ES RES 1 (PI 0 { |: LEE | | JAI NZ f AP v A y dl ra di pay Î A Î L Ü ' } | (h / ‘ TN FMC LS DTA | \ AD: À LA" À | É 4e | nl l : 1 ALU d V A. RUN | Qi A M MEL CT NN AU) NT l ; Î A] LE 1 LA [ M : PMU RER HA ‘à ‘" A0 ( Li RARE" PNR UNS UN "VTT t, PUB INES Wr (ei d | PA bi | | } 0 d'A: ai h : W 1 x Ai 1 EN L'N 14 | N De; AND AIRE" DT Don L EN WA IN 4 1 AT Av CR ñ (y | { n fi j , M (1 : 1h nl 2 A l ÿ Ù [l " i y # FRE k 1 URSS ; 1 = 1 M? ' l Li ne DE” Pré L : 15 ds L a D un on n 1 D (ARE Rue OBSERVATIONS (SUR LA PEKYS#TQ UE, SUR L'HISTOIRE NATURELLE ENT SUR DES A RUES, AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE; D'ÉDIT ÉIE’S À Ms. LE COMTE D’ARTOIS; PAR M. l'Abbé ROZIER, de plufieurs Académies , & par M. J. A Moncez le jeune , Chanoine Reégulier de Sainte- Geneviève, des Académies Royales des Sciences de Rouen , de Dion, de Lyon, &c. &c. JOUA LE E M 17 8 23 TOME:XX. AP A LR TI SE AU BUREAU du Journal de Phyfique, rue & Hôtel Serpente, MAID'C CT LUX XX UTIIE AVEC PRIVILÉGE DU ROLL IN 27 OBSERVATIONS ET: MÉMOIRES SAUCE: LA PHYSIQUE, SUR L’HISTOIRE NATURELLE, ET SUR LES ARTS ET MÉTIERS. BE PARC E De S. E. M. le Comte JUAN GREGOREVITSCH DE CZERNISCHEW ;, Vice-Préfident du Collège de L Amirauté, Chambellan aëtuel, & Chevalier des Ordres de Ruffie & de Pologne, à l'Académie Impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg, fur l'inflammation d'un mélange de noir de fumée 6 d'huile; traduite du Ruffe. Les 20 Avril, à 11 heures du foir, on apperçut dans le Port de Cronftadt une fumée épaifle, qui s’élevoit d'une frégate de l’efcadre qui fe préparoit à mettre à la voile , quoique depuis cinq jours il n’y eût ab{o: Tome XX, Part. II, 1782. JUILLET, À 2 vs L 4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ument point eu de feu. Cette fumée parut fortir de la chambre du maî- tre d'équipage , fermée & cachetée depuis quatre heures : on y avoit porté & dépofé plufieurs chofes nécelfaires à l'entier équipement de la frégate. On força la porte de lachambre ,& l’on y vit des toiles à voiles rouges de feu & étincelantes. Toutes les recherches qu’on put faire pour découvrir la caufe de cet accident furent infructueufes, & à la fin on auroit été obligé de laiffer la chofe dans lobfcurité qui l'enveloppoit , en foupçonnant peut-être des erfonnes innocentes , ainfi que l'année dernière, à l’occafion d’un fem- blable accident, fi Sa Mayeflé Impériale n'avoit pas daigné elle-même mettre fur la voie les perfonnes chargées de cet examen , en me donnant Vordre fuivant : « Comme nous avons vu , par le Journal que vous nous avez préfenté » touchant l'accident arrivé à la frégate Marie, qu'il y avoit eu dans la » chambre où le feu s’eft manifefté , quelques rouleaux de cordages, & # au milieu d’un hamac, un mélange de fuie & d'huile enveloppé, & » deftiné à la peinture du vaifleau , nous nous fouvenons qu'entre autres >» caufes du feu qui pritlannée dernière aux magafns de chanvre, on avoit » allégué que cet incendie pouvoit avoir eu lieu , parce que le chanvre » avoit peut-être été enveloppé de nattes enduites, ou bien amoncelé avec » ces mêmes nattes : c'eft pourquoi vous aurez foin d'examiner fcrupuleu- » fement cette obfervation dans Le cas préfent ». J'ai d’abord communiqué cet ordre au Comité nommé par le Collége de l'Amirauté à cet examen , & qui étoit compofé d’un Membre dudit Collége, du Commandant en chef du Port, & de quelques autres Off- ciers de Pavillon. Ce Comité réfolut, en conformité de l’ordre Impérial qu'il avoit pour guide , d'examiner attentivement fi l'incendie en queftion p'auroit pas pu Être l'effet phyfique d'une caufe qui eût pu le produire d’eile- même ; & comme on a vu effectivement , par le procès-verbal dreffé à cet effet, qu'il s’étoit trouvé dans la chambre du Maître d'équipage, où la fumée s’éoir manifeftée, un mêlange de fuie & d'huile, & qu'en l’é- teignant on le vit jeter des étincelles, on réfolut de faire des expériences l-deffus. Pour cet effet, on fit l£ même mêlange de fuie & d'huile que celui de la frégate: on mit dans un feau 40 tb de fuie: on y verfa #5 d'huile de chenevis cuite , que lon répandit après ly avoir jaiffé durant une heure. On laiffa la fuie imbibée d'huile dans le feau au- tant de temps qu'un pareil mélange aufli dans un feau refté dans la fré- gate, c'eft-à-dire, quatre heures ; enfuite on enveloppa cette mafle de fuie , & on la mit dansun hamac, placé à côté de la chambre du Con- feil;, & pour éviter tout foupçon, deux Membres du Comité mirent leur cachet fur le hamac & fur la porte , que l’on fit garder par une fenti- nelle. Pour plus de füreté , quatre Officiers de Marine eurent ordre d'y SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, avoir l'œil pendant la nuit, & d'avertir le Commandant en chef, au moindre figne de fumée, Cette expérience fe fit le 26 Avril à 11 heures avant midi , en préfence de tous les Officiers qui avoient été nommés pour y aflifter, Le lendemain à 6 heures , après un intervalle de 13 heures depuis l’appofition du fcellé, la fumée fe manifefta. Le Commandant en fut averti fur-le-champ par le plus ancien Officier de garde, Il ÿ accourut promptement, vit par un trou de la porte fortir de la fumée du hamac; & avant que de defceller la porte, il envoya chercher les autres Membres du Comité : mais comme la fumée devenoit trop épaifle , & que le feu commençoit à éclater, il fe vit obligé d'ouvrir la porte fans les atrendre. Dès que l'air libre eut pénétré jufqu'au hamac , il commença à s’enflammer & brüla. Le Collége de l'Amirauté réfolut de réitérerces je en plufieurs endroits & de différentes façons , pour mieux approfondir les effets & les fuites de ce mélange de fuie & d'huile enveloppé de toile : elles ont réufli pour la plupart. Je fais perfuadé que l'Académie Impériale des Sciences prendra cet objet en confidérarion, & qu'elle fera des expériences relatives, qui con- duiront à de nouvelles découvertes, J'ai l'honneur de joindre ici une notice de la quantité de fuie & d’huile qu'on a employée, ny te du temps que le mêlange a mis à s’en- flammer, J'ai jugé à propos d'y ajouter la remarque, que les mélanges de 3 tb de fuie & d’15 tb d'huile de chenevis cuite, faits dans ma maifon, fe font toujours enflammés. JUAN , Comte CZERNISCHEw. I. Expériences faites au Port des Galères, I. Le28 Avril, à 3 heures après midi, on verfa fur 20 Ïb de fuie ordi- naire , 20 Ïb d'huile de chenevis cuite, dont on répandit enfuite un go- belet. IL. À quatre heures du même après-midi , on verfa ce gobelet d'huile de cheneviscuire fur 2 15 de fuie ordinaire. 3 Ces deux mafles furent fcellées & enfermées dans la chambre attenante au Corps - de - Garde. ' Effer. Le lendemain 29, le matin à 10 heures , la première mafle enve- loppé: dans un hamac n'avoit acquis aucune chaleur. La feconde, qui étoit reftée dans une cuve, fur trouvée chaude: on l'enveloppa dans dela toile, & on en vit fortir de la fumée vers le foir. IT. Le29 Avril , vers les $ heures du foir, on verfa 4 # d'huile de chenevis cuite fur 8 Àb de fuie ordinaire , & on enferma la mafle dans la chambre du bain. Effet. La chaleur fe manifefta à 8 heures du foir, mais elle ne futfuivie d'aucun embrafement, D À 6 OBSERVATIONS SUR LA PAYSIQUE, IV. Le même foir, à 9 heures on verfa fur 20 1b de fuie ordinaire 17< tb d'huile commune, dont on répandit 71 au bout d'une heure. La mafle repofa pendant $ heures ; le lendemain 30 , le matin à 3 heures , on l'en- veloppa dans un hamac, & on l'enferma dans la chambre du Corps-de- Garde. Effer. La mafle devint chaude au bout de 3 heures, & elle sembrafa à x2 heures & demie. Le feu qui fortit du milieu fut violent. V. Le 29 Avril, à 10 heures du foir, on verfa fur 20 Ïb de minium 10 ibd'huile de chenevis cuite , dont on répandit enfuite 75 1b : on plaça cette mafle dans le comptoir. VI: Le nième foir à 11 heures, on verfa fur 3 5 de fuie d'Hollande < tb d'huile de chenevis cuite. Cette maile fut dépofée dans la chambre de VOficier, auprès des magafns. VII. En même temps on verfaauffi À # d'huile de chenevis cuite fur ro fb de fuie Commune, & on enferma cette mixtion dans ia chambre de la Garde, à côté du comptoir, VIII, Le 1°* Mai, à 1 heure après-midi , on verfa fur 18 tb de fuie com- mune 13 #b d'huile ordinaire, dont on répandit après quelques momens 516, % la mafle fut mife dans la chambre du pre. Effet. Toutes ces mafles acquirent quelque degré de chaleur, fans sembrafer ; & au bout de quelques heures , elles fe refroidi- tent. IX. Le 1°° Mai, à 2 heures après-midi, on prit 10 tb de fuie ordinaire, & $ 1b d’huile de chenevis commune ou crue , dont on répandit enfuire 1 16 à 7 heures du foir. La mafle fur enveloppée dans un hamac, & en- fermée dans la chambre du bain. Effet. Le lendemain 2 , à 9 heures du matin, la mafle commença à donner des indices de chaleur ; & à 6 heures du foir, elle s'embrafa avec violence, TU], Expériences faites dans l'Hôtel de S, E. M. Le Comte de Cyernifchew. LT & IT, Le 30 Avril à midi, on prépara les deux mélanges füui- vans. ; 2 15 de fuie d'Hollande avec +1b d'huile de chenevis cuite, 31 de fuie d’Hollande avec 3 tb d'huile de chenevis cuite. On enveloppa ces deux mafles, d’abord après leur mixtion, dans des toiles: on pofala première dans le veftibule du bain, & l'autre dans un corridor ayant deux fenêtres expofées au fud. Effet. À 6 heures du foir , l'une & l’autre mafles acquirent de la cha- leur; mais il ne s’enfuivit aucun embrafement. LL. Le 1°° Mai à midi, on verfa 10 tb d’huile de chenevis cuite fur 10 15 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 7 de fuie d'Hollande: on laifla repofer la mafle pendant $ heures fans la mêler: on l’enveloppa enfin dans un hamac , & on l’enferma dans Le vef tibule du bain. I1 n’en réfulta aucune chaleur. IV. Le 3 Mai, à 11 heures avant midi, on méla enfemble 3 tb de fuie ordinaire avec 1: 1b d'huile de chenevis cuite, Cette mafle repofa durant une heure , & fut enfuite enveloppée dans un hamac , & tranfportée dans Le veftibule fus-mentionné. Effer. Elle s’embrafa à 4 heures & demie après-midi: on Ja porta à l'air libre, & elle brüla plus de 3 heures, V. Le 4 Mai, à 10 heures avant midi, on répéra l'expérience précé- dente , & onenveloppa la maffe , une heure après la mixtion , dans de la toile. Effet. À 2 heures & demie après-midi , on en vit fortir de la fumée; à 3 heures il en fortit des étincelles ; & après que la mafle fut expofée à l'air libre , elle s'enflamma & fe confuma. VI. Le même jour, à 12 heures & demie, on fit une feconde répétition de la IV expérience , en enveloppant la mafle dans un hamac, toujours une heure après la mixtion, Effer. Les mêmes phénomènes eurent lieu à $ heures du foir, VII & VIIL. Le $ Mai à 4 heures du matin, on prépara deux maffes pa- reilles à celle de la IV° expérience & des fuivantes : on enveloppa l’une & Fl’autre dans des toiles ; & on les enferma dans le veftibule du bain. Effet. À 8 heures du matin lune & l’autre mafles s’embrasè- rent. TI. Expériences faites à Cronfladt le 28 Avril, à $ heures du foir. Avertiffement, Dans lesfix premières de ces expériences, on verfa fim- plement l'huile fur la fuie, & on laïffa repofer les mafles pendant 4 heures, c'eft-à-dire , jufqu'à 9 heures du foir. On répandit enfuite l'huile fuper- flue, dont le poids eft marqué à chaque expérience. Enfin, on enveloppa les portions de fuie ainfi imbibées dans de vieux hamacs, & on les pofa dans une chambre à une diftance fufifante l’une de l’autre, Dans les Le dernières expériences, les mafles furent , d’abord après leur mixtion, en- veloppées dans des hamacs, I. 40 Ïb de fuie commune. 351b d'huile de chenevis crue , dont on répandit au bout de quatre heu- res 24 Ïb. Æffir. La mafle s'embrafa le lendemain matin à ÿ heures à. IL. 20 ib de fuie commune, 173 1b d'huile de chenevis crue , dont on répandit 7 1, "8 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS- Effet. L'embrafement eut lieu à la même heure, III. 10 tb de fuie commune. $ 1 d'huile de chenevis crue , dont on répandit 3:16, Effet. La chaleur de la mafle augmenta jufqu'à $ heures ? du lende- main matin; mais il n'y eut point d'embrafement. IV. 41 de fuie d'Hollande. 1b d'huile de chenevis crue : on n'en répandit rien, Effer. La mafle s'embrafa à 12 heures = de la nuit. V. 8 tde fuie commune, 41b d'huile de chenevis cuite, dont on répandit +15. Effet. La mafle s’échaufla & fe refroidit alternativement, fans s’en- flammer. VI, 32 1 de minium. 10 1 d'huile de chenevis cuite, dont on répandit 7 = 16. Effèr. Il ne fe manifefta aucune chaleur. VII. 36 de fuie d'Hollande. + 15 d'huile de chenevis cuite. Effer. La mafle s'embrafa à 9 heures du foir , c’eft-à-dire, au bout de 4 heures. On ne l’éteignit qu'avec peine; même après l'avoir jettée dans une cuve remplie d’eau, elle remonta , & brüla encore pendant quelque temps, NTTR 10 Ïb de fuie commune. 2 1 d’huile de chenevis cuite. Effet. La mafle s’échauffa, & la chaleur augmenta jufqu'à minuit; elle diminua enfuite , & la mafle rédevint froide. IV. Expériences faites à l’Amirauté, I. Le 28 Avril, à 6 heures 20/ du foir, on verfa fur 4$ tb de fuie commune, 25 b d'huile de chenevis crue; 1 heure après, on en répandit 141; & au bout de 4 heures , on enveloppa la mafle dans de la toile, & on la mit dans une chambre voutée fans fenêtres. Effet. La mafle s'embrafa le 30 à 3 heures gs’ du matin; par confé- quent 27 heures 35/ après l'avoir enveloppée. Il'Le 29 Avril, à 3 heures après-midi, on verfa, fur 40 15 de füuie -commune , 35 1b d'huile crue: on procéda comme dans l'expérience pré- cédente, en répandant 27: Ïb d'huile. La maffe fut mife dans une chambre à deux croifées. - Effer. L'embrafement eut lieu le lendemain après-midi , à 2heures 15’, ou 23 heures 45/ après qu'on eut enveloppé la mafle. IT, À 4 heures du même jour 29 Avril, après-midi ; on réitéra le même procédé avec 32 #b de fuie commune , &! 16/15 d’huile dé chenevis é cuite, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 9 cuite, dont on répandit 13 tb. La mafle fut pofée dans une chambre à une feule croifée. Effër. Le feu y prit le lendemainàg heures 45’ du foir, 12 heures 45 après que la mafle eut été enveloppée. IV.A 5 heures du même après-midi, on verfa £ur 6 1b de fuie d'Hollande, un poids égal d'huile de chenevis crue , & on n'en répandit rien. La mafle fut dépofée dans la chambre à une croifée. Effet. On obferva de la chaleur , mais elle ne fut point fuivie d'em- brafement. Au bout de 18 heures, la mafle fut refroidie. V. A 6 heures du même foir, on fit un eflai avec 32 tbde minium, fur lequel on verfa ro fb d'huile de chenevis cuite, dont on répandit au bout d’une heure 7 1b. On mit la mafle dans la chambre à deux croifées. Effer. XL ne fe manifefta aucune chaleur. VI. Le lendemain 30 Avril, à 8 heures du matin, l'expérience fut faite avec 10Ïb de fuie commune & 4 tb d'huile de chenevis cuite, fans en ne LS La mafle fut encore enfermée dans la chambre à deux croi- ées. Effer. La chaleur fe manifefta au bout de $8 heures, mais il n’y eut point d'embrafement. VII. Le 1% Mai, à 12 heures+, on mêla enfemble 20 tb de fuie commune, & 17 tb d'huile de chenevis crue: on enveloppa enfuite cêtte mafle dans de la toile, & on la tranfporta dans une chambre dont les deux fenêtres regardent le fud. Effet. La mafle s'échauffa au commencement, mais elle ne s’embrafa pas, & fe refroidit au bout de 48 heures. VII. IX. A la même heure, onfitencore deux mixtions pareilles à celle de l'expérience précédente, en employant pour la première : 10 Ïb de fuie commune,& $ 1 d'huile de chenevis cuite; & pour la feconde : 3: tb de fuie d'Hollande, & 3 tb d'huile de chenevis cuite. On tranfporta ces deux mafles , enveloppées dans de la toile , dans {a même chambre à deux croifées vers le fud. Effer. Les phénomènes furent les mêmes que dans l'expérience précé- dente , à l'exception que les mafles fe trouvèrent déjà refroidies au bouc de 18 heures. X. XI. Le 4 Mai, à 11 heures avant midi , on fit deux effais. Dans le premier , on méla enfemble 10 tb de fuie commune ,-& 8 1b d'huile de . chenevis crue, dont on répandit à midi le fuperflu pefant 1 Ïb. Dans le fecond eflai, on employa pour la même quantité de fuie 8 #b d'huile de chenevis cuite , dont on répandit au bout d'une heure 1115. À 4 heures après-midi , on enveloppa l'une & l'autre mafles dans de la toile, & on les mit dans la chambre à deux croifées vers le fud, Tome XX, Parc. I1, 1782, JUILLET. B 10 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Effer. Ces deux mafles donnèrent les mêmes phénomènes: elles mani- feftèrent d’abord de la chaleur, mais elles ne s’embraferent pas; & au bout de 32 heures, l’une & l’autre avoient perdu toute chaleur. XII. XIII. A la même heure , on fit encore deux mixtions, en employant pour la première 2 fb de fuie d'Hollande, & + 1b d'huile de chenevis cuite: & pour la feconde, 1 #b defuie d'Hollande , & :#b d'huile de cheneviscuite: on mic l'un & l’autre paquets dans la chambre à deux croifées. "Effet. Aucun indice de calétaction pendant 32 heures. XIV.XV. Toujoursau même avant-midi , & dans la même chambre, on mit les deux mixtions fuivantes enveloppées dans des toiles, La première, de 25 1b de fuie commune , & = #b d'huile de chenevis cuite, La feconde , de 2° #b de fuie d'Hollande, & =ïb d'huile de chenevis cuite. Effés. Ces deux mafles s’échauffèrent au commencement , & fe refroi- dirent au bout de quelques heures, XVI. Le $ÿ Mai, à 8 heures du matin, on mêla enfemble 3 #b de fuie commune avec 1; 1b d'huile de chenevis cuite : on enveloppa la maffe comme dans les expériences précédentes, & on la dépofa dans une chambre à deux croifées expofées vers le nord. Effe. À 1 heure 45’ après-midi , ou bien au bout de ÿ+ heures, la mafle s’enflamma , & le feu fur très-vif. NV. Expériences faites à l Amirauté , le 2 Mar , avec du Chanvre, de PHuilé de Chenevis 6 de la Suié, A 12 heures & demie , on entortilla dans des toiles les huit mélanges fuivans, & on les mit dans la chambre à deux croifées expolées vers le nord, I. Du chanvre poiflé & de l'huile de chenevis crue. IT. Du chanvre poiflé & de l'huile de chenevis cuite. III. Du chanvre ferancé & de l'huile de chenevis crue. IV. Du chanvre ferancé & de l'huile de cherevis cuire. V. Du chanvre poiflé , de l'huile de chenevis crue & de la fuie. VI. Du chanvre poiffé, de l'huile de chenevis cuite & de la fuie. VII. Du chanvre ferancé , de l'huile de chenevis crue & de la fuie. VIII. Du chanvre ferancé , de l'huile de chenevis cuite & dela . fuie. Le dernier paquet où le chanvre n’avoit point été humeété confidéra- blement, fut le feul qui s'échauffa & s’embrafa. Cela arriva à 4 heures & demie après-midi , c'eft-à-dixe au bout de 4 heures, Les fepc autres pa- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 1 quets , où une plus grande portion d'huile avoit été employée, ne don- nèrent aucun indice de caléfaétion , quoiqu'on ait attendu au-delà de 28 heures. VI, Expériences faites à l'Amirauté le 4 Mai, à 11 heures avant midi; dans la chambre à deux croifées expofèes au [ud. I. 1 Ïb de chanvre poiffé , humectée de = tb d'huile de chenevis crue, commença d’abord à s’échauffer: mais il ne s’enfuivit point d'embrafe- ment; & au bout de 31 heures, la chaleur avoit entiérement dif- ar. II. Les trois mafles fuivantes n’ont donné aucun indice de caléfaion, quoiqu'on les ait obfervées pendant 31 heures, 1°. 1 #b de chanvre poiflé & = tb d'huile de chenevis cuite. 2°. 1 Ïb de chanvre ferancé & = tb d'huile de chenevis crue, 3°. 1 1b de chanvre ferancé & = tb d’huile de chenevis cuite. Expériences [ur l'inflammation fpontanée de la fuie mêlée avec différentes huiles, par M. J, G. GEORGY; traduites de l'Allemand. P:v après que le bruit fe fut répandu que la frégate Impériale Marie avoit pris feu dans le port de Cronftadt , ce qui arriva le 20 d'Avril 1781, on commença à parler aufli d’un mélange de fuie & d'huile, dont l'in- flammation fpontanée devoit avoir caufé cet incendie. En fuppofant le fait avéré, il paroïfloit bien paradoxe qu’on n’eût encore jamais obfervé la réalité, ni mêmela pofhbilité d’un pareil phénomène, vu que fans contredit le mélange en queftion s'eft fait, non une fois, mais des mil- lions de fois dans toutes les contrées de l’Europe , & qu'il s’'eft trouvé, foit par accident, foit à deffein, tantôt couvert, tantôt à découvert, tantôt dans un lieu , tantôt dans un autre, & cela pendant des intervalles de temps plus ou moins longs. Mais lorfque notre augufte Souveraine eut fait faire des perquifitions fur les lieux mêmes , la chofe fe trouva certaine, & plufeurs expériences réirérées la confirmèrent, Comme il ne s’agifloi donc plus d’un foupçon, ou d’une fimple probabilité, je me mis aufli-tôt de mon propre chef à faire des expériences là-deflus, & peu après je me fis un devoir de les continuer par ordre de Son Excellence M. le Cham- bellan de Domafchnef , Directeur de l’Académie Impériale des Sciences, Les expériences de l’Amirauté ont été faites avant les miennes; & fi elles Sr pu mètre communiquées , j'aurois omis quelques- unes des miennes, ou du moins je les aurois faites d’une autre ma- Tome XX , Part, II, 1782. JUILLET. B 2 12 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nière ; j'aurois tâché ,en partant du point auquel l'Amirauté s’éroit arrêté, de pouiler mes recherches auf loin qu'il étoit pollible. Mais ne pouvant les obtenir, je fus réduit à confidérer la chofe comme un problème à réfou- dre , dont cependant la poffibilité étoit démontrée. Les indices que je reçus, par la complaifance de M. Jean Alb. Euler, touchant l'une de ces expériences , qui devoit rarement manquer , & qui étoit indiquée dans un rapport du Comité établi à Cronftadt pour cet objet. m'épargnèrent beaucoup de peines inutiles , quoique cette expérience même ne m'ait ja- mais réulMi, quand j'ai voulu la répéter. Lorfque, le 13 du mois d’Aoùût, S. E. M. le Comte Jean Czernifchef, Vice-Préfident de l'Amirauté , com- muniqua à l’'Académie.les expériences faites par lFAmirauté , je trouvai que les miennes pouvoient fervir en partie à les conftater , en partie à leur donner plus d'étendue, & en général à répandre du jour fur toute cette matière. C’eft pourquoi je vais tranfcrire ici mes obfervations , telles que je les ai préfentées à l'Académie le $ de Juillec 1781, en y ajoutant celles que j'ai faites depuis. Pour éviter les répétitions qui pourroient fe gliffer dans mon récit, je me crois obligé de faire préalablement les remarques fuivantes : La fuie ou le noir de fumée d'Allemagne eft ce que les Allemands ap- pellent fuie de Peintre ( Mahler-Ruff), & qu'on nommeici noir à noir- cir. On le vend ici en boîtes plus ou moins grandes, qui ont la forme de petits tonneaux , fous le nom de fuie d'Hollande ( Ghollands-kaja Saya ). Je me fervirai indifféremment de ces divers noms, C’eft une matière très- fine , très-légère & très-noire dans fon genre. La fuie ou le noir de fumée de Ruffie eft une fubftance plus groffère , plus pefante au triple ou au quadruple de l'autre , & plus grafle en appa- rence, On latire des réfidus de la poix, aulfi-bien que du bois de fapin réfineux. On s'en fert communément pour peindre le boifage, à caufe du bon marché. C’eft de cette dernière efpèce qu'étoit le noir que le Barbouilleur à Cronftadt avoit malheureufement mêlé avec de l'huile, & confervé pour fon ufage. ( Woyez la Lettre du Comte de Crernifchef.) L'huile de chenevis cuite. C’eft cette huile , réduite par la cuiflon en vernis, après avoir été mêlée d’un peu de minium, par un procédé affez connu, que nos Barbouilleurs prennent pour leur vernis, qu'ils appellent olive d: l'huile d: chenevis (Ranapli mafla), parce que cette huile eft moins chère que celle de lin, & qu’elle ne dépofe pas tant de fédiment falin. En place delitharge d'argent, en prend ici fur une livre d'huile environ une demi-once de minium C’eft avec de pareilsymatériaux que PAmirauté a aufli tait fes expériences. Pour ferrer ou envelopper les mafles, j'ai toujours pris de Ja toile grofière & non blanchie , qui reffemble beaucoup à celle dont on fait les eftrapontins à coucher & les voiles des vaifleaux, hormis qu'elle eft moins forte, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 13 Les mélanges ont été faits dans une jatte ou un affez grand bafin de bois, où les maffes font toujours demeurées à découvert jufqu'au moment que je les ai enveloppées de toile, La chambre de l’Académie, qui fert de laboratoire chymique, a deux fenêtres , qui donnent à-peu-près à l’eft, & une troifième prefque au fud ; elle a deux portes. Pour arrêter autant qu'il étoit poflible tour mouve- ment & toute affluence de l'air extérieur, “re être empêché néanmoins dans l’obfervation des phénomènes , je me fuis fervi d’une caïfle de bois de cinq pieds de long , deux de large tre autant de haut, qui étoit muni d'un bon couvercle. Je fis faire des échancrures aux deux ex- trémités de la caifle, & les fis fermer par des vitres. Chaque fois qu’il fe manifefta quelque réaction intérieure dans les mafles, on fentit une odeur plus défagréable que n’eft celle de l'huile bouillante , & on vit s’é- lever des vapeurs dont les vitres furent humectées. Expérience I, Le 1° de Mai , je mêlai dans un vafe Ge verre 1 de noir de fumée de Rullis avec une pareille quantité d'huile de fin crue ou non cuite, & je plaçai le vafe ouvert dans une cheminée, Cette mafle vifqueufe ne fubit pas le moindre changement fenfible, ni ce jour-là , ni les jours fuivans. Expérience II, Un autre mélange de 1 fb de noir de fumée de Ruffie avec autant d'huile de chenevis crue, refta également inactif, Expérience 111. 1 Ïb de noir de famée de Ruflie ayant été mêlée avec x À d'huile d'olive crue , le tout demeura froid. Expérience IV. Le 4 Mai, je fis une mafle femblable de 1 tb de fuie d'Hollande ou d'Allemagne, avec de l'huile de lin, prenant 3 tb de cerre huile; je plaçai cette mixtion à découvert dans la cheminée, mais elle demeura fans action. Expérience V. Une autre mixtion de 1 Ïb de fuie d’'Hollande , avec 3 15 d'huile de chenevis crue, qui fut placée à côté de la précédente, demeura tout auf inactive. Expérience VI, Le $ Mai, une mixtion de 1 # de fuie d'Hollande avec #5 d'huile d'olive commune, laiflée à découvert , me fruftra encore de l'efpérance du fuccès. Expérience VII. Le 10 Mai, on mit dans le baflin de bois 3 #b de noir de fumée de Rufie: on répandit deflus 15 5 d'huile de chenevis cuite, & on fitune pâte de ces deux ingrédiens. Après l'avoir laiffée durant une heure à découvert, on la pétrit de nouveau; ce que faifant, on la trouva chaude vers le milieu , de façon qu'elle affeétoit l’odorat, Là deffus on la lia bien ferme dans de la toile groffièréraprès l'avoir en- core faupoudrée d’un peu de noir tout fec. Aïnfi empaquetée, on la mit dans la caifle qui avoit été préparée dans le laboratoire, & dont il a été parlé au commencement de cette Differtation. Après qu'elle y eur repofé durant 3 heures & demie, on fentit l'odeur de l'huile bouillante, 14 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & le paquet devint chaud. La chaleur alla en augmentant pendant deux heures, après quoi elle diminua. Ayant ouvertie paquet le lendemain matin, je ne m'apperçus d'aucun changement dans la male, Je l'enveloppai de nou- veau, & la misen lieu de füreté. Le 3 Juillet je rouvrisle paquet, & je trouvai que la mañle avoit contracté extérieurement une croûte sèche, & intérieu- rement une couleur grisâtre: expofée à l'air libre , elle s’échauffa fenfible- ment; mais elle perdit fa chaleur au bout de quelques heures. Expérience VIIL. Une autre mafle de 3 15 de noir de Ruflie & de 2 tb d'huile de chenevis cuite, pétrie & préparée de la même manière, & mile en même temps que la précédente dans la caifle, demeura froide, Expérience LX, 3 #5 de noir de Ruflie ayant été mêlées avec 1 15 d'huile de chenevis cuite, le tout ayant été bien pétri , puis au bout d'une heure empaqueté comme ci-deflus, après avoir été faupoudré de noir fec, on ne s’apperçut pas de la moindre réaction dans cette mañle. Expérience X. Le 12 Mai , 3 b de noir de Rufie furent pétries avec 15 #b d'huile de chenevis cuite, & le tout fut traité & préparé comme dans les expériences précédentes ; mais la mafle ne devine ni plus ni moins chaude qu’elle ne l’étoit. Expérience XI. Le 14 Mai, pour effayer fi la fuie & l'huile en plus grande quantité ne feroient pas mieux difpofées à s’échauffer & s’enflam- mer enfemble qu'en moindre quantité, comme il arrive ordinairement # des tas de foin & à d’autres matières femblables , j'ouvris toutes les males précédentes, qui étoient demeurées froides, jufqu'a celle qui avoit fervi à la dixième expérience inclufivement, ce qui fit une maffe totale de 301b; je la pétris, la laiffai une couple d'heures à l'air , la ferrai bien ferme dans un fac de toile, & mis le fac en lieu de füreté dans le laboratoire, en cas d’'inflammation: mais plufieurs femaines fe pafsèrent, fans que j'y remarquafle le moindre changement. Expérience XII, Le 1$ Mai, on pétrit 3 #b de noir de Ruflie avec 1+ # d'huile de lin cuite, & = once de naphte d’Aftracan; la mafle fut pofée aufli-tôt fur une pièce de toile, faupoudrée abondamment de noir fec, liée bien ferme dans de la toile, & mife dans la caïfle: elle ne s’échauffa point. : Comme je ne pouvois faire parvenir jufqu’au degré d’ignition la cha< leur des mafles de fuie & d'huile femblables à celles qui s’étoient le plus fréquemment enflammées dans les expériences de Cronftadt, & qui, d’a- rès les indices que m'en fournit M. l'Académicien Euler, conhftoient en 1= tb d'huile fur 3 Ïb de noir; je conclus de-là que la faute prove- noit ou des matériaux, ou de la manipulation: c’eft pourquoi je tâchaï d'obtenir pour mes expériences les mêmes Matelots que l'on avoit em- ployés à Cronftadt pour faire Les mélanges ; mais au liey de Matelots, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 15 on m'envoya de la fuie & de l'huile pour une mixtion. Il y avoit 3 1 de noir de Rufie & 4 tb d'huile de chenevis, au lieu de 1 Ïb : que je croyois néceffaire. Après un léger examen, je trouvai que ces matériaux ne différoient en aucune façon des miens. Expérience XIII. Le 20 Mai, je pétris les 3 Ïb de noir de Ruflie que j'avois reçues de l'Amirauté avec 12 1 de l'huile de chenevis qui m'avoit été envoyée en même temps; je laiffai la mafle pendant une heure à décou- vert, & procédai pour tout Le refte comme dans ma 7° expérience. J'avois retenu un peu du même noir, pour en parfemer la mafle. Ce paquet demeura aufli fans réaction; ce qui ne feroit pas arrivé , fi j'y eufle mis route l'huile qui m’avoit été envoyée , comme je le reconnus depuis par d’autres expériences. Expérience XIV. Pour comparer mes matériaux avec ceux de l’Ami- rauté, je pris des miens la même quantité que dans la 13° expérience, & HA en général comme dans les 7° & 13° expériences, mais fans fuccès. Expérience XV. Le 24 Mai , fur 4 #b de noir de Rufie furent ver- fées 21b d'huile de chenevis cuite, & le tout fut mêlé légèrement. La füie refta sèche en grande partie, après avoir englouti l'huile. Ce mélange fut mis à découvert dans le baflin de bois & dans la caifle à expériences. Au bout de 9 heures , on fentit une odeur défagréable & fétide d'huile bouillante, & un peu de chaleur. Cette chaleur augmenta durant trois heures, & fut accompagnée de vapeurs aqueufes qui s’élevoient de la mafle ; après quoi la chaleur fe D infenfiblement , & il ne fe fit plus d'autre changement. d Expérience XVI, Le 26 Mai, 4 de noir de Ruflie ayant été bien mêlées avec 3 tb d'huile de chenevis cuite, fans que l'on eût cependant péri ces matériaux, on mit d’abord la male dans de la toile groflière , puis dans la caifle : point de fuccès. j Experience XVII. Le 1°° Juin, on verfa lentement & uniformémens $ 15 d'huile de chenevis cuite fur : #b de noir de Rufñlie, La fuie engloutit tout le vernis, de façon qu'il n’en refta point à décanter. Au bout fe cinq heures , fans mêler davantage cette compoñrion, on l’enveloppa de toile groffière : elle confiftoit en un grand nombre de petites mafles humides & en partie mollafles, qui étoient entourées d’un peu de fuie demeurée à fec ; le tour étoir froid , & c’eft dans cet état que la mafle entière fut mife dans la caifle à expériences. Seize heures après avoir été imbibée, & onze après avoir été enveloppée, elle commença à odorer & à s’échauffer, Au bout d’une heure encore, il y eut queues places dont la chaleur étoit à-peu près la même que celle que l’on fent fous une poule qui couve ; les exhalaifons qui en fortoient étoient vifbles; à d’autres endroits au con- traite le paquer éroit froid. Après l’intervalle d'une demi-heure, l'une de ces places chaudes , dela grandeur environ d’une pièce de demi-rouble, 16 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, devint brune, & quelques momens après, on la vit incandefcente; elle s'érendoit infenfiblement, & gagnoit un peu par fes bords. Au bout de= d'heure , il en arriva autant à une feconde place , & bientôt après à une troifième, Toutes trois étoient rouges comme de la braife, & il en fortoit une fimée épaifle de couleur grisâtre, & d’une odeur moins fétide que n'avoit été celle de la mafle entière au commencement de La réaction. La chaleur du paquet n'étoit pas égale de toutes parts. La mafle ayant été ôtée de la caifle , & tran{portée dans un air plus libre , le feu fe développa , formant une flamme de la hauteur d’un empan, mais peu vive, tranquille, & qui donnoit beaucoup de fumée. Ayant fait une ouverture à une place qui ne brüloit pas, je tirai du milleu du paquet une petite portion de la mafle ; je la trouvai chaude, mais non ardente , molle, d’un noir luifant , d’une odeur forte & répu- goante, Quand je faifois des ouvertures dans la mafle en la piquant, il en fortoit peu après une fumée fuligineufe, qui, s’allumant d'elle-même, brûloic en Aamme ; & en général , le feu n’étoit proprement par-tout qu’à la furface où fe faifoient des crevafles : il fortoit de ces crevafles des exha- lailons épaifles, qui, en s’allumant , formoient la flamme. Je mai point vu que la maffe fe foit gonflée fenfiblement , foit pendant la réaction, foit pendant l'ignition. Environ au bout d'une heure, les flammes s’éteignirent, & la mafle ne fit plus que brüler en braife. Mais lorfque, pour la dé- gager de fes cendres , on l’eut pouflée de la planchette qui la foutenoit fur les pavés de la chambre, & qu'elle fe fût par-là un peu éparpillée, elle jetta fubitement une flamme violente, jufqu’à 3 pieds de hauteur , qui donna une fumée épaifle & abondante; après quoi cette grande flamme diminua peu-à-peu , & le feu fut réduit de nouveau à la fimple incandefcence , d’a- bord avec fumée , & enfin fans fumée. Au bout de huit heures, tout fut confumé. Les cendres étoient grifes , tirant fur Le noir, & affez compa@tes; elles peloient ç: onces. Expérience XVIII. Le 4 Juin , je répétai l'expérience précédente avec la même quantité de matières; je verfai le vernis d'huile de chenevis fur le noir de fumée, fans mêler autrement ces matières, & procédai en tout comme ci-deffus. Cinq heures après l'opération, la mafle fut trouvée froide ; je lenveloppai & la pofai dans la cafe. Ce ne fut que 40 heures après avoir été imbibée, & 35 après avoir été enveloppée, qu'elle com mença à s’échauffer & à répandre de l'odeur. La chaleur alla en augmen- tant pendant quatre heures: de manière que l’incandefcence fpontanée f manifefta 44 heures après l'imbibition. Cette incandefcence, & la flamme qui s'enfuivit & qui dura huit heures, préfentèrent des phénomènes exac- tement femblables à tout ce qui arriva dans la 17° expérience. Les cendres pesèrent cette fois ÿ< onces & 1 fcrupule. Expérience XIX. Le 10 Juin, ayant mis dans la jatte ou le baflin de bois 3 #b de noir de Raffie, je verfai deflus lentement & uniformément $s & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 $ # d'huile de lin, qui avoit été cuite en vernis avec 22 onces de mi- nium ; puis je procédai en tout, tant par rapport aux intervalles de temps que par rapport à la manipulation , comme dans les 17° &'18° expériences, Lorfque j'enveloppai la mafle, je la trouvai plus pénétrée du fluide que’ celles que j'avois faires avec de l'huile de chenevis cuite, & où une partie de la fuie éroit demeurée à fec. Dix-fept heures aprèsla mixtion & douze heures après l'enveloppement , la mafle fe mit en réaction, & devint chaude & odorante. La chaleur alla en augmentant durant deux heures confécutives; puis elle diminua, & il ne s'enfuivit point d'autre change-. ment. Je ne doute pas que l’inflammation fpontanée n’eût eu lieu , fi j’eufle ré- pété cette expérience avec un peu moins de vernis à l'huile, ou peut-être imême fans cela dans un temps fec ( car c’étoit un jour de pluie ). Je foup- çonne que l’huile de pavot, celle de noix, & toute autre huile à vernis ou ficcative produiroit le même effer, Expérience XX. Le 16 Juin, ayant pris 3 fb denoir de fumée de Rufle , j'y fis imbiber lentement 4 #b d’huile d'olive , qui avoit été cuite en manière de vernis , jufqu’a l’évaporation de toute aquofité , quoique par elle-même , & fans chaux de plomb. Lorfqu’au bout d'une heure, je voulus envelopper cette mafle comme de coutume dans de la toile grofière, je la trouvai toute molle ,"& fans aucun refte de fuie sèche. C'eft pourquoi je la fau- poudrai abondamment d'autre füie toute sèche , & la mis dans la caifle; mais il ne s’y manifefta pas le moindre changement. Expérience XXI. Le 17 Juin, jecroyois avoir remarqué que l’inflam- mation fpontanée exigeoit de petites mafles de fuie imbibées d'huile, & entourées de fuie sèche ; c'eft pourquoi je fis imbiber 2 #5 d'huile d'olive cuite dans 3 Ïb de fuie de Rufie, ce qui produifit les mafles ou globules en queftion , & laiffa une partie de la fuie à fec. Au refte, je procédai en tout comme dans la 20° expérience; mais après avoir attendu plufieurs jours, je me vis fruftré de tout fuccès. - Expérience XXII. Le 20 Juin, je répandis 2 tb d'huile de térében- thine, qui eft la moins coûteufe des huiles effentielles fur 2 #5 de fuie de Rufie. Celle-ci engloutit promptement l'huile, Au bout d’une heure, je mélai l'une avec l’autre, & je trouvai ma mixtion compofée de petits amas qui ne faifoient point une maffe continue. Je Ja mis dans de la toile, puis ans la caïffe ; elle y demeura froide & fans mouvement. Experience XXIII. Le 23 Juin, pour faire un nouvel eflai avec une huile empyreumatique , je mis dans la jatte 3 Ïb de fuie de Rufie, & je verfai lentement deflus 3 #b de d'oggor de Ruflie, c’eft-à-dire, d'huile ou de goudron de bouleau (que lon fait diftiller per defcenfum dans des creux faits dans la terre , fe fervant à cet effet de l'écorce du bouleau ). Je laïffai cette compofition à découvert pendant deux heures ; puis voulart Fenvelopper, j'en trouvai l'odeur plus forte qu'auparavant, & je la fentis Tome X X, Part. II, 1782. JUILLET. C 18 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tiède. Sans la mêler davantage, je la mis dans la caïfle; la chaleur s’y augmenta d’abord: mais au bout d'une heure, elle commença à dimi- nuer ; & trois heures s'étant encore écoulées , toute chaleur fut dif- fipée. Expérience X XIV. Je pris de la fuie de cheminée ou de cuifine toute pure, & provenue de bois de bouleau ( ce bois étant ici le plus commun pour le chauffase ); elle confiftoit en petits amas fecs, poreux, fans luftre. Je la fs pulvérifer par le pilon & le crible, de façon que j'en obtins une poudre très-fine, J'en mis 3 b dans la jatte, & je verfai deffus 1: 1 d'huile de chenevis cuite, qui fut auflitôt engloutie. Après avoir laiflé le tout pendant deux heures à découvert ; & voulant enfuite l’envelopper,, je trouvai que je pouvois décanter environ 1 once d'huile, qui ne s'étoit pas incorporée avec la fuie, Je faupoudrai encore ma mafle glaireufe d’une demi- livre de fuie de cheminée pulvérifée; & l'ayant enveloppée, je la mis dans la caiffe : elle demeura auffi froide & inactive qu’elle l’avoit été. Expérience XXV. Le 26 Juin , voulant avoir une mafle moins molle, je pris 3 Ïb de fuie de cheminée pulvérifée ; je ne verfai deflus que 1 d'huile de chenevis cuite , & procédai au refte comme dans l’expérience précédente. Pour faupoudrer cette mafle, qui ne laiffa pas d’être humec- tée d'outre en outre, il me fallut eñcore une 4° #b de poudre de fuie. En l'enveloppant après qu'elle eut repofé pendant une heure, je trouvai qu'elle avoit contracté un peu de chaleur, mais à peine jufqu'à la tiédeur. Ce commencement de chaleur fe perdit bientôt, & ne revint plus. Expérience XXVI. Je répandis une boîte à noir de fumée d'Allemagne dans ma jatte ; & quoiqu'il n’y en eût que +#b , le vafe en fut plus rempli que de 3 15 de fuie de Rufie: jy verfai autant d'huile de chenevis cuite que la fuie put en humer, ce qui alla jufqu'à 22 #b. La mixtion étant reftée à découvert pendant deux heures, & allant être enveloppée, fe trouva toute molle; c’eft pourquoi je la faupoudrai préalablement d'un peu de fuie sèche : elle demeura plufeurs jours dans la caiffe , fans lemoin- dre changement. Expérience XXVTII. Le 4 Juillet, comme il me fembloit qu'il y avoit eu trop d'huile d’employée dans la 26° expérience, je pris à dix heures du matin + fb de noir de famée d'Allemagne, & y verfai 12 tb d'huile de chenevis cuite, procédant au refte comme ci-devant. Cette mixtion demeura froide jufqu'an 7 du mois, qu’elle commença à fept heures du matin à s'échauffer & à odorer, À neuf heures, le paquet fut déjà aflez chaud pour répandre des exhalaifons humides vifibles, & qui fembloient trembler. Cette chaleur dura à-peu-près au même degré pendant fix heures , après quoi elle diminua; & ce ne fut qu'au 8 du mois, versle foir, qu'elle fe perdit entièrement. Le 9 Juillet jouvris le paquet, & j'y vis une mafle comme fondue, vifqueufe & d’un noir luifant; d'où l’on voit que la réaction ne commença qu'au bout de près de trois jours entiers, & dura trente-fix SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 1:19 heures. IL n’eft point à douter que je n'eufle obtenu le degré de réation néceffaire à l'infammation fpontanée , en faifant encore quelques eflais avec moins d'huile, ou avec une plus grande quantité de fuie. Expérience XXVIII, Le 8 Juillet, je réitérai les 17° & 18° expériences avec toute l'exactitude poflible. Lorfqu'au bout de cinq heures on enve- loppa la matière, elle fe trouva tiède, & commença à aff:cter l’odorat. La chaleur augmenta pendant quatre heurés; après quoi elle diminua , de manière qu'au bout de quatorze heures, il n'y en eut plus du tout, Le 10 du mois au matin , la mafle redevint chaude, & le fut pendant tour le jour & la nuit fuivante ; enfin; -elle {e refroidit vers la pointe du jour, pour ne plus jamais fe réchauffer. On remarquera ici qu'environ quarante heures après le En s vingt après la fin de la première réaction, il s’en fit une feconde , qui dura plus de douze heures. La mañlé enfin refroidie fut femblable à celle de l'expérience précédente , à la réferve d’un peu de ténacité. Expérience XXIX. Le 12 Juillet, les 17 & 18° expériences avoient été faites dans un temps ferein ; les 19° & 28° au contraire, où la réac- tion n'’alla pas jufqu'au “ de l’ignition, avoient été exécutées pendant des jours pluvieux. Cette fois-ci, voyant que le jour étoit beau , je répétai le même procédé avec la dernière exactitude , en prenant de l'huile de che- aevis cuite, avec cette feule différence que la fuie de Ruñlie, après avoir été imbibée d'huile, ne demeura que pendant quatre heures expofée à l'air libre. Kn enveloppant la mixtion à une heure après-midi dans de la toile, je la trouvai tiède & odorante. Elle conferva cette même tiédeur jufqu'à quatre heures après-midi, après quoi elle s'échauffa de plus en plus & très-promptement , répandant une odeur plus forte & des exha- laifons humides, À fepc heures du foir , c’eft-à-dire , dix heures après le mêlange & fix heures après l'enveloppement , on vit fubitement une épaiffe fumée , qui fut immédiatement fuivie de l’incandefcence. La Aamme jaillit bientôt , & dura quelques heures; enfin l’incandefcence continua fans flammes jufqu'au lendemain à midi; ce qui fait en tout une ignition de dix-fept heures. La cendre pefa 4 onces 3 drachmes. Expérience X XX. Le 14 Juillet , ayant mis dans la jatte 3 #b de fuie de Ruffie , je verfai deflus 3 fb d'huile de chenevis crue, la répandant lentement & uniformément, fans mêler davantage les matières. Je procédai au refte comme dans la 17° expérience, hormis que la mafle fut enveloppée au bout de quatre heures : elle formoit des amas de fuie imbibés d'huile, & comme enfevelis dans le refte de la fuie qui étoit demeurée sèche. La réaction commença cinq heutes après le mélange , & une heure après l’en- veloppement. Elle alla en augmentant durant cinq heures confécutives. La chaleur augmenta à proportion , aufli-bien que les exhalaifons vifibles qe faifoient monter , & qui (à ce que je vis, par des effais que j'avois éjà faits & que je fis encore ) ne {€ laïfloient pas allumer par du pa- Tome XX, Part. II, 1782. JUILLET, C2 20 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, pier brülant. Quatre autres heures s'étant écoulées, c'eft-à-dire , treize heures après l'imbibition, la mixtion fe mit à fumer & à s'enflammer. Ce fut une Hamme foible & comme mourante, qui ne dura que peu; mais lincandefcence continua pendant plus de douze heures. La cendre étoie d’un gris noirâtre, & pefoit 16 onces 6 drachmes. . Expérience XXXI. Le 16 Juillet, d’après les indices que M. J. 4. Euler, Membre de l'Académie, me donna touchant les expériences de PAmirauté, felon lefquelles inflammation fpontanée devoir fe manifef- terle plus fürement dans des mixtions compofées de deux parties de fuie de Rufie & d’une partie d'huile cuite , j'étois porté à croire que j'avois manqué dans la manipulation pour mes7 , 9, 13 & 14° expé- riences. C’eft pourquoi je les répétai, en obfervant Le procédé de la 17°. Je fis imbiber 42 tb d'huile de chenevis cuite dans 3 ib de fuie de Rulfie. Au bout de quatre heures , j'enveloppai la. matière dans de la toile, &c. ; fept heures après le mélange, elle s'échauffa & odora, mais un & l’autre aflez foiblement, Elle refta durant quelques heures dans cet état ; après quoi elle redevint froide à jamais. Eïpérience XX XII, Le 19 Juillet , la mixtion précédente me paroïfloit un peu sèche, & les petits amas de fuie n'avoient été que peu imbibés; c’elt pourquoi je verfai encore deffus ? fb d’huile de chenevis cuite. Je renveloppai le mélange & le remis dans la caifle. Au bout de onze heures, le paquet devint chaud & odorant. L'incandefcence commença feize heures après l'imbibition. Pendant fix heures , il brüla ainfi fans flammes , avec une fumée épaifle & grisâtre tirant fur le blanc; après quoi il continua encore à fcintiller & brûler en flammèêches pendant fix autres heures. La cendre pefoit 7 onces 3 drachmes. Expérience XX XIII. Le 21 Juillet, pour trouver la moindre quantité de matière capable de produire l’infammation fpontanée, je fis cette 33° expérience avec 1 #b de fuie de Ruflis, imbibée de 1° tb d’huile de chenevis cuite. Au bout d’une heure, je l’enveloppai dans de la toile, & la mis dans la caifle; mais je n’y remarquai aucun changement. Expérience XX XIV. Le 24 Juillet, 1 1 de neir de Ruflie ayant été imbibée de 1b d'huile de chenevis cuite, fut aufli-tôt enveloppée de toile, & mife dans la caiffe, Après l'efpace de fix heures , elle devint tiède & odorante ; mais la tiédeur & l'odeur fe perdirent à-la-fois au bout de quatre autres heures. Expérience XXXV. Le 26 Juillet, x # de noir de Ruflie fut imbi- bée d’une quantité pareille d'huile de chenevis cuite , & mife au bout de trois heures dans la caifle, étant enveloppée de toile. Six heures après le mélange, elle s’échauffa fenfiblement ; mais au bout de deux heures, elle fe refroidir. Expérience XXXVI. Le 29 Juillet, 1 1 de noir de fumée de Ruffie ayant été imbibée de dans laquelle j'avois fait diffoudre la mélaffe , je n'ai rien appperçu qui fît connoître la nature des particules. Ce ne font certainement ni des ani- « malcules, ni des infeétes, puifque, malgré l'immenfe Fi dont la » terre eft couverte, on n’en a jamais rien vu naître. Ce fingulier brouil- » lard au refte, continue M. Norris, ne s'étend pas fort loin fur la mer; > à deux ou trois milles, il eft déjà moins épais qu’à la côte, & onne le 2 trouve plus à la diftance d'environ cinq milles, quoique l’'Aarmattan fe » faff> fentir jufqu'à celle de dix ou douze lieues , & qu'il y fouffle mème » avec aflez de force pour changer la direction des courans ». 2°, Une féchereffe extrême eft un fecond caractère de ce vent extraor- dinaire, Auf long-remps qu'il règne, il ne tombe point de rofée , & il n'y a pas la moindre apparence d'humidité dans l’atmofphère; les végétaux de toute efpèce fouffrent beaucoup; toutes les plantes délicates , & la plu- part de celles qu'on cultive dans les jardins, fériflent; le gazon devient auffi fec que du chaume; les arbres qui ont la propriété de conferver.leur verdure toute l’année, fe reffentent dé même de la pernicieufe influence de l'Harmattan ; les citronniers , les orangers & les limoniers languiffent; leurs feuilles font flétries , pendantes, & à la fin tellement grillées, quand le vent dure dix ou douze jours, qu’elles fe réduifent en pouflière entre les doigts ; & le fruit de ces arbres , arrêté dans fon accroifflement par le défaut de nourriture, prend une faufle apparence de maturité avant qu'il ait acquis la moitié de fa grofleur ordinaire. Les Naturels du Pays profitent de cette grande féchereffe pour mettre le feu à l'herbe haute & aux brouffailles dont la campagne eft couverte ; ils le font fur-tout dans le voifinage des routes, non-feulement pour les ou- vrir aux Voyageurs , mais pour ôter à leurs ennemis la facilité des em- bufcades, La flamme vole Etablir que les Voyageurs qui fe trou- vent fous le vent, courent les plus grands dangers. Le feul parti qu'ils aient alors à prendre, & celui qu'ils prennent en effet, c’eft de mettre éux-mêmes l: feu à la campagne devant leurs pas, & de fuivre la trace de ce nouvel embrafement. Ce ne font pas-là les feuls effets de cette fécherefle extraordinaire, M. Norris rapporte que des livres mêlés parmi des hardes , dans une malle bien fermée , fe fonc trouvés avoir les couvertures defféchées, comme s'ils avoient été tenus auprès du feu. Les panneaux des portes & des boiferies éclatent; les placages tombent en pièces ; des parquets de bois fec, bien affemblés , s'écartent d'un travers de doigt, &, fe rejoignent aufli exacte- ment qu'auparavant, lorfque l’Harmartan cefle. Les joints des ponts & du bordage des vaifleaux s'ouvrent, & donnent naïffance à des voies d'eau, quoique les plan hes aient jufqu'à trois pouces d’épaifleur. On eft forcé de rebartre fréquemment les tonneaux, dont les cercles font de fer; & quant aux barriques de rum ou d'eau-de vie, il faut les’tenir fans cefle mouillées, fans quoi LLs cercles de bois tomberoient, y SUR L'HIST. NATURELLE ÊT LES ARTS, 5x Ce prodigieux defléchement ne fe manifefte pas moins fur les parties expofées à l'air. Les yeux , les narrines, les lèvres & le palais en font fort incommodés : on éprouve à tout moment le befoin de boire ; mais c'eft moins par un fentiment de foif, qu'à caufe de la fécherefle défagréable “qui fe fait fentir à la gorge; le nez devient douloureux; les lèvres fe ger- cent; & quoique la chaleur de l'air foit affez vive, on éprouve fur toute la peau la fenfation d'un froid piquant. Au bout de quatre ou cinq jours, l'épiderme s’exfalie fur les mains & fur le vifage; & fi l'Harmattan dure quelques jours de plus, le même effet a lieu également fur toutes les autres parties du corps. M. Norris a obfervé que quand en a fait de l'exercice, la tranfpiration des membres vêtus eft fingulièrement âcre ; & il rapporte qu'ayant appliqué la langue fur la fueur de fon bras , il lui trouva le goût d'une eau chargée d'efprit de corne de cerf. Comme l’état du /e/ de tartre, expofé à Fair, & la quantité d'eau qui s’é- vapore fur une furface donnée , font des moyens de comparaifon affez fim- ples pour juger du degré d'humidité ou de fécherefle de l'atmofphère, j'avois prié M. Norris de faire ces deux fortes d'épreuves dans la faifon de l'Harmattan , & en particulier d'humecter le /e/ de rartre jufqu’à la dé- Jiquefcence , & de l'expofer à ce ventpendant la nuit. Ses expériences ont fait voir,non-feulement que le /el de sartre demeure alors également fec de nuitcomme de jour; mais que lorfqu'il eft diffous au point de pouvoir couler facilement , il devient parfaitement fec dans l’efpace de deux ou trois heures , & avant le retour du matin, s’il a été expofé le foir. Quant à l’évaporation de l'eau pure, entendons M. Norris lui-même. « Je » mis, dit-il, le vafe de fer-blanc que vous avez bien voulu me procu- » rer fur un fupport élevé de quatre pieds, & je le plaçai derrière ma » maifon, dans une prairie où il recevoit, pendant la plus grande partie » de la journée, les rayons du foleil, mais où la maifon le garantifloit » un peu du vent. Voici le journal de mes obfervations. Evaporation Thermomètre. en 10° de ligne. jour. nuit 6h.m, rh.f. 6 h.f. Remarques. 227 1% ,. - + . . . - Brife foible &brume. Le] {28.020000 0e le em. Beatitemps. D'29 Mister ; + Brume; brife réglée, tant de mer que de terre. 390: 1 5 vurehsoñe lis 44e 'e Idem. LL Eoel NN TE Ten: QUz Cv 2 » 76. Bo. 79. Brife fraîche. Beau temps. DÉS Anman TT 74 76 75 L'Harmattan commence à fouffler modeérément., È 4. 24 1x 75 77 76 Harman modéré; peu de brouillards. ? 2 1. 74 76 76 L’Harmauan a prelque ceflé. 6 2 76 8o 78 L'Harmattan a ceflé. Brume. Brile comme à l’ordin, 7: 2 76 So 78 Brife foible & Brume, 8 2 8o 78 Idem. 76 Tome XX , Part. II, 1782. JUILLET. G2 -e 52 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, « Le shermomètre évoit placé dans un grand magafn, auprès d'une fe- » nêtre tournée-vers le nord , fur laquelle par conféquent le foleil ne » donnoit pas dans cette faifon. Une prairie fituée au devant, préfervoit >» linftrument dela réflexion des corps voifins. Quand on le tranfportoit # dans la pièce attenante , qui donne par trois croifées & une porte fur la » place d'armes, la liqueur montoit pos l'ordinaire de 4 degrés, & y mar- » quoit communément 84 degrés , depuis 1 heure jufqu'à 3 heures de l’a- » près-midi. » Le 14 Décembre (c’eft toujours M. Norris qui parle), temps où > l’Harmattan ne fouffloit pas , le thermomètre étant plongé dans le vafe » évaporatoire , ily monta jufqu'à 88 degrés; retiré de l'eau, il tomba » à 79 degrés, pendant l'évaporation de l'humidité dont il étoit chargé; » mais expofé au foleil, il s'éleva au bout de $ minutes jufqu'à SHOP Ë » Le Jendemain après-midi, à l'air de la fenêtre de ma chambre, mais » à l'ombre, leshermomètre fe tint à 84 degrés’; &. dans l’évaporatoire, à » 88°. Il baifla jufqu'à 80°, pendant qu'il perdoït l'humidité qu'il avoit » contractée; monta enfuite à 104°, après avoir été fix minutes au foleil , » & redefcendit à 76°, plongé dans une cuvette d'eau qui fe trouvoit ” dans monappartement », ® Ces expériences de M. Norris montrent que fi l'évaporation étoit, pen- dant toute l’année, proportionnelle à celle qu'il obferva durant la courte période d'un Harmattan modéré, elle iroit à 133 pouces; & que fi l’on faifoit un calcul femblable , d'après l'évaporation qui doi avoir lieu , lorfque ce vent eft plus fort & de plus longue durée , on trouveroirune fomme encore plus confidérable ; mais fi on la tire des obfervations faites avant ou après V'Harmattan , on n'aura que 64 pouces; & comme j'ai trouvé que l'éva- poration annuelle étoit, à Liverpool , de 36 pouces (1), il en réfulte Les trois termes de comparaifon fuivans, pouces. Evaporation annuelle à Juidab , par l’'Harmattanr , 133 fans l’Harmattan, 64 A Liverpool. =, 7, 36 On fait que plufieurs chofes tirent leur nom de quelqu'une de leurs pro- priétés Les plus remarquables. J’avois en conféquence prié M. Norris de rechercher l’origine du mot Aarmattan. 11 trouve que c'eft une corruption d’'Aherramantah , nom de la faifon dans laquelle ce vent fe fait fentir, & (3) Tranfattions philofophiques , vol. LXVEH, page 252, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 53 que ce dernier moc et compofé d’Aherraman , qui, dans la langue des Fantis, fignifie fouffler ; & de #4h , fuif ou graiffe, dont les Habitans da Pays font dans l’ufage de fe frotter la peau, pour empêcher qu'elle ne de- vienne rude & sèche. Dans le langage Dunco , l'Harmattan'portele nom de Peppeh, qui fi- gnifie peau sèche G rude. 3°. Une troifième & dernière propriété de ce vent, c’eft fa grande fa- lubriré, Les effits meurtriers qu’il produit fur les végétaux, & le defsèche- ment incommode dont il affecte les corps animés, n’empêchent pas qu'il ne foit extrêmement favorable à la fanté. Les dyffenteries & les fièvres in- termittentes ceflent pour l’ordinaire, quand l'Harmartan furvient. Les malades, jettés dans un épuifement défefpéré, foit par la fièvre, foit par les évacuations & les faignées prodiguées fouvent mal-à-propos dans cette maladie, guériflent & recouvrent leurs forces en dépit de leurs Médecins. Les épidémies s'arrêtent, & ceux qui fe trouvent atteints de la petite vérole font prefque affurés d’un prompt rétabliffement; il paroît même qu’alors il devient difficile de communiquer le venin de cette ma- ladie, En 1770 il y avoit à Juidah plus de trois cents efclaves à bord du navire l'Unité. La petite vérole fe manifefta parmi eux , & il fut réfolu de les inoculer. Ceux qui reçurent la maladie avant l’Harmattan, l'eurent fort bénigne ; mais d'environ foixante-dix qui ne furent inoculés que de- puis que.ce vent fouffloit, aucun n'éprouva ni mal-aife, ni éruption. On croyoit l'infection totalement diflipée, & par conféquent le vaifleau à l'abri du refte de cette épidémie; mais au bout de quelques femaines: elle parut parmi ces foixante dix nègres. On en inocula une cinquantaine pour la feconde fois; les autres prirent naturellement la maladie, 11 fur- vint par bonheur un nouvel ‘Harmattan, & tous guérirent, à l'exception d'une fille, chez qui la plaie désénéra en mauvais ulcère, & qui mourut quelque temps après avec le sétanos. La grande falubrité de l’'Harmatran & cette propriété d'arrêter les épi- démies, font des circonftances fi remarquables, que je priai M. Morris de. faire de nouvelles recherches à cet égard, dans fon dernier voyage à la Côte d'Or. « Je n'ai rien appris de nouveau fur ce fujer, me répond-il ; » fi ce neft que le témoignage unanime des naturels du pays confirme » ce que je vous en ai déjà dir. J'ai été moi-même fort incommodé dans » ce voyage, d'une fièvre qui a duré neuf jours, & de laquelle j'ai éré » guéri aulli tôt que l'Harmattan a commencé de fouffler. Eft ce l'effet » des remèdes que j'avois pris, ou du changement furvenu dans l’état de » l'air? ceft ce que je ne prétends pas décider. Je viens d'apprendre » pour la première fois, ajoute M. Norris, que l'Harmartan pafle pour » contribuer efficacement à la guérifon des ulcères & des éruptions cu- 2 tanees », L . M, Norris témoigne du regret d'être obligé de contredire une autorité jt ‘ OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, aufi refpetable que celle du Docteur Lind. Ce Docteur dit que l'Hur- mattan eft mal-fain; que les vapeurs qu'il apporte font également fu-- neltes aux nègres & aux blancs; & que la mortalité qu'il caufe eft en proportion de la denfité & de la durée du brouillard dont il eft accom- pagné. — Mais les pernicieux effèts qu: le Doéteur Lind attribue à l'Hur- mattan , ne dépendent point de ce vent: ils appartiennent aux pluies pé- riodiques qui tombent en Mars & 4 les mois fuivans; pluies annoncées par les sornados, qui font des tourbillons impétueux de nord-eft & d’eft-nord-eft, accompagnés de tonnerres, d’éclairs & de violentes on- dées. La terre détrempée par ces pluies & recevant aufñi-rôt que l'orage a ceflé, les rayons d’un foleil brûlant, produit des exhalaifons malignes & infectes , qui caufent des vomifflemens de bile , des dyflenteries & des fièvres putrides, Outre ces émanations qui fe dégagent de la terre routes les années, il paroît qu'il sy forme comme un amas de vapeurs de même nature, mais encore plus peftilentielles, qui ne s'en échappent qu'après un in- tervalle de cinq, fix ou fept ans. « Les années, dit M. Norris, qui de » mon fouvenir, ont été marquées par ces éruptions périodiques, fone » 1756, époque de la mort du Gouverneur Melvyll, & de la généralité » des habitans & foldats du Cap-Coaff ; enfuite 1763, 1769 & 1775. » Toutes ces années ne furent pas également meurtrières; mais dans [a » plupart la mortalité fut fi grande, que , comme le dit le Docteur Lind, » le nombre des vivans fufhfoit à peine pour emporter & enterrer les » morts ». Un autre objet que j’avois recommandé aux recherches de M. Norris, c'eft l'origine de PH , & la nature des terres fur lefquelles il pañle. IL paroît qu’à la réferve d'un petit nombre de rivières & de lacs, le pays fitué derrière celui de Juidah, eft par-tout couvert de verdure, jufqu'à la diftance de 400 milles. C’eft une vafte campagne, parfemée de touffes d'arbres & de quelques forêts peu confidérables. Le {ol eft un fable qui couvre une bonne terre de couleur rouge. Le terrein s'élève infenfible= ment RAS 1$0 milles des côtes, avant que de préfenter la moindre ap- parence de colline. F1 ne s'y trouve pas une pierre dont la groffeur fur- pafle celle d'une noix; & derrière les collines, on ne consoît aucune grande chaîne de montagnes. Quant à l'origine de l’Harmattan, le Docteur Lind le fait venir du con- fluent de diverfes rivières dans le Bénin. « Mais il m'eft arrivé, dit M. » Norris, étant allé vificer le Roi de Dahomé, à 120° milles plus au nord & plus avant dans les terres que le Fort de Juidah, d'y trouver un vent d'Harmattan , plus fort que je l’aie jamais éprouvé, & fout- flant du nord-eft, quoique le Bénin fût au fud-eft, par rapport à >> MOI >». M. Norris ajoute que, pour découvrir le foyer de ce vent, il faut h y Ÿ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ss je chercher dans le point d'interfeétion de trois lignes tirées felon les trois directions diflérentes qu’il fuit au Cap-Verd , à la Côte-d'Or & au Cap-Lopez; c'eft-à-dire que la première doit aller vers l’eft, la feconde vers le nord- eft ,/& la troifième vers le nord. Or, je trouve que ces trois lignes fe rencontrent aux environs du 15°. degré de latitude feptentrio- nale, & du 25°. de longitude orientale, & que c’eft dans cette partie de l'Afrique que Prolémée place les montagnes de Caphas, d'où il faic fortir le fleuve Duradus, que plufeurs croient être celui que nous nom- mons aujourd'hui le Sénégal, On peut conjeéturer, ce me femble, qu'un certain vent d’orient fort défagréable , qu'on éprouve dans quelques parages de la Méditerranée , viens des mêmes régions de l'Afrique. Il règne à la même époque que V'Harmartan , & il tite probablement les qualités qui lui font particulières, de la nature des terres fur lefquelles il pafle. _ Les derniers éclairciffemens enfin que j'ai reçus de M. Norris, concer- nent la manière dont les Fansis divifent l’année, Je vais terminer ce Mé- moire en rapportant les noms, la durée & les caractères de leurs diffé- rentes faifons. 1. Aherramantah (1): C'eft, comme on l'a déjà vu, celle qui com- mence avec le mois de Décembre & dure jufqu'au milieu de Février, pen- dant près de dix femaines. 178 2. Quakorah: Efpace d'environ trois femaines, comprenant les deux dernières de Février & la première de Mars. Les vents foufflent de la côte, & varient du fud-fud-oueft au fud‘{ud-eft, 3. Pempina ou faifon des tornados : Elle dure le refte du mois de Mars, tout celui d'Avril & la plus grande partie de Mai, pendant en- viron douze femaines. ; 4. Abrenama ou les enfans du vieil homme & de la vieille fëmme ( qui eftle nom des Pleiades ): Saifon pluvieufe de huit femaines, finif- fant vers lé 20 de Juillet. s. Worrobakorou ( nom d’une étoile ): Fin des pluies; efpace de trois femaines. : 6. Mawurrah ( nom d’une étoile ): Ciel couvert, brouillards, point de brife; les trois premières femaines de Septembre. 7. Boutch : Saifon d’environ fix femaines ; point de brife de terre; vent frais foufflant à la côte. . 8. Authiophi ou les croifés, torrados : Vents du fud , & quelques pluies ——- (1) Note du Tradufleur. On a écrit tous ces noms comme ils le font dans Porigis mal, en leur confervant l'orthographe Angloife; mais dans le corps de ce Mémoire, on a cru devoir rendre par Fanrilenom de Peuple , que les Anglois écrivent Funrée; & par “rt Fe du Royaume qu'ils appellent Z74ydah, & que plufeurs François pronon= cent /#dds 7 * ’ 56 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, appelées Zes dernières pluies. Cette faifon, qui eft d'environ quatre fe+ maines, eft immédiatement fuivie de Z’aherramantah. RE MÉMOIRE SUR une nouvelle manière de faire éelore les Œufs , au moyen de l'Eleürisités par M. ACHARD, Licccrmerré produit plufeurs effets analogues à ceux de la chaleur ; elle augmente l’'évaporation , tant des corps animés, que des corps privés de vie ;-elle accélère le mouvement du fang; elle favorife Vaccroiflement des végétaux, & produit encore plufieurs autres effets, dont l’énumération m'arrêteroit trop, & qui ont une très-grande reflem= blance avec ceux que produit la chaleur, Cette conformité entre les effets de la chaleur & du fluide électrique, m'a fäit penfer que l'électricité feroit peut-être également propre à développer le germe des œufs: Pour vérifier cette idée , j'éleétrifai des œufs de poules confécutivement pendant plufeurs jours & plufeurs nuits ; mais il ne me fut pas poñible de découvrir au bout de ce temps le moindre développe- ment fenfible, Attribuant le peu de fuccès de cette première expérience à la négligence des perfonnes auxquelles j'en avois confié Le foin pendant la puit , je la répétai, & ne quittai pas la machine électrique. Je ne fus ce- pendant pas plus heureux que la première fois; les autres n’avoient fubi d’autres changemens , fi ce n’eft qu'ils avoient perdu quelques grains de leurs poids, effet que produilit probablement l’évaporation, ce qui fue encore confirmé par l’efpace vuide que je trouvai dans ces œufs en les ou yrant. Comme il n’y a qu'un certain degré déterminé de chaleur propre à dé- velopper le germe des œufs, & que toute chaleur plus forte, moindre ou inégale le détruit, je crus que le peu de fuccès de ces deux expé- riences provenoit de ce que le degré d'électricité avoit été ou trop fort, ou trop foible, ou peut-être trop varié, Afin de déterminer celui qui pro- duit des effets femblables à ceux d’une chaleur de 32 degrés, qui eft celle que MM, de Réaumur & Beguelin trouvent la plus propre pour couver artificiellement des œufs de poule, je déterminai ie degré d'élec- tricité , qui, appliqué à un fluide , en augmente l'évaporation dans la même raifon qu’une chaleur de 32 degrés; car ces deux caufes produifant alors le même effet dans le même degré, je crus pouvoir en conclure qu’elles devoient néceflairement agir avec la même force. ; Pour SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 5 Pour faire cette détermination , je remplis d’eautrois cubes de laiton de la même capacité: l'un fur éléctrifé pendant plufieurs heures de fuite, en forte que le degré d'électricité étoit connu & invariable; l’autre fut placé à côté de la machine électrique , & le troifième fut plongé dans de l'eau entrerenue par une lampe au 32° degré de chaleur. En comparant la dif férence qui fe trouva à la fin de l'opération entre l’évaporation du cube électrifé & celui qui avoit été placé à côté de la machine éleétrique avec celle qui fe trouva entre l'évaporation de l'eau contenue dans ce dernier cube , & celle qui avoit été expofée pendant le même temps au 3° de- gré de chaleur , je fus en état de déterminer la raifon entre l'évaporation qu'occafionne chaque degré d’éleétricité , & celle que produit un degré de chaleur donné. En répétant très-fouvent cette expérience , &en variant toujours le degré d'électricité, je crouvai que celui dont la force eft exprimée par le nombre 257 =, dans la table jointe à la defcription que j'ai donnée d’un élec- tromètre harmonique , inférée dans Le premier volume des Ouvrages de la Société Phyfique de Berlin , eft exaétement celui qui accélère autant l'évaporation qu'une chaleur de 32 degrés. Après avoir déterminé de cette manière le degré d'électricité, qui, à ce qu'il me fembloit , devoit être le plus propre à développer le germe des œufs, je fufpendis une afliette d’étain au conducteur D machine électrique , & y ayant mis feize œufs, je commençai à éleétrifer , & en- tretins tout cet appareil pendant huit jours & autant de nuits, dans un de- gré d'électricité le plus approchant qu'il me fut poflible de celui qui cor- refpond , fi je puis m'exprimer ainfi, au troifième degré de chaleur. Le fuccès de certe expérience fut des plus heureux , & vérifia toutes mes conjectures ; car ayant ouvert, après 48 heures, un de ces œufs, j'eus le plaibr d’y trouver un petit commencement de développement; j'en ouvris alors tous les jours un , & trouvai conftamment le degré du développe- ment de l'embryon proportionné au temps pendant lequel les œufs avoient été éle@rifés (1). Je m'étois propofé de pouffer CN En plus loin; mais les chaî- nes s'étant dérangées, il fortit uneWétincelle, & cette perte trop fubite, & pourainfi dire momentanée , du fluide éle@rique, qui toujours eft ac- compagnée d’une petite commotion , tua probablement les embryons; cat le lendemain je Les trouvai tous morts. ; Pour tirer un œuf de l’afliette , fans nuire à ceux qui y devoient refter, je fus obligé de me fervir d’une pince de verre, afin d'empêcher la produc- . (x) J'ai eu l'honneur de es préfenter à l'Académie , confervés dans lefprit-de- vin. Tome XX , Part, II, 1782. JUILLET, H 58 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tion des étincelles qui paroiflent à l'approche de tout corps conduc- teur. , Quoiqu’on ne puifle douter que l'électricité étant capable de donner vie 3 l'embryon, ne foit aufli fufifante pour lui donner fon accroifflement parfait, & le mettre en état de quitter fa prifon , fl feroit cependant fort curieux de continuer l’électrifation jutqu’à la naiffance du poulet, elle four- niroit matière à plufeurs obfervations intéreffantes , & apprendroic auf fr le temps qu’exige le développement du germe produit par l'électricité eft égal à celui qui eft néceflaire pour donner à lembryon fon plus grand degré de perfection , au moyen de la chaleur. COMTE , Du Procès-verbal des Expériences faites avec le fieur BLETTON, au Jardir de l'Abbaye de Sainte- Geneviève, le 29 Mai 1782 (1). PAR que de commencer aucune opération, j'ai conftaté l’état de l’atmofphère un moment avant l'arrivée’ du fieur Bletton. Le baro- mètre étoit à 27 pouces 11 lignes; le thermomètre placé à left à 15 de grés , & le vent S.O. Il faifoir très-beau ; des nuages blancs , femés dans le ciel , empéchoient le foleil d’êtrz crès-chaud. Une demi heure avant l'arrivée de Blerton, il éroit tombé qu:iques gouttes de pluie fort larges , mais afl:z rares. Le nuage qui les laiffoit échipper ne seft point arrêté. La férénité de l'air, la chaleur & la féchereffe ont bientôt reparu (2). Voyez planche II le plan du jardin & des marches de Bletton. La ligne pleine. marque celles de la première Séance , & les points celles de la fe- conde, n” Le feur Bletton eft arrivé à or ARE à cinq heures trois quarts, conduit par M Pelletier , élève de M. Darcer, & accompagné d’un de fes amis & compatriotes, On s’eft raffenblé dans une des falles de l'Ab- baye, & à fix heures environ on a procédé aux expériences, Les fpecta- teurs étaient MM. le Marquis de Condorcet, Tillet, de Bory, l'Abbé Boflut, de l’Acadé nie Royale des Sciences ; le Marquis de Creny , l'Abbé Vennini, de Charantonneau, Darcer, Pelletier ,le Dru , l'Abbé dela Lauze, Bertholet, Cuchet, le Febvre Procureur-Général de l'Abbaye , Mongez l'aîné, Garde du Cabinet d’Hiftoire Naturelle & d'Antiques de la même * Voyezles notes à la fin du Mémoire. SUR L'HIST. NATURELLE ÆT LES ARTS. s9 Abbaye. Pendant le cours des expériences, MM, Defeffarts , Maloët & Bofcheron font arrivés (3). On eft entré dans le jardin par la porte À ; Bletton avoit les yeux ban- dés avec un mouchoir plié en plufieurs doubles, & du coton, Arrivé à l'endroit 1 , Bletton a dit reffentir un léger friflon , & fa baguette a tourné fur les points r,2, 3,4, que l’on a marqués à terre avec une croix. La fenfation a ceflé, & n’a recommencé qu'au point $.Je l'ai fait revenir par6,7,8,f{ur4,3,2, oùil n'a point éprouvé defenfation. Il a donc traverf{é deux fois lecanal BC fans s'en appercevoir ;à9, 10 & 1 1 ilaéprouvé des fenfations , légères aux deux premiers, & fortes au troifième. De 1 1 jufqu'à 12 & 13, rien Pt Il a franchi le canal D E où j'avois établi un cou- rant d’eau (4), fans la moindre fenfation. Il en a éprouvéune au point 13, & rienne s'eft fait fentir à 14. Un léger mouvement a faru à 15 &2à r6. Jelai conduit enfuite par la ligne 17,21, 18, 19, & il a pañlé enfuite au- deflus du canal FG, qui porte de l’eau à mon Laboratoite de Chymie, Dans ce moment, l’eau étoit arrêtée ; ce qui n’a pas empêché d'en fentir l'impreflion au point 21. Arrivé à 19, il en a fenti une rrès-vive. Ayant fait figne à quelqu'un, placé au regard F, d'ouvrir le robinet, l’eau a coulé fur le champ dans le baflin du Laboratoire, comme je m'en fuis afluré moi-même. Je l’ai ramené par la ligne 20 au point 21, quil a franchi fans s'en appercevoir. En allant de 21 à 22, les cotons qui étoient interpofés entre fon vifage & le mouchoir font tombés, par un mouvement de tête qu'il a fait. On les a remis probablement fort mal; car-je me fuis apperçu, un peu tard à la D à point 33 , quil voyoit. Je lui ai fait parcourir la ligne rentrante 22,23, 24, 25, 26 &27; il a éprouvé des fenfatiôns aux points 22, 15 & 16, où , au lieu de faire une croix pour marque, on avoit fait un petit trou. Du point 22, je l'ai ramené une troifième fois à 21 ,qu'ila bien reconnu , quoique j'euffe faic figne de refermer le robinet, Ramené au point 19 par la ligne 27, il l'a arfaitement retrouvé : là je lui ai fait prendre fa baguette; elle a tourné & Fa guidé par les points 28, 29, 30 & 31:il a paffé très-adroitement entre le grand quarré F & le rond de verdure H. Dans tout ce trajet , fa ba- guette tournoit , & S’arréroit aflez régulièrement de fix ou huit pas alter- nativement (5). Elle a ceffé totalement au point 31, pour recommencer à 32, 33» 34» 35 » 36, 37: La marche de la baguette & des commotions a été alternative fur toute cette ligne, quoiqu'il n’ait commencé à être fur le canal D F qu’au point 34. Au point 37 , je lui ai fait décrire laggourbe 37,38, 39 , 40 , autour du baflin I. Il a paflé fur le trop plein 38, qui couloit , fans s’en apperce- voir, & a indiqué de l’eau aux points 39 & 40. Je l’ai approché du ca- nal DE, dont l'eau étoit courante. Il n'a rien éprouvé en le defcendant, quoiqu'il füt prefqu’au deflus. Au point 42, il a éprouvé une impreflion, Tome XX, Part. II, 1782. JUILLET, H 2 6o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, qui a continué en remontant par 43 , 44, 45 » 46, 47 (6): là elle a ceflé, Je lui ai fait fuivre le canal pendant quelques toifes; puis, je l'ai conduit ‘tout d’un coup à 48, où il a éprouvé une légère fenfation. Par les points 49, 50, 51, 523 57:53, 54, je l'ai amené & éloigné fucceflivement de def- fus le canal, Point de fenfation à 49 ,uneà 50, d’autres à Sr, 52, 57» 53 >.54 Ici j'ai imaginé delefaire enlever par deux perfonnes , dele perdre & dele ramener fur les mêmes trates qu'il avoit parcourues. Je l'ai donc pris avec M. Pelletier; nous l’avons enlevé, lui avons fait faire plufieurs cours, puis l'avons remis fur la ligne $5. Ila parcouru $$, 52, $0, 56, 57,543il n'a pas retrouvé 52 ni SO, mais bien $7 & ÿ4. De ce point-là, nous l'avons encore tran‘porté à deux fur la terrafle du jardin , du côté de la pompe K & du réfervoir qui fournit l'eau à toute la maifon. Remis à terre au point 58, il a traverfé le canal K D aupoint 59, fans Le fentir. Comme je voulois faire quelques expériences dahs cer endroit, je l'ai ramené au point 60 fur le canal, que je lui ai dit être une fource dont il s’éloignoit. I a éprouvé une forte commotion , & fa baguette a tourné. Je l'ai engagé à fuivre la direction de cette fource. Au lieu de fuivre 60, 64 K, vraie direction du canal, il a pris la direction 6Q, 61, où il a été ariêté par le mur M, Je l’airamené par la ligne 62,63, 64 fur le canal, d’où je l'ai reconduitau point 60. Quoique fur le canal, du point 64 à G6oil n’a rien fenti ; mais à 60, il a retrouvé le piquet que l’on y avoit planté, ; Tout ce canton dela terrafle étoit couvert de gramens de prés d'un pied de hauteur. Ces grandes herbes inquiétoient un peu le fieur Bletton. Je l'ai rafluré , en lui difant qu’il étoit dans un pré. Je-ne fais fi l’idée de Pré l'a frappé, mais dès ce momentil a indiqué beaucoup de fources dans tout cet endroit. Je lui ai propofé de trouver la profondeur de la fource ; il s'eft remis au point 60, & a fuivi la ligne 66 un peu divergente de la ligne 60, 61. Il a indiqué pour profondeur 10 pieds 9 pouces; & pour la ligne 60, 67, 10 pieds 11 pouces. Me défiant un peu de cette précifion, qui pouvoit n être due qu’à l'exactitude de la marche du fieur Bletron, je l'ai enlevé avec M. Pelletier, & tranfporté au point 68 , en lui difant que je voulois favoir la profondeur d’une autre fource du pré. Je l'ai ramené au point 60 par la ligne 68, 69 & 7o. Arrivé à 60 , comme il alloïe renverfer avec le pied le piquet placé en fignal, on l’a: averti, & il a fort adroitement détourné la jambe, en difant qu'il étoit fur la fource. Au lieu de lui faire prendre la direction 60, 61, 60 ou 66, je lui ai fait prendre 60, 71, & ilwa plus trouÿéh de profondeur que 6 pieds 3 pou- ces (7). Plufieurs perfonnes ayant cru. que le piquet planté au point 60 étoit une marque qu'il reconnoifloit facilement, on la arraché & on a mis à fa place un peu d'herbe fraiche, Je l'ai fait pafler trois fois de fuite pardeflus , D SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 61 fans qu'il s’en foit apperçu, & qu'il ait éprouvé prefque aucune fenfation. (Prefque tous les Chanoïines Réguliers de Sainte-Geneviève ont été té- moins de cette épreuve & des fuivantes , tout le monde étant arrivé à cet inftant au jardin pour la récréation), £ Nous l'avons enfuite tranfporté, M. Pelletier & moi, au milieu de [a terrafle, où il a indiqué plufeurs fources : il en a même indiqué une qui décrivoit la courbe 72, 73 , 74, où il l’a perdue (8). Comme il paroif- foit un peu fatigué , & qu'il y avoit environ une heure & demie qu'il travailloit, je lui ai propofé de fe repofer, ce qu'il a accepté; & nous l'avons tranfporté encore , M. Pelletier & moi, au jardin , dans la coquille 75. Il y eft refté environ un quart-d'heure; & pendant ce temps, j'ai fait le relevé des indications des endroits où nous ayions paflé. IL nous reftoit deux expériences à faire, cellédes ffoloirs & celle des métaux. Toutes les eaux qui fe diftribuent dans la maifon & dans les baf- fes-cours fe rendent du regard D par le canal E au crapaud de diftriburion N, fous la colonnade du préau OO. Le canal 86 , 87, 88, eft attaché à la voûte qui foutient la colonnade; & comme il eft déraché du mur , ilm’a été très-facile de l'envelopper d’une toile tirée, qui faifoit au moins cinq révolutions , ce qui équivaloit à cinq toiles cirées. J'ai placé deux pareils ifoloirs, l'un au point 87, & l’autre à 88 (9). J'avois aufi placé dans la grande allée un morceau de charbon de terre de deux pieds cubiques au point92, une médaille d’or de la valeur de 12 louis au point 94, & une médaille d'argent dü poids d'un marc au point 97. Ces différentes pièces de métal devoient fuffire , puifque Le fieur Ble- ton a trouvé aux Chartreux de Dijon une pièce de 24 fols. Nous fommes repartis du point 7$, & nous avons parcouru la ligne 76, 77; 78 & 79. Bletton a trouvé de l'eau à 76, 77. Au point 10, il n’arien fenti; mais au point 11, il a indiqué de l'eau. Arrivé au point 79, ayant fenti une légère fenfation, je l'ai fair remonter le lono du canal ED par la ligne 80, 81. Il a annoncé de l’eau pendant ce trajet; mais il n'en a plus retrouvé en defcendant par la ligne parallèle 82 jufqu'à 83 , où il a indiqué une fource qu'il a fuivie jufqu'à 84. Nous l'avons enfüite porté, M, Pelletier & moi, jufque fous la colonnade au point 8$ , & je lui ai fait fuivre la ligne 85,86, 87,88, 89. Il n'a fenti que deux légères fenfations entre 87 & 88, aux endroits marqués par des étoiles. En appro- chant de 88 , lieu où étoitunifoloir , je l'ai averti de faire attention. Ila fait quelques pas, & a indiqué de l’eau. La baguette atourné , mais foi- blement. Il fe trouvoit alors exactement au-deflus de l'ifoloir, Nous fommes xentrés dans Le jardin par 89 (10), Là , je l’ai fait arrêter; & après plufieurs queftions faites publiquement, il n'a afluré qu'il trouveroit de l’argent caché & du charbon de terre, ajoutant , /ur-1our s'il étoit en filon. Je lui annonçai alors que j’en avois caché , & qu'il falloit les trouver , & nous fommes repartis, Arrivé à 90, 63 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, il s'eft arrèté , & m'a demandé naïvement s’il falloit déjà penfer à trouver de l'argent (11). Je lui ai répondu qu'il auroit dû y penfer dès le moment que je lui en avois parlé; alors il a voulu retourner fur fes pas, difant qu'il avoit fenti quelque chofe. Je fuis retourné avec lui; je l'ai fait repafler par 90 ; & arrivé à 91, ila déclaré qu'il fentoit quelque chofe. Comme je Le conduifois , je l'ai raté. & ne me fuis apperçu d'aucun mouvement dans les mufcles & les tendons, Je lai engagé de s'aflurer avec fa ba- guette; elle n'a fait que trembler fur fes mains, fanstourner , &il a an- noncé que c'étoit de l'argent , & non de l’eau qu'il rencontroit. J'ai fait marquer l'endroit comme auparavant. En le ramenant dans la grande allée, je l'ai fait repafler aux points 15, 14 & 13. Ce n'éroit plugide l’eau qu’il fentoit aux points 15 & 13, mais du métal. Au point 02, il n'étoit qu'à quelques pouces du charbon de terre, & iln'a rien fenti (12). Il a fuivi enfuite les lignes 92, 93, 94, 95» 96,97» 98, fans prefque s'arrêter ; il a indiqué de l’eau à93 ,9$ & 96, du métal au-deffus du grand canal DN (13) , mais il n’a rien fenti à 94 où étoit l'or, & rien à 97 où étoit l'argent. Pendant une partie de cette route, j'ai tenu un écu de 6 livres ous fon vifage; il ne l’a pas même foupçonné, & n'a éprouvé aucune fenfation. J'ai caché cet écu au milieu de la grande allée au point 102; il m'étoit recouvert que d'un peu de fable. Mon deffein étoit de lui faire mettre exactement le pied deffus, Je l'ai donc ramené par la ligne 98, 77,99, 100 , 101 & 102. À 77, il n'a rien reffenti. Comme je foupçonnois tou- jours qu’il voyoit, j’avois foin qu'on tînt un chapeau fous fon menton. Il a traverfé le canal BC fans s’en appercevoir. IL a trouvé de l’eau au point 100 , & na éprouvé qu'une légère fenfation au point 101. Par malheur, lorfqu’il eft arrivé vers le point 102, on lui a demandé s’il ne fentoit rien; fur le champ ila dit qu'il fentoit du métal. Il a fait plufieurs zig-zags tout autour, & s’eft arrêté deux ou trois fois, mais toujours à quelques pieds de diftance (14). Il étoit huit heures ; nous avons donc fini ici les expériences , & nous avons défait le bandeau du fieur Bletton. Je lui ai propofé de fe repofer , de boire un coup , & de le ramener dans la falle oùil étoit avant les expériences, En approchant les yeux ouverts des points 83 & 79 ,ila annoncé de l'eau, & a fait tourner la baguette , en fuivant une ligne que lon avoit tracée à terre. Comme nous étions tous dans la falle , & que l’on parloit de ce que l'on avoit vu, M. Comus a prétendu que Bletton retrouveroit tous les en- droits marqués, mème ceux où nous étions fürs qu'il n’y avoit point d'eau, comme für la terraffe. On a propofé à Bletron J refaire quelques expé- riences : on eft reparti pour la terrafle, & après plufeurs tours , on l'a con- duit fur la ligne 74 qu'il a indiquée : il aaufli indiqué 72. La nuit eft enfin venue; nous l'avons renvoyé. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 63 Les perfonnes qui ont figné le relevé des opérations , fur un plan du terrein que j'avois fait, font MM. le Marquis D£ CONDORCET , T1LLET, MaALOET , lé Marquis DE CRENY, DESESSARTS , BOSCHERON , DaR- CET, LE DRU ou Comus , l'Abbé VENNINI , l'Abbé DE LA LAUZE & LE FEBVRE. CRE TRE PER TE PES VERSER LENS SERRE ERREUR TRE OP EE UT CRESCO CP PEER LUE EL TE EBE NT Le) — PAR GC EMSE VE R BA L Des Expériences faites au Jardin de Sainte-Geneviève avec Le fieur Bletton, le $ Juin 1782, à dix heures du matin, D — Baromètre 28. x. Thermomètre 25. Vent S. O. Beau temps. Nov s nous fommes propoté trois objets principaux dans cette Séance: le premier de s’aflurer fi le fieur Bletton retrouvereit les mèmes endroits u'il avoit indiqués huit jours auparavant; le fecond, d'examiner fcrupuieu- CES le mouvement de la baguette de verre , immobile quand elle eft feule, & tournant , lorfqu’on en met une feconde de métal fur le poignet de Blerton ; le troifième enfin, de le tranfporter dans un endroit où nous ferions fürs mathématiquement qu'il n’y auroit point d’eau. Tout le monde étoit raflemblé ; Bletton eft entré par la terrafle, les yeux bandés: on l’a fait afleoir fur le banc1, & pendantce temps-là, j'ai Dr le plan des expériences aux Spectateurs, qui étoient au nombre e vingt, & dont dix-fept , qui font reftés jufqu’à la fin, ont fiené ; favoir, MM. Thierry, Maloët, Defeffarts, Darcet, Guillotin & Bertholet . Mé- decins de la Faculté de Médecine de Paris; Milon, Confeiller au Châte- let; le Baron de Goulas, de la Tour , le Chevalier de Montbayen. Ber- geret, Marchais de Migneaux | Percenet, Billiaux , Gabrie, Pelletier. Le plan ayant été accepté, & érant convenu d’obferver le plus profond fi- lence , on a conduit Bletton le long de la ligne 73, 74, qu'il avoit in- diquée huit jours auparavant. Il ne l'a fentie, que lorfqu'il a été au - point À. Surtoute cette ligne, il a trouvé de l'eau , a, 4, c, d,e.' Il a paflé enfuire fur le canal de la pompe KD en 59, fans l'indiquer, Dans la partie de la terrafle, depuis fo jufqu’à &, & en revenant depuis ijufqu'au banc K , il a indiqué jufqu’à fix endroigs où il difoir y avoir de Peau (1), On marquoit exactement tous les points avec des clous à téresplatte , afin qu'il ne les reconnüt pas avec le pied, & on les recouvroit d’un peu 64 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : d'herbe , pour qu'il ne les diftinguât pas, dans Le cas où il verroit. Après s'être repofé fur le banc R deux fois, on l’a mené fur 60 où eft le canal: il n'a pas retrouvé le point où il l’avoit annoncé huit jours auparavant. Dans les différens tours qu'on lui a fait faire, on l’a mené jufqu'auprès du château-d’eau, fans qu'il s'en apperçût. Au point 60 , on lui a de- mandé la profondeur ; il l'a indiquée deux fois, 6 pieds d'un côté & 8 de l’autre; ce qui n’eft point d'accord avec l’indication du 29 Mai, où il avoit trouvé 10 pieds 9 pouces & 11 pieds (2). Après l'avoir fait re- pañler fur le canal , pour aller de 64 à 59, fans qu'il ait rien fenti, on l'a defcendu de laterrafle, & fait afléoir fur le banc 75. Après quel- ques minutes de repos, on lui a fait parcourir la ligne ponctuée gg— 95; où il a paflé trois fois fur le canal, fans le reconnoitre, &,ila indiqué de Veau à /,m,n, 0 ,p, g. Il n’a approché que de deux endroits indiqués le 29, qui peuventrépondre à 77 & 10. De 95, on l’a conduit jufqu'à 13, en le faifant pafler & repafler plu- fieurs fois fur le grand canal DE. Quoiqu'il füt ouvert, il ne la fenti qu'une fois à 101, &c légèrement ; maïs il a fenti de l’eau tout autour , comme r,u,t,5,v. Au point 79, où il difoit éprouver la plus forte fenfation , ona fait l'épreuve de la baguette de verre, qui n'a pas tourné, Au lieu de lui mettre fur les poignets une baguette de métal, fuivant l'expé- rience de M. Thouvenel, on a mis une feconde baguette de verre du poids à-peu-près d’une baguette de fer, & la première baguette a tourné au point qu'il l’a caflée. On a répété lexpérience avec la nouvelle ba- guette de verre, qu'il a reconnue en touchant fes extrémités, à caufe de fa groffeur ;»mais on l’a trompé une feconde fois avec une troifième ba- guette de verre, & même avec les deux morceaux de la première ba- guette caflée. On a répété plufieurs fois cette expérience, & Bletcon s'eft toujours trompé (3). Dex, on l'a conduit fur le canal FG du Laboratoire, qu'on lui a fait traverfer & parcourir plufeurs fois, ouvert & fermé , &ilne l’a in- -diqué précifément qu’une feule fois. Il l'a parcouru en longueur depuis y juiqu’à deux ou trois pieds du baflin G. Quoiqu'il fût ouvert, & qu'il pût entendre le bruit de l’eau coulant dans le boire il a annoncé qu'il ne fentoit plus rien RE la porte jufques vers C (4). On la ramené au point B, qui corre pend au point 19 de la première Séance , & qu'ilavoit trouvé trois fois: ilne l’a pas reconnu. Depuis 21 jufqu'à ce point-là , il a trouvé de l'eau à x ,y, , A.De retour à 21 , il s'eft plaint d'un mal de tête confdérable , & d’une envie de vomir. On lui a propofé de s'en tenir là, de remonter en voiture, & d'aller dans un jardin voi- fin, peu éloigné. Bletton l'a accepté (5). Ce prétendu jardin eft la nou- velle Eglife de Sainte-Geneviève , qui a plus de 100 pieds de profondeur en fondations , voûtes & baffle Eglife. En nous en retournant le long de ka grande allée, pour fortir par la porte A, j'ai prié M, Bertholet dere- marquer SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 6% marquer que Bletton traverfoit tous Les canaux , fans rien dire, ainfi que les endroits où il avoit indiqué de l'eau, ce qui eft arrivé fur-tout au point 100,4: & O (6). A la porte A , Bletton eft monté en voiture , les yeux bandés, & on l'a conduit dans la nouvelle Eglife. Quand tout le monde a été arrive, on l'a fait defcendre dans la nef d'entrée , & on lui a dit de chercher de l'eau (7). Il da pas eu fait fix pas, qu'il en a indiqué; & dans la lon- gueur de l'Eglife, il en a marqué au moins fept ou huit fois (8), Arrivé au centre du dôme , fur le noyau de l’efcalier de la bafle Eglife, qui eft un cylindre de plus de 20 pieds de profondeur, il a annoncé une fource confidérable. Là on lui a fait répéter toutes les expériences qu'il fait or- dinairement fur les canaux. Le mouvement direct & rétrograde de la ba- guette a eu lieu ; il a marqué la direction , & calculé la profondeur , qui s'eft trouvée de $ pieds & quelques pouces (9). Il a indiqué encore quel- ques fources au-deflus de La bafle Eglife. Enfin, à midi & demi , tous les Spectateurs , fatisfaits de la dernière expérience faite dans l'Eglife, ont propofé de s'en tenir là. On eft defcendu dans la bafle Eglife, pour conftater qu'il n'y avoit point d’eau de pluie amaflée: on a fignéle plan fur lequel j’avois marqué les endroits où Bletton avoit trouvé de l'eau dans le jardin, & ou s’eft retiré. NYO,TE,S Sur les Expériences faites avec le fieur Blerton à Sainte-Geneviève. (1) Le phénomène inexplicable du fieur Bletton étant oppofé à toutes les loix de la Phyfque , il étoit eflentiel de s’aflurer de la vérité d’une manière aufh tranquille qu’exacte. M. Darcet , & plufeurs autres Savans curieux de vérifier un fait qui fembloit sembrouiller de plus en plus, par la manière dont on faifoit les expériences, me proposèrent de les répéter dans un endroit où l’on füt für que Bletton n’eüt jamais eu d’ac- cès , qu'il ne connût point, & fur lequel il ne püt avoir de renfeignemens antérieurs, ou par lui-même, ou par d’autres. J'acceptai la propofition , & le jardin de Sainte-Geneviève fut choifi. Telle eft la caufe qui a donné lieu à ces expériences. Notre projet étoit d'en faire de parallèles à celle que M. Thouvenel cite dans fon Mémoire Phyfique & Médicinal, montrant des rapports évidens entre les phénomènès de la baguette divinatoire, du magnétifme € de l’éleé&lricité ; & dans le Journal de Paris, 26 Mai 1782. (2) L'état de l’atmofphère entrant pour beaucoup dans la fenfbilité de Tome XX, Part. I1,1782. JUILLET, ul n cé OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Bletton , il étoir néceflaire de conftater cet état. (Ouvrage cité de M, Thou- venel, page 56 du Journal de Paris, 2 Juin 1782). (3) Avant de partir, on eft convenu d'obferver le filence le plus pro- fond; il eft abfolument néceffaire. Pour le prouver , nous ajouterons que dans plufieurs Séances on ne cefloit d’inftruire Blerton, Ne féxrez-vous rien? luidifoit-on. Bleuon, rournez de ce côte-cr ; fuivez certe direftion , &'c. Séances d’Arcueil, du Jardin des Apothicaires, de Tivoli (celle où MM. Darcer & Defeffarts ont aflifté: ils’en étoit déjà tenu d’autres dans le même endroit, &c. &c.) (4) Afin d’en être fär , j'avois envoyé un domeftique pour ouvrir le ro- biner, & Bletton n’a pañlé fur le canal qu'après qu'on eft venu me dire qu'il étoit ouvert. (5) Trois femaines après toutes ces expériences, M. Darcet & moi faifant un nouveau relevé des indications de Bletton , dans les endroits où nous avions mis des clous & des cartes pour marquer , nous nous fommes apperçus de cette efpèce de régularité fur la terrafle & dans la nouvelle Egli£e. c (6) Ce qui eft contradiftoire à ce que M. Thouvenel aflure, page 58 de l'Ouvrage cité. (7) La vraie profondeur du canal eft de 14 pieds, à quelques pouces pres. (8) La terrafle , comme le jardin, eft fur des carrières que l’on peur parcourir, en y defcendant par le puits de la pompe. (9) Voyez l'Ouvrage cité, page 96. (10) Cette expérience des ifoloirs n’a pas mieux réufli que celle dont j'ai été témoin auchâteau-d’eau, près l'Obfervatoire ,où M. le Duc de Chaulnes avoit placé lui-même l'ifoloir. Il n’y en avoit qu'un feul , & Bletron en indiquoit trois , fans. rencontrer Le bon. (11) Plufieurs perfonnes ont remarqué, comme moi, que Bletton, avant de commencer fes expériences , avoit grand foin de dire : Faut-il que Je faffe attention ? Nous verrons dans les expériences de la feconde Séance, que lorfqu'on ne l’avertit pas, Bletton pañle au-deflus des canaux, fans éprouver de fenfations. Des fenfations involontaires , forcées & nécefli- tées par une caufe phyfique , doivent-elles dépendre de l'attention com- mandée du fujet qui Les éprouve ? (12) D’après fon aveu, & les découvertes qu'il dit avoir faites en Bourgogne, il devoir éprouver au moins une légère fenfation. C’eft ici le lieu de dire la vérité, & de rendre juftice à un homme de mérite. Dans une Séance faite fur Le canal d’Arcueil, où mon frère affifta, on l’aflura (& c’étoit un Blettonien décidé) que M, de Morveau étoit revenu fur le comptede Bletton,& qu'ill’avoit Fo pour fes mines de charbon de terre de Montcenis. J'ai reçu une lettre de ce Savant, où il déclare pofitivement qu'il s'en faut de beaucoup qu'il foit revenu fur le compte de Bletton ; & que SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 67 ce prétendu Sourcier n'a jamais approché de fes mines. Eft-il honnête de faire courir de faux bruits, & de compromettre un homme de mérite, pour accréditer un nouveau /yflême ? (14) Singulier effet de la préoccupation. (15) Voilà juftement la caufe pour laquelle on doit faire abferver le plus profond filence. Peut-être auroit-il paflé au-deffus fans Le fentir. On peut le conclure avec aflez de vérité, puifqu’il a tourné tout autour , fans s'arrêter au-deflus. NROMMEESS Sur Les Expériences de la feconde Séances (1) More l'on a conftruit la nouvelle Eglife , on a coupé à l'endroit z la terrafle qui s’étendoit beaucoup plus loin : on a élevé un mur pour foutenir les cerres, & on ne s’eft point apperçu qu'il y eût de fources ou des courans dans fon épaifleur ; de plus la terrafle eft toute entière de terre rapportée, (2) Voyez la note 7 précédente. (3) Voyez Journal de Paris, 26 Mai 1782. Quoique M. Thouvenel nait point imprimé qu'une feconde baguette de verre ne faifoit pas tourner la première , cependant il doit fe fouvenir qu'au château-d’eau , près l'Ob- fervatoire , lorfqu’il nous fit voir ce nouveau phénomène, il affura qu'il n'y avoit que des baguettes de métal qui puflent faire tourner la baguette de verre; & il fera difficile d'expliquer comment une feconde baguette de verre , mife fur les poignets , pourra faire mouvoir ou occafionner le mou- vement d'une première, mife fur les doigts : mais il fera encore bien plus difficile d'expliquer comment deux morceaux de verre, qui n'ont aucune communication entr'eux , pofés pareillement fur les poignets , produifent le même effet. (4) On ne niera pas que le canal fütouvert , puifque le jet-d'eau alloit, que tout le monde le voyoit, & que Bletton lui-même pouvoit l'entendre. Comment fe peut-il faire qu’il ait fuivi ce canal , dans le fens le plus favo- table (fuivant le cours du canal , Ouvrage cité, page 58), fans éprouver la moindre fenfation ? (5) Si Bletton étoit réellement malade, comment a-t’il pu éprouver, quelques minutes après , des fenfations aufli vives dans la nouvelle Eglife ? Voyez Ouvrage cité , page. 56. ; (6) J'ai fait faire la même obfervation àM. Bertholet, en conduifant Bletton Le long du canal qui va à la colonnade, Bletton avoit les yeux oue Tome XX, Part. II, 1782. JUILLET. 12 68 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, verts & S'en alloit, & il n’étoit pas averti de chercher de l'eau. Je n'ai point rapporté cette obfervation dans le procès-verbal , parce qu'elle a été faite après le retour de la nouvelle Eglife, & la fignature. (7) Il venoit de dire: Faut-il que Je faffe attention ? (8) Avant d'arriver fous le dôme, il en avoit indiqué quatre fois, & on avoit mis quatre clous en terre avec des cartes. On en a enlevé plu- fieurs; il en reftoit cependant encore deux , quand M. Thouvenel eft venu faire la reconnoiflance du local le 17 Juin. (9) Voici la grande expérience que M. Thouvenel s'efforce de tourner en fa faveur, dans laquelle il nous accufe d’un faux capital. Nous nous con- tenterons d’expofer fimplement le fait, en difant feulement tout ce que M. Thouvenel ou n’a pas voulu dire, ou na pas fu. Nous diftinguerons d’abord trois épreuves différentes, faites dans la mème Eglife ; 1°. du point où Blettoneft defcendu de la voiture de M. Defef- farts jufques fous le dôme ; 2°. les expériences faires fous le dôme ; 3°. les expériences faites depuis le dôme jufqu'au chevet de l'Eglife. 1°. Bletton, comme on l'a vu dans la note précédente, a indiqué qua- tre fois de l’eau au moins 40 pieds avant le dôme. Dans cet cie il écoit au-deflus de la voute des caveaux ; qui a environ trois pieds d’é- paifleur , & conftruite de façon à ne pas laïfler pafler de courans d'air frais. 2°. Le noyau de l’efcalier , ou plutôt l’efcalier de la baffle Eglife qui eft fous le dôme, eft compofé d’un mur circulaire & du noyau cylindrique de l'efcalier , placé au centre de ce mur; l'efpace entre le mur circu- laire & le noyau où doivent fe trouver les marches de l’efcalier, a 5 pieds de large; le mur du noyau a 4 pieds d’épaifleur ; l'intérieur vuide, mais voûté du noyau, a 11 pieds 10 pouces de diamètre , ce qui donne 20 pieds 10 pouces environ de diamètre à l'emplacement total de l’efcalier. La voûte du noyau cylindrique ne vient pas jufqu'à fleur de terre de l'Eglife ; il y a 3 pieds 10 pouces de diftance occupée par les poutres qui fupportent le faux plancher. Ce faux plancher lui-même, de 3 pouces d'épaifleur , eft encore recouvert au centre du dôme de 1 pouce de terre, Ce n’eft qu'au- deffus de l'intervalle vuide entre le mur circulaire & le noyau cylindrique , que dans plufeurs endroits le faux plancher eft percé de plufeurs trous; par le défaut des madriers qui le forment. La hauteur du noyau cylindri- que eft de 13 pieds depuis la voüte jufqu'aux décombres, & ces décombres fe trouvent élevé de 7 à 8 pieds au-deffus du fol de la baffe Eglife. Bletton a annoncé de l’eau dans cette Séance, étant fur le bord du mur circulaire, & il s’eft arrêté lorfqu'’il a été fur le noyau cylindrique, comme Les clous plantés encore dans les madriers en font foi , ainfi que la diftance qu'il a trouvée de $ pieds & quelques pouces. Voilà les mefures exactes , tellesque M. Thouvenel au roit dû lesdon- ner ; voilà l'expérience telle qu'il auroit dû la citer. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 69 Qu'il me foit permis de faire ici quelques réflexions. Si Blerron jouit encore de la nouvelle propriété d'être fenfible aux courants d'air frais, ainfi que M. Thouvenel vient de nous l’apprendre , relativement à cette expé- rience , il doit les indiquer toujours dans les mêmes lieux où ils exiftenc : l'effet fuit la caufe. Pourquoi Bletton ayant éprouvé au bord de l’efcalier devant nous, & fans M. Thouvenel, le ç Juin, des fenfations qui ont ceflé au centre; pourquoi ; dis je , le17 avec M. Thouvenel, après y être déjà venu deux fois fans nous , mais avec lui, n’en éprouve-tiil plus fur le bord , & précifément au centre du dôme ? On avouera de bonne foi que ce changement de local eft extraordinaire , & ce choix du centre ne paroît pas être l'effet d’une fenfation mécanique & involontaire. C’eft La réflexion que M. Darcet fit fur le lieu même à M. Thouvenel: il doir sen ref fouvenir, Pourquoi ne pas faire part au Public de ce nouveau phéno- mène ? Bletton a indiqué dabord $ pieds & quelques pouces , & enfuite 3 pieds ; pourquoi cette variation ? Le faux plancher eft à la vérité élevé de 3 pieds, 10 pouc. au-deflus de la voüte du noyau cylindrique : mais eft-ce l'air frais contenu feulement entre cette voûte & Le faux plancher que Bletton devoit annoncer ? Si c'étoit lui, pourquoi la couche d'air frais qui tou- choit le plancher lui eft-elle inconnue , & qu'il ne diftingue que celle qui repofe fur la voûte à 3 pieds de profondeur? Il n’auroit dû trouver que 3 pouces de profondeur , épaifleur des madriers, Si Bletton a des fenfations produites par des courans d’air frais, le courant étant établi, & ayant fon effet dans tout l’efpace circulaire com- pris entre le mur & le noyau cylindrique, pourquoi Bletton, placé au centre de cet efpace , n’indique-t-il pas le diamètre de cet efpace , ou plu- tôt fon diamètre 10 pieds $ pouces ? ou, ce qui eft encore plus dans l'efprit de fes phénomènes particuliers , pourquoi n'annonce-t-il pas la profondeur de ce prodigieux courant d'air frais , qui eft de 16 à 17 pieds ? Si les impreflions communiquées à Bletton font interceptées en partie par des conduits en bois, ou du moins moitié moindres ( Ouvrage cité, page 74) , pourquoi Bletton , placé au centre du dôme, fur des madriers de 3 pouces d'épaifleur , & éloigné de plufieurs pieds des trous par lef- quels s’échappent les courans d’air frais & humide, éprouve-t.il des impref- Jions convulfives avec plus d'énergie & d'intenfité. (Journal de Paris, n° 177, page 723). 3°. Bletton parti de deffous le dôme , s’efl avancé vers le chevet , au-deffis de la baffe Eglife , jufqu'a l'endroit où l'on a pratiqué dans le pavé un ruiffeau pour l'écoulement des eaux , avant que cétte partie für couverte, De- puis le dôme jufqu'à cet endroit, il y a 68 pieds de diftance. Il a indiqué dans cet efpace de l'eau plufieurs fois. La voûte & le pavé de la bafle Eglife ont3 pieds d’épaifleux dans toute cette longueur, Certainement 7o OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, M. Soufflot , ce favant Architecte , & les perfonnes habiles qui ont exé- curé fes plans, ont difpofé les pierres qui forment les voûtes de manière qu'il ne peut s'établir aucun courant d'air, ou d’eau, À Telles font, dans la plus exacte vérité , les obfervations que M. Thou- venel ou n’a pas fu , ou n'a pas voulu dire , mais dont il étoit effentiel que le Public für inftruit. Il lui demandera toujours pourquoi il a parlé des impreflions éprouvées fous le dôme, & pourquoi il a tu celles que Bletton avoue lui-même avoir reffenties avant que d'arriver fous le dôme & au- deflus de la nouvelle Eglife. Je veux bien qu'il ne le croie pas, & qu'il engage en propres termes des perfonnes refpeétables qui l'accompagnoieut Le 17 Juin, à ne pas les croire ( M. Thouvenel fait bien ce que je veux dire); mais le Public croira que ceux qui ont figné Le procès. verbal ont vu toutes ces expériences. Une obfervation générale & intéreffante, c’eft que la plus grande pro- fondeur d’eau que Bletton a indiquée à Sainte-Geneviève , tant dans le jardin que dans l’Eglife , eft 10 à 11 pieds, & cependant tous les puits en exercice dans l'Abbaye de Sainte-Geneviève, ceux des environs, ceux que l’on a été obligé de combler , pour aflurerles fondemens & les pla- teaux de lanouvelle Eolife, ont 80 à 90 pieds de profondeur. EXPÉRIENCES NOUVELLES Faites Le Lundi 17 Juin à Sainte-Geneviève, devant M. Thouvenel, & dont il n'a pas parle. M. THOUVENEL étant venu faire la vérification le 17 Juin avec Bletton, MM. le Baron d'Holback, Bergier,le Comte de Carburi, Bayen, Mitouard (M. Defeffarts, Médecin, ART en même temps), Bletton fit quelques expériences , les yeux ouverts , fur les canaux, fur-tout fur celui qui va à la bafle-cour , expérience que M. Thouvenel , je ne fais pourquoi , n'a pas rendue fidellement, dans le Supplément au Journal de Paris, n°. 177, page 721. M. Thouvenel dit, 1°. que Bletton avoit toujours été à plus de 3 pieds du canal ; 2°. que ce canal éroit fermé, Mais M. T'houvenel a- t-il donc oublié que Bletron ne rencontroit pas lé canal par la ligne droite qu'il fuivoit? Je l’ai engagé moi-mème à aller en zig-zag, en l'aflurant qu’il pafferoit exactement deflus , ce qu'ila fait. A-t-il oublié que Bletton ne le rencontrant point, je lui ai appris qu'il étoic le long du mur ; qu'il y a été ; & qu'alors, inftruit par moi-même, il a dit naïvement, la main fur la poitrine ( c'eft fon gelte ordinaire) , qu'il fentoir bien quelque pete SUR L'HIST. NATURELLE ET LES-_ARTS. 71 chofe ? À-t-il donc oublié que, lorfque nous fümes trous deux nous affurer fi le canal étoit ouvert, nous le trouvâmes à la vérité fermé ; mais nous trou- vâmes à côté l'homme qui venoit de le fermer, parce qu’il l'avoir trouvé ou- vert? A-t-il donc oublié que moi-même, & devant lui, je l'ai ouvert, & que l’on a recommencé les expériences, qui n'ont pas mieux réufh?> S'il ne l'a pas oublié, pourquoi ne la-t-il pas dit, ou n’a-t-il dit que la moitié des chofes ? M. Thouvenel a-t-il oublié que, faifant marcher Bletton en zig-zag dans la grande allée en bas de la terrafle, pour indiquer le canal qui va de la pompe au grand baflin , après qu’il eut paffé plufieurs fois au-deflus fans le reconnoître , je voulus le faire remarquer , & que fur le champ on m'impofa filence, en m'aflurant que cela n’étoit pas vrais & fans M. Mi- touard , Apothicaire , qui rendit juftice à la vérité, on auroit encore im- primé dans le Journal de Paris , que j'en impofois. M. Thouvenel a été témoin de cette fcène; pourquoi n’en a-til pas parlé ? Je cite M. Mitouard, afin de faifir l'occafion de louer fa générofité, qui l'a porté à dire la vérité, quoique l’inftant d’auparavant je l’aie mor- tifñié , fans le vouloir, en ne répondant pas à une objection fingulière qu'il m'avoit faite. M. Thouvenel a-t-il oublié la petite Séance particulière que Bletton a eue ce même jour avec M. Darcer & M. le Comte de Carburi dans notre jardin , dont voici les réfultats , tels que je les ai reçus de M. Darcet ? æ 1°. De tous les points ou conduites d’eau , Bletton , /es yeux ouverts, » & accompagné de M. de Carburi & de moi, n’en a trouvé aucun, que » le conduit qui mène du petit baflin du grand potager à celui du petic » jardin du Laboratoire de Chymie. Ces deux baflins font à-peu-près à » jo pas de diftance l’un de l’autre , & Bletton marchoit au milieu; il » les connoifloit ; il les voyoit, & il étoit impoflible qu'il ne les vi » point. ; » 2°, M. de Carburi & moi l'avons mené fur la terrafle , & les yeux » bandés & marchant feul, il trouva de l’eau dans différens endroits ; » mais deux fois entr'antres où il nous annonça des courans plus confidé- » tables, nous lui demandämes la profondeur, qu'il nous donna à 8 pieds » & quelques pouces. Le premier de ces deux points éroit un peu au- » deflas du milieu de La terrafle, prife dans fa longueur du côté du chä- » teau-d’eau. » Le fecond point, & le plus important, fut marqué d’une manière » plus précife par Bletton lui-même, à côté d’un arbre, à 4 pieds à- » peu-près du conduit dela pompe, & aflez près de la fortie du chä- » teau-d’eau ; Bletton nous en marqua la profondeur à 8 pieds & quel- » ques pouces. It pafla, en prenant la profondeur , fur le conduit de la » pompe, fans s’en appercevoir; il y repafla encore, fans Le fentir , en re- 72 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, # venant au point d'où il étoit parti, pour en redonner une feconde fois » la profondeur , ce que nous lui fimes faire dans le même fens, afin de » le faire paifer une troifième fois fur le même conduit. Il pafla deflus » eneffèr ,comme la première fois, fans le fentir. » IL faut obferver par rapport à la profondeur de 8 pieds & quelques # pouces, qu'un quart-d'heure avant de faire cette expérience les yeux « fermés , il avoit été au même endroit, les yeux ouverts, & qu'il avoit » déjà marqué la profondeur de ce conduit de la pompe à la même pro- » fondeur de 8 pieds & 4ou $ pouces ». Si M. Thouvenel n'avoit pas oublié toutes ces particularités , pourquoi n'en a-t-il pas fait mention dans le Supplément au Journal de Paris, au- quel nous avons promis de ne point faire d'autre réponfe que la fimple expofition des faits ? NOUVELLES LITTÉRAIRES. P RIX propofes par l'Académie des Sciences, Arts © Belles-Letrres de Dijon. L'Académie propofe , pour le fujet du Prix de 1783 , la Théorie des Vents. C'eft pour la feconde fois que cette Compagnie demande l’expo- fition de cette théorie. Elle efpère que ce nouveau concours fera plus fa- tisfaifant pour elle, Ce Prix fera double : elle le partagera, fi deux des Mémoires envoyés fe trouvent y avoir un droit égal. Comme on n’a encore envoyé aucun Mémoire fur les Savons acides, le Prix extraordinaire qu’elle definoit à cette queftion refte en réferve, & fera donné à celui qui, en quelque temps que ce foit , remplira les vues qui ont engagé l'Académie à propofer ce fujet. Tous les Savans, à l'exception des Académiciens réfidens , feront admis au concours. Ils ne fe feront connoître ni directement, ni indirec- tement; ils infcriront feulement leurs noms dans un billet cacheté, & îls adrefferont leurs Ouvrages , francs de port , à M. Mares , Docteur en Mé- decine, Secrétaire perpétuel , qui les recevra jufqu'au 1° Avril inclufive- ment, des années pour lefquelles ces différens Prix font propofés. Le Prix fondé par M. le Marquis du Terrail 6 par Madame Cruffol d'Uzès de Montaufier fon époufe , à préfent Ducheffe de Caylus, confifle en une Médailk - SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 73 Médaille d'or de la valeur de 300 livres, portant, d'un côté | l'empreinte des armes & du nom de M. Pouffier , Fondateur de l'Académie; € de l'autre, la devife de certe Société Litrératre, L'Académie Royale des Sciences, Belles-Lertres & Arts de Rouen, a demandé , pour le Prix des Sciences qu'elle defroit décerner au mois d’Août 1782: HT « Jufqu'a quel point, & à quelles conditions peut-on compter, dans » le traitement des maladies , fur le magnétifme & fur l'électricité , tant » pofitive que négative À # La théorie doit être appuyée par des faits, » » L'appareil des expériences doit être aflez détaillé pour que l’on puiffe » les répéter au befoin. » L'Académie n'ignore point le nombre d’Ecrits publiés fur ce fujet; » les Auteurs y trouveront des matériaux pour former le tableau de nos » connoiffances acquifes fur cet objet, & il fera facile d'apprécier ce que » l'Art devra à leurs recherches perfonnelles. » Le Prix eftune médaille d’or de 300 livres». Depuis cette prÉpoltion , publiée en Septembre & Octobre 1781, l'A- cadémie a reçu plufieurs Lettres anonymes, par lefquelles elle eft priée d'accorder aux concurrens un délai pour perfeétionner leurs travaux &c multiplier leurs expériences. Et vu l'importance majeure de l'objet, elle fe détermine à laiffer Le concours ouvert jufqu'au premier de Juin 1783 , paflé lequel temps au- cun Ouvrage n'y fera admis. Prix extraordinaire pour 1782. f“ Un Amateur des Sciences, qui defire de refter inconnu , a vu avec in- térêtcombien la queftion fur les terres calcaires , propofée en 1780, avoit donné lieu à l’Auteur couronné de s’érendre en application à l'Agri- culture & aux Arts. Dans l'efpoir qu'il pourroit réfulter autant d'avantages d’un travail femblable-fur les terres vitrifiables , il a fait offrir une fomme de 300 liv: our un Prix extraordinaire, à décerner au mois d'Août 1783. L'Académie de Rouen accepte fes offres sénéreufes avec reconnoiflance; & autant pour en accélérer le témoignage, que pour ménager plus de temps aux Savans qui defireront concourir, elle annonce dès-à-préfent que , dans fa Séance publique de 1782, elle propofera ce Prix de 3ooliv., pour être adjugé, au mois d’Août 1783, à un Mémoire dont l'objet fera : æ D'établir des caractères diftin@ifs entre les diverfes terres argileufe, Tome X X, Part. II, 1782. JUILLET, K 74 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, >» alumineufe | quartzeufe & autres, que les Chymiftes ont jufqu’a préfenc » confondues fous le nom de terres vitrifiables ; en forte que de ces diftinc- » tions Phyfiques & Chymiques bien établies , réfultent des connoiffances » utiles à l'Agriculture & à différens Arts, tels que la Foulerie, la Po- » terie, la Faïancerie, la Porcelaine, la Verrerie, &c., dont plufieurs font cultivés avec fuccès à Rouen, & font-une partie du commerce de cette Ville ». Les Mémoires, lifiblement ‘écrits en François ou en Latin, feront adreflés , francs de port, avant le 1%° de Juin 1783, à M. L. A. Dam- bourney , Négociant à Rouen, Secrétaire perpétuel pour la partie des Sciences. : Cette époque exclufive du premier jour de Juin a éré jugée néceflaire pour laifler aux Commiffaires de l'Académie Le temps de répéter les ex- périences indiquées , ou d'en faire de relatives , s'ils le jugent con- venable. Les concurrens font avertis d'éviter tout ce qui pourroit les faire con- noître , mais de joindre un billet cacheté, contenant leur nom, leur adreffe, & la répétition de l’épigraphe infcrite en tête de leur Mé- moire. Signé, L. A. DAMBOURNEY , Secrétaire perpétuel pour la partie des Sciences. ! uw o y ÿ Aa Academiæ Elettoralis Moguntinæ , &c. &c. Mémoires de L Académie Eleüibrale des Sciences utiles de Mayence , établie a Erfort , pour les années 1778 & 1779. À Erfort, chez Keyfer, 1780, in-4°. Le nombre d’excellens Mémoires que cette Académie offre au Public, annonce avec quel zèle & quelle activité fes membres s'occupent d'objets intéreffans. Elle ne fait que de naître pour ainfi dire, & déjà on a d'elle un recueil affez confidérable de Mémoires pleins de découvertes utiles ou de differtations favantes. Quelle leçon pour nos Académies de France, dont on ignoreroit l’exiftence, du moins pour la plupart, fi leur nom & la date de leur origine n’étoient confignés dans quelques Almanachs ! LI eft poflible que ces Académies ne foient pas en état de donner au Pu- blic toutes les années un volume de leurs travaux ; mais nous l'avouons , c’eft en vain que nous leur avons offert d'imprimer dans notre Journal les Mémoires intéreflans qui s’y lifent quelquefois, Ces Mémoires reftenr en dépôt dans leurs Greftès: on les néglige, on les oublie. Que de richefles fouvent perdues , dont les Savans profiteroient, fi elles étoient con- nues! Les Mémoires renfermés dans ce volume de l’Académie de Mayence font: 1°, En Allemand: « Expériences chymiques pour obtenir une couleux SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 75 # bleue des osde divers animaux , faites par M. Bucholz». Ce Savant a fait cette découverte, en cherchant fi la Chymie avoit des moyens de diftin- guer les os humains de ceux des bêtes. 2°. En Allemand: « Revue des principes de l'affinité chymique des » corps, par M. Wiegleb ». Dans cette Differtation, ce favant Chy- mifte érablit cette loi des affinités: « L'affinité des corps, avec un dif » folvant commun, eft en raifon inverfe du temps de leur diflolu- » tion », 3°. En Allemand: « Examen chymique du Sumach, appellé Roux des » Corroyeurs , rhus coriaria de Linnée; par M. Tromfdorf, Profefleur » en Médecine », 4°. En Allemand : « Expériences pour faire du Savon avec des cham- s pignons, par M, Sieffert ». 5°. En Allemand : « Recherchés fur la couleur bleue du Paftel, ifaris » cinéloria ; par M, Planer, Profefleur en Médecine ». 6*. En Allemand: « Examen de la Source de Mouriat au pied de » Cyriambourg , près de la Gera , entre Erfort & Hocheim; par M. Pla- » ner », 7°. En Allemand: & Obfervations de M. Crell, Profeffeur de Mé- » decine à Helmftadt, fur le Phofphore & fon fel ». C’eft la méthode de Gahn, pour tirer des os brülés un fel phofphorique , fimpli- ée, 8°. En Allemand: « Eflai d'un Mémoire pour fervir à l’'Hiftoire du » Commerce d'Erfort, par M. le Baron Charles de Dalberg ». 9°. En Latin : « Ebauche d’une Hiftoire ancienne de la Charrue, avant » que l’ufage en ait été reçu en Allemagne ; par M. Springer », 10°. En Latin: «& Obfervations de M. Runyfel, fur la Juftice provin- # ciale de Thurinoc, autrefois rendue à Mittelhaufen ». 11°. En Allemand : « Combinaifon de la parabole apollonienne avec » la cubique, appliquée au calcul de la réfftance de l'air, dans la » chûte des corps; par M. Langsdorf ». 12°. En Latin : &« Vraie notion de l'addition & de la fouftrattion des » Quantités oppofées ; par M. Reinhard ». 13°. 14°. 15°. Trois Mémoires fur la Muire ou Saumure. Les deux premiers traîtenc de la manière dont le poids de la faumure augmente par degrés, & du degré le plus convenable de fa cuiflon; & le troifième, de l'évaporation des parties aqueufes de la faumure , au moyen de la gelée; par M. Lanosdorfde Salzhaufen , près de Gieffen. 16°. En Latin: 5 Mémoire fur la difficulté de déterminer précifément » la mefure des angles très-aigus, par M. Kaepner c. 17°. En Latin: « Formules pour trouver l'autre côté d’un triangle Tome XX, Part. Il, 1782. JUILLET. K 2 76 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » fphérique , dont on connoît deux côtés, & l'angle compris entre ces » deux côtés; par M. Kaepner ». 18°. En Allemand:« Méthode employée pour guérir les Troupeaux de » la Maladie épidémique qui, a régné fur les bords du Khin en » 1770 », 4 l 19°. En Latin: « Mémoire fur les vertus du Mezereum; par M. æ Rüimpel ». 20°. Mémoire de M. Nunn, « fur la vertu fingulière du Quinquina, » non-feulement dans les fièvres intermittentes, mais aufli dans les au- tres efpèces de fièvres, & dans plufeurs différentes maladies, confir- > mée par des obfervations chymiques ». 21°. En François: « Mémoire fur diverfes efpèces de Plantes, pro- » pres à fervir de fourrage aux Beftiaux ; par M. Cloner ». Ce Mémoire eft fi intéreffant , que nous ne pouvons nous refuler au defir de le faire connoître, en l'imprimant dans notre Journal. 22°, En Allemand: « Nouvelle explication de Aurore boréale, par » M. Helfenfrieder , Profeffeur à Ingolftadt». L’Auteur y foutient le fenti- ment que cette Aurore eft produite par la réfraction des rayons du foleil & de la lune , & il enfeigne comment ces aftres, étant fous l'horizon, donnent naïflance à ce phénomène. 23°. En François : « Obfervations fur l'altération des pilotis de bois » de chêne, retirés des démolitions du pont de Chatou, & fur la phof- » phorefcence de ce bois pourri dans l'eau ; par M, Sage ». 24°. En Allemand: « Des couleurs de l'Ombre , par le Baron de » Gleichen ». Differtatio de Lichene Iflandico. Differtation fur e Lichen PIflande, par M. CRAMER. À Erland, chez Kundmann, 1780 , in-4°. de 60 pages. M. Cramer examine, dans cette Diflertation , les qualités nutritives & médicinales de cette plante; en y ajoutant un examen chymique & des ob- fervations pratiques. Olfervations fur plufeurs Maladies des Befliaux , telles que la maladie rouge € la maladie du fang , qui attaquent les bêtes à laine, & celles que caufe aux bêtes a cornes & aux chevaux la conffruëtion victeufe des étables & des écuries, avec le plan d’une étable & celui d’une écurie convenable aux chevaux de Cavalerie, de Fermes, de Pofles, &c. &c. ; par M. l'Abbé Tessier. In 8°. de 200 pages, 1 liv. 10 fols broché. Tout le monde connoïît les travaux foutenus de M. l'Abbé Tefier ; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 77 touit le monde connoît fon mérite; mais tout le monde ne fait pas avec quel courage & quel zèle il affronte tous les dangers , pour s’inftruire , inftruire les autres, & être utile à fes concitoyens. Une longue & cruelle maladie a été le fruit de fon féjour en Sologne, canton infalubre & maré- cageux, Le dépériffement de fa fanté ne l’a pas empêché de conrinuer fes obfervations, & de rendre les plus grands fervices à l’économie champêtre, en inftruifant les Habitans de cette malheureufe Province, & en arrachant leurs trouveaux à la mort, Puiffe la reconnoiffance de la Patrie faire oublier fes maux à ce généreux Savant, & être fa jufte récompenfe ! ; M. l'Abbé Teffer , envoyé par la Société Royale de Médecine, en So- logne, pour les maladies des beftiaux, donne , dans l'Ouvrage que nous annonçons , le réfultat de fes obfervations & de fes opérations. li fpécifie d’abord les caraétères de la maladie rouge & de la maladie du fang , qui faifoient tant de ravages en Sologne; il fait voir enfuite qu'elle n’eft pas contagieufe, & qu’elle attaque fpécialement les agneaux de 1 ou 2 ans: il cherche les caufes de ce fléau, & c’eft dans le fein même de fes victimes, & d’après l'ouverture des cadavres, qu'il offre fes idées fur cet objet. Enfin, il indique le remèdes les plus convenables & les moins dif- pendieux, Il fuit le même drdre par rapport à la maladie du fang ou de chaleur des bêtes à laine de Beauce. C’eft dans la conftruétion vicieufe des étables qu'il trouve le principe des maladies qui enlèvent un fi grand nom- bre de bêtes à cornes & de chevaux. La réforme qu'il propofe annonce un obfervateur intelligent & un Médecin favant fur tout.ce qui peut influer fur la falubrité de l'air, Inflruétions pour Les Bergers & les Propriétaires de Troupeaux ; par M. DAUBENTON , de l’Académie des Sciences de Paris , in-8° avec fig. Paris, chez Pierres, Imprimeur , rue Saint-Jacques, & chez Debure, fils aîné , Libraire, quai des Auguftins, Le réfultat de 14 années d’obfervations fur la manière d'élever, de nourrir & de conduire les moutons , & d’obfervations faites par le Savant peut-être le plusexact & le plus attentif de l'Europe, forme tout l'Ouvrage que nous annonçons. M. Daubenton , qui a voulu écrire pour le Payfan & le Berger, l’a fait de la manière la plus fage & le plus à la portée de cette clafle d'hommes. IL a divifé fon Ouvrage en 13 leçons, dans lef quelles il pale en revue tout ce qu'il eft effentiel à un Habitant de la Cam- pagne de connoître par rapport à fes moutons: elles traitent fucceflive- ment des Bergers , de leurs chiens & des loups ; du logement, de la li- tière & du fumier des moutons; de la connoiflance & du choix des bêtes à laine; de la conduite des troupeaux aux pâturages ; des différentes chofes qui peuvent fervir de nourriture aux moutons ; de la manière de Leur don- 33 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ner à manger, deles faire boire, de leur donner du fel ; des alliances des bêtes à laine & de leur amélioration ; desbrebis , des agneaux, des moutons & des moutonnes ; des laines & de leurs efpèces ; enfin, du parcage des bêtes à laine. Ces leçons font terminées par quelques mémoires fur difiérens objets relatifs aux moutons , comme le parcage , les remèdes & le régime né: ceflaire aux troupeaux , & l'amélioration des laines. Il feroit bien à fou- haiter que cet Ouvrage , fi bien & fi fagement fait, füt entre les mains de tous les Bergers, ou au moins de tous les Fermiers & des Proprié- taires de grands troupeaux; nous verrions bientôt fe perfectionner les lai- nes en France, & nous ne ferions pas obligés de tranfporter chez l’Etran- ger des fommes immenfes pour l’acquifition d’un objer qui égaleroit, s'il ne furpafloit pas bientôt en France ce qu'il y a de plus beau en ce genre en Efpagne & en Angleterre, Traité de L Anthrax où Puflule maligne ; publié par M. CHaAmBoN , Mé- decin de la Faculté de Paris , de la Socièté Royale de Médecine de Paris, &c. À Paris, chez Belin, Libraire , rue Saint-Jacques, vis-à-vis celle du Plàtre. Ily a long-temps que les Médecins font perfuadés que l’anthrax eftune maladie très-meurtrière. La plupart des Praticiens l'ont regardé comme un fymptôme de la pefte, A la vériré on le trouve fouvent réuni avec elle; mais il ne fufht pas pour la conftituer , & il exifte fouvent fans elle. Quoi qu'ilen foit, la quantité de victimes qui fuccombent journellement fous les efforts de ce mal, prefque univerfellement répandu dans les Provinces, le fait regarder comme un des plus grands Aéaux. L'Académie de Dijon, inftruite des ravages qu'il caufe , avoit propofé pour Prix de l’année 1780 la queftion fuivante: « Déterminer la nature du Charbon malin... , en dé- » figner les caufes, & établir, d’après l'obfervation, la méthode la plus >» füre à fuivre dans le traitement de cette maladie ». Le Prix , qui étroit double cette année, a été partagé entre MM. Chambon, Thomaflin, Aflocié regnicole de l’Académie de Chirurgie de Paris, & Chirurgien du premier Régiment de Chafleurs. La doctrine des deux Auteurs eft en- tièrement oppofée , puifque M. Chambon, ainfi que tous lès Médecins de antiquité, croient que certe tumeur étant gangréneufe de fa nature, porte un principe deftruéteur dans les fonctions vitales, & par conféquent doit être traitée d’après les indications que ces diverfes circonftances préfen- tent. M. Thomañin, au contraire, prétend que la méthode anti-phlogiftique eft celle qu'on doit adopter dans la cure de lanthrax, D’après ce principe, il indique les faionées répétées , les topiques émolliens, &c., remedes que M. Chambon aflure être d’un ufage funefte. L'Académie a donc laïflé, par cette conduite, les Médecins dans leur SUR L’HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 79 premier doute fur le choix des moyens convenables à la cure de l'anthrax, {ls font d'autant moins en garde contre l'erreur , que la doétrine de M. Thomaflin étant affez analogue à celle de la,plupart des modernes , doit trouver les efprits plus difpofés à la recevoir. Pour mettre fin à une incerti- tude aufli dangereufe, M. Chambon, Médecin, a fait imprimer l'Ou- vrage de M. fon père, en y ajoutant des notes , qui déterminent abfolu- ment le choix des remèdes propres à la curation de l’anthrax. II prouve, par des obfervations nouvelles, & qui lui font particulières , que le traite- ment anti-phlogiftique, ainfi pe l'a penfé M. fon père » eft une mé- thode meurtrière. Cer objet eft difcuté avec une grande fagacité & tout le développement dont il eft fufceptible , dans l'introduction qui précède le Traité de l’anthrax, Nous penfons qu'un Ouvrage de cette nature doit intérefler non-feule- ment les Médecins & les Chirurgiens , mais encore les perfonnes qui font un féjour habituel ou momentané dans Les Provinces, & que le Public ne peut manquer de recevoir avec une forte d'empreflement un travail auf utile à l'humanité, Recherches phy[iques fur L EleSricité ; par M. MARAT, Dolleur en Méde- cine, @& Médecin des Gardes du Corps de Monfeigneur Le Comte d’ Artois. A Paris, chez Nyon, rue du Jardinet, Belin , rue Saint Jacques, & au Bureau du Journal de Phyfique , rue & Hôtel Serpente. 1782, in- 8°. s Liv. broché. Les Savans connoiffent déjà les travaux & les découvertes de M. Marat fur le feu & la lumière; il offre aujourd’hui , dans l'Ouvrage que nous annonçoss , fes nouveaux principes & fa nouvelle théorie fur l'électricité, Regardant l'attraction comme la bafe de rous les phénomènes électriques , il bannit la répulfion réciproque & l’élafticité du Auide électrique. Beau- coup de réforme dans Les principes généralement adoptés parmi les Phy- ficiens électrifans ; de nouvelles explications, de nouveaux appareils, & par conféquent de nouvelles expériences ; enfin, un fvftèéme nouveau, tel eft l'Ouvrage de M. Marat. Ceft en le lifant, & en répétant fes expé- riences, que l’on fera en état de le juger. 89 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, €. FA; DB EE, DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. j JR $.E.M. le Comte JUAN GREGOREVITSCH DE CZERNISCHEW, Vice Préfident du Collège de lAmirauté, Chambellan aë&uel, & Chevalier des Ordres de Rufie & de Pologne, à l'Académie Impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg , fur l'inflammation d'un mélange de noir de fumée & d'huile; traduite du Ruffe. Page 3 Extrait d'un Mémoire [ur la ftruéture des Spaths calcaires , approuvé par l Aca- démie Royale des Sciences , le 22 Décembre 1781; par M. l'Abbé HAUY , Profeffeur de l'Univerfité au Collège du Cardinal le Moine. 33 Memoire fur la Minéralogie del Aunis , par M. MONNET. 39 Memoire fur un Vent remarquable de l Afrique, appellé Harmattan, par MAT- THIEU D'OBSON, D.M., Membre de la Société Royale de Londres ;traduit de l'Anglois, par M. GUYOT, de l’Académie de Bordeaux : commu- niqué à la Société Royale, par le Dotkur FOTHERGILL le 7 Décembre 1780, 6 imprime dans les Yranfactions Philofophiques, pour 1781. Vol. LXXI, Partie première, page 46. 48 Mémoire fur une nouvelle manière de faire éclore les Œufs , au moyen de l’E- leëlricité; par M. ACHARD. 56 Copie du Procès-verbal dès Expériences faites avéc le fieur Blerton au Jardin dé l'Abbaye de Sainte-Genevièye , le 29 Mai 1782. 58 Nouvelles Litréraires. 72 APPROBATION. J'" lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, fur l’Hiftoire Naturelle & fur les Arts, &c.; par MZ. Rozier & AONGEZ Le jeune, &c. La Collection de faits importans qu’il offre périodi- quement à fes Lelteurs , mérite l’accueil des Savans ; en conféquence, j’eftime qu’on peut en permettre l'impreflion, À Paris, ce 24 Juillet 1782. VALMONT DE BOMARE. 27 7 elles LUS 27/4 #3 a SP 4 52 = HR, y "A 53 hÎZ FF # askG qq LL ès mm AS 7722 — 2 — a — ——— AOUST, 1782. | D ——;; nn) = F De M.Le ROY, de l'Académie des Sciences, à AUTEUR de ce Journal, Moxsreur, J'at l'honneur de vous envoyer l'Extrait d’une Relation des effets de la foudre , fur une maifon de la Ville de Breft wqui prouve, de la manière la plus fenfible , lutilité des conducteurs ou gardes-tonnerre (1). J'ai lu un grand nombre d’obfervations de ce genre, & qui toutes la conftatent plus ou moins : mais j'avoue que je n’en ai rencontré aucune qui me parût mettre aufli bien fousles yeux l’effec de ces conduéteurs , & qui portt par-là leurs grands avantages à ce degré d’évidence. Le fait rapporté dans une Lettre de M. Kinnerfley à M. Donhlin, publiée dans les Tranfaëlions Philofophiques , & que vous avez inférée dans le troifième volume de vo- tre Journal (Mai 1774, page 347), établit bien leur utilité pour tranf- mettre le tonnerre, parce qu’il prouve qu'une maifon qui en avoit un, en a été garantie au milieu de plufieurs maifons qui en ont été frappées, faute d'en avoir. Cependant on n'y voit point la marche de la foudre, comme on la voit fenfiblement dans la relation dontil eft ici queftion; & fi vous avez bien voulu remarquer , Monfieur, dans cet article , que le fait rapporté par M. Kinnerfley confirmoit la vérité de ce que j'ai avancé dans mes Mémoires fur les gardes-tonnerre, vous verrez que celui qui eft (x) Je me fers du mot garde-tonnerre, que j'ai déjà employé dans plufieurs Mé- noires , non-feulement parce qu’il me paroît conforme à l’analogie de notre lan- gue , mais encore parce qu'il me paroît beaucoup plus propre à RE le vé- ritable effer des conduéteurs de la foudre, qui eftd’en préferver , que celui de pararon- nerre car d’après! les mots paravenr, parapluie, &c., on peur donner une faufle idée de ces conduéteurs ; comme de quelque chofe qu’on établit devant le connerre ; poux s'en garantir. Toms XX, Part. II, 1782. AOUST., L 82 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, configné dans cette relation en fournit encore des preuves beaucoup plus convaincantes, J'efpère en conféquence que vous voudrez bien donner place à cet extrait dans votre plus prochain. Journal. Des obfervations de ce genre ne peuvent être crop tôt répandues, par la lumière qu’elles peu vent porter dans l’efprit des perfonnes qui ont encore des doutes fur la füreté & les avantages de ces gardes-tonnerre, quoique , comme je l'ai dit il y a lono-temps, il n’y aitrien en Phyfique de mieux prouvé. Puiffent les conduéteurs être enfin par-là généralement adoptés, felonles vœux de l’Auteur de cette relation & de tous les bons Phyficiens ! & puif- fent ces derniers n'avoir pas le regret de voir , malgré leurs obfervations, leurs recherches & leurs efforts, les avantages de cette importante décou- perse négligés par leurs contemporains , & réfervés pour. leur pof- térité ! EX TIR ANT D'une Relation: intéreffante des effets du Tonnerre fur une maifon de la Ville de Breff, qui prouvent démonfrativement que cette maifon a été préfervée des ravages de ce météore, par un appareil de canaux métalliques | deflinés a l'écoulement des eaux , qui a fait dans cette occafion la fonélion de conduüleur ou de garde-tonnerre (1). D Ë s que le Docteur Francklin eut fait l’admirable découverte de l’a- nalogie de la matière électrique avec celle du tonnerre, il propofa, dit M. de Blavau , l'établiffement des barres métalliques, pour préferver les édifices publics de ce fléau deftructeur ; mais cet ufage ne fut pas généra- lement adopté, les uns le regardant comme dangereux , les autres comme inutile. En 1770 (2), M. le Roy voulant ranimer l'attention fur cet objet in- téreffant, donna plufeurs Differtations (3) très-curieufes, dans lefquelles a ——————— {1) Cette Relation a été envoyée à l’Académie des Sciences par lun de fes Corref- pondans, M. de Blavau, Chevalier de Saint-Louis, ‘&1-Capiraine dans le Corps Royal du Génie. (2) Voyez les Mémoires de l’Académie des Sciences , année 17701, page 53. (3) Il paroïît néceffaire d'ajouter à ce que ditici M.-de Blavau , que long-remps avant ces differtations, M le Roy. s’étoit expliqué fur les avantages des conduéteurs ; qu'il avoit donné des infiructions à différentes perfonnes pour en établir ; enfin , que, comme il le dit lui-même dans une note du Memoire où fe trouvent ces Diflerta= SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 8; il établit , par les faits connus, l’analogie annoncée par M. Francklin du tonnerre avec l’éleétricité ; il y difcute toutes les relations détaillées de chütes du tonnerre ; il fait remarquer que dans toutes les defcriptions de ces chûtes, on voit conftamment fon feu fuivre dans fa marche les ma- tières métalliques , foit barres ou verges de fer , fils de fonnettes, &c., & qu'ordinairement les ravages qu'il fait n'arrivent. que lorfqu’il n'en trouve plus pour le guider; d'où il conclut que les barres métalliques établies avec intelligence , ne peuvent être que très-avanrageufes. « Pour cela, » dit-il, il faut qu'elles foient d'une certaine groffeur, qu’elles partent de » l'endroit le plus élevé du bâtiment, & que ces barres foient conduites » fans interruption , un peu ifolées de la muraille , defcendant verticale- > ment le long d’un pignon ou d'un mur de face , de manière que l’autre » extrémité aille aboutir dans un puits, dans un baflin, ou dans la terie » humide », Il ne paroït pas douter que la matière électrique ou le ton- nerre ne füuive cette route préférablement à tout autre , & ne fe perde foit dans l’eau, foit dans le terrein. Comme M. le Roÿ ne cite aucun exemple où de pareils conduéteurs aient préfervé les édiñces auxquels ils éroient adaptés, il paroît qu'il n’en étoit pas venu à fa connoiffance (r). Le manque , de preuve, d’après l'expérience, eft vraifemblablement caufe que cet.