^ /w ^^M vr s. é I ^%. .,1^' Digitized by the Internet Archive in 2011 with funding from Open Knowledge Gommons and Harvard Médical School http://www.archive.org/details/nouvellesrechercOOspal NOUVELL ES RECHERCHES >. SUR LES DÉCOUVERTES MICROSCOPIQUES, E T LA GÉNÉRATION DES CORPS ORGANISÉS. OUVRAGE Traduit de l'Italien de M. V Abbé Spalanzani , Frofejfeur de Philofophie a Modene. Et àéàié à Son Alteffe, Monfeigneur le Prince de Marsan, par M. l'Abbé Regley , Aumônier de Son AltefTe* Avec des Notes , des Recherches phyfiques &: métaphyfîques fur la Nature & la Religion , &: une nouvelle Théorie de la Terre. Far M. de Needham , Membre de la Société Royale des Sciences , & de celle des Antiquaires de Londres , 6c Correfpondant de l'Académie des Sciences de Paris. Omnia per fcclam quamdam ad Mnitatem afcendere voxnaiura ingemmabit, etfi vox hominum reclamet- Bacon de Augm. Scient. L. 5 , cap. 4 PREMIERE PARTIE. A L OND RES; & A PARIS, Chez Lacombe, Libraire, rue CKriftine, près la rue Dauphine, M. D C C. L X i X, »yr- -I - I - — ^ ^^^^.^ ..: ^^ i yie A SON ALTESSE, monseTî&Weur camille-louis de lorraine, Prince de Marfan , Sire de Pons , Prince de Mortagne , Marquis de Mirambeau , Souverain de Bedeille & autres lieux, Chevalier des Ordres du Roi , Lieutenant-Général de fes Armées. Monseigneur, J'ai fait devant VOTRE ALTESSE les expériences du Ij É P I T R E. microfcope de MM^ de Needham & Spalatizanî ; vous ave^ faifi leurs vues philosophiques avec des vues plus fuhlimes encore ; toutes les fciences ont le droit d'amufer vos loijirs. Fuijfe cet Ouvrage montrer aux Fhilofophes que leurs travaux font de quelque prix auprès des Grands y & les encourager à mériter leurs regards ^ en éclairant T huma- nité. _ g^K -,- . - " Te fuis avec le plus profond refpcS ^ MONSEIGNEUR, DE VOTRE ALTESSE,. Le très-liumble & très- "\ obéiffaîic ferviteur ' , R E G L E y. DISCOURS %* ^ *^^ ^^#?> ?-^* ^ *î êh. ^ .î^ «1%^^ ^î. ^ .î DISCOURS PRÉLIMINAIRE. ill o u S voyons les petits objets aflez diftinâement à une diftance de quinze ou feize pouces ; mais il en eft que leur extrême ténuité dérobe à l'oeil fimple , & d'autres qui étant placés fur nos têtes ^ nous échappent , malgré leur volume , dans l'immenfité de refpace. H femble que l'homme , peu content de la claffe mitoyenne dans laquelle la nature l'a placé , ait voulu rapprocher les deux extrêmes de la petiteffe & de Téloignement. D'un coté , le télefcope foumet a fes égards ces maffes énor- mes , folides ou enflammées qui roulent & fe balancent dans les airs. De l'au- tre , le microfcope lui dévoile ces par- Part. I. a ij DISC O U R S ticuîes infenfibles , & prefque élémen- taires qui entrent dans la compofition des corps. Je ne m'élèverai point ici par le fecours du télefcope jufqnes dans ces régions fupérieures que parcourent des globes , peut-être habités, & des aftres qui les éclairent. Je defcends aujourd'hui avec Lcuwenhock dans ce monde d'infiniment petits dont il a fait la découverte ; la main fuprême qui a tiflli Porganifation délicate des êtres vivans qui Thabitent , n'y a pas moins étalé de richefîes que dans la ftruâure des mondes ôc l'azur des cieux. M. l'Abbé Spalan^cmi 2i beaucoup en- richi ce monde invifible ; M. de Need- ham Y ^ porté l'œil d'un Philofophe qui veut voir la marche de la nature , & qui peut-être a levé une partie du voîle qui la couvre ; pour être en état d'ap- précier les travaux de cts deux hommes célèbres 5 je vais faire un petit détail du monde microfcopique ; on verra ce qu'il PRÉLIMINAIRE. iij étoit avant eux , & ce qu'il efl: devenu entre leurs mains ) les obfervations que j'abrège font celles de Baker , de Laiwai- hoek j Hartfocker y Swamcrdam y La HirCy Job lot y Sedileau y Jurin ^ Haris ^ Hook , Harvcy i Redi j Power ^ Malphigi^ Der- ham y Lijîer y &c. J'en ai puifé quelques- unes dans la Grammaire des fciences , ouvrage traduit de l'Anglois \ Baker efl: mon principal guide j je le fuis pas à pas dans cet abrégé : les noms de ces hom- mes fçavans peuvent fervir à nous faire foupçonner que le microfcope n'efi: pas toujours entre les mains de TObferva- teur un amufement vain , une curiofité ftérile , & qu'un œil intelligent fera peut-être affez heureux pour y faifir de nouveaux objets qui feroient utiles aux grandes vues que nous avons fur la na- ture. 'Une eau dans laquelle on avoit fait in- fufer des grains de poivre pendant quel- ques jours 5 a donné des animaux , ou des êtres organifés , qui avoient autour d'eux aij iv DISCOURS une frange , ou une infinité de pieds , avec de longues foies en forme de queue , & dont la longueur réelle n'égaloic que ledianiétred'un cheveu. D'autres avoient une queuexlroite , ou courbée en zigzags, &c des franges autour de la langue ; quel- ques-uns prenoient une figure ovale , en forme de carrelets, & paroilToient feuls ou accouplés ; il y en a qui , comme le vefr , étoient cinquante fois aufîi longs que larges, qui nageoient en avant & en ar- rière, & fe balançoient en marchant. Les. eaux de foin j, de froment, d'a- voine, de paille , &c. donnent des ani- maux ovales , petits y & femblablcs à. des œufs de fourmis. Les uns opaques par le bas & tranfpareiis à une extré- mité ) ont la forme diineboujteiile, faiiSi pieds , ni. nageoires. Les autres reffern- blent à une veffie pleine d'eau. Ils tour- neiit fur eux-mêmes cent fois dansj uiie minute , ou prennent Ki^a mouvernenc. progreffif. On en voit qui ont plufieur^) pieds à une extrémité r,,, qui fe contrac- PRÉLIMINAIRE. v tent &z s'étendent pour nager avec beau- coup de vîtelTe. Baker a vu fur Técume de l'eau de foin des ferpens plus gros que les anguilles microfco piques , & dont la tête étoit moins tranfparente que la queue. Lcuwen/iGek a vu dans de l'eau de pluie des animaux quiitoient à la mite , com- me l'abeille eft au cheval , mille fois plus petits qu'un gr^in de fable. Derham croit que la couleur verte des eaux dormantes vient des animaux qui en tapiffent la furface. Il y a reconnu une efpece de chevrettes ; il a été témoin de leurs accoupîemens aux mois de Mai & de Juin ; alors l'eau devenoit jaune, ou d'un rouge pâle & quelquefois foncé. Les animaux de l'eau de fumier ont le milieu du corps noir , la queue ter- minée en cône , la marche de l'anguille & le mouvement lent. Baker a confervé dans de la colle de farine aigrie , des anguilles auxquelles le microfcope folaire donnoit jufqu'à un a iij vj DISCOURS & deux pouces de diamètre. On y dif- tinguoic leurs vifceres ^ & lorfque Peau commençoit à leur manquer , elles bail- loienc comme un animal qui expire. M. Joblot a apperçu dans des infu- fions de rofes , d'anémone , de jafmin , de bafilic , de thé , de champignans ^ &c. des animaux auffi variés que les différentes efpeces de fleurs & de végé- taux auxquels ils appartenoient. L'in- fufion de citron lui a donné un animal qui avoit fur le dos la figure d'un fatyre. La racine de lentille fauvage^ qui croît dans les eaux des étangs & des foffés , a des animaux ou polypes en forme de cloches , qui s'étendent & fe contraftent tous à la fois*. * M. Tremblay a coupé un polype en plufieurs morceaux , & chaque morceau a produit un polype entier. Le corps d'un feul lui en a donné jufqu'â cinquante. Il a fait (qs fedions en long & en travers , en moins d'une heure chaque partie eft devenue un corps parfait , mais il a fallu quelques jours pour la réprodudion àts PRÉLIMINAIRE. vij Leuwenhock a découvert dans cette ma- tière gluante qui eft fous les gouttières, des animaux a deux & a quatre roues , armées de dents, qui fortent de leur tête & tournent circulairement comme fur un effieu. Lorfqu'on les touche ou que Teau s'évapore , ils fe contradent. On les conferve pendant plufieurs années fous une forme ovale dans ce limon def- féché ; & lorfqu'on délaye le limon dans de l'eau , on les voit fe ranimer , s'al- longer & nager. Le pou , dont la vue fait horreur , s'embellit au microfcope. On y voit les ramifications de fes veines, le battement régulier de fon pouls dans les artères , le mouvement périftaltique de fes in- teftins , & le paflage rapide du fang dont il fe nourrit. Son fuçoir eft fept cens fois plus délié qu'un cheveu , & ce fuçoir eft renfermé dans un four eau pour s'en fer- bras. Un polype , coupé à huit heures du matin, a mangé un ver le même jour à trois heures après midi. a iv viij DISCOURS vir au befoin. L'ovaire de la femelle contient toujours cinq ou fix œufs prêts à fortir 3 & environ foixante & dix au- tres plus petits 5 difperfés comme dans Tovaire d'une poule. Tous les animaux ont une vermine qui les afflige. Le cerf , le tigre , le cha- meau , le pigeon , la tourterelle y le cigne j le canard 5 la limace , l'arai- gnée j les abeilles mêmes en ont. Kirker en à vu jufque fur les puces. M. de La Hire a examiné celle qui fe forme fur la feuille de nos orangers , & que l'œil ii'apperçoit que comme une tache ; la tête d'une mouche lui a montré des in- fedes quatre mille fois plus petits que la tête même de la mouche. ' ■ Les mites du fromage, des fruits fecs & des grains , font des animaux régu- liers & voraees ; elles tournent leur vo- racité contre elles-mêmes lorfque la nourriture manque à la république. On les prendroit fouvent pour un amas de pouiîiere^ mais au microfcope cette pouf- PRÉLIMINAIRE. ix fiere s'anime ; Leuwenkoek 2LConkrvé une mite pendant près de deux mois fans la nourrir. Celles qui dévorent les beaux papillons du Cabinet des Curieux ne périlTent que par les émanations d'un morceau de camphre que l'on place dans un tiroir. Leurs œufs ont à peine le dia- mètre d'un cheveu. La puce a des écailles du plus beau poli, placées avec beaucoup d'ordre & de régularité ; on prendroit fon col pour celui d'une écrevifle de mer ; fa tête eft armée de deux pattes , au milieu def- quelles eft le fuçoir qui fert à fa nour- riture. Tous les changemens que fubit le ver à foie , la puce les éprouve. Que l'on enferme fes œufs dans un tube de verre , bientôt il en fort un ver , ou ma- got qui rampe comme la chenille j ce ver fe file une coque dans laquelle il fe change en chryfalide , & prend enfuite la forme d'une puce. Qu'on la difféque, Tœil eft étonné de la petiteffe extrême de fes veines & de fes artères. X DISCOURS L'araignée que nous regardons comme un animal fort vil , a été mieux parta- gée que nous par la nature du côté d'un organe fort délicat. Les unes ont fix yeux , d'autres quatre , quelques - unes en ont jufqu'à dix. Chaque œil eft dé- fendu par une paupière violette , tirant fur un bleu clair , & entourée d'un cer- cle jaune. Par ce moyen l'araignée voit à la fois & au-deffus d*elle & autour d'elle. Le fi! d'une jeune araignée eft quatre cens fois plus petit que celui d'une autre qui eft parvenue à toute fa grolTeur. L'araignée chaffeufe porte à {es pattes une touffe de plumes qui font nuancées par les plus riches couleurs. Le coufin , cet infecte qui tantôt vie fous les eaux , tantôt prend fon effor dans lair , a de même fur la queue des plumes exquifes. Ses ailes font ornées d'un long falbala , & rien de fi admi- rable que la tête de cet animal. Dcrham a compté huit barbes fur l'ai- guillon de la guêpe; Baker en a compté PRÉLIMINAIRE. xj autant fur celui de l'abeille : ce font de petits hameçons qui forcent l'abeille de dépofer ce dard dans la bleffure qu'elle fait, fur-tout lorfqu'elle l'enfonce avec fureur , & qu'on l'agite en voulant l'é- carter. A la racine de l'aiguillon cft un fac plein du fuc venimeux qui c^ufe l'en- flure. On voit flotter dans ce fuc des fels , & ces fels fe cryfl:allifent. On a été long-tems fans appercevoir aucune ouverture dans le dard du fcor- pion ; enfin Rcdï l'a vue avec les microf- copes du grand Duc de Tofcane. Il faut , dit Baker y que le poifon de cet animal foit bien fubtil pour couler dans la pi- quure par un canal prefque invifible , caufer dans la malTe de nos fluides un dérangement total & donner la mort. Le poifon de la vipère eft logé dans un fac qui eft à la racine de fa dent , & qui y vient par un conduit placé der- rière l'orbite de l'œil , en fortant d'une glande qui le fépare du fang. C'eft le Docteur Mcad qui a vu cette ouverture , xîj DISCOURS femblable à la fente d'une plume que l'on taille ; les fels de la liqueur fe font convertis à fes yeux en cryftaux d'une petiteffe incroyable. A l'extrémité de la corne du limaçon eft une tache noire , formée en demi-cer- cle; c'eft^ félon Lijler., l'œil de l'animal, qui en a jufqu'à quatre & qui eft aufli armé de fix dents , dures comme de la corne. Swamerdam a trouvé fous fa tête une pierre à laquelle il donne des qua- lités diurétiques. La mouche préfente au microfcope des richeffes qui étonnent /un luxe qui éblouit. Sa tête eft ornée de diamans ; fon corps eft tout couvert de lames bril- lantes 5 elle a de longues foies & un plu- mage éclatant. I&i cercle argenté envi- ronne ks yeux. Sa trompe eft affilée de manière qu'elle lui donne la double pro- priété de trancher les fruits ou d'en pom- per les fucs. C'eft avec le microfcope qu'il faut vaîr Jes yeux des infeâes j lorfque Ton croie PRÉLIMINAIRE. xiij n^ confidérer qu'un œil , il s'en préfente une multitude du plus beau poli & de la plus grande régularité. Ce font des miroirs qui ont chacun leur prunelle & leur lentille. L'objet s'y multiplie fous la main de l'Obfervateur , & s'y réduit probablement à Tunicé pour l'animal. Leur nombre devient effrayant. Leu- wenhoek en a compté 61^6 far un ver à foie , & Hock 14000 fur un bourdon. La mouche - dragon en a i-^oSS. Au milieu de chaque lentille eft une tache fept fois plus petite , & environnée de trois cercles ; Lcuwenhotk s'amufa à adapter, une de ces lentilles à celle de fon microfcope , & la dirigea du coté d'un clocher éloigné d'environ 750 pieds. La flèche lui parut renverfée , & auffi petite qu'une aiguille fort fine. La pouffiere qui couvre les ailes du papillon eft vraiment un amas de petites plumes difpofées régulièrement & avec ordre ; leur variété eft infinie. On çoiinoît aux écailles l'âge du poif- xiv DISCOURS fon. Dans celles d'une carpe de qua- rante-deux pouces & demi de long, Leiiwenhock. a vu avec fon microfcope quarante lames ajoutées les unes fur les autres , & a prononcé que la carpe avoit au moins quarante ans. Uanguille, le ferpent , la vipère & les lézards font écaillés. La peau de 1 homme même a des écailles qui la couvrent , & qui peut- être font la caufe de fa blancheur ; on dîftingue au microfcope fes cinq pans & la manière dont fes écailles anticipent les unes fur les autres. Nos pores s'y montrent de même d'une manière fort fenfible. Lcuwcnhoek en compte cent dans rétendue d'une ligne , cent quarante- quatre millions fur un pied quarré > & deux mille feize millions fur toute la furface du corps. Ceux de la paume de la main font des filions parallèles qui paroiiTent comme autant de fontaines , defquelles découle une eau claire & lym- pide. La coquille des huitrcs donne dans PRÉLIMINAIRE. xv robfcurité une flamme bleue. j M. Au- xant 2l trouvé que cette flamme efl: le réfultat de l'afîemblage de trois efpéces d'animaux dont les uns font blanchâ- tres 5 les autres rouges , & ceux d'une troifième efpéce marquetés ; on difl:in- gue leurs têtes , leurs dos, leurs pattes, &• on préfume que la lumière que jette le bois pourri efl: de même due à des animaux. Baker étend fa conjedure ju{- que fur l^s feux follets qui caufent quel- quefois tant de frayeur , & qui étoienc fi refpeâés chez les Anciens. Les poils des animaux ont un grand nombre de tubes extrêmement petits. M. Malphigi y a vu des valvules , & des cellules médullaires de la ftruâure la plus élégante & la plus délicate. Il y en a qui, coupés tranfverfalement, mon- trent une moelle femblable à celle du fureau ; d'autres ont une moelle blan- châtre & étoilée : on trouve dans ceux de Thomme une variété infinie de vaif- feaux , & des figures fort régulières. xvj DISCOURS On a ixgardé pendant long-tems les étamines des fleurs comme une fubf- tance farine ufe afiez inutile , & même excrémentitielle ; aujourd'hui cette pouf- fiere eft un affemblage de corps régu- liers , uniformes , & dans lefqoels on ne voit de la variété que fuivant les efpe- ces auxquelles ils appartiennent. Enfin, c'eft ^ d'après quelques Naturaîiftes , la femence même de la plante k laquelle la nature a préparé avec beaucoup d'art un piftile qui la reçoit dans fa maturité. Chaque plante a une étamine qui bai eft propre ; celle de la mauve eft fphéri- que , opaque & armée de pointes ; celle du tourne-fol eft plate, circulaire , & tranfparente au milieu; celle du pavot eft oblongue & fîllonnée. Plufieurs Obfervateurs éclairés ont crû appercevoir la figure de la plante dans fon germe. Ainfi le gland renfer- me un chêne, & une forêt entière. Baker a préfénté à la Société Royale de Lon- dres une femence du gramcn trcmulum dans PRÉLIMINAIRE, xvij dans laquelle il montroit une plante en- tière avec fa racine, fes branches & fes feuilles. Il a vu que les femences des fraifes font autant de fraifes qui for- cent de la pulpe du fruit. Si les Anciens avoient eu le fecoiirs du microfcope , ils fe feroient bien donné de garde de faire une claîTe de plantes ftériles , & d'y ran- ger les différentes efpeces de fougères & de capillaires y dans le^uelles nous voyons vraiment une pouiîiere impalpa- ble & des vailîeaux féminaux qui les rendent fécondes. Le microfcope nous a fait de même àppercevoir les fels des végétaux & des minéraux : ceux qui flottent d?dis le vi- naigre font obiongs & quadrangulaires| avec deux pointes extrêmement déliées i fi Ton y jette des yeux d'écreviffe , ces pointes fe brifent dans PeiFervelcence y & les fels prennent une forme quarrée. Les fels du vin font plus émouflés . quel- ques-uns reiîemblenc à un fuleau , d'au- tres à une navette. Le vitriol , l'alun ^ Pan. L h sviij DISCOURS îe faîpêtre , !e feî marin ont tous des feh propres & conftamment les mêmes. Les fables font également admirables au microfcope ; il y en a d'opaques & de diaphanes ; d'autres qui font brutes ou naturellement polis ; quelques - uns t)ù Ton voit des bâtimens , des plantes & des animaux. Ltuwenhock plaça à fon microfcope de petits morceaux de dia- mant éclairés par la lumière du foleil , il en fortit des flammes écincelantes ; il les obferva enfuite à Fombre , la flamme parut s'élancer de chaque particule du diamant & avoit un éclat inégal. Tan- tôt c'étoient des étincelles rouges & fort vives ; tantôt une flamme foible & verte. Quelquefois il crut voir des éclairs ; il en retira encore un autre avantage , ce fut •de diftinguer & de compter les petites îames dont le diam.ant eft compofé, La neige a été de même un objet des ■obfervations microfcopiques ; fes petits floccons ont à-peu-près la forme d'une écoik ; M. de CaJJïni Fa trouvée héxa- PRÉLIMINAIRE. xk gone ; les fix rayons font autant de bran- ches garnies de feuilles , & chaque floc- con forme une efpece de fleur. Mais rien ne doit nous intérefier au- tant que la vue de la circulation du fang dans les vaifleaux. On l'obferve aifë- ment fur les moules , les têtards & la membrane de la patte des grenouilles. Si c'eft le fang même que l'on veut con- îidérer, on en étend une goutte fur une lame de verre ou de talc , lorfqu'il eft encore chaud, & tout récemment forci de la veine : on peut aufîi le délayer avec un peu d'eau tiède ou dans du lait chaud. Ses parties fe diftinguent ailément fous la forme de globules ; on fuit avec f œil la marche de ce fluide , le ^égré de fon impuîlion, fa progrelîîon, favîteffe, & la direcdon de fa courfe dans les vaif- feaux. A quel point la nature n'a-t-elle pas porté la ténuité de les parties ? Leu- wenkocu & Jurin ont calculé que i6o de ces globules , placés les uns à côté des autres ^ égalent a peine la longueur d une XX D I s C O U R S ligne : ils les ont trouvés mois & flexi- bles dans un état de fanté , mais durs & roides dans la maladie, Lorfqu'on obferve le fang dans les animaux vivans^ on voit fa circulation , les altérations qu'éprouvent fes globules en paffant d'un grand vaiffeau dans un plus petit 5 leurs collifions , & jufqu'à la forme ovale qu'ils foiit forcés de pren- dre pour y entrer. Si Panimal expire dans le cours de l'obfervation , on eft témoin de tous les changemens qu'il fu- bit & des caufes qui les opèrent. Le fang 5 la falive , Turine , le chyle, le fiel & les humeurs ne contiennent point d'animaux vivans , ou de corps animés ; mais nous en portons conti- nuellement avec nous dans notre bou- che même , & quelque foin que nous apportions pour la nettoyer , il y en a toujours dans cette matière qui fe loge entre nos dents , dont les uns font ronds, les autres ovales , & qui prennent bien- tôt la forme de l'anguille ou du ferpent PRÉLIMINAIRE. xxj fî un plus long féjour dans la: bouche leur permet de fe développer. Le microfcope nous a conduit fort loin par les découvertes qu'il nous a fait faire , mais quelques Obfcrvaceurs ont voulu aller encore plus loin qu'ils n'a- vaient été conduits par le microfcope même. Il y a eu des hommes d'une ima- gination affez ardente pour s'écrier , dit Baker ^ qu ils avoient apperçu la matière fubtile de Dcfcartcs , & les émanations de l'aimant. Contentons -nous de porter nos re- gards fur les objets que le microfcops nous rend fenfîbles , & foyons aifez fages pour ne point nous élancer au - delà;. Cette carrière eft déjà affez vafte , & peut-être trop peu connue , pour vouloir reculer les bornes qui ont été pofées par la nature. N'eft-ce pas affez pour nous de croire que nous nous fommes avan- cés jufques fur les bords de ce baffin où elle travaille à la première formation des corps 3 & que nous y avons vu nager b iii xxî] DISCOURS l'homme & les animaux ? Si cette vérité nous refte , elle doit nous fuffire ; mais la découverte ne nous fatisfait pas ^ & nous courons à une autre. Nos Obfer- vateurs ont commencé par pofer pour principe que ces êtres qui nagent dans la liqueur font des animaux parfaits ; d'autres , pleins de cette idée , préten- dent démêler dans chacun le penchant & le caraâere de l'efpécej dans le chien, la vigueur & la force ; dans le lièvre , la foibleffe & la crainte ; dans le coq , le feu , la vivacité , l'audace. N'a-t-on pas vu Leuwcnhock s'y méprendre , appeller fes voifins , & leur montrer avec en- thoufiafme les entrailles d'un bélier ou de jeunes brebis ne marchoient quen trouoes , & fuivoient timidement leur conduéteur comme celles qui broutent l'herbe dans nos campagnes ? Voila 5 je crois , des abus de l'efprit qui ne fervent qu'à nous égarer. J'ai pl«s de confiance dans la defcription que le même Leuwcnhotk nous a donnée d'un PRËLIMINATRE xxîij petit agneau qui n avait que dix-fept jours, & qu'il a vu très - diftinâement dans le ventre de fa mère. C'étoit d'a- bord une petite fubfianee rouge & char- nue dont l'œil confondoit les traits ; mais au microfcope ce fut un agneau bien for- mé , avec une tête, un corps, des côtes, des inteftins , des vertèbres , des vaif* féaux fanguins , & deux petits yeux qui avoient toute la tranfparence du cryftaK Je croirai de même qu'un petit agneau ^ âgé feulement de trois jours, avoit déjà une tête & des yeux , & qu'il étoit cou- ché en rond dans fes enveloppes. Mais laifTons-là ces brebis futures qui ne na-- gent qu'en bandes dans ks inteftins du bélier^ Il y a encore un calcul de Leuwenhock qui devient eiFrayant par fon étendue , & qui par-lk même perd jufqu'à la vrai- femblanee, c'eft celui de fa grenouille 3, de fon merlus mâle , ou de ce merlus qui eft appelle Jack par les Anglois. On a accordé à la femelle du merlus uiie biv xxiv DISCOURS • prodigieufe quantité d'œufs. De compte fait , on en a trouvé dans une jufqu'a neuf millions trois cens trente -quatre mille, &c comme il faut à Leuwenkoek dix mille animaux dans le mâle pour chaque œuf de la femelle , il va fe trou- ver qu'un merlus mâle contiendra feui un bien plus grand nombre de merlus vivans qu'il n'y a d'hommes exiftans fur toute la furface de la terre. L'Obferva- teur a même fait ce calcul avec tant de complaifance que y pour marcher avec un certain ordre dans fa combinaifon ^ il a mis d'un côté l'efpace qu'occupent les mers , & de l'autre celui des jierres habitées j enfuite jugeant de la terre en- tière par la population de la Hollande , qui lui étoit connue j il a trouvé un nom- bre d'hommes fort inférieur à celui des prérendus individus de fon merlus mâle j, de foD jack & de fa grenouille., „ Harvey a jette un coup d'œil bien dif- férent fur Foovrage de la généra tioUo Charles I ^ Roi d'Angleterre^ lui avoii; PRÉLIMINAIRE. xxv abandonné les cerfs , les biches , & les Japins de fon parc. Le Fhyficien faific tous les momens où leur diffeâion pou- voit lui donner des lumières ; tantôt il immoloit les biches le jour même qu'el- les avoient reçu le cerf ^ tantôt il ne les ouvroit que quelques jours après. Les premiers changemens qu'il apperçut fu- rent un gonflemenc , & des excroiflan- ces fpongieufes j enfin il vie manifefte- mcnt des filets extrêmement déliés , & étendus en forme de réfeau , avec une poche qui renfermoit une liqueur épaiffe & glaireufe. Dans cette glaire nageoit un corps fphérique rempli d'une eau bril- lante, & au milieu un point vivant , qui ne s'agitoit que par bonds & par fauts. Il nomma ce point, punSuin fàliens y & il le fit remarquer au Roi. Harvcy , fier de fa découverte , crut pouvoir renverfer le fyftême des œufs & des animalcules microfcopiques. II ima- gina que ce puncliim Jaliens étoit le pre- îiiier principe de l'organifation animale ^ xxv] DISCOURS & que les autres parties du corps ve- noient s'y adapter & s'y unir par juxtà^ pofition , de manière que les vifceres fe formoient toujours avant les organes du dehors. M. de Maupertuis eft étonné de voir ce grand appareil d'obfervatîons ^ & ce maflacre de biches aboutir à compa- rer la génération au fer que touche Tai* mant, ou au cerveau qui reçoit des idées» Ce n*eft pas feulement dans la for- mation des animaux que le microfcope a été utile à la Phyfique , il nous a mis à portée outre cela de connoître les par- ties fimples & primitives que l'on peut regarder comme les rudimens des plan- tes. Si l'on veut obferver les parties or- ganiques dont la nature fe fert , que Ton coupe tranfverfalement une racine , & que l'on en préfente au microfcope une tranche fort mince , ce petit volume s'a- grandira , & on y diftinguera aifément une membrane e^^térîeure deftinée à {er-. vir d'enveloppe à la racine , & qui efï compofée en partie de véiicules & d'une PRÉLIMINAIRE, xxvlj fubftance ligneufe. Enfuite on verra le bois de la racine qui dans quelques-unes va jufqu'au centre , & dans d'autres fe termine au tiers de ce même centre , avec des véficules qui fe logent réguliè- rement entre les parties du bcis. Dans la fubftance même du bois , on apper- cevra Torifice des petits tubes ou veines ' que l'on peut regarder comme autant de canaux pour ménager un palTage libre à l'air du dehors. Dans les plantes où la fubftance ligneufe ne va pas jufqu'au centre ^ comme dans la rave , on aura à cet endroit un amas de véficules fpon- gieufes , fembîables à celles de Pécorce, ou y ft l'on veut , un parenchime , c'eft- à-dire une fubftance molle & charnue. Mais comme la nature a dans tout ce qu'elle fait un but confiant , elle a marqué l'emploi de chacune de ces par- ties ; & cet emploi , le microfcope l'a démontré de la manière la plus fenfible. Les véficules de l'écorce font autant d'é- ponges qui pompent les fucs aqueux dç xxviij DISCOURS ia terre d'où ils tirent leur vie végéta- tive. La pellicule de Pécorce crible & élabore ces fucs pour les affimiler à la nature du parenchime ; d'autres véficu- les les filtrent de nouveau , & les atté- nuent en fe les tranfmettant fucceflive- ment jufqu'a ce qu'ils arrivent au centre ; enfin ils font portés dans la partie ligneu- fe de la plante. On peut , k l'aide d'un microfcope folaire , fe mettre foi-même devant les yeux une image de toutes ces chofes ,. & les tracer avec facilité fur un tranf- parent. Les organes des plantes n'y font pas équivoques , & c'eft peut-être un des plus beaux fpeâacles & des plus flat- teurs que la vue de cet ordre admirable dans lequel la nature a difpofé les vélî- cules 5 la fubftance ligneufe , les tubes & le parenchime dans la rave , l'abfynthe , le faule , le buis^ le chêne , &c. Il fem- ble même , à cet afpeâ: , que l'on aille rendre compte de la variété des faveurs dans les plantes & les fruits ^ dire ^ par PRÉLIMINAIRE, xxix exemple^ pourquoi la poire & la pom- me qui naiffenc voifines l'une de l'au- tre , font cependant fi différentes par le goût; montrer, d'après le microlcope, que leurs racines & leurs branches n'ont pas une filière femblable , ôc que pro- bablement les fucs n'ont pas dû y être élaborés de la même manière. Je ne parlerai point de la circulation de la fève dans les plantes ; il eft alTez vraifemblable que la nature lui a ouvert tous les paflages pour y monter par l'é- corce 5 le bois , ou la moelle , ou même par tous les trois à la fois. Haller ne veut pas qu'elle y circule , mais il s'appli- que à prouver que les plantes tranfpi- rent. Bohcraavc prétend que les fucs de la terre doivent charrier dans ces grands canaux toutes fortes de fels , de l'eau, des huiles , & même des métaux, & il croit reconnoître les particules métalli- ques dans les cendres des végétaux qui font attirables à l'aimant. Baker invite les Philofophes à pré- XXX DISCOURS fenter au microfcope les feuilles des plantes & des arbres. Leurs ramifica» tîons & répaiffiiTement des fucs qui fe coagulent lorfqii'ils en font fortis ^ an- noncent afi'ez ouvertement un état de circulation. Pour ies pores , Leuwenliock en a comp- té plus de 340000 fur une fimpîe feuille de buis. Ceux de la rue relTemblent aux cellules d'un rayon de mouches à miel 5 & d'autres à des trous d'épingle. , Nous devons au microfcope la découverte d'u- ne membrane blanche & fine qui les tapiffe. 11 y a des feuilles fur lefquelles le mi- crofcope étale aux yeux un tiiîu où la nature a prodigué des richeffes & un tra- vail inimitable ; telles font celles de fau- ge 5 de mercuriale & d'églantier ; ce font des grains de cryftai , des lames d'argent, des grappes ^ des nœuds que les plus mer- veilleux d'entre nos Artiftes n'imiteront jamais. Baker compare pour un moment nos PRÉLIMINAIRE, xxxj ouvrages les plus finis avec ceux de la nature. Il cice le tranchant d'un rafoir, la pointe d'une aiguille , le linon le plus fin 5 une belle dentelle de Malines , une chaîne d'or , longue d'un pouce , com- pofée de trois cens anneaux , & fi légère qu'on la faifoit traîner par une mou- che ; une chaife d'ivoire qui avoit quatre roues , avec un homme ailis dedans , & traînée de même par une mouche j une chaîne de cuivre , longue de deux pou- ces 5 compofée de deux cens anneaux:, qui 5 avec fon crochet , fon cadenat & fa clef 5 ne pefoit pas un grain ; une table , un buffet , un miroir , douze chai tes , trois figures , &:c. que l'on renfermoit dans un noyau de cérife. Voila d'admirables inutilités , & dans lefquelles fans doute l'ouvrier avoit em- ployé toute la délicatefle & toute la per- fedion de fon art. Baker qui a préienité au microfcope ces ouvrages futils , les a trouvés bien inférieurs à ceux de la na- ture. Le tranchant du rafoir étoit rabo- I xxxîj DISCOURS ceux 5 inégal , plein de fiHons. La pointe de raiguiîle étoic irréguliere , femée d'é- minences , & de la largeur de plus de quatre lignes. Le linon parut femblable à une claie , & fes fiis auffi groffiers que ces cables dont on fe fert pour les vaif- féaux, La dentelle étoit raboteufe ^ en- tortillée & fans arc. La chaîne d'or 5 la chaîne de cuivre , la chaife d'ivoire 3 le cadenat ^ la clef ^ la table d'ivoire , le buf- fet , le miroir , les chaifes & les petites figures 5 tout cela parut difforme &nionf- trueux. Sans le microfcope, nous euffions conftamment admiré ces chefs - d'csuvre de l'art ^ comme nous nous extalions en- core devant nos mignatures. Notre ad^ miration ^ dit Baker 5 ne vient que. de notre Ignorance, Il ntïi eft pas de même des ouvrages de la nature ; quelque petîtefle qu'elle leur ait donnée , ils ne perdent rien dans FagrandiiTement des parties qu'ils éprou- vent au microfcope. L'aiguillon d'iTne abeille ^ & même le fourreau de cet ai- guillon PRÉLIMINAIRE, xxxiij guiilon eft par-tout d'un poli achevé , & d'une perfeâion qui étonne ; ces taches qui ont été femées fur les mouches , & en général fur les infedes, font réguliè- rement circulaires , & les lignes qui les environnent gardent le parallelifme le plus exad. Les herbes , les moufles mê- mes annoncent par-tout Tordre, l'exac- titude 5 la fymétrie , les proportions , la îuftefle , enfin des richefîès , & une har- monie qui marquent bien la grandeur du fuprême ouvrier qui les a faites. Telles font k-peu-près les découvertes intéreflàntes que l'on doit à l'invention du microfcope. Ce nombre prodigieux de petits êtres que nous voyons nager dans les infufions des graines & dans les liqueurs fpermatiques des poifîbns & des autres animaux a fait éclore bien des fyftêmes. On a crû généralement que c'étoient des animaux parfaits logés dans les graines que Ton fait infuier , ou de vrais habitans des eaux. Il y a eu des Philofophes qui ont imaginé que des Part^ L c xxxiv DISCOURS cEufs d'une petitefle extrême font difle- minés dans l'air , & qu'ils defcèndent de Fatmofphére dans les liqueurs que l'on foumet à l'examen du microfcope. Baker a penfé qu'une foule de petites mouches învifîbles apportent leurs œufs dans les fluides , où elles trouvent une nourri- ture convenable. M. de Buffon a trouvé dans ces êtres un mouvement différent de celui des animaux ; leur queue lui a paru trompeufe & poftiche ; ils n'ont point eu à fes yeux de forme confiante & d'organifation décidée. Dès-lors M. de Buffon a retiré ces êtres de la claiîe des animaux , & le nom de ce grand homme a entraîné la plus grande partie des Phyficiens dans fon parti. M. de Needham a fait enfuite des ob- servations micro fco piques qui vienne^nt à l'appui de l'opinion du Philofophe Fran- çois, mais qui étendent fon fyftême, qui l'amplifient , qui le développent. Ce font ces mêmes obfervations qui ont occa- fionné la differcaûon de M. l'Abbé Spa^ PRÉLIMINAIRE, xxxy lan^ani que j'ai traduite de l'Italien , & les notes qui y ont été ajoutées par M* de Ncedham. Dans cet ouvrage, M. Spalan^anï fc plaint de ce que MM. de Buffon & de Ncedham travaillent à renouveller le fyC- terne des forces pla/liques qu'il regarde comme profcrit de la bonne Philofo* phie : il fait une defcription de la figure , de rinftinâ^ & des loix que fuivent les petits corps qu'il a obfervés. Dans les infufions qu'il avoit préparées avec la graine de citrouille , il a vu ces petits êtres s'élancer , décrire dans l'eau tantôt une ligne droite , tantôt mie ligne cir- culaire , pirouetter fur eux-mêmes^ fe jetter fur de petits morceaux de matière comme pour les manger avec avidité , fe pourfuivre les uns les autres , s'at- teindre & s'arrêter. Ils étoient tous tranf- parens , & n'avoient point de pieds ] leur forme étoit ovale , leur bec crochu , & de petites véficules rondes leur tenoienc lieu de vifceres. Ceux des infufions de cij xxxvj DISCOURS camomille , de patience , de bled de Tur- quie & de froment avoient quelque légère différence. Jamais ces petits corps ne fe heurtoient dans leur marche , malgré leur - nombre & leur vîteffe , & fouvent ils na- geoient contre le courant de l'eau \ mais cette eau venoit-elle à leur manquer , ils s'agitoient , rallentiffoient leur mouve- ment , s'arrêtoient , & on les voyoit ex- pirer M. Spalan^ani conclut de -là que ce font ici des animalcules aquatiques qui ont un mouvement régulier, produit par un principe intérieur & fpontané , & il les place dans la clafle des animaux. Ces animalcules demandent un cer- tain degré de chaleur pour éclore ; une fois nés , ils bravent les rigueurs du froid, à moins qu'il ne foit exceffif. Notre Auteur a foupçonné que la pro- dudion de ces êtres pouvoit dépendre de l'état de la végétation ; & pour par- venir à le connokre , il a pris le parti de concaîTer , ou de broyer les graines PRÉLIMINAIRE, xxxvij qu'il faifoit infufer , & de préparer en même-tems des infufions avec des grai- nes qu'il laiffbit entières ; fçavoir celles de chénevis , de lin, de haricots. Il a eu dans les unes des animaux bien formés, & dans les autres des animaux diffor- mes. Mais lorfqu'il abroyé les graines juf- qu'à les réduire en farine , celle de fro- ment 5 dont il a pris la partie animale , ou gélatineufe , a été la feule qui lui a donné des animaux. Ainfî ce procédé lui a appris que lorfqu'on arrête la végétation , on peut quelquefois altérer la produdion , mais qu'on ne la détruit pas toujours. Un autre procédé lui a fait voir qu'en ac- célérant la végétation , on peut de même avancer la produâion ; car la naiffance des animaux fuit toujours d'un pas égal la lenteur ou les progrès de la végétation. Le fameux paffage du végétal à l'ani- mal , & le retour de l'animal au végétal eft ici examiné avec beaucoup de fcru- pule. M. Spalan:^am a répété avec le plus grand foin les expériences délicates qui ciij xxxvn] DISCOURS avoienc été faites par M, de Needham avec des grains d'orge ou de froment ma- cérés dans l'eau pendant quelques jours. II a vu comme lui des ramifications très- déliées , fans interrompre le cours de la végétation. Leur forme étoit prefque cy- lindrique , & elles avoient à l'extrémité une grofîeur d'une certaine tranfparence autour de laquelle de petits corps ont paru s animer. Des graines qu'il a lailTées dans la terre pendant quelques jours ^ & dont il a coupé les premières racines , lui ont donné un tifTu de fibres longitudinales ^ & un du- vet dans toute la longueur de la racine ; ce duvet étoit compofé de petits rameaux qui pouflbient fort au loin leurs bran- ches 5 avec des diredions différentes , & au bout une grofleur tranfparente. Le lendemain on a vu au-deflus une vapeur épaiiîe qui n'étoit qu'un amas de fils ex- trêmement déliés 5 & entrelacés de mille, manières. Les jours fuivans il y a eu unQ infinité d'animaux^ PRÉLIMINAIRE, xxxîx Cette expérience , variée adroitemenc par un Obfervateur habile, lui a toujours donné des réfultats. à-peu-près fembla- bles. Il a eu le plaifir de fuivre la na- ture pas à pas dans la formation des petits êtres animés , & d'obferver tous les eiForts que faifoient ces corps pour brifer leur enveloppe & nager dans le fluide. Mais tous les phénomènes que la nature a mis fous fes yeux n'ont point pu , dit - il , le porter à adopter cette propofition , qu^un végétal Je convertit en animal. Le retour de l'animal en végétal pa- roît de même à M. Spalan^ani un mira-* cle dans la nature , qui a pour lui tout l'air de la nouveauté. Pour l'obferver, il a retiré de la liqueur les germes des graines après qu'ils lui ont donné une abondance d'animaux , & il a enlevé avec eux le duvet qui s'y étoit formé. Il a at- tendu alors la transformation de fes ani- maux en plantes • l'eau ne leur a jamais manqué ) ils ont eu de même toute la civ xî DISCOURS nourriture néceffaire^ mais bientôt leur nombre a diminué ; il en a vu fur la liqueur quelques-uns qui étoient morts: enfin ils ont tous difparu fans qu'il ait pu fçavoir au jufte ce que toute cette population étoit devenue. Une particularité qui Ta frappé , c'a été que quand une efpéce a commencé à s'é- teindre y une autre colonie, mais compo- fée d'animalcules infiniment plus petits y lui a fuccédé y & a fubfifté environ une quinzaine de jours. On en voyoit un nom- bre prodigieux ; tous ces individus étoient fi petits qu'il a été abfolument impoffi- ble d'en diftinguer les formes. Aucun végétal n'a paru ^ & au lieu d'eni tirer une conféquence favorable a fon opi- nion 5 notre Obfervateur fe tait par ref- ped pour M. de Nccdham. Il ne reftoit plus à notre Philofophe qu'à prendre tous les moyens imagina- bles pour s'afîlirer que les animalcules microfcopiques ne naiffent point des œufs que certains Philofophcs placent dans PRÉLIMINAIRE. xîj Patmofphére & dans les corps : il a fait là-delTas les expériences les plus déci- fives 5 tantôt en prenant des viandes cui- tes & rôties ; tantôt en faifant bouillir les légumes pendant une heure & de- mie. Il devoit réfulter de ces épreuves que fi une légère ébullition fuffit pour détruire le germe des gros œufs , épaiflir leur fluide & le durcir , ce degré de cha- leur devoit 5 a plus forte raifon , donner la mort aux petits individus renfermés dans ces prétendus œufs ; cependant ces chairs & ces légumes lui ont donné des animaux fort vifs qui n'avoient rien de gêné dans leurs mouvemens ; il a même trouvé dans Pinfufion de la graine de trèfle bouillie plufieurs anguilles d'une fort belle forme , qui étoient toutes fe- mées de globules hrillans , & beaucoup plus grandes que celles du vinaigre. Pour ôter tout prétexte du côté de l'air que l'on fuppofe dépofer des œufs dans les infufions , M. Spalan:^ani a ex- pofé fes vafes à l'aélion du feu j il les â xlij DISCOURS fermé exaâement , ou il les a mîs dans le vuide de la machine pneumatique. Ses vafes fermés hermétiquement ont eu des animaux dans les infufions qui avoient éprouvé l'adion du feu , ou qui avoienn été faites à froid ; mais il obferve que fi l'air contenu, dans les vafes a été for- tement échauffé , il ne permettra jamais aux animaux de paroitre ^ à moins qu'un nouvel air n'y foit apporté du dehors. Enfin , il penfe qu'il eft indifpenfable , pour la produâion des animalcules mi- crofcopiques ^ que Pair des vafes dans iefquels on fait infufer les fubftances n'ait point fenti l'action du feu. Voila ce qui a donné matière aux notes de M. de Necdham ; on connoît déjà en Europe le fyftême de cet homme célèbre , & il eft bon d'y revenir plus d'une fois pour le bien connoître. Son opinion paroît au premier afpeâ hériffée de difficultés , ou accompagnée de con- féquences dangereufes , mais pour qui- conque veut l'approfondir ^ le Matéria- PRÉLIMINAIRE, xliij lifte n'y gagne rien , & le Philofophe y gagne beaucoup. M. dcNccdham a des vues étendues & fages ; il voit les chofes en grand , & il les rapporte toujours à une intelligence fuprême. Son principe fur la vitalité lui a déjà fait des enne- mis qui ne l'ont pas entendu , peut-être il lui fera un jour des partifans lorf- qu'on voudra l'entendre. L'attraâion de Newton n'a- 1- elle pas trouvé des con- tradiétions dans les écoles } Aujourd'hui le mot d'attradion fe prononce dans toutes les chaires de l'Europe. Le tems nous réconcilie aifément avec les chofes qui nous ont révolté, parce qu'il nous familiarife avec elles , & nous apprend à les connoître. Je crois du moins qu'on lira avec plai- fîr ce que M. de Ncedham a penfé de la formation des courans & des monta- gnes. Ces deux objets font intéreflans , & il les a vus en Phyficien éclairé & profond. Son voyage fur les Alpes peut de même être fort utile par la mefure xîi> DISCOURS de leurs hauteurs comparées avec celles des Cordelières. Je ne parle point de ce qu'il raconte de quelques arbuftes aux- quels les Chinois & les Efpagnols attri- buent des propriétés finguliéres. M. de Needham n'a point d'opinion à ce fujet ; il ne fait que raconter ce qu'il en a ap- pris. Pour fa nouvelle théorie de la terre 9 c-eftune opinion qui lui appartient ^ & qui peut-être réconciliera bien des Phi- lofophes avec la chronologie de Moyfe. Il n'efl: pas néceflaire que j'invite les Philofophes à lire cet ouvrage : l'impor- tance de la matière fixera bientôt leur attention. Mais , je le répète^ il faut y revenir plus d'une fois. M. de Needham penfe avec force ; il eft Anglois 5 & , en écrivant^ il confulte plus la chofe que Pexpreffion. D'ailleurs fes vues philofo- phiques ne font ici jettées que comme au hafard & fans ordre , même fans trop courir après les grâces du ftyle & les ornemens du difcours. Dès-lors il faut une main habile pour les recueillir où PRÉLIMINAIRE, xiv elles fe trouvent & les préfenter à l'eC- prit avec la méthode & la clarté qui leur manquent dans cette colledion. Au refte ces richefîes n'en exiftent pas moins aux yeux de ceux qui penfent ; c'eft pour eux que M. de Nccdham écrit ; il eft même étonnant qu'un Anglois ait pu s'exprimer avec tant de facilité dans une langue qui lui eft étrangère. Je ne m'arrêterai pas ici fur ce que M. de Nccdham nous dit des êtres mi- crofcopiques auxquels il ne veut pas que nous donnions la qualité d'animaux : fon opinion doit être connue. J'obferverai feulement que l'emploi qu'il donne à la force végétatrice, ou végétative, dans la production de ces corps organiques , re- garde moins la végétation ordinaire des plantes , que l'état aduel de la fubftance que l'on tient en macération & qui s'y dépouille de tous fes principes. C'eft par cette aâion que devenant , félon lui ^ une efpéce de glu filamenteufe , elle ac- quiert la propriété 4^ végéter eu bran- xlv] DISCOURS ches vitales , & de fe divifer en corps animés , ou globules mouvans. On ne les y voie jamais paroître , ces globules , que la fubftance infufée n'ait été réduite en matière glutineufe , & on celle de les y voir auffi-tôt qu'elle s'épuife par l'ac- tion continuée de cette force végétative & intérieure qui la pénétre dans tous fes points. C'eft par un effet fort naturel de cette même aftion que les corps microf- copiques paroilTent avoir des générations fucceffives, L'Obfervateur , peu attentif , fe figure que ce font des milliers d'ani- maux dont les infufions fourmillent , & que les germes y font inépuifables ; il crie au miracle ; mais ce n'eft pas dans cette prétendue fécondité que le miracle réfide ; c'eft dans la feule divifion des points de la matière à laquelle la force ex- panfive a fait éprouver fucceffivement des dégrés d'atténuation, jufqu'à ce qu'elle rentre dans fes premiers élémens. Auifi M. de Saujfure a-t-il remarqué avec beau- coup de fagacité que ces êtres microf- PRÉLIMINAIRE, xlvij copiques ne fe propagent pas , ne s'en- gendrent pas 5 mais qu'ils ne font que fe divifer ; & M. de Necdham qui ne les a jamais vu mourir d'une mort natu- relle , conduit cette divifion jufquà une difparition totale de la multitude , c'eft- à-dire jufqu'au moment où la fubftance macérée devient un vrai caput mortuum qui ne produit plus rien d'animé. Telle eft l'eau de la Tamife qui fe corrompt & fe purifie jufqu'à fept fois dans les voya- ges de long cours ; c'eft-à-dire que Ton y voit fept générations d'êtres vitaux qu'o- père la végétation des fubftances orga- niques qui fe trouvent mêlées dans cette eau , & qui enfin s'épuifent en atteignant une divifion qui les mène jufqu'aux pre- miers principes de la matière. On doit s'appercevoir que tout ceci fe fent un peu des monades de Lcibnit^; aufïi M. de Necdham fe donne-C-il pour Leibnitien. Il veut que la matière fe réduife à des êtres fimples qui fe com- binent; & produifent par leur adion & xlviij DISCOURS leur réaflion fur nos organes toutes les idées qui proviennent des objets fenfi- bles , & même les idées les plus géné- rales , comme celles que nous avons de rétendue ^ de la figure ^ de la divifibilité , &c. Il y a 5 fuivant M. de Ncedham , deux efpéces d'êtres fimples ; l'un eft un être mouvant , l'autre un être réfiftant ; c'eft de leur union , & de la variété infinie de leurs combinaifons dans toutes les proportions poffibles que naît la collec- tion générale des êtres , depuis la mafle la plus brute jufqu'a la matière la plus exaltée , même le fluide lumineux & le feu élémentaire ; & comme ces êtres font matériels , quoique fimples , il eft en droit d'appeller leur union une colleâion ma- térielle, un compofé matériel. Il eft mê- me porté à croire que l'être réfiftant , ou , fi l'on veut , la réfiftance , n'eft autre chofe qu'une moindre aâivité, une efpéce de négation , mais qu'il n'y a là- dedans rien de pofitif proprement dit. Nous PRÉLIMINAIRE, xlix Nous aurons donc une échelle d'êtres lîmples matériels que Ton pourra fe re- préfenter comme plus & plus aâifs , depuis le moins adif qui fera le dernier, jufqu'au plus aâif qui fera le premier. ^ Il eft aifé de concevoir par ce moyen que le phénomène de la réfiftance ne peut être dû qu'à une combinaifon de cette efpéce. Toutes les fois que deux êtres fe rencontrent avec des dégrés d'ac- tivité diiFérens , la moindre adivité de l'un eft conftamment abforbée par la plus grande aâivité de l'autre ; ainfi c'eft toujours aux dépens de l'un que l'autre fe rend plus aâif & exalté. Tel un che- val qui tire une maffe pefante, commu- nique à cette maffe une partie de fa force & perd ce qu'il communique. Il eft néceffaire de bien entendre ces chofes pour fuivre W.^ de Needham lorf- qu'il entre dans la claffe de la vitalité ^ & qu'il parcourt tous les dégrés poffi- bles que l'on remarque dans les tempé- ramens des corps organifés végétaux ^ Part. L à 1 DISCOURS de ceux qui font fîmplement vitaux & même des animaux. La vitalité qu'il fait confifter dans une exaltation de la force végétative n'eft point fenfibilité dans au- cun fens , mais elle fuppofe la première claffe des êtres fîmples dont elle eft corn- po{ée ; la fenfîbilité fait la féconde , l'in- telligence la troifième, & ainfî de fuite, en s'élevant depuis l'homme jufqu'aux efprits céleftes. Dans l'état préfent des ehofes, la vitalité, ou l'organifation par- faitement vitale , eft également néceffaire à l'être fimple, fenfitif & à l'être intelli- gent, refferré dans un corps mortel. M. de Necdkam ajoute que fon prin- cipe de vitalité , qu'il appelle un principe compofé , matériel , & deftitué de fen- fation, doit s'étendre à tous les êtres qui fe multiplient par divifion, comme font les êtres microfcopvques ^ mais que l'être fenfitif, fimple & immatériel , c'eft-à- dire fans fpiritualité & fans intelligence, eft celui qui ne fe partage pas , & qui cefîe lorfque l'organifation fe diffout ; PRÉLIMINAIRE. Ij cependant M. de Nccdham permet , en nouveau Pythagorc , que cet être pafîe fucceffivement d'un corps dans un autre , & fe perpétue par une forte de métemp- fycofe. Ce fyftême doit pafoître ingénieux. M. de Nctdham n'a imaginé ceux qu'il nous donne qu'en fouillant dans toutes les profondeurs de laPhyfique, & même de la Métaphyfique la plus abftraite : c'eft peut-être cette Métaphyfique qui effarouche , ou qui rend les avenues de la chofe plus difficiles. Mais elle eft com- mune à tous les grands fyftêmes. Ne faut-il pas être Métaphysicien avec Dcf- cartes j Lcibnit^ &c Newton ? Ces grands hommes commencent tous par la matiè- re , & font forcés de finir par Tinfenfible & par des puiffances données à la ma-- tiere. M. de Needham fe renferme dans le même retranchement , autant pour fa force expanfive *, que pour fa force vé- * 11 y a chez le Sieur Pafquier , rue Sains dij lîj DISCOURS gétative. Il donne à l'une le foin de for- mer des ifles & des montagnes , & il la rend refponfable du renverfement de nos villes dans les fecoufles qu'éprouve la terre. L'autre eft chargée de l'emploi d'animer tous les points de la matière , de purifier les parties exaltées y de les Jacques , une Carte mathématique , phyfique & politique , tirée des obfervations de M. Buacke , avec une brochure qui lui fert d'éclaircilTement. On y voit la terre fortie par dégrés de deifous les eaux. Dans la première vue , ce font (împle- ment quatre plateaux , le premier en Aiie , au mont Ararat , dans l'endroit où Moyfi place le premier homme j le fécond en Afrique ; le troi- fîème dans l'Amiérique feptentrionale , & le qua- trième dans l'Amérique méridionale : l'Europe eft encore fous les eaux. Dans la féconde vue on découvre la grande chaîne des montagnes qui inveftifTent la terre, & dont le pied s'étend par les bas-fonds & les ifles à travers les mers. Dans la troifîème , on diftingue les petites chaî- nes des montagnes , & dans la quatrième , les diflerentes parties àcs Conrinens. Cette Carte répand un grand jour fur la ÎQconà^ partie de cQt ouvrage. Elle a été gravée par le Sr Louis Dcnys> PRÉLIMINAIRE. liîj détacher de la matière brute fous la for- me d'êtres vitaux * , d'agir dans nous indépendamment de nous-mêmes, d'y former jufqu'à nos pafîions , nos tem- péramens & nos goûts , & d'avoir mê- me préfidé à la formation de la première femme. Voilà des fondions bien étendues ; mais devons-nous les adopter fans exa- men ? C*eft ce que je n'ofe prefcrire. On fent bien qu'il ne s*agit ici que d'un fyf- tême , & que tout fyftême n'enlève pas nécefîairement les fuft'rages. La nature ne nous trompe jamais fur les effets ; ce font toujours les caufes qui nous éga- rent. Peut-être que la Divinité , qui a fî bien caché le jeu de la grande machine * M. de Necdham lui attribue aufli les infeéles qui font dans les matières purulentes. Le Docteur Bononio & Baker ont donc pris ici l'efec pour la caufe \ ils ont crû que ces animaux à fîx pattes qui reiïemblent â une tortue , & que Bononio a découverts avec le microfcope dans les puftules d'une peau fcabieufe , caufoient ôc comnauni- <]uoient cette maladie. liv D I s C O U R s , &c. de l'univers , s'amufe des efforts que nous faifons pour en connoitre les refforts fe- Grets , & rit de nos erreurs. Mais erreur ou véricé , cela nous occupe , & nous y mettons de Timportance. Tradidit Dcus mundum difputationi hominum *. * On raconte qu'un grand terrein , fitué près Aè Mâcon , fur le penchant d'une montagne , a été tranfporté il y a quelque tems fur un terrein voifîn avec les maifons & les arbres , & qu'au- deiTous on a trouvé une carrière de marbre. Cambden fait mention d'un événement fem- blable arrivé en Angleterre. M. de Ncedham en tire des inductions favorables à fa théorie de la terre , conformément aux altérations phyfiques qui s'opèrent continuellement dans l'intérieur du globe : la formation de cette carrière a pro- duit 5 félon lui , un gonflement qui a fait gliffer les terres. Il invite les Lecteurs à ne pas pro- noncer fur la première partie de cet ouvrage , fans avoir auparavant jette les yeux fur {qs nou- velles obfervations microfcopiques , imprimées en 1750 5 chez Gamau^ à Paris. Ils y trouveront des chofes très propres à donner l'intelligence de fon fyftême. ERRATA. // feroit bon de jctter Vœil fur ut Errata avant que d'entreprendre la lecture de r Ouvrage , & de corriger foi-même les fautes qui ont échappé dans Vimpreffîon, j ART. I, pag. 8i , lig. 1$ & Z7. Boîte, ///. boète. Pag. 103 , lig. 7. De produire, ///. de fe produire. Pag. 144, lig. 1 3 Et qui vient, lif. & qu'il vient. Ih. lig. 16. Par les phénomènes , ///. les phénomènes, Ih. lig. ^%. Par la divifibilité , ///. la divifibilité. ïb. lig. 30. Par la formation , L'if. là formation. Pag. T45 , lig. I. De dehors , ///. du dehors. U. lig. 1 3 . Conféquemment , lif. qui conféqucmraent. Il>. lig. 15. Qui fait ibrtir, lif fait fortir. Pag. 149 , lig. li De tous les êtres , ///. de tant d'êtres. Pag. 1 51 , lig. 14. Sans jamais refter , iif. fans refter long- tems. Pag. 155, lig. II. Coreaux , lif. coraux. Pag. 157, lig. lo. D'un corps étranger afTemblé en de- hors , attiré , diftribué , & arrangé , lif, d'un corps étranger dont les parties font affemblées en dehors , attirées, diftribuées , & arrangées. IL lig. 30. Ce que j'ai remarqué moi-même parfai- tement , ///. ce que j'ai remarqué moi-même être par- faitement. Pag. 158, lig. 5. Eft celui, ///. n'eft celui. Pag. 161 , lig. 18. Et dépofés comme des œufs, /// & dépofés comme des femences. ^^g« 17» j lig* 2.8. Je crois qae, lif. je crois que. Pag. 177 , lig. 3. Il aura vu, ///. il aurait vu. JÀ. lig. 4- Il aura, remarqué , ///. Il auroit remarqué, Pag. 180 , lig. 13. Ou ténuité , ///. ou continuité. 16. lig. i8. Donc, lif dont. Pag. 18^, lig. i6. Ou que je n'aie fçu pas prendre, lif, ou que je n'aie pas fçu prendre. Pag. zoT , lig. 15. Comme vraimen: générarives , life^ comme vraiment générative. 'P^g" i-ù^ , lig. I. Elaftîque , izf. éltûnquc. Pag. X09 , lig. J. Et même fans , ///. & ians. IL lig. I 8. Total , iif. local. Ik lig. 30. Total 5 lif. local. Pag. iio , lig. 5-. Total , /// local. Pag. 144 , lig. i ï. Peut l'expliquer , lif. peut s*cxpliqtier. Ik lig. i6. Semblabe , lif. femblable. Pag. 24<î, lig. 2.8. En en ferrant, ///. en ferratft. Pag. 1 jo , lig. 3. Du pays , lif. de notre pays. NOUVELLES NOUVELLES RECHERCHES SUR LES ÊTRES MICROSCOPIQUES, ET SUR LA GÉNÉRATION DES CORPS ORGANISÉS» CHAPITRE PREMIER. État de la Queflioris Le fa„,e«xfyftà„e de ces forces, auxquelles leur étymologie grecque & fore ancienne a fait donner le nom de forces plajiiques , a été fi univerfellement combatru dans les Ecoles de la Phyfique moderne , qu'il fembloit ne devoir plus fe montrer nulle part j il y avoit d'autant plus lieu de le préfumer , que l'opinion des Ovipares ôc des Vivipares s'eil fait en Europe A L â Nouvelles Recherches un grand nombre de partifans parmi les PKyfî- ciens les plus célèbres & les plus fenfés. On en trouve une preuve fenfîble dans cette foule d'é- crits admirables , que nous ont lailTés les grands hommes qu'éclairoit l'expérience j leur but prin- cipal eft de nous montrer que toutes les fubftances vivantes naiiTent d'un œuf, qu'après avoir été relTerrées étroitement dans cette écorce , elles ne cherchent plus qu'à fe dégager & à f e développer fuccefïivement j enfin que c'eft par ce mécha- nifme que chacune d'elles paroît chargée du foin de maintenir & de propager fa propre efpece. Tel eft le fyftême adopté par les Savans, pour nous expliquer d'une manière fatisfaifante le grand Ouvrage de la Génération , fans être dans le cas de recourir aux forces plajliqucs ; ils les rejettent , ces forces , comme abfolument inu- tiles ôc inefficaces , indépendamment de Fobf-» curité qui en eft inféparable. Pour m.oi , je fuis fortement perfuadé qu'aujourd'hui même on les rejetteroit encore avec autant de répugnance que d'éloignement 5 & que le fyftême des Oi^i- pans fe feroit maintenu dans toute fa fplendeur àc tout fon luftre , fi deux Académiciens célè- bres , MM, de Needfiam & de Bufon , ne fe ^n&nt pas réunis pour le combattre par de nouveaux argumens i il femblè qu'ils aient voulu donner fur les Etres microfcopiques, ^ une féconde vie à cqs forces plafiiques qui étoienc dans l'oubli , & qu'ils aient formé le deflein de leur rendre leur premier éclat. Je conviens que l'on ne trouve nulle part dans leurs écrits le nom de force plafùque \ ils ne fe font fervis que de celui de force aBïve , ou vraiment végétatrice ; mais en pefant bien toutes leurs expreilîons , &c en faifant attention à l'emploi qu'ils donnent à cette force , il ell évident que c'eft au fonds le même que celui dont les Anciens avoient chargé \qs forces plafliques ^ 6c que nos deux Phyiiciens modernes ne font que prêter un nouveau nom à une opinion ancienne & connue. Il y a vraiment en cela un art admirable ; c'étoic fans doute pour ne point trop effrayer les Phy- ficiens qui pencKoient déjà pour rejetter ces fortes de forces : mais nos Académiciens pou- voient bien penfer que l'on ne manqueroit pas de s'appercevoir de la fupercherie (i) à mefure que l'on avanceroir dans la ledure de l'Ouvrage i malgré cela ils fe font perf.îadé que le Ledeur , déjà ébranlé Se comme entraîné par la force du raifonnement , leur feroit aifément grâce , 6^ qu'a la vue des expériences citées en faveur de ces forces , on ne tarderoit pas à revenir de réloignement que l'on a pour elles. Alfurémenc , il faut convenir que ces deu?^ Aij ^ Nouvelles Recherches grands hommes ont bien faiiî tous les moyens imaginables d'établir leur opinion , & de fe concilier le fuffrage des Philofophes de nos jours. Ces formes fe font embellies fous leur main : ils les ont ornées des obfervations les plus fages & des expériences les plus délicates. Les voilà donc portées à un tel point que leur exiftence , s'il eft vrai qu elles en aient une , fera bien moins due à leurs premiers Inventeurs , qu'à ces deux hommes habiles. Pour parvenir à prouver qu il y a vraiment dans la matière une force produdrice pour ces êtres organifés , nos deux Auteurs commencent par jetter un coup d'œii fur le règne végétal & fur le règne animal. Ces changemens étonnans , ces formes variées , &: ces combinaifons étranges que M. di Buffon a apperçues dans le petit ver fpermatique , il les attribue à une force inté- rieure qu'il fait agir fur chaque point de la matière , & qui produit la variété infinie des molécules organiques. C'eil dans (on Hiftoire Naturelle des Animaux qu'il s'eil étendu fort au long fur cette matierco M. de Needham admet au(îi cette force inté- rieure , &: paffe en revue toutes les différentes formes que prennent les animalcules microf- copiques , qui paroiiTênc dans les infufions des fur les Etres micro f ce piques: f végétaux. Comme mon principal d elfe in , dans cet Ouvrage , eCt de ni'étendre fur l'opinion de cet Auteur, je crois, que pour répandre plus de jour fur la queftion , il feroit fort à propos de commencer par donner un précis clair & /impie du fyftême qu'il s'eft fait fur la génération des corps vivans. M. de Needham a parlé de cet étonnant phé- nomène avec beaucoup de clarté. Il commence par un examen des alimens dont fe fervent les animaux. Ce font en erfet les alimens qui , par leur fubftance , fournifTent à l'animal de quoi fe ilévelopper & s'agrandir : notre Auteur en in- fère 5 comme une chofe fort probable , que lorf- que les membres du corps fe font une fois unis pour le développement de la matière qui y ett alors fort abondante , une efpece de magiftère la purifie fortement , la redlifie , convertit {qs parties les plus déliées en une fubftance fémi- nale , & lui donne la faculté d'en produire de femblables dans fon efpece. Ces conduits fécré- toires 5 ces canaux, ces vafes préparatoires que l'on remarque dans les animaux , lui paroifTenc très-bien combinés , & d'une proportion bien mefurée pour digérer , filtrer , & difpofer les principes qui doivent produire ce nombre infini d'individus que l'on voie naître chaque jour. Le Aiij é Mou V elles Rec/ierches moment, de leur produdion , e(l celui où k liqueur fécondante du mâle ayant été portée dans la matrice d'un autre être de fon efpece , y a rencontré la liqueur féminale de la femelle : toutes deux alors s'uniffent , fe confondent à l'aide d'une force active , produdkrlce , ou , com- me on l'appelle , végétatrice , 3c s'arrangent d'une manière admirabk pour donner la forme convenable à un petit corps organifé de confor- me à leur efpece. Tout cela fe fait de façon <5u'il ne refte plus à cet individu que d'étendre êc de développer enfuite fes organes. M. de NeeJham attribue donc tout le mécha- nifme de la génération des êtres vivans à une force végétatrice qu'il dit exifter vraiment dans la nature , Se qu'il préfente comme toujours prête à former , dans les circonftances , le tiffu des corps organifés ; il a même fait un fort -grand Traité pour établir cette opinion par des obfervarions microfcopiques fur différen- tes fubftances , prifes dans le règne végétal êc le règne animal. D'abord il a fait infufer xes fubdances dans de l'eau commune , avant de les préfenter â la lentille d'un bon mi- crofcope ; au bout d'un certain tems ces petits rorps ont pris une nouvelle difpofîtion , un nouvel arrangement de parties , ils ont paru fur les Etres microfcopiquesl 7 comme aiuanc de globules , ou de petites maffes , que l'on a vues peu- à peu fe gonfler , fe mou- voir , s'agiter , donner des fîgnes de vie , non équivoques \ enfin ils font devenus évidemment des animalcules réels , qui fe promenoient libre- ment dans la liqueur. Lorfque l'on a tenu plus long-tems c^s fubftances en infufion , leur nom- bre a augmenté prodigieufement , & fouvent la goutte d'eau a préfenté à Fœil un peuple in- nombrable. Ce n'eft pas tout j on y a diftingué les filamens de la végétation , ou des ramifica- tions bien formées , qui tantôt relTembloient 1 un collier de perles & montroient une efpece de coralloïde microfcopique , tantôt paroiffoienc comme tuméfiées dans différens points de leur longueur , les unes inégales , les autres entiè- rement femblables , mais toutes ordinairement ' pourvues d'un principe intérieur de mouve- ment , par lequel celles-ci fe portoient d'un lieu à un autre , tandis que celles-là ne faifoient que tourner circulairement & s'agiter fur elles- mêmes. Or 5 ces changemens de forme qu'éprouve la matière , c^s mouvemens qui fe font dans une partie d'elle-même ^ bc que l'on démontre clairement , ne pouvant appartenir , ni à une fermentation inteftine du fluide , ni à tous^ Aiv ^ Nouvelles Recherches autre caufe adventice , font fans doute Teffet d'une force intérieure végétatrice , qui pénètre intimement toutes les fibres & tous les points de la matière , la détermine à fe modeler fur à^s formes nouvelles , à végéter & à recevoir un principe de mouvement & de vie. Afin de pouvoir mieux nous convaincre que ces zoofites, ou plantes animales, ne rirent point leur origine des œufs qui auroient pu être dé- pofés dans la liqueur par quelque infede étran- ger 3 M. de Ncedham a porté le fcrupule jufqu^à fermer , avec la plus grande exaditude , l'orifice des vafes dont il s'eft fervi pour l'expérience ; èc pour ne rien laifTer abfolument a defirer , il a employé le fuc à^s viandes auxquelles il avoir fait fubir la plus grande adion du feu. AiTurément la ftructure délicate de ces petites machines que l'on fuppofe renfermées dans les prétendus œufs, auroit dû alors fouffrir quelque déran- gement , & il femble qu'on ne devoit point s'attendre à les voir naître j cependant , quelques jours après , les animalcules ont paru à l'ordi- naire. Voilà le fydême de M. de Ncedham , fyflême qui a beaucoup de conformité avec celui de M. de Buffon, Mais les obfervations qu*il a faites 6c celles qu'il cite pour appuyer fon opinion 5 fur les Etres micro fcopiques , 5 n'ont pas fnffi pour lui gagner tous les fuffrages. Il a déplu particulièrement à un Ecrivain Fran- çois 3 dont l'Ouvrage a pour titre , Lettres à un Amériquain, Cependant les objections que fait cet Auteur anonyme , femblent moins annon- cer dans lui un defTein formé d'approfondir la matière, que l'envie de mettre en avant quelque queftion qui exerce nos Philofophes. Comme les obfervations & les expériences 5 faites à ce fujet y paroifTent donner plus de force & plus de vigueur à l'opinion de M. de Needham , je penfe que pour être en état de porter fur cette ma- tière un jugement aiïuré , on devroit en faire un nouvel examen. Si les découvertes que l'on cite 5 fe trouvent conformes à la vérité , elles ne ferviront qu'à, donner un nouveau luftre à la réputation de notre admirable Phyficien : mais elles pourront au contraire porter des atteintes à fa gloire, il on les trouve faufTes, incertaines, ou du moins équivoques. Le Critique , fans fe jetter dans des détails , s'eft Contenté de répandre des doutes fur quel- ques-uns des faits , &: d'expliquer à fa manière ceux dont i] a bien voulu admettre la poiîibi- lité. Dans plufieurs villes d'Italie , on a vu àcs partis formés contre l'opinion de M. de Needham-j mais je ne crois pas que perfonne ait jamais Xq Nouvelles Recherches fongé à l'examiner par la voie de l'expérience. Le nom de Tilluftre Anglois , & les cris qui fe font élevés de toutes parts , m'ont déterminé à cher- cher les moyens d'approfondir cette matière qui eft à la fois vafbe & relevée : la nature s'eft plu à la couvrir de fon voile refpedable , & dans tous les tems elle a excité l'admiration des hommes nés pour penfer , autant qu'elle a fça piquer leur curiofité. Voilà , £i j'ofe le dire , ce qui a donné un choc agréable à mes efprits , ôc a mis de Tardeur dans mes recherches. D'ailleurs l'amitié de M. de Needham eft devenue pour moi pn motif aflfez puifTant pour m'y engager : il m*a écrit a ce fujet les lettres les plus honnêtes^ 6r m'a beaucoup invité à foumettre à l'expé- rience fon fyftême , qu'il convient lui-même avoir befoin de quelques éclaircifTemens. J'ai regardé cette invitation , plutôt comme un effet de fa politeiïe ordinaire , que comme un befoin de la chofe. D'autres Philofophes à qui la quef- tion a paru de même épineufe & obfcure , ont auflî fait tous leurs efforts pour me porter à cette entreprife. Ce n'eft pas que je me croye aflez de lumières pour répandre fur cet objet toute la clarté & toute l'évidence poiTibles : on ne m,e trouvera pas cette préfompcion ridicule : mais fiatté de l'honneur de marquer mon dévouement fur les Etres microfcopiques . i\ a un auffi grand homme que M. de Necdham , je donnerai volontiers au public les petites parti- cularités que j'ai obfervées fur cette matière : j'y ajouterai quelquefois , &: autant que le fujet pourra le comporter , les réflexions qui me pa- roîtront les plus ja{les. Sur-tout je me tiendrai bien en garde contre cet efprit de fyftème qui ne fait que conduire a l'erreur : mon guide fera celui qui mené à la vérité» C H A P I T R E I I. Defcription de la Figure de rinjlincl (^ des loïx que fuivent les petits Corps que F on apperçoïî dans les injujions ^ d'où Von infère qu'il y a dans eux un vrai principe d' animalité * V^'est une chofe affez connue depuis fort long- tems , que fi l'on fait infufer dans de l'eau des graines , des herbes , ou toute autre fubftance végétale ^ cette eau paroît fe charger d'une in- :foit-é de petits anitnaux. L'inftinâ: ^ les loix , & le caradere fpécifique de ces individus font toujours un phénomène qui n'a point encore été '12 nouvelles Reckerches approfonai par nos Philofophes. Cent qm eît ont fait une étude particulière , êc à qui nous devons route forte de confiance ^ étoient ce- pendant bien en état de nous donner une def- cription exade Se complette de ces animalcules ^ mais ils fe font contentés de nous annoncer am- plement leur exiftence : on diroit même qu'ils en ont fait une efpece de myftere. D'autres , plus occupés du foin d'exagérer leurs obferva-^ tions 6c de les embellir , que de nous en rendre compte avec une certaine précifîon , ne nous ont donné que des chofes déguifées , infidèles ôc qui blefTent la délicateffe de la Phiîofophie. Pour moi, dans le defTein où je fuis de m'éten- dre fort au long fur cette petite race d'animaux ^ je veux y apporter toute l'exaâritude polîible ^ ôc expofer d'une manière hiftorique leur figure , leur inftinct 3c les loix qu'ils fuivent entr'euîa Que l'on n'attende point de moi une deferip- tion détaillée de tout ce que j'ai obfervé pendant le cours de plus de crois ans de travail : ce feroit donner au public un Ouvrage trop volumineux. Je ferai un choix du petit nombre d'obferva- tions que je croirai les plus propres à mettre dans le plus grand jour les matières que je veux traiter. Les végétaux dont les infufions montrent a fur les Etres micro fcopîques* i^ nos yeux ces petits animaux vivans , font la grai- ne (i) de citrouille, celles de petite camomille, de patience , de bled de Turquie , de grain & de froment ; & pour commencer par la pre- mière 3 voici quel eft l'mftindt ôc le caradere des animalcules que j'y apperçois. On les voit s'élancer en tout fens ; décrire dans l'eau , tan- tôt une ligne droite , tantôt une ligne oblique ; quelquefois fe mouvoir circulairement ; former comme des efpeces de cernes ôc de pirouettes en tournant fur eux-mêmes , ôc fe jetter tous avec une égale avidité fur les petits morceaux de matière qu'ils rencontrent dans leur route. Au commencement de l'infufion la liqueur n'eft pas fort chargée de matière étrangère : mais peu de tems après elle en paroît toute rem- plie , parce que les petites particules des graines fe détachent à mefure que l'eau les pénètre : p8u-à-peu cette eau devient trouble , ôc prend , même à l'œil nud , une couleur cendrée. A l'aide du microfcope , cette eau montre une infinité de petits corps opaques Ôc de figure irré- guliere , qui errent ça & là , ôc dont le tilTu des fibres prend , dans plufieurs d'entr'eux , la figure d'une gaze légère. Si quelques-uns fe mettent à la pourfuite de leurs camarades , bientôt ils les atteignent par uno marche vive , s'arrêtent , t^ Nouvelles Recherches tournent autour d'eux, & favent faifir une ou- verture pour pénétrer dans le cifTu de leur peau. Dans une petite goutte de liqueur , qui deve- noit une mer vafte pour ces êtres animés , on découvroit comme des efpeces d'ifles flottantes , autour defquelles ils paroilToient s'attrouper. A en juger par l'œil , tous me femblerent ne point avoir de pieds : la forme extérieure de leur corps approchoit beaucoup de l'ovale, Fig, i. PL i. fi l'on en excepte une extrémité qui fe terminoit en un bec crochu, ou pendant , dont ils fe fervoient toujours pour aller en avant, (i) Une tranfparence éclatante me procuroit les m.oyens de porter la vue au-dedans d'eux-mêmes, autant qu'il étoic poffible , ôc d'y diftinguer leurs vifceres. Ces vifceres ne font qu'un amas de boules , ou de véficules rondes & diaphanes que la nature n'a pas arrangées toutes d'une manière égale. Dans les uns , c'ed: une couronne qui s'étend le long des extrémités intérieures du corps , ôc qui laiiTe au milieu un vuide elliptique. Dans d'autres , ce font des véficules femées confufément fur un même plan , tandis que dans pluiieurs d'en- tr'eux 5 elles paroiifent amoncelées Se comme unies enfemble. Chacun de ces animaux a une pellicule diaphane ôc légère, deftinée à lui fervir d'enveloppe ôc à déterminer le contour entier fur les Etres microfcopiques: ly de fon corps. Leur forme femble plate & comme ccrafée : elle a même un tranchant aigu que j'ai diftingué aifément dans les différens mouvemens que je leur ai vus faire. Tels font les animalcules que m'a donnés Tin- fufion de graine de citrouille. Souvent la liqueur en contenoit avec ceux-ci d'autres plus petits, dont les uns avoient une figure ronde ôc nageoienc comme les premiers , fans plier leurs membres d'une manière fenfible : d'autres avoient une taille longue & déliée , & s'agitoient beaucoup pour prendre la nage du ferpent. Fig, 2, PL 1. Quant à ceux que j'ai découverts dans l'in- fufion de petite camomille , ils avoient en partie les caraderes des plus grands d'entre ceux que l'on trouve dans la citrouille , & en difFéroienc de même par d'autres caraderes : leur bec ne fè rerminoit pas en pointe comme le leur , mais plutôt en rond, femblable à-peu-près par l'extré- mité, à celui d'un canard ou d'une oie. Fig, ^,PLi. Non-feulement leur corps avoir plus de volume, mais il étoit encore parfemé d'une plus grande quantité de globules tranfparens : quelques-uns mêrne en étoient entièrement couverts. (3) Rien de plus curieux que leur manière de fe mou- voir : tantôt c'eft une marche précipitée en ligne droite , fans courber le contour du corps : taia- 1^ Nouvelles Recherches tôt c'eft un mouvement double : avec l'un i!s fe portent diredement en avant : avec l'autre ils tournent fur eux-mêmes , comme fur un centre. Telle une boule d'ivoire , prefTée adroitement avec le bout du doigt , forme un cercle autour d'elle-même fur un plan liorifontal. Dans les différentes fituations que prenoient ces petits animaux , j'ai eu occafion de m'ap- percevoir qu'ils étoient encore plus gros 6^ plus vigoureux que ceux qui s'étoient préfentés à mes yeux les premiers : aufîî leur ai-je trouvé moins de diaphanéité j & comme il me reftoit quel- que foupçon que cela pouvoit auiîi provenir de la nature du fluide qui paroiifoit tant foit peu noirâtre ^ pour m'en éclaircir , j'ai jette defTus une petite goutte d'eau claire \ mais bientôt les animaux qui s'y font plon.gés , m'ont fait com- prendre 5 par leur peu de tranfparence , que je m'étois bien trompé dans mes conjeârures. . Ceux-ci 5 ainfi que les autres , avoient le fin- gulier inftindl de fe réunir & de fe raffembler vers une matière féminale difperfée ça & là dans plulieurs endroits de l'infuiionj Flg, 4. PL /. de manière qu'ils tournoient tout au tour, & y fautil- loient comme dans un endroit où ils fe plaifoienc beaucoup , fans paroître nullement fe foncier de fe tranfporter ailleurs. J'ai donné à la liqueur des fur les Etres micro fcopi^ue^ . 'vf des fecouiTes légères , & j'ai vu très-fenfiblement que nos petits animaux n'alloient dans cet endroit que pour y prendre quelques fucs nourriciers ^ ou toute autre fubilance. Mais jettons encore un petit coup d'œil fur ce que j'ai apperçu dans l'infufion de patience. Outre quelques animalcules , aifez rares néan- moins , auxquels j'ai trouvé une efpece de figure régulière 5 & qui refTembloient afTez à ceux de la camomille , il s'y en eft rencontré qui avoienc environ un tiers de moins que ceux de la graine de citrouille , ils étoient de la forme d'un ovale un peu allongé , Se rétrécis dans les deux extré- mités oppofées. Leur corps étoit rempli A^^ yéficules ordinaires , fort tranfparentes , & leur couleur approchoit , beaucoup de celle de la nacre de perle , mais avec des nuances variées , fuivant la différente intenfité de la lumière. J'ai obfervé que leur vélocité s'accroiifoit confidé- xablement avec le tems , de manière qu'après avoir oris au commencement une marche tran- quille , (4) fans cependant jamais s'arrêter , l'ac- célération de leur courfe fe portoit enfuite jufqu'à la rapidité , & étoit quelquefois interroïnpue par des intervalles de rallentilTement. On ne les voyoit gueres s'arrêter fur le champ : mais après quelques inftans de lenteur, ils reprenoient leuc B îf Nouvelles Recherches première vîteffe , & Ton peut dire que lorfqu'ik fe remuoient , ils n'avoient point d'autre façon de marcher (5) que de courir. îi nous refte maintenant à faire mention des trois 3 ou plutôt des deux dernières infufions , puifque Ton mêla le bled de Turquie avec le froment dans un même verre. Ceci me donna en même tems trois efpeces d'animaux qui avoienc en partie pour moi tout l'air de la nouveauté. Quelques-uns étoient ronds , Se en même tems très -petits ; communément on en voyoit qui ctoient ovales & un peu plus forts j les plus grands de tous avoient le corps allongé : la mar- che des premiers étoit lente & pénible , tandis que les féconds ^ à l'aide d'un fautillement léger ^ fe tranfportoient par- tout où bon leur fembloit, ^à- peu -près comme ces infeétes que l'on voit fe courber en forme d'arc , pour s'élancer d'un lieu à un autre. Leur marche avoir cela de par- ticulier 5 que tantôt elle étoit très - accélérée , tantôt fort lente. J'ai eu le plaifir de remarquer qu'après avoir marché un peu , fans fe plier en aucune manière, ils faifoient de tems en tems volte-face , & reprenoient leur route comme auparavant. Le dedaus de leur corps étoit par- femé des globules ordinaires, mais bien plus petits que les autres, plus brillans 6c comme fur les Etres microfcôpiques^i tp argentins. La partie antérieure qui , fuivant les différentes réverbérations de la lumière , fe montroit tantôt éclatante , tantôt obfcure, avoic une forme ronde , Fig, 6, PL 2. à-peu-près comme une tète d'épingle ôc un peu plus large que le rede du corps : leur volume s'agrandiflfoit , avec une jude proportion , jufqu'à un point marqué; enfuite fe rétreciffant de nouveau ôc par degrés ^ il fe terminoit en une pointe très-fine. En fixant l'œil avec une certaine attention , on diftinguoit en dedans un petit canal, ou tube blanc, qui s'étendoit dans toute leur longueur. J'ai foup«* çonné que ce canal pouvoir être deftiné che^ eux à contenir les alimens , parce qu'il reffemble fort à celui que l'on trouve dans les vers ronds des hommes & des veaux. Venons aux animaux que donne le bled : mais avant que d'en parler , que Ton me permette de placer ici une expérience que j'ai faite fur eux & fur ceux de plufieurs autres infufîons. Nous voyons , autant qull eft permis à l'œil' d'en juger , que la (Iruéture méchanique de leut corps confifte dans un amas de boules ou glo- bules brillans, revêtus en dehors d'une pellicule mince Se tranfparente. Pour foumettre ces glo- bules myftérieux à un examen plus rigide , il me vint dans i'efprit de leur arracher 5 ou de â5 Nouvelles Recherches déchirer cette même peîUcule qui leur fert d'en- veloppe 5 de manière que je pufTe avoir la liberté de les confidérer féparément dépouillés & mis à nud. L'urine fut le moyen qui me parut le plus propre pour y parvenir. J'en jettai quel- ques gouttes fur Peau de l'infuiion. A l'inftant mes animaux devinrent mous & appéfantis : ils cefTerent de courir dans la liqueur , & tous péri- rent [6) avec des convuliîons étranges. Peu après leur enveloppe commença infenliblement à dif- paroître , & fe trouva à la fin entièrement diflbute. Alors chaque animal ne préfenta plus qu'un amas de petits grains fortis de leur goulTe 6c que l'on diftinguoit avec plus de clarté , quoi- que leur extrême ténuité dérobât entièrement au microfcope le tiffu intérieur de leurs parties. Ce phénomène s'eft montré dans tous les ani- maux fur lefquels j'ai fait cette expérience , mais il s'eft manifefté d'une manière bien plus fen- iîble dans ceux qui avoient plus de volume. J'ai donc employé l'épreuve de l'utine pour les plus grands d'entre les animaux que j'avois vus dans l'infufion du bled , & j'ai été très - attentif à bien faifir ce qui alloit fe pafler : j'ai découvert que les animaux , réduits alors au point* d'ex- pirer , rapprochoient les deux extrémités oppo- £éQs 5 àc formoient une ligne circulaire j les uns fur les Etres microfcopiques, 2Î fe repHoient fur eux - mêmes , & fe tenoîene tout récoquillés j les autres devenoient fecs & maigres j & au milieu de toutes ces métamor- phofes , j'ai vu leur volume s'élargir & prendre à-peu-près la figure d'une feuille fort mince. Mais une découverte que je regarde comme nouvelle , cft cette couronne de filets, Fig. 6» PL z, ou de petits points allongés qui bordoit , comme un ourlet 5 leur circonférence extérieure. Ces petits points divergoient entr'eux à mefure qu'ils s'é- loignoient , femblables à des rayons qui vont du centre à la circonférence , & chacun avoir un mouvement fort rapide , qui occafionnoit une légère agitation dans le fluide j & ce mou- vement , dont ils étoient pourvus , ne duroit fouvent dans eux qu'autant que les fels corro- ûfs de l'urine avoient dérangé l'organifation .naturelle de ranimai. C'eft à l'aide de ces filamens que j'ai diftin- gué fort aifément tous ces animaux , lorfqu'ils voyageoient dans le fluide , comme dans leur élément naturel ; car fans ce fecours , la rapi- dité de leur courfe ne m'auroit pas permis de les obferver. Que ces filamens falTent ici les fondions de pieds pour aider ces animaux à marcher , ou qu'ils foient deftinés à d'autres ufages 5 c'eft ce que je n'ofe pas décider , ôc qus Biij 22 Nouvelles R.echerches l'expérience ne m'a pas encore permis de connoî- tre. Je comprends moins encore de quelle utilité peuvent être ces petites boules , ou globules bril- lans 3 dont la nature a pourvu abondamment toute la race de ces animalcules microfcopiques. Les uns 6c les autres ont été fans doute deftinés à quelque chofe de grand , puifqu ils font l'ou- vrage de la nature , ou plutôt de Dieu même , qui n'opère que des prodiges \ mais quelle que foit cette deftination ^ je conviens ingénuement qu'elle m'efc inconnue. J'abandonne cqizq ma- tière à ces génies profonds qui ont pénétré plus avant que moi , dans Fétude de la nature. En voilà aCTez pour ce qui concerne la forme & le méchanifme des organes de nos animaux microfcopiques. Je veux actuellement ajouter quelque chofe à ce que j'ai dit de leur inftinéb ^ de leurs ufages ^ afin de pouvoir en tirer les çonféquences qui me paroîtront les plus juftes , ^ terminer par-lâ ce Chapitre. J'ai dit que le propre de ces animaux étoit de s'élancer avec avidité fur les petites parcelles qui fe détachent lentement des femences dans les infuiîons. Mais on remarque outre cela une particularité qui n'eft pas à négliger : c'efl que ^es animaux favent fe détourner avec beaucoup d'adreife des obftacîes qu'ils rencontrent ^ 6c fur les Etres microfcopîquesl 2.f même s'éviter entr'eux. J'en ai va des centai- nes 5 renfermés dans le plus petit efpacs , fe mouvoir à l'ordinaire , & ne jamais fe heurter l'un l'autre en marchant. Souvent même il leur arrivoit de changer brufquement de diredion , ou d'en prendre une diamétralement oppofée à celle qu'ils avoient prife d'abord ; cependant je ne me fuis jamais apperçu , du moins d'une manière fenlîble , qu'ils aient été donner de la tète contre les corps qui fe trouvoient fur leur route. J'ai plié la petite lame de verre qui fou- tient la goutte d'eau de l'infufion , afin de faire defcendre la liqueur dans cette courbure j & je les ai vus alors defcendre vers le fond , mais fans être plus gênés dans leurs mouvemens que les poiflbns qui nagent contre le courant de l'eau. Lorfque la petite goutte commençoit à dimi- nuer, ils ne manquoient pas alors de fe retirer dans les endroits les plus profonds , où l'eau avoir moins baifTc par la diiîlpation j ii elle per- doit un peu plus , on les voyoit tous fixés & attachés a la lame de verre , dans la partie où l'ex- ficcation leur ôtoit la liberté de fe mquvoir dans le fluide. Lorfque la liqueur eft fur le point de s'évaporer entièrement, on a beaucoup de plaifîr à voir ces petits êtres ^ & fur -tout les pUis, Biv à^ Nouvelles Recherches robuHes d'entr'eux ^ fe tourmenter , faire des culbutes far la tète , s'agiter en rond , rallentir leur agitation par degrés , & enfin , fe trouvant à fec 3 s'arrêter fur le champ & expirer. On a beau , après cela, leur donner une nouvelle eau, elle ne les rappelle point à la vie , quoiqu'on les y laifle plongis pendant quelques heures , ou même pendant plufieurs jours. 11 eft vrai néan* moins que pour qu'ils ne puiffent plus fe rani- mer 5 il faut qu'ils aient été abandonnés à Çqc pendant un certain tems ; fans cela il arriveroit que 5 comme il refte toujours dans eux quelques légères étincelles de vie , une liqueur , amie de leur conftitution , leur donneroit des forées & pourroit les faire revivre. Je dois avertir ici que je me fuis d'autant plus volontiers appliqué a cette recherche , que je m'y fentois porté par l'autorité de M. de Ne-edham qui , outre ces petits animaux ordinaires , a vii dans la liqueur cert-ains filets ou fibres allongées , qui refîemblent à des anguilles, autant par leur longueur, que par les difFérens plis & replis de leur corps. Lorfque le fluide fe delféchoit , ces anguilles s'agitoient & fe rouloient far elles - mèm.es. Leur rendoit- il une goutte d'eau ? elles reprenoient leur pre- mier mouvement. Ainfi il pouvoit les faire périr ou revivre à fon gré , en fubfïituaRt une fur les Etres microfcoplquesl 25 goutte de liqueur à celle qui s'étoit évaporée. Des expériences réitérées m'ont appris qu'il ne faut point confondre nos petits animaux av^c ces anguilles; celles-ci ne font vraiment que des filets allongés, (7) & mis en mouvement par le fluide qui les pénétre : mais ce mouvement eft aveugle & irrégulier, & en conféquence il n'a rien de commun avec celui de nos animaux. Je pourrois ajouter les autres propriétés qui fe rencontrent dans ceux-ci , & qui ne fe trouvent point du tout dans ceux-là. On devroit , je crois , conclure de toutes les obfervations que j'ai faites jufqu'ici , que les mouvemens ordinaires de nos animalcules aqua- tiques ne font point purement méchaniques , mais vraiment réguliers , produits par un prin- cipe intérieur & fpontané, & qu'il faut placer ces êtres dans la clafTe des animaux vivans , non pas apurement d'une manière im.propre &: figurée y mais en parlant rigoureufernent & dans le vrai. . En effet , cette manière de s'obferver avec l'œil y de becqueter doucement les parcelles àQs végétaux difperfés dans l'infuiion , de fe réunir lorfque le fluide fe delféche , de s'atrouper dans les endroits où l'évaporation eft plus lente , de paffer du repas à un mouvement rapide , fans %(i Nouvelles Recherches Y être déterminés par aucune impulfion étran-^ gère , de nager contre l'effort du courant , de favoir adroitement éviter les obflacies 5c s'éviter eux-mêmes en marchant , enfin cette faculté de changer brufquement de diredion Se d'en pren- dre même une toute oppofée , font autant de fignes évidens & inconteilables d'un tel prin- cipe. (8) CHAPITRE II L Moyens dont fe fen M, de Buffon pour prouver que ces Etres nom pas un vrai principe d'animalité, Réponfe qu'on lui fait* jM.» de Buffon veut bien convenir que ct% petits corps, que montrent les infufions des végétaux, ont un principe adif & régulier : malgré cela il refufe conftamment de les mettre au rang à^t animaux : il aime mieux créer pour eux une efpece , une clafTe qui leur eft propre , 6c qui diffère de toutes celles dans lefquelles nous ren- fermons les êtres animés. Cette clafTe qui , à la rig.ieur , n'appartient point au règne animal 5 devroit donc être placée dans le règne végétal j. fur les Etres microfcopiques. '27 mais M. de. Buffon lui fait tenir le milieu entre l'un & l'autre , il appuie fon fentiment fur les obfervations les plus délicates & les plus exactes qu il a faites fur les vers fpermariques. Les Natu- raliftes étoient généralement convenus entr'eux de leur donner le principe de l'animalité , & ils le leur actribuoient , tant à caufe de la propriété qu'ils ont de fe tranfporter d'un lieu à un autre ^ qu'à caufe de cette queue qui les décore & qui leur fert à fendre l'eau. Mais ces motifs ne pa-»- roiflent point affez concluans à M. de Buffon j il penfe même que cette queue 6c ce mouve- ment 5 il l'on y fait bien attention , doivent fervir à prouver tout le contraire. Pour ce qui concerne le mouvement , fi Ton prérendoit s'en fervir pour trouver dans ces corps les propriétés des animaux , la raifon pour- roit exiger , dit-il , qu'il fût femblable à celui des autres animaux que nous voyons marcher tantôt lentement , tantôt d'un pas précipité , qui s'arrêtent , qui fe repofent. Les corps fperma- tiques au contraire , continue l'Auteur françois , ne font jamais en repos j ils marchent toujours d'un pas égal , & quand ils s'arrêtent , ils s'ar- rêtent pour toujours. Leur queue même eft un titre qui dépofe contr'eux ^ puifqu'elle n'en a que les dehoi:s trompeurs. Dans le vrai 5 c'eft ^g Nouvelles Kecherches un fimple filet auquel un corps fe trouve atta- ché 5 & dont cQt être fe débarraife comme d'un ornement étranger à fon individu , lorfqu'il en a fait ufage pendant un certain tems. Mais voici une raifon plus forte encore : les animaux ^ de quelque efpece qu'ils foient , ont les organes diftinds & une forme confiante : pour- quoi dans ces êtres fpermatiques ne voit-on pas cette diftindion des organes? Pourquoi leur for- me varie-t-elle à chaque inftant ? Enfin M. dt Buffon 2l obfervc que ces vers ne foutiennent pas le plus léger degré de chaleur au cependant on n'ignore pas qu'il y; en a auiîi un fort grand nombre qui échappent à ce danger ^ ils fe mettent par tas dans de petits trous , ou dans ûqs endroits écartés , de là, dans le repos & Tinadlion, ils attendent que la douceur de la faifon les invite à fortir des bras du fommeii & de i'obfcurité , pour jouir de la chaleur douce que le printems a répandue dans l'air. Les chryfalides , par exemple , qui renferment les organes délicats d'un animal qui doit un jour prendre place parmi les infecbes volans, les chryfalides, dis- je , s'attachent aux murs des maifons vers la fin de l'automne , ou aux branches à^s arbres , &c s'y confervent pen- dant tout le cours de l'hiver. Je m'en fuis con- vaincu moi-même par celles qui nous donnent le papillon, Souveait j'en ai détaché de delTus une fur les Etres microfcopiques. 