce nom composé de trois mots grecs qui signifient (îûî/, peigne., feuille^ est celui que Vaillant a donné au Cormifle. Depuis , on l'a raccourci des deux premières syllabes, ceratopltyÛum. V. Cort^ifle. (ln.) HYDROCHÂRIDÉES , Hydrochari des, 3ms. Y amWXcAe plantes monocotylédones, le plus souvent dioïques , et spa-< thacées, dont la fructification est composée : d'un calice mono- phylle , divisé en six ou en un plus grand nombre de parties disposées sur un ou plusieurs rangs , les intérieures ordinaire- ment pétaloïdes ; d'élamines au nombre de neuf ou en nom- bre indéterminé , insérées sur le pistil ; d'un ovaire simple , inférieur, à style multiple ou nul, à stigmate simple ou mul- tiple ; d'un fruit à six ou plusieurs loges, rarement mono- sperme ; de semences à embryon situé à la base d'un péri- sperme charnu ou farineux. Ijes plantes qui appartiennent à cette famille sont toutes herbacées et aquatiques. Leurs racines fibreuses ou tul^éreuses, portent souvent les feuilles et les parties de la fructification ; quelquefois elles poussent des tiges rampantes , noueuses et garnies de feuilles aux nœuds. Leurs feuilles, communément* sessiles et engainantes , munies de pétioles à demi-engainans, sont enfoncées dans l'eau ou flottent sur sa surface. Leurs (leurs ordinairement situées sur une hampe ou sur des pé- doncules scapiformes , renferment dans la même enveloppe les organes sexuels , dont un est quelquefois sujet à avorter. Cette famille , qui est la quatrième de la quatrième classe, du Tableau du Règne végétal de Ventenat, et dont les caractè- res sont figurés pi. 6 , n." i , du même ouvrage , a été éclai- rée ])i\T un très-beau travail de Richard inséré dans les mé- inoires de l'Institut de France pour l'année i8ii. H Y D 457 Les genres que ce dernier y rapporte sont : Elodée , Ana- CHAras , Hydrille , Blixe , Attelie , Limnobion , Enhale , StRATIOTE, VaLISNÈRE, MoRRÈNE, NÉLUMBO etPESLE. (b.) HYDROCÏIARIS {Ornement de l'eau, en grec). Linnseus nomme ainsi le genre de la MoRRÈiNE(r. ce mot) , dont l'es- pèce d'Europe est le microleuconyniphea de Boerhaave , et le morsus ranœ de Tournefort et des botanistes qui l'ont précédé. (LN.) HYDROCHLOÉ, Hydrochloa. Genre de plantes de la famille des Graminées , établi par Palisot-Beauvois , sur la Zizanie nageante de Michaux, Il offre pour caractères : des épillets ^ l'un terminal uni- flore, mâle, sans balle calicinale, à six étamines ; les autres axillaires, uniflores , femelles, sans balle calicinale , à balle florale membraneuse , et à stigmatestrès-longs. (b.) HYDROCHŒRUS {Cochon d'eau). Nom donné au Cabiai proprement dit, par plusieurs auteurs. Erxleben a formé un genre hydrorhœnis , dans lequel il réunit deux ani- maux fort différens l'un de l'autre par tous les points de leur organisation, le Tapir et le Cabiai. V ces mots, (desm.) HYDROCORAX. Dans quelques auteurs c'est le nom d'un Calao cormoran, (v.) HYDRO CORÉES ou Remitarses. M. Duméril désigne ainsi une famille d'insecles hémiptères , que j'avois déjà éta- blie, dans le tome troisième, de mon Histoire générale des insectes, sous le nom de Punaises-d'eau, Hydrocoris. Voy. Hydrocorises. (l.) .HYDROCORlDES,Fj^roron leur , Paris 1751 , in-4° , tom. i , pag. 61 — 62. ) Nous ne poui^ons donner ici que des indications succinctes de ces divers feux naturels , et l'auteur même du Mémoire où nous puisons ces indications , n'a pu entrer dans de beau- coup plus grands détails. Mais en recourant aux sources , on se convaincra que tous les effets dont il s'agit , ont les uns avec les autres tant d'analogies, qu'ils ne sauroient appar- tenir qu'à des causes sinon absolument identiques, du moins liées entre elles par les plus grands rapports. Or, quelles sont ces causes? quels peuvent être, encore une fois, l'origine, le principe de cet hydrogène intarissable .''C'est une question à laquelle M. Menard croit qu'il estimpossible, quant à présent, de répondre d'une manière satisfaisante. «Je « pense enfin , dit-il, que dans cette circonstance, comme dans « beaucoup d'autres , et nommément à l'égard des volcans, « des eaux thermales , des fumeroles et des autres mofettes, « ce qu'il y a de mieux à faire est d'ajourner toute explica- U-jo H Y D « tlon Jusqu'à nouvel ordre. Je dirai seulement qu'ayant re- « jelé l'analogie qu'on a supposée enlre le phénoniène dont K il s'agit et celui des volcans , je suis loin de penser de « même à l'égard de plusieurs auJres genres d'e'ruption , et « que je crois , au contraire , qu'il existe des rapports plus «f ou moins étendus , prochains, même intimes, entre les *i sources hydrogéniques qui donnent lieu aux feux naturels , «f certaines eaux minérales, surtout celles qui charrient du « bitume, et ces espèces de volcans froids et à fange argileuse , « dits volcans d air^ tels qu il s'en trouve aussi dans le pays «f de Modène , où on les nomme salse. » Le gaz hydrogène carboné, et mêlé dacide carbonique, est effectivement aussi l'âme des salses , comme nous le di- rons dans un autre article , d'après un second Mémoire du même auteur. V. S\L.s. (luc.) HYDROGETON, Hydmgeton. V. Ouvirandre. (b.) HYDHOGLOSSE , Hydroglossum. Genre de la famille des fougères, établi par Willdenow, aux dépens des Ophio- GLOSSES de Linnœus , et renfermant dix-huit espèces. Il ne dif- fère pas de I'Ugène de Cavanilles , du LYGOntON de Brown » du Ramotsdie de Mirbel et du Ctéision de Michaux, (b.) HYHROLAPATHUM {patience deau). Lobel a donné ee nom à une grande espèce de patience qui croit commu- nément dans les fossés profonds des marais. C'est le rumex hydrolnpathum^ Willd. Cln.) HYDROLIE, Hydrolia. (ienre établi par Dupetit- Thouars, mais qui ne paroît différer des Coutardes que parce que les étamines de la seule plante qui le compose, son l insérées non surle tube, mais sur lesdivisionsde la corolle, (b.) IJYDROLITHE. Substance encore peu connue que l'on a confondue, suivant M. de Drée (Musée minér;»logique , page 18";, avec \analcime et la sarcolithe de Thomson. Elle çU d'une couleur rougeâtre , tendre el facilement fusible au feu du chalumeau. Son nom lui vient de la grande quantité d'eau qu'elle renferme, M. Vauquelin y ayant trouvé sur 100 parties: silice, 5o; aluniin^, 20; chaux, ^■■.S; soude, l^^S\ et eau 21. On la rencontre dans les roches amygdaloïdes du Yi- cenlin dont elle garnit des cavités, (luc.) La forme de ïhydrolithe est celle d'un prisme hexaèdre ter- miné par des pyramides à six faces , comme dans le quarz. Quelquefois les pyramides sont tronquées. Ces cristaux ont pour noyau un rhomboïde voisin du cube. Cette substance, très-distincte de Tanalcime et de la chabasie , est aussi ren- contrée en Ecosse , en cristaux d un blanc de lait, (ln.) HYDROMÈTRE , Hydrometra, Latr. Fab. ; Aquarius, Schellenb. Genre d'insectes, de l'ordre des hémiptères, sec- tion des hétéromères , famille des géocorises , tribu des ra- H Y D 471 meurs ou de ceux dont les quatre pattes poste'rieures , lon- gues, très-déliées, insérées sur les côtés de la poitrine, écar- tées entre elles, à leur naissance, terminées par deux crochets très-petits et peu distincts, sont propres à ramer ou à marcher sur l'eau. Les hydromètres sont distinguées des autres insectes de la même tribu, en ce que leurs pieds antérieurs, quoique plus courts , sont semblables aux autres, que leur corps est filiforme, avec la tête prolongée en un museau long, cylin- drique , avancé, ayant, en-dessous, un canal longitudinal recevant le bec; et que leurs antennes sont sétacées, insérées à l'extrémité du museau, avec le troisième article le plus long de tous. Linnœus et Geoffroy ont confondu ces insectes avec les punaises. Fabricius, après les avoir d'abord placés avec ses gerris, les réunit sousle nomgénérique d'hydromètres, à d'au- tres géocorises rameurs, qui composent, dans ma méthode ,■ les genres Gerris et Vélie. Les hydromètres Ç^arpenieurs afjuaiitjues^ ont le corps long et très-délié, plus étroit en devant, et de là le nom à'aiguille que Geoffroy a donné à Tespèce que l'on trouve dans nos environs. La tête est plus longue que le corselet, et s'avance en forme de museau cylindrique, droit, portant, près de son milieu, les yeux que Llnnôeus et Fabricius ont pris pour des tubercules, épaissi au bout et où sont Insérées les antennes. Ces organes sont sélacés, de quatre articles, dont le troisième beaucoup plus long que les autres ; le bec se loge dans un ca- nal inférieur du museau et ne paroît pas ou presque pas ar- ticulé ; le. corselet est cylindrique; l'écusson est très-petit; les pieds sont longs, filiformes, et leur longueur, à partir des premiers, diminue graduellement ; ceux-ci ne sont point ra- visseurs , caractère qui distingue ce genre des gerris et des vélles ; les quatre tarses antérieurs n'ont que deux articles ; les deux derniers semblent en avoir un de plus. Les hydromètres fréquentent les bords des eaux et courent avec vitesse sur leur surface ; mais elles ne nagent point , et ne se servent point de leurs pattes pour ramer, ainsi que le font les gerris. La seule espèce qui m'est bien connue est I'Hydromètre DES ÉTAiSGS , hydromelm stagnorum ; ciinex stagnonim , Linn. ; \a punaise aiguille, Geoff ; aquarius pahidum^ Schell. cfmic. t. 9, fig. 2. Son corps est long d'environ cinq lignes, noir oud'un brun noirâtre, avec les bords de i abdomen et les pieds d'un brun roussâtre ; les élytres sont très-courtes, avec deux nervures sur chaque. (l.~) HYDROMYES ou BECMOUCHES. M. Duméril (Zool. analyt. ) donne ce nom à une famille d'insectes dip- tères à bouche prolongée en museau .plat et saillam, munie 472 H Y D «le palpes, sans trompe ni suçoir, et qui comprend les genres TlPULE, CÉRATOPLATE , PsYCHODE et SCATOPSE, (DESM.) H YDROMYS, Hytlromys. Genre de mammifères rongeurs établi par M. Geoffroy Saint-Hilaire (^Jnn. du Mus., tom. 6 ), et adopté par llliger (P/oJrom. ), se rapprochant particulière- ment des Loirs et des Rats proprement dits, par la forme des dénis molaires, et des rats d'eau et des castors par leurs autres caractères et leur manière de vivre. Ces animaux ont à chaque mâchoire deux fortes incisives et seulement deux molaires (i) ; celles-ci sont une fois plus longues que larges , et T émail les traverse par leur milieu, de manière que sa tranche figure assez bien le chiffre arabe 8, avec deux excavations correspondantes aux espaces qui existent dans le tracé de ce chiffre. Tous les pieds sont à cinq doigts. Le pouce de ceux de devant est fort court et presque entière- ment enveloppé ; les autres doigts sont libres. Ceux des pieds de derrière sont au contraire engagés dans une mem- brane , et il n'y a que le doigt extérieur qui jouisse de quel- que liberté , n'étant que bordé par la membrane. Les on- gles sont comprimés , assez longs et pointus. La tête paroît large et déprimée comme celle des castors et des campagnols rats-d'eau ; le museau semble moins obtus; le cou est gros et court ; les oreilles sont petites et rondes; les moustaches longues et fournies. Le poil est de deux sortes comme dans les castors ; sous les longues soies est un feutre court, très- fourni et d'une grande finesse. La queue est presque de la lon- gueur du corps parfaitement ronde, et terminée en pointe. Le genre des hydromys se compose de trois espèces seu- lement, dont une appartient à FAmérique méridionale , et les autres aux îles qui avoisinent la terre de van Diémen , soit au sud , soit à l'est. Leurs habitudes ne sont point con- nues. On sait seulement qu'elles sont aquatiques. M. Geoffroy avoit d'abord donné à ces animaux le nom générique de cœlodon. Première Espère. — H YDROMYS CoYPU ou CoYPOU ( Hy- dromys coypou), Geoffr., Annal, du Bluséum, \om. 4-, pL 36,pag. qo; Mus. roypiis., Molina et (imelin ; Myopotamus bonariensis ., Commerson {manuscrit); Ououyiâ, d'Azara, Essai sur VHisi. nai. des quadr. du Paraguay .^ traduct. franc. , tom. 2 , p. i. — Raroonda des Pelletiers. Cet animal a été décrit d'abord par Molina sous le nom (i) Ces molaires n'ont e'te' seulement observées que dans les hydro- mys à ventre jaune et à ventre blanc ; mais leur nombre est conslanl dans les trois espèces. H y D ^75 chilien de coypou; et Gmelin, d'après la description de ce voya- geur, rintroduisit dans son édition àaSysiema naturœ, sous la dénomination àe mus coypus. Gommerson se procura aux îles Maiouines une figure d'un animal dont tous les caractères se rapportoient à ceux du coypou, et il lui donna le nom de myopotamus bonariensis , parce qu'on lui avoit appris que cet animal se trouvoit aux environs de Buénos-Ayres. En- fin , d'Azara décrivit un rongeur sous le nom de quouyia qu'il porte au Tucuman , qui avoit aussi la plus grande ressem- blance avec ce même animal. M. Geoffroy , dans ses recherches chez les fourreurs , dans le but de se procurer des renseignemens sur les espèces de quadrupèdes qui fournissent au commerce de pelleterie , trouva dans un magasin une quantité considérable de peaux d'un animal qui lui parut inconnu aux naturalistes , et il ap- prit que ces peaux étoient introduites dans le commerce de- puis 1794 ou 1795 , qu'elles étoient expédiées par la voie de l'Espagne, qu'elles arrivoient par milliers, et qu'elles étoient maintenant en usage dans la fabrication des chapeaux , sous le nom de racoonda. L'habile professeur ne tarda pas à s'aper- cevoir que les descriptions du coypou et du quouyia, ainsi que la figure du myopotamus bonariensis ^ convenoient parfaitement aux animaux qui avoient fourni ces peaux ; et il ne balança - pas à adopter l'idée de Gommerson , qui avoit considéré , comme devant appartenir à un genre particulier son animal de Buénos-Ayres ; et bientôt il fut encore plus convaincu de la nécessité de l'établissement de ce nouveau genre , lors- qu'il reçut de l'expédition aux Terres Australes deux autres quadrupèdes qui se rapportoient au premier par beaucoup de traits de ressemblance. Molina parle assez légèrement dé son coypou , comme d'une espèce de rat d'eau de la grosseur et de la grandeur d'une loutre, et Sonnini (Nouv. Dict. !,«" édit., art. Coypou^ pense , mais à tort , que c'est en effet une espèce de loutre mal décrite. Gmelin a copié Molina ; mais d'Azara donne au contraire des détails assez minutieux sur son quouyia, qui, joints aux observations que M. Geoffroy a pu faire sur les nombreuses peaux qu'il a examinées^ donnent à ce naturaliste les moyens de faire une bonne description de cet animal. 11 se dislingue surtout des deux autres espèces, dit-il, par sa grande taille , par son pelage brun-marron surle dos, roux vif sur les flancs et brun clair sous le ventre. Son corps a un pied neuf pouces et demi de longueur; sa queue , un pied deux pouces trois lignes ; sa tête, quatre pouces trois lignes, et ses extrémités quatre pouces et demi.,.. Chaque poil sur le dos estannelé de brun et de roux , mais le brun y do- 474 H Y D mine ; tandis que sur les flancs les poils ont leur partie rousse très-étendue, et le brun cendré seulement à l'origine. Le feutre , caché sous de longs poils , est cendré brun , d'une teinte plus claire sous le ventre. Comme dans tous les animaux qui vont fréquemment à l'eau, les poils de la queue sont rares , courts, roides et d'un roux sale; elle est, dans ses parties nues , écailleuse. Le contour de la bouche et l'ex- tréniilé du museau sont blancs ; les moustaches qui sont longues et roides , sont aussi de celle dernière couleur , à l'exception de quelques poils noirs. Les oreilles sont courtes et arrondies. M. (Tcoffroy a trouvé d'ailleurs plusieurs variétés de cou- leurs dans ces animaux : une toute rousse; une avec la grande raie dorsale presque rouge et les flancs très-pâles ; et , enfin, d'autres qui paroissolent produites par la maladie albine. Le mâle ne diffère point sensiblement de la femelle par les couleurs de son pelage. Le coypou s'apprivoise facilement; son caractère est doux; il n'est pas difficile à nourrir, car il mange de toutes les sub- stances végétales qu'on lui présente. 