établif- fement utile & peu coûteux n’a pas été pratiqué jufqu'à préfent en France, quoique Les Italiens & les Allemands en faffent le plus grand ufage, J'ai regardé en conféquence, continue M. de Blavau, Les effets du tonnerre ER je vais rendre compte , non-feulement comme très-curieux, mais encore comme très- propres à convaincre des avantages des conduc- teurs métalliques , & de la bonne difpofition que M. le Roy leur a aflignée dans les Diféreaions que j'ai citées ci-deffus. Mais es : fuivre M. de Blavau, & de parler des effets du tonnerre qu'il a obferŸés , il faut don- ner une idée de la fituation de la maifon fur laquelle il eft tombé , de fa grandeur & de quelques parties accefloires. . Cette maifon, fituée entre cour & jardin, n'a qu’un étage, furmonté d’une manfarde; elle eft terminée du côté où eft tombé le tonnerre, par un pignondé:- tions , il en auroit entretenu l'Académie beaucoup plutôt, fans des raions bien connues de cette Compagnie , mais dont il étoit inutile de parler. | (1) Comme les obfervations & les expériences peuvent feules former la bafe folide de nos connoïffances en Phyfique, il et à propos de remarquer ) 19. qu'en 1770, temps où le Mémoire dont il eit ici queltion a été lu à l'Académie, les obfervations ue l’on avoit fur les effets avantageux des conduéteurs, & que M. Francklin a rappor- tées dans fes Œuvres, n’étoient pas encore connues dans ce pays-ci, le, Recueil ne nous érant pas encore parvenu à cette époque ; 2°. qu'alors on ne pouvoit guère efpé- rerdes Obfervations de ce genre d’ailleurs que de l'Amérique feptentrionale sa caufe ge ce n’étoit que dans cette partie du monde Fr les conducteurs avoient été établis aflez anciennement, pour que des circonftances favorables euffent pu en fournir. Tome XX, Part. Il, 1782. AOUST. L'2 84 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, paité par les fouches de plufieurs cheminées. Les premières croifées de fa façade font à 4 pieds ou environ de ce pignon, ainfi que celle de la man- farde. La couverture eft en ardoifes épaifles, portées fur des planches qui recouvrent les chevrons. Ces ardoifes forment égoût pour les eaux du toit, qui font reçues , fuivant l’ufage du Paysgians une gouttière de fer- blanc placée au deflous. Cette gouttière, qui règne le long de la façade, eft inclinée du côté de l'angle ou pignon du bâtiment dont on a parlé, pour aller porter fes eaux dans un tuyau de même métal, qui eft placé verticalement le long du même angle, & ifolé ou éloigné du mur d'un. efpace de 10 pouces ou à-peu-près. Quatre crampons de fer , fcellés dans Le mur, ont chacun un collier à charnière qui enveloppe cetuyau; ils fervent à Le foucenir dans toute fa longueur : enfin , il va fe rendre, en formant un coude , dans une barrique eafoncée dans la terre , & deftinée à rece- voir ainfi l'eau qui vient du toit. Cette barrique ef traverfée en haut par une forte croix de fer, pour retenir fon cercle fupérieur. H y en a une feconde auprès, dans laquelle l’eau de la première coule , quand elle eft trop pleine. Celle-ci en étoit toute remplie, lors de l'orage, de façon que l'extrémité du tuyau y étoit plongée d'un pied ou environ, I] faut ajou- ter encore qu'il y a dans le toit une lucarne fituée entre le pignon & la première croifée de la manfarde, en remontant un peu vers le faite, & w’entre cette lucarne & ce pignonil y a des crochets de fer qui faillent en ehors de 8 ou 10 pouces , ce qu'il eft fort important de remarquer. Ces crochets fortent de deflous les ardoifes, étant attachés aux chevrons qui les portent: ils font deftinés à fixer des échelles, en cas d'incendie ; leur diftance étoit de trois pieds ou à-peu-près. Enfin , une circonftance qu'ilne faut pas oublier ;’ c’eft que la fenêtre de la lucarne dont on vient de par- L:r étroit ouvette lors du coup de tonnerre , & que fur fon appui, re- couvert en plomb, repofoit un crochet de fer , faillant en dehors , & qui fert à tenir le contrevent ouvert. Le deflin de la maifon, qui eft joint à cetre defcription , aidant à en faire mieux connoître toutes les parties, & à fuivre avec plus de facilité les effèts que le tonnerre a produits, mettra encore plus à portée de pro- noncer fur la jufteffe des conféquences qu’on en a tirées, relativement à le route qu’il a fuivie; mais il faut en venir à l'orage, pendant lequel cette maifon a été foudroyée. Le 15 de Septembre 1781, vers les 10 heures du matin , on vit à Breft un orage s'élever dans le lointain; bientôt il s'approcha, & s'étant avancé de plus en plus vers la Ville, il fe trouva au-deffus , & dans fa plus grande force vers les onze heures. Les coups fe fuccédoient alors avec la plus grande rapidité, & léclair & le bruit du tonnerte partoient prefque en même temps. Enfin , il furvint un coup fi violent, que plufeurs perfon- nes, & M. de Blavau en particulier, jugèrent que la foudre étoit tombée fur la Ville, Elle l'étoit en effec, & fur une maifon fituée dans la rue SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 85 (nommée d'Aiguillon) , occupée par un Perruquier, qui loue des apparte- mens à des Officiers. Il eft néceflaire de remarquer que, quand ce coup de tonnerre éclata, la pluie tomboit abondamment , & par conféquent w’il devoit y avoir un courant d'eau confidérable dans la gouttière & due le tuyau dont on a parlé. M. de Blaÿau ne manqua ‘pas d'examiner la maifon , & voici ce qu'il y obferva. Le crochet a (pl. I ), le plus élevé fur le toit, avoit unetache noire ; les ardoifes fous lefquelles il pafloit étoient enfoncées & brifées; la planche à laquelle il écoit attaché étoit aufli enfoncée , & un éclat en avoit été em- porté dans l’intérieur du grenier, fans être brûlé, ni même noirci, Le fe- cond crochet 4 étoit noirci comme le premier, & les ardoifes d’au-deffous étoient brifées comme celles qui étoient au-deffus. La gouttière c & le tuyau e n'avoient aucune tache noire à l'extérieur; mais celui-ci avoit , de diftance en diftance , des trous ggg, dont les bords étoient noircis, & où le fer paroifloit avoir été fondu. Celui du coude inférieur en A étoit plus grand ue ceux-d’au-deflus ; mais le plus confidérable de tous étoit à Ja furface se l'eau en £, précifément à la hauteur de la croix de fer qui retient le cercle"fupérieur de la bartique. Il remarqua en outre que l'appui en plomb de la lucarne dont on a fait mention, étoit percé d’un trou dans l’endtoit où fon crochet £ repoloit , & que les bords de ce trou en étoient fondus , comme fi ce trou avoit été fait avec un fer rouge. Voilà à quoi fe borna tout le dommage de ce coup de tonnerre fi épouvantable. Or, M. de Blavau obferve , avec jufte raifon , que fi on en examine les différens effets , on reconnoîtra fans peine qu’ils indiquent, de la manière la plus évidente , la route de la matière fulminante du haut en bas de la maïfon , par Le paflage ou la communication métallique que lui ont-fourni cette gouttière & ce tuyau , établis là comme par hafard ou pour un au- tre objet. En effet, il eft plus que probable que la foudre tombant au- près de la maifon, aura été attirée ou déterminée dans fa chûte par le crochet de fer a le plus élevé, & faillant, comme on l’a dit, de 8 à 10 pouces au dehors du toit; que le fecond crochet 4, diftant du premier de 3 pieds, & faillant comme lui en dehors de 10 pouces, aura attiré demême la matière fulminante qui y aura fauté du premier, & dans fon paflage l'aura noirci; que de-là elle aura continué fa route par les ardoifes , qui étant mouillées , à caufe de la grande pluie qui tomhoit alors, auront fervi de conducteur jufqu'à la gouttière de fer- blanc c; qu’arrivée à cette gouttière, fa direction aura été déterminée vers le tuyau vertical e, au moyen de l’eau qui alloit fe dégorger en abon- dance dans ce tuyau, & du paflage qu'il lui offroit jufqu'au terrein en bas, par fa nature métallique, & par cette même eau qui y couloit ; enfin , que cette matière aura fuivi ce tuyau intérieurement, n'y ayant aucune trace extérieure de fon paflage jufqu’au tonneau où elle s’'eft perdue , après avoir fait une efpèce d’explofion , comme on le dira dans un moment, Cette 86 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, marche de la matière fulminante paroît encore confirmée par le récit de plufeurs témoins oculaires. Le propriétaire de la maifon, sua étoit au rez-de-chauflée , aflura avoir vu toute la furface de l’eau de la barrique où defcend le tuyau comme en feu (1), au moment de l’explofion. Un Caporal d'Artillenie, qui étoit aufñi en bas dans le jardin, prétend avoir vu plufieurs boules de feu au- tour de lui, & avoir entendu une efpèce d'explofion, comme celle d'un pétard. Enfin , un Colonel du même Corps, M, de Lance, qui étoit au premier, en face de la croifée la plus proche du tuyau, dit à M. de Bla- vau avoir vu comme plufieurs boules de feu defcendre & traverfer devant fa croifée. Ces petites boules de feu étoient vraifemblablement produites par le métal des trous du tuyau qui avoit été fondu par la matière fulmi- nante, Mais, quoi qu'il en foit , ces différentes déclarations de perfonnes qui avoient Les yeux tournés du côté du tuyau , lors du coup de tonnerre, fourniffent encore, comme on l'a déjà dit, de nouvelles preuves de la route de la foudre de haut en bas. Il eût été curieux de favoir pourquoi ces trous du tuyau fe trouvoient plutôt dans un endroit que dans un autre : mais M. de Blavau avoue qu'il n’a pu en découvrir la caufe. Et en effet, il femble qu'il n'y a que ceux qui fe trouvoient au coude de ce tuyau, & celui qui a été fait {ur l'appui de la lucarne , dont on puifle facilement rendre raifon. Mais la plupart de ces effets tiennent fi fouvent à des circonftan- ces difficiles à faifir , qu’il n’eft pas étonnant qu’elles lui aient echappé. De tout ce que l’on vient de rapporter , il conclut à jufte titre, que l’ef- pèce d'appareil adapté à certe maifon , pour un objet tout différent ( puif- que c'éroit pour la conduite des eaux du toiten bas), a fait véritablement la fonétion de conducteur du tonnerre , & l'a préfervée par-là des ravages dontelle étoir menacée ; car il eft clair que file crochet d'en haut avoit communiqué métailliquement & bien exaétement avec une barre de fer de (1) On trouve, dans une lettre de M. Kinnerfley à MaFrancklin, page 211 des Œuvres de cet illuftre Phyficien, un fait qui a trop de reffémblance avec celui-ci, pour ne pas mériter d’être rapporté. Après avoir parlé des effers de la foudre fur la pointe d’un conduéteur établi fur la maifon de M. Weit à Philadelphie, & dit comment, au moyen de ce conduéteur, qui defcendoit jufqu’en bas fur le pavé, cette maifon n’a- voit éprouvé aucun dommage , M. Kinnerlley continue en ces termes « Une perfonne » digne de foi ( témoin de ce coup de tonnerre) affura M. Weft, qu'étant à la porte » de la maïfon, de l’autre côté dela rue Z7arer-Srreer., qui eft, comme vous favez, » aflez étroite , elle avoit vu Péclair s'étendre à la diftancé de deux on trois verges du » condufteur, furle pavé, qui étoit alors fort mouillé par la pluie». On voit par-là combien ce fait, ainf qu'il a été dit , a de rapport avec celui de cette relation, l'éclair ayant éclaté fur le pavé trempé d’eau par la pluie, à Philadelphie, au moment de l’ex- lofion , comme il a éclaté fur la furface: de la barrique d’eau, dans le jardin de la naifon de Breft, SUR C'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ® tranfmiffion jufqu'en bas , comme cela doit fe pratiquer dans les gardes- tonnerre ; la matière fulminante auroit été tranfmife du haut en bas de Ja maifon parfaitement , & fans l’efpèce de petit dégat des ardoifes, qui n’a été caufé que parce que cette tranfmiflion métallique n'étoit pas immédiate de ce crochet à la gouttière, &c. M. de Blavau ajoute, que les effets du tonnerre fur cette maifon, bien examinés & bien fuivis, font d'autant lus. intéreffans , qu'ils femblent, non-feulement confirmer le fentiment de M. Francklin fur les avantages des barrés métalliques , pour préferver les édifices de la foudre, mais encore démontrer la bonne difpolition de ces barres, indiquées par M. le Roy dans les Differtations déjà citées. Ces effets ont fait conjecturer de plus à M. de Blavau , qu'on pourroit fubitituer destuyaux de fer aux barres en mafles deftinées à la tranfmiflion de la matière fulminante du haut en bas de l'édifice. En effet , le courant RpaAe par ces tuyaux dans les orages, ne pourra qu'être avantageux pour déterminer la foudre à en fuivre la direction. Les gouttières & les tuyaux de fer ifolés pourront fervir par-là au double ufage & de recevoir l'eau des couvertures, & de préferver les édifices des effets du tonnerte. Il ne faudra, pour réunir ces deux avantages, que faire communiquer ces gouttières & ces tuyaux bien exaétement avec les barres ou les pointes élevées fur Les édifices. - Cette conjecture de M. de Blavau eft d’autant mieux fondée, qu’elle eft parfaitement d'accord avec ce qu'ont déjà propofé plufieurs habiles Phyfciens. On fait d’ailleurs qu'aux magafñns à poudre de Purfleet, aux environs de Londres, où il y a des gardes-tonnerre, dont la difpofition & l’arrangement ont été dirigés par un Comité de la Société Royale, ces gardes-tonnerre font par en bas de vrais tuyaux en plomb, qui vont def- cendre dans des puits , pour fe plonger dans l’eau qu'ils renferment. Il faudra obferver feulement de donner aux tuyaux avec lefquels on fe pro- pofe de faire la tranfmiflion de la matière fulminante, une certaine épaif- feur ; car fi elle n'étoit pas fuffifante , ils pourroient être fondus , comme cela eft arrivé au tuyau de la maifon dont il eft ici queftion. Et comme ceux de fer-blanc ne peuvent, par cette raifon , être employés avec füreté, M. de Blavau propofe: de leur en fubftituer de fer fondu , qui certaine- ment tranfmettront éualement bien la matière de la foudre, un grand nembre d'expériences ayant déjà prouvé que le fer fondu -a la même pro- priété à cet égard que le fer forgé. Il termine cette dernière relation par des vœux pour que les effets de la foudre fur cette maifon de Brelt, qui prouvent fi bien lutilité des conducteurs, en faffent enfin adopter l'ulage, pour préferver les édifices, les vaifleaux & les magalins à poudre des ra- vages du tonnerre. VA 88 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, TRAIT BEI OI EE OBS: E'RV ANT T'ON D'une variation particulière dans le Baromètre , par M. ToALDO, Profejfeur d’Afironomie à Padoue, L 1e Phyficiens reconnoiflent généralement que l’aétion de la [une doit produire dans l’atmofphère une marée analogue à celle de l'océan: mais plufieurs doutent, ou nient même abfolument que l'effet de cette al- tération dans le poids de l'air puifle fe faire remarquer dans le baromètre. Parmi ceux-ci eft monilluftre ami & notre célèbre Confrère M, l'Abbé Frifi, qui, dans fes favans Ouvrages de Gravitate & de Cofmographià fur- toutfayant calculé cette altération du poids dans l'air, & l'ayant trouvée équivalente à — de ligne dans le baromètre par l'action du foleil, &à 5 par l’action de la lune, en conclut que cette variation eft fi petite, qu'on ne fauroit l’obferver; en conféquence, il jette des doutes fur les réfulrats que j'ai tirés des obfervations faites par M. Poleni , qui prouvent que le baromètre fe reffent d’une manière fenfible de l’action de la lune, de l'apogée au périgée, des fyzygies aux quadratures , &c. (1). IT. Maintenant ayant à communiquer une fuite d'obfervations , qui prou- vent une variation diurne du baromètre , dépendante du même principe de l'action de la lune , il faut que je commence par écarter ce qu'on oppofe à ces obfervations (quoique toute difficulté & tout raifonnement contre un fait bien conftaté tombe de foi-même ). C’eft ce que je vais faire en peu de mots. IT. La première objection eft prife dela petiteffe de la variation; car +3 de ligne n’eft pas remarquable dans le baromètre. Je réponds, 1°. qu'en fuppofant même cette variation de + de ligne feulement, il s’enfuivroit — —————— (1) En fuivant les traces de feu M. Lambert , j'ai trouvé dans l'intervalle de 48 ans; prenant cinq joursæant autour de l’apogée que du périgée de la lune, que la hauteur moyenne du baromètre a été, pendant 31 ans, plus grande autour de l'apogée D'a , dant 17, plus petite ; l’excès de l’apogée réfultant de -2Z de pouce ( mefure de Lon- dres) \uc’eft-à-dire , de plus d’un tiers de ligne; que la hauteur moyenne des quadra- tures (fan excédé de 17 ans fur 21 ) a été plus grande que celle des fyzygies de + de ligne ; enfin, que la hauteur moyenne , dans les fignes méridionaux, a été plus grande de 5 de ligne que dans les fignes feprentrionaux. (Voyez mes Voyæ Tubule Baro- metré Paravii, 1773 }r tous SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 89 tout au plus qu'on ne fauroit la diftinguer dans une feule obfervation ; mais en prenant les fommes des obfervations, comme j'ai fait pendant l'efpace de 48 ans, il eft évident qu'on trouvera cette différence accu- mulée dans les fommes, & même dans les quotiens des fommes divifées par le nombre des jours. IV. Qu'il me foit permis , fondé fur les obfervations, de douter que cette variation foit fi petite; de douter, dis-je, non pas du calcul, mais des élémens employés , ou plutôt omis dans le calcul. C’eft-là ce qui eft caufe que tant de réfultats dans la Mécanique , dans l'Hydrodynamique, & dans les autres Sciences Phyfico-Mathématiques, fe trouvent dans le fait différens du calcul, Dans ce calcul de la variation du baromètre, on a omis deux élémens fort importaus ; je veux dire la force d'inertie dans l'air & la force élaitique. V. Tous ceux qui ont traité du flux & reflux de la mer, ont reconvu l'effet de la force d'inertie dans les eaux, qui eft même fi confidérable , qu’elle augmente du double la marée caufée par la diminution de gravi- tation ; de manière que, pendant que la marée, par ce principe feul , ne feroit que de4 pieds, on la trouve, en prenant la moyenne de tous les ports, & dans la zone torride , de 8 pieds environ , tel que l’a obfervé: même dernièrement le Capitaine Cook à la nouvelle Zélande, Si donc la marée de l'air, par la feule diminution de gravitation , équivaut .: de ligne, en joignant la force d'inertie , elle fera de +. VL. IL faut y ajouter l'effet de la force élaftique ; car M. Beguelin (vol. 1773) adémontré, contre le fentiment de M. de Luc , que le reflort de l'air doit influer fur le baromètre. Or , la force élaftique agit en raifon des poids. IL eft donc naturel de conclure qu’on aura un autre = (au moins) a ajouter, & la variation totale deviendra enfin de ÿ—; de ligne. Ajoutez enfin que cette quantité de variation eft prife fur le niveau moyen de l’atmofphère ; par conféquent il faut en prendre autant au-deflous, comme on le pratique pour le Aux & reflux de la mer. Nous aurons donc enfin :— * de ligne de variation dans le baromètre, caufée par la feule action de la lune, telle à peu-près que les obfervations nous la don- nent, VIT. Or, une variation de © de ligne, pour peu qu'on foit exercé à obferver le baromètre, eft très-fenfible, & M. de Luc le confirme dans tout fon excellent Ouvrage fur les variations de l'atmofphère. On verra même ci-deffous qu’on peut relever une partie beaucoup moindre jufqu'à L 260° “VIT. M. l'Abbé Frifi fait une autre difficulté ; il croit prefque impof- fible d’avoir jamais la hauteur moyenne du baromètre: car il ne fuffit pas, dit-il , de prendre un milieu entre deux extrêmes; il faut prendre le milieu de toutes les obfervations , en calculant le temps qu'a duré chacune, IX. Cela eft vrai , à la rigueur Le milieu par deux extrêmes, tel qu'on Tome XX , Part. II, 1782. AOUST. M , 90 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le donne vuloairement , n’eft pas le vrai moyen; il faut prendre toutes les variations , y introduire le temps de la durée de chacune, & enfin en tirer le moyen. Pour moi, je crois en avoir ufé à-peu-près de la forte; car par rapport aux réfultats précédens entre les hauteurs barométriques de l’apo- gée, du périgée, &c., il faut favoir que M. Poleni obfervoit à l'heure fixe du midi. J'ai fommé ces hauteurs ( relativement auxdites fituations de la lune), pendant l’efpace de 48 ans , ou de 17532 jours. Quelqu’éloignées que ces hauteurs fe foient trouvées des moyennes pendant un fi grand nombre de jours (environ 3000 pour chacune), elles doivent s'être com- penfées dans les fommes, & par cela même dans le quotient. Les Aftro- nomesont-ils d’autres moyens pour tirer le milieu le plus exact des ob- fervations? [ls cherchent même les plus éloignées pour parvenir à ce but. Il eft donc à préfumer que les milieux que j'ai tirés ne s’écartent pas fenfble- ment du véritable moyen. X. Cette objection a moins lieu encore à l'égard des obfervations que je vais donner, par rapport aux heures de la lune , car le baromètre a été obfervé à chaque heure de la lune (en interpolant , felon les règles , le peu d'heures qui feroient échappées ). Ce feroit une véritable chicane que de trouver ici à redire au moyen : chaque heure ayant 136 obfervations , s’il y avoit quelque anomalie, elle feroit effacée par un auf grand nombre. XI. J'en viens donc à rendre compte de ces nouvelles obfervations. Ayant, comme j'ai dit, découvert dans le baromètre une variation , que j'appellerai menfuelle, il me vint à l’efprit, l'été dernier, d’eflayer de dé- couvrir s’il y auroit-une variation diurne , dépendante de la fituation de la lune , par rapportà l’horizon & au méridien, analogue au flux & reflux de la mer. Il falloit donc prendre les XXIV heures planétaires dela lune , ce qu'on a faiten commençant la numération des heures du lever de la lune ; pofant pour I la première des douze parties de temps que la lune demeure chaque jour fur l'horizon (autant au-deffous), foit que cette douzième füt plus grande ou plus petite d’une heure folaire. XIT. J'ai engagé à fe charger d'une fuite d’obfervations fi pénibles le Doëteur Chiminelle (mon neveu & mon aide à cer Obfervatoire , qui cultive avec fuccès ces Etudes & les Mathématiques , ayant remporté un Prix de l'Académie Impériale de Sienne dont 11 eft Membre). Il les commença le 11 Mai 1777, & les continua jufqu'au 4 Septembre; & les ayant interrompues à caufe des vacances, il les reprit le 1° Janvier 1778 jufqu'au 25. Comme il eft impofible d'obferver aflidument toutes les heures dans un temps 'aufli long , il a fallu , comme je le difois, en in- terpoler quelques-unes; par exemple, deux à trois heures de fommeil : mais chaque jour le nombre des heures obfervées a été plus grand que celui des heures omifes , & aucune des heures remarquables au lever , au cou- cher de la lune & à fon double paflage par Le méridien , n'a été omife, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 91 XIIL. La méthode d'obferver a été celle qu’enfeigne M. de Luc. Le ba- romètre a été purgé d'air par le feu. L’échelle eft divifée en pouces & lignes (mefure de Paris), & chaque ligne en quatre parties. Un œil exercé diftingue aifément la quatrième de la quatrième, c'eft-à-dire , la à de laligne. L'on corrige la hauteur apparente du baromètre par le thermomètre, dont un degré (dans l'échelle de 96 parties) vaut = de ligne dans {e baromètre, Or, comme dans le thermomètre on diftingue à l'œil la dixième partie du degré, il fallut fubdivifer la © de ligne du ba romètre en dix parties; d'où réfulta la diftinétion de la — partie de ligne. Cette diftin@ion , qui eft une conféquence de la correction, étoit nécef- faire dans des obfervations fi fubtiles, & prouve en même temps qu'on peut remarquer la moindre variation dans Le baromètre. XIV. Nous avons partagé ces obfervations , qui embraffent 135$ jours, en fix intervalles, grands & petits, fans autre but que de faire plus com- modément les fommes, & de découvrir peut-être , s’il y en avoit, quelque diverfité dans la marche du baromètre. J’en fais autant de colonnes. La feptième contient les fommes totales; la huitième es moyennes diurnes de toutes les heures, XV. On ne fera pas choqué des différences remarquables qu’on rencon- tre dans les fommes de plufieurs heures, par exemple des premières & des dernières, pourvu qu'on veuille réfléchir que de petites différences , prifes plufieurs fois , en produifent de grandes dans les fommes, En effer, cette grande différence s'évanouit dans la huitième colonne, qui repréfente les bauteurs moyennes du baromètre, les fommes ayant été divifées par le nombre des jours. XVL.Faifons maintenant quelques remarques. D'abord, il eft vifible qu'il ÿ a une marche graduée du baromètre par toutes les XXIV heures de la lune, ce qui eft Le réfultat principal de ces obfervations , qu'en général le baromètre s’abaiile , lorfque la lune monte, & qu'il fe haufle pendant que la lune s’abaifle. La différence diurne entre les extrèmes de ces hauteurs, réfulre de 1%, ou bien , ce qui fair prefque Le double de la quantité que nous avons trouvée ci-deffus par la théorie. XVIL. J'ai repréfenté par une courbe ces hauteurs moyennes du baro- mètre rapportées aux XXIV heures de la lune, L'axe de cette courbe pafle par la hauteur moyenne prife entre routes les XXIV beures. Les hauteurs pofitives (PI. Il, fig. 1) ou excédantes font au-deflus ; les négatives an- deflous (fig. 1.) J’appelle cette courbe la marche confufe du baromètre , à caufe qu'elle réfulte de routes ces obfervations mêlées enfemble, & qui , comme on le verra ci-après , fe déguifent & fe troublent réciproque- ment. XVIII, Ce qui pourra le plus choquer , eft de ne voir dans les XXIV prefque qu’une feule marée, un flux & reflux du baromètre, Je ferai voir ci-après qu'il y a réellement, même dans l'atmofphère & dans le baro- Tome XX, Part. II, 1782, AOUST, M 2 92 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mètre , une double marée (1). Cependant il n’eft pas inutile de faire quel- ques réflexions fur cette apparente irrégularité. XIX. Nous avons quelques exemples d’une fingularité femblable dans La marée de l'Océan , comme dans le port de Tunquin à la Chine, & onen rend raifon par l'accès redoublé des eaux des deux mers, l'un par la mer du nord, l’autre fix heures après parla mer du fud, Mais l'armofphère eft une mer tout-à-fait libre , fans îles, fans rivages, fans promontoires ou autres obftacles. En un mot, c’eft certe couche fphérique du fluide envi- ronnant toute la terre, que les Phyficiens conçoivent pour expliquer la forme ellipfoïde que l'Océan doit prendre par l’action de la lune. XX. Cependant dans un autre fens, l’air a des propriétés toutes diffé- rentes de celles de l’eau, L'air eft donc doué d’une grande force de reffort dont l'eau eft privée ; & d’une grande force de cohéfion ou d’adhéfion, à caufe de laquelle il eft difficile de le détacher des fluides de la furface des corps & des parois des tuyaux. Or, l’élafticiré de Pair doit produire , dans l'air élevé fous la lune, de longues & grandes ofcillations, & fon adhérence à la terre, jointe à l'inertie & à la cohéffon, doit retarder fes mouvemens ; de forte que l'air , fur un lieu , fe trouvera élevé dans le temps qu'il devroit y être abaïflé, & vice verf4. Etenfin,on pourra dire, dans une révolution diurne, n'avoir qu’une feule marée du baromètre ( qui correfpond à la haute marée de l'Océan) , fe trouve vers les dix heures du matin ( par rap- port aux heures lunaires), c’eft-à-dire, dix heures après le paflage de la lune au méridien deflous , & la haute marée arrive environ douze heures après la baffle. Ce retardement provient des caufes que j'ai indiquées. Un femblable retardement de dix heures & demie arrive auf dans la marée da golfe de Venife; mais c'eft par d'autres caufes que dans l'atmof- phère. Dans celle-ci, il peut y entrer un autre élément, & ce feroit fa grande hauteur. Les obfervations des aurores boréales prouvent que la hauteur de l'atmofphère atteint à trois ou quatre cents lieues ; elle peut s'étendre da- vantage. Or, une telle hauteur, qui diverfifie fi fort la diftance de l'air dans un hémifphère, par rapport à la fituation de la lune au zénith de cet hémifphère, ou à fon oppofite, doit produire une grande diverfité dans la marée de l'air; car d'un côté, lorfque la lune eft verticale à un lieu de la terre, elle doit y élever l'air à proportion beaucoup plus que l'eau. C’eft peut-être à caufe de ceci que l’abaïflement du barometre fe trouve plus fort que ne le donne la théorie : cela pourrait produire même une marée plus lonoue, fur-tout à caufe des balancemens réitérés excités par le reffort de Pair dont on a parlé, & à caufe de la cohéfion entre fes (x) Cerre double marée s’entrevoit dans cette même courbe vers les heures VIIF, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 93 parties. De l’autre côté, il eft bien vrai qe la lune fe trouvant à l’oppoñite douze heures après , doit attirer la terre de deffous l'air comme de deflous les eaux; mais il y a cette différence , que, pendant que les eaux fe détachent en quelque forte de la terre , l'air, à caufe de fon adhérence, peut acquérir plus de preflion vers la terre , étant attiré avec elle; par-là preffer bien plus le baromètre, empêcher enfin la feconde marée qui devroit ar- river. XXIT. Ce fonc là les idées qui me pafsèrent par l’efprit au premier afpect de Ja fuite confufe des XXIV hauteurs du baromètre, repréfentées par la fomme totale. Tout cela a lieu encore en partie ; car les faits font en partie vrais, comme on le verra. Mais j'ai penfé enfuite que la fomme totale, par la complication de plufieurs circonftances , pourroit bien nous dé- guifer la marche véritable du baromètre , & l'action graduée de la lune fur l’armofphère, , XXIIL. Premièrement, pour découvrir la marche régulière du baromè- tre, il faut l'obferver dans des temps tranquilles. Or, dans le cours de nos obfervations , nous eûmes par malheur des mois très inconftans & pluvieux, des journées très-inégales & orageufes, où le baromètre ne faifoit qu’of- ciller très brufquement. Le feul mois d’Août fur beau, & l’on voit que Ja fuite de ce moiseft bien plus régulière que les autres. Il en eft de même, fi l'on examine quelque femaine tranquille des autres mois. On feroit donc en droit de faire un triage de toutes ces obfervations, comme on le fait en Aftronomie , & nous aurions une régularité bien plus marquée, comme je le difois du mois d'Août. XXIV. Mais 2°. par rapport à l’action de la lune, il faut auffi qu’elle fe trouve dans des fituations favorables où elle foit le moins traverfée, plus libre & dégagée des circonftances & altérations étrangères. Par exemple , il eft bon d'obferver fon action près de l’équateur , où elle exerce plus de force fur le total de la terre , que dans les quadratures , où fon ation eft dégagée de celle du foleil; & par rapport à nous, dans fon luneftice boréal, où elle déploie le plus direétement fon impreffion fur notre hémifphère, XXV. Dans cette vue, nous avons fait un triage des obfervations, & avons cherché des fommes particulières, relatives aux divers points de la lune, prenant cinq ou fix jours ( fuivant les circonftances) pour chacun, chaque fois; Car ces points, dans cet efpace de temps, revenoient quatre ou cinq fois. Je donne ces fuites en autant de colonnes, chacune avec une petite co- Jonne qui marque les différences politives ou négatives, par rapport à la quantité moyenne de chaque fuite, XXVI. Ces colonnes préfentent un tableau fort différent du pre- mier. Il eft bien vrai que quelques-unes retiennent encore la fimple ma- rée (à caufe de quelque complication rélidue, & des principes énoncés F 94 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ci devant). Telles font celles de fyzygies, celles des luneftices auftraux, celles des premiers quartiers , & cependant l’on y découvre enfemble des penchans à une feconde marée , mais qui eft moindre; car il n’eft pas né- ceflaire que la quantité pafle du négatif au poftif, ou vice verfa. XXVIT. Mais les autres fuites (celles où l’action de la lune fe rencon- tre plus libre ou plus forte), décèlent évidemment une marée double, Telle eit la fuite du luneftice boréal, celle du dernier quartier , celle des deux équinoxes, fur-tout de l'équinoxe defcendant, qui , avec leluneftice boréal, par rapport à notre climat, eft la plus remarquable ,, & doit nous fervir de règle. XXVIIT. Je trace ici (fig. 2) /a courbe à l'équinoxe defcendant : (celle de lafcendant eft à-peu-près femblable; celle du dernier quartier eft en= core plus régulière). L'on voit que cette courbe traverfe l'axe (dreflé fur la quantité moyenne ) quatre fois ; deux en defcendant au négatif, ce qui montre deux marées bafles du baromètre ou de l’atmofphère, & deux en montant au pofitif, ce qui montreles deux hautes marées, & les unes & les autres tombent dans les heures propres & analogues au flux & au reflux de la mer ; la baffle (qui correfpond à la haute de la mer), deux heures environ après le paffage de la lune au méridien ; la haute ( correfpondante à la bafle de la mer) à o ou 12 heures, c’eft-à-dire , à l'heure du lever & du coucher de la lune, XXIX. Voilà ce que j'avois à communiquer. Je ne prétends donner que des obfervations, ou plutôt des effais & des tentatives. Je fouhaite que d'habiles Obfervateurs les vérifient; & fi les réfultats fe confirment , je ne doute pas non plus que des Phyficiens plus heureux ne découvrent les véritables principes de quelque irrégularité qu’on y rencontre. Avertiffement , pour l'intelligence de la Table fuivante. XXX. Nous avons coutume de noter les degrés du baromètre par la feule quantité variable , qui fe trouve iciau-deflus de 26 pouces. Dans les fommes fuivantes, pour toutes les heures, on a mis dans chaque colonne la quantité commune des pouces (marquée au pied de la colonne même, & qui doit s'entendre , ajoutée au nombre exprès qui marquent des lignes & des centièmes fexagones de ligne. Dans les colonnes fuivan- tes , après la feptième , on a marqué feulement la quantité moyenne de la colonne, pour y rapporter les différences de la petite colonne an- nexée, Les fommes ont été très-pénibles à faire; deux perfonnes les ont faites chacune à part; enfuite on les a collationnées & corrigées, lorfqu'il sef trouvé quelque différence, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 95 Hauteurs du Baromètre, fuivant les heures de la Lune. I IL VI Du 11 Mai Du 1° au Heures |au3Juin | Du $ Juin, Du s Juiller/Du 4 au 3x]Du 1°° aufzo Janvier| Sommes TT EL V — | ———— | — — VIT — — lunaires. 1777. au s Juiller.'au 3 Août.! Août. 4 Sepremb, 1773. totales, lig. 160". | Lig. 160°. | Lig. 1607. } Lig. 1607. | Lig. 160°. | Lig. 1601. | lig. 10°. I 11,116 2,044 5,159 5,081 6,097 2,127 | 10,144 II 11,02$ 2,082 S,112 $,930 6,136 2,059 8,124 III 10,124 2,132 5,053 4,117 6,104 2,117 9,007 IV 10,246 1,093 s,102 4,108 6,038 2,123 8,130 V 10,142 2,106 5,103 4,129 5,095 3,013 8,108 VI 11,051 3,029 S,117 4,120 4,133 4,001 9,131 VIII 11,089 3,108 7,018 5,089 2,127 4,129 | 11,100 IX° 11,157 3142 7,086 5,031 1,158 4,054 | 12,138 X 11,118 3,143 8,057 $,099 1,141 6,048 | 13,126 XI 11,056 2,11$ 8,057 6,086 2,012.| 7,039 | 14,045 XII 11,136 2,050 9,072 7,040 2,055 7,118 | 16,151 XIII 12,027 2,066 9,158 7,120 2,086 7,002 | 19,019 XIV 12,056 | 2,028 | 10,055 7115 2,156 Ss142 | 18,012 XV |M3,036 1,154 | 11,007 | 9,005 4,00$ 4,106 | 19,157 XVI 14,058 1,045 | 11,114 9,025 4,151 4,049 | 21,120 XVII | 14,080 | o,146 | 11,118 9,049 5,031 3,114 | 20,068 XVII | 14,087 0,122 | 11,125 9,002 5073 3064 | 19,147 XIX rs,or8 0,0$2 | 11,027 8,063 s,114 2,113 | 19,067 XX | 14151 | oc,o79 | 1o,05$ | 7,146 | s,155 | 1,147 | 18,096 XXI 14,099 O,112 9,084 | 7,060 6,936 2,131 | 17,042 XXII | 14,029 | ‘1,013 8,128 6,153 6,089 3,095 | 17,027 XXIII | 13,076 1,075 8,114 6,080 é,1$4 4,031 | 17,019 XXIV | 13,056 1,082 7,157 S,132 7,041 4,021 | 16,009 Quantité ae commune a|pouc. 673.|pouc. toutes les 24 heures. | ILE D te cit ME CR RE SR SERRE - VII 11,134 31037 6,094 4,149 3,120 4,129 11,023 | pouc. 840. | pouc. 789. |pouc. 112, | pouc. 561. |pouc. 3790. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 96 Hauteurs du Baromètre, fuivant les heures de la Lune, Suites. | VIII IX Ré a i - XI XII XIII | Hauceur Heures de! moyenne | Différences Autour de la Pin Te P. Q. DO: la Lune. |fur le vocal. | au moyen. N. L. Lig. 160°. Lig.160°. lig. 160. | différences. Lig, 160°. | différence. | lig. 160°. différence. Lig.160°.7 différence. I 1,025 —0,00$ | 19,079 | +4,06 17,079 | —1,080 752510) —1,022 135025 | —0;137 II 1,024 | —0,006 | 19,133 | 4,129 | 18,083 | —0,070 73009 | —2,003 | 13,010 | —o,152 III 1,023 | —0,007 | 19,127 | 4,123 | 19,067 | “o,067 6,064 | —1,108 | 13,023 | —0:139 IV 1,022 | —0,008 | 19,037 | 4,033 | 20,029 | 1,019 5,090 | —3,082 | 13,039 0,123 V 1,022 | —0,008 | 17,071 | “1,067 | 20,126 | 1,126 5,045 | —3,127 | 13,059 0,103 VI 1,024 | —0,006 | 15,093 | <+0:089 | 20,078 1,078 5,039 | —3,133 | 13,115 | —0:047 Vil 1,025 | —0,00$ | 13,114 | —1,050 | 20,140 | +1,14 6,107 | —1,06$ | 14,017 | “+oo1s VIII 1,026 | —0,004 | 11,137 | —3:027 | 20,127 | 1,128 6,033 | —2,139 | 14,153 | Hoost IX rois | —0,00$ | rojorz | —4,152 | 21,063 | 2,064 | 6,051 | —2,121 | 14,056 | 0,054 X 1,018 | —0,007 9,108 | —5,056 | 21,115 | H+2,rié 7,104 | —1,068 | 14,092 | 0,090 XI CRC EH 9,097 | —55065 | 20,146 | 1,147 8,002 | —1,010 | 14,081 | 0,979 XII 1,032 | 0,002 | 10,140 | —4,024 | 21,100 | 2,107 8,080 | —0,092 | 14,076 | —r0:074 XIII 1,034 | 0,004 | 12,018 | —1,146 | 22,069 | 3,170 8,115 | —0,057 | 14,062 | 0,061 XIV 120330 Mpocos | 135027 | 10137 2350590) 5654/0568 or EE; 00501403 3p 0031 XV 1,037 | 0,007 | 14,141 | —0,023 | 23,047 +4,048 9,054 | 0,042 | 13,136 | —0,026 XVI 1,938 | —Ho,008 | 15,149 | 0,145 | 23,092 +4,093 | 10,041 | 1,029 | 13,088 | —0,074 XVII 1,037 | Ho,007 | 15,147 | 9,143 | 22,019 #3,020 | 10,113 | H1,1o1 | 13,102 —0,060 XVIII 1,037 | —o,oo7 | 15,137 | “0,133 | 20,006 1,007: | 11,063 | 2,051 | 13,105 | —0,9077 XIX 1,03$ | —o,oos | 15,140 | Ho,136 | 17,065 | —1,094 | 12,028 +3,016 3157 0,00$ XX 1,03$ | -o,o04 | 15,125 | —o,r21 | 14,03r | —4,128 | 13,005 | 3,153 14,048 | 0,046 XXI 1,033 | =+o,o03 | 15,118 | —o,114 | 11,095 | —7,064 | 13,075 | 4,053 14,065 | 0,063 XXIT 1,032 | 0,002 | 15,121 | 0,117 | 11,020 | —7,139 13,068 | H4,056 | 14,058 | +o0,056 XXIIT 1,032 | 0,002 | 16,033 | 1,029 | 10,095 | —8,064 | 13,024 | 4,012 | 14,043 | 0,041 XXIV | 1,031 | Ho,oor | 16,031 | 1,027 | 11,150 | —7,009 | 13,020 —4,008 | 14,039 | —+0,037 pouc. 23 moy: 15,004 18,159 9,012 14,002 moyen , 28. 1,030 no SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 97 7 Hauteurs du Baromètre, fuivant les heures de la Lune. Suis. XIV XV XVI XVI Heures de 14 la Lune, Luniftice boréal. Luniftice auftral. Equinoxeafcendant. | Equinoxe defcendanr. * lig. 160°. différence: lig,160°.| différence. |-Hg. 160°. | différence. dige r6of« différence. I 16,o21 |<7,091 12,142 | —2,010 | 14,030 | —4,599 6,076 | 1,076 Il 16,131 |+8,041 13,017 | —1,10$ | 14,047 | —4,082 4,145 | 0,145 I 16,098 |+8,008 12,157 | —1,125 | 14,078 | —4,051 5,940 À 0,140 IV 16,048 +7,18 135053 | —1,069,| 14,437 | —3,052 4,068 | —0,092 V 15,015 |<+6,08$ 13,105 | —1,017 15,104 | —3,027 4,10$ | —0,05$ VI 13,109 |+5,019 14,006 | —0,116 16,125 | —2,004 3,129 | —1,03€ VII 12,063 |+3,133 14,107 | —o,;o1s | 18,094 | —0,03$ 3,2$9 | —1,001 VIII 10,063 |+1,138 15,011 | +o,ogo | 20,117 | +1,148 3073 | —1,087 IX 9,11€ |+toz1t 15,066 | +o,104 [22,138 | +3,069 4013 | —0,147 X 6,068 |—2,021 155097 | 0,135 | 23,030 | 4,061 5,063 | 2,063 XI 4,066 |—4,014 15,074 | +o,11z | 23,048 | 4,079 6,007 | 1,007 XII 4133 [3217 ]issisa | 1,032 À 24,082 | +sruz À 5,092 | +0,092 XIIL , 5,950 |—3,040 16,090 | 1,138 | 23,155 |: 5,026 5,00$ | 0,005 XIV ) $,119 173046 2,084 21,068 —+<2,099 4,074 —0,089 XV 5147 18,007 | “3:04$ | 20,100 | 1,071 3:093 | —1,067 XVI 7,935 17,110 | +2,158 | 19,146] +1,017 4,022 | —0,138 XVII 6,107 17,095 | 2,133 | 18,063 | —0,o66 4,101 | —0,059 XVIII 6,107 16,124 | 25002 | 17,146 | —0,023 53010 | +o,oto XIX 5,138 15,059 | -F0,097 | 17,061 | —1,067 5,913 | +o,oto XX $»019 13,028 | —1,994 | 17,134 | —0,05$ $:084|- 0,084 XXI 4,044 11,035 | —3:087 | 18,126 | —o,003 | S,114 | +o,r14 XXIT 3,053 10,044 | —4,078 | 20,117 | +1,148 6,009 | +1,09 ZXXIII | 2,074 9,062 | —5,053 | 21,08$ | 2,116 6,000 | +1,000 XXIV |! :,0o1 1 9,122 | —5,000 | 28,016 | —+-1,147 1 S129 | +0,116 PÈRES LL 9 PRES moy\ | 8,090 | MRTALE | | 18,r29 | s,000 | oo Tome XX, Part. Il, 1782, AOUST, N - 98 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, DE D AO Un mo mg om PE LATURUE AUX AUTEURS DU JOURNAL DE PHYSIQUE, Au Jujet de quelques Offemens trouvés dans les Carrières de Montmartre > par M, PASUMOT, Ingénieur du Roi. Messieurs, Depuis l'impreflion du Mémoire de M. de Lamanon , inféré dans votre Cahier de Mars de cette année, les offemens trouvés dans les car- rieres de plâtre de Montmartre deviennent des plus intéreflans, fur-touc lorfqu'il ont une configurarion bien déterminée. J'ai, dans ma Collec- tion, deux vertèbres très-femblables à celles dont M. de Lamanon a fait mention, & qui font gravées, fig. $ , pl. IE. Ces vertèbres femblent de- mander une defcription particulière : l’une a 21 lignes de longueur, & l’autre 19. Leur forme eft un prifme quadrangulaire d'environ 9 lignes de groffeur & la réunion des faces forme une arête bien décidée. Les extrémités ne font point égales; l’une RE groffe que l’autre d’environhun huitième. La petite eft parfaitement femblable à la coupe de la fig. 6 du Mémoire de M. de Lamanon , & elle porte quatre apophyfes arrondies, L'autre ex- trémité , qui eft la plus groffe , porte cinq apophyfes moins arrondies que les premières, beaucoup plus faillantes , & dont une eft beaucoup plus groffe que les quatre autres. Je donne, fo. 3 , pl. IT, api de cette groffe extrémité dans la grandeur naturelle, afin de faire diftinguer ces cinq apophyfes, & faire remarquer qu'elles ont un contour particulier, qui donne aux quatre petites la forme de quatre oreilles, & que la plus groffe de ces apophyfes a comme deux têtes ou proéminences que Les autres n'ont pas. J'obferverai cu les quatre arêtes formées par la réunion des quatre faces du prifme, aboutiffenc en À, B, C & D , tellement qu'une de ces arêtes, qui eft d’une taille très-vive, aboutit en D entre les deux apophy- fes, tandis que les trois autres, qui font des arêtes moufles, même arron- dies , s’épatent vers les extrémités des vertèbres , & forment les apophyfes par leur épatement, Le centre de ce plan eft un peu concave; & au lieu de fe repréfenter des cercles parfaits, il faut imaginer que dans la réalité ce font des ellipfes ou ovales, qui approchent beaucoup de la figure cir- culaire, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 99 Je pofsède encore un autre offement, parfaitement bien confervé , & dont je joins ici le deflin, fig. 4, de grandeur naturelle; mais il eft d'ail- leurs d'une forme fi irrégulière, qu’il me paroït impoffible d'en faire la defcription de manière à pouvoir la rendre feulement intelligible. On ne peut comparer cet os qu'à ceux des mains ou des pieds. Je ne parlerai pas d'une tête de fémur , qui reflemble parfaitement à celle d'un homme, mais qui eft un PRE grofle. Je n'ai que la tête feule , & j'ignore fi elle a été trouvée ainfi ifolée, ou bien avec l'os auquel elle a appartenu. Mais je pofsède encore une dent, très-différente de celles que M. de La- manon a décrites, Elle eft encore adhérente à la pierre (voyez fig. ç ); elle paroît plutôt une défenfe qu'une dent. Je vais la décrire: elle a environ 15 lignes de longueur fur 4 de largeur à la bafe ; fa pointe eft moule, & elle eft courbe dans fa longueur , ainfi qu’elle eft repréfentée ; fon ex- trémité a eft couverte de fon émail, qui eft brunâtre , & qui a environ un huitième de ligne d'épaifleur. La portion b qui fuit eft d’un gris blanc, & a perdu fon émail, & on voit des lignes circulaires blanches qui deflinent cette fuperfcie, La portion c eft dépouillée de la couche b; elle eft d’un gris brunâtre: 4 eft l'ouverture d’une cavité ovale dans le centre de la dent, qui en occupe prefque toute la longueur; & e eft une portion an- téricure de l’intérieur de la dent. La cavité ovale paroît indiquer que cette dent eft une dent de lait ou d’un jeune fujer. On voit, par les différentes couches, qu’elle eft exfoliée longi- tudinalement , & qu'elle montre trois couches différentes, Le deffous de la pierre contient une portion plate d’un os qui paroît avoir été de la mà- choire, Je laiffe aux Zoologiftes à décider à quels animaux ont pu apparte- nir ces dépouilles. Les deux vertèbres, manquant du trou longitudinal qui donne paflage à la moëlle alongée, me PRE avoir été plutôt les os de la queue que des vertèbres. L'os de la figure 2 paroît avoir fait por- tion d'une patte. La partie inférieure de la dent manque. Comme certe dent eft plus ovale que ronde, elle pourroit avoir appartenu à un qua: drupède pluôt qu'à un poiffon , à moins que l’on n’y trouve quelque ana- logie avec celles des jeunes cachalots. Je fuis, &c. Paris , Mai 1782. Aa Tome XX , Part. II, 1782. AOUST. N 2 100 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, MÉMOIRE Sur les couleurs des Végétaux ; par M. ACHARD. PARVE UT EUR ESP EN IRC TA Les Phyfciens font encore très-peu d'accord fur la caufe à laquelle l'on doit attribuer la couleur des fleurs & des autres parties des végétaux; il paroît même que ce fujet n’a encore éré examiné par perfonne dans un détail fuffant. Le célèbre Hales, qui dans l'analyfe qu'il a faite des végétaux, paroît avoir eu principalement en vue de déterminer la quantité d'air qu'ils contiennent , attribue dans fa Statique des Végétaux, chap. 7, pag. 277, la couleur des leurs aux principes aëriens fubrilifés. Bécher, dans fa Phyfique fouterreine, & Stalh dans fes Elémens de Chymie, at- tribuent la couleur verte des végétaux au fer que l’on trouve, fuivane les expériences que Lémeri rapporte dans un Mémoire imprimé parmi ceux de l’Académie de Paris a l’année 1706, dans les cendres des ma- tières végétales. Henckel paroît n'être pas décidé sil doit attribuer la couleur verre dés végétaux au fer ou au cuivre. L'illuftre Pott attribue, dans fa Lithogéognofie , indiftinctement la couleur de tous les corps na- ture!s au phlogiftique. M. le Comte de Mouroux rapporte dans un Mémoire inféré dans le cinquième volume des Mifcellanea Taurinenfia , qui a pour titre Examer Phyfico -Chymique fur Les couleurs des fleurs & de quelques autres fubf- tances végétales , un aflez grand nombre d'expériences qui tendent à prou- ver que les fleurs contiennent un principe colorant particulier fixe, qui exift: encore dans les cendres, & qui communique aux vitrifications dans lefquelles on les fair entrer , la couleur de la fleur ou d’une autre partie quelconque de la plante, Cette découverte me parut mériter une attention infinie, tant parce qu'elle détruifoit entièren ent les idées que fe font formées la plupart des Phyficiens fur la caufe des couleurs des corps naturels, & en particulier des végétaux, que parce qu'elle fembloit prouver que les couleurs-ne font pas une fuite de l’arrangement des parties ; mais qu’elles font dues à l'exiftence d’un principe colorant particulier qui , indépendamment du tiflu des corps avec lefquels il eft uni, produit toujours la même cou- leur. Enfin. les expériences du Comte de Mouroux faifoient entrevoir la poffbilité de foumettre le principe colorant à l’analyfe chymique, ce qui n’auroit pu manquer de donner lieu à de très-importantes découvertes, Dès que je trouvai dans un Journal l'annonce de ce Mémoire, je me SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 0x propofai de me convaincre du fait, en répétant du moins une partie des expériences, Dans la première partie de ce Mémoire , dont j'aurai l’honneur de faire aujourd’hui la leéture à l'Académie , je rapporterai les réfultats de mes expériences, & ferai voir qu'ils font entièrement oppofés à ceux qu’a obtenus le Comte de Mouroux. Dans la feconde partie, dont je re- mets la leure à un autre temps, je tâcherai de prouver que les cou- leurs des fleurs & des végétaux en général, ne proviennent que de la combinaifon de toutes leurs parties compofantes & de leur degré de fer- mentation , qui, fuivant qu'il eft différent , doit néceflairement produire une différence dans l’arrangement des parties végétales; ce qui me conduira à expliquer la caufe des changemens que produit l'abfence ou la préfence de la lumière dans la couleur des végétaux & de pluleurs autres corps naturels. # ’ . Je pafle au détail de mes expériences. La plus petite quantité de terre métallique fufifant pour celorer très- fenfiblement le verre, il étoit néceffaire de prendre beaucoup de précau- tions afin que pendant l'incinération de la plante, il ne fe mélât rien avec la cendre qui püt donner de la couleur au verre, Les creulets ordi- naires & les autres vaifleaux d'argile qu'on emploie dans la Chymie, étant faits d’une argile plus ou moins ferrugineufe, je fus obligé de brüler les matières végétales fur lefquelles je voulois faire des expériences, dans des vales de porcelaine que j'enduifis extérieurement d'argile, afin de les préferver f l'impreffion trop fubite du feu , qui n’auroit pas manqué de les faire éclater. Par la même raifon je ne fis pas Les vitriäcations dans des creufets ordinaires, mais dans des creufets de porcelaine; car puil- qu'il s'agifloit de juger des couleurs , il étoit néceflaire que le vale re püt pas les altérer. M. le Comte de Mouroux ne fait pas mention de la nature des creufets qu’il a employés, ce qui cependant auroit été né- c-flaire; la nature de l'argile ayant dû beaucoup influer fur la couleur des vitrifications. Qu'il me foit permis de remarquer ici en paflant, qu'en général l'on ne fait pas aflez d'attention, en Chymie, à la diffolubiliré des vaiffeaux par les fubftances qu'on y travaille, & qu'on attribue fou- vent à une opération à laquelle on foumet un corps, un effet qui n'eft dû qu’à fa combinaifon avec une partie des vaifleaux qui ont fervi à le contenir, C'eft à ce défaut d’exactitude qu'on doit attribuer le prétendu changement de l'eau en terre par l'agitation & par des diftillations téitérées dans des vaifleaux de- verre , de même que l'augmentation du poids ds corps qu’on fait fondre dans des ereufets, & qui ne provient que de la diflolubilité du creufet dans la matière qu'on y a fair fondre. Le Comte de Mouroux dit avoir obfervé que la couleur de Ja fumée qui s'élève des végétaux lorfqu’on les brüle, & en particulier des Reurs, eft crès-femblable à celle de la fleur; mais quoique j'aie porté à J'ob- 102 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fervation de ce phénomène toute l'attention poflible, je n’ai pu remar- quer aucune différence dans la couleur de la fumée qui s’élevoit de fleurs très différemment colorées. Je commençai par vitrifier les cendres des fleurs de pavot ( Papaver Rhæan. Linn. ); ces cendres avoient une couleur gris foncé, & étoient très- chargées de {el alkali. Deux drachmes d’un verre très-blanc pulvérifé dans un mortier de por- celaine, mêlées avec vingt grains de cendre de fleurs de pavot, fe changèrent au bout de deux heures dans un fourneau à vent, en un verre bien tranf- parent, qui n'avoit pas la moindre couleur. Deux ape de verre blanc mêlées avec une drachme de borax cal- ciné pour faciliter la fufion, & avec vingt grains de cendre de fleurs de pavot, fe fondirent en un verre tranfparent d'une couleur de topaze très-foncée. ‘ Les cendres des leurs de pavot mêlées à parties égales avec du borax calciné, formèrent une mafle demi-tranfparente d'un blanc fale. Les mêmes cendres mêlées à parties égales avec du nitre, formèrent un verre bien tranfparent, d'un gris tirant un peu fur le rouge, Les cendres des Aeurs de la Poronia officinalis de_Linné, qui font d’une très-belle couleur rouge, avoient une couleur grife tirant un peu fur le jaune, & ne contenoient que très-peu d’alkali fixe. Vingt grains de ces cendres, mêlés avec deux drachmes de verre blanc pulvérifé & une drachme de borax, fe changèrent par la fufion en un verre parfait cou- leur de topaze foncée, Les Lo du bois de Fernambuc ne contiennent prefque point d’al- kali, & ont une couleur grife tirant fur le rouge de brique. Cette cendre mêlée dans la proportion fufdite avec du verre & du borax, fe changea en un verre couleur de topaze, avec des taches très-foncées d’un jaune ti- rant fur le rouge: au bord qui touchoit le creufet, ce verre éroit dans quelques endroits d’un gris jaune, & dans d’autres d'un gris tirant fur le rouge clair. Les cendres des racines de l’Anchufa tinéloria de Linné, qui eft, comme l'on fait, d'un très-beau rouge, étoient d’un gris clair, & ne conte- noient pas fenfiblemenr d’alkali: elles fe fondirent, étant mêlées dans les mêmes proportions de l'expérience précédente , avec du verre blanc & du borax calciné, en un verre tranfparent tirant un peu fur Le ver- dâtre. à Je pafle au récit des expériences faites avec des cendres de fleurs bleues. + Les cendres des fleurs de la plante nommée par Linné Centaurea cyæ- us, qui font d'un très-beau bleu , contenoient une quantité fort confi- dérable d’alkali fixe, & avoient une couleur grife tirant fur le rouge de brique. Vingt grains de ces cendres, mêlés avec deux drachmes de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 103 verre blanc pulvérifé, fe changèrent par un feu très- fort en un verre bien tranfparent, qui n’avoit pas La moindre couleur. Un mêlange de ces cendres & de verre, fait dans les mêmes propertions, auquel j'ajoutai encore une drachme de borax, fe changea par un feu moins fort en un verre couleur de topaze, qui avoit des taches plus ou moins foncées de la même couleur. Un mêlange de ces cendres & de borax, fait à parties égales & fans addition de verre, fe changea en une mafle demi-tranfparente, d’un blanc fale tirant fur le gris jaunatre. Les cendres de la même fleur mêlées à parties égales avec du nitre, fe changèrent par la fufion en un verre blanc qui n’avoit pas la moindre couleur. Vingt grains de cendres de fleurs de violette ( Viola odorata Linnæi), qui contenoient beaucoup d’alkali fixe, & dont la couleur étoit prefque entièrement blanche , étant mêlés avec deux drachmes de verre blanc & une drachme de borax calciné, fe changèrent par la fufion en un verre bien tranfparent couleur de topaze claire. Les expériences fuivantes ont été faites avec des fubftances végétales colorées en jaune. Les cendres de la Calendula officinalis de Linné, étoient d’un gris foncé & très-fenfiblement alkalines. Un mélange de vingt grains de ces cendres avec deux drachmes de verre blanc pulvérifé, fe changèrent par un feu très-fort en un verre tranfparent très-blanc, & qui n'avoit pas la moin- dre couleur. Un mélange de ces cendres avec du verre dans les mêmes propor- tions, avec addition d’une drachme de borax calciné, fe changea en un verre dont la partie du milieu avoit une couleur jaune de topaze; mais qui, dans les endroits où il touchoit les bords du creufer, avoit une belle couleur de rofe. Une drachme de ces cendres mêlée avec autant de borax calciné, fe fondic en une mafle demi-tranfparente d'un blanc fale. Un mélange de ces cendres & de nitre, fait à parties égales, entra en fuñon, & fe changea en une mafle demi-tranfparente, d’un blanc fale tirant fur le jaune. Les cendres du quinquina étoient d’un gris clair, & ne contenoient pas fenfiblement d’alkali. Un mélange de vingt grains de ces cendres avec deux drachmes de verre & une drachme de borax calciné, forma par la fufon un verre jaunâtre. Les cendres de la racine de la Curcuma longa de Linné, qui, comme l'on fait, contient une quantité très-grande de parties colorantes, étoient prefque entièrement compofées d’alkali fixe, Vingt grains de ces cendres mêlés avec deux drachmes de verre & une drachme de borax calciné, 104 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fe fondirent en un verre tranfparent, d’une très -belle couleur de topaze fort foncée & tirant un peu fur le rouge du rubis. Les cendres de l'écorce brune des châtaignes fauvages étoient d'une couleur grife : elles contenoient une quantité fenfible, mais peu confidé- rable, d’alkali fixe: mêlées dans les proportions fufdites, avec du verre blanc pulvérifé & du borax calciné, ces cendres fe changèrent par la fufion en un verre couleur de topaze foncée. Il paroît, par toutés ces expériences, qu'aucune des couleurs des fubf tances végétales ci-deflus mentionnées ne s’eft communiquée au verre ; foic que les cendres aient été mêlées avec du verre fans addition de fel propre à faciliter la fufñon, ou enfin, que ces cendres aient été vitrifiées fimplement par le borax & le nitre, Le Comte de Mouroux difant avoir trouvé que les différentes parties des plantes étoient plus ou moins propres à communiquer leur couleur au verre, j'ai choifi à deffein, pour mes expériences de fleurs, des racines & des écorces: mais il eft évident que dans aucun cas il ne s’eft trouvé la moindre analogie entre la couleur de la fubftance végétale avant l'in- cinération, & celle du verre dans la compofition duquel entroit fa cendre. Le Comte de Mouroux s'efforce de prouver par plufieurs expériences, que ce qu'il nomme la matière fixe colorante des végétaux eft adhé- rent aux parties falines, en forte que l'extrait aqueux + Végétaux co- lore le pius , parce qu'il contient le principe colorant plus concentré & féparé des parties terreufes qui reftent après l'extraction & qui ne pro- duifent aucune couleur. Mais dans ce cas, les cendres des fleurs de pavot & de la racine de curcuma, qui font prefque entièrement com- pofées de fels, auroient certainement dû colorer le verre; ce qui cepen- dant n’eft pas arrivé. La couleur jaune de prefque tous les verres compofés de cendre, de borax & de verre blanc pulvérifé , provient, à ce que je crois, des par- ties martiales contenues dans ces cendres, que le borax a diffoutes; car on fait qu'une quantité prefque imperceptible de terre ferrugineufe, qu’on fait fondre avec du borax , lui donne toujours une couleur de copaze plus ou moins foncée, ë Je ne vois qu'une feule raifon à laquelle l'on pourroit attribuer le peu de réuffite de mes expériences, & la différence entre leurs réfultats & ceux qu'a obtenus M. Le Comte de Mouroux; ce feroit d’avoir manqué dans le degré ou dans la durée du feu : je remarque , pour répondre à cette objection, qu'on ne peut que me reprocher le trop; car tous mes mélanges étant très-bien vitrifiés, il eft prouvé que la chaleur a été aflez forte & d'aflez de durée: pour ce qui regarde le défaut de réuñite pro- venant d’une chaleur trop forte ou continuée pendant trop long-temps, qui auroit pu volatilifer les parties colorantes, je remarquerai qu'il eft pollible de donner au même mélange, en l'expofant à des degrés de feu différens SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. ÿos différens & de différentes durées, fucceflivement prefque routes les cou- leurs; ce qui provient de l’état plus ou moins parfait de diflolution réci- proque des parties compofantes du mélange, qui eft trés-différent, fui- vant le desré & la continuité du feu auquel il a été expofé, Gr, cer érae de diffolution influant beaucoup fur l’arrangement des parties du com- polé , & les couleurs dépendant de cet arrangement, il eft clair qu'on pourra donner au même mélange des couleurs très - diffé- rentes ; mais l'on ne pourra pas dire que la couleur jee aura ac- quife par une chaleur d'une intenfité & d’une durée données, foit l'effet d’un principe colorant, puifqu’elle n’eft produite que par les cir- conftances. Je ne doute pas par cette raifon qu'il ne foit poflible de donner à un verre la couleur d’une matière végétale, en y faifantentrer {a cendre: nrai£ je crois, & il eft aifé d'appuyer ce fentiment par des expériences que la même cendre donnera dans la même vitrification une couleur très- différente en changeant la force ou la durée du feu; d'où il fuit claire- ment que les couleurs que donnent les cendres des végétaux aux vitris fications dans lefquelles on les fait entrèr, ne font poinr effenrielles :&c ne réfultent pas di la nature de ces cendres, ou du végétal par lin- cinération duquel elles ont été produites, mais qu'elles font indépen- dantes de la couleur du végétal & dues fimplement aux circonftances dans lefquelles la vitrification a été faite. Je finis la première partie de ce Mémoire par le récit d’une expé- tience qui prouve très bien ce que je viens d'avancer. Ayant befoin, pour une certaine opération de Chymie, d'un verre blanc très-fufible , je mêlai deux drachmes d'un verre très-blanc pulvé- rifé, avec une égale quantité de nitre très-pur, efpérant que par la fu- fion de ce mélange j'obtiendrois un verre blanc; l'ayant expofé pendane deux heures à une chaleur très-forte dans un fourneau à vent, j'obtins un verre coloré en jaune. Un mélange, femblable à tous égards, fe changea, fous une moufile rougie dans l'efpace d’une heure , en une mafle demi-vitrifiée, d’une rrès- belle couleur bleue tirant fur le violet; & dans l'efpace d’une heure, dans un fourneau à vent, en un verre bien tranfparent qui, aux en- droits où il touchoit le creufet, & où par conféquent la chaleur avoit été plus forte, avoit une couleur jaune approchante de celle des topazes de Saxe; tandis que dans la partie du milieu il avoit une couleur bleue très-belle. Cette expérience prouve évidemment que le même mélange prend, par la vitrification, des couleurs très-différentes , qui font indépendantes de la nature de fes parties compofantes, & qui par conféquent ne font pas effentielles à ce mélange, & dépendent Énplément de l'intenfité & Tome XX, Part. II, 1782. AOUST. O 106 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la durée du feu, qui fuivant qu'il eft plus où moins fort & de plus ou moins de durée, produit un arrangement différent dans les parties du verre, fans cependant le faire changer par-là de nature; ce qui arri- veroit infailliblement , fi ce changement de couleur provenoit de la vo- latilifation de quelque principe colorant. EL S'SFANT Sur la converfion de tous les acides en un feul ; adreffé à ‘M. le Profeffeur Moscarr, par M. le Chevalier LANDRIANI (1) : traduis de lIra< Len par Madame P*Y**, Ur des problèmes dont on a jufqu’à préfent inutilement tenté la fo= lution, eft la converfion de tous les acides en un feul , qui , s'il eûr été trouvé, feroit confidéré comme l'acide élémentaire & primitif. Vous favez mieux que moi combien peu les expériences publiées jufqu'à ce jour con- courent à établir l'opinion du célèbre Stalh, qui regardoit l'acide vitrio- lique comme l’acide élémentaire, & les autres acides comme des modi- fications de celui-ci. Les idé:s de M. Sage fur l'acide phofphorique fonc très-éloignées de ce degré d'évidence que l'on delire dans la fcience des faits. Je ne fais fi les expériences que j'ai faites pour trouver la folution de ce grand problème feront d'une plus grande valeur, je vous les adrefle, comme à quelqu'un qui eft juge très-compétent pour les appré- cier. L'acide univerfel élémentaire primitif, dans lequel tous les acides connus peuvent fe réfoudre & fe convertir, eft, fuivant moi, l'acide méphitique (2) , c'eft-à-dire, celui qui, combiné avec la chaux, la dul- cifie & la neutralife ; qui uni à l'eau, la rend acidule & piqua’te; celui enfin que M. Black appelle air fixe ; M. Macquer, gas mephitique; M. Bergmann , acide atmofpherique, & d’autres de divers noms. Voici Les ex- péiences qui conduifent directement à établir que l'air fixe eff l'acide élé- mentaire. (1) Opufeoli Fifico-Chymici. Milan, 1781, Page 59. (2) L'original porte : çido Hzojeuco, 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 107 Que l’on prenne une certaine quantité d'acide vitriolique, qu'on la mêle à une portion donnée d’efprit-de-vin rectifié, comme fi on vouloir faire de l'éther vitriolique. Si on recueille les produits aëriformes dans l'appareil pneumatique ordinaire, on obtiendra une quantité confidérable d'air fixe, entiérement femblable à celui qui fe dégage de la pierre cal- caire , des alkalis, des fubftances fermentantes, &c. Que l’on répète la même expérience ; mais au lieu d'acide vitriolique , que l’on emploie de l'acide muriatique ou de l'acide nitreux avec les précautions ordinaires, & dans des proportions convenables , pour éviter les explofions & autres accidens funeftes, comme s'il étoit queftion de faire de l’éther nitreux ou de l'éther muriatique , on aura conftamment dans la diftillation une quan- tité remarquable d’air fixe. J'ai tenté la même expérience avec l'acide arfenical (1), l'acide phof: phorique, le vinaigre radical; elle a eu le même fuccès, “c’eft-ä-dire, qu'il en eft conftamment réfulté une production confidérable d’air fixe parfaitement femblable , dans fes effais & dans fes phénomènes , à l'air fixe obtenu par les procédés connus du Docteur Prieftley. IL ne m'a pas été poflible , jufqu’à préfent , de répéter cette expérience avec l'acide fuo- rique , l'acide faccharin & l'acide tartareux ; mais je prévois' que dans la formation des divers éthers qui en réfultent , il s’engéndrera toujours de l'air fixe en quantité. Puifque le fucre feul, en fe décompofant- au feu, fournit , outre beaucoup d'air phlogiftiqué & inflammable , une portion confidérable d'air fixe , ce dernier fe dégage par ‘de l'acide préparé à la manière du célèbre Bergmann (2). A l'égard de l'acide tartareux (3), il weft pas befoin de le combiner avec l’efprit-de-vin ; les expériences de M. Bertholer ont prouvé que la crême de tartre fournifloit une prodigieufe quantité d'air fixe , & je ne doute pas que l'acide tartareux pur ne donnät les mêmes produits. (x) Cet acide a été récemment . découvert par un célebre. Chymifte; Suédois, M Scheele : on le retire facilement de larfenic, en dittillant fur Parfenic crÿftallin de Fa- cide nitreux, qui, en abforbant le phlogiltique , met à découvert l'acide arfenical. M. Fabroni a publié, dans le fecond volume des Opufcoli feeki.dée Milan, une très-bonne ARE pour obtenir facilement cer acide de l’arfenic cryftallin. On trouve dans le même volume la belle Differtation de M. Bergmann fur l’arfenic , dans laquelle il a rapporté tout ce que l'on fait de cette fingulière produétion de la Na- ture, (2) Ontrouve des détails fufifans fur la manière de cre dans le vol, cité des Opufcoli fcelri, &c. . (3) Cer acide a été découvert par le célèbre Bergmann , qi ,a publié le procédé pour l'obtenir. On trouve dans le Journal de Phyfique de M. Rozier yne Differtation où il eft indiqué, Tome XX, Part. II, 1782. AOUST, HAVE 04 préparer ce nouvel acide, du fu- 108 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Que l’on prenne un tuyau de verre ouvert des deux bouts; que l'on ajoute à l’une de fes extrémités , avec de la cire d'Efpagne ou autre ma- tière folide, un gros fil de fer, dont une partie entre dans la cavité cy- lindrique , dont il refte en dehors une partie furmontée d’une boule de métal. Si on remplit le tuyau de mercure, qu'on y introduife une certaine portion d'air déphlogiftiqué , retiré du précipité rouge en une petite co- lonne d’eau de chaux (1), & que l’on décharge plufeurs fois de fuite une roffe bouteille de Leyde au travers de cette couche d'air, jufqu'a ce qu'elle foit fenfiblement diminuée, on obfervera que l'eau de chaux aura blanchi, & qu'elle aura dépofé une quantité fenfible de poufière blanche à la furface de mercure. Si, au lieu d'eau de chaux , on eût introduit dans le tube une couche de teinture de tournefol , elle fe feroit rougie par la pré- cipitation de l’air fixe que l'air déphlogiftiqué a dépofé pendant la défa- gration électrique. À l'air déphlogiftiqué tiré du précipité rouge, que l'on fubftitue l'air déphlogiftiqué tiré du turbith minéral bien lavé, pour le dépouiller de tout acide furabondant ; & par des décharges réitérées de la bouteille de Leyde, cetairfe phlogiftiquera, & il fe formera de mème de l'air fixe (2). Cette production d'air fixe a également lieu Iorfqu'on emploie l’air dé- phlogiftiqué tiré du précipité couleur de brique obtenu de la diffolution de fublimé corroff décompofé par l’'alkali cauftique , ou de L'air déphlogifti- qué dégagé des fleurs de zinc faturées d’acide arfenical, ou de fel acéteux mercuriel, lavé en grande eau , pour le dépouiller de tout l'acide non intimément combiné, &c. Enfin , tout air déphlogiftiqué , fait avec un acide quelconque , eft en partie convertible en air fixe par le moyen de l’é- le@rifation , ou , pour mieux dire, en ÿ faifant pafler l’étincelle élec- trique, ï .— -— (r) Tous ceux qui ont voulu répéter l’expérience du Dofteur Prieftley, pour élec- trifer une couche d’air, ont toujours trouvé beaucoup de difficulté dans le procédé qu'il indique pour introduire dans le tuyau l'air atmofphérique à éleétrifer, ainfi que la teinture de tournefol ou l’eau de chaux. Pour éviter cet embarras , on wa qu'à prendre le tuyau que j'ai déctir favec Ja boule métallique, &c., & la remplit de mercure : on bouche enfuite l’ouverture avec le doigr; 6 en traverfant lé tube, on y introduit la me- fare d’af que l’on veut éle&trifér Quand Pair à été éleétrié, on bouche de nouveau l'orifice du tuyau avec le doigt : on 1: tanfporte ainfi bouché, & on plonge l’extré- mité dans leau de chaux , ôu dans la teinture de tournefol; alors en retirant un peu le :dojer , ©& laiffant couler un peu de mercure , Peau de chaux ou la rein ture monte dans le tuyau à la place du mercure, en telle quantité que l'on juge con- venable, : | 25 . (2) M. de Morveaua indiqué cene expérience comme une des plus importantes pour sêfoudre La grande gueffion dé li produtfion de l'ainfixe par compofitioh où par dé- éompôfition. Voye? l'édition Françoife des Opefentes de Me Bergmanh, tom. x, pas 64. Note du Traducteur. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 109 Que l'on rempliffe un récipient du meilleur air déphlogiftiqué, & que l'on y introduife du phofphore d'urine , du pyrophore ou un mélange de foufre & de limaille de fer, cet air fe phlogiftiquera bientôt ; & fi l’on fait pafler dans le récipient de l'eau de chaux & de la teinture de tournefol , l'une blanchira , l'autre rougira fur le champ par-l’air fixe précipité de l'air déphlogiftiqué. Le célèbre M. Lavoifer a publié, dans le cinquième volume du Jour- nal de Phyfique , une expérience pour prouver que l'air déphlosiftiqué peut fe changer en air fixe par l'addition du phlooiftique, Ayant mélé une once de précipité per fe avec quatre grains de charbon, il a obfervé que l'air obtenu de ce mélange avoit toutes les propriérés de l'air fixe, c’eft-à-dire , qu'il précipitoit la chaux vive difloute dans l'eau en terre calcaire , qu'il rougifloit la teinture de tournefol , q'il neutralifoir les diffolutions alkalines; enfin , qu'il préfentoit abfolument tous les phéno- mènes de l'air fixe, d’où cet habile Phyficien conclut que l'air déphlogif tiqué eft convertible en air fixe routes les fois qu'il eft faifi par le phlogifti- que au moment de fa formation. Vous aurez le même réfultat , en mêlant du charbon avec le turbith minéral, & vous croirez également que l'air déphlogiftiqué s’eft changé en air fixe, en fe combinant avec le phlogiftique, Mais le Docteur Prieftley , dans le quatrième volume de fes belles ex- périences & obfervations , perfifte à croire que l'opinion du Phyficien Fran- gois n’eft pas fondée (1), parce qu'ayant mélé une drachme de précipité per fe avec un demi-denier de charbon , il a trouvé, en recevant fuccelli- vement les produits aëriformes , que le premier produit contenoit trois parties d'air fixe & une partie d'air inflammable; que le fecond étoit de Pair refpirable, & le troifième de l'air phlogiftiqué. Si ces divers produits éuflent été reçus enfemble , ils n’auroient pas manqué , fuivant le Docteur Prieftley , d'offrir les mêmes apparences que M. Lavoifier a décrites, & qui l'ont porté à conclure que l'air déphlogif- tiqué s’éroit changé en air fixe, parce que M. Prieftley ne regarde pas les trois parties d'air fixe du premier produit comme provenant de l'air dé- phlooiftiqué changé en air fixe, rnais bien comme proverant du charbon mêlé au précipité , étant bien connu que Le charbon ,expofé au feu, donne beaucoup d’air fixe & d’air inflammable, ; Pour décider fi tout l'air fixe obtenu parce procédé vient effectivement du charbon mêlé au précipité per fe, ou s’il eft produit par le phlosiftique , qui, en s’uniflant à l'air déphlogiftiqué , dans le moment de fa formation , QE PUS RE CEE ER DEP UC S VOININ RG CRE EE 212 UE EE ER CRUE EN LR RR (1) On peur voir à ce fujet le tôme II des nouvelles expériences & OBJervarions, es de M. Pricftley , craduires par M. Gibelin, pag, 273. 110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le change en air fixe, il faut déterminer la quantité précife qui fe dégage d'une quantité donnée de charbon expolé feul, & examiner enfuite fi la quantité d’air fixe obtenu du mêlange du charbon avec le précipité per fe, eft plus ou moins grande que celle que fournit le charbon feul , parce que fi elle eft plus grande, on ne peut s'empêcher de conclure qu'une portion d’air déphlooiftiqué s’eft changée en air fixe , conformément à l'opinion de M.'Lavoifier. Pour cet objet, j'ai mis dans l'appareil pneumatique une dofe donnée ds charbon pulvérifé ; j’en ai chaflé cout l'air par l'action d’un feu vio- lent, & je l'ai reçu dans un vafe cylindrique, rempli de mercure très-fec. Quand le charbon ne donna plus d'air, j'introduifis dans le vafe cylindri- ue de l'eau & un peu de chaux vive, pour faciliter l’abforption de l'air pa (x). Cette abforption fut d'environ 3 lignes & demie au bout de vingt-quatre heures. Après cela , j'ai mêlé une pareille dofe du même char- bon à une quantité convenable de turbith minéral; & ayant reçu les pro- duits aëriformes dans le même vaifleau cylindrique, j'ai trouvé que la quantité de fluide élaftique , ERRUe d’être abforbé par l'eau, étoit de 1 pouce 10 lignes, c’eft-à-dire, d'environ 1 pouce & 9 lignes de plus que celui qu'avoit fourni une pareille dofe de charbon feul. Il eft donc prouvé qu'une portion d'air déphlogiftiqué , faifie par le phlogiftique dans le moment de fa formation , s’eft convertie en véritable air fixe. Pour naflurer que tous les acides qui fourniffent de l'air déphlogiftiqué font convertibles en air fixe, quand on leur fournit du phlogiftique au moment qu'ils font près de lâcher l’air déphlogiftiqué , j'ai repris la même expérience avec l'air déphlogiftiqué tiré du turbith minéral , du précipité , du fublimé corrofif par l’alkali cauftique , du fel ammoniacal de zinc, &c., & j'ai toujours obtenu beaucoup d'air fixe, (x) L'air fixe eft bien abforbé par l’eau, mais très-lentement, quand on ne lagite pas ; de plus, lorfqu’il s’agit d’une quantité d’air fixe un peu confidérable, il faut auf une uès- grande quantité d’eau. Pour favorifer l’abforption, fans recourir à l’agiration de l’eau, j'introduis dans le -vaifleau où j'ai reçu le produit aëriforme , d’abord une couche d’eau , enfuite un peu de chaux vive ou .d’alkali cauftique, parce qu’alors l’eau diffolvant ces deux fubftances cauftiques, abforbe promptement l'air fixe. Quelqu'un pourroit croire que l’alkali feul, ou la chaux vive , introduite dans le récipient fans eau , abforberoit également l’air fixe , mais il fe tromperoit ; & je me fuis afluré, par des expériences multipliées, que ni l’alkali cauflique, réduit à ficcité, ni la chaux vive bien sèche n’abforbent l'air fixe, lors même qu'ils en font environnés de toute part, quoiqu’ils aient une très-grande affinité avec lui. En ajoutant à ces fubftances un peu d’eau, l’air fixe eft promptement abforbé avec beaucoup d’avidité, ce qui prouve ue ont befoin du véhicule aqueux pour abforber cet 4cide méphitique. M. Faujas de Saint-Fond , dans {on Traité de la Pouzzolane, & M. Higoius, dans fon Traité de la Chaux, ont toujours fuppofé la néceflité de cet intermède pour l’ab- forprion de l’air fixe, SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 111 Mais fans recourir à ces expériences décifives , n’eft-il pas furprenant ue le célèbre Prieftley ait refufé d'admettre les expériences & la conclu- ion de M. Lavoiñer, tandis qu’il fait remarquer lui-même, dans plu- fieurs endroits de fes excellentes Obfervations fur les différentes efpèces d'air, que lors du dégagement de l'air déphlosiftiqué , il y a toujours une certaine portion d'air fixe; de forte qu'on eft obligé de l’agiter dans l'eau , fi on veut l'avoir toujours pur? Cet air fixe, qui s'engendre conf tamment dans la production de l'air déphlogiftiqué, ne vient que de quel- que portion de phlogiftique très-adhérente aux fubftances qui fourniffent l'air déphlogiftiqué, & qui, fe combinant avec lui, le convertit en air fixe. ‘D'autre part, M. Prieftley a plus d'une fois averti que, foit par l'électricité, foit dans la combuftion, l'air atmofphérique dépofe une quantité confidérable d'air fixe, qui auparavant n'y étoit pas fen- fible. On peut donc regarder comme hors de doute, 1°. que l'air déphlogif- tiqué fe convertit en air fixe au moment qu'il eft dégagé des corps capa- bles de le produire , s’il vient à étre furpris par le phlogiftique dans l’a@te de fa formation; 2°, que comme il réfulte des expériences que nous avons fai+ tes enfemble, que les acides nitreux, muriatique , vitriolique, phofphorique & arfenical , unis à une certaine portion de terre, peuvent être changés en air déphlogiftiqué, on peut aufli facilement changer celui-ci en air fixe ou acide méphirique : d’ailleurs l'acide du fucre , celui de la crème de tartre , celui des fourmis , celui du vinaigre, &c fe changent aifément en air fixe par le moyen de la chaleur; d’où il me femble que l’on peut re- garder comme fuffilamment démontré que tous les acides font converti- bles en air fixe; & cet air, comme l’a très-bien remarqué M. Bewiy, dans la lettre où il démontre mon erreur & celle du célèbre Abbé Fontana fur l’origine & la nature de l'acide de l’air fixe (1), eft probablement l’a- cide univerfel, précifément parce qu'il eft le plus commun , le plus abondamment répandu dans les diverfes produétions de la: Na- ture (2). . Avant que d'abandonner ce fujet , je ne, puis me difpenfer d'examiner ——- (1) Troïfième Lertr: de M. Bewly à M: Prieftley, contenant des expériences {us VPacile méphitque. (2 L’Autcur afmefrane que Pair pur peut devenir fixe par la combinaifon du phlo- gillique dans le moment qu’il eft dégagé , ül ne paroitpas fondé à regarder plurôt l'air fixe que l'air pur comme scide univerlel. On péur remarquer auffe que l'expreffion d’a- cide uriver{el r'elt pas exutle ; car l'air , quel qu'il foir, ne conflitue pas feul lacide; mais, comme le dit très bien M. Lavoiffer , Le préncipe origine. Voyez Les Elémens de Chymie de L Académie de Dijon, rom 1, pag 325 , tome Il, pag: 21, & Les Mém, de L'écad, Royule des Sciences, année 1778, pag. 535. Note du Traducteur, 112 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un point de Phyfiologie qui ne l'a pas encore été convenablement, & qui mérite de l'être par fon importance. Dans mes recherches phyfiques fur la falubrité de l'air, j'ai obfervé que * Pair qui avoit paflé par les poumons troubloit l’eau de-chaux, rougifloit la teinture de tournelol , &c. ; enfin, qu'il préfentoit tous les phénomènes connus de l'air fixe: & j'en ai conclu que cet air Axe étoit produit dans la refpiration par Le phlogiftique que fournifloient les poumons , qui s’unif- {oit à l'air atmofphérique , & le changeoïit en air fixe de la même ma- nière que l'air atmofphérique étoit changé en air fixe par tout autre pro- cédé phlogiftiquant, Cependant M. l'Abbé Fontana penfe (du moins cela eft-il annoncé par M. Ingen-Houze, dans fes Expériences & Obfervations fur les végétaux) que cer air fixe dont fe trouve chargé l'air qui a paflé par les poumons, ne vient pas du phlogiftique qu'ils fourniflent, & qui, en s’uniflant à l’air RTE ; le change en air fixe: il paroît plutôt porté à croire qu'il s’engendre dans notre corps une grande quantité d'air fixe, laquelle s'échappe par les pourhons dans la refpiration, L'opinion d'un auf célèbre Phyfcien eft pour moi d’un trop grand poids, pour ne pas me faire douter de la mienne fur l’origine de l'air fixe pulmonaire : mais avant que d'adopter fon fyftême , je defirerois qu'il voulut faire réflexion qu'il nya pas dans les fluides anitnaux, & fur-tout dans le fang, une aufli grande quantité de cet acide méphitique, de celle qu'il fuppofe s’exhaler des poumons ; d’ailleurs on ne comprend pas comment cet ait fixe pourroit être dépofé par Les poumons dans l'air atmofphérique , parce ue quand même il exifteroit dans le fang , il paroîtroit toujours étonnant qu'il pût l’abandonner pour sunir à l'air atmofpbérique, avec lequel il a très-peu d'affinité. Enfin , comme toutes les fois que l'acide atmofphé- rique fe phlogiftique, il s'engendre toujours beaucoup d'air fixe , il femble que cet air fixe pulmonaire doit être attribué à la phlogiftication de la ref- piration plus qu’à toute autre caufe , d’autant plus que le volume d’air ref piré devroit être augmenté par l'addition de l'air fixe, que l’on fuppofe continuellement fourni par les poumons, au lieu qu'il fe trouve di- minué. M. l'Abbé Fontana ne manquera pas de répondre d’une manière folide & fatisfaifante à ces obfervations, & j'attendrai de lui-même les éclaircif- femens néceffaires fur ce point important de Phyfologie, à DES SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, ri DES INONDATIONS VOLCANIQUES, Par M. DucaARLA. M. L'AGBBk NOLLET, fur la foi d'un Manufcrit dont il étoit dépo- fitaire , dit: Que Les volcans ouverts en 1730 aux Canaries, fournirent une inondation, quoiqu'il n’y eût point de neige [ur les montagnes | € qu'il ne füt point tombé de pluie auparavant. I] ajoute : Que les éruptions du Véfuve font ordinairement accompagnées de fortes pluies (x), Ce font encore des inon- dations , fuivant l'Académie de Naples (2). Le P. della Torre attribue aux pluies qui fe réuniffent dans le vallon & dans l'intérieur du Véfuve , ces torrens IMPRÉVUS, qui, en certaines an- nées , depuis 1631 SUR-TOUT, ont coulé en abondance de L’Atrio, ou, comme le veulent quelques-uns , de la cime même du Véfuve (3); grandes pluies , ajoute-t-il, qui commencèrent dès le 17 Décembre 1631, € qui, après avoir duré plufieurs jours, firent defendre des torrens d’eau ; ils em- Portèrent des maifons enterrées fous La cendre. Des torrens qu’on appelle des laves d'eau , defcendent encore du Véfuve , après de grandes pluies (4). Le Di- manche 28 Décembre, il defcendit du Vefuve un large rorrent d’eau, quoi- qu'il fit tombé peu de pluie auparavant. Quelques perfonnes crurent qu’il ven zoit de la mer par le cratère (5). Guiliani rapporte un Edit du 26 Mars 1632 (6), qui exempte de certaines corvées les terres endommagées par l'inon- dation & autres. Cette éruption de 1631 dont il s'agit, fut la plus terri- blequ'on ebtvue depuis la mort de Pline (7). Les torrens horribles d’eau bouil- lante qu’elle fournit avec les cendres, dit le P. Damato , frent périr trois mille ames dans la plaine , felon l Abbé Brancini, témoin oculaire. Le temps étoit beau, puis vint une grande pluie. Ambroife de Léon , de rebus No- lant, lib. 10, c. 1 , dit: Que La ongieme éruption du Véfuve donna des torrens d’eau bouillante (8j. La pluie tombée, commeon fait, en grande abondance pendant l'éruption de 1754 & 1755, émouffa l'épidémie mor- celle quien fur l'effet (9). Le Prince d’Arragona mandoit à M. Sloane , que ces inondations étoient régulièrement arrivées dans toutes les éruptions du V'éfuve antérieures à celle qu'il lui décrit comme témoin (10). M. de Dietrich, pour appuyer les rai- fonnemens de M. Ferber, rappelle les inondations que produifent les vol- cans allumés de l'Amérique & de l'Italie, L’Erna vomit fouvent des 1or- rens d’eau: il en fortit un nilo d'aqua en 17$1. Les volcans d'Amérique en ont fouvent fourni des exemples. Le Véfuve a fréquemment jetté des eaux, Il Tome XX, Part.Il,1782, AOUST. D En 114 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en fortit beaucoup de la bouche de Monte-Nuovo en 1538. Celles du Vé- Jüve firent autant ds dévét en 1680 qu'en 1631 (11). M. d’Arthenai décrit ce nilo d’aqua produit par l'Etna , allumé Le 3 Mars 175$ 1. Il couvrir de [able les afpérités impraticables des anciennes laves ; il en fic des plaines parfaites ; l’eau etoit fort chaude. M. d’Arthenai ajoute, pour l'inondation du Véfuve en 1689 , un trait fur lequel nous revien- drons ; c'eft qu'une pluie abondante tomba péle-mêle avec Les cendres fur Le tour feulement du Vefuve , tandis que le rejte de l'horizon étoit parfaitement Jérein : cette pluie étoit glaciale (12). È Torrent épouvantable d’eau chaude forti de l’Etna brûlant en 19755, & dont le Chevalier Hamilton vit les traces en 1769. Cet Obfervareur com- pare ce torrent a celui produit par l’éruption célèbre du Vefuveen 1631 (13). Îl ajoute que /e sorrent d’eau produit par l'éruption de la précédente annee, avoit détruit Portici, Torre-del Greco, € plufieurs autres Villes (14). Au commencement des éruptions ,continue-t-il, les volcans vomiffent fréquemment de l’eau mêlée avec des cendres. Ulloa n'a pas oublié que l'eau accompagne l'éruption des volcans en Amérique (15). Pluie abondante de cendres & beau- coup d’eau a Naples par l'éruption du 29 Septembre 1538 (16). à Voici ce que dit en fubftance M. du Chanoi , fur l’éruption du 7 Août 1779: Petite pluie mêlée de cendres. Après avoir cef[é une heure & demie, elle recommença , augment:, continua prefque route la nuit. Les cen- dres & l'eau tombées [ur Les plantes formérent une leffive dangereufe , qui fut lavée par une très-groffe pluie. L: 8, jufqu'à 12 heure du foir, il plut par intervalles. Les nuages éloignés qui portoient la pluie fe confondoïent fouvent avec la fumée , dont la malle avoit fa principale direétion vers Ottojano..…. ox la chaleur étoit fuffoquante (17). Pendant cette éruption , un de ces nua- ges d'été, que les Napolitains appellent Tropea , vint fubitement méler fès va- peurs aqueufes & pefantes aux nues minérales , qui , comme autant de mon- tagnes , s’étoient accumulées [ur le fommet du volcan. L'incendie fut enfuite écliplé par le Tropea, qui donna une terrible averfe de pluie (18). Voilà pour Les volcans d'Italie ; parcourons ceux de tous les climats. L'éruprion du Cotopaxi , dans la Cordillière , le 9 Décembre 1742, donna un courant qui remplit la belle vallée de Quito , prit 120 pieds de profondeur, 4 toifes de vireffe moyenne par feccnde , rafa $oo maifons, fit pé- rir 800 perfonnes. Le même volcan avoit produit une inondation un peu rnoindre le 24 Juin precédene (19). Dom Ulloa donne les, inondations du même volcan, du Lucanat, du Calgairafle , & autres en divers lieux (20). RECU Le volcan de Mayère dans l’Ifle de Luçon, vomit, le 23 Olobre 1766, une quantité d'eau qu'on me peut exprimer que par [es ravages (21) ; peu de pluie. | Le volcan Gounong-Api, eft une Ifle d’une lieue de circonference , dans He SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 11 le département de Banda: c'eff le plus terrible des Indes ; [ès éruptions font Jouvent accompagnées d'inondations, qui femblent devoirenglourir la plupart des Îles voifines. Cette eau traverfe le détroit qui [épare Le volcan Etneiro , où elle entraine des moles entiers), quantité de maifons, G des canons pefans 3500 (22). " Laflamme fortoit du fommet d’une montagne dans lIfle brélante 5° 4! fud & 164°27/ eff, la nuit du 20 Avril 1643. Entre ceite Ifle & la Nouvelle- Guinée, on vit des arbres flottans , 6 diverfes brouffailles que Les rivières enrrat- noient (23). Voilà une éruption bien marquée par la Aamme d’une Jfle appellée érélante , puis des arbres & des brouffailles qu'entrainoit l'inonda- tion. Dans d’autres parages, /e 7 Juiller 1616, près l'Ile du Volcan, la flamme, quoique mêlée de cendre & de fumée, dirigeoit Le vaiffeau ; la mer étoit de dif- férentes couleurs, & fe trouvoit moins falée; des arbres € des branches flot- zoient (24). Eau prefque durcie par le mélange du débordement ; eau de toutes couleurs , fuivant celle des divers terreins défolés par divers torrens; arbres enlevés, brifés; tout ce qui caractérife un grand débordement, comme Ferber l'a remarqué dans toutes les grandes éruptions; & cette éruption étoit grande , puifque la famme , enveloppée de tourbillons , éclairoit pendant la nuit la route du navire. L’inondation produite en Iflande par un volcan autre que l'Hécla , dura trois Jours ; elle parut devoir entraîner une montagne fur laquelle les Specta- teurs S'écoient refugiés ; elle fondit des glaces énormes ; Le terrein qu’elle par- courut perdit fa couche végétale ; il n’y refla que du fable : elle forma fur la côte une 1mer qui S'avança douze milles fur la terre (25). Peu de temps après, une pluie abondante emporta la cendre, & dura tout un jour. Autre inondation produite par un volcan enflamme en Iflande, € diffe- rent de l'Hécla ; elle fit périr 600 moutons & 150 chevaux au moins (26). Quand nous fümes fur le rumb du vent qui venoit du volcan, nous ef- Juyämes, dit Forlter, wne petite ondée de pluie. Ce volcan appartient à l'une des Ifles qui comprend l’Archipel des Amis, vers le milieu de la mer pacifique (17). Ce fait général paroît fingulier. On fe perfuade avec peine qu’un em- brafement produife un déluge ; & les Phyficiens , qui, fur tant d’obf:rva- tions & de récits, l'ont érigé en maxime , ainfi qu'on vient de le voir, fe font tous mis l’efprit à la torture pour l'expliquer. Les uns font monter | certe eau de la mer au travers de la montagne; les autres ont avancé que 1 cette eau réfidant dans les gouffres de l’abime, eft éjeflée, c'eft leur ex- reflion , comme les laves , la cendre & les pierres. Plufisurs ont hafardé des folutions plus fétonnantes que le phénomène , & prefque tous ont paru plus mécontens de leurs conjeétures profondes que leurs Leéteurs même. Pour moi, je n’efpère plus de concevoir comment un feul d’entre les mo- dernes a pu n’en pas voir fur le champ la véritable caufe; mais elle étoit Tome XX, Part, II, 1782. AOUST. Pz 116 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, trop fimple po qu'on püt s'en douter de long-temps. Les grands efprits, qui voient de grands faits, cherchent de grands mécanifmes : voici ce que c'efr. Pour plus de clarté , que l’atmofphère foit dans une tranquillité parfaire, dans un équilibre parfait; qu'un feu vafte & violent s'allume dans une montaone, la colonne d'air aflife fur cette montagne fera violemment ra- réfiée, Devenue plus légère que le refte de l’atmofphère , cette colonne montera vers le zénith, ainfi que l’air échauffé par nos foyers. L'air éloi- gné de la montagne affluera fans cefie vers elle , comme plus pefant ; il s'y échauffera brufquement , deviendra plus rare , plus léger que l'air éloigné, s'élevera aufli de même, & par la même raifon fera toujours remplacé par de nouvel air que fon poids entraîne vers la montagne , que le feu raréhe, qui monte, eft remplacé de même , ainli toujours, pendant la durée quelconque de l'incendie ; car l'air que porte la montagne , d’où & comme qu'il y vienne, fera toujours Le plus chaud, le plus rare & le plus léger, s'élevera toujours , fera toujours remplacé par l'air éloigné qui court à un équilibre impoflible. La montagne embrafée porte donc une colonne d'air perpétuellement afcendante, Voilà ce que nous dit la loi de l'équilibre & de l’expanfbilité reconnue dans l'air, & ce que tout homme voir de fes deux yeux. La fumée du volcan monte avec l'air; elle prend, comme la flamme de nos bougies, la forme d’un pin (28), parce que l'air qui afflue horizontalement vers elle par tous les rumbs, la prefle vers l'axe de la colonne , & l'empêche par conféquent de fe difperfer ; puis, quand cette fumée atteint la région moins denfe qu’elle, elle s'arrête, & y forme, en s’accumulant , des monta- gnes (29) ondoyantes , qui s'étendent jufqu'à couvrir quelquefois l'hori- zon (30). Le Chevalier Hamilton nous a déjà dit qu’au Ze tropea vint fubitement rnêler fes nuées aqueufes € pefantes aux nuées minérales qwexhaloit ‘le volcan (31). Ce nuage étoit donc entraîné vers l’axe. Hamilton ne nous parle que du tropea, parce qu'il ne remarqua point les autres nuages. Comment voir tout dans des objets fi multipliés, fi grands, fi rares? M. du Chanoi vit ces nuages qui régnoient ailleurs, & qui portant la pluie, Je confondoient de temps en temps avec la fumée (32). Ain, les nuages ac- couroient avec l'atmofphère vers l'incendie du 7 Août 1779, & par tous Les rumbs, Cet air, qui arrive ainfi par tous les rumbs fur le volcan, pour s'élever, en y arrivant, eft chargé de molécules hétérogènes dont l’eau eft la prin- cipale partie : elleconflitue, dit-on , le iers du fluide que nous refpirons (33); en forte que tout examiné , cette eau évaporée ou diffoute étant mife autour du globe dans fon état d'eau commune, feroit une couche dont l'épaif- feur auroit environ trois pieds. Cet air, qui monte fans cefle au zénith pendant linflammation , par- vient aux limites de l’atmofphère , où, toujours plus chaud qu'elle, il SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 117 prend toujours une froidure inconcevable, & de plus une rareté incon- cevable; il n’y peut entraîner ces molécules étrangères qu'il ne fourenoit de par fa chaleur & fa denfité. Cette eau ne pouvant monter au-deflus une certaine répion , & äârrivant toujours, fe crible dans cet air , qui l'abandonne chemin faifant ; elle s'accumule dans cette région , s'étend comme un fluide cherchant fon niveau , & fous toutes les formes qu'il plaît aux circonftances de lui donner, s’épaiflit, fe coagule, redevient eau commune , & retombe en forme de pluie comme dans les autres orages. ï Je fupplie les Phyficiens de s'arrêter fur ce mécanifme. Il eft évident que l'air aûlis fur le volcan s'élève fans ceffe; qu'il eft chargé d'eau; que cette eau ne peut gagner, comme lui, le haut de l’atmofphère; que cette eau arrivant toujours doit donc fe cribler toujours , & qu'en fe coz- gulant dans une certaine région comme dans la machine à feu , elle doit retomber en pluie, C’eft ainfi qu’il en arrive dans tous les cas où elle fe dégage de l’air qui lui fert de menftrue : c'eft un précipité chymique. Ainf, quand tous les témoins du phénomène fe réuniroient pour le nier, nous ne ferions pas moins certains de fa caufe, & nous nous demande- rions ce que peut devenir ce torrent d'eau que l'air dépofe en montant; car il eft impoflible qu'il exifte un grand incendie dans notre atmofphère, fans produire une grande pluie, Ceci réfulte de tout ce que nous favons en Hd ÿ mais ici le témoignage le plus unanime fe joint à la nécefité théorétique du fait. J'ai dit qu'une colonne aërienne contient environ trois pieds d'eau. On fait que le feu de nos fourneaux augmente d'environ un tiers le volume de l'air, fa lépèreré ; & je donne au feu des volcans à-peu-près la même énergie. La colonne aërienne aflife fur lui ne pèfe donc qu'environ 21 pieds d’eau, & toutes les colonnes ambiantes pèfent 11 pieds plus qu'elle. Cette colonne eft donc pouffée au zénith par une force égale au poids d'une co- lonne d’eau qui auroit 11 pieds de hauteur; cette colonne monte donc avec une vitelle d'environ 4 toifes par feconde. Je donne enfin avec M. Bouguer à cette région de l’atmofphère , qui contient des vapeurs dignes d'attention , une profondeur de 4400 toiles. Cela pofé, une molécule d’air, partie du bas du volcan, emploiera 110° fecondes ou environ 18 minutes pour monter dans la région où elle aura dépofé fon eau quelconque; c'eft-à-dire, que cette colonne entière dépofera fes 3 pieds d'eau dans 18 minutes. Et comme cette colonne eft fans cefle renouvellée par latmofphère qui y afflue en corps avec fa fa- turation ordinaire, c’eft 3 pieds d’eau qui retomberont fur le volcan cha- que 18 minutes , pendant toute la durée de l’incendie , ou environ 2 pou- ces par minute, plus par conféquent qu'aucun orage n’en donna jamais en une heure. Cette inondation a donc, à efpace égal, une mafle foixante fois plus forte que celle d'aucun orage venu à notre connoiffance, Il ne - ; + ; { à 118 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, faut donc plus s'étonner que les inondations volcaniques reflemblent aux débordemens de la mer, ou plutôt qu'on les prenne pour une mer tom- bée de quelque part fur la montagne en feu. Le problème eft donc réfolu. Nous connoiffons la quantité moyenne d’eau qui arrive, monte & retombe fur cette montagne, tandis que Fatmofphère eft paifble. Qu'on réduife, fi lon veut, à la moitié cha- cun des trois élémens que j'ai employés, & qu'on double la profondeur de la région vaporeufe : en réduifant par-là les effets au feizième , qui ef la quatrième puiflance d’un demi, Finondation volcanique fera toujours à-peu-près quadruple des orages les plus affreux quon ait jamais éprouvés. L'inondation réfulte fi évidemment de l'incendie , qu’il faut s'occuper à l'avenir, non de la caufe qui produit les typhons volcaniques ( elle eft trouvée), mais de celle qui les empêche de fe manifefter fouvent & long- temps ; & n'oublions point que les éruptions sèches font une exception forcée. Des témoins oculaires n'ont afluré que plufeurs de ces incendies bien forts ne leur avoient point paru donner d’eau, & nous trouvons dans les livres qu'ils ne font point aufli conftamment pluvieux qu'ardens ; à quoi je réponds d'abord que le fpectateur n'étant pas aflez voifin de l'axe de la colonne afcendante , ne peut éprouver des pluies qui ne tombent qu'auprès de cette colonne ; car le vent qui croît par tous les rumbs vers cet axe, preffe con- tre lui & le nuage & les pluies ; tour s’accumule autour de lui , tout fond autour de lui. Je trouve même dans l’obfervation, qu’on jouit de la plus - parfaite férénité dans des temps où la pluie inonde le volcan (34). Les pluies ne doivent point avoir lieu voutes les fois que Leur fubitance à mefure qu’elle fe crible dans la colonne afcendante , eft difpofée par un des vents forts qui défolent ordinairement la région des nues, quoiqu'on ait fur terre un calme parfait. J'en ai recueilli un grand nombre d'exem- ples , que je ne puis mettre ici (35). La vapeur s’'évanouit dans la grandeür de l'efpace que ces vents lui font parcourir: ils doivent être bien violens, puifqu'ils ont porté la cendre du Véfuve à Conftantinople ,à Rome, en Egypte, en Syrie, à Tunis; c’eft-à-dire , à deux, quatre & fept cents lieues du foyer. Si ces vents difperfent ainfi la cendre, à plus forte raifon difperferont-ils la vapeur mille fois plus légère. La furie de ces courans aëriens pafle toute croyance. En voyant les faits que je ramafle, on con- viendra quelque jour de combien fe font mépris ceux quiont vu l’'atmof- phère plus tranquille , à mefure qu’elle eft plus élevée. Ainfi , pour reve- nirà montitre, je dis que le plus fouvent les dépôts de la colonne af- cendante font diflipés avant de fe former, & alers plus d'inondation, La vapeur ou la pluie vont fe difloudre , ou tomber au loin, Cependant cette pluien’eft pastoujours perdue , & prefque jamais tout-à- fait, Les perfonnes qui fe trouvent furle rumb du vent qui a paflé par Le vol- [l SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 119 can, font quelquefois mouillées, ainfi que Forfter vient de nous le dire für fa propre expérience. La pluie tombée à Ontvjano dans l’éruption d’'Août 1779 , fut non de pierres, comme ailleurs , mais d'eau , qui y caufa un dom- mage plus confidérable. Les fables, les cendres rombés fur Orrojano , la Somma & ailleurs, avoient une palme d'épais, Ce fur une grande révolu- tion (36). Les fables, les cendres , le rapilli avoient une pâlme d’épais, & cependant l'eau fit plus de mal que tout cela, tandis qu'ailleurs on n'eut point de pluie. C’eft que les vents alors réonants poufloient toute Veau dans le rumb d'Ottojano, balayoient le refte de l'horizon, & ne pouvoient dévier de même les matières denfes, appellées cendres, fables , rapilli, que le volcan éjeétoit , &'Qui s’éparpilloient à-peu-près également dans tout fon contour. Cette déviation des eaux volcaniques n'eft nulle part aufi frappante que vers Guatimala dans le Mexique. Cette Ville eft a/fife entre deux mon- fagnes , dont l’une efl appellée volcan de feu , & l’autre volcan d'eau , Jè- parées par la feule largeur de la vallée. Le volcan de feu brûle toujours ; rou- Jours il bruie , toujours il infetle. Le volcan d’eau fournit des fources fortes € mulripliées. Le volcan d’eau eff beaucoup plus élevé que le volcan de feu (27). Toutes les fois que le vent eft dirigé du volcan brülant au volcan d’eau, celui-ci reçoit une bonne partie des eaux , qui fe criblent dans la colonne embrafée, & ce vent n'a qu’à fouffler. quelquefois & quelque peu, pour verfer fur le volcan d’eau toute la mafle d’eau néceflaire à l’entretien de ces fources ‘pendant un long temps. Si ce vent fouffoit toujours, le volcan d’eau feroit le foyer d’un déluge éternel, Ce typhon n'a point lieu pour les autres montagnes, & dans les autres rumbs , parce qu'elles font moindres, plus éloignées, moins bien orientées pour retenir ces dé- pôts. Le volcan d’eau eft donc inondé, tandis que le refte de l'horizon jouit d’un ciel ferein. Faifons tombet ce volcan. Le vent venu de la four- naïfe paflera fans dépofer fenfiblement ; la matière de ces pluies bornées à ce rumb, ira fe difperfer: l’on ne verra point d'inondation: on croira que le volcan n’en produit point: on cherchera une caufe aux inondations volcaniques remarquées ailleurs: on n’avancera que des erreurs, & la vérité fera de plus en plus inacceflible. Cette montagne , appellée volcan d’eau, eft placée on ne peut mieux pour nous éclairer. Gage , Auteur de cefair, avoit refté fept ans fur les lieux. Toute éruption produit donc de l’eau. Qu'on faffe ceffer le vent qui tranfporte cette eau, & on la verra fondre à torrens fur la bafe de la colonne où elle fe crible; & même, dans lésiforts embrafemens des gros volcans, toute limpétuofité des vents ne peut difperféritoute l'eawque ces volcans foulèvent ; ils ne peuvent que réduire à un moindre volume celle qui retombe fur ces volcans. : Une autre circonftance modifie encore ces inondations. L'air qui afllue par tous Les points de l'horizon, pour remplacer celui que Le feu pouile au 110 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, zénith , eft plus ou moins faturé dans un temps que dans tout autre. Lorf- qu'en général l'air eft Le plus dépourvu d’eau, il en dépofera le moins; lorf- qu'en général il eft plus faturé , fon dépôt fera le plus fort, tout le refte étant {uppofé, & la force de l'inondation réfultera de ces inégalités. Ceci donne occafion à M. Ferber de remarquer que la fumée du Véfuve eft bien moindre par les vents de terre que par les vents de mer, & de rap- peller la même obfervation faite par [fidore, Cette eau, que l’afcenfion continuelle de l’air raffemble dans la région des vapeurs, prend , en devenant pluie, une denfité mille fois fupérieure à celle de cet air, raréfié par des feux. C’eft en vertu de cette pefanteur fpécifique, qu'elle retombe au travers de cet air &c de fes fammes , malgré la violence de leur afcenfion. Cetteeau tombe un per moins vite, parce que la colonne afcendante lui réfifte; cette colonne monte ua peu moins vite, parce que cette eau lui réfifte en tombant : mais les gouttes de cette eau tombent toujours au travers des vapeurs, comme celles de la pluie ordinaire tombent dans les cheminées ouvertes fumantes. La pluie volcanique retombe & dans le cratère & fur les faces de la montagne. Celle qui tombe dans le cratère s’accumule dans les cavernes du gouffre: elle fort quelquefois de la montagne par la bafe ou par les flancs de la montagne; par les points quelconques que le feu a le plus corrodés, fappés, amincis , & que le poids de l’eau peut brifer, C'eft alors un zilo d'aqua qui fort par un trou, & l'on ne fait ni d'où , ni comment, arce qu’on ne veut pas en voir la vraie origine. Tout cela fe pafle dans les flancs de l'abime , tandis que l’eau tombée fur fes faces va bouleverfer les campagnes. Cetre eau émergente & celle qui tombe du ciel font parfois falées, bitumineufes , corrofives, parce qu'elles fe combinent , foit dans la co- lonne afcendante , foit dans les fourneaux, avec toutes Les fubftances qui ont nourri le feu, que le feu volatilife. Cette eau a des qualités que n’a point l’eau marine, & plulieurs qualités de l’eau marine, Si lon a trouvé du fel en grande abondance autour du volcan devenu tranquille, c’eft que la terre elt peuplée de falines, dont quelques-unes fe trouvent dans les hautes profondeurs du volcan. Les blocs de fel font lan- cés jufqu’aux nues avec la cendre & les rochers. La violence de l'éjection les pulvérife; ils fe heurtent mutuellement en l'air, fuivant la bizarrerie de leurs directions. Ceux qui montent fracaffent ceux qui defcendent, jufques- Jà que les rochers eux-mêmes font réduits en un détritus qu'on appelle du rapilli. Les blocs de fel, incomparablement plus friables, font incompa- rablement plus atténués , & rombent fur terre prefque dans l’état où les réduit une trituration légère dans un mortier. Ce fel ne peut venir de la mer , puifque la mer ne charria jamais du fel concrer. Celui qu’elle dépofe dans les falines forme une forte de grande glace, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 11 glace, prefque toute d'une pièce. Si l'eau volcanique dépofoit Le fel dont on parle , il auroit à-peu-près la même confiftance. D'ailleurs, cette eau qui court comme un torrent ne peut dépofer des fels. Celle des falines en dépofe que parce qu’elle eft tranquille, La cou- che humide qu’elle laifle fur Le terrein,, après le tumulte , ne contenant ue qu'un trente-deuxième de fel, en la fuppofant marine, Jaiflera , 1 l’on veut, une couche de fel qui aura untrente;deuxième de fa propre épaifleur, & cette couche humide ne peut certainement avoir en épaifleur la douzième partie d’une ligne. La couche de fel qu'elle dépofe n'aura donc que la trente-deuxième partie d'un point; il faudroit de bons mi- crofcopes pour la voir. Les eaux forties des volcans peuvent étre falées , dit le P. della Torre, puif- qu'il fort de la lave une quantité prodigieufe de [el commun , de nitre , & en Partie ammoniac. Croire que tous ces fels viennent de la mer, c’efl croire que tous les fels tirés des montagnes , & lé fel: en pierre, qui diffèrent du [el ma- rin, viennent auffi de la mer (38). 1 feroit en effet bien fingulier que les volcans , qui pouflent hors de leur fein toute forte de matières , ne puf- fent vomir de fel, d’autant plus même qu'on trouve tant de couches de fel, vaftes, épaifles, dans tant de pays, des couches dont une feule fournit prefque tout Le fel qu'on confomme en Pologne & ailleurs, fans paroître diminuer depuis tant de fiècles (39). Si l’on ne voit pas de ces couches autour de plufieurs volcans qui ont lancé du fel, c'eft qu’on n’a pas fouillé jufqu’à la profondeur qu’elles habitent. Pour moi, je raifonnerois ainfi: Puifque les volcans jettent du fel , il y en a dans la capacité dü volcan; & je raifonnerois comme un bon Charbonnier , fans imaginer une mécani- que fublime & faufle. Les volcans affectent de fe placer près de la mer, parce que leurs va- peurs ouvrent les voûtes de l’abime par les endroits qui oppofent le moins de réfiftance. Puis ils bâtiffent autour du trou le Véfuve, l'Etna, le Chim- boraco , en rejettant leurs laves autour de l'entonnoir qu'elles forment; & quand ces édifices font très-élevés, la vapeur fe forme d’autres ouvertures fur les flancs, fur la bafe, fur les environs du cône, toujours par le plus facile. Vous avez remarqué comme mot, dit M. de Sauflure à M, Hamil- ton, fur Les environs de Naples, que La maffe des Apennins avoit réfiflé aux explofions : vous m'avez trouvé de vefliges de volcans que dans Les lieux bas , excepté la où ces feux ont eux-mêmes formé les montagnes dont ils [or- cent (40). D'ailleurs lignorance de la vraie caufe de cette affectation ne nous au- torife point à en donner une arbitraire. Pour montrer que les volcans font communément voifins des mers par une telle raïfon, il faut montrer ce qui lie cette raifon au fait, Il eft apparent que la nature , en plaçant ainfi Les volcans , fuit un certain mécanifme, En attendant qu'il fe montre, Tome XX , Part. II, 1782. AOUSF, Q 522 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, décidons - nous de bonne grace à le chercher, ‘& à convenir que nous Fignorons ; ne nous expofons point à prêter nos idées à cette nature, qui nous écrafe toujours fous les conféquences de nos erreurs, Si la mereft agitée lors des éruptions, c’eft, ce me femble, parce que le foyer ou les gros rameaux du volcan pourroient bien s'étendre fous fon lit. Le feu qui y brûle s'y propage ou en vient, foulève les mers & les fait bon- dir. 11 fait plus de fracas fous les mers, parce que les mers n’ont ni le poids, ni l’adhérence des verres. L’effervefcence des volcans vient de la mer, dit- on ; autant vaudroit-il dire qu’elle produit les vents , parce que Les vents l'agitent. l Comme je n’afpire point à lier les mains à la Nature, je conviendraï que les eaux volcaniques peuvent fortir quelquefois de la mer; j'ai même hafardé de dire comment , dans le feptième cahier de ma Cofmogonie ; & j'en fuis fâché. La folution eft plaufble & non certaine : or, en: écrivant , nous devons garder les conjeétures pour nous, & ne donner au Public que des vérités ; il faut le refpecter, le plaindre de tout ce que nous lui faifons efluyer , lui épargner la perte dutemps, les dépoûts de l'in- certitude , de la contradiction , le mauvais exemple. On trouve aufli des coquilles difperfées autour du volcan; car il peut fe trouver des coquilles parmi les couches qu'il brife, qu'il difperfe, qu'il fond. Et comment n’y auroit-il pas des coquilles dans le fond des fcènes. volcaniques, puifqu’on en trouve par-tout ? En voilà aflez pour les érup- tions; venons à l’état ordinaire des volcans danses intervalles des éruptions.. Ce qu'il nous plaît d’appeller éruption , pour la commodité du lan- gage , n'eft qu'une variété dans l’érat des volcans non éteints pour toujours. Leur ér ption réelle eft permanente ; leur embrafement fenfible eft pour eux ce que les accès font pour le corps animal. Notre pouls bat toujours, mais nous ne regardons que la fièvre, Ainfi, les Phyficiens qui ont vu de près ont toujours remarqué dans ces volcans une fumée plus ou moins: épaiffe ou tranfparente ; indice afluré d’un feu toujours vivant. C’eft ce qu'on trouve dans routes les relations de ce genre; ce qui m'oblige à faire un volume de citations , ou à n’en point faire du tout. Ce feu communique une certaine chaleur au terrein qui lenvirônne,. & Le couvre; ce terrein communique cette chaleur à l'air qu'il porte, qui fe raiéfie par conféquent, s'envole au zénith, dépofe toutes les eaux qui le faturent , & qui deviennent des fources copieufes , nombreufes: aufñli les: pays voifins des volcans font-ils Le plus arrofés qu’on connoifle. C'eft ce: qu'il faut vérifier. £ Suivant le P. della Torre, /a fuperficie du volcan qui entoure la moi- tié du Véfuve étant fablonneüfe, s’imbibe facilement des eaux plüviales (41) qui coulent continuellement vers la mer par des conduits fouterreins (42). Selon Damato, Le tour du Véfuve donne un ft grand nombre de fources mi- nérales en général, qu’il féroit trop long de rapporter même les noms des plus: SUR L'HIST.. NATURELLE ET LES ARTS. 1:23 fameufes (43). Cependant la plus grande partie des eaux du Véfuve vont à la mer par des conduits fouterreins creufés fous le fable. Si Le P. Damato nous aflure que es pluies mg peuvent fournir les vafles fleuves qui fortent du Véfuve & de l'Etna (44), c'eft qu'il croit que ces pluies font celles qu'il éprouvoit dans le lieu de fon féjour. Jamais Phyficien n’a porté d’eudiomè - tre fur Les volcans : on n’y va point quand il pleut; & 1l peut y pleuvoir dix fois plus qu'ailleurs, fans qu’on le fache, & quand il pleut tout au- tour. Mais ces fleuves qui étonnent doivent leur exiftence à des pluies étonnantes. Le fol de LIfle d'Ifchia reffemble aux environs du Véfuve, de Naples & de Pouxzole ; il y a un nombre infini de fources brélantes & froides. ... Dans plufieurs endroits , le fable eff bitlant, même fous la mer (45). Cette Ile eft donc aufli la fcène des feux & le rendez-vous des pluies; elle re- çoit autant d'eau qu'elle exhale de feu; elle reffemble au Vefuve dans la caufe & Peffer. Ecourons le P. du Tertre. La Guadeloupe occidentale 4 au centre de très-hautes montagnes ; un peu vers le fud ef? la Soufrière , affife fur les autres, & qui s'élève à perte de vue avec une ouverture d'où fort continuellement une groffe fumée, entre- mélee d’étincelles pendant la nuit (46). L'eau de la mer bréloit ma main ; J'y fis cuire des œufs. À terre, vis-à-vis l'endroit où la mer bout , le fable n'avoit pas de chaleur particulière ; mais ayant creufé avec la main, je trouvai une chaleur confidérable. Plusje creufois , plus elle augmentoit; de forte qu'æ La profondeur d’un pied , ma main ne put la foutenir. Ayant fait creufer d'un fecond pied avec la pelle, Le fable brélant fuma comme un four à charbon... L'eau bout toujours dans une marre dont le diamètre moyen a fept toifes ; a côté efl un marécage où des étrangers ont laiffé la peau de leurs jambes dans La vafe. Voilà pour les feux fouterreins perpétuels de la Guadeloupe ; voici pour les eaux. Les ruiffeaux € Les torrens font affez abondans dans cette partie de l'Ifle (47), & non dans le refte, où il n’y a point detels feux. £r deféen- dant de la Soufrière, nous trouvâmes trois petites marres d'eau refpeétivement éloignées de cinq pas , puis beaucoup de petites fources qui formoient des ri- vières & de gros torrens (48). Plufeurs rivières & de gros torrens iflus d'un pain defucre ! Que font donc les pluies? Le parc ef? un lieu renfermé par des rivières profondes, & adoffé aux montagnes qui portent la (49) Sou- frière ; Ja plus grande largeur & 1900 pas. Un efpace de demi-lieue , dans un coin d’une petite Ifle, avoit donc plufieurs rivières profondes & larges, tandis qu'une pareille étendue ailleurs fournit à peine un ruifleau, En eflet, il Habtanco pleuvoir là où l’on trouve beaucoup de feu, Kang-Hi, Roi de la Chine, dans les haltes d'une chafle qu'il avoit été faire en Tartarie en 1695, racontoit au P. Gerbillon Les propriétés de plu- Jieurs bains chauds répandus dans fes Etats, Il diflingua principalement ur local dont la circonférence évoir de 10 lis (2 lieues) , & renfermoit deux cents Tome XX, Part, II, 1782. AOUST. Q2 124 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Jources, Puifque ces fources étoient chaudes , cet cfpace couvroit un feu; ce feu devoit être bien confidérable pour échauffer tant d'eau; & ces fources n'étoient aufli nombreufes, que parce que ce feu étoic aflez confidérable pour faire defcendre les fortes & longues pluies qui entrete- nojent ces fources. Les feux fouterreins font reconnus pour la principale , & peut-être pour la feule caufe des tremblemens de terre. Or, les tremblemens de terre font fè frèquens au Japon, qu'ils effraient peu , quoiqu ils renverfent des Métropo- les. Jedo , Capitale Civile, fut prefque entièrement abiméeen 1703 ; il y pé= rit 200,000 ames, Meaco , Capitale Ecclefiaffique , fut engloutie en 1729 avec un million d’'Habitans ; elle avoit été fort endommagée en 1586 & 1596. Ces cremblemens crouvent leur explication dans le grand nombre de volcans répandus fur ce pays. Une petite Ifle voifine a brlé pendant plufieurs fiècles, une autre Brile roujours. Une mine de charbon , près Cujanoffa , allu- mmée par la négligence des Ouvriers , n'a plus ceffé de briler. La montagne neigée de Feft, près Surunga , pouffoit des flammes , qui, depuis une ou- verture faite a côté, font place à une fumée noire & puante. La terre bräle en plufieurs endroits. Le Japon a quantité d’autres volcans : auffi ne trouve-t-on nulle part autant de foufre. La Province de Sarf[uma, qui en a pris [on nom ; vomit fans cefle & par-tout des tourbillons d’une fumée épaifle & noire, Le pays de Ximabara contient auffi beaucoup de foufre. Le foufre ef£ une des principales richefles du Japon (5o). Voilà Le feu , & voici l'eau. Les pluies font fréquentes pendant toute l'année au Japon; il a de toute part des lacs, des fontaines, des rivières exceflivement rapides ,une grande quantité d'eaux médicinales, qui annoncent beaucoup de foufre(s 1}. Sources bouillantes, fortes & nombreufes vers embouchure du Bolskaja , dans le Kamfchatka; elles y rempliflent des difiri&ts entiers, & s’élancene Jufqua deux aunes avèc un bruit qui rend toute converfation impoffible. Le volcan de l'Ifle Canas, voifine de cette côte, fournit des fources bouillantes fort copieufes. L’Ifle Tcheptina , éloignée de 14 lieues, n'a aucune fource ni torrent, ni rivière d'eau froide, Nous ne connoiffons pas de pays qui réuniffe tant de volcans @ de fources chaudes, Certe cote & fes Ifles font Le produie des éruptions (52). L’Hécla paroït être intérieurement embrafë, lorfqu'il ef? le plus tranquille. Le Farenheit fe tenoit au fommer € en l'air à 24° , € montoir à 153°, quand on l'appuyoit furterre , 15 Septembre 1772 (53). Huit fources d'eau chaude à deux journées de L'Hécla, près du lac Langervatr, dans la circon- férence de 6000 toifes. Nous fimes cuire dans une | én G minutes , des truites, des beccaffines , du mouton. Elle s’élevoit de 20 pieds , fur un dia= mètre de 7 (54). Cette fource donne donc cinq toifes cubes d’eau par fe- conde; elle eft donc plus forte que la marne : elle eft encore accompa- gnée de fept autres fources, Quel feu ne faut-il donc pas pour les mettre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 125 en état de cuire du mouton dans 6 minutes, & de le cuire parfairement ! S'il fufit pour faire bouillir à jamais une celle maffe, il fufit auf poux la faire defcendre du ciel. IL produit cet effet à vingr lieues de l'Hécla , qui paroît être l'axe vertical de l'incendie. Il eft donc bien valte. Une autre fource d’eau chaude | près de Reikun, jaillit a GO pieds. Le plus grand jet qui exifle eff celui de Geyfer , près de Skallot, Réfidence Epifcopale. Dans un cercle dont le rayon a 3000 toifes, on trouve cirquante fontaines bouillantes..La principale fort du milieu par un conduit dont le diamètre a 19 pieds. Nous la vimes Jaillir dix fois en cinq heures à GO pieds, 6 une fois à 90 (55). Si ce jet d’eau étoit perpétuel , il donneroit 84 toi- fes cubes par feconde, en prenant 60 pieds pour terme moyen d’afcen- fion. Mais la durée du jet varie d’entre 6 & 40 fecondes. Tout compenfé, l'on peut dire qu’elle donne un jet de demi-minute par heure. C’eft donc en tout comme un jet de 12 minutes par jour, qui font par conféquent 2520 toifes cubes d’eau dans les vingt-quatre heures: mais autour & au- près de ce jet , il s’en trouve 49 autres. Quel eft donc encore une fois le feu qui fait bouillir tant d’eau , & qui la fait fortir du fond de l’atmof- phère © Ces fortes de fyftèmes , auxquels les Iflandois dénnent un nom généri- que, font diltribués tout autour de lfle comme un chapelet, dont chaque grain eft compofé de plufieurs. M. Troil compte cinquante de ces aflemblages, dont l’un a vingt , l’autre dix, l’autre quarante fources jailliffances bouillantes., quelques-unes perpétuelles , d'autres intermit- tentes , & ne prétend pas les fpécifier toutes, ni aucune des fources fous-marines indiquées par l'épaifle fumée qui, dans beaucoup d’endroits, fort continuellement ni ondes. Les fources d’Iflande font, fans aucun doute , les plus extraordinaires qu’on connoïf]e dans le monde entier, Je Juis Jur-tout émerveillé de leur volume ($6), dit M. Bergmann, Toutes ces fources dont nous parle M. Troil, paffent le 188% du Faren- heit: elles font à 191%, 193°, 212° (57); & c'eft parce qu’elles font fi chaudes , qu’elles font en fi grand nombre, Le même feu fouterrein & per- pétuel qui les fait bouillir dans une fi vafte étendue , échauffe l'air affis fur cette terre. Cet air fe raréfie , s’allège, eft foulevé par l’atmofphère en corps qui accourt par tous les points du compas , pour s'échaufler , fe raréfer , s’alléger , dépofer , à mefure qu'elle arrive , tout ce qu’elle con- tient , & qui devient la fubftance de ces jets. L'effet eft perpétuel comme la caufe, prodigieux comme la caufe, L'Iflande n’eft qu'un volcan recou- vert par {es laves; toujours il brüle, toujours il inonde. Auf les cartes de cette Tfle nous peignent-elles fes courans non comme des rivières, mais comme des bras à mer : ils font tous grands en naif- fant. M, Bertrand a remarqué , dans Les Alpes Suiffes , que les endroits qui ont 1 126 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le plus de fources chaudes, de foufre, de fumée , font ceux où il pleut davantage, MM. les Académiciens du Pérou, en déterminant leurs angles pour la mefure de la terre, étoient continuellement fecoués par l'incendie qui bruïfloit fous leurs pieds. Dans tout un efpace de 6o lieues en longueur méridienne , ils ne pouvoient jamais s’aflurer de retrouver à la place un feul de leurs fignaux: tout dans cette Cordillière paroît être l'ouvrage du feu; & ces illuftres Martyrs de la Science ne manquent pas de nous peindre les eaux , les vapeurs & Les ténèbres de cet horizon; il donne naiflance aux plus grands fleuves du monde, ou plutôt tout courant y eft fleuve ; fes feux font perpétuels & violens, & par conféquent des eaux éternelle- ment volumineufes. Dans un Mémoire de ce Journal, j'ai dit que Le vent perpétuel d'eft fournifloit les eaux du Maragnon, de l'Orénoque, & d’autres fleuves de l'Amérique équinoxial dirigés vers lorient ; que la côte occidentale étroit très-sèche , & j'en ai montré les raifons (ÿ8) ; que la côte du Pérou nord étoit une exception à cette feconde règle, & que j'en donnerois la caufe ail- leurs (9). Voici le moment de remplir ma promefle. Etabliflons l'état des chofes. Les tremblemens de terre & Les volcans font nombreux dans la vallée de Quiro (GO) , ce qui dérangeoir continuellement toutes les opérations des Aca- démiciens (61). Les entrailles de ces volcans brälent fans ceffe (62) , ce qui a fait déferter le Village de Tichan dans V Audience dAlouft (63). Le San- gai vomit un feu continuel : on l'entend de Pintan, éloigné de 40 lieues, & de Quito même par un vent favorable (64). Les Académiciens parlent de plulieurs autres volcans qu'ils avoient eus fous les yeux dans leur opéra- tion, M. Faujas de Saint-Fond, d’après tout ce qu’il a lu fur cette fcène , dit que les hautes montagnes du Pérou font peut-être les foyers volcaniques les plus formidables & Les plus abondans en matière inflammable. Cette immenfe chaïne ef fans contredit le plus grand tableau volcanique qui exifle dans la Nature. ,.., fiége habituel des tremblemens de terre, des explofions Les plus épouvantables , & des éruptions prefque journalières, Recherches fur les vol- cans éteints , page 82. D. Ulloa va nous montrer la fumée qu’exhalent ces fournaifes, mêlée avec les vapeurs que produit la fecrétion des colonnes afcendantes. Un nuage épais & continuel nous empéchoit de rien voir à huit pas [ur le Pichinça, Quelquefois il deftendoit au col de la montagne , & l'environnoit de près ou de loin. C'étoit comme une vafle mer, dans laquelle on entendoit l'orage crever fur Quito. Nous nous entreconnoiffions d'ordinaire & la lueur des lampes en plein midi. Nous palèmes ainfi vingt-trois jours fans pouvoir Prendre nos angles, parce que les autres montagnes où mous avions les ne SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 127 fgnaux étoient enveloppées de leur nuage, quand le nôtre fe diffipoir. Nous employdmes le même temps, & fubimes les mêmes difficultés fur chacune des autres flations (65); car ce nuage étroit comme perpétuel & général fur une fcène embrafée. On éprouya prefque la même chofe à Cuença, diftant de 40 lieues (66). La neige fermoit soutes Les nuits La porte de notre tente: on fe courboic pour y entrer (57). Or, cette porte ne pouvoit guère avoir moins de 4 pieds; & comme la neige ne la fermoit pas entièrement , on peutéva- luer à 3 pieds la hauteur de cette neige. M. Van-Swinden va la réduire en eau, en nous apprenant que la denfité moyenne des neiges paroïît être à celle de l’eau comme 1 à 10 (68). 30 pouces de neige égaloient donc 3: pouces d’eau tombée dans la nuit: & comme il en romboit aufli le jour , qui obligeoit ces Meflieurs à fecouer leur tente, pour l'empêé- cher de s’écrafer (69) , on peut évaluer à 7 pouces la maffe d'eau tombée fur Pinchinça toutes les vingt-quatre heures. Cette eau , tombée fur une hauteur de 2400 toifes, n'étoit pas aufli confidérable que celle tombée fur la bafe du fommet, ainfi que je lai dit dans mon Mémoire (70). Mais cette addition ne nous eft pas nécef- faire pour prendre une idée de ce dépôt , caufé par la chaleur de l'in- cendie. Ces 7 pouces d’eau par jour font dans l’année 216 pieds d’eau , c'eft-à-dire, cent huit fois plus qu'il n'en tombe en Europe. Chacun elt bien le maître de corriger mes idées, & de réduire par conféquent mon réfultat; mais je Les puife aux fources: le refte eft une affaire d’arithmétique élémentaire. Auffi les rivières qui fortent de ce volcan d’eau , entretenu par tant de volcans en flamme , paflent-elles toute croyance. Je ne parle point de celles qui tournent vers lorient: on feroit en droit de les attribuer au vent d’eft, Comme je l'ai fait dans mon Mémoire fur Les vents plu- vieux. Je ne confidère que les rivières dirigées vers la mer pacifique, fur la côte nord du Pérou. Cette côte devroit être abfolument fans eau, comme la côte fud, & fuivant le principe de ce Mémoire-là : mais les torrens d’eau , produits par les torrens de feu qu'on vient de parcourir, vont arracher ce pays à fa ftérilité naturelle, en y prenant l'étendue des mers. D. Ulloa va nous inftruire. Le fleuve Quajaquil a une lieue de large vers fon embouchure, & un peu plus devant Quajaquil, avancé de trois lieues dans le continent. Point de marée vers Noël, € trois ou quatre autres époques, 6 prefque point le refle de l'hiver, parce que le fleuve les repouffe. Les pluies de la plaine ne contribuent point aux crues ; elles ne font que changer la campagne en mer. Les crues ne fonr produites que par es PLUIES DE LA MONTAGNE. En hiver, on remonte de Quajaquil à Caracol en huit jours: on em deftend dans deux. Or, la fource & l'embouchure da Quajaquil ne font éloignées que de 40 lieues. Le Quajaquil ne devroit donc pas être plus confidérable que la Seine à 128 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Paris, & cependant il eft cinquante fois plus large. C’eft que Le Quajaquil eit entretenu par les volcans les plus opiniâtres , les plus forts, les plus nombreux de l'univers, & que le berceau de la Seine n'en a pas un. Certe largeur du Quajaquil n’eft pas,comme celle dela Seine, dela Gironde & de la Loire à leursembouchures, l'ouvrage des marées, puifqu'il anéantit les marées dans fon lit. D. Ulloa venant du Mexique au Pérou, & fe trouvant en mer à environ 10 lieues de l'Ifle Verte, embouchure du Quajaquil, éprouva le 20 Mars 1736 un courant qui fuivoit continuellement le cours du reflux. Le temps qu'il s’arrêtoic futfort court, puifqu'il n'eut point de paufe en 197 heures, ce qu'il attribua à la grande abondance des eaux que fournit le Quajaquil. La force & l’obitination de ce courant contraire le forcèrent à jetter l'ancre, & à le Lever par intervalles. Il ne put faire que 7 lieues en quatre jours, & arriva à l’Îfle Puna, fituée vers le milieu du golfe, à 3 lieues de l'embouchure, Ce trait fufit pour montrer la violence de ce fleuve en hiver (71). Le Quajaquil ne doit donc point fa largeur à fa tranquillité : on lejugeroit même fort rapide, par cela feul qu'on emploie huit jours à remonter le même efpace qu'on defcend dans deux, Il ne la doit pas à fa petite pra- fondeur, puifqu'il eft navigable dans les bafles eaux, étant plus rapide, plus profond , & cinquante fois plus large que la Seine. Il vaut donc plus de cent fois la Seine ; il reçoit donc cent fois plus de pluie, ainfi que nous l'avons déjà reconnu à l'occafon des neiges du Pichinça. Et même les pluies qu’ii reçoit dans la plaine ne contribuent point à fes crues ; ces crues font produites par les feules eaux de la montagne, ce qui groffit étonnamment leur volume, Voilà donc quatre phénomènes , dont le premier fuppofe les trois au- tres; de grands feux, des vapeurs épaifles, des neiges ou pluies prodi- gieufes, & uneivière étonnante. La dépofñition de M. Bouguer , beaucoup moins détaillée, ne nous fournit point les mêmes rapprochemens , & n’en eft pas moins tranchante. Cet Obfervateur confirme ce que toute l'Europe favoit avant lui : c’eft que Les pays d’entre les golfes de Quajaquil € de Panama font d’une exceffive humidité ; elle corrompt tout , malgré Le foin qu'on prend de jucher les maifons Jur des pieux. Les pluies font affez vives, affex continuelles | principalement wers le Choco , pour qw'on n'aille qu'avec répugnance, € très-pen, recueillir l'or difféminé fur cette contrée (72). M. Bouguer ne pouvoit mieux peindre F'abondance & la perpétuité de ces pluies, qu’en les montrant en état d’é- teindre les feux de l'avarice ; ces feux qui bravent l’océan, les canons & Vopprobre. £ Dampierre va renforcer ce trait. On va par terre, dit-il, de Panama dans zout le Mexique, pays plein de pacages ; maïs on ne va vers le Pérou quejuf- qu'a la rivière de Choco. Au-delà font des bois impénétrables , € un fi grand nombre de groffes rivières , fans compter les petites & les bras de mer, que le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 129 Ls Naturels du pays n'y peuvent aller qu'avec beaucoup de peine (7:). L'elpace qui fournitces rivières eft entre la Cordillière & la Mer pacif- que: il n’a pas 10 lieues de largeur moyenne. Or, cette largeur , qui eft la direction ordinaire descourans, n’en produiroit point chez nous qu'on püt remarquer. Ils font donc plus forts au Choco qu’en Europe. On ajoute que ces courans font en grand nombre, Cette fupériorité des pluies eft donc générale dans ce pays là. Mais fi ce font de groffes rivières, SE font un orage : on ne compte point les petites rivières , ni les bras de mer. IL faut que ces pluies foient bien fortes , puifque les Naturels n’y vont qu'avec beaucoup de peine Ces gens-là font cependant preffés par le be- foin , exercés par l'habitude, inftruits par la tradition domeftique, & or- ganifés par le pays, puifqu'ils y fonc nés. S'ils n'y vont qu'avec beaucoup .de difficulté, comment y courroit un Européen? Voilà donc de bien grandes eaux fur l'efpace maritime du Pérou nord ; atteftées par MM. Bouguer , Dampierre , Ulloa, tandis que la côte du Pérou fud n’a prefque point d'eau , felon les mêmes relations; €’eft que Le Pérou nord a beaucoup de gros volcans ,:& que le Pérou fud v’en a pas même de petits que je fache. Or, toute la côte du Pérou duit être aride , fuivant mon Mémoire fur les vents pluvieux , où je n'ai pu faire entrer Les volcans. Mais la côte nord doit être fort pluvieufe ; puifqu’elle avoifine beaucoup de gros volcans, On peut voir jafqu'où mon principe s'accorde avec le témoignage. ù Les éruptions font plus fortes & plus longues dans certaines faifons. J'en ignore .la caufe ; mais c’eft un fait. Je ne dois point m’arrêter fur ce fait , puifque je ne fais rien de fa çaufe. Je voulois dire comment le feu produit l'eau: c'eft ce que j'ai exécuté ; & non comme le feu fe pro- duit. ; Ajoutons que chaque faifon a fon vent dominant, qui rend l'humidité volcanique plus ou moins forte, plus ou moins fenfble, plus eu moins ici que là. Ainfi , ce qu'on appelle hiver à Quajaquil réfulte de toutes les circonftances qui jettent les vapeurs volcaniques des Cordillières vers l'oueft, & l'été réfulte de toutes les circonftances qui donnent à ces va- peurs une autre direction. Le Choco ne paroît guère avoir de férénité : aufi plufieurs de fes courans font appellés bras de mer, comme le Rhône, le Danube, le Nil; ce qui ne nous furprendra plus, dès que nous faurons qu'ils naiffent dans un incendie, GES Tome XX , Part.I1,1782. AOUST. R 139 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, NSONEUETS (1) More de l'Académie 1750 , page 89. (2) Ibid. pag. 91 & 96. (3) Hift. & Phén. du Véfuve, trad, par l'Abbé Peton, Paris, 1760 ; in-12, pag, 22. (4) Ibid, pag. 138. (5) Ibid. pag. 139. (6) Ibid, pag. 140. . : (7) Ibid. pag. 134 & 285. Voyez encore M. d’Arthenai, Sav. étr.,, tom. 4, pag. 272. M. Ferber, traduit par M. Dietrich, Lettres fur la Minéralogie, pag. 206. (8) Differt, crit. du P. G. d'Amato , Jéfuite, jointe à l'Hiftoire du P. della Torre, pag. 330. ge (9) Ibid. Lettres de Jean Vivenzio , Médecin, pag. 205. (10) Tranf. phil. 1737, p. (11) Lett. pag. 206. Il avoit déjà dit plus généralement que /es vo/- cans vomiffent l'eau avec les cendres, lors des fortes éruptions , pag. 172. (12) Sav. étr., tom. IV, pag. 272. (13) Œuv. compl. du Chev. Hamilton, réimp. chez Moutard. Paris, 1781, in-8° , pag. 136. (14) Ibid. pag. 66. (15) Ibid. pag. 166. (16) Ibid. pag. 171. (17) Journ. de Roz. 1780 , pag. 1 & fuiv. (18) Lettre du Chev. Hamilton à M. Banks, Journ. de Roz, 1781, ag. 8. à se Bouguer, témoin oculaire. Mém. de l'Acad. 1744, pag. 270. (20) Voyage hiftorique d'Amérique, tom. I“, pag. 468. (21) Voyage dans les Mers de l'Inde, par M. le Gentil, tom. If, ag. 14: 2 tut des Voyages, tom. XVII, pag. 108 ; in-4°. (23) A. J. Tafman , Hift, des Voy. , tom. XI , pag, 213. (24) J. le Marre, Hift. des Voy., tom. X, pag. 451 & 452. (25) Extrait d'Horrebore dans l'Hifts des Voy., tom. 18, pag. 9. C'étoiten 1721, Journ. des Sav. 1764, pag. 753 ; in-4°. (26) Lettre fur l’Iflande par l'Evêque IL , traduites du Suédois par l'Ind- blom , pag. 325, en 1727. ° SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 131 (27) Voyages des Anglois, tom, 5 ,pag. 38, in-4°. (28) La Torre, pag. 1345: d'Amato, #bid, pag. 346 ; Hamilton, pag. 32 & 59, & tous ceux qui ont donné une formé à cette fumée. (29) Œuvres d'Hamilton, pag. 59. (30) La Torre , pag. 134: d Amato, ibid. pag. 134. (31) Journ, de Roz. 1781, pag. 8. (32) lbid. 1780, tom. II, pag. 1 & fuiv. (33) Mém. de l'Acad. de Berlin 1771 , pag. 104. Lambert, Journ, de Roz. 1781, pag. 127. (34 M. le Gentil, Voy. , tom. IT, pag. 145 la Torre, pag, 139; d'Ar- thenai , Sav.étr., tom.4, pag. 272. ? (35 Journ. de Roz, 1780, pag. 361, dans la Lettre du Duc de Belforte, trad. par M. Faujas de Saint-Fond, Thomas Gage, Dominicain, Hift, des Voy.:, tome XII, pag. 493 & fuiv. (36) Pag. 188. - (37) Voyez tous les Mémoires qui parlent de la mine de Wiliska, parmj ceux de l’Académie , & dans Le Journal de Rozier, (38) Journ. de Roz. 1776, pag. 27. Ld (39) Pag. 21. (49) Pag. 186. (41) Ibid, pag. 333 & 352. (42) Ibid, pag. 352; La Torre , pag. 191. (43) Hamilton, pag. 226 & 228. (44) Du Tertre , Hift. des Voy., tom.XV, pag. 509, (45) Labat, ibid. pag. 517. (46) Ibid. $18. (47) Idem. pag. 520. (48) Idem. pag. $31. (49) Hift, des Voy. , tom. 10, page 6$r: (50) Jbid. (51) Recueil fait par le Baron de Dietrich , Journ. de Roz. 1781 , pag. 35 & fuiv. Le même feu qui fuit pour échauffer tant d'eau, fuffit pour la féparer de l'atmofphère. (52) Lettre fur l'Iflande par l'Evêque Troil, traduit du Suédois par M. Lindblom. Paris, 1781 ,in-8° , pag. 302 & 341. (53) Ibid. pag. 304. (54) Ibid. pafsim , & principalement pag. 351 & fuiv. (55) Ibid. Lettre du Chev. Bergmann à l'Auteur , pag. 406. (56) Ibid. 347 & fuivantes. + (57) Journ. de Roz. 1781, pag, 446 & fuivantes; 1782, pag. 58 & fuivantes, (58) Ibid. 1781, pag. 450, 6. 20. Tome XX, Part, II, 1782. AOUST., R 2 132 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, (59) Bouguer , Mém. de l'Acad. 1744, pag. 260. (60) Bouguer, Fig. de la Terre, p. xxxV1, 291 , & Mém, de l'Acad, 1746 , pag. 605. (61) D. Ulloa, Voyage d'Amérique, tom, I, pag. 239. (62) Ibid. pag. 273. (63) Ibid, pag. 352. (64) Ibid, pag. 197. (6S) Ibid. pag. 203. (66) Ibid, 199. : (67) Journ. de Roz. 1776 , pag. 330. (68) Ulloa, tom. I‘, pag. 197. (69) Journ. de Roz. 1782, page 66 , $. 112. ds (79) D. Ulloa , Voy. d’Am. , tom. I°°, pag. 163—167 pafsim. (71) Dom Ulloa, Voyage d’Amér., tom. [ , pag. 124 & 162. (72) Fig. de la Terre, pag. xxr. (73) Nouveau Voyage autour du monde. Rouen, 171$, in-12, pag. 273: nee NOUVELLES OBSERVATIONS Sur La Machine Hydraulique de M. PE RA ; par M. PiLATRE DE Rozrer, Ecuyer, Membre de plufieurs Académies des Sciences, Belles-Lettres & Arts Nationales & Etrangères ; Chef du premier Mufèe autorifé par le Gouvernement fous La proteülion de MONSIEUR G de MADAME; Profeffeur de Phyfique & de Chymie, &c. &c. Dci: qu'Archimède a pofé les premiers fondemens de l'Hydrofta- tique, Mariotte s’eft occupé à établir des principes certains fur l'Hydrau- lique , cette partie de la Phyfique qui fatisfait tout-à-la-fois nos befoins & nos plailirs, par la diftribution & l'élévation des eaux. Guglielmini, Daniel & Jean Bernouilli, Gafpard Schott, Salomon des Caux , de Chales & Belider font aufli parvenus à faire des applica- tions très-heureufes de ces principes à diverfes machines hydrauliques. A certe époque, ces deux fciences avoient donc déjà ouvert une car- rière très-écendue aux plusbrillantes découvertes ; mais leurs loix invariables oppofoientà chaque inftant des obftacles qu'on croyoit infurmontables ; en forte qu'après les recherches Les plus laborieufes & prefque infructueufes SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 133 des plus grands génies, l'Hydraulique fembloi devoir refter encore refferrée däns fes bornes étroites, & nous étions forgés de nous contenter d’une fimple combinaifon des Pompes afpirantes , élévatoires, foulantes & à réfervoir d'air. Mais outre les dépenfes exceflives de conftruction, d’en- tretien & de forces, elles ne peuvent élever l’eau qu'à des hauteurs très- bornées... e «* Si la pompe à feu imaginée par Papin , & exécuté pour la première fois par Dalefme, peut en fournir des volumes immenfes à des hauteurs confi- dérables , il y a peu d’endroits où elle puiffe dédommager des frais exor- bitans de conftruétion & de fervice. Il ne faut pas moins que l'habileté de MM. Perrier pour efpérer employer cette machine avec fuccès, à con- duire les eaux de La Seine, de la grille de Chaillot dans plufieurs quartiers de la Capitale, Jufqu'ici les procédés multipliés des Mécaniciens & les calculs des plus fublimes Géomètres ne nous avoient donc encore fourni qu'une feule machine capable d'élever avec peu de forces des mafles d’eau confidé- rables à des hauteurs encore indéterminées. Mais cet appareil auquel M. de Bernières vient de donner un nouveau degré de perfection, ne peuc guères s'établir que pour des monumens confacrés à foutenir l’exiftence d’un très-grand nombre de Citoyens, tels qu’à l'Hôtel Royal des Invalides & au Château de Bicêtre, dans. lefquels la profondeur des puits & la con- fommation prodigieufe d'eau ont forcé & s'écarter des règles générales pour le diamètre de leur ouverture. Une obfervation heureufe & bien faifie , qui attire aujourd'hui lat- tention autant qu'elle excite l'admiration des Savans & des Amateurs les plus diftingués, femble enfin nous mettre fur cette voie fi long-temps defirée, Nous en fommes redevables à M. Vera, qui, en regardant tirer des feaux d'un puits, a remarqué que la corde qui avoit été mouillée, entraînoit d'autant plus d’eau , que les feaux écoient montés avec plus de célérité. En Obfervateur intelligent , il répéta des expériences fur une ma- chine dont la forme pouvoit procurer une grande vitefle à la rotation de la poulie qui fupporte la corde. Enfin, par différentes combinaifons auñi fimples qu'ingénieufes , il parvint à rappeller cette vérité inconteftable , qui dit: Qu'on gagne fouvent plus à examiner avec attention Les phéromènes & la marche de la Nature, qu'a fatiguer fon imagination par des recherches qui éloignent prefque toujours du but auquel on s'efforce de parvenir, Siune machine finaple & peu difpendieufe pouvoit toujours procurer les avantages qu'ona droit d'attendre d’une plus compliquée , certainement celle de M. Vera mériteroit la préférence fur toutes celles qu'on a tenrées depuis fa découverte. Mais comme les mafles d'eau qu'on élève font en railon des forces qu'on emploie, & que ces dernières font fubordonnées à des règles de Mécanique immuables , il faut donc les connoître pour . 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, juger des avantages produits par les petits changemens qu'on a apportés à cetré machine, que je vaisd abord décrire Le-plus fuccinétement qu'il me fera pollible, . Idée générale de la Machine. Tout le monde fair qu’à la partie fupérieure d'un puits Mly a ordinaire- ment un treuil ou une poulie qui fupporte une corde à laquelle font at- rachés les feaux, Suppofons maintenant une feconde"poulie placée au fond du puits, bien parallèle à la première: après avoir fupprimé les feaux, fi on noue les deux extrémités de-la corde à la manière d'un chapeler qui embrafferoit les deux poulies, il eft certain premièrement qu’en tournant l'une de ces poulies, l'autre fera le même nombre de révolutions, fi elle elt d'égal diamètre , puifque la corde fans fin qui l'embrafle lui impri- mera le même mouvement ; 2°. qu'il yaura un côté de cette corde qui def- cendra, tandis que l’autie montera. C’eft par un mécanifme auñli fimple qu'on apperçoit toute la fusface extérieure de la partie afcendante de la corde couverte d'un fourreau d’eau, qui la cache au point de la faire paroître fous la. forme d’un cylindre de-cryftal, La mafle d’eau qu’on peut élever par ce procédé augmente en raifon de la groffeur , de la dureté de la corde, & de la rapidité qu'on impri- mera aux poulies. Quelques Phyficiens avoient d’abord foupçonné que la rapidité avec laquelle la corde étoit élevée, ne permettoit pas à l'air fupérieur de dé- ployer fon reflort ou fa pefanteur fur l’eau adhérente à cette corde , qui fe trouvoit alors preffée en tout fens par l’atmofphère environnant; mais M, Charles, Profefleur de Phylique, ayant répété l'expérience dans le vuide, obtint un fuccès , qui nous apprit que l'air n’infuoit en rien dans cette opération, MM, les Commiffaires de l’Académie attribuent cette propriété fingu- lière aux afpérités de la corde, qui forment une efpèce \ chapelet, fur lequel s'applique une première couche d’eau , de proche en pro- che, fuccèdent plufeurs filets ou anneaux fgides , qui adhèrent les uns aux autres en vertu de leur vifcofité. * Cetre définition démontre clairement que. cet effet dépend de la caufe défignée en Phyfque fous le nom d’attration, & en Chymie, fous le nom d’aggrégation. Il y a rout lieu de préfumer qu'il y a encore une au- tre caufe ; c'eft le choc ou l'impulfion violente que l’eau reçoit de la corde , qui la détermine à monter jufqu'à 6 pieds au deflus de la poulie fupé- rieure. Les perfonnes qui n’ont pas fait attention à cette vive impulfion donnée par la corde, n'ont point encore expliqué pourquoi l'eau s'élève au- deflus de la poulie, tandis que cette corde l’embrafle, La vifcofité ou l'at- traction des molécules d’eau devroit favorifer également fa chüte , bien SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 13% loin de permettre à ces mafles volumineufes de quitter cette corde pour jaillir auñli haut, 2°. Pourquoi une corde molle , & qui n’a pas été ébarbée, fournit elle infiniment moins d’eau qu'une très-dure &c très-liffe ? Telle eft en peu de mots l'idée de la fuperbe découverte de M. Vera. Examinons maintenant les moyens adroits qu’il a employé pour donner à fes poulies une rotation très-vive. On fera étonné, malgré tous les chan- gemens qu'on a annoncés , combien on s'eftencore peu écarté de la route * qu'ilnous a frayée. “ Défcription de la Machine, planche III, fig. 1. M. Veraenfile fur le même axe À de la poulie B fupérieure, une autre poulie. C d’an plus petit diamètre, que j'appellerai pignon; 2°. une corde fans fin D embrafle ce pignon & une grande roue de Coutelier E , placée fur un axe particulier F, à une diftance quelconque l’une de l'autre, mais rangées dans le même plan. Sur l'axe de la grande roue eft adaptée une manivelle g, qui, en lui donnant un mouvement, le communique par la corde fans fin au pignon C, & par conféquent à la poulie congénère B. Cette dernière , de toute néceñlité, va produire le même effet fur la corde H, qu'elle fupporte comme celle-ci fous la poulie I du fond du puits ; & par ce fimple mécanifme, l'inftrument préfente Le fpectacle qu'on attend. C'elt à cette époque que je pris connoiffance de cette Machine que M. Vera & plufeurs Phyficiens avoient alors établie fur le comble de leurs maifons. Un tonneau placé dans une cour repréfentoit un puits diftant de la machine de 63 pieds. L’ingénieux Inventeur voulut bien me céder le premier modèle, que je deftinai à Monfieur & à Madame, comme Pro- teleurs de mon Mufée. Le rapport de l’Académie n'étant pas encore publié, je m'occupai à chercher la caufe qui permettoit à l'eau de fuivre la corde, L'expérience de M. Charles ayant éclairci ma première opinion, j’adoptai par antici- pation, & fans le favoir, l'explication de MM. de l'Académie. Pour confirmer mon idée, j'effayai aufli-tôt de fubftituer à la corde qui defcend dans le puits une chaîne dontles mailles étoient un peu ferrées, parce que fi c’eft l'attraction qui produit ce phénomène , une chaîne doit avoir des avantages bien fupérieurs à la corde, puifque chaque maille recevra une goutte d'eau qui en attirera une feconde, & ainfi fucce‘livemenr. En efler, le fuccès répondit fi parfaitement à mon attente, que la même nuit qui précédoit le jour que je devois préfenter le modèle à Monfieur & à Madame, je fis fabriquer une chaîne qui rendoit près du double d'eau de Ja corde, Cette prémière expérience excita vivement l'admiration du Prince & de la Princefle, qui engparlèrent au Roi, à Monfeigneur & à Madame Comteffe d'Artois, qui defirèrent aufli connoïtre cette nou- velle Machine, 136 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, À certe époque, perfonne n’avoitencore fait ufage de la chaîne (1); qu'on chercha d'abord à difcréditer par mille objeétions trop mal fondées pour tte rapportées dans ce Mémoire, A la vérité, deux Anonymes les confeillèrent depuis dans un Ouvrage périodique : mais à cette époque, j'en avois déjà fair connoître les défagrémens en grand à Monfeigneur le Contrôleur Général des Finances ,à M. l’Intendant de Paris, à M. le Comte de Vaux, à M, d’Aguefleau , aux Soufcripteurs de mon Mufée , & à beaucoup de Savans très-diftingués (2). Un grand nombre d'Amateurs s’occupoient alors à multiplier les pro- duits de cette machine, mais aucun n’annonçoit l'avoir érablie fur des puits , des marais & des rivières, qui font les principales circonftances où l’on pourra en faire ufage; s’ils font facilement parvenus à tirer avantage de cette belle découverte, en l’appliquant fur des tonneaux ou des caif- fes , en augmentant le nombre des poulies & des cordes, en fubftituant à ces dernières des fangles ou des ficelles chargées de nœuds. J'ai obfervé que le fuccès feroit bien différent, fi on fuivoit le même procédé fur un puits. Je doute, & je pourrai dire plus, qu'on réufifle à tirer beaucoup d’eau en fixant la poulie au fond du puits, ainfi qu’on l’a pratiqué fur les ronneaux & les modeles. L’alongement confidérable des cordes & même des chaînes , la difficulté de fceller l'axe de la poulie inférieure, de ma- nière qu'elle tourne aifément & rondement, l’aplomb des deux poulies, fi néceflaire pour éviter les grands frottemens , l'échappement des cordes, qu'on ne maintient que très-difficilement fur la poulie d'en bas, la place qu'on doit afligner à cette poulie, foit au fond , au centre ou à la furface de l'eau, &c., font autant d'obftacles qu’on n'a pu prévoir, en bornant fes expériences fur des tonneaux. Voici deux méthodes fort fimples de placer avec avantage la poulie au fond du puits. » 1°. Toute efpèce d’armure ou de poids attaché à la poulie du fond, nuit au fuccès de l’opération. Il fuffit , ainfi que l’avoient foupçonné MM. Ma- nouri & Guyot, d'abandonner cette poulie inférieure à fon propre poids fur la corde qu’on defcend. Comme par fon immerfion elle perd de fa pe- fanteur en raifon du volume d'eau qu'elle déplace, j'ai fubftitué au deficit , par deux petites bandes de fer formant un triangle ifocèle , dont l'axe de la poulie fait la safe, er roulant dans deux trous percés dans la - (1) J'apprends à l'inftant que deux perfonnes infruites de Lyon réclament l'anté- riorité de cette expérience. Il fera bien facile de juger cette petite difcuflion, puifque je ne date que du jour où j’offtis mon modèle à la Famille Royale; d’ailleurs cette idée , ainfi que l’a dit M. de Bernières , cette idée a pu fortir de cent têtes le même jour. (2) MM. Macquer, le Roy (Cafini, de la Lande, Vallot, de Bernières, de Montigny, &c. largeur SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 137 largeur de ces bandes. Le fommet du triangle qui regarde le fond du puits, lefte la poulie & la tient d'aplomb, ainfi qu'on le voit dans la figure première à la lettre L. Au fommet de ce triangle, j'ai ménagé un anneau deftiné à recevoir des poids, en cas de néceflité. Comme j'ai remarqué que les chaînes feront quelquefois d'une grande utilité, alors on peut fupprimer la poulie du fond , dont l'effet eft rem- placé par le poids de la chaîne ; cette méthode diminuera confidérable- ment les frottemens. Il arrive quelquetois qu’en abandonnant [a poulie au fond du puits, s’il eft profond , la corde & même les chaînes fe cordent, On pare bientôt à cet inconvénient, en mouillant ces cordes ; & avant d’attacher les deux bouts , en la mettant à cheval fur la poulie fupérieure , fufpendant à cha- que extrémité un poids de 40 à ç0 livres. Après quelques minutes, elles {e détordent; auter$e on forme le chapeler où corde fans fin , en liant les deux bouts, après en avoir détaché les deux poids. Malgré ces précautions, il peut encore arriver que les cordes fe tordent, principalement dansles puits profonds ; alors on aura recours aux deux pro- cédés fuivans: 1°. en mettant la poulie du fond du puits d’un grand dia- mètre , comme 16 à 18 pouces; 2°. en féparant les deux côtés de la corde afcendante & defcendante par une traverfe horizontale en bois ou en fer de 4à $ lignes de diamètre, qu'on arrêtera à la furface ou au centre de la corde. Quand on emploie la chaîne , on doit conferver une maille en forme d'S , de fer doux ; qu'on ouvrira & qu’on fermera à volonté. J'ai préféré un petit chaflis pour defcendre la traverfe & la remonter n quand onle juge à propos , au centre du puits ou à la furface de l’eau, Deftription du Chaffis. aa,bb, fig. 4, font deux tiges de fer d'environ 2 pieds fur 7 à 8 li- gnes de large , terminées par deux anneaux, qui reçoivent deux cordes fixées à des crampons fcellés fur le haut du puits ce. Deux autres barres cc font deftinées à retenir l'écartement des tiges, qui doit être proportionné au diamètre du puits; elles font courbées ou cintrées de manière qu’elles s'appliquent affez exactement fur la circonférence du puits, La feule partie eflentielle du chäffis, vue en d 4, n’eft qu'une traverfe en forme de crochet fixée fur la tige aa , tandis que l’autre extrémité peut tomber dans le piton qui fait partie de la tige 2. On pafle d’abord un des côtés de la corde derrière ou entre le crochet 44 & les barres cc, cc : on aflujertit le crochet à l'ordinaire; puis on defcend le chafis par des cordes fixées aux anneaux. Quand on juge qu'il eft aflez bas, on arrête les cordes aux crampons du haut du puits, & l'appareil eft établi. La traverfe qui fe trouve alors au milieu des cordes les empêche de fe tordre. Comme cette propenfon n’a lieu que lorfque la machine eft Toms XX, Part. I1,1782. AOUST, S 138 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dans l’inaétion, onn’a donc pas à craindre des frottemens de la part de cette traverfe, quand la machine eft mife en mouvement. M. Billiaux n'a fait part d’un procédé plus fimple; mais j'attendrai pour le publier que nous ayionseflayé s il n'aura aucuninconvénient engrand. La figure 6 repréfenre une boîte ou caïfle ; percée dans fon fond de deux trous de 2 & 3 pouces de diamètre. La poulie fupérieure étant en- fermée dans cette boîte , on fait pafler les deux côtés de la corde par les trous , en obfervant de donner le plus grand à la corde qui monte l’eau. On peut donner à cette boîte une forme quelconque , pourvu qu’elle ait 4 pieds de haut, c’eft-à-dire, de zen 4, ou debenc,4 pieds de long ,dezene, 14 pouces de large. La figure de ma boîte peut être comparée à un cafque: on voit partir de la poulie e qui fupporte la corde, un jet-d'eau qui s'élance fous la figure d’une tangente en g; l'eau retombe de-là fur le fond f, qui n'eft que tracé,parce qu'on n'eft pas cenfé voir dans l’intérieur de la boîte, que je préfente de côté , ainfi que la machine. Ce fond doit avoir 4 à 6 pouces de pente, afin que l’eau arrivée en f s'écoule facilement dans le ré- {ervoir À fuppofé. Les points dd défignent deux points d'interfection, lorfqu’on veut faire la boîte de deux pièces, c’eft-à-dire , qu'on peut faire entrer la calotte db d dans deux gorges pratiquées dans toute la partie inférieure de la boîte. Voilà , je crois, les premiers obftacles furmontés : je defire & j'efpère néanmoins qu'on trouvera des procédés plus fimples pour placer la pou- lie du fond du puits, que je regarde comme un objet capital de cette machine, quoi qu’en difent les faifeurs d'expériences. Voyons actuellement quelles font les fubftances les plus propres à mon- ter une grande quantité d’eau, & quelle eft la forme la plus avantageufe à leur donner. On a vu plus haut que, fur le modèle que j'ai fait connoître à Ja Cour & aux Miniftres, j'avois fubftitué une chaîne qui me rendoit près du dou- ble de la corde; mais les expériences répétées en grand ont produit le con- traire. Si une chaîne de puits ordinaire entraîne à la vérité des maffes d’eau très-volumineufes, elle ne peut les élever à plus de 15 à 18 pieds: c'eft alors l'effet de la corde à nœuds des vaifleaux. Siun Savant moderne a obtenu de l’eau à 164 pieds, c’eft parce qu'il a employé des chaînes de tourne-broche, dont la petieffe & la fragilité in- terdiront vraifemblablement l'ufage à des hauteurs un peu confidérables: d’ailleurs la petite quantité d’eau qu'on obtient n'eft pas comparable à celle que peut fournir la corde de fparterie. L'ouverture des mailles d’une chaîne de deux pouces de circonférence m'ayant paru être le feul obftacle à l'enlèvement de l'eau ; j'ai imaginé de la diminuer, en y entrelaçant plufieurs ficelles de fparterie ; ce qui me donnoît une chaîne-corde , qui entrainoit aïfément l’eau hors du puits, auoiqu’à la vérité en moindre quantité que la corde de fparterie feule. © Jai oublié de dire que j'avois conftruit un modèle fur lequel une corde “cLiel SUR L'HIST. NATURELLE ET. LES ARTS. 139 & une chaîne de même diamètre éroient mis en mouvement au même in{- tant & par le même moteur: on voyoit très-diftinétement que la chaîne élevoit plus du double d’eau que la corde; ce qui démontre combien peu on doit compter fur les réfultats calculés d'après des modèles que l'infidé- lité devroit prefque roujours faire ranger au nombre des joujoux. Par l'application fage & heureufe que M. de Bernières vient de faire des chaînes , il prouve qu'il eft des circonftances où elles feront indifpenfa- bles : l’épuifement à fec des marais & des citernes ; les puits qui ne con- MRSROnE. pas plus de 3 pieds d’eau; enfin , toutes les fois qu'il n'y aura pas affez d'eau pour couvrir la poulie du fond. Dans tous ces cas, ma chaîne corde ou la chaîne feule deviendront précieufes, fur tout fi on n'a pas à élever l’eau à plus de 15 à 20 pieds. Après avoir traité des avantages de la corde fur la chaîne, & de cette dernière fur la corde, paflons aux différentes marières qui pourront les remplacer. La laine avoit été annoncée comme ayant un avantage bien fupérieur à la corde de fpartérie, d’après une expérience faite fur un puits de 240 pieds (1): mais l'Auteur de cette obfervation n’y attachant aucune pré- tention, nous difops avec lui que la dernière méritera toujours la préfé- rence , à raifon du prix, de la durée & de ja facilité de s’en procurer. M. Vera a d puis peu fubftitué à la corde une fangle qui entraîne des volumes d’eau bien fupérieurs. En effet, le centre d’une corde ne peut que nuire infiniment par fon peids , puifque l’eau n’adhère qu’à la furface extérieure. Or, en fendant cette même corde, on double prefque les furfaces, fans augmenter le poids de la corde. Voilà donc un avantage cer- tain que produit la fangle. Un Amateur m'écrivit de la Province, qu’il avoit trouvé que plufeurs ficelies chargées de nœuds rendoient encore mieux que les fangles & les nattes. M. Guyot a fait cette expérience chez moi avec tout Le fuccès pof fible. Enfin, M. Berthe, Directeur de la Manufacture de Sparterie , après avoir fait fabriquer des cordes d’une infinité de formes , a remarqué , ainfi que je le lui avois dit d’après mes expériences publiques , que plus elles font dures, plus elles rendent d’eau. Les nattes & les fangles de fpar- terie en fourniflent aufli prodigieufement. Comme il fe propofe de rendre fes travaux publics, je différerai à entrer dans de plus longs détails, imaginant bien d’ailleurs qu'on multipliera plus aifément les moyens pour augmenter la quantité d’eau , que les forces pour les élever , celles-ci refte- ront toujours bornées aux loix de la Mécanique. (1) M. le Comte de B...: ayant obtenu de l’eau fur ün puits de 240 pieds , il y a tout lieu d’efpérer que la machine de M. Vera pourra en fournir à toutes les hauteurs, puifqu’elle n’avoit reçu aucun degré de perféétion entre les mains de M. le Come de Tome XX, Part. II, 1782. AOUST. S2 140 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Pour fe former une idée claire & précife de cette machine, on doit fe rappeller que la maffe d'eau produite par la corde eft en raifon de la vi- telle & de la célérité avec laquelle on tourne la poulie fupérieure. Plus on pourra augmenter cette virefle, plus on obtiendra d’eau. Mais pour mou- voir un corps, il faut néceffairement une force quelconque; conféquem- ment , plus on le fera mouvoir, plus il faudra employer de force. Cette loi , qui n’admet aucune modification , nous démontre que toutes les piè- ces qui compofent la machine exigent des proportions exactes, defquelles on ne peut s'écarter, fans perdre plus ou moins des avantages que procure la Mécanique, Jufqu'ici on n'a pas encore calculé quelle eft la vîtefle né- ceffaire pour monter une quantité d’eau donnée dans un temps connu. Mes experiences m'ont déjà prouvé que la hauteur des puits entrera pour peu en confidération ; car la viteffe que M. Vera a employée pour mon- ter un muid d'eau à 63 pieds, a été fufhfante pour en obtenir une pareille quantité à 240 pieds; 2°, j'ai trouvé que la viteffe employée jufqu'à pré- fent, pouvoit être réduite à moitié, & M. de Bernières a porté cette ré- du&tion jufqu'à un quart. Cette remarque ne doit s'appliquer qu'à la hau- teur des puits, puifque j'ai dit plus loin que les maffes d’eau obtenues font toujours en raifon de la viteile imprimée aux poulies. Je n'ai en vue, par cette obfervation , que d’affurer qu'il ÿ a poflibilité d’établir cette ma- chine fur un puits de 240 pieds & plus; 2°. que le courant d’eau fera également continu: mais on conçoit qu'il faudra d'autant plus de force, que la longueur de la colonne rendra fon poids plus confiderable. C’eft ce que je ferai connoître , en joignant l'expérience au calcul d’un inftant. Éxaminons maintenant les proportions des parties qui concourent à cette machine. 1°. Nous avons l'axe qui fert à la poulie fupérieure B & au pignon C; 2°. l'axe de la grande roue E: comme c’eft à leurs extrémités que font les principaux points d'appui, & par conféquent les grands fiottemens , il faut leur donner beaucoup de folidité, en réduifanr néanmoins leurs grof feurs autant qu'il fera poilible. Ils doivent être tournés avec la plus grande attention : on éviteroit beaucoup de frottemens , en faifant tourner ces deux axes entre deux pointes, à la manière des Tourneurs ; alors il feroit à propos de tremper Ces extrémités, ainfi que les pointes: on garniroit même les trous ou gorges de l’axe avec de la corne, qui faciliteroit le mouvement, & s’oppoferoit à l’ufure qui réfulteroit du frottement des points contre l’axe. Je crains cependant que cette méthode n’entraîne un inconvénient , qui feroit infaillible, fi les fecouffes occafionnées par celui qui tourne la machine , ou le poids de la colonne d’eau, venoient à fauf- fer les points qui fupportent l'axe. Dans ce cas, on fera forcé d'aban- donner ce procédé. : J'ai préféré de pofer les extrémirés de mes axes entre trois rouleaux de cuivre de $ pouces de diamèrre , formant un triangle équilatéral , fig. $. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 141 On ajouteroit à la facilité qu’ils m'ont procurée , en fendant & enlevant au centre de l'extrémité de chaque axe une portion de ces mêmesaxes, qui auroient alors la forme d’une fourche, repréfentée par la fig. 2. La poulie fupérieure doit être tournée fur l'axe du pignon ou lanterne, afin qu'elle tourne rondement. 2°. Les roues n'éta‘it qu'un aflemblage de leviers, dont le point d'appui eft fur l’axe; la force motrice d’un levier érant en raifon de fon éloignement à ce point d'appui, & la manivelle terminant le bras des leviers, il s'enfuit né- ceffairement que plus les grandes roues & les poulies auront de diamètre, plus elles exigeront de force pour produire des effets avantageux, € vice versä. C'elt ce qui m'a déterminé à réduire le diamètre de ma grande roue à 1 pied 8 pouces, quoique d’autres Phyficiens l'aient porté jufqu'à 7 pieds. 3°. La grande roue érant deftinée à augmenter la viteffe de la poulie fu- périeure , remplira d'autant plus exactement fa fonétion , que le pignon fera plus petit, Or’, {ur la première machine de M. Vera , le diamètre du pignon étoit le huitième de celui de la grande roue: donc celle ci faifant une révolution, en faifoit faire huit au pignon, & par conféquent à la poulie congénère. On conçoit aifément qu'il falloit alors le double de la force nécefluire pour faire tourner quatre révolutions auxquelles j'ai borné ma machine. 