33 une muraille qui étoit expofée aux vents du nord j je les ai confervées dans une bocte , 6c j'ai vu qu'aux approches du printems , il en for- coic un papillon blanc , vif & animé. M. de Reawnur , ce François qui a fait tant d'honneur à fa patrie par fes lumières , rapporte que ces mêmes chryfalides ne périffent pas dans un froid qui feroit à 16 degrés au-deifous du terme de la glace \ cependant on fçait que ces infedbe^ n'ont aucune enveloppe qui les mette à Tabrî des injures de l'air , ils font toujours nuds &: fans armure. La même chofe arrive à ces che- nilles qui ne bravent l'hiver que pour dépouiller nos arbres de l'ornement de leurs feuilles , de dévorer les fruits de nos jardins. Vers la fin du mois de Février , je mêlai enfemble de la glace pilée & du fel marin , dc je plongeai dans ce mélange un thermomètre dont la liqueur defcendit prefque à un degré au-delTous du terme où étoit le froid en 1705?» Je mis enfuite à côté du thermomètre un tube de verre qui n'étoic ouvert que par la partie fupérieure , & qui renfermoit fept à huit de ces chenilles : elles y refterent environ une de- mi-heure : lorfqu'on les retira , je crus vérita- blement les trouver mortes , vu la rigueur du froid : mais iîtôt qu'elles fentirent la chaleur du C ^^ Nouvelles Kecherches feu 5 on les vit fe ranimer par degrés , & don- ner comme auparavant àts fîgnes de vie. Cette expérience ne me fufHfant pas, je réfolus le jour fuivant de foumettre mes chenilles à un froid encore plus rigoureux \ je pris du fel gemme avec de la glace , mes chenilles foutinrent par- faitement cette nouvelle épreuve. On peut rapporter à cela ce que raconte Lif- ter y il aifure avoir trouvé quelques-uns de ces infedes tellement endurcis par le froid , qu'en lés laifTant tomber fur le verre , ils faifoient un bruit tout femblable à celui qu'auroit occa- fionné un petit caillou , & cependant**ces che- nilles étoient encore vivantes , comme il eut bientôt occafîon de s'en appercevoir aux petits mouvemens qu'il leur vit faire , lorfqu'on les ranima par l'action d'un feu modéré. Mais outre ces animaux qui réfiilent au froid dans l'inaction & l'immobilité , nous en avons encore d'autres qui reviennent mieux à notre fujec y parce qu'ils féjournent dans l'eau , qu'ils s'y meuvent librement , & y courent avec vî- XQÏ^Q 5 même au milieu des rigueurs de l'hiver. Un jour je rompis un glaçon dans un fofTé ; c'étoit environ vers le milieu du mois de* Jan- vier 5 & la faifon étoit fort rigoureufe j je ne fongeois point du tout , dans ce moment , à fur les Etres micro fcopiquesl 3 y faire aucune expérience de Phyfique. Quel fut mon éconnement lorfque je vis une foule de petits animaux noirs qui faifoient là leur de- meure 5 &: qui 5 faifis de frayeur , fe mirent à courir , & à s'enfoncer dans l'eau ! 11 y avoic parmi eux quelques-uns de ces infedtes que nous appelions amphibies \ ils font de la groffeur d'un pignon ; leur couleur efc d'un cendré jaune 6c obfcur j leur bec eil: armé d'un aiguillon long & dangereux. Je me rappelle aufli qu'ayant un voyage à faire dans un chemin femé de cailloux , à la à^^cQ^n^ ^ts cimes inhabitables des Apennins de Rhége, je vis une fontaine qui étoit formée par des neiges fondues , & dont l'eau fe trou- voit prefque gelée , quoique nous fuiîions au commencement du mois d'Août ; elle prenoit fon cours par defTus des pierres avec lefquelles on avoir voulu la couvrir , 6c dans un endroit abfolument impénétrable aux rayons du foleil. 11 y avoit une quantité prodigieufe de vers de bois aquatiques ^ qui s'étoient fabriqués des de- meures flottantes dans des feuilles de hêtre de cette a£Freufe foret. Ce n'efl: donc pas une chofe fort extraordinaire de rencontrer différentes for- tes d'infedes qui font d'une trempe affez forte pour réfifter i toutes les rigueurs du froid , 6c Cij ^6 Nouvelles Recherches qui non -feulement s'y maintiennent en vie,; mais qui y confervent toute la liberté des fonc- tions animales , & le jeu des organes. On objede enfuira que les animaux des in- fufions cèdent trop aifément à un certain degré de la chaleur du feu , ou périffent par l'adion du foleil. Ne pas pouvoir foutenir l'adion du feu , eft une chofe qui , je crois , ne furprendra perfonne j mais il n'eft pas non plus fort éton- nant que CQ% animaux ne puiifent pas réfifter à celle du foleil , fur-tout lorfqu elle fe trouve auffî vive qu'elle l'efl quelquefois dans les gran- des chaleurs de l'été. La même chofe n'arrive- t-elle pas à plufieurs efpeces d'infedtes aquati- ques que l'on expofe pendant quelques heures à un foleil brûlant avec l'eau dans laquelle ils falfoient leur féjour ? du moins j'en ai fait plu- sieurs fois l'expérience. M. de Buffon ajoute que ces animaux changent de forme à chaque inftant : pour moi je n'ai rien remarqué de femblable dans les infuHons. Au contraire , j'ai vu qu'ils retiennent condam- ment la forme fous laquelle ils ont une fois commencé à paroître , foit qu'elle foit ronde , allongée ou ellipriqiie : feulement ils amplifient leur volume à la manière des autres animaux. Si l'on paffe enfuire a l'examen de leur queue 5 fur les Etres micro fcop'tques, '57 il y en a dans lefqiiels on n'en apperçoic aucun veftige , comme dans ceux qui font ovales , ou Il l'on voie une queue à ceux qui ont pris une ligure plus allongée , elle ne devient point dans eux un ornement qui leur foit abfolument étran- ger : il eft évident à l'œil feul , autant que par. le rétréciirement graduel de cette même queue , quelle eft dans ces animaux un alongemenc de leurs organes , &: que la nature l'a deftinée à. former le contour de leur corps , comme dans les anguilles du vinaigre \ audî la voit-on route; femée de petits globules au-dedans , ainfi que le refte du corps. Prétendre que cq.s animaux s'en débarralTent comme d'un poids inutile &: fuperflu 5 c'efl: ce que l'on n'a jamais vu j je dis jamais , & je peux .le prouver par une race d'a- iiimaux fort femblables que j'ai eu occalion d^examiner , 6c dont je veux faire la defcrip^ tion ; je la dois aux intérêts de la vérité , ^ a cette lîmplicité pure dont un Philofophe ne s'écarte jamais, lorfqu'il eft fans paffion & fans partialité. Dans le cours de l'hiver de ly^'j , on avoiç laifTé croître jufqu'â une certaine hauteur quel- ques légumes qui étoient dans des taffes pleines d'eau j l'air de la chambre avoir toujours , un certain degré de chaleur , afin que ces, plantes G iij ^S Nouvelles Recherches pufTent végéter , quoique dans une faifon qui leur eft contraire 5 & nous donner par-là les animaux microfcopiques : en effet , elles nous en fournirent régulièrement , & en abondance pendant un efpace de trois mois. Je les vifitois exaârement chaque jour. Le 1 1 Janvier , deux de ces infufions , dont l'une étoit de pois chi- elles 5 &; l'autre de haricots blancs , me donnè- rent un phénomène fingulier. Dans la première f apperçus , outre les animaux ordinaires , diffé- rens globules qui , a l'aide du microfcope , ne paroiifoient être que de la grolTeur d'un petit pois. C'étoient alors des animaux mixtes. Fig, y & 8. PL z. Une moitié de leur corps fe trouvoit engagée dans la matière des femences qui étoienc déjà dififoutes & corrompues , l'autre moitié en étoit débarraifée & fe plongeoir dans le fluide. On en voyoit fortir un fil brillant de très-délié. Dans les uns ce fil s'uniifoit, avec l'autre extré- mité, aux morceaux de matière, dans les autres il en étoit féparé. Sa longueur pouvoir être d'un travers de doigt , & fa diredion étoit toujours çn ligne droite. Ces globules ne paroifToient pas agités ; ils fe contraéloient infenfiblement 3c diminuoient leur volume , en fe repliant fur eux-mêmes; mais à mefure que la diminution fe fai&it ^ ils devexioient plus fombres de plus fur les Etres microfcoplques: 3p obfcurs. Pendant ce tems-là , ceux qui éroient encore adhérens aux morceaux de matière , à l'aide du petit fil , paroifToient s'en rapproclier par un mouvement affez prompt , & les tou- choient, de manière que toute la longueur du fil fe trouvoit fouvent prefque réduite à un point. Un moment après ces mêmes globules fe déve- ioppoient de nouveau , & s'allongeoient comme la première fois ; alors le globule attaché repre- noic feniiblement fon premier volume de fou ancienne immobilité : ce phénomène , que je n'ai plus rencontré depuis , fe renouvelloit agréa- blement au bout de quatre fécondes. Tandis qu'un fpedtacle auffi charmant me tenoit fixé fur le microfcope , deux des globules dont j'ai déjà fait mention , vinrent changer la fcène. Ils couroient librement dans toute l'é- tendue du fluide , traînant derrière eux ces filets en guife de queue. Lorfqu'ils vinrent à s'en dépouiller , on les trouva tout femblables aux autres animaux , foit que l'on confidérat la ftruc- ture de leurs organes , foit que l'on fit attention à l'adrefle avec laquelle ils fçavoient éviter les obftacles qui fe préfentoient devant eux , ou que Ton examinât cet inftind fingulier qui les porroit à s'élancer , avec une efpece de gourmandife , fur les more aux des matières végétales , & à faire Civ '0 Nouvelles Recherches tous ces tours & détours qui font propres aux autres animaux. Je n'ai point perdu de vue cette infuiîon pendant piufîeurs jours , & le réfultat a été qu'au bout d'une femaine la plus grande partie de ces globules s'étoit déjà débarraffée àes fils comme n'étant d'aucun ufage , & que ceux à qui ils reftoient encore , pouvoient courir avec une liberté entière dans le fluide , & fe porter par- tout où bon leur fembloit. L'infufion àes haricots blancs , où quelques animaux étoient nés, & d'autres corrompus, m'a donné un phénomène qui reflembloit en quelque façon à celui - ci ^ & qui avoit en même tems quelque différence fenîible. La liqueur contenoic un plus grand nombre de corps entaiTés , qui s'élargiifoient vers le milieu, Flg. ^, P^^ 3» ^ alloient en fe rétréciiTant vers les extrémités » dont une fe terminoic par une pointe très-mince. Ces pointes venoient fe perdre dans une plus grande , ôc repréfentoient comme des grouppes de fruits unis à une branche commune , de la- quelle ils tiroient leur nourriture. Ces corps , à rimitation des globules , fe rétréciiToient &: fe diktoient tour à tour , fans néanmoins fortir de leur place. Seulement quelques-uns d'entr'eux fe mirent en marche après le dixième jour, mais ï@ur pointe les avoit abandonnés, 3 ^ ils portoiçaç fur les Etres microfcoplques^ 41 tous les caractères des autres animaux. Les jours fuivans on en apperçuc facceffivenient plufieurs autres qui s'avançoient en fe détachant de leur compagnie. Il y avoir dans ceux-ci une parti- cularité bien remarquable , c'eft qu'après avoir fait une partie de la route , ils s'arrètoient de fe replioient tous , de manière que leur corps allongé prenoit une figure fphérique ; un mo- ment après ils reparoiffoient fous leur première forme , & continuoient leur voyage , qui étoit toujours interrompu par des intervalles que je crois dignes de notre curiofité. Malgré tous cQs traits de relTemblance & de conformité entre ces corps & les vers fperm.a- tiques , je me garderai bien de les confondre enfemble , & de vouloir leur trouver tous les caradteres évidens du principe d'animalité 3 donc j'ai parlé fur la fin du fécond Chapitre. Pour ne rien laififer à dcflrer dans cette quef- tion 5 & mettre ces preuves dans tout leur jour 5 je vais rapporter en peu de m.ots les rai- fons fur lefquelles M. de Buffon établit fou opinion , & en même tems y répondre (j). Ces prétendus vers fpermatiques , dit M. de Buffon 5 ne font pas de vrais animaux ; ils ont un mouvement tout- à- fait différent de celui des animaux j leur queue efl trompeufe bc polliche \ :5.2, Nouvelles Recherches leurs membres , privés d'organifation , changent Je forme à chaque inftant ; un léger degré de chaleur les fait mourir , & le froid le plus aigu n'agit point fur eux. Je réponds à cela qu'il eft faux que les petits corps qui nagent dans les infufions, ne foient pas doués d'un mouvement tout femblable à celui des animaux ; que la nature a mis dans leurs membres une organi- fation fenfîble , & une proportion exade , fans trop les foumettre à des changemens de fermes ; qu'ils partagent avec la plupart des infedes la faculté de fupporter le chaud & le froid , juf- qu'à un certain degré & non au-delà j qu'il n'y en a parmi eux qu'un très- petit nombre qui ait cette queue poftiche , & que ce petit nombre même porte avec foi tous les caractères de l'animalité dans la plus grande évidence. Il fuit donc de-là que , d'un côté , ces derniers diffé- rent eifentiellement des vers fpermatiques,, & que 5 de l'autre , on doit vraiment les placer au rang Aqs animaux. Mais 5 dira quelqu'un , pourquoi donc M. 4e Buffon , qui joint à la profondeur du génie tant de difcernement & tant de délicatefTe , a~t-il ran^é dans la même clalfe les animaux fpermatiques & ceux des infufions , s'il exifte ime différence réelle entre les uns & les autres ? fur les Etres microfcopiques. 4$ Si j'étois dans le cas de faire une réponfe à cette demande , je dirois volontiers que ce grand homme n'a écouté en cela que l'amour qu'il fe fentoit pour fon fyftême. Il lui importoit beau- coup d'établir dans la nature une nouvelle efpece d'êtres , auxquels il a donné le nom de molécules organiques. Ces molécules 5 il prétend qu'elles ne font ni Aqs animaux , ni des végétaux , mais qu'elles fe rencontrent en abondance dans les uns & dans les autres , & que c'eft de leur affemblage , & de leur défunion que réfultenc la produdion & la deftrudion de tout ce qui a quelque vie dans l'univers. S'agit-il de démontrer Texiftence de ces mo*- lécules dans les animaux ** leur fperme contient de prétendus vers , &: cela fuffit à M. de Buffon. Faut-il les faire appercevoir dans le règne végé- tal ? rien ne lui paroît plus propre à les mettre en évidence que cette foule immenfe de petits corps qui flottent dans les liqueurs où l'on a fait infufer les femences des végétaux. Si , lorf- qu'après avoir refufé les droits de l'animalité aux vers fpermatiques , M. de Buffon a voulu étendre cette conféquence jufque fur les petits corps des infuiions , il n'a fans doute confuké en cela que cette façon de raifonner , Ci connue parmi les Philofophes fous le nom d'analogie. ^4 Nouvelles Recherches Pour moi , je fuis vraiment fâché de voir que ce favant François ait donné tous fes foins à l'obfervation des vers fpermatiques, fans pref- que jamais jetter les yeux fur ce qui fe paffe dans les infufions , &: qu'il ait entièrement aban- donné cette occupation à M. de Needham , €omme il en convient lui-même. Cet admirable connoifTeur de la nature auroit pu nous don- ner d'excellentes obfervations fur les différences effentielles qui fe trouvent entre les uns & les autres de ces êtres , &: fe feroit bien gardé d établir entr'eux aucune analogie. On fçait généralement que l'analogie ne peut prêter quelque force au raifonnement que par le concours de deux chofes , que l'on déiireroit bien rencontrer dans une même efpece. Il faut que , connoiffant Tune , &: ne connoiifant point alTez l'autre , nous découvrions du moins , en- tr'elles , une certaine convenance établie fur plufieurs propriétés , afin que nous puiflions en inférer qu'elles s'accordent de même dans tou- tes les autres ; or , nous fommes fi éloignés de trouver ici cette correfpondance mutuelle entre les vers fpermatiques ^ & les vers des infufions , que les propriétés des uns font pref- que toutes oppofées aux propriétés des autres. . Je crois avoir démontrd fuiSfamment cette fur les Etres microfcopiquesi 4J vérité , & il fera aifé à chacun de s'en con- vaincre en préfentant l'œil au microfcope , 3c en examinant avec quelque attention ce qui fe pafTe dans les infusions. CHAPITRE IV, Si les dïfférens changemens que l'on remar-* que dans les infujîons ^ s'accordent avec le fyfiéme de M. de Needham, Xxpre's avoir fait un examen des différentes form.es , des marques caradériftiques & indivi- duelles que l'on voit dans les petits corps des infufions , & de ce principe d'animalité qui eft démontré par un ii grand nombre d'expériences , je dois maintenant faire mention de tout ce qui arrive aux animaux microfcopiques , & le com- parer avec l'opinion de M. de Nccdham , pour pefer , fans aucune prévention ^ les réfultats qui peuvent lui être favorables , indifférens ou con- traires. Il faut obferver que , pour parvenir à cette connoiîïànce , j'ai choiiî la faifon favorable du printems , & que j'ai fait macérer dans à^s vafes de verre , des femences de concombre 6c de citrouille , dépouillées de leur écorce 5 ainfi que 4^ Nouvelles Recherches des germes de pêcher &: d'amandes ameres que l'on avoir adroiremenr rires de leurs lobes. Com- me l'expérience m'avoit appris que l'eau com- mune donnoir quelques petirs animaux , à caufe des fubftarices hétérogènes qu'elle renferme , &c que je voulois procéder avec toute la circonfpec- tion imaginable dans cette expérience , de même que dans toutes celles que j'avois à faire , je me fervis , pour cet effet , de l'eau légèrement dif- tillée : j'enfermai cette eau dans des vafes polis & bien fermés : on n'y vit jamais paroître aucun animal vivant* Or , les germes qui s'étoient cor- rompus & brifés au bout de quelques femaines , ne me donnèrent rien non plus qui parût ani- mé intérieurement d'aucun principe de vie , ôc cependant j'y apportai la plus grande atten- tion (i). Il n'en fut pas de même de mes deux pre- mières infufions , trois jours après j'y apperçus des animaux vivans , & ce fut celle de citrouille qui m'en donna la première , cependant les lobes s'étoient gonflés fenfiblement , & montroient déjà l'allongement de ces petites barbes , qui fe convertiffent enfuite en racines. Je laifTai repo- fer le vafe jufqu au jour fuivant , qui étoi^ le vingtième du mois de Mai : en levant le cou- vercle que j'avois pofé deflus fort doucem.ent fur les Etres microfcopiquesl ^ êc fur les autres , je vis que l'eau étoit fore chargée & d'une couleur brune ; elle commen- çoit même à exhaler une odeur défagréable ; il y avoir, je ne fçais quoi de gluant & de vif- queux j ce que je ne pus attribuer qu'aux longs filamens qui avoient été poufTés par les femen- ces. De plus , les lobes étoient beaucoup plus gonflés qu'auparavant ; quelques-uns même s'é- toient ouverts , & leurs petites barbes s'allon- geoient , principalement dans ceux qui fe main- tenoient à lafurface de l'eau. Mon infufion, vue avec le microfcope , parut contenir un plus grand nombre d'animaux ; ce nombre augmenta beau- coup pendant les quatre jours qui fuivirent , de le premier de Juin ils s'étoient fi prodigieufe- ment multipliés , que le fluide , devenu extrê- mement épais , ne préfentoit plus qu'une efpece de bouillie , formée par ces animaux. Leur multitude fe foutint jufqu'au troifieme jour du même mois j alors elle commença à diminuer , à proportion que les femences fe délayèrent , ôc la plupart des animaux périrent comme fuffoqués dans le fluide. Cette expérience me mit à portée de remarquer qu'il en étoit né beaucoup , d'un volume bien plus petit que les premiers , & qui périrent comme eux. Enfin le i^ , on ne voyoic plus rien d'animé dans l'infufion 3 ce n'étoit déjà ^8 Nouvelles Recherches qu'une maiTe de femences entièrement corfom-^ pues , & qui jettoienc une odeur défagréabie & fétide. (2) Parlons maintenant des animaux que je dé- couvris le quatrième jour dans Finfuiîon de con- combre. Ici on voyoit croître nos automates, à mefure que l'eau s'épaifïiiToit de jour en jour ^ qu'elle devenoit trouble & gluante , & que les femences , qui avoient déployé leurs germes ^ donnoient des lignes de végétation. Le 9 Juin , je vis paroître des animaux exadement femblables à ceux que donne la femence de citrouille. Le 1 0 3 leur nombre fut prodigieux , & il fe main- tint jufqu'au 15. Ce jour- là ils commencèrent à diminuer par degrés, & le 2 5 on n'en découvroit plus aucuns veftiges. Il eft bon cependant d'ob- ferver que la mort de ces animaux ne laiffa pas rinfufion entièrement privée d'habitans \ une autre colonie fuccéda à celle - ci , & périt de même. Le 27 elle n'exiftoit plus. Ces animaux étoient ii petits , que l'œil avoit peine à les faiiîr; & peut-être même , fans le mouvement dont ils étoient pourvus , n'aurois-je pas pu les apper- cevoir. Vers les derniers jours particulièrement, l'eau devint li trouble & iî infeétée par la cor- ruption des graines , que je ne vis plus qu'une fourmilliere confufe ^ Uialgré toute l'attention que fur les Etres microscopiques. 49 que f y apportois j de manière que , pour dif- tinguer les objets , je fus contraint de délayer avec de l'eau ce mucilage vifqueux (3). Ces deux infufions me firent foupçonner que les animaux microfcopiques ne fe manifeftenc pas en tout tems dans les infufions , mais que peut-être ils fuivent conftamment une loi , en vertu de laquelle ils commencent à naître dans les premiers momens de la végétation , fe mul- tiplient a mefure qu'elle fait des progrès , 6^ diminuent enfin lorfqu'elle s'altère , ou fe per- dent entièrement. Les foupçons que me fit naître le réfultat de ces faits , ne devinrent de quelque prix à mes yeux , que fur l'opinion , où eft M« de- Nccdham , que l'on ne doit uniquement la produdion de ces animaux , qu'à une force vé- gétatrice qui réfide dans la matière. J'ai cru que , pour me mettre à portée de voir d'une manière évidente (\ cette correfpondance mu- tuelle exifte vraiment dans la matière ^ ou fi elle n'en eft qu'une propriété accidentelle, je pou- vois tirer , avec avantage , quelques indudions des différentes infufions dont je me propofe de rendre compte dans cet Ouvrage j j'aurai foia- de le faire avec toute la clarté pofiible , en y mettant de l'ordre & de la précifion. Le 29 Juin je fis deux infufions, l'une étoit D yo Nouvelles Recherches de chénevis , l'autre de miller. Le i=^ de Juiller, dans la matinée , rinfufîon de chénevis conte- noit des animaux d'une très-belle forme : le 2 , leur nombre étoit augmenté : il y en avoit en- core avec eux d'autres d'efpeces différentes , & aiTez grands : le 3 , les uns & les autres s'étoient multipliés à un point , que l'on auroit pu en compter des milliers dans la plus petite portion de matière. Le 4 , ayant examiné le vafe où ils fe trouvoient plus abondamment , je m'apperçus que les plus grands n'étoient pas les plus nom- breux ; & fur la fin du fixieme jour il n'y en ireftoit plus aucuns , excepté ceux de moyenne grandeur , parmi lefquels il y en avoit de fort petits 5 que l'on auroit pu prendre pour ô,q% grains de fable. Le 7 , ceux-ci fe firent voir en quantité , ôc différoient en cela des grands qui avoient beaucoup diminué , & qui moururent le 9. (4) Peu de tems après les petits eurent le même fort , & laifTerent l'infufion entièrement dépouillée d'habitans. Que l'on confidere ici ces différens régimens d'animaux , s'il m'eft permis de leur donner ce nom. Les uns fuccédent aux autres , fans trop changer leurs formes , de ma- nière qu'à mefure qu'une race diminue Se s'é- teint 5 une autre fe renouvelle, 6c prolonge fon exifteuce jufqu à un terme marqué , au - delà fur les Etres microfcopiques, 51; duquel ils difparoifirenc aux yeux de l'Obferva- teur , qu'ils privent par-là d'un fpedacle aufli bizarre qu'agréable. J'ai vu 5 avec plaifir , ce même phénomène fe répéter dans différentes infufions 5 cependant il y en a où les formes ne font pas toujours les mêmes. J'en ai trouvé quelques - unes où les animaux étoient en fi grand nombre , & £1 va- riés 5 qu'il n'étoit pas poffible de les diftinguer, même en les obfervant avec toute l'attentioa imaginable. La graine de millet fut plus long-tems que? les autres à germer, & les petits animaux mirent proportionnellement plus de tems a paroître ^ on n'en apperçut aucuns avant le 4 de Juillet, fur le foir j cependant ils ne tardèrent pas a s'accroître prodigieufement : vers le 1 1 il y en avoir une quantité étonnante de toute efpece ^ les jours fuivans ils commencèrent à dépérir , ôc vers le 20 on n'appercevoit plus que quelques automates animés dans cette infuhon corrom- pue ; la même chofe arriva à la graine de ché- nevis 5 lorsqu'elle perdit fes habitans (5). Or , ces deux dernières infufions , Se une infinité d'autres , achevèrent de me perfuader que ces animaux obfervent une marche confiante 6c régulière , foit lorfqu'on les voit paroître par Dij y 2 Nouvelles Recherches degrés , & enfuite s'accroître prodigieufement , foit lorfqu'ils diminuent infeniiblement , juf- qu'a ce qu ils finilTenr par s'anéantir ^ mais ces différentes périodes fuivoient-elles exactement l'augmentation , la diminution & la cefTation de la végétation dans l'infufion des femences ? c'eft ce que je n'ofe pas encore décider , toutes mes obfervations n'ont point été afTez heureu- £ts jufqu'à ce moment , pour m'y faire apper- cevoir cette liaifon &: ce concert heureux qui eft fi nécelfaire , & fi recherché , pour pouvoir rendre raifon des caufes par leurs effets {6). Pour ce qui regarde les deux infufions dont je viens de parler , la chofe ne pouvoir pas être en m.eilleur état j mais je n'ai point trouvé un réfultat égal dans les autres. 11 y en eut même quelques-unes où les animaux commencèrent à paroitre avant la germination des femences , 6c d'autres où ils difparurent entièrement , foit que les petites plantes qui avoient déjà paru , continuafTent à fe développer , ou qu'elles ref- taffent dans leur état naturel. D'autres plantes ne laifTerent pas de me fournir une bonne quan-- tité d'animaux , quoiqu'elles fuffent flétries & dépouillées de leur verdure (7). Je ne prétends pas néanmoins que toutes ces obfervations foienc abfolumenc fans difficulté ^ fur les Etres micro fcopiques. ^^ & qu il ne foit pofTible d'y faire quelque répli- que. On pourroit me dire que ii , dans le premier cas , les animaux ont paru avant le développe- ment du germe , cela ne détruit pas , dans eux , l'élément ou le principe de la végétation ; feu- lement cela fignifie que ce principe ne fe décla- roit pas encore par le développement entier des petites barbes & du germe. Pour ce qui eft de ceux qui fe font montrés , quoique les plantes macérées enflent perdu leur verdure naturelle , je n'ofe point aflurer que leur apparition foit postérieure à la végétation dont il s'agit , peut- être avoient-ils déjà été produits avant ce tems- lâ 3 & ont enfuite prolongé leur exiftence pendant un certain tems. S'ils difparoiflent abfolumenc avant que les plantes fe fannent & fe flétriflent , on doit moins en accufer la lenteur de la force végétatrice , que l'influence dangereufe de quel- que caufe étrangère. L'incertitude &: les doutes où me jetta cet événement, me portèrent à imaginer un nouvel expédient pour apporter plus de clarté dans cette matière , & la mettre , s'il étoit poiîible , dans une entière évidence. Je me difois donc à moi- même 5 s'il exifte vraiment une relation entre la végétation des femences Se la naiflançe des. ani- maux 5 on pourra fans doute inférer légitime- Diij j^ Nouvelles Recherches ment de ce procédé , que fi l'on accélère cette végétation dans les femences , l'apparition des animaux fera de même plus prompte & plus accélérée. Par une raifon contraire , fi l'on retarde la végétation , & fi on la conduit , de manière qu'après s'être manifeftée par des effets fenfibles, on trouve le fecret de la traîner en longueur , les animaux tarderont de même à naître , & auront enfuite ^ dans leur développement , une lenteur proportionnée. Enfin (i l'on arrête , autant qu'il eft pofiible 5 toute végétation , on doit , par ce moyen ^ détruire abfolument la produ6tion àes animaux. Je donnerai dans le Chapitre fuivant, en détail des expériences & des obfervations que j'ai faites à ce fujet, & l'on pourra juger des lumières que j'ai retirées de mes découvertes par tQite manière de procéder. CHAPITRE V, Continuation du même Sujet» JJE tous les moyens que l'on peut employer pour empêcher les graines de donner quelques fignes de végétation, le plus efficace, & en mê- sne-tems le plus fimple y eil de les broyer &: de fur les Etres microfcopiques . yj les mettre en poudre : il eft conftant que , dans cet état , elles ne pouITeront point de racines & ne produiront aucune efpece de germe. Comme on conclud de-là que c'eft en germant que ces femences produifent une grande quantité d'ani- maux, je m'appliquai à les broyer avec foin , de le 19 Juillet j'en ^s fix infuiions différentes.; mais , pour procéder avec plus de fureté dans cette expérience , je formai , avec les mêmes graines , un nombre égal d'infuHons dans des vafes femblables. J'y verfai la même quantité d'eau ; la feule différence qui s'y trouva , fut que je ne broyai point ces graines comme j'avois broyé les autres. C'étoient celles de chénevis , de lin , de vefce , de bled de Turquie , de hari- cots blancs & de pois ; deux jours après l'eau de tous mes vafes fourmilla d'animaux. Je ne dois point ici omettre deux circonilan- ces ; fçavoir , que dans les vafes où les femences étoient entières , les animaux fe montrèrent bien formés & aifez agréables à la vue , tandis que le contraire arrivoit dans celles qui avoient été broyées \ outre cela ils difparurent promptement dans les infufions de ces dernières ; mais ils fe conferverent quelque tems dans celles dont les graines n'avoient pas été entamées, lorfque leurs feuilles furent portées A une certaine hauteur. Diy ^fS Nouvelles Recherches J'ai retrouvé plufieurs fois ee même phénomè- ne dans plufieurs autres infufions des femences broyées , Se quelquefois il m'eft arrivé que fi je broyois celles qui , en germant , m'avoient fourni des animaux en abondance, elles ne m'en four- iiiiToient plus aucuns lorfque je les avois réduites en poudre. Peu content des expériences dans lefquelles j'avois employé des graines triturées , je voulus pouffer mes découvertes plus loin , & voir ce que me produiroient ces mêmes graines broyées plus fortement , Se réduites en farine. Celle de froment , comme la plus commune , me tomba la première fous la main. Je me fentis d'autant plus porté à lui donner cette préférence, que fon grain m'avoit donné , dans toutes mes expérien- ces 5 les animaux les plus beaux & les mieux formés. En effet elle ne trompa point mon ef- poir, lorfque je Feus réduite en poufîieré avec toute l'exaditude poiîible , ôc purgée du fon qu'elle renferme. Peu après Favoir enfermée dans îin vafe , elle me fournit des animaux auffi abon- damment que je pouvois le défirer. Cette décou- verte me porta à en féparer la partie animale de la partie végétale , pour fçavoir a laquelle des deux appartenoient proprement les animaux ^ ou s'ils étoient une produdion de toutes les deu% fur les Etres microfcopiques, y 7 à la fois. M. Beccari nous avoit déjà appris que cette farine renferme deux fortes de matières fort différentes l'une de l'autre ; il tire la pre- mière du règne végétal , & la féconde du règne animal j voici comment je m'y pris pour en faire la féparation. Je pris la portion de farine qui m'étoit né- ceffaire , (i) j'en retirai le fon, dont le mélange eut pu troubler l'opération , &: je la fis macérer dans l'eau. On fçait que l'eau entraîne naturel- lement 5 & charrie avec elle toutes les parties de farine qu'elle peut diffoudre , & ne fe charge point des autres. Celles-ci néanmoins ne laiffent pas de s'imbiber, mais il faut pour cela les prefTer fortement dans la main, & les pétrir avec l'eau \ alors le fluide les pénétre , &: leur fait prendre une adhérence entr'elles \ cet adhérence augmente & forme enfin une pâte vifqueufe , qui devient alors immiffible à l'eau : c'eft cette colle excel- lente que nos ouvriers employent (\ utilement dans différens ufages. Les parcelles de farine que l'on a vues fe diffoudre naturellement dans l'eau , & la colorer d'un blanc laiteux , tombent doucement au fond, & forment un fédiment , qui eft un véritable amidon ; c'eft ce que M. Beccari appelle matière mmilacée j il donne â l'autre le nom de matière glutlntufe. 58 Nouvelles Recherches Un même grain donne ces deux fortes de fubftances j cependant elles font fort différentes enrr'elles. La partie amilacée porte avec elle tous les caractères des végétaux j elle fermente aifé- nient , & s'aigrit en fermentant ; la portion glu-- tineufc paroît au contraire appartenir au règne animal j on la voit fe corrompre au bout de quelques jours , & elle répand alors une odeur fi fétide , qu'on la croiroit plutôt une matière animale , qu'une matière végétale. Je féparai donc la fubftance glutineufe de la fubftance ami- lacée , & j'en fis deux infufions. U amilacée ne me donna jamais aucuns animaux , ou du moins ne m'en donna que très-rarement, tandis que la glutineufe en contenoit un nombre prodigieux. Mais il s'en faut bien, que l'abondance des animaux que j'ai trouvé dans c^n^ forte de farine , m'ait été également fournie par toutes les autres graines. Je ne fçais iî je ne dois point attribuer ce phénomène à la féparation de la matière glutineufe que j'ai trouvée fi favorable à la production des animaux , comme M. Beccarl l'àvoit obfervé avant moi. Du moins il eft conf- tant que quatre farines différentes, fçavoir, celles d'orge , de bled de Turquie , de lupins & de fèves 3 ne me donnèrent aucun être vivant , & cependant ces infufions fe firent dans une faifon fur [es Etres microfcopiques. 59 chaude. La même chofe s'eft manifeftée de même dans les farines de ris &: de lin pendant l'hiver , quoique l'air de la chambre, où l'on avoir mis les vafes , fût au degré de chaleur fufïifant pour faire naître les animaux. Je pouvois donc con- clure légitimement de toute cette fuite d'obfer- vations confiantes, qu'en arrêtant la végétation, on ne met point pour cela d'obflacîes à la pro- duction des animaux , mais que feulement il arrive fort fouvent que cette produdion n'a point lieu , & que fi , par hafard , elle fe ma- nifefte , il eft aifé de s'appercevoir qu'elle a été altérée. On le connoît au peu de durée des petits animaux , & à leur extrême petitejGTe. Il femble que l'autre partie du phénomène que je viens de rapporter , fe foit trouvée plus conforme à mes obfervations ; je veux dire que quand la végétation a déjà été portée à un cer- tain point dans les femences , avant qu'on les falfe infufer dans l'eau , l'infufion que l'on en fait enfuite , donne des animaux beaucoup plus promptement que fi l'on avoir fait de ces mêmes femences une mafîe féche & aride , ce qui arrête ordinairement les progrès de la végétation. Pour m'en convaincre , voici le moyen que j'employai, d£ qui me réuiîit très-heureufement. Je plantai en terre à-^s pois chiches 6c des hari- 66 Nouvelles Recherches cots : lorfqu'ils eurent pouffe leurs racines , ôc leur germe , je les arrachai , je les nettoyai pro- prement 5 Se je les mis dans de l'eau. Au bout de trois heures, les animaux parurent j il eft vrai que je n'en eus qu'un petit nombre , mais ils ëtoient tous en bon état de d'une belle forme. D'un autre côté , deux vafes où j'avois fait infu- fer les mêmes graines , mais dont je n'avois pas avancé de même la végétation , ne me donnè- rent des animaux que le troifîeme jour. Différentes graines fur lefquelles j'ai répété la même expérience , n'ont fervi toutes qu'à me convaincre que ce procédé eft beaucoup plus propre à avancer la naiffance des animaux que l'ufage des infuilons ordinaires. C'eft par ce moyen que je fuis venu à bout de vérifier plei- nement tous les faits qui font cités â ce fujeç par M. de Necdham. Il rapporte qu'ayant exprimé le fuc des graines qui avoient été jettées en terre , il le fit tomber fur quelques gouttes d'eau , êc qu'au bout de quelques heures il y apperçuc des animaux. J'ai fait cette expérience avec tout le fuccès pofîible , &c j'ai eu , outre cela , l'avan- tage de voir plufieurs animaux dans le fuc même que je préfentai au microfcope, lirôt après l'avpir exprimé. Il ne me reftoit donc plus qu'à éprouver fi fur les Etres mïcrofcopiques; 6f végétation lente , ôc que l'on auroit foin de traî- ner en longueur , feroit fuivie d'une quantité proportionnelle de petits animaux aquatiques. Je crus ne pouvoir choifir une faifon plus propre pour cette expérience , que le tems de l'hiver. Je plaçai les femences dans une atmofphére tem- pérée 5 de manière que la végétation ne pouvoit fe faire qu'avec beaucoup de lenteur, J'avois préparé jufqu'à vingt-cinq infufions , de diffé- rentes graines ; Se j'avois choiQ des vafes larges 6>c bien ouverts , afin que mes plantes pufTent fe conferver plus long-tems dans un air libre ôc échauffé. Il arriva , dans une grande partie de mes infufîons , que les animaux fe montrè- rent avant que l'on vît paroître les filamens que jettent les graines ; .cependant chaque graine en ctoit abondamment pourvue , lorfque les petits germes fe déployèrent dans le fluide. La mul- titude des animaux accrut aufli , à mefure que les plantes prirent de l'accroifTement , de ma- nière que cette population fut fort nombreufe vers le milieu du mois de Décembre. On obfervera que quoique cette colonie parût -être en affezbon état, cependant elle n'égala point celle que donnent des femences qui germent rapidement par le fecours de la chaleur. Elle fe conforma , mais lentement , à la végétation de ^2 Nouvelles Recherches mes plantes, que j'eus foin de conferver jufqu'au^ approches du printems \ tandis qu'au contraire la grande chaleur de l'atmofphére , enlevé très- promptement , & les plantes & les animaux. J'ai donc eu occaiion de m'appercevoir que la naiffance des animaux fuivoit toujours , d'une manière uniforme ^ les progrès & la lenteur de la végétation , & qu'elle les fuivoit même dans la proportion la plus exade , avec cette diffé- rence néanmoins, qu'en empêchant les femences de végéter , on n'empècheroit pas toujours les animaux de naître. Je fçais que M. de Necdham pourra fiire ici une application de fes principes , & trouver aifémenc quelque degré de végétation dans àQS plantes qui , fans fe développer , ont pu donner des animaux. On entend communément par végétation , le développement des parties : cet agrandiffement auquel tous les corps vivans font foumis , eft ce qui fait que nous difons que les animaux & les plantes végètent. Mais notre Auteur lui donne une fignification beau- coup plus étendue. Selon lui, la végétation e/l une opération par laquelle la nature décompofe, & détruit les anciennes formes pour en com- pofer &: en conflruire de nouvelles. Ainfi , quoi- que dans le cas dont il s'agit ^ les kmQiicQS fur les Etres microfcopiques^ 6j concaiïees ou réduites en farine , ne produifenc vraiment aucune plante , cependant elles ont une végétation réelle , puifqu'il y a une décompo- fition dans laquelle leuts parties perdent leur première forme, & pafTent à une forme nou- velle, en devenant des êtres vivans, foit que ce foient des animaux , foit que ce foient des plantes. Je n'attaquerai point cette définition donnée par M. de Ncedham * elle eft trop bien adaptée à fon fyftême. Je ne parlerai pas non plus de cette métamorphofe de femences en animaux j j'aurai occafion d'en faire mention ailleurs fort au long. Je me contenterai de dire , pour mettre un certain ordre dans tout ceci , & dans ce que j'ai avancé au Chapitre précédent, qu'en fup- pofant de l'exadtitude dans la relation que j'ai trouvée entre la végétation des femences & l'ap- parition des animaux , je crains qu'elle ne foie de nature à ruiner l'opinion de ceux qui préten- dent que ce font de petits œufs qui produifenc tous les phénomènes des animalcules microfco- piques. L'harmonie que je viens de citer , paroît, au premier coup d'œil, une preuve affez plau- iîble qu'il faut regarder la végétation comme la caufe phylique de ces phénomènes. Cependant la chofe paroîtra fort équivoque ^ très-douteufe , ?4 Nouvelles Recherches îî l'on veut y apporter une certaine attemioii. On croit quelquefois appercevoir , entre deux chofes 5 une connexion réelle & phyfique , fem- blable à celle qui fe trouve entre l'effet & fa caufe , tandis que , dans le vrai , il n'exifte en cela qu'un accord qui ne tient lieu que d'une iimple condition : c'eft ce qu'il me feroit aifé de démontrer par plufieurs exemples tirés de la Phyfique oc de l'Aftronomie , il j'aimois à faire un vain étalage d'érudition : mais, pour me renfermer dans les bornes de l'Hifloire Naturelle, je me contenterai de rapporter ici l'opinion des partifans de la putréfaction , qui revient très- bien à mon fujet. Ces prétendus Pliilofoplies s^étoient fortement perfuadés que la corruption de la matière peut engendrer des infedes , & ils étoient d'autant plus portés à le croire , qu'ils voyoient fenfîble- ment que jamais les vers ne fe montrent fur les chairs tant qu elles font faines Se vives , & qu'ils y fourmillent aufîi-tôt qu'elles commencent à fe corrompre. Mais cette vieille erreur doit tomber devant toutes les obfervations & les expériences des Phyliciens modernes. On fçait aujourd'hui que la putréfaction n'eft qu'une fimple condition qui peut avancer la naifTance des infedes par la chaleur douce qu elle communique aux œufs qui ont fur les Etres micro fcopiques. 6j ont été dépofés , dans cette vue , par les mères. Mais, difenc les Partifans des œufs, pourquoi ne pas croire que la nature fuit ici fa marche ordinaire ? c'eil-à-dire qu'une chaleur douce ÔC modérée , qui fera propre à faire germer les femences des infuiions, aura auffi la propriété de faire éclore les animaux dans les œufs que contiennent ces mem^es infuHons , foit au'un courant d'air les y ait portés, foit qu'ils fe foient attachés a la furface intérieure des vafes avant que de fe mêler avec Teau que l'on y a verfée, ou enfin que les infecles mtmes les aient confiés aux graines avant i'infuiion ? Ils ajouteront enfuite que cela eft fort facile à comprendre , puifque , fi l'on exprim.e le fuc des graines infufées , ou fi Von fait infufer celles qui ont germé en terre , on y découvre des ani- maux dans le moment m.ême j du moins on les voit naître peu de tems après. Si l'on vouioit fuppofer que ces œufs fe fulTent mêlés avec la liqueur qui circule dans les petits canaux des graines , il feroit aifé de s'apperce- voir que la chaleur les auroit mis en état de faire éclore ces petits vers qui fe montrent en- fuite dans le fuc nourricier , ou dans l'infufion. Lorfque les femences concalTées ou réduites en farine , ne produifent rien , c'efl probablement E C6 Nouvelles P^echerches parce que ces matières ont été vitiées au point de ne pouvoir plus concourir à la nai (Tance de l'aninial , ou parce que l'on n'a pas donné le degré de chaleur néceffaire , ou enfin parce que les fucs , dont les œufs fe font abreuvés , étoienc gâtés & corrompus ; car il eft fort polTible que le fuc des infufions doive y concourir , comme la qualité des matières fur lefquelles les mères dépofent les autres œufs , doit contribuer à leur développement. Des adverfaires ingénieux feront valoir ces argumens , ou d'autres de cette nature , pour ne pas être forcés de reconnoitre le rapport pliy- fique qui fe trouve entre la végétation des fe- mences & la naiffance des animaux , rapport qui eft vraiment celui de la caufe à fon effet. Ces difficultés ne fuffiront point pour l'anéantir : cependant elles pourroient faire jetter des dou- tes fur cette vérité ^ ii l'on n'avoir rien de- mieux à leur oppofer. Mais font- ce bien- la des motifs fufîifans pour douter ? c'eft ce que nous verrons dans le Chapitre fuivant, &: dans le cours de cet Ouvrage. ^^ fur les Etres microfcopiques . 6*7 CHAPITRE VI. Examen des P hénomenes cités par M. de Needham ^ pour appuyer la vérité de fon fyjîême. vJN pourroit faire trois clafTes des preuves far lefquelies M. de Needham s'appuye , pour prou- ver que ce ne font point les œufs des mères qui engendrent les animaux microfcopiques , mais ia force végétatrice des fubflances que l'on fait infufer. Il tire ia première des différens phéno- mènes que fourniiTent les infufîons j la féconde de l'action du feu à laquelle il les foum.et , & la troiiieme de ce qui fe paiTe dans les vafes que l'on a eu foin de fermer , pour leur ôter toute communication avec l'air qui les envi- ronne. Il n'y a perfonne qui ne voye combien chacun de ces articles QlC intéreiTant ; nous \qs difcuterons donc chacun en particulier. Comme les phénomènes fur lefquels ce Phyfîcien établit fa première preuve , dem^andent un exameu férieux & des détails circonilanciés , j'en ferai le fujet de ce Chapitre , & je réferverai les au- tres pour la fuite de cette diiTertation. 6È Nouvelles Recherches M. de Ncedham rapporte qu'ayant fait macérer pendant quelques jours des grains d'orge , de des femences d'autres légumes , il vit fortir de ces fubftances des ramifications très-déliées , ou^ fi l'on veut , des filamens , qui n'étoient autre chofe que la végétation même des graines , ( i ) lefquelles , en peu de tems , s'accrurent confi- dérablement : il les coupa avec des cifeaux , 3c les pofa fur des cryftaux de montres. Il lui fut fort facile , par ce m^oyen , de préfenter ces cryftaux à la lentille du microfcope , ôc d'ob- ferver les progrès de la végétation , fans être obligé de morceler ces petits filamens , ce qui ne pouvoit pas fe pratiquer auparavant dans les infulions ordinaires. En effet, lorfque Ton préfentoit une goutte du fluide au microfcope, la végétation qui alloit fe former, ne pouvoit pas manquer d'éprouver un certain dérangement ôc une divifion, & alors il n'étoit plus pofîible de pouffer l'obfervation plus loin. Ces cryftaux mirent M. de Ncedham en état de remédier à l'inconvénient 5 & de fuivre de près la nature dans les différens phénomènes de ces plantes \ elles n'interrompirent point leur végé- tation 5 quoique détachées du corps de a graine. Leur forme étoit prefque cylindrique excepté une de leurs extrémités ^ qui prenoii la figure far les Etres microfcopîques. <5"p d'une tête affez groife. Se d'une certaine tranf- parence. Ce fut autour de cette tcte , ou a cette extrémité , qu'il apperçut les animaux microf- copiques privés de vie , en façon de femences ou de petits grains ^ il les confidéra avec plus d'attention , & , quelque tems après , ils lui parurent infenfiblement s'animer , fe mouvoir & s'agiter dans la liqueur (i). Cette expérience annonce une grande faga- cité & le génie de fon Auteur : elle paroît même venir, avec aifez de vraifemblance , a l'appui de fon fyitême ; ceci mérite donc toute notre atten- tion : ainfi je dois rapporter, avec la plus grande exaditude, les expériences que j'ai faites à cette occafion , & comme je ferai forcé quelquefois de m'écarter du fentiment de M. de Needham pour ne m'attacher uniquement qu'à la vérité , j'aurai foin de le faire avec les égards qui font dûs à la célébrité de (on nom ; je veux mêm© mériter fon eilime , en combattant fon opinion. Revenons à notre fuiet. Dans la vue d'obtenir tous les phénomènes dont parle M. de. Needham , je m'en tins a la manière dont il a lui-même opéré , comme la plus fimple Se la plus com- mode. Je femai en terre quelques légumes , Se j'en coupai les racines lorfqu'elles commencèrent à fortir de la plante. Elles étoient alors de la E iij »7ô Nouvelles Recherches grofTeur d'un fil , & longues de la moitié d'un travers de doigt , Fïg, lo & n ^ PL 3* Je les mis féparément avec un peu d'eau , dans de petits cryftâux concaves. Le microfcope me les Çlz pa» roitre comme un tilTu de fibres longitudinales ^ qui s'étendoient jufqu'à la pointe de la racine» Avec l'œil feul , on appercevoit un duvet dans toute la longueur de la racine : mais , avec le microfcope , ce duvet paroilToit formé d'une in- finité de petits rameaux, qui fortoient du corps de la racine , & pouiToient au loin leurs bran-= ches. Les uns confervoient entr'eux une direc- tion parallèle , les autres fe réunillbient en for- mant un angle. Il y en avoir un grand nombre que l'on voyoit entrelacés & confus. Ceux-ci étoient tous d'une pièce \ ceux-là de plufieurs morceaux, prefque ronds , à- peu -près comme des grains de chapelet. Ces petits rameaux avoient de la tranfparence. L'extrémité, oppofée à la racine , s'arrondiiïoit ordinairement , & avoir plus de groffeur que le reile du corps. En général , ils fe renoient attachés fi fortement , qu'il n'étoit pas pofiible de les défunir, foit en agitant l'eau ^ ou en les faifant changer de place. Les racines qui m'ont fervi pour cQiie 'expé- rience , font celles de petits pois , & de pois chiches. Je les avois mifes dans l'eau k 1 3 Dé- fur les Etres microfcopiques, 71 cembre , & je n'y avois d'abord, rien apperçu qui fut animé. Le jour faivant , je vis , dans mes cryftaux , une efpece de vapeur épaifTe ^ qui fembloit forrir de la racine même , & qui Ten- vironnoit , mais qui , en s'en éloignant , deve- noit beaucoup plus légère. Cette vapeur, ou, il l'on veut y ce voile , qui couvroit alors la racine , n'étoit qu'un amas de fils extrêmem.ent déliés, F'ig, II. PL ^, ou plutôt de ramifications qui fe coupoient & s'enrrelaçoient en mille ma- nières différentes , & s'uniRoienc à plufieurs petits corps dilfeminés ça oc là entre ces fîlamens. Je n'y ai abfolument rien découvert qui parue avoir un principe de vie : feulement , vers le foir, j'ai vu quelques animaux, &c le lendemain il y en avoir un grand nombre. En examinant de plus près ces infufions , la vapeur m'a paru augmenter fon volume , elle étoit devenue beau- coup plus épailTe qu'auparavant. Pour les petits corps dont j'ai parlé , ils éroient bien diminués : ceux -même qui s'étoient formés les jours fui- vans 5 avoient difparu avec eux. Mais les ani- maux s'étoient mAilti plies au point qu'ils cou- roient par bandes dans route l'étendue du fluide ^ Se remplilToient la capacité du vafe. Leur volume étoit un peu plus grand qu'à l'ordinaire. Gomme M. de Necdh.tm , dont l'autorité cCt Eiv 72 Nouvelles Recherches infiniment refpeârable , a voit dit que l'on voyoit, autour de qq,^ rameaux de la végétation , des animaux, qui d'abord croient fans vie, & qui avoient l'air de graines éparfes de cotés & d'au- tres , la reiïembiance qui fe trouvoit dans les petits corps dont j'ai parlé , & leur diminution qui paroifToit fe faire a mefure que les animaux augmentoient , me portèrent à croire qu'ils étoient eux-mêmes des animaux , mais des ani- maux immobiles , & encore morts ^ fi je puis m'exprimer ainfi : quelques obfervations m'ap- prirent que je ne m'étois pas trompé. Je me contenterai d'en rapporter une entr'autres , au- tant pour abréger, que parce que toutes les autres me réuffirent, quant au fond, à-peu-près de la même manière. Le 23 Septembre je coupai une à^s racines qu'avoir pouifée un grain de froment , & je la mis , à l'ordinaire , fur un cryflal de montre : elle y refta deux jours entiers fans rien produire, H y avoir autour une forêt de filamens , & prin- cipalement au fommet , où ils étoient plus épais que dans les autres endroits. Le troifieme jour elle me donna beaucoup d'animaux fort petits, &, avec eux, à^^ efpeces de mafifes teintes d'ujie couleur noirâtre. Les unes étoient pofées fur le large tiffu des filamens 3 ce qui contribuoir a fur les Etres micro fcopiques, 7J les faire paroître encore plus fombres & plus obfcures ; les autres en étoient enveloppées. Ces mafTes, du moins celles que l'œil pouvoit faifîr aifément , paroifToient formées au-dehors d'un nombre iniini de filamens entrelafTés , & ferrés les uns dans les autres. Je voulus fçavoir s'ils logeoient quelques animaux , & je ne quittai point le microfcope que je ne m'en fuîTe entiè- rement aiTuré. Sur les quatre heures il ne me refta plus rien à délirer lâ-defiTus ; voici comment ce phénomène fe manifefta. Je fixai attentivement la vue fur mes petites malTes : au bout d'un quart d'heure il y en eut deux qui commencèrent à s'agiter & à tourner fur elles-mêmes , fans néanmoins fe tranfporter d'une place à une autre. Au milieu de ces con- torfions 3 un animal fortit à moitié d'une de CQS maffes , & une féconde après , un autre en fortit de même : tous deux faifoient continuellement les plus grands efforts pour fe débarrafTer de cette prifon : ils y parvinrent en effet au bout d'un certain tems , & me donnèrent par-là le moyen de faire fur eux mes obfervations à découvert. Leur forme fe rapporcoit affez à celle des ani- maux que m'avoit donnés l'infafion à&s graines de citrouille, excepté qu'ils étoient plus petits, & n avoient pas le bec (i élevé , je ne leur trouvai 74 Nouvelles Recherches pas non plus , dans la taille ^ la beauté & la fine^Te de ceux-là. D'abord ils me parurent lourds , ilu- pides , fe tramant avec lenteur , mais infenfible- ment ils acquirent de la légèreté : en moins d'une demi - heure , ils devinrent aufîi adifs que les animaux des infufions : leur forme même fem- bîoit avoir acquis quelque perfection : du reile je les trouvai en tout fi femblables aux autres animaux , qu'il eft abfolument inutile d'en parler davantage. Mais je ne dois point ici paiTer fous filence l'apparition de quelques autres animaux, qui ne s'étoient point cachés , comme ceux-ci , dans une enveloppe épaifle : ils fe montroient au con- traire afTez vifiblement fur le tiffu des lîlamens. Je ne les trouvai pas , au commencement , fort animés. Ce ne fut qu'au bout d'une heure & un quart qu'ils donnèrent quelques fignes de vie , par des fecouiTes légères , qui durèrent environ une heure , en augmentant par degrés : enfuite ils commencèrent à fe tranfporter d'une place à une autre : après cela , ils fe mirent à fuir , & fe joignirent aux autres. Alors je les perdis de vue. Souvent , dans les endroits où ils avoient paru d'abord s'arrêter , comme abfolument im- mobiles , on appercevoir des redes de petits corps fecs , que j'étois tenté de prendre pour la fur les 'Etres micro fcopiques . yf pellicule qui leur avoir fervi d'enveloppe : mais je ne donne ceci que comme une iîmple conjec- ture. Pour ce qui regarde la forme du corps , ces animaux étoient un peu plus gros que ceux qu'a- voient produits les petites malTes : ils avoient , comme eux , un extérieur difforme , & d'une mauvaife tournure. La manière dont ces petits animaux fe pro- duifent, m'a paru^ en général, être à-peu-près la même dans plulieurs autres infuiions où j'ai employé les cryftaux pour examiner la fommité ^ùs racines. Je dois même obferver que l'on réu/îit également bien dans cette expérience , foie que l'on fe ferve de ces racines , foi^ que l'on prenne le germe que^iâr^graine pouife au- dehors. Il eft bon d'avertir , à cette occaiion , que les graines qui montrent leur germe, ou de petites barbes , réuililTent plus heureufement lorfqu'on les a mifes en terre , que quand on les a fait germer dans l'eau. A peine les a-t-on pofées fur le cryftal ^ qu elles donnent à l'oeil une prodi- gieufe quantité d'animaux. Du reile ^ ii l'on a foin de fe conformer, avec exactitude, à la mé- thode que je viens d'indiquer , on peut être très-certain que l'on ne manquera pas de voir cQs petits animaux fe produire ^ & que l'on aura 'f6 Nouvelles Recherches ragrément de prendre , pour ainfi dire , la nature iar le fait. Cependant il faut que rObfervateur joigne à nne vue très-bonne , & à beaucoup d'attention , \m grand fond de patience : car fouvent l'opé- ration demande que l'on tienne l'œil fixé pen- dant des heures entières , & fans difcontinua- tion. Il n'eft pas poïïible de prefcrire la-deiïiis des règles certaines , parce que l'apparition , plus ou moins tardive des animaux , dépend de la chaleur , plus ou moins grande , de la faifon. Seulement il arrivera qu'en été l'œil aura bien moins d'efforts à faire , pourvu que l'on ait foin de rafraîchir , de tems en tems , la goutte de Fobfervâtion , en y ajoutant une nouvelle eau avec la pointe d'une plume , pour réparer la perte continuelle qu'elle éprouve par l'évapo- ration. Ce phénomène montre , avec affez d'évidence ^ que mes expériences font parfaitement confor- mes à celles de M. de Needham , 6c qu'elles doivent fervir à démontrer que les petits corps, qui d'abord paroilTent immobiles dans les infu- fions 5 y font fenfiblement animés. C'eft à M. de Needham que je fuis redevable de cette de- couverte , c'eft lui qui m'a mis fur la voie pour y parvenir. J*aurois déiiré pouvoir de même fur les Etres mîcrofcopiques. 77 dire 5 avec lui , que ces petits corps qui s'aîii- ment , ont appartenu auparavant à la plante qid végète, & en font des portions détachées, com- me il le prétend , afin d'adopter , de concert, cette propofîtion , quun végétal fe convenu en im animal, J'aurois été charmé de concourir par-lâ à affermir une même opinion , quoique fous un ciel différent du lien. Accord heureux qui, fuivant la remarque d'un de nos Savans , eâ toujours , en Philofophie , une Aqs plus fortes preuves de la vérité ! Mais quelques efforts que j'aie faits pour interroger la nature , je lai tou- jours trouvée muette fur ce point. Ce duvet épais qui entoure la racine , ou îe germe , ôc qui fe trouve formé , comme nous l'avons dit , par un amas de plufieurs petits rameaux accrochés au tronc par une extrémité, ce duvet 3 dis-je , n'en eil conflamment pas une extenfion. Cette vérité eft trop fenfible pour avoir befoin d'une démonflration. La vapeur épaiffe , qui fe forme fucceffivement , qui va enfuite jufqu à obfcurcir la liqueur , ^ qui eH vraiment un tlifu de filamens entrelaffés , ne doit être regardée que comme une végétation qui provient de la racine même , fuivant l'opi- nion de M. de Needham. Elle eft comme le prin- cipe duquel les fibres doivent émaner ; cela pa- ijgr Nouvelles Recherches roît évidemment par la diminution continuelle qu'elle éprouve , & par la forme même de ces filamens , tout- à-fait femblable à celle des fibres qui compofent le corps de cette même racine. _ Mais que l'on doive appliquer ce raifonne- ment aux petits corps qui s'animent dans l'in- fufion^ c'eO: ce que je n'oferai point en conclure par deux motifs. Le premier , eft la différence fenfible qui fe voir d'un côté dans l'organifa- tion des petits corps dont il s'agit, & de l'autre , dans les fubftances qui compofent la racine , ou qui lui appartiennent originairement. Ces fubilances ne font qu'un tifTu de petits nerfs , ou de petites fibres , qui s'entre-coupent , tandis que la texture des petits corps , qui paroifTent vîvans 5 eft femblable à celle des autres animaux, que Ton peut prendre vraiment pour un amas de véiiciiles brillantes, qu'enveloppe une peau très- polie 5 & qui ne montre aucunes fibres à l'œil. La féconde raifon , qui m'arrête , eft que s'il faut regarder ces petites particules de la racine , comme s'ouvrant un paftage du règne végétal au règne animal , on devroit auiîî accorder le même avantage à celles qui fe décompofent & fe détachent de la racine, ou bien à celles *quî font deftinées à produire le duvet. Cependant une expérience , que j'ai fuivie conftammenc fur les Etres microfcopîques, 7^ pendant plufieiirs femaines , ne m'a jamais fait ûppercevoir cette métamorphofe. Si M. de Nudham prétend que la force de la végétation , qui agit intimement dans la ma- tière 5 & qui fe diftribue fur chacune de fes parties, de quelque ténuité qu'elles foient, doit la configurer , de manière qu'elle puiiTe , dans certaines circonilances , changer abfolument la première forme de quelques particules , pour leur en donner une nouvelle : s'il veut que cette force les élevé à la dignité d'animaux , & qu'en même tems elle en lailTe d'autres dans leur an- cien état de fubftances purement végétales, ce qui paroît être une fuite de fes principes , pour- quoi s'eft - il contenté de nous le dire fimple- ment, & pourquoi. n'a- t-il pas orné ce fyflème de quelques expériences particulières? Je ne penfe pas que l'on doive beaucoup s'arrêter à cette opinion , vu que les petits corps fe montrent , & prennent leur principe de vie autour 5 &: au fein même des fubilances àt% végétaux , & que jamais on ne les trouve , dans les cryftaux , qu'unis aux matières qui végètent. Un phénomène de cette nature , pourroit éga- lement arriver dans le fyftême de ceux qui veu- lent abfolument que les animaux ne tirent leur origine que d'un œuf j ce que je peux prouver Id Nouvelles Recherches par un fait que je regarde comme un amufement utile. Il eft bon de changer de matière pour un inftant. Un jour de prîntems j'érois occupé à examî- lier une infuiîon de fèves , lorfque j'apperçus un mouvement fubit dans différentes parties de la matière : ce mouvement avoit quelque chofe d'extraordinaire , qui fixa mon attention : il étoit occafionné par un corps qui tiroit fur le blanc , & que l'œil feul pouvoir à peine apper- cevoir, mais qui, vu au microfcope, paroifloic un énorme géant au milieu des autres animaux. Il s'agitoit de mille manières pour fe dégager d'une enveloppe : enfin , fes efforts l'affranchi- rent de fes fers. En le confidérant plus attenti- vement, je vis que c'étoit un ver blanc, compofé de plufieurs petits anneaux. Ce qui avoit formé fon enveloppe , n'étoit autre chofe que la pel- licule de l'œuf duquel il étoit forti. Cette obfervation fut caufe que je fufpendis la recherche des animaux microfcopiques , livré entièrement à la fingularité du phénomène. J'exa- minai donc fcrupuleufement fi , par hafard , il n'y auroit point eu , dans rinfuiion , quelques œufs d'animaux déjà nés , ou prêts à naître ;*j'en apperçus en effet une vingtaine, & même plus encore, les uns placés fur la partie fupérieure du fur les Etres microfcopiques, Sî du fluide 5 épaifïî par le mélange des graines qu'il tenoit en dillolution 5 les autres attachés à trois grains de fèves qui en étoienc fortis« Leur volume n'étoit pas égaL Les plus gros éga- loient environ la moitié de ceux des grolTes mouches : pour les plus petits ^ l'œil pouvoir à peine les appercevoir. En les preiTant avec l'on- gle y on entendoit un petit bruit , comme il arrive quand on écrafe les œufs àts infectes, 6^ il en fortoit une petite goutte d'une iiqueut gluante. Je les vis tous éclorre dans l'^efpace d'une femaine. Les vermiiTeaux qui en fortirent , fe plongèrent dans l'eau trouble du vafe , & en firent leur nourriture , ou du moins des ma- tières qu'elle renfermoit , & qui pouvoient être pour eux un mers fort agréable. Jaloux de m'alTurer des réfulrats que me don- neroit l'obfervation de ces nouveaux hôtes , je plaçai 5 dans une boîte bien fermée , le vafe où ils étoienî , dans la crainte qu'ils rie vinffenr à m'échapper , lorfqu'ils fe transformeroient en chryfalides , fi, par hafard^ ils dévoient éprou- ver ce changement de forme , & en effet ils le fubirent , à mes yeux , quelques jours après : je les trouvai même fortis de l'infuiion : les uns s'é- toient attachés légèrement au fond du vafe , les autres s'étoient logés dans les angles de la boîte. Si' Nouvelles Recherches Parmi ces chryfalides, il y en avoit qili étoient d'un rouge fafrané : quelques-unes d'entr'elles avoient une couleur de châtaignier : elles me don- nèrent trois fortes de moucherons d'une taille élégante , les uns plus grands , les autres plus petits , mais tous proportionnés à la grandeur du ver fous la forme duquel ils s'étoient d'abord montrés. Les plus grands avoient le tiers de la groiïeur de ces miouches que l'on voit roder autour de nos tables , & ils étoient armés de deux ailes , plus grandes à proportion que le rede du corps : ils tiroient un peu fur la cou- leur d'un rouge pâle, fur -tout du coté de la tète , & lorfqu'ils prenoient leur vol ^ ils étoient lourds & pareiTeux. A ceiiQ efpece , en fuccéda une autre de mou- cherons plus petits y & d'une couleur plus fon- cée <, tous meublés de deux ailes étroites , &: qui leur donnoient un vol plus facile. Leur ventre fe terminoit en pointe , avec toutes les propor- tions d'un cône régulier. Six petites pattes for- toient de la partie inférieure du corps , & leur fervoient à marcher avec beaucoup de vîtefTe. Pour ceux de la troiiieme efpece , c'eft-à-dire les plus petits de tous, ils excédoient à peine, dans tout leur volume ^, la groiTeur d'un grain de fable. Us étoient d'an verd obfcui fur les Etres micro fcopiquesl 83 de deux ailes, prefque aiùîî grandes que toute la longueur du corps. Lorfqu'une fois je fus fuiïîfamment éclairé fur ces différens phénomènes 5 il me fut fore facile de diftinguer plufieurs de ces moucherons, parmi d'autres de différente efpece , avec lef- quels ils fe mêlèrent ; ils s'artroupoient à Fentour de mes vafes , & fouvent fe gUifoient douce- ment au- dedans , en y defcendant par les bords pour y dépofer leurs œufs chéris \ ces œufs don- nèrent de nouveau de petits vers, qui devinrent, à leur tour , àQS chryfalides & des moucherons. Combien de fois ce changement de fcène ne jYi'a-t-il pas procuré Tamufement le plus agréa- ble ? Une centaine d'infuiions , que je mis Thi- ver fuivant dans des phioles de verre , fe trou- vèrent 5 au mois d'Avril, remplies la plupart de plufieurs efpeces de vermiiTeaux , qui , parvenus à un certain degré de vigueur , s'échappèrent de mes vafes , cherchèrent un lieu (qc , & garni- rent de leurs chryfalides la corniche du buffet fur lequel les vafes étoient pofés. Je reprends maintenant le fil de mon dif- cours. Le phénomène que je viens de rapporterj ne doit pas fuffire pout nous porter à en con- clure légitimement que les animaux microfco- piques naiflfent des plantes qui végètent , parce Fij 8^ Nouvelles Recherches que nous les trouvons toujours dans ces plantes. Ce ne feroit point -là, je le fçais, une bonne manière de philofopher. Mais les partifans du fyftême des Ovipares pourront en tirer une conféquence oppofée , & qui paroîtra affez con- cluante : ils diront , les animalcules microfco- piques , ainfi que les vers des moucherons , s'engendrent dans les fluides , toutes les fois qu'ils y trouvent différentes fubftances des vé- gétaux 3 foit que ce foient celles des germes , ôr Aqs racines que pouffent les femences , foit que ce foient les femences mêmes que l'on a fait • macérer & diifoudre dans le fluide \ les uns & les autres habitent également dans la même de- meure, fe nourriiTent à^s mêmes fucs, s'agitent, & fautillent dans ces eaux épaifles & fétides; tous enfin, au bout d'un certain tems , meurent, & difparoiifent : or, comme il eil démontré par l'expérience que les moucherons fortent tous d'un œuf, pourquoi vouloir refufer cette origine aux animalcules , ou plutôt pourquoi ne pas dire ^ qu'elle leur eil commune ? N'eA-il pas manifefte que , tant qu'ils féjournent dans le fluide , ils fe montrent fous la forme de vermifleaux , & que lorfqu'ils ont abandonné k liqueur, c'a été pour fe retirer dans un lieu fec & tranquille , & s'y transformer en chryfalides. On eft bien fondé fur les Etres mlcrofcopiques. 85' a croire qu'ils paient de l'eau dans l'air ^ puif- qu en moins de quelques heures , & fur - tout dans les grandes chaleurs de l'été , il en périt fore fouvent des armées entières , fans que Ton en ait vu un feul de mort , & dont le corps ait furnagé. Cependant, lorfqu'ils fe font confer- vés conftamment dans l'état de vermilTeaux 5 èc qu'enfin ils y ont péri, on devroit bien voir leurs cadavres flottans fur le fluide , comme il arrive lorfqu'ils fubiflent un trop grand degré de chaleur de la part du feu ou du foleil. M. Vallfnkri ^ ii verfé dans l'art de faire des expériences , n'a-t-il pas obfervé que les anguilles du vinaigre pro- viennent des œufs qu'un petit moucheron y a dépofés ? que ces vermifTeaux , lorfqu'ils font parvenus à un certain développement de leurs organes, fe changent en chryfaiides , & qu'il en naît des moucherons femblables à leurs pères ? Si l'on demande pourquoi nous apperçevons les animalcules , tandis que nous ne découvrons pas également leurs œufs , il eft fort aifé de répondre que probablement lorfqu'on les voit fans mouvement , c'eft qu'ils font dans l'œuf même , & que quand ils fe trémoulfent & s'a- gitent 5 ce font autant d'efforts qu'ils font pour en fortir , en abandonnant la petite coque , ou écorce qui demeure vuide & fans mouvement, î iij ^6 Nouvelles Reckerckes On a une preuve confiante de tout ceci , en ce que ces fortes de dépouilles , comme on l'a déjà obfervé , fe trouvent, en plus grande quantité, dans les endroits où ils font nés. Mais nous ne les appercevons aifément à la vue fimple, qu'au-* tant qu'ils font brilîans & diaphanes. Ce n'eft qu'à l'aide de cette tranfparence que l'on dif- îingue les organes de l'animalcule qui eil ren- fermé dans fon écorce ; & il a cela de commun avec les œufs de plufîeurs autres infedes , à travers lefquels on voir l'animal lorfqu'il eft fur le point d'éclorre. De-là, il arrive que fi les c£ufs ne font pas encore portés a un certain point de maturité, de même que la machine de l'animalcule , de que celle-ci foit encore comme fous un point de matière, il eft confiant que la vivacité de fon éclat la dérobe à la vue , d'autant plus que ce doit être là probablement le moment où cqs œufs font plus petits , comme le font alors les œufs des autres infedes. Cette tranfparence eft fî grande dans ces animaux j que fouvent on ne fongeroit point du tout à ks obferver , s'ils ne faifoient pas quelque mouve- ment, 8c elle peut fort bien faire qu'ils échap- pent à la vue, même avec le fecours du meilleur microfcope , lorfqu ils abandonnent le féjour de leur liqueur ^ en grimpant le long du col des fur les Etres micro fcopiques, 87 vafes pour fe changer en chryfalides» Il eft fore pofTible, ajouteront ces mêmes Philofophes, de fuivre ceci attentivement avec l'œil , mais il n'ell: pas également facile de pouvoir faifir le moment fortuné où ce paflage s'opère. CHAPITRE VII. Examen de quelques autres Phénomènes qui appartiennent à ce fujet. J E me fuis alTez étendu fur les phénomènes que je viens de rapporter : il en refte deux qui pa- roilToient rentrer dans la même clafTe , & fur lefquels je voudrois. m'arrêcer un moment j M. de Nccdham prétend en tirer de nouvelles preu- ves 5 qui doivent venir à l'appui de fon opinion o Le premier phénomène concerne les filamens que jettent les femences que l'on a fait infufer : on fçait que les petits lambeaux dans lefquels elles fe partagent ^ nous paroilTent s^agiter, faire des efforts 5 6c pafTent vifiblement d'un lieu à uii autre , comme M. de Ncedham lui-même en con-^ vient 5 tandis qu'auparavant on les avoit vus fouvent en repos , & comme immobiles. H m'eft arrivé ^ nous dit M. d& Ncedham , de voir un F iv 88 Nouvelles Recherches atome fe détacher des autres , qui alors n'a- voient aucun mouvement, &, qu'après' avoir parcouru un efpace huit ou dix fois plus grand que la longueur de fon corps , il s'arrêtoit au milieu des autres atomes , puis reprenoit fa route de nouveau , & la fuivoit avec une allure fem- blable à la première. Or , nous ne dirons pas que ce mouvement foit fpontané , tant parce que les atomes ne favent point éviter les obfta- cles qui fe rencontrent devant eux , que parce qu'ils n'ont pas les autres marques caradériîli- ques de la fpontanéité. On ne prétendra pas non plus qu'il faille attribuer cela à une commotion, à une fermentation de la liqueur, ou bien à une évaporation des parties volatiles, puifque nous voyons fouvent un gros atome fe détacher d'un plus petit, tandis que celui-ci refte en repos. C'eft donc l'ouvrage d'un principe interne , ou d'une force qui agit fur chaque élément dé ces atomes vifibles , & les détermine à pafTer du règne végétal dans le règne animal, ou plutôt c'eft par Tadion de ce principe que les petites parcelles des femences commencent à fe trans- former en de vrais animaux. Ce principe a non- feulement un pouvoir de cqiI'ù nature^ mais il e(l encore doué de celui de faire rentrer ces mêmes animaux dans la clalTe des plantes, fur les Etres micro fcopiques: 8p M. de Necdham a encore fait la découverte d'un autre phénomène : félon lui, plufieurs animaux, après avoir été formellement engendrés par les plantes, fe convertilTent de nouveau, par un jeu fîngulier de la nature , en de petites plantes d'une autre efpece ; ces plantes redeviennent , à leur tour , des animaux d'un grade inférieur , & ceux-ci encore des plantes , & ainfî du refte. Pour ce qui regarde le premier phénomène cité par M. d& Necdham^ j'ai obfervé plufieurs fois, qu'indépendamment des animaux aquati- ques , les autres petits corps étoient auflî pour- vus de mouvement ; qu'ils n'éroient pas vraiment des animaux , mais de petites portions de ma- tière qui avoient pu fe dilToudre par la macé- ration -, & pour ne pas trop m'étendre fur ce fujet, je me bornerai à un feul exemple. Dans une infufîon faite avec de la graiiTe de veau, on voyoit une fourmilliere de très-petits animaux, & on diftinguoit , parmi eux, d'autres corps qui paroifToient avoir des cara6teres fort différens. Les animaux avoient une figure ronde & beaucoup de tranfparence , remplis au-dedans des petites bouUes que Ton a coutume d'y voir. Pour les petits corps, ils étoient opaques, courts & inégaux. Geux-là fçavoient éviter , dans leur courfe , les obftaçles qui fe rencontroient devant ç6 Nouvelles Recherches eux 5 changeoient fouvent , ôc tout - à - coup 3 leur marche directe en rétrograde , & revenoient fur leurs pas , tandis que ceux-ci , en fe tranf-= portant d'un lieu à un autre , donnoient aveu- glément dans les corps qui fe trouvoient fur leur paffage ^ & paroiiToient vifiblement ne fui- vre aucune route déterminée. La matière même , dont ils paroiiïbient formés , étoit une véritable^ graifife , divifée en petits fragmens , ce que l'on connoiiToit évidemment à la reifemblance qui fe trouvoit entr'eux de les autres parties qui entrent dans la compofition de la grailTe , feu- lement il y avoit cette différence qu'on leur voyoit 5 comme je l'ai dit , une forte de mou- vement 5 tandis que la graiife étoit abfolument immobile. Je ne penfe cependant point, malgré cela, qu'il faille légitimement en conclure que le mouvement des petits corps , obfervés par notre Auteur , foit une preuve évidente du paffage d'une matière du règne végétal dans ie règne animal , puifqu il eO: très-polTible , fi je ne me trompe , de donner à ce phénomène une autre explication qui me paroit beaucoup plus direde & plus naturelle. Jaloux de fçavoir au jufle ce qu'étoient ces petits morceaux de gcailTe qne je voyois rouler far les Etres microfcopiquesi $v çà & là alTez irrégulièrement , je voulus les délayer avec un peu d'eau, parce que celle dii vafe étoit réduite en bouillie épaifle par l'éva- poration continuelle qu'elle avoit éprouvée : je pris donc , avec la pointe d'une plume à écrire, un peu de cette liqueur , qui , au microfcope , étoit un amas d'anim-alcules & de morceaux de graifTe , les uns en mouvement , les autres en repos \ je la détrempai , je la délayai avec une goutte d'eau pure , & en effet les petites parties de la graiffe en devinrent bien plus déliées , mais prefque toutes demeurèrent en repos ; la liqueur ne fit que s'enrichir d'un grand nombre d'animaux , ce qui vraifemblablement ne pou- voit pas provenir de mon eau , puifque je l'avois vifîtée auparavant , .& que je n'y avois rien trou- vé qui donnât aucun (igné de vie. Je jugeai donc que les petits morceaux de graifTe , qui paroif- foient fe mouvoir, ne pouvoient être autre chofe que la demeure des animaux de l'infufion , qui , par les différens efforts qu'ils faifoient en s'a- gitant dans cette enveloppe , donnoient à cette graiffe un mouvement circulaire. Il n'eft pas fort étonnant qu'après avoir brifé ce tégument > ils foient venus fe joindre aux autres animaux ^ pour en augmenter le nombre. Cette expérience ^ faite exaclement , à diffé- ^i, Nouvelles Recherches rentes repiifes , m'a toujours donné les mêmes réfukats , & toutes celles que j'ai faites par la fuite 5 n'ont fervi qu'à m'affermit dans mon opinion. On fçait que toutes les graines qui font mifes en infufion ^ ont une tendance natu- relle a fe corrompre , au bout de quelques jours, principalement en été , & que l'eau les divife , de façon que ce ne font plus que des points de matière prefque infenfibles. Or , cqs points , on les auroit pris pour de vrais animaux , parce qu'ils étoient tous en mouvement , fi l'on n'eue pas fait attention qu'un mouvement de cette nature n'avoir rien de régulier , tandis qu'on voit évidemmei:\t le contraire dans celui àes animaux ; c'étoiè une agitation aveugle , qui appartenoit à un autre principe ; & cela fe ma- nifefla, en ce qu'ayant détrempé avec de l'eau une portion de cette matière , on l'a vit four- miller par - tout d'un déluge d'animaux , qui , d'abord attachés , & unis à Îqs parties , fe dé- roboient à l'œil , & ne faifoient paroitre qu'un bouillonnement général &c confus. Or 5 en fuppofant la vérité de ces phéno- îTîenes, pourquoi ne prononcera-t-on pas, fans craindre de fe tromper , que les atomes de M. de Needham , malgré le mouvement qui paroît les animer ^ ne font point àQS portions de la fur les Etres microfcopiques^ pf graine qui commencent à s'animer , mais feule- ment de petits animaux qui s'y trouvent empri- fonnés , Ôc que les efforts qu'ils font , occafion- nent le tranfport de ces atomes d'un endroit a un autre. Voila ce que j'ai cru devoir en penfer d'après une infinité d'obfer varions qui n'ont fait qu'a- jouter de nouvelles lumières à celles-ci. J'en ai le témoignage de mes yeux , pour avoir vu évidemment des groupes d'animaux fortir de ces petites portions des femences dilfoutes , après s'être agité en rond , & porté en différens en- droits 5 de la même manière que ceux qui ont été découverts par notre Auteur. Que s'ils ref- toient enfermés dans ces morceaux de la graiffe ou des graines , c'étoit probablement , ou parce qu'ils n'avoient point aifez de force pour s'affran- chir de cette prifon obfcure , ou parce qu'ils ne cherchoient point encore à en fortir , par le plaiiîr qu'ils trouvoient à féjourner dans ces de- meures fombres, mais agréables pour eux. On en a une preuve dans ceux qui s'attroupent par goût au milieu , ôc à l'entour des petits mor- ceaux de raatiere que l'on a faits macérer, fans jamais fonger à changer de place. Venons maintenant au fécond phénomène , je veux dire au célèbre changement des animaux 54' Nouvelles Recherches €n végétaux. Il eft fâcheux que M. dt Needham fe foit contenté de prendre la peine de nous le dire, (i) & qu'il n'ait pas voulu nous apprendre comment il eft parvenu à cette découverte , ou même nous faire part des précautions exades qu'il faut mettre en ufage pour cela j peut-être, s'il eût eu cette attention , auroit-il diminué la répugnance qu'éprouvent bien des gens pour admettre une métamorphofe ii étrange , ôc il bizarre. Je me fens alfez de courage pour dire qu'un femblable miracle , dans la nature , eft tout-à- fait nouveau pour moi ; il n'y a point d'expé- riences que je n'aie mifes en ufage avec une patience incroyable, point d'artifices que je n'aie employés pour parvenir à cette découverte, &: acquérir la-deftlis quelque certitude , mais foit défaut de lumières nécelTaires pour une chofe aufïî délicate , foit faute d'avoir fçu clioifir une main aiTez heureufe pour des obfervations de cette nature , j'avoue ingénument que tous mes efforts , à ce fujec , ont été abfolument inutiles de vains. Je m'étois bien apperçu 3 comme je l'ai déjà dit plufieurs fois, des différens cliangemens^qui arrivent dans les infufions j teb font la prodi- gieufe multiplication des aninmux^ la diminution fur les Etres mlcrofcopïquesl 5)5 qui s'en ed: faite par degrés , & leur difparition totale. Souvent à l'extindion d'une efpece en fuccédoit une autre , fouvent plufîeurs efpeces , confufément unies , fe combinoient enfemble ; mais il n'étoit pas poiTible de fuivre , jufques dans les plus petites circonftances , le paîîage que font ces animaux d'un état à un autre, &: de s'en alTurer dans ces fortes d'infufions , fans être auparavant en état de retirer toutes les plus petites gouttes du fluide. Les racines & les ger- mes mêmes , que l'on place fur les cryftaux , ne font point , à mes yeux , exempts de difficulté ^ vu cette quantité de petits rameaux verds qui les entourent , & ces paquets de filamens que le tems fait naître dans les cryftaux ; tout cela peut porter l'Obferyateur à douter s'il faut attri- buer ces produdions à la fubftance des animaux qui périiTent , ou plutôt fi elles appartiennent aux germes & aux racines. Le parti enfin pour lequel je me déterminai , fut de m'en tenir à ces deux expériences. Je fis infufer douze germes , à l'ordinaire , dans une douzaine de cryftaux , ils étoient tous tirés de femences différentes ; je retirai enfuij:e ces germes, lorfqu'ils eurent donné à la liqueur une grande abondance d'animaux j j'enlevai avec eux le duvet ; ce fut un embarras de moins dans ï)(^ Nouvelles Recherches mes cryftaux. Quant aux filets , comme j'ai dé- montré qu'ils ne provenoient que des fibres & de la diiïblution des végétaux , il n'y en avoit pas une certaine quantité , parce que les germes n'avoient pas féjourné aflfez long-tems dans la liqueur. On n'y voyoit uniquement qu'une infi- nité de petits corps qui troubloient la tranfpa- rence de l'eau , mais qui ne dévoient nullement empêcher l'exécution du deffein que je m'étois propofé. L'autre partie de mes expériences fut exécutée dans un nombre égal de cryflaux où l'on avoit verfé l'eau de douze infufions diffé- rentes 5 &: qui y toutes , contenoient beaucoup d'animaux. Muni donc de mes vingt - quatre cryftaux, que j'appellerois volontiers des cryf- taux animés , & dont chacun pouvoit aifément être préfenté au microfcope , fans occafionner aucune altération , ni aucun dérangement , je me difpofai à les examiner attentivement tous les jours , pour parvenir , par ce moyen , a la découverte d'un fecret auffi caché.' Il étoit donc néceifaire que les animaux par- vinffent à une certaine maturité avant que de fe transformer en plantes : tout me paroifîbit bien préparé pour cela j on ne pouvoit gueres leur donner un fluide plus homogène & plus favorable ^ l'eau ne leur manqua jamais : j'eus foin fur les Etres mîcrofcopiques . 97 foin d'en renouveller les gouttes , en puifant dans celle qui avoit fervi à faire Tinfuiion -, mes animaux avoient abondamment la nourriture nécefraire à leur fubfidance , parce que le fluide fut toujours rempli de ces petits corps qu'ils recherchent avec tant d'avidité. Ceci fe pafToic le 25 du mois d'Août , & le 2^ il ne paroilToic aucune difrérence dans tous les cryftaux , excepté que la liqueur étoit devenue plus claire & plus tranfparente par le dépôt des matières hétéro- gènes qui s'étoient précipitées au foçd , & y formoient des fédimens de différentes couches. Le 27 & le 28 ces fédimens augmentèrent , & par ce moyen la liqueur s'éclaircit , mais cela n'apporta aucun changement dans les animaux: qui l'habitoient. Le 30 je m'apperçus de quel- que diminution dans deux ou trois efpeces de ceux qui étoient fortis des germes ; je fixai l'œil alors fur le microfcope pour tâcher de décou- vrir s'il n'y avoit point eu en leur place quel- que nouvelle végétation , mais je ne pus rien découvrir , dans ce moment , ni même par la fuite \ mes animaux allèrent toujours en dimi- nuant. Avant qu'ils eufifent tous difparu , j'en vis quelques-uns hors de l'eau qui étoient m^orts , & beaucoup plus petits qu'auparavant j le rede G ^8 Nouvelles Recherches de ce petit peuple mourut ainfî peu-a-peu fans que jamais j'aie pu fçavoir ce qu'il éroit devenu. La liqueur fe montroit toujours plus limpide , par le moyen des fédimens précipités au centre de mes cryllaux , mais je n'y apperçus plus au- cun animal vivant. Telles furent les obfervations que je fis fur deux ou trois efpeces d'animaux , & même fur plufieurs autres 5 placées dans des cryftaux. J'en excepte quelques légères différences que je ne rapporterai point , parce qu'elles ne font pas eiïentielles : je veux épargner à mon Lecteur la peine de fuivre ces détails. Là feule particula- rité qui mérite d'être obfervée , fut que quand une efpece , qui avoit peuplé un fluide , com- mença à s'éteindre , une autre colonie , mais compofée d'animalcules infiniment plus petits, lui fuccéda , & fabfifta environ une qumzaine de jours. L'extrême petitefTe de ces individus ne me permit point d'en diftinguer les formes : je n'en pus voir qu'un nombre prodigieux & qui augmentoit chaque jour. Voilà tout ce que m'apprirent t^^ deux expé- riences: routes celles que je tentai par la fuite , ne m'éclairerent pas davantage fur ce poiht : ce phénomène , que j'avois (\ fort à cœur de dé- couvrir 5 fut toujours une énigme pour moi. fur les Etres mïcrofco piques: pp Mais fî le hafard ne m'a pas mis a portée de faire cette découverte, dois- je en conclure qu'il faudra nier Texiftence du phénomène ? La pro- fonde vénération , dont je fuis pénétré pour M. de Nccdham , m'impofe fîlence , & ne me permet point de révoquer en àome un fait qui a été avan- cé par un homm^e auiïî refpedable. Qu'il me foit feulement permis de lui faire part des foupçons que mes expériences ont pu faire naître à ceux qui ne font point partifans décidés de fon fyf- tème \ les Philofophes prudens , & ennemis de toute partialité , en feront l'ufage le plus con- venable. On pourra dire : les animaux , qui d'abord abondent dans les cryilaux y fe perdent lenterrient au bout d'un certain tems ; les petites fubftances des végétaux , difperfées dans la li- queur 5 defcendent au fond du vafe , & fouvent il arrive que ce dépôt eit fuivi d'une nouvelle claiïe d'animaux beaucoup plus petits que les premiers. Ne peut-il pas fe faire que , dans une fi grande multitude de ckofes , notre Auteur, naturellement incliné pour fon fyftême , n'ait pas toujours vu ce qu'il a cru appercevoir , foie qu'il fe foit déterminé pour cette manière d'o- pérer , foit qu'il en ait choifi une autre ? Lorfque les animaux diminuent , les iîbres fe détachetit des végétaux , 6c leurs ramifications Gij ïoo Nouvelles Recherches defcendent jufqu au fond de la liqueur ; au com- mencement on en voit peu, parce qu'elles font difperfées ça & là , m.ais en fe précipitant elles fe réuniffent, & paroiiTent en plus grande quan- tité : or 5 celui qui fait cette obfervation , & qui k trouve conforme à fa façon de penfer , ne doit-il pas naturellement être porté à croire que cet amas , auquel M. de Needham donne le nom de végétation, eft une production faite aux dépens des animaux qui viennent de difparoître ? Comme il y en a d'autres d'une efpece plus pe- tite, qui fuccédent au fédiment de cqs matières, on pourroit fe perfuader, par la même raifon, que c'eft de cette manière qu'ils ont été engendrés. Lorfque nous nous avifons de bâtir un fyflême que nous étayons fur quelque expérience favo- rable , nous avons la malheureufe habitude de nous y attacher , de manière que nous inter- prêtons toujours en notre faveur les expériences les plus indifférentes , & même celles qui font équivoques , & que fort fouvent nous croyons voir des phénomènes qui n'exiftent pas, mais dont nous délirons l'exifcence. Leuvcnoech , qui fembloit avoir fait la conquête d'un univers peuplé d'objets inviiibles , étoit fortement per- fuadé que la génération fe faifoir par le moyen des vers fpermatiques j ^ plein de cette idée. fur les Etres microfcopiques» lOi il n'a pas balancé un* inftant pour nous dire que fi on leur trouve cous les caraderes àQS animaux, une tête , un bufte , une queue , il n'en ^ut pas davantage pour être en droit de les regarder comme des animaux véritables & parfaits. Ce- pendant pluiieurs Philofophes , dont la plupart avoient beaucoup de célébrité, étoient bien con- vaincus au contraire , que tous les animaux ^ excepté les vivipares , fortoient d'an œuf. Ils" trouvèrent dans la femelle du vivipare , un amas de véficules , remplies d'une humeur limpide , qui fe coagule & fe durcit comme la glaire de l'œuf 5 lorfqu'on la préfenre au feu , & ils pen- ferent que ce ne pouvoit pas être autre chofe que le magafin des œufs de l'animal. Mais l'ingénieux- M. de Buffon a démontré évidemment que ces prétendus traits caraélérif- tiques attribués par Leuvenocch au ver fperma- tique, font moins un phénomène exiftant dans la nature, que l'ouvrage d'une imagination échauf- fée qui veut créer à^s objets. M. de Valifnieriy quoique fortement attaché à l'hypothéfe des ovi- pares 5 convient qu'il ne s'efl jamais apperçu que ces véficules dûlTent être regardées comme au- tant d'œufs dans l'animal , & il en convient avec cette candeur qui caradérife bien l'ame d'un grand Philofophe» C'eft ainiî qu'il détruit cette G iij •102 Nouvelles Recherches opinion fauflfe & trompeufe par des obferva- tionsai'épétées avec beaucoup d'exaâritude , qui font d'autant 'plus certaines , & d'autant plus convaincantes , que c'eft la feule manière de parvenir à la connoiiTance de la nature. Or, feroir-il poflible de foupçonner que M. de Ncedham fût tombé dans une erreur de cette efpece ? On fçait que l'ame de celui qui invente ^^_ naturellement vive & hardie , & que rare- ment elle marche avec une circonfpe6tion me- furée. Souvent l'éclair paifager d'une apparence qui revient à fon fyftême , lui fait dédaigner cette prudente lenteur qui s'arme de précau- tions 5 & qui pèfe fes expériences. En voilà alTez fur ce fujet : peut-être me fuis- je étendu avec trop de prolixité. CHAPITRE VIII. Expériences fur les Infiifions expo fées à raclion du feu. i_,A féconde preuve que rapporte M. ^^ A^^e^- ham , pour fervir d'appui à fon fyftême , eft ti- rée de cette fameufe expérience qui fe fait par le moyen du feu ( ï ). On foiimet à fon adion fur les Etres micro fcopiques* 103 un petit morceau de viande j enfuite on le fait infufer , & au bout de quatre jours il donne àQS animaux. Affurément on ne dira pas qu'ils foient nés àcs œufs qui aurcient pu fe trouver dans rinfufion , puifque Tadivité du feu a dû les attaquer , & leur ôter la propriété de produire , comme on voit qu'elle l'enleva aux œufs des oifeaux & des infedes , loriqu ils ont fenti un trop grand degré de chaleur. Mais il l'expérience réuflit , en fe conformant aux procédés dont nous avons parié, on fera forcé de convenir que cette multitude d'animalcules ne fuit point en nailTant les voies ordinaires de la génération. C'eft ainfi que raifonne notre Auteur Anglois ; & il a pour lui l'apparence de la vérité ; mais il auroic donné beaucoup plus de force à fes preuves, ii, à côté de cette expérience, il en eût placé un certain nombre d'autres de la même nature. Une ou deux obfervations ne doivent pas fufïïre pour mériter les fufrrages des Phi- lofoplies éclairés j on ne les obtient, ces fuf- frages, que par une chaîne de faits évidens , conformes entr'eux, & fuivis avec l'attention la plus marquée. Je penfe qu'il auroit encore fallu paffer du règne animal dans le règne végétal , en faifant Giv fi04 Nouvelles Recherches cuire & bouillir des grains de froment, de vef- ce , de bled de Turquie & de légumes femblables qui donnent beaucoup d'animaux ; en former un grand nombre d'infufions avec de l'eau bouil- lante ; les examiner avec foin , 6c comparer ce qui fe paife dans l'eau chaude , avec ce qui arrive dans l'eau froide ; car c'eft ici principa- lement que la nature nous ouvre un champ fpa- cieux oc vâile , pour fatisfaire notre curiofité fur ces fortes de phénomènes. Si ces expériences ob- fervées avec tout le foin pofllble , donnent les mêmes réfultats , & qu'on les rapporte avec candeur, toute conteftation doit ceffer dès le moment. Ce point doit paroître aux Philofo- phes de la plus grande importance. Comme donc notre Auteur ne nous a fait entrevoir qu'une lueur fort foible par fa fameufe expérience , je penfe que mon Lecteur me fçaura quelque gré de lui mettre fous les yeux le petit détail des obfervations &: des expériences que j'ai faites fur cette matière, dans les deux règnes. Je fçavoîs qu'outre les femences àes plantes, les chairs des animaux que l'on a fait macérer dans l'eau , donnent de petits corps animés , qui font fournis par la nature aux mêmes loix que les autres ^ quoiqu'on ne les y trouve pas fur les Etres micro fcopîques. îoj en aufïi grand nombre. Je formai donc une fuite de huit infufîons de viandes cuites dans Teaii bouillante. J'avois pris pour cela des chairs de différens animaux , &: je fis en mème-tems huit autres infufîons avec leurs chairs crues, pour fçavoir fi les animaux viendroienc auffi vite dans les unes que dans les autres , bien réfolu de ne pas laifTer échapper la moindre particularité, fans y donner toute l'attention imaginable. J'étois dans la plus grande impatience de voie le fuccès de mes travaux , lorfqu'au bouc de deux jours tout me réuflic parfaitement, & d'une manière bien conforme à l'opinion de M. de Ncedham, Il y avoit des animaux dans l'infufion de chair de bœuf crue \ je jettai l'œil fur celle qui avoit paffé par le feu , & j'y en trouvai de même qui étoient fort vifs Se fort agiles ; leurs mouvemens n'avoient rien de gêné dans toutes mes infufions ; cependant la vifcofité de la liqueur épaiffie, les contraignoit de s'arrêter de tems en tems ; mais toutes les fois que je levois cet obftacle , en y mêlant un peu d'eau , leurs courfes devenoient plus rapides de de plus de durée , comme il m'étoit fort facile alors de les obferver & de les diftinguer, ils me paru- rent tous d'une belle forme , & portant fur eux les mêmes caraderes. [10(5 Nouvelles Recherches Ces animaux fe montrèrent encore a meâ yeux pendant cinq autres jours ; enfuite ils di- minuèrent. La viande avoit été portée à une corruption infoutenable. J*en vis encore quel- ques-uns les jours fuivans , & qui fe maintinrent pendant quelque tems dans \qs infufions bouil- lies. Je ne m'amuferai point ici à rapporter tou- tes ces circonftances j ce feroit m'appéfantir fut des minuties. J'obferverai feulement que les animaux ne difFéroient point de ceux qui avoient paru dans les infufions froides. Cette conformité fembloit me promettre des réfultats femblables pour la fuite de mes expé- riences , de manière que le feu dût ne déran- ger en rien la naiffance des animaux , ou du moins y être peu contraire , mais des obferva- tions plus fuivies fervirent bientôt à me défa- bufer , & m'apprirent qu'il eft bien facile à un Pliilofophe de tomber dans l'erreur, lorfqu'en- traîné par la précipitation , il veut ériger en règles générales le fuccès d'un petit nombre de tentatives. En effet, de vingt -cinq infufions tque je lis de nouveau avec des chairs rôties , une feule me fournit des animaux , &: ce fut celle où j'avois mis de la chair de veau, cçàx-- pée en petits morceaux , & écrafée , tandis que les autres 5 qui étoient en grand nombre ^ n'en fur les Etres micro fcopiques. 