11 habite le bord, des eaux , et quelquefois il s'éloigne beaucoup pour chercher d'autres rivières. Il nage avec facilité, creuse des terriers dans les berges avec ses ongles qui sont vigoureux, et s'y réfugie et y habile. La femelle met bas cinq ou six petits, selon Molina , et quatre à sept selon d'Azara , qu'elle conduit toujours avec elle. Ce dernier auteur dit que cette espèce abonde dans la province de Buenos Ayres et dans celle du Tucuman ; mais qu'elle est fort rare au Paraguay. Deuxième espèce. Hydromys A VENTRE JAUNE ( Hydromys chrysogasier , Geoff. , Ann. du Mus. tom. 6, pag. 86 , pi. 36 » fig. A. Cette espèce , dont un seul individu exisîe dans les gale- ries du Muséum d'Histoire naturelle de Paris, est de moi- tié moins grande que le coypou. La longueur de son corps est d'environ un pied ; celle de sa queue de onze pouces , et celle de sa tête de deux .pouces et demi. Les longs poils de cet animal ne se distinguent pas aussi sensiblement du feutre que dans l'espèce précédente; ils sont proportionnel- lement plus courts et plus fins; ce qui produit une fourrme extrêmement fournie, et dont le loucher est on ne peut plus doux. Le poil, dans sa partie apparente, est en dessus d un brun-marron, et en dessous de la plus belle couleur oran- gée : il est, à sa racine , cendré et gris sous le ventre. La queue est entièrement couverte de poils très-courts et roides ; H Y D 475 elle est, vers son origine, assez grosse et plus fournie en poil; dans les trois premiers pouces à sa base, sa cou- leur est la même que celle du dos ; dans les six pouces sui- vans, cette même couleur prend une teinte noirâtre ; et les deux derniers pouces de l'extrémité sont d'un blanc très- pur La membrane qui enveloppe les doigts , n'est pas aussi étendue que dans le coypou ; sa découpure intérieure est un peu plus profonde. Les pattes antérieures sont brunes, comme le dos; mais, ces deux parties sont séparées par une teinte rousse , qui vient des flancs et qui se prolonge jusqu'aux coins de la bouche. Cet individu ressemble d'ailleurs infiniment à ceux de l'es- pèce suivante que nous avons pu examiner, et Ion seroit d'autant plus porté à les considérer comme n'en différant pas spécifiquement, qu'on remarque, dans les derniers, quelques passages dans la couleur des parties inférieures du corps, du blanc au roux. M, (ieoffroy dit que cet animal a été tué par un matelot dans une des iles qui forment le canal d'Kntrecasleaux , à la pointe sud de la terre de Diémen , au moment où il alloit troiiyer un abri sous un tas de pierre. En effet , nous trou- vons dans le Voyage aux Terres Australes ^ rédigé par Péron, que de tous les objets nouveaux que procura VîleBniny^ l'une du détroit cilé, le plus précieux fut un quadrupède à pieds palmés, de Tordre des rongeurs, et nous ne pouvonsguère dou- ter, que ce rong. ur ne soit Vhydrontys dont parle M. (ieoffroy. Troisième espèce. — Hydromvs a VENTRE BLANC (//f5. En général les opales , les hydrophanes , les halb opales , et même plusieurs /)e^/i5^mj5, ne sont que des variétés qui pas- sent de l'une à l'autre par nuances insensibles. Voyez Quarz- RÉSINITE. On explique le phénomène que présente Vhydrophane , en disant que cette pierre paroît d'abord opaque , parce que ses pores sont remplis d'air , et que la densité de ce fluide étant très-différente de celle de la pierre , les rayons de lunuère H Y D ^73 sont réfléchis au lieu d'être transmis, attendu que lorsque la lumière passe d'un milieu dans un autre qui est de densité différente , une partie des rayons est réfléchie au point de cojitact ; mais quand l'eau , dont la densité est beaucoup plus voisine de celle de la pierre que n'est celle de l'air, vient à remplir ses porcs , alors il y a beaucoup plus de rayons transmis que de rayons i-éjléchis , et la pierre devient diaphane. (PXT.) ^J. Patrin a combattu fort au long cette opinion qui est admise par tous les physiciens. Voy. la l/^ édition de ce Dic- tionnaire. Quant au phénomène lui-même F. les Traités de Physique de MM. Hauy et Biot. (luc.) HYDROPHILACE, Hydrophilax. Plante rampante et vivace, qu'on trouve sur le bord de la mer dans l'Inde, et dont la tige est filiforme et articulée; les feuilles opposées , petiolées, ovales, pointues, charnues, couvertes, à leur base, de graines membraneases ; les fleurs asillaires , presque sessiles , ordinairement géminées et bleues. Cette plante forme ungenredans la tétrandrie monogynie. Ses caractères sont : un calice de quatre folioles charnues , adhérentes à leur base; une corolle monopétale, infundibu- liforme, à tube plus long que le calice, à limbe divisé en quatre parties roulées en dehors ; quatre étamines; un ovaire inférieur, oblong , gladié , strié, chargé d'un style filiforme à stigmate bifide ; un fruit ovale-oblong , quadrangulaire, un peu courbé , ligneux , ne s'ouvrant pas , et contenant une se- mence linéaire, un peu scabre. (b.) HYDPvOPHILE, ///J/o;?/i//«5, Geoff. Genre d'insectes, de l'ordre des coléoptères , famille despalpicornes, tribu des hydrophiliens. Linnceus avoit formé , avec ces insectes , la première divi- sion de son genre, dytiscus ; Geoffroy les en détacha le pre- mier , et sous le nom générique actuel. Mais l'un et l'autre ne saisirent pas les rapports qu'ont avec eux les élophures , autres coléoptères , qui appartiennent évidemment à la même tribu. Degeer les retira des boucliers {si/pha) où le premier les avoit placés , ainsi que les denmestes , avec lesquels le second les avoit confondus, et les réunit aux hydrophiles, qu'ils avoisinent, comme je viens de le dire, mais dont ils diffèrent cependant. Fabricius saisit ces caractères, et institua le genre clophore. Kugelan forma , avec l'espèce nommée par celui- ci mini mus , une nouvelle coupe générique , celle des hydrcb' nés. Enfin, cette sous-famille s'accrut bientôt après d'un au- tre genre, celui de sperchée, dont l'espèce servant de type avoit d'abord été prise pour un dytique , et associée ensuite aux hydrophiles : par leurs antennes composées seulement de iSo H Y D six articles et qui, à commencer du second, forment une massue; par leurs mâchoires, dont la division extérieure grêle, allongée et arquée , ressemble à un palpe ; les sperchées sont évidemment très-distincts des hydrophiles. Un corps rond ou ovalaire et très- convexe; des antennes terminées en une massue, distinctement perfollée , et plus courtes que les palpes maxillaires, ou du moins de leur longueur; la forme en fil de ces palpes, des mandibules bideniées à leur pointe, des pieds en rames et très-aptes à la natation, éloignent les der- niers des élophores et des hydrsenes. Les hydrophiles ont le corps défendu par un derme écail- leux ou très-dur et généralement glabre , tantôt ovalaire ou elliptique , tantôt presque hémisphérique , bombé en dessus et plat en dessous ; la tête est un peu penchée et son extré- mité est un peu avancée, en manière de chaperon ob- tus, un peu saillant; leurs yeux sont arrondis, s'éten- dent plus en dessous qu'en dessus; lés antennes insérées au- devant d'eux, et recouvertes à leur naissance par les bords saillans de la tête , sont un peu plus longues qu'elle, et de neuf articles; les deux premiers sont allongés et cylindriques ; celui de la base est un peu plus long et un peu courbe ; le troi- sième et les deux suivans sont très-longs ; les quatre derniers forment, par leur réunion, une massue ovale, comprimée, perfoliée , un peu tronquée obliquement à son extrémité ; le sixième est évasé en forme d'entonnoir ; le labre est crustacé, transversal et arrondi sur les côtés antérieurs ; les mandibu- les sont cornées, fortes, avec deux dents à leur extrémité; leur côté interne en offre aussi dans les grandes espèces, mais il est simplement garni de poils ou de cils dans les autres ; lespalpes sont filiformes.'La longueur et la saillie des maxil- laires m'a fait donner à la famille où ce genre est compris , la dénomination de palpicornes ; les mâchoires se terminent par deux divisions crustacées ou coriaces , conniventes, pres- que de la même longueur et velues à leur extrémité ; le men- ton de la lèvre est grand , crustacé , presque en forme de carré transversal, et couronné par les deux divisions de la languette; ces divisions sont coriaces , transverses et velues. Le corselet est transversal et un peu plus large postérieure- ntent ; l'écusson est triangulaire ; les élytres sont convexes , sans rebords et de la grandeur de l'abdomen : elles couvrent deux ailes, grandes, membraneuses et repliées ; dans plu- sieurs espèces, les plus grandes notamment, l'arrière sternum se prolonge du côté du ventre , en une pointe , forte , droite , très-aigue , et qui peut blesser lorsqu'on tient ces insectes dans la main , et qu'on leur laisse la liberté de se mouvoir ; les jambes sont armées de petites épines et de dents, très- H Y D 48. fortes à leur extrémité ; les tarses ont cinq articles, mais dont le premier beaucoup plus court que le suivant, de sorte que l'on croiroit, au premier coup-d'œil , qu'ils n'en ont que quatre; aucun d'eux n'est biiobé ; ceux des quatre derniers sont comprimés et cillés intérieurement ; dans les grandes es- pèces, le dernier article des deux antérieurs est dilaté et a une forme particulière , dans quelques mâles. Les hydrophiles forment un genre composé d'une trentaine d'espèces, dont la majeure partie habite l'Europe ; quelques- unes sont d'une grande taille ; les autres sont au-dessous de la moyenne; toutes sont de couleurs obscures ou peu bril- lantes. Ces insectes se trouvent dans les eaux douces , dans les lacs, rarement dans les rivières, mais le plus souvent dans les marais et dans les étangs. Ils nagent assez vite , mais avec moins de célérité que les dytifaes. C'est ordinairement à l'approche de la nuit qu'ils sortent de l'eau , pour voler et se transporter d'un marais ou d'un étang à un autre. Aussi trouve-t-on ces insectes, ainsi que tous ceux de la tribu des hydrocanthares ^ dans les moindres amas d'eau, même dans ceux que la pluie peut former dans les inégalités d'un terrain. Ils font entendre, envolant, un bourdonnement semblable à celui des scarabées. Degeer avoit dit que les hydrophiles, ainsi que les dyti^ cjues^ sont carnassiers, très-voraces , et qu'ils ne vivent qu'aux dépens d'autres insectes aquatiques et terrestres , qu'ils peu- vent attraper. Ce fait, que l'examen des parties internes de ces insectes sembleroit démentir, a été cependant confirmé par M. Félix Miger, dans un Mémoire sur les métamorphoses des hydrophiles ^ inséré dans le tome i^ des Annales du Muséum d Histoire naturelle de Paris. 11 a nourri , pendant plus d'un mois, Vh. carabdide^ avec des limaçons d'eau. Il a vu aussi 1'^. brun., dévorer avidement ces mollusques et des lar- ves aquatiques. Mais il remarque aussi , d'après s'es propres observations , qu'il fais sa principale nourriture des plan- tes aquatiques , ce qui pourrolt faire croire qu'il n'est carnas- sier que par circonstance , ou plutôt qu'il est omnivore. On a ouvert son canal intestinal, qui est très -long, et on l'a trouvé toujours rempli de débris de substances végétales. Dans la larve , au contraire, les intestins sont si courts qu'ils ne dépassent pas en longueur celle du corps entier. Les hydrophiles , dans l'état parfait, ont de plus un des attributs qui caractérisent les insectes herbivores; c'est qu'ils sont pour- vus de deuxcœcum très-longs , qui viennent aboutir au canal intestinal près de l'anus , et qui sont roulés sur eux-mêmes en spirale , dans la cavité de l'abdomen, ' XY. 3l 482 H Y D La nature et la forme de l'appareil masticateur ont paru fournir une nouvelle preuve que ces coléoptères sont herbi- vores; mais Ton sait que les hannetons, quoique herbivores, ont des mâchoires solides , et armées de fortes dents. Quoique leshydrophiles puissent vivre Irès-long-temps sous l'eau, ils ont cependant besoin de respirer l'air de temps en temps, lisse portent à sa surface, et pour y parvenir, ils n'ont qu'à tenir leurs pattes en repos , et se laisser flotter. Plus légers que l'eau, ils surnagent d'abord; le derrière se trouve alors appliqué à la surface de l'eau , et même un peu au-dessus. Ils élèvent ensuite tant soit peu leurs élytres, ou baissent le bout de l'abdomen, de manière qu'il se forme un vide entre les élytres et le derrière, qui se trouve ainsi à sec. L'air exté- rieur pénètre alors aisément entre les élytres et l'abdomen , sans que l'eau puisse s'y introduire ; il est porté aux siigmates placés au-dessous des élytres, le long des deux côtés de l'ab- domen. Quand l insecte veut retourner au fond de l'eau, il rapproche promptement l'abdomen des élytres, et bouche en même temps le vide qui se rencontroit entre eux , de sorte que l'eau ne peut jamais y pénétrer. Lyonnet nous a appris un fait assez singulier, et qui ne peut plus être révoqué en doute , d'après les belles observa- tions du naturaliste que j'ai cité plus haut ; c'est que ces in- sectes savent filer , et qu'ils font une espèce de nid ou de coque de soie, défigure ovoïde, dans laquelle ils pon- dent et renferment leurs œufs. Degeer a trouvé de pareils nids flottans sur l'eau , et remplis d'œufs , d'où sortirent ensuite de petites larves qu'il ne put méconnoître pour celle des hydrophiles ou des dytiques. 11 n'a jamais pu saisir le moment où ils travailloient à construire de pareilles coques ; mais Lyonnet a été plus heureux, et il dit avoir vu l'insecte travailler à ces coques, qu'il les fait avec le derrière, et qu'il y ajoute une espèce de corne brune , un peu recourbée et so- lide. L'usage de cette corne lui paroît être de retenir la co- que , lorsque quelque coup de vent ou quelque autre accident pourroit la renverser. Ce.sfaits, ainsi que d'autres, sontbien développés dans le Mémoire deM.Miger. 