4°. La manivelle étant le bras de leviers oppofé au point d’appui, il eft inconteftable que plus elle fera longue , moins elle exigera d'effort pour faire agir la machine. On lui a donné depuis un pi:d jufqu'à 14 pouces fur les plus grandes roues , qui avoient 7 pieds de diamètre , tandis que fur la mienne , qui n’a que 1 pied & 8 pouces, j'ai donné 1$ pouce: au rayon de la manivelle. J'aurois même defiré qu’il me füt encore poflible de l'alonger. Quelques Amateurs ont beaucoup défapprouvé , dans les Papiers publics, Ja préférence que je donne aux roues d'engrénage. Si l'obfervarion , jointe à l'expérience, fufoit pour les perfuader que j'en obtiens beaucoup da- vantage , je répondrois qu'en fubftituant une roue d’engrénage à la grande roue E, & une lanterne , dont les fufeaux font mobiles , à la pe- tite poulie C, qui fert de pignon, je puis fepprimer la corde fans fin D, qui, en fe cordant par la pluie ou l'humidité de l’atmofphère , ferre plus ou moins fortement la grande roue E contre la petite C , & occafionne par-là des frottemens, qui quelquefois fauffent les axes de ces deux roues, qui font alors hors d: fervice La fécherefle au contraire, en relâchant confidérablement la corde fans fin, ne peur plus faire rourner les roues, à moins d’avoir été mouillée , ce qui oblige à porter de l’eau au puits dont on voudroit en tirer. On a cru avoir tout prévu , en remplaçant cette corde par une chaîne fans fin. Outre qu'elle s'alonge aufli très-fenfiblement , 142 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, elle a l'inconvénient de fecouer la colonne d'eau , qui fe répand dans le puits. En adoptant les roues d’engrénage, ainf qu’elles font repréfentées par la figure 3, on trouve dans mon appareil plus de folidité, de léoéreté, infiniment moins d'embarras, puilqu'elle n’a en cour que 2 pieds de long. Enfin, elle n’exige aucune attention de la part d'un dom:ftique, qui peut tirer de l'eau fans craindre de rien déranger à la machine; avan- tage qui devient réellement précieux , fur-rout dans les campagnes éloi- gnées des Villes de Province, Comme ces machines ont befoin d’une folidité proportionnée à l'effort qu’elles ont à vaincre , que cer effort eft en raifon de la cojonne d’eau , il fuit de-là qu'il faudra des machines d'autant plus fortes , que les cordes où fangles feront plus groffes, & que les puits feront plus profonds. D'un autre côté, on ne pourra guère augmenter la folidité , fans étendre Le diamètre des roues ; ce qui prouve clairement que , fur Les puits rrès-élevés, il faudra bien plus de forces que fur les autres pour monter une quantité d'eau déterminée dans un temps donné : d’où nous pouvons conciure qu'il eft encore impoñlible d’afligner les meilleures proportions à donner à ces machines, qui varieront felon la hauteur des puits & la confommation d'eau. En parlant néanmoins des épreuves faites fur le puits du Mufée, qui a 41 pieds, hauteur moyenne des puits ordinaires , je vais indiquer les dimenfions qui n'ont paru les plus favorables, même d’après la chéo- rie que j'expofe. On fait que dans cette machine, le poids de la colonne d’eau qu’on élève eft la force motrice qu’on applique à la manivelle, comme le rayon du pignon, multiplié par la longueur de la manivelle , ett au rayon de la poulie, multiplié par le rayon de la roue; ce qui peut fe repréfenter par la proportion fuivante, en défignant avant chaque pièce par des lettres. Soit p — le poids de la colonne d’eau à élever à H, fig. r. R — le rayon de la poulie B , pardeflus laquelle paffe la corde fansfin, Petiter—le rayon du pignon C. a —le rayon de la grande roue E, m — la longueur de la manivelle g. F— la force appliquée à la manivelle qui fait tourner la Machine. Cela pofé, nous aurons P :F::r.m:R. a. Maintenant, en rapportant la valeur connue des parties qui compofent la machine, je dirai que R, qui repréfente le rayon de la poulie qui fupporte la corde, a 9 pouces. Petite r, qui égale le rayon du pignon ou de la lanterne, a 2 pouces. a , qui éft le rayon de la grande roue , a 10 pouces. m. La longueur de la manivelle eft de 1 $ pouces; ce qui donnera 1 $ tours au pignon, tandis que la roue en fera un. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 143 La proportion eft donc: P:F::2 x15:9 x 10; ou bien P:F::30: 90. Il faut donc avec ma ma- chine employer une force de 90 livres, pour élever 30 livres d’eau. Ab£ traction faite des frottemens & de la force d'inertie de la machine à nud, que j'ai démontré n'être que de 2 livres (1), cetre découverte deviendra ans doute très-intéreffante entre les mains des Mécaniciens & des Géo- mètres, qui trouveront peut-être les moyens d’en augmenter encore les produits, qui , d’après les obfervations de M. de Bernières, font déjà infi- niment fupérieurs aux pompes, que les dépenfes d'entretien &la difficulté de trouver dans la campagne de bons Ouvriers , pourront bien faire abandonner. Comme je ne fuppofe aucune connoiffance de cette machine aux per- fonnes qui liront ce Mémoire , j'ai été forcé d'entrer dans quelques dé- tails , qui faciliteront fingulièrement l'intelligence de celui que je me pro- pofe de mertre à la fuite, & qui renfermera toutes les expériences faites avec fuccès jufqu'à préfent. Je préviens que je n'en annoncerai aucune qui h'ait été répétée au Mulée. RRSRX MENT ME N'C'O'U KIA GE M'E'N:S Propofes par la Branche Economique de la Société Hollandoife des Sciences érigée à Haarlem, & publiés pendant les années 1778, 1779 , 1780 & 1781 ,pour les années 1782, 1733, 1784 & 1785. CE —— a ——— ap Conditions générales. Es réponfes & explications aux queftions propofées ne doivent être fignées , ni de la propre main de l’Auteur, ou de celui qui travaille poux le Prix, ni de leurs noms, mais feulement d’une devife ; & toutes les ré- ponfes, ainfi que les inftrumens , échantillons d’étoffes, &c., doivent être envoyés à la Société fous couvert fcellé, fur le revers duquel fe trouvera la devife avec laquelle le Traité fera inclus. Sur le côté oppofé de ce couvert , il doit y avoir une marque diftinétive , afin que l’Auteur d’un (r) Une perfonne à pu tirer 10 muids d’eau par heure, fans beaucoup fe fati- guer, Lei 144 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de ces Traités, qui auroit pris part à la folution du problème, & fequel Traité n’auroit pas été jugé digne du Prix, puifle donner une contre- marque à l’Académie, pour qu'elle lui renvoie fon Manufcrit. Outre cela, il doit y avoir un autre billet fcellé fous ce couvert, dans lequel il y aura le nom & la demeure de l'Auteur, parce que celui qui fe fera connoître de façon ou d'autre avant que le Prix foit adjugé, fera par cela même exclus de toute participation au Prix, excepté dans le cas que la fituation de la demande ne lui permit pas de refter inconnu. Toutes les réponfes & atteftations néceflaires , ainfi que les traités & propolitions nouvelles (qui , autant que poñlble, doivent être écrits en Langue Hollandoife, uoiqu'on admette aufli les Langues Françoife, Latine , Angloife ou Allemande ), doivent être adreflés, felon la coutume , francs de port , à lun des Départemens (1) de la Société Economique que l’Auteur trouvera à propos de choilir. Tous les Etrangers ont cependant la permiflion d'envoyer leurs Ecrits immédiatement aux Directeurs de la Société Hollandoife des Sciences , qui font en même temps Directeurs de cette branche d'Economie. Au refte, tous les deflins & modèles qu’on enverra appartiendront à la Société. Ce- pendant, fi quelques inftrumens ou modèles de valeur lui font préfentés, elle aura le droit, après le jugement qu’elle en aura porté, de les remettre à leur poffefleur, ou de convenir avec lui d’une indemnifation, Si quelqu'un prétend avoir contribué, par la folution d'un problème, d’une façon ou autre à l'avancement du bien public , les Directeurs , ainfi que les Commiffaires de la Direction, de même que l'Affemblée géné- tale , auront le droit d'exiger les preuves néceffaires pour vérifier le fait, fi, felon les circonftances, ils le trouvent à propos. Au refte, fi quelqu'un peut être convaincu d’avoir voulu en impofer à cette Société , il fera non- feulement exclus pour cette fois, mais à jamais de toute récompenfe. Celui qui aura inventé quelque chofe ou fait quelque nouvelle décou- verte, pourra jouir du Prix propofé aufli-tôt qu'il donnera des preuves fufifantes de ce qu'il eft en état d'exécuter, fans qu'en aucune façon ül foi obligé de publier [es fécrets ; excepté qu'à la propofition de la queftion on n’eût déjà exigé expreffément la publication du fecret, en confidération du bien public, è D'ailleurs toutes les découvertes , qui doivent être tenues fecrettes , ne fe- ront jamais communiquées au Public, finon qu'avec l'approbation de la Société. Auffi chaque Auteur d’un tel ou tel Traité fera tenu, à la récep- tion du Prix ,de ne publier fon Ouvrage nienentier, ni en partie. (1) Les Membres en général de chaque Ville ou lieu , ou bien ceux des environs qui s’y raffemblent , font regardés comme une Société, & c’eft ce qu’on appelle un De- parement ; où à M.C. H, Vandercla , Secréraire à Haarlem, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 145 Le Prix ordinaire de la Scciéré eft une Médaille en or de la valeürin- trinfeque de 20 ducars ; le fecond Prix eft une Médaille en or de : 0 ducats; le D TR une Médaille en argent de 3 ou 4 furirs; & f quelqu'un préféroit de recevoir la récompenfe en argent, on donnera 25 ducats pour la première Médaille, 12 ducats pour la feconde , & 2 ducats pour celle en argent, à moins que, dansune Aflemblée générale, on ne jugeât à propos d'augmenter la fomme. Au refte, l’Affemblée gé: érale fe réferve Le droit de ne remettre aux Auteurs qui ont concouru, qu'une partie du Prix fuf- mentionné , & cela en proportion du mérite de la Diflertation , ou bien qu: la réponfe ne faristir point en tout à la queftion promulguée, Si quelquefois , dans Les articles fuivans , il eft dir que le Prix fera pro- longé à une teile ou telle année, cela veut dire que, file Prix ne fe donne pas au terme fixé, il fera regardé comme une nouvelle propofition, & qu'il ef renvoyé à la foiution de l'année fuivante, & ain de fuite, juf- qua ce que le terme u'rérieur fera exyiré. Quant à l'envoi des réponfes, il n'y a aucun temps fixé: on donne à connoître par-là que la récompenfe Pau peut être méritée en tout temps, Îl faut bien faire attention que dans tous les autres cas où il y a un terme fixé pour la folution de la queftion , toute la Société renvoie fon ju- gement jufqu'au temps prefcrit. On n'ouvrira aucun autre billet que ceux des Auteurs jugés par la So- ciété dignes de quelques récompenfes; les autres feront brüiés en pré- fence des Membres de la Société. Prix propoes en l'année 1778. N°. 7. Celui qui érablira dans ce pays une Teinturerie de Rouge- Arabe, ou ce qu'on appelle le Rouge-iure, obtiendra une récompenfe de $o du- cars, ou la Médaille en or & 2$ ducats; mais à condition que l’Auteur doit auparavant livrer un échantillon de vingt-cinq livres de fil, & au- tant de livres de coton, qui n’ont été teintes dans ce pays que depuis l’éra- bliffement de cette Société Economique ; & cer échantillon doit égaler parfaitement cux de Ja Turquie , foit à l'égard de la vivacité de couleur, foit à l'égard de leurs bonté & durée , & que Les prix ne foient point diffé- rens. Les avis avec les échantillons doivent être envoyés avant le dernier du mois de Septembre 1783. N°. 3. Celui qui, dans cette République, établira une Fabrique d'Ou- tils en fer pour l'avancement de l'Agriculture dans les Colonies des In- des occidentales, avec un moulin dontle marteau eft mis en mou- vement par une chûte d’eau, moyennant une roue, ou conftruit d’une autre manière avantageufe , aura une Médaille en or € 200 ducars. Les preuves par écrit doivent être envoyées avant ou le dernier de Dé- Tome XX, Part. II, 1782. AOUST. & 146 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cembre 1781. On prolongera ce Prix jufqu'au dernier Septembre 1784. 6 N°. 4. Celui qui, dans cette République , aura établi une Fabrique de toute forte d'Outils en fer, dans lequel l'on travaille au marteau, & où quarante Garçons pour le moins font occupés pendant un an fous la direc- tion d’un Maître, aura 100 ducats, Les preuves par écrit doivent être envoyées avant ou le dernier de Dé- cembre 1781. On prolongera ce Prix jufqu'au dernier Septembre 1782. N°. g. Celui qui, dans la République, aura fabriqué de bon Acier, duquel on puiffe faire de bons couteaux .& autres outils égalant en tout celui de lÉtranger, & qui enfuite s'oblige, apiès en avoir montré des échantillons , d'en employer cinquante Taux, qui auront été fabriqués dans l’efpace d'un an, & au même prix que ceux de l'Etranger, aura 2900 ducats. : Les échastillons , ainfi que les atteftations par écrit , qui prouvent qu'une telle fabrique eft réellement érablie-dans le pays, doivent être envoyés avanc ou le dernier de Décembre 1782. On prolongera ce Prix jufqu'au dernier Décembre 1785. N°. 6. Celui qui, dans cette République , fait ou fera faire des Erriers & des Chapes de Boucles en acier, égaux en prix & en bonté à ceux d’An- glererre , & qui en outre foit en état d'en produire au moins quatre cents douzaines dans l'efpace d'un an, conformes à l'échantillon qu'on lui en aura donné, obtiendra 80 ducats, L'échantillon, qui confiftera pour le moins en douze douzaines, doit être envoyé , avec les preuves néceffaires , avant ou le dernier de Septembre 1784. À N°. 7. Celui qui, dans cette République, établira une Fabrique de Fer blanc, égal en bonté & valeur à celui de l'Etranger , aura une Mé- daille #n or. S'il eft en état d'en fournir la première année cinquante mille feuilles conformes à l'échantillon donné & égalant en grandeur, en bonté & en prix, celles de l'Etranger, il obtiendra 100 ducats. Si le Fabriquant promet en outre de fournir dans la première année ,en cas qu'on le defi- reroit, un plus grand nombre de ces feuilles au même prix, lagécom- penfe alors fera augmentée à proportion de la quantité des feuilles que le Fabriquant promettra de livrer au-delà du nombre mentionné jufqu’à 200 ducats. Au relte, il faut qu'on en préfente au moins dix feuilles de différentes façons , avec les atteftats requis , avant ou le dernier du mois de Septembre de l'année 1783. Si plufeurs, par hafard , travaillent pour le même pris, & que tous fatisfaffent à la demande, alors chacun d’eux aura une Médaille en or; mais la récompenfe en argent fe partagera entre tous. N°. €, Celui qui, dans cette République , faura fabriquer des aiguilles à SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 147 coudre, égalant en bonté , forme & prix, celles qui nous viennent de l'E- -tranger , & qui foic en état d'en fournir la première année cinquante mille pièces conformes au modèle donné, aura 100 ducars. Les échantillons, qui pour le moins doivent être au nombre de cinq cents pièces, doivent €tre envoyés, avec les atteftats néceffaires , avant ou le dernier de Septem- bre 1782. On prolongera ce Prix jufqu'au dernier Septembre 1785. N°. 10. Celui qui , a la Campagne, ou bien dans une Ville de cette Ré- publique , fera fabriquer cinquante pièces de toile, chacune pour le moins de cent aunes de long , pour l'habillement des efclaves en Amérique , & qui égale en bonté & en prix celles d'Osnabrug , aura $O ducats, ou la Médaille en or & 25 ducats. Les échantillons & preuves de quantité doivent s'envoyer avant Le der- nier de Décembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu’à l'année 1787. N°. 11. Celui qui, dans ce Pays, établira une Fabrique de Tafféras, confiftant pour le moins en fix métiers , égalant en bonté ceux d’Avi- gnon , aura cinquante ducats, ou la Médaille en or & 25 ducats; c’eft- a-dire, s'il s’oblige de refter avec la Fabrique dans cette République , & d’en fournir la première année , fi on le demandoit, pour le moins foixante pièces conformes à l'échantillon donné & au prix ci-deflus mentionné, es preuves requifes , ainfi que deux pièces d’échantillon , doivent étre en- voyées avant ou le dernier de Septembre 1784. N°. 12. Celui qui, dans cette République, faura fabriquer, pour le battant du Métier, ur Peigne d'acier très-fin de la même bonté que ceux de l'Etranger , de douze cents rofeaux en acier, pour la largeur, fur la longueur de trois quarts d’aune d’Hollande , & qui s’oblige en même temps de les livrer, pour le bien de nos Fabriques, à un prix honnête à arrêter avec MM. les Directeurs, aura une récompenfe de 100 ducats. Si, par hafard, plufieurs travailloient pour ce Prix, cette fomme fe partagera entreux, & chacun d’eux aura encore une Médaille en or. La préfentation doit fe faire avant ou le dernier Septembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu’au mois de Seprembre de l'an 1783. N°. 16. Celui qui démontrera comment , de la manière la plus facile & la moins coùteufe, on peut remettre à flot un vaiffeau échoué fur le ri. vage , de façon au’il faut l'élever de 4 ou $ pieds plus haut que 1: flux le lus haut de cette contrée ne pourroit le porter. Si la démonftration eft Éndée fur des expériences, on propofe à l’Auteur une récompenfe de 100 ducats ; mais on prie de ne point perdre de vue que le remède doit être applicable autant fur un fol fablonneux que marécageux , & que dans ce dernier cas on ne peut point fe fervir d’une ancre jettée à une diftance, par le moyen de laquelle on pourroit, dans d’autres cas, retirer le vaiffeau de deflus la côte, Tome XX , Part. II, 1782. AOUST. 2 148 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les avis fur cette queftion , ainfi que les preuves par écrit , doivenr être envoyés avant ou le dernier Septembre 1782. Celui qui aura inventé un Pont-levis moins dangereux , tout auff fort , & qui fe Paille d’une manière plus commode , plus prompte , plus douce, & qui ne foit guères plus coûteux que nos ponts-levis ordinaires , aura une Médaille en or, où 25 ducats. Les preuves doivent être envoyées avant le dernier Septembre 1782. N°. 18. Celui qui faura indiquer la raifon d'où provient ( ce qu’on ap- pelle) e feu dans le bois de chêne , aura une récompenfe de 100 du- cas. Et celui qui pourra indiquer les moyens les plus convenables & les mieux confirmés par l'expérience pour prévenir Les progrès de ce feu, aura de même une récompenfe de 100 ducais. Les avis là-deflus , avec les preuves par écrit, doivent être envoyés avant ou le dernier Septembre 1782. N°. r9. Celui qui faura indiquer un meilleur moyen, & qui foit moins coûreux que celui qui eft préfentemient connu , ou qui du moins n’eft pas encore généralement en ufage, pour détruire les vers qui percent le corps des Navires , aura la Médaille en or & So ducats. Les avis, ainfi que les preuves par écrit, doivent être envoyés avant ou Le dernier Septembre 1783. Prix propofes en l'année 1779. N°, 3. On donnera une Médaille en or à celui qui fera un Traité de Médecine en langue Hollandoife , regardant les maladies climatériques des Indes Orientales, & qui l’enverra avant le dernier Décembre 1784. N°. 4. Celui qui indiquera le meilleur moyen , confirmé par l'expé- rience , pour prévenir ou détruire Le mal qu'on appelle Teranus ou Spaf- mus Cinicus, maladie qui occafionne la mort des enfans les premiers neuf jours après leur naïffance , aura une Médaille en or & 25 ducais, ou $o ducats. Les Traités , ainfi que les preuves par écrit, doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. On prolongera ce Prix jufqu’au dernier Décembre 1783. N°, 6. Celui qui , avant ou le dernier Décembre 1784, fera parvenir un Traité pareil au précédent, concernant les remèdes ufités dans les Indes Orientales, aura la même récompenfe. N°. 7. Celui qui indiquera le plus für moyen pour détruire le ver qui fe trouve dans le Coconnier , aura une Médaille d’or & 25 ducats, ou 50 ducats. Les avis, ainf que les preuves par écrit, doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 178r. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Décembre 1783. N°. 8. Celui quiindiquera le meilleurmoyen &cla'manière la plus avanta- SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 149 geufe pour cuire & raffiner Le Sucre dans les Colonies del Etat ; qui en même temps indiquera les ingrédiens, leurs quantités, le temps de la cuiffon, &c enfin La preuve qui défigne quand la cuiflon eft à fon degré de per- fection , aura la Médaille emor € 25 ducais, ou $O ducats. Les échantillons & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. N°, 9. Celui qui indiquera la meilieure manière de cuire le Dram ou le Ram dans les Coiontes de l'Etat, tant de l'écume du Sucre que de la mélafle , comme il fe pratique dans les Colonies Angloifes , & qui démon- trera avec précifion quand l’écume a affez fermenté, & quand le rum par conféquent fe trouve dans fa force néceflaire Luc oo être bouilli ou alambiqué, & qui de plus indiquera la quantité d’eau qu'il faut pour fe mêler avec la mélafle, avec un indice fervant de preuve à quel point la fermentation doit être pour qu'il puifle être bouilli ou APE au plus haut degré de fa force; un tel obtiendra $o ducats , ou une Médaille en or 6 25 ducats. On en attend les échantillons, les preuves & les atteftats avant ou le dernier Décembre 1782. Ne. ro. Celui qui, dans les Colonies de notre République , cultivera & préparera la plus grande quantité & la meilleure qualité d'indigo, égalant , autant qu'il eft poffible , celui de Saint-Domingue, & qui en produira les échantillons avec les atteftations néceffaires , aura une ré- compenfe de 100 ducats, ou une Médaille en or & 75 ducats. Celui qui, en travaillant cette drogue , aura atteint le fecond degré de perfection, obtiendra $o ducats, ou la Médaille en or € 25 du- Cats. Celui qui aura atteint le troifième degré de perfection fera récompenfé d'une Médaille en or ou 25 ducars. Les échantillons & les atteftats néceffaires doivent être envoyés avant le dernier Décembre 1782. N°. 11. Celui qui, avant ou le dernier Décembre, enverra le meilleur plan pour conttruire un Moulin à fucre à meilleur compte qu’à préfent, & qui foit non-feulement plus durable, mais aufli qui puiffe parfaite- ment bien écrafer la canne de fucre , aura la Médaille en ox . & le premier qui conffruira en effer un tel moulin, ayant toutes les qualités fufdites, obtiendra 200 ducats. Les preuves & les atteftats doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. N°. 12. Celui qui conftruira le meilleur Moulin ou autre Machine pour ôter l'écorce rouge ou blanche du café, ou qui inventera un Moulin pour nettoyer le coton, & que ces moulins foient plus avantageux que ceux dont on fe fert à préfent dans les Colonies, aura pour chacun 50 4 cats. ou la Médeille en or & 25 ducars , & le dédommagement des frais du modèle, 150 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, avant ou le dernir Décembre 1781, on doit envoyer les preuves je écrit, ainfi que le modèle d’une telle machine , & le montant des frais, N°. 13. Celui qui tranfportera dans notre Patrie, non-feulement la femence , mais aulli- trois plantes de la double efpèce d'Arbres à Pain, que Milord Anfon a décrites dans fes Journaux , & dont beaucoup de Voyageurs, qui ont navigé après lui dans la mer du Sud, ont fait men- tion, de forte que ces plantes puiffenc être tranfplantées dans un jardin botanique, pour être enfuite envoyées dans nos Colonies, aura la Me- daille en or & 2$ ducats, ou $O ducats. Les preuves doivent être envoyées avant ou le dernier de Décembre 1782. N°. 14. Celui qui pourra tellement préparer le Tabac du Pays, qu'il ne cède non-feulement en rien à celui de Dunkerque, foit pour le goût, foit pour le prix ou pour les autres qualités, mais qu'il puifle auf en conferver les propriétés, obtiendra 10 > ducats. Les atreftations & échantillons, confiftant en vingt livres au moins, doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. N°. 15. Celui qui, dans notre République , travaillera le Cuir pour les Empeignes de Souliers , de manière qu'il égale parfaitement Le meilleur de, l'Etranger, tant en bonté qu'en prix , aura ou la Médaille en or, ou 25 ducats ; & celui qui fera le fecond dans cette imitation, aura la Médaille en argent Où 8 ducats, Les échantillons, avec es preuves , doivent être envoyés avant ou Îe dernier Décembre 1787. L'on prolongera ce Prix jufqu'au dernier Décembre 1783. N°. 16. Celui qui , des Peaux ou Cuirs de notre Pays les plus propresà cet ufage, fera du Cordouan, qui égale en couleur, odeur & autres qua- lités celui de la Rufie , aura 100 ducats , ou la Médaille en or & 75 du- Cats, Les preuves & échantillons doivent être envoyés avant Le dernier Dé- cembre 1781. : N°. 17. Celui qui aura fabriqué les meilleurs Durans pour doublure ; la plus fine Flanelle à chemifes , le meilleur Drap ruges, le meilleur Drap de Buffle, la meilleure Serge, le meilleur Damas de laine, la meilleure Calaminque, le meilleur Camelor de laine & le meilleur Manchefter , & que chaque efpèce égale en bonté le meilleur de l'Etranger , il aura pour cha- cune , travaillée dans la République, la première année, la Médaille en or & 60 ducats ; & dans les quatre années fuivantes , il aura 30 ducais chaque année. Celui qui aura atteintle fecond degré de perfe&tion , aura la première année , la Médaille en argent & 10 ducats ; & dans les quatre années fui- yantes, il aura chaque année 10 ducars, à condition cependant que de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 151 chaque pièce, fabriquée chaque année , de largeur & longueur ordinaires, & au même prix que chez l'Etranger, il en foit remis vingt-cinq pièces aux Marchands de ce pays-ci. Les échantillons & preuves doivent être envoyés avant le dernier Dé- cembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu'à l'année 1785. eÙN°. 18. Celui qui, dans cette République , fabriquera des Etoffes de laine égalant en efpèce, prix & qualité celles de Liége, Seipergue & Ch4- dons , & qui puiflent fervir pour doubler les habits, & qui, pendant fix ans confécutifs, entretiendra vingt métiers de la première forte, & dix des autres, aura, à l'expiration de la première année, s'ils ne fe trouvent point dans le terme du Prix propofé n°. 1 de l'année 1780, car alors on pourra préférer cette récompenfe, la Médaille en or & 109 ducats. On paiera de plus pour chaque année où les fufdits Méviers fe conti- nueront , jufqu’à la fixième année inclufivement, 30 ducars, Les échantillons , preuves & atteftats, doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. N°. 19. Celui qui, dans la République, fabriquera du Crejau & de la Bavette , égalant ceux de l'Etranger , & qui puifl: en fournir les meil- leurs échantillons, en s’obligeant en même temps d'en fournir pendant le courant de l’année après la préfentation de fon Effai , cent pièces de lon- gueur & largeur ordinaires , obtiendra pour chaque forte ÿo ducars , & So autres ducats également pour les quatre années fuivantes, à moins qu'il ne fe trouve dans lestermes du Prix propofé l’année 1780, n°.1; alorsil pourra choifir cette récompefe. Les preuves & échantillons doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu'au mois de Septembre 1785. N°. 20. Celui qui, dans notre République , introduira la méthode Angloife pour paffèr & luftrer les Calaminques , les Damas, les Durans de plufieursprix & autres éroffes, & qui produira des preuves & d2s échan- tillons de ce qu'ilaura paflé & luftré dans l’efpace d’un an à la manière Angloife, aura 200 ducats ; & pendant les dix premières années , il aura chaque année so ducars, sil coutinue fa fabrique à l’ufage des Fabriques de ces Pays. N°. 2r. Et celui qui. dans la République , fera de même pour l'apprét & la preffe du Drap ordinaire , aura 100 ducats. N°. 22. Celui qui fabriquera les meilleurs Coupoirs-Franchettes pour les Tifferands en Velours, égalant, pour la bonté & Le prix , les meilleurs de l'Étranger , & qui, outre l'échantillon, indiquera la manière dont on les travaille, recevra SO ducats, 152 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Les échantillons & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Septembre 1782. N°. 23. Celui qui, dans l’efpace d’un an, pourra travailler dans la République, la Tozle groffière, de la largeur de cinq aunes & ur huitième, égalant en bonté & prix celle de la Flandre, & dont on puifle faire jes voiles légères dont on fe fert fur nos Navires, aura pour chaque pièce pour le moins de quatre-vingts aunes , 4 fforins; & celui qui aura fabri- _ le plus grand nombre £ pièces , ou fait fabriquer par d’autres fous fa irection , & qu'il en ait fait pour le moins deux cents pièces , aura encore la Médaille en or & 25 ducars. On doit envoyer les atteftats & les échantillons avant ou le dernier Septembre 1782. N°. 24. Le Papetier qui, dans l’intérieur de la République, préparera une efpèce de papier d’impreflion égalant en tout celui que nous recevons de la Francefous le nom de Papier de Bouclier de Bourdeaux , c'eft-à-dire, qu'il foit aulfi fin &aufli doux, qu'il puiffe fe vendre au même prix , & qu'il pro- metteen même temps d'en fournir, dans l'efpace d'un an , cinq mille rames égales en tout à celui de France, obtiendra 100 ducats & la Médaille en or. Mais il faut prouver , par des atteftats , avant le derrier Décembre 1784, que les cinq mille rames ontété fabriquées de la manière fufdite dans l'ef- pace d'un an, & on doit en envoyer un échantillon de dix rames. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Décembre 1782. On peut voir chez M. le Secrétaire de cette Société d'Economie, un échantillon de ce Papier, qui a été fabriqué chez le {eur Boinette a Bor- deaux , aux Armes d’Amflerdam , & dont la rame, avant d'être à l'Impri- merie, coûte actuellement de 4. 2-8 -: à #. 2-10 - : N°. 25. Le Papetier qui, dans l’efpace d’un an, aura fabriqué , dans la République, cinq mille rames du papier Morlaix-Starbatard de la même bonté & qualité, & aufli du même prix que celui de France, aura 100 ducats & une Médaille en or. $ On donnera de même7o ducats & la Médaille en or pour cinq mille ra- mes de papier Morlaix-Bouclier ; mais on doit envoyer avant ou le der- nier Décembre 1782 des échantillons de cette dernière forte, comme du papier Bouclier de Bordeaux, & les Prix feront prolongés jufqu'au der- nier Décembre 1782. On trouvera chez M. le Secrétaire de la Société d'Economie une feuille d'échantillon de ce papier Morlaix-Srarbatard, Le prix de ce papier eft communément de 29 , 30 à 32 fols la rame. La fufdite feuille eft d’une rame, qui revienr à 32 fols ; le prix vient à 26 à 27 fols la rame. Quant au papier Morlaix-Bouclier, on fait favoir que, comme il n’y a point - sl \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 153 point de feuille d’échantillon , cette forte de papier eft feulement d’un plus petit format que Le Srarbatard , & de la même grandeur que le pa- ier Bouclier de Bordeaux. x N°. 26. Celui qui produira le Modèle d'une Machine , par le moyen de laquelle on puifle sranfporter une certaine charge de bois, avec moins de perfonnes & en moins detemps qu'il ne seft pratiqué jufqu'à préfent, à travers les contrées marécageufes de nos Colonies , aura fo ducats, lar quelle fomme fera augmentée jufqu'à 200 ducats , fi l’on atteint entière- ment le but où ja Sociéré vife. On doit en envoyer un modèle & une def- cription de la conftruétion de, cette machine, ainf que le calcul des frais, & les preuves néceffaires des frais qu'on en a pris, avant ou Le dernier Décembre 17817. ! N°. 27. Celui qui produira le modèle d'une Pompe à feu , qui, en moins de temps, poufle une plus grande quantité d’eau , & la jette avec plus de force dans un plus grand éloignement , qui n’exige pas tant de monde, & qui, conduite par un homme plus où moins expert, puifle être appli- quée plus utilement dans toutes les Villes & lieux , quel que foit l'éloi ment des canaux ou des réfervoirs que ceux que l’on connoît a fent (il faut de plus ajouter à ce modèle une defcription détaillée de la façon de fe fervir des Leviers & autres inftrumens néceflaires | de forte que les travailleurs & gens de manœuvre ; dontles lumières font bornées, puiffent apprendre à conftruire une telle machine & à s’en fervir avec le plus d'avantage poffble) , jouira d'une récompenfe de 100 ducars , s’il pro- duit le modèle & les inftruétions avant ou le dernier Décembre 1781. | N°. 28. Celui qui produira une Machine quelconque, par Jaquelle on puifle dérerminer plus exactement qu’à préfent la v{efe d’un Vaiffeau fur mer, aura SO ducats. N°. 29. Celui qui indiquera un moyen plus für & plus efficace qu'il n’en exifte actuellement, & s’il eft poflible, vérifié par des preuves pour fau- ver l'équipage des vaifleaux jettés par des orages ou contre-vents fur nos cô- tes, aura SO ducats. Les avis & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1782. La fin dans le Mois prochain. à | | is Tome XX , Part. IT, 1782. AOUST, 154 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, NOUVELLE DÉCOUVERTE Concernant la Punaife des Jardins ; par M. BRIDELLE DE NEUILLAN. ; M. VALMONT DE BOMARE, dans fon favant Dictionnaire d'Hiftoire Natur:lle, fait bien exactement mention des différentes efpèces de Papas que nous avons; mais en parlant de celle des jardins , il fe orne à dire tout fimplement qu’elle fe nourrit de chenilles , de limaçons, &c. Aucun Naturalifte jufqu’ici ne s'étend à ce fujet; ce qui prouve bien clairemert que l’hiftoire intéreffante de cet infecte a roujours échappé à leugs recherches, ainfi que fon combat finguliër avec la chenille. lus heureux qu'eux à cet égard, j'ai furpris, pour ainfi dire, la Na- ture furle fair, & obfervé que la punaife des jardins eft un ennemi très- redoutable pour les chenilles qui dévaftent les arbres fruitiers, particu- lièrement c:tte efpèce ordinaire qui eft fond brun, rayée de plufieurs couleurs ; longue d'environ 2 poutes , grofle comme le bout d’un tuyau de pipe, ayant un point jaune entre chaque anneau & deux fur le de- vant de la tête en forme d’yeux. Dès que la punaife voit une chenille, & que rien ne la trouble, elle s'approche rout doucement d'elle, & lui enfonce directement dans l'œil l'aiguillon dont elle eft armée, & qu'ordinairement elle tient renfermé dans un fourreau placé entré fes antennes : alors la chenille fe fentant pi- quée , fait des efforts pour fe débarraffer ; mais la punaife fe laiflant en- traîner avec une réfftance proportionnée , les rend inutiles, & ne la quitte pas: En peu d'inftans, la chenille perd fes forces , diminue fenfiblement de volume , & meurt en moins de fix minutes. On remarque, à mefure qu’elle s’affoiblit, fes ee fe déracher les unes après les autres, à l'exception cependant des deux principales, qui ne quittent qu'après plufieurs fecoufles que donne la punaife de droire & de gauçhe, afin de la tirer de l'endroit où elle s’eft ramponnée Elle y parvient pourtant aff.z promptement , & entraîne la chenille à l'écart, pour achever de lui fucer tout l'humide radical. , J'igrore fi la punaife pique par préférence la chenille plutôr à un œil qu'à un autre; c'étoit dans le gauche qu'elle lui avoit enfoncé fon ‘aiouillon ; que je foupçonne être par le bout femblable à la pointe d’une flèche d'arc, & fait en forme de pompe: mais je n'ai pu m'en aflurer pofi- tivement. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x$$ —— BLANC DE ZINC POUR LA PEINTURE, Préparé fuivant le procédé communiqué à l'Académie de Dijon , par M. DE MoRvVEAU. C E blanc a la propriété d'être inaltérable , même par les vapeurs ph'o- giftiques les plus fortes , qui noirciflent fur le champ le blanc de Crems, & tous les blancs tirés du plomb ; il n’a aucune des qualités malfaifantes des chaux de plomb: on fait que celle du zinc peut être prife intérieure- ment. Le blanc de zinc fe mêle parfaitement à toutes couleurs ; il s'em- ploie également à l'huile & à la détrempe. On a remarqué qu'il avoit l'avantage de prendre moins d'huile & de fécher moins rapidement que les blancs de plomb. Le fieur Courtois , attaché au Laboratoire de l'Académie, ayant été chargé d'en préparer pour plufieurs Artiftes , fit annoncer l’année dernière qu'on en trouveroit toujours chez lui au prix de 6 francs la livre. Les de- mandes s'étant multipliées , il a été forcé d'augmenter cette fabrication: il a tiré du zinc de première main & de meilleure qualité. L'Académie lui a permis de faire exécuter un appareil propofé par M. de Morveau fur de nouveaux principes, qui a l'avantage dabrge beaucoup l'opération , & de mettre les Ouvriers à l'abri de tout danger & mème de toute incom- modité. Il fe trouve , par la réunion de ces circonftances , dans le cas de faire aujourd’hui une diminution confidérable fur le prix. IL donne avis en conféquence que le blanc de zinc ne fera vendu doré- navant que 4liv. 10 fols, première qualite, Et 4 francs la livre , féconde qualite, Il prévient que la compofition de ces deux qualités eft abfolument la même , & qu'il n'a établi cetre diftinétion que pour pouvoir garantir à ceux qui l'ont defiré, le dernier degré de pureté & de blancheur par une manipulation plus foignée. Il fe vend toujours à Dijon chez ledit fieur Courtois. Il en a établi un dépôt à Paris, pour la commodité du Public , chez Le fieur Trénard , Marchand Epicier, rue de Grammont ; quartier de Richelieu, aux Armes de Conde. % Tome XX, Part. II1,1782. AOUST. \‘4 W “156 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 1 ESPRIT DE VINAIGRE POUR LA TABLE; Extrait des Regifires de ? Académie de Dijon, du 18 Avril 1782. M M. DE MORVEAU , Maret, Durande & Chauflier, Commiffaires nommés pour examiner un Efprit-de-Vinaigre , préfenté & préparé par le fieur Courtois , en ont fait leur rapport en ces termes : 2] » 2: So « Les Académiciens, chargés du Cours de Chymie , ayant fait fentir tout le danger du vinaigre diftillé dans les vaifleaux de cuivre, même étamés , tel que celui qui étoic le plus généralement dans le Com- merce ; plufieurs perfonnes engagèrent le fieur Courtois , attaché au Laboratoire de l’Académie, à leur remettre, pour leur ufage, du vinai- gre diftillé dans les vaiffeaux de verre ou de grès qui fervoient aux ex- périences. » Ce vinaigre, eftimé pour fa pureté & pour fa falubrité, avoit l'in- convénient inévitable d’être toujours plus foible que le vinaigre dont on le retiroit, & il n’écoit pas poflible, fans perdre les premiers avan- tages, ni de l’aiguifer par des acides minéraux; ni même de le ren- forcer par le vinaigre radical ou efprit de Vénus , que tous les Chymiftes reconnoiffent ne devoir jamais être adminiftfé intérieurement. » Il s'agifloit donc de trouver la manière de faire un vinaigre auff pur, & que l'on püt néanmoins mettre au degré de force que l’on deli- reroit; il nous a paru que le fieur Courtois avoit atteint ce but par une heureufe application des principes développés dansles Cours de l’Aca- démie, & particulièrement d’après les expériences d'un célèbre Chy- mifte Allemand, M. Weftendorf. ». Nous avons fuivi tous les procédés de diftillation , de concentration & de rectification de ce nouveau vinaigre ; nous l'avons fournis à toutes les épreuves d’analyfe & par les réactifs, & nous nous fommes convaincus qu'il ne tenoit effectivement que le pur acide du vin, dégagé de toure matière colorante & extractive, & porté à un degré de force qu'il n’eft pas. poñible d'obtenir par la feule diftillation ; enfin, que la méthode du fieur Courtois le mertoit à portée de conferver invariablement à fon vinaigre le terme de concentration auquel il s’eft arrêré , & qui Le rendra aufli agréable que fain dans tous les ufages domeftiques. » Fait à l'Académie ce 18 Avril 1782. Signés DE MORVEAU , MARET, DurANDE & CHAUSSIER ». Je fouffigné Secrétaire perpétuel, certifie que l'extrait ci-deffus ef? conforme SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 157 à l'original & au jugement de l’Académie. A Dijon ce 19 Avril 1782. Signé MaARET. L'efprit-de-vinaigre pour la table fe vend 2 Liv. la bouteille, contenant la pinte de Paris, L faut s'adreffèr au fieur Courtois, à l'Hotel de l'Académie. Les perfonnes qui defireroient un efprit-de-vinaigre encore plus fort, ou pour d’autres ufages que pour la table, en trouveront chez ledis fieur Cour- tois , tel degré qu'ils jugeront à propos, moyennant une augmentaon de prix, — = — RENVOTI des Leures pour la Maifon ( Planche 1) fur laquelle le Tonnerre ef? tombe a Bref. a Cxocnér de fer Le plus élevé fur lequel le tonnerre a premièrement frappé. b& Deuxième crochet. £ c Nochère ou gouttière de fer blanc. d Embouchure de la nochère dans le tuyau vertical. e Tuyau vertical. ff Barriques enterrées où aboutit dans une le tuyau vertical e. gggg Trous faits par le tonnerre le long du tuyau vertical e. k Trou plus grand que les autres au coude inférieur. à Endroit au-deflus de la furface de l’eau où le tuyau paroît crevé. k Crochet de la lucarne qui a attiré une étincelle électrique, & percé le plomb quicouvre l'appui de ladite lucarne. NOUVELLES LITTÉRAIRES. Plrrores NATURELLE dela Province de Dauphiné, 4 vol. in-$°, avec des Gravures, & une Carte Geographique & Minéralogique de certe Province; par M. FAUJAS, DE SAINT-FONDS, rome ΰ. A Paris, chez Nyon aîné, Libraire , rue du Jardinet; & chez CUCHET ; rue & Hôtel Serpente. Prix, 6 liv. broché. On parlera de cet Ouvrage dans leprochain Journal. 158 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Notions Elémentaires de Botanique, avec l'explication d'une Carte compofée pour fervir aux Cours publics de l Académie de Dijon; par M. DURANDE, Médecin, de l’Académie de Dijon. À Dijon, chez Frantin; & à Paris, chez Moutard , in-8°. 1781. Le zèle qui anime MM. les Académiciens de Dijon enrichit tous les jours le Public, ou par de nouvelles découvertes, ou par des Ouvrages fou- vent plus utiles que des découvertes. La Botanique y eft cultivée avec au- tant d’ardeut que la Chymie ; & après nous avoir donné un excellent Traité fur cette dernière Science, äl étoit jufte que cette Académie nous en donnäc un aufli bien fait fur la Botanique. M. Durande, Profefleur pour cette partie, a été chargé de tracer des notions élémentaires du Règne Végétal, & d'imprimer le, plan de fes leçons. Pour la première partie, fon Ouvrage préfente d’abord l'explication des mots de la Langue Bota- nique avec celle des phénomènes fi intéreflans de la végétation; enfuite le développement des méthodes les plus utées & les plus néceflaires à con- noître, comme celles de Tournefort, de Linné & de Jufieu; enfin, les propriétés des plantes, & les moyens de les connoître. Elle eft terminée par la table des termes François & Latins qui font expliqués dans l'Ouvrage, avec deux Tables alphabétiques des genres & des dénominations Fran- çoifes. Pour la feconde partie, M. Durande a fait graver une fuperbe Carte par M. Monnier, d'après les deflins de M. Deoye , Profeffleur de l'Ecole de Defin de Dijon, tous deux habiles Artiftes. Cette Carte offre la nouvelle divifion, ou plutôt le nouveau fyftème de Botanique adopté pour Les leçons publiques de certe Ville, [1 confifte tout fimplement dans le rapprochement des divifions du fyftème de Tournefort par la corolle, avec les genres du Chevalier von-Linné par les parties fexuelles. Ce nou- veau Tableau fait ainfi connoître , d’un feul coup-d’æœil , la corolle, le fruit, les étamines, le piftil & les rapports que les plantes gardent en- tr'elles, C’eft dans l'Ouvrage & dans la Carte même qu’il faut voir le dé- veloppement de cette idée ingénieufe , qui doit être du plus grand fe- cours pour ceux qui veulent fe livrer à cette étude fi compliquée par elle- même. Neueffe eusdeckungen in der Ehemie, Les Découvertes Les plus neuves de la Chymie , recueillies par M. CRELL , Confeiller des Mines ; U° & Il parties. À Léipfick, 1781 , in-8°. Le nom de M. Creil eft très-connu en Chymie; & graces aux Acadé- miciens de Dijon , les expériences & les Mémoires de ce Savant ont appris au Public qu'il eft un très-grand Chymifte. Nous avons déjà inféré dans notre Journal plufieurs de fes Mémoires. Auteur d'un Journal de Chymie \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 159 M. Crell fair connoître à fes Compatriotes toutes les découvertes des dif= férenres Nations dans cetre Science. L’extrair de Mémoires de l’Académie des Sciences de Paris , de celle de Copenhague , & l'extrait de notre Jour- nal, avec l'annonce de vingt-deux Ouvrages Chymiques , & quelques Traités particuliers : tel eften peu de mots le contenu de l’Ouvrage que nous annonçons. C’eft ainfi que notre correfpondance avec les Acadé- mies étrangères nous met à même de faire connoitre à nos Soufcripteurs les travaux des Académies d'Upfal, de Copenhague , de Stockholm, de Saint-Péterfbourg , de Berlin, de Bruxelles, &c. &c. Verfuch, Ec. Effai d'une Hifloire du Regne Mineral, par M. GERHARD. A Berlin , chez Himburg; 1781, première partie, in-8°. avec fig. M. Gerhard, dont nous avons imprimé plufieurs Mémoires, & dont nous en poflédons encore plufieurs que nous ferons connoître , recherche dans cet Ouvrage les caufes produdtrices des minéraux , & il en admet huit principales ; favoir la concrétion, la précipitation , la cryftallifation, l'évaporation , la fufñon & la fermentation, Ceft dans l'Ouvrage même qu'il faut voir le développement & l'effer de toutes ces caufes. Tous les minéraux feuilletés font des effets de la décompofition ou diffolution ; mais tout ce qui provient de la décompofition n'eft pas feuilleté. L’Au- teur croit que tous Jes cryftaux doivent leur naiffance ou à la diffolution, ou à l’évaporation, ou à la fufion. Nous fommes de fon fentiment ; mais nousne le fommes pas, lorfqu'il prétend que leur forme dépend de la différente nature du corps dans lequel la diflolution s'opère. 11 s’en faut de beaucoup que les cryftaux des régules méralliques & demi-métalliques foient femblables , quoique cependant ce foit dans le même menftrue que s’en faffe La diflolution, le feu. - Hydrachnæ quas in aquis Daviæ paluffribus detexie, &c. MuLrer. Def- cription des Animalcules découverts dans les eaux marécageuf?s du Da- nemarck ; par M. MULLER , avec onze planches de figures enluminées. À Léiplck, chez Clufus , in-4°. Voyez ce que l’Auteur dit lui-même de cet Ouvrage, dans fon Mémoire fur le Tœnia, que nous avons imprimé dans le volume du Supplément au Journal de Phyfique pour cette année 1782. NA 160 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6x. ABS EN DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. Lire de M. LE RoOY, de Ÿ Académie des Sciences , à L'AUTEUR de ce Journal, Page 8x Extrait d'une Relation intéreffante des effets du Tonnerre fur une maifor de la Ville de Bref, qui prouvent démonflrativement que cette maïfon a été préfervée des ravages de ce météore, par un appareil de canaux métalliques , deflines a l'écoulement des eaux , qui a fait dans cette occafion la fonétion de condutfeur ou de garde-tonnerre. 2 Obfirvation d'une variation particulière dans le Baromètre , par M. TOALDO, Profeffeur d’Afironomie a Padoue. 88 Lettre aux Auteurs du Journal de Phyfique, au fujet de quelques Offemens trouvés dans les Carrières de Montmartre; par M. PAsUMOT , Inge- rieur du Roi. 98 Mémoire fur les couleurs des Végétaux ; par M. ACHARD. 100 Effai fur la converfion de tous les acides en un feul ; adref]e a M. le Profeffeur Moscarr, par M. le Chevalier LANDRIANT : traduit de l’'Iralien par Madame PXX*%, 106 Des Inondations volcaniques , par M. DucARLA. 113 Nouvelles Obfervations fur la Machine Hydraulique de M. VE RA; par M. PicATRE DE ROZIER, Ecuyer , Membre de plufieurs Académies des Sciences , Belles-Eettres & Arts, Nationales & Etrangères , &c. 132 Prix & encouragemens propofes par la Branche Economique de la Société Hollandoife des Sciences érigée a Haarlem. 143 Nouvelles Lirtéraires. “re 157 A P°PR O BAT I ON. J lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervaions fur La Phyfique, [ur l'Hiftoire Naturelle & fur Les Arts, Éc.; par MAL. Rozier & MONGEz le jeune, Etc. La Colleétion de faits importans qu’il offre périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l’accueil des Savans ; enconféquence, j’eftime qu’on peut en permettre l'impreflion, À Paris, ce 24 Août 1782. VALMONT DE BOMARE, "YF eULÈT?} ANS PY047 °° À STEEL LES cg 7 #00 din songer “AIXX HIXX JEXX JIXX XX XIX IHAN/HIAYX L/ “AIXX HIXX IEXX IXX XX XIX JIAX ILAX IAX AX AIX JIIX HIX Fe à +. = 11 f 22 V0 de F #3 s AU: Lu {1 CHE A | ie À “rer À cer sur CE Det = PS :! A à Qe 0 ce # W vos ft | 1] c'e A Ni TaS À A cet. Ta - 7% = | 1 L à UNE ES 1 ] ir ent ROERPRES PP Ee D TE-PRATN PUIS 08 AIDE HAETS Tr M): COMORAAUN É DIT Le 4 pe dar FOUR oi. VND Wu rl | Aoust 1792. SET AG, mm — ER ES SEPTEMBRE 1782. | JOURNAL DE PHYSIQUE. all | ton, EF ERA re re ra dE fe RE Sonore DESCRIPTION Des Sources de Naphte de Baku, près Derbens fur la Mer Cafpienne ; tirée de PHifloire des Découvertes faites par différens favans Voyageurs Ruffes. Le fources de naphte onttrop de célébrité pour que nous négligione d'en donner une defcription. Kæmpfer les vifta, il y a près d’un fècle, & na pas manqué de Les décrire ; mais le Leéteur trouvera dans ce que nous allons en rapporter, nombre de chofes qu'il chercheroit vainement dans Kœmpfer. , La prefqu'Ifle d’Ap/cheron , à laquelle Kæmpfer donne le nom d'Oce- cra , qui v’eft plus en ufage aujourd'hui , prefqu'Ifle qui s'étend depuis le côté du nord-oueft de Baltu jufqu’à la mer , eft la matrice inépuifable du naphte ou nephta, car c’eft ainfi qu'on nomme cette huile naturelle. de montagne dans le langage du Pays. On met trois heures pour arriver au feu perpètuel, & l'on “ie à moitié chemin devant le Village de Xef- chlor, près duquel on voit un ancien Temple Mahométan, d'une hauteur extraordinaire & d’une vaite enceinte. Quoiqu'il ne tombe point encore en ruines, on n'en fait actuellement aucun ufage, & les adhérens de læ Seéte des Schabis ne fe font aucun fcrupale,, lorfqu'ils font en voyage, de s'en fervir comme d’un lieu de repos; ce qu’un zélé Sunni fe garderoie bien de faire jamais. On trouve plus loin divers édifices ruinés, parmi lef- ae il y en a deux qui ont l'apparence d’avoir été ci-devant des lieux ortifiés, On voit aufli dans Le même endroit une caverne retranchée , qu doit avoir fervi de retraite au fameux Rebelle Srezko-Rafin. L'endroit où fe trouve le feu perpétüel, annonce fa préfence avant qu'on y arrive, par l'odeur de naphte qui frappe de loin l’odorat du Voyageur (1). Lorfqu'on (r) Les Indiens n’attribuent point l’origine de ce feu inextinguible au naphte; mais ils foutiennent qu'il brûle depuis un grand nombre de milliers , de millions d’années , & que Dieu ÿ avoit jeté le Diable, pour en délivrerles hommes, à qui cet efprit ma: in avoit faie beaucoup de mal. Ils ajoutent que ce feu reçoit fon aliment perpétuel de La Tom: XX , Part.II, 1782, SEPTEMBRE. X 162 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, eft parvenu , voici Les phénomènes que la Nature y expofe aux yeux de l'Obfervateur. On y apperçoit d'abord une place , dont l’érendue eft in- déterminée ; car elle change avec le cours des années, Le fol y eft de na- ture à s’allumer , dès qu'en le touche avec un charbon ardent, ou toute autre fubftance combuitible, Cetre flamme brûle fans difcontinuer , à moins qu'on ne veuille l'éteindre à deffein ;ce qui peut avoir lieu lorfqu'on Fé- touffe avec de la terte jettée pardeflus , ou en y verfant une fufflante quan- tité d'eau. La terre à travers laquelle le naphte pénètre eft de la clafle des argiles , ou proprement une manne groflière; car elle fair une violente effer- vefcence avec les acides, fe durcit au feu, & fe laiffe travailler forfqu’elle eft détrempée avec de l'eau. Elle eft rude au toucher, parce quil sy trouve du fable mêlé, mais en moindre proportion avec l'argile. Sa cou- leur eft d’un bianc plus ou moins grisâtre , & tire auili fur le jaune : elle fe pénètre entièrement de la matière de naphte; ce qui fe ma- nifefte non-feulement par des morceaux entiers devenus noirs comme du charbon , mais encore plus pofitivement par la dittillation , laquelle four- nit une eau d’une odeur exttémement défagréable , qui, dès qu’on y mêle Facide vitriolique, donne à connoître aufli tôt fes propriétés. Lors donc qu’on écorche la fuperficie de cetre terre à 1 ou 2 pouces de pro- fondeur , à quelqu’endroit que ce foit de cet efpace de rerrein, elle prend feu , comme nous difons, aufli - tôt qu'on la touche avec un tifon ou quelqu’autre corps allumé. La flamme et d’un jaune bleuâtre ; lorfque l'air eft calme , ou que le vent eft favorable, elle s'élève à quelques pieds du fol, & ne s'éteint jamais d'elle-même; la fumée qui en fort eft très- nuifible , & infupportable à ceux qui font incommodés de la poitrine. Les places qui brülent effectivement ( & par les raifons que nous dédui- rons bientôt, il ne manque jamais d°y en avoir ), s'étendent tantôt en lon- gueur , tantôt obliquement, quelquefois aufli en cercle; ou bien elles forment des rameaux, Ces places brülantes font plus ou moins larges, & la flamme s’en élève avec plus ou moins de tranquillité; quelquefois auf elle fort avec une telle impétuofité, qu'il femble qu'on lexcite avec des foufflets. Cependant elle ne confume pas la terre ; elle l’échauffe feulement, & cela de manière qu'on ne fauroit y tenir la main dans la proximité des places brülantes. M. Gmelin ayant fait creufer à 2 pieds au-deffous, ne put rien découvrir qui eût l'apparence de pierre-ponce ou pierre cal- cinée : 11 trouva feulement qu'à cette profondeur , la marne étoit plus douce au toucher, & n’étoit plus mêlée de fable, comme nous ayons vu qu’elle Pétoit par le haur. « Ce feu perpétuel eft d’un excellent fecours aux Habitans de Baku , pour faire leur chaux. On enlève la fuperficie d’un petit circuit de ce terrein graifle du Diable, & ils y viennenten pélerinage pour prier Dieu qu’il daigne conti- se se doi : Ê ; aüer à tenir ainf emprifonné l'ennemi du genre humain, (Grclin.) SUR L’'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 163 brûlant , qu'on détermine à volonté: on y entafle les pierres Fa def- tine à être calcinées, & dont prefque tout le fol des environs de Baku eft compafé : on couvre ces pierres avec la terre qu'on vient d'enlever ; & dans l'efpace de deux ou trois jours, la chaux eft entièrement cuite. Les Ha- bitans du Villagede Frogann fe rendent là pour y préparer leurs alimens. En général , la Aamme de naphte peut être employée aux mêmes ufages que tout autre feu. Le choix que quelques Pélerins Indiens ont fait de ce lieu pour y fixer leur féjour, contribue encore à en augmenter la célébrité. Ce font des defcen- dans des anciens Guèbres; lenom de Dervifchis ( Derviches) que le com- mun du Peuple leur donte, ne leur convient pas du tout. Ces Indiens re- gardent ce feu perpétuel comme une chofe extraordinairement facrée , &c comme un figne palpable de la Divinité , qui ne fauroit fe manifefter aux hommes fous une forme plus pure & plus parfaite que le feu & la lu- mière ; matière tellement épurée , qu'on ne peut plus la mettre au rang des corps, Les Dévots de certe Nation font des pélerinages vers celieu, du fond des Indes leur Patrie, & viennent rendre leurs refpe&tueux hom- mages à l’Etre éternel, d'une manière fi touchante, qe ceux qui les voient prennent de ces gens-là des idées toutes différentes de celles qu’on fe faic communément des Gentils. Ils ont élevé tout autour du lieu du feu per- pétuel , de petits Temples conftruits en pierres ; dans lefquels ils ont placé des Autels, Ïl n'y a pour le préfent qu'un feul de ces Temples d’employé. On ya pe près de l’Autel un tuyau de deux pieds de haut, Lx il fort une belle Aamme bleue, mêlée de rouge, qui ne rend pas la moindre odeur. Ce tuyau fe rétrécit par en haut , pour qu'on puiffe pofer des pots fur fon ouverture , de manière qu'il fert en hiver à donner A la chaleur, & tout le long de l’année à cuire des alimens. Aufli-tôt qu’on y préfente un brin de paille allumée, la flamme monte par le tuyau; & lorfqu’on veut l'abattre de nouveau , on fe fert d’un morceau de gros linge ou de feutre , qu'on jette pardeflus. Les Indiens, lorfqu'ils fe trouvent devant ce tuyau ou devant tout autre; car ils en ont auf pratiqué dans les de- meures fouterreines qu'ils fe font conftruites tout attenant au Temple , ob- fervent un profond & religieux filence, qui n'eft interrompu que par les foupirs de dévotion qu'ils pouflent. Quelquefois ils font aflis, ou bien ils joignent les mains msg la tête ( pofition dans laquelle l’un d’entr'eux, mort il n’y a pas long temps, a paflé vingt annéesconfécutives fans en chan- ger, ne buvant ni ne mangeant que pour l'extrême befoin, & ce que d’autres lui apportoient ) : ou bien ils ne tiennent qu'un bras étendu en l'air ; & un de ceux -là , pour s'être aflujetti pendant fept ans à conferver cette pénible pofture, en a contracté, pour toute récompenfe, un roidiflement total. Aucun objet quelconque n'eft capable de les diftraire dans leur dé- votion, & il eft difficile de deviner précifément en quoi elle con- fifte, à moins que ce nefoit dans ces attitudes gènantes, ou dans l'air {é- Tome XX, Part, II, 1782. SEPTEMBRE. X 2 ; 164 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rieux & réfléchi qu'expriment les traits de leur vifage , qu'ils placent le plus haut degré de refpe@& qu’ils rendent à l’Etre tout-puiffant. Comme les adorateurs du feu font regardés par les Perfans comme les plus abomina- bles de tous les [dolâtres, & qu'ils ont même été entièrement expulfés par Schach Abas,il ny en a pour le préfent qu'un très-petit nombre qui s'arrêtent dans ces quartiers, & qu'on paroît plus difpofé à tolérer jufqu’à un certain point, M. Gmelin n'en trouva que trois, lefquels font en- tretenus par un autre Indien appellé Schamachie , pour lequel ils prioient; car ils ne font pas toujours ces fortes de pélerinages pour eux-mêmes , mais ils les font aufMi quelquefois pour d’autres. [ls vont tout nuds & la tête rafée; il n’y a que les parties naturelles qu'ils couvrent avec un mor- ceau de toile. Leur nourriture fe réduit à dés racines crues & à des fruits; aufli reffemblent-ils à des fquelettes fur lefquels on auroit tendu une peau noirätre, Le tuyau facré des Indiens nous rappelle ce que Garber *& Hanvey ont rapporté (1) ; favoir, que*loïfqu'on enfonce en terre, à une profondeur | indétermi iée, un tuyau, ne füt-il que de rofeau', où même feulement de papier, pourvu qu'il foit bien recouvert de cette temæe vers le bas; fi on approche de fon extrémité fupérieure un charbon allumé la vapeur de naphte! qui fort s'allume incontinent, & continue à brüler comme une chandelle, fans interruption , jufqu'à ce qu’on l'éreigne tout exprès , ou qu'on enlève les tyaux. Ces fortes de tuyaux tiennent lieu de chandelle pendant la nuit, & ne fouffrent aucun dommage , moyennant la précau- tion que nous venons d'indiquer , fans laquelle le tuyau feroit néceflaire- ment confumé par le feu. Le puits d'où lon tire le naphte blanc, n'eft éloigné du feu perpétuel que d'environ un demi-werft vers le fud oueft. Avant d'y arriver, l’on pale à côté d’un petit lac de cinquante & quelques toifes de long fur vinge de large, & d'environ deux toifes de profondeur, qui eft la plupart du temps à fec, & ne fe remplit de quelque peu d'eau qu'en temps de pluie, C’eft à l’oueft de ce lac tout-à-fait en plaine, au pied d'une petite col- line, qu’eft la fource de naphte. C’eft proprement un puits de la gran- deurde 30 & quelqu:s pieds | & large de deux , au fond d'iquel le naphte fourcille goutte à goutre hors de la terre, & s’y conferve jufqu'à ce qu'on vienne len tirer. M. Gmelin n’y vit qu'une feule fource; mais les Habi- tans lui affurèrent que les chofes changeoïent de temps en temps ; que bientôt une fu ce fe perdoir, & qu'aufli-tôtaprès il en reparoifloit une autre. Le puits eft recouverten pierres enduites dans leurs'joints d’un ci- ment de terre vrafle , dans lequel on a gravé lé nom de Kan, afin que (x) Le premier dans Afuwllers Samml. Ruffifeh. Gefeh; c'elt-à-dire, Recueil pour fervir à L'Hifloire de. Ruffe , par AZ. Muller, part, 1 & Il, pag. 336 ; & le fecond, dans la Reluion de fes Voyages en Ruffie & en Perfe , tome I, page 281. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 165 perfonne ne puifle s'emparer du naphte , à moins que celui qui eft prépofé par le Kan à cet effet né lève certe efpèce de fcellé. Il ne faut pas s'imaginer que le naphte blanc ait reçu cette dénomina- tion parce qu'il a cette couleur : on ne la lui a donnée que parce qi eft tranfparent & jaune , & qu'il fe diftingue par-là du naphte noir; a flamme eft plus fubrile & plus pure, & la vapeur qui s’en élève n’eft pas à beaucoup près aufli défagréable que celle de l’autre; mais il brûle aufli beaucoup plus vite, & il s’enflamme même avant le contact du feu bien plutôt que le naphte noir, Le batmann, évalué à huit livres pefanc de naphte b'anc, fe vend 1 abas & demi ou 30 copecks; & c’eft le Kan de Baku qui jouit de ce revenu , fous le bon plaifir du Feth Ali Kan, Ce n’eft que lorfqu’on fait pafler ce naphte par l'alambic, qu'il prend une couleur blanche; & fi l’on réitère lopérationà une ou deux reprifes , il fe concentre au plus haut point , & on le prend en Perfe comme un réfolu- tif des plus pénétrans dans les rhumatifmes & dans les paralyfies ; de forte que les Mahométans , ainfi que les Arméniens en font généralement ufage, & le mettent au nombre de leurs remèdes domeftiques Le plus en vogue, Ce n'eft pas feulement dans la prefqu'Ifle d’'Apfcheron, décrite par Kæœmpfer ,. qu’on trouve du naphte : on en tire encore d’autres endroits de cette contrée, comme dans la prefqu'Ifle que les Perfans appellent Bae/, & le commun des Rufles ENS A ou Marche du Schach, où l'on a découvert dans ces derniers temps plufeurs puits de ce bitume li- quide. M. Gmelin ensa compté plus de foixante dix, qui font pareille- ment de figure cylindrique , profonds de douze toifes , & placés fans ordre les uns parmi les autres, L’un d'entreux, qui furpañle les autres en capa- cité , tient lieu de réfervoir, dans lequel on va verfer le naphte de toutes les autres fources qu'on a foin de fceller : mais ce naphte là n’eft pas d’auffi bonne qualité quecelui d’Apfcheron, parce qu'il eft confidérablement atténué par l’eau de la mer, & brüle par conféquent moins bien ; auñi ne le tranfporte t-on qu'à Sallian , tandis que toute La Perfe fe fournit de Fautre. Le naphte noir eft le feul dent on fafle ufage pour brûler ; aufi s'en fait-il un grand trafic. Le barmann de 15 livres fe paye $ copecks, & c'eft encore là un des revenus du Kan ,ainfi que le fel , qui fe vend 7 co- pecks & demi le poude. Tout le naphte blanc, ainfi que le noir, fe con- ferve & fe tranfporte dans des facs de cuir; il perd trop de fon poids dans des vaifleaux de bois. Ceux de terre valent mieux; mais les plus conve- nables de tous font ceux de verre, Le revenu annuel que le Kan de Baku retire de ce produit territorial , a été évalué par des Arméniens très-au fair , à 40,000 roubles, Il y a peu de chofe à dire fur l’origine de ce bi- tume, vu qu'il découle des Monts-Caucafe, dont l’hiftoire naturelle eft encore très-inconnue. Quantité de fuperfu de cette huile coule dans la 66 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mer , qui en contracte une amertume très-fenfible, & produit ce fef connu en Ruflie fous le nom de /e/ amer d'Aflracan. NE PE ET TNT EE SEE ETS EPP PEUT EU PEN IT AE PES TONI DISSERTATION BOTANIQUE Sur Le Fucus Helminthochotton , où Wermifuge de Corfe, improprement appellé Mouffe , Coralline, &c., contenant des recherches fur quelques Planres Cryptogames ; par M. DE LA TOURRETTE. h A célébrité que ce puiffant helmintique a méritée (1), fon ufage de- venu très fréquent , fon efficacité reconnue , même dans plufieurs fièvres vermineufes , doivent engager les Naturaliftes à fixer, d’une manière non équivoque , Les caractères extérieurs qui le diftinguent, afin de raffurer ceux qui l’emploient , de diriger ceux qui le recueillent, & de prévenir les fupercheries des Marchands qui Le débitent. En l’année 1776 , à l’époque à-peu-près où ce pu fut, pour [a première fois, apporté en France, je le préfentai à l’Académie de Lyon, & j'invitai à l’éprouver, d'après le récit d’un homme très-éclairé , qui, nouvellement arrivé de Corfe , m'en avoit donné une certaine quantité (2). EEE (1) On emploie communéinent dans la Ville de Lyon depuis cinq années , & tous jours avec le plus grand fuccès, contre les vers LomBRICS ; mais les deux efpèces de TŒNIA , le ver folitaire & le cucurbitain lui réfiftent ; il ne paroît même avoir aucune action contre les ASCARIDES. ayez Les Obfervaions fur les Maladies régnantes a Lyon, par MM. Virer & Perrin, Doüleurs-Médecins, année 1779 » Feuille 20. (2) Il meremiten même cemps deux autres produtions végétales , qui peuvent de= venir utiles à la France ; l’une eft le Lichen , connu de nos Teinuriers pe le nom d'oRSeILLE , cher roccella. Linn. Ils n'emploient que celle qu'ontire des Ifles Cana- ries. Les Juifs de Livourne fe procurent à meilleur compte l’orfeille que fourniffent les rochers de la Corfe. On en doit la connoiffanceà Micheli , célèbre Botanifte du Grand- Duc , qui le premier, au commencement de ce fiècle, la découvrit près de là, dans les les de la Tofcane. Il n€ faut pas la confondre avec une faufle orftille qu'on trouve en France, le lichen parellus , Linn. , la PARELLE ou orfeille d'Auvergne quife re- cueille auf fur les roches de plufieurs montagnes du Lyonnois & du Beaujolcis, {ous la forme d’une croûte grisâtre, patfemée de petitestécuelles blanches. La véritable orfeille a la forme d’un petit arbriffeau , & donne une couleur rouge très-fupérieue à celle que fournit la parelle. Avec la troifième produétion apportée de Corfe, on obtient une teinture brune, a , amalgamée , produit une forte de venrre de biche affez agréable : c’eft une pouf- ère brune , appellée serra-truffa , ape dans laquelle on trouve quelques frag- méns noirârres , fecs, de nature fongueufe. Elle provient d'une efpèce de uufte qui f Pre SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 167 J'expofai dès lors les raifuns qui me le faifoient confidérer comme appar- tenant au Règne Vépéral & au genre des FUCUS (1). Néanmoins il seit élevé des doutes à cet égard; & les Auteurs qui depuis en ont parlé , ont adopté diverfes opinions qu'il importe d'examiner. / Il convient d’abord dater un nom déterminé , parce que la fcience des noms , en Hiftoire Naturelle , fait éviter les erreurs de fait , en rappel- Jant à l'homme inftruit les caractères diftinctifs confignés dans d’exactes defcriptions. Le vermifuge de Corfe fe trouve dans cette Ifle (2), particulièrement au-delà des Monts, Il adhère aux Rochers baignés par les eaux de Ja mer, uelquefois aux pierres & aux coquillages jetés fur le rivage, Les Habitans LE Pays le nomment indifféremment erba Greca , mufchio di rocca di marre , limivho où lemithochortone , & corallina di Corfica. De-là font venues les diverfes dénominations qu’on lui donne en France; mais les unes & les autres font également défectueufes. Erba Greca, herbe Grecque, eft un nom local , qui paroît devoir fon origine à ce que la vertu de certe production a été publiée dans la Corfe, depuis pluñeurs fiècles , par des Grecs qui habiteient la Ville d'Ajazzo, Il eft évidemment trop vague, puifqu'il pourroit convenir à toute autre plante, Celui de mufchio di rocca di mare, mauffe de roche de mer, eft encore moins convenable. Les mouffes conftituent une famille de plantes , ordi- nairement terreftres , verdârres, douées d'organes vifibles, & d’une ma trouve fous terre dans l’Ifle de Æ/onre-Chriflo & dans la Corle. Les gens du Pays font cuire “æette truffe & la mangent avant fon entière maturité.En mñriffant, la pulpe fe defsèche & tombe en pouflière; ce qui montre que RUE eft du genre des lycoper- don de Linnée. Cependant , comme dans l’épaifleur des fragmens de l’écorce on voir évidemment de petites veflies fphériques , dans lefquelles la poudre brune eft contenue, cette efpèce paroit devoir être rangée dans la férie particulière que Micheli indique fous le nom de lichen-agaricus, tab. $4 & 55 , dont M. Adanfon a fait le genre de valfz, & qu'Haller a déterminée fous celui de fphæria, particulièrementilluftré & dé- veloppé par M. Weigel. (Voyez fes Obfèrv. Botan. , p.41, fx 4 2). : 41) MM. de Réaumur & Adanfcn ont confacré ce nom, & l’on s’en {ervira dans le cours de cette Diflertaion , quoiqu'on eût pu employer, avec quelques Auteurs mo- dernes , le nom de varFcH , dont la terminaifon eft plus françoife ; mais celui-ci ne paroît pas devoir indiquer le genre en ufage pour défioner une efpèce très con nue , qui fert d'engrais, & dont on fait de la foude en Normandie. C'eft le fucus veficulofus , L. , nomme par G. Bauhin & par Tournefort fucus marinus veficulas habens ; fe quercus murira Lobel, ic, tom. IT, 255. Il eft encore mieux repréfenté dans la planche de Réaumur , A/émU4cad. S., ann. 1711, pl 10, e (2) Je fuis forréloigné de penfer quelle de Corfe foit le feul pays où il fe ren- contre ; il eft à préfumer que les Ifles de la Tofcane en produifent: je crois même, fans pouvoir l'affurer , en avoir vu près du port de Livourne , & fur les côtes des en- virons de Naples, 4 ‘ 168 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nière de fe propager qui leur font propres, & qu'on r’apperçoit point ici (1). - La Gazette de Santé (2), en publiant ce fpécifique , fit remarquer que le nom de /emito ou limithochortone, étoit un nom barbare, corrompu, ui venoit vraifemblablement de he/minthochorton, mot compofé, dérivé ak deux mots grecs , tags & xépres lefquels fignifient ver & herbe. IL a paru depuis lors, dans un Recueil de Differtations Médicales (3) ; une Thèfe intéreffante, foutenue en 1780 par M. Schwendimann , fur la nature & l’ufage du vermifuge de Corfe, avec fon analyfe. L’Auteur adopte l'obfervation de la Gazette de Santé (4), fans la citer. Il emploie le mot he/minthochorton , qui paroît en effet devoir être confacré, parce qu'il eft en foi très-expreflif, & qu'il rappelle le nom vulgaire en le reéti= fiant. Ainfi, quel que foit Le vrai genre de cette produétion naturelle, le nom d’helminthochorton doit fervir à la fpécifier , & devient pour elle ce je les Botaniftes appellent le 70m srivial, furnom qu'ils ajoutent à celui u genre pour défigner l'efpèce avec précifion. Quant à la dénomination de coralline , elle eft ici dans le cas d’être abfolument rejettée; elle donne une fauffe idée de la chofe, Les Anciens confondoient une infinité de corps eflentiellement différens , fous les noms vagues de plantes marines , mouffes marines & corallines. Ces dernières font ainfi appellées à raifon de ce que leurs ramifications imitent celles du corail. Les obfervations des Modkeinee les font aujourd'hui placer, non- feulement dans des gentes , mais fouvent dans des règnes dif tinds, En annonçant l’helminthochorton , les Auteurs de la Gazette de Santé, fi eftimables d’ailleurs, ne paroiffent pas s’être fufifamment occupés de ces diftinétions, fans lefquelles néanmoins on retombe dans l’ancien chaos, & l'on s’expofe à de funeftes confufons. Is rangent l’helminthochorton à la fuite de deux vraies corallines, qui ont aufli quelques vertus anthelmin- tiques, & le défignent par le même nom. Cette méprife a induit en er- reur plufieurs Auteurs, qui depuis lors ont parlé de ce vermifuge. La fubftance des corallines craque fous la dent, parce qu’ellé eft en partie pierreufe, calcaire, Elle paroît, comme les coraux , avoir été pro- duite par des polypes , dont elle devient l’habitation. Les corallines appar- tiennent donc au règne animal, tandis que l'helminthochorton, ainfi qu'on le verra , eft une véritable plante, @) Poyez Drrrenir Hifforia mufcorum, & Mar. Jof. ve Necker Phyfiologia mufcorum. (2) Année1777, 30 Janvier ,n°. $ , p. 19, aux notes. (3) Dekiülus Differtationum Medicarum Argentoraten{um , collec. à Phil. Lud. M iwer, Aled. Norimberse , 17814 (4) Tbid, page 252. RATE Le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 169 Le moindre examen fuffit pour le diftinguer efléntiellement à l'extérieur des deux corallines anthelmintiques , la coralline officinale ou blanche & la coralline rouge (1) ; elles droit évidemment compofées d’articulations, dont on ne trouve en lui adcune trace, Ces articulations font autant de petits corps minces, crétacés , pierreux, unis par unefine membrane à laquelle ils adhèrent. iA reconnoître ces corallines , il fuffit de jeter les yeux fur les plan- ches gravées qu'on trouve dans les Auteurs. La Gazette de Santé a donné une très-bonne figure de la cotalline officinale blanche (2); les articula- tions y font exprimées. Celle de M. Ellis (3) eft encore plus nette, mieux prononcée, On en voitd’autres fufifantes dans Barrelier (4) & Morifon(s), & de très inférieures dans la plupart des anciens Botaniftes |, notamment Lobel , Tabernæmontanus, Dodoens, Dalechamp, Parkinfon, Jean Baubhin , &c. Sa couleur eft ordinairement blanche, quelquefois teinte en verd , en gris ou rougeñtre ; mais elle redevient blanche lorfqu'elle a refté fur le rivage expofée à l'attion du foleil. - La coralline rouge, moins connue, eft cependant prefque aufli com- mune dans nos mers : fes articulations font plus fines, plus ferrées, ab- folument cylindriques; fa couleur tend conftamment du blanc au rouge. On peut confulter fur celle-ci Ellis, Tab. 24, litt. E , la planche de Barre- lier, 1276 , n°. 2; Plukenet (Phitographia), Tab. 168, f. 3; & vrai- femblablement aufli Chabrée ( Sciagraphia) , pag. 578. Il paroït l'indiquer fous le nom de corallina five mufcus marinus tenut capillo. Peut être a-t-il voulu exprimer la coralline officinale ; mais fa figure , un peu confufe, repréfente encore mieux la rouge. Il affure qu’elle expulfe Les vers du corps humain dans lejour, er la faifant prendre dans du vin, du lait ou de La caffe. Au refte, lorfque je confidère les corallines comme faifant partie du règne animal , j'embraffe l'opinion de Linné, fondée fur les obfervations de M. Ellis , fur l’analogie de ces corps avec les autres polypiers, fur la nature calcaire de leur fubftance , & fur une obfervation plus ancienne du Comte Marfgli (6), qui, cherchant à découvrir leur manière de feu- tir, pour établir qu'elles faifoient partie du règne végétal, reconnut ce- pendant dans elles un fel volatil & une huile animale, Je n'ignore pas que le favant Bernard de Juflieu, dans fes Recherches (x) Corallina officinalis & corallina rubens. Linn. Syfk nat. anim.pag. 1304. Hola mie , 1767. (2) Loco cirato, n°.7,a. & b. (3) Hiftoire des Corallines , tab. 24, fig. 2. (4) Barrelieri, Plantarum Icones, 1276, n°. {s) Hiftoria Plantirum Oxon. {e@. 15 ; t. 9. (6) Hiftoire phyfique de la Mer. Tome XX, Part. II,1782. SEPTEMBRE. Y 170 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur les polypiers (1), dit n’voir pas apperçu l'animal de la coralline, & qu’en conféquence un Naturalifte appellé à réparer la perte des Linné & des Jufieu (M. Pallas ) a élevé des doutes fur l'animalité de ce corps, dans fon Traité des Zoophites (2). Lorfque de pareils Obfervateurs ne s'accordent pas, il eft prudent de fufpendre fon jugement , d’attendre-de nouvelles lu- mières , ou d'adopter le fentiment du célèbre M. Bonnet (3), appuyé des nouvelles obfervations de M. Necker (4); fentiment qui confifte à ne confidérer les trois Règnes que comme une méthode factice imaginée pour foulager notre mémoire , en mettant de l'ordre dans nos études , & à ne reconnoître effectivement dans l'univerfalité de la Nature qu'une continuité d'êtres enchaînés les uns aux autres par des rapports effen- tiels. Remarquons toutefois que M. Pallas lui-même place dans fon Ouvrage les corallines à la fuite des zoophites. Mais à fuppofer qu’elles fuffent re- connues, fans aucun doute , pour de fimples végétaux, il faudroit en- core fe bien garder de leur aflocier l'helminthochorton. Suivant les pro- pres documens de M. Pallas, lorganifation & la fubftance des unes font trop différentes de celles qu'on voit dans l'autre, pour pouvoir en aucun cas les confondre fous un même nom, & ne pas leur afligner au moins dif- férens genres, La Fule infpection fuffit pour s’aflurer que l'helminthochorton eft une plante (voyez planche I, fig. 1), & qu'il n'a de commun avec quelques zoophites que le lieu natal, Il croît fur les rochers de la Corfe, qui font baignés par les eaux de la mer; il y adhère comme de la mouffe diftri- buée en buiffons , par petites touffes de la hauteur d’un pouce environ. Sa couleur dominante eft fauve, paflant quelquefois au gris, avec une teinte rougeâtre. Lorfqu'il eft defféché tel qu'on le trouve dans le com- merce , il eft caffant, & répand une forte odeur de marée; mais par la combuftion , il ne donne aucun principe volatil; il exhale une fimple odeur végétale , femblable à celle d’un fragment d'herbe ou d’un mor- (1) Mém. Acad. Sc., ann. 1742. (2) Elenchus zoophitorum ( pag. 418.) Hagæ-Comitum, 1766. En dernier lieu, le P. Maratti , Profefleur de Botanique à Rome, attaché aux idées de Marfigli & de Tour- nefort, a rejetté , fans héfiter, les obfervarions des Peyffonnel, des Réaumur, des Juffieu , des Ellis, des Pallas, &c., & a préteadu faire rentrer dans le Règne végéral, non-feulement les corallines, mais généralement tous les zoophites, les lithophites , les coraux , les fertulaires & même les polypes de M. Tremblei, malgré leur mouvement fpontané. La Science , ainfi que la mode, elt-elle donc condamnée à ne parcourir qu'un cercle, & à reveni: fans cefle au point d’où elle elt partie? Woyeg J. Fr. Marauë, de plais zoophits & lirhorhitis. Rome, 1776: (3) Voyez la Contemplation de la Nature, part. 10, & la Palingénéfie, tome z, (4) Phyfiologia mufcorum , coneluffo ,p. 309, & eq. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17x ceau de bois , qui, après avoir long-temps trempés dans l’eau de la mer, auroient été defléchés & brüleroient. Si on le met dans l’eau , bientôr il fe dilate en touc fens, & toutes fes parties fe développent ( fig. 2.) Examiné dans cet état, on reconnoît facilement que c’eft une plante, non pas du nombre de celles qui font li- gneufes ou herbacées , mais de celles qui font cartilagineufes, telles que les ulva , les fucus & plufeurs lichens : avec de bons yeux ou une fimple loupe, on difcerne alors fans peine fon organifation; elle eft aflez fimple , mais cependant beaucoup moins qu'on ne l'imagine à la première vue. En général, la plante eft compofée de petites tiges cartilagineufes o# filets pleins, à-peu-près cylindriques & fubulés, c’eft à-dire, rerminés en pointe, comme une alène (fig 1, 2 & 10, leu.b.) Leur adhérence au rocher ou à d’autres corps durs , exifte fans empatement & fans racines (fig1,S68,/let.a), Îl convient de remarquer que tous les filets ne naiflent pas immédiate- ment du rocher, Très -fouvent vers la bafe de la plante on voit de plus grofles tiges (fig. 466, lerr. d.), couchées , prefque horizontales , noueu- fes, ftriées , irrégulières, d’où partent les fibres cylindriques. Ces tiges ho- rizontales refflemblent en petit à certaines racines de joncs & de rofeaux, traçant fous la terre, & donnant naïflance aux tuyaux des tiges qui for- tent & s'élèvent en l'air. On en voit d'à-peu-près femblables à quelque fucus , comme au fucus fafligiatus. Lin, très-bien exprimées dans la plan- che d'Oeder (1). Les fibres ou petites tiges ne font pas toujours fimples; plufieurs jettent dans leur prolongation des rameaux latéraux (fig. 2 & 6 , Less. 1), ordinai. rement dichotomes ou fourchus (fig. 6 & 7, lee. e); très-fouvent elles fe terminent en deux , trois ou quatre filets fubulés, ainfi que les branches latérales (fig. $ , 6, ler. f.) Au point où commence la fourchure des filets, & à l'infertion des rameaux, on voit prefque toujours un petit nœud de couleur rembrunie (fig. $, 6,7, 8 69, ler. g), d'où s’élancent les fiiets fupérieurs, qui , partant d'un même point , lorfqu'ils font multipliés, imitent en quelque forte les rayons de certaines ombellifères , ou les ver- ticilles des rubiacées. Ces verticilles ne fe voient guères qu'aux extrémi- tés; cependant ils fe répètent quelquefois le long de la tige (fig. 3, dert. h.) Telle eft l’organifation extérieure de l’helminthochorton , qui, dans l'intérieur, ne laiffe voir qu'une fubltance cartilagineufe homogène. La Gazette de Santé, & les Auteurs qui l'ont décrit, n’ont fait aucune men- tion des diverfes ramifications qu'on vient d'indiquer; néanmoins elles (1) Flora Danica , 1.393. Tome XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE, Vz 172 . OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, doivent concourir à le diftinguer de plufeurs autres plantes congé- nères, D'ailleurs, lobfervation la plus fcrupuleufe, aïdée de la plus forte loupe , ne fair découvrir dans les tiges, ni dans les rameaux , aucune ap- arence de fleurs ou de femences, ni rien qui puifle en faire fuppofer Pexiftence. On fait que les Botaniftes n’attachent pas au mot fleur le même fens que le vulgaire. Faïfant abftraction des couleurs, des odeurs , des formes mêmes ,ils nomment ainfi toutes parties de la plante deftinées à devenir le lieu & l'agent de la fécondation , confidérant la fleur comme le Zi conjugal où fe produit la génération & fe prépare la reproduction de Yêtre. Or, l’helminthochorton n’en préfente aucun indice , fous quelque afpect que ce foi. On voit à la vérité affez fréquemment adhérer aux tiges ou aux fauffes racines, de petits corps folides, ordinairement blanchâtres & crétacés , affectant diverfes formes irréoulières (fig. 3, less: c.c. c.); mais ils paroiffent évidemment étrangers à la plante. Ce font des fragmens de tuf, des rudimens de coraux , de madrépores , de coquillages , tels qu'on en trouve fur la plupart des corps baignés par les eaux de la mer. De ces obfervations, & de la defcription précédente, il fuit que l’hel- minthochorton doit être confidéré comme plante eryptogame, c’eft-à-dire, faifant partie de la clafle des végétaux, qui font dépourvus d’étamines , de piltils , de pétales & de tous les organes qui, dans les plantes ordinaires, con- courent à la reproduction ; enun mot dont la génération & la fruification: font cachées , inconnues ou peu déterminées; fortes d'êtres à peine inté- riéurement organifés , & qui paroiflent former le premier, ou, fi l’on veut; le dernier chaînon de la chaîne végétale. D'accord avec le Chevalier Linnée, la plupart des Botaniftes moder- nes divifent les cryptogames en quatre grandes familles naturelles , qui . font-les mouffes , les fougères, les champignons & les algues (1). Chaque famille fe fubdivife enfuite en genres, diftingués par des caradtères plus ou moins fenfibles ; car dans cette obfcure férie des végéraux, la Nature paroît fe jouer de l’obfervateur, & ne foulever à fes yeux un coin du voile dont elle s’enveloppe, que pour le livrer bientôt à des ténèbres plus pro- fondes, L'helminthochorton appartient évidemment à la famille des aïgues , en obfervant que ce mot ne fe prend point ici dans le fens vague des Hiftoriens & des Voyageurs, qui confondent fous cette dénomination un grand nombre de genres différens, en particulier le foin de mer, zofferæ (r) Le favant M. Adanfon a propofé quelques changemens &c des fous-divifions | fondées fur des obfervations très-lumineufes; mais on fuit ici la divifion de Linné , comme plus Gmple & plus en ufage, SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 173 marina. L., plante complette , anciennement nommée par les Botaniftes mêmes (1) alga Vitriariorum , algue des Verriers, parce que fes feuilles, qui ne pourriflent point , fervent à emballer les bouteilles. Leur incorrup- tibilité & l’élafticité qu’elles acquièrent lorfqu’on les amoncèle , les ont fait entrer utilement dans la compofition des digues de la zort-Hollande; & les fibrilles de la plante , brifées , entrelacées, roulées par les vagues de la mer, forment ces efpèces d'égagropiles, nommées pelores de mer, fi communes fur les côtes de la méditerranée. Mais le nom d’algue ne convient aucunement à cette plante, puifqu'elle,eft pourvue d’éramines & de piftils, quoique M. Klein, dans la belle planche qu'il en a donnée (2), ait omis de les exprimer. Si donc l’on confidère les algues , fuivant l’acception des Botaniftes mo- dernes, comme une des quatre familles de plantes cryptogames , on les diftinguera d’abord des champignons , dont la forme, la fubftance & la manière de fe reproduire, n'ont aucun rapport avec elles, & diffèrent tellement de celles de tous les végétaux , que de nos jours ils ont été tépu- tés des productions animales (3). On obfervera néanmoins que les algues s’'éloignent aufli des plantes complettes, encore plus que les fougères & :(r) G.B. P. & Tournefort, (2) Jac. Theod. Klein, Differr. Epiftolaris de pilis marinis. Gedani, 1773. (3) Au rapport de M. Weis ( Planr. Crypwog. Goning. ,p. à & feg.) M. Büttner, Profeffeur dans l’'Univerfité de Goxtingue , obferva en 1756, que divers champignons renfermés dans une boîte à l’ombre, répandirent en pourriffant beaucoup de pouflière blanche ; que cette pouflière , examinée au microfcope , fut reconnue pour être un amas de petits œufs, pleins d’une matière liquide, & qui faifoientdu bruit, lorfqu'on les écrafoit ; qu'au bout de quelque temps , ces petits œufs fe convertirent en efpèces de chryfalides | d'où fortirent autant de mou- ches différentes qu’il y avoit eu de différens champignons dans la boîte. M. Von-Lin- né, en 1767, annonça ( ifferr. mundum énvifibilem breviter delineaura) que la poul- fière farineufe que produifoient les lycoperdons, les agarics & autres champignons, celle même du mucor ; étoient bien la vraie femence deces plantes; mais que fi l’on mettoit ces femences dans l’eau tiède pendant quelques jours, il en fortoit de petits vers vifbles au microfcope, qui bientôt formoient un petit tiffu, dans lequel ils reftoient immobiles , & d’où fortoient enfuite des champignons de [a même efpèce que ceux qui les avoient produits. En 1768, M. Wilk publia en Angleterre une autre expé- rence fur la pouflière des champignons. Ayant enlevé la pellicule irférieure de l’aga- ric des prés qui fe mange , il la mit dans de l’eau, qui fe teignit en rouge. Une goutte de cette eau, obfervée au microfcope, parut contenir une grande quantité de femences de champignons ou globules rougeâtres, ps avoient un point noir. Trois jours après, ces globules prirent un mouvement pontané très-prompr, & M. Vilk crut remarquer que plufeurs de ces animalcules s'étant agrégés & réunis , poufloient des efpèces de radicules ; d’où il conclut qu’il y à beaucoup de rapports enrre les champignons & les zoophites. Cette obfervation paroit confirmer celle du Chevalier Linné; mais celle de M. Büttner n’a certainement aucune analogieayec Les deux aurres. x 134 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les moufles. Celles ci font pourvues de quelques efpèces de feuilles, & pofsèdent, chacune à leur manière, une fructification qui leur eft pro- pre; fruétification quelquefois peu fenfible , mais toujours plus caractéri- fée que celle des algues. La fubftance des algues eft ordinairement cartilagineufe, membraneufe, filamenteufe , lanugineufe ou même pulvérulente. En général, elles croif- fent fans avoir befoin de terre, & plufieurs font aquatiques. Le plus fou- vent parafites, elles s’attachent à d'autres plantes ou à des corps étran- gers, prenant leur nourriture par Les pores abforbans de leurs furfaces, & non par leurs racines , qui ne font que de fimples griffes, par lefquel- les elles adhèrent. La plupart font vivaces , fe defsèchent facilement à l'air, reviennent à la vie lorfqu'elles font expofées à l'humidité, & ne paroiflent avoir de vigueur que dans l'eau , dans les lieux humides & les faifons plu- vieufes. Leur forme varie à l’infini; les unes rampent , les autres s'élèvent ; elles s'éloignent quelquefois abfolument de l'idée qu'on a d'une plante ; elles s'en rapprochent d’autres fois par des efpèces de tiges & de rameaux, va- riés , applatis, branchus ou même réticulés. Dépourvues d'étamines & de pétales, leur caraétère diftin@tif confifte dans une fructification obfcure , rarement fupportée par un pédicule (1), placée ordinairement à la furface de la plante (2), où même contenue dans fon épaifleur (3). Les parties de cette frudtification ne font autre chofe que de fimples réceptacles de pouflières fécondantes & de femences, ou de corps qu’on juge tels. Micheli (4), Dillen (5) & Linné (6) ont confidéré les réceptacles de pouflières comme les fleurs males, & les ré- ceptacles de femences comme les fleurs femelles : mais il faut remarquer ue très-fouvent ces caractères manquent entièrement ou font invilibles ; de manière qu'il faut y fuppléer par l'analogie , l'examen comparé & la progreffion des autres rapports. C'eft ce qui arrive à l'helminthochorton, qui, comme on l'a dit, ne préfente à l'obfervateur attentif aucun indice d'organifation génitale. Mais il eft évidemment doué des caractères généraux qui conftituent les algues ; fuivant les principes établis. En effet, c'eft une production végé- tale, cartilagineufe, à peine intérieurement orgañifée, dénuée de vraies racines, adhérant fimplement à des corps durs (fig. 1 , lert. a. ), pom- (1) Dans quelques Jungermania , marchantia anthoceros. (2) Dans les Zchens , byus , conferves , bluffa , riccia , targionia, tremea, (3) Dans les fucus, les wlva. (4) Nova genera Planrarum. (s) Hifforia mufcorum. (6) Gencre Plantarum, un: 7 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 17 pant , par les pores de fa furface, la nourriture dont elle eft environnée dans la mer, compofée de filamens ramiñés & cartilagineux , qui fe defsèchent à l'air (fig. 1), s’y contractent & fe développent de nouveau dans l’eau ( fig. 2.) Elle eff donc de la famille des algues; mais comme cette fantille fe fubdivife en plufeurs genres, il s’agit de reconnoître celui auquel elle fe rapporte. Obfervons d’abord que le plus léger examen fépare totalement J'hel- minthochorton des fix premiers genres établis par Linné. On ne fauroit non plus le confondre avec les chara , quoique ce foient aufi des plantes aquatiques. Ce genre, anciennement placé dans la cryptogamie parmi les algues, a été reconnu depuis par plufieurs Botaniftes, entr'autres MM. Adanfon (1), Schreber (2)& Linné (3), pour être compofé de plan- tes complettes, pourvues d'une anthère, d'un calice , d’un ftigmate, d’un germe : mais d'autres Obfervateurs (4) ont nié l’ufage de ces parties , & ont refufé cet honneur au chara. M. Scopoli fe contente de l’appeller p/éu- docryptogame (5). Quoi qu’il en foit de leur ufage & de leur deftination , ces caractères font fenfibles & conftans, ce qui fuffit pour diftinguer l'helminthochorton, qui certainement ne les pofsède pas. Il a encore moins de rapports avec les sremella , dont la confiftance eft . gélatineufe, & les u/va, qui font des membranes applaties. Tout conf: déré, on ne peut guères lui foupçonner d’analogie qu'avec les hyffus, les /ychens , les conférves ou les fucus, genres de plantes où l’on trouve des efpèces fibreufes ou rameufes comme lui. La confiftance des kyffus , molle , lanugineufe, ou fe préfentant comme un fimple duvet, n’eft point celle de l'helminthochorton ; quelques lichens le rappellent par leurs divifions filamenteufes où même ramifées, tels que les #/mées & les coralloïdes de Dillen ; mais , indépendamment de leur fructification en écuflon, le plus fouvent apparente, leur fubftance cruftacée , farinacée à l'extérieur , les en diftingue fufhfamment, & l’on ne connoît aucun lichen aquatique , marin. Reftent les conferves & les fucus, deux genres dont toutes les efpèces font conftamment aquatiques, & dans le dernier toujours maritimes, J'a- voue qu'à mes yeux tout annonce une parfaite aralogie entre notre plante & les fucus; & je n’eufle pasmis la chofe en doute, fi l’eftimable Auteur (1) Familles des PL ,t. XT, p.472 , hermaphrodite, parmi les arum. (2) Flora Lypfica , n°. 1009. (3) Lin. Mantiffi, p.23 , & Genera pl. ed. nova ,n®. 1171, parmi les plantes mo- noïques. (4) Haller, Hifi. Srirp. Hely., tom. III, p.3;& #7eis, Plant, crypr Going. ; ae (5) Flora Carniolica , ed, fec., p. 400. 176 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de la Thèfe dont j'ai parlé ci-deffus, M.Schwendimann, ne fe fût dé- cidé en faveur des conferves. Je conviens qu'il eft très-dificile d’afligner Les vraies limites de ces deux genres; qu'on pafle de l'un à l'autre par des nuances prefqu'infenfibles ; qu'ils préfentent plufeurs attributs communs, & que leurs efpèces femblent quelquefois fe rapprocher d'autant plus , que les caractères tirés de la fruc- tification , qui feroient les plus certains, font très-obfcurs, & nuls dans un grand nombre d'individus , comme dans le cas préfent, Mais la Science n’elt pas pour cela en défaut; elle a recours alors au concours des autres circonftances , principalement à cette habirude générale de la plante , qui eft à-peu près dans les végétaux ce que chez les animaux, parmi les hommes fur-tout, on nomme port & phyffonomie; cette facies propria, qui fert à découvrir, fous Le mafque , celui dont on n'entend pas la voix; qui fait reconnoïtre quelqu'un qu’on n’a jamais vu, pour frère d’une per fonne dont Les traits font néanmoins différens. Je conviens que cette ma- nière de difcerner & de clafler les plantes, eft aflez vague & peut-être fau- tive pour les commençans ; mais elle dirige , avec une forte de certitude, le Naturalifte plus inftruit , comme l'Aloëbre conduit le Géomètre fans l'éclairer. Je conferve dans mon Herbier plufieurs efpèces de conferves, & un très-grand nombre de fucus defléchés. J'ai comparé fcrupuleufement les unes & les autres , efpèce par efpèce, à l'helminthochorton & à fes varié- tés. Il fuit de cette comparaifon qu'on ne peut fe refufer à lui trouver les rapports les plus direéts avec certains fucus , 8 prefque aucun avec les çconferves, dont il n’a ni l'allure, ni le port, Mais voyons, par l'examen des fignes détaillés qui diffinguent les deux genres, s'ils ne préfentent pas aufli quelques caractères fecondaires fur lefquels on puifle appuyer une décifion plus fatisfaifante. Examinons d’abord les conferves (1) ; c’eft un genre de plantes aqua- tiques , adhérentes aux corps durs, ou fans adhéfion. (Les nappes ver- dâtres & filamenteufes , qui furnagent fur les eaux ftagnantes, font de ce nombre). Ces plantes paroiflent ftériles , deftituées de leurs, & de tout ce qui entient lieu dans les moufles & les lichens, Cependant, quelques Modernes ont cru reconnoître des femences microfcopiques dans des cap- fules ou points gélatineux , difperfés dans toute leur fubftance. Cette fubftance eft muqueufe, gélatineufe , foyeufe ou fpongieufe; leur forme eft rameufe ou fimple. Ce font des filamens uniformes, fouples , alongés, quelquefois de plufieurs aynes de long , & terminés en cheveux , capillamenta tenuia, comme le veut Dillen (2), ce grand & profond 2 ———_—— ————————— ————— (1) Plinii conferva , appellata à ferruminando , &c. Lobel Srirp. obf. 654. {2) Hiftoriz mufcorum , pag, 11. Scrutateux SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 177 Scrutateur des petits détails végétaux. Il faut ajouter que leurs filamens font creux, tubulés, comme autant de petits canaux (1), & ces tuyaux font fouvent divifés dans leur longueur en petites articulations , ainfi que le lombric par fes anneaux (2); mais cette divifion n’eft qu'extérieure, & due au refferrement occafionné par des bulles d'air, interpofées de dif- tance en diftance dans les petits tubes pénétrés d’eau. Ce refferrement perfifte au dehors, après la defliccation, fans qu'il y ait aucune divifion réelle ou valvule dans l'intérieur du tube (3). On voit que, parmi tous ces caraétères , quelques-uns en FAP nombre pourroient peut-être fe rapporter à l’'helminthochorton, ainfi qu’à certains fucus ; mais ceux qui font le plus apparens les en diftinguent très- certainement. Paflons aux fucus. Les parties de leur fructification confiftent, fuivant quelques Botaniftes, dans certaines véficules , qui font difpofées dans leur épaifleur. D'autres confidérant ces veflies comme fimplement defti- nées à faire furnager la plante, n’admettent que les tubercules granifères qu'on y rencontre aulli (4). Mais ces queftions, très délicates, ne font ici d'aucune importance; pou lhelminthochorton ne préfente aucune apparence de fructifca- ion quelconque; & remarquons que ces parties paroïflent manquer éga- lement dans un grand nombre de fucus , tels que les efpèces, qui font nommées par Linné, crifpus, criflatus ; dentatus , rubens , plumo- Jus , &ec. (5). D'où il fuit que l’Auteur de la Thèfe rejette à tort de ce genre l’hel- minthochorton , par l'unique raifon qu'il ef, dit-il, dépourvu des véfcu- les & des grains dont il s'agit (6). S'ils manquent dans d’autres efpèces de fucus , ne peuvent-ils pas être pareillement invifibles dans notre plante, fans que pour cela elle foit d’un genre différent ? Il faut donc recourir aux autres caractères qui conftituent Les fucus, (x) Conferva. .. fpongia aguarum dulcium veriüs quèm mufeus au herba; villofe denfiratis atgue FISTULOSæ. llin. lib, 27 ,ch.9. 'ila vacuo canali prædira. HW els. crypt., p.10. (2) Toutes les conferves marines font géniculées ou articulées, fi l’on excepte la /tro- ralis & l’æruginofz. Lin. (3)Zcis. crype, p.10. (4) Voyez dans l'Hiftoire des Fucus , par M. Sam. Gmelin , l'examen qu’il fait des fleurs mâles & femelles, obfervées par M. de Réaumur dans quelques fucus. Hi/for. Fucorum, pag. 8& [eg. (s) Linnæi Syft. Nat, edit. 12. (6) Non poteft annumerari fucis , cm granula, nec vefficulæ ,nec corpus penicillifor= mme , ën ëll& confpiciantur, (Loco cirato , pag. 259.) Tome XX , Part, II, 1782. SEPTEMBRE, Z 178 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & qui fervent à les diftinguer des autres genres de la famille des algues. Adhérens, comme la plupart, à des corps durs (1), fans racines nutritives, les fucus font en général difpofés en buiflons ou arbriffeaux élevés; ils font compofés de tiges fimples ou rameufes , fouvent applaties , terminées quelquefois par des efpèces de feuilles , variant dans leur grandeur depuis 1 pouce js 20 pieds (2), leur fubftance eft cartilagineufe, coriace ou gélarineufe, principalement dans les jeunes produétions; le plus grand nombre eft cartilagineux. M. Gmelin (3) fait de ce caraétère une de fes prin- cipales divifions, obfervantque ce font les fucus les plus fimples & en même temps ceux dans qui les organes de la reproduction font plus cachés. Tout cela convient parfaitement à l’helminthochorton , qui paroîe évidemment faire partie de cette férie ; il eft rameux , fous forme de touffe ou de buiflon (fig. 1 6 2), & fa fubftance eft cartilagineufe, Les con- ferves ne préfentent ni cette forme, ni cette confftance; elles font com- pofées de fimples membranes, infiniment plus ténues & plus fouples. La fubftance cartilagineufe, dans l’helminthochorton comme dans le fucus, devient sèche & caffante par la defficcation; elle fe renfle dans l'eau, sy ramollit & s'y développe. Les conferves, plus flexibles en fe defféchant, ne deviennent ni dures, nicaflantes. Si quelques-unes paroiflent friables, en cet état, on doit uniquement l'attribuer aux grains de terre ou de fable qui adhèrent quelquefois à leurs membranes. La fouplefle de ces mem- branes facilite leur développement dans l’eau; mais elles n'ont pas l'expanfi- bilité du cartilage des fucus. Ce n’eft pas leur fubftance qui enfle dans fon épaiffeur ; le léger renflement qu’elles paroïffent éprouver dans l'eau n'eft produit que par les bulles d'air qui fe dilate alors dans-fes petites cavités, Enfin , un des caraëtères des plus fenfibles qui diftingue l’helminthochor- ton des conferves, c’eft que les filamens de celles-ci font fiftuleux , tubu- lés, au lieu que les tiges de lhelminthochorton font pleines comme celles des fucus. Si l'on joint à cela l'habitude générale dont j'ai parlé, le port qui dans les conferves fe préfente comme un amas de tuyaux capillaires , alongés, d'un diamètre à-peu-près égal dans toute leur longueur, furnageans & fottans librement au gré des ondes, à raifon de leur foupleffe & de leur ténuité & qui , dans l’helminthochorton , offrent l’afpe& d’un petit buiffon, dont les tiges courtes & rigides font fouvent noueufes par le bas (fig. 4 & 6 , let. d') , à la manière de plufeurs fucus, notamment du foffigratus , gravé dans la Flore Danoife (4), il me paroît que l'analogie eft très- fufhfante , fi elle ne pafle pas pour complete, (1) Ærracate adaliri corpi, come unacera liquefuta Jopra unapietra, Boccon. Muf. P. 168. (2) Samuel Gmelin, Hiftor. Fuçorum , pag. 7. (3) Tbid, (4) Flora Danica, tab. 393. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 179 Parmi les fucus décrits par le Chevalier von-Linné & par M.S. Gme- lin, l’helminthochorton paroît fe rapprocher des efpèces que j’ai cirées ci- deflus , & plus particulièrement du fucus aculeatus de Linné, fur-tout de la variété indiquée dans fes mantifla (1) , fous le nom de B. mufcoides , qui eft le fucus mufcoides de Gmelin, table 12 ( Barrelier. ic. 1123, n°. 1.). La maffe totale ne difière, au premier afpeét, que par fa peti- tefle , n'ayant que douze ou quinze lignes , tandis que le rrufcoïdes a plu- fieurs pouces , dans les individus que j'ai cueillis aux environs de Livourne, & dans ceux qu’on trouve auf près du port de Marfeille, où l'efpèce pa- roît plus colorée, Coupez l'extrémité des rameaux du fucus mufcoides, fuppofez cette partie fupérieure adhérente par fa bafe , vous croirez voir une touffe d'helminthochorton , & je ferois porté à penfer, vu les rap- ports extérieurs, que ce font de jeunes individus du ufcoides, qu'on a quelquefois confondus fous le nom d'helminthochorton #ajor (2): je dis confondus , parce qu'en effect, au moyen d'une loupe, & même à œil nud, on apperçoit une différence trop marquée dans les ramifications alternes & fubulées de l’aculeatus mufcoïdes , pour ne pas en conftituer deux efpèces ; ce qui paroît d'autant plus effentiel , que ce grand helminthochor- ton, que je fuppofe avoir été pris pour le mufcoides , eft reconnu pour in- férieur en qualité & moins efficace que le petit. Je ne doute pas au refte qu'on ne trouvât des vertus analogues à plu- fieurs autres fucus , comme ägrand nombre de produétions marines, em taifon des fubftances falines qui les pénètrent & les alimentent. L'eau de mer eft elle-même réputée vermifuge (3). Après avoir établi que As du eft du genre des fucus , il refte à fixer l'efpèce; & pour cela , à chercher premièrement fi les Auteurs an- ciens ou modernes , qui ont publié des obfervations fur les plantes mari- nes & fur les zoophites qui leur reffemblent , ont déterminé de quelque manière cette petite plante, s'ils l'ont décrite, gravée ou fait connoître, fous quelque nom que ce foit. - L'étude de la fynonymie n’eft pas de fimple curiofité en Botanique; je la regarde comme de la plus grande utilité. Cherche-t-on, fans fon fe- cours, à reculer les limites de la Science ? on rifque de la faire rétrogra, der , en l'embarraffant dans fa marche. On donne pour nouveau ce que d’autres ont connu : on détruit au lieu d'édifier , & l’on répand de nouvel les ténèbres. Pour bien obferver , il ne fufht pas d’obferver tout feul ; il faut fur-tout vérifier & comparer les obfervations des autres. Chaque Bo- 0) Linn. Mantiffa | pag. $09. (2) Voyez la Thele citée page 260 , & la Gazette de Santé, page 19. (3) Voyez la Gazette de Santé, année 1777, n°.31, pag. 124. Tome XX , Part. Il, 17982. SEPTEMBRE. Z 72 \ 480 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, tanophile a fa manière de voir & de décrire. La connoiffance & la com paraifon des phrafes defcriptives, qu'on nomme /ynonymes , doit done jeter un vrai jour fur la détermination de Pefpèce ; & de quelqu'impor- tance que foit celle des genres , la diftinétion des efpèces eft certainement le dernier but &le véritable objet de la Botanique. Convaincu de la vérité de ces principes, j'ai voulu les appliquer à l'examen de la plante dont il eft queftion ; mais c’eft en vain que j'ai cher- ché à la découvrir dans les Ouvrages modernes les plus eflentiels , tels que ceux de MM. Linné (x), Ellis (2), Pallas (3), ni même dans la belle & nombreufe Hiftoire des Fucus de M. Samuel Gmelin. On pourroit fuppofer , fi l’helminthochorton n'exifte réellement que fur les rochers de la Corfe, que ces Savans n'ont pas été à portée de le con- noître; peut-être aufli, vu fa petitefle , a-t-il échappé à leur examen, comme une produétion qui n'avoit encore fon plein accroifflement. L'abfence ou l'invifibilité des parties de la frudification, pourroit le faire conjecturer; car , fuivant l’ebfervation de M. Gmelin, les fucus en font très-fouvent dépourvus dans leur enfance, & ne les acquièrent qu’en avan- çant en âge, comme les autres plantes ne fleuriflent qu'après un certain accroifflement. Mais on ne peut pas fuppofer que, dans l'immenfe quan- tité d’helminthochorton qu'on tire de la Corfe, depuis qu’il eft en ufage parmi nous , il ne fe füt rencontré aucun individu dans fa maturité, Tout porte à croire que l’état où nous le voyons eft fon état naturel. M. Gme- lin en cite d’autres efpèces , qui , comme celle-ci, n'ont jamais plus d’un pouce de grandeur; & dans le nombre de celles qu’il a fait graver , il en eft plufieurs dans lefquelles il n’a point découvert les parties de la gé- nération. Avant M. Gmelin, Pluchnet (4) & Morifon (5), Botaniftes Anglois ; qui ont publié les defcriptions & les figures de plufeurs fucus, n’en ont indiqué aucun qui puifle fe rapporter à l'helminthochorton : on Le cher- cheroit en vain dans le fuperbe Recueil de M. der, intitulé: /4 Flore Danoife. On trouve dans Buxbaum (6), Botanifte Ruffe, un petit fucus, qu'il nomme : Mufeus marinus, denticulatus, parvus , ramis falcatis , & qui repréfente en quelque forte un rameau détaché de l'helminthochor- ton; mais cette figure n'eft aucunement fufhfante, & la defcription eft trop vague. (1) Syft. nar. ed. 12, & pofteriores , à D°. Murraï, & à D°. Reichard. (2) Hiftoire Naturelle des Corallines , trad. de PAnglois. (3) Elenchus Zoophitarum. (4) Leon. Pluchnerii Opera Lotanica. Londini. (s) Planrarum Hifloria Univerfulis , Oxonienfis , &c. (6) Plansarum minüs cognitarum centuriæ , Perropoli, cenr, 3, r. 66 , f. x: SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 18x On pourroit , avec plus de vraifemblance, reconnoître notre plante dans les trois petites figures que Boccone (1) a données , fous le nom de mufeus tridaëtilites ; capillaceus | maritimus | multifidus , niger , fibrosä ra- dice. Les divifions des petits rameaux, & même lestiges horizontales , in- férieures, noueufes, y paroiffent indiquées : mais le fucus de Boccone, d’après fa defcriprion, diffère évidemment du nôtre par fa couleur marron, qui noircit à mefure qu'il fe defsèche; par fa grandeur , qui eft d'un em- pan ; par fon lieu natal , l'océan fur les côtes d'Angleterre , &c. Je foup- çonne qu'il a voulu exprimeren petit le fucus fafligiatus de Linné & de Gmelin , defliné en grand dans la Flore Danoife, pl. 393. M. Schwendimann , dans la Thèfe que j'ai citée pluñeurs fois, confi- dérant notre plante comme une conferve, dit qu’elle approche de la con- ferva dichotoma de Linnée ; mais le Chevalier Linné afligne pour celle-ci la figure gravée par Dillen à la table 3 , fig. 9 de l'Hiffoire des Mouffss. Or, il fuffit de jeter les yeux fur cette planche, pour s’'aflurer que la con- ferve indiquée n’a très-exaétement aucun rapport avec l’helminthochorton, ni parla taille, ni par la forme , encore moins fi l’on en juge par les def- criptions de ces Auteurs. [l feroit moins étonnant qu’on eût remarqué dans les conferves de Dillen la fig. 15 de la planche IV. On peut effectivement y prendre une légère idée de J'helminthochorton, en s’arrêtant à la forme générale , fans confidérer les divifions particulières, & abitraction faite de la fubftance, de la couleur , du lieu natal, &c., qui démontrent que c'eft une plante différente. M. Schwendimann croit aufli retrouver l’helminthochorton dans le mufeus fpicatus capillaris de Barrelier, planche, 1291, fig. 13 (2). La plante de Barrelier eft certainement plus rameufe ; quant à moi , je penfe qu'il eft plus à propos de le rapporter au mufcus coralloïdes bifidus du même Auteur, planche 1276, n°. 3. La defcriprion donnée par Antoine de Juffieu , éditeur de Barrelier, convient infiniment mieux, parce qu’en effet l'helminthochorton eft fouvent bifide , comme je l'ai dit ; ce que la planche exprime fufffamment. Peut-être encore pourroit-on adopter le mufeus coralloïdes bifidus minor du même Auteur, pl. 227$ , n°. 6 (3) ; car les anciens Botaniftes ne fe fai- foient pas fcrupule de donner quelquefois la plante & fa variété avec deux phrafes & deux figures différentes : mais l'Editeur a obfervé, à l’égard du mufeus coralloides bifidus minor , que cette petite plante craguoit fous la dent, (1) Mufeo di fifica di Don Paulo Boccone, in Venetia, 1697 , pag. 268 , m8, s#°.11. (2) M. Schwendimann cite DRRRS 1391: c’eft une faute d’impreflion. Barrelier n°4 donné que 1327 planches , & le fynonyme cité fe rapporte à la planche 1192 (G) Pag. 121, obfery, 1332. 2 182 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, à caufe de fa fubftance topheufe, ce qui fembleroit devoir la placer indubita. blement parmi les vraies corallines, S'il écoit permis de fuppofer quelque inexa@irude dans l’obfervation , & de croire que ce craquement étoic dû à quelques-uns de ces petits corps étrangers, fragmens de coquilles, ma- drépores & autres, qui s'attachent fréquemment à la furface de notre plante, on pourroit alors foupçonner , à la grande refflemblance de la figure, où l’on ne trouve point les articulations de la coralline, que Bar- relier a exprimé la petite variété de l'helminthochorton , celle dont les Praticiens font le plus de cas. Quoi qu'il en foit , la Gazette de Santé (1) a fait graver une planche, qui eft encore préférable, La mafle eft bien repréfentée dans fon état de deficcation. Il feroit à defirer feulement qu’on ne fe fût pas contenté d’y joindre un feul rameau détaché , & qu’on eût mieux caraétérifé l'efpèce, en figurant la plante plus développée , avec les divers accidens que pré- fentent les rameaux & les tiges, multifides, horizontales , noueules, &c. La même Gazette cite une autre planche moderne , & le fynonyme de M. Velfch, corallina tenuifolia , conchis & tophis marinis adnata (2); elle avertit néanmoins que la planche eft défectueufe, Je n'ai point lOu- vrage de cet Auteur; mais M. Schwendimann obferve qu'il ne faut pas s'étonner de l'inexactitude de cette plante, puifque M. Velfch a entendu indiquer une plante , qui, bien qu'elle foit anthelminthique , eft abfolu- ment différente du vermifuge de Corfe. Dans ce chaos d’incertitudes , j'ai cru devoir donner un nouveau deflin, qui, par fes détails & fa précifion , pût fervir à fixer inconteftablement les idées (3), fans rejerer néanmoins la figure de la Gazette de Santé, en adoptant même celle de Barrelier , pl. 1276, n°. 3. Ainfi , après avoir examiné quelle eftla dénomination la plus convena- ble au vermifuge de Corfe , & avoir fixé le règne auquel il appartient, j'ai décrit la plante dans routes fes parties. Par cetre defcription , j'ai re- connu quelle étoit fa clafle, & j'ai été conduit à déterminer fon genre. Des recherches multipliées ont fait voir enfuite que l'efpèce n'avoit pas été fuffifamment diftinguée jufqu'à ce jour. Pour completter ces obfervations , peut-être trop longues en elles-mê- mes (4), je les terminerai par un tableau, qui les circonfcrive & Les raf- femble fous un feul point de vue , à la manière des Botaniftes modernes, ———— (x) Au lieu cité, ann. 1777, n°.$ , page 20, fig. 2. (2) Hecaroftez , IE Obfers. Phyf. Méd. XVII. (3) Voyez pl. I. : . (4) Elles fontinfiniment trop longues pour les Botaniftes ; mais j'ai cru devoir me Jivrer à tous les détails d’une Differtation , afin d’être entendu de ceux à qui la Botanique p'a jamais été familière, ou qui l’ont perdue de vue, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 18 & dans La langue qui paroît leur être confacrée , par fon abondance, fa précifion & fa clarté. * Fucus HELMINTHOCHORTON. Uncialis , cefpitofus, elureo-rufus , fubrubefcens ; ramis bafi horizontali- bus , intricaris | nodo/o-rugofis ; fupernè erelis, fémplicibus , fubulatis ; Jæpits apice bifidis trifidifve ; ad divifionem nodo/fis. Icon. propria, tab, 1. CoRALLINA minima bifide, Ant. Juif. , feu mufcus coralloïdes bifdus, Bat: relier, page 120, icon. 1276, n°. III. An varietas B. Corallina cruftacea bifida , Ant, Jui. , fèu mufèus coralloïs des bifidus minor. Barrelier , page 121 , icon. 127$, n°.6. CONFERVA HELMINTHOCHORTOS, dichotoma , uncialis , rufefcens , ramis horigontalibus. Scwhendimann , helmint. , Hift, Differt. Med. Ar- ntor, LEMITHOCHORTON ou CORALLINE DE Corse. Gazette de Santé, année 1777,n°. $, tab. 2. Ad rupes marinas Corfice & ad faxa arëlè adhærens, Cgserv. /ubflantia cartilaginofa & color FUCI ACULEATI , ecnon MUS- corp: {qui varietas, Linn. Mant.) & huic proximus. Differt tenuitate , habitu minori, G ramos alternos non gerens. Vefficulis uterque caret , veluti FUCUS CRISPUS, L. RUBENS, CRISTATUS, PLUMOSUS, @ plurimi fiquentes. Défcription des Figures, PL I, fig 1. Touffe d’helminthochorton, repréfenté de grandeur ra- turelle, & defléché, tel qu'il arrive de Éorke. aa, petite portion du rocher auquel adhéroit la plante ; à , extrémité des fibres ou rameaux con- tractés par la defliccation. Fig. 2. Une pareille touffe , ramollie & développée dans l’eau, pour reconnoître les divifions des tiges & leur difpoñtion. (b, vers Le haut), tiges fimples & fubulées, (b, er bas) , tiges compofées , multifides; £ , di- verfement ramifiées. Fig. 3. Une touffe d'helminthochorton , également développée. C C C indiquent plufieurs -petits corps étrangers , ou fragmens de coraux , de madrépores , coquillages , &c, adhérens aux fibres de La plante: en H,un rameau à double verticille. Fig. 4. Touffe développée & renflée dans l'eau , pour découvrir en dd les groffes tiges horizontales, noueufes , irréoulières , d’où s'élèvent des fibres fimples ou rameufes, Nota. Les fix figures fuivantes montrent Les diverfes ramifications que pra- Jentent les tiges | après leur développement dans l'eau. Fig. $.a , fragment de corps dur auquel La plante adhère par fa bafe, 194 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE. ST, les extrémités des tiges , divifées en trois, quatre ou plufeurs filets, & comme verticillées, gg , le point ou nœud où fe réuniflent les filets. Fig. 6. d, fragment d'une orofle tige noueufe, horizontale, donnant naiffance à deux petites tiges fibreufes , qui fe ramifent ; e, tige fourchue ; f; fibre divifée en quatre ou cinq filets; g, nœud de l'infetion des filets, :, autre ramification. Fig- 7. Diverfes ramifications ; e, fibre fourchue ; g, point de l’infer- tion. Fig. 8, idem. en «& , corps durs, fragment de coquille auquel elt attas chée la plante. Fig. 9, idem.; c, tige fourchue, & nœud de l'infertion comme en g, Fig, 10. Petit rameau moins compolfé; 4, tige fimple, MÉMOIRE Contenant les details, analyfes € réfultats des experiences faites en 1780 par ordre du Gouvernement, dans les Forges du Comté de Buffon en Bour- gogne, © dans la Manufaëture Royale d’Acier fin de Néronville en Gäti-= nois ; afin de connoître fi les Fers françois ont la propriété d’être convertis en Acier , par la voie de la cémentation. Lu a l'Académie des Sciences les 8 & 12 Juin 1782; par M. GRIGNON, Chevalier de l'Ordre du Ror, Nvavr préfenté à l’Adminiftration plufieurs Mémoires, dans lefquels j'avois démontré la néceflité de tenter les moyens d'élever en France des M d'acier fin, pour enlever aux Etrangers une branche de commerce d'importation qui eft fi onéreufe à la Nation; que Néronville étoitla feule Manufacture en grand d'acier fin par cémentation , & qu'elle n’employoit que des fers de Suède (1); & enfin, ayant afluré, d'après les effais que j'avois faits , qu'il étoit poflible de convertir nos fers françois en bon acier fin. (x) M. le Comte de Broglie fait fabriquer de l'acier par cémentation, depuis environ quinze ans, dans fes forges de Ruffecqen Angoumois , avec les fers de cette forge. En 1781, M. Mongenet, Maître des Forges de Franche-Comté, s’eft attaché un Gare Etranger pour lui monter une Fabrique d’acier avec les fers de la Province. Toutes les guues Fabriques d’acier du Royaume travaillent en acier naturel ou produit par la fonte de fer immédiatement, Le SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 118$ Le Gouvernement , attentif à procurer aux Arts & aux Manufadures nationales , des objets d’émulation & les moyens de faire fleurir le Com- merce, m'autorifa en Novembre 1779 à faire les expériences néceflaires pour conftarer la propriété relative que les meilleures efpèces de fers fran- çois ont pour être convertis en acier fin, par la voie de la cémenta- tion, M. le Comte de Buffon voulüt partager le facrifice que Le Gouvernement faifoit à l'utilité publique ; il offrit fes forges & un fourneau, que cet homme célèbre à tant de titres avoit fait conftruire à grands frais pour reprendre la fuite de fes expériences für l'acier. Nous engageimes l'Admi- niftration à accepter ces offres avec d'autant plus d’empreffement , que cette poftion nous fournifloit l’occafion de confulter ce Savant dans le cours de nos opérations , de profiter de fes lumières & de fes confeils , & que les moyens qu'il offroit diminueroient ‘confidérablement les dé- penfes. Dèslors je me difpofai à préparer tous les objets néceffaires. J'écrivis dans différentes Provinces du Royaume , pour faire rendre à Buffon lee fers de meilleures qualités qui m'étoient connus. J'en tirai des Pyrénées, des Alpes, des Vofses, de Franche-Comté, Lorraine , Champagne & Berry. Dans l’examen de ces fers, j'indiquerai les forges dans lefquelles ils ont été fabriqués. 11 éroit néceffaire que je m'afluraffe de l’état du fourneau deftiné à mes opérations , afin de prévoir & faire d’avance les réparations dont il pee voit être fufceptible. Je me rendis en Décembre 1779 aux Forges de But- fon; j'examinai le fourneau ; je trouvai les arceaux & des dalles de pier- res de 4 pouces d’épaifleur préparées pour le creufet. Jeles fis placer dans l'intérieur du fourneau, & le fis murer , comme fi le creufet eût été rem- pli dé fer en cémentation. Je fis enfuite du feu de bois pendant un jour entier, pour en connoître le tirage & le degré de chaleur dont il étoit fufceptible. Par cette tentative préliminaire, je reconnus que ce fourneau , éroit en état de remplir le but de mes opérations , en y faifant quelques changemens légers , & cependant effentiels au révime du feu. e Ce fourneau eft une mafle de maçonnerie adoffée à un mur de forte conftruétion; la bafe forme un quarré long de 14 pieds 2 pouces de lon- gueur fur 8 pieds 2 pouces de largeur ; tout l'extérieur eft compofé de gros carrodages en pierres de taille, dans lefquelles on a pratiqué trois rangs d’évents triangulaires , au nombre de 30, diftribués fur les trois faces apparentes du fourneau. Au centre de cette mafle l’on a laiffé un efpace vuide pour contenir le foyer , le éreufet & fes fupports. Cer efpace a 26 pouces de largeur; elle pénètre la maffe de parten part, & s'élève juf- ge la hauteur de 7 pieds 3 pouces, depuis le fol jufques fous la clef une voûte en brique de 12 pouces d’épaifleur, Cette voûte eft percée de Tome XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE. À a 186 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, cinq ouvertures régulièrement efpacées, & garnies chacune d’un tuyau de fonte de fer de $ pouces fur $ pouces en quarré. C’eft par ces tuyaux que la flamme s'échappe dans cinq canaux formés en maçonnerie de brique, fur les mêmes dimenfions que les tuyaux de fonte de fer. Ces canaux fonc pofés obliquement; leur bafe s'embouche avec les tuyaux, & leurs fom- mets vont dégorger dans l'ouverture d’une cheminée élevée fur un des côtés du mafhf du fourneau; la partie fupérieure s'élève au-deflus des toitures : c'eft cette cheminée qui détermine Le tirage du fourneau & le send très-aéctif, Le vuide intérieur du fourneau eft muré de part & d’autre avec des bri- ques ; l’épaiffeur de chaque portion de cette maçonnerie eft divifée en deux parties , l’une extérieure , qui reçoit l'impreflion du feu: c'eft une che- mile de 13 pouces d'épaifleur , n'ayant que 8 pouces à la bafe, parce qu'il y a une faillie de la maçonnerie qu'elle enveloppe fur 20 pouces de hauteur. Cette chemife s’élève perpendiculairement , & fupporte la voute de l'intérieur du four ; elle n’eft point liée avec le mur de brique intermé- diaire entr'elle & la maçonnerie en pierre, parce qu'étant fujette à éprou- ver des dégradations occafionnées par le feu, on peut la démolir & la re- conftruire , fans altérer les autres parties du fourneau, Le mur intermé- diaire en brique eft feulement de 6 pouces d’épaiffeur ; il fert de cuirafle à la maçonnerie en pierre calcaire du pourtour du fourneau , afin de le défendre de l’action de la chaleur. Pour placer le creufer dans le fourneau , l’on conftruit treize arceaux, dont les deux premiers affleurent la face extérieure des deux côtés des tie. fards, & n’ont que 6 pouces d’épaifleur & de largeur: ils ne ferven. qu'à fupporter le mur de brique que l’on élève de chaque côté pour fermer le fourneau, lorfque lenfournement eft complet. Les onze autres arceaux ont chacun 8 pouces de largeur & 6 pouces d’épaifleur ; ils font efpacés de 6 pouces en & pouces, pour donner des iflues à la flamme qui doit - chauffer le creufet, & s'élèvent à 37 poucesde hauteur, où ils fe termi- nent horizontalement, pour recevoir la plate-forme du creufer. L'efpace longitudinal qui règne dans touté la longueur du fourneau fous Ces arceaux , pour former le foyer , eft de 16 pouces de largeur & de 29 pouces de hauteur fous clef. Le creufet qui portoit fur ces arceaux étoit compofé de dalles de pier- res (dites grès de Semur) de 4 pouces un quart d'épaifleur; celles du fond étuient pofées à plat fur les arceaux , & celles des quatre côtés de champ à la hauteur de 27 pouces au-deffus du fond , toutes liaifonnées avec un mortier d’argile rouge. L'on tifoit le feu des deux côtés, en jet- tant des fagots & des bourrées fous l’arcade: il éroit excité par un vent paffant ; & lorfque nous fimes ouvrir les murs poftiches du fourneau, pour en reconnoître l’état intérieur, nous nous apperçümes que le feu que nous avions fait faire en Décembre avoit calciné les pierres de grès dont SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 137 Je creufet éroit compofé ; ce qui me fit connoître que ce grès de Semur n'eft compofé que d'un très-gros fable quartzeux , réuni en mafle fort dure par un cément de fpath calcaire, & qu'il n’eft pas propre à former un creufet de cette efpèce. Je le remplaçai avec des Crabe de Montbar & d'Ancy-le-Franc, n'ayant pu m'en procurer de meilleure qualité. Je crus devoir divifer en deux parties le foyer inférieur quirégnoit dans toute la longueur du fourneau , parce que l'air entroit par un côté plus abondamment que par l’autre, fuivant l'impulfion qu'il recevoit de la preflion de l’atmofphère : cette variété rendoit le feu inégal, abforboit une parte dela chaleur, & incommodoit les Ouvriers; accident qui n'eut pas liew depuis que j'eus fair élever un diaphragme au centre, afin de divifer le foyer inférieur en deux parties féparées & fans communication. J'avois reconnu aufñli que la méthode de chauffer ces fortes de four- neaux étoit vicieufe, en ce que l'on jette le bois fous l’arcade, ainfi qu'il fe pratique dans les Briqueteries & autres fourneaux en différens genres. Les inconvéniens qui en rélultent font une moindre chaleur , une plus grande dépenfe de combutible, & le tirage moins actif, Je fis conftruire à cha- que bout, des landiers tels que ceux dont on fait ufage dans plufieurs fours de porcelaine; ils avoient 27 pouces de hauteur, 32 pouces de lon- ueur , & un pied de largeur intérieurement : ils étoient traverfés par deux a de fer de 15 lignes de proffeur, & j'avois fait pratiquer dans la partie antérieure une ouverture de 12 pouces de hauteur fur 15 pouces de largeur , pour débraifer en cas de befoin; & hors le temps néceflaire pour cette opération , cette ouverture éroit coujours fermée par une plaque de fonte de fer, l La méthode de tifer le feu ,en fe fervant de landiers, procure une in- finité d'avantages dont voici les principaux. 1°, Un enfant de 15 à 16 ans peut alimenter le feu, puifqu’il fuit de pofer fucceflivement une buche de 28 à 30 pouces fur le foyer. 2°. Le tifeur n’eft jamais vexé par la chaleur ; au contraire, en pofant fa buche fur le centre d'où le fourneau tire la chaleur la plus intenfe, il reffent l'effet d’une fraîcheur occalionnée par la colonne d'air qui fe préci- pite avec rapidité , & fe renouvelle fans cefle. 3°. Il ne fe fair de braife dans les fourneaux de ce genre, qui ont un bon tirage , que dans les premières journées , ou jufqu'à ce que le feu ait acquis affez d'activité pour blanchir les corps qui font foumis à fon action; alors toute la matière combuftible fe décompofe, pour augmenter la chaleur : à peine refte-t-il quelques cendres. 4°. Il n’entre dans le fourneau , à travers les buches qui couvrent les lan- diers , aucune partie furabondante d'air atmofphérique, qui ne foit dé- compofée par l’embrafement du bois qu'il occafionne ; point bien effentiel , & fur lequel ceux qui ont écrit fur la Pyrotechnie n’ont pas encore aflez réfléchi, & qu'ils n'ont peut-être pas encore apperçu. Tome X X, Part. 11, 1782. SEPTEMBRE. Az2 188 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, Dans un fourneau où l’on établit le foyer fur Le fol , même fur une grille, il pañle une colonne d'air, dont il n’y a que la partie qui touche immédia- tement la mafle de combuftible embrafée , qui fubifle une décompofition néceffaire à l'intenfité de la chaleur: l’autre , qui pafle pardeflus le centre du foyer, eft entraînée par le tirage dans la capacité dufourneau , fans être décompofée; elle atténue une partie de la chateur, & détruit même fon effet. L'air fait plus ; il décompofe les corps , & réduit en chaux Les métaux que l’on fe propofoit de fondre. C'’eft fur cet accident qu’eft fon- dée la litargiration en grand du plomb dans la coupelle; l’on favorife cette litargiration par l’intromillion de l'air fourni par le vent d’un fouffler, rabattu fur le métal en bain par des papillons. Cet air atmofphérique cal- cine le plomb & l'empêche d'entrer en une vitrification complette, parce qu'il na pas fervi à l’'embrafement, & qu’il n'a pas été décompofé; car fi le plomb , dans les affinages en grand, fe vitrifioit , il s’imbiberoit prefque totalement dansle maflif de la coupelle, ce qui arrive dans les eflais do- cimaftiques. t Lorfque nous avons appris que tous les fers que nous avions demandés étoient arrivés aux Forges de Buffon, nous nous y fommes rendus ; nous avions pris la précaution de recommander aux Maîtres de Forgzs qu'ils fiffent mettre ces fers en bottes; qu’ils fuffent marqués exactement des ca- ractères diftinctifs & d’ufage dans les Forges d’où ils procédoient, pour éviter la confufon , être bien für de l’origine de chacun de ces fers, & enfin qu’ils fuffent forgés à très -peu-près fur les mêmes dimenfions (r). Voulant éprouver la propriété des fers des Forges de Buffon, & per- füadés qu'en prenant des précautions pour les purifier, l'acier qui en téfulteroit feroit d’une meilleure qualité que celui que l’on faifoit avec les fers fabriqués fuivant l’ufage ordinaire de la forge , j'ai choifi une gueufe, portant le n°, 49 ; fon grain étoit gris, petit, brillant; il y avoit peu de facettes. J'ai démoli une Afinerie; pour y monter une Fonderie, afin d'y ma- cérer partie de cette gueufe : l’on en atiré 458 livres de mazelle ; le furplus de cette gueufe a été affiné dans une renardière à la manière ordinaire. On verra la difparité de ces fers, procédans de la même oueufe , dans l'exa- men de tous les fers qui ont été employés à nos effäis, Les 458 livres de mazelle ont produit 330 livres de fer: c’eft à raifon de 1287 + pour 1000, Je m'érois procuré des fers d'Efpagne , de Suède & de Sibérie, par la voie du Havre, afin d’avoir des points de comparaifon avec les 2 de France, Ceux d’Efpagne étoient fous forme d’applati, échantillon qui ne (1) M. de Lauberdière, Maître des Forges de Buffon, nous a prêté, de Ja manière la plus officieufe, tous les fecours dont nous avions befoin, Ouvriers, ufines, matériaux en tousgenres & fa mailon, avec la plus grande générofité. Nous lui devons cet hommage public de notre reconnoiffance. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 189 convenoit pas à mes opérations: je l'ai fait couper & corroyer, pour le ré- duire fous le marteau à des dimenfions à-peu près femblables à celles des fers des autres qualités, Ce fer d'Efpagne, qui venoit de Bilbao, s’eft trouvé rouverain , c’eft-à dire, caffant à chaud , & fe forgeant très-difficilement; mais d’une très- grarde ténacité à froid. J'ai procédé enfuice à marquer toutes les barrés aux deux bouts & fur chaque fice plate avec un cifeau à froid, pour y imprimer un n°, particu- lier à chaque efpèce , afin que je pufle les reconnoître après qu'elles fe- soient cémentées , & je Les ai placées chacune féparément dans des cafes co- tées des n°° correfpondans. Je fis caffer Les fers, afin de reconnoître la qualité de chacun; enfuite couper de longueur propoitionnée au creufet, en leur donnant 2 pouces de moins que le creufet, qui avoit 10 pieds 7 pouces de longueur en de. dans. Tous ces fers furent d’abord cifelés de quatre faces , & rompus à coups de mafle fur un cafloir de Fenderie. Nous détaillerons les qualités diftinétives de ces fers, dans un tableau qui préfentera leur état en nature de fer, d'acier bourfoufflé , &en acier fabriqué, afin que l’on foit à même de faire des comparaifons plus précifes. Pendant qué je faifois préparer les fers, je m'occupois en même temps des matières propres à la cémentation, & de la conftruétion du creufer, Je fis monter les arceaux , des dimenfions décrites plus haut, avec des briques de Montbar, ainfi que la féparation des deux SRE inférieurs ; je fis pofer fur ces arceaux une plate-forme de 11 pieds 4 pouces de lon- ueur fur 20 pouces de largeur, & de $ pouces d’épaifleur , ns de Éiques d'Ancy-le-Franc , qui font moins ferrugineufes que celles de Mont: bar. J’obfervai de former le premier rang de cette plate-forme avec de grands carreaux , qui portoient de 2 pouces fur les arceaux , & de faire cou- vrir tous Les joints par le fecond rang, ainfi fucceflivement par les trois autres rangs, afin de bien liaifonner la maçonnerie faite avec mortier de terre roug> aroilleufe détrempée claire, pour éviter lépaifleur du mortier, J'élevai enfuite les SD rire du creufet avec des briques de même qua- lité, fur æpouces d'épaifleur & 37 pouces de hauteur. J'obfervai d'ap- puyer ces parois du creufet par des piles de 4 pouces de largeur, montées en briques, & liaifonnées avec le creufet, laiflant des intervalles de 4 pou- ces de largeur & de 8 pouces de longueur fur toute la hauteur du creu- fer, pour fervir de paflage à la flamme. Lorfque le creufet fut achevé, je le laiffai fécher un jour, & enfuite jy plasai le fer lit fur lit, entremêlé de lit de poudre de cémentation , preffée avec les pieds, le premier & Le derhier lit de poudre étant de 1 = pouce, & les autres d’égale épaifleur À celle du fer. Il y a eu quatorze Lits de fer; fur le dernier lit de cémenta- tion, jy avois placé une couche formée d’une triple feuille de papier gris mouillé , & pardeflus une couche de fable vitrefcible , tiré de la rivière 199 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'Armançon , afin de contenir le cément, & de Le garantir de l’action immédiate du feu & de l'air. Ce lit de fable portoit fur les briques des côtés du creufer, & décrivoit un arc dont la corde avoit 20 pouces & la flèche 4 pouces. J'avois fait pratiquer à chaque bout du creufet deux ouvertures de 2< ouces de largeur & de 15 pouce de hauteur , pour placer des barres d'épreuves ; & en rangeant le fer dans le creufet, j'avois eu l'attention de faire pafler par ces trous des bouts de barres qui fortoient de 8 pouces de longueur, pour pouvoir Les tirer, & par-là juger des degrés de lac- tion de la cémentation. L'on éleva enfuite en briques les deux murs pofti- ches qui fermoient Le fourneau , en obfervant de pratiquer des carneaux vis-à-vis les éprouvettes; carneaux que l'on fcelle en maçonnerie, pendant que le fourneau eft en feu. Je laiflai fécher un jour cette maçon- nerie. J’avois tenu regiftre des fortes & du poids des fers qui compofoient chaque rang ; il en étoit entré 3737 : livres en 73 barres, avec 65 bouts & a filières de fer provenant de la Filerie de Lod en Franche-Comté; enfin, 22 pieds cubes de poudre de cémentation. Le cinquième jour d’Aoùt , à $ + heures du matin, je fis mettre le feu au fourneau, & l'on commença par un petit few pour fécher les mortiers ; le lendemain à pareille heure, le fourneau poufla beaucoup de vapeurs, & le feu prenoit déjà de l'intenfité. Le 9, àtrois heures du matin, l'on s’eft apperçu de la chûte d'une bri- que, & vers minuit un arceau s'affaifla. Le 10 , à fix heures , cer arceau coula en mâchefer, & le fond du creufet s’ouvrit: il fallut cefler le feu, Cet accident a été accalionné par la qualité trop fondante des briques de Montbar & du mortier (1). Lorfque le fourneau fut refroidi , on démolit tout l'intérieur ; la partie du fer qui avoit reçu immédiatement l’action du feu, par la rupture du creufet , occafionnée par La fufion des briques ferrugineufes qui compo- foient les arceaux , étoit -très-endommagée, & l'acier qui s’étoit formé avoit été en plus grande partie détruit par Le recuit qu'ilavoit reçu ; mais la partie des barres qui n'avoit point ceflé d'être entourée de cément , étoit convertie plus des deux tiers , c’elt-à-dire, qu'il reftoit environ un tiers de fer au centre. Je procédai promptement à la reconftruction d’un nouveau creufet ; je (1) En1780 , pareil accident a manqué d’être très-funefte à la Manufacture de Néronville; au huitième jour de feu, les mortiers du fourneau fondirent & formè- rent une matière vitreufe , qui , ruiffelant de toutes parts, vint fe réunir dans les chauffes, où il fe forma une maffe de plus de fix milliers de verre très-maffif. Heureufement que Ja cémençation étoit finie, & que cet accident n’endommägea point l’acier ÿ car il y en avoir plus de 73 milliers dans les creufets. L. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. x91 füivis l'avis de M. le Comte de-Buffon, pour faire les arccaux en pierre de taille calcaire, puifqu'il ne devoir fervir qu'une fois: on mit feulement des patins ou des bafesde briques fous les arceaux , & le dizphragme fut fait de briques d’Ancy , n'ayant pas fous la maïn des pierres propres en fuf- fifance. Le fond du creufer fut tormé par des dalles de pierres à ÿ pouces d'épaiffeur , fur lefquelles on éleva les côtés avec des briques d'Ancy-le- Franc, liées avec du mortier compolé de terre à faïance pulvérifée & ta- milée , gâchée très-claire. Je fis donner 33 pouces de hauteur au creufet, & je le remplis de vingt-deux lits de barres de fer, & dervingt-fix lits de poudre de cémentation ; il y entra 4070: livres de fer , faifant 7: pieds Cubes, & 24 pieds cubes de poudre de cémentation; en total, 31+ pieds çubes, quoique les dimenfions du creufet, qui font de 10 pieds 7 pouces de longueur , 12 pouces de largeur, & de 33 pouces de hauteur, ne donnent que 29 < pieds cubes: en forte que la cémentation a été diminuée de volume de 2 > pieds, par la compreflion qu’on lui a donnée en en- fournant. Elle a éprouvé encore une plus forte diminution par le taffe- ment , qui eft l'effet du feu , ainfi que nous le verrons plus bas. J'obfervai les mêmes précautions pour cette fournée, comme dans la précédente, Tout étant prêt, les rouvettes placées & les murs poftiches finis le 22 Aoûc, je laiflai le as raffermir le 23, ; Le 24, à cinq heures du matin, on alluma le feu fur lâtre , c’eft-à- dire , fur Le fol du cendrier, fans faire ufage des landiers, afin de faire petit feu pour fécher & échauffer infenfiblement le fourneau. Le lendemain matin on poufla le feu jufques vers le diâphragme du fourneau , toujours très-doucement avec trois à quatre buches de chêne par chaque bout , ran- gées le long du cendrier. Pendant la nuit , le fourneau parut s’échauffer, particulièrement dans le milieu; l’odeur de corne brülée fe fit fentir, ce qui dénotoit que le feu commençoit à porter fon action dans l’intérieur du creufer. Le 26, à cinq heures du matin, je fis tifer fur les landiers, après avoir fait débraiferen partie le cendrier; les deux rangées fupérieures des foupiraux commencèrent à poufler quelques vapeurs aqueufes; & dans le milieu du jour du 27, le feu pritune fi grande intenfité ,que le diaphragme fondit en partie , ainfi que la bafe en briqué des arceaux : les parties en pierres ne reçurent aucune atteinte; & quoique l’on ait retiré de.dedans le fourneau quelques briques réduites , par la chaleur , en pâte molle, il n’en eft réfulté aucun accident qui ait porté préjudice au fuccès de l'opéra tion, Le même jour , vers les fept heures du foir , l'on fentitune légère odeur fulfureufe , qui provenoit des matières de la cémentation , quoiqu’elles ne continffent rien de fulfureux par elles-mêmes, Le 28, à feptheures du matin, je tirai une éprouvette, qui me dé- montra que lacémentation n'avoit encore pénétré qu'au tiers de l'épaif- 192 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, feur du fer: mais quoique le bout de barre qui fervoit d’éprouvette füt compofé d’un fer très nerveux & difficile à rompre, il étoit devenu très- caflant, tant la partie. qui étoit déjà de bon aeier , que la partie fer- reufe. , Re Il avoit régné un vent très-violent, qui , refoulant fur la cheminée, avoit un peu ralenti l’activité du feu, ce qui avoit fait accumuler de la braife dans le cendrier, & fait-pouffer par les foupiraux des vapeurs noi- res , qui avoient une odeur de Be de foufre: il fallut débraifer par les portes des landiers, & j'apperçus alors des gâteaux de mafles vitreufes, qui me donnèrent de l'inquiétude; mais ne m'appercevant d’aucun déran- gement , je continuai à poufler le feu. Quoique le 29 le vent eût gêné le feu , le fourneau étoit très-chaud, & ronfloit uniformément ; les foupiraux cefsèrent de pouffer des vapeurs noires & odorantes, Le feu fe foutint très-bien par un tirage uni- forme. Le 30, à l'aurore, le vent vint encore nous contrarier. Je fis tirer à huie heures du matin une feconde éprouvette, qui montra un beau grain uni- forme, femblable à une belle fonte grife de fer , fans apparence de partie ferreufe. Cet acier , chauffé cerife ,'fe forgeoit bien ; chauffé blanc, avant d'avoir été forgé , il éclatoit fous le marteau: mais après lavoir traité doucement , il a fubi les chaudes fuantes, s’eft bien foudé. J'en ai fait faire un cifeau à froid, qui enlevoit des copeaux de fer, fans grainer, ni refouler. À dix heures du même jour, j’äi tiré une troifième éprouvette , qui étoit entièrement convertie en acier d'un grain uniforme; & comme les di-* menfions de cette barre étoient un peu plus foibles que la majeure partie de celles qui étoient foumifes à l'effet de la cémentation, j'ai fait continuer Le feu jufqu'à fept heures du foir. Le feu a duré continu fix jours & treize heures , dont trente-fept heures de petit feu , un jour de feu moyen , & quatre jours d'un feu très- vif. L'on a confommé douze cordes de bois de 8 pieds de couche & de 4 pieds de hauteur , les buches de 28 pouces, ce qui fait feize voies de Paris , tant en chêne que hêtre , frêne & tremble, avec cent cinquante fa- gots de peuplier, qui ont produit 9 pieds cubes de cendres paflées, pe- fant 37 liv. le pied cube ; au total, 333 livres, en négligeanc les cendres rovenant des fagots pour celles qui ont pu être mêlées dans les décom- de & celles qui ont été entraînées dans la cheminée par le torrent de la ventilation. Il auroit fallu près de 100 pieds cubes de bois , tant plein que vuide, pour donner un pied cube de cendres, & la voie ne donneroit que 20 - livres de cendres. - Le lendemain 31 Août, j'ai fait démolir les murs poftiches du four- peau encore rouge , afin de refroidir le creufet, lequel s’étoit affaiflé de 3 pouces SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 193 3 pouces au couchant & de 2 = pouces au levant, par la fufion des mor- tiers qui lioient les briques: mais comme cette fufion s'étoit opérée len- tement & fucceflivement, les briques s’étoient reflerrées & foudées l’une fur l’autre, ce qui avoit empêché le creufet de prendre de l’évent par les parties latérales, à l’exceprion du bord fupérieur au couchant, où il y avoit une légère ouverture , qui avoit donné lieu à une dépreflion de 2 pouces = de la cémentation qui s’étoit confommée. Le fer qui s'y trou- voit n'étoit point ardoifé comme l’autre ; il étoit rougeâtre , & cette partis étojt redevenue fer à l'extérieur par le recuit. La voûte fupérietfre éroit confidérablement endommagée par l'effet de la chaleur ; plufeurs briques s'en éroient détachées, & elle s’eft furbaif- fée de 8 pouces dans plufeurs endroits où les mortiers s'étoient fon- dus. Les tuyaux de fonte de fer qui fervoient de paflage à la Aamme , avoient éprouvé plufieurs fortes de dégradations ; l'ouverture des trois du centre s’étoit confidérablement referrée par le gonflement de la fonte qui s’étoit calcinée. Une partie étoit réduite en colcotar ; l’autre , & c’éroit la ma- jeure , étoit.décompofée en une efpèce de laitier fragile & teflulaire , dont les feuilles formées fucceflivement , avoient diminué confidérablement le diamètre de l’orifice de ces tuyaux. Les deux des bouts étoient calcinés en partie comme les précédents ; mais il s'en étoit fondu une portion confidérable, qui étoit tombée en nature de régule fur la couche du fable du creufet, & l’avoit même pé- nétrée. Les côtés intérieurs du fourneau, formant fa chemife , avoient pouffé intérieurement, & par conféquent avoient reflerré les évents qui donnent paflage à la Aamme, Cet effer procédoit, d'un côté, du ramolliflement des briques par l’action du feu ; de l’autre, par l'effet de l'expanfbilité des vapeurs, qui, agiflant par une force centrifuge dans le maflif des murs, fe portoit évalement du côté des paremens extérieurs de la maçonnerie en pierre de taille, laquelle , par fa mafle & fon poids , oppofoit une réfiftance fupérieure à l'effort , repoufloit leffet contre le mur intérieur, dont les briques ramollies cédoient à la puiflance. Cependant ik fe fit le cinquième jour du feu, à la grande face extérieure du fourneau , une petite lézarde, d'où il fortoit une vapeur légère, dont une partie condenfée fuintoit une eau limpide. Après quatre jours de refroidiffement , je fis démolir le 3 Septembre les bouts du creufet, pour en tirer l'acier, qui étoit encore aflez chaud pour que les Ouvriers fuffenc obligés de fe fervir d'enveloppes. Le fable vitrefcible qui couvroit le creufets’étoit agglutiné en une maffe blanche, grenue & cryftalline , qui formoit une efpèce de granit artificiel. Cette couverture s'étoit foiblement dérangée: elle éroit feulement crevaf- fée dans quelques endroits. La mafle totale du fer & du cément s'étoit Tome XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE. Bb 194 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, furbaiflée de près de 2 pouces, lefquels , joints aux 2 + pouces de taffement du creufet, ja us en tout une dépreflion totale de 4 + pouces fur toute la capacité du creufet, ce qui-fait près de 4 pieds cubes ou + de la poudre de cémentation employée ; mais cette perte de la cémentation eft produite par plufieurs caufes, foit naturelles, foit accidentelles , lef- quelles préfentent différens phénomènes , qui méritent attention. La fuie & les matières animales qui entrent dans la cémentation, ne font pas réduites à l’état charbonneux parfait qu'elles acquièrent pendant Ja cuite de l'acier; cet effet qu’elles fubiflent les diminue de volume , pre- mière caufe de taflement. : Lorfque des fubftances de diverfe nature, combinées dans une même mañle, font expofées au feu, elles fubiffent l'effet de la réaction que leurs par- ties conftitutives ont l’une fur l’autre ; il en réfulte une pénétration, qui en diminue le volume & en augmente le poids fpécifique : feconde caufe phyfique de diminution. Une troifième caufe, qui eft accidentelle, procède de l’évent produit, tant par les crevafles légères de la couche de fable qui couvre le creufer, que par l'ouverture formée à l’un de fes bouts par la fufion des mor- tiers; en forte que la portion de cémentation qui avoit communiqué avec le feu extérieur combiné avec l'air atmofphérique , s’'étoit ‘en partie con- fommée. 5 Enfin , une quatrième caufe procède de la nature calcaire de la pierre poreufe du fond du creufet, laquelle a confommé en partie la poudre de cémentation d’une part, & de l’autre en a détruit l'effet par fa propriété oppofée à celle de la cémentation : en forte que les barres du fond , qui, après l'opération , rouchoient la furface intérieure de cette pierre, y étoient adhérentes ; & cetre furface éroit redevenue fer, tandis que celle oppofée , couverte de cémentation, étoit detrès bon acier. Afin de ne pas nous dilftraire des différens objets qui doivent fixer attuel- lement notre attention, nous réfervons à [a fin de ce Mémoire des réfle- xions & des obfervations qui pourront fervir de règle aux Particuliers qui voudroient élever des Manufaétures d’acier par cémentation, dans fa conf- truction des fourneaux deftinés à certe opération. Je reviens à l’acier , qui eft le principal objet des vues du Gouverne- ment, & conféquemment de ce Mémoire. Je fis tirer Le 4 Septembre tous les fers cémentés du creufet, & ayant l'inventaire à la main, j'en reconnus les numéros , pour faire ranger cha- que forte fous fon numéro particulier , &enfuite je les fis pefer féparément. Le poids total fe trouva de 4131 = livres; ils pefoient bruts, avant la cémentation, 4070 = liv. Il y a donc une augmentation de 61 livres, qui donne par quintal 1 liv.7 onces 4 gros 71 grains moins =. Ce accroiffement de poids pouvoit procéder en partie de quelques parcelles de . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 194 . matières charbonneufes de la cémentation , attachées à la furface des barres; & pour conftater précifément l'accroiflement de poids que pro- duit la cémentation , dans une expérience fubféquente j'ai foumis à la cémentation 500 liv. de barres de fer. écurées’, pour en enlever la rouille : elles ont éré de même écurées après la cémen- tation, pour enlever la matière charbonneufe ; & après en avoir re- connu le poids, il s'eft trouvé 5 + livres d’excédant, ce qui donne par quintal 1 liv. 4 onces 6 gros 28 + grains d'augmentation, qui ne peut être attribuée qu'à la quantité de principe qui s'incorpore dans le fer, & le convertit en acier; principe qui en augmente non-feulement le poids, mais encore le volume de 10 + lignes jufte par 100 pouces de longueur desbarres, indépendamment des foulevemens de l’étoffe du fer, qui forment des ampoules dont il fera queftion. Nous nous étendrons beaucoup plus au long fur ces points de Phyfique, dans le Traité compler de l’Acier que nous nous propofons de publier inceflamment ; nous y donnerons des réfultats d'expériences faites fur des males de 8o milliers de fer cémentés à-la-fois, Comme il nous reftoit 941 + livres de fer brut, que le fourneau de Buffon ne pouvoit fervir à une troifième opération, fans y faire des ré- parations notables , qui auroient exigé beaucoup de temps, & que nous defirions varier l'opération ; nous avons fait tranfporter à la Manufacture de Néronville ces fers , qui ontété joints avec 440 liv., provenant des Forges du Berry appartenantes à M. le Duc de Charoft , & qui font arri- vés trop tard pour être cémentés à Buffon. Tous ces fers ont été cémentés avec ceux de la fournée de Décembre 1780, dans un creufet féparé & diftingué de ceux de la Manufacture. Lorfque l’acier fut pelé, je féparai tous les bouts pefant 582 livres, que j'envoyai au martinet de la petite Forge de Buffon , pour le fuer, le fouder & l’étirer en barrettes ; l’on y employa 45 pieds cubes de charbon de bois, Cet acier brut a produit: « En acier bon, propre à travailler. : . : so3 liv. » En rebuts, de celui qui n’a pas bienfoudé, . é 15 » Et endéchets confommés. 4 x ‘ | 64 » Total du poids de l'acier brut. + : . 