107 donnèrent point , lorfqu'elles eurent fenti Tac- tion du feu. Il eft bon de remarquer ici que fî je m'étois décidé inconfidérément, & avec trop de légè- reté 5 j'aurois cru appercevoir des animaux dans prefque toutes mes infudons , puifque la plus grande partie paroifToit vraiment , au premier coup d'œil, en contenir. Leur eau étoit deve- nue épaifTe & infecte. Dans les unes , elle tiroit fur la couleur de feuilles mortes, & elle pre- noit dans les autres , la teinte d'un rouge obf- cur. J'attribuai cet effet, autant à l'adion du feu qui étoit devenu un puifTant difTolvant de la matière animale , qu'à la putréfadion qui en avoir détaché lentement les parties. L'eau de cette infufion, vue au microfcope, ne préfen- toit qu'un amas de fubftances farineufes , ou plutôt de petits grains ronds Se polis , qui avoient une grande facilité pour fe mouvoir , & que l'on eût aifément pris pour un tas d'animaux; mais en laifiant repofer ce fluide iî propre à faciliter le mouvement , on voyoit de même tous ces petits grains rentrer dans le repos, fans donner aucune marque de la plus léger® agitation. Je me fuis aflliré par un nombre infini d'au- tres expériences, de cette bizarrerie du feu, qui rio8 Nouvelles Kecherches tantôt dépouille les infufîons de leurs habitatis^ 6c tantôt leur en donne , après un délai d^ quelques jours. On ne foupçonnera alTurémenc pas que le feu n'ait pas pu avoir afTez d'effica- cité fiir celles qui renfermèrent des animaux, puifque fon degré avoir été porté dans quel- ques-unes 5 au point qu'une longue ébullition avait entièrement défuni toutes les chairs. J ai vu la même chofe arriver aux infufions préparées avec les matières végétales. Parmi une vingtaine de celles que je fis à la fois , 6c avec différentes graines , dans le courant du mois de Septembre , il y en eut deux qui donnèrent des lignes de vie j ce furent celles de chenevis & de falade : mais au printems fuivant, les chofes prirent une tournure toute différente. J'avois fait bouillir pendant une heure 6c de- mie fept efpeces de légumes , fçavoir , des haricots blancs, des haricots rouges, des vef- cts , àts lentilles , du bled de Turquie , de l'é- péautre 6c du froment j je verfai dans mes vafes quelques gouttes de l'eau dans laquelle mes légumes avoient bouilli; tous, excepté un feul, renfermoient des animaux ; mais aupara- vant j'avois fait deux obfervarions qui me pa- roifTent mériter quelque attention \ la première eil que Tinfuilon d'épéautre bouilli fourmilloic fur les Etres mlcrofcopiquesl jôjJ d'animaux dès le commencement du troifîeme jour 5 tandis que j'en appercevois à peine dans celle de la mêm.e graine^ qui avoit été faite à froid : car j'avois eu foin de préparer fans feu fept autres infufions femblables. La féconde re- marque que je fis , c'efl: que le bled de Turquie qui avoit bouilli , fe remplit d'animaux deux jours avant celui qui n'avoit pas fenti le feu, La graine de trèfle bouillie me fournit aufîî une particularité fort amufante. Outre cette multitude infinie d'animaux , qui étoient égale- ment dans les infufions préparées fans feu , j'y vis un anguille belle & tranfparente , Fig, I2, PL S* & de l'efpece de celles qui vivent dans le vinaigre ; elle fendoit le fluide avec fa queue longue & forte j fa couleur étoit fi brillante , &c fes mouvemens fi vifs , qu'à chaque inftant elle fortoit du champ du microfcope , 6c que je l'aurois perdue de vue entièrement , Çi je n'a- vois pas eu foin de tenir le verre de manière > qu'elle fût toujours dans le milieu du cryftaL Mais fes mouvemens fe rallentirent lorfque le fluide commença à fe difijper par l'évaporation , 6c elle demeura entièrement immobile, lorf- qu'il fur defieché. Ce fut alors que je pus exa- miner attentivement le méchanifme intérieur de fes organes. Sa peau HlTç 6c unie me parue fïio Nouvelles Recherches toute parfemée de globules briilans ; ces glo- bules n'étoient point amoncelés comme dans les autres animaux ^ mais ils s'étendoient en ligne droite depuis la tête jufqu à la queue , qui étoit terminée par une pointe très-déliée. Je ne vis qu'une anguille pour cette fois ; mais le jour fuivant , elles s'étoient multipliées au point , que dans une feule petite goutte , j'en découvris trois grandes & dix petites , fans compter deux autres qui , étant mortes ^ courbées en forme d'arc , flottoient au gré de la liqueur. Les plus belles de ces anguilles égaloient en longueur les plus grandes de celles que l'on trouve dans le vinaigre ; mais elles les furpaf- foient en grolTeur, Elles étoient douées d'une extrême agilité , & , félon l'ufage des animaux micro fcopiques, elles marchoient par bandes, 6c s'élancoient fur les morceaux de matière cor- rompue. Ce fpeélacle fe préfenta fouvent à mes yeux , 6c je ne pouvois point me lafTer de le contempler. Il eft tems de finir ce iChapitre par la con- clufîon générale que je tirai d'une centaine d'ex- périences que j'avois entreprifes dans diftérens tems de l'année \ ce fut, que l'action du feu peut bien ôter aux fubftances animales & vé- fur les Etres microfcopiques\ xii gétales la faculté de produire des animaux , mais qu'il s'en trouve plufîeurs auxquelles il ne Tenleve pas. Cette produdion eut égale- ment lieu , foit que les fubftances ne refîen- tiffent le feu que pendant quelques heures , foit qu'elles éprouvafTent fon adion au point d'en, être entièrement défunies. Enfin , il fut égale- ment indifférent, ou de faire macérer dans l'eau froide les fubftances qui avoient éprouvé l'é- bullition , ou de faire bouillir les infufions déjà préparées , & de les laifTer refroidir enfuite dans les mêmes vafes où elles avoient fubi ra(5lion du feu, pour les difpofer a la macération. La feule différence que l'on remarque entre les animaux des infufions froides., & ceux des infu- fions préparées au feu, vient de la grandeur & de Fa forme des uns & des autres. ii}£ Nouvelles Recherches C H A P I T R E I X. Les Objections formées par un François anonyme contre les expériences des infu^ fions faites au feu ^ ne fuffifent pas pour les détruire, Apre*s avoir rapporté les expériences faites au feu , & qui viennent à Tappui de celle qui a été citée par M. d& Nudham , pafïbns mainte- nant aux objedtions qu'a formées l'Auteur du Livre qui a pour titre , Lettres à un Américain. Cet Auteur femble avoir fait tous (qs efforts pour renverfer de fond en comble le fyftême de M. de Buffon fur la génération ; ce ne font par-tout que àQs faillies îngénieufes , & àQS jeux de l'imagination ; mais dans la onzième Lettre, il fe déchaîne avec fureur contre M. de Needharît y Se n'omet rien pour détruire fon opinion. Ce n'eft pas afTez de vouloir cofnbattre îe fentiment de ces deux grands hommes , il ofe encore entreprendre de jetter du ridicule fur leurs écrits. Laiffons-là les bons mots ôc les plaifanteries qu'il répand avec complaifance , ôc contentons-nou§ de rapporter les deux objec- tions , fur les Etres mîcrofcopiques^. 115 rions, avec lefquelles il entreprend de nous enle- ver l'expérience de M. de Needham. Le premier de le plus fort des argumens de cet Ecrivain, eft la défiance qu'il tâche d'inf- pirer 5 & le doute qu'il veut que nous ayons fur ce fait , il foupçonne que c'eft là plutôt une penfée ingénieufe de l'Auteur , qu'une vérité trouvée. Après cette fuppofîiion gratuite , il palTe à fa féconde preuve j àc plein de con- fiance dans la force de fon raifonnement, voici comment il s'explique : tous les animaux que l'on voit par hafard dans les infufions qui onc été expofées au feu, ne s'y trouvent qu'autant qu'ils ont pu furmonter l'aclivité de la flamme , ou que la chaleur y a fait éclorre les œufs. Mais d'après M. de Needham même, on ne fçait, ni quel degré de chaleur on peut faire fupporter aux animaux dans le premier cas, ni celui qui eft néceffaire pour faire ouvrir & éclorre les œufs dans le fécond. Tel eft le raifonnement de cet Anonyme. On. fent affez que les expériences dont j'ai fait men- tion dans tout le cours de cet Ouvrage , ne permettent pas trop de déférer à fon opinion* Je me trouve donc contraint de lui faire part de la mienne , avec toute l'honnêteté polîible ; mais je dois le faire en même-tems avec une liberté H 114. Nouvelles Recherches vraiment philofophîque. S'il m'eft permis d'an- noncer mon fentimenc au public avec toute la franchife dont je fais profeflion , je ne peux pas me difpenfer de dire à cet Auteur que ce n'a été qu'avec le plus grand étonnement, que je l'ai vu marquer des défiances , & jetter des doutes fur l'expérience de M. dsr Needham. Je fçais bien que ce Philofophe a fecoué ces pré- jugés ridicules , qui ont infedé une fi longue fuite de fiécles au grand détriment de la Philofophie 5 préjugés qui portoient nos Pères à embrafier aveuglément l'opinion d'un homme, que le tems & la renommée avoient rendu célèbre ; je fçais encore qu'aujourd'hui rien n'efi moins refpedé que les grandes réputations , mais je n'ignore pas non plus que lorfqu'il efi: queilion d'obfer- vations & d'expériences , il faut les avoir répé- tées avec beaucoup de circonfpedion , avant que d'ofer prononcer qu'elles font douteufes du men- fongeres. Celui qui viendra nous en parler avec mépris , & qui ne les réfutera que par des écrits compofés a la lueur d'une lampe trompeufe , ne fera point en état de foutenir les regards à^s Sçavans , & pourra courir les rifques de fe voir condamné à ramper dans la clafie des Philofo- phes obfcurs. Si l'Anonyme , au lieu de fe repo- fer avec tant de- fécurité fur la fublimité de fon fur les Etres microfco piques, ii^ génie , eût daigné rechercher le témoignage de fes fens, & s'il fe fût appliqué à faire, dans le particulier , quelques petites expériences , je fuis convaincn qu'il n'auroic jamais fongé à en- treprendre une réfutation de cette nature , ou qu'il fe feroit montré dans cette carrière , d'une façon bien différente. Il ne falloir donc à cet Ecrivain que le té- moignage de fes yeux , pour le convaincre qu'il a grand tort de vouloir douter de rexiftence des animaux dans les infafions auxquelles on a fait fubir l'action du feu , ou du moins dans la plu- part d'entr'elles ; la réalité de ce fait anéantie toutes fes fuppofitions. Lorfque je dis que les infufîons que l'on a fait bouillir , renferment à^s animaux , je ne prétends pas pour cela qu'il s'y en trouve im- médiatement après qu'on les a retirées de defïas le feu, & dans le moment où on les préfente au microfcope , mais j'entends qu'on les laiiTe repofer pendant quelques jours , fuivant la char leur de la faifon , afin de donner aux matières le tems de fermenter , de fe macérer , 3c de fe diffoudre ; alors on ne manque pas d'y en trou- ver plus ou moins abondamment. En fuivanc ce procédé , notre Auteur eût découvert la fauf- fêté du principe qu'il introduit , fçavoir que les Hij 1 1 6 Nouvelles Recherches animaux ne naifTent dans les infufions bouillies qu'autant qu'ils ont pu rélifter à l'adtion du feu , puifque l'expérience nous a convaincu , comme j'en ai fait robfervation ailleurs , qu'ils meurent tous dans un fluide qui pafTe tant foit peu le degré d'une chaleur modérée. Je ne veux rien oppofer à l'opinion pour la- quelle il paroit avoir du penchant , c'eft-à-dire qu'il faut une chaleur d'une grande intenfiîé pour aider la naiiTance des animaux : pour moi , je ne donne point dans cette erreur. S'il nous dit qu'il faut une chaleur douce 3c modérée pour donner la vie au fétus , ou embrion qui eîl dans l'œuf de l'animal , c'eft une chofe que perfonne n'ignore ; elle efc aîTez connue des femmes mêmes qui font éclorre des vers à foie. Mais cela n'empêche pas qu'il ne foit bien dé- cidé que rien n'eO: plus nuifible à ces mêmes CEufs qu'un certain degré d'une chaleur confi- dérable j nous en avons la preuve chaque jour dans les gros œufs^ dont une légère ébullition coagule le fluide & le durcit. On voit même que l'adion violente de la chaleur déchire les ligamens qui tiennent le jaune fufpendu au mi- lieu des deux blancs ; détache de la membrane la partie qui renferme l'organifation délicate de l'animal , la corrompt j la déforme &z la fur les Etres micro fcopîques , 1 17 jette pendant la cuifTon jafqu'au centre de l'œuf. Ce phénomène a été le fujet d'une difTerta- tion fort fçavante de M. Balbi , Dodeur en Médecine de Boulogne. M. de Valïfjikri a ob- fervé que les infedes ont la prévoyance de placer leurs œufs , en été , de manière qu'ils foient toujours expofés au nord ou à l'orient ° qu'ils les attachent fur l'envers des feuilles , ou au milieu des feuilles mêmes , qu'ils replient foi- gneufement tout au tour , en forme de cornet 5 & que 5 dans quelque endroit qu'ils les placent, ils ont toujours l'attention de les dérober aux ardeurs du foleil , dans la crainte que îç,s rayons ne les échauffent, & ne donnent la mort à l'a- nimal au travers de fa petite enveloppe ? En effet , il nous fuiEt de jetter les yeux fur ce tifïu fin & délicat qui compofe la machine intérieure de l'animal, que l'on pourroit regar- der comme un amas léger de filamens de la foie la plus déliée , & l'on s'appercevra aifé- ment quels ravages doit y caufer le mouvement irrégulier d'une chaleur intefline. Si nous avons, vu que ce mouvement peut , en réchauffant le fiuide 5 donner la mort aux animaux microfco- piques lorfqu'ils font déjà forts &: vigoureux, à plus forte raifon pourra - 1 - il les faire périr dans leur enveloppe , puifqu'ils y font encore Hiii [ïiS Nouvelles Recherches foibles &: tendres , & que la chaleur lui prête bien des forces pour opérer ces effets. Que l'on ne m'objede pas ici que la pelli- cule qui fert d'enveloppe, quelque dureté qu'on. lui fuppofe 5 pourra devenir un bouclier impé- nétrable qui mettra ces petits êtres à l'abri de l'adion de la chaleur. Il me fera facile de dé- montrer la faufTeté de cette objection par un exemple tiré des femences des plantes qui fe corrompent, & perdent la faculté de produire lorfqu'elles ont éprouvé l'action du feu ; cepen- dant leur fubftance eft d'une certaine dureté , & la nature les a manies , outre cela , d'une écorce très- propre a réiifter au choc des corps qu'elles rencontrent. Quelque convaincu que je fujQe de ctix^ vé- rité, je voulus 5 l'été dernier, en acquérir une nouvelle preuve par le témoignage de mes yeux» Je ramaiïai différentes graines toutes couvertes d'une écorce fort dure , & je les jettai dans l'eau bouillante pendant i'efpace d'une demi-heure j enfuite je les enfonçai légèrement dans un vafe plein de terre : c'étoit une terre choifie & qui convenoit à leur qualité : j'eus foin avec^ cela de les arrofqr légèrement : cependant aucune de mes graines ne germa ; & en effet il n'étoit yas vraifemblable qu'elles puîTent germer* fur les Etres microfcopiques, iip J'ai de même eu la curiofité de prendre les noyaux de quelques fruits que j'avois faits bouil- lir 5 comme ceux de pêches , de cérifes , d'aman- des, de prunes, &c. j'ai vu que non-feulement l'écorce intérieure s'étoit imbibée d'eau , mais encore que cette pellicule légère qui enveloppe le germe , s'en étoit détachée , & que le germe même paroiifoit comme tuméfié par l'eau bouil- lante qui l'avoit pénétré. Si telle eft l'adion du feu que , dans l'efpace de quelques heures , elle enlevé aux fem.ences la faculté naturelle qu'elles ont de germer , quelle réiiftance pourront lui oppofer de petits œufs que l'on fuppoferoit fe trouver dans les infufions ? Cette vérité fe voit , non-feulement par ce qui fe paffe dans les grands oeufs , comme nous l'avons dit , mais encore par ceux des infedes ^ tels font 5 par exemple 5 les lentes des puces > les petits œufs des groiTes & des petites mou- ches 5 ceux des araignées &: de cette multitude immenfe de papillons , qui , dans l'inftant où ils arrivent au degré d'une chaleur trop forte , fe contractent &: fe durci (Tent ; j'en ai fait l'é- preuve moi-même en en jettant une prodigieufe quantité dans de l'eau chaude. Si cela arrive aux œufs Aqs grands ^ à.QS .petits animaux ^ commeat pourra- t-on en pré- Hiv ^ - [126 Nouvelles Recherches ferver ceux des animaux microfcopiques , d'au- tant plus que la chaleur qu'ils reçoivent par i'ébuîlirion de l'eau , a plus d'intenfîté & même dure plus long-tems ? Je devrois peut-être rapporter ici une autre objeclion que citent ceux qui tiennent 'jour la défenfe des œufs dans les infufions j^iais elle m'a paru li foible , que j'aurois pu la pafïêr fous iilence fans donner aucun fujet de plainte aux Partifans de ce fyftème , cependant pour ne leur laifTer aucun prétexte , je vais rapporter cette objection, ôr en même-tems y répondre. On die donc que la violence du feu n'a au- cune action fur les œufs , ou du moins que cette aclion eft très-foible, &: on s'appuie fur ce que l'extrême petitefTe de ces œufs ne donne aucune prife à cqi ag:?nt deflmcleur qui ne peut que fort difficilement les rencontrer & les anéantir. Mais un raifonnement de cette forte efl ab- folument contraire à toutes les notions que nous avons du feu. L'expérience nous démontre cha- que jour qu'il n'y a dans l'univers entier ,- au- cun corps 5 foiî folide, fcit fiuide , que le feu n'inveiliiTe de toutes parts , quelque denfité que puiffenr avoir fes parties , &: dans quelques vafes qu'on le renferme. Lés autres fluides &: les ef- prits les plus fubtils que l'on conferve dans des fur les Etres microfcopiques. i2î vafes de verre ou de métal, n'ont pas autant d'adiviré. Le grand Boheraave , dont l'antorirc eft d'un 11 grand poids auprès des Philofophes modernes dans les matières qui concernent le feu , a obfervé qu'un grain d'or fondu avec cent mille grains d'argent, s'incorpore de manière qu'il en réfulte un mélange parfait , malgré l'inégalité des dofes ; & ce mélange eft Ci effi- cace, que fî l'on prend un grain dans la maOTe en- tière, For, qui fe trouve dans ce grain, garde la proportion qu'il avoir auparavant avec l'ar- gent ; c'eft-à-dire , qu'il eft dans le tout, comme un eft à cent mille. On fera en droit ^ je crois , de prononcer d'après cette expérience , que l'adlion du feu attaque juf- qu'aux élémens des métaux les plus durs, qu'elle enlevé peu- à-peu l'adhérence naturelle de leurs parties , les détache les unes des autres , & les met en fudon. Si cet agent a une fi grande fa- cilité pour agir jufques fur la moindre partie de la matière , comment eft - ce que l'ébul- lition qui a prodigieufement exalté le fluide, n'aura livré aucuns afifauts à tous les animalcu- les qu'il contenoit, 3c ne les aura pas pénétrés? En qualité de corps, ils ont leurs pores com- muns : on peut même croire , en voyant cette analogie que la nature a répandue par-tout avec [122 Nouvelles Recherches complâifance 5 qu'ils en ont reçus 5 comme les gros œufs , une autre forte de pores plus larges & plus ouverts 3 que Ton appelle communément Voies bdliniennes^ du nom de l'immortel Bdlini qui en a fait la découverte : leur ufage eft de cribler l'air qui entre dans l'œuf, & qui va juf- qu'à Fembrion. Eft-il vraifemblable que le fluide ignée 5 qui eft par fa nature très-pénétrant & très- fubtile 5 ne puifTe pas trouver le moyen de s'ou- vrir un palfage libre à travers les premiers po- res , n'entre pas en plus grande abondance dans les autres , ne coagule pas à l'inftant les humeurs qui fe trouvent relTerrées dans un point , & ne détruife pas les tendres organes de ces vermif- feaux par la vivacité de fon adion ? Voilà , à ce que je penfe 3 une pleine réfu- tation du fyftème de ceux qui veulent que les œufs aient la propriété de fe conferver dans les infufions que l'on a fait paiîer par le feu ; mais croirons-nous pour cela que les Partifans du fyf- tème des ovaires voudront bien nous accorder que du moins les animaux qui paroiiTent dans les infufions bouillies , ne doivent point leur exiftence à des œufs ? Je doute qu'ils en convien- nent. La raifon qu'ils oppofent , eft que il les in- fufions, qui ont fenti le feu^ ne renferment plus aucun germe , il eft fort podible que fe trou- fur les Etres micro fcopiqu es. 123 vant expofées à un air libre , cet air porte des cEufs dans les vafes , comme nous allons le voir dans le Chapitre fuivant. CHAPITRE X. Examen des Expériences précédentes , fai- tes avec de nouvelles précautions pour confirmer lefyflime de M, de Needham. \2 u'i L y ait dans la vafte région de l'air , que nous refpirons , des particules terreftres , aqueu- {^s y fulfureufes 5 métalliques, falines , &c. que ces particules y féjournent , qu'en s'égarant çà & là, elles s'accrochent aux corps auxquels par hafard s'attachent les œufs des infedes , c'efl un fait fur lequel le célèbre Chymifte , que j'ai nommé plus haut, ne veut pas que nous ayons aucun doute. Il fit bouillir pendant quelque tems un morceau de viande dans de Tefprit de vin rec- tifié j enfuite il l'enduifit d'huile de thérében- tine 5 & le fufpendit au bout d'un long fil dans un endroit écarté, où l'air ambiant étoit hu- mide & chaud 5 & dans lequel on ne pouvoir pas foupçonner qu'il y eût aucune efpece d'ani- maux. Que penfera-t-on qu'il dût arriver ? Peu Î24 Nouvelles Recherches de tems après la viande fe trouva remplie de petits animaux qui s'y étoient logés , & qui fe nourrilToient de tout ce qu'il y avoit de plus fuc- culent & de meilleur. Or , comment les œufs qui ont produit ces vermiffeaux , auroient-iîs pu s'introduire dans cette viande , s'ils n'y avoient pas été apportés par l'air dans lequel elle fe trou- voit fufpendue r Je ne parle point de certains vents qui^ au printemsj nous amènent des milliers d'infedes^ qui dévorent les plantes & les bleds 5 &: ruinent l'efpoir du Laboureur \ je me contenterai de rap- porter VlXï autre exemple que le même Boheraavz regarde comme une preuve de ce fait. Il tombe fouvent dans TEthyopie de grandes pluies qui font d'un froid fi piquant, que ceux qui en font atteints 5 relTentent fur le champ le frifTon le plus violent. Les gouttes de cette pluie font larges ^ & environ d'un pouce de diamètre. Frappent- elles la peau à nud ? il fe fait une corrofion dans les chairs. Tombent-elles fur les habits ? elles y engendrent àes teignes & des vermiffeaux» Si ces preuves , & une infinité d'autres que M. Boheraave ne fe charge point de rappor- ter 3 dans la crainte d'être trop prolixe , nous portent à croire que l'air renferme au- dedans de lui-même ^ les femences fécondes des ani« fur les Etres microfcopîqiies . '12/. mauX) il eft évident que toutes les tentatives faites avec le feu, peuvent bien fervir à prou- ver que les animaux microfcopiques ne nailTenc point des œufs que l'on fuppofoit exider dans les infufions avant qu'on leur fit fentir le feu j mais cela n'empêche pas qu'ils n'aient pu être formés de ceux qui auront été portés dans les vafes après l'ébullition. Ainfi pour écarter tout foupçon 5 il faudroit difpofer les chofes de ma- nière 5 que les fubftances que l'on a fait bouil- lir 5 & que l'on a prifes dans la clafTe des vé- gétaux ou dans le règne animal , ne fulTent jamais foumifes à l'influence de l'air extérieur, pendant tout le tems qu'elles font dans des vafes pour y fermenter. Si l'on veut mettre dans ces procédés la plus rigoureufe exactitude, & ôter, par-là, jufqu'à l'ombre même du doute , il fera bon de pur- ger avec le feu la capacité intérieure des vafes bouchés que l'on emploie. Cette opération dé- truira immanquablement les petits œufs que l'atmofphere aura pu y porter , au cas que par hafard il s'y en trouve quelques-uns. Que fi après avoir purgé , par le moyen du feu , & les fubf- tances que l'on met dans les vafes , de l'air contenu dans ces mêmes vafes, on porte en- core la précaution jufqu'à leur ôter toute com- ;I2(Ï Nouvelles Recherches miinicatîon avec l'air ambiant, & que malgré cela 5 à Fouvertiire des phiolles , on y trouve en- core àcs animaux vivans , cela deviendra une forte preuve contre le fyftême des ovaires, j'i- gnore même ce que fes partifans pourront y répondre. M. de Needkam^ que j'ai nommé fî fouvent avec tous les éloges qui lui font dûs , nous af- fûte que cette expérience a toujours réuffi fort heureufement entre {qs mains , & qu elle a été la dernière preuve qui a mis le fceau à fon fyf- tême. Nous avons dit au commencement du huitième Chapitre , qu'en mettant dans un vafe du jus de viande cuite , notre Phyficien en avoir vu fortir les animaux microfcopiques ; & nous n'avons confidéré alors que la circondance du feu 5 parce que nous étions en train de difcou- rir fur cet élément. Mais il eft bon d'obferver , outre cela ^ que pour oter tout accès à l'air ex- térieur 5 & fermer exadtement les paifages ^ M. de Necdham avoit fcellé l'orifice de fes vafes , èc y avoit fait pratiquer un bouchon de Liège ^ de manière que l'on auroit pu les regarder com- me fcellés hermétiquement. Pour ce qui re- gardé la portion d'air qu'ils renfermoient avant l'expérience , il en écarte de même tout foup- çon, puifqu'après les avoir bien fermés ^ comme fur les Etres micro fcopîques^ Î27 Je viens de le dire > il les paffa fur des char- bons ardens. Comme c'eft principalement far cette expé- rience qu'eft appuyé tout l'édiiice de fon {yÇ- tême, j'ai cru devoir entrer dans tous ces dé- tails , &: en faire un examen fcrupuleux. Mon but étant de ne rien omettre dans cqs diffé- rens procédés, j'ai tenté toutes les expériences poflibles, tantôt en privant d'air les animaux, tantôt en prenant des précautions pour faire macérer les graines dans le vuide , ou bien en ôtant à l'air àes vafes , toute communication avec l'air ambiant , & enfin , en les expofant , foit en partie , foit en entier à l'adtion du feu. Commençons par la première de mes expé- riences. Nous étions en été j je mis les animaux dans le vuide de la machine pneumatique , ils nageoient tous dans leur liqueur, comme les infedes amphibies & les aquatiques , ils y vé- curent pendant deux jours j mais au bout de ce rems , je les trouvai tous , ou morts , ou mourans. Les uns étoient abfolument fans mou- vement , & en partie défigurés ; les autres fe remuoient encore , ôc n'avoient qu'un mouve- ment lent & parefTeux. Si le vuide de la machine pneumatique fut fatal aux animaux qui étoient déjà nés, il ne 129 Nouvelles Recherches le devirxt pas moins pour ceux qui étoient a naître. De routes mes infudons froides , qui ^ dans un air libre, avoient produit abondamment des animaux , aucune ne m'en donna dans le vuide. Les chofes furent bien différentes , lorfque je me fervis d'un bouchon contre l'air extérieur ^ pour lui fermer toute encrée dans mes vafes. Déjà une longue fuite d'expériences m'avoit porté a croire que , foit que je me ferviffe d'un bou- chon de cotton, de bois, ou de papier, foie que je laiiTaiTe les vafes ouverts, cela étoit ab- folument indifférent, tant à la nailTance, qu'à l'accroilTement des animaux. Il eft vrai que je n'étois pas encore bien certain d'en avoir en- tièrement banni l'air , parce que ce n'étoit point là mon premier but j je ne cherchois , en bou- chant mes vafes , qu'à prévenir l'évaporation de la liqueur qui fe perd trop facilement lorfqu'on les tient ouverts. Mais pour m'en affurer , je les fermai exadlement avec un bouchon de bois , adapté avec beaucoup de foin à l'orifice inté- rieur , & ce fut alors que \qs animaux^ian- querent dans pluHeurs infufions , quoiqu'ils fe montraflTent à l'ordinaire dans les autres. , Cette irrégularité me donna des inquiétudes fur le fuccès de mes expériences ^ je craignis que fur les Etres microfcopîquesl lap que l'air des vafes n'eue encore quelque com- merce avec l'air ambiant, par le moyen des pores du bois , ou que le col n'étant pas fermé exadement, il ne trouvât une entrée fecrette dans mon infufion. Pour me mettre à l'abri de tous ces inconvéniens, j'eus recours à l'expédient que je regarde comme le plus certain ; ce fut de fceller hermétiquement l'orifice des vafes, & voici quel en fut le réfultat. Lorfque mes vafes éioient petits , & que je les brifois au bouc d'un certain temiS, je n'y découvrois aucune ap- parence de petits animaux , même en obfer- vant avec la plus grande attention , & en ré- pétant fort fouvent la même expérience. Mais lorfque je prenois à^s phioles d'une plus grande capacité , & plus propres par-là à contenir uii grand volume d'air, comme font, par exemple^ les bouteilles dont on fe fert pour \qs tables . j'eus toujours une quantité d'animaux, malgré la précaution que j'avois prife de les fermer toutes hermétiquement. C'efl ainlî que je fuis parvenu à découvrir qu'il fufïifoit pour cette ex- périence , d'avoir dans le vafe un volume d'air plus raréfié que l'air extérieur. Je choifis à cet effet un récipient fort large j j'y fis infufer d froid différens légumes, & afin que l'air extérieur n'y pénétrât point à mon inf- I 130 Nouvelles Recherches eu, lorfqiie j'y aurois fait le vuide, j'en retirai autant qu'il m'en falloit pour faire baiiTer le mercure de neuf pouces ; j'avois précifément befoin de cette mefure , afin que le poids de ratmofpliere , incombant fur la partie convexe du récipient , le tînt iixé & attaché au cuir mouillé que l'on étend fur la platine , de ma- nière que l'air ne put point s'y infinuer par les bords. Lorfqueje n'en retirois pas une alTez grande quantité , & que le mercure ne gardoic pas la hauteur requife dans le tube adapté aa récipient 5 l'air trouvoit moyen d'y rentrer en fe pratiquant un paiTage infenfible j il ne falloit pour m'en inftruire, que jetter l'œil fur l'élé- vation du mercure. L'infuiion que j'avois enfermée dans cet air raréfié , fourmilla d'animaux deux jours après j j'étois bien certain cependant que rien n'avoit va- rié dans mon récipient j je le voyois évidemment au mercure , qui avoir prefque toujours confervé la même hauteur par les foins que je pris d'en- tretenir le cuir mouillé ^ fur lequel pofoit le récipient. Le fuccès de cette expérience démontroit plei- nement que les infufions faites à froid • n'ont point du tout befoin du fecours de l'air exté- rieur pour la produdion des animaux. Malgré fur les Etres micro fcopiques. 131 cela , il me reftoit encore à conftater tout ce que M. de Needham avance, j'avois à détruire le foupçon de la préexiftence des œufs qui au- roient pu s'attacher au dedans du vafe , fe trou- ver renfermés dans les femences mêmes , ou être dififeminés dans l'air du récipient. J'eus donc grand foin de prendre toutes les précautions nécelTaires pour n'avoir rien à craindre du cote des vafes & des femences ; je commençai par faire bouillir différentes fortes de graines & de viandes , jufqu'à ce qu'elles fulTent parfaitement cuites , & je les renfermai dans de grands dc larges f afes , tour en fortant de l'eau dans laquelle elles avûient bouilli. Depuis ce tems , je n'em- ployai plus dans mes expériences que de grandes phioles 5 & je les paiTois auparavant fur le feu , dans la vue de faire périr les œufs qui, par hafard , s'y feroient attachés. Lorfqu'elles f© refroidirent, & que par ce moyen elles pou- voient fe remplir d'un nouvel air, je les fcellaî hermétiquement. Le quatrième jour, je briiai les cols de ces vafes : dans quelques-uns , les ani- maux n'avoient pas encore paru j mais il y ea avoit dans quelques autres , quoiqu en fort petit nombre. Il ne me reiloit plus qu'à détruire le ^roifîème foupçon, établi fur la préfence àcs œufs mêlés 132, Nouvelles Recherches au volume de l'air intérieur du vafe : voici com- ment je m'y pris pour y parvenir. Je fcellai her- métiquement les orifices de dix-neuf vafes rem- plis d'un aufîi grand nombre d'infufions faites avec différentes graines ; je les plongeai en par- tie dans l'eau d'un vafe plus grand, & je les y fis bouillir l'efpace d'une heure : par ce moyen, il me parut qu'il n'y avoit rien à defirer du côté de i'exaélitude de l'expérience. Avant que d'en rapporter le fuccès , je ne dois pas pafTer fous filence une chofe qui , fans avoir un rapport direct à l'expérience dont il s'agit , pourra nous inftruire pour prendre les précautions nécefTaires dans des cas femblables. Elle confifte a fe tenir un peu éloigné à^^ vafes que l'on a fcellés hermétiquement, & même à ne point s'en approcher pendant tout le tems qu'on les expofe à l'adion du feu. L'air qu'ils renferment , dilate puifTamment Îqs molécules élaftiques, & fait voler le verre par éclats, com- me cela m'eft arrivé plus d'une fois. Mais revenons à notre fujet. Je vilitai mes infufîons au jour marqué j elles ne me donnè- rent pas le moindre ligne d'aucun mouvement fpontanée ou d'animalité , pendant tout le tems que je les examinai avec le microfcope. Il elt bon d*obferver que j'ai toujours eu les mêmes fur les Etres micro fcopîques. 135 réfultats , non-feulement dans cette occafion , mais dans toutes les expériences que j'ai faites par la fuite avec des précautions femblables. Mais fi après l'ébullition , je pratiquois quelques lé- gères ouvertures par lefquelles l'air pût fe glilTer dans les vafes , il arrivoit fouvent que les ani- maux y rentroient en même-tems. Voilà ce qui m'a empêché d'adopter en entier l'opinion de M. de Ncedham, Je veux bien croire avec lui que les animaux fe font montrés dans les vafes qui renfermoienc les fucs des viandes cuites ; je n'ai aucun doute fur la réalité de ce fait ; mais je me fens fore porté à douter qu'il ait tenu fon vafe aifez long- tems fur les charbons , pour parvenir à échauffer fenfiblement l'air qui y étoit renfermé \ je penfe plutôt qu'il ne l'avoir point affez bien fcellé , pour être en fureté du coté de l'air du dehors \ Se cela me paroît aiTez vraifemblable j car il efl fort facile de fe tromper là-deffus , en adaptant le bouchon de liège dont M. de Ncedham s'eîl fervi. Le liège eft extrêmement poreux , & peut librement ouvrir un pafTage à Tair du dehors. Ce feroit envain que l'on employeroit d'autres matières plus denfes & plus compactes, pour n'a- voir abfolument rien à craindre. Elles auront de même de petits pores , 6c des conduits impercep- liij :I34' Nouvelles Kecherches tibles qui pourront fe trouver aifez ouverts pour un fluide auflî fubtii , & qui échapperont tou- jours à nos fens. Le feul moyen d'obvier à ces inconvéniens , eft de fceller hermétiquement fes vafes ; & fi notre Auteur eût ajouté cqizq précaution à tou- tes celles qui! a prifes, il fe feroit alTuré par lui-même que le phénomène des animaux dans Iqs infuiions bouillies 3 ne répondoit pas entière- ment à (qs vues 5 comme je viens de le dé- montrer. Récapitulons maintenant tout ce qui a été dit, èc concluons qu'en fermant hermétique- ment les vafes , on n'eft pas toujours fur d'em- pêcher la naiifance Aes animaux dans les in- fufions bouillies ^ ou faites à froid , pourvu que l'air intérieur n'ait point fenri les ravages du feu. Si au contraire cqi air a été fortement échauffé, jamais il ne permettra aux animaux de naître , à moins qu'un nouvel air ne pénètre du dehors dans les vafes. C'e(t-â-dire qu'il eir indifpenfable pour la produdion des animaux 5 de leur donner un air qui n'ait point fenti lac- riou du feu. Et comme il ne feroit point aifé de prouver qu'il ny a pas eu de petits œufs difféminés & Hottans dans le volume de l'air que contiennent les vafes ^ il me'femble (jue fur les Etres micro fcoplqiies , 15IJ? le foupçon de ces œufs fubfifte toujours , & que l'épreuve du feu n'a pas entièrement détruit les craintes de leur exiftence dans les infufions. Les Partifans du fyftême des ovaires les auront tou- jours , ces craintes , & ne foufFriront pas aifé- ment que l'on entreprenne de les détruire. Peut-être que l'on pourroit encore former une petite objedtion en faveur de M. de Needkamy ëc dire que les animaux ne s'engendrent point alors dans les infufions , parce que l'air qui , dans le fyftème de l'Auteur , devroit corrompre les parties de la matière, l'atténuer ôc la difpofer à l'animation, perd cette propriété lorfqu'il ref- fent l'adion du feu ; que le feu eft un agent compofé de principes fulfureux qui fixent fes parties , & qui , en le rendant plus raréfié , le rendent aufîi moins propre à nous donner hs productions ordinaires. Je n'oferois pas prononcer fur cette grande raréfa6tion de l'air Aqs vafes ; je n'ai rien qui m'aiTure qu'elle ait été portée à ce point j mais il ne feroit pas fort difficile de la connoître avec une certaine précifion , par le moyen d'un baromètre que l'on adapteroit aux vafes fcellés hermétiquement , lorfqu on les préfente au feu. Comme on lai (fera à ce baromètre une com- jnunication avec l'air intérieur , il n'eft pas pof- liv 'j^6 Nouvelles Recherches fîble qu'une auiîî grande altération ne le rende fendbie. Cependant en admettant pour un inftant cette prétendue raréfaction , il refteroic encore à fça- voir pourquoi les animaux ne pourroient pas s'y produire , tandis qu'on les voit naître, comme je l'ai die plus haut, dans un air à-peu-près auiïi dilaté , puifque le mercure y a baiiTé de neuf pouces. Jai donc enfin mis fous les yeux du Public les principales découvertes de M. de Needkam^ autant que mes foibles talens ont pu me le per» mettre, ôc je ne l'ai fait que pour m'exercer fur cette matière j je laifTe à d'autres la liberté de porter ll-deiTus leur fuffrage. Mais lorfque je me fuis engagé dans cette carrière , je fçavois bien que je pouvois y marcher à la clarté du flam- beau de l'expérience. Si je n'ai pu mettre dans cet ouvrage toute l'élégance du flile , on y trou- vera du moins beaucoup de candeur ôc un grand amour de la vérité. Je ne me fuis paffionné pour aucun fyftême, excepté pour ces loix admirables qui font écrites dans le grand livre de la na- ture 5 ôc pour me mettre en état d'en faifir le langage, qui eft fouvent équivoque 5c obfcurj l'ai pris les confeils de ceux de mes amis , qui ont été témoins de mes expériences ^ tels font fur les Etres micro fcopiques. 137 encr'autres , le R. P. Troilo de la Compagnie de Jefus 5 Bibliotécaire du SérénifTime Prince ré- gnant ^ M. Augujlïn Paradiji ^ Poëte agréable , 3c Philofophe charmant ; & M. Corti , Dodeur de Rhege, ProfefTeur de cette Ville, mon ami particulier. Dans toutes les obfervations que j'ai faites fur les animaux des infufions, mes inftrumens ordi- naires étoient ces microfcopes que Ton appelle communément des Lceuvenoeck ; ils font garnis d'une feule lentille , & fort commodes pour ren-^ contrer avec beaucoup de facilité & de juftetTe , les traits les plus fins &; les plus déliés des corps que l'on examine. Je n'ai cependant pas rejette l'ufage des microf- copes compofés y je m'en fuis fervi quelquefois , principalement pour voir en entier èc d'un feul coup d'œil de plus grands objets , comme des morceaux de racines entourés de leur chevelure verte , des gouttes d'eau devenues alors une vafle mer qui renfermoit des milliers d'animaux, les plus petites graines des plantes , & autres chofes de cette nature. J'ai toujours eu foin de m'a- dreffer aux plus habiles ouvriers pour avoir cqs inftrumens : leur perfection eft de la plus grande conféquence dans cette matière. Je ne prefcrirai rien fur la manière d'opérer. 15 8 Nouvelles Recherches y &c# j'ai fuivi la méthode qui nous a été indiquée par les plus favans Microfcopiftes , c'eft-à-dire,de ne point pofer horifontalement le corps du mi- crofcope , parce qu'alors la petite goutte de la li- queur defcend & entraîne avec elle les animaux ; ce qui fait que l'on ne peut obferver qu'avec une confusion défagréable. J'ai donné à mon microfcope une direction verticale & perpendi- culaire à rhorifon : l'œil eft alors plus repofé & plus tranquille , & robfervateur beaucoup plus à fon aife. Pour la lumière , j'ai mieux aimé la tirer d'une bougie 5 en la faifant réfléchir fur le porte objet par le moyen d'un miroir concave , que de la prendre du foleil même. Ceft de M. de Nccdham que je tiens cette manière d'opérer. NOTE s DE M. DE NEEDHAM Sur h ^>rimur Chapitre. Jlag:E 5. ( I ). L'Auteur de cette DifTertation nous fait prendre à M. t/e Buffon 8c à moi , des prccautioiis aux- *]uélles nous n'avons jamais penfé. . Cependant lorfquil s'agit de faire connoître la vérité, il eft toujours bon de commencer par écarter les préjugés. Si la PuilTance im- périale étoit plus avantageufe aux Romains après leurs guerres civiles , que l'Anarchie républicaine , où ils fe trouvoient réduits , Jules Céfar a eu raifon de préférer au nom odieux de Roi ^ celui d'Empereur. La multitude fe laiffé conduire par des mots, plutôt que par des chofesj 8c en cela , les Philofaplies deviennent Peuple fort fou- vent. Pour nous, nous n'avons eu d'autre préférence dans le choixMes mots, que celle qui provient de leur force ïéi?rérentative, plus ou moins propre à peindre nos idées.' Si je n'étois pas parfaitement au fait. du peu de va- leur que l'on doit attacher aux éloges trop intérefTés des Philofophes modernes, dont la fcibleffe en ce point égale pour le moins celle des Littérateurs pédantefques du fei- !iieme fîécîe, & dont le Public eft la dupe en tout tems , je devrois rougir des louanges exceffives dont je me trouve accablé par M. l'Abbé Spalan'^ani ^ dans tout le cours de cet Ouvrage ; je le connois perfonnellement , &: je îe connois comme un Philo fôphè intègre , ftès-eftimable à jous égards. J'e lui dois par conféquent des remerciaienss 140 Notes des nouvelles Recherches mais c'eft en avouant avec franchife que le mauvais exemple de nos Philofoplies l'entraîne bien au-delà du vrai , & que Ton ftyle , en fait de louanges , fent trop le vice puérile du fîécle. îl paroît vouloir étayer le fyftême des germes préexif- tans, & déprimer le nôtre fur la génération , malgré l'ex- périence & le raifonnement ; il invoque même l'autorité des PKyfîciens les plus célèbres qui nous ont précédés. Cependant il eft bien plus naturel &: plus philofophique ^ans la recherche des caufes immédiates , de monter aux caufes générales qui lient les corps organifés avec le fyftême total , & de les faire dériver de celles qui ont été établies par la Divinité , que de pofer pour premier principe ce qui n'eft qu'une pure défaite , peu digne d'un Phyfîcien. Dire que les corps organifés fe montrent par développement , & qu'ils exifient parce qu'ils ont toujours exifté depuis la création^ autant vaut la rcponfe d'un Cartéfîen à un Léibnitien , que la matière efi étendue & compofée y parce quelle efi toujours étendue & compofée ; ou celle d'un Athée à Ton adverfaire , que le monde exïfie * parce qu'il a toujours exifié. Ges réponfes ne font afTu- rément rien moins que fcientilîques j & fî nos connoil^ fances en Phyfîque , à mefure qu'elles fe généralifent , doivefSt fe réfoudre en pareilles défaites,, rien n'cft plus futile qu'une Philofophie qui ne mène à rien. Sçavoiu s'arrêter à propos, quand nos facultés très-foibles ne peuvent pas nous porter plus loin fans reculer , c'eft tout ce que la raifon exige. Efi aliquid prodire tenus, fi non iatur ultra. Pour prévenir les calomnies & les préjugés ridicules d'S ceux qui , fous prétexte de venger les droits de ia fur les Etres microfcopîquesl 141 Divinité, n'ont cherché qu'à détruire notre fyftême fur la génération , il eft abfolument néceflaire d'en développer les principes & les conféquences j mais avant que de faire cette analyfe, je crois qu'il eft à propos de mettre fous les yeux duLedeur, le fentiment du fçavant M. HaUer^ dont la célébrité eft fi bien méritée par les fervices qu'il a rendus à la Phyfique. Voici comment il s'exprime dans fa Préface à l'Edition Allemande de l'Hiftoire naturelle de M. de Buffon , où il examine & traite exprefTément cette queftion. 53 II fufîit de dire que M. àe Buffon, & même 93 M. de Needkûm, ne portent pas plus de préjudice à la 33 religion , que n'en a porté ISlewton , qui 5 par le moyen » de deux forces , a développé le fyftême admirable de 33 l'univers , & les loix fecrettes de la révolution des 33 corps céleftes. La doâirine de M. ae Bujfon eft encore 93 en quelque fens moins dangereufe que celle de M. de 33 Needham. La matière organifée fe moule dans l'hom- 33 me même , pour devenir un homme ; mais après le 35 tems où la terre aura été embrafée par le feu , & inon- 33 dée par un océan univerfel , les hommes auront dû être 33 produits fans moule , puifque l'eau & le feu ne leur 33 auront point laifTé de père , dont ils aient pu tirer 33 leur origine. Leurftrudure , ce modèle général du genre 33 humain j eft donc, félon M. de Buffon , fortie immédia- 33 tement des mains de Dieu , dans le tems que la terre 3> s'eft defTéchée. Son fyftême n'offre aucun autre plan pour 33 commencer le genre humain. La nature ne fe donne pas » elle-même la forme chez M, de Buffon s elle ne fait que 33 copier des moules déjà créés. ?3 Nous pouvons donc attendre fans inquiétude , fl les 3> expériences d,es gens entendus combattront les forces 'î42 Notes des nouvelles Kecherches 33 végétales &; animales de M. Needham. De nouvelles 35 lumières nous approcheront toujours de la vérité , & 33 de Dieu par le moyen de la vérité 33. A ce témoignage li fort Se fi authentique d'un adver- faire célèbre , j'ai fort peu de chofes à ajouter pour ef- facer parfaitement tout préjugé réel ou prétendu, qui paroit dériver de la religion. M. Haller, qui voit fans doute que mon fyftême n'eft autre chofe que celui de M. de Buffon i plus développé & généralifé, auroit dû adoucir la phrafe de docirine plus ou moins dangereufe, en y ajoutant ces mots, relativement a V ignorance ., au. libertinage & a la foiblejfe des hommes qui veulent éteindre la rai/on & fe -plonger dans les ahfurdités du Spinofifme , ou aux préjugés qui dominent dans les écoles en faveur des: fyfiêmes établis j fur lefquels leur métaphyfique fe trouve entée pour le moment. Il fçait très-bien par toute la te- neur de mes obfervations microfcopiques , que je ne donne aucune autre puiffance à la matière , que celle qui pro- duit la pure vitalité dénuée de toute fenfation , & qui dérive, comme fon exifl:ence primitive, delà feule Di- vinité j que cette vitalité ed un compofé matériel de la force réfiftante &: de la force expanfive , dont les premiers principes ont été donnés à la matière par le Créateur au moment de la création ; que tout corps ou partie organifee , eft une procefîîon ou prolongation d'un corps organifé , foit végétal ou animal , qui doit nécefïairement préexifter , Se dont la fouche primitive fort immédiatement des mains de Dieu j que cette proceffion ou prolongation infenfible, qui doit donner ce germe nouveau , dont la petiteiTe eft indéfinie , pour fe con= former à toutes les cirçonflances pofîlbles, fe fait moyen- fur les Etres microfcopiquesi 145' nant une efpece de réduâiion dirigée par les forces piaf- tiques , & une concentration des parties fpécifîques , qui tendent , en les atténuant vers un point déterminé ou un certain foyer commun , de même à-peu-près que l'œil eft au monde vifible , un centre où les rayons viennent s'arranger de toutes parts, fans confufîon , dans le même ' ordre qu'ils reçoivent de l'harmonie préétablie de l'uni- vers ; que quant aux premiers principes de cette vitalité purem.ent matérielle , il y a une matière indubitablem.ent démontrée par des expériences confiantes, très-atténuée, très-exaltée , éthérée félon Newton , éledrique félon les idées préfentes , três-élaftique par fa nature intime , tou- jours prête à donner le branle à la matière brute & ré- fîftante , & qui pénètre fubftantiellement la malTe en- tière ; que par conféquent fes deux efpeces de matière mêlées dans toutes les proportions pofiibles , peuvent fournir les tempéramens néceiTaires pour tout degré de vitalité quelconque , & pour tous les grands phénomènes ou changemens phyfiques de l'univers, en partant d'ua feui principe 5 que cette vitalité n'étant autre chofe qu'un efprit três-fubtil & très-adif , agiffant dans une matière brute, tenace & dudile , pour former, félon les forces fpécifîques de chaque corps vital, un nouveau fyflême organifé , eft très-différente, félon mes idées, du prin- cipe fenlitif, qui ne peut être compofé, & encore plus diftinguée du principe intelleduel & fpirituel , l'ame de l'homme j que M. Haller lui-même a découvert dans les corps organifés un principe aélif d'irritabilité , qui dif- fère totalement du principe de fenfation, puifqu'il a trouvé des parties organiques, irritables, fans fentimenc, d'autres fenfitives fans irritabilité , ôc d'autres enfin ir- 144 No^^^ ^^^ nouvelles Recherches îitables en même-tems & fenfitives ; que cette irritabi- lité n'eft pas un principe étranger , palTager & acciden- tel, mais un vrai principe interne & effentiel aux corps organifés 5 ce qui Te conftate Tuffifammcnt par les phéno- mènes du fyftole & du diaftole , qui ont été obfervés dans les cœurs détachés des vipères , des hérilTons Se d'autres animaux, par M. Haller , par M. Temple y Se par d'autres Phyfîciens qui ont vu leurs mouvemens con- tinuer pendant plufîeurs heures après leur exfeétion com- plette , fans aucune irritation extérieure i que le même principe pervade tout le fyftême organique , comme l'é- ledricité , qui fe décèle par-tout dans le monde phyfique, & qui vient d'être obfervé fendblement depuis peu dans les parties les plus exaltées des fleurs à Florence , 8c depuis long-tems dans la Tremella , plante aquatique , parle célèbre M. Adanfon, dont je donnerai ci-après un petit détail qui m'a été communiqué par lui-même 5 qu'enfin cette hypothèfe d'une vie vitale, diftinguée de la vie fenfîtive, & fubordonnée à elle, eft plus con- forme , non-feulement à la raifon , à l'expérience & à la vraie métaphyfique , mais encore aux idées phyfîques & morales de tous les Philofophes , & aux dogmes de la religion révélée , en mêm.e-tems qu'elle ne déroge en rien aux droits de la Divinité. Voilà ce que je crois être démontré clairement par mes obfervations microfcopiques ; par les phénomènes qu'on découvre dans la décompofition des fubftances animales & végétales 5 par la divisibilité produdrice & réparatrice des Polypes ou autres Zoophytes de la même clafîe en grand nombre 5 par la formation de tant d'êtres vitaux dans mes infuflons , dont une grande partie ne peut pas venir de fur les Etres microfcopiques. i^-j dt dehors , comme le prouvent nos expériences avec des vaifTeau-x hermétiquement fcellés ; la produdion iuccefTive des parties des poulets dans les œufs couvés , obrervée Se détaillée avec une induftrie admirable, par M. Hailery l'irritabilité vitale, découverte ^r le même Phyficien dans les animaux , & par un Naturalifte de Florence dans les plantes ; tant de phénomènes abfolument oppofés à rhypothefe des germes préexiftans , ne s'expliqueront jamais bien que par le fyftême de Vépigenefe, comme nous l'avons expofé d'après l'expérience. Ce fyftême eft le même que celui qui a été foutenu dans tous les tems , mais fans preuves fenfibles , juf- qu'au lîecle de Ds/carceSy oii l'on imagina, pour tran- cher le nœud gordien , l'hypothefe des germes préexif- tans. La vie végétadve a toujours été diftinguée de la vie fenlitive , par cequc les anciens appelloient ûme vé* §étaîive , fubordonnée à la fenfitive , fans que perfonne s'en foit jamais form.alifé , ou fe foit récrié que l'on donnoit trop à la matière, ou trop peu à la différence qui doit fe trouver entre elle , & Tame fpirituelle de l'homme. Cette opinion s'accorde aufïi parfaitement avec l'Hif- toire facrée, conféquemment à l'arrangement des élémens dans une échelle exaârement graduée , telle que nous là trouvons aduellement dans la nature ^ qui fait fortir fuc- cefiîvement des eaux les poifFons &. les oifeaux , tire dé la terre les animaux terrefbres & le corps humain, (chan- gement vraiment phyfique de la matière brute , qui s'exalre en matière vitale & organifée, ) ôc cela avant que de faire defcendre d'en haut fon ame immortelle. Les nouveaux germes & iv-ur développement viennent ia6 Notes de^ nouvelles Recherches cnruice de ces mêmes corps primitifs par la nutrition & la prolongarion des parties , de m.aniere que le corps de la première femm.e ne fe forma pas de la terre com- me celui de fon mari^ mais procéda de lui pendant fon fommeil par une végétation accélérée & nourrie de fa fubOiance j il s'en détacha dans un état de perfection , comme font les jeunes Polypes & les autres corps organifés du raêmie genre. La vraie Pliyfique doit fervir de correélif à toutes contradictions apparentes de l'Hiftoire facrée 5 la nature nous étonne par fes rayfleres , commie la religioQ révélée, & ne s'accorde pas toujours avec nos idées &: nos habitudes , mais ce font de j>art & d'autre des faits inconteftables , qui dépofent toujours en faveur de la ■vérité. Bacon a dit fort fagement : Brèves haufius iy^ Thilofopkici ad Atkeifnziim ducunt j largiores ad Deum , & ad religionem reducunî. Que l'on examine bien ce fyftême , on lui trouvera de la conformité avec la bonne métaphyfique 5 j'entends celle de Leibnitz, qui traite l'eîTence primitive de la ma- tière, & la nature de fes principes. Selon es Pliilofoplîej ces principes (impies Se inétendus, comme caufes, font âclifs par eifence , Se produifent par leur aclion Se réac- tion combinées , les pliénom.enes de rétendue folide, du mouvement , de la figure & de la diviiibilité ; phénomènes que nous n'appercevons que dans nous-mêmes par les effets qu'ils produifent intérieurement , Se qui ne font que relatifs à notre fyftême organifé Se à la nature de nos connoifTances. C'cO: ou Platon Se tous les vrais Philofo- phes ont été néceiTairem-ent amenés dans leurs méditations raifonnées fur la nature. Se c'ePc le terme où un Philo- fophe quelconque doit aiiâver de même, lorfqu'il porte fur les Etres micro fcôpiques^ 147 fes fpéculations aufll loin que les phénomènes nous con- duifent. Tous les Phyfîciens après Lock , s'accordent fur rexif- tence purement idéale des qualités qu'on appelle fecon- daires dans la matière , telles que la chaleur, la cou- leur , &c. Mais celui qui n'a pas la force d'aller plus loin , conduit précifément par le même raifonnemenr , n'eft qu'un Philofophe à demi. Je fçais qu€ l'on ne manque pas d'attaquer par le ri-» dicule toutes les vérités auxquelles on ne peut pas at- teindre 5 on a voulu plaifanter aux dépens de Newton, & de Leïbnit^ j on s'efl adreflé à la religion même 5 35 mais la plaifanterie * n'eft jamais bonne dans le genre 05 férieux , parce qu'elle ne porte jamais que fur un des 35 côtés des objets , qui n'eft pas celui que l'on confî- 55 dere 5«lle roule prefque toujours fur des rapports faux 35 & fur des équivoques 5 de là vient que les plaifacs de 35 profeffion ont pxefque tous i'efprit faux , autant que '-•5 faperfîciel 55. Ceux qui peut-être né connoiffent pas encore affez la Philofophie de Ldbnit:^ peuvent jetter les yeux far les Injiïtuîions Leibnidennes , ou Précis de la Monadologie» Ceft Touvrage d'un Philofophe célèbre & profond , M. l'Abbé Sigorne. Je penfe qu'il eft impolTibleàcelui qui aura îa force d'efprit néceffaire pour fâiiîu cette Métaphyfique fublim.é , de refufer de s'y rendre : c'eft la folution de toutes les difficultés épineufes du fameux Berkslay , contre i'exiftencc de la matière & de toutes les contra- didions apparentes qui naiffent de la divifibilité , enfin * Mil. de Li::. U. de Phil par M, de Voltaire j ch= 55, "î 4§ Notes des nouvelles Recherches tç. livre eft de la plus grande utilité pour combattre it Scepticifme. Je ccnfeillerai en même-tems à celui qui ne l'entendra pas, de s'en tenir en tout à la foi du Char- bonnier , 5c de ne jamais pouller Tes recherches en Phi- lorophic, en Morale ou en F>.eligion, âu-deli de ce qui eft palpable èc fenfible. Je crois enfin pouvoir dire que le fx/ftéme de Vépî^ genefe , s'accorde plus avec la religion , que tout autre , fans déroger en rien à la puiffance abfolue & aux droits de la Divinité. Il fuppofe une vie fubordcnnée au prin- cipe fenfiiif & intelleduel , qui fans être ni l'uo ni r autre , eft un vrai principe de mouvement Se d'adion, divifîbie , parce qu'il eft compofé , réparateur par un ac- croiffement vital & producbif, fufceptible enfin par Ton action vitale &: fon organifation , de toutes les p^ceptions objedives, qui nous appartiennent comme anjiauxa en tant qu'objeélives , & en tant que matériellement repré- fentatives des caufes extérieures. Voilà tout ce qu'exige cette clalTe inférieure des êtres pour leur confervation , Se cette caufe matérielle agif- fant fur toute la machine organique fufHt à l'économie loco-moîive, dont ils ont befoin pour fe nourrir' & pro- pager, fans aucun principe fenfitif intermédiaire , ou pour les attirer , & les déterminer à tout ce qui leur convient^ Par-là ils fe trouvent liés parfaitement d'un côté avec les plantes, & de l'autre avec les animaux, pour for- mer l'échelle que nous obfervons à leur éeard. dans la nature ; c'eit ce même princioe de deux forces antâ2:o- niftes combinées, qui végète dans les plantes & les zoo- phytes, qui façonne les corps organiques, qui excite &, donne matière au fentimeot dans les êtres feniîtifs ^ & au fur les Etres mlcrofco piques, 145? raifonaement dans les êtres intelleduels incarnés , & qui tient par une réfiftance &: une expanfion univerfellement répandue, au grand fyftême de l'univers. C'efl ainfl qu'il devient la vie matérielle de la nat«re priCe dans fa tota- lité , 5c en le regardant comme un effet qui part immé- diatement de la Divinité , il répond parfaitement à la Vert-a route-puiiTante qui le renouvelle à chaque inftant comme un effet digne de fa caufe , atîingens a fine cd f,nem fortîter , & difponens omnia fuaviter. On peut aifément , avec ce fyflême , répondre à une obje. la même qui diffère dans fes effets 5c qui prend une route diffé- rente. Il efl très-vrai que pour hâter la génération de ces corps vitaux , & pour prouver en même-tems que la force végétante qui forme, nourrit & développe la plante , &: la force vitale qui produit les êtres microfcopiques, dé* pendent d'un feul 6c même principe , je me fuis fervi très- fouvent, en difpofant la fubftance végétale à germer, des moyens propres à mettre ce principe en mouvement 5 mais je n'ai pas poufie ces moyens H loin que notre Au- teur, qui les fait aller jufqu'à produire des racines, & dès branches parce qu'il ne m'a pas compris. Le réfultat étoit , & pour lui & pour moi , à-peu-près le même , il a eu auflî bien que moi de ces êtres vitaux , bien plutôt que par la voie ordinaire , &: prefque fur le champ j mais il auroit été plus fimple, félon mes principes, & peut-être plus heureux encore dans les effets, d'exciter feulement la force organique végétatrice , fans la pouffer trop loin , plutôt que de lui lailTer prendre la route de la végé- tation ordinaire , pour la rappeller enfuite à celle de la végétation vitale. Le moyen dont je me fuis fervi', Se qui eft décrit dans mon Traité fur ces matières , eft ItjS Notes des nouvelles Recherches de femer pendant quelque tems des grains de froment;» ou tout autre grain , & de les tirer de terre avant qu'ils aient poulfé des racines , aufTi-tôt que la fubftance intérieure du grain s'eft convertie en fuc laiteux. L'effet fut que ce fuc laiteux , comme je Tavois prévu , mêlé avec un peu d'eau bien claire , me fournit aufTi-tôt des corps vitaux , pendant que le même grain, infufé entier dans un état aride , rélîfta très-longtems à la décompofî- tion, &", autant que je m'en fouvieus , celui du froment réfifta quelquefois pendant plus de trois fcmaine's. Si M. Spalan\ani avoit lii mon Ouvrage attentivement , il au- xoit pu voir que j'ai pris toutes les précautions nécefTai- res , quand j'ai difpofé mes grains à produire les végé- tations vitales, pour les empêcher de gamer par la voie ordinaire , ( ce qui auroit affoibli leur force inutile- ment, ) en ôtant le petit germe qui paroît à une des extré- mités. Alors en les faifant furnager par le moyen d'une tranche de liège très - mince dans laquelle ils avoient été inférés , la partie inférieure du grain , qui étoit plongée dans l'eau , pouffoit en bas , non pas des raci- nes naturelles , comme l'Auteur entend la chofe , mais des fîlamens vitaux , ou de vrais zoophytes. Voyez mes obfervations microfcopiques. Toutes les expériences de ce Chapitre , qui confirment exactement mes découvertes , étant mifes dans le jour qui leur convient , il paroîtra très-clair que la production de ces êtres dépend entièrement de la force intérieure organi- que de la fubftance infufée^ comme caufe vraiment effec^ tive, & non pas de fa corruption, félon les idées.de M. Spalan:(ani , comme caufe purement occafionnelle. Je fuis d'autant plus fâché de la méprife d'un Obfer- vaceur fur les Etres microfcopiques* ï7f vatcur fi induilrieux , & fi ingénieux dans une expérience fi importante , que s'il avoir faivi exactement ma mé- thode ; il aura vu les mêmes zoophytcs , que f ai obte- nus par les rnoyens que j'ai employés ; il aura remarqué leur vraie vitalité, 5c devenu par -là témoin oculaire des produits qu'ils donnent en forme de globules raou- Vàns , après les avoir portés quelque tems en forme àt femence comme les plantes ordinaires , il auroit rendu indubitablement jufîice à la vérité j à i'exaditude & aux 'conCequênces de mes découvertes. Suivons notre Auteur dans Tes expériences : voici là différence qu'il a trouvée dans les réfultats de fes infu' fions avec des graines broyées ou des graines entières. la fubftance non broyée fourniffoit des corps mouvaiis, ■grands, diitinds, bien fofmés 6c- agréabks à ta vue "^ ■c'efi: Ton expreiïîon : le contraire arriva quand la rubfrancè eut été broyée 5 de plus, dans celle-ci ils difparurent bientôt , dans la première ils Te conferverent plus long- îems. Or fi la produdion de ces corps vitaux dépend, comme l'Auteur le foupconne , de la décompofition de 3a fubftance infufée , feulement comme caufe occaiion- nelle,qui fait éclore les œufs dépofés par des animau*: dans la fubftance même avant qu'elle fe décompofe , cU fi on doit attribuer ces produâions à cette efpece de nour^ riture propre qu'elle fournit , qui attire les mères comme la chair attire les mouches , ou qui reçoit les germes qui tombent de l'atmofphére j je dis que dans toutes ces vues on ne rend aucune raifoii fufnfante de ia difFé-» rence qui fe trouve entre les produits de la même fubf* taace broyée , ou non broyée. Au contraire , fi on fup- pofe avec moi, que toute fubftance quelconque, aairaaîe M ïjS Notes des nouvelles Recherches ou végétale , donne pour produit en fe décompofant ces corps vitaux , comme caufe vraiment efFedive , alors on conçoit il bien pourquoi la même fubilance dans un état différent doit donner des réfultats différens , de la ma- nière qu'il nous les décrit , que j'aurois pu lui prédire exactement avant l'expérience ce qui lui eft arrivé, uni- quement par les vues générales que l'expérience me donne dans cette matière. En effet , la fubftance infufée n'étant pas broyée , & fe décompofant par de grandes parcelles , fournit né- ceffairement des fîlamens vitaux plus grands ^ & plus dénies en proportion : or les êtres vitaux , qui font les produits de ces mêmes filam.ens , quelquefois par une fimple divifion des parties , quelquefois par une efpecc d'accouchement, chofes dont j'ai été très-fouvent témoin oculaire , doivent pareillement être proportionnels en malTe , 6c en volume aux matrices , d'où ils fortent. Par les mêmes raifons, la fubftance broyée doit donner des êtres plus petits, toujours en proportion de Tes parties, & ces êtres, comme M. Spalan^ani le remarque , doivent .difparoître de l'infufion plutôt , parce que la divifîon continuelle , qui a toujours lieu dans cette efpece de vie , les enlevé plutôt que ceux de la grande efpece, dont le volume & la maffe font plus fenfibles. Je prie le Lec- teur de fe fouvenir que tout ce que je viens de dire , 8C qui feul peut rendre raifon des phénomènes , n'eft pas une hypothefe arbitraire imaginée pour les expliquer , mais que ce font autant de faits dont je fuis témoin , & qu'il pourra lui-même renouveller auffi fouvent qu'il ,vou- le Leâreur jugera par lui-même fi mes preuves fonc aflez folides , &: fufïifamment conftatées pour la fou-, tenir. Premièrement , les animalcules , comme on les a|)pelle Nij ï^6 Notes des nouvelles Recherches communément, les animalcules , dis-je, que l'on trouve dans le fperme de tous les animaux , n'exiftent pas dans cette liqueur avant qu'elle foit fortie des vaifTeaux fper- lîiatiques j fi on la prend avant qu'elle Te décorapore , & fi on l'applique immédiatement au microfcope, qui doit fe trouver d'avance à fon point de vue , on les voit fe former fous les yeux par une vraie végétation vitale *» Ce phénomène eft comm.un au fperme des femelles &c à celui des mâles , comme M. de Buffon l'a démontré. Cette "végétation commence par une diftribution de la partie la plus épailTe de la femence, en forme d'arbriffeau , qui }ette de tous côtés des branches , au bout defquelles les êtres vitaux ou animalcules fpermatiques paroilfeut en form.es des globules. Ces êtres, animés à leur façon , fe détachent infenfiblement par un mouvement continu ofcillatoire , &: traînent après eux , en nageant dans la liqueur , qui fe clarifie infenfiblement , des efpeces de queues , qui ne font en effet autre chofe que les extré- mités des branches vifqueufes auxquelles ils étoient atta- chés. Leur vie n'efl pas d'une fort longue durée , ils avan- cent prefque toujours Se fe meuvent fans tourner ni à gauche ni à droite 5 leur agitation celTe peu à peu, & finit ordi- nairement par une efpece de mouvement circulaire , qui 3 rentrant en lui-même comme celui d'un tourbillon , ne cefTe que quand le corps fpermatique , prefqu'en repos, plonge par fon poids fpécifiquem.ent plas grand, dans la liqueur, & refle immobile au fond du vafe. Voilà des faits indubitables dont MM. de Buffon 8c Daubencon , avec moi-même , ont été témoins oculaires * Jlîftoire Natuieile % fécond volume* fur les Etres microfcoplques, ip7 à différentes reprifes , &: voilà des preuves non équivo- ques d'une végétation vitale produdive des êtres vitaux, qui reiTemblent fî fort aux animaux , qui ont toujours été pris pour tels, & rangés dans cette claffe par les Natu- raliftes. Je n'entre pas ici dans le détail nécefTaîre pour inf- truire le Ledeur fur la manière de s'y prendre pour répé- ter nos obfervations , ni pour lui dire quelle efpece de femence animale eft propre à employer , ni dans quel tems _, ou comment il arrive que Leuvenkoeck Se tant d'au- tres , qui nous ont précédés j n'ont pas faits les mêmes découvertes j tout cela eft fuffifamment détaillé dans le fécond volume de i'Kiftoire naturelle du Cabinet du Roi & dans mes Obfervations microfcopiques. Mais je deman- derai maintenant à M. Spalan^ani , qui veut abfolument, avec les Adverfaires de l'épigenefe , trouver par-tout des germes préexiftans prêts à fe dépofer dans les fubftan- ces organiques qui fe corrompent , ou qui font cachés dans chaque partie de ces corps , comment il s'y prendra pour faire entrer d'avance , ou pour faire tomber de l'air, immédiatement au point nomm.é , cette efpece d'être fper- matique qui eft précifément propre à chaque efpece de iemence , fans qu'aucune autre efpece de germe , dans le nombre prefqu'infini des êtres microfcopiques , vienne s'y mêler. Que l'on me dife pourquoi, en fiippofant que la nature a quelque moyen inconnu de diftribuer ainfî avec une réguiariré conftante les germes de chaque efpe- ce , toute la multitude innombrable , qui fe trouve dans une certaine portion de femence animale , concourt à s'alTmiiler la partie épaiife de cette liqueur, à la faire çouffer 3£ végéter en forme d'arbriffeau , pour en fûïtir Niij î^S Notes des nouvelles Recherches enfnite eux - mêmes fous la forme de globules animés attachés aux différentes branches , comme de vrais pro- duits de cette plante vitale , 6<: comme les fruits^, les fleurs & les grains fortent des végétaux ordinaires. Que peut- on defîrer de plus clair ou de plus pofitif que cette expé- lience en faveur de la puiffance végétatrice de la matière exaltée ? Je viens maintenant à ma féconde preuve , qui doit s'étendre aux autres êtres microfcopiques 5 &: qui démon- tre qu'il y a des alternatives d'aûion & de repos dans cette puiffance : c'eft ce que j'entends , quand je dis que ces êtres fortent de la cîaffe végétale pour fe rap- procher de l'animale , & qu'ils y rentrent de nouveau pour reparoître dans l'état vital fous une forme plus petite. Si l'on prend une certaine quantité de froment pilé un peu grolTiérement , &: qu'on le mette infufer dans de l'eau claire au rems des chaleurs de l'été , ou même en tout tems , fi on a foin de lui conferver le degré de chaleur nécefTaire , on trouve , après plufîeurs jours , que la malfe produit des filamens vitaux en très-grande abondance ^ Se même toute cette partie de la farine, qui efl: géla- tineufe , n'eft qu'un compofé de iîlaraens qui eft tout vital. Or , en obfervant de près ces filamens , on voit non - feulement qu'ils font animés d'un efprit expanfif intérieur , mais on remarque qu'ils fe gonflent , qu'ils s'étendent, qu'ils ont un mouvement progreffif, par ac- cès, &: comme indéterminé, & qu'enfin ils fe partagent continuellement en petites parties après avoir paru en forme de chapelets. Ces petites parties ain^ détachées , & plus exaltées par la force végétatrice qui les purifie, coutinnellemeiit & les fépare de la matière brute , de- fur les Etres mlcrofcopiqites, ipp viennent, ce qu'on appelle communément des animal- cales microfcopiques , qui fe promènent librement avec rapidité par toute la liqueur , s'arrêtent de tems en tems , & fe partagent enfuitc en globules plus petits, dont le mouvement progrefTif & continuel, prefque fans repos, paroît plus animé à proportion de leur petitefTe. C'efl: en- core un fait dont je fuis témoin, & qui eft fans équivo- que, quant aux conféquences que l'on doit en tirer. Carie détail que je viens de faire ne demande aucun commen- taire pour prouver que la matière végétale ou animale en infuiîon fe fublime par la force végcratrice £^ devient vitale ; quelle donne comme une fuite naturelle de por- tions de plus en plas exaltées , qu'on nomme animaux microfcopiques , qui confervent leur forme pendant quel- que tems 5 & qu'enfin ces corps, végétans de nouveau , fe partagent en des corps plus petits , toujours plus vifs &: plus exaltés que les premiers. Quelquefois un glob-uie des plus considérables en vo- lume, quand il doit fe partager en deux, fe tourne fur îui-m.éme pendant long-tems, ou en ligne fpirale, & on voit infenfiblement fe former comme un trait noir qui le traverfe diamétralement , & quelquefois deux traits noirs qui fe croifent , ce font les endroits où le par- tage doit fe faire, & oii il fe fait réellement peu de tems après. Le gros globule paroît enfuite fous la form.e de deux ou de quatre petits globules : car telle eft la force élaftique de la puifTance végétatrice qui l'anime , que les deux moitiés reprennent la figure ronde à rinftant même de la divifion. Se elles fe promènent avec plus de viteife qu'auparavant jufqu'à un nouveau partage de chacune d'elles. D'autrefois un globule tombera au fond du vafe , ' N iv ^ôD Notes des nouvelles Recherches en y reftant camme immobile , s'étendra en ovale ou Ci| forme d'un filament encore plus allongé , fe formera ea efpece de chapelet, & fe partagera enfuite en plufieurs globules. Voilà ee que j'entends par des alternatives de végé- «atipn nouvelle , quand l'être change fa ligure primitive ou de repos , pendant que l'être produit conferve fa nou- velle forme j & en retenant toujours l'idée d'une végé- tation vitale , qui diffère par fon degré d'exaltation de la végétation ordinaire des plantes , on peut dire , noa pas , comme M. Spalan^anz s'exprime , que les animaux deviennent plantes , pour paroître de nouveau fous la for- sne d'animaux , mais, que les êtres vitaux végètent de nouveau pour en produire , par leur partage , d'autres d^une claiTe inférieure en volume , quoique fupérieure par leur degré d'exaltation : cela ne veut pas dire que, dans toute efpece dinfufion , chaque corps m.icrofcopir ^ue 5 après avoir exifté quelque tems fous fa forme , devient un arbrilfeau , une plante, ou un filaiaent ab-r folument immobile, qui fe partage enfuite en êtres vitaux ^ comme M. Spalan^ani l'a entendu y il n'y a pas de règle générale fur cet article , puifque la force végétatricç varie toujours félon la matière' qu'elle informe 5 mais cela arrive , comme je l'ai obfervé dans certaines infufions , qu quelque chofe d'équivalent, par une finiple divifion de ces êtres , félon les obferva:tions àzlA^de Saujjure. J'ai cité ci-delTus un exemple aflez remarquable de la nature de cette végétation vitale qui fe rafine ainfi , & tend toujours à fe partager dans les huîtres : elle peut fe rapporter ici. Leurs extrémités filamenteafes qui font \êrs le bord de h. çoquiUe , quand on les examine dç fur les Etres microfcopiques. 20 1 près , fe détachent à tout moment , & continuent de fc mouvoir après d'elles-mêmes en ferpentant dans l'eau avec une force progreffive 5 c'eft ce qui fait que l'eau qui fe trouve dans cette efpece de coquillage eft toujours remplie d'une infinité de corps mouvans qu'on a pris jufqu'à préfent pour des animaux microfcopiques : c'eft un fait alTez connu de nos Obfervateurs , qui contribue beaucoup à faire comprendre ce que je cherche à dé-s montrer au Ledeur fur ce fujet *. La troifieme remarque qui fe préfente fur ce fujet , & qui m'authorife à étendre la même idée d'une force végé'^ tatrice à toutes les matières quelconques végétales ou animales infufées , comme vraiment génératives de pref- que tous les êtres mouvans qu'on voit communément dans le microfcope , eft la dépendance de cette efpece de génération , la décompolîtion de la matière , fa liai- fon intime avec tous les changemens, foit naturels, foit accidentels qui arrivent à la fubftance macérée , l'irapodi- bilité prefqu'abfolue que les prétendus germes lui vien- nent du dehors , ou foient dépofés d'avance dans chaque |)artie , & enfin la produ(^ion par la végétation pofitive * 35 Eadem ( concharum ) fir'i^ copiojljjîmè injlruSl,£ erant u- 3> nuibus capillamentts , quibus-cùm concha maxhnos motus ciebat , %y quafi totidem animalculis , & hifce ftriis immixtus confpiciebatur 3> tantus animalculorum numerus , ut admiratione obfiupefierem : & 3î quamvis à conchis eximerem exiguas cliquas particules horum 05 capillamentorum fibratorum , remanebant tamen e^dem tanto tem- Xi poris fpatio in fud agttatione , ut haud potuerim diutiùs in illâ 35 contemplatione defixus ejfe , etiamfi mihi maximam afferret de- » leâiationem. Lewenbosck , Obf, Microf, Ep. ad R. Hooke. Trao- faa. PhilofopU, 202 Notes des nouvelles Recherches iîe la matière , dont nous avons été témoins dans pîufieurs cas déjà cités, & qui doit s'étendre par une induétion très-légitime , vu les circonftances , aux autres matières ïnfufées , quoique nous n'ayons pas là-delTus des preu- ves par la voie de l'expérience , ou des faits également conftatés. M. Spalan^ani reconnoît lui-même l'accord étonnant & parfait qui fe trouve conftamment dans tou- tes les infulions , entre la décompofition aétuelle de la fubftance macérée & la produétion des corps mouvans , de façon que û on l'avance par quelque moyen parti- culier, on les a toujours aufTi-tôt qu'on le délire ; fou- Tent leur génération eft prefque inftantanée fi la matière fe coiTompt avec vîtefTe ^ & les différentes parties du même animal , en commençant par les plus folides, pour arriver par dégrés aux plus délicates Se aux plus corrup- tibles par une fuite d'infufions , fourniront plutôt ou plus tard ces corps mouvans dans une exade proportion. C'eft encore par ces mêmes raifons qu'il eft arrivé autrefois que certains Obfervateurs ayant trouvé dans les puftu- les, & dans toutes les efpeces d'éruptions qui fe montrent dans plusieurs m.aladies , quelques-uns de ces corps vitaux , ou, comme il les appelle, des animalcules microfcopi- ques, les ont regardés comme la caufe de ces mêmes ma- ladies , au lieu qu'ils ne font en effet que les produits naturels de la fubftance animale décompofée par cor^ ruption fous la forme de pus. Or , comment concevoir cette exaéle conformité , û on ne regarde pas la décom- polîtion de la fubftance infufée comme une caufe effec- tive, puifque nous voyons fenfiblement que l'œuf d'une mouche , dépofé fur la chair animale , aufti - tôt qu'on l'expofe, n'attend pas fa corruption pour prendre vicj 6c fâr les Etres mîcrofcopîques: f^o^ paroître fous la forme d'un ver parfait ? D'ailleurs l'in- dudion que nous faifons de ce que nous avons pu dé- couvrir par certaines expériences pofitives de la force végétatrice de la matière ^ eft très-légitime en faveur de ces fubftances , oii la conduite de la nature eft plus obf* cure ou entièrement cachée à nos yeux. C'eft par de pareils moyens que toute thèfe générale doit s'établir 5 c'eft ainfl même que les Défenfeurs des germes préexiftans raifon- nent : car où eft le Philofophe qui ofe dire avoir vu la nature dans tous fes détails? La Métaphyfique même, 011 ces Mefîieurs , comme l'Auteur des Lettres Am.ériquai- nés , fe retranchent communément &: fe croyent les plus forts , ne s'y oppofe pas , & nous n'avons pas plus à craindre dans notre fyftême , qu'eux dans le leur , l'abfur- dité de la génération équivoque. Cette puîfTance végé- tatrice, vitale, irritable, générative qui fe trouve dans toute matière animale ou végétale , s'étend , & appar-- tient comme une propriété naturelle à toutes les formes fous lefquelles elle exifte. Elle agit pendant que nous dormons , indépendamment ou de notre raifon , ou de notre fentiment , comme une force entièrement diftinéle, 5c on conçoit facilement la nature de la nutrition ou de l'affimilation de nourriture dans tous les corps orga- niques , quand on admet une vitalité toujours agifTanre dans chaque partie , qui , en décompofant par une exal- tation continuelle la matière nutritive , agit en même- tems , 5c fe répand en dehors pour perpétuer la tranl^ piration. On conçoit encore , félon les différentes pro- portions entre la force expanfive Se la force réfîftante qui compofent la puifTance végétatrice , tous les diiïérens tempéramens que l'on voit ou que l'on peut imaginer ; âd^ Notes des nouvelles Recherches les pallions dominantes , les appétits du corps , les îdîo^ fyncrafes de chaque partie , qui conftituent ces difFérens corps , les raifons pour ierquelles un corps organique qui s étend trop , & au delà de fa jufte nature par un défaut dans la force réfiftante , devient en proportion plus foi- hlt i pourquoi les gens d'une taille médiocre , ou même petite & quarrée , font communément plus forts que ceux d'une taille démefurée 5 pourquoi , & comment l'efpece de nourriture ^ les différens climats influent tellement fur la forme , que les Lappons , les Efquimaux , & tous ceux qui font à-peu-près au même degré de latitude , n'ex- cèdent pas quatre ou cinq pieds en hauteur , pendant que les hommes plus éloignés du pôle atteignent à la hau- teur d'environ fîx pieds. On voit aifément la raifon du changement qui arrive aux animaux dans le tems qu'ils entrent en chaleur , dans leurs difpofîtions , & dans tous les autres effets , qui en dérivent , par cette dilTolution gé- nérale dont ils fe trouvent affedés , & qui rend alors leurs chairs mal-faines , quand on en fait fa nourriture. Enfin, fans entrer dans un long détail qui ne finiroit pas fi je pour fui vois tout ce qui arrive aux corps orga- niques dans tous leurs états , foit de fanté , foit de ma- ladie , & qui s'explique heureufement par le fyftême que nous établifibns, on conçoit, fans beaucoup de difficulté, que la force végétatrice d'un être vital , tel que nous lerepréfentons, étant excitée par l'adivité des principes de la même efpece , que ceux dont elle eft compofée , mais plus exaltés , & déterminée par leur adion dans les vaif- feaux qui font les plus vitaux &: les plus fenfibles, fe porte à façonner , par une efpece de prolongation de ces parties les plus fubùlçs j ou çoncentiaiioîi iaftg-ataiiée ^ fous la Jur les Etres mîcrofcopîques, zof forme peut-être d'un feu élaftique, un germe parfait & fpécifique qui fe nourrit enfuite , fe développe , & paroît fous la même figure du père ou de la mère 5 dans tout autre fyftême , la relTemblance entre les pères & les en- fans , les maladies héréditaires , les tempéramens qui fc tranfmettent , les monftres que nous voyons fi fouvent, &: qui arrivent par un défaut , ou par un dérangement de cette même force mal-combinée ou mal-dirigée, ne s'expliqueront jamais ; car outre que ce mélange intime des germes préexiftans , que les Adverfaires de l'épige- nefe ont imaginé , ne pourra jamais expliquer toutes les bizarreries de cette efpece que nous voyons chaque jour, il y a des monftres tellement conftitués , qu'il faut , de toute néceflité , ou les attribuer à une force plaftique , afTujettie à des loix générales , qui peut néanmoins fe déranger par des obftacles accidentels , ou les mettre fur le compte de la Divinité^ qui les a faits ainfi dans leur origine primitive , ce qui me paroît ridicule , pour ne pas dire blafphêmatoire , Se donne beaucoup plus de prifc aux Matérialiftes que notre fyftême , comme je le pré- fente. D'un autre côté , pourquoi accufer les Défenfeurs de répigenefe de vouloir , par leurs principes , admettre la génération équivoque , puifqu'il eft clair que , félon ces mêmes principes , la force plaftique , aufïi bien que toutes les autres propriétés de chaque corps organique , eft fpécifique , & tels doivent être , de toute jnécelTué , les effets fpécifîques , comme font leurs caufes ? Quant à la génération des êtres microfcopiques, quoi- qu'elle ne reffemble pas à celle des autres dans les claffes fupérieures, puifqu'ils font comme les derniers efforts de la force végétatrice qui s'épuife hors de toute matrice âo 6 Notes des nouvelles Recherches déterminée , néanmoins elle efi: autant fpécifique dans les effets que l'on doit l'attendre des circonftances. Les mêmes infufions produifent toujours les mêmes corps or- ganiques. Tans jamais s'écarter ou de la manière parti- culière de végéter dans chacune félon la nature de la fubftance macérée , ou des loix prefcrites à leur force géncrative , qui ne font pas moins confiantes que celles qui ont été prefcrites par la Divinité pour la produdion des êtres fupérieurs. Il me femble enfin que les Natu- ralifles , qui ne voyent pas les cliofes avec une certaine précifîon, fe trompent précifément par -les mêmes routes en Phyfique que les Moraliftes dans la Morale. Defcartes paroît, &: pour ne pas tomber dans l'inconvénient d'une efpece de génération équivoque des idées , autant que pour affermir la Morale dont il n'embraffe pas encore les principes dans toute leur étendue , il imagine la fable des idées innées qu'il repréfente groffiérement fous îa notion de traces matérielles dans nos cerveaux, exiftans avant notre naiffance , Se tout exercice des facultés de notre ame. Un autre Philofophe vient enfuite, le célèbre Lock y il rentre au-dedans de lui-même pour examiner la chofe dans fon origine , Se entreprend de détruire ce fyftême auquel tous les Cartéfiens avoient attaché leur Morale. Les Sophiftes libertins , qui ne cherchent que des prétextes pour couvrir leurs folies Se leurs extrava- gances, profitent de cette occafîon pour ébranler la ver- tu : on crie beaucoup de part & d'autre , ceux-ci veulent que tout foit arbitraire pour fatisfaire leurs paffions , & fe donnent pour difciples de Lock ; ceux-là veulent au contraire affurer la vertu , mais ils la pofent fur des principes faux » & tous deux fe trompent d'une manière Jur les Etres microfcopiques: 207 grolTiere. Car qu'importe à la vraie Morale , pour fa pureté , quelle fe trouve fixée matérielleiDeiit dans l^ tête de chaque homme à fa naiiTance, comme les Car- té fiens le veulent , ou que fa fureté dépende des loiz générales établies par le Créateur au-defTus de la vue bornée du commun des hommes , ou de la troupe de nos libertins, de façon que les objets extérieurs, d'où naif- fent nos idées , étant difpofés d'une certaine manière invariable , ils doivent frapper tout être réfléchiflant , &: bien conftitué pendant tous les fiécles, tellement que certaines maximes générales domineront par une confé- quence nécelfaire dans toutes nos délibérations? Malgré les faulfes vues des Matérialiftes qui cor- rompent la vérité , & qui donnent une tournure abfurde à nos principes , qu'importe , pour alfurer à la Divinité fon empire fur ce- monde matériel , Se pour exclure les prétendus effets du hafard qui n'a jamais exifté que dans les têtes imbéciles de gens abreuvés des fables du Paga- nifme , ou fuivant les rêveries des Matérialiftes ,- fî les germes des corps organiques exiftent depuis le corameiV" cément de ce monde , formés immédiatement par fo^ Créateur , ou iî les loix générales par lefquelles cet uni- vers eft, gouverné font tellement fixées fous le bon &;. Je fage plaiiir de Dieu , qu'un tel effet fpécifique doit né^ ceffairement être produit par une telle caufe prédéter- minée ? La difpute , quant à la Morale , roule fur un fimple motj.fçavoir fi. Dieu doit agir immédiatemenf pour exercer fon empire fouverain fur la caufe ou fuî fon effet , avec cette différence que ceux qui peuyenc étendre leur vue jufqu'aux caufes mêmes générales pour fixer les principes de U nature.^ f9ftç..CQXtai»çBieii£ ,plu? â"ôS Notes des nouvelles Recherches philofophes que ceux qui font agir la Divinité pour cKâ- ïjue effet en particulier _; c'eft ainfi que nos ancêtres employoient le miniftere des Anges pour faire rouler les corps célefles. Nec Deus interfit nijl dîgnus vlndice no- dus. Hor. Cette remarque ell fort longue , mais pour dédom- ttiager mon Ledeur , je veux la rendre encore plus inté- relTante par la belle découverte communiquée par M. Adanfon , de l'Académie Royale des Sciences , à fes illul> très Confrères dans une de leurs féances , &: donnée att public dans l' Avant-Coureur , N°. 14, lundi 6 Avril 17^7 - non-feulement elle entre très -bien dans mon fyftême avec lequel elle eft parfaitement d'accord , mais elle ferc en même-tems à donner au Leéteur une idée claire de ce que j'entends par vitalité diftinguée entièrement de tout pouvoir fenfitif ou intelleduel , quoiqu'accompagné d'un mouvement local , qui , dans le fenis que M. Adanfon donne au mot , peut fe nommer fpontanée 5 l'être qu'il décrit eft une efpece de zoophyte qui, fans fortir du règne végétal , fe préfente comme le chaînon le plus propre pour lier les deux règnes enfemble. Il jette de plus une lumière fî vive fur tous les autres zoôpliytes d'une claffe fupérieure dont je viens de traiter, quon "comprend aifément , par fa nature , celle de la vitalité organifée , avec toutes les variétés dont elle eft fufcep- tible, car on conçoit, par une gradation tres-aifée & très-naturelle , qu elle renferme dans elle , non - feu- lement le principe d'un mouvement local, mais qu'elle peut être tellement ordonnée &; variée par la fageîTe du Créateur , qu'elle imitera prefque tout ce que nous voyons «^.ans les vrais animaux, fans fortir de fes^ bornes & fans être fur tes Etres fnicrofcoptqiieSé 16^ être fenficive , ou même elle i'eticncira fî bien ccitainci? autres propriétés du végétal , qu'elle peut être partagée continuellement fans que fa vie s'éteigne , &: même (ans qu'elle foit endommagée en aucune façon : au contraire cette divifion , bien loin de nuire a fon exiftence , ferc à multiplier & à préparer les efpeces , comme dans le règne végétal , dont elle conferve certaines qualités , 6c caradlérife en même-tems le genre fi claireiacnt, qu'on ne peut fans abfurdité , malgré les apparences , le con- fondre avec le règne animal , dont les individus font ^ par la nature du principe qui les anime, eircntieilernenc indivifîbles. Voici comment M. Adanfon rend compte de cet objet fi intéreffant pour les Naturaliftes , & Çi digne de leurs recherches. 33 En obfervant en 1759 , à un micro fcope des plus 33 forts , les filets qui compofent le Tremella pour en dé- as terminer l'organifation , M. Adanfon a eu lieu d'y î3 découvrir un mouvement total , qu'il fe contenta 33 d'indiquer alors dans ks familles des plantes qu'il iic iï imprimer la même année. Cette efpece de Tremella. 33 eft celle que Dillen appelle Conferva gelatinofa omnium t>3 ten€rrima & minfma aquarum limo znnafcsns ^ Dil/en^ 33 Hift. Mufc. page 1 5 , & dont il ne donne pas de figure» 33 Elle fe trouve communément au printems & en au- S3 tomne dans les ornières Se les fofles couverts de quel- 33 ques pouces d'eau , & relîemble à une glaire verte ^ 33 compofée de filets croifés Se rapprochés comme les poils 33 d'un feutre. 33 Chacun de ces filets forme une petite plante qui vit 33 & fe propage indépendamment de fes femblables. Cha- 3î cuii a mx mouYement total qui , à la vérité, n'dl o 210 Notes des nouvelles Recherches 33 qu'ofcillatoire , mais qui fe fair en tout fens , indé- 35 pendamment du chaud ou du froid , ou de tout autre 33 caufe externe , & qui continue tant que la plante fub- 30 fifte. 