11 parle d'abord de l'accouplement des hydrophiles qui se fait à la manière ordinaire de celui des autres insectes. Mais le mâle s'accroche au bord extérieur des élytres de sa femelle , et se maintient sur son dos , en se ser- vant du dernier article de ses tarses antérieurs qui a la forme d'une palette triangulaire ou d'une truelle. Cet observateur ne les a point vus consommer leur accouplement ; mais il a é\é témoin de la manière dont la femelle fait sa ponte, et la H Y D ^83 coque singulière qui la renferme^ Je rapporterai , à cet égard , les propres paroles de l'auteur. « Je la vis s'attacher au revers d'une feuille qui flotloit sur i'eau , s'y placer en travers , et allongeant ses premières paires de pattes , les .appuyer sur le dessus cl de chaque coté de cette feuille, de manière à lui faire prendre une légère courbure. L'abdomen étoit fortement appliqué au revers de la feuille , et laissoit voir , à son extrémité, deux appendices qui s'avançoient et se retiroient avec vitesse, et desquels il paroissoit sortir une liqueur blanche et gommeuse. Cette li- queur étoit le principal de la coque , et les appendices étoient les deux fdières de l hydrophile. En cousi allures, par des mouvemens vermiculaircs horizontaux. Les unes et les autres subissent leurs métamorphoses dans la terre. Leurs nymphes ont toujours deux petits appendices à l'extrémité postérieure de leur corps, et quelques poils ouaigrcttes cornées aubord an- térieur du corselet. Lestuberculeslatérauxdu corps des larves sont très-diversifiés dans leurs formes et leurs dimensions; mais ces modifications n'ont point paru, à M. Miger, entraî- ner de changemens sensibles dans leurs habitudes. Les hydro- philes essentiellement nageurs proviennent de larves placées dans ces deux divisions ; leurs femelles filent ces coques, dont nous avou3 donné la description; outre celle de l'/f.Zinin, M. Mi- ger a observé celles do 1'//. carahôuie et de VH. piciplde ; mais les espèces qui nagent difficilement appartiennent, en géné- ral, à la seconde division ; leurs femelles portent sous le ventre un tissu soyeux enveloppant les œufs ; 1"//. Imde nous en offre un exemple. I. L' arrière-sternum prolongé du côté du ventre en une pointe très- forte , en forme de dard. L'HYDROPHILEBRU^^/i>'^,oyo/^^7«5/3^m^5,Fab.; pi. E i^-io, de cet ouvrage ( le mâle); il a près d'un pouce et demi de longueur; il est d'un noir luisant en dessus, et d'un brun obscur en dessous: on remarque une légère impression de chaque coté du corselet; les élytres ont chacune trois stries peu marquées, formées par de petits points enfoncés. Le 490 H Y D mâle a le quatrième article des tarses antérieurs dilaté, et il lui sert pour se tenir fixé sur le corps de la femelle pendant raccoupicment. Les tarses de la femelle sont simples. On le trouve communément dans toutes les mares des en- virons de Paris. L'Hydkophile CARABOïde ., Hydrophilus carahoides^ Fab.; Oiiv. Col. , tom. 3, n.° 3g, pi. 2, fig. 8, est aussi très-commun autour de Paris. Il a environ neuf lignes de long; tout son corps est noir, luisant; les élytres ont des stries à peine mar- quées, formées par de petits points enfoncés. II. L' arrière-sternum sans défense ou point prolongé en pointe. L'Hydrophile scaraboïbe, Hydrophilus scarabœoides. Fab.; Oliv. /Zi/J. ,pl. 2, fig. f), A B ; il est ovoïde , allongé , noir, lui- sant, très-finement pointillé en dessus, avec la base des an- tennes et les tarses d'un Lrun-roux. Il y a sur chaque élytre environ dix petites lignes formées par des points enfoncés. Il est coiTunun dans toute l'Europe. On rapportera à la même division l'H. orbiculaire , //. orhicularis , qui est presque hémisphérique et d'un noir luisant; l'H. livide d'Olivier, //. Uoidits , ou le giis de Fabri- cius , qui est ovale, peu convexe, d'un gris fauve en dessus, avec quelques lignes éparses, formées par des points noirâ- tres aux élytres; le dessous du corps et les cuisses d'un noir cendré; l'H LURIDE, H. luridus^YAh., qui est ovoïde-oblong, plus étroit en devant, très-convexe , et d'un jaunâtre tirant sur le gris, en dessus, noir en dessous, avec les élytres striées. Les hydrophiles de cette division ont les tarses filiformes, moins propres à la natation que ceux des espèces de la pre- mière , avec les crochets des tarses entiers ou à peine uni- dentés, (o. L.) HYDROPHILIENS, Hydrophilii, Lat. Tribu d'insec- tes, de l'ordre des coléoptères, section des pentamères , fa- mille despalpicornes, ayant pour caractères: palpes maxil- laires presque aussi longs ou plus longs que les antennes ; an- tennes en massue perfoliée , insérées chacune dans une fos- sette profonde sous un avancement des bords de la tête , fort courtes, de neuf articles au plus, dont le premier allon- gé; devant de la tète avancé au-delà des mandibules en forme de chaperon ; yeux situés plus en dessous qu'en dessus ; corps ovale , bombé; tarses le plus souvent ciliés , propres à nager ou à courir dans l'eau, et dont le premier article est plus court que le suivant ou peu distinct; mâchoires entièrement cor- nées. C'est par les deux derniers caractères qu'ils diffèrent plus particulièrement des sphéiidiotes. Les hydrophiliens euTibrn<:sent, ainsi que l'indique leur H Y D 4g, dénomination, le genre hydrophile et ses dérivés. On voit aussi par l'élymologle de leur nom que ces insectes sont aquatiques. On les trouve, soit sous la forme de larves, soit en étal parfait, dans les eaux douces des étangs, des mares, des fossés , etc. \Jélophore nubile passe néanmoins une grande partiede sa vie hors de cet élément, et il paroît même, d'après des observations qui m'ont été communiquées par M. Vau- douer , que sa larve ronge les racines de quelques plantes des champs. M. IMiger a pareillement découvert que celle de VJiydrophile tronqué est terrestre. Ces coléoptères sont, en général, carnassiers. Ils composent les genres: Hydrophile, Sperchée, Elophore, et celui d'HYDR^ENE. V. ces articles, (l.) HYDROPHIS , Hydrophis. Genre de reptiles de la fa- mille des Serpens , dont les caractères consistent à avoir le corps garni en dessus et en dessous , ainsi que la queue , d'écaillés semblables , et point disposées en anneaux ; une queue comprimée ; des crochets à venin. Ce genre a été établi par Latreille qui y avoit réuni des serpens qui n'ont point de crochets à venin , espèces que Daudin en a séparées pour former le genre Pelamide. Il ren- ferme cinq espèces. La queue des hydrophis est pour eux en même temps une rame et un gouvernail , qui aide et guide leur natation ; et ils avoient besoin de ce surcroît de moyens , parce qu'ils sont destinés à vivre presque perpétuellement dans l'eau douce , et à y poursuivre les poissons et autres animaux aqua- tiques dont ils font leur proie; ce qu'ils n'auroient pas pu faire avec avantage, s'ils avoient été conformés comme les autres serpens , qui ne nagent que par circonstance. Russel qui les a fait connoître , rapporte que leurs morsures sont extrême- inent dangereuses , et qu'ils sont vivipares. L' Hydrophis obscur est bleu , avec un grand nombre de fascies jaunes qui s'oblitèrent sur le dos dans les deux tiers postérieurs de sa longueur ; ses écailles sont légèrement bor- dées de jaune. 11 acquiert trois pieds et demi de long. wSa queue est lancéolée. Il a trois cent trente-deux écailles abdomi- nales, et quarante caudales. On le trouve dans l'Inde , aux lieux marécageux. L'Hydropuis a bandes bleues. Il est blanc, avec un grand nombre de fascies d'un bleu clair : sa queue est obtuse. Il a trois pieds de long. On lui compte trois cent huit rangs d'écaillcs abdominales , et quarante - huit de caudales. U ge trouve dans Tlnde. L'iiYDRoPHis ARDOISÉ. Il cst bleu sur le dos, et jaunâtre i(9> H Y D sous le ventre ; sa queue est lancéole'e et toute bleue. Il a deux pieds et demi de long, trois cents six rangs d'écaillés ab- dominales, et quarantc-hnil de caudales, (b.) HYDROPHORE, Hydrophora. Genre de plantes crypto- games, de la famille des Champignons, dont les caractères sont d'avoir un chapeau globuleux , aqueux, et un pédicule capillaire , presque droit. Ce genre , qui a élé établi par Todde , renferme trois es- pèces qui paroissenl avoir les plus grands rapports avec les Moisissures à pédicules simples, et qui , comme elles , nais- sentsur les matières fécales et lesvégélauxen putréfaction, (b.) HYDROPHORE GRIS DE-UN. Espèce d'AcARic qui croît parmi les graminées , s'élève à quatre pouces , et se ré- sout en encre, dans sa vieillesse. Son chapeau, très-long et peu ouvert , est gris , strié par l'impression des feuillets. 11 n'est nullement dangereux, (b.) HYDROPHORE TROIS COULEURS. C'est en- core un Agaric qui croît sur les plantes potagères qui se gâtent. Il est de mêmes forme et grandeur que le précédent; mais son chapeau en diffère par ses couleurs qui sont le gris- de-noiselle au sommet du chapeau, le gris-lilas aux bords, et le blanc , en dessous. Ce champignon qui ne paroît pas avoir de qualités nui- sibles, est figuré pi. i23 du Traité des champignons de Paulet. HYDROPHORES. Famille de champignons , formé* aux dépens du genre Agaric de Linnppus : clic renferme les espèces dont le chapeau est fort haut , peu l.irtje , peu épais, et souvent rayé , et dont la chair se résout par vétusté , en couleur noire. Paulet lui réunit sept e5;pèces , savoir rl'HY- DROPHORE TROIS COLLEURS ; le ChaMPIT.NON DE LA CHICORÉE ; I'HyDROPIIORE GRIS-DE-LIN ; le CHAMPIGNON DE MlTIlRI- DATE ; les Petites clochettes ; les Clochettes serpen- tines ; le Dé a coudre et les Petits œufs, (b.) HYDROPHYLLE , Hjdroph/hmi. Genre de plantes de la pentandrie monogynie et de la famille des s«;besleniers , qui présente pour caractères : un csiire monophyllc , divisé en cinq parties étroites et persistantes ; une ( orolle mono- pétale , campanulée , à limbe droit , partagé en cinq décou- pures , et ayant intérieuren»ent cinq stries longiludmales, mellifères, dont les bords sont connivens ; cinq éiamines ; un ovaire supérieur , ovale, se terminant en un style de la lon- gueur des étamines , à stigmate bifide et aigu; une capsule globuleuse, uniloculaire , bivalve , contenant un placenta qui. porte quatre semences , dont trois avortent souvent. H Y D 493 Ce genre contient quatre espèces , qui sont des herbes vivaces de l'Amérique , dont les feuilles sont palmées ou presque ailées , et les fleurs disposées en corymbes pédon- cules et terminaux. L'une, I'Hydrophylle pinnée , Hydro- phyllum virgiidcum , Linn. , a les pédoncules plus longs que les pétioles ; l'autre , I'Hydrophylle anguleuse , Hydrophyi- lum (unadense^ Linn. , a les feuilles lobées, et les pédoncules plus courts que les pétioles. Toutes deux sont cultivées dans les jardins de Paris , et toutes deux se plaisent dans les ter- rains gras et ombragés , ainsi que je l'ai observé en Caroline , et non dans l'eau, comme leur nom semblerolt le faire pen- ser. La troisième , I'Hydrophylle de Magellan , vient du détroit de Magellan. Elle a les feuilles pinnées; les folioles entières , ondulées , inégales et velues, (b.) HYDROPHYLLE , Hydrophylla. Genre de plantes , éta- bli par Slackouse, Néréide britannique ," aux dépens des Va- RECS de Linnseus. Ses caractères sont : frondes feuillues, vei- nées , très-grêles , à rameaux cylindriques ; fructifications tuberculeuses sur les rameaux, les nervures des feuilles, et sur les bords. Ce genre rentre dans celui appelé Delesserie par La- mouroux. Il renferme deux espèces , les Varecs sanguin et Sinueux, (c.) HYDROPHYLLUM {Feuille d'eau, en grec). Ce nom étoit celui de Yhydrastis r.anadensis , plante aquatique, à la- quelle les Canadiens donnoient le nom dé Feuille d'eau. Depuis, il a été appliqué à une autre plante de Virginie et du Canada , qui n'est point aquatique , mais qui , par la forme de sa feuille, ressemble à Vhydraslh. C'est V hydropl/yl- lum virginicum , Linn., type du genre hydrophyllum de Tourne- fort, Gronovius, Linnseus, etc. V. Hydrophylle, p.492. (ln.) HYDROPIPER, Ydropeperi des Grecs. Dioscoride donne ce nom à une plante aquatique qui avoit la saveur du poivre. Ses commentateurs la rapportent au /?e/5/V;«/v« des Latins, ainsi nommé à cause delà forme de sesfeuilles, semblables à celles des feuilles du pêcher , ou bien mieux à une de nos espèces de persicaire qui en a conservé le nom(polygonumhydropiper). Celte dernière plante a en effet la saveur poivrée , et dans quelques endroits on la fait sécher pour la réduire en poudre et s'en servir en guise de poivre. Plusieurs autres plantes dont la saveur est la même , ou qui se rapprochent de celle ci-dessus, sont indiquées sous ce nom : telles sont le Beccabunga, la Renoncule graminée , les Bidens aquatique et penché , VÉlatine hydropiper, le ralla palustris^ et quelques autres Per- SICAIRES. (lN.) • 494 H Y D HYDROPITYON , Hydwpityon. Genre établi par Gœrr ncr, pour placer l'HoTTONE de l'Inde de liinnceus, qui sV-- carte beaucoup des autres hottones, que Jussieu regarde même comme appartenant à la famille des Caryophyllées. Il offre pour caractères : un calice de cinq folioles ; une corolle de cinq pétales plus petits ; dis étamines à filets ve- lus ; un ovaire supérieur à style terminé par un stigmate or- biculaire ; une graine nue ou une capsule monosperme. La plante est petite , a les feuilles verticillées et les fleurs axillaires. (b.) HYDROPORE, Hydroporus, Clairv. Genre d'insectes. V. Hyphydre. (l.) HYDROPTERIDES, Hydroptendes.Tamûle déplantes établie par Willdenow aux dépens de celle des Fougères- II a réuni les genres Isoïte , Pilulaire , Salvinie , Mar- siLLE et Azolle. (b.) HYDRORHIZA. Nom par lequel Commerson désigne le genre Bacquois, Pandunus. (ln.) HYDROSACES. Synonyme A' andresaœs ^ chez les Grecs. Ces deux noms ont appartenu à une petite herbe blanche sans feuilles, munie de vrilles, et ayant des follicules vers le som- met. Elle croissoit sur les bords de la mer , en Syrie. On ignore quelle elle est. La cuscute^ l mette , etc. , ont été prises pour elle, (lis.) HYDROSELÏNUM. Persil aquatique des Grecs. V. Eleo- •SELINON. (LN.) HYDROSCOPE. On a donné ce nom à des charlatans qui prétendoient voir couler l'eau à une grande profondeur sous terre , et qui découvroient ainsi les sources avec autant de facilité qu'on découvre les trésors par le moyen de la èa- guetie divinatoire. On seroit surpris sans doute d'apprendre que cette puérilité ait trouvé des partisans, même parmi des hom- mes qui sont supposés instruits , si l'on ne savoit pas com- bien le MERVEILLEUX a d'attraits pour nous , et combien ses prestiges sont puissans pour faire disparoître à nos yeux l'in- vraisemblance des prétendus phénomènes et leur défaut total d'analogie avec les véritables phénomènes de la nature. Notre siècle est sans doute le siècle des lumières ; mais on sait bien qu'il y a des tachés même dans le soleil. V. l'article Baguette DIVINATOIRE. (PAT.) HYDROSTACHYS, Hydrosiachys. Genre établi par Dupelil-Thouars , pour rassembler des plantes aquatiques ide la dloécie monandrie et de la famille des nàyades , qu'il a observées à Madagascar. Ce genre présente pour caractères : un calice formé par H Y E ^gS une écaille perpendiculaire à l'axe et recourbé à son sommet ; une seule anthère sessile à deux loges distinctes ; un ovaire supérieur surmonté de deux styles ; une capsule ovale com- primée d'un côté, à deux valves, et à une loge polysperme ; les semences attachées aux parois internes des valves, (b.) HYDROTITE. Petite géode de calcédoine qui contient de l'eau. V. Enhidre. (pat.) HYENE, Hyœna, Storr., Briss., Cuv., Geoff. , Dum. , lUig. Genre de mammifères carnassiers digitigrades, ainsi caractérisés : six incisives et deux canines fortes, à chaque mâchoire ; cinq molaires en haut et quatre en bas de chaque côté, dont les trois premières sont coniques, mousses et fort grosses; à la mâchoire supérieure, la quatrième dent ou la carnassière, la plus grande de toutes, tricuspide en dehors et munie d'un petit tubercule en dedans et en avant ; à la mâchoire inférieure , la carnassière correspondante , bicus- pide et n'ayant point de tubercule ; la cinquième et dernière dent d'en haut, petite et tuberculeuse ; quatre doigts à chaque pied, munis d'ongles crochus, mais non rétracliles ; une po- che profonde et glanduleuse sous l'anus ; langue rude ; tête assez semblable à celle des chiens ; mâchoires moins allon- gées que celles de ces animaux et plus que celles des chats ; yeux grands ; oreilles médiocres, oblongues, pointues, très- mobiles; queue courte; poil long et grossier; train de derrière en apparence plus bas que celui de devant, etc. Les hyènes sont, avec les animaux du genre des chats, les mammifères terrestres les plus cruels et les plus carnassiers; aussi leurs systèmes dentaires ont-ils plusieurs rapports com- muns. C'est dans ces deux genres d'animaux féroces qu'on trouve le moins de dents, et qu'on observe le moins de dents tuberculeuses ou d'appendices mousses aux dents tranchantes. Dans l'un comme dans l'autre, il n'y a point de petites dents du tout derrière la grosse molaire d'en bas. Malgré ces rapports entre les chats et les hyènes, celles-ci en offrent quelques autres avec les chiens. Cependant elles ont plus de dents que les premiers, et elles en ont moins que les derniers ; ce qui rend la longueur de leurs mâchoires moyenne. Aussi les hyènes ne vivent-elles pas uniquement de proie vivante comme les chats, et recherchent-elles avec avidité comme les chiens , les cadavres et les chairs pour- ries pour s'en repaître. En général, ce sont des animaux ex- cessivement farouches et qui vivent dans l'obscurité , ainsi que le démontre suffisamment la forme de leurs yeux. Elles appartiennent à quelques contrées très-chaudes de l'ancien continent. Première £s/?