582 liv. Comme je me fuis apperçu que te Martineur de Buffon n'avoit pas l’u- fage de travailler l'acier, & que l’ordon n’étoit pas favorablement difpofé Es cette opération, je me détébroihss à faire tranfporter 3#ç0 liv. d'acier rut à Néronville, pour y être fabriquées en acier commerçable fous dif- férens calibres , par des Ouvriers au fait & outillés convenablement. Les fers que je fis cémenter à Néronville en Oétobre 1780 , éprouvèrent Tome XX, Part, II, 1782. SEPTEMBRE. Bb 2 196 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, des variétés dans leur cémentation, comme ceux que j'avois cémentés à Buffon, & ce en raifon de leur qualité intrinsèque & de leurs dimen- fions. L'on verra dans Le tableau fuivant les qualités, les défauts & les. variétés qui Les caractérifent , & les différentes fortes de mines qui les ont: produits. Nous avons ajouté au tableau, 1°, une forte de fer fous Le n°..13, pros- venant d’un mélange des fers des dix premiers numéros, dont j'avois. coupé les bouts, qui avoient été expolés à l’action immédiate du. feu,. lors de laccident arrivé au ereufetle 9 Août. Ces bouts, pefant r3oliv.s. ont été mis à l’affinerie pour les corroyer; l'on en a tiré deux barres, pefant 105 livres; ce qui donne 25 livres de déchet, à caufe des parties calcinées avant cette opération. 2°, Une barre de fer de Sibérie, que nous nous étions procurée , &. dont les Ouvriers ont mêlé l'acier fabriqué avec les fers de Suède, 3°. Du: fer de Pemes.en Franche-Comté, que la Manufadture de Né-- ronville avoit fait venir par effai. e Nous avons fixé à so l'effort néceffaire pour rompre le fer Le plus caffant , & à 200 le dernier terme de la force de ceux que nous avons éprouvés. Nous n’aflurons pas que ces degrés foient aflignés avec une précilions tigoureufement mathématique; nous n’avions-pas à notre difpofition des. inftrumens propres à reconnoitre la force précife de chaque fer: nous ne l'avons reconnue que par. les coups de mafle plus ou moins mulripliés. qu'ils ont exigés pour les rompre fur le cafloir; & comme, dans toutes les efpèces, nous en avons trouvé.de plus ou moins réliftans, nous avons. toujours pris pour bafe ceux qui ont exigé le plus d'effort dans chaque forte. L'on doit faire attention aufli que, dans le cours d'une longue fa- brication., il y a des variétés-qui nuancentla qualité des fers, & la chan- gent. même prefque totalement. Des veines de minérai, des qualités de- charbon , l'intelligence & l'attention des, Ouvriers y concourent. Nous avons penfé qu'il étoit néceflaire de donner d’abord le détail de. routes les opérations fucceflives de la cémentation , avant d'entrer dans. Fanaly{e des différens fers employés, des modifications qu’ils ont reçues, * & de, la qualité de l'acier qui eft réfulté dé chacun de ces fers , afin de donner-plus de liaifon à nos obfervations ;, & quoique nous les ayions: détaillées dans ce Mémoire , nous les avons réunies dans le tabieau que- nous avons annoncé, lequel concentre fous un coup-d’œil: 1°. La férie des fers quenous avons employés. 2°. Le caractère des mines. qui les ont produits. 3°. Les marques -cara@ériftiques & diftinétives de- chaque efpèce de- er: ls 4°. Les Provinces d’où ils ont été tirés. :.5 Le nom des Forges dans lefquelles. ils ont été fabriqués, il SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 197 6°. Le nom de MM. les Propriétaires ou des Maîtres de ces! Forges. 7°. Les dimenfions de l'échantillon de ces fers en largeur & épaif- feur. 8°. La contexture de chacun, 9°. La qualité particulière de chacun, avec une effimation de leur force. 10°. Le déchet que ces fers ont éprouvé en les corroyant, pour en ré- duire une portion fous la forme de carillons d’une dimenfion propre: pour des expériences ultérieures. 11°. Les effets extérieurs de la cémentation. 12°, L’altération de leur contexture par la cémentation. 113". Le jugement qu’en ont porté les Ouvriers dans le corteiemant des: aciers-poule , pour le convertir en acier commerçable dans-le martinet de: Buffon. 14°. De même dans la Forge de Néronville, 15°. Les eflais qui.en ont été faits par le fieur Langlois ; Coutelier , & fon Avis. 16°. De même, celui du fieur Perret. 17°. Enfin , nos obfervations particulières. Quoique nous ayions formé ce tableau par extrait, il eft d’une trop. grande étendue pour tenir place dans ce Mémoire , ce qui nous détermine à le développer ici. Examen des différentes fortes de Fers qui ont été foumis aux experiences de la cémentation , des différens rapports qu'ils ont entr'eux , des modifica= zions qu’ils ont éprouvées, tant avant qu'après leur cémentation € leur converfion en acier commerçable , avec l'avis des Ouvriers qui en ont fait: les effais. N°. I Fer de: Suédé , marqué Si: I D: Nous ne connoiffons point le caraétère particulier des mines qui ont: produit ce fer, parce que nous-n’ayvons point fu de quelle: Province de Suède il avoir été tiré. Les barres de ce fer aflez bien fabriqué , quoique pailleux, avoiene: 18 + lig. de largeur fur 6 = lig. d’épaiffeur ; il montroit à la caflure moi- tié grain fin brillant & moitié nerf blanc, rompant avec. effore fans arracher , forgeant bien à chaud & à froid, pailleux, fernre à la: lime. Nous l'eftimons à 175 degrés de force; il.a perdu 9 pour. 5; de déchet dans le corroiement. Les barres de ce fer, en fortant de la cémentation | étoient très-bour- foufflées de. bulles rondes de moyenne grofleur, & couvertes d’un vernis, bleu azuré ; le nerf avoit difparu, & étoit remplacé parun gros grain 198 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lamelleux & brillant ; il avoit perdu plus de 150 degrés de fa force. Lorfque cet acier-poule a été corroyé & forgé au martinet de Buffon, il s’eft montré un peu vif, cependant forgeant & foudant bien; un grain: fin, cendré au centre, blanc & brillant au contour; des parties homo- gènes , d’autres filandreufes, d’autres ferreufes avec des pailles. A Néronville cet acier a paru vif, chauffant, fec, facile à forger , fou- dant bien , plein, homogène, grain fin, fombre , d’une trempe très- dure , caffant en flûte avec des miettes, Le fieur Langlois l’a trouvé vif, fec, craignant le feu, pailleux, dur à la trempe, d'un grain très-fin, uniforme. Le fieur Perret l’a jugé chauffant & foudant à volonté, doux au mar- au, dur à la trempe , d'un grain fin avec quelque brillant , ayant des pailles & des filandres. Obfervations particulières. La difparité des effais procède des nuances qui fe trouvent dans une même barre d'acier. La pate de celui-ci eft gé- néralement bonne : fon étoffe eft défedtueufe , fa vivacité eft le défaut de tous les aciers fins; ils perdent infenfiblement cette vivacité, par lin- telligence de l'Ouvrier. Les défauts de fon étoffe proviennent de ceux de la Ébrication primitive du fer ; il demande une cémentation mo- dérée. N°. II. Fer d'Efpagne, venant de Bilbao, fans marque. Nous ne connoiffons pas la nature des mines qui ont produit ce fer: il étoit en applati; nous l’avons fait corroyer, pour le réduire en barres : il s'eft montré caflant, crevant, & très-difhcile à forger à chaud, très- facile à froid ; & de la plus grande ténacité, Sa pâte étoit compolée de + grain fin gris, ? nerf cendré rembruni, rompant avec Le plus grand effort, & en arrachant de loin, doux à la lime, affez mal fabriqué, ayant des pailles & des gerçures. Nous eftimons fa force à 199 degrés: il a perdu au corroi 6 pour :. Ce fer étant forti de la cémentation, étoit couvert de beaucoup de bulles rondes , larges & élevées ; fon vernis étoit bleu , moins haut en couleur que celui de Suède; fon grain moyen, lamelleux , divifé par des foufflurés, Cet acier-poule, travaillé au martinet de Buffon, s’eft trouvé très- facile à chauffer , à forger & à fouder ; fa pâte pleine, homogène , d'un rain fin,-gris-fombre, dur à la trempe, À Néronville , il s’eft travaillé avec la plus grande facilité , foudant parfaitement, d’une pâte homogène , d’un grain fin, gris, uniforme , quel- ques pailles & filandres dans fon étoffe , d’une moyenne dureté à la trempe , caflant net en flûte, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. “99 Le fieur Langlois l’a qualifié d’excellént acier fuperfin , fe chauffant & foudant bien, dut à la trempe, d'un grain très-fin, uniforme. Le fieur Perret, qui n’a pas porté la même attention que le fieur Lan- glois pour diftinguer la différence de ces aciers , a confondu ce n°, avèc neuf autres, qu'il dit fe chaufler & fouder à la volonté de l’Ouvrier, doux au marteau , dur à la trempe, d’un grain fn, pastoujours égal, ayant des filandres & des cendrures. Obférvations. La pâte de ce fer d'Efpagne eft une des plus propres à faire des aciers de haute qualité: on defireroit un peu plus de netteté dans fon étoffe ; il demande une cémentation active , & d’être trempé rofe pour lui donner de la dureté, N°. IIL Fer de la Forge de Gincla en Rouffillon, timbré d'une cloche, appartenante à M, DE Rivazz. Ce fer a été travaillé à la Catalane, avec des mines fpathiques blan- ches & brunes; des hématites rouges & brunes, mélées d’une terre vitref- cible. Les barres avoient 26 = lignes de largeur & 6 = lignes d’épaif- feur. La pâte étoit compofée de très-peu de grain fin & gris : tout le refte étoit nerf blanc , rompant avec beaucoup d'effort, en arrachant & de loin ; forgeant très bien à chaud & à froid , doux à la lime, mal fabri- qué, ayant des pailles, Nous eftimons fa force à 200 degrés : il a perdu 6 - pour +au corroi. Ce fer avoir déjà été repañlé au martiner dans la forge , parce que la première fabrication dans les Forges Catalanes eft ordinairement très-défeétueufe. Ce fer , au fortir du creufet de la cémentation, a montré des pailles: il étoit couvert de grofles bulles plates , éloignées les unes dés autres ; fa furface étoit d’un bleu foncé rembruni. Cet acier-poule , paflé au martinet de Buffon, s'eft trouvé vif au feu, exigeant des ménagemens pour le forger & le fouder ; d'une pâte homo- gène , d'un grain fin uniforme, d'une éroffe filandreufe, À Néronville ,il a été trouvé fenfible au feu, difficile à forger, fou- dant bien en le ménageant , d’une pâte égale, ayant du corps, un grain fin, gris uniforme, d’une étoffe pailleufe & filandreufe, caffant inéga- lement. Le fieur Langlois juge cet acier fe chauffant facilement , très-dur au marteau, cependant fe foudant très-bien , ce qui n’eft pas ordinaire, Cela prouve qu'il a beaucoup de corps; ilfe trempe dur à une douce chaleur , fe dépouille bien, montre un grain fin & égal, & eft propre à faire de bons tranchans, 200 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le fieur Perret le confond avec le précédent n°. MM. Bernières & Duviviers, Graveurs des Monnoies, ont fait faire des coins de cet acier; quatre ont parfaitement réufli, un s’eft brifé à la trempe, un autre s’eft éclaté fous le balancier, après quelques jours de fervice. “ Ob/ervations. Co fer , que je confidère comme Ja première qualité de France dans fon état de fer, donne un acier très-fin, qui a du corps & du reflort , qualité très-recherchée : il ne lui manque qu'un peu plus de propreté, qu'il feroit facile de lui donner en foignant plus fa fabrication. Sa vivacité neft quun défaut accidentel dont on peut le cor- riger. N°- IV, Fer dela Forge de la Combe, appartenante à M. D AGUILLARD, dans le Comté de Foix , marqué des trois Leutres EF, 1. S. Ce fer eft fabriqué à la Catalane comme le précédent, avec des mines à-peu-près de même caractère (1); les barres avoient 27 lignes de lar- geur fur 6 + lignes d'épaifleur , compofées de = de grain fin , mélé de nerf blanc , rompant difficilement & en arrachant, forgeant bien à chaud & à froid, ferme à lalime, médiocrement fabriqué , ayant des pailles, Nous eftimons fa force à 180 degrés: il n'a perdu que 4 + pour çent au corroi. Après la cémentation, ce fer étoit couvert de bulles oblongues de moyenne groffeur ; fon vernis étoit bleu clair ardoifé ; fon grain petit, uniforme , lamelleux & brillant. Cet acier-poule , corroyé à Buffon, s’eft trouvé facile à chauffer, fou- dant bien avec attention , doux au marteau. Quoique fa pâte ne füt pas entièrement homogène, le grain en étoit fin , uniforme , ayant une tache noire au centre, fon étoffe filandreufe , prenant une dureté moyenne à la trempe. À Néronville, il s’eft montré fenfible au feu, exigeant un forgeage, d'un grain fin gris, d'une pâte homogène, d’une étoffe pailleufe, d'une trempe dure, & caflant irrégulièrement avec des miettes. Le fieur Langlois s’exprime ainfi: « Cet acier ne craint pas le feu; il >» fe chauffe fans griller , foude facilement, fe dépouille bien à la trempe, » & y prend beaucoup de dureté : fon grain eft très-fin & uniforme; il » eft propre , comme le précédent, à faire de bons tranchans. Le couteau ui b (x) Je dois au zèle dont M. de Saint-Sauveur , Intendant de Rouflillon , donne des preuves dans toutes les occafions qui fe préfentent d’exciter l’émulation dans les Arts de fon Département, les fers de la Combe & de Gincla. Ce n’eft pas la {eule obli- gation en ce genre dont je dois à ce Magiltrat un hommage de reconnoiffance. Fa #» que - SUR L'HIST NATURELLE ET LES ARTS. or # que nous en avons fait; a un grèssbon tranchant, montre quelques f- # landrures & des pailles ». Le fieur Perret ayant effayé un premier morceau ; l’a trouvé réfractaire, & ne pouvant fe "chauffer fuant fans fe décompofer ni éclater fous le marteau, Un fecond morceau s'eft montré plus duétile, d'un grain fin, dur à latrempe, aÿant des pailles & des veines. Obfervations. Ce fer a été fabriqué comme le précédent, par liquation, à la Catalane; mais il n'eft pas d'une pâte aufi égale , ce qui a donné lieu à la variété qu'il a montrée dans les eflais. I1 eft cependant fufceptible d'être converti en très-bon acier, lorfque lon en foignera plus la com- poftion de l’écoffe , pour le rendre plus net, N°, V. Fer marqué A, R., provenant de la Forge d’'Articole dans les Alpes du Dauphiné, appartenante a M.DE LA MokLiÈRr. Ce fer a été travaillé à l'Italienne , avec des mines fpathiques blanches & brunes tirées de la montagne noire, partie en rives, partie en maillat, & partie décompofées. ; Les barres avoient 265 lignes de largeur fur 8 d'épaiffeur ; il mon- toit à fa fraure = grain, fin & brillant , &=+ nerf blanc, rompant avec beaucoup d'effort en arrachant de loin. Il s’eft rrouvé dans plufieurs barres quelques parties aciéreufes cantonnées dans la pâte du fer. T1 forgeoit très-bien à chaud & à froid, bien fabriqué & mal paré, parce que, dans les forges à l'Italienne, l’on ne contreforge pas; que l'on étire toujoûrs en travers, & jamais de long, &que l'on ne pare pas. Nous eftimons fa force à 190 degrés : il a perdu $ + aa corroi. Le fer de Dauphiné eft forti de la cémentation chargé de beaucoup de groffes bulles plates & oblongues, difperfées dans l'étendue des barres qui étoient. vernies en bleu ardoife ; fon grain étoit petit, lamelleux , uni- forme , traverfé de quelques gerçures. Cet acier-poulle , corroyé à Buffon , a chauffé & foudé facilement , a pris de la dureté à la trempe & un grain fin , ayant un peu de nerf fer- reux, avec des filandres & descendrures. : Les Ouvriers de Néronville l'ont trouvé facile à travailler, prenant de -14 dureté à la trempe & un beau gris fombre , montrant des parties fer- reufes & des filandres, caflant net. Le fieur Langlois dit qu'il grille un peu au feu par cantons, & qu'il fe foude difficilement; qu'il fe trempe très-dur à une légère chaleur; que fon grain eft fin; qu'il fe dépouille bien, & feroit de bons tran- chans, Le fieur Perret a trouvé au contraire que cet acier étoit doux au mar- gau, chauffoit & foudoit facilement; qu'il prenoit un beau grain & de Tome XX, Part, II, 1782. SEPTEMBRE, Cc 202 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la dureté à la trempe ; qu’il étoit plus,net que les n°°, précédens & les fui- vans , excepté le n°. X. ë Obférvations. Le fer de Dauphiné eft travaillé à l'Ttalienne, magere € pati ; il eft très-propre à faire un bon acier. La vivaciré que le fieur Lan- glois y a trouvée eft un accident qui ne doit point tirer à conféquence, & procède de ce que le morceau qu'il a éprouvétavoit foufferc deux fois la cémentation. L'on fait que les fontes du Dauphiné ont une très- grande propriété à être converties en acier, & qu'il y a dans certe Pro- vince vingt-huit Acieries, qui ne font alimentées qu'avec les fontes pro- cédant des mines fpathiques des Alpes Françoifes & Savoyardes. Au fur- plus, fi cet acier a paru avec des veines ferreufes, c'eft a le fer avoit: éte fabriqué fous une trop forte épaiffeur, Celui que Le fieur Langlois a éprouvé, n’avoit point de nerf, parceque la cémentation avoit été non-- feulement complette ,. mais mème trop continuée. N°. VE Fer marqué F,, provenant de la forge de Lod en Franche- Comté, appartenante à M.FLEURS l'ainé. Ce fer aété travaillé à la manière Allemande”, en renardière, avec des mines d’alluvion en pifolite des bords de la Saône , dans la terre cal- Caire, Les barres avoient 27 + lignes de largeur & 7 < d'épaiffeur bien fabri- qué & bien forgé; fa pate éroit compofée de = de grain fin pass & inerf cendré , rompant difficilement en arrachant de long , fe forgeant bien à chaud & à froid, un peu dur à la lime. Nous eftimons la force à 170: degrés : il a perdu 7 + par © au corroiement, Ce fer eft forti du creufet de cémentation couvert de beaucoup de: petites.bulles femées daris l'étendue des barres, dont les furfaces étoiene: de couleur bleue ardoife ; fon-grain étoit fin, plein, uniforme , de cou- leur cendrée. : : I s'eft montré, à Buffon, vif, difficile à forger , ayant un grain blanc- & brillant, avec un peu de nerf ferreux. } A Néronville, on a trouvé qu'il craignoit le feu, qu'il foudoit difi- cilement , dur à la trempe, d'un grain fin, gris mêlé de plus gros &: Brillant , ayant des veines ferreufes, & caflant en flûte, Dans la feconde opération , Le fieur Langlois dit que cet acier chauffe: chaud'; qu'il foude bien & facilement; qu'il fe crempe dur à un foible- degré de chaleur; qu'il ne fe dépouille pas net; que fa pâte eff compo-- fe d’un grain très-fin, uniforme, homogène ; qu'il a les propriétés du n°. IV, pour faire de bons tranchans; & au furplus, qu'il eft propre: à faire des reflorts, ‘ Le fieur Perret l’a. mis au nombre des dix n°°, qui fe chauffent & {e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 20; foudent à volonté, qui prennent une bonne dureté À la trempe & uu grain fin. ‘ Les deux fsières qui ont été cémentées n’ont pas été entièrement con- verties en acier, parce qu'elles éroient beaucoup trop épaifles; elles pro- venoient de ce fer, & éroient deftinées pour la Treflerie de Lod. Offervations. Il ne manque à ce fer que plus de netteté dans fon étoffe, pour faire un excellent aciers il exige uhe cémentation qui ne foit pas trop active , mais qui foit long-temps continuée. L’acier-poule qu'il a pro- duit a eu d'abord beaucoup de vivacité, mais il l'a perdue dans le cor- roi , & eft devenu facile à forger: il réunit deux grandes propriétés, la dureté & 16 reflort. N°. VIL marqué B.F, , envoyé par M. GRANDIDIER , Maître des Forges de Beffort en Alface. 5 Ce fer a été fait à la méthode Vallonne ou Françoife , avec des mines en hématites brunes , rouges & noires’, dans une terre vitrefcible & argil- leufe. Les barres étoient forgées fur 27 + lignes de largeur & 7 + d'épaif- feur , forgeant bien à chaud & à froid. Sa pâte eft compofée de ? de grain gris, & de + nerf cendré, rom- pant difficilement en arrachant de loïh ,un peu dur à la lime , fon étoffe bien fabriquée & pleine. Nous l'eftimons à 170 degrés de force : il a perdu $ + par © au corroi. La cémentation a couvert fes furfaces de bulies nombreufes très-petites, les a colorées d’un bleu ardoife, & a changé fa chair en un petit grain famélleux , uniforme & cendré. 1 é L’acier-poule a paru , au travail de la Forge de Buffon, vif au feu & au marteau, ne foudant qu'avec précaution; fa pâte étoit homogène & fon étoffe quelquefois filandreufe, Quoiqu'il ait montré à Néronville quelques parties vives, il s’eft en général bien manipulé, & a bien foudé; la trempe lui a donné de la dureté &un beau grain fin grisblanc, caffant inégalement. Le fieur Langlois dit : « Cet acier ne craint pas le feu ; il eft plus » dur au maïteau que les précédens , foude aflez bien , fe dépouille en- # tièrement à La trempe qui lui donne un grain fin & uniforme, furpafle » en qualité le n°. IV , eft égal au n°.I1, & peut être comparé au »> meilleur acier d'Angleterre, sil étoit aufli net; mais le couteau qui en a été fait, montroit des filandres ; un burin formé de cet acier en- » tamoit l’acier , fans grainer , ni refouler ». Le fieur Perret l'a confondu avec les dix n°°, qui fe forgent & foudent bien. | Obfervations. Ce fer n’eft pas d'une qualité égale; l’un eft prefque tout Tome XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE, Cc2 Ÿ 204 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nerf & l'autre tout grain, ce qui occafionne de a difparité dans les effais de fon acier, qui a Étoes de corps. Ce fer foutient une cémentation: active; il donne un acier d’une excellente pâte &.d’un beau grain: on: n'y defire dans l’étoffe que la netteté néceffaire pour les ouvrages de belle coutellerie & de bijouterie, perfection qu'il feroit poffible de lui donner en foignant fa#abrication. . N°. VUL. warqué d'un trèfle. Fer dé la Forge de Clavidres en Berry 3. : envoyé par M, CARROYON. , Ce fer a été fabriqué à la Vallonne, c’eft-à-dire, en affinerie plate, avec des mines en pifolites dans la terre calcaire. Les barresavoient 2 $ + ligne de lar- geur & 6 lignes d’épaiffeur ; il montroit à-la fracture = petir grain , plat, brillant, & : de nerf médiocre cendreux , rompant de court par un premier effort, forgeant paflablement à froid & à chaud, doux à la lime & au: marteau, Il étoit fort mal fabriqué. Nous eftimons fa force à 150 degrés :: il a perdu.7+ pour £ au corroiement. La cémentation a fait élever à fes furfaces quelques bulles petites. & ondes, mêlées de plus groffes plates ,.& lesa vernies d’une couleur bleue- ardoife , mêlée de traits azurés; fa pâte étoir-compofée d'un.grain fin foms bre ,& fon étoffe eft devenue pailleufe & fendillée. Cet acier-poule , travaillé à Buffon, a chauffé fec, & s’eft forgé aflez facilement: il n’a pas pris une trempe très-dure; fon grain étoit moyen ». blanc , & fon étoffe filandreule & pailleufe. Les Ouvriers de Néronville l’ent trouvé facile à chauffer , à forger & à fouder , d’une moyenne dureté, d’un grain fin, inégal & brillant ; fon étoffe étoit ferreufe & pailleufe , caflant cependant net. Le fieur Langlois l’a jugé inférieur au n°. VIT , tenant le milieu entre- Les n°°, IV & V, foutenant bien les chaudes oraffes , forgeant & foudant-. bien, ne fe dépouillant pas à la trempe, d'un grain fin égal, & d'une étoffe pailleufe & filandreufe. C Le fieur Perret l’a confondu, comme le précédent, avec les dix n°°.. qui fe forgeoient & fe foudoient à volonté, prenant une bonne dureté à la trempe, & d’un bon grain , avec des points brillans. Obfervations. Quoique la pâte de ce fer foit fufceptible d'être convertie en acier fin, fon étoffe eft trop défunie pour efpérer d’en faire de bel acier. Il eft difficile de faifir fon point de cémentation, puifqu'il a pris de la vivacité, quoiqu'il contienne encore des parties ferreufes. Nous en avons effayé d’une autre forge de cette même Province, qui a été beaucoup plus vif, & dont il n'a pas été poñlible de lier la pâte par le forgeage., Ce dernier fer provenoit des Forges de M. le Duc des Æbaroft; SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 20ÿ N°.IX. Fer marqué 3. N. de la Forge de Longuion dansiles Evéchés, - appartenante à Madame Hart, Ce fer, fabriqué à la Vallonne, eft produit par des mines d’alluvion en pierres hématites jaunâtres, en oolites & en greluches dans la terre cal- caire, Les barres avoient 27 © lignes de largeut &7 — lignes d'épaif- feur. à Sa pare eft compofée de = grain-rond & mat, & de © de nerf gris cendré, rompant avec effort & déchirement , forgeant bien à chaud & à froid , ferme à la lime, dur au marteau. Il étoit très-bien fabriqué. Sa force a été eftimée 175$ degrés: il a perdu 6 À au corroiement. Ce fer eft forti du creufet de cémentation couvert de bulles élevées & oblongues, de médiocre groffeur, mêlées de plus petites fa.couleur étoir bleue-ardoifée; fon grain étoit fin, lamelleux & brillant, fans pailles ni gerçures, ! Cet acier-poule, travaillé à Buffon, s’eft trouvé facile à chauffer, à forger & à fouder ,-d'un grain fin, égal, un peu blanc, dur, d'une pâte homogène , & d’une étoffe pleine & unie. A Néronville, de même fon grain éœitun peu plus gris, avec quelques: veines ferreufes, dur & caffant net, { à Le fieur Langlois l’a trouvé plus difficile à chauffer & à fouder que le n°. VINS, dur au marteau , fe À PE à la trempe, qui lui donne un grain fin , dur , ayant des pailles & des filandres. ; * Le fieur Perret l'a confondu avec les dix n°, qui forgent & foudenc: bien. Û ; Obfervation. Ce fer eft un des mieux fabriqués, & donne un très-bon: acier; il prend difficilement la cémentarion; il faut qu'elle foit vive par: fon action , & pouflée modérément ; il eft facile d'en faifir Le point de fa- turation; fon acier eft ferme , dur & élaftique, : 4 N°. X. Fer marqué R. @h E. de la Forge d'Ecot en Champagne, envoyé par M. MicHEL, Maître de cette Forge. Ce fer, fabriqué à l'Allemande, avec des mines d’alluvion, dires mines en roche ; ce: font des hématites brunes & roufles, mêlées d'oolites dans: la terre calcaire. Les barres avoient 27 + lignes de largeur, & 7 + d’é- päifleur , forgeant bien à chaud & à froid. L’étoffe de ce fer étoir com pofée de : de grain rond & gris, & de + nerf cendré, rompant avec effort & déchirement, Quelques barres fe font trouvées compañées enriè xement d'un grain plat & brillant. Ce fér, Itrès-bien forgé, étoit dur au marteau & à la lime:il a été eftimé r4ÿ degrés de force, & a perdu: 7: pour = au corrojement.. 25 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Après la cémentation, les barres ont paru médiocrement couvertes de petites bulles'rondes & élevées , colorées en bleu-ardoifé ; fon grain étoit petit, lamelleux, fombre , fans pailles ni gercures. I s'eft travaillé à Buffon avec beaucoup de facilité ; fon grain étoit très-fin, blanc-mat dans le contour, gris au centre; fa pâte homogène & un peu cendreufe, d’une étoffe unie. Il a été trouvé à Néronville , facile à chauffer, difficile à fouder , d’un grain fin gris, cendreux, dur à la trempe , & caflant fec. Le fieur Langlois a trouvé que cet acier craignoit le fen , qu'il foudoit cependant aflez bien; qu'il fe dépoñilloit à la trempe, & y prenoit beau- coup de dureté ,.d’uñ grain fin; qu'il étoit plus net & moins pailleux que les n°. précédens ; qu'une lancette & un couteau faitsade cet acier fe font trouvés d’un très-bon fervice. Le fieur Perret a diftingué cet acier des autres , & l’a comparé au n°. V. Un rafoir qu'il a fait avec cet acier trempé rofe , 8e recuit jaune , malgré des filandres apparentes , a confervé dans le fervice fon tranchant avec beaucoup de douceur. , Il a été fait deux coins de monnoie de cet acier, pour frapper des louis; ils fe font trouvés d’un bon fervice. Obfervations. Ce fer , qui eft de* lefpèce que l’on nomme fer de roche de Champagne, n’eft pas d’une pâte cout-a-fait aufli fine que celle du fer de Berry , mais elle eft plus pure en général. Ce fer de roche eft plus propre que celui de Berry à faire des ouvrages qui exigent de la force & de la propreté; la pâte eft plus liante & plus unie; d'où naît la pro- priété à faire de bon acier. Il reçoit avidementla cémentation , ce qui doit rendre circonfpeét & dans la nature de la cémentation & dans le ré- gime du feu. N°. XI. Fer de la Forge de Buffon en Bourgogne, appartenante à M. le Comte DE BUFFON, & fourni par M. de Lauberdière, Maïtre de ladite Forge. Ce fer, qui a été fait par macération , avec des fontes qui proviennent de mines.en pifolites , mêlangées de fable vitrefcible , d’oolites & gre- luches dans la terre calcaire, eft une des meilleures qualités de la Pro- vince de Bourgogne, | Les barres avoient 23 = lignes de largeur fur 8<, lignes d'épaiffeur. Ce fer étroit compolé de + gros grain , de = de petit lamelleux & brillant, & de + nerf gris, rompant de court fans beaucoup d'effort, forgeant mieux à froid qu’à chaud , dur à la lime , médiocrement fabriqué avec des pail- les. Il eft eftimé avoir 100 degrés de force : ila perdu $ : pour ? au cor- £oiement. Ces barres, après la cémentation , étoient parfemées à leur furface de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 207 petites bulles rondes , un peu élevées & très-mulripliées , & teintes d'une couleur bleuc-ardoifée; l'intérieur montroit un petit grain brillant, la- melleux & uniforme , avec des pailles. Cet acier-poule a forgé & foudé en général affez bien; il seft trouvé des parties plus vives les-unes que les autres; fa pâte étroit d'un grain très-fin, de couleur matre, & fon étoffe filandreufe. A Néronville, cet acier s'eft forgé facilement & bien foudé; la trempe ne lui a pas donné une très- grande dureté; il a pris un grain très fin gris, ayant au-centre ug nerf ferreux. Entre les mains du fieur Langlois, il a paru vif, & craignant le feu & le marteau, foudant cependant aflez bien en le ménagrants il s'eft pew découvert à la trempe, y a pris de la dureté, un grain moyen & mêlé : tel un acier commun qui n'eft pas net. Un premier morceau , travaillé par le fieur Perret, s'eft trouvé ré- fractaire, ne pouvant chauffer fans fe décompofer fous Je marteau comme le n°. V. Un facond morceau a été plus ductile, dur à la trempe, mais d’une étoffe défunie & fale, N°. XII. Fer de la même Forge de Buffon en Bourgogne. Ce fern’a point été fait par macération comme le précédent; il étoie tel que celui qui fe fabrique ordinairement dans la Forge de Buffon, & procédant de la même gueufe que le n°, XI. # Les barres avoient 24 lignes de latgeur & 8 d'épaifleur ; fa pâte étoit compofée de + de gros grain lamelleux , de = de plus petit & brillant, & de = de nerf, fombre, caffant avec peu d'effort, forgeant à froïd, cre- vant à chaud , propriété qui l’aflimile.au fer d'Efpagne, n°. II. IL étoic médiocrement fabriqué, dur à la lime ; fa force a été eftimée 90 de. grés. Cefer, après la cémentation ; étoir parfemé dans {es furfaces de pe- tites bulles; partie rondes, partie oblongues , avoit pris une couleur bleue- ardoifée ; fon grain étoit très-petit, lamelleux, uniforme & brillant ; il montroit des gerçures, des travers & des pailles. Travaillé à Buffon, il s’eft montré vif au feu, forgeant difficilement .. d'un grain fin blanc , ayant des pailles, des flandres & du nerf: il s’efe montré tel à Néronville, Le fieur Langlois dir, dans fon verbal: « Cetaciereft vifaufeu, s’y æ brüle , éclate fous le marteau, fe foude très-difficilement, fe découvre æ bien à la trempe, y prend de la dureté, aun grain aflez fin , mais ». il eft pailleux & gercé ». Le fieur Perrec-a confondu ce n°. collectivement avec ceux qu'il dit s'être forgés & foudés à volonté, &c. Il y a apparence que l'ayant come 2 208 - OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, paré aux n°, I. II. TI IV. VL VIL VIEIL IX. & XL, pour éviter Les détails, il s’eft trompé particulièrement fur ce n°. XII. Obférvations. Ces fers, difficiles à travailler dès leur origine, à caufe des matières hétérogènes qu'ils-contiennent, ‘ne pourront jamais produire que des aciers communs quant’ à la pâte, & défectueux quant à l'étoffe, Nous voyons que , malgré que le n°, XI , procédant de la même gueufe que Ie n°. XIL, aitété macéré avant l’affinage ordinaire ,-n’a qu’un très-léger avan- tage fur Le n°, XII qui ne l’a pas été. Cette qualité de fer faifit trop avidem- nient la cémentation; il en exige uhe très-modéréeÿ & conduite avec beaucoup de ménagement, Ce genre de fer réufliroit mieux à faire des aciers naturels, ° N°. XIIL Fer procédant de la combinvifon de tous les n°°. précédens, corroyes enfemble. / : Ce fer ,compotfé des bouts de tousles autres fers corroyés enfemble, a été forgé en barres de 25 liones de largeur fur 8 lignes d’épaiffeur ; fa päre étoit compofée de : de grain petit, & de = de nerf gris, rompant en arra= chant avec beaucoup d'effort. Il a été jugé de 170 degrés de force ; il étoit ferme à la lime , dur au marteau , forgeant bien à chaud & à froid , ayant ‘cependant quelques veines aciereufes. Il s’eft médiocrement bourfoufilé à a cémentation , en petites bulles; partie rondes & partie oblongues , & a pris une couleur bleue-ardoifée, “avec un grain petit, égal &.oris. Cet acier, corroyé à Buffon, dau un peu vif, s’eft bien forgé & foudé de même; il a montré un grain fin, ayant du nerf ferreux & des fi- landres! A Néronville , il s’eft chauffé plus facilement, s’eft forgé & foudé aflez bien; il a pris une trempe dure, un beau grain fin gris, ayant des vei- nes ferreufes, caflant ni fec, ni net. I: n'en a point été remis aux Couteliers. Les perfections & les défauts des autres fers dont celui-ci étoit com- pofé fe font réunis, d’où il eft réfulté un deier mixte, qui n'eft que d’une qualité médiocre. La force de ce fer, qui a été eflimée 170 degrés, eft plus forte de 9 degrés que le terme moyen de celles de ceux ci-deflus, parce que ce fer a reçu un fecond affinage, qui a plus épuré fes différen- tes parties. Mais comme l’on ne peut unir & combiner du fer aigre avec du fer doux, fans altérer l'effence de ce dernier, & que la pâte quien réfulte ne peut être affez bien combinée, pour qu'elle foit homogène , il en réfultera toujours une étoffe inégale, qui ne pourra produire que des aciers-d'une qualité inférieure. Il eft donc prudent de cémenter les fers gbacun féparément, Adi N°. XIV. f … SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 203 N°. XIV. Fer de Sibérie | marqué du chiffre À.P. V. L. Ce fer nous.a été adreflé du Havre , mêlé avec le fer de Suède, Nous * connoiflons point le caraétère des mines dont il provient, parce que aous n'avons pas fu dans quel canton de la Sibérie il a éré fabriqué. Ce fer étoit mal fabriqué , en barres de 24 lignes de largeur & de 7 lie nes d'épaifleur ; fa pâte éteit compofée de? de grain moyen terne, & ka + nerf gris, rompant de court , avec peu d'effort, fe forgeant médio- crement à chaud , s'écrouiflant à froid, dur fa lime, d'une étoffe pail- leufe avec des travers Il a été eftiméà 155 degrés de force, & a perdu 7 = par £ au corroiement, Dans la cémenration de ce fer , il s’eft élevé à fa furface beaucoup de bulles larges , plates, diftantes les unes des autres, &ila pris une couleur bleu-ardoife; fon grain eft devenu moyen fombre & faillant. Travaillé à la forge de Buffon , il s’eft montré vif au feu , difficile à for< ger & à fouder ; il a pris beaucoup de duretétà la trempe, un grain fin blanc; fon étofle étoit cendreufe & filandreufe , caflant net. Obfervations. Il peut fe faire, & il eft hors de doute, que dans l’im- menfe quantité de fer qui fe fabrique en Ruflie , il y ait des qualités qui aient plus de propriété à faire de bon acier, que celui qui a fervi à nos expériences; mais celui-ci wa produit qu'un acier dur , très difficile à tra- vailler, & défectueux par Le peu d'union de fon étoffe, [1 failit vivement le principe aciereux ; c'eft pourquoi il faut le ménager, lui donner une cémentation moins active , & faifir le point de faturation, N°. XW. Depuis expérience, nous avons fait pafler à la cémentation trois milliers de fer de la Forge de Pefmeen Franche Comté , qui nous a été adreffé par M. Roffigneux. Ce fer, qui eft employé avec fuccès à la Manufacture Royale d’Armes de Saint-Etienne, provient des mines d'alluvion en oolites ; pifolites, & en pierres fparhiques dans une terre calcaire ; il eft compofé de + de petit grain brillant, & de ? nerf blanc, rompant avec effort. Il a produit un acier, qui fe travaille très-facilement , & fe foude affez bien: il prend de la dureté à la trempe & un beau grain gris; fon étoffe n’eft pas nette; il il y a des filandrures & des cendrures. ) Si ce fer étoit fabriqué exprès , comme l’on fait les bons fers de Tir- rerie, il feroit très-propre à compofer un acier fin. Le tableau des différens fers cémentés & convertis en acier , offre plu- fieurs fujets d'obfervations & de réflexions, Nous nenous livrerons pas à tous ceux qui fe préfentent, parce que Tome XX, Part, II, 1782. SEPTEMBRE. Dd 210 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nous nous propofons de donnerinceflammentun Traité complet fur l’Acier:, dont la plus grande partie du travail eft fair & copié. Les voyages que nous avons été obligés de faire, en ont retardé la publication. Nous en dérachons ce Mémoire, parce qu’il nous a été demandé par le Gouverne- ment. - La force & le liant du fer procèdent de fes parties conftitutives, de leur jufte combinaifon, de l'homogénéité de fa pâte, & de la iiaifon in- time de fon étoffe; enfin, d'une jufte dofe du principe du feu, qui n’ex- cède pas celle qui eft néggaire pour donner de la duétilité aux parties. élémentaires du métal, La première de ces qualités procède de l’effence des mines. La feconde, du travail de l’affinerie, La troifième, du travail à la chaufferie & au marteau , lorfque l'Ou-- vrier cingle fes pièces:, chauffe & fue fon fer, le ramañle, le tranche, l'érire ,_ le drefle & le pare. La quatrième procède de l’effence, de la qualité des charbons, du régime- dü feu & de la dire&ion du vent. Or, comme l'effet des caufes fecondaires varie au point que l’on peut faire, avec les mêmes matières premières, dans la mênte Province , dans: le même canton, dans la même forge , & à différentes époques , des fers de qualité variable , nous ne préténdons point donner atteinte à la répu- ration des différens fers du Royaume , en leur” aflignant leur rang de per- fettion dans le tableau que nous en allons préfenter. Notre jugement porte uniquement fur ceux qui ont été foumis individuellement à nos expé- riences. La perfeion du fer , exigée par les Arts qui l’emploient , dépend au- tant de l’étoffe que de la pâte. Un bon fer eft rarement fujet aux travers 5: mais fouvent ila des pailles profondes, des fentes & des cendrures. Les pailles, en formant une folution de continuité , affoibliffent les mafles , & les font rompre fous un fardeau bien moindre que celui qu’un barreau de- fer de même qualité auroit fupporté, G:fon écoffe eût été pleine & conti- nue. Les fentes, qui font-une divifion des parties fibreufes, font formées: par l’interpofition d’une légère écorce de fer en décompofition , qui s’eft. oppofée à la foudure complette du vif des molécules ferreufes. | Tous. ces défauts du fer paffènt dans les aciers qui en procèdent ;. la cé- mentation ne fait que les développer & les rendre plus apparens: Comme ils n’ont d'autre fource que l'inexactitude dans la fabrication , & qu'ils s’oppofent à la force & à la netteté du poli des ouvrages qui en font com- polés, nous formerons une colonne, qui indiquera leur plus ou moins: de perfection procédant de la principale opération de la fabrica- on. Les fers tirent aufliune perfection du forgeage, S'ils n'ont pas éré bier a SUR L'HIST. NATURELLE ÊT LES ARTS. 21r ramaflés & étirés pardevant, ils font fujets à avoir des bouts écrus, des crevafles ; lorfqu’ils font trop tranchés & parés fur Le champ, ils font fu- jets à des moines ; & lorfqu'ils ont été bien forgés fur le plat & parés noirs, ils font plus denfes & d’un poids fpécifique plus fort, Nous formerons donc une colonne, quiindiquera , par l'ordre de leur infcription, les fers plus ou moins parfairement fabriqués. Cela peur être utile pour faire naître l'émulation ; véhicule puiflant pour la perfection des Arts. TAB LE AU des différentes qualités de Fers du Royaume qui ont été convertis en Acier, & dans lequel ils font claffés fuivant leur diffèrene genre deperfeétion, de manière que les plus parfaits en chaque genre font infcrits les premiers. EF £,Rt ANCÉT EH, M ualités qui procèdenc ualités qui èdent £ RES rimiifé de É xature . Étant & de La | a, ES ts Cr x Hide | bonté de La pâte. (PA La fabrication) de La forme exté-| de La pureté de La] de La netteté de nimes ane} Cu de Pétoÿe. rieure par Le pâte. L'étoffe. forgeage: Provinces. | Forges. Provinces. lrovinces. Provinces. Provinces. IT, |Rouflillon. Gincla. Champagne. |Evèchés. Allace. Champagne. V. |Dauphiné. Atticole. Evêchés. Champagne. (Champagne. |Alface. IV. |Comté de Foix.| La Combe, 1 Alface. Alface. Dauphiné. Evêchés. IX. |Evéchés. Longuion, |Fr.-Com.Lod.|Fr.-Co. Lod. |Roulillon. Fr.-Com. Lod. VI. [Fr.-Comré. Lod. Dauphiné. F.-Co. Pefine.|Comté de Foix.| Fr.-Co. Pefine. VII. |Alface. Béfort. Fr.-Co. Pefme.| Dauphiné. F.-Comt. Lod.| Dauphiné. XV. .|Fr.-Comté. Pefine. Bourgogne. |Bourgogne. |Evéchés. Roullillon. VIII. |Berry. Clavière. Comté de Foix. Comit.deFoix.| Berry. . |Comt. de Foix. X. |Champagne. | Ecor. Rouflillon. |Rouflillon. Fr.Co.Pefme, Bourgogne. XI. ‘Bourgogne. | Buffon. IBerry. Berry. Bourgogne. |Berry. Depuis que j'ai lu ce Mémoire à l'Académie , j'ai fait un voyage en Limoulfin , dans lequel j'ai eu occafion de voir trois petites for- ges. Le fer que l’on y fabrique eft d'une très bonne qualité , propre à faire de très-bon acier , fur-tout le fer que l’on emploie à la Manufacture d’ar- mes près de Tulles: il eft de même qualité que celui du Dauphiné. Nous faiñirons la première occafion de donner des détails fur les opérations de cette Mu t us, dans laquelle nous avons remarqué plus d'attention dans Le choix & dans La préparation du fer , de précifion dans le forgeage , de facilité & d'intelligence dans le travail de la meulière , d'ad-efls ie les foudures , & d'économie dans la confommation , que dans d’autres Ma- nufaétures de ce genre que nous avons eu occafion de voir dans nog voyages. Des trois fers étrangers que nous avons convertis en acier, celui de Teme XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE. Dd 2 212 OBSERVATIONS SUR LA PHŸSIQUE, Suède a donné l'acier le plus fin, mais le plus vif au feu ; celui d'ES pagne, le plus facile à travailler , le plus beau , mais un peu mou, quoi- qu'il ne foir point ferreux. Celui de Sibérie n'a produit qu'un acier des de médiocre qualité , rrès-vif, & difficile à forger & à fouder. Cerre der- nière forte, dont il peut y avoir des variétés plus propres à étre converties en acier que celle que nous avons éprouvée, ne peut donner que des aciers très-communs ,. d’un difficile emploi. Celui d'Efpagne feroit de la très-belle bijouterie , & demande une: cémentation active. À l'égard de celui de Suède , ilreçoit avec tant de facilité l'effet de la: gémentation ,. qu'il faut faifir preftement le point de faturation , afin de pouvoir le travailler facilement, Il fait d’excellens tranchans. Il y: à. en Suède des qualités fupérieures, tels ceux de Dannemora, de Roffelagie .. & en général ceux appellés Doregrund: Nous voyons, par ces obfervations, que les fers de Suède qui ont ac- quis une grande réputation, ont une très-grande propriété pour faire- de bon acier; ils ne auffi Le défaut d’en. faire de très-vif. Les aciers que” l'on fait avec: les fers de Suède ordinaires qui.circulent dans le commerce, font des aciers dont la pâte eft bonne; mais létoffe en eft fale , cen-. dreufe & pleine de moines , de veines & de filandrures. J'en ai l’expé- rience, pour en avoir employé de. plufeurs Provinces de ce Royaume. ettons un-coup-d'œil fur les divers aciers provenants des fers François, Dans cet examen , nous ferons abftraétion de deux défauts accidentels, qu: différentes efpèces de ces aciers nous ont montrés, l’un d'être vif au feu , & l’autre d’être ferreux ; défauts oppofés, qui procèdent d’une même- caufe , c'eft-à-dire, des degrés de cémentation qu'ils ont reçus en plus ou en moins. : Les aciers cémentés trop. vifs font fuperfaturés par l'effet d'une cémen-- tation trop active ou trop continuée , ayant égard à la propriété des fers. qui procède ou de leur effence , ou de leur forme. Les fers mous, gre- aus_ & minces, d'échantillon, faifffent plus abondamment & plus promp- tement le principe -aciereux : les fers compactes, fibreux & forgés {ur de groffes dimenfions , reçoivent plus lentement les effets de la cémenta- tion : ils font fujets à donner des aciers ferreux , fur-tout lorfque la pou- dre de cémentation n’eft pas aflez active , que fon cffet à été interrompu & pas affez prolongé, ou qu'il a été déeruit par une caufe extérieure. Nous développerons ces caufes , ces effets, & les moyens à employer pour craiter les fers fuivant leurs divers caraétères & leurs différentes modif. gations, dans notre Traité fur l’acier, dans. lequel nous ne négligerons rien pour faire connoître les cinq fortes d'opérations que l'on emploie- . pourfaire l'acier, qui font la‘/iquation, la fufion:, la précipitation, la ce- mentation &. la réduction, Ces cinq procédés produifent autant de fortes: f SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 213 d’aciers , qui ont des caractères différens, & qui fe fubdivifent en des muances très-étendues quant à leurs qualités. Nous ne nous arrêterons donc, dans examen des aciers que nous avons faits avec les fers François, qu'aux défauts qui procèdent de la nature de la pâte & d: la difpofition de l'étoff: ; défauts qui les rendent difficiles à forger , à fouder, hétérogènes, cendreux , pailleux , gerceux , filan- dreux ; qui les font boutonner au recuit & à la trempe en paquet ; les ren- dent mous où aigres à la trempe aqueufe ou huileufe, rl laquelle ils fe voilent plus ou moins; enfin, qui les empêchent de prendre un beau oli, d'une couleur uniforme , fans taches, ondes, nuages ou piquures, * He effentiels que les bornes de ce Mémoire ne nous permettent pas de développer. Quoique le fer de Roufillon ait paru devoir être placé au premier rang des fers de France par fa haute qualité, cependant il n’a pas prô- duit un acier aufi parfait que celui d’Alface , qui n’eft qu’au fixième rang desfers, & qui occupe la première place des aciers; & par le contraire, celui de Champagne , qui n'a que le neuvième rang parmi les fers, oc- cupe la deuxième place parmi les aciers. | La caufe de ce phénomène paroît difficile à mettre en évidence’; car fi on pofoit pour principe que les fers les plus nerveux , les plus forts, qui ont une liaifon plus intime, ou ceux dont les parties élémentaires font combinées en fi jufte proportion, qu'ils fouffrent une moindre décompofi- tion au feu, doivent être les plus propres à être cémentés en bon acier: an verroit bientôt écrouler ce {yftème ,,en jettant les yeux fur nos tableaux, qui démontrent d’une part que le fer de Roufillon, qui a 200 degrés de force, a produit un acier inférieur à celui de Champagne, quin’en a que 1455 & d'autre part ce même fer de Champagne a éprouvé au cor- roiement un déchet de 7 = par ©, tandis que celui de Rouflillon rx perdu que 6 = par ©. Il faut donc recourir à des preuves plus démonf- tratives ; & en attendant que des expériences lumineufes nous les aient fait connoître , nous expoferons fimplement nos préfomptions à ce füujer.. À Nous avons déjà traité de l'unité du fer dans le volume de nos Mé- moires (1), & nousavons fait connoître que la variété & la difparité que Ton apperçoit dans les différens fers procèdent ou des matières étrangè- res qui lui font unies ou interpofées , ou d’une combinaifon inégale de fes élémens. Or, en partant de ces. principes, il paroît vraifemblable que des fers dont La pâte eft ferme & folide, l'éroffe bien liée , aient par (1) Mémoires de Phyfique fur l'Art du Fèr, chez Delalain Paîné , rue Sainr: Jacquess Paris, 1775. f 214 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, furabondance une portion quelconque du principe conftitutif de l'acier, qui le difpofe déjà à prendre la nature d’acier. Le fer, dans cette poli- tion, eftun être mitoyenentre le fer & l'acier, defquels il s'éloigne en railon du plus ou moins de ce principe {urabondant, Le fer que l'on nomme communément dur dans les Provinces de Roufillon , Comté de Foix, Dauphiné , Limoufin, eft de ce genre, L'on pourroit oppofer à ce raifonnement que la pratique dans la cé- mentation a démontré que les fers qui avoient un grain aciereux , produi- foient pour l'ordinaire des aciers intraitables & de qualité très-inférieure, 11 faut convenir de ce fait, mais il faut diftinguer deux caufes de cet ac- cident, : Les fers peuvent avoir une qualité aciereufe qui {e manifefte de deux manières ; ou la totalité de la pâte left, ou l'acier eft cantonné. Si c'eft toute la pâte qui le foit, & qu’on expofe Le fer dans une cémentation avec d’autres fers doux, nerveux ou à grain gris, ce fer faififfant plus avi- dement l'effet de la cémentation, & y seftant aufli longtemps expofé que le fer doux, il y aura néceffairement fuperfaturation dans toute la mafle , d’où il réfulte un acier brûlant au feu , comme un corps réfineux, & ne pouvant fe fouder, Si les parties aciereufes ne font que canton- nées & interpofées dans une étoff: nerveufe , le même effet arrivera; mais la modification du fer étant inégale, les’ parties qui étoient déjà acier avant Ja cémentation, le feront trop après, tandis qu'il pourroit arriver que les parties charnues ne fuflent pas encore converties en acier. Ce neft pas aflez, pour faire de bon acier, que l’on puifle fe procurer du fer dont la pâte ait Le plus de propriété à faire des aciers fins , durs & faciles à travailler, enfin, d’une pâte bien homogène ; il faut aufli que J'étoffe des fers que l’on veut cémenter foit pleine , continue, exempte de tous les défauts qui forment une folution de continuité, parce que la plus grande partie des ouvrages auxquels l'acier eft deftiné, exige ces perfections, tant pour La force des pièces, que pour la bonté des tranchans & la beauté du poli. Les bulles qui fe forment à la furface des barres de fer, lorfqu’elles ont fubi l'effet de la cémentation, ne font point , comme on l’a cru jufqu'a- lors , l'effet d'un bouillonnement de la fubftance du fer, occafionné par l'effet des fels , des foufres, de la grande chaleur, €& de l'aëtion de la cémen- sation. Ces bulles ne font autre chofe que l'effet de l'air groflier, & fou- vent de l'eau, interpofés dans l’éroffe du fer, qui étant raréfiés par le feu, cherchent à s'échapper ; foulèvent les cloifons des cellules qui les renfer- ment. Le fer contient d’autant plus d'air, d'eau, quelquefois de corps étran- gers ifolés , que fon étoffe eft plus défunie par des pailles, des travers, des gerçures & des fentes. Plus ces corps font intérieurs, plus les bulles . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 217$ font fortes & élevées; lorfque l'effort eft violent , la bulle fe crève: on y apperçoit à Ja loupe une légère fente ; alors elle cefle de s'élever : c'eft ce qui forme les bulles plates & larges ; les petites font rarement ouvertes. Lorfque les bulles ont pris de l’évent, leurs furfaces intérieures fe décom- ofent , & forment des moines dans la pâte de l’acier qui en procède. Locales n'en ont point pris , elles fe foudent dans le corroiement , fur- tout fi leurs couvertures font aflez épaifles pour fouffrir une chaude fuante. Lés fers les mieux étoffés, dont la pâte eft pleine & homogène, fone moins fujets aux bulles que les autres. Ceux qui n'ont que l'apparence d'une belle fabrication, c’eft-à-dire, qui font bien unis, bien fués au dehors, mais dont l'affinage primitif n’a pas affez lié la pâte, font fujets à une très-grande quantité de bulles ; & par le contraire, les fers dont l'étoffe eft défunie par des défauts, qui des furfaces pénètrent au-dedans, ces fers font moins fujets aux ampoules, parce que l'air intérieur fe dégage par les fentes, les pailles & les tra-- vers. Les fers cémentésne font pas feuls fujets aux ampoules; les rôles & les fers noirs préparés pour l'étamage font fouvent défectueux par les mêmes caufes, La couleur bleue du fer cémenté, au fortir du creufet, eft l'effet d'une Tégère décompofition des furfaces du fer. Plus le bleu eft intenfe, plus on a lieu de foupconner l'acier de vivacité. Ce défaut s'annonce aulfi par la grande fragilité, par un fon aigu: le fon grave annonce des parties fer- reufes. Le bon acier fe connoît par un fon foutenu , ondulent & timbré, Nous développerons ces points de Phyfique néceffaires à cornoître , ainfi que le rapport immédiat dés parties conftitutives de l'acier avec celles des corps fcintillans, patticulièrement avec la fubftance vitreufe naturelle & artificielle. Ces obfërvations préviennent fur lès précautions que l’on doit prendre pour choifir les fers que l'on veut faire pafler à l’état d'acier. Dans l’Ou- vrage complet que nous nous propofons de publier fur l'acier , nous nous étendrons fur les moyens de procurer ces qualités au fer. Il réfulte donc des expériences que nous avons faites par ordre du Gou-- vernement : Qu'il eft très-poñlible de faire de trèsbons aciers fins par cémentation avec les fers des différentes Provinces du Royaume; qu’il fuit de choifr parmi ceux. qui ont le plus de propriété à devenir acier, les fers Les mieux fabriqués , & de les traiter fuivant leur caractère particulier. I feroit à defirer qu'il s'élevät plufieurs Manufactures en cegenre dans le Royaume, particulièrement dans le Rouflillon, l’Alface , la Franche- 216 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Comté, le Limoufin & la Champagne, afin de fournir aux Arts les aciers dont ils font une très-grofle confommation, laquelle forme une branche immenfe de commerce d'importation qui enrichit nos voi- fins. Extrait du Rapport de MM. les Commiflaires de l'Académie Royale des Sciences, du 14 Août 1782. Bous avons été chargés par l’Académie, MM. Macquer, Tiller & Ca- det , de lui rendre compte d’un Mémoire de M. Grignon, Chevalier de POrdre du Roi, & Correfpondant de l’Académie, contenant les détails, l'analyfe 8 les réfultats des expériences dont il a été chargé par le Gou- vernement , afin de connoître fi les fers du Royaume étoient propres à être convertis en aciers par la cémentation, & quelles étoient les Provin- ces qui produifoient les fers les plus propres à fubir cette converfion. L’Au- teur nous a paru avoir parfaitement traité ces différens objets importans. Il réfulte de notre rapport que ce Mémoire contient une fuite d'expériences en grand, & des obfervations qui concourent à étendre nos connoiflan- ces, non-feulement fur l'art de faire l'acier , mais même fur les effets de la cémentation du fer, & à exciter l’émulation pour élever des Manu- faêtures d'acier, qui procureroient de grands avantages à l'Etat. Ce travail fait infiniment d'honneur à M. Grignon, & prouve combien il eft digne de la confiance que lui a accordée le Gouvernement pour les opérations dont il l’a chargé. Ce Mémoire mérite à l’Auteur des éloges, & nous le croyons digne d’être imprimé dans les Recueils des Mémoires des Sa- wans étrangers. Fait à Paris le 14 Août 1782. Signés, MACQUER , T'ILLET , CADET Je certifie le préfent extrait conforme à l'original & au jugement de l'Académie. A Paris, ce 14 Août 1782, Signé le Marquis DE €onDorcCET. s ? MÉMOIRE |. RS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 217 NL TM OR L'R IE Sur La liaifon des Volcans d'Auvergne avec ceux du Gévaudan, du Velay, du Vivarais , du Forez, Gc. ; par M. PASUMOT , Ingénieur du Roi, &c.; . AUX AUTEURS DU JOURNAL DE PHYSIQUE. Msssreurs, JE fuis très-peu furpris que M. Chaptal ait découvert un volcanéteint - dans le Gévaudan. Si ce Naturalifte eût fait quelques recherches, il en au- roit pa reconnoître peut-être deux cents. Il i ignoroit fans doute que ceux de la Province d'Auvergne fe font étendus dans le Gévaudan , le Velay, le Vivarais, & qu’en fe prolongeant du Velay au nord, ils ont embrafé les montagnes du Forez. : ‘ En difant que ce font les volcans d'Auvergne qui fe font étendus , peut- être me trompé-je, & que ce font ceux du Vivarais, du Velay & du Gévaudan , qui ont embrafé les montagnes d'Auvergne ;, & qui fe font enfuite prolongés pour incendier une partie du Limofin , de la Marche & du Bourbonnois, Mais comme la mañle principale des montagnes des Cevennes. que j'ai traverfées n’a été aucunement volcanifée , & que Le fyf- tême montueux incendié le plus confidérable & le plus élevé eft celui de la.Province d'Auvergne, voilà pourquoi .j'admets, par fuppoñtion feule- ment ,que les volcans d'Auvergne fe font étendus. Je vais, Meflieurs ,.vous rendre compte des obfervations que j'ai faites en 1766 fur la fuite non interrompue de ces volcans jufqu'aux Cevennes, en traverfant le Velay , une partie du Vivarais & du Gévaudan, pour pé- nétrer dans le Languedoc. Il fau confidérer d’abord que la principale direction de la chaîne des montagnes d'Auvérgne , qui toutes ont été volcanifées, s'érend du nord au fud-fud-oueft ; elle comprend l’enfemble des Pics des environs de Clermont, dont le Puy de Dôme peut êwe confidéré comme le centre; enfuite les Monts d’or; & plus loin, dans la plus haure Auvergne , le fyftème des montagnes connues fous le nom de Cantal. De cette dernière mafle , le feu s’eft étendu au fud dans une partie du Rouergue ; au fud eft , dans le Gévaudan, à left dans toute la haute Tome XX ; Part, II, 17982. SEPTEMBRE. |, E e 218 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Auvergne, & jufques dans le Velay. Là les volcans ont formé .deux branches : une au nord, qui comprend le baflin de la Loire, & quia embrafé les montagnes du Forez jufqu’à la hauteur de Montbrifon & au- delà; L'autre branche s'eft dirigée vers le fud-eft, en tirant au Rhône, vers Viviers. Cette branche occupe en grouppe le Vélay & une partie du Vi- Varais. Je pourrois fuivre l'extenfion de cette branche volcanique, qui a tra- verfé le Rhône & pénétré dans la Provence; mais comme elle eft indi- quée dans l'Ouvrage de M, Faujas fur les volcans éteints du Vivarais, je m'écarterois de mon fujer, qui eft de faire connoître la fuite des volcans d'Auvergñe, jufqu'aux grandes montagnes des Cevennes que le feu n'a point attaquées. Pour aller de Clermont en Auvergne aux Cevennes, j'ai fuivi. la route qui pouvoit me conduire à Nîmes parle Puy-en-Velay. On compte fepr lieues de Clermont à Ifloire. Depuis Coude, on fuit Je canal de l'Allier, dont toutes les hauteurs , tant à left qu’à l'oueft , ont été des volcans , ou font eouronnées de matières volcaniques; mais 4pé- cialement du côté de l'oueft, qui eft celui des plus grandes & des plus hautes montagnes. : D'Iffoire à Saint-Germain-Lambron , il y a deux lieues, Dans cet inter- valle, on trouve deux courans de laves provenus des volcans fitués à l'oueft , & qui fe font étendus jufqu’à la grande route, Depuis Saint-Germain-Lambron jufqu'à Brioude , on compte fix lieues. Tout cer efpace eft terrein intact: après avoir paflé le Bourg de Lempde, qui n’eft qu'à deux lieues de Saint-Germain, on entre dans le baflin de l'Allier , & l’on perd de vue Les volcans , qui font les hauteurs à Poueft. Si, depuis Brioude, on remonte le canal de l'Allier, on trouve au- delà de Vieille Brioude , que fesbords , qui fe reflerrent beaucoup , font tous volcanifés , entr'autres à /a Woute, à Langeac, à Chanteufe, Saint Arcons , Saint-Julien, ainfi de fuite jufques près la fource de ce fleuve. Son cours fait la limite orientale du Gévaudan. Mais fi lon prend la grande route de Brioude au Puy, après avoir traverfé la largeur du baflin de l'Allier, il faut monter; & à environ 300 toifes, avant que d'arriver à la Chomette, Village qui n’eft diftanc de Brioude que de deux lieues, on traverfe un courant de laves peu large, & provenu du Puy-de-Sénèze , fitué à un quart de lieue au nord : on entre alors dans cette portion des volcans, qui, dérivés des montagnes de Can- tal, garniffent toute la haute- Auvergne. La Chomerte eft fituée fur une petite hauteur de granit intact; dès qu lon a defcendu , l’on fe trouve dans un bañlin qui a à-peu-près une lieue & demie de diamètre, dont le Village de Saint-George-Daurat eft à-peu- près le centre, & qui a été tout couvert de matières brülées, Les Villages SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 219 en fonc bâtis, & la grande route en a éré route conftruite. Un peu au-delà de Saint-George-Daurat , il faut monter en pente douce jufqu'à Villeneuve-de-Fix , Hameau fitué fur un autre courant volcanifé. Depuis ce courant jufqu’à Fix , qui eft un Village confidérable, on re- trouve l'intaét , qui comprend l'efpace d'une demi-lieue, Fix eft éloigné de la Chomette de 4 lieues ; c’eft le point Le plus élevé entre Brioude & Le Puy-en-Velay ; il eft fitué fur une éminence inta@e, nommée la montagne de Fix , & qui eft formée de granîts de différentes efpèces avec de la terre micacée. Néanmoins Fix eft dominé par une hau- teur fupérieure, prefque attenante au Village, & fituée au nord. Cette hau- teur, dont le fommet eft un amoncelement de fcories rouges , paroïc avoir été ainfi couronnée par leffet d’un volcan confidérable, firué au nord-ouelt , & qui a donné un courant de bafalte grumeleux, que l’on traverle en defcendant de la montagne de Fix, & à environ 300 toifes à l'eft du Village. Depuis Fix jufqu'au Puy-en-Velay, il y a quatre lieues que l’on par- court toujours en defcendant. Une demi-lieue au-delà de Fix, on entre dans un terrein tout volcanifé, qui continue fans interruption jufqu’aw Puy. Au Village nommé la Borne, mi-chemin de Fix au Puy, les ma- tériaux brülés ont formé , en fe pouffant les uns les autres, un amon- celement avancé en l’air, & dont le deflous fait une efpèce de caverne. Une portion du Villagea été bâtie dans ce trifte abri, effet d’un affreux défaftre de la Nature, . La Ville du Puy eft fituée fur un tertre ou puy, au milieu d'un bafliu aflez évalé , & arrofé par une petite riviète nômmée / Borne. Le con- tour de ce baflin eft un enfemble de collines peu élevées refpectivement à laffierte de la Ville ; leur pente, aflez efcarpée, offre des vignes difpofées en gradins comme des fiéges d’un amphithéatre. Ces collines font furmon- tées de tertres coniques, incultes, plus ou moins élevés les uns que les autres , mais quitous ontété des volcans. Celui qui porte la Ville a été volcanifé comme ceux qui l’environnent : il en porte des caractères non équivoques. La Ville entière eft adoffée du côté du nord à un énorme rocher, qui n'eft qu'une feule mafle, & qu'on nomme /e Rocher des Cor- neilles, Le fommet eft élevé d'au moins 7$ à 80 toifes au-deflus du niveau de la rivière. Ce roc eft compofé d’un affemblage grumeleux de petites parties , les unes fondues, les autres feulement chauffées , & d’autres ab- folument intactes. Ces dernières, qui font du quartz ou du granit, fone en aflez petite quantité. Le fommet de ce rocher prodigieux préfente des couches horizontales , phénomène affez fingulier , mais très-intéreffant, & qui prouve que cette malle, liquéfiée par le feu , renfermée dans les en- trailles de la terre, lorfque le baflin du Puy n'exiftoit pas, & lorfque tout cet efpace évuidé étoit terre-plein, a été refroidie d’abord par fon fon fommet & par degrés fucceflifs ; a éprouvé, enfüite un refroidiffe- Tome XX , Part. Il, 1782. SEPTEMBRE. Ee2 e / 220 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment en bloc, & ga ainfi paru au grand jour que lorfqu'un courant d'eau confidérable, qui a débouché par le vallon de la Borne , a déblayé les terres légères confumées par le feu, & a laiflé à nud ce rocher, devenu cxlor , refroidi-fur la place même , dans fon propre creu- ft. C'eft près d'un b:lvéder, conftruit fur le fommer de ce roc, que l'on peut bien obferver les couches horizontales dont je viens de parler. A la diftance d'environ 200 toifes du pied du rocher des Corneilles, . on trouve le Bourg ou Fauxbourg Saint-Michel, qui fait portion de la Ville, quoiqu'il foit enclos de murs. C’eft dans cette enceinte qu'exifte un füuperbe roc de forme conique, qui a environ 20 à 25 toifes de dia- mètre & fo de hauteur. Ce roc eft de même nature que celui des Cor- neilles : on y voit beaucoup de fragmens de quartz ou de granit, qui font ou inta@s , ou feulement chauflés. On a taillé dans cette quille des degrés & des repos pour monter au fommet, qui porte une aflez valte Chapelle. fous l'invocation de Saint-Michel , furmontée d’un clocher pyramidal fort élevé & très-élégant, parce qu'il eft de ftruéture gothique. Îl paroît que l’on a rabaiffé la cîme de ce roc pour Papplanir, afin d'y conftruire l'édifice. Cetre cîme ne m'a montré aucunes couches horizon- tales. L'identité de nature de ces deux rochers, & leur proximité , quoi. que leurs fommets foient diftans l’un de l’autre de plus de 300 toifes, me portent à penfer qu'ils font tous deux le produit ou l'effet d’un même volcan qui avoit deux bouches, ou toutes deux enfemble, ou bien l'une après l’autre. Au refte, on en conjeéturefa ce que l’onvoudra. Le pont du Fauxbourg occidental du Puy eft garni, à droite & à gauche, de bornes, qui font des prifmes de cinq, fix & fept faces, fur environ un pied de diamètre. Il y en a une centaine; ils ont été tirés du fuperbe rocher d'Efpailly, nommé Les orgues, & qui eft d’une beauté fin- gulière. IL eft firué à environ çoo toifes à l’occidenr'de la Ville, fur le bord de la rivière, & tenant au Village d'Efpailly. C’eft une efpèce de tertre conique , formé d'un affemblage énorme de prifines, porté fur un maflif confidérable , qui eft toar prifinatifé, dont le pied eft baigné par l'eau de la rivière, & le fommet du tertre eft fubordonné à une montagne atte- nante, toute volcanifée & couronnée par des piliers de juftice. Malgré l'énorme multitude de prifmes que toute cette maffz comporte, on en a tiré une fi grande quantité; que des parties confidérables des murs de la Ville ont été entièrement conitruites de ces prifmes par le pied, & à une hauteur aflez confidérable (1). (1) Je ne dirai rien des hyacinthes que fournit le fable ferrugineux & volcanique du ruiffeau d'Efpailly. J’ai publié dans ce Journal, 1774, tomelIlf, page 442, la manière donton les recueille. M. Faujäs a parlé des faphyts que l’on trouve aufli dans ce fable, H auroit pu ajouter qu'il fournirencore de la: chrylolite, que les Habirans du pays de Vaud emploient comme M yacinthes, pour décorer le centre du coq de leurs montres. 1 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 221 Le Village de Fix , dont j'ai parlé ci-deflus , eft fitué au nord-oueft.du Puy. Les matériaux volcanifés s’érendent à trois lieues de cette Ville au nord & au nord-nord-oueft, C’eft dans certe dernière direction que fe trouvent les buttes volcaniques des environs de Polignac, ainfi que les volcans des environs de Saint-Paulien. Les matières volcanifées, qui, fans aucune interruption , s'érendent une lieue au-delà de Saint-Paulien jufqu'au Village de Ceaux, ont été fournies par les hauteurs firuées à left, & qui s'éloignent très-peu des bords du baflin de la Loire. Ceaux n’eit pas encore Le terme abfolu des volcans de ce côté-là ; car à une lieue au-delà fé trouve le Village d’'Alècre , adoflé à une montagne nommée Bar, qui a été un volcan, & qui a produit par le flanc plulieurs courans de laves. Mais fans m'étendre davantage fur cette branche volcanique, je reviens à la route du Puy aux Cevennes, Cette route s’écarte fort peu de la direction du nord au fud. Au-delà du Village de Vats, diftant du Puy d'environ un quart de lieue , on monte par une pente toute brûlée, & jufqu'à /a Sauverar | Hameau éloi- né du Puy de quatre lieues; la route eft fans aucune interruption allife Er dés matières volcaniques , fans que l’on voie ni à droite ,nia gau- ché, rien qui foic intact. Les Villages de Vals, Cofaros ;, La Sanverar , & d’autres voifins, font entièrement bâtis de laves & de bafalre. A Coflaros , Paroife diftante du Puy de trois grandes lieues, on eft Ja haureur de la montagne du Gerbier-du-Jonc, au pied de laquelle , l'eft , la Loire prend fa fource: on n’en eft éloigné que d'environ quatre A a A a . lieues: on en voit le ommet , ainfi que celui des hauteurs, qui en font peu éloignées , telles que le Mézinc, le Puy de Freyfener, & d’autres, qui tous font des pics volcanifés. 4 * Dépuis /a Sauverat , on marche toujo@f8ffur des matériaux brûlés l’ef- pace d'une lieue, qui eft la moitié du chemin de la Sauverat, à une petite Ville nommée Pradelles. Après cette lieue , l'on trouve deux ou cinq pe- tites interruptions , qui montrent le granit intaét. Une demi-lieue avant d'arriver à Pradell:s, on voit fur le bord oriental de la grande route, une croix , dont la tige eft un prifine exagone de bafalte, d'environ 8 pieds de hauteur hors de terre, fur 6 à 7 pouces de diamètre. Environ 3 à 400'toifes avant de trouver cette croix, on trouve fur le même bord de la grande route un fragment d'un prifme pareil, planté perpendiculaire- ment pour fervir de borne, '& qui a environ 4 pieds de hauteur. En- fin, l’on arrive à Pradell:s ; qui eft fituée fur le granitintact, mais adof- fée du côté du couchant à des rochers volcanifés , qui font portion d’un courant de laves produit par umvolcan. fitué aflez près & au nord-oueft, Ce volcan eft aifé à reconnoître; c'elt La pointe conique la plus élevée qui foitaux environs; & quoiqu'il y ait un vallon qui fépare : Ville de Pradelles de cette montagne volcanique, le courant de laves ayant pris 222 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'abord fa direétion vers lorient, a fuivi l'inclinaifon du térrein , a dé- verfé enfuire fon cours en defcendant vers le fud , & la Ville fe trouve fi- tuée fur Le bord oriental de ce courant. Je remarquerai que Pradelles eft l'endroit habité le plus élevé entre le Puy & les Cevennes. Il faut monter de prefque tous les côtés pour arri- ver à cette petite Ville. Au fortir de Pradelles , on entre dans le courant de laves dont je viens de parler, dans lequel on a conftruit la grande route. On le traverfe l'efpace d'environ une demi-lieue. En le quittant , on fe trouve fur le granit intact, & l’on entre dans le Gévaudan. Le premier endroit de cette Province eft la petite Ville de Langogne. Environ 600 toifes avant d'y arriver, on pañle l'Allier fur un pont; fes eaux , qui font abondantes & très limpides, laiffent voir que le fond du lit de ce fleuve eft rempli de matériaux , lesuns intacts & les autres volcanifés. Il eft aifé de dif tinguer ces derniers des blocs de granit & de quartz que la rapidité du cours des eaux entraîne. Langogne n’eft éloignée de Pradelles que d’une lieue; elle eft fituée dans un terrein dont le fond eft intact, mais dont la fuperficie eft tou- verte de matières volcaniques, méêlées avec celles ui n'ont jamais fubi l'action du feu. Depuis cette Ville jufqu'à Luc, Paroïfle qui en eft dif- tante de 2 lieues, on fuitle canal de PAllier , qui eft très-ferré, dont le fond eft le granit intact ; mais le chemin eft parfemé de matériaux brü- lés. La plus grande partie des hauteurs, tant à droite qu'à gauche, a été volcanifée ; ces hauteurs ont fourni plufieurs courans de laves, qui garnif- fent les pentes des montagnes. Le canal de l'Allier Mon ns Depuis cet endroit jufqu'à /2 Baf- tide , autre Paroïffe qui n'en éloignée que d’une lieue, l’on fuit l'AI- lier lui-même , que l’on traverfe trois fois à oué; les matériaux brûlés deviennent fort rares: on n'en voit qu’accidentellement dans le lit de l'Allier: on abandonne les hauteurs volcanifées qui s’éloignent, tant à left qu'à l'oueft & fud-oueft. A la Baftide, tout le terrein eft abfolument inta@: on y emploie pour couvrir les maifons unfchifte orisâtre , très-talqueux, doux au taét , & qui eft un vrai talc congloméré. [l rouoit au feu , fans y perdre ni fa texture, ni fa couleur; il fe délite en lames aufli minces que celles de l'ardoife. Il fe trouve en très-grande abondance dans les montagnes des environs, & j'ai obfervé qu'il fair le fond des vallons élevés des Cevennes. L'Allier prend fa fource à une lieue & demie de la Baftide vers l'occident. L'on m'a afluré qu’il fort de deffous cette efpèce de fchifte dont je viens de parler, & cela me paroît très-probable. , à Le Village de Luc eft donc le terme des volcans; je les ai fuivis jufques- là fans aucune interruption l’efpace de trente-une lieues depuis Cler- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 223 mont-en- Auvergne , & vingt-trois feulement ‘depuis Iffoire. A la Baftide commence la mafle principale des hautes montagnes des Cevennes, Cette chaîne de montagnes, après avoir borné le Gévaudan dans fa partie méridionale de l’oueft à l'eft, fe dirige enfuire au nord-ett. La portion qu’il faut traverfer pour pénétrer dans le Languedoc , occupe en large fix lieues du pays , du nord au fud ; favoir , une lieue de la Baftide au Hameau /a Moubitte, deux de La Moulere à Villefort ( Ville), deux autres de Villefore à Genoilhac ,autre Ville, & une de Genoilhac à Cham- borigaud, Une lieue au delà de Chamborigaud , on trouve la terre calcaire, & le terrein va en s’abaiffant toujours jufqu’à la Méditerranée, La plus grande hauteur dans cette traverfée fe trouve entre /4 Baflide & la Garde, ce qui comprend deux lieues & demie. L'endroit habité le plus élevé eft un Hameau nommé Létor ou Léraur , placé entre la Baftide &la Moulerte, à la latitude de Montelimart, Dans lefpace de ces deux lieues & demie, le terrein eft inculte, fec , ftérile, prefque fans rerre comme fans plantes; ce n’eft par-tout que rochers & pics de rocs arides entaflés les uns fur les autres. F Le fchifte talqueux dont j'ai parlé & le granit compofent par-tout cette mafle montueufe. Ce fchifte fert de bafe aux granits qui paroiffent l'avoir percé, pour s'élever en pics,.en fe faifant jour au travers. Il eft néan- moins très-élevé en plufeursendroits , entr'autres au Hameau Létor. Cette hauteur eft un plateau nud , life & fort gliffant, qui, dans toute fon étendue, montre qu'il eft formé par cette mafle de fchifte ralqueux , dont les filons font du quartz ou du feld-fpath. Il n'y a point de chemin tracé fur ce plateau ; il y eft feulement tre d'efpace en efpace par des py- ramides d'environ huit pieds de hauteur. Le Languedoc commence à Bagard, Hameau ficué à un quart de lieue au nord de Vällefort,Ainf, il y a neuf lieues de cette route comprifes dans le Velay, & dans le Gévaudan fix , dont deux feulement font dans le ter- rein volcanifé que l'on abandonne à Luc, comme je l'ai dit , parce qu'il s'étend vers le fud-oueft. Comme Sauveterre, où M. Chaptal a découvert un volcan éteint , eftà fix lieues & demie ou fept fud-oueft de Luc dans la direction volcani- que , il eft naturel de penfer que ce volcan de Sauveterre n’eft point ifolé, & qu'il doit être la fuite de beaucoup d’autres. - . L n al 224 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LEE RTE. Sur l'identité de l'Eleétricité aërienne avec l'Eleétricité artificielle ; par M. l'Abbé BERTHOLON , Meribre de plufieurs Académies ? en réponfe & celle de M. DE. ...., inferée dans le Journal de Phyfique du mois d’ Août 1781, page 157. pe s difcufions littéraires font fouvent utiles, & il eft rare qu’elles ne tournent pas à l'avantage des Sciences, en accélérant leurs progrès réels. Je fouhaite bien fincèrement que celle qui s’eft élevée entre nous, Monfieur, n'ait pas un fort différent; & j'ofe l'efpérer, parce qu'il paroîr que l’un & l'autre nous n'avons d'autre but que la recherche de la vérité, J’aurois cer- tainement bién plutôt répondu à votre Lettre , fi quelques voyages & une maladie ne m'avoient empêché jufqu’à préfent de remplir ce devoir. Tout ce que vous dites d'obligeant au fujet de mon Ouvrage de l'Eleéfricité du Corps humain en état de fanté G de maladie, n'en impofoit encore la loi d'une manière particulière. Le fuffrage des perfonnes auffi éclairées que: vous eft bien capable de dédommager des peines & des travaux qui font inféparables de la carrière des Lettres. û Dans l'Ouvrage que je viens de citer , j'ai dit, & je crois l'avoir prouvé, que le Auide électrique de l’armofphère eft le même que celui qui brille entre les mains des Phyficiens , & que frottement du verre, de la foie, des réfines & des autres matières idio-éleétriques, développe d'uñe ma- nière fi merveilleufe. Vous penfez au contraire, Monfieur que confondre l'électricité aërienne avec l'électricité artificielle, c’eft tomber dans une erreur. Quoique mes idées fur ce fujet paroiffent bien oppofées aux vôtres, je vais effayer de les développer de nouveau, & de les étayer fur des preuves non moins claires que certaines : peut-être nos fentimens fe trou- veront-ils enfuite plus rapprochés "qu’on n'auroit d’abord ofé le préfumer. C’eft un principe avéré, qu'on ne doit jamais diflinguer deux fluides qui font de même nature, & il n’eff pas moins für que deux caufes qui produifent les mêmes effets doivent être regardées comme une feule fubf- tance. Perfonne ne fera tenté de contefter ces vérités, qu'il fur de pro- pofer pour les voir univerfellement admifes. Les différences accidentelles qui dépendent des milieux divers, des circonftances locales, & de plufeurs autres objets accefloires, ne nuifent aucunement à l'identité effentielle & rigoureufe. Pour réfoudre [a queftion ptopofée, il eft donc néceflaire de prouver que le fluide électrique qui règne dans l'air produit les mêmes effets SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 225$ effets que le fluide électrique de nos machines fait paroître, afin de pou- voir conclure , non-feulement des rapports & une analogie , mais Pidenriré de la caufe de l'identité des effets. Ÿ | Les principaux effèis de ia matière électrique que nous avons l’art de faire naître dans nos Laboratoires , font d'attirer & de repoufler enfuite les corps légers, d'exciter une odeur de foufre & de phofphore, de faire briller des étincelles & des traits de feu qui ferpentent, de tuer des ani- maux, d'allumer des corps inflammables, de percer quelques-uns de ceux qui ne le font pas , de brifer & de déchirer les autres, d'êrre mieux tranfmile par les matières métalliques & par l'eau , que par l’entremife de tout autre corps; de fondre les métaux, de les réduire en chaux , & même de revivifier enfuite ces chaux , en leur rendant le phlogiftique dont elles ont privées dans ce dernier état, &c. Toutes les obfervations que nous avons faites jufqu’à préfent nous prouvent que la foudre a fouvent produic des phénomènes qui font abfolument de la même efpèce. Des corps jetés ça & la, & difperfés en toue fens, l’odeur de foufre qu'on fent après la chüte de ce météore , des animaux foudroyés, des matières diverfes per- cées ou brifées, le feu mis à des édifices, des fubitances métalliques & des mafles d’eau tranfmettant parfaitement le fluide fulminant, des fils de fer fondus en tout ou en partie, des métaux calcinés ou réduits , &c., fonc fans contredit des effets de même nature que ceux qui font produits par nos appareils: la feule différence qu'on puiffe remarquer et celle du plus au moins, du grand au petig; différence qui n’eft jamais effentielle, mais purement accidentelle : encore peut-on facilement la faire difparoître, ou du moins la diminuer de telle forte, que l’'approximation foit aufli grande qu'on puife le défirer. Pour développer davantage mes preuves , fuppofons que dans un La- boratoire de Phyfique on ait deux appareils, dont l'un foit un conduc- teur atmofphérique ifolé, ou un grand électromètre propre à tranfinettre dans le cabinet même le Auide éleétrique qui règne dans l'air, & que l’autre foit une machine électrique ordinaire; fuppofons encore deux Phyfciens munis d'inftrumens femblables pour faire les mêmes expériences, & que le temps foit favorable aux expériences éleétriques : dans peu de temps on pourroit, dans votre appartement, réalifer cette fuppoñition, comme elle left effectivement chez quelques Savans. Dans cette hyporhèle , je dis que fi lun deces Phyfciens préfente au conduéteur de la machine, des corps légers pour être attirés, & enfuite repouflés, l’autre produira les mêmes effets en plaçant les mêmes corps légers & d’autres femblables près du corps atmofphérique; le carillon électrique fonnera aufli rôt & de la même manière. Si le premier tire des étincelles & allume de l'efprit- de-vin ,le fecond en fera autant. Dès que celui-là, par le moyen de l'é- tincelle; tuera un oïfeau, celui-ci foudroiera également l'animal qu'il mettra en expérience. Deux bouteilles de Leyde égales, chargées égale- Tome XX , Part. Il, 1782. SEPTEMBRE. F£ 226 OBSERFATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment , feront reffentir la même commotion. Si l'un fond un fil ou unñe . L; . » . A # feuille métallique, l’autre obtiendra le mème réfultat. Si le premier, par NU , . à % . Lo “ériacelle électrique > perce un jeu de cartes ou une main & ARTS de papier, le fecond préfenrera auur-to4 LONATERS rhénomène, Fos ef ES En un mot, il n'eift aucun effet électrique que ces deux appareils ne puif- fent produire; & fi on compare avec foin les réfulrats obtenus de part & d’autre, l'œil le plus fin ne pourra même y découvrir la plus légère différence. Il vous eft facile, Monfieur, de faire les mêmes expériences que je vous propofe; je les ai faites plufieurs fois, & je vous offre bien volontiers d'être votre Collégue, & de me tenir près du conduéteur at- mofphérique , bien entendu qu'il y aura une barre de décharge pour m'en fervir au beloin. Que Les effets des deux appareils fur l'économie animale, & en particulier fur le corps humain , font les mêmes, toutes chofes égales. L'impreffion de la toile d’araignée, celle d’un venr frais , l'odeur de phofphore, la faveur propre , le bruiffsment, la crépitation des Auides qui feront raflemblés par les deux conducteurs, feront les mêmes. La forme des aïgrettes & des étincelles qu’on excitera de part & d'autre, la variéré de leurs couleurs ne différeront én aucune façon. Deux perfonnes, électrifées chacune par un de ces conduéteurs , éprouveront une égale augmentation dans la quantité de la tranfpiration , une diminution égale du poids de leur fubf- tance, la fréquence du pouls aura lieu des deux côtés ; la liberté des mou- vemens d’'infpiration & d'expiration fera la même de part & d'autre ; les forces vitales évalement augmentées:, les Auides également divifés , 8& mus avec un accroiflement de vitefle, les folides affectés de la même manière; plufieurs des maladies auxquelles l'efpèce humaine ef fujette , feront gué- ties indiftinétement par l’un ou l’autre moyen. Je n’ai garde d'oublier de vous parler de Péleétricité négative, moi qui aiété le premier .des Phyfciens à l'appliquer au corps humain , comme il confte par deux Differtations que j'ai fait imprimer dans le Journal des Savans en 1770 & 1771, & quon peut voir aufh dans mon dernier Ouvrage déjà cité, page 402 & fuivantes. Si le Phyficien qui a recours aux machines ordinaires ; peut préfenter une électricité pofitive & l’autre négative, celui qui maîtrife l'éleétricité- célefte, fi je puis parler ainfi, nous montrera aufli ces deux efpèces par le fecours de- fon conducteur atmofphérique; l’un & l'autre feront briller alternativement des aigrettes & des points lumineux. Comment, Monfieur, ne pas confondre le fluide électrique répandu dans les nuages, dans l’atmofphère & dans le globe de la terre, lorfque je vois qu'on réuñlit à épuiferune machine électrique, dès qu'on l'a ifolée, ‘qu'on l’a féparée du réfervoir commun, en interceptant toute communication avec lui? Vous favez , auffi bien que moi, qu'une machine électrique , dans cet état, ne donne plus d’aigrettes , d'étincelles , ni aucune marque d’é- SUR l'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 327 Je&tricité. Qu'on rétabliffe la communication avec la terre, les fignes re- paroiffent, Il en eft de même fi, l'ifolement ayant toujours lieu, la mas chine épuifée communique avec la corde d’un cerf-volant éleérique, comme je l'ai éprouvé; expérience qui, pour le dire en paflant, n'a ja- mais été faite avant moi , & qui eft de la dernière certitude. Si, aux preuves d'expérience que j'ai rapportées , il en falloit ajouter d'autres d'un genre différent, je vous citerois le témoignage de la plupart des Phyficiens qui ont écrit fur cette matière, & qui prefque tous ont été perfuadés que les deux éleétricités dont nous avons parlé ne font au fond que la même. M. PAbbé Noller & M. le Comte de la Cépède me paroif- fenc être, eu égard au temps où ils ont publié leurs excellens Ouvrages, les deux extrêmes de cette chaîne de Savans, qui ont eu le même fenti- ment que moi. D'après ces preuves , & plufieurs autres que je fupprime ici , parce qu'elles font dans quelques-uns de mes Ouvrages, je vous avoue qu'il m'eft impoflible de ne point confondre abfolument l'électricité aërienne ou naturelle avec l'électricité nommée artificielle, & de ne pas regarder ces deux éleétricités comme une feule , comme dépendantes d’un feul & même fluide. Cette doctrine me paroît porter avec elle tous les carac- rères de la vérité. Si, dans l'examen de cette queftion , nous precédons de la même manière, il nous fera difficile de penfer différemment. La route que nous devons tenir l'un & l'autre, eft l'expérience : fi nows la conful- tons , fa réponfe fera la mème; ce fera celle qui nous a déjà été faite, Abandonnerions-nous le flambeau de l'expérience pout nous livrer au rai- fonnement & aux preuves métaphyfiques , nous ne trouverions bientôt que doute & incertitude. S'il y-a eu jufqu'à préfent de la diverfité dans nos fentimens , je crois qu'elle ne vient que de la différence des moyens que nous avons pris pour parvenir à connoître la Nature. Quand on a» une imagination brillante comme vous paroiffez l'avoir, permettez moi de vous le dire, on eft naturellement porté à admettre les idées qu’elle fait naître, Vous les préfentez, Monfieur , d’une manière fi féduifante, que ce n’eft pas fans peine que je me vois forcé de ne pas les adopter, & j'ai befoin de tout mon amour pour les vrais principes, afin de me défendre contre vos raifonnemens. Rien, fans contredit, n'eft plus ingénieux que ce que vous dites à la fe- conde page de votre Lettre. « Je ne connois pas de compolé de matière » plus parfaite, plus compliquée que l’homme. C'eft donc en lui que » doit agir le fluide univerfel dans toute fa pureté, ou du moins avec le » plus de pureté; car fi je veux croire qu’il n’eft pas dans l’homme avec » toute fa pureté, je ne peux qu'imaginerun être plus parfait que je ne connois pas, & qui dès-lors ne m'intérefle plus en aucune manière. Je » dois donc fuppofer que le fluide univerfel agit dans toute fa pureté dans la machine que je fuppofe qu'il fait mouvoir, Je conclurai donc Tome XX, Part. T1, 17982. SEPTEMBRE, . F£2 o ou v 228 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » que le fluide univerfel fe trouve dans l’homme ». Quant À moi, je vous avoue de bonne foi que j'ignore s’il y a un fluide univerfel, ou plu- fieurs Auides répandus dans l'Univers ; fi ces derniers font fpécifiquement différens , ou feulement des modifications du premier & je crois que long- temps l'efprit humain fera condamné à Pignorer. Si ces queftions cepen- dant peuvent être réfolues, ce fera certainement par MM. Carra, de la Métherie, le Baron de Marivets & fon digne Collaborateur. Si je m'en occupe dans mon nouveau Cours de Phyfique & dans d’autres Ouvrages que je publierai , ce ne fera qu'après avoir examiné, avec la plus grande attention, ce qu'ils auront écrit de relatif à cet objet. Mais, en fuppofant que ce Auide univerfel exifte, & qu'il ne diffère point du fluide électrique de l’atmofphère, je ne me croirai pas pour cela obligé de dire avec vous qu'il agit dans toute fa pureté dans la machine la plus parfaite, c'eftà-dire, dans l'homme; car ce fluide éleétrique de l’'atmofphère que j'ai prouvé être eflentiellement le même que celui que nous faifons naître avec le fecours de nos appareils , me paroît agir dans toute fa force, & confé- quemment dans toute fa pureté, dans une machine bien moins parfaite que l'homme, dans la torpille, ce chétif amphibie qui vit au fein des eaux ; dans l’anguille de Surinam, qui n'eft guère d’un rang plus élevé. C’eft dans ces êtres d’une claffe inférieure que le Auide électrique agit avec une énergie toute particulière, & qu'il femble s'y jouer, pour mettre en défaut les plus brillantes théories auxquelles l'efprit fourit toujours, & que la raifon plus févère enveloppe quelquefois dans une profcription fou- vent trop méritée, Je fuis, &c. RES CAN DUO EN 5 DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE De M. l'Abbé DicQuEMARE, de plufieurs Sociétés & Académies Royales de France , Efpagne, Allemagne , & Correfpondant de l'Académie Royale de Marine. AE NE —— 5; DESTRUCTEURS DE PIERRES, féconde efpèce (1). |: LS efpèces , peut-être même des genres d’infectes marins qui {1) Voyez tom. XVIII, 178r, Septembre, page 222,le Mémoire, avec figure de M. l'Abbé Dicquemare ; fur la première efpèce, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 229 détruifent la furface des pierres , pour s'y loger en tout ou en partie, fe trouvent aux rivages du Havre, & fans doute ailleurs; elles font à la fur- face des pierres, des trous , des cavités de grandeurs & de formes diffé. rentes. Mes premières découvertesen ce genre m'ont mis fur la voie, & j'at- tends avec impatience les circonftances favorables pour faifir quelques individus des plus grands que je n'ai fait qu'entrevoir, tant ces animaux prennent foin de fe bien loger, & font prêts à fe fouftraire lorfqu'on les attaque. Il nous feroit utile de découvrir & de fuivre leurs manœuvres, qui peuvent fuggérer des vues avantageufes , relativement aux Arts. Mon objet préfent eft de faire connoître une des petites efpèces. Celle dont je donnai la defcription & la figure dans le rome XVIII des Offérvarions Jur la Phyfique, Gc., étoir, je crois , la plus difficile à découvrir. La forme de celle que je dénonce eft repréfentée, dans les figures 1 & 2, con- fidérablement aggrandies , puifque l’aninial n’a qu'environ fix lignes de longueur depuis l'extrémité de la partie antérieure jufqu'à celle de la queue, Cette partie antérieure ou tête eft fourchue , fes deux fommités agiflent indépendamment l’une de l'autre; elles font garnies d'un très- grand nombre de membres, fig. $, de différentes longueurs, cylindri- ues, déliés, articulés, très-Aexibles en tout fens , fe roulant fouvent en { irale , tranfparens, mamelonnés , ayant un canal dans le milieu; ils font À couleur grife , qui eft celle de la tête, excepté quelques parties blan- ches & quelques raies noires; le corps eft un peu long, d’un blanc fale comme le pou , tranfparent avec des vifcères fanguins. [l a deux rangs de membres l’un au deflus de l’autre; ceux du rang fupérieur font au moins vingt-fix de chaque côté, articulés & un peu nie , fig. 33 ceux du rang inférieur , ou plus près du ventre, fig. 2 & 4, font à-peu-près de même nombre, & ont la forme d’un cône tronqué, terminé par une touffe de poils que l'animal fait rentrer quand il veut, Au-deffus de la partie pof- térieure du corps naît une queue aflez longue , & qui reffemble en tout aux membres de la tête. Ainf,je ne pourrois que répéter, pour la dé- crire, ce que j'ai dit de ces membres. J'ajoute que fon extrémité eft ouverte, peut s'élargir, & que les bords de l'ouverture font terminés par un cercle d’appendices ou mamelons, comme celle de la première ef- pèce (1), fig. 6, ce qui mérite notre attention. Ces mamelons feroient- ils des inftrumens propres à creufer la pierre ? diftillent-ils, exfudencils par le canal de la queue ou par les mamelons qui Ja terminent, quelque humeur qui puifle la diffoudre? ceci me femble plus aifé à croire. Je ne fais fi ces infectes fe retournent dans leur logement , comme les vers à fourreau cylindriques ; mais leur tête ou partie antérieure ne me paroît (x) Ces mots, première & feconde efpèce , ne fignifient rien autre chofe ici, finon que l’une a été découverte avant l’autre; & quoique ce foit réellement des efpèces dif- férences, on ne prétend point par-là en fixer le rang, 230 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, guère propre à faire dans-la pierre des trous menus & profonds. Si on pouvoit Bite l'analyfe du diffokvant que doivent employer les grandes ef- èces , & l’imiter , gette découverte ne feroit-elle pas avantageufe pour la de FR RIerS dans certaines circonftances ? Quel parti n'a-t-on pas tiré de l'eau-forte pour la gravure en cuivre? Je ferai voir, par de bonnes figures, une fuite de pierres,que je conferve , percées en tout fens par des infeétes marins de différentes efpèces, qui juftifieront ce que j'avance : jufqu'ici elles font toutes calcaires. La partie antérieure des animaux qui nous occupent me paroît deftinée à former le fourreau graveleux dont je parlerai bientôt , & à failir quelque proie. Je penfe que c’eft d’elle qu'exfude Ja matière qui unit les grains de fable, & qui eft elle-même en grains légèrement colorés : le tout eft de nature ferme & caffante. Ce fourreau eft évafé par le haut, comme on le voit, ifolé dans la figure 7, où l’on apperçoit aufli le logement de la queue prolongé dansla pierre, & qui fait angle avec celui du corps. La figure 8 fait voir quelques ouvertures de fourreaux réunis, deflinées en grand; & pour fe former une idée de toute la fociété, il ny a qu'à les multiplier, en fe repréfentant la furface d'une groffe pierre qui en foit toute couverte. Ces figures font autant dé- monftratives que naturelles. F Il y a de ces fourreaux qui rampent feuls ou en petitnombre fur la fur- face des pierres , y prennent une forme un peu vermiculée, & ont, comme les autres, jufqu'à deux pouces de longueur; & quelquefois aufli ils ne fe terminent pas dans la pierre. Fr : Je dis tout ceci, pour éviter maintenant des gravures trop difpen- dieufes , & j'ajoute qu’on. ne peut trouver plus aifément & reconnoître ces fourreaux, qu'après que les vagues, agitées par .une tempête, ont nettoyé les rochers qui ne découvrent que dans les grandes marées ; l’ani- mal retire alors dans fon fourreau la partie antérieure qui, lorfqu'’elle en fort, paroît comme dans la figure 2. On trouve fur les mafles de fourreaux: de menus cylindres de limon un peu longs, qui ont l'air d’avoir été re- jettés par l'animal : on y trouve aufli des pellicules qu’on prendroit pour des dépouilles ; ce font peut-être des fourreaux membraneux, qui, dans certaines circonftances, tapiflent les autres. [l paroïc que les grandes ef- pèces les enduifent d'un ciment , qui y forme comme un tuyau miInçes ENS SUR L'HIST. NATURELLE:ET LES ARTS. 231 SA} TT E DES MRIX ET EN COUR AGE MEN S Propofés par la Branche Economique de la Société Hollandoife des Sciences, érigée à Haarlem. Prix propofés en l’année 1780. N°. 7. QE LUI qui introduira & établira dans la République un Tra- fic ou une Fabrique qui n'y a point encore exifté, & à l'établiffement de laquelle certe Société n'a pas encore deftiné de récompenfe annuelle ; ou celui qui rétablira une fabrique tombée , & fur le Re pour le moins vingt perfonnes qui auront paflé leur dix - huitième année, y trouvent leur entretien fans interruption, obtiendra, pendant fix ans confécutifs, 50 ducats. Une autre , qui procurera de l'ouvrage à trente perfonnes, aura 7$ ducats. Une troilième aura 10O ducats pour quarante perfonnes, Et une quatrième, pour cinquante perfonnes ou plus, aura 150 du- sals. Ê Les preuves d’une telle introduction & établiffement doivent être en- voyées avant ou le dernier Décembre 1782; & les preuves de fa conti- nuation , fur le pied fufmentionné , doivent être envoyées avant le der- nier Décembre de chaque année, Celui qui établira dans cette République une Fabrique de Plancherres d’Eventail en bois , en Ivoire ou en Os ,où dix perfonnes pour le moins trouvent continuellement de l'ouvrage, & dont les meilleurs échantil- - dons n'excèdent pas Le prix de celles. qui nous viennent de l'Etranger ; & fi un tel s’oblige en même temps d’en PARLER cent douzaines, en cas qu’on l'exigeit ,au même prix dans l’efpace d'un an, à compter depuis le temps que les échantillons en auront éré préfentés, & qui doivent confifter en une demi-douzaine de chacune des trois fortes fufmentionnées , il obtien- dra 2$ ducats. Et celui qui imitera les meilleures P/anchettes de l'Etran- ger de 6 à 12 Aorins, & qui en fournira dix douzaines, après en avoir produit fix pièces d'échantillon, aura encore 2$ ducars. Les modèles & atteftations doivent être envoyés avant le dernier Dé- cembre 178. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1783: N°. 3. Celui qui , dans cette République , travaillera la meilleure Terre pour Faïance blanche ou jaune, égalant en bonté, façon. & luftre celle >32 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUÉ, d'Angleterre, & qui pourra produire des preuves fuffifantes que la fienne n'eft pas plus coûteufe que celle d'Angleterre, qui d'ailleurs s’oblige de même de fournir la première année , au prix fus-mentionné , pour le moins dix Services de Table, chacun de deux cents cinquante pièces , la, feconde année vingt-cinq , & ainfi de fuite chaque année cinquante Services , fi on l'exige, recevra confécutivement pendant les neuf premières années d'enfuite, 100 ducats, & la premièré année 200 ducars , & la Médaille d’or. Les preuves & atteftats doivent être envoyés avant ou le dernier de Décembre 178r. Ce Prix fra prolongé jufqu'au dernier Décembre 1782. N°. 4 Celui qui établira dans la République une Fabrique de Vitres de verre blanc de la même qualité & bonté , ainfi qu'au même prix que les meilleures d'Angleterre , & qui s’oblige en même temps de ne pas fortir du pays , & de fournir la première année au moins cinquante Panneaux , fi on l'exige, conformes à l'échantillon donné & au prix fus-mentionné , obtiendra 100 ducats, & recevra en outre chaque année 40 ducars pen- dant les premières fix années. - Le modèle , ainfi que les preuves par écrit , doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1783. N°. 5. Celui qui travaillera des Ornemens en cuivre , embellis du meil- leur vernis, dont fix doivent être travaillés à jour, & fix autres tout /£m- ples , qui égalerent pour le moins en bonté & prix ceux de l'Etranger, & qui en étant requis ;! fournira la première année , d'après le modèle donné, trois cents pièces au même prix que ceux de l'Etranger, aura 50 du- çais. Les échantillons & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1787. Ce Prix fera prolongé jufqu’au mois de Septembre de l'an 1783. N°. 6. Celui qui, dans la République , établiraune Fabrique d’Affiertes ou Tablettes en fer pour le Thé & la prefentation, de différentes façons, avec les bords travaillés à jour, & qui foient de la meilleure forte, éga- lant en bonté & valeur celles d'Angleterre, & qui, en cas de befoin, fournira , dans l'efpace d'un an, trois cents pièces au même prix , recevra O ducats. Les échantillons, confiftans en douze ‘pièces , doivent être envoyés, avec les preuves néceffaires , avant ou le dernier Décembre 1781. La récompenfe en fera cependant renvoyée jufqu'à la fin de l’année 1782. N. B. Dans cette queftion, on ne demande que de les travailler, fans exiger de favoir comment on y applique le vernis. N°, 7. Celui qui , dans la République, établira une Fabrique de Limes & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 233 8&c de Räpes , égalant en bonté & prix celles de l'Etranger, & qui s'obli- gera en même temps d’en fournir au moins trois mille pièces ou plus, la première année, après l'échantillon donné, qui doit confifter pour Le moins en cent modèles , aura 100 ducats; & il recevra en outre , pendant les cinq premières années d’enfuite, par chaque année, 40 ducats. Les Modèles, ainfi que les preuves par écrit, doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1782. N°. 8. Celui qui, dans la République, fabriquera du Cuir qui con- vienne pour les Canons de Bottes , égal en bonté & prix à celui qui nous vient de l'Etranger, & qui, pendant un an, ne perde rien de fa qualité, aura $Ô ducars. Les échantillons, confiitant pour le moins en fix pièces , & les attefta- tions néceflaires , doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1781. Le Prix en fera prolongé jufqu'à l’année 1783 , & ne fera diftribué qu'un an après avoir été adjugé ; c'eft-à-dire, quand les échantillons en- voyéstauront refté un an enfermés avec du cuir de l'Etranger, & qu’on pourra voir fi le cuir Hollandois n'aura rien perdu en comparai- fon de l’autre. N°. 9. Le Fabricant qui préfentera une pièce de Taffetas en foie, fa- briqué en Hollande, qui foit ondulé, & d'auffi bonne qualité que celui de Lyon, & qui pourra en fournir pour le moins vingt-cinq pièces la pre- mière année, aura 6O ducars, & la Médaille en or. La préfentation d’une pièce & Les certificats doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Décembre 1783. N°. 10. Celui qui établira dans cette République une Fabrique de Toile de Mouffeline faite de coton des Indes celte , dans laquelle l’on oc- cupe pour le moins vingt Tiflerands pendant toute l'année, recevra 200 ducats. Les échantillons & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1784. N°. 11. Celui qui TE dix livres de Coudeou Déchet de Soie qui aura été filée dans cette République, & qui, à l'égard du prix & de la qualité, ne cède en rien au f£/ flore: d'Angleterre, qui fournira en, outre les Inftrumens & donnera l'inftruétion pour la préparation , obtiendra 5° ducars, Les preuves & atreftats doivent être envoyés avant où le dernier Décembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Septembfe 178$. N°. 12. Celui qui indiquera un moyen für pour empecher la crue du Toms XX, Part. II, 1782. SEPTEMBRE, Gg 034 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Champignon qui fe met fur le côté extérieur ou intérieur du bois, & qui eft tellement nuifble, qu'elle ne fait pas feulement pourrir les lambris dans Les chambres , mais ronge aufli le bois de conftruétion, les moulins & les vaifleaux , fur-tout quand le bois eft travaillé étant encore humide, tecevra 25 ducais. . Les avis avec les atteftations & preuves néceffaires, doivent être remis avant ou le dernier Décenibre 1781. N°. 13. Celui qui indiquera un remède fpécifique & plus für que ceux qui font connus jufqu'à préfent contre les efpèces de tumeurs qui affectent l'æ/ophage ou le conduit par où les alimens entrent dans l’eftomac (maladie qui prefque toujours eft mortelle), aura la Médaille en or & 6O ducats, à condition, comme s'entend , que le fait foit conftaté par un nombre fufffant de preuves & atteftations, On doit répondre à cette queftion avant le dernier Décembre 1781. te |: N°. 14. Celui qui indiquera la caufe d’où provient que les Cuves des Teinturiers en bleu découlent ou perdent la couleur, & qui fera cornoi- tre un moyen confirmé par des preuves pour pouvoir remédier à £et in- convénient , reCeVr'a 100 ducats. Cet avis, avec les preuves & atteftats néceflaires , doivent être en- voyés avantou le dérrier Décembre 1781. N°. 15. Celui qui établira le premier dans cette Répubiique une Sa/- pétrière affez vafte pour qu'elle puiffe fournir annuellement vingt-cinq mille livres de Salpêtre qui foit utile à nos Fabriques, & principalement à la compofition de la poudre à canon , recevra 300 ducats. Les acteftats doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1783, avec des échantillons néceflaires. N°. 16. Celui qui indiquera mathématiquement le meilleur moyen, non-feulement shéorique , mais aufli pratique , &° inconnu jufqu'à préfent , ainfi que peu coûteux , pour la perfection des Phares fur les côtes de notre mer, de façon que le feu qui eft fur ces tours puifle s’appercevoir en mer un demi-mille plus loin qu'on ne le voit à préfent , recevra 10 ducats: & sil peut y joindre l'invention d’un moyen par lequel on puille diftinguer un feu de l’autre de manière que le Navigateur difcerne d’abord À la lueur du feu fur quelle côte fe trouve le phare, il obtiendra , outre le prix fufmentionné, 25 ducats, & fi cela peut s'effeétuer par le moyen d’un-autre feu ou d’autres matières combuftibles moins coûteufes que le feu ordinaire, l'inventeur aura le double des récompenfes promifes ci- deflus. } . On doit en envoyer une inftruétion fufifante avant ou le dernier Dé- cembre 1782. M: 146 N°, 17, Celui qui indiquera Le meilleur remède & le moins coûteux, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 235$ confirmé par des preuves fuflifantes , pour garantir dela piquure des vers les Pilouis dans les Ports 6 Les Digues | aura une récompenfe de 100 ducats. Les avis & preuves par écrit doivent être envoyés avant ou le dernier Décembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu'à la fin de Décembre 1784. Prix propolés en l'année 1781. : N°. 1. Le premier qui dans Cette République établira une Fabrique de Glaces, aura 1000 ducats ,. aux conditions toutefois qu'il enverra à MM. les Directeurs pour le moins douze échantillons coulés en ce pays, lefquels auront 40 pouces de hauteur fur 26 de largeur , mefure de Khyn- land, & qu'il promette de les livrer de même qualité & au même prix que les glaces qui fe fabriquent & fe vendent hors du pays. Si, dans le cours de cinq ans confécutits, ledit Fabricant eft en état d'en livrer une double quantité , il aura peur chaque année 100 ducats. Il faut que les certificats & échantillons foient envoyés au dernier Sep- tembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu'au dernier Décembre 1784. N°. 2. Au premier , dans la République , qui faura travailler, foit au marteau , foit par le cylindre , le cuivre pour ble les navires, de ma- nière que lefdites feuilles de cuivre foient aufli minces & d’aufli bonne qualité que Les meilleures qui nous viennent de l'Etranger ; pour le cui- vre travaillé au marteau, ledit Ouvrier aura fo ducats ; & pour le cuivre travaillé par le cylindre, 100 ducats. ° Les avis & les preuves doivent être euvoyés au plus tard le 30 Sep tembre 1781. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Septembre 1786. N°. 3. Celui qui , dans la République , fera filer fous fa direction Ja plus grande quantité de fil de Quinerre (au moins 1200 livres par an), qui foitide la même qualité & au même prix que le meilleur qui nous vient de la Flandre-Wallonne, & en produira les preuves, aura 50 du- cats ; & fi, pendant cinq années confécutives , il continue d'en fournir la quantité ci-deflus fpécifiée , il aura encore une Médaille d'or, & une prime de 25 ducats chaque année, N°. 4 La perfonne qui, avec un certificat d’un. Fabricant de cette République (fuppofé que ledit certificat foit préfenté & fatisfafle à la Commiflion de direction de fon propre Département, ou autre circon- voifin ) , prouvera qu'elle a livré à un Fabricant au moins la quantité de vingt-cinq livres de fil de Quineste de la meilleure qualité, filé fous fa di- rection , d'égale qualité au fil que MM. les Directeurs auront remis au Secrétaire du Département, à leur requifition , cette perfonne recevra Tome XX, Part. Il, 1782. SEPTEMBRE, Gg2 Ü 236 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un fol & demi par chaque livre, quelle que foit la quantité de livres qu'elle aura fournie, Ces Prix feront prolongés jufqu’au dernier Septembre 1783. N°. 5. Celui qui pofsède le talent de filer la première & meilleure efpèce de fil Quinerte, qui établira fon domicile dans cette République, & l'exercera comme fon métier ou gagne-pain , aura d’abord ; après fon arrivée , & après avoir donné des preuves fuffifantes de fa capacité, 8 du- cats ; & à la fin dela première année qu'il aura exercé fon talent, il rece- vra une prime de 4 ducats ; & s'il continue à l'exercer pendant quatre ans de fuite, il aura pour chaque année une récompenfe de 2 ducats. N°. 6. Toute perfonne qui établira un Attelier au moins de quatre en- fans , au-deffous de l’âge sa douze ans , pour leur apprendre à filer le fil fin Quinette, aura une récompenfe de 2 ducats pour chaque enfant, quel ue foit le nombre au-deflus des quatre, qui aura appris à filer en per- Lion ledit fit, en tout femblable à ce que lon nomme Cadjantes d'Angleterre , fervant à faire des tentures de lits & des rideaux, pourvu que cela n'excède point, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 237 le prix d’un fol & demi par aune, ledit Ouvrier aura $O ducats. Les preuves, certificats & la pièce d’échantillon, doivent être envoyés au plus tard le dernier Septembre 1782. Ce Prix fera prolongé jufqu’au dernier Décembre 1785. N°. 10. Comme il n'eft pas poflible de fixer une récompenfe à cêux qui voudroient travailler à une ou plufeurs queftions propofées comme la fabrique d'acier , la nÉtadiidalér , moirer les camelots & cadjan- tes, la poterie, la fabrique des verres ronds , les limes, les râpes, les ca- nons de bottes , les objets concernant le fecret de moirer ou onduler les étoffes fabriquées dans le pays, de ceux qui fervent de tentures de lits; il eft réfolu que & celui qui pofsède un ou plufieurs de ces talens vouloit dé- clarer fon fecret , il doit s’adrefler à MM. les Directeurs, pour convenir conjointement de la récompenfe, N°. 11, De plus, il fera accordé une honnéte récompenfe à tous ceux qui ont quelques machines , qui jufqu'à cé jour n'ont point été en uŸage dans nos Fabriques, & qui pourroient y étre utiles. En les envoyant à MM. les Directeurs, avec la manière de s'en fervir, & les preuves fuff- fantes, on peut fe tenir afluré que la récompenfe fera proportionnée à l'utilité de la chofe. N°. 12. Les Fabricans en foceries, rubans, bas de foie, velours de coton, aciers , limes , & en aiguilles , qui les premiers feront venir de l'E- tranger un ou plufieurs Ouvriers fervant à leurs Fabriques , auront une prime de 10 ducats par chaque Ouvrier, & chaque Ouvrier recevra une prime de 10 ducars au bout de la première année, & 6 ducars les deux années fuivantes, moyennant qu'ils produiront des certificats de leurs Maîtres ou Fabricans , par lefquels il fera conftaté qu'ils ont demeuré le temps prefcrit dans cette République, & qu'ils y ont fait de bons ou- vrages. N°, 13. La Société donnera en outre une Médaille d'or au Fabricant qui aura fait venir dans cette République dix Ouvriers ou plus, pour les occuper dans leurs métiers, Ces primes ou récompenfes mentionnées dans cet article & le précédent, feront diftribuées aux cent premiers Fabricans ou Ouvriers , qui pour cet effet doivent donner à MM. les Direéteurs leur demeure, avec des lettres de recommandation du Département dans le- quel ils demeurent. 4 Les demandes n°, 10, 14,15, 16, de l’année 1778; n°. 1, 2,5, 12,14, 16,18, 27, 28, 30 , de l’année 1779; & n°. 8 , 11,13 , de l'année 1780, duquel le temps pour y répondre expire avant le dernier Décembre 17817, feront, fuivant toutes apparences , propofées de nouveau dans la grande aflemblée en 1782. NP 238 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, RE Len Nc *NOUVELLES LITTÉRAIRES. D: S Furflen Demetrius von Gallitzin fendfchreiben, &c. Lettre du Prince Démétrius de Gallitzin , fur plufieurs objets d’éleétricite. Les différentes obfervations inférées dans cet Ouvrage regardent la théorie de Francklin, dont il admer les deux électricités pofitive & néga- tive , non comme eflentiellement différentes, mais comme de fimples modifications; l'origine des ttemblemens de terre, qu'il attribue à l’électri- cité; & fur la meilleure manière de terminer les conducteurs du tonnerre qui eft la forme pointue, Modèles en terre cuite de tous les Polyèdres ou Cryflaux qui compofent Les onze premières planches de la Cryffallographie de M. dE ROMÉ DE L'IsLE, exécutés d’après ceux de l'Auteur , & propofes par foufcription. L'objet de la Cryftallographie étant de faire connoître les formes ré- gulières & géométriques que prennent naturellement tous les corps du rè- gne mineral dans l'état de combinaifon faline, pierreufe où métallique, & ces formes étant un des caractères diftinctifs attachés par la nature aux différens /é/s, pierres , minéraux , métaux ; &c., il étoit indifpenfable de faire fuivre leur defcription d’un certain nombre de figures propres à en faciliter l'intelligence, & c'eft ce qui fera exécuté avec rout le foin pof- fible dans les douze planches de gravures jointes aux srois volumes in.8°, de la Cryftallographie, qui s’impriment actuellement. Ces planches contiennent plus de cinq cents figures apparentes , appar- tenantes à quatre cents trente-huit polyèdres ou cryftaux de toute efpèce: mais comme ces polyèdres ne font pas tous également fufceptibles d’être rendus par le fimple trait, quelqu'exatts qu'en foient d’ailleurs la perf pedtive & le deflin , on a cru devoir y fuppléer , en les exécutant en relief d'après les originaux, & dans les mêmes proportions où ils font repré- fevtés dans les planches de la Cryftallographie. Ces modèles rendront l'étude des cryftaux d'autant plus facile, qu'on pourra les comparer avec la Nature, & les confidérer fous toutes leurs faces; avantage qui ne fe rencontre pas toujours dans Les cryftaux ratu-- sels, puifqu'à l'exception du petit nombre de ceux qui font fo/isaires , tous les autres fe préfentent, foit en groupes , foit enfevelis dans des gangues LUN SUR L'HIST: NATURELLE ET LES ARTS. 239 pierreufes , où l’on n’apperçoit qu'une partie du polyèdre , l’autre étant mafquée par la gangue ou par les cryftaux voilins. Cette fuite de modèles en terre cuite ; fur l'exaétitude defquels on peut compter, furpafle de beaucoup en nombre toutes celles qu'on a précé- demment.exécutées, foit en argile, foit en méral, en bois, en porcelaine , en ivoire, en blanc de baleine, &c., puifqu'alors le nombre des cryftaux connus montoit à peine à cent dix, & qu'il eft ici quadruplé, Conditions de la Soufcription. 1°. On paiera en foufcrivant , pour les quatre cents trente-huit Modèles en terre cuite, ayant chacun un numéro correfpondant aux figures des planches de la Cryftallographie, 5 3 . PAU Et en les recevant au moment où l'Ouvrage paroîtra , c'eft- à-dire , dans les premiers mois de l’année prochaine. . . . 48 Total. : : . : . +. 96 € 2°, La Soufcription ne fera ouverte que jufqu’au premier Janvier 1783 , pañlé lequel temps ceux qui n'auront pas foufcrit paieront la même fuite, 120 liv. 3°. Les perfonnes qui ont foufcrit l’année dernière pour les 240 pre- miers cryftaux , n'ont pas befoin de foufcrire de nouveau ; elles recevront a totalité des modèles énoncés ci-deflus, en préfentant à la même époque leur quittance de foufcription , & en payant pour Le furplus Ja même omme de 48 liv. On fouférit à Paris chez DESFONTAINES , Graveur de Monfeigneur le Comte d'Artois , r4e du Fauxbourg Saint Martin , petit Hôtel de Boynes x € chez l’'Autcur de la Cryflallographie, maifon de M. d’Ennery , rue neuve des Bons-Enfans. ERRATA pourle Mémoire de M. PiLATRE DE ROZIER , Cahier d'Aoûr, y GE 140, digne 38, des frottemens des points , /ifez des pointes. Jdem, lig, 39 , fur les points , if: les pointes. Pag. 142 , lig. 20, en parlant, Zf. en partant. Idem ; dig. 24 , et la force, 4f. eft à la force. Jdem , Lig. 38, à 9 pouces, Lf. à 6 pouces. Idem, lig. 41, donnera 1$ tours, if: « tours, Pag:143 ,ligu2, P:F::1X 15:9 Xao, lifetà6 X10, Au lieu de la proportion P:F:: 30:90, On aura .=. . . —P:F::30:60. Idem. , lig. 4, une force de 90 , if. de 60, 240 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, &c. SRE ED LOT 7 EE ONE PR CRIER, FMC EE Des ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. D... des Sources de Naphte de Baku, près Derbens , Jur La Mer Cafpienne ; tirée de l'Hifloire des Découvertes faites par différens favans Ruffes. Page 161 Differtation Botanique fur le Fucus Helminthochorton , ox Wermifuge de Corfe | improprement appellé Mouffe, Coralline, &c., contenant des recherches fur quelques Plantes Cryptogames; par M. DE LA TOURRETTE. 166 Mémoireconenant les détails , analyfes & réfultats des expériences faites ex1780 par ordre du Gouvernement, dans les Forges du Comté de Buffon en Bour- gogne, € dans la Manufaëlure Royale d’Acier fin de Néronville en Géti- nois ; afin de connoîrre fi les Fers françois ont la propriété d'être convertis en Acier, par la voie de la cémentation, Lu à l'Académie des Sciences Les 8 @ 12 Juin 1782; par M. GRIGNON, Chevalier de l'Ordre du Roi. 184 Mémoire fur la liaifon des Volcans d'Auvergne avec ceux du Gévaudan, du Velay, du Vivarais, du Forez, &c.; par M, PASUMOT , Ingénieur du Roi, &c.; 217 ‘Lettre fur Lidenricé de l'Eleétricité aërienne avec l'Elkétricité artificielle ; par M. l'Abbé BERTHOLON , Membre de plufiewrs Académies ; en réponfe à celle de M. DE... , inférée dans le Journal de Phyfique du mois d Août 1781, page 157: 224 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. l'Abbé DICQUEMARE. 228 Suite des Prix € encouragemens propofés par la Société Hollandoife des Scien- ces érigée a Haarlem. ; 231 Nouvelles Littéraires, 238 À) P\P RO NBA TT O/N J' lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour titre: Obfervations fur La Phyfique, [ur l'Hiftoire Naturelle & fur les #rts, &c.; par M. Rozier & Moncez {le jeune, 6e, La Collection de faits importans qu’il offre périodi- quement à fes Lecteurs, mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu'on peur en permettre l'imprefion, À Paris , ce 16 Septemb. 1782. VALMONT DE BOMARE, LE Septembre 1782. FUCUS helminthochorton LT, 2. 11. } ( ANUS Le Lcd / = ji ail A. mn 77/0) Lx D | D à ! CAP TE PER PET T A | : PE PIPT] déiialutt A£ Si) S » A NY, H/ 4, NE à VOLE, \ nelle E Sir Judp Jep ler DIE 1782. JOURNAL DE PHYSIQUE. OCTOBRE. :782. | — — mé Le De — EE qe Le È | SUR LA DÉPHLOGISTICATION DE L'AIR PHLOGISTIQUÉ , par M. ACHARD. PREMIER MÉMOIRr=. Le élémentaire, par lequel j'entends l'air de l’atmofphère , dégagé de toutes les parties étrangères qu'il peut contenir , eft capable de s'unir avec différentes fubftances. Il y en a avec lefquelles il ne peut que fe mé- ler, & d’autres fur lefquelles il agit comme un véritable menftrue; 8e qu'il diffout. C’eft à cette mifcibilité & diffolubilité des corps dans l'air, que l'on doit attribuer leur évaporation: danc tout corps qui, foit par les degrés de chaleur brdinaire de l'armofphère, foit par des degrés de chaleur fupérieurs , eft réduit en vapeurs , eft aufli de nature à pouvoir fe diffoudre dans l'air. ; : Il en eft de la diffolution des corps dans l'air commegde leur diffolution dans tous les autres menftrues: donc la chaleur, foit de l'air, foit de la fubftance qui s'évapore ou qu'il diflout, doit néceffairement augmenter fon action diflolvante ; & c’eft par cette raifon que certains corps fur lef- quels l'air ne peut agir par les degrés de chaleur de l’atmofphère, font réduits en vapeur par des degrés de chaleur fupérieurs. L'on m'objeétera peut-êtreique cette évaporation, pour ainfi dire forcée , eft produite par le Auide ignée, & que l'air n’y contribue en rjen , puifque la chaleur venant à cefler , les vapeurs fe féparent entièrement de l'air & fe condenfent. Mais pour peu qu’on faffe attention à cette féparation des fubftances ré- duites en vapeurs d'avec l'air, produite par la diminution de la chaleur, Yon verra aifément qu'il ne fe fait jamais une féparation entière, mais qu'il refte toujours une partie de la fubftance évaporée adhérente à l'air, qui eft d'autant plus confidérable , fuivant que la chaleur a moins diminué, que la différence entre la gravité fpécifique de l'air & celle de la fubftance en queftion eft moins confidérable, & que cette fubftance eft par elle- même plus ou moins évaporable. Tome XX, Parc, II, 1782, OCTOBRE, HB 242 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je fis, malgré moi, l'hiver paflé, une expérience qui conftate très. très-bien ce que je viens d'avancer. Pendant les jours les plus froids, & où l'on éroir obligé de chauffer aflez fort, j'avois placé fur un fourneau qu'on chauffoit journellement deux fois, une jatte ouverte avec environ 20 livres de mercure, & cela dans le deffsin de le hien fécher. L'on fait que le mercure demande un degré de chaleur confidérable pour s’évapo- rer, & qu'il fembie fe féparer très-promptement & entièrement de l'air, lorlque la chileur qui lavoïit réduit en vapeurs diminue, La température de l'air dans laschambre où j'avois mis le mercure fur le fourneau, & où je me tenois pendant prefque toute la journé:; étoit ordinairement entre 14 & 18 degrés de Réaumur. Au bout de quelques jours, je fentis un mal-aife auquel je ne fis pas d'attention : il augmenta ; je fentis un mal de gorge ; les gencives commencèrent à me faire fouffrir & s’enflammèrent; en un mot, J: commençai à faliver, Comme je ne fongtois plus au mercure que j'avois placé fur le four- neau , j'attribuai cet accident à la rupture d’une cornue dans laquelle j’a- vois, quelques jours auparavant, diftillé du mercure. Le même jour où je commençai à faliver, deux autres perfonnes qui avoient conftamment été dans la même chambre , & qui n’avoient pas mis les pieds dans le lahoratoire où la cornue s’éroir caffée, fentirent les nièmes incommodités, & falivèrent le lendemain. Je cherchai alors foigneufement quelle pou- voit être la caufe de cet accident, & ne pus la wouver que dans l’im- prégnation de l'air par le mercure placé fur le fourneau , & volatilifé par La chaleur. Je n'ai rapporté ce fait que parce qu'il prouve très-bien que , quoiqu'il faill: une chaleur près de 400 degrés de Réaumur au mercure pour le réduire en vapeurs , il en refte cependant toujours une partie adhérente à Fair , qui n'a que r4à 18 degrés de chaleur; car fi cet air n’avoit pas re- tenu de mercure , il n’auroit pu faire faliver les perfonnes qui le refpi- roient. Ce que je viens de dire, tend à prouver que tous les corps évapora- bles par des degrés de chaleur naturels ou artificiels , fe combinent & fe diffolvent dans l'air, & que la chaleur néceffaire à certains corps venant à cefler, l'air ne fe fépare que d'une partie de la fubftance qu'il avoitdif foute, & qu'il en retieut toujours une certaine quantité, d’autant plus pe- tite, que la diminution de la chaleur a été plus grande. La diffolubilité des corps dans l'air peut très bien êrre comparée avec celle de certains fels dans l’eau, qui s'y diffolvent en quantité d'autant plus confidérable que Veau eft plus chaude , & dont il fe fépare par le refroidiflement, une partie proportionnelle à la diminution de la chaleur, Tous les menftrues , par leur combinaifon avec les corps füur lefquels ils agiflent , & qu'ils peuvent difloudre, changent entièrement de propriétés, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 243 IL en eft de même de l'air. Un menftrue, par lui-même indiffoluble dans un autre menftrue, y deviendra diffoluble , lorfqu'il aura diflous une fub£- tance qui {e diflout aifément dans ce dernier diflolvant, Ceci eft exaéte- ment Le cas de l'air fixe , qui réfulte de la combinaifon intime de l'air élé- mentaire avec un acide d'une nature particulière, quia une affinité très- grande avec cet air, & beaucoup plus confdérable qu'avec les fubtances alkalines. De plus , l'air fixe contient encore une certaine quantité de phlo- giftique, qui eft combiné avec fon acide ou avec l'air élémentaire , & peut-être avec tous deux. L'air , comme tous Les autres menftrues, ne peut diffoudre qu'une quan- tité déterminée d'une certaine fubftance ; & lorfquw'il en eft Gruré ;ilne peut en recevoir davantage, L'air élémentaire fe combine & diflout fort aifément le phlogiftique, avec lequel il a une très-grande affinité; & lorfqu'il en eft faturé, il ne peut pas s’en charger en plus grande quantité. De certe union de l'air avec le phlogiftique, il réfulte une forte d'air qu'on nomme air phlogiC tiqué, L'air élémentaire, qui ne tient pas de phlogiftique en difiolution , fe nomme air déphlogiftiqué ; il reçoit le phlogiftique fort aifément , & même avec avidité, L'air élémentaire ne s'unir qu’en très-petite quantité, & fort difficile- ment, avec les acides que nous connoïflons; car fi l'on fait évaperer dans une quantité déterminée d'air commun des acides minéraux ou végétaux, foit par la chaleur, ou en décompofant des fels neutfes bien fecs par des acides plus forts, comme, par exemple, le, nitre & Le {el commun par l'acide vitriolique , l'on ne trouve pas que l'air foit devenu par-là fenfiblement acide, & fes propriétés ne font que très-peu changées: donc fi l'on trouve de l'air combiné avec une quantité plus fenñble d'un des acides connus , il s'enfuit que cette combinaifon provient d’une autre combinaifon , qui étant unie, foit avec l'acide , foit avec l'air, fert d'inter- mêde à ces deux fubftances, & facilite leur union au moyen de fon af- nité avec l'air & avec l'acide. Lephlogiftique a, comme je l'ai déjà dit,unetrès-grande affinité avec l'air élémentaire , & l’on fait qu'il a également une très-grande affinité avec les acides. Il paroîc donc très-propre à fervir d’inrermède pour unir l'air avec les acides ;-aufli trouvons-nous que c’eft effectivement le phlogifti- que dans l'air nitreux qui unit l'air avec l'acide, L'afinité du phlogiftique avec l'air paroît cependant être plus grande que fon affinité avec l'acide nitreux; car en ajoutant à l'air nitreux de l'air commun, une partie du phlogiftique de l'air nitreux fe combine avec l'air qu'on y a ajouté , & l'acide fe précipite, parce qu'il n’étoit diffous dans l'air que par l'inter- mède du phlogiftique. En confidérant l'air nitreux comme un compofé d'air élémentaire & d'acide nitreux uni à l'air , au moyen du phlogiftique, Tome XX , Part. Il, 1782. OCTOBRE, Hh2 , 244 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, il eft fort aifé d'en expliquer toutes les proptiétés : je n’en rapporterai mainténant qu'une. . L'air commun qui eft mêlé avec l'air nitreux le décompofe , lorfqu'il ne contient pas aflez de phlogiftique pour en être faturé ; & cette dé- compofition eft d'autant plus confidérable , que l'air qu’on ajoute à l'air nitreux contient moins de phlogiftique. IL eft fort aifé d'expliquer ce fait. Le phlogiftique de l'air nitreux fe partage d’une manière uniforme entre l'air nitreux & l'air qu'on y ajoute, Lorfque- ce dernier eft déjà faturé de phlogiftique , il ne peut en recevoir davantage; & il en reçoit d'autant moins, qu'il en contient déjà plus, & d’autant plus, qu'il en étoit moins chargé. Or, comme la décompofition de l'air nitreux par l'addition d’une autre forte d'air, ne fe fait que parce qu'il donne à cet air une partie de fon phlogiftique , il s'enfuit que la quantité d'air nitreux , décompofé au même devré par différentes fortes d’air, fera en raifon directe de la quantité de phlogiftique qui manque à ces différentes fortes d'air pour en être faturé, 4 La diminution du volume de l'air nitreux par l’addition d’une autre forte d'air, provient de fa décompofition; & fa décompofition eft due au tranfport d’une partie de fon phlogiftique fur l'air qu'on y a ajouté. Cette quantité de phlogiftique eft d'autant plus confidérable , que l'air qu'on a ajouté à l'air nitreux contient moins de phlogiftique; donc Ja diminution du volume d’un ®mélange d'air nitreux avec une autre forte d'air, eft très- ‘propre à indiquer la quantité de phlogiftique que l'air ajouté à l'air ni- treux , pouvoit encore recevoir , & par conféquent combien il lui en man- quoit pour être faturé. Les eudiomètres n’indiquent donc que la quantité du phlogiftique contenue dans une forte d'air donné ; & tant qu'on n’aura pas prouvé que le phlogiftique eft la feule fubftance qui , étant combinée avec l'air, peut le rendre impropre à la refpiration, il ne fera pas non plus prouvé que les eudiomètres indiquent dans tous les cas , fi une forte d'air donnée eft propre à la refpiration & le degré dans lequelil eft nuift- ble, cetiinftrument ne pouvant fervir à cet ufage que dans le cas où de tou- tes les fubftances qui peuvent fe combiner avec l'air , le phlogiftique foit la feule qui puifle lui ôter fa falubrité. L'air inflammable eft, comme l’air nitreux , compofé d'air élémentaire, d'acide & de phlopgiftique. La différence entre ces deux fortes d’air ne provient que de la différente nature des acides qu'ils contiennent , de La différence entre l’affinité de ces acides avec lelphlosiftique, & enfin des différens degrés d'inflammabilité de l'efpèce de foufre qui réfulte de la combinaifon de fon acide avec le phlogiftique. Le phlogiftique a autant d’affinité, & peut-être plus avec les acides qui peu- vent être contenus dans l'air inflammable , & qui font différens , fuivant l’o- pération qui fert à dévager cet air, qu'il n'ena avec l'air élémentaire ; de plus, de la combinaifon de ces acides avec Le phlogiftique, il réfulte, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 245 comme je viens de le dire, une efpèce de foufre qui s’enflamme fort aifé- ment , & auquel on doit AE linfammabilité de l'air inflam- mable. j Il fuit de ce que je viens de dire fur la compofition de l'air inflamma- ble, qu'il ne fera pas, comme l'air nitreux, décompofé par l'addition d’une forte d'air, qui n'étant pas faturé de phlogiftique, eft encore ca- pable d'en recevoir , parce que l’afhnité du phlogiftique de l'air inflam- mable avec fon acide furpafle l’affñinité du phlogiftique avec l'air élémen- taire, C'eft par cette raifon que l'air déphlogiftiqué même , qui reçoit, comme je l'ai déjà remarqué, le phlogiftique avec la plus grande facilité, ne diminue point le volume de l'air inflammable , & augmente fon in- flammabilité , bien loin de la diminuer. Le phlogiftique a la propriété, lorfqu'il fe combine avec l'air élé- mentaire, d'en diminuer le volume. Cette diminution ne provient pas d’une contraction de toutes les parties de l'air, mais de Ja féparation d'une des parties dont l'air eft compofé. La preuve en eft que l'air, en diminuant de volurfe par fa combinaifon avec le phlogiftique , n'aug- mente pas de gravité fpécifique ; & il eft aifé de prouver que cette par- tie féparée eft précipitée de l'air commun & de l'air fixe, puifque , lorf- qu'on combine l'air avec le phlogiftique dans des vafes plongés avec leur ouvérture dans un Auide qui ne peut pas s'unir avec l'air fixe précipité, comme par exemple du mercure , il n’y a aucune diminution de volume, tandis que lorfque les vafes font plongés dans de l’eau de chaux, la dimi- nution de volume fe fait fort vite, & l’eau de chaux fe trouble , ce qui eft une des propriétés sas de l'air fixe; d'où il fuit que, puifque le phlopiftiqte précipite l'air fixe de l'air commun , il doit avoir plus d’affnité avec ce dernier que n’en a l'air fixe. - J'ai dit que l'air fixe éroit compofé d'air élémentaire & d’un acide, Cet acide eft effentiel à l’air fixe, & je ne crois pas que l'air qui fe dégage des corps par différens procédés , fe change en air fixe par fa combinaifon avec quelque acide contenu dans le corps dont on le tire, & qu'on eft obligé d'ajouter à ce corps pour en tirer l'air; car dans le cas contraire, Vair fixe, tiré du même corps par différens acides , devroit néceflairement avoir différentes propriétés, & l'air qu'on tire des corps qui ne contien- nent pas d'acide, ne pourroit avoir les propriétés de l'air fixe. Or, tout ceci eft entièrement oppofé à l'expérience; d'où il fuic que l'acide eft effen- tiel à l'air fixe, qu'il y eft extrèmement adhérent, & qu’il a une très-grande affinité avec l'air; que ce n’eft qu'au moyen de la combiraifon de cet acide avec l'air, qu’il devient propre à s’unir avec descorps felides, & à deve- nir pour ainfi dire lui-même folide , en fe combinant avec les corps; & que l'acide effentiel à l'air fixe , que je fuis très-difpofé à nommer, avec M. Tobern-Bergmann, habile Chymifte Suédois , acide aërien, a plus 246 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'affinité avec l'air que tous les autres acides que nous connoif- ons. L'air atmofphérique ne fait que remplir les interftices que laiflent em. trelles les parties d'un corps, à peu-près comme l'eau remplit les pores d’une éponge : mais il paroît qu'il ne peut pas fe combiner & entrer dans la compofñtion des corps; il n'y a que l'air fixe qui ait certe propriété. Lorfau’on tire l’air d’un corps qui ne contient pas de parties volatiles , ou. q P ; au cas qu'ilen cortienne au moyen d’une opération qui ne puille pas les volatilifer , & qui n’exige pas l'addition d'une autre fubftance volatile, Vair que l'onentire eft toujours de l'air fixe ; d'où il fuit que l'air, tel -qu'il eft contenu dans le corps, eft de l'air fixe: donc, lorfque nous tirons d'un corps une forte d'air différent de l'air fixe, l'on doit le re- garder, non comme tel qu'il étoit dans le corps, mais comme produit par a décompoftion de l'air fixe occalionnée par Les parties volatiles du corps dont on a tiré l'air, ou de la fubftance qu'on y a ajoutée, & qui étant combinée avec l'air fixe , l’a entièrement dénaturé. La diffolution des chaux métalliques par l'acide nitteux , fournit toujours de l’air fixe. Qu'on change maintenant ces chaux en métaux, en les combinant avecle phlogiltique , & l'air qu’on en retirera ne fera plus de Vair fixe, mais de l'air nicreux; ce que l’on ne peut attribuer qu’à la combinaifon du phlogiftique & de l’acide nitreux avec l'air fixe de la chaux métallique. Cela eft aufli très-bien prouvé par la décompoñition de l’air nitreux. Au moyen de la théorie que je viens de donner des dif férentes fortes d'air, il eft aifé de rendre raifon de leurs propriétés , & d'expliquer leur formation. Lorfqu'on envifage l'air des corps fous le oint de vue où je L’ai préfenté , c’eft-à-dire, comme des* combinaifons de l'air fixe des corps avec fes parties volatiles ou avec celles de la fubf- tance qui a fervi à dégager l'air, l'on trouve plufieurs moyens, que la Chymie fournit aifément de décompofer ces fortes d'airs, d'en former de nouvelles, & de changer une forte d'air dans l’autre, & fi l’on ne par- vient pas toujours à changer une forte d'air, l'on fait du moins quels fe- roient Les moyens par lefquels ce changement pourroit fe faire : l'air fixe, par exemple , qui eft compofé d'un acide étroitement uni*à l'air élémen- taire ; & fi cetre décompolition n’a pas encore pu fe faire , ce n'eft qu'au défaut d'une fubftance qui ait affez d'affinité avec l'acide aërien, que l'on doit l’attribuer. Le phlogiftique ayant une très-grande affinité avec l'air, il en eft tou. jours plus ou moins chargé , & la déphlogiftication de l'air eft un fujer de recherche très-important, l'air déphlogiftiqué étant un de ceux qui mé- ritent particulièrement notre attention, parce qu'ileft , -de toutes les fortes d'air , celui qui eft le plus propre à la refpiration , & quele mêlange de cet air avec l'air gâté par la refpiration des animaux , par des corps qui y ont D. 4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 247 brûlé , ou par quelqu’autre opération, lui ôte fes qualités nuifbles, & lui rend fa falubrité, J'ai fait un grand nombre d'expériences dans la vue de féparer le phlo- giftique de l'air qui en étoit chargé, J’efpérois d'y parvenir, en impré- nant l'air de fubftances qui ont une très-grande affinité avec ie phlogiftique cé l'idée que le phlogiftique fe joindroit à ces fubftances & abandonne- roit l'air; mais toutes périences ont été fans fuccès. Il me reftoit encofe un moyen , que les Chymiftes emploient très-fré- quemment, & qui eft de la plus grande utilité dans la Chymie, pour pri- ver les corps de leur phlooiftique, c’eft-à-dire, la déconnation avec le ni- tre. Je crus qu’en faifant pafler de l'air phlogiftique par du nitre fondu, Je phlogiftique de cet air détonneroit avec l'acide nitreux , & que l'air phlogiftiqué fe changeroit par-là en air EP REINE Ce qui me con- firma dans cette idée , & me fit efpérer que je réufhrois, c’eft que l’on tire de l'air fixe devoutes jes terres aikalines, des fels alkalins , & des chaux métalliques , en les expofant au feu , tandis qu'après avoir imprégné les mêmes {ubftances d'acides nitreux , l'air qu'on en tire par la même apé- ration , Ceft-a-dire, au moyen de la chaleur, n'a plus aucune des pro- riérés de l'air fixe, mais au contraire toutes les propriétés de l'air très- Be déphlogiftiqué. Cela prouve que l'air fixe des fubftances alkalines, foit cerreufes ou falines, eft privé de fon phlogiftique; ce qui ne peut fe faire, à moins qu'il ne détonne avec l'acide nitreux. L'on ne remarque à la vérité daus le nitre fondu, pendant que l'air s'en dégage, aucune dé- tonnation; mais cela n'empêche pas que l'explication que je viens de donner de la formation de l'air déphlogiftiqué ne foi jufte , parce que la quantité de phlogiftique de l'air fixe eft trop peu confidérable pour que la déronnation puifle être vilble. Il ne s’'agifloic plus, pour mettre hors de tout doute la poffibilité de la tranfmutation de l'air phlogiftiqué en air déphlosiftiqué, qu: de faire détonner de l'air chargé de phlogiftique avec du nitre; maïs l'opération en elle-même étoit fujette à de grandes difficultés. Après beaucoup de tentatives inutiles , j'y parvins de ja manière fuivante: Je courbai un tube de verre ABCDE (fg. 9, planche II du mois de Septembre dernier ) de 3 à 4 pieds de longueur, & d'un demi-pouce de diamètre, comme l'indique la figure. J'enduifis la partie C d'argilegde l'épaiffeur d’un pouce, & nouai aux extrémités À & E du tube , après y avoir mis environ une demi once de nitre, que je fis defcendre en ar de petites fecoufles, deux veflies F & G. La veñlie G contenoit l'air qu'il s'agifloit de faire déronner avec le nitre, & la veflie F éroit vuide. Cela étant fait, je mis la partie C du tube fur des charbons, & augmentai le feu peu-à-peu , jufqu'à ce que le nitre fût fondu & rouge dans Le tube ; alors je fis pailer l'air d’une veflie dans l'autre, en les preflant fucceilive- 248 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ment; de cette manière, il pafla & fe filtra, pour ainf dire , par le hicre fondu. Le tube, pourvu qu'il foit bien enduit d'argile, fupporte le feu aflez long-temps ; mais il eft rare qu'on puifle, pour deux opérations, fe fervir du même tube, parce qu'en fe refroidiffant, il fe cafle ordinairement. La première expérience que je fis , fut avec de l'air qui s’éroit chargé de phlogiftique par une chandelle qui y avoit brüléjufqu'à ce qu’elle fe fût éteinte, Je fis pafler cet air plus de cent fois veflie dans l’autre, &c après que le ie fut refroidi, j'en féparai la veflie; en forte que l'air qu'elle contenoit ne fe mêlat pas avec l'air commun. J'examinai cet air, & trouvai que la chandelle y Éraloie aufi bien que dans l'air déphlosif- tiqué le plus pur, Je répétai la même expérience avec de l'air fixe & de l'air gâté par plufieurs lapins que j’y avois fait mourir fucceflivement , au point de tuer dans l'inftant un animal qu'on y mettoit ; Le fuccès fut aufli heureux que dans la première expérience, ” Il était fort intéreflant de faire la même expérience avec de l'air in- flammable. Si cet air n'avoit pas fubi de changement parle nitre, il étoit décidé qu'il ne fe feroic pas allumé , parce que l'air inflammable feul &c fans addition d'air commun ou d'air déphlogiftiqué ne s'allume jamais; en forte qu'on peut plonger une chandelle allumée dans une bouteille remplie d'air inflammable pur , fans avoir d'inflammation à craindre: mais dans le cas préfent , je pouvois m'attendre à une explofion extrêmement violente, parce qu’au moment où une partie de cet air auroit perdu fon phlogiftique ; l'air de la veflie auroit été compofé d’un mêlange d'air dé- phlogiftiqué produit par la décompofition de l'air inflammable, & d’une partie d'air inflammable non décompoté. Or, l’on fait qu'un mélange de ces deux fortes d’airs s'allume fort aifément , & avec uneexplofion & une violence beaucoup plus forte qu'un mélange d'air commun & d'air in- flammable. | L'expérience vérifia toutes ces conjeéturés , & j'eus à peine fait pañler cinq ou fix fois l'air inflammable par le nitre fondu , qu'il s’enflamma avec un bruit terrible , & porta crès-loin & avec beaucoup de force les mor- ceaux du tube, Quoiqu'il ne m’ait pas été poflible d'examiner l'air, après l'avoir fait paf- fe#lpar le nitre , parce qu'il étoit diffipé par linflammation , il eft cepen- dant clair, & l’inflammation même prouve que le nitre a décompofé une partie de cet air, puifque, comme je viens de le dire, dans le cas où l'air inflammable n'auroit pas été changé, il n’auroit pu fe faire d’inflamma- tion. Je n'ai pas encore répété cette expérience avec l'air nitreux, parce que air commun dont il eft prefque impoñlble d'empêcher entièrement le mélange avec l'air de la voflie, lorfqu'on la noue au tube, Le décompofe d'abord, Lait SUR L'HISTMNATURELLE ET LES ARTS. 249 d'abord ; ce qui rend le réfultat fort incertain, Cette expérience ne peur fe faire qu’à l'aide d'un inftrument plus compolé & de difficile exécution, auquel je fais encore travailler. Îl fuit des expériences que je viens de rapporter, que l’afinité du phle- ai avec l'acide nitreux, échauflé au degré néceflaire pour faire ouillir le nitre , eft plus grande que fon aflinité avec l'air, puifqu’il l'en prive; ce qui eft propre à répandre beaucoup de jour fur la compofñition des différentes fortes d’air. " La déphlogiftication de l'air phlogiftiqé , au moyen du nitre fondu , eft d'une grande utilité, puifque, par fon moyen, l’on peut aifément & à peu de frais rétablir parfaitement & rendre très-falubre l'air le plus pâté, tan- dis que la production de l'air déphlogiftiqué que l'on tire immédiarement des corps, eft fujette à beaucoup de difficulté, & devient toujours très- coûteufe , par la petite quantité qu’on en obtient. Il me refte encore plufñeurs remarques à faire fur l'air déphlogiltiqué , & plufieurs expériences à rapporter , qui tendent à mieux faire connoître la nature de cet air, & à en rendre l'application utile. Il me refte aufli à répondre à plufieurs objections qu'on pourroit faire contre mes expérien- ces, & en particulier à celles qu'il paroît d'abord qu’on pourroit me faire avec raifon , en attribuant le changement de l'air que j'ai fait pafler par le nitre fondu, non à la décompofirion de cet air, mais à fon mélange avec l'air déphlogiftiqué qui fe dégage du nitre pendant qu'il eft en fufñon, Pour ne pas être trop long , je rêmets les réponfes à ces objections, &” le détail de mes autres expériences & obfervations fur l'air déphlogifti- qué, à la feconde partie de ce Mémoire. ” R ELLE XIQNS SurPapplication de la Période lunaire de dix-neuf ans à la Météorologie(x) , avec les Obfervations faites en différens pays fur le froid rigoureux & ex: traordinaire du mois de Février dernier ; par le P. CortE , Curé de Mont- morency | L ATTENTION que l'on apporte aujourd'hui aux obfervations mé- téorologiques ; le grand nombre de bons Obfervateurs, qui fe multiplie tous les jours ; la perfeétion qu’on a donnée aux inftrumens; les fruits que Von croit avoir recueillis de ces obfervations jufqu'à préfent, & qui vrai- Q “ . femblablement feront encore plus abondans par la fuite : routes ces eon- (1) Voyezle Mém. de M. Toaldo furle Saros Météorologique, Suppl. XXP, p. 176. Tome XX , Part. II, 1782, OCTOBRE. li 259 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fidérations ne fervent qu'à exciter nos regrets, lorfqu’en regardant der+ rière nous, nous avons la douleur de voir que , dans une Science où la lumière ne peut fortir que de la combinaifon d’un grand nombre d’ob- fervations, celles qui nous précèdent nous font prefque toutes inutiles, foit parce qu’elles ont été faites avee négligence , foit parce que les inftru- mens étoient défectueux , foit enfin parce qu’il s'y trouve des lacunes con= fidérables qui en interrompent le fl, Nous fommes donc obligés de nous borner à un petit nombre d’obferva- tions bien faites, dont l'époque ne remonte guères qu'à la publication de l’ex- cellent Ouvrage de M, Deluc fur les Modifications de l'atmofphère , c'eft-à- dire,en 1774. Cet Ouvrage occalonna une révolution bien avantageufe à la Météorologie ;il réveilla l'attention des Académies fur cette partie est fante de l'Hiftoire Naturelle: on propofa des fujets de Prix relatifs à la Météorologie; dé nouvelles Sociétés fe formèrent, & firent entrer Les ob- fervations météorologiques dans le plan de leurs utiles occupations , en établiffant des correfpondances fort étendues fur cet objet : telles font les Sociétés de Médecine de Paris & de la Haie , la nouvelle Société Mé- téorologique-Palatine établie à Manheim , & plufeurs autres, foit en Al- lemagne, foit en Italie, queje pourrois citer. ‘ L'Ouvrage de M. Deluc anima’aufli le zèle des Artiftes , qui s'empref- sèrent , par une noble émulation, de donner aux inftrumens ce degré de perfection , fans lequel lafhduité des obfervations fexviroit plutôt à per- pétuer les erreurs qu'à les diffiper, Des Savans du premier ordre, tels que MM. Magellan, Van-Swinden, Baumé, Eavoifier, Gauffèn, Changeux , &c., ont pris la peine de faire les recherches les plus laborieufes , foie pour perfectionner les inftrumens , foit pour établir entr'eux une concor- dance qui püût lier Les anciennes obfervations aux nouvelles , & rendre in- telligible le langage de tant de différens inftrumens. à Je n’entreprendrai pas de nommer ici tous les bons Obfervateurs que la Météorologie a enrôlés depuis l’époque dont je viens de parler, & dont M. Duham:l du Monceau doit être regardé à jufte titre comme le Patriar- che. Tout le monde connoît cette belle fuite d'Obfervations Botanico-Mé- téorologiques qu'il publie chaque année, depuis plus de quarante ans, dans les Mémoires de l'Académie Royale des Sciences. Ses autres Obfervations font affez connues, foit par le jufte hommage que je leur ai rendu dans les Mémotres de la Société Royale de Médecine, foit par les différentes Ob- fervations que les favans Rédacteurs du Journal de Phyfique publient de temps en temps dans ce Recueil précieux & intéreflant. Nous fommes donc arrivés au fiècle de la Météorologie ; mais pouvons- nous efpérer de recueillir les fruits de nos travaux? Les obfervations , quoi- que multipliées, remontent-elles aflez haut pour pouvoir en tirer des con- féquences théoriques & pratiques. L'envie de jouir ne nous rend-elle pas un peu trop précipités dans nos réfultats> Voilà des réflexions que je fou- mets au jugement des Savans, qui font de la Météorologie le fujer de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 251 leurs méditations. S'il m'eft permis de hafarder ma façon de penfer fur ce point important de la fcience Météorologique, je prierai ces Savans de con- fidérer : 1°. Que l'on ne peut fonder des réfultats probablestque fur une fuite d'obfervations bien faites, qui comprennent au moins trois ou qaatre pé- riodes lunaires de dix-neuf ans chacune. 2°, Que les réfultats qu’on peut obtenir doivent néceffairement fe bor- ner à des généralités fur les températures correfpondantes des faifons & des années de chaque période. 3°. Que les conféquences qu'on voudra tirer , relativement aux degrés extrêmes & moyens de chaleur qui doivent avoir lieu dans tels mois & dans telles faifons , parce qu’elles ont été obfervées dix-neuf ans aupara- vant à pareille époque ; que ces conféquences, dis-je, feront prefque toujours fautives, parce que l'influence des points lunaires fe combine, fur-tout dans nos climats, avec plufeurs caufes que nous ne connoiflons Point aflez , & qui occafionnent néceffairement des anomalies, dont on ne peut pas encore fixer les bornes. J'en dis autant des obfervations du baromètre & des autres inftrumens météorologiques. 