33 Ce mouvement , comme l'on voit , étant total & 33 intrinfsque , eft par conféquent comme fpontané , &: 3i plus analogue au mouvement des animaux que celui 35 de la fenfitive qui exige un attouchement ou au moins 33 un changement de température dans l'air , pour être 33 excité : d'ailleurs la ftruélure , la fubftance même & 33 la propagation des filets du Tremella font , fans com- 33 parcifon , plus femblables à Torganifation animales 33 enforte que s'il y a quelque plante connue qui puiffe 33 faire cette liaifon que les Naturaliftes cherchent depuis 93 (i long-tems , entre le règne végétal & le règne ani- 33 mal , c'eft fans contredit le Tremella , au moins cette 3' plante fe rapproche-t-elle du polype ou des animaux 33 qui lui font analogues , de plus de dix mille dégrés 33 ou efpeces de plantes qui fe trouvent naturellement: 33 placées entre la fenfitive 6c l'animal le plus impar- 33 fair. 33 Le Tremella venant à difparoître tous les ans deux 33 fois, en hiver par les gelées, en été par les grandes 33 chaleurs , & reparoiifant cependanî: tous les ans deux »î fois, fçavoir j au printems &: en automne, il fe pré- 33 fente naturellement la queftion fuivante , fçavoir ; fi 33 la réprodu5iion de cette végétation ejl due a une nouvelle 33 création fpontanée dont la puijfance tiendroit a rkumi- 3> dite de la terre , ou bien fi elle ne provient que de ce 33 que y malgré les intempéries de l'air , il fe conferve queU ^^ que pan ds s parties CQmmç infenfibUs de €€s filets qui fur les Etres microfcopiques , 21 X it fu^fent -pour la multiplier de nouveau , ce qui rentrerait 35 dans l'ordre naturel des plantes parfaites qui f: mal'- 33 tiplient la plupart au moyen de leurs graines. M Pour s'afTurer de ce dernier point , M. Adanfon â w confervé dans des cornets de papier , non - feulemenc 33 des lambeaux de Tremella , mais encore des filets du 35 Conferva de Pline , & de «quelques autres végétations 55 analogues de la famille des BifTus , dans le delTein de :» les femer dans les faifons & les lieux les plus conve- 55 nableSj afin de fçavoir fi elles avoient la vertu répro- 55 du(5i;ive à la façon des graines , & fi cette vertu fs 55 confervoit après piufieurs années d'exficcation de ces 35 plantes 5 enfin, à quel nombre d'années s'arrêtoit cette 35 faculté réproduclive. Mais les circonftances ne fe font 35 pas montrées alfez favorables pour fuivre cet objet , 35 qui , bien éclairci , peut donner la folution d'un pro- 35 blême de l'Hiftoire Naturelle qui n'a point encore été 35 appuyé de preuves folides , qui doit lever bien des 33 doutes qui nous reftent fur les facultés des plantes , 35 & qui mérite par-là le foin des Naturaliftes les plus 35 confommés dans ces expériences délicates «• REMARQUES Sur Us huitUrm , neuvième & dixième Chapitres, IVl . Spalan^ani commence par me reprocher en quel- que façon , malgré l'envie que j'avois de ne donner au public qu'un effai très-court fur ce fujet , de n'avoir pas multiplié fiiffifamment , à fon gré , les expériences Cûz Oij % 1 2 Notes des nouvelles Recherches les TubOiances expofées à l'a^lion du feu. Mais fi je paroîf avoir manqué à cet cgaid , je crois être bien plus en droit de lui repiocher d'avoir donné dans l'excès con- traire à force de vouloir remédier à ce prétendu incon- vénient. En efïet à quoi bon , fous prétexte d'exterminer cer- tains germes qu'il croit s'attacher aux parois intérieurs d'un vafe fcellé hermétiquement , ou dans la fubftance même de la matière renfermée , vouloir trop gêner une expérience , & la mettre à la torture , pour la forcer à dépofer faux contre le témoignage pofîtif de la nature , qui réclamera toujours €n faveur de l'épigenefe ? Un feul quart d'heure , quelques minutes de cuiifon dans de l'eau bouillante , doivent fuffire affurément , pour détruire tous les germes prétendus qui peuvent fe trouver dans l'intérieur d'an vafe fermé hermétiquement, fans pouffer cette cuiffon , comme il l'a fait , jufqu'à une heure , ou même une heure & demie d'une ébullition très -forte. Selon Tes propres expériences , il paroît évidemment que tous les êtres microfcopiques , en général , qui naif- fent dans nos infufions , périiTent dans un fluide qui palTe tant foit peu le degré d'une chaleur modérée , que les germes des vers à foie font détruits par l'eau bouillante en très-peu de tems , & prefqu'en les plongeant fimple* -ment ou les y laiflant un inftant 5 que l'ardeur même du foleil fufHt pour deiîécher , & détruire les œufs de tous les infectes généralement , & qu'enfin les germes mêmes les plus durs des végétaux deviennent inféconds, par la chaleur excelTive du feu , dans quelques minutes ou de cuiïTon , ou de torréfadion. Voilà précifément comme il propofe ia caufc lui-même, eu ia plaidagit ea fur les Etres microfcopiquesl 2 î 3 ma faveur contre les infultes de l'Auteur des Lettres Amériquaines, qui a cru fans doute, dans le tems, faire fa cour au public, en attaquant M. de Buffon & moi : mais il Ta fait avec une indécence & une arrogance fi extraor- dinaire , & avec fi peu de connoiffances , que nous avons alors réfolus enfemble de ne lui jamais répondre. M, de Voltaire nous a de même accufé d'Athéifine dans fes Lettres fur les Miracles, imprimées à Genève , & dont on a fait une nouvelle édition en 1166. Comme cet Au- teur n'omet rien pour égaler le public à mes dépens par des plaifanteries ingénieufes , j'aime mieux penfer que je n'ai point encore a (fez bien développé mes principes pour les rendre intelligibles , que de me croire en droit de répondre à ces deux Ecrivains avec le célèbre Mon» tefquiou , dans fes Lettres familières. MM. de Voltaire & de Lignac ne nous entendent pas ou ne veulent pas nous entendre ; tout ce qu'ils lifent chez fious, ils l'expliquent à leur façon, & ils le critiquent enfuite félon kurs idées. Après avoir fi bien établi mon fentimenc , croiroit- on que M. Spalan:^ani , par trop d'ardeur à pourfuivre la vérité , a donné dans l'autre extrême ? Je connois perfonnellement fcn mérite à tous égards , & fa bonne foi , & je fçais en même-tems que le grand défir qu'il avoir d'^aifurer fes expériences , en ôtant l'ombre même de la moindre équivoque , l'a précipité dans l'excès dont je me plains. Voici les conféquences très - naturelles & trcs-légitimss que je dois tirer de fes expériences : de vingt-cinq infufions faites en même-tems , une feule , qui étoit celle de veau , a produit des corps mouvans ; mais, en général , notre Auteur a trouvé dans un très-grancJ saombre , que ces infufions, palTées ainfi par le feu, tan- O iii 2î4 Notes des nouvelles Recherches tôt donnoient des êtres microfcopiques , tantôt n'en don- noient point. Or , le Ledear doit remarquer que toutes les matières , tant animales , que végétales de ces diiFé- rentes infuiions , avant d'être plongées dans leurs vafes lefpedifs , avoient été cuites au point qu'une longue ébuUition avoit entièrement défuni leur fubftance , &: les avoit réduites comme en pâte. De tout ces procédés. Je conclus premièrement que la cuiiTon a été pouiTée beau- coup au-delà de ce qui étoit nécelTaire pour détruire les prétendus germes des animaux qui tombent, dit-on, de l'air ou fe cachent dans la fubftance infufée , fî l'on n'en- vifage iimplement dans l'expérience que cette dellruâiion ; fecondement, que toute cuifTon , qui excède celle qui eft nécelTaire pour ctt effet , ne peut fervir qu'à nuire aux: expériences & à déguifer la vérité, fl on veut tenir la balance égale entre les Défenfeurs des germes préexif- tens & leurs Adverfaires. En effet nous voyons que tantôt ces matières cuites ont été prolifiques , tantôt infécondes , conféquemraent fans doute, comme il me paroît très-certain, à la réfif- tance de quelques-unes qui ont , en partie , confervé leur forme primitive avec leurs forces végétatrices & vitales , malgré cette cuifTon violente d'une heure à une heure & demie , ou la foibleffe des autres^ dont la fubflance a péri avec fes qualités naturelles , ou a été changée totalement. Dans tout autre fyflême que celui que je propofe, il eft impoiïîble que M. Spalan:(ani me donne une raifon valable de cette variation dont il a été étonné lui-même, comme il en' convient & comme il devoit l'être , s'il n'a d'autre reffource pour expliquer les phénomènes que celle, de prétendus germes attachés fur les Etres microfcopiques . 2.1^ aux parois intérieurs d'un vafe fcellé hermétiquement , ou flottans dans le peu d'air qui refte dans la partie -vuide. Troifîemement , cette variation , loin de nuire à mes principes , ne peut fervir qu'à les confirmer , non- feulement par la raifon que je viens de donner, mais parce qu'un feul argument pofitif , tiré de la préfence de ces êtres, quelquefois malgré toutes les tortures qu'il a données aux expériences , vaut dix mille argumens né- gatifs, comme tout le monde en conviendra. La même façon de raifonner doit s'appliquer aux ob- fervations qui fuivent dans les deux autres Chapitres , par lefquels il remarque que de vingt infuflons végé- tales , traitées comme les premières , dans le mois de Septembre , deux feulement ont donné figne de vie , pen- dant qu'au printems fuivant de fept efpeces de légumes cuits pendant une heure & demie , foit ouverts , foit en- fermés dans un vafe bien clos ou fcellé hermétique- ment, tous, excepté un feul, fourmilloient d'êtres vivans. Je dis des vafes ouverts, ou bien bouchés, ou fcellés her- métiquement , parce que j'ai droit de regarder toutes ces conditions comme indifférentes , fans diftinguer en détail fes expériences , oii il a porté plus loin les précautions contre toute communication avec l'air extérieur, de celles oii il a été moins attentif. Car jufqu'à fa dernière ex- périence, que j'examinerai avant de finir mes remarques, fok qu'il ait laifTé fes vafes ouverts, ou fimpîemenr bou- chés avec un bouchon de bois qui s'ajuftoit néanmoins exactement , foit enfin qu'ils aient été fcellés herméti- quement , il a conftamment trouvé des êtres vivans dans nombre de fes infufions , à certaines petites circonflances près qui font indifférentes à mon fyflême , & qui regar- Oiv ^i6 Hôtes des nouvelles Fecherches dent le plus ou le moins de capacité des vafes. Une chofe même encore fort remarquable qui fe trouve parmi Ces obfervation'; , eft que les infiifions cuites oiiê fouvent produit des êtres viv^us avant , U deux jours pIuioL , que la même vXferx- de matière avoit pu les don- ner infufée fimplement à froid 5 ce qui revient exade- anent à ce que nous avons fait obferver au Ledeur ci» deflus 3 que la produâiion plus ou moins lente de ces êtres dépend enticremer.t de la décompofition plus ou moins prompte de la matière infufée , pourvu que la matière ne foit pas tellement décompofée par le feu qu'elle perde fa forme fubllantielle. Il ne me reftc plus maintenant qu'à parler de la dernière expérience de M. Spalaniani , & qu'il regarde lui-même comme la feule, dans tout fon cours, qui paroît avoir quelque force contre mes principes > mais après l'avoir léduit aux juftes termes dont il ne pourra pas difconve- nir, à raifon de fon efprit de juftice, de fa bonne foi 8c de fon amour pour la vérité , je ne ferai pas grande dépenfe en paroles pour faire évanouir toui ce qui pa- îoit s'oppofer à mes principes dans le réfultat de fes eflais» Il a fcellé hermétiquement dix - neuf vafes remplis de différentes fubftances vésiétales , &: il les a fait bouillir zinCi fermées pendant l'efpace d'une heure. Yoilà le fait^ & voici un autre fait qu'on ne doit pas oublier & que je tiens également de lui-même : dans des vafes ainft fcellés , la préfencc d'une certaine quantité d'air pur , proportionnée à la quantité du fluide contenu & de la fubflance macérée , eft abfolument néceffaxre pour la génération de ces êtres vitaux dans le fyftême également des germipares a comme dans celui de l'épigenefc : or, de fur les Etres microfcopîquesl ni'Tf la façon qu'il a traité , & mis à la torture fes dix-neuf infufîons végétales fans aucune nécefTité , s'il n'a cher- ché fimplement qu'à détruire les germes prétendus qu'il fuppofe pouvoir exifter fur les parois intérieurs de fes vafes , il s'enfuit vifiblement que non ~ feulement il a beaucoup affoibli , ou peur -être totalement anéanti la force végétatrice des fabuances infufées, à raifon de leurs tempéramens plus ou moins forts, mais aufTi qu'il a en- tièrement corrompu, par les exliaL'f' ns ^i par l'ardeur du feu, la petite portion d'au: ov\ je'kùt dans la partie vuide de fes phioles i il n'efi: pas ei.civ.vant par-cc'-'i*;quent que fes infufions, ainil traitées, n"ai :oi: donné aucun ligne de vie *, & il en devoit être aiuf^ , comme il le foupçonne lui-même , en me fuggérant la vraie répcnfe qu'il fem- ble attendre de ma part à fcn cbic^ion. Vcici donc ma dernière propofîtion , & le réfulî-^t de tont mon travail en peu de mots. Qu'il fe ferve , en renouvellant fes ex- périences , de fubftanccs fuf&famment cuites pour dé- truire tous les prétendus germ.es qu'on croit attachés ou aux fubftances mêmes , ou aux parois intérieurs ou flot- tans dans l'air du verre , qu'il fcelle fes vafes herméti- quement 5 en y laifTant utie certaine portion d'air fans le bouleverfer 5 * qu'il les plonge enfuite avec leurs * Pour ne fe jamais tromper , le feul moyen de faire l'expérience ett queftion eft d'avoir un vafe d'une certaine capacité , dans lequel on n'aura rais qu'une petite quantité de fubftance végétale légère- ment cuite , infufée dans un peu d'eau feulement : de cette façon on peut plonger le vafe dans de l'eau bouillante afTez long-tems pour détruire les germes qu'on fuppofe y être , fans corrompre l'ait intérieur qui ell Abfolumenc nécelTaire à la produdion de tout être vivant. hî§ Notes des nouvelles Recherches -^z^zs, dans de Feau bouillante pendant quelques mî-* nates , le tems feulement qu'il faut pour durcir un œuf de pouîe 5 & pour faire périr les germes des papillons à foie ou des autres infedes 5 en un mot qu'il prenne toutes les précautions qu'il voudra, pourvu qu'il ne cher- che qu'à détruire les prétendus germes étrangers qui vien- nent du dehors, & je réponds qu'il trouvera toujours de ces êtres vitaux micro fcopiques en quantité fuffifante pour prouver nos principes : s'il ne trouve à l'ouverture de Tes vafes , après les avoir laiffé repofer le tems néceffaire à la génération de ces corps , rien de vital , ni aucun iîgne de vie en fe conformant à ces conditions , j'aban- donne mon fyRême, & je renonce à mes idées. C'eft^ je crois , tout ce qu'un Adverfaire judicieux peut raifon- nableraent exiger de moi. Après des expériences il déciiîves de part & d'autre , î\ elles réufïliTent fuivant mon opinion fur cette matière, il ne reftera aucune reifource à nos Adverfaires pour fou- tenir leur hypothéfe , que de fuppofer que des êtres 3 continuellement divifibles , comme ceux- ci paroiffent l'être , peuvent parvenir a la fin à un tel degré de ténuité , qu'ils n'excéderont pas le volume d'un globule de lu- mière. Sous cette forme , on conçoit facilement qu'ils pénétreront la maife même du verre ; & qu'ainiî parvenus à la fubftancc infufée , ils fe reproduiront de nouveau , quoique ces vafes aient été fcellés hermétiquement. Je n'ai rien à dire contre une pareille fuppofition , finoiv, qu'il fera fort difficile de la rendre probable , & que tout le procédé de la régénération de ces êtres , fous la forme '' végétale, telle que nous l'avons obfervée dans la femence animale on dans d'autres fubftances qui fe décompofent , fur les Etres microfcopîques. '±i§ ne paroît jamais pouvoir fe concilier avec une fuppofî- tion pareille, comme nous l'avons remarqué ci-devant dans le* corps de cet Ouvrage. Les feuls faits phyfiques qui paroifTent dépofer , finon en faveur des germes préexiftans depuis le commence- ment du monde , du moins pour le développement des parties contenues dans d'autres parties , font tous ceux qui ont été obfervés par le célèbre M. Haller , & cités par M. Bonnet de Genève que j'ai l'honneur de connoîtrs perfonnellement , &: dont je refpeâie le fçavoir, la droi- ture , & l'honnêteté au-delà de toute expreffion. Il eft boa d'en faire part au Leéleur. Les voici : certaines parties , ou membranes des œufs avant qu'ils éclofent fous la poule , deviennent des membranes & des parties fubf- tantielles du germe ou du poulet qui fe développe. Quel- ques autres parties paroifTent , avec le tems , pour la première fois fous des dimenfions fi confidérables qu'à- moins d'avoir été invifibles auparavant par leur tranfpa- rence naturelle, elles auroient paru bien plutôt aux yeux armés d'un microfcope ; d'eu ces célèbres & fçavans Na- turaliftes concluent que le germe peut avoir vraiment préexifté depuis la création , & que la génération , dans la fuite du tems , n'en eft que le développement , quoi- que les parties paroifTent à l'Obfervateur vraiment fortir Tune de l'autre par une nouvelle production , & que le développement pofîtif ne foit pas toujours vifible. Mais outre que le développement des parties vifibles ne fait rien en faveur des germes préexiftans , puifque les Dé- fenfeurs de i'épigenefe peuvent Se doivent l'admettre après la première formation du germe qui eft probablement comme inftantanée au moment de la conception , oa 1220 Notes des nouvelles Recherches s*apperçoit aifément que la force plaftique , feîon ^€S Joix établies , peut opérer à part fur différentes parties du corps qui fe réuniffent après par leurs anaftomofes j & quant à une partie fubitement vifîble fous un volume confidérable , on peut la repréfenter comme une toile d'araignée qui efl fabriquée d'un nombre de fils invifi- bles. Elle ne fe montrera jamais qu'en tifTu , & quand les dilïérens fils feront unis enfemble pour former une feule texture vifible ; or cette idée eft maintenant con- forme à la nature de la végétation & d'une membrane organique. Je finirai ces remarques par quelques extraits concernant le fujct de l'épigenefe , tirés du célèbre Bacon , non pas comme me fervant de fon autorité, qui, fans des faits phyfîques pour la foutenir , n'eft d'aucune valeur, non plus que celle de la Philofophie de vingt fiécles, depuis les premiers Philofophes Grecs jufqu'aux Philofophes du dernier, mais uniquement pour éclaircir la matière qu'il femble avoir mieux envifagée que tout autre Phi- îofophe , en s'éloignant toujours du matérialifme. Il fça- voit non - feulement refpeder la religion , comme une chaîne de vérités célefles , munie des preuves qui lui font propres , mais comme un fyftême fi bien lié avec la vraie phyfîque, que les prétendues contradidions ne font que les rêves des Sophifles qui s'amufcnt des om- bres , 6c s'endorment dans leur ignorance. Le Dieu qui fe révèle aux yeux de la foi dans les faintes Ecritures , eft le même que celui qui fe révèle aux yeux de la Philo- fophie dans le grand Livre de l'Univers. " Naturaleifi w enim Philofophiam , dit ce grand homme , poft verbum. w Dei j certiiTimam fuperftitionis medicinam, eandem pre- fur les Etres microfcopiques. 22t >• batiflimum fîdei alimentum efle, itaque merito religioni « tanquam fidiffimam ancillam attribui : cum altéra vo- » luntatem Dei , altéra poteftatem manifeftet. Nequc 35 erraffe cum qui dixit : erratis nefcientes fcripturas 6? » potejîatem Del , informationem de voluntare , & me- » dîtationem de poteftate nexu individuo copulantem «c. Bacon j de Interpretatione natur& , éd. in Folio , Londinî 1740, pag. 169. » Canon. II. Ineft orani tangibili fpiritus corpore cyslC* 9> fiore obtedus & obfeiTus 5 atque ex eo originem habenc »> confumptio & difToIutio M Canon. IIL Spiritus emiflus deficcat j detentus & mo- » liens intus aut colliquat , aut putrefacit , aut vivificat, 3' Explicatio. Quatuor funt procefTus fpiritûs , ad are- » fa(^ionem, ad colliquationem , ad putrefadionem ,' ad «» generafionem corporum. Arefaâiio non efl opus pro*- » prium fpiritûs , fed partium cralfiorum poft emilTum 93 fpiritum : tune enim 'ûix fe contrahunt per unionem » homogeneorum , ut iiquet in omnibus , qu^; arefîunt 99 pcr aetatem , & in flccioribus corporibus , quse defîc- » cantur per ignem , ut lateribus , corporibus , panibus, « CoUiquatio eft mcrum opus fpirituum , neque fît nifi » calore excitentur ; tune enim fpiritûs fe dilatantes , ne- » que taraen exeuntes fe infînuant , & perfundunt inter » partes craffiores , eafque ipfas reddunt molles Se fufiles, w ut in metallis & cerâ : etenim metalla , & alla tena- » cia apta funt ad cohibendum fpiritum , ne excitatus »• evolet. PutrefaiStio efl: opus mixtum fpiritûs , & partiura M cralfiorum r etenim fpiritu , qui partes rei continebac » & tenebat , partim emiflb , partim languefcente , orn- as nia foifuntur , & redeunt in biçterogeneas Tuas , ûye ^ 222 Notes des nouvelles Recherches o2 fi placet , elementa Tua y quod fpiritiis inerat rei con=^ 33 gregatur ad fe , unde puti-efaâ:a incipiunt efTe gravis 53 odoris 5 oleofa ad fe , unde putrefada habent non nihit 33 laevoris Se unftuofitatis , aquea itidem ad fe, faeces ad 33 fe ; unde fit confufio illa in putrefadis. At generatio S3 Jlve vivificado eji opus itidem mixtum fpiritûs \j> par- » dum crajftorum y fed longe alio modo , fpintus enîm M totaliter detinecur ^ fed tumet & movetur localiter ; par- X tes autem crajfiores non folvuntur , fed fequuntur motam ^■i fpiritûs atque ah eo quafi difflantur ^ & extruduntur in 33 vadas figuras j unde fit illa generatio & organifatio : 33 itaque femper fit vivificatio in materiâ tenad & lentâ • 33 atque etiam fequad & molli ; ut fimul & fpiritûs fiât 33 detentio , atque etiam cejjto levis partium , prout eas 33 effingit fpiritûs ; atque hoc cernitur in materiâ omnium 33 tam vegetabilium , quam animalium , five gêner entur ex 33 putrefaBione , five ex fpermate : in his enim omnibus 33 manifefiijfime cernitur ejje materiâ diffidlis ad adrum^ » pendum , fadlis ad cedendum ce. Rien ne peut être plus exad , ni s'accorder mieux avec mille obfervations que fai faites fur la force végétatrice des fubftances organifées , que cette defcription de Bacon ^ qui , ne connoifTant alors aucune hypothéfe établie pour couper court fur les phénomènes difficiles , ne fait que fuivre la nature pas à pas , & la peint fidèlement en conféquence des faits qu'il obferve. 33 Canon. IV. In omnibus animatis , duo funt gênera 33 fpirituum \ fpiritûs mortuales , quales infunt inanima- 33 tis , & fuperadditus fpiritûs vitalis. 35 Explicatio Itaque noffe debemus inelTe M humanis carnibus , oflibus , membranis , organis » de* fur les Etres mkrofcopîquesl m 2% *> nique partibus fingulis , dum vivunt , in fubdantil w earum perfufos taies fpiritus , quales infunt in hujus* 33 modi rébus , carne , ofle , membranâ , &: casteris fepa- 33 ratis & mortiiis 5 quales etiam manent in cadavere : at 33 fpiritus vitalis , tametfi eos regat , & quemdam babeat 33 cum illis confenfum , longé alius eft ab ipfîs , inte- 93 gralis , &. per fe conftans. Sunt aiitem duo difcrimina 33 prsEcipua inter fpiritus mortuales , & fpiritus vitales j 33 alterum quod fpiritus mortuales minime fibi continuen- 33 tur , fed fint tanquam abfciffi & circumdati corpore 33 craffiore , quod eos intercipit -, quemadmodum aer per- 33 mixtus eft in nive aut fpumâ. At fpiritus vitalis omnis 33 fibi continuatur , per quofdam canales , per quos per- 33 méat , nec totaliter intercipitur. Atque hic fpiritus 33 etiam duplex eft j alter ramofus tantum permeans per 33 parvos dudus , 8c tanquam lineas : alter habet etiam 33 cellam , ut non tantiim fibi eontinuetur , fed etiam 33 congregetur in fpatio aliquo cavo , in benè magnâ quan- 33 titate , pro analogiâ corporis 5 atque in illâ cellâ eâ 33 fons rivulorum , qui indè diducuntur. Ea celia praecî- 33 puè eft in ventriculis cerebri , qui in animalibus magis 33 ignobilibus angufti funt. Adeo ut videantur fpiritus 33 per univerfum corpus fufî potiiis quam cellulati : u£ 33 cernere eft in ferpentibus , anguillis , mufcis , quorum 33 fîngulze portiones abfcifT^ moventur diu : etiam aves » diutius capitibus avullîs fubfultant 5 quoniam parva 3s habeant capita , &: parvas cellas : at animalia nobi- 33 liora ventricules eos habent ampliores , &: maxime 33 omnium homo. Alterum difcrimen inter fpiritus eft, 33 quod fpiritus vitalis non nuUam habeat incenfîonem, sî atque fit tanquam aura compofita ex flamma & aère 5 X24 T^ot^^ ^^^ nouvelles Recherches^ %■> quemadmodùm fucci animalium habent & oleum , ÔS 35 aquam. At illa incenfio peculiares prxbet motus 8C 33 facuitates 5 etenim & fiimus inflammabilis , etiam ante »> concepcam âammam , calidus eft , tenuis , mobilis 5 ^c 93 tamen alla les eft , poftquam fada fît flamma j at 33 incenfio fpirituum vitalium multis partibus lenior eft, 33 quam moUifTima flamma ex fpiritu vini , aut aiiàs ; 33 arque infuper mixta eft ex magnâ parte cum fubftan- 33 tiâ aereâ , ut fit 6c flammeae , 5c aerex naturx myfte- 33 rium «. Après cette defcription de la vitalité matérielle , qui eft afiez palpable , 5c qui revient entièrement aux principes que j'ai puifés dans toutes mes expériences , on ne fe plain- dra pas fans doute que ni>us repaiffions le public de mots, ou de pures notions métaphyfiques , quand nous em- ployons ce que nous appelions force végétatrice , pour expliquer les phénomènes microfcopiques. 33 Canon. V. Adiones naturales funt proprl^ partium 33 fingularum, fed fpiritus vitalis eas excitât, ^ acuit 33 Canon. VIL Spiritûs quafi defideria duo funt ; unum 33 fe multiplicandi , alterum exeundi , 5c fe congregandi 33 cum fuis connaturalibus........ 33 Canon. VIII. Spiritûs Hetentus, fi alium fpiritum 33 gignendi copiam non habeat , etiam craffiora inteneraç» 33 — Bacon y Hiftoria vïtx ^ mortis, edit. Lond. in-foL 33 1740, pag. 181 , i8i , 183 , ôcc. vol. II. 35 labrica autem partium , organum fpiritus 33 eft , quemadmodùm &c ille animA rationalis , qu& in- 33 corporea eji Cr' divina» — Ibid. pag. 1 88 «. Après une déclaration fi pofitive, on ne.s'avifera pas de faire paffer Bacon , malgré ces iiotions phyfiques fur 33 la fur les Etres microfcopiquesi 22 f k nature de la vitalité , pour un Matérialifte , comme on a affeété de faire pafTer le célèbre Lock pour un Déifie , parce qu'il foutenoit mal-à-propos , & fans raifon , une prétendue pofTibilité , quoiqu'il ait été toute fa vie en oppofîtion fur cet article avec fon ami Colllns , & qu'il ait écrit un eflai exprès en faveur de la religion révélée? On peut juger des fentimens de Bacon en fait de religion , par les paroles fuivantes. « The beft temper of minds , « dit le même célèbre Philorophe , defireth good name, M and true honour ; tlie lighter popularity and applaufe : w the more depraved fubjeébion and tyranny , as is (ç.tn. « in great conquerors , and troublers of the world , and 33 yec more in arch-hereticks : for rhe introducing of 31 new^doélrines is likev/ife an aiFe6l:ation of Tyranny » over the underftandings, and beliefs of men ". Bacon, Nat. Hift. voU III , pag. 109. 33 Canon. XXXII. Flamma fubftantia mcmentanea eftj " aer fixa 5 fpiritûs vivi in animalibus média eft ratio. 33 Explicatio Spiritus utriufque naturse eft èc 33 flammeae , & aereae Spiritus habet ex aère faciles 33 fuas & delicatas imprefllones & receptiones , à flammâ 33 autem nobiles fuos & potentes motus , & aétivita- »3 tes Reparatur autem fpiritus ex fanguine vivido , 33 & florido arteriarum exilium , qus infmuantur in cere- 33 brumcc. — Bacon» Ibid. pag. i88. Cette dernière remarque de Bacon me rappelle une expérience très-intérelTante dont j'aurois dû faire mention dans le corps de cet Ouvrage , mais elle ne m'eft pas revenue alors dans l'efprit. Elle confifte à prendre du fang frais, nouvellement forti du corps de l'animal, & à l'agiter beaucoup , &: pendant un allez long-tems avec ua P à 2^ Notes des nouvelles Recherches ifaifceau de petites branches. Outre refprit vital que lé fang contient , Teion Bacon , il a une certaine portion de parties folides , & le réfultat de ce procédé eft de les unir , & d'en former un corps. En effet il en fort une maffe alTez confidérable , toute géîatineufe, molle, tenace &: très - élaftique , qui indique aflez que cette liqueur eft chargée en même-tems de tout cequ'il faut à la na- ture pour réparer un corps organique , tant en fluides , qu'en folides. Cette maffe , mife en infufion , donne prefqu'auffi-tôt des êtres vitaux micro fcopiques en grande quantité. 33 If the fpirits be not mereîy detained , but pirotrude 33 a littl , and that motion be confufed , and inordinate, 33 there followerh putrefadion which ever difTolveth the » confiftence of the body into much inequality * 33 But if that motion be in a certain order, there follo- 33 weth vivilication , and figuration , as both in living 33 créatures bred of putrefadion , and living créatures 33 perfed «. Il y a plufîeurs autres endroits , dans Bacon , ou iî entre encore dans un plus grand détail fur la nature de îa vitalité & de la force plaftique de la matière , mais ce que j'ai cité fulHt pour faire connoître les idées faines & naturelles qu'il avoir fur ce fujet , & qui s'accordent parfaitement avec mes obfervations. La feule objedion qui fembîeroit avoir quelque force contre l'épigenefe , ou les forces plaftiques régénératri- ces , de la façon que M. de Buffon s'exprime fur ce fujec dans le fécond volume de fon Hiftoire Naturelle, eft celle que j'ai trouvée autrefois dans un elTai fur la Généra- tion 5 par un Médecin Anglois. Je crois même > fi je n© fur les Etres micro fcoplques, 2.ij fût trompe, que M. Raller la répète encore dans fa Pré- face de l'édition allemande de la même Hiftoire Natu- relle. Elle conlîfte à conclure que s'il y a des moules inté- rieurs ôc des molécules organiques fpécifiques , & propres à chaque partie d'un corps organifé pour la formation de cette même partie dans le fétus , un père aveugle , un borgne , ou un manchot ne pourront jamais produire des enfans complets dans tous leurs membres , fur-tout fi la mère , de fon côté , participe aux mêmes défauts phyfiques. Or l'expérience, difent-ils , démontre le con- traire, L'objedion feroit vraiment fpécieufe, fi les ter- mes , dont M. de Bujfon fe fert pour peindre d'une ma- nière fenfible les forces plaftiques aux yeux de certains Lecteurs peu éclairés en Métaphyfique , dévoient fe prendre à la lettre. Mais le mot de l'énigme fe devine aifément , 11 l'on fait attention que le terme de moule intérieur ne doit pas être pris matériellement , comme l'imaginent ces Critiques 5 car alors l'idée en feroit ab- furde èc contradicî^loire , en même - tems que celle de molécule organique , fl la vue fous laquelle on conlîdérc le fyftême fe borne à cette idée fans l'étendre plus loin, ne repréfenteroit qu'imparfaitement , & fous un faux jour , les opérations de la nature. En effet ce n'eft point entendre M. de Buffon , que d'imaginer qu'il n'a d'autre idée des forces plaftiques dans la génération des corps organifés , que celle qui réfulte du concours phylique par l'appofition fuperfîcielle des particules falines , par exemple, dans les cryftallifations ordinaires, ou des grains de fable dans la formation des pierres j telle enfin que nous donne le mot de wjolécule organique pris maté- riellement. C'eft une image , lî vous voulez , dont il fe pij 12 8 Notes des nouvelles Recherches ferc pour aider l'imagination de ceux à qui il faut de? repréfentations fenlîbles , mais une image fî imparfaite, que l'on voit allez par toute la teneur du fécond volume de l'Hiftoire Naturelle , que ce célèbre Auteur, loin d'aftreindre fon Le6leur , le mené infenfiblement par des tableaux purement phyfiques à des idées plus exades , plus étendues & plus métaphyliques. Un feul exemple répandra un grand jour là-delTus , 6c mettra le Ledeur en état de prononcer. On fçait que les écrevilTes qui ont la faculté reproduéïrice , comme les polypes , les étoiles de mer , & beaucoup d'autres corps organifés , réparent la perte qu'elles font quelque- fois de leurs pattes. Maintenant que l'on fuppofe pour un moment ce que nous avons alTez clairement expofc par un grand nombre de faits , qu'il y a une force végé- tatrice dans le corps de cet animal par laquelle il fub- iîile 5 & qui pouffe toujours au dehors , en déterminant la nourriture afTimilée en plus grande abondance vers cette partie ou la réparation doit commencer. On con- çoit aifément que cette force eft déterminée en elle-mê- me par la nature fpécifîque du corps déjà organifé, & comme elle répare conftammcnt toutes les parties infen- fibles qui échappent par la tranfpiration , il y a de ces parties infenfibles qui ont chacune leur figure détermi- née félon la patte qui doit fe reproduire , ou tout autre membre qui peut manquer à ce genre de corps organifés. Sa quantité donc , fa qualité ^ fon tempérament particulier, tout efl fpécilîque , & la moindre partie eft également comme le total, idiofyncratique , de façon que les couloirs & les extrémités organiques où la végétation commence , fervent, pour ainfi dire, en qualité de mouU intérieur^ fur les Etres micro fcopiques , 21$ quand on conddere la force plaftique métaphyfiquement , pour déterminer la figure de celles qui doivent les fuivre immédiatement 5 celles - ci fervent de même aux autres qui viennent après , & ainfi du refte. Or reprenons à préfent l'idée générale qui doit réfulter de ces idées particulières, & nous concevrons fans diffi- culté qu'une force végétatrice , exactement diftribuée , intérieure Se déterminée en elle-même fpécifîquement , doit donner par ces moyens, quand elle pouffe au dehors, une figure toujours déterminée, comme une force pro- jedile quelconque déterminée , 6c combinée avec la gra- vitation, décrit néceffairement une certaine portion pa- rabolique d'une forme déterminée , & s'arrête à un point mathématiquement fixé , ou comme un feu d'ar- tifice dont les forces font combinées avant que l'on applique le feu , fe répand au dehors , & produit une figure déterminée d'avance par la volonté de l'Artificier. Or cette même figure , dans l'exemple dont nous nous fervons , eft la patte de l'écreviffe , qui eft formée félon des loix tellement établies par la Divinité , & propa- gées depuis la création de corps en corps, que les pre- miers individus de chaque efpece une fois donnés par la volonté toute puiffante de Dieu, tous les produits doi- vent néceffairement être fpécifiques Se fimilaires fans aucune équivoque, fi nul obfbacie accidentel ne fe pré- fente pour détourner le cours de la nature , comme il arrive quelquefois dans les monftres. Je ne puis rien ajouter de plus efficace pour faciliter l'intelligence de mon fyftême , à cette vue fous laquelle je préfente ici l'aâiion de la force végétatrice , qu'une obfervation très-finguliere faite par M. dç Sauffure de P iij I 55 o Notes des nouvelles Recherches Genève que j'ai déjà cité , fur un être microfcopique , qu'on peut nommer le Protée dans cette clafle , avec plus de raifon encore que celui dont M. Baker , célèbre Ob- fervateur Anglois , fait mention dans fes découvertes , & qui lui reffemble en quelque façon par le pouvoir qu'il a de fe métamorphofer. Telle eft la grande dudilité de ce corps organifé , qu'il change continuellement de figure à tout moment 5 toutes les différentes formes de rond , d'ovale, d'un filament délié qui ferpente, d'un corps plat à deux cornes , à plufieurs rayons , enfin à toutes fortes d€ projetions, lui conviennent également. Il paroîr pou- voir fe changer comme à volonté , & avoir pleine liberté de s'accommoder , félon le befoin , aux circonftances ou il fe trouve. Il me femble , après ces deux exemples 8c plufieurs autres , que des Obfervateurs attentifs pourront découvrir par la fuite qu'il ne refte rien à défirer pour comprendre afiez facilement comment une force inté- lieure modifie une forme extérieure félon la dudilité de la matière qu'elle informe , Se produit fpécifiquement , félon les circonftances , les figures quelconques conve- nables à toutes les efpeces de corps organifés. C'eft enfin ce que j'entends par une force végétatrice, feul principe de génération. Tout cela une fois pofé , on entend facilement avec très-peu de métaphyfique amenée par des images fenfi- blés , quoiqu* imparfaites , comme M. de Buffon l'amené, que non-feulement un aveugle , un manchot ou un borgne peuvent , Se doivent avoir des enfans aufiî complets dans leurs membres que les parens les plus fains &: les plus parfaits , mais que cette force végétatrice qui vita- Hfe leur corps , leur rendra même les organes & les fur les Etres micro fcopiques. n^ i membres dont ils font privés, comme nous le voyons arriver dans jcs écrevifTes , &c. fi la réfîftance n'eft pas invincible pour elle, ou fî la matière qui les compofe eft auffi dudile que celle de leur fétus. On voit encore, par cette feule façon d'envifager ce fyftême , que la vraie Philofopbie ne nous égare jamais , & que c'eft toujours par ignorance que l'on fe plonge d'un côté dans les abfurdités du matérialifme , ou qu'on les attribue d'un autre, fans connoifiance de caufe, aux Phi- lofophes mêmes, en les jugeant félon les difpofitions de fon cœur. ^ littU fcience is a dangerous th'ing , Drink deep , or tajl not the Pierian fpring ; Too fhallow drafts inioxicate the brain , But drinking largely fobers us agaln. Pope. C'eft toujours une imagination vive ^ ardente , effré- née qui nous précipite dans l'impiété , & non pas un jugement raifonné fur les ouvrages de Dieu ; une ima- gination de cette trempe fubftitue un phantôme à la place de la raifon , ne regarde jamais les objets que du mauvais côté & dans un faux jour , & décidant de ce qu'elle prétend peindre , par des vues faufles , elle at- taque la Providence , & caloiinnie la vertu de la religion. On auroit pu s'appercevoir avec la plus légère atten- tion que le fyfteme de l'épigenefe , comme nous l'a- vons décrit d'après les faits , s'élève par dégrés en mon- tant pas à pas l'échelle tracée par la nature , qu'il ne déroge pas un inftant , ni à l'ordre établi par la Divi- ' nité , ni aux loix que nous devons regarder comme fa- crées, & qu'il porte le fceau de la vérité dans l'univerfalité Piv 2.^ 2 Mûtes des nouvelles Recherches de Tes principes , qui s'étendent aufll ioin que notre vue peut fe porter dans ce monde vlfible. Cette exaltation graduée , cette adivité progreffive donû la matière eft douée, principe de toutes les métamorphofes phyfîques ou chymiques, qui végète dans les plantes j qui compofe & vitalife les corps organifés ; qui s'irrite dans leurs mem- bres 5 qui conftitue leurs idiofyncrafès ; qui donne nai^ fance aux difFérens phénomènes microfcopiques dont nous avons parlé , qui vivifie la femence animale & végétale j qui diverfifîe toutes les fécrétions , qui fixe le nombre des efpeces par des analogies fecretes ; qui s'exalte dans les vivipares & l^s ferpens venimeux j qui fe diffipe en particules contagieufes ; qui , en agiiTant fur l'ame par des imprefïlons fenfibles , l'excite à penfcr & lui en fournit la matière 5 qui fépare les élémens les uns d'avec les autres dans une échelle exaderaent graduée & variée à chaque pas 5 qui fe fubtilife en vapeur éledrique ; qui brille dans la lumière fous la forme de fept couleurs princi- pales avec mille nuances différentes j qui fe change en matière étherée; qui fait graviter les planètes vers le foleil ; qui les unit dans un feul fyftême , &: qui anime tout l'-univers , avons - nous une feule fois infinue dans aucun de nos écrits qu'elle renfermât dans la fphére de fon adivité la fenfation , &: encore infiniment moins la puifiance intelleâiuelle > Si dans mon elfai fur la génération, j'avance, en rai- fonnant d'après Le'ibnlt^ Se bien d'autres Philofophes , que toute matière quelconque , même la plus exaltée , eft clTentiellement compofée , quoique les premiers princi- pes qui la compofent foient des êtres fimples , je refufe en même-tems à ces mêmes principes toute fenfation 3 fur les Etres micro fcopiques, 235 '& à plus forte raifon tou|¥ intelligence ; & je la refufe avec d'autant plus de fondement que leur eflence , com- me principes de la matière , eft de fe combiner toujours pour produire par leur adion multipliée & coordonnée • les phénomènes de l'étendue , de la figure , du mouve- ment & de la folidité j or on ne conçoit pas que la fen- fation puiiTe exifter , fînon dans un être en quelque façon ifolé , diftingué du corps qu'il habite , & dont l'adivité eft comme concentrée en lui - même. Toute fenfation demande par fa nature , pour dernier terme , l'unité parfaite , au lieu que toute compofition maté- térielle quelconque , même la plus exaltée , renferme dans fon idée la multiplicité , tellement que fi Dieu même par un effet de fa toute-puifiance vouloir donner à un de ces êtres fimples , principes de la matière , la puifiance de fentir, il fortiroit nécefiairement de fa fphére fans pouvoir plus fe combiner pour reproduire les phé- nomènes matériels. Il en fera enfin de lui comme d'une ligne quelconque qui ne peut être en même - tems un cercle & un quarré. Par une raifon de la même efpece , tirée de la nature des chofes , un être purement fenfitif ne pourra jamais acquérir l'intelligence fans fortir de même de fa fphére qui eft déterminée par la Divinité , car l'adion d'un être fenfitif ne s'élève jamais au - defiiis des iraprefiîons pu- rement matérielles , & ne travaille pas fur elle-même pour reproduire , par la comparaifon de ce qu'elle fent, de nouvelles idées , & les fpirimalifer par fes abftrac- tions de plus en plus, efpece d^opération dont les bêtes font vifiblement incapables. En effet les animaux n'ont pas la moindre idée du 234 Notes des nouvelles Recherches Dombrc , ni les premiers principes d'aucune fciencc , ni la moindre teinture de la morale , & la raifon de tout ce qu'ils font de plus admirable dans l'économie de cha- que efpece , eft dans l'être fupéricur qui a combiné pour eux les effets naturels de pur fentiment dans tous les cas poflîblcs pour la confervation de leur être , & non pas en eux-mêmes. Je m'explique par un exemple 5 une cer- taine grofTe efpece de canard , qu'on appelle quelquefois canard de Mofcovie , marche après la pluie dans des en- droits un peu humides en frappant à chaque inftant la terre avec fes pattes , cette adion répétée remue la boue , & fait fortir les vers dont il fe nourrit : on eft naturel- lement porté en voyant l'effet , à croire que ces ani- maux agiffent ainfî avec une prévoyance bien marquée en cette occafion. Point du tout : placez - les dans une cour pavée , 8c donnez-leur de la nourriture , ils conti- nueront , comme auparavant , de firapper les pierres en mangeant, & ils ne cefTeront que quand la nourriture leur manquera. La prévoyance donc qui les dirige n'eft pas dans l'animal, mais dans le Créateur qui a combiné fes deux adions eiifemble pour leur bien-être général » félon le genre de vie auquel ils font deftinés. Le même principe , plus ou moins compliqué , s'étend à tous les animaux quelconques , & conftitiie ce que nous appelions inftinëi , qui fufîit avec la fîmple perception des idées qui leur reviennent immédiatement des objets, fans la puiiTance abftradive ou comparative de les con- duire chacun félon fa propre économie. D'ailleurs, fans trop entrer dans la Métaphyfîque qui démontre de plus en plus , à mefure que l'on y entre, la fupériorité , l'in- dépendance , êc l'immortalité naturelle de l'ame inte!- fur les Etres microfcopiques. ^55 kc^ucllc , une preuve bien fenfible que la connoiiTancc purement fcnfîtive eft une efpece d'aftion qui diffère tota- lement de l'intelligence , c'eft que l'une , au lieu d'aug- menter en raifon de l'intcnfité de l'autre , diminue au contraire fenfiblement jufquà l'extindiion. Ce phéno- mène s'obfer\'e tous les jours dans des perfonnes totale* ment renfermées en elles-mêmes , & occupées fortement de leurs propres penfées 5 c'eft une vérité aflez connue de tout le monde que la méditation très-profonde éteint la fenfation. Voilà ce que j'avoîs à répondre à ceux qui n'ont pas encore bien faifî notre fyftême , ou qui n'ont pas encore eu le tems de Tapprofondir. Je défire qu'ils veuillent bien le juger un peu plus digne de leur attention. REMARQUES Sur certaines nouvelks découvertes faites à Upfal en Suéde , extraites dhine Dijjertation Acadé- mique fur h Monde invifcbk , par M, Charles Roos. A Upfal lyGy. H AUD ita pridem Nob. Dom Praires feminibus fun- 35 gorum quorundam examinandis occupatus oftendebat « mihi lucuIentifTimè moveri hsc, & curfîtare in aquis 35 inftar pifcium 5 verè viva animalcula , quse poft mo- M dum lege naturae bue ufque inauditâ , & intelledurai 35 hominis omnem fuperante , ( ut fîeri non polTe dice- » rent multi , nifi videre oculis & palpare manibus rem ^5 6 Notes des nouvelles Recherches M liceret ) muta , & fixa fuerunt fungorum corpora «» pag. z. Pag. 8, L'Auteur parlant des coreaux , des coralloides , des madrépores & d'autres zoophytes , ajoute conformé- ment à ce que nous avons toujours foutenu, & que nous venons de préfenter fous un nouveau jour dans les note^ précédentes. « Superfuit igitur ut crederent hos flores ^3 animatos feu polypinos, effe adventitios, zoophytis ad- » h^rentes , ut es liis nutrirentur , quemadmodùm larvae 35 infedorum à fuis piantis. Hoc vero controverfias ope- 33 rofîori , maxime inter viros accuratiffimos , EUiJium Se 33 Bafterum agitât^ dédit occadonem , donec Nob. Dom. »' Prasfes in fyftem. nat. edit. lo. rem conficeret , quod 33 nempè in his zoophytis planta effet vegetabilis , fed 33 flos animalis , unde clarior quoque acceffit zoophyto- 33 rum conceptus «. ^3 Scripfit hic vir ( Baro Otto Munchaufen in libro quem 39 dedir anonymus , fub nomine der Hans vatter , ^ vol. 33 8^. Hannov. 176^. ) ante decennium fe inveniffe 33 quod uftilago hordei vivis confiât animalculis, nunc 33 denique in opère nuper nominato narrât non foliim 33 farinam nigram in uflilagine hordei &: tritici mera 33 effe ova , fed etiam fîmilem farinam in lycoperdis , 35 agaricis , & aliis fungis , immo ipfam mucoris fari- 33 nam nihil aliud quam femina fungorum effe ; fedfemink 33 h&c tepid& per dies aliquot aqu& commijfa veros germi- 33 nare in vermiculos microfcopiis perfpicue viftbiUs , tan^ Si demque telam contexere exiguam ^ cul inhéireant immota^ 3» atque intumefcant infungos^ quious debeant çnginem'^e. pag. li. Pag. 15, 33 Multiâ adhuc tenebris hxc gênera eifent fur les Etres microfcopiques . 237 w învoluta , nili illuftrifTimus Munchaufius experimentis »' fuis longiiîs progreffus , fumptâ fcilicet nigrâ farina 33 lycoperdi , & aquse pariter immifsâ tepidse , atque in 33 animaiem commutatâ formam , vidljfet h&c animalciila M iterum infungos abire , id eft , motum amittere volun- » tarium , crefcere ubi fatis fuerit alimenti humidi , in 3> corpore magnitudine capitis , fîcque catenulam often- M diflec per totum nos fyftema fungorum deducentem «. De jour en jour un vafte champ s'ouvre , 8c préfente de nouveaux objets entièrement conformes aux principes que nous venons d'établir , M. de Bujfon dans fon Hif- toire Naturelle , & moi dans mes Obfervations microf- ' copiques. Rien n'a été plus clairement établi dans nos Ouvrages que le palTage fouvent très-prompt , félon le degré d'exaltation du végétal au vital , Se le retour du vital au végétal dans toutes les efpeces ou ces deux clafles fe touchent prefque immédiatement. M. Spalan:^ani ré- voque en doute , comme on l'a pu voir , la vérité &: l'exaditude de mes obfervations fur cette métamorpho- fe : cependant les voilà confirmées par le Baron de Mun- xhaufen , & vérifiées par fes expériences fur plufîeurs corps , dont la corruption , comme on l'appelle commu- nément , ou plutôt la décompofîtion fe développe en êtres vitaux. Je crois , après avoir rapporté tout ce que j'avois à dire fur la nature de ces chofes , qu'il efl inu- tile d'appliquer de nouveau nos principes aux expériences en détail que je viens de citer: le Ledeur doit voir main- tenant comment tous ces phénomènes entrent dans nos vues , & s'expliquent heureufement , même a priori 3 car il ne fufîît pas , avec les Sçavans d'Allemagne , de pou- voir faire une claffe à part de tous les zoophyteSj ds aj 8 Notes des nouvelles Recherches décider qu'ils ne font proprement ni végétaux , ni anî-^ maux, mais une efpece de clafle mitoyenne, 8c de ran- ger les nouvelles expériences du Baron de Munchaufen , parmi celles de MM. Tremblay , Jujjîeu , Peyfonel , ElUs & autres Phyficiens qui ont écrit fur cette matière : il faut les prendre dans leurs principes ; & ces principes doivent embrafler la génération de tous les corps orga- nifés quelconques dans fa totalité , par un enchaînement non interrompu qui pervade tout le fyftême. C'eft ce que M. de Bujfon a fait le premier par des recherches fur une partie de la matière organifée , Se perfonne n'en a jamais eu la moindre idée avant ce célèbre Naturalifte. TsLi eu le pîaiiir de coopérer avec lui fur une autre par- tie , d'étendre fes vues , de les confirmer & de les géné- ralifer il y a plus de vingt ans. Si les Sçavans du Nord avoient bien médité fur notre fyftême , & fur les con- féquences qui en découlent , loin d'être frappés d'éton- nement par les obfervations du Baron de Munchaufen , ils auroient vu , ce qu'on pouvoit facilement prévoir d'à* vance , qu'elles ne font que des conclufions nécefTairement renfermées dans nos principes. Si l'Auteur des Lettres Amérzquaines vivoit encore , il apprendroit par les nou- velles découvertes qui fe font tous les jours, que ce qu'on appelle communément efprit à Paris , ne fuffit pas , fans des expériences bien faites , pour dévoiler même impar- faitement la nature , ni réconcilier la Philofophie avec la religion , que la plaifanterie eft une reflburce alTez pitoyable au défaut de raifons , & qu'enfin le prétendu ridicule que l'on veut jetter fur un Adverfairc ne lîienc pas à la vérité. fur les Etres micro fcopiques. 259 REMARQUES Sur l^ Analogie. ^ & le pajfagz du visitai au vitale JLa plupart dés Phyficiens ne connoifTent la nature que fuperficiellement ; ils ne la confîdérent jamais pour lui donner toute fon étendue , mais feulement pour la refTerrer & la ramener à leur méthode toujours fautive , & fou- vent démentie par les faits. L'obfervation faite par M. de Bufon , & très-bien prouvée en plufieurs occadons dans le cours de fon Hiftoire Naturelle , fe vérifie encore plus amplement par les confidérations que nous venons de donner dans nos remarques fur le pafTage du végétal au vital , & fur leur analogie réciproque. Voici un exem- ple qui mérite notre attention dans la claffe des zoophy- tes de mer, & qui confirme nos idées. » Les Anglois, dit l'Abbé Prevoji , tom. III, pag. xpx. in-12, dans l'ex- trait de la relation du voyage aux Indes orientales par le Capitaine Lancafier en i^oi , dans l'Ifle de Sombrero, » découvrirent fur le fable du rivage une petite plante » qui croît affez pour devenir une efpece d'arbre , mais Tt qui fe retire dans la terre lorfqu'on y touche , 8c qui » s*y enfonce alfcz pour n*en être arrachée qu'avec effort- M Lorfqu'on l'en a tirée , on trouve avec admiration que M fa racine efl: un ver qui diminue à mefure que la plante M s'élève, & qui prend par dégrés la conûftence duboisV s> l'Auteur ajoute que cette transformation eft un des 35 plus étranges phénomènes qu'il ait vus dans tous fes ?3 voyages , &: le refte n* eft pas moins merveilleux , car ^40 Notes des nouvelles Kecherches 3> fi l'on arrache la plante dans fa jeunefie , elle acquiert 35 en féchant la dureté d'une pierre, jufqu'à devenir fem- « blable au corail blanc ; de forte que le ver fe change »3 fucceffivement , dit le Traducteur , en deux natures 33 efientiellement différentes. Il ne paroît pas que la vé- 93 rite de cette obfervation puiiTe être fufpede , puifque 53 les Anglois de la flotte prirent plufieurs de ces plantes S3 & les rapportèrent en Angleterre «. En effet on ne trouvera rien qui détruife la probabi- lité de ce récit , fi l'on confidére la nature du corail & de plufieurs autres zoophytes pendant leur vie. » Nous 33 trouvâmes , dit un autre Voyageur , plufieurs branches 33 de corail encore toutes molles & gluantes que nous 33 ne reconnûmes point , parce que nous n'en n'avions 33 jamais vu de même, mais ceux qui virent les éclian- 33 ti lions que nous en avions apportés , nous apprirent 33 que c'étoit de très - bon corail ". Ceci eft tiré d'un voyage fait aux Indes orientales depuis l'année 1^71 juf-: qu'en 1678 par un vaiffeau de la Compagnie des Indes ^ nommé le St. Jean-Baptifie , commandé par le Capitaine Herpin. Il fuit de cet état mollajfe , ou prefque tous les zoo- phytes de mer fe trouvent quand ils font en vie , con- firmé en même-tems par MM. Marfigli , EUis , Donati & plufieurs autres Naturaliftes , que cet être organique, vu par les Anglois, étoit de ce genre 5 & tout ce que l'on peut blâmer dans cette relation , c'efl: la diftindion qu'ils font affez mal-à-propos de la racine & du corps de l'arbriifeau , comme fi tout ce qu'il y avoit proprement de vivant , fût renfermé dans cette même racine qu'ils repréfentent fous la forme d'un ver. Or , s'ils avoicnt réfléchi fur les Etres ?nlcrofcopiques\ 24-î' refléchi fur cette puifTance , que la prétendue plante avoic de fe contrader , de plier toutes fes branches , de fc retirer , & de s'enfoncer aiTez dans le fable , comme ils le remarquèrent , pour n'en être arrachée qu'avec force , ils auroient fenti en miême-tems que le tout ne faifoîc en effet qu'un feul corps organique dont la vie s'éten- doit é3 vient arrive à fa perfeâ:ion , & reffemble à une branche » de coraii. Elle croît jufqu à la hauteur de trois pou- »» ces , & porte piufîeurs petites goufTes , d'où naiffenc 3> certains vers qui fe métamorphofent enfuite en mou- 33 ches, comme les chenilles en Angleterre»'. Les deux perfonnes nommées dans les Tranfadions de Londres $ comme témoins de ces phénomènes fînguliers , & de qui nous tenons la relation précédente, tranfmife mot pour mot 5 comme elle efb énoncée ci-deffus, à la Société Royale , font le Capitaine Neivman^ Officier dans le Régi- ment du Général Duroure , qui revenoit de i'îfle Do« minique, & le Capitaine Gafcoign , c^ui commandoit le vailTeau de guerre le Dublin, revenant auffi de la même Ifle. Pour réfoudre cette efpece de paradoxe phyfique, fî Ton pouvoir fe contenter de l'ombre d'une réponfe , qui n'eO: rien moins que fatisfaifante , il me fuiïîroit peut-être de donner celle de M. Hill à M. Walfon ^ qui l'avoic confulté fur cette produdion finguliere , dont le premier venoit de faire l'examen. Mais elle ne s'étend pas au- delà de l'état de l'infede fous la forme de nymphe, & ne comprend que la première partie & la moins confidérabic de fa relation , celle qui regarde le commencement de fa végétation pendant qu'il refte en terre, ( ce qu'il* eCl: fort important d'obferver ) celle qui cbncerne l'arbriiTeau quand il s'élève 3 les vers qui fe forment dans les goiif- fur les Etres micro fcopïques. n^i Ces, &: les mouches qui en proviennent, ont été entiè- rement négliges. M. Hiil ne prétend pas nous rendre raifon de cette opinion , ou nous dire ce qui peut avoir donné occafion aux habitans du pays &z à nos Oificiers de Te tromper dans des faits dont ils fe portent pour témoins conftans. Voici comment le Dodeur Hill s'ex- prime dans Ca. réponfe à M. Wàlfon, M Après que le Colonel Melvil eut tranfporté ces mou- 9> ches de la Guadeloupe à Londres , Milord Bute m'en- 33 voya la boîte qui les contenoit pour les examiner. Voici w quel en fut le réfultat. Il y a à la Martinique un Fungus 33 du genre des Clavaria , qui diffère en efpece de tout » ce que nous avons connu jufqu'à préfent. Il produit fur 33 fes côtés des goulTes. Je l'appelle en conféquence la »3 Clavaria fobolifera. Il croît fur les corps putrides des 33 animaux , comme notre Fungus ex pede equino , qui vient 33 fur la corne des chevaux morts. La cigale eft fort com- as mune à la Martinique, &; pendant fon état de nym- 33 phe, connue alors par nos Auteurs anciens fous la 33 nom de Tettîgometra , elle s'enterre fous des feuilles 33 mortes pour attendre fa métamorphofe : alors fî la 33 faifon n eft pas favorable, il périt un grand nombre 33 de ces infectes , en attendant , les femences du clavaria 33 s'attachent au cadavre , & fe développent. 33 La tettigometra fe trouve rangée parmi les cigales 33 dans le Mufeum de Londres, & la clavaria nous eft: 33 connue depuis très - peu de tems. Voilà exad:ement 33 le fait & tout ce qu'on peut penfer de vrai fur ces pro- 33 durions , quoique les habitans ignorans croient réelle- 33 m.ent qu'une mouche végète, 6c que même l'on trouve ici 33 un deffein de cette plante de la main d'un Efpagnol, ^y^ Notes des nouvelles Recherches as fous la forme d'un arbrifTeau à trois feuilles , en même^ M tems qu'il repréfente Fanimal qui emporte en volanr » ce même arbrilTeau fur fon dos ». Voici ce qui me refte a dire fur cet objet , d'après les nouvelles recherches que je viens de faire a Paris. Nous âvons ces mouches en aflez grand nombre difperfées dans les diiFérens cabinets de Paris. M. Bernard de luJfteiL » de trois nymphes qu'il avoir, a eU îa bonté de m'en céder une pour en faire l'examen. C'eft la même ou la plante ne commence qu'à pouffer, dont j'ai donné la figure, PL 6, Fig. 3 , avec celle d'une autre beaucoup plus avancée Fig, i , PL 6 , que M. Dauèenton le jeune m'a- voit procurée , venant du cabinet de M. de Mauduit , pour la faire deffiner. On y voit la plante d'environ un pouce en longueur, fe repliant autour du corps de i'infede. Je parle d'après les fentimens de MM. Bernard de lujfteu & Adanfon , deux habiles Naturaiiftes de l'A- cadémie Royale des Sciences, &: d'après ma propre inP- pedion, lorfque je me déclare dans la nécefïîté de con- firmer l'opinion de MM. Walfon Se Hill , quant au genre de la plante, qui fort toujours de la tête de ces infedes dans l'état de nymphe. Mais pour pouvoir rendre raifoii de cette partie du récit de nos Officiers, qui regarde l'arbriffeau lorfqu'il s'élève , fes gouffes , les vers qui fe forment dans l'intérieur de ces mêmes gouffes , & leur métamorphofe en mouches , je trouve deux hypothefes affez probables , dont la ftridle vérification doit être re- fervée à quelque Naturalifte qui fe trouvera dans le pays même. Ce font des phénomènes qui méritent bien d'être éclaircis, d'autant plus que tout ce que je peux ^ire n'eft qu'une pure fuppofition qui, quoique platîfî- fur les Etres microfcopiques\ a^^ l>lc, eft encore bien éloignée de me fatisfaire pleine- ment. On remarque aflez communément que toutes les plan- tes du genre des fungi fe trouvent prefque toujours per- cées par des mouches qui dépofent leurs œufs dans leur fubftance, d'où naît après quelque tems une nouvelle race de la même efpece , & c'eft ma ^première hypothefe pour expliquer les phénomènes dont parlent nos Officiers, en fuppofant que ni eux-mêmes, ni les habitans n'ont jamais regardé l'événement d'afTez près pour pouvoir dé- cider avec précilîon que les mouches qui en proviennent, ne font pas de la même efpece que la mouche ou la cigale , dont la nymphe fert à nourrir la clavaria qui s'attache à elle après fa mort. Ma féconde fuppofition eft , qu'il y entre peut-être de la fupercherie de la part de certaines perfonnes intéref- fées à faire commerce de ces prétendus miracles de la nature. M. Daubent on le jeune m'affure qu'un Natura- lifte de fes amis ayant ouvert la clavaria qui s'attache à la nymphe des infeâ:es en queftion en forme d'un pé- dicule affez long , comme on le voit à la féconde Fi- gure , P/. (j , a trouvé dans l'intérieur de fa fubftance cinq ou iîx grains en forme de femence de millet. On n'a pas pu connoître par la fîmple infpeétion de fa fe- mence r efpece de la plante qui en provient , mais il peut fe faire qu'elle foit très-propre à nourrir l'impof- cure en préfentant après le développement qu'elle fait en racines Se en branches aux dépens de la clavaria qui s'efface , une fubftance très-propre à nourrir le fœtus de certaines mouches qui reflemblent en quelque façon, £uaïid OA ue les examine pas de près , à la cigale donc 2 J4 Notes des nouvelles Recherches on tire de terre la nymphe avec la cîavaria qui s'y attacîie. Les deux impoftures fe trouvent par cet artifice afTez; bien liées enfemble , & on rend en même-tems une rai- fon probable de l'erreur des habitans, en expofant le fiioyen qu'on peut employer pour les tromper. Après tour a c eft une efpece de myftere dont je recommande la dé- couverte à ceux qui ont des correfpondans dans ce pays , en état d'examiner la chofe en vrais Naturaliftes ^ & de nous communiquer enfuite leurs obfervations , telles qu'on peut les délirer pour l'entière fatisfadion du monde fçavant. A cette hiftoire de la mouche végétante , celle du plante-ver doit fuccéder, comme analogue en quelque façon. Elle fe tire d'un Mémoire de M. de Reaumur , lu a la féance du ii d'Août lyz^, & publié dans les Mémoires de l'Académie des Sciences pour la même an- née. 35 Nous avons reçu , dit ce fçavant Naturalifte , 33 du Père Varennin Jéfuite , quelques racines propres à 33 étendre nos connoiffances fur l'Hiftoire Naturelle. Entre 33 ces racines eft celle d'une plante qui feroit un étonnant 33 prodige , fi ce qu'on en débite à la Chine, & lî ce 33 qu'on apprend de fon nom feul , étoit vrai. On l'y ap- 33 pelle Hia tfao tom tchom-, ce qui veut dire, au rap- 03 port de ce Père, qu'elle eft plante pendant l'été. Se 33 que pendant l'hiver elle eft ver Rien ne manque 33 elFedivement , continue M. de Reaumur ^ à ce qui fe 33 trouve au bout de ces racines , à la reffemblance par- 33 faite d'un ver ou d'une chenille : auiiî ne fçauroit-oii 33 douter que ce ne foient véritablement de ces infec- 33 tes 5 mais la merveille fe réduit fans doute à ce qu'ils -5 choififïent les racines de cette plante pour s'y attacher fur les Etres micro fcopiques, 2.^f 50 lorfqu'ils font prêts à fe mécamorphofer en aurclies 23 eu en nimphes .... Il refte pourtant une fîngularité « remarquable au ver ou à la chenille du Thibet, qui 33 auroit pu faire penfer en Prance , comme à la Chine , 3> à ceux qui ne font ni Phyficiens ni Obfervateurs , qu'une 35 portion de la racine s'eft métamorphofée en ver, c'eft 33 que cette chenille attache fa queue précifément au bout 33 de la racine , de manière que le corps de l'infecte «■ï femble être un prolongement de cette même racine 33. Rien ne peut être plus piaulîble que la réfolution don- née par M. de Reaumur de ce problême phyfique, mais je ne fçaurois m' empêcher de remarquer malgré les pré- jugés légitimes que nous avons contre de pareilles mé- tamorphofes , qu'elle fuppofe toujours la chofe qui eft encore en queftion entre nos Obfervateurs Européens 5c ceux de la Chine. C'eft une pure fuppofîtion tirée par analogie de ce que nous obfervons chez nous , & la feule preuve pofitive que l'on allègue contre la réalité de cette métamorphofe , eft qu'il eft facile , félon ce Naturalifte, de reconnoître avec un peu d'attention oii finie la plante , & où commence l'animal , par les fibres ligneufes de la racine, aifées à diftinguer, dont on a fait exprès la dif- feftion à quelque diftance de la pointe de l'union des deux corps. Or cette preuve n'eft pas du tout propre d'elle- même à décider la queftion, car nous voyons tous les jours des bois dont une partie eft devenue pierre , pen- dant que l'autre demeure dans fon état primitif 5 cepen- ..dant celui qui par une pareille raifon , & dans la fup- pofition que ce changement du bois en pierre eft phy- llquement impoflible , fe perfuadera que ce qu'on lui préfente dans le genre ne peut fe fajre autrement, que 2 J (^ Notes des nouvelles Recherches par l'union accidentelle de deux corps diftinds , fe trom-i pera grofliérement. Je ne prétends pas malgré la force de cette comparaifon , foufcrire à la croyance Chinoife fur cet article î mais ce que je foutiens , c'eft que l'on n'a pas encore fuffifamment éclairci ni les phénomènes du plante-ver , ni ceux de la mouche végétante des Ca- raibes. Ce que M. de Reaumur aura pu faire de mieux à la diftance ou nous fommes de la Chine, & n'ayant devant lui que des objets morts & deiTéchés , eft pré- cifément ce qu'il a négligé de faire. Il falloit examiner ces deux corps à la pointe précife de leur union , & vérifier ce qu'il fuppofe feulement , l'exiflence pofitive de cette efpece de glue , dont la chenille a foin , dit-il , peut- être d'enduire le bout de la racine à laquelle elle s'attache» Il refte encore à faire , même après cela , d'autres quef" tions très-dignes de notre attention. Pourquoi cet infede préfere-t-il toujours cette efpece de racine uniquement pour s'y attacher , puifqu'un infede qui fe difpofe à la métamorphofe ne doit pas la regarder comme une nourri- ture? Pourquoi choifit-il toujours le bout de la racine plutôt que toute autre partie également alTurée dans la terre qui l'enveloppe de toutes parts ? Et enfin , pourquoi les Chinois, s'ils n'ont d'autres raifons pour leur hypo- thefe, que celles qui fe font montrées à M. de Reaumur^ fe décident- ils fur des apparences fi légères pour foutenir une telle mervèîlle , puifque les mêmes Chinois qui voient tous les-jours des chenilles & des nimphes attachées également à divers autres végétaux , ne prétendent pas que les branches de ces végétaux fe mécamorphofent en animaux , ou portent des infectes , comme elles produifens 4es fruits ou des femences \ fur les Etres mîcrofcopiques . 2)y  l'occanon des mouches végétantes des Caraibcs , j'aurois encore à demander pourquoi la clavaria s'attache par préférence à cette efpece de nymphe , de manière qu'on lie la voit pas de même fur les autres efpeces qui font enfoncées également dans la terre, fous le même climat & dans le même fol. Cela fe manifefte fufnfamment par la diftir.clion quelle â obtenue vis-à-vis des autres, 8c par fon nom de mouche végétante. Secondement pour* quoi certc plante part-elle toujours de la tête de Fin- fède ? Si où doit regarder cet elFet plutôt comme acci* dentel , que phyfîquement lié à la nature de la chofe , fdon les idées de M, Hi//, pourquoi enfin trouve- t-on conftamment dans le pays des Caraibes, quand la faifoa aïrive , tant de miliers de ces auréiies qui portent cette efpece de plante, dont on a déjà vu des centaines à Londres 8c à Paris, efpece de phénomène fi fingulier, qu'on n'en a pas un feul exemple connu dans aucun autre pays, parmi les milliers -de nymphes qu'on déterre jour- nellement ? Si cela n'indique pas un paflâge clair & m.a* nifefte du vital au végétal , & réciproquement , comme les recherches faites fur les hiftoires ci-delTus énoncées i, qTie l'on ni et avec rai fon en grande partie âu rang des fables , paroifient le démontrer , il nous fournira néan* ifioins des preuves affez fortes par induétion , pour croire que les plantes au moins fubàlternes, telles que les fungî cti général , dont perfonne n'a jamais pu découvrir les fcmences avec certitude , peuvent fe former par végéta- tion de la fubftance morte des animaux *. Cela revient entièrement à nos principes , & ne fera * V»yez à la Jn , U noce fur la diffeûioa de la Glavaria. R ijS Notes des nouvelles Recherches pas certainement défapprouvé par aucun Phyficien qui prendra la nature dans toute fon étendue. Selon ces mê- mes principes , cette conclufion ne tire pas à conféquencc en aucune manière pour l'admilTion de la pofTibilicé phy- fîque d'une pareille métamorpliofe en plantes parfaites, Tans autres preuves plus dircdes, parce que leur nature auffi bien que leur fubftance, diffère totalement de celle des fungi en général , qui fourniffent un Tel volatil al- kali , comme l'on fçait , & dont les principes appro- chent bien plus près du terme animal que les autres vé- gétaux. Après les précautions que j'ai cru nécelTaire de prendre au commencement de cette remarque, & en fuivant exac- tement l'efprit d'un jufte difcernement,, qui doit toujours régler la croyance de tout homme fênfé , je me per- fuade que je ne rifque rien auprès du vrai Philofophe, en lui propofant comme un fujet digne de fes recher- ches , ce que Guillaume Fifon, Médecin 6c Phyfîcien HoUandois , nous apprend des propriétés d'une efpece de locufte nommée par les Portuguais loava Deos , ou prè" que Dieu. Si ce qu'il raconte étoit moins extraordinaire j on ne dcuteroit peut-être pas un infrant de fa réalité, non- feulement à caufe que l'Auteur qui a demeuré très- long-tems dans le pays du Bréfil, dont il nous donne THiftoire Naturelle d'après fes propres obfervations , étoic Phyficien par profefùon , mais auffi parce qu'il a écrit après Markgrave , Naturalise très-judicieux & très- eftimé, dont il a beaucoup profité en s'appropriant fon travail : mais que chacun penfe ce qu'il voudra la-delTus, je crois devoir en faire part au public, comme le feul moyen de f^avoir au jufle dans la fuite ce que le récic fur les Etres microfcopiques . 25*9 de Vifon contient de vrai ou de faux , en excitant des recherches ultérieures fur une matière c^ui renferme, feica toutes les apparences , quelques vérités naturelles , ex- traordinaires 5c intérefTantes. Voici ce qu'il dit de cec infeâie. s^ Unde non folùm Barbari , fed & ChriPciani 33 imprimis multa fuperftitiofa fîbi imaginantur , quafi 35 macie perpétua confedae homines docerenr fupplices. « Beftiolae hae in plantam ejufdem ferè viridi taris & 33 tenuitatis duarum palmarum raagnitudinis transformant 53 tur. Pedes primùm terrae aftîguntur, unde acce'dente hu- 33 miditate requifitâ radices exeunt , qu^ terrse infîgun- 33 tur, atque ita paulatim parvo temporis fpatio tot^ 33 convertuntur. Aliquando autem inferior tantiim corpo- 33 ris pars naturam & faciem planta; induit manente fu- 33 periori parte aliquandiu mobili , ut antè , dcnec tan- >3 dèm totum infedum paulatim tranfmutetur , arque fen- S3 fitivum quod fuit vegetativum fiât, naturâ per circulunrA >3 quad fucceflivè agente , motuque perpétue in fe recur- 33 rente. Hanc plantam libentilTimè curiofo Ledori ex- 33 hibuilfem , fed per varias temporis & itineris injurias 33 re dedderatâ potiri non licuit. Hift. Nat. & Medic, 33 BrafilisE, lib. 5 , cap. zi 33. Ce phénomène extraordinaire fe trouve confirmé par un extrait que j'ai fait du Père Bluteau à l'article louva Deos y Tome LN du Vocabulaire Portuguais & Latin. Cet extrait ne parle que de la féconde métamorphofe , ou du retour du végétal au vital , comme dans le précédent il ne s'agit que du changement du vital en végétal i mais les deux palTages pris enfemble, fi en doit les regarder comme vrais à la lettre , en même>teras qu'ils fe con- firment nnutueilement , renferment l'économie complette Rij sl€o Notes des nouvelles Recherches de cette efpece d'être organique. Voici ce que rapporte le Peie Bluîeau dans la vie du Père Jean d'Aï- meyda^ iiv. 4, cap. 3, page 11 x. ^d On donne encore 3j le même nom de Louva Deos^ (ou Louer Dieu) à un 35 infecte dans le Brefil , de la longueur d'environ un s: demi-pied , avec fix pattes. L'Auteur aiTure qu'il a vu »3 de fes propres yeux naître cet infecle d'une petite bran- as che 35. (Il ne Tpécifie pas de quelle efpece de plante ; mais (î ce qu'il raconte eft vrai , on doit la fuppofer la même que celle dans laquelle l'infede de 'Pifon s'étoit transformé ). 35 Une partie de cette branche commençoit 3^ s'animer, à fe mouvoir &: à fe transformer dans le « dit infede 5 la même branche (zoophyte) venoit d'un 33 bourgeon ou d'une efpece de nœud , tel qu'on voit sa fur un fep de vigne, & l'infede qui en provenoit, 33 avoir le fang verd, femblable en tout au fuc de la 33 branche d'où il fortoit3D. Je ne fçais pas ce que l'on penfera de ces deux paf- fages 5 chacun raifonnera fans doute félon fes idées; i'avoue naturellement, quant à moi, que fi je voyois de mes propres yeux ces deux phénomènes à ne pouvoir pas me tromper fur leur réalité , tout extraordinaires & même fabuleux qu'ils peuvent paroître à plufîeurs Na- turaliftes, ils ne m'étonneroient que très-foiblement , Se loin de déranger mes idées , ou phyfiques ou morales , ils ne rendroient que plus palpable &: en grand , une vérité dont je fuis très-convaincu déjà par mes obfer- vations microfcopiques. Elles m'ont fait prendre pref- que malgré moi une vue plus étendue de la nature , 6c ces efpeces de métamorphofes , fî on peut efTedivemens s aiTurer de leur véiité , fe trouvent d'elles-mêmes rerie^ J fur les Etres microfcopiques, 261 fermées dans mes principes. En attendant, les témoi- gnages paroiflent artez podtifs , mais ce font les faits en Piiilofophie , quand on peut les rendre inconteftables, qui doivent régler nos fillêmes , & nos fyftêmes n'ont aucun droit par eux-mêmes, fans d'autres rai (on s , d'anéantie les faits. Ils font, fi vous voulez, totalement inconnus à certains Philofophes , inouïs &c contraires à leurs idées , mais tout extraordinaires qu'ils paroifTent, ils ne font pas plus étonnans ni plus contraires à notre façon de pen- fer, que plufieurs phénomènes nouveaux dont nous fom- mes très-afTurés.. Ceux des Polypes , par exem.ple ; s'ils avoient été annoncés par quelque Obfervateur du Bréfil , fans que nous fûffions en état de les vérifier chez nous> comme font ceux que nous venons de décrire , je doute que les Philofophes de l'Europe leurs euiTent donné plus de croyance , qu'ils fe trouveront peut-être difpofés à en don- ner à l'hiftoire du Louva-Deos , faite par Pifon & le Père Bluteaa. En tout cas la chofe m.érite des recherches plus fuivies , & on ne doit jam.ais , il me femble , regarder des faits phyfîques comme fabuleux , uniquement parce qu'ils excédent nos idées , Se qu'ils ne peuvent fe con- cilier avec nos fyftêmes. C'ell: la conclufîon qui paroît naître directement de tout ce que nous avons dit dans cette remarque, &: qui fera, fi on l'applique avec. juftçfTe^ d'un ufage tres-étendu dans la Phyfique. Rii| 1 62 Notes des nouvelles Recherches NOTE Relative aux deux dernières Planches» V^ E T T E note , qui contient plufieurs chofes relatives aux différentes parties de mon Ouvrage, eft en quelque façon déplacée ; mais comme c'eft une fuite des nouvelles réflexions que j'ai faites depuis , on ne fera pas fâché de la trouver ici , d'autant plus qu il fera aifé , après avoir lu. ce qui précède , de rétablir l'ordre idéal de ce que j'ajouterai ici , dont le local n'a été dérangé qu*à î'occalîon des nouvelles obfervations qui font venues après coup. Pour rendre mes idées plus claires , & leur liaifoii avec ce qui précède plus évidente, j'ai fait graver deux Planches avec un certain nombre de Figures, dont je donnerai l'explication avant que de faire mes remarques. La Planche 6 repréfente tout ce que j'ai pu obferver fur la mouche végétante des Caraïbes, dont il y a deux Fi- gures différentes en état de nymphe, chacune pprtant fa plante au-devant de fa tête en forme de corne. Les deux plantes font de la même efpece ; mais celle de la première Figure eft beaucoup plus avancée que celle de îa féconde. On les appelle mal-à-propos mouches ; ce font en effet de véritables cigales , & leurs nymphes en portent tous les caractères, comme je l'ai vérifié exac- tement fous la diredion de M. Adanfon , en les comparant avec les nymphes des autres cigales, dont czt habile Naturaliîte a fait une très-riche collection pendant fou féjour en Afrique. fur les Etres micro fcoplques, 26} J'ai déjà expofë mon fentiment fur cet objet dan5 une note précédente ; ce qui me refte à ajouter ici, re- garde principalement une diffeclion que nous avons faite enfemble , M. Adanfon êc moi , de la plante qu'elle porte , qui a fervi à nous afîarer, comme plufîeurs autres l'avoient ^éja remarqué avant nous , que c'étoit une efpece de Clavaria.. La première Figure repréfente une de ces ci- gales en crat de nymphe , avec fa plante A fort avancée, qui . fe trouve encore repréfentée en grand dans la fé- conde Figure divifée en trois panies. La fedion B de cette (zzonàe. Figure montre l'intérieur Je la Clavaria, coupée tranfverfaiement. On y voit comme des traces de ce que l'on pourra prendre pour des capfules defti- nées à loger les femences difpofées circulairement. Ce îie font que des traits nofrs, parallèles, à des diftances égaies, mais on n'y découvre aucunes femences, ni même aucune cavité propre à les loger. Le milieu de ce cercle efl d'une fubftance plus denfe , plus foncée 5c tachetée de très-petits points noirs. La fedion C n eft faite que pour montrer que la diftribution des parties 6c la con- figuration intérieure eft la même qne celle de la fedion B continuée dans toute la longueur de la plante. Les lettres DDD font un épanouiflement de la même ma- tière, qui fert à former 6c à nourrir la Clavaria, fous la figure d'une pellicule de rcoifilîure ordinaire, auHî fine qu'une toile d'araignée, S^ la lettre E marque la racine, ou plutôt la bafe de la plante, de laquelle on a écarté la pellicule pour la faire paroître. Elle ed trian- gulaire en forme de marteau , parce qu'elle fort immé- diatement de deiax fentes qui communiquent enfemble à angles droits , tracées par la nature fur le devant de Riv •^^4 Notes des nouvelles Recherches la tête de la nymphe pour faciliter fa fortie, & pour donner ifîae à l'infede fous fa nouvelle forme. La même prëvoyaiiee fe trouve fur toutes les autres nymphes , êc une fente deftinee au m.ême objet fe voit encore fur la partie fupérieure vers la tête des différentes cryfali- des. Comme la double fente eil: en creux , la bafe de la Clavaria qui prend la forme d'un marteau eft en relief fblide , fans filamens & fans apparence de racines ; ce qui démontre aflez clairement que la plante eft produite immédiatement par la matière végétante, qui s'extravafe & pouffe au-ciéhors du corps de l'infede. Une aut^e preuve de cette vérité eft la pellicule de moifiifure épa- nouie tout à l'entour de la tête & du corfet , qui ne fait évidemment que le même corps organique avec la plante 5 elle fe détache très- facilement , même fans fe déchirer en la levant fimplement avec le bout d'une lan- cette , & ne montre aucune adhéfion au corps de l'in- fe£te , en même-tems qu'elle eft attachée intimement à la bafe de la Clavaria , 3c le tout fe tient uni enfemble fubftantiellement. Une troifieme remarque que j'ai faite en comparant les deux infedes enfemble, eft que la iziz 8c îe corfet de celle de la figure 3, où la , plante n'eft que naif- fante, étoient beaucoup plus gros à proportion du refte du corps que ces deux mêmes parties dans l'infede , Fig. I , dont la plante avoit pouifé aux dépens de la fubftance intérieure, jufqu'à huit fois, pour le moins, la longueur de l'autre. La grande différence en mêjne- tems du poids & du volume entre ces deux plaôtes , fe peut eftiraer aiTez par la comparaifon des deux Fi- gures qui font- faites d'après iiature avec leurs juftes ^w-^ fur les Etres micro fcoplques » 26 f portions. Toutes ces confîdérations prifes enfemble , me ramènent aux principes que j'ai établis par-tout dans ce Traité d'après un nombre d'obfervations , fçavoir , que toute matière organique, animale ou végétale, qui fe décompofe , végète de nouveau fous de nouvelles formes organiques plus ou moins parfaites , plus ou moins vi- tales, félon les circonftances où elle fe trouve. Dans ce point de vue , quoique pour généralifer mes idées & pour entrer dans la métaphysique de mon fujet, je me fois exprimé autrement que M. de Bujfon dans fon Hif- toire Naturelle , où il s'arrête au tableau phyfique 8c fenfîble , c'eft mal-à-propos que certains Journaliftes de ce tems ont voulu nous mettre en contradidion. Je crois avoir fuififamment éclairci ce point dans le cours de mes remarques fur M. Svalan:iani , pour être très-bien en- tendu de tous ceux qui font au fait de ces matières. Je n'écris pas pour tout le monde ; mon fujet n'eft pas de cette nature, non plus que les infiniment petits en ma- thématique , ni l'attradion Neutonienne en Agronomie 5 mais quoique mes nouvelles obfervations microfcopiques puifient pécher du côté d'une diftribution claire & bien méditée dans les différentes matières qu'elles renferment , de forte que ce que Horace appelle le luczdus ordo, tant recherché en France, ne s'y trouve pas dans la plus grande rigueur, je n'ai pas manqué dans tous les pays de l'Europe de trouver plufieurs Sçavans qui ont par- faitement compris l'étendue & la vérité de mes prin- cipes avec leur application jufte & générale aux phéno- mènes & la force de m.es raifonnemens. S'il a plû à M. Clément , Auteur d'une certaine prétendue Année LU- térairç de fortir des bornes de fon Titre pour s'éléincer z66 Notes des nouvelles Recherches dans les régions de la Philofophie , & d'appeller Meta- phyfîc^ae inintelligible ce qu'il n'entend pas , & même -«4/- chymït Métaphyjîque , par une Figure inconnue aux Ora- teurs, ce que j'ai écrit dans le tems , fa critique peut fervir à prouver que ces chofes jettoient une lumière trop éclatante & trop vive qui ofîufquoit fa foible vue , mais elle note point pour cela leur prix aux yeux du vrai PMîorophe & du Naturalifte éclairé. Ce que les petits efprits inventent tous les jours pour mafquer leur ignorance, ne fait rien à la chofe : c'eft noe vérité que les Sçavans , dont j'ambitionne unique- ment l'approbation , m'accorderont fans difHcuîté , par- ce qu'ils font feuls faits pour la fentir. Si un journa- IWct , qui pour parler pertinemment devroit tout fçavoir ^ n^entend pas par-tout l'Auteur dont il fait l'extrait , il ne «îoit pas en conclure immédiatement que czt Auteur dérai- £onnQ , parce que fes idées ne quadrent pas exadement avec les fîennes , ou parce qu'elles ne fe trouvent pas renfermées dans le cercle de fes propres connoifTances. Le parti qu'il doit prendre en cette occafion eft de ne pas s'ériger en Juge fans appel , des matières qu'il n'a ja- mais étudiées, mais de confulter des perfonnes plus éclai- rées que lui , & iî efFedivement il ne fe trouve aucun Sçavant dans une grande ville telle que Paris , qui les puilTe entendre , c'eft alors qu'on préfumera avec raifon que l'Auteur ne s'entend pas lui-même. Perfonne ne me foupçonnera certainement de vouloir faire ici une compa- raiCbn entre des chofes fort difparates 5 chacun travaille comme il peut ; mais que feroit devenu le fameux liVre des principes du grand Niufon , fi le jugement qu'auroit pu en porter un Journaîiile ^ à fa première appaci don fur les Etres micro fcopiques. ^Sj <îans le monde , avoic dû être regardé comme abfolù- ment décifîf ? Je peux au moins me flatter , qu'en met- tant de côté ma petite réputation , qui eft fans doute de bien peu de poids dans le monde Sçavant , on voudra bien, par égard pour le nom feul de M. de Bujfon , le plus célèbre & le plus Sçavant des Naturaliftcs & des Phi" lofophes de nos jours , nous faire l'honneur de croire que peut-être nous nous entendons nous-mêmes. Après tant de recherches , un travail opiniâtre , Se des examens fui- vis & faits enfemble pendant le cours de plufieurs an- r>ees , qu'il nous foit permis de demander que l'on nous faffe la grâce de préfuraer que nous connoiflbns afTei bien la nature , l'étendue & les conféquences de nos décou- vertes pour fentir l'accord parfait de nos principes. Je dois ici rendre jùftice à M. le Docteur Maty , de la Société Royale, un des Gardes du cabinet de l'Hif- toire Naturelle à Londres , & Auteur du Journal Britan- nique 5 il a donné dans le tems un précis julle de nos obfervations comm.unes & de mes principes en homme intelligent ; ce Philofophe a très-bien fenti que ce que j'avois donné n'a été qu'une extenlion même chofe s'obferve dans la partie poftérieure de cet infede féparée de même du refte da corps, donc l'aiguillon s'élance contre ce qui l'irrite , exadement comme (\ l'infede étoit dans fon entier, C'eft encore l'irritabilité de M. Haller , vrai principe de vie & la fource de mille opérations réglées avec un artiiîce admirable par la Divinité , qu'on appellera inf- tind , fî l'on veut , cii la fenfation n'a aucune part. C'eft l'origine de toutes les pallions qui nous vienneiat du corps , & qui préviennent la raifon , &: qui , quand elles font dans leur plus grande force , éteignent très- fouvent , comme nous l'éprouvons , la fenfation 5 ceft enfin l'âme végétative des plantes , & même en quel- que façon le moteur principal dans les animaux , qui ne s'élèvent jamais, comme l'homme au-defîus des ob- jets fenfibies , dont les anciens Péripatéticiens , Secta- teurs à'AriJîou, apperçe^çoienc très -bien la réalité. Se qu'ils crpyoient fortir , comme ils s'énoncent , des pîiîf- fances de la matière. J'ai encore un mot à ajouter relativement au raêsis objet fur une découverte que M. Gueitard ^ de TAca- démie R.oyale des Sciences à faite , & dont ii donne la defcription j)a^e 80 du premier Tome de fes Mémoi- res fur différentes parties des Sciences 3c dés Arîs. Ççî ^7^ Notes des nouvelles Recherches Babile Naturalifte à trouvé fur une plante du genre <2es efpargoutes , de petits corps parfemés & liés enfem- ble , qu'il auroic pris facilement pour une de ces ef- peces de moififTure , dont Micheli a fait graver plu- iîeurs , (i leurs mouvemens variés , qu'il n'a jamais obfervés dans les moifilTures , ne l'avoient point déter- miné à les regarder comme une efpece de très-petits polypes terrcftres. Ces corps n'ont gueres qu'une ou deux lignes de longueur j ils jettent plufieurs ramifica* tions , qui font très-fouvent chargées de globules de la même efpece. Dans la Préface de fôn livre , M. Guettard parle des mouvemens conftans que plufieurs Naturaliftes ont obfervés dans le Conferva, ou le lin aquatique 6c dans le Tremella , dont nous avons parlé ei-devant , en ci- tant les remarques de M. Adanfon. M. Guettard panche pour attribuer fes mouvemens , qui certainement dé^ pendent d'un principe intérieur , plutôt à des caufes ex- térieures & à des raifons méchaniques. C'eft: éviter un «xtrême pour tomber dans un autre , que de paroître croire qu'il n'y a aucun milieu entre l'abfurdité de faire par- tir ces mouvemens continuels dans les plantes d'une vo- lonté , comme il s'exprime , ou d'un fentiment intérieur ^ & la pure méchanique , félon l'acception commune de ce terme. Ce milieu eft la vitalité qui n'eft jamais par elle-même fenfitive & qui ne peut avoir aucune volonté , dont nous avons tant parlé &: foutenu les droits , dont l'irritabilité de M. HalUr n'eft qu'un mode , & elle- même par exaltation , comme nous avons dit , gu'un moie de végétation. C'eft à ce principe qui fert à unir la plante avec les corps organifés vitaux fsns forûr de fur les Etres microfcopiques , 2jf la ligne de matérialité , que je ramené non-feulemenr ces plantes vitales , mais même ce que M. Guetiard appelle ici une efpéce de polype terreftre, A force de multiplier les obfervations , les Natura- liftes trouveront avec le tems beaucoup moins de diffi- culté pour adopter mon opinion , quand ils auront remar- qué que cette efpéce de moifilfure , ou polype terreftre , n'eft pas la feule qui ait les mouvemens dont nous par- lons, & lorfqu'ils fçauront, par des expériences réitérées, que prefq'je toute forte de moililTure quelconque , infu- fée dans l'eau , devient vitale , & fe partage enfuite en ce que l'on nomme communément animaux microfeo-' piques. C'eft toujours le même principe végétant qui opère dans les deux cas , mais qui s'accélère , & devient infiniment plus adif par la dudilité de la matière donc Teau diîTûut les parties. Voyez mes Obfervations microf- copiques. Je finirai cette longue remarque par une nouvelle dé- couverte de mon Auteur M. Spalan^^ani , dont j'eftimerai toujours les talens S: l'induftrie, quoique nous ne foyons pas d'accord fur plufieurs articles. Cette découverte vient d'être rendue publique par une lettre du célèbre P. Bofcovich a. M. de /a Condamim , & qui a été lue dans une afiemblée de l'Académie des Sciences. M. Spalan7[ani a coupé la tête à un limaçon ; quelques femaines après une nouvelle tête lui eft revenue , aulfî parfaite que la première. Je fuis d'autant plus charmé de terminer mes obfervations fur mon Auteur par cette ex- périence , qu'elle lui fait honneur en même-tems qu'elle rentre parfaitement dans les principes que nous avons établis : leur univerfalité eft d'autant mieux coaftaté© S ll ^74 Notes des nouvelles Recherches pêr cette obfervation , que la tête d'un limaçon , qui a fes cornes mobiles , fes lèvres mufculaires , fa bouche , fes dents , fa mâchoire , fes inftrumens de déglutition , & même , comme hermaphrodite » le double organe de génération du mâle Se de la femelle placé au col, eft beau- coup plus compliquée que la tête d'un polype , d'un ver- înilfeau , ou d'aucun autre zoophyte qui répare fes parties perdues & fe propage par divifion. J'ai donné là-deflus une idée affez fenfible de la configuration néceffaire qui iiaîc de certains principes intérieurs mis en mouvement, qui fe déployent par la comparai fon des figures déter- minées que nos Artificiers produifent tous les jours , comme ils le veulent, en combinant les forces connues des matériaux dont leurs fufees 6c autres machines font compofées * 5 on n'a qu'à appliquer cette comparaifon aux forces végétantes 8c vitales , qui , d'une matière toujours donnée & préparée , forment , vivifient , nour- lifi'ent 5c développent tous les corps organifés. Mais afinque les Phyficiens jugent par eux - mêmes de l'application jufte &: nécelTaire de mes principes aux phénomènes de la divifibilité vitale , je crois qu'il fera £rès-à-propos d'ajouter ici divers extraits que j''ai faits du Profpe^us d'un nouveau Ouvrage que M. Spalaniani promet aa public. * On nous aflure que les Artificiers Chinois imitent dans leurs feux toutes les formes diiTérentes de vignes avec leurs bran, ches , leurs feuilles & leurs grappes de railin , des pommiers, ou d'autres arbres quelconques , d'une manière fi parfaire que i'«a f «at en recoîinoître les efpéces. Voyez le Perc du Haldt.^ fur les Etres mlcrofcopiques . 2j^ Le Ver de terre. « I <^ . M. Spalan^anVz coupé la queue d'un ver , ou la par- «î tie poftjéi'ieure de cet infe<5te, & a obfervé que la partie 33 de la tête a reproduit une nouvelle queue j mais que » la force réprodudrice a certaines limites , de façon S3 que la fedion ayant été faite trop près du bout de la 33 tête , la réproduAion de la queue n'a pas eu lieu «c. Remarque. Lorfqu'un corps organifé , qui pendant Ton intégrité ne fait qu'un feul fyftême de vitalité non interrompu , eft divifé en deux ou en plufîeurs portions, les parties infenfibles , dont chacune eft animée à part , commencent à fe décompofer en fe volatilifant du côté de la bleflure, lî elles ne font pas retenues & rappellées par une puilTance fupérieure à la leur , qui peut enfuite concentrer leurs forces pour agir de nouveau avec con- cert. Le remède que la nature a préparé contre la dif- folution totale d'un corps, partagé , eft la faculté que les vaiiTeaux ont , par leur élafticité , de fe fermer en (c eontradlant pour fixer les parties volatiles , & arrêter la perte des fucs nourriciers. Si la partie vitale qui reftc n eft pas douée d'une force fuftifante , à raifon de fon peu de malTe pour comprimer , retenir & rappeller les fucs , elle ne fait que languir en fe relâchant de plus en plus. La conféquence eft que non-feulement la nou- velle réprodudion n'aura pas lieu , mais que les parties infenfibles fe décompoferont , & tomberont en pourriture. Il n'eft donc pas étonnant que la force reproductrice , donc la puifTancc eft toujours en raifon de la malfe animée, ou de la quantité vitale qui refte , ait fes limites, com- me le remarque notre fçavant Phyficien. Un ver écrafé Sij ^j6 Notes des nouvelles Recherches ou réduit en poudre pourra- 1- il renaître dans chaque partie infenfible , quoiqu'animée à part , comme les Anciens prétendoient que le phénix renaiffoit de Tes cendres ? la mafle vitale réprodudrice eft donc néceflai- rement limitée dans fa quantité par la nature même du corps organifé. n z°, L'Auteur a trouvé que la réprodudlion de la » queue , ou partie poftérieure du ver, réufTifloit égale- iB ment bien dans nombre de différentes efpeces de vers 53 terreftres , mais qu'il y avoir une différence de tems «pour 1^ réprodudion complette de cette partie d'une 59 efpece à une autre «. Remarque. C'cft une conTéquence néceffaire des diffé- rens tempéramens de ces corps organifés par la combi- naifon très-différente , félon les efpeces , de deux forces fimples , la réfîflante & l'expanfive , qui conftituent le degré d'adivité dans la puiffance végétatrice , & qui la compofent. 33 3°. Une efpece de ver de terre s'eft préfentée ici 05 tout-à-fait différente quant a fa manière de reproduire S3 fes parties, de tout ce qu'on a obfervé jufqu'à préfent *> dans tous les corps organifés «. M 4°. Quant à la réproiudion de la tête , l'Auteur a 33 découvert qu'ayant coupé un certain nombre d'anneaux 33 de la partie antérieure de l'infedle , elle a eu lieu dans 33 tous les vers de terre far lefquels il a fait des expé- ^3 rien ces «. 33 5^. Mais fi l'on coupe avec la tête un nombre con- 33 fidérable d'anneaux , alors la réproduction de la têre 20 n'a lieu qu'après un certain tems , & même très-diffi- sî cilement, ou point du tout dans certaines efpeces de I sî vers de terre «. fur les Etres micro fcopiques. 277 53 I*, Lorfque l'on coupe peu d'anneaux avec la tête, » la nouvelle partie eft égale à- peu près à l'ancienne , »' mais lorfqaon en fépare un grand nombre , la tête î3 reproduite eft plus courte , & compofée d'un moindre w nombre d'anneaux que celle que l'on a voit coupée ««, Remarque. Toutes ces obfervarions démontrent non- feulement que les parties reproduites font formées de nouveau par une difpofition organifique de la matière vitale , mais audî que la force réciproque eft toujours en raifon de fa malTe , ou de fa quantité comparée avec l'effet qu'elle doit produire , comme nous l'avons établi ci-de/Tus. dans la première remarque. M 7**. M. Spalaniani ayant cherché fi la réprodudioa » d'une petite portion de la tête étoit la première à 35 paroître avant une pareille portion de la queue , il 35 a trouvé que la tête fe reproduifoit la première «. Remarque La tête de tout être organifé étant ce qu'il y a de plus adif, de plus vital, & compofé de vaifTeaux très-fins & très-deliés , il n'eft pas étonnant qu'elle fe forme avant la queue. L'adion réprodudrice travaille avec d'autant plus de vîcelfe , que les parties qu'elle forme font infiniment moins mafîives , & la matière dont elles font formées , plus vitale & plus exaltée en raifon de fon peu de réfiftance. Dans la formation du poulet , les deux parties qui fe montrent les premières font la tête & le cœur. M 8°. La réprodudion de la tête, lorfque l'on coupe » avec elle beaucoup d'?înneaux , tarde auffi beaucoup 33 à paroître ; mais lorfque l'on en coupe feulement une a> petite portion , alors la nouvelle tête reparoît en fore 3î peu de tems «, S iij xjS Notes des nouvelles Recherches 35 ^?. Les parties intermédiaires , privées <3e leur tête & 3î de leur queue, reproduifent les deux parties dont elles 33 avoient été privées. De plus fî on en a coupé peu s3 du côté de la tétc , celle-ci paroît la première & la queue 3î ne vient qu'après. M io«. La réprodudion de la tête, qui manque aux »3 parties intermédiaires , paroît plus difficile que celle 93 de la queue. Souvent elle ne fe reproduit pas du tout, »3 mais un commencement de queue Te montre toujours, &5 qui , tôt ou tard , quand la tête ne revient pas , meurt 33 avec la partie intermédiaire «. 'Remarque. Il n'eft pas étonnant pour qui confidére Torganifation très -complexe &: très -vitale de la tête, qu elle fe reproduife avec plus de difficulté & plus de rifques que la queue , quoique l'opération fe faife avec beaucoup plus de vîtefTe lorfqu elle réuffit. 