^ce. — L'Hyèhe rayée, Caniskyœnaj Liun. ; 496 H Y E riÏYÈNE, Buff. , siijtp. tom, III, pi. 4^6. — Cuvier, Mmagerie du Muséum d'Histoire naturelle; pi. t. i6 de ce Dlct. Hyène d'Orient. ar Palisot-Beauvois, aux dépens des Agrostides de Lin- 5i6 H Y M naeus. Ses caractères sont : fleurons inégaux 7 aigus. L'in- férieur beaucoup plus petit et stérile ; à balles aiguës la supérieure très-courte, membraneuse, transparente; fleuron supérieur à balle de deux valves membraneuses et aiguè's. Les Agrostides queue de souris et k un seul épi consti- tuent ce genre, (b.) HYMENiEA. Nom poétique donné par Linnaeus aa genre de légumineuses qui renferme le Courbaril , parce que , dans cette plante , les feuilles sont composées de deux folioles, et peuvent être regardées ainsi comme une image de l'union conjugale. F. Courbaril. (ln.) HYMENATHERE, Hymenaiherum. Genre de planteséta- LU par H. Cassini dans la famille des synanthérées, tribu de» héliantbées , dans le voisinage des Clemenocomes et des Tagets. Ses caractères sont : calice propre radié ; calice commun monophylle ; réceptacle nu ; aigrette composée de petites écailles , dont la partie inférieure est large , mem- braneuse , et la partie supérieure divisée en deux ou trois filets inégaux , barbellulés. (b.) HYMÉNÉLYTRES , Hymenefytra. FamiUe d'insectes hémiptères, section des homoptères , distinguée des autres familles du même ordre par les caractères suivans : bec nais- sant de la partie la plus inférieure de la tête, près de la poitrine ; élytres de consistance égale, dans toute leur éten- due , presque semblables à des ailes ; tarses à deux articles ; antennes filiformes ou sétacées , plus longues que la tête , de de six à onze articles. Dans la partie des insectes de l'ouvrage de M. Cuvier, sur le Règne animal , j'ai désigné cette famille sous le nom d'a- phidiens^ parce que le genre le plus nombreux et le plus connu /de ceux qu'elle comprend, estcelui des Pucerons. Ces insectes sont très-petits, ont ordinairement le corps mou, et puUuleut |)eaucoup. Les uns ont les antennes de dix à onze articles , dont le dernier terminé par deux soies. Ils forment la tribu des Psyl- CIDES. Les autres n'ont que six à huit articles aux antennes. Ceux dont les élytres et les ailes sont linéaires , et couchées hori- zontalement sur le dessus dyi corps , dont le bec est très- petit ou peu distinct, qui ont les tarses terminés par un article vésiculeux et sans crochets , comprennent la tribu des Thripsides. Celle des Aphidiens est distinguée de la précédente en ce H Y M 5i7 que leurs organes an vol sont inclinés , triangulaires ou ovales ; qu'ils ont un bec distinct , et que le dernier article de leurs tarses n'est point vésiculeux , et qu'il se termine par des crochets. F. ces mots, et l'article Entomologie, (l.) HYMENOCARPUSî^ Genre établi par Willdcnow ( Horl. berol. ), et fondé sur le medicago circinata^ Gaerlner, Fruct. 2, tab. i55. Cette plante, très-voisine du medîcago circinata , L. , tiré ses caractères génériques de la forme cir- culaire', comprimée , mince et large de ses fruits. Ce genre n'a pas été adopté. V. Medîcago. (ln.) HYMÉNODES , Hymenodes. Nom donné par moi aux plantes de la cinquième tribu ou section de la famille des mousses , dont l'urne est garnie à son orifice de dents en forme de crochets ( péristortie externe ) , qui soutiennent et retiennent une membrane horizontale qui remplace le péristome interne. La découverte récente d'un nouveau genre de mousses par M. Rob. Brown, à la Nouvelle-Hollande , la Dawsonia, qui est privée de cette membrane , et dont le péristome in- terne est composé d'un grand nombre de cils soyeux , néces- «ite le changement de nom pour cette tribu, (p. B.) HYMÉNONÈME , Hymenonema. Genre de plantes établi par H. Gassini , pour placer la Cupidone grecque de Lin- nœus , et la Scorsonère Apre de Desfontaines. Ses carac- tères sont : calice commun cylindrique , composé d'écaillés imbriquées, ovales-aiguës, coriaces; réceptacle nu; stig- mate composé de deux lames spathulées , presque mem- braneuses ; aigrettes très-longues, au nombre de dix; la par- tie inférieure plus large , l'inférieure plus épaisse , irrégu- lièrement barbellulée. (b.) HYMENÔPAPPE, Hymenopappus. Nom donné par Lhéritier au genre que Lamarck a appelé Rothie. (b.) HYMÉNOPHYLLE, Hymenophyllum. Genre de plantes cryptogames , de la famille des fougères , dont le caractère consiste à avoir la fructification en points situés aux bords des feuilles ; les follicules en poche arrondie , s'entr'ouvrant «xtérieurement, et à filet ligneux et court. Ce genre comprend quelques espèces , confondues par Linnaeus avec les Trichomanes. (b.) HYMÉNOPHYLLE, Hymenophrlla. Genre de plantes établi par Stackhouse , Néréide britannique^ aux dépens des Varecs de Linnseus. Ses caractères sont: frondes très-grêles, sans veines, laciniées de diverses manières; fructification en tubercules attachés aux frondes. Ce genre rentre dan» la seconde section du genre appelé 5i8 11 y jNT BELESSERiEpar Lamouroux. Il renferme sept espèces , dont font parlie les VaRêcs déchiré, lacinié et bifide, (b.) HYMENOPODES. Oiseaux qui ont les doigts garnis d'une foible membrane à Torigine. (V.) HYMÉNOPOGON, Hynànopogon. Genre établi par Palisot-BeauvoissurleBuxBAUME feuille. Il a pour carac- tères : une coiffe petite en forme de capuchon ; un opercule conique aigu; des cils réunis en une membrane plissée; une urne ovale renflée d'un côté à sa base, et frangée à son ori- fice; le tube court, placé obliquement, (b.) Il YMÉNOPTÈl\ES,7/j7neHo/?/mz. Neuvième ordre dans ma méthode, de la classe des insectes, qui a pour caractères : quatre ailes nues ; des mandibules propres ; mâchoires en forme de valvules; lèvre tubulaire à sa base, terminée par une languette^ soit en double, soit repliée : ces parties se rapprochant pour former une sorte de trompe , propre à conduire àts Substances liquides ou peu concrètes ; ailes veinées, de gr'andeurs inégales; les inférieures toujours plus petites , sOus toutes leurs dimensions ; une tarière ou un ai- guillon, dans les femelles. Nous découvrons d ans les écrits des premiers naturalistes l'i- dée fondamentale qui a conduit à la formation de cette coupe. Ils remarquèrent que, parmi les insectes à ailes découvertes, les anélyfres , et dans lesquels ces organes sont au nombre de quatre, plusieurs de ces insectes , tels que les abeilles, les guêpes, etc. , avoient Tabdomen armé d'un aiguillon. Linnaeus , en établissant, dans les premières éditions de son Systema nalurccy l'ordre des névroplère^ et celui des hyménoptères, n'avoit pas employé cette considération comme caractère principal. Quatre ailes à réseau formé par des veines , telle étoit alors la manière dont il signaloit le premier de ces ordres. Des ailes membraneuses distinguoientle second; les névroptères cependant ont des ailes aussi membraneuses que les hymé- noptères, et l'on peut dire qu'elles ont , dans les uns comme dans les autres, un réseau, mais à mailles plus ou Inoins grandes et plus ou moins nombreuses. Les caractères de ces ordres ne sont donc pas bien tranchés, et c'est probablement ce qui a déterminé Geoffroy, dans son Histoire des insectes des environs de Paris, à réunir ces deux ordres en un , sous le nom de téimptères : Linnseus revint ensuite à la distinction indiquée primitivement. La présence d'un aiguillon fit partie du caractère essentiel des hyménoptères. Dans les premières éditions de son Système d'entomo- logie, Fabricius composa avec tous les insectes à quatre ailes nues, ainsi qu'avec nos crustacés branchiopodes etisopodes et ^es insectes de notre ordre des thysanopres, celui des synistates. Il Y ^I 5i^ Mais dans le second volume de son Entomologie syste'mati- que, publié en lygS, il détacha des synîstatesles hyménop- tères , et en forma , sous le nom de pièiaies^ un ordre particu- lier, et qu'il caractérisa ainsi, mais d'une manière bien insi- gnifiante : mâchoire cornée , comprimée , souvent allongée. Nous avons dans Degeer, qui a perfectionné la méthode de Linnœus , un ^uide bien plus sûr et plus intelligible.Qualre ailes découvertes , membraneuses , dont les inférieures sont plus courtes , à nervures la plupart longitudinales ; bouche armée de dents ; aiguillon ou tarière dans la femelle : tels Bont , d'après lui , les traits distinctifs des hymérioptèrcs. Aux caractères qui signalent cet ordre , j'en ai ajouté un autre qu on n'avoit pas remarqué , et qui peut suffire dans un système fondé uniquement sur les organes de la mastication : une langue ou lèvre inférieure renfermée à sa base dans urie gaîne coriace qui s'emboîte, sur les côtés, dans les mâ- choires ( Pre'f. des carnet, génér. des inscci. , imprimé en 1796). L'ordre des hyménoptères est si naturel , que tous les natu- ralistes l'ont adopté , et tel que Linneeus l'avoit circonscrit. On a seulement varié , quant à son placement dans la série générale des insectes. Ces changemens dépendent de l'ira-- portance plus ou moins grande que l'on attache aux carac- tères tirés , soit des organes du vol , soit des parties de la bouche , considérées sous le rapport général de leurs formes. et de leur action, ces animaux étant broyeurs ou suceurs. Si , comme dans la méthode de M. Lamarck , on met cette distinction en première ligne , et que 1 absence ou la pré- sence des ailes, leur nombre et leur consistance ne fournis- sent que des caractères secondaires, ou si, comme l'ont fait MM. Clairville et Duméril, f'on prend pour base ces der- niers organes , mais de manière à conserver néanmoins la. division précédente , la série des ordres sera nécessairement différente de celle que Linufeus a présentée ; car , dans les autres méthodes, les diptères n'offrant que deux ailes et fai- sant partie des suceurs, seront un des extrêmes de la division des insectes ailés, et conligus soit aux hémiptères, soit aux lépidoptères. On ne pourra s'empêcher de lier cette série des insectes suceurs avec les broyeurs, par le moyen des hymé- noptères , puisqu'ils semblent participer, sous ce rapport , des uns et des autres. C'est ainsi que M. de Lamarck , en allant du plus simple au plus composé, passe des lépidoptères aux hyménoptères, et que M. Duméril fait succéder les derniers aux hémip- tères. Dans la méthode de M. Clairville, qui termine par ceux-ci , sa division des insectes ailés avec un suçoir , nous conduit des hyménoptères , qu'il nomme yhléboptères , aux 530 H Y M in.sectes à deux ailes , les premiers de la série des suceurs. Mais toutes ces distributions ont le défaut de réunir des in- sectes très-disparates, quant à la nature des organes du vol. C'est ainsi que les hémiptères , si voisins à cet égard des co- léoptères et des orthoptères , se trouvent placés au milieu d'insectes à ailes membraneuses. L'inconvénient disparoît, si on les considère ( V. les articles Entomologie et Insectes) comme une branche latérale. Les hyménoptères ont tous des yeux composés, souvent plus grands dans les mâles ; trois petits yeux lisses , rassem- blés ordinairement en triangle, sur le vertex; des antennes très-variées , non-seulement selon les genres , mais encore dans les sexes de la même espèce , néanmoins filiformes ou sélacées dans la plupart , composées de trois à dix articles ou de plus de onze , dans ceux qui ont une tarière , de treize (les maies) ou de quatorze (les femelles) dans ceux qui ont un aiguillon ; deux mandibules cornées , variant aussi selon les sexes ; des m^ichoires et une lèvre généralement étroites, allongées , attachées dans une cavité profonde du dessous de la tête , par de longs muscles , en demi-tube à leur partie inférieure , souvent repliées à leur extrémité , plus propres à conduire les sucs nutritifs qu'à la mastication, en forme de trompe dans plusieurs ; la languette membraneuse , ordinai- rement trifide, soit évasée à son extrémité, soit longue et filiforme; le pharynx situé à la face supérieure des muscles de la lèvre , et dont une petite lame triangulaire , cachée par la lèvre, Vépiphaiynx ou Vèpiglosse, ferme à volonté l'ouverture , qui même l'est quelquefois doublement au moyen d'une autre pièce plus inférieure, celle que M. Sa- vigny nomme langue ou hypopharynx ; quatre palpes , dont deux maxillaires , composés fréquemment de six articles , et dont deux labiaux n'en offrant que quatre ; le tronc , dé- signé communément sous le nom de corselet, thorax^ formé de trois segmens réunis en une masse, tantôt cylindrique ou ovoïde, tronquée aux deux bouts, tantôt presque globuleuse, dont l'antérieur {collier, Kirby) très-court, transversal, et dont le second ( thorax , Kirby), ordinairement plus étendu, in- timement uni avec le troisième {metathorax ^ Kirby), et se confondant avec lui ; les ailes croisées horizontalement sur le corps, membraneuses, hyalines ou transparentes, et dont les supérieures plus grandes , ayant à leur origine une petite écaille arrondie , convexe , n'offrent dans celles dont la réticulation est la plus composée que trois à quatre nervures principales et longitudinales , réunies dans le sens de la lar- geur par de petites nervures ou des veines ; l'abdomen ré- tréci le jplu5 souvent à sa basç , en m«inière de filet ou de H Y M 521 pédicule, qui le suspend à l'extrémité postérieure du cor- selet , formé de segmens coriaces ou membraneux , dont le nombre varie de cinq à neuf, mais souvent de six dans les femelles , avec une tarière ou un aiguillon au bout, et de sept dans les mâles ; enfin les pattes contiguëS ou très-rappro - chées à leur base , terminées par un tarse allongé, filiforme, de cinq articles entiers, avec deux crocbets au bout, et entre lesquels est souvent une pelote; enfin les deux pattes antérieures insérées près du cou , avec une épine ( le voile , Kirby ) au côté interne de leurs jambes , et une échancrure au même côté du premier article de leurs tarses. Ces parties présentent quelquefois des différences , selon les sexes. La tarière ou l'oviducte , et l'aiguillon , sont composés , dans la plupart, de trois pièces écailleuses ; elles sont lon- gues , grêles , en forme de fil , ordinairement saillantes , en manière de queue , dans ceux qui ont une tarière ; l'une d'elles , la tarière proprement dite, pointue et dentelée, en scie au bout , est placée entre les deux autres , qui lui forment une gaine. Ces pièces sont plus courtes, aciculaires et ca- chées, dans ceux où elles sont transformées en aiguillon; la supérieure a une coulisse en dessous , qui emboîte les deux autres , ou l'aiguillon propre , et dont l'extrémité offre aussi souvent des dentelures ; à la base sont deux petites lames cylindriques ou coniques , en forme de styles ; la ta- rière est quelquefois formée par les derniers anneaux , et tantôt écailleuse , saillante en manière de queue pointue ou d'aiguillon , et tantôt membraneuse , cachée , et consistant en une suite de petits tuyaux , susceptibles de s'allonger ou de rentrer les uns dans les autres , avec un petit aiguillon au bout. Les organes sexuels du mâle sont composés de plusieurs pièces , dont la plupart en forme de pinces ou de crochets , et entourant le pénis. La réticulation variée des ailes supérieures des hymé- noptères a fourni à M. Jurine de bons caractères auxiliaires pour la distinction des genres. Nous avons exposé à l'ar- ticle Ailes des Insectes les principes de sa méthode, et afin d'éviter des redites , nous y renvoyons nos lecteurs. Ces insectes sont tous terrestres , et subissent une méta- morphose complète. La plupart de leurs larves ressemblent à un ver et sont dépourvues de pattes ; telles sont celles des hyménoptères de la seconde famille et des suivantes. Celles de la troisième en ont six écailleuses et à crochet, et le plus souvent en outre , douze à seize autres , simplement membraneuses. Par leurs formes et leurs couleurs, ces lar- ves sont très-semblables à celles des lépidoptères, et ont reçu 5231 II Y ^I le nom de fausses-chenilles. Les unes et les autres ont une tête écailleuse , et une bouche composée de mandibules, de mâchoires et d'une lèvre, à l'extrémité de laquelle est une filière pour le passage de la liqueur soyeuse qui leur sert pour se construire une coque , lorsqu'elles veulent passer à l'état dé nymphe, et où elles se renferiaent. Celle matière s'élabore dans des réseiToirs intérieurs. Les femelles des hyménoptères à tarière n'amassent point de provisions pour leur famille, et se bornent à placer leurs œufs sur la surface ou dans l'intérieur des substances tant végétales qu'anima'es , devant servir de nourriture à leurs petits , sous la forme de larves. Cette section d'hymé- noptères térébrans nous offre seule des larves pourvues de pattes et des fausses-chenilles. Elles sont toutes herbi- vores, et la plupart des dernières, de même que de véri- tables chenilles , se tiennent à nu sur les feuilles dont elles font leur pâture. Les autres larves herbivores de la même section vivent presque toutes dans ces excroissances végé-> taies , de formes très-variées, qu'on appelle galles ( Voyez ce mot ) , et qui se sont fornjées à la suite de la piqûre ou de la plaie que la femelle avoit faite en celte partie du végétal , Eour y faire sa ponte. Les autres hyménoptères téré-» rans se nourrissent, dans le même état, soit de larves, de chenilles particulièrement, dont elles rongent l'intérieur, sans attaquer d'abord le principe essentiel de la vie, soit de nymphes ou d'œufs d'insectes, corps où elles avoient été déposées , sous cette dernière forme , par la mère. Les larves des hyménoptères à aiguillon sont privées de pattes et ressemblent à des vers. Les unes vivent soli-^ laires dans des nids ou retraites que la mère leur a préparés, et souvent avec un art qui excite notre surprise ; des cada- vres d'insectes, ou de la poussière d'étamines mêlée d'uiv peu de miel , transportés dans l'habitation par cette mère prévoyante, forment leurs alimens. Les autres larves sont réunies en société. Celles-ci ont besoin de matières nutri- tives, tant végétales qu'animales, plus élaborées et souvent renouvelées. Quelques-unes d'entre elles sont élevées pardea femelles qui ont survécu aux rigueurs de l'hiver , et qui sont ensuite aidées dans leurs travaux par des individus du même sexe , mais incapables de s'accoupler et d'engendrer, à raison de l'imperfection de leurs ovaires. La plupart des autres lar- ves, et c'est le plus grand nombre, sont confiées exclusi- vement aux soins d'individus de même nature , dont les uns sont aptères, les autres ailés, et qui forment tous des sociétés très-populeuses , et dont les ouvrages et le régime de vie sont pour nous le sujet d'une continuelle admira- Il Y M 523 tion. V. les articles Asr.îLLE , Bourdon , Fourmi et Guêpe. Les hyménoptères , dans leur état parfait, vivent presque tous surles fleurs, el sont, en général, plus abondans dans les contrées méridionales. La durée de leur vie, depuis leur naissance jusqu'à leur dernière métamorphose , ne s'élend guère au-delà d'une année. De tous les ordrt-s dont se compose la classe des insectes, celui des hyménoptères est, sans contredit, sous le rapport des mœursetdeshabituacs,leplusdigne denotrc attention. Malgré les nombreuses elbeiies observations des Réaumur, desDe- geer et des Huber, il présente encore, aux amis de la nature , un vaste chr.mp tie découvertes. Christ a réuni, dansun ouvrage spécial, tout ce «qu'on avoit écrit jusqu à lui sur ces insectes. Mais, outre que les ligxirey qu'il y a jointes sont grossières et souvent mécom.oissabîes, ce livre, par les progrès de la méthode , est aujourd'hui très-imparfait. Le système des piézates de Fabricius n'est qu'un catalogue spécifique, ré- digé trop à la bâte, sans notions préalables et accessoires sur leurs différences sexuelles, sans le sentiment des rapports Jiaturels qu'on acquiert, surtout par l'étude des mœurs des insectes , souvent inexact dans l'exposition des caractères des genres, et très-incomplet quant aux espèces d'Europe. M. Jurine, aussi recommandable par ses connoissances en histoire naturelle et dans Tart de guérir, que parl'amabilité de son caractère , a publié un excellent ouvrage sur les hymé- noptères {Nouvelle méihode âc classer les hyménoptères^ Ge- nève, 1807 ). Il partage ces insectes en trois ordres : ceux du premier ont le ventre sessile ; sa largeur égale celle du cor- selet ; j'avols déjà établi la même division dans le troisième volume de mon Histoire générale des insectes. Les hymé- noptères du second ordre ont le ventre pétiole , et le péttole est implanté sur le corselet ; il est inséré derrière lui , dans ceux de troisième ordre ; l'absence ou la présence de ces cellules des ailes, qu'il appelle radiales et cubitales, leur nom^ bre, leurs fomies , leurs connexions, les mandibules en- suite, et, en dernier lieu, les antennes, lui fournissent les ca- ractères distinctifs des genres. En ne considérant cette mé- thode que sous des vues^ systématiques , ce savant a parfai- tement rempli le but quil s'étoit proposé. 11 a soigneusement distingué les sexes ; ses coupes sont nettes et sans mélange d'espèces disparates. J'aurois seulement désiré qu'il eût fa- cilité Tétude des genres de son troisième ordre, le plus con- sidérable de tous, par des divisions. Des figures, d'une per^ feclion admirable , font connoîlre une espèce de chaque genreet toutes lesparties sur lesquelles il a fondé sa méthode. J>eux cçlèbres liaturalisles qui m'honorent de leur amitié , $2^ H y o MM. Kirby et Kliig , ont été très-utiles à cette partie de la science ; le premier, par son excellente monographie des abeilles de la Grande-Bretagne; l'autre par l'établissement de plusieurs genres nouveaux et par des monographies en- core de quelques-uns de ceux de notre famille des hymé- noptères porte-scie. Je divise cet ordre en deux sections : les Térébrans et les Porte-Aiguillons. F. ces articles et celui d'E^TOMOLOGiE. HYMENOTHÈQUES,//ym«no//imV. Nom ducinquième ordre , deuxième classe de la méthode des champignons , Î)ar le docteur Persoon. Il contient cinq sections, savoir, es Agaricoïdes composés de trois genres , Amanite, Aga- ric et Mérule. Les Bolétoïdes composés de deux genres, Dœdale et Bolet. Les Hydnoïdes comprenant également deux genres, Systotrœme et Hydne. Les Gymnodermates^ contenant deux genres , Téléphore et Mérisme. Les Cla- viformes contenant deux genres. Clavaire et Géoglosse- Enfin , les Helyelloïdes contenant dix genres , Spatu- LAI RE, LÉOTIE , HeLVELLE , MoRILLE , TrEMELLE , Pe- Z1ZE , Ascobole , Helotion , Stilbon , AEgerite. (p.-b.) HYNOR-FU. C'est le nom de la Persicaire, en Hon- grie. (LN.) HYOBANCHE, Hyobanche. Plante de la didynamie an- glospermie , de la famille des orobanchoïdes , qui est d'une couleur de sang, dont la tige , haute de quatre à cinq pou- ces , est imbriquée de feuilles squamiformes , ovales , ob- tuses , glabres , convexes en dehors , et dont les fleurs sont disposées en épi terminal, imbriqué de feuilles et de bractées. Chaque fleur offre : un calice de sept folioles linéaires et acuminées ; une corolle monopétale, à lèvre supérieure voû- tée , échancrée , et sans lèvre inférieure ; quatre étamines , dont deux plus grandes ; un ovaire supérieur , ovale , chargé d'un style filiforme , courbé à son sommet, où est un stig- mate obtus et échancré. Le fruit est une capsule arrondie , biloculaire , renfermant des semences petites et nombreuses. Cette plante est parasite des racines des autres végétaux , et se trouve au Cap de Bonne-Espérance, (b.) liYOPHORBE, Hyophorhe. Gœrlner figure , pi. 120 de sa Carpalogie , sous ce nom , les fruits d'un palmier de l'île de la Réunion , dont il forma un genre quoiqu'il ne connût pas les autres parties de la fructification. Ce fruit est une baie monosperme , dont l'albumen est cartilagineux , so- lide , et porte l'embryon à son sommet. V, au mot Pal- mier, (b.) H Y 0 52S HYOPHTALMON ( œU de cochon ; en grec ). Chez les Grecs, c'ctoit un des noms de la plante que Dioscoride nomme aster aiticos et bubonion^ qu'on croit être V aster atiicus de Pline, I'a7ne//M5 de Virgile , ti V aster aviellus ^ Linn. (LIS.) HYlOSCYAMUS, Yoscyamos des Grecs. Ce nom est com- posé de deux mots grecs qui signifient /we à cochon. Les an- ciens le donnoient à des plantes qui étoient mortelles aux pourceaux et aux sangliers qui en avoient mangé. Suivant Elien, ces animaux n'évitoient la mort qu'en se plongeant dans l'eau, et en buvant une grande quantité de ce liquide aussitôt qu'ils s'éloient empoisonnés. Hippocrate parle de Vhyoscyamus; Dioscoride en indique trois espèces : la pre- mière à fleurs rougeâtres et à graines noires ; la deuxième à fleurs et à graines jaunâtres, et la troisième à fleurs et graines blanches. Pline admet un plus grand nombre d'espèces d'/(/05- cyamus^ et donne pour synonyme à ce nom celui à'apollmaris. JJhyoscyamus avoit beaucoup d'autres noms : tels sont ceux- ci indiqués par Dioscoride ; dyoscyamos , pythonion , ada- man , hypnoiicon , emmanes , atomos , dithyamhrion , xèléon , adamenon.lie téphonion deZoroastre est Vhyoscyamus., de même que le saphto des Egyptiens , le dielaia des Daces , le fabu~ longa des Etrusques , le bilinumtia des Celtes , et Vapollina- ris et Vinanœntaria des Romains. \J Hyoscyamus servoit en médecine pour calmer les dou- leurs et les inflammations qui se développoient dans toutes les parties du corps. Il étoit utile pour guérir la goutte et le gonflement des mamelles ; on l'employoit comme odontal- gique , et lorsqu'il falloit arrêter les pertes chez les femr- mes , etc. Les plantes que Dioscoride nomme hyoscyamus , et la plupart de celles que Pline indique passent, pour être les es- f»èces placées par Linnaeus dans son genre hyoscyamus ., dont e nom corrompu a donné naissance à celui de Jusquiame. Ces plantes sont effectivement la Jusquiame commune ou JUSQUIAME NOIRE, la JuSQUIAME BLANCHE, la JusQUIAME A FLEURS DORÉES et la JuSQUIAME A FLEURS RÉTICULÉES, CeS plantes sont certainement vénéneuses et narcotiques. V. Jusquiame. Elles sont indiquées d^ans les ouvrages anté- rieurs à Linnaeus sous le nom d'Hyosciamus, nom que Ges- ner, Dodonée, Camerare , Epit, etc. , ont étendu aux diver- ses espèces de tabacs {nicoti'ana) qu'ils ont connues ; Cordus le donne an daiura meiel^ Hentidinn 3.11 pedaiium murex , d'autres à quelques MoRELLES , etc. Le genre hyoscyamus actuel desbotanistes fut fixé parTour- nefort ; il est peu nombreux en espèces et très-naturel; ce- S25 lï Y O pendant Jacquin et Mœnch en séparent l'espèce nommée hyosnamiis sropolia pour en faire un genre qui porte ce non» jetqui paroît être le même que Icsara.'Iui de Ruiz et Pavon. (l!s.) HYOSERIDK,7f)Ojm5. (^enre de plantes de la syngéné- fiie polygamie égale , et de la famille des chicoracéés , qui offre pour caractères : un calice conmmn , ovale , conique calicuié , ou composé de deux rangs d'écaillés , dont les in- térieures sont plus longues; un réceptacle nu , portant un grand nombre de demi-Heurons hermaphrodites à languette linéaire, tronquée , terminée par cinq dents ; plusieurs se- mences oblongues , dont celles du centre sont couronnées ^'une aigrette sessile composée de paillettes aiguës , ou de fdets roides, tandis que celles de la circonférence n'ont sou- vent qu'un rebord denté et presque nu. Ce genre renferme une vingtain.e d'espèces , la plupart propres à l'Europe , dont les feuilles sont alternes ou sim- plement radicales , et les fleurs placées au sommet, soit d'une hampe, soit des rameaux d'une tige feuillée. Les espèces les plus communes sont : L'Hyoséride rayonnée , dont la lige est unlflore , nue ; les feuilles glabres , rongées, et les angles dentés. Elle se trouve dans les parties méridionales de l'Europe. L'Hyoséride dormeuse, Hyoseris hedypmïs , Linn. , a les tiges rameuses, les calices fructifères, presque globuleux et f labres. Elle se trouve dans les parties méridionales de la 'rance. Elle forme actuellement un genre particulier, sous le nom d'HEDYPNOÏDE ( F. ce mot ). Elle n'ouvre sa (leur que pendant fort peu de momens chaque jour; de là le nom de dormeuse^ qu'on lui a donné. Les Hyosérides fétide et minime de Linnoeus , font ac- tuellement , selon quelques botanistes , partie des Lamp- SANES ou constituent un genre nouveau, appelé Arnosère. L'Hyoséride de Virginie forme le genre Krigie. (b.) Hyoseris ou Hyosiris. Pline donne ce nom, grec d'origine , et qui signifie laitue de cochon, à une herbe qu'An- guillara et la plupart des botanistes croient être la Jacée noire {centaurea nlgra\ L'on cite également pour Vhyoseris de Pline des hypochœris et surtout Yliyoseris minima de Lin- nseus, qui paroît avoir cru que c'étoit la plante de Pline, puis- qu'il donne au genre qui la renferme le nom A'hyoseris. Tour- nefort n'ayant appliqué celui-ci à aucun de ses genres , semble être de l'avis d'Anguillara , comme Adanson qui ap- pelle trinciaiella^ ïhyoseris de Linnseus. Ce genre de Linnœus se composoit de quelques espèces de dens leonis et de Vhedyp-^ H Y P S27 t2oV5tleTournefort;maîsil a été consklerableTnent changé de- puis. L'on a rétabli le genre hedypndîs ; Willdenow a fai* ^Qnkrig'e sur Vhyoseris virginîca , et Gœrtner son genre arno- sens SUT Vhyoseris minima ; mais ce dernier est réuni par pres- que tous les botanistes au lapsana, ainsi que d'autres espèces d'hyoseiis. Les espèces restantes forment ïhyosens actuel et le iaraxaconastrum de Vaillant, \jhyoseris taraxacoid^s de Villars constitue le colobium de Pvoth ou ihrincia. V. ce motet Hyo- *ÉR1DE. (ln.) HYPACANTHE,flj7jacaR^^«5. EniSio, M. Rafines- que-Smahz a établi ce genre de poissons, dans lequel il place le scomber oculeatus ^e Linnapus, et le centronoius vadigo deLacépède; il le caractérise ainsi : poissons osseux, thora- ciqucs, à corps comprimé; ayanlune nageoire dorsale oppo- sée à Tanale et deux rayons épineux situés antérieurement, etc. (desm.) HYPASME , Hypasma. Genre établi par Rebentisch, sur une plante de la famille des champignons , et qui est le Dé- lation de Persoon , et !e Mesentérique de Tood, Palisot- Beauvois a prouvé que c'étoit un Bolet mal observé. Voyez Annales du Muséum, septième volume, et le mot De- MATION. (B.) HYP*ÉCOON , Hypecoum. Genre de plantes de la tétran- drie digynie , et de la famille des papavéracées , qui a pour caractères : un calice de deux folioles opposées , ovales ef caduques ; quatre pétales , dont deux extérieurs plus larges , obtus , à trois lobes , et deux intérieurs semi-trifides ; quatre élamines égales ; un ovaire supérieur oblong , terminé par deux styles courts , à stigmates pointus ; une silique allon- gée , quelquefois articulée , contenant plusieurs semences. Ce genre comprend quatre espèces. Ce sont des plantes annuelles , propres à l'Europe méridionale, dont les feuilles sont finement découpées, et les fleurs pédonculées , latérales ou terminales. Les deux plus communes sont : L'Hypécoon COUCHÉ , dont les siliques sont courbées en «rc , comprimées et articulées. Elle se trouve dans les par- ties méridionales de la France , parmi les blés. L'Hypécoon a fruits pendans a les siliques réfléchies et cylindriques. Elle se trouve avec la précédente. (B.) HYPECOUM. Cette plante des anciens, mentionnée par Pline sous ce nom; par Dioscoride , sous celui à!Hypecoon, ëtoit aussi nommée Hypopheon. Dioscoride la met avec les Pavots , parce qu'elle s'en rapprochoit par sa nature et par epn suc. Ou la trouvoit dans les champs , les moissons, et sur- 52» H Y P tout dans les lieux très-chauds. Ses rameaux etoient petits ; et ses feuilles semblables à celles de la Rue. Pline est d'ac- cord avec Dioscoride. Galien et Paule d'jffigyne lui attri- buent des qualités voisines de celles du Pavot. Les commen- tateurs ont cité pour Vhypecoum, le petit Pigamon, thalictnim minus) , je ne sais trop pourquoi la Ketmie vesiculaire (^Hi- biscus trionum ) ; la FuMETERRE A FLEURS JAUNES ; des pa- vots, et surtout les petites plantes connues sous les noms vulgaires de petit Pavot cornu et de Cumin sauvage. L'une d'elles ^ qui est Vhypecoum procumbens, est , selon Gesner, Clusius , et C. Bauhin, le vrai Hypécoon des an- ciens. Cette plante est le type du genre de ce nom , fondé par Tournefort, et adopté par Linnaeus , et qui répond au mnemosilla de Forskaël. Linnaeus croit que Vhypecoum avoit été ainsi nommé d'un mot grec qui signifie ye résonne , parce qu'on entend remuer les graines lorsqu'on agite le fruit , ce qui seroit très-exact , si Vhypecoon étoit un pavot. Ventenat croit que ce nom est formé d'un autre mot grec , qui signifie soumis ., flexible ., parce que la plante est petite et pliante. V. Hypécoon. (ln.) HYPELATE, jFfy/j^/a/e. Genre de plantes de la polygamie monoécie, et de la famille des savoniers, qui a été établi par Brovvn sur un arbre de la Jamaïque, dont les feuilles sont ter- nées. Ce genre a pour caractères : un calice de quaire folioles ovales ; une corolle de quatre pétales étroits ; un nectaire charnu, entourant l'ovaire; huit étamines insérées en-dedans du nectaire, et se fléchissant au-dessus de lui ; un ovaire ob- long , trigone , surmonté d'un style court , à stigmate aigu ; un drupe à une semence, (b.) HYPELA.TE. Suivant Pline , ce nom étoit un de ceux qu'on donnoit à la plante qu'il nomme Laurus alexandrina, qui paroît être une espèce de Sceau de Salomon ou de Fragon. (ln.) HYPERANTHÈRE , Hyperanthera. Genre de plante» établi par Forskaël, sur un arbre d'Arabie, qui paroît avoir beaucoup de rapports avec les Bens. F. ce mot. Ce genre a pour caractères : un calice divisé en cinqpartîesî une corolle de cinq pétales, dont le supérieur est le plus grand ; neuf filamens , dont cinq seulement sont fertiles , et parmi ces derniers un supérieur plus grand ; un ovaire surmonté d'un style simple ; un légume bosielé et à six angles , qui renferme des semences ailées. Yahl a adopté ce genre , et lui a réuni le guilancUna mo^ H Y P Sig tinga de Linnseus , quî est le Ben de Lamarck, et alors il Ta placé dans la décandrie, en appelant Hypérantiière semi- DÉCANDRE Tespèce deForskaël. A ces deux, Willdenow en a joint une troisième , qui est peut-être une variété de la seconde . f^. au mot Ben. Ce genre ne paroît pas différer du c/^/co< de Lamarck d'une manière véritablement prononcée. Loureiro , d'un autre côté, a appelé ce genre Anome, et y rapporte trois espèces, (b.) HYPÉRICOÏDES, Hypericdidœ , Jussieu. Famille de plantes, dont la fructification est composée d'un calice à quatre ou cinq divisions ; d'une corolle de quatre à cinq pé- tales ; d'étamines nombreuses , réunies en paquets par leur base ; d'un ovaire simple , ordinairement surmonté de plu- sieurs styles à stigmates simples; d'un fruit polysperme, rare- ment bacciforme etuniloculaire, plus souvent capsulaire , eti presque toujours multiloculaire, à loges formées par les re- bords rentrans des valves , en nombre égal à celui des styles ; de semences très-petites, insérées sur les bords des valves ou sur un placenta central, dans les fruits capsulaires ; portées sur des placentas latéraux, dans les fruits bacciformes; à péri- sperme nul, à embryon droit, à lobes semi-cylindriques , et à radicule inférieure. Les plantes de cette famille ont une tîge herbacée, ou suf-' frutescente, ou frutescente, rarement couchée, ordinaire- ment droite cylindrique , et portant des feuilles opposées , quelquefois croisées , souvent ponctuées , c'est-à-dire parse- mées de petites vésicules, qui contiennent de l'huile essen- tielle. Leurs fleurs, presque toujours terminales et disposées en corymbes , sont généralement de couleur jaune. Cette famille comprend les genres BRATaYS,HARONGANE, Palavier , Ascyre et Millepertuis, (b.) HYPÉRICOÏDES. Nom sous lequel ont été décrites et figuréesplusieurs espèces des genres HYPERicuMet Ascyre. (LN.) HYPERICUM (Ypericon des Grecs). Pline etDiosco- ride désignentsous ce nom plusieurs plantesquiparoissentêtre toutes des Millepertuis : i." l'^/yoma/w proprement dit, que les commentateurs croient être V hypericum perforatum ou IVliL- PERTUis perforé, ainsi appelé parce que ses feuilles , rem- plies de glandes transparentes, semblent percées d'une mul- titude de petits trous. 2.° h'androsœmum , espèce d'hYperirum en arbrisseau, dont les fruits étoient rouges de sang lorsqu'on les écrasoit entre les doigts; on le rapporte à Vhyperimm an- XY- 34 53o tî Y P tJiusœnmm^ L. 3." Le coris ^ ou rorion, on chamœpUys ^ dont les noms rappeloient l'odeur de punaise ou celle de la résine de pin qu'eshalent ses graines ; ses feuilles ressenibloient à cel- les du iamariscus ; les botanistes le rapportent à Vhypencnm coris^ L. 4." Enfin rai^-zo/î , qui paroit moins bien déterminé, quoique considéré comme une espèce à'hypericum de Linnoeus, et principalement comme 17/)'/?em;«OT ascyron. Le genre hypericuni de Linnœus est un des genres les plus naturels qui existent en botanique ; il ne paroît pas devoir être divisé avec avantage, comme le veut Adanson qui, en enché- rissant sur Tournefort , le partage en six genres, savoir : les trois de Tournefort, qu'il adopte, et qui sont: i .'^\liypencum,([m xenfermeles espèces à trois styles, à étamines àpeinepolyadel- pîies et à capsules triloculaires; 2.0 ïandrosctmum^ dont le fruit est une baie presque uniiocuiaire; 3.° Vascyrum, Tourn. (non de Linn,), dont les espèces soiî« les hypericuni à cinq styles et à capsules à cinq loges. Plus les suivaos : 4-" elodea , 5." krdfd , 6.'^ komana. ( K. ces mots.) Willdenow et quelques autres bo- tanistes réunissent à ïhyperiatm^ L. , le èraihys de Mutis ; IMichaux y rapporte le saroihra, L. Le vismia de Vandelli, est «n autre genre, extrêmement voisin de ïhypericum, et ses es- pèces nnêmes, indiquées par M.Persoon, onttoutes été décrites comme des hyperkum. 11 n'eu est pas de même de ïhypencum lasianthus, L., qui s'éloigne et difière réellement de ce genre, aussi Linnœus en fit-il sou genre gordunia. Enfin, le genre hypericum ou Millepertuis , et tous ceux qui sont faits à ses dépens , constituent une famille très-naturelle, que Adanson confond mal à propos avec celle des cistes^ et que Linnœus indiquolt par le nom de perforées {perforalar.)^ à cause des feuilles qui semblent persillées de petits trous , dans beau- coup d'espèces. V. Hypéricoïdes. (ln.) HYPERMENES IRA. F. Diane, (s.) HYPEROODON. Nom donné, par M. de Lacépède, à un genre de cétacés qu'il établit et que nous avons cru devoir faire rentrer dans celui des Dauphins et dans le sous-gcnre IIÉTÉRODON, que nous y avons distingué, d'après M. Blain- ville. (desm.) HYPERSTHENE, Hauy. Ce minéral, qui a été placé d'abord parmi les variétés de Vampldbole ou hornblende , sous le nom de labradorische hornblende , hornblende du Labrador , de Werner , est regardé auj.ourd'hui comme une espèce par- ticulière par le plus grand nombre des minéralogistes. En le compilant avec l'amphibole et avec la diallage, a laquelle il a été aussi associé , on trouve que ses caractères distinclifs, tels que le nombre des joints nati^rels , la dureté et la pesan- H Y P 53r teilr spécifique , sont en excès 5 ce qui a suggéré à M Haiiy le nom à^hypers/fiène, qu'il a adopté pour cette substance. Sa pesanteur spécifique est de 3,3857; *^ ''^y^ ^^ verre et tlonne des étincelles par le choc du briquet, quoique avec une certaine difficulté ; il acquiert l'électt-icité résineuse par le frottement, même aux. endroits qui ont été polis, pourvu que le fragment soit isolé ; enfin son éclat est demi-métalli- que sous certains aspects; sa couleur oi Ijnaire est le brun noirâtre , avec un reflet d'un roug ; cuivreux. Il est infusible au chalumeau , et sa couleur noire passe au brun rougeâtre. Son tissu est lamelleux, et sa division mécanique conduit à un prisme rhomboïdal, dont les pans font entre eux des angles d'environ 100 et 80 degrés. Ce prisiiie se soudivise dans le sens de ses deux diagonales ; la division qui a lieu parallèlement à la petite diagonale est la plus nette de toutes. Réduit en poussière , il a une couleur gris de cendre foncé. D'après l'analyse de Klaproth, cent parties contiennent : Silice 54, ai Magnésie i^., o Alumine 2, aS Chaux I, 5o Oxyde de fer 24, 5o Eau î, o Oxyde de manganèse . o, 25 Perte 2, 25 Total 100, 00 Ufiypersthène n'a encore été trouvé que sur la côte du Labrador, et en particulier à l'île de Saint-Paul, d'où lui vient le nom de Paolith , qui lui a été donné aussi en Alle- magne. Suivant Jameson (t. 2, p. 45), il forme une des parties constituantes d'une roche composée principalement de feldspath opalin , et quelquefois aussi d'amphibole et de fer oxydulé ; c'est une syénite. Il est assez fréquemment en morceaux roulés d'un volume peu considérable , et encore assez rare dans nos collections, (luc.) HYPHiENE. Nom sous lequel Gsertner a établi le pre- mier un genre particulier sur le Palmier de la Thébaïde , ou Doiim. Ce genre a été appelé depuis Douma et Cuci- FERA. Le premier nom est celui qu'on lui a donné en Egypte ; le second signifie qui porte le cuci , nom de son fruit. V. DouM. (ln.) S32 H Y P HYPHEAR. L'un des noms du Gui, chez les Grecs. (LN.) HYPHYDRA. Schreber , Willdenow , Persoon , ap- pellent ainsi le tonina d'Aublet , que Rottbole réunit à Veriocaulun. V. ToNINE. (LM.) HYPHYDRE , Hyphydms , Illig. ; Hydroporus , Clairr. Genre d'insectes , de l'ordre des coléoptères , famille des carnassiers, tribu des hydrocanthares, ayant pour carac- tères : antennes filiformes de onze articles, dont le second plus grand que les suivans; palpes filiformes, le pénultième article plus court que le dernier , celui-ci ovalaire ; les quatre tarses antérieurs presque semblables dans les deux sexes , n'offrant que quatre articles distincts , le troisième profon- dément bilobé. Je ne dirai rien ici sur l'établissement de ce genre et de quelques autres dérivés pareillement de celui des dytiques , ayant exposé ces faits à l'article hygrobie. Plusieurs hyphy- dres ont le port de ces derniers coléoptères , et n'en diffèrenB que par la conformation des tarses. Aussi Fabricius en avoit- il réuni quelques espèces à ses hydrachnes ou mes hygrobies. M. Clairville a bien développé les caractères qui distinguent ces coupes ; mais je ne puis adopter la dénomination dliydro- pore qu'il adonnée à l'une d'elles , celle qui fait le sujet de cet article , puisque le genre avoit été formé avant lui par Illiger, sous la désignation d'hyphydre, qui est déjà généralement reçue. Plusieurs espèces ont le corps plus déprimé que les autres , et m'ont paru d'abord ( Considér. génér. sur Vord. nat, des crust. , des arach. et des insecl. , pag. 4-i5 ), constituer un genre propre auquel j'ai conservé le nom d'hydropore ; mais comme les organes les plus importaris de ces insectes ne pré- sentent pas de différences essentielles appréciables, je réta- blis le genre hyphydre dans sa première intégrité. Ces insectes sont en général les plus petits de la tribu des hydrocanthares; aussi peuvent-ils vivre dans les mares et les fossés aquatiques qui ont peu d'étendue : ils manquent , pour la plupart , d'écusson. Les uns sont en forme d'ovale court , presque globuleux, bombés ou très-convexes, du moins en dessous , comme I'Hyphydre ové, Hydrachna oQalis, Fab. , le mâle ; H. gibba ejusd.ldi femelle; Panz. Faun. inseci. Germ., fasc. 91., iah. 5; il est long d'environ deux lignes, d'un jaune foncé, avec les élytresbrunes, etsanspointsdansquelques-uns. L'Hyphydre INÉGAL, Hypîiydnis inœqua/is, Schoënh,, dyiis-^ eus inœqualis ; Fab. , le mâle ; ejusd. d. reticulaius ^ la fem, ; Panz. , ihid. , pag. 26 , tab. 4 ■> v^^r. , Clairv. Eniom. heh. 2 , tak. 28. A. a. var. ? fauve çn dessous , noir en dessus , avec le H Y ? 535 milieu du corselet , les côte's et la base des élytres , et quel- quefois des lignes sur leur disque , fauves ; élytres très-poin- tillées. Les autres ont le corps plus oblong et moins élevé ; ils se rapprochent davantage , sous ce rapport, des dytiques. Tels sont : L'Hyphydre a six pustules, Hyphydrus scxpustulatus y Schoè'nh, ; dytiscus sexpusiulatus , Fab. ; ejusd. d. palustris , Var. ; Panz, ibid. , fasc. il^. , iab. 4- ; long d'environ une ligne et un quart ; noir , avec la base des antennes , la tête , les pattes et les bords latéraux du corselet d'un jaune fauve ; élytres noires , avec la base et une petite ligne près du bord extérieur , dilatée vers l'extrémité, d'un jaune pâle. H YPHYDRE CONFLUENT , Hyphydnis confluens , Schoënh. ; dytiscus conjliicns , Fab. ; Panz. ibid. , fasc. ^I^. , iab. 5. Il n'a qu'une ligne de long ; son corps est noir , avec la tête et le corselet fauves ; les élytres sont d'un jaune pâle , avec la suture et quatre lignes discoïdales , courtes et confluentes j noires. Hyphydre granulaire, Hyphydrus granidarls.) Schoè'nh. ; dytiscus granularis , Fab. ; Oliv. , Col. , tom. 3 , n." l^o , iab. 2 , fig. i3 , pas plus grand qu'une puce , noir , avec les bords la- téraux du corselet , et deux lignes longitudinales sur chaque élytre , d'une jaune fauve. Hyphydre unistrié, Hyphydrus unistriatusj Schoè'nh; Panz. ibid. , fasc. 99 , iab. 2 ; très-petit, noir, avec une petite ligne imprimée àlabase du corselet et une autre à celle desélylres, «ne bande sur le corselet , et des taches sur les élytres , mais qui manquent quelquefois , fauves. Ces espèces se trouvent aux environs de Paris et dans d'autres contrées de l'Europe. V. Schoenherr , Synonymia iri" sectorum , iom. 2 , pag. 28. (l.) HYPNE , Hypnum. Genre de plantes cryptogames de la famille des Mousses , qui offre pour caractères : une gaine polyphylle ; une urne axillaire, stipitée, oblongue; un péris- tome cilié ; un opercule souvent acuminé ; une coiffe lisse ; des rosettes axillaires, sessiles et distinctes. Ce genre comprend un très-grand nombre d'espèces (plus de deux cents), presque toutes indigènes à l'Europe. Ce sont de petites plantes vivaces, à tiges feuillées, rameuses, rampantes ou couchées dans le plus grand nombre , et for- mant des gazons qui tapissent la surface de la terre , les troncs des arbres ou les pierres. V. au mot Mousse. 