4°. Que les vents étant une des caufes qui influe fenfiblement & plus conftamment fur la température générale des faifons & de l’année en- tière, il eft effentiel de bien obferver fi le retour des vents eft périodique, & fi cette période tient à la période lunaire; c’eft-àsdire , fi les vents qui ont dominé par exemple Me les différentes faifons de 1763 , 1744, 1725 , 1706, &c., dominent également dans les faifons correfpon- dantes de 1782. Comme ce font les vents qui nous amènent le chaud & Le froid , la fécherefle & l'humidité , fi l'on parvient à conftater le retour périodique des vents dont je parle, il fera très-aifé de prévoir après cela que telle année fera chaude eu froide , ou sèche ou humide. Tant de cau- fes locales & accidentelles peuvent influer fur lintenfité de la chaleur & du froid indiqué par le thermomètre fur les variations du baromètre & de l’hygromètre , fur les quantités plus ou moins grandes de pluie, que je rte comme fort hafardées les conféquences que l’on a tirées de ces fortes d'obfervations relativement à la période lunaire. IL faut remonter our cela à la caufe première & générale des variations de l’atmofphère,, à une caufe qui foit en quelque forte indépendante des caufes locales & accidentelles. Je fais que les vents ne fonc point à l'abri des modifica- tions qui dépendent de ces caufes ; mais elles ne varient pas dans un même pays. Je veux dire que fi le voifinage d’une montagne ou d’üne forêt confidérable contribue à modifier tel ou tel vent, cette caufe fub- filte toujours; les données du problème à réfoudre ne changent pas. Il n'en eft pas ainfi des caufes qui influent fur le thermomètre & fur le ba- romètre; elles font extrêmement variables; car outre lation marquée des vents fur ces fortes d'iuftrumens , il eft certain que la préfence ou Tome X X, Part. II, 1732. OCTOBRE, li2 252 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Tabfence des nuages, la poñtion plus ou moins avantageufe des inftru- mens, les variations fi fubites de température qui fe font dans des couches très voifines de l’atmofphère , felon la nature des vapeurs & des exhalaifons qui s’y mêlent; aj8utez à cela la difficulté d’avoir des inftrumens bien concordans, ou deconferver, à l'abri de tout accident, pendant une lon- gue fuite d'années, les mêmes inftrumens, &c.; il eft certain , dis-je, qu'en voilà plus qu'il n’en faut pour rendre extrêmement douteufes les conféquences qu'on voudroit tirer dés obfervations’ anciennes, relative- ; ; mer t aux températures à venir. Je penfe ; d'après ces réflexions , que les Phyficiens plus intelligens que moi voudront bien apprécier ; je penfe, dis-je, que nous devons nous en tenir jufqu’à préfent aux grandes périodes, à des généralités fur l’ef- pèce de température qui doit affecter telle ou telle armée , en conféquence de celle qui a eu lieu dans les années de la période lunaire , correfpon- dantes à celle dont il s’agit de prévoir Le caractère. C'eft en me bornant à ces généralités, que j'arhafardé depuis quelques années d’annoncer la température à laquelle nous devions nous attendre. Je n'y ai point été trompé ; au lieu que fi j'euffe voulu m'appefantir fur de petits détails re- facifs aux degrés extrêmes & moyens de chaleur & de froid , aux quantités de pluie auxquelles on devoit s'attendre chaque mois, j'aurois fûrement paffé , avec raifon, pour un faux Prophète. Le temps n’eft pas encore venu dans nos climats, de pouvoir faire des prédictions aufli détaillées, Je n2 défefpère pas que l’on parvienne à ce point de perfection ; mais il faut pour cela un fiêcle ou deux d’obfervations faites avec le même foin, la même exactitude que l'on y apporte depuis dix ou douze "ans. Dans les climats fitués entre les tropiques, où les vents font conftans, & où par conféquent la température et plus égale , la marche du baromètre plus uniforme que dans les autres climats, les prédictions de ce genre feront bien plus füres que les nôtres, & elles n'auront pas befoin d'être fondées fur un aufi long efpace de temps d’obfervations. Bornons-nous donc ici à des généralités, lorfqu'il s’agit de prévoir les températures ; mais ne craignons pas d'être minutieux dans la manière d’obferver , multiplions les obfervations , amaflons des matériaux, & con- folons-nous du peu de fruit que nous en retirerons nous-mêmes, par l’ef pérance qu’un temps viendra où nos neveux moiflonneront ce qe nous aurons femé. Etre utile, voilàla devife du vrai Savant. Que lui importe que ce foit aujourd hui ou dans cent ans que l'on jouifle de fon travail, pourvu qu il foir affuré que l’objet de ce travail eft d’une utilité réelle , mais qu'ila befoin, pour devenirtel, d’être müri par le temps! Les Ob- fervations Météorologiques font affurément dans ce cas, On peut en dire autant de toutes les Sciences qui ne font fondées que fur l'expérience & l’obfervation. Les découvertes journalières que l’on fait, foit en Phyf- que , foit en Hiftoire Naturelle , devroient rendre circonfpects ceux qui fe > SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 253 plaifent à établir des fyitèmes & des théories , & qui vont jufqu'à fufpec= rer-les expériences & les obfervations qui ne cadrent pas avec les idées qu'ils fe font formées, Je citerai pour exemple de découvertes qui décon- certenten partie les idées qu'on ävoit eues jufqu'ici fur la génération des animaux & des végétaux , celles de M. l'Abbé Spallanzani , inférées de- puis peu dans-ce Journal(1). Je pourrois encore alléguer, dans un autre enre , la belle découverte de M, fera furles pompes à cordes (2), & certe Fee d'obfervations que M. de Luc a confignées dans fes Lerrres Phyfiques & morales fur la Terre & fur l'homme, & qui fervent de bafe à un nou- veau fyftéme cofmologique , contraire à tous ceux qui avoient paru auparavant. . Nous devions donc attendre du temps fêul les connoiffances néceflai- res pour former des théories; & comme on ne peut pas prévoir les dé- couvertes qui fe feront dans la fuite, on ne peut pas établir d2 théories ui ne foient füujettes à des exceptions qu'un vrai Savant admet de bonne oi, quard il fait qu'elles font démontrées par des expériences ou par des obfervations bien faites & fans efprit de fyftème. Ainfi, on avoir cru jufqu'à préfent que la pouflière des étamines dans les végétaux éroit abfo- lument néceffaire pour la fécondation de la graine. M. l'Abbé Spa/lan- ani vient de démontrer que plufieurs plantes , telles que le chanvre, peuvent donner des graines fécondes fans le fecours de cette poufñière, J'avois publié en 1778 une expérience femblable, faite aufi fur le chanvfe ; elle n’éroit que la répétition de celle que M. 7 4goty avoit an- noncée avec les mêmes réfultats. Quelques Botaniftes s’infcrivirent en faux contre ces réfulrats, prétendant qu'une expérience qui coñtrarioit le fyf- tème fexuel de Linnœus, devoit être néceflairement mal faite, L'expé- rience de M. d’Agoty & la mienne fe trouvent cependant confirmées par celles de M. Spal/anzani. Sans doute que les Botaniftes dont je veux parler feront de nouveau leurs objeétions; mais je les prierai de vouloir bien auparavant méditer cette réflexion du célèbre M. Bonnes de Genève. Il écrit à M. Spallanzani, au fajec des découvertes dont je viens de parler: . æ Vos belles expériences me prouvent aflez, mon bon ami, que je me » trompois avec tous les Naturaliftes. Nous avons tous précipité notre » jugement, & tiré une conféquence générale de prémifles particulièress » nous avons déduit la néceflité de l'intervention des pouflières , des >» expériences exécutées fur différentes efpèces de plantes ; & nous devions » nous borner à dire, qu'il fembloit réfulter de ces expériences que , = dans ces efpèces, l'inrervention des mn: étroit néceflaire à la fé, » condation ». Telle doit être la façon de penfer de tout Naturalifte fage & perfuadé que la nature a infiniment plus de reflources qu’il ne lui en connoît. a ——— 1) Avril 1782, pag. 273. 2) Août 1782, pag. 132» 254 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je pafle maintenant au détail des obfervations faites en différens pays fur le froïd rigoureux & extraordinaire du mois de Février dernier. On fe fouvient que le mois de Décembre 1781 & celui de Janvier fuivant ont été extrèmement doux , & que le paflage fubit de cette tempé- rature à celle qui a eu lieu en Février , a dû rendre le froid encore plus fenfible. Je ferai obferver auffi que (relativement à la période lunaire de 19ans) cette année conçcourt avec les années 1706 , 172$, 1744 & 1763 (1), & que toutes ces années font marquées dans les Mémoires de ? Acadèmie peux avoir été froides, humides & tardives. Voilà ce qui m’engagea à annon- cer, à la fin de mes obfervations de l’année dernière, que nous devions nous attendre à une femblable température en 1782. ( Voyez Journal des Savans , Mars 1782, pag- 164 de l'édis in-4°.) Enfin , j'ai remarqué que la température froide qui aconcouru cette an- née avec la lune de Février, a été précifément la même en 1763 pendant la lune de Janvier, Voici maintenant ce que j'ai appris de ce froid rigoureux, foit par les Papiers publics, foit par ma Correfpondance particulière. Les Feuilles Périodiques nous ont annoncé des alternatives très-fu- bites de froid & de chaud dans les pays du nord, qui ont occafionné des maladies générales , fur-tout à Péterfbourg, un froid très-vif& des neiges abondantes en Italie. MM, Van-Swinden, de Franeker en Frile , & dela Haye en Hollande , m'ont mandé que la température de leurs Pays avoit été, comme ici, très-douce en Janvier, & enfuite très-froide en-Février, Mars & Avril; J'ai reçu À peu-près les mêmes détails de M. le Baron de Poederle , à Bruxelles ; de M. Meyer fils, à Mulhaufen en Alface; de M. Fleuriau fils, à la Rochelle ; de M. Gallor, Doct. en Méd. à Saint-Maurice-le- Girard en bas-Poitou ; des Pères /e Bouxillier & Rondean, de l'Oratoire, à Troyes, &c., &c. On en jugera par les détails que je vais donner de çes obfervations , auxquelles je joindrai les miennes, Bruxelles, Après de petites gelées, qui eurent lieu les 1,2, 6,7, 8,9, 10 & x1 Févriers, le froid devint tout-à-coup très-vif le 12. En voici les progrès, obfervés fur un thermomètre de Réaumur, à V'efprit-de-vin. Celui de mer- cure auroit defcendu plus bas, ainfi que je m'en fuis afluré par la com- paraifon que j'ai faite de la marche Fur nns des thermomètres à mer- cure & à l'efprit-de-vin, depui$lgot au-deffous de la glace jufqu'à l’eau bouillante , ou 80% au-deflus du terme de la congélation. Je rendrai compte de ces expériences dans mes Mémoires fur la Météorologie, qui font fous prefle. (1) Sur-sout 7725. Voyez ce qu’en dit M, Hales , Srarique des Végéaux, , page 60 Jours du mots, 12. 13. 14. xs: 16. 12 18. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 245 Heures du Degrés de froid. Vents, E. N. E. piquant. N. E. y ass O. N. O. neige. E. N. E. violent & piquant à 11 heures dy matin. E. IN. FE. ciel ferein. E. N. E. idem. S. O. Les 19, 20 & 211, gelée le matin & dégel pendant le jour. Mulhaufèn en Alface. (Thermomètre de Réaumur , & mercure.) Jours du mois, o Heures Degrés "du de Vents, jour. froid, i 75 m, —1 1e d Fe o — 4$. 10: LL _— 4. N. . — 54 N. E, 2z — 45 2 — 6. . 13ù 77 Me Eros N.E, 21 — 5% NN. 9- —12+ E. 77 Mu —14 S. E. ACMRS UN 9. “hs 69 0 75m — 9%. N. E. 4 2. L — 3 N. violent 9. —10! N. idem. 75 M —13. N. idem. 2. f — 8% N. idem. 9. —12. N. idem, 75 M —14, E, 2 L — 6 N. A m né N. E De — 13 E. L 1 PET TN SE 75 m 11 O — 6. E. 7: . 22e non 256 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, - Lrancker en Frife. (Thermomètre de Farenheit, réduir à Celui de Réaumur , a mercure.) Jours 7heures Degrés 10 heures Degrés du du de du de mois, matins froid, foir. froid. Res A de fr A LL © er NET 10. — —3,6 —— —3,7. 11. ——— —0,7. —— —5,8. I2e = —6,0. —— -—8,8. 13: —— —0,7. —— —0,:, 14 —— —2,3. —— —1,3. IS — —7,2. ——— —8,9 16. — —9,3. —— —6,2 170 —— —5,6. —— —21,8. 28 ——— +i1,6. —— —0,1. Le moïs de Mars a été aufli très-froid ; Le 23, à 10" Dee ds le 24 UE 7 , au foi —0;1:"; 1e 25 matin —0,7* , le foir * — 3,4%; le 26 matin — 4,74, le AL à rs le froid a UE en Avril, & vraifemblablement aufli en Mai. La Haye en Hollande, ( Thermomètre. de Farenheit rm ci-deffus.) Joùrs Degrés Degrés Degrés Degrés du de de » de de mois, froid. froid. froid. froid. 35 à 7h.mat —2,8.d. àroh.m. F4. à A2h£ 5,5 d. àrrhf, —6,,4. à 16 = —7,8. Fe ete PPS. LAC e —— ds os TP em 7 Le En Mars, le 23, à 11° foir — 1,6. Le froid a continué aufli en Avril, & probablement en Mai. Pétershoura. (Thermomèrre de Réaumur , à mercure.) Jours Degrés , Degrés Degrés \ ©, Depres du de de de de mois. froid, froid. froid. froid, 10. à9h.f. — 8,0.d, 11. 7. m. ne | à2h.f —:i0,.d. à9h.f. —20,8.d. 12. =—— +259 —— 17,6. ET 13. —— —25,6. —— —:10,8. Ur VER rie PE 2013 eds TA UE: mp) 1455. = 7 % —— —211,3. 15: Ts M —29,3e —— —13,0, D'UMR. 25 MON ES CET 0 16 —— —30,0. —— —:3,5. 2 6,7 —— | 25e 17. $. M. —12,0. Te Me —18,7e 2 NN ==T2 9e Î — 9,6. 78. 9. Me — 4,3. midi. — 56,3. CPE LA LE en ES à 11, — 7,5. 19% 7: M, 17,6. 2e L. 216,5. Montmorency SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 257 Montmorency. J'ai obfervé cinq thermomètres; favoir, n°. I, à mercure, expofé hots de la croifée de mon cabinet, au N.O.; n°, II, à mercure, expofé dans l'embrafure d’une croifée à l'air libre au N. E., d'où foufiloit le vence, qui étoit très-piquant ; n°. IL, à mercure , dans l’embrafure de ma croifée au N.O.; n°. IV, à l'efprit-de-vin , à côté du ne°.1 ; n°. V , à l'efprit-de- vin, expofé hors de la croifée d’un autre cabinet au N. O., à peu de dif- tance de l’avant-corps du bâtiment, qui eft faillant de 3 pieds. J'ai ob- fervé , plufeurs fois par jour , ces thermomètres, qui font tous felon la graduation de M, de Réaumur , & faits avec foin ; mais je ne rapporterai que la première & la dernière de chaque jour. à fèpt heures du matin. Jours Les N@L N°.IL N°.IIL N°. IV. N°. V. mois. Degrés. Degrés. Degrés. Decgrés. Degrés, 16. 10,6. 10,6 10,2. =“IO,1. — 9,8. 17. 11,0. 11,0 10,8. “10,7. 10,1. 18 7,2 — 6,8 — 6,7. — 7,1. — 6,6. 19 = 13e Ile = 1,0 — 1,f, — 1,0 à reuf heures du foir. 16 9,0. — 8,5. — 8,5. — 8,7. = 8,1. Tnt) ET Die ne À Oo can CEE PCT 18. —— 1,6 — 1,6. 4 1,0 — 2.0. — 1,6 Lesthermomètres ont toujours été au-deflus du terme de la congéla- tion , depuis le 8 jufqu'au 19; la chaleur moyenne du mois a été nulle; le baromètre s'eft peu élevé, & il a beaucoup varié, aufli-bien qu'en Mars & en Avril. Les 1°° & 2 du mois d'Avril, il a prodigieufement baïffé en fort peu de temps. Le 1°°, nous eümes une tempête , avec pluie, rêle & tonnerre; à $+ heures foir, à La fuite d’une grêle aflez forte & SA quelques coups de tonnerre , le baromètre monta fubitement d’une demi-ligne, & efcendit peu de temps après encore plus bas qu’aupara- vant. M. Berthoud, célèbre Horloger-Méchanicien du Roi, obferva la même chofe à Groflay, éloigné d'ici d'un quart de lieue. Voici la mar- che du baromètre que j'ai fuivie pendant ces deux jours, heu, pouce. lis heu pouc lis. — Le 1° Avril,à 6.m, 27. 5,4 Le 2 Avril ,à 4.m. 26. 8,3. 10. 432 se 8,3. ME 1,6. 6 8,6. 2 1,4. 7e 9,0° he 3- O,1. 8. 10,0. 5. 26, 10,1. LA 10,4. $ + * 10,8, 10. 10,9. 6. 10,4. 11. 11,5. 8, 10,0, 12. 27e 0,0. x L 0,5. 2. ET 6. 2,4 8, 33: Tome XX, Part, II, 1782. OCTOBRE, Kk 258 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Obférvations faites en d'autres Villes, [ur le froid du mois de Février. Tous les Thermomètres font felon la graduation de M. de Réaumur, & prefque tous mercure, : Paris Ne « « — 9,7 d. à l’Arfenal, le 17. LATTES elle Die . — 8,7. Grenoble, . is MU 18 0: E Bordeaux. . + . 2 7,5. Le r7. La Rochelle. . . « , —10,0. Saint-Maurice-le-Girard. —11,0. Troyes Me ETS Metz ES DNS TEA Dar NE Or Befançon, + , . . —11,0. Haguenau (Alface,) . —12,5. Bruyères (Lorraine. ) . —13,5. Le 16. Schaffaufen (Suifle.) . —18,0. Mänheim (Palatinat.) . — 9,3. Lers. Stockholm (Suède.) . —24,0. Breda ( Hollande.) . . —10,3. Rodez Rene — 8,0: Le r6. Les mois de Mars & d'Avril ont été généralement froids & pluvieux. Les premiers jours de Mai jufqu’au 9, jour où j'écris ceci, font auf très-froids & humides, Hier ‘au matin il y eut forte gelée blanche, & il gela à glace Er" 8 les On trouvera , je crois, des exemples très-rares d’une température pareille à celle que nous éprouvons depuis cinq mois , en y comprenant le mois de Janvier, remarquable par la chaleur qui l'a caractérifé. La végéra- tion n'a point été interrompue pendant ce mois: maisau moment où j'é: cris , elle eft rgrardée de près d’un mois fur l’année moyenne. Les bleds, qui avoient été femés de bonne heure , & que la température douce des mois de Décembre & de Janvier avoit avancés , font gelés dans plufieurs cantons , les abricots font perdus ; les autres arbres fruitiers , qui font ac- tuellement en fleurs , paroiffent fouffrir ; la vigne n’eft point encore aflez avancée ici pour pouvoir être endommagée par le froid. Les hirondelles, au lieu de paroître à la fin de Mars , ne fe font montréesfur notre colline u'à la mi-Avril. Tout nous annonce une année aufli tardive, en 1782, qu elle avoir été hätive en 1781. Rédigé a Montmorency en Mai 1782, COTTE , Prêtre de l'Oratoire , Curé de Montmorency , Correfpondant des Académies Royales des Sciences de Paris 6 de Bordeaux , 6e, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 259 OBSERVATIONS Surun Phnomène des environs de Vefoul; par M.HASSENFRATZ. (CHER AR ayant vainqu une partie de la Séquanie, tourna fes armes victorieufes fur Vefoul. Après avoir pris une pofñition favorable fur un côteau dominant le Village de Charmois, & avoir tracé des lignes de circonvallation , que les viciflitudes des temps ont refpectées, le Général Romain fut contraint de retourner fur fes pas, par l’obftacle que portoit la mer de Vefoul (1) à l’exécutfon de fes projets. Quoiqu'an ait toujours prétendu que l’épanchement momertané de la fource du frais-puis für la caufe principale qui avoit empêché cette petite Ville de tomber fous la pRfanee de Céfar, & que l’on voie de nos jeurs des épanchemens fu- its de ce trou produire le même effet, je fuis bien éloigné de regarder ces deux obfervations comme les mêmes: mais cette difcuflion devant faire le fujet d'un Mémoire particulier , je me difpenferai d'entrer dans de plus grands détails. Le but que je me propofe eft de faire connoître le phéno- mène que produit ce trou, & de donner les eaufes que je crois avoir dé- couvertes. On appelle en Franche-Comté frais-puis, une efpèce d’affaiffement en forme d’entonnoir , qui jouit de la propriété fingulière de lancer avec force & en forme de jet une très-grande quantité d’eau, & cela après de grandes pluies: fouvent la maffe eft tellement confdérable, qu'il en naît un rapide torrenr, qui n'a lieu que lors de l'irruption, puis cefle, & le fond du trou refte quelquefois à fec. J'ai eu connoiffance de trois de ces frais-puis dans Les environs de Vefoul: un dans les Terres de M. le Prince de Beaufremont , près des bords de la Sûne; un autre entre Andelare & Rofey; enfin, un troifième que j'ai obfervé, que j'ai fuivi & dont je vais tracer la pofition. A TE, N. E. de Vefoul, diftant d'une demi- lieue, eft le Village de Frotey , qui termine la charmante prairie qui environne la Ville. De ce Village, côtoyant les bords d’une jolie petite rivière, dont les finuofirés bordées de faules & d'herbes variées d’une infinité de couleurs flattent ‘ l'œil de l'Obfervareur, on arrive au moulin de Chamdamois: ce moulin elt placé à l'extérieur d’une ifle que forme cette rivière , qui elle-même prend fa fource d'un gouffre en forme d’entonnoir fitué à fon extrémité: cette fource s'appelle la Fond-Damois ; elle a une profondeur aflez con- a (1) Ce font les propres paroles de Céfar. Tome XX, Part. Il, 1782, OCTOBRE. Kk2 260 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fidérable. Le morne filence qui règne dans ce lieu, imprime le plus grand sefpet. Côtoyant les contours agréables des pieds des mornes efcarpés qui forment l'enceinte de ce lieu enchanté , on arrive fur une petite hau- teur: là, la vue s'étend fur deux vallées, l’une à l'E. N. E., divifée par un etic ruifleau ; l’autre à l'E., aride & sèche, d'où quelques arbres, un peux d'herbes & de pierres amoncelées, en forment l'endroit le plus fauvage. Pénétrant dans la vallée où l'afpect eft le plus pittorefque , on voit, après avoir marché l'efpace de huit cents pas en fuivant les contours du vallon, on voit, dis-je, à l'E. fur la face d'un roc vertical, une large ouverture en forme d’arc de triomphe : cette ouverture efk celle d’une grotte aflez confidérable, tapiffée d’une infinité de ftalactites différemment variées. On ne peut parvenir à ce fouterrein qu’en graviflant fur des fragmens inadhé- rens, qui, s'écroulant fous les pieds de l'Obfervateur que le defir de s’inftruire y Sri lui font courir le danger prefqy’inévitable de terminer fa carrière dans un lieu qui femble éloigné de lhabitation des hommes. De cette grotte, fuivant toujours la direction de cette vallée, on ne peut fe laffer d'admirer les points de vue & les fites qui varient à chaque détour du chemin finueux : là font des rocs à pics, dont les tranches fonc verticales ,.où, felon l’expreflion du favant Profefleur de Sauffure, on voit à leur fommet la trace du paffage des eaux & de leurs érofions (1); ici font des éboulemens caufés par les neiges & les glaces: dans le mi- Jieu eft une peloufe charmante qui croît fur la vafe que dépofe le cou- rant, lorfqu'il s'ouvre un paffage dans ces lieux; à l'extrémité font des arbres qui ombragent de leur fommet, & qui ont à Leur pied la marque de la dernière hauteur d’eau qui les arrofa: de ce côté font des débris accumulés par la main des hommes; débris dépofitaires des maffes qu'ils ont enlevées des entrailles de ia terre pour conftruire de valtes édifices: enfin, ces rocs blancs, formés de pierres calcaires , remplis de coquillages, dépofent que les eaux de la mer ont féjourné fur ces lieux. Après avoir parcouru l’efpace d'une demi-lieue dans certe vallée, on arrive au frais-puis, qui au premier coup-d’œil paroît la terminer. Ce frais- puis eft une efpèce d’entonnoir de 60 pieds de diamètre à fon fommer, de 44 pieds 8 pouces de haut, & de 12 pieds de diamètre à fon autre extrémité, Souvent il y refte de Veau, & les Habitans du lieu prétendent TR (x) J'appuie un peu fur la direétion verticale des couches; car les pierres calcaires ne confervent cette direction que jufqu’à une certaine diftance du Jura: enfuit il ya des variétés infinies jufqu’à la chaîne des Alpes , où, ainfi que dans les Vofges, il n’y æ plus de tranches dérerminées , quoique beaucoup de perfonnes croïenten avoir vu. Maïs au retour du voyage que j'efpère faire de nouveau dans fes Alpes , en Obfervateur dé gagé de tout fyftême, je ferai voir, dans un nouveau Mémoire, fi mes Obfervations font les mêmes, que ces prétendues couches ne viennent que d’uneillufion opti- que : témoinsles couches elliptiques d’un arc fitué dans la Vallée de Lauterbrune , où eft la fuperbe cafcade, qui tombe de mile pieds de haut, &c. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 26x ue l’on ne peur en trouver le fond; mais le 15 Août 1781, lorfque je ds le voir, une vafe terreufe ; mêlée de pierres calcaires arrondies par les eaux & de grains ferrugineux , le faifoit paroître entièrement à fec. Le 24 Août, après une pluie abondante qui duroit depuis Le 19, je fus le vifter ( Le Éte-piris ÿs je vis la fource de la Fond-Damois jaillir avec plus de vitefle, & s'élever en bouillonnant de 2 ou 3 pieds au-deflus de fa furface. En arrivant au frais-puis, le baflin commencoit À fe rem- plir, & le bord fupérieur étoit furmonté d’un jet de 3 pieds de haut & de 3 pieds de diamètre, A peine le baflin étoit il rempli, que les eaux re- fluant de fes bords s’épanchèrent dans le vallon que nous avons fuivi, & donnant naiffance à une rivière, vinrent s'unir à celle qui forme la fource de la Fond-Damois. Comme la pluie n'avoit duré que quatre à cinq jours, le courant fe tarit peu de temps après; car le 26 be je voulus recon- noître le pays, afin d'établir la caufe de ce phénomène, je ne vis plus dans Je trou que 8 pieds d’eau ou environ. Je partis à fix heures du matin du frais-puis, en me dirigeant fur Prés- les-Maifons , laiffant à droite le Village de Neurey. Les terres de ce canton font rougeätres & remplies de grains ferrugineux. Après avoir dépaflé Neurey & Saint-Ygni, on trouve dans deux foflés creufés le long du grand chemin qui conduit à Beaume-les-Dames , quantité de pierres de différentes formes. La nature femble s'être plue dans ce lieu à imiter Le produit de nos végétaux : il eft de ces morceaux qui reffemblent à des poires, des pommes, des citrouilles, &c. Le defir de connoître la conf- truétion intérieure de ces minéraux men fit caffer plufieurs: chacun d'eux contenoit dans leur centre différens objets; les uns des écrevifles, ou feulement des parties d’écrevifles pétrifiées ; d’autres des fruits, des cryf- taux. Je ne finirois pas fi j'entrois dans le détail des objets que contenoit le centre de ces ode. qui toutes avoient une configuration qui appro- choit beaucoup de la configuration extérieure, Si 1: corps étranger que Von trouve au centre a quelque chofe de particulier , le dedans des pierres ne laifle pas d'avoir aufli fa fingularité. Autour des corps qui forment le noyau, on voit une fuite de couches de la même matière, mais qui différencie de denfité: la première couche eft très-poreufe; celles qui fui vent le font moins, & cela en fuivant une progreflion jufqu’à la furface , où le tiflu eft uni, ferré & très-dur. Les Habitans des environs du frais-puis & d’une partie de la Franche- Comté prétendent que la rivière de Lougnon produit ce phénomène ar fes ditérens accroiffemens , & cela en fuppofant qu'à une demi-lieue . de Villers- Uxel, contre les parois du roc vertical qui en forme les bords, eft une caverne ou un conduit fouterrein qui communique avec le fond du frais puis: de-là, lorfque l’eau eft aflez élevé: pour y pénétrer, le phénomène doit avoir lieu dans fon entier. Ce qui paroît encore aflurer cette hypothèfe , c'eft que l'eau qui jaillit du trou, lance des pierres rour 262 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lées, dont la nature approche beaucoup de celles que le Lougnon charie dans fon cours. I] refte à s’aflurer s'il y a poffibilité, c’eft-à-dire, fi la ri- vière de Lougnon eft plus haute que la furface fupérieure du frais-puis. On fera peut être furpris que pour aller à une demi-lieue N. de Villers- Uxel , je me dirige fur Prés-les-Maifons, route de Bannal, à deux lieues S. de ce Bourg : mais un prodige non moins extraordinaire que l'on raconte d’un trou qui fe trouve dans cette direction m'y détermina. Il eft fingulier ue des hommes, qui fouvent paroiflent inftruits, affurent aux Voyageurs de merveilles dans les lieux qu'ils habitent, lorfque fouvent il n’en exifte aucune trace. Si je n'ai pas l'avantage d’affurer ces merveilles, j'aurai au moins la gloire de détromper ceux qui n'ont pu s’en rendre témoins ocu- aires, Un affaiffement fubit ( difoit-on ) a produit un trou d’une énorme profondeur fur le bord d'un grand chemin, peu éloigné de Prés-les- Maifons. La proximité du pañlage le fit fervir de tombeau à une infinité de gens, que la cupidité de certains hommes, qui exiftent pour le malheur des fociétés, faifoir précipiter dedans pour affouvir leur avarice. Un particulier, doué d'une hardiefle au-deflus de celle du vulgaire , forma le projet imprudent d'y defcendre : après avoir pofé un treuil & l'avoir entouré d’une aflez grande quantité de cordages, il s'attacha à l'extrémité, & deux hommes l’y defcendirent, Arrivé au fond, plufieurs conduits fou- terreins éclairés par la lumière du foleil, qui pénétroit dans ce lieu de -divers endroits, lui firent appercevoir des chemins, des maifons, des ruif feaux , &c. Au-deflus du pont pafloir un rapide torrent, qu'un large pont couvroit; fur le pont & fur les bords du torrent étoient des monceaux d'offemens humains, monceaux accumulés lorfque l'art deftructeur de la -guerre ravagea ces environs... Arrérons, car le merveilleux furpafle déjà ce que l'imagination peut envifager. Quel eft l'Obfervateur qui, après un pareil récit, fait par des hommes que l'en ne peut foupçonner d'exagé- ration, n'eft tenté de facrifier mille fois fa vie pour en examiner tous les détails? Mais combien mon attente a été trompée! au lieu de ces mer- veilles je n'ai vu-qu'une ouverture de quinze pas de diamètre, d'où def- cendant cinq à fix pas, on {e trouve fur une furface unie , au milieu de laquelle eft un trou parallélogramique de fix pas de long fur trois de large. J'ai defcendu dans ce trou environ de 20 pieds de profondeur, & j'ai vu au fond un amas de pierres que les Habitans avoient jetrées dedans pour le combler. Ce trou paroît avoir été formé par un affaiflement fouterrein, comme une infinité d’autres, dont l’efpace que j'ai parcouru eft rempli. D'un côté du trou on voit s'élever des foupiraux qui forment d’autres ou- -vertures, & de l'autre on voit un canal d’un pied de diamètre que les eaux ont formé à travers le roc pour s'ouvrir un paflage, tomber dans -ce trou & s'unir aux écoulemens fouterreins qui probablement paflent par ce lieu. : < ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. 9263 J'ai dit qu'il exiftoit une infinité de trous dans l’efpace que j'ai parcouru; il eft bon de faire attention à cette remarque, Que l’on me permerte en- core d'obferver ce que j'ai vu de fingulier dans un de ces affaiffemens ; obfervation favorable aux fentimens du favant Profeffleur de Sauflure, de l'ingénieux Auteur des Lettres à M. de Buffon, & d’une infinité d’au- tres , qui prétendent que les vallées & ravins n'ont été formés que par un épanchement fubit des eaux de la mer, qui couvroient les plus hautes fommités. Quoique je ne puifle me former l'idée de cet abaiflement fubit des eaux, & que je rapporte ces effits à d’autres caufes (1), je ne puis m'empêcher de détailler cette obfervation fingulière. La quantité d’eau tombée du 19 au 23 Août avoit formé une ef: pèce de torrent: les eaux s’écouloient dan$ un trou de quatre-vingts pas de diamètre & de 15 pieds de haut; ces eaux pénécroient à travers le roc qui en conftitue le fond, & s’unifloient probablement à un conduit fou- terrein: car, malgré le volume d'eau, dont la rapidité alla jufqwà can- neler le roc calcaire fur lequel il couloit, ce baflin re put jamais s'em- plir. L'eau dans fon cours charioit Le fol végétal qui couvroit cette pierre calcaire , dont les tranches font horizontales, & le dépofoit dans l’efpèce de baflin, de manière à furpafler tout ce qu’on peut imaginer. Ce dépôt formoit un fond uni, qui É levant parsépaifleur de 6“lignes, 1 pouce, 2 pouces ; faifoit voir comme fe forma la couche de pierres calcaires qui conftitue la bafe de nos plaines. A une certaine diftance du débouché du torrent , S'élevoient par une pente douce de petites fommités, dont les plateaux réunis formoient encore une plaine particulière; la configuration avoit un rapport particulier avec les hauteurs qui bornent les plaines: on y voyoit des caps, baies, &c. De ce plateau s’élevoient encore différentes fommités : les unes qui fe fuccédeient en gradins, jufqu'à l'endroit où les eaux arrivoient; & d’autres détachées & placées çà & là, dont les cimes paroifloient être efcarpées: au milieu étoit un ravin, que Peau avoit creufé en finiffant de s'écouler, Les fâces à pic de ce ravin com- mencoient à s'ébouler, & formoient une pente douce à partir de la bafe à la moitié de la hauteur, le refte des faces éroit vertical. La direétion des couches ( car cette vafe en avoit ) fuivoit toutes les finuofités que formoit cet amas de vale, à l'exception du ravin où l’on découvroit fur les faces latérales les épaiffeurs des bancs, qui tous avoient une direétion horizontale : il eft peu d’amas de vafe qui aient plus déffimilitude avec la (3) Je craignois de donner mon fentiment fur la formation des vallées & ravins FU Jai obfervées dans la chaîne des Alpes & du Jura; mais lingénieux Auteur de la inéralogie des Pyrénées paroïflant être d'accord avec moi, je in’enbardis à avancer nee m'ont toutes paru avoir été formées par les rapides torrens qui coulent encore ans leur fond, mais avec moins de viteffe & de volume qu'ils n’en avoient lorfqu'ils ont commencé à s’ouvrir un paflage, 264 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, A: manière d'être de nos pierres calcaires. Revenons à’ nos obfervations fur le frais-puis.- De la forge de Bannal, je fuivis le cours de Lougnon jufqu’à Villers- Uxel. Arrivé dans ce lieu je réfolus de prendre un guide pour me con- duire à la fource du frais-puis. Le nommé Bernard, Compagnon Menui- fier, âgé de foixante-quinze ans, fe propofa de me conduire ; je l'acceptai, & fus avec lui à trois quarts de lieue de ceijoli petit Bourg, & une demi- lieue d’Aillevans. Je vis dans ce lieu, fitué au milieu d’un bois, les ro- chers qui bordent la rivière; dans cés rochers eft une infinité de petites go » Mais qui toutes n'ont pas plus de 9 pieds de profondeur. J'ai ob- ervé dans cet endroit la hauteur du baromètre, le degré de chaleur du thermomètre , qui comparé à l'obfervation que j'avois faire fur le fommee du frais-puis, & à un baromètre & un thermomètre que l’on obfervoit à Vefoul pendant mon voyage, me donna 71 pieds - d’exhauffement de la furface de Lougnon 2 la furface fupérieure du frais-puis. Le foleil avoit terminé fa carrière ; le crépufcule pouvoit à peine nous éclairer: je priai mon guide de me fortir du bois, & de me conduire fur le chemin d'Ail- levans. À peine pus-je être certain de ne pas m'égarer que je voulus fa- tisfaire ce bon Vieillard ; mais me regardant avec fierté: « Gardez votre .» or ( me dit-il ) ; le defir de vous être utile , m’a fait entreprendre de vous >» rendre ce fervice pénible pour mon âge, afin en à nos jeunes » gens ce qu'ils doivent aux étrangers; tout autre vous l’auroit rendu » comme moi: aufli je remercie l'Eternel de ce qu’il a bien voulu que » j'aie la fatisfation de rendre encore un fervice avant de mourir ». Ce bon Franc-Comtois s'en fut gaiement chez lui malgré l’obfcurité de la nuit. Je ne cite cette anecdote, qu'afin que ceux qui ont voyagé comme moi dans la fuperbe & incomparable Helvétie tant célébrée, puiflent com- parer Les mœurs de l’un & de l’autre pays, & juger fi nos bons Séquanois méritent moins d’être chantés qu'eux, D'Aillevans je revins fur fe frais-puis, en remarquant toujours une in- finité de trous en forme d’entonnoirs fur toute la furface. du pays: ces trous reçoivent l'écoulement des eaux, qui de-là pénètrent dans les entrailles de la terre. Du frais-puis je fuivis la vallée, & je fus faire une obferva- tion barométrique & thermométrique à la fource de la Fond-Damois: cette obfervation comparée me donna la fource de la Fond-Damois 65 pieds = plus baffe que la fürface fupérieure du frais-puis, De-là il eft poffible d'ima- giner une communication entre la fource de la Fond-Damois & celle du frais-puis : cette communication fouterreine peut prendre naiflance ou de la rivière de Lougnon, ou de quelques réfervoirs qui reçoivent une partie de l’eau qui tombe fur la furface a terrein contenu entre Lougnon & le frais-pruis : confidérant enfuite qu'après de grandes pluies, les eaux qui viennent fe déboucher à la Fond-Damois peuvent former un volume tel que le débouché ne puilfe fuffire à la dépenfe, il fera aifé d'en conclure que SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 326$ ue les eaux refluant & tentant à fortir du côté où la réliftance eft la moindre , doivent foulever la vafe qui bouche Le fond du frais-puis, fortir avec violence & en forme de jet. Ce qui paroït prouver mon raifonne- meut, c'eft l'obfervation que j'ai faite à la Fond Damois , avant d'arriver au frais-puis, le jour de fon débordement : cette fource jaillifloit à-peu- près de même que le frais-puis ; de plus, l'irruption ne fe forme qu'après de grandes pluies, &nejette que peu de temps. Si la pluie ne continue pas, on apperçoit fa furface fe baifler fucceflivement, ce qui prouve que le volume d'eau qui le formoit a un écoulement particulier: la Carte du pays n'indique aucun autre endroit ; il s'enfuit donc que le frais-puis a une communication avec la Fond-Damois. Il eft facile de voir que les affaif- femens fouterreins que mous avons remarqués, font les caufes princi- pales de ce phénomène fingulier ; car l'exhauflement de Lougnon après de grandes pluies eft peu confidérable , & alors il doit peu influer: au lieu que la mafle d’eau qu'abforbent ces affaiflemens , eft aflez volumineufe our former un rapide torrent, & on apperçoit dans le pays très- peu d'autres débouchés. On ne peut fe difpenfer de faire entrer la rivière de Lougnon comme une des caufes de ce phénomène; car la fimilitude ow la reflemblance des pierres calcaires roulées que charie Lougnon, & celles que lance le frais - puis , femble en être une preuve convaincante. Pour conclure donc, on peut croire que le phénomène du frais-puis dépend d’une communication fouterreine avec la fourcé de la Fond-Damois, d'unecom- munication avec lawrivière de Lougnon, & d'une autre communication avec les affaiflemens fouterréfns que l’on rençontre entre la rivière de Lougnon & le frais-puis. à Jesterminerai mes Obfervations , par une Relation que M. de Leur- ville vient de, m'envoyer d'un débordement du frais-puis, datée du 17 Novembre 1781. « J'arrive à l'inftant même du frais-puis (m'écrit-il), » que j'ai vu dans toute fa beauté: vous pouvez , Monfieur , juger ai- » fément de la quantité d’eau que nous avions à Vefoul, puifque, pour » fortir de la rue qui vient au quartier, j'ai été obligé de monter à che- » val, & qu'elle montoit au-deflus de la Pofte aux Lettres. Ce débor- >» dement étoit en partie occafionné par celui du frais-puis. Je ne l'ai pas » vu, à la vérité, s'élever comme l'annonçoient toutes nos bonnes gens de » Veloul, à la hauteur de 40 ou fo pieds: mais je n’en ai pas moins > admiré ce phénomène, La circonférence du trou pouvoit égaler dans » ce moment celle du grand bafñlin des Tuileries; la boule d'eau ne >» s'élevoit pas à plus de 3 pieds: on entendoit diftinétement un bruit # fourd, occafionné fans doute par la rapidité & le frotrement des eaux » dans ces conduits fouterreins. L’écoulement de ces eaux remplifloit la # largeur du petit vallon (1) qui vient à Chamdamoiïs. Enfin , la | (1) Qui peut avoir HAE Gus 13 de large. Le Tome XX, Part, II, 1782, OCTOBRE, LI 266 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » Garde (1), ce jour-là, fut relevée à cheval. Vendredi & Samedi foir ; » nous eûmes des orages très-violens, beaucoup de grêle , de tonnerre, n» & toute la nuit ilne cefla de faire des éclairs d’une force & d'une # beauté furprenantes ». Roue Voilà donc une nouvelle irruption du frais-puis, qui probablement durera long-temps, fi la pluie continue , puifque la caufe aura toujours lieu. Pour le débordement des eaux dans la Ville de Vefoul, comme la caufe tient à une digue que l'on a fait boucher au moulin de Saint- Martin , au S. O, de la Ville ,ileft à croire qu'il durera jufqu'à ce qu'on la faffe élargir, puifque l'ouverture qui donne paflage aux eaux n’eft pas fuMfante. MÉMOIRE Sur l'Emeétique ou Sel fhibié; par M. DE LUNEL, Membre du Collége de Pharmacie (2), LE tartre ftibié ou l'émétique’, connu depuis Adrien Mynfich, eft un des plus beaux préfens que la Chymie ait fair à la Médecine. Ce fel a tou- jours occupé les Chymiftes les plus inftruit$, pour découvrir un procédé für & conftant pour le préparer toujours le même. Ce n’eft pas fans rai- fon que les Médecins fe plaignent de rencontrer plufieurs médicamens, dont les effets fonc variés, chez ceux même dont les talens font connus; (1) Du Régiment des Dragons de Ja Reine, qui y eft en quartier. (z) Depuis quelques années, MM. du Collége de Pharmacie ont coutume de s’affem- bler publiquement à loccafon de la diftribution des Prix d'Emulation , fondés par M. le Noir en faveur des Elèves : on ÿ rend compte des travaux du Collège & de fes: Membres dans le courant de l’année: on y paie le tribut d’éloge mérité, à la mémoire ds Membres du Collége que la mort a enlevés ; & on y lit différens Mémoires. Jaloux de mériter les fuffrages du Public, dont ils ont acquis la confiance, MM. du Collése de Pharmacie ont le foin de rendre leur Séance toujours très-intéreffante, par les objets qui y font traités. Le compte des travaux de l’année, rendu par M. Demachy; VE- loge de M. Gi/kr; le Mémoire que nous imprimonsici; celui de M. de 4 Planche, fur lextrait de régliffe, fair par un Pharmäcien habile , comparé à celui d'Efpagne; celui de M. Buiffon fur les caraétères dittinéifs de plufieurs efpèces de pommes de terre, & fur les caufes délétères de tous les champignons ; enfin, celui de M. Cuder de Vaux, fur les moyens efficaces employés danses circonftances graves de’ méphitifime, ciréonftances dans lefquelles des moyens différens des fiens ont été employés fans fuccès, tandis que les’ fens ont réufli parfaitenrent, ont rempli cette Séance, & mérité Les juftes applaudiffemens de tous ceux qui y ont aflifté. 0 . SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 267 & (foi dit en paflant) comment doivent-ils être chez ceux que la cupi- dité ou le défaut d’inftruétion peut rendre infidèles dans leurs travaux? L'émétique , qui fait l’objet de ce Mémoire , eft un des remèdes les plus employés, & dont la variété eft prefque aufli multipliée qu'il y a d’Artif- tes qui s'occupent de fa préparation, De tous les procédés connus , le plus ufité à jufte titre conflte à faire bouillir enfemble partie égale de crème de tartre & de verre d’antimoine,, filtrer & faire cryftailifer. Les autres varient dans les dofes ou dans les formes. ” Les uns emploient Le verre & le foie d'antimoine mêlés enfemble, & de- mandent une longue ébullition ; d’autres ne font ufage que du verre, & ne font prefque pas bouillir. Nous croyons pouvoir affurér que le nœud de la difficulté n’a point été fenti jufqu’à préfent; car notre procédé, tout différent des autres, don- nera à connoître qu'il faut fupprimer un être qui joue le grand rôle, & qui probablement a toujours mis obftacle à la perfection du tartre ftibié; nous voulons dire le phlogiftique, Pour mieux rendre compte ds motif qui nous a déterminés à notre pre- cédé , nous croyons néceflaire de faire obferver que Le but qu'on fe pro- pofe dans la préparation de l’émétique , eft de o la terre de l'an- timoine plus ou moins déphlogiftiqué avec l'acide tartareux; ce qui fait le fujet de ce Mémoire. * Avant de parler des moyens que nous employons , il faut obferver que le verre d'antimoine le mieux fait, contient encore trop de principe in- flammable pour la préparation de l’émétique. Pour en être convaincu , il ne faut que réfléchir fur ce qui fe pafle dans l'opération ordinaire, Tous ceux qui ont eu occalon de préparer ce médicament, n'ont pa manquer de s’appercevoir que, pendant la combinaifon de la terre métallique avec l'acide tartareux , il fe fépare uneimatière rougeâtre (que des expériences étrangères à ce Mémoire nous ont afluré être du foufre doré). Cette matière étrangère fe trouve féparée par la fimple filtration , à l'exception d'une partie plus divifée qui pafle à travers le filtre, & que l'on trouve mêlée avec le fel, dontil fautle priver pour l'avoir bien pur & fur-tout bien cryftallifé , ainfique le recommandoit, avec grande raifon, M. Rouelle. * D’après ce qui vient d’être dit, il eft aifé de fentir que le foufre doré eft le corps, finon nuifible, au moins étranger , que nous croyons jufqu'à préfent avoir été la caufe des difficultés que l’on a rencontrées. Le moyen de rompre le nœud doit donc confifter, 1°, à priver le verre d’antimoine de la furabondance du principe inflammable; 2°, à faciliter une combinai- fon directe , égale , fans qu'il y ait à craindre le mélange de matière étrangère, Le moyen que nous propofons pour obtenir un émétique de même degré d'éméticité, confifte donc , comme nous l'avons déjà dit , à enlever au verre d'antimoine la furabondanice de phlogiftique démontrée inutile, Tome XX , Part. Il, 1782. OCTOBRE, Li2 / 268 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : & qui occafionne abfolument la variété que l’on rencontre dans les diffé- rentes préparations. Nous difons, avec connoiffance de caufe, e phlogiflique furabondant 3 car il ne faut pas s’imaginer qu'on doive réduire Le verre d’antimoine à l'é- tat de terre abfolue : ce feroit une erreur , dont nousont afluré plufieurs expériences. Par exemple, l'antimoine diaphorétique, combiné avec l'a- cide tartareux , ne nous a rien bpeduie de femblable au tarte ftibié. * Tout le monde fait le moyen employé pour priver l'antimoine de fon principe inflammable. Nous nous contenterons de dire que ce moyen ne peut remplir notre objet. Le grillage aun terme au-delà duquel il ne peut aller, & qui ne fuit pas pour rendre le verre d'antimoine convenable à notre opération. ' Pour fuppléer à cet inconvénient , nous employons un intermède , ou, pour mieux dire, un corps avide de phlopiftique ; l'acide vitrio- lique. + Nous prenons 12 onces de verre d’antimoine du Commerce, ayant une belle couleur d'hyacinthe , que nous réduifons en poudre & porphy- rifons, pour le mêler avec 16 onces d'huile de vitriol blanche , telle qu'on la débire à la Mafufacture de Javelle: on met le tout dans une cornue de veire , que l'on met à feu nud dans un fourneau de réverbère. Le premier degré de feu combinant le phlogiftique avec l'acide vitrios lique,, donne naiflance àune matière rougeâtre , qui n’eft autre chofe qué du foufre qui fe fublime dansale col de la cornue. Le foufre difparoît par l'augmentation du feu, qui fait noircir le mélange d'autant plus qu'il augmente en chaleur. IL faut augmenter le feu jufqu’à faire rougir la cor- nue. L'acide , combiné avec le phlobiftique, fe dégage à la manière de l'acide fulfureux, dans la rectification de l'huile de vitriol. Le feu doit être continué, jufqu'à ce que tout l'acide foit diflipé; ce qui eft facile à connoître à la matière reftante dans la cornue,, qui devient d’un blanc fale: on cafle la cornue, pour obtenir le réfidu , qui rétient quelquefois de l'acide vitiiolique dont on le prive par les lavages. Il faut abfolument que la matière à employer foit fans goût ni faveur, & bien féchée. On prend enfuite partie égale de ce verre d’antimoine ainfi préparé & de crême de tartre : on commence pr faire bouillir qua- tre pintes d’eau , qui doit fervir de véhicule , & on jette par parties Le mê- lange qui doit former le fel ffibié. Au bout d’un quart-d'heure a’ébulli- tion, on filtre la liqueur, qui fouvent, au bout d’une heure , laiffe dépo- fer des cryftaux. Si la cryftallifation n'a pas lieu, on a recours à l'évapo- ration, Sur le filtre refte une matière blanche qui na pas éré combirée avec l’acide tartareux, mais qui cependant en eft fufceptible , en la re- combinant avec fon poids égal de crème de taitre, On évite ; par ce pro- cédé, l'embarras de difloudre à pluñeurs reprifes l'émétique, qui, par des . SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 969 autres procédés, fe trouve fouvent combiné avec une plus ou moins grande quantité de foufre doré, felon l’état dans lequel étoit le verre d’antimoine ; incertitude embarraflante pour l'Artifte, & nuilible à l'o- pération, Nous nous fommes affurés que cette manière de faire donne réellement un fel vomitif, propre à remplir les vues du Médecin. 1°. Il précipite à la mauière d’un émétique bien fair, & en quantité toujours égale. Une once de l'émétique fait par notre procédé nous a toujours donné 1 gros 1$ grains de terre d’antimoine obtenue par précipitation. L'eau-mère fournit tou- jours des cryftaux , jufqu'à ce qu’enfin elle ne contienne plus du tout de fel en diffolution; ce qui eftun très grand avantage , qu'on ne rencontre pas dans les autres procédés. Ce fel par conféquent réurit plus que l’autre les caractères chymiques , puifqu'il exifte roujours le même, & que le moyen für de l'obtenir eft la cryftallifation, 2°. [1 brûle fur les charbons. 3". Il excite le vomiffement d’une manière conftante & à petite dofe. * L'objet de ce Mémoire étant de procurer un moyen qui puifle guider fürement l’Artifte dans fon opération, nous croyons le but rempli, puif- quesnous faifons voir la poflibilité de préparer uniformément ia ma- tière qui fait la bafe de l'émétique , la couleur & la faveur étant un ca- ratère invariable. " I eft aifé de fentir que la furabondance de phlogiftique eft le rec plus ultra , au-delà duquel on n'eft point allé, & faifoit le nœud de la dif- culté ; qu'on peut enlever l'excès de phlogiftique par un inter mède ; Qu'on peut être für, par ce procédé, d’avoir toujours une matière üni- forme, puifque le coup-d’œil {ufr pour en juger. On objectera peut-être qu'on a fait de l'émétique jufqu'à préfent, qui a procuré de bons effets, & qu’un procédé , jufqu’a certain point embarraf- fant, peut être regardé comme inutile, Nous répondons que le point eflentiel étant de faire un émétique égal, il falloit trouver une manière füre & co flante de préparer le verre d’antimoine, dont les caraëtères fuffent aufli certains que faciles à fair, Tel eft le but que nous nous fommes propofé, ef a ex fe 270 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ge LA PHOSPHORESCENCE DU DIAMANT, Avec les nouvelles Expériences de MICHEL DE GROSSER. P; USIEURS expériences nouvelles m'ont engagé à écrire fur la phof- phorefcence des diamans ; elles m'ont paru propres, finon à porter au dernier degré de perfection, du moins à fortifier & à augmenter en ce genre les premiers élémens de la théorie. «+ Quoique MM. de Faye & Beccaria nous aient Jaiffé d’excellens Mé- moires fur cet objet, on n’y voit cependant pas affez clairement, ni quels font les diamans qui fe phofphorifent, ni pourquoi ils fe phofphorifent, IL falloit donc de nouvelles expériences, qui puflent afligner, d’une ma- nière plus certaine , les caufes de la phofphorefcence, & déterminer lef- pèce de diamans, qui, auf précieufe que les autres , eût encore l'avantage de fe phofphorifer. Rien ne m'étoit plus facile que de faire ces fortes d'ef- fais. Mon père avoit des diamans de toutes les couleurs & de routes les efpèces : au ta Le plus für pour les diftinguer, il joignoit, pour les ex- périences, un goût qu’une longüe habitude & l’âge avoient encore rendu plus vif. Ainf, dans tout ce qui pouvoit contribuer à fixer l'efpèce de diamant qui fe phofphorife, je devois entièrement compter, foit fur fa générofité, foit fur fes connoiffances. Quant à la caufe même de la phofphorefcence , avec la Differtation d'Herbert fur le feu , ilne me reftoit plus qu’à chercher à quelle efpèce de phofphore les diamans appartenoient, Ce Savant me prefloit d'ailleurs d'entreprendre ce travail, m’offrant à cet effer fes confeils & fes fervices. Guidé par ces deux habiles Maîtres, les ayant pour témoins de mes ex- périences & pour collaborateurs , rien ne pouvoit plus m'empêcher ; qe “fimple apprenti, non-feulement de marcher fur les pas d’Aca- émiciens célèbres , mais encore d’aller plus loir qu'eux dans la route qu'ils avoient tracée , & d'ofer fonder la profondeur des myftères de la Nature. ; Quoique plufeurs Phyficiens, par le mot de phofphore , entendent tous les corps luifans, ce nom cependant, dérivé de la lumière incer- taine de l'étoile du matin, ne paroît convenir principalement qu'à ceux qui réfléchiffent une lumière beaucoup moindre que celle du jour , peu différente & fouvent plus foible que celle de la lune. Nous appellerons donc phofphores ces corps lumineux dont l'éclat ne peut éblouir les yeux , ni affecter le toucher par une chaleur fenfible. IL eft deux genres de corps de cette efpèce; les uns, c'eft l'action feule | SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 271 de l'air qui les fait briller ; les autres, foit dans le vuide, foit en pleiñ air, btillent également. Herbert a démontré ee le phofphore de Prandius, que l’on appelle auñfi le phofphore de Kunckel , ainfi que le bois pourri & ces légères érincelles de l’éleétricité paflant à travers un air raréfié, ne devoient leur éclat qu’à Paétion de l'air, Quoique des expériences direétes n'aient point encore prouvé évidem- ment qu'à ce premier genre appartenoient les vers luifans , les couteaux de mer, les poiflons cuits dans l’eau falée , la phofphorefcence de la mer que Canton vient d'examiner tout récemment ; enfin , les feux-follers: telle eft cependant la reflemblance qui exifte entre les uns & les autres, que l'on penfe communément qu'ils ne brillent tous que par l'incerpofition de l'air; & de même que la lumière du phofphore de Prandius difparoït dans l'eau, de même aufli jamais l’on n'a vu fous cet élément ni poif fons phofphorifés , ni feux-follets même dans les endroits les plus ma- récageux,» | L'on a encore obfervé que l'agitation de la mer & des Auides qui ren- fermoient les couteaux de mer, donnoit de l'intenfité à la lumière. Or, Peffer de l'agitation eft de préfenter à l'air une furface tantôt plus grande & tantôt moindre : enfin , cette lumière qui fort ou des tombeaux ou des caves qui font reftés long-temps fermés, lorfqu'on vient à les ou- vrir , prouve que l’action de l'air éroit néceffaire pour la phofphorefcence des vapeurs qui y demeuroient cachées. - À L'autre genre de phofphore brille fans air, même dans un tube de baro- mère vuide. Tels font les phofphores de Canten, de Bologne, de Bau-. douin & autres de certe efpèce, Si on les expofe quelque temps à la lu- mière du jour, & qu'enfuite on L£s porte dans un endroit obfcur, ils bril- lent dans le vuide comme en plein air. Déterminé à examiner la phofphorefcence des diamans , un de mes pre- miers foins devoir être de chercher à connoître Ÿ quelle efpèce de phof- phore ils appartenoient fpécialement. Quoiqu'au premier coup-d'œil , il fütaifé de voir qu'il n’y a aucun rap- pore entre les diamans & les phofphores du premier genre, dont l'éclat dépènd de ces exhalaifons, qui à l'air perdent la lumière dontelles s'é- toient auparavant imprégnées ; cependant, pour ne tien précipiter , j'ai cherché , par toutes fortes d’expériences, à comparer les diamans , fur-rout avec la pierre de Bologne. Expérience 1°, J'ai pris un diamant couleur de citron , du poids d’en- viron deux-grains: au milieu de beaucoup d’autres diamans, & expofé au foleil, il contraétoit bientôt un éclat qu'il confervoit long-temps dans lobfcurité. Je l'ai mis dans un tube de verre de 2 pi:ds de long fur 2 li- gnes de diamètre , que j’ai rempli de mercure; & tandis que j'en tenois plongé l'orifice inférieur dans une mafle de mercure, je l'ai bouché avec le doigt ; j'ai enfuite renverfé le tube : en un mot, J'ai pris toutes les pré- 272 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, cautions d'ufage pour la fabrique des baromètres. Le diamant s'arrêtoit alors à-peu-près au centre de la colonne de mercure; mais bientôt les fe- couffes réitérées du verre l'ont fait monter à la fuperficie du mercure. Placé fur le mercure, & dès-lors dans le vuide , je l'ai expofé au foleil; & mis enfuite dans un endroit obfcur , il a jetté, comme le phofphore de Bo- logne , 12 même éclar dont il brilloit en plein air. Expérience LI, IL et conftant que le phofphore de Bologne emprunte fon éclat, non-feulement de la lumière du jour, mais encore de la cha- leur. J'ai donc chauffé , fans cependant la faire rougir, une cuiller de fer; j'ai mis deflus ce même diamant, qui, au bout de deux fecondes, brilloit déjà ; je l'ai enfuite ôté de la cuiller; & quoique beaucoup refroidi , il a confervé, l'efpace d'une minute & plus, l'éclat que lui avoit donné la cha- leur de la cuiller. Expérience III. J'avois déjà obfervé que des parcelles de phofphore de Bologne, fixées avec de la cire furun conducteur électrique , deve- noient brillantes au moment où l'étincelle part. J'ai voulu faire la mème expérience fur le diamant ; j'ai pris en confé- quence l'extrémité d’une chaîne qui touchoic à l’armure extérieure ; j'y ai at- taché , avecde la cire, un diamant: au moyen de cette chaîne, j'ai tiré de l'armure, qui avoit trois pieds quarrés, un coup éle@trique ; Le diamant a rendu l'éclat le plus vif, M Une fi grande refflemblance entre les effets de la pierre de Bologne & ceux du diamant , me prouvoit évidemment l'identité de leurs caufes: auf, fans la définition de la caufe de la phofphorefcence des diamans , étois-je bien décidé à prendre mon Profeffeur pour guide, & à appliquer au diamant ce qu'il a écrit & ce qu'il a enfeigné dans les Chaires publiques fur la pierre de Bologne. Mais ce Savant voulut que je traitaffe de nouveau la queftion; il m'en- gagea dans la définition® de la caufe de la phofphorefcence, à répéter fes expériences fur la pierre de Bologne, & à faire les mêmes fur les dia- mans , convaincu que des obfervations fur des efpèces différentes , qui ap- artiennent au même genre, démontreroient en quoi la théorie auroit pu être vicieufe , par l'accord & l'union des unes avec les autres. J'ai d’abord répété Les expériences de Zanoti, qu’on lit dans les Mémoires de l'Aca- démie de Bologne, Les voici, telles qu'elles y font rapportées: « Zanoti, » notre Secrétaire, s'occupoit de cette queftion difficile, que Marfgli >» avoit déjà propofée ; favoir , fi la pierre de Bologne reçoit & conferve au-dedans d'elle-même une lumière empruntée des corps extérieurs , ou » fielle brille d’un éclat qui lui eft propre. En effet, quoique plufieurs » Auteurs & nous-mêmes nous ayions dit que la pierre de Bologne ré- 2 fléchit une lumière étrangère , qu’elle l’attire , qu'elle la pompe , qu’elle » la reçoit & quelle en eft imprégnée, cette aflertion a plutôt la çou- x tume que la vérité pour fondement ; & rien ne nous empêche de » croire ñ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 273 ! croire que la lumière qui vient de l’intérieur n'eft pas inhérente à la pierre de q P P Bologne , mais plutôt qu'elle l'enfamme, de manière qu'elle brille enfuite d’un éclat qui lui eft propre , comme le font tous les corps allumés, Zanoti , comme Je viens de le dire, s’étoit prépolé cette queftion : La pierre de Bologne reçoir-elle une lumière extérieure , qu’elle répand enfuice dans l'obfcurité? ou bien, affectée d’un éclat étranger, réfléchit- elle une lumière qui lui eft propre»? .... « Zanoti faifant réflexion spa moyen du prifme, un rayon de lumière fe divifoit en faifcesaux de iférentes couleurs, crut qu’il feroit très-ailé de réfoudre cette queftion, filon plaçoit une pierre de Bologne fur un fpectre de diverfes cou- leurs, je manière qu'elle pût.ne recévoir que les rayons d'une feule couleur. En effet, {1 elle eût attiré en même temps la couleur & la lu- mière , ce devoir être une preuye qu'elle avoit pris & confervé au-dedans d'elle-même des rayons venant de l'extérieur. Si au contraire elle acti- roit la lumière & non pas la couleur , il étoit démontré qu'elle n’avoic pas abforbé des rayons extérieurs; mais qu'échauffée d'abord par une lu- mière étrangère , elle en réfléchiffoit enfuite une qui lui étoit propre. En effèr, fi la couleur qui s'eft une fois fixée dans les rayons ne peut plus en être féparée, comment la pierre de Bologne conferveroit-elle au-dedans d’elle-mêine les rayons qu’elle auroit reçus, fans en garder la couleur ? Algeroti répétoit les mênies e*périences aveg des Phy- ficiens: il fe fervoit à cet efféc de prifme Anglois; ceux de Zanoti étoient de Venife, Algeroti avoit expofé aux rayons du foleil plu- fieurs pierres de Bologne, parmi lefquelles il avoit choifi les deux plus brillantes. Avec ces deux pierres, ils firent l'expérience dont Zanoti avoit rendu compte; ils introduifirent dans une chambre obfcure, par une petite ouverture , un foible rayon de foleil, qu'ils firent tomber , au moyen d'un prifime, fur Le pavé , pour y former Le fpectre folaire. Après avoir placé l’une de ces pierres fur la bande rouge & l’autre fur la bande bleue , & les y avoir laifléesl'efpace de huit minutes environ, ils Les tranf- portèrent dans une autre chambre obfcure , où d'autres Obfervateurs atténdoient depuis long-temps l'effét de cette expérience. Les. pierres paturent à ces derniers moins brillantes qu'auparavant: mais elles fe reffembloient tellement , foir par la couleur qui étoit blanchätre, foie ar la lumière, qu'on ne pouvoit appercevoir entr'elles aucune diffé- rence {enfble ; d'où il réfulte queles pierres de Bologne ne s'imprè- gnent certainement pas d'une lumière externe & étrangère: car (i c'é- toit ainfi, pourquoi ces deux pierres auroient-elles eu la même cou- leur? pourquoi l'une n’eüt-elle pas été rouge & l’autre bleue, puifque celle-ci auroit pompé une lumière bleue & celle-là une lumière rouge ? Sur. ces entrefaites , Zanoti imagina ‘quelqu’autre expérience , qui püt faire connoître encore mieux la nature de Ja lumière que rendent les pierres de Bologne. A l'aide d'un prifme qu'il avoit approché le Tome XX , Part. 11, 1782. OCTOBRE, * Mm 274 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, plus près qu'il put de fes yeux, il en examina quelques-unes, qui, » récemment frappées des rayons du foleil, venoient d’être tranfportées >» dans un endroit obfcur ; il n’y apperçut rien de ce que l’on voit communé- » ment, lorfquon cohfidère un corps lumineux au travers d’un prifme. > En effer, fi le prifmeeft bien placé, la lumière que l’on apperçoit au » travers, paroît beaucoup plus étendue. qu'elle n'eft effectivement , & » mélangée des plus belles couleurs. Or, rien de femblable n’eft arrivé » à l'égard des pierres en queftion; ce qui certainement eût été fenfble , »> çar elles ont tocjours pe conferver leur couleur & leur figure, > ae vues au travers du prifme: elles ne firent que changer de po=. ition, chofe que la réfraétion des rayons rendit néceflaire , & femblèrent » être moins brillantes. Pourquoi ont-elles. confervé prefqu’entièremenc » leur figure & leur couleur ? eft-ce parce qu'elles ne donnoient que des » rayons d'une feule couleur ou d'un feul genre , ou plutôt à caufe de La >» foibleffe dé la lumière ? Et en effer, c’eft une obfervation que Zanoti » & d’autres Phyficiens ont faire fur la lumière du charbon, lorfqu’elle 2 commence à s'éteindre, & fur les autres lumières qui font foibles. Mais » fi l’on employoit pour cette expérience les pierres les plus belles & les » pluséclatantes, leur figure paroïtroit peut-être d'une plus grande éten- » due , & leur couleur variée. C’eft ce qui arrive aux vers que l’on voit » dans Jest nuits d'été briller fur l'herbe. Algeroti, les deux Zanoti, » François & Euftache Manfrede , étant enfemble à la campagne, ont » fait cette obfervation plus d’une fois; mais la lumière que ces vers ré- » Béchiffent eft toujours plus confidérable & plus éclatante que celle des » pierres de Bologne ». Quoique l'expérience de Zanoti parüt , au premier coup-d'œil , portée au dernier degré de perfection , reftoit cependant une chofe, qui , dans toute hypothèfe, me paroifloit inconcevable, L'efpèce de la couleur des deux pierres de Bologne , fur l’une defquelles on avoit fait réfléchir une lumière rouge, & fur l’autre une lumière bleue, parut la même, ainfi que l’intenfité de ta lumière. On ne perfuadera pas aifément à quiconque , par la réflexion des mi- roirs ou la réfraction des lentilles, a amalgamé une fois des rayons bleus & rouges , divifés par le prifme, ou qui, par l’afpect feul d'un fpectre coloré, a comparé l’une avec l’autre force de ces mêmes rayons: on ne lui perfuadera pas , dis-je, que les effets de ces deux efpèces de rayons foient également fenhbles , puifqu'il eft conftant que l'éclat & la force des rayons rouges l'emportent fur celles des rayons bleus , qui font beaucoup plus foibles. Faifanc réflexion que, dans le rapport de l'expérience ci-deflus , on n’a- voit déterminé ni lefpèce du prifme, ni jufqu’à quel point il avoit divifé les rayons, ni à quelle diftance du prifme étoit le fpectre ; je foupçon- nai que peut-être Les couleurs n'étoienr pas aflez féparées lorfqu'elles tom- ÿ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 275 bèrent fur le pavé; & qu'en les fuppofanttelles, les deux pierres de Bo- logne , que l’on avoit placées deflus, pouvoient très-bien avoir été frappées d’une couleur rouge & bleue encore mélangées enfemble. [1 falloit donc prendre une autre précaution, Des rayons introduits par l'ouverture la plus petite, font réfléchis & par cette même ouverture, & par les deux fees du prifme fur lefquelles ils tombent, Indépendamment de ceux qui par- tent direétement du foleil , il en eft d’autres qui , réfléchis dans toute ae de direction par les objets voilins , pénètrent dans une chambre obf- cure. Peut-être ces rayons avoientils eu aflez de force pour donner de l'éclat aux deux pierres de Bologne? Pour n'aveit aucun doute à ce fujet , je répétai l'expérience de Zanoti avec les précautions fuivantes : » Appareil. J'ai rendu une chambre fi obfcure , qu'y étant demeuré l'ef- pace d'un demi-quart-d’heure , la lumière ne n\a paru y entrer d'aucun côté, J'ai fait appliquer contre la porte un miroir métallique , auquel on pouvoit imprimer toute forte de mouvement, fans fortir de la chambre. En un mot, il étoit arrangé comme celui du microfcope folaire, qui ré- fléchir à volonté les rayons du foleil , fous quelqu’angle qu'il tombe. Une ouverture de 2 lignes de diamètre, pratiquée dans une feuille de laiton , donnoit entrée au rayon dans la chambre obfcure. Ce rayon étoit reçu par un prifme , dont l'angle étoit de 60 degrés. L’angle du prifme regardoit le plancher de la chambre , de manière que Le trait de lumière divifé püt donner une direction parallèle à l'horizon. Le prifme n'avoir ni ondes , ni veines; il étoit d’un cryftal que les Anglois nomment ffnt-glaff, afin que la diffraétion caufée par ce cryftal érant plus grande, les rayons fe fépa- raflent pe promptement les uns des autres. Une table noire , placée tout auprès du prifme, & dans laquelle étoit une ouverture d’un doigt & demi, tranfmettoit le fpeétre produit par le prifme. Son effet éroit de fermer , le plus qu’il feroit poflible , le paflage à la quantité de rayons réfléchis par le ça , où qui, produits par les objets voifins, pénétroient dans la cham- re obfcure. A la diftance de 10 pieds, jufqu'où paroïfloit pouvoir s'é- tendre de trait de lumière de couleur , on avoit placé une autre table noire, avec deux ouvertures féparées l’une de l’autre de 4 doigts, Au travers de l'une pafloient les rayons rouges & une partie des rayons dorés; aù travers de l’autre, les gayons indigo & une partie de ceux de couleur bleue; derrière la table , un fupport noir préfentoit deux morçeaux diffe- rens de la même pierre de Bologne, l’un à la lumière bleue, & l’autre à la lumière rouge. ( Voyez La Planche. ) Expérience I V. J'ai d’abord porté mes yeux fur Les pierres; je les ai enfuite fermés l’efpace de quelques minutes. Après que les pierres eurent été affez expofées à la lumière , & mes yeux préparés@ voir la lueur même la plus foible, j'ai fait couvrir d’une étoffe noire l'ouverture , le prifme , & tout l'appareil qui renvoyoit la lumière, J'ai enfuite confidéré Tome XX, Part. II, 1782. OCTOBRE. Mm2 . 278 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les pierres: celle que j’avois expofée au rayon rouge ne rendoit qu'une lu- _ mière foible, & quant à la couleur, fort reffemblante à celle qui eft mê- langée de vert & de bleu; la pierre au contraire fur laquelle réfléchifloie un rayoh bleu, donnoit une lumière beaucoup plus vive, de couleur d'or % de charbon à demi-enflammé, femblable enfin à l'éclat qui ré- fulte du jaune & du rouge mariés enlemble. Jai fouvent répété certe expérience devant beaucoup de perfonnés , entr'autres devant le célèbre Nag:lius, Directeur de la Faculté de Philofophie , que je cite ici par hon- neur ; honime non feulement très-profond dans toutes les parties de la Philofophie , mais même qui y a fair des découvertes importartes Il aété témoin de cette expérience & de beaucoup d’autres ; le réfultat en a tou- jours été le même. Le jour étoit alors dent oi Ja pluie qui éroit tom- bée la nuit précédente, avoit purgé l'air de la plus grande pattie de fes vapeurs, Expérience V. J'ai expofé au même rayon de lumière le diamant dont j'ai parlé plus haut; foir gt füt frappé du rayon bleu ou rouge , je ny ai apperçu aucune trace lumineule, Appareil. Perfuadé que l’un & l’autre rayons fe difperfoient trop pour avoir la force néceffaire, je crus que mon expérience pourroit réuflir, fi, à l'aide de la lentille, je raflemblois les rayons rouges & les bleus dans le même foyer, & que j'y plaçafle le diamant J’ai donc fait faire uné caifle attachée à une forte poignée, & qui, portée fur un pied creux, pouvoit s'élever & s’abaifler, & être placée à volonté, au moyen d'une vis, À [a partie antéricuré de la caifle étoit une ouverture longue de 6 doigts, fur 2 + de large, Sur la partie extérieure , on avoit appliqué une planche, qui jouoit dans une coulifle, & qu'une vis fxoit à volonté: la lentille éroit atrachée au milieu dela planche; elle avoir 2 doigrs de dia- mètre; fon foyer étoit de 6: Pour diriger commodément fur les phof- phores les rayons raffemb'és au moyen de la lentille, je plaçai derrière un fupport mobile , auquel on pouvoit attacher des phofphores de rous les genres, les élever & les baïffer, les éloigner ou les rapprocher du foyer de la lentille. Expérience VI, J'avois placé le diamant, l'efpace de quelques mint- tes, dans le foyer des rayons touges; il ne rendit &ucune lumière que lon pût apperævoir dans l’obfcurité. Celui que je mis enfuite dans le fover des rayons bleus’, rendir, l'efpace de cinq minutes, une lumière très agréa- ble d’une couleur de blanc jaunâtre. Comme j'avois fait ces expériences dans un temps qui n'étoir pas fort beau, je n’apportai d'autre change- ment à l'appareil , que de fubftituer à l'ouverture de 2 lignes, par la- quelle la lumière tomboit fur le prifime, une autre de 6 ou 7 lignes. Quoique ces expériences paruflènt démontrer évidemment que la [u- mière qui tombe fur le phofphore étoit différente de celle qu'ils reflé- # + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 377 chiffent ; je crus néanmoins devoir répéter une autre expérience de Zanoti, par laquelle , ayant confidéré le phofphore au travers, d'un prifme, il n'avoir apperçu aucun changement, ni dans la dimenfion, ni dans la cous leur. Expérience VII. J'ai confidéré , au travers d'un prifme du même cryf tal d'Angleterre , une pierre de Bologne & un diamart, qui, rouc ré« cemment frappés de rayons bleus, rendoient encore une lumière écla- tante; &, ce que Zanoti n'avoit point obfervé, je remarquai dans la ER de Bologne, que l'image paroifloit s’'agrandir & avoir une cou- eur particulière. J'ai cru y diftinguer du rouge & du jaune, non pas ces pendant aflez clairement pour n'avoir aucun doute. Bien loin de diftin- guer le changement de figure & de’couleur dans le diamant, à peine pod- voit-on l'appercevoir lui-même. 1 Il m'étoit venu dans l’efprit de varier @ette expérience. En effet, me difois-je à moi-même , fi le phofphore rend une lumière autre que celle dont il eft frâppé, alors recevant, au moyen du prifme, les rayons bleus, ces mêmes rayons que réfléchit le phofphore, fe diftingueroient de ceux qui lui font propres. Expérience VIII. J'ai reçu, avec le prifme, un rayon de lumière qui pafloit au travers d'une ouverture plus petite; & ayant eflayé, autant que je l'ai pu, par linterpolition des tables noires, & fur-tout d’un dia- phragme , d'éloigner de la lentille tous les rayons hétérogènes, j'ai pré- fenté au foyer de la lentille une petite feuille de papier blanc, que j'ai exa- minée au travers du prifme, lorfque ce foyer étoïifdevenu celui des rayons bleus. Je dois avouer ici ingénument que, malgré tous mes foins, je n'ai jamais pu obtenir un point lumineux, auquel la couleur bleue feule donnât de l'éclat: on appercevoit toujours enfemble, quoique très-foible- ment, quelques rayons rouges , jaunes, verts avec les bleus. Cependant , comime le bleu étoir pour moi la couleur la plus intéreflante , cette fépa- ration imparfaite de lumières ne me paroifloit pas contrarier abfolument mon deflein. Je mis en conféquence fur le foyer des rayons bleus du phofphore de Bologne , & jewemarquai que l’intenfité du rouge & du jaune fur-tout que rendoient les rayons échappés du phofphore , avoit prodigieufement augmenté pendant je temps de l'obfervation. Lorfqu’en- fuice, mon œil & le prifme toujours à la même place, je fis couvrir l’ou- verture d'une étoff? noire , les ragons bleus difparurent rout-à-fait: on diftin- guoit clairement les rouges & les jaunes q®@é rendoit le phofphore, Cette expérience prouvoit donc évidemment que, dans le cas où le phofphore toit placé dans les rayons bleus , le rouge & le jaune éroisnt des cou- leurs dominantes. J'avois auffi laiflé tomber le foyer des rayons rouges fur Le phofphore ; l'ouverture bouchée, on n’appercevoit au travers du prifme aucunetraitde lumière dans le phofphore , fans doure parce que cette lumière, qui de blanche devenoit verte , repouffée par l’action des rayons rouges qui tomboient deflus, étoit fi foible , que linterpolition du 278 “OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, prifme Ja faifoit entièrement difparoître. J'ai répété la même expérience fur le diamant, Pendant qu'il étoit frappé par les rayons bleus, le jaune fur-tout m'a paru, au travers du prifme , prendre de l'intenfiré. Lorfque j'eus fait couvrir d’une étoffe noire l'ouverture & tout l'appareil au travers de laquelle la lumière pénétroit , le jaune de ce diamant, confidéré au tra- vers d'un prifme, m'a paru alors de ce genre de couleur ; qui, dans un fpectre coloré , touche immédiatement le vert. L Après avoir rendu compte des expériences de Zanoti, Prieftley en cite d'autres abfolument contraires , faites par le P. Beccaria, célèbre Philofo- phe de Turin. Comme l'original n’eft point fous ma main, je copierai les paroles de Prieftley. « Tout récemment le P. Beccaria a démontré à Turin que des mor- » Ceaux de phofphore artificiel, beaucoup plus gros que la pierre de Bo- » Jogne, mis dans des tubes oùfla lumière pénétreroit au travers de verres » colorés , ne rendroient pasune lumière autre que celle qui s’étoit intro- » duite dans ces tubes par les verres; qu'il arrivoit alors#que le phof- ». phore étoit frappé beaucoup plus fortement que par l'image réfléchie du » foleil. Cette obfervation prouve la vérité de l'opinion où l’on eft ,que le »_ phofphore rend dans l’obfcurité la même lumière dont il s'étoit imprégné » auparavant», Comme, dans cette expérience de Beccaria , il eft queftion de tout autre chofe que du phofphore de Bologne, & qui n'a aucun trait à mon fujet, je continue à parler de la phofphorefcence des diamans; & quant aux phénomènes que la foibleffe de la lumière empéche d'y apper- cevoir , je prétends qu'offidoit les y fuppofer , par l’analogie qui exifte entre la pierre de Bologne & le diamant. J'en excepte feulement l'in- tenfité de la lümière: aufli ne m'arrêterois-je pas au phofphore de Becca- tia, qui eft, comme on le voit, d'une autre efpèce , fi cet homme cé- lèbre ne me paroifloit en conclure, que tous les phofphores en général ne rendoient point d'autre lumière que celle qu'ils ont reçue ; & voilà pour- quoi j'ai répété les expériences de Beccaria , non fur fon phofphore, mais fur celui de Bologne. Appareil. J'avois un verre d’un rouge foncé, un jaune, un vert, un bleu & un violet. Après avoir fait réfléchir, par le moyen d’un miroir, un rayon de foleil dans une chambre obfcure , j'ai placé ce verre à l'orifice d’un tube , d’où fortoit la lumière. Comme ils avoient plus ou moins de diaphanéité , j'ai pris les deux morceaux les plus diaphanes, afin que tout fût égal dans lexpérience que j'allois tenter fur l'intenfité de la lumière reçue au travers. Expérience IX. La lumière qui pañloit à travers des verres de couleur violette & bleue, donna au phofphore une lumière d’or fort reffemblante à la couleur d’un charbon enflammé, Au travers d’un verre rouge , vert & jaune, la couleur parut pâle, d’un blanc tirant fur le vert, moins claire au travers d’un vert rouge & jaune, qu’au travers de celui qui étoit vert, Au milieu de cet océan de lumière , le diamant ne rendit aucun SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 279 éclat dans l’'obfeurité. M. Defaie cite fur les diamans une expérience fem blable , dans laquelle il n’apperçut rien, quel que füclerayon qui tombâe fur les diamans au travers des verres colorés. Celui qu'ils donnoient étoic toujours blanchätre. Sans doute que M. Defaie avoit des verres plus dia- phanes que les miens. Je dirai au refte, avec tout le refpect qui eft dû à M. Defaie & au P. Beccaria , que je n'ai jamais approuvé leur manière de faire cette expérience. Jamais les verres ne font fi imprégnés d’une feule couleur , qu’ils ne tranfmettenc pas des rayons d’autres couleurs en aflez grande “anis Un rayon qui traverfe un verre d'une couleur foncée, eft trop foible pour donner de l'éclat aux phofphores. Qu'on reçoive, au moyen du prifme , le même rayon qui traverfe un verre coloré un peu plus diaphane , il rend toutes les couleurs fur le fpectre , telles que peu importe qu'on examine Les phofphores , foit lorfque le rayon direct eft un peu plus foible , foit lorfque ce même rayon pafle au travers de verres co- lorés. Peut-on d’ailleurs répéter ces expériences avec une attention fufi- fante ? En effet, qui a décrit lefpèce de couleur , le degré de diaphanéité de manière à pouvoir diftinguer d’un autre un verre qui lui eft abfolument femblable, & s'en fervir pour l'expérience? Qui niera,, par exemple , que l'interpofition du verre jaune exclut une quantité de rayons bleus aflez fufifante, pour ne pas tirer du phofphore cette lumière d’or que produit dans le fpeétre de couleur la rencontre des rayons bleus ? Ce qui doit ache- ver de démontrer la faufleté de ces expériences , c’eft qu'au moins les ierres de Bologne , confervées long-temps auparavant dans l’obfcurité, Pts à peine par la chaleur: expofées à la lumière du jour, elles don- nent un éclat plus foible que lorfqu'elles ont été expofées peu de temps auparavant à lalumière du foleil. Si elles ne rendent effectigement que la lumière qu’elles viennent de pomper, peu importeroit certainement combien de temps elles feroient demeurées auparavant dans l’obfcu- rité. : Voici le réfultat de mes expériences à ce fujet ; expériences telles , que je crois n'avoir fait que fuivre dans cette occañon la voie de la Nature, dont elles me fembloient pour ainfi dire être les organes. Le diamant a ceci de commun avec le phofphore de Bologne , qu'il brille dans le vuide, que la chaleur & même le feu électrique lui ES nent de l'éclat ; &-qu’enfin , expofé quelque temps à une lumière de cou- leur bleue, raffemblée au moyen de la lentille, il rend, dans l'obfcurité, l'éclat le plus brillant, La plus grande différence qui exifte entreux , c’eft que la pierre de Bologne donne une lumière de couleur d'or femblable à celle d’un charbon enflammé; celle du diamant au contraire eft d’un blanc tirant fur le jaune. Or, cette différeece démontre que le diamant n'abforbe pas les rayons rouges , & que’ la rencontre des rayons bleus ne les lui fait pas perdre. Il ne faut pas conclure de-là qu'il n'en abforbe & qu'il n’en renvoie pas d’autres. Une fecorfde différence qui fe trouve entre le diamant & la pierre de Bologne, c’eft que le diamant, expofé à une :80 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lumière rouge ou jaune, ne brille pas, foit que cette lumière frappe fe diamant, à l'aide d’un fpectre de couleur, foit que paflant au travers de verres colorés, elle fe réuniffe dans le foyer de la lentille. Un rayon bleu he fait rendre aucun éclat au diamant, à moins que , raflemblé par la lentille, il ne tombe fur lui en très-grande quantité. Cette feconde diffé- rence qui fe rencontre entre le diamant & la pierre de Bologne , ne prouve rien autre chofe, finon que les mêmes caufes produifent les mêmes effets fur l'intenfité de la lumière beaucoup moindre dans le dia- mant que dans la pierre de Bologne. Ce qu'il y a de fur , c’eft que dans les jours nébuleux , où la lumière du foleil eft auf plus foible , les effets de l’intenfité de la lumière font les mêmes fur le diamant que fur le phof- hore de Bologne. Ajoutons à cela , que les mêmes effets prouvent non- {eulement l'identité des caufes de la phofphorefcence dans le diamant & dansla pierre de Bologne, mais, ce qui eft plus effentiel encore, qu’ils démon- trent que la lumière qui combe fur le diamant eft différente de celle qu'il rend dans l’obfcurité, Les chofes étant ainfi , pour démontrer la caufe de la phofphorefcence du diamant, je me fervirai des mêmes expreflions qu'employoit autrefois mon Profgffeur pour foutenir ‘on opinion fur l'é- clat de la pierre de Bologne, prop. 4, fol. 168. « Confdérant que le >» phofphore rendoit des rayons äutres que ceux qu'il recevoit , quel- » qu'effort que je file pour imaginer le contraire, j'en revenois toujours » à croire qu'il y avoit des rapporïts différens entre tels & tels corps & Les » rayons hétérogènes de la lumière; que les uns avoient plus d'afinité >» avec les rayons rouges, les autres avec les rayons bleus ; que ceux qui » avoient plus de rapport aŸec les rayons rouges, À l'approche de ces » derniers, perdoient les rayons bleus & ceux des autrés couleurs ; que » ceux au contraire qui fe rapprochoient davantage des rayons bleus, » renvoyoient les rayons rouges & les autres ; & que le phofphore ren- » fermant une plus grande quantité de particules plus rapprochées des » rayons bleus que des rouges , la chüte des rayons bleus devoit lui faire ° reñdre une lumière beaucoup plus vive que celle des rayons rouges. » Lorfque nous voyons une efpèce d'air ou d'acide ‘chaîlé d’un autre » acide, nous difons que celui des deux qui a la ‘plus forte affinité a >» chaffé l’autre. Pourquoi raifonnerions:nous autrement fur les différens » rayons de lumière hétérogènes entr'eux » ? Après avoir employé tous les moyens pofñibles pourconnoître les caufes de la phofphorefcence , il mereftoir encore à favoir quels étcient les diamans les plus propres à la phofphorefcence, M. Defaie a fair à ce fujet les plus belles expériences. Digne continuateur de Pline, de Solin , d’Elian & des autres modernes qui ont écrit fur la phofphorefcence des différentes pierres, à leurs expériences il en ajouta de nouvelles , qui lui ont fait découvrir ‘enfin que non-feulement le frottement ou la chaleur, mais même la lu- mière Fe foleil , phofphorifoient les diamans : véritéinconnue aux Anciens. 1 p .: Mais # Li SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 28x Mais ae tentative qu'ait faite ce grand homme pour connoître la caufe de la phofphorefcence de certains diamans qui fe phofphorifent plutôt que d’autres , jamais le fuccès n’a couronné fes efforts. Au moment ‘où l’on y penfe le‘moins, fouvent le hafard fait trouver ce qui avoit échappé aux recherches les plus exactes, Auñi ne défefpérois- je pas, en fuivant la route que M. Defaie avoir tracée, & en répétant fes expériences , de rencontrer ce qui s’étoit fouftrait fi conftamment à fon œil obfervateur. Dans l'expérience que j'ai faire à ce fujet, je me fuis un peu écarté du procédé de M. Defaie. Je m'étois.apperçu que les diamans fe phof- phorifoient beaucoup plutôt dans le foyer des rayons bleus qu'en plein jour , fur tout lorfque ces mêmes rayons paflant en plus grande quantité au travers d’une ouverture de 6 lignes, tomboient fur le prifme. Certe obfervation me détermina à faire ufage deM'appareil ci-deflus. J'expofai en conféquence tous les diamans que je Voulois examiner à la lumière du foleil , & je les plaçai outre cela quelque temps fur le foyer des rayons bleus ; la plupart ne reçurent du foleil que très-peu ou point de phof- phorefcence : celle au contraire que leur donna le foyer des rayons bleus, étoit très-brillante. Expérience X. Un diamant rouge , oblong , du poids de 66 grains; un autre ovale, rofe, de 24 grains; un troifième, de couleur d'or, de 36 grains; un quatrième, d'un jaune foncé , de 17 grains; & un cirquième enfin de 14 grains, abfolument diaphanes , ne rendoient aucun éclat, quoiqu'ils euffent demeuré l’efpace de plufieurs minutes fur le foyer des rayons bleus. Un diamant de 40 grains , d’une diaphanéité parfaite , ne donna d'a- bord aucune étincelle de lumière. Cependant, confervé plus long-temps dans le foyer des rayons bleus , il parut briller. J'en conciuois que plus les diamans ont de poids , plus ils ont befoin d’être long - temps frappés de la lumière pour devenir éclatans. Enfin , j'obfervai que , fur une quantité aflez confidérable de diamans lus petits, & qui éroient diaphanes , quelques-uns rouges, jaunes , verts, ÉL & noirs, fe phofphorifoient, tandis que d’autres de la même cou- leur & de la même groffeur ne pouvoient le faire. Je m’apperçus aufli que tous ceux qui étoient abfolument jaunes, & dont M. Defaie en avoit vu quatre éents fe phofphorifer, n’avoient pas tous donné de l'éclat dans l'obfcurité. J'en concluois qu'il étoit inutile de chercher dans la couleur les caufes dela phofphorefcence. J'imaginai que peut-être elle dépendoit du lieu d'où nous vient le dia- mant, ( On nous les apporte des Indes orientales & occidentales). Quoi- que les uns & les autres préfentent des pyramides quadrangulaires, ce- pendant , lorfqu'ils font encore bruts, leur forme eft abfolument difié- rente , & il eft aifé de connoître alors le lieu d’où ils fortenr. J'en pris Tome XX, Par, II, 1782. OCTOBRE. Nn 282 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, donc quatre encore bruts, dont deux venoient des Indes occidentales , & les deux autres des Indes orientales, chacun du poids d'environ 6 grains. Je Les examinai ; aucun ne donna le moindre trait de lumière dans l'obf- curité, quoiqu'on les eût placés fur le foyer des rayons bleus , après les avoir long-temps expofés au foleil. Voyant que ni la couleur, ni l’origine du diamant, n’influoïent fur la caufe de la phofphorefcence, je crus,comme M.Defaie, que l’art pouvoit Ja lui donner, ainfi qu'à la pierre de Bologne. Il étoit aifé d'imaginer que le feu , dans cette opération , étroit l'agent principal. Mon père avoit aflifté autrefois , autant comme collaborateur, que comme témoin , àdes expé- riences que faifoit en grand un célèbre Amateur de Phyfique. Son ue étoit de découvrir les moyens de fondre les diamans; voici les expé- riences, Il fie chauffer, pendant hufjours, au plus grand feu , un fourneau de terre de Hefle , conftruic en forme de pyramide: on plaça au milieu ur globe de cuivre, qui renfermoit 100 karats de diamans, Lorfqu’on leut Ôté & ouvert, à peine apperçut-on Le moindre veftige des diamans qui y avoient été placés; ils s’étoient tous évaporés (1). Inftruic par cette expérience & par les avis de mon père à employer un feu moins violent pour la fonte É diamans , j'en pris trois, que je laif- fai fur le feu jufqu'au moment où leur furface commençoit à former une croûte brute ; je les examinai enfuite : ils ne donnèrent pas plus de phofpho- refcence qu'auparavant. Pareille chofe étoit arrivée autrefois à M. Defaie, Je crus que cette non-phofphorefcence pouvoit venir de ce que les par- ties de diamant en état d’en donner s’étoient évaporées au feu , quoique je ne l'eufle pas beaucoup animé. Je mis en conféquence un diamant du poids de 6 grains dans un vafe de terre de Cologne, rempli de pouflière de charbon ; je bouchai avec de l'argile toutes les ouvertures par où l'air pouvoit pénétrer; j’allumai un feu capable de faire rougir le vafe en une demi-heure. J'avois appris de mon père, que c’étoit le moyen qu'em- ployoient les Orfévres pour donner aux taches qui nuïfent à l'éclat du dia- mant une couleur noire qui ne leur fait aucun tort. Je retirai le diamant du vafe, & l'ayant tranfporté dans une chambre obfcure, il ne rendit pas plus de lumière qu'auparavant. Cette expérience , répétée fur trois diamans différens, trompa autant de fois mon attente, À force d’y réfléchir, je crusenfin que , dans'les dia- mans comme dans les autres phofphores , la phofphorefcence dépendoit ron-feulement du feu, mais encore de l’intervention des fels. Je deman- dai donc-à mon père fi les fels entroient quelquefois dans la fonte des dia- mans , & je le priai, lorfque l'occafñon s’en préfenteroit , d’en faire avant moi l'expérience. ; (:) Voyez dans ce Recueil les travaux des différens Savans für cet objet. Introd.; tom. I, pag. 480;tom. II, pag. 108, 112, 197, 401 , 408, 4473 1773, tom.Ï, Pag. 17 ; 1775, tom. VI, pag. 410. # u ee +” SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 283; Appareil. Il avoit pris un gros morceau de charbon, qu'il fit rougir pou: l'empêcher de fe fondre pendant l’opération : il y pratiqua un trou « de la grandeur d’une noifette, En lequel il mit du borax. La Aamme d'une de ces lampes dont on fe fert à cet ufage, foufflée fur le borax, le fit d'abord bouillonner ; mais bientôt après , il devint aufli limpide que le cryftal le plus pur. Expérience X I. Il jerta alors dans le borax un diamant de 6 grains, ge l'on avoit jufqu'à ce moment eflayé en vain de faire phofphorifer. On rh pendant plus d’un quait-d'heure , la Aamme fur le diamant: on ne cefla de fouffler que lorfque le borax , évaporé en grande partie , ne cou- vroit plus le diamant. Os retira alors le diamant, on le laïiffa refroidir ; & après l'avoir placé pendant quelque témps fur le foyer des rayons bleus, il donna dans l’obfcurité la phofphorefcence la plus brillante, La même expérience, répétée {ur deux autres diamans avec le mème fuccès, me convainquit que mes foupçons n’étoient point deftitués de fondement. Expérience XII Après avoir extrait du fel de diamant, au moyen d'un feu très-ardent, j'ai pris de ce fel au lieu de borax , fans rien chan- ger au refte de l'appareil; j'en ai retiré le diamant , & l’ayant expofé à la lumière du foleil ou au foyer des rayons bleus, il n’a donné aucuns fignes de phofphorefcence. Ces expériences me faifoient prefque foupçonner que l’art feul donnoit Ja phofphorefcence aux diamans , & qu’elle dépendoit de l’action du feu & des felsen général, mais non pas de tous indiftinétement. Si d'un côté les expériences rapportées plus haut me confirmoient dans cette idée, de l’autre cependant la quantité prodigieufe de diamans qui fe phofpho- rifent me la rendoit problématique. J'avois en conféquence réfolu d'en faire l'effai fur les diamans encore bruts, que mon père avoit entre les mains. Je voulois voir fi, n'ayant point été travaillés , ils n'avoient pas une phofphorefcence naturelle. Les deux premières que je foumis à cette expérience , donnèrent un phofhore très-brillant: [1 étoit donc évident que parmi les diamans auxquels l’art n'avoit apporté aucun changement, les uns donnoient de la lumière , & les autrés ne rendoient aucun éclar, J'en concluois enfin que la Nature accordoit à plufieurs une propriété que j'étois parvenu à donner à quelques-uns; que les parties les plus fub- tiles de fel, placées dans l’intérieur du diamant au moment où il coni- mence à fe former, & la chaleur continuelle des climats qui les voient naî- tre, donnoient à plufieurs d’entr'eux une force fufffante pour pomper la lu- mière & la réfléchir enfuite, J'étois néanmoins afligé de ce que l'igno- rance où l'on elt encore de la nature du borax, ne me permit pas de pouffer plus loin mes recherches , & de déterminer l’efpèce de fel qui s'y trouve comme dans les autres phofphores, & dont l’action eft effentielle pour la phofphorefcence. ' Tome XX, Part, 11,1782. OCTOBRE. Nn2 284 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, MÉMOIRE Sur la Sangfue Médicinale, par M. DU RONDEAU. L A fangfue eft un infeéte aquatique , amphibie au befoin, fans pieds, fans nageoires proprement dites, & fans arêtes. Elle a la figure d’un gros ver, marquetée de points & de lignes. Celle dont on fe fert dans cette Ville eft longue de 4 à $ pouces lorfqu’elle s'é- tend ; fa peau eft compofée d’un tifflu membraneux très-fort, mais très- fouple : la furface de ce tiflu eft life & onctueufe, Comme notre fangfue ne fe trouve décrite ni par Linnæus, ni par au- cun autre Auteur, j'ai cru devoir la faire connoïtre par fes caracteres les plus diftinétifs, Son dos eft partagé parallèlement en trois parties à-peu- près égales , par quatre lignes longitudinales jaunes fur un fond verd obf cut; le milieu des parties latérales du dos eft occupé par une efpèce de pañlement, compolé de petits grains noirs , placés à la file. & tenant les uns aux autres par un ornement jaune en forme de chaîne. Le bord fupé- rieur de la ligne latérale externe eft également orné d’une décoration fem- blable. Cette décoration eft un peu flottante & faillante; lorfque le petit animal nage , elle lui fert de nageoire : le véntre eft marqueté de jaune fur un fond bleu turquin ; toute la peau eft onctueufe & graffe; elle eft inti- mément collée fur une efpèce de lard fort épaifle. La charpente de la fangfue confifte en cent cinq anneaux cartilagineux, rangés fous fa peau depuis l'extrémité fupérieure jufqu'à l’inférieure. Ces anneaux ne font pas placés tous à la même diftance les uns des autres, Ceux du milieu Le corps font beaucoup plus éloignés que ceux qui ap- prochent des extrémités : ceux-ci fe reflerrent infenfiblement du deffous , pour. terminer les extrémités , la fupérieure en bec de flûte & l'inférieure en cône tronqué obliquement. Le diamètre des anneaux diminue à propor- tion de leur éloignement du milieu du corps; de forte que ceux des ex- trémités ont à-peu-près un tiers de diamètre de moins que ceux du milieu. Ces anneaux ne font pas d'une feule pièce, comme ils le paroiflent au premier coup d'œil; ils font compofés de plufieurs pièces de rapport, adaptées les unes fur les autres, comme la chaîne d’une montre. Sans cette difpof ion , le corps de l'infeéte n’auroit pas été fufceptible du raccourcif- fement ni de l’alongement qu'il fe donne à volonté. L’interftice des anneaux eft occupé par des cloifons mufçulaires très-épaifles, au moyen defquelles il s’alonge, fe contracte, fe tourne, fe roule ; & l'agilité de he D SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 285$ la fangfue doit paroître furprenante à tous ceux qui ne l'ont point obfervée de près; mais la furprife fièrs ceffer, dès que l'on fair attention à l'irri- tabilité dont elle eft douée, & à l’épaifleur de la mafle mufculaire dont elle eft enveloppée. L'extrémité fupérieure eft prefque pointue ; elle eft un peu courbée de haut en bas , pour couvrir la bouche , qui n'eft pas triangulaire comme quelques Auteurs le difent , mais ovale lorfque l'animal veut faifir quel- que chofe , & quadrangulaire lorfque la bouche eft en repos. Les lèvres font mollafles & Aottantes ; la direction de leurs fibres exter- nes eft tranfverfale, La lèvre fupérieure eft légèrement repliée de bas en haut; l’inférieure au contraire eft recourbée de dehors en dedans. La lèvre fupérieure eft fendue par le milieu; cette fente fait un des quatre angles de la bouche. La commiflure des lèvres fournit les angles latéraux ; la lèvre inférieure fe replie un peu par le milieu, & forme le quatrième angle, ou l'angle inférieur. Cer angle eft obtus; mais le fupé- rieur , ainfi que les latéraux , font aflez aigus. Le palais eft voûté de devant en arrière ; il eft terminé poftérieure- ment par trois mamelons charnus, dont les deux latéraux font placés au fond de la bouche, & Le troifième derrière la lèvre inférieure, M. Mo- rand le père attribue à ces mamelons les fonctions de langue, ce qui eft indubitable : mais il a eu tort de n’en faire qu'un feul; car ils font très- diftinétement féparés les uns des autres par une ouverture triangulaire, dont les angles font occupés par les dents, Les dents ne font pas, comme plufieurs Auteurs fe font plu à le ré- péter, AL & perçantes; elles font au coftraire arrondies, comme le couteau dont les Cordonniers fe fervent pour couper les empeignes : elles font fort blanches & cartilagineufes ; elles font Mobiles par leur bafe , au moyen d’un ligament tendineux que l'animal a la faculté de faire mouvoir au befoin; elles font même fituées de façon quil ne peut s'en fervir qu'en pinçant. Je fais que ce fentiment n’eft pas conforme à ce que plufieurs Auteurs ont avancé fur la merfure de la fangfue ; ils en parlent tous comme fi les dents étoient piquantes, & comme fi elle s’en fervoit en les enfon- çant perpendiculairement daus la peau: mais leur figure plate, leur cran- chant arrondi , leur direction oblique, la mobilité de leur bafe, tout fait voir qu’elle les enfonce obliquement dans la peau, après lavoir fou- levée par l'attraction où fucement qu’elle occafionne au moyen de fes “lèvres, dort elle fe fert en guife de venroufe. D'abord que la peau eft percée , la fangfue retire fes dents au fond des angles des mamelons. Ceci doit raflurer les perfonnes qui craignent qu'elle ne les laiffe dans la plaie. Cette crainte eft très-mal fondée, 1°. parce que la fangfue ne pourroit pas fucer , ayant les dents dans la plaie; 2°. parce qu’elles font mobiles; & 3° parce qu'il y a des fangfues venimeufes qui peuvent caufer 286 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'infammation & la fuppuration même, fans recourir aux dents reftées | dans les plaies, pour trouver la caufe de ces accidens, Les mamelons charnus font d’une confiftance fpongieufe , mais élaftique cependant ; de forte que chaque lobe forme un mamelon particulier, qui déborde de beaucoup les dents qui ÿ font contiguës. Le fond de l'ouverture des trois mamelons eft garnie d’une foupape, qui empêche le retour de La nourriture de l'eftomac vers la bouche. Cette foupape, qui fait les fonctions de pharynx , aboutit à un canal membraneux qui tient lieu d’œfophage, & qui conduit à l’eftomac. L’efto- mac eft une poche mufculeufe très-ample ; elle occupe tout l'efpace qu'il y a entre la partie inférieure de l’œfophage & le' commencement des intel- tins. Le commencement du canal inteftinal répond à-peu-près aux vingt- deuxième & vingt-troifième anneaux; il longe les deux côtes de l'infecte jufqu’à l'anus. Il forme dans fon trajet douze poches de part & d'autre : ces poches alongent beaucoup ce canal ; il eft garni intérieurement d’un nombre infini de valvules , qui empêchent le retour de la nourriture vers l'eftomac. Enfin, ce conduit occupe les + de la longueur du corps de l’a- aimal; il fe termine inférieurement par un anneau mufculeux qui lui fert de fphinéter. La partie du fphinéter eft garnie d’une manchette mufcu- leufe, qu'il épanouit & replie à volonté. M. Morand père a eu tort de refufer à la fangfue un anus; la feule infpection fufit pour prouver le con- traire, Les Auteurs qui ont parlé de la fangfue, ont fort bien :obfervé see eft hermaphrodite ; mais je ne penfe pas qu'aucun ait donné la efcription des parties génitales. Ce filence a piqué ma curiofité , & je n’ai point de regret des peines que je me fuis données pour la fatisfaire; car ce petit animala, par rapport à la génération, un plus grand appareil d'organes qu'une infinité d’autres plus connus ou plus étudiés. La matrice de la fangfue eft placée immédiatement au-deffous de l’efto- mac, à-peu-près vis-à-vis le vingt-deuxième anneau ; elle a la forme d’une poire, de façon que l’on y diftingue le fond & le col; le cel aboutit à un canal membraneux , qui s'ouvre en dehors entre le vingt-quatrième & le vingt-cinquième anneau. Le corps, ainfi que le col , font Née fubftance charnue & très-folide; ils ont enfemble à-peu-près la même longueur que le canal membraneux. La fituation de ce vifcère eft parallèle au corps; le fond vers latète, & le col vers la queue. Les vélicules feminales font logées de chaque côté de la matrice , entre fon col & le canal membraneux ; elles font de forme oblongue, mais elles font arrondies par les extrémités & applaties par les faces. Leur volume égale au moins celui de la matrice; elles font ARS au corps par leur grande longueur: chaque véficule eftun affem- lage de grains cellulaires , remplis d’une fubftance médullaire. Ces cellu- les , vuesà la loupe , reffemblent aux anfractuofités de la fubftance corti- cale du cerveau, . 6 SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 287 Îl naît de la partie inférieure du bord interne de chaque véficule femi- - pale un petit conduit, auquel on pourroit donner le nom de conduit fper- matique; ce conduit s'ouvre dans le même canal membraneux qui com- munique avec la matrice. Ce canal fe prolonge hors du corps des petites fangfues, de la longueur de deux à trois lignes ; & comme ce prolonge- ment ne fe montre point chez les grandes, je foupçonne que c'eft une portion du cordon ombilical. L'ouverture des tégumens qui donnent pallage à ce canal , et munie extérieurement d’up anneau que la peau forme autour de l'ouverture. Le cœur eft fitué à la diftance d’une demi-ligne au-deflous de cet an- neau ; c'eft une poche charnue, de figure conique , mais irrégulière, Ces irrégularités font peut-être les féparations d'autant de ventricules qui com- muniquent enfemble ; car tel eft le cœur de la tortue & de plufieurs autres animaux , qui font obligés, fur-tout pendant l'hiver , de pafler un temps confidérable fans nourriture. On trouve, à la bafe du cœur, un appendice de même nature que le vifcère. Cet appendice, faiten forme de capuchon, eft fans doute deftiné au même ufage que les oreillettes du cœur de l’homme, Le cœur eft attaché au dos, au moyen de gros vaifleaux ; mais fa pointe eft libre & Aottante vers le ventre. La fangfue jouit de deux mouvemens progreffifs en directions contraires: le premier a lieu lorfqu'après avoir fixéfa bouche fur quelque corps folide, elle attire Le refte de fon individu vers cette extrémité ; veut-elle fe tranfpor- ter en fens contraire , elle fe colle par la queue, & contracte le refte de fon corps vers cette partie. Elle s'attache aux corps folides , au moyen d’un fuc glutineux & tenace, que fa bouche & fa queue fourniflent, Mais PRES ne préfente pas une furface aufi large que fa bouche, la nature lui a accordé une manchette membraneufe , qui fe contracte & s'épanouir à fa volonté. C’eft par cette manchette épanouie & enduite de colle, qu'elle s'attache fi promptement fur tout corps folide, & qu’en foulevant le milieu de la man. chette, elle produit cette même adhérence RUUEReR circulaire de cuir mouillé, appliquée fur une pierre polie. Chacun fait qu'en foulevant le centre de cette pièce au moyen d'une ficelle qui le traverfe, l'adhérence de la circonférence en devient plus forte. Le même effet a lieu chez notre infeéte: mais ces deux mouvemens progreffifs ne font en fon pouvoir que lorfqu'il trouve des corps folides à fa portée; car lorfqu'il nage , il eft borné , ainfi que les autres animaux aquatiques, au feul mouvement d'en avant. Il a cependant ceci de particulier, c’eft qu'il nage toujours en ferpentant. Veut-il s’enfoncer ou aller au fond , il ferre fa manchette & l'efpèce de ruban qui fépare le dos du ventre; & fon corps s'enfonce perpendiculairement , comme sil y avoit un poids attaché à fa queue, - ‘ : T0 - 4 288 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La fangfue ne fe nourrit d'aucun aliment folide proprement dit , & les dents dont fa bouche eft armée ne lui fervent qua percer les corps dont elle veut tirer fa nourriture. Lorfqu'elle veut tirer fa nourriture d'un corps quelconque , elle commence par fixer fa queue ; elle arque enfuite fon ER de façon que fon ventre ne touche à rien ; après quoi elle porte fa bouche fur l'endroit qu'elle veut mettre à contribution. Ses lèvres y érant collées au moyen du fuc gluant, elle attire & foulève le milieu de la peau, comme fait la ventoufe , pour y enfoncer obliquement fes trois dents. D'abord que les ouvertures font faites, elle retire fes dents, pour fe mettre à pomper. Le corps de l'animal fait les fonétions de pompe & de pifton; la foupape du pifton eft le centre des mamelons charvus,, pla- cés au fond de la bouche. Le point fixe d'où part le mouvement de la pompe eft la queue ; c’eft de-là que contmence le mouvement alternatif, mouvement qui fe communique d'anneau en anneau , jufqu'à celui auquel font attachés les mamelons qui foutiennent la foupape. Certe foupape eft le commencement du canal par lequel la matière pompée eft tranfmile dans l'eftomac. Ce canal, ainfi que leftomac même , font munis & tapiflés de fibres circulaires très-fortes pour accé- lérer le paflage de la nourriture vers les inteftins; mais ceux-ci font d’un tiflu très-lâche, & très-peu réfiftant, Ils ne réfiftent apparemment à l'en- gorgement , qu'autant qu'ils ne font point farcis; en forte que ce petit animal eft doué de tout ce qu'il faut pour être farci de nourriture en fort peu de temps. C’eft un fait inconteftable que les fangfues vivent plufieurs mois fans nourriture apparente, parce que je ne doute aucunement que l’eau, même la plus pure , ne leur fournifle des infectes en aflez grande abon- dance pourles nourrir. Mais nonobftant que cette efpèce d’abftinence leur foit commune avec plufieurs autres animaux aquatiques, amphibies, terreftres , &c., je fuis fort éloigné de croire que la même caufe la fait fupporter à tous individus qui en font fufcepribles. Quant à [a fangfue, je ne doute aucunement qu'il n’y ait plus d'une raifon qui foit favorable a fon abftinence. Premièrement, la lenteur du mouvement périftaltique des inteftins ; fecondement, le grand nombre de valvules conniventes dont ils font gar- nis; & troifièmement, la folidité de l'anneau mufculeux qui termine le canal inférieurement. Les inteftins de cet infecte font d'un tiflu fimince & fi lâche, qu'il eft furprenant que le mouvement progreflif de la matière alimentaire puifle y avoir lieu. Les valvules conniventes fe découvrent manifeftement , fi l’on fouffle dans la bouche de l'animal au moyen d'un chalumeau; l'air infinué dans le canal partage ce conduit, d'une extré- mité à l’autre ,enune infinité de poches féparées lesunes des autres par les étranglemens intérieurs de fes valvules.. La folidité de l'anneau mufculeux qui termine le canal, comparée avec nd SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 289 avec la délicateffe des inteftins, prouve évidemment que rien ne peut s’é- Vacuer par cette voie, finon que l'anus ait été fortement agacé , agace- = Ment qui ne peut guère être occafionné que par l'âcreté que les matières excrémentitielles y contractent par la longueur du féjour qu'elles font obli- gées d'y faire avant d’être expulfées. L'analogie qu'il y a entre la fitua- tion, la, ftructure , la forme & la force de la matrice de la fangfue, & ces mêmes qualités dans celle de tous les animaux vivipares , doit nous convaincre que ce petit animal n’eft point ovipare, comme plufieurs Na- turaliftes l'ont cru. J’aurois deliré pouvoir confirmer ma propo- fiion par des preuves démonltratives: mais il ne m'a pas été pofible devle fuivre dans les myftérieux fecrets de fa génération ; premièrement, parce qu'il n’engendre point, lorfqu'il eft privé de fa liberté; & feconde- ment’, parce que , dans l’état de liberté même , il fe cache dans la fange, dès que le froid autumnal fe fait fentir, & que le foleil'cefle d’échauffer Matmofphère , d'où il ne fort qu'au premier beau jour du printemps, pour paroître immédiatement après, fuivi d’une nombreufe poftérité. Les peines que je me fuis données pour découvrir les yeux & l’ouie de cet infecte ont éte inutiles. Je n’oferois cependant pas en inférer qu'il ne jouit point de ces organes , puifqu'il donne au moindre bruit des marques d'ouie fi évidentes, qu'il n’eft pas pofible de lui refufer cette faculté, non plus que celle de voir; car il évite avec trop de foin les objets vifibles quelconques qui lui fontcontraïfes. » « F La fangfue n’a ni poumons, ni rien qui paroifle lui en tenir lieu, La diffec- tion prouve évidemment leMdéfaut de poumons. L'expérience fuivante ne décide*pas moins pour la privation de ces trachées dont jouiffent les vers de terre, les chenilles, &c. ,que l'huile fait périr. Si l’on plonge une fang- fue dans l'huile , elle s’y meut, monte & defcend , comme fi elle étoit dans fon élément, Si, au bout de huit jours , on la remet dans l’eau, elle y met bas une pellicule auli folide que la dépouille que la couleuvre a’ dé- ofée au printemps. Comme l'air paroît abfolument néceflaire à tous les êtres animés, j'ai voulu voir ce qui ‘arriverait à La fanÿfue dans le vuide, Ayant placé huit fandifftes dans un grand gobelet d’eau fous le récipient de la machine pneumatique , j'en ai pompé l'air de la manière ordinaire, & voici ce que j'ai obfervé : crois font forties de l’eau pendant que je pom- pois elles n’étoient cependant point incommodées; car elles néroient ni moins agiles, ni moins gonflées qu'avant que l'air für pompé. Des cinq autres , trois font montées à la furface de l’eau , & fe font attachées par la bouche au bord du gobeler. La partie du corps de ces trois dernières , ainfi que le corps entier des deux non-forties de l'eau , pendant que je pompois l'air , fe font couverts de bulles: les unes fembloient fortir de cer- tains points déterminés, & obfervoient une certaine régularité; les autres fortoieht fans ordre, & formoient des grouppes irréguliers. Après Tome XX, Part, II, 1782. OCTOBRE. Oo . 250 OBSERPATIONS SUR LA PHYSIQUE, avoir pompé tout l'air, je vis avec furprife que les fangfues qui étoient demeurées au fond du gobelet pendant que je pompois, fortoient de l'eau, & fe promenoient aufli tranquillement que fi elles euflent joui de l'air libre, tandis que celles qui s'étoient atrachées au récipient pendant l'extraction de l'air, rentroient dans l'eau ; de forte qu'aucune d'elles ne donna des marques de mal aife ou d'incommodité quelconque, pendant, Les huit jours que je les tins privées d’air fous le récipient. J'ai placé fous Le récipient un gobelet d’eau & quatre fangfues coupées tranfverfalement; & après avoir pompé l'air, j'ai remarqué que les par- ties répondantes à la tête font forties de l’eau, & qu'elles y font rentrées, comme fi elles n’euffent pas été privées de la moitié de leur individu ; mais les parties répondantes à la queue font reftées conftamment dans l'eau : il s'eft élevé des parties fupérieures, ainfi que des inférieures, la même quantité de bulles que dans l'expérience précédente , & ces bulles ont offert les mêmes révularités & irrégularités que les fangfues entières. Les quatre parties fupérieures fe font promenées fans cefle; elles font for- ties & rentrées dans l’eau comme les fangfues entières ; mais les extrémi- tés inférieures n’ont pas quitté Le fond du vafe pendant toute la huitaine que j’aidonnée à cette expérience. Les huit morceaux étoient encore pleins de vie, lorfqu'après la huitaine, je les ai retirés de deflous le réci- pient. Expérience III, Ba même expérience , faite avec quatre autres fangfues coupées longitudinalement, a fourni quelques différences. Premièrement, aucun des huit morceaux w’eft forti du gobelet ni avant, ni après avoir pompé l'air ; fecondement, ayant tiré, après huit jours, quatre morceaux du gobeler, & les ayant privés d'air, je remarquai que le cœur, la ma- trice & les véficules feminales, & quelques poches du canal'inteftinal donnoient des marques d'irritabilité , de gonflement & de mouvement bien évidentes; marques que je n'ai pas apperçues fur Les pièces reftées au fond du gobelet. Mais quelle conféquence fera t-il permis de tirer de ces obfervations Soutenir que la fangfue peut vivre fans air, cela paroîtra peut-être ridicule ; il n’eft pas moins vrai & inconteftable qu'elle peut s'en pafler très-long-temps, puifque j'en ai gardé un@vingt-trois jours fous la cloche, dont j'avois foif de pomper journellement le peu fd’air qui auroit pu y pafler entre le cuir & le récipient; & je crois qu’elle eft morte au bout de ce terme ou par maladie, ou parce que l’eau avoit perdu les qualités effentielles à fa confervation. Mais comment expliquer pour lors le gonflement furvenu aux vifcères reftés hors de l’eau? Dire que ces vif- cères ont laïflé échapper l'air qu'ils contenoient , parce qu'ils étoient pri- vés d’une partie de leur enveloppe, cela eft inconteftable & contraire à l'expérience journalière; car il eft connu de tout le monde que les fang- fues recherchent l'air chaud pendant l'hiver, & qu'elles fortent de l'eau chaque fois qu’on Les tranfporte , pendant cette faifon , d’un ‘endroit froid D SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 291 dans une place échauffée, Ceci paroît bien prouver que cet infecte aime Y'air, & même l'air chaud. Je crois donc que la fanglue admet par la bouche certaine quantité d'air , & que cet air fe mêle avec le fang , fans fubir d’autres. modifications que celles qui arrivent dans le-corps dès poiflons. On fait que les animaux aquatiques reçoivent l'air par la bouche avec l’eau , & qu'ils rendent l'eau par les ouies, mais qu'ils réfervent une portion d'air qui y eft contenue ; & puifque les poiffons vivent fans pou- moñs & fans trachées , il eft probable que la fangfue exifte de la même manière, avec cette différence cependant que le poiflon , privé d'air, refte au fond de l’eau fans pouvoir remonter, & que la fangfue, quoi. que privée d'air ,a la faculté de pouvoir remonter à volonté, parce que la faculté de nager , de plonger & de remonter, ne dépend pas dans celle-ci, comme dans le poiffon , d’une vellie remplie d'air; & comme cette vellie fe vuide dans lamachine pneumatique , il et évident he le poiffon dont la vellis eft privée d'air, doit demeurer au fond de l'eau, puifqu'il eft privé de la portion d'air qui, en augmentant fon volume, le rendoig refpectivement plus léger qu'un pareil volume d’eau. Expérience 1 V. Mais quoique la fangfue puifle vivre très-long-temps fans air & fans nourriture, il n'eft'pas en fon pouvoir de prendre de la nourritife dans le vuide : voici la preuve. J'en ai mis fous legécipient un petit vafe rempli de fang de poulet nouvellement recueilli , & quatre fanglues. D'abord elles fe font miles à fucer le fang. J'ai commencé à omper l'air, & elles ont läché prife dès qu’elles en ont été privées; j'y ai äiflé réhtrer l'air, & elles fe font d’abord jettées fur le fang, qu'elles onc abandonné de recheF, chaque fois que j'en ai tiré l'air. J'ai répété cette expérience plufieurs fois, & j'ai eu la fatisfaétion d’obferver conftam- ment qu'elles ont ceffé de fucer dès que la machine étoit vuide d'air, & ss contraire elles fe font jettées avidement fur la nourriture chaque ois que je l’y ai laiffé rentrer. .: Explication des Figures. Figure premiére. Cette figure repréfente la fanglue couchée fur le ventre: on y diftingue très-bien Les anneaux cartilagineux & les bandes longitudinales qui divilent la partie fupérieure du corp en trois portions à-peu-près égales. A. La tête. B. La manchette vue de profil, Figure IL, . La fangfue couchée fur le dos. A. Ouverture quadrangulaire de la bouche, B. La manchette épanouie. Tome XX, Part. II, 1782, OCTOBRE. Oo 2 A 292 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ù Figure TIT. . Les parties internes. . A. Les trois dents en forme de tranches prolongées hors de leur étui où mammelon. \ . B. L'urérus & fon col. €. Conduit urerin. D. D. Véficules feminales. E. E. Conduits fpermatiques. F. Conduit commun pour les fonctions des deux fexes. , G. Le cœur avec fon oreillette, H. L'anus. Les 24 poches, formées par les circonvolutions du canal inteftinaf, font is de façon qu'elles occupent tout l'efpace qu'il y a depuis la pointe du cœur, où finit l'eftomac, jufqu'à l'anus, Li UNE EM) OL TRE » ... Sur les changemens que les Chaux métalliques € leurs mélanges faits en Les combinant de deux à deux @ de trois à trois, éprouvent par l'aétion du feu ; par M. ACHARD. ÿ ? JL ES chaux des différens métaux éprouvent de la part du feu des al- térations très-différentes : il y en a qui fe vitrifient fort aifément ; d’autres exigent pour leur fufñion un feu très-confidérable; & enfin il y en a que le feu le plus fort des fourneaux ne peut mettre en fufon. L'on a des connoiffances affez certaines fur les changemens que le feu fait éprouver à chaque chaux métallique: mais l'on n'a pas encore fait des efforts fuivis pour découvrir de quelle manière ces chaux métalliques agiffent les unes fur les autres lorfqu'on les expofe au feu; recherche qui cependant doit intéreffer les Chymiftes, puifqu'elle eft propre à faire con- :noître plufeurs propriétés des Chaux métalliques qui font encore incon- nues, & qu’on peut pat fon moyen découvrit avec quelle terre fimple une chaux métallique a le plus d'analogie, Bien loin de prétendre avoir dans ce Mémoire achevé le travail qu’exi- geroit cet objet, je conviens qu'il y refte beaucoup d'expériences à faire, qui feront encore le fujet de plufieurs autres Mémoires que je donnerai dans la fuite. Le préfent Mémoire renferme les expériences que j’ai faites au feu de { . - SUR'L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 2931 fufion pendant trois heures dans un fourneau à vent, fes chaux des mé- taux imparfaits & des demi-métaux (‘excepté celles de la platine & du régule de cobalt) mêlées à parties égales, & combinées de toutes les manières poflibles de deux à deux &+de trois à trois. La chaux de fer a été produite en diffolvant du fer dans de l'acide nitreux , & en le précipitant enfuite par de l'akali fixe : la chaux de zinc & de plomb a été produite de la même manière. La chaux de cuivre fut faite par la calcination du cuivre avec le foufre: elle produit des effets très-différens de ceux que produit la chaux de cuivre produite ‘par fa calcination per fe, & aulli de celle qui eft faite par la diflolution du cuivre dans un acide & fa précipitation; ce que je remarque à deflein, afin qu’au cas qu'on répète ces expériences avec une chaux de cuivre faite a autre manière, l’on ne 1 pas étonné de trouver un réfultat tout-à-fait différent. Pour priver l'étain & le régule d’antimoine de fon phlogiftique, j'ai fait bouillirces métaux avec de l’acide nitreux bien concentré, qui, comme l'on faies les change en chaux très-blanches & très-bien déphlogiftiquées. La chaux de bifinuth fur faite en diflolvant ce métal dans de l’acide nitreux, & en le précipitant par de l’eau. Toutes ces chaux métalliques furent lavées avec une très-vrande quan- tité d'eau diftillée bouillante, afin d’emporter toutes les parties falines qui pourroïent y adhérer, & qui faciliant la fufion auroient produit des erreurs dans ces expériences. Les métaux parfaits n'étant pas fufceptibles de calcination, ils ne peu- vent pas être aéduits en chaux, ce qui empêche qu'ils ne puiflent être foumis au mênxe examen. , Je commence par le récit des expériences que j'ai faites en expofant au feu les chaux métalliques fans addition: Quoique ces expériences ne foient pas nouvelles & Le réfulrats foient connus, il eft néseffaire de les . rapporter, parce qu'älf moyen de leur comparaifon avet Les expériences qui fuivront’, l'on peut en tirer plufeurs conélufons. … La chaux de cuivre fe changez en une maïîle opaque très-dure, qui avoit la couleur de l’antimoine crud. L'he La chaux de ter avoit éprouvé les premiers degrés de fufion, & formoit une mafle noire très-dure, . ; La chaux d’érain n’éprouva pas de fufñon: il en réfulta une mafle grife, qu'il étoit aifé de pulvérifer entre les doigts. . La chaux de plomb fe changea en un yerre qui avoit percé & détruit le creufer. La chaux de zinc r’éprouva pas de fufñon , & fe changea en une mafle qu'il étoir fort aifé d'éerafer entre les doigrs & de pulvérifer de certe mia- mière. ‘294 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La chaux de bifmuth fe changea, comme.celle de plomb, en un verre qui avoit percé & détruit le creufet. or La chaux d’antimoine entra en fufñon & forma une mafle un peu po- reufe, très-dure , qui donnoit des étincelles avec l'acier: elle éroit opa- que, d’un gris verdâtre ; à fa furface il fe trouva quelques grains d'une {ubftance terreufe, qui n'avoit pas éprouvé de fufon. Tous les mélanges fuivans ont été faits à parties égales; ce que je re- marque, afin de ne pas avoir befoin de Le répéter à chaque expérience. Un ‘mélange de chaux de fer & de chaux de cuivre fe changea en une mafle poreufe, noire, qui avoit éprouvé une certaine fufñon, & dans la- quelle il fe trouva plufieurs grains de cuivre réduits. Un mêlange de chaux de cuivre, & de chaux d’étain forma une mafle qui n'étoit pas fort dure: elle n’avoit pas éprouvé de fufon. Un mélange de chaux de cuivre &-de chaux de plomb fe changea par la fufion en une maffe qui reflembloit extérieurement à l’antimoine crud : au fond du creufet il fe trouva un bouton de métal blanc comme de l'argent, qui étoit très-malléable. * Un mélange de chaux de cuivre & de chaux de zinc entra en fufion,; & forma une mafle qui n’avoit pas de poli: dans la fracture , elle reflem- bloit à de rantimoine crud. Un mélange de chaux de cuivre .& de chaux de bifmuth forma une mafñle qui n’avoit pas éprouvé de fufion parfaite, en forte qu’elle n'étoic pas adhérente aux côtés du creufet: dans la fraéture, elle reffembloit au bifmurh. Un mêlange de chaux de cuivre & de chaux d’antimoine éprouva la fufñon, & fe changea en une mafle dont la furface n’avoit pas de poli, & dont l'intérieur avoit un brillant métallique & La couleur de l'anti- moine crud. Un mélange de chaux de fer & de chaux d’étaip entra en fufon , & forma une mafle noire, poreufe, qui avoit ès attaqué le creufet; jy trouvai plufieurs petits grains d’étain réduits. < Un mêlange de chaux de fer & de chaux de plomb entra parfaite- ment en fufon: il en réfulta une maffe noire, poreufe , qui avoit beau- coup de luifant, mais non de poli: elle avoit un peu attaqué le creufet. Un niélange de chaux de ter & de chaux de zinc forma une mafle très-dure, qui n’avoic pas éprouvé la fuñon: elle avoit, en diminuant de dimenfons, gardé la figure triangulaire du creufet; fa couleur étoit grife. Un mêfange de chaux de feg & de chaux de bifmuth forma une mafle très-dure, qui n’étoit pas devenue fluide ; elle avoit, en diminuant de di- menfons, gardé la figure du creufet; fa furface étoir couleur de rouille de fer: dans ia fratyre, l'on découvroit de petits cryftaux métalliques, qui probablement étoient des parties de bifmuth réduites, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 295 Un mêlange de chaux de fer & de chaux d'antimoine fe changea en une mafle noire, qui avoit éprouvé les premiers degrés de fufon: le creufet étoit enduit d'un verre jaune. Un mêlange de chaux d’étain & de chaux de plomb fe changea en une mañfle qui n'avoit éprouvé un commencement de fufon que + les en- droits où elle rouchoit les parois du credfet: le creufer étoit enduit d’un verre jaune, Un mélange d&chaux d'étain & de chaux de zinc avoit percé le creufet, dans lequel il ne fe trouva plus que quelques grains d'une terre grife, Un mélahge de chaux d'étain & de chaux de bifmuth forma une fcorie demi-vitrifiée brune, done la furface étoit blanchey le creufet avoit été ercé, . Un ne de chaux d’étain & de chaux d’antimoine forma une maffe qui n'avoittéprouvé que fes premiers degrés de la fufon: elle étoit verte à a furface, & blanche à la partie inférieure. ‘ Un mélange de chaux de plomb & de chaux de zinc entra parfaite+ ment en fufion : il en réfulta une maffe très dure, opaque, poreufe, fur- tout à la furface, qui étoit d’un jaune verdâtre; la fracture étoit bfune & n’avoit, tour comme la furface, que très- peu de poli; plufeurs en- droits de la furface étoient cryftallifés ot aiguillés, Un mélange de chaux de plomb & de chaux de bifmuth forma un verre jaüne , qui avoit entièrement détruit le creufer. Un mélange de chaux de plomb & de chaux d’antimoine s’étoit fondu en une fafle opaque, poreufe, grife, fans poli. Un mêlange de chaux de zinc & de chäux de bifmuth fe fondit en une mafle poreufe, tranfparente, jaune, & un peu polie à la partie in- férieure; mais dont La furface étoit opaque , inégale, grife, & n'avoit que très-peu dé 1e Un mélange de chaux de zinc %& de chaux d’antimoine n'éprouva pas de fuñon, & forma une mafle qu'on pouvoit aifément pulvérifer en la fer- xant entre les doigts. Un mêlange de chaux de bifmuth & de chaux d'antimoine n’entra pas en fufñon & forma une mafle aflez dure, qui en diminuant de volume avoit gardéBla forme du creufet. Les expériences précédentes font voir quels font les changemens que les mélanges des chaux métalliques qui réfultent de leur combinaifon de deux à deux , éprouvent. lorfqu'on les expofe au feu de fufion. Les ex- périences fuivantes montreront les altérations que le feu fait éprouver aux mélanges des chaux métalliques qui réfalrent de leur combinaifon de trois à trois ; tous ces mélanges ont été faits, comme les précédens, à parties égales. : Un mélange de chaux de cuivre, de chaux de fer & de chaux d'étain, LL 296 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nentra pas en fufion & formoit une mafle endurcie , qui en diminuant de volume avoit confervé la figure du creufer, Un mélange de chaux de cuivre , de chaux de fer & de chaux de plomb, étoit entré en fufon & forma une mafle poreule, couleur de cuivre à la furface, fans poli, noire & un peu brillante dans la fraéture. :. Un mélange de chaux de cuivre, de chaux de fer & de chaux de zinc, éprouva la fufon & forma une mafle noire, fans poli, poreufe, qui avoit attaqué Le creufet, au fond duquel il fe trouva un gräin de métal très- caffant, qui avoit la couleur du régule de cobalt. Un mélange de chaux de cuivre, de chaux de fer & de chaux de bif- muth; entra parfaitement en fufion & forma une mafle qui à la furface avoit du poli, mais qui n'en avoit pas dans la fracture: elléécoit po- reufe, & avoit attaqué le creufer, dans lequel, je trouvai un bouton de métal. | Un mélange de chaux de cuivre, de chaux de fer &,de chaux d’anti- moine, entra en fufion & forma une mafñle poreufe, dont {a furface étoit grife & fans poli, & qui dans la fraéture étoir noire & polie. ; Un mélange de chaux de cuivre, de chaux d’étain & de chaux de plomb, éprouva la fufñon & forma une male noire, poreufe, fans bril- lant, qui avoit attaqué le creufer. Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux d’étain & de chaux de zinc, entra en fufion; & il en réfulta une mafñle dont la partie inférieure, qui occupoit Le fond du creufet, formoit un verre rougè, dans lequel il y avoit des grains de métal difperfés : la partie fupérieure de cette maflé étoit grife & fans poli à la furface; dans la fraêture , elle reflembloit à de l’antimoine crud. or Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux d'étain & de chaux de bif muth, n’éprouva qu'un petit commencement de fufon : elle étoit jaune & grife, & n’avoit aucun poli; au fond du creufet il fe trouva un grain de métal, Un mélange de chaux de cuivre, de chaux d’étain & de chaux d’anti- moine , entra complettement en fufion & forma une maffe dont la furface étoit prife & fans brillant; dans la fra@ture elle étoit polie, couleur de foie, avec des ftries d’un très-beau rouge: ilsy avoit un bout@n de métal au fond du creufet, qui étoittrès-caflant, & qui pour la couleur reflem- bloit au réoule de cobalt, Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux de plomb & de chaux de zinc, entra en fufon: il en réfulta une mafñle dont la furface étoit iné- gale; elle avoit des taches rouges, brunes & noires. Un mélange de chaux de cuivre , de chaux de plomb 8 de chaux de bifmuth , éprouva la fufon : je trouvai dans le creufet un bouton de métal confidérable, couvert d’une fcorie dont la furface étoit noire & inégale, & dont {a fracture étoit rouge & polie. Un SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 297 : Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux de plomb & de chaux d’an- timoine, éprouva la fufñon"& fe changea en une mafle dont la furface étroit inégale, noire & fans poli: la fracture étoit polie & rouge; au fond du creufec il fe trouva un bouton de métal. Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux de zinc & de chaux d'an- timoine, éprouva une entière fufñon & fe changea en une maffe grife à la furface, couleur d’ardoife dans la fracture; au fond du creufet il y avoic un bouton diftinét du refte de la mafle, qui avoit un brillant métalli- que: il étoit très-caflant, & avoit la couleur du régule de cobalt Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux de zinc & de chaux de bif- muth, fe changea en une mafle noire , opaque, entièrement cryltallifée ; à fa furface il {e trouva une grande quantité de cryftaux blancs, formés comme des'aiouilles: les parois intérieures du creufet écoient couvertes d'un verre jaune fale. : Un mêlange de chaux de cuivre, de chaux de bifimuth' & de chaux d’antimoine, entra entièrement en fufñon; le creufet avoit été en partie diflous: il fe trouva un bouton de métal de: la couleur de l'or, qui étoit . couvert d'une mafle dont la furface éroit-grife & fans poli, & qui dans la fracture éroit polie & rouge. - Un mêlange de chaux de fer, de chaux d'étain & de chaux de plomb, fe changea par la fufion en une matle noire, fans poli, qui avoit percé le creufer. Un mêlange de chaux de fer, de chaux d’érain & de chaux de zinc, forma une maffe noire, qui n'avoir éprouvé qu'une demi-fufon: elle n'a- voit aucun poli & avoit un peu attaqué Le creufer. à Un mélange de chaux de fer, de chaux d'érain & de chaux de bif- muth, éprouva la fufñon; & il en réfulta une mafle noire , qui avoit atta- qué le creufer: fa furface éroit inégale, brune & fans poli; dans la frac- ture elle éroit noire & également fans poli: l'on y découvroit de petits cryftaux métalliques, qui probablement étoient des parties de bifmuth réduites, Un mêlange de chaux de fer , de chaux d’étain & de chaux d’antimoine, forma une mafle noire très- dure, dont toutes les parties n’étoient pas réunies : à fa furface elle n’avoit pas de poli; dans fa fracture elle en avoic un peu: le creufet étoit percé. Un mêlange de chaux de fer, de chaux de plemb & de chaux de zinc, entra en fufñon: il en réfulta une mafle noire, poreufg, très-dure,, qui avoit un peu attaqué le creufet , dont les paroisintérieures étoient cou- vertes d’un verre jaune. Un mélange de chaux de fer , de chaux de plomb & de chaux de bif- muth, éprouva une entière fufon: il en réfulta une mafle noire, dont la furface paroifloit cryftallifée ; elle n’avoit que peu de poli à la furface, Tome XX , Part, II, 1782. OCTOBRE, Pp 298 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mais beaucoup dans la fraéture: il y avoit au fond du creufet, qui étoit un peu attaqué, quelques yrains de métal. ) Un mêlange de chaux de fer, de chaux de plomb & de chaux d’an- timoine, entra en fufon: il en réfulta une mañle dont la furface éroit iné- gale , grife & fans poli; la frature éroit noire & n’avoit que peu de poli: le creufer avoir été percé. Un mélange de chaux de fer, de chaux de zinc & de chaux de bif- muth, n’entra pas en fufion, & forma une mafle fort dure, jaune; à fa furface il s’éroit formé de petits cryftaux jaunes, qui avoient la figure des fleurs argentines d’antimoine, Ë Un mélange de chaux de fer, de chaux de zinc & de chaux d’anti- moine, commença à entrer en fufon: il en réfulta plufieurs maffes noires, féparées, très dures, qui dans les endroits où elles touchoient le creufer, avoient commencé à le pénétrer. Un mêlange de chaux de fer, de chaux de bifmuth & de chaux d’an- timoine, n'éprouva qu'une demi-fufñon; & il en réfulra une mafle noire, facile à cafler, dans l’intérieur de laquelle il fe trouva plufeurs perits cryftaux métalliques de différente figure: les parois du creufet éroient juf- qu'au haut jaunes comme du foufre. Un mélange de chaux d’étain, de chaux de plomb & de chaux de zinc, fe changea en un très-beau verre verdâtre, Un mêlange de chaux d’étain , de chaux de plomb & de chaux de bif- muth , entra parfaitement en fufon: il en réfulta une mafle opaque, noire, qui tant à la furface que dans la frafture avoit un beau poli ; au fond du creufet il fe trouva un bouton de métal blanc très-malléable, Un mêlange de chaux d’étain , de chaux de plomb & de chaux d’an- timoine, avoit percé le creufet, qui ne contenoit plus qu'une fcorie opa- que , jaune & grife , fans aucun poli. Un mêlange de chaux d’étain , de chaux de zinc & de chaux de bif- muth, éprouva les premiers degrés de la fufion: il en réfulta une mafle poreufe , entièrement opaque, fans aucun poli, jaune, grife & rougeärre. Un mêlange de chaux d’étain, de chaux de zinc & de chaux d’anti- moine, n’éprouva pas de fufon : Le creufet étoit enduit d’un verre jaune, & renfermoit une mafle dont une partie étoir blanche, l’autre jaune & l'autre brune ; l'on pouvoit aifément la brifer entre les doigts. Un mélange de chaux étain , de chaux de bifmurh & de chaux d’an- timoine, éprouva la fufion & fe convertit en une male poreufe, brune “& très-peu polie dans la fradure ; fa fuxface étoir d'un jaune verdârre. _ Un mêlange de chanx de plomb, de chaux de zinc & de chaux de “bifmuth, forma un verre d'un très beau jaune ; couvert d'une croûte mince, jaune , opaque : le creufet n'avoit pas été attaqué. «- Un mélange de chaux de plomb , de chaux de bifmuth & de chaux d’antimoine, forma un très-begu verre, couleur d’hyacinthe, \4 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 299 -: Un mêlange de chaux de zinc, de chaux de bifmuth & de chaux d’an- timoine, forma par la fufñion une mafle jaune , forc poreufe, qui avoic percé le creufret. E.S.S A I Sur la manidre de donner un Vernis aux Papillons 6 autres infeétes , adref]é a M. le Conféiller Scopoli , par M. LANDRIANI; traduit de l'Italien, @ par Madame P*** de Dijon. ; We US favez, Monfeur, que pour conferver les papillons, on es mer dans une boëte de verre fermée hermétiquement & remplie de vapeurs de camphre; cependant ils perdent en peu de temps cette poullière qui colore leurs aîles, & il y introduit facilement des infectes qui les dévo- rent. Il en eft de même des fleurs, que l'on conferve très-difficilement, parce que l'air feul les altère 8e en détruit les couleurs, que leur pouthière eft emportée par le moindre fouffle ou pi le plus léger attouchement. Je regarde en conféquence comme une heureufe idée celle qui m'eft venue & que j'ai déjà communiquée, de fixer cette pouflière colorante fi fugace & {1 périffable, rant des Aeurs que des papillons, par une mérhode pa- reille à celle qui a été propofée par M. Loriot pour fixer Le paftel. ( M. Landriani rapporte enfuite le procédé de M, Loriot: on croit de- vôir fe difpenfer de le tranfcrire ici, non-feulement parce qu'il eft bien connu prélentement en France, mais encore parce qu'il a déjà été imprimé en entier dans ce Recueil: le paffage de M. Landriani n'eft lui-même que la traduction des DÉTAILS DU SECRET. Journ. Phyf. tom. 15, pag. 449 & 450). La pouflière colorée adhérente aux fleurs & aux aîles des papillons, n'ayant toujours paru devoir être confidérée comme une efpèce de paltel , j'ai cru qu'il feroit poflible de la fixer de la même manière. Dans cette vue, j'ai préparé le mêlange d’efprir-de-vin & de colle de poiflon qu'em- ploie M. Lorior, & j'ai eflayé de le faire tomber en pluie avec une ver- gette ordinaire fur différens papillons. Mes premières tentatives n'ont pas eu grand fuccès, principalement par défaut d'expérience, & n'ont Évi qu'à me convaincre qu'on pou- voit retirer quelque utilité de cette méthode. En eflet, ayant répété l’'é- preuve &endu l'expanfon plus fine & uniforme, je fuis parvenu à fixer folidement la couleur de la manière la plus farisfaifante. Mais ayant ré- féchi depuis que la colle attiroit l'humidité de l'air, qu'elle éroir fujette Tome XX, Part. II, 1782 OCTOBRE. Pp2 300 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, à être attaquée par les infectes qui la recherchoient avidement , &c., je penfai à faire ufage du vernis ordinaire à l’efprit-de-vin , que j'étendis en y ajoutant une double dofe du même efprit le plus rectifié, afin de le rendre plus fluide & qu'il ne féchât pas aufli facilement. Je le fis de plus chauffer prefque jufqu'à ébullition , pour augmenter encore la fluidité; j'y trempai les foies ie la vergette tandis qu’il étoit encore chaud, & j'en afpergeai différens papillons de la manière PA M. Loriot. Quand la première afperfion fut sèche , j'en ajoutai fucceflivement une feconde, une troifième , & jufqu'à ce que la furface des aîles des papillons fût bril- lante & la couleur entièrement fixée, En füuivant cette méthode, je fuis parvenu à donner aux aîles des pa- pillons un beau vernis qui les rend plus folides, &, fi j'ofe fe dire, plus membraneufes, fans que leur couleur en foit aucunement altérée e un feul point; ce vernis, pourvu qu'il foit blanc & bien préparé, ne peut que leur donner plus de vivacité & d’éclar. Quoique ces ailes ainfi couvertes de vernis ne puifent plus être aullr facilement attaquées par les infectes deftructeurs, j'imaginai encore de faire entrer dans ce vernis une bonne quantité de camphre, & je le pré- parai en conféquence à l'efprit-de-vin camphré. On voit donc qu'indé- endamment de ce qu'un femblable vernis. conferve bien les couleurs, il défend encore les papillons des attaques des infectes, & donne à leur corps une plus grande confiftance ; de forte qu’on peut les manier plus commodément pour les montrer, ou autrement, & qu'on peut les ‘con- ferver fürement fans recourir aux méthodes ufitées d'appliquer leurs aîles fur un papier gommé , de les enfermer dans des vaifleaux de verre, & au- tres moyens connus. J'ai encore effayé de vernir de cette manière les aîles des papillons vi- vans, ce qui m'a très-bien réuffi, tellement que je fuis perfuadé que cette nouvelle méthode de préparer les papillons fera très-utile pour les rendre ivaltérables, & les mettre à l'abri de la voracité des infectes, qui détrui- fent fi fouvent cette belle production de la nature. Vous qui avez fi bien mérité de la République des Lettres’, principa- lemênt pour avoir parcouru toutes les branches de l'Hiftoire Naturelle, vous pouvez, Monfieur, plus que tout autre, apprécier cette petite dé- couverte. Je fuis, &c. De Milan, le 20 Mars 1781. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 301 22 RECHERCHES Suila propriété vitrefcible de l Acide phofphorique offeux , par M. WYEGLES 3 extrait du Journal de M. CRELL, par M@BROUST. L: procédé dont s’eft fervi M. Wiegleb pour purifier l'acide phofpho- rique offeux, ma paru confirmer ceque j'ai avancé de fon état de combi- naifon, dans ce Journal , mois de Juillet 1781. Mais je le abs moins par cette raifon , que parce qu'il donnera, j'efpère, la plus haute idée de la manière de travailler de cet illuftre Apothicaire. Sans compter nom- bre de Recherches Chymiques publiées en Allemagne, nous connoif- fons de lui plufeurs favans Ouvrages, tels qu'un Traité hiftorique & cri- tique fur l'Alchymie , imprimé en 1778 ; une Suite d'expériences on ne peut plus nombreufes & mieux faites fur les alkalis fixes & volatils, im- primée pe la feconde fois en 1781 ; une Théorie nouvelle de la Fermen- tation, de 1776 ; un Manuel de Chymie, &c. Le procédé de M. Wiegleb nous a femblé mériter la préférence fur ceux qui ont paru avant le fien; & au verre près, que cet acide enlève inévitablement aux vaifleaux pat où il paffe , il eft pur en comparaifon de celui que nous donnent les pro- cédés de MM. Rouelle & Scheele (1). Ce qui fuit eft de M. Wiegleb. 6. I. N'ayant appris qu'avec beaucoup d'étonnement la fingulière (x) 11 fmble que la découverte de cet acide dans les os appartient plutôt à M. Gahn, Médecin de Scockholm , qu’à M. Scheele. M. Sage a eu la bonté de me communiquer une Thèfe qui lui a été envoyée par M. Spiélmann. L’Auteur de certe Thele , intitulée : De Analyfi urine & Acido l'hofphoreo. Argenr. 1781 , avance que la découverte de M. Gabn eft imprimée dans le Commentaire de la Société Royale d’Edimbourg, pour 1775 ; que M. Scheele n’a rien écrit fur cet acide , fi ce n’eft un paflage quel’Auteur ex- trait d’un Ouvrage ( “) de M. Scheele, & qu’il‘rend ainf : Vuper énnosuifle terram offium cornuumque acido phofphori efle faruraram , & que c’eit probablement d’après ce paflage de quelques Chymiftes François auront attribué la découverte à M. Scheele. Ceux qui ont à portée , peuvent vérifier ce qui en eft. Toujours eft-il certain que le procédé donné dans l& Gazette de Bouillon 1775, n°.40, n’eft guère propre à figurer auprès des analyfes données par le favant Apothicaire d'Upfal , telles que celles du fpath fluor, de Parfenic, de la pierre de la veflie, de la manganèfe, &c., qui fe trouvent dans le Journal de M. Crell, & que les Connoifleurs ne fauroient lire fans une vraie admi- ration. Nous avons déjà imprimé de luiune Lettre fur le Sel fédatif, 1781 ,tom. XVIII, p-44 5 & des Obfervations Chymiques fur l'Acide Oxalin, Supplément de 1782, rom AAI, pag. 25. (*) Unter fuchung des fluff fpats und deffen faure , 17710 302 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, propriété qu'a l'acide phofphorique offeux de fe fondre en verre , fans l'ad- dition d’aucunes fubftances, je ne fus pas long-termps fans foupçonner que cet acide pouvoit bien n’avoir pas toute la pureté qu'on lui fuppe- foit. Fondé fur ce qu’il eft abfolument contraire à la nature des fels purs de couler en verre (1), & bien convaincu de la juftefle de cette confe- quence, je crus devoir entreprendre les expériences fuivantes, $&. LI. Je fis diffoudre huit onces d'os calcinés à blanc dans fufifante quantité , Fe 2 dans quatorze onces d'acide marin, Je donnai la préférence à cet acide, parce qu'il me fembloit que la félénite qui alloit fe roduire dans ce procédé fe fépareroit plus facilement. Cette diflolution fut étendue d'environ quatre onces d’eau diftillée, & cinq onces d'huile de vitriol fuffirent à la précipiter entièrement. $. III. La félénire ayant été féparée & bien lavée à l'eau diftillée, & Les liqueurs raffemblées dans une cornue, je les diftillai; le phlegme pafla ; d'acide marin parut enfuite, & continua de pañler à-peu-près jufqu'à la fin de la diftillation. Le lendemain, le réfidu de la cornue fut diflous à l'eau diftillée, & l’on en fépara par filtration la félénire qui s’étoit dé- pofée. $. I V. Notre liqueur fut évaporée au bain de fable, à ne laïffer qu'en- viron fix onces de matière. Ce réfidu , qui étoit aflez confiftant , avoit déjà de la tranfparence; mais en refroidiffant, il ne tarda point à fe trou- bler par une nouvelle quantité de félénite qu'il fallut féparer comme au- paravant. $. V. Notre acide offeux éroir alors parvenu à cette pureté , que l'on eftime fufifante , quand on veut le convertir en verre ou en phofphore ; il n’avoit même befoin pour cela que d’être defléché ; mais je Le gardai , parce qu'il éroit à l’état où je pouvois le defirer pour être livré aux exa- mens ultérieurs. Etoit-ce bien là, comme on l’avoit cru, unacide vérita- a (1) C'eft-à-dire, ge Pacide phofphorique , les verres de borax , le fel fédatif, l’arfe- nic blanc, &c., qui font folubles dans l’eau, ne font pas des verres. Suivant les dé- finitions anciennes , le verre eft en général un corps fondu , tranfparent, dur & info- luble ....; &, fuivant les définitions du même âge, les terres font bien aufli des êtres pefans, infipides , infolubles, &c. Mais toutes ces vaines définitions ne font pas aujour= d'hui des loix de Chymie. La plupart des verres que leur état de maffe fait réfifter à l'eau » s’y diffolvent quand on les broie avec elle dans un mortier de porcelaine dure. L'eau eft une terre fimple a@tuellement en fufion , un verre qui ne perd fa fluidité are degré de froid défigné par zéro fur le thermomètre de Réaumur. Dans la férie es terres , confidérées par leur fufñbilité, l’eau eft un des extrêmes, & le quartz eft Pautre. Terra eft agua fluide, ont dit Van-Helmont, Beccher, Senac & M. Bergmann. Lorfqu'un verre dur ou tendre fe diflour dans l’eau, je ne vois dans cette diffolution, & fuivant les notions les plus vraies & les plus exaétes de la Chymie, qu'un verre qui f diffout dans l’autre. Je ne vois pas d’ailleurs pourquoi on excluroit plutôt de Ja ss des verres celui qui fe diffout dans l’eau, que celui qui fe diflout dans les acides, ue SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS, 303 blement pur? ne contenoit-il rien qui pût aider ou ajouter à fa vitrifica- tion ? C'eft ce qui reftoit à voir. $. VI. Pour m'éclaircir de ces foupcons, voici ma première expé- rience, J’étendis mon acide phofphorique avec plufieurs onces d’eau dif tillée; j'y verfai enfuite quelques gouttes d'huile de vitriol; mais je ne fus point étonné de le Voir Le troubler encore. La précipitation fut achevée; je féparai de la félénite , qui, lavée & féchée , fe trouva être du poids d'un gros & demi. S. VIL. L’acide vitriolique ne troubloit plus notre liqueur ; & bien qu'on püt alors la regarder comme débarrailée de toute terre , je ne foup- çonnai pas moins qu’elle püt contenir quelque refte de certe même terre à laquelle lation du précipitant pouvoit avoir manqué , ou qui enfin n’a- voit point eu toute la facilité néceflaire pour fe dépofer. En effit , quel ques gourtes de diflolution aikaline troublèrent notre liqueur, & fufirent pour aflurer mes foupçons, Ayant donc à me défaire de cette dernière por- tion de terre, j'eus recours à l’alkali volatil. La chaleur, comme on le fait, décompofe facilement la combinaifon ou le fel ammoniac qu'il forme avec l'acide phofphorique, C'eft donc par ce moe" que Jefpérai de me procurer un acide phofphorique pur. Je verfai de l’efprit de fel ammoniac dans notre liqueur; il s’enfuivit un précipité blanc, fort di- vifé, & auquel je trouvai une forte de tranfparence comparable à celle de la terre d'alun fraîchement précipitée. Ce dépôt, lavé & defléché , pefa 3 gros 6 grains. Il a des propriétés remarquables, que nous décrirons tout à l'heure. ° S. VIII. Notre fel ammoniac phofphorique, bien defféché au bain de fable , fut placé en diftillation dans une cornue de verre. 11 pafla d’abord unefprit de fel ammoniac aflez cauftique. La chaleur augmentée fit fuccé- der un fublimé fec. Le dernier pr feu fut porté à rougir la cornue. Refroïdie & brifée, on fépara de fon col 1 gros 44 grains de vrai fe] ammoniac , & à fon fond étoit une forte de mafle laiteufe aflez fembla- ble à de la porcelaine : elle éteit fortement acide au goût, & s’humec- toit à l'air ; c'étoit de l'acide phofphorique très-fixe & très-pur. $. IX. On concevra facilement l'orisine de ce fel fämmoniac, fi on fe rappelle deux chofes; la première eft que les os furent diffous dans la- cide marin ; la feconde, que cette safe portion de terre reconnue $ VIT, avoit néceffairement rerenu de cet acide même que les diftillations & évaporations mentionnées . FIL & IV , n’avoient point entièrement difipé. L’alkali volatil qui fervit à la précipiter s'empara & de l'acide ma- tin qui la faturoit, & de l'acide offeux. Il en réfulta d’une part du fel am- moniac marin, & de l’autre du felammoniac phofphorique, C’eft à la dé- compofition de ce dernier qu'appartient l'alkali volatil qui parut au com- mencement de la diftillation , & le fel ammoniac qui réffte à la chaleur pafla en fubftance, 304 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, $. X. Pour féparer facilement l'acide phofphorique qui adhéroit à [a cornue, je pris le parti de Le faire difloudre dans l'eau chaude. Les éclats de verre, qui furent lavés de même, fe trouvèrent rongés & dépolis à l’in- térieur. Cette diffolution, filtrée & évaporée à fec (1), fut fondue dans un creufet de terre rouge, puis coulée fur une plaque, Ce n'éroit point un verre, mais une matière qui lui reflembloït; elle étoit très-acide , & s'hu- mectoit à l'air: c'écoit en un mot de l'acide phofphorique offeux ur. ï $. XI. Il eft donc évident , par toutes ces recherches , que l'acide phof= horique ofleux ordinaire contient une quantité notable de terre, à la- quelle il eft redevable de fa propriété de couler en verre. [l ne me refte plus qu'à examiner la nature des précipités que nous avons féparés dans le cours de ces expériences. $. XII. Les précipités que l'acide vitriolique nous a procurés, font , comme on n’en peut douter, de la félénite. L’alkali fixe leur enlève cet acide, & les reporte à l’état de terres calcaires , folubles avec effer- vefcence dans les acides, &c. ( $. X IT I. Mais celui que nous a donné l’alkali volatil, $. VII, mérite quelqu'’attention. Ce précipité (2) fe diffout dans les acides nitreux & ma- rin. L’acide vitriolique , qui ne l'attaque. qu’en petite quantité , le préci- pite dela diffolution dans ces deux acides; & comme ces deux acides ne le diffolvent qu'avec un mouvement d’effervefcence on ne peut plus foi- ble, je n’en ai pu conclure que ce précipité füt une terre calcaire où ma- gnéfienne, moins encore une terre filiceufe, puifqu’elle eût alors réfifté totalement à l’action de ces acides. Je conjeéturois au contraire que cette terre, loin d’être fimple, pouvoit bien être d’une nature mixte ou com- pofée; & ce quiappuyoit ce jugement felon moi, c’eft que fa diffolu- tion dans l'acide marin & nitreux n’avoit point une faveur que l’on püt comparer à celle des autres terres fimples dans les mêmes acides. 