3* 11°. On remarque que de deux parties extrêmes as dont on a privé un ver de terre , la queue vit plus 33 long-tems que la tête «. Remarque, C'eft encore l'organifation très - complexe & très-délicate qui en eft la caufe. w 11°. L'Auteur a obfcrvé que dans la grande artère »3 du dos , qui porte le fang de la queue à la tête , le * fang conferve fa première direction dans les parties 33 coupées , foit de la tête , foit de la queue , ou même >3 de la partie intermédiaire. Le même phénomène a lieu 33 dans des feâ:ions qui n'excèdent pas une ligne en lon- ï3 gueur ce. 33 13°. La force réprodudrice ne s'épuife pas dans la S3 première réproduction 5 au contraire , fî l'on perfîfte à3 à couper les nouvelles parties reproduites , une féconde fur Us Etres micro fcopiques, 27^' 33 reproduction fuit îa première, une troificme la féconde ^^ 30 & ainfi de Tuite «» 3i 14°. Non-reulement M. Spalan^ani a cû des répro- » duélions fuccefTives , mais même il les a obtenues après 33 avoir fait de nouvelles fedions des parties reproduites „ 35 jufqu'à la quatrième fois. Par-là il a découvert que la 35 force réprodudrice exiftoit non-feulement dans l'an- al cien corps , mais auflî dans le nouveau qui venoic de 33 fe reproduire «. 33 15^. Quant aux organes, ou parties d'organes, qui » fe reproduîfent de nouveau dans les vers de terre , à 53 naefure qu'on les en fépare , il a trouvé ceux des deux » féxes dans chaque individu , fçavoir les artères Se les 33 veines avec leurs communications , les mufcles , les 33 inftrumens de la refpiration , le ventricule , l'éfophagc 33 &: les inteftins 'c Le Ver aquatique de hatteau, 33 i«. Ce ver eft compofé d'anneaux comme celui 33 de terre. Il refte dans l'eau douce , claire & dormante» 33 La partie antérieure de cet infeéte eft plongée perpen- 33 diculairemenc dans la boue , & la queue refte à fleur 33 d'eau , en fe rangeant en forme de batteau «t. » i*'. Toutes les parties de ce ver fe reproduifent 35 comme celles du ver de terre. La feule différence eft » » que cette opération ^ dans le ver de batteau, eft beau- 33 coup plus prompte , & qu'elle fe fait même en hiver 33 La réprodudion de la tête précède celle- de la queue ^ 33 & ce phénomène a lieu , fans s'afFoiblir , dans les par- as ties déjà reproduites que l'on coupe de nouveau ce. Remarque, En général il y a plus d'humidité, & à^ Siv âSo Notes des nouvelles Recherches éudilitc dans la fubftance organique des infecles aqua- tiques, ^ par- conféquent moins de léfiftance dans les J5arties qui s'arrangent plus aifément que celles des. in- feéles terreftres. Ainfî il n'eft pas étonnant que la répro- ^udion s'opère avec plus de vîtefTe ^ de facilité. hes Têtards^ » 1^. Si l'on coupe aux têtards la queue en entier, v> ou prefque en entier, ils tombent au fond de l'eau , oii ils 93 relient fans mouvement , & périlfent faute de pouvoir 35 chercher leur nourriture. Mais fi l'on n'en coupe qu'une 39 petite partie , elle fe reproduit dans tous en général , Si & il n'en meurt aucun «. 33 i*. Si l'on coupe la queue d'un têtard fort jeune, 85 la réprodudion fe fait en très-peu de tems , & dans M un jour d'été le progrès en eft très-rapide. Non feu- »5 lement la partie reproduite fe trouve bientôt égale à 33 celle qui a été coupée , mais la queue entière devient 33 aufïî grande que celle des têtards du même âge qui 33 n'ont pas été mutilés «. 3> 3». La réproduûion des parties eft au contraire plus M lente dans les têtards plus avancés , de façon qu'il 93 paroît conftant que la force réprodudrice agit toû- 33 jours , & s'augmente en raifon inverfe de l'âge du 33 têtard «, 33 \° . Pendant le tems de la réprodudion de la queue, 33 le corps du têtard celfe de groffir dans ceux qui font i3 d'un âge plus avancé j l'animal groifit médiocrement 33 s'il eft moins avancé , & beaucoup s'il eft dans l'en- 33 fance. La réprodudion paroît fe faire par un allon« ?5 gement des parties anciennes «. fur les Etres microfcoplques. 281 Remarque. Si tous ces phénomènes s'exécutoient par un fimple développement des parties déjà piéformées , comme le prétendent les Défenfeurs des germes préexi(^ tans , il me femble que plus qu'il y a de relTort dans un corps organifé , comme il y en a toujours dans les corps adultes , plus il y aura de vîteiTe dans le déve- loppement ; nous voyons cependant , par les obfervations précédentes, que le contraire arrive conftamment. De-Ià je conclus entièrement pour le fyftéme de l'épigenefe , qui demande une nouvelle difpofition fubflantielle des parties infenfîbles pour la reconftrudion des organes entièrement nouveaux. Non - feulement la force répro- duduice doit être plus adive , & plus vitale dans des fujets nouveaux nés , mais la dudilité des parties eft beaucoup plus considérable , & la réfîfbance bien moindre. 3î 5*^. L'Auteur a examiné les œufs des grenouilles qui 95 avoient été fécondés , & il les a trouvés compofés d'une 33 matière blanchâtre tirant fur le jaune , dont les par- 33 ties font globuleufes" , fans apparence d'aucune liai- as fon entr'elles , ou continuité organique quelconque. « Il a examiné de même , avec la plus fcrupuleufe atten- 35 tion, les œufs non fécondés, & il n'y a trouvé aucune M différence fenfîble , quant aux parties ou à leur difpo- 33 f tion entr'elles _, & les œufs qui avoient été fécondés 33 par le mâle ce. Remarque. Il efl très - naturel de conclure de cette comparaifon , puifqu'on ne trouve rien d'organifé dans les œufs fécondés , non plus que dans ceux qui n'ont pas encore reçu la femence du mâle , que le jeune têtard n'exifte pas dans l'œuf avant que les parties infenlîbîes fe difpofent autrement par un changement fubftamiel. 5^2 Notes des nouvelles Recherches Tous les principes néceffaires à la produéïion du corps cyrganifé du têtard y font \ îa femcnce du mâle y ajoute fans doute un efprit invilîble , mais il éclrappe tellement s nos obfervatîons , qu'on ne remarque , avec les meil- leurs microfcopes , aucune difFérence entre les œufs qui ibnc fécondés , & ceux qui ne le font pas. L'Auteur, loia d'adopter ce raifbnnement , croit qu'on doit conclure de ce q,u'on ne trouve rien d'organifé dans les uns ni dans les autres , que le corps du têtard préexifte dans l'œuf avant la fécondation. C'eft une affertion pofîtive fondée fur une négation & une pure pétition de principes, que certaî- ïiement aucun Epigenéfifte ne lui accordera jamais. Voici fa façon de raifonner fur ce fujet , & d'après fes propres paroles. " Les œufs non fécondés ne diiré- » rent aucunement des œufs fécondés : mais les fécondés » ne font autre chofe que les têtards reflerrés & con- 35 centrés en eux - mêmes , & l'on doit dire la même » chofe des œufs non fécondés 5 donc les têtards préexi(^ »> tcnt à la fécondation , & n'ont befoin de la femence 33 du mâle que pour les développer «c. J'abandonne à tout Ledeur les réflexions que Toit peut faire fur ce raifonnemcnt. hes Limaçons ïf les Limaces terrejîres. 35 I®, Les limaçons reproduifent leurs cornes, fi oîî â3 les coupe , en entier , ou en partie , & autant de fois 33 que l'on voudra répéter l'expérience «. w 1*'. Si l'on coupe entièrement la tête d'un limaçon 5 55 il s'en reproduit une autre avec les mêmes organes 33 précifénient que ceux de l'ancienne. Dans les vers de 33 terre , cette reproduction des parties , dont la tête Se fur les Etres microfcopiques. 2. S 5 sî le col de l'infeâie font compofés , fe fait enfemble , » & dès le commencement la tête entière paroît en for- aï me de bouton, mais dans les limaçons, la tête, & le 33 col avec leurs organes fe rcproduifent par parties fé- « parées , qui fe réuniifent après pour former un tout 93 organique «, « 3°. Ces réprodudions ont lietT indifféremment dans « toutes les efpéces de limaçons «. " 4°. Les limaces ont la même facilité que les lima- 3>^ons ordinaires pour reproduire leurs cornes ; mais 33 quand à la puiiTance réprodudrice de la tête ^ elles 33 y parviennent difficilement ce. Remarque. La difficulté que l'on trouve dans les lima- ces pour la réprodudion de la tête , provient fans doute de ce qu elles font fans coquille , expofées au defféche- ment par le grand air qui les touche de tous côtés , & fait évaporer par la tranfpiration les fucs nourriciers. Les limaçons au contraire, auflfi-tôt qu'on leur coupe la tête , rentrent dans leur coquille , & en ferment l'ouver- ture par un couvercle d'une matière vifqueufe & gluante. Peut-être que , lî l'on mettoit entre deux verres concaves bien maftiqués enfemble , les limaces mutilées , & fans les gêner, elles reproduiroient de même leurs têtes , com- me les limaçons ordinaires, La Salamandre, 33 I'. Les pattes de la falamandre étant coupées en . 33 partie en tel endroit que l'on voudra , ou entièrement , 33 de façon qu'elles foient féparées à l'articulation qui 33 les unit au corps , elles fe reproduifent de nouveau. »5 La réprodudion a lieu , fi on leur ôte plufieurs pattes 284 Notes des nouvelles Recherches 3> en même-tems , & même fî on fe leur arrache toutes 30- quatre : fi la fedion fe fait fur une feule partie , 30 comme fur la moitié de la patte , la force réproduc- 33 trice leur rendra précifémcLt la partie qu'elles vien- '» lient de perdre; mais fi on l'arrache en entier, quoique » jufqu'à l'articulation , le tout fe formera de nou^ 33 veau c*. » 1°. Quand les pattes font enlevées entictement avec 5T rarticulation , les nouvelles égalent en dimenfion , Se 3^ avec les proportions les plus exades , celles que l'a- 33 rfeimal vient de perdre ; mais fi l'on n'en enlève qu'une «» certaine portion , il fe fait une fouftradion précifé- 3» ment au point ou la nouvelle partie s'unit avec l'an- se cienne. Ce défaut n'a pas lieu dans la petite efpece 3» de falamandre , en la prenant à tout âge , non plus 3>que dans les jeunes individus de la grolTe efpece «. 35 3 ^. La réproduélion fe fait toujours avec plus de 33 vitefie , en raifon inverfe de l'âge du fujet. C'eft une 53 re^Ie çrénéraîe «. » 4''. Dans la réproduétion des parties enlevées , la 35 nature fait ce qu'elle a à faire à-peu-près dans le même w tems , foit qu'il lui manque une patte entière àvea » fes griffes , ou les griffes feulement «. Remarque. La raifon eft, je crois, que la force répra- dudrice , quoiqu'elle opère fur un plus grand plan quand elle forme une patte que quand elle fait feulement quel- ques griffes, cependant elle emploie plus de mouvement & de matière qu'elle ne peut en employer fur un plaa plus petit pour ne former que des griffes » Se que tout cîl en proportion du côté de l'effet qu'elle produit. Cette idée ne peut pas , comme il me femble , s'appliquer au fur les Etres microfco piques. aSy €mi)Ie développement des parties , parce que la quantité 4u développement eft toujours en proportion du nombre des parties développés. C'eft ainfî qu'entre deux efpeccs de végétaux de clafîe différente , la plus grande en dimenfions naturelles peut végéter avec autant de vîteflê que la plus petite. Ce phénomène n'eft pourtant qu'ua cas parricalier & un effet du tempérament , car en gé- Ecral la nature emploie plus de tems à former les plus grands corps organifés , & par la même raifon à faire le tout , qu'une partie. M 5*?. Le nombre des os, ou ofTelets , dans les quatre- " pattes de la falamandre monte à quatre-vingt-dix neuf, » qui fe reproduifent exaâ:ement avec les deux peaux » extérieures & intérieures, les glandes, les mufcles, M les nerfs , les veines & les artères ; mais fî on ne » tire feulement qu'un certain nombre déterminé de ces 99 os , ou offelets , ce nombre fe reproduira de nouvean s> avec la plus grande exaditude. Si la fedion fe fait «au milieu d'un osfolide, la partie qu'on enlève, fe 33 reproduit de façon que les fibres longitudinales de ce » qui paroît <îe jiouveau , fuivent précifément la direc- 33 tion de celles dont la partie qui refte , eft compofée , » en un mot les parties nouvelles de toute efpece ne 9î font qu'une prolongation des anciennes ««. 33 é°. Si on enlevé les nouvelles pattes que la nature 33 vient de former , elles fc reproduiront toujours indé- »3 finitivement. L'Auteur a fuivi cette opération juf- a3 qu'à fix reprifes , fur les quatre pattes , & en méme- •3 tems fur la queue des jeunes falamandres , dans lef- »3 quelles la réproduârion eft beaucoup plus p''ompte pen- » daat les trois mois de Juin , Juillet & Août. Par c« 2,26 Notes des nouvelles Recherx:hes w moyen il a compté jufqu'à £x cens quatre vingt- fepc » os nouveaux, reproduits fur un feul fujet. Il croit même 33 que fi un Obfervateur vouloit commencer ces opéra- 33 tions au mois d'Avril , & les continuer jufqu'à la 33 fin de Septembre fans interruption , il feroit poffible » d'avoir en douze réproduâiions , jufqu'au nombre de 3' treize cens foixante & quatorze olTelers nouveaux. On » n'ira pas plus loin dans la même année , parce qu'en « hiver la force reproductrice ne travaille pas «. 3> 7". L'Auteur a fait encore plufieurs autres obfer- » vations particulières fur la réprodudion des queues 33 dans les falamandres , fur leurs mâchoires qui fe re- 33 produifent de même avec toutes leurs dents ; fur les 9> pattes des crapauds &: des grenouilles , ou la même 33 force réproduâirice a aulTi lieu , quoiqu'elle ne tra- 33 vaille pas avec la même vîtefTe , ni avec la même » facilité ou la même confiance , comme dans les fala- 33 mandres ; mais il efl: inutile d'entrer ici dans le détail 31 de tout ce qu'il a fait ; ce que nous venons d'extraire 33 fuffit pour donner une idée complette de la nature de 33 la régénération des nouvelles parties dans certains 33 corps organifés , & de l'étendue de la puiifance répro- 33 dudrice avec les règles générales qu'elle paroît fuivre 33 dans fes opérations «c. Remarque. Après avoir confidéré attentivement tous les phénomènes précédens , peut -on défirer une preuve plus complette du changement fubftantiel , & de la nou- velle difpofîtion des parties infenfibles, ou des fucs nour- riciers qui fe moulent & s'ajoutent aux ar iennes par, ties, en les prolongeant lentement pour s'arrêter à une figure organiquement déterminée , comme nous i'avon fur les Etres microscopiques, 2S7 «xpliqué ci-defTus , & fpécifiqt^i pour le corps dont dles font les parties î Le feul fyftême de l'épigenefe peut renfermer tous ces phénomènes fl variés , en même-tems qu'ils font conformes aux circonftances , à moins que l'on ne veuille dire que chaque partie infenlîble eft à la fois la tête & la queue , félon l'occurrence , ou en petit telle portion de l'infeâie que l'on voudra , qui fc «îéveloppe enfuite en fe conformant très-exadement aux caprices de l'opérateur. Pourvoir ainfi les corps orga« nifés d'un magafîn indéfini de parties , & des parties même des parties à volonté , afin de répondre à toutes îes circonftances poiïibles , me paroit un monftre en Phyfique plus incompréhenfible , pour ne rien dire dé- plus, que toutes les qualités occultes de nos ancieniieg Ecoles , & plus compliqué infiniment que les principes îiomoiomériques ^Anaxagort. M. Wartel^ Chanoine Régulier de l'Abbaye de Saint Eloi , & de la Société Littéraire d'Arras , a obfervé que les limaçons vivent très-long-tems privés des parties qui paroifTent elTentielles à la vie des animaux. Vers la fia 4u mois d'Octobre 17^7 , ce Phyficien coupa la tête a plufieurs limaçons , qui d'abord fe renfermèrent dans leur coquille , & en bouchent l'ouverture comme s'ils cufient été entiers ; ce fut avec furprife que dans le mois de Mai 1768 , il vit fortir ces animaux de leur co- quille pleins de vie , mais fans tête. Il fufïïfoit de les cxpofer pendant quelque tems au foleil pour les enga* , ger à fe montrer hors de leur coquille ; mais M. Warttl ne croit pas que la réprodudion de la tête des limaçons foit poflibie , d'autant plus qu'après fes expériences au- cun de ces animaux n'a recouvré la tête, qu'il avoic âSB Notes des nouvelles Recherches perdue , & que les cornes n'ont pas même reparu dans ceux à qui il les avoir coupées *. Comment concilier les expériences de M. Wartel avec celles de M. Spalan^ani , dont nous connoifTons d'ailleurs l'application & l'habileté ? D'abord celles de M. Wartel y qu'on ne doit point contefter , ne font que négatives y or mille expériences négatives , par des circonflances purement locales , ne valent pas en Phyfique une feule expérience pofitive. Déjà la vitalité des limaçons attef* tée par M. Wartel , vitalité qui fe foutient dans toute fa vigueur pendant fept mois en plein hiver, privée d'une partie qui paroît eflentieile à la vie animale , eft non- feulement une preuve dans cette efpece de corps orga- nifés du manque de fenfation , comme nous l'avons établi ci-defTus , mais elle eft en même-tems un préjugé très- fort en faveur de leur puiffance réproduâ;rice. Dans mi fyftême de pure vitalité réproduélive , le centre des for- ces eft nécefTairement mobile & variable en raifon de la quantité de matière qui peut s'accroître , ou diminuer j dans un fyftême organifé au contraire , qui renferme un principe fenfitif , le point d'adion eft fixé immua- blement par les nerfs qui fe concentrent toujours au cerveau. Dans ce dernier cas , la vitalité fubordonnée au principe fenfitif ne peut jamais fe foutenir long-tems privée d'une partie effentielle , comme eft la tête d'un animal ; dans le fécond cas , non-feulement elle fe fou- tient très-long-tems , mais elle eft un gage certain de la reproduction des parties qui manquent , & fi qWq. n'a pas été plus loin , en les reproduifant entre les mains de M. Wartel , il faut nécefTairement attribuer ce défaut * Extraie de l'Ayantii Coureur, N'. 2.7, 17^8* fur les Etres rnicrofcôpiquesl ^8p à la falfon & au climat. En été , & à Modêne , ou les chaleurs furpafTent de beaucoup celles du pays d'Artois, ces mêmes limaçons auroient repris indubitablement leurs têtes , fi ce que M. Spalan^ani nous annonce eil un fait que l'on ne doit nullement révoquer en doute. Depuis que j'écris ce que j'ai dit ci-deiTus, non- feule- ment j'ai fait réuflir en partie l'expérience de M. Spa- lan^ani fur cinq limaçons , mais difFérens Phydciens ont produit devant l'Académie Royale des Sciences plus de quarante de ces êtres , dont les têtes fe font réproduites parfaitement avec toutes leurs parties. Ces faits m'ont été attelles par M. Grandjean de Fouchy , Secrétaire per- pétuel de ce Corps favant , & qui en tient les Regiftres. Pour terminer tout ceci , je me citerai moi-même dans une lettre que j'ai écrite autrefois au célèbre M. Haller» 33 Quod autem vis vitalis totam mafTam uniformiter à M fine ufque ad fînem penetret quàm intimé , & ipfis 35 compofiti principiis attribuenda fit , non caulîs extrin- 53 fecis, ex hac unicâ confideratione erui poterit. Nemo, 35 qui nutritionis naturam confiderat , non videt , quod 33 hsEc operatio totam impregnet mafTam fingendo &: ad- 33 dendo in omni trium diraenfîonum fenfu partes ana- 33 logas undè extenduntur & mole , & longitudine non 33 foliim contenta , fed & ipfa vafa continentia. Hinc 33 jam obfervavimus in dillertatione de gencratioîje , quod 33 qui naturam nutritionis benè confiderat facile fibi 33 perfuadebit regenerari corpora de novo non irregula^ 33riter, & sequivocè, fed ex datis à Creatore principiis, 33 nec pr^eexiftere jam formata ab initio creationis , ut 33 deinceps in fuo tempore explicentur : idem quippe » rcgener^tionis hujus principiiim eft , ac ipfms ûucr.i- T 2po Notés des nouvelles Recherches ?3 tionis , &: li necefTe fit ut exiftant in rerum naturâ 3û vires corporese, & leges conftantes, per quas nutriun- 33 tur animalia & vegetabilia , iifdem plane viribus , 35 iifcjemque legibus ex matrice prseexiftente & fpecificâ, *5 ad quam nutriendam refluit ttiateria organica conti-- i3 nuo , regenerabuntur denuo , nec unum plus implicat 3î difficultatis quam alterum. Totam autem mafTam im- 33 pregnat hase vis vitalis , & expanfiva extenditur in 33 omni trium dimenfionum fenfu , ficut jam diximus, 33 à maxime folido procedendo ad maxime tenue uni- 33 formiter , donec viâ:â continua refiftentiâ , ad tantam 33 tenuitatem gradatim per vafa ferpendo pervenit , ut 33 caufse extrinfecse , & prsecipuè elementum aeris non 33 foliini corrodât & abripiat vaforum extremitates & 3-3 tranfpirata fluida , fed & ulteriori harum virium jam 3^ psnè vidarum progreffîoni obftaculum invincibiie po- 33 nat. Hinc fatis féliciter concipi & explicari poteft , 33 quomodo homunciones benè formati, teretes, & in fe 33 quafi. coUedis viribus fortiflimi fint , è contrario veio 33 qui ultra debitam &: harmonicam proportionem pro 33 quantitate, &: qualitate materix vitaljs hac vi impulfi. 33 crefcunt , fuit etiam proportionaliter débiles. Agunt 35 enim externa , fi hœc vis confideretur ut totam per- 33 means à fine ufque ad hnem , 6c penetrans maiTam , 33 majori. potentiâ in vedem longiorem , & tenuiorem , 3D quàm in breviorem ; & hsec confideratio eo magis 33 locum habebit , fi hxc vis nutritiva , fimul & ^ege- 33 nerans , cum in matricem exuberet , admittatur us 35 intrinfeca primis compofiti principiis. Proptereà in trac- 33 tatu, quem dedi o6rodecim abhinc annis, necefiarium -3 omnino duxi principia Pbyfica ex obreryatloiiibus rai- fur les Etres microfcopiques. 29 1 » crofcopicis eruta ufque ad Metaphyficam materia! na- 33 turam elevare , & leibnitianum fyftema ampledi , uc 33 unicè confonum natur^e & rationi. Alla multa fimi- 3î liter phenomena , quse in corporibus organicis depre- »î hunduntur , his folis principiis innixi fatis apte conci- » père, & explicare fimiliter poterimus , qua; Philofophis 33 pro prsefenti derelinquere plané libet «. REMARQUES Sur ce que j'ai dit de la Propagation de la pre^ miere Femme , fuivant U récit de Moyfe , page 146". ^I l'ori croit quelquefois trouver dans l'Ecriture Sainte une forte d'abfurdité apparente , elle vient plutôt de la manière de voir les cKofes , que de ces écrits facrés. Platon fait mention d'une ancienne tradition qui por- toit que le premier homme , & la première femme ne faifoient, au commencement de l'cfpece humaine, qu'un feul corps uni phyfîquement , dos à dos , comme nous voyons encore de tems en tems naître des gémeaux, qui fe nourrilTent ainfî , Se fubfiftent très-bien , même plufîeurs années après leur naifTance 5 oC fuivant cette même tradition. Dieu les avoir féparés enfuite en deux corps diftinds & parfaits , chacun félon fon fexe. ' La même idée ( corpus Adami biforme ) fe confirme par le témoignage des anciens Rabbins, comme on peuc le voir plus particulièrement dans le Didionnaire de BayU , à l'article Evs , 6c dans plufîeurs Commeatateiirs Tij :2p2 Notes des nouvelles Recherches qui ont traité cette matière. C'eft un moyen de géné- ration renfermé dans le plan général établi par la Di- vinité , qui fe vérifie encore dans plufîeurs animaux , Bc qui n'a rien en foi que de très-conforme à nos prin- cipes j la volonté de Dieu eft de commencer en tout par l'unité , qui fe propage enfuite ou fe développe. La création primitive de la matière avec fes reflbrts inti- mes , qui exiftoit , félon Moyfe , avant les fix périodes du développement du chaos , aufli-bien que le dévelop- pement lui-même , eft en tout & par -tout attribué à Dieu feul , in ipfo vivimus , movemur (^ fumus 5 l'effi- cacité , aufïî - bien que l'exiftence de toutes les chofes créées , provient de lui , & l'ordre avec lequel elles fe développent a été établi & préordonné par lui feul. C'eft pour cette raifon très- philofophique , que Moyfe dit, en parlant de ce même fait connu des Rabms , & de 'Platon par tradition , que Dieu ayant envoyé un profond fommeil far Adam , a pris une de fes côtes , ô" qu'en la revêtijfant de chairs il en a fabriqué le corps de la femme. Or le corps du premier homme étant déjà formé de terre, fe vitalifant. & s'organifant félon les difpofitions foutenues dont cette matière avoir été douée par fou Créateur , il a acquis par la nature même des princi- pes , dont il étoit compofé , le pouvoir de fe propager organiquement & fpécifiquement d'une manière indé- pendante de l'ame fpirituelle , qui lui a été furajoûtée après fa formation complette , comme Moyfe le dit po- fitivement. Cela pofé , en fuivant pas à pas l'Ecriture Sainte , il eft indifférent à la nature des chofes , *que le germe particulier, ou le point prolifique d'où le nou- veau corps devoit fortir par une végétation nourrie j fur les Etres micro fco piques* spj fût placé dans un endroit plutôt que dans un autre, & on ne peut demander philorophiquement rien autre chofe , finon que Dieu l'ait placé convenablement à la nature déjà formée en général , & aux fins qu'il fe propofe. Dans plufieurs êtres organiques, comme poly- pes & autres , dont la matière vitale eft à - peu - près également duélile par-tout, les nouveaux germes poulTenc de tous côtés , parce que la force végétatrice qui les pénétre entièrement comme corps organiques & vitaux, trouve par - tout une certaine facilité à-peu-près égale. Mais dans l'homme , afin de partir de l'unité vitale &: organique , qui alors étoit la feule de fon efpece , & pour produire de même la femme par végétation , ( principe général qui pervade tout fyftême ) Dieu a jugé à propos de former le premier être humain avec -treize côtes com- plettes , ou, pour ôter toute équivoque, avec vingt-fix demi-côtes unies organiquement, Se fubftantiellement , chaque pair à fa vertèbre , dont elles ne font en effet que des produélions. Cette conformation nous paroît toute extraordinaire,' parce que nous ne la retrouvons plus dans l'efpece hu- maine , mais elle fe voit dans l'homme de bois , efpece de Singe , qui approche plus de nous par fon organi- fation que de tout autre animal quelconque 5 il ne lui manque , comme M. de Bujfon l'a obfervé , que la fimple intelligence pour le claffer avec l'homme. On conçoit très -bien maintenant que telle étant la jvolonté particulière de Dieu , félon les loix qu'il avoit: préétablies en cette occafion, la force végétatrice auroic pu poulTer au-déhors le corps de la femme, pendant le fommeil à' Adam , par la treizième vertèbre qu'elle eiFaça :âp4 Ilotes des nouvelles Recherches avec les deux demi-côtes. Le plus ou le moins de tems quil faut pour une telle opération, dépendra de la vc îonté adive , & imprefîive de Dieu , qui peut accélérer îes eiFets naturels , & ce moyen très-fîmple de généra- tion , néceflaire dans l'origine des chofes dont les tra- ces rubfîftent encore dans la race des infedes^ pourra, quoique l'Ecriture n'en faiTe aucune mention , s'appli- quer très -bien par indudion à toutes les autres efpeces qui naquirent dans ce tems. Or le nouveau fétus une fois formé , cette quantité de nourriture furabondante , qui étoit requife pour la formation complette du corps féminin dans toute fa grandeur, fe tire également, fans fortir du plan général de la propagation que la Divinité avoit établi , par un écoulement non inter- rompu de la maffe totale du premier homme , dont le corps avoit été formé d'avance proportionnellement à cette fin par fon Créateur, Hoc nunc os ex ojftbus meis , dit Adam ^ ô* caro ex carne meâ ; h&c vocabitur virago , quia de viro fumpta eft. St. Thomas a dit à cette occa- lion , hanc coflam adA fuijfe înftar feminis quod individuo fuperjluum ejl , fed ad generationem prolis eft necejfarium ; & la verfion Arabe fur les mots Hébreux qui font tra- duits dans la Vulgate , par &dificavit coftam , quam tuU" rat , in mulierem , s'exprime encore plus emphatique-, ment , par crefcere fecit coftam fubftantiam in mulierem , ce qui renferme précifémcnt les idées que nous venons d expo fer. Il n'y a rien en tout cela qui foit contraire à la bonne Philofophie pour ceux qui confidérent les prin- cipes végétans de la génération dans toute leur éten- due, par lefquels feuls on explique les phénomènes des fur les Etres microfcopiques. spj polypes , 8c plufieurs autres découvertes microfcopiques faites dans ces derniers tems. Les Philofophes qui croi- ront devoir regarder cette opinion comme abfurde , parce qu elle paroît choquer les idées qu'ils fe font faites fur ce qu'ils voyent a»' A LONDRES; & A PARIS, Chez L A c o M B E 5 Libraire , rue Chriftine , près la rue Dauphine. M. PCC LXIX, ®f @ lllîlll ïl fin ^ J ©fe P R-É F A C E DE M. DE NEEDHAM. J-jE célèbre Halky , qui a rendu taiic de fervices à la Phyfique & l'Aftrono- mie, a imaginé fur la firudure inté- rieure du gbbe terreftre , une hypochéfe qui favorife beaucoup la théorie fui- vante , tant fur la produftion des mon- tagnes , que fur les caufes phyfiques du déluge. Son fyftême eft fondé fur la variation dans la direction du magné- tifme , qui traverfe fuccefFivement de l'orient à l'occident d'une manière affez régulière, & qu'il a lui-même obfervée dans les différens voyages entrepris uni- quement pour prouver fa théorie. Son opinion fur la ftruaure de notre Part. IL a ij PREFACE. globe , efl: que la furface extérieure de la terre , qu'il regarde comme une efpece de croûte , ou de coquille , contient en dedans un globe intérieur ou noyau féparé de la croûte extérieure par un fluide qui fe maintient entre les deux. Ce noyau ayant , félon lui , le même centre & le même axe commun , fait fa révolution avec la croûte extérieure en 24 heures , fans qu'il y ait dans les deux mouve- niens aucune différence qui puiffe fe ren- dre fenflble ^ à moins que ce ne foit dans un tems aflez confidérable \ mais à la fin la plus petite différence efl: deve- nue fenflble , en fe répétant ^ & par des additions continuelles. De cette manière le noyau , ou la partie interne du glo- be 5 s'écartera tellement de la croûte , ou partie externe , que leurs axes fe croi- feront, & en s'écartant du centre com- mun fon mouvement fe manifeftera en dehors par la variation du compas-, qui fe tourne fucceffiyement du côté de lo- PRÉFACE. iij rient ou de roccident. Ainfi dans la fup- polition que la croûte extérieure , ou la coquille , & le noyau intérieur foient deux aimants qui aient leurs pôles refpectifs à des diftances différentes des pôles de la rotation journalière, M. Halky préfume qu'il a donné une explication fatisfai- fante de la caufe phyfique des quatre pôles magnétiques démontrés , comme il le croit , par les phénomènes , & des variations de l'aiguille aimantée. En effet fa théorie a été confirmée, non- feulement par les obfervations qu'il a fai- tes dans plufîeurs voyages entrepris pour la vérifier , mais aufli par celles des voya- geurs de toutes les Nations de l'Europe^ & nouvellement par Mylord Anjou ^ qui dit à cette occafion ?:> que les obferva- >j tions faites pendant fon voyage * fur 5:) la variation de l'aiguille aimantée, font )j> d'autant plus remarquables , qu'elles >:> confirment l'admirable hypothéfe de ^ Voyage à'Anfon^ chap. S* a'îj iv PRÉFACE. V M. Halley , & qu'elles mettent le fceau ^y à fa réputation immortelle par leur ^y correfpondance dans la quantité de la 3y variation prédite par ce grand hom- $y me , & fixée par fa théorie pour les V différentes parties de la mer pacifique 5> cinquante ans avant fon voyage , & 3:>long-tems avant qu'on ait fait dans yy ces mers aucune obfervation fur cette 5j? matière v. Cette théorie, toute iînguliére qu'elle peut paroître, quoique prouvée par les phénomènes de Taiguille aimantée, n'efl: pas abfolument nouvelle. Kepler , long- tems avant Halley , a expliqué les orbi- tes ellyptiques des planètes , & a fup- pofé qu'elles étoient compofées chacune d'une croûte extérieure , qui faifoit fa révolution par un mouvement diurne qui lui efl propre, & d'un noyau inté- rieur , dont le mouvement s'écarte un peu de celui de la croûte extérieure.*. * Agronomie phylique de Kêfler, PRÉFACE. V Enfin , non-feulement M. Hallcy fe fert très-heureufement de fon hypochéfe pour expliquer tous les phénomènes de l'aiguille aimantée , mais il l'étend encore - plus loin pour donner une raifon phy- fique de l'aurore boréale, en fuppofant que la vapeur lumineufe , ou élcârique , dont notre globe eft vifiblement impré- gné , & qui eft , félon lui , contenue en grande abondance entre la croûte exté- rieure & le noyau intérieur , s'échappe par les pôles de la terre en différentes quantités, pour produire ce phénomène fi extraordinaire & fi frappait par fon éclat. M. de Mairan croit devoir l'attri- buer à Tatmofphere folaire. Une hypothéfe de peu d'étendue ne mérite guère l'attention des Philofo- plies; celle de M. Halky ^ bien maniée j, fe généralife , même au-delà des vues de fon inventeur. En effet , tout Phyficiea qui fe trouve frappé par la fingularité de quelques phénomènes ifolés , s'occupa aiîj vj P R É F A C E. à imaginer un fyftême pour les expli- quer j ians confidérer fi cela peut s'ac» corder avec ce que îa nature nous indi- que en la prenant dans toute fon étendue» On a pouffé cette extravagance fi loin ^ fous prétexte de nous faire comprendre pourquoi on trouve très-fouvent dans les terres au milieu de la Syberie, non- feulement des dépouilles de monflres marins de toute efpece y mais aufîi des fqueiettes prefqu'entiers d'éléphans, qu'il y a des Pliyfîciens qui croyent que les pôles de la terre , & fon équateur ^ fe déplacent de façon , que chaque por- tion, ou pointe du globe, parcourt fuc- ceiîivemeot toutes les latitudes. Par ce moyen , non-feulement ils reculent l'âge du monde bien au-delà du terme fixé par la chronologie facréè, mais ils ren- verfent la phyfîque entière de la terre pour on phénomène ifolé, local & pu- rement accidentel. Cela feroit niqins abfurde^ fi notre globe n'avoit pas une P R È F A C E, vij figure d'applatiffement phyfiquepnent dé- terminée aux pôles aâueîs , & d'éléva- tion qui ne peut fe déplacer, fous fon équateur. En effet , comment croire que réquateur ^ & les pôles aéluels fe dépla- cent alternativement 5 fans concevoir que les différentes parties de la terre chan- gent continuellement leur figure , ce qui eft une conféquence néceffaire des forc- ées centrifuge & gravitante ? Et com- ment imaginer que leur figure étant une fois pofée comme elle l'efl: aujour- d'hui, elle puiffe jamais fe changer en- fuite fans amener un défordre général ? Des montagnes en chaînes inveftiffanc toute la terre , formées de couches régu- lières 5 defléchées , endurcies , pétrifiées ^ chryftallifées , minéralifées , & s'abaif- fant par degrés ; une fuperficie , qui s'élève fôus Téquateur pour finir par une dépreffion toujours graduée dans un applatiffement parfait aux deux pôles ^ voilà Tétat préfent de la terre , & corn- aiv viij PRÉFACE. nieiiî fe perfiiader qu'une maffe de cette figure ^ phyfîquement déterminée par fa conftitution inaltérable , pourra fe con- former enfuite à la force centrifuge pour changer fa forme à mefure , fi on la prend dans fon état préfent de rigidité, fans déranger fes parties , & fans bou- leverfer toute fa fuperficie. La fuppo- iition des applatiffemens ^ & des éléva- tions toujours variables feroit tout au plus admiffibie 5 fi le globe étoit un fluide 5 ou au moins compofé d'une ma- tière molle y qui cédât , fans fe rom- pre y aux efforts continuels de la force centrifuge. Mais cette ftabilité de figure & de ftruâure immobile de la terre ne regarde pas feulement la fuperficie, elle doit s'entendre pareillement de l'inté- rieur même du globe jufqu'à des pro»- fondeurs confidérables. Les Académi- ciens de Peteribourg, dans le voyage de Syberie , écrit par Gmelin^ obfervent que les minéraux en Syberie font répandus PRÉFACE. îx par- tout fur la furface de la terre fans y entrer jamais profondément, comme en Allemagne , & ailleurs en Europe , auffi-bien qu'en Amérique. Ils s'éton- nent beaucoup de cette difpofition de la matière minérale dans ce pays , fi con- traire a leurs idées , & en concluent que la Syberie eft un amas de terres plus nou- velles que celles des autres contrées. Or la véritable raifon de cette phyfique , tirée , non pas du local , comme celle qu'ils imaginent , mais de la théorie gé- nérale de la terre , eft fon applatiflement vers le nord, qui eft très-confidérable relativement à l'Allemagne , & l@s au- tres pays méridionaux dont la furface eft plus élevée. Il s'enfuivra de-lk que les racines pour ainfi dire , ou les foyers des mines étant par-tout à-peu-près à la même profondeur , les veines ou les ramifications minérales doivent s'appro- cher bien plus près de la furface en Sy- berie fous le cercle polaire , que dans x^. P R E F A C E, les pays méridionaux ; foit que fes rami- fications s'élèvent par une continuité non interrompue de filamens infenfi- bles qui s'accumulent vers la furface , foit qu'elles fe forment d'une vapeur qui fe condenfe à mefure qu'elle en appro- che. La même.raifon phyîique s'appli- que également aux couches de charbon que l'on trouve de même dans ce pays vers la fuperficie ; & ce qui eft encore plus remarquable , c'eft que les feux fouterreins , par lefquels cette efpece de foffile fe forme , les fuivent de près , & paroilTent en plufieurs endroits. Ce ne font pas des volcans , on n'y a jamais fenti des tremblemens de terre ; mais c'eft un feu fuperficiel qui n'a que quel- ques lignes d'épaiffeur , & reflemble à une bruine légère. A mefure que l'on avance vers le nord du côté de la mer glaciale^ ces feux deviennent très-fré- quens , & ces charbons ardens font fi communs dans tous ces cantons feptexi» PRÉFACE. 4 trionaux , que les bords de la mer , qui s'étendent depuis le fleuve Jcnefai à Teft vers Lena en font tous remplis , & qu'il y en a à telle profondeur , qu'ils font ar- rofés par l'eau de la mer *. Maintenant , en admettant Phypothéfe de M. Halley , en la modifiant , & en l'étendant , comme j'ai fait dans cette féconde partie de mon Ouvrage , on donne des raifons phyfîques , non-feu- lement des phénomènes auxquelles ce Philofophe l'applique fi heureufement , mais auffi du déluge attefl:é par tous les anciens monumens , & de l'afped pré- fent de la terre , où les feux fouter- reins qui fe montrent a la furface vers le nord, & travaillent plus profondément dans les pays méridionaux , jouent un fi grand rôle. Toute autre hypothéfe eft 5 je le répète , abfolument contraire à la phyfique de la terre , & à cette Habilité conftitutive qui eft effentielle au * Hift. gén. des Voyages, voL iS, p. 30(5'» xij PRÉFACE. maintien des phénomènes que l'on a tou- jours vus fubfifter depuis fon origine. Selon les mêmes Académiciens , ( pag. 349 du voyage de Gmelin ) on trouve plufîeurs veftiges , qui font conjedurer que la mer glaciale s'eft étendue autrefois bien plus loin au fud qu'elle ne l'efl: à préfent. Il n'eft donc pas étonnant , fans recourir à un changement de climats pu- rement imaginaire & phyfiquement im- poffible 5 que l'on trouve , fort avant dans les terres en Syberie , des reftes de monf- tres marins , des os d'éléphans , & même des fquelettes entiers , que l'on prend quelquefois pour ceux du Mammont y animal fabuleux : il eft aifé de conce- voir , dans cette fuppofition , non-feu- lement que toute la partie feptentrio- nale de l'Afîe eft un amas de terres nouvelles , qui ont paru pour la plupart depuis le déluge ; mais encore que toutes ces dépouilles ont été dépofées en par- tie fous les eaux de la mer avant leur PRÉFACE. xiij retraite , ou portées vers le nord par le reflux des eaux pendant le déluge de- puis rintérieur des provinces méridio- nales de cet ancien continent antédilu- vien. Ce qui faifoit alors une partie de la mer , & qui eft maintenant une terre ferme, conftitue ce que nous appelions aujourd'hui la Syberie , & le nord de PAfie , & jamais on n'y auroit trouvé dans les terres , des dépouilles d'élé- phans , fi les eaux du déluge , qui ont fait périr ces animaux , ne les avoient pas tranfportés dans des climats où Té- léphant ne peut fubfiflier. Voici maintenant des vérités généra- les qui réfultent de tant d'hypochéfes , dont quelques-unes font ingénieufes , & font le fruit de l'imagination des Phi- lofophes. Les phénomènes de différente efpece , lorfqu'on veut les ifoler , mènent néceffairement à des théories différen- tes ) celle-là feule méjrite la préférence^ xiv P RÈ F AC E, qui en embraffe un grand nombre ; en- core ne ferons-nous jamais afîurés que la théorie même la plus généralifée , qu'enfantent nos facultés très-bornées , foit le véritable fyftême de la nature , puifque tout ce que nous voyons fe peut exécuter par des moyens abfolument inconnus , & qui nous échapperoient tou- jours dans notre état aâuel d'enfance ^ s'il pouvoit durer éternellement. Il fuit de cette vue générale , qu'au- cune conféquence phyfique , bâtie fur des hypothéfes humaines , ne peut tenir contre les vérités révélées ^ de même qu'aucune conféquence théologique, ti- rée direâement des fimples paroles de l'Ecriture Sainte y fuivant la remarque du célèbre Holdcn , ne doit être regardée comme concluante dans la clafTe des vérités philofophiques. 5^ T^eriîatcs enim 5^ philojophicce * nec probandœ , nec im- jj proband(Z funt ex puris nudifquc Saerce * Holdcn y Anal. Fid, Div. L. i , c. 5 , {qq^, i. PRÉFACE, x¥ 5:» Scripturœ verbis , S^ fcntcnûis : quam- V vis eni/n nulla comphaitur fcriptura ^:> faljltatcm y attamen ipjius loquaidi mo- yj dus y ut plurimùm vulgarïs ejî ^ atquc yy adcommuncm hominum captum potïùs , V quam ad loqudœ proprictatem fcrmonls V rigorcm adaptans jo . Si les Théologiens d'un côté , & les Philofophes de l'autre étoient bien pé- nétrés de la jufteflè de cette obfervation, ils ne feroient peut-être pas fi éloignés les uns des autres , & la paix pourroic fe rétablir fouvent entre eux à peu de frais. Pendant ce tems-là, faute de s'en- tendre , la difcorde ne femble qu'aug- menter ^ & la Religion , auffi-bien que la Philofophie ^ en fouffre conlidérable- ment au grand préjudice de la vertu & des fciences ; les deux feuls appuis foli»- des de la fociété civilifée. Henri Etienne , en parlant des défauts de fon lîécle , peint les deux extrêmes auxquels les Sçavans de fon tems fe laif* xvj PRÉFACE. foient entraîner par l'efprit de parti. Ses vers , avec fort peu de changement , peu- vent également s'appliquer à ceux qui courent aujourd'hui dans la carrière des fciences. In Phyjicâ re Jit al'iqua libertas vdim , Licentiam ill'i ncutiquam concejferim , Kœnophilus hâc utitur , in hâc Jlbi placct : Non audet uù Mifokœnus altéra. Non par tamm peccare pcccatum puto ; Vcniam merctur Mifokœnus : haud item Vcnîam mereri Kcsnophilum crcdidcrim. AU* NOUVELLES màm ' 'Si,. T ^^ « Si ^1 BaHl*llH(S jî; gg . ^^ 1 NOUVELLES RECHERCHES PHYSIQUES ET MÉTAPHYSIQUES SUR LA NATURE ET LA RELIGION. SECONDE PARTIE. Lettre de M. de Needham^ Membre de la Société Royale des Arts 6' des Sciences & de celle des Antiquaires à Londres , Correfpondant de V Académie Royale des Sciences à Paris ^ à M. de Buffon. V ou s pouvez vous rappeller 5 Monfieur, qu'il y a quelque tems qu'examinant enfemble dans les^ Livres de Moyfi l'hiftoire de la création , nous cherchâmes à développer le fens caché de cette phrafe obfcure & remarquable , le foir &: le matin firent un jour , fa^us ejî vefpcrh & manh Part, IL ^ A \2 Nouvelles Recherches Mes unus y &c. Elle mérite effectivement d'au- tant plus notre attention , que le foir y eft die précéder le matin du premier jour, c'eft-à-dire de celui qui fut Y éternité , Se cela non-feulement avant la création du foleil , mais même avanc réduction & la fortie de la lumière Dans cette foule d'opinions, qui, chaque jour le fuccédent & fe détruifent , de tous les êtres moraux dans la clafiTe de l'humanité , les deux plus dignes d'eftime & les moins éloignés de la conciliation , font d'un côté le Déifte de bonne foi , qui embralTe la loi de nature dans fa plus grande étendue , & de l'autre le Chrétien , donc le cercle des idées n'étant pas borné par l'igno- rance , ni par les préjugés , donne auiîi à la Phi- lofophie la plus grande liberté que la Religion bien développée puilTe admettre. La Religion révélée 5 lorfqu'on l'examine bien ^ paroîc fe rapprocher de la Religion naturelle j . elle la retrace , la développe & l'éclairé , mais elle y ajoute auili des vérités qui ne font connues que par la révélation divine ^ & auxquelles nous devons une foumiiïion entière. Cet efpric de la foi , ajouté à la morale purement humai- ne , eft comme le foufïle de la Divinité ^ donc parle Moyfe , foufïle infpiré au fyftême vital 6c organique , tiré des piùiFauces de la matière , fur la Nature & la Religion, \ '| qui rend l'homme, de mortel qu'il étoic , capa- ble de s'élever jufqu'à l'immorcalité ; la loi de la pure raifon eft incomplette , fi rentendemenc n'eft pas circonfcrit par la foi raifoniiée , rationa- hik objcquium vejlrum ^ en même -rems que le cœur Ted: par les mœurs. Il y a donc un point ^ où le Déifie fincère & le Chrétien le plus parfait , doivent fe rencontrer \ &c c'eil Icrfque toutes les concevions raifonnables auront été faites des deux côtés , le Dieu de la révélation étant auill le Dieu de la nature. Alors s'il n'arrive pas une aflimilation totale du Déiue au Chrétien , un changement entier de fa raifon , à caufç de quel^ que réfiftance fecrette de fa part , il fe trouvera du moins une (i grande analogie entr'eux 3c une adhéfion fi complette , qu'il en naîtra une har- monie entière dans plufieurs points. La nature d'un fyftème intelleduel n'eft point une idée étrangère au vrai Déifte , il fçait parfaitement que l'échelle de l'intelligence ne finit point avec l'homme , il méprife même le fenfualifle dont la vue eft bornée , qui s'imagine , ou que l'in- telledt doit être noyé & confondu dans la fen- fation fubftantielle ,. ou que ces deux principes fi nobles & Ci diftinûs de la puiiTance idéale doivent fe perdre dans la matière infenfïbie* li fent il vivement $c fi douloureufement la foi* A i j 4 Nouvelles Kecherches biefTe de fon propre efprit , & les bornes de k carrière permife à fes efforts / que loin de fe re- garder comme au plus haut degré de l'échelle, il fçaic & ed: très-convaincu qu il ne forme que le dernier anneau de toute la chaîne intellec- tuelle. Son fens moral eft ii fin , (i délicat & ii dégagé de route fenfualité groffiere , q'^i'il ap" perçoit bien vite la néceiîité d'un état futur dans un fyftême nouveau , plus exalté que cet inftant aduel de mifere , de chaînes & de prifon , où le bien & le mal , le juile & l'injude , font tel- lement mêlés &: confondus , que le vice ne fe remarque fouvent que par l'afcendant qu'il ufur- pe fur la vertu. Dans cette vue les attributs de la Divinité , qui l'a créé pour des delfeins plus élevés que la jouiffance fi paifagere àts plaifirs des fens , fe développent à fes yeux , & il trouve dans la compofition même de fon fyPtême moral la conféquence nécefiaire d'un état futur de pei- nes & de récompenfes. Je parle ici comme fi le hafard m'eût fait ren- contrer un Déifie d'une difpofition fi défirable 5 & je l'ai cru d'autant plus néceiTaire , qu'étant Catholique Romain , c'efi:- à-dire Chrétien , dans la fignification du mot la plus étroite , je ne veux pas que mes opinions ayent l'air d'une nou- veauté dangereufe aux yeux d'un homme aufli fur la Nature & Icl Religion. J plein de raifon que vous , Monfieur , & auflî dégagé des paflîons qui nous agicenr. J'aurois pu vous répondre fur le champ à la queflion qui occaiionne c^ito. lettre , car il y a long-tems que j'ai une opinion fur ce fujet \ mais j'ai jugé que la matière étoit trop délicace pour être traitée par la voie de la converfation , &: j'ai imaginé que la correfpondance feule du ca- binet pourroit l'éclaircir. Si la chaîne de l'intelleâ: créé ne commence & ne finit pas dans Thomme , il qÇi évident que des êtres fupérieurs doivent envifager la nature fous un point de vue différent de celui où nous l'appercevons , & plus fublime que cette ligne de lumière qui fépare le payfan ignorant d'a- vec le Philofophe éclairé. Tout fçavoir créé quel- conque eft relatif, comme i'efl l'exiftence mê- me de toute créature quelconque. La Divinité feule a le fçavoir abfolu \ comme doit, être la nature de celui , qui s'efl déiini lui-même dans l'Ecriture Sainte par cette dénomination fubli- me : je fuis celui qui efl. Ego fum qui fum. Ce- lui qui eft m*envoie à^^ous , dit Moyfe , infpiué par Dieu même , qui eji mijît mz ad vos. On s'étonnera peut-être du fens que j'entre- prens de donner à un paiTage de l'Ecriture , &: je pourrai palTer auprès de quelques gens fu-- A. îrj 6 Nouvelles Recherches perfîciels , pour un novateur en matière de Re- ligion 5 cependant comme Chrétien bien inf- triiit des motifs de la foi , je fçai qu'elle eft toujours raifonnable ^ & je fuis convaincu par les grgumens les plus forts , que l'efprit de Dieu j dans lequel tout vit , tout fi meut & tout exifîe ^ fans la volonté duquel un pajfereau ne tombe pas fur la tzm , a dirigé les écrivains facrés fans aucun miracle vifîble , mais intérieurem.ent , & fouvent d'une manière infenlible à eux-mêmes : de cette façon tous les endroits de l'Ecriture Sainte ^ relatifs à la connoifiTance de la Religion ^ foit hiftoriques ^ foit dogmatiques ou mioraux , ont été infpirés , & ont un fens littéral , moral ^ intelleduel. Le fens littéral admet une cer- taine latitude d'explication , ainfl que les écrits ordinaires , ou ceux des Auteurs prophanes. La Sainte Ecriture alors doit être interprêtée par elle-même , l'obfcur par le clair , & elle peut l'être par la raifon lorfque celle-ci nous prête Yiiiblement fon flambeau ; enfin l'Eglife légale- ment alTemblée & confukée à cet effet, eft auto- rifée fans doute à interprêter la Sainte Ecriture , & fa voix alors ne doit pas être confondue avec celle des Théologiens & des Commentateurs , qui n'ont droit à l'infpiraiion ni perfonnelle- mmx ni çolledivçiîient : je vais plus loin ^ ^ fur la Nature & la Religian. 7 pour me purger de la plus légère teinture de novation , ou de fanatifme , je feroîs fâché qu'un Théologien ou un Philofophe , pût envifagerun Concile général dans un point de vue aiiiil ri- dicule qu'une alTembiée de Quakers , qui divi- fent l'infpiration & qui l'appliquent à chaque individu. Voici 5 je crois , la véritable idée d'un Concile général légalement aifemblé , idée vraiment Phi- lo fophique , conforme à la toute-puiffance de Dieu qui agit imperceptiblement , mais effica- cement j qui embraire avec force le commence- ment & la fin 5 Se difpofe tout aVec fuavité 5 at^ tingens à fim adfinem fortitcr & difponens omnïa fuaviur : idée conforme a la raifon la plus faine & la plus pure. Dans un Concile général ^ Dieu permet la coUifion & le conflid de routes les paffions hu- maines poffibles ; il permet la chaleur At% dîf- putes de tout genre \ il permet les abfurdités perfonnelles \ il permet & il infpire les bons raifonnemens , qui fouvent 5 & quand il lai plair^ prennent leur afcendant naturel , il permet auflî l'amibition , les intrigues & les vues intéreifées des Souverains Pontifes \ mais il appaife ou di- rige, comme il lui plaît , les efforts tumuliacas de la tempêce ^ & le réfukat ell que la vérité en A IV § Nouvelles Recherches fort , autant qu'il eO: néceffaire qu'elle foit dévoi- lée pour le bien aduel de l'humanité. C'eft , fî vous voulez 5 une providence extraordinaire , qui 5 fuivant fa promeiTe ^ veille fur fon Eglife dans le moment critique de la décifîon , & c'eft dans ZQ^% circonftances fur- tout que l'œil toujours vieiîant de la Divinité femble fe fermer f^ir tous \qs mouvemens humains , tandis qu'elle opère infenfîblement , fans aucun miracle vilible , fans altérer les pouvoirs , ou la nature de l'homme , & fans bleiïer la liberté de chaque individu. On peut dire en un mot que Dieu gouverne fon Eglife 5 comme il fait l'Univers , je veux dire imperceptiblement & fans déroger aux loix de la nature , de forte que le pieux enfant de l'E- glife peut dire à la fin de ces tumultes , avec au- tant de raifon que le pieux Déifie , échappé à la tempête , qu'il remercie la Divinité , qui a bien voulu le conduire au port. Dans cette vue Frax Paolo & Pallaviclnl , ou tout autre Ecrivain , Proteilant ou Catholique , qui déclament contre la conduite de la Cour de Rome & la dépen- dance du Concile de Trente , ou qui en défen- dent opiniâtrement chaque çirconftançe hiflori- que 3 font à mon égard comme l'aveugle né qui difpute fur les couleurs. La vue Philofophique de la Religion ^ établie fur les principes Catho- fur la Nature & la Religion. ^ liques , s'élève , fous la conduite de la Divinité , bien au-deffus des événemens & des foiblefTes humaines; au-delTusde la conduite perverfe , fcandaleufe , abuiîve , ôc criminelle des hom- mes ; au-deiïus de la vie privée ou même publi- que des Papes , quelque peu édifiante qu'elle ait pu être ; Se dans l'ordre de la Pveligion , Alexandre V I eft au Catholique bien inftruit , ce qu'eft Niron ^ dans l'ordre de la nature , au Philofophe moral. C'efl donc invifiblement , & d'une maniera fouvent inconnue à eux-mêmes , que l'efprit Di- vin a conduit les Ecrivains Sacrés pour tout ce qui eft efTentiel au bien & aux progrès de la Religion. Mais de même qu'il a permis que dans tous les Manufcrits originaux de l'Ecriture, il fe foit gliffe nombre de variantes dans àts matières de peu de conféquence , qui font la fource d'erreurs Chronologiques , ou d'autres méprifes légères abandonnées aux difcuilions acs Commentateurs , de même auffi l'efprit de Dieu s'eft accommodé auftyle , à la tournure des phra- {qs ôc à toutes les idées humaines des Ecrivains Sacrés , quand ces défauts ou ces foiblefTes n'ont été d'aucune importance pour la morale ou pour la foi. Le ftyle à'Ifaye , élevé à la Cour , ell poli êc fublime , celui d'Jmos , qui n'étoit qu'un 10 Nouvelles Recherches berger ^ eft ruftique & greffier , comme fon état ; êc Saint Paul ^ qui étoit un homme de lettres , n'a pas écrit d'une manière auffi iimple fes Epî- tres 5 que Saint Pierre , qui étoit un pauvre pé- cheur de Galilée. La Divinité agit comme caufe générale , en fuivant le plan qu elle s'efl formé de nous faire parvenir à autant de connoilTan- ces qu'il nous eft néceffaire pour notre utilité réelle y mais dans les matières importantes , où îa vérité eft intérelTée , foit qu'il s'agiiTe de l'hif- toire ou du dogme , non- feulement, toutes les copies de l'Ecriture , dans toutes les langues , font parfaitement femblables , mais les expref- fions même font merveilleufement exactes 8c. conformes , fubiimes & inflrudives , fans dif« tînétion de la perfonne 3c du caraélere de TE- crivaîn , comme le remarquent tous ceux qui méditent la parole de Dieu avec quelque dé- gré d'application Se de foin. Yous devez appercevoir , Mondeur , la con- nexion idéale de mes penfées , quoique dans le cours de mes raifonnemens , je puiffe paroitre m'être écarté de Moyfe &: de la folution de ce paiTage obfcor dans fon hifloire de la création , qui fait le fujet de cette lettre. Je me fuis ex- pliqué fur la vraie façon de rendre le fens lit- téral de l'Ecriture 3 & fur le genre d'autorité des fur la Nature & la Religion': îï Théologiens & des Commentateurs. Quand ils font unanimes , ou prefque unanfmes , leur au- torité eft proportionnellement grande , & mê- me alors cette autorité n'ePc que celle des hom- mes 5 qui 3 pris diftributivement ou colledive- ment , font toujours faillibles ; en conféquence dans des queftions mixtes , c^eft- à-dire qui ne font pas purement Théologiques , & où la Phi- lofophie a quelque part , il eft certain que àzn% tous les tems des Théologiens fe font trom- pés efifentiellement , en s'attachant trop littéra- lement à quelques expreffions obfcures & po- pulaires de l'Ecriture. Deux queftions vont fer- vir d'exemple de leur précipitation fréquente à décider fur des matières , qui ne font pas de leur compétence , & cette décifion précipitée a malheureufement jette une ombre fur la Re- ligion aux yeux des ignorans , qui ne connoif fent pas la nature de l'autorité Eccléfiaftique , & qui confondent la fimple opinion des Pères &: àQs Théologiens avec Iqs objets de notre foi. Ces deux fameufes queftions font celles de Texif tence àes Antipodes & de la vérité du fyftême de Copernic. On a tort , il eft vrai , d'imaginer que i'Eglife ait jamais condam.né comme héré- tique la croyance des Antipodes , non - feule- ment parce que la condamnation d*une opinion ÏJ2 Nouvelles Rechercha par les Papes feuls , n'eft obligatoire en matière de croyance , que quand elle a été reçue par tout le corps ou par la plus grande partie du corps de l'Eglife ; mais auffi parce que dans le fait , il eft faux que le Pape Zacharïe. en ait jamais con- damné le véritable fyftême , cependant il efl très- certain que 5 fuivant l'opinion la plus générale Aq^ Pères , des Théologiens & des Commenta- teurs 5 on regardoit le fyftême comme contraire à i'Ecriture , parce que dans cette m^atiere , qu'ils n*entendoient pas , ils s'attachoient trop ftridte- ment à la lettre. L'opinion de Vigile , condam- née par le Pape Zacharic , étoit que la terre ayant deux furfaces également plates , & couvertes tou- tes deux d'une voûte folide j, il y avoit fur le coté oppofé au nôtre 5 un autre foleil , une au» tre lune , d'autres étoiles & d'autres hom.mes , qui ne defcendoient pas 6! Adam, A l'égard du fyftême de Copernic , chacun fçait que la voix de l'Eglife n'a jamais prononcé fa condamnation , & la Religion ne doiç pas plus repondre de la méprife des Papes , des Cardi- naux 6c des Inquidteurs , que des bévues des Théologiens particuliers. Il eft vrai que lopi- nion générale étoit contre cette hypothéfe . îTiais ce n'étoit qu'une opinion établie par des Théologiens qui vouloient fe mêler de matie- fur la Nature & la Religion: if res hors de leur fphère , & elle n'a jamais été un article de foi , comme tout le monde à pré- fent le fait & en convient. Il fuit donc de ces obfervations , que lorfque TEglife légalement affemblée ou confultée , n'a pas décidé un point particulier de controverfe ou d'interprétation , il eft permis de s'écarter du fentimenr , quand on ne le fait ni par témé- rité ni par caprice. Scot étoit un Novateur en Théologie , il s'oppofa au corps entier des Théo- logiens de fon tems j cependant Scot n'a jamais été accufé , ni même foupçonné d'héréûe. Molina s'eft féparé des fentimens communs fur la gracej je veux dire dans une matière où la Philofo- phie n'a pas droit , dans une queftion purement théologique \ cependant quelque grandes qu'aient été les clameurs , qui fe font élevées d'abord contre lui , Molina n'a pas été condamné , &; fes difciples , qui font devenus très-nombreux, ont eu un grand afcendant dans l'Eglife. Com- bien d'autres exemples femblabies ne pourroit- cn pas produire , où l'opinion établie a été com- battue & détruite par une opinion contraire , fans qu'il y ait eu d'accufation ou de condam- nation d'héré(ie ? La raifon en eft évidente : c'eft qu'aucun Corps de Théologiens n'a le droit d'accufer ou de condamner définitivement des î4 Nouvelles Recherches opinions , quand l'Eglife , dont le Tribunal e(l incommunicable , n'a pas parlé & prononcé la Sentence. Pour réfumer ce que j'ai avancé plus haut dans des matières Théologiques , & à plus forte rai- fon dans des matières mixtes , où la Philofo- phie a des droits , on ne doit pas , en fe fépa- rant du fentiment reçu , être accufé de témérité ni de caprice , lorfque de fortes raifons , ap- puyées d'autorités refpeârables , ou tirées de la nature même & de Teffence des chofes , moti- vent cette différence d'opinion & cette expli- cation de la lettre de l'Ecriture , à laquelle la voix de l'Eglife ne nous a pas attachés littéra» lement. Telle eft la régie que donne Saint Au* gujiin , dont l'autorité dans la matière préfente , eO: univerfellement refpeârée. Vous fçavez que ce Saint dans fes Commen- taires fur la Génèfe , abandonne totalement la lettre de l'Ecriture , & penfe que le fyilêrae entier de la création a été completté dans tou- tes les parties par le Fiat Tout-puiiTant de la Divinité , ouvrage d'un feul inilant , &; que le période àQs fix jours doit être pris dans le fens myftique. Je dirai plus encore , c'eft que dans un cas 5 où l'Eglife ne s'eft pas énoncée 5 iorf- qu'un homme fe fépare du fentiment commun ^ fur la Nature & la Religion. i J ' &: qu'il n'eft appuyé que fur des raiforts apparen- tes, quoique foibles & hypothétiques, cet hom- me ne doit pas pour cela être traité d'ennemi de la Rehgion ; fes raifons deviennent fortes reia- tivement à fa propre confcience j cependant iî peut être téméraire , imprudent , ignorant & foi- ble dans la voie de Dieu , mais ce ne font que {qs raifons que les Théologiens doivent attaquer, fans s'en prendre ni à fa perfonne ni à fa doc- trine ; & jufqu'à ce que l'Eglife ait prononcé fur la queftion , il ne doit pas même être taxé d'héré(ie. La conféqucnce a beau être tirée logi- quement de {qs principes , s'il la défavoue , il eft à couvert. Les Thomiftes accufoient les Mo- liniftes de femi-pékgianifme, conféquemment à leurs principes \ les Moliniftes à leur tour , taxoient de même les Thomiftes de Calvinif- me 5 mais les deux partis s'accordoient à établir que Théréiie conféquente , dans le cas où cha- cun nioit la conclufion de fon adverfaire & ac- ceptoit la dodrine établie de la grâce & da li- bre-arbitre , n étoit pas une imputation qui duc rompre la Communion. Vous voyez , Monfieur , qu'à l'égard du fens littéral de l'Ecriture , fi vos raifons tirées de la nature des chofes mêmes , font fortes & urgen- tes 5 vous pouvez vous écarter de la lettre dans fl6 Nouvelles Recherches rexplication de Thiftoire de la création par Moyfi , Se vous le pouvez même fans vous ex- pofer à ia cenfure j Saine Augujtin l'a fait 6c l'Eglife n'a rien décidé. Il eft donc permis d'en- tendre par les fix jours , fix périodes quelcon- ques , & non pas fix révolutions de 24 heures. Il y a long- rems que j'ai cette opinion , & quoi- que je fois le premier qui ai avancé cette ex- plication ; la conviélion que j'en ai , déduite des preuves de l'Ecriture auffi-bien que de la raifon , eft telle , que je fuis bien affuré de ne mériter aucun reproche du coté du fens moral de l'Ecriture , qui n'a guère jamais befoin d'ex- plication , étant prefque par - tout l'objet du fentiment , même de tout leâreur ; mais le fens intellecbuel n'appartient qu'au feul Philofophe Chrétien , encore n'en a t-il qu'une idée obf- cure & imparfaite , & comme d'un objet qui ap- partient dans fon entier à ces efprits fupérieurs , qui forment l'étage du fçavoir créé plus élevé que le (len , montant toujours par une échelle continuée , vers le trône de la Divinité ^ s'en approchant fans celfe , & fans ceffe en étant à une diftance infinie. C'eft; le fens intelledael 6^ philofophique que j'applique à cette difpofîtion obfcure de mors & d'idées , par laquelle le foir eft dit précéder chaque jour de la création , fans fur la Nature & la Religion, \y fans même en excepter le premier , le faifanc anticiper par conféquent fur i'éducbion même de ia lumière \ voici mon fentiment à ce fujer. A proportion que la Philofophie pénètre plus avant dans la conftitution de la nature , elle ap- perçoit plus diflindement que dans l'homme ^ tout fçavoir pris diftributivement , ou même coUedivement , eft toujours relatif. La chaîne de ce fçavoir ^ telle que nous l'apperçevons au- dedans de nous-mêmes , eft compofée de rela- tions diverfes dans une ligne non interrompue j comme il eft toujours formé par comparaifon , il eft toujours dans chaque partie alternative- ment pofitif & négatif. Semblable au Syftême de l'Univers , fon objet immédiat , il a com- mencé par la non exiftence , le chaos & les té- nèbres. Sa nature eft conforme à la conftim- tion de cet Univers , dont il eft le repréfenta- tif 5 & l'Univers dans fon exiftence totale eft aufti toujours relatif par rapport à la Divinité, fa caufe première , & relatif aufîi dans toute ia graduation de fes parties , lefquelles com- parées entr'elles ^ font à leur tour , comme le fçavoir , alternativement négatives & poficives. Tout dans l'Univers eft adion 6c réadion , ce qui ne peut fubfifter qu'entre des êtres politifs & négatifs j la lumière même nous eft tranf- Taru IL B î8 Nouvelles Recherches mife , comme nous l'apprend le Chevalier Ncu" ion , par des accès conftans de vibrations dou- ces. Si jamais l'Univers dans fa totalité , & dans chaque partie , pouvoit arriver à un équilibre parfait, en devenant fubftantiellement fimilaire & en acquérant une égalité d'adion dans cha- que partie , il s'enfuivroit une (lagnation tota- le ; non-feulement la matière brute & la ma- tière exaltée 5 font l'une à l'autre négatives &: pofitives 5 fans quoi il n'y auroit ni aélion ni réaéiion , mais auffi dans l'échelle de l'exalta- tion de la matière , les diverfes parties font l'une à l'autre négatives & pofitives , d'où la vitalité fe répand dans chaque portion infen- fible. La régie en eft (i exade que le plus puif- fant agent matériel , le pouvoir éledrique mê- me 5 fe diftingue dans fes diverfes portions , Îqs, qualités & fes quantités , en pofitif & négatif j il eft conftitué jufqu à l'échelle des couleurs vifî- bles , de façon que les quantités graduées de la lumière deviennent l'une pour l'autre , om- bre & lumière , & font encore bien au - delà de l'obfervation & de la portée des meilleurs inftrumens optiques. Enfin l'agent feniitif étant au vital , & k principe intelligent étant au fenfitif dans cette réciprocité de relation mu~= tuelle 3 ou cette caufalité de poiitif ôc de né- fur la Nature cf la Religionl \^ gatif , non - feulement la vitalité efl: répandue daïis la matière organifée , mais dans les clafTes intermédiaires elle ell: douée de fenfation par l'addition d'un principe immatériel , Se dans l'homme , la fenfation eft animée d'intelligence par l'addition d'un Agent fpirimel : Agent non-» feulement diftingué de la matière , même la plus vitale 5 comme eft le principe de la fenfation ^ mais d'un caraétere qui le place dans la cbxaîne àts êtres intelleduels , caractère infiniment fupé- rieur à l'âme des bêtes. Si tel eft l'état exadfc de la nature , comme elle fôrtit des mains de fon créateur , Ôc telle que votre pénétration , Monfieur ^ vous l'a fait connoître , eft-il étonnant qu'un Auteur infpiré, d'après les effets produits fur la fenfation , en ait fait dans la Génèfe cette defcription pitto- tefque 5 & fi parfaite ? Ce qui eft pour nous une portion , ou plufieurs portions de tems quelcon- que 5 un , ou plufieurs périodes , ne préfente à des intelligences fupérieures que des vicifiitudes fuccelîives de repos 6c de mouvement fi bien identifiées avec le tems qu'elles en deviennent la mefure j & ces vicifiitudes d'adion ou d'i- nadioii , pofitives ou négatives , ont des rela^ tions , qui paroifient à ces efprits fupérieurs bien plus claires qu'à nous j ils les compren- 20 Nouvelles Recherches nent iiitelledueilement , & ne les fentent pas comme nous dune manière groflîere fous le voile Se les modes de la chair Se du iang. Au contraire , vis-à-vis de la Divinité dont l'intelli- gence infiniment éminente nous eft incompré- henfible , toutes les viciflitudes difparoifTent ; mille ans ne forment devant Dieu que l'efpace d*un jour j apud quem non eji tranfmutatïo ncquc vïcijjitudinis ohumhratio j & mïlU anni anu ocu- los ejus tanquam dics hejîcrna quce priZHrïit, Dans ce fens intelleduel de l'Ecrivain Sacré , les ténèbres des chofes créées précédoient la lu- mière 5 le cahos étoit avant le développement ^ le foir 5 ohumhratio y précédoit le matin , & le négatif étoit devant le pofîtif , parce que tout ce qui exifte vient de Dieu , qui eft l'Etre qui précède le tems , antïquus diemm , & qui ap- pelle ks €hofis qui m font pas comme- celles qui font , de l'état de non exiftence , ou de privation ^ à celui d'exiftence. En examinant l'hiftoire de la création dans les livres de Moyfe , il eft aifé d'y obferver cette échelle fi conforme à la Philofophie & à la natu* re des chofes. On voit d'abord la féparation du chaos & l'édudion des quatre principaux élé- mens , aufli - bien que leur difpofition fucceflî- ve j enfuite les quatre élémens , ainfi diftribués fur la Nature & la Religion. ^i & prolifiquement difperfés , retournent une fé- conde fois en eux-mêmes partiellement , & fe mêlent enfemble dans certaines portions pour produire les corps fublunaires moins confidéra- bles 5 & recommencer encore une nouvelle échelle , qui monte graduellement de l'impar- fait au parfait , de la fimple appojîtïon réguliè- re à l'économie vitale & fimus-fufccption orga- nique 5 & de la fimple vitalité à l'organifation la plus complette , parcourant chaque clafTe de la vie didinciement , avec une addition vers le milieu du terme d'un principe feniitif , jufqu'à ce que réchelle iinifTe à l'homme auquel y die l'Ecrivain Sacré , Dieu infpira d'en haut une ame fpirituelle & immorçelle. L'Ecriture , fuivant la régie reçue , s'explique par l'Ecriture ; je vais donc rapporter ici un pafTage du livre de la Sageffe au dernier Chapitre , où l'Ecrivain Sa- cré fait évidemment allufion à la defcription de Moyfc 3 & peint , avec la plus grande énergie , cette échelle que nous obfervons dans la nature. Après avoir parlé des divers changemens des formes fubftantielles ou élémentaires ^ & Aqs moyens que la Divinité avoir employés en Egyp- te contre les ennemis de fon peuple choifi , fui- vant cette idée de l'Ecriture , & pugnabit cum eo orhis urrarum cantrà infmfatos , il conclut qu'il Biij â^ Nouvelles Recherches eft auiïî facile auTout-puinant de faire ces chan- gemens fubdantiels dans la nature , qu'il l'eft à i'organifte de changer le même fon en un autre ^ ou une nouvelle relation en élevant ou abaif- fant l'échelle de la muiique. Ces paroles font d'autant plus remarquables , que la converfion des élémens y eft expreOement comparée au changement de la clef muiicale i elles ne font mê- me intelligibles que dans cette vue Philofophi- que 5 les voici : în fr cnïm cUmznta convertun- tur 3 Jîcuî in organo qualïtaùs j'onus immutatur & omnia fuum tonum cujlodlimt. Cette échelle générale 6c particulière , décrite par Moyfi , & à laquelle Salomon fait alluiion , demande une fucceiïion de tems proportionnée à fon mouvement intérieur , tandis qu'elle fe gradue & fe développe j une quantité de mou- vement efl: une quantité & une mefure detems. Afin donc qu'elle foit parfaitement graduée dans une juile harmonie pour devenir une échelle parfaite , il faut qu'il s'y trouve une confiante alternative de parties afcendan tes & defcen- dantes , plus ou moins parfaitement , & les par- ties font l'une à l'autre , relativement poiltives & négatives ; comme plus ou moins de lumière, ou Féchelle naturelle des couleurs , qui font om- bre l'une à rautre dans les proportions harmo- fur la Nature & la Religion. 2 s niques j comme l'odave muficale ^ comme plu- ou moins d'adtivité répandue harmoniquement dans tout le fyftême de la création j comme Fac- tion 3c le repos par intervalles j comme un pé- riode 5 ou un jour qui monte ôc qui defcend ; ou enjfin comme les deux termes extrêmes de la lumière & des ténèbres. Le progrès de cette échelle de développement demande , comme je l'ai dit 3 un tems proportionné : car quoique cha- que période nouveau fût un nouveau terme d'ef- ficacité additionelle , à mefure que les différens effets montoient en perfecbion , Se quoique cha- que nouveau degré d'efficacité dérivât de Dieu même , cependant tous les dégrés d'efficacité créés étoient finis & limités ; car tel eft l'effet, telle doit être la caufe ; cette caufe eft fans doute originairement l'Etre fuprême , mais il ne déploie jamais fa toute-puiffance illimitée & infinie. Pour produire une action ou un effet limité , ce doit être là elfentiellement l'ordre de la créa- tion & du fyftême préfent de la nature , tel qu'il fe dévoile à l'œil de la Philofophie j 8c pour ren- dre le tableau de Moyfi femblable à (on ori- ginal 3 tel doit être auffi l'ordre de la defcrip- tion quq cet Ecrivain Sacré nous en a donnée. Eftedivement , qui peut mieux nous crayon- ner & nous faire concevoir une caufalité mu- Biv â4 Nouvelles Recherches tueîie dans une échelle harmonique , compofée de relations alternativement pofitives & négati- ves 3 fortant originairement du néant par le pouvoir infini de Dieu , quun jour inconnu & inujîîl qui précède le foleil & le jour naturel , fui- vant l'expreffion de Saint Augujiin ? qui peut mieux l'exprimer qu'un période de tems , mon- tant par dégrés comme le jour naturel en effica- cité 5 de la négation ou des ténèbres , jufqu'à fon Zenith , & baifTant enfuite jufqu'â ce quelle finifTe dans la négation pour faire place à un nouveau degré d'efficacité ou à un période nou- veau , qui doit encore être épuifé & finir dans robfcuiité & le repos de la nuit ? La répétition de l'échelle afcendante en perfection de chaque tems périodique , donne la fomme totale de fix périodes d'une longaeut proportionnée à la na- ture des chofes qui s'exaltent de plus en plus , ainfî que la Philofophie nous l'apprend. Pour nous montrer donc non-feulement que tout vient de Dieu , (ce qui eft elfentiel à la Religion ) mais que le commencement du premier période étoit Ké avec les termes qui le précédoient, je veux dire avec le repos de l'obfcurité abfolue , ou la non exiftence , & la négation univerfelk de toute forme fenfible , qui précéda la création immé- diate de la matière , ce période , le premier de fur la Nature & la Religion. 2 y tous 5 nous eft préfenté non-feulement comme ayant fa nuit , ou fa foirée ; mais cette foirée , ou cette nuit précéda & anticipe réduction de la lumière même : & facius cjl , &c. C'eft fans doute de-là que les Juifs ont coutume de com- pter leurs jours du foleil couché , à l'autre foleil couché 5 & que le Sabath commence toujours au foir précédent. C'eft pour la même raifon que l'Ecriture Sain- te appelle la femaine Judaïque une image des iix périodes de la création & du feptieme , le re- pos de Dieu qui s'étend jufqu'à ce jour. 11 s'en- fuit donc de ce que j'ai dit , que les paroles , facius ejl vefpere & mane dus primus , ne pouvoient pas s'entendre d'un jour naturel de 24 heures , & le foir précédant le matin du premier jour qui ï\xi jamais , il faut prendre ces iîx termes de la création , pour iix périodes d'un tems inconnu. Pifcis hic non efi omnium. Mais quelque opinion que d'autres de mes ledteurs puiiTent fe former de ma façon de traiter cette matière , j'ai lieu de croire , MonHeur , qu'un homme de votre pénétration dans les loix les plus infenfibles de la nature , & quelques autres qui ont porté la Philofophie jufqu'à fa plus grande élévation mé- taphyfique , ne taxeront pas d'enthoufiafme le fens intelleduel que j'attribue à l'Ecrivain Sa- 26 Nouvelles Recherches ^ ^c. Clé ; mes idées font fans cloute fort abflraites % je n'ai cependant jamais perdu de vue le tact de la matière palpable ; je n'ai point pris mon elTor au - deffus de l'atmofphère ; & fortement convaincu de l'infpiration Divine qui condui- foit les Auteurs Sacrés , mes conciufions ont été formées fur les principes de la Religion révé- lée , aulîi-bien que fur ceux de la Religion na- turelle 5 principes dérivant de la Divinité mê- me 5 qui facït utraque unum , & liés intimement avec la plus folide métaphyfique , je veux dire celle qui émane de l'obfervation exacl:e & pby- iique de la nature , telle qu'elle fe préfente en- core aujourd'hui à celui qui la fuit avec attention. J'ai l'honneur d'être très-parfaitement , Mon- lieur 5 votre très - humble & très - obéiffant fer- viteur , &c. A Paris i ce ij Mars 17^7. * L'aflîftance invifîble que Dieu prête à fon Eglife jufqu'à la fin du morxde ne fe fonde pas feulement fur une promefTe pofîtive , mais elle fe fait fentir par la fuccelfion des tems. Le plus ardent ennemi de ce vrai prin- cipe d'unité catholique ne peut pas montrer la moindre contradidion réelle en matière de foi entre deux Con- ciles œcuméniques quelconques. L'efprit qui dirige d'E- glife dans fes Conciles , efl: de rechercher foigneufement la tradition de fiécle en fiécle fur laquelle elle s'appuie fous la conduite de Dieu qui l'éclairé, Se jamais fur la RECHERCHES PHYSIQUES ET MÉTAPHYSIQUES SUR LA NATURE ET LA RELIGION. Jr o u R étendre la chaîne des vérités nniverfel- les auxquelles j'ai effayé , dans la première par- tie de cet ouvrage , d'élever mes le(5teurs , en fuivant pas à pas les obfervations de M. Spa- lanianï , je crois devoir ajouter certaines idées , ou principes généraux , dont les objets font ou clairs & évidens par eux-mêmes , ou paroilTent émaner , par des conféquences prefque nécelTai- res 3 de la Phyfique dirigée par la révélation. Elles ferviront en même tems comme de corol- laire à la lettre précédente , & fourniront aux vrais Philofophes , matière à penfer fans cho- quer leur délicatefTe naturelle. Nous n'avons que trop de motifs pour être dégoûtés du ton dogma- tique des Ecrivains modernes, &: de lahardieffe avec laquelle ils s'efforcent fans celfe de fapper pénétration , le fçavoir ou l'éloquence d'un particulier ^armi fes membres. Mémento dierum antiquorum , cogita generationes Jîngulas : intcrroga patrem tuum & annuri" tïabit tibi , majores tuas & dicent tibi. Voilà la feule règle d'union & de vérité établie & par la Loi révélée , & par la Loi de la raifon depuis le commencement. 28 Nouvelles Recherches ia morale Chrétienne , en attaquant les princi- pes fur lefquels elle eft pofée , pour vouloir leur refTembler , même en plaidant la caufe des vérités révélées. Rien que ce qui eft clairement démontré par l'analyfe , ou la fynthefe ne doit être préfenté au ledeur avec ce ton impofant^, qui convient à la vérité feule , mife dans la plus grande évidence autant que fa nature peut le comporter. Les objets de la foi , qui font myf- térieux dans leur origine , & ne peuvent pas être connus antérieurement , ou comme s'expriment les Philofophes à Priori , relTemblent en cela aux premiers principes de la Philofophie Neu- tonienne. Ils n'admettent d'autre genre de preu- ves , que celles qui fe tirent d'un nombre de faits certains , avec lefquels ils font nécefîaire- ment liés , & qui dépofent unanimement en leur faveur • or une analyfe de cette efpece bien en- chaînée eft auiîî puifTante pour nous convaincre pleinement en Aftronomie , ou en Religion » que la fynthefe dans la Géométrie , & fert par conféquent à établir avec certitude , ou des prin- cipes généraux en Philofophie , ou des articles de foi 5 auxquels il faut fe foumettre : ce n'eft que dans ce cas unique , que je conclurai dogma- tiquement 5 & lorfque je propoferai quelque hy- pothéfe, qui ne fera pas invinciblement prouvée fur la Nature & la Religion, '«p par des faits en afTez grand nombre pour l'é* riger en fyftême , je donnerai auffi à l'imagina- tion le moins qu'il fera pofTible , elle fera liée vifiblement avec la Phyfique par quelques faits univerfellemenc connus , & je laiiTerai toute difcuiîîon ultérieure à ceux qui s'occupent de ces objets. En attendant il fuffit , pour ôter l'ab- furdité apparente dont nos incrédules cher- chent inutilement à couvrir la révélation , que l'hypothéfe foit non- feulement très-pofïible , & très-philofophique , mais aufîi très - probable , en fe liant avec les connoifTances que nous avons déjà acquifes. Le grand défaut de nos Philofophes moder- nes , eft de vouloir traiter des chofes dont ils n'ont jamais fait une étude approfondie , ôc d'être plus peintres que Phyficiens , en ne pré- fentant que la furface extérieure des objets , & plus Poètes que Philofophes. Or les Poiftes par eux-mêmes n'ont jamais eu une croyance ferme fur aucun objet , & fi la Philofophie s'en mêle malheureufement , les erreurs deviennent en- core plus graves. Une morale féche &: courte qui n'eft autre chofe que le tronc de la Religion naturelle privé de prefque toutes fes branches, TEpicureifme , le Spinofifme , ou le Scepticifme, Eout eft égal pour eux \ en fait d'opinions renou- ^o Nouvelles Recherches: vellées & libres , celle du moment , conforme I quelque goût pafTager , devient bientôt l'opinioti favorite : c'eft l'idole du jour , qu ils ont grand foin d'orner de toutes fes grâces & de parer de fleurs pour plaire à la multitude. Otez - en le charme de la mefure &: de la rime , écartez l'en- thoufiafme , mettez leurs penfées en profe , tout le preftige s'évanouit & fuit comme un éclair ^ qui s'éteint & nous laifTe dans les ténèbres* Eripitur perfona , mamt res. Le mafque tembe , l'homme refte , Et le héros s'évanouit. Un Poëte pour fe conformer à fon génie ^ dont il eft le malheureux efclave , fe laifTe en-^ traîner par fon imagination , l'imagination aban- donnée fans retenue , reiTemble à un cheval fou- gueux fans frein 6c rempli de vigueur , qui fé jette avec fon cavalier dans des précipices. Un Poëte Philofophe eft prefque une chimère. Se^ faux ornemens font à craindre. Lepoifon ncfe bok pas dans des vafcs de. terre ; craigne^ les vafes £or ^ omis de purrerïes^ Nulla âconita bibuntur îiétilibus \ tune ilia time cura pocula fumes Gemmata. . c ^ - ^ « o » . . • • * Juv. Satm \ôh Les Ecrivains de cette efpece reffemblent au.^ fur la Nature & la Religion. 3 1 Sophiftes 5 qui ont tant fervi autrefois à avancer la corruption & la ruine des Athéniens vers la fin de leur République ; mais quoiqu aveuglés par la vanité & les acclamations de la multitu- de ils faflent un tort irréparable à la Religion , ils font des objets plutôt dignes de compa(îion que de colère j on peut les réprimer dans la So- ciété par le fimple mépris, & les traiter avec humanité dans la vue de les guérir j c'efl: la feule efpece d'intolérance qui foit permife à leur égard. C'eft donc à eux principalement que je m'a- dreflTerai dans les queftions fuivantes , en y com- prenant néanmoins tous ces Philofophes , qui , quoiqu'attachés aux vérités révélées , croyent , nonobftant cet attachement , que l'on doit , en raifonnant fur la nature , les féparer totalement des vérités Phyfiques , non- feulement comme des objets d'un ordre fupérieur , mais comme des chofes qui n'ont avec elles aucune forte de liaifon. Or rien , félon moi , n'eft moins Philo- fophique , malgré le préjugé du liécle , que de féparer Dieu de fon ouvrage , ou d'attribuer à un fyftême purement méchanique privé de fon Auteur , ( feul principe toujours a6tif & nécef- , faire de fa vie , de fon mouvement & de fon exiftence ) ce qui appartient à la caufe pre- mière , comn:îe à une fource qui ne peut tarir ^ ^2 Nouvelles Recherches fans que le fleuve qu'elle nourrit continuelle- ment 5 ne fe defféche & ne tarifle. Toute abf- tradion de cette efpece eft impie en quelque fa- çon 5 indigne d'un Philofophe , & mené à grands pas vers rAthéifme. I. On attribue un fort mauvais raifonnement, touchant l'exiftence de l'Univers dans la Lettre fur les aveugles à Vufage de ceux qui voient , au cé- lèbre Saunderfon, Il fuppofe qu'un Philofophe ne doit jamais rien croire que ce dont il peut avoir une idée dire6te ; & c'eft la manière de certaines gens de rejetter tout ce qui eft pour eux incompréhenfible , quoique phyfîquement démontré par une infinité de faits , qui font la feule bafe folide de nos connoiflances les plus certaines. Mais les aveugles nés , uniquement déterminés par l'affirmation unanime des té- moins oculaires , &: ce qui eft encore plus fort fans aucune connoiflance direâre , font aifez fa- ges pour croire l'exiftence de la lumière , exif- tence toute myftérieufe pour eux , & fes qua- lités 5 même contradidoires en apparence à leur façon de raifonner par le tad. Leur foi fur cet objet 5 femblable à celle du Chrétien & toutes leurs connoiffances , ne leur arrivent que par les oui-dire de mille témoins à qui ils fe foumet- cenc fans héûter. Le reproche de crédulité , fait i pac far la Nature & la Religion. 53 par certains beaux efprits de leur claflTe , fî par hafard. il s'en trouvoic parmi eux , n afFoibiiroic jamais cette foi naturelle &c raifonnable fur la réalité de cette fubflance inconcevable ; le dé- faut de la feule vue matérielle qui leur man- que j n'aveugle pas l'efpric , & Saiindcrfon écoit incapable d'imaginer une chimère de Fefpece de celle qu'on lui attribue. * G'eft.une pure invention * Je ne dois pas îailTêr échapper l'eccafion que me four- niflenc les aveugles nés de rapporter un phénomène afTez rare Se fort fingulier, c'eft une efpsce de vifîon moyen- ne très -remarquable. J'en connois deux exemples, un en Angleterre dans la perfonne d'un Marchand d-e drap , nommé Scot , demeurant à Marketrafen , petite ville de la Province de Lincoln -5 & un autre en ÈcoiTe d'une Dame de diftindion, connue du Chevalier Scuart, Auteur très-célebre Se très-verfé dans l'économie civile & po* litique. Je puis avec d'autant plus de confiance afTurer les Phyliciens de la réalité de ces deux faits, que je les siens , le dernier du Chevalier Scuart lui-même , & l'autre d'un témoin oculaire qui en a fait plufieurs fois des épreuves répétées. Ces deux perfonnes diftinguent parfai- tement bien, & les perfonnes & les objets j mais fans difcsrner & fans cônnoître aucune couleur en particulier ^ & quand ils font dans le cas d'en faire un choix , comme il arrive tous les jours au Marchand de drap , ils font conftamment obligés de fe fervir du miniftere de quel- qu'autre. Voilà des faits certains qui peuvent fe trouver fans doute d^ns d'autres pays, fî les Phyfîciens veulent ea - Pan. IL V ' G 34: Nouvelles Recherches dont on a cru devoir fe fervir pour en impofer aux fîmples par une autorité refpedable que Ton prétend puifer dans un iivre imaginaire qui n'a jamais exifté. La voici , je ia répète d'après mes nouvelles Obfervations microfcopiques , données en 1750, pag. 345 , 346-. L'argument en faveur de FAthéifine , attribué à. Saundcrfon , dans une prétendue vie de ce Phi- lo fophe 5 imprimée , dit-on , à Dublin , eft tiré d'une fuppofiîion , que la génération d'un nom- bre infini de formes par un mouvement perpé- tuel 5 qui date de toute éternité , doit contenir bc îaiirer derrière elle ia chaîne préfente des faire des recherches , & voici comment je crois devoir les expliquer, ce qui pourra fervir à faire comprendre leur pofTibilité. Toutes les couleurs , même les plus éclatan- tes , ne font que des ombres comparées à ia lumière avant qu'elle fe décompofe. Or on n'a qu'à concevoir que ces deux perfonnes , faute de la délicatefTe , 5c de la fenfibilité requife dans l'organe de la vue , ne voient les couleurs qu'en malfe , comme des ombres qui font plus ou moins noires. Les objets , par rapport à eux, feront comme les eftampes & les deffms à notre égard j ils les connoîtront fufRfamment pour les diftinguer par la figure , les con- tours & les dimenflons exaclement , comme nous con- îioilfons les perfonnes , & les cliofes delîînées ou gravées en noir Se en blanc avec toute la précifion poiTible , quoi- <|ue les couleurs foient parfaitement f^ppriiîiées. fur ta Nature & la Religion, ^^ ecres , parce que les formes infinies irréguliéres , périront faute d'une jade ordonnance , & que les finies régulières au contraire fe foutiendronc par leur équilibre ôc fe propageront. Examinons cette manière bizarre de raifonner , non dans les principes Métapliyfiques que nous avons établis fur les premiers élémens de la ma- tière d'après Leibnlt^ , * mais dans ceux même qu'un Athée clioifira fans doute par préférence , qui 5 partant d'après (qs fens du fenfible & du palpable , croit pouvoir faire tout ce qu'il vou- dra avec une fubftance atomique eiTenrielle- ment étendue , félon lui , & fans cefTe eiTentiel- lement divifible. Dans cette vue groiîiere , qui lui convient de toutes façons , je dis ^ ou que ce nombre infini de formes fut engendré dans une quantité infinie de matière en un tems fini , ou dans une quantité finie de matière dans un tems infini. Entre ces deux façons de concevoir la chofe 5 il n'y a pour lui aucun milieu , s'il veut que fa génération prérendue d'un nombre infini de form.es fini (Te par l'état préfent de rUnivers. Or une quantité infinie de matière efl une abfurdité , que nous fçavons ne pou- voir pas coexider en aucun tems donné , pour * Voyez mes nouvelles Découvertes microfcopiques. 3 6 Nouvelles Recherches répondre favorablement aux conféquences qu'il en tire : car une quantité infinie de matière eft commenfurable avec une efpace infini , & non- feulement la partie fyftématique dans cette fup- pofition 5 mais tout efpace feroit un plein uni- verfel , immobile , impénétrable & improduc- tif d'aucune nouvelle forme quelconque : i^- nivers «Se fes loix ne peuvent jam.ais fe produire fous cet état d'un repos néceffairement abfolu, & s'il le pouvoit , par Fimpoifible , il ne fubfifte- roit pas tel qu'il QÎt un inftant. Refte donc que ce nombre infini dé formes ait été engendré fur une quantité infinie de ma- tière dans une tems infini. Ce tems quoiqu'infini par une rétrogradation fur l'éternité , lorfqu'il eft ainfi appliqué à différentes révolutions dans une quantité finie de matière , eft effentiellement fucceiîif. Maintenant on peut démontrer , que commue toutes les parties de cette fuccellion in- finie font finies , il eft impoffible qu'il y ait un tem.s déterminé , où ce hafard prétendu puifle tirer la chaîne préfente des êtres d'un nombre infini de formes coexijîenus , parce qu'il n'y a aucun tems déterminé dans toute la fuccelîion , clans lequel un nombre infi.ni de formes puifîe erre engendré tout à la fois , &c coexifter fous une quantité finie de m.atiere. Ce tems infini fur la Nature & la Religion» 37 en diirarion fuccefîîve ne fervira donc de rien à notre ariiée , & fa quafttité infinie de madère en maife ell impoiîible. Mais ce n'eft pas encore tout ^ il ne fiiffir pas de tirer une ou deux formes de tems en tems , par quelques coups heureux , de tous ces infinis fuppofés 5 il faut une chaîne d'êtres dans une liaifon exadfce , accompagnée de mille relations qui confervent entr'elles la dernière jufteiTe. Si l'on pouvoir , pour en citer une de mille mil- lions , form.er la planctte de Jupiter , & la con- ferver enfuite en fureté dans ce prodigieux tour- billon de matière , jufquà ce que i^^ quatre Sa- tellites paruiTenc quelques millions de fiecles après ; mais non ; Jupiter ne fera pas ce qu'il eft privé un inftant de fes quatre Satellites ? ou (i l'on pouvoit produire un mâle &: le nourrir de fécon- des intentions , comme la chimère de Rahdais^ jufqu'à ce que la femelle fût formée , alors ce fyftême feroit un peu m^oins ridicule. De pareil- les idées ne valent peut -être pas une réfutation ; on voit bien que ceux qui raifcnnent ain(i , sil y en a qui le faffent férieufement , jettent de la poufliere contre le foieil , ^ qu'alors ils ima- ginent que perfonne ne peut le voir , parce qu'ils ont commencé par s'avcugler eux-mêmes. Je veux bien que ces grands Philofopbes ayent C iij 3$ Nouvelles Recherches leurs myfteres aufîi-bien que nous , & qu'ils foient entr'eux de la compofition la plus facile fur ce fujet 5 mais qu'ils ne s'expofenc pas d'une ma- nière fi louche 5 après avoir tourné en ridicule les myfteres de la foi , aux railleries améres d'un ennemi qu'ils afredenc fi fort de méprifer. Myftere pour myftere , j'aimerai mieux me fier à la puilTance de la Divinité , qui me dirige par la révélation fous laquelle je puis hardiment tran- cher tous ces nœuds - Gordiens fans exception , que de me plonger , pour les éviter , dans un abyme d'abfurdités , où la raifon fe perd fans retour : c'eft le moucheron arrogant à'Efopc , vainqueur du lion , qui s'enveloppe malheureu- fem.ent dans une toile d'araignée , & devient en- fuite 5 en punition de fa forte vanité , un objet de pitié & de dérifion. 1 1. Puifque nous avons ci-delTus touché , com- me en pafTant , à la foi naturelle des aveugles nés , fur l'exiftence m.yftérieufe de la lumière , & fur les qualités des couleurs , pour rendre le parallèle , qui fe trouve entr'eux & les fidèles qui fe foumetrent à la révélation^ plus fenfible , voici commuent j'imagine qu'un bel efprit de cet- te clalfe pourra raifonner fur ce fujet, à 4a fa- çon des nouveaux Philofophes , en s'adreiTant à i^s compagnons. ;? Mes amis ^ point de myile- fur la Nature & la Religion. 