3Le genres Leskée , Ptérigynani)RE,Fissident, Neckère , 534 H Y P DicRANÉE, Cécxlyphe, Harrisone; Cyathophoré, AlSIC- TANGE et HooKERiE Ont été établis aux dépens de celui-ci. D'après ces soustractions , ce genre se trouve réduit , selon Bridel , aux espèces qui ont un péristome double , l'externe de seize dents , l'interne muni de cils dissem- blables nés de la membrane , et dont les fleurs mâles sont en boulons. Lamarck divise leshypnes en six sections, dont on va suc- cessivement mentionner les espèces les plus communes. La première section comprend les hypnes à jets droits , très-simples , à feuilles non distiques. Elle ne renferme que deux espèces, qui croissent aux Antilles, et qui sont peu connues. La seconde section a les jets à feuilles distiques; elle ren- ferme principalement: L Hypne a feuilles d'if, qui a les jets régulièrement pectines, le pédoncule sortant de la base , et l'urne recour- bée. Il se trouve sur la pente des fossés, dans les bois. C'est un des plus petits du genre. L'Hypne bryoïde a les jets simples pectines, les pédon- cules sortant du sommet, et les urnes droites. Il se trouve dans les mêmes endroits que le précédent. L'Hypne adiantoïde a les jets rameux, pectines, pédon- culifères dans leur milieu, et les urnes très-peliles. 11 se trouve dans les lieux marécageux. L'Hypise aplati a les jets très-rameux, imbriqués des deux cotés de feuilles aiguës et luisantes. Il se trouve au pie4 des vieux arbres et sur leur tronc. La troisième section a les jets pinnés et filiformes, les ra- meaux distiques et diminuant de grandeur vers le sommet des tiges. On y distingue : L' H YPNE FOUGÈRE, qui a les jetspinnés, les rameaux nomr breux, écartés, les feuilles frisées, recourbées, et les pé- doncules fort longs. Il se trouve dans les lieux humides et ombragés. L'Hypneen PLUMET a les jets pinnés et courts, les ra- meaux rapprochés, les feuilles frisées , et les pédoncules mé- diocres. Il se trouve sur la terre, le pied des arbres, e^ même les pierres, dans les lieux frais et ombragés. L'Hypne PROLIFÈRE a Ics jcts ramcux de distance en dis- tance; les rameaux pinnés, aplatis, les feuilles petites , aiguës f t non luisantes- Il se trouve dans les bois au pied des arbres. On peut le prendre pour le type du genre Hypne de Eridel- H Y P 53^ L'Hypne poitstu a les jets ramcux, pintiés, les feuilles imbriquées , luisantes, et les supérieures réunies en pointe. 11 est commun dans les marais. L'Hypne pur a les jetspinnés, cylindriques, luisans, les feuilles ovales et fortement imbriquées. Il se trouvé très-com- munément dans les Lois sur la terre. La quatrième section comprend les hypnes doïit les r; - meaux sont irrégulièrement disposés , et les feuilles courbées ou réfléchies , tels que: L'Hypne cupressiforme , qui a lés jets rameux , aplatis dans leur partie supérieure, les feuilles tournées d\m seul côté , crochues et terminées par un poil, 11 est très-commun dans les bois, au pied des vieux arbres. L'Hypne squarreux a les feuilles ovales, lancéolées, re- courbées, les urnes presque ovales et penchées. 11 se trouve dans les prairies humides et les landes. La cinquième section présente des espèces dont les rameaux sont irrégulièrement disposés , et les feuilles droites. L'Hypne fourgon a les jets rampans , les fouilles ovales , mucronées, écartées de la tige, les urnes recourbées et lé- gèrement penchées. 11 se trouve très-fréquemment dans les bois , au pied des arbres, sur la terre. L'Hypne triangulaire a les rameaux courbés, Icsfcuiîlcs ovales, aiguës, très-écartées, et les urncsrecourbces.il est un des plus communs dans les bois parmi tes gazons même exposés au soleil et dans les prés secs. La sixième section offre les hypnes qui ont les rameaux ramassés contre la tige. L'Hypne soyeux a les jets rampans, les rameaux courts, réunis, d'un soyeux luisant; les feuilles en alêne, et les urnes droites. U est des plus communs sur les troncs d'drbres , les pierres, etc. L'Hypne velouté a les jets rampans: les rameaux réunis et droits; les feuilles en alêne, et les urnes un peu courbées. Il est commun au pied des arbres , sur les murs, etc. L'Hypne traînant a les jets rampans ; les rameaux fili- formes; les feuilles petites et terminées par un poil; les urnes ombiliquées, un peu penchées. lise trouve dansles lieux frais et ombragés, sur le tronc des arbres et les pierres, (b.) HYPNEE, Hypnea. Genre de plantes établi parLaraou - roux, aux dépens des Varecs de Linnœus. 11 offre pour ca- ractère des tubercules subulés presque opaques. Ce genre renferme seulement huit espèces, dont la pluj commune est IcYarec. spinulet x, S36 H Y P L'H YPNÉE CHAROÏDE , Originaire de la Nouvelle-Hollande , se voit pi. lo du Mémoire du botaniste précité, inséré dans les Annales du Muséum, (b.) HYPNOTICON de Dioscoride. Voyez H Y ose y a mu s, HYPOCALYPTUS. Genre de la famille des légumineu- ses, établi par Thunberg , et qui rentre dans le genre Çro- TALLARIA , L. (LN.) BY i^ OCVimm%, Hypochceris. Genre de plantes de la syngénésie égale et de la famille des chicoracées , qui offre pour caractères : un calice presque imbriqué de folioles iné- gales ; des demi-fleurons lingulés à quatre dents ; un récep- tacle couvert d'écaillés; des semences surmontées d'aigrettes piumeuses. Ce genre renferme cinq à six plantes d'Europe , à feuilles radicales plus ou moins dentées ou sinuées, à tiges le plus souvent rameuses , qui se rapprochent beaucoup des éper- vièrcs par leur apparence extérieure. lues plus communes sont: L'Hypochéride maculée, qui a la tige presque nue , à un seul rameau, et les feuilles ovales , oblongues , dentées. Elle est vivace et se trouve dans les pâturages des montagnes froides , et même dans ceux des environs de Paris. L'Hypochéride radicale, qui a la tige rameuse, les pé- doncules écaiUeux et les feuilles rongées. Elle se rencontre dans les lieux arides, (b.) D'après Ventenat , le nom grec à'hypochœrls seroit formé de deux mots grecs qui signifieroient , sous, cochon. Lest le nom donné, par Théophraste, à une plante qui est une Chicorée, suivant Dalechamps et Adanson, et selon Tabernaemontanus , là Vorcelle ihypochœrîs radicaia, Linn.). Vaillant et Linnseus semblent partager celte opinion, conservant au genre de cette plante le nom àliypochœrîs ; Adanson le réunit à celui qu'il nomme achyrophorus , qui a été modifié par Scopoli et Gsertner. Plusieurs espèces du genre de Linneeus sont maintenant rapportées aux Épervières et aux Serioles. (ln.) HYPOCISTIS , de deux mots grecs qui signifient, ciste et dessus. C'est le nom d'une plante mentionnée par Hippo- crate, Dioscoride , etc. , et qui croît sur les Cistes. C'est THypociste (cytinus hypocistis, Linn. ). V. Hipociste. (ln.) HYPOCRÀS. Liqueur qui se prépare avec du vin, du sucre et des épices, ou avec de Teauet des essences, (s.) HYPODERME , Hypodermum. Genre de plantes, établi par DecandoUe, dans la famille des hypoxylons., aux dépens des Variolaires de Bulliard , des Spheries de Bolfon, des H y ? 53y Xylomes et des Hysterions de Persoon. 11 renferme sept espèces qui toutes vivent sous Técorce des arbres. Ses caractères sont : un réceptacle oblong, qui s'ouvre par une fente longitudinale , et répand une matière pulvérulente qui renferme les bourgeons séminiformes. (b ) HYPODRIS , Hypodris. Nom donné par Solenander à un genre de champignons qu'il a établi sur le Bolet-làngue- DE-BŒUF de Schœffer. Buliiard a , depuis, donné le nom de FiSTULiiSE à ce genre, (b.) HYPŒLYTRE , HypceUirum. Genre de plantes , fort voisin des Choins. Ses caractères sont : épis imbriqués , a écailles ovales , serrées, concaves , unidores ; les inférieures stériles; graines bivalves , linéaires, inégales , comprimées ; deux ou trois étamines ; un germe ovale , oblong ; un style simple ou bifide. Ce genre renferme plusieurs espèces, toutes exotiques, dont l'une est figurée dans la Flore d'Oware et de Bénin, parPa- lisot-Beauvois. (b.) HYPOESTE, Hypœstes. Genre déplantes , établi dans la dioécie triandrie et dans la famille des jbncs ,pour placer deux herbes de la Nouvelle-Hollande , qui ont beaucoup de rap- ports avec lesAViLLDENOwiEs et avec les Bestioles. Les caractères de ce genre sont : fleurs en épi; des écailles imbriquées pour calice ; un style à deux ou trois divisions ; une noix monosperme , entourée par le calice , et placée au sommet de l'épi, (b.) HYPOGÉE, Hypogœa. Genre de vers mollusques , établi par Poli , dans son ouvrage sur les testacés des mers des Deux-Siciles. Son caractère consiste à avoir : deux siphons très-allongés , quelquefois réunis ; un pied en massue ou ovale , comprimé , rétractile dans une gaîne ; le limbe mle- rieur des branchies toujours réuni , et de la longueur des tubes. Il a pour type les animaux des genres Solen , Pholade, Sanguinolaire et Pandore , dont on voit une anatomietrès- détaillée , ;?/. 7 , 8 , lo , ii , 12, et i3 du même ouvrage, (b.) HYPOGLOSSUM. Synonyme d'HYPELATE et d'HYPO- GLOTTON, noms donnés, chez les Grecs, an laurier alexandrin^ espèce de Fragon. (ln.) HYPOGYNE. Dans la méthode de Jussleu , ce mot ex- prime l'insertion de la corolle ou des étamines , sous l'ovaire ou sur le réceptacle du pistil. Voyez à la suite de l'article Bo- tanique, (d.) HYPOGYNIE. Nom donné par Jussieu à la disposition des Étamines sous le Pistil. V. ces mots et Fleur, (b.) HYPOLJENE, Hypolœna. Genre déplantes, fort voisin b.-îS H Y P des WiLLDENOwiEs , établi par R. Brown dans la dioécic trlandrie , et dans la famille des joncs. Ce genre , qui renferme deux espèces originaires de la Nou- velle-Hollande , offre pour caractères : des écailles imbri- quées , pour calice; six valves, pour corolle; une noix osseuse , monosperme, pour frnit. (b.) HYPOLEON. M. Duméril (^Zool. anal ) donne cç nom à un genre de diptères , qu'il forme des espèces de stratio- mcs à antennes courtes, à abdomen obtus et à écusson épi-, lieux. Il correspond aux Oxycères et aux Ephippium do M. Latreille, ou aux CliteLlaria de Meigen. (T. ces mots.) (desm.) HYPOLEPÏS, Hypolepjs. Plante parasite du Gap-de- Bonnc-Espérance , fort voisine des Orobanches , qui a été rangée parmi les Phelipées , mais dont il paroît qu'on doit faire un genre dans la dioécie monogynie et dans la famille des personnées. Les caractères de ce genre consistent ciï une corolle monopé- tale , à six découpures ; dans les Heurs mâles , une seule éta- mme ; et dans les fleurs femelles , un ovaire inférieur, qui devient une capsule à sept loges polyspermes et à sept val^ ves. (b.) HYPOLEUCOS, Dénomination spécifique de la Gut- GNETTE dans Linnœus. (s.) HYPQLYTRE , Hypolytrum. Genre de plantes , de la triandrie monogynie et de la famille des cypéroïdes , qui a été établi par Vabl , et qui présente pour caractères : des éplllels formés décailles entourantes ; deux ou trois étami^ nés ; un ou deux stigmates ; les semences enveloppées par une balle de trois à quatre valves. Ce genre renferme trois plantes exotiques très-peu connues et fort peu importantes, (b.) HYPONEVRIS. Nom latin donné par Paulet à la Chanterelle, (b.) HYPOPHLEE , Hypophlœus, Fab, Genre d'insectes, de Tordre des coléoptères, section des héléromères , famille des taxicornes , tribu des diapérales. Plusieurs de ces insectes avoient été mis avec les ips de. Fabricius. Cet auteur les en a séparés , et en a formé le genre qui est l'objet de cet article. Les bypopblées ont de si grands rapports avec les Jiapères et les phalérks , qu'ils n'en diffèrent , au premier aperçu , que par la forme cylindrique ou linéaire de leur corps. Les an- tennes sont courtes , et vont en grossissant, depuis le troi- sième article ; le cinq^uième , et les suivans , sont presque- H y P 539 lenticulaires, un peu en scie late'ralement , et forment, réu- nis , une tige perfoliée , terminée par un article ovoïde et court. Le labre est saillant et entier ; les mandibules sont bifides ou bidentées à leur pointe ; les mâchoires ont deux lobes , dont l'intérieur très-petit ; leurs palpes plus grands que les labiaux, sont terminés par un article plus grand et ovoïde , et le corselet est en carré long et bordé ; les élylres sont étroites , et les jambes vont en s'clargissant, de la base ^ l'extrémité ; le corps est glabre. On trouve les hypophlées au printemps et en été , sous les écorces de différens arbres : ils sonî assez agiles. Les larves de ces insectes ne sont point connues ; mais il est présuma- ble qu'elles vivent dans les troncs des arbres cariés. Ce genre est composé d'un petit nombre d'espèces , qui toutes habitent l'Europe ; on en trouve plusieurs aux envi- rons de Paris, parmi lesquelles on remarque I'HypophlÉE MARRON , Hvpophlœus caslaneus^ Fab. , pi. E ii , 5 de cet ou- vrage ; il a près de trois lignes de long ; il est d'un brun fer- rugineux , sans tache : et TIIypophlée BICOLor , Hypophlœus bicûlor^ Fab. ; Oliv. , Col. , lom. 2 , n.° 18, pi. 2 , fig i^. Il est d'une couleur rougeâtre ; ses élytres sont noires, avecla base rougeâtre. (o.) HYPOPHOEN. V. Hypecoum. (ln.) HYPOPHYLLE, HypophyUa. Genre de plantes, établi par Stackhouse , dans la Néréide britannique , aux dépens des Varecs de Linnseus. Ses caractères sont : fronde mem- braneuse, aplatie, rameuse ; nervure mitoyenne des feuilles , rameuse, souvent prolifère ; fructification variable. Ce genre rentre dans la première section de celui que Lamouroux a appelé Delesserie. Il renferme six espèces^ dont font partie les Varecs a larges feuilles, Hypoglosse et A feuille de Fragon. (b.) H YPOPHYLLOCâRPODENDRON. Boërhaave donne ce nom à un groupe d'espèces de Protea, qui paroissenl voi- sines du Mimetes de Brown. Ces espèces sont : les protea hirta, Ijinn., cucullaia, Linn,, eihypophyllocarpodendron^ Linn. (LN.) HYPOPITYS. Ce nom a été donné par Bauhin, et depuis par Dillen, Haller, Rivin , à une plante semblable aux Oro- BANCHES, et qui croît sur les racines des arbres, et notamment des pins, ainsi que l'exprime son nom tiré du grec. On la nomme aussi pour cela SucEPiN. Cette plante est celle qui constitue le genre Monotropa, Linn. (ln.) HYPOPIÛM. V. Thapsi.