6. XIV. Pour porter l'examen de cette terre encore plus loin , j'en mêlai 1 gros: avec 2 gros d'huile de vitriol étendue de 6 onces d’eau dif- tillée; je fis deffécher ce mélange fur le bain de fable ; je le délayai en- fuite avec deux onêes d’eau diftillée, Cette diflolution filtrée laifla fur le papier de la félénite très-pure ; elle avoit un excès d’acide fenfible au goût, & ne donna point de crytaux après fon évaporation. J'étendis (1) M. Wiegleb ne dit pas f cette diffolurion, qui provenoit d’une maffe laiteufe & opaque, $. VIII, ne laiffe rien fur Le filtre, non plus que la quantité d’acide phof- phorique qu'il retire des 8 onces d’os calcinés. (2) M. Scheele a démontré que le précipité du /guor-filicum) n’eft point foluble dans les acides , & que la petite quantité d’alun qu'il forme avec l'acide vitriolique, pro- vient de l'argile du creufer. d’eau SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 30. d’eau diftillée ce magma (1) falin-acide, pour le précipiter enfuite avec Palkali fixe: j'en obtins 9 grains de précipité. Quelques gouttes d'acide vitriolique verfées deflus, manifeftèrent un mouvement d'effervefcence ; mais cet acide , ajouté en plus grande dofe fur ce précipité, n'en fit pas une diffolution complette. Il n'en fallut pas davantage pour fne con- vaincre que la terre , féparée de l'acide offeux , ft une pure terre cal- caire. S. XV. Ces recherches prouvent fuffifamment que l'acide phof phorique , retiré des os par les méthodes connues ,. retient une portion confidérable de terre qui le détermine à former du verre, Lorfque cet acide eft arrivé au degré de purification, 6. IV , on peut tout ;de fuite le précipiter avec l'alkali volatil, deffécher la liqueur, mé- ler fon rélidu avec la poudre de charbon, pour obtenir le phofphore (2), ou enfin le diftiller {eul, fi l'on veut avoir l'acide phofphorique pur. Sur l'Acide phofphorique trouvé dans le Règne minéral, par M. GAHN. J'ai déjà fait part au Public de cette nouvelle, qui fut communiquée à M. de la Peiroufe, par M. Stokenftroom,, Suédois. IL eft furprenant que cette découverte ne foi pas plutôt parvenue en France; mais elle ne fau- toit être plus confirmée que par l’analyfe de la mine de plomb phofpho- rique, donnée dans une Diflertation , intitulée: Differtatio Merallurgica de minerarum docimafié humid& , quampræf. M. Torb. Beremann. Defender Per. Caflorin Vefim. Upfal, , 1780. M. Crell a donné, dans fon Journal de Chymie, tame ΰ*, 1780, un précis fogt étendu de cette Differtation, Le m'a femblé pouvoir être citée comme un des meilleurs Ouvrages ans ce genre. Ce qui fuit eft extrait du Précis de M. Crell. La chaux de plomb naturelle eff minéralifée par l'acide aërien, ou, fuivant la découverte de M. Gahn, par l'acide phofphorique. On diffout cette mine dans l'acide nitreux ; quelques portions de fer s'en féparent & tombent au fond : on précipite le plomb ke cette diflolution par l'acide vitriolique ; le plomb fe trouve dans le rapport de = ; cipitée & évaporée donne l'acide phofphorique pur. la liqueur pré- (1) Ce magma devoit contenir de l'acide phofphorique. (2) Le peu de terre qui tient à l'acide phofphorique ne pouvant, dans l'opération du phofphore, empêcher l’anion de l'acide avec le phlogiftique, il devient dans ce cas ioutile de faturer avec l’alkali volatil. Le 0 Tome XX, Part. IT, 1782. OCTOBRE, Qq 306 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, D'ES'C'R L'ETAT ON De la Chaÿfe des Palombes ou Pigeons Rarniers , dans les Pyrénées. L ES Monts Pyrénées nourriflent dans leur plus grande partie toutes les bêtes fauves qui habitent les autrestpays montagneux de l'Europe en-deçä de a Suède. Les ours, les loups, fangliers, cerfs, chevreuils, chamois, &c.,, n'y font pas rares; mais quelques unes de ces efpèces ne fe trou- vent point communément dans Ja petite portion des Pyrénées, qui, de- puis les confins du pays de Soule, s'étend au travers de la Navarre jufqu'à l'océan. L’ours n'y paroît que quelquefois, comme par incurfon, tue quelque bétail , & retourne dans les montagnes de Soule ou de Béarn. Les loups n’y font pas fort communs non plus; les fangliers & les chevreuils lé font davantage, & encore plus les renards, dot le grand nom- bre ne détruit cependant pas celui des lièvres. On trouve moins com- munément le blaireau , la loutre , la marte & la genette. Il y a une quan- tité étonnante de vautours, qu'on voit fouvent au nombre de plus de cent, tournoyer dans l'air, lorfqu'ils fentent une charogne à portée. La rivière qui traverfe la vallée de Baygorry , «eft très-poiflonneufe en truites & anguilles : Le pays fournit d’ailleurs des perdiix rouges, des bécafles, poules d’eau, & diverfes autres éfpèces de volatiles , autant que tout au- tre. Si cette contrée, ainfi que la chaîne des Pyrénées en général , peutà bon titre être appellée un pays de gibier , e’eft fur-tout depuis Le mois d'Aoùût jufqu'au folftice d'hiver , parce que, pendant cer intervalle, il paffe par les gorges de ces montagnes une prodigieufe quantité de toutes for- tes d’oifeaux , qui quittent le nord pour aller pafler l'hiver dans les pays méridionaux. . : “Ce pañlage eft réoulier chaque année ; il commence vers le milieu d'Aoûc par les petits oifeaux; des bec - figues, des müriers & des milliers de rof- fignols fe rabattent fur les buiffons & les haies, Les Habitans y tendent des lacets conftruits avec intelligence, & peu. conous. ailleurs; c'eft une ba- guette en forme d’arc renverfé, & qui a de mêmeune corde tendue , à laquelle eft attachée une fuite de crins à nœud coulanr, difpofés de ma- nière que l’oifeau ne fauroit fe percher fur la baguette , fans étre pris dans Pun des crins: auñi tout le monde mange-t-il, dans cette faifon, des oi- feaux ordinairement fort gras. Après-les.petits oifeaux , viennent en Sep- tembre les cailles & les tourterelles: on fait la chafle aux dernières avec des appeaux & des filets couchés par terre , comme à la chafle aux alouet- res, C'eft un oifeau d'excellent goût, lorfqu'on l'a gardé quinze jours en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 307 cage , & il ne faut pas plus de temps pour l'engraïfler avec du millet. Les tourerelles font {uivies des fanfonnets, des merles & desgrives. On a vu des années où ces dernières paroiffoient en fi grande quantité , que les Habi- tans, pour préferver leur vendange de ces hôtes incommodes , étoient obligés de les écarter des vignes par Le bruit de leurs chaudrons & autres inftrumens, On les prend aux lacets comme les petits oifeaux. Après la Saint-Martin viennent les bécafles: on remarque qu’elles paffent la nuit comme le jour. La marche de ce paflage général eft fermée par les grues & les oies fauvages , précurfeurs de l'hiver. La plus intéreflante de ces tranfmigrations annuelles d'oifeaux eft celle des pigeons ramiers (co/umba vinago ), appelés palombes dans le pays. Il “en pañle uné quantité incroyable par toute la chaîne des Pyrénées, de- puis Les derniers jours de Septembre jufqu'à la Saint-Martin. Nous con- noillons trois efpècesde ces pigeons ; l'une , que l'on nomme bizet où ro- quet, eft la plus petite, & commence le paflage; celle qui fuit eft la plus grofe , & de beaucoup plus chaïnue que le pigeon domeftique ; il s'y mêle vers la fin du paflage une autre efpèce, appellée par les Bafques papagorry , qui eft un peu plus petite, & qu'on diftingue d’ailleurs par la Couleur vineufe & plus chatoyante de {à gorge. Ces animaux pañlent par Compagnies , quelquefois au nombre feulement de trois où quatre , fou- vent de deux ou trois cents dans un feul vol. On fait la chaffe aux palombes dans toute l'étendue des Pyrénées , avec uelque différence dans la difpofition des filets & des autres accefloires. Celle dont il eff ici queftion eft en ufage en bafle-Navarre; elle demande beaucoup d'apprêr, un nombre de Chaffeurs, & c'eft en général une chaffe de conféquence , qui demande, pour ainfi dire, un, équipage. Si elle pouvoit être à portée de fervir aux amufemens de notre Prince, il y prendroit probablement autant de plaifir qu'à la chafle au vol ou à celle diFÉctto se Qu'on fe repréfente dans un canal de montagnes le penchant d'une col- line , fituée en face du fud, & garnie d'arbres ; entre une rangée de ces ätbres, fur‘une même ligne, une fuite de plufeurs. grands filets , rendus verticalement ; à quatre pas de ces filets, du côté du nord , quelques ca- banes très-bailes, conftruites de branchage ; dns lefquelles font ac- croupis & cachés les Chaffeurs qui doivent gouverner les filets; plus loin, du même côté, d’autres niches de branchages, nommées trèpes, conf truites au fommet de trois ou quatre arbres, l'un plus éloigné des filets que l'autre , dans lefquelles fe tiennent les Chaffeurs , qui fucceflivement, au moyen d'une palette de bois blanchie, qu’on appelle épervier, & qu'ils jettent au moment du paflage du. vol , doivent effrayer les palombes, les faire baïfler vers la terre , & ainfi les forcer à donner dans les filers. Plus foin encore, & felon la difpofition du local , jufqu'a la diftance de plus d'une lieue, d'autres Chaffeurs fonc poités fur diverfes hauteurs , fur-tout Tome XX , Part, II, 1782. OCTOBRE, Qq2 308 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, aux endroits où d’autres gorges communiquent au canal de la montagne, & que les palombes pourroient enfiler, au lieu de pourfuivre leur route vers le lieu de la chaffe, Ces fentinelles tiennent une efpèce d'étendard , fait d'un morceau de toile blanche, qu’ils agitent à la vue du vol, & par ce moyen l’empêchent de fe détourner à droite ou à gauche. : Cette chafle ayant lieu depuis le commencement d'Oftobre jufqu'au milieu de Novembre, faifon où dans ces montagnes les brouillards, les vents de bife & les pluies froides annoncent déjà les approches de l'hi- ver, il y a des jours où le paffage des palombes eft interrompu par le mau- vais temps; alors les Chafleurs paflent aflez triftement leur journée dans une attente inutile, & dans des lieux déferts & incommodes : mais lorfque Île temps eft beau & le vent favorable à cette chañle, il n'yen a peurêtre aucune qui foit nl agréable. Le figral des drapeaux , qu'on nomme chatards, l'avertiffement loin- tain d’un porte-voix , les coups de fifflet des Chaffeurs fur les arbres, l’em- preffement de ceux qui font aux filets à fe cacher ; le filence qui règne dans ce defert , fuivi du cri ou plutôt du jurement de ceux qui, à l’arrivée du vol , jettent la palette ; enfuite le bruit d’aîles de ces pauvres oifeaux, qui fe précipitent dans les filets; la réfurreétion fubite des Chafleurs; courant à leur proie, leur empreflement à s’en faifir & à la mettre en füreté , fur-tout fi un autre fignal annonce l'approche d’un nouveau vol: tout cela, dis-je, préfente un coup dé théâtre qu'il eft impoflible de: voir fans reffentir un fingulier plailr. La palombe a, comme les autres efpèces de pigeons , le vol très-ra» pide; elle eft timide & méfiante, non fans raifon. Au haut des airs, elle eften butte aux oifeaux de proie; fi elle fe rapproche de la terre, elle eft expofée aux coups de fufñl & aux filets: aufñi tout lui fait-il om- brage; & le mouvement, quoique lointain, d’un linge blanc fufñit pour Yempêcher de tourner de ce côté. De cette manière, on conduit dans l'air des troupes entières de ces craintifs oifeaux, comme fi on Les tenoit par un fl, & onles fait aboutir, comme malgré eux, au lieu où ils doivent perdre la vie ou la liberté. Une pa partie fubit ce fort, lorfque le temps eft favorable & que la chafle eft bien conduite. Les filets font fabriqués de ficelle, & ont environ 60 pieds de haut fur autant de large. La pièce revient à environ 80 livres; chaque maille: a cinq pouces de long , lorfqwon tire la ficelle, On teint les filets en: brun prefque noir avec Le jus de la graine d’hièble , dans lequel on les: Jaiffe tremper plufieurs jours. Lorfqu'ils font tendus, leur hauteur ne fe trouve être qué d'environ 30 pieds, à caufe de la queue qu'on laiffe trai- ner à terre, & qui fert à leur faire faire un ventre, c’eft-a-dire, à fe pré- ter À l'impulfon du vol. On choifit pour les placer un côteau d'une pente: aflez douce, & dans une gorge où il eft reconnu que la palombe eft accou- tumée de pañler, La manière de les tendre eft fimple. On place à la hau- teur où on veut les faire parvenir , une poulie de chaque côté , à des ar+ À 2 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 3 bres sil y en a à la diftance requife’, ou à des poteaux plantés à cet éffer. Cette poulie eft attachée entre deux morceaux de bois bien joints, qui empêchent la corde de fortir d’un côté ni de l'autre, & ces mor- ceaux de bois font percés, vers le haut, d'un trou à travers lequel on paile une corde, & c’eft par cette corde qu'on attache la poulie à l'arbre, à l'endroit deftiné. Cela fait, on pafle une corde par l’une de ces poulies; & au moyen d'un crochet, qui eft fixé en terre vers le milieu de la lon- gueur du filet , & à fix ou fept pieds en avant, on fait faire à cette corde un angle ; & la prolongeant au-deflous de ce piquet, pour aller rejoin- dre la feconde poulie , on a exaétement la figure d’une M. Aux deux extré- mités de cette corde fe placent deux morceaux de bois arrondis & un peu oblongs , du poids de dix à douze livres, qui doivent fervir à hâter la chüte du filet. Ces poids, jufqu'à Bale touchent à terre, parce que la corde ainfi difpofée eft à l’état où elle fe trouvera quand le filet fra tombé, Ce premier arrangement fait, on porte le filet, qui s'attache par les deux extrémités de fa largeur , au moyen d’une petite corde, qui y eft paflée dans toute fa largeur, aux deux billots de bois : alors celui qui eft le plus près de la cabane, tire prefque perpendiculairement à lui une des branches de la corde, ou une des diagonales de M, & au moyen d’un fecond crochet, comme celui du milieu , mais placé à 7 pieds feu- lement du bord de la cabane, & toujours à 7 pieds de diftance en avant du filet; & après que le billot eft près de la poulie, il fait pafler la corde fous ce crochet, & l’arrête à un piquet fendu , placé auprès de la cabane même : il tire enfuite l’autre corde vers la cabane; mais comme Le piquet fous lequel elle pafle eft arrêté au milieu , elle décrit une diagonale lorf- que le billot eft auprès de la poulie, & enfuite une ligne droite dudit cro- chet jufqu'à un autre piquet fendu placé auprès du premier, où lon a arrêté la première corde, Les quatre piquets dont j'ai parlé fonc en ligne droite ; lé premier, au milieu & vis-a-vis le filer, ne permet pas à la corde de le quitter; le fêcond, à 6 pieds de la cabane , n'a au contraire qu’un très-petir crochet, qui ne retient la première corde que jufqu’au moment où on lâche le filet : elle quitte alors d'elle-même , & les deux autres, ou un feul fendu en plufieurs parties, dans la cabane même , où on arrête les cordes qui tiennent le fiiec tendu. Une corde de 8 lignes de diamètre eft de groffeur fuifante, & fa onçueur, pour un grand filer, eft d'environ 40 brafles. Au refte, on accommode les filets à la largeur du local, fuivant la commodité des plantations; car il faut de toute nécefité des arbres, non-feulement pour tenir les filers , mais devant & derrière pour les mafquer, car la palombe a la vue très-perçante. Les cabanes font faites de pieux inclinés d'environ 45 degrés, &re- couverts de fougère sèche : elles ne font ouvertes que pardevant, & dif- pofées de façon qu'un Chafleur, couvert par fa cabane, mais agenouillé { 310 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, k en ligue droite des trois piquets, ne découvre guères que 8 ou 9 pieds en avant du filet, car il eft effentiel d’être fort couvert : mais il faut auf être très-prefte à lâcher fon filet; car fi la palombe vient à le toucher encore tendu, on n'en prend point, ou fort peu. IL faut le lâcher au moins 1 pied avant que la palombe n'y touche, & pour lors il eft bien are qu'on ne premne toute une troupe, ou du moins une grande partie. Une cabane fert ordinairement pour deux Chaffeurs. Ainf, l'on voit qu'il eft indifférent dans quel fens fe trouvent difpofés les crochets, puif que , pour l'un des filets, le premier eft à la droite, & pour l’autre il eft à la gauche. On a foin d’attacher le bas d’un filer avec le "bas de ce- fui qui l'avoifine, afin de laiffer le moins de jour poflible entre les deux filets. . Les Trépiers font des gens poltés au fommet des plus hauts arbres , & abfolument cachés dans une cabane de verdure qui y eft pratiquée. On en a plus ou moins, fuivant Les lieux. Il y a beaucoup d'art dans leur office. Le dernier Trépier eft affez communément à cent cinquante pas de celui- ci, & un ou deux autres à de pareilles diftances. On en a fouvent de même de l’autre côté de la gorge, dans le verfant de la montagne vis- à vis, ou bien des Chaffeurs qui, avec un linge blanc attaché à un bà- ton, cfiraient la palombe & la dirigent pour ainf dire où bon leur fem- ble; mais c'elt à eux à favoir donner à propos, & à s'arrêter à temps. L'ufage eft de donner les coups de chatard (nom du linge ainfi arrangé, & des Chafleurs qui font cet office) de haut en bas. Il en eft de même des autres chatards qu'on place fur la crête des montagnes, & partout où il y a d'autres canaux ou gorges par où les palombes pourroient paffer, fibien que de quelque côté qu'elle fe dirige, on la fait aller dans le canal qui lui eft deftiné. ‘ On eft averti de Join de l'apparition d’un vol , car le premier chatard a un cri deftiné à avertir celui qui eft le plus à portées lefecond en fait autant ; & de fignaux en fignaux, la nouvelle eft promptement portée. Lorfque la troupe eft amenée près du premier Trépier , il décoche une pa- lette de bois, blanchie d’un côté, avec route la force dont il eft capable, & ordinairement avec un bon juron”On prétend que la palombe prend cette palette pour un épervier, Quoiqu'il en foit, fi la palette eft bien Jan- cée, qu'elle n'aille ni trop draite, ni trop penchée, & qu'elle tombe fur- tout fort vite, on voit la troupe s'abaifler jufqu'au niveau de la térre, quelque haute qu'elle füc Done & alors le fecond Trépier, lorf- qu'il voit la palombe un peu paflé fa trèpe , darde une feconde palette ; le troifième en fait autant, & le vol, toujours fort peu éleve, vient, avec un bruyant fraças, fe.jetter dans les filets qu'on lache. On .eft averti du moment où il faur fe cacher abfolument- dans les ca- banes, premièrement , par les cris redoublés des chatards, & puis par un mot d'avis du dernier Trépier; & l’on fait quand il eft temps de prendre SURPHIST. NATURELLE ET LES ARTS. #*3rt en main les deux cordes, par un fifflement que fait ce même Trépier. On fait de même fi la troupe eft petite ou grande par ce fignal; car un feul coup de filet très-court annonce très-peu de palombes , awflieu qu’un fiflement alongé en indique une troupe. À ce fifflement, on ne fait que dérouler les cordes du piquet fendu; & fes tenant d’uné main, on re- garde attentivement , pour favoir s'il en arrive dans celui que l'on tient, Si on en apperçoit , comme je l'ai dit, on lâche en ouvrant la main; fi le vol eft dans d’autres filets, on rattache fes cordes , & on va aider à fortir le gibier pris: oma fur-tout foin, dès qu'un filer eft vuide, de le replacer. , Il eftà remarquer que les palombes ne font pas toujours aufli aifées à rendre; le temps influe beaucoup fur li manière dont elles prennent la palette. Si le temps eft beau & que le vent foit au nord , elles volent trop haut ; fi le vent eft au couchant, elles ne font pas auffi fenfibles à la peur. Le temps le plus favorable eft un temps noir fans être couvert, & fur- tout un vent de fud; alors la palombe eft très-peureufe, & volant natu- relléement fort bas , ne donne pas de peine à conduire , ni à abattre, $ Lorfqu'’on détendles filets, ce qui fe fait chaque foir , on ne fait que les détacher des billots, mais on laiffe toujours les cordes. Un filet bien foigné peut durer quarante ou cinquante ans. Il faut le reteïndre rous les ans , ne point le ferrer mouillé, ni garder en lieu humide & en- fermé. 1 © On conçoit, par la defcriprion des filets, & ‘par leur difpofition, que lorfqu'un vol de palombes y donne, il poufle devant lui Ja partie du mi- lieu, & que la partie haute tombant fur la baffle, ces oifeaux font en- fermés comme ge une poche: on fe hâte de les en tirer, & on les met dans un fac qu'on porte dans la cabane; & puis, dans les intervalles de loifir,. on les examine les unes après les autres. On tue celles qui fe trou-' vent bleffées: on coupe à celles qui font faines les grandes plumes des af- les, & on tranfporte le tout à la barraque qui fert de logement aux Chaffeurs. Une grande partie des palombes fe blefle à la prife, à caufe de la vé- hémence de leur vol. On aflure qu'il eft arrivé que des palombes fe fonc coupé le col contre les mailles du filer, tellement que la tête s'eft fépa- rée du corps. On prend quelquefois d’autres oifeaux avec les palombes ; des grives , merles , bécaffes , éperviers. J'ai nourri long-temps un faucon qui fut pris avec une troupe de palombes qu'il pourluivoit. Le prix des palombes mortes eft dans ce pays communément de 12 f. la paire; les palombes vivantes fe vendent de 6 à 8 livres la douzaine, On les nourrit en volière avec du gland & du bled d'Inde: mais cet oifeau étant vorace, fa nourriture devient toüteufe à la longue, La pa- 312 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lombe s'engraifle aifément en cage: on la garde durant tout l'hiver, &, fi on veut, jufques vers l'été. Elle fournit un mets excellent: on l’ap- prête en falmi, comme la bécafle, & elle vaut encore mieux rôtie : mais ce doit être fi peu que la chair refte faignante ; elle eft alors tendre 8: de très-bon goût, tandis que dans d'autres pays , où on a rarement occafion de manger du pigeon ramier, & où on le cuit au même point que d’autres volailles , il pafle pour un aliment coriace. On fait encore la chafle aux palombes à coups de fufil, moyennant des appeaux , qui, fixés fur des HA en croix, font attachés fur la branche d'un arbre, au haut duquel eft pratiquée une niche de verdure , d'où un Chaffeur fait jouer les appeaux , loriqu'il apperçoit des palombes en l’air; elles viennent s’y poler , ou fur les arbres voifins. Cette chafle eft moins difpendieufe , mais auffi moins agréable que celle qu'on vient de décrire: on n'y prend d’ailleurs pas de palombes en vie, Les palombes, comme les autres oifeaux qui ont quitté les pays du nord à l'approche de l'hiver, y retournent au printemps ; mais le paflage nm'eft pas aufli régulier qu'il l’a été en automne. Ces ojfeaux repaf- fent nos montagnes pour ainfi diré à la débandade, & l’époque n’en eft as fixe; elle dépend de la durée de l'hiver, qui, dans ce climat , fem- bte fe confondre avec le printemps. Souvent japrès avoir joui en Mars de tous Les agrémens de la Nature renaiflante, nous voyons en Avril nos montagnes de nouveau couvertes de neige, MANIÉÈRE De faire les Bougies inflammables d'elles-mêmes ; par M. Lours PEYLA, Amateur de Phyfique expérimentale , demeurant à Turin, E N réfléchiffant fur la nature & fur les effets du phofphore, j'ai toujours été furpris qu’il n'ait été jufqu'à préfent qu'un objet de pure curiofité. Per- fuadé qu'on en pouvoit tirer quelqu'avantage , je réfolus de faire des expériences. Mes tentatives ne furent point inutiles; car dès l'an 1779, j'avois trouvé la manière de le renfermer dans des tubes de verre avec de petites bougies de cire , de telle façon qu'en caffant le tube, & en re- tirant la bougie, elle s’allumoit d’elle-même, Cette découverte, qui n’avoit d'autre mérite que la nouveauté & l'avantage de fe procurer de la lumière dansun moment, fans courir le rifque de fe battre les doigts avec un briquet, fut goûtée de plufeurs , & piqua la curiofité de quelques perfonnes de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31; de ma connoiflance , au point qu'elles voulurent abfolument que je leur communiquafle mon procédé. d Quoique je n'eufle aucune vue d'intérêt, je crus cependant devoir leur en faireun myftère, d'autant plus qu'avant de publier la manière de pré- parer ces bougies , je voulois en conftater la réuflite. A préfent que mes expériences ont répondu à mon attente, je me fais un plailir de publier mon procédé , très-perfuadé qu'on ne me fera pas un reproche de rendre public un fecret dont on pourroit abufer ; car la plupart des découvertes chymiques , & même des remèdes , font fujettes aux mêmes inconvéniens que mon invention. On prendra un tube de verre de la longueur de $ pouces, d'envi- ron deux lignes de largeur, & d’un quart de ligne d’épaifleur. On en fcellera une extrémité avec un chalumeau , ou à la lampe d'émail- leur. L'on aura de petites bouvies de cire pure, &un peu plus longues que les tuyaux de verre dont on voudra fe fervir. Leur grofleur féra proportion- née à la longueur du tube, afin qu'on puifle les y introduire & les y faire tourner aifément, Elles feront faites avec trois fils doubles de coton filé un peu finement. Le bout de la mèche fera d’un bon demi-pouce de lon- gueur, & ne doit point être recouvert de cire. On mettra dans une foucoupe , qu'on remplira d’eau , une lame de plomb de la largeur d’un pouce, longue du double , & de l’épaiffeur de demi- ligne, On mettra le phofphore dans l’eau, & on le coupera fur le plomb avec un couteau bien afñlé: on le réduira en petits morceaux de la grof- feur d’un grain de millet. On prendra un de ces grains de phofphore avec des pincettes , & on le mettra fur du papier brouillard plié en quatre, avec lequel on l'effuiera bien. Après avoir efluyé les pincettes, on pren- dra, fans perdre de temps, le phofphore, & on l’introduira dans le tube de verre; & fi par hafard il reftoit attaché au milieu, on le fera aller au fond avec un fil d’archal. On mettra enfuite environ la quatorzième partie d'un grain de foufre bien fec & bien pulvérifé, c'eft-à-dire ; la moitié du poids du grain de phofphore. Une très-petite Quantité fut; s'il y en avoit un peu trop, il ne fe mélerdit pas entièrement avec le phofphore & feroit un très- mauvais effet. [l y eft très-néceffaire , car il augmente non-feulement le phlogittique du phofphore , mais il lui donne de {a promptitude à s'allu- mer; & étant en aufli petite quantité , il ne peut point faire fentir de mauvaife odeur, Où prendra une bougie, & on trempera l'extrémité de la mèche dans de l'huile de cite bien claire & parfaite, laquelle , par fa grande fluidité, mMontera dans un inftant fur touté la longueur de a mèche {qui n'eft point recouverte de cire ) : celle-ci en AT plus de ce qu’il en fau- Tome XX, Pare, II, 1782. OCTOBRE. Rx 314 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dra; mais on l’effuiera un peu avec un linge fin, cars’il y en avoit op, elle noieroit le feu du pholphore. On introduira la mèche dans le tube, en tournant la bougie tou- jours entre les doigts , afin qu'elle puifle arriver plus aifément au fond. IL faut avoir dans une tafle, de l’eau prefque bouillante, dars laquelle on fera entrer le fond du tube , ayant attention qu'il y plonge à la pro- fondeur de trois lignes feulement , pendant trois ou quatre fecondes, Cette chaleur fervira pour faire liquéher le phofphore & le foufre. Il ne faut pas l'y laiffer davantage , parce que trois fecondes de plus fufifent pour faire prefque calciner le phofphore , & lui ôter par conféquent beau- coup de fa propriété à s’enflammer à l’air‘libre, La bougie étant au fond du tube, on la tournera &retournera en tout fens, afin que la mèche puifle bien s’imbiber du phofphore & du foufre: on la retirera enfuite à la hauteur d’un pouce; on la coupera avec des ci- feaux , & on la repouflera au fond avec un fl d’archal, On préparera & cette façon une douzaine de ces tubes, & on les fcel- lera enfuite hermériquement avec le chalumeau, les uns après les autres, de la même manière que l’on fcelle les thermomètres. J'ai dit de préparer une douzaine de ces tubes, & pas davantage, parce que fi l'on en faifoit une plus grande quantité, le phofphore ayant pendant ce temps commu- nication avec l'air extérieur, perdroit beaucoup de fa propriété de s’en- flammer promptement, lorfqu'on tireroit la bougie du tube. Les tuyaux ayant été fcellés hermétiquement, on les limera légèrement & circulairement au milieu avec une pierre à fufl, ou mieux encore avec une petite lime ronde bien dure, Ufage de ces Bougies. Lorfqu'on voudra s’en fervir, on rompra le tube à l'endroit marqué : Ôn jettera le morceau fupérieur qui a le bout plus pointu , & l’on tournera & retournera plufieurs fois la bougie entre les doigts , en faifant atten- tion de faire toujours toucher le fond du tube à la mèche, afin qu'elle puiffe toujours s’imprégner de tout le phofphore & de tout le foufre: on la tire hors du tube environ 1 pouce; on la repouffe cinq à fix fois au fond , pour occafionner un plus grand frottement : on la tire enfuite tota- lement & avec promptitude, en ayant foin de tenir la mèche penchée du côté de la terre. Si l'air eft fec & chaud , la bougie s’enflammera tout de fuite; s’il eft au contraire froid , ou beaucoup humide, elle fera d’abord un-peu de fu- mée, & tardera quelques fecondes à s’allumer: mais dans les grands froids , elle aura encore beaucoup plus de difficulté à donner une prompte: flamme. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 31$' Pendant que la flame fort de la mèche, on fera tourner la bougie entre les doigts ; & aufli-rôt qu’elle s’y fera bien attachée, on la tournera en haut, & on la tiendra un peu horizontalement , jufqu'à ce qu'elle foit prefque toute confumée. J'oubliois d’avertir le Leéteur que dans le commencement de l'inflam- mation, le moindre courant d'air, ou la refpiration de la perfonne qui a forti la bougie du tube, ou qui y elt préfente, peut faire éteindre la flamme , qui eft très-foible dans ce moment, parce que la force du phof- phore s'eft évanouie avec la Aamme dans un inftant : alors la bougie ne pourroit plus S'allumer. Ainfi , il ne faut point Re dans le moment qu'on voit paroître un peu de flamme, & la défendre du courant d'air avec un chapeau, ou avec quelqu’autre chofe. L'extrémité du tube qui contient la mèche pko/phorifée, doit être obtufe & non pas pointue, afin que les fils de la mèche puiffent bien s'imprégner du phofphore, ce qui ne pourroit pas fe faire, fi l'intérieur du tube n'étoit pas plan, car ils ne s'en imbiberoient pas entièrement avant de fortir du tube. | L'effét de ces bougies eft beaucoup plus prompt, fi , au lieu de s’en fer- vir tout de fuite après les avoir finies, l’on attend trois ou quatre jours. On pourroit les faire durer plus long-temps en les faifant plus grofles & plus longues ; mais étant d’un plus gros volume, elles donneroient plus d'embarras dans la poche, & s’y cafferoient plus facilement , quoi- que renfermées dans un étui. Celles-ci paroiffent être plus commodes , tant pour la grofleur que pour la longueur; elles durent aflez de temps pour pouvoir s’éclairer dans un befoin preflant, & allumer même plu- fieurs chandelles. J'ai erfectionné ges bougies ; je m'occupe à préfent à en faire de la même fe mais qui feront beaucoup plus commodes & plus avanta- geufes, puifqu’on pourra les allumer dans un inftant à fa volonté, toutes les fois qu'on le voudra, même dans les temps les plus froids , & leur vertu durera plufieurs années: mais la compofition en eft beaucoup plus difficile. Dès que j'aurai rédigé à mon gré la manière de les com- pofer , je me ferai un devoir de la communiquer, comme je le fais de celle-ci. Je me crois obligé d’avertir ceux qui ne cennoiflent pas affez Le phof- phore, qu'il fautbienufer de précaution en s'en fervant , parce que fi, par malheur, un petit morceau allumé tomboïit fur la main ou für quelqu'au- tre partie du corps, il brûle dans un moment jufqu'à l'os® Le meilleur & l'unique remède dans ce cas eft de mouiller plufieurs fois la partie avec du linge imbibé d'urine , qui a la vertu d'arrêter le progrès de cette brûlure. Cependant, dès qu’on a fait ces bougies avec foin , il n'y a plus à craindre de fe brûler : il fufht de faire attention que le phofphore ne Tome XX, Parr, II, 1782. OCTOBRE. * Rr2 316 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, s'allume pasr& ne tombe pas fur les mains lorfqu'on l'introduit dans le tube. Cet accident ne m'eft jamais arrivé. M: : On aura de l'huile de cire , en diftillant plufieurs fois avec de la chaux le beurre de cire. Celle du Levant eft très-propre pour cet effet. Dans les diftillations de la cire, de cinq parties, environ quatre fe convertif- fent en eau ,.& une en huile, ce qui-eft bien furprenant. J'ai effayé routès fortes d’huil:s & d’eflences, & je n'ai rien trouvé qui faile mieux dé- layer & incorporer le foufre avec le phofphore, & qui fafle prendre feu plus promptement à la mèche, lorfqu'on la tire du tube; le prix d’ailleurs n'en eft pas aufñi exorbitant, ni fi exceflif que celui de leflence de ca- nelle ou de girofle , dont quelques Amateurs fe fervent. Pour marquer les tubes, il n’y a rien de mieux qu'une bande de cuivre jaune, faite comme une lame de couteau un peu mince, qu'on mouillera avec un pinceau d'émeri très-fin, détrempé avec un peu d’eau. L'on fera’ entrer le tube dans des pincettes de bois, que l’on arrêtera avec une vi- role dans l'endroit où il faudra le ronger circulairement. On les fera au tour avec quelque bois dur ; elles feront longues de 6 pouces, & auront un trou dè la même longueur au milieu , lequel fera d’une ligne de largeur, Un bout aura 6 lignes de diamètre, & ira en diminuant: jufqu'à l’autre extrémité, qui fera de 4 lignes & demie; & par celui ci, elle en- trera dans la virole de fer-blanc. Elles feront fendues par la longueur de 4 pouces du côté le plus gros, avec une fcie mince, qui aura les dents fines. Ces pincettes, par leur bout plus gros, qui ferrera le vube vers fon milieu , aflujettiront la bande, pendant qu'elle rongera le verre un peu profondément tout autour de l'endroit où il faudra le cafler. On le lavera avec de l’eau, pour lui emporter l'émeri, & on l'efluiera bien. Dans l’entaillure, on pañfera , avec une plume à écrire , : dé Fencre un peu chargée de gomme arabique. Cette marque noiréindiquera de jour où l’on devra le rompre , & l'entaillure le fera connoître de nuit à tâtons. Avec ces règles , accompagnées d’un peu de patience, d'ad:effe & de pratique, tout le monde pourra faire des bougies phofphoriqués , qui {e- ront probablement goûtées du Public, à caufe de leur commodité & de leur utilité. : A Turin, ce 17 Juillet 1782. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 317 ————— — RE : LA NOUVELLES LITTERAIRES. D e JOAN. Ern. Hebenffreit, @c. Paleologia Therapie, &c. Paléologie The- rapeutique , dans laquelle on compare les dogmes des Anciens fur L1 ma- nière de guérir les maladies , avec Les fentimens des Modernes ; par JEAN- ERNEST HEBENSTREIT , Profeffeur de Thérapeutique dans l'Univerfité de Lépfick; édition donnée par M.CHRÉTIEN-GODEFROI GRUNER, Profeffeur de Botanique en l'Univerfité de Jena , &c. A Hälle, chez Gebauer, 1778, in-8°; & fe trouve à Strafbourg', chez Koenig, Libraire. Second Memoire fur l'Eleëtritiré Médicale, ou Hifioire du traitement de guarante-deux malades entièrement guéris, ou notablement foulagés ; par M. Mazors DE CAZELLES, Doëteur en Médecine , Correfpon- dant de la Societé Royale, de plufieurs Acadernies | Gc. ,an-12. À Paris, chez Méquignon, Libraire , rue des Cordeliers ; & à Touloufe, chez Dauphin, Sacarau, Moulas & Laporte, Libraires. Différentes obfervations confirment de plus en plus l’eficacité de l'Elec- tricité dans certaines maladies : mais pour qu'on puiile compter jufqu'à un certain point fur cette efficacité, il faut qu'elle foit appliquée dans des ‘circonftances favorables & par un Médecin habile; c’elt alors que d’heu- reux fuccès peuvent récompenfer des foins que l’on s’eft donnés, & c’eit ce qui elt arrivé à M. Mazors. Les détails des traitemens divers qu'il a em- ployés dans différentes maladies , annoncent un Obfervateur éclairé comme un Médecin habile, qui ne choifit pas pour bafe une routine aveuglelli& générale. Nouveaux Principes de Phyfique, ornés de planches, € dédiés au Prince Royal de Pruffe; par M. CarRA, tome II, À Paris, chez l'Auteur, rue neuve des Petits-Pères; Morin, rue Saint-Jacques; & Efprit, au: Palais Royal. Ce troifième volume eft entièrement dans le genre des deux premiers que nous avons annoncés ; même obfcurité , mêmes énigmes à réfoudre, mêmes principes & même ftyle pour les expofer : ce nelt par-tout que des atomes cubicules ou alkilis majeurs ; qu'atomes globnlès ou alkalis mineurs enexcès , qu'atomes pointes ou acides majeurs , qu'atomes fpirales ow acides mineurs , Gc., Ec. 318 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Détail général des Fers, Fonte, Serrurerie , Serrure & Clouterie à l'ufage des bätimens , avec les tarifs des prix ; per M. BONNOT, Vérificateur de Serrurerie. Paris, in-8°, 6 liv. broché, chez Morin, Libraire, rue Saint-Jacques; & chez l’Auteur, rue du Four, Carrefour de la Croix- Rouge, maifon du Papetier, 1782. Etre utile à fes Concitoyens & les éclairer fur leurs intérêts, les inf truire & les mettre à même de n'être plus dupes de leur bonne foi, eft un fervice très-eflentiel | & c’eft celui que M. Bonnot rend aujourd'hui, en imprimant fon Ouvrage. \ ÆEffai fur Les Problémes de fituation. À Rouen, chez Jean Racine, Li- braire, rue Ganterie, 1782, in-8°. de 74 pages, avec 7 planches. Cet Effai . fruit du délaffement d’un homme d’efprit, regarde les diffé- rens pas que le Cavalier peut faire fur un échiquier. MM. Ozanam, Moivre, Guyot, Montmaur , Sa de W...., Capitaine au Régiment de Kinski , cité par Guyot , Euler & M. Vandermonde, fe font occupés de réfoudre le fameux problème de faire parcourir au Cavalier toutes les cafes de l'échiquier, fans s'arrêter fur la même, Non-feulement l'Auteur de cet Effai donne plufeurs folutions de ce problème ; maisil en a ajouté quelques-unes ‘pour d’autres problèmes aufli ingénieux qu’amufans. Pièces invéreffantes fur La Médecine € la Phyfique, traduites de CoCCHx € d'autres célèbres Médecins, in-12. À Paris, chez Lamy, Libraire , quai des Auouftins , 1782, Ce Recueil de Pièces renferme, 1°. le régime Pythagoricien, pour vivre en parfaite fanté jufqu’à une extrême vieilleffe; traduit de Cocchi, Profeffeur en Médecine & en Avatomie à l'Hôpital Royal de Sainte-Marie- Neuve à Florence ; 2°. un Difcours fur l'Hiftoire Naturelle, par le même; 3°. la defcription du corpshumain , par M. Pontonoo, Académi- cien dela Colonia Alfea; 4°.un Difcours Académique fur les influences des corps céleftes, par le même; $°. une Differtation , dans laquelle on examine fi les forces de l'imagination peuvent quelquefois influer fur les maladies, & nous rendre la fanté que nous avons perdue; 6°. une Lettre de M. Chriftophe Mantellaffi , fur la probabilité de la fuperfétation, où l'on traite, par occafon , de différens {yftèmes concernant la génération ; 7°. une Lettre fur la mefure & le calcul des douleurs & des plaifirs ; 8°. enfin , un Difcours Philofophique fur la fympathie, par M. P.P. A, Manu:l-Pratique ; où lon traite des différentes manières Les plus fimples & LS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 319 les meilleures pour faire toutes fortes de vins qui foient de qualité & de garde ; par M. BRIDELLE DE NEUILLAN. À Montarois, chez Prevoft, Libraire ;-à Paris, chez Méquignon , rue des ne in-12 de 104 pages: Séiagraphia Regni Mineralis fecundum principia prôxima Digefli TORBERN + BERGMANN , Chemiæ Profeffor Upfal. , &c., à D, FERBER edita. Lipfiæ & Deffavie , in Bibliopolio Eruditorum ,1782. Sciagraphie du Règne Mineral , diffribuée d'après l'analyfe chymique de M. TORBERN BERGMANN , Profeffeur de Chymie a Upfal, & publiée par M. FERBER , Profeffeur de Chymie a Mittaw ;traduite en François, & aug= mentéæ de notes par M. MoNGEz le jeune, Chanoine-Régulier de Saintes Geneviève, des Académies de Dijon, Lyon & Rouen, Auteur du Journal de Phyfique, in-8°. M. Ferber m’ayant fait parvenir , il ÿ a quelques mois, le Profpe“tus de ce petit Ouvrage, parut en même temps defirer que nous puflions nous charger de fa traduction. A peine at-il été imprimé, qu’il m'en a envoyé un exemplaire. Je m'occupe actuellement de cette traduction; & pour ren- dre cette Sciagraphie aufli complette qu’elle peut être , j'ai foin d'y join- dre aux différens articles qu'elle contient, les analyfes des mêmes fubf- tances faites par nos meilleurs Chymiftes & Naturaliftes François, qui ne font pas venues à la connoiffance du Profeffeur d'Upfal : & ce nombre eft aflez confidérable, D'après les principes de l’Auteur de cette Sciagraphie, je clafferai plufieurs corps qui ne fe trouvent pas dans la fienne ; en un mot , je n'oublierai rien , foit en fait de recherches, foit en fait d’expé- riences, pour que cette traduction fafle une claffification minéralogique auffi exacte & aulli parfaite qu’on la puifle defirer. Elle paroïîtra au com mencement de l'année prochaine, Obfervations minéralogiques, faites dans une partie des Vofges de l'Alface, Ouvrage qui a remporté le Prix , en 1782, à l'Académie de Nancy; par M. DE Sivry, Avocat ai Parlement. À Nancy, chez Hænner , Im- primeur du Roi, 1782. Ce n'eft ici qu’un voyage dans une partie des Vofges. L’Auteur fe propofe de le continuer , & d’achever la defcription minéralogique d’une artie de la France. Il feroit à defirer qu'il fe trouvat des Savans comme Mn. Guettard, Monnet, de Sivry, Faujas de Saint-Fond , &c., qui nous donnaffent de pareilles defcriptions minéralogiques de toutes Les Pto- vinces de la France : ce feroit alors que nous connoïtrions toutes nos richeffes, EX AS 320 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, @. EE. Eee DR RO UIÈUE DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. S U R la déphlogiflication de l Air phlogiflique, par M. ACHARD.Pag. 241 Réflexions fur l'application de la Période lunaire de dix-neuf ans à la Météorolo- gie , avec les Obfervations faites en diffèrens pays fur le froid rigoureux € ex- traordinaire du mois de Février dernier ; parle P. CorTE , Curé de Mont- mOrenCY. 249 Obfervations [nr un Phénomène des environs de Wefoul , par M. HASSEN- FRUTZ, 259 Mémoire fur l'Emétique ou Sel fhbic ; par M. DE LUNEL, Membre du Collége de Pharmacie. 266 La Phofphorefcence du Diamant , avec les nouvelles Expériences de MICHEL DE GROSSER. 270 Mémoire fur la Sangfue Médicinale, par M. pu RONDEAU. 284 Mémoire fur les changemens que Les Chaux métalliques € leurs mélanges faits en Les combinant de deux à deux & de trois à trois, éprouvent par l'aëlion du feu; par M. ACHARD. 292 Bffai [ur la manière de donner un vernis aux Papillons & autres Infeëles, Ec. ; par. M, LANDRIANI. 299 Recherches fur la propriété vurefcible de l'Acide phofphorique offeux ; par M. WIEGLEB, 301 Defcription de la Chaffe des Palombes ou Pigeons Ramiers, dans Les Pyre- nées, 06 Manière de faire les Bougies inflammables d’elles-mémes , par M, PEYLA. ; 12 Nouvelles Lirtéraires, 317 APPROBATION. J lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Oéfervarions fur la Phyfique, [ur l'Hiftoire Naturelle & fur Les Arts, Ge.; par MM Rozrer & Monwcrz/e jeune, Ec. La Colleétion de faits importans qu’iloffie périodi= quement à fes Lecteurs, mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu'on peut en permettre l’impreflion, AParis , ce 19 Oftobre 1782. VALMONT DE BOMARE. RE EE / Jédior Jeu - Octobre 1782. rez: AR nie PT, -NOVEMBRE :782. a + ÉSENE MRORLE SUR LA GÉNÉRATION DES SAUMONS; Par M, FERRIS (1), Lo 1: paroît, Monfieur , par l'extrait curieux de lOuvrage de M. l'Abbé Spallanzani fur la génération des amphibiess inféré dans votre Journal du mois de Mars de cette année, que ce faMant Obfervateur n’a pas en- core découvert la manière donc les fœtus ou les œufs des poiffons fonc | fécondés ; il paroît même conjeturer qu'ils Le font dans le corps de la | femelle ou avant que d'en fortir. . Le hafard, Monfieur, m'a mis à portée peut-être de répandre ue [ lumière fur ce point de l'Hiftoire Naturelle, C’eft environ à l’âce de qua- | torze ou quinze ans, que me trouvant fur le bord d'une rivière poiflon- % neufe, dont les eaux font rapides, bafles & claires , que j'ai apperçu à À environ 2 pieds de profgndeur deux faumons remuer le fableçavec leurs queues oppofées l’une re, & y faire un enfoncement en forme de Î cône renverfé, au-deffus duquel la femelle eft venue placer l'extrémité de fon ventre & y répandre une traînée de fluide rouge: elle fut aufli-tôt . remplacée par le mâle, qui, dans la même pofition, répandit pardeflus un jet confidérable de liqueur blanche: ils fe réunirent enfuite , & cou- vrirent de fable avec les extrémités oppofées de leurs queues , le trou qu'ils avoient d'abord formé ,-& fe féparèrent. Voilà, Monfieur , un fait que j'ai remarqué, quoique fort jeune , & F dont je me fouviens bien diftinétement, M. l'Abbé Spallanzani fera peut- être bien aife d'en être informé; connoiflant la marche de la nature, ïl (1) Plufieurs pétfonnes nous ayant écrit, depuis limprefion de l'extrait de l'Ouvrage de M. l'Abbé Spallanzani , fur le même objet, nous allons inférer ici la Lettre la pe importante, & le Mémoire füivant , qui nous a été indiqué par M. de Fourcroy, Maréchal- de-Camp , & Correfpondant del Académie. Tome XX, Part, II, 1782. NOVEMBRE. Ss ‘322 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dirigera mieux fes nouvelles expériences fur la génération des poiffons, dont le réfultat ne fera pas moins curieux ni moins intéreflant que les autres découvertes de ce Naturalifte célèbre. : Je fuis, &c. Amiens, 15 Avril 1782. MÉMOIRE Sur une fagon de faire naïtre des Saumons € des Truites , pratiquée fur les bords du Wefer ; extrait du Traité des Pêches de M. DUHAMEL DU MoNCEAU. : O N fera conftruire une gaifle de grandeur à volonté; par exemple, de 11 pieds de long, 1 pied & demi de large, & 6 pouces de hauteur. A l'une des extrémités on laiflera une ouverture de 6 pouces en quarré, fermée d'un grillage de fer ou de laiton, dont les fils ne feront pas éloi- gnés plus de 4 lignes les uns des autres. A l’autre extrémité, fur le côté de la caifle , fera pareille ouverture de 6 pouces de large & 4 de hauteur grillée de même : celle-ci fervira pour la fortie de l'eau , l'autre pour fon en- trée, & le grillage empêchera qu'il ne fe puifle gliffer dans la caifle ni rat d’eau, ni aucun autre infecte ennemi ou deftucteur des œufs de poiflons. La caille fera exaGtement fermée par le d our les mêmes raifons: on peut cependant laiffer au couvercle une ouvértnre de 6 pouces en quarré, femblablement grillée, pour donner du jour au jeune poiffon; mais cela n'eft pas néceflaire. On choifira quelque lieu commode près d’un ruiffeau, ou mieux en- core près de quelque étang nourri par de bonnes fources , d’où l’on puifle, par une fente ou petit canal de dérivation , faire couler un filet d’eau d’en- viron 1 pouce d'épaiffeur, à travers la caïfle, par les grilles, après lavoir placée dans la fituation néceffaire à cer effet. Enfin, on couvrira le fond de la caiffe d’un pouce d’épais de fable ou de gravier , recouvert d’un lit de petits cailloux jointifs de la grofleur d’une noïfette ou d'un gland, ( On aura par ce moyen un petit ruifleau factice , roulant fur un fond de cailloux : on en verra plus bas la néceflité ). On préparera une ou plufieurs de ces caifles en lieu convenable pour le mois de Novembre; c’eft la faifon où les famons commencent à frayer. RE LT nt crime dre dd eh ds PR “SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 313 Alors, mâles & femelles, ils remontent des grandes rivières dans les ruif- faux pour ÿ jetter leurs œufs & leur femence, comme on le voit arriver près Kaldorff: c’eft alors qu'il faut procéder comme il fuit. On verfera environ une pinte d’eau bien claire dans quelque vafe bien nettoyé, comme feau de bois, ou tine, ou baquer; & faififant une fe melle de faumon par la tête, on la tiendra fufpendue fur ce vafe. Si fes œufs font bien à maturité, ils comberont d'eux-mêmes dans Je vaifleau; finon en lui preflant lévèrement le ventre avec la paume de La main, les œufs fe détacheront , & on les recevra facilement dans l’eau. On fera de même d’un faumon mâle : quand il y aura fur les œufs affez de laitance pour blanchir la furface de l’eau , l'opération de la fécondation des œufs fera finie. On répandra ces œufs ainfi fécondés dans une des caifles ci-deflus, & on y fera couler de l’eau du ruifleau; ayant attention qu'elle n’y coule pas avec aflez de rapidité pour emporter les œufs avec elle, car il faut qu'ils demeurent tranquillement entre les cailloux. #11 faut avoir foin de nettoyer de temps en temps ces œufs, des ordures que l'eau y apporte & y dépofe; cela fe peut faire au moyen d'une plume que l’on agite fur l’eau de côté & d’autre. Quelquefois au bout de cinq femaines les petits faumons font déjà formés dans les œufs, y font vivans & s’y remuent : on le reconnoît à leurs yeux. qui font noirs, au lieu que les autres parties font diaphanes & ne ren- voient point la lumière. Huit jours après que l'on a diftingué les yeux, ces petits poiffons percent la coque ou peau tendre de l'œuf, & fe promènent dans l’eau, Le temps néceffaire pour la naïffance des faumons n’eft cependant pas toujours le même. Si l'eau de la fource eft plus chaude, l'opération fera plutôt faite, comme aufli fuivant la température de l'air. L'expérience nous a appris qu'il faut fouvent le double de temps pour faire éclore ces œufs, - Pendant que le poiffon croît dans fon œuf, on y diftingue très-bien une membrane ou pellicule déliée , féparée de la coque. Le petit poiffon couché dans cette coque eft adhérent à la membrane, qui forme ün fac autour de lui, comme fi c’étoit un pois traverfé par üne petite aiguille. Ce petit fac, qui tient au poiflon, & qui remplit prefque toute la ca- pacité de l'œuf, lui tient lieu tomes & d'entrailles. Le poiffon fe nourrit quatre ou cinq femaines après qu'il eft éclos , de la matière renfermée dans certe membrane, Pendant ce temps-là fa gueule , d’abord, informe , s’a- longe fucceflivement; puis enfuite Le fac difparoît tout à-fait & l'animal a pris la figure qu'il doit avoir. . hs. Après les quatre ou cinq premières femaines, la faim furvient à ces pe+ tits poiffons; & comme dans les caifles ils ne trouvent ni les vermifleaux propres à les nourrir, ni l'efpace dont ils ont befoin, ils vont chercher lun & l’autre en fortant de leur caïfle à travers les grillages. Si pour lors Tome XX, Part. II, 1782: NOVEMBRE. Ss2 324. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, " le filet d’eau de la caïfle aboutir à quelque réfervoir fuifamment grands où lon puilfe élever les faumons jufqu’à la groffeur dont il les faut pour rempoiflonner les étangs, c’eft tout ce qu’il y a de plus convenable. Les faumons & les truites nouvellement éclos, peuvent fe conferver jufqu'à dix femaines dans quelque grand vafe de verre bien net, ou de quel- que autre matière, comme de porcelaine , faïence, &c. fl faut feulement faire en forte de les ÿ tranfporter fans les bleffer, & avoir ajouté pour cela à Ha caiffe où ils font nés , un petit crible de crêpon, monté fur une planche qui entre jufte dans le travers de la caiffe, Nous ne nous arrêterons pas davantage à cette defcription, pour abréger (1). Pour faire naître les truites, on fe fert précifément de la même méthode, à laquelle il n'y a rien à ajouter: j'avertirai feulement ici que leurs œufs & laitances font à maturité & en abondance dans les mois de Décembre & de Janvier; & comme les truites font plus petites que les faumons , il neneft que plus aifé (2) de faire fortir leurs œufs & laitances, fans leur faire courir aucun rifque de la vie. Il ne faut pas croire que Les poiflons foient fujets à s’accoupler en mélant leur fexe comme les aurres animaux, quoiqu'on ne s’en apperçoive pas, ni que leurs œufs aient éré fécondés par le mâle avant d'être pondus, en forte qu'il en püt éclore de petits poiflons fans cette formalité fuperflue d'y répandre de la laitance , comme naîtroient des poulets, en mettant fim- es des œufs fous une poule ou dans un four ou poële, ainfi qu'en e pratique aux Ind-s (3). Pour m'aflurer de cette vérité, je fs, il y a en- viron fix ans, l'expérience fuivante. Je tirai d'une truite, des œufs très-mürs, & j'en eus tout Le foin poflible, fans y mettre dexlaitance : jamais il n’en vint le moindre poiflon; tous ces œufs fe corrompirent en très-peu de temps: j'en ai conclu avec certitude É les œufs des truites & des autres poiffons ne reçoivent pas leur fécon- ation tant qu'ils font dans le corps du poiffon & attachés à lui, comme cela arrive aux autres animaux, mais feulement lorfque les truites les ont pondus. É } En faifant éclore des truites, j'ai quelquefois remarqué quantité d'avor- tons ou de monftres , certaines années plus, d’autres moins. Quelques-uns (n) Il auroït cependant été bon de dire un motde la nourriture de ces petits poiffons dans le vaifleau de verre, au bout de quatre ou cinq femaines. Les vermifféaux font bien difficiles à trouver dans cette faifon. (2) Lasraifon de cette plus grande facilité ne fe fait pas bien fentit, à moins que les truites, qui font plus petites , ne foient plus aifées à contenir dans une fituation verticale au-deffus du vaiffeau qui reçoitles œufs & laitances; À moins que les faumons , qui font- plus forts, & qui fans doute fe débatrent vigoureufément , exigent, pour les contenir , des efforts qui puiffenc les bleffer & les faire périr. (3) L'Auteur, apparemment, n’avoit pas oui-dire qu’on le fit en France. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 325 avoient deux têtes & le corps bien formé. D’autres avoient le ventre com- muün , & du refte étoient deux poiflons bien diftinéts, comme feroient deux poiflons ordinaires que l’on coucheroit fur une table , bien ferrés l’un contre l'autre par Le ventre. D'autres étoient tellement unis par le Aanc, qu'ils ref fembloient à deux truites qui fe tiennent feulament l’une près de l'autre dans l'eau. Quelques.unes avoient deux corps par en-haut , fe réuniflant en un feul vers le milieu, & terminés par un feul ventre & une feule queue. Enfin, parmi ces montres j'en ai rencontré un qui paroifloit formé de deux poiflons qui fe traverfoient, n'ayant qu’un feul ventre pour les deux. De tous ces avortons, jamais aucun n’a vécu jufqu'à fix femaines , c’eft-à- dire , au-delà du rerme où la matière contenue dans la membrane ou fac de l'œuf, & qui leur fert d’eftomac , peut fufñire à fa nourriture. On peut conjeéturèr que rous ces monftres de poiflons proviennent de ce qu'un œuf s’eft trouvé fécondé par plus d’un animalcule de la laitance; & comme c'eft la matière contenue dans l'œuf de la truite & des autres poiflons qui fournit au petit poiflon le ventre, l'eftomac & les inteftins , au lieu que les autres parties du poiffon véoètent ou pouflent entre la mem- brane & la coque de l'œuf, tous ces montres fe trouvent avoir les intef- tins communs, & il eft facile d’en inférer comment fe produifent les monf- tres, dans les poiflons & les animaux ovipares: mais ce fyftème ne peuts avoir lieu pour les-monftres des vivipares , qui étant nés dans une ma- trice, n'ont pas de même un feul fac deftiné à leur fournir les entrailles en commun. Il neft pas fort rare de trouver de ces monftres dans les oifeaux, même dans les quadrupèdes, bien plus daris les végéraux; & l'on penfe que, quand les embryons étoient très-rendres , deux fe font collés & enfuire comme greffés lun à l’autre. + » Les œufs de truites, principalement quand ils font à maturité, font to- talement féparés les uns des autres, ainfi que de toutes les autres parties du poiffon , & couverts d’une peau ou coque très-dure : il n'y a donc pas alors beaucoup de circulation, s’il en refte quelqu'une , entre les liqueurs du poiffon & celle de l'œuf. Auffi les œufs de truites ne fe corrompent- ils pas aufi-tôt que le poiflon, &c j'en ai vu fe conferver fains quatre & cinq jours après que le poiffon s'étoit putréfié. Pour m'en affurer par expérience, j'ai pris les œufs mürs d'une truite déjà pourrie, étant morte depuis quatre jours & très-puante; je les ai cou- verts des laitances d’un mâle vivant, & j'ai eu des poiflons comme fi la truite qui m'avoit fourni les œufs eut été vivante. Et attendu que la vie des animalcules des laitances n'eft pas non plus tellement liée à celle de l'animal qui les produit, que la mort du poiffon puifle donner aufli-tôt la mort à ces petits animalcules, mais que ces ani- malculès au contraire confervent la vie & leur faculté teproduétive , tant que le fuide qui les contient n’a pas contracté de putréfaction; c'eft un Z 326 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fait conféquent & d'expérience tout enfemble, que cette efpèce de pa- radoxe, é . Parle moyen des laitances & d'œufs de truites déjà mortes & en partie fétides , on peut faire naître de nouvelles rruites, ( On fent combien, awmoyen des faits de ces quatre derniers articles , on pourroit trouver de facilité à fe procurer des truites dans un canton où jamais il n’y en auroit eu ). L'exemple des mulets entre Les quadrupèdes & des brèmes entre Les poif- fons, fait voir que le mélange de deux efpèces en produit une troïfième qui a beaucoup de rapport aux deux premières. Pendant les mois de No- vembre, Décembre & Janvier, les faumons & les truites ont leurs œufs & laitances en maturité, On peut donc faire le mélange de ces deux ef. pèces, & éprouver f l'on aura des poiflons qui ne féïient ni truites ni fau- mons, mais qui tiennent un milieu entre les deux. ILne faut pas conclure de-là que l’on aura des truites faumonnées : celles- ci ne conftituent pas une efpèce différente de la truite qui a la chair blanche; j'ai fait un très- grand nombre d'expériences qui prouvent & conftatent que la différence entre les cruites faumonnées & celles qui ne le font pas, vient en partie de la nature de l’eau dans laquelle elles vivent, & prin- cipalenrent de leurs alimens. Nous avons dans nos cantons le Pourvoyeur du carème de Veftrux, qui poffède un vivier dans lequel toutes les truites jettées de la groffeur du rempoiflonnement deviennent en un an prefque faumonnées. Cette fofle reçoit la chûte d’un ruifleau dont l’eau eft de a meilleure qualité, très-propre à diffoudre le faven, & nourrit beaucoup de goujons ou barbillons , comme 1l s’en rencontre beaucoup dans les ruif- feaux. Qn trouve de même des truites faumonnées communément dans tous les ruifleaux dont l’eau eft de cette efpèce, & qui abondent en gou- jons: c’eft par cette rajfon que j’attribue à la nature des eaux & à la nour- riture des truites, certe propriété d'améliorer leur goût , & de changer La couleur de leur chair. Les brochets fraient au mois de Mars, & les truites, comme nous l'avons dit, en Décembre & Janvier, quelques-unes même en Février, quoiqu'aflez rarement, Si donc on trouvoit moyen de conferver des œufs de truites juf- qu'en Mars, ce que je n'examine pas ici, on pourroit eflayer fi des lai- tances de brochets jettées fur des œufs de truites produiroient une troi- fième efpèce. I! eft bon de remarquer que les animaux métis , ou’ produits de deux efpèces différentes , n’ont pas la faculté de fe reproduire; & il eft évident par-là que Dieu, en créant la nature, a déterminé la quantité d’efpèces auxquelles il a voulu donner l’exiftence. Les œufs des faumons & des truites fe pourriffent infailliblement s'il ÿ féjourne quelque faleté , où qu'ils reftent long-temps fur la terre, quoique LS SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 327 les petits poiflons y foient déjà tout formés : c’eft ce que m'ont appris quan- + tité d'expériences; & c'eft la raifon pour laquelle ces efpèces ont reçu de la Nature l'inftinét de dépofer leurs œufs fur le gravier des ruifleaux, dans les endroits&où le courant de l’eau les nettoie continuellement de route ordure, Les truites qui font dans les étangs y jettent bien leurs œufs & femences dans la faifon. Ces œufs combént fur la terre ou la vafe; ou s'il fe ren- contre un fond de gravier ; pierres ou fable, c'eft-l2 que la truite fraie, & par fon mouvement elle travaille tant qu'elle peut à nettoyer fes œufs : mais c’eft tout au plus fi elle peut les entretenir propres pendant huit jours, C'eft un fait certain, que tout ce qui repofe dans l’eau la plus pure, con- tracte de jour en jour quelque crafle : il et impofñlible que les œufs des truites y demeurent environ dix femaines fans devenir fales. Voilà pour- quoi jamais le frai des cruites ne réuflit dans les étangs, à moins que ce ne foit dans des endroits où le fond foit de gravier, & où il fe rende des fources d’eau vive. Il fe trouve cependant, mais très-rarement, de jeune frai de truites dans qd étangs, & l’on s'imagine qu'il y eft éclos; mais dans ces cas il aut remarquer qu'il y tombe quelque fource voifine , ou quelque ruifleau qui coule fur du gravier. La truite, aux mois de Décembre & de Janvier, ne manque pas de monter de l'étang dans ces ruifleaux pour y jetter fes œufs & fes femences. Dès que Les perits font éclos, ils cherchent l'eau & leur nourriture, defcendent dans l'étang , & font croire à ceux qui n’y re- gardent pas de fi près, qu'ils y ont pris naiffance. Nos obfervationsæi-deflus font voir que les truites ne peuvent fe mul- tiplier dans les étangs: on fait d’ailleurs qu’il feroit impolfible de tirer tous les ans des ruifleaux , fans un dommage confidérable , un rempoiflonnement ou alvinage en ce genre, outre quil ne fe trouve pas par-tout des ruif- feaux qui produifent des truites, quoiqu’on eût dans fon voifinage des étangs très-propres à les nourrir. On ne pourra done difconvenir que cette inven- tion de faire naître des truites, au moyen des œufs & des laitances , ne puiffe procurer un grand profit dans beaucoup d'endroits , outre le plaifix & l'amufement que l'on y pourra trouver. Les faumons , dañff la faifon de leur frai, pailent comme les truites des rivières dans les ruiffeaux caillouteux; &, après y avoir frayé , reviennent dans les rivières, où les petits faumons viennent les trouver dès qu'ils Le peuvent. Tel eft l’inftinét que la Nature leur a donné; d'où l'on peut con- clure, avec vraifemblance, que les jeunes faumons ne fe tiennent point du tout dans les ruiffeaux, & qu'il eft difficile de Les contenir dans des vi- viers, quand il y entre & qu'il en fort des fources abondantes. Les poiffons voraces de nos contrées, comme brochets, truites, &c., lorfqu'on les garde à part dans des viviers , fe nourriflent principalement des rats d’eau, grenouilles , lézards , falamandres d'eau , orvets & autres 328 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, infectes de cette efpèce ; & comme les faumons fe nourriflent de même ; on ne perdra pas fes peines, fi l'on jette beaucoup de ces infectes dans les étangs où l'on veut les faire profiter, Les eaux d’étangs propres à nourrir les carpes, font ordinairement du même degré de chaleur que celles dans lefquelles les faumons aiment na- turellément à demeurer; c'eft ce qui fait que les eaux tempérées leur con- viennent mieux que les étangs plus froids, dans lefquels les truites fe plai- fent davantage. : Les faumons ne fraient pas dans les étangs, & il eft très-difficile d’en pêcher dans les rivières pour le rempoiflonnement: il fuit de-là que notre invention ci-deflus des œufs & laitances de truites & de faumons peut être très-utile , pourvu que les étangs où l’on voudra les garder leur fourniflenc la nourriture, J’ai actuellement quatre cents trente petits faumons de la première expé- rience que j'ai faite pouren élever: lorfqu'ils onteu fix femaines , je les ai dif- perfés dans plulieurs petits viviers ; j'efpère qu'au bout de l’année je pourrai juger avec certitude s'il fe trouve quelque profit à nourrir & à garder ainfi des faumons dans les étangs. Eesbrochets & les perches fraient dans la plupart des étangs , au lieu que les carpes & les karutfchen (corvus pifcis ou coracinus)ne fraient qué dans ceux où Les eaux font tempérées, aux endroits qui fe trouvent unis fans beaucoup d'her- bes , & qui ne font pas environnés de beaucoup devafes molles. Si la Nature n’a pas ainfi difpofé Le terrein d’un étang, il eft très-facile d'y remédier à peu de frais ; & après avoir éprouvé & obfervé comment il convient de préparer & d'entretenir les étangs, on pourroitätirer un grand profit de cette éducation artificielle des poiffons, à l'exemple de tout ce qui vient d’être dit fur Les cruites & faumons de notre pays. Les poiffons mâles ont auprès de l’arête deux lobes de ce qu'on ap- pelle la laitance ; c’eft une-matière blanchâtre & quelquefois un peu grife, dont les parties font afez folides. Cette matière s’accroît ordinairement depuis le printemps jufqu’au mois de Novembre dans les faumons, & jufqu’en Décembre dans les truites, & c'eft la matière prolifique de ces poiflons. " Lorfque le temps du frai des faumons & des truites eft arrivé, il fe li- quéfie journellement dans chaque mâle environ la fixième partie de cetre matière , qui du’ refte demeure folide, C’eft au moment de certe liquidité w’elle a acquis route fa maturité; & alors elle reffemble à un véritable Jait blanc & fluide, qui contient les animalcules feminaux parvenus à leur perfection. Les femelles de ces poiffons ont pareillement leurs œufs affemblés en deux lobes contigus à l’épine du dos, & qui y croiffent dans Le même temps. Lorfque ces œufs, à l'approche du frai, ont acquis leur jufte volume & Jeux : . SUR L’'HIST. NATURELLE ET-LES ARTS. 329 leur maturité, la membrane qui les unit enfemble s'en fépare; en forte qu'au moyen de quelques mouvemens, foit d’extenfion ou de compreflion, les œufs font expulfés l'un après l’autre du corps de la femelle, Au moment du frai des faumons , comme en Novembre, le mâle & la femelle , dont les laitances & Les œufs font à maturité , fortent des grandes rivières, vont gagner quelque ruifleau dontl'eau murmure fur un fonds de cailloux , fable ou pierres, parce qu'il faut un tel fonds pour que les œufs s'étendent, Alors le mâle fe tient auprès de la femelle : tous les deux s’agitent & fe frotrent le ventre fur le fable ou fus le fonds , afin de faire fortir par ce petit choc ce qu'ils ont d'œufs & de laitances en état de maturité. En même cemps que les œufs tombent du corps de la femelle , leur poids les porte vers le fonds; & comme il eft pierreux, l’un pafle derrière un caillou, l'autre derrière un autre. On peut remarquer dans les eaux courantes, que chaque petite pierre occafionne un petit tourbillon d'eau , au milieu te quel fe trouve un point de repos , dans lequel eft chaflé tout corps léger qui fe rencontre , & par conféquent l'œuf de notre poiffon : c'elt ainfi que fe difperfent & s'étendent les œufs de cruites & de faumons fur les fonds graveleux des ruiffeaux, - La laitance du mâle fe répand en même temps par petits tourbillons fur le fable & les graviers, compolée , comme on le fait, d’une infinité d’animalcules féminaux , dont l’un étant porté d’un côté de l'œuf, l’autre d'un autre , il s’en trouve un qui rencontre certaine cicatricule de l'œuf, s'y infinue & le féconde. Après cette opération, le cours & le choc con- tinuel de l'eau conferve les œufs dans la propreté qui leur eft indifpenfable; & après environ dix femaines , arrive au jour le petit poiflon , plutôt ou plus tard , felon que la fource eft d'une température plus ou moins froide ou chaude, Si l'on compare cette hiftoire de la propagation. naturelle des truites & faumons , avec les procédés que nous en avons déduits pour les faire naître chez foi, nous nous flattons-que l’on reconnoîtra dans notre mé- thode toutes les attentions indiquées comme principales & effentielles par la Nature, en forte qu’on pourra en hafarder l'expérience avec confiance de réullir, 77 a SLA Tome XX , Part, II, 1782. NOVEMBRE, Tt * 330 OBSERVATIONS. SUR LA PHYSIQUE, EXAMEN CHYMIQUE DE L'AURUM MUSIrUM; Procédé pour l'obtenir conflamment beau ; par M, le Marquis DE BULLION. UOIQUE l’aurum mufivum foit une des expériences de Chymie la plus frappante, par l’alrération qu’on fait éprouver à l'étain, par la cou- Jeur jaune & brillante de lo: qu'il prend, cependant les Chymiftes ne paroiflent prefque pas s'y êtr: arrêtés (1); peut - être cela provient-il de la difficulté qu’il y a de l’obtenir: un coup de feu trop fort fait bientôt difparoître cette couleur; ce- qui fera démontré dans la fuite de ce Mé- moire. La préparation d’étain, connue fous le nom d’aurum muficum, ox de mofaïque , tire fon nom de l'emploi qu’on en fait pour dorer: on trouve dans quelques Auteurs aurum muffcum , or de Muficien; cette dénomina- tion elt triviale, & ne mérite pas qu’on s’y arrête. L'emploi qu'on peut faire de laurum muficum, pour exciter en plus & prodigieufement l'effet des machines électriques , me fit rechercher à Paris cette préparation : ce fut en vain. J'en fis venir d'Angleterre, & delirant ‘m'en procurer à meilleur compte, je pris le parti d'en faire. Kunckel, dans l'Art de la Verrerie, dit qu’on peut préparer l’eurum mu/t- yum avec parties égales d’étain, de mercure, de foufre & de fel am- moniac. , On fait fondre l’étain dans un creufet; on verfe deffus le mercure qu’on a fait chauffer dans un autre creufet; on agite le mélanse & on le verfe encore chaud dans un mortier de fer après lavoir pulvérifé: on y ajoute le fel ammoniac pulvérifé (2); on triture le mélange jufqu'à exacte com- binaifon ; il fe dégage une odeur de foie de foufre. J'inrroduis enfuite ce mêlange dans un matras à long col, capable de contenir trois fois autant de matière ; l'extrémité de ce col doit être bouchée avec un tampon de papier. Je place le matras dans un bain de fable, où je mets affez de fable pour que les trois quarts du ballon foient couverts. (1° Excepté M. Woulf, qu'on m'a dit avoir donné un Mémoire relatif, mais dontje gai pointeu connoiffance. (2, Kunckel recommande de verfer le fel ammoniac pulvérifé (ur le foufre fondu ; mais cette manipulation eft inutile, exige plus de peine , & n’accélère point l'opération. { Art de La Verrerie , pag. 465.) “ \ SUR L’HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 331 Je commence à échauffer par un feu gradué, que j'augmente jufqu'à faire rougir obfcurément le fond du bain de fable; je foutiens Le feu pen- dant trois heures : il fe dégage au commencement de l'opération une odeur de foie de foufre infupportable; il fe fublime du foufre , du fel ammoniac, du cinabre & un peu de fublimé corrofif. Les vaiffeaux étant refroidis & le matras café, il s’en exhale une odeur fuffoquante d'acide fulfureux; laurum mufivum occupele fond du ballon, & offre une mafle d'environ 2 pouces d’épaifleur. Quand 6n a employé 8 onces d’érain, quelquefois cet aurum mufivum elt recouvert de cinabre; après l'avoir féparé, on trouve 9 onces d’or de mo- faïque : il ya fouvent fur les parois du ballon de l'aurum mufivum cryftal- lifé en lames hexagones , difpofées en rofe; celui-ci eft plus brillant & plus doré que celui qui eft en mañfe. En variant les dofes de foufre & de fel ammoniac pour préparer l'au- rum mufivum, j'ai reconnu que l’on pouvoit diminuer la quantité de foufre, & fur-tout de fel ammoniac, & obtenir autant de cet aurum rmufivum & d’une aufli belle qualité. - Je n’emploie plus , pour le préparer, que 8 onces d’érain amalgamé avec aurant de mercure, # onces de foufre & 4 onces de fel ammoniac. Les expériences dont je vais rendre compte, ferviront à confirmer l’étiologie que M. Sage a donnée fur la préparation de l’aurum mufivum. Le mercure qu'on emploie dans cette opération, ne fert qu'à divifer l’é- tain & lui faire préfenrer beaucoup de furface (1): dans cet érat l'acide marin, principe du fel ammoniac, fe combine avec l'étain qu'il dépouille d'une partie de fon phlogiftique; l'alkali volatil du fel ammoniac s’unit au foufre, & produit le foie de foufre volatil qui fe dégage pendant certe PURE opération. sr L'action du feu continuée décompofe l’étain corné, dont l'acide marin devenu libre fe porte fur une portion de mercure avec lequel il conflitue du fublimé corrofif. L'autre portion d'acide marin s’unit en excès au fel ammoniac qui s’eft fublimé fans fe décompofer, & donne à ce fel ammo- niac, qui fe trouve mêlé de fublimé corrofif, la propriété de rougir Les teintures bleues des végétaux. | L'analyfe de l'aurum mufivum fait connoître que cette préparation ne contient que du foufre combiné avec Pétain : mais l'acide marin a con- couru à la conféction’de cet or de mofaïque; c'eft ce que les expériences - fuivantes feront connoître. J'ai mêlé enfemble 8 onces de potée d’étain & autant de foufre; j'ai ex- pofé Le tout au feu, en employant l'appareil que j'ai décric; le foufre s'eft (1) Ayant mêlé dela limaille d’érain avec le foufre & le fel ammoniac , j'ai obtenu de très-bel aurum mufivum. Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE. Tce 332 OBSERVATIONS SUR LA PHISIQUE, combiné avec la chaux d'étain, & la mafle qui. en eft réfultée avoit une couleur brunâtre ; il ne s'eft point fublimé de foufre. Il eft néceflaire que l’étain foit pourvu de fon phlosiftique, pour que l'aurum mufivum puifle s'obtenir, puifqu'un mélange de 8 onces de poté@, d'autant de fel ammoniac & de foufre, ayant été expofé au feu, le foufre & le fel ammoniac fe font fublimés, & la chaux d’étain eft reftée au fond du matras fans velliges d'aurum mufivum. Si l’étain a été diflous par l'acide marin, enfuite précipité par le natron, lefpèce de chaux qu'on obtient étant mêlée avec du foufre, enfuite ex- pofée à lation du feu, produitle plus bel aurum mufivum. J'ai employé pour cette expérience 8 onces de précipité d'étain & 4 onces de fleurs de foufre; cet aurum mufivum n’étant point propre à aug- menter l'activité des machines électriques, j'ai cherché à déterminer d’où cela pouvoit prévenir, & j'ai reconnu qu'en ajoutant à un nouveau mê- lange un quart de foufre, l'aurum mufivum que j'ai obtenu étoit un peu rouge & donnoit beaucoup d'activité aux machines électriques ; j'ai dif- tillé dans une cornue lutée 1 once du plus bel aurum mufivum, dans la préparation duquel j'ai fait entrer du mercure. J'ai adapté à la cornue un récipient dans lequel j’avois mis de {4 diffo- lution de nitre lunaire étendu d’eau ; il a d'abord paflé de l'acide fulfu- reux , enfuite du mercure, qui a étamé le col de la cornue: en continuant le feu , une portion du foufre s’eft dégagée de l'aurum mufivum ; ce qui ref- toit au fond de la cornue avoit pris une couleur grife & pefoit un peu plus d'un fixième de moins ; ce qui manquoit pour compléter le poids étoit pour la plus grande partie du mercure, & ce mercure provenoit d'un peu de cinabre qui ne s’étoit point fublimé, & qui étoit reftéinterpofé dans la mañle d'aurum mufivum, Lorfqu’il ne refte point de cinabre, on n'obtient point de mercure en dif- tillant l'aurum mufivum, la diflolution d'argent que j'avois mife dans le récipient n'a point manifefté de lune cornée; ce métal a été précipité par Yacide fulfureux & a pris une couleur orife, L'aurum mufivum étant expofé au feu dans un creufec, s’y fond prompte- ment, & produit par le refroidiflement une mafle grile & feuilletée, ayant uelques cellules dans fon intérieur; ces cellules font quelquefois tapiflées d’étain fulfureux , lamelleux & capillaire. Toutes ces expériences prouvent que le mercure n’eft pas partie confti- tuante de l'aurum mufivum, & qu'il n’y a que le foufre & l'acide marin ui contribuent à donner à l’étain cette belle couleur d’or & la propriété de donner de l’activité aux machines électriques. ne » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 333 OFB S:E1R IV ALT EF ON S SUR IE CROCODILE DE LA LOUISIANE; Par M.P.bE LA COUDRENIERE. ELA Baffe-Louifiane eft remplie de canaux, de lacs & de marais, qui la mettent au nombre des contrées les plus humides, Dans le grand nom- bre d'ampbhibies qui s’y trouvent, on remarque fur-tout le crocodile, Je ne m'amuferai point à donner la defcription de ce monftrueux reptile, parce qu'on la trouve très-bien détaillée dans les Ouvrages de plufeurs Natura- liftes ; je vais me borner feulement à quelques obfervations. Le crocodile ne mange jamais dans l’eau, fi ce n’eft, peut-être, des coquillages & des petits poiffons. S'il furprend des hommes ou des qua- drupèdes fur le rivage, il les entraîne au fond de l’eau, les noie, les ra- mène à terre & les dévore. Quand il a pris un gros poiffon , comme Ja barbue , il élève fa tête hors du fleuve, & en moins d'une minute il le brife entre fes dents & l’avale. Sa voix eft aufli forte que celle d’un taureau : or l'entend quelquefois poufler un cri; mais jamais ce eri n'eft redoublé. Ces animaux ne paroiffent pas refpirer: on peut en approcher de bien prés quand on monte le Mififfipi dans des bateaux. Ceux que j'ai vu dormir ur les bords de ce fleuve, avoient la gueule exactement fermée & ne don- noient pas le moindre figne de refpiration, . Malgré qu'ils foient trés-friands de toute efpèce de chair, humaine, ils courent pourtant de préférence fur les Nègres; cela n'empêche pas les Créoles, blancs & noirs, d’aller tous les jours fe baigner dans ce dange- reux fleuve, . Si l’on veut tuer cet animal à coups de fufl, il faut vifer aux yeux; parce qu'en tout autre endroit, excepté fous Le ventre , il eft à l'épreuve de la balle, Beaucoup de Sauvages en font leur principale nourriture, Quand ils vont l’attaquer , un d'eux tient à la main un morceau de bois dur & pointu des deux bouts; puis le préfentant au monftre affamé, il le lui enfonce verticalement dans la gueule. Dans cet état il n'y a plus que fa queue à craindre ; mais comme il fe détourne avec difficulté , les Sauvages l’affomment aifément à coups de bâtons. Ses plus grands ennemis font le requin, le poiflon armé, & une grande efpèce de tortue de mer, nommée caouane. On fera peut-être furpris que ces animaux marins puiflent aller attaquer le crocodile dans le Mifif- fipi; c'eft pourquoi il eft bon de dire ici que Le lit de ce grand fleuve cit fi profond dans la Bafle-Louifiane, que l'eau de la mer ÿ pénètre à près s 534 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, de cent lieues de fon embouchure, La Nouvelle Orléans a tout au plus 40 pieds d'élévation au-deflus du niveau dela mer; cependant la fonde donne devant cette Ville 79 braffes de profondeur : il refte donc au moins 6o braffes d’eau falée ou faumäâtre, qui doit occuper Le fond. Auffi eff-ce dans la crainte de trouver ces ennemis redoutables, que le crocodile évite le plus qu'il peut l’eau faumâtre : il nage toujours à la furface du fleuve & ne va jamais pêcher au fond. On trouve aflez fouvent de ces amphibies qui ont une ou deux pattes coupées. Ce font les caouanes, à ce qu'on dit, qui les mutilent ainfi. Ces hideufes tortues ne paiflent point l'herbe, comme des Naturaliftes l'ont écrit : leur bec, gros & crochu comme celui des aigles, prouve qu’elles font purement carnivores ; c’eft la raifon pour laquelle, leur chair n'eft point à beaucoup près auffi bonne que celle des autres tortues. Les crocodiles fe tiennent dans la partie la plus chaude de la Loui- fiane; car on n’en trouve plus au-deffus de la rivière Rouge. Ils s'éloignent peu de l’eau, qui eft l'élément où ils trouventle plus de nourriture: en été on les voit dans les Jacs, le fleuve & les ayous (1) profonds ; mais quand le froid commence à fe faire fentir , ils fe jettent dans la boue des marais, où bientôt ils tombent dans un fommeil léthargique qui leur ôte toute fenfibilité. Dans cet état ils ne font point gelés ; ils ont encore la chair molle & les pattes fouples. ê Ces amphibies choififlent fans doute ces marais pour fe mettre en fü- reté contre leurs ennemis : ils n’ont guère que l'homme à craindre dans ces retraites. La caouane va bien quelquefois à terre; mais elle ne peut nuire en hiver à ces animaux; car on aflure que le froid la fait tomber dans le même engourdiffement. Comme l'hiver eft peu rigoureux dans ce pays, & qu'il eft fouvent in- terrompu par des journées très-chaudes, ces changemens du froid au chaud font éprouver aux crocodiles autant de réfurreétions : il y a des jours où ils n'ont qu'un léger affoupiflement; mais lorfqu'il fait très-froid , leur léthargie eft fi profonde, /que quand on les couperoit par morceaux, ils ne donnéroient pas le moindre figne de vie, Ce fommeil léthargique , que le froid fait éprouver à un grand nombre d'animaux, feroit bien digne d’exciter la curiofité des Phyficiens. J’ai re- marqué dans des obfervations fur la récolte du fucre d'érable, que le froid fufpend de même lation du principe végétatif; mais que nralgré cette fufpenfion , la circulation de la fève fe fait toujours dans les arbres pen- dant les plus grands froids. Nous obferverons ici que le froid fait l'effet d'un puiffant narcotique, quand il jette les animaux dans cet état d'en- gourdifflement; car tous ceux qui meurent par la gelée , commencent par (x) On nomme Bayous des çanaux navarels, qui conpent la baffe-Lovifiane en, plu- fieurs canaux. + du ha Lo MURS: : 28 - SOÜR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 335 s'endormir; du fommeil ils paflent à la léthargie , & de-là ils paffent à la mort. C’eit alors que toute efpèce de circulation s'arrête, & que trous les membres fe roidiflent (1). » Terminons ces æ@bfervations par une dernière remarque fur le croce- dile. Ces animaux font forcés par le froid de ne pas paffer une certaine latitude : ils ont gagné autant de terrein qu'ils pouvoient le faire fans périr. Si nous voyons, dans les pays les plus feptentrionaux , des ani- maux fujets au même engourdiffement, c'eft qu'ils ont des moyens que les crocodiles n'ont pas. Les marmottes, les loirs, les hériffons, les chauve- fouris & autres, fe rafflemblent par pelotons, fe mettent en petite boule & fe retirent à l’abri du vent dans les lieux les plus convenables ; de même les tortues giflent en des trous & font retirées fous leurs écailles: mais le crocodile ne peut jouir de ces avantages dans les marais, où fon corps, étendu dans toure fa longueur, eft expofé à toute la rigueur du froid. Heureufement pour cet animal, que fa peau dure & écailleufe le garantie un peu; Car fans ce bienfait de la Nature, il gèleroit & périroit infail- liblement. OBSERVATIONS Surl& crivique d'un Ecrit, intitulé : Avis pour neutralifer à peu de frais les Foffes d’Aïfance, par M. DE MARCORELLE, Kc:...; infèré dans Le Journal de Paris du 12 Juin 1782. . « - » Ego cur acquirere pauca, Si poflum, invideor ? Horace, L E feul motifde l'utilité publique me détermina à publier, au mois de Mars dernier, un écrit, qui a pour titre: Avis pour neutralifér a peu de frais Les Foffes d'aifance , afin d'en faire la vuidange fans inconvénient & fans danger. MM. les Journaliftes du Journal de Paris ont cru devoir l’annoncer dans leur : } han À Feuille du 12 Juin 1782 , n°. 163, page 660, à l'article Chymie (2). x) La mort feule pit faire ceffer la circulation des fluides dans les animaux & les végétaux ; les uns & les autres meurent dans l'inftant qu'ils gélent, parce que les fuides glacés augmentent de volume, rompent les vaifleaux , & détruifent l organifacion, : (2) Cet Ecrit a été imprimé depuis dans le Journal de Phyfique du mois de Juia ” 336 (OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Js auroient pu faire fentir les avantages de ce Mémoire ; ils fe font bornés à le critiquer. Je déclare d’abord, avant de répondre à leurs remarques , que , loin d’avoir prétendu à la gloire des découvertes, je n'ai jamais af piré qu'à celle de foulager l'hamanité, & j'eufle été peu touché de leur critique , fi elle m’avoit paru plus honnête & moins injufte. Les Auteurs du Journal de Paris me reyrochent de m'être arrogé une de- couverte qui appartient à MM. Laborie, Cadet de Vaux & Parmentier, & de donner pour neuf un procédé ufité depuis 1778 , dans toutes les occa- ions où l’on a eu à combattre le méphitifme. Ces reproches font graves; il ne s'agit que de favoir s'ils fonc fondés , & fi je me fuis mis dans le casude les mériter, Pour en juger avec connoiffance de caufe, il faut exa- miner, 1°. fi l'expofé que les Journaliftes font du procédé que j'ai indiqué pour neutralifer les foifes d’aifance eft exact ; fi l'idée qu'ils en donnent au Public eft jufte , & fi cette idée & cet expofé ne font pas propres à Vinduire en erreur dans un fujet dela plus grande importance ; 2°. fi MM. Laborie, Cadet de Vaux & Parmentier font effectivement les premiers qui aient employé la chaux vive pour définfecter ces foffes, & s'ils font véritablement les auteurs de cette découverte; 3°. fous quelle forme ils ont employé cette fubftance.; {1 je l'ai employée fous la même forme , ou fous une forme différente, plus propre a donner une plus grande étendue à fa fphère d'activité ; 4°. fi d’autres que M. Cu/- metres & moi ont employé, pour la définfe“tion des fofles , Le lait de chaux mêlé avec les alkalis ; quelles font les expériences qu'ils ont faites à ce fujet, & quel en eft le réfultat. Pour la décifion de ces queftions, je ne rapporterai que quelques faits connus & inconteftables, Les preuves de cette forte font les feules que j'a- dopte pour ma juftification. 1°. En expofant le procédé que j'ai indiqué pour neutralifer les fofles d’aifance , les Journaliftes difent, que ma découverte con/ifle dans la chaux vive ou le lait de chaux. Cet expofé, qui fert de bafe à leur critique ; manque d’exactitude. Ma découverte ne confifte pas dans la chaux vive ou le lait de chaux; elle confifte uniquement dans l'emploi du lait de chaux mêlé avec des 1782, pag. 440, & lu au commencement du mois de Mai précédent à l'Académie Royale des Sciences de Paris, qui a bien voulu l’accueillir favorablement. Huit jours après cette lecture, M. ZLavoifier, qui n’y avoit pas affifté, fit part à la même Académie d’un Mémoire fur les différens Gaz de la Matière Fécale. Cet Académicien prouve , pat fes expériences, que l’on en obrient de l’acide méphirique & de l'air inflam- mable ; que les acides verfés fur cette matière , dégagent une énorme quantité de ces airs, & que les alkalis cauftiques retiennent au contraire ces différens gaz. J'ignore en quoi ces expériences s'accordent avec les miennes, & en quoi elles diféreot. Ce qu'il‘ y a de vrai, c’eft que celles que j'ai communiquées au Public font d’une date anérieure de quelques mois. alkalis. y SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 357 +” .. alkalis. IL n'eft pas queftion , dans mon Mémoire , de l'emploi de la chaux vive, Les Journaliftes ne la nomment immédiatement avant le lait de chaux, que pour mieux rapprocher, à la faveur de l'équivoque qui peut naître de cesmoms , mon procédé de celui des trois Chymilkes, & avoir par-l un prétexte plus fpécieux de dire que je me fuis arrogé leur décoy- verte. Mais elle reffemble fi peu à la mienne, ou plutôt elle lui eft fi op- pofée, qu'il n’eft pas pofible de lesconfondre, En effét, le lait de chaux diffère d'autant plus de la chaux vive, qu'il eft le produit desla chaux éteinte dans de l’eau (1). Ce font-là deux modifications de la chaux bien différentes; & cette fubftance , fous ces modifications, produit des effets différens, La chaux vive ne fauroit détruire, dans les foffes d’aifance ,.le méphitifme, comme on le verrabientôr. Le lait de chaux & les alkalis mélés enfemble , le détruifent au contraire , ainfi que l'expérience l'a démontré. Cet éclairciflement fur ces deux états de la chaux, renverfe de fond en comble les prétentions des Auteurs du Journal de Paris. 2°, En vain les Journaliftes ne ceflent de répéter que l’ufage de la chaux pour définfeéter les foffes d’aifance, n'a commeñcé qu’en l'année 1778, époque de la publication de l'Ouvrage des trois Chymift ils ne par- viendront jamais à le perfuader. La chaux étant reconnue comme un des plus puiffans anti-fepriques , divers Peuples en projettent dans leurs foffes d'aifance depuis un temps immémorial, afin d’y enchaïner les vapeurs empeftées répandues dans l’atmofphère de ces foffes, & les empêcher de s’exhaler & d’altérer la falubrité de l'air. Cet ufage fe pratique , depuis plu- fieurs fiècles, dans différentes Villes de France & d'Allemagne, &c. De- puis long-temps encore on charge, dans beaucoup d’endroits , les cercueils des cadavres d'une certaine quantité de chaux vive, afin de détruire les miafmes férides, &c.... À ces faits mamifeftes , joignons le témoignage L de MM, les Commiffaires de l’Académie Royale des Sciences (2), qui ne fauroit être fufpect aux trois Chymiftes. Dans leur Rapport de l'Ou- vrage fur les foffes d’aifance , ces Commiffaires s'expriment ainfi: « Après # les moyens dont nous venons de rendre compte (3), MM. Cader , Par- : » mentier & Laborie en propofentun autre, qui confifte à projeter » de Ja chaux en poudre, & la méler avec les matières fécales, Cette (1) Si on veuf mieux favoir en quoi confifte la différence qu’il y a entre la chaux vise & lelait de chaux , on peut confulter, MR livres de Chymie , l'Excy- élopédie, au mot chaux , tom.IIT, pag. 264, premiè Édition in-fo/. ; le Di&ionnaire de M.Macquer, aux articles chaux & laitdechaux , &c. (2) Ces Commiffaires font MM. le Comte de Ailly, Lavoifier & Fougroux de Bondaroy. : ; (3) Les moyens dont parlent MM. les Commiflaires , font le feu &-le ventilateur. Les trois Chymiftes ne font pas non-plus les premiers qui les aient employés. Voyez ce qu’en difent les Commiflaires de l’Académie, dans leur RE PAS 77» : Tome XX, Part. Il1,1782, NOVEMBRE. Nb 338 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » méthode eft srès-connue, & fe pratique dans plufeurs endroits du » Royaume & d'Allemagne (1) ». Il eft donc évidemment démontré que lestrois Chymiftes ne font pas les premiers qui aient fait ufage de la chaux, pour réprimer dans les fofles l'infeétion des vannes, & que je nai pu par Conféquent leur enlever , ni marroger une découverte qui ne leur appartient pas. [ls en ont fait tant d’autres qui intéreffent également la vie & la fanté des hommes, dontils ont la paifible jouiffance , qu’ils peuvent bien fe dépaitir de celle-ci, fans crainte de s’appauvrir. 3°. Peut-être que la forme fous laquelle les trois Chymiftes emploient la chaux pour définfecter les fofles , leur eft tellement propre, qu’elle peut les faire regarder comme Auteurs de cette découverte ; mais cette forme eft celle de la chaux qu'emploient divers Peuples pour le même objet: c’eft la chaux en poudre sèche, Il n’eft parlé d'aucune autre forte de chaux, ni dans le Journal de Paris , ni dans l'Ouvrage des trois Chymif- tes; ce qui prouve que c’eft La feule dont ils font ufage. L'expérience a appris que la chaux en pierre ne détruit pas la mauvaife odeur des fof- fes (2), & quéfes effecs à cet égard font abfolument nuls. Il fuit de-là que la chaux en poudre ne la détruit que par l'expanfon de la pouffière calcaire qui fe répand dans larmofphère de ces foffes, N’agiffant que dans cette atmofphère , la définfection qu'elle produit n'eft que momentanée; mais n’attaquant, ni ne pouvant attaquer le foyer de corruption, elle ne peut détruire le méphitifme, Pour que la chaux en poudre le détruisit , il faudroit que fes particules pénétraflent la mafle putride , qu'elles s'inf- nuaflent entre les parties de cette mafle, les divifaffent , les atténuaffent, les décompofaflent, &c.... Mais elle ne fauroit opérer d'aufli orands effets : 1°, parce qu'elle n'a ni aflez de ténuité, ni aflez de finefle, ni aflez de force; 2°. parce qu'elle eft dénuée du véhicule qui lui eft nécef- fäire pour multiplier Les furfaces , augmenter le nombre des points du con- tac de la maffe fétide, & déployer enfin toute fon énergie. C'’eft cette infufffance de la chaux dans fon état pulvérulent , qui m'a déterminé à la remplacer par le lait de chaux, en y ajoutant des alkalis, Les expériences que J'ai faites avec M. Ca/merres fur les matières fécales m'ayant fait voir que ces fubftances donnoient beaucoup» d'acide gazeux, je conjeéturai que les agens les plus propres & les plus efficaces pour annihiler les vapeurs méphitiques qu'elles renfermoient, éroient les alka- lis cauftiques. Mes conjeciftes fe font vérifiées ; le lait de chaux, rendu plus caultique par les alkalis, a fort bien neutralifé les fofles dans lef- quelles on la répandu. Quand même, pour les définfecter, je n'aurois (x) Voyez le Rapport, page 78. (2) Ibid., page 89. & SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 339 fubftitué à la chaux en poudre que le lait de chaux, il paroît que j'aurois donné un procédé nouveau. Cette manière d'employer la chaux dans ce cas et en effet nouvelle, & les trois Chymiltes n'en ont jamais fait ufage fous cette modification. Mais ce procédé mérite bien plus encore la qualification demeuf, quand il confifte dans un mêlange de lair de chaux avec des alkalis , que perfonne , que je fache, n’avoit employé avant M. Calmetres & moi. Bn général , pour avoir le mérite d’une découverte, il ne fuffit pas d'être le premierà employer telle ou telle matière ; il faut de ‘plus favoir la mertre en œuvre , de manière à, développer le principe d’ac- tivicé qu'elle peut renfermer , pour produire fans obftacle l'effet qu'on fe * propofe (1). 4°. On ne fera pas furpris que Les Auteurs du Journal de Paris fe foient abufés au point de croire qu'ils perfuaderoient que j: me fuis arrogé le - procédé connu & pratiqué, non depuis 1778, mais depuis plulieurs fiè- cles, à ceux qui, faute d'une certaine attention, ou par une méprife invo- lontaire, peuvent confondre le lait de chaux avec la chaux vive; mais on fera fans doute étonné qu'ils fe foient portés à me faire le mème repro- che au fujec du procédé ss lait de chaux mêlé avec des alkalis. Nous nous flattions , M. Calmertes & moi, d'être les premiers & les feuls jufqu'à préfent , qui euflions fait desexpériences fur les matières fécales , & donné pour neutralifer les fofles d'aifance , la méthode d'employer le lait de chaux , én y ajoutant des alkalis (2). Les Auteurs du Journal de Paris vont (1) Si MM. -Z24orie , Cadet de Vaux & Parmentier, dont l'Ouvrage für les Foffes d’aifance a .obienu, avec raifon , l’approbation de l'Académie Royale des Sciences, veulent confentir à ce que œrtte Compagnie décile, 1°. s'ils fonc les premicrs qui ont fairufage , dans les foffes d’aifance, de la chaux en poudre, & fi certe découverte leut apprutient; 2°. je me la fuis arrogée , en donnant, dans l’Avis pour neutralifer ces folies, le procédé qui confifte à employer le lait de chaux rendu plus cauflique par-les alkalis; 3°. fi ce dernier procédé eft neuf, je leur déclare d'avance que je fouferis aveu- sglément & entièrement à la décifion qu'elle prononcera. (2) L’approbation qu le Comte de Buffon a bien voulu donner, de fon propre mouvement , à la méthod® de l'emploi du lait de chaux mélé avec les alkalis, pour neu- tralifer les foffes d’aifance , eft fi flareufe, fi honorable & fi précieufe , qu'elle mérite qu’on en faffe une mention exprefle. fAprès avoir remercié M. Deczmpe des belles obfervations que ce zélé Direéteur de la Feuille Périodique de Narbonne lui a envoyées für l'oifeau pænicoptère , le Pline François s’exprime ainfi dans [a lettre qu'il lui a écrite de Montbar en Bourgogne, le 14 de ce mois ( Juillet r,8:). « J'ai reçu , par la voie de Tone, au mois d'Avril dernier, un exemplaire de » l'Ouvrage de MM. de AZarcorelle & Calmerres , & je l'ai donné à M. Amelot , eh » le lui recommandant .,.,; & comme j'ai quitté Paris dans ce temps , je ne fais pas » l’ufage qu'en aura fait M. Amelot: mais il e/? fr que MM. de Afarcorelle & Cul- » mettes font dans les bons principes , &c.. .. ». M. Cader de Gagicoure, A l’Académie Royale des Sciences, marque aufli, dans fa Tome XX, Part, 11,1782. NOVEMBRE. Vv2 349 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, nous faire appercevoir de notre erreur. Voici comment ils s'expriment Ces moyens (les alkalis cauftiques) , nos Chymifles les ont tentés dans les diverfes expériences auxquelles ils fe Jont livrés. Qu'il nous foit permis de leur demander , pour notre inftruétion., files expériences qu’ils ont faites étoient conformes aux nôtres, & dans quel livre ilsen ont dépofé le réfultat? Il eft certain qu’il n’en eft pas parlé dans leur fameux Ouvrage fur les foffes d’aifance; nous l'avons parcouru d’un bout à l’autte, & nous n'avons pas fu trouver une feule fois les mots /ait de chaux, alkali fixe. Les favans Commiffaireside l’Académie font mention, dans leur Rap- port (1), de quelques expériences qu'ils ont faites ; tantôt avec les alkalis fixes, tantôt avec la chaux vive, tantôt avec la craie, jettés fur ane dif- folution de foie de foufre décompofé; maisils n'ont eflayé ces fubftan- ces que féparément , & ils ne fe font point occupés à les éprouver , ni en les mélant enfemble, ni en employant le lait de chaux, Tous ces moyens , continuent les Journaliftes , réuffiffent merveilleufement en petit ; mais ils font impraticables en grand, ne füt-ce que relativement à la dépenfe. Les mêmes motifs nous déterminent à demander encore aux mêmes Chymiftes dans quel Ouvrage ils ont parlé de ces expériences faites en petit & en grand, & de leur bon & mauvais fuccès? Il paroît aflez fingulier que d:sexpériences , qui reuffiffent merveilleujement en perit, ne réufliflent pas en grand , fur-tout lorfqu'elles font faites en préfence & fous les yeux de trois habiles Chymiltes , Infpecteurs-Généraux des objets de falubriré. Les nôtres ont été plus heureufes ; elles ont réufli de toutes les manières, & ont eu le fuccès le plus complet dansla vuidange des foffes d’aifance , quoiqu’elles ne fuffent dirigées que par des Maçons. Si, parmi les moyens de neutralifer les fofles d’aifance dont il a été parlé jufqu'à préfent , il y en a dont la pratique foit difficile , c'eft celui de la chaux en poudre sèche , propofé par les trois Chymiftes (2). MM. les Commiflaires de l’Académie des Sciences vont nous l'apprendre ; écoutons- les ; ce font eux qui vont parler. « À l'égard de la chaux, nous croyons qu'elle eut fuppléer que bien* » imparfaitement aux deux premiers moyens (le Fu & le ventilateur ).. D Lettre du 8 Mai précédent à M. de Afarcorelle , que le procédé publié par ce dernier eft flon les vrais principes de la Chymie. (1) Voyez le Rapport, pag. 1088, 103 & fuivantes. (2) Le procédé des trois Chymiftes confifte dans l'emploi de fa chaux en poudre, qui d’entre pas dans le mien: celui-ci au contraire confite dans l'emploi du lait de chaux & des alkalis, qui n’entrent pas dans le leur. Ce font deux procédés bien diffé- | rens l’un de l’autre. Comment & fous quel prétexte ces Chymiftes me reprochent-ils donc de n'arroger le leur? Ne ferois-je pas mieux fondé, moi, à leur reprocher qu'après s'être arrogé un procédé connu & pratiqué depuis des fiècles , ils veulent, encore s’arroger le mien? SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 341 » 1°. parce qu'il en faut une trop vrande quantité pour faturer & neutrali- > fer le principe odorant , ce qui-deviendroit coûreux ; 2°. parce qu'enfin, >» pendant la faturation , les émanations infeéteroient toujours le voil- » nage (1)». Mais, en fuivant le procédé du lait de chaux mêlé avec les alkalis, on prévient ces inconvéniens , parce que le mephitifme eft retenu & enchaîné, our ainfi dire , par l'effit de ce mélange , & ne peut s'élever dans l'atmof- phère : d'ailleurs, en pratiquant ce moyen , on emploie beaucoup moins de chaux ; on le répand beaucoup mieux, & même avec fe de facilité, foit fur l'entière mafle putride , foit dans tout l'intérieur des gouffres em peltés. Ces avantages ne dévoïent pas être oubliés. À l'égard de la dépenfe qu'exigent les moyens de la neutralifation que J'ai indiqués , elle ne fauroit ètre fort confidérable! J'ai même avancé, dans mon Ecrit, que 15 ou 20 fols fufifoient pour neutralifer quelqu’amas de corruption que ce für. El eft vi qWil y a dés moyens plus coûteux les uns qué les autres: mais l'excès de cherté doit être réputé nul, à caufe de la modicité des fubftances qui font employées. Les prix dont il eft ici queltion font ceux des Provinces, & en particulier de Narbonne, On fent qu'ils doivent être plus forts dans la Capitale ; mais , quels quefoient cesgerniers, ils ne peuvent être que modiques. : F Après s'être décidés à'pafler fur mon zèle, qu'ils trouvent trop vif, & Jir ma morale , qu'ils altèrent, les Journaliftes du Journal de Paris ne veulent plus me faire grace; aufli me reprochent-ils de dire pompeufement en terminant mon Ecrit, que, ff en fuivant le procédé que J'ai indiqué ,or parvient à fariver la vie d’un feul Citoyen, J'aurai obtenu de mon travail læ plus douce récompenfe qu’il foit poffible d'ambitionner | lorfqu'on s'intéreffe à la confervation des hommes. Qu'il me foit permis de croire que les Lec- teurs non prévenus ne verront dans cette phrafe que l'expreflion du fen- timent, Le ton faftueux ne fut jamais le mien, & je crois avoir toujours pris celui de la modeftie, dans les différens Mémoires que j'ai publiés. "Parmi ces Mémoires , il'y en a qui ont efluyé des critiques, Comme je n'ai point l'humeur batailleufe, je n’ai répondu à aucune ; j'aurois tenu Ja même conduire ‘dans cette occafion ; fans la haute eftime que j’ai pour MM. Cadet de Vaux, Laborie & Parmentier, & fans l'invariabilité & la vérité de mon attachement pour les refpectables frères de l’un deux. Ils voudront bien me permettre, les uns & les autres, de me renfermer pré- fentement dans le dhènée , pour ne plus en fortir. Je dois d'autant plus prendre ce parti, que les maux violens dont je fuis accablé, & fur-tout l'extrême affoibliflement de ma vue, qui ne diffère guère de la cécité. m'interdifent toutes fortes d’occupations, de travail & de combat. A Narbonne, le 31 Juillér 1782. : MARCORELLE. (x) Voyez le Rapport, page 108. ‘342 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, : ES SAT Sur la Mine de Plomb ou Molybdène ; traduit du Suédois de M,SCHEELE ( 1); par Madame P*** de Dijon. J E ne parle pas ici de la mine de plomb commune qui fe trouve chez les Droguiltes, parce qu’elle eft fort différente de ceile fur laquelle je vais maintenant communiquer mes expériences à la Société Royale; je parle de celle que M. Cronftedr, dans fa Minéralogie , appelle molybdène , & fur laquelle M. Qvift & plufeurs autres#apportent avoir fait leurs effais. Les efpèces que j'ai eu occafien de foumertre à l'épreuve, avoient été prifes en différens endroits; mais elles fe font wouvées du même genre & com- pofées des mêmes parties conftituantes, $. 1°. Je voulus favoir d’abord comment la molybdène fe comportoit ar la voie humide;-il falloit pour cela la réduire en poudre. très-fine : comme elle nesfe laifle pas pulvérifer par elle-même à caufe de fes lames flexibles, on jetta de temps en temps dans le mortier de verre quelques fragmens de vitriol de potafle ; alors elle fe mettoit en poudre fine comme on le defiroir. Sur cette poudre on jetta enfuite de l'eau chaude, & on remua le tout: la molybdène fe précipita au fond, & on décanta la dif- folution. Cette opération ayant été réitérés plufieurs fois, jufqu’a ce qu'il ne { trouvât plus de vitriol dans l’eau décantée, on fit fécher la poudre reftante. $. II. J'ai fait tant digérer que bouillir ce minéral dans tous les acides connus: mais il ne s’en eft trouvé que deux qui euflenc action fur lui; favoir , l'acide arfenical & l'acide nitreux. L’acide arfenical r’attaqua la molybdène que quand toute l'eau fut évaporée ; fi alors on augmente un peu la chaleur , l’arfenic monte-au col de la cornue; & fur la fn il fe _— (1) Les expériences du même Auteur fur la mine de plomb ou p/ombagine , dont la traduétion a été inférée dans le Journal de Phyfique de Février, renvoientà cer Effai, qui a effectivement été publié un an auparavant, & en 1778, dans les Mémoires de la Société Royale de Stockholm. Il devoit donc paroître aufli le,premier dans ce Recueil ; mais il n’a pas été poffible de fe le procurer plutôt, & on le jugera fans doute ençore affez neuf, (oit pour les Minéralopiftes qui n’ont pas encore perdu lhabitude de con- fondre la molybdène avec la plombagine, foit pour les Chymiftes , qui n’ont eu jufqu’à préfent aucune connoïffance de l'acide caché dans la molybdène. More du Traduc- eur. . : . en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 343 fublime de l’arfenic jaune : on trouve dans le récipient de l'acide fulfureux volatil. “ÉTITS Sur une partie de molybdène en poudre , on verfa deux parties d'acide nitreux fumant. À peine le mélange fut-il devenu tiède dans la cornue , que tout pafla enfemble en une fois dans le récipient, avec forte chaleur & vapeur obfcurément rouge : je ne doute pas que le mélange ne fe füt enflammé, s’il eût été en quantité un peu plus confidérable, J'ai penfé qu'il valoit mieux employer de l'acide nitreux délayé. S. III. Sur une once & demie de molybdène pulvérifée, on verfa fix onces d'acide nitreux délayé , & l’on mit le tout dans une cornue de verre durée avec le récipient, fur un bain de fable. L’acide n’eut aucune action pendant la digeftion: mais quand il vint à bouillir, il s’éleva en vapeurs rouges élaftiques, avec forte écume ( on fent que la cornue doit être aflez grande pour cela ). L’acide ayant été diftillé à ficcité, le réfidu fe trouva d’une couleur cendrée: on remit deflus pareille quantité d’acide nitreux délayé ; il parut de l'écume comme la première fois: on diftilla encore jufqu'à rélidu fec , qui fe trouva alors plus blanc qu'auparavant; on jetta encore deflus pareille quantité d'acide nitreux on le diftilla de la même manière. La même opération fut répétée quat cinq fois: il refta enfin une poudre blanche comme de la craie. Ce rélidu fut édulcoré avec l’eau chaude , jufqu'à ce qu'il n'y eût plus d'acide, & il fut enfuite defféché : 31 pefoit fix dactunes & demie ; je le nommai serre de molybdène. Les eaux qui avoient fervi à l'édulcoration , claires, non-colorées, furent évaporées jufqu'à ce qu’elles fuffent réduires à une demi-once : la liqueur prit alors une belle couleur bleue, étoit épaifle & contenoit un peu de fér ; le refte étoit pour la plus grande partie de l'acide vitriolique, L’acide ayant été délayé avec l’eau, la couleur difparut, Les alkalis fixes & volatils cauf- tiques n'attaquent pas la molybdène par la voie humide. $. IV. Nous favons par lesbelles expériences que M. Qvift à faites fur la molybdène, que ce minéral fe volatilife prefque tout entier à feu ouvert & contient du foufre. Quand on en préfente un petit fragment fur une lame d'argent à la flamme du chalumeau , il eft agréable de voir s’at- ji 4 fumée blanche fur la lame comme une petite écaille brillante, dan$®fa même direction que la Aamme a été pouflée. Ce fublimé blanc devient bientôt bleu , quand on dirige fur lui la pointe bleue de la Aarame ; mais à la pointe extérieure de la Aamme, la couleur difparoît de nou- veau, Ce fublimé blanc eft une terre pareille à celle que l'on obtient par l'acide nitreux ( S. III ); il fe comporte aufli de la même manière, à la flamme du chalumeau. $. V. Une once de molybdène pulvérifée & mêlée avec quatre onces de nitre pur, & mife à détonner dans un creufet bien rougi, la maffe que l'on obtint'étoit rouseâtre ; fa diflolution dans l’eau étoit claire & fans couleur ; il refta au fond un peu de pouflière rouge , qui pefa étant fèche 344 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE! onze grains, & qui fe trouva être une ochre martiale. La diflolution éva- porée donna des cryftaux de vitriol, de potafle & de nitre; mais il en refta une bonne partie qui refufa de cryftallifer, qui cependant ne donnoit au- cune trace d'alkali furabondant: elle fut délayée avéc un peu d’eau dans laquelle on verfa de l'acide vitriolique affoibli, jufqu'à ce qu'il n'occa- fionnit,plus aucune précipitation fenhble; le précipité, édulcoré dans l’eau froide & féché, pefoit trois drachmes. Si on ajoute trop d'acide , le préci- ité fe rediflout , & l'eau elle-même en tient une partie en diflolution; & même lorfque la diffolution eft chaude , il n'y a abfolument aucune pré- cipitation, On obtient un femblable précipité avec l'acide nitreux ou l'acide niuriatique, $. VI. Pour faire mieux connoître certe efpèce de terre, j'ai d'abord examiné ce qu'elle donnoit par la voie humide avec l’acidemitreux ( S. IEL): (a) On en mit un fcrupule réduit en poudre trés-fine dans un mortier de verre; on verfa deflus Lire onces d’eau diftillée, & on fic bouillir pen- dant un quart d'heure; l’eau fut enfuite décantée dans un autre vaifleau : on. fit bouillir de nouveau deux onces d’eau fur le réfidu, & on décanta pareillement; je trouvai après cela que l’eau décantée avoit un goût fingu- lièrementacide & De pe Ayant ainli continué la lixiviation ju{- qu'à dix fois avec deux onces d’eau à chaque fois, Le tou fut à la#fin pref- qu'entièrement diffous. F (&) Je crus qu'il pouvoit s'être fixé à la terre un peu d'acide vitriolique ui occafonnoit la diffolubilité dans l’eau : je mis en conféquence une partie ss terre de” molybdène dans une cornue de verre à feu nu; je pouffai le feu jufqu'au moment la cornue commença à fondre ; j: trouvaien effec dans le récipient un peu d’odeur d’efprit de foufre, La terre fut mife après cela dans un creufet, fur lequel j'en luttai un autre renverfé & que je plaçai fur le feu. Un quart-d’heure après , ayant ouvert le creufer, je trouvai la terre fondue , & il s’éleva aufli-tôt une fuméellqui fe fixa fur une lame de fer froide , & qui y tenoit comme une petite écaille brillante & d'un blanc tirant {ur le jaune. Aufi tôt que le creufet fut replacé deffus en forme de cou- vercle, la fumée cefla; mais elle recommença dès que l’on rendit l'air: je ne crouvai cependant pas pour cela de fleurs dans Le creufet Fupgieur La terre étoit fondue autour en une larme, & avoit acquis ‘une coüleur d’un gris blanc, avec des rayons qui partoient du centre, allant en pointe à la circonférence. A la Aamme du chalumeau, la terre eft promptement abforbée par le charbon; mais expofée fur la cuiller d'argent, elle coule & fume avec les mêmes phénomènes que la molyhdène ($. IV )..Il écoir queftion main- tenant de favoir fi cette:terre fondue confervoit la même propriété de fe difloudre dans l’eau bouillante. (e) Elle fut pulvérifée pour cela, & on en mit une petite partie bouillir dans l'eau comme auparavant (a ): elle fe comporta de la même manière , A, rit SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 345 manière, & la diflolution avoit le même goût. Je me fuis fervi de çete terre de molybdène fondue, pour Les expériences fuivahres; Les Aeurs qui s'é- toient fixées fur la lame de fer avoient les mêmes propriétés que la terre $. VII. (a) La terre de molybdène eft de nature bete ; car fa diflolution CS. VI, c.) rougit la teinture de tourne - fol, trouble la diffolution de favon & précipite le foie de foufre, (6). Cette diffolution a aufi quelque aétion fur les métaux, & boxillie fur la limaille de tous les métaux imparfaits, elle devient à la fin blénärre: (c) Si on ajoute une très-petite portion d’alkali, alors la terre fe diflout en plus grande quantité dans l'eau, & donne par le refroidifiëment de pes cryftaux irréguliers. Ce peu d’alkali empêche la terre de fe volatilifer feu ouvert (S. VE, 8. d. ). Cette diflolution, quand elle eft encoré chaude, manifefte fenfiblement fes propriétés acides : elle rougit fortement le tourne- fol ; elle fait effervefcence avec le calce, la magnélie & l’alumine, avec lefquels elle forme des fels moyens qui font peu folubles dans l’eau. (e) Elle précipite l'argent, le mercure, & le plomb diffous dans l’acide nitreux, & pareillement le plomb diffous dans l’acide muriatique. Ces précipités fe réduifenc fur le charbon, & la terre fondue s'étend à la fur- face : elle ne précipite pas les autres métaux, ni même le muriate mercu- riel corrofif, | (f) Elle précipite de mème les diffolutions nitreufe & muriatique de terre barotique : ce précipité n’eft pas du fpath pefant régénéré, car il fe diffout dans l’eau froide; propriété qui n'appartient pas au fpath pefant régénéré : elle ne précipite pas les autres diffolutions terreufes. (g) Elle dégage le gaz acide des alkalis fixe & volatil, & il en réfulte des fels neutres (1).qui précipitent toutes les diflolutions métalliques ; fa- voir, l'or, le muriate mercuriel corrofif, le zinc & la manganèle ez blanc ; le fer & le muriate d’étain ez brun ; le cobalt er couleur de rofe; le cuivre en bleu ; les diflolutions d’alumine & de calce ez blanc. Si on diftille le fel ammoniacal: compofé de terre de molybdène & d’alkali volatil, la terre Jaifle aller l'alkali volatil à un feu doux , & il refte dans la cornue une poudre grile. $. VIII (a) L’acide vitriolique concentré diffout , à l'aide de Ja cha- leur , une grande quantité de notre terre; la diflolution prend une belle (1) M. Schecle ne s'érant propolé dans ce Mémoire que d’examiner la fubitance ter- reufe, qui (e trouve dans la molybdène, n’a pu la nommer autrement que serre de mo- drbdëne; & on a dû fuivre fon exemple dans la traduétion, pour ne pas décider d’a- vance ce qu'il falloit metre en queftion : mais cette terre une fois reconnue pour un acide particulier, les fels qui en feront formés prendront les noms de molybde de pouaile, molybde de foude, molybde ammoniacal, molybde calcaire, mclybde d’or , &c., &c. Voyez le Tableau de Ne lue Chymique, Journal de Phyfique , rome XIX ,page 382. Nore du Traduéteur. Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE. Xx . 346. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, couleur bleue, & deyient épaifle en refroidiffant : cette couleur difparut à la chaleur, mais elle revint après que la liqueur fut un peu refroidie: il en fut de même dans l'eau; à un feu plus fort ( $. III ), l'acide vitrio- lique lâche la terre & elle refte fans être altérée, (6) L’acide nitreux n’a point d'action fur elle. (c) Si on la fait bouillir avec l'acide muriatique, il en diffout une quan- tité confidérable ; la diffolution diftillée à‘ficcité, on trouve un réfidu d’un bleu obfcur: en augmentant alors la chaleur , il s'élève des Aeurs blanches & un peu de fublimé bleu; ce qui pafle dans le récipient eft de l'acide ‘muriatique fumant. Alors le réfidu eft gris; le fublimé & les fleurs fe ré- folvent en liqueur à l'air: fi on en met fur des métaux, elle f2 colore en bleu, & ce n’eft autre chofe que de la terre de molybdène volatilifée par l'acide muiatique. (d) Si on diftille une partie de notre terre avec deux parties de vitriol de potafle, il pafle à la fin & à l’aide d’une forte chaleur, un peu d'acide vitriolique ; la terre reftante fe diflout dans l'eau plus facilement qu'au- paravant. (e) Traité: avec deux parties de nitre , elle en dégage l'acide en état d'acide fumant: le réfidu eft foluble dans l’eau; c’eft un fel neutre qui précipite toutes les diflolutions métalliques , & reffemble exaétement à un fel ($. VIL,g). (f) Traitée avec deux parties de fel commun pur , elle en dégage Vacide fumant, & il s'élève au col de la cornue des Aeurs blanches, jaunes & violettes, qui fe réfolvent en liqueur à l'air: cette liqueur prend une couleur bleue fur les métaux ( lettre c ). $. IX. On voit par la couleur bleue que le fublimé prend à la flamme du chalumeau ( $. IV ) , que cette terre ne manque pas de difpofition à attirer le phlogiftique. La même couleur bleue prouve aufli qu'elle fe charge de ce principe par la voie humide ( $. VIT, VIIT ). (a) Pour acquérir plus de certitude de la diffolurion de Ia terre de mo- Iybdène dans l’eau bouillante , avec addition d’un peu d'alkali(s. VII, c), on verfa dans cette diflolution quelques gouttes d'acide muriatique ; on la diftribua dans piufieurs vaifleaux, & on jetta dans chacun de la li- maille d’un métal particulier : la diffolution prit fur-le-champ une cou- leur bleuâtre qui augmenta de plus en plus, & qui en agitant de temps en temps le vaifleau , étoit au bout d’une heure d’un beau bleu foncé: ce qui prouve que cette couleur elt produite ici par le phlogiftique , c’eft, 1°. que fi au lieu de métaux on emploie des chaux métalliques , il n’y a aucun changement de couleur, 2°. fi on verfe quelques gouttes d'acide nitreux dans la diflolution bleue, & qu’on l’expofe à la chaleur, la cou- leur difparoît. Il n’eft donc pas étonnant que , réunie à l'acide muriatique, elle attaque l'argent & le mercure à raifon d’une double affinité, l’acide muriatique fe portant fur La terre métallique, & la terre de la molybdène SUR L'HIST. NATURELLE. ET LES ARTS. 347 fur le phlogiftique du métal ; cependant elle n'attaque pas l'or. (ë) Si on met trop d’acide muriatique dans cette même diflolution, il ne paroît point de bleu, mais une couleur jaune, qui à la fin devient brune, lorfqu’on fait digérer le mélange avec des métaux. L’attraction du phlogiftique eft ici bien plus fenfible; car fi on fait tomber quelques gouttes de cette diffolurion dans une diffolution de terre de molybdène, le phlo- giftique fe trouve plus divifé & le mêlange devient bleu. (c) L'alkali pruffique , dans lequel il y à excès d'acide, précipite en brun la diflolution aqueufe de cette terre; & l'infufon de noix de galle la pré= cipite en brun obfcur. $. X, J'ai effayé la têrre de la molybdène par la voic de la réduction avec Le Aux noir & le charbon; puis, avec le verre de borax & le charbon: mais tout cela a été inutile, je n'ai pu appercevoir la moindre partie de métal (1). Je penfai que le phlogiftique pouvoir avoir la même vertu que Vair fur la terre de la molybdène, c’eft-à-dire de la volatilifer ( s. VI,6 ). J'imbibai en conféquence une partie de cetre terre avec de l'huile d'olive; je mis ce mêlange dans une cornue de verre que je chauffai jufqu'à ce u’elle commençât à entrer en fufon: mais il ne fe trouva point ici de iblimé : le réfidu étroit dans la cornue comme une poudre noire, Une partie de cette poudre ayant été mife dans un creufet & expofée au feu, elle devint rouge & il fe fublima des fleurs blanches. Une autre partie fut mile enfuite dans un creufet couvert d'un autre creufet renverfé & lutté; ce creufet fut expofé de même à un feu violent: on ouvrit Le creufer quelque temps après que tout fut refroidi; mais on trouva la terre avec fa cou- leur noire, fans aucune altération , & fans aucun figne de difpoftion à l'a fufñon, Cette poudre noire s’eft comportée de la manière fuivante : 1°. elle ne fut pas difloute par l’eau bouillante ; 2°. l'addition de l’alkali ne la pastrendue plus foluble , même à l’aide de l’ébullition, quoique d’ail- leurs l’alkali diffolve volontiers cette terre (S. VIL, g ); 3°. cependant l'ayant mêlée avec trois parties de potafle & pouflée à La fufon dans un creufet , il y eut une vive effervefcence : alors fi on diffout la mafle dans l'eau, & qu'on fature l’alkali furabondant avec l'acide nitreux , on ob tient un {el neutre compofé de terre de molybdène & d’alkali, & ce fel décompofe tous les autres fels moyens { &. VII, g ); 4°. l'acide nitreux attaque avec violence cette terre phlogiftiquée pendant la digeftion ; il la dépouille de ce principe : elle devient blanche & recouvre toutes les pro- priétés qu’elle avoit auparavant; l'acide vitriolique ni l'acide muriatique n'ont fur elle aucune action. (x) M. de Morveau a annoncé qu'un Difciple de M. Bergmann étoit parvenu, depuis peu, à retirer le régule de la molybdène. Voyez les Nouvelles de la RMC des Lettres de M. de la Blancherie, n°. 17 de cete année, & le n°. 23 dela Gazette Salu- taire, Vote du Tradudeur. Tome XX, Part. I1,1782, NOVEMBRE, Xx2 343 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, $. XI. La terre de la molybdène, que l'on obtient par le nitre (S. V}, eft à plufieurs égards différente de celle dont il a été fait mention pré- cédemment; car, 1°. elle exigea bien moins d’eau pour fa diflolation; deux onces d’eau bouillante en ont diflous onze fcrupules & demi, en continuant l'ébullition : 2°. elle n'a point dégagé d'acide vitriolique du vitriol de potafle: 3°. elle fe fondoit plus facilement: 4°. elle ne fe fu- blimoit pas dans un creufer découvert: $°. après avoir été fondue avec du charbon pulvérifé, elle donnoit dans l’eau une diffolution qui tenoit un fel neutre, lequel précipitoir tous les fels moyens. $. XII. La caufe de cette grande différence eft dans l’alkali par le- quel ce précipité eft retenu en païtie affez opiniatrément : on reconnoît talémenc ici qu'elle tient de l'alkalÿ, quoiqu’elle foit pure dans plu- fieurs des diffolutions & cryftallifations précédentes: 1°, en ce que quand on jette un peu d'acide nitreux dans la diffolution concentrée & chaude, & que l’on fait bouillir le mélange, il tombe au fond une grande partie de la terre difloute en forme de très-petits cryftaux; & fi on évapore en- fuite la liqueur claire, on trouve un peu de nitre. Les petits cryftaux ont toutes les propriétés de la terre de molybdène que l'on obtient par l’a- cide nitreux (S. LIT ). 2°, Le fel qu'on en tite après la fufion(s. XI, n°. $ }, en fournit une feconde preuve. Ce fel neutre fe fait de la manière fui- vante: La terre qui tient feulement une petite partie d’alkali, & qui con- féquemment peut agir encore comme acide, change en reuge la reinture de tourne-fol; ‘attire le phlogiftique lorfqu'on la traite avec le charbon : mais l'alkali s’oppofe d'autant plus à cette union de la terre, qu'elle en exige davantage pour fa faturation ( on a vu $. X, n°. 3, que Palkali attire plus fortement la terre qu'elle n’attire le phlogiftique ); & celle- ci eft un fel neutre qui peut être extrait par liiviation & qui reffemble abfolument à un fel (s. VII, g). Le charbon qui refte après la lixiviation fume dans un creufet découvert, & donne un fublimé : il y avoit donc de la terre de molybdène phlogiftiquée. 3°, L'alkali retient cetré terre Jorfqu'on l’'expofe à feu nu (S. XI, n°. 4 ). 4°. On voit encore par-là pourquoi cette terre ne dégage pas l'acide vitriolique du vitriol de po- tale; car fa force attractive diminue néceffairement en proportion de cé qu'elle eft plus près du point de faruration , & puifque la terre pure ne tient point d’alkali, elle doit en prendre une petite partie au vitriol de or: & ce n’eft que dans ces circonftances qu'elle peut aufli donner elques légères tracès d'acide vitriolique ( 6: VHL, 4.) Cette petite quan- tité d’alkali eft caufe de fa grande diffolubilité dans l'eau : il a été fait mention de cette même-terre (S. VII, c ). $. XIII. Après avoir analyfé la molybdène & dirigé mesexpériences fur fa terre particulière , il reftoit encore à recompoler ce minéral avec fes principes prochains où parties conftituantes. On fait que la molyb- dène tient du foufre, & mon analyfe l'a prouvé, J'ai mêlé une partie pr SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 349 de terre de molybdèn: réduite en poudre très-fine ( $. VE, c ), avec trois parties de foufre: ce mélange a été mis dans une cornue de verre à feu nu, & on a lutté le récipient. A peine la cornue fut-elle placée, que le foufre qui s'éroit élevé dans le col retomba en coulanr, jufqu'a ce que le foufie für cout-à-fait forti. Le récipient fe trouva en même temps rempli de foufre, avec une odeur piquante d'efprit de foufre volatil. Il refta de même dans Ja cornuc ure poudre noire , qui, broyée entre les doigts, les tachoit d’un noir brillant, & qui au furplus fe comporta dans toutes les expériences comme la molybdène naturelle. On voit donc ici une efpèce de terre qui jufqu'à ce jour n'étoit pas connue des Sayans, & qui doit être nommée acide de la molybdène , pui. qu'elle a toutes les propriérés des acides. Il me femble déjà entendre dire que d’autres terres métalliques pourroient bien être aufi unies à un acide inconnu ou réciproquement, Je fais de cette opinion & de toute autre du même genre le cas qu’elle mérite, jufqu’à ce qu'il y en ait des preuves convaincantes, fondées fur des expériences exactes; & quoique la molyb+ dène ait quelque refflemblance avec les terres métalliques, je me bornerai à conclure avec aflurance qu'elle eft compofée d’un acide minéralifé par le foufre, à'RET 0e A0 IN 0) DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE De M. l'Abbé DICQUEMARE, de plufieurs Sociétés & Académies Royales de France , Efpagne, Allemagne, & Correfpondant de l'Academie Royale de Marine. EE ——— » L'INFORNE. < Da à EN PRÈS avoir fouvent dévoilé lanimalité’ cachée fous des formes fi ex- traordinaires ou fi fimples, qu'elle s’éroit fouftraite aux recherches des Naturaliftes, devois-je m'attendre à découvrir des animaux dont la forme rendroit élégante par comparaifon (1), celle du reclus-marin, des cœurs- (x) Voyez tome IX , 1777, Février, page 137 ; Mai, page 356; & tome XVI, 1780, Oftobre, page 304 de ce Recueil. 350 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, unis & même du fac-animal? Celui que je vais décrire produit cet effet; j'ai cru en conféquence pouvoir lui impofer Le nom d’informe (fig. 1, pl.IT). Ce n’eft aflurément pas qu'il foit fans forme conftante; mais outre qu'elle eft très-fimple , elle eft voilée par une enveloppe fortuitement mamelonnée, dont l’épaiffeur moyenne eft d'environ 2 lignes, d’une couleur jaunâtre , obfcure, approchant de celle des nèfles, très gliffante fous les doigts, & - dont la texture paroît vermicuiée, plus folide que les fortes gelées, & d’une pefanteur fpécifique plus grande que celle de l'eau de mer. Cette fubftance n'eft que comme collée fur la peau de l'animal: on le trouve en cet état attaché fur les huitres aux rades du Havre. La figure x repréfente de grandeur naturelle l’un des individus que j'ai trouvés. La fig. 2 fait voir l'animal déshabillé : il eft alors de couleur gris - rendre comme celle de l'agate, demi-tranfparent ; fa peau eft rendue comme une veflie foufflée : l'un de fes bouts eft terminé par deux mamelons alongés. Si on ouvre cette peau , qui ne laiffe pas d’être forte & qui fe contracte beaucoup, on en trouve une autre plus fine & très-tranfparente, ‘qui ne tient à la première que par les orifices des deux mamelons; ce font les iflues de l'animal : on voit à travers fes inteftins & fes vifcères de l’un & l’autre côté, comme le repréfentent les fig. 3 & 4. De ces inteftins les uns contiennent une matière,grife limoneufe ; les autres une matière jau- nâtre-avec des parties dures , comme l'efpèce de bézouart , que les Peintres nomment pierre de fiel. Entre les vifcères, l’un a une teinte légère d’in- carnat, avec de petites taches ou points d'une teinte plus forte; l’autre, qui a la forme d’un rein fort alongé , eft rempli d’une matière de la cou- leur de celle qui enveloppe l'animal. Je fuis porté à croire que c'eft un réfervoir qui lui fournit de quoi s'en envelopper: il paroït que cet animal eft attaché fur l'huitre dès fa naïflance , & qu'il ne peut s'en détacher, çar la coquille de l’huitre ou fes feuillets font engagés dans fa peau au point de contact, de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 35x 2 mn On NOUVELLES OBSERVATIONS Sv-R: L' 40 CU PEN D'EUPASTIEL, Fondees fur l'analyfe des fubffances qui la compofent; lues à l'Aca- démie Royale des Sciences , par M. PILATRE DE ROZïTER, Intendant des Cabinets de Phyfique , de Chymie & d'Hifloire Naturelle de MONSIEUR , en fon Palais du Luxembourg > attaché au férvice de MADAME ; Chef du premier Mufée autorife par le Gouvernement ; Mem- bre de plufieurs Académies Nationales & Etrangères , &c. Messieurs, On a propofé jufqu'ici une infinité de fyftèmes très-ingénieux , pour expliquer les phénomènes que préfente la cuve de paftel; mais l’analyfe chymique des différentes fubftances qui la compofent ne s’accordant nul- lement avec les effets fuppofés par ces Savans, j'ofe efpérer qu'étant per- fuadés que je ne cherche que la vérité, ils daïgneront accueillir la théorie ue je foumets à leurs connoiffances , comme étant le fruit d’un travail Ru fur la pratique & les expériences les plus évidentes. Je dois néan- moins avouer , Meflieurs, que les découvertes de ces Chymiftes ont beau- coup applani les difficultés que j'ai d’abord trouvées à expliquer le mou- vement inteftin qui s'excite dans la cuve de paftel. Les Mémoires réunis de MM. Hellot, Quatremere d'Isjonval, Hecquet, &c., font jetté le plus grand jour fur cette importante théorie, Ce n’eft point ici l'inftant de détailler toutes les différentes obfervations qu'on a publiées fur cette matière, ce Mémoire n'ayant pour but que des faits & non de fimples conjectures; d’ailleurs lextrème complication de Ja plupart, en prouvant le pénie de l’Auteur, ne fatisfait pas toujours l'Artifte qu'on perfuade difficilement, même par les faits les plus frappans. Si la plupart de ceux qu’on a avancés exiftent réellement dans l'intérieur de la cuve, comme rarement ils fe manifeftent, je penfe qu’on fera beau- coup plus fatisfait, & même qu'on ne pourra fe refufer à l'évidence de ceux que je vais mettre en avant. Je ne répéterai point ici l’analyfe du paftel qu'a publiée M. Quatremere; La plus grande partie de mes expériences s’érant trouvée conforme à celles de ce Phyficien, je me contenterai de rapporter celles qui m'ont préfenté des réfultats différens & celles que j'ai cru devoir y ajouter. Première Analyfe, Perfonne n'ayant encore donné J'analyfe du paftel 3$2 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, frais , j'ai imaginé faire plaifir aux Savans , en inférant ces produits dans ce Mémoire. Quatre onces de feuilles de paftel frais , foumifes à la diftillation, dans un alembic de verre, placé dans un bain-marie, m'ont fourni d'abord : Eat ou phlegme limpideodorant, . . . . une once demi-gros. En augmentant le feu, il a paflé de l'eau acidule, . . deux gros. Sur la fin , elle eft devenue jaunätre , ou légèrement ambrée : la plante ne fourniffant plus rien à ce degré de feu , je l'ai paffée dans une cornue de verre, que j'expofai à feu nud ; alors j'obtins une eau alkaline très-cauf- tique, * « LOT ee de ET ES Ci LE PT TR AN Te ET TG ECS Huile citrine opaque & acide, . . . . . ,!. . #roisgros, Huile noire empyreumatique , . . . . . : un gros & demi, Réfidu. Un charbon très-noir , pefant . . . . quatre ftrupules. Ce charbon s'incinéroit très- promptement ; fa cendre leflivée m'a fournie, de l'alk ah fes CU NE DENT NA TEE AO 72 ner En fublimant une partie de cendre & deux de fel ammoniac, j'obtins quelques fleurs martiales. L’acide obtenu dans cette diftillation, ne cryftallifoit point avec l’al- kali volatil, mais avec l’alkali fixe végétal ; j'obtins de petits cryftaux, dont les plus grands nombres affsétoient la forme cubique. Durant cette opération, il s'eft échappé une once trois gros deux fcru- pules d'un fluide que j'ai reconnu, à la machine hydro - pneumatique , être de l'air atmofphérique , du gaz ou acide méphitique , enfin uhe petite quantité de phofphore volatil, ou gaz inflammable. Seconde Analyfe. Outre..les principes que M. Quatremere a découverts dans le paftel, j'ai reconnu que quatre onces de cette plante fournifloient trente onces d'air atmofphérique (1), trente-fix onces d'acide où gaz mé- -phitique , & deux cents fix onces de gaz inflammable ou phofphore vo- latil. nn Le réfidu du paftel, qui pefoit cinq gros, étoit mêlé d'une infinité de particules brillantes , que M. Quatremere a reconnu être attirables à .Vaimant. ï Malgré la grande quantité de fer contenu dans ces cendres , elles ne don- nent que de l'air atmofphérique, fi on les diffout dans l'acide vitriolique ; ençore faut-il que le vaifleau, qui contient le mélange, foit expofé fur un xéchaud embrafé, Pour retirer le gaz inflammable ou phofphore volatil du paftel fec, il {uit de le foumettre dans un matras à la diftillation , & d’en recevoir les émanations par le tube de M. de Romé, ayagt foin d'emplir la boule (x) J'entends par once d’air l'efpace qu'occupe, dans une fiole, une once d'eau. Conune on nva chicané fur çe que j’avois adopté cette mefure, qui elt cellle du Phyfis cien Anglois, c’eft ce qui n'oblige a infilter fur certe obfervarion. d’alkali, 4e SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 353 d'alkali. Le gaz acide méphitique, en fe combinant avec cet alkali, aban- donne le phofphore volatil ou gaz inflammable, qui, paflant très-pur , s'enfamme d'autant plus rapidement par le contaét d’une bougie, qu'il et toujours mêlé avec une portion fuffante d’air atmofphérique , aufli dé- gagé du paitel; la Aamme qu’il répand eft violette, & légèrement empy- xeumafique. L'huile qui fe dégage danscette opération, fe combine avec l’alkali vo- latil, & forme un favon très-brun , très-dur, qui furnage le Auide. Cette expérience prouve qu'on pourroit parvenir à combiner les alkalis fixe & volaril avec toutes les huiles eflentielles, en réduifant ces dernières Au problème qui n’a pas encore été réfolu d’une manière fatis- aifante. Diflillation du Paftel fee. Le paftel fec, foumis à la diftillation , donne tous les produits indi- qués par M. Quatremere, J'obferverai feulement que Les produits des plan- tes des trois premières récoltes font près du double de celles des der- nières, On trouve dans la cornue une matière charbonneufe , qui eft du paftel privé de fes principes volatils, mais qui a confervé néanmoins fa forme : on y apperçoit du flex , di quartz ,°& du fer déjà attirable à l’aimant. Une motre de paftel d'Albi, pefant deux onces (elles Sud =rucnt davantage) , expofée dans un creufet, couvert d’un fecond non luté,& l'action d’un feu aflez véhément, a d’abord brûlé à la manière des ma- tières grafles ou rélineufes , fans répandre d'odeur défagréable. A près quel- ques minutes , j'apperçus, en découvrant le creufet , que la Aamme oc- cupoic tout Le diamètre inférieur, & qu’elle s’'élevoit aflez haut, Cette motte étant parfaitement brülée, je la réduifis en poudre groflière , fans détruire la forme ou letiffu du paftel. En préfentant le barreau aimanté, je vis u’il avoit attiré une infnité de particules de fer de différentes formes, : en quelques-unes reffembloient à ces petites lames ou écailles qui s'é- chappent lorfqu'on bat le fer rouge fur l'enclume. Les portions du végé- tal que le contact de l'air avoit réduit en cendres, ne fournifloient pas de fer attirable à l’aimant, Un Chymifte très infruic aÿant contefté la préfence du fer dans cette expérience, excita d'autant plus ma curiofité, que M. Quatremere annon- çoit avoir répété ce procédé avec M. le Comte de Milly. Connoiffant l'éxactitude de tous ces Savans, je foupçonnois que la difcuflion ne s'é- toit élevée que parce qu'ils avoient opéré , ou fur différens paftels , ou avec Je même fous divers états. Pour m'en convaincre , je répétai d'abord l'ex- érience , telle qu'elle eft décrite(1), c’eft-à-dire, fur le paftel d'Albi en P il CE P (x) Le Mémoire fur le paftel , couronné par l’Académie Royale des Sciences. Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE, Yy 354 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mottes, duquel j'obtins , ainfi que je l'ai déja dit, du fer attirable à l’aimane: mais ayant reconnu que ces mottes étoient mêlées avec une très-grande quantité de particules terreufes, quartzeufes & calcaires, par la né- gligence ou la cupidité des Payfans, je préfumai que c’étoit ces corps étrangers qui fournifloient le fer; en conféquence, je féparai, par deux fimples lotions, faites à froid , les matières hétérogènes au paftel: ommé elles font naturellement pefantes, elles fe précipitèrent à la partie conique d’un entonnoir , dans lequel je jettai toutés ces fubftances très-étendues d'eau, 3 Je raffemblai le paftel nageant, qui étoit alors beaucoup plus pur; je le remis en motte : après l'avoir expofé de nouveau à l’action du feu, & réduit à l’état charbouneux , comme dans l’expérience précédente, je l’ai concaffé groflièrement ; en préfentant le barreau de fer aimanté, il n’en attira aucun atôme de fer. Je mélai enfuite les parties terreufes, quartzeufes & filiceufes reftées au fond de l’entonnoir , avec de la colophone (1), que j'expofai dans un creufet couvert à l'action du feu , jufqu'a ce que toute la colophone für brülée, Je retirai le creufet, quand il fut refroidi: je préfentai mon bar- reau àla poudte , devenue en partie noire & en partie très-brillante ; il en attira confidérablement de particules de fer. ES De cette expérience , 8 de quelqués autres que je détaillerai dans mon Traité ft les Teintures, je crois avoir droit de conclure que ces Chy- miftes avoient raifon de dire que le paftel contient & ne contient pas de fer attirable à l'aimant, puifque tout dépend de l'état fous lequel on ana- lyfe ce végétal. « Un Phyfcien a avancé que, d'après les découvertes de M. Sage ,on » pouvoit attribuer la préfence du quartz, tant dans l'intérieur des mot- » tes de paftel qu’à leurs furfaces extérieures, à la décompofition du >» paftel, dont les parties conftituantes s’aflimilent à la terre ». Îl appuie fon affertion de l'expérience fuivante : En laiffant pourrir du fumier dans lequel on a foin de ne pas introduire la plus légère por- tion de terre ou de fable ,ilsoffrira , après un laps de temps, des cryf- taux très-caractérifés de quartz & de mica. Mais ne pourroit-on pas ob- ferver à ce Savant que, premièrement, rarement les mottes de paftel éprouvent le plus léger degré de putréfaction ,-puifque leur intérieur eft encore tout vert, & qu'il conferve toute l'odeur du paftel ; 2°. que le fu- mier n'offre jamais de cryftaux , qu'après avoir été’ expofé au moins fix mois à l'air, tandis que le paft:l n’eft jamais plus de quinze jours en fermentation ; 3°. qu'aucune combinaifon ni cryftallifation pierreufe ne peuvent avoir lieu que par la voie humide? On fait que le paftel eft à a ————— — ——— (1) J'obrins un fuccès égal, en fubitituant à la colophone de l'huile & de fa poix. L SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS; 355$ peine coupé & broyé, qu'on l'expofe en piles à l’ardeur du foleit, qui sèche leur furface extérieure, au point qu’on'ne peut les brifer qu'à coups redoublés de maflues aflez confidérables ; & lorfque l’intérieur eft arrivé à fon degré de fermentation , que j'indiquerai ailleurs, on le mêle aufli-tôt avec l'extérieur, & qu’on réduit le tout en mottes, dont on ac- célère la defficcation aufli promptement qu’il eft poffible, Ce travail dure dix & quinze jours, felon la chaleur de la faïfon, à laquelle onseit EL obligé de fuppléer , en expofant les mottes fur des claies dans es étuves, Or , on voit nue que cet efpace de temps eft trop court, il n'y a pas affez d'humidité pour produire cette cryftallifation ; d’ailleurs, il paroït bien évident que ce quartz ou le filex que j'ai rencontré dans la portion d'un douzième , & quelquefois plus , aan ou de la pouf fière que Les vents jettent fur Les piles , ou du fable que forme le fol fur lequel on élève les piles : quant à la terre, qui fe convertit en fer par l'addition d’une matière grafle, la couleur & l’analyfe du terrein qui pro- duit Le paftel, nous prouvent inconteftablement qu'elle lui doit fon origine. Je reviens à l'analyfe des cendres de paftel. Si on les expofe dans un creufec avec un peu de borax à l’action d'un feu de forge ; äprès une heure d'un feu véhément, on obtient un verre de couleur verte jaunâtre; ce qui fournit une preuve non équivoque de la préfence du fer. L'expérience qu'on a propofée pour prouver la préfence du fer dans es cendres de paftel, eft infufhifante : on confeille de verfer de l'acide vi- triolique fur Le cendres calcinées , d'étendre la diflolution d’eau dif tillée, d'y verfer de l'alkali phlogiftique ou fel animal , fans être. cependant faturé de la matière colorante du bleu de Pruffe, En peu de temps, la liqueur {2 trouble, & l’intenfité de fa couleur augmente au point de devenir d'un bleu caractérilé, Je ne ferai qu'uñe feule objection, c’eft qu'en verfant de l'acide vitriolique fur ce même alkali phlogiftique ou fel animal ,«on développe cette couleur bleue , provenant fans doute du fer, que MM. Sage & Demefte, & d’autres Phyficiens , regardent comme prin- cipe de ous les alkalis (1), & principalement de celui qü'on appelle phlo- (:) Des Savans _ es mérite ont prétendu que le fer nentroit jamais comme principe des alkalis: Pour prouver que cette conteftation eft dénuée de fondement, it fuit de {e rappeler ce qu'ont prouvé une infinité de Phyficiens ; c’eft-âsdire, que ce méral eft le principe de la couleur des végétaux. Que devient il par l’incinération , puif- qu'il n’eft pas volatil, & que les alkalis ont la propriété de le diffoudre ? Au refte , on eut confulter les belles & nombreufes expériences confignées dans les recherches fur es couleurs dans les corps opaques, par M. Eward Hufley de Läval, de la Société Royale de Londres, pag. 44 & fuiv. de la traduétion de M. Quatremere d’Isjonval: elles fourniflent des preuves irrévocables des faits que j’ai établis, Tome XX, Part, Il, 1782. NOVEMBRE. ) A 356 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUÉ, giftique ou fel animal. MM. Junckers (1) & de Laval (2) prétendent aufli que ce dernier alkali eft faturé d’un acide. Analyfe par les Acides minéraux. Si l’on verfe deux onces d'acide vitriolique concentré fur deux gros de pañtel en poudre, lemêlange fe bourfouffle fans la moindre chaleur ; Les vapeurs font peu fenfibles : le tour prend bientôt la confiftance d’un fyrop épais , de couleur noir; l'acide étant féparé du paftel , a une couleur rouge fatranée : en étendant la diflolution de 16 onces d’eau diftillée, la chaleur devient confidérable, & la couleur d’un jaune rouge; après un mois de digeftion fur le paftel , certe couleur s’eft un peu foncée. J'ai plongé à plufeurs reprifes des échantillons de laine, mais qui n’ont pris qu'une couleur roufâtre , par conféquent éloignée du bleu de Saxe annoncé J'ai réitéré & varié cette «expérience, eonjoin- tement avec M. Richard , en augmentant les dofes, & faifant même bouil- lir la liqueur, après l'avoir étendue d'eau; mais tous nos efforts ont été in- fructueux. . 6 onces d’efprit-de-vin à 34 degrés à l'aréomètre de M. Baumé , mifes en digeftion fur 2 gros de paftel, ont pris une couleur fafranée ; diftillées & évaporées, elles ont laiflé 23 grains d’une fubftance gommo-réfineufe, jaune foncé. Ayant eu occafion de retirer de l’alkali volatil , felon le procédé de M. Wolf, je me fuis convaincu, ainfi que l’a avancé M. Quatremere , que le plus foible, mêlé au paftel, acquiert toute la volatilité du plus fort. 5 De l'emploi du Paffel. Comme chaque Province a des procédés particuliers pour monter ow affeoir la ed paftel , on doit en conclure que cette opération n’eft pas , à beaucoup près , aufli dificultueufe qu'on le croit communément , quoiqu'elle foit la plus importante de la teinture, & celle dans laquelle le plus grand nombre des Artiftes échouent. Parmi tous les Maîtres Tein- turiers que j'ai confultés, M. Oudin m'a paru le plus verfé dens cette mani- pulation ; je dois àtoute fa complaifance les connoiflances que j'ai ac- quifes fur le bleu de paftel, Je ne décrirai pas ici cette opération , déjà très-bien détaillée par MM. Heilot & Quatremere d'Isjonval ; je rapporterai feulementles particularités 1) Confpeft. Chym., v. 1,p. 573. { Recherch., &c. , p. 46 & fuiv. SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 357 que j'ai été à même d’obferver avec M. Oudin, qui eft un des Artiftes qui a Le plus perfeétionné cette partie de la reinture, 1°. On a toujours dit qu'il falloit être exaét à pallier les cuves quatre heures après leurs afhertes. Se m'a convaincu que douze , feize &c quelquefois vingt heures d'infufion ne pouvoient que mieux divifer le paftel, & qu'il n’en réfultoit jamais d'accident. 2°. Qu'il eft abfolument inutile de réduire le paftel en ‘poudre: cette manipulation fuperflue exige un temps & des bras qui doivent être employés “plus utilement; d'ailleurs , en palliant toutes les quatre heures, on refroi- dit la cuve d'autant de fois trois degrés du thermomètre dé M. de Réau- mur. Îl vaut donc mieux abandonner ce travail à l’eau, dont la chaleur eft plus de MEGnee pour divifer Les mottes, & en extraire tous les principes néceflaires à cette opération, Cette méthode offre de plus l'avantage de re- connoître combien une balle de paftel, qui pèfe cent foixante livres net , contient de mottes putréfiées, parce qu'au bout de quelques heures elles viennentMurnager le bain. Si on les ouvre, elles Pan pe une odeur très-féride , & ont une couleur brune foncée. à 3°. Les dofes de chaux qu’on a indiquées jufqu'à préfent ne fuffifenc jamais pour prévenir ou remédier aux accidens des cuves ; il faut au moins un tiers, & fouvent moitié en fus. : 4°. Afin que les étoffes foient teintes uniformément, il faut, avant de les plonger , pafler la fleurée de cette cuve dans une autre. $°. Avoir grande attention que les Ouvriers mènent bien l’étoffe entre deux eaux, afin d'empêcher le contaét de l'air extérieur fur les étoffes, qui, en les faifant paffer du vert au*bleu , donne une nuance plus foncée à la partie qu'il a frappée. Il faut aufli ne pas agiter trop le bain, pour ne point y introduire’ d'air , qui, s'arrêtant dans les plis de l’éroffe , produit fouvent des inconvéniens de je viens de parler; je veux dire des étoffes vergetées. : 6°. Enfin, pour éventer ou déverdir les étoffes, il faut les préfenter en totalité à l'air le.plus promptement qu’il ëft poflible. J'indiquerai ailleurs un nouveau moyen. J’entre dans des détails qui n’amuferont certainement pas les perfonnes uine voudroient qu'une idée fuperficielle de la teinture: cependant, fi j'obfervois qu'en négligeant ces petites précautions, & avant que je les eufle découvertes , il y avoit toujours, furcent pièces d’étoffe , foixante & foixante-dix de vergetées, & qu'on étoit par conféquent obligé de rejet- ter à la teinture , malgré qu'elles euflent reçu les derniers apprêts quiexi- gent des dépenfes & une perte de temps confidérable; on concevra combien il eft important de les fuivre exactement, 358 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Explication du mécanifme de la Cuve de Paflel. D'après l’analyfe la plus exaéte des fubftances qui entrent dans la cuve de paltel , j'ai découvert qu'on pouvoit la confidérer comme une per- fonne d’une complexion Ta fujette à deux maladies feulement , dont à la vérité une infnité de caufes font la fource. Si, par une circonf- tance quelconque , on n’a pas prévu les accidens, on remédie aux mala- dies, en détruifant les caufes par deux remèdes très-fimples, qui ont eu jufqu'ici le plus grand fuccès. Je m'explique , & je dis que la cuve de paftel peut tomber en putréfac- tion ou être rebutée , qui eft l’oppofé ; que deux ou trois moyéks fufhfenc pour la rétablir ou la mettre 4 doux, qui eft le feul état où elle teint par- faitement en bleu. Ces moyens font la chaux, le repos , ou un léger acide végétal. MM. Quatremere & Hellot ont très-bien prouvé qu'on peut fubitituer au repos l'eau des Amidonniers, qui, en acaglérant la fermentagon, rétablit la cuve, & prévient le retard que le repos apporte toujours àu travail. En réfléchiffant fur l'analyfe du paftel & des autres matières qui com- pofent la cuve, on fuivra bien facilement tous ces phénomènes qui éton- nent Les Artiftes & même les Savans: on Les excitera & onles préviendra à volonté. . ’ Premier Procédé. Le premier procédé du Teinturier confite à faire une infufñon "de trois cents foixante livres de paftel dans trente pièces d'eau de rivière bouillante, ou dans une même quantité d’un vieux garençage, mais très-peu chargé de couleur, Ce dernier procure le double avantage d’exciter une prompte fermentation, par le développement de fes parties mucilagineufes extratives , déjà aigries ou acidules ; fecondement, par fa couleur rougeâtre, qui donne de l'éclat au bleu, en le faifant tirer fur le violet. Si on fait cette infufon dans de l’eau de rivière pure, le bleu qu'on obtient eft prefque toujours terne , quoique plus azuré que Le précédent. 3°. On fait bouillir dans cette eau du fon, ou on y fubftitue l’eau füre des Amidonniers. Si, ainf qu’on l’a avancé, le fon qu’on jette dans la cuve au commen- cement de l'opération, ne donnoit qu'une colle qui fert à maftiquer les molécules bleues dans les pores de l'étoffe:, ou à tenir ce bleu fufpendu dans la maffe du fluide, pourquoi Ja graine & d'autres corps muqueux & plus mucilagineux ne produifent-ils pas les effets du fon ? En obfervant un inftant ce que devient le fon , on reconnoît que non -feulement il ne fournit plus de colle après quelques jours, mais quil eft déjà paflé à la fermentation acide: d’ailleurs la petite quantité qu'on emploie en éta- bliffant une cuve, m’eft guère propre à produire de la colle au bout de SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 359 fix mois, &, à plus forte raifon, après un an & dix-huit mois que dure une cuve ordinaire {1). À En fe rappellant des movens qu'emploient les Payfans pour interrom- pre brufquement la fcrmentation du paftel, on concevra facilement que le fon ou l’eau füre qu'on y fubftitue, font un levain qui rétablit puiffam- ment cêtte fermentation fufpendue dans les mottes du paftel, en déve- loppant, divifant ou atténuant toutes les fubftances falines extraétives & colorantes. En effet, au bout de deux jours, on voit déjà ces mêmes parties colorantes furnager le bain fous la forme de veines plus ou moins confidérables. On peut attribuer cette dernière propriété à leur ex- trème ténuité , ou, comme l’a dit M. Quatremere, à ce qu'elles font inter- pofées dans les matières émullives & huileufes très-abondantes dans le paftel. C'eft cependant à tort qu'on a conclu de-là que ces mêmes parties co- lorantes ne font pas réparties dans toute la mafle du fluide : on juge très- bien qu’alors l’éoffe, plongée dans la cuve , ne fe teindroit que d’un feul côté , puifque ces veines font prefque toujours l'indice qui détermine l’Ar- #ifte à teindre ; d’ailleurs il fufñt de plonger un flacon, qu'on ne débou- che que lorfqu'on eft artivé au centre de la cuve, pour être afluré que les parties colorantes font non-feulement réparties dans tôht le fluide, mais encore dans la pâtée ou marc de la cuve, . La cuve ne produit d'abord qu'une fermentation vraiment fpiritueufe, endant laquelle on voir à la furface du bain une multitude de bulles Énehes ou écume femblable à celle qu'on apperçoit fur le vin ou fur la bière à l’état de moût. Ces bulles, comme on le fait, proviennent de l'air interpofé dans les corps, & de l'acide ou gaz méphitique , qui fe dégagent durant la fermentation : aufli le bain manifefte-t-il alors cette odeur inconteftable , qu’on confondgcependant avec celui de l’alkali vo- latil , qui eft aufli pénétrant ; de plus, l’eau qui diflille fous les couvercles des cuves , rougit la teinture de tournefol. Enfin, il paroît que c'eft ce gaz ou acide méphitique que j'ai déjà-trouvé en analyfant le paftel à la machine hydro-pneumatique. … On fait très-bien que tout fluide qui contient beaucoup de matières muqueufes & extractives, pafle rapidement de la fermentation acide à la fpiritueufe ; eng , à la puttide : Le même le paftel ne tarde pas à éprou- ver cette altération , fi on n’y remédie par un moyen aufl fimple qu'ingé- nieux , qui eft fans doute le fruit de recherches long-temps méditées ,ou du hafard, ——————————— ——_———————————…—— …"—_— …"——.