59 35 res iiicompréheniîbles , fi vous voulez avec moi M fuivre In raiion que Dieu nous a donnée , donc » le tact doit ècre le miniftre le plus fur , & le 3J plus fidèle. C'eft pour nous alTervir fous leur »* conduite , aux dépens de ceux qui veulent bien *' les payer , ou pour dominer fur nous qu'une y» multitude de gens ambitieux ou intérefTés pré- 33 tendent a l'avantage d'un cinquième fens plus '* raftiné , plus prompt & plus étendu , que le ** tad le plus fubcil : ne foyons plus déformais '3 leurs dupes j reprenons la liberté, avec laquelle 33 nous fommes nés« Quelle honte pour nous de 33 vivre ninfi fous leur tutelle dans une enfance 33 perpétuelle ? ou s'ils perfiftenc à vouloir loù- 33 jours nous tenir dans un état de dépendance , 33 qu'ils daignent nous faire comprendre en quoi '3 confifie leur fupériorité , & quelle efi: la na- 33 ture de leur prétendue faculté vifuelle. Croyez- 33 moi 5 notre crédulité fait toute Icurfcicnce : & ce 33 que l'on débite hardiment contre certains » Myfteres Sacrés , s'appliquera avec la mêm.e "o force 6c la même vérité à Fexiftence prétendue » de cette fubftance infenfible , qu'on appelle lu- X» miere , avec toutes fes qualités oppofées à no- ' 3> rre raifon. Des faits abfclument contraires à » l'ordre de la nature , & connus comme tels par » un tad fouvent plus fin que celai de nos pré- Ciy ^o Nouvelles' Recherches 30 tendus guides , ne peuvent jamais fe foutenk 33 par un nombre de témoins quelconques , félon »le fublime oracle de nos jours , le célèbre » ^*** , * quel que puifTe être le poids de leur 35 témoignage. Tout homme eft naturellement 35 menteur , mais dans le cas préient , c'efi: on s* horrible complot formé contre notre liberté j 33 par un nombre d'hommes , qui fe font fans 33 doute donné le mot , & s'entendent parfaite- 53 ment entr'eux , pour nous furprendre féparé- 33 ment par une chaîne de connoiifances corn- as muniquées de l'un à l'autre, C'eÛ: par ce moyen 33 que je comprends & que j'explique fans diffi- 33 culte 5 quand ils nous prédifent fur le charr^p 33 l'arrivée certaine de ce qui eft encore à une 3^ certaine diilance , long - tems avant qu'il foit 53 préfent , comment ils ne manquent jamais de 33 nous dire la vérité ^ & c'eft ainli précifement ^ * Voyez l'EiTai^de M. Hume contre les Miracles , ou cet Auteur, fans prétendre prouver que Dieu ne peut ou ne veut pas les opérer „ ce qui les laiiTe du côté de la poffibiiité au niveau de' tous les autres faits hiftoriques, cherche néanmoins à nous perfuaaer , par fa façon trom- peufe de raifonner , que 11 la Divinité fe détermine à les faire, on ne doit pas les croire, ni fc laifTer perfuader de leur réalité, raaigré imilk témoins qui les atreftereat lînanimement. fur la Nature & la Religion, 41 9> que nos joueurs de gobelets , en s'afifociant 3> fecrétemenc avec quelqu'un de la compagnie , î5 trompent les affiilans. Mais croire qu'ils le "» içachent par une faculté à nous inconnue , dont 35 ils prétendent être doués par la nature , qui les » aura traités avec une partialité a notre égard » incornpréhenfible , cela efl indigne de roue " homme qui penfe. Qeftionnez un peu ces pré- 30 tendus "clair -voyans, & vous jugerez vous- 35 mêmes à quel comble d'abfuLdité toute leur » prétendue fcience va fe réduire. Quoi 1 unbou- » let , qui , félon nos prétendus témoins oculai- »res 5 précède le fon lorfqu'il part de la bouche » du canon , demandera pour arriver du foleila jî la terre , en gardant toujours fa première vîtef- r> fe , l'efpace de vingt-cinq années , & un pré- X. tendu globule de lumière , dont des milliards « à leur aveu , même en nombre quarré , ne 55 peuvent produire le moindre poids feniible au jî taâ: 5 parcourt ce même efpace en fept minii- jî tes ? Quelles inepties î d'une abfurdité une fois 3î pofée pour principe , on en verra naître mille x> autres de la même efpece ; comment croire 3> fans cela qu'en pourfuivant toujours la m.ême 35 thèle , certains de leurs Philofophes ont me- :»î me eu la hardieiïe de foutenir , qu'il y avoit i-i dans l'Univers ^Qs étoiles fixes , comme ils iss 4 2 Nouvelles Recherches « appellent , ou certains globes lumineux d'un » volume au-deifus de tout ce que l'on conçoit ^ a* & placés à une diftance fi prodigieufe de la »' terre ^ que le premier rayon de lumière qu'ils 5? ont produit à leur création , ne pourra peut- -être pas avec fa grande vîteffe achever le voya- 3> ge 5 qu'il a entrepris il y a lix mille ans pour 35 le moins y avant la fin de ce monde , dont le 33 terme efi: encore inconnu ? Vous ne ferez cer- » tainement pas étonnés que àts menteurs de n profefîion , à force de répéter leurs menfon- M ges 3 les croyent à la fin eux-m.èmes fi forte- » ment , qu'ils paflent fans héfiter des fables aux => contradictions. Une boule de quatre pouces 33 de diamètre , dont la figure , comme vous l'a- » vez mille fois fenti , ne peut être connue par M le ta6t, que fuccefîîvement & d'un petit nombre »• de perfonnes , en la donnant de main en main » pendant un certain tems , cette même boule >j fufpendue en l'air , fera vue , félon nos pré- 3> tendus témoins oculaires, au même inftant par » dix mille , par cent mille , par un million de 33 fpedateurs , & chacun connoitra aufiî - tôt fa i> figure ronde , chacun verra en même-tems la w moitié de fa fphère , & perfonne de cette «mul- » titude ne verra exactement la même moitié. » Cette boak donc , elt réellement partagea fur la Nature & la Religion, 4j a oculairemenf en un million de moitiés , fans » être partagée réellement au ta6t , ni même j> aux yeux , finon idéalement , puifque chacun » voie la moitié lolidement complette , & ce- >j pendant chacun de ce million de témoins fou- 5> tient que fa viiion eft réelle. C'eft ici , mes îî amis , qu'il fliut abfolument revenir aux prin- 3> cipes de notre ami le célèbre H'^'^*\ & quand >3 un prétendu fait renverfe direâiement , non- »» feulement Tordre de la nature à nous connu " palpablement , mais aulîi les idées les plus >i nettes 5 en mcme-tems que renchérilfant fur 35 le merveilleux de l'Evangile , il fe trouve en ao pleine contradiction avec lui-même, nul ré- » moignage , quel que foit le nombre à^s té- s* moins , ne peut le rendre croyable. Le tact î3 eft quelque chofe qui nous perfuade forte- y> ment , mais la raifon , encore plus forte , eft » féal juge fouverain, au-deiTusde tout ce qu'on " peut nous dire de la part d'un million de men- » teurs femblables. 33 Leur manie ne connoîc aucunes bornes , & 3> le jour me manqueroit , li j'entreprenois de 3> vous raconter tous les phénomènes qu'ils at- 33 tribuent imprudemment à leur prétendue fa- 33 culte de voir. Je veux bien qu'ils ayent , fur w certaines chofes peut - être , le tadc plus ^n 44f Nouvelles Recherches j> que nous , & qu ils ^tn prévalent quelquefois 3> pour vous faire accroire mille impertinences. 3> Ces meubles qu'ils appellent des miroirs , qui w ne font rien , comme vous fçavez , qu'une 3' glace extrêmement polie , montrent , dit-on > 3>au{îi-tôt qu'on fe met devant leur furface , » la figure très-exaâ:e des fpeélateurs. Je ne leur » difputerai point ce fait ; c'eft une chofe qui » peut s'imaginer , & quoiqu'au ra6t il ne me »j paroiiTe rien de fenfible fur ce miroir , je con- » cois cependant , malgré la fineiïe & la déîi- »> cateffe de la peinture . relativement à celle de » leurs tableaux ordinaires , dont je connois 5> alTez bien la forme déterminée , qu'avec un » taét fait à cela , par de longues habitudes , ils « en peuvent peut-être fentir la figure repréfen- » tative 5 mais de croire , comme ils le débi- 5> tant 5 qu'après avoir brifé ce miroir en mille «morceaux, chaque fragment repréfente auffi- ?> tox. la figure humaine en entier ; ctit^ m^ême *> figure qui étoit feule un moment auparavant ^ y» eil: maintenant multipliée mille fois , & cepen- 5:» dant elle garde toute fon intégrité dans cha- w que morceau. Jufl& Dieu ! la tête me tourne ^ 33 comme dit l'éloquent Roujfcau , fur les dém'ons i9 qui entrent dans le corps des cochons. "* Ce. ^ Voyez fa troiiîeme Lettre , écrite de ia Montagne» fur la Nature & la Religion. 45* :ofont là , Mcffïeurs , Us fondemens de votre fou 3> La mienne en a de plusfûrs , ce me ftmhle : vive 3> le tad toujours certain , 6c la raifon qui ne peut nous tromper. Je reviens à mon fujet , & fans entrer plus avant fous la perfonne d'un aveugle né dans les phénomènes de la vifion j la communication de nos penfées par des lettres , la connoifTance dif- tinde des objets à de grandes diftances , les dif- férences que nous apperçevons entre des dif- tances & des diftances , quoique chaque objet renvoie à^s rayons , qui nous touchent les yeux par à^^ lignes droites , & mille autres phéno- mènes qui font des miracles pour ces aveugles^ je me perfuade qu'en voilà alTez pour nous con- vaincre que le parallèle entre la foi naturelle de cette clalTe d'hommes , & la foi furnaturelle , eft parfaitement juflie. Ce n'eft que par de pa- reilles parodies que l'on peut trancher fouvent la difpute contre les incrédules , fans aucune ré- plique de leur part. Qui ne connoît pas l'examen des Apologiftes de la Religion Chrétienne, attri- bué à feu M. Fnret , peut-être pour cacher le véritable Auteur ? * ôc qui ne voit pas en même- ■^ Un homme de Lettres m'a aiTiiré polîtivemeiit que cet Ouvrage n'cft pas de M. Frer^t, ^6 nouvelles Recherches rems que ce tilTu de Sophifmes dont ce livre impie eft rempli , s'appliquera avec la plus gran- de facilité, argument pour argument, au fyftê- me abfurde du P. Hardouin ? Il réuiTira toutes fois 5 aidé par nos pafïions, à faire des incrédu- les y mais le parodifle réufîira-t-il également à nous fiire accroire que Virgile , Horace & les autres livres claffiques ont été faits par des Moi- nes du neuvième fiecle ? Pourra- 1- on même ga- gner un feul Profélite ? certainem.ent , non ; un intérêt très- mal entendu ne nous aveugle pas fur un article qui ne flatte aucune de nos paffions. ^ Enfin j'exhorte très -fort les défenfeurs de la Re- ligion à fe fervir fouvent de ces mêmes armes , en les aifurant qu il n'y a aucune efpece d'écrit quelconque fait contre elle , dont on ne puiffe pas former la parodie parfaite , en partant de ce que l'adverfaire eO; forcé d'admettre , & très- fouvent en fe fervant de ^qs propres paroles. ^ Quiconque eft au fait àç. la façon jufte oC concîfe àc raifonner dont M. Freret fe fcrt dans les DifTertations où il réfute la prétendue antiquité des Chinois , 5c fait quadrer leur Hiftoire avec la Chronologie de Moyfe^ feloa les Septante, fera étonne qu'on ofe lui attribuer un fatras de fophifmes, tels qu'on en trouve , à la honte de la rai- fon humaine , dans l'examen des Apologiilies. Voyez les Mémoires de l'Académie , dixième volume & fui vans. fur la Nature & la Religion» 4*^ m. Toute intelligence humaine eft bornée ; fe trouve- 1- il un Sceptique fur la terre, qui ofe me contefter ce principe ? Or l'intelligence n'eft ainfi limitée que parce qu'il y a des vé- rités réelles , qui font au-delTus de fa portée 9 donc il y a démonftrativement des vérités réel- les 5 qui font pour nous incompréhenfibles. Que font des hommes fuperbes ? pour éviter cette conféquence , à laquelle ce que nous éprouvons cous les jours malgré nous , dans c-e monde viii- ble , nous mène nécefTairement , & pour éviter la difficulté de la création , Ç\ on les interroge , par exemple , fur la caufe première , ils fuppo- fent que le monde exifte par une efpece de né- cedité 5 & qu'il a toujours exifté par un enchaî- nement de caufes & d'effets non interrompu de toute éternité. Que gagne- 1 -on par cette éva- lion puérile ? au lieu d'une vérité myftérieufe , ils embrafTent une abfurdité , & fe repaiffent de contradictions. Dans une chaîne infinie , par une fucceffion non interrompue de toute éter- nité , voici ce que je crois être clair 6c démontré. Tous les êtres , révolutions , ou effets quelcon- ques qui ont jamais exifté , ont exiflé chacun réellement dans un tems que l'on peut aiïigner y ils ont eu chacun leur commencement 6c leur fin : or il^eft en même-tems très-clair , par la ^•S Nouvelles Recherches nature d'une fucceffion infinie , que les plus fé- cules dans la chaîne n'ont pour eux en propre aucun tems d'exidence pofiible , parce qu'il eft évident par l'efTence même de l'hypothéfe, qu'il y en a de (î reculés , que ni aucun tems poffible ^ ni aucun nombre fini , ni aucun calcul limité ne peuvent les atteindre : & de plus , fi chacun en détail a eu un commencement fans exception , ce que l'hypothéfe énonce , la chaîne n'eft pas infinie , fuivant la même hypothéfe : donc y Ôc fans entrer dans la queftion , fi une telle chaîne renferme en elle la poffibiiité d'un nom.bre infini ^ictuel^ que tous les Philofophes regardent com- me une âbfurdité manifeile ^ * cette hypotéfe au premier afpedl , porte avec elle une contra- didion aufii vifible que celle d'un quarré rond , dont rimpoffibiiité nous frappe , mcme en l'é- nonçant , par des idées contradidtoires. IV. L'éternité de la matière eft une opinion folle 5 plus contraire au bon fens , que les rêves d'un malade. Si on la fuppofe avec Lcibn'it:^ , & * Voyez la Démonftration mathématique contre Té- ternité de la matière , par le R. P, Gerdil , dans le recueil des Difiertations , &c. à Paris l'jéQy chez C haubert ^ oii cet excellent Métaphyiicien démontre qu'une telle chaîne ne peut avoir exifté fans renfermer en elle la polTibilité d'un nombre infini actuel. la fur la Nature & la Religion; 4^' la raifon compofée de parties iîmples , dont les adions & les réadions produifent toutes les re- lations qui font les objets de notre ame , & tous les phénomènes phydques , il faut dire que cha- que partie (impie , dont l'exiftence eft abfolu- ment indépendante de celle de tout autre , eft non-feulement immortelle , mais éternelle com- me la Divinité même. Or dans la clafTe des êtres fimples 5 l'ame humaine doit trouver fa place , quoiqu'elle foit d'un ordre fupérieur de plus élevé dans l'échelle , par fa faculté intelleduelle , que les parties fim.ples , principes de la matière , donc les qualités effentielles à la conftitution d'un compofé ne renferment ni raifon, ni fentimenr. Il faudra donc par une convenance , qui fuie nécefTairement de la nature des chofes , lî cha- que être iimple > conftitutif par combinaifon de la matière, eft éternel , que l'ame humaine , ôc même a plus jufte titre , au(ïi-bien que toutes les autres intelligences finies qui compofent en montant par dégrés l'échelle aduelle de perfec- tibilité intellectuelle , foient pareillement éter- nelles. C'eft un axiome très-ancien , ex impo/- Jibili fequitur quïdlïbu : l'abfurdité une fois ad- mife comme principe , il en naîtra des monf- tres qui s'entre-détruironc , comme les foldats àQ Cadmus , nés des dents du ferpent j toutes Fan. II. D jo Nouvelles Recherches ces intelligences finies fe mettront en quelque façon au niveau de la Divinité , dont on ne s'avifera guère de nier l'exiftence , après avoir admis la polîibilké d'un efprit éternel j c'eft les déifier à Tiniiration des Anciens ; & comme la crédulité qui dérive d'une imagination extra- vagante , ne connoîc aucunes bornes , qui nous empêchera enfuite de réalifer , par un délire toujours conféquent , la métempficofe de P7- thagorc^ fes rêveries fur le perfonnage £ Euphorbe^ qu'il s'attribuoit au fiege de Troye , fon privi- lège prétendu de fe fouvenir toujours de chaque état de préexiftence , les eaux d'oubli , ou le fleuve de Lethé , & mille autres menfonges ri- dicules , avec tout l'attirail fabuleux qui corn- pofoit autrefois l'enfer Poctique. Refte donc pour donner quelque couleur à l'hypothéfe d'une matière éternelle , de la fup- pofer avec les Matérialiftes folidement éten- due en elle-même par eflTence , & divifîble à l'infini. Or commuent concevoir dans cette fup- poficion l'éternité de la matière , fans lui attri- buer en même-tems une immenfité illimitée, ftérile , éternellement immobile , éternellement improdudive des phénomènes , dont nous fom- mes témoins ? Pour peu qu'on lui donne Aqs limites aulTi reculées que l'on voudra , le lieu fini fur la Nature & ta Religion^ 5" i qu'elle occupera , ne fera jamais qu'une partie infinitéfimale de l'immenfité. Elle eft donc par fa nature eirentiellement limitée , elle eft fixée dans un lieu fini & déterminé , qui n'eft qu'une partie infinitéfîmale de l'immenfité pour laquelle elle a une parfaite indifférence ; elle eft affujet- tie aux loix du mouvement , & du repos , à cel- les de l'inertie &: de la réfiftence , aux forces cen- trales & projediles. Toutes ces loix fi précifes , par lefquelles elle eft conduite infailli blem.ent , ces limites exacbes , ces bornes étroites , ces for- ces déterminées , fuppofent de route néceffité un Créateur , un Légiflateur , un Maître Souve- rain , qui l'a précédée , qui l'a formée , qui la dirige , qui la limite , & qui eft totalement dif- tingué de la mafte dé l'Univers : enfin l'éternité eft un attribut inféparable de l'immenfîté qui ne peut convenir à la matière réduite en fyftême , & par conféquent inapplicable à la matière li- mitée par effence. V. Les Philofophes Indiens , comme les Poètes qui jadis fe fervoient , en guife de Cariatides , du géant Atlas , donnent pour bafe à la terre le corps d'un éléphant j m.ais ne font-ils pas en cela moins fubtils que nos maîtres d'Europe ? & ne devoienr- ils pas imaginer une chaîne d'éléphans à l'infini ? Interrogés par un bel efprit de nos climats , fur ^2 Nouvelles Recherches quoi leur éléphant appuie fes pieds , qu avoient- ils befoin de fubdituer fi mal - adroitement la pauvre tortue ? On évite les queftions imporru-- nés de la part d'un obftiné qui revient malgré nous à la charge , en les efquivant , comme font ordinairement nos Sages modernes \ une chaî- ne établie à l'infini , fupplée admirablement bien aux myfteres d'une religion qui embarafTe èc que l'on veut rejetter. Dans un nombre infini d'éléphans pofés de fuite , il n'y a point de dernier , & dès lors point de difficulté j nul ne peut manquer d'être foutenu , & tout le fiyftê- me fe maintient au parfait par fes propres for- ces. Les voilà donc nos beaux efprits bien à leur aife par ce moyen , & les Philofophes ennemis des obfcurités religieufes, au lieu des myfteres qu'ils haifTent , fe repaîtront tranquillement de leurs propres rêveries. Un Quaker Anglois avoit- il fi grand tort de répondre à un petit maître de cette efpece , dans un des caffés de Lon- dres ? Mon ami ^ Ji tu ne veux admettre pour vérité que ce que tu peux comprendre , ton fymbole fera bien court, VL Un exemple tout-à-fait femblable au précé- dent^ & peut-être encore plus fenfible, que l'on peut préfenter aux Athées modernes qui ne veu- lent pas de caufe première pour raifon de leur fur la Nature & la Religion. y j' propre exiftence , fera une chaîne immenfe d'a- veugles 5 qui marchent roûjours en fe tenant par la main fans jamais fe détourner un inftant du droit chemin. Leur fuppoferont-ils à la tête un conducteur clair- voyant ou non , pour expliquer cet étrange phénomène ? voilà la queftion : ou le défaut de la vue dans toute la chaîne peut-il être fuppléé par l'aveuglement multiplié à l'infini? C'eft ainfi que nos Philafophes évitent adroite- ment les myileres. Uoftem dum fugeret fe Fannius ipfe peremit , Die mïhi y quis furor efi , ne moriare mori ? VII. La création pofée comme une vérité né- ceflTaire & d'une obfcurité impénétrable , telle que'l'attradtion Neutonienne confiderée dans fa caufe 5 ou comme les Philofophes s'énoncent à Priori, mais claire & très-évidente par fes con- féquences , fe trouve précifément dans le même point de vue , quant à nous , que tous les au- tres myfteres de la Religion révélée , & même que le Neutonianifme qui a été fî viétorieu- fement démontré par les Phénomènes. Toutes nos connoiiïances quelconques , même les plus fcientifiques , dépendent d'un nombre de faits , qui fe prêtent un jour mutuel , réduits à des principes généraux , auxquels tout homme fenfé Diij 5^4 Nouvelles Recherches s'arrête , & celui , qui fous prétexte de vouloir pénétrer au - delà , ou de traiter les fciences , comme nos incrédules traitent la Religion , au lieu d'augmenter Tes connoifTances , en fappe îés fondemens , fe perd dans les fouterreins , & demeure dans les ténèbres du Scepticifme. Examinons maintenant la Cofmogonie de Moyfi par les feuls principes de la Phyfique , &: voyons fî on peut la regarder comme contraire en aucune façon , a la bonne Philofophie : elle nous préfente au premier abord la création de la xnatiere , fans nous dire expreffément fi la dif- po(ition actuelle de l'Univers à fuivi immédiate- ment cette première action de Dieu , par laquelle la Divinité efl fortie en quelque façon hors d'El- le-même , ou iî la matière a fubi antérieurement Se avant l'état préfent des chofes , plufieurs au- tres révolutions. Six mille ans , foixante mille ans, foixante millions ou milliards , cela eft tout un devant Dieu '^ , & tout nombre fini quelconque n eft qu'une partie infinitéfimale de l'éternité ; il fufïit que de toute néceffité la matière ait eu un commencement , & ce commencement , fî l'on ne confulte que la fimple raifon , peut fe dater avec la même juftelfe du terme commu- * Mille antii anîc oculos e]as tan^uam dîes htficrna^ far la Nature & la Religion, 5*jf nément admis par les Théologiens cle fix ou fept mille ans environ , que fi on le recule à mille milliards , celui de fept mille doit avoir nécef- fairement exifté , or qui de nos Philofophes , avec tous leurs vains calculs , peut me dire que nous n'y fommes pas compris , ou m'en alîigner avec fondement quelqu'autre beaucoup plus re- culé ? C'ell au premier afpect un problême in- xléterminable , parce qu'il admet un nombre , indéfini de réponfes , & une queftion d'ailleurs très-inutile , qui ne peut fe réfoudre ni par la révélation , parce que Dieu de fon côté n'a pas jugé à propos de nous éclaircir définitivement fur une chofe purement arbitraire , ni par la raifon qui ne peut procéder que fur ce qu'elle voit. Or l'état préfént de l'univers ne peut ja- mais nous élever au-delà du moment de fa pro- pre exiftence , ôc les traces , ou (i l'on veut, les ravages que l'on croit appercevoir fur la terre , faits par l'élément du feu antérieurement à ceux de l'eau , peuvent s'expliquer de mille façons différentes. Au commznumznt ^ dit Moyfe, Dieu a créé U cul & la une. Ce commencement donc a exifté dans fon tems. Mais quand ? le terme ^ comme l'on voit , eft inconnu. Or la terre étoit fans ornement & toute nue , & les ténèbres étoïent répandues fur la face de Hahime^^ & Htfprït de Dkit Div ^^6 Nouvelles Recherches étoit porté fur les eaux. Gen. ch. i . Ces deux textes renferment clairement deux idées très-diilinc- tes 5 celle de la création primitive de la matière dont l'univers eft compofé , comprife fous ces deux mots , le ciel & la terre ; & celle de ce globe terreftre que nous habitons , comme une por- tion de cette même matière encore informe , ou parce que fa difpofition préfente eft la pre- mière qu'elle ait reçue , ou parce qu'elle fortoit alors de quelque révolution qui l'avoit totale- ment bouleverfée avec le fyftême entier , & confondu tous les élémens enfemble. VIII. La matière première , dont le ciel & îa terre font compofés dans l'état où nous \ts voyons , contenoit en elle-même les principes Tiéceîïaires pour produire la forme préfente des chofes. C'eft pourquoi elle a été repréfentée par les Anciens fous Femblême d'un œuf, image qui quadre très- bien avec la Cofmogonie de Moyfe, Car de même qu'il faut à l'œuf le concours de certaines caufes extérieures pour le faire éclx)re 3 il fallut auffi que la Divinité ( feule caufe au- dehors diftinguée de l'univers & fuffifante ) ap- pliquât fa puiiïance pour la faire développer fous la forme préfente ; de même que les principes végétatifs , qui conftituent l'œuf, fe déployent infenfiblement dans un ordre exad ^ & en par- far la Nature & la Religion. yy courant les difFérens degrés de perfedibiliré , dont il efi: fufceptible , il change facceiîîvement fa forme jufqu à ce qu'il arrive à fon terme de perfection , qui efi: la vie animale ; ainfi au com- mencement la maffe de matière primitive fe développe par dégrés pour atteindre dans un or- dre relatif & gradué fon dernier degré de per- feélibilité. C'eft ce qui efi: figuré fous l'image de l'efprit de Dieu porté fur les eaux , où l'amas àcs quatre élémens amalgamés enfemble dans une feule mafTe fluide ; il efi: repréfenté d'une manière digne de fa Toute-puififance , & con- forme à la difpofition de la nature dans une échelle exadement graduée, donnant Tes ordres, en raifon àts volontés fpéciales difi:inguées par des intervalles marqués extérieurement , en mê- me-tems qu'il agit par une efficacité intérieure qui pénétre la mafife entière fubfi:antiellement , avec une force toujours égale , fe répand fans s'afFoiblir jufqu aux extrémités , & difpofe les parties avec une harmonie fi jufi:e , que le tout ne fait qu'un feul fyfiiême avec un accord admi- rable. Attingit à fine ad finem fortiur & dïfponit omnia fuavïur . Sap. cap. 8. IX. Pludeurs Philofophes trompés par ce que nous voyons dans la difpolition préfente à^s cou- ches dont la terre efi: compofée , & par une 58 Nouvelles Recherches recherche fuivie fur les difFérens corps qu'elle contient , croyent devoir donner à la terre une antiquité plus reculée que celle que l'on affign® communément avec les Théologiens. Cela fe peut faire de deux façons fans blefler la Reli- gion & fans aller contre laCofmogonie de Moyfi ^ pourvu que la raifon, appuyée par l'expérience , l'exige. La Chronologie établie par Moyfi n'eft en aucune façon celle de la terre , ni celle de notre fyilême , encore moins celle de l'univers entier , qui peut , par des fyftêmes innombrables &: fuccelîifs , percer fort avant dans l'éternité j elle eft , pour parler plus rigoureufement , la Chronologie du feul genre humain , exprimée uniquement par des générations qui fe fuccé- dent 5 & calculée fur leur durée. Qui dira voici vingt ans que j'ai des abeilles dans mon jardin , ne dit pas néceflfairement que le jardin a été formé dans le tems , ou vers le tems qu'il a jugé à propos d'y placer fes ruches. Les deux moyens àonc d'étendre la Chronologie de la terre au- delà du terme ordinaire , adopté par les Théo- logiens fans blefifer la Religion , font premiè- rement ^ de fuppofer que la terre décrite par Moyfi comme informe & ténébreufe , fortoit alors d'une révolution qui l'avoit mife en ruines ^ en amalgamant enfembie les quatre élémens^ ce fur la Nature & la Religionl J9 qui pouvoir avoir été fait par un bouleverfe- ment univerfel qui s'érendoic par-tout le fyftè- me , ou amplement par un changement qui n'afFedoit que la terre feule avec fa planette. Que les Philofophes ne s'effrayent pas d'une pa- reille fuppofition , comme (i la ruine de la terre emportoit nécelfairemenc celle du fyftême en- tier. En réfiéchilTant qu'elle n'eil que la mille millième partie du foleil & la huit centième partie de Jupiter, ils fçauront auiïi-rôt que fou anéantiffement même ne déran^eroit Das {Qn^x- blement aucune autre planette principale , 8c encore bien moins le foleil *. L'aélion de toutes les planettes enfem.ble ne le déplace guère du milieu du fyfteme qui eft très-peu éloigné de fon centre, & l'approximation au centre du fyf- tême total , augmentée d'une mille millième partie par l'anéantiffement de la terre dont on * M. Pope après fon maître Bolingbroke j qui , fans être ni Philofophe , ni Calculateur , n'écoit qu'un beau- difeur, nefaifoit, dans Ces raifonnemens fur réchelle de la nature , aucune différence entre un grain de fable & une montagne. Il croyoit que le moindre vuide dans cette échelle devoit jetter en confufîon tout le fyftême. Mais l'anéantilTement d'un grain de fable , d'une montagne fur la terre , d'une efpece d'animaux ou de plantes , ou même d'une planette , ne peut aifeder le tou: que fort légè- rement & fans aucune conféquence. 6o Nouvelles Recherches fouftraït la force attradive 5 devient comme zéro en fait d'un changemeiiE fenfible aux yeux d'un Calculateur, Le fécond moyen de reculer l'antiquité de la terre , fans forcer le texte , peut fe trouver dans la prolongation des fix périodes que rAuteur facré déiîgne par le mot de jours , nous avons déjà parlé de ce moyen dans la Lettre à M. de Buffon , & nous ajouterons ci-après différens palTages de FEcriîore Sainte , où le mot jour , le même en liébreu dans tous ces pafTages de TEcriture Sainte que dans le premier chapitre de la Généfe qui traite de la Cofmogonie de Moyfe , eft em- ployé évidemment pour fignifier des périodes de différentes durées , jufqu'à comprendre plu- Heurs années. Il s'agit feulement de fcavoir fi la Phyfique , ou la nature , demande que ce mot exprime de même un période de plufîeurs an- nées , quand il s'agit de la Cofmogonie ^ comme dans les autres paffages. C'eft ce que j'examinerai avec attention ci- après dans le détail des motifs cm m'autorifenr à rejetter comme de vaines hy- pothéfes 3 00 comme de purs foupçons fans fon- dement 5 ces deux fuppoiitions , quand on les employé pour reculer fort loin , au-delà de la création du genre humain , l'antiquité trop exa- gérée de k terre. Les jours de Moyfi font pro- fur la Nature & la Religioru 6i bablement des périodes dont chacun s'étend au- delà de vingt-quatre heures j mais on n'a aucu- nes preuves qu'ils doivent s'étendre a des milliers d'années. X. Voici ce que je penfe par une indudioa îrès-conféquente a Thiftoire de Moyfc , qui fera en même-tems fi conforme à la Phyiique de notre fyftême que les Aftronomes & les Phyiiciens ng pourront jamiais prouver le contraire par les con- noiiTances que nous avons du Ciel & de la terre jufqu'à préfent. Je commence par remarquer ^ & je défire qu'on l'ait toujours préfent à la mé- moire 5 que Moyfe , en nous faifant le tableau de la création , ne place fur le devant , d'une ma- nière détaillée & très - diftinde , que la par- tie de notre fyfteme folaire & les feuls objers qui peuvent nous regarder diredement ; les antres parties du fyftême , dont le détail ne nous el: pas néceflaire , ni dans le fens phyfîque ni dans ie fens moral , font placées dans le lointain du Tableau , & peintes prefque en mafTe par des traits jettes négligemment & comme au hafard. Les objets principaux qui nous regardent de près^ font la terre avec toutes fes produdions dans ua très-grand détail^ un peu plus loin font les deux eîémens de l'air & du feu, ou de la matière élec- trique, que l'on peut exprimer encore arecle céie- 62 Nouvelles Recherches bre Newton, i^2lx le moi Ether-^ viennent enfuira les deux grandes lumières , comme Moyfc les appelle , la lune &: le foleil , & tout -à- fait au fond du tableau dans le lointain & comme en maffe , les étoiles fixes toutes enfem^ble avec les cinq grandes planettes , qui fe confondent avec elles aux yeux de tous les fpedtateurs ordinaires , ou les hommes en général. En effet Moyfi écrit pour tout le genre humain , Se non pas pour les Agronomes ou les Philofophes en particulier , qui ne font qu'une portion très-petite de l'Uni- vers. Il diftingue néanmoins très-expreffément , & c'efl une chofe bien digne de remarque, l'élé- ment de la lumière du corps du foleil , en déve- loppant les quatre grands principes dans un or- dre philofophique félon leurs différens dégrés d'exaltation. La lumière , qui eft la plus exal- tée des fubftances matérielles , paroît à l'aurore du premier période , &: le foleil ne commence à agir fur la terre qu'aux premiers inftans du quatrième. En cela l'Auteur Sacré confirme l'o- pinion de plufieurs Philofophes , qui ne regar-= dent pas la lumière , avec le Chevalier Newton , comme une émanation immédiate des parties détachées du foleil , mais qui la diftinguent ^ com- me les cloches , ou tout autre corps fonore , font diftingués de l'élément de l'air : dans cette vue fur la Nature ^ la Religion, 6^ îe foleil n'agit fur la terre , qu'au moment où il doit agir immédiatement après la fin du troi- fieme période , quand la terre par fa propre chaleur a déjà fait paroître les végétaux , & pré- cifément au commencement du quatrième , qui fe touchent. Il n'y a rien dans tout cela qui ne foit abfolument conforme à la chaîne phyfique. XL Cela pofé préalablement , j'ofe avancer comme une hypothéfe affez probable , & nul- lement contraire à l'Ecriture Sainte , que Dieu en préparant la terre principalement pour l'ha- bitation du genre humain , dont il avoir d'avan- ce créé la matière , a créé de même la matière néceifaire pour tout le refte de notre fyftême folaire , & l'a difpofée d'une manière fembla- ble 5 quoique Moyfc , qui ne parle qu'aux hom- mes , fe borne principalement à ce qui regarde la terre diredement j le refte du tableau eft , fous -entendu ou vu, comme je l'ai déjà dit, dans le lointain. La raifon en eft fimple , c'eft que notre terre n'eft qu'une très-petite portiv:i du total 5 & fe trouve , quant à fes fondions , néceiTairement liée avec le fyftème entier. Cette raifon ne s'applique pas en même- tems à la créa- tion , & à la difpofition néceffaire des autres par- ties de l'Univers j car non - feulement en regar- dant avec les Philofophes les étoiles fixes com- 6^ Nouvelles Recherches me autant de foleiis , dont chacun eft le centre d'un monde à part , il n'ell: pas néceffaire qu'el- les ayent été créées en même tems que notre i-^i-^ tème 5 avec lequel elles n'ont , non plus qu'en- tre elles-mêmes , aucune liaifon phyfîque ^ mais il eft aiTez probable , par ce que l'on peut déduire de l'Ecriture Sainte indiredement, qu'elles per- cent, par leur antiquité, bien avant dans l'éter- nité , & qu'elles ont exifté long- tems, même avant notre terre & notre foleil. Parmi des fyf- têmes , dont chacun fait un tout à part , il fuf- iïi à des efprits intellectuels que leur liaifon foie feulement morale quant à l'ordre général &: quant à Féchelle totale de perfedibilité qui monte vers le Créateur, s'approchant toujours de l'infini , & toujours infiniment éloignée \ parce que la fucceilion , pourvu qu'elle fe faiïe dans Tordre d'un plan préétabli , ne fait aucun tore à leur liaifon entre eux : l'Écriture même fem-- ble reculer leur antiquité au-delà du terme de notre fyftême , quand elle fait parler ainfi la Divinité à Job. Ubï aras , quando pombam furi" damenta wrx. .... cum me laudannt fimul ajîra matutina ? chap. 38. v. 4 & 7. Ou étiez- vous ^ lorfque je pofois \^s fondemens de la terre îorfque \qs aftres du matin me louoient tous en- femble ? car l'épithéte matutina ou du matin ^ appliquée fur la Nature & la Religion. 6$ appliquée aux étoiles , exprime ici & fouvenc ailleurs, une priorité d'exiftence, comme nous le prouverons ci-après ^ & quoiqu'en difent les Com- mentateurs 5 en détournant le texte à un fens moral & métaphorique , il eft afTez probable que le mot i étoiles, doit être pris lirtérallement^ com- me lorfque le Pfalmifte dit, Laudau eum omnes JidlcB & lumen ; laudau eum cœll cœlorum, Pf. 148, Quant à Moyfc , après avoir peint avec la plus grande exadtitude la Cofmogonie , pièce par pièce 5 pour tout ce qui nous regarde directe- ment , & après avoir dit que toutes les diffé- rentes parties ont été faites fucceffivement en conféquence d'une volonté fpéciale de Dieu pour chaque partie , loin d'afErmer la chofe touchant les étoiles , il ajoute fimplement : & il créa les étoiles, y. i^. Cela fembîe dire afTez clairemenc quelles préexiftoient déjà crées antérieurement, pour la plus grande partie , fi nous en excep- tons les cinq grandes planetles , Saturne , & Ju- piter avec leurs Satellites , Mars , Vénus , &: Mer- cure 5 qui ne font que fous- entendues ^ comme des chofes . étrangères à la plupart du genre hu- maij.1 , quoique liées aflronomiquement avec no- tre fyftème , & formées par conféquent en me-. me - tems , à-peu-près , que la terre. . XII. Or il tous ces différens mondes ont été Part. IL E €^ Nouvelles Recherches faits &c diftribués fucceiîivement , chacun dans fou période , comme les différentes parties de notre fyftême folaire , ôc comme celles de notre globe terreftre en particulier, fi cette diftribution & cette difpoluion fucceflives defcendent par une échelle toujours graduée , & telle que nous la voyons dans la petite portion de la nature qui tombe fous nos fens 5 fi le nombre des mondes , quoique fini ^ efl néanmoins immenfe , Ji tu peux compter les étoiles du Ciel 3 dît Dieu à Abraham ; Ç\ pour les créer & pour les diilribuer enluite , il faut de même un nombre proportionnel de périodes , qui percent bien avant dans l'éternité ; (i le mot dies ou jour, quand il s'agit de la création de quelque mon- de dans le langage de l'Ecriture Sainte , doit s'entendre d'un période de tems indéfini pour nous & inconnu \ & îi le nom d\intiquus dierum^ ou d'ancien des jours attribué a la Divinité, veut dire celui qui a exifté avant toutes les chofes créées èc de toute éternité , dont ces périodes fi nombreux ne font encore que des parties intl- nitefimales , de fiiçon qu'au lieu de V ancien des jours , on peut fubflituer celui qui eft avant tous ces périodes proportionnels en nombre aux mille milliards de mondes qui exifienc adbueilement , alors on recule l'antiquité de la création prife dans toute fon kieviàsx^ ^ d'une manière in- fur la Nature & la Religion. 6j commenfurable pour nous , & notre fyftême qui nous parole fi confidérable ôc Ci étonnant , n'eft que la produdion la moins parfaire, la plus nouvelle , 8c le dernier de tous les ouvrages divins. XI î î. Expofons maintenant tous les différens textes tirés de l'Ecriture Sainte , dans lefquels le mot dies, on Jour , eft employé pour fignifier un période , afin que l'on voie clairement que je ne veux rien hafarder dans mes aifercions , m profiter de lobfcurité de certaines exprefîions pour établir mon opinion. Dans tout livre Sacré , ou même profane, quand il s'agit de preuves, dont toute la force dépend de leur autorité , on n'admet d'autre interprétation que celle qui fe trouve clairement prouvée par pluficurs paca- ges tirés de ce même livre. Je commence par cette partie même de la Genèfe qui traite im- médiatement de la Cofmogonie , de j'invite à faire de nouveau la remarque que j'ai déjà faite , dans une lettre d M. de Biifori , c'eft-â-dire que Moyfe fe fert des termes madn ,Joir 8c jour avant la produdlion , ou plutôt avant l'action du fo- ieilfur cette fubdance élaftique , ethérée , qui remplit tout le fyftême , pour produire \qs vi- brations lumineufes , enfin avant le mouvement journalier de la terre , qui fait la mefure d'un Eli 6B Nouvelles Recherches Jour naturel de 2,4 heures. De cette feule re- marque 5 on forme aulTi-tot un préjugé légitime contre l'interprétation ordinaire de ce mot jour , que l'on veut reftreindre à la mefure d'un jour naturel même avant fon exiftence ; & comment peut -on entendre ces paroles matin de foir dzns ce même fens , Ci la terre alors ne tournoit pas fur {on axe , Se fî elle n'étoit pas encore éclai- rée fuccelîîvement fur fes différens hémifphéres par l'action du foleil ? matin Ôc folr donc , dans le langage de l'Ecriture Sainte , ne peuvent Signi- fier autre chofe que le commencement & la Cin d'un période ou amplement avant de après , com- me dans le 24^ chap. de la Genèfe, v* 17. Ben- jamin eji un loup 5 k matin il ravira fa, proie ^ & kfoir il partagera fes dépouilles. Ce texte e(l tra- duit littéralem.ent de l'Hébreu , qui diifére un peu de la Vulgate ^ & 5. Augufin lui-même ex- plique les deux mots matin Scfoir , par avant &c après. Voici une fuite de textes , tirés prefque de chaque livre de l'Ecriture Sainte , où le mot dies eft pris pour un période de tems , qui ne peut pas s'entendre d'un jour naturel de 24 heures. XIV. Gen. Chap. 2. v. 4. Mojfe fait une ré- capitulation de toute la Cofmogonie , en rédui- fant les iix jours ou périodes à un feul qu'il ex- prime par le mot dies o'ajour, Ifisfunt gênera- fur la Nature & la Religion. 6^ ilones cœli & urrcz , quando creata funt ^ in die qiio fecit Dominus Dms cœlum & terram & omm virgul- tum agrl , Sec, Telle a été l'origine du Ciel &: de la terre , & c'eft ainfî qu'ils furent faits au jour que le Seigneur les créa ^ & toutes les plan- tes àcs champs , &c. G en. Chap, ^i. v. 3. Deo qui exaudivit me in die trihulationis & focius futt itincris mei, A Dieu qui m'a exaucé dans le jout de ma difgrace, & qui m'a conduit dans mon voyage. Exod, Chap, 6, v, 2^, IJîe ejl Moyfis & Aaron in die, quâ Locutus ejl Dominus ad Moyfeji in terra, jEgypti, C'eft au jour auquel Dieu a parlé à Moyfe & à Aaron dans la terre d'Egypte : Or ce jour renferme clairement tous les différens tems^ où le Seigneur a daigné fe montrer & parler à ce Prophète. Exod, Chap, 51. r. 18, Qualis non fuît in Egypto à die quâ fundata ejl ufque ad prœfins tempus. Telle qu'on n'en a jamais vu en Egypte depuis le jour de fa fondation jufqu'au tems pré- fenr. Or l'Egypte n'a pas été formée dans un jour de 24 heures. Exod, Chap, J2. r. J4.Egà autem in die ultionis vijîtabo hoc peccatum eorum^ Dans le jour de ma vengeance , &c. Liv» des Nom- bres, Chap, J. V, i, Ha^funt generationes Aaron & Moyji y in die quâ locutus eji Dominus ad Moyféri in monte Sinai. Or Dieu a parlé à Moyfe fur fè mont Sinai pluiieurs fois dans des tems différens ? Eiij 70 Nouvelles Recherches le motyoz/reftici un terme qui les comprend tous enfemble. Dmt, Chap, 3a. v, 35. Juxtà eji dies perditionis ^ & adejfe fejîinant tempora. Le jour de deftrudion n'eft pas loin & les tems s'appro- chent. Livre des Juges. Chap, i8,v, 1. (Remarquez que le jour au fingulier, ^c les tems au pluriel font /ynonimes. ) Dan quczrebat poffejjionem jibï lifque ad illum enim dïem ïnter cœteras Tribus for^ tem non acceperat, La Tribu de Dan cherchoic à s'établir ...... Car jufqu'à ce jour , elle -n'avoit pas encore eu fon lot parmi les autres Tribus. Or la prife de poffefîion n'étoit pas certainement l'affaire de 24 heures. Liv, premier des Rois, Chap, 3. V. /:2. In die illâ fufdtaho advcrsum Heli cm" nia qucs locutus fum , fuper domum ejus yincipiam & compleho. Dans ce jour je fufciterai contre Heli tout ce que j'ai prédit concernant fa mai- fon 5 je le commencerai & l'accomplirai. Chap, 8» V, 18, Et clamabitis in die illâ à fade Régis vejîri qmm elegijlis. Vous vous plaindrez dans ce jour du Roi que vous vous êtes choifi , c'eft-à- dir£ de fa tirannie & de votre efclavage. . . , Liv, 3. des Rois, Percutiet domum Jéroboam in hoc die & in hoc tempore. Il frappera la famille de Jéro- boam dans ce jour & dans ce tems. Pf, So, v, 7. Annos ejus ufque in diem generationis & gène-- rationis. Les -années de fà vie feront égales au fur la Nature & la Religion, fi jour de plufieurs générations , ou à un période de plufieurs années. Pf. i^)' 3' ^^ ^^^ vinutis tua. Dans le jour, ou pendant le tems de votre force. Pf, ij6. V, y. In die Jervfakm, Dans le jour de l'afîlidion de Jérufalem , pendant qu'elle éroit afïîégée par le Roi de Babylone. . . Ecckf, Chap, 1 8, V, 8, Numerus durum homïnum , ut multûm ^ un- tumannï^ quaji gutta aquce maris deputati funt & Jicut calculus arcnœ , Jic cxigui annï in die cevi, La vie de l'homme la plus longue n'eft que de cent ans 5 c'eft une goutte d'eau de la mer , ou comme lui grain de fable au prix du jour de l'éterniti. Chap, 4. V. z. Le Prophète prédifant la gloire & la magnificence de TEglife de Jefus-Chrifi: > dit 5 in die illd ^ dans ce jour , ou pendant ce période de tems. Chap. 11. v. 10. In die iUâ radix Jejfe qui Jlat in Jignum populorum , îpfum gmus deprecahuntur. Dans ce jour , la racine de JeÏÏe qui eft élevée comme un fignal pour les peuples , les Nations lui adreiferont leurs priè- res. .. Jer. Chap. 17. v. 16, Diem hoivÀnis non dejideravi , tu fois. Vous fçavez que je n'ai jamais défîré le jour , ou ce genre de vie que les hom- mes fouhaitent fi ardemment. Abdias. Ch. i. v. II. Etxion dcfpicles in die patris tui , in die pcre- grinationis ejiis. Pendant le jour de ton père ^ pendant le jour de fon pélexinage , c'eft-à-dire Eiv 72 Nouvelles Recherches pendant fa vie moi'telîe. Johan. Cap. S. v. 56". Abraham patcr vejîer exultavît ut vident d'iem meurn, Abraham votre père fe réjouilToit dans le déûr de voir mon jour , c'eil-à-dire de voir Jefus- Chrift en chair pendant le cours de fa vie mor- telle de trente-trois ans. Ep. de S, Paul aux Hébr. Chap. 3. V. 8, & Pf. 94. V. 8. Hodie fi vocem ejus audierîtis ^ nolitô ohdurare corda veflra , ficut in exacerbatione , fecundùm diem tentationis in defir- îo 5 ubi tentavcrunt me patres vejîri , probaverunt & viderunt opéra mea quadragintà annis. Si vous en- tendes aujourd'hui fa voix , n'endurciffez point vos cœurs comme au jour ou au tems de la ten-' ration dans le défert , où vos pères me tentèrent & où ils virent les merveilles que j'opérai du- rant quarante ans. Voilà une forte preuve de ce que j'avance fur la fîgnification métaphorique ^ & qui eft très- fréquente dans les Auteurs Sacrés , du mot dies ou jour ^ puifque le même Texte la détermine exprefifément & l'étend jufqu'à près de quinze mille fois vingt-quatre heures. C'eft un période enfin de quarante ans , exprimé en Hébreu au fînguHer & par le même mot précifément com- me aux autres Textes que j'ai déjà cités ci-defTus, dont Moyfe fe fert quand il nous décrit la Cof- mogonie de l'univers. fur la Nature & la Religion* 75 XV. A cette multitude de Textes que j'ai trouvés fans faire beaucoup de recherches , j'en pourrois encore ajouter d'autres fi ceux-ci ne fufïifoienc pas pour nous montrer que le mot dies OM jour doit néceffairemenr être pris dans un fens plus étendu que fa lignification propre , pour une faifon , un période fixe , ou enfin pour lin rems indéfini : mais fans entrer dans un plus grand détail des pafTages de l'Ecriture , ceux qui fe font un peu familiarifés avec le langage de l'E- criture, fe rappelleront aifément les phrafes fui- vantes qui fe préfentent à chaque infiant , par exemple , in die œflatis ; die frigoris , die Meffis ; vajiitatis , fuperbice , confolationis ^ furoris Domini , afliclionis , tribulationis ; die malorum , helli , vin- dicix , ulùonis , angiijliœ , obducîioriis & vindicîœ , adoUfcentiœ , feneciutis , conjilii , diviùariim , pau- pertatis , agnitionis , vindemiœ. Domini , hceredita- tis 5 interficîionis multorum ^ perditionis , Et fur-tout cette exprefiion très-remarquable de S, Pierre, Ep. 2. Chap. 3. V. 18. Ipjî gloria & nunc & in diem ceternitatis, A notre Sauveur Jefus - Chrifi:^ gloire dès-à-préfent jufqu au jour de l'éternité ; c'eft-à-dire félon le fi:yle de l'Ecriture Sainte , pendant le préfent période , qui efi le feptieme , ou celui du repos ^ pendant les fix de la créa- tion jufqu au période de l'écerniré , qui étant un 74 Nouvelles Recherches dans toutes les parties infinies , fans change- ment , eft très-bien repréfenté , quoiqu'infini en ^arécj fous la figure d'un feul jour naturel, com- me la terre eft repréfentée fous la forme d un globe il petit , qu'un pouce équivaut à mille lieues de fa circonférence. Ce n'eft que dans le même fens que l'on peut bien entendre encore les Textes fuivans , qui fe répètent fouvent en parlant des impies multipliés en grand nombre & qui blafphément tous les jours contre la Loi de Dieu ; en parlant de la fin du période préfent le Pfalmifte dit : convenmtur ad v^fperam , ils SQn repentiront vers le foir , & famem patimtur ut ca^ nes^ ils feront affamés comme des chiens. Pf, 58, w y, V. i6. & Pf, zc), V. C, où l'on voit par tout ce qui précède, que le Prophète adreflfant fon dif- cours aux Juftes , les confole fur les mifères de cette vie par l'efpérance de la joie dont ils feront comblés au matin du nouveau période, qui doit fuccéder au foir du période préfent. C'eîl encore dans le ftyle de Moyfe , facïumque ejl vefperc &* mam dies unus , & du foir &c du matin fe fit le premier jour , que le Pfalmifte dit , ad vefperum demorahitur jUtus , G* aâ matutinum latïtia» Ils pleureront le foir , & ils fe réjouiront le niatin» Soph. Chap. 3. V. 5. Dominusjufius .... mam ^ maru judïdum fuum âahït in lucem. ^ 6* non ahfr fur la Nature & la Religion. yj condetur. Dieu eft jafte. ... au matin , au matin il manifeftera Tes jugemens , & il ne fe cachera pas. Le Pfalmifte dit.auffi dans le même fens , en parlant de la punition des Impies & de la gloire future des Juftes après la fin du monde préfent : In inferno pojltï funt ^ dominahuntur eisjufii in matutïno. Ils font plongés dans l'enfer , & les Juftes 5 opprimés dans cette vie , leur corn- manderont au matin de la vie future. Je ne finirois point fi j'entreprenois de rappor- ter tous les Textes , où le foir & le matin doivent s'entendre abfolument dans le fe^ns à! avant ôc à'aprhs ^ ou de la fin & du commencement d« deux tems différens , qui fe fuccédent , comme- Ton voit dans Sophonie , chap. 3. v. 3. Judiccs ejus lupi vefpcre , non nlinqucbant in manç : mais je crois avoir prouvé afiez clairement que les Phiio- fophes peuvent, fans blefTer la Religion, étendre Tantiquité de la terre bien au-delà du terme de la Chronologie de Moyfi , qui ne regarde que la naiifance du genre humain , fi la raifon èc Tobfervation le demandent nécefîairement j c'eft ce que nous verrons ci-après. En attendant , l'a- vantage qu'ils auront , par ce moyen, les metira plus à leur aife , & leur donnera la liberté de faire des recherches utiles à la Phyfique ^ dont la Religion , qui ne peut être contraire à la na- ^6 Nouvelles Recherches tare, n'a rien à craindre. Quant à moi , je peux leur faire généreufement cette concefîîon , quoi- que je ne fois pas toujours de leurs avis & je ferai encore en état de combattre leurs objedions. XYI. Or pour pouvoir affirmer qu'au tems d'où Moyfi part , en commençant fa Cofmogo- nie par le Chaos , la terre fortoit alors d'une révolution qui l'avoit réduite en ruines , il faut premièrement à^s traces phyfiques très- fortes imprimées vilîblement fur elle , & qui paroif- fent encore aujourd'hui , de manière qu'elles ne puiffent admettre ni favorifer aucune autre hy- pothéfe , & que les conféquences que Ton en tire , puiffent quadrer avec le récit de l'Auteur Sacré : en un mot , il faut que cette idée de la préexiftence de notre globe foit conforme de toute néceflité avec la nature 6r avec la révé- lation. Maintenant , de ce que je vais dire eft très- clair 5 la nature ne dépofe pas nécefTairement en faveur de cette hypothéfe , puifque fi la terre fortoit alors d'une révolution qui l'avoit mife en ruines , c'efl au feu , le plus puiffant de tous les élémens , qu'il faut avoir recours , comme au feul agent d'une force qui paroît fuffifante pour effeduer une révolution complette , & pour la ramener en quelque façon à fes premiers prirt- fur la Nature & la Religion. 77 cîpes. Or les feules rraces qui nous reftent en- core de l'action jadis opérée par cet élément , & qui ne font nullement équivoques , fe trou- vent pour la plupart dans les différentes chaînes F iij s 6 Nouvelles Reckerckes du fameux courant de Mofchen y appeilé vulgai- rement le Mojche-Strom. On y voit diflindtemenc les propriétés & les caufes phyfiques de ce phé- nomène 3 & l'on y détruit diverfes erreurs 6c quantité de fables que les Hiftoriens & les Géo- graphes ont débité à ce fujet ^ en même - tems que l'on applique heureufement à tous les autres courans nombre de circonftances communes que l'on remarque dans celui-ci , où la nature fe peint en grand d\me manière très-intérefTante par la force & l'étendue du tableau, XXL *> Ce courant , qui tire fon nom d'un 35 rocher , nommé Mofckzjt-Fieldt ^ fitué dans la 3> mer entre l'Ifle de Lofoddai Se celle de JFœron, 5> s'étend jufqu'à quatre milles au midi & à une 55 égale diRance au nord : il eft extrêmement 53 rapide , principalement entre le rocher de 33 Mofchen de la pointe de Lofodden, • mais fa 55 rapidité diminue , à mefure qu'il s'approche 55 des deux Ifles de Wœron 6c de Rcji^ 8c il four- M nit fa courfe du nord au fud dans (ix heures , M & du fud au nord en autant de tems : il eO: 5? ii violent qu'il forme quantité de tournoyé- 55 mens ou grands touibilions que les Norvégiens » appelleni: Gaargamer, 55 On croie qu'il eil: caufé par une langue de n terre très-haute qui avance dans la mer de la fur la Nature & la Religion. %j 35 longueur de feize lieues de Norvège , depuis 3> la pointe de Lofoddcn , qui ell: l'extremiré la y> plus occidentale jufqu'a la pointe opporée de 53 Loddîngen , fon extrémité orientale. Cette lan- 35 gue de terre eO: environnée de la mer de tous w côtés ^ foit que la marée monte , foit qu'elle » àQ^cQnào. 5 l'eau s'arrête toujours auprès de » cette terre , & ne peut trouver iifue que par » les détroits _, ou paifages qui partagent cette » langue de terre en autant de parties. Quelques- 33 uns de ces détroits n'ont qu'un demi-quart de 35 mille de largeur : il y en a qui font encore 33 moins larges ^ & par-conféquent ils ne peuvent 35 recevoir qu'une très -petite quantité d'eau. Il « arrive donc de-là que quand la mer monte ^ 33 l'eau qui coule vers le nord fe trouve arrêtée 35 en grande partie au midi de cette langue de 35 terre , & devient ainii beaucoup plus haute » du aoié. miéridional que du côté feptentrional, :>5 De m.ême lorfque la m.er defcend & qu'elle 33 coule vers le midi , les eaux fe trouvent en 33 grande partie arrêtées au nord de la langue » de terre , &: deviennent plus hautes du coté 33 feptentrional que du côté méridional. L'eau , y> qui s'arrête de cette façon , tantôt d'un côté , » tantôt de l'autre , ne peut trouver iiTue qu'entre s* la pointe de Lofodden ôc l'Ifie de Wœron , & î iy 8 â Nouvelles Recherches s? entre cette dernière Me & celle de Rofl, La 33 pente qu'elle a en paflant fait la rapidité du Si courant , & c'eft pour cette raifon qu elle aug- ?> mente près de la pointe de Lofoddcn • cette >^ pointe étant plus proche de l'endroit où l'eau » s'errête , la pente y efi: auffi plus coniîdérable , >^ èc plus le courant s'élargit vers les Ifles de « W^ceron & de i^(?/2 , plus il perd de fa rapidité «. Toutes ces circonftances concourent à prouver clairement que ce fameux courant doit entière- ment fon exigence & fa force à la forme ëc à îa fituation des terres qui s'élèvent au-deifus de fon niveau , & qu'en général les élévations qui font au fond de la mer , Se les courans refpec- tifs 5 font les uns &c les autres des corrélatifs toujours dans l'ordre de caufe Se d'effet. » Ce courant ne fuit point le flux ôc le reflux »» de la mer 5 au contraire il leur eft entièrement 35 oppofé ; car lorfque les eaux de Yocéan mon- 30 tent, elles avancent au midi au nord, au lieu « que le courant de Mofchen va alors du nord 5? au midi ; & lorfque la mer defcend , fes eaux 5î coulent du nord au midi , tandis que celles 35 de ce courant vont du midi au /zor^. » Ce qu'il y a de plus remarquable, c'eft que,^ 23 ni en avant ni en arrière , ce courant ne va «^ point en droite ligne comme les autres coU'i [ur la Nature & la Religion. Sp 33 rans que l'on voit dans plufieurs détroits où 3> il y a flux & reflux , mais il décrit une efpece >5 de cercle. Lorfque les eaux de Vocéan font à î> demi-flot , le courant va 2i\xfud-fud-ejl , & plus 35 la mer monte , plus le courant tourne vers le iifud^ en fuite du fud ^lu fud - oueji , ôc de-là à » Voueji : quand la mer eft en plein flot , le cou- 3> rant tourne au nord-oueji 6c enfin au nord, Sc J5 vers la moitié du reflux de la mer , il reprend « fon cours , après s'ctre arrêté quelques mo- w mens. La difficulté eft de fcavoir s*il continue j> à aller en avant ou s'il rebroufle chemin , c'eft- S) à-dire s'il court à ïefi ou à Voueji, Les habitans j5 du pays croyent qu'il tourne du côté de l'e/?, >j qu'il va du Tzor^par ÏQnord-eJi, à Veji , & de-là « par lefud-e/i anfud. Se qu'ainii il fait le tour » de la bouflble en douze heures ; mais il efi: w probable que ceux qui ont donné lieu à cette « opinion fe font trompés dans leurs obferva- 3> tions. En effet , il répugne à la nature que le 3î courant puifle retourner par VeJi : il faut né- *> celTairement qu'il retourne par Voueji en pre- 53 nant fon cours du nord au midi , comme il a s> fait en allant du midi au nord \ c'eft ce que l'on S) montrera clairement lorfqu'on parlera des cau- « fes de ce courant &: de fa circulation. 33 Le vrai phénomène eft donc que ce courant ^o ' Nouvelles Recherches s* va en arrière du fud-fud-ejl par Vouejl au nord 3î & du /2ori 2x\fud-eft par le même côté : s'il ne ^ retournoit pas par le même chemin , il feroic 35 difficile & prefque impoiTible de palfer de la 2> pointe de Lofoddcn aux deux grandes Ifles s2 de Wceron ôc de i^o/? , & ces deux Ifles , qui 33 forment aujourd'hui une paroifïe entière , fe » trouveroienc par-là fans habitans : mais com- n me le courant tourne de la manière que l'on 3a vient de le dire ^ ceux qui veulent pafTer de ^ la pointe de Lofoddcn à cqs deux Ifles , atten- îî dent le demi-flot, auquel tems le courant tourne 3> à Vefi y & lorfqu'ils veulent repaifer à ladite 35 pointe , ils attendent que le reflux de la mer 35 foit à demi, parce qi^'alors le courant les porte » vers le continent , & de cette manière on paiTe 53 & repafle fans difficulté. « Les tourbillons qu'il forme ont donné lieu 55 à diverfes fables , que les gens peu inflruirs ?> ont débitées a ce fujet : on a avancé, entr'au- 2> très , que ces tourbillons mettcient en pièces » oc broyoient tout ce qui en approchoit , & ** qu'ils étoient fi violens qu'une baleine ne pou- » voit pas y réfîfler; mais l'expérience fait voir le 39 contraire , puifque fi l'on jette un morceau de » bois , le tourbillon s'arrête Se difparoit auffi-tôt ; 35 d'ailleurs on trouve dans ces endroits quantité âî depoiiïbns. fur la Nature & la Religion. pi 5> Il eft cependant certain que c'eft une mer- aï veille de la nature qu'une mafle liquide fafTe 5î àes tourbillons qui ont fouvent quatre brafles « de diamètre. Piufieurs perfonnes qui ont voulu « en chercher la caufe , ont fuppofé qu'il y avoit » fous l'eau àes écueils qui occafionnent ces tour- » noyemensj ce qui ne fçauroit être fondé , puif- î> que l'on fçait que les écueils , bien loin de les 3> caufer, les empêchent : c'eft donc dans le cours 35 rapide & turbulent de ce courant que l'on doit îî en chercher la caufe. Pour cet effet on pofe w deux principes , fondés l'un & l'autre fur les w loix du mouvement : le premier eft que lorf- « qu'un corps qui fe meut en rencontre un autre »» qui l'empêche d'avancer en ligne direde , il 3î bricole , ou fe meut en ligne circulaire : l'eau » étant un corps liquide ne fçauroit bricoler , » elle eft donc contrainte de circuler : le fécond 5» principe eft que dans un efpace , où une maffe M d'eau court rapidement Bc confufément , il eft 3> impoffible qu'une colonne d'eau ne fe meuve »• plus fortement que l'autre ; c'eft ce que l'on 3> voit tous les jours diftindement dans les riviè- » res & les ruifteaux. 5î Ce qu'il y a de plus merveilleux dans ce cou- » rant & qui mérite que l'on y faffe attention , » c'eft qu il ne va pas en ligne directe comme pz Nouvelles Recherches » la plupart des autres courans , mais qu'il fléchit » peu- à- peu du midi au nord , &c en fuite du nord « au midi. Ce phénomène eft néanmoins aifé à » comprendre , Ci Ton obferve que ce courant 53 eil contraire au cours de la mer , d'où il s'en- 3s fuit qu'en fe rencontrant, l'un empêche les w progrès de l'autre.: la me: ne peut rien faire « contre le courant au commencement du flux » & du reflux , mais lorfqu elle eft à demi-flot, ^> ou à demi-reflux , elle acquiert alfez de force 33 pour s'y oppofer , le courant ne pouvant alors « fléchir à l'e/? , parce que l'eau s'y arrête toû- w jours auprès de la terre de Lofodden , il efl: 33 contraint de fe tourner vers Vouejt où l'eau efl: 33 plus bafle c< . XXÎI. Maintenant , fi nous généralifons nos vues, ce qui nous refle après cette defcription pour principe général & commun à tous les au- tres courans de la mer, fe tire uniquement de là forme des terres marithres , de leur direétion, & des gifemens des cotes qui fe jettent dans la mer j 6c ce qui eft particulier au courant de Mofchen , à fçavoir fa circulation par laquelle il diffère àes autres , eO: purement accidentel d<. local : mais quoique les courans ordinaires les plus connus fuivent à-peu près , pour la plupart , des YignQs droites, nous devons préfumer qu*ii fur la Nature & la Religion. 93 fe trouve très-fouvent dans la grande étendue de la mer des variétés 4ocales en grand nombre , qui changent leur direâ:;0 1 , fans jamais pouvoir les réduire à la règle générale qui doit gouver- ner la caufe produ6fcrice des montagnes. Nous fçavons qu'il y a des courans qui vont dans tou- tes les directions poiHbles ^ il y en a encore dans la même partie de la mer de fupéiieurs & d'in- férieurs 5 qui vont en fens contraire ^ & il y ea a fans doute qui fe détournent , qui ferpentent & circulent , parce que , dans le nombre de tant de directions différentes qu'ils font forcés de prendre > ils doivent très-fouvent rencontrer le flux Se reflux , comme celui de Mofchen, Jugez ii une caufe fi variable , &: fi irréguliere , peut produire un effet (i réglé , fi lié , fi ordonné , comme font les grandes chaînes des montagnes fur la terre. XXIII. Mais pour ne pas nous expofer aux railleries de ceux qui , femblables aux démons de M'ilton afîemblés , commencent par nous dé- biter des oracles fur les attributs de Dieu , ou fur les ouvrages de la nature , & finiffent pat des fiiïlemens , nous n'imiterons pas certains Phi- lofophes qui ne pouvoient pas s'accorder en- tr'eux, pour {c^voiiji la poule exijîoit avant l'œuf, mTc^ufavam la poule. Et afin d'éviter gn incon- 54 Nouvelles Recherches vénient de cette nature , tranrportcns-nous aa moment , dont parle Moyfc , iorfque les eaux ont commencé à fe féparer de la terre ferme , & ne clierchons pas à juger de l'état de notre globe dans fon enfance par l'état préfenc. Autant vau- droit-il prétendre juger de l'afped ancien & des mœurs de l'Allemagne , de la France & de l'An- gleterre 5 dans le tems de JuUs^Clfar ^ par la dif- pofition préfente , ou à l'imitation du célèbre Monufquku^ qui fommeille quelquefois, afTortir la politique régnante & les différentes Religions du monde aux climats , & les en faire dépen- dre , en partant de la didribution préfente des chofes 5 fans confidérer que la feule Religion , qui en mérite aujourd'hui le nom , après être née en Judée , femblable au foleil & aux fcien- ces 5 parcourt fucceffivement tous les pays. De même tout a eu un commencement , excepté Dieu 5 & a changé de forme depuis fur notre glo' be 5 d'autant que tout eft d'une nature périflfable, & par-conféquent il s'enfuit néceiTairement, ou que la terre ell: fortie des mains de Dieu cou- verte de Tes montagnes , qui fe trouvent aduel- lement élevées au-deiTus du niveau de la mer par la retraite des eaux dans les fouterreinSj'ou que fi le lit de la mer étoit alors parfaitement arrondi , il n'y avoit aucune autre caufe cxté-^ fur la Nature & la Religion* "'^ pf rieure y qui pût le rendre inégal Ôc le creufer» que le fîmple ilax de refîux fans courans , excepté ceux qui auroient été produits par les vents , Ôc qui fur un fonds uni ne peuvent être que fuper- fîciels : je dis une caufe extérieure , car nous par- lerons après des forces intérieures , qui font bien plus puiiTantes que toutes les caufes extérieures , êc plus que fuffifantes , avec la force centrifuge , pour former toutes les grandes chaînes de mon- tagnes fur un plan donné avec toute la régula» rite requife. Or le llmple flux 8c reflux de la mer, qui commence à opérer fur la furface lifl^e du balîin , & qui enfuite , félon l'hypothéfe , vient à>fe réunir aux afpérités naiflantes , Se forme des courans, dont les forces augmentent conti- nuellement 5 non - feulement n'eft pas capable de couvrir & d'inveftir la terre de montagnes fur aucun plan régulier , puifque l'effet doit ré- pondre à la caufe qui eft toute irréguliere , m.ais il ne parviendra peut-être jamais à les élever au-deffus du niveau des eaux pour faire paroître la terre ferme , ou s'il y parvient après bien des efforts , il lui faudra un tems prefqu'infini , dont la longue durée fera accompagnée de conféquen- ces phyflques , irréconciliables avec la nature ; mon argument fe tirera des principes mêmes de l'hypothéfe , Ôc comme les Orateurs s'expri^ ment , ex vifceribus caufes. ^g Nouvelles Recherches XXIV. La plus grande difficulté que je trouve contre ce fyftême nouveau , dans la fuppofition ld*un parfait arrondifTement du fond de la mer , eft que le flux & le reflux dans chaque hémif- phére fuivra toujours des lignes droites, dirigées vers tous les points du compas , par la raifon que rien ne fe préfente encore fur une furface ronde qui l'en détourne en lui réliftant , & qui forme les courans que l'on fçait n'être , par leur nature , qu'une caufe fecondaire ; il faut en ex- cepter les vents , dont l'effet , pour la plupart ^ eft toujours fuperficiel , fur un fond uni , comme je l'ai déjà remarqué ; & quoiqu'à mefure que ia lune agit fuccefîîvement fur les eaux entre les Tropiques , le double reflux de chaque hé- mifphere fe rencontre par oppolition à tout mo- ment 5 les fables que ces deux forces contraires pouffent devant elles ne peuvent s'arrêter fous aucun méridien , parce que , bien loin d'être fixées , leur point de concours varie continuelle- ment. Il n'y a qu'aux feuls pôles qu'elles fe ren- contreront conilamment , & par - conféquent il n'y a que là qu'aidées encore par une force gra- vitante dans les matières amoncelées , qui aug- mente fans ceife depuis l'équateur , elles doivent nécefTairement commencer par faire paroître la terre ferme. Il arrivera doni; dans cette vue précifément fur la Nature & la Religion ^ P7 précifément le contraire de ce que nous obfer- vons ; les plus hautes montagnes fe trouveront fous les pôles j la force centrifuge , qui agira très -bien avec une force intérieure expanfîve pour donner plus d'élévation fous l'équateur , conformément aux phénomènes, produit ici, en concours avec le flux de la mer , un effet abfo- lumenr contraire j & les deux continens polaires ^ qui augm.entent à mefure & s'étendent autour de CQs deux points , s'approcheront toujours , en laiffant entre-deux un baflin parallèle à l'équa- teur. Ce baffin fe creufera en conféquence , de- viendra de jour en jour plus profond , entourera le globe 3 & 5 f e rétréciffanc de plus en plus , préfentera à -peu -près l'afpecl: des bandes qui environnent la planecé de Jupiter parallèlement à fon équateur : or tout ce tableau ne reffemble en rien au vrai tableau de notre terre , on ne peut donc pas , ii on perfide à foutenir la nou- velle hypothéfe de la mer comim^e caufe produc- trice de l'élévation , de l'ordre &: de l'enchaî- nement des montagnes, commencer par la fup- pofition d'un globe lifiTe Se arrondi. XXV. Il ne nous rede par-conféquent , pouc donner tout l'avantage poffible à cetre hypothéfe, que de fuppofer qu'aux premiers inilians l'adion de la mer a trouvé des montagnes fous les eaux Part, IL G ^B Nouvelles Kecherckes déjà formées fur un certain plan régulier , te! a- peu-près que la nature nous le préfente aduel- lemenc. Cela eîl d'autant plus aifé à croire , qu'il faut de toute néceffité donner une ligure déter- minée quelconque a la terre au premier moment de fon exiilence , & qu'il ne coûte pas plus à U Divinité de lui donner celle d'un globe hérifTé de montagnes fur un plan régulier , que celle d'une furface unie \ par ce moyen , les amis de cette hypothéfe auront tout ce qu'ils peuvent déiirer de plus favorable , & l'action de la mer qui fe partagera en mille directions différentes par une oppofition confiante & variée, d'où naî- tront autant de courans , travaillera fur un plan régulier déjà donné : malgré tous ces avantages^ je crains encore non-feulement que ces forces ne s'employent plutôt à ruiner la forme régu- iiere & primitive des chaînes données qu'à i'en- -trerenir , mais aulfi qu'elles ne parviennent jamais à les faire paroitre au-deifus du niveau de la mer 5 ou (1 elles y réuffiiTent après plufieurs mil- liers de iîécles , que les conféquences pliyiiques ne foient fooeiles au fyilème que l'on cherche à étayer par leur moyen. En un mot , feion le plus célèbre Phylicien de nos jours , & certaine- ment perfonne n'a jamais vu la nature prife dans : fon tor::îl d'nn r^''^ '-^'^^ romoréhenlif , ks courans fur la Nature & la Religion; p5> Jont produits par U mouvement des maries , & fui- vent dans leur direction celle des inégalités du fond de la mer , fans aucune exception * ^ par-confé- qu^nt ils ftippofent nécefTairemenc la préexif- tence de ces mêmes inégalités : de plus , ces mêmes courans ont tous , félon le même Auteur , une largeur déterminée & qui ne varie point ; & cett^ largeur dépend de V intervalle qui fe trouve entre les montagnes de la mer qui leur fervent de hods ^ donc 5 fans entrer dans les différentes queftions, fi ceux qui font produits immédiatement par les vents font plus que fuperiiciels \ fi les vents , en général fi variables , peuvent opérer fur un plan donné pour produire des courans confer- vateurs ou architedes d'un enchaînement réglé , eu fi les vents alifés , qui , félon M. de Buffon , caufent des courans conftans , qui vont comme les vents , iix mois dans une diredion Se ûx mois dans la diredion oppofée , peuvent nous donner , en fait de montagnes , quelque chofe de ftable & de permanent. Je dis que , fans en- trer dans toutes ces queftions , qui font en quel- que façon étrangères à l'hypothéfe , je dois con- clure , pour limplifier mon objet , que tout fe réduit à des courans caufés immédiatement , & dirigés par des inégalités qui devancent l'état * Hift. Nat. du Cabinet du Roi , vol. I , pas. 448» Gij 'iO'O Nouvelks ^Recherches ptéfent de la nature , ^C qui doivent exifter avec la terre dans fon origine. XXVi. Cela pofé pour principe néceffaire, voici ce que i'on demande de ces forces , ou de cette aélion compliquée , conipofée des vents , des courans & de la gravitation univerfelie réci- proque 5 chef , moteur & principal refïort de toute la machine , premièrement d'opérer fur la furface donnée , femée préalablement d'iné- galiîés 5 fuivant un plan réglé , pour creufer par tout le baffin de plus en plus , & de faire pa- roitre ces inégalités primitives de la mer au- • deifus du niveau de fes eaux , jufqu'à la hauteur de près de quatre mille toifes j fecondement de travailler en mème-tems^à détruire en partie ce qui a déjà été élevé \ troifièmement de tranf- porter ces ruines ailleurs , afin de nous donner dans d'autres climats de nouvelles élévations d'égale hauteur , qui doivent s'accorder dans leur enchaînement avec le plan primitif, qua- trièmement de nous manifefter par les phéno- mènes aduels , que l'afpecb préfent de la terre €Ït Touvrage de plufieurs changemens , ou de ré- volutions alternatives entre l'eau & la terre ferme. Or fi telle eil la nature des courans ,* félon i'hyporliéfe , qu'ils doivent travailler en même- | ïêms à creufer leur baliin ^ détruire en partie . far la Nature & la Religion, loî les digues déjà pofées , & t-ranfporter ailleurs les matériaux pour faire de nouvelles élévations,, toutes ces adfcions fi différentes eiitr'elies fe trou- veront oppofées de manière que les montagnes ne s'élèveront jamais au - delTus du niveau des eaux 3 ou que dumoins l'opération demandera un tems d'une fi longue durée , aue les effets feront abfolument contraires à Fâfped préfenc du globe terreftre : car fi les nouveaux amas font en proportion des mines , comme ils doivent l'être , non - feulement Teffradiion des digues affoiblira les forces des courans & les empêchera de creufer leur baOïn , mais les montagnes ma-^ rines feront continuellement tranfportées d'uiî lieu à un autre d'une m.aniere tcut-à-fait irrégu- liere &: deftructive du plan primitif, fans jamais s'élever au-defliis du niveau des eaux de l'océan %. Ç\ au contraire il nous eft permis , en faveur de i'hypothéfe , de fuppofer qu'il n'y aura plus de- proportion entre les amas & les ruines, dont des- accidens purement locaux , ou la différence très- variée des matériaux , peuvent détruire i'exaét: équilibre , la moindre di^culré fera le tems énor- me qu'il faut avant que les am.as fe forment ère quantité fufEfante , afin de réfifter aux forces: des courans & s'élever au-deflus de leur niveam jufqu'à la hauteur requife^ G ii| "102 Nouvelles Recherches Ce tems peut fe calculer en quelque façon par l'accroiffement des terres en différentes con- trées & par l'éloignement aduel de certaines villes qui éroient autrefois des ports de mer , en pren int un certain milieu dans le nombre total de ces faits hiftoriqaes. Cette proportion eit d'autant plus jufte , que les phénomènes d'où elle eO: tirée , font eux-mêmes les prétendues confé- quences phyfiques &: immédiates qui ont donné lieu à riiypothéfe. Or la proportion qui peut provenir de tous ces phénomènes combinés , ap- pliquée à la deftrudion future des deux conti- neps aiStuels d'Afie & d'Afrique pour en former de nouveaux ailleurs , donne pour le tems requis environ trois millions d'années, comme il eft fa- cile de le vérifier par les mefures géographiques. Il s'agit ici des terres aduellement formées fur lefquelles les courans peuvent agir ;'mais ii nous partons du commencement du globe ter- reftre , il faut ajouter à ce nombre déjà trouvé le tems néceflaire que ces mêmes forces deman- deront 3 vu les obilacles qu'elles rencontreront & les retardemens qu'elles éprouveront en fe con- tre-carrant par àcs effets contraires, comme nous l'ayons obfervé , pour creufer le baffin actuel & donner aux montagnes la hauteur requife : ce tems eft très-coniidérable , comme on le voit ^ fur la Nature & la Religion. ïof êc il échappe à tout caicul faute d'élémens 5. mais je le mets â parc , &c je m'en tiens à troi& millions d'années déjà donnés par l'autre calcul Sc qu'on ne peut pas me refufer , fous prétexte que dans l'enfance du globe terreftre , les parties féli- dés étant moins liées , les courans auront tra- vaillé avec bien plus de viteffe à produire les changemens demandés par l'hypothéfe : car non- feulement dans l'enfance de la terre , mais même en tout tems , les courans , qui maintenant agif- fent fur la bafe des con:inens pour les démolie infendblement ^ attaquent également les fables mouvans & des parties entièrement imbibées des eaux de la mer , Se par-conféquent également .dif- pofées à fe défunir & à s'écrouler : le feul cas que l'on doit excepter ell celui de la pétrifica- tion j or les parties folides du globe , qui fe pé- triïienr avec l'âge, (i elles font mafiives , ne fonc pas dans un état qui leur permette d'être, défa- nies ou traiifportées ailleurs par les coiirans. XXIX. Voici donc mes réBéxions fur lescoa- féquences phyiiques de ce terme de trois millions d'annies 5 ou de tout autre terme, donc Tex^ î^rême longueur eft abfoiumenc contraire aux phé- nomènes & à l'afpecl préfent de la terre,. Je pars des principes mêmes, dont on veux étayer i'hy- gocKéfe 3 fçavoir que des recherches exactes.^. ï04 Nouvelles Recherches faites fur les différentes couches en différens en- droits de la terre , indiquent , par la diftribu- tion 5 l'ordre & la profondeur des dépouilles de la mer &: autres matières , un cliangement alter- natif entre l'eau & la terre , & que notre globe porte depuis l'origine du monde l'empreinte & les reiles fuccellîfs d'un nombre confidérable de lîécles , par la confervation d'une certaine partie de ces mêmes dépouilles marines & d'autres ma- tières terreftres. La multiplication de toute efpé- ce quelconque eO: égale à la confommation , oa lî elle eft au-deifous, l'efpéce périra immanqua- blement après une certaine fuite d'années. Je donne à la Grande Bretagne pour la confomma- tion annuelle de la feule efpéce des huîtres le nombre de dix millions égal au nombre des habitans : on pourra même , fans craindre aucun excès dans le calcul , affigner ce même nombre aux feuls citoyens de la ville de Londres , puif- que l'un portant Fautre , il ne montera guère au-delà de dix par tête. Je mefure les côtes de la Grande Bretagne , & je les trouve égales â la foixante- quatrième partie de toutes les cotes des terres connues prifes enfemble. On remar^- quera que je ne fonde mes calculs que fur une efpéce de coquille , tandis qu'il y en a une infi- nité qui exiflent dans la mer ^ & que par-con- fur la Nature & la Religion. lOj féquent , quoique toutes les côtes ne donnent pas des huîtres , toutes les côtes connues don- nent au moins des coquilles de différente efpe- ce : (Se il dans le total il s'y en trouve un grand nombre qui font bien plus petites & moins maf- iîves que l'efpece que j'ai choi& , il y en a au(ïî dans toute cette clalTe , que l'on appelle Conch(z pclagicz , ( fans compter les os des gros poifTons, & mille autres efpeces de dépouilles marines qui fe confervent également bien, ) une infinité d'ef- peces qui les furpaiTent cent fois & mille fois même en maffe & en grandeur : or dix millions multipliés par foixante-quatre & enfui te par trois millions d'années , produiront un nombre de feize figures qui , fi nous les réduifons en malTe folide compofée d'huîtres ou: d'autres coquilles , nous en. donneront une prefque auffi grande que celle du globe teireflre j donc s'il en échappe une fur cent, & que la terre , comme on le fuppofe , porte en dépouilles miarines l'empreinte de fon âge , nous aurons pour réfultat un fol qui ne fera compofé que de coquilles en forme naturelle, fans compter \qs autres dépouilles de la mer dont il exifre une infinité d'efpeces , jufqu'à quelques lieues au moins de prorondeur , fur un diamètre de trois milliers qui eft celui du globe entier. Première difficulté contre Thypothéfe nouvelle , tirée de l'afped préfent de la terre. Joë Nouvelles Recherches XXX. Je me perfuade que l'on n'aura rien à objeder contre la vérité du calcul précédent ^ mais pour nous ôcer tout fcrupule, & nous con- vaincre que loin de profiter avec rigueur des principes que la nature m'offre dans io'^xi<à leur étendue , j'ai donné plutôt dans l'extrême op- pofé pour éviter les apparences contraires à mon raifonnement , je ne puis mieux faire que de citer M. de Bvffon lui-même fur la multiplica- tion de la feule efpece des huitres : » cette quan- » tité il confidérable de coquilles , ( qu'on trouve 3î dans la terre ) nous étonnera moins , fi nous »j faifons attention a quelques circonftances qu'il » efl bon de ne pas omettre ; la première eft 3î que les coquillages fe multiplient prodigieufe- » ment & qu'ils croifTent en fort peu de tems j 33 l'abondance d individus , dans chaque efpece , îî prouve leur fécondité ; on a un exemple de ïj cette grande multiplication dans les huirres v » on enlevé quelquefois dans un feul jour un vo- 33 lume de c^s coquillages de plufieurs toifes de 33 groifeur jon diminue confidérablem.ent en alfez 33 peu de tems les rochers dont on les fépare , 33 & il femble qu'on épuife les autres endroits 33 où on les pêche , cependant l'année fuivante 53 on en retrouve autant qu'il y en avoit aupa- 33 ravant , on ne s'apperçoit pas que la quantité î5 des huîtres foie diminuée ^ Se je ne fçache paa fur la Nature c^ la Religion. 107 5> qu'on ait jamais épuifé les endroits où elies >» viennent naturellement. Une féconde atten- » tion qu'il faut faire , c'eft que les coquilles font 33 d'une fubftance analogue à la pierre , qu'elles i> fe confervent très-long-tems dans les matières 33 molles, qu'elles fe pétrifient aifément dans les w matières dures , & que ces productions mari- 33 nés & ces coquilles que nous trouvons fur la ^> terre étant les dépouilles de plufieurs iiécles , 33 elles ont dû former un volume fort confidé- M rable «'. Hiil. Nau. vol. I , pag. 27 i , 271. On peut ajouter que (î elles fe confervent plufieurs iiécles > parce qu'il n'y a aucun diiTolvant uni- verfel pour elles dans l'état préfent des chofes , elles fe conferveront fi la terre fe conferve éter- nellement. i: XX XL II efr très- certain que nous voyons tous les jours des changemens naturels de l'ar- gile en pierre faits en très -peu de tems fur les montagnes ; la chaux fe convertit de mêm.e en verre , mais nous ne voyons aucun retour de ce verre en chaux : l'argile & le fable ne font que du verre ou du caillou brifé , S^ formé par la vitrification , ou la cryftallifarion. Toute efpece d'eau eft chargée de matières pierreufes j qu'on laifTe tomber une goutte d'eau de pluie fur un verre bien uni & qu'on la faife évaporer , on loS Nouvelles P^echerckes fera étonné de la quantité de fubftance dtire qu'elle dépofera. Un gros grain de grêle eft en- core plus chargé de cqs madères pierreufes. Le Chevalier Newton lui-même a bien remarqué que les folides augmentent par- tout aux dépens des fluides , & c'ed pour trouver un remède à un inconvénient qui n'ed qu'une conféquence ordonnée par la Divinité de la nature périifable de la terre , qu'il croyoit les Comètes deflinées à réparer ce défaut par les vapeurs qu'elles diilri- tribuoient à chaque partie du fyftême. 11 n'y a même guère aucun Phyficien , bien verfé dans cette partie , qui ne voie que notre habitation dépérit & change infsnliblement , & qu'elle n'a jamais été £iite pour fubfifter long-tems y les montagnes qui s'affaifTent ; les vallons qui fe comblent peu-à-peu & les fubftances terreflres qui fe durciiïenc , lui confirment cette vérité : En général l'ouvrage de la pétrification dans la mer, comme dans la terre , eO: beaucoup plus efficace ^ plus prompt & plus fréquent que l'ou- vrage de la dilTolution , par rapport aux pierres , aux marbres & auï autres corps durs déjà for- més , dont il y a deux exemples afiez remar- quables dans des Mémoires de l'Académie des Infcriprions & Belles-Lettres. Le premier eft une monoie de Frobus , élu Empereur l'année deux fur la Nature & la Religion, io^ cens foixante-feize , tirée d'une carrière dans la plus grande épaiiTeur d'une groiTe pierre de taille, fans aucune fradture par où elle eût pu s'intro- duire dans un corps de cette folidité ; & le fé- cond efi: un morceau de bronze , qui faifoit partie d'une parure militaire romaine , que l'on a trou- vé de même au milieu de la maîTe folide d'une pierre meulière , dont l'efpece étoit très-dure ^ grommeleufe *. Or on auroit été très-naturellement porté à donner plus de tems à la formation de ces deux mafTes énormes , fi le tems précis n'avoir pas été déterminé j d'où j'infère que fi la terre étoit de la date , je ne dis pas de trois millions d'an- nées, mais même de tout autre terme beaucoup antérieur à la Chronologie du genre humain , tel fur- tout qu'il le faudroit pour faire une feule fois le changement complet de l'eau en terre ^ toute la matière terreftre auroit déjà été pref-~ que changée en pierre. Pour donner de la force à ce raifonnement con- tre la trop grande durée du fyilême préfent , qui dérive de la difpofition prompte & naturelle , que diverfes matières terreilres ont par-tout à "^ Ces deux faits fe prêtent un fecours mutuel & peu- vent fervir à fixer les idées fur la formation des pierres. M cm, de i'Acad. des înfc, vol, 2.7, f. I74« ^110 Nouvelles Recherches s'unir , à s'endurcir ^ & à fe pétrifier fans qu'il y ait un diffolvant univerfel aiTez puifTant pour les réfoudre à mefure , il eft très-à-propos de remarquer ici que , quoique les maifes le^ plus dures fe forment en fort peu de tems , comme nous l'avons vu ci-deffus , ces mêmes maiTes , pour la plupart , ne fe réduiront jamais proba- blement à leurs premiers principes avant la dif- folution 2:énérale annoncée dans l'Ecriture Sainte. La preuve démondrative decette vérité fe tire des pyramides , des obélifques & Aqs autres mona- mens d'Egypte , qui depuis trois mille ans qu'ils exiftent , expofés aux pluies & à tous les vents , loin de fe diifoudre , n'en font devenus que plus durs. A CQS marques , il ed évident que la plus grande partie de tout ce que notre foibleffe peut atteindre fur le globe terreftre , auroit été au- jourd'hui ou pétrifiée , ou incruftée d'une m.aniere impénétrable fi ce globe avoir fubfifté , ou qu'il doit le devenir en peu de fiécles , s'il faut qu'il dure|aufii long-tems que quelques fyftèmes mo- dernes le demandent. Nous n'imitons que trop la folie des anciens Romains , qui , pendant que leur Empire attaqué de tous les côtés par les Nations barbares tendoit vifiblement à fa fin, ne vantpienc rien tant que la fiabilité de leur demeure. Com- bien de Médailles menfongeres confacrées à leur fur la Nature & la Religion. 1 1 î Roma œurna , fubfifcent encore après les *monu- mens qu'elles repréfentent ! Que l'on confidere à quoi ont abouti leurs folles efpérances. Rome n'eft plus : il ne refte fouvenc de fes Héros que des ftatues tronquées , inconnues , fans tète , mais avec cette pompeufe infcription fur leurs bafes > De Vïro îmmortali , qui ne fert maintenant qu'à caufer des difputes intarifTables parmi les Savans de nos Académies. Sommes-nous plus fages aduel- lement? & pourroit on fe flatter, malgré la fen- tence prononcée par la Divinité &: confirmée par la nature , que la terre ait reçu de fon Créa- teur la puilTance de fe renouveller éternellement en faveur d'une race fi chétive que celle qui l'habite ? Pourfuivons les caufes phyfiques qui travail- lent depuis près de cinq mille ans , & entrons dans un plus grand détail de toutes ces révo- lutions. La matière n'eft guère plus ftable que la mo- rale , & depuis une quinzaine de fiécles la phy- fique même de la terre eft totalement changée aux environs de Paris, auffi-bien que le caradère des habitans. Cefar ^ dans fes Commentaires , Liv, 7 5 dit que de fon tems cette ville étoit envi- ronnée de marais , & c'eft peut-être à caufe de fa fituation qu elle portoic le nom de Lutece, On [il 2 Nouvelles Recherches peut conclure de fon état préfent, comparé avec l'état paifé , que les eaux chargées probablement de matières calcaires , telles que celles que les eaux d'Arcueil charrient encore aujourd'hui , ont formé les carrières que nous trouvons actuelle- ment par-tout, qu'elles ont pénétré a travers les vuides des matières , & ont uni les parties de diverfes couches compg^fées de coquilles ou d'au- tres fubPcances foililes en des malles folides. Julkn l'Apoftat , parlant de fa chère ville de Lutece , nous aiTure dans fon Mifopogon que le fleuve qui l'environne de routes parts eii prefque toujours au même état fans enfler ni diminuer confidérabiement ; que l'eau en eO; très-pure & très-agréable à boire j que les hivers y font fore, ^oux pour l'ordinaire & moins rudes qu'ailleurs; qu'il y croît dans les environs d'excellent vin & que les figuiers y étoient devenus fort com- muns ; qu'on les couvroît de paille pendant le froid pour les défendre contre les injures du îems j & enfin que les habitans de cette ancienne ville étoient laborieux , infatiguables , fobres , équitables , ouverts , ennemis de la flatterie & méprifant fouverainement la molleiTe & tous les diverriflemens frivoles. Mlfopog, pag. 5)3 & 94. Les anciennes annales de France parlent d'un droit de chalTe excluiif pour les oifeaux aqua- tiques fur la Nature & la Religion, 115 tiques qui fe trouvoienc alors en très - grande quantité dans les marais des environs de Paris , donné aux Moines de l'Abbaye de St. Germain- des-Prés par Childebert, Quant au Phyfique pré- fent du terrein qui environne cette ville, c*eft une remarque communiquée par un ami curieux & très - bon Obfervateur , que d*un côté de la rivière il différé prefque totalement de celui qui eft de l'autre bord , en ce que les matières calcaires paroifTent fe trouver prefque exclufî- vement au-delà d'un de fes rivages & les tai- queufes au-delà de l'autre. En effet toutes les carrières , fi je ne me trompe , font fur le côté gauche en defcendant , ainfi que les eaux cal- caires d'Arcueil *, & les montagnes de fable ou de matières talqueufes , comme celle de Mont- martre ^ font fur le côté droit. On y trouve aulîi des cailloux difperfés dans la campagne , ou pofés par couches : ces cailloux font regardés par certains Phyficiens comme des matières à demi-vitrifieés très-anciennement ôc comme les produits du feu. Or il eft certain que l'on rencontre fouvent des coquilles au milieu de ces pierres , & quelquefois des huitres ou d'au- tres poifTons : aduellement il exifte un caillou parfait dans le Cabinet d'Hiftoire Naturel!^- des Bénédidins Anglois , dans lequel on voie la Part. IL H 114 Nouvelles Recherches coquille complette d'une huître trouvée près de Paris par une perfonne de ma connoifTance. C'eft donc une démonftration phylîque des plus com- piettes que cqs matières n'ont jamais pafle par le feu 5 & qu'elles fe forment par une efpece de cryftallifation imparfaite qui procède de la puif- fance du foufre. La preuve fe tire de ces cailloux ronds fans noyau , dans lefquels on trouve très- fouvent un vuide au milieu , & des aiguilles parfaitement cryRallifées , claires & tranfparen- tes qui partent de la circonférence & aboutiflent au centre. C'eft en quoi , dit-on , les cryftalli- fations fulfureufes différent Aqs cryftallifations arfénicales qui fe font toujours en feuilles & par couches. Ne fera - 1 - il donc pas bien plus raifonnable de croire que toutes ces différentes fubftances fe forment à mefure & en très-peu de fiécles , que de les attribuer à des caufes phyiîques prefque contemporaines au globe ter- reftre ? Au moins il eft très-fur que l'on ne rifque pas tant de choquer la vraie Phyiique en em- ployant par-tout des agens qui travaillent con- tinuellement fous nos yeux , comme les cryftalli- fations à froid de toute efpece , qu'en cherchant des caufes très-éloignées , équivoques ôc *nulle- ment nécefTaires. Les émanations font fort communes par toute fur la Nature & la Religion. iif la terre. Il y a très- peu d'années qu'une forêt entière a été fubitement détruite par des vapeurs fulfureufes près de Fréjus. Les eaux minérales chaudes ou froides fe trouvent généralement par tous les pays du monde. Perfonne n'ignore les effets du foufre qui travaille continuellement fous nos pieds à chaque pas que nous faifons en Italie. Les Mes flottantes près de Rome , les corps que Ton appelle Gli confetti, ou les confitures de Ti- voli , les mafles irrégulieres de différentes for- mes dans les mêmes cantons, femées par-tout d'empreintes de toutes fortes de véc^étaux & dont on trouve des couches entières , ne font que des amas d'un foufre qui enveloppe les fubftan- ces qu'il rencontre , & que l'on montrera , fi l'on veut , pour des refies du déluge , avec autant de raifon peut-être que ceux qu'on nous préfente très-fouvent dans le même genre en les datant de cet événement. Les mêmes confidérations doivent avoir lieu dans les recherches que les Phyficiens font fur des couches entières de la matière qu'on appelle Ofiêocolla ; elle pénétre à Aqs profondeurs coniidérabies j elle enveloppe & confume les corps qu'elle rencontre , comme les bois , les plantes & les feuilles ; elle reçoit leurs empreintes , & tout cela fe fait en peu de fiécles. J'ai vu & examiné en Angleterre un lis Hij ï I (5 Nouvelles Kecherches de cette efpece , qui renfermoir des bois de cerf, des défenfes de fanglier , des couteaux & des haches de caillou des anciens Bretons. Ajourons à tout cela, outre les carrières nou- velles dont nous venons de parler , qui font dans l'intérieur de la terre , les grolTes pierres ron- des & ovales formées à la fuperiicie : ce ne font dans leur origine , comme j'ai eii occafion de le remarquer moi même dans les montagnes où le Pô prend fa fource , que des mafTes d'argille dé- tachées par les torrens, arrondies dans leur chute & endurcies enfuite par l'adion de l'air & de la chaleur du foleil. J'ai ramalTé dans ces quar- tiers de ailleurs , dans les pays de montagnes , de ces corps , dont la forme & même la couleur étoient parfaitement reiTemblantes à l'extérieur, mais dont les dégrés de confiftance étoient très- différens , prefque depuis l'argile primitive juf- qu'aux pierres les plus dures & les plus folides. Jugeons maintenant de ce qui fe doit pafTer fur toute la fuperiicie du globe terreftre par ce que nous venons de voir du feul local de Paris S>c de quelques autres lieux particuliers feule- ment, donc j'ai marqué bs changemens^ physi- ques en aiTez petic nombre. C'efl ma féconde difficulté contre Thypothéfe en queftion tirée de Férat préfeat de k terre ^ qui n'eil certainement fur la Nature & la Religion. 