\. (ln.) HYPORINCHOS. Le toucan à ventre rouge est désigné ainsi dans Jonston. V. ToucAK. (s.) S^Q H Y P HYPOSPARTIUM. Nom donné anciennement à TO-; POBANCHE qui croît sur le Genêt à hâUis, spartiumscoparium^ L. (ln.) HYPOSTOME, HYpostomiis. Poisson des rivières de l'A- mérique méridionale , que Linnœus et Bloch avoient placé dans le genre Cuirassier {lorkarid) , mais que Lacépède en a ôté pour en faire un particulier, sur la considération qu'il a deux nageoires dorsales. Ce genre a donc le corps et la queue couverts de lames osseuses ; la bouche au-dessous du museau ; les lèvres exten- sibles ; deux nageoires dorsales. L'Hypostome Guacari qu'on appelle gorée à Cayenne et diptère dans quelques livres , est très-bon à manger ; s'il est quelquefois difficile de le tuer , à raison de la dureté de sa, peau , il est commode de le faire cuire , car celte même peau sert de casserole, (b.) HYPOTHÈLE. Paulet donne ce nom aux Chevrettes ou Chevrotines, famille de champignons, établie aux dépens des Urghins (^hydnum)^ de Linnseus, c'est à dire qui com- prend les urchins à pédicule central et aminci parle bas. (b.) HYPOXIS , Hypoxis. (ienre de plantes , de Ihexandriç monogynie, et de la famille des narcissoïdes, qui offre pour caractères : une écaille spathacée, servant de calice ; une co- rolle monopétale, persistante , moins colorée en dehors, à limbe divisé en six parties ; six étamines insérées sur une glande qui recouvre l'ovaire; un ovaire inférieur, turbiné, duquel s'élève un style à stigmate simple ; une capsule à trois loges, sans valves, couronnée, qui contient plusieurs semences attachées à l'angle interne des loges. Ce genre renferme une trentaine d'espèces, la plupart du Cap -de- Bonne-Espérance , ou des parties chaudes de l'Amérique septentrionale. Ce sont des plantes vivaces à ra- cines fibreuses ; à feuilles graminlformes, radicales ou alter-- nes; à fleurs terminales, solitaires, fasciculées ou corymbi- formes. L'espèce la plus commune dans les jardins, est THypoxis DE Virginie, dont les fleurs sont pédonculées, et les décou- pures de la corolle plus longues que l'ovaire. Elle croît dans la Virginie et la Caroline , dans les lieux qui sont couverts par les eaux pendant l'hiver , mais très-arides pendant l'été. Je l'ai trouvée fort abondamment dans les environs de Char- leston. Le genre Fabricia, de Thunberg, a été réuni à celui-ci, L'Hypoxis en étoile , qui a constitué le genre Chloro- PHYTE, est figuré pi. 1223 du Boianical Magazine de Curlis. Tî Y P 5/,T Quatre espèces nouvelles de ce genre sont mentionnées dans le bel ouvrage de MM. de Humboldt, Bonpland et Kunlh, sur les plantes de T Amérique méridionale, (b.) HYPOXIS. De deux mots grecs qui signifient presque aigu. Renaulme a donné ce nom à Vornilhogalum minimum , parce que cette espèce se distingue de Vorniih. luteum, par les divi- sions de la corolle, qui sont très-aiguè's. Linnseus nomme hypoxis un autre genre. V. Hypoxis et Fabricia. (ln.) HYPOXYLON, Hypoxylon. Genre de plantes crypto- games, de la famille des Champignons, qui offre pour carac- tères : une substance coriace ou presque ligneuse, dont les semences sont renfermées dans de petites loges et mêlées à un suc glaireux. La plupart des espèces de ce genre, que Bulliard porte à «eize pour les environs de Paris seulement, naissent sur le bois dépouillé de son écorce. Il ne faut pas les confondre avec les hypoxylum de Lamarck, qui sont les clai>aires coriaces de Lin- neeus. V. au mot Clavaire. Quelques hypoxylons sont à une seule loge, mais la plupart sont composés de plusieurs loges réunies sous une croûte commune. Ces derniers fontparlie des sphéries des auteurs allemands. li y a aussi quelques espèces qui, de l'intérieur* de leurs loges, produisent des filamens plus ou moins allon- gés. Une seule porte ses loges séminales sur des espèces de petites tiges. Ce genre est monoïque, selon Bulliard; mais il ne peut y avoir de monoécie dans la famille des champignons, ainsi qu'on peut le voir au mot Champignon. En conséquence il peut être, sans inconvéniens, réuni aux Variolaires. Parmi les espèces qui n'ont qu'une seule loge, il faut noter principalement : L'HvpoxYLON globulaire , d'abord blanc et pubescent , est alors muni d'un mamelon supérieur; il devient roux et enfin noir. Il se trouve épars sur la surface des vieilles sou- ches. L'Hypoxylon pourpré est fort petit, et est plus ou moins kicrusté dans l'écorce des vieilles souches. Parmi les espèces qui ont plusieurs loges, les plus remar- quables sont : ^ L'Hypoxylon scarlatin, qui se trouve principalement sur les écorces de noyer ou de marronnier d'Inde ; il forme des boutons épars d'un rouge tirant sur le vermillon , et sa surface est composée d'un rang de loges fort petites. L'Hypoxylon charbonneux forme de larges plaques sur les vieilles souches ; il est mollasse et gris dans sa jeunesse , 54i Tî Y P dur et lioïr daiis sa vieillesse ; ses loges sont placées sous une membrane mince, et séparées les unes des autres. L'Hypoxylon glomerulé a la forme d'un gros bouton fiphérique, blanchâtre dans sa jeunesse , iioir dans sa vieil- lesse ; il n'est point granuleux. On le trouve sur les vieilles souches. Ce genre fait aujourd'hui partie d'une famille particulière qui porte son nom, (b.) H YPOXYLONS. Famille de plantes, intermédiaire entre les champignons et les lichens. C'est à Decandolle qu'on en doit l'établissement. Elle renferme des plantes de consis- tance coriace , le plus souvent de couleur noire , vivant sur les plantes ou parties de plantes mourantes ou mortes. Tan- tôt ces plantes ont un réceptacle commun , tantôt elles sont isolées; au moment de la maturité, leur point supérieur s'ouvre plus ou moins pour laisser sortir une pulpe qui con- tient les bourgeons séminiformes. Les liypo'xylons qui se rapprochent le plus des Champi- gnons forment une section dans cette famille, composée des genres Rhizomorphe , Sphérie , Némaspore , Xylome et Hypoderme. Les hypoxylons qui se rapprochent les plus des Lichens, en forment une autre qui réunit les genres Hysïérion , Ope- GRAPHE , VeRRUCAIRE , PeRTUSAIRE. (B.) HYPPOLYTE, Hyppolyie. Genre de crustacés, de l'ordre des décapodes , famille des macroures , tribu des salicoques , établi par M. Leach, très-voisin du ^enre alphée , et dont il ne paroît différer qu'en ce que le dernier article des pieds-mâ- choires extérieurs est beaucoup plus court que le précédent ; ce même article est beaucoup plus long dans les alphées. Ce naturaliste mentionne deux espèces , qu'il a observées dans les mersbritanniques. L'une est TH. CHANGEANT (var/a/Ji), et l'autre l'H. sans défenses {inermis). La première a deux dents en scie , tant au bord supérieur qu'à l'inférieur de la pointe, en forme de corne, de son test; il offre aussi une épine au-dessus et au-dessous des yeux. Dans la seconde espèce , la pointe antérieure du test n'a point de dentelures; on voit seulement une épine de chaque côté de sa base, (l.) IIYPSIPHYLE. F. Diane, (s.) MYPSIPRYMNUS. Nom donné par lUiger, à nôtre genre Potoroo , qui renferme le kanguroo-rat de la Nou- velle-Hollande (^V. ce mot). Ce nom à'hypsiprymnus vient de y^«7rpu.Avoî, parie posticâelepatâ^ a cause de l'extrême allon- gement des pieds de derrière dans ©et animal, comme chez les kan^uroos. (desm.) Tî Y P 543 HYPTÉÈÉ, Hypterns. Genre établi par M. Hafinesque , dans la classe des mollusques céphalés. Ses caractères consis- tent en un corps gélatineux, cylindrique ; une bouche à l'extré- mité d'une trompe ; deux yeux ; une aile comprimée sous le ventre ; des branch'"«s soùs la queue. Ce genre renferme deux espèces. L'une, I'HyptÈre appen- DICULÉ, est transparent , a deux appendices sous la poitrine et un«ous l'aile L'autre, I'HyptÈre a estomac ROUGE, a l'esto- mac rouge et point d'appendices. Tous deux vivent dans les mers de Sicile. V. Firole. (b.) HYPTIE, Hypiie. Genre d'insectes formé par Illiger d'a- près remanie pétiolée de Fabricius , qui nous est inconnue. (L.) HYPTIS , Hyptis. Genre de plantes de la didynaraie gymnospermie , et de la famille des labiées, qui présente pour caractères : un calice monophylle persistant , à cinq décou- pures presque égales ; une corolle monopétale renversée , à tube insensiblement dilaté, à limbe ouvert, formant une lèvre supérieure bifide , et une lèvre inférieure plus grande, partagée en trois découpures , dont les latérales sont planes , tandis que celle du milieu est concave; quatre élamines, dont deux plus courtes ; un ovaire supérieur quadrifide , duquel s'élève un style à stigmate simple ou bifide ; quatre graines nues, situées au fond du calice. Les espèces primitives de ce çenre faisoient partie des CLlNOPODEsdeLinnseus. Depuis, Poiteaules a portéesàseize; ce sont des plantes à feuilles simples , opposées, et à Heurs nombreuses , sessiles , disposées, soit en verlicilles axillaires, soit en tête pédonculée, et qui , froissées entre les doigts , répandent une odeur suave. Les deux espèces les plus communes, sont : I'Hyptis EN TÊTE , dont les fleurs sont pédonculées , entourées d'invo - lucres aussi longs qu'elles , et les feuilles ovales dentées. li croît à Saint-Domingue et à la Jamaïque. Etl'HYPTisRADiÉ, qui a les fleurs en tête , entourées d'involucres plus longs qu'elles, et les feuilles oblongues , dentées , atténuées à leur base. Je l'ai fréquemment observé en Caroline, dans les en- droits où l'eau a séjourné pendant l'hiver. C'est le dinopo- diiim rugosum de Linnaeus. (b.) HYPUDOEUS. Nom donné, par Illiger, au genre de Mammifères rongeurs , qui comprend les campagnols , les lats-d'eau , les lémings. V. Campagnol, (desm.) H.YPULE , Hypulus^ Payk. Genre dinsectes coléoptères. V, SeRROPALPE et MÉLANOaYE. (l.) HYRACLIA. L'un des noms de la PARfÉTAiRE chez l'es Grecs, (ln.) 544 ^ ^' S HYRAX, Nom latin du Daman, mammifère de Tordre des pachydermes, (desm.) HYRODELLA. C'est la Chanterelle aux environs de Limoges, (b.) HYSSON-TEA, Nom anglais d'une espèce de Viorne, viburmim cassindides , L. (ln.) HYSOPE DE HAIE. Nom du Ciste hélianthème «t de la Gratiole. (ln.) HYSOPE DES GARIQUES. C'est I'Héliantème^ espèce de Ciste, (ln.) HYSSOPE , Hyssopus , Linn. (^Didynamie gymnospermie.') Genre de plantes de la famille des labiées, qui se rapproche des cataires^ et qui comprend des herbes dont les feuilîessont simples et opposées , et dont les fleurs naissent aux aisselles des feuilles, attachées plusieurs ensemble à un même pédon- cule. Le calice de chaque fleur est oblong , légèrement strié, à cinq dents et persistant ; la corolle est monopétale, avec un tube cylindrique aussi long que le calice, et un limbe partagé en deux lèvres ; la lèvre supérieure est courte, droite et échancrée; l'inférieure découpée en trois lobes inégaux ; le lobe moyen est plus grand que les deux autres, en cœur ren- versé et crénelé; quatre étamines, deux longues et deux courtes, saillent hors de la corolle ; elles sont droites et écartées. Au fond de la fleur est un germe divisé en quatre parties; il porte un style mince , placé sous la lèvre supé- rieure, et couronné par un stigmate fourchu. On trouve dans le calice quatre semences nues et ovoïdes. Le genre Elsholtzie a été établi aux dépens de ce- lui-ci. Hyssope officinal , Hyssopus officinalis , Linn. C'est une plante vivace et même un sous-arbrisseau , qui croît sponta- nément en France , en Autriche , en Savoie et dans le Le- vant. On le cultive dans les jardins à cause de ses propriétés médicinales ; il a d'ailleurs un aspect assez agréable dans le temps de sa fleur. Sa racine est ligneuse et grosse comme le petit doigt ; ses feuilles sont ovales , lancéolées , ponctuées, entières etsessiles; ses tiges, carrées et cassantes , s élèvent à la hauteur d'une coudée; elles sont garnies, d'un seul côté , d'épis de fleurs bleues , quelquefois rouges ou blan- ches , selon les variétés. Ltliyssope est une plante dure , qui supporte aisément le froid de nos hivers. Il ne demande point un sol gras et fumé, mais une terre sèche et légère , comme la plupart des plantes aromatiques. On le multiplie par graines ou par boutures : on sème les unes au commencement du printemps, et on plante les autres un peu plus tard. H Y S 543 Hyssope a feuilles de basilic , Hyssopits ocymifoUus , Lam. C'est une plante dure» qui a une odeur pénétrante fort agréable, et à peu près semblable à celle de la rose. Son fays natal ne nous est pas connu. Elle fleurit au milieu de été. Ses fleurs sont bleuâtres ou d'un violet pâle , et unilaté- rales. L'épi qui les porte est garni de l'autre côté, dans toute sa longueur, de deux rangées de bractées ovales , terminées par une pointe. Les botanistes connoissent encore cinq à six autres es- pèces d'hyssopes, dont nous ne faisons point mention ici , parce qu'elles n'offrent rien d'agréable ou d'utile, (d.) Hyssope des gariques. C'est I'Hélianthème , espèce de Ciste, (ln.) HYSSOPIFOLIA. Nom sous lequel C. Bauhin et d'au- tres botanistes ont indiqué deux espèces de Salicaires dont les feuilles sont étroites comme celles de l' Hyssope. Ce sont le lythrum hyssopifoUa et le lythrum thymifoUa. Ce dernier est le pentaglossum de Forskaè'l. (ln.) HYSSOPUS. Il faut distinguer trois espèces d'hyssopus chez les anciens : i." celui des Hébreux qu'ils nommoieut esof^ esofion et les Chadééns esofa. Il paroit avoir été le nom de la plus petite des plantes que connussent les Hébreux, puisqu'il est dit dans le livre des Rois , que Salomon avoit décrit toutes les plantes depuis Vhyssopiis jusqu'au cèdre. L'oa croit que ce devoit être une mousse, et celte opinion est fort ancienne : mais laquelle? c'est ce qu'il est impossible de dire. Le Bry tronqué (^hiyum tnincatulum , Lin.), trouvé abondamment sur les murs de Jérusalem par Hasselquist, lui a fait soupçonner que ce pourroit bien être Vésof dont parle Salomon. 2." \j'hyssopos de Dioscoride. Il en distingue deux sortes , Vhyssopos de montagne et celui des jardins. On les rapporte à des plantes labiées des genres saiureia ou ihyttibra, ou ieu- crium et même à notre Hyssope officinal , ce qui est très- douteux ; 3.0 L'/?j550/?zwdes Arabes, qui est noiTÇ hyssope officinal^ au- quel ils donnent beaucoup de noms différens. Le nom àliyssopus a été appliqué aussi dans les bas temps à plusieurs autres plantes et principalement à des labiées des genres dracocephalum , syderitis , thymhra , salureia , rltinon~ thus , etc. Notre hyssope officinal qui forme un genre que Lin- nœus et d'autres botanistes ont augmenté de plusieurs es- pèces qni sont des sidcritis pour Tourneforl , des belonica pour Plukenet , Hermann, etc., ou qui forment le nouveau genre elsholtzia de Willdenow. V. Hyssope. (ln.) XY. à\x S56 H Y V HYSTERIE, Hysterium. Genre de plantes de la famille des hypoxylons , établi par ïode. Il a pour caractères : un chapeau sessile , creux , avec des rides transverses en dessus, et des semences globuleuses, sans queue sur le disque. Ce genre contient quatorze espèces , qui se trouvent sur les écorces et les feuilles des arbres. Plusieurs ont été prises pour des Lichens. Toutes sont rares, (b.) HYSTEROLITE. C'est le moule intérieur de certaines TÉiiÉBRATULES, qui représente assez exactement les organes extérieurs de la génération de la femme. On a fait beaucoup de contes sur ce fossile ; on lui a attribué beaucoup de pro- priétés , le tout d'après des considérations déduites de sa forme, (b.) HYSTEROPHORUS. Vaillant nomme ainsi le genre de plante que Linnaeus appela ensuite Partheisium , dérivé de paHheniasirum , que lui donnoient Nissole et Dillen. Quel- ques naturalistes séparent les deux espèces qui composent ce genre -, l'une le parthenium hysierophorus , Linn. , est le Viila- nooa d'Ortéga ou V argywcheta àe. Cavanilles; et la seconde, le Irîchospermum de Palisot-Beauvois ; mais ces deux espèces sont bien du même genre, seulement les caractères donnés par Linnseus étoient inexacts, (ln.) HYSTRICIENS. Famille de mammifères, que j'avois établie parmi les rongeurs {Tab. méih.du 24..^ volume de la ij^ édit. de cet oii<>ragé) , et qui renfermoit les deux genres PoRc- ÉPic et CoENDOU, caractérisés également parleur corps cou- vert de piquans, par leurs molaires à couronne plate, et par le manque de clavicules, (desm.) HYSTRICITE. Bézoard du Porc-épic. V. ce mot. (s.) HYSTRIX. Nom latin des mammifères du genre des PoRc- ÉPics. V. ce mot , ainsi que ceux de Coendou , ECHIMYS et EcHiDTSÉ. (desm.) HYSTRIX. Nom spécifique d'une Barlerie. (b.) HYVIN. Synonyme de Lierre, en anglais, (ln.) HYVOURAHE. C'est le Gayac, au Brésil (b.) fm DU QUINZIEME VOLUME- ''■♦•■''■''. '■'■■/v'' "■'' ■ '■' •■' 'ù -'-■"' y-, •"■, r«-^ ■-:'■,. ■■.-'" ,-.iv-^'-?'Vi'-i;' ..■>." ^»-y K'^--' ^■.^'•5^^^ '•■■-V.' •■-■■■"'- A' rli/ ^ Ar ^ .ç---^:^.::':-x^:-^^^vK^^ ^■'' v: r.l:ryw.-: .^'^^^ .V^-Vv^ ^^■^^> ^ 'mm^mMm -ikX ^Xh : 'r-K.. V ' )-ï