—" ——— — (:) Lorfque le Brafleur a employé trop d’eau dans la confeétion de la bière, la fermentation étant: arrêtée ou retardée , il y jette du fon, qui abforbe l’eau & rérablit cette fermentation, « 360 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, La chaux, cette fubftance fi commune, eft le remède le plus efficace que M. Hellot ait confeillé d'employer pour arrêter les progrès de la pu- tréfaction dans une cuve (1). Cette vérité , reconnue des Teinturiers long- temps avant que M. Hellot la publiät, a été mife depuis peu dans fa plus grande évidence, par M. Quatremere d'Isjonval , dans fon analyfe de l'in- digo; mais je fuis très-éloigné de croire, ainfi qu'on l’a avancé , qu'on rétablifle, par ce fecours , le paftel putréfié. Cette affertion feroit contre tous les principes de la Chymie, qui établit que jamais les fermenta- tions n’éprouvent.un ordre inverfe; c'eft à-dire , que tout cotps peut paffer dela fermentation acide à la fpiritueufe ,& de-là à la putride: mais une fois arrivé à ce terme, il n’eit plusen notre pouvoir de faire rétrograder la fermentation putride à la fpiritueufe | & encore moins à l’acide. Or, voici ce que produit l'addition de la chaux. A peine a-t-onjetté dans une cuve de paftel trois à quatre livres de chaux éteinte à l’eau , qu'on fent une odeur piquante , qui irrite Les houpes nerveufes de l'odorat & l’organe de la vue. « Cette odeur diftèra beaucoup de celle de la putréfaétion, qui eft nau- féabonde. La quantité de veines colorantes femble doubler ; la fleurée ou moufle eft infiniment plus abondante, fur-tout fi on a pallié ou heurté la cuve un inftant après l’addition de la chaux. Pour comprendre la caufe bien fimple de ces phénomènes intéreffans , il fuit de fe rappeler les propriétés de la chaux & l’analyfé chymique du paltel. ; 1°. On fait qu'une des principales propriétés de la chaux , c’eft de dé- compofer tous les fels ammoniacaux, la cuve de paftel en putréfaction contenant beaucoup de fel ammoniacal méphitique (2); plus , un foie de foufre: dès l’inftant qu’on jette de la chaux, Lalkali volatil eft dégagé de fabafe; & le principe ignée de la chaux , en s’uniffant à l’alkali volatil , aug- mente fon énergie: de-là l'irritation qu'on éprouve fur la vue & l'odorat, lorfqu'on s'approche trop près du bain de la cuve. L’acide ou gaz méphi- tique qui fervoit de bafe au fel ammoniacal, abandonné à lui-même, décompofe le foie dedoufre , & fait ceffer l'odeur défagréable. S'il y a furabondance de gaz ou acide méphitique, il s’unit à la terre calcaire te- nue en diflolution dans le bain , & la régénère en vrai fpath ou pierre calcaire , qui furnage long-temps le bain en croûtes d’autant plus épaifles, qu'onen a jetté une plus grande quantité de chaux. Tels Roi , en peu de mots, les vrais effets que procure la chaux, & la manière dont elle agit se la cuve. Nous y reviendrons plus au long, en parlant de la cuve rebutée, . (x) Teinture des laines, pages 49 & füiv. 1748. , (2) Tous les crucifères fourniffent du fl ammoniac, J'obferve ’ n < LT SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 361 J'obferve maintenant que la portion de paftel putréfiée, qui renvoyoit l'odeur défagréable que M. Sage appelle foie de foufre phofphorique, de- vient non-feulement nulle dans la cuve, mais encore ternit les couleurs. Je fuis, comme on le voit, bien éloigné du fentiment de ceux qui pré- tendent avoir rappellé la cuve dæpaltel putréfié ; les cuves fur lefquelles ils ont opéré, conrenoient une trop grande quantité de paftel pour qu'il püt jamais fe putréher dans cinq à fix jours. On fait d’ailleurs que deux ou trois livres de paftel en putréfaétion font certainement plus que fuflfantes pour infecter l'Attelier le plus fpacieux. C'eft fans doute ce qui en a im- polé à ces Savans , qui ont avancé que toute la cuve étoit putréfiée. Il ya une ivfinité de faits, qui tendent à réfuter la théorie établie fur l'application des couleurs. 1°. Nous connoiflons des bois & des plantes qui contiennent une très-petite quantité de fel, & qui cependant fourniflent - des couleurs très-folides; 2°, tous les fels employés dans la teinture étant folubles dans une grande quantité d’eau bouillante, il s'enfuir que les étoffes devroient fe décolorer parles ébullitions long-temps continuées, tandis que nous voyons au contraire une infinité de couleurs augmenter en éclat par le bouillon dans l’eau. Il eft à préfumer que toutes les cou- leurs font les réfulrats d'un précipité qui s’unit à l'éroffe, de a même manière que deux plans polis adhèrent entr'eux. Cette opinion n'eft pas cependant encore démontrée d’une manière fatisfaifante. Si, ainfi qu'on l’a publié, la partie colorante eft tenue en diffolution par l'alkali volatil, il paroît vraifemblable que cet alkali, en s'uniffant à l'huile ou à la matière graffe de la plante , laiffe précipiter les atômes co- . Jorans , qui, étant infolubles dans l’eau , reftent attachés aux parois des #ores de la laine, ainfi que plufieurs faits tendent à le prouver : 2 couleur verte-brune du bain, quand on y jette de la chaux; 2°. l’alkali volatil eft le feul ingrédient de la cuve qui ait la propriété de pénétrer les pores & même les tiffus les plus ferrés des éroffes & des fubitances animales; 3°. il a une très-grande affinité avec les matières grafles ; 4°. toutes les étoffes, en fortant de la cuve, ontune couleur verte qu'on attribue à la furabondance d’alkali volatil ; $°. la chaleur de l'étoffe fai- fant promptement diffiper l’alkali , il laifle précipiter une feconde por- tion de bleu, qui s'échappe au foulon & au dégorgeage; 6°. de-là la néceflité de donner aux étoffes une teinte plus foncée que la nuance de È l'échantillon. Je pourrois encore rapporter d’autres faits en faveur de cette théorie ; mais comme je ne la crois pas inconteftable , je n'irai pas plus avant , defirant d’ailleurs qu’on en établiffe une autre, & qu’on l’étaie fur des faits aufli évidens , qu'exiftans généralement dans toutes les cuves de à paftel. et Tome XX, Part, II, 1782. NOVEMBRE. N N 362 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'ESTIECRYE De M. BiNELLI, Ingénieur des Mines, des Académies de Nimes, Dior 6 autres, a M, L, P. D, L. T. D. A., 4 21 Juille 1780. Mowstreur, J'ai lu attentivement les Effais fur la Minéralogie & la Métallurgie, que vous eûtes la bonté de me communiquer ; je vous rends, Monfieur , ce Livre, accompagné de tous mes remerciemens? J'ai trouvé à la page 78 de cet Ouvrage , l'article dont vous m'avez fait l'honneur de me par- ler, en examinant chez moi le modéle en relief de la montagne des Chalanches. Bien des perfonnes ont parlé de la mine qu'on y a décou- verte, les unes fans l'avoir jamais vue, & les autres fans y avoir rien connu. J’ailieu de croire que l’Auteur de ces effais eft du nombre des premiers. Il rapporte , qu'a Æ/mont en Dauphiné on a exploité , pen- dant trois ans, un vrai filon de mine d'argent. Le filon s'ef} perdu à la fin de 1772. Il ef? difficile de croire à la perte totale d'un vrai filon; il s’égare quelquefois ; 1! diminue : maïs ül ef? bien rare qu'il difparoiffe tout entier & pour toujours. Pour prononcer fur La perte d’un vrai filon , il faudroit préalablement être certain de fon exiftence réelle. C’eft ce qu’on va contefter, en démon- trant que jamais dans cette montagne on n'a vu un vrai filon, fuivant l’acception du terme. Sans citer un grand nombre de Minéralogiftes les plus eftimés qui ont traité de cette partie, il n’y a qu’à voir la définition uen donne le Collége de Freyberg, dans fon Traité de l'exploitation d Mines. Il confirme l’opinien reçue, en annonçant que les veines qui ap- prochent de la ligne perpendiculaire , font connues fous Le nom de flonss, & que l'on nomme couches, celles qui, par leur obliquité, ne font pas bien éloignées de la ligne herizontale, M. le Marquis de Luchet convient même de ce principe ,en difant, à la page 86 , que plus les filons Jont cou- chés, moins onefpère; & par la raifon contraire, plus üls font perpendicu- laires, G& pluson s'y confie. I] y a toute apparence que ce n’eft pas des pre- miers qu'il a entendu parler, en établiffant un vrai filon à Allemont, Mais comment s'y prendra-til pour prouver que ce vrai filon a exifté dans la montagne des Chalanches, tandis que les veines métalliques parallèles aux bancs de rocher de cette montagne ne s'étendoient que dans une obliquité d'environ 33 degrés, fur la largeur de 25 toifes, en SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 363 füivant fa direction , & de 40 toifes tout au plus, en fuivant l'inclinaifon fur coute fa longueur ? M. le Marquis de Luchet a trop de lumières dans cette partie, pour qualifier davantage du nom de vrais flons des couches fi bien caractérifées , que le célèbre Delius, au $. 62 de fon [nftruétion fur l'Art des Mines , nomme, à juftetitre, coureurs de gazon , & pour n'être plus furpris que ces couches aientun terme, quoiqu'il ne foit pas plus vrai que le filon s’efl perdu à la fin de 1772, car cette époque fut la plus brillante de la mine , ayant retiré depuis de ces mêmes couches autant de minerai pour le moins qu'on en avoit extrait à cette date. À la même page, & à l'article qui fuit immédiatement le précédent, l'Auteur ajoute, qu'on ne peut pas appeler mines d'argent celles d'Alface & celles de Dauphiné. Ceci paroît impliquer contradiction ; car, en fuppo- fant , ponrun moment, avec lui que la couche fût vrai filon, quel nom lui donnera-t.il, & à quelle efpèce de mine appropriera-til la qualité de mine d'argent, s'il la refufe à un vrai filon fuivant lui, & dont la richefle commune eft arrivée jufqu'à crois marcs d'argent par quintal ? Voilà, M.le Préfident , comme l’on s'égare dès qu'on ne juge pas avec connoïflance de caufe, & que l’on n'a pas été témoin oculaire de ce de l'on avance, L’Auteur eft également dans l'erreur , lorfqu'à la même euille il prétend encore que la plupart des mines de fer ne donnent pas plus de vingt pour cent. Sans entrer dans des détails fuperus fur celles des autres Provinces, c’eft la chofe la plus aifée à connoître que , parmi les mines de fer qui font exploitées dans la Province de Dauphiné, il n'y en a pas une feule qui ne moins de trente-trois pour cent en métal à la fonte. IL eft fâcheux au refte de trouver dans cet Ouvrage, qui a ce- pendant des droits aux éloges des Savans , des inexactitudes de cette efpèce. Je fuis, &c. LETTRE DE M DE LA METHERIE, D.M:, AUX.AUTEURS DU JOURNAL DE PHYSIQUE; NL Sn pharmacie an rose mt ar Ca Bot \é A nature de la platine n'eft me encore connue, malgré les travaux des célèbres Chymiftes qui s'en font occupés. Les uns, tels que MM. les Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE, Zz2 364 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Comtes de Buffon , de Milly, &c., penfent qu'elle eft un fimple alliage de fer & d'or; d’autres, avec M Macquer, font portés à la regarder comme un métal particulier. C’eft à l'expérience à prononcer de quel côté eft la vérité. Je n'examinerai ici que la partie noirâtre qu'on rencontte toujours mélangée avec la vraie platine; elle fe préfente fous forme de petits grains arrondis, dont Les angles font émouflés , ainfi que ceux de la platine : ce qui ne permet pas de douter que ces deux fubftances n’aient éprouvé de grands frottemens. Ces grains noirâtres font très-fenfibles à Vaimant: mis dans les trois acides minéraux , quelques portions s’y diflol- vent; & à la loupe, on apperçoit dans l'acide nitreux & dans l'acide marin une petite efferve{cence , qui eft trop peu confidérable pour qu'on puifle ramafler le gaz qui fe dégage. La liqueur teignante en précipite un bleu de Pruffe : mais la majeure partie de ces grains noirâtres eft inatta- quable aux acides; l’eau n’a ésalement aucune action fur eux. Ce font ces mêmes phénomènes que préfente la limaille de fer expofée à l'adtion du feu. Sa propriété d’être attirable par l’aimant n'eft point al- térée; elle y perd fon gaz, que j'ai fait voir (1) être prefque tout inflam- mable, excepté une certaine quantité d’air fixe, qui précipite l’eau de chaux. Les acides ne l’attaquent prefque pas; il n’y en a qu’une très-petite portion, qui fans doute ayant échappé à l’aftion du feu , fe diffout avec légère effervefcence, & donne du bleu par la liqueur teignante. Enfin, fon gaz eft remplacé par une autre fubftance , qui augmente fon poids con- | fidérablement. Cette augmentation va prefque à un tiers de la mafle totale, Les grains noirâtres qu'on trouve dans la platine, ayant toutes les mêmes propriétés , ne paroiflent donc être que des portions ferrugineufes qui ont fubi l'aétion du feu, & ont perdu leur az. L'augmentation de poids que celles-ci acquièrent , influe fans doute fur la pefanteur fpécifique de la platine. Ceci pourra paroître une probabilité à ajouter à l'opinion des Savans , qui croient que cette finguliere fubftance n’eft qu'un mélange d'or & de fer. On n’a pu, ileft vrai, opérer jufqu'ici cet alliage. Mais ce ne fauroit être une raifon d’en nier la poflibilité pour les Chyrmiftes, qui favent trop aujourd'hui combien ce qu'on appelle un tour de main, eft difficile à failir. Je fuis, &c. (1) Journal de Phyfique, Janvier 1782. rer SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 365 RENE" MR" DE M, ANTONIO-Mario LORGNA , au Chevalier ALEXANDRE VOLTA, Sur un Coup de Foudre parti de terre ; waduit de llialien, par M, MARCHAIS, fils. À À vous promis , Monfieur, dans ma dernière Lettre , de vous faire part d'un événement arrivé près de Vérone à la fin du mois paflé; mais une foule d’occupations m’a empêché jufqu’à préfent de remplir ma promefle, à laquelle je vais enfin fatistai Le génie obfervateur, qui , depuis quel- ques années, circule & s'acc les jours dans l’Europe, a fait faire à la Phyfique les plus grand s’eft rencontré des faits, qui, au pre- mier coup-d'œil, ont paru i mais tôr ou tard ils font devenus des chaînons qui s'ajoutent à la chaîne générale, C'eft ce qui a pu me ré- foudre à vous faire part du fait dont il s’agit , parce qu'il eft évident qu'il lie enfemble plufieurs opérations de la Nature. Le 27 Avril dernier , furles $ heures du foir, nous eûmes un orage très-violent » accompagné de grêle, qui ravagea toutes les campagnes dans nos environs. M. Saverio Larofola étoit À fa maifon de campagne, diftante de deux milles de cette Ville, & fe trouvoit alors avec fa fœur près d’une porte qui menoit dans la cour. La pluie tomboit en très - grande abondance ; il tonnoitde toutes parts, & l’atmofphère étoit, pour ainfi dire, en convulfion, Peu de jours auparavant , on avoit forti de l’étable du fumier parfai tement confommé , & propre à être employé tout de fuite à fumer les champs: on en avoit fait, pour le moment, un amas dans la cour , qui eft fermée de murs, d’où on l'avoit enfuite tranfporté dans un champ de mürier , diftant d'un mille de la maifon: Les égoütures du fumier avoient mouillé tout l'emplacement fur lequel il avoit été pefé dans la cour, Il y avoit même au milieu une place où il étoir refté une partie de cetengrais, compofée de fragmens de paille & d’excrémens à moitié putréfiés, Tout- à coupon vit fortir de cette place même une flamme qui fe répandit promp- tement , non{eulement dans tout l'efpace que le famier avoit occupé , mais qui s’éleva encore vers la pluie , alors très-abondante. Cette partie de la cour étoit celle où les troupeaux avoient coutume de s'arrêter , & où , de temps à autre ,on dépofoit le fumier qui fe tiroit de l’étable. La flamme monta à ÿ ou 6 pieds de terre, éclata violemment, heureufement près de 366 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, l'angle de la cour le plus éloigné de la maifon. Le bruit fut femblable à celui d’un coup de tonnerre ; la maifon trembla. La jeune perfonne ref- fentit une violente commotion dans tous fes membres ; & {ur-tout dans la poitrine ; fon frère & elle firent craindre pour leur vie. Dans la cour , un gros pilaftre de la porte qui menoit aux champs, fut détruir entière- ment; mais la maifon n’éprouva aucun mal. Cet événement eut encore des fuites. Le même champ où l'on avoit répandu le fumier, offrit des traces évidentes d’une pareille inflammation. Cinq muriers furent entr'au- tres traités d'une manière fingulière. Je les ai vifirés les uns après les au- tres, & confidérés avec la plus grande attention. L’écorce , en partant de terre (ce qui mérite attention), étoit enlevée , comme fi on les en eût dépouillés adroirement avec un couteau , au moins jufqu'à 3 pieds de haut: ils ne préfentoient qu'un tronc nud , & quelques commencemens de fente dans les branches; les feuillés au fommet de l'arbre avoient des marques de feu (1). (1) Multiplier les obfervations , eft fans moyen de hâter les progrès d’une cience : mais il faut les regarder comme un bien appartenant à la Société ; car c’eft für-tout à la communication des idées qui s’eft établie entre les Savans de toutes les Nations , que nous devons les lumières dont jouit notre fiècle. Avant lui, les connoif- fances d’une Nation n’appartenoient point 2 fa voiline; & lorfque je confidère la façon dont les Savans travailloïient alors, il me femble voir d’habiles Architectes élevant un même édifice , chacun fuivant fon idée , fans s’aflujettir au même plan, & ne produifant enfin qu'un mélange tidicule, tel que le feroit le gothique hardi , marié aux beautés ré- gulières des ordres grecs. Un phénomène ifolé paroît quelquefois faire exception à la règle, randis que, lié avec d’autres , il eft fait pour la confirmer. Je connojs des gens inftruits, qui ne peuvent pas croire à la foudre afcendante; & la multiplicité des ob- fervations pouvant feule élever ce fait au plus haut degré de conviétion, je vais en dé- crire deux : l’une m'eft particulière ; je dois la feconde à un Savant que les Sciences viennent de perdre, dont le nom fera époque dans l’hiitoire de nos connoïflances, & les vertus dans celle de l'humanité. Voici la première, Le tonnerre tomba, il y a quelques années, dans les Champs-Elyfées , & un des arbres fut foudroyé. Je fus examiner les traces de la foudre; le fol étoit percé tout au- tour de plufieurs petits trous de 2 à3 lignes de diamètre. En trois où quatre endroits, Pécorce étoit levée de bas en haut ; les feuilles de Parbre étoient jaunes & grillées par- deffous, & elles s’étoient retirées comme le fait une feuille de parchemin que lon préfente à la chaleur; le côté qui eft au feu devient convexe, & les extrémités fe tortil- lenten fe roulant. Le deflus des feuilles étoit refté verd : tout annonçoit donc que la foudre étoit partie de terre; mais, comme le dit l'Auteur, je ne croyois pas devoir craindre d’autres coups que ceux partis de l’atmofphère, & je ne regardai l’état de cet arbre qüe comme une des fingularités que la foudre offre quelquefois dans les corps w’elle à bpés , lorfque le Mémoire de M. Mourgue fur plufeurs foudroiemens emblables parut, & je parlai de ce fait à M. Duhamel, qui me dit que M. fon frère fut furpris un jour à Denainvilliers , dans les champs , par un orage violent, & qu’il vit un jet de feu partir de terre, & tracer dans l’air une traînée lumineufe, comme Peît fait une fufée volante. Ce fut même fa première idée ; mais la détonnation violente qui füivit immédiatement, lui appritce qu’ilen devoit penfer. Voici donc trois faits ana SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 367 . Au pied d'un mûrier, on appercevoit un trou qui s’enfonçoit profon- dément fous les fâcines ; mais cependant, & ce qu'il faut bien remarquer, c'eft que, dans les champs voiüns , je n’ai pu découvrir aucunes marques, aucunes traces de la moindre fulmination, Je vous préfente ce fait avec {es véritables circonftances. L'inflammation dans la cour & dans les champs ‘où l’on avoit difperfé cetengrais; la fulmination arrivée dans ces deux fituations, comme je vous l'ai dit , diftantes d’un mille , tout ici me paroït mériter réflexion : c'eft Rue J'ai tenté une expérience , qui, fuivant ma manière de voir, non-feulement rend ce phénomène décifif, mais encore le#lie à cette grande chaîne, qui forme la théorie du feu combiné , des méréores inflammables , de l’éleétriciré atmofphérique , & enfin de la foudre méme, Avant de partir de cette maifon de campagne, je ramaffai avec foin dans la cour une portion du terrein fur lequel avoit été dépofé le fumier, & d'où s’étoit élevée l’émanation qui avoit pris feu. Je lemportai, pour la foumettre à quelques expériences. Lorfqu’elle me parut dépouillée fuf- fifamment de toute humidité feperflue , je l'introduifis dans un appareil convenable , & je réuflis, fans autre intermède , avec Le feul fecours du feu, à remplir un facon d’un gaz que je confervai avec grand foin. Que direz-vous, Monfeur, en apprenant que ce gaz étoit entièrement com- buftible ? En effet, une portion s’enflamma à l'approche d'une bougie allumée ; l’autre fut rentermée dans votre piftolet électrique, où elle brüla par le feul contact d’une étincelle très-foible que je tirai d'un électro- phore. Ce phénomène eft fi clair , & lie tant de faits différens, que c’eft avec raifon que je me fuis empreflé de vous le communiquer; vous fur- tout qui avez ouvert à la Phyfique une carrière fi vafte par vos travaux fur les fluides inflammables retirés des fubitances animales & végétales en putréfaction. En effet, de quoi font compofés les marais fur lefquels vous avez fait vos expériences, & qui vous en ont fourni fi abondam- ment? De matières en fermentation , de corps organifés en diflolution ; en logues , d’où il réfulte que la foudre eft quelquefois afcendante. M. Lorgna eft porté à croire que l’air inflammable produit par la deftruétion des corps organilés peut fou- vent former ces coups terreftres. Il eft vrai que dans le cas qu'il cite,& dans le premier dont j'ai parlé, c’eft de deux endroits abondans en marières végétales détruites que font paris ces foudroiemens. Mais avant de prononcer d’une manière afirmative , il fau- droit foumettre à l'expérience faite par M. Lorgna, des terres qui auroient été foudroyées par un coup atmofphérique, & éclaircir fi l’on n’en retireroit pas quelques principes in- flammables. Je ne puis trop engager ceux qui conferveroient TE doutes fur le phénomène de la foudre afcendante , à lire le Mémoire de M. Mourgue( tome XIII, page 45° du Journal de M a }. Ce Savant ne paroît point avoir penfé au rôle que peur jouer l'air inflammable de l’atmofphère dans ces foudroiemens. Vore du Tra- dutleur. ’ 368 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, un mot, de végétaux & d'animaux putréfiés, fubftances dans lefquelles aboñde la partie huileufe , fource où la Nature puife fanstcefle Les principes combuftibles: & c’eft pofitivement là notre poltion. La propriété de” certe terre, couverte de fumiers, c’eft-à-dire, de matières putrefcibles , tendant à une entière diflolution , exige non-feulement la préfence de ces principes, mais encore qu'ils foient préparés à rompre tous leurs liens, extrémement atténués & diffous dans la fermentation putride; qu'ils puiflent enfin devenir feu libre , feu en action. Eo effet, dans un tel état de décompolition, la matière du feu eft toujours pète à abandonner la combinaifon dans laquelle elle fe trouve, foit pour former un nouveau compofé, foit pour fe difhper d'une ma- nière infenfble, fans aucune combuftion , foit enfin par une combution qui la meten état de feu libre. Les circonftances feules déterminent la manière dont fe fait cette mutation. Vous favez que nous avons des preu- ves de tous ces faits, & comment fe fuccèdent ces changemens, ces cir- culations perpétuelles que le feu éprouve, quelle que foit la narure du corps qui le contient. Nos expériences für les Auides inflammables , que Y'on a pouflées fi loir , ne font-elles pas les mêmes opérations que la Nature fait en grand & perpétuellement dans les entrailles de la terre, ou à fa fuperficie, lorfqu'elle produit ou qu’elle détruit cette foule d'êtres dans lefquels le feu eft combiné? Voilà la fource féconde de ces inflam- mations fouterreines ou extérieures dont nous fommestous les jours fpec- tateurs, & fouvent les victimes, & mêmide ces productions dont l'uri- lité eft journalière, En effet, que la matière foit parfaitement atténuée, fes liens prefque rompus , ou il furvient une fecouffe fufifante pour pro- duire l’inflammation, ou il y a contaét avec la matière combuftible dans Vétat d’ignition. Le feu alors fort de prifon , & de toutes parts eft en action. Telle eft fans doute l’origine de ces météores, où il eft en liberté, à commencer par le feu folle jufqu’au coup de foudre le plus meurtrier. Notre phénomène , vu avec attention , démontre de la manière la plus claire, que les coups de foudre terreftres, pour les diftinguer de ceux qui partent de l’atmofphère, ne font pas aufli rates que pourroient nous le faire imaginer tous les préjugés que nous tenons de l'enfance, où l'on ne nous a appris à les redourer que du ciel. N'avons-nous pas , dans le fein de la terre, une fource abondante de feu ? Je n’ai pas recours ici aux fubitances fofiles phlogiftiquées , fubftances qui ne font pas fufcepribles d'une véritable fermentation, N'eft-ce pas affez de la furface de la terre, où nait & meurt une foule de’végétaux & d'animaux, qui tour-à-tour nous fervent & nous font la guerre? En effet , la fermentation n'eft-elle pas due aux corps or- ganifés remplis de fubftances huileufes, qui font, à ce que je crois, la fource première de tous les mixtes FRE & combultibles. Autant à . ,. - elle n’a lieu que d’une manière lente & foible tant qu'ils font vivans, q autant Le. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 369 aûtant reprend-elle de forces pour hâter la décompofition du mixte , dès qu'ils ont ceffé de vivre: alors ils font fufceptibles de devenir nuifibles, Le moment de cette diflolurion , qui fe répète à chaque inftane , eft celui dans lequel Les principes inflammables acquièrent la Éculté d'abandonner leur ancienne combinaifon , de devenir feu pur, s'il y a lieu, de déton- ner même, fuivant le plus ou le moins de matière combultible qui fe trouve en action, le plus ou le moins de grandeur du lieu où la matière putrefcible eft renfermée, le plus ou le moins de force , de rapidité avec laquelle le feu eft excité. La grêle, la pluie même peut receler la matière huileufe; & quelque peu propre qu’elle paroifle pour fixer le feu, elle fuffic pour imprimer une fecouffe affez forte pour le faire jaillir fous la forme d'émanation inflammable, ainfi que vous l'avez prouvé dans votre expé- rience fur les marais, par la percuflion d’un bâton que vous enfonciez dans le terrein. , Mais enfuite, qui enflammera cette émanation? Nous avons bien des exemples dans BALL la combuftion peut arriver fpontanément, foit par la fermentation des fubftances qui en font fufceptibles , toutes les fois “que l'air y a un libre accès , foic par la fimple réaction des minéraux, ainfi que l’a prouvé Lemery. Son mêlange de foufre & de limaille de fer, unis enfemble avec de l’eau , donnent enËn de la flamme , quoiqu'ils n'aient point de contact avec aucun corps en état d'ignition. En effet, quoique j'aie enflimmé, avec une étincelle électrique très-foible, lémanation combuftible obtenue de la terre de La cour , il me paroît que la détonna- tion arrive dans des momens de tempête où l’atmofphère eft en commo- tion; & cela me porte à croire que les émanations combuftibles pourroient, en quittant le mixte qui les produit , fe difliper fréquemment en filence, fi l'électricité de l’atmofphère ne les enflammoit: électricité toujours pré- fente, &, comme vous le favez, beaucoup plus active dans un moment d'orage. Mais , d’après tout ceci, & d’après les lumières que nous avons fur la manière & les caufes dont fe produit autour de nous & fous nos yeux certe foudre afcendante , comment difpeferons-nous d'abord les conducteurs deftinés à attirer & à difperfer feulement celle defcen- dante , puifqu'ils doivent avoir aujourd'hui un double objet ? Nos lumières s’étendront encore, fi nous tournons nos obfervations doréna- vant à connoître le chemin parcouru par la foudre, & par où elle aura commencé {a route , toutes les fois qu’elle aura frappé des lieux habités, Continuons donc à examiner davantage les phénomènes que préfentent les endroits foudroyés , & fur-tout dans quelle place ils l'ont été d'abord; nous aurons par la fuite , j'en fuis prefque certain , lieu de nous affurer que les fubftances putrefcibles dont nous fommits entourés, fi riches en phlogiftique, font peut-être celles d’où la décompofition journalière à la- quelle elles font fujettes fépare le feu en plus grande quantité, & par conféquent la matière de la foudre. Tome XX, Part, II, 1782. NOVEMBRE. A aa 370 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Sait-on fi cette même matière du feu, qui, dans notre atmofphère ; prend tant de faces, qui ÿ forme la foudre , ne doit pas en grande partie, fi ce n'eft mème entotalité, fon exiftence aux corps organifés? En fe décompofant à la furface de la terre , ne la laïflencils pas s’exhaler & fe développer fous la forme d’une émanation combultible ? Ce qui eft très- certain , C’eft que nous ne devons pas confondre les inflammations fou- terreines avec celles de l'atmofphère. Le contact eft immédiat entre cebles- ci & les émanations inflammables que les matières végétales & animales, qui fermentent & fe putréfient à la furface du olobe, laifflent échapper fans ceffe ; au lieu que , dans fon intérieur , non-feulement les décom- pofitions & les mouvemens qu'éprouvent les fubftances fofliles n'ont pas cette communication libre , mais encore les minéraux n’abandonnent pas leur phlogiftique avec la même facilité que le font les végéraux & les animaux fujets à un changement d'état perpétuel. Les efforts com- binés de l'air & de l’eau peuvent , à la longue, priver les métaux de leur phlogiftique , je le fais : mais ceux-ci ne font point difféminés à la furface de la terre, comme l'herbe left dans les prés, Les foutres, fuflent-ils ex- pofés à Pair libre, ne laifleroient pas aulli aifément échapper leur phlo- giftique ; il y eft combiné trop fortement & d’une manière trop intime avec l'acide vitriolique. Il n'en eft pas ainfi des êtres organifés qui fermen- tent & fe putréfient fpontanément, Ce feroit juger trop précipitamment, que de rejetter fur cette foule de corps que l’on enterre dans nos Eglifes , les coups de foudre dont elles font frappées ; mais je me bornerai à de- mander que l’on obferve avec attention, & cela en vaut la peine, tous es phénomènes de ce genre , où l’on voit les lieux voifins des OR des étables & des amas confidérables de matières animales & végétales en putréfaétion être foudroyés. Je ne nierai pas que les conducteurs em- ployés à foutirer de l’atmofphère la matière du tonnerre , ne puiffent être éga- lement déférens pour celle qui part deterre. Le feu eft toujours un , quel que foit le corps qu'il abandonne, foit végétal , animal ou minéral; mais il ne part pas toujours de l'intérieur de la terre. Je crois qu'il fe déve- loppe le plus ordinairement d'une matrice huileufe due à la deftruction des animaux & des minéraux qui fe décompofent à la fuperficie du globe. L’explofon eft alors trop voifine de l'inflammation, pour que le conduc- teur , fut-il même très-proche, puifle attirer & difperfer le feu allumé, avant qu'il y ait eu de détonnation. Il n’eft pas non plus inutile de faire obferver que toutes les places peuvent n'être pas propres pour recevoir l'extrémité inférieure des conducteurs, puifque la plus foible érincelle fut pour enflammer une émauation combultible qui peut fe rencontrer dans le voifinage. . à En effet, j'ai allumé , comme je vous l’ai dit , avec une étincelle à peine fenfble , le gaz que j'avois retiré de la cour. Je regarde donc comme démontré que nous devons foigneufement SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 37r garantirtoutes nos habitations du voifinage des amas de matières végérales 8e animales en putréfaftion, en nettoyer nos baffe-cours & les lieux clos. En divifant & en éloignant les engrais des endroits habités, l'infammation fe fair à l'air libre, & n’eft point fuivie d'explofon; ou s'il s’en produit , elle eft foible & peu nuilible. [1 deviendra très difficile, quand on aura pris routes ces précautions, que les matières fofliles, quoiqu'abondantes en phlosiftique , nous faffent courir un pareil danger ; elles ne font pas comme les corps organifés, dans une tendance perpétuelle à la diffolution , & par conféquent à mettre en liberté leurs principes combuftibles , qui, dans les autres, fe trouve à nud à la furface de la terre, après quelques révo- lutions périodiques. : Mais en voilà affez; je ne voulois d’abord que vous faire part d'un fait, & je n'ai pu me refufer à en difcuter quelques conféquences, Je ferai trop heureux fi mes réflexions vous deviennent utiles, & vous donnent lieu à augmenter nos connoiffances & vos découvertes. tm mm tient tem diniiantnmnte À ME UMSO TER E Sur un nouveau moyen de produire , avec une très-petite quantité de charbons ou d’autres fubflances inflammables, une chaleur égale à celle qu'on peut Produire par des verres G des miroirs ‘ardens d'une grandeur confiderable 3 avec la defcription d'un fourneau, qui ; en fervant à chauffer un appar- tement ; purifie L'air qw'il renferme, en le privant de fon phlogiflique. PareM, ACHARD. La chaleur que produit le feu eft en raifon de fon activité, ou de la viceffe avec laquelle le corps qui fert d’aliment au feu eft confumé. Entre tous les moyens qu'on connoît pour accélérer la combuftion , & ar conféquent aufli pour augmenter la chaleur, le plus efficace conffte à faire paîler un courant d'air fur la furface du corps qu'il brüle ; plus il eft rapide, plus il accélère l’infammation. L'on explique aifé- ment de quelle manière l'air agit pour accélérer la combution, lorfqw'on fe le repréfente comme un fluide, capable d’abforber une certaine quan- tité de phlogiftique , & d’emporter, par fon mouvement, celui qui émane conftamment des corps qui brülent , & qui s’amaflant àsleur fur- face , s'il n’étoit pas entraîné par le mouvement de l’air , les entoureroit dans peu de temps d'une atmofphère qui, ne pouvant recevoir une plus grande quantité de phlogiftique , empêcheroit l'éruption de celui que renferme le corps qui brûle, & par conféquent auñi l'inflammation fucceflive de fes parties. En confidérant l'air , en tant qu'il eft néceffaire à l'inflammation , Tome XX , Part, II, 1782. NOVEMBRE, Aaa2 372 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, comme un milieu capable de tranfmettre le phlogiftique qui émane des corps qui brülent, l’on voit aifément que plus il fera propre à recevoir le phlogiftique , plus il accélérera la combuftion des corps enflammés qu'il entoure. Or l'air, comme tous les autres menftrues , ne reçoit qu'une quantité déterminée de la fubftance qu'il peut difloudre, & il s’en charge avec d'autant plus de promptitude qu'il en contient moins; & lorfqu'il en eft faturé , il ne peut en recevoir une plus grande quantité : d’où il fuit que fi l’on place un corps, actuellement enflammé , dans de l'air chargé de la quantité de phlogiftique qu'il eft capable de recevoir, il ceifera de brüler; ce qui eft aufli confirmé par des expériences très- connues. L'air atmofphérique, quoiqu'il ne foit pas entièrement faturé de phlo- giftique , en contient cependant toujours une certaine quantité : or l'air étant d’autant plus propre à accélérer l'inflammation , qu'il contient moins dé phlogiftique ; il s'enfuit que de l'air qui ne feroit pas chargé d'autant de phlogiftique que de l'air de l’atmofphère , feroit beaucoup plus propre à augmenter l'activité du feu , en accélérant la combuftion. Les expériences faites par Prieftley , & répétées par plufieurs Phylciens , prouvent très-bien ce que je viens de dire; car il fuffit de mettre dans de l'air déphlogiftiqué un corps actuellement enflammé, ou un corps non enflammé placé dans les circonftances néceffaires à fon inflammation, dans de l'air déphlosiftiqué, pour fe cenvaincre de la différence qui fe trouve entre l'activité du feu dans cet air & dans Fair commun: des corps qui, dans l'air commun, ne brülent qu'avec une flamme fenfible, & ne fe réduifent que lentement en cendre, comme par exemple du fil, du coton, de l'éponge, brülent dès qu'on les met dans de l'air déphlogiftiqué , avec une flamme qui prend une étendue confidérable, & dont le blanc éclatant prouve l'activité. La célérité avec laquelle les corps brülent dans de l'air déphlo- gifiqué, me fit efpérer qu'en faifant pañler un courant de cet air fur des corps enflammés ,.de manière qu'il touchät leur furface, l’on pourroit parvenir à produire une chaleur bien fupérieure à celle qu'on peut pro- duire au moyen des foufflets ordinaires. Afin de vérifier cette conjeëture, il fallut recourir à l'expérience: dans cette vue , je remplis d’air déphlogiftiqué tiré du nitre, plufieurs vefhies qui communiquoient entr’elles par de petits tubes de verres ; à une de ces veflies , je nouai un chalumeau , que je dirigeai contre la flamme d’une lampe, dont la mèche n'éroit que fort petite. En preflant douce- ment les veflies , je donnai à la Aamme de la lampe , au. moyen du jet d'air déphlogiftiqué qui fortoit du chalumeau , une figure conique. Outre que cette flamme augmenta d’abord beaucoup en étendue , elle devint, fur-tout à fonextrémité , d’un blanc éclatant : un filde fer de : de pouce de diamètre, que je renois dans le milieu de la flamme, fe fondit en deux fecondes, en formant des gouttes ; effet qu'il feroit certainement ss D SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 373 impofñfible de produire, fi, toutes les autces circonftances reftant les mêmes , l'on fe fervoit de l'air commun pour diriger en pointe une flamme bien plus grande que celle de la lampe. Le fuccès de certe première expérience me ft efpérer qu’en faifane peter au moyen d'un foufflet , un courant d'air déphloviltiqué, par des char- ons embrafés, lon produiroit une chaleur bien fupérieure à celle qu'on peut produire jufqu'à préfent au moyen des fourneaux, & avec des foufflets mulripliés : pour m'en aflurer, je fis confhuire un petit cylindre de tôle, de 10 pouces de hauteur fur 4 pouces de diamètre, ouvert ” par le haut & fermé par le bas. A la diftance de deux pouces de fa AR je plaçai une petite grille, faite d'argile blanche très-réfractaire : entre cette grille & le fond du cylindre, je fis faire ur trou rond de = pouce de diamètre , dans lequel j'affermisle bec d’un fouffet double ; à la foupape ; par laquelle l'air entroit dans le foufflet , je fixai exactement un tuyau d'argile cuite, qui répondoit à la partie fupérieure d'un globe d'argile creux , à la partie inférieure duquel étoit fixé un autre tuyau d'argile recourbé vers le haut, prefque: parallélement à celui qui éroic attaché à la foupape du foufller. Por faire ufage de cet appareil, je remplis de nitre le globe d'argile jufqu'à la moitié, & l'ayant entouré de charbons ardents, je le chauffai jufqu'à faire entrer le nitre en fufon. En mettant alors le foufflet en mouvement , l'air qui y entroit étoit obligé de pañler par le nitre fondu , où il perdoit fon phlogiftique par fa détonnation infenfible avec l'acide du nitre , en forte qu'il for- toit déphlogiftiqué du foufflit. J'ai fait voir, dans un Mémoire fur la déphlogiftication des différens airs, qu’on peut de cette manière priver toutes les fortes d'airs de leur phlogiftique , & Les changer par-là en air dé phlogiftiqué; ce qui fournit un moyen de fe procurer cet air à très- peu de frais , fans beaucoup de travail, & en très-grande quantité. Lorfque le nitre fur bien fondu , je fixai, avec un peu d'argile, un petit creufet de Hefle, dans lequel j'avois mis quelques cloux fur la grille du cylindre ; & après lavoir rempli jufqu'aux + de fa hauteur de charbons ardents de la grofleur environ d’une noix, je fis jouer le fouffler: les charbons devinrent d’abord d’un blanc éclatant; il s’en éleva une flamme très-confidérable , & ils furent confumés avec une rapidité progidieufe. J'eus foin, à mefure qu'ils fe confumoient, d'en ajouter toujours d'autres : au bout de 4 fecondes le cylindre éroit rouge dans tous les endroits où les charbons le touchoient. Après avoir çcon- tinué le mouvement du foufflet pendant 8 fecondes , je trouvai que la grille, quoique faite d'une argile extrêmement réfractaire, commen- çoit a entrer en fufñon; le creufet, qui de tout côté avoir été entouré par les charbons , étoit en partie vitrifié & s’étoic applati; les cloux étoient parfaitement fondus, le cylindre étoit prefque entièrement détruit (1). Q) Dans une lettre de M. Achard, du 25 Août 1782, il nous annonce que par 374 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Cette expérience prouve évidemment, qu'avec un très-petit fourneau lon peut, à l’aide fe l'air déphlogiftiqué, produire un degré de chaleur bien fupérieur à celui qu'on peut produire dans des fourfiéaux ordinaires, & avec des foufflets qui ne font que mettre l'air commun en mouvement. En appliquant, de la manière que je viens de l'expliquer, l'air déphlogiftiqué à un petit fourneau , l'on fera à portée de faire, dans très-peu de remps & à fort peu de frais, des expériences qui , exigeant une très-forte cha- leur, demanderoient beaucoup de temps % des dépenfes confidérables. Le globe d'argile, étant une fois rempli de nitre, pourra fervir piufieurs fois, parce que l'air ne pouvant pas fe charger de beaucoup de phlo- giftique, quelque phlogiftiqué qu'il foie, il en pourra pafler une très- grande quantité par Le nitre, avant que tout fon acide foit détruit par a détonnation avec le phlosiftique de Fair, qui, quelque phlosiftiqué qu'il foit, ne left jamais aflez pour produire une déronnation {enfible. En ajuftant à une lampe d’émailleur , un petit foufflet dont la foupape, par laquelle l'air y entre, répond par un tube d'argile à un vale qui renferme du nitre qu'on met en fuñon , de forte que l'air qui entre dans le foufilet, foit obligé de pañler en bulles par le nitre fondu , l’on pourroit certainement produire , au moyen d'une lampe dont la mèche auroit une certaine grofleur, un degré de chaleur fem- blable à celui que donne un miroir ardent , de plufeurs pieds de diamètre, La premiere expérience que j'ai rapportée, & que je fis, en donnant à la famme d’une lampe une figure conique par un jet d'air déphlo- giftiqué, renfermé dans des vellies, prouve combien une femblable machine feroit utile. $ Outre l'avantage, que la Phyfique & Îa Chymie peuvent retirer de {a déphlopiftication de l'air commun , au moyen de fon pañlage par le nitre fondu, pour produire un degré de chaleur , qui certainement peut être rendu égal à celui qu’on peut produire par la réunion des rayons folaires , l'on peut encore en retirer un fecond avantage non moins importart, & qui étant plus général intérefle de plus près; j'entends la déphlogiftication de l'air d’un appartement, qu'on peut poufler, par ce moyen., au degré où on le juge à propos. Il feroit fuperflu de m'arrêter à donner des preuves de l'influence de la pureté de l'air que nous refpirons, fur l'état de notre fanté & fur la confervation de notre exiftence ; cette vérité eft du nombre de celles que l'expérience a déjà depuis longtemps mife hors de tout doute: fi lon veut s'en convaincre par foi-même, il fufit de pañler de l'air commun dans un apparte- ment rempli d’air déphlogiftiqué ; l'on éprouve’ une fenfation délicisufe, Si c’eft un hypocondre qui fait cette expérience, fon inquiétude, qui le rend toujours mécontent & malheureux , fera bientôt place à une le même procédé il a fondu de la Platine, il y a déjà quelque temps , devant le Prince Henri, frere du Roi de Pruffe. à SUR L'HIST., NATURELLE ET LES ARTS. 375 tranquillité d'efprit & à une féréniré qui, dans l'air commun, lui étoient inconnues. Mais fans m'arrêter davantage à donner des preuves de l'utilité qu'on peut retirer d’un moyen de produire, à très-peu de frais " q P n 2 » de l'air très-pur , & de changer l'air gâté d’un appartement dans l'air le plus falubre & le plus propre à la refpiration , je donnerai, en peu de mots , la defcription de la manière la plus, aifée de priver l'air d'un appartement de fon phlogiftique, S'il s'agit de déphlogiftiquer Pair d’un appartement qu'on n'occupe qu'en hiver, faifon où la déphlogiftication eft la plus néceffaire , parce que le froid empêche de renouveller aflez l'air, l'on peut affermir au fond du fourneau qui fert à le chauffer, dans fon centre, une brique ui foutient la bafe d’un vaifleau d'argile cuite, qui a une figure conique de 6 à 8 pouces de hauteur, & dont la bafe a 4 pouces de diamètre, La fomimité de ce cône fe termine en untuyau d'argile , qui s’élevant verticalement à la hauteur de fix pouces, eft recourbé à angle droit, & entre dans l'appartement, en traverfant l’épaifleur du fourneau: près de la bafe du cône il doit en fortir un fecond tuyau qui, après s'être élevé perpendiculairement à La hauteur d'environ un demi-pied , eft recourbé, & entre, comme le prémier, dans l'appaïtement; ce tuyau reçoit le bec d'un foufflet à double foupape , qui doit repofer fur deux appuis , afin que, comme les foufflets des forges, l'on puifle aifément le mettre en mouvement au moyen d'un lévier. Il feroic aifé, fi l’on ne vouloit pas occuper une perfonne , d'imaginer un rouage très-peu compofé & facile à exécuter, au moyen duquel le foufflet füt mis en mouvement par un poids : tout étant arrangé de la manière'que je viens de dire, le feu qu'il faut mettre dans.le fourneau pour chauffer l'appartement met le nitre en fufion , & lorfqu'il eft bien fondu, il fufñt pour déphlogiftiquer l'air, de faire jouer le fouffler: l'air gâté de l'appartement eft obligé de pañler par le nitre fondu ; il y perd fon RARES & fes propriétés nuifbles, & rentre, purifié & très-falubre , dans l’appartement par l’autre tuyau: plus on continue le mouvement du foufflet & plus on puïife l'air, en forte -que l’on peut poufler la déphlogiftication au degré où on le juge à propos. Cette manière de déphlogilftiquer l’air , en fe fervant pour faire fondre le nitre du fourneau qui eft deftiné à chauffer l'appartement , quoique fort économique, eft cependant fujette à un grand inconvénient ; cat d’abord en été la chofe eft impraticable , & en automne , au commencement du printemps, & même au cœur de l'hiver, lorfqu'il dégéle & lorfqu'il ne fait pas fort froid , l’on feroit obligé, pour déphlogiftiquer l'air, de chauffer le fourneau autant qu'il faut pour faire fondre le nitre , ce qui fouvent rendroit la chaleur de l'appartement fort incommode, Il eft aifé de remédier à cet inconvenient, en plaçant hors de l’appartement, dans un fourneau, ou fimplement fur un petit foyer, un vale d'argile 376 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, conique rempli de nitre, & muni de deux tuyaux, comme celui qu’on place dans le fourneau qui fert à chauffer l'appartement, dont l'un répond à un foufflec double, & dont l'autre entre dans l'appartement , en traverfant la muraille: l'air qu'on fait pafler, au moyen du fouffler par le nitre qu'on a mis en fufion , entre déphlogiftiqué dans l’appar- tement fans que l'appareil néceflaire pour déphlosiftiquer l'air y occupe de la place, ou en gate l'arrangement. Je finis, en remarquant feulement que, fi les Médecins fonc ufage de ce moyen de faire refpirer l'air déphlogiftiqué, ils trouveront aflu- rément, fur-tout dans les hôpitaux , où à caufe de la quantité des perfonnes qui y font raffemblées l'air doit néceffairement toujours être fort gâté, que C’eft un remède fort efficace dans plufieurs cas ; que la plupart du temps il peut être utilement employé comme préfervatif , & qu’il y a des cas où il peut agir comme curatif. W.Journ. de Phyf.1781,tom. XVIII, p.09, Du 24 Janvier 1779. = Lo à E X TRAIT D'une Lettre de M. J. H. MAGELLAN, Membre de la Société Royale de Londres , E&c., à un de fes Amis de Paris ; Sur la préférence des grands Arcs de vibration pour la régularité des Pendules Affronomiques , avec la deféription d'un Echappement libre , pour des petites Pendules à demi-fecondes , qui batrent des fecondes entières, Gt. ASE avez raifon, mon cherami, de direque les échappemens libres, dontje vous donnaiune efquifle däns mon dernier féjour à Paris, Le printemps dernier (1781), demandent des arcs plus grands dans leurs vibrations que les échap- pemens ordinaires dont, à coup für, les avantages ne peuvent être mis encom- paraifon avec les premiers ; car vous favez que la qualité effentielle d’où dé- pend l’ifochronifme du pendule, eft l’aëlion conflante de la force de la pefan- teur qui produit les vibrations. Ainfi, sil étoit pofible que certains obf- tacles ou circonftances concomitantes n'apportaflent pas la moindre influence dans le mouvement du pendule , ou fi cette influence étoit in- variable dans fes effets , il eft de la dernière évidence que nous aurions alors obtenu un ifochromifme parfait, par le moyen du pendule , pour mefurer , fans la moindre erreur , Les quantités réelles du temps qui s'écoule fi rapidement, fans prefque nous en appercevoir que par des fignes très-vagues & incertains. Or, n’eft-il pas évident qu'il y a beaucoup à gagner , toutes les fois qu'on peut réduire à un prefque infiniment petit la quantité des caufes principales de lirrégularité des pendules? Affurément tel 1z SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 377 teleft le cas des échappemens libres dont on a fait ufage jufqu'ici. On eft convenu d'appeler échappement cette mécanique ingénicufe , qui faic un grand honneur à l'induftrie humaine, par laquelle on redonne au pendule la quantité de force qu'il avoit perdue à la fin de fa vibration, par les obftacles inévitables qui s’oppofent à fon mouvement; & on eft générale- ment d'accord que l'échappement à repos, dont l'invention appartient au fameux Graham , Anglois , un des plus grands Artiftes de notre fiècle, eft celui qui donne le plus de régularité aux vibrations du pendule. Cepen- dant il eft fort aifé de voir combien cet échappement ef encore aflujetti à l'action variable des caufes de ces irrégularités ; car, pendant tout le zemps de fon repos , qui eft prefque le total du remps de chaque vibration, toute l’irrégularité de la force du rouage, jointe avec celles provenantes de la différente preflion de l’atmofphère, de la différente fluidité de l'huile, & , ce qui eft encore beaucoup plus, l'irrégularité de la courbe des deux branches de l'ancre de l’échappement, qui, malgré tout l’art de la Mé- canique, ne font jamais deux portions parfaites d'un arc concentrique au centre de fon mouvement, Toutes ces irrégularités , dis-je, agiffenr fur la vibration; c’eft-à-dire® elles empêchent la régularité conftante de la force de la pefanteur par laquelle le pendule fair fes vibrations: tout au contraire, dans les échappemens libres, la force de La pefantenr elt celle qui agit fur le pendule pendant prefque toute La vibration, à l'exception du dérangement caufé par la différente preflion de l'atmofphère, qui n’eft jamais d'un grand effet, comme il eft aifé de le voir par le calcul, Il écoit réfervé au célèbre Elève de Graham, à M. Mudge, d'introduire certe efpèce d'échappement dans PHorlogerie, & de faire ce grand pas vers . la perfection de {cet Art au-delà de fon Maître, Voyez Le h°. 472 de la Colleétion de mes Traités. : Mais une circonftance très-intéreffante eft que les échappemens Libres de- mandent tout naturellement des arcs aflez grands pour leurs vibrations , .Ce qui paroît former le motif de votre objeétion. Lifez , je vous prie, mais fans préjugé, les raifonnemens de M. Cummings , dans fon Effai en Anglois fur l'Horlogerie ; & vous trouverez qu'ily a le plus grand avantage à employer de grands arcs, par préférence aux petits arcs, dans les vibra- tions du pendule; car ce n’a été que par un fimple mal-entendu qu'on a décidé très-inconféquemment qu'il valoit mieux fe fervir d’ares fort petits dans les pendules, Tout ce qu'il y a à dire en leur faveur , c’eft que les pe- tits arcs circulaires fe confondent avec ceux de la cycloïde , dont il eft dé- montré que les grands & les petits font parcourus en temps égaux par un corps qui les décrit en + librement, Maïs on n'a pas réfléchi que la proportion des fotces aux'taufes qui nuifent à la répulatité des vibra- tions , eft infiniment plus grande , lorfqu'elles agiflent fur les perits ares, que für les grands ares. En effet , le momensum , ‘où la quantité du mou- vemént des vibrations d'un pendule, doit être mefuré par les /fras verfes Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE. Bbb $ ° 378 OBSERVATIONS SUR L4 PHYSIQUE, des arcs qu'il décrit, Or, j'ai démontié, même à la vue, dans mon petit Traité fur la nouvelle Machine de Dynamique, n°. 620 , que fi les remps font égaux , les forces motrices font comme les “efpaces parcourus. Ainf, vous n'avez qu'à confidérer la petitefle du fnus verfe d’un petit arc de 2 de- grès, par exemple, comparée à celle du finus verfe d'un arc de 12 ou 20 degrés ; & vous ferez pleinement convaincu que les mêmes caufes nui- fibles ou fources de l'irrégularité des vibrations reftant toujours les mêmes dans les grandess& dans les perites vibrations , ces dernières doivent fouffrir infiniment plus que les premières: d’ailleurs , il faut confidérer qu'on eft bien revenu deja manière de faire la fufpenfon de la verge par une ef- pèce de couteau tranchant; fufpenfion la plus mauvaife, qui n'a jamais pu Ctre imaginée par aucun Mécanicien de bon fens; & c’étoit dans ce cas que les vibrations du pendule éroient proprement circulaires. Mais en faifanc cette fufpenfion par un, ou plutôt par deux reflorts, comme je le dirai plus bas , alors les vibrations deviennent ou tout-à-fair cycloïdes , ou du moins très approchantes des arcs de la cycloïde. IL eft temps de pafler à la defcription du mécanifme employé pour avoir les échappemens libres. « Quoique je vienne de démontrer l’erreur où l’on eft tombé jufqu’à préfent , en faifant en forte que les pendules des horloges aftronomiques décrivent des arcs très petits à chaque vibration, il eft aifé de voir que l'oppofé doit être une propriété avantageufe des échappemens libres , qui, pour la plupart , demandent de parcourir de grands arcs dans leurs vi- brations. Cependant je vais montrer, dans l’échappement dont j'entre- prends la defcription, ‘qu'on peut l’arranger néanmoins en telle manière que chacune de fes vibrations n’excédera 3°. 45” de chaque côté , ce qui en effet n'eft qu'une étendue aflez médiocre: mais lorfqu'on voudra lui faire parcourir des arcs beaucoup plus grands, il fuffira de placer le centre a de la fufpenfon de la verge du pendule , un peu plus près de la roue d; car il eft aifé de fentir que dans ce cas il lui faudra parcourir des arcs d’au- tant plus grands, que ces deux centres (favoir %Æelui de la fufpenfion de la verge du pendule, & celui de la roue de l’échappement 4) fe rappro- cheront davantage. + Explication du mécanifme d’un échappement libre, Je fuppofe que la longueur du ‘pendule pour battre des demi-fecon- des, foit depuis a , centre des vibrations, jufqu'à 4 , centre de la lentille du pendule, & que les vibrations foient de 3°. 45/ de chaque côté ; favoir , de 7°. 30/ chacune de c jufqu'à d. Je fuppôfe aufli qu'on a arrangé les roues de façon que celle de l’échappement d n'ait que fix dents ou che- villes. Par exemple , fi ka roue 4 , fig. 6 , qui porte l'aiguille des minutes , a 6o dents , & agit fur un pignon de 8 de la roue , celle-ci fera 8 tours J'ÉPRRE È SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 379 pät chacun de la roue a; & fi ba 60 dents, & agit fur un autre pignon de 8 de la roue c, celle-ci fera 60 tours, tandis que 4 fait un feul tour: ca © X ©— 60. Ainf , celle-ci portera l'aiguille des /écondes. À préfent , fi la roue c a 6o dents, & agit fur le pignon de la roue 4, qui a 6 dents, celle-ci fera dix tours , tandis que c n'en fera qu'un (car L2— 10): donc fi la roue d a 6 chevilles , il s’en échappera une à chaque /éconde (car 6 x 10— 60). Cela étant établi & indubitable, paflons à l'échappemient libre. Soit la verge 24, fig. 1%, fufpendue de a (par un reflort, ou mieux encore par les deux reflortsee, fig. 3 (la fig. 4 eft vue pere ment à la plaque de derrière du mouvement , & la figure 3 donne l'appa- rence latérale) ; de façon quele centre de fa vibration foit a (1). La fec- tion horizontale de cette verge eft repréfentée par aa dans la fig. 2. cc eft la plaque de derrière, & rr les chevilles de la roue d, Soit la pièce ff, re- préfentée par 46 dans la figure 2 , attachée à la verge (entre elle & la pla- tine ccde la même fig. 2). Cette pièce porte une palette, formée d'un parallélipipède de pierre dure g, fig. 1 , à fon bout inférieur, en cas que les chevilles de la roue d foient d’acier trempé: mais fi ces chevilles fonc de cuivre, alors il fuffit que le parallélipipède foit d'acier trempé, Le bout inférieur g de certe pièce vibrera felon l'arc # ; & paflera à chaque vi- bration, fans coucher à la cheville , ni à l’autre cheville £, parce que la roue d eft retenue dans cette pofition par le bout / du levier mn. Soit une fourchette go attachée à la même pièce ff; & en outre foit la tringle po, mobile en A un côté, & de l'autre côté foutenue entre les deux chevilles qu’on voit dans l’autre branche de la fourchette en g: le bout s de cette pièce po eft trempé dur, & forméen bifeau , de même que le bouc 7 qui lui correfpond. Enfin, foit le petit reflort # qui poule conf- tamment le bout / du levier #m / contre la pointe x, & qui par conféquent foutient, tandis qu’il y eft, la éheville / de la roue d. Notez que la branche ml de ce levier doit coïncider avec la tangente qui paîle par la cheville Z de la roue d , afin de pouvoir s’en dégager fans difculté. Voici actuelle- ment le jeu de cet échappement libre. ; A chaque fois que la verge du pendule vient de k vers //, le bout g de la palette pafle librement pardeflus les deux chevilles zk, mais fans les toucher ; & le bout sp de la pièce mobile po olifle fur le bout z du levier nml, qui étant appuyé fur les pointes y & x, une de chaque côté, ne peut point remuer de fa place. Long-temps avant que le pendule finifle fa vibration de ce côté , la pointe s aura gliffé & pañlé librement au-delà du bout z du levier 2" 1. Aufli-tôt que le pendule revient de Z2 vers k, (1) N. B.II eft avantageux que les refforts foient plus minces vers le bout ia- férieur, Tome XX, Part. II, 1782. NOVEMBRE, Bbbz 30 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le bout s s'engage dans le bout 7 du levier, & lemporte avec foi vers #, & par conféquent en fait dégager la cheville / de, la roue Z. Mais celle-ci ne doit pas être dégagée avant que la palette g fait arrivée entre les deux chevilles £z, ce qui dépend de la propoition du bras 27 du levier [ qui eft mobile en 7], pour la longueur de l’autre branche #72 du mème levier. Or, ileft bien évident que la roue 4 n’étant plus foutenue par le levier #4, doit aller frapper avec fa cheviilek fur la palette g, qui fe trouve dans le moment de la plus grande vélocité de fa vibration, & reftaurera ce qu’on avoit perdu dan$ la vibration précédente de # vers 2. Mais-aufli-tôt que le bout 7 du levier eft dégagé de la pointe du crochet s, le petit reflort # le pouffe contre-la pointe eu détente x, & arrête la cheville fuivante qui fe préfente de la roue 4. Il eft donc évident que les vibra- tions de ce pendule font parfaitement libres, à l'exception du moment où le bifeau s pañle ou gliffe fur le bout » du levier 7 "1, où il fait un frotte- ment infiniment petit. On peut varier cet échappement par un petit reffort très-mince 4 b, fig. 5, qu'on met fur la pointe « du levier principal ; car fi l'on fuppofe que ce le- vier de la fig. #foit mis à la place de l'autre #7, fig. 1°%, on fent bien que la pièce p o doitalors être immobile en o , & Jorfque fa pointe vient de k vers //, elle la pliera très-aifément dans fon paflage ; mais en revenant de //.vers h, alors elle attrapera la pointe de ce reflort , qui étant appuyée fur la cheville au bout du mème levier én c, emportera né- ceffairement avec foi le levier , & produira le même effet ci deflus. L'avan- tage qu'il y a dans cette méthode eft que la pointe 5 @e la pièce po n’a . pas befoin d'être en bifeau, & peut être aufli étroite qu’on le voudra. Notez que, dans ce cas , il faut mertre le bout c , fig. 6, du levier beaucoup plus près de la palette g de léchappement, que la pointe » du levier zm1 de la figure 1° ne l'eft ; car dans ce cas le bour a du petit reffort plie dans le fens contraire, c'eft-à-dire, de a vers f(fig. 6) ; avant que de re- tomber dans fa place pour engager la pièce qui lève la détente dans la vi- bration fuivante, ‘ N. B. Il eft fort néceffaire de pourvoir au cas où , par quelqu’accident, le reflorts , fig. 1°%, ne produiroit pas fon effet; car alorsle rouage tour- neroitavec grande vélociré, & feroit caflé par-là. Pour prévenir cet ac- cident , il fautajouter la petite queue en fourchette z , qui eft marquée par des points dans la figure 1°%, & qui eft placée en forte qu'elle corref- ponde au cercle où les dents ou chevilles de la roue d font mifes, mais feulement un moment après que‘la dent ou cheville & a paflé pour pren- dre la place de la cheville: ; car fi, par hafard , le bout / du levier n’ar- rêtoit pas la cheviller, alors la cheville Z iroit tomber dans cette four- chetre r, & la roue feroit arrètée entièrement. J'ai vu de ces échappemens libres exécutés à Londres dans les deux manières que je viens d'expliquer ; ils ne font rien moins que difficiles à . 1 x SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 38x , , , .* A pratiquer, & leur marche el infiniment plus régulière que celle des autres échappemens qu'on connoît. 6 DEN ST MEN LES A DE M. LE Conte DE Sauces A MM. MacquEr ET Cicxa, Doëleurs en Médecine, & de plufieurs Académies, &c. Sur le Salpétre arrificiel. Mässreurs, Vous favez que ce n'eft que depuis peu que j'ai pu m'occuper de la formation du falpëtre , qui fait l'objet 4 Programme publié par lAcadémie Royale des Sciences de Paris, en 1776 (1 ), & que lorfqueffe fis pafler la première partie de mon Mémoire, elle ne fut plus à temps pour être admife au concours. - L'analyfe de l'acide nitreux a été l'objet de cette première partie de mon travail; & il m'en eft réfulté que les parties conftituantes de cet acide font une liqueur acidule empyreumatique , l'alkali volatil , La terre calcaire, & un peu de terre vitrifiable ( 2 ), d'où s’enfuivoit, de nécef- fité, la fuppoñtion du changement de nature de l'acide. C'eft d'après ces données que jefuis parvenu à compofer du nitre, en combinant ces principes par la voie de fynthèfe, & à me procurer de l'acide nitreux fans rien employer qui puifle être foupçonné contenir du nitre & par conféquent à démontrer à la rigmeur la converfion d'un acide, qui eft le vitriolique , en acide nitreux : ce qui a été regardé jufqu'ici comme un point des plus fublimes de la Chymie, & qui a été en même temps la piétre d'achoppement contre laquelle ont échoué les eftorts desplus grands Maîtres de l'Art ; l'importance de la découverte m'engage à fuivre les inftances que vousme faites , Meflieurs , dela publier pour m'en aflurer le droit. (1) L’on fait que ce Programme a été publié par ordre de S. M. le Roi de France, dont les fentimens d’humanité & de fagefle affurent la félicité de fes Sujets. (2) L’analyfe ea queftion étant purement chymique , je ne dirai rien de l'air que le falpêtre abforbe dansle temps de fa cryftallifation, ayant d’ailleurs certe propriété gommune avec d’autres fels dans cette circonftanse. Au refte, il s’agit ici de l'acide nitreux , & non du falpèrre, qui eft le réfulrat, comme l’on fait ,de l'union de cer açide à l’alkali fixe ; ce qui fera le és du refte de mon travail. 382 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Je me contenterai cependant de la donner en gros, en me réfervant de la faire paroître en détail, & en forme de differtation, pour fervir de fuite au Mémoire que j'ai eu l'honneur de préfenter à l'Académie (1), & dans laquelle je tâcherai de remplir les conditions qu’elle défire par rapport à la pratique, dont je vous dirai cependant un mot en faveur de la découverte que j'ai faite aufi du moyen qu'emplaie la Nature dans la production de cette fubftance faline. Le procédé pour produire l'acide nitreux , & pour compofer du nitre artificiellement, confifte à précipiter la terre du fer d’une diffolution de couperofe verte par un alkali volatil, & cette précipitation fe fait avec des fymptômes différens , fuivanc l’intermède dont on s’eft fervi our la décompofition du fel ammoniac. Ainf jen ai retiré en employant l'alkali volatil que m’avoient fourni l'huile de tartre, la leflive des favon- niers & la liqueur de cailloux ; ces liqueurs doivent enfuite être com- binées à l'alkali fixe , après un long repos & après la filtration, pour être enfuite évaporées ou diftillées. J'en ai encore obtenu d’un foie de foufre alkali. calcaire , que j'ai diflous dans du vinaigre concentré par la gelée, & dont j'ai obtenu une fécule noire, par l'addition aufli de l’alkali volatile Je ne m’arrêterai pas à déterminer , dès-à-préfent , les quantités ref- ectives de ces fubftances , ce n’en eft pas ici le cas; & je me bornerai à remarquer que cette feule circonftance rend ie fuccès de l'opé- ration, très-dificile à fair. La diftillation fournit l'acide nitreux, tandis que par l’évaporation lente on obtient du nitre, qui n’eft cependant qu'informe & non cryftal- lifé: avec l'alkali volatil retiré par l'huile de tartre, la fubftänce nitreufe de procure l'évaporation fe manifefte aux parois des capfules en orme de concrétion. à . Avec l'alkali volatil produit par la liqueur concentrée des cailloux, il fe fait une végétation qui borde la liqueur , dont la couleur paroîtroit annoncer du foufre plutôt que du nitre; & certe liqueur eft d'une grande évaporabilité. . L’alkali volatil enfin, retiré par une forte leflive des favonniers , fournit de même une concrétion nitreufe, très-grafle en apparence , & très-difficile à fe fécher: cette liqueur efé beaucoup moins évaporabie de les deux autres; & en ajoutant du cryftal de roche en poudre & calciné ans la diffolution que j’en ai faite , j'ai obtenu une cryftallifation très-bien (1) Malgré que cet Ouvrage n’ait plus été à temps poutle concours, M. Macquer m a néanmoins fait l'honneur de le retenir, en m’engageant à lui en faire pañler.la fuite; ce qui m'impofe l'obligation de ne pas donner des détails , qui feroient d’ailleurs aéceffaires pour épargner des foins faftidieux dans la répétition de ces procédés. NL SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 383 figurée par bouquets aflez réguliers ; il en fut de même des deux autres fubftances nitreufes dont j'ai parlé ci-devant. [left vilible qu'il entre dans ces nitres les principes que m’a donné l'ana- lyle :,car le vitriol martial fournit de l'acide chargé du phlogiftique du fer ; l'alkali volatil eft celui du fel ammoniac, & il ne refteroit de difficulté que par rapport aux terres calcaires & vitrifiables : mais fi l’on confidère en premier lieu que l'alkali fixe dont j'ai fait ufage, n’avoit efluyé qu'une fois Ja calcination , après l'avoir tiré par la leflive du tartre brülé que l’on vend dans le commerce pour les Teinturiers, & qu'il reftoit probablement encore des parties terreufes unies à la fubftance faline, on ne trouvera pes que je préfume fans fondement que ces deux parties conftituantes de l'acide aient été fournies par le fel de tartre que j'ai employé ; je fuis d’autant plus fondé à penfer MER que j'ai toujours obtenu avec la plus grande facilité de l'acide nitreux très - rutilant par la diftillation de ces mêmes fubftances, & qu'il ne m'a pas été poflible de me procurer du nitre cryftallifé par l'évapo- ration , même fpontanée : ainfi je crois hors de toute conteftation que l'alkali fixe, employé aprèsda précipitation de la fécule produite par la combinaifon de l’alkali volatil à la dffolution vitriolique martiale, efluie lui-même une décompofition en achevant la modification de l'acide ; d’où s'enfuit le peu d’adhérence du même acide avec cette partie de l’alkali fixe qui ne concourt point à fa formation, mais qui lui fert de bafe dans le cas d'une douce évaporation. D'ailleurs, l'illuftre M.de Morveau ayant démontré que les cendres végé- tales contiennent une grande quantité de terre calcaire , il n’eft nullement extraordinaire de penfer que cette fubftance fe trouve combinéeen différentes quantités dans les alkalis fixes; & pour ce qui regarde la matière vitrefcible les eflais dont je vous ai rendu compte, femblent prouver qu’elle n’eft quune partie intégrante du falpêtre. Ne pourroit-on pas au refte foup- çonner que la terre du fer füt elle-même de cette nature ? car j'ai remarqué dans le compte que j'ai rendu des réfultats particuliers de mon analyfe, que la partie vitrifiable que j'ai retirée étoit en très - petite quantité, & ici il entre d’ailleurs du fer (1). : Je vous ai encore annoncé une feconde découverte par rapport au moyen employé par la Nature pour la production du falpêtre ; je m’em- refle de vous en faire part aufli , parce qu'il pourrait étre probablement FE la plus grande utilité dans la pratique pour procurer du nitre artificiel, Ce moyen eft donc celui de la filtration ; & le falpêtre même, lorf- qu'il eft diffous , a la propriété de pénétrer à travers les pores des uftenfiles ————— (x) Je ne fais pas fi l’on feroit fondé à réjetrer cette idée en fuite du procédé du foufre ; car il eft affez probable qu'il y ait du fer dans le vire , & peut-être y en ayoit-il dans la chaux. Je ne donne ceci cependant que pour un foupçon. 384 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, d'argile cuite (1), malgré qu'ils foient vernis en dedans, & de fe pré- fenter fous la forme ordinaire du nitre de houffage comme un duvet lanu- Gt j'en ai même qui, après avoir été filtré ainf plufieurs fois, a formé es bouquets d’un tiflu tfès-fin, foyeux, & qui reflemble parfairement à dé l’amiante, mais il eft plus doux au toucher. L'analyfe de ces expériences vient encore de m'offrir une nouveauté prefque auf intéreffante que celle du nitre , favoir celle de La formation du fel commun par la feule variété de quelques circonftances dans la combinaifon de ces mêmes principes ; & cette converfion de l'acide vitrio- liqué en acide marin feroit tout aufli extraordinaire que celle en acide nitreux , s’il ne me-reftoit pas quelques fcrupules, fondés fur l’exiftence de l'acide marin dans les alkalis volatils : ce qui, comme vous favez, a déja fait le fujet d'un Mémoire que je vous ai communiqué (2), & qui va paroître à Vérone. Malgré cette circonftance néanmoins j'ai lieu de croire qu'il arrive ici cette fingulière modification qui fournit ou du fel marin, ou du falpètre, ou enfin du fel fufñble, & quelquefois du foufre calcaire , outre un peu de tartre vitriolé, fuivant les variétés des circonftances qu'on pourroit croire tout-à-fait indifférentes ; ce qui n'eft ce endant pas & ce qui rend ces expériences très- délicates & très - difficiles à conduire, & dont je réferve Le détail intéreffant pour la difertation en queftion. Je dois enfin vous prévenir, Meflieurs , qu'il, n'eft pas indifférent ‘d'employer une diffolution quelconque de vitriol, ni que la manière de fe procurer les alkalis volatils n'eft pas non plus indifférente ; mais j'en tenvoie le détail au Mémoire que j'ai annoncé, Ce font-là, mes chers Amis, les-objets dont je me fuis fait un de- voir de vous faire hommage, pour témoigner au Public leftime qui vous eft due à tant de titres; & pendant que ma tendre amitié ne fait que fe permettre l'épanchement le plus doux, votre célébriré fi bien méritée juftifiera Les fentimens avec lefquels j'ai l'honneur d'être, &c. Turin, le 15 Mai 1782. —_—_—_—_——— . (1) Cette propriété lui eft commune avec d’antres fels , tels que celui de glauber, celui d’eplom ; le fel commun, le vitriol de zinc, &c: (2) Ce Mémoire a auffi été remis à M. Poli, favant Napolitain, à fon paflage pat cette Ville, après m'avoir fait l'honneur d’aflifter aux expériences qui en font lé gontenu, : QU2 De LETTRE VA SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 385 SEEN ENT D EE EPA APS EURE DE M. LE ComTe MOROZZO, A M. l'Abbé Moncez, Auteur du Journal de Phyfique, Sur les Expériences de M, ACHARD , fur la couleur des Végétaux. Moxsreur, Je m'étois propofé de ne point faire de réponfe à la cenfure que le favant M. Achard m'a fait l'honneur de publier dans les nouveaux Mé- moires de l’Académie de Berlin, pour l'année 1778 ; für La couleur des fleurs & de quelques autres fubflances végétales, qui a fait le fujec d’un Mémoire que j'ai eu l'honneur de préfenter à la Société Royale, & qui a été inféré dans le cinquième volume de fes Aétes. L'eftime que j'ai pour les talens & le zèle de cet induftrieux Phyficien m'avoit engagé d’autant plus volontiers à garder le filence, que j'avois lieu de me fatter qu'il pourroit peut-être reprendre fes expériences , & remanier le fujet dans la feconde partie qu'il annonçoit, avec les précau- tions néceffaires à Fexactirude qu'il eft indifpenfable d'apporter dans l’art très-difficile d’en faire pour développer les myftères de la Nature, & fur laquelle ce Savant fait une digreflion très-judicieufe à la page 64. Je m'y croyois d'autant plus obligé, que cer illuftre Chymifte fe trouvoie alors engagé dans un travail très important , celui de former des cryflaux par le moyen de l'air fixe. Vous favez l'intérêt que l'Académie Royale des ” Sciences de Paris a pris à cette intéreffante découverte ; & j'aurois eu très- mauvaife grace de rien retrancher aux momens précieux de ce refpectable Chymilte, pour lui faire des remarques d'ailleurs très-fimples , & que j'étois fondé à attendre de lui-même lorfqu'il auroir lu mon Mémoire, fans s’en rapporter aux extraits d'un Journal, comme il paroît avoir fait fuivant ce qu'il dir lui - même au commencement de fon Mémoire (1). J'aurois continué dans cés mêmes fentimens, Monfeur, fi je n’avois pas vu paroitre ce Mémoire dans le cahier du mois d'Août de votre excel- (r) Voyez la page 63 du Mémoire en queflion , ou la page 100 du Journal de Phy- fique, cahier du mois d'Août 1782. Tome XX, Part, II, 1782. NOVEMBRE. Cce 386 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, lent Journal, & sil ne s'écoit pas écoulé un temps fi long fans voir paroïtre la feconde partie du Mémoire en queftion : je ne me propofe cependant pas une difcuflion minutieufe de la critique de ce Savant, & je me bornerai à rapprocher les difparates qui peuvent avoir donné lieu à des réfultats différens entre fes expériences & les miennes, 1°, par La diverfité des fubflances , & principalement des fondans qu'il a employés ; 2°. par le rapport différent qu'il a mis entre ces mêmes fubflances , ce qui fufit pour produire de très-grandes variétés, fans qu'on foit d’ailleurs autorilé à conclure que ces différences foient des contradictions. Vous fentez , Monfieur , que des faits négatifs n'ont pas été regardés jufqu'’ici par les Philofophes comme des démonftrations rigoureufes de la faufleré des faits politifs , & je ne réclameraï fur cela que l'autorité unanime des Savans. . J'ai au refte entre mes mains les produits dont j'ai rendu compte, & je n’ai pas manqué de les préfenter dans le temps à plufieurs de nos Mef- fieurs, dont quelques-uns même ont été témoins de mes opérations. Je ne ferai pas de plus grande apologie en faveur de mon Ouvrage, dont je laifle aux Savans le droie qui leur appartient d'en apprécier le mérite, & je ne m'en tiendrai qu'à leur préfenter, & à M. Achard lui-même , les obfervations qui fuivent: à 1°. Quoique je n'aie point parlé de l’efpèce des creufets d'argile dont je m'étois fervi pour mes expériences, & dont je ne difputerai pas à M. Achard l’omiflion que j'en ai faite, j'ai cependant eflayé auparavant la poudre de cailloux toute feule avec le fel de tartre, avant de l’agréger aux cendres végétales, pour être afluré, par le verre d’effai , que ni le creu- fet, ni les matières employées, ne contenoient aucune partie colorante , comme on lit à la page 36 (1) de mon Mémoire, où je fais de même remarquer que J'ai banni le borax & les autres fondans , comme foupçon- nés de contenir des parties colorantes. Voici ce que j'ai dit : I ef? bon ce- pendant de remarquer que, dans la compofition de mes verres, je ne me Juis fervi d'autre matière vitrifiable que de la poudre de cailloux ( filex cor- neus), ou du cryftal de roche ; que pour aider la fufion, je nai employé que du fel de tartre bien dépuré, ayant banni le borax € les autres fondans , comme foupçonnés avec raïon de contenir des parties colorantes ; que pour dter tout foupçon de couleur étrangère, j'ai effayé le fimple caillou & le cry flal de roche avec Le [el de tartre, qui me donnèrent tous deux un affez beau verre tranfparent , 6 point du tout coloré, dont je me Juis fervi quelquefois auffi pour unir aux fubflances vépétales calcinees, 2°, Les fondans dont s’eft fervi M. Achard pour aider la fufñion, ont toujours été le borax , & quelquefois le nitre, Ce font précifément ceux (1) Mémoires de la Société Royale de Turin , tom, 1°. LED SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 387 que j'ai bannis, pour n'être pas trompé dans la couleur de mes eilais. Pour fe convaincre que le borax contient des parties colorantes, qui fe décèlere lorfqu’il ett pouflé à la vitrification feul où agrézé, l'on n’a qu'à confulter les expériences de plufieurs Savans , qui ont particulièrement travaillé fur cette fubitance faline. On peut auMi réfléchir à la propriété qu'a cette matière faline de fe fondre, fans aucune addition | dans une mafle vitriforme ; ce qui m'a fair conclure que ce fel contient une grande quantité de principes terreux , & peut-être Le terre métallique, qui étant eux-mêmes très-vitrifians, peuvent fervir d’agrégation À la partie faline pour donner une fubftance vitreufe affez folide, & fouvenr colorée. 3°. Le nitre, lorfqu’il eft agrégé aux matières vitrifiables , donne pref- que toujours une couleur rougeñtre au verre, & ila été banni pour cette faifon des Verreries, depuis que l'on fe fert de la foude. Cette couleur que donne le nitre n’eft pas accidentelle ;,mais elle eft fürement due à la matière vitrifable qui fe trouve dans le nitre, & qu'on a tout lieu de croire une terre martiale, Les favantes recherches de M. le Comte de Saluces fur le falpètre artificiel, & fur l'analyfe de l'acide nitreux , nous démontrent les principes conftituans de ce corps (1). M. Pricftley croit que dans le gaz nitreux il y a une terre martiale, & le procédé de M. Wolf femble le prouver, De façon que l'expérience , qui paroît à M. Achard la plus convain- cante pour prouver que les couleurs qu'on peut obtenir des cendres des végétaux font indépendantes de la couleur du végétal, & dues fimple- ment aux circonftances dans lefquelles la vitrification a été faite (2), favoir celle du verre pulvérifé mélé avec partie égale de nitre , qui lui donna , felon Le degré de feu, différentes couleurs, depuis le violet juf- qu'à l’orangé , tombe d'elle-même , en reconnoiffant dans le nitre une terre métallique. 4°. Outre la difparité de mes expériences avec celles de M. Achard , relativement aux fondans, il y en a une très-forte dans fes proportions; car dans mes expériences ; la proportion des cendres végétales a tou- jours été partie égale à la poudre de cailloux, & c’eft fur des fortes quan- tités que j'ai opéré: au contraire , la proportion obfervéé par M. Achard eft de 20 grains de cendre végétale, avec’ deux drachmes de verre pul- vérifé; favoir dans la proportion de 1 à 7. : j Les remarques que j'ai faites en plufeurs endroits de mon Mémoire, (r) Voyez Lettre de M. le Comte de Saluces à MM. Macquer & Cigna, fur la con- serfion de l’acide vitriolique en acide nitreux, dans ce même mois, (2) Voyez page 69 de fon Mémoire, & page 105 du Journal de Phyfique cité, Tome XX, Part. I1,1782. NOVEMBRE, Gecz — 358 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, fur la grande volatilité de la partie colorante qui a même pénétré les creufets & les couvercles , me difpenfe d'une plus longue digreflion pour prouver que la partie colorante qui étoit en fi petite dofe s'eft entière- ment volatilifée avant l'entière fufion du verre, & que par conféquent elle n’a pas été en état de colorer le verre, & que les autres teintes que M. Achard a obtenues étoient dues au borax dont il s’étoit fervi, comme il le foupçonne lui-même. : s”. La couleur de la fumée des fleurs que j'ai obfervée , teinte de la même couleur. C'eft en opérant fur de grandes quantités qu'on peut l'appercevoir ; car C’eft furle pavot & le genêt, dont j'ai brülé plus de dix livres de chaque efpèce, que je lai particulièrement reconnue, étant prefque impoñible de l’appercevoir en opérant fur des petites quantités. 6°. Quant à l'adminiftration du feu , je ne doute nullement qu'il y ait apporté route l'attention ; mais du moment qu’on n’étoit pas en parité de circonftancess & pour les proportions , & par Les fondans , il feroitinutile d’en inculper la feule modification du feu. 7°. Je conviens que le degré plus ou moins violent du feu peut contri- buer à faire pafler une fubftance métallique dans la vitrification à différen- tes couleurs, felon la plus ou moins grande divifion des parties colorantes, & que de cet arrangement dépendent les couleurs (1). Mais je fais , par l'expérience , que la divifion des parties de cendres des fleurs dans l’état de la vitrification, m'a toujours donné des couleurs femblables à celles des fleurs dont je les avois tirées; & quoique ce foit au fer feul, reconnu dans toutes les plantes , que j'aie attribué la raifon de toutes les couleurs, c'eft précifément en vertu du différent arrangement de leurs parties combi- nées avec les différens fels & autres fubftances terreufes qu’on doit la va- riété des couleurs, ’ C'eft ainfi que le fer des différens fafrans de Mars produit différentes couleurs fur le verre, felon les différens menftrues dont on s’eft fervi pour le compofer, puifque celui préparé par le vinaigre donne une couleur verte ou d'émeraude , celuitiré par le foufre ou le vitriol donne diffé- rentes nuances de rouge, fans en pouvoir attribuer la diverfité à un autre métal (2). 8°. J'ai été très charmé cependant que , malgré la totale diverfité de la proportion & des fondans dans les expériences de M. Achard, il ait obtenu quelquefois desfverres colorés de la couleur de la fubftance em- ployée ; & qu'il ait obfervé particalièrement dans le verre des cendres de la Calendula Officinalis de Linné, un verre jaune, dont près des bords (x) On peur confulter fur cette matière les favantes Obfervations de M. Delaval, dans fon..excellent Livre , intitulé: Recherches expérimentales fur Le changement de cou- leur dans les corps opaques & ‘colorés. s (2) Voyez les Notes de Meret & Kunckel fur l'Art de la Verrerie de Neri. É S on Rs, Le à PR CPR M. des. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 389 du creufer il reconnut une belle couleur de rofe. C’eft ce que j'ai obfervé moi-même dans le verre fair avec le genër ( voyez table 1° , page 37 de mon Mémoire), phénomène qui m'engagea à fuivre quelque travail particulier fur cette plante. 9°. Malgré que M. Achard ait révoqué en doute les réfultats de mes expériences , j'ai été ravi de trouver à la fin de fon Mémoire , qu'il ne doute pas qu'il ne foit poffible de donner à un verre la couleur végétale, en y faifant entrer fa cendre. À Qu'il opère fur de fortes quantités de cendres qui ne foient pas moins de 4 drachmes; qu'il ne fe ferve d’autres fondans que du fel de tartre, pourfaire les expériences comme je les ai faites, & il ne manquera pas d'obtenir des verres colorés de la couleur descendres végétales employées, comme je les ai obrenus moi-même, J’efpère que ces confidérations fuffiront pour faire voir à M. Achard que, par les expériences qu'il a faites, il devoit tout naturellement s'attendre à des réfultats différens, tandis que je ne ceflerai d’avoir la plus grande eftime pour lui. Je fuis, &c. A Turin, ce2$ Septembre 1782. NOUVELLES LITTÉRAIRES. Prix publics propofés par l'Académie Impériale des Sciences de Saint: Pétersbourg. ] SORT de Saint-Pérersbourg, fous les aufpices de Catherine IT, protectrice des Sciences & des Arts, & ayant pour directeur M. Domal- chnef, Chambellan de Sa Sacrée Majefté Impériale, avoit propofé pour fujet du Prix de l'année 1781 la queftion fuivante : « Indiquer des raifons certaines, s’il en exifte, au-moyen defquelles on puifle démontrer l'uniformité du mouvement diurne de la terre, & » fi ce mouvement n'eft point uniforme, mais éprouve en effec quelque » changement, foit par la rélftance de l'éther, ou par une autre caufe » quelconque qui agifle fur la terre; alligner quels font les phénomènes qui produifent ce changement dans le mouvemert diurne de la terre; » quels font les moyens de rectifier la mefure de temps, à caufe de cette 2 La ÿ 8 399 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, » inégalité du mouvement diurne de la terre, afin d’avoir un point jufe - » de comparaifon entre la mefure de temps des fiècles paflés & celle » des fiècles moins reculés ». L'Académie n'ayant point tenu de Séance publique l’année dernière , elle a arrêté de ne prononcer fur les Mémoires qui lui ont'été adreffés à ce fujet qu'à la fin de 1783, & de proroger jufqu'au premier Juillet de la même année l'admiflion des Mémoires qui pourront concourir. Il a été néanmoins décidé de propofer la queftion fuivante pour lannée 1784. La nutrition qui donne également un nouvel accroifflement à chacune des parties du corps animal , ou qui leur rend les forces qu’elles ont perdues par l'exercice ; les phénomènes dont la garance eft la caufe, lorf- ue la rouseur dont fe couvrent les os fe répand en proportion égale dans toute la fubftance offeufe, & fe communique même aux plus petites parties qui la compofent; la nutrition enfuite des différentes parties qui n'ont point de vaifleaux , telles que l’épiderme , les ongles, les poils & la corne ; l’accroiffement enfin de l'embryon, qui pendant un temps dé- terminé , n’a ni vaifleaux, ni éœur, ni fang, & bientôt après renferme un cœur immobile, démontrent aflez clairement que le mouvement du cœur conduit d'abord par le moyen des vaifleaux Les fucs nourriciers dans l'animal qui vient de naître, & qu'enfuite ces fucs fe répandent d'eux- .mêmes par un mouvement indépendant du cœur tant qu'ils ne touchent pas les vaifleaux. Dans les plantes qui végètent comme les corps, qui comme eux pompent des fucs, prennent de la nourriture, de l’accroiflement , & fe renouvellent continuellement tant qu’elles ont de la vie, il n'y a aucune force que l’on puifle comparer au mouvement du cœur. Dans ces plantes cependant, ‘ la circulation des humeurs, foit qu’elle fe faffe par le moyen des vaifleaux , foit qu’elle fe diftribue par la fubftance des parties qui n’ont point de vaiffeaux , n'eft due qu'à cette force feule dont nous venons de parler. On demande donc : « Quelle eft la nature de cette force? eft-elle la même que la force attractive commune à tous les corps ; ou , comme il ÿ a tout lieu de. le croire, eft-ce une autre force propre à la fubftance végétale & animale Si cette dernière opinion eft vraie, on demande quels font fes principaux effets, quelles propriétés la diftinguent de la force attractive commune à tous les corps, & dénotent fa nature particulière » ? On peut faire fur les plantes & fur les animaux Les expériences né- ceffaires. L'Académie invite les Savans de toutes les Nations à envoyer leurs Mémoires avant le premier Juillet 1784. Celui que les Académiciens réfidant à Saint - Pétersbourg ( & il ne leur eft pas permis de concourir) » 44 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 391 auront jugé être le meilleur, recevra un Prix de cent pièces d'or, nommées vulgairement ducats de Hollande. Les Mémoires doivent être écrits diftinétement, ou en Rufle, ou en Latin, ou en Allemand , ou en François, fans nom d’Auteur , mais feule- ment avec une épigraphe pour les diftinguer : on y joindra un billec cacheté, fur le deflus duquel l'épigraphe en têre du Mémoire fera écrite, & au dedans le nom de l’Auteur. On les adreffera avant l’époque ci-deffus marquée à M, Jean- Albert Euler, Secrétaire de l'Académie Impériale des Sciences, qui en enverra une reconnoiflance à l'Auteur, avec le numéro fous lequel fon Mémoire aura été enregiftré, pourvu qu'il indique l'endroit où l'on pourra la lui faire pañler. Les Mémoires qui arriveront après le temps fixé, ne pourront concourir. L'Académie annoncera fon jugement en 1784, dans la première Séance publique qui fe tiendra après le mois de Juillet. Dans le Programme diftribué il y a deux ans, l'Académie propofa aux Savans la folution des problèmes fuivans. Nous croyons qu'il ne fera pas inutile de les leur rappeller ici. Pour l'année 1782. æ Donner la théorie de la génération & de la fructification des plantes cryptogamies du Chevalier de Linné ;° y joindre des obfervations fur les différentes efpèces de tous les genres de cryptogamies du » Chevalier de Linné, ou du moins de la plus grande partie ; des defcriptions » claires & précifes , enrichies de figures de toutes les parties de la fruéi- » fication; & enfin , démontrer fi la manière de fructifier & de fe propa- » ger eft la même pour toutes Les plantes comprifes jufqu'’ici dans la claffe se cryptogamies, ou fi elle s’en éloigne felon la différence de leurs » ordres. L'Académie defireroit en outre que , pour répandre un plus » grand jour fur les Mémoires, on y joignit les figures des plantes qui en Éne le fujet, tirées ou des livres de Botanique , ou que les Auteurs au- ront raflemblées ». Ce Prix fera adjugé au meilleur Mémoire, dans la première Séance publique de cette année. on Ÿ % + L E Pour l'année 1783. « Expofer la théorie des machines que la force du feu ou des vapeurs » de l’eau fait mouvoir ». L'Académie attend la folution de ce problème & les réponfes des Savans avant le 1°° Juillet 1783. Elle portera fon Jugement dans la Séance publique qui fe tiendra immédiatement après. Endn , fans fixer de terme pour la réception des Mémoires qui traiteront la queftion fuivante: 392 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, « On demande , quel eft le caraétère des fons ge rendent des tubes » égaux en groffeur , dans lefquels le vent fouffle de haut en bas, & dont » l'ouverture eft fur le côté ? quelle eft la variété des fons qu'ils rendent, >» foit graves, foit aigus , felon la grandeur & la poñtion différente de » cette ouverture » ? Chacun de ces Prix eft de 109 écus d’or ; il fera adjugé au Savant qui aura préfenté le meilleur Mémoire. Sujets propofès par l'Académie Royale des Sciences, Infcriptions & Belles- Lertres de Touloufe, pour les Prix des années 1793, 1784 & 1785. Le fujet propofé pour le Prix de 1782, étoit « De détailler les avan- # tages en général de l’établiffement des Etats Provinciaux , & en par- » ticulier de ceux dont le Languedoc eft redevable aux Etats de cette » Province ». Les vues de l’Académie n'ayant point été remplies pour le Prix de cette année, elle propofe pour celui de 178$, qui fera de ÿo0 livres, « D'ex- >» pofer les principales révolutions que le Commerce de Touloufe a ef- » fuyées, & les moyens de l’animer, de l’étendre , & de détruire les » obftacles, foit moraux, foit phyfiques, s’il en eft, qui s'oppofent à fon » activité & à fes progrès ». É À l'égard du Prix de 1783 , l'Académie annonça en 1780 qu'elle pro- pofoit deux fujets , à chacun defquels elle deftine un Prix de 100 pif- toles, Le premier eft « L'influence de Fermat fur fon fiècle, relativement aux » progrès de la haute Géométrie & du calcul, & l'avantage de les Ma- » thématiques ont retiré depuis & peuvent retirer encore de fes Ou- » vrages », : Le fecond eft « De déterminer les moyens les plus avantageux de con- » duire dans la Ville de Touloufe une quantité d’eau fuffifante , foit des >» fources éparfes dans le territoire de cette Ville, foit du fleuve qui baigne fes murs, pour fournir en tout temps, dans les différens quartiers , aux » befoins domeftiques, aux incendies & à l’arrofement des rues , des pla- » ces, des quais & des promenades », à Les Auteurs font invités de joindre à leurs projets le plan des Ouvrages à faire, avec les élévations , les coupes & les eftimations néceffaires pour conftater la folidité & la dépenfe de l’entreprife, & à donner auf un ap- perçu des frais de conftruétion des tuyaux de dérivation & de conduite pour amener les eaux dans les maifons particulières. Ils font libres de faire ufage à leur gré des eaux de fources & des eaux de la Garonne , re- lativement aux quartiers de la Ville qui pourront être plus aifément & plus abondamment fournis de ces diverfes eaux, même de ne propofer que les unes ou les autres pour tous lés objets de fervice. L’Adminiftration Va SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 393 L'Adminiftration Municipale de cette Ville , pénétrée de l'importance de ce dernier fujet , & du peu de proportion qui-fe trouve entre les tra- vaux qu'il exige & une fomme 1 1000 livres, a délibéré d'y ajouter 100 louis , de manière que le Prix total fera de 3400 liv. L'Académie commullquera à ceux qui fe propoferont de concourir pour ce Prix, les renfeionemens qu'elle a déjà, & ceux qu’elle efpère de fe procurer encore. Quant au Prix de 1784, le Public fut informé l’année dernière , qu’elle reproduifoit le fujec donné en 1778, dans l’efpoir que les Auteurs traite- ront avec une égale profondeur la partie Chymique & la partie Médi- cale. Ce fujet confifte à « Affigner les effets de l'Air & des Fluides ». aëriformes, introduits ou produits dans le corps humain relative- » ment à l’économie animale ». Les Savans font invités à travailler fur les fujets propofés. Les Membres de l’Académie font exclus de prétendre au Prix, à la réferve des Affociés étrangers, , Ceux qui compoferont, font priés d'écrire en François ou en Latin, & de remettre une copie de leurs Ouvrages, qui foit bien lifible, fur-rout quandil y aura des calculs algébriques. j Les Auteurs écriront au bas de leurs Ouvrages une fentence ou de- vife ; ils pourront aufli joindre un billet féparé , & cacheté, qui contienne la même fentence ou devife , avec leur nom, leurs qualités & leur adreffe. Ils adrefleront le tout à M. l'Abbé’ de Rey , Conféiller au Parlement, Secrétaire perpétuel de l’Académie , ou le lui feront remettre par quel- que perfonne domiciliée à Touloufe. Dans ce dernier cas, il en donnera fon récépiflé , fur lequel fera écrite la fentence de l'Ouvrage, avec fon numéro , felon l’ordre dans lequel il aura été reçu. Les paquets adreffés au Secrétaire , doivent être affranchis. Les Re ne feront reçus que jufqu'au dernier jour de Janvier des années pour les Prix defquelles ils auront été compofés. L'Académie proclamera, dans fon Affemblée publique du 25 du mois d’Août de chaque année, la Pièce qu’elle aura couronnée. Si l'Ouvrage qui aura remporté le Prix a été envoyé au Secrétaire en droiture , le Tréforier de l'Académie ne délivrera le Prix qu'à l’Au- teur même, qui fe fera connoître, ou au porteur d'une procuration de fa part. S'il y a un récépiffé du Secrétaire, le Prix fera délivré à celui qui le préfentera. ” . L'Académie, qui ne prefcrit aucun fyftème, déclare aufi qu'elle n’ex- tend pas adopter les principes des Ouvrages qu'elle couronnera, NP Tome XX, Part. LI, 1782. NOVEMBRE. Ddd 304 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Prix diflribués & annoncés par la Société Royale de Médecine , dans fa Séance publique, tenue au Louvre le Mardi 27 Aoët 1782. Ï. La Société avoir propofé , dans fa Séance publique du 29 Août 1780, pour fujet d’un Prix de la valeur: de 300 liVres, dû à M. Menuret, Aflocié regnicole à Montélimar, le Programme fuivant : « Expofer la » nature, les caufes , le mécanifme & le traitement de l'Hydropile, & > fur-tout faire connoître les fignes qui fxent d'une manière précile >» les indications des différens genres de fecours appropriés aux divers » cas & aux diverfes efpèces d’épanchemens » ? . Ce Prixa été partagé entre M. Camper, Affocié étranger à Klein- Lankum , près de Franeker en Frife , Auteur du Mémoire envoyé , avec l'Epigraphe fuivante: Ne Medicina quidem morbos infanabiles vincit : tamen adhibecur aliis in rèmedium , als in levamen. SENEC. ; & M. Barailon, Aflocié regnicole , dans le pays de Combrailles , Auteur du Mémoire remis avec cette épigraphe: Que in fcend imaginationis, non verd in ipfä rerum naturà , fundamentum habent dies delebit ac-proteret. SYDENH. Traë. de Hydrop. La Société n’a point adjugé d’Acceffir. I évoit difficile qu’une queftion aufli étendue fût trairée complettement dans tous fes points. Le Mémoire de M. Camper contient un grand nombre d'obfervations intéreffantes fur l'Hydrocéphale , le Spira-bifida , l'Hydrocèle & l'Hydropifie des articulations. L’Auteur y a joint des détails de Chirurgie & d'Anatomie qui font très-curieux. Le travail de M, Ba- railon comprend toutes les efpèces d'Hydropifies , & il préfente des vues hardies, dont quelques-unes font appuyées fur l'obfervation. Mais le traitement méthodique de l'Hydropiüe étant l'objet fur lequel ces deux Mémoires laiffent le plus à defirer, la Société a penfé qu'il feroit utile de ne pas abandonner ces recherches, & de propofer une feconde quef- tion qui püt fervir de fupplément à la première: en conféquence elle annonce, pour fujet du Prix de 600 Liv. fondé par le Roi, le Pro- gramme fuivant: « Déterminer quels font les efpèces & les différens cas > d'Hydropifie dans le traitement delquels on doit donner la préférence » au régime délayant ou au régime fec »? Ces deux méthodes ont eu leur fuccès. On demande une réponfe fon- : dée fur des obfervations & des faits de pratique relatifs aux différens gen- res d'Hydropifie, & à leurs complications. Les Mémoires qui concour- ront feront envoyés avant le 1°° Janvier 3784, & le Prix fera diftribué dans la Séance publique du Carème de la même année. IE La Société propofe pour fujer d’un Prix, dout la valeur fera une Mé- daille d’or de 200 livres: « Déterminer, par des Obfervations exactes, >» fi le Scorbut eft contagieux »? Déjà deux Programmes ont été publiés par la Société, relativement 7 SUR LHIST. NATURELLE ET LES ARTS. 395 au fcorbut :lun concernoit la nature & le traitement de ce mal, &il a été diftribué dans la Séance tenue le 28 Août 1781; l'autre eft relatif à l'analyfe chymique des remèdes anti-fcorbutiques, tirés de la famille des plantes crucifères, & il fera diftribué dans la première Séance publique de l'année 1783. Pour completter le travail annoncé fur cette maladie , il refte à dérerminer fi elle eft contagieufe. Cette queftion elt très-importante pour l’Adminiftration des Hôpitaux. La Société Royale , confultée en 1777 par M. l'Intendant de Bordeaux , & depuis pat plufieurs de fes Correfpon- dans ; fur cet objet, a cru ne pouvoir mieux faire que de le propofer pour fujet d’un de fes Prix. Prefque tous les Auteurs affurent que le fcorbut ne fe communique point par contagion. Kramer , qui l’a vu faire de grands ravages dans l'armée dé Hongrie; Richard Walter, qui a décrit l'expédition de l’Amiral Anfon, & quia donné lieu aux Docteurs Méad & Warfon de faire des obferva- tions intéreflantes fur le fcorbuts Henri Ellis & M, Lind n’admettent point la communication de ce mal d’un fujee à un autre, même dans les cas qui femblent les plus propres à la favorifer, A la vérité, Poupart a obfervé qu'il furvenoir quelquefois à ceux qui rouchoient des fcorbutiques dans Le dernier degré, des éréfypèles aux mains ou au vifage. Plat:rus, D. Sinopeus & A. Ni:zfch ont fait la même remarque. Lorfqu'il eft com- pliqué ‘avect'autres levains contagieux , il eft ericore plus facile d'être trompé fur fa communication, Enfin, il eft quelquefois épidémique , comme dans les conftiturions décriges par Walter & par Vandermye ; mais alors les caufes ou fources d'inftétion font communes à cous lés Ha- bitans d’une contrée. D'après cet expolé, la Société demande quél’on fixe, par des obferva- tions exactes , l'opinion des Médecins à ce fujer. Les Mémoires feront en- voyés avant le premier Mai 1783 , & le Prix fera diftribué dans la Séance de la Fête de Saint-Louis de la même année, IT La Société avoir annoncé ,' dans fa Séance publique du 19 Février de cette année , que la defcription & le traitement des maladies épidémi- ques étant un des travaux les plus importans de la Compagnie, elle croyoir devoir le joindre aux autres fujers pour léfquels elle propofoic des Prix d'encouragement. Parmi les Mémoires qu'elle a reçus AE certe époque , elle en a diftingué trois , aux Auteurs defquels elle a adjugé des Prix, ) Le premier, confftant dans une Médaille de la valeur d'un double jetton d’or , a été remporté par M: Lépecq-de-la-Clotute, Affocié regni- cole à Rouen, Auteur d'un Mémoire fur les maladies ou conftiturions épt- démiques qui ont régné à Rouen & dans la Généralité, depuis Le printemps dé 1778 jufquà l'automne de 1780 inclufivement. Ce Recueil ef le fep tième du même genre remis par M. Lépecq-de-la-Cloture à la Société; elle ne fauroit trop applaudir à fon zèle. Tome XX, Part. Il, 1782. NOVEMBRE, Ddd 2 396 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Le fecond Prix , auffi de la valeur d’un double jetton d’or, a été dé- cerné à M. Poma, Correfpondant à Bruyères en Lorraine, [l a préfenté un Mémoire ou plutôt un Ouvrage Latin, intitulé: Obfervationes Mereo- rologice & Medico-Praîlicæ circa Topographiam foli Bruyerienfis ; [eu de Aere, Locis , Aquis, Produëlis, & Morbis endernicis , circa conftituriones Acris & Morbos graffantes in Urbe Bruyerienft, apud Vofgas ,'in Lotharin- gid, ab anno 1770 ad annum 1782. La précilion & l'exactitude de ce trävail doivent mériter des éloges à M. Poma, Le troifième Prix, de la valeur d'un jetton d’or, a été adjugé à M. Ja- delot, Aflocié regnicole à Nancy, Auteur d'un Mémoire fur la conftitu- tion de l’Atmofphère en Lorraine, depuis le mois de Janvier 1781 jufqu'au mois de Mai 1782, avec l'hiftoire des maladies qui ont régné à Nancy pendant ce temps. Les Obfervations de M. Jadelot font rédigées avec beau- coup de méthode & de fageffe. La Société croit devoir citer avec éloge un Mémoire de M. le Canut , Aflocié regnicole à Caen, mtitulé: Compte rendu des Maladies qui ont régné pendant l'année 1781, fur Les côtes de la Normandie, depuis la rivière de Dive jufqu'au Vey. M, le Canuty remplit dignement les fonctions d’/nf- peéteur Royal pour la Sante. La Société l'invite à continuer des travaux aufli utiles, & à lui en communiquer les détails. IV. Parmi les Mémoires envoyés fur la Topographie Médicale , deux ont mérité d'être couronnés. F Le premier Prix d'encouragement, confiftant en une Médaille de la valeur d’un double jetton d’or, a été remporté par M. Thion de la Chaume, Correfpondant de la Société, & premier Médecin de l’Armée Françoife devant Gibraltar. Ila remäs un Mémoire intéreffant fur la fituation, le terrein , l’air & les eaux de la Ville d'Ajaccio en Corfe, fur les maladies qui y règnent , les Cafernes & les Hôpitaux. Le fecond Prix, de là valeur d’un jetten d'or, a été adjugé à M. Léon Beltz, Docteur en Médecine à Sultz en haute-Alface, Auteur d'un Mé- moire bien fait fur la Topographie Médicale de Saint-Grégoire en haute- Alface , avec cette épigraphe : Quare f£ quis ad Urbem fibi incognitam per- veniat, circumfpicere oportet ejus fitum , &c. HiPPOCR. De Aere , &c. V. La Société defire toujours qu’on lui envoie, pour concourir aux Prix d'encouragement , des Mémoires , 1°. fur la Conftitution Médicale des faifons & fur les Epidémies réonantes ; 2°, fur la Topographie Médicale des différentes Villes ou Cantons ; 3°. fur l’analyfe & les propriétés des. Eaux minérales ; 4°. fur les maladies des Artifans; $°. fur celles qui font . le plus répandues parmi les beftiaux, VL. Elle adjugera au des Prix d'encouragement aux Auteurs des Mé- moires qui , fans traiter de ces différens objets, lui paroîtront propres à con- tribuer , d’une manière marquée, aux progrès de la Médecine, so a s SUR L'HIST, NATURELLE ET LES ARTS. 307 VIL. Nous rappellerons ici les Programmes de Prix déjà propofés par la Société. Premier Programme. Prix de 1200 livres. « Déterminer quel eft le » meilleur traitement de la Rage » ? Les Mémoires feront envoyés avant le premier Janvier 1783. Second Programmie. Prix de 600 Jivres. « Déterminer quels font les » fignes qui annoncent une difpofition à la phthifie pulmonaire, & quels » font les moyens d'en prévenir l'invalion ou d’en arrêter les progrès » ? Les Mémoires feront envoyés avant le premier Janvier 1783. Troifième Programme. Prix de 300 livres. « Déterminer , par l’analyfe » chymique, quelle.eft la nature des remèdes anti-fcorbutiques, tirés de » la famille des plantes crucifères »? Les Mémoires feront envoyés avant le premier Mai 1783. Quatrième Programme. Prix de 400 livres. « Indiquer quelles font les + maladies qui règnent le plus fouvent parmi les Troupes pendant l'été, & » en général dans les temps de grandes chaleurs? quelle eft la méthode » la plus fimple & la moins difpendieufe de les traiter? quels font les », moyens d'en prévenir ou d'en diminuer les effets dans les pays très- » chauds, comme dans les Ifles du vent & fous Le vent » ? Les Mémoi- res feront envoyés avant le premier Décembre 1783. Cinquième Programme. Prix de 600 livres. « Déterminer quels font » les efpèces’ & les différens cas d'Hydropilie dans le traitement defquels » on doit donner la préférence au régime délayant ou au régime fec »? Les Mémoires feront envoyés avant le premier Janvier 1784. Sixième Programme. Prix de 200 livres. « Déterminer , par des ob- » fervations exaétes , fi le fcorbut eft contagieux »2 Les Mémoires feront envoyés avant le premier Mai783. Les Mémoires qui concourront à ces Prix, feront adreffés, francs de port, à M. Vicq-d'Azyr, Secrétaire perpétuel, rue des Perits-Auguflins , n°, 2, avec des billets cachetés , contenant le nom de l’'Auteur, & la même Epigraplte que le Mémoire. Ceux qui enverront des Mémoires pour concourir aux Prix d’émulation , pourront y mettre leur nom , & Les adreffèr au Secrétaire, par la voie ordi- naire de la Correfpondance. ÿ La Séance publique de La Société Royale de Médecine a été tenue au Louvre Le 27 de ce mois dans l'ordre fuivant. Après la diftribution & l’annonce des Prix qui ont été faites par le Se- crétaire, M. Hallé a luun Mémoire fur la nature & le traitement de la wualadie épidémique qui a régné cette année dans le haut-Languedoc & dans une RTE Rouffillon. . M. de Fourcroyen a lu un fur la combinaifon du kermès minéral avec 398 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Falkali fixe cauftique , fur Les phénomènes qui accompagnent, & fur les avantages que la Médecine peut en retirer. Î ; M. Vicq-d’'Azyr, Secrétaire perpétuel, a lu enfuite l'Eloge de feu M. Fo- thergill, Médecin célèbre de Londres, Aflocié étranger, mort l’année dernière, ù Après la lecture de cet Eloge, on a entendu celle d'un Mémoire de MM. de Laflone père ,& Cornette, fur la diffolubilité des précipités mercuriels dans l’eau, & fur la combinaifon du mercure avec l’alkali volatil. La Séance a été terminée par la le“ture d'un Mémoire de M. Caille, fur les fièvres rémittentes & intermittentes qui ont régné pendant les an- nées 1780 & 1781, j L'Académie Royale des Sciences, Belles - Lettres & Arts de Rouen, tint le 7 Août 1782 fa Séance publique. Elle avoit propofé pour le Prix des’ Sciences qu'elle defiroit décerner cette année : ce Jufqu'à quel point & à quelles conditions peut-on compter, dans » le traitement des maladies, fur le magnétifme & fur l'électricité tant » poftive que négative ? i » La théorie doit être appuyée par des faits, - » L'appareil des expériences doit être affez détaillé, pour que l'on puifle » les répéter au befoin, » On n'ignore point le nombre d’Ecrits publiés à ce fujer. Les Auteurs » y trouveront des matériaux pour former le tableau de nos connoiflances » acquifes fur cet objet ; & il fera facile d'apprécier ce que l'Art devra à »> leurs recherches perfonnelles. » Le Prix eft une médaille d’or de trois cents livres +. Depuis certe propofition publiée en Septembre & Oétobre 1781, l'Académie a reçu plufieurs Lettres anonymes, par lefquelles elle eft priée d'accorder aux Concurrens un délai pour perfectionner leurs Le & multiplier leurs expériences. Et, vu l'importance majeure de l'objet, elle s’eft déterminée à laiffer le concours ouvert jufqu'au premier jour de Juin 1783 , paflé lequel aucun Ouvrage ny fera plus admis, Les Mémoires, lifiblement écrits en François ou en Latin, feront adreffés francs de port, avant le premier jour de Juin 1783, à M. L.A. Dambourney, Négociant à Rouen, Secrétaire perpétuel pour la partie des Sciences. Les Concurrens font avertis d'éviter cout ce qui pourroic les faire connoître ; mais de joindresun billet cacheté, contenant leur nom, leur adrefle & la répétition de l'épigraphe infcrite en tête de leurs Mémoires, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 809 Hifioire Naturelle , ou Expofirion générale de toutes fes parties | gravées & imprimées en couleurs naturelles ; continuee par Madame veuve DAGOTY, première partie du Règne Minéral, quatrième Décade, Cet Ouvrage, qui ne peut être que très-intéreffant pour l'Hiftoire Na- turelle , avoit été fufpendu par la mort de M. Dagoty , & l’on craignoit qu'il ne füt totalement interrompu : mais le zèle de la veuve pour remplir les engagemens de fon mari , & les foins de M. Romé de l'Ifle qui dirige cet Ouvrage, doivent tranquilifer & rendre toute confiance au Pu- blic & aux Soufcripteurs. La Décade que nous annonçons, imite les pré- cédentes, par l'exactitude & la vérité du deflin & le ton des couleurs. Les fieurs Desfontaines & Bonvaller, qui font chargés de l'exécution , ne. peuvent que rendre un grand fervice aux Sciences , en perfsétionnant de plus en plus & leur deflin & leur gravure. Cette livraifon contient, 1°. groupe de fpath pefant ou féléniteux en tables; 2°. groupe de cryf taux de fchori, violet tranfparent rhomboïdal du Dauphiné; 3°. macles L. fchorl blanc -exägone, avec cryftaux de roche verdâtre de Barège ; . groupe de fpath calcaire Thomboïdal, de même forme que le grès de Fontainebleau; $°. groupe de cryftaux de mine de fer fpéculaire de PIfle d'Elbe; 6°. groupes de eryftaux folitaires de feld fpath rougeâtre de Baveno en Italie ; 7°. mine d’antimoine en aiguilles, traverfant de part en part des rhombes de fpaths féléniteux de Falfobania; 8°, groupes d'hya- cinthes enfumées de la Somma, au Véfuve; 9°. groupe de cryftaux de quartz d’un rouge de coralline , de Geyer en Saxe; 10°. quartz cryftallifé en ro- fes ou en rayons qui divergent de différens centres. Fautes 4 corriger dans le Cahier de Septembre 1782. P: GE 157, ligne 12, di marre, lifez di mare, » Ibid., ligne 36, le genre en ufage, Afez le genre étant en ufage. Page 168, ligne 10, de fanté (4), fpprimez (4). Ibid. , ligne 19 , de deux, Lfeg des deux: x Tbid., ligne 41, aux-notes, après 1q81, ajoutez : Vid. tom..4', pag: 151, Ihid., ligne 42 , (4) Ibid. pag. 162 ; fxpprimez cene Ligne. Page 169, ligne 40, aux notes, fondées , /ifez fondé. Page 174, ligne 38, blufia , Zfez blafa. Page 177, lig. 31, aux nores, après Le mor Prædita, ajoutez : Weil, céypt, ; p. 20. Ibid. , Ligne 33 , fupprèmez certe ligne. 4 Page 178, ligne pénulüème , aux notes, ibid., ajoutez : Page32. Page 179 , ligne 4, B, Lifez 8. Page 182 , ligne 20 , plante , lifez planche. Page 183, ligne 10, varietas B, Lifez €. + 400 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, 6x. TES PR SEE TPE EL T'AS BEVE DEs ARTICLES CONTENUS DANS CE CAHIER. 1 DM Jur la génération des Saumons , par M. FERRIS. . Page 321 Mémoire fur une façon de faire naître des Saumons & des Truites , pratiquée fur Les bords du Wefer; extrait du Traité des Pêches de M. DUHAMEL DU MoncEaAu. 322 Examen Chymique de l'Aurum Mufivum ; procédé pour l'obtenir conflamment beau ; par M. le Marquis DE BULLION. 330 Obfervations fur Le Crocodile de La Louifiane ; par M. P. be LA Cou- DRENIERE. 333 Obfirvations fur la critique d'un Ecrit, intitulé: Avis pour neutralifer à peu de frais les Fofles d’Aifance, par M. DE MARCOREELE, &c...., inféré dans le Journal de Paris du 12 Juin 1782. 3 Effai fur La Mine de Plomb ou Molybdène ; traduit du Suédois de M,SCHEEL E, par Madame P *** de Dijon. 342 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M, l Abbé DiCQUEMARE. 349 Nouvelles Obfervations fur la Cuve de Paftel ; par M. PiLATRE DE ROZIER. 351 Letre de M. BINELLI, Ingénieur des Mines ,àa M. L. P.D.L.T.D. A. 362 Lettre de M. DE LA METRERIE, D. M., aux AUTEURS du Journal de Phyfique, fur le Sable ferrugineux qu’on trouve mélé avec la pla- Tune. 363 Lettre de M. ANTONIO MARIO LORGNA, au Chevaliér ALEXANDRE _ VoLTA, furun Coup de foudre parti de terre, 365$ Mémoire fur un nouveau moyen de produire une chaleur égale , &c. ; par M. ACHARD. 371, Extrait d'une Lettre de M. MAGELLAN fur la préférence des grands Arcs de vibration pour les pendules Affronomiques , Ec. 376 Leutre de M. le Comte DE SALUCES, fur le Salpétre artificiel. 381 Lerire de M.le Comte DE MoROZZO , fur les Expériences de M, ACHARD , fur la couleur des Végétaux, 385 Nouvelles Lictéraires, | 389 APPROBATION. J': lu , par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux , un Ouvrage qui a pour tite: Obfervations fur La Phyfique, [ur l’Hiftoire Naturelle & fur les Ars, &c.; par MAMA. Rozier & MoNcEz le jeune, Ge. La Colleétion de faits importans qu’il offre périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l’accueil des Savans; en conféquence, j’eftime qu'on peut en permettre l’impreflion. À Paris, ce 8 Novembre 1782. VALMONT DE BOMARE, < LE < | Ë —_ _ = crier Jeu. RARE RS CUT € Novembre 1782 . orné intel RES Sa | JOURNAL DE PHYSIQUE. | | DÉCEMBRE 1782, (l JE — A —_——_ — (7 NOMENCLATURE RAISONNÉE D'une Colleélion de toutes les Subflances foffiles qui appartiennent aux Mines de Charbon deterre, tant en France qu'en Pays étrangers , à prendre ces fubflances depuis la terre végétale jufqu'aux veines de charbon elles- mêmes, connues par l'exploitation ; faifant partie du Cabinet de M. Mo- RAND , de l’Académie Royale des Sciences de Paris (1). cp | AVANT-PROPOSs. à | commun des hoîines ne connoît prefque le charbon de terre que par les tas & amas qui fe voient de fois à autre aux portes de quelques Ate- liers, avant qu'il foit ferré: aufli beaucoup de perfonnes ont une idée con- fufe de ce genre deïfoflile; encore la plupart le confondent-elles très-fou- vent avec de la courbe , avec ce qu'on appelle charbon foffile, avec toutes fortes d’efpèces de terres inflammables ou combuftibles. La plupart de nos Cabinets d'Hiftoire Naturelle, même les plus riches , ne diffèrent au- cunement, pour cet article, des Collections faites par ce qu'on nomme fimples Amateurs ; ils n'offrent que peu d'échantillons de charbon de terre comme bi- tumes , Ou comme bijoux finguliers : on n’y voit ou que des morceaux de charbon de terre dont les couleurs changeantes font récréatives à l'œil, ou des échantillons de leur gangue , remarquables par des empreintes cu- rieufes, par des accidents agréables, qui rendent ces pièces à-peu-près dignes de trouver place dans des Cabinets. Le charbon de terre, aulli important néanmoins que bien des miné- <Æ Fa .* (x) L’Avant-Propos & l’Introduétion de cet Ouvrage, quæe nous inférons ici, ont été lus à l'Académie, & foumis au jugement de MM. de Buffon, Daubenton & Def marets. Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE, Ece 402 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, raux eftimés, eft digne d'une attention férieufe, fi on a feulement égard à l'abondance , on peut dire à la profufion avec laquelle il eft répandu plus ou moins profondément , dans prefque la cotalité de la pre- mière épaifleur du globe. Pour peu qu'en même temps on réfléchifle un moment à la rareté du bois de chauffage dans nos pays & dans plu- fieurs autres , tout fait preffentir l'utilité du charbon de terre. Déjà fon ufage commence à s'introduire dans beaucoup de grands Ateliers, dont les opérations s'exécutent par le feu , & confommoient une quantité éffrayante de bois. Nous ne fommes plus enfin fi éloignés de regarder ce fofile comme un vrai tréfor fouterrein, deffiné à confoler un jour les Habitans de la terre de la négligence de ceux qui les auront précédés , à éco- nornifer le bois de chauffage pour leurs deftendans (1). Sous ce point de vue, je crois avoir traité le charbon de terre dans tous les dérails donr il peut être fufceptible pour donner matière à des fpéculations de plus d’un genre. Dans l'Ouvrage que je préfente, il s’agit de ce même fofile & des fubf- tances qui l'accompagnent dans fa mine , uniquement à+la manière dont les Phyficiens & les Naturaliftes confidèrent toutes les produ@ions natu- relles raflemblées dans un Cabinet, lorfqu’ils veulent en dreffer un état fommaire, Plufeurs Savans , notamment dans la Grande-Bretagne, profitant de ir féjour dans le voilinage des mines de charbon de terre, ont dé- les couches qui en compofent la mafle , en fuivant l’ordre dans lequel ces ffrata fe rencontrent en fouillant par puits. Vs Art d'exploiter, part. 1, & Jeë. 2, part. 2, Cette manière abrégée de dont de ces minesou car- rières une idée très exacte, eft intéreffante pour faire connoître le local auquel appartient une mine. La première partie de l'Art d'exploiter les mines de charbon renferme un aflez grand nombré de ces états miné- ralogiques des carrières de charbon de terre de plufieurs pays. Depuis ce temps , j'en ai recueilli le plus qu'il m'a été poflible, Maïs quelle induc- tion vraiment utile pour l'Hiftoire Naturelle peut-on tirer de ces énumé- rations? Les noms reçus en différens cantons pour défigner, par exemple, les argilles blanches qu'on y appelle fouvent warnes ; les pierres calcaires arrondies, qu'on nomme ailleurs cailloux ; le gravier calcaire, qu’on appelle fable, &c.: ces faufles dénominations ne peuvent, la plupart du temps , qu'induire en erreur. Chaque Auteur cependant, en partant de ces defcriptions particuliè- es, fouvent peu approfondies , s’eft cru en état de raifonner fur la naturé de cés mines & des charbons eux-mêmes : il n'a réfulté de-là que confu- fion & obfcurité fur ce genre de foflile. M, Zimmermann a fait cette re- marque , que je trouve très-jufte. Mes recherches fur cet objet m'ont con- (1) Hif, du Cabinet du Roi , Supplément au tome IX, éditionin-4£, page 160. — éd SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 40; vaincu de la vérité de cette, opinion. Ce qui m'a paru manquer eflen- tiellement à ces defcriptions ifolées, même-en les rapprochant, c'eit de raflembler aufli , autant que la chofe et faifable, les échantillons eux- mêmes de beaucoup de couches terreufes & pierreufes , même les échan- tillons de charbon de terre de différens pays , pour les comparer, les appareiller , & déterminer enfuite jufqu'à quel poinc les variantes de ces defcriptions font conformes entr’elles. La correfpondance que j'ai été obligé de fuivre dans les pays à char- bon de terre, pendant les vingt années que j'ai employées à rédiger la defcription de l'Art d'exploiter les mines de ce foflile trop négligé en France , m'a préfenté , pour cette efpèce de confrontation , une forte de facilité que perfonne autre ne pouvoit avoir; je dis une forte de facilité, car elle na pas été telle qu'on fe l’imagineroit d’abord. Je n'ai pu m'em- pêcher de faire mention dans mon Ouvrage, des peines de divers genre que j'ai eu à obtenir, fur les lieux où je ne me fuis pas tranfporté, les éclairciffemens dont j'avois befoin concernant les circonftances relatives à l'exploitation, aux ufages & au commerce de ce foflile. IL eft aifé de juger que les entraves qui ont prolongé mon travail, & qui en ont re- tardé la dernière publication , ont du à plus forte raifon s'étendre bien davantage fur la Collection que j'annonce, & qui ne m'étoit pas inu- tile, S'agifloit-il uniquement de prendre & de faire mettre de côté fur les lieux , avec les renfeignemens convenables, foit un morceau de char- bon de terre, foit un morceau de pierres de mines qui peuvent fe trou- ver mélées dans les magafins? les perfonnes auxquelles je m'adreflois, obligées elles-mêmes la plupart du temps de s'adrefler à d'autres, étoienc fans ceflé dépendantes & leur négligence ou de leur indifférence. Etoit- il queftion de profiter des occalions peu fréquentes des nouvelles fouilles, dont il falloit être inftruit à temps pour avoir une fuite de couches tra- verfées dans cette première exploication de mine ? on conçoit aifément que je n'ai pas toujours été fervi à fouhaic. Je fuis cependant parvenu, en prenant à tâche de me procurer des échantillons de mines en plus grand nombre poflible, de former une Colleétion certainement unique, foit des lits qui compofent les montagnes par couches auxquelles font propres les charbons de terr&, foit de différens charbons de terre eux- mêmes qui fe rencontrent parmi ces couches. Certe feule Colleétion,eft compofée actuellement de plus de mille-pièces, fans parler d’une autre fuite formée de fubftances dépendantes de ces mines; entr'autres de fubftan- ces provenantes de plufieurs mines embrafées, de rélultats chymiques de charbon de terre, des mêmes charbons réduits en braifes par diffé- rens moyens, & de différens produits de la combuftion de ce foflile dans les foyers domeftiques. C'eft l'expofé de cette Colle&tion, telle qu'elle eft pour le moment, Tome XX, Part, Il, 1782. DÉCEMBRE. Étec\z 404 * OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, que je donne aujourd'hui (1). Ce tableau bhiftorique, général & particu- lier, doit être agréable aux Phyficiens & aux Naturaliftes : il offre, pour la partie des mines de charbon de terre, une étude complette de ce foflile, une forte de coupe efquiflée de ces mines. Elle pourroir être ren- due fenfible & exprimée à l'œil dansun Cabinet, par l'arrangement de chaque morceau, les uns au-deflus des autres, fur de fimples treillages de fil d’archal , au lieu de tablettes en planches, Afin de garder un certain ordre dans ce Catalogue, à la faveur du- quel je me propofe de conduire d’abord le Naturalifte à la onnoiffance la plus générale de routes les mines de charbon qui fe trouvent dans un même canton, j'ai divifé cet Ouvrage en deux parties ; la première comprend l’énumération des lits terreux , des bancs pierreux & des charbons auxquels les uns ou les autres fervent de toit ou de plan- cher, & qui forment ma Collection. Les pierres ou les couches fur lef quelles font repréfentées des efquiffes de fubitances, foit végétales, foit animales ou inconnues, forment la feconde partie , toutes comprifes fous le titre du Pays & de la Province où eft fituée la mineà laquelle ,appar- tiennent les échantillons , tant des chaïbons, que des différentes couches ou lits qui les accompagnent dans le fein de la terre. _- En ne préfentant ici qu’une fimple Nomenclature fous une forme peu Matisfaifante à la vérité pour le Savant, feul moyen cependant pratiqua- ble, jedois répéter (2) qu'il eft une autre manière de connoïtre plus avant la ftruéture de la plupart de ces fubftances , tant charbon de terre , que celles qui forment les couches intermédiaires de ce foflile dans fa mine. Il n'eft queftion que de les foumettre à l’action d’un petit feu ordinaire : à mefure qu'elles font attaquées par la chaleur , & diverfement altérées par l'ignition, leur texture, que la cohérence intime empêchoit de découvrir, fe développe en grande partie. Cette voie , aufli fimple que facile, pa- roît la feule propre à jetter du jour fur ce point :elle n’exige de l'Obferva- teur d'autre attention que celle de ne point perdre de vue ; pendant la durée de l'ignition, la fubftance foumife à cette décompofitien dont on veut fuivre la marche. Par ce moyen, j'ai obtenu d’un grand nombre de charbons de terre & de couches pierreufes qui les accompagnent dans ‘la mine, des réfultats dignes de l'examen d'un Naturalifte. Îls entrent dans ma Colle&ion, après l’état des fchiftes & empreintes. L'objet particulier de cette Collection que j'annonce, & du Catalogue (x) Ayanteu, depuis que j'ai terminé mon Ouvrage, plus de loifir pour m'occuper uniquement des foins relatifs à cette partie de mon Cabinet, en fuivant davantage mes correfpondances fur cet objet, je juge, par les envois qui doivent m'’arriver fuc- ceflivement , que cette Colleétion doit inceflamment s’augmenter confidérable- ment. (2) V. Art d'exploiter les Mines de Charbon , part, 2, p. 539. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 405$ que j'enai formé, n’eft pas feulement , comme on voit, un objet de cu- riofité. Tirer ce foflile de l’obfcurité des Ateliers , donc il eft le prin+ cipal. fourien ; faciliter au Naturalifte la connoiflance de ce foilile , aufli entière que faite fe peut : telle eft l’idée que j'ai attachée*à l’entreprife de raflembier fous un même coup-d’œil tout ce que les fouilles de. charbon de terre peuvent faire rencontrer. Pour remplir ce but, je termine ce Catalogue par un appendice , dans lequel j'indique une fuite ( qui peut en être rapprochée utilement) de différentes fubftances végétales altérées ; & en cela diverfement analogues à la plupart des charbons de terre. Cette fuite tient à des recherches particulières, dont je m'occupe, fur l'origine , fur la formation & l’organifation de ce foflile bitumineux , dans lequel , à en juger par les principes, tantôt acides, tantôt alkalis volatils, que la Chymie faiwreconnoître dans les uns ou dans les autres, ily auroit à p'élumer des différences remarquables, foit à raifon du règne auquel il doit fa première formation , foit à raifon de l’altération que les fubitan- ces animales ou vécétales ont éprouvée. Cette füite peut fournir, je crois, des points d’analogie avec quelques charbons de terre; elle eft compofée, 1°. de fubftances terreufes, pier- reufes , falines & bitumineufes , provenantes de la fuperficie extérieure de montagnes de charbon emb s fponranément depuis plufieurs fiècles, dans quelques Provinces de e & en Pays étranger. Cerre Coilettion particulière a-été expofée fous les yeux de l’Académie, dans diverfes Séañces. i 2°. D'une fuite de braifes de différens bois de chauffage , pouvant four- nir à quelques comparaifons au moins curieufes entre le charbon de terre brut 8e Les charbons de terre réduits en braifes. Je me fuis procuré la facilité de cette comparaifon , moyennant‘un ‘très-grand nombre de réfultats de la combuftion de différens cHarbons de terre dans les fourneaux chymi- ques, de produits réfultans de la combuftion de quelques autres à l'air libre, ou dans les foyers domeftiques , ou dans le creufet, ou même dans des fourneaux conftruits à la manière «des Anglois, ce qu'ils appellent coaks , propofés aujourd'hui en France pour fervir au chauffage domef- tique, fous la qualification impropre de charbon défoufré , quelquefois de charbon épuré. Ces produits , auxquels je donne le‘nom de braifes, de- viennent intéreflans , par une fuite que j'indique aufli de femblables ré- fultats de la combuftion de plufñeurs fubftances analogues, ou même de fubftances animales & végétales. 3°. Une fuite de bois fofliles, de bois pourris fous terre ou à l'air , dans le fein de la madans le lit des rivières; une fuite d’écorces d'arbre, pourries ou carriées fur Le tronc, & dans leurs différens états d’altération , de dégénération ou décompofition , laiflant reconnoître à l'œil nud la contexture du corps ligneux, la direction & l’arrangement de fes fibres : d'où il réfulte, felon moi , des points de comparaifon à approfondir fur 1 406 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, la tiflure de plufieurs charbons de terre , ou bruts, ou réduits en braifes. 4. Une fuite de bois fofliles. imprégnés de bitume groflisr, impur & fétide, connu des Allemands fous le nom de ho/tz-kohlen | & que j'ap- elle bois-courbes , de terres afphatiques, de terres bitumineufes & de terres- courbes (1), foit vitrioliques, foit inflammables , connues dans plufieurs de nos Provinces fous le nom imprepre de serroutes, que leur qualité combutible à fait fouvent regarder mal-à-propos comme des charbons de terre impatfaits , ce qui a quelquefois donné li:u à des fouilles inutile- ment difpendieufes. 5°: Une fuite de tourbes proprement dites, de France & de pays étran- gets, rapprochées de courbes formées naturellement , fans avoir eu la terre pour matrice , & dont plufeurs fourniffent des apperçus fur les différens degrés de la première formation de ce genre d'humus (1). Je me contenterai, pour chacun des articles de cet appendice, d'indi- quer deux ou trois objets les plus remarquables par quelques circonftances, ou par les idées de reffemblance qu’on leur avoit appliquées, en les croyant charbons de terre. La première, la feconde partie & l'appendice de ce Catalogue , font précédés d’un préliminaire fervant d'introduction fuc- cincte fur chaque partie de la Collection à prévenir le Lecteur ou rap- peller fon attention fur quelqu'une des Mes qui entrent dans l'in- dication de plufeurs pièces. Introduétion à La première Partie. Dans l'état que je donne , foit des terres & des pierres de mine, foit des charbons compofant ma Colleétion, je déligne ces différentes fubf- tances par des définitions analogues à ce quelles Botanift:s appellent phra- fes, & dont l'ufage s'eft introduit dans les Ecrits fur les crois Règnes de la Nature. Ces defcriptions fommaires , fondées uniquement fur des effais fim- ples ; auxquels on eft obligé de s’en tenir pour le genre d'Ouvrage que je publie, font à la vérité bornées à l'extérieur ; elles ne fuppofent, ainfi que perfonne ne l’ignere, ni développemens, ni expériences de longue durée, qui, plus décifives à la vérité, préfenteroient fouvent des fujets de differtations chymiques. Les moyens de parvenir à ces développemens ne peuvent convenir à un fimple Catalogue. Cependant, la comparaifon attentive, exacte & réitérée que perfonne n’a été à même de faire comme moi pendant plus de vingt ans, d'un nombre confidérable de ces fubf- (1) V. à l’appendice, art. rerre-tourbe, la fubftance à laquelle j'applique ceue dé- nomination. … : (2) V. idem. terres défignées fous le nom de terre d’ambre jaune. S'URIL'HAST: NATURELLE ET LES ARTS. 407 tantes de mines de charbons , m'autorife à prendre fur la plupart d'en- trellis une opinion précile, & j'ai cru en Conféquence pouvoir intituler ce Catalogue Nomenclature raifonnée , parce qu'elle left en effec autant que la chofe Le permet: d'ailleurs ; l'exactitude des eflais, d'après lefquels les phrafes ou les defcriptions fommaires ajou- tées à ces différences fubftances ont été fixées, fera bientôt juftifiée par le, foin que j'y ai apporté, & dont il convient d’inftruire le lecteur. Ces phrafes font le réfulrat d’un examen foioneux , attentif & difcuré de qua- tre Chymiftes, qui tienneng.un rang dans cet ordre de Savans, MM, De: machy, Parmentier & Deyeux, cités plulieurs fois dans mon Ouvrage ; M. Bayen, également connu par des recherches inréreffantes en Chymie, fe fonc fait un plaifir de m'aider dans l'exécution de ce projet de Cata- logue. Ils ont bien voulu fe rendre enfemble à mon Cabinet , autant de fois qu'il a été néceffaire pour ce travail fommaire , & cependant difcuté, Il n'y a pas une feule des pièces de la première partie de ce Catalogue qui n'ait paflé par les mains de ces Chymiftes éclairés. Nous l’examinions chacun ; nous nous rendions compte de nos obfervations. C’eft ainfi que nous avons fixé , de concert, l'idée qui nous paroifloit devoir être atta- chée à ces échantillons (1). La plupart de ces fubftances , foitterreufes, foit pierreufes | foit même les charbons de terre, font indiqués d’abord par les noms fous lefquels ila plu aux Ouvriers de mines de les défigner entreux. Ces noms ne font abfolument que le-jargon de lOuvrier, ufté dans chaque local : on ne doit la plupart du temps sy attacher en aucune manière, particu- lièrement quant à l’objet (foncièrement inftruétif) de ce Catalogue. Ce jargon néanmoins devient renfeignement pour le Naturalifte auquel on enverroit les pareilles couches. J'ai jugé , par cette raifon , indifpenfable de conferver ces dénominations ; elles fe trouvent éclaircies ou rectifiées par les qualifications & les caractères qui leur ont été aflignés dans les Séances tenues pour ce travail , en obfervant que les fubftances qui fe- ront marquées par une WT, font ou paroiflent tellement néceffaires à La préfence , à l’exiftence d’une mine de charbon , que toutes les fois que dans une fouille on ne rencontre pas de ces fubftances, on ne doit pas s'at- tendre à trouver du charbon de terre. Quant aux couleurs aflignées à ces terres, à ces pierres, comme ocrés, (r) Ce concours n’a pas eu & ne pouvoir avoir lieu pour les charbons de terre. L'exa- men convenable .pour fixer leur defcription fommaire, eft d’une autre efpèce ; il en- traîne plus de temps, demande le fecours" d’un jour net, ferein, éclairé même par ‘ Je folcil, J'ai éié obligé de me charger feul de cette partie dans mes temps de loifir , & dans les temps favorables, lorfqu'ils fe préfentoient. Toute perfonne peu exercée à voir du” charbon de terre, ou qui n’en auroit pas vu aufli fréquemment que j'ai été à portée d’en voir , auroitetrouvé de grandes difficultés fur ce point. 408 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, argile, cos , &c., les Naturaliftes qui ont obfervé la Nature en place, n’ou- blieront point de faire attention qu'il ne s’agit dans cette Nomenclature que de la teinte que ces fubitances oht contractée par l’état de ficcité, & qu'il eft d’ufage de marquer dans ce qui s'appelle Catalogue. Les Minéralogiftes favent que, lorfqu'une fois les fofiies , les terres & des pierres {ur-tout , font privés de la fraîcheur humide que leur commu niquoient ou les entrailles de la terre , ou les efflux minéralifans dont ils étoient environnés , les véritables nuances de couleur, c’eft-à-dire, celles qui leur étoient propres, fe cerniflent , s'anéantiflent même la plupart du temps, au point que les couleurs que nous voyons à ces fubftances dans nos Cabinets , ne font plus du tout leurs couleurs primitives, Cette colora- tion des fubftances formant les couches qui précèdent les veines de char- bon, tant fupérieures qu'inférieures , fixe dans quelques circonftances Vattension des Mineurs; c’eft lorfque, pour l'éntreprife d'une exploita- tion dans un endroit où l’on foupçonne une mine, on fe détermine à en fonder la couverture avec une tarrière. Les terres, les pierres humeétées par l’eau , à deffein de mouiller detemps en temps la fonde , pour faciliter fon jeu ; ces pierres dis-je, brifées, écrafées , brouillées par l'aétion du cuiller ou dutuyau du fouilloir, ont fubi un rapprochement particulier, qui leur fait contracter , même lorfqu’elles font féchées , une teinte, une apparence ui s’écarte des caractères extérieurs particuliers à chacune d'elles , confi- dérée en mafle avant l'opération de la fonde. Il eft donc important de ne point confondre cette différence d'état, colorée d’une même fubftance , vue en mañle avant le brouillage qu’elle a efluyée, ou vue en pouflière , telle qu’on la retire avec la fonde. Il feroit fouvent à propos de pouvoir faire connoître ce comparaifon , afin de diftinguer ou de reconnoître ces cou- ches de mines. Dans cette vue, quelques-unes de celles qui entrent dans ma Collection font répétées fous forme pulvérulente , auprès de la même fubftance, dans fon état primitif. A l'égard des charbons de terre, foit d'un même pays, foit d'une même mine & d’une veine différente, foit de différens pays , & dont les échantil- Lons plus ou moins reflemblans , plus ou moins différens, font indiqués fous leurs numéros dans ce Catalogue, ileft encore à propos de remettre fous les yeux la remarque que j'ai faite dans la première partie de mon Ouvrage , page 1652. Dans le trajet d’une veine, la nature du charbon ne fe foutient pas la même; le charbon qui en provient, diffère à la réte & au pied de la veine, En confidérant une mafle de veine en épaif- feur , les lits ou frata, ou membres dont elle e(t formée, foit au ro, foit au fol & dans fon centre , fe trouvent également variés ; ileft même pofible que le charbon (1) foit encore différent par fa rexture ou par fa — ————— — ——————— ——"— (1) Du Charbon de terre , confidéré dans toutes fes particularités extérieures , page 75: qualité , SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 409 qualité, felon qu’ileft placé à une plus ou moins grande profondeur, felon qu'il : eft difpofé en mafle ou en veine, felon que cette veine marche en plarure où en roiffe à différens degrés, peut-être même felon l'a//ure qu’elle fuivra Cextraordinairement ) du nord au midi (1). En un mot, il eft permis de regarder comme certain ou te POtble , que dans les parties diffé- rentes de veines , il fe rencontre plufieurs qualités de charbon, Cette pré- fomption fe confirme en vifitant de grands magafins de charbon de terre : on reconnoît la fréquence ou la quantité de matières hétérogènes dont la mine eft plus ou moins furchargée. Nous ajoutons de plus, que cette vérité s'étend en général à toutes les fubftances minérales, qu'il faut tou- jours chercher à connoître | premièrement par leurs qualités invariables, & enfuite au befoin par leurs accidens. Ainfi, dans les phrafes par lef. quelles je vais effayer de caractérifer les variétés nombreufes de charbon de terre qui -compofent ma Collection (2), on ne doit appliquer ces efpèces de définitions qu'à l'échantillon lui-même, fans en érendreftoujours les caractères à route la mafle qui forme la mine dont il provient. Avec un peu de réflexion, il n’eft pas difficile de croire qu’on ne peut juger que d’une manière fautive fur des morceaux pris au hafard, ou fouvent choifis à la main, foit comme beaux & curieux, foit dans quelques oc- cafions qui tiennent à des vues d'intérêt particulier, afin de faire prendre une opinion avantageufe de la mine. Il eft maintenant à propos de don- ner la clef des phrafes dans lefquelles je me fuis reftreint à tracer une idée repréfentative à chaque charbon en particulier, foit dans fes circonf- tances apparentes , foit dans fa qualité. Pour cet effct , je dois rendre compte ici de ma manière d'envifager ce foflile , d'après le grand nombre qui m'en pañle par les mains depuis plus de vingt ans. Je ne parle pas ici desexamens de tout genre que j'en ai faits moi-même , des expériences chymiques que j'en ai recueillies foigneufement de tout pays, & faits par d'habiles Chymiftes; celles même auxquelles j'ai eu part, ou en les follici- tant, ouen y afliftant. Ces travaux particuliers (3) ne peuvent entrer en rien dans la Nomenclature que je publie aujourd’hui. Le charbon de terre ou de pierre eft diverfement défigné par les Na- turaliftes (4); aucun d'eux ne s'eft attaché à en donner, ce qu'on appelle (1) V. idem. , part. 2, pag. 1149 , caraétères de bonté des charbons de terre en énéral. (2) Les phrafes dela plupart des fchiftes & de tous les charbons de terre, feront en . Latin ; je placerai bientôt un état explicatif de ces phrafes. (3) V. Art d’expl. les Mines de charb., p. 1154. (4) Bitumen folidum, lapideum , fifJile. CarTeus. Elemenr. Mineralog. , claf. IV, ord. 1, fpec. generis primä. Fiwumen lapideum , fehifto vel aliis terris mixtum, & indu- rarum, W ALLER. fpec. 265. Biumen fchiftofum. Lan. Il ,7. Phlosifion argillà mix Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE. FF£ 410 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, une définirion-exaéte. Malgré tout le travail particulier auqnel je me fuis . livré, le feul qui puifle donner fur cet objet une expérience aufli entière qu'en peut ladefirer , je d’entreprendrai point de définir ce bitume ; il pa- . roit fufhfant pour l'idée à fe former de la Nomenclature à laquelle je me borne, de faire attention aux cara@ères diftinctifs du charbon de terre, tels que la diverfité de fon mélange , d’où réfulte la concrérion bitumi- reufe, plus ou moins pure, c’eftä-dire, alliée en proportions inégale- ment variées, avec des pyrites, des fels, avec différentes efpèces de terres, fous forme fchifteufe pour l'ordinaire, ou fiflile, quelquefois même avec use fubftance métallique , formant les unes ou (1) les autres, par leurar- rangement ou leur fuperpoftion différente, une tiflure variée . lâche ou ferrée , qui ne permet au bitume de charbon de terre de s’amollir qu'à la chaleur du feu, où il fe maintient long-temps , à la différence des autres bitumes , qui s’amolliflent & laiflent échapper leur odeur au folcil, C'eft de cette compofition générale (2) qu'émanent toutes les parti- cularités que l'examen Le plus fuivi , & fur-tout Le plus répété, de route ef- pèce de charbon de terre, y fait appercevoir. Ces particularités renfer- ment celles que l’on découvre dans un charbon au fimple coup-d’æœil, au toucher ; au poids, la couleur noire plus ou moins intenfe ; l'état dur, pefant & compact, ou tendre & friable; enfin, la manière dont fe fépa- rent quelques charbons de terre en fe caflant : c’eft de-là aufli que dépen- dent les altérations que les uns ou les autres éprouvent ou n'éprou- Vent pas à l'air , quand ils y reftent long -temps expolés, foit celle que l'action du feu y développe, & qui comprend les différens phénomènes que préfentent plufeurs charbons , depuis le premier inftant qu'ils commencent à être attaqués par la-chaleur du feu, & dans tous les périodes de leur combuftion, jufqu’à leur dernière réduction en fco- ries, en cendres, &c. . La diverfité des parties conftituantes & de leur mélange, entr'autres une odeur d'acide vitriolique particulière au charbon de terre , lorfqu’il brûle, peuvent aligner les caractères diftinétifs de ce bitume-foffile : ils le rangent fans réplique dans une claffe à part, différente des autres bi- rum. CROMSTEDT. 258. Carbo fo[filis nonnullorum; fchiftus carbonarius , fiMilis , bivu= minofles ; biçumen lapide filé mineralifarum. Dictionn. ORxcro10G. UNIVERS. E. BERTRAND. (1x) Lithañtrax mineralifarum , E. Bertrand. Il n’eft aucune fubftance métallique qui n’eit été obfervée dans quelque charbon de terre. W. Art d’exploit., part IL, p. 137, Récipitulation fommaire & générale des matières qui fe trouvent dans toutes les mines de charbon de terre. à TR PT Er PEN (2) Déjà indiquée, part. 1, pag. 74, particularités extérieures du charbon de terre, & page 133. ner, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4xr tumes, différente des tourbes proprement dites , des terres que j'appelle terres-rourbes, des bois tourbes , de certaines terres combuitibles , même de plufieurs fchiftes dont'je ferai bientôt mention féparément; fubitances qui, à La première apparence , ou par leur inflammabilité plus ou moins fenfible , ou par’leur odeur bitumineufe au feu, ont toutes une forte d'analogie ou d’affinité avec le charbon de terre, pour lequel mème il eft fouvent arrivé de les donner (1). La feule infpeétion d'une grande quantité de charbon de terre dans les endroits où il s'emmagaline, décide bientôt une divifion générale fort fimple , & qui eft auf adoptée, mais cependant d’une manière fouvent équivoque par les Naturaliftes Nomenclateurs, De ces charbons , les uns font compactes, durs & pefants ; les autres font légers, tendres , fria- bles, fecs, mais peuvent à-peu près également abonder en bitume, comme on le verra. [l s'en trouve enfin dans lefquels La terre conftituante de ce foflile bitumineux, ou un alliage pyriteux, compofent fenfible- ment la plus grande partie de leur mafle, au point que les charbons de cette nature font manifeitement argilleux ou pyriteux. Toutes ces circonftances, tant les premières , je veux dire celles qui font apparentes à l'œil, que celles qui ne peuvent fe reconnoitre que par l'expolition continue à l'air, ou par Les épreuves pyriques , ont cela de remarquable, qu'elles paroiffent annoncer des dépendances les unes des autres ; qu'elles jettent un jour plaufible fur toutes les différences appa- rentes de charbon de terre , ces différences ne provenant réellement que des différentes fubftances diverfement combinées avec le bitume, & de la texture variée qu'on y découvre , en examinant les charbons de terre. Le’ dénombrement qui entre dans ce Catalogue ne pouvant porter, pour les indications générales, que fur ces premiers apperçus, j'aurai at- æntion, dans la plupart des phrafes , de rapprocher les principaux ca- ractères extérieurs de la divifion que j'établis de trois clafles de ce foffile : il eft feulement à propos de développer cette divifion, par rapport à la nature & à la qualité de chaque charbon dont on voudroit établir des fubdivifions ou des variétés très-indifférentes quant au fonds, Je vais en même temps eflayer d'éclaircir préliminairement ces defcriptions abré : gées , en renvoyant ici en notes , pour être lues féparément , les = (1) Perfonne ne s'eft trouvé plus à même que moi, par les occafions que m'a fourni mon travail, d’être témoin de ces mépriles , fur lefquelles je crois devoir ren- voyer à ce que j'ai dit, Art d'exploiter, part. II, pag. 609. M. Wallerus foup- -çonne avec quelque raifon Gafpard Newmann d’avoir ainfi confondu quelque peu de pytite ou de fchifte, ou autre fubitance combuftible , avec du charbon de terre. Voy. Syft. Minéral., tom. 2 , p.102. Tome XX, Part, II, 17982. DÉCEMBRE. Fff 2 412 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, phrafes que l'on pourroit trouver rapportées dans ce Catalogue À chaque charbon qui fera cité dans le développement. Ë Les charbons de Ja première clafle, par exemple, ou dela première pureté, & qui font les moins communs, préfentent une texture en mafle abfolument continue , uniforme & homogène, au point d’être fufceptible de poli en totalité, Tels font le jayet, le kannel-coal des Anglois (1). Il n'elt aucun de ces charbons purs ou de première qualité , qui ne fafle appercevoir dans toutes leurs caffures des furfaces étendues, liffes, d’un noir brillant, fur lefquelles fe remarquent de grandes facettes excentriques. La flamme de ces charbons donne une clarté qui leur eft propre , compara- ble à celle d'une bougie ou d’une belle chandelle. Le plus ordinairement les charbons compaétes ne font ni de ce premier degré de pureté, ni en maffe aufli parfaitement continue, Quoique fe féparant-comme les pierres dans les carrières, en éclats d’un volume très confidérable, felon leur con- . fiftance & leur compolition variée, ils fe caflent plus ou moins diffcile- ment en feuillets , en morceaux irréguliers, approchant quelquefois de la forme cubique (2). Les plus purs de ces charbons compactes & communs dont je parle , & qui forment une feconde clafe(3), préfentent toujours des furfaces aflez étendues , arrangées en petites bandes ou zones tranf- verfales (4), tantôt parallèles (5), tantôt bien alignées (6), comme dans le charbon repréfenté planche IV, n°. 3 de la première partie de l'Art d'exploiter, tantôt interrompues (7) & en défordre (8). Plufieurs font re- marquables par une difpofition de couleurs brillantes, femblables à celles qui fe voient dans les verres prifmatiques ou triangulaires (9). (x) Biumen duriffimum , polituram admirtens, aquis innatans. Waxx. fpec. 266: Suc- cinum nigrum; officér. lapis thracius Diofcorid. ; Gemma fammothracea, PLin. Bicumen Jolidum, purum, natans. Lanx. Gangiris. SrRAB. Vegerabile ligneum , lirhantrace impregnarum. CROMSTETD. Gagas latin, La propriéié attribuée au jayet par MM. Linné & Waller. n’eit point du tout connue, (2) Lithantrax in fragmenta difparia excidens, feu in varia latera fiffile. (3) Je définis le jayet, Airhantracis genus primarium , durifJimum, ficcum, flruc- ur æquabili & polità éntrinfecis gaudens , fragmentis politis concavo-convexis fplen- dens , ufibus mecanicis idoneum; fuccinum nigrum, vulso Gagas, in aquû f[ubmerft- ile. Après lequel en vient un autre, que je définis rhantracis genus primarium , vul- garius ,fratturû nirenti & poli& vitreâ, fuccino nigro obfeuré æmulum , poliwram nihi- dominüs non admittens. 4) Lithantrax longitudinaliter faferatum , feu fafciis continuis tranfverfis. 5) Livhantrax fufciis continuis parallelis. 