117 pas 5 en grande partie & aufli loin que notre foiblefle peut pénétrer , celui de l'ancien nionde^ XXXII. M. de Buffon remarque très-bien la jufte proportion qui règne entre les côtes de la mer & fa profondeur. C'eft un fait obfervé en général par tous nos Marins ; & Dampîer , un des plus Judicieux, donne pour règle univerfelle, comme il l'a vérifié dans le cours des différens voyages qu'il a faits fur prefque toutes les mers connues , que leur profondeur eft toùfours dans îa plus exaâre proportion poffible avec la hauteur Aqs côtes qui les bordent. C*eft de cette règle générale que M. de Buffon part avec raifon pour prononcer que comme il y a fur la terre à^s élévations de plus de trois mille toifes au-deffus du niveau des eaux , il y a de même dans la mer des profondeurs qui furpafTent cette mefure. Or il fuit diredtement de cette obfervation , ( félon les principes de la nouvelle hypothéfe , fi Taf- ped préfent des chofes dérive du changement alternatif de la terre & de la mer ) que l'on doit trouver des dépouilles de la mer à toutes les profondeurs connues & à connoître jufqu'à la mefure de trois mille toifes , Se même au-delà en quantité confidérable , maintenant le contraire paroît ; plus on defcend en avant dans îa terre , moins on trouve de ces dépouilles j le plus grand Hiij ïi8 Nouvelles Recherches nombre eft toujours vers la fuperficie , & îear ordre , ou emplacement naturel , eft fi bouleverfé , que les Conchœ Pdagice , comme les Naturaliftes les appellent , coquilles d une grandeur déme- furée qu'on ne trouve jamais fur nos cotes 5 parce qu'elles habitent conftamment les parties les plus profondes de la mer , s'y voyent mêlées fans ordre avec les efpeces ordinaires jufqu'à la furface même de la terre ferme. On n'a jamais pu trouver , ni dans nos mines , ni ailleurs , les dépouilles de la mer d'aucune efpece au-delà de deux cens toifes, &: elles y font en moindre quan- tité à raifon de la profondeur. C'eft une obfer- vation que j'ai faite moi-même en différens pays» Il y a Aqs mines de charbon en Angleterre que j'ai vifitées , qui n'excédoient guère cent toifes ^ où on n'en a jamais vu le moindre veftige. Ce renverfement de la nature ne peut donc abfo- lum.ent provenir que d'un bouleverfement de peu de durée;, fubit , pafîager, rapide & fuperficiel, & jamais de l'adion lente, infenfible , profonde & mefurée des courans. Que l'on fe repréfente pour un inftant cette même adion ; félon les partifans de la nouvelle hypothéfe , elle ronge infeniiblement la terre ferme d'un côté , pour bâtir de même infenfiblement & laifTer à fec de nouvelles terres dans quelque autre partie du fur la Nature & la Religion, i ip globe adtuellement couvert des eaux de la mer ; par-conféquent les eaux , à mefure qu'elles ga- gnent du terrein , pouiTent devant elles les fables mêlés des coquilles les plus petites & les plus légères , foit qu'elles fe retirent , foit qu'elles s'avancent , enfouiffent les grofTes dépouilles ma- rines 5 & les grandes coquilles immobiles par leur poids dans les profondes cavités où elles fe trouvent uniquement , depuis cent , jufqu'à la profondeur même de trois mille toifes : or dans le fyftême que nous attaquons , il eft effentiel de creire que toutes les parties du baffin de la mer en deviennent les bords fucceffivement & par me- fure. Cela étant , puifque les courans n'ont ja-- mais la force d'élever les Conchœ. Pclagice qui font d'une grandeur & d'un poids très-confidérable , & les pouffer devant eux vers les côtes , ce que l'expérience attefte , il s'enfuivra, félon Thypo- théfe même , que nous ne devons jamais trouver ces efpeces enfévelies dans nos terres , fînon à de grandes profondeurs & jamais près de la fur- face. Ces grandes profondeurs , comme je l'ai obfervé , font évaluées à trois mille toifes en- viron 3 & les profondeurs ordinaires a cent, ou à cent cinquante ; maintenant , bien loin qu'il foit vrai qu'on ne trouve jamais ces coquilles énormes ^ ou autres coquilles de la mer afforties Hiv Î20 Nouvelles Recherches avec elles par la nature , qu'à la profondeur de cent, ou de cent cinquane toifes pour le moins, on ne les a au contraire jamais vues , & j'en appelle à tous les Naturaliftes , qu'aflTez près de la fuperfîcie. Une preuve de cette vérité géné« raie, entre pîufîeurs que je fuis en état de citer ^ fe voit encore aujourd'hui près d'Afti en Pied- mont , dans une efpéce de vallon élevé entre des montagnes : une quantité prodigieufe de coquil- les de toute efpéce & d'autres dépouilles de la mer mêlées avec des Conchœ pelaglce en grand nombre , dont plusieurs font d'un volume & d'un poids très-confidérable 5c qui n'ont jamais été faites pour habiter enfemble , fe trouvent amon- celées 3 jufqu'à une très- grande élévation , à la furface de la terre même , fans prefque aucune terre intermédiaire. C'eft un fait que j'ai appris d'un Phyficien du pays pendant mon féjour à Tu- rin ; il eft cependant très-clair , par l'hypothéfe , qu'il y a eu un tems où les montagnes qui tou- chent ce vallon , étoient les bords des eaux de la mer : par-conféquent puifque toutes ces différen- tes efpéces hétérogènes , dont une partie ne peut être tranfportée par les courans ordinaires , fe trouvent ainfi pèle mêle 5 il faut de toute né- cefîité qu'un effet lî contraire au procédé com- mun de la nature foit produit par quelque force fur la Nature & la Religion. I2i extraordinaire , telle qu une inondation & une éruption fubite , rapide & violente des eaux , qui , après avoir couvert les plus hautes montagnes , fe font retirées de même en peu de tems avec une impétuofité & une rapidité extraordinaires dans les fouterreins qu'elles occupoient aupara- vant. C'eft de ce tableau, peint d'après Moyfi^ qu'il faut partir pour expliquer en grande partie les phénomènes que nous obfervons maintenant , & c'efl: à des caufes qu'il a marquées dans la courte defcription qu'il nous donne du déluge univer- fel 3 qu'il faut attribuer principalement les tra- ces & les ruines que l'on voit encore après cette cataftrophe dans les vallons Se les montagnes , caufées par des courans très-rapides qui ont dé- chiré en fe retirant les couches , défiguré la fur- face & bouleverfé l'ordre de la nature. Certai- nement l'afpedt de la terre feroit tout autre que celui qui nous refte des ruines que l'on y voit aujourd'hui , & il nous auroit marqué en quelque façon les époques diverfes d'une ma- nière moins équivoque , fi la marche des caufes phyfîques avoir été aufîi lente & aufîi compafTée que celle qui nous eft tracée dans la nouvelle hypothéfe. C'eft la troifième difficulté qui ;Tie porte à la rejetter. XXXIII, Je me fouviens d'avoir été témoin 122 Nouvelles Recherches oculaire il y a quelques années de trois diffé- rentes époques diftindtement tracées dans une couche de tourbe qui bordoit environ à vingt pieds de profondeur les deux côtés d'une rivière dans le Comté de Barkshire en Angleterre à dou- ze mille au-delà de Reading , fur le grand che- min de Londres à Bath. Ces trois époques étoient fi clairement marquées , qu'un curieux du voi- iinage y fit une colledbion fort ample ^ divifée en trois claires , félon l'ordre exa6b des fubftances foiîiles 5 comme il les avoit trouvées en terre à des profondeurs différentes. Depuis quinze à vingt pieds on ne trouve jamais que des troncs d'ar- bres, des bois de cerf, beaucoup de défenfes de fanglier , &: d'autres dépouilles d'animaux fau- vages 5 fans aucune marque d'habitation , ni le moindre veftige des hommes. A iix pieds environ jufqu'à quinze les traces des animaux fauvages cefTent de paroitre , 6c l'on trouve afTez fouvent des efpéces de petites fétiches ou d'idoles d'un travail greffier , à^s haches faites avec le caillou , des reftes de pots de terre mal-figurés & mal- cuits 5 & d'autres marques d'hommes fauvages j vers la furface de la tourbe on voit au contraire , par ce qui refle des ouvrages de ce tems , l'épo- que des habitans plus polis , plus induflrieux & plus fçavans. Ces trois efpéces de fofTiles s'é- fur la Nature & la Religion, 125 tendent fur les bords de la rivière dans le même ordre pendant l'efpace de quelques milles en longueur & d'environ cent pieds en largeur de chaque côté. La couche de tourbe qui les con- tient 5 eft compofée principalement de bois pour- ri , dont on voit encore de gros troncs enterrés , d'où l'on doit inférer que la rivière qui coule le long du vallon , a été autrefois beaucoup plus large , & bordée de forêts , de près & de loin , fur les deux chaînes des collines voifines. Les animaux , aufîî bien que les hommes la fréquen- toient fans doute & y laiffoient de tems en tems quelques traces ; &: comme probablement dans ces premiers fîécles , les arbres abandonnés à eux- mêmes tomboient par le laps du tems , ou par de fréquentes inondations , ils ont contribué en grande partie à compofer les deux couches de tourbe fur les deux bords ; infenfiblement ces matières en s'accumulant ont gagné fur la rivière en retréciffant toujours fon lit, qui main- tenant eft réduit à la largeur d'environ vingt pieds , & à mefure qu'elles avançoient , elles ont enfoui dans l'ordre que nous venons de décrire les divers foflîles que l'on y trouve encore au- jourd'hui. Voilà donc inconteftablement des traces bien marquées 6c des preuves nullement équivoques 124' Nouvelles Recherches des trois différentes époques. Voit-on quelque chofe de femblable fur notre globe qui prouve également le changement alternatif & lent des terres & des eaux , fans aucune équivoque , je ne dis pas des traces bien vifibles de plufîeurs géné- rations d'hommes , mais de végétaux , ou d'a- nimaux dans un ordre qui paroiffe de même répondre en quelque façon à des époques fue- ceffives ? Mais, ce qui augmente l'incertitude, il fufEt de confîdérer attentivement les grands chan- gemens qui s'opèrent continuellement fur la fuperficie du globe terreflre par les torrens qui fe précipitent , par les rivières qui fortent de leurs lits , par les pluies & les orages qui fon- dent fur nos terres , par les rochers qui s'écrou- lent , 6r les énormes avalanges de neige qui tombent dans les pays montagneux , par les végétaux de toute efpéce , depuis le chêne juf- qu'aux moufTes qui croifTent fur les pierres mê- mes 5 & dont il y a plufîeurs centaines d'efpéces qui périiïent en formant de nouvelles couches de terre \ enfin par les anciens volcans qui fe font éteints , fans autre date que celle de leurs traces qui fubfiftent encore dans tous les pays connus , ou par d'autres plus modernes qui brû- lent encore de nos jours ; & par les tremble- mens , dont aucune partie de la terre ou des fur la Nature & la Religion. 12 J mers n'eft exempte , qui embrafTent quelquefois tous les quatre continens à la fois , comme celui de 1755. Il eft bon avec cela de remonter juf- qu'aux caufes phyfiques qui agiffent fi puifTam- ment & li univerfellement depuis cinq mille ans & plus , pour affaiiïer les montagnes , pour com- bler les vallons , pour inonder de grands pays , ou pour les couvrir de nouvelles couches , pour foulever la terre , pour abforber ou déraciner des montagnes , pour fubftituer de grands lacs à leur place , outre mille autres changemens in- fenfibles , produits par s vapeurs minérales , qui s'exhalent & s'accumulent en mafTes folides, ou par des fucs pierreux ou bitumineux qui pé- nétrent fort fouvent des couches de terre & à^s montagnes entières remplies de fubftances fofîî- les, terreftres & marines & les convertifTenc en marbre de toute efpéce , tantôt en pierre , tan- tôt en charbon , en tourbe , ou dam d'autres matières , & fi après cet examen on fe remec les caufes fous les yeux dans un cabinet tran- quille 5 on pourra dire alors : comment trouvera- t-on des preuves phyfiques de la nouvelle théorie fur la fuperficie d'un globe qui varie continuel- lement 5 & dont les changemens & les mélanges fubflantiels fe font opérés pendant cinq mille ans, depuis nos mines les plus profondes , jufqu'à jioç %a6 Nouvelles Recherches plus grandes élévations ? Comment peut-on s^af- furer que les argumens purement locaux que Ton fait en fa faveur , font d'une date affez reculée pour nous afliirer de fa réalité ? ou il l'on trouve une certaine quantité de dépouilles marines &: de corps terreftres , animaux ou végétaux en cou- ches, enfévelis, même avec un certain ordre appa- rent 5 jufqu'à la profondeur , fi l'on veut , de deux cens toifes , comment doit-on s y prendre pour démontrer qu'il ne s'agit pas ici d'un vallon comblé par quelqu'une de ces caufes puiflantes , dont les différentes fubftances fofliles que le déluge univerfel avoir laiflees près de la furface , ont été entraînées & dépofées , comme on les trouve à préfent ? Peut on dire avec certitude & fans aucune équivoque que l'ordre , qui fe trouve dans le local de toutes ces fubftances , eft d'une très-ancienne date , &: l'effet indubitable des courans , pendant que d'autres caufes phyfi- ques beaucoup plus modernes, fe préfentent pour les produire d'une manière plus fimple 6c plus naturelle ? Enfin c'eft dans les pays de monta- gnes que les plus grands changemens s'opérenc continuellement par les caufes que nous venons d'indiquer \ or c'eft au fein de ces mêmes mon- tagnes principalement que nos recherches dans les mines Ôc les carrières , qui s'y trouvent ^ onc fur la Nature & la Religion» 1 17; été poulTées jufqu'aux profondeurs les plus gran- des y rien par - conféquent de fi incertain & de fi équivoque que les conclufions que nous tirons de la difpofition locale des foffiles , en faveur d'une hypothéfe , qui n'a aucune liaifon nécef- faire avec des phénomènes d'une date bien plus moderne. Les pays de plaines mêmes , quoique les changemens n'y foient pas à beaucoup près fifréquens, n'en font néanmoins pas tout-à-fait exempts. La pofîîbilité de ces changemens locaux dans les couches qui fe préfentent de tems en tems à nos recherches , affoiblit nos raifonne- mens & y jette de l'incertitude , parce que les çonféquences deviennent beaucoup plus éten- dues que les antécédens ; or les changemens auxquels les plaines font fujettes proviennent de l'addition des nouvelles couches de fédimenc qu'y dépoferont les pluies continuelles dont cha- que goutte eft chargée, & par le dépérilTement an- nuel d'un grand nombre de végétaux j par la chiite fucceffive des forêts 3c par les inondations des rivières voifines qui fortent de leur lit avec im- pétuofité 5 ou des torrens qui defcendent avec fureur des lieux voifîns Se plus élevés. Nous avons prefque par-tout des preuves de ces vérités y en France , comme en Angleterre , dans le laps de peu de fiécles j nous trouvons très-fpuvenc des 128 Nouvelles Recherches fondemens de bâtimens afTez modernes enfoncés dans lef plaines jufqu'à la profondeur" de dix , quinze ou vingt -cinq pieds, & très -nouvelle- ment, c'eft-à-dire en 1757, on a découvert en Artois une chauffée romaine enfévelie fous les eaux & entourée d'une couche de tourbe , com- pofée jufqu'à une profondeur Confidérable d'ar- bres entiers , les uns debout & les autres ren- verfés ; enfin elle renfermoit , félon ladefcription donnée par M. le Comte d& Caylus , jufqu'à des carcaffes entières d'animaux , de meubles & d'uf- tenfîles dont on reconnoît l'ufage , des vafes , des moules, des armes & des médailles, comme on en retrouve plus ou moins dans tous les lieux qui fourniffent la tourbe. Ces faits prouvent avec évidence l'accroiffement de cette matière dont î'abaiiïement des terres plus élevées , & qu'entraî- nent les pluies, eft une des caufes principales *. Nous connoiffons beaucoup moins la difpo- iition des couches jufqu'à des profondeurs con- fidérables dans les plaines , que dans les mon- tagnes , parce que nous n'avons prefque rien qui nous invite à creufer bien avant dans cette partie de la terre. Quelques puits ou quelques carrières de peu de profondeur ne fuffifent pas 5 * Voyez les Mémoires de l'Académie des Infcriptions & Belles -Lettres 3 vol. ^7, pag, 141. très- fur la Nature é la Religion, i^^ très-foiivent on cq^q de trouver à une perire aiftance de la furface , des coquilles, ou autres dépouilles marines ^ & fi par hafard on Us trouve quelquefois à deux ou trois cens pieds , l'argu- ment que l'on veut tirer de cette découverte , en faveur de la nouvelle liypothéfe , n'efl pas concluant autant par le défaut d'une profondeur fuffifante que par l'incertitude du local , dont l'entière compofition peut n'être pas fort an- cienne. Comment en effet fçavoir que le puits, ou la carrière que nous creûfons , n'a pas été autrefois une efpece de vallon comblé par è.^^ terres rapportées depuis quelques fiécles feule- ment ? Enfin l'incertitude & l'infuffifance des preuves , qui femblent favorifer au premier coup d'œil le fyftême nouveau fur les courans , n'eft que trop bien conftatée , Icrfqu on les examine ; en détail, pour me permettre d'y foufcrire. Et c eft la quatrième difficulté que j'avois a propofer contre fa réalité, XXXIV. Il y a dans la lune des montagnes bien plus élevées que celles de la terre. On leur donne en hauteur un excès d'environ deux tiers par-deflus les nôtres ;, mefure connus séométri- 'quement par l'ombre qu'elles projettent. Or la 'caufe doit répondre à l'effet, & la force des eaux dans la lune , félon les principes de la nouvelle Paru IL T 150 Nouvelles Recherches liypothéfe , eft par-conféqiient fupérieure à celle de nos eaux dans la même proportion : fi cela étoit ainfi , & s'il y avoit dans cette planète des eaux d'une quantité fi confidéuable , non- feule- ment nous obfefverions quelquefois avec nos plus forts télefcopes un changement de figure au limbe par la hauteur exceffive des marées , mais . auilî d'autres phénomènes fe préfenteroient com- me les conféquences néceifaires d'une atmof- phére chargée de nuages & beaucoup plus denfe que celle de la terre. Sur les bords du croifiant nous voyons très-diflindement les fommets éclai-. rés àcs montagnes lunaires détachées du corps de la planète en forme de pointes lumineufes. Il eft en mème-tems démontré que par nos meil- leures lunettes nous découvrons des taches qui 1 ne font pas plus grandes que la ville de Paris : I ajoutez encore qu'il y a bien des années que la \ Sélénographie nous e(l marquée fur nos cartes dans le plus grand détail , fans qu'il y ait eu la moindre variation indiquée par nos Obferva- teurs 5 & fans qu'aucun Aftronome aie remar- qué, ou des obfcurcifiemens 5 ou des change- mens de toute autre efpece dans la plus petite tache lunaire. De tous ces faits pris enfèmble & de l'approximation fréquente à.QS étoiles fixes aux limbes de la lune fans aucune réfradion fen- 1 ^^ fur la Nature & la Religion, 131 fîtle 5 j'ai certainement raifon de conclure qu'il n'y a ni atmofpliére denfe , ni nuages, ni gran- des eaux , ni marées , ni courans deftrudreurs de îa terre ferme j par-conféquent les montagnes qui s'y trouvent proviennent de caufes plus in- times & plus elTentielles à la conftitution de la planète que ne peuvent erre des courans , ou toute autre caufe extérieure Se fuperficielle ^ & c'eft ma cinquième objeilion contre la nouvelle hypothéfe. XXXV. Après avoir dit mon fentiment fur îa nouvelle théorie philofophique , que notre grand Naturalifte ne défapprouvera certainement pas , on remarquera que m^a critique ne peur tomber fur cette théorie , que félon la manière que je la conçois uniquemient, Se d'après la façon qu'elle me paroît être préfentée dans le premier volume de fon Hiftoire Naturelle. Si M. de Bufon veut admettre avec moi une force intérieure expanQve , modifiée par la gravitation , un feu . central qui fe répand jufqu'à la fuperlicie du î crlobe , & dont lui-même trouve par- tout avec ( les Naturaliftes modernes les traces les plus évi- \ dentés , pour pouifer au dehors toutes les gran- - des chaînes des m^ontagnes j s'il fait dériver la ' régularité marquée de ces chaînes , tant pour leurs directions, que pour leurs hauteurs ref- ïjâ Nouvelles Recherches peclives, -de ces deux caufes phyfiques combi- nées enfemble , il s'approchera de (î près de la Cofmogonie de Moyfi ôc des phénomènes , que j'admettrai fans difficulté avec lui les courans com- me de vraies caufes fecondaires, qui ont travaillé en conféquence à nous donner en partie l'afpeét préfent qui fe voit fur l'extérieur de notre globe. La Cofmogonie de Moyfi perte que la terre cou- verte au commencement , pendant les deux pre- miers périodes , d'une matière fluide qui s'eft développée enfuite en répandant au dehors la fubilance lumineufe de la matière aérienne , s'efl élevée après au-deffiis de ce qui reftoit alors , fous la forme d'eau pure , ou d'un troifième élé- ment , après la féparation des deux premiets. C'eil le congregemur aquœ ^ quœ fub cœlo fum ^ in locum unum , & apparcat arida de Moyfi ^ c'eft ia force expaniive qai commence à pouffer au- dehors & a diriger avec la force gravitante les grandes montagnes , dont nous voyons encore de tems en cems quelques effets dans ces Mes, qui fe forment par la force des volcans marins au milieu des eaux \ ce font ces courans par- con- féquent qui fe rendent avec précipitation dans le balîin de la mer formé en même -tems, & après la retraite du déluge j 5c fî tous ces phé- îïomenes peuvent s'exécuter par une théorie quel- fur la Nature & la Religion. î 55 conque dans un tems raifonnable , fans faire entrer enfuite un changement alternatif de l'eau Se de la terre , contraire aux loix de la nature , par un excès de milliers ou de millions de fiécles, comme nous Tavons prouvé ci-deffus, cette théo- rie répondra parfaitement aux fix joursde là créa- tion mofaïque , pris pour des périodes^ de tems , dont la durée doit fe régler par la phyiique de la terre. Je laifTe ce foin à M. de Buffon , li jamais il juge à propos d'éclaircir les difficultés que j'ai l'honneur de lui préfenter , en développant la théorie autant que les principes le demandent , & en la mettant ainfi à la portée de tous les. Ledbeurs. Voici une occafion de préfenter une idée neuve de M. Linnœus , qui revient parfaitement biert aux conféquences que nous cherchons à établir d'après l'Hiftoire facrée , & à Fafped préfent de la terre, & qui fait en même- tems partie d^une hypothéfe alTez probable que nous préfentons maintenant 3 en Tabandonnant aux recherches des Phyficiens. L'idée de ce Naturalifte eft de démontrer qu'il ftiffifoit , pour remplir dans la fuite la terre d'êtres vivans , d'en avoir à la créa^ tion deux individus de chaque efpece , l'un mâle , l'autre femelle. Il eft certain déjà, que c'étoit-li W cas du genre humain 3 ôc cela par le témoin lii} 154 Nouvelles Recherches gnage de l'Ecriture Sainte , qui dit de plus qae cette première paire fut placée dans le Paradis Terrellre , & c^'Adam , après avoir conlidéré pendant quelque tems les efpéces , leur donna àes noms propres , & exprefTifs de leur nature, C'efl ainfî, dit -on , que les Tartares , par un leul mot compofé, approprié ou à leurs chevaux ou à leurs chiens , expriment enfemble leur taille, leur couleur & toutes leurs qualités. C'eft l'efprit de l'Ecriture Sainte , abfolument contraire à celui de nos Philofophes modernes , d'attribuer tou- jours à Dieu perfonneîlement ce quin'eft très- fouvent qu'une fuite ordonnée des phénomènes phyfiques & de ne jamais féparer la nature de la providence paLticuîiere , qui préfide fpécia- lement à tout événement quelconque. Perfonne par-conféquent tant foit peu au fait de fon dyle^ ne s'étonnera de fa façon de s'énoncer, quand elle dit : Le Seigneur Dieu ayant donc formé de, la terre tous les animaux terrefrres & tous les oifeaux du ciel ^ il les amena devant Adam y afin quil vît comment il les appellerait ; & le nom quAdam donna à chacun ejl fon véritable nom, G en. Cap. ii. v. * Ce Texte de rEcriture Sainte femble confirmer ^ à n'en pouvoir douter , que les fix jours de la création doivent être pris pour fix périodes ^ eomme nous l'avons fur la Nature & la RetlgLOîî. 135' C'eft fans doute de ce témoignage pofltif que M. Linnœus eft parti pour pofer comme principe qu'il n'y avoir au commencement que deux êtres de chaque efpece d'animaux , & que toute cette partie de la création étoit afTemblée devant Adam dans le même lieu , de plus on doit fuppofer , ce qui n'efl nullement contraire aux loix de la nature , que dans ce tems , & même long-tems après jufqu'au déluge, efpece d'époque qui ré- pond au fiécle d'or des Anciens, les hommes & les animaux maintenant carnivores , vivoient de végétaux , & que la terre produifoit alors en abondance fans culture. Dans cette vue la malé- didtion de Dieu contre la terre & fes habitans ne s'exécuta pas tout de fuite, mais par le laps du tems & principalement par le déluge ^ dont les caufes phyiiques fe préparoient de loin j évé- nement qui a changé totalement & l'influence des élémens , & la conftitution du fol , & la nature ^des animaux & le tempérament du genre humain. Une preuve afTez forte de cette hypotîiéfe f© trouve dans la vie des Patriarches, quis'eft foa- dit ci-defTas. La connoilTance de l'Hiftoire Naturelle dans «n degré de perfedion , comme étoit celle à' Adam , fup-» pofe un tems d'une certaine durée , c]ui ne peut pas s'ejar»- tendre. d'un jour de 14 heures^ \^6 Nouvelles Recherches tenue dans toute fa force prefque jufqu au dé- luge 3 & qui a commencé à s'abréger d'une ma- nière très-prompte immédiatement après cette révolution. Je fens bien qu'un Naturalifte moderne , qui , comme la plus grande partie de nos Hiftoriens , ne fe tranfporte jamais hors du cercle étroit de fes connoifTances préfentes , s'effrayera de ce que j'ofe avancer que les animaux maintenant car- nivores, n'étoient pas toujours de même, ôc me montrera, comme une démonftration phyfique, leur force , leurs griffes ôc leurs dents canines ; mais je lui demanderai â mon tour , s'il ne dé- pend pas abfolument de lui de nourrir fon chien comme il veut , & de le reftreindre pour toute nourriture aux végétaux , afin de lui faire perdre par l'habitude le goût qu'il a pour la chair ; ne peut-on pas élever de la même manière un jeune lionceau ou un tigre , comme un chien ou un chat ? C'eft fur cette expérience , qu'il eft aifé de faire , que Je pofe , comme fur une bafe cer- taine, la vérité de mon hypothéfe. Voici un fait que j'ai appris pendant mon féjour à Genève : une perfonne m'ayant affuré qu'on prenoit par an fur les montagnes voifines dans un efpace de iix lieues aux environs de la ville plufieurs^ milliers de renards , je me fuis adreffé à un fur la Nature & la Religion^. 157 marchand Foureur de l'endroit pour en fçavôir l'exadte vérité ; non-feulement il m'a confirme ce que l'autre m'avoit dit , mais il a ajouté que dans certaines années le nombre des peaux qail avoir eues des chafifeurs montoit jufqu'à dix & même jufqu'â quinze mille. Mon étonnement a été , non pas qu'il y ait dans un efpace fi peu confidérable un C\ grand nombre de cqs ani- maux , mais de fçavoir d'où cette multitude pou- voit tirer une nourriture fuffifante. Car la mul-- tiplication d'une efpece très-prolifique ^ comme eft celle des renards , dépend uniquement de l'abondance de la nourriture. Pour m'éclaircir fur cette difficulté, je me fuis adreifé aux chaf- feurs 5 qui tous , en me confirmant le fait an- noncé 5 m'ont répondu , qu'outre le gibier qui fe trouve en très-grande quantité dans les Alpes, le renard vivoit dans ce pays de racines fari- neuf^s , mais particulièrement de celles qui font bulbeufes & groifes comme des patates. On m'a dit la même chofe des loups , qui très-fouvent , quand ils ne trouvent aucune autre nourriture ^ ont recours aux végétaux. Tous ces faits fervent à me convaincre que l'efpece de nourriture n'effe abfolument qu'une affaire de tempéram.ent pour tous les animaux carnivores quelconques , vu que la néceiîité les force quelquefois à vaincre leurs I i^S Nouvelles Recherches habitudes fanguinaires , même dans l'état pré- fent des chofes , & que les feuls végétaux peu- vent fufïire à leur fubhftance. D'où j'infère fans difficulté que leur férocité & leur manière de vivre aujourd'hui eft plutôt accidentelle & lo- cale 3 en quelque manière , fuivant les change- mens produits dans le tempérament des élémens , qu'une fuite nécefTaire de leur organifation , ou effentielle à leur nature. C'eft pour la même rai- fon que je n'ai nulle répugnance à admettre la pofiTibilité phyfique de ce que l'Ecriture Sainte nous préfente dans un fens métaphorique , quand elle dit , en parlant du changement de la nature humaine par l'avènement du Mefîie , Léo ut Bos paUas comedet ^ le Lion & le Bœuf fe nourriront de pailles : & je crois pouvoir conclure fans hé^^r , que non- feulement le vin fut inconnu aux Antédiluviens , n'étant pas nécefTaire fous la température adluelle de la terre , mais aufîi que l'ufage de la chair fut ignoré des hommes & des animaux. Je vous ai donné ^ dit Dieu avant le déluge , touus les herbes qui pomnt leur graine fur la terre , &' tous les arbres pour vous fervir dû nourriture, Gen. Chap. i. v. x^. Et après cet évé- nement 5 tout ce qui a vie &* mouvement vous fer- vira de nourriture , je vous ai donné tout cela comm& fai donné autrefois les légumes ùf les herbes, Gen* fur ta Nature & la Religion. 13^ Chap. 9. V. 3. Or rien ne peut erre plus pofitiE que cette différence d'économie en fait de nour- riture établie par Dieu même avant , & après le déluge; la terre, ou cette partie du globe terreftre qui paroiffoit hors des eaux avant cette époque , dont le Paradis Terreftre détruit par un feu fouterrein , probablement immédiatement après l'expulfion de l'homme , faifoit comme le centre , cette terre , dis- je , étoit beaucoup plus féconde fous un climat plus heureux , que les terres nouvelles qui fe font montrées après tou- tes en ruines , mêlées de fables ftériles , de fubftances pétrifiées , Se de mille autres dépouil- les de la mer , dont une partie a été difperfée par toute leur fuperficie pendant l'inondation générale , & une autre partie encore plus confi- dérable a été dépofée fucceffivement en cou- ches depuis la première production des animaux aquatiques au quatrième période , jufqu'à leur, émerfion après cette cataftrophe. Aucune raifoii en effet ne nous force de croire que la Géogra- phie antédiluvienne ait été la même que celle d'aujourd'hui , ni fi étendue de beaucoup près » ni de la même forme. Il fuffifoit que la terre augmentât alors en proportion de la propagation . des hommes , & de leur genre de vie : or nous voyons qu'à la Chine par exemple , où les hom- ï^o Nouvelles Recherches mes vivent pour la plupart de végétaux, un efpace affez borné peut nourrir facilement jufqu'à qua- rante millions d'habitans. Le luxe de mille per- fonnes fait de plus grands ravages que la nour- riture d'un million de gens qui fe contentent du fimple néceffaire. Ces concluions donc pofées comme très-probables , voici l'hypothéfe de M. Llnnœus fur la fortie de la terre ferme des eaux de la mer , qu'il doit néceflairement fuppofer fucceflive dans une certaine fuite proportion- nelle à raccroilTement de (qs habirans , comme je l'ai dit ci-devant, quoiqu'il n'entre pas dans le dérail des caufes phydques , dont elle fut l'effet 5 ni dans l'ordre des phénomènes qui en furent les conféquen ces. XXXVI. La partie de la terre ferme , qui a paru la première hors des eaux , étoit le Paradis Terreftre : Adam avoir pour compagne non- feu- lement fa femme , mais aufii toutes les efpeces d'animaux , dont chacune renfermoit au com- mencement un mâb & une femelle , & toute la création étoit alors comme concentrée. Cette fuppofition eft abfolument néceffaire pour nous faire comprendre ce que dit l'Ecriture Sainte , que toutes les efpeces d'animaux paffoient en revue devant le premier homme , & qu'à me- fure qu'il les avoit bien confîderées à plufieurs ' fur la Nature & la Religion, iâ^i reprifes , il leur donnoit des noms propres qui défignoient leur nature. Or TaiTemblage de tou- tes les efpeces d'animaux dans une feule région ^ fuppofe nécefTairement & la préfence de tous les végétaux , & le concours de tous les climats. Cette conféquence eft prouvée par la nature des animaux en général, qui dcivent avoir, par-touc où ils fe trouvent , de quoi fe nourrir , & par- ticulièrement par celle des infedes , dont plu- fieurs ne peuvent s'accommoder que d'une feule efpece de plantes. Maintenant ii le globe terreftre avoir été form.é dès le commencement, comme nous le voyons dans fon état préfent , il ne kzolt pas naturel de croire que toutes les efpeces d'a- nimaux euflfent été enfermées & circonfcrites dans un efpace aufïi étroit qu'étoit celui du Pa- radis Terreftre \ il faudroit plutôt en conclure qu'elles étoient alors , comme aujourd'hui , dif- perfées & diftribuées par toute la terre , ce qui n'eft nullement probable pour plufieurs raifons , & fpécialement pour celle du plan de la nature qui fuit toujours la marche la plus fimple. Afin donc de réfoudre tous les phénomènes , M. Lin- nœus pofe pour principe d'après Moyfi^ qu'au com- mencement la terre écoit couverte par les eaux^ excepté une feule Ifle affez griinde pour contenir tous les animaux Se les végétaux. Ce principe 14^ Nouvelles Recherches eft appuyé par plufieurs phénomènes qui paroîjf- fent prouver que la terre ferme s'augmente en tout tems aux dépens de la mer , dont les caufes phyfiques, foit intérieures, foit extérieures , opè- rent avec plus ou moins de vîtefle, félon leurs différens dégrés d'adivité ; cette adtivité peut avoir été au commencement , félon la nature de ces caufes , beaucoup plus confîdérable qu'au- jourd'hui \ ainfi il ne nous eft pas poflible d'efti- mer la durée exadte du période depuis la créa- îion par ce que nous obfervons maintenant , mais de quelque manière qu'elle ait été , elle fuffira toujours pour expliquer les phénomènes que nous voyons dans les plantes de toute efpe- ce 5 dans les coquilles foflîles Ôc dans d'autres dépouilles de la mer que Ton trouve par-tout fur la terre , & qu'on ne peut pas attribuer dans leur totalité à un déluge pafTager. Après avoir établi ces principes , M. L'mnœus entreprend de montrer comment tous les ani- maux 6c les végétaux peuvent , dans cette Ifle , avoir un fol , un climat propre a leurs efpeces , en la plaçant fous l'équateur & en la couronnant d'une très-haute montagne , égale à la plus haute des Cordillieres : car c'eft itî^ fait généralement connu , que les mêmes plantes fe trouvent fur les Alpes, les Pyrénées ^ les montagnes d'Ecofle^ fur la Nature & la Religion. 14J îe mont Olympe, le mont Liban & le mont Ida, & qu'on les voit fur celles de la Laponie & du Groenland j M. Tourmfon a trouvé au pied du mont Ararat en Afie , les plantes ufuelles d'Ar- ménie , un peu plus haut celles d'Italie , encore un peu plus haut celles des environs de Paris 9 enfuite en montant toujours il vit les plantes de la Suéde , & en dernier lieu prefqu'au fom- met & parmi les neiges , dont le mont Ararat ^fl couvert plus ou moins en tout tems , étoient les plantes des montagnes de la Laponie : »j II y i> a même moyen , ajoute notre Auteur, de con- y> noître les différentes hauteurs par les plantes « qu'on y trouve , ce que j'ai éprouvé plufieurs >5 fois avec fuccès moi-même , en comparant les M montagnes de la Dalécariie avec celles de la » Laponie «. M. Linnceus s'applique enfuite à nous faire comprendre comment le nombre immenfe des individus qui exiftent à préfent pouvoir naître d'une feule plante de chaque efpece , ce qui eft bien plus (impie & plus conforme aux voies de la nature , que de croire que Dieu les ait créées par-tout au même inftant. Pour preuve de ce qu'il avance de leur fertilité & de leur propa- gation prodigieufe en peu de tems , il cite l'ef- pece de l'Ele-Campana , dont une ^eule plante 144 Nouvelles Recherches a fourni trois mille femences , celle du Tournâ- fol quatre mille, celle du Pavot trois mille deux cens 5 celle du Tabac quarante mille trois cens vingt : mais à chaque efpece de plantes an- nuelles , dont nous fuppofons qu'au commence- ment il n'y a eu qu'un individu de créé, donnons deux femences feulement \ il y aura encore après vingt ans un million quarante-huit mille cinq cens foixante-feize individus , car elles augmen- tent dans une proportion géométrique qui double toujours , à fçavoir 2. 4. 8. i(j. 5Z. &c. * Cette hypothéfe , toute iînguliére qu'elle peut paroître , porte avec elle un certain air de pro- babilité & fe conforme aiTez bien à l'Hiftoire Sacrée où nous apprenons que quatre grandes rivières prenoient leur fource dans le Paradis Terreftre , qui après l'expullion à' Adam a été pro- bablement changé en volcan, comme nous avons tout lieu de le préfumer , puifque Moyfe dit, dans le ftyle de l'Ecriture en parlant de Dieu ** , ^ M« Linn&us remarque que depuis quelques années feulement nous voyons en Europe plufieurs efpeces de plantes qui nous viennent d'Amérique. Voyez dans fon Ouvrage les moyens dont il penfe que la nature fe ferc pour la propagation des végétaux. ^^ Qui facit Angelos fuos fpiritus , & Minijlros faos ignem urentemc Pf 1030 y. 4, dont fur la Nature & la Religion, 145- 'dont les vents font les meffagers & le feu le miniftre , & après qu'il Veut chajfé du jardin , il mit devant et lieu de délices un Chérubin avec un glaive éîincelant & mobile, Gen. Chap. 3. v. 24. L'idée d'une montagne élevée fous l'équateur, prémices de la terre future , fe confirme encore par quelques autres Textes. Le Seigneur navcit pas encore plu fur la terre & il n en fortuit aucune fource d'eau pour en arrofer toute la fur^ face. Gen. Chap. 1. v. 5 ôc 6, ou comme quelques Interprêtes l'expliquent , une rofée ne fe rèpandoit point fur la terre. Et v. lo. De ce lieu de délices fortoit un fleuve pour arrofer le Paradis, Or de ces Textes, on peut inférer clairement la forme qu'avoic alors cette partie de la terre qui étoit néceifai- rement élevée , avec une pente très-douce pou& la diftribution de l'eau qui defcendoit toujours , & fe rèpandoit par-tout lentement. Cette rofée fans pluie , qui ne devoir paroître qu'après , ou cette inondation lente , femblable à celle de TEgypte 5 femble devoir s'étendre à toute la terre 'antédiluvienne, qui par-conféquent n'écoit pas aflfurément fi étendue que nos continens d'au- jourd'hui 3 peut-être^ pas plus que le Royaume de la Chine : fans cela comment entendre ces paroles de Dieu après le déluge, Gen. 9. v. 13. Je mettrai mon arc dam Us nuées , G?* il fera lefi^m Fan. IL K ï4^ Nouvelles Recherches de ralliancs, entre moi &* la terre ? Et comment comprendre la vie très-longue de ceux qui vi- voient avant cette cataflrophe , (î l'équilibre des elémens étoit rompu à tout moment , comme aujourd'hui , pour produire les pluies , les vents ^ les orages ? XXXVII. On pourra oppofer à M. Lïnnaus , qui fait fortir toute la multiplication de deux feuls individus , mâle & femelle dans chaque efpéce 5 robfervation de M. àe Buffon , qui , comparant en Naturalifte l'état préfent des cho- fes^ trouve piufieurs efpéces propres au nouveau continent , dont l'ancien , comme il croit _, efl totalement privé ^ mais outre que M. de Bufhn n'a jamais crû que ces efpéces foient lerrigénes , ^ que lui-m.ême applique ce fyftème aux chiens qu'il fait defcendre par une propagation qui s'altère continuellement en comptant depuis le chien du berger, on peut dire , i®. que nous ne connoiiTons pas routes les efpéces qui font éloignées de nous dans les déferts de l'Afrique , pendant que nous connoiiTons à- peu- près toutes celles qui fe trouvent dans les climats chauds du nouveau continent dont il s'agit uriquemenr, parce que fous l'équateur & entre les deux tro- piques 5 l'Amérique efl il refferrée que luutes les races qu'elle poiTéde paiOfenc tôt ou tard e^ fur la Nature & la Religion, 1 47 tevue devant fes habitans. C'eft ainii que dans une rivière très - étroite , un pécheur connoïc bientôt tous les poilTons qui l'habitent , au lieu que dans une rivière , telle que celle des Ama- zones ou de la Plata , dont on ne peut point atteindre à la vue les deux bords oppofés , aucun des navigateurs qui les fréquentent ne peut fça- voir toutes les efpéces aquatiques qu'elles nour- riffent. On peut dire , avec M, de Buffoii , qu'an- ciennement les deux continens étoient liés en- femble par des bandes de terre à la façon de celles de Jupiter , & dont il y a encore des traces très - évidentes dans la chaîne continuelle des ïfles & des bas-fonds qui fubiident aujourd'hui entre les deux tropiques *. La tradition hiftori- que femble concourir avec ces remarques ; elle fait mention de l'Iile Atlantique qui touchoit prefqu'à notre continent ancien , plus grande que l'Afrique , en s'étendant vers )^ou€(l , & d'autres terres abforbées depuis par des tremblemens de terre. Au moins c'eft une hypothéfe à laquelle aucun Naturalifte ne peut oppofer des raifonne- mens tirés de l'état préfent de la terre , & qui par - conféquent eft très - polTible , ce qui fufEt pour celui qui veut foutenir le fyftême de M. * Voyez la Carte phyricjuc, politicjue & matb'^matique iu Sieur Denys^ ■^^S Nouvelles Recher cites Linnœus v la feule objedion qui paroît un peu plaufible 5 eft celle qui fe tire de ces deux efpéces d-'aniuiaux^ que ron appelle VUnau Se l'^i, qui, félon M. de Buffon , font propres aux terres mé- ridionales de l'Amérique & ne fe trouvent main- tenant nulle part, linon par accident, dans l'ancien continent : ces animaux , que Ton nomme aufïî panjfèux , font ii lents dans leurs mouvemens , qu'ils ne font guère qu'un quart de lieue dans un jour ; par-conféquent , en avançant toujours en ligne droite par une forêt continuelle d'ar- brilTeaux propres à les nourrir , il leur falloir pour j arriver depuis le Cap Tagrin en Afrique par la chaîne marine 5 ou reRes de l'ancienne Ifle Atlantique , jufqu'au Cap St. Âugudin dans le Brélîl^ trente mille jours ou quatre-vingt année» environ. La chofe n'eft pas phyfiquement im- poffible, fur- tout il on peut fjppofer leur multi- plication, pendant ce période, aifez confidérabîe pour occuper un très .grand efpace en longueur fur un terrein un peu étroit : mais j'aimerois mieux croire qu'ils y ont été apportés autrefois par les habitans qui pafToient d'un continent à l'autre , comme l'obferve M. de Bufvn en parlant de d'état préfent des chofes. Que Ji Von a vu quelques-uns de ces animaux ^ foit aux Indes Orien-' iahs 3 folt aux cous d' Afrique ^ ce que certains i fur la Nature é" ^^ Religion. r4p Naturalises précenHent , il efi fur qù ils y avGizju éd tranfponés. On demandera peut-être ce que font devenus les refies de ces animaux & toutes les autres efpeces que l'on ne voit plus dans l'an- cien continent-; il eft probable que ces efpécei ont été détruites par les hommes ^ com.me les loups en Angleterre. Dans cette vue , je conhdére l'Amérique eit grand comm_e je vois en petit une lile au milieu d'une grande rivière, & qui faifoit autrefois une pénin fuie attachée à fon rivage. Sur cette ïfle je trouve établie une efpece de fourmis que je ng vois nulle part , vingt lieues à la ronde , & je dis tout de fuite en moi-même, ces fourmis ne font point venues ici a la nage , car la chofe n'eft pas poffi'ble pKyfîquement j elles ne font pas non plus terrigénes , quoiqu'il ne m.e foit pas encore ar- rivé de voir cette efpéce ailleurs j mais cette Ifle faifoit faiis doute autrefois, une partie du rivage ^ &: elle a été coupée enfuite & féparée avec fes habitans par la ruine des terres intermédiaires & par les eaux. Cette comparaifon, eft d'autant plus jufte qu'aucun Phyliciea n'oferoit avancer que les.efpéces d'animaux que Ton croit parti- culières à l'Amérique , ne pourroient pas vivre, ^ m propager fi elles étoient tranfportées dans les mè.me^ climats & fous les mêmes latitudes dans. K iij. i^o Nouvelles Kecherches l'ancien continent, C'eft donc un pur aecideûî qui les a féparées , èc par-conféquent cette ob- fervation ne fait rien contre le fyilème de M. LinrKZus ^ qui parc de la première création da monde , ni contre Thifloire de Moyfi , qui ren- ferme toute la race des animaux avec leur femen- ce future dans l'arche de Noë, Ce font-là de ces petites dilîicuités phyfiques qui nailTent de notre ignorance , mais qui dirparoiiTenc comme une vapeur légère devant les grandes preuves de la Religion , & qui s'expliquent par mille hypo- théfes phyliquenient: poffibles. XXXVIIL Après tout il y aura peut-être des Philofophes , qui , refpedanr à leur façon l'au- torité des Livres facrés, fans nier i'hypothéfe de M. Linnceus , quant à la produdion locale & concentrée de toutes les efpéces d'animaux , pro- pres en quelque façon au terrein & au climat de notre continent , ne laiiTeront pas de dire que le continent nouveau, en vertu de la même puif- fance divine communiquée à ces terres , a pu produire en mème-tems les animaux & les vé- gétaux qui lui font propres , conformément aux remarques de M. de Biiffon, Dans ce cas ils ne manqueront pas d'ajouter que l'on doit fuppofer que j ( fi nous exceptons les communications qui ont été détruites entre plufieijrs Ifles 6c les conti- fur la Nature & la Religion, i^i nens , & peut-être encore dans ces anciens rems entre continent & continent , par le déluge , par des tremblemens & autres caufes phyfiques ) la géographie générale, quant aux quatre grandes parties qui compofent maintenant la terre habi- table 5 éroic alors à-peu-près la même qu'aujour- d'hui : que par-conféquent les caufes primitives , mifes en mouvement à la parole de la Divinité par fa vertu intim.e , ont agi en conféquence pour élever au troi(ième jour , ou période de la création , toutes les terres habitables à-peu-près comme nous les voyons & avant de les peupler. Viendra enfuite le déluge, qui, quoiqu'annoncé commue général , n'enveloppera pas abfolument , félon leurs idées , tout le continent d'Amérique , qui dans ce tems n'étoic peuplée que d'animaux fauvages j parce que , diront-ils , cette dévada- tion 3 félon l'efprit même de l'Ecriture Sainte y ne tombe en forme de punition que fur le local du genre humain directement , comme feul cri- minel devant lui. Dans cette vue , quoique l'E- criture Sainte dife poiîtivement en parlant des eaux : ^ omnia repUvcrunt ïnfupzrfLcïe terrœ , elles couvriront toute la furface de la terre : OpertU qmfunt omncs montes exce^Jifub unlverfo cœlo , tou- tes les plus hautes montagnes qui font fous le ciel en furent couvertes : quindscim cubids altior^ 'j^L Nouvelles Recherches fuit aqua Juper montés quos opcruerat , l'eau for- paiTa de quinze coudées le fommet des monta-- gnes : confumptaque efi omnis caro , quos, movebatur fuper tcrram , volucrum , animantïum , bilîiarum , oni' niurnquc nptïlïum , qu(Z nptant fuper tcrram : uni^ yerjî homïnzs 6?* cuncla , in quibus fpiraculum vîtes eÇi ^ in terra mortuafunt. Toute chair qui fe meut: fur la terre fut confumée , tous les oifeaux ^ rous les animaux , routes les bêtes & tout ce qui rampe fur la terre : tous les hommes moururent , ôc généralement tout ce qui a vie & qui refpire fur la terre. Et ddevit omnem fubjlantïam qaœ, erat fuper terrant , ah homme ufque adpecus^ tam reptile quam volucres cœli ^ & deleta funt de terra : rcmanfît aiLtem folus No'é & qui cum eo erant in arcd. Toutes îes créatures qui étoient fur la terre , depuis riiomme jufqu aux bêtes , tant celles qui rampent que celles qui volent dans l'air, tout périt j il ne refta que Noë* feul , & ceux qui étoient avec lui dans Farcheo Je dis que malgré ces exprelîions fi pofîtives, les Philofophes reftreindroient fans doute l'univerfalité des e^ets du déluge aux feu- les terres habitées alors par le genre humain , comme feules impliquées , félon leur totalité , dans la maiédidion générale. Les montagnes îes plus élevées du continent nouveau , celles qui ^ont fous réquateiir^ fe trouveront par ce moyen fur la Nature & la Religion, ijj exemptes de l'inondation à caufe de leur hauteur extrême que l'on croit furpafTer celle des mon- tagnes d'Afrique ou d'Alie , & ainii il y aura encore de la terre féche & en alTez grande quan- tité pour fauver les débris du règne animal , qui, chafTé à mefure par les eaux qui avançoient , sy fera réfugié naturellement. En attendant , com- me tout change par le laps des tems , certaines efpéces conferyées dans une terre long - tems inhabitée fe trouveront aujourd'hui en Améri- que , tandis qu'elles ont été détruites autrefois par les chafTeurs dans les autres continens , com- me les loups d'Angleterre. Mille autres acddens , ou caufes phyiiques , contribueront en mème- s^ms , félon eux , à produire par à^s changemens infenfibles le contrafte obfervé par M. d& Buffon entre des contrées fi éloignées & féparées de- puis un fi long- tems. C'eft même la raifon qu'en donne ce célèbre Naturalifte , car il eft bien éloi- gné de croire les animaux propres au nouveau continent comme terrigénes. Cette hypothéfe paroit très - plaufible en ne la regardant que légèrement ; mais m^algré fon afpeél flatteur , j'aimerois mieux avec les vrais Sages 5 qui craignent de compromettre la parole. faerée , ou de mettre la fcience & le témoignage de Dieu en balance avec les opinions purement 15*4 Nouvelles Recherches humaines , m'en tenir a la iertre de l'Ecriture Sainte & me fier à la providence de la Divinité, qui 5 fans faire des miracles proprement dits , mais difpofant de tous les événemens & de la volonté humaine , peut avoir mis en ufage des moyens qui nous font inconnus pour repeupler enfuite l'Amérique d'hommes & d'animaux fé- lon fon bon plaifir. Or pour le tranfport de cer- tains animaux l'homme éroit alors conduit com- me aujourd'hui 5 par ce qui lui paroiîToit utile, & encore plus fouvent par fes caprices. Depuis que nous connoilTons ce pays^ & dans refp««e de deux fiécles environ , les Européens y ont tranfporté un grand nombre de différen- tes efpéces d'animaux, en même - tems qu'ils en ont rapporté avec eux une très-grande quan- tité de végétaux , autrefois inconnus à nos con- trées & propres à l'Amérique. L'afpedl des deux continens eft prefque changé par-tout dans un efpace de tems très- court. Eh bien ! pourquoi ne m'eft-il pas également permis de fuppofer que des colonies Afiatiques anciennes , dont nous ignorons aujourd'hui & les mœurs & les ufages , navigateurs comme nous par des voyages plus courts , ou autrement par des com.munications qui ne fubfiftent plus , auront tranfporté un cer- tain nombre d'efpéces 5 tant animales que végé- fur la Nature & la Religion, i$f taies , par des vues ou des caprices connus d'eux feuls ? ce qui fait maintenant un grand myftère pour nos Philofophes , comme ce que nous fai- fons aujourd'hui deviendra myftérieux pour quel- que fiécle futur , fi le monde fubfifle alfez long- rems pour produire des problêmes nouveaux. En tout cas je m'en tiendrai à la lettre de l'Ecriture Sainte , comme étant un appui plus folide que tous les raifonnemens difcordans des hommes , parmi lefquels on n'en trouvera pas deux du même fentiment, jufqu'a ce que l'on nous donne- une démonftration phyfique qui falFe ceffer les contradidions qui les divifent aujourd'hui. Il fe paiïera peut-être bien des années avant que nous foyons forcés de reculer , en abandonnant le fens littéral , &: quand ce tems arrivera , s'il arrive jamais , il fera aifé de le faire , en fuivant la fage maxime de St. j4ugujiln , fçavoir que les grands argumens en faveur de la révélation doivent por- ter tout homme raifonnable à refpeéter l'Ecriture Sainte comme la parole de Dieu , & à l'entendre toujours à la lettre , à moins que des raifonne- mens abfolument vidorieux , ou la voix de l'E- glife 5 ne nous obligent de la prendre dans un fens métaphorique. XXXIX. Dans les idées que je viens de préfen- ter 5 toutes fingulières qu elles peuvent paroître, ïfê Nouvelles Recherches ôc que je tâche de pofer pour principes dans mes recherches phyfiques , bien loin de croire que je m'écarte de refpric de la Religion & de l'E- criture Sainte , je cherche au contraire à m'en approcher plus qu'on n'a jamais fait en uniffant enfemble la Théologie de la Philofophie. Les Incrédules modernes > en jettant des doutes fur la réalité des miracles opérés de tems en tems , quoique rarement , par la Divinité , Ôc en attri- buant tous les effets phyfiques à des puiifances purement méchaniques fans aucune intervea- îion de fa part , femblent , dans leur façon de raifonner , tendre de plus en plus vers l'Athéif- me. Les Auteurs Sacrés au contraire , outre hs miracles qu'ils établiifent comme des faits qui arrivent quand il plaît à la Divinité , finiiTenc par lui attribuer , même perfounellement j les effets naturels. Le Philofophe méchanique s'ar- rête au monde vifible , ne voit nulle part que la nature 5 Ôc Dieu par fes principes exclufifs fs perd dans la matière. Le vrai fage Chrétien aa contraire dévoile la création, écarte la matière Ôc perce jufqu'au premier principe , dont telle eft la providence qui veille à chaque elfet en détail, qu'un paifereau ne tombe pas à terre fans une volonté particulière. C'eft.pour cette raifon que 3 félon les mêmes Auteurs facré§ , la Phyfx- fur la Nature & la Religion. 15' 7 •que 5 par une harmonie confiante préétablie , eft toujours liée avec la morale j ainfi la même théo*; cratie , mais beaucoup plus générale 5 règne main- tenant fur les Nations , comme elle conduifoit autrefois chaque événement en particulier chez la Nation Juive. Il y a Aqs Philofophes qui , faute de généralî- fer afTez leurs idées , regardent le déluge décric par Moyfi , & attefté par la tradition générale de prefque toutes les Nations , tant civilifées que fauvâges , comme un effet au-deffus des forces ordinaires de la nature. Ils fe prévalent en con- féquence de la manière dont les Auteurs facrés s'expriment , en ne perdant jamais de vue la Di- vinité 5 pour faire pafTer ce phénomène comme un miracle produit par un effet extraordinaire de la Toute- Puiiïance \ ils oublient en même- tems les refforts cachés de la nature que nulle perfonne ne peut connoître dans toute leur éten- due 5 & la préfence intime de Dieu , qui eft le maître de ces relTorts pour les faire agir comme il veut 5 ou par une harmonie préétablie depuis le commencement , qui conftitue fa providence générale , ou par une volonté fpéciale confor- mément à cette vérité énoncée & toujours fup- pofée par les Auteurs facrés : 6* pugnab'u cum €0 orbis urrarum contra injmfatos. Et l'univers îj'S Nouvelles Recherches combattra avec lui contre les infenfés. L'ordre de la nature , félon mes idées , n'eft donc autre chofe que l'ordre de la providence , & Dieu ne peut fe réparer de fon ouvrage en l'abandonnant totalement a lui-même. Cela pofé , voici com- ment je place le déluge général du côté de la Phyfîque parmi les effets naturels ^ en mème- tems qu'il eft vraiment du côté de la morale une punition infligée de la part de la Divinité par la liaifon que Dieu a établie au commencement entre ces deux fyftêmes fans aucun nouveau mi- racle , ou effort extraordinaire de la Toute- Puiffance. X L. Je commencerai cette fedion , qui eft une des dernières fur la théorie de la terre , par préfenter différens faits phyfiques très- connus, avec leurs conféquences immédiates fur la na- ture des hautes montagnes & fur les volcans en général pour les réunir enfuite dans un feul point de vue & réfumer tous mes principes. La première caufe adive & expanfîve qui fe montre avant toutes les autres , félon Moyfe , eft l'éiément de la lumière; or on peut très -bien entendre par lumière la matière éledrique en mouvement 5 je veux dire cette matière que*tous les Phyfîciens reconnoiffent pour un agent géné- ral plus puiffant qu'aucune autre caufem atérielle fur la Nature & la Religion^ I0 quelconque , qui remplit 3c pervade librement toute la malfe de la terre , dont chaque partie en particulier en pofTéde une certaine quantité pro- portionnée à fa nature. Elle exifloit , félon le même Ecrivain facré , avant que le foleil , qui n'eil qu'un inftrument fecondaire pour agir fur elle 5 comme les corps fonores agififent fur l'air, ait commencé à l'ébranler. Cachée dans les en- trailles de la terre , en même-tems qu'elle fait la vie de l'atmofphére, elle étend fon empire, dont nous ne connoifTons pas les bornes , aufli loin que fe porte l'influence du globe terreftre ; elle nous éclaire, &; elle allume les maffes in- flammables ôc combuftibles qui font contenues dans l'intérieur du globe ^, Par-conféquent fon droit de priorité , d'indépendance des autres caufes créées , & de fa puifTance fupérieure eft attefté par fon Créateur , dont l'Ecriture Sainte ■^ Les révolutions qui fe pafTent dans l'intérieur de la terre communiquent fouvent des chocs aux différentes parties du globe , que nous relTentons fur la fuperfîcie , 8c les mouvemens extraordinaires qui parviennent jufqu'à nous, ne font alors que les contre-cou[S de ceux queTia- térieur du globe a éprouvés. Ces impulfions prefque cen- trales , ou qui vont du moins à de grandes profondeurs , deviennent d'autant plus fenfibles à raifon de la longueur du levier, que nous forames éloignés du centre du mou-î yement. fï6d Nouvelles Recherches eft l*organe qui l'exprime , & par la nature qaî fe découvre en même-tems à nos recherches. Voici des faits phyfiques conféquons à cette caufe univerfelle , le feu éledrique , dont tout notre fyftème eft imprégné , & d'où procède im- médiatement la figure pré fente des chofes par expanfion. Les élévations les plus exhauffées ne font fur la terre qu'une très-petite portion du total; des gonflemens fuperficiels , que nous appelions continens , & de peu de valeur en comparaifon de fa maffe. Toutes les montagnes confidérables , faifant partie des grandes chaînes qui inveftifTent le globe terreftre , portent en elles vifiblement l'empreinte du feu fouterrein d'où elles tirent leur origine. Selon M. de la Condaminc , celles des Cordillieres qu'il a examinées , font ou des volcans aduels , ou d'anciens volcans éteints ; peut-être encore ces volcans ne font-ils éteints que depuis le déluge , &: c'eft la raifon qui fait que l'on n'y trouve plus aucunes dépouilles de la mer , comme le même Académicien l'attefte ; on ne les verra pas non plus dans le voifinage du mont Véfuve , ni aux environs d'aucun autre volcan qui bride depuis cette époque , parce que le feu doit les calciner & les réduire en poudre. Toute la chaîne des Appennins a été de même examinée par plufieurs de nos Phyficiens d'An- gleterre fur In Nature & la Religion. i6î gîecerre que j'ai connus dans mes voya^res : ils Qnt trouvé de ia lave &z d'autres marques d'un embrafement ancien depuis le mont Véfuve juf- qu'à Viterbe. Les coquilles foffiles y font auflî mêlées par- tout, excepté auprès de ce volcan : c'eft iin^ marque que le feu y eft éteint depuis rrès-long-rems. Les Phyficiens françois ont fait les mêmes remarques fur les montagnes d'Au- vergne ; &c c'eil dans ces cantons , auiii - bien qu'en Afrique , qu'on trouve de cqs colonnes pen- tagones qui com.pofent ce pavé tant célébré des Géans en Irlande. Ces colonnes, dit-on, traver- fenr le fond de la mer jufqu'en Ecoife , où on nous aiïure qu'on en voit encore àes traces. Elles font l'effet, félon M. Dcjmarais , célèbre Obfer- yateur , des volcans jadis enOammés & éteints aujourd'hui. La furface de ia terre en efc parfe- mée 5 & on les fait monter jufqu'au nombre de cinq cens , connus , fans compter ceux qu'on ne connoit point dans les pays inhabités ou inac- celfibles aux voyageurs. Le mont Véfuve près de Napîes brûle depuis dix-fept fiécles , & le monc Gibel en Sicile depuis l'antiquité hiftorique la plus reculée. Quelle doit être la profondeur de leurs foyers ? Le Père d^ la Torré ^ Phyiicien d^ Naples , a fait une efpece d'eftimation des ma- tières qui font forries du Véfuve : la quantité en Par:, IL L i6z Nouvelles Recherches eft prodigleure ; mais on ne fait pas 'entrer en ligne de compte ce qui s'exhale en fumée & en vapeurs qui en forcent fans ceffe nuit & jour. Une torche de quatre livres fe confume en très- peu de tems fans laiffer aucunes traces. Que l'on imagine maintenant combien de milliards de milliards de livres en matière folide ont difparu depuis la première éruption connue du tems de rEm.pereur Tite - Vcfpajïcn , & qui échappent aux plus habiles Calculateurs. Des Provinces en- tières ne fufEfent guère pour fournir la maffe de matières com.buftibles requife pour un vafte incendie d*une il longue durée. L'Italie 6c la Sicile font routes minées à une très-grande pro- fondeur \ qui peut en douter ? Elles peuvene difparoître un jour & être englouties dans les goufres fouterreins, comme le vafte continent de l'Atlantide miné & fabraergé jadis , dont les Mes Canaries , les Acores & celles du Cap verd ne font peut-être que les fommsts. Ce qu'on affure des Cordillieres dans une étendue de plus de ioo lieues , peut fe dire également de toutes les grandes chaînes quelconques ; elles abondent en mines qui travaillent a fe développer, & elles font creufées par-tout. On ne voit ni mines mé- talliques 5 ni volcans dans les plaines pour l'or- dinaire , mais on y trouve par - tout àQ$ eaux fur la Nature & la Religion. 1 6j rfiaudes minérales & des exhalaifons. C'eft une marque de l'iiniverfalité des feux fouterreins qui fe décèlent plus fenlîblement dans les grandes montagnes , où le paifage eft plus libre , & la ré/iftance moindre. L'eau peut être dilatée par le feu que nous avons entre nos mains jufqu'â occuper un volume treize ou quatorze mille fois plus grand que fon volume naturel. Les vapeurs qui fortent des fentes du baffin du Solfatara à Pozzuolo près la ville de Naples font d'une fî • grande fubtilité , fi rapides & fi raréfiées qu elles paffent facilem.ent au travers d'un morceau d'é- toffe 5 de laine , de foie , de toile , de cuir , ou enfin de toute autre matière molle & poreufe quelconque qu'on lui oppofe , fans les mouiller. Il n'y a d'autre moyen de les arrêter que de leur préfenter une lame de m.étal ou une glace j- alors elles fe condenfent en eau un peu falée, & même affez promptement & en quantité fufEfante pour en remplir en peu de tems une bouteille d'une pinte. On né peut avoir , à ce qu'il me paroît , une preuve plus fenfible de l'extrême ténuité de ces vapeurs , dont la force expanlîve , fem- blable à celle d'un vent impétueux , augmenté, en raifon de la raréfadion produite par la violence inconcevable des feux fouterreins qui . les portent an dehors. Le foufre efl générak- i-ij Q %gj. Nouvelles Recherches ment répandu avec des matières combuftibles* L'intérieur de toute l'Italie paroît en être rem- pli. L'ïlle d'iflande n'eft peut-être qu'une grande mailè de foafre , comme i'obfervent les Naru- ralides , dont tous les faits phyfiques que j'ai rap- portés ici , ne font que des extraits copiés prefque mot pour mot. Les charbons de terre, le bitume, le nitre , tant de matières converties en vapeur doivent tendre à occuper un efpace immenfe 5 & la force expaiifive , prife en général , doit exer- cer une a6lion très-puilTante contre les maiTes qui s'oppofent a fon développement. Ces maifes peuvent réfîfter abfolumenc : ce font les plaines fur la furface de la terre ; elles peuvent réfider en partie feulement ; ce font les montagnes creu- fées en dedans , mais entières au-dehors : enfin elles peuvent céder à Tadion impétueufe de ces feux prodigieux , félon toutes les proportions imaginables , jufqu'à fe rompre , de-là procéderont les volcans. La gravitation augmente continuelle- ment depuis réquateur jufqu'aux pôles , &c par- conféquent une partie de laréiiftance. Lesmouve- mens , ou les chocs s'arrêtent aux pôles j mais ils fe dirigent , & par propagation en avant de l'é- quateur vers les deux extrémités 5 & par ré'fléxion en arrière , & des deux pôles vers la ligne. C'eft la diredion générale de toutes les grandes chaînes,. fur la Nature & h Rdlgicn. \6f S'ils rencontrent des obftacîes locaux ^ ils s'écar- teront latéralement : les moindres chaînes vont pour la plupart de Vejl à Vomjî, Les foyers àts forces expanfives doivent fe trouver à de gran- des profondeurs, & plufieurs milliers de toifes pour le moins au - deflous des bafes des plus hautes montagnes. Cette vérité phyfique s'an- nonce par divers phénomènes j on le prouve par le feul mont Véflive qui brûle depuis dix- fepc iîécles aux dépens d'une quantité de m.atières combuftibles que l'on ne peut point calculer. Il y a long-tems que Naples & tout fon voiiinage auroient été rongés intérieurement jufqu'à la fu- perfîcie du fol, & même minés & abforbés, fi le foyer de ce volcan n étoir pas à des milliers de toifes enfoncé fous la terre. Les volcans en gé- néral ne pourroient jamais fufîire à cqs incendies continuels d'une ii longue durée , fi. la matière inflammable étoit toute contenue dans leurs cavités, & ne partbit pas d'un abyme très éloi- gné de leurs bafes \ c'eft une preuve que toute § ces grandes chaînes ne font pas fimplement des élévations fuperficielles placées par des courans , mais des excroiffances énormes donc les racines s'étendent bien avant vers le centre du globe. 11 y a des volcans qui fe font élevés au milieu de ï Océan en y formant des Ifles qui fubfiflcnt Liij l66 Nouvelles Kecherches encore depuis leur excindion ; ces volcans n'aa- roient jamais pu foutenir leur intégrité en for- me de montagne rn.airive , fans s'éteindre , ou s'écrouler contte le volume immenfe d'eau qui les enveloppoir , s'ils n avoient pas eu une den- fîté & une profondeur proportiomiées à leur volume. Ajoutons donc à la hauteur de ceux qui s'élèvent fur nos continens , comme les Cordil- îieres , jufqu à trois ou quatre mille toifes , U profondeur de VOcéan , qui ce peut fe toifer par les fondes des mariniers , & celle qu'il faut en- core pour maintenir l'intégrité d'un volcan ma*- rin , & nous aurons pour la profondeur totale de leurs racines , ou foyers, pluileurs milliers de toifes. C'eft la moindre mefure que l'on peut leiur donner , fans néanmoins la fixer à cette valeur précife , car qui de nos Philofophes , dont les reckerches les plus profondes n'embra(fent pas la trois cent foixantième partie de la capacité du globe terreftre , peut m'afUirer que le foyer commua de tous les volcans & de tous les mou- vemens convulfifs que la terre éprouve , n'eu: pas placé au centre même ? Dans la fuppoil" tion déjà prouvée par un certain nombre d'ob- fervatipns qui augmentent tous les jours / que Ton trouve des veftiges du feu dans toutes les grandes chaînes , l'action de ce feu comme caufe , fur la Nature & la Religion* 16^ porte une relation phyfique Se nécelTaire avec l'origine de la montagne comme effet ; car , fui- vaut ce que j'ai déîa remarqué^ nous ne trouvons dans les plaines ni volcans , ni même des veftiges de volcans. D'ailleurs nous avons des montagnes produites par la force expanfive des feux fou- rerreins , comme le Monte novo à N?»ples , celles de rifle d'ifcliia dans le dernier (lécle , dont trois bouches que j'ai vues fubfiftent encore , les Ifles élevées par la même force au milieu de la mer & plufieurs autres exemples femblables qui fê voyent encore. Douze villes célèbres d'Afîe , affez éloignées les unes des autres, ont été renverfées'dans une feule nuit 5 félon Taciu , par un tremblement de terre qui l'ouvrir dans toute la contrée ; deS' monta- gneis s'afFaifTerent , à^s plaines s'élevèrent, & au travers de ces ruines il s'élançoic des feur. Tac^ Armai. Liv. IL Foumier y dans fon Hydrographie, rapporte que dans le Pérou , au commencement du dix- fcptième fîécle, en un quart d'heure les mon- tagnes, les villes, les rivières furent boulever- fées , & cela dans Tefpace de trois cens lieues de long fur quatre-vingt-dix de large. Il eft très- légitime & rrès-phyfîque de con- clure d'une force connue 6r fuiSfante , & d^s Liv ï62 Nouvelles Rec/ierc/ zes efiets vifîbles encore forr communs fur le globe ^ à une force générale ^ qui pouvoir 8c devcic agir avec une certaine uniformité far une maire nou- velle plus dudile de plus homogène qu'elle ne peut l'être dans un état de demi-pétrifacftion , comme elle fe préfente aujourd'hui. Si Ton me demande maintenant de quel principe cette maffe nouvelle tenoit la quantité de réfiilance fiiiHfante pour modifier cette grande force ex- panilve , ôc la contraindre en la refTerrant , non- feulement à fe montrer hors du baffm de la mer fous une forme régulière, mais auffi à travailler avec uniformité Ôc une lenteur proportionnée à la propagation du genre humain , comme je le fuppofe 5 je réponds avec Moyfi que Dieu, dont la puiflance , félon TEcriture Sainte , fait tout par nombre ^ poids & mcCure , avoir tout com- biné d'avance relativement à {qs delTeins. Dans cette vue on aura non-feulement toutes les con-. N ditions néceifaires pour la figure requife au-déhors de la fuperficie de la terre , mais il eft abfolument impoilïble de faire dériver les phénomènes phy- fiques , qui en lont la fuite , de quelqu'autre caufe. Encore une fois les courans peuvent- ils donner des chaînes régulières avec des directions ^ déterminées , ôc proportionnées en hauteur , de manière qu elles agifient enfaite comme çaufes fur la Nature & la Religion. \6g phylîqiies pour atriter les nuages. Faire l'aîllii les fources , nourrir les rivières , enirerenir les ma- gafins de glace & ae neige , & former les diffé- rentes mines ? Tour cela fuppofe une méchani- que & une combinaifon , qui n'efl nullement donnée aux courans irréguliers , incertains & aveugles; & s'il faut de plus que rout fait calculé préalablement pour former une habitation avec toutes fes relations phyiiques convenables aux befoins des plantes , des animaux ^c des hom- mes dans un tems donné & proportionné à leur propagation future , qui ne doit pas être d'une trop longue durée , certainement , pour folu- tion d'un problême fi compliqué , perfonne ne s'avifera d'appeiler à fon fecours les caurans , Ci on fait attention à l'extrême lenteur de leurs effets & à leur infuftîfance phyfique de quelque façon qu'on les confidére. Il èll même beaucoup plus conforme à nos idées phyiiques de regarder la terre côm.me une efpéce de globe vital & or^ ganifé à fa façon , & d'attribuer fa figure exté- rieure à Taclion des caufes intérieures j comme lorfque l'on voit fur le corps d'un animal une excroifTance beaucoup plus grande en raifon de fon volume , que la plus haute montagne ne l'eft à celui de la terre , on ne s'avifera jamais de douter qu'elle ne foit l'effet immédiat de la Î70 Nouvelles Recherches force végétacrice intérieure dont ee corps eft animé. Voici un extrait que j*ai fait d^nn Auteur moderne y ceft un calcul connu que 1 on trouve dans tous les Traités d'artillerie. Six mille livres de poudre à canon placées dans une mine à qua- rante pieds de profondeur enlèvent de terre un fblide , qui forme un paraboloïde , dont la partie fupérieure eft un cercle qui a quarante pieds de rayon. Ainfii puifque le trop fameux tremblement de terre de 1755 a ébranlé la terre dans une étendue de plus de 1500 lieues en longueur , prefqu en tous les fens , il faudroit fuppofer que le foyer d'explofîon a été à plu- fieurs lieues de profondeur dans la terre , juf* qu'aux deux tiers pour le moins de fon rayon. Ce tremblement a paru par-tout prefque fimul- tané \ car il s'eft fait fentir à la même heure à' peu-près dans les quatre parties du monde juf- qu'à leurs extrémités. Qu'il ait été ou qu'il n'ait pas été l'effet immédiat d'un feu 3 ou d'un volcan intérieur à une profondeur proportionnée à fon extrême étendue , cela revient au même quant à la puiflànce de la caufo phyfique ^ dont je foutiens les droits , qui fouieve ainll en même- tems les continens &/ les mers dans toiis las pays connus. Elle a travaillé vifibiement dans i'mté- fur la N'ancre & la Religion. 171 rieur de la tei;re en la pénétrant bien profon- dément 5 puifque quelques, jours ava^nt , félon différentes relations qui nous font venues de- puis y des Obfervateurs ont remarqué que plu- ijeurs fources très- éloignées les unes des autres ont tari prefque fubit^ment , & d'autres ont été troublées confidérablement à àt^ centaines de lieues de Lisbonne ^ en France , en Italie , en An- gleterre ôç dans prefque tous les pays qui font fîtués plus au nord. Qu'on la réduife par-con- féqu-ent , fî Ton veut , à des phénomènes élec- triques ; réleâxicité qui n'eft qu'un mode du feu fouterrein exalté , dont tout le globe eft imprégné quand elle s'accumule pour caufer àes effets funultanés , fî prodigieux Ôc fi éloignés , eft toujours proportionnée à la malfe , & mon raifonnemient fur fa puiifance , fur fon étendue > fur fa quantité & fur fa profondeur s'appliquera, de même , comme caufe néceflaire , aux effets phyfiques dont je cherche l'origine , oc fe fou- tiendra dans toute fa vigueur. En un mot la force expanfive , dont je parle , produit encore aujourd'hui les mêmes effets , quoique dans une moindre étendue , tels que la génération des nouvelles montagnes , l'écroulement des ancien- nes , la fubflitution Aqs grands lacs à leur place, 6c d'autres du même genre précifément que ceux 172 Nouvelles Recherches dont nous cherchons les caufes phyfiques au corn- lîiencement de notre globe. Que peut-on défirer de plus formel & de plus précis ? Je ne puis finir le tableau que je viens de crayonner fans préfenter l'original d'où je l'ai tiié 5 où prefque toutes mes idées fur la théorie de la terre font renfermées en peu de mots. Sa- lomon parle dans la perfonne de la fagelTe qui précède , produit & gouverne tous les ouvrages de la Divinité. Elle exifte avant la formation des collines , des montagnes , des fources qui fe font élevées enfuite, &: à^s abymes qui font une conféquence nécelTaire de la difpofition géné- rale des chofes : voilà l'ordre phyfique établi par l'Auteur Sacré, dans fon Livre des Proverbes , chap. 8.V. 25. 24. 25. 2<3. 27. 28. 2c;. Les abymes nétoient point encore , ( ou 5 comme porte l'Hé- breu , ils nétoient point fermés coïKme au compas ) lorfqiie j'étois déjà conçue : les fontaines nétoient pas encore for tics de la terre. ^ . . . Les montagnes avec leur maffe énorme ne pef oient pas encore fur la terre ; fétois enfantée avant les collines, ... Il na- V oit pas encore façonné la terrt ^ ( félon l'Hébreu & les Septartte y les campagnes , les déferts & les hauteurs habitées de la terre : ) il navoit pas produit les fleuves , ni fait tourner la terre fur fes gonds ou fur f es pôles. . , . Lorfquil préparoit les cieuxfàois fur la Nature & la Religion. 175 pùfinu ; lorfqull cnvironnoit les ahymes de leurs bornes & qu'il leur prefcriv oit une Loi inviolable. . . . Lorfquil affermijjoit l'air au-dejfus de la terre & qu il foutenoit en équilibre les eaux des fontaines.,^ Lorfquil renfermait la mer dans fes limites & quil inipofoit une Loi aux eaux afin quelles ne pajfajfent point leurs bornes ; lorfquil pofoil les fondemens de la furface de la terre. Les Auteurs facrés parlant du globe terreflre s'expriment ainfî : // efl fondé fur fa Jlabiliti ; il efl fufpendu fur le néant. Job. 2(3. 7. . . . Ces paro- les font entièrement conformes au vrai fyftême -des Antipodes : mais quand ils ajoutent dans d'autres endroits que Dieu a établi la terre fur les eaux 5 il eft évident , par toute la teneur de l'E- criture Sainte 5 qu'ils, parlent de la furface ex- térieure hériCfée de montagnes , & bâtie y^r les abymes. Héfiode a recueilli des idées femblables de la plus haute antiquité. Tlieog. v. 315. Le noir Tartare , dit- il , efî au centre de la terre ; il y a un cercle de fer qui le lie fortement ; par di-ffus ce cercle tjl répandue une nuit obfcure qui l'enveloppe de trois rangs d'épaijfeur ; au-deffus de cette nuit ténébreufe font pofés les fondemens de la terre & de la mer. XLI. Après qu'on aura pris une jufte idée du tableau précédent 6c de tous les effets phyfiques î74 Nouvelles Recherches qaè j'ai préfentés pour faire fentir îa force ex- panfîve intérieure dont norre globe eft vifîble- menr animé , quel eft ce vafte problême dont la folutioti 5 il nous en croyons nos Philofophes, demande de fi grands frais ? C'efl: pour l'attein- dre que Burnet emploie les plus grandes forces de la nature à bâtir les continens avec leurs montagnes pour les faire écrouler au déluge uni- verfel , & les plonger enfuite dans le grand aby- me. C'efl pour nous fournir une quantité d'eau fuffifante qui puifTe les couvrir , & un furcroît de la puîîTance attradive pour rompre la croûte folide de la terre , que W'hijion nous amène aQS extrémités de notre fyftème fo îaire par une eîlypfe allongée de cinq cens années de cours , ia plus grande de toutes les Comètes connues, îa même , dit-il , qui a paru en 1^80 : c'eft pour expliquer la grande diverfité des matériaux hé- térogènes , leur accumulation & leur difpofition que Woodv/ard réfout toutes les parties folides de la croLire terreftre , & les fait entre- naeer dans une eau trouble qui les dépofe enfuite , comme il le prétend fauifement , félon l'ordre de leur gravité fpécifique : c'eil pour fe tirer de l'embarras que les phénomènes terreftres lui eau- fent 3 que l'Auteur de Telliamcd , fans lumières 6c fans connoiiTances néceiTaires pour rendre fur la Nature & la Religion* '17J Fhypothéfe plaufible , déplace les continens avec leurs montagnes & les mers avec leurs Ifles, & parmi lefquelles il y en a de très-petites donc nous connoiffons néanmoins Iiiftoriquemenc la fiabilité depuis près de trente (iccles , & qui fe perd enfuite dans les ténèbres d'un tems fî reculé qu'il choque la Phyllque : c'eft encore pour nous dire comment les coquilles & les autres dépouil- les de la mer fe trouvent enfouies fur les plus hautes montagnes , fans l'aide d'un déluge qui fait peur à nos Incrédules , que le célèbre M. d& *** 3 après avoir recherché fort foigneufement fî ces mêmes coquilles n'étoient pas , par quelque heureux hafard , nn jeu de la nature , s'eft déter- miné à la fin 5 dans un Mémoire préfenté au fçavant Inftitut de Boulogne , à attribuer leur tranfport fur les montagnes d'Europe aux Pèle- rins dans le tems des Croifades, & aux Singes celles d'Afîe & d'Afrique. Après une dépenfe fi grande d'efprit & de recherches de la part des hommes, de quoi enfin s'agit-il ? Croira-t-on que tout fe réduit litté- ralement à des £xFoliations & à des élevûres , eft , en général , celle qui s'accorde le mieux avec mes idées , & ap- proche le plus de la vérité du Texte facré; à l'exception de certaines caufes phyfiques qu'il a employées, & qui me paroifiTent trop vaftes, trop compliquées , trop irrégulières , 6c trop lentes par elles-mêmes pour produire les effets qu'il en déduit. Il eft beau fans doute d'avoir péché par un excès de génie qui embraffe trop à la fois 5 & qui s'étend encore au-delà de foa fujet. C'eft tout ce que j'ofe dire , quand il s'agit de faire la critique Aqs opinions d*un Sa- vant de fon mérite en fait de- connoifTances naturelles. Peut-être fon fyftème n'eft-il fujet à des exceptions que faute d'un développement qui lui manque encore , & que fon illuftre Au- teur pourra lui donner dans la fuite j en ce cas l'aurai contribué par mes objections à lui pro- curer cette clarté néceflaire , 6c c'eft tout a % Miij i 82 Nouvelles Recherches que je dois défîrer : je ne cherche que la vérité, a laquelle je fuis toujours difpofé de facrifier mes idées favorites. XLIII. Les conféquences phyfîques de tout ce qui précède me femblent aflez fenfibles , quoi- que la grande multiplicité des objets que j'ai xalTemblés fe montre d'abord avec une certaine confufion \ mais enfin pour les rendre encore plus claires & plus précifes, je vais en faire une efpéce de précis en les réuniffant à mefure que j'avancerai avec le Livre de laGénefe : c'eft le feul moyen de leur donner toute la force néceffaire , en démontrant , par Tenfemble , leur conformité avec THiftoire Sacrée ôc avec celle de la nature. Après le développement lent & gradué des quatre élémens, comme nous l'avons déjà remar- qué , Dieu dit aujjî : que Us eaux qui font fous k cidfe raffemblem dans un fui llm & que V élément aride paroijfe , & cela fe fit ainfî, Gen. Chap. i . v. c). Dieu dit encore : que la terre pouffe de Vherhc verte .... 6* cda fut fait ainfi, V. 1 1 . Et dufoir &* du matin fe fit le troifieme jour, V. i 3 . Dieu dit auffi : que les corps lumineux foient faits 5 ou comme l'Hébreu le porte , que des lumi-- naires foient dans le firmament du ciel ^ afin quils Vivifient k jour & la nuit, V. 14 Et dujoir C?* du matin fe fit k quatrième jour, V. 15» fur la Nature & la Religion^ 1S5 Dieu dit aujjî : que les eaux produifent des poif- fons vivans & des oifeaux qui volent fur la terre. "Sf » 10 Et dufoir & du matin fe fit le cinquième jour. V. 13. Dieu dit cLujJi: que la terre produlfe des animaux vivans chacun félon fon efpéce , des quadrupèdes , des reptiles. V. 24. . . . Dieu dit , faifons l* homme. V. 16. Dieu dit auffi : ( parlant à l'homme ) je vous ai donne toutes les herbes qui portent leurs graines fur la terre Gr tous les arbres qui renferment en eux- mêmes leurs femences , chacun félon leur efpéce , pour vous fervir de nourriture & à tous les animaux de. la terre ^ & a tous les oifeaux du ciel y & à tout ce qui a vie & mouvement fur la terre , afin quils aient de quoife nourrir ^ & cela fut fait ainfî, V. 29, 20.... Et dufoir & du matin fe fit le fîxieme jour. 2. 31. Et Dieu acheva le feptieme jour l'ouvrage quil avait fait ^ & il fe repofa ^ ou comme l'Hébreu porte 5 il ceffa de travailler. , , . Chap. 2. v. 2. Ift^ funt generationes cxlï ôc iqux. Telle a été C origine du ciel & de la terre , & cefi ainfi quils furent faits , au jour que le Seigneur les forma , & quil fit de même toutes les plantes des champs , avant qu elles fuffent forties de la terre ^ ou quelle s cuffent germé ; car le Seigneur navoit pas encore Miv 1S4 Nouvelles Recherches fait pleuvoir fur la terre ^ & la. terre , ( félon I© Texte Hébreu) n av oit pas encore fait fonlr d'elle des fources , ni de la rofée , qui pujferit arrofer tou^c fafurface, V. 4. 5. & 6, Le Seigneur Dieu forma donc l'homme du limon de la terre. V. 7. Or le Seigneur Dieu avoit planté au commence^ ment un jardin délicieux dans lequel il rnit Vliomm^ quil avoit formé. V. 8. De ce lieu de délices fortoit un fleuve pour arrofer h Paradis ^ & de- là ce fleuve fe partage en quatre . canaux, V. i o. Le Seigneur Dieu prit donc Vhomme & le mit dans le Paradis de délices afin qu'il le cultivât^ V. 15. Le Seigneur Dieu dit aufjz\ il nejî pas bon que Vhomme foit feul , faifons lui une compagne fem^ hlahle a lui. Le Seigneur Dieu ayant donc formi de la terre tous les animaux terrejîres & tous les oifeaux du ciel les amena devant Adam , afin qu'il vît comment il les appelleroit, V. i 8. 6c 1 9. Le Seigneur Dieu envoya un fommeil à Adam ^ 6' lorfquil étoit endormi ^ Dieu tira une defes côtes & mit de la chair à la place ^ & le Seigneur Dieu forma de la côte . . , . une femme quil lui préfenta^ Alors Adam dit : voilà maintenant Vos de mis os. ^ ^ la chair ds ma chair, V, ii. 2,2. & xj. fur la Nature & la Religion^* iSy Le Seigneur le mit hors du jardin de délices afin quil cultivât la terre & après quil Veut chajp du, jardin , il mit devant ce lieu de délices un Chérubin avec un glaive àfiammes étincelantes & mouvantes *. Or toute la terre étoit corrompue & remplie d^ïnï-r- quités devant le Seigneur, , , , // dit à Noé , la fin de toute la chair efi réfiolue en mapréfence. Chap. 6, V. II. & 15. J'amènerai fiur la terre les eaux du déluge , & je ferai mourir tous les animaux vivanjs qui font fious le ciel ^ & tout ce qui efi fur la terre fera confumé.,,. Et vousfere^ entrer dans l'arche ..., de toutes les efpéces mâles & femelles , afin qu elles vivent avec vous : des çifiaux félon leurs efpéces , des animaux (^ des reptiles .... de chaque ejpéce^ V. 17, 15?, Fous prendre^ donc avec vous de toutes les chofes dont on peut manger 6* vous les porterez dans Var^ che 5 & elles ferviront à votre nourriture & a cells des animaux, V. 2 1 . Prene^fept mâles Çf fept femelles de tous Us ani- maux purs 5 & deux mâles & deux femelles des * Chérubin , ou fort & puîjfant , vient d'une racine c[ui fîgnifîe labourer, c'eft ce qui fait que quelquefois on le fubftitue au mot bœuf, Chap. 3. v. 23. 24. On foupçonne que le Chérubin de Moyfe étoit un HiercH glyphe d'Egypte qui avoit fa (îgniiication particulière ;ç U qui , peut-être , exprimoit un volcan. tB6 Nouvelles Recherches animaux impurs, Prene:^ au[ji fept mdles & fept femelles des oifeaux du ciel , afin d'en conferver la race fur la terre. Chap. 7. v. 2. & 3. Je détruirai de dejfus la terre toutes les créatures que fai faites. .... V. 4. Apres donc que les fept jours furent écoulés , les cau^ du déluge fe répandirent fur la. terre .... les fources du grand ahyme furent rompues & les caia^ racles du cid furent ouvertes ; & la pluie tomba fur la terre pendant quarante jours & quarante nuits. V. 10. I i. 12. Les eaux crûrent & groffirent prodigieufement fur la terre ^ & toutes les plus hautes montagnes qui font fous le ciel en furent couvertes. Veau ayant gagné le fommet des montagnes s'* éleva encore de quinze coudées plus haut. Toute chair qui fe meut fur la terre fut confumée . , , , & tout ce qui rampe fur la terre. V. 19. 10. 21. Or le Seigneur s^ étant fouvenu de Noé ^ envoya un vent fur la terre qui fit diminuer les eaux. Et les fources de V ahyme furent fermées , auffi bien que les cataractes du ciel^ & les pluies qui tomhoient du ciel furent arrêtées , & les eaux agitées je reti- rèrent de dejfus la terre , allant & venant les unes fur les autres. Chap. 8. v. i. 2. & 3. Or Noé bâtit un autel au Seigneur^ & prenant de tous Us animaux 6* de, tous Us oifeaux purs ^ il fur la Nature & la Religion. 187 les lui ofrit en holocaujic fur tautd. V. 20. Taï mis entre vos mains tous Us poi[fons de la mer ; tout ce qui a vie & mouvement vous fcrvira, de nourriture ; je vous ai donné tout cela comme les légumes & Les herbes. Chap. 9. v. 2. & 3. Je mettrai mon arc dans les nuis , & il fera h Jlgne d^ alliance qui ejî entre moi & la terre ^ &c, Y. 1 3 , Et comme Noé était Laboureur , il planta une. vigne , & ayant bu du vin il s'ennivra. Y. 20. 21, Et tout le tems de fa vie ayant été de neuf cens cinquante ans ^ il mourut, Y. 29. On attribue à Saturne ^'avoir commencé à cultiver la terre & la vigne ; on lui donne la terre pour époufe. Ici le prophane même s'accorde avec le facré. Immédiatement après le déluge , furvient le changement de la terre \ effet vraiment phy- fique. Cette cataftrophe & celle des climats , malgré l'ufage de la chair & du vin , qui étoit permis dès- lors pour en retarder les conféquen- ces 3 font les caufes qui font quye l'âge de Thom- me diminue continuellement dans une proportion fuivie jufqu'au tems d'Abraham. X L I Y. Yoici maintenant les vérités phy(î- ques qui dérivent de tous les textes que je viens de citer dans leur ordre naturel. La pointe la plus élevée de TAfie , cette mon- îSS Nouvelles Recherches tagne fur les coteaux de laquelle Te place en- fuite le Paradis Terreftre ^ paroit au comman- dement de Dieu. C'eft la tête & la partie la plus ancienne de la terre antédiluvienne , qui fe dé- veloppe enfuite lentement. Premier phénomène. Cette partie de la terre , qui vient de fe montrer , commence à pouffer de l'herbe verte ^ précifément à la fin du troifième période , qui touche à l'aurore du quatrième ; or c*efl exade-» ment à ce moment que le foleil fe montre pour perfectionner la végétation déjà portée à un cer- tain degré par la chaleur intérieure du globe. Second phénomène. La préfence du foleil avoit échauffé la terre & les eaux , pendant tout l'efpace du quatrième période, pour les difpofer à devenir prolifiques , quand les eaux émues intérieurement par l'ef- prit de la Divinité toujours agiifant fous le voile des caufes fécondes , fe fécondent & produifent les poi(fons ^ les oifeaux. Troifième phénomè- ne 3 avec lequel finit le cinquième période. La terre fe développe à mefure fous la con- duite de Dieu , & f e perfectionne de plus en plua. Le commencement du fixième période voie paroître les quadrupèdes avec la fuite des ani- maux terreftres , & la fin nous préfente l'homme qui doic les commander, comme le dernier &. fur la Nature df la Religion^ 189 ïe plus parfait de tous les ouvrages divins. Qua- trième phénomène. La durée de ces /îx périodes nous eft entiè- rement inconnue ; elle dépend, pour ainiî dire, des différentes pièces , dont les élémens prolifi- ques ôc leurs produits font compofés j leur nom- bre 5 leur oi:dre intérieur , la nature de leur dé- veloppement, & mille autres circonftances qui les regardent de la part des caufes extérieures , nous font néceffairement cachées j tout ce que BOUS pouvons foupçonner , c'eft qu elle doit être confîdérable 5 fi nous prenons pour terme de valeur les extrêmes parmi les végétaux & les animaux , comme font les chênes & les baleines. Or il eft certain, par ce que Moyfe nous dit des végétaux, qu'ils n*ont pas été produits dans toute leur grandeur, puifque l'ordre a été donné di- rectement à la terre de commencer à les pouf- fer au-déhors avant que le foleil eût paru, pour les perfe(5i:ionner. X L V. Il n'y a rien dans cette notion d'un développement par dégrés de la terre ferme , de contraire à la vraie Phyfique j loirr de s'y op- pofer , elle eft même très-conforme à la nature du globe nouveau, qui fortoit alors d'une ma- tière lente , quoique proportionnée préalable- ment par la Divinité à la propagation future du ïpd Nouvelles Recherches genre humain. La maife qui pefoit contre la force expanlîve prefque en équilibre, n'étoit alors ni delTéchée encore , ni brûlée j ni pétrifiée , com^ me aujourd'hui dans fes différentes parties, par conféquent elle cédoit avec douceur j cette force expaniive n'agiifcit point dans ce tems ni par fauts, ni par bonds , ni par des ruptures, comme nous la voyons maintenant , par conséquent en fe conformant à la gravitation dont la force cen- trifuge de la terre diminue la quantité par dé- grés depuis l'équateur jufqu'aux pôles , elle nous donne des continens pour bafes, & de grandes, chaînes de montagnes qui les couronnent & fe dirigent vers les deux pôles , toujours en fe baiflant de plus en plus. Les moindres chaînes ne fe forment peut-être que par contre-coups , parce que la force réHéchie aux deux pôles s'é- carte latérallement \ elles vont pour la plupart de l'eft à l'ouefl , entre lefquelles on trouve en- core des montagnes pofées fans règles par le flux & reflux des eaux , & les courans qui naif- fent des grandes montagnes déjà établies. Ces eaux rentrant après le déluge auroient aulîi con- tribué pour leur part à les multiplier. Cette ef- péce d'élévation fe reconnoît facilement par i'immenfe quantité des dépouilles marines , dont elle e(l compofée. il y en a une tout près d'Aix- fur la Nature & la Religion, ip'î Îa-Chapelle , ifolée au milieu d'une plaine , en- tourée de montagnes qui forment une efpece d'amphithéâtre, à la diftance environ de cinq ou fix lieues. En la voyant , même fans être inf- truit de ce qu'elle contenoit, fa feule fituation , fur - tout du côté qui regarde le bafïin de la mer, me fit deviner les m.atériaux dont elle étoit compofée. Je jugeai qu'elle devoit être un amas de fables, de coquilles, de coraux, de madré- pores & de mille autres dépouilles marines ^ l'effet juftifia ma conjecture peu de jours après lorfqu'on y fouilla en ma préfence. Les montagnes produites par les courans font d'une compofition très-différente de celles qui ne font qu incruftées tout au plus de quelques dé- pouilles de la mer ; celles des courans font com- pofées entièrement de fables légers , mêlées in- timement & par-tout , de fubftances marines de toute efpéce , qui s'y trouvent enfemble fans au^ cun ordre depuis leur fommet jufqu'à leur bafe^ comme celle d'Aix-la-Chapelle , dont je viens de parler ^ cette extrême différence fe préfente prefque d'abord aux yeux du Phyficien , même fans faire des fouilles profondes , 6c elle eft vrai- ment caradtériftique pour cette efpéce de mon- tagnes form.ées uniquement par les courans. Cette vue générale de mes principes quadre ipé î^ouvelles Recherchés paufaitement, & en tout, avec le fyftême de Me Linncem fur la fituation du Paradis Terreftre, dont j'ai donné un précis ci-deflfus. Les montagnes lu- naires paroiiTent au contraire avoir été produites fur un autre plan , conformément à la feule def-^ tinàtion de cette planète \ elles excédent prefque trois fois en hauteur les plus élevées dé notre globe , & 5 relativement au volume à^ la lune , la difproportiôn eO: encore infiniment plus frap^ pante. Comme cette planète ne paroît nulle- ment , pour plufîeurs raifons affez convaincan-* tes, deftinée à nourrir dès êtres vivans d'au-' cune efpéce , puifqu elle eft fans pluies , fans eaux, fans atmofphere fenfîble, on doit la re- garder fimplement comme un fatellite , oii appen* dice nécefTaire a notre terre pour l'éclairer prin» cipalement èc plus efficacedient par fes afpéritésj èc produire dans nos eaux Aqs moiivemens conf-^ tans & uniformes. Par conféquent fî nous k bornons à cet ufage feul , loin d'être étonnés de la hauteur exceffive de fes nîontagnes, de leur difproportiôn apparente, du balancement qu'el^ les caufent dans fon mouvement , Se de l'irré- gularité , fans gradation , avec laquelle elles pa-^ roiifent fem.ées fur fa perficie , nous connoîcrons en cela les vues de la Providence , & iiôus eii trouverons les caufes phyiiques dans la différence di fur la Nature & la Rellgloru ipj de la proportion priinirive comparée avec celle de norre terre, entre la force expanfive & la force réfiftante jointe à l'abfence de la force cen- trifuge 5 régulatrice chez nous de l'expanfive , dont la lune efc nécelTairement privée , parce qu'elle n'a pas fur fon axe le mouvement journa- lier de notre globe* Les effets de cette force expanfîve fur la terre ,. fe montrent avec la dernière évidence aux Ob- fervateurs dans tous les pays de montagnes. On les voit compofées de couches concentriques d'égale épaiiTeur de bas en haut, qui ont été vifîblement foulevées & rompues après avoir pris une certaine confidence de l'état prefqne fluide où elles fe font néceiTairement trouvées à leur première formation. Elles fe font rem- plies èc pénétrées de coquilles , & même quel- quefois d'empreintes de poifTons, ou d'herbes marines 5 avec une abondance & une régularité qui fe remarque dans toute leur étendue , ce qui démontre leur état primitif de fluidité ; l'épaiiTeur égale qu'elles confervenc fur toute la pente de la montagne efl: de même une preuve qu'elles ont été formées dans une fituation pref- que horifontale avant leur foulé vement. Aucune autre théorie , même la plus plaufible , je veux dire celle du célèbre M. d^ Buffon^ ne peut nou^ Faru IL " N ft$4 Nouvelles Recherches donner une raifon phyfique de ces phénomè- nes 5 excepté celle d'une force expanfive qui agit doucement après la formation horifontale des couches dont les montagnes font compofées. Un courant ne peut jamais femer & fixer avec égalité , fur une pente , des coquilles Se d'autres fubftances légères , encore moins élever une montagne , dont les couches concentriques , au- trefois molles y fe trouvent par-tout d'une épaif- f^ur égale. Il e(l impofïible de déterminer à préfent la figure exaéte que la force expaniive a donnée à la terre ferme primitive ; mais il eft très- cer- tain 5 ôc par l'hiftoire ,- de par l'afpect préfent de nos concinens , comme M. de Buffjn le re- marque avec beaucoup de judeife , que le pays le plus ancien du monde eft l'Afie , & qu'il y avoit autrefois une communication entre toutes les parties de la terre ferme en forme de zones qui entouroient le globe fous l'équateur, telles à -peu -près que nous les voyons encore dans Jupiter y la quantité prodigieufe d'ifles qui font entre les tropiques en eft prefque une preuve évidente, Aiais fans entrer dans des recherches de cette nature , où nous nous perdrons fans reifource , faute de principes fur iefquels on puiiTe appuyer fur la Nature & la Religion, 19 j 3es raifonnemens , qui d'ailleurs font fort inuti- les j il eft cependant bon de remarquer que ce développement , par dégrés de la terre ferme , que je fuppofe proportionnelle à la propagation future d'une race plus iimple dans fes mœurs & fa nourriture que la race préfente , fert à réfoudre un problème que je ne crois pas encore fuffifamment réfolu par aucune théorie. Le tems de plufieurs générations fucceiîlves que je donne par ce moyen aux poiifons & aux coquillages pour fe former , périr & dépofer régulièrement leurs dépouilles mêlées de fables en couches , comme nous les voyons actuelle- ment jufquà une certaine profondeur, fe trou- vera pendant le cinquième & le (ixième période ^ & dès-lors même , pendant près de deux m.ille ans jufqu'au déluge , (i Ton fuppofe que la feule terre , qui paroiiToit hors des eaux alfez con^ fidérable pour former une habitation convenable de fuffifamment étendue fans interruption , éroit le continent d'Afie- Dans cQttQ vue , on doit regarder les autres continens comme naiffans , & par-conféquent comme autant d'amas dlfles, dont la plus grande partie qui fe font élevées depuis ce tems , éroient encore enfévelies fous les eaux de la mer; enfin que cela foi r vrai ou faux 3 il eft très - certain qu'il n*eft nallement Nij t^6 Nouvelles Recherches néceffaîre de croire que la terre antédilavîenna étoic précifément la même que celle qui nous refte aujourd'hui ; car , en admettant les caufes phyfiques du déluge , affignées par Moyfe , & qui fappofenc une rupture en plufieurs endroits de la croûte extérieure , avec un foulévement des bas-fonds , les eaux en fe retirant auroient pu lailfer à fec prefque par- tout le globe des terres nouvelles , de menfie que les conques de la plus grolTe efpéce ôc les autres dépouilles de la mer les plus malîives , déjà enfévelies fous les eaux pendant plulieurs fiécles. Il n'eft pas néceffaire non plus , comme je Tai déjà remarqué plus haut , que la terre antédiluvienne ait été d'une vafte étendue , parce qu'une race qui fe nourrif- foit entièrement de végétaux , qui n'avoit point de vignobles , & prefque point de pâturages , dont les mœurs & la façon de vivre différoient totalement àes nôtres, ne demande pas un ter- rein immenfe pour la fubliftance de plufieurs aiiillions d'habitans *. La preuve de cette vérité * Note fur la manière de vivre des Antédiluviens. Si la férocité que le Philofophe de Genève , fi connu par fa dévife , De Vitam im-pendere vero , attribue à la Nation Angloife , efl en raifon dirc^le de la quantité de chair qu'on mange , comme il le prétend , on pourra, dans mon hypothéfe, rendre une bonne rait'jn de Thu- fur la Nature & la P^eligion. 197 • fubfîfte encore de nos jours chez les Chinois , donc le nombre , dir-on , excède quarante mil- lions dans un pays qui n'eft guère la dixième partie du continent d'Afie. La plupart tirent des végétaux ordinaires & leurs boiifons , & leur nourriture, &z le ris feul leur fuffit pour l'entre- tien du peuple , qui fait la malTe de la Nation. Ce genre de vie eH; commun entre les Tropiques. Que l'on joigne maintenant à cette idée de la terre antédiluvienne Tidée de celles , qui , après avoir été long- rems fubmergées fous les eaux, fe font montrées enfuite de la cataftrophe du déluge 5 dont les eaux après cent cinquante jours d'inondation fe retirèrent dans les cavités de la terre 5 on aura en même -rems de quoi répondre aux phénomènes des couches réguliè- res des dépouilles de la mer dépofées dans un certain ordre 5 &: des bancs de coquilles de toute meur pacifique des Antédiluviens, L'hiftoire du genre humain , qui ne parle que des grands Conquérans , des Guerriers & des batailles fanglantes après le déluge , n'en fait aucune mention avant cette épcque. Mais mai- heureufement pour l'honneur du fyftême , n ces raifbns phyfiques étoient bennes Se valables, les Montagnards des Cevennes devroient être mille fois moins féroces que les Courtifans les plus doux, ou les Princes les plus hu- mains j ce que la poflérité pourra peut-être lui contefter un jour 5 quoiqu'en penfs le liécle préfenc. . Niij - îpS Nouvelles Recherches efpéce jettées pèle mêle fans aucun ordre , dont nous avons tant d'exemples dans toutes les con- trées de la terre. Il n'y a certainement aucun autre moyen de répondre à tout ce que Ton peut objeder contre toutes les fiypothéfes ima- ginées jufqu'à préfent , & de réfoudre le pro- blême de l'afped préfent de la terre. XLVI. Revenons à préfent à l'ordre du Texte facré , que j'ai interrompu un moment pour ex- pofer mes principes & les appliquer aax phé- nomènes connus de tous les Naturaliftes. Si nous com.parons ce que Dieu a annoncé touchant la nourriture qui étoit alors deftinée à l'homme dans le 29 verfet du premier chapitre de la Ge- iiéfe , avec la nouvelle inftitution faite à ce même fujet en faveur de Noé , chap. 9 , v. 1 3 , il eft d'autant plus clair que ni les hommes , ni les animaux n'étoient point carnivores avant le dé- luge 5 que Dieu ajoute , en parlant de tout ce qui a mouvement & vie , je vous ai donné tout cela comme je donnai autrefois les légumes ^ les herbes. G'eft en partant de cette idée que M. Linnœus fiîppofe avec raifon que la création a commencé dans chaque efpéce par la feule formation de deux animaux , mâle & femelle , comme dans le genre humain , paixe que la fimpiicité paroiE fur la Nature ef la Religion. \^§ demander que l'unité foit Torigine 6c la racine de la multiplicité. De-là il conclut que toutes les efpéces primitives étoient dans le Paradis Ter- reftre avec l'homme , & que c'étoit-lâ o^Adam avoit eu le tems & l'occaiion de les étudier , & les nommer chacune félon fa nature. Cette hypothéfe n'eft nullement contraire à la phyfî- que des animaux prife dans toute fon étendue, comme nous l'avons remarqué ci - deiFus , & prouvé par quelques exemples. Si les becs cro- chus & les ferres des oifeaux de proie étoienc des marques certaines de leur genre de vie dé- terminé physiquement dans toutes les circonf- tances quelconques & nécefTaire , la clafTe noni- breufe des perroquets par exemple, qui fe borne aux végétaux , auroit été, comme eux , affujettie à la mem^e néceirité. Mais nous fommes fort éloignés de connoître k nature du climat & les produ6tions particulières de la terre antédilu- vienne, détruite après par le déluge en confË- quence de la malcdidbion divine j tout ce que nous dirons là-delTus ne fera jamais que très- vague, néanmoins il eft très- probable que, plus féconde & plus heureufe qu'aucun autre fol éta- bli depuis cette époque , la terre auroit pu four- nir des végétaux , qui auroient fufïi aux animaux carnivores & aux oifeaux de proie , non-feule-: Niv 200 Nouvelles Recherches ment pour les nourrir , mais encore pour les attirer par goût , comme aujourd'hui même aux Indes orientales , des animaux carnivores & des oifeaux de proie fe repaîjTent par préférence , | dît on 5 d'une certaine efpéce de tocufte dont les hommes aiment auHi à faire leur nourriture. Cette hypothéfe fe confirmée encore par l'énu- mération des animaux & des oifeaux qui font entrés dans l'arche ^ & dont le nombre fuflifoic Amplement pour la propagation future de ceux qu'on eilimoit impurs , fçavoir deux individus feulement de chaque efpéce , mâle & femelle : les animaux purs , quoique plus nombreux , n'ex- cédoient pas fept paires de chaque efpéce qui pouvoient fournir aux befoins des facrifices , comme la diftindion de pur & d'impur paroît l'infînuer , & non pour nourrir pendant cent cinquante jours les animaux & les oifeaux que l'on fuppoferoit alors mal-â-propos carnivores. Cela eft ii vrai que , dans le v. 2 1 du 7^ chapitre , l'ordre efl:, relativement aux hommes , & à tous les animaux , de prendre fimplement de toutes les chofes dont on peut manger ^ fans faire aucune mention des bêtes furnuméraires qui auroient du être defiinçes en partie pour leur nourriture fuivant l'hypothéfe contraire. XL VII. L'idée du Paradis Terreflre ^ dont fur la Nature & la Religion, 20 î nous avons parle vers le commencement de la fection xlv^ faifanr p^rrie d'une montagne cen- trale très haute , ifolée au commencement, le fommet , pour ainfî dire , & la portion la plus ancienne de la terre antédiluvienne , paroît ful- vre alTez natarellement du quatrième , cinquiè- me & fixième verfet du fécond cKanitre cirés i. ci-deiTus. L'Auteur facré , pour nous enfeigner que chaque chofe dans fon origine dépendok immédiatement de la feule Divinité , nous dit que tous les végétaux ont été créés avant de fe développer par la force des caufes fécondes : car, ajoute- t-il, le Seigneur rSavoït pas encore plu fur lit terre , G* la terre navoit pas encore fait fortit des fources ni des vapeurs qui pujfent arrofir toim fa fuperficie. De ces deux manières d'humeéter la terre , dont la diflinccion ed; particuliéremenr remarquée , il paroît fuivre que la terre anré-- diluvienne étoit dans l'état de celle d'Egypte ^ fertilifée fans pluies par les inondations du Nil, ou comme certaines îiles des Indes orientales auxquelles la feule rofée fuffit. Cette hypothéfe fe trouve encore confirmée par l'inflirution de FArc en ciel que Dieu a pofé en forme de iignè pour les hommes , afin de les guérir de cette frayeur naturelle qui leur avoit été caufée par le délu':ie : rinilitucion m!nBe paroît nous alTurer- t02 Nouvelles Recherches de la nouveauté du phénomène. On peut ajouter en même tems que fi les hommes avoient été déjà accoutumés depuis près de deux mille ans aux pluies & aux orages , la grande habitude de les voir les auroit fuffifamment munis contre une peur qui eft par elle-même déraifonrable ^ & le déluge , qui n'eil; arrivé que cette feula fois après des altérations très - extraordinaires dans ratmofphére ; auroit été regardé plutôt comme accidentel , que commue une fuite nécef- faîre des changemens de la même efpéce , aflfez rares enfin pour ne jamais tirer à conféquence. La iituation du Paradis Terreftre & la figure de la terre antédiluvienne pfefqu'unie , ( fi nous en exceptons quelques chaînes de montagnes ^ dont la pente de tous côtés vers la mer qui l'en- touroit étoit probablement très-douce,) avoit été formée ainfi exprès par la volonté de Dieu qui coopéroit avec les caufes fécondes dont il ed: toujours le maître. * Cette fituation & cette figure peuvent encore fe déduire du verfet lo^ chap. z. De u Iku de délices , dit l'Auteur Sacré ^ fortuit un fleuve pour arrofer Le Paradis , & de- là * L'Italie qui efl partagée par une chaîne , avac une penre vers les deux mers , peut donner quel, quels phénomènes extraordinaires ? fçais-tu les loix du mouvement , & les puilTances méchani- ques j quels efïets prodigieux proviennent des caufes les plus légères 5 les plus infenfibles ? arme ces yeux des lentilles les plus fortes , pourfuis ,- fi tu peux 5 toutes les parties conîlitutives du corps humain , les artères , les veines , le fyitê- me nerveux j vois leurs ramifications innombra- bles, quelle liaifon , quel ordre, quelle jui^ie^lle, quelles proportions ? 6c fi tes yeux ne te iviàaem. pas pour éclairer ton efprit qui me demandera fur la Nature & la Religion. 207 peut - être des preuves palpables , fais un elTai fur toi-même j la moindre piquûre te caufe de la douleur ; toute douleur eft l'effet immédiat 5c palpable d'un défordr^ , d'un dérangement dans les parties fouifranres \ apprends donc du fen- timent même de la douleur que tout eR fcru- puleufement arrangé , & mis dans un ordre ad- mirable par U fagelTe du Créateur , jufqu'aux moindres parties conftitutives de ton corps y variété fans confufion, loix , fyftême libre dans tout ce que tu vois , & fans néceffité. Qui eft celui qui a commandé à toutes les planètes de fe tenir dans les bornes du zodiaque , & de fe mouvoir dans le même fens ? celui même qui ordonne aux Comètes de s'éloigner dans l'ef- pace illimité & de le parcourir librement dans tous les fens pofîibles. Maître du tems , de Tef- pace 5 de la matière & du mouvement , il diver- fîfie tellement les objets , que deux êtres , de quelque petiteffe qu'on les imagine , ne fe trou- vent jamais fur la terre parfaitement femblables entr'eux , & que ton efprit n'en faifîra point le nombre illimité , & néanmoins tel eft l'ordre uniforme & conftant qu'il y a établi , telle eft la gradation invariable , que tu peux raifonner fur la nature fans t'égarer , tu l'arranges par cbffes & par efpéces , ôc toute ta fcience, donc 2.oè Nouvelles B^echerches VI fais un fi vain étalage, dépend d'un encliaî-- îiement qui annonce un Créateur. Comment un fydème plein d'intelligence exifteroit il fans un fecre intelligent, & infiniment fage , qui Ta pro- duit & qui ie gouverne ? Comment l'univers feroic-il alTujetti à des loix i.ivariables fans un Légiilateur éclairé ? Une fuite d effets innombra- bles fe conçoit-elle fans une caufe première ? Celui qui a donné à riiom.me fon intelligence fera-c-il lui-même une caufe aveugle & matorielle fans intelligence ? L'œil eft fait pour voir , les oreil- les pour entendre , & celui qui les a formés ne pourroit pas voir , ne pourroit pas confidérer l'ouvrage de ^es mains ? O Philofophe aveugle , tout infenfé que tu es , tu ne peux t'empêchei: toi-même de fentir que tout a fa deftinatioii particulière , fa nature , fon efTence , {qs qua- lités 5 fa fin ; & tu veux que le principe , qui préfide a toutes cqs caufes finales-, foit lin être paffif , indifférent , ignorant , qui te laiiTera agir à ta volonté , fans te prefcrire d'autres loix que cette même volonté , & fans te demander au- cun compte de ta conduite & de tes adions? Une montre , un tableau , un morceau d'étoiîe , Fouvrage le plus vil que tu trouveras fur quel- que ïfle inhabitée , élèvera fa voix, èc te dira i voilà Les traces de quelque homme, ,^ tu n'oferas jamais fur la Nature & la Religion. '209 jamais dire : voilà l'ouvrage du hafard ; & la voix de l'univers entier , tant d'étoiles fixes , tant de fyftêmes n'auront pas la force de te con- vaincre de t'exiftence de celui qui les a fonnés ? Hélas î ton efprit t'éclaire malgré toi , & c'efl: à .ton cœur que tu mens , quand tu cherches à rejetter la Providence qui te menace , & qui rie de tes efforts impuiffafis, XLIX. J'ai démontré, dans la première partie de cet Ouvrage *, que l'homme eft évidemment compofé de deux principes antagoniftes , & j'en ai inféré qu'il doit y avoir une diftindlion réelle & fenfible entre le corps & l'ame. On me dira peut-être que mon raifonnement porte à croire qu'il y a donc dans l'homme deux forces ou deux principes oppofés qui font les fources de la vraie vertu , & d'où réfultent nos connoif- fances , comme un effet compofé , provenant de Tadion & de la réadtion mutuelle de ces deux caufes différentes \ mais que cela n'empêche pas que nous ne croyons que l'ame comme le corps ne foit au(îî une caufe matérielle , dont les principes identifiés avec ceux de la matière ne font combinés feulement que d'une manière différente & plus rafïinés. Pour réfoudre la queftion , il eft néceffaire de * Page 151. Part. IL O jpiO Nouveties RechercheÈ diftinguer les idées comme objedives & caa- fales , des idées vues §c fenmes , ou plutôt àQ% effets produits dans l'ame intuitive. Les idées comme obje6bives 6c caufales ne font , à pro^ premeiic parler , que les difFérens mouvemens produits dans tes nerfs & dans les efprits ani- Sïiaux par les objets extérieurs , & ces mouve- mens abfolument matériels dc méchaniques de ieur nature , en mème-tems qu'ils font àts effets conâans , & répréfentatifs de l'adion fpécifique àe$ objets extérieurs , deviennent à leur tour les caufes d'autres effets d'une nature différente , en affei^ant par leur adion le principe fenfitif & intuitif ; ces effets font ce que l'on appelle proprement les affedions intimes de notre ame. Comme les caufes font toujours diftinguées de l'effet 5 ces mouvemens matériels & méchani- ques Ats nerfs ne font en aucune manière les objets extérieurs , mais feulement leurs répré- feiatatifs conftaîis.,: de même ces mouvemens nerveux 5 qui deviennent caufes par rapport aux effets produits fur le principe fenfîtif , ne font auffi en aucune manière les effets feniitifs, mais ies caufes de la fenfarion , par la raifon que la caufe doit être toujours différente de fon effet. £e plaifo Se la peine font les dexix effets les plus généraux produits par les mouvemens ner- fur la Nature & la Religion. ±11 veux fur i'ame , & toutes les autres fenfations particulières font plus ou moins qualifiées par ces deux effets généraux qui les comprennent toutes : or le plaifîr & la peine ne proviennent pas feulement de la quantité abfolue , mais auiîî de la quantité relative à^s diiFérens mouvemens nerveux ; comme dans la mufique , la peinture , Tarchitedure & dans tous les objets naturels en général , qui ont chacun les proportions qui leur font effentielies pour être telle ou telle chofe. Jufqu'à ce point il n'y a rien qui décèle dé- monftrarivement la (implicite & la fpiritualite 'du principe fénfitif dans l'homme , parce que l'on peut toujours répondre que la quantité rela- tive du mouvement en méchanique produit des effets relatifs qui font phyfiques & matériels , aufïi bien que ceux produits par la quantité ab- folue ; mais lame ne fent pas feulement les effets relatifs 3 elle voit au(îî intuitivement &: fcientifiquement les rapports mêmes qui en font les caufes , auiîi bien que les rapports qui réfal- tent entre les effets produits par ces caufes. Donc l'ame eft un principe totalement diilin- gué de tous ces rapports pris collectivement où diftributivement 5 quelque rafinés que puilfent être ou les mouvennens , ou les parties mifes en mouvement. D'ailleurs qui voit un rapporç Oi; à 12 Nouvelles Recherches «ntre deux mouvemens nerveux, ou entre les caufes extérieures de deux mouvemens nerveux , voit proprement ce qui n'efl: en effet ni Tun ni l'autre. Comment veut - on donc que l'ame ne foit pas diftinguée des mouvemens nerveux ou des efprits animaux , puifqu'elle voit ce qui n'exifte pas marériellement en eux , & qu'elle eft fapérieure par fon intuition au réfultat & aux rapports mêmes qui proviennent des mou- vemens nerveux ou de l'adion àes efprits ani- îhaux ? Que Ton joue un air de mufique , que Ton élevé un beau bâtiment , ou que Ton nous préfente une belle ftatue , h Tame s*arrètoit au iîmple pîaifir fenfitif, on pourroit dire que l'effet produit fur elle n'eft qu'un effet phyfique & matériel , relatif & combiné ^ mais l'ame s'élève en fentant ce plaifir audeflus même àts rap- ports qui font entre les noces de mudque , ou dont les objeâ:ions fe renouvellent en fe diver- fîfiant par les nouvelles vues que l'objet , quoi* que le même par- tout ^ préfente dans une fuite d'expériences , tandis que les réponfes ne rou- lent que fur un feul principe très-Umple en lui- même 5 & dans fa manière d'opérer. On pourra croire aufïî que j'infifte trop fouvent fur ce qui peut écarter de ma façon de penfer toute ombre de matérialifme , en appuyant fréquemment fur la diftindion bien marquée entre la vitalité Se la fenfation , & qui fe tire de la divifibilité de la première & de l'unité de la dernière de q,z% deux puifïànces ; mais on avoir repréfenté ces principes , qui me font communs avec M. ds. Buffon , d'une manière il erronée & fi éloignée fur la Nature & la Religion, 2 ip du vrai , que j'ai cm ne pouvoir trop m'emprefTer de défabufer mes Lecteurs fur une do6i;rine im- portante qui touche de lî près le bien-être moral de la Société. Au refte j'ai tâché de donner àts id^es neu- ves, vraies ou vraifemblables , 6c non pas des: môts^choifîs avec art , ni des périodes qui mar- chent pompeufemenr. Quant au flyle , le Fran- çois eft pour moi une Langue étrangère , & je frémis lorfque je penfe que j'écris dans un ûécle poli & délicat. Tite-Live malgré fa Patavinké y comme le remarque un Auteur moderne , a été. 6rès-bien reçu des Romains en faveur de la ma- tière intérefTante qu'il traitoit. Je ne prétends pas cependant établir quelque comparaifon en. citant de grands exemples , c'eft de l'indulgence que je demande & non pas des éloges. Qu'im- porte en effet que le goût anglois perce & fe décèle à chaque page ? Il n'y a qu'un Rhéteur ou un faux Philofophe qui puifle s'en forma- lifer, comme ce Grec qui fe fâcha de ce qu'une Fruitière le reconnut pour barbare a foii langage incorred & peu attique , quoiqu'il eût vécu long- tems parmi les Athéniens. Commds and points they fet exaBly right , 'T'would he a fin to roi them of their mite. Pope. aïo Nouvelles Recherches y &c. Je me paiTe aifément de cette petite gloire, êc pourvu que les Savans ^ plus riches en idées qu'en phrafes , ôc plus attachés au vrai qu'aux grands mots, ne trouvent rien de répréhenfible dans ma façon de penfer, je fuis tranquile fur le refte. Ceft la raifon qui doit décider du mérite, 6c non pas une imagination qui s'enflamme aux étincelles électriques des phrafes pompeufes Se des anti-thèfes recherchées. Ceux qui s'appuient fur la révélation & fur la nature rrouvei ont la théorie que fétablis aflez probable ; & ceux qui font peu de cas de l'Hiftoire Mofaïque verront que loin d'être contraire à la phyfîque préfent» de la terre , comme la plupart des hypothéfes imaginées , elle renferme d'une manière plus fimple les phénomènes tant généraux que par- ticuliers du globe terreftre , d'où chaque Natu- ralifte prétend étayer fon fyftème , mais fans les comprendre dans leur totalité. Je terminerai cette féconde Partie par des obfer varions que j'ai faites autrefois fur une partie des Alpes à la fuite de S. E. Milord , Comte de Rochford , aujourd'hui Ambaffadeur Extraordinaire de Sa Majefté Britannique à la Cour de France ; je crois qu'on ne les trouvera pas tout-à-fait déplacées à la fin de cet Ouvrage* OBSERVATIONS DES HAUTEURS, Faites avec le Baromètre , au mois d'Août 175 1 , fur une partie des Alpes , en préfence, & fous les aufpices de Pvli- lord , Comte de Roch/ord, alors En- voyé Extraordinaire de Sa Majefté Britannique à la Cour de Turin ; par M. de ISIccdham , de la Société î-'oyale des Arts & àts Sciences , ôc de celle des Antiquaires à Londres , Corref- pondant de l'Académie des Sciences à Paris. AVERTISSEMENT. l^A relation de u voyage, fait dans Us Alpes à la fuite de Milord Rochford auroit pu être beaucoup plus intèreffante» Ce Seigneur s'efi fait un plaifîr de donner toutes les facilités pour la plus grande exa&itude des ohfervations. Lui-même en a fuivl a 2 2. Nouvelles Recherches le cours avec autant de goût que d'inteUlgence, Va- mour des fciences excitoit fa curlojité. Ses talens & fes connoijfancss r avaient mis en état dUn re- cueillir le fruit, Taï faïfi avec emprejfement tous les moyens de fatisfaire un dcfir fi louable & fi conforme à fan objet, Tài fnultipriè les obfrvations au-delà peut- être de ce quon auroit pu efpérer d*un tems auffi court, Pal profité de foccafion pour les comparer avec celks que fav ois faites à diverfes reprifes dans les Apennins, Les di^érepues inductions , que fat tirées de ce parallèle , formoient une chaîne de con^ féquences propres à répandre un certain jour fur la théorie de la terre. Cette acquiftion de nouvelles idées y puifées dans fexpérience , me fourniffoit la matière d'un ouvrage plus étendu, C*efl celui que je viens de donner au Public y &* que je me propofois alors de faire im- primer à Turin pour payer le tribut de mon rejpeci ^ dt ma ritonnoïffance à S, A, R, Monfeigneur le Duc de Savoye, Ce Prince , en qui le plus heu' reux naturel a été fi bien fécondé par V exemple G* € éducation , avoit daigné s'entretenir avec moi de tes mêmes obfervaûons , & m^ encourager par fort fuffrage à les rendre publiques, U approbation des Grands eji en droit de flâner , même les Philofo^ pkcs j lorfquclle doit fon prix , moins à l'éclat dtù fur la Nature & la Religion. 225 mng , quâ la fupiriorhé des lumières. Des occu- pations d'un genre Ji différent , des devoirs à rem" plir^ un grand voyage à faire , ne me l afférent pas alors tout le tems nicejfaire pour exécuter mon projeta Je me bornai donc à donner Jimpiement Us hauteurs de la partie des Alpes que y avois parcourues. Etendu- «2 moi-mime , fai mis mon ouvrage en état de pa- raître 3 je déjîre quil plaife au Public ^ & au Prînct ^ui m* honore de fes bontés. Observations génêrazes. JLA" montagne de Joch en SuilTe eft, de tomes les montagnes des Alpes, obfervées par ^cA^z^*- ch^er dans fes difFérens voyages , la plus élevée , 6c fa hauteur, perpendiculaire au niveau de la mer, eft de 1340 toifes. Ce Physicien donne pourtant, par conjecture , la hauteur de 1660 coifes à Tittlisberg , qui fait une pointe latérale plus élevée tenant à la même montagne de Joch, hauteur qui furpaiTe celle du Canigou la plus Kaute des Pyrénées. ~ Comme le mont Tourné, fans confîdérer fes pointes latérales qui "s'élèvent bien davantage , de auxquelles aucun Obfervateur ne peut par- yQUK pour fixer fon baromètre , donne pour fon 224 Nouvelles Recherches élévation i6%^ toifes ; il eft à préfamet que le mont Tourné eft la plus haute montagne de l'Eu- tope. Sa iituation , prefqu'au milieu de la chaîne des Alpes , qui va toujours , félon l'ordre géné- ral de la nature , en diminuant , tant du coté des plaines de la France & du Piedmont , que du côté des deux mers , & le cours des rivières , fervent également à confirmer cette idée , au moins jufqu'à préfent aucune obfervation ne nous a donné une hauteur plus coniidérable en Europe. Les autres obfervations font à la fuite de celle du mont Tourné , dans Tordre que je les ai fai- tes 5 & je n'ai rien négligé pour les avoir exades, autant que la fidélité de mon baromètre pouvoir me le promettre. Cependant celles du mont Cénis , & la Gla- cière au nord-eft de l'Hôpital font prifes de la relation du Supérieur de cette maifon , qui me \q$ a données comme faites par M. l'Abbé NoUc. Avant que d'arriver à cette dernière montagne , la defcente affez dangereufe du mont Tourne avoir tellement dérangé mon baromètre , qu'il n'étoit plus en état de me fournir des obferva- tions exades , & le tems ne me permettoit pas de le rétablir. Pour donner plus de poids aux obfervations barométriques 3 fur la Nature Ù la Religion. 22 J - barométriques , j'ai crû nécelTaire d'ajouter les extraits fuivans. >3 Le Père Laval ayant mefuré géométrique- » ment diverfes hauteurs à la fainte Baume & »» aux environs , y a enfuite porté un baromètre, 5> & a obfervé de combien il y étoit plus bas îT qu'à Ton obfervatoire à Marfeille, dont il con- »j noiiïbic l'élévation fur le niveau de la mer. 9> Il a envoyé Tes mefures 6c fes obfervarions à 35 MM. Cafjinï , qui ont cherché quelle dévoie ï> erre , félon leur progreffion , la hauteur des 33 montagnes qui donnoit l'abaiffement obfervé î> dans le baromètre , & ils ont trouvé les mê- 33 mes hauteurs , que le Père Laval avoit trou- » vées d'ailleurs par les mefures géométriques , 55 à deux ou trois toifes de différence près , ce 53 qui n'eft pas coniidérable ". Hiji, de V Acadlmis^ diS Sciences y 1708 , pag. 27, Quant à la manière d'obferver avec le baro- mètre , & d'en tirer les conféquences , c'ell ce qui fournit cette règle très-fimple que je rap- porte en faveur de quelques Lecteurs. 33 II n'y « a qu'à chercher dans les tables ordinaires les 33 logarithmes des hauteurs du mercure dans le 33 baromètre , exprimées en lignes ,_ & fi on ôte 35 une trentième partie de la différence de ces w lo<7arithmes , en prenant avec la caradérifti- p'art.lL P ^iiS Nouvelles Recherches *> que feulement les quatre premières figures qui >^ la fuivent ^ on aura en toifes les hauteurs réla^ ïî tives des lieux. Le mercure fe foutenoit dans w le baromètre à Garabourou , qui eft la plus 5s baffe de tontes nos tarions j à 1 1 pouces i \ vi lignes 5 ou a 254 I lignes, au lieu que fur le î3 fommet pierreux de Pichincha il fe foutenoit sî à 15 pouces II lignes ou 1.91 lignes. Si l'on ïî prend la différence des logarithmes de ces " deux nombres , on trouvera 1150, & fi on 6î ote la trentième partie , il viendra 1 209 toifes « pour la hauteur de Pichincha au - deffus de »3 Garabourou j ce qui s'accorde avec la déter- » mination géométrique ««. Voye^^ la Flgun de la Terre , par M. Bouger , pag. 59. Gette règle eR fondée fur ce que les conden- farions aâ:uelles en chaque endroit y font pro- portionnelles au poids àQ,s colonnes fupérieures qui caufent la eompredion : ces condenfations , ou CQS denfîtés , changent en progrefTion géo- métrique , pendant que les hauteurs Aqs lieux font en progreffion arithmétique. Uapplicatîon de cette règle à la formation de la table fuivante , doit être cenfée d'autant plus exade , que tout le tems de notre courfe dans les Alpes étoit parfaitement beau , & tou- tes les obfervations faites dans des jours d'une légale férénité. far la Nature & la Religion, 227 Par la table cies hauteurs des montagnes nom- niées les Cordelières au Pérou , en la comparant avec celle que j'ai donnée de cette partie àes Alpes que j'ai parcourue 5 on peut, enrr'autres chofes, remarquer, non-feulement que les Cor- delières en général font beaucoup plus hautes , &: prefoue le double des Alpes , mais que les habitations du vallon de Quito font les plus hautes da monde, & même plus hautes que le Couvent du grand Saint-Bernard. Ce qui ferc , par la pureté & Télafticité de Tair , à tempérer les chaleurs de leur iicuation précifément au- deiiiis de la ligne équinoctiale , & rend leur demeure une efpéce de Paradis Terreftre. Une m.ontai^ne ell une maiTe immenfe en comparaifon de cette portion de mxatière que nous animons , & de cette efpéce de champ qui fe trouve renfermée dans la fphère de la viuon méchanique ; mais cette grandeur s'évanouic quand la penfée embraiTe tout le globe terreftre. Le xliamétre de la terre eft a - peu près de 3000 lieues \ la hauteur de Chimborafo en Pé- rou , l^j>lus haute mcncagne connue , eft de 3000 toifes \ ^coo toifes à 5000 lieues font la proportion d'une toife dans une lieue , -ou un pied dans 2,2.00 , ou moms encore que la (ixièm^ partie d'une ligne fur un globe de deux pieds aîâS ^Nouvelles Recherches Se demi de diamètre. La régularité de la couite de la cerue ne fouffre rien par une telle éléva- tion. Voyez l'Hiftoire Naturelle , par M. de Èuffon , tom. L Tout eft relatif dans la nature , & les con- îîoiîTances bornées des hommes ne font établies que fur la comparaifon. Comme la terre s'élève graduellement *vers Féquateur , bc s'applatit en approchant des deux pôles , ainii les différentes chaînes àQs monta- gnes s'élèvent ou s'abaifTent à mefure qu'elles s'approchent , ou qu'elles s'éloignent de l'équa- teur. Les montagnes d'Afrique ou d'Ade font plus hautes que celles de l'Europe , & \es Cot- dilières fous féquateur en Amérique , furpalfenc toutes les autres. Les chaînes les plus confîdérables tendent , les unes d'occident en orient , les autres du nord àil fùd : celles-ci occupent les terres entre les Tropiques & quelques endroits du nord \ celles- là s'étendent dans les zones tempérées , & font en plus grand nombre. Les montagnes , dont la maffe va d^ccident en orient, forment des deux côtés des avances 3 dont les unes regardent le nord 6c les autres ïe midi \ de celles , dont la maiTe gît nord & &ds forment des avances qui répondent à l'eH fur la Nature & la Religion, isp & à l'oueft 'j c eft-â-dire que les montagnes décri- vent deux lignes qui fe coupent à angles droits ^ & qui font parallèles , autant qu'il eft poffible ^ à réquateur & au méridien. Lorfque deux montagnes gifent à côté l'une de l'autre , elles forment des vallons de diffé- rente largeur, & les avances de ces montagnes répondent alternativement les unes aux autres ; c'eft-à-dire qu'elles font prefqu'aufîi régulières que des ouvrages de fortifications , & l'angle faillant de l'une répond à l'angle rentrant de l'autre. Voyez Lettres Philo fophiques , par M. Bourguet, Cette remarque , qui efl entièrement de M. Bourguet , jointe aux coquilles , & autres dé- pouilles de la mer qui fe trouvent difperfées fur toute la terre , démontre aux yeux des Phy— ficiens , que la terre efl: fortie clqs eaux de la mer. Elle nous fait admirer la grande régularité qui règne par-tout , même dans les montagnes qui d'ailleurs paroiffent fi irréguliéres aux yeux du vulgaire \ il fuit de -là que certaines cauCes très- générales , qui m fubfijîùnt plus , agiffant par des loix fixes (Si déterminées , ont prefcrit aux montagnes une hauteur régulière, à la mer une profondeur proportionnée , & à la terre cette courbe prècife 6c fphérique qui fe préfente aux yeux du Géomètre. P iij Sjo Nouvelles Recherches Ceux enfin qui veulent avoir une idée jufte des montagnes , comme elles fe trouvent dif- pofées par ia nature dans un certain ordre & une certaine gradation , doivent confidérer le îDonc Cénis , par exemple , comme le premier degré d'élévation , qui va toujours en augmen- tant, à mefure que l'on avance ; de cette ma- nière on fera bien éloigné , comme il arrive afTez fouvenr , de prendre le mont Génls » ou le mont Vifo, ou même la Roche-Melon pour des hauteurs très-confidérables , en comparaîfon des autres plus reculées dans la chaîne. La nature eft par tout d'une exa^fbe régularité ; fes gradations font mefuréés ; elle n*a ni élé- vations foudaines 5 ni chatés précipitées: & cela fcul Tuffiroit pour confondre le prétendu Philo- fophe qui bâtit fur le hafard , & l'infenfé qui a dit dans fon cœur , il n*y a point de Dieu. La fagelfe du Créateur brille autant au pied de fon thrône & fur la terre que dans la voûte célerte i ôc parmi les aftres qui l'éclairent d'une manière fi adixiirable. fur la Nature & la Religion^ 23 î LETTRE [A Mcjflcurs les Éditeurs du Journal Lit-- tiraire de Berne. Je dois vous remercier , Meflieurs , de Thon- neur que vous m'avez fait , en publiant , dans votre Journal Littéraire , mes Obfervations ba- rométriques fur les montagnes des Alpes en Savoye & dans le Duché d'Aofte. Pour rendre c^^ Obfervations encore plus intéreffantes , j'ai pris la liberté de vous envoyer une lettre , que l'illuftre M. Bougmr , dont nous regrettons fi fenfîblement la perte , m'a fait parvenir , fcrc peu de tems avant fa mort , ,fur la métliode d'appliquer la règle ^ qu'il donne dans fon Livre dz la Figure de La Terre ^ pour trouver la hauteur des montagnes par le moyen du baromètre. J'ai -crû ne pouvoir mieux faire pour la communi- quer au public , que de vous la tranfm.ettre , afin qu'elle trouve la place qu'elle mérite dans un recueil fi diftingué , & propre , par le choix judicieux des pièces , à plaire généralement à tout le monde fçavant. Voici l'extrait de cette Piv 23^ ^0 u V elles- ' R ech erches lettre , avec l'application de fa méthode a mes obfervations barométriques. « La méthode que j'ai donnée dans le Livre w de la Figure de la Terre pour trouver la hauteur 3> des montagnes par le moyen du baromètie , 35 n'eft bonne que pour les montagnes afTez hau- >5 tes , pour que l'élévation du mercure dans le 33 baromètre ny foit guère variable , ainfî je »' ne crois pas qu'on puiife l'appliquer avec fuc- 3) ces aux expériences faites à Turin , à la cité 35 d'Aofte , à l'hôpital du mont Cénis , & autres 33 moindres hauteurs. Cette méthode , outre 33 cela 5 ne donne pas immédiatement la hau- 33 teur des montagnes au - deffus du niveau de 35 la mer , elle donne la quantité dont elles font 33 moins hautes que Flchincha que j'ai pris pour 33 terme , parce que j'ai crû que cette montagne 33 d'auprès de Quito , étoit la plus haute de tou- 33 tes celles de notre globe , qui font acceflî- 33 blés En appliquant la règle au mont 33 Tourné , je trouve qu'il efl moins haut que 35 Flchincha de 66% toifes , & comme cette der- 33 niere montagne a 2434 toifes d'élévation au- >3 deiïus de la mer , ainfî que je l'ai trouvé par » la mefure géométrique , il s'enfuit que le mont 33 Tourné eft élevé de 174^^ toifes. J'ai fuivi la me- ss me méthode pour les hauteurs des autres podes* fur la Nature & la Religion» 253 Hauteurs ob- fervées. Hauteurs du Mercure en lignes* Hauteurs des^ Montagnes < en toifes. i Exemple de la méthode pour U mont Tourné, St. Rémi. . . Couvent du grand Saint Bernard. . . . Rocher au Aid-Dueftdu- dit Couvent. Mont Séré- né CorMayeur. Milieu du chemin de l'allée blan- che Au haut de l'allée blan- che Villes des Glacières. . Bourg Saint Maurice. . . Mine de Pe- fey. .... Mont Tour- ne. 250. 148. î47f 18^ T 270. i45r 270- 191. 261. 115. 888. 1304. 1337- 134^. ^84. 843 1311. 573 666. II07. 174^. ^ 2-. 3 512. Loga- rithme de 215- lignes ; hauteur du Mercure fur le mont Tourné. 2» 2 8io.Logar. de T^i lig. hau- teur du Mercure fur Pkhincka, 712. diiFérencc des logarithmes. 24. Trentième partie à retran- cher. ^88. Différence réduite, qui mar- que combien P/- chincha eft plus . haut quele mont Tourné. 2434. toifes , hauteur de Fi- ckincha , mefu- furée géométri- quement. ^88. différence des 2 hauteurs. •174^. toifes , hauteurdumonc Tourné au-def- fusdu niveau de \ la mer. Il s'agit à préfent de comparer la table des hau- teurs donnée par M. Bou^mr dans cet extrait 3 !234 Nouvelles Recherches avec ceîie que j'ai déjà fait paroitre. Pempîoie la même règle en montant du niveau de la mer^ que j'^ai pris pour terme , comme il fe prend en defcendant de la montagne de F'ichincha , qui lui fert auiîî de terme dans fes calculs , le ce qui paroîtra peut - être afTez remarquable 3, c'eft que k différence entre les mêmes hauteurs données par les deux tables , eft précifcment de foixante- trois toifes *. Cette différence une fois donnée doit néceffairement , par la nature des logarithmes , fe trouver entre les deux ta- bles dans toute la fuite , mais il refte toujours * J'ai déjà donne, parmi mes obfervations générales fur les montagnes, la règle dont parle M. Bouguer '^ je la répète ici pour la commodité de mes Leâ:eurs. Il n'y a qu'à chercher dans les tables ordinaires les logarithmes des hauteurs de mercure dans le baromètre , exprimées en lignes , & fi on ôte une trentième partie de la diffé» rence de ces logarithmes , en prenant avec la càra<^é- riftique feulement les quatre premières figures qui la fuivent , on aura en toifes les hauteurs relatives des lieux. Cette règle eft fondée fur ce que les condenfations aftuelles en chaque endroit y font proportionnelles au poids des colonnes fupérieures qui caufent la compref- fion : ces conden Tarions , ou ces denfités changent en progreifiori géométrique , pendant que les hauteurs des lieux font en "pîogreflion arithmétique. fur la Nature é' l^ Religion. 23$' à fçavoir , laquelle des deux pèche, ou la (îenne par un excès , ou la mienne par le défaut de foixanre-trois toifes , qui font la différence des deux râbles. Si la règle de M. Bouguer , de la façon donc il s'en fert, pèche par excès , cet excès, qui n'eft que de ^3 toifes , ne fera pas confidérable pour les grandes hauteurs auxquelles feules il veut qu'elles foient appliquées * ^ d'ailleurs noiis fça- Vons , par les obfervations , qu'elle s'accorde très bien, pour les rriontagnes fous l'équateur , qui font les plus hautes de norre globe , avec les mefures géométrique? : d'un autre coté , fl nous ajoutons cette même différence de foixante- trois toifes aux moindres hauteurs dans ma table des obfervatiohs , comme à celle de Turin au- deirùs du niveau de la mer, celle d'Ivrée , de la cité d'Aofte , ou du mont Cénis , il e(l évi- dent , non -feulement qu'elle èfl coniidérable ■par iàpport au total de cent , de deux cens , ou de- trois cens toifes , mais qu'elle donne des mefures abfolument faufles , qui pèchent claire- iîieht par un excès très fenfible. » On fera du baromètre , félon M. l'Abbé * Cela paroîtra par la comparaifon des deux tables, '{1 on néglige les demi-toifes. La raifoa de ceîce difFé- xei>ce remarquable fe trouvera ci-après. a^6 Nouvelles Recherches M Noht * y une application lieuEeufe & utile , f « Ton s'en fert pour mefurer la hauteur des » montagnes , fuivant les expériences qui furent » faites par MM. Cajpni ^ Maraldi & Chafdk^^ » en Auvergne , en Languedoc & en Roufîîl- » Ion **, Maintenant il paroît par leurs obfer- » varions , que depuis le niveau de la mer juf- » qu à une demi - lieue de hauteur , on peut » compter environ lo toifes d'élévation pour f* chaque ligne d'abaiffement du mercure , en w ajoutant un pied à la première dixaine , deux » pieds à la féconde , trois pieds à la troifième , » & ainfî de fuite. Cette règle , qui pèche par défaut fur les hau- teurs moins confidérables , & par excès fur les grandes hauteurs , comme nous le démontrerons dans la fuite , ( quoique ni le défaut , ni l'excès ne foient confidérables, fi la règle n eft pas por- tée au-delà de la hauteur de 76*4 toifes , ou un mille Italien , & non pas , comme ces Meffieurs le veulent , à une demi - lieue de hauteur , ou 1 14(5 toifes , ) cette règle, dis-je , s'accorde affez avec toutes les obfervations fur les moindres * Phyfique Expérimentale , Leçon II , tom. 3 , page ** Mémoires de 1* Académie des Sciences , 17©^ > pag» 21^ & fuiv. fur la Nature & la Religion. 237 hauteurs , pour démontrer que la méthode de M. Bouguer ^ appliquée pareillement aux moin- dres hauteurs , comme je l'ai déjà dit , pèche par un excès très - confidérable. Cela paroîtra très-clair à quiconque fera l'application de ces deux méthodes à ma table des obfervations ba- rométriques. Que la ligne de mercuie foit éva- luée avec M. Caffinl , fur la montagne de Notre- Dame-de-la-Garde près de Tou'on , à dix toifes 6c cinq pieds *, ou avec M. La Hire , en diffcrens cems & lieux , à douze toifes fur le mont Clai- ret dans le voifinage de la même ville , à douze toifes 5 quatre pieds à Meudon , & à douze toi- fes 5 deux pieds , huit pouces à Paris *, ou avec M. Pican au mont St. Michel à quatorze toi- fes j un pied , quatre pouces ; ou enfin avec M. Vakriiis , fçavant Suédois , à dix toifes , un pied , quatre lignes , il fe trouvera toujours que la méthode de M. Bouguer pèche par un excès très- confidérable fur les moindres hauteurs , ôc qu'elle n'eft applicable , comme il le dit lui - même , qu'aux montagnes affez hautes , pour que la hauteur du mercure dans le baromètre ne foit guère variable. Il paroîtra peut-être étonnant que des Ob- fervateurs fi bien inflruits foient fi peu d'accord ^ntr'eux , de que leur rapport foit fî différent. 25 s Nouvelles Recherches ïi cO: bon par-conféquent de remarquer en paf- fanr, qu'on doit attribuer toutes ces diiférences^ ou à des couches de vapeurs qui peuvent régner dans certaines parties de l'atmofphére , & qui en altèrent pour un tems la pefanteur , ou à la iîruation des lieux où Ton fait ces expériences y ôc par-confcquenr à la pefanteur adtuelle , ou plutôt à l'éiafticité , plus ou moins grande , de l'atmofphére * , qui e(l très- variable dans Tes bafTes régions aullî- bien que la denfîté , à pro- portion qu'elle eîl: plus ou moins chargée , foit par la propre matière amoncelles , foit par des p.trries étrangères qui s'y mêlent ; ou enfin 3 corn- m3 M TÀbbé N.olei le remarque très bien , ( ëc ceïï peut - être la raifon la plus forte ) , parce qu'il eil très difficile d'eflimer au juTte chaque ligne d'abaiilement de mercure dans le baro- mètre j où le mécompte d'un douzième de ligne eft d'une grande conféquence. Il fuffira pouc produire de pareilles erreurs , ou d'un défaut do mobilité , qui empêchera le rnercure de fe re^ inetrre dans un parfait équilibre avec l'atmof- phére après fes balancemens , ou de la convexité de fa furface , &c des petites réfractions occa= * Voyez la DifTertation de M. Bouguer fur les diia= tarions de ratmofphére , dans les Ivlémoires de l'Académie des Sciences pour ranr.éc 1753 , pag. 3^ & pag, jij,, fur la Nature & la Religion. ^39 (îônnées par repaKTeur du verre , qui peuvent facilement tromper la vue de i'Obfeivateur , même le plus attentif. Mais toutes ces variations dans les régions bafles de ratmofphére n'affec- tent pas le baromètre d'une façon fi irrégulière fur les hauteurs confidérables qui furpafTent iix cens ou fept cens toifes , èc le défaut qui pro- vient du mécompte de la hauteur réelle du mer- cure 5 difparoîtra dans un baromètre très-fen- fible dont la defcription fe trouvera ci -après : pour les hauteurs qui font moindres , & qui n'arrivent pas jufqu'à fix cens toifes , il n'y a d'autre remède que de choifir , pour faire {qs obfervations , le tems le plus férein & les jours les plus calmes , & les unir enfuite dans une échelle de hauteur relative , bien aifurée avec les obfervations qu'on fera fur des hauteurs plus confidérables. Revenons à préfent à la méthode prefcrite . par M. Cajjîni \ fi nous prenons , comme il eft très-raifonnable , un milieu entre tous les diffé- rens rapports donnés pour évaluer en toifes une ligne de. mercure , & que nous le fixions à douze toifes environ , il fe trouvera que la méthode de M. CaJJim pèche par défaut pour les moin- 144 Nouvelles Recherches trcs- clairement à ceux qui fe donneront la peine de lire la diCTertarion de M. Bouguer dans les Mémoires de TAcadémie des Sciences pour l'an- née 1753, fur les dilatations de l'air dans l'at- mofphére. Selon cet illuftre Philofophe , » les x> denlîrés de l'air ne font pas toujours propor- » tionnelles aux hauteurs du mercure , elles font 30 fou vent ou trop grandes , ou trop petites , 30 comme effectivement il les a trouvées en s'ap- 30 prochant de la mer ; alors la règle , qui réuffit 30 dans le haut de la cordelière , aura befoin 33 d'une équation : fi l'air eft trop denfe^ la mê- » me quantité occupera m.oins de place , ainfi 30 on fera obligé de faire une légère diminution :» à la hauteur trouvée par les logarithmes : fi 30 au contraire l'air eft trop peu condenfé à pro- » portion de la hauteur du mercure , il occu- » pera plus d'efpace \ il faudra donc augmen- 39 ter la hauteur fournie par la première règle ce. Le cas de mes obfervations particulières fera le cas d'une plus grande denfité de l'air , par la- quelle il s'eft écarté dans les régions baffes de la denfité toujours proportionnelle qu'il devroit avoir avec l'air fupérieur s'il n'étoit fujet à de grandes variations. De quel côté pourtant que foit Terreur , foit qu'elle provienne d'un dé- faut 3 ou d'un excès de denfité proportionnelle , fur la Nature & la Religion. 245^ il eft toujours vrai que les deux termes em- ployés dans le calcul fervent à la diminuer en la partageant , 6c fe corrigent réciproquement en ôtant , ou en ajoutant ce que l'un ou l'autre donne de trop ou de moins. Les conditions que je demande ^ font pre- mièrement 5 une égale & confiante féréniré pen- dant tout le tems de l'obfervation, autant qu'on peut la trouver , Se cette condition regarde principalement la partie inférieure de l'atmof- phére qui eft feule fujette à à^s variations con- fîdérables , pour pouvoir enfuite former avec exaditude la partie inférieure de l'échelle de- puis le niveau de la mer , jufqu'a la hauteur d« cinq ou fix cens toifes , fecondement un bato- mètre portatif beaucoup plus fenfible que les baromètres ordinaires : de cette façon, fur- tout par le moyen d'expériences encore plus exades que celle de M. Caffmi de autres , je ne défef- pére pas de pouvoir prendre les hauteurs avec plus de facilité & de préciiion qu'on ne les prend même avec un quart de cercle par des mefures géométriques , qui fouvent font très- trompeufes par la quantité toujours variable &c inconnue de la réfraction , d'autant plus que les hauteurs font prifes ordinairement dans la pat- rie inférieure de l'atmofphére , outre qu'il y a Qiij 24^ Nouvelles Recherches fouvent bien des occafîons où les mefures géo- métriques ne peuvent être employées , & où Ton doit fe contenter de connoître les hauteurs à 1 G ou 12 toîfes près. Le baromètre que j'ai à vous propofer eft de l'invention de M. Pajfemant , Artifte de Paris îrès- connu 6c très- ingénieux. C'efl le baromètre de M. Hayg.ns réduit par les inflexions d'une table qui ferpente entre les deux colonnes de inercure , ailez commode , léger , portatif ^ qui ne fe dérange guère par le mouvement ^ & fe range facilement quand il eft en repos , enfin Ci fenhble, qu'au lieu de quinze pouces, il pourra avoir quinze pieds de marche. Au lieu de deux ponces de marche qu'ont les baromètres ordi- naires , M, Pajjlmam a donné au fien fix pieds : mais pour notre baromètre des hauteurs une ii grande fenfibilité n'eft pas néce (Taire , & ajoû- leroit inutilement au poids , qu'il faut diminuer autant qu'il eft poifible. On pourra toujours obje6ber contre l'ufage d'un baromètre de cette efpéce ce qu'on a ob- jeélé en tout tems. Plulieurs Phyficiens , en- tr'autres M. Défaguillcrs^ regardent un tel baro- mètre comme tenant trop du thermomètre, à eaufc de l'efprit-de-vin qui enrre dans fa conf- irudion j mais ces Mgffieiirs n'ont pas fais fur la Nature (^ la Religion. 247 attention que par fa conftrudtion même, ce ba- romètre eft tellement une véritable balance hy- droftatique , dont les diverfes colonnes pefent félon leur hauteur , que le vif-argent céda tou- jours en proportion , & s'accommode à mefure que Tefprit-de-vin fe dilate par la chaleur, de- forte que la dilatation par la chaleur devient abfolument nulle , & tout autre changement eft infenfible , excepté celui du poids variable de l'atmofphére. En effet , verfez de l'efprit-de vin dans un baromètre de cette efpéce \ ou , ce qui revient au même , tâchez de le dilater par la chaleur , & la vérité de ce que j'avance devien- dra fenfible \ mais je fuppofe qu'on a toujours très-grand foin de faire botiillir préalablement le vif- argent avant de s'en fervir , & d'ôter tout l'air entremêlé dans i^s parties , afin que de fon coté il ne foit pas auffi dilatable par k chaleur, & ne participe pas lui-même à la nnture du thermomètre : car dans ce cas il eft vifible qu'ils fe dilateront tous deux , tant le vif-argenc d'un côté 3 que de l'autre l'efprit-de- vin qui fait fon contre-poids , & l'inftrument fubira un chan- gement par l'augmentation de la chaleur , ou de fon contraire , le froid : mais c'eft alors la faute du conftrudeur s'il devient thermomètre. On fe fert communément dans cette efpéce Qiv 24^ Nouvelles Recherches de baromètre , pour faire contre poids aux deux coionnes de vif argent ^ de deux liqueurs , à fçavoir ^ de i'huile de tartre pour la partie infé- rieure du tuyau ferp ntin , & de l'huile de pérréole pour ii partie fupérieure \ mais comme ^ dans un baromètre propre à mefurer les hau» teurs 5 le tuyau qui ferpente entre les deux co-- lonnes de vif- argent doit avoir quinze pieds ou environ de longueur , il eil: à craindre que riiuiie de tartre trop pefante ne ralentifie le mouvement , c'eft pour cela qu'il fera plus utils de fe fervir , pour les deux liqueurs , d'huile de pécréole & d'efprit-de-vin , ou même d'eau- de vie colorée , & en cas qu'on trouve l'huile de pérréole trop analogie en pefanteur fpécifique ^ on peut y mêler une petite quantité d'huile de tartre pour la rendre tant foit peu plus pe- fante *, ^ M. de l'Or s Phyficien de Paris très-connu, a trouvé, pendant quinze mois d'obférvations , le baromètre de M. Hujghens fans défaut & très-exad , en le comparant jpurneilement avec un baromètre ordinaire très -bon 5 ainfi ma théorie fur l'ufage de cette efpéce de baro- mètre , pour prendre Içs hauteurs , fe trouve déjà con- firmée par l'expérience. J'ai recommandé dans la cohf- truélion de ce baromètre i'huile de pétréole comme plus légère que l'huile de tartre s M. de tOr croit avoir remar- -*^ué que rhuik de pétréok diffouc à la longue & en'partiç fur la Nature & la Religion. 249 Je pourrois ajouter ici une courte defcription du baromètre dont je viens de parler, d'un autre baromètre marin que le même Artifte a inven- té, & d'un thermomètre plus fenlîble d'une nou- velle conftrudion , mais j'aime mieux finir par une table démonftrative de ma théorie j tout cela s'entendra facilement par ce moyen 6c fans autre fecours. Du refte fi les Savans de votre pays veulent bien travailler d'après mes vues , & faire quel- ques efTais fur les montagnes voifînes pour les perfectionner , je ferai d'autant plus flatté de leur complaifance , que je fuis trop éloigné des occalions de les pouvoir faire moi-même , & il leur fera aifé de réduire en une pratique très- utile 6c très-commode une théorie , qui fans cela demeurera alTez imparfaite , comme bien d'autres 5 6c de très-peu d'ufage. Je fuis , d<:c, N E E D H A M. le mercure. Il penfe que l'huile de tartre bien clarifiée Se l'eau-de-vie colorée font préférables à l'huile de pétréok 5 l'expérience en décidera. Tahk dimonjîradvc des hauteurs ohferyécs en 1751 Théorie HatîCe-urs obfervées. Hauteur du mer- Hauteur des monta- cure en lignes, gnes en toifcs , par M. de Needhain. \k la mer. 5?^. Toifes. !A Tarin. 3^8. 101. jA Ivrée. 5iO. X04, % la Cicé d'Aofte. jii. 511. Ia Ammeville, trois milles : au nord-oueft d'Aolle. îoS. î^f. V Saine Remy. Z76. 825. Au Couvent du grand St. Bernard. ïSO. 12^. Rocher au fud-oueft du- dit Couvent. 24S. Ii74. Mont SérePxé , entre Saint Remy Se Cor-Mayeur. M7| 11S5. Cor Mayettr. 28yi 624. A la moitié du chemin de l'allée blanche. 179. 7S0. Au Commet de l'allée blan chc , au pied de la croix. ^A9l 12-45- Ville des Glacières. 270 i .910* Bourg Saint Maurice. Z9I. 605. Mine de Pefey. x6i. 1044. Mont Tourné. Zl^. 1685. Hôpital du mont Cénis. ÎI4. 2S4. Glacière de Ronce , oi Sommet du mont Cénis au N. E. de l'hôpital. 305. 454- iMont Pischintcha au Pérou .1 Î5I. 1 l fur les montagnes des Alps , 6* relative à la, précédente» Hauteur des monta- gnes en coii'es, leion jMM. CaJJini & Ma- raidi. Hauteuf des mêmes montagnes, félon M- Bouguer , prifes de la mer. Les mêmes hauteurs prifes du mont Pit- chinccha, fuivanc M. Bouguer. Toifes. Toifes. 8^. loi. H I 81-4. pieds. .04. 190. 511 Î47-4- pieds. 3°î- 9o6 cJerèn^ . i7,S 5/77. / dmm. ^^. Rourq f. îTlxuirlcA . ùo3. T". nuneJeÉeaey ■i . i o 4^ 4- -T'- Ai ont (Uoiu-né ■S 8 3. T. La.Vc Entre 2i etuxi eatUK ^^^^^ /"kj- ' .g Çlaotere. Je- Honce- ■ ^^ ■ Tl frqpiiaL JLW U mont Cênùj^ ^^jSSj^r^ -t^,-.-^^_ _. ^t:^> ::~ V _i " - ? ^^ft 1= ^ ^^p PI . a MESURE de la Lautcur des C ORDKLIERES au dessus du niveau de la mer BaiÀIAInE L'Acade.mie. i A- i ^■ .^ 1 >l À 1: i -\ Xc francoid cJculptj i .# _*. #.^:<*>^ ^^- 4^ ^''^ #x#' 'î. ^ .f^' >t'^^^^5^ WWÎ. ^ .f TABLE GÉNÉRALE DES MATIERES CONTENUES DANS LA PREMIERE ET LA SECONDE PARTIE DE CET OUVRAGE. Le Chiffre romain déjigne la Partie , ^ le Chiffre arabe la page. A j^Lbanson (M.) a découvert rirritabilité dans la Tremella , ôc un Naturalifte de Florence l'a obfervée dans les parties les plus exaltées des fleurs. Partiel, page 144. Air 5 il eft nécelTaire dans les infufîons ; pré- cautions qu'il faut prendre pour ne pas le corrompre. P. I 5 p. 217 Se fuiv. Particules détachées de tous les corps qu'il renferme. p. 123. Alpes , obfervations générales de leur hauteur faites par M, de Ncedham, P. Il, p. 221 & 154 TABLE. fuiv. Manière d'y faire ufage an baromètre. 225, Ame , elie s'affoiblit en cédant aux efforts mé- chaniques du corps, P. I , p. 153. Elle eit diftinguée des mouvemens nerveux, m. Elle peut s'élever au-deffus du plaifîr pure- ment fenfitif 3 par la comparaifon des rapports des deux mouvemens matériels. 212. Elle fent féparément les mouvemens nerveux , 3c les voie çolledivement. 213. Elle n'eft pas éten- due. 2 T 4. Différence qui fe trouve entre Tame de l'homme & celle des bêtes par la fcience des caufes finales & le fentiment des rap- ports. 215. Exemple tiré des caftors , des fînges, des abeilles. Ibld & fuiv. Ame végétative des Anciens , admife avant Defcanes , eft la même chofe que la vie végé- tative , fubordonnée à la fenfitive. P.I , p. 145. Elle eft conforme à l'hiftoire de la création par Moyfi, Ihid, A la métaphyfique de Ltib- nitij, i4(?. Les Péripatéticiens la tiroienc des puiffahces de la matière. 271. Anguilles , ou filets allongés que Ton voit s*a- giter , fe rouler , fe fixer , fe deffécher , & revivre.?. I ^ p. 24 & 25. Celles que doone le bled niellé. 1(52. Ce font des êtres pure- ment vitaux, privés de fpontanéité. Ib^ Leurs TABLE. 255 mouvemens fe font par des inflexions con- tinuelles Ôc alternatives , en fens contraire , fans progrefîîon. i6^. Elles ne paroilTent pas fe nourrir comme les autres animaux. Uid, M. de Nccdham en a confervé pendant quatre ans entièrement defTéchées. Ibid. Sçavans qui les ont vues. Ibid, Confervées à fec elles paroiffent fans vie , & adhérentes en mafTe, L'eau les fait revivre autant de fois que l'on veut. Ibid, Anguilles d'une infufîon de graine de trèfle 5 vues au microfcope. 109 & iio. Expérience faite par M. de Nccdham devant la Société royale de Londres qui prouve qu'elles font vivipares. 187. Animalcules fpermatiques ; ils n'exiftent pas dans le fperme avant qu'il foit forti de (qs vaifleaux. P. 1 , p. 196^. On ne les voit que iorfqu'il fe décompofe. Ibid, Ils fe forment par une vraie végétation vitale qui com- mence par une diftribution de la partie la plus épaifle en forme d'arbrifleau. Ibid, Ils fe détachent du bout A^s branches par un mouvement ofcillatoire , en forme de globu- les. Ibid. Ce qui forme leur queue, Ibid, Leur durée , leur mouvement. Ibid, Pourquoi ils defcendent enfuite au fond du vafé. Ibid, Animaux , pourquoi leurs chairs font mal-faî- %^6 TABLE. nés lorfquils entrent en chaleur. P. I, p. 104. Leur férocité eft plutôt accidentelle & locale qu'eiTentielle à leur nature , & une fuite né- ceiïaire de leur organifation qui fe conforme aux circonftances phyfiques, P. II, p. 138. Antipathie préfumée entre la matière éleâ:ri- que & le laurier. P. I, p. 249. A^TiQuvs DiERUM , cxpUcation de ce mon P. II , p. 66. Arbuste de Tifthme de Panama , dont les branches arrêtent les palfans. P. I, p. 143. Explication de la fmgularité de ce phéno- mène. :44 & 245. Argile , elle fe change naturellement en pierre, & la chaux en verre , mais le verre ne fe con- vertit jamais en chaux. P. Il, p. 107. MaiTes J'argile détachées & durcies à la fource du Pô. ii6. Différens degrés de confiftance dans ces pierres. Ibld, Asie , elle eft le pays le plus ancien du monde. P. II 5 p. 194. Les iHes qui font entre les Tropiques prouvent qu'elle avoit autrefois une communication avec toutes les parties de la terre ferme en forme de zones. Ibid. Elle a pu être , pendant près de deux mille ans 5 avant le déluge , le feul continent qui fortoic des eaux. 195. Augustin TABLE, 157 Augustin (Saint ) a penfé que le période des fui jours devoit ctre pris dms îe fens iiiydi*» que. P. li, p 14. Il s'eft écarté du fens litté- ral. 16. Auteur des lettres à un Amériquain, fes ob- jedions, & fes erreurs. P. i , p. m êc fuiv, B i3A€ON , extraits de cet Auteur concernant répigenefe & la vitalité matérielle. P. I , p. 2>o & fuiv. Baguette divinatoire , manière de la tenir^ P. I , p. 14(5 Explication de fes phénomènes par la contraction du fyftême mufculaire* ^47- Beccari ( M. ) a trouvé deux matières dans la farine de froment , l'une amilacée , ôc végé- tale , l'autre gélatineufe & animale. P. I, p. 5 7. Manière de les féparer. Ibid, Phénomènes que donne leur infafion. 58. La partie géla- tineufe rend un fel volacd animal , au lieu d'un fel hxe végétal. 174. Bled , la ftructure méchanique des anim.aux qu'il donne paroit conf llv^r dans un amas de globules. P. l, p- 19' L'urine déchire la pel- licule qui les enveloppe. 20. Changemens qu'elle opère dans leur organifation. 21, Cou- Pan. IL R 25§ T A B L E. ronne de filets , ou de points allongés qui borde leur circonférence. Ibid, Blhd de Turquie , mêlé avec le froment ^ il donne trois efpcces d*animaux. P. ï, p. i8. Leur marche \ faurillement avec lequel ils s'élancent. Ibid, Canal ou tube blanc qui s'é- tend dans toute leur longueur. 19. BoERHAAVE , fes expériences fur le feu. P. I, p. 121. Sur un morceau de viande enduit d'huile de thérébentine. 123. BouGUER (M.) ; fa lettre à M. de Ncedham fur fa méthode pour trouver la hauteur des mon- tagnes par le moyen du baromètre. P. II , p. 232. Différence de fa méthode d'avec celle de M. de Ne-zdham, 234. BouRGUET (M.) ; fon obfervation fur les avan- ces des montagnes qui fe répondent alter- nativement. P. II, p. 229. BuFFON ( M. de ) 5 ce qu'il penfe du ver fper- matique. P. I , p. 4. Des êtres microfcopi- ques 3 de leur forme , de leur queue , de leur mouvement , ^c. 28. Réponfe qu'on lui fait. 41 & fuiv. Il a remarqué une puKTance vitale organique dans les animaux fpermiatiques. KJ3. Son fyftême. \G6. Ce qu'il penfe de la formation des montagnes & des continens. P. II 3 p. Z^ de fuiv. Ses remarques fur la TABLE. 159 pïopoïdon qui règne entre les côtes de la mer & fa profondeur. Ï17. Il veut que les deux continens aient été liés autrefois par des bandes de terre femblables a celbs de Jupi- ter. 147. Ce qu'il dit de FUnau & de l'Ai , animaux de rAmérique méridionale , fui'- nommés parelFeux. 148. Raifonnement de M. Je Necdham a ce fujet. 149. Commient il penfe que les animaux & les végétaux y o^it été tranfporrés. 154. Sa théorie ne fuffit pas pour expliquer par les courans i'ig.dité des cou- ches concentriaues des montagnes & les dé- pouilles marines que l'on y trouve. 15^4. V^AMOMiLLE , les aniitiaux que donne fa graine ont un bec de canard. P. I , p. 15. Smgula- rité de leur mouvement, UU, Canard de Mofcovie paroît avoir de la pré- voyance , & n'en a pas P. I , p. 254. Cas'UNI ( m. de ) ; Cl méthode pour obferver les hauteurs. P. II , p. 259. Changemens opérés fur le gicbe par les tor- rens, les pluies , les neiges, les tremblemens de terre de d'autres caufes phyfiques. P II , p. 114 & 125. Leur date n'eft pas fort an- cienne, lié". Ils fe font dans les plaines par i6o TABLE. l'addition des couches , le dépériiTement des végétaux, ies inondations. 127. Preuves tirées de l'enfoncement d'une chaulTée romaine dans l'Artois. 128. Chérubin de Moyje ; il peut exprimer d'une manière hiéroglyphique un volcan qui a pris la place du Paradis terreftre. P. Il, p. 203. Chrysalides , elles ne périilent pas dans un froid qui feroit à 16 dégrés au-delTous du terme de la glace. P. I , p. 33. Ce qu'en ra- conte Lijier,,^^, CiTPvOuiLLE 5 animaux que donne fa graine. p. i,p. 15. Colonnes , ou pavé des Géans en Irlande j ce font les effets d'un ancien volcan éteint. P. II 3 p. 161. CoNCHyE PEL^Gi^ , à quelle profondeur elles fe trouvent, P. II , p. 1 18 , 119. On en voit auprès d'Aili , dans le Piedmont , à la fur- face de la terre, 120. C'eft l'effet d'une inon- dation ou d'une éruption fubite. 121. Conciles généraux , comment la providence les dirige. P. II , p. 7 & 8. Continens d'Aile , réBexions à ce fujet. 103. Raifonnement tiré de la confommation an- nuelle des huitres en Angleterre. 104, 105, Ils ne peuvent être détruits par la mer que TABLE. 2(^1 dans un efpace de trois millions d'années. P. II, p. 101. Coquillages , ils vivent dans l'eau falée , 8c meurent avec des convulsions quand on jette du fel delTus. P. I , p. i6i. Corail qui a des branches molles Se gluantes. P. I , p. 140. Cosmogonie de Moyfi examinée par les feulj principes de la Phyfique. P. Il , p. 54 &: fuiv. Le mot jour doit s'entendre des périodes de tems. 6j 6c fuiv. Suivant Moyfe la terre fut couverte pendant les deux premiers périodes d'une miariere fluide qui s'eft: développée en répandant au-dehors la fubltance lumineufe , & la matière acrienne , &c. 132. Corps organifés . leur prolongation infenfible qui doit donner le germe , fe fait par une concentration des parties fpécihques qui ten- dent à un foyer commun , & que dirigent les forces plaftiques. P. I , p. 141 <3c 145. CouRANs , ils font déterminés & dirigés par l'inégalité du fond du balîin de la mer <3c par les promontoires. P. II , p. 85. Defcrip- tion de celui de Mofchen , ou Mofche-Strom , en Norwége. 85 Se fuiv. Il y en a qui vont dans toutes les directions poflibles. 93. Ils font produits par le m.ouvement des marées, Riij %6i T  B L K & fuppofent la préexifience dss inégalités àa fond de la mer. 95). Ils n'ont pas pii don- ner aux montas,nes les directions détermi- liées , & la propriété d'agir comme caafes phyriques pour attirer les nuages, faire jaillir les fources & former les mines. i6<^. Les montagnes qu'ils forment font routes compo- fées de fables légers & de fubllances mari- nes 5 fans aucun ordre depuis leur fommet jufqu'â la bafe. 191. Exemple tiré d'une mon- tagne près d'Aix-la-Chapelle. Ibid. Création , fes fix termes font autant de pério- des d'un tems inconnu. P. lï, p. 25. Cuisson violente , comment elle a opéré fur les plantes & les chairs qui ont enfuite été pro- lifiques ou n'ont point donné d'animaux. P, la p. 2 1 4 5 ii6. Elle peut affoiblir ou anéantir la force végétative. 217. D X^ÉBSSE de Syrie y fes fêtes célébrées à Hiéra- polis en mémoire du déluge. P, II , p. 1 80- Déluge 3 il n'a fallu pour le produire que Aqs. eaux footerraines , dont le volume nQnciào. pas la trois cent foixantième partie de la capa- cité au. globe. P. Il 3 p. 177. Inutilité d'une fçiçcî çentâfuge qui accélère le mouvemene TABLE. 163 diurne. Ihid. Ou de rapproximation d'une co- mète. Sec. 178. Exemple tiré d'un globe de fept pieds ôc demi de diamètre , dont vingt- deux pintes fuffiront pour inonder fa furface d'une demi-li^ne. i-o. La chaleur intérieure a pu faire jaillir les eaux en augmentant, ÔC les iailTer rentrer en diminuant. 180. Il a produit plus d'eifets que n'en admet M. de Biifo/2. Son univerfalité. 205. DÉPOUILLES de la mer , elles ne fe trouvent pas au-delà de 200 toifes de profondeur dans les terres. P. 11 , p. 11 S. Il y a des mines de charbon, profondes de 100 toifes où l'on n'en trouve aucuns veftiges. li^id. Boule verfe ment palTager <5c fuperficiel que cela indique plutôt qu'une action lente des courans. Ibid, Se fuiv. Descartes , fon opinion fur les idées innées, P.ï, p. iq6. xLav y elle dépofe une fubftance pierreufe en la faifant évaporer fur la furface d'un verre poli. P. 11 5 p. 107, îo8. La grêle en dépofe de même. 108. Eau chaude , fon adion fur les graines. P. I , p. 118. Sur les noyaux des fruits. 115). Sur les œufs. Uid. Riv 1^4 TABLE. Eaux chaudes minérales, pourquoi on les trouve plutôt dans les pliines que les volcans ôc les mines métalliques. P, II , p- i6i ^ i6^. Eléphant , il paroît raifonner ôc ne raifoiine pas, P. 1 3 p. 16^ , Electricité , elle ell; un mode du feu fouter- • rein exaltée P. II, p. 171, Elle eil toûjoars proportionnée à la maffe. ÎBid. Ellîs ( M, ) 3 Tes remarques far les poiypes,^ -^ P. I , p. ï 5 5^. Émaîiatîons 5 leurs effets parle moyen du {on- fre à Fréjus , dans les ides flottantes près de RomiC, dcc. P, îî 5 p. 115. Dans les couches ::.. de la matière appeilée OJieocolla. Ibid. Haches ■ de caillou , couteaux que renferme un lit de . cette matière en Angleterre, né". ÈpiaiNÉSE 5 elle peut feule expliquer les phé- nomènes oppof'és a rhypothefe des germes préexiilans. P. î , p. 145 , 148. Objedion con« ire ce fyftême. 227. Réponfe que l'on y fait* Ihid, Exemple tiré de Fécreviffe. 22 S , 229., EUe n'eil pas contraire à la religion. 231. Esprit de Dieu , il a dirigé les Ecrivains facrés d'une manière qui leur étoit infenfible. P. II ^ Ethyopie 5 iingularité de fes pluies. :, citée par Bocrrhaaye, P, I ^ p, 124. TABLE. 2^5 Etoile de mer , comment fa plus petite partie clomie l'être organique entier. P. I , p. 194. Elle eft alors un fimple végétal. Ibid. Etoiles fixes , elles ont pu exifter longtems avant notre terre &: notre foleil. P. il , p. 6j^, Probabilité de leur préexiftence. 6^. Etres microfcopiques , ils on: un inftindt & iiQS loix. P. î , p. 13. Ligne droite , oblique ou circulaire qu'ils décrivent. Ibld, Ils fe jet- tent avec avidité fur certains morceaux de matière. Ibid, Ils fe pourfuivent , s'arrêtent. Ibid. Leur figure , leur tranfparence , leurs vifceres. 14. Les uns ont une figure ronde , \qs autres font allongés & nagent comme le ferpent. 15. Ils fe détournent des obftacles qu'ils rencontrent , & s'évitent entr'eux. 1 1 & 13. Ils nagent contre le courant de l'eau. 23. Mouvemens qu'on leur voit faire avant que de mourir. 24. LTne goutte d'eau les fait revivre, ibid. Preuves de fpontanéité de leur mouvement. 25 & 16. Ils fouriennent les ri- gueurs du froid. 30. Comment la chaleur agit fur eux. 315212,214. Examen de leur queue. ^6 ôc 37. Leur apparition fuit toujours la lenteur ou les progrès de la végétation. 61, La grande chaleur leur eft contraire. Ibid. lis îie s'agitent que pour fortir de leur coque. 85,, 166 ■ T A B L I. On voit leurs dépouilles dans les endroits ou ils font nés. %6. Ils redeviennent des plantes. 8l). Efpeces qui fe fuccédent. 95 , 98. Ils iiaifTent d'un morceau de viande fournis à Tadion du feu. 103. Et des chairs crues. 105. Quelquefois le feu les empêche de naître ^ tant dans \qs matières animales que dans les matières végétales. Ibid. &: 108. Ce qui arrête leur naiiTance dans le vuide. 128. Précautions que l'on doit prendre pour les faire naître dans un volume d'air plus raréfié que l'air extérieur. 129 & 130. M. SpalanTani n'en a point vus dans les infufions des vafes purgés d'air. 132. Leurs mouvemens fe font en fer- pentant, ou par des rames qu'ils tirent d'une coquille bivalve tranfparente, par un bec cro- chu, par des filamens , par des nageoires qui enveloppent leurs corps , ou par la faculté qu'ils ont de fe comprimer & de s'allonger. 160^ i<^i. Il y en a parmi eux qui font des animaux parfaits , produits par un germe , & d'autres qui ne font que des parties organi- ques des corps qui fe décompofent & fe com- pofent de nouveau. 161. Tout acide les fait mourir \ la falive feule produit cet effet. 161, Il ne faut pas les confondre avec les corps fpermatiqucs. Ibid, Ils naiiTent , & fe muki°. TABLE. -lGj plient à proportion que la matière végétale fe décompofe pour rentrer dans fes premiers élémens. 171. Ils ne proviennent pas tous des germes étrangers qui s'y dépofent. Ibid, Ils ne meurent jamais d'une mort naturelle. 172. Les grands diminuent en fe partageant , & les petits fe divifent jufqu'à une difparition totale, ihïd. Leur apparition fe conforme toii-» jours à la décompoiition de la fubftance infu- fée. Ibid. & 173. Us viennent par diviiion & quelquefois par une efpéce d'accouchement. 178. 17S. En quoi ils différent des vers que les mouches dépofent fur les chairs. 182. Les plus petits difparoiffenr toujours les premiers, au lieu d'aggrandir leur volume en fe nour- riffant. 188. Ils ne fe changent jamais en chryfalides , ni en moucherons. Ihid. On ne doit point leur donner le nom d'animaux. 193. En fe divifant ils païTenc alternativement d'un état de végétation à un état de vitalité parfaite. 195. Leurs iilamens en forme de chapelet indiquent toujours une végétation qui opère intérieurement , 6r une divifion prochaine. Ihïd, Les filamens du froment pilé, ou concalfé , font animés d'un efprit expandf intérieur. 19S. Ils fe gonflent, ils s'étendent, ils ont 5 par accès ;, un mouvement progreflif;, 16B TABLE. ils fe divifenr en petites parties après avoir paru en forme de chapelets» 3id, Ce qu'in- diquent les traits noirs qui les traverfent dia- métralement larfqa'ils tournent fur eux-mê- mes, ou en ligne fpirale. 199. Pourquoi les deux moitiés d'un gros globule 3 qui fe divife^ prennent à Finftant une figure ronde ôc fe promènent avec plus de viteiTe, 3id, Phéno- mène des gros globules qui defcendent au fond du vafe. Il^id. 5c 200. Comment ces êtres vitaux végètent pour en produire d'autres plus petits en volume, & fupérieurs par le degré d'exaltation. 200. Ils font comme les derniers efforts de la force végétatrice qui s'épuife hors de toute matrice déterminée. 20^. Ils ont des loix prefcrites à leur force généra- tive , auiîi confiantes que celles des animaux fupérieurs. 206^. Etres feniitifs , ils ne fe multiplient pas par divifion. P. I , p. i (^4. Etres vitaux, ils peuvent être affeétés dans leurs organes fans avoir la fpontanéité &c le fenti- ment. P.l , p. 16^. En quoi ils différent des animaux parfaits. 150. Leurs adions font des effets purement mécHaniques d'une organifa*^ tion très-délicate. 151, 151. TABLE. 2^9 J/ EU 5 fon aftion fur les œufs. P. 1, p. ii6 Se iij. Sur les corps durs. iio. Sur un grain d'or 5 & cent mille grains d'argent, m. Flux 3c reflux de la mer j il n'a pas pu produire les montagnes fur un plan régulier , en fup- pofant un parfait arrondiffement du fond de la mer. P. Il , p- 95 6c 96'. Sa direction a dCi erre en lignes droites vers tous les points du compas, c)6. Il n'auroit pas pu arrêter les fables fous aucun méridien à caufe de la variation continuelle du point de concours des deux forces contraires qui ne peuvent fe rencontrer que vers les'p6lës.'//'i^. Il auroit produit des bandes parallèles à l'équateur , femblables a celles de la planète de Jupiter. 97. Forces plaftiques , rejettées par quelques PJû- lofophes j admifes par MM. de Euffon 3c de Needhaîth, ]? . I , p. 1 & 3. Force végétaH^.e intérieure , elle agit en tout tems fur chaque point de la matière. P. I , p. 4. Il fuffit 5 pour l'apparition àQs êtres microfcopiques , de l'exciter , fans lui laiffer prendre la route de la végétation ordinai- re , pour la rappeller enfuite à la végétation ijQ TABLE. vitale. 175. Moyens qu'il faut employer pour cela. îhld. Se i-j6. Force expaniive. DifFérens dégrés de réfiftance qu'y apportent les plaines , les montagnes , les volcans Se la gravitation. P. I , p. 1^4.. Profondeur de fon foyer démontrée par le mont Véfuve. 16 j. Et par les ifies qui étoient autrefois des volcans. 166. Montagnes , iiles qu'elle a produites , villes qu'elle a renver- fées. 1^7. Elle agit moins aujourd'hui parce que la malfe de la terre eft moins dudile Se moins homogène par fon état de demi pétri- fication 1(58. Profondeur du foyer de fon explofion dans le tremblement de Lisbonne. î70« Fossiles différens trouvés à certaines profon- deurs dans le Comté de Barkshire en An- gleterre. P. II, p. 121 5 125. Freret ( m. ) ; examen des Apologides de la îelic^ion chrétienne qu'on lui attribue. P. II , p. 45 Se ^6. FuNGi 5 ils font prefque tous percés par des mouches qui y dépofent leurs œufs. P. î, p. 2 SI. Ces plantes peuvent fe former de la fubfcance des animaux morts. 257. Elles don- nent un fel alkali volatil qui les rapproche des animaux. 258. TABLE. 171 G CTerme j fa formation eO: probablemenr inftan- tanée au moment de la conception, iic? & 210. Geraies préexiftans , faits cités en leur faveur par MM. H aller ^ Bonnet. P. I, p. 119. Les germes ne circulent point dans la fève des plantes, ou dans les vailTeaux des animaux. P. 1 5 p. 183. Il n'y a point de germes préexif- tans qui fe dépofent dans les fubftances orga- niques corrompues. 197. Globules microfcopiques , ce font des germes qui fervent à la m.ultiplication de Tefpece. P. I, p. 161. Graines , celles que l'on a broyées donnent des animaux diiférens de celles qui ne l'ont pas été. P. I , p. 5 5 & fuiv. Leur fuc exalté, & exprimé les fiit paroître promptement. 60. Duvet que l'on apperçoit fur la racine de ■ celles que l'on a femées en terre. 70, 71. Figure & diredion de leurs rameaux. Ihid. 8c fuiv. Vapeur que l'on y diftingue. 71. Petits corps ou animaux immobiles qu'elles produi- fent. 71. Mouvement de ces petites mafles. 75. Animaux qui en fortent. IBid, Mouve- ment de leurs £lamens. 87. Il eft l'effet d'un 272. TABLE. principe interne. 88. Leur pafll?,ge du règne végétal dans le règne animal. Ihid. Leurs in- fu(ions foumifes à i'adlion du feu. iiS. Pur^ gées d'air. 125, 127. Pourquoi celles qui n'ont pas été broyées fourniifent des êtres viraux plus grands que celles qui ont été bro^ yées. Ï7S. Pourquoi ceux que donnent les graines broyées difparoiiTent de l'infuiion plu- tôt que les autres. Ibid. Lorfque leur prin- cipe de vitalité eft interrompu par le broye- ment pendant l'infuiion ^ il ne refte plus qu'une maflTe morte en apparence c]ui ne fournit au- cun être vivant. 179. Leur fuc laiteux eft aife^ exalté pour fe volatilifer en corps organiques. 185. Manière dont M. de Ncedham s'y prend pour les empêcher de germer. îhid. Ce qui leur arrive lorfqu'elies font dégagées de toute matière étrangère. i8(j. îl fufïit de les faire bouillir pendant quelques minutes pour dé- truire les germes. 201. Graisse de veau, ce qu'elle produit. P. I , p. S 9. Les petits morceaux que l'on y voit font la demeure des animaux de rinfufion. 91, Gravitation , elle augmente depuis l'équa- teur jufqu'aux pôles où les chocs s'arrêtent. P. II, p. 1(^4. Guêpe , fa têteféparée du corps exerce fes fonc- tions TABLE. 275 tions naturelles. P. I, p. 171. Son aiguillon s'élance de même. Ibid, GuETTARD ( M. ) a trouvé fur une plante du genre des efpargoutes de petits corps parfe- més & liés enfemble. P. I , p. 272. Ces corps jettent des ramifications vitales chargées de globules. Ibid, M. Guettard attribue leur vita- lité à des caufes extérieures & â des raifons méchaniques. Ibid, H JlIabitudes , elles tiennent â la méchanique du corps , & ne différent point de l'organifa- tion phyfique & vitale. P. I, p. 153. H ALLER ( M. ) , ce qu'il dit du fyflême de la génération de MM. de Buffon Se de Needham, P. I, p. 141. Principe d'irritabilité , différent du principe de fenfation qu'il établit dans les corps organifés. 143 & 271. Elle eft un mode de la vitalité. 272. 11 a vu le fyftole ôc le diaftole dans les cœurs détachés des vipères, des hériffons & d'autres animaux. 144. Hardouin ( le p. ) fait les Moines du neuvième fiècle Auteurs des ouvrages de Virgile Ôc d'Horâce, &c. P. II, p. 4^. Haricots blancs , figure des animaux que donne Fart. IL S 274 TABLE. leur infulîon. P, î , p* 40. Particularité de leur mouvement. 41. Hommes d'une taille médiocre ; pourquoi ils font plus forts que ceux d'une taille déme- furée. P. î 5 p, 204. Huîtres , elles ont des extrêmirés filamenteu- fes vitales , que la végétation détache , qui ferpentent dans l'eau avec une force progref- fîve 5 Se que Ton prend pour des animaux micro fcopiques. P. I, p. 200 & 201. Hume (M.) , ce qu'il dit des miracles. P. II, p. 40- Hydrophories ou fêtes du déluge à Athènes. P. II, p. 180. ï Idées caufales & objedives, elles font des mou- vemens produits par les objets extérieurs dans les nerfs & les efprits animaux. P. II , p. 210. Comment les mouvemens repréfen tarifs de cette adion produifent d'autres effets en agif- fant fur le prmcipe fenfitif & intuitif. UU, Indiens , bafe qu'ils donnent a la terre. P. II , Infusions faites avec différentes graines , glo- bules , filamens de la végétation , ramifica- tions bien formées que l'on y apperçoit. P. I , TABLE. 275 f. 6 Se j. Mouvement qui leur eft propre. li^iJ. Il eft l'effec d'une force intérieure végé- tative. Ibid. Defcription de la figure , de l'inf- tinct , ôc des loix que (uivent ces corps. 1 1 ' & fuiv. .Intellect , il doit être diftingué de la fenfa- tion fubftantielle. P. Il , p. 3. Sa chaîne ne commence pas dans l'homme ôc ne tînic pas dans lui. 5 . Instinct , ce qui le conftitue. P. I , p. 254. Italie , elle eft probablement minée , ainii que la Sicile , p. Il > p. éi. J-uiFs , pourquoi ils comptent leurs jours du couché du foleil. P. II , p. 25. JussiEU ( M. Bernard de) ; les efTais qu'il a faits fur les étoiles de mer étoient déjà connus des pécheurs de Normandie. P. I , p. 248. I^Ancaster ( le Capitaine ) a découvert dans l'ifle de Sombrero une plante qu'il dit s'en- foncer en terre quand on la touche , & donc la racine eft un ver , ôcc. P. I, p. 239. Ce que devient cette plante quand on l'arrache. 140. Elle eft de l'efpéce des coraux. Uid, Elle ' ne forme qu'un feul corps organique. 241. Lappons 5 Efquimaux , pourquoi ils font plus Sij ^'JG T A B L E. petits que les hommes plus éloignés du pôle. P. I , p. 204. Lewenhoeck. Ses obfervations fur les extrémi- tés filamenteufes des huitres. P. I , p. 201. LocK renverfe le fyftême de Dcfcartes fur les idées. P. 1 5 p. 2 0(j. Il eft regardé mal à- pro- pos comme Déifte. 125. Lune 5 hauteur de £qs montagnes, & leurs poin-* tes îumineufes fur les bords du croilTant. P. II 3 p. î 20 5 130. Marées & phénomènes que l'on devroit y appercevoir , fuivant l'hypo- théfe de la grande antiquité de la terre. Ibid, Elle n'a ni nuages , ni marées , ni courans qui produifent fes montagnes. 131. Elle n'a pas le mouvement journalier de notre globe fur fon axe. 195. LuTÉcE , ce qu'en difent Céfar. P. II , p. m, & Julien l'Apoftat. 112. Carrières, matières calcaires & talqueufes , montagnes de fable que l'on trouve dans les environs de cette ville. 113. Caillou iingulier qui y a été trouvé. 1 1 4. Ces matières fe forment par une cryf- tallifation à froid fans le fecours du feu. Ibid, Conféquences que Ton en tire pour toute la fuperficie du globe, 11 -5. Lynn^us 5 ce qu'il falloit au commencement, fuivant lui , pour remplir la terre d'êtres TABLE. ^77 vivans. P. II, p. 133. Conféquences de fon fyflême. 140 & fuiv. Il prétend que k terre 5'augmente aux dépens de la mer. 142. Son calcul fur la fertilité des plantes. 144. Proba- bilité de fon hyporhéfe. Ii?id. Objections con- tre fon fyftême , tirées des efpéces d'animaux qui ne fe trouvent pas dans l'ancien conti- nent. ijf6. M JVaagistere qui purifie la matière > la redifie, convertit fes parties les plus déliées en une fubftance féminale , Ôc lui donne la faculté d'en produire de femblables dans fon efpéce. P, 1 5 p. 5 & fuiv. Matière , il y a une matière très- atténuée , exaltée , éthérée , électrique & élaftique qui pénétre fubftantiellement la mafle , ôc donne le branle à la matière brute & réfiilante. P. I5 p. 143. Ce qu'elle renferme dans fon idée. 150. Opinion folle fur fon éternité. P. II, p. 48 de fuiv. Inconvéniens qui en réfultent. 50. Matière éledrique , elle remplit de pervade librement toute la malfe de la terre , elle exiftoit avant le foleil. P. II , p. i V9. Les chaînes des montagnes , les continens mêmes ne font que des gonflemens opérés par ce Siij 27S T A B L R feu fouterrein qui agit comme caufe expan- iîve. ï6o. Matière animale , elle fe décompofe plutôt que la matière végétale. P. I , p. 180. Pourquoi elle donne un grand nombre d'êtres vitaux» î8 1'. Ses fels , fes foufres, fes huiles ont plus de légèreté que les fels tires des végétaux. lèiJ, MîLLET que les Marchands mettent dans la cla- varia des mouches végétantes. P. I , p. 153. Monde microfcopique , il peut fervir à prou- ver 5 aind que les infectes , Texiftence d'une matière vitale organifique , qui eft au-deffus de la vie fenfitive. P. l , p. 160, Montagnes , elles ne font que la trente-huit millième partie de la folidité de la terre. P. lî 5 p. 78. Elles ont été enfcvelies autrefois fous les eaux de la mer avec les continens. 83. Leur difpofition régulière par des chaînes dirigées vers les quatre points cardinaux du ciel 5 Se qui pafTent par le baffin de la mer. IbU. Elles ont été produites fous les eaux fur un plan régulier. 9S. Leur élévation dépend de ra<5tion compliquée des vents, des cou- rans , & de la gravitation univerfelle réci- proque. iGo. Elles font l'efct d'une force expanfîve intérieure - modifiée par la gravi- tation ^ ôc d'un feu central qui fe répand juf- TABLE. 279 qu'à la fuperficie. 131. Les courans nVn font que les caufes fecondaires. 132. Celles dts Cordelières , le mont Véfuve , les Apennins , les montagnes d'Auvergne font , ou ont été des volcans. 160 , î6i, Eftimation des ma- tières qui font forties du Vefuve , fuivant le Père La Torré. 161. On les compare aux ex- croilTances du corps des animaux qui font produites par une force végétative intérieure. 170. Les plus hautes font à la terre ce que font à un globe de fept pieds 155- Spalanzani ( M. l'Abbé ) a fait des expériences fur le ver de terre dont il a coupé la tête Se ia partie poftérieure , fur le ver à bateau , fur TABLE. i^i^f fur les limaçons , les limaces , la falaman- dre , & les têtards qu'il a mutilés de mê- me , & toutes CQS parties fe font réproduites. Explication que donne M. de Needkam de chacun de ces phénomènes par le fyftême de répigenefe. P. II , p. 175 & fuiv. Spontanéité 5 elle eft une habitude de vie, dirigée par des connoifTances qui partent d'un principe fendtif & fupérieur à la matière. P. I , p. (j 1. Son défaut n'exclut pas le principe organique intérieur de mouvement purement matériel , ou de vitalité. Ibid. Systèmes de Burmt^ de Whifloriy de Woodward êc de Telliamcd, P. II , p. 174. T X AMI SE 5 fon eau fe corrompt & fe purifie jufqu'à fept fois par la végétation des fubf- tances organiques , & leur atténuation juf- qu'aux premiers principes. P. I, p. 172. Table démonftrative Aqs hauteurs d'une partie des Alpes, obfervées en 1752. P. II , p. 250 & 2 5 1 . Et de celle de la Province de Quito au Pérou. 252. Terre repréfentée par les Anciens fous l'em- blème d'un œuf. P, II, p. ^6* On lui donne Fan. IL T icjo TABLE. une antiquité beaucoup plus reculée que célîe' que lui affîgnent la plupart des Théologiens- 58. Obfervations physiques fur fon âge , tirées de la difpofîtion des couches de fa fuperficie , de renchaînement des montagnes , &c. 80 & §1. De l'enfoncement des' corps terreftres, du dérangement des couches, &c. 81. Elle n'a pas été créée liiTe & unie, mais hériffée de montagnes fur un plan régulier. 98. Elle étoit beaucoup plus féconde & moins étendue avant le déluge qu'après. 139. PafTages de l'Écriture d'après lefquels on peut connoître la forme qu'elle avoit autrefois. 145. Elle eft comme une efpéce de globe vital , 6c orga- nifée à fa façon par l'acbion des caufes inté- rieures. i6ç). Idées fur fa théorie , tirées de Salomon, 172. Et à'HéJiode, 175. L'antédilu- vienne n'a pas dû être aufîî étendue que la nôtre pour fournir à la nourriture de fes ha- bitans , à caufe de leur frugalité. i()6» Exem- ple tiré des Chinois & de ceux qui vivent entre les Tropiques. 197. Son anéantiiTemenc ne produiroit pas un changement fenfîble dans le fyftême folaire. 59. Erreur de Pope ôc de Bolinhroke à ce fujet. IMd, TouRNEFORT (M.) a trouvé fur le mont Ararat en Afie , & par dégrés , les plantes ufueiks TABLE. 2^1 dé rArméhie , de la France , de la Suéde , 8c de la Laponie. P. II , p. 145. Tremblay ( M. ) a vu de petits polypiers en forme d'arbrifleaux. P. I , p. 1 5 1. Et des filets en forme d'anguilles, confervés depuis quatre ans dans un grain de bled niellé. 16^, Tremella , zoophyte qui lie enfemble les deux règnes 5 l'animal & le végétal. P. I, p. 208 & 209. Nom que lui donne DilUn» 209. Def- cription qu'en fait M. Adanfon. Ib'id. & fuiv. V V ALisNTERi ( M. ) 5 à quoi il attribue les an- guilles du vinaigre. P. 1 , p. 8 5 . Prévoyance qu il a obfervée dans les infedtes pour placer leurs œufs. 117. Il fuppofe gratuitement que les anguilles du vinaigre fe métamorphofenc en moucherons. 187. Vases des infufions , il efl: alTez indifférent de les tenir ouverts ou fermés. P. I , p. 2 1 5. Dans ceux qui font fcellés hermétiquement , il eft nécelfaire de maintenir une certaine quantité d'air pur , fuivant celle du fluide & de la fubftance macérée. 20^. VÉGÉTAUX , ils fervoient autrefois de nourri- ture aux hommes 6c aux animaux qui font aujourd'hui carnivores. P. II , p. 1 3 5 . Obfer- Tij icji TABLE. vacion à ce fujet fur les renards des environs de Genève. 137. Ils donnent, en fe décom- pofant 5 les mêmes principes chymiques par la réparation naturelle de la partie gèlatineufe & vitale. 182. C'eft la proportion de ces prin- cipes qui forme les différens tempéramens de la chaîne de vitalité. 3id, Dans quel fens MM. de Buffon & de Nudham ont dit que les végétaux exaltés fe vitalifent. 190. Ils laif- fent en arrière une matière brute & fans vie , quoiqu'organique. i^i. Ver fpermatique. P. I , p. 4. Mis en parallèle avec ceux que donnent les infulions. 25? & fuiv. Vers aquatiques trouvés dans l'eau au bas des Apennins de Rhege. P. I , p. 55. Vers blancs dans une infufion de fèves. P. I , p. 80 & fuiv. Ils fe changent en chryfalides. 81. Leur couleur. 82. Moucherons qui leur fuccédent. Ibid. Vers à foie , l'eau bouillante & Tadion du foleil font mourir leurs œufs. P. 1 3 p. 212. Vigile , dans quel fens le Pape Zachark a con- damné fon opinion fur les antipodes. P. 11 , p. 12. Vision moyenne des gens qui apperçoivent les objets fans diftinguer les couleurs. P. 1> p. J3. TABLE. 291 Elles ne. voyent les couleurs qu'en maffe. 54. Vital , il eft matériel ôc fe répare par la force végétative j le fenfîtif eft fimple & ne fe répare pas. P. I , p. 1 5 (j. Preuve de cette opinion. Ibid, & fuiv. ViTALixi , elle eft fubordonnée à la vie fenfî- tive. P. I, p. 144. Elle monte à mefure que la matière s'exalte vers le principe fenfitif , & defcend avec des nuances vers la matière morte ou réfiftante. 182, Elle n*eft jamais fenfitive. 272. Elle fert à unir les plantes avec les corps organifés vitaux. Ihid, & 273. Univers , tout y eft action & réaction, P. II, p. 17, 18 & 19. Il y auroit une ftagnation totale s'il devenoit fubftantiellement fîmilaire. 18. Voies belliniennes , ce que c*eft. P. I , p, 1 21. W"artel (M.), {qs expériences fur les lima- çons. P. II, p. 287 & fuiv. -iLooPHYTES 5 ou filamens vitaux. P. I, p, 17^. Ils touchent également aux animaux & aux végétaux fans être ni l'un ni l'autre. ic,j. Fin de la Tahk^ ERRATA. 1 ART. II, pag. i6. Je fuis bien affuré de ne mériter aucun reproche du côté du fens moral de l'Ecriture qui n'a guère jamais befoin , &c. Life7[^ , je fuis bien afTuré de ne mériter aucun reproche. Du côté du fens moral l'Ecriture n'a jamais guère befoin d'explica- tion, &c. • Pag. 19, lig. 15. Comme elle fortit , lif. comme elle eft fortie. Pag. 3^, lig. 13. Sur une quantité infinie de matière, ///. fur une quantité finie de matière. Pag. 41 , lig. 8. Geftionnez, lif. qucftionnez. Pag. 45 , lig. ij. Imprudemment , ///. impudemment. Pag. 51 , lig. 8. Réfiftence , ///. réfiftance. Pag. 58, lig. 5. Antiquité plus reculée , ///. antiquité beaucoup plus reculée. Pag. 88 , lig. 6. S'errcte , lif, s'arrête. Pag. 108, lig. 15. Dans des mémoires, lif, dans les mé- moires. Pag. III ,lig. 7. De viro immortdU , lif. viro immortali, Pag. 141, lig. 15. Enfoncées, lif. enfermées. Pag. ifi , lig. zi. Les Philofophes, lif. ces Philofophcs. Pag. 1^4, lig. z6. Et des deux vers la ligne, ///. des deux pôles vers la ligne. Pag. 175 , lig. ^. Et les mers avec leurs ifles , & parmi iefquelles, lif. &c les mers avec leurs ifles parmi lef- quelles. Uid i lig. 5. & qui fe perd, lif & qu'il fe perd. 'V ■^ wj^jmm. V ^■^^>>. :^^'~i