6) Lichantrax ftratulis 14 lineam direttis. (7) Lithantrax ffraulis énterruptis. (8) Lithantrax fafciis confufts. ÿ (s) Lithantrax radiis folaribus verftcolor; lith. variis iridis coloribus diffintum , feu variegatum 3 lith. difcolor. ; Lith.variati luce micans ; lith. recenti fra@ur4 cx rurilo-cœru- do, ex rubro purpureo , aut violaceo nitens. SE rt fa SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 413 D'autres offrent à la vue quelque chofe d'agréable ou de frappant ‘dans leur texture, qui feroit difficile à décrire (1), & que l’on ne reconnoît bien qu'en fuivant la décompolition de ces charbons par la combuftion à un feu lent. Ces chatbons, que l’on peut en général appeler charbons compactes communs (2), font encore fujets à fe trouver féparés dans leurs feuillets par des folioles ou lames fpatheufes , quelquefois quartzeufes, très-étendues, fouvent par des écailles pyriteufes (3). Lorfque ces char- bons de la feconde claile brülent, les phénomènes qu'ils préfentent fonc caractériftiques; leur mafle fe gonfle, fe bourfouffle dans toute l'étendue de fon volume, fe tourmente en {e défuniflant , fe ramollit, s'agolutine, fe recolle enfuite de nouveau en écumant , en formant des bulles fongueu- fes, fuperfcielles, tant que fa principale partie conftituante, Le bitume, n'eft pas épuilée par le feu; efpèce la meilleure, roujours compaéte , toujours plus lente à s’allumer , donnant au feu une flamme, une chaleur vive & durable, pendant laquelle il s’exhale une odeur fumeufe d’acide vitrio- lique propre au charbon de terre pur, mais que l'on diftingue bitumi- neufe , naphteufe même plus ou moins fenfiblement (4), & laiflanc, après lignition complette, une fcorie tuberculeufe noire , plus ou moins éclatante, lorfqu’elle eft refroidie , plus où moins compate, gerfée plus ou moins profondément , fonore , légère, poreufe comme un charbon végétal , & qui ne tombe que très-diffcilement en cendres. La troifième claffe de charbon , qui pourroit n’être encore qu’une fous- divifon de la première clafle , fe marque aufli à l'œil à raifon du bitume, différent feulement en ce qu'il eft allié à plus ou mains de fubftance hé- térogène non bituminifée, Ces charbons, inférieurs pour la pureté (5) à ceux de la feconde clafle, font plus légers, plus friables , & fe feparent en molécules prefque toujours parallélogramiques, ou à-peu-près cubi- ques (6). Sion examine cescharbons tendres , les molécules qui compo- fent leur mafle ne paroïflent pas avoir la configuration décidée dont il vient d’être fait mention; ils paroiffent quelquefois granulés (7) ou arran- (1) Lichantrax eleganté fruturà ; Lith. concinné difpofftum ; Lith. ordinatim concin- natum. (2) Lithantrax bituminofo-fulphureum , HorFM. , & que je définis, quant aux pre- miers apperçus, Lirhantracis genus fecundarium , picis artificialis colore & facie , flam- mam tardé concipiens , liberé flagrans, igne molléfèens, intumefcens , fpumefcens & coa- Lefcens ÿ bitumen olens , grumifque feu ampullis fungofis germinans, CHAR30ON cRaAS, CHARBON FLAMBANT. (3) Lichantrax pyrüibus intermixtis radians. (4) V. Art d’expl. les Mines de charb., part. Il, pag. 1153: . (s) Livhanrracis genus fecundarium , friabile , vulgatiffimum , citis & debiliis igneftens , odore gravi, fæpé fæepiüs bicumini abffmili ; Grk. fulphureo:acidum, HorrM. (6) Lichantrax ref]ularum. (2) Lithantrax granulis colliquatis diftintlum , feu afpetu granuluri, feu facie gran eulatÂ; livh, granulatim concrerun. 414 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, gés confufément (1), jufqu'à être comme brouillés (2), & quelquefois tout-à-fait informes (3). Dans quelques variétés, ces molécules font ra- maflées par places, formant de petites facettes à miroirs ; ceux-là ont un éclat argentin (4). Affez fouvent cependant il s'en rencontre dont les molécules font difpofées en feuilles ou lames (5), quelquefois arrangées en faifceaux comme les fibres du bois (6) , ou {triées comme la blende (7). Les charbons de cette troifième clafle font particulièrement fujets à fe reffentir de la nature de leur couverture fchiftsufe , où le fer fe trouve fous toutes les formes, & qui , la plupart du temps, font de vraies mines de fer. Ces charbons fe rencontrent affez fréquemment dans le fein dela terre, entrefemés de lames aflez_ épaifles & confidérables d’une ochre rouilleufe où jaunâtre, qui , à la longue, fe répand en lame’ croûteule, ou fous forme de fuie farineufe , fubrile & légère, fur la majeure partie des furfaces de ces charbons (8), conxme fur Les couches terreufes qui les avoifinent , la plupart du temps d’une couche pyriteufe (9). Ces charbons au furplus ont leur manière particulière de brüler; ils s'enflamment plus promptement, ne fuivant pas dans l'ignition la même marche que ceux de la feconde claffe, quoiqu'il s'en rencentre néanmoins qui, en brü- lant, bouillonnent & champignonent paflablement dans quelques par- ties. Le réfidu de leur combuftion eft plus promptement cendreux ; pen- dant tout le temps qu'ils flambent, ils portent un caractère particulier dans lexhalaifon,odorifère, Elle n’eft pas décidément graffe & bitumi- neufe. Dans quelques-uns , & ce font ceux qui abondent en pyrites, cette odeur eft affez piquante, défagréable, incommode pour les perfonnes qui n'y font pas habitüées, fuffoquante à un certain degré , fans néanmoins être nuifble , comme on l'a cru long-temps. (x) Lithantrax confufum, feu inordiraré difpofirum. (2) Lichantrax ruberofum, & nodofum. (3) Lichantrax Amorphon; Lich. rude & informe; lith. miner@ difformi ; lith. facie & confiflentià terred. (4) Livhanrrax veffulis minimis,politis & fpecularibus confpicuum ; feu lith. partibus renuibus aut minimis areis poliris & fpecularibus. (s) Lithanrrax ftruflurû lamellari , fèu in lamellas file; Lirh. in bratleus de- hifcens. (6) Défigné d’une manière équivoqte par M. Bertrand Zthanrrax ligneum , que je dé- finis Zrhanrrax fibrofum , feu fériarum , feu flamenrofum. : (7) Livhantrax galene , fErutlurà haud ab/f£mile. (8) Lichantracis genus fecundariun friabile | aëre humido , in pulverem flavum fa- cifcens ; dith. excès farinaceum ; léth. ochr@ pulvereâ , feu efflorefcenti& ochracet præe- gnans; lich, fariné feu ochr& fubriliffim4 exrrinfecus pregnans ; lith. rubricofum, [eu pulvere rubente afperfum ; lith. rubedine feu ochr à ferri pulvereë (rufa, lutcû , fav) fatu- ratum; lith. atramentum flavum , eflorefcens ; Lith. eruff@ ochraced obduttum , Jec uadäm rubisinof[à cuticul4 nirens, V. Art d'exploiter , pag. 74. - (9) Lithantrax pyritaceum feu pyriticofum , id efEwbundanti pyrite penderofurs. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 4i$ Enfin, on pourroit admettre rigoureufement une dernière claffe de char- bons imparfaîts ou mauvais (1) , laquelle comprendroit ceux dans lefquels les parties hétérogères terreufes ou pyriteufes font en quantité abfolu- ment prédominante fur le bitume. Cette efpèce n’a , la plupart du temps, befoin, pour être jugée, que du feul coup-d'œil; elle n’eft pas plus charbon de terre ,& ne mérite pas plus d'être claffée dans ce genre de foflile, que la plupart des fchiftes argilleux, qui forment la véritable en- veloppe des veines de charbon dans la mine (2), qui, par cette raifon, font imprégnées de bitume, qui tiennent’ quelquefois même encore à quelque portion charbonneufe , qui peuvent en conféquence tenir lieu & tiennent lieu en effer de combuitible pour des ufages peu importans, Je narrêterai bientôt en particulier à ces fchiftes. Telle eft la divifion générale , dont l'idée me paroît pouvoir fe préfen- ter à toute perfonne qui aura été à portée de voir, d'examiner fouvent & long-temps beaucoup de charbons de terre de différens pays , de diffé- rentes mines, & qui voudroit eflayer , comme je Le fais, de renfermer dans de courtes defcriptions les différences de ce foffile , d'après les circonftances générales & particulières. Cette divifon eft exprimée daus les phrafes , ainfi que tout ce qui s’'an- nonce au premier coup-d'œil, tels que la pefanteur, l’état compacte ou friable , l'état pyriteux, c'eft-à-dire le mélange pyriteux , ou l’état pyri- tacé, c’eft-à-dire l’alliage & la pefanteur pyriteufe ; la texture extérieure- ment apparente , ou groffière, ou informe, ou agréable dans quelque point; la manière de fe cafler en pièces régulières ou irrégulières. La couleur des échantillons de ce‘foffile n’a paru devoir entrer auñi dans le nombre des circonftances à énoncer. Quels que foient les charbons de terre , perfonne n'ignore qu'ils font conftamment noirs. Cette teinte, felon l'abondance ou la pureté du bitume formant partie conftituante,du charbon de terre, varie depuis le noir luifant ou brillant de la poix, juf- . qu'au noir mat & terne; quelquefois cette teinte eft coupée! par des om- bres différentes, & ces nuances graduées fe rapprochent des caractères particuliers. On obferve que les charbons , appellés CHARBONS FORTS, CHARBONS GRAS, ou propres aux ufuines, font d’une couleur noire plus décidée & plus frappante que les charbons nommés CHARBONS FOIBLES (3). , Pour défigner, dans tel ou tel charbon, le degré différent de la qua- lité plus ou moins pure , ou de la quantité de bitume, j'ai quelquefois (1) Que je définis Zithantracis genus infimæ notæ , rerreum , feu dererius , bisuminis penuriam afpeélu reférens. (2) V. Art d’exploit., part. II, pag. 53. (3) Il paroît que c’eft ceque lès Auteurs Latins ont voulu exprimer communément par l’épithète piceum. 416 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, jugé à propos , au lieu d'indiquer le gezus lithantracis primarium , fecun- darium, &c., de fpécifier principalement la première & la dernière nuance de couleur noire , ainfi que la teinte ombrée & la couleur, pana- chée, "Enfin, l'odeur que ce fofile fait fentir quand il brûle , & qui toute feule le diftingue conftamment de tout autre bitume ; cette odeur eft en- core, felon fa nature, particulière, fenfiblement diverffiée ; comme je lai fait remarquer il ny a qu'un inftant. Avec tant foit peu d'attention & d'habitude , il eft facile, à mon avis (j'en parle d’après ma propre ex- périence , qui ne me trompe point fur cela) , de diftinguer dans les foyers brülans , les charbons dont l'odeur eft fimplement celle de ce bitume, & fumeufe , (i l'on me permet de m'exprimer ainfi , d’autres charbons dont l'odeur eft vulgairement dite fulfureufe , à caufe de fon âcreté plus mar- quée. Il en eft même ( & cela tient au local, traverfé de couches terreu- fes animales), ilen eft dont l'odeur aun caractère particulier & décidé de vraie puanteur (1). Toutes ces différences accidentelles doivent, à mon avis, être regardées comme autant d'indices du caractère, de la qualité & de la nature des charbons (2). N. B. L’Auteur ayant defiré que ce Memoire parut tout entier à la fin de cette année, nous en avons infèré la première continuation dans le der nier Cahier du Supplément , qui paroîtra en même temps que celui-c1. MÉMOIRE Sur une nouvelle conftruétion de Girouettes. Crus: fans doute au peu d'importance que lon attache à l’ufage des girouettes , qu'il faut attribuer leur infuffance à bien des égards; elle eft l'effet de leur conftruction trop négligée, & à laquelle on n'a prefque pas daigné faire aucunerectification depuis leur origine. à Il eft cependant vrai de dire que, foit pour indiquer d'une manière plus pofitive le vent qui règne , foit pour fervir à s'orienter dans les lieux où elles exiftent, on auroit dû employer plus d'art & de foin à la (x) V. Aït d'exploiter , pag. 529. (2) V. idem , pag. 1149. perfection SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 417 perfection de cet inftrument : il ne falloir que dontfler aux croix & aux autres ornemens, dont la plupart font furmontées , une direétion paral- lèle, ou à la ligne méridienne, ou à l'équateur. La comparaifon de cette direction avec celle de la girouette, quoique difficile de loin, auroit en- core pu guider l'Obfervateur dans fes remarques. Ce moyen fimple eût fuff àla multitude pour s'orienter & connoître le vent du moment: mais à l'homme inftruit, il faut plus de précifion ; & l'inftrument qui fert à fixer {es obfervations, doit, à la première infpection, lui rendre compte de la direction du vent & de la fituation des lieux à l'égard des di- vers points de l’horizon ; en forte que les moindres ainfi que les plus rapides variations ne lui échappent pas, & ne l’arrêtenc point dans fes recherches. Pour réunir dans cette forte d’anémomiètre le double avantäge de faire connoître tout-à-la-fois le vent régnant & les quatre points cardinaux de l'horizen (voyez Planche 1°), il faut y adapter un index ou alidade, qui ait deux mouvemens différens, l’un horizontal , & lautre vertical C’eft de leur différence que l’on obtient un réfultat certain. Cet index fe place au talon de la monture, en forte que la tige foit toujours entre lui & la girouette; un arbre vertical traverfe le talon de cette monture , & porte à fon extrémité extérieure cet index , dont ci-après eft la defcrip- tion. L’extrémité intérieire, voifine de la tige, porte une petite roue € cuivre de deux pouces de diamètre, dentée fur fa circonférence ; laquelle doit s’engréner avec une autre roue d’un égal diamètre, de même nombre de dents, faite en couronne, fixée au haut de la tige , la denture en deffous. e L'index que porte l’arbre vertical eft compofé de deux aiguilles d’égale longueur , traverfées l’une par l’autre à angles droits dans leur milieu, formant conféquemment quatre branches ou rayons égaux. L'une de ces aiguilles porte à l’une de fes extrémités une feur-de-lis , qui eft le figne du nord , tel qu'on l’emploie dans les bouffoles & dans les cartes géo- graphiques ; elle marque le fud par un croiflant placé à fon extrémité oppofée : l’autre aiguille repréfente une flèche dont le dard défigne Pet, & l'emplumage l'oueft, Les chofes ainfi conitruites, on place le tout au lieu de fa deftinätion, la tige orientée fur la ligne méridienne; en forte que la girouerte étant dirigée parle vent du nord , la branche portant la Aeur-de-lis foi per- pendiculaire , fon figne en haut: l’autre aiguille fe trouve alors en fens horizontal , & le dard doit regarder l’eft qu'il fert à déGgner. L'index , monté au talon de la girouette , fair avec elle un mouvement horizontal; mais par l'effet que produit la roue adaptée à fon nême arbre, & qui, mobile autour de la tige, engrène avec la roue à couronne qui y eft fixée, il a auf un mouvement vertical, lequel , dans la révolu- tion du tour entier de la girouette, lui fait préfenter alternativement fes Tome XX, Part, 11,1782. DÉCEMBRE. Gzgg 418 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, quatre branches en haut. Ce fünt les fignes qui les terminent, qui, élevés perpendiculairement , indiquent alors les vents cardinaux ; les fignes des branches qui fe trouvent couchées horizontalement, indiquent les points de l'horizon qu'ils regardent, c’eft-àdire, quela Aeur-de-lis ainf couchée, elt toujours tournée du côté du nord. Il en eft de même des trois autres fignes. . Deux fignes élevés en ligne diagonale au-deffus de l'axe de l'index , in- diquent un vent qui participe de deux vents cardinaux, c’eft-à-dire un hui- tième de vent, tels que nord-eft, nord-oueft , fud-eft , fud--oueft. De deux Gignes élevés au-deflus de l'axe, fi lun eft fupérieur à l'autre, le vent alors participant plus de ce premier, eft un rhumb de vent d'une divifion plus grande, tel qu'un feizième , un trente - deuxième de vent , &c. 1 Lorfqu’aucun rayon de l'index ne fe trouve parfaitement perpendicu- laire ou horizontal , il fac, pour connoître l'effet que le premier mou- vement de la girouétte produira, de favoir que les rayons des fignes S'abaiffent toujours fur le côté auquel la girouette tend à tourner , confé- quemment ils s'élèvent du côté qu'elle fuit, de façon que l’on peut pren- dre pour règle invariable que la girouettre & les fignes de l'index tendent epfemble au même côté, c’eft-à-dire, qu'ils conéurert en mème temps de droite à gauche , ou bien de gauche à droite, Ce: dernier fens eft celui de l'aiguille d'un cadran d'horloge, Ces girouettes, placées fur un édifice ifolé, peuvent être obfervées de tout côté avec le même avantage, par rapport à ce que l'index tourne horizontalement avec la girouette, & que la forme triangulaire des fignes les rend vifibles , fous quelqu'afpect qu’on les examine. * Au lieu d’un index à quatre branches, on pourroit y fubftituer un cercle , qui porteroit au-dehors de fa çirconférence trente-deux figres , re- préfentant chacun une des divifions de la bouflole. Le vent régnant feroit de même indiqué par le figne élevé au fommer perpendiculairement à la tige ; mais cette conftruction , plus lourde, plus compliquée & plus em- barraflante à l'œil, feroit tout au plus utile dans les ports de mer, où ces fubdivifions font plus connues, & où l’on a plus de motifs à les obfer- ver exactement, Quoïque furchargées d’un poids plus grand que celui des girouetres actuelles ; celles-ci tournent bien plus librement, 1°. en les montant fur un pivot d'acier poli, tournant dans une chape de cuivre ou de verre, ce qui évite des frottemens qui font aflez confidérables dans leur conf- truction actuelle, pour caufer un bruit qui les a déjà fait profcrire de nom- bre d'endroits; 2°.en mettant l'index & fa montureen équilibre avec la girouette, de même que les fignes doivent l'être entr'eux; 3°. dans celles qui, comme pour les para tonnerres , ne peuvent être montées fur pivot, en faifant tourner la platine du collier inférieur fur les rouleites adaptées SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 419 à la tige : ce qui diminueroit beaucoup les frottemens , & en rendroit le mouvement plus libre. On vient de faire exécuter en grand cette pirouette; elle eft placée fur un édifice au Roufa , près de Lyon, où elle produit, au moindre vent, tous Les effers annoncés. Celui de donner la facilité de s'orienter, ce qui eft agréable & commode aux Voyageurs , tant dans les Villes qu'a la Campagne, fe réunit à l'utilité de connoître les plusinfenfibles & les plus fréquentes variations des vents. Ces avantages feroient d’une importance bien* plus grande, fi cer inf trument pouvoit s'appliquer à l’ufage dela Marine , & être expofé fur les navires en vue du Pilore & de tout l'équipage; mais les vaiffeaux, pour le moins aufli variables que les vents , ne permettroient pas à la tige de conferver fa première polñtion. I ne réfulreroit donc alors rien de certain entre la fituation & la direétion de la girouette, On obvieroit cependant à cet obitacle, s'il étoit poflible de donner à une aiguille chargée de 10 à 12livres de poids, une force magnétique capable de la contenir dans une direction foutenue aux pôles de la terre, en {orte que , dans les révolutions continuelles du vaifleau & des vents, elle ne pût être entraînée par aucun frottement dans les chapes des deux pivots de l'aiguille & dela girouette; la tige de la girouette mon- tée fur certe aiguille, confervant alors fa Gtuätion , donneroit fur mer fes réfulrats comme fur terre. Cette aiguille, portant en-deffous un contre-poids plus qu'équivalent au por dont elle feroit chargée en-deflus par la girouerte, &c., feroit en- ermée dans une mônture propre, conime pour Ja bouflole, à la maintenir toujours dans un état horizontal , & il n’y auroit d'expofé aux impreflions du vent que la girouette & fon index ; leurs volumes feroient même bien plus réduits que s'ils devoient être employés fur terre , les diftances dont ils doivent être apperçus étant bien moins grandes. L’Auteur de cette nouvelle conftruétion prie les perfonnes inftruites des effets de l’aimant , de lui faire connoître, par correfpondance directe , ou par la voie du Journal de Phyfique, fi fes recherches font fufceptibles de quelques fuccès. Le moyen le plus convaincant feroit celui de l'expé- rience. [l eft auli difpofé à récompenfer très-cénéreufement celui qui lui préfenteroit une aiouille de 12 à 13 pouces de longueur , qui, fur- chargée du poids de dix à douze livres, fe centiendroit dans fa direction aux pôles (routefois ayant égard à la déclinaifon de l'aiguille aimantée) ; en forte que la variation , lente ou rapide de fon pivot ou ftyle ,.ne l'en détournät pas fenfiblement. Nota. Dans la girouette exécurée en grand, la feuille a 20 pouces de longueur fu15 dé hauteur ‘chaque rayon de l'index a 2 pieds ; y compris le Mn jigne placé 2 fon extrémité , lequel a lui-méme 8 pouces de long [ur 7 de dia- mètre, ; Tome XX, Part, II, 1782. DÉCEMBRE. Gog 2 LS 420 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, EX AUM'EN CE Y. M I QUU'E D'une Subflance pierreufe , venant des mines de Fribourg en Erifgaw, défignée par Les Naturalifles fous le nom de Zéolite ; précédé de l'analyfe de la Zéolite de Feroé. Par M. PELLETIER. C——— VE —— 5 Hifloire de la Zéolite. 6: T°. M. CRomsTEDT eft le premier qui nous ait fait connoître u nouveau genre de pierre , qu'il a défigné fous le nom de zcolite. Il l'a- voit féparé des fpaths, avec lefquels elle avoit un grand rapport , quant à la dureté, mais dontelle différoit, par la manière de fe comporter au feu: il avoit reconnu qu’elle entroit facilenvent en fufon , en jettant des lunières phofphoriques, &*que , mêlée au fel fufible, au natrum ou au borax, elle produifoit des verres tranfparens. Après M. Cromfledt , M. Swab trouva une autre pierre, qu'il reconnut êtreune zéolire; & il nous a indi- qué un autre caraétère pour les diftinguer: c'eft la propriété qu’elles'ont de faire la gelée avec les acides, & ce moyen fert aujourd'hui aux Natu- raliftes pour les caraétérifer. Ces deux Savans ne s'étant point occupés de l'analyfe de ces pierres ,il nous reftoit à favoir quels étoient leurs prin- cipes conftituans. , M. Bucquet nous a fait part de fes recherches fur celles de Feroë (135 & d'après fes expériences, il la regarde comme une terre particulière, différente des terres métalliques, alumineufes, &c:, qu'il nomme terre zéoliteufe. M. Monnet (2) ne penfe pas de même, & il regarde au con- traire la zéolite d’Iflande, qu'il a examinée, commeun compofé de par- ties égales de terre argilleufe & de quartz. M. Bergmann, qui en a aufli parlé (3), dit que la tèrre filiceufe y et en grande quantités enfuite la terre argilleu(e ; que la terre calcaire y eft en moindre quantité , & que la terre martiale rarement farpaffe =. On voie, par cet expofé , que 100" des Chymiftes font peu d'accord fur les principes de la géo/e: c'eft ce (x) Mémoires des Savans Etrangers, tome IX, pâge 370. à (2) Obfervarions furla Phyfique, &c., Supplément, tome XII, page 410. . (3) Opufculs Phifica & Chémica , vol. 2°, pag. 109. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 42» qui m'a engagé à m'en occuper; & j'ai choifi celle de Feroé, pour en Comparer Les réfultats avec cetix d’une prétendue nouvelle zéolire qui vient de Fribourg en Brifgaw , & qu'on trouve chez tous les Marchands Naru- raliftes de Paris. Zéolite de Feroë , traitée par la vois humide, $. II. La zéolite de Feroé n’eft point foluble dans l’eau. J'en ai mis 6 grains dans une livre d’eau diftillée , qui a reçu le degré de l’ébullition ; l'ayant féparée ‘enfuite de ce qui n’étoit point diffous, & évaporée à fic- cité , je n'ai eu que: grainde rélidu , & les 6 grains de zéolite bien féchés féparément n’avoient prefque rien perdu. $. HI. 100 grains de cette zéolis, traités avec de l'acide nitreux, ont produit une gelée bien tranfparente, que j'ai fait fécher à un bain- Marie; l’ayant enfuite leflivée avec de l’eau diftillée, il eft reflé fur le filtre une matière infoluble ; qui, féchée , pefoit so grains, & les leffi- ves évaporées ont produit 1 gros & 48 grains d'un fel déliquefcent, très-ftyprique , qui ne fufoit point fur les charbons. Ce fel , rediffous dans de l’eau diftillée, & précipité avec de l'alkali fixe , a fourni un préci- pité très-long à fe réunir au fond du vafe (caraétère qui annonçoir déjà la terre argilleufe., qui eft très-flottante). Le précipité, féparé des li- queurs & féché, pefoir 66 grains, & les liqueurs ônt fourni du vrai ni- tre. Ces 66 grains de précipité ayant été tenus dans un creufet rouge pendant deux heures , ne pefoient plus que 28 grains. Dans cet état, traités avec de l’eau diftillée, ils ont perdu 8 grains: c’eft la portion de terre qui étoit dans l'état de chaux qui a*été difloute par l'eau diftillée. J'ai eu encore recours à un procédé plus court, qui eft de traiter dans un creufet ‘au feu le fl qu’en obtient de {a combinaifon de l'acide ni- treux avec les principes folubles de la zéolite; le feu en chaffe l’acide, & le réfidu , traité avec de l’eau diftillée , lui abandonne la terre qui eft dans l’état de chaux. J'ai de même traité une pareille quantité de réfida calciné avec du vinaigre diflillé, qui n’a diffous que Îa terre calcaire, & a laiffé 20 gros d’une autre terre , qui eft de nature argilleufe. $. [V. 200 grains de zéolire ont de même produit, avec de l’acide vi- tiolique, une belle gelée , lagnelle , féchée & traitée avec de l'eau difz tillée, a laiffé 162 grains de rélidu bien fec, & les liqueurs évaporées ont fourni 1 once 2 gros de fel, qu’on reconnoifloit au goût ftyprique & à la figure oftaëdre des cryftaux pour de l'alun. Ce fei, décompolé par lalkali fixe, a fourmi 108 grains de précipité. Comme je foupçonnois que les 162 grains de réfidu pouvoient contenir de la félénite, qui fe feroit produite en traitant la zéolite avec l'acide vitriolique, j'ai fair ufage Fe procédés fuivans pour n'en aflurer, J'ai pris la moitié de ce 421 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, réfidu, ou 81 grains. 1°. Je l'ai fait bouillir avec de l’alkali fixe; & après avoir été bien lavé & féché, il ne pefoit que 73 grains, & les liqueurs ont fourni, par l’évaporation , du tattre vitriolé, 2°. Ces 73 grains ayant été calcinés ,ont perdu $ grains. : 3°. Les $8 grains qui reftoient ont été traités avec de l'acide ni- treux ; & les en ayant féparés, ils ne pefoient plus que 50 grains. 4°. Ayant mis quelques gouttes d'acide vitriolique fur l'acide nitreux qui avoit digéré au feu fur le réfidu , & qui en avoit diffous 8 grains, j'ai procédé à l'évaporation , & j'ai obtenu 20 grains de félénire ; ce qui prouve que dans un quintal fitif de zéolite, il y a huit parties de terre de nature calcaire . qui, traitée avec l'acide vitriolique , produit de 20 à 22 grains de félénite, . $. V. Cette zéolite produit de inème une gelée avec l'acide marin, & il en refte toujours la moitié qui ne peut être difloute. Certe diflolu- tion m'a fourni un fel très-ftyptique & très-difficile à cryftallifer. Par des procédés , trop longs à détailler, j'ai féparé la terre alumineufe de la terre calcaire (1). &. VI. Le vinaigre diftillé n'a point d’adtion fur la zéolice ; mais le vinaigre radical en diflout la terre OU gaz méphitique ; d'autres, au con- traire, à addition d’un principe ignée, nommé aufli acidum pingue, qui, en s'échappant des matières combuftibles > fe combine à cette pierre ; & quelques-unes enfin en ont conclu , d’après plufieurs expériences, que "Ja pierre ne pouvoit pas être calcinée dans des vaifleaux de verre. Defrant me convaincre de la vérité d’une expérience aufñli facile à ré- péter , j'ai eflayé de calciner tantôt des fpaths calcaires ou félénireux , des marbres & de la craie: il a réfulté de routes mes opérations , que le fuc- cès dépend en grande partie de la qualité du verre, c’eft-à-dire, que le verre Élnc ne produit jamais une calcination parfaite ; 2, que plus il eft fufible, moins la chaux s’y calcine promptement ; 3°, que le verre vert de Lorraine fournit une chaux prefque parfaite ; 4°. que la pierre fe calcine trois fois plus vîte dans une cornue de grès ; $°. que dans un creufet, on convertit dans une demi-heure en chaux parfaite une pierre qui re l'étoic que très-légèrement , après avoir été expofée pendant fix heures , dans une cornue de verre, au feu le plus véhément ; 6°. enfin, qu'on s’aflure facilement du degré de calcination par la perte réelle du poids de Ja pierre, qui eft beaucoup plus confidérable dans les creufets que dans les trois cornues, & par le degré de chaleur que les chaux produifent en les jettant dans l’eau. Quelle que foit la caufe de Ja calcination ,il eft très-prouvé que la chaux, 43 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, mêlée aux alkalis fixe ou volatil, en augmente la caufticité; 2°. qu'elle décompofe tous les fels ammoniacaux ; 3° qu’elle fe combine avec l’acide ou gaz méphitique, & régénère un fpath. Ces trois propriétés, qui fe mañifeftent inconteftablement dans la cuve de paftel , font fufifantes pour expliquer la théorie du bleu. Je trouve que les termes de ronger ou d'ufér de la chaux , employés même par les Savans qui ont écrit fur cette teinture, ne, déterminent ab- folument aucun de fes effets, puifqu'elle exifte toujours dans la pâtée. À la vérité, elle y eft rappellée en grande partie à l’état de pierre, qui ef bien oppofé à l’idée qu'en donnent les expreflions ronger & ufer. Je penfe qu'en difant farurer La chaux, ou régénérer la pierre , on concevra facilement, que par l'acide ou gaz méphitique produit par la fermentation, ayant beaucoup d'afhnité avec la chaux qui en eft privée , on régénère la pierre, & qu'en recalcinant cette pierre qui eft au fond de la cuve, ou même la pellicule qui furnage, on obtiendra une nouvelle chaux: fi, avant la calcination de cette dernière, on y verfe un acide, il fe fera une vive effervefcenceg enfin, que cette pellicule, qui n’a plus aucune faveur, eft abfolument cette matière défignée fous le nom de crème de chaux. . Des accidins gwéprouvent les Cuves par la trop grande quantité de chaux. 1 Examinons maintenant pourquoi la trop grande quantité de chaux fait perdre à la cuve la propriété qu’elle a de teindre en bleu, & quels font les moyens infaillibles d'y remédier. ; ” S'il paroifloit intéreffant de prouver que c’eft par une fuite de préjugés, que quelques Artiftes ont: publié qu'on ne pouvoit pas arrêter les progrès de la fermentation putride une fois établie dans la cuve de paftel , il n'eft pas moins étonnant qu'on ait afluré depuis qu'une cuve, completrement putréfiée , pouvoit être rappellée à fon premier état, & qu'elle conte- noit encore toutes fes parties colorantes. Quelque peu fondées que foient ces affertions, elles fort cependant accréditées au point qu'on les regarde comme des vérités démontrées. F C'eft commettre la plus grande injuftice envers les bons Artiftes qui fe livrent à la teinture, que d’âvancer qu'ils ont prétendu qu'on ne pouvoit pas arrêter les progrès de la putréfaction: ils font depuis long-temps inf- truits des moyens d'y remédier. J'ai déjà rapporté les obfervations de M, Hellot; je pourrai citer les expériences de M. Oudin à Rérhel, faites en 1772, que je fupprime, parce que ces détails n'ont qu'un répport éloi- gné au but de ce Mémoire, La théorie des fermentations, fi bien difcutée par M. Macquer , prouve fuffifamment qu’une cuve, entièrement putréfiée, ne peut jamais être rappellée SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 433 zappellée à fon premier état; & que fi les apparences ont dépofé en faveur des Auteurs de cette affertion, c'eft parce qu'ils ont vraifemblable- ment opéré fur des cuves qui n'avoient éprouvé qu’un commencement de putréfaétion. En effet, la putréfaétion eft le dernier degré de la fer- mentation , qui dénature entièrement toutes les fubftances qui fe méta- morpholent alors en alkali volatil, en huile fétide, en terre & en lumière: tout ce qui refte de l’organifation eft détruit ; les vaifleaux, les fibres, les trachées , les cellules , letifflu même des parties les plus folides ,.fe défu- niflent & fe réfolvent totalement: ce qui démontre évidemment l'erreur de ceux qui affurent avoir rétabli des cuves totalement putréfiées. Les ob- fervations fuivantes vont encore mieux convaincre que c’eft par un défaut de connoiffance fur les degrés de fermentation , qu’on a avancé certe opi- nion. 1°, Les Phyficiens & les Chymiftes n'ont pu encore obferver que les -commencemens de la putréfaction ; 2°. les derniers termes paroiflent hors de notre portée, puifqu’un corps n’eft entièrement putréfié que lorfqu'il ne refte plus que la terre hypoftatique , ou fes parties les plus fixes, qui font la moindre portion de ce cerps organifé; 3°. j'ai déjà die qu'il eft démontré en Chymie qu'on ne peut pas faire rétrograder les fermenta- tions. De ces faits , qui font généralement admis, on doit en conclure qu'il eft phyfquement impofible de rétablir un végétal complettement putréfié , & que c’eft avec railon que nous confidérerons toujours la fyn- -thèfe des règnes animal & végétal comme impraticable. J'ai prouvé cette vérité d'une manière inconteftable , en effayant de teindre {ur une cuve du paftel , qui ne contenoit que trente livres de paftel. “Comme , après un mois , cette plante avoit fourni toute fa partie colo- rante, & qu'elle étoit décompofée , elle entra dans une putréfaétion , qui, au bout de huit jours, éroit fi fétide, que , malgré la grande quavtité de chaux que j'y jettois, je ne pus faire ceffer l'odeur de foie de foufre & pauféabonde qu'elle exhaloit. La caufe provient de ce qu'aufli-tôt que j'avois décompofé le foie de foufre, il s'en praduifoit du nouveau, puif que le paftel étoit réellement & en totalité en putréfaétion : il me fut par conféquent impolible de rebuter cette cuve ; d'ailleurs elle ne pouvoit plus fournir de teinture. 5 On concevrä peut être difficilement comment le paftel peut attendre fi long-temps à fe putréfer; mais ce probléme fera aifé à réfoudre, fi on fe rappelle de tout ce que je viens de dire fur la putréfaétion en général, & fi l'on veut jetrer un coup-d'œil fur les fucs & les extraits qui fe confervent plufieurs années. < * *Q uoique mes expériences fembloient fuffifantes pour prouver qu'une cuve entièrement putréfiée ne pouvoit être rappellée à fon«premier état, je tentai encore de teindre dans une cuve, faite avec $ livres de paftel érendues, de trente pièces d’eau. Ces $ livres font pafñlées à la putréfac- tion au bout de cinq jours, après avoir donné la plus belle fleurée, Tome XX , Part. II, 1782. DÉCEMBRE, lii 434 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'addition de la chaux n’a jamais pu rétablir cette,cuve , tandis que 360 iv. de paftel étendues d’une même quantité d’eau fe confervent fix mois, un an & dix-huit mois, fur-rout fi on a foin de jetter de temps en temps de la Chaux qui neutralife le levain de la fermentation putride , lorfqu’il fe trouve en trop grande abondance dans les cuves. Dans certaines Provinces, les Teinturiers font dans lufage de renou- veller une partie du paftel tous les fix mois; dans d’autres toutes les an- nées , ou après dix-huir mois, Il eft très conftant que la beauté & la vi- vacité des teintures de Carcaffonne dépendent de leurs précautions à chan- ger le paftel tous lesfix mois; mais alors les dépenfes font bien plus con- fidérables , & ne peuvent avoir lieu dans les Fabriques où les draps font à prix modique, On reconnoît qu'une cuve de paftel commence à fe putréfier, ou qu’elle a fouffert & qu'elle ne peut plus teindre, 1°. lorfque le bain ou brevet, après avoir été heurté, ne donne qu’une fleurée ou moufle grisätre, au lieu d’une bleue (1)3 2°. que ces bulles fe crèvent aufli-tôt qu'elles fe forment à la furface , en occafionnant ce bruit qu’on appelle friller ; 3°. lorf- que le bain a une odeur & une faveur d'œufs pourris & nauféabonde; 4°. quand il eft rudé & fec au toucher; 5°. que fa pâtée , tirée hors du bain, ne change pas de couleur, & refte noirâtre; 6°. que ce bain ou brevet eft d’un brun foncé, fans apparence de veines bleues ; 7°. enfin, lorfque , bien Loin de teindre les mains , il enlève la couleur qui y feroit adhérentes Tous ces caractères annoncent une cuve déjà en putréfaction; mais, je le répète , il n'y a qu'une très-petite partie du paftel d’altérée, & on peur retirer tous les avantages ordinaires de celui qui refte intact , en dévelop- pant fes principes, après avoir détruit les effets du paftel putréfié. Lorf qu'on a réufli par l'addition de la chaux ou d’autres fubftances , telles que l'alkali fixe, qui ont les mêmes propriétés, on peut alors dire qu'on a ar- rêté les progrès de la putréfaction, & non pas qu'on a rétabli une cuve complettement putréfiée , puifque la putréfaétion d’un végétal quelconque eft une opération qui décompofe & volatilife les principes les plus fo- lides. Je n’entrerai point dans de plus grands détails fur la putréfaction; Boërrhaave , dans fes Aphorifmes , a trop bien décrit tous les paflages des trois fermentations, La putréfaétion dégageant tous les principes du corps qui l’éprouve , on fent aifément qu’il n’y a que la Chymie qui puifle nous dévoiler les nou- veaux compofés qui en réfultent. En effet, lorfqu'on connoît parfairement l'analyfe des-principes conftiturifs du paftel, les merveilles de la cuve (1) C’eftce que les Feinturiers appellent crêmer , d’autres blanchir. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 435 ceffent tour-à-coup de nous furprendre: on en reconnoît à l’inftant le mé- canifme , & on trouve qu'il y a une infinité de moyens de remédier à fes maladies où accidens. On fe rappelle que sp m'a fourni , par l’analyfe de l'acide ou gaz méphitique , de l'huile, de l’alkali volatil, de la terre, &c. On verra faci- lement que la fermentation, en féparant & divifant ces principes, donne fouvent naiflance à de nouveaux compofés. Par exemple, fi l'alkali vo- latil fe combine avec l'acide où gaz méphitique , il en réfulte Le fel am- moniacal - méphitique de M. Sage; 2°. fi ce mème alkali s’unit aux ma- tières huileufes ou réfineufes , à l’aide de la chaleur de la cuve, ils fe formeront en efpèce de favon; 3°. fi les plantes ne contiennent pas un foufre tout formé , peut-être l’art en feurnit-il un femblable à celui qu'ob- tint, ily a quelques années, M. Vieillard. De l'union de ce foufre à la chaux , qu’on jette continuellement dans les cuves, ou à l’alkali volatil, naît fouvent cette odeur défagréable que renvoie une cuve qui commence à fe putréfier, C’eft à toutes ces différentes combinaifons qui exiftent réel- lement dans les cuves de paftel, qu'on doit attribuer les accidens qu’elles éprouvent journellement. 1°. Lorfqu'une cuve eft en putréfaétion , elle renvoie une odeur de foie de foufre très-marquée ; fi on y jette une petite quantité de chaux éteinte à l’eau, à l’inftant on fait fuccéder à cette odeur défagréable celle de l’alkali volatil-cauftique. Il paroît inconteftable que, par cette addi- tion, j'ai décompofé an fel ammoniacal-méphitique ; la chaux a aiguife l'alkali volatil, & l'acide méphitique ou air fixe a décompofé le foie de foufre. 2°. Si on jette une trop grande quantité de chaux , non-feulement on fait difliper l'odeur ; mais comme on dégage beaucoup de gaz ou acide méphitique, ce dernier, mis en liberté , s’unit à la chaux, qu'il rappelle, ainfi que je l'ai dit, à l'état de pierre calcaire, dont une partie fe pré- cipite, tandis que l’autre couvre la furface du bain, fous la forme d'une pellicule fouvent très épaifle, qne les Teinturiers appellent croûte. L'a- nalyfe m'a prouvé qu'elle eft abfolument analogue à celle qu'on défigne en Chymie fous le nom de crême de chaux : elle n’a aucune faveur, fait effervefcence avec les acides, &c. 3°. Calcinée, qe produit de nouvelle chaux vive. 4°. L'alkali volatil qui s'eft dégagé de ces matières , eft très-pi- quant. Si, aulieu de chaux, on jette dans cette cuve un acide quelconque, même celui du vinaigre , la cuve fe tourne aufli-tôt, & fouvent de su manières différentes, quoique fans effervefcence bien fenfible. Quand on verfe dans une cuve de l'acide vitriolique concentré , on voit prefque aufli-tôt le bain fe divifer en deux parties très-diftinétes, à la manière du lait qu'on feroit tourner : la fupérieure eft compofée des Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE, Tii2 436 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, matières huileufes , réfineufes & mucilagineufes, tandis que l’inférienre eft très-limpide , & d’une couleur légèrement ambrée, J'imagine qu'on ne peut attribuer ce phénomène qu'à la propriété qu'ont les acides de décompofer les favons & les fels ammoniacaux , dont l'acide eft moins pefant , ou dont l’afhnité eft plus grande. ÏL paroïtra fans doute bien étonnant, d’après ces faits, qu'un Phyficien moderne ait avancé que les acides n'altéroient aucunement le bain , la cuve de pañtel ; que même l'acide vitriolique n’excitoit pas la putréfaction, maisqu'il arrétoit les opérations de la teinture , en empêchant les éroffes de vérdir. Certe expérience eft trop facile à répéter, pour que les Savans refu- fent de reconnoître l'erreur de cettè affertion , qui eft fondée fur des principes contraires aux affinités Les plus fimples, puifqu'il fuffit de verfer de l'acide vitriolique dans un verre rempli du bain d’une cuve , pour ap- percevoir aufli-tôt la féparation du fluide de fes parties plus groflières ou plus léoères, & les matières qui furnagent, qui ne tardent pas à entrer en putréfaction, fur-rout fi on a placé le verre dans une étuve à $O degrés de chaleur. Quelque temps qu'on laifle ces matières , elles ne fe recom- binent plus au fluide inférieur, même au bout de fix mois, Les autres acides foibles ou concentrés font aufli tourner les cuves; mais c'eft la partie claire qui furnage , tandis que les matières muqueufes, huileufes & réfineufes reftent au fond, IL eft à préfumer que dans l'expé- rience précédente, l'acide vitriolique augmente plus la denfité de l'eau que les autres acides. L’efprit-de vin, quoique le plus foible des acides, produit aufli cet effer, &,il fe colore aufli-tôt par une portion de réfine qu'il retient en diffo- Îution, Je puis rapporter ici une expérience que je fis conjointement avec M. Oudin , defrant favoir fi, en mélant un acide dans ue cuve en putréfaction , on ne pouvoit pas faire cefler cette odeur défagréable ; hous penfions que cet acide , en s’uniffant à l’alkali volatil , le neutrali- feroit, & que peut-être la cuve fe rétabliroit. ; Je dois obferver que nous avons opéré fur une cuve de vouède, qui avoit déjà teiat quatre cents livres de laine. Le vouède, qui ne renvoyoit qu'une odeur défagréable , cependant fupportable , unsquart d'heure après l'addition de l’acide végétal devint fi fétide, que nous avions déjà or- donné de le jetter. Cependant , voulant encore une fois tenter fi la chaux pouvoit rétablir une cuve putréfiée, nous en jettèmes environ 20 livres, fans qu’elle ait pu diminuer cette odeur nauféabonde, Convaincus par cette expérience & une infinité d'antres, qu'on ne peut jamais rap- peller une cuve entiérement putréfiée, deux jours après on la jetta. J'ou- bliois de dire que cette cuve ne contenoit que 25 livres de vouède, J'en donnerai le détail & la manipulation dans un autre Mémoire, SUR L'HIST.:NATURELLE ET LES ARTS. 437 - On doit remarquer que les précipités où dépôts obtenus par l'union des acides avec le bain d’une cuve, font d'autant plus abondans que les acides font plus concentrés, Les alkalis fixe & volutils ne produifent aucun effet bien cara@éifé, quoique mis en digeftion avec le bain d'une cuve, finon le dernier , qui acquiercmde la caufticité. * La chaleur étant l'agent le plus puiffant pour divifer les corps , il s’en- fuit méceflairement qu'en faifant réchauffer une cuve, on développe tous les principes fermentatifs , & on accélère par conféquent la putrétaction. Ce moyen eft depuis long-temps employé avec fuccès, lorfqu'une cuve eft rebutée : j'en dennerai la raifon. On conçoit donc facilement qu'une cuve qui tendroit déjà à là putréfaétion, y entreroit dès l'inftant qu'on l'é- chaufferoit. C'eft pour éviter cet inconvénient, que les Teinturiers font dans l'ufage de jerter de la chaux dans les cuves avant de les réchauffer. C'eft d’après ce principe que M. Quatremère a dit, qu'il faut recourir au réchaud pour faire tomber en putréfaction les cuves qu’on veut rétablir par le moyen de la chaux. Mais fi la chaleur a la propriété de développer tous les principes fer- mentatifs du paftel , elle atténue doncaufli la chaux qu'on y jette ; en forte que celle qui ne feroit pas rappellée à l'état de pierre, recouvreroit bientôt fes effets, & produiroit ce.que les Teinturiers appellent un coup de pied , c'efti-dire, une cuve rebutée ; d'où il fuit-qu'on doit rarement ajouter de Ja chaux, lorfqu'on veut réchauffer une cuve, puifque celle qui reftoit embarraflée dans la pâtée, tient lieu d’addition, Au refte , c'eft le degré de féridité de la cuve paillée qui doit guider le#guédron. J'ignore pourquoi on a voulu prétendre qu'une cuve ne tomboit jamais en putréfaction , lorfque fa chaleur équivaloit à 45 degrés du thermomè- tre de M. de Réaumur. Nous avons journellement des preuves incontefta- bles qu’elles l'éprouvent depuis 45 jufqu'à 60, & même 80. La chaleur n'eft pas ici un anti-putride ; mais c'eft l'abfence de la chaux qui fournit les indices les moins équivoques, Du Son ou de l'Eau füre. Après avoir fair connoître tous es avantages ou les mauvais effèts de la chaux , je vais pafler à la préparation de l'eau füre , & développer fes propriétés avantageufes dans la teinture, L'écorce eft la partie ligneufe qui fert d’enveloppe au grain pour ga- rantir fa farine de l'humidité & des impreflions de l'air, Etant réduite en poudre par Le moulin, elie prend alors Le nom de /or , qui eft prefque tou- jours mêlé avec une portion de farine qui refte dans le bluteau. Le fon n'étant confidéré que relativement à fes propriétés dans la tein- 438 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ture , je n’entrerai pas dans la difcufion des Chymiftes , qui ont pré- tendu qu'il contenoit & ne contenoit pas des matières nutritives. « Le fon ou la farine qu'il retient contenant un corps muqueux fucré , eft par conféquent Not d’éprouver Les trois fermentations | toutefois lorfqu'il eft étendu d’une fufhifante quantité d’eau. C'eft fur cette pro- priété qu’eft fondée la fermentation panaire. Tout le monde fait qu'on accélère cette fermentation dans la pâte, en y introduifant une petite quantité de levain, qui n'eft qu'une pâte ou une liqueur (1) qui eft déjà paflée à la fermentation acide. L'eau füre qu'en emploie dans la teinture ne doit fes qualités avantageufes qu'à la matière muqueufe extraétive con- tenue dans le fon ou la farine, qui , étant déjà paflée à cette fermentation acide, fert d’un levain pour accélérer ou établir la fermentation du pañtel. : M. Hellot & d’autres Artiftes, en afléyant leurs cuves, prefcrivent de faire bouillir dans la grande chaudière , ou de jetter au fond de la cuve 8 à 10 Livres de fon, & après une demi-heure, de le rejetter: c'eft parce qu'alors l’eau ayant extrait du fon ou de la farine fa matière muqueufe extractive , la partie ligneufe ou l'écorce ne fait qu'embarraffer dans la cuve, en augmentant-la patée. Ce procédé de jetter du fon au lieu d'eau füre , a un avantage: comme il faut au moins douze heures pour que les matières que l'eau a extraites foient paflées à la fermentation acide , il s'enfuit néceffairement que la même eau ayant le temps de diffoudre une affez grande quantité de prin- cipes extractifs du paftel, tous entrent aufli-tôt & également en fermen- tation, & La cuve ne fe"putréfie pas aufli vîte, Je dois cependant convenir qu’il y a beaucoup de Teinturiers, foit à Reims, à Paris ou à Amiens, qui, en afléyant leürs cuves , emploient indiftinétement l’eau fûre des Amidonniers ou le fon ordinaire : mais alors ils commencent M pallimens au bout de quatre heures d'in- fufion , tandis qu'ainfi que je l'ai déjà obfervé , nous ne l'avons fait chez M. Oudin qu'après feize & quelquefois vingt heures , fans que lacuve ait fouffert. On fait que les Amidonniers ont toujours de grandes provifions d’eau füre. Si cependant on n'en trouvoit gs ; On pourroit en préparer en faifant bouillir trois boifleaux de fon dans une pièce d’eau de rivière , & pafler le tour par un tamis de crin, dans un tonneau recouvert & placé dans le guèdre ou autre endroit chaud. © L'eau ayant extrait tontes les matières muqueufes & extraétives du fon, ne tarde pas à entrer dans une fermentation qu'on peut accélérer , en y nn | (1) On fe fert quelquefois de levure de bière, SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 439 jettant une chopine (1) de vinaigre, ou un autre acide végétal, tel que le cidre ou la bière aigrie, & non pas, ainf qu'on l'a prétendu, des acides du règne minéral. Au bout de quinze à dix-huit Heures au plus, l'eau eft déjà acidule, Un Chymifte a affaré être parvenu à procurer cette fermentation en treize heures, en y ajoutant de l’alun : mais ce fel ne feroit-il pas contraire à cette teinture, en faifant tirer le bleu fur un noir pâle ? Comme je n’ai pu avoir, par fon procédé, d’eau véritablement füre, qu'après vingt-fix ou vingt-fept heures , quoique j'aie cependant donné jufqu'a 21 degrés de chaleur de plus qu'on ne l’avoit prefcrit, je n’oferois pas attefter le fuccès de cette opération, qui dépend peut-être de quel- ques particularités qu'on n'a pas indiquées , ou que j'aurai mal faifies, j L'eau füre, préparée fuivant Le procédé que je viens d'indiquer , eft préférable à celle des Amidonniers, qui étant trop près de la putréfac- tion , brufque la fermentation dans les cuves; d'ailleurs, cette Éte ; par fa plus ou moins grande vétufté, n'ayant jamais eu égal degré d'aci- dité , il s'enfuit néceflairement que le Teinturier eft toujours incertain fur la dofe qu'il doit jetter dans fa cuve, randis que celle qu'il a préparée étant une fois acide & reportée dans un endroit froid , fe conferve très- long-temps , fans s’altérer bien fenfiblement, Si on a mis trop de fon ou d’eau füre, il arrive de-là que ce levain accélère trop rapidement la fermentation , & que la cuve pale à la pu- tréfaction. Le meilleur remède eft la chaux éteinte à l'eau , qui, en fe combinant à la grande quantité de gaz ou acide méphitique , dégage l'alkali volatil; & en décompofant le foie de foufre , il diminue l’acti- vité de la fermentation. J'ai dit que les Teinturiers entendoïent par une cuve roide ou rebutée , celles dans lefquelles on a jetté trop de chaux, dont le bain ou brevec devient noirâtre, fans moufle ni leurée, fans veines bleues , & qui fe cou- vrent ordinairement de cette pellicule appellée crème de chaux , qui ren- voie une odeur âcre & cauftique, Lorfqu'on plonge de l’étoffe ou la main dans ces cuves, elles en fortent d'un gris fale ou fans couleur. Enfin, ce bain a une couleur & une faveur alkaline; filtré, il verdic Ja teinture des violettes. On remédie facilement à cet accident ; 1°. fi on n'’eft pas preffé d’ou- vrage ; le repos fuit: en abandonnant la cuve deux, trois, quatre, juf- qu'à quinze jours, crois femaines & même plus, on parvient à la réta- blir à doux (2); c'eft-à-dire, qu'on la mettra en état de teindte, Pen- (1) La chopine équivaut à 1$ onces & demie, poids de marc. (2) L'expérience m’a convaincu que, malgré ce laps de temps, les cuves ne doi vent pas être abendonnées, parce qu'il eft quelquefois néceffaire pour réablir la fer- mentation, 440 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dant cet intervalle, il faut avoir foin de pallier la cuve deux ou trois fois par femaine, en obfervant chaque jour les changemens qu’elle a éprouvés. Qu'eft-il arrivé dans cette expérience ? 1°. Par la trop grande quantité de chaux qu’on a jettée dans la cuve , on a décompofé les foies de foufre, s'il y en avoit; 2°. Les fels ammoniacaux; 3°. tout l’acide ou gaz mé- phitique , en fe dégageant, a porté fon action fur la chaux vive, qui eft régénérée en pierre calcaire; 4°. le bain, furchargé d'acide ou gaz méphitique , s’eft reporté fur une grande quantité de chaux qui n’avoit pas trouvé à fe neutralifer; $°. enfin , le bain eft devenu une efpèce d'eau de chaux, qui s’oppofe à la fermentation du paftel. Que produit-on par le repos? 1°. On donne le temps au paftel qui eft au fond de la cuve de renouveler, à l’aide de la chaleur, une nou- velle fermentation ; mais à mefure qu'il f& dégage du gaz ou acide me- phitique , il s’unit à la chaux qu'il régénère. Comme ce paftel ne peut jamais refter dans une inaction parfaite, la fermentation fe rétablit in- fenfiblement ; & par les pallimens , on étend tous les principes fermen- tatifs, La pierre calcaire, à mefure qu'elle fe régénère , tombe au fond de la cuve, où elle refte fans aucun effet; & cette fermentation reprend une fi grande vigueur, qu’elle eft fufceptiole de pafler à la putréfation. Or, dans cette opération , il arrive pofitivement la même chofe que fi j'avois ajouté de nouveau paltel à celui qui étoit décompofé ; la feule différence , c'eft qu'au lieu de l'ajouter, ii s’eft trouvé au fond de la cuve. On fentitrès-bien que la fermentation ne fe rétabliflant que dans l'inté- rieur de la pâtée, les pallimens deviennent donc indifpenfables quand on veut l’accélérer, 2°. M. Hellot parvenoit aufli à rétablir les cuves rebutées, en les ré- chauffant , parce que, difoit-il , on ufe leur chaux (1). M. Quatremère a aufli depuis employé ce moyen avec beaucoup de fuccès: il réchauffoit fes cuves rebutées jufqu'à quatre & cinq fois par femaine. Qu’opère-t-on par ce procédé ? rien de plus que de divifer con- fidérablement le paftel, & de le rendre par-là plus propre à exciter une prompte fermentation. On obferve conftamment qu'une cuve, quelque rebutée qu’elle paroiffe , après plufieurs réchauds , entre dans une nouvelle fermentation, qui rétablit bientôt l'équilibre ; d'où nous devons con- clure que /a cuve rebutée ne diffère de celle en putréfaëtion , qu'en ce que, dans cette dernière, il faut jetter de la chaux éteinte, pour faturer ou dé- compofer Les fels qui, Sy formant en trop grande abondance, s’oppofent à ce qu'elle puiffe teindre ; tandis que dans la cuve rebutée par l'addition de la chaux, il faut faturer l'excès de chaux par l'acide ou gaz méphitique qu'on (x) Art du Teinturier, page 7. produit SUR L’HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 441 Produit en excitant la fermentation , ou en décompofant les fèls ammonia- caux, C’eft pour conferver ce jufte milieu ou.l'équilibre , que les Tein+ türiérs jettent de temps à autre quelques tranchoirs de chaux. 3°. Nous avons aufli vu qu’on rétablit très-facilement une cuve rebu- tée, en y ajoutant du fon ou de l’eau füre, Comme ce leyain excite promp- tement la fermentation du patel, il en dégage beaucoup de gaz ou d'a- cide méphitique , qui fature la furabondance de chaux répandueldans la cuve, : M On peut encore fubltiruer à l’eau füre du tartre, du vinaigre, du vieux bain de garance; enfin, toutes les fubitances qui font propres à exciter la fermentatiôn. L'urine bouillie & Les autres levains alkalins nuifent plutôt dans les cuves que d'y produire de bons effets. Comme ces matières font en partie putréfiées , elles ne tardent pas à établir ce degré de fermentation dans les cuves. La cuve de vouède, dans laquelle on emploie la potafle ,en eft une preuve bien inconteftable , puifqu’après quatre & cinq jours.on eft obligé de la jerter. * L'indigo qui eit répandu dans les cuves , éprouve les mêmes altérations que le paîtel. Je prouverai ailleurs qu'on peut le putréfier au point d’être converti totalementten une poudre blanche ; & par conféquent c'eft faute d'expérience , qu’on a avancé qu'il he fe perdoit jamais dans les cuves de paftel. En réfumant tout ce qui fe paffe dans la cuve de paftel, on voit que cette opération n'eft pas à beaucoup près aufli dificultueufe ni aufli abftraite qu’on l'a publiée jufqu'ici , & qu'avec quelques connoiffances chymiques , on parvient très-aifément à en fuivre tout le mécanifime. J'ofe me flatter que toutes mes expériences fourniflent des preuves complettes & très-évidentes d’une théorie qui eft aufli impoftante à connoître , puif- _qu'elle eft fondée fur des principes de Phyfique & de Chymie. Je ne crois pas qu'aucuns Savans puifflent m'en contefter quelques points: ce qu'il y . a de certain, c’eft que j'ai défini tous les phénomènes que préfente la cuve de patel , fans être obligé , comme quelques Chymiftes modernes, de fuppofer des principes & des effets qui n’ont jamais exifté, ou au moins qui ne font point fenfibles dans les cuves. Si l'Académie , qui reconnoît quelquefois l'importance d'établir des principes fondamentaux , daigne approfondir la théorie que j'ai l'honneur de lui préfenter, j'ai lieu d’efpérer qu’elle - voudra bien l'accueillir , puif- qu'elle a pr bafe l'expérience , & une pratique de plufeurs années dans les plus grands Atteliers de la France , & fous les Artiftes les plus confom- més dans l'Art de la teinture (1). : (x) La plus grande partie des conteftations emire les Chymiltes & les Phyliciensé Tome XX, Part, II, 1782. DÉCEMBRE, Kkk SUITE DES EXTRAITS DU PORTE-FEUILLE L De M. l'Abbé DicQUEMARE, Correfpondant de l Académie des Sciences de Paris, de plufieurs Sociétés & Académies Royales de France , Efpagne, Allemagne, 6 Correfpondant de l'Académie Royale de Marine. EE "Polypes*du cœur humain. L . Piucreuss Soldats étant morts à l'Hôpital du Hâvre, à la fin de Mai & au commencement de Juin 1782, ont été ouverts: on leur a uouvé dans le cœur & dans fes dépendances un ow plufeurs polypes, ayant depuis 3 pouces de longueur jufqu’à 1 pied. Ils étoient rameux & très-forts ; l'extrémité la plus mañive logeoit dans l’un ou l’autre ventricule, dans les oreillettes ou les gros vaifleaux ; & les ramifications s'y étendoient en s'éloignant du cœur. Comme cette efpèce de phénomène , quoique connu, eft l’un des plus. finguliers de l’économie animale , j'ai cru dévoir m'en occuper, en Jaiflant aux Miniftres de la Santé ce qui eft plus parti- culièrement de leur reffort. Entre ces Soldats , les uns étoient du Régiment de Neuftrie , Infanterie# les autres , de celui de Strafbourg ,*Corps Royal d'Artillerie: le premier , venu de Quimper, ayant ci-devant embarqué; l'autre fortoit d'Auxonne..,.. Lorfque cer événement parvint à ma connoiflance , il y avoit déjà plufieurs polypes dans lefprir-de vin ; j'en deffinai quatre, trois tirés du cœur & dépendance de S***, Soldat de Neuftrie, mort le 27 Mai, & le quatrième , figure 1°, Planche I, repré- fenté prefque de grandeur naturelle , tiré du cœur de Pierre V ***, Sergent d’Artillerie, mort le 2$ Mai , où on en trouva un plus petit. Je les defii- nai le 3 Juin. La liqueur les âvoit déjà fait fe retirer fur eux-mêmes. Il ne feroit pas plus avantageux de les deifiner frais. ... En cer état leurs ra- mifications m'ont paru avoir quelques reflemblances avecMlës membres ne confiftent dans des dénomisations. L’Auteur a cru devoir fes admettre toutes, afin de laïfler au. Leéteur la liberté de choilir celles que fes connoïffances lui auront prouvé devoir être admifes. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 442 des orties marines qui piquent. Le même jour 3 Juin, je vis ouvert un Soldat Allemand du Corps Royal d’Artillerie, qui éroit mort la veille , & auquél on trouva dans le cœur deux polypes , dont l'un de 1 pied de long; l'autre d'environ 8 pouces. En général, ces pôlypes font une caufe de morc fubice ; mais le Soldaten renfermoit plufieurs autres, comme le poumon gangrené, l’un des reins dans un état de diflolution , &c. en juger par l’obfervation que j'ai faire de ces deux polypes frais, les polypes du cœur humain me paroïflent être des efpèces de végérations animales , auxquelles on aura donné ce nom , parce qu'ils ont une forme rameufe , qui rappelle , quoique très-foiblement, lilée de certains grands polypes marins, Tous ceux que j'ai deflinés n'étoient point adhérens aux vifcères dans lefquels en les à trouvés. On a pourtant foup- çonné qu'un l’écoit légèrement par l’une de fes ramifications. C'eût été peu de ne defliner que l'extérieur de cee productions fingulières. J'ai cru devoir faire plus en faveur de ceux qui cultivent les Sciences & qui n'en ont jamais vu. L'intérieur n'eft pas une chofe indifférente. À l'extérieur, les polypes du cœur humain ne fe refflemblent point, fice n’eft en ce qu’ils ont l’une de leurs extrémités maflives ,. d’où partent les principales bran- ches, qui fe ramifient & prennent à-peu-près la forme de racines, Tous ceux que j'ai deflinés étoient ou avoient été de la couleur du cœur, avec queaues variétés ; ils font très-élaftiques , revêtus d'unê membrane ail:z épaifle, qui y forme comme un fourreau : elle eit fibreufe ; d’autres mem- branes traverfent l'intérieur, non comme dans les mufcles, mais avec une difpofition moins régulière. Payez La figure 2 ; elle repréfente, vue à la loupe, la coupe tranfverfale de l'une des ramifications du plus grand polype frais que j'aie eu. ‘Le mème arrangement fe trouve dans les parties les plus maflives. La figure 3 eft desgrandeur’naturelle, & repréfente la même coupe. Entre ces membranes , on apperçoit des trous plus remplis de fang que les autres parties, & qui femblent être les principaux vaif feaux fanouins. ., . Tout ceci me porte à croite.que ces-polypes pour- roient bien n'être pas de fimples concrétions formées par juxta-polition, ou par une lymphe coagulée, nimême par la réunion des fibres que #a chaleur de l'eau tiède forme dans la lymphe, Je penfe qu'ils pourroient étre düs à l'évolution, imparfaite de quelques fibres ou de qualques lambeaux membraneux, doft l’organifation donne lieu à l'intus-fufcep- tion qui caufe le développement, Maintenant quetnëus avons été témoins des reproductions du tout par la moindre partie dans le règne animal, pourrions-nous douter de la poflibilité de reproductions moins com- pletres, & que les plus petites particules d’un animal puiflenr fe déve- lopper & prendre de l’accroifflement dans des circonftances favorablegè Eh ! quelles circonftances plus favorables que celle d’être baiynée dans le fang , pour qu’une fimple végétation animale ait lieu ? Je crois donc que Ja formation d’un polype de la nature de ceux-ci peut s'opérer de la forte, Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE. &Kkk2 444 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, & que cette formation exige quelque temps. Si ceux qui fe font occupés des polypes du cœur, avoient été aflez initruits de la poflbilité des re- productions ; s’ils les avoient vu s'opérer dans des «animaux tranfparens, uoïque gros, combien cela ne leur eût-il pas fuggéré de vues! ..., La AURA du polype leur auroit-elle paru l'effet du mauvais état du pou- mon, ou ce mauvais état celui de l'exiftence du polype ?... Si les cau- fes morales auxquelles on l’a attribuée ont quelque vraifemblance , les Supérieurs ne courent aucun rifque de mettre tout en ufage pour pré- ferver les inférieurs de cette dangereufe maladie, Il y a tout à gagner, & rien à perdre, SE OBSERVATIONS SUR LES BLÉS GERMÉS, Par le Comité de l'Ecole Gratuite de Boulangerie. a Caufe de la Germination du Bl. L: BONDANCE des pluies, pendant Le temps des récoltes, a retardé la moiflon, & fait germer une partie, des blés fur pied ou en javelle. Ce qu'on nomme Blé germe. On donne le nom de blé germé au blé dont une portion a fubi la germination ; car fi la totalité du grain avoit entièrement développé fon gêrme, il feroit difficile d’en faire de bon pain, parce que le germe auroit épuifé une partie des principes du blé. Cequ'on nomme blé germé fe borne donc à quelques grains, qui font plus ou moins germés dans chaque épi. j Le Blé germe ref? pas nuifible à la fane. IL eft bon de prévenir que le pain qui provient du blé germé n'a rien de dangereux pour la fanté, fi on a recours aux précautions qui vont être indiquées ; quelques Médecins regardent même la farine de blé comme préférable pour faire la bouillie des enfans, parce que la germination du blé détruit en partie la vifcofité de la farine, \ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 445 | Inconvéniens du Su germe, Dificile à conferver. Le blé germé eft très-difficile à conferver , parce que le développe- ment du germe le difpofe à fermenter & à séchauffer , & qu’en outre il retient beaucoup d'humidité, raifon de plus pour qu'il fermente & s'é- chauffe. Plus fujet aux Infe&es. Les infectes paroiffent l'attaquer jar volontiers , parce qu'il éft plus tendxe, & que la germination lui donne un goût fucré; parce qu'auffi, plus füufceptible de s'échauffer, il favorife davantage la ponte des infectes. Aliérations qu'il fubir, Le blé germé, abandonné à lui-même, ne tarde pas à ferméhter & à s'échauffer ; il contracte de l’odeur & de la couleur ; le grain devient d’un rouge obfcur. Dans cet état, il a un mauvais goût, & une faveur piquante qui fe communique à la farine & au pain. Enfin, il fe moilit & s’aigric: alors les animaux même le rebutent, & de pareil blé ne peut plus faire tout au plus que de lamidon. On conçoit que des blés germés , qui auroient été altérés de la forte, ne pourroient plus donner qu'un pain très-mauvais & nuiñble à la fanté. N Du Moulage du Blé germe, - Leblé germé fe mout mal. IL engrappe les meules, Il engraifle les bluteaux. Il donne peu de farine. Le fon retient une partie la farine: & De la Farine de Blé germ, EL) La farine de blé germé eft humide & molle, Elle prend peu d’eau au pétriflage, & donne communément moins de pain. j Elle ne fe conferve pas, fur-tout pendant les chaleurs ; un orage , un coup de tonnerre peut la gâter. : Du fon de Blé germe. Le fon du blé le meilleur & Le plus fec ne peut pas fe conferver long< 446 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, temps; le fon d’un blé germé@ humide doit, à plus forte raifon, fe corrompre ailément : auf il s'aigrit , & pañle, fur-le-champ à la putridité ; les animaux n'en veulent plus; & s'ils en mangeoient, ils en feroienc in- commodés. 71 ’ Ce fon retient beaucoup de farine. Si on a attendu un peu de temps pour le bluter, cetre farine eft aigre, bife, remplie de mittes ; confé- quemment elle rendra Le pain très-mauvais. Des Levains faits avec la Farine de Blé germé. Le levain fait avec la farine de blé germé , abforbe peu d’eau. Il fermente ou revient très-promptement; mais il ne tarde pas à s’affaif- fer & à s'applatir; & fi on ne l'emploie pas. à temps, c’eit un | TS pañfé. De la Pâte faite avec la Farine de Blé germe. La pâte eft encore fujette à plus d’inconvéñiens que le, levain, Comme le levain, elle abforbe ou boit peu d'eau. Elle eft courte. Elie eft gluante. Elle n’a pas de foutien. Elle mollit, : Elle lâche à l'apprèt. Elle rend fon eau, i ) Du Pain de Blé germe. Le pain de blé germé ne bouffe ou ne fe gonfle pas au four. Il s'y applatit. . ’ Si on n'a pas mis beaucoup d’efpace entre les pains, ils tiennent tous enfemble, é Il cuit difficilement. Il quittefa croûte. + La croûte eft coriace. On a rs vouloir le reffuyer, il refte mat, gluant & gras-cuit. Il eft fade. Il fe digère difficilement. . Il nourrit moins, Il s’aigrit. L fe moifit. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 447 Moyens de remédier aux inconvéniens du Blé germe. Après avoir bien fait. connoître tous les inconvéniens du blé germé, on va indique#tles moyens les plus propres à y remédier. Il eft imprudent de laifler le blé germé en meule ou moie ; il faut le mettre en grange. . ».! Si on a dans la grange des blés fecs, le blé germé finira par Jes rendre “humides, Il eft donc important de les féparer. Si la grange n’eft pas bien aërée , le blé germé s’y confervera mal; il vaut mieux le battre fur-le-champ, au rifque de laifler du grain dans l'épi. La gelée arrête la germination, en fo rigueur , fe conferver pendant l'hiver: ur peu que cette faifon foit humide , ou lors a retour des chaletrs, le blé germé eft expofé à forte desfaccidens décris ci-deflus, & on ne peutypas l'en pré- erver ; Tous les foins poflibles" ne l'empêchent pas de s’altérer. … Déffécher les Bles. Le blé étant battu , on l'expofera fur le deflus d’un four : on le répandra fur le plancher, ou on le mettra fur des claies ferrées; on le remuera de quart-d’heure en quart-d’heure avec une pelle : on laiflera une porte ou fenêtre entr’ouverte , pour donner iflue à l'humidité. Si on n’a pas de pièce au-deflus du four, on mettra le blé germé dans le four même , quelque temps après quale pain en aura été retiré: on Jaiflera la porte du pe entr'ouverte, & on remuera le blé de dix en dix minutes , avec de longues pelles ou des rateaux, pour faciliter l'éva- poration de l’eau. Onn'attendra pas que le blé foit parfaitement fec pour le retirer du four; car alors il feroit trop defféché : d’ailleurs Le blé le plus fec contienc toujours une portion HÜR ‘alé Le blé ainf étuvé , onle c ra. j On aura l'attention de ne le mettre en fac ou en tas, que quand il fera bien refroidi ; car fi on l’enferme chaud, il retiendra un peu d'humidité, qui adhère à la furface du grain, & le feroit moifir. Or objeétera que cé moyen eft embarraffant; mais fi C’eit Le feul, il faut néceffairement lemployer, eu courir Je rifque de voir fes blés per- dus. Les foins qu'exige la confervation des blés germés, font bien plus pénibles & bien plus coûteux ; ils font prefque toujours infruétueux : enfin, ce font des foins continus, tandis que huit ou dix jours’ de defliccation fauveront la provifion d’une année entière. D'ailleurs, ce moyen füt-il en- core plus embarraffant, on en M: dédommagé par la meilleure qualité, par l'abondance de la farine , ainfi que par fa quantité &la bonté du pain. le blé germé peut, à la 443 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, Des* Etuves. Si la defficcation du blé germé eft praticable à l’aide du four pour le confommateur, elle devient plus difiicile pour celui qui fair le com- merce du grain, ou qui en a de grands approvilionnéments. Dans ce cas, un four ne fuffic plus; il faut recourir à une étuve: mais la dépenfe & les foins que demande cette deficcation en grand, font bien com- penfés par le plus de valeur qu'a ce blé étuvé, Etabliffement d'Etuves publiques. Quelques Provinces font aflez füujettes à l'accident de la germination. Sur dix années, ilyenaa efois quatre où le blé fe récolte germé. Combien il feroit à defir , dans ces Provinces-là, le Seigneur , le Fermier &u la Communau ent une étuve commune, comme il y a un prefloir, où chacun püt aller étuver fon grain, moyennant une lé- gère redevance ! Ç " Autres avantages d’une Etuve publique. M Une pareille étuve pourroit également fervir à fécher les pois, les ha- ricots , enfin les légumes qui, dans les années humides , font fujets à fe âter , & qu'on eonferveroit fains par ce moyen. . Cet établiflement, d’une bienfaifance éclairée, feroit bien préférable au fecours momentané que la charité donne à l'indigent, en aflurant une nourriture plus faine , en diminuant le nombre des malades, ou en écar- tant ces épidémies dont on ignore prefque toujours la caufe, & quinen ont fouvent d'autre que la mauvaife qualité des aliments. Eruver la Farine, Si malheureufement on avoit fait moudre le blé germé, fans avoir pris la précaution de Le deffécher ou Jde l’étuver, comme la {farine ne pour- roit pas fe conferver, il faudroit rroug aux mêmes moyens que pour les blés , quoique l'application alors en Toit plus difficile. Il faut étendre la farine fur des toiles, & la remuer quand elle sèche, ce qui exige des foins plus grands &' occafionne un peu de perte. Avantage de la Defficcation. Le blé germé, ou la farine qui en provient, une fois étuvés & bien defféchés , auront l'ayantage de fe conferver autant que des blés & des fas zines ordinaires. Le blé fe moudra bien. Les meules ne s’engrapperont pas ; la farine fera plus sèche, On retirera plus de farine. . Le fon ne retiendra pas autant de farine. ‘ SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 449 Si on le blute quelque temps après le moulage, on en retirera de la fa- tine, qui ne fera pas aigre & pleine d’infe@tes , comme celle que donne le fon de blé germé non étuvé , lorfqu’on le blute. Le fon moins humide ne fe corrompra pas aufli aifément , & fera bon pour les beftiaux. Obfèrvation importante. Le blé germé ou la farine qui en provient, perd, par la deficcation , une portion d'hnmidité, qui diminue d'autant leur poids; mais ce neft une perte ni pour le Commerçant , ni pour le Confommateur. Le Commerçant vendra fon blé beaucoup plus cher, comme étant plus fec & plus capable de fe conferver. Quant à la portion d'humidité que les blés & farines germés étuvés ont * ai à la defficcation, elle eft & au-delà, remplacée par l'eau que ces farines abforbent au pétriflage; en forte que les blés & farines étuvés donnent plus de.pain que ceux qui ne l'ont point été. Des Levains. Les levains faits avéc la farine du blé germé, doivent être plus now- veaux, plus jeunes qu’on ne les emploie ordinairement , parce que la ger- mination rend la farine propre à fermenter plus promptement. Lis doivent être plus fermes & plus foutenants, c’eft-à-dire , qu'on ne doit pas employer trop d'eau. On ne doit pas les placer dans un endroit trop chaud. Au lieu de moitié, il faut en employer deux tiers, c’eft-a-dire, que far quatre-vingt-feize livres de farine deftinée à la fournée, il faut en mettre environ foixante quatre en levain. » , De la Pâte. On aura foin de ne pas employer d’eau trop chaude pour faire [a âte. ; IL faut la travailler le plus légèrement & le plus promptement poffible, SR de la fatiguer. L ne faut pas faire apprêter ou revenir la pâte dans un lieu trop chaud, parce que l'apprêt pafle bientôt. Du Sel dans la pate. Le fel corrige fingulièrement le défaut des farines humides , & fur-tout celui des farines de blés germés : on peuten mettre une demi-livre fur cene livres de farine, On le Éie fondre qe l'eau des derniers levains & du pétriflage. On regagne bien certe légère dépenfe par la bonté du pain & - par la quantité, le fel donnant du corps à la pâte, & lui faifant ab- Tome XX, Part, I, 1782, DÉCEMBRE. LI 450 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, forber plus d'eau; car l’eau fait partie du pain, & elle doit y entrer en- viron pour un quart, c'eft-à-dire, que douze livres de farine donnent feize livres de pain après la cuiffon, Le fel corrige aufli la fadeur de ce pain. De la Cuiflon. IL faut tenir Le four un peu plus chaud, fans quoi le pain lächeroit fon apprêt, & s’applatiroit, ce qui le rendroit plus mat. IL faut le faire reffuer après qu'il eft cuit , parce que les farines de blé germé retiennent davantage l'humidité. En fe conformant exactement à tout ce qui vient d’être indiqué, on re- médiera aux inconvéniens des blés germés, & on en obtiendra un pain bon & falutaire. Ces Obfervations font Le réfultat des expériences faites fur les blés ger- més, en vertu d'ordre du Gouvernement, par les Profeffeurs & Mem- bres du Comité de l'Ecole gratuite de Boulangerie. Fait & rédigé en Comité , à l'Ecole gratuite de Boulangerie, ce 3r Otobre 1782. CADET DE VAUX, Profeffeur de l'Ecole, & Secrétaire perpétuel du Comité, Cenfeur Royal , &c. N. B. Les Villesou Communautés qui defireroient former l’établiffe- ment d’une étuve, pourront s’adrefler au Comité de l'Ecole gratuite de Boulangerie, établie rue de la Grande Truanderie à Paris, qui leur indi- quera les moyens de fe procurer cet établiffement. ; On adreflera les Lettres, Mémoires & Obfervations relatifs à la Meünerie & à la Boulangerie, francs de port, à M. Cadet de Vaux, rue des Gravilliers, à Paris. » SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS 451 EXPÉRIENCES Sur le pouvoir qu'ont les Animaux , dans certains cas, de produire du froid ; Par ADAIR CRAWFORD, D. M.; communiquées à la Societé Royale de Londres, par Sir JosepH BANCKS, Préfident de certe Société (1). h M Oo N deffein, dans ce Mémoire, eft de mettre fous les yeux de la Société le réfulrat de quelques expériences que j'ai faites dans le courant de l'été dernier , fur Le pouvoir qu'ont, dans certains cas, les animaux de produire du froid , après avoir donné au préalable quelques remarques . fur les progrès fucceflifs qui fe font faits dans les connoiïffances de la chaleur en général, è Les opinions des Anciens fur la nature & les propriétés du feu ne font “que des cohjectures hardies, qui femblent avoir été plutôt l'effet d'une imagination vive & féconde, qé le réfultat d'un jugement fain & cor- rect, leurs idées fur ce fujet ne provenant pas autant de l’exacte obferva- tion des faits, que des fentimens d'admiration & de crainte que leur ont infpirés plufieurs phénomènes du feu. Ainfi, on'avoit cru que cet élé- ment, dans la fermentation primitive de l'Univers, étoit monté à La plus haute place, & avoit occupé la région des cieux: on le regardoit comme le feul principe capable de communiquer la vie & l’activité au règne ani- mal, & conftituant l’effence de tous les êtres intellectuels d'ici has; enfin, plufieurs Nations anciennes en ont fait leur Diviniré fuprème, & lui ont rendu hommage, En effet , la profonde vénération qu’a eue pour l'élément du feu, pendant une longue fuite de fiècles, une grande partie du genre humain, paroît être une des circonftances les plus curieufes dans l'hif- toire des opinions anciennes. D'après ces confidérations , nous pouvons obferver qu'il n’y a pas dans la Nature de principe à Ja portée des fens, qui produife des effets aufli importans dans le fyflême materiel, & qui (1) Voyez les Expériences de M. Hunter , fur le pouvoir que les animaux &les végé- taux ont de produire de la chaleur. Journal de Phyfique, 1781, tom. XVII, pag. 12 & pag. 116. Tome XX, Part, II, 1982. DÉCEMBRE. Lil 2 452 : OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L] foit en même temps aufli obfcur & aufli incompréhenfible dans fa manière d'agir. Ï1 paroît accumulé en quantité immenfe dans le foleil & les étoilesfixes, d'où il étend fon influence bienfaifante fur tout l'Univers; il eft l'agent immédiat au moyen duquel s’opère le changement des faifons. La diverfité des climats eft due principalement à la différente quantité qui en eft diftri- buée par toute la terre. Si nous ajoutons à cela les changemens qu'ont opérés dans les connoiffances humaines l’introduétion du feu artificiel &c fon emploi dans la féparation des métaux de leurs mines , & dans les diffé- rens Arts qui fervent au plailir, à l'ornement ou à la confervation de l'ef- pèce, il ne paroîtra pas étonnant que, dans des temps d'ignorance & de barbarie , on ait cru ce merveilleux principe doué de vie & d'intelligence, & qu’il foit devenu l’objet d’une vénération religieufe. Dans les fiècles de ténèbres, les Alchymiftes ont regardé le feu pur comme le fiége de la Divinité; ils l'ont regardé comme non créé & im- menfe, & lui ont attribué la plus grande influence fur les phénomènes de la Narure.'En effet, il n’eft pas furprenant qu'ils lui aient afligné le premier rang dans l'échelle des corps , puifqu'il étoit le principal agent qu'ils employoient dans l’analyfe chymique , & l’inftrument des découvertes qui ont attiré tant d’admiration , & Les ont mis dans le cas d’en impofer fi heureufement à l'ignorance & à la crédulité des temps. Au rétabliflement de la Littérature , l'importance de cette branche des Sciences a bientôt commencé de fixer dattention des Philofophes. Ïl ne pouvoit pas échapper à la pénétration & aux recherches d'un temps plus heureux (lorfque l’efprit humain s'occupoit avec tant d’ardeur & de fuc- cès à l'explication des opérations de la Nature) , cette obfervation géné rale, que l'élément du feu eft le principal agent dans le fyftême du monde ; qu'il eft la fource & le principe de tout mouvement dans le rè- gne animal & dans le végétal; qu'il eft effentiel à la prodution & à la confervation de la vie; en un mot , que c’eft lui qui opère ces combinaifons & décompolitions faccefives par lefquelles toures chofes fur la furface de la terre, & probablement dans tout l'Univers, font tenues dans une uc- tuation continuelle. Quoiqu’on eût reconnu l'utilité de cette branche des Sciences , cepen- dant les progrès qu’on avoit faits depuis qu’on la cultivoit, n’avoient au- cune proportion avec l’idée que les hommes s’étoient faire de fon impor- tance. Nos fens nous démontrent la connoiffance réelle de la chaleur, mais ils ne nous donnent point la connoiffance directe de fa nature &. de fes propriétés. On a infinué, avec beaucoup d’adrefle , qu'elle avoit été appellée par un grand Philofophe , une qualité occulte; elle a même été confidérée par quelques-uns comme un être immatériel, Ce. n’eft donc qu'avec de grandes difficultés qu’on peut en faire le fujet de nos recherches 22 SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 453 philofophiques, & de-là les opinions des hommes fur cette matière ont été incertaines & variées, & leurs expreflions vagues & ambigués. Le premier pas qu’on a fair dans la vue de cultiver cette branche des Sciences, a été la conftruétion d’une machine propre à melurer les varia- tions fenfibles de la chaleur. Les Philofophes obfervant que la chaleur a la propriété de dilater les corps, & regardant le degré d'expanfion comme p'oportionné à l'augmentation de la chaleur , fe fonc fervis du premier effet pour rendre le fecond fenfible. C'eft à cette importante découverte, dont on ne connoît pas füre- ment lAuteur, que nous fommes redevables de tousles progrès fuccef- fifs qui ont eu lieu daus la Science de la chaleur. Par fon fecours, les hommes font venus à bout de fixer des faits intéreffans, & de foumettre lufieurs des phénomènes les plus obfcurs & les plus inexplicables de la Re au creufet de l’expérience. L'opinion, que la chaleur inhérente aux différentes fubitances hétérogènes diffère dans toutes'fes efpèces, aufli-bien qu’en degrés, eft aujourd’hui rejettée , depuis qu’on a trouvé que toutes produifoient le même effet fur le thermomètre. On a déterminé, avec la dernière exactitude, l'augmentation & la diminution de la tem- pérature dans les différentes faifons & climats, les loix que la Nature ob- ferve dans l’échauffememt & le rafraichiflement des corps; les points de la fonte , de la volatilité & infammabilité , d'incandefcence, & le degré ce chaleur dans les règnes animal, végétal & minéral. En conféquence de Vattention qu'on a prètée à ce fujet , il s’eft élevé plufeurs queftions in- téreflantes & curieufes , qui ont long-temps exercé l'imagination des Phi- lofophes. Cetre propriété qu'a la chaleur de dilater les corps denfes & durs , fon pouvoir de produire la fluidité, la tendance à fe mettre en équi- libre, & les caufes de la différente diftribution dans les différentes fubf- tances dans la Nature , font devenus l'objer des recherches philofophiques, On a obfervé que certains corps, expofés à la chaleur , deviennenc rouges & lumineux, mais qu'ils font incapables de s'enfammer & de re- tenir le feu ; que d’autres au contraire, par l'application du feu & le contact de l'air, s'enflammoient & continuoient de lancer de la lumière & de la chaleur, dont ils ont apparemment la fource en eux-mêmes, jufqu’à ce qu'elles foient confumées : de-là fe font élevées les queftions con- cernant la nourriture du feu , l'ufage de l'air dans linflammation , & la diftinétion des corps en combuftibles & incombultibles. On doit avoir conçu, dès l'aurore de la Philofophie, que la plupart des animaux jouifloient d’un degré de chaleur fupérieur à celui du Auide dans le- quel ils vivent, & que la fuccelion conftante d'un air frais eft indifpenfa- ble pour la durée de la vie. Les caufes de ces phénomènes ont donné, chez les Anciens commechez les Modernes, matière à beaucoup de fpé- culations : mais il étoit réfervé à l’induftrie de notre fiècle de découvrir que 4ÿ4 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, les animaax , dans certaines circonftances, ont le pouvoir de produire eux-mêmes une température plus froide que celle de l’atmofphère. Cette découverte femble provenir originairement des "obfervations faites fur la chaleur du corps humain dans les climats chauds. Le Gouverneur Ellis en a fait mentionen 1758. Le Docteur Cullen l'enfeignoit avant l'année 176$; & enfin, il a été complettement établi par les expériences qu'a faites le Docteur Fordyce dans une chambre chaude, & qu'ila mifes fous les yeux de La Société en 1774. Dans le cours de ces expériences, ce Docteur a demeuré dans un air humide , à 130 degrés de chaleur, l'efpace de 1$ minutes, durant lequel temps le thermomètre fous fa langue s’eft arrêté à 100 degrés; fon pouls a donné 139 pulfations dans une minute; la refpiration a été peu affec- tée ; fon corps étoit couvert d'un courant d’eau provenant de la conden- fation des vapeurs, comme il patoît, par une femblable condenfation , fur le côté d’une bouteille qui a été remplie d’eau à 109 degrés. Il a cependant trouvé qu'il fupporteroit un plus grand degré de cha. leur, lorfque l'air feroit fec. Dans certe fituation , il a fouvent fupporté nud , pendant un temps confidérable , & fans beaucoup d'inconvénient, une chaleur de 260 degrés, fon corps Ro fa rempéra- ture ordinaire, qui n'a jamais été plus élevée que de 2 degrés au-deflus de Vérat naturel. :: Il s’eft élevé diflérentes opinions fur Les caufes des faits qu'ont conftatés ces expériences. Quelques-uns.ont attribué le froid à la feule évaporation, & ont cru qu'une mafle égale de matière inanimée , contenant une égale quantité d'humidité, pourroit produire le même degré de réfrigération; d’autres ont foutenu que le froid ne provenoit pas feulement de cette caufe , mais qu'il dépendoit en partie de l'énergie du principe viral plus confidé- rable que ce qui auroit réfulté d'une maffe égale de matière ina-. nimée, Le favant Docteur Monro, d'Edimbourg, attribue le froid qui a eu lieu dans les expériences ci-deflus mentionnées , à la circulation du fang, en conféquence de laquelle la portion plus chaude de ce Auide eft continuel- lement pouffée de la furface vers le centre, où elle fe mêle avec elle, dont la température eft moindre, & de-là l'animal eft échauffé avec lenteur de la même manière que l’eau, dans un lac profond , eft lentement re- froïdie pendant l'hiver, & ne fe gèle qu'après des gelées long-remps répé- tées, une partie ne devenant folide que lorfque le tout eft affoibli au point gelant, Les expériences fuivantes ont été faites dans la vue de déterminer au jufte les caufes de la réfrigération dans le cas ci-deflus, Pour favoir fi le froid produit par un animal vivant, placé dans un air plus chaud que fon corps, étoit plus confidérable que ne feroit celui SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 455$ que produiroit une égale mafle inanimée , j'ai mis dans des lieux égale- ment.humides , & à-peu-près de même grandeur , une grenouille vivante &,une morte: la première étoit dans une température de 67 degrés; la feconde de 68 : je les ai laiflées fur de la Aanelle dans un air qui avoit été élevé à 106 degrés. Dans le courant de 25 minutes, le degré de chaleur s'eft préfenté dans l'ordre qui fuit (1): 4 minute. air. gren.MOrte. gren. vivante. Dans la 1/— — 70°: — 67°; 2 — 102 — 72 — 68 3 — 100 — 72; 4 — 100 — 73 — 70 NT NE LA ] (o Le] 1 Ayant enfuite introduit mon thermomètre dans l’eftomac , j'ai trouvé ue la chaleur interne de l'animal étoit la même que celle de la fur- Pa IL paroît de-là que le grenouille vivante a acquis la chaleur plus lente- ment que celle qui étoit morte: fon principe vital doit donc avoir puif famment agi pour produire le froid. Pour déterminer fi le froid produit dans ce cas dépend uniquement de l'évaporation qui fe fait à la furface , augmentée par l'énergie du principe vital, j'ai pris une grenouille vivante & une morte au 75° , & je les ai plongées dans l’eau au 03°, la grenouille vivante placée de manière que fa refpiration ne füt point interrompue. minute. gren, Morte. 9ren, ViVante. Dans la 1/ — 85° — 81°, 2 — 88; — 85. — 90: — 87. — 91: — 89. — 915 — 89. L — 91: 89. oo an - Ces expériences (2) prouvent évidemment que les grenouilles vivantes QE (x) Dans lesideux expériences fuivantes , le thermomètre étoit placé fous les aiflelles des animaux. - (2) Dans Pexpérience ci-deflus , l'eau étoit réduite à-peu-près au 919 + par le froid des grenouilles, & par l'agitation qu’elle a fou ferte pendant l'immerfion. - 456 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, ont la faculté de réfifter au chaud, ou de produire du froid lorfqu’elles font plongées dans l'eau chaude; & celles du Docteur Fordyce démontrent que le corps humain poffède la même propriété dans l'humidité comme dans un air fec. Il eft donc très-probable que cette faculté ne dépend pas uniquement de l'évaporation. I n'eft pas hors de propos ici d’obferver que les grenouilles qui ne fouf- froient point dans une atmofphère au deflus de 70°, ont gardé elles- mêmes une température moindre que celle de l'air extérieur; mais qu'elles font plus chaudes intérieurement qu’à la furface de leurs corps : & lorf- que l'air étoit au 77°, la grenouille s’eft trouvée au 68°, le thermomètre appliqué à la peau; mais aufli-rôt que Le thermomètre a été introduit dans l'eftomac , il eft monté au 70°: I eft encore bon de dire que j'ai trouvé l'animal de même efpèce placé dans l'eau au 61°, à-peu-près au 61° + à la furface & à l'intérieur au 66° =. Ces obfervations s'étendent feulement aux grenouilles vivantes dans l'air & l’eau, à la température ordinaire de l’atmofphère en été. On n'a pas pu tenir en refpect ces animaux', quand on les a plongés fubitement dans l'eau , comme dans l'expérience précédente, Pour déterminer fi les autres animaux ont aufli lé pouvoir de produire du froid, lorfqu’on les a environnés d’eau de la même température que leur chaleur naturelle, j'ai plongé un chien au 102° dans l'eau au 114°, le thermomètre appliqué exaétement à la peau fous laiflelle , & une grande partie de fa tête couverte de façon qu'il pût avoir une refpiration fraîche. Dans ÿ minutes, le chien étoit au 108°, l’eau au 112° 6 169 112 Nérx ÿ 108 112, la refpiration étant devenue très-rapide. Dans 13 minutes, le chien éroit à 108°, l'eau à 112°, la refpiration toujours très-rapide, | Dansenviron demi-heure, le chien étoit à 109°, l’eau à 112°; l’animalétoie dans un état languiffant. J'ai fait tirer une petite quantité de fang.de l'artère crurale & de la veine contioué; la température ne m'a pas paru augmentée de l’état naturel; le degré fenfible du premier a paru le même avec celui du fecond. Dans cette expérience, la couleur du fang veineux a éprouvé un chan- gement notable ; d’où l’on fait que dans l’état naturel, la couleur du fang veineux eft d'un rouge obfcur, & celui des artères d’un rouge clair & ver- meil ; mais après que l'animal , dans l'expérience en queftion, a été tenu plongé dans l’eau chaude environ une demi-heure, le fang Véineux a pris la couleur du fang artériel, & lui reffembloit au point qu'il éoit très-di£= ficile de les diftinguer. Il eft bon de remarquer que l'animal , qui fait le fujet SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 457 {ujet de cette expérience avoit été auparavant affoibli par une quantité Confidérable de fang qu'il avoit perdu peu de jours avant. Lorfquw'on a répéré cette expérience avec des chiens qui n'avoient pas-fouffert de pareille évacuation , le changement dans la couleur du fang veineux a été plus gradué ; mais routes les fois qu'on a fair cette expérience (&'on l’a répétée jufqu'à fix fois ), l’altération a été fi fenfble, que ceux qui neconnoif- foient pas les motifs & Les circonftances de cette expérience, aüroient promptemert diftingué Le fang qui a été tiré dans le bain chaud , de celui qui l'a été avant l'immerfion. Pour favoir fi le même changement auroit lieu dans la couleur du fang des veines dans l'air chaud , j'ai placé un chien au 102° dans l'air à 134°. — Dans 10 minutes, la température du chien étoit au 104° =, & celle de l'air de 130°; dans 15 minutes, le chien étoirau 106°, l'air au 130°. J'ai fait tirer une petite quantité de fang de la jugulaire ; la couleur en étoit fenfiblement altérée , étant plus claire que dans l'état na- turel. L'effet que produit la chaleur externe fur le fang"veineux , femble con- firmer l'opinion fuivante, qui m'a été d’abord fuggérée par mon digne & favant ami, M. Wilfon, de Glafcow : admettons donc que la chaleur fen- fible des animaux dépend de la féparation de la chaleur abfolue du fang par le moyen du phlogiftique dans les petits vaifleaux. C’eft en partie dans la vue de découvrir la vérité de cette opinion , que j'ai été porté à faife les expériences que je viens de rapporter. | Nous allons maintenant , d’après les faits précédens, tacher d’expli- quer ce qui me paroît être les vraies caufes du froid produit par les ani- maux, lorfqu'ils font placés dans un air dont la température elt au deffus du degré de leur chaleur naturelle. . Dans les différens Ouvrages que j’ai publiés ; ayant effayé de prouver que la chaleur animale dépend de la féparation du feu élémentaire d’a- vec l’air dans le procédé de la refpiration, j'ai obfervé que lorfque l'a- nimal eft placé dans un air chaud , fi l’évaporation qui a lieu par les poumons a été augmentée à un certain degré , toute la chaleur féparée d'avec l'air fera abforbée par les vapeurs aqueufes. D'après les expériences fur le fang artériel & veineux , rap ortées dans la troilième feétion de cet Ouvrage, il paroît que le volume du fang con- tenant la chaleur , eft tellement augmenté dans le poumon, que fi la tem- pérature n'étoit pas foutenue par la chaleur qui fe fépare de l'air dans la refpiration., elle defcendroit austrentième degré : de-là, fi l'évaporation du poumon a été tant augmentée qu'elle emporte toute la chaleur qui fe dégage de l'air, le fang artériel, lorfqu'il revient par la veine pulmo- naire, aura fenfiblement diminué de chaleur, & abforbera conféquem- ment la chaleur des vaifleaux qui la touchent, & de ceux*qui font dans Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE. Mmm + . 453 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le voifinage, La chaleur ainfi abforbée dans: Les grands vaiffeaux, fera de nouveau développée dans lesvaifleaux capillaires, où le fang reçoit l'addition fraîche du phlogiftique. Si, daps ces circonftancês, le fans , pendant chaque révolution, pouvoit être imprégné de ce dernier principe, 11 eft évident que tour l'effet du procédé ci-deffus feroit de rafraîchir le fyftème vafculaire au centre, & de l’échauffer à la furface, ou de tranf- mettre la chaleur à cette" partie du corps où elle peut à chaque inftane être emportée par l'évaporation. Mais il paroi , daps les expériences que nous avons rapportées , que, lorfque l’animal eft placé dans un air chaud , la maîle du fang, dans chaque révolution , eft moins imprégnée de phlogiftique; car nous avons oblervé que dans ces circonftances la couleur du fang veineux pâlifloit graduellement de plus en plus, jufqu’à ce qu'à la longue il eût acquis à-peu-pfès l'apparence du fang artériel; & les expériences du Docteur Prie/lley rendent encore plus probable que la couleur noire & livide du fang veineux dépend entièrement de fa com- binaifoh avec le phlogiftique dans les petits vaifleaux. C’eft pourquoi, puifque ce principe ne prend pas dans un air chaud Ja même couleur livide, nous concluons qu'il ne doit pas attirer une éyale quantité de phlogiftique (1), I fuit que la quantité de chaleur laiflée par le fang dans les vaifleaux capillaires ne fera pas égale à celle qui a été abforbée dans les grands vaifleaux ; où bien le froid fera produie, fi, par exemple, le fang, dans fon pañlage à travers les capillaires, abforbe des grands vaifleaux une quantité de chaleur égale à 30 degrés; & fi, recevant moins de phlogiftique qu'auparavant , il tombe à l'extrémité des vaifleaux une quantité de chaleur feulement de 20°. II eft clair que fur tout le degré de refroïdiflement elle fera produite comme 10°, & certe caufe de réfroidifle= ment continuera d'agir pendant que le fang veineux prend graduellement la couleur du fang artériel, jufqu’à cé que leur différence foit totalement cacée , après quoi elle ceffera d'agir. Ainf, il paroît que , lorfque les ani= maux font placés dans un air chaud , le même procédé qui l’a fourni pré- cédemment avec la chaleur , devient enfuite l'inftcument au moyen duquel le froid eft produit, & probablement le préferve d’une altération fi ra- pide de la température , & lempèche d’être fatal à la vie, eee EE . (1) Peu importe , dans l'argument ci-deffus, que nous fuppoñons , avec le Doëteur Priefbley”, que Laltération de la couleur du fang dépend de fa combinaifon avec le phlosiftique dans les vaifleaux capillaires , ou que nous fohrenions , avéc-quelques au tres Philofophes, que cette altération provient du changement, produit dans’ le ang même par l’action des vaiffeaux : il nous fufit de la regarder comme un fait qui,; je je crois, a été prouvé par l’expérience directe ; que dans l’éian naturel de l’animal, le fang a éprouvé dans les vaifleaux capillaires un changement par lequel fon volume a diminué avec la chaleur, & que dans un air chaud il wa pas éprouvé un pareil chan- sement | , Ts, L SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 49 De tout ce que je viens de dire, l’évaporation augmenté: , la dimi- nution de ce pouvoir par lequel, dans l'état naturel, le fang eft impré- gné de phlogiftique, & Le conftant reflux de ce Auide , femblent être les principales caufes dont dépend le refroidiflement. Ayant tréuvé que l’at- traction du fang avec le phlogiftique étoit diminuée par la chaleur , il pa- roîc probable,d’un autre côté qu’elle fera augmentée par le froid. Pour le dé- terminer , j'ai plongé un chien au 100°. dans de l'eau à-peu-près aû 45°, pendant'environ un quart-d'heure, J'ai tiré de la veine jugulaire une petite quantité de fang , qui étoit évidemment beaucoup plus chargé dans fa couleur que celui qui avoit été pris dans un bain chaud; il m'a paru, auli-bien qu'à différentes autres perfonnes, Le fang veineux le plus foncé nous ayions jamais vu. après cette expérience, comparée avec celles que nous avons rappor- tées plus haut, nous pourrons appercevoir la raifon par laquellé les ani- maux gardent leur même température , malgré les grandes variations de la chaleur atmofphérique provenante des viciflitudes du temps & de la différence des faifons & du climat; & quelque vite que foit produite par l'expoftion au froid externe la diflipation de la chaleur vitale ,le fang, dans le cours de la circulation , commence à être plus profondément im- prégné de phlogiftique : il fournira donc un fecours plus copieux de ce principe à l'air dans les poumons, & en retour abforbera une plus grande quantité de, feu. En été, au contraire, il arrive l'inverfe de cela ; les petits vaifleaux atti- retont moins ‘de phlogiftique , moins de feu fera abforbé de l'air. De-là, la propriété de produire la chaleur eft dans tous les cas propor- tionnée à ce qui elt néceflaire : elle eft augmentée par Les froids de, l'hiver, & diminuée par les chaleurs de l'été; elle eft entièrement”changée en un pouvoir contraire, felon que l’exigg l'état de l'animal, D'après les changemens que produifent fur le fang veineux Le chaud & le froid, nous pouyons prudemment appercevoir la raifon pour la- quelle la température du corps eft, fréquemment augmentée en le plon- geant fubitement dans l'eau, & pourquoi le bain chaud a de fi puiflans effets, en rafraïchiffant le fyftème , & en éloignant la tendance générale ou particulière à l'infammation, : 7 , - Tome XX, Part. Il, 1782. DÉCEMBRE, Mmm 2 460 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, LE LEUR ù A M MONNET, Infpeéleur des Mines de France , Auteur d'un, Mémoire fur la Mine. ralogie de l'Aunis, imprimé dans le Journal de Phyfique du mois de Juiller 1782; | “ Par M. LAVILLEMARAIS, de L'Académie de la Rochelle: Mowsreur, Notre petite Province tient une place fi peu confidérable dans le Royaume, que nous avons bien de l'obligation aux Voyageurs inftruits qui daignent s'y arrêter en paflant, & plus encore à ceux qui ont la bonté d’en faire mention dans leurs Ecrits. Nous*fommes déjà redevables à quelques Savans d’avoir fait connoître, l'extrême population du Pays d’Aunis , la fertilité de fon terroir , fes différentes produétions; mais-per- fonne, jufqu'à préfent, n’avoit graité avec quelqu'étendue l'article de fa Minéralogie, Il vous étoit réfervé, Monfeur, d’en faire le fujet d'un Mémoire intéreflant; & quoique , d’après vos obfervations , nous n’ayions pas lieu de nous féliciter de nos richefles dans le Règne minéral , nous n'en fommes pas moins reconnoiffansdes foins que vous vous êtes don- nés pour conftater notre indigence , & de ce que vous avez bien voulu configner votre Mémoire dans un Ouvrage périodique, qui pañlera à la poftérité comme un dépôt précieux de pièces originales fur l'Hiftoire Na- turelle & la Phyfque. . Me permettrez-vous, Monfieur, de vous communiquer, par la même voie, quelques notes que la le£ture de votre Mémoire a fait naître ? Je ne les produis au jour, que dans l’efpoir qu’elles ajouteront un nouveau degré de lumière à vos propres obfervations. Si je relève quelques légères inadvertances” qui paroiflent vous avoir échappé, je fuis bien éloigné de m'en faire un mérite ; il ne feroit pas fort étonnant qu'un Rochellois connüt plus particulièrement la nature du fol, la conformation exté- rieure, &, fi j'ofe m'exprimer ainfi, la phyfonontie de fa Patrie, qu'un Etranger occupé ailleurs de grands travaux, & quin'a pu jetter fur l’'Au- nis qu'un coup-d'œil rapide, Ainfi, Monfieur, vous avez pu vous mé- SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS: 46r ptendre quelquefois , fans rien perdre d’une réputation déjà folidement établie par plufieurs bons Ouvrages ; & moi, le feul honneur que je puifle recueillir en vous‘faifant pafler ces notes, c’eft d’avoir témoigné publiquement mon zèle pour le progrès, des Sciences que vous cul- tivez. Je ne fuivrai d’äutre ordre que celui que vous avez-tenu dans votre Mémoire , & je commencerai avec vous par l'étendue de la Province d'orient en occident, à laquelle vous avez retranché une partie eflen- tielle, qui eft l'Ifle de RéMiBans la defcription phyfique d'un pays, il «me femble qu'un Naturalifte ne doit pas être arrêté par un petit bras de mer, fur-tout lorfque les terres qui font au-delà paroïffent être un pro- longement de celles qu'il obferve , comme le prouvent vifiblement la conformité des rivages oppofés & la reffemblance du fol de part & d'autre. Ainfi, la véritable longueur du pdys d’Aunis, du levant au couchant, doit fe prendre depuis Mauzé jufqu'à l'extrémité occidentale de l'Ifle de Ré ; ce qui fait une étendue d'environ 37,500 toifes, ou de 15 lieues communes de France , qui n'eft pas de 2000 toifes, comme vous le dites par inadvertance , mais de 2500 toifes. Sa largeur eft beaucoup moindre , étant bornée au midi & au fep- tentrion par de vaites marais , qui la féparent de la Saintonge & du Poitou. Vous dites, Monfieur , que /e terrein de l'Aunis va en s'abaiffant 6: en s'applatiffant vers la -mer. Cette obfervation, qui paroît naturelle , _m'eft pourtant pas exacte relativement à cette contrée, qui , depuis Mauzé jufqu'à la Rochelle , conferve à-peu-près par-tout fa même hau- teur , & ne préfente , dans toute cette étendue, qu'une longue & haute laine , Le comme les Aots de la mer, & fillonhée de diftance en Mance par de petits vallons & des élévations qui paroïflent jettées çà & là fans beaucoup de régularité. Quelques-unes de ces élévations , qui pourroient pafler pour des collines, telles que la Garde-aux-Valets, Montroy , Saint-Rogarien, le Payaud, quoique très-voifines dé la mer, font cependant les plus grandes de tout le pays; la côte même offre en plufeurs endroits des falailés coupées à pic de 50 à 60 pieds de hauteur au-deffus du niveau de la mer. On ne peut donc pas dire que le terrein de l'Aunis s'abaifle & s’applatifle de ce côté-la. , . Une preuve plus’convaincante que le témoignage des yeux , fe prend de la pente naturelle des eaux de fource & de, pluie qui fe trouvenc dans l'intérieur du pays: les ruifl:aux d'Aigrefeuille , de Saint-Chrif- tophe , de Fonpatour, au lieu de defcendre vers la Rochelle , qui n'eft qu’à trois lieues au couchant, coulent ai contraire d’abord à l’orient, uis fe détournent vers le nord, & traverfent cinq à fix lieues de terres barres , pour fe rendre dans la Sèvre Niortaife. La rivière de Surgères, en partant de fa fource , femble vouloir fe diriger à l’oueft; mais rencon- _ 462 «OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, trant bientôt les terres élevées de l’Aunis, elle fe courbe au midi, & va fe perdre dans le marais de Muron, .qui tient à la Saintonge. Plus «près de la Rochelle, les eaux de Groleau,de Candé , de la Sauzaie ,onr toutes leur pente au #eptentrion; aucun de ces cours d’eau ne defcend directement à la mer, De cette obfervation, il faut conclure que ce neft pas vers le cou- chant que Le cerrein.s’abaifle & s’'applatit , mais plurôc vérs le midi & lé feprentrion , où fe trouvent des terres bafles & de vaftes marais , qui étoient autrefois entièrement fubmergés; de forte PAunis reflembloit alors à une lonoue chauffée , qui s’avançoit de dixa douze lieues dans la mer, Plufieurs de ces marais , quoique detléchés & confidérablement élevés, font encore aujourd'hui plus bas que le niveau de la mer, & ce n’eft qu'a- vec de fortes digues qu'on les préferve des irruptions de ce terrible élément. Pour expliquer ce prétendu applatiffement du terrein , vous fuppofez., Monfieur, que « la mer furmontant autrefois le Pays d’Aunis , l'a rongé >» plus ou moins, & l'a diminué d'épaiffeur à propurtion du féjour -qu'elle » ya fait € des ravages qu'elle y a occafionnés ». . Vous avez raifon , Monfieur, de foupçonner que notre petite Province aéré couverte par les eaux de la mer; toùt l'annonce à fa furface, comme dans fa formation intérieure. J'en citerai plufieurs preuves dans un £ffai fur l'Hifloire Naturelle de certe partie dugolfe de Gafcogne, dont je moc- cupe aétuellement. Mais la conféquence que vous en tirez, eft-elle bien d'accord avec l'obfervation? L'océan peut bien fapper peu-à-peu & dé- ruire une côte élevée qui fe trouve expofée au choc réitéré de fes flots ; car il agit alors comme une mafle active, comme un énorme bélier, dont la force augmente à raifon de fa vitefle: il peut bien encote dépla- cer quelques bancs de fable, ou rouler un rocher çà & là fur une,plage peu profonde; lorfqu'il coule rapidement entre deux terres étroites, . peut bien élargir brufquement, & approfondir quelquefois fon canal; mais a-t-il jamais creufé & rongé (comme vous dites) le fond de fon lit? L'obfervation journalière ne prouve-t-elle pas plutôt qu'il le comble & l'élève peu-à-peu, en y dépofant continuellement les terres , les pierres &c les fables que Les fleuves charient dans fon fein, & ceux qu'il entraine des rivages qu'il a renverfés? Nous fommes aflurés, par les journaux des Navigateurs, que le fond de la mer dans le golfe de Gafcogne s'élève fehfiblement, fur-tout à fa proximité des côtes, & que les écueils & les bas-fonds s'y multiplient chaque jour. Il eft donc vraifemblable que la mer ayant couvert auttefois le pays d’Aunis , loin d’avoir ronge & di- minuésa furface , elle y aura plutôt dépofé de nouvelles couches de limon, qui, mêlées avec les détrimens des nombreux coquillages de nos côtes, auront formé ces bancs de pierres calcaires que l’on trouve prefque à la fu- perfcie de la terre. Vous nous annoncez, Monfieur , que « /a mer minant continuellement SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 46, » es bords, s’introduit & S'ouvre un paffage, par où elle ferépandra dans # d’autres parties de l'Auris », Cela peut.artiver ; mais les empiètemens que la mer fait aujourd’hui fur s côtes, ne font.rien en comparaifon des reftitutions confidérables. qu'elle a faites depuis quelques fiècles, au midi &' au nord-de la Province; & fi quelque révolution imprévue doit occafionner une nouvelle irruption de l'océan fur nos parages, il y a toute apparence que les vaftes marais du Poitou & de la Saintonge, dont nous avons parlé, feront engloutis plutôt que l'Aunis , qui eft une terre beaucoup plus élevée. E #A la fuite de ces préliminaires fur l'étendue & {a configuration de no- “tre petitescontrée, vous parlez, Monfieur, de fa culture ; & voyant pref que par-tout le peu d’épaifleur de la terre végétative , vous en avez con- tlu que le fol y eft ingrat & peu fertile. Cependant ces mêmés terreins fi pierreux , où l’on trouve à peine 3 ou 4 pouces de bonne terre fur une banche profonde, produifent généralement trois récoltes de fuite, en fu- mant la terre une feule fois la première année. Le froment, l'orge & l’a- voine sy fuccèdent tour-à-tour , & font bien fupérieurs en qualité à ceux qu'on recueille dans les terres les plus profondes du marais, Quant, aux vallées qui font le long de la côte, & que vous appelléz les bas-fonds & les anciens criques de la mer, ils font ordinairement convertis en marais falans , fi Le fol y eft favorable ; ou bien on eñ fait d’excellens pâturages, ce qui vaut mieux que d'y cultive: du feigle , qui eft une production in- connue dans la Province , & qui ne convient qu'aux terres argilleufes & vraiment maigres. . En confidérant le manveis état des arbres qui croiflent aux environs de la Rochelle, vous en accufez uniquement le {ol pierreux, & vous rejer- tez l'opinion vulgaire , qui l’attribue en partie aux grands ventst& à l’air de fa mer. Cependant, avec une légère attention , il eft aifé de reconnoître que toutes ces caufes cencôurent enfemble au prompt dépériflement de nos arbres, On a beau débancher profondément un‘terrein, y porter du meilleur terreau, & même l’arrofer, fi les plantations qu'on y fait font trop expofées au hâle de la mer -& au fouffle deftruéteur du vent de nord- oueft, les arbres fe couronnent bientôt, l'écorce fe gerce , les branches périflent fucggñivement , &toutle bofquét languit & meurt; tandis que d’autres arbres, plantés fans beaucoup de précaution dans un fol pier- reux, mais abrités des mauvais vents par une maifon ou par un mur, poufferont vigoureufement & auront beaucoup de feuillage, Dans nes bois de plaifance que nous avons autour de la Ville, on remarque que la liäère expofée aux vents de mer eft compofé: d'arbres petits & ra- bouoris ; les rangs qui fuivent s'élèvent en proportion que, s'éloignant de cette Jifière, ils font plus garantis des mauvais vents. Les Voyageurs qui arrivent dans le pays d’Aunis, obfervent que les arbres plantés le ong des grands chemins, font tous inclinés à l'orient par la violence des 464. OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, vents d'oueft & de fud-oueft ; & ce n’eft pas feulement le tronc de l'arbre, mais toutes les branches qui prennent cette direétion. On peut voir'aufli que de ce côté-la les couches ligneufes prennent FRANS EEE d'accroiflement , & qu’elles font quelquefois defléchées jufqu’au cœur de l'arbre. Le remède “alors eft de le couper rez-pied rez-terre, & il repouflefa de nombreufes tiges ; ce qui prouve évidemment que ce n'eft pas le fol' pierreux ue rl ment qui caufe la mauvaife végétation de nos arbres, puifque, dans cette fuppofition , les racines devroient périr les premières. : Ce n'eft pas non plus 4 force d'engrais que nous faifons venir la vigne & le blé; car le fumier eft très-rare en Aunis,"& nous ne favons même pas tirer parti de toutes les reflources que la Nature nous offre pour le multiplier. Nos meilleurs vignobles font fe long des côtes, & quelques-uns n'ont pas été fumés depuis cinquante à foixante ans. Nous .ne faifons point ufage des vafes de la mer ni des cendres de varech (1), pour ferti- lifer nos terres. Les Habitans des Paroifles voilines de la côte vont à mer baffle arracher le varech fur les rochers, & le tranfportent dans des foffes, où ils Le font pourrir avec du fumier commun. Dans les Ifles de. Ré & d'Oléron , ils le dépofent tout frais fur leurs champs, & le recouvrent , pouf conferver fous le fillon les deux grands principes de végétation dont cette plante marine eft imprégnée , je veux dire le fel & l'humidité, qui feuls peuvent donner de la-fécondité à leurs fables arides. Le far que l'on fait brûler fur le rivage en plulieurs endroits, s'emploie dans la Ver- rerie de la Fond, comme une foude propre à la fabrication des bou- teilles, ” En général, les vins du pays d’Aunis font fecs & capiteux: mis à la chaudière, ils rendent beaucoup d’efprit ; lorfqu'ils font faits avec foin, ils plaifentgaux Gourmets les plus délicats: mais la majeure partie des propriétaires de vignes n'ayant pas d'autre objet que l'abondance , ont multiplié les mauvais plants dans la Province , & font du vin très- groffier, Celui que vous avez goûté, Monfeur ; étoitapparemment de cette efpèce. Quant au blé, il eft également certain que ce r'eft pas la quantité du fumier qui nous procure celui quenous recueillons, maisla bonne nature du fol , jointe aux labours à bras qui font en ufage dans 1&s envixons de la Ro- chelle. Outre l'avantage de mieux préparer la terre , de la rompre & de Vameublir parfaitement , le Laboureur à bras, pour peu qu'il foit vigou- reux, pénètre avec fa bèche plus profondément que la charrue ordinaire; il caffe cette première couche de pierre mince qui eft prefque à la fur- (1) Warech, far & goëmon défignent la même plante ; nous l'appellons plus com- æunément /4r dans le pays d'Aunis. , face SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 46$ face de la terre, & fous laquelle fe trouve communément une autre ef- pèce de terre blanchâtré & onctueufe , que l’inftrument ramène fur la fur- face, & qui, mélangée avec la terre végétative, tient lieu d’un véritable engrais (1). Vous voyez ; Monfieur , que l'Aunis, malgré fon fol pier- reux, n'eft point une terre ingrate & ftérile. Mais un autre agent de la végétation , auquel il ne faut pas manquer de rendre hommage, & qui eft peut-être plus puiflant que les engrais & l'induftrie du Laboureur , c'eft cet air vif & chargé de particules falines que nous refpirons fur nos bords maritimes , & c’eft ici véritablement que l’on peut je : Non hu- nus, fed aer fruétificar. Les heureux effets de cet air actif & fécondant font fenfibles jufqu’à une certaine diftance , dans l’intérieur du pays: on recon- noît facilement les terres qui font hors de fa fphère d’aétivité; leurs pro- duétions en tous genres n’ont pas le même afpeët, font plus infipides & plus tardives, d IL eft temps , Monfieur, de rentrer avec vous dans le véritable objet de votre Mémoire, qui eft La Minéralogie de l'Aunis, Je ne puis que rendre juftice aux obfervations que vous avez faites fur la nature de notre pierre calcaire, que nous appellons ici moëllon. La plus dure , comme vous le dites très-bien, feroic une excellente chaux; mais je ne fais par quelle fatalité cette brancheutile de commerce & d’induftrie eft entière- ment négligée dans cette Province, où il feroit fi facile d'établir un grand nombre de fours à chaux, Cependant je ne connois, dans tout le Pays, que ceux établis à la Fond par le Directeur de la Verrerie, & je crois que l’on vous a induit en erreur , fi l’on vous a dit que l’on en faifoit avec ces groffes roches calcaires-fpathiques , que vous avez vues fur le chemin de Rochefort , & que vous penfez être l'ouvrage des polypites. Toute- la chaux que nousconfommonsici vient de Saintonge, par la Charente. Quant à la piérre de taille, proprement dite, nous n'en connoiffons point de carrière dans toute l'étendue de l’Aunis ; nous tirons des environs de Niort ou de Saintes celle dont nous avonsbefoin pour nos bâtimens. À Vandré, Bourg de Sainronge, à une lieue & demie de Suroères , on trouve une pierre grife très-compaéte , & d’un grain très-fin, laquelle réfifte à l’action du feu, & dont, pour cette raifon, on conftruit l'inté- rieur-des fous & des cheminées. On aflure qu'elle vaut autant que les meilleures briques. On cite encore la chaux de ce même lieu de Van- (x) Cette terre, qui n’eft pas rare dans la Province, peut être confidérée comme une efpèce de marne fecondaire. Mife dans le vinaigre, elle fait une forte effervef- cence , & répandune odeur trés-défagréable. Elle eft quelquefois dure & compaéte, Jorfqu’on d'a tirée d’une certaine profondeur ; mais expolée à l'air, elle s’efleuille & s’amollit comme une véritable marne. J'en ai trouve par couches épaiffes dans plu- fieurs endroits du pays. Elle eft ordinairement deffous le premier ou le fecond lie de pierre ; fa couleur eft quelquefois jaune , mais plus {ouvent orife. J'ai engagé des Culrivateurs de ma connoiffance d’en faire l’effai fur leurs terres maigres & épuilées. Tome XX, Part, II, 1782. DÉCEMBRE. Non 466 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, dré, qui, après avoir été éteinte dans l'eau, fe pétrit comme de l’ar- gile, & fe façonne en vaifleaux de différentes grandeurs, & propres à contenir plufieurs barriques d’eau. Mais la pierre la plus curieufe, fans contredit, d2 toute la Province, c'eft celle que l’on trouve au bas de la falaife du (1) rocher , entre Chä- telaillon & Fouras, dans les caflures de laquelle on apperçoit des crÿf- taux & des pyrites. Vous dites, Monfieur qu'il y a généralement peu de coquilles dans ces pierres, & vous convenez qu'on y voit des perits pei- gnes , des cammes , des buccins, des moules & des cornes d'ammon. Afluré- ment, 11 feroit difficile d'en trouver d'avantage dans les pierres purement coquillières. Je fuis bien fâché que le peu de féjeur que vous avez fait dans notre Ville ne vous ait pas permis de faire des obfervations plus étendues fur cette pierre fingulière , & fur la nature des concrétions métalliques qui s'y rencontrent, & qui, par leur mélange de fer & de cuivre, femblent nous indiquer la préfence de ces deux métaux dans les entrailles de ce ro- cher, qu'il froit intéreflant de creufer en plufieurs endroits. Ayant eu occafon d'y pafler au mois de Juin dernier, j'en ai détaché moi-même plufieurs échantillons, que je defirerois bien être à même de vous montrer. Les Ouvriers qui latirent du pied de la carrière, m’en ont fait voir de deux efpèces très-différentes, qui fe trouvent immédiatement l’une fous Vautre. Le lit de la plus dure, où fe forment les pyrites, eft formé fur celui de la pierre tendre, qui ne m'a pas paru différer eflentiellement de notre pierre calcinable ordinaire, fi ce n’eft qu'elle paroît plus compacte & d’un meilleur grain. On emploie l’une & l’autre à bâtir les maifons des environs; mais je n’ai point appris qu'on s’en ferve nulle part 4 faire des pavés, comme vous le dites dans votre Mémoire. Peut-être feroit-elle très-propre à cet ufage , étant fort dure , & fufceptible d’être taillée comme lon veut. Nous aurions également fouhaité, Monfeur, que vous nous euffez donné quelques éclairciflemens fur la nature des amas de fable que l’on voit en certains endroits de la côte, depuis la Rochelle jufqu'à Rochefort; mais principalement fur la côte d'Arvert en Saintonge , & fur celle d'U- leren quiy correfpond. Vous obfervez très bien que cette quantité pro- digieufe de fable ne provient pas des détritus de la pierre calcaire de nos côtes , puifque cette pierre ne donne pas de vrai fable, Aïnfi, il faur né- ceffairement le faire venir de plus loin que l'Aunis, & même la Sain- (x) C’eft une petite colline à moitié chemin entre la Rochelle & Rochefort, fur le bord de la mer, qui l’a confidérablement minée & détruite ; elle s’étend à un quart de lieue dans les terres, ou plutôt dans un vafte marais defféché qui la borde à lorient. La Paroifle d'Yves eft furle penchant de cette colline, au fud-ef de la maïlon du Rocher, ton + SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 467 tonge; mais cette difcuflion, qui feroit de pure curiolité ici, appartient plurôt à l'Hiftoire Naturelle de la baie de Bifcaye qu'à un EM fur la Minéralogie de l'Aunis. J'obferverai feulement que le fable que nous em ployons à la Rochelle & aux environs pour la compoñition du mortier, {e prend dans les dunes de Pont-la-Pierre, auprès d’'Angoulin: il eft trop fn & trop arrondi pour faire un mortier durable. Les terres-ulaifes & les différentes efpèces de brie dont on fe fert dans la Province pour former les marais falans, paroiflent avoir échappé à vos obfervations : quant à largile, on convient généralement qu'elle n’eft pas abondante en Aunis; les Ouvriers de la Faïancerie n’en ont en- core trouvé qu'en deux ou trois endroits; mais je crois pouvoir affurer qu'on ne connoît pas encore toutes les richefles de notre pays en ce genre. L'objet qui paroît avoir le plus fixé votre attention pendant votre fé- jour à la Rochelle , quoiqu'il foit peut-être le plus étranger à la Minéra- logie de l’Aunis, c'eft cette variété de pierres rares & de cailloux de toute efpèce qui compofent la majeure partie de nos pavés, & dont on trouve aufli des fragmens répandus çà & là fur Le rivage parmi les nombreux dé- triments ou galets de la pierre commune calcaire de nos côtes. Frappé d'admiration à la vue de ces précieux fragmens que vous faites dériver des montagnes primitives, & dont vous dites #’avoir jamais rencontré nulle part des analogues vivans | vous vous livrez avec complaifance à des recherches purement fpéculatives, pour rendre raifon de leur origine; 8& vous fuppofez « une chaîne de montagnes qui auroient exiflé au-dela des Ifles » de Ré € d'Oleron, G que des révolutions terribles, tels que des trem- » blemens de terre, auroient renverfées. . . . » Vous ajoutez que « ces > debris, enfevelis dans Peau de la mer, auront été amenés peu-a-peu par » Les courans ou les marées ; fur les parties où nous Les voyons aujour- » d'hui, Ge. Ec ». IL eft beau, fans doute, Monfieur , de s'élever jufqu'au principe des chofes , & de pouvoir expliquer tout ce qui n’eft pas à la portée du val: gaire. J'admire, comme je le dois, votre favante hypothèfe ; mais nous fommes ici, dans le fond de la Province, de fimples Obfervateurs , qui étudions la Nature avec un refpeét qui approche de l'adoration. Quand elle juge à propos de fe voiler à nos yeux, nous ne faifons point de con- jecture pour deviner fon fecret; & nous nous gardons fur-tout de fuppléer, par les rêves de l'imagination , à ce que des recherches foutenues & une attention aétive peuvent nous faire appercevoir, Sans avoir recours au merveilleux, voici ce que l'obfervation nous apprend de plus certain fur l’origine de ces pierres. La Rochelle , fituée au fond’ du golfe de Gafcogne, elt le réceptacle de toutes les matières que l'océan détache continuellement des côtes qui le preffent & l’environ- pent, Les grands fleuves, qui ont leur embouchure dans le golfe, y char. Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE. Nnn2 468 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rient aufli beaucoup de fables , de pierres & de cailloux , roulés & arron- dis par Le frottement. L’Adour , en defcendant des Monts Pyrénées , en- traîne avec fracas des blocs énorires de granit, de bafalte & de fchorl , que l'impétuolité de fon cours roule bien avant dans la mer. Tous ces nombreux débris de côtes différentes & de régions éloignées font pouflés de proche en proche par le mouvement des eaux & la violence des vents jufqu'au fond de la baie , où nous trouvons confondus péle-mêle des fragmens de la pierre du Cap Finiftère, avec des morceaux de cette roche de grès qui De la rive droite de la Loire, & qui s’étend jufqu'à l’extré- mité de la Bretagne ; des granits , des bafales, des pierres de touche des Pyrénées, avec des cailloux de lIfle- Dieu & de Noirmoutiers. Voilà, Monfieur, Yorigine de la plupart de ces pierres, dont vous avez donné une lifte pompeufe dans votre Mémoire. Il n'en eft prefque aucune qui ne fe rencontre où dans les Pyrénées , ou Le long des côres qui berdent le grand baflin au fond duquel nous fomimes placés. Mais ces précieux fragmens ayant été long temps roulés dans les goufres de la mer, nous parviennent en petits volumes & fort arrondis , de manière qu'ils ne font guères propres à faire des pavés. Ces gros blocs de pierres dures que vous avez admirés dans nos rues de la Rochelle, ont une autre ori- gine; ils ne font pas tirés d’un trou fur Le rivage, comme vous l'avez imaginé; mais ils nous font apportés de loin par des navires qui, ve- nant à vuide pour charger ici des marchandifes , rempliflent leurs cales de grofles pierres, qu’ils vendent enfuite à nos Paveurs. Les bâtimens de Calais & de Dunkerque fe leftent avec des roches de pyrites, qui fe trouvent en abondance {ur les côtes de Picardie, & comme ils viennent prefque toujours fux leur left, c'eft à eux que nous fommes redevables de la majeure partie de nos pavés. Il eft arrivé, en différens temps, que nos vaifleaux n'ayant pu fe procurer du fret à l'Amérique, ont été orcés d'en revenir à vuide ; alors ils fe font chargés de pierres , lefquelles font noires, fort pefantes, & reflemblent à des pierres volcaniques. Nous pouvons donc avancer , fans exagération, que nos pavés de la Rochelle font compolés du tribut de toutes les carrières du globe (1), ce qui ne doit pas éronner, quand on réfléchir que notre Ville a fait, pendant plufieurs fiècles, un commerce très-étendu avec les quatre parties du monde. I merefte, Monfeur , une dernière obfervation à vous faire; c’eft que Von aura peut-être lieu de s'étonner que dans un Mémoire fur la Miné- ralogie de lAunis , il ne foit fait aucune mention des minéraux propre- (r) En exaiminant la prodigieufe quantité de ces pierres & de ces cailloux , la fineffe de leur grain , la variété de leurs couleurs , les veines & les nuances qui s’y diftinguent, des Curieux ant imaginé que s’ils étoient taillés & polis, on en feroit de très-belles mofuïques. SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 469 ment dits, & des fofliles qui peuvent s'y trouver, Je connois l'indigence prefque abfolue de ma Patrie à cet égard; mais enfin , on y a découvert en plufieurs endroits des pétrifications , des cryftallifations curieufes, des pyrites, des concrétions métalliques, du fer en globules très-pur, des terres-glaifes de différentes qualités , des marnes fecondaires ; & fi jamais vous avez l’occafñon & le loifir de vifiter une feconde fois l’intérieur de l'Aunis, je ne doute pas, Monfieur , que vous n’y faîliez des découvertes intéreffantes , qui pourront donner à notre petite Province une exiftence plus confidérable dans l'empire minéral, Je fuis, &c. A la Rochelle, le 16 Septembre 1782. NOUVELLES LITTÉRAIRES. 1 Prix que la Société Royale des Sciences de Copenhague avoit propofé en 1780, pour la meilleure differtation fur la durée de l’année folaire , a été adjugé à M, de la Lande, Profeffeur en Aftronomie , & Membre de l’Académie des Sciences de Paris. Pour cette année on propofe les fujets fuivans : 1°. Monffrare indolem Poëftos féptentrionalis antique 6 in ejus à Græec4 Romanâque diférepantiam inquirere, tum in quo cum Anglo - Saxo- nià prifcäque Germanicd conveniat , vel fecis. 2°. Tradere methodum praxi accommodatam , aèrem phlogiflo aliifque pere- grinis inquinatum fubfidiis Chermicis depurandi aut corrigendi. 3°. Queritur de Hygrometro e& Lege confrulo , ut duo certa ficcitatis € humidiratis punéla certiès | quam hüc ufquè faëlum eff, poffint inveniri, utque oradus diverforum Hygrometrorum correfpondeant. ; Liberum erit Autori, vel novum inffrumentum invenire, vel jam cognitum ad defideratim perf&ionis gradum evehere : principia omnia conflruélionis & divifionis adeù dilucidè erunt defcribenda , ut Artifices ea rutd exfequi valeane, Defideratur denique ut Autor duo Hygrometri exemplaria juxta regulas à Je craditas conffrutla Societati mittar. Le Prix qu'on donnera à celui qui aura le mieux traité chaque fujet, confifte en une Médaille dor de la valeur de cent écus, argent de Danemarck. ; Tous les Savans , excepté les Membres de la Société , font invités à concourir pour ces Prix, Ils voudront bien écrire leurs Mémoires 470 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, en François, Latin, Danois ou Allemand , & les adreffer à S. E. M. de Luxdorph, Chevalier de l'Ordre Royal de Dannebrog , Confeiller privé de S. M. Danoife, & Prélident de la Société, avant la fin de Septembre 1783. “Les autres conditions font comme d’ufage, Programme de l Académie des Sciences , Belles-Lettres & Arts de Lyon. Diftriburion des Prix. L'Académie, dans fa Séance du 27 Août dernier , a proclamé le Prix de Phyfique fondé par M. CHRISTIN. Après avoir confidéré, dans les Sujets précédents, l'Eleétricité de lAtmofphère , relativement au corps humain, en 1780, elle en propofa un nouveau , relatif à fes rapports avec les végétaux , conçu en ces termes: « L’Electricité de l’Atmof- » phère a-relle quelqu'influence fur les Vésétaux? Quels font les effets » de cette influence? Et s’il en eft de nuiñbles, quels font les moyens » d'y remédier »? + Quatre Mémoires ont été admis au concours: ils ont tous fixé l’atten- tion de l’Académie ; mais elle en a particulièrement diftingué deux: an Mémoire François, qui , au mérite de l’élocution, réunit celui de rap= porter les plus importantes obfervations des Phyficiens fur cette matière ; & un Mémoire Latin, qui , après avoir réfumé les mêmes faits , préfente plufieurs expériences nouvelles & intéreffantes, au moyen defquelles il établit , fous un nouveau jour, l'inuence de l'électricité fur la végé- tation, L'Académie a accordé le Prix, confiftant en une Médaille d’or de ‘la valeur de 300 livres, au Mémoire Latin coté n°. 1, ayant pour devife: Tgnis enim omnia per omnia movere potefl ; aqua verd omnia per omnia nu- crire. Hippocr. , lib. 1. de diœta. L’Auteur eft M. Fr. Jos. GARDINI , Docteur-Médecin en l'Univerfité de Turin, à Saint-Damiens , près d’Afti en Piémont, le même qui, en 1779 , partagea avec M. Bertholon un des Prix concernant l'éleétricité es animaux. L'Académie invite ce Savant, s’il eft dans l'intention de pu- blier fon Mémoire, de Le terminer par des Tables analytiques, qui, en rapprochant particulièrement les faits nouveaux, indiquent , dune ma- nière précife , Les conféquences qui en réfultent. L'Acceffit a été décerné au Mémoire ci-deffus mentionné, lequel a pour devife ces mots d'Horace : 2 AJE ubi plura nitenr, . .. non ego paucis offendar maculis. L'Auteur ne s’eft pas fait connoître, SUR L'HIST. NATURELLE ETLES ARTS. #71 L'Académie s’eft vue , à regret, dans le cas de ne pouvoir diftribuer en même temps les deux autres Prix qu'elle avoit propofés pour la préfente année: elle n’a reçu aucun Mémoire fur le fujet « des alimens & des boif- » {ons des différens Peuples » , relati fau Prix de l'Hiftoire Naturelle, fondée par M. Apamozr, & s'eft décidée à le propofer double pour 1784 , avec un fujet nouveau , ci après énoncé. À l'égard du fujet concernant « Les Manufaétures de Ja Ville de Lyon», pour le Prix dont M, l'Abbé Ray NAL a fait les fonds, l'Académie a reçu deux Mémoires très-eftimables par les recherches & plulieurs des vues qu'ils renferment; mais l’objet lui a paru d'une trop grande importance pour ne pas fufpendre fon jugement, & ne pas defirer que la matière foit encore plus approfondie. La partie hiftorique lui paroït éclaircie, mais elle demande plus de développement dans les deux autres, fur-tout dans les moyens « dE maintenir & d’aflurer la profpérité des Manufaétures ». En conféquence, elle a prorogé le Prix à l’année 1784, en confervant néan- moins , aux deux Ouvrages dont il s'agir, le droit de concourir à cette époque, avec les nouveaux Mémoires qui lui feront remis, & en annon- çant qu'elle recevra les changemens ou additions que les deux Auteurs voudroient lui adreffer , fous les mêmes devifes qu'ils ont adoptées. L'Académie ayant à diftribuer , en 1783, le Prix des Ars, fondé par M. CurisTiN , a jeté les yeux fur une partie intéreffante de nos Pro- vinces, où la misère du Peuple paroît provenir autant de l’inaction dans laquelle il vit, que des maladies locales auxquelles il eft expofé, En con- féquence , elle propofe le fujet fuivanr : « Déterminer quel eft le genre d’induftrie qui pourroit occuper utile- » ment les Habitans de la plaine du Forez, fans nuire aux travaux de » la campagne »? CON DVI TUTO NS: Toutes perfonnes pourront concourir pour ce Prix, excepté les Aca- démiciens titulaires & les vétérans ; les Affociés y feront admis. Les Mé- moires feront écrits en François ou en Latin. Les Auteurs ne fe feront con- noitre ni diretement, ni indirectement ; ils mettront une devife à la tête de l'Ouvrage , & y joindront un billet cacheté , qui contiendra la même devife, leur nom & le lieu de leur réfidence. Les paquets feront adreffés, francs de port, à Lyon, a M. de la Tourette , ancien Conféiller à La Cour des Monnoies ; Secrétaire perpétuel pour La clafle des Sciences | rue Boiffac ; Ou a M. de Bory, ancien Commandant de Pierre-Scige | Secrétaire perpétuel, pour la claffe des Belles-Lertres , rue Sainte Hélène. Ou chez Aimé de la Roche, Imprimeur:Libraire de [Académie , maifon . des Halles de la Grenette. Aucun Ouvrage ne fera reçu au concours paflé le premier Avril 1783; 472 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, le terme eft de rigueur. L'Académie décernera le Prix dans l'Affemblée ublique qu’elle tiendra après la Fêre de Saint-Louis ; il conffte en une: publiq À P Médaille d’or de la valeur de 300 livres. La Médaille fera remife à l'Aureur couronné , ou à fon fondé de pro- curation. Prix extraordinaires. L'Académie avoit réfervé, en 1778, une Médaille de 300 livres, de la fondation de M. CHkisTIN , pour un Prix extraordinaire, Un de MM. les Académiciens a propofé, pour fujet de ce Prix, «Ja mixtion de l’alun > dans le vin, confidérée relativement à la confervation du vin & à » la confervation de la fanté »; & dans le cas où ce fujet agréeroit à l'Académie, il lui a demardé de permettre qu'il s'engageat à doubler la valeur de la Médaille, -L'Académie a penfé que cet objet intérefloit particulièrement les Pro- vinces où cette mixtion devient d'un ufage fréquent ; en conféquence elle propofe le double Prix, & demande « l'examen phyfique & raifonné de >» la diflolution de l’alun dans le vin, confidérée relativement à la confer- » vation du vin & à la confervation de la fanté », Elle exige des expériences précifes , conftantes, faciles à répéter, & dont le but foit la folution des queftions fuivantes : æ 1°, La mixtion de l’alun dans le vin eft-elle un für moyen de le » conferver ou de établir fa qualité, lorfqu'elle eft altérée ? de quelle » efpèce d’altération dans le vin lalun eft-il le préfervatif ou le cor- æ rectif 2 » 2°. En quelle proportion faut-il mêler l’alun dans le vin, au cas que » ce mélange foit reconnu avantageux ? » 3°. Le vin tenant en diflolution la quantité d’alun néceffaire à fa » confervation ou à fon amélioration, eft-il nuifible à la fanté ? quels en » font les effets fur l'économie animale ? » 4°. Si lalun diflous dans le vin eft reconnu préjudiciable à la >» fanté, eft-il quelque moyen d'en corriger les effets nuifibles ? » 5°. Enfin, quelle eft la manière la plus fimple & la plus exacte de » reconnoître la préfence de l’alun, & fa quantité, lorfqu'il eft en diffo- » lution dans le vin »? Les conditions comme ci-deflus. Le Prix, confiftant en deux Médailles d’or, de la valeur chacune de 300 livres , fe diftribuera dans la même Séance, & les Mémoires ne feront admis que jufqu'au premier ‘Avril 4783: A la même époque , l'Académie décernera le Prix de 1200 livres, dont M. l'AbbéRAYNaAL a fait les fonds, & dont le fujet a été annoncé ainfi qu’il fuit : » La SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS. 473 œ La découverte de l'Amérique a-t-elle été utile ou nuiñble au genre * humain 2 » S'ilen eft réfulté des biens, quels font les moyens de les conferver » & de Les accroître? » Si elle a produit des maux, quels font les moyens d'y remé- » dier » ? Vu l'importance du fujet, l'Académie n’a point fixé l'étendue des Mémoires, & s’eft contentée d'inviter les Auteurs à les écrire en François ou en Latin. Aucun Ouvrage ne fera admis au concours , paflé le pre- mier Avril 1783. Nouveaux Sujets pour l'année 1784, L'Académie, pour le Prix de Marhématiques , fondé par M. CHRISTIN, propofe le fujet fuivanc: à « 1°, Expofer les avantages & les inconvéniens des voûtes furbaiffées, » dans les différentes conftruétions , foit publiques, foit particulières , » où l'on eft en ufage de les employer. » 2°, Conclure à cette expolition, s'il eft des cas où elles doivent » être préférées aux voûtes à plein ceintre , & quels font ces » Cas, » 3°. Déterminer géométriquement quelle feroit la courbure qui leur » donneroit le moins d’élévation, en leur confervant la folidité nécef- » faire », A Le Prix eft une Médaille d'or de la valeur de 300 livres. Les conditions comme ci-deflus, Aucun Mémoire ne fera admis à concourir , paflé le premier Avril 1784. La proclamation fe fera après la Fête de Saint- Louis. Pour les Prix d’Hiffoire Naturelle ou Agriculture, de la fondation de M. ADamoLi, propofés doubles, l'Académie demande « des obferva- » tions théoriques & pratiques fur les haies deftinées à la clôture des » prés, des champs, des vignes & des jeunes bois. » Les Auteurs indiqueront le choix convenable des diverfes efpèces de haies , fuivant la diverfité des climats, des terreins & des cultures; ils détermineront la meilleure manière de les former & de les en- » tretenir, en confidérant le produit des récoltes , l'extenfion des ra- » cines, le chauffage , les arbres fruitiers qui peuvent être placés dans » les haies, &c.». Les Prix confiftent en deux Médailles d’or, de Ja valeur de 300 liv, chacune, & en deux Médailles d'argent. Les conditions comme ci-deflus. Les Mémoires ne feront admis au concours que jufqu'au premier Avril 1784 La dilftribution fera faite après la fèce de Saint Pierre. Tome XX , Part. II, 1782. DÉCEMBRE. Ooo 8 474 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, L'Académie a prorogé à la même année & à la même époque , la diftribution du Prix de 609 livres, dont M. l'Abbé RAyNAL a fait les fonds; il fera décerné au meilleur Mémoire fur Le fujet fui- yant: « Quels ont été les principes qui ont fait profpérer les Manufadtures » qui diftinguent la Ville de Lyon? > Quelles font les caufes qui peuvent leur nuire ? » Quels font les moyens d'en maintenir & d'en affurer la prof- » périté » ? Les Mémoires feront envoyés avant le premier Avril 1784 Socièté Hollandoife des Sciences de Harlem. En réponfe à la queftion concernant les efpêces vraiment différentes de fluides qui paroiffent être de l’air, & auxquels on a donné les noms d'air fixe, air déphlogifliqué, air inflammable, air nitreux , air acide , air alkalin | @c, dont on avoit demandé , 1°, les dif- férences réciproques , & en quoi ils diffèrent de l'air atmofphérique; 2°. fi chacune de ces efpèces de fluides élaftiques a aflez de rapport avec l'air de l'atmofphère , pour qu’on puifle la croire une efpèce d’air; 3°. jufqu’à quel point on peut déterminer la nature.de l'air atmofphé- rique par les exÿériences & les obfervations faites avec ces Auides; la Compagnie a reçu un Mémoire, qui a pour épigraphe: Cherchez Les caufes y & vous aurez les effirs. Elle a jugé qu'il étoit écrit avec beau- coup de fagacité , mais que l’Auteur n’avoit point aflez réfléchi fur plu- fieurs découvertes déjà faites, ni conftaté fes aflertions par un aflez grand nombre d'expériences. Cette queftion eft conféquemment propofée pour la feconde fois. Malgré Les grands progrès que l’on a faits dans la connoiffance de Vair, on n'a tenté jufqu'ici que peu d'expériences fur l’air condenfé; ce qui pourroit être attribué à l'imperfeétion des machines, ou de l'appareil néceflaire À cet égard. Cette raifon engage la Compagnie de demander, 1. une defcription de Yappareil le plus propre à faire des expériences fur l'air condenfé de la manière la plus commode & la plus füre; 2°. de rechercher, avec cet appareil, l’action de l’air condenfé dans les cas dif- férents, de s'occuper entr'autres de la vie animale, de la croiffance des plantes, & de l’inflammabilité des différentes efpèces d'air; 3°. d’ex- pofer quelles fuites ou quelles nouvelles AU eee on pourroit en déduire. Les Mémoires doivent être envoyés avant le premier Janvier 1784. Tous les Ouvrages écrits en Hollandoïis, en François ou en Latin, feront adreflés, francs de port, à M. C. A, VANDER AA , Secrétaire de la Société, LR SUR L'HIST. NATURELLE ET LES ARTS, 47$ Le Prix des Arts, fondé par la Ville de Befançon, confifte en une Médaille d’or de la valeur de 200 liv. Il fera donné à celui qui indi- quera « Quelles font les Manufaëtures que l'on pourroit établir & per- » fectionner en Franche Comté? Quels feroient les moyens d'y réuilir, » en conciliant la poflibilité avec la dépenfe »? Les Ouvrages feront adreflés en la forme ordinaire , francs de port, à M. Droz , Confeiller au Parlement , Secrétaire perpétuel de l'Académie, avant le premier Mai 1783. Herbier de la France par M. BULLIARD , 23, 24,25 ,26,27 livrai- ons. À Paris, chez l’Auteur, rue des Poftes. Ces livraifons renferment, 1°. la clématite des haies, Flor. Franç, clematis vitalba ,L, Sp. PI. ; 2°. l'agaric rampant , agaricus repens ; 3°. la petite ciguë, ou æthufe perfillée, Flor. Franç. , æchufa cynapyum, L.Sp, PL. 367 ; 4°. l’agaric doré , agaricus aureus; $°, la jufquiame noire , Flor. Franç. , kyoftiamus niger, L.Sp.PL., pent. mono. 257; 6°. l’agaric en- taflé , agaricus congregatus ; 7°. la tithymale des bois, Flor. Franç., eu- phorbia fylvarica, L. $. PL. dodec. tryg. 663 ; 8°. l’agaric aranéeux , agari- eus aranofus 3 9°. la tithymale cyparifle , Flor. Franc. ; euphorbia cypa- riffias, L. Sp. PI. 661, dodec.trigy.;10°. l'agaric vagine, agaricus vaginatus ; 11°. la jufquiame blanche , Flor. Franc. ; kyofciamus albus , L. Sp. PI, pent. monog. 257 ; 12°. le bolet tubereux , holetus tuberofus; 132. la pivoine officinale , Flor, Franç. , pæonmia officinalis , L. Sp. PI. polya. dioy. 747; 14°. l’agaric rameux , agaricus ramofus ; 1$°. la tithymale épurge, Flor. Franç., euphorbia lathyris , L. Sp. PL dodec. trigy. 655; 16°. l'agaric laiteux zoné, agaricus laëliflus zonarius ; 17°. la bugrane des champs, Flor. Franç.; ononis fpinofa, L. Sp. PI. deadelph. deca. 1006.; 18°. l’aga- ric piedfu, agaricus fuffipes-craffipes , Schæff., tab. 77 ; 19°. l'ivraie an- nuelle, Flor. Franc. , lolium temulentum , L. Sp PI. 122; gramen lolium , Scheuch, , tab, 1, fig. 73 20°. l'agaric bulbeux printanier , agaricus bul- bofus vernus, Dei Terre moti di Bologna , &c. Du Tremblement de rerre de Boulogne, par MicHEez AUGUSTI, Religieux Olivetain, feconde édition, revue, augmentée de notes, À Bologne. Nouvelles Recherches fur l'Economie animale , par M. VRIGNAUD, Doc- reur em Médecine. Paris, in-8° , chez Didotle jeune, Cailleau & Mé- quignon l’ainé , Libraires, 1782. Prix, broché, 3 liv. $ fols. Rien n’eft plus intéreffant pour l'homme que l'homme même; le mé- canifme qui le fait agir, fentir & vivre, eft pour lui le fujet d'étude le plus Tome XX, Part. II, 1782. DÉCEMBRE, O00 2 475 OBSERVATIONS SUR LA PHYSIQUE, rand & le plus noble; mais rarement sy livre-t-il, qu'il ne cherche à à l'expliquer & à deviner les moyens par lefquels il exilte, Un très-grand nombre d’Auteurs s'y font appliqués avec plus ou moins de fuccès, & M. Vrignaud, d’après les principes de MM. Barthes & Lamure, offre , dans l'Ouvrage que nous annonçons, fes nouvelles recherches fur toute l'économie animale, parcourant dans différentes fections le mouvement du fang , la refpiration , les effets de l'air fur le corps mort & vivant, le befoin que ce corps a d’alimens folides & fluides, leur digettion, la coétion des humeurs & leurs fecrétions , l'exercice, le repos, la veille, le fommeil, la nutrition, l’accroiflement, le décroiffement du corps, les organes des fens , ceux du mouvement, [a génération, &c. &c.; par- tout il difcute avec fagacité toutes les notions modernes fur les différens points de phyfologie, & fouvent il appuie les nouvelles vérités qu'il avance ou qu'il veut faire valoir , par des expériences très-ingénieufes & très-bien faites. Mineralogefchichte. Hifloire Minérale des Mines des montagnes de la Weft- manie € de la Dalékarlie, traduite en Allemand du Manufcrit Suédois de Cromfledt ; par M. GEORGI , de l'Académie de Pétersbourg, 6 im- primée par les foins de M, SCHREBER. À Erxland, chez Grattenaver, 1781 , grand in-8°. La defcription de ces mines par un Minéralooifte auffi favant que M.Cromftedt , ne peut être que très-intéreffante. Befchreibung der filberfchmelz proceffes, &c. Defcription de la manière de fondre l'argent à Neufohl en Hongrie; par M. HERMANN. À Vienne, chez Kurzbeck, in8°. 1781. Tentamina Hiflorie Naturalis Vermium vifceralium , &c. Effai d'Hifloire Naturelle des Vers qui habitent dans Le corps des animaux ; par M. GoErz. Cet Ouvrage, qui avoit été propofé en Allemagne par foufcription, a dû paroître aux foires de Léipfick, à la Saint-Michel dernière, C'eft le fruit de fept années d’obfervations de la part de l’Auteur. Quand nous le connoîtrons plus particulièrement, nous en donnerens de plus grands détails. On peut s’adreffer , pour fe le procurer, à l'Auteur même, à Quedlimbourg ; ou à M. Laehr, à Léipfick. ANPLPLRNO BR AL INT ONT: ’AI lu, par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage qui a pour titre: Obfervarions fur la Phyfique, fur l’Hiftoire Naturelle & fur les Aris, &c.; par MM. Rozier & MoNGEz le jeune, &c. La Colle&ion de faits importans qu’iloftre périodi- quement à fes Leéteurs, mérite l'accueil des Savans ; enconféquence, j’eftime qu’on peut en permettre l'impreflion, À Paris, ée 13 Décembre 1781. VALMONT DE BOMARE, 477 TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES C'ONN TE NUS DANS CE V O‘L'U ME. PHYSIQUE. E XTRAIT d'un Mémoire fur la flruëture des Spaths calcaires, par M. l'Abbé Hauy. Page 33 Memoire fur un Vent remarquable de L Afrique, appellé Harmattan, par MAT- THIEU D'OBSON. 48 Mémoire [ur une nouvelle manière de faire éclore les Œufs , au moyen de l'E- leéricité; par M. ACHARD. 56 Copie du Procès-verbal des Expériences faites avec le Jieur Bletton au Jardin de l'Abbaye de Sainte-Geneviève , le 29 Mai 1782. 53 Leure de M. LE Roy, fur ur Coup de Tonnerre tombé à Brefl. 82 Obfervation d'une variation particulière dans le Baromètre , par M. TOALDO, Profeffeur d’Aflronomie à Padoue. 88 Des Inondations volcaniques , par M. DUCARLA. 113 Lerrrefur l'identité de l'Eléétricité aërienne avec l’Elecfricité artificielle ; par M. l'Abbé BERTHOLON. 224 Réflexions fur l'application dela Période lunaire de dix-neuf ans à la Météorolo- gie, & fur Le froid rigoureux & extraordinaire du mois de Février dernier 1782; parle P.Corre. 249 Obfervations fur un Phénomène des environs de Vefoul | par M, HASssEN- FRUTZ,. 259 La Phofphore[cence du Diamant, par M. DE GROSSER. 270 Leure de M. ANTON10-MARIO LORGNA, fur un Coup de foudre pañti de terre, 36$ 478 TAPBLE “GÉNÉRALE CHYMIE, : LE Jur inflammation d'un mélange de noir de fumée & d'huile: par M. DECZERNISCHEW. Page 3 Mémoire fur les couleurs des Végétaux ; par M. ACHARD. 10Q Effai fur La converfion de tous Les acides en un feul ; par M. le Chevalier AN- DRIANI. 106 Sur la déphlogiffication de P Air phlogiflique, par M. ACHARD, 241 Mémoire fur l'Emétique ou Sel fhibié ; par M.DE LUNEL. 266 Mémoire fur les changemens que les Chaux métalliques & leurs mélanges faits er les combinant de deux à deux & de trois à trois, éprouvent par l'aëtion du feu ; par M. ACHAR D. 292 Recherches fur la propriété virrefcible de l’Acide phofphorique offeux ; par M. WIEGLEB. 304 Examen Chymique de l'Aurum Mufivum ; procédé pour l'obtenir conflamment beau >; par M, le Marquis DE BULLION. 339 Memoire fur un nouveau moyen de produire une chaleur égale , &c. ; par M. ACHARD. : 371 Lertre de M. le Comte DE SALUCES, fur Le Salpétre artificiel, 381 Lettre de M. le Comte DE MOROZZO , fur les Expériences de M, ACHARD ;, fur la couleur des Végétaux. 385$ FT SP OT IR ETS NA CP PRAE) REUES More fur la Minéralogie del Aunis , par M. MONNET. 39 Lettre fur quelques Offèmens trouvés dans les Carrières de Monsmartre ; par M. PAsSUMOT. 938 Défcripuon des Sources de Naphte de Baku , près Derbens. 161 Mémoire fur la liaifon des Volcans d'Auvergne avec ceux du Gévaudan, du Velay, du Vivarais, du Forez, &c, ; par M. PASUMOT. 217 DRE SNATRET ACL) EXS: HT 479 Suite des Extraits du Porte-Feuille de M. l'Abbé DiCQUEMARE, Le Perce= Pierre, 228 L'Informe. 349 Polypes du Cœur humain, 442 Mémoire fur la Sangfue Médicinale, par M. DU RONDEAU. 284 Effai fur la manière de donner un vernis aux Papillons & aures Infeëles, & c.; par M. LANDRIANI. 299 Deftription de la Chafle des Palombes ou Pigeons Ramiers , dans les Pyré- nées, 306 Effaifur la Mine de Plomb ou Molybdène ; traduit du Suédois de M.SCHEELE, par Madame P *** de Dijon. 342 Lertre de M. BINELLI, Ingénieur des Mines, fur la Mine d’Allemon. 362 Lettre de M. Dx LA METHERIE, fur le Sable ferrugineux de la Pla. Line, 363 Nomenclature railonnée d'une Colleëtion de toutes les Subflances foffiles qui appartiennent aux Mines de Charbon deterre, par M. MORAND. 401 Examen Chymique d'une Subflance pierreufe | défignée par les Naturalifles fous Le nom de zéolite; par M. PELLETIER. 420 Expériences [ur le pouvoir gw'ont les Animaux , dans certains cas, de produire du froid; par|ADAIR CRAWFORT. à 45! Lettre à M. MONNET , Auteur d’un Mémoire fur la Minéralogie de l Au- nis ; par M, LAVILLEMARAIS. 469 BOTANIQUE ET ÉCONOMIE RURALE. | 5 PAPE EE BOTANIQUE fur le Fucus Helminthochorton , ox Vermifuge de Corfe; par M. DE LA TOURRETTE. Page166 Lettre fur la generation des Saumons ,par M. FERRIS. 321 Mémoire fur une façon de faire naître des Saumons & des Truites fur les bords du Wefer. 322 4$o TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. A:R'M:5: Novrss LESOBSERYATIO NS fur la Machine Hydraulique de M. VE RA ; par M. PiLATRE DE RoziEr. Page 132 Mémoire fur les Fers de France, réduits en acier ; par M. GRIGNON 184 Prix & encouragemens propofes par la Branche Economique de la Société Hollandoife des Sciences érigée a Haarlem. 143 Suite. 231 Manière de faire les Bougies inflammables d’elles-mêmes , par M.PEYLA. 312 Obfervations fur la critique d'un Ecrit, inticulé: Avis pour neutralifer à peu de frais les Foffes d’Aifance, par M. DE MARCORELLE 335 Nouvelles Obférvatiens fur la Cuve de Paflel, par M, PILAFRE DE Ro- ZIER. 351 Surte, 439 Extrait d'une Lettre de M. MAGELLAN fur la préférence des grands Arcs de vibration pour les pendules Affronomiques, &c. 376 Memoire fur une nouvelle conflruëtion de Girouettes. 416 ObferPations Jur les Blés germes , par le Comité de l'Ecole gratuite de Bou- langerie. 444 Nouvelles Littéraires. 72—157—238—317—389 & 469 De l’Imprimerie de Demonvisee, Imprimeur de l’Académie Françoife, rue Chriftine. nn 2 L= ? 1722. Decembre LAN d TRUE Me vs di |: Li Li LME . 1 . LÉ | HT si M We 4 pr ! k nl ol Ÿ \ : : | nn L, AO al Ai L à RM | 117 L | L x ut (9 LA UR Al L JUS SES ce RE ie ee FES RES {4 ‘ AA MINT De ji